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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 30 octobre 2002 - Vol. 37 N° 125

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de représentants de la communauté libanaise du Québec

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Beaulne): Chers collègues, je vous souhaite une bonne journée. Mais, avant d'amorcer nos travaux, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Alors, veuillez prendre place et vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée dénonce
le laxisme du gouvernement dans la gestion
des contrats reliés à l'implantation du nouveau
Centre hospitalier universitaire de Montréal

Alors, à l'article 36 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député de Marquette présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal, le CHUM.»

À la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires, je vous avise de la répartition du temps de parole que j'ai établie pour le déroulement de ce débat. L'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; 10 minutes seront allouées aux députés indépendants; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement; 50 % restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants sera redistribué également entre les deux groupes parlementaires. Sauf le temps dévolu aux indépendants, les autres interventions ne seront soumises à aucune limite.

Alors, je suis maintenant prêt à reconnaître le premier intervenant. M. le député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Alors, M. le Président, je dépose la motion:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal.»

Vous allez comprendre, M. le Président, qu'il s'agit d'une motion qui remet en question toute la gestion gouvernementale dans l'implantation non seulement du CHUM, mais également du Centre de santé universitaire de McGill, le laxisme dont a fait preuve le gouvernement depuis le tout début du dossier. Et je pense qu'il est important de se rapporter, de se reporter à l'annonce qu'avait faite la ministre des Finances, accompagnée du premier ministre de l'époque, lors de l'annonce de ce projet auquel l'opposition avait concouru, avait donné son aval, avait donné son accord pour dire qu'il s'agissait de deux projets structurants à la fois pour la grande métropole, mais, bien sûr, également à la fois pour la recherche médicale et la dispense des soins de santé pour des patients.

Je cite le communiqué de presse du 25 janvier 2002 où la ministre des Finances disait ceci: «La décision a été prise à la suite d'une démarche rigoureuse que j'ai confiée à la Corporation d'hébergement du Québec, laquelle a procédé à une étude exhaustive. Le gouvernement n'avait pas l'intention de dépenser la somme requise pour un tel projet sans avoir mesuré toutes les options.» Mme Marois a déjà convenu que les gestionnaires de l'institution... de l'élaboration d'un calendrier de travail et de l'évaluation plus précise des coûts.

Donc, au moment de l'annonce du projet, du côté de l'opposition, on est rassuré. La ministre parle de rigueur, la ministre parle d'évaluer les coûts, la ministre donne toutes les impressions que l'opération sera sous un bon contrôle.

Un mois plus tard commencent les révélations au niveau du Centre hospitalier universitaire de Montréal. Sous la plume de Valérie Dufour, dans le journal Le Devoir: Site futur du CHUM, la facture risque de s'alourdir. Et là je cite la journaliste: «En plus du sol contaminé et de la proximité de la voie ferrée, tout indique que ceux qui ont évalué les coûts du projet de 862 millions de dollars ont oublié un chiffre important, celui de l'expropriation des terrains. La facture, elle pourrait grimper de 86 millions de dollars.»

Vient par la suite, M. le Président, les faits troublants révélés par le journaliste Denis Lessard, du journal La Presse, qui, à la une du journal du 11 février 2000, titrait: CHUM, on a sauté l'étape des appels d'offres. Et là je cite le journaliste, ce n'est pas les propos de l'opposition: «La firme retenue pour déterminer l'emplacement du futur CHUM a été choisie sans un appel d'offres public. Le groupe Daniel Arbour n'avait aucune expérience dans le secteur de la santé.» Et c'est à eux qu'on donnait le mandat, M. le Président, de choisir le site d'emplacement du CHUM.

Et là il entre dans les détails troublants en ce qui concerne la firme Daniel Arbour et la filiale l'Expertise 3S: «Parmi les 16 employés de cette compagnie à Québec, on retrouve Jean-Claude Filion et Martin Cayer qui ont été respectivement chef de cabinet et chef de cabinet adjoint du prédécesseur du ministre de la Santé, l'actuel ministre du Travail. On y retrouve aussi une avocate, Anne-Marie Pepin, qui travaillait au même cabinet. "Ces gens du cabinet de M. Rochon, je les connais, ce sont des amis", disait le président de la Corporation d'hébergement du Québec, celui-là même qui a donné le mandat à ces firmes pour choisir l'emplacement du futur site.» Et là le journaliste nous révélait que la filiale de Daniel Arbour n'a jusqu'ici jamais eu de mandat important dans la conception d'un hôpital.

Lysiane Gagnon, journal La Presse, faisait l'analyse suivante le lendemain: CHUM, béton et politique était le titre de l'article. «Improvisation, absence de consultation, risques environnementaux, on croyait avoir tout entendu à propos du futur CHUM. Hélas, ce projet a été lancé en catastrophe par un gouvernement en perte de vitesse.» Et voici ce que disait Mme Gagnon: «Ce projet, qui déjà dégageait de forts relents d'incompétence, sent à plein nez le copinage partisan.»

Et là je pense, M. le Président, que ça vaut la peine de relire les extraits de l'article de Lysiane Gagnon, parce que ça permet de tisser la toile de fond, ça permet d'identifier, dès le départ, les problèmes et pourquoi les problèmes qu'on connaît présentement se sont concrétisés, se sont matérialisés, se sont développés. «On a procédé par invitation, disait-elle. Or, par le plus grand des hasards, la firme choisie, Daniel Arbour & Associés, a une filiale, elle aussi basée à Québec, qui compte parmi son personnel Jean-Claude Filion, l'ancien chef de cabinet de l'ex-ministre du ministère de la Santé et des Services sociaux, Martin Cayer, son ancien chef de cabinet, de même que Me Anne-Marie Pepin, qui, elle aussi, fit partie de l'entourage politique de l'actuel ministre du Travail. Autre stupéfiante coïncidence, Michel Salvas, président de la Corporation d'hébergement du Québec, était sous-ministre adjoint au ministère de la Santé et des Services sociaux durant tout le mandat de l'actuel ministre du Travail. M. Salvas est, pour finir le plat, un ami intime de M. Filion.»

n(10 h 10)n

Voici ce que nous révélaient les journalistes il y a plus de deux ans maintenant, on était au mois de février 2000: on indiquait qu'il n'y avait eu, dans l'octroi du contrat, aucun appel d'offres et que le contrat avait été alloué à une firme qui avait des liens très, très près de personnes influentes au niveau du gouvernement.

Là commencent les révélations, M. le Président, au niveau de l'engagement des fonds publics: Nouveau CHUM, facture à la hausse. La question des dépassements de coûts est d'actualité. Il y a deux semaines, les dirigeants de l'autre hôpital en devenir à Montréal, le Centre universitaire de santé McGill, reconnaissaient que le coût des travaux de construction, d'abord estimé à 850 millions, pourrait atteindre 1,2 milliard de dollars. Ce qui faisait dire à l'ex-directeur général de la Régie régionale de Montréal-Centre, M. Marcel Villeneuve, dans une entrevue qu'il accordait au journal la Gazette et qui avait fait la une de ce journal-là le 27 septembre 2002, et je cite M. Villeneuve, qui a été remplacé par la suite par le ministre défait du gouvernement, M. Levine: «When there's a significant increase in costs, it inevitably brings us back to the question of whether this project can be financed at all, said Marcel Villeneuve. The project was originally expected to cost 600 million dollars ? 600 millions ? that figure was revised upward to 850 millions de dollars. Now, it's even higher, entre 1,1 milliard et 1,2 milliard de dollars.»

Quelques mois plus tard, à la une du journal Le Devoir: Nouveau CHUM, la facture grimpe. Le coût d'acquisition du site pourrait dépasser les 100 millions de dollars. Et je cite maintenant la journaliste Kathleen Lévesque, du journal Le Devoir: «Fin 1999, la firme Daniel Arbour & Associés analyse qu'il faudra investir 19,9 millions de dollars pour acquérir l'immense terrain de l'angle des rues Saint-Denis et Rosemont. Mais c'était sans compter les frais de déménagement obligé du garage de la Société de transport de Montréal. Le ministre de la Santé et des Services sociaux, prédécesseur de l'actuel ministre, reconnaissait que l'aspect de la relocalisation n'avait pas été pris en compte.»

Plus tard dans le temps, M. le Président ? et là on constate les coûts exponentiels des deux projets qui ne cessent d'augmenter au fur et à mesure que des révélations sont faites, au fur et à mesure que des gens décident de parler aux journalistes pour indiquer à quel point le gouvernement avait mal, mais très mal, évalué l'ampleur des coûts dans ce dossier-là ? à la une du journal La Presse toujours, sous la plume de Denis Lessard, le 28 septembre 2001: 700 millions de plus pour le nouveau CHUM. Et là on parlait... le journaliste révélait une facture similaire, elle aussi, qui augmente de mois en mois au niveau du Centre de santé universitaire de McGill. Et là le journaliste concluait: «À ces 3 milliards pour les nouveaux établissements ? donc on est loin du 1,6 milliard de dollars que ça devait coûter au départ, on est rendu à 3 milliards de dollars ? il faudra ajouter des centaines de millions de dollars pour convertir les trois hôpitaux existants au centre-ville à de nouvelles vocations.»

Au début de l'année, 2 juin 2000, c'est-à-dire le 20 juin 2000, au niveau des terrains, nouvelle manchette: Québec paiera 110 millions de dollars pour un terrain évalué à 20 millions de dollars. Et là le journaliste concluait: «Comme le terrain sera contaminé, sa réhabilitation risque évidemment de faire augmenter davantage les coûts de l'aménagement des lieux.»

D'autres problèmes sont soulevés par la suite, et là on entre dans la phase des révélations faites par le président démissionnaire de la Société d'implantation du Centre hospitalier universitaire de Montréal, M. Claude Béland, M. Béland qui, en démissionnant, décide de faire un certain nombre d'aveux et révèle un certain nombre de faits troublants qui ont été portés à la connaissance de l'actuel ministre de la Santé et des Services sociaux: «La décision de commander une étude inutile de 70 000 $, Price Waterhouse, pour rien, disait M. Béland, sur le partenariat public-privé, qui parlait des écoles en Nouvelle-Écosse; une autre étude inutile, de 25 000 $, sur les biotechnologies; et 200 consultants qui pédalent dans le vide depuis six mois.» Voilà, M. le Président, comment s'exprimait M. Béland au moment où il annonçait sa démission. La ministre des Finances, elle ? si je peux retrouver sa citation ? a indiqué à un moment donné aux journalistes qu'elle n'était pas inquiète outre mesure, qu'il était normal qu'il y ait un certain dépassement des coûts dans des projets de cette envergure-là.

M. le Président, je pourrais continuer assez longuement à ressortir ce qui a été rapporté dans les journaux au niveau de l'escalade des coûts par rapport à ces deux projets. Les coûts ont été mal évalués, le projet a été parti dans l'improvisation, on a accordé des contrats sans appel d'offres.

Et, nous, au départ, l'opposition, on accordait notre appui aux projets, on accompagnait le gouvernement dans sa décision de construire et de bâtir deux nouveaux centres hospitaliers universitaires, à la fois pour l'Université de Montréal et ainsi que pour l'Université McGill. Au fur et à mesure qu'on prenait connaissance des révélations troublantes, l'opposition a demandé des comptes au gouvernement. À plusieurs reprises, M. le chef de l'opposition officielle a interpellé le ministre des Affaires de la santé et des services sociaux pour lui demander plus de clarté, pour lui demander de la transparence. Mon collègue le député de Châteauguay lui a demandé de rendre public l'ensemble des coûts pour qu'on puisse savoir où on s'en va dans ce dossier-là, parce qu'il s'agit des fonds des contribuables que nous devons gérer avec efficacité, avec rigueur et dans la plus grande transparence.

Depuis que le ministre occupe ses fonctions, je pense qu'il a pris deux engagements, à deux reprises différentes, de rendre publics les coûts, de nous donner ça de façon détaillée pour savoir les sommes d'argent qui ont été engagées jusqu'à date et les sommes d'argent que ça coûtera pour mener à terme ces deux projets.

Je relisais les échanges entre le ministre et mon collègue le député de Châteauguay, au mois de juin dernier. À ce moment-là, le ministre n'avait toujours pas une compréhension, une bonne compréhension de où on s'en allait dans ce dossier-là. Par rapport aux coûts, lorsqu'on parle de 3 milliards de dollars, M. le Président, on est loin de l'annonce initiale de la part du premier ministre et de la part de la ministre des Finances, qui était ministre de la Santé à cette époque-là, qui avaient annoncé un projet de 1,6 milliard de dollars. La facture a plus que doublé, et, selon certains analystes, selon certaines personnes qui sont dans le domaine médical, ces gens-là rapportent que la facture pourrait monter jusqu'à 4 milliards de dollars. Moi, je m'étonne, je m'étonne que le ministre n'ait pas encore déposé un rapport détaillant et ventilant à la fois les coûts de construction et les coûts d'opération de ces deux centres universitaires. Hier, je lui ai reposé la question. Il a pris un engagement, troisième engagement, je pense, éventuellement, de déposer ces coûts-là.

n(10 h 20)n

M. le Président, je pense que le ministre va convenir avec l'opposition que la confiance du public à l'endroit de ces deux projets-là commence à être ébranlée de façon sérieuse. Lorsque, à tous les mois, vous ouvrez votre journal et qu'à la une du journal on parle que la facture pour l'implantation et la construction de ces deux centres de santé universitaires... que les factures continuent d'augmenter, c'est très, très, très inquiétant. Moi, je pense que le ministre a l'obligation, s'il ne veut pas perdre l'appui de l'opposition, le plus rapidement possible, la semaine prochaine, de déposer l'ensemble des coûts et les estimés des coûts à venir pour qu'on puisse rassurer la population et pour éviter le genre de spéculations auxquelles on assiste sur la place publique depuis maintenant plus de deux ans.

Je pense que, comme ministre... moi, je prends pour acquis qu'il a une bonne connaissance des coûts, je prends pour acquis qu'à son ministère on l'a mis en garde, on lui a fait un rapport détaillé. J'imagine que le ministre est en train de l'étudier. Moi, mon souhait, c'est qu'il ne rende pas public ce rapport-là la veille de Noël ou la veille de l'ajournement de nos travaux, comme il se fait trop souvent lorsque les décisions ne sont pas bonnes pour le public. Il a tout intérêt à ce moment-ci de déposer l'ensemble des coûts, de les ventiler, de nous dire combien exactement ça va coûter, combien ça a coûté, afin que la population puisse voir clair, que le gouvernement est en train de contrôler le processus, est en train de contrôler ce qui se passe et qu'il va y avoir, je ne sais pas, moi, un comité de vérification solide qui va assurer qu'il n'y aura plus de dépassement de coût. Mais je suis inquiet, parce que le ministre n'a pas encore réussi ni à rassurer le chef de l'opposition ni l'ensemble des membres de l'opposition officielle à cet égard-là. Il s'engage continuellement pour l'avenir, mais on n'a toujours pas une idée claire des coûts de réalisation et de construction. On les apprend par bribes dans les journaux.

Maintenant, le ministre va se lever tantôt et va peut-être nous dire que ce qui a été affirmé par tel journaliste, tel autre journaliste, tel autre journaliste n'était pas tout à fait exact. Les gens spéculent, les gens se fondent sur des informations qu'ils glanent ici et là pour tenter d'avoir un aperçu du coût de ces deux projets-là. Mais il est impératif... Parce que plusieurs intervenants du monde médical sont en train de débarquer par rapport au projet, sont en train de le remettre en question et se posent la question également: Est-ce que le gouvernement a véritablement l'intention de continuer, d'aller de l'avant avec ces deux projets-là?

Moi, j'aimerais que le ministre ce matin puisse se lever pour nous rassurer de ses intentions et puis par la suite, en toute transparence... Parce que souvent il invoque et la transparence, et la rigueur, et l'importance de bien gérer les fonds publics, les fonds qui sont prélevés à partir des impôts que nous versent nos concitoyens. Moi, je me mets dans la peau d'un intervenant du monde de la santé et qui se dit: Il n'y a pas d'argent dans le réseau hospitalier présentement pour faire fonctionner de façon efficace notre système de santé, et le gouvernement est en train de laisser aller la spirale des coûts au niveau de l'implantation des deux centres universitaires pour la santé, soit à McGill et à Montréal.

Alors, moi, je lui demande ce matin, là... Premièrement, je pense qu'on doit dénoncer, on doit dénoncer la gestion gouvernementale au niveau de ces deux projets-là majeurs pour la métropole et pour tout le Québec, parce qu'on constate, là, que ça dérape, il y a un dérapage important. Mais, au-delà de la dénonciation, moi, j'aimerais que le ministre nous rassure sur les intentions de son gouvernement d'aller de l'avant avec ces deux projets-là. Mais j'aimerais également qu'il nous dise combien ça va coûter et qu'il nous donne les estimés les plus justes et les plus réels, et les ventiler poste par poste pour ne pas qu'il y ait d'oubli, pour que la population puisse savoir où va le gouvernement par rapport à ces deux projets-là.

Je vais maintenant céder la parole soit à mes collègues ou au ministre de la Santé, mais j'espère qu'il va saisir l'occasion, une fois pour toutes, pour dire clairement l'orientation gouvernementale et les coûts. Et je pense qu'il ferait oeuvre très utile pour l'ensemble de la population du Québec.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. J'invite maintenant le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux à prendre la parole. M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. Ça me fait plaisir, ce matin, de venir discuter de ces deux projets importants de centres hospitaliers universitaires, un pour l'Université de Montréal, un pour l'Université McGill. Étant donné que le député semble vouloir parler des deux projets, donc ça me fera plaisir peut-être de parler des deux projets, puisque... Par contre, si je lis bien la motion, on parle surtout du Centre hospitalier de l'Université de Montréal.

D'abord, vous dire, M. le Président, ce qui a été dit à plusieurs reprises par mes prédécesseurs et, ce que je comprends aussi, qui est appuyé par l'opposition officielle, c'est qu'on a besoin à Montréal, tout le monde va en convenir, de centres hospitaliers universitaires pour bien soigner les gens, pour s'assurer aussi qu'on ait une excellente formation pour nos professionnels et s'assurer aussi qu'on puisse collaborer à l'amélioration de la recherche dans le domaine médical. Donc, je pense que tout le monde est d'accord sur la nécessité d'avoir ces projets.

Maintenant, et moi le premier, là, comme comptable agréé, comme ancien gestionnaire, je ne peux pas tolérer qu'on puisse penser dépenser des sommes ou investir des sommes aussi importantes sans bien savoir où on s'en va. Donc, M. le Président, je veux rassurer toute la population, il n'est pas question de construire quoi que ce soit à Montréal sans qu'on ait bien évalué tous les coûts reliés à ces constructions-là. Et, quand je dis bien évaluer les coûts, M. le Président, ça veut dire s'assurer qu'on sache exactement combien de lits on va avoir dans cet hôpital, savoir exactement quelles vont être les missions de ces hôpitaux à Montréal, s'assurer que, quand on évalue tous les coûts de construction, oui, qu'on inclue les coûts pour l'acquisition des terrains, les coûts pour la décontamination, si c'est nécessaire, de ces terrains, les stationnements, etc., tout ce qui est relié, là. Je ne veux pas qu'on dise: On en fait seulement un petit bout. On ne construira pas ces deux grands hôpitaux sans bien connaître d'abord les coûts de construction. Ensuite, il faut connaître aussi les coûts de fonctionnement de ces hôpitaux-là. Donc, il faut s'assurer que les dépenses d'opération, à chaque année, soient bien connues.

Et, aussi, une question qui est très importante, on le sait qu'actuellement le CHUM et le CUSM sont sur plusieurs sites, dans des hôpitaux existants, donc il faut s'assurer qu'on connaisse bien ce qu'on va faire avec les hôpitaux existants: qu'est-ce qu'on va faire avec l'hôpital Notre-Dame, qu'est-ce qu'on va faire avec l'hôpital Saint-Luc, qu'est-ce qu'on va faire avec l'Hôtel-Dieu, qu'est-ce qu'on va faire avec le Royal Vic, qu'est-ce qu'on va faire avec les hôpitaux qui sont dans les deux centres hospitaliers universitaires actuellement. Ce n'est pas simple. Il faut leur trouver des nouvelles missions. Dans certains cas, il faut peut-être les vendre; dans certains cas, il faut peut-être les rénover puis en garder une partie pour... une partie des lits. Mais une chose qui est certaine, c'est que je veux qu'on s'assure d'avoir évalué toutes les alternatives pour répondre aux besoins des Montréalais, Montréalaises, mais aussi, parce que ces centres ont une vocation nationale, de répondre à tous les besoins des Québécois et des Québécoises, donc au moindre coût possible.

Donc, je veux avoir toutes les réponses à ces questions avant de commencer à construire ces centres. Et, M. le Président, malheureusement, malheureusement, je n'ai pas actuellement, aujourd'hui, les réponses à toutes ces questions. Oui, il y a eu du travail qui a été fait par la Corporation d'hébergement du Québec, par les deux sociétés d'implantation des deux hôpitaux universitaires, mais je n'ai pas aujourd'hui toutes les réponses à ces questions. Et je comprends, là, que le député souhaiterait que je dépose ces coûts. Mais je ne suis pas satisfait des réponses, donc je ne rendrai pas publiques des réponses incomplètes. Je rendrai publiques, et, je l'espère, au cours des prochaines semaines, les réponses complètes lorsque je les aurai moi-même. Et, pour l'instant, tout ce qui peut être dit dans les médias, ce n'est que pure spéculation. Le député disait: Probablement que le ministre va répondre ça. Effectivement, c'est de la spéculation parce qu'on n'a pas encore convenu de ce qui serait construit et, de façon exacte, quels seraient les coûts et les tenants et les aboutissants.

n(10 h 30)n

Donc, oui, peut-être que certaines personnes peuvent trouver que ça prend du temps, mais je pense que vaut mieux prendre le temps qu'il faut quand il s'agit de projets de milliards de dollars, s'assurer qu'on les construise au moindre coût possible, s'assurer qu'on sache bien ce qu'on va faire avec les bâtiments existants, savoir bien ce qu'on va faire aussi dans chacun de ces hôpitaux au niveau des missions. Il y a du travail à faire, je pense, aussi pour s'assurer d'une certaine complémentarité entre les deux hôpitaux. Je comprends qu'on a deux universités qui ont des facultés de médecine, que plusieurs pays envient, à Montréal: l'Université de Montréal et l'Université McGill. Mais ce n'est pas parce qu'on a deux universités performantes qu'on ne doit pas s'assurer justement qu'il y a certaines complémentarités pour le bien, là, d'une meilleure formation, de meilleurs soins et d'une meilleure recherche. Donc, dès que j'aurai tous les coûts, on les fera connaître.

M. le Président, peut-être rappeler rapidement tous les faits dans ce dossier, parce que je pense qu'il faut faire attention, lorsqu'on reprend les articles de journaux, il faut aussi reprendre les faits. Donc, reprenons les faits. Le 25 janvier 2000, notre gouvernement annonçait la création, donc, si on parle plus spécifiquement, du CHUM ? il y avait aussi le CUSM au même moment, mais parlons du CHUM pour l'instant ? et, en juin 2000, on créait la Société d'implantation du Centre hospitalier de l'Université de Montréal, qui était constituée pour superviser la mise sur pied de cet hôpital important pour les Québécois et les Québécoises.

Or, le travail a avancé depuis ce temps, et, au printemps dernier ? donc ce printemps, au printemps 2002 ? certaines allégations d'irrégularités étaient portées à mon attention et à l'attention de toute la population. Et je pense que c'est important de le dire, on ne parlait pas de fraude ou de malversation financière, c'étaient plutôt des allégations de ne pas avoir respecté certaines procédures administratives, c'est-à-dire, par exemple, d'avoir rémunéré à des tarifs différents des tarifs qui avaient été convenus dans les décrets, et je pense que c'est quand même important, là, mais il faut quand même remettre les choses en perspective, il n'y a jamais eu de cas de fraude de mentionné. C'était respect des mesures administratives.

Donc, je pense que, pour nous, au gouvernement du Parti québécois, oui, c'est important, la rigueur et la transparence, et, personnellement, je trouve que c'est inacceptable qu'on ne suive pas ces mesures administratives, que, lorsqu'on s'entend qu'un contrat devrait être fait à certains tarifs et qu'on ne respecte pas ces tarifs, ce n'est pas acceptable. Quand il y a aussi ce qu'on appelle des dépassements et que ces dépassements ne sont pas correctement autorisés, c'est inacceptable. Et c'est pour ça que, dès que j'ai été mis au courant, j'ai amené le dossier au Conseil des ministres, et, au mois de juin dernier, le Conseil des ministres a confié au Contrôleur des finances du gouvernement le mandat d'analyser la gestion de tous les contrats reliés à l'implantation du CHUM et la gestion des dépenses de la SICHUM et de la Corporation d'hébergement du Québec, donc la CHQ.

Au même moment, M. le Président... Je ne voulais pas présumer des recommandations ou des conclusions du rapport du Contrôleur des finances, je ne voulais pas présumer de ça, mais, quand même, pour s'assurer qu'entre le délai où le Contrôleur des finances commencerait son travail et le délai où on recevait son rapport, il y a quelques jours, je voulais m'assurer qu'entre-temps on mette en place tous les contrôles nécessaires qui n'étaient pas en place à ce moment-là. Donc, j'ai exigé, dès le mois de juin dernier, de la SICHUM et de la CHQ, que des mesures de contrôle très strictes soient mises en place, ce qui a été fait. Et d'ailleurs le Contrôleur des finances le mentionne dans son rapport ? j'y reviendrai tantôt ? en disant que ces contrôles ont été mis en place depuis le mois de juin.

Donc, c'est vrai que, dans le rapport, on parle d'un certain laxisme dans la gestion des contrats. Ce qui semblait surtout difficile, c'est qu'il n'y avait pas... on n'avait pas peut-être assez clairement établi quels sont les rôles et responsabilités de la Corporation d'hébergement du Québec et de la SICHUM. Donc, à un moment donné, la CHQ pensait que c'était la SICHUM qui s'en occupait, puis, à un autre moment donné, la SICHUM pensait que c'est la Corporation d'hébergement du Québec. Et d'ailleurs le Contrôleur des finances, dans son rapport, blâme les deux. Il dit: Les deux ont fait preuve de laxisme. Donc, je comprends que M. Béland, qui était président de la SICHUM, avait comme un peu accusé la CHQ, mais on voit dans le rapport que ce sont les deux organismes qui sont blâmés de laxisme au niveau du contrôle. Donc, non seulement on a mis en place des contrôles, M. le Président, mais je suis actuellement à redéfinir les rôles et responsabilités des organismes pour s'assurer que non seulement sur le dossier des contrôles, mais sur le dossier entier, là, de qui fait quoi, dans l'analyse du projet du CHUM, on éclaircisse comme il faut ces rapports.

Mais, M. le Président, je veux quand même mentionner et citer, à la page 8, le rapport du Contrôleur des finances du gouvernement qui dit, et je cite: «Les autorités de la SICHUM et de la CHQ ont déjà pris des actions pour corriger la situation. Elles nous ont assuré que toutes les mesures seront prises pour obtenir les renseignements manquants et négocier, s'il y a lieu, les ajustements avec les contractants concernés, permettant ainsi la mise en place des conditions nécessaires au respect du budget octroyé pour leur projet.» Fin de la citation.

Donc, comme vous le voyez, M. le Président, même le Contrôleur des finances reconnaît le fait que, depuis les événements, effectivement, depuis juin, suite à ma demande, on a mis en place les contrôles nécessaires, toutes les mesures qui doivent être prises. En fait, le Contrôleur, dans son rapport, nous fait trois recommandations. D'abord, la première, mettre des contrôles en place pour s'assurer du respect des règles en vigueur dans chacune des entités et des clauses stipulées dans les contrats; deuxièmement, établir des procédures claires et précises pour s'assurer de l'application de contrôles efficaces; troisièmement, porter une attention particulière au suivi des contrats pour s'assurer d'une meilleure gestion des travaux additionnels ou ce qu'on appelle les avenants, là, dans le jargon administratif.

Donc, je l'ai dit au moment où j'ai rendu public ce rapport, j'endosse complètement, entièrement les recommandations du Contrôleur des finances. Et, d'ailleurs, j'ai mandaté le vérificateur interne qu'on a au ministère de la Santé et des Services sociaux pour qu'il s'assure de la mise en oeuvre rapide et complète de l'ensemble des recommandations du Contrôleur des finances. Et il a déjà débuté son travail avec les représentants de la SICHUM et de la CHQ, et je peux vous assurer, M. le Président, qu'on va faire un suivi périodique de la situation pour s'assurer que tout soit bien suivi.

Je tiens, M. le Président, à dire que, oui, c'est important, ce CHUM et ce CUSM, donc les deux centres universitaires, un de l'Université de Montréal et l'Université McGill. Mais, même si ces deux projets sont nécessaires, je ne ferai jamais aucun compromis sur la façon dont sont gérés les deniers publics. Oui, il faut deux projets qui répondent à nos besoins, mais il faut le faire avec les coûts les plus bas possible dans un contexte de rareté des ressources. Et, dès que j'aurai tous les chiffres, dès que j'aurai toutes les réponses aux questions normales qu'on doit poser lorsqu'on vient pour mettre en place un projet comme celui du CHUM ? on n'a pas parlé de celui-là ? je ferai le point et j'espère être capable de le faire au cours des prochaines semaines.

Donc, M. le Président, je pense qu'on a géré, le gouvernement du Parti québécois, de façon courageuse depuis qu'on est au pouvoir. On a ramassé ? je pense qu'il faut le dire ? un gâchis, 6 milliards de déficit par année qu'il y avait en 1994 au moment où les libéraux ont laissé le gouvernement. Donc, ils nous ont laissé les finances publiques dans un état déplorable, M. le Président. Il a fallu apporter... et porter, dans des réseaux importants, entre autres celui de la santé et l'éducation, des gestes courageux pour ramener les dépenses pour être capables de vivre selon nos moyens. C'est facile ? et l'opposition officielle le fait régulièrement ? de jouer au gérant d'estrade puis de dire: Oui, on a trop coupé là puis pas assez là, puis bien... Par contre, quand on a un gâchis comme celui-là, M. le Président, 6 milliards de dollars de déficit par année que nous avaient laissé les libéraux, je pense qu'il fallait agir avec courage.

n(10 h 40)n

Et ce que je trouve malheureux, M. le Président, c'est de voir aujourd'hui les libéraux encore recommencer le même manège de promettre tout à tout le monde. Vous avez probablement lu quelques extraits du programme du Parti libéral du Québec. On promet, d'un côté, de baisser les revenus de 5 milliards parce que c'est bon politiquement de promettre des baisses d'impôts. En même temps, on va rajouter de l'argent en santé ? je ne sais pas où est-ce qu'on va prendre l'argent. Nous, on ne promet pas de baisse d'impôts puis on pense qu'il manque d'argent dans le domaine de la santé.

Je comprends que ce qu'on fait aussi, c'est qu'on dit: On va couper la croissance du budget de l'éducation. M. le Président, j'ai été, pendant trois ans, ministre de l'Éducation. Je peux vous dire que ce qui est promis par le Parti libéral du Québec, ce sont des coupures à l'éducation. Quand on dit: On va seulement augmenter le budget de l'éducation de 1,75 % par année, on n'en a même pas assez pour payer les augmentations de salaires avec ça, M. le Président. Donc, oubliez ça, la lutte au décrochage, oubliez ça, les programmes de formation professionnelle et technique, oubliez ça, de continuer à investir dans nos universités pour avoir des universités qui sont parmi les meilleures dans le monde. Avec ce que promet le Parti libéral du Québec, c'est des coupures continuelles dans le réseau de l'éducation.

Et, M. le Président, même aujourd'hui ? et je l'ai dit souvent lorsque j'étais ministre de l'Éducation ? même comme ministre de la Santé, jamais je n'accepterai, M. le Président, qu'on joue ainsi avec l'avenir de nos jeunes, qu'on dise: On va un peu mieux financer la santé, mais au détriment de l'éducation, on va baisser les impôts, mais en coupant dans l'éducation, en fermant une partie du ministère de l'Environnement, de la Culture du Québec. C'est ça qui est promis par les libéraux. Donc, cauchemar si ça arrivait. On parlait de ça hier. Ça serait dramatique, M. le Président, pour le Québec parce qu'on se retrouverait dans la même situation dont on a hérité en 1994.

Donc, je trouve ça un peu spécial aujourd'hui d'avoir cette motion du Parti libéral qui vient nous parler de laxisme dans la gestion des fonds publics, alors que les champions du laxisme, c'est le Parti libéral du Québec qui a laissé un déficit annuel de 6 milliards de dollars par année, M. le Président, 6 milliards de dollars par année.

M. le Président, ce que je peux vous dire, c'est que, dans le projet du CHUM, dans celui du Centre universitaire de l'Université McGill, comme dans tous les projets qu'on mène au gouvernement, on va continuer de gérer avec courage. On a bien sûr des choses qui sont encore à améliorer. Je ne vous dis pas que tout est parfait. Il y a eu des lacunes dans le dossier de la gestion à la CHQ et à la SICHUM. Je suis à travailler très fort avec les gens de mon cabinet puis du ministère pour s'assurer qu'on prenne toutes les mesures pour que ce soit modifié. Et, M. le Président, je pense que la population du Québec peut compter sur le gouvernement du Parti québécois pour continuer à gérer avec courage les fonds publics et à corriger ce qui reste à être corrigé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. Y a-t-il d'autres intervenants? Mme la députée de Viger.

Mme Anna Mancuso

Mme Mancuso: Oui. Bonjour, M. le Président. Donc, on a devant nous la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal.»

Donc, M. le Président, je tiens à dire que ma propre préoccupation et celle de ma formation politique est celle de l'accessibilité et de la qualité des soins médicaux et hospitaliers. Il va sans dire que, présentement, il y a des besoins criants dans lesquels il faut répondre, pour lesquels il faut répondre. Comme vous le savez, nous, on propose de renforcer le domaine de la recherche scientifique, incluant la recherche médicale. C'est ce qu'on a proposé dans notre plan, et je voudrais qu'on le répète ici une autre fois pour s'assurer que le ministre prend connaissance de ce document-là et qu'il lit au complet le document parce qu'il ne semble pas comprendre notre plan très bien.

Donc, on dit qu'on veut promouvoir la recherche scientifique, incluant la recherche médicale, et, donc, nous croyons que le projet de construction du CHUM est un important défi de développement pour Montréal et pour le Québec. Cependant, il faut que ce projet soit géré très, très bien parce qu'il faut éviter le risque qu'on prenne... que les finances publiques soient mises dans un état déplorable et qu'elles s'engouffrent. Donc, pour l'instant, nous savons que le projet est évalué à 1,3 milliard de dollars, et, comme le député de Marquette, mon collègue, a très bien exposé tantôt, ce sont des coûts qui sont toujours en train de se doubler à chaque fois qu'il y a des estimés qui sont faits. C'est important qu'on ait un bon contrôle sur les finances de ce projet-là, et, jusqu'à date, ce qu'on a vu, c'est qu'il y a un manque de contrôle. Le projet s'élève à 1,3 milliard, et ça pourrait s'élever beaucoup plus quand ce sera construit. On a un exemple. Aujourd'hui, on lit dans les journaux, on a un exemple très récent des estimations des coûts, qui sont mal faites, soit les coûts des travaux de réfection de l'autoroute Décarie et ceux du rond-point de l'Acadie: les factures ont grimpé de presque 180 %. Donc, c'est un exemple d'estimés de coûts qui ne sont pas tout à fait réels, et donc il faut être mis en garde autour de ça.

Mais, depuis le début de ce projet sur la construction du CHUM, nous avons raison et la population a eu raison de craindre que le gouvernement ne gère pas bien ce projet. Tout d'abord, on a sauté l'étape de l'appel d'offres pour déterminer l'emplacement du CHUM. Le député de Marquette a bien exposé ce fait. À l'époque, la Corporation d'hébergement du Québec a décidé de nommer Daniel Arbour & Associés sans appel d'offres, un processus qui est tout à fait inhabituel et inacceptable en plus. Donc, déjà, on avait raison de remettre en question tout le processus d'attribution des contrats. C'était un contrat qui était assez important, ce n'était pas un contrat qui était au seuil de 25 000, ce qui serait dans la normale qu'on ne passe pas par appel d'offres, mais c'était un contrat de 175 000 $. Donc, on a le droit de se demander: C'étaient les intérêts de qui qu'on cherchait de servir?

En mai dernier, le président du SICHUM, M. Claude Béland, a abandonné la présidence. L'expertise et l'expérience de M. Béland est sans reproche, mais il ne se sentait plus à l'aise avec le laxisme, les dépenses fulgurantes et le manquement de gestion qu'il voyait autour de ce projet. Imaginez que M. Béland a dû stopper des décisions de commander une étude complètement inutile de 70 000 à Price Waterhouse, sur des partenariats public-privé, qui parlait des écoles en Nouvelle-Écosse, une autre étude inutile sur les biotechnologies, un contrat de 25 000 qui avait été donné à une firme spécialisée dans le démarrage des industries et des entreprises dans le domaine des biotechnologies, qui n'avait pas été commandée par M. Béland. Donc, on doit comprendre que M. Béland ne se sentait pas à l'aise dans la façon de fonctionner autour de ce projet et qu'il avait justement raison de ne pas renouveler son mandat à la présidence du SICHUM.

Un autre exemple de manquement de transparence et d'imputabilité, c'était qu'on a nommé 200 consultants pour faire rien, il n'y avait rien à faire pendant six mois, et ces consultants ont été payés à peu près 100 $ de l'heure. Donc, pendant six mois, 100 $ de l'heure, c'est une somme assez importante, ce n'est pas une somme à négliger. Donc, est-ce que le gouvernement réalise que cet argent pourrait être très bien utilisé ailleurs dans le système de la santé? Il y a des besoins criants, et ces sommes-là représentent des sommes très, très importantes. Entre autres, le contrat octroyé à SNC-Lavalin et ses partenaires aura accaparé 18 des 22 millions des budgets alloués il y a deux ans à la SICHUM, et c'est loin d'être fini, le projet, encore, doit passer à plusieurs étapes, et on a déjà dépensé les 18 des 22 millions qui étaient alloués à la SICHUM. Donc, on a raison à craindre que... Il va falloir qu'on regarde ce projet-là de plus près.

n(10 h 50)n

Last June, we questioned the Government on the way the contracts were attributed, because we feel that it is completely irresponsible for a government to be spending sums like $70 000 on a study for private sector involvements in Nova Scotia's school system. What could that have possibly to do with the construction of a mega-hospital? Other questionable expenditures include $25 000 for a study from a biotechnology company, and over 200 consultants being paid to do nothing for six months. And yet, this is a project that is far from completion. Mr. Béland, justifyingly so, felt that he could not renew his mandate as president of the SICHUM because of the poor management and the excessive spending involved in this project.

Est-ce que le gouvernement réalise que cet argent pourrait être très bien utilisé ailleurs dans le réseau de la santé? Par exemple, dans mon comté, on a l'hôpital Santa Cabrini qui demande, depuis 1999-2000, qu'on investisse dans la salle d'urgence, pour agrandir la salle d'urgence. Le ministre nous a déjà dit que c'est un projet qui est louable et c'est un projet qui aurait dû prendre priorité. Là, il utilise les raisons pour lesquelles ils ne peuvent pas donner encore la voie ouverte à ce projet-là: il manque d'argent. Mon collègue le député d'Argenteuil, la semaine passée, a vu la même problématique, il a demandé... Dans leur comté, ils ont demandé pour un scanner, ça a été promis: Oui, oui, oui, oui, mais, ensuite, le ministre, la semaine dernière, nous a dit qu'il n'y a pas d'argent.

Il y a du gaspillage. On a eu des exemples concrets, ici, de gaspillage d'argent, de sommes qui sont octroyées pour des contrats, pour des consultants, qui n'aboutissent à rien. C'est des contrats qui vont être donnés pour des rapports qui vont être dans une filière, quelque part, à ne rien faire. Donc, on demande au gouvernement d'arrêter ce gaspillage, et c'est la raison pour laquelle on propose cette motion aujourd'hui, et qu'il prenne les bonnes décisions.

On a appris aussi, en juin dernier, que les terrains pour construire le CHUM pourraient aller jusqu'à 110 millions. Donc, ça voudrait dire six fois plus que la valeur foncière du terrain. Si on parle dans l'ensemble, on a parlé tantôt de 200 millions. Ce serait pour les deux projets. Mais, en tant que tel, ce n'est pas encore acheté, le terrain n'est pas encore acheté. Et, évidemment, si on doit dépenser 110 millions, c'est une somme qui est assez élevée et qui n'est pas normale. Donc, on est en droit de se demander: Est-ce que cette somme-là est justifiée et est-ce qu'on devrait repenser à cette décision-là?

Le ministre de la Santé connaissait l'existence des problèmes des contrats du CHUM et, n'eût été de la dénonciation de M. Béland, je ne suis pas certaine s'il y aurait eu des vérifications. Mais une chance que M. Béland a dénoncé cette façon d'attribuer les contrats. Et, en effet, l'enquête a été commandée par le ministre et le rapport du Contrôleur des finances du Québec a été rendu public vendredi dernier.

Donc, le ministre nous a dit tantôt qu'il fait siennes les recommandations du Contrôleur, qui recommande que des contrôles stricts soient mis en place. Il nous a dit tantôt que ces mesures ont été mises en place, mais il ne nous a pas dit spécifiquement quelles mesures ont été mises en place. Donc, on demande au ministre d'élaborer sur cette mise en place des contrôles et de nous en dire plus à cet égard-là, parce que c'est en effet très important. Le rapport a relevé qu'il y a un manque de contrôle flagrant, et on dénonce cette façon de faire. Donc, on a le droit d'en savoir plus, et mon collègue a justement demandé tantôt au ministre de déposer les coûts de construction et de réalisation, parce que la population est en droit de savoir.

Donc, as I said earlier, my main preoccupation, as well as that of the Liberal Party, is that accessibility to quality health care is insured. We are proposing, in our plan of action, to promote scientific research including medical research. So we believe in the CHUM project.

Our financial figures were filed with our plan and we have a solid plan in our hands. And I think that the Minister hasn't understood our plan, and we don't expect him to understand our plan. But we have verified it by many fiscal experts and it is possible. We have verified that it is possible to reduce taxes and, at the same time, increase spending for health care because that's where the priority is. There are no other priorities other than health care.

Donc, M. le Président, je vous remercie et j'espère que le ministre nous écoute et que les mesures nécessaires vont être prises. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée. Y a-t-il d'autres collègues, à cette étape-ci, qui souhaitent intervenir? Mme la députée de Joliette.

Mme Sylvie Lespérance

Mme Lespérance: Alors, M. le Président, je trouve un peu dommage que notre collègue, monsieur... Alors, j'espère moi aussi, comme ma collègue, que M. le ministre entendra ce qu'on avait à dire.

On pourrait insister sur des chiffres, on pourrait effectivement rappeler à la population que tout ce qui se fait dans le public coûte trois fois plus cher que dans le privé, nommer des études, interpeller des fonctionnaires du ministère de la Santé et des Services sociaux. On pourrait nommer plusieurs ministres qui ont eu le dossier entre les mains. On pourrait finalement pointer du doigt tous les intervenants qui ont fait du projet du CHUM Saint-Denis le monstre qu'il est en train de devenir.

Je crois, M. le Président, qu'il faut pousser la réflexion beaucoup plus loin. On se rappellera tous, M. le Président, que la Corporation d'hébergement du Québec, après l'adoption du projet de loi n° 53, avait comme premier objectif de masquer à la population une dette de près de 4 milliards. Et, tout à l'heure, il a parlé de l'excellente gestion qu'ils ont faite au ministère et du déficit qu'avait laissé le Parti libéral, mais il ne revient jamais sur le comment il a fait pour atteindre le déficit zéro et comment il a fait pour tout masquer ça.

La Corporation d'hébergement du Québec, en tant que propriétaire unique, maintenant, de l'ensemble des parcs immobiliers en santé, s'est donné un pouvoir hégémonique sur la prise de décision dans tous les dossiers qui ont trait aux nouvelles constructions en santé au Québec. M. Claude Béland, pourtant un bon ami de l'actuel gouvernement, disait, en claquant la porte de la Société d'implantation du Centre hospitalier universitaire de Montréal, que la Corporation d'hébergement du Québec avait la fâcheuse tendance à administrer à très gros prix, en commandant des études payées par des budgets qu'elle avait elle-même dévoilés à la SICHUM. Avec le laxisme qu'elle a démontré jusqu'à maintenant dans ce dossier, avec toutes les erreurs administratives qui font sentir un certain copinage dans l'attribution de plusieurs contrats, la Corporation d'hébergement du Québec est-elle en train de devenir la nouvelle RIO du Québec en finançant à grands frais des éléphants blancs qui, s'ils étaient gérés de façon efficace et efficiente, sont absolument nécessaires à la population du Québec?

Dans le dossier de l'implantation du nouveau mégacentre hospitalier universitaire de Montréal, la Corporation d'hébergement du Québec a contrôlé indûment, selon M. Béland, les budgets de la SICHUM. La CHQ a commandé à très gros prix un nombre d'études inutiles payées à mêmes les budgets. Je pense qu'on l'a mentionné ici, ce matin, à plusieurs reprises. La Société... On peut citer, comme avait souligné ma collègue, les études avec Price Waterhouse qui avaient coûté 70 000 $. Ça, c'est juste pour n'en citer que quelques-unes. Mais, au total, 18 millions de dollars ont été investis actuellement en consultants de SLP, un groupe de SNC-Lavalin, pour faire des études qui ne sont pas encore terminées. Deux cents consultants payés à 98 $ de l'heure se sont penchés sur différentes analyses, et plusieurs d'entre elles n'ont eu aucune utilité. C'est ça, une saine gestion? Ça m'apparaît difficile à gober.

n(11 heures)n

Il faut notamment se rappeler qu'un important contrat avait été confié à l'Expertise 3S, une filiale de Daniel Arbour & Associés, qui avait récemment embauché M. Pierre D'Amours, le chef du cabinet de Mme Pauline Marois. Des consultants payés hors décret, 38 sur 200 ont touché des sommes faramineuses, 14 consultants qui ont reçu 480 000 $ en trop, selon les normes de la CHQ, des coordonnateurs payés à 160 de l'heure, pour n'en citer que quelques-uns, donc 3 900 heures facturées, 624 000 d'honoraires. Juste à regarder toutes les sommes faramineuses actuellement qui ont été dépensées, c'est scandaleux. La CHQ avait procédé sur invitation seulement pour la sélection du site, un autre contrat de 200 000 $ qui aurait normalement dû aller en appel d'offres.

Donc, Claude Béland, le seul ayant une vision d'ensemble du projet, il a quitté la présidence de la SICHUM parce qu'il voyait le monstre qui était en train de se créer et il ne pouvait pas tolérer l'hégémonie de la CHQ dans les dépenses. Il se voyait comme un gérant de chantier et trouvait inadmissible que 400 000 $ par mois soient investis dans un projet dont on ne connaissait même pas l'avenir. Possiblement pour acheter la paix, le président démissionnaire s'est vu offrir par le gouvernement la présidence de la Commission de la réforme des institutions. Et vive la république de copains!

David Levine, le spécialiste en santé dont le gouvernement actuel a eu la chance de compter parmi ses rangs, s'est prononcé en tant que coministre de la Santé et des Services sociaux en défaveur du méga CHUM actuel, tel que prévu. Il était convaincu que des petits centres hospitaliers couplés à des hôpitaux de soins généraux assurant la première ligne ? et ça, c'est lui qui le disait ? coûteraient moins cher. Il avait rappelé à l'époque que ce n'était pas dans un méga CHU, où les coûts sont en moyenne trois fois plus élevés que dans un hôpital ordinaire, qu'il faut traiter, et je cite «les hernies et les pharyngites».

À la suite du départ de Claude Béland comme président de la SICHUM, la CHQ a jugé qu'il était bon qu'elle place par intérim un des membres de son conseil d'administration ? peut-être pour avoir une mainmise encore plus grande ? qui est M. Claude Desjardins. Ce dernier a refusé de commenter toutes les allégations de son prédécesseur sur les questions de contrôle des finances de la part de la CHQ. Les doutes de M. Béland sont confirmés. La Corporation d'hébergement du Québec n'a pas l'intention de perdre la mainmise qu'elle a sur le projet du méga CHUM. Ce sont ces guéguerres intestines dont les contribuables font les frais qui font perdre actuellement le sérieux de ces deux projets qui, je le répète, sont essentiels pour le Grand Montréal et qui sont essentiels aussi pour nos deux hôpitaux universitaires.

Donc, dans un communiqué de presse du 10 mars 2000, l'Association professionnelle des ingénieurs du Québec s'inquiétait avec raison de ne pas avoir été mise à contribution. C'est de nombreuses choses comme ça qui s'additionnent, d'irrégularités qui font qu'on a des doutes sur la capacité de gestion actuelle du gouvernement du Parti québécois. On a des doutes puis on a raison d'avoir de sérieux doutes.

Il y a tellement de contractuels engagés par la CHQ, qui l'ont été sans suivre les normes, que, lorsque M. le ministre nous dit qu'il y a du sérieux dans ce dossier-là, permettez-nous d'en douter. Pour 112 personnes qui ont travaillé au contrat de SLP, on ne retrouvait même pas l'approbation prévue au contrat. Donc, les laxismes sont présents dans pratiquement tous les contrats, les appels d'offres. Et, en fin de mandat, il est clair que le gouvernement actuel ne semble plus prêt à aller de l'avant dans ce projet qui s'avère un gouffre sans fond. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que les échéances sont continuellement reportées et, comme le disait M. Béland, on pédale dans le vide et on continue de verser 400 000 $ par mois.

Ce qu'on veut savoir, c'est: De façon responsable, de façon réaliste, quand le gouvernement nous amènera-t-il un dossier complet sur ces deux mégacentres? Et est-ce que ce même plan-là, il va nous l'amener... Parce qu'il n'est pas prêt, qu'il dit. Est-ce qu'il va faire exactement la même chose que dans le plan qu'il devait nous déposer au début du mois d'octobre concernant la réorganisation du réseau de santé? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Joliette. J'invite maintenant notre collègue la députée de Marie-Victorin à prendre la parole. Mme la députée.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Alors, merci beaucoup, M. le Président. Alors, je dois vous avouer que ça me fait un grand plaisir de pouvoir ajouter ma voix à celle de mon collègue le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Et oui, M. le Président, ça ne fait pas mon premier mandat que je suis ici, en cette Chambre, j'ai plusieurs mandats, je serai à mon cinquième mandat à la prochaine élection. Et c'est avec ces années d'expérience pour lesquelles je représente les électeurs du comté de Marie-Victorin... Et, malgré ce fait, plusieurs années ici, en Chambre, je parviens encore à m'étonner des énormités que peuvent énoncer les élus du Parti libéral.

M. le Président, j'ai connu notre réseau de la santé et des services sociaux de l'intérieur. Je suis infirmière de profession, j'ai fait des études en administration hospitalière et j'ai eu l'occasion de siéger à titre de présidente sur le conseil d'administration de l'hôpital Charles-Lemoyne, sur la Rive-Sud de Montréal, mais jamais, ni dans ma carrière dans le domaine médical ni dans ma carrière politique, n'ai-je rencontré tant de culot que dans cette motion libérale ce matin. Oui, M. le Président, il faut avoir du culot pour nous arriver ce matin, nous, les artisans du déficit zéro, avec une motion sur le laxisme dans la gestion des fonds publics.

Un peu d'histoire, M. le Président. Moi, je me souviens qu'en 1985 j'entendais les ténors libéraux, au moment de la campagne électorale, qu'ils devaient changer l'ensemble du réseau de la santé, C'était incroyable, c'était pitoyable, ce qui se passait au Québec, c'était une médecine de guerre, et, eux, s'ils prenaient le pouvoir, ils verraient à changer le statut des services de santé dans nos hôpitaux. Qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? Force est de constater qu'il y a un seul ministre qui a essayé de faire quelque chose, et puis ça, il a été rabroué par son premier ministre.

Deuxièmement, je me souviens très bien aussi des mandats de 1985-1989, 1989-1994, j'y étais. Nous avons assisté à un véritable festival des déficits qui, année après année, s'accumulaient les uns sur les autres. Oui, M. le Président, je me souviens des déficits successifs qui ont culminé avec le déficit de 1994. Six milliards dans le rouge, l'héritage que les libéraux nous ont laissé, à nous et aux générations futures. Pourtant, en 1985, quand ils prenaient le pouvoir, ce n'était pas ça qu'ils avaient dit à la population. Ils étaient supposés de réformer l'ensemble du système de santé. Ils n'ont rien fait, mais rien. Ils n'ont qu'accumulé un déficit. C'est tout ce qu'ils ont été capables de faire.

Et, nous, lorsque nous avons pris le pouvoir, en 1994, qu'est-ce qu'on a fait? Eh bien, on s'est battu, on s'est battu pour redresser le navire. Ça n'a pas toujours été facile, M. le Président, mais, au bout du compte, on y est parvenu parce que la population comprenait notre message et savait que c'était important de donner un coup de barre dans le déficit accumulé que nous avaient laissé les libéraux d'en face. Donc, on est parti d'un déficit de 6 milliards puis on a ramené ça à zéro.

Et aujourd'hui qu'arrive-t-il? Les libéraux nous arrivent avec une motion sur le laxisme dans la gestion des fonds publics. C'est assez particulier, M. le Président. Il faut avoir, comme dit l'expression populaire, avoir du front tout le tour de la tête. Je trouve particulièrement dommage la façon dont les libéraux s'attaquent à notre gouvernement. Ils s'attaquent à un projet extrêmement important pour le développement futur de la région métropolitaine. J'aurais aimé entendre, en tout cas, quelle est la vision de l'avenir des libéraux dans le domaine de la santé, mis à part le système privé. Comment vont-ils gérer l'ensemble du système de santé avec toutes ses problématiques? Pouvons-nous faire un débat de fond? La population s'attend à ce qu'on ait plus que des motions, tel qu'on vient de le faire, qui ne mettent en rien un vrai débat sur le système de santé.

n(11 h 10)n

Comme vous le savez, M. le Président, les citoyens et les citoyennes de la Rive-Sud de Montréal ont longtemps souffert d'une iniquité dans la répartition des budgets dévolus aux centres hospitaliers, et c'est pourquoi la population, en Montérégie, tout comme dans Les Laurentides ou dans les régions de Lanaudière, augmentait plus vite que leurs subsides en santé, et ce sous-financement a amené mes concitoyens de la Rive-Sud à se rendre sur l'île de Montréal pour obtenir leurs soins de santé. Et Dieu sait que je me souviens, on s'est vraiment débattu pour l'autonomie de notre région et pour l'équité interrégionale et régionale.

Mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux ? et je tiens à le remercier et à le féliciter pour son courage ? a commencé à redresser cette injustice en allouant dès cette année 24,5 millions de plus à la région au titre du rétablissement de l'équité interrégionale, ce qui va permettre à davantage de citoyens du Grand Longueuil de venir chercher leurs services chez nous, sur la Rive-Sud.

Cela dit, il reste que les services surspécialisés, troisième et quatrième ligne... Ce qu'on appelle troisième et quatrième ligne, ce n'est pas les services communs qu'on donne à tout le monde. C'est quand on arrive à un niveau de soins de santé vraiment très pointu, très particulier, exemple, quand on appelle... quand on peut faire référence, en cardiologie, à tout l'Institut de cardiologie, bien, quand on remplace un coeur, on ne peut pas faire ça dans tous les hôpitaux du Québec. Donc, il faut certains endroits plus spécialisés que d'autres parce que ça demande une expertise excessivement pointue, une équipe excessivement surspécialisée, ce pourquoi je pense qu'il est tout à fait approprié que ces soins de troisième et quatrième ligne se retrouvent regroupés dans un centre tel que celui que nous voulons construire avec le CHUM, le nouveau CHUM.

Et c'est là que le projet des deux grands hôpitaux universitaires prend toute son importance. M. le Président, il s'agit de projets majeurs qui nécessitent des investissements importants de la part du gouvernement du Québec, nous en convenons. Mais il faut bien comprendre que les deux implantations de ces deux hôpitaux sont complexes parce qu'ils relèvent de deux conseils d'administration ou deux organismes, un c'est du CHUM et l'autre, qui est subalterne au CHUM, qui est le SCHUM. Voilà. Alors, pour les gens qui nous écoutent, peut-être que... ? moi aussi, je suis perdue avec tous ces sigles ? on pourrait peut-être leur expliquer. Un, c'est le Centre hospitalier universitaire de Montréal et l'autre, c'est pour l'implantation... c'est la Société d'implantation du Centre hospitalier universitaire, la SICHUM. Alors, je pense qu'il faut qu'on comprenne. Et, quand il y a deux têtes, c'est plus difficile qu'une tête. Alors, évidemment, c'est ce qui arrive, c'est qu'à ce moment-ci il faut toujours qu'il y en ait un qui supervise l'orientation de l'autre, et je pense que c'est là que s'est glissé, en fait, ce qu'on peut appeler certaines décisions qui n'ont pas nécessairement toujours été dans le sens de ce qu'on s'attendait. Et alors...

Mais, pour élaborer des plans de soins et de services, des plans de financement, établir quelle utilisation on fera des immeubles en trop... Alors, c'est un peu tout ça que devait faire la SICHUM, si je comprends bien. Et c'est à ce moment-là, lorsque le Contrôleur des finances a fait la reddition de comptes ou s'est rendu pour vérifier comment ça se passait, les choses, au niveau de la gestion, alors c'est là qu'il a cité un certain laxisme dans son rapport. Mais, il faut bien s'entendre, on ne parlait pas ici de fraude ni de malversation, de détournement ou de quoi que ce soit de ce genre, non. Il faut vraiment ramener les choses dans leur contexte, M. le Président, dans leur juste perspective.

Et je pourrais vous donner certains exemples. Certains avenants ont effectivement été réalisés avant d'avoir été autorisés et certaines personnes ont reçu des honoraires supérieurs aux standards qui s'appliquent dans ce genre de cas, ce que je n'admets pas, M. le Président. Et même le ministre de la Santé et des Services sociaux lui-même n'a pas accepté, puisqu'il a fait siennes les recommandations du Vérificateur... du Contrôleur des finances.

Donc, M. le Président, je ne pense pas qu'on voulait... on était de mèche, on était de connivence avec qui que ce soit, c'est que, tout simplement, on n'était pas au courant de la situation. Et, dès qu'on a été mis au courant d'une telle situation, tout de suite, le ministre a vraiment rencontré... a fait siennes les recommandations du Contrôleur des finances et puis ensuite il s'est assuré que ces mêmes recommandations seront appliquées à la lettre. Puis là il n'a pas dit, là: C'est juste une intention, puis là je veux que ça se passe comme ça. Non. Il a posé un geste concret. Et quel geste concret a-t-il posé? Il a mandaté le vérificateur interne de son ministère pour suivre à la trace les orientations et les décisions que prendra la SICHUM. Pour ma part, M. le Président, je ne vois pas ce qu'on peut demander de plus. On veut vraiment faire qu'en sorte les deniers publics soient bien dépensés, mais, en même temps, répondre aux nouveaux besoins dans le domaine de la santé, des nouvelles technologies, les nouvelles façons de faire, de regrouper l'ensemble de ces soins-là en un seul endroit pour mieux gérer et administrer les soins de santé à la population. Alors, nous avons un superbe projet devant nous, un projet qui est mobilisateur non seulement pour Montréal, non seulement pour la grande région métropolitaine, mais pour l'ensemble des citoyens et des citoyennes du Québec.

Moi, je pense, M. le Président, plutôt que les libéraux, de s'en aller dans tous les sens, dans toutes les directions puis essayer de trouver, faire lever des lapins là où il ne faut pas, eux, ces grands experts en gaspillage et en déficit, de laxisme dans la gestion des fonds publics devraient plutôt joindre leurs voix à tous les gens qui ont travaillé et qui travaillent actuellement pour faire qu'en sorte qu'on puisse obtenir efficience, efficacité dans ce dossier et permettre à l'ensemble des Montréalais et des Montréalaises et l'ensemble des Québécois et des Québécoises d'avoir une fierté dans le domaine des soins et l'administration des soins de santé et d'avoir la fierté d'un CHUM qui est adapté à la réalité moderne de nos institutions dans le domaine de la santé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée. M. le député de l'Acadie, vous avez maintenant la parole. Pour votre gouverne, il vous reste 14 minutes.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je veux d'abord rappeler l'objet de la motion de ce matin et qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal.»

Alors, M. le Président, je veux d'abord mentionner qu'on ne remet pas en cause, d'aucune façon l'importance du projet du CHUM dans la région de Montréal. C'est un projet qui est excessivement important, et il ne s'agit pas ici de remettre en cause ce projet-là, mais il s'agit plutôt, tel que le stipule la motion, de parler du laxisme qui entoure la gestion et l'attribution des contrats dans ce projet.

Alors, M. le Président, la députée de Marie-Victorin nous parlait de fierté. Je pense qu'on serait certainement fier de voir un établissement relié à la santé, dans la région de Montréal, d'une telle importance, mais on n'est certainement pas fier de voir la façon dont le gouvernement s'est comporté dans le dossier au niveau de la gestion de ce projet. Et, malheureusement, compte tenu de l'importance du projet pour la région de Montréal, je dois vous dire qu'on a là une illustration assez caractéristique de la performance du gouvernement, qui est basée, au fond, sur de l'improvisation à tout point de vue, qui est basée sur du laxisme, du manque de transparence et aussi d'un écart ou d'un fossé énorme entre les paroles et les actions concrètes du gouvernement. Et ce n'est pas spécifique à ce dossier-là, M. le Président, l'improvisation, le laxisme, le manque de transparence et l'écart entre le langage et l'action, c'est la marque de commerce, je pense, du gouvernement qu'on a en face de nous, M. le Président.

n(11 h 20)n

Alors, je veux tout d'abord peut-être ? mon collègue le député de Marquette l'a fait un peu tout à l'heure ? faire un petit peu l'historique du projet et revenir peut-être un peu en arrière pour voir... Quand je dis que c'est de l'improvisation à tout point de vue, je pense qu'il faut se rappeler que le projet du CHUM a d'abord commencé à l'époque du ministre de la Santé qui était le député de Charlesbourg à ce moment-là, en 1995, où, à ce moment-là, on annonce une fusion des trois hôpitaux dans la région de Montréal, c'est-à-dire l'hôpital Notre-Dame, l'Hôtel-Dieu et Saint-Luc. Et, à ce moment-là, on parle d'un projet de 475 millions. On prévoit la fin de la construction du CHUM pour dans cinq ans. Alors, je vous rappelle, M. le Président, on est en 1995; on prévoit la fin de la construction du CHUM cinq ans plus tard, c'est-à-dire 2003. On parle d'un projet de 427 millions. Ça, c'est en 1995.

Alors, M. le Président, quelque temps après, ce qu'on peut observer dans le dossier, c'est qu'il y a de la contestation, et là on remet en cause un projet de fusion réparti sur trois sites. Parce que c'était ça, le projet initial. Et, en 1999, quatre ans après la fusion décrétée par Québec, M. le Président, c'est un retour à la case départ dans le dossier du Centre hospitalier. Alors, un article disait: «Retour à la case départ au CHUM. Le constat d'échec par les médecins ne signifie pas pour autant que le CHUM... l'abandon du projet du CHUM par la vaste majorité des gens qui appuyaient le projet, mais essentiellement le rejet d'un projet de fusion qui correspond toujours à trois sites distincts.» C'est ça qu'on rejette en 1999, alors quatre ans après le lancement du projet où on parlait de fusion. Et, au même moment, on était rendu... La ministre de la Santé, à ce moment-là, et responsable du dossier était la députée de Taillon, et elle nous disait à ce moment-là que le projet de construction sur un seul site, ça la faisait triper. Alors là on est en mars 1999, M. le Président.

Alors, à ce moment-là, il se passe 10 mois entre mars 1999 et le 25 janvier 2000. Et là, maintenant, on parle d'un projet... d'un site unique. Le cabinet de la ministre émet un communiqué de presse en date du 25 janvier 2000, où on dit: «Le Centre hospitalier de l'Université de Montréal occupera d'ici quelques années un immeuble neuf sur un nouveau site.» Et là on spécifie le site: «Le quadrilatère délimité par les rues Saint-Denis, Rosemont, Saint-Laurent et Bellechasse.» Là, on parle maintenant d'un projet de 700 millions. On avait parlé de 427; là, on parle maintenant de 700 millions. Et la ministre nous dit, et je cite les propos de la ministre: «La décision a été prise à la suite d'une démarche rigoureuse que j'ai confiée à la Corporation d'hébergement du Québec, laquelle a procédé à une étude exhaustive de cinq sites possibles... potentiels. Le gouvernement n'avait pas l'intention de dépenser la somme requise pour un tel projet sans avoir mesuré la valeur de toutes les options.» Alors là on voit arriver dans le décor, M. le Président, la Corporation d'hébergement du Québec.

Alors, l'étude exhaustive en question est fortement contestée quelques jours plus tard, c'est-à-dire au début du mois de février, où on dit, dans un article qui est paru dans le journal La Presse, et je vais en citer un extrait: «Les terrains choisis pour recevoir le futur Centre hospitalier de l'Université de Montréal, un projet estimé à 850 millions, n'ont fait l'objet d'aucune étude environnementale détaillée même si on sait qu'ils sont contaminés par des hydrocarbures après un demi-siècle d'activités industrielles ininterrompues. De plus, a appris La Presse, cet emplacement aurait été choisi sans tenir compte de la présence à proximité d'une voie ferrée. Celle-ci, toujours utilisée, pourrait poser de graves problèmes de sécurité si un déraillement suivi d'un déversement toxique ou d'un incendie se produisait.» Alors, M. le Président, l'étude rigoureuse, c'est à ça que ça a abouti. On a choisi un site, d'ailleurs qui n'est pas seulement contesté par les journalistes, contesté par beaucoup d'experts dans le domaine. Et je pense ici à des urbanistes tels M. Marsan et M. Lewis, professeurs à l'Université de Montréal, où on remet en cause le site en question. Et je tiens à vous faire remarquer, M. le Président, que, dans cet article-là, ici, on parle maintenant de 850 millions: 427, 700, 850.

Et là, M. le Président, c'est là qu'on arrive à l'attribution des contrats, et c'est ce à quoi on fait référence quand on parle de laxisme au niveau de l'attribution des contrats. Parce que le laxisme existe depuis le début, dans toute la gestion du dossier. Alors là, M. le Président, on s'aperçoit, suite à l'étude pour identifier le site, une étude qui avait été confiée à la firme Arbour, plus précisément, Daniel Arbour & Associés, que ça commence à s'embrouiller passablement. Et, dans un article sous la plume de Mme Marie-Claude Girard, en date du 10 février 2000, on dit: «Pour la Corporation d'hébergement du Québec, la présence d'une voie ferrée et de sols contaminés à l'emplacement du nouveau CHUM, près du métro Rosemont, constitue de simples contraintes qu'on pourrait atténuer ou éliminer. Le président-directeur général de la Corporation, Michel Salvas, ne croit pas que les coûts de décontamination seront astronomiques. Sans avancer de chiffres, il assure que le plan budgétaire prévoit une réserve suffisante pour éponger une hausse des coûts.» Alors, M. le Président, ce que je comprends, là, c'est qu'il sait que c'est contaminé puis il ne sait pas comment ça va coûter. C'est ça que je comprends. Puis ça, c'est la Corporation d'hébergement du Québec.

Et on mentionne dans le même article: «Si on n'a pas mentionné la présence de la voie ferrée dans le rapport d'urbanisme ? et là on fait référence à la firme Daniel Arbour & Associés ? une erreur, selon certains professionnels ? alors, les professionnels considèrent que c'est une erreur, dans ce rapport-là, de ne pas avoir mentionné ces contraintes importantes pour l'emplacement d'un hôpital ? c'est qu'on ne juge pas les risques liés aux trains, assez importants, explique M. Serge Carreau, vice-président de la firme Daniel Arbour & Associés.» Alors, il commence à y avoir passablement de contestations et de critiques par rapport à la valeur de l'étude ou du rapport qui a été produit.

Et là on apprend, M. le Président, qu'il n'y a pas eu d'appel d'offres pour ce contrat qui a été donné à la firme Daniel Arbour & Associés, alors qu'il aurait dû y avoir un appel d'offres, selon les normes d'attribution des contrats. Et là on nous dit que c'est à cause des délais trop courts que ça a été fait. M. le Président, on est rendu en 2000, en 2000. Depuis 1995 qu'on parle du projet du CHUM, et là on n'a pas eu le temps, on se réveille, cinq ans plus tard, puis les délais sont trop courts, on est obligé de procéder sans appel d'offres.

Et, comme par hasard, M. le Président, ce qui est assez particulier, comme par hasard, c'est tombé que l'appel d'offres est sur invitation. Alors, on a invité quelques personnes, on a sélectionné quelques personnes, et le hasard a bien fait les choses, puisque le contrat a été donné à la firme Daniel Arbour & Associés. Et je vais vous lire un extrait qui explique très bien le portrait global de cette chose: «Daniel Arbour & Associés, a comme filiale Expertise 3S, une firme spécialisée dans la conception de plans fonctionnels et techniques pour la conception générale d'un hôpital ou d'un centre de soins de longue durée. Parmi les 16 employés de cette compagnie, à Québec, on retrouve M. Jean-Claude Filion et Martin Cayer, qui ont respectivement été chef de cabinet et chef de cabinet adjoint du ministre Jean Rochon. On y retrouve également une avocate, Mme Anne-Marie Pepin, qui travaillait au même cabinet et qui a un contrat de quelques mois chez Expertise 3S.»

Là, M. le Président, on pourrait continuer puis voir tout le portrait global. Mais globalement, là, c'est tout un petit paquet de monde qui avaient circulé autour du ministre de la Santé, qui se retrouvent associés, d'une façon ou de l'autre, directement ou indirectement, à la firme en question, et c'est eux qui ont le contrat. Et ces gens-là n'avaient pas... ? c'est mentionné dans le document ? n'avaient jamais eu un tel contrat, ils n'avaient pas l'expertise pour avoir ce type de contrat. Et d'ailleurs, ça a été contesté par les urbanistes en question.

n(11 h 30)n

Et je pense que la conclusion qui sort dans les journaux, de la part de Mme Lysiane Gagnon, quelques jours après, est très éloquente: «On apprenait hier, grâce à notre collègue Denis Lessard, que ce projet, qui déjà dégageait de forts relents d'incompétence, sent à plein nez le copinage partisan.»

Plus tard, elle dit dans son article ? plus loin, c'est-à-dire: «La ministre n'a même pas l'air de savoir ce qu'il adviendra de l'Hôtel-Dieu, de Notre-Dame et de Saint-Luc. Quelle sera, au juste, la vocation des trois hôpitaux? Deviendront-ils des satellites du futur CHUM, des centres ambulatoires, des institutions pour malades chroniques, des condos, des centres commerciaux? Ne fallait-il pas déterminer la vocation des hôpitaux existants avant de commencer à dresser les plans d'un nouvel hôpital? Mais, évidemment, ce sont là des questions que l'on ne se pose pas quand le souci prioritaire est d'ordre politique.»

Alors, M. le Président, le dossier est parti de cette façon-là, et on a vu qu'on a nommé à un moment donné M. Béland à la tête, comme président de la société d'implantation. M. Béland a fait une certaine période de temps pour s'apercevoir que ce qui se passait là était aberrant, au point où il a démissionné, M. le Président, après en avoir certainement informé le ministre responsable. M. Béland ne s'est pas levé un matin et dire: Je démissionne. Il avait informé le ministre, il l'avait certainement informé. Et il ne s'est rien passé, et je suppose que c'est parce qu'il ne s'est rien passé, que le ministre n'a rien fait, que le président a été obligé de donner sa démission. Alors, ça nous laisse très songeurs, M. le Président.

Et ce qui se passe globalement à la Corporation d'hébergement du Québec, M. le Président, je pense que ça mérite d'être regardé de plus près. Vous savez, invoquer l'urgence pour passer outre aux procédures normales d'appel d'offres, ce n'est pas la première fois que ce gouvernement-là le fait. Je vous rappellerai qu'il l'a fait dans le cas de la construction des 12 CHSLD où, encore là, comme par hasard, le contrat a été donné à un consortium où on incluait Construction Marcon. Et Construction Marcon, M. le Président, c'était un nommé Mélançon. M. Mélançon était un bailleur de fonds du Parti québécois. Et c'était un contrat de 2,5 millions sans appel d'offres, et le résultat, comme dans le cas ici: des amis en ont profité.

Alors, M. le Président, vous me dites que le temps s'écoule. Alors, je pense que la seule chose que le gouvernement a pu faire dans le projet du CHUM, M. le Président, ça n'a pas été de faire avancer le projet, ça a été de satisfaire les amis du régime.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Mme la députée de Crémazie.

Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. M. le Président, je dois vous avouer que ça me fait grand plaisir, ce matin, de pouvoir soutenir mon collègue le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux à l'occasion du dépôt de la motion du député de Marquette qui est celle-ci:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier de Montréal, le CHUM.»

Une voix: ...

Mme Blanchet: Peut-être pas si vite que ça.

C'est une motion, je dirais, qui était assez extraordinaire d'ailleurs, M. le Président, une motion qui me fait dire que, si les libéraux ont peut-être perdu la mémoire, ils n'ont pas perdu, par contre, une once de culot en osant venir parler en cette Chambre de laxisme dans la gestion des fonds publics. Il suffit seulement de rappeler la situation financière que le gouvernement du Parti québécois a trouvée à son arrivée au pouvoir en 1994: plusieurs millions de déficit, plus de 6 milliards, un ménage, je dirais, que l'on a dû faire depuis. Donc, je peux vous dire qu'en tant que députée de l'île de Montréal je veux réitérer mon appui à mon collègue qui pilote ce dossier avec beaucoup d'énergie, beaucoup d'engagement, mais aussi avec beaucoup de rigueur, parce que, évidemment, c'est un dossier très, très, très complexe, soit celui de la santé en général.

Mais ce qu'il serait important de rappeler, M. le Président, c'est qu'il est nécessaire et primordial de doter Montréal de deux nouveaux hôpitaux universitaires, soit celui de l'Université de Montréal et celui aussi de l'Université McGill. Notre gouvernement a fait beaucoup pour Montréal au cours des dernières années, et j'ai été très fière de pouvoir y contribuer en partie depuis mon élection en 1998. Il nous a fallu beaucoup de courage pour mettre fin finalement, de façon définitive, à l'émiettement et aussi à l'éparpillement municipal qui caractérisaient la situation sur l'île de Montréal jusqu'à la naissance de la nouvelle ville il y a quelque temps. Oui, il nous a fallu beaucoup de courage pour donner enfin à Montréal les moyens d'assumer pleinement le rôle qui est le sien, c'est-à-dire celui d'une grande métropole internationale.

Et, à ce sujet, qu'est-ce que nos amis d'en face, de l'opposition officielle, proposent pour Montréal? Bien, on l'a souvent entendu, c'est de revenir en arrière, morceler de nouveau l'île de Montréal pour que les guerres de clocher reprennent, que les plus riches paient moins de taxes, etc., ce qu'on a voulu régler justement avec la fusion à Montréal, il y a quelque temps.

J'imagine aussi, une fois que nos amis libéraux auraient démantelé Montréal, ils voudraient sûrement abandonner le projet de ces deux hôpitaux modernes qui nous permettraient de pouvoir offrir... et qui nous permettront, pardon, d'offrir aux Montréalais ou aux Montréalaises une meilleure qualité de soins, des services aussi et une meilleure accessibilité.

Des hôpitaux, M. le Président, nous en avons grandement besoin à Montréal. Ils sont nécessaires à bien des égards, mais tout particulièrement afin d'améliorer les conditions dans lesquelles s'effectue la formation de nos futurs médecins et de nos futurs infirmiers et infirmières. Ils sont également nécessaires pour permettre un meilleur développement de la recherche et de la technologie. Le Québec, vous le savez, son expertise dans le domaine des biotechnologies, entre autres, et dans le domaine de la santé est très, très... son expertise est reconnue à travers le monde. D'ailleurs, plusieurs grandes compagnies multinationales viennent s'installer dans la grande région de Montréal et à Montréal. Donc, on doit demeurer compétitif en santé évidemment, mais, comme partout ailleurs, dans tous les autres domaines où nous oeuvrons.

Vous savez, M. le Président, Montréal est maintenant une ville de haute technologie. Notre gouvernement a été largement impliqué dans le développement de ce secteur d'activité au cours des dernières années. Et, à mes yeux, je vous dirais qu'il me semble absolument capital que notre métropole reste à la fine pointe de la haute technologie, et ce, tout particulièrement dans un domaine aussi crucial que celui de la santé.

Ceci dit, je suis complètement d'accord avec mon collègue le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, on ne peut pas évidemment... non, on ne défendra pas l'indéfendable, mais notre gouvernement, oui, va continuer à gérer de façon responsable, de façon transparente en administrant l'argent qui nous est confié par tous ceux et celles qui habitent dans nos circonscriptions, je dirais, permettez-moi l'expression, à la manière d'un bon père ou d'une bonne mère de famille. Donc, nous allons gérer de façon responsable et avec beaucoup de rigueur.

Là-dessus, par contre, je ne pense pas que la population du Québec doute, justement, de notre gestion, puisque nous avons, depuis 1996, entre autres, fait l'assainissement des finances publiques. Ça n'a pas été facile pour personne. Avec la contribution de tous et toutes au Québec, nous avons pu assainir les finances et atteindre le déficit zéro et arrêter de vivre au dessus de nos moyens. Là-dessus, bien, effectivement, la population, à voir notre bilan, peut tout... n'a pas à s'inquiéter de nos compétences.

Nous gérons et nous avons toujours géré de façon responsable et rigoureuse. Et la situation de la SICHUM, la Société d'implantation du Centre hospitalier de l'Université de Montréal et de la CHQ, la Corporation d'hébergement du Québec, fournit d'ailleurs une excellente illustration de ce que j'avance, M. le Président. En effet, dès que des problèmes ont été portés à son attention, mon collègue le ministre d'État à la Santé et notre gouvernement sont rapidement intervenus et aussi avec une grande fermeté. Effectivement, le Conseil des ministres a immédiatement saisi le Contrôleur des finances du gouvernement du problème qui était soulevé, et mon collègue a pris acte des recommandations que le Contrôleur des finances lui a faites suite au récent dépôt de son rapport de vérification. Ensuite, bien évidemment, mon collègue s'est assuré que le suivi allait être fait avec toute la rigueur nécessaire et mis en place tous les mécanismes pour s'assurer que les problèmes de coordination existants entre les deux organisations ne se reproduisent plus pour ainsi retrouver la bonne voie.

Honnêtement, je ne vois pas vraiment ce que mon collègue aurait pu faire de plus, M. le Président et, pour ma part, je suis aussi pleinement satisfaite de ses actions et aussi convaincue que le développement du Centre hospitalier de l'Université de Montréal et aussi bien celui du Centre hospitalier de l'Université McGill se feront très bien. Ce sont des projets très structurants pour Montréal et pour aussi l'ensemble du Québec. Nous allons les mener à terme et aux meilleurs coûts possible, bien évidemment.

n(11 h 40)n

Vous savez, le Parti libéral nous dit, depuis plusieurs semaines, qu'il veut réinventer le Québec, mais je pense qu'il devrait plutôt renouveler son engagement envers notre métropole. En essayant d'entraver tout ce que nous faisons pour assurer le rayonnement et la prospérité de Montréal, il me semble qu'il continue à manquer le bateau en essayant de rapetisser plutôt le Québec et, évidemment aussi, en essayant de rapetisser Montréal.

Donc, M. le Président, le Québec ne peut pas être grand pour les libéraux. Le Québec doit être plutôt petit, une petite province, être très discret, ne pas trop proclamer sa différence, son identité et sa métropole. Je dirais que, selon le même raisonnement, le Québec doit être un agglomérat de petites villes avec de petites ambitions et aussi de petits hôpitaux. Moi, je dirais plutôt, M. le Président, que le Parti libéral, après huit ans dans l'opposition, n'a rien compris. Ce n'est pas le Québec qui devrait être réinventé, M. le Président, mais plutôt le Parti libéral. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Crémazie. J'invite maintenant le député de Johnson à prendre la parole, en vous indiquant qu'il vous reste huit minutes.

M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. Notre collègue de Crémazie a dit des choses extraordinaires sur la vision du Parti libéral par rapport au Québec. Effectivement, le Parti libéral a peur que le Québec grandisse. Et, lorsque quelqu'un dans ce gouvernement souhaiterait que le Québec devienne un grand État ou un grand pays, tout le monde lui dit de se taire et de fermer sa boîte.

Ce qui est arrivé d'ailleurs au niveau de la santé quand le célèbre ministre de leur gouvernement Marc-Yvan Côté a voulu réformer la santé et les services sociaux au Québec. Il a fait un show qui a coûté 600 000 $, avec tous les intervenants de la santé, directeurs généraux, présidents de conseil d'administration. Ici, à Québec, vous vous souvenez, il était dans une espèce de table ronde, en cravate et en chemise, et voilà! on se mettait au travail. Et, très rapidement, le gouvernement du temps, avec son chef, a ramené M. le visionnaire d'un grand système de santé rénové à l'ordre. Si bien que rien ne s'est fait, et les dépenses en santé ont continué d'augmenter de façon phénoménale. Et il a fallu que le gouvernement libéral soit battu en 1994, il a fallu que le gouvernement de M. Parizeau nomme ce grand homme que fut et qu'est toujours Jean Rochon, et qui a été un grand ministre de la Santé, pour entreprendre cette magnifique réforme qui était axée, vous comprenez, sur un certain nombre de valeurs qui avaient été véhiculées par le gouvernement libéral précédent, mais que le gouvernement libéral n'avait pas eu le courage de réaliser.

Et ces gens-là aujourd'hui critiquent la gestion du système de santé, comme ils le font actuellement par rapport au CHUM, mais comme ils le font de façon générale. Alors, je n'élaborerai pas longtemps sur cette question-là du CHUM, ma collègue l'a bien démontré: le gouvernement a fait tout ce qu'il pouvait faire de façon intelligente pour que soit réglé le problème. Et il va l'être. Notre collègue François Legault est réputé pour régler les problèmes et le faire de façon efficace et à des coûts inférieurs à tout ce qu'on a connu dans le temps des libéraux. Parce que, lorsqu'ils ont terminé le pouvoir, vous vous rappelez, M. le Président, il y avait 6 milliards de déficit, et ça allait plus mal que jamais dans la santé. Parce que, pour les libéraux, il y a une façon de régler le problème: On met de l'argent, mettons de l'argent. On ne sait pas où ils vont le prendre, surtout qu'ils veulent baisser les impôts en même temps qu'ils veulent mettre plus d'argent dans la santé, mais mettons de l'argent.

Alors, permettez-moi, M. le Président, de... Parce que c'est très intéressant. Ils ont un programme intéressant à lire, M. le Président. Je ne dis pas que le programme est intéressant en soi, mais il est intéressant à lire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boucher: Lorsqu'on lit leur programme, on découvre des choses formidables, et c'est très, très intéressant. Et j'inviterais d'ailleurs tous les Québécois à lire le programme. Alors, lorsqu'ils auront lu ceci, M. le Président... c'est D'abord soigner. Ils disent: «Un gouvernement du Parti libéral du Québec remettra sur pied ce système de santé qui a permis au Québec de s'élever parmi les sociétés les plus modernes du monde.» Entendez-vous ce qu'ils ont dit? Il y en a un dans leur gouvernement, à leur dernier mandat, qui s'est levé pour essayer de remettre le système de santé sur pied et en faire un des systèmes les plus... Il y en a un, Marc-Yvan Côté. Il s'est fait rabrouer et envoyer au placard de belle façon, il n'avait pas fini sa conférence de presse. Alors, voilà ce que ces gens-là disent. Mais ce qu'ils font, ce n'est vraiment pas ça.

M. le Président, je lis aussi, à la page suivante, quelque chose qui est très intéressant à lire: «Un gouvernement du Parti libéral du Québec sera le gouvernement de la santé.» En d'autres mots, le Parti libéral du Québec deviendra une grande régie régionale. Pourtant, ils veulent les abolir, hein! Ils veulent abolir les régies régionales et remplacer ça par une espèce de table conviviale sympathique d'amis du régime, hein, qui vont ensemble discuter des budgets qu'on va distribuer dans chacune des régions. Mais ils veulent devenir un gouvernement de la santé. Bien, imaginez-vous, avec ce que je viens de vous dire par rapport à ce qu'ils ont fait à leur dernier mandat, c'est très peu crédible. Comment le Parti libéral peut-il devenir un gouvernement de la santé en abolissant les régies régionales et, vous le savez très bien, M. le Président, en recréant des petites tables régionales conviviales très souples, comme ils disent, très souples? Bien sûr, plus c'est souple, plus on peut intervenir pour influencer, hein! Alors, on veut établir ces espèces de petites tables, là, sympathiques, avec les amis.

M. le Président, j'ai fait le tour du comté de Johnson, 23 rencontres, depuis le 10 septembre, avec les maires de mon comté, avec les conseillers municipaux, avec les responsables d'organismes, 25 rencontres où j'ai demandé à la population, une fois que je leur ai eu expliqué... Apparemment, d'ailleurs, que la députée de Saint-François aurait la publicité que je fais dans les journaux dans son bureau et qu'elle inviterait les gens qui la visitent à faire le budget avec elle. On m'a dit ça. Ce doit être une idée très intéressante, n'est-ce pas?

Alors, j'ai fait le tour de 23 municipalités avec lesquelles j'ai fait le budget du Québec 2003-2004. Et là les gens, quand ils ont su qu'ils avaient... quand ils apprennent qu'ils ont un montant limité, parce que ce n'est pas élastique, le budget du Québec... depuis qu'on a adopté la loi du déficit zéro, ce n'est pas élastique. Il y a un budget qui est déterminé et qu'on doit respecter. La loi du déficit zéro, M. le Président, c'est nous qui l'avons adoptée. Si bien que, une fois que les gens, qui étaient 25 en moyenne par rencontre, ont fait la démarche du budget 2003-2004... Je vais vous révéler une chose, M. le Président, que je devais faire à la presse la semaine prochaine avec le premier ministre, mais je vais vous en révéler une partie, des choses qui ressortent de cet exercice budgétaire là: les gens ne mettent presque pas plus d'argent dans la santé. Les gens découvrent qu'on ne peut pas être le gouvernement uniquement de la santé comme veulent être les libéraux, que l'État québécois, là, ce n'est pas juste la santé et les services sociaux. L'État québécois, c'est des routes; l'État québécois, c'est de la culture; l'État québécois, c'est l'éducation; l'État québécois, c'est la famille; l'État québécois, c'est des allocations familiales; c'est des femmes au foyer qui ont besoin d'être supportées dans l'éducation de leurs enfants. L'État québécois, ce n'est pas simplement un État de santé et de services sociaux comme veulent faire les libéraux.

M. le Président, les gens de mon comté ont dit: Ils ne sont pas crédibles; ils ne sont pas crédibles, les libéraux; jamais on ne pourra leur confier le pouvoir. Et je vous dirai que ce n'est pas juste des péquistes qui l'ont dit, c'est des adéquistes puis des libéraux qui l'ont dit. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Johnson et secrétaire d'État aux Infrastructures. J'invite maintenant le député de Marquette et porte-parole de l'opposition officielle en matière de la métropole et des services gouvernementaux à se prévaloir de son droit de réplique. Dix minutes, M. le député.

M. François Ouimet (réplique)

M. Ouimet: M. le Président, si le député de Johnson est si sûr de ce qu'il dit, pourquoi est-ce qu'il ne tente pas de convaincre le premier ministre de déclencher des élections au Québec? On verrait bien quel serait le verdict de la population, hein! Ce serait quoi, le verdict de la population?

n(11 h 50)n

Nous, de notre côté, on est prêts à confronter notre chef, notre programme, notre équipe avec votre chef, votre programme ? vous n'en avez pas ? votre équipe et celle de l'ADQ. Nous, on est prêts. Ça fait longtemps qu'on réclame des élections pour permettre à la population du Québec de juger de votre bilan des huit dernières années. Le peuple décidera ultimement. Si vous êtes si sûr de ce que vous avancez, pourquoi est-ce que vous ne réussissez pas à convaincre votre premier ministre?

M. le Président, ça fait huit ans que je siège en cette Chambre et que j'entends les ministres du gouvernement et les députés du gouvernement répéter la même, même chose au niveau du déficit qu'aurait apparemment laissé le gouvernement libéral en 1994. On nous accuse d'avoir laissé au Québec le pire déficit de son histoire. Moi, en huit ans, je l'ai entendu au moins plus d'une centaine de fois, cette accusation-là, plus... mille fois, cette accusation. Je n'ai jamais entendu le premier ministre, ou un ministre, ou un député péquiste citer une seule source.

Moi, je vais vous en citer une, source. Je vais vous citer Claude Picher, économiste au journal La Presse, qui, lui, avait décidé de faire la feuille de route des ministres québécois des Finances depuis 1970 jusqu'à 1994. Ça va intéresser la députée de Marie-Victorin sûrement. Voici la conclusion que tire Claude Picher, et je le cite au texte: «Au Québec, c'est Jacques Parizeau qui détient le record du déficit le plus grave en 1980.» M. le Président, j'espère qu'une fois pour toutes les députés péquistes vont arrêter de répéter le même discours. Le deuxième pire ? attendez que je vois ? le deuxième pire bilan, c'est Yves Duhaime en 1984, le deuxième pire. Voulez-vous connaître le troisième pire bilan au niveau des déficits? Le troisième pire, bien c'est à nouveau Jacques Parizeau en 1979. Donc, vous voyez, les trois pires ministres des Finances au Québec, c'est trois ministres du Parti québécois. J'espère que la députée de Marie-Victorin écoute ce que je dis, qu'elle prend des notes, M. le Président. Les trois pires au Parti québécois, donc la médaille d'or, la médaille d'argent et la médaille de bronze, champions des déficits au Québec au cours des 25 dernières années, ça appartient au gouvernement du Parti québécois. C'est clair?

Et, d'ailleurs, après 1994, rappelez-vous lorsque Jean Campeau, l'ex-député de Crémazie, était devenu ministre des Finances, il avait fait... Ça n'a pas duré longtemps, mais il avait pris le temps quand même, après 1994, son élection, de faire le tour des finances publiques, et le titre dans La Presse: Campeau n'a pas découvert de mauvaises surprises. Le ministre des Finances du Québec, Jean Campeau, juge que les finances publiques ne sont pas en trop mauvais état.

Voyez-vous ce qu'il disait, M. Campeau, hein? Savez-vous ce qui s'est passé par la suite? C'est Richard Le Hir ? rappelez-vous de Richard Le Hir qui a été député d'Iberville ? qui a été ministre responsable de la restructuration. Il a écrit un petit livre. C'est intéressant, ce qu'il révèle dans le livre. Il disait que ça changeait de semaine en semaine. Il y avait des commandes de placées par le premier ministre du Québec, données au ministre des Finances, de gonfler le déficit des libéraux. Est-ce que vous vous rappelez de ça, M. le Président? Ils ont décidé d'imputer des dépenses d'une autre année financière, les imputer au bilan du Parti libéral du Québec. C'est comme ça qu'ils ont réussi à gonfler le déficit au Québec, M. le Président. Alors, ça pourrait intéresser la députée de Marguerite-Victorin de lire un peu ce que son collègue a déjà dit au sujet des stratégies du gouvernement pour tenter de noircir la feuille des libéraux.

Mais revenons maintenant à la saine gestion gouvernementale dans le dossier du CHUM et du CUSM, du Centre universitaire de santé McGill, parce que nos collègues d'en face nous disent que, «nous, les péquistes, on gère avec rigueur et de façon responsable». Lorsqu'on regarde le dossier des deux centres universitaires de santé, c'est loin d'être le cas, c'est la spirale des dépenses qui n'en finit plus. Moi, je suis inquiet. Le ministre de la Santé et des Services sociaux est venu nous dire ce matin, ici, à l'Assemblée nationale, qu'il ne sait pas combien ça va coûter. Il ne sait pas combien ça va coûter, mais, il y a deux ans, ils ont annoncé la décision qu'ils allaient de l'avant et qu'ils allaient les construire, les deux centres universitaires. Et Mme Marois, dans un communiqué de presse, avait dit qu'ils avaient mesuré les coûts de façon rigoureuse. C'est ce qu'elle disait le 25 janvier 2000. Deux ans et demi plus tard, le ministre de la Santé nous avoue bien candidement ce matin: Je ne sais pas combien ça va coûter, je n'ai pas les réponses.

Est-ce que c'est ça, gérer de façon responsable et rigoureuse? Quand on prend des engagements, on permet d'engager 200 consultants, on permet d'engloutir 18 millions de dollars dans un projet, et on ne sait même pas combien ça va coûter, on n'a pas mesuré le coût de construction et le coût de service pour les deux centres universitaires. Et, aujourd'hui, nos amis d'en face voudraient nous faire la démonstration qu'ils gèrent de façon rigoureuse et de façon efficace? Vous n'avez pas choisi le bon dossier pour tenter de le démontrer.

Ce qui m'inquiète, par ailleurs, M. le Président, c'est qu'on ne sait pas où va le gouvernement dans ce dossier-là. Le ministre nous dit: Il n'est pas question pour nous de remettre en question le choix que nous avons fait de construire deux centres universitaires de santé à Montréal; on ne remet pas ça en question, mais on n'engagera pas la construction tant et aussi longtemps qu'on ne connaîtra pas les coûts. Et là la question se pose: si on ne sait pas combien ça va coûter mais qu'on a déjà annoncé qu'on allait le faire... On annonce qu'on va le faire, mais on dit: On n'est pas sûr de le construire; on va être sûr de le construire une fois qu'on va connaître les coûts, mais on ne connaît pas les coûts. Et, si les coûts dépassent largement ce qui avait été prévu et budgété, qu'allez-vous faire? On ne le sait toujours pas ce matin.

On ne sait pas où le gouvernement s'en va, mais on sait une chose cependant, c'est qu'à chaque mois ça coûte aux contribuables québécois, au bas mot, 400 000 $, 400 000 $ que les Québécois payent pour l'improvisation du gouvernement. Un gouvernement qui ne sait pas où il s'en va, c'est manifestement un gouvernement qui est en déroute. Parce que le directeur général de la Régie régionale de la santé, que vous avez remercié récemment pour faire de la place à un candidat péquiste défait à Montréal, lui, avait annoncé que, si jamais la facture était trop salée, c'est sûr et certain qu'il déciderait, et que le gouvernement déciderait, de ne pas aller de l'avant avec ces deux projets-là.

Ce matin, on essaie d'obtenir des réponses claires du ministre. C'est un dossier quand même, là, qui est en marche depuis plus de deux ans et demi, qui avait fait l'objet de grandes décisions. Le seul effet concret des décisions prises par le gouvernement, c'est la pancarte qui a été installée au coin de Saint-Denis et Rosemont, une grosse pancarte, et le plus de 18 millions de dollars qui a déjà été englouti, et ça continue à la hauteur de 400 000 $ par mois. Puis on tente de savoir, puis mon collègue le député de Châteauguay a tenté de savoir à plusieurs reprises: Déposez les coûts, dites-nous combien ça va coûter au niveau de la construction, combien ça va coûter au niveau de l'opération pour qu'on puisse savoir vers quoi vous voulez amener les Québécois. Et le ministre qui nous avoue bien candidement ce matin... c'est qu'il n'a pas réponse à ces questions-là, il ne sait pas où il s'en va.

M. le Président, je terminerai en disant... La députée de Marie-Victorin qui nous invitait à faire le débat au niveau de notre position sur les services de santé, nous, on est prêts à en débattre, nous avons déposé notre plan d'action comme gouvernement. On attend juste une chose, Mme la députée, c'est que votre chef déclenche des élections, on est prêts.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député. Alors, je vais maintenant mettre aux voix la motion du député de Marquette qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal.»

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

n(12 heures)n

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe. Sur division.

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je demanderais de rapporter, s'il vous plaît, le vote, selon l'article 223, après les affaires...

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe, à ma connaissance, je n'ai pas entendu, de la part du leader de l'opposition, une demande à l'effet qu'on tienne un vote par appel nominal. Donc, je considère que la motion...

Des voix: Adopté.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Beaulne): Oui. Bon. Alors, effectivement, M. le leader adjoint, la leader du gouvernement peut bien se prévaloir également des mêmes dispositions. Et je constate que vous demandez qu'il y ait un vote reporté après la période des affaires courantes. Alors, voilà. M. le leader adjoint... M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: ...tout le monde, M. le Président, je demande qu'il y ait un vote, que ce vote soit fait par appel nominal.

Vote reporté

Le Vice-Président (M. Beaulne): Bon. Alors, il y aura un vote par appel nominal, comme le prévoit le règlement, après la période des affaires courantes. Et, sur ce, je suspends nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 14 h 7)

La Présidente: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Présence de représentants
de la communauté libanaise du Québec

Alors, j'ai le plaisir, le très grand plaisir de souligner la présence parmi nous cet après-midi, dans les galeries, de représentants de la communauté libanaise du Québec. Ils se trouvent également dans les galeries du public, et je les salue.

Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre des Finances, de l'Économie et de la Recherche.

Rapport annuel de l'Inspecteur
général des institutions financières

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je dépose le rapport annuel de gestion 2001-2002 de l'Inspecteur général des institutions financières.

La Présidente: Ce document est déposé. M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Rapports annuels du ministère de la Santé et
des Services sociaux et du Protecteur des usagers
en matière de santé et de services sociaux

M. Legault: Oui, Mme la Présidente. Je dépose les rapports annuels 2001-2002 suivants: celui du ministère de la Santé et des Services sociaux et celui du Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux.

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi.

Rapport annuel du ministère
de l'Éducation et rapports
annuels 2000-2001 de certaines
universités et institutions d'enseignement

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel de gestion 2001-2002 du ministère de l'Éducation ainsi que les rapports annuels 2000-2001 des universités suivantes: Bishop's, Concordia, Montréal, Sherbrooke, 2000-2001, et École Polytechnique de Montréal.

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole, à l'Environnement et à l'Eau.

Rapports annuels du Bureau d'audiences publiques
sur l'environnement, du Palais des congrès
de Montréal et de la Commission municipale

M. Boisclair: Oui. Mme la Présidente, je dépose les rapports annuels 2001-2002 suivants, à savoir: le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, celui du Palais des congrès de Montréal et finalement celui de la Commission municipale du Québec.

La Présidente: Ces documents sont déposés. Alors, toujours au dépôt de documents, Mme la ministre d'État à la Solidarité sociale, à la Famille et à l'Enfance.

Rapports annuels du Centre de recouvrement,
du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale,
du Secrétariat à la condition féminine et
de la Sécurité du revenu

Mme Goupil: Alors, Mme la Présidente, j'ai le privilège de déposer les rapports annuels de gestion 2001-2002 du Centre de recouvrement, du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale, du Secrétariat à la condition féminine et de la Sécurité du revenu.

n(14 h 10)n

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le ministre de la Sécurité publique et ministre des Transports.

Rapport annuel du ministère des Transports et
erratum au rapport annuel du Comité
de déontologie policière

M. Ménard: Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel 2001-2002 du ministère des Transports ainsi qu'un erratum sur le rapport annuel 2001-2002 du Comité de déontologie policière.

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le ministre de la Justice.

Plan d'action 2002-2003 du
Bureau des infractions et amendes

M. Jutras: Alors, Mme la Présidente, je dépose le plan d'action 2002-2003 du Bureau des infractions et amendes.

La Présidente: Ce document est déposé. M. le ministre du Revenu.

Rapport annuel du ministère du Revenu,
rapport d'activité du ministère du Revenu
résultant de la comparaison, du couplage ou
de l'appariement des fichiers de renseignements
au 31 mars 2002 et avis de la CAI

M. Julien: Alors, Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel de gestion 2001-2002 du ministère du Revenu du Québec, ainsi que le rapport d'activité résultant de la comparaison, du couplage ou de l'appariement des fichiers des renseignements au 31 mars 2002 du ministère du Revenu, ainsi que l'avis favorable de la Commission d'accès à l'information sur ce rapport d'activité.

La Présidente: Ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement, au nom du ministre d'État aux Ressources humaines et au Travail.

Rapport annuel de la Commission des lésions
professionnelles et rapport d'activité
de la Commission de la construction

M. Boisclair: Oui. Merci, Mme la Présidente. Je dépose, au nom du ministre d'État aux Ressources humaines et au Travail, le rapport annuel de gestion 2001-2002 de la Commission des lésions professionnelles ainsi que le rapport d'activité 2001 de la Commission de la construction du Québec.

Rapport sur l'état des dépenses et des crédits
autorisés au Vérificateur général du Québec

La Présidente: Ces documents sont déposés. Pour ma part et conformément aux dispositions de l'article 70 de la Loi sur le vérificateur général, je dépose le rapport des vérificateurs qui ont procédé à la vérification des dépenses et des crédits autorisés au Vérificateur général du Québec pour l'exercice financier terminé le 31 mars 2002.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

Alors, au dépôt de pétitions, Mme la députée de Mégantic-Compton.

Maintenir ouverte la Centrale de coordination
des appels d'urgence pour les ambulances en Estrie

Mme Bélanger: Merci, Mme la Présidente. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 2 090 pétitionnaires pour le maintien de la Centrale de coordination des appels d'urgence pour les ambulances en Estrie.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que deux études sérieuses ont recommandé très clairement, en 1997, l'établissement d'une centrale de coordination des appels d'urgence en raison de la qualité des services offerts à la population et d'une série d'avantages économiques;

«Attendu que les Services de sécurité de l'Estrie inc., Ambulance Isabelle inc., Ambulance Côté et Ambulance Stanstead ont mis en commun leurs ressources en mars 1997 pour doter l'Estrie d'un centre de coordination muni d'un système de répartition assisté par ordinateur très sophistiqué;

«Attendu que le gouvernement du Québec projette de fermer le point de services régional et de transférer les appels d'urgence à une centrale située en Mauricie;

«Attendu qu'aucune étude n'a encore démontré hors de tout doute que le transfert des activités vers une autre région serait avantageux pour les usagers de l'Estrie;

«Attendu que la réalisation d'études additionnelles est nécessaire pour juger des impacts réels d'un éventuel transfert sur les services offerts aux contribuables de notre région;

«Attendu que rien ne nous permet de croire que la communauté anglophone recevra des services adéquats dans sa langue, advenant le transfert des activités dans une région à très forte proportion francophone;

«Attendu qu'un rapport produit par les copropriétaires à la demande de la direction des services préhospitaliers au Québec recommande le statu quo;

«Et l'intervention se résume ainsi:

«Nous, résidents de l'Estrie, exhortons l'Assemblée nationale du Québec à ne pas fermer le point de services de Sherbrooke et à ne pas transférer la gestion des appels d'urgence à une centrale située en Mauricie pour ainsi conserver l'efficacité, l'efficience, la qualité et la continuité des services reconnus offerts à la population régionale au cours des dernières années.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

La Présidente: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et de réponses orales M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, ministre responsable des Relations avec les communautés francophones et acadiennes et ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques répondra à une question posée hier par M. le député de Brome-Missisquoi relativement au remboursement d'une contribution versée à l'Action démocratique du Québec.

Je vous avise également qu'après cette réponse différée sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le député de Marquette débattue ce matin aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Questions et réponses orales

Alors, nous allons aborder la période de questions et de réponses orales. Mme la députée de Saint-François, en question principale.

Investissements prioritaires
dans le secteur de la santé

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, Mme la Présidente. Ma question s'adresse à la ministre des Finances. Hier, j'ai tenté sans succès de faire confirmer par le ministre de la Santé que la politique des services de soins et de maintien à domicile que le gouvernement s'était engagé à déposer en février 2002, on se rappellera, suite à un rapport accablant du Vérificateur général, dormait sur les tablettes, faute de fonds. Or, Mme la Présidente, la ministre des Finances est bien placée pour savoir qu'une personne hébergée coûte environ 40 000 $, alors que, si elle était à domicile, elle en coûterait environ 25 000. Donc, le gouvernement pourrait ainsi faire des économies. Le gouvernement pourrait aussi implanter cette politique graduellement, parce que ce dont on parle, Mme la Présidente, il s'agit de personnes, il s'agit des êtres humains, et donc on a des choix à faire. Comme gouvernement, il faut faire des choix.

Et je m'adresse à la ministre des Finances: Peut-elle nous dire si son gouvernement a l'intention véritablement de faire de la santé une véritable priorité?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on sait que, depuis qu'on a réparé le gâchis qui avait été laissé en 1994, c'est-à-dire un déficit annuel de 6 milliards, donc depuis 1998, on est maintenant en équilibre, et le deux tiers de tous les surplus qui ont été réalisés depuis ce temps-là ont été investis en santé. Donc, quand la députée nous dit qu'il n'y a pas d'efforts qui ont été faits par le gouvernement du Parti québécois en santé, je me demande ce qu'elle propose.

Est-ce qu'elle propose qu'on cesse d'ouvrir des garderies? Ce n'est pas ça que son collègue disait. Est-ce qu'elle propose de couper en éducation? On n'est pas d'accord avec ça. Donc, j'aimerais ça qu'elle nous fasse des propositions concrètes.

Mme la Présidente, comme je l'ai dit hier, oui, il y a des besoins importants en services à domicile, à cause du vieillissement de la population, à cause du virage ambulatoire. C'est pour ça qu'on a, depuis 1995, doublé le budget des services à domicile, qui est passé de 297 millions à 555 millions de dollars par année.

Je sais qu'il y a encore des besoins en santé. Oui, il y a une politique qui est prête pour en faire encore plus. Je veux bien comprendre la proposition de la députée. Est-ce que la députée... est-ce que j'ai bien compris quand elle nous dit qu'on devrait peut-être fermer des places en hébergement pour pouvoir investir dans les services à domicile? Est-ce que c'est bien ça qu'elle nous a dit? Parce que, Mme la Présidente, c'est facile de dire que ça coûte moins cher, et on est d'accord avec ça, de mettre de l'argent dans les services à domicile plutôt que de le mettre en hébergement ou dans les hôpitaux, mais on ne peut pas couper... À moins que c'est ça qu'elle suggère, la députée de Saint-François. J'aimerais qu'elle soit claire. Mais j'aimerais une fois pour toutes qu'on arrête de promettre tout à tout le monde comme le fait le Parti libéral et qu'on ait des suggestions constructives.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-François.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, Mme la Présidente. Je rappelle au ministre de la Santé que les plus gros déficits ont été faits sous un gouvernement du Parti québécois, entre autres deux avec Jacques Parizeau et un autre avec Yves Duhaime. Et rappelons-nous que, quand le gouvernement a pris le pouvoir, même le ministre de l'époque, des Finances, M. Campeau, avait dit qu'il n'y avait aucune surprise. Alors, ceci étant dit, Mme la Présidente, la population, de toute façon, n'est pas dupe. Mais c'est ce ministre, Mme la Présidente, c'est ce gouvernement qui s'est engagé à élaborer une politique pour les soins et les services à domicile. Alors, c'est vous qui avez fermé des hôpitaux pour pouvoir injecter davantage d'argent dans le virage ambulatoire. Vous avez promis cette politique, vous avez dit à la population qu'elle serait présentée en février 2002. On nous dit que la politique est élaborée mais qu'elle est sur les tablettes parce que vous êtes incapable de faire les véritables choix qui s'imposent.

Il s'agit de personnes humaines, il s'agit de personnes qui ont besoin de soins. Alors, à vous de faire les choix, M. le ministre.

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, ceux qui nous écoutent vont avoir remarqué qu'il n'y a aucune suggestion constructive. On nous dit: Il faut investir plus en services à domicile. On est d'accord avec ça, on a doublé le budget. Ce n'est quand même pas rien, on a doublé le budget. Faudrait-il faire plus? Oui, Mme la Présidente, il faudrait faire plus. Mais où doit-on prendre l'argent? On sait que le gouvernement fédéral a des surplus. Je sais que, de l'autre côté, quand on parle de ça, ça les achale parce que ce sont leurs petits amis, à Ottawa. Qu'est-ce que propose le Parti libéral du Québec, Mme la Présidente? Il nous propose de geler les budgets des autres ministères. Or, on s'est amusé, au cours des dernières semaines, à voir les députés du Parti libéral du Québec dire: Oui, on va couper, mais surtout pas dans mon ministère, ou en tout cas pas celui que je critique.

n(14 h 20)n

Regardez, Mme la Présidente, je vais vous donner deux exemples. Le 24 septembre, la députée de Sauvé, qui est critique en matière de culture, a dit... Elle précise que le gel des budgets de l'État qui est proposé par le Parti libéral du Québec pour financer la santé, elle dit, ce ne sera pas en culture. Le gel des budgets de l'État n'entraînera pas nécessairement celui du ministère de la Culture. Donc, ce n'est pas la Culture. Hier, notre ami le député de Notre-Dame-de-Grâce ? vous l'avez vu dans les journaux ? nous dit: Ce ne sera pas à la Famille non plus. On nous dit: Le ministère de la Famille serait plus riche sous les libéraux, à l'intérieur du volet du développement de notre politique familiale, pour poursuivre le développement. Cela veut dire qu'on va mettre des crédits supplémentaires pour le ministère de la Famille.

Mme la Présidente, ce n'est pas sérieux, ce n'est pas crédible. On promet tout à tout le monde. Est-ce que c'est ça, réinventer le Québec, de promettre tout à tout le monde? Je pense que la population est assez intelligente pour comprendre que c'est facile de se lever en Chambre puis dire: Vous avez doublé le budget des services à domicile, mais ce n'est pas assez. Mais ils n'ont rien à proposer.

La Présidente: En conclusion.

M. Legault: Nous, on a fait des choix, des choix courageux, puis on va continuer à le faire, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-François.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, Mme la Présidente, nous en avons, des choix. Nous pouvons en proposer, des choix, à la population. Déclenchez des élections, puis on va pouvoir les appliquer, nos choix, M. le ministre.

Mme la Présidente, le ministre nous dit que... C'est lui qui l'a proposé. C'est lui qui s'est engagé à déposer une politique, Mme la Présidente, suite à des rapports accablants du Vérificateur général. Aujourd'hui, il nous dit: Non, on a déjà mis de l'argent. Mais, s'ils ont déjà mis de l'argent, pourquoi que ça, encore, ça fait défaut? Pourquoi que les personnes n'ont pas encore de traitements? Mme la Présidente, le gouvernement dépense 1 milliard par semaine, 1 milliard par semaine dans tous les ministères. Alors, à vous de faire des choix, M. le ministre.

La Présidente: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Mme la Présidente, du temps des libéraux, on dépensait 11 milliards de dollars par année en santé, 36 % des dépenses du gouvernement du Québec. Actuellement, avec le gouvernement du Parti québécois, on dépense 17,5 milliards de dollars par année en santé, 40 % du budget du gouvernement du Québec. Donc, je ne vois pas comment la députée peut être crédible de dire que, elle, elle ferait des efforts, qu'elle irait piger dans le budget de la Famille, alors que son collègue dit: Non, non, non, surtout pas, on ne pigerait pas dans mon budget. Elle nous dit qu'elle irait piger dans le budget de la Culture, mais sa collègue qui est la critique de la culture nous dit: Non, non, non, pas dans le ministère que je critique. Les gens, là...

Mon collègue de l'Éducation est sûrement sur le terrain, encore en contact... Moi, je le fais encore avec quelques personnes. Les commissions scolaires, les cégeps, les universités nous disent: La proposition du Parti libéral du Québec, une augmentation réduite à 1,75 %, c'est ridicule, c'est irresponsable. Ça n'a pas de bon sens si on veut vraiment lutter contre le décrochage, si on croit vraiment dans nos universités, dans nos programmes de formation professionnelle et technique.

Mme la Présidente, nous, on fait des choix. Pendant ce temps-là, le Parti libéral du Québec continue de promettre tout à tout le monde d'une façon irresponsable, et, Mme la Présidente, oui, effectivement, la population jugera.

La Présidente: En principale, M. le député de Chomedey.

Injection de fonds publics dans
le chantier maritime Davie

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Oui, Mme la Présidente. Le ministre se demande où est-ce qu'on peut trouver l'argent pour les besoins criants en santé et en éducation. On va leur donner une suggestion. Le journaliste Michel Hébert, du Journal de Québec, nous apprend aujourd'hui que le gouvernement du Parti québécois s'apprête à jeter encore de l'argent public dans le chantier maritime Davie, malgré les avertissements formels des experts du Conseil du trésor et du ministère des Finances. Il révèle que, d'après les analyses internes, les différents gouvernements, pour tous les partis politiques ici, au Québec, et à Ottawa, ont déjà englouti plus de 500 millions de dollars, 500 millions des contribuables dans cette compagnie. Le pire, Mme la Présidente, c'est que, d'après les experts du Conseil du trésor, il n'y a aucune mise de fonds privée, ce n'est que de l'argent des contribuables, et on n'est même pas capable de savoir qui serait le bénéficiaire spécifique de cet argent public.

Pourquoi risquer des millions de dollars dans un chantier maritime toujours en faillite alors qu'on a des besoins criants en santé et en éducation, Mme la Présidente?

La Présidente: Mme la vice-première ministre et ministre d'État aux Finances et à l'Économie.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. La réponse est très simple, cela bénéficiera aux centaines de travailleurs et de travailleuses du chantier Davie, Mme la Présidente, puisqu'on parle de 600 emplois. On parle de 600 emplois qui, en pointe, pourront être offerts aux travailleurs de cette industrie, et l'argent que nous y mettrons, parce qu'il n'y a pas eu de déboursés, à l'exception d'une marge de crédit qui est sur garantie, Mme la Présidente, et qui, dans un premier temps, a été remboursée...

Nous avons accompagné et nous continuerons d'accompagner le chantier pour qu'il puisse obtenir ce contrat, ce contrat à hauteur de près de 60 millions de dollars, Mme la Présidente, et qui permettra encore une fois de supporter des emplois, et des emplois de grande qualité, directement, mais avec un effet indirect majeur, puisqu'on sait que, dans le secteur manufacturier, l'effet de levier est très significatif.

Mme la Présidente, c'est vrai qu'il y a eu des études faites tant aux Finances qu'au Conseil du trésor qui nous ont prévenus de certains risques. Et, à partir de ces études, nous avons convenu de faire une proposition au chantier Davie qui est très rigoureuse et qui exige une surveillance constante des sommes allouées et évidemment qui ne seront versées que si le chantier a le contrat. Alors, dans un premier temps, nous accompagnons le chantier pour qu'il obtienne ce contrat, nous nous assurons de la bonne utilisation des sommes qui seront dégagées, et, au maximum, le risque est évalué à 5 millions. Il me semble que ça vaut bien la peine pour les centaines d'emplois qui seront créés et préservés, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, M. le député de Chomedey.

Évaluation du risque lié à l'aide financière
accordée au chantier maritime Davie

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Mme la Présidente, je ne doute pas pour un instant de la bonne foi et des bonnes intentions de la ministre, sauf qu'il faut qu'elle fasse une cure de réalité. Cela fait 15 ans que les ministres responsables, des deux côtés, et ici et à Ottawa, disent avec la même bonne foi: Juste un petit peu plus pour les chantiers maritimes Davie, juste un petit peu plus. On est déjà au-delà de 500 millions. Ça n'a pas de bon sens.

Est-ce que la ministre se souvient de Métaforia, un centre d'amusement sur la rue Sainte-Catherine, à Montréal, que son gouvernement a mis en place et qui a coûté 28 millions de dollars aux contribuables? C'était fermé même avant que ce soit vraiment opérationnel. Est-ce qu'elle se souvient de Lavalum, dans une cour de ferraille à Laval? C'était supposé d'être une merveille; en faillite 15 mois plus tard. Est-ce qu'elle se souvient d'Ultravision, 60 millions? Et qu'est-ce qui s'est passé? À peine 18 mois plus tard, c'était en faillite. Et là on apprend que nos autres fleurons que les péquistes se sont vantés d'avoir inventés, qui s'appellent Sol Plastiques, dans l'est de Montréal, un autre 35 millions de l'argent du public, de toutes les tentacules de l'État là-dedans, ça vient de faire faillite. La proposition des créanciers vient juste d'être déposée à la Cour supérieure.

Est-ce que la ministre peut regarder la réalité en face? 500 millions de dollars plus tard, est-ce que, s'il vous plaît, le gouvernement peut arrêter de faire semblant de s'y connaître en affaires, laisser le marché libre décider? Le chantier est en faillite pour une bonne raison. Plus une cenne publique pour le chantier Davie.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Peut-être que le député ne se rappelle pas que c'est le gouvernement du Parti québécois qui a vendu le chantier Davie. Et nous n'avons pas l'intention de le racheter et nous n'avons pas l'intention non plus d'y dilapider des fonds publics. Nous avons l'intention cependant d'accompagner ce chantier, puisqu'il a la possibilité d'obtenir un contrat majeur, important, qui nous permet de préserver l'expertise d'une entreprise de grande qualité qui, si elle obtient ce contrat...

Et ça ne coûte pas cher, un contrat de cette envergure avec un support de l'ordre de 5 millions, un risque de 5 millions. Ça ne veut pas dire que nous le perdrons, Mme la Présidente, parce que nous avons pris toutes les mesures nécessaires pour surveiller cet investissement, pour nous assurer que chaque geste posé allait l'être de façon rigoureuse. Je crois que, pour permettre à ce chantier d'obtenir d'autres contrats, d'être éventuellement pris en charge, acheté, que ces installations soient acquises par une entreprise, cela vaut la peine, Mme la Présidente.

Et je rappellerai à nos amis d'en face qu'à cet égard, lorsqu'ils étaient au pouvoir, disons qu'ils avaient pris de très grands risques, avec l'article 7, alors que la SDI et la SGF étaient concernées. Et c'est eux, à ce que je sache, qui ont...

Une voix: Des milliards.

n(14 h 30)n

Mme Marois: Oui, des milliards. Et c'est eux, à ce que je sache, qui ont augmenté la dette accumulée à cause de déficits annuels de 67 % lorsqu'ils étaient au pouvoir, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire? En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Mme la Présidente, est-ce que la ministre des Finances peut nous dire sur quelle étude elle se base pour contredire l'avis circonstancié, objectif et externe, des experts du ministère du Conseil du trésor et de son propre ministère? Contrairement à l'Action démocratique qui aimerait mettre la hache dans la fonction publique, style américain... Parce que, quand il y a un nouveau gouvernement, on met tout le monde dehors. Nous, on a toujours cru, au Parti libéral du Québec, qu'il était important de valoriser le rôle d'une fonction publique autonome et permanente. Alors, j'aimerais savoir de la part de la ministre, qui vient de nous dire que ses propres fonctionnaires ne savent pas compter, parce que, eux, ils évaluent le risque... Elle dit que le risque, c'est 5 millions. Eux, ils évaluent le risque à au-delà de 100 millions. Alors, où est-ce qu'elle a réussi à trouver une étude pour lui donner raison contre l'avis de ses propres experts? Merci, Mme la Présidente.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Parce que, justement, suite à ces avis, nous avons fait un certain nombre de corrections dans la proposition qui a été déposée et nous avons mis en place des mesures d'encadrement de telle sorte que nous soyons en contrôle sur ce risque. Et d'ailleurs il faut savoir que nous ne sommes pas les seuls à appuyer le projet, puisqu'il y aura des fonds fédéraux, par l'intermédiaire des programmes réguliers, qui seront disponibles pour la réalisation du contrat au chantier maritime de Davie. Nous parlons d'un financement dans une proportion de 48 % du coût du projet par Exportation et développement Canada. Et, dans notre cas, ce n'est pas cela, c'est d'abord et avant tout une marge de crédit à ce moment-ci, une garantie, avec un risque potentiel de 5 millions, et un accompagnement pour qu'ils obtiennent le contrat. Jusqu'à maintenant, ce qui est réellement engagé, ce n'est que 3 millions de dollars et, encore une fois, qui est garanti, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Au-delà de répéter ce qui est contenu dans le communiqué de presse qu'elle vient juste de sortir avant la période de questions, où elle parle justement d'encadrer, est-ce que la ministre n'est pas en train d'admettre qu'il n'y a rien qui contredit le fondement des études des experts du Conseil du trésor et du ministère des Finances, sauf ses suppositions et les mêmes sortes de garanties qui ont fait en sorte que, depuis les 15 dernières années, 500 millions de dollars de l'argent des contribuables a été englouti et perdu dans le chantier maritime de Davie?

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Dont le parti du député de Chomedey a été responsable, entre autres, hein! Bon. Alors... Et nous avons réussi à corriger la situation. On a corrigé cette situation-là, puis on en a corrigé pas mal d'autres, dont, entre autres, ce fameux 6 milliards de dollars, 5,7 milliards exactement de déficit qu'on nous a laissé la dernière année, plus l'accumulation de la dette liée au déficit, pas à des dépenses d'investissement, à des dépenses de fonctionnement, à des dépenses d'épicerie, Mme la Présidente. C'est ça qu'on nous a laissé. Alors, en termes de leçon sur la gestion, disons que vous n'avez pas grand-chose à nous apprendre.

Alors, cela étant, nous supporterons ce projet en autant évidemment qu'ils obtiennent le contrat. Nous le faisons dans une perspective temporaire. Nous ne reprenons pas de participation dans l'entreprise, cela va de soi, donc nous ne devenons pas propriétaire. Nous surveillons l'opération, nous sommes rigoureux dans la gestion des sommes que nous prêtons ou que nous garantissons essentiellement pour faire un passage, de telle sorte que ce chantier puisse devenir intéressant parce qu'il aura ce contrat qu'il réalisera dans ses installations, qu'il redeviendra intéressant pour un éventuel acheteur. J'imagine que le député ne peut pas être en désaccord avec cela, M. le Président.

La Présidente: En principale ou en complémentaire?

M. Mulcair: En complémentaire, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire.

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Est-ce que la ministre des Finances peut répondre à notre question concernant ses priorités? Alors que le ministre de la Santé dit: Pas d'argent pour mettre en place nos propres engagements concernant les soins à domicile, alors qu'ils se plaignent que les augmentations que l'on propose seraient passées en éducation, comment ça se fait qu'on se fait encore flouer, on se fait encore berner, on se fait encore dire par on ne sait pas qui... Parce que les experts du gouvernement disent: Surtout pas plus d'argent à la Davie. Où sont les priorités du gouvernement? Ça ne marche pas, votre interventionnisme. Échec après échec, après échec, après échec. Pourquoi continuer? On est déjà les plus taxés en Amérique du Nord. Et c'est précisément parce qu'on a un gouvernement qui insiste de faire semblant d'être des gens d'affaires, alors qu'ils ne laissent pas le marché libre, déterminer les entreprises qui vont survivre et celles qui vont passer à l'histoire. C'est ça, le problème, Mme la Présidente.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Je trouve que, pour un gouvernement qui a accompagné l'économie comme nous l'avons fait, avec les résultats que nous connaissons aujourd'hui, j'ai un petit peu de difficulté à comprendre le jugement que porte le député de Chomedey.

Encore ce matin, le Conference Board disait que l'économie québécoise a performé de façon exceptionnelle, remarquable, ce qui nous a permis, oui, de générer des surplus que nous avons réinvestis en santé, que nous avons réinvestis en éducation, que nous avons réinvestis dans les politiques familiales. Nous nous retrouvons, Mme la Présidente, avec l'un des plus bas taux de chômage que nous n'avons jamais connu. Nous nous retrouvons avec une création d'emplois de 116 000 depuis le début de l'année, Mme la Présidente. Dans la région de Québec...

Des voix: Bravo!

Mme Marois: La stratégie du gouvernement ne devait pas être si mauvaise, Mme la Présidente, en même temps que nous avons réussi à redresser les finances publiques. Nous continuerons à le faire, nous continuerons à le faire avec rigueur, à gérer les finances publiques avec rigueur, à établir les priorités, tel que nous croyons nécessaire de le faire et que nous l'avons fait jusqu'à maintenant, en plaçant ces priorités aux bonnes places. Peut-être que vous pourriez... en identifiant les bonnes priorités.

Peut-être que vous pourriez vous retourner vers vos amis d'Ottawa et leur demander de corriger la situation de déséquilibre fiscal, ça nous permettrait de faire encore plus et encore mieux avec notre argent, Mme la Présidente.

La Présidente: Alors, en question principale, M. le député de Chomedey.

Choix stratégiques en matière
de développement économique

M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, Mme la Présidente. Comment est-ce que la ministre des Finances peut dire que c'est la meilleure priorité pour l'argent des payeurs de taxes que de l'investir dans un chantier maritime alors qu'il manque de l'argent en santé, qu'il manque de l'argent en éducation? Est-ce qu'elle oublie que les trois plus grands déficits de l'histoire du Québec ? médaille d'or, médaille d'argent et médaille de bronze ? c'est Parizeau, Duhaime, Parizeau, c'est trois gouvernements péquistes?

Non, Mme la Présidente, on n'est pas en train de dire qu'il n'y a pas eu une augmentation des emplois au Québec. C'est vrai qu'il y en a eu. Mais on tire toujours de la patte vis-à-vis le reste de l'Amérique du Nord. On est toujours les plus taxés en Amérique du Nord et on est une des économies les plus pauvres per capita en Amérique du Nord. Oui, comparez-nous aux 50 États et aux neuf autres provinces; c'est vrai. Et une des raisons principales pour cela, c'est qu'on a un gouvernement qui croit qu'en intervenant, en saupoudrant de l'argent public partout dans l'entreprise privée, ça fait de la magie. Fun Key Studios, Métaforia, Lavalum, Ultravision, tous ces échecs sont juste des exemples. C'est le bout de l'iceberg.

Il faut corriger la situation. L'argent public pour des services au public. Laissez le privé tranquille. Arrêtez de perdre de l'argent dans des entreprises qui sont en faillite, comme le chantier de Davie. C'est une erreur, Mme la Présidente.

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, Mme la Présidente. Si le député de Chomedey veut faire ce débat quant aux comparaisons du Québec avec d'autres États à travers le monde, je suis disponible. Ça m'intéresse. Ça m'intéresse, et beaucoup, à part ça.

Alors, prenons d'abord la situation du Québec en termes d'emplois par rapport au reste du Canada: l'une des meilleures performances, un des taux d'emploi les plus élevés, qui se rapproche de quelques points de pourcentage de celui de l'Ontario, alors que de tout temps il a été de l'ordre de cinq à six points de différence. Ça, c'est une amélioration que nous avons connue sous notre gouvernement.

C'est vrai qu'au Québec on paie un peu plus d'impôts qu'ailleurs, mais ? mais ? on paie un peu plus d'impôts, on paie moins cher notre électricité. Ah! c'est intéressant de savoir ça. On a accès à des services de garde à 5 $ par jour; allez-y donc, à Toronto, pour savoir comment ça coûte, les services de garde là-bas. Achetez-vous donc une maison de l'autre côté de la frontière, en Ontario, par rapport à la même maison à Montréal. Autrement dit... Oui, allez donc à l'université ? très intéressant ? les frais de scolarité sont gelés, le taux d'endettement est l'un des plus bas au Canada, en fait le plus bas, pour les étudiants québécois. C'est ça, la réalité québécoise.

n(14 h 40)n

C'est vrai que c'est un modèle un peu différent, c'est vrai que nous avons fait des choix qui nous sont propres, et ils ont donné de bons résultats. Nous allons continuer à les faire, nous allons continuer aussi à le moderniser, ce modèle-là, à l'améliorer et à nous assurer que les Québécois et les Québécoises en aient pour leur argent, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, M. le député de Shefford.

Évaluation des coûts
de réfection du réseau routier

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, on connaît l'état de nos routes. Si je vous disais que, sauf cette année, Mme la Présidente, qui aurait dû être une année d'élections, le gouvernement actuel a carrément laissé à l'abandon le réseau routier. En plus, Mme la Présidente, en plus, non seulement ils n'ont pas entretenu le réseau routier, ils sont incapables d'en planifier les coûts. Le ministre fait encore planifier ses coûts en dollars actuels même si les travaux sont répartis sur plusieurs années.

Le directeur territorial du ministère de la région de Québec, Mme la Présidente, lors d'une entrevue radio à Québec le 29 août dernier, avouait qu'il n'avait aucune idée des coûts des travaux routiers, si ces travaux étaient répartis sur plusieurs années, tout en avouant, par exemple, que les travaux sur le boulevard Sainte-Anne, à Québec, auront coûté 50 millions plutôt que 35 millions prévus. L'animateur lui demande combien va coûter, par exemple, la route 175, si on parle de 525 millions en dollars d'aujourd'hui. La réponse, Mme la Présidente, de Luc Bergeron, directeur territorial et représentant du ministre, et je cite, Mme la Présidente: «C'est des coûts. Si on faisait l'ensemble du tronçon cette année, ça nous coûterait ça. Ce que ça va coûter lorsqu'on aura terminé, en 2009 ou 2010, je ne le sais pas.»

Mme la Présidente, comment le ministre des Transports peut-il justifier qu'à part de connaître le coût pour remplir les nids-de-poule, Mme la Présidente, il est incapable de chiffrer des travaux de plus grande importance?

La Présidente: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Bien, c'est une réponse sage, et avoir donné une réponse différente aurait été vouloir spéculer sur l'avenir, parce qu'on ne sait pas d'avance quel sera le taux d'inflation. Non seulement on ne sait pas d'avance quel sera le taux d'inflation général, mais le taux d'inflation dans le domaine de la construction peut varier. Le taux d'inflation actuellement, nous avons remarqué ces dernières années, probablement à cause d'une hausse de demandes de travaux... Parce que je pense que vous commenciez par dire qu'on n'entretenait pas nos routes, puis je vous signale que, cette année, nous avons fait pour 1 400 000 000 de travaux sur les routes du Québec.

Des voix: Bravo!

M. Ménard: Bon. Et, alors que l'année précédente, qui avait été la meilleure année, était de 880 millions, nous avons donné, cette année, 1 400 000 000, c'est-à-dire presque la totalité de ce que nous avons perçu sur la taxe sur l'essence, qui est de 0,15 $. Et 0,01 $ sur le litre, ça donne à peu près 100 millions. Donc, nous avons perçu 1 500 000 000, nous avons redonné 1 400 000 000 en travaux ? rajoutez ça. Par rapport au gouvernement fédéral qui, lui, perçoit 0,10 $ sur chaque litre d'essence, a perçu donc 1 milliard et a donné moins de 100 millions. Et, pire encore, le gouvernement fédéral percevait uniquement 0,085 $ et, en 1995, il a rajouté 0,015 $, donc 150 millions, sur l'essence, pour atteindre le déficit zéro; il a atteint le déficit zéro en 1998, il garde la taxe mais ne la met pas sur les routes.

Alors, franchement, nous sommes responsables, en disant: Les prévisions sont faites en dollars d'aujourd'hui, et les dollars de demain dépendront de l'inflation. Et aussi, il faut prévoir qu'il y a parfois des inflations dans certains domaines, comme le domaine de la construction. N'importe qui qui est en construction aujourd'hui sait que les coûts ont augmenté beaucoup parce que, justement, il y a une surchauffe dans le domaine de la construction.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Comment le ministre des Transports peut-il expliquer qu'à Montréal, pour l'autoroute Décarie, sur une courte période, sur une période de trois ans, les coûts soient passés de 36 millions de dollars en 1999 à 100 millions de dollars en 2002, soit un dépassement de 180 %? Est-ce qu'il s'agit là d'inflation, comme le prétend le ministre, ou de mauvaise planification?

La Présidente: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Alors, dans ce cas-là, Mme la Présidente, la réponse est encore plus simple. C'est très simple. Ce qui a été évalué d'abord à 36 millions... Ce qui a été réalisé est beaucoup plus de travaux, et des travaux plus importants que ce qui avait été estimé à 36 millions au départ. Il faut comprendre que cette estimation a été faite dans une situation d'urgence: des blocs de béton s'étaient détachés de certains viaducs, sur Décarie, et avaient blessé des gens. Il a donc fallu faire une évaluation sommaire pour des réparations sommaires et inscrire ça tout de suite au programme de dépenses.

Quand on a étudié la qualité des travaux qu'on devait faire, plutôt que de faire des travaux qui dureraient, de façon sécuritaire, pendant 10 ans, on a décidé d'en faire qui dureraient pendant 30 ans, au moins. Ensuite, on a examiné d'autres structures, pour trouver qu'il y avait des défauts qui risquaient aussi de les rendre dangereux. Il faut bien comprendre que l'autoroute Décarie a été construite en... a été livrée en avril 1967 et que, dans ce temps-là, on disait, bon: Ça va durer 30 ans. Mais ça a duré plus que ça. Alors, il y a des choses qui ont... En plus, la ville de Montréal a demandé de faire des travaux à cette occasion qu'elle a payés elle-même.

C'est vrai aussi qu'il y a eu des augmentations de coûts dues aux augmentations qu'on observe actuellement dans les soumissions, et, comme je vous disais, il y a effectivement une inflation dans les coûts de construction. Il y a des choses qui ont été faites, aussi, dans des conditions difficiles pour garder la circulation. Donc, cela a aussi augmenté les coûts. Les travaux étant plus importants, il était plus important de ne pas interrompre la circulation, et donc cela implique des travaux plus coûteux parce qu'il y a moins d'heures par jour où on peut les faire, puis il faut prendre plus de précautions pour maintenir la fluidité de la circulation.

C'est donc le cumul de ces facteurs qui a fait que les travaux d'abord estimés à 36 millions ont été complétés, avec d'autres travaux, qui a donné 95 millions et non 100 millions. Et, continuellement, la ville de Montréal était tenue au courant, et les fonctionnaires de la ville de Montréal examinaient les coûts avec ceux du ministère des Transports.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Marquette.

M. François Ouimet

M. Ouimet: Comment peut-il expliquer que, dans un autre dossier, maintenant, celui du rond-point L'Acadie, les coûts soient passés de 58 millions à, selon les estimés de la ville de Montréal, à 100 millions de dollars, soit un dépassement de 72 %? Est-ce que, ça aussi, c'était urgent et de l'inflation?

La Présidente: M. le ministre.

M. Serge Ménard

M. Ménard: Dans ce cas-là, quand les travaux ont été entrepris, il s'est avéré que... nous croyions que les anciens viaducs pouvaient supporter le flot de circulation temporaire pendant les travaux. Nous avons constaté que non. Il a donc fallu construire effectivement au-dessus de Décarie un pont temporaire.

Ensuite, nous avons demandé un audit de sécurité, qui a fait plusieurs suggestions qui ont aussi augmenté les coûts. Encore là, la ville de Montréal a décidé aussi d'en profiter pour faire certains des coûts qu'elle devait assumer elle-même. Dans ce cas-là, ce sont donc ces trois facteurs qui ont fait que le premier coût évalué, n'est-ce pas, est passé, pour la totalité... qui représente donc des travaux supplémentaires à ceux qui avaient été évalués à 58 millions, est monté non pas à 100, mais à 95 millions. Et, encore là, la ville de Montréal, les fonctionnaires de la ville de Montréal ont travaillé en collaboration avec les fonctionnaires du ministère des Transports et ont été tenus au courant de tous ces dépassements.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Jonquière.

Choix d'un cégep au Saguenay?Lac-Saint-Jean
pour offrir la formation en métallurgie

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Merci, Mme la Présidente. Depuis deux ans, nous sommes en attente d'une décision du ministre de l'Éducation afin de savoir dans lequel des cégeps de la région sera donnée la formation pour l'obtention d'un D.E.C. en métallurgie. On sait que les collèges d'Alma, Chicoutimi et Jonquière ont travaillé conjointement pour l'élaboration de ce programme.

Est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous dire s'il a enfin pris sa décision et nous informer dans quel cégep sera donnée la formation collégiale en métallurgie?

n(14 h 50)n

La Présidente: M. le ministre d'État à l'Éducation.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Oui, Mme la Présidente. Excusez ma voix, j'ai été beaucoup à l'écoute des Québécois ces derniers jours, et des Québécoises.

Mme la Présidente, effectivement, j'aurai à rendre publique une décision que je m'apprête à prendre dans le cas de cette option importante au Saguenay?Lac-Saint-Jean.

Je dois cependant déplorer... Et le raccourci un peu rapide de la question de la députée de Jonquière l'aura empêchée sans doute de mentionner ce petit phénomène: Nous avons attendu très longtemps que chacun des cégeps de cette région, en coordination... que la région fixe elle-même l'endroit où ces cours seraient donnés.

J'aurais apprécié que, mettant fin, momentanément du moins, aux querelles qui parfois secouent cette région, nous ayons une volonté commune pour l'emplacement de ce programme dans un cégep. Malheureusement, je me suis retrouvé avec trois volontés communes venant de trois cégeps différents et j'ai donc dû, actuellement... et je dois donc actuellement réfléchir à une décision qui permettra, de façon économique et efficace, de donner cette option si importante dans la vallée de l'aluminium, vallée de l'aluminium que nous sommes extrêmement fiers d'avoir créée et qui va nous permettre de débloquer... de développer au cours des prochaines années ? j'ai... ménagé ma voix, ha, ha, ha! ? qui va nous permettre au cours des prochaines années de développer de nombreuses industries secondaires dans ce secteur si important.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Jonquière.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Mme la Présidente, on doit constater que, s'il l'a écoutée beaucoup, on comprendra que sa voix soit si éraillée. Enfin!

Si tant est, Mme la Présidente, que le ministre n'a pas encore pris sa décision, comment se fait-il que son collègue de Chicoutimi dépose un dépliant, dans le comté de Chicoutimi, et il parle de ses réalisations, et il dit: Cégep de Chicoutimi, Diplôme d'études collégiales en métallurgie? Est-ce que son collège de Chicoutimi avance la décision, ou est-ce que la décision est prise ou non?

La Présidente: M. le ministre d'État à l'Éducation.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Oui, pour préciser le début de la question de la députée, évidemment, non seulement j'écoute, mais je réponds. Et je vais répondre, Mme la Présidente, que, non, la décision n'est pas prise.

J'aurais aimé cependant qu'à l'occasion de nos échanges de l'après-midi nous parlions un peu de questions d'éducation d'une façon un peu plus large. J'aurais aimé, par exemple, que la question des bons en éducation vienne ici, à l'Assemblée nationale, qu'on se préoccupe du budget libéral en éducation, par exemple. 1,75 par année, soit 2 % de moins que les coûts de système pendant cinq ans: une coupure, des coupes drastiques, radicales, dans tout le secteur, catastrophiques dans le domaine de l'éducation. Ce qui voudrait dire, Mme la Présidente, que l'option que nous allons annoncer au Saguenay?Lac-Saint-Jean n'aurait pas été possible, puisque les budgets auraient été non seulement gelés, mais coupés pendant cinq ans. Alors, Mme la Présidente, un peu de patience, et la décision viendra à temps et dans l'intérêt de la région et du Québec.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Jonquière.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Mme la Présidente, plus j'écoute le ministre, plus je comprends qu'il a un problème de voix. Il n'écoute pas, il n'a pas écouté ma question...

La Présidente: En complémentaire.

Mme Gauthier: Je veux savoir, Mme la Présidente, pourquoi, comment se fait-il que votre collègue de Chicoutimi distribue un dépliant et qu'il écrit, comme réalisation, un D.E.C. en transformation d'aluminium au collège de Chicoutimi? Est-ce qu'on doit comprendre qu'il y a quelqu'un qui devance la décision, ou est-ce que vous avez plus ou moins pris votre décision?

Mme la Présidente, est-ce que le ministre peut nous dire comment se fait-il que son collègue informe comme ça? Je veux dire, il y a un imbroglio dans la région. Tout le monde se dit: Est-ce que la décision est prise ou pas? Est-ce que vous êtes en mesure de nous expliquer la raison de ce dépliant?

La Présidente: M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, je veux vous certifier que la décision n'est pas prise. Excès d'optimisme du député qui a voulu par là défendre ses électeurs. Le connaissant, fougueux comme il est, déterminé à défendre les gens du Saguenay?Lac-Saint-Jean et du comté de Chicoutimi, ça ne m'étonne pas de sa part. Mais je dois dire que la décision n'est pas prise.

La Présidente: En principale, M. le député de l'Acadie.

Francisation des immigrants installés en région

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, Mme la Présidente. Alors, le 6 septembre 2000, le Conseil des relations interculturelles alertait le gouvernement quand à son approche inadéquate à l'égard des mesures à mettre en place pour favoriser la francisation des immigrants en lui demandant de s'adapter aux réalités régionales. Deux ans plus tard, Mme la Présidente, plusieurs intervenants en région parlent de je-m'en-foutisme gouvernemental, ou encore d'incohérence totale, ou de manque de suivi. Par manque de sensibilité ou de volonté à reconnaître la spécificité des régions, le ministère applique un modèle de francisation propre à Montréal aux diverses régions du Québec, où, malheureusement, la présence des immigrants est évidemment beaucoup plus faible.

Pour illustrer cette aberration, on compte dans certaines régions jusqu'à un an d'attente avant qu'un immigrant puisse avoir accès à des cours de français parce qu'on exige ou attend d'avoir 18 immigrants avant de donner un cours de formation en français. Voilà un manque de réalisme, Mme la Présidente, qui a pour conséquence de rendre quasi impossible l'existence de cours de français en région pour de nouveaux arrivants.

Le ministre ne reconnaît-il pas qu'en uniformisant des normes de soutien de Montréal à toute la province, en faisant du mur-à-mur, il provoque des disparités importantes entre la région de Montréal, où se concentre l'immigration, soit plus de 80 %, et le reste du Québec et qu'en agissant ainsi il est lui-même responsable de l'échec en matière de francisation des immigrants dans les diverses régions du Québec?

La Présidente: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Mme la Présidente, on a vu hier, à l'occasion du dépôt du plan d'immigration au Québec pour 2003, que nous avons d'abord, dans un premier temps, atteint nos objectifs d'accueillir plus de 40 000 personnes immigrantes au Québec pendant l'année qui vient de se terminer et qu'on est en bonne voie, avec les moyens que nous avons pris, de réaliser également nos objectifs, pouvant aller jusqu'à 45 000 personnes immigrantes pour l'année qui vient.

D'autre part, il y a 15 % maintenant... 15 % des personnes qui viennent joindre la nation québécoise qui vivent en région et s'y établissent, en dehors de l'île de Montréal. Pourquoi? Parce que nous avons au cours des dernières années... Oui, c'est vrai, on s'est fixé, avec mon prédécesseur en particulier, des objectifs ambitieux, de déployer des moyens pour que 25 % de ces personnes puissent s'établir en région. On est rendu à 15 %, et nous avons investi tout près de un demi-milliard de dollars, 500 millions de dollars, au cours de la dernière année pour développer les services d'accueil et d'intégration dans le Bas-Saint-Laurent, au Saguenay?Lac-Saint-Jean, en Abitibi-Témiscamingue, à Québec, dans les régions. Pourquoi? Parce qu'une des conditions essentielles de la réussite en régionalisation, c'est de travailler avec les organismes d'intégration, de support à l'intégration et les institutions, et que nous sommes à parfaire le travail à réaliser avec ceux-ci dans chacune des régions du Québec.

La Présidente: En complémentaire ou en principale?

M. Laporte: Non, en principale, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, M. le député d'Outremont.

Mise en place de conditions facilitant
la francisation des immigrants en région

M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: Ma question s'adresse à la ministre responsable de la Charte de la langue française, parce que, dans ce domaine-là, contrairement à ce que vient de nous dire le ministre de l'Immigration, pour ce qui est de la formation linguistique, vous n'avez pas à vous glorifier de rien, parce que vous avez des sacrés problèmes.

Donc, ma question est la suivante. Ma question à la ministre est la suivante: Mme la ministre, vous savez sûrement ? et, si vous ne le savez pas, vous devriez le savoir, n'est-ce pas? ? que la formation linguistique en français en région est de loin la plus hautement rentable qu'on puisse espérer obtenir ici, au Québec. La raison est très simple, c'est qu'en région, qu'il s'agisse de Joliette, qu'il s'agisse de Granby, qu'il s'agisse de Rivière-du-Loup et, pourquoi pas, de Saint-André-de-Kamouraska, toutes les conditions sociolinguistiques sont présentes pour que, quotidiennement, une formation linguistique en français soit activée, pratiquée, de sorte que la formation linguistique en français devient de loin la plus efficiente, la plus efficace, la plus effective et la plus durable.

n(15 heures)n

Ma question, Mme la ministre, est la suivante...

La Présidente: ...la présidence.

M. Laporte: Au nombre de questions que je pose, vous pourriez peut-être me donner...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laporte: Alors, ma question à la ministre est la suivante, Mme la Présidente: Mme la ministre, comment pouvez-vous tolérer, je dirais sanctionner que des immigrants adultes qui ont choisi d'habiter en région soient privés d'une formation linguistique en français, faut-il le dire, hautement rentable, parce qu'une norme administrative, bureaucratiquement absurde, n'est-ce pas, ministérielle stipule qu'un seuil de 18 immigrants regroupables ? un seuil souvent inatteignable en région ? soit présent pour que l'enseignement leur soit offert?

La Présidente: M. le ministre d'État.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Bien, voilà, Mme la Présidente, précisément pourquoi nous cherchons à développer des relations de soutien à l'accueil et à l'intégration non seulement avec les organismes communautaires, mais également avec les institutions, collèges, universités, commissions scolaires, pour faire en sorte que, d'une part, dans des cas fréquents, on puisse procéder, accéder à de l'alphabétisation, à de la formation en alphabétisation, et que, d'autre part, on puisse aussi s'intégrer à des cohortes, à des groupes pour l'apprentissage du français. Et, à ce point de vue là, oui, nous avons l'intention d'encore intensifier nos relations avec les institutions comme points d'appui, carrefours d'intégration dans les régions du Québec.

Il en sera question, M. le député, largement au prochain Rendez-vous national des régions ici, au mois de novembre, dans quelque 15 jours. Pourquoi? Parce que, dans nos rencontres avec les 2 300 leaders socioéconomiques du Québec, dans les 14 régions du Québec, largement, dans toutes les régions du Québec, on nous a parlé de la nécessité de s'intéresser et de prendre davantage d'actions pour l'accueil des immigrants et leur intégration à la société québécoise, à la nation québécoise, à cette nation française en Amérique.

La Présidente: Alors, à moins qu'il y ait consentement, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales. Consentement. Alors, consentement? Oui?

M. Laporte: En additionnelle, Mme la Présidente.

La Présidente: Alors, consentement, une question complémentaire; complémentaire, M. le député d'Outremont, au sens du règlement.

M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: Oui, madame. En additionnelle, Mme la Présidente: Le ministre ou la ministre sont-ils en train de nous dire que c'est là où l'enseignement est le plus hautement rentable, c'est-à-dire en région, du point de vue de l'acquisition du français, que l'investissement dans cet enseignement doit être réduit au minimum? C'est ça que vous pratiquez avec le choix d'appliquer une norme bureaucratique absurde, fonctionnelle à Montréal mais totalement dysfonctionnelle soit à Rivière-du-Loup, soit à Saint-André-de-Kamouraska, soit à Joliette ou soit à Granby. Donc, êtes-vous en train de nous dire que c'est là où ça doit être le plus rentable que vous allez investir le moins dans la formation linguistique?

La Présidente: M. le ministre d'État.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Ce que nous réaffirmons, c'est que c'est rentable partout sur le territoire québécois, l'apprentissage de la langue française et que l'essentiel de cette langue commune de la nation québécoise. Et nous devons déployer des efforts autant en région que nous en déployons, par exemple, avec la création de ces carrefours d'intégration non seulement sur l'île de Montréal, mais à l'extérieur, à Gatineau, à Québec, dans la région de l'Outaouais, dans la région de l'Estrie.

Et, maintenant, il faut compléter ce cycle des carrefours d'intégration par des mécaniques particulières et une application particulière dans les autres régions pour s'assurer, avec un appui institutionnel, que nous allons également pouvoir offrir de la formation à la langue française d'égale qualité, aussi accessible partout sur le territoire du Québec, parce que c'est une valeur essentielle, et nous correspondons à votre jugement quand vous énoncez cette position du Parti libéral.

La Présidente: Alors, c'est donc la fin de la période de questions et de réponses orales.

Réponses différées

Remboursement par l'Action
démocratique du Québec d'une
contribution électorale jugée illégale

Alors, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, ministre responsable des Relations avec les communautés francophones et acadiennes, ministre responsable de la Réforme des institutions démocratiques va répondre à une question posée hier par M. le député de Brome-Missisquoi relativement au remboursement d'une contribution versée à l'Action démocratique du Québec. M. le ministre.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Bien, Mme la Présidente, je voudrais d'abord rappeler le contexte. Le député de Brome-Missisquoi, leader du gouvernement... en fait leader de l'opposition officielle, je m'excuse ? je vous rassure, ce n'est pas de la projection ? alors, a posé à la Chambre une question d'abord concernant un individu, un organisateur de l'Action démocratique, à laquelle j'ai répondu. Hier, il faisait référence à un autre cas d'infraction à la Loi électorale commise, celle-là, par un autre individu et organisateur aussi, collecteur de fonds de l'Action démocratique, M. Guy Pilon junior, qui s'est reconnu coupable récemment et qui a enregistré un plaidoyer de culpabilité. À ce moment-là, il doit rembourser 22 800 $. Et on avait eu un communiqué. C'est à ça que faisait référence le député de Brome-Missisquoi hier. Il y avait eu, après cet aveu de culpabilité, un communiqué émis par l'Action démocratique du Québec indiquant que le représentant officiel de cette formation politique, M. Denis Massé, entrerait en contact avec le représentant du Directeur général des élections pour établir les modalités de remboursement.

Ce que je puis dire aujourd'hui après vérification, c'est qu'il n'y a pas eu encore de contact entre M. Massé et le DGE, d'une part, et que cependant, il y a cinq jours, soit le 25 octobre dernier, le Directeur général des élections a de toute façon pris l'initiative, comme c'était normalement le cas... ce qu'il devait faire, de demander par écrit un remboursement de la somme qui est due, à ce moment-là, au Directeur général des élections.

La Présidente: Ça va? Très bien.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée
dénonce le laxisme du gouvernement
dans la gestion des contrats reliés
à l'implantation du nouveau Centre
hospitalier universitaire de Montréal

Alors, nous en sommes aux votes reportés. Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le député de Marquette débattue ce matin aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce le laxisme du gouvernement dans la gestion des contrats reliés à l'implantation du nouveau Centre hospitalier universitaire de Montréal.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Bourbeau (Laporte), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. Mulcair (Chomedey), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), M. MacMillan (Papineau), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), Mme Gauthier (Jonquière), Mme Rochefort (Mercier), Mme Mancuso (Viger).

M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Corriveau (Saguenay), Mme Grégoire (Berthier), Mme Lespérance (Joliette), M. Gaudreau (Vimont).

La Présidente: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Boisclair (Gouin), Mme Marois (Taillon), M. Simard (Richelieu), Mme Beaudoin (Chambly), M. Charbonneau (Borduas), M. Legault (Rousseau), Mme Goupil (Lévis), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Bertrand (Charlevoix), M. Julien (Trois-Rivières), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Jutras (Drummond), M. Baril (Arthabaska), M. Létourneau (Ungava), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Bertrand (Portneuf), M. Legendre (Blainville), M. Simard (Montmorency), M. Morin (Nicolet-Yamaska), Mme Lemieux (Bourget), Mme Maltais (Taschereau), M. Côté (La Peltrie), M. Boucher (Johnson), Mme Charest (Rimouski), M. Geoffrion (La Prairie), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), M. Côté (Dubuc), M. Payne (Vachon), M. Kieffer (Groulx), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Lachance (Bellechasse), M. Paré (Lotbinière), M. Rioux (Matane), Mme Doyer (Matapédia), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Laprise (Roberval), M. Cousineau (Bertrand), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Iberville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Labbé (Masson), M. Boulianne (Frontenac), M. Désilets (Maskinongé), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), M. Pagé (Labelle).

La Présidente: Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général.

n(15 h 10)n

Le Secrétaire: Pour: 33

Contre: 55

Abstentions: 0

Motions sans préavis

La Présidente: Alors, aux motions sans préavis, M. le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi. Alors, je vais demander aux députés qui doivent quitter l'Assemblée de le faire dans les minutes qui viennent. Alors, M. le ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi.

Souligner la Semaine québécoise
des adultes en formation

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, je tiens aujourd'hui à souligner la tenue de la première Semaine québécoise des adultes en formation, qui se déroule depuis le 27 octobre, et ce, jusqu'au 1er novembre.

Mme Vermette: ...que les députés qui n'ont pas affaire en cette Chambre puissent dégager le plus rapidement possible dans le silence pour permettre à notre ministre, qui a déjà des problèmes avec la voix, de pouvoir se faire entendre.

La Présidente: Alors, M. le ministre. Est-ce qu'il y a consentement pour... Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Problème d'interprétation suite à l'intervention de Mme la leader adjointe du gouvernement. Les députés dont il est question sont encore debout de l'autre côté, là.

La Présidente: Alors, je crois qu'ils sont en grande conversation, ce qui ne leur aura pas permis d'entendre des interventions de Mme la whip adjointe. Alors, j'apprécierais que les députés qui sont debout puissent prendre leur siège, que nous puissions entendre la motion du ministre d'État à l'Éducation et à l'Emploi. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. Alors, M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Merci, Mme la Présidente. Alors, je rappelais que nous soulignons par cette motion aujourd'hui la tenue de la première Semaine québécoise des adultes en formation, qui se déroule depuis lundi, depuis le 27 octobre, et ce, jusqu'au 1er novembre. Cet événement fait suite à l'adoption d'une résolution adoptée par 186 États membres de l'UNESCO au moment de la 30e conférence de cet organisme qui s'était tenue à Paris en 1999.

C'est d'ailleurs dans cet esprit que le gouvernement du Québec a inscrit dans le plan d'action de la Politique gouvernementale de l'éducation des adultes et de la formation continue une mesure à l'effet qu'une telle semaine soit organisée annuellement au cours des cinq prochaines années de concert avec l'Éducation, l'Emploi, la Solidarité sociale et différents partenaires sociaux. Le Québec est la première nation en Amérique du Nord à proposer sept journées débordantes d'activités liées à l'éducation des adultes et à la formation continue. Notre nation se joint ainsi à plus de 30 pays d'Europe, d'Amérique du Sud, d'Asie, d'Afrique et d'Océanie qui célèbrent chaque année le goût et le plaisir d'apprendre.

Durant cette Semaine, près de 300 activités sont proposées dans la plupart des régions. C'est l'occasion d'entendre des témoignages d'adultes en formation, de prendre connaissance des multiples modes et lieux de formation et de constater les réussites de démarches d'apprentissage entreprises par plusieurs hommes et femmes de tous âges. Chaque jour, des parents, des travailleuses et des travailleurs, des personnes immigrantes, des personnes en recherche d'emploi ou en réorientation de carrière se définissent un projet de formation et s'inscrivent en francisation, en formation générale, en formation professionnelle et technique, au collégial, au secteur universitaire ou encore à des activités communautaires et culturelles.

Cela nous permet de constater qu'au Québec le développement d'une culture de formation continue est déjà bien amorcé et qu'il est partagé tant par la population, les entreprises, l'appareil gouvernemental que le milieu des affaires et le milieu communautaire.

C'est d'ailleurs dans cet esprit de partenariat que le gouvernement a confié à l'Institut canadien d'éducation des adultes le mandat d'organiser la première Semaine des adultes en formation. À l'occasion de cette première édition de la Semaine québécoise des adultes en formation, je propose une motion de félicitations à l'endroit de tous les adultes québécois qui ont le souci de maintenir à jour leurs connaissances et leurs compétences, tout en conciliant les exigences de leur vie professionnelle et personnelle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Éducation. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. M. le Président, à mon tour de joindre ma voix à celle du ministre ? pour ce qui en reste, pour ce qui en reste au ministre ? pour appuyer cette motion de la Semaine québécoise des adultes en formation. Simplement indiquer que plus le monde change, plus l'économie se développe et plus on se rend compte que la formation, peu importe notre âge, peu importe notre lieu, peu importe d'où on vient, est extrêmement importante. Et, dans le cadre de cette Semaine-là et dans le cadre de la commission canadienne qui avait justement lieu pour inaugurer cette Semaine-là, on parlait qu'apprendre tout au long de la vie c'est se donner les moyens de participer à un monde en changement rapide, développer et améliorer nos compétences, connaître les découvertes scientifiques récentes et apprendre à les utiliser, comprendre notre passé et son influence sur le présent et l'avenir, découvrir la richesse des autres cultures, faire face aux problèmes rencontrés dans notre vie personnelle et professionnelle, en fait plein de raisons de prendre et de suivre de la formation.

Cependant, ce qui est aussi inquiétant, c'est que, quand on parle du développement d'une culture de la formation, on doit aussi se rendre compte que, par exemple au Québec, quand on regardait en 1997 la proportion d'adultes qui participent à des activités de formation, nous nous retrouvions les avant-derniers. C'est donc dire qu'il y a beaucoup de chemin à faire, mais en espérant que les chiffres ont changé depuis ce temps.

Mais on doit aussi continuer à sensibiliser les gens à l'importance de cette formation et enlever un peu cet esprit de dernier recours: On va suivre de la formation si on y est obligé, si on perd notre emploi, si on n'a pas d'autre choix, alors que la formation, c'est une plus-value. Et d'autant plus, dans le contexte économique actuel, dans la structure comme telle des emplois, où quelqu'un peut changer d'emploi de cinq à 10 fois durant sa vie professionnelle, la formation est un outil extrêmement important. Il faut aussi, si on en parle, d'un outil important, rendre cette formation-là disponible partout au Québec et dans toutes les régions du Québec, et ça, c'est un défi qui, avec la décroissance des populations, la diminution des populations, est de plus en plus difficile et de plus en plus coûteux. On a tous et toutes connu des gens de notre entourage, de nos villages, de nos municipalités, qui ont dû s'exiler, qui ont dû partir pour aller suivre des formations ailleurs parce que ça ne se donnait pas dans leur région, dans leur coin.

Alors, oui, ces semaines-là, c'est bien important, ça démontre l'importance de la formation. Il faut sensibiliser les gens mais, en même temps, il faut aussi se donner les moyens de nos ambitions et faire en sorte que, si la formation est vraiment une priorité, bien, cette formation-là soit accessible, soit disponible et que les gens qui veulent y avoir accès puissent y avoir accès. Alors, merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Berthier. Mme la députée.

Mme Marie Grégoire

Mme Grégoire: Alors, c'est avec plaisir que je joins ma voix à celle de mes collègues, et, au nom de ma formation politique, je veux, moi aussi, souligner cette première édition de la Semaine québécoise des adultes en formation.

n(15 h 20)n

Le thème est fort intéressant: 1 001 façons d'apprendre. C'est apprendre en milieu de travail, c'est apprendre aussi par son engagement dans la communauté, c'est apprendre de façon plus traditionnelle dans nos institutions d'enseignement. Alors, c'est le défi qu'on a dans notre économie changeante de développer une culture de formation. On fait face dans certains secteurs à des pénuries de main-d'oeuvre. Par ailleurs, notre taux de chômage continue de rester plus élevé que certains de nos voisins. Alors, on doit se développer une culture de formation de façon à avoir une main-d'oeuvre qui soit capable de répondre avec flexibilité et souplesse aux demandes changeantes du marché du travail dans une économie qu'on appelle, nous, l'économie du savoir et du savoir-faire. Parce que, au Québec, on a développé une expertise extraordinaire dans plusieurs secteurs. Il faut cependant parfaire cette expertise-là et faire en sorte qu'on soit toujours plus concurrentiel et toujours plus productif.

En terminant, je veux seulement... saluer non seulement les gens, les adultes qui sont en formation continue ? on sait que c'est un défi de chaque jour de concilier travail, famille, formation ? mais aussi saluer les formateurs qui travaillent avec ces gens-là, qui les accompagnent dans leur démarche, et aussi les gens qu'on a rencontrés aussi dans le cadre de la consultation sur le projet de loi n° 112, les gens qui accompagnent, dans des démarches d'employabilité, des adultes qui sont en requalification, qui sont à se trouver une nouvelle niche dans le marché du travail. Alors, merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Berthier. Alors, il n'y a plus d'autres intervenants.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Nous allons passer maintenant à l'autre point à l'ordre du jour, les motions sans préavis. J'inviterais... Excusez, nous venons de terminer les motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions, et j'invite la leader adjointe du gouvernement à nous donner ces avis.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale à l'égard du projet de loi n° 112, Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, aujourd'hui, de 15 h 30 à 17 h 45, à la salle du Conseil législatif; et cette même commission entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 96, Loi sur les services préhospitaliers d'urgence et modifiant diverses dispositions législatives, demain, le jeudi 31 octobre 2002, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la leader adjointe. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'économie et du travail se réunira en séance de travail demain, jeudi 31 octobre 2002, de 9 h 30 à midi trente, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira en séance de travail demain, jeudi 31 octobre 2002, de 8 heures à 9 h 30, au salon Johnson de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de faire le bilan des auditions dans le cadre du mandat d'initiative sur la fluctuation des clientèles dans le secteur de l'éducation.

Alors, ceci met fin aux avis. Nous sommes maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Alors, il n'y a pas de demande de renseignements.

Affaires du jour

Nous allons mettre fin aux affaires courantes et passer aux affaires du jour. Et, aux affaires du jour, j'inviterais Mme la leader du gouvernement à nous indiquer le menu, s'il vous plaît.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de vous référer à l'article 8 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 111

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci. À l'article 8, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes propose l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes. Alors, je suis prêt à céder la parole à M. le ministre. M. le ministre.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, il y a 40 ans, alors que le Québec entrait de plain-pied dans la modernité, à la faveur de cette période d'effervescence qu'on a appelée la Révolution tranquille, l'une des toutes premières mesures que le gouvernement de Jean Lesage fut amené à créer au sein du gouvernement, c'est un organe spécialisé afin de coordonner les relations du Québec avec les autres gouvernements du Canada. Cet organe existe toujours, il s'agit du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes, qui est maintenant rattaché au ministère du Conseil exécutif, et que j'ai l'honneur de diriger à titre de ministre.

En 1961, la création du ministère des Relations fédérales-provinciales, comme on l'appelait alors, se voulait une réponse à la nouvelle dynamique politique qui était engendrée par l'opération de modernisation qui était entreprise à ce moment-là et également à une volonté très affichée de consolider l'autonomie politique du Québec. Si tous pouvaient souhaiter que le Québec, à ce moment-là, développe ses relations avec les autres gouvernements, il importait, aux yeux des architectes de la Révolution tranquille, que cela se fasse d'une manière ordonnée plutôt que de laisser cet important volet de la vie d'un État être dicté au hasard des circonstances et des personnalités sur le terrain. Bref, agir en véritable gouvernement supposait de conduire ces relations avec les autres gouvernements de la fédération, de les organiser et de les orienter, et cela ne pouvait s'accomplir efficacement et de façon cohérente sans l'apport d'un organe central, sans l'apport d'un ministère qui pouvait s'acquitter de cette responsabilité.

Et le respect de la Constitution, lorsque ce ne fut pas sa réforme, a aussi toujours été au coeur des préoccupations du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. En 1961, Jean Lesage lui-même indiquait que le premier objectif de la loi constituant cet organe d'État était de «favoriser le plein épanouissement ? je le cite ? de l'autonomie provinciale et faciliter la collaboration intergouvernementale dans le respect de la Constitution». Ce principe, il l'a inscrit d'ailleurs au centre de la loi, et il y est toujours.

C'était aussi la vision d'un des successeurs de M. Lesage, de la même équipe politique, Gérard D. Levesque, qui, en 1974, a entrepris de moderniser les dispositions de la loi qui, à ce moment-là, était déjà vieille de 13 ans. Les dispositions en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes que l'on retrouve aujourd'hui dans la Loi sur le ministère du Conseil exécutif sont d'ailleurs, pour l'essentiel, issues de cette vision des choses.

Voici d'ailleurs comment on voyait le rôle du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes au moment de présenter le projet de loi, et je cite Gérard D. Levesque: «Quelles que soient les garanties apportées par la Constitution aux pouvoirs des États membres de la fédération, il est clair que, dans les faits, la multiplication de rapports purement sectoriels entre le gouvernement fédéral et les divers ministères provinciaux risquerait fort d'avoir pour effet de créer, à toutes fins utiles, une subordination de l'administration québécoise ainsi sectorialisée par rapport à l'administration centrale.» Fin de la citation.

Et il concluait ainsi ? et, à nouveau, c'est une citation, M. le Président: «C'est donc l'existence même du fédéralisme canadien qui requiert la mise sur pied, au sein des divers États membres de la fédération, d'organismes de coordination des relations avec l'extérieur destinés à réaliser la tâche exigeante d'assurer la cohérence des actions externes par rapport à la politique interne du gouvernement de chaque État.» Et j'ajouterai que, depuis, tous les États fédérés ont emboîté le pas sur le Québec en se dotant d'un organe de même nature.

Si j'ai tenu à rappeler, M. le Président, ces propos, c'est que fondamentalement les modifications que nous proposons aujourd'hui d'apporter à la loi ne s'écartent nullement de l'esprit originel de cette loi que tous les gouvernements qui se sont succédé à la tête de l'État québécois depuis son adoption ont non seulement jugée essentielle, mais ont également, lorsque les circonstances l'exigeaient, actualisée à leur tour afin qu'elle conserve toute son utilité. Or, plus de 27 ans après la révision de 1974, les circonstances présentes exigent que nous actualisions encore à nouveau la loi. Mais, avant de décliner ces circonstances ainsi que les modifications que nous proposons pour y répondre, permettez-moi tout d'abord de rappeler l'essentiel des dispositions législatives qui gouvernent actuellement les relations intergouvernementales canadiennes du point de vue québécois.

La section II de la Loi sur le ministère du Conseil exécutif du Québec se divise en trois sections. La première sous-section contient des dispositions générales où sont énoncés les principaux pouvoirs et les principales responsabilités du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. C'est ainsi qu'on indique, entre autres, que celui-ci conseille le gouvernement en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes, qu'il recueille l'information pertinente à cette fin, qu'il maintient des relations avec les autres gouvernements de la fédération, qu'il a la responsabilité des activités du gouvernement du Québec qui se tiennent ailleurs au Canada et, enfin, qu'il s'occupe des relations avec la francophonie hors Québec, c'est-à-dire avec les communautés francophones et avec le peuple acadien. On précise également dans cette partie que le ministre, dont la conduite des affaires intergouvernementales canadiennes, veille à ce que soient respectées les compétences constitutionnelles du Québec, c'est-à-dire, dans le fond, l'autonomie partielle que nous avons obtenue lors de la création du Canada en 1867.

n(15 h 30)n

En fait, cette première sous-section de la loi établit les principes-cadres de la politique intergouvernementale canadienne du Québec. Et, comme je le soulignais, parmi ces principes, la nécessité d'assurer le respect des compétences constitutionnelles du Québec a toujours été centrale, d'autant plus que, dès le départ, nous n'avons obtenu qu'une autonomie partielle. Nous avons donc toujours été jalousement... toujours précautionneux, si on veut utiliser cette expression, de la part de tous les gouvernements du Québec à l'égard de la protection de cette autonomie partielle. Et, comme nous le verrons plus loin, une des modifications proposées consiste à apporter un complément logique à cette responsabilité en confiant au ministre le mandat de veiller également à la défense des institutions du Québec.

Si les objectifs contenus dans la première sous-section de la loi vont de soi, la deuxième sous-section vient quant à elle fournir au ministre et au gouvernement d'importants instruments pour atteindre ces objectifs. C'est ainsi qu'elle prévoit que les entités publiques qui émanent de la compétence du Québec et qui concourent à l'exercice des responsabilités que la Constitution nous attribue «ne peuvent sans l'autorisation transiger avec le gouvernement fédéral ou celui d'une autre province ou leurs créatures». Nous parlons ici des ministères du gouvernement du Québec, des organismes publics québécois ainsi que des municipalités ou des commissions scolaires. Et c'est la seule voie à suivre, a-t-on décidé dès le départ, pour assurer la cohérence de la politique intergouvernementale du Québec et, en bout de ligne, le respect de ses compétences.

Selon l'identité des parties en cause, la loi distingue deux types d'entente: les ententes intergouvernementales au strict sens et les autres types d'entente analogues. On y prévoit que le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales veille à la négociation et à la mise en oeuvre des ententes intergouvernementales, c'est-à-dire celles conclues entre le gouvernement du Québec ou l'un de ses ministères ou organismes et un autre gouvernement au Canada ou l'un de ses ministères et organismes. On y précise en outre que toutes les ententes intergouvernementales doivent être, pour être valides, approuvées par le gouvernement et signées par le ministre responsable.

Concernant les autres types d'entente analogues, c'est-à-dire les ententes qui sont conclues avec un autre gouvernement ou l'un de ses ministères ou organismes par des entités publiques et non gouvernementales, la loi prévoit deux régimes distincts. Tout d'abord, s'il s'agit de municipalités, de communautés urbaines ou de commissions scolaires, la loi leur interdit à ce moment-là en principe de conclure de telles ententes. Cependant, pour ce qui est des autres organismes publics québécois, la loi leur permet de le faire en autant qu'ils aient obtenu l'accord préalable du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Incidemment, est considérée comme un organisme public au sens de la loi toute entité qui répond à l'un des trois critères énoncés dans celle-ci, c'est-à-dire d'abord:

1° un organisme dont le gouvernement ou un ministre nomme la majorité des membres;

2° un organisme dont la loi ordonne que les employés soient nommés ou rémunérés selon la Loi sur la fonction publique du Québec; ou encore

3° un organisme dont les ressources proviennent pour plus de la moitié du fonds consolidé du revenu du gouvernement du Québec.

Il s'agit donc de critères couramment employés dans les lois québécoises pour définir la notion d'«organisme public». Et on peut penser, par exemple, à la loi d'accès à l'information ou encore à la Loi sur le vérificateur général.

Par ailleurs, il est à noter que la loi prévoit aussi la possibilité pour le gouvernement de soustraire au moyen d'un décret d'exclusion certaines ententes ou catégories d'entente à son application. C'est la procédure généralement suivie lorsqu'une municipalité désire conclure une entente qui serait autrement interdite.

En outre, au cours des années, le gouvernement a adopté de nombreux décrets pour exclure certains types d'entente qui, de par leur nature, ne sont pas susceptibles de soulever des difficultés au plan intergouvernemental; c'est le cas notamment des actes de gestion courante, par exemple, l'achat d'équipement ou la location d'espaces à bureaux. Ce sera aussi à l'occasion le cas d'ententes récurrentes conclues en vertu de programmes fédéraux établis de longue date. À ce chapitre, nous n'entendons pas changer de philosophie.

Et, enfin, soulignons que, dans l'éventualité où il n'existerait pas de décret d'exclusion ou qu'une entente serait conclue en contravention des dispositions de la loi, la sanction prévue par la loi est la nullité de l'entente.

Il m'apparaissait important, M. le Président, de prendre quelques minutes pour présenter plus en détail cette deuxième sous-section parce que plusieurs des ajustements que nous proposons maintenant dans ce projet de loi s'y rapportent.

La troisième section de la loi, de son côté, traite de la représentation du Québec au Canada, c'est-à-dire du rôle du ministre dans l'établissement des Bureaux du Québec au Canada, dans l'affectation du personnel destiné à ces Bureaux ainsi que dans la constitution des délégations officielles chargées de représenter le Québec aux conférences intergouvernementales canadiennes.

Comme je l'ai invoqué précédemment, la plupart des dispositions législatives concernant les affaires intergouvernementales canadiennes du Québec n'ont connu sur le fond pratiquement aucune modification depuis 1974. Et, si la loi est restée essentiellement la même, le contexte cependant des relations intergouvernementales canadiennes, lui, a changé et, du point de vue du Québec, malheureusement pas pour le mieux. Qu'on me comprenne bien, je ne parle même pas ici de la question du statut politique et constitutionnel du Québec. Je parle tout simplement du respect du partage des compétences qui sont prévues par la Constitution de 1867.

Et, à cet égard, je crois qu'il faut rappeler une constance du combat politique québécois, quels que soient les partis qui ont dirigé l'État québécois. Ce combat, ça a été d'abord un combat pour la protection de l'autonomie partielle acquise en 1867, et, depuis la Révolution tranquille et le processus de modernisation de l'État québécois, ça a été aussi un combat pour accroître l'autonomie et la marge de manoeuvre politique du Québec et de son gouvernement. Bien sûr, le maximum d'autonomie envisagé par plusieurs, dont les membres du gouvernement actuel, bien sûr, la souveraineté et l'indépendance politique. Mais, dans d'autres cas, pour ceux qui ne veulent pas se rendre jusqu'à cette limite, néanmoins il y a toujours eu jusqu'à maintenant une attitude de vouloir augmenter l'autonomie partielle qui avait été consentie en 1867.

La nouvelle situation maintenant, M. le Président, que je voudrais décrire, c'est qu'avec l'accumulation d'importants surplus budgétaires à Ottawa on assiste depuis quelques années sur le plan intergouvernemental à une multiplication des interventions fédérales dans les domaines de compétence provinciale soit par le biais de mesures législatives, soit par la mise en place de nouveaux véhicules subventionnaires.

Pour peu qu'on examine par exemple le dernier discours du trône fédéral qui date d'à peine septembre 2002, on verra que c'est patent; presque toutes les mesures annoncées dans ce discours visent en réalité des domaines de compétence des États fédérés, c'est-à-dire des provinces canadiennes: éducation postsecondaire, santé, aide à l'enfance, droit de la famille, aide aux municipalités, aide au développement régional, société du savoir, et j'en passe. C'est à croire qu'envahir les domaines de compétence provinciale est devenu la mission première du gouvernement fédéral.

Mais, comme je le rappelais, le combat politique du Québec a toujours été un combat pour la protection, au minimum, de l'autonomie acquise en 1867. Parce que, dès le départ, la conception du fonctionnement du pays, du point de vue canadien anglais, c'était d'avoir un pays unitaire. Et, depuis ce temps, l'attitude des gouvernements qui se sont succédé à l'État central ont toujours été d'essayer d'envahir les champs de juridiction des provinces et en particulier du Québec qui, contrairement aux autres États provinciaux, n'est pas un État provincial ordinaire; il est aussi un État national.

Pendant ce temps, la situation des provinces, elle, reste fragile, confrontés que nous sommes à d'importantes pressions qui résultent de la croissance des dépenses qui découlent de nos responsabilités constitutionnelles. Si on pense par exemple au secteur de la santé ou de l'éducation, c'est évident, et je crois qu'il y a peu de citoyens au Québec actuellement qui ignorent le fait que les dépenses augmentent en santé, pour toutes sortes de raisons, et les dépenses aussi augmentent en éducation et que, dans ce contexte-là, le gouvernement du Québec comme les autres gouvernements des États de la fédération sont aux prises avec une situation d'étranglement budgétaire et fiscal, peut-être à l'exception de l'Alberta qui dispose, elle, de ressources de revenu qui sont liées au pétrole. Mais, pour les autres provinces du Canada, la situation est moins simple et moins agréable aussi à gérer.

Bien que le phénomène dont je parle ne soit pas nouveau, ce déséquilibre fiscal d'ordre structurel entre les deux ordres de gouvernement, ce déséquilibre-là facilite aujourd'hui plus que jamais les intrusions fédérales dans des domaines de compétence provinciale. Et c'est ce qu'a constaté la commission Séguin que le gouvernement a mise sur pied au début de l'année pour étudier cette question-là et faire des recommandations à l'Assemblée nationale et au gouvernement. Et, plus récemment, c'est le même constat qui a émergé du Forum national sur le déséquilibre fiscal qui a réuni des représentants de l'ensemble des gens de la société québécoise qui ont, d'une certaine façon, confirmé et appuyé le vote unanime que nous avons tenu à cet égard à l'Assemblée nationale.

n(15 h 40)n

D'ailleurs, la conclusion sans le Québec de l'entente-cadre sur l'union sociale de 1999 n'est pas étrangère à cette problématique. Si l'absence de toute référence à cette entente dans le dernier discours du trône semble confirmer que le gouvernement fédéral ne se sent pas lié par aucun accord-cadre en ce qui regarde son pouvoir de dépenser et que cette entente n'a rien donné aux provinces, sa simple signature a certainement contribué à l'accentuation de la tendance interventionniste du gouvernement fédéral, vu la reconnaissance formelle apportée par les autres provinces à l'exercice du prétendu pouvoir fédéral de dépenser dans des champs de politique sociale.

Ainsi que vous le savez, M. le Président, et l'ensemble des collègues de l'Assemblée, le gouvernement du Québec n'a jamais reconnu l'existence d'un tel pouvoir qui ne se trouve d'ailleurs nulle part dans la Constitution. Et ça, le rapport Séguin l'a également bien signalé. Nulle part il y a une disposition constitutionnelle qui accorde au gouvernement fédéral le pouvoir d'utiliser ses moyens fiscaux pour dépenser dans des champs de compétence des États fédérés et, donc, de contrevenir lui-même à la loi fondamentale du pays.

Cet interventionnisme dans le domaine social fait en sorte que la présence du gouvernement fédéral dans ce champ de compétence que l'on sait être de compétence provinciale semble désormais aller de soi pour une proportion grandissante de la population canadienne, pour une raison aussi très simple: nos concitoyens canadiens anglais des autres provinces considèrent que le gouvernement canadien est leur gouvernement premier, leur gouvernement national. Quand la même question est posée aux Québécois, qu'ils soient indépendantistes ou fédéralistes, la réponse, c'est que le premier gouvernement des Québécois, c'est celui du Québec. Alors, il y a nécessairement une dynamique particulière qui amène une pression chez les gouvernements des autres provinces. À un moment donné, quand le gouvernement fédéral devient très insistant, il y a une pression même de l'opinion publique canadienne anglaise qui amène les autres gouvernements de la fédération à finalement capituler souvent.

Or, si un certain dialogue avec les provinces constituait, dans le passé, un passage obligé pour la mise en oeuvre des initiatives fédérales, aujourd'hui, on doit convenir que ça a changé, et je pense qu'on en a encore eu une illustration, il y a à peine une journée ou deux, quand le premier ministre du Canada, M. Chrétien, a refusé une demande qui avait été formulée l'été dernier par tous les premiers ministres du Canada et réitérée par les ministres de l'Environnement à l'égard d'une demande de rencontre avec le premier ministre fédéral avant que le Parlement fédéral soit amené à ratifier l'entente de Kyoto. Je pense que, dans un contexte de relations correctes et d'un rapport d'égalité entre les deux niveaux étatiques de la fédération, on aurait pu penser qu'une demande formulée par l'ensemble des dirigeants des États de la fédération aurait été acceptée correctement et reçue positivement par le premier ministre du niveau fédéral, mais ça n'a pas été le cas.

De plus en plus, le gouvernement fédéral contourne les provinces en établissant des contacts directs avec leur clientèle traditionnelle, comme si le pays, d'une certaine façon, était un pays unitaire. Et, quand on parle de clientèle traditionnelle, on parle des individus et des groupes dans la société québécoise qui s'attendent et qui demandent d'avoir des services publics qui, constitutionnellement, doivent leur être donnés par l'État québécois, et, dans les autres provinces, par les autres gouvernements provinciaux. Alors, c'est vrai dans le secteur social, comme on vient de le voir, mais c'est également vrai dans le secteur municipal ou dans le secteur de l'éducation. Ça permet de tisser, de la part du gouvernement fédéral, un important réseau grâce auquel il peut en outre recueillir l'information dont il a besoin dans l'élaboration de ces mesures.

Et le problème, c'est que, souvent, nos concitoyens ne voient pas cette approche-là. Ce qu'ils voient, eux, c'est finalement l'intérêt d'avoir à leur disposition des fonds fédéraux qui leur sont offerts, en se disant: Bon, bien, ça va nous faciliter la vie; ça va faciliter l'accomplissement de nos missions particulières au plan des mesures. Mais ce que nos concitoyens souvent négligent de prendre en considération, c'est l'impact. Il ne s'agit pas d'interdire au gouvernement fédéral, dans le contexte constitutionnel actuel, de parler aux citoyens du Québec ou de traiter avec les citoyens, avec les organismes du Québec, il s'agit de reconnaître la responsabilité constitutionnelle et la valeur de l'acte constitutionnel qui nous régit, même si, dans le cas du Québec, nous n'y avons pas adhéré.

Un exemple, M. le Président, qui illustre bien cette tendance est le regain d'intérêt à Ottawa dans le secteur municipal; encore un autre secteur de juridiction provinciale. On se souviendra que, dans le dernier programme électoral du gouvernement Chrétien, on faisait référence au renforcement des villes comme un des principaux engagements, thème qui a été repris par la suite au lendemain des élections dans le discours du trône de 2001, et, depuis, les contacts entre le monde municipal et le gouvernement fédéral se sont multipliés. C'est ainsi qu'Ottawa appuie de plus en plus ouvertement le mouvement revendiquant la reconnaissance au niveau municipal d'un troisième ordre de gouvernement autonome, tout comme il s'applique à défendre la constitutionnalité et la pertinence des interventions fédérales directes auprès de ce milieu.

C'est comme si, tout à coup, on voulait transformer la structure étatique du Canada, qui est une structure fédérale, en une structure qui ajouterait un autre palier de gouvernement. Ça donne que les municipalités dans ce pays ne sont pas des États. Ils sont des créatures administratives d'ordre politique, puisqu'ils sont dirigés par des instances politiques élues qui relèvent d'un niveau de l'étatique qui est en l'occurrence le niveau des États fédérés des provinces.

Alors, encore récemment, le discours du trône du mois dernier a fait écho à Ottawa de ce désir de passer par-dessus la tête des provinces afin de transiger séparément avec les municipalités en annonçant de nouveaux partenariats, une nouvelle stratégie urbaine et une nouvelle approche en la matière. Mais, encore une fois, c'est très tentant pour les dirigeants municipaux, c'est très séduisant aussi ce qu'on leur offre. Parce que, comme on le sait, actuellement il y a des surplus considérables au niveau du gouvernement fédéral. Donc, on est en mesure de faire miroiter des avantages financiers importants à des institutions puis à des organismes relevant de l'État québécois.

C'est dans cette optique qu'il faut se rappeler l'annonce dans le dernier budget fédéral, qui remonte en octobre 2001, de la création d'une fondation pour l'infrastructure stratégique qui avait comme objectif justement d'oeuvrer dans le domaine municipal. En marge de son budget, le ministre fédéral de l'époque, Paul Martin, avait d'ailleurs pris soin de souligner que cette nouvelle fondation, qu'il voulait mettre en place, pourrait faire affaire directement avec les municipalités. Et, en faisant ça, il savait très bien qu'il allait à l'encontre des dispositions constitutionnelles et de la loi québécoise qui amène le Québec, depuis la Révolution tranquille comme on l'a vu, à vouloir protéger son autonomie partielle.

Ce projet-là n'a pas vu le jour encore. Il y a eu un changement, comme on le sait, au niveau du gouvernement fédéral. Paul Martin a quitté, a été remplacé par M. Manley qui, pour l'instant, a mis cette idée de côté. Mais ce qu'il faut savoir, c'est qu'on en était rendu à la onzième fondation du genre que le gouvernement fédéral créait, a créée depuis 1997. Donc, depuis cinq ans, on a créé au niveau fédéral 11 nouvelles fondations pour dépenser des fonds publics qui sont collectés par le gouvernement fédéral, souvent et presque toujours dans des interventions qui visent des compétences exclusives des États fédérés dans toutes les provinces.

Alors, cette utilisation croissante de fondations ? quasi privées au surcroît ? comme intermédiaires, comme je l'indique, permet au gouvernement fédéral en leur confiant littéralement des milliards de dollars, là... On ne parle pas de quelques dizaines de millions de dollars ou quelques centaines de milliers de dollars; non, on parle de milliards de dollars qui sont octroyés à ces fondations-là. Alors, ça permet finalement au gouvernement fédéral d'accroître sa présence sur le terrain, généralement dans des domaines, comme je l'ai indiqué, de compétence provinciale, en s'associant avec des acteurs du milieu, tout en contournant certaines contraintes constitutionnelles et juridiques.

On se rappelle notamment la création de la Fondation canadienne des bourses du millénaire, encore une fois, qui avait été dénoncée par l'ensemble de l'Assemblée nationale, alors des deux côtés: du côté du camp libéral fédéraliste comme du camp du Parti québécois souverainiste. Cette attitude-là avait été dénoncée d'une voix unanime parce qu'on considérait que c'était un empiètement inacceptable dans un domaine encore plus névralgiquement lié à l'identité québécoise, c'est-à-dire l'éducation. S'il y a un secteur qui, dès le départ, a été reconnu comme de compétence provinciale et pour lesquelles ceux qui ont, dans le passé, négocié pour nous, en 1865-1866, le pacte fédératif, l'éducation était un champ de juridiction qu'on voulait exclusif aux provinces, parce qu'on reconnaissait qu'il s'agissait là d'une réalité qui était liée à l'identité même des peuples qui étaient en discussion, notamment à ce moment-là du nôtre.

n(15 h 50)n

Et, si l'on peut s'entendre sur son caractère préoccupant, il faut aussi conclure qu'au plan législatif le Québec n'a pas tous les outils pour gérer efficacement ce phénomène. En fait, ce qu'il faut voir, c'est qu'il y a eu une évolution et que maintenant il faut faire face à une nouvelle dynamique politique, donc à une nouvelle façon de faire au niveau fédéral, et c'est la raison pour laquelle, dans le fond, on se retrouve ici à l'Assemblée nationale.

Une des difficultés qui découle du recours par Ottawa à des fondations qui ont fait que ces organismes périphériques auraient échappé aux catégories actuellement prévues dans la Loi du ministère du Conseil exécutif en matière d'ententes intergouvernementales... Quand la loi a été créée par le gouvernement de Jean Lesage à l'époque et révisée par la suite 13 ans plus tard, ces situations étaient moins présentes et la relation était moins conflictuelle. Cette situation maintenant est de plus en plus préoccupante parce que le gouvernement fédéral a de plus en plus tendance à donner à de nouveaux organismes qu'il crée la capacité d'étendre leur champ d'intervention dans des secteurs de compétence provinciale et avec toujours le même objectif évidemment.

À ce qui précède, il faut aussi ajouter que le gouvernement fédéral, sous la responsabilité du Conseil du trésor canadien, a adopté une politique en matière d'entente de contribution que tous les ministères et organismes fédéraux doivent appliquer dans le cadre de leurs programmes. Cette politique touche, entre autres, aux conditions que doivent contenir les ententes de contribution sur les questions visant, par exemple, la langue, les clauses environnementales, la reddition de comptes, la visibilité et l'information. En fait, à des organismes québécois qui relèvent de la juridiction de l'Assemblée nationale du Québec, on veut imposer des clauses qui, par exemple, dans le domaine linguistique ou dans d'autres domaines, vont parfois à l'encontre des législations qui ont été adoptées par l'Assemblée nationale du Québec. Dans le cas de la visibilité, l'objectif aussi est très clair: c'est de faire en sorte que les gens pensent que les interventions du gouvernement canadien, un, sont multiples, donc sont importantes, donc sont indispensables. Est-ce qu'on peut penser qu'il y a d'autres raisons? Bien sûr, il y en a une autre aussi: c'est celle d'essayer de convaincre les Québécois qu'ils sont d'abord des Canadiens avant d'être des Québécois.

Mais au-delà de cette volonté-là, cette espèce de condition qu'on met presque continuellement à l'égard de la visibilité n'est pas neutre, pas plus que l'indiquent les conditions, en regardant l'information qui est exigée par le gouvernement canadien... est neutre. Et, si la loi, dans sa version actuelle, semble mal conçue, c'est-à-dire notre loi, pour faire face à ce nouveau contexte, c'est aussi parce que, au plan administratif, les nouveaux organismes périphériques qu'on voit apparaître à Ottawa se démarquent souvent de ceux qui les ont précédés parce qu'on cherche, au moyen de ceux-ci, à établir une certaine distance entre le gouvernement qui souvent aura une influence réduite sur la composition de leur conseil d'administration.

On met en place des fondations, on prend une certaine distance et on donne l'impression au public, québécois en particulier, que ce n'est pas de l'ingérence du gouvernement canadien. Écoutez, les gens, quand la publicité intervient ou quand les formulaires arrivent, c'est la fondation x, y, z qui traite avec les organismes du Québec. Alors, souvent, malheureusement, les gens n'y voient que du feu et se disent: Bien, écoutez, ce n'est pas un problème, là, c'est une fondation privée. Oui, mais c'est une fondation privée mise en place par une loi fédérale, répondant en général de son administration tout au moins au Parlement canadien. Alors, on voit que, encore là, il ne faut pas être naïf dans cette nouvelle pratique administrative. Et on encourage également ces fondations à aller chercher une certaine autonomie financière à travers, par exemple, des frais qu'on demande aux usagers ou des partenariats avec d'autres entités publiques ou encore avec le secteur privé.

Et enfin, on voit aussi généralement accorder une marge de manoeuvre accrue au niveau de la gestion interne de leur personnel. Si bien qu'ils ne seront pas régis par les lois relatives à l'embauche et à la rémunération dans la fonction publique, ce qui fait qu'ils échappent aux moyens de contrôle que le gouvernement du Québec a mis en place en 1961 et par la suite, 13 ans plus tard, pour justement éviter ce genre de situation là, éviter ce genre de pratique et d'attitude qui, comme le disaient Jean Lesage et par la suite Gérard D. Levesque, vise à contourner l'autonomie québécoise et à la diminuer et à lui mettre une pression considérable.

Toutes ces nouvelles façons de faire ont permis au gouvernement fédéral de se doter d'un véritable réseau qu'on pourrait dire tentaculaire, dont les frontières sont souvent très floues. Il s'agit d'une réalité qui n'existait pas à toutes fins pratiques en 1974, quand le gouvernement libéral a décidé de modifier la loi. Mais, maintenant, on doit en tenir compte; on ne peut faire comme si les choses n'avaient pas changé. Et l'existence de ce réseau résulte aussi, comme je l'ai indiqué... Je pense qu'il faut que nos concitoyens en prennent conscience. C'est aussi le résultat de cette réalité qui a été abondamment décrite au cours des dernières semaines, au Québec et dans l'opinion publique, c'est-à-dire cette réalité d'un déséquilibre fiscal.

Si on a tant d'argent du côté canadien, dans le fond on peut décider de payer la dette mais on peut aussi décider ? c'est ce qu'on fait souvent ? d'intervenir dans des champs de juridiction du Québec en disant par ailleurs: Vous savez, nous, on a des responsabilités importantes; alors on ne peut pas finalement accorder au gouvernement du Québec ou aux autres gouvernements des provinces ce qu'ils demandent par exemple pour le financement de leurs services de santé ou de leurs services éducatifs.

En réalité, si on prenait en compte les interventions fédérales dans les champs de juridiction et qu'on les comptabilisait et qu'on disait: Bien, écoutez, voici ce que ça coûte, les intrusions fédérales, on se rendrait compte que finalement, si le gouvernement fédéral s'en tenait à ses propres juridictions, bien, ça coûterait moins cher de taxes et d'impôts aux Québécois. À ce moment-là, finalement on se retrouverait avec la capacité de rééquilibrer la dynamique fiscale au Canada.

Enfin, un dernier élément de contexte qui justifie la mise à jour de la loi après plus de 27 ans est le simple passage du temps qui a fait apparaître la lourdeur administrative de certaines de ces dispositions. C'est le cas notamment de l'impossibilité pour les municipalités de conclure des ententes à caractère intergouvernemental autrement que via la procédure du décret d'exclusion. De la même façon, certaines ambiguïtés se sont révélées au fil des années, rendant quelquefois difficile l'interprétation des dispositions de la loi. L'une de ces ambiguïtés et non la moindre, M. le Président, concerne la nature des organismes fédéraux actuellement visés par la loi, comme on vient de le voir.

Et j'en arrive maintenant aux modifications que nous proposons dans le projet de loi. Comme je l'ai déjà mentionné, le projet de loi modifie d'abord la description du mandat du ministre aux Affaires intergouvernementales canadiennes par l'ajout d'une référence directe au fait de veiller, dans la conduite de ses affaires, non seulement au respect des compétences constitutionnelles du Québec, mais également au respect de l'intégrité de ses institutions qui, en définitive, incarnent et concrétisent la mise en oeuvre de ses compétences. Si nous proposons cela, c'est qu'il arrive que certains gestes d'Ottawa, bien que n'emportant pas forcément des empiètements constitutionnels au plan juridique, cherchent néanmoins délibérément à remettre en cause des institutions québécoises.

Cela est particulièrement vrai depuis le référendum de 1995, et ça, je crois que, au-delà de nos allégeances politiques, on doit reconnaître qu'il y a une attitude beaucoup plus agressive, beaucoup plus offensive, beaucoup plus belliqueuse à l'endroit du Québec et de l'État québécois depuis le référendum de 1995.

Encore tout récemment, on a eu droit à un exemple de ce phénomène lorsque, tour à tour, le premier ministre du Canada, son vice-premier ministre et le ministre des Finances et son ministre des Affaires intergouvernementales s'en sont pris au réseau des délégations du Québec à l'étranger. Et, encore une fois, il y a eu une réaction très saine au Québec; de chaque côté de l'Assemblée nationale, on a critiqué cette attitude du gouvernement central qui, encore une fois, essayait de convaincre l'opinion publique par cette déclaration que finalement ce sont des dépenses inutiles: Ce serait plus simple, ce serait plus économique de laisser au gouvernement canadien le soin de faire la représentation de l'ensemble des citoyens puis des organismes et des différents peuples du Canada, donc le soin de laisser ça au gouvernement fédéral.

n(16 heures)n

Alors que, on le voit bien encore aujourd'hui, il y a un expert international qui vient nous dire que, quand on regarde la réalité du Québec, on se rend compte que c'est ce que les États américains font depuis un bon moment; c'est ce que d'autres provinces canadiennes font; c'est ce que d'autres États, ailleurs dans le monde, qui ne sont pas des pays, font; c'est ce que même certaines régions autonomes, qui ne sont même pas constituées en États, font également, c'est-à-dire avoir la capacité d'une représentation à l'étranger pour défendre notre façon de voir les choses, nos intérêts propres qui ne sont pas toujours les mêmes que ceux de l'Ontario ou que ceux de la Colombie-Britannique ou que ceux des Provinces maritimes. Parfois, les intérêts convergent, parfois ils divergent.

Alors, bien que la modification que nous proposons nous apparaisse nécessaire à la lumière de ces développements, il faut dire qu'elle est davantage de la nature d'une précision, puisqu'on pourrait argumenter que, dans son libellé actuel, la loi sous-entend cette mission. Quoi qu'il en soit, nous ne nous écartons nullement de l'intention originelle de la loi. Au contraire, je dirais qu'il s'agit un peu d'un retour aux sources, puisque, dans la version originale de 1961, le mandat du ministre était déjà conçu en termes plus larges et moins techniques qu'aujourd'hui.

Une autre importante modification proposée, en lien direct avec les développements auxquels nous assistons et dont je viens de parler abondamment, consiste à étendre l'application de la loi aux organismes publics fédéraux. Comme je viens de l'indiquer, à partir du moment où on a plus d'interventions d'un nouveau type, bien, ces nouveaux types qui n'étaient pas couverts par notre loi, maintenant, on veut s'assurer qu'ils soient couverts.

Alors, présentement, la loi ne vise que les ententes conclues avec le gouvernement fédéral ou celui d'une autre province ou leurs ministères ou organismes gouvernementaux au sens strict. Les ententes conclues avec les organismes publics fédéraux ne sont donc pas visées. Il y a une dichotomie à cet égard, puisque, du côté québécois, les organismes publics non gouvernementaux sont, pour leur part, visés par la loi. C'est-à-dire, quand nos organismes publics non gouvernementaux veulent traiter avec le gouvernement canadien, ils doivent se soumettre aux dispositions de la loi québécoise. Mais, quand des organismes québécois veulent traiter avec des organismes publics non gouvernementaux canadiens, ils ne sont pas régis actuellement par notre loi.

Alors, en 1974, cette dichotomie pouvait se comprendre, puisque, contrairement aux provinces, le gouvernement fédéral ne disposait pas alors, en raison de la nature même de ses compétences constitutionnelles, de vastes réseaux publics et parapublics. Mais aujourd'hui, comme on l'a vu, par le développement d'un fédéralisme beaucoup plus centralisateur et beaucoup plus impérialiste ? et je reprends à cet égard des propos qui ont même été utilisés à d'autres moments donnés par les collègues d'en face ? on se retrouve avec un vaste réseau d'organismes publics, parapublics et même privés ou semi-privés qui visent à étendre l'action du gouvernement central, encore une fois, dans des champs de responsabilité qui relèvent, selon la Constitution, des États fédérés, donc du Québec et des autres provinces.

Aujourd'hui, comme on l'a vu, c'est de moins en moins vrai. Le but de la modification que nous proposons consiste donc à prendre acte de cette nouvelle réalité et à soumettre aux divers régimes d'autorisation préalable prévus dans la loi la conclusion d'ententes avec des organismes publics fédéraux, notamment ces nouveaux véhicules d'intervention que sont les fondations.

À cet égard, en ce qui a trait à la définition de ces organismes publics fédéraux, en plus de reprendre les trois critères présentement utilisés pour définir les organismes publics québécois, soit ceux du financement, de la composition du conseil d'administration et du statut des employés, le projet de loi introduit un critère additionnel, un quatrième critère par lequel seront dorénavant visés tous les organismes qui, en vertu d'une disposition législative, donc d'une loi fédérale ou d'un règlement du gouvernement fédéral, ont l'obligation de rendre des comptes périodiquement de leurs activités au Parlement fédéral.

Ça veut dire, par exemple, que des fondations à qui on reprochait justement de ne pas être redevables au niveau du gouvernement... On a au moins compris, au niveau canadien, qu'on ne pouvait pas faire en sorte que des fonds publics ne soient pas au moins vérifiés et contrôlés dans leur utilisation par le Parlement canadien. Mais, à partir du moment où le Parlement canadien a une disposition, nous nous sommes dit: Voilà un critère: quand un organisme fédéral a, en vertu de la loi ou des règlements, une obligation de rendre des comptes au Parlement de ses activités, alors cet organisme sera assujetti aussi, dans ses relations avec les organismes québécois, à la loi québécoise.

Ce quatrième critère, qui est de nature plus fonctionnelle, est lié au principe de la responsabilité ministérielle. Il est en lien avec le recours aux fondations auquel nous a habitués Ottawa au cours des dernières années, comme je viens de l'indiquer. Rappelez-vous comment le gouvernement canadien s'est défendu, l'année dernière, face au tollé provoqué par son projet de créer une autre fondation. Aux critiques qui fusaient de toutes parts concernant le caractère non démocratique de la façon de gérer les deniers publics, le gouvernement s'était, à ce moment-là, justifié en rappelant l'obligation imposée à ces fondations de produire un rapport au Parlement fédéral.

Alors, si le gouvernement fédéral a indiqué, comme je viens de le démontrer, que ces organismes sont néanmoins assujettis au contrôle parlementaire central, bien, nous, nous nous sommes dit: Bien, voilà une occasion et un moyen d'établir un critère objectif, simple, qui permettra au gouvernement du Québec de remplir ses obligations et d'assurer justement la protection de sa responsabilité constitutionnelle. Ainsi définie, la nouvelle catégorie des organismes publics fédéraux devrait donc pouvoir prévenir bon nombre d'intrusions dans les champs de compétence du Québec.

Mais est-ce que ça va être suffisant? Nous le souhaitons, mais nous ne pourrons que le voir à l'usage. Il faut cependant reconnaître qu'un contournement des dispositions de la loi représente toujours un risque qu'on ne peut éliminer totalement. Mais, ici, on doit rappeler qu'il existe déjà dans la loi actuelle une disposition prévoyant qu'on ne peut en contourner les exigences en permettant, par exemple, qu'une municipalité ou une commission scolaire soit affectée par une entente entre un tiers et un autre gouvernement au Canada ou l'un de ses ministères et organismes.

Nous proposons d'ailleurs de reprendre, mais en l'adaptant, cette disposition dans un nouvel article, celui-là qui s'appliquerait à tous les organismes visés par la loi. On y préciserait notamment que sont visées par cet article, donc interdites à moins d'autorisation préalable du gouvernement du Québec, les ententes conclues par un organisme québécois qui sont reliées à une entente qu'un tiers aurait conclue avec le gouvernement fédéral. L'idée ici est de clairement ouvrir les cas de plus en plus fréquents de ce que j'appellerais la sous-traitance, où, moyennant certaines conditions, le gouvernement fédéral subventionne un projet piloté par une entité carrément privée, par exemple les fonds d'aide verts qui sont administrés actuellement par la Fédération canadienne des municipalités, laquelle cherchera ensuite à conclure des ententes avec des organismes québécois selon les conditions préalablement convenues par le gouvernement fédéral. En somme, il s'agit de s'assurer du respect non seulement de la lettre, mais également de l'esprit de la loi.

Autrement dit, ce qu'on dit, dans le cas, par exemple, de cet exemple, c'est que la loi québécoise, depuis le début, interdit aux municipalités de traiter directement avec le gouvernement canadien sans l'autorisation du gouvernement du Québec. Alors, ce qu'on vise à éviter, c'est que, par exemple, par le biais d'une subvention ou d'un fonds accordé à la Fondation canadienne des municipalités, on se retrouve finalement à voir cet organisme pancanadien de représentation des municipalités subventionner des municipalités du Québec avec des fonds fédéraux sans l'autorisation du gouvernement du Québec. Alors, voilà la raison pour laquelle on va amener cette correction au niveau de la loi.

Bien que la loi couvre non seulement les relations fédérales-provinciales, mais également les relations du Québec avec les autres provinces, on aura remarqué, M. le Président, que nous ne proposons pas d'assujettir au contrôle gouvernemental les ententes conclues avec des organismes publics provinciaux ailleurs au Canada. La raison en est bien simple. Le danger d'empiètement constitutionnel est plutôt marginal, de ce côté. On ne sent pas chez nos vis-à-vis des autres provinces une visée impérialiste et tentaculaire qui viendrait envahir les champs de juridiction du Québec. Cela étant dit, il y a quand même certains types d'ententes structurantes conclues entre les entités publiques québécoises et leurs contreparties dans les autres provinces à l'égard desquelles le ministre ou le gouvernement du Québec devrait avoir un droit de regard pour juger de leur cohérence avec la politique intergouvernementale canadienne du Québec. Je pense ici notamment aux ententes en matière de valeurs mobilières conclues entre les différentes commissions provinciales chargées d'assurer la surveillance de ce secteur-là.

La loi, dans sa version actuelle, prévoit déjà que les ententes avec un organisme gouvernemental d'une autre province doit faire l'objet d'un suivi, mais elle ne définit pas ce qu'est un organisme gouvernemental. Elle se contente de les mentionner dans une énumération qui revient à plusieurs reprises, et on dit «un autre gouvernement, l'un de ses ministères ou organismes», et le mot «organismes» n'est pas plus précisé. Alors, cette lacune est d'autant plus problématique maintenant lorsqu'on considère qu'il s'agit d'une catégorie d'organismes qui est distincte de celle des organismes publics, qui, eux, font l'objet d'une définition par ailleurs fort générale.

Alors, dans le but d'éviter toute confusion, le projet de loi propose de définir la notion d'organisme gouvernemental. Le principal avantage, nous croyons, d'une telle modification est que la loi offrira alors un contrôle beaucoup plus calibré à l'égard des ententes conclues entre les organismes provinciaux ailleurs au Canada en ne visant que celles susceptibles d'exiger une supervision au plan intergouvernemental. À cette fin, la définition contenue dans le projet de loi cible les organismes qui exercent de véritables fonctions gouvernementales en faisant appel à des notions de droit administratif courantes en cette matière.

n(16 h 10)n

Il est à noter que, du côté québécois, cette définition n'aura pas pour effet d'assujettir de nouveaux organismes au contrôle de la loi, car ceux qui pourraient tomber dans cette catégorie se qualifient déjà de toute façon comme des organismes publics. En fait, du côté de la définition des organismes québécois couverts par la loi, il n'y a, en dehors de certains réaménagements de textes, que très peu de changements. La seule modification que l'on doit signaler, qui est assez technique incidemment, s'explique en raison de certaines nouvelles tendances en matière d'administration publique qui ont aussi cours au Québec.

Essentiellement, on constate que les sources de financement public de beaucoup d'organismes ont tendance à se diversifier, de même que la composition de leur conseil d'administration a tendance aussi à se diversifier. C'est pourquoi il est apparu opportun d'ajuster les définitions des organismes municipaux, scolaires et publics afin d'en tenir compte. Ainsi, les entités qui seront contrôlées ou financées majoritairement par plusieurs organismes eux-mêmes visés par la loi québécoise peu importe dans quelle catégorie ils appartiennent seront dorénavant couvertes.

Ceci étant dit, un des inconvénients du critère financier utilisé dans plusieurs lois québécoises pour définir les organismes publics est son caractère fluctuant qui fait que l'assujettissement de ceux-ci à une loi comme celle du ministère du Conseil exécutif peut varier d'une année budgétaire à l'autre. Dans le domaine des relations fédérales-provinciales, cette situation pose un vrai problème en raison de l'important déséquilibre fiscal ? dont on a parlé ? entre le gouvernement fédéral et celui du Québec. Avec ses énormes surplus accumulés au détriment des États fédérés, Ottawa dispose d'importantes sources financières aux fins des programmes de subventions. Soucieux d'appliquer sa politique de recherche d'équité en matière de fonds fédéraux accumulés, il faut le rappeler, en bonne partie grâce à l'impôt payé par les Québécois et les Québécoises, le gouvernement du Québec peut, en règle générale, difficilement refuser les subventions fédérales qui s'offrent aux divers organismes québécois.

Le problème est que parfois l'approbation d'une entente par le gouvernement ou le ministre au terme de laquelle un organisme québécois reçoit une subvention fédérale peut avoir pour effet temporairement de changer la nature de cet organisme et de le faire sortir du champ d'application de la loi, voire même en faire un organisme public fédéral. Cette conséquence est d'autant plus fâcheuse que les subventions fédérales ont tendance à être généreuses sur le coup mais sporadiquement en fonction de projets précis, alors que le financement québécois est souvent moins spectaculaire mais récurrent et assure en définitive le fonctionnement de beaucoup de ces organismes.

Alors, pour pallier à ce problème, il est donc proposé de prévoir expressément que, lorsque le ministre approuve une entente, il peut fixer comme condition que le financement obtenu en vertu de cette entente ne sera pas pris en considération ultérieurement pour établir l'assujettissement de l'organisme à la loi. Il s'agit en quelque sorte d'éviter un dilemme néfaste pour la cohérence et la pérennité des orientations de la politique intergouvernementale canadienne. Alors, ça veut dire, d'une autre façon, M. le Président, que, quand des organismes reçoivent du financement de tous bords tous côtés, à un moment donné, alors qu'au départ ils étaient assujettis à la loi québécoise, il peut se retrouver qu'à un moment donné, en recevant certaines sources de financement, par exemple, plus importantes du niveau fédéral, ils se retrouvent à sortir du champ de juridiction de la loi et du champ d'intervention, de protection de la loi québécoise. Alors, c'est à ce problème là qu'on veut s'attaquer.

Moderniser la loi, c'est aussi en assouplir le fonctionnement là où il est indiqué de le faire. Alors, présentement, des ententes avec d'autres gouvernements, leurs ministères ou organismes conclues par les municipalités et les commissions scolaires sont, en principe, interdites. Cette interdiction date de 1974. La pratique, depuis cette date, a toutefois démontré la nécessité de permettre aux municipalités et aux commissions scolaires de conclure de telles ententes lorsque le gouvernement n'a aucune objection quant à leur contenu. Devant cette nécessité, pour pallier l'interdiction de 1974, lorsqu'une entente est souhaitable, on procède, à l'heure actuelle, au moyen d'un décret d'exclusion pris en vertu d'un article de la loi, l'article 3.13. Cependant, cette façon de faire a suscité des questionnements au plan juridique. Il nous est donc suggéré, afin de lever toute ambiguïté et de faciliter l'application de la loi également, de plutôt énoncer que de telles ententes seraient permises sous réserve de l'autorisation préalable du gouvernement du Québec, à l'instar de ce qui est prévu actuellement pour les organismes publics, lesquels peuvent conclure des ententes avec l'autorisation du ministre québécois.

Toujours dans le but d'assouplir et de faciliter l'administration de la loi, le projet de loi renferme un certain nombre d'autres modifications plus techniques. Ainsi, on simplifie les règles en matière de conservation des originaux des ententes intergouvernementales, on permet la délégation de signature lorsqu'un ministre doit signer une entente, on implique davantage les ministères sectoriels, on subdivise certains articles pour en faciliter la lecture ? et Dieu sait parfois que les textes législatifs, on leur reproche d'être ardus à comprendre et à lire ? on précise la portée également des décrets d'exclusion et on fait un certain nombre d'autres modifications, encore une fois, techniques. Mais je crois que nous aurons sans doute l'occasion d'examiner plus en détail ces modifications lorsque nous passerons à l'étape de l'étude détaillée du projet de loi en commission parlementaire.

Alors, voilà, M. le Président, les principales mesures de ce projet de loi, qui, comme on peut maintenant le constater, est essentiellement de nature d'une mise à jour de notre législation en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes pour tenir compte de l'évolution du dernier quart de siècle. Le principe de la loi régissant ce domaine que tous les gouvernements du Québec ont fait depuis leur adoption est pour sa part maintenu dans son intégralité. Les modifications apportées visent d'abord et avant tout à mieux assurer le respect des compétences constitutionnelles du Québec, et ce, au chapitre, on le comprendra, que le gouvernement ne saurait être trop vigilant. Alors, M. le Président, chers collègues, je vous remercie et j'espère que nous pourrons par la suite, après ce débat, passer à l'étude plus détaillée du projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chapleau. M. le député.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. M. le Président, le projet de loi n° 111 poursuit plusieurs objectifs. Un des objectifs est d'alléger les règles en ce qui concerne la conservation des ententes intergouvernementales. Un autre objectif, c'est de s'assurer que le ministre puisse veiller à l'intégrité des institutions québécoises. Et le troisième objectif, peut-être même le principal objectif poursuivi par le projet de loi, c'est d'encadrer, de limiter, si on veut, d'encadrer, donc, le pouvoir fédéral de dépenser dans les champs de compétence québécois, dans les champs de compétence provinciaux. Et, pour atteindre cet objectif, le projet de loi propose différentes avenues, différentes options, différentes voies.

Notamment, on propose de modifier la définition du terme «organisme public» de façon à tenir compte des développements les plus récents en droit administratif et de façon à couvrir, dans le terme «organisme public», les organismes non gouvernementaux du Québec. On vise également à étendre l'application de la loi ? je dis bien «à étendre l'application de la loi», puisqu'elle ne s'applique pas en ce moment ? donc étendre l'application de la loi aux ententes conclues avec des organismes publics fédéraux. On veut aussi donner une définition large à l'expression «organisme public fédéral» de façon à couvrir notamment les organismes qui doivent rendre compte de leurs activités périodiquement au Parlement canadien. Et là, ici, évidemment, ce que le projet de loi a en tête, c'est les fameuses fondations comme la Fondation sur les bourses du millénaire, qui dorénavant donc serait assujettie à la loi.

On veut également remplacer la prohibition par l'autorisation au préalable du gouvernement dans le cas des ententes entre un organisme municipal ou un organisme scolaire, d'une part, et le gouvernement du Canada ou un organisme public fédéral, d'autre part. Cela revient à consacrer dans la loi la pratique courante en vertu de laquelle les organismes municipaux ou scolaires bénéficient de décrets qui les excluent de la prohibition générale contenue dans la loi actuelle. Le projet de loi vise également à soumettre à l'approbation au préalable du ministre les ententes entre un organisme public québécois et le gouvernement du Canada ou un organisme public fédéral afin de mieux encadrer l'exercice du pouvoir fédéral de dépenser.

n(16 h 20)n

Voilà donc ce sur quoi porte essentiellement le projet de loi n° 111. Il y a quelques autres amendements aussi qu'on y retrouve, des définitions nouvelles, des précisions quant aux définitions, des pouvoirs de délégation du ministre, des dispositions en ce qui concerne les ententes conclues entre un tiers et le gouvernement du Canada ou un organisme public fédéral et affectant un organisme gouvernemental québécois, un organisme municipal ou un organisme scolaire. Mais donc, M. le Président, comme je le disais, un projet de loi qui vise essentiellement à limiter, encadrer le pouvoir fédéral de dépenser dans les champs de compétence québécois, et on essaie d'y parvenir en faisant en sorte qu'il y ait plus d'organismes publics québécois qui soient visés par la loi, d'une part, et de façon à ce que la loi s'applique dorénavant aux organismes publics fédéraux, l'expression «organismes publics fédéraux» étant définie de façon suffisamment large pour couvrir les fondations qui sont créées par le gouvernement du Canada comme ? je l'ai mentionné un peu plus tôt ? la Fondation des bourses du millénaire.

Alors, puisque nous sommes en présence d'un projet de loi qui vise à mieux encadrer le pouvoir fédéral de dépenser... Et, vous savez, M. le Président, que le Parti libéral du Québec est aussi très inquiet de l'exercice du pouvoir fédéral de dépenser. Nous voulons que ce pouvoir-là soit davantage balisé, nous voulons qu'il soit davantage limité, puisque le projet de loi, donc, s'inscrit également dans la protection des compétences du Québec. Et là encore, M. le Président, vous savez jusqu'à quel point nous tenons à la défense soutenue, à la protection des intérêts du Québec et des compétences du Québec. Et on sait très bien que le fédéral, de plus en plus, donc, est tenté d'utiliser ses surplus budgétaires pour intervenir dans des secteurs comme les affaires municipales et urbaines, la santé et l'éducation. Tout ça est au coeur du problème du déséquilibre fiscal que nous nous employons, nous aussi, à critiquer et que nous nous employons, nous aussi, à contester et auquel, nous aussi, nous nous opposons fermement. Donc, parce que le projet de loi poursuit des objectifs qui, dans le fond, sont aussi les nôtres, parce que ce projet de loi là épouse une vision qui est aussi la nôtre, M. le Président, je peux vous dire que l'opposition officielle votera en faveur de l'adoption du projet de loi en ce qui concerne le principe. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chapleau et critique de l'opposition officielle en matière de relations intergouvernementales. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saguenay ? très bien, de Saguenay. Je vous cède la parole.

M. François Corriveau

M. Corriveau: Alors, au niveau de l'Action démocratique, suite à la lecture du projet de loi, suite au long exposé du ministre et suite également à ce qui a pu être mentionné par l'opposition officielle et pour ne pas tomber dans la redite une fois de plus, je pense que tout a été dit sur ce sujet, effectivement, il est très intéressant de voir que le gouvernement est préoccupé par, encore une fois, cette intrusion, cet interventionnisme que le fédéral fait au niveau des dossiers provinciaux, où il peut y avoir à certains endroits des négociations directes entre des organismes provinciaux ou encore... bien, c'est ça, des organismes provinciaux et, par exemple, les municipalités ou des corporations avec le fédéral. Alors, c'est une chose qui effectivement doit être corrigée.

Alors, l'inclusion de ce quatrième critère afin de permettre que les agences et les fondations soient couvertes pour ne plus qu'elles puissent négocier directement nous apparaît fort à propos, d'autant plus que ça permet non seulement de voir à un certain droit de regard du Québec sur ces négociations-là, mais également ça permet de protéger ces organismes-là, ces municipalités-là qui pourraient arriver à faire des ententes avec le fédéral et parfois se faire avoir un petit peu au niveau du deal entre elles et Ottawa. Alors, comme ça, ça autorise, en fait, le gouvernement et son ministre à avoir un souci d'équité puis un souci de protection envers le public au Québec face aux négociations qu'il peut y avoir à la pièce avec les organismes qu'Ottawa crée continuellement.

Alors, c'est pourquoi nous allons être également en accord avec ce principe-là. Et c'est de façon, je pense, concise et précise, comme on nous l'enseigne au Barreau, que je tenais à vous faire cet exposé-là, sans que ça traîne pendant 52 min 35 s.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Saguenay. Alors, il n'y a pas d'autres intervenants. M. le ministre a droit à son droit de réplique. Je vous cède la parole.

M. Jean-Pierre Charbonneau (réplique)

M. Charbonneau: Simplement pour me réjouir de l'attitude et de la position qui sont prises aujourd'hui par les deux partis d'opposition. M. le Président, je crois que tout le monde a compris qu'il ne s'agissait pas, dans ce cas-là, d'une opération politique qui visait à aller plus loin que la défense des intérêts du Québec, l'autonomie du Québec est déjà une autonomie limitée... et de faire en sorte que, dans l'avenir, la juridiction du Québec et l'esprit de la loi qui avait été mise en place par Jean Lesage en 1961 continuent toujours de prévaloir, mais en tenant compte des nouvelles réalités et de la tendance de la pratique du fédéralisme qui prévaut dans ce pays, depuis plusieurs années, du point de vue de l'attitude fédérale, qui en est une, malheureusement, de non-respect de la Constitution et de marginalisation des États fédérés et des provinces, et en particulier du Québec. En ce sens-là, on peut tous être satisfaits de la conclusion du débat.

Puis j'ai déjà offert à mes vis-à-vis, je crois, les informations nécessaires pour procéder correctement à l'étude détaillée du projet de loi. Alors, s'ils ont besoin d'autres précisions, ça va me faire plaisir, M. le Président, de leur communiquer les informations qu'ils souhaiteraient avoir. Merci.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Je m'en vais mettre aux voix le principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes. Est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Oui, Mme la leader adjointe?

Renvoi à la commission des institutions

Mme Vermette: Oui. Alors, je fais une motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions et que le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes en soit membre, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Mme Vermette: Adopté.

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement, pour le prochain sujet.

Mme Vermette: Oui. Alors, le prochain sujet, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à jeudi, 31 octobre 2002, à 10 heures, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Ajournement

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, conséquemment, je vais donc ajourner nos travaux à demain, jeudi, 10 heures.

(Fin de la séance à 16 h 27)