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Version finale

36e législature, 2e session
(22 mars 2001 au 12 mars 2003)

Le mercredi 20 mars 2002 - Vol. 37 N° 79

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de la consule générale du Royaume-Uni de Grande-Bretagne
et d'Irlande du Nord à Montréal, Mme Sarah Gillett

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Annexe

Membres du Conseil des ministres

Journal des débats

(Dix heures cinq minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée
déplore le manque de vision et de leadership
du gouvernement dans la mise en oeuvre
des recommandations du rapport Clair

À l'article 33 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député de Châteauguay présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale déplore vivement le manque de vision et de leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair.»

À la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires, je vous informe de la répartition du temps de parole que j'ai établie pour le déroulement de ce débat: 10 minutes de réplique seront réservées, cinq minutes sont allouées au député indépendant et le reste du temps est divisé à parts égales entre les deux groupes parlementaires de cette Chambre. Il n'y a pas de limite à l'intérieur, si vous voulez, de ce temps, et le temps non utilisé par l'un sera distribué à l'autre parti.

Alors, je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Si vous permettez, à ce moment-ci, compte tenu de l'heure à laquelle nous débutons nos travaux, de façon à ne pas écourter le droit de parole ni du ministre ni du critique de l'opposition officielle, il y aurait peut-être lieu de consentir à ce moment-ci à ce que les deux heures de débat aient lieu conformément à ce qui est prévu.

Mme Vermette: M. le Président, nous n'avons pas de problème. Alors, nous allons acquiescer à cette demande.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous ferons deux heures de débat. Alors, le premier intervenant. M. le député de Châteauguay, je vous cède la parole.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Merci, M. le Président. La motion d'aujourd'hui va nous permettre de faire un tour d'horizon du rapport Clair et surtout faire un tour d'horizon de ce qu'il en est advenu un an après qu'il soit rendu public.

La motion d'aujourd'hui ne se veut pas qu'une critique, je le dis d'entrée de jeu au ministre. La motion d'aujourd'hui se veut d'abord et avant tout constructive, M. le Président, parce qu'elle va permettre au nouveau ministre de découvrir les opportunités d'action qui, malheureusement, jusqu'ici ont été oubliées par la partie ministérielle. Au-delà de la partisanerie, ce que je compte faire ce matin, M. le Président, c'est de plaider pour la santé des Québécois. C'est ce que je m'apprête à faire, donc, sur cette motion.

Voyons d'abord, pour faire un tour d'horizon de ce qui s'est passé avec le rapport Clair ? et je vous annonce à l'avance que je vais y référer assez souvent ? voyons d'abord ce que nous disait la conclusion du rapport Clair. On peut lire dans la conclusion ceci: «Peu importe la nature des recommandations et des propositions, l'affirmation d'une vision et la capacité d'enclencher et de gérer les changements proposés seront déterminantes[...]. Les participants aux auditions et aux consultations nous l'ont dit: Ils attendent une direction et des orientations claires de la part du ministère. Ils veulent aussi passer à l'action. Nous sommes d'avis qu'il faut établir un plan d'action triennal susceptible de faire évoluer l'ensemble du système de santé et de services sociaux dans la direction souhaitée.»

On avait déjà là, M. le Président, une première piste pour le gouvernement pour les jours et les semaines qui ont suivi le dépôt du rapport Clair. Un an après, ni direction ni action, et la vision du Parti québécois reste la même. La santé, disait le premier ministre, ça ne rapporte pas, dépenser pour les hôpitaux, ça ne rapporte pas. Voilà la vision du Parti québécois. Cette vision-là n'a pas changé avec le rapport Clair, on va en parler abondamment.

n(10 h 10)n

Pour le Parti libéral du Québec, M. le Président, vous le savez, il y a une autre vision, et cette vision-là... Notre chef, M. Jean Charest, a prononcé à plusieurs reprises: La santé est une richesse collective. Ce qu'il est intéressant de noter, c'est que la vision du chef du Parti libéral du Québec, la vision du Parti libéral du Québec, qui est différente de celle du Parti québécois ? tout ça, c'est clair ? elle se retrouve à la page 7 du rapport de la commission Clair, où on peut lire: «Les Québécois considèrent généralement la santé comme une richesse individuelle et collective.» La conclusion parle des valeurs. Nous avons les mêmes valeurs que celles qui sous-tendent le rapport Clair, nous, au Parti libéral du Québec. Au Parti québécois, il n'y a pas de telles valeurs. Pour eux, la santé, ça ne rapporte pas, ce n'est pas leur objectif, M. le Président.

Voilà une première chose à dire lorsque nous parlons du rapport Clair et des suites dans l'année. Non seulement doit-on regarder ce que le Parti québécois en a fait, mais aussi regarder ce que, nous, au Parti libéral du Québec, on propose, parce que les Québécois doivent très prochainement se faire un choix, se faire une idée, choisir un gouvernement qui va pouvoir mettre en place ce rapport-là. C'est pour ça qu'il y a une motion où on déplore le manque de vision, où on déplore le fait qu'il n'y a pas de capacité à générer le changement au Parti québécois. Nous, nous entendons le faire, nous entendons passer à l'action, et d'abord inspirés par ces valeurs, des valeurs où, nous, on considère que la santé est une richesse collective, et eux considèrent que ça ne rapporte pas.

Bien, ça a des conséquences, ça, quand on n'a pas les mêmes valeurs. Pour le Parti québécois, la conséquence, c'est que, en 1994, lorsqu'ils ont pris le pouvoir, le Québec était au troisième rang des provinces canadiennes en termes de financement de la santé, selon un indicateur auquel réfère la commission Clair, soit dit en passant, les dépenses par habitant en matière de santé. C'est un indicateur que nous conseille de prendre le rapport Clair. Selon cet indicateur, nous étions troisième en 1994 lorsque le Parti québécois a pris le pouvoir. Nous sommes aujourd'hui au dixième rang, au dixième et dernier rang. Bien sûr, si votre vision, c'est que ça ne rapporte pas, vous n'y investissez pas. Mais, si votre vision, c'est que la santé, c'est un enrichissement individuel et collectif, vous prenez tous les moyens pour y investir, vous vous battez pour y investir. Et on ne peut pas dire que le ministre actuel comme ses prédécesseurs se sont bien battus pour ça.

Et là, M. le Président, vous avez la tentative de rhabillage, le Parti québécois qui veut nous faire croire que, si on n'investit pas dans la santé, c'est de la faute du fédéral. Dois-je vous rappeler que, passant de la troisième à la dixième position, les autres provinces avaient elles aussi connu les coupures du fédéral. Ce n'est pas ça qui justifie qu'on soit passé en dernière position. C'est la valeur péquiste qui dit que la santé, ce n'est pas important puis ce n'est pas rentable qui fait qu'on est allé à la dixième position.

Hier, on a assisté à une manoeuvre, M. le Président. Je vous donne le titre du Devoir de ce matin, c'est en première page: La ministre de la Santé prive la santé à cause d'Ottawa. Deux choses: «prive la santé», ça, c'est un fait depuis 1994, mais là où on essaie de nous faire croire, comprenez-vous... Parce qu'on en parle souvent, de plus en plus de monde le savent, que Parti québécois puis santé, ça ne rime pas, ce n'est pas équivalent, il n'y a pas d'équation entre les deux. Là, ils essaient de trouver une parade. On nous dit: C'est à cause d'Ottawa, à cause de la péréquation, M. le Président, à cause de la péréquation d'Ottawa. Savez-vous c'est quoi, la péréquation, M. le Président? C'est des versements inconditionnels qui sont faits par des populations de provinces riches aux populations de provinces qui sont sous la moyenne, sans condition. C'est 5 milliards à peu près annuellement, grosso modo, que le Québec reçoit, plus de 50 % des versements de péréquation, parce qu'on est la province la plus populeuse ? c'est sur une base par habitant.

Ce que la ministre des Finances se plaignait hier, c'est du fait, disait-elle, que notre économie va mieux, donc on reçoit moins de péréquation; c'est une taxe au développement. Devrons-nous lui rappeler qu'on ne la paie pas, la taxe de la péréquation, on la reçoit. Ce qu'elle nous dit finalement, c'est que, elle, elle considère ceci: il faudrait que les chômeurs, une fois qu'ils trouvent un emploi, gardent leur chèque d'assurance chômage pour toute leur vie. Ça, c'est la logique de la ministre des Finances. Puis le ministre de la Santé, il considère que c'est ça, elle a bien raison. Il ne se battra pas pour aller chercher de l'argent.

Ce qu'il faut comprendre, M. le Président, c'est que ces versements de péréquation que nous recevons à hauteur de 5 milliards, bien, depuis 1996, le Parti québécois a décidé d'en détourner 1 milliard. 20 % de ces montants-là qui auraient dû aller à la santé, savez-vous où ils les ont mis? Dans les aides aux entreprises, parce qu'ils ont des petits amis qui prennent des commissions là-dessus. On le sait, on en connaît: Oxygène 9, Vaugeois. Il y en a-tu d'autres? Puis c'est dans tous les secteurs, là. C'est dans le multimédia, c'est dans l'aide aux entreprises communautaires, c'est dans tout.

Comment je vous dis ça? Bien, ce n'est pas compliqué, je prends le livre du budget de novembre dernier. Dans les documents sur les dépenses fiscales, on peut lire, à la page 53: En 1996, les dépenses fiscales, l'aide aux entreprises qui font de l'argent: 862 millions; en 2002, 1 854 000 000. Il y en a 1 milliard de plus. Ils l'ont pris où, cet argent-là? Moi, quand je demande, quand on demande ensemble de l'argent pour les soins à domicile, pour les lits d'hébergement, quand on veut donner des soins, on leur dit: Il faut mettre de l'argent là-dedans. Ils nous disent: On n'en a pas, on n'en a pas. Vous le trouvez où? Le ministre me disait ça, hier soir. Je le trouve où? On le trouve à la page 53, M. le ministre, page 53, dépenses fiscales, budget de novembre 2001. C'est l'argent que vous avez pourtant trouvé, notamment dans les montants de péréquation, que vous êtes allés mettre dans des entreprises qui font de l'argent.

Maintenant, on me dira, M. le Président: Oui, oui, mais c'est important de mettre l'argent là-dedans parce que ça développe l'économie. En 1996, lorsqu'on mettait le 800 millions, notre proportion des investissements privés, comparé au reste du Canada, qui venaient au Québec, on en avait 18 % des investissements privés canadiens qui venaient au Québec en 1996. En 2001, alors qu'on dépense 1 milliard de plus par année pour ces compagnies-là, on en a combien? On pourrait se dire: 22, 23, tu sais, ça a donné quelque chose. Bien non, on en a moins. C'est rendu 16,7.

Et quel n'était pas mon étonnement, M. le Président, quel n'était pas mon étonnement hier après-midi de lire dans les documents du nouveau budget d'hier, six mois après celui du mois de novembre: Du côté des entreprises, pour l'année qui vient, les investissements non résidentiels devraient diminuer légèrement en 2002, huit dixièmes, près de 1 % de moins. Y a-tu quelqu'un qui va allumer les lumières au gouvernement et qui va s'apercevoir que la raison pour laquelle on n'a pas d'argent pour la santé, pourquoi la ministre des Finances prive la santé, ce n'est pas à cause d'Ottawa, c'est à cause des choix du gouvernement du Parti québécois?

Les propositions qui sont faites dans le rapport Clair, M. le Président... Je viens de démontrer que les valeurs nous amènent à des conséquences au niveau du financement. Les valeurs du Parti québécois: Ça ne nous intéresse pas de financer la santé, ça ne rapporte pas. Les nôtres: C'est un enrichissement collectif; nous, on croit qu'il faut financer la santé. Et on dit même, avec les documents du gouvernement, où il y a des sommes d'argent disponibles pour ça.

Mais regardons les propositions du rapport Clair. D'abord, les propositions sur la modernisation du processus décisionnel, parce que la façon de prendre des décisions... la planification est déficiente. C'est ce qu'a remarqué la commission Clair. À la page 35 du rapport, on lit ceci: Nous proposons... C'est la proposition 1 de la recommandation 1. Autrement dit, c'est ce qu'il y a de plus important que Clair nous propose: «Confie au ministère de la Santé et des Services sociaux le mandat de coordonner l'analyse des impacts [...] des politiques et programmes de tous les ministères et grands organismes gouvernementaux.» Les gens au Parti libéral, ça leur sonne des cloches, ça, parce que, nous, on sait que, dans nos propositions à nous, nous, on veut faire des études d'impact.

Ça continue: «...le ministère de la Santé et des Services sociaux ne peut assumer seul, sur le plan gouvernemental, la responsabilité et l'imputabilité globales de la santé de la population. La commission estime qu'elles incombent d'abord au gouvernement du Québec.»«Le ministère de la Santé ne peut assumer seul.» Ce que ça nous dit déjà, que vous ayez un, deux ou trois ministres de la Santé, ce que Clair nous dit, c'est que la santé, ça ne concerne pas que les ministres de la Santé, ça concerne les Transports, ça concerne le Conseil du trésor, ça concerne l'Éducation, ça concerne l'Environnement, ça concerne le gouvernement.

Ce qu'ils veulent, la population, les Québécois, ils veulent un gouvernement de la santé. Ce que Clair proposait, c'était un gouvernement de la santé. Ce que le Parti québécois propose, c'est un gouvernement qui oublie la santé. Bien, le Parti libéral du Québec, lui, veut être et sera un gouvernement de la santé. Nous, M. le Président, nous proposons d'avoir, à la lueur de ce que dit le rapport Clair, un mécanisme d'étude des impacts des décisions gouvernementales.

Je continue la lecture du rapport Clair, page 26: «...l'organisation des services n'a pas pu s'adapter de façon dynamique et adéquate à ces transformations. Elle les a plutôt subies. D'autant plus qu'elle a dû faire face à des contraintes budgétaires majeures, concentrées dans le temps, et à une perte d'expertise par suite de la mise à la retraite massive de milliers de professionnels. Il en résulte aujourd'hui une organisation en difficulté qui connaît des problèmes croissants d'accessibilité et de continuité.»

n(10 h 20)n

Je peux vous lire un autre passage, à la page 112 et 113, et vous allez comprendre pourquoi j'en parle dans le processus décisionnel et la modernisation du processus décisionnel. On peut lire: «Les dernières années ont été éprouvantes pour ceux qui oeuvrent au sein du réseau de la santé et des services sociaux. Encore aujourd'hui, la surcharge de travail, l'instabilité des équipes, les pénuries dans certaines catégories de professionnels, notamment les infirmières, s'ajoutent aux rigidités de toutes sortes pour entretenir un sentiment général d'insatisfaction, d'épuisement et de morosité qui règne trop souvent dans les établissements.»

«Les coûts de l'assurance salaire ont augmenté de 25 % de 1993 à 1999.» Je fais une parenthèse juste pour rappeler que, de 1999 à 2001, de 32 % qu'elles ont augmenté. Le rapport Clair trouvait ça épouvantable, de 25 % en six ans, l'augmentation; bien, trois ans après, c'est 32 % d'augmentation. Juste pour vous dire que ça ne s'améliore pas, là. Je poursuis la lecture.

«De l'avis général, ces départs massifs ont profondément fragilisé l'expertise du réseau aussi bien que les équipes de travail, souvent dans des secteurs où il faut des années pour consolider des compétences collectives.» On peut penser aux infirmières et aux médecins.

Qu'est-ce que ça nous dit, le rapport Clair? D'abord, ça nous fait un bilan, le bilan des mauvaises décisions du gouvernement. Ils ont donné des bonus aux gens pour qu'ils arrêtent de travailler. Ça a défait tout le système. Qu'est-ce qu'il dit, le rapport Clair? Première recommandation, première proposition: Ne recommencez plus jamais cela, faites des études d'impact de vos décisions gouvernementales, parce qu'on ne peut pas se payer deux fois cette gaffe-là qu'on paie et qu'on va payer longtemps. Nous, on a demandé au gouvernement: Combien d'études d'impact et quelles sont les études d'impact que vous avez faites avant de faire les bonus à la retraite? Et ils nous ont répondu: Bien, on n'en a fait aucune. Alors, il faut prendre acte de ça. Nous, au Parti libéral, on dit ? puis le Parti québécois devrait faire pareil ? on dit: Soyons capables de voir les erreurs et corrigeons ce qu'il y a à être corrigé. S'il y a une chose qui marche, on n'y touche pas, mais, quand c'est brisé, on le répare. Or, le système de prise de décision est pourri. Donc, ça prend une mécanique d'étude systématique des décisions gouvernementales pour voir quels sont les coûts-bénéfices.

Je pourrais vous donner l'exemple du virage à droite sur un feu rouge, où on apprend qu'au ministère des Transports on tripote les documents pour ne pas qu'on sache quelles sont les conséquences pour la santé de décisions qui sont déjà prises. Je me demande comment ça se fait que le ministre de la Santé est silencieux là-dessus. Le rapport Clair dit: Il faut éviter ça, ça prend une mécanique, une étude d'impact des décisions gouvernementales. Le Parti québécois, ça ne l'intéresse pas, le rapport Clair, il ne veut pas faire ça. On est sur la carte à puce en ce moment, en commission parlementaire. Je demande sans arrêt au gouvernement de nous donner les études coûts-bénéfices de cette carte-là. Réponse: On les a, on ne les montre pas. On les cache. Comment voulez-vous que les Québécois participent à leur santé individuelle et collective si le gouvernement décide de faire ça en catimini?

Ça nous prend une mécanique indépendante d'étude d'impact des décisions gouvernementales. Au Parti libéral, on a proposé cette mécanique et on a même ajouté le concept d'un commissariat général à la santé, une unité indépendante qui va voir à assurer l'intégrité de cette mécanique. C'est un peu comme la bretelle puis la ceinture, M. le Président: s'assurer que les décisions vont être bonnes à l'interne comme à l'externe. On lui demande, à ce commissaire à la santé, de faire les études coûts-bénéfices. On lui demande de suivre la charte des droits du patient. C'est notre réponse à nous, au Parti libéral du Québec, à la commission Clair, laquelle parlait de la pertinence, se posait la question de la pertinence d'une agence santé.

Ils en parlent dans les pages introductives, M. le Président, je vous en lis un court passage: «Nous leur proposons donc de réfléchir à la meilleure structure opérationnelle permettant de bien gérer les quelque 200 milliards de dollars que les Québécois vont mettre dans la santé au cours des 10 prochaines années.» Ce n'est pas banal. Ils disent en introduction: Regardons comment on va faire ça. Dans la proposition qu'ils mettent sur la table, aux pages 214 et suivantes, ils nous disent, ils posent la question: «Ne faudrait-il pas créer une agence ou une société publique dotée d'un conseil d'administration hautement crédible pour coordonner l'administration de l'offre de services?» Quelle réponse le Parti québécois a donnée à cette réflexion? Quelle réponse? Aucune. Aucune.

Ce que disait le rapport Clair, dans le fond, il disait: Ça va prendre une agence indépendante du gouvernement qui va voir à opérationnaliser. Nous, on a un peu de difficultés avec ce concept parce qu'on pense que le problème, ce n'est pas dans les opérations. Au contraire, il y a déjà trop de monde qui s'occupe des opérations. On l'a vu dans le dossier du bain thérapeutique: il y avait l'établissement, la régie puis le ministère qui s'interrogeaient à savoir qui qui était pour installer le bain. Les opérations, là, on en a beaucoup de monde. Ça, il faut clarifier ça, je vais en parler tantôt.

Nous, on pense, par exemple, que, dans la planification, il y a un gros problème: problème parce qu'ils ne font pas des études, problème de transparence, problème d'empiétement. Alors, on répond à la question posée, ça répond aussi au Collège des médecins qui parle d'un Hydro-Québec de la santé. Nous, on dit: On va avoir un commissariat général à la santé, indépendant, nommé par l'Assemblée nationale, qui va suivre les indicateurs individuels et collectifs contenus dans la charte des patients, qui va suivre le mécanisme d'étude d'impact, qui va s'assurer des évaluations coûts-bénéfices publiques, connues. Nous, on répond au rapport Clair. Comment ça se fait que c'est le Parti libéral du Québec qui est le seul à répondre au rapport Clair? Il est où, le gouvernement? Nulle part. Ça ne l'intéresse pas, le rapport Clair. Sa vision, c'est: La santé, ça ne rapporte pas, donc on ne s'en occupe pas. Ils ont fait la commission Clair parce qu'ils voulaient faire du marketing, des relations publiques, mais, quand c'est le temps d'agir, ils ne sont pas là.

Je disais tantôt, M. le Président, que le problème avec la proposition de Clair sur l'agence indépendante, c'est qu'il veut les amener dans les opérations. Et d'ailleurs, nous, on dit: Bien, il y a quelque chose qui ne marche pas, parce que, dans le rapport Clair, eux-mêmes, ils disent qu'il y a trop de monde dans les opérations, il y a trop de monde qui s'empiètent.

Encore une fois, je vais vous rapporter à certains passages, dont celui-ci, à la page 213: «La clarification des rôles aux différents paliers de la gouverne devrait conduire à des responsabilités mieux définies des intervenants à tous les niveaux et ainsi diminuer les risques de dédoublement souvent dénoncés devant la Commission. En conséquence, le ministère [...] et les régies devraient diminuer leur effectif substantiellement de façon à pouvoir se mesurer avantageusement avec les administrations publiques comparables.» Depuis un an, il s'est-u passé quelque chose dans les effectifs, M. le Président? Rien.

«En 1996, un comité d'experts a reçu mandat du ministre de l'époque...» 1996. En quelle année on est? On est en 2002, ça fait six ans. «En 1996, un comité d'experts a reçu mandat du ministre de l'époque de procéder à l'examen des responsabilités respectives du ministère, des régies [...] et des établissements. Son rapport a été déposé le 9 décembre 1996.» Écoutez ça: «De l'avis de la commission, ces principales propositions sont toujours pertinentes.» Et elles attendent toujours sur une tablette.

Je m'excuse. Non seulement le rapport ne les intéresse pas, mais tous les rapports qu'ils font ne les intéressent pas. Il y a un rapport de 1996 sur le partage des responsabilités pour qu'on fasse le ménage, qu'on sache qui fait quoi, pas qui nomme qui, pas qui nomme qui, qui fait quoi. Là-dessus, M. le Président, il n'y en aura pas, de réponse.

Clarifier les opérations, de la planification, ça ne les intéresse pas. Moderniser la prise de décision par des mesures d'étude d'impact, par des cibles publiques engageantes et par un suivi périodique, ça ne les intéresse pas. C'est pourtant la piste que Clair proposait, c'est la piste que nous avons suivie. Demandons-nous, dans ces élections qui viennent, qui est prêt à passer à l'action, avec les vraies valeurs, pour la santé des Québécois. Il y a un grand fossé qui nous sépare, M. le ministre de la Santé. Depuis un an, vous avez pas mal de chemin à rattraper.

Un jour, M. le Président, il faudra bien redécouvrir les vertus de laisser les opérations aux opérateurs. Je vais vous citer un passage de la page 129 du rapport de la commission Clair. Comme vous voyez, j'ai eu l'occasion de le lire à quelques reprises. «Proposition 45. Nous proposons que les parties patronales conviennent que les questions relatives aux horaires de travail, au remplacement, à la présence et à l'absence au travail ainsi qu'à la gestion des postes soient négociées et agréées à l'échelle locale avant le début de la prochaine négociation nationale.»

C'était il y a un an. On parlait, dans cette proposition-là, de profiter de la paix internégos pour asseoir ça, là, que les opérateurs aient une marge d'opération. Puis on en parle-tu, là, des horaires de travail en ce moment, là? C'est-u un gros problème dans nos hôpitaux? Majeur. Je pose la question, M. le Président: Qu'a fait le Parti québécois avec cette proposition 45? Zéro, rien, le néant, le vide. Du vent, M. le Président, du vent!

Dans le processus de prise de décision, il faut avoir un cap, M. le Président, une destination, des indicateurs. C'est d'ailleurs ce que nous disait le rapport Clair, page 19: «Pour la décision administrative, il faudra des études et des analyses et développer des systèmes d'information et des indicateurs. En ce qui concerne le choix des politiques publiques, les informations sur les rapports avantages-coûts seront croisées avec d'autres choix politiques et soupesées à la lumière des valeurs et des orientations quant aux grands enjeux sociaux.»

n(10 h 30)n

C'est drôle, quand on lit ça, il me semble que je me retrouve pas mal dans les remarques préliminaires que je faisais sur le dossier de la carte à puce et il me semble que c'est plutôt le contraire que le gouvernement a décidé de faire en cachant les informations, en évitant qu'on puisse soupeser les choix par rapport aux moyens financiers que nous avons. Comment ça se fait que c'est l'opposition officielle qui est en train de se préparer à implanter le rapport Clair pendant qu'on a un gouvernement, à coups de nombreux ministres, qui est assis sur le rapport Clair et qui ne sait pas ce qu'il y a dedans?

M. le Président, ça continue. Page 169, toujours dans ce cap, dans ces indicateurs, dans cette destination qu'il faut se donner: «Recommandation 24. Nous recommandons que le ministère et le Conseil du trésor se dotent d'un plan de monitorage spécifique de chacun des principaux facteurs de croissance de la dépense de santé et de services sociaux et qu'il rende compte annuellement de leurs constatations et actions.» Elle est où, la grille de monitorage? Et puis ils ont rendu compte quand? Je l'ai manqué? Ça fait plus d'un an, là. Ils ont rendu compte quand? Jamais. Ça ne les intéresse pas, M. le Président, d'améliorer le processus de décision, d'améliorer le suivi.

À la page 136 du rapport, on peut lire: «Il faut aussi savoir quelles sont les ressources financières disponibles, d'où provient l'argent, où il va, le tout de façon transparente. Quels budgets seront consacrés à quels services et pourquoi? Quels sont les coûts globaux et unitaires de chaque programme? Comment se comparent-ils à l'échelle québécoise, canadienne et internationale?» Pour y arriver, M. le Président, à ces comparaisons, ça prend des indicateurs. Que ce soient les dépenses par habitant, dont j'ai déjà parlé... Et, à la page 140 du rapport, on y fait référence. Ces indicateurs-là prouvent hors de tout doute que nous sommes les derniers de classe. Il y a quelqu'un qui devrait se réveiller.

Puis il y a d'autres indicateurs de comparables. À la page 172, savez-vous ce qu'ils nous disent? Ça, c'est bon, quand on lit ça, c'est assez surprenant. À la page 172, M. Clair ? il n'a pas sa carte de membre du Parti libéral, je vous le dis tout de suite ? il dit: «Il faut que le Québec adhère à l'Institut canadien d'information sur la santé.» Elle est bonne celle-là! Le prédécesseur du ministre disait que c'était pourri, cet Institut-là, puis Clair, il nous dit qu'il faut y aller.

Le ministre, là, le ministre de la Santé d'aujourd'hui, pas plus tard qu'hier, niait l'indicateur qui s'appuie sur le financement per capita de la santé, il disait: Ce n'est pas bon de regarder ça. C'est le rapport Clair qui nous dit de faire ça. Dans les indicateurs, le rapport Clair nous dit: Allez voir l'ICIS, adhérez à l'ICIS. Le prédécesseur du ministre de la Santé disait: Ce n'est pas bon, l'ICIS. Mais qui est intéressé par le rapport Clair? Le gouvernement est assis dessus. Ça ne l'intéresse pas d'appliquer le rapport Clair, il ne veut pas suivre aucune des directions. Pour nous, M. le Président, il nous semble évident qu'il faut absolument se donner des indicateurs puis il faut se donner des comparables.

Il y a un indicateur privé, secret, qui existe, l'indicateur pour les urgences. Jamais vous n'avez vu un ministre qui est allé en public dire: C'est mon indicateur. Jamais, jamais, jamais. Même si on leur a demandé souvent. Jamais. Il y a un indicateur qui dit que les urgences devraient être occupées à 80 %. Qu'est-ce que ça donne, cet indicateur-là? Ça donne que, quand vous l'avez, puis que vous voulez le réaliser, puis qu'il est public, puis qu'il est engageant, bien, vous prenez les moyens pour l'atteindre: des soins à domicile, des lits d'hébergement, les SIPA. Hein? Tu vas vers la première ligne, c'est pour ça que ça déborde. On n'est pas à 80 aujourd'hui, c'est à 150, 175, avec des pointes à 400 % dans les urgences. Le gouvernement, lui, des indicateurs, ça ne l'intéresse pas. Nous, on l'a dit qu'il y aurait des indicateurs. Nous, on a dit que, dans notre charte des droits du patient, il y aurait des indicateurs, dont celui privé, actuellement, sur les urgences, qui sera public, qui va nous forcer à agir, notamment à agir sur la première ligne.

Et parlons-en de la première ligne. À la page 193 du rapport ? je le dis parce que, M. le Président, presque à tous les jours, à l'Assemblée nationale, on en parle, de la première ligne. Le financement des besoins prioritaires: une stratégie possible: «Il faut en premier lieu dégager de l'augmentation annuelle du budget global du ministère une marge de manoeuvre spécifique pour la réorganisation des services de première ligne.» Quand est-ce qu'on a eu ça depuis un an? Quand est-ce qu'on nous a dit, là, que la marge de manoeuvre supplémentaire... Bien, la marge de manoeuvre supplémentaire, c'est sûr que, comme le ministre prive la santé, on n'en aura pas beaucoup parce qu'il donne l'argent aux compagnies qui sont riches. Mais cette première priorité, cette première stratégie de la commission Clair, pas tenue, M. le Président, ils n'ont pas tenu à ça. On verra s'ils vont le faire dans le prochain exercice.

Ils vont nous parler des groupes de médecine familiale, M. le Président. Ah, ça, les groupes de médecine familiale, ils en ont parlé pas mal. Et là ils vont nous dire: Bien, ça, au moins, on l'a fait, hein, on l'a fait. Bon. Qu'est-ce que Clair disait? «Dans un an ? ça, c'est déjà fini, là ? au moins de 30 à 40 projets devraient avoir vu le jour.» En ce moment, il n'y en a aucun qui a vu le jour. Savez-vous pourquoi? Je vais vous le dire pourquoi. Parce qu'à la page 53, juste avant, Clair disait: Ce qu'il faut pour arriver à ça, il faut un mode de rémunération mixte pour les médecins de famille. Autrement dit, il faut négocier la rémunération.

Moi, j'ai demandé au ministre de la Santé, il y a un an: C'est quoi, ton échéancier pour négocier ça? Il m'a dit: Ça ne nous intéresse pas, nous autres, les médecins; ce qui nous intéresse, c'est les patients. J'ai dit: Mais c'est le passage obligé pour faire les groupes de médecine familiale. Il a dit: Ça ne m'intéresse pas. Aujourd'hui, bien, ça ne l'intéresse pas, ça fait que les groupes de médecine familiale, il n'y en a pas. Et pourtant Clair disait que c'était de 30 à 40 dans la première année. Est-ce que ça les intéresse, la santé? Est-ce que le rapport Clair les intéresse? Jusqu'ici, force est d'admettre, M. le Président, que ça ne les intéresse pas.

Alors là j'ai hâte de voir ce qu'il va me dire sur les services intégrés pour les personnes âgées et les personnes atteintes de maladie chronique. J'ai hâte de voir ça. Là, voyons ce que... On est toujours en première ligne, M. le Président, hein? Puis c'est toujours la première chose à faire, selon Clair. Puis, nous, on a déjà pris des positions là-dessus puis on a déjà dit que c'étaient nos priorités, ça. Le Parti québécois, ce n'est pas si évident. Page 67 du rapport: «Les expériences émergentes de services intégrés aux personnes âgées en perte d'autonomie, au Québec et ailleurs, démontrent qu'il est possible de changer leur profil d'utilisation des ressources, de façon efficiente, tout en leur offrant des services de meilleure qualité et plus continus.» En pratique, proposition 21: «Pour les personnes âgées en perte d'autonomie nous proposons: Que les régies régionales amorcent et supervisent la création de réseaux de services intégrés...»

Attachez votre ceinture, M. le Président. On est passés d'un modèle à généraliser, avec le rapport Clair, à un modèle en danger. On lisait, en décembre dernier: «Le projet SIPA est abandonné. Le ministère de la Santé le citait pourtant comme un modèle à suivre.» On est passé d'un modèle à généraliser à un modèle en danger, et aujourd'hui on sait qu'à compter du 1er avril ce sera un modèle abandonné. Alors, on veut savoir pourquoi on devrait féliciter le gouvernement avec son rapport Clair, il est assis dessus. Il faut le sortir, il faut le lire, il faut l'appliquer, il faut avoir une vision. Nous, des solutions émergentes, on en voit, mais on ne veut pas juste les voir émerger, on veut en profiter puis on veut les appliquer. Pour le gouvernement du Parti québécois, ce n'est d'aucun intérêt.

Si on veut répondre à notre indicateur sur les urgences, il va bien falloir qu'on découvre qu'il y a du monde qui occupent des lits, qui devraient être en soins de longue durée puis qui sont dans des lits de courte durée. D'ailleurs, le rapport Clair en parlait. Page 71: «Il n'est pas acceptable, aux points de vue humain, clinique et économique ? en voulez-vous d'autres, là? ? qu'il y ait 10 % à 15 % des lits d'hôpitaux de courte durée (incluant les hôpitaux universitaires) ? je ne sais pas si je vais avoir le temps d'en parler ? qui soient occupés par des personnes âgées en attente de placement.»

Ça, ce que ça dit, dans le fond, là ? puis le rapport Clair, des fois, le canal était assez serré, ça fait qu'il essayait de ne pas trop donner de tapes au gouvernement ? ce qu'il essaie de dire, c'est qu'il n'y a pas assez de places en soins de longue durée. Savez-vous quoi? Il n'y a pas assez de places en soins de longue durée, il n'y a pas assez de places en courte durée, c'est pour ça que l'urgence déborde. Ils ont fermé 11 000 lits. 11 000 lits: 7 000 en courte durée, 4 000 en longue durée. Le rapport Clair, il dit au gouvernement: Bilan: fiasco. Mais reprends-toi, ressaisis-toi.

Je ne veux pas faire de la partisanerie, M. le Président, je veux juste donner des éléments constructifs. Il n'est pas trop tôt... il n'est pas trop tard pour le ministre de se lever puis de dire: On va changer de cap, on s'excuse, on recommence. Ça n'a pas d'allure, la proposition de Clair, c'est d'accroître globalement l'offre et l'intensité de services en hébergement, mais là on n'a rien de disponible, on n'a rien.

Ça ne déborde pas pour rien. Il y avait le Dr Lamoureux, dans L'Actualité médicale, qui disait ceci ? puis l'image est assez bonne pour le ministre s'il veut comprendre comment ça fonctionne ? il disait: Écoutez, pour comprendre comment ça se fait que ça fonctionne dans les urgences, ce n'est pas plus compliqué, imaginez que vous fermez les prisons. Ça va déborder où? Dans les postes de police. Bien, si vous fermez les lits, ça va déborder dans les urgences. Et c'est exactement ce qui s'est produit. Pourtant, depuis un an, le gouvernement a un rapport qui lui dit quoi faire, mais il a décidé qu'il ne ferait rien.

Et je ne vous parle pas de l'intensité de services pour les personnes âgées à domicile, je laisse ça à un rapport qui vient de la Commission des droits de la personne, qui disait du gouvernement du Parti québécois qu'il exploitait les personnes âgées. Je n'en dis pas plus, il me semble que c'est suffisant. Ça vient d'un organisme indépendant, et le mot est assez fort, M. le Président.

n(10 h 40)n

Les urgences. Je vous ai parlé des urgences et des effets sur la première ligne. Savez-vous que, dans le rapport Clair ? M. le Président, je vais vous étonner ? dans le rapport Clair, on parlait des urgences? Bien oui, on en parlait pas mal. C'est de valeur, le gouvernement ne s'en est pas aperçu. Pages 84 et 85: «Le projet Urgence 2000», «Relever ensemble le défi des urgences...» Neuf recommandations, elles ne sont toujours pas appliquées: «Favoriser une meilleure coordination des soins et des services[...]; favoriser une meilleure continuité des soins aux clientèles vulnérables[...]; donner aux urgences un accès suffisant au plateau technique d'investigation.»

«La commission estime aussi: Que l'accès aux ressources d'hébergement, en CHSLD ou ailleurs, doit être accru, facilité et plus flexible.» C'est le contraire qui se passe en ce moment, M. le Président. Ils ont décidé de ne pas appliquer ces dispositions-là.

Et le bilan, et le bilan. Le bilan, c'est le suivant. C'est à la page 24 que vous le voyez: «S'il doit être hospitalisé depuis l'urgence, il pourra attendre 48 heures ou plus sur une civière parce que de nombreux lits sont occupés par des patients qui attendent une place d'hébergement ailleurs.» Quand vous lisez souvent le rapport Clair, vous êtes capable de voir les points de contact, ça se retouche, tout ça est un réseau. Sortons du silo, tout ça se tient. C'est ce que je veux faire comme démonstration aujourd'hui. Il faut s'occuper de la première ligne si on veut dégager tout ça.

Non seulement ça déborde dans les urgences au-delà du 80 %, mais il y a un autre indicateur privé qui existe, que le gouvernement n'a jamais voulu tenir publiquement: tolérance zéro pour les attentes de 48 heures et plus. Or, M. le Président, depuis le rapport Clair, qui écrivait pourtant ce que je viens de vous lire, depuis le rapport Clair, à Montréal, l'attente de 48 heures et plus a doublé. Il ne fait rien, ce gouvernement, pour aider la santé des Québécois. Ils peuvent avoir le nombre de ministres qu'ils veulent, ça ne change rien.

Parlons maintenant de la place du médicament. Et je vais faire vite parce que, malheureusement, je n'ai pas assez de temps pour faire le tour de l'inaction du gouvernement. Page 78: «Le médicament est de plus en plus utilisé comme technologie thérapeutique[...]. De là, la nécessité d'assurer une utilisation optimale des médicaments par des outils de gestion thérapeutique et des revues d'utilisation de médicaments[...]. Il faut donc que les pharmaciens jouent un rôle actif dans ces réseaux afin d'y représenter l'expertise pharmaceutique.» Puis je vais vous lire une autre page. Je veux juste vous rappeler que la seule chose qu'ils ont faite avec les pharmaciens, depuis ce temps-là, c'est de leur faire une loi spéciale. Ce n'est pas fort, fort, fort, là; disons que c'est pas mal le contraire. Et pourtant, le médicament prend une place prépondérante, prépondérante.

À la page 169: Nous proposons... Devant l'évolution des coûts des médicaments les gestionnaires doivent se doter «d'un plan d'action pouvant comprendre les mesures suivantes: ajustement à court terme du mandat du Conseil consultatif en pharmacologie pour renforcer les critères d'inscription [...] sur la base des critères coûts-efficacité; accélération des programmes d'utilisation optimale des médicaments; mise en place de mécanismes d'information indépendants et d'une analyse des nouveaux médicaments "on line" à diffuser auprès de tous les médecins et pharmaciens, quel que soit leur lieu de pratique; campagne d'information auprès de la population[...]; ajustement du rôle professionnel des pharmaciens.»

Aïe! Ce n'est pas les signaux qui manquaient pour dire au gouvernement: Voilà ce que vous pouvez faire. Qu'a-t-il fait? Rien. La seule chose qu'il a faite, il a tapé sur la tête des pharmaciens plutôt que de les insérer dans le réseau de la santé. Comment on peut qualifier cet exercice-là quand on sait que les médicaments prennent une place si importante?

Les cabinets de spécialistes, M. le Président. On sait que les nouvelles technologies permettent de faire des opérations parfois qui ne nécessitent pas l'ensemble des infrastructures d'un hôpital. Alors, une proposition a émergé, au fil du temps, c'est de permettre à des médecins spécialistes affiliés de pouvoir pratiquer dans des cabinets. Alors, la commission Clair reprenait ça: «Que des cabinets ou des cliniques de médecins spécialistes puissent s'affilier à un centre hospitalier et ainsi en devenir le prolongement fonctionnel.»

«L'affiliation des cabinets et cliniques de spécialistes à un hôpital, avec rattachement au chef de département ou au service clinique, devrait permettre de: améliorer l'accès aux services[...]; diminuer les listes d'attente[...]; désengorger graduellement le bloc opératoire et indirectement l'urgence.» Ça, c'est des cliniques où le patient utilise sa carte de la RAMQ, là, pas la carte de crédit, pas la carte de débit, la carte de la RAMQ.

Il a fait quoi? Ils sont où, les projets de cliniques? Ils sont où, les gains qu'on peut en avoir dans les urgences, dans les listes d'attente? Nulle part! Le gouvernement n'a rien fait. Ça ne l'intéresse pas, le rapport Clair. Comment est-ce qu'on peut le féliciter de son leadership à l'appliquer? Le Parti québécois, M. le Président, ne fait rien.

La mission universitaire. Je vais passer rapidement, mais simplement pour vous dire qu'on en parle notamment comme ceci à la page 90: La commission juge qu'il y a urgence d'agir pour clarifier la mission universitaire. Il faut créer un comité interministériel regroupant différents ministères, «que ce comité s'adjoigne des experts du Québec et d'ailleurs dans le monde; qu'il ait le mandat de proposer, en six mois, une vision moderne, établie sur un horizon de 10 ans». Bien là, on est rendu au quatorzième mois puis il n'y a toujours rien, M. le Président. Puis pourtant les hôpitaux universitaires, c'est extrêmement important. On veut avoir une médecine de pointe, on veut avoir de plus en plus de médecins. Parce qu'ils ont décidé de fermer la porte d'entrée, et maintenant on a une pénurie. Il faut en former, il faut moderniser nos instituts universitaires. Rien, rien!

La seule chose qui est faite avec ça, quand les hôpitaux universitaires sont arrivés puis qu'ils ont démontré qu'ils étaient sous-financés, le gouvernement a dit: Je ne vous crois pas, je vais vous envoyer des experts comptables de l'externe. Ils sont revenus, les experts, puis ils ont dit: Ils ont raison. Mais le gouvernement ne veut pas le savoir, savez-vous, parce que, quand il se fait dire qu'il sous-finance, ça leur rappelle qu'eux autres, leur vision, c'est que la santé, ce n'est pas important, les hôpitaux, ce n'est pas rentable. C'est pour ça qu'on en est là aujourd'hui. Et les hôpitaux universitaires en souffrent. Donc, les patients d'aujourd'hui et ceux de demain vont en souffrir.

Je pourrais vous parler des problèmes avec la répartition des médecins, M. le Président, hein, et de la situation de la planification. La commission considère ? page 100 ? «que les problèmes ont leur source dans l'ignorance de la situation réelle des effectifs, dans une mauvaise planification des effectifs». La commission propose, M. le Président, différentes mesures: octrois... En premier lieu, il faut avoir un portrait réel de la situation des effectifs, intégrant les omnis et les spécialistes; à court terme, plus d'ouverture et de flexibilité pour les médecins formés au Canada et aux États-Unis, pour les médecins qui viennent d'ailleurs, de l'étranger; augmenter le nombre de places en résidence pour des résidents provenant des autres provinces ou des États-Unis; octroi aux régies régionales d'une enveloppe budgétaire spécifique, en dehors des ententes de rémunération, pour aider à solutionner les problèmes de recrutement, de rétention, d'affectation.

Il y en a plein, de solutions comme celles-là. Comment ça se fait qu'il n'y en a pas une qui est appliquée? Comment ça se fait que ça ne les intéresse pas? Pourtant, ce n'est pas parce qu'on manque d'en parler dans les journaux, tout le monde le sait. C'est qui, ce gouvernement-là? Les Québécois méritent mieux que ça, M. le Président.

Aujourd'hui, on parle de la carte à puce, on a un projet sur la carte à puce. Qu'est-ce qu'il dit, le rapport Clair, sur la carte à puce? Je vais vous en citer quelques pages, là, en fait, vous allez voir le fil conducteur. Page 28, sur l'état de ce que le Québécois souhaite, il souhaite que son médecin de famille ait accès à un «dossier médical informatisé». Retenez bien les concepts: «dossier médical informatisé». Page 106: «Près de 50 % des établissements n'ont toujours pas de système d'information clinique en laboratoire, en radiologie, en pharmacie ni en soins infirmiers. Les cabinets de médecins ne sont pas reliés au RTSS ? c'est le réseau de télécommunications du système de la santé ? et le dossier médical informatisé partagé est dans les faits inexistant.» Remarquez les expressions, «dossier médical informatisé.» Page 170, recommandations: «Implantation de la carte à puce et du dossier clinique informatisé partageable.» Page 175, ça continue, M. le Président: «Il est essentiel d'implanter le dossier médical électronique.»«Dossier médical électronique». Page 182: «Voici les priorités[...]: Informatiser les établissements avec un réseau de communication interne et des systèmes d'informations cliniques de laboratoire, de radiologie, de plans de soins et de pharmacie[...]. Mettre en place les infrastructures d'accès et d'échange de l'information entre les établissements, soit [...] le dossier patient partageable.»

Je vous pose une question, M. le Président: À quelle place dans le rapport Clair on nous dit que la carte à puce doit nous donner accès à un résumé des renseignements de santé? À quelle place? Jamais! Il n'y a pas un endroit. Ce que ça dit, le rapport Clair, c'est ce que sont venus dire tout le monde, sauf le Dr Bessette. Puis je peux accepter qu'un urgentologue ait besoin d'un sommaire plus rapide. Parfait, qu'on étudie ses besoins puis qu'on lui donne quelque chose. Mais qu'on regarde l'ensemble des besoins puis qu'on ne vienne pas me dire que c'est à la suite au rapport Clair. Jamais dans le rapport Clair on parle d'un résumé de renseignements de santé, jamais.

J'ai hâte de voir, moi, j'ai hâte de voir, M. le Président, qu'est-ce que M. Clair va répondre à ce projet de la carte à puce. On sait que, sur le projet de loi n° 28, je ne sais pas si vous vous souvenez... Parce que, dans le fond, le gouvernement, il a fait quoi avec le rapport Clair? Parlons-en, là. Il a fait la gouverne, le projet de loi n° 28. Il a fait deux affaires législatives puis, l'autre affaire, des discours. On va regarder les affaires législatives qu'ils ont faites.

28, le projet de loi n° 28 sur la gouverne, le qui nomme qui. Qui fait quoi, ça ne les intéresse pas. Qui nomme qui. Écoutez ça, 12 mai, l'année passée: «Michel Clair ne reconnaît pas les recommandations de la commission qu'il a dirigée dans les premiers échos qu'il a eus du projet de loi de Rémy Trudel. Celui qui prêchait la décentralisation est surpris d'entendre que les membres des conseils d'administration des régies et des établissements pourraient être dorénavant nommés.» Citation: «Nous croyons à une approche populationnelle du système de santé, et c'est ce que nous préconisions dans le rapport. La participation des citoyens est un des piliers de nos recommandations. Nous n'avons jamais recommandé qu'ils soient tous nommés.» Michel Clair. Non seulement ils n'ont pas lu le rapport, mais ça a l'air qu'il y a quelqu'un qui l'a lu pour faire le contraire.

n(10 h 50)n

Puis là on a la carte à puce. Puis ils nous amènent un résumé de renseignements de santé qui n'est pas sur la base des besoins, pour lequel le rapport Clair ne disait pas ça. Moi, je n'ai pas de problème à discuter du résumé de renseignements de santé, mais j'aimerais ça qu'on discute aussi des autres besoins, des autres donneurs de soins, qui nous ont tous dit que... Je vais prendre Dr Lamontagne. Lui, il est responsable du Collège des médecins, ça doit être quelque chose d'important. Lui, il nous a dit: Le plus important, c'est informatiser. Le ministre, hier, il disait: Non, non, non, l'important, c'est une carte vers une banque centrale. Informatiser, c'était trop, ça. Ah, qu'on retienne ça, Lamontagne, Clair, l'ensemble des donneurs de soins, qu'on les écoute plutôt que de faire semblant, en déformant leurs propos, de ce qu'ils auraient de besoin parce que ça fait leur affaire.

Alors, le 28, Clair était contre. La carte à puce, Clair, il ne dit pas ça. Ce n'est pas l'avant-projet de loi, en tout cas. Ça, je peux vous passer un papier, ce n'est pas l'avant-projet de loi. Qu'est-ce qu'ils ont fait d'autre? Les groupes de médecine familiale. Ils ne l'ont pas fait, ils en ont parlé. Ils en ont parlé, mais ils n'ont rien fait, ils n'ont pas négocié.

Je pourrais vous parler des équipements technologiques, M. le Président, hein? Je pourrais vous parler des équipements technologiques. Recommandation 28: «La création d'une grande fondation et la stimulation des fondations hospitalières existantes en vue de mobiliser des ressources pour une corvée acquisition...» Ça me faisait penser, quand je lisais ça, au cas de Granby. La fondation est prête à acheter deux caméras gamma en médecine nucléaire, ça va faire économiser de l'argent au gouvernement. Réponse: Non. Un scan à Argenteuil? Même chose, la fondation met de l'argent... Vous en voulez-vous une, corvée? Il y a des fondations qui sont partout, prêtes à acheter des équipements. Le gouvernement ne veut rien savoir parce qu'il a une vision dans laquelle la santé, ça ne rapporte pas. C'est là où on en est aujourd'hui.

Et j'amène aussi, M. le Président, qu'il y avait aussi une petite version, je dirais, canadienne dans ce rapport-là: «Que le gouvernement du Québec, en association avec les autres provinces ? avec les autres provinces, ah, ça existe! ? propose une stratégie d'investissement majeur dans les infrastructures technologiques, médicales et dans les systèmes d'information et dans les immobilisations.» Ils sont où? Le Parti québécois a fait quoi là-dessus? C'est quoi, la suite pour qu'on ait une médecine moderne, pour qu'on puisse avoir quelque chose qui a de l'allure? Ça a l'air que ce n'est pas important.

Page 209, M. le Président. Et je termine parce que je veux laisser du temps à mon collègue d'intervenir aussi. Page 209: «Le Québec dispose d'experts et de spécialistes de grande qualité pour assumer avec le ministère un leadership certain et proposer une interprétation contemporaine de ces principes ? de la Loi canadienne sur la santé. En raison de son dynamisme et d'une couverture de services globalement bien plus large que ne l'exige le respect à la lettre de la loi canadienne, le Québec est bien placé pour promouvoir cette initiative auprès des provinces canadiennes et du gouvernement fédéral.»

Avez-vous vu l'initiative du Parti québécois là-dessus? Bien non, eux autres, il ne faut absolument pas qu'ils reconnaissent qu'il existe quelque chose à côté, qu'il y a des voisins avec lesquels on pourrait s'associer pour bâtir quelque chose. Moi, quand j'entends le premier ministre du Québec dire que, lui, il a le modèle européen, aïe, je tombe à terre! Ce n'est pas vrai, ça! Ça, c'est des arguments de discours pour essayer de faire passer une souveraineté par la porte d'en arrière. Dans le fond, ils sont contre ça. Il n'y a aucun geste qui prouve qu'ils veulent s'accrocher à une association quelconque, M. le Président. Pourtant, ils ont la possibilité de le faire. Mais le Parti québécois a décidé de bouder, de chercher des griefs. Le Parti québécois, en santé, n'est pas partie de la solution, il est le parti du problème parce qu'il veut la souveraineté et il carbure avec des problèmes, pas avec des solutions.

Conclusion, M. le Président, les appétits de souveraineté grugent la santé des Québécois. La conclusion du rapport Clair que je vous citais en début d'intervention, à la page 238, je vous le rappelle, disait: «Peu importe la nature des recommandations et des propositions, l'affirmation d'une vision et la capacité d'enclencher et de gérer les changements proposés seront déterminantes.»

Vision. La leur: la santé, ça ne rapporte pas. La nôtre: La santé, un enrichissement collectif, une richesse collective. La capacité d'enclencher du changement, pour eux, ça ne les intéresse pas, ça ne rapporte pas. Ils aiment mieux avoir des problèmes, mettre ça sur le dos du fédéral. Pour nous, M. le Président, il faut revoir le processus décisionnel, se donner des mécanismes d'étude d'impact des décisions gouvernementales. On ne se limite pas à un, deux ou trois ministres de la Santé pour dire: Tout est correct. On veut un vrai gouvernement de la santé avec des ministres, dans chacune de leur sphère de compétence, qui vont avoir une préoccupation santé, un commissariat général à la santé qui va s'occuper de façon indépendante, à l'extérieur du gouvernement, de nous assurer des études de coût-efficacité de chacune des décisions, d'assurer l'intégrité des mécanismes d'étude d'impact pour s'assurer que, dans l'ensemble des cas, M. le Président, on prenne la bonne décision, qu'on finance plus, mais qu'on finance mieux, qu'on en ait pour notre argent, qu'on ait des indicateurs individuels et collectifs qui font en sorte que le citoyen québécois, actionnaire et client du système de santé, sache à quoi s'attendre, ce qu'il doit recevoir pour l'argent qu'il met. Il sera suivi par un commissaire externe nommé par l'Assemblée nationale qui va s'assurer non seulement de ses... individuels, mais qui va s'assurer d'une pression à exercer de façon énergique sur le ministère pour qu'il y ait dorénavant de meilleures décisions, pour qu'il y ait dorénavant de meilleurs outils, pour qu'il y ait dorénavant de meilleures répartitions d'effectifs, pour qu'il y ait, M. le Président, dorénavant, de meilleurs soins de santé pour les Québécois. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. Le député de Châteauguay nous fait venir ce matin à l'Assemblée nationale pour débattre d'une grosse motion. Hier soir, ceux qui suivent les débats ont vu qu'on a eu droit à un débat de fin de séance qui avait été demandé aussi par le député de Châteauguay pour nous parler du manque d'argent dans les soins à domicile. Aujourd'hui, c'est une motion qui se lit ainsi:

«Que l'Assemblée nationale déplore vivement le manque de vision et de leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair.»

On est ici pour ça, là. Ça, c'est l'urgence nationale, de venir débattre ici, à l'Assemblée nationale, d'un rapport, d'un rapport, puis on va tous en convenir, qui a fait consensus, je dirais, sur la majeure partie des recommandations. Je pourrais dire que personnellement, oui, personnellement... Tantôt, le député de Châteauguay nous disait: Je l'ai lu. Hein, il voulait nous dire qu'il l'a lu. Bon. Moi aussi, moi aussi, M. le Président, je l'ai lu. Je l'ai lu, puis je dirais que je suis d'accord avec à peu près 80, 90 % de ce qui est écrit dans le rapport Clair, donc une bonne majeure partie de ce qui est écrit là.

Puis d'ailleurs notre plan de match, qu'on a annoncé, notre équipe ? parce qu'on est une équipe, à la Santé, trois ministres, donc j'ai la chance de travailler avec un ministre délégué à la Santé puis un ministre délégué aux Services sociaux puis à la Prévention ? on a annoncé qu'on va travailler sur quatre points, quatre points, M. le Président: l'accessibilité et l'intégration des services, les ressources humaines, les règles d'imputabilité puis de gouverne, puis le financement. Quand on regarde finalement toutes les recommandations du rapport Clair, on voit que les recommandations du rapport Clair sont réparties en quatre groupes: l'organisation des services, les ressources humaines, le financement public et la gouverne. Il y a des grandes ressemblances avec notre plan de match, même si, à l'intérieur de chacun des éléments, bien, on peut être en désaccord parfois avec l'approche qui est proposée là. Mais ce qu'il est important de dire, M. le Président, c'est que, au gouvernement du Parti québécois, on s'est donné justement des priorités, quelques priorités sur lesquelles on travaille, les quatre que je viens de mentionner.

Le député de Châteauguay commence son petit discours tantôt en nous disant: Nous, on veut être constructifs. Quand un gars se sent obligé de dire qu'il veut être constructif, en partant, ça commence mal, hein? On peut se demander pourquoi il vient nous dire qu'il veut être constructif. Peut-être que c'est parce qu'il est en train de se rendre compte qu'il ne l'est pas beaucoup. Parce que, comme disait un de mes collègues, il faut que les babines suivent les bottines, hein? Bien, dans leur cas, ce n'est pas ça qui arrive, ce n'est pas ça qui arrive.

n(11 heures)n

M. le Président, est-ce que quelqu'un a entendu ce matin, est-ce que quelqu'un a entendu ce matin une suggestion constructive, une proposition? Ce qu'on fait ici ce matin, c'est de promettre tout à tout le monde, hein? J'ai retenu qu'il faut mettre plus d'argent dans les hôpitaux, plus d'argent dans les urgences, plus d'argent dans l'aide aux personnes âgées, plus d'argent dans le maintien à domicile, plus d'argent dans les équipements, plus d'argent dans les services sociaux, plus d'argent dans les centres universitaires, plus d'argent dans les CLSC, plus d'argent dans les enveloppes pour payer les médecins, etc. Je ne les ai même pas tous pris en note. C'est ça, les suggestions du député de Châteauguay.

En fait, j'ai gardé avec moi un article qui est paru dans le journal La Presse sous la plume de l'éditorialiste en chef. Il n'y a personne qui pourra accuser le journal La Presse d'être un journal souverainiste ou péquiste. Il y avait un article, qui est paru le 5 février 2002, qui s'intitulait Le parti placebo. C'était, vous vous en souviendrez, M. le Président, suite au grand ? comment ils appellent ça? ? le grand congrès... en tout cas, la fin de semaine que le Parti libéral avait faite à Sherbrooke pour parler de santé. Et qu'est-ce que M. André Pratte, l'éditorialiste en chef, nous dit de ce grand weekend de la santé du Parti libéral? Il nous dit, et je cite: «Réuni en fin de semaine à Sherbrooke, le Parti libéral du Québec a voulu démontrer qu'il sera en mesure de "réparer" [...] le système de santé au Québec. Malheureusement, le plan présenté par les libéraux est un leurre.»

«Le plan présenté par les libéraux est un leurre», ce n'est pas moi qui dis ça, M. le Président, c'est l'éditorialiste en chef, l'éditorialiste en chef du journal La Presse, qui continue en disant ? puis c'est exactement ce que je disais tantôt: Mais, quant aux solutions concrètes, les libéraux ne proposent rien que le gouvernement péquiste n'a déjà envisagé sinon entrepris ou mis en oeuvre. C'est ça qu'il dit. Donc, les libéraux ne proposent absolument rien que le gouvernement du Parti québécois n'a pas déjà mis en oeuvre ou dans lequel on ne s'est pas déjà engagé. Et il continue en disant: «Par exemple, ils ? il parle du Parti libéral du Québec ? ils veulent augmenter le nombre d'admissions dans les facultés de médecine. Or, Québec a déjà annoncé des hausses importantes du nombre d'admissions. À l'automne 2003, 666 jeunes entreprendront leurs études de médecine. C'est 40 % de plus qu'en 1999. Aller au-delà serait imprudent, notamment pour la qualité de la formation.» Donc, ce que M. Pratte, l'éditorialiste en chef de La Presse, nous dit, c'est: Le Parti libéral du Québec ne nous propose rien; c'est déjà fait, ce qu'il nous propose, ou c'est en marche.

Et je continue avec l'article de M. Pratte. Il nous dit: «Avec raison, M. Fournier ? ça, c'est le député de Châteauguay ? souligne l'importance pour le gouvernement de fixer des priorités. Parfait. Il énonce ensuite... une bonne douzaine de priorités! ce qui revient à dire que, pour un gouvernement libéral, tout serait prioritaire.

«Et quelles sont ces priorités? Organiser les soins de première ligne, améliorer les soins à domicile, augmenter les services aux personnes âgées, moderniser les équipements... Tout le monde est d'accord ? je continue à citer André Pratte, M. le Président. Le problème du gouvernement du Québec, c'est qu'il doit faire des choix. Et ensuite, trouver l'argent.»

L'argent, c'est ça qui est le nerf de la guerre. Il se moque... Tantôt, vous avez entendu le député de Châteauguay se moquer des revendications qu'on fait à Ottawa. Il nous a dit: C'est effrayant, tout ce qu'on a vu dans ce que fait le gouvernement du Parti québécois, c'est de dire que l'argent est à Ottawa. Puis il trouve ça... sur un air un peu drôle, comme si ce n'était pas vrai, M. le Président. Pourtant, son chef nous a dit il y a quelques semaines ou quelques jours, quand le rapport Séguin est sorti: On est d'accord avec le rapport Séguin. Aujourd'hui, le député de Châteauguay vient nous dire: Non, non, non, non, non, on n'est plus d'accord avec ça, là, nous autres, il faudrait prendre l'argent ailleurs. D'ailleurs, ils avaient dit, dans leur fameuse grosse fin de semaine de la santé à Sherbrooke...

Je reprends l'article d'André Pratte, de La Presse, qui continue en disant: «Pour ce qui est de l'argent, les libéraux veulent que le Québec se classe au cinquième rang ? il nous a répété ça tantôt, cinquième rang ? des provinces en matière de financement de la santé par habitant, alors qu'il traîne présentement en queue de peloton. Cela nécessiterait des dépenses supplémentaires d'au moins 1 milliard par année.» Un milliard par année. D'ailleurs, M. le Président, vous allez vous rappeler, durant cette fameuse fin de semaine, le député de Châteauguay, à un moment donné, sort puis dit: Ça nous prend 2 milliards. À un moment donné, quelqu'un lui a dit: Wo, wo! je pense que tu n'as pas fait tes calculs comme il faut. Il revient et dit: Non, c'est 1 milliard. Le chef arrive avec 1,3 milliard. C'est la valse des milliards, M. le Président. Ils sont là, ils passent en quelques heures... Le même samedi du congrès à Sherbrooke, ça passe de 2 milliards à 1 milliard, à 1,3 milliard. En tout cas, ça continue.

Je continue à citer M. Pratte. Donc, M. Pratte, dans son article, nous dit: «Cela nécessiterait des dépenses supplémentaires d'au moins 1 milliard par année et peut-être beaucoup plus. Où un gouvernement libéral dénicherait-il un tel magot? M. Fournier ne le dit pas clairement, mais il fait remarquer que, sous le Parti québécois, les avantages sociaux consentis aux entreprises ont augmenté de 1 milliard.» Donc, il nous dit, ce qu'il vient de nous dire là: Il faudrait couper dans l'aide aux entreprises, couper la Cité du multimédia dans laquelle il y a 250 millions. Donc, même si on le coupait, il faudrait qu'il nous dise où il prend le reste.

Et je poursuis la lecture, et c'est là que ça devient intéressant, M. le Président. On nous dit: «Jean Charest, on le sait, promet des baisses d'impôts financées... par la diminution des mêmes crédits d'impôt aux entreprises. Et il s'est engagé à adopter un barème plancher pour l'aide sociale, mesure financée... à même les crédits d'impôt aux entreprises. Décidément, ces crédits d'impôt ont le dos bien large.» Ce n'est pas moi qui dis ça, c'est l'éditorialiste en chef du journal La Presse, qui n'est pas un journal, je vous le répète, qui est souverainiste ou péquiste. C'est un journal, donc, je pense, qui est sérieux.

Et tantôt le député de Châteauguay nous en a parlé, de son fameux commissaire, hein, il a découvert la pensée magique: On va tout régler les problèmes de la santé, on a trouvé la solution. Enfin, une solution qui arrive, on va créer un poste de commissaire général à la santé. Hein, il nous dit ? c'est ça: On va créer, on va créer un poste de commissaire général à la santé, et le commissaire ? la recommandation qui a été faite dans le fameux congrès où on a tout réglé puis tout fait les grandes discussions, au Parti libéral, à Sherbrooke, cette grande fin de semaine ? un commissaire qui va se rapporter ici, à l'Assemblée nationale. Donc, le commissaire ferait rapport sur le respect des engagements pris par le gouvernement de même que sur l'efficacité du système de santé.

Et M. Pratte poursuit un peu plus loin: «M. Fournier soutient que ce nouveau chien de garde permettrait d'augmenter la pression sur le gouvernement et le réseau. Pourtant, si les urgences débordent, ce n'est pas faute de pression - difficile d'imaginer une pression médiatique plus forte - mais faute de ressources.» Et là M. Pratte conclut. Son dernier paragraphe, je pense que ça résume exactement la position, je pense, que tous les Québécois et les Québécoises voient quand ils regardent le Parti libéral sur n'importe quel dossier mais, entre autres, sur le dossier de la santé. Donc, je reviens à la citation de M. Pratte qui nous dit: «Le Parti libéral annonce une "nouvelle approche" dans le domaine de la santé. En réalité, son approche est on ne peut plus traditionnelle. C'est celle d'un parti d'opposition qui promet tout à tout le monde.» C'est ça, le Parti libéral ? fin de la citation ? c'est ça, le Parti libéral du Québec, donc un parti qui promet tout à tout le monde. On va recommencer à faire des déficits dans les hôpitaux: Vous devriez enlever la loi antidéficit, on devrait aller chercher de l'argent dans les autres ministères, hein, on ne sait pas lesquels, mais, tu sais... Bon.

On dit: Il y a des crédits d'impôt, l'aide aux entreprises. Je ne sais pas s'ils prévoient aller en chercher à l'éducation, mais on devrait... La députée de Saint-François aussi, qui a été citée dans un article de La Tribune, dit: On devrait aller couper dans d'autres ministères pour mettre de l'argent à la santé.

Mais revenons au sujet de ce matin, la commission Clair, commission Clair qui a fait l'objet de consultations. Je pense que tout le monde est d'accord, et puis je suis content de voir l'appui du Parti libéral de ce côté-là, et un rapport qui a été bien accueilli, qui a été déposé il y a à peu près un an, qui a quatre grandes sections, comme je le disais tantôt: organisation des services, ressources humaines, financement public puis la gouverne.

Première série de recommandations, M. le Président, autour de l'organisation des services. Et, au coeur du rapport Clair, ce qu'on nous dit, qui est probablement la recommandation la plus importante: Il faut réorganiser la première ligne. Ça commence là. Si on ne réorganise pas la première ligne, on va avoir une pression tantôt sur les urgences, sur tous les autres secteurs de la santé. Donc, il faut réorganiser la première ligne. Et la recommandation se lit ainsi: «Que le volet médical de ce réseau de première ligne soit assumé par des groupes de médecine familiale composés de médecins omnipraticiens travaillant en groupe, en cabinet ou en CLSC, avec la collaboration d'infirmières cliniciennes ou praticiennes.» Donc, c'est au coeur du rapport Clair, et l'équipe au gouvernement du Parti québécois en fait sa première priorité.

n(11 h 10)n

Le député de Châteauguay nous disait: On n'a rien fait, on n'a rien fait depuis un an. On n'a rien fait? M. le Président, il y a 333 médecins répartis dans 20 GMF. Au total, il y avait même eu une offre de plus de 50 groupes, mais on en a retenu 20 qui sont prêts à participer à l'expérimentation, prêts donc à rendre nos cliniques de premier niveau, associées avec les CLSC, de les rendre accessibles, de prendre en charge des patients et de s'assurer aussi qu'il y ait une bonne continuité des services dans le réseau.

Le député de Châteauguay nous dit: Oui, mais vous n'avez pas fini les négociations avec la Fédération des omnipraticiens. Donc, je ne sais pas s'il est en train de nous suggérer de dire qu'on devrait par-dessus ça faire une loi spéciale, dire: Voici comment ça va marcher, les rémunérations. Je ne le sais pas, ce qu'il a en tête. J'ai rencontré effectivement le Dr Dutil, et on a convenu tous les deux que, d'ici quelques mois, on devrait avoir conclu ces négociations, donc ce qui va permettre la mise en application pratique des 20 GMF. Donc, 333 médecins qui vont s'occuper de 475 000 patients, ce n'est pas rien, ça.

Mais, M. le Président, en même temps, on n'en fait pas un dogme, des GMF, on travaille aussi en même temps sur d'autres projets qui nous sont présentés. Il y a un projet, entre autres, d'une quarantaine de cliniques à Montréal, des cliniques pivots qu'on propose d'ouvrir sur des heures étendues, donc 12 heures par jour, de 9 heures le matin à 9 heures le soir, sept jours par semaine. Parce que, il ne faut pas oublier, les GMF, ce que ça vise, c'est toujours la même chose, les trois objectifs: accessibilité de la première ligne, s'assurer que, le soir ou les fins de semaine, les gens ne se rendent pas directement à l'urgence, qu'ils passent par une clinique. Ça suppose que la clinique soit ouverte, ça suppose d'avoir une nouvelle entente avec les médecins, hein? C'est un changement de culture, là. Ce n'est pas quelque chose qui se fait de façon simple. Il faut aller convaincre les médecins de dire: Il faut que la première ligne soit ouverte aussi le soir, les fins de semaine, pendant les périodes de vacances. Donc, il y a d'autres projets aussi qui sont en marche de ce côté-là.

On ne se limite pas aux GMF. Le député de Châteauguay parlait tantôt des urgences. C'est certain que les urgences, c'est un peu la vitrine de notre réseau, et je dirais qu'il y a peut-être une dizaine d'urgences au Québec qui ont des problèmes plus importants. Il y a une équipe d'experts, avec le Dr Deschênes, le Dr Poirier, le Dr Afilalo, qui sont probablement parmi les plus grands experts, pas seulement au Québec, mais en Amérique du Nord, qui travaillent là-dessus, qui travaillent avec certains des établissements. J'ai commencé à visiter certains de ces établissements. On va avoir un plan d'action avec des objectifs sur des indicateurs de performance très ciblés, il y a un guide qui a déjà été émis puis déjà du personnel de direction dans certains hôpitaux m'ont dit: Le guide nous est très utile, il est très concret. Il a été fait avec des gens du terrain qui savent comment ça marche, des urgences, puis ça a donné des résultats, ça a donné des résultats.

Par exemple, à la Cité de la santé, à Laval, le délai d'attente moyen a été diminué presque de moitié, M. le Président. Et, quand j'ai rencontré le dirigeant qui s'occupe de l'urgence à la Cité de la santé, à Laval, il nous a dit: Un des outils importants qu'on a utilisés, c'est le guide des urgences qui a été préparé par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Donc, on va continuer. J'en fais une priorité personnelle de régler le problème dans la dizaine d'urgences où il y a des problèmes plus importants.

Le rapport Clair nous parle aussi de l'importance de jumeler le volet social de la première ligne et d'avoir aussi un ensemble minimal commun de services de base partout au Québec. C'est déjà prévu dans les GMF qu'on mettra en place, M. le Président, parce que ces GMF devront être associés avec le CLSC et offrir un parcours complet dans tous les projets, dans tous les programmes qui existent en santé et en services sociaux. Et, concernant le panier de base, j'ai déjà rencontré l'Association des CLSC-CHLSD, on travaille déjà, dans le cadre d'un projet qui s'appelle Allons à l'essentiel, sur la mise en place d'un panier de base. Évidemment, ça suppose une injection de fonds, mais, comme le disait M. Pratte tantôt, bien, la question qu'on pose au Parti libéral, c'est la question qu'il posait: Où le gouvernement libéral dénicherait-il un tel magot? Il veut investir 1,3 milliard en santé, donc, c'est certain, oui, il en manque, entre autres, dans le volet social.

Une autre recommandation du rapport Clair parle de clientèles spécifiques: personnes âgées en perte d'autonomie, personnes avec des problèmes majeurs en santé mentale, personnes avec des maladies complexes, souvent de nature chronique. De ce côté-là aussi, on a commencé, à l'intérieur de nos budgets, à l'intérieur de nos moyens, à agir. Il y a déjà 17 projets intégrés de première ligne qui ont été implantés, et il y a un fonds récurrent qui a été mis en place, et on en est actuellement à évaluer d'autres propositions qui sont faites par le réseau. Donc, il y en a de ce côté-là aussi.

Il y a une autre recommandation, une recommandation qui traite de l'organisation des services spécialisés de deuxième et troisième ligne. Ça va être une des grandes responsabilités de mon collègue, et ce l'est déjà, mon collègue le ministre délégué à la Santé. Donc, il est en train actuellement de faire la tournée des différentes régions, des différents établissements... s'assurer, entre autres, qu'une des recommandations, qui est proposée par Clair, d'avoir des cabinets affiliés... Ce n'est pas simple. Ce n'est pas simple. Ça a des effets et des questions juridiques qui se posent. On est, encore là, en négociation avec la Fédération des spécialistes du Québec. Encore là, je ne sais pas si le député de Châteauguay voudrait bulldozer la Fédération des médecins spécialistes du Québec, mais il y a des affaires qui se font de ce côté-là aussi.

Mission universitaire. Tantôt, il nous a dit: Dans le rapport Clair, on parle de la mission universitaire des centres hospitaliers. On n'a pas attendu le Parti libéral pour faire des choses. Il y a M. Carignan qui a mis en place un groupe qui devrait, au cours des prochaines semaines, nous faire son rapport, le rapport Carignan. Il y a eu beaucoup de travail qui a été fait pour voir comment on intègre l'enseignement, la recherche, l'évaluation des technologies, et donc bientôt on aura un rapport pour être capable de mettre, entre autres, continuer l'implantation des plans pratiques. Et, encore là, ça va supposer aussi de revoir la rémunération des médecins. Ce n'est pas simple, là, mais il faut s'assurer que les médecins aient un incitatif, un incitatif pour donner la partie enseignement-formation, que la rémunération ne soit pas seulement orientée sur les actes, mais qu'elle tienne compte aussi du temps qu'on doit passer avec les jeunes médecins, avec les étudiants puis les futurs médecins.

Maintenant, dans le premier groupe aussi de recommandations du rapport Clair, on parle de prévention. C'est la première recommandation qu'on retrouve dès le début des recommandations. Encore là, on a commencé à travailler. On a une version, qui sera bientôt connue, de politique de santé et de bien-être où on a intégré la prévention, et on a un ministre maintenant délégué à la Santé et aux Services sociaux mais aussi à la Prévention qui s'occupe particulièrement de ce dossier, et il y aura aussi, d'ici l'automne, une version finale de notre programme de santé publique.

Maintenant, une autre recommandation. Je suis toujours dans le premier bloc, là, M. le Président. Il y a une recommandation où on dit, et je cite: «Que soient implantés des systèmes d'information clinique et de gestion efficaces et sécurisés.» Bon. Le député de Châteauguay, vous avez tous vu tantôt, s'est moqué un peu de la carte santé. Il nous a dit: Il y a juste le Dr Bessette qui est d'accord avec ça. Je ne sais pas s'il dormait, hier, je ne le sais pas, s'il dormait, hier, pendant la commission parlementaire, mais, à la commission parlementaire, on a reçu d'abord l'AHQ, l'Association des hôpitaux du Québec ? ils doivent savoir un petit peu comment ça marche, des hôpitaux, c'est des directeurs généraux, directrices générales d'hôpitaux ? qui sont venus nous dire: C'est un projet indispensable, on est d'accord avec le projet. Ils proposent quelques modifications, mais c'est un projet indispensable.

Ensuite, il nous a dit: Il y a juste le Dr Bessette qui est d'accord. Il devait dormir quand est venu le Dr Dutil hier. Pourtant, j'ai bien vu, il était assis dans sa chaise, pourtant, le député de Châteauguay. Et le Dr Dutil... Parce que tantôt le député de Châteauguay, il nous a dit: Oui, oui, oui, mais, le résumé de santé, là, on n'est pas d'accord avec ça, Michel Clair n'est pas d'accord avec ça, le rapport Clair n'est pas d'accord. Écoutez, à un moment donné aussi, il faut consulter, il faut aller avec les experts qui sont sur le terrain. Et qu'est-ce que le Dr Dutil...

Le Dr Dutil, M. le Président, au cas où vous ne le sauriez pas, c'est le président de la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec. Il représente tous les omnipraticiens. Ce n'est quand même pas rien, là. Son opinion est importante. Puis là, dans un échange... Il doit s'en rappeler, pourtant, il me semble. Il a même parlé. Je me souviens qu'il ait parlé, le député de Châteauguay. Le député de Châteauguay a dit au Dr Dutil: Oui, mais vous ne pensez pas qu'un résumé, ce n'est pas une bonne idée puis qu'on devrait plutôt avoir accès à tous les rapports qui sont dans tous les établissements? Et je me souviens que le Dr Dutil, il a répondu: Bien, voyons donc, M. Fournier! Il l'a appelé comme ça, il a dit: Voyons donc, M. Fournier! vous n'avez rien compris! Vous n'avez rien compris. Il y a un résumé, là, c'est important pour un médecin parce que le médecin, là, chaque seconde compte quand on soigne. Quand un médecin est à l'urgence puis il reçoit un patient, il n'a pas le temps d'aller dire: Je vais mettre mon fureteur en marche pour aller chercher tous les rapports qu'il y a de tous les épisodes de soins que le patient a déjà eus dans un des 10 000 établissements du Québec. Ça prend un résumé, ça prend un résumé avec, entre autres, les médicaments.

n(11 h 20)n

Je l'ai vu moi-même quand je suis allé visiter, entre autres, l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. À un moment donné, il y a un médecin, qui ne manque pas de travail, c'est le moins que je puisse dire, qui est avec le petit sac, un petit sac avec toutes les boîtes de médicaments de la patiente qui vient d'arriver, puis là il est en train de les noter à la main. En 2002, M. le Président, il est en train de noter à la main les médicaments. Si on avait un résumé, M. le Président, on les aurait tout de suite, les médicaments, parce qu'on serait branché avec les pharmacies. Mais le député de Châteauguay nous dit: Non, non, non, on est contre ça, nous autres, le résumé sur le passé médical, on est contre ça, et, écoutez, même si le Dr Dutil, même si la Fédération qui représente tous les omnipraticiens est d'accord avec le résumé, nous, on connaît ça plus qu'eux autres et on pense que ce n'est pas bon d'avoir un résumé. C'est ça qu'il nous a dit, le député de Châteauguay, puis je suis content, on va sûrement pouvoir ressortir les déclarations du Dr Dutil qui l'a remis pas mal à sa place hier en disant: Bien, voyons donc! Nous autres, sur le terrain, ce n'est pas ça qu'on pense. Donc, cette carte de santé, on va continuer de bonifier le projet qui est sur la table.

Ce que je trouve malheureux, par exemple, ce que je trouve malheureux... Puis, même le député de Châteauguay, je sais qu'il ne peut pas le dire, mais il va probablement être d'accord avec moi. C'est inacceptable, M. le Président, que la députée de Saint-François, sa collègue la députée de Saint-François, qui est présidente de la commission des affaires sociales, qu'elle ait déclaré publiquement que c'était une perte de temps, cette commission qui étudie la carte de santé. Donc, comment le député de... Il doit être gêné un petit peu, je suppose, parce que là le député de Châteauguay, il dit: Oui, bien, il faudrait bonifier le projet de carte santé; on va en débattre, mais en même temps ma présidente, qui est quand même la députée de Saint-François... Ce n'est pas une nouvelle venue au Parti libéral du Québec, c'est quelqu'un d'influent ? je pense, en tout cas ? dans le Parti libéral du Québec. Il me semble que je l'ai déjà vue assise... D'ailleurs, elle est assise pas loin du chef. Donc, je ne sais pas, il faudrait que les députés du Parti libéral se parlent. Mais ça n'a pas de bon sens que sa collègue la députée de Saint-François trouve qu'on perd notre temps à essayer de bonifier un projet sur la carte santé. En tout cas, ça me fait sûrement me poser des questions sur la façon dont voit la démocratie le Parti libéral du Québec.

Maintenant, deuxième série de recommandations à l'intérieur du rapport Clair. Ça s'intitule Ressources humaines, développement des compétences et raviver la fierté. M. le Président, de ce côté-là, on est trois ministres qui se promènent sur le terrain, sur le terrain pour trouver des façons de continuer à bonifier les conditions de travail du personnel qui travaille dans notre réseau. Dans un réseau, on est d'accord avec le fait qu'il y a des besoins qui ne sont pas financés, donc qui vivent une situation difficile dans un contexte de ressources qui sont à Ottawa, qu'on ne peut pas utiliser pour pouvoir investir dans ce réseau de la santé. Donc, il faut les appuyer. J'ai d'ailleurs rencontré déjà à deux reprises Mme Skene, la présidente de la Fédération des infirmiers et infirmières du Québec. On regarde certaines pistes, entre autres ? c'était d'ailleurs proposé dans le rapport Clair ? réorganiser le travail, s'assurer que, tout ce qui peut être fait par les brancardiers, les préposés aux bénéficiaires, les réceptionnistes, s'assurer qu'il y a certaines tâches qui soient transférées des infirmières à ces groupes d'employés. Et déjà on me confirme que dans plusieurs établissements on a réorganisé le travail. Donc, on doit s'assurer que ce soit fait partout.

Et, encore une fois ? tantôt, je parlerai de la gouverne ? ça ne peut pas tout se décider. Vous savez, des fois le député de Châteauguay puis les députés du parti de l'opposition viennent à l'Assemblée nationale puis ils nous disent: Oui, il y a Mme Unetelle qui a passé à travers un établissement, puis ça ne s'est pas passé comme il faut. Qu'est-ce que le ministre attend pour faire... Voyons donc! M. le Président, il faudrait être sérieux, là. Il y a des régies régionales qui sont responsables des établissements et il y a des dirigeants de ces établissements-là qui sont responsables de réorganiser le travail. Nous, notre rôle, c'est de les accompagner, s'assurer que la réorganisation du travail se fasse partout.

On va continuer à travailler aussi sur les conditions de travail des infirmières. On sait que c'est important, entre autres, la formation, l'encadrement, de les impliquer dans les décisions. C'était une des grandes recommandations du rapport Clair. Donc, de ce côté-là, il y a du travail qui se fait dans beaucoup d'établissements, j'ai pu le constater moi-même.

Bon, il reste un problème important, c'est que, pour protéger sa qualité de vie, bien, aujourd'hui ? puis c'est vrai pas seulement dans le domaine de la santé, c'est vrai dans à peu près toutes les organisations ? il y a des hommes et des femmes qui choisissent de travailler moins d'heures, qui n'acceptent pas des postes réguliers. Dans le domaine des infirmiers et infirmières, c'est une situation qui est presque dramatique: on a 25 %, 25 % des infirmières qui refusent de travailler à temps plein, donc qui refusent d'accepter des postes réguliers. Évidemment, les postes réguliers les plus difficiles à combler, c'est les postes sur les quarts de soir, quarts de nuit, quarts de fin de semaine, pendant certaines vacances, bon.

C'est vrai qu'il faut toujours être prudent quand on compare avec d'autres industries, mais ce n'est pas unique dans le domaine de la santé, il y a beaucoup de secteurs aussi où on a des opérations qui doivent se passer 24 heures par jour, sept jours par semaine, 52 semaines par année. Ça suppose de mettre en place une série d'incitatifs mais aussi de s'entendre avec les représentants syndicaux pour trouver des façons de rendre les postes réguliers attrayants pour être capable d'avoir une bonne organisation du travail. Donc, on travaille là-dessus avec les représentants de la FIIQ. On veut essayer de se concentrer surtout sur une dizaine d'établissements parce que, surtout, on parle beaucoup, là, de tout le réseau, mais, on dirait, il y a surtout une dizaine d'établissements où il y a des problèmes plus importants. Et je dirais même que, dans ces 10 établissements, ça se passe surtout sur certains quarts, les quarts de soir, les quarts de nuit, puis ça se passe surtout dans certains secteurs, entre autres les soins intensifs et les urgences. Donc, il faut éviter le mur-à-mur. Ce n'est pas facile. Encore là, le député de Châteauguay pense que tout se règle demain matin. On a juste à réécrire une convention collective comme ça, puis tout se règle demain matin. Il faut le faire de façon consensuelle, et c'est ce qu'on essaie de faire, M. le Président. Donc, il y a beaucoup de choses.

Il y a des choses aussi qui se discutent du côté des médecins. C'est important que les médecins aussi aient confiance dans la direction où on s'en va. Mais, encore là, il y a un consensus sur les grandes orientations du rapport Clair. Ça nous permet justement de tous ramer dans la même direction dans un contexte, dans un contexte, M. le Président, qui est quand même difficile.

Il y avait, dans les recommandations du rapport Clair, aussi certaines recommandations concernant... Je vais vous demander un petit peu d'eau, madame, s'il vous plaît. Il y a donc des recommandations qui concernent la gouverne. Bon, c'est un projet qui n'était pas simple. Mon prédécesseur a déposé, à la dernière session, le projet de loi n° 28, donc un projet de loi où on revoyait les règles d'imputabilité, entre autres, des régies régionales. Ce n'est pas simple, M. le Président, parce que ce qu'on cherche à faire, c'est de responsabiliser tout le monde, donc de se dire oui à la décentralisation, oui, il faut donner plus de pouvoirs aux régies régionales. Les régies régionales doivent transférer plus de pouvoirs aux établissements, et les établissements doivent impliquer davantage leur personnel. Ça suppose la mise en place de nouvelles règles de gouverne. Ça a été fait ou ça a été démarré avec le projet de loi n° 28.

Maintenant, il y aura, au cours des prochains mois, une partie que j'ai connue ailleurs, la mise en place des contrats de performance. On va avoir, avec chaque régie régionale et avec chaque établissement, un contrat de performance. C'est quoi, un contrat de performance? Vous savez, on a fait la même chose avec les universités, on a fait la même chose aussi avec les écoles, avec les cégeps. Dans un contrat de performance, il y a trois parties. Il y a la première partie où on fait l'évaluation de la situation. C'est un mot qui est toujours difficile, dans le secteur public, même à prononcer, «l'évaluation», mais on fait l'évaluation, quelles sont les forces, les faiblesses de notre organisation, qu'est-ce qui fonctionne bien, qu'est-ce qui ne fonctionne pas bien, et on se donne des objectifs, des objectifs et des moyens pour atteindre ces objectifs. Mais ces objectifs-là, ils doivent avoir une partie qualitative et une partie quantitative. Ça, ça veut dire qu'il faut se donner des indicateurs, des indicateurs de performance, donc être capable de dire comment mon établissement, au niveau de sa performance sur les coûts, sur les délais d'attente, sur la satisfaction de la clientèle, comment mon établissement se compare avec les autres établissements du réseau et quel objectif on se donne pour la prochaine, les deux prochaines et trois prochaines, même, si c'est souhaité, les cinq ou 10 prochaines années, donc d'être capable de se donner des objectifs concrets. Évidemment ? puis je reviendrai tantôt ? ça suppose aussi de s'entendre sur un financement équitable, s'assurer que, compte tenu de leur volume puis compte tenu de la lourdeur de leur clientèle, que chaque établissement reçoive un montant de financement équitable par rapport aux autres établissements du réseau. Mais je reviendrai tantôt sur le financement.

n(11 h 30)n

Bon. Le député de Châteauguay nous dit: On ne va pas assez vite. Le député de Châteauguay nous dit: Ça ne va pas assez vite, là; ça fait un an que le rapport Clair est là, il y a plein de choses qui ont été faites, mais ce n'est pas encore assez vite. Moi, ce que je souhaiterais, c'est qu'il parle à ses petits amis qu'il connaît bien à Ottawa qui ont mis en place une commission, la commission Romanow. Et qu'est-ce que M. Romanow a dit, hein? M. Romanow, qui a été nommé par Jean Chrétien, premier ministre du Canada, il a dit: Attention, toutes les réformes que vous voulez faire en santé, attendez à l'automne que notre rapport soit rendu public.

Donc, vous voyez l'incohérence, hein? Ils devraient parler avec leurs frères, là, leurs frères au Parti libéral du Canada, surtout le député de Châteauguay qui doit bien les connaître puisqu'il était un des organisateurs du ministre des Finances et qu'il s'est déjà présenté d'ailleurs comme candidat du Parti libéral du Canada. Donc, je suppose qu'il a gardé certains contacts. Il devrait peut-être les appeler puis dire: Regardez, là, moi, ce matin, le 20 mars, je viens dire à l'Assemblée nationale qu'il faut aller plus vite avec les recommandations du rapport Clair, puis votre gars, Romanow, il dit d'attendre à l'automne avant de faire quoi que ce soit. On a l'air d'une gang qui n'est pas cohérente, faites quelque chose. Je suppose, j'espère qu'il va lâcher un coup de téléphone à Chrétien ou à Romanow, à ses amis, pour dire: Écoutez, ça n'a pas de bon... Arrêtez en plus de mettre de l'argent là-dedans! Arrêtez de mettre de l'argent là-dedans!

Des voix: Bravo!

M. Legault: M. le Président, 240 millions que ça fait que le gouvernement fédéral met dans les études sur la santé. Là, il est en train d'en mettre 15 millions dans la commission Romanow pour savoir qu'est-ce qu'on devrait faire. Pourtant, le député de Châteauguay dit: Nous autres, on le sait. Puis il dit: Le rapport Clair, on est d'accord avec ça, donc on le sait, où on s'en va. Mais est-ce qu'on a entendu le député de Châteauguay faire une grande déclaration disant que la commission Romanow, c'était une perte de temps? Bien non. Ils n'ont pas le droit de chialer contre leurs grands frères à Ottawa. Ils n'ont pas le droit. Écoutez, leurs amis! C'est leurs amis, l'autre bord. Donc, Romanow qui nous dit: Ne mettez pas en place aucune recommandation avant qu'on ait fini, puis on pense finir à peu près à l'automne 2002, peut-être, si ça va bien, peut-être plus tard si ça va mal, peut-être le printemps 2003, ne mettez aucune des recommandations du rapport Clair en place.

Tu sais, ça fait à peu près 10 fois que depuis tantôt le député de Châteauguay me montre le rapport Clair. Bien, qu'il aille le montrer à Romanow! Qu'il aille le montrer à Jean Chrétien! Qu'il aille dire: On sait où on s'en va, nous autres, au Québec, on n'a pas besoin du fédéral pour nous dire quoi faire en santé. Qu'il aille lui dire. Qu'il ne vienne pas nous le dire ce matin, qu'il aille à la bonne place, à la place où il y a de l'argent, aussi.

Des voix: Bravo!

M. Legault: M. le Président, le député de Châteauguay, il n'est pas à une incohérence près. Il nous dit qu'on ne va pas assez vite. Pourtant, qu'est-ce que le Parti libéral a fait, quand il était au pouvoir, avec la santé? Rappelons la petite histoire. 1987 ? 1987 ? il y a un rapport qui arrive d'un gars qui connaît pas mal ça, qui s'appelait Jean Rochon, qui est aujourd'hui député de Charlesbourg, du Parti québécois. Dépose son rapport, dépose son rapport d'une commission d'enquête, 18 décembre 1987. C'était le Parti libéral qui était au pouvoir, hein, vous vous en rappellerez, jusqu'en 1994. C'était supposé de tout changer.

Qu'est-ce qu'ils ont fait? 1987, qu'est-ce qu'ils ont fait, le Parti libéral, 1987? D'abord, ils reçoivent le rapport de Jean Rochon, s'assoient dessus pendant deux ans. En 1989, le Parti libéral se réveille puis dit: Il faudrait peut-être faire une petite tournée régionale. Donc, le ministre de la Santé de l'époque, en 1989, va faire une tournée. Après ça, il dit: Bien, il faudrait peut-être écrire un rapport. Donc, en décembre 1990, là on est trois ans plus tard, ils écrivent un beau rapport qui s'appelle Une réforme axée sur les citoyens. C'est ça qu'ils ont fait, le Parti libéral. Et ils attendent un autre deux ans, le 23 mars 1992, pour annoncer un plan d'implantation de la réforme. Donc, le rapport déposé en 1987, en 1992... ils attendent cinq ans pour proposer un plan d'implantation. Cinq ans.

Puis là le député de Châteauguay, qui n'a pas peur du ridicule, vient nous dire ce matin: Vous avez mis en place plein d'affaires depuis un an, là, mais vous n'êtes pas encore assez vite. Un an, vous avez tout fait ça, là, mais ce n'est pas assez. Nous, là, en cinq ans, on n'avait rien fait, là, mais vous, là, en un an, vous n'en avez pas fait assez. Voyons donc! Ça n'a pas de bon sens, ce que fait le Parti libéral du Québec.

Et je termine sur le financement, le financement public. Probablement, encore là, je ne sais pas, je l'inviterais, le député de Châteauguay, à le relire, le rapport Clair, parce que, peut-être, il ne s'en souvient pas. Il nous a dit tantôt qu'il l'avait lu, mais peut-être que ça fait trop longtemps qu'il l'a lu. Il en a peut-être oublié des bouts, parce que, à l'écouter parler tantôt, ça me donnait l'impression qu'il en a oublié des bouts.

Qu'est-ce que disait le rapport Clair? Le rapport Clair disait d'abord: Il faut assurer l'équité, s'assurer que, entre les établissements puis entre les régies, les différentes régions, on ait une certaine équité, donc qu'on enlève, un peu comme on l'a fait dans les universités, qu'on enlève le financement sur une base historique puis qu'on y aille surtout sur une base de volume, en tenant compte de la lourdeur du volume.

Le député de Châteauguay dit: Le Parti québécois n'a rien fait. Ce n'est pas vrai, ça, M. le Président. On a mis en place, avec Denis Bédard... Denis Bédard que j'ai rencontré la semaine dernière, qui va sortir, dans les prochaines semaines, son premier rapport sur les centres hospitaliers. Il est en train d'en faire un autre aussi sur les CLSC pour revoir toute l'équité, s'assurer qu'entre les établissements, si on est pour les comparer... Moi, je suis absolument d'accord avec ça. D'ailleurs, quand on a fait le même exercice avec les universités, ça avait été leur première demande. Les universités nous avaient dit, avec raison: Vous voulez nous comparer au niveau de certains indicateurs de performance, bien comparez-nous à armes égales, donc comparez-nous avec un financement comparable. On va faire la même chose avec les établissements du réseau de la santé.

Mais, même si on parle du financement équitable entre les régions, il reste un problème qui est majeur, qui est le niveau de financement global. Il y a un problème structurel de financement qui est bien simple à comprendre, bien simple à comprendre, M. le Président. Ce n'est pas seulement vrai au Québec, c'est vrai dans les autres provinces, c'est vrai dans les autres pays. À cause des impacts du coût du vieillissement, des médicaments, des nouvelles technologies, des coûts de système, on a une croissance des coûts qui devrait être de 5 % par année à la santé. Or, les revenus du gouvernement du Québec, en moyenne, augmentent d'à peu près 3 %. Donc, il y a un manque à gagner. Et, au même moment où on a ce manque à gagner, M. le Président, on a de confirmé par un rapport qui a été très bien fait, qui a été applaudi par tout le monde, même par le Parti libéral du Québec, un déséquilibre. Il y a des surplus de milliards de dollars qui s'accumulent à Ottawa. Faut aller chercher cet argent! Faut aller chercher cet argent pour investir dans la santé!

Et, encore une fois ? et je termine là-dessus ? j'invite le député de Châteauguay... M. le Président, le député de Châteauguay, c'est un ami du ministre des Finances à Ottawa. Il a été son organisateur en chef pendant un bout de temps. Il a été son organisateur, son organisateur pendant un bon bout de temps, au ministre des Finances à Ottawa. Il a été lui-même candidat du Parti libéral du Canada. Il doit avoir gardé des contacts. Ce que je lui demande, ce que je lui demande, c'est de s'élever un petit peu au-dessus des débats partisans pour faire avancer le Québec puis nous donner les moyens, nous donner les moyens, M. le Président, pour continuer à prévenir, soigner et guérir les Québécois et les Québécoises. Merci beaucoup, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Nelligan. Je dois vous dire qu'il vous reste six minutes à votre formation. Alors, je vous cède la parole.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai voulu faire une intervention aujourd'hui pour supporter mon collègue le député de Châteauguay pour dénoncer et déplorer vivement le manque de vision et leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair. Ce n'est pas facile pour le ministre. Je sais que lui est le cinquième ministre de la Santé depuis les élections du Parti québécois. N'oubliez pas que nous avons eu le député de Charlesbourg, la députée de Taillon, le député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue, le non-élu, le non-élu, le choix du premier ministre, et maintenant lui comme cinquième ? et deuxième en poste, mais cinquième ministre de la Santé.

Malheureusement, je présume, particulièrement avec son premier 12 minutes dans son intervention, je pense que je peux faire un résumé de son intervention: que le ministre actuel lit La Presse, mais il n'a pas lu le rapport Clair, malheureusement, M. le Président.

n(11 h 40)n

Je vais parler pour les jeunes aujourd'hui, pour les familles en difficulté et pour les intervenants, parce qu'ils ont été complètement oubliés par le gouvernement du Parti québécois depuis le rapport Clair. M. le Président, ils ont plusieurs recommandations. Malheureusement, je n'ai pas assez de temps de faire beaucoup, mais, sur toute la question du financement des CLSC, la première ligne, il y a une recommandation qu'effectivement les CLSC prennent... la première ligne, ça tombe sur la relève des CLSC.

Le ministre lui-même a parlé d'Allons à l'essentiel. C'est un document bien préparé, que nous avons une chance de parler avec les CLSC et les CHLD sur cette recommandation, beaucoup de bonnes idées. Mais, M. le Président, ils ont bel et bien dit qu'ils ont besoin d'argent pour faire ce travail. Le ministre va dire: Ah! il n'y a pas d'argent. Mais il n'a pas compris, M. le Président, que même le rapport Clair dit, et c'est assez clair: «Une action rapide et préventive en temps utile, à mi-chemin entre l'absence d'une intervention et une intervention très spécialisée de la DPJ, serait certainement souhaitable dans le but d'éviter aux enfants le maximum d'interventions de protection lorsque cela est possible.»

Si on fait un investissement dans la première ligne, aux CLSC... Et ils ont parlé d'une centaine de millions de dollars, même que le rapport Clair dit: On peut augmenter la qualité de vie, augmenter la qualité du service et, M. le Président, sauver de l'argent. Et les CLSC, comme les centres jeunesse, sont prêts à travailler avec le gouvernement, à mettre en place les indicateurs de résultat. Ils ne sont pas contre ça, ils n'ont jamais dit qu'ils sont contre ça. Mais, malheureusement, M. le Président, le gouvernement n'a pas suivi les recommandations du rapport Clair, dans le dossier des jeunes, les jeunes en difficulté, aux CLSC.

M. le Président, le rapport Clair aussi a parlé des centres jeunesse qui doivent... Et laissez-moi citer le rapport, page 64, M. le Président, qui recommande de «mettre en place un financement stable basé sur les coûts réels de production de services ainsi que sur les meilleures pratiques et non plus sur une base historique». C'est ça que Clair a recommandé.

M. le Président, est-ce que, hier, j'ai entendu que le gouvernement a changé de stratégie? Non. Est-ce que les listes d'attente sont maintenant moins grandes, M. le Président? J'ai juste sorti une... une comparaison entre le 15 mars 2002 et le 9 mars 2001. La liste d'attente de 2002 est de 915, attendre l'évaluation; l'année passée, c'était 867. C'est pire maintenant, M. le Président. Attendre l'application, c'est plus ou moins égal à 550. M. le Président, est-ce que le gouvernement a bel et bien travaillé pour le bien-être des jeunes en difficulté? Non. Ils ont commandé un rapport. Ils ont eu beaucoup de rapports, je n'ai pas toute la pile, mais, effectivement, nous avons eu beaucoup de rapports. Et les intervenants ont dit le suivant, que les listes d'attente, c'est encore en augmentation.

Et il y a toute la question de supervision des professionnels. Ils disent: «Devant la gravité et la complexité des situations vécues par les jeunes en difficulté et leurs familles, les intervenants se disent de plus en plus souvent laissés à eux-mêmes, sans accès au soutien de leurs pairs ou aux conseils d'un intervenant aguerri.» M. le Président, est-ce que vous avez vu un changement de stratégie après Clair pour ces intervenants? Non, M. le Président.

Et aussi, sur la question du financement: «Le mode actuel de financement est non seulement incapable, mais carrément contradictoire avec une stratégie qui entend renforcer la capacité collective d'un réseau de fournir une réponse adéquate, cohérente et continue aux besoins multiples et toujours changeants des jeunes en difficulté et leurs parents.» Ce n'est pas l'opposition officielle qui dit ça, c'est les intervenants, M. le Président.

Et, M. le Président, les familles d'accueil. J'ai mentionné, j'avais écrit au ministre le mois passé, il y a à peu près 5 500 familles d'accueil qui rendent des services extraordinaires pour nos jeunes en difficulté. Sous le gouvernement du Parti québécois, ils reçoivent moins d'argent cette année que l'année 1998. Ce n'est pas correct, ça. On demande à ces personnes d'ouvrir les maisons, d'aider nos jeunes, mais, malheureusement, M. le Président, le gouvernement n'a pas suivi les recommandations de Clair et de tout le monde dans le dossier des jeunes en difficulté.

M. le Président, je n'ai même pas le temps de parler des problèmes de réadaptation physique et intellectuelle, qui ont été presque oubliés. La loi n° 107 cause un problème à nos centres jeunesse et tout le réseau. La loi n° 28, mon collègue en a déjà parlé. Il y a une recommandation dans le rapport Clair qu'ils ont changé la Loi de la protection de la jeunesse, M. le Président, et ils n'ont rien fait.

Avec ça, M. le Président, comment le gouvernement... Je sais que le ministre est nouveau, mais il est le cinquième dans ce gouvernement fatigué. Il est le cinquième. Et il doit maintenant tenir compte des recommandations de Clair, il doit respecter les besoins de nos jeunes, il doit continuer de travailler pour les jeunes en difficulté. Mais, malheureusement, M. le Président, le gouvernement n'a pas respecté les recommandations de Clair. Comme d'habitude, il prend un rapport et maintenant il essaie de nous convaincre qu'il est de toute bonne foi, il veut travailler pour aider nos jeunes, il veut maintenant commencer le travail. Tous ces commentaires, c'est pour le futur, mais c'est huit ans que le gouvernement est au pouvoir. Ils ont complètement oublié nos jeunes, ils ont complètement oublié les jeunes en difficulté et les familles en difficulté. Et, malheureusement, M. le Président, c'est nos jeunes, c'est nos familles qui sont en difficulté, qui manquent de services et c'est eux autres qui paient pour l'incompétence de ce gouvernement. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Nelligan. Il reste 12 minutes au parti ministériel. Alors, je vous cède la parole, Mme la députée de Sauvé.

Mme Blanchet: De Crémazie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Pas de Sauvé, excusez, de Crémazie. Excusez. Mme la députée de Crémazie.

Mme Manon Blanchet

Mme Blanchet: Merci, M. le Président. Mon collègue le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux le disait tout à l'heure, tout au long des années quatre-vingt-dix le système de santé du Québec a connu des changements importants, comme d'ailleurs dans la plupart des systèmes de santé des pays industrialisés. Alors, il me semble effectivement tout à fait logique, après avoir mis en place une série de mesures qui transformaient de façon importante non seulement notre réseau, mais aussi la façon dont les gens, les Québécois et les Québécoises devaient se comporter face à lui, qu'il fallait évaluer l'impact de tous ces changements-là effectués et déterminer aussi comment on allait s'ajuster pour l'avenir.

Alors, c'est dans ce contexte que le gouvernement du Québec avait demandé à Michel Clair et à une équipe de commissaires d'examiner l'organisation et le financement des services de santé au Québec. À l'époque, nous avions demandé à M. Clair et à sa commission de solliciter l'avis d'experts nationaux et internationaux et de mener aussi une large consultation auprès de différents groupes d'intérêts, de la population aussi, avec une attention particulière évidemment pour les régions, et puis finalement de nous soumettre ses recommandations. Et c'est ce qu'il a fait il y a plus d'un an. Donc, ce matin, nous sommes ici, M. le Président, parce que le député de Châteauguay a déposé hier une motion qu'il voulait que l'on débatte ce matin et qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale déplore vivement le manque de vision et de leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair.»

Donc, le député de Châteauguay veut donner l'impression, par cette motion, que le gouvernement du Québec ne fait rien et n'a rien fait depuis le dépôt du rapport de la commission Clair, il y a un peu plus d'un an. Vous me permettrez donc, M. le Président, de vous démontrer qu'évidemment ce n'est pas le cas. Le gouvernement s'est assuré de faire un suivi sur les travaux de la commission. D'ailleurs, ce suivi a directement structuré le plan d'action et le plan stratégique du ministère de la Santé et des Services sociaux pour les trois prochaines années, et les différentes mesures citées au rapport sont implantées... on dit que certaines sont déjà commencées et les autres le seront graduellement au cours des trois prochaines années.

Ce matin, donc, en complément de ce que mon collègue le ministre d'État à la Santé a fait tout à l'heure, je vous parlerais plus particulièrement du financement public du système et aussi de la gouverne. D'abord, une des recommandations était la modification des modes d'allocation des ressources et de la budgétisation des établissements. Alors, comme M. le ministre d'État le disait tantôt, il y a le comité Bédard qui travaille justement à la redéfinition d'un modèle pour évaluer les budgets et aussi certains services offerts en centre hospitalier. Il y a aussi des travaux qui se font par le même comité sur les CLSC et les centres d'hébergement de longue durée. Et, au cours des prochains mois, ce rapport-là nous permettra justement d'évaluer les futurs modèles de budgétisation.

n(11 h 50)n

Il est important aussi de permettre l'équilibre budgétaire. On a adopté une loi antidéficit, nous avons fait de gros efforts, tout le monde, pour justement venir à bout des déficits qui nous avaient été laissés par les libéraux lorsque nous sommes arrivés en 1994. Donc, évidemment, on ne veut pas retourner en arrière. Les Québécois et les Québécoises ont payé déjà beaucoup justement, et nous tous ensemble, pour permettre un équilibre budgétaire. Alors, il faut aussi que, dans le réseau, ça s'applique.

Il y avait aussi une recommandation à l'effet qu'il fallait donner de meilleurs équipements. Alors, la ministre d'État aux Finances, en novembre dernier, annonçait plus de 500 millions d'investissements dans le réseau de la santé. Et je vous dirais qu'il y a plusieurs projets évidemment qui ont été mis en branle. Mais il y avait aussi une annonce faite en décembre dernier pour 100 millions investis dans la mise à niveau des différents établissements au Québec. Et je pourrais vous dire qu'il y a une annonce qui a été faite à ce sujet-là chez moi, dans Crémazie, pour justement le réaménagement d'ascenseurs dans une résidence pour personnes âgées et en perte d'autonomie. Et cet investissement-là, de près de 500 000 $, va justement aider ces personnes âgées qui sont résidentes de cette résidence-là, puisque les ascenseurs n'étaient plus adéquats, avec la perte de mobilité de ces gens-là. Alors, c'est un engagement concret et un investissement concret dans les suites que l'on donne au rapport de M. Clair. Et je suis persuadée que tous mes autres collègues pourraient donner des exemples semblables qui permettront justement une meilleure qualité de vie et aussi la sécurité des gens dans leurs déplacements à l'intérieur d'une résidence.

Il y a aussi la gouverne. J'étais présente, M. le Président, je suis membre de la commission des affaires sociales, et je peux vous dire que, l'année dernière, nous avons rencontré plusieurs groupes qui sont venus nous dire que tout n'était pas parfait dans le projet de loi n° 28, à l'époque. Mais, depuis, le projet de loi a été adopté et sanctionné, et d'ailleurs les nominations ont commencé à se faire. D'ailleurs, les groupes, les différents groupes d'intervenants sont concernés et invités à faire leurs recommandations dans chacune des régions du Québec. Maintenant, les conseils d'administration, les membres en seront nommés par le gouvernement. Et bientôt, en avril, on pourra compléter ces nominations-là par les nominations des présidents-directeurs généraux. Alors, les gens sont concernés et sont invités et consultés particulièrement dans chaque région pour justement nous faire part de leurs recommandations, dans les représentants.

Alors, sur ce, M. le Président, je veux évidemment joindre ma voix à mon collègue de la Santé. Et évidemment je ne suis pas tellement d'accord avec la motion du député de Châteauguay, puisque le gouvernement a dit qu'il agirait, et il a agi, et nous avons des exemples concrets. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Crémazie. Alors, il reste cinq minutes à M. le député de Maskinongé. M. le député.

M. Rémy Désilets

M. Désilets: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais vous mentionner qu'on est ici aujourd'hui ? c'est des choses qui arrivent ? à cause de la motion que l'opposition a présentée, concernant le rapport Clair, pour nous dire qu'on n'a rien fait, qu'on a perdu notre temps, ainsi de suite. Je vais inviter mes collègues à voter contre cette motion parce que, loin d'avoir perdu notre temps, on a travaillé depuis un bon bout de temps, depuis au moins un an à préparer la relève, la suite du rapport Clair.

En fait, depuis que le rapport Clair est sorti, on travaille, on a à coeur l'amélioration de la qualité des services et l'amélioration de la qualité de vie de nos citoyens. Et, je vous dirais, le remaniement ministériel qui vient d'avoir lieu, par M. Landry, dénote encore une fois l'action du gouvernement dans le rapport Clair, dans l'aboutissement du rapport Clair, parce que trois ministres ont été nommés à la Santé, mais il y en a un, entre autres M. Roger Bertrand, qui est député de Portneuf, qui est ministre délégué à la Santé et Services sociaux mais également à la Protection de la jeunesse et à la Prévention. C'est la première fois dans l'histoire du Québec, du Canada, qu'il y a un ministre qui est attitré à un titre de prévention. Et ce n'est pas rien, c'est quelque chose d'important, et ce n'est un poste pas juste honorifique, mais c'est un poste qui demande beaucoup d'implication et qui va solliciter beaucoup de réflexion et de travail.

Dans cette optique, le rapport Clair, lorsqu'il a été déposé... Pourtant, l'opposition n'ont pas tenu compte de lire le premier rapport, le communiqué de presse qui a été émis, le premier paragraphe, qui dit: «La commission confirme, dès le début de son rapport, que la prévention doit constituer l'élément central d'une politique québécoise de la santé et du bien-être. L'objectif premier du système de santé doit être de prévenir les maladies et les problèmes sociaux, de promouvoir la santé, de la protéger et de l'améliorer.» Premier paragraphe, premier paragraphe du communiqué de presse émis par la commission, par M. Clair.

Je ne prendrai pas l'ensemble des 36 recommandations puis des 59 propositions, mais il y en a quelques-unes que je veux vous sensibiliser, vous sensibiliser parce que, la minute que ça a été... il y a quelques propositions, les quelques-unes qui nous ont incités à travailler davantage à la prévention, c'est la première recommandation, la reconnaissance...

«Nous proposons que le gouvernement du Québec:

«Reconnaisse sa responsabilité et son imputabilité globale face à la santé de la population;

«Confie au ministère de la Santé et des Services sociaux le mandat de coordonner l'analyse des impacts sur la santé de la population, des politiques et programmes de tous les ministères et grands organismes gouvernementaux.» La coordination, de là l'importance d'avoir un ministre à la prévention, pour lui permettre de coordonner l'ensemble des services qui s'en viennent.

La commission Clair recommande aussi d'assumer «un leadership fort en [...] protection et promotion de la santé et prévention de la maladie». C'est important. Ça, c'est la deuxième proposition, celle-là: «Révise la politique de santé et de bien-être social, d'une part à partir des priorités identifiées à l'échelle [...] régionale et provinciale et, d'autre part, en traduisant ces priorités en moyens d'action que les établissements et les professionnels peuvent s'approprier et appliquer.»

«Fassent connaître aux professionnels de la santé et des services sociaux les pratiques efficaces de prévention; que celles-ci soient intégrées dans leur pratique clinique.»

«Soit sensibilisé à la responsabilité de prendre en charge sa propre santé et qu'il ait accès aux informations lui permettant de le faire.» Ça, c'est pour chaque citoyen, que chaque citoyen soit sensibilisé à sa propre responsabilité.

Et la dernière, pour les enfants, notre jeunesse, leur proposition, c'est: «Un programme d'éducation, pour les enfants d'âge scolaire, visant le développement d'habitudes de vie saine et de comportements sociaux adéquats; une stratégie de prévention du tabagisme et des autres toxicomanies, adaptée aux enfants.»

Oui, il me restait, vous m'avez dit, six minutes, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cinq.

M. Désilets: Cinq?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Et ça fait cinq minutes, alors...

M. Désilets: Mais tout ça pour vous dire, au bout de la ligne, tout ça... En conclusion, M. le Président, ce qui est important, c'est qu'on a un ministre attitré à la prévention, et c'est une volonté gouvernementale d'établir des éléments de solution. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): On vous remercie. Alors, M. le député de Châteauguay, je vous cède la parole pour votre réplique.

M. Jean-Marc Fournier (réplique)

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je vais réagir aux propos du ministre de la Santé, M. le Président, d'abord pour noter, et, je pense, c'est un guide pour l'avenir: on a bien vu ses qualités de désinformation et de déformation. Et je pense que ça va nous permettre, pour l'avenir, de savoir sur quel pied le prendre et toujours mettre en doute ce qu'il va nous dire.

Pourquoi je vous dis ça? D'abord, il dit que, nous, on est d'accord avec Romanow puis Jean Chrétien à l'effet qu'il ne faut pas rien faire avant l'automne prochain. À quel moment est-ce que moi ou quelqu'un ici a dit ça? Jamais. Mais lui, il a décidé que ça faisait son affaire de dire ça.

Ce qui faisait son affaire aussi, c'était d'oublier la page 209 du rapport Clair, qui dit ceci: Le Québec dispose d'experts et de spécialistes de grande qualité pour assumer avec le ministère un leadership certain et proposer une interprétation contemporaine des principes de la Loi canadienne sur la santé. Ça, c'est ce qu'est en train d'étudier Romanow.

«En raison de son dynamisme et d'une couverture de services globalement bien plus large que ne l'exige le respect à la lettre de la loi canadienne, le Québec est bien placé pour promouvoir cette initiative auprès des provinces canadiennes et du gouvernement fédéral.»

n(12 heures)n

Moi, je pose la question: Qu'est-ce que le gouvernement du Québec a fait là-dessus? Comment est-ce qu'il a appliqué cette recommandation du rapport Clair? Rien, pas du tout. Mais le ministre, lui, il a préféré déformer mes propos plutôt que de voir la réalité. Qu'est-ce qu'il y a sur les groupes de médecine familiale? Là, les groupes de médecine familiale, il est en train de nous dire que, au contraire de ce que j'ai dit, ils les ont implantés. Au contraire de Clair, que ce que Clair dit, il les a implantés. Or, nous savons qu'ils viennent tout juste de commencer à négocier. Et il dit que, moi, j'aurais voulu que ce soit une loi spéciale. À quel moment est-ce que j'ai dit ça? À quel moment? Il a dit que le député de Châteauguay souhaitait passer par une loi spéciale pour forcer la négociation. À quel moment j'ai dit ça? Jamais. À quel moment quelqu'un a dit ça? Jamais. C'est de la déformation.

Ce que j'ai dit et ce que je vais répéter, c'est ce que j'ai dit lors de l'étude des crédits de l'an passé. Son prédécesseur, M. Trudel, je lui ai demandé quand est-ce qu'il va commencer à négocier la rémunération mixte. Pas le montant de la rémunération, le concept de rémunération mixte. C'est tout mélangé, de l'autre côté. Savez-vous ce qu'il m'a répondu? Je l'ai dit tantôt, il m'a répondu: Ce n'est pas notre priorité. Bien, si ce n'est pas sa priorité de négocier la rémunération mixte, ça ne peut pas être la priorité des groupes de médecine familiale, parce que c'est le passage obligé. On a déformé les propos pour faire assemblant que tout allait bien. Mais la vérité, M. le Président, c'est que c'est une déformation constante pour nier qu'il n'y a aucune application du rapport Clair.

Sur le financement, là il essaie d'inventer que je serais en opposition avec mon chef ou en opposition avec mon parti par le fait que nous avons été les premiers à dire qu'on voulait avoir un transfert de points d'impôt pour la santé. On a été les premiers à le dire puis on le dit encore. J'ai dit deux choses. J'ai dit que, pour être crédibles auprès du gouvernement fédéral, pour que le gouvernement fédéral fasse lui-même de la santé une priorité, notamment par les transferts de points d'impôt pour la santé, il fallait qu'on démontre au Québec nous-mêmes qu'on était capables de faire une priorité de la santé.

J'ai démontré, tableaux à l'appui... Puis pas n'importe quels tableaux, des documents du ministère puis du gouvernement établissant que le Parti québécois a fait le choix de faire passer l'aide aux compagnies qui ont de l'argent de 800 millions à 1,8 milliard et que, pendant ce temps-là, la proportion d'investissements privés qui revenait au Québec par rapport à l'ensemble du Canada a chuté et qu'elle va encore chuter cette année. C'est ce que la ministre des Finances a dit hier. Je pose la question. Répondez-y si vous voulez ou pas. Je pose la question: Est-ce que c'est de l'argent bien placé? Je ne dis pas qu'il faut enlever le 1,8 milliard, je pose la question sur le milliard de plus, par exemple, qu'on a mis là-dedans. Puis je me pose la question: Qui, au gouvernement, s'est demandé elle venait d'où, cet argent-là? Vous êtes-vous demandés d'où vous le preniez, cet argent-là? Bien, j'ai des petites nouvelles pour vous autres, vous la prenez dans les marges de manoeuvre du gouvernement, marges de manoeuvre qui auraient pu aller à la santé mais que le ministre ne veut pas avoir.

Alors, il a déformé mes propos, parce que ce sur quoi je parlais à l'égard de la nouvelle parade qui a été inventée hier par la ministre des Finances, c'était de la péréquation. Pas du transfert social canadien, pas du transfert de points d'impôt, de la péréquation. Et ce qu'on veut nous faire avaler du côté du Parti québécois, c'est un concept de péréquation exactement à l'image suivante: un chômeur qui se trouve une job a le droit de garder son chèque de chômage tout le reste de sa vie. C'est comme ça que le Parti québécois voit le système de péréquation qui serait juste pour le Québec. Ça n'a pas d'allure. Mais pourquoi ils font ça? Parce qu'ils ne veulent pas d'un système de péréquation, parce qu'ils veulent la souveraineté. Or, si on avait la souveraineté, ce 5 milliards de péréquation qu'on reçoit annuellement, sans aucune condition, qu'on peut mettre dans le transport, qu'on peut mettre dans tous les secteurs, qu'on peut mettre dans la santé, ce 5 milliards qui vient des populations de provinces riches en appui aux populations de provinces qui le sont moins, nous ne l'aurions pas.

Quelle est la solution qu'on nous propose du côté du Parti québécois? Ce n'est pas grave, ça va être un moment magique. On va être souverains. Ça va être un grand soir. Il n'y a pas de problème pour la santé. Bien, il y a un problème aujourd'hui pour la santé parce que vous avez décidé de ne pas vous battre pour que nous puissions gagner ce point auprès du gouvernement fédéral en faisant d'abord ici une priorité avec nos marges de manoeuvre, et c'est ça qu'il nous manque, et ça nous prendrait un gouvernement qui décide de se battre pour nous.

Les inscriptions en médecine, ah! bien là, là, j'ai failli tomber à terre! Un ministre qui déforme. Il dit: Voyez-vous, nous autres, au Parti québécois, on a augmenté les admissions en médecine. Aïe! tu voyais les bretelles, tiens, qui faisaient ça comme ça. Des grosses marques rouges, M. le Président! Ils ont fermé les admissions en médecine. Ils ont réduit de façon dramatique les inscriptions en médecine de la même façon qu'ils le faisaient pour les soins infirmiers, en même temps qu'ils donnaient des bonus à la retraite, en même temps que le Québec était, de toutes les provinces canadiennes, la championne pour l'exode des médecins. Et là on va nous dire aujourd'hui que c'est un bon gouvernement, qu'ils sont très bons parce qu'ils ont augmenté les inscriptions. Ça va nous prendre 10 ans pour rattraper ce que vous avez fait avec les bonus à la retraite, plus la porte d'entrée des écoles de médecine et de soins infirmiers qui a été fermée dans un contexte d'exode. Ça va nous prendre 10 ans.

Le ministre essaie de dire que, moi, je veux une solution magique. Je n'ai jamais dit que j'aurais une solution en deux jours, jamais dit ça. J'ai dit qu'il fallait commencer aujourd'hui. Il aurait fallu commencer hier si on veut, demain, voir la lumière au bout du tunnel, voir la lumière au bout du tunnel. Il fallait commencer, et vous n'avez jamais commencé. Vous avez décidé de rester assis sur le rapport et vous péter des bretelles pour des décisions...

Le ministre, ce n'est rien d'autre que le pompier qui arrose le feu qu'il a lui-même allumé quand il dit qu'il a augmenté le nombre d'inscriptions. Qu'est-ce qu'on fait avec un pompier qui arrose un feu qu'il a déjà allumé? Qu'est-ce qu'on fait avec un pyromane pompier dans notre société, M. le Président? On ne commence pas à l'applaudir, j'espère. Or, nos bons amis d'en face, pas partisans pour deux sous, très constructifs, qui ont vraiment à coeur le sort des Québécois, ça se levait debout, comprends-tu, puis ça applaudissait le pyromane pompier. C'est épouvantable. C'est épouvantable, M. le Président.

La carte à puce, ah, bien, la carte à puce, là, le ministre, je le savais, qu'il déformait un peu les propos, c'est son genre. Mais là, sur la carte à puce, il vient de dire que l'AHQ ne veut pas d'informatisation des dossiers pour qu'on ait un vrai dossier patient partageable. Il est venu nous dire ça. J'ai hâte de voir comment l'AHQ va réagir à ça. Il me dit que les omnipraticiens nous auraient dit hier qu'ils ne veulent rien savoir d'un dossier patient partageable, ils veulent juste un résumé. Ils nous ont dit ça pour vrai, M. le Président? Il ira voir la transcription. J'étais là, je ne dormais pas, et, il a bien raison, j'ai parlé, j'ai posé des questions, et j'ai écouté, puis je sais ce que tout le monde dit, je sais ce que tout le monde dit: Il doit y avoir informatisation de l'ensemble du réseau pour que nous puissions communiquer et avoir un dossier complet.

La carte fureteur peut bien être décrite par le ministre comme étant quelque chose qui prend 44 ans avant d'avoir l'information, mais, c'est drôle, il y a des gens qui sont venus nous voir, M. Sicotte, expert choisi par la RAMQ elle-même pour vérifier les processus, qui est venu nous dire qu'il y avait d'autres technologies plus modernes puis que ça vaudrait la peine, tant qu'à mettre des millions de dollars, des centaines de millions de dollars là-dedans, d'avoir la technologie la plus appropriée pour répondre aux besoins. C'est drôle, moi, je n'ai pas trouvé ça fou quand il a dit ça. Quand il a dit: Prenons les centaines de millions pour que ce soit utile avec la nouvelle technologie pour répondre à tous les besoins, moi, je trouvais que ça avait de l'allure. Je ne suis pas un spécialiste. Le ministre, parce qu'il a travaillé à Air Transat, il connaît tout ça, lui. Il pense que, lui, il est au courant de tout ça. Bien, moi, j'ai des petites nouvelles pour lui. Je sais à l'avance et je vous le dis à l'avance, M. le Président, l'avant-projet de loi du ministre est un projet mort-né, il va le réécrire. Et ce que je veux qu'il nous fasse avant qu'il nous le dépose, c'est qu'il nous dise combien ça va rapporter, quels sont les coûts-bénéfices de tout ça. Parce que, s'il dit que, nous, on a beaucoup de priorités parce qu'on en a 12...

Je l'ai écouté parler, puis je le regarde dépenser l'argent, puis je me demande si c'est toujours bien fait. Il y a encore deux salles de chirurgie cardiaque à Québec ? 18 millions de dollars de construction dont on n'a toujours pas de budget d'opération ? qui sont encore fermées. Moi, ça ne me fait rien d'entendre le ministre parler comme ça, mais je m'aperçois qu'à Québec, en ce moment, on n'a pas un gouvernement qui est capable de planifier, de financer correctement. On n'est pas capable d'avoir un gouvernement du Parti québécois qui s'intéresse à la santé des Québécois parce que ce n'est pas un gouvernement qui a comme vision que la santé, ça rapporte, que la santé, c'est une richesse collective. Pour eux, la santé, c'est un poids, c'est un embêtement. Tout ce qui les préoccupe, c'est la souveraineté. Aux prochaines élections, on va régler ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant mettre aux voix la motion du député de Châteauguay qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale déplore vivement le manque de vision et de leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair.»

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal.

Vote reporté

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais de reporter le vote après la période des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le vote sera reporté aux affaires courantes de cet après-midi. Alors, nous allons maintenant suspendre jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 10)

 

(Reprise à 14 h 3)

La Présidente: Alors, mesdames et messieurs, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Vous pouvez vous asseoir.

Présence de la consule générale du Royaume-Uni
de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord
à Montréal, Mme Sarah Gillett

J'ai le plaisir de souligner la présence parmi nous cet après-midi dans les tribunes de Mme Sarah Gillett, consule générale du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, qui est à Montréal.

Affaires courantes

Alors, aux affaires courantes aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Il n'y a pas de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre d'État à la Population et ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

Rapport annuel 1999-2000
du Conseil des relations interculturelles

M. Trudel: Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel 1999-2000 du Conseil des relations interculturelles.

La Présidente: Ce document est déposé. Mme la ministre d'État à la Culture et aux Communications.

Rapport annuel de la Société
de la Place des Arts de Montréal

Mme Lemieux: Oui. Mme la Présidente, je dépose le rapport annuel 2000-2001 de la Société de la Place des Arts de Montréal.

Dépôt de rapports de commissions

La Présidente: Ce document est déposé. Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des institutions et député de Bellechasse.

Consultations particulières
sur le projet de loi n° 68

M. Lachance: Merci, Mme la Présidente. Je dépose le rapport de la commission des institutions qui, le 19 mars 2002, a tenu des auditions publiques dans le cadre de consultations particulières sur le projet de loi n° 68, Loi modifiant la Loi sur les cours municipales, la Loi sur les tribunaux judiciaires et d'autres dispositions législatives.

Dépôt de pétitions

La Présidente: Ce rapport est déposé. M. le député de Rivière-du-Loup, au dépôt de pétitions.

Élargir la route 185 entre
Rivière-du-Loup et Edmundston

M. Dumont: Oui. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition de 305 noms adressée à l'Assemblée nationale du Québec concernant la route 185.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que 89 personnes sont décédées depuis 10 ans, dont 11 en 2001 seulement;

«Considérant que 62 accidents ont été causés par des voitures venant en sens opposé entre 1992 et 1995;

«Considérant que, des 46 personnes qui ont perdu la vie depuis 1997, 37 seraient toujours en vie si la 185 avait été une autoroute à quatre voies séparées;

«Considérant qu'entre 1991 et 1995 toutes les sections d'un kilomètre ont eu des accidents;

«Considérant que la 185 est le théâtre de plus de 218 accidents graves par année;

«Considérant que l'incidence de la gravité des accidents est plus élevée sur la 185 qu'ailleurs au Québec;

«Considérant que la 185 n'a pas été conçue pour supporter un tel débit routier, même si elle est considérée comme une transcanadienne: moyenne de 6 859 véhicules par jour, dont 1 800 camions, qui peut atteindre plus de 12 000 véhicules par jour pendant les vacances de la construction;

«Considérant que les échanges commerciaux entre les Maritimes, et le Québec, et l'Ontario ont atteint 10 milliards de dollars; 10 milliards passent chez nous chaque année, mais les gouvernements refusent toujours d'y investir 600 millions;

«Considérant qu'au Témiscouata presque tous ont un proche ou une connaissance qui est décédé sur la 185;

«Considérant que les gouvernements provincial et fédéral ont les moyens de construire une autoroute;

«Considérant que la vie des gens est une priorité et qu'on ne lâchera pas tant et aussi longtemps que l'autoroute ne sera pas construite de Rivière-du-Loup à Edmundston;

«Nous, soussignés, vous demandons d'agir immédiatement pour mettre fin au carnage de la 185 en établissant une vraie collaboration entre le fédéral et le provincial et en injectant les sommes nécessaires pour faire de la 185 une autoroute à quatre voies d'un bout à l'autre.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

La Présidente: Alors, cette pétition est déposée. Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le député de Châteauguay présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Questions et réponses orales

Nous abordons maintenant la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle.

Expansion de l'aluminerie
d'Alcoa à Baie-Comeau

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, Mme la Présidente. Ma question s'adresse au premier ministre. Mme la Présidente, il y a une élection partielle actuellement dans le comté de Saguenay, sur la Côte-Nord. Le premier ministre doit savoir qu'il y a des problèmes économiques extrêmement graves dans cette circonscription, et, de fait, la ville de Baie-Comeau est la ville au Québec qui a connu le déclin de population le plus important depuis les cinq dernières années alors que son gouvernement était au pouvoir. C'est un déclin de 9,7 % de sa population entre 1996 et 2001. Depuis ce temps-là, il y a eu un projet de très grande importance qui a été soumis à son gouvernement par la compagnie Alcoa dans le domaine de l'aluminerie, de l'aluminium, pour l'expansion de l'aluminerie, et son gouvernement n'a pas pu donner suite à ce projet par manque de planification, puisqu'il n'y a pas suffisamment de mégawatts pour l'ensemble des projets disponibles au Québec.

Est-ce que le premier ministre peut nous dire aujourd'hui s'il a l'intention de rectifier le tir et de s'assurer, en tenant compte du fait que la ville de Baie-Comeau a perdu 9,7 % de sa population entre 1996 et 2001, s'il a l'intention de rectifier le tir et de s'assurer que ce projet de première importance pour la population du comté de Saguenay puisse se réaliser le plus rapidement possible?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Il y a, Mme la Présidente, un manque dans ce dossier. Ce n'est pas un manque de mégawatts, c'est un manque de compréhension vraiment étonnant de la part du chef de l'opposition officielle. Il ne manque tellement pas de mégawatts que je dis, en réponse à sa question et à la population de Baie-Comeau, que, si Alcoa, puissante multinationale de l'aluminium, veut mettre son usine à niveau ? car c'est bien de ça qu'il s'agit ? moderniser l'usine, faire un investissement considérable, elle a déjà 700 MW qui tournent, elle peut demain se brancher à hauteur de 175 MW. Je remercie le chef de l'opposition de me donner l'occasion de redire ça à la population de Baie-Comeau, qui le sait, et à Alcoa, qui le sait également. Mais je veux que toute la population du Québec sache qu'il ne manque pas de courant pour moderniser Baie-Comeau.

n(14 h 10)n

Quant à cette offre dans laquelle Alcoa, hélas! fut perdante, rien n'est joué, les discussions continuent. Mais la beauté de la chose, c'est que ceux qui ont gagné, c'est-à-dire Alcan et Alouette, pour la première fois dans l'histoire de l'aluminerie au Québec, s'engagent à créer deux fois plus d'emplois dans la transformation que dans le primaire. Si les gouvernements qui nous ont précédés avaient fait ça au lieu de négocier des tarifs secrets, il y aurait 50 000 emplois dans la transformation aujourd'hui, c'est-à-dire 10 fois plus que dans le primaire.

La Présidente: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Est-ce que le premier ministre réalise qu'il se contredit dans sa propre réponse alors qu'il dit, premièrement, qu'il est possible de réaliser un projet, qu'il y a 175 MW de disponibles, et que du même souffle il affirme qu'Alcoa n'a pas pu accéder à l'offre que son gouvernement a faite, offre limitée de mégawatts, justement, pour des projets et de la création d'emplois dans la ville du Québec où on a connu le plus important déclin de population? Pourquoi autant d'incompétence, de manque de planification et pourquoi viser, entre autres, la population de Baie-Comeau?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je regrette, le chef de l'opposition, dans sa principale, avait démontré son ignorance du dossier pointu de Baie-Comeau; dans sa question accessoire, il démontre son incompétence dans le dossier de l'aluminium en général. Il n'a pas fait la distinction entre la mise à niveau des vieilles cuves de Baie-Comeau, 175 MW, et 500 MW qui étaient offerts pour faire du primaire et du secondaire. Et la puissante Alcoa, malheureusement, n'a pas été capable d'égaler l'offre de la puissante Alcan.

Alors, Alcan fait du primaire, 2 000 emplois de secondaire. C'est un des rêves de ma vie, je vous le confesse, Mme la Présidente. Vous me connaissez bien, d'ailleurs, vous savez que l'aluminium et sa transformation ont toujours fait partie de mes priorités. Bien là on l'a: deux fois plus d'emplois dans la transformation que dans le primaire. Puis, avec Alcoa qui va aiguiser son crayon un peu plus la prochaine fois, j'espère que les mêmes bienfaits en secondaire tomberont sur Baie-Comeau et sur l'ensemble du Québec. Mais, en attendant, si Alcoa veut commencer les travaux demain à Baie-Comeau, il y a 175 MW disponibles qui ronronnent en attendant qu'Alcoa bouge.

La Présidente: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Je doute beaucoup que la population de Baie-Comeau et du comté de Saguenay se console à la belle réponse du premier ministre qui fait des finasseries sur les emplois, lui qui fait une distinction maintenant entre les emplois dans le primaire et le secondaire dans la ville du Québec qui se vide le plus rapidement sous son gouvernement alors qu'il n'y a pas d'emplois, alors qu'ils ont un taux de chômage qui est inacceptable, déclin de population, exode des jeunes, exode des personnes plus âgées et parce que son gouvernement n'a pas planifié correctement justement pour rendre des mégawatts disponibles pour l'ensemble des projets, pour l'ensemble des emplois. Parce que, à Baie-Comeau, peu importe que ce soit du primaire ou du secondaire, ils avaient la possibilité de créer des emplois maintenant si vous aviez planifié correctement. Vous ne l'avez pas fait. Qu'est-ce que vous allez faire pour corriger le tir?

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Ceux et celles qui connaissent un peu l'aluminium et l'économie en général auront été édifiés par l'éventail de faussetés que nous a servies le chef de l'opposition officielle. Il vient de dire...

Des voix: ...

M. Mulcair: Mme la Présidente, question de règlement. Mme la Présidente, question de règlement.

La Présidente: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Mme la Présidente, vous avez entendu le premier ministre employer le mot «faussetés». Auriez-vous l'obligeance de lui demander de retirer cette parole?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Landry: Ce ne sont pas des faussetés qui mettent en question sa bonne foi, ce sont des faussetés économiques. Il est de bonne foi, mais il n'y connaît rien. C'est ça que je voulais dire, Mme la Présidente.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente: Alors, M. le premier ministre, je crois qu'il serait de bon ton pour le climat de notre Assemblée que nous puissions nous en tenir à des propos plus protocolaires. Je vous prierais de conclure.

M. Landry: Mme la Présidente, le printemps s'en vient, je veux bien contribuer au climat. Je vais dire, à la place de «faussetés», «des monstruosités d'analyse économique rudimentaire». Est-ce que ça pourrait aller?

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente: Alors, je rappelle qu'il ne s'agit pas seulement de ne pas prononcer des paroles interdites, il ne s'agit pas de paroles interdites, mais il s'agit aussi de maintenir un bon climat à la période de questions et de réponses orales. M. le premier ministre.

M. Landry: Bon. Alors, je vais simplement lui dire, Mme la Présidente, que ça m'a un peu choqué d'entendre en cette Chambre un homme aux responsabilités importantes, l'opposition officielle, ne pas faire la différence cruciale entre des emplois dans le primaire et dans le secondaire. Et c'est pour ça que les libéraux ont toujours eu, en matière d'aluminium, des politiques déficientes. Quand un lingot est fabriqué au primaire, ça crée un emploi, et, quand on va au bout de la fabrication secondaire, ça en crée sept. C'est un rapport de 1 à 7. Alors, c'est pour ça que j'ai employé des mots... des mots sonores. Mais, quand on se trompe de 1 à 7, ça vaut la peine d'avoir une petite réplique dans ce sens-là.

La Présidente: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

Survie des écoles de Godbout et de Baie-Trinité

M. Jean J. Charest

M. Charest: Je pense que la population du comté de Saguenay puis de Baie-Comeau aura bien compris que, pour le premier ministre, l'occasion de créer des emplois n'était pas assez bonne, que pour lui ce n'était pas important. Mais, dans le même comté, il n'y a pas juste les problèmes évidemment de création d'emplois, il y en a qui y sont reliés directement. Et, comme le premier ministre semble bien connaître le comté, j'aimerais savoir son intention pour ce qui est des écoles de Godbout et de Baie-Trinité qui sont menacées de fermeture par la commission scolaire, qui a donné un répit d'un an.

Est-ce que le premier ministre, à qui je m'adresse, est prêt à nous confirmer ou à donner une bonne nouvelle aux populations de Baie-Trinité et de Godbout et à affirmer aux comités de parents, qui se battent corps et âme pour la survie de leurs écoles et pour leur communauté, que son gouvernement va permettre à ces écoles de survivre et de rester ouvertes?

La Présidente: M. le ministre.

M. Sylvain Simard

M. Simard (Richelieu): Mme la Présidente, vous aurez compris que nous sommes en période électorale et que le parti d'en face va se faire le promoteur de toute interdiction, de toute fermeture d'école où que ce soit et, évidemment, du maximum d'ouvertures de nouvelles écoles partout où il pense que c'est nécessaire pour gagner quelques votes. Moi, je peux vous assurer, Mme la Présidente, et vous pouvez assurer l'opposition que la commission scolaire est en train d'étudier très soigneusement les diverses options qui s'offrent à elle et que, si ça reste possible ? et nous sommes en discussion ? nous pourrons annoncer de bonnes nouvelles. Mais, entre-temps, faisons donc confiance à la population du Saguenay, faisons donc confiance aux gens qui ont été élus pour analyser ces problèmes, pour nous assurer que, au-delà des trois votes qu'essaie de gagner le chef de l'opposition, une décision rationnelle, une décision qui tienne compte de la volonté de la population, du bien-être des enfants, des nécessités de la pédagogie soit prise. Moi, je fais confiance, Mme la Présidente, à la population de Godbout, à la population du comté de Saguenay et à la commission scolaire qui dialogue actuellement avec eux.

n(14 h 20)n

La Présidente: En principale, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Poursuite des projets expérimentaux
de services intégrés pour personnes
âgées en perte d'autonomie

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, Mme la Présidente. Voici un exemple flagrant d'un gouvernement essoufflé qui fait preuve d'un manque de jugement, qui fait preuve d'un manque de vision, un vrai gouvernement arrogant, Mme la Présidente, et, on vient d'en avoir un bel exemple avec le premier ministre désigné du Québec, un vrai gouvernement de fin de mandat.

Des voix: Bravo!

Mme Loiselle: Mme la Présidente, on m'informe que le nouveau ministre de la Santé, le trio de la Santé a l'intention de ne pas renouveler les deux projets SIPA de Côte-des-Neiges et de Bordeaux-Cartierville, reniant du même coup la parole, l'engagement, la promesse de deux ex-ministres de la Santé, aujourd'hui ministre actuelle des Finances et le ministre de la Population. Il est très difficile de suivre et de comprendre un tel ministre qui veut laisser tomber un projet si novateur que le projet-pilote SIPA, un projet performant mais avant tout un projet humain. En abandonnant le projet SIPA, il abandonne, Mme la Présidente, du même souffle des personnes âgées en perte d'autonomie.

Est-ce que le nouveau ministre de la Santé peut aujourd'hui, dans un geste de bon sens, réviser sa décision et accorder les fonds nécessaires afin de garantir la survie des projets SIPA et respecter du même coup la parole, l'engagement et la promesse de deux collègues au cabinet des ministres?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, le SIPA, pour ceux qui ne le savent pas, c'est un service intégré aux personnes âgées. C'est un projet expérimental qu'on a eu à Montréal sur deux territoires de CLSC, donc Côte-des-Neiges et Bordeaux-Cartierville. Il y avait un engagement pour financer ce projet pendant trois ans. C'est un projet expérimental. Donc, il y a eu une expérience qui a été faite. On est à avoir les rapports d'évaluation. Mais ce qui est important, Mme la Présidente, c'est de s'occuper des personnes âgées, s'occuper de donner des services aux personnes âgées. Donc, il ne faut pas être dogmatique face à un projet.

On s'est assuré, le ministère de la Santé et des Services sociaux s'est assuré, avec la Régie régionale de Montréal, qu'aucune des 300 personnes qui ont participé au projet expérimental ne serait laissée de côté, qu'il va y avoir continuité dans les services, Mme la Présidente, et c'est ça qui est important. Ce n'est pas de tenir un projet expérimental, c'est de s'occuper du monde. Puis je compte sur la Régie régionale puis les gens des CLSC à Montréal pour continuer de s'occuper de ces 300 personnes, Mme la Présidente.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: S'il vous plaît, Mme la Présidente, est-ce que le nouveau ministre de la Santé est au courant que la commission Clair recommandait de généraliser les services intégrés aux personnes âgées, de généraliser le projet SIPA? Est-ce que le ministre de la Santé est au courant que le ministre de la Population, ex-ministre de la Santé, grand chasseur émérite du Québec, lui, il avait dit, le 13 décembre, en Chambre: Nous allons évaluer, évaluer, au cours des prochains jours, la capacité financière, et il est clair, il est très clair que nous allons poursuivre l'expérience?

Si le nouveau ministre de la Santé, Mme la Présidente, ne préfère pas regarder le côté humain du SIPA, qu'il regarde l'aspect économique pour son gouvernement, parce que le SIPA, c'est 15 000 $ par personne par année comparativement à 45 000 par personne dans un centre d'hébergement. Si vous préférez envoyer ces personnes-là, les 300 personnes, dans un centre d'hébergement, c'est que vous n'avez aucune compassion.

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, d'abord, je le répète, ce qui est le plus important, c'est qu'on va s'occuper des personnes. Maintenant, pour ce qui est du projet expérimental, Mme la Présidente, la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne nous dit: Est-ce que vous êtes au courant que c'était une recommandation de Clair? Mais je lui dirais: Est-ce que vous êtes au courant, Mme la députée, que le fédéral avait mis 7 millions dans ce projet-là puis s'est retiré? Est-ce que vous êtes au courant aussi que, dans le rapport Clair, on recommandait d'aller chercher de l'argent à Ottawa pour investir en santé? Appuyez-nous donc pour qu'on aille chercher notre dû à Ottawa.

Des voix: Bravo!

La Présidente: Alors, je vous rappelle à tous que vous devez vous adresser à la présidence dans la période d'échange de réponses et de questions orales, et je rappelle également les termes de l'article 78 du règlement qui prévoient qu'il puisse y avoir plusieurs questions complémentaires mais une seule question à la fois. Alors, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne.

Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Mme la Présidente, est-ce que le nouveau ministre de la Santé est au courant ? puis ça, ce n'est pas le gouvernement fédéral, là ? d'un certain rapport qui s'appelle L'exploitation des personnes âgées en centre de soins public, centre d'hébergement? Ça, c'est votre gouvernement, c'est de votre faute si on exploite les personnes dans les centres d'hébergement parce que c'est vous qui les sous-financez. Alors, pour les 300 personnes...

Des voix: ...

La Présidente: M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: J'apprécie la mise en garde que vous avez faite, Mme la Présidente, mais, à l'évidence, elle n'est pas entendue, à moins que vous ayez reconnu la députée en principale.

La Présidente: Alors, en complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, en vous rappelant que chaque question complémentaire ne doit porter qu'une seule question.

Mme Loiselle: Oui. Est-ce que le nouveau ministre de la Santé est au courant d'un rapport qui s'appelle L'exploitation des personnes âgées, créature de votre gouvernement? Est-ce que le ministre de la Santé peut nous garantir, Mme la Présidente, la parole de son ministre de la Population quand il a dit dans cette Chambre: Notre volonté, elle est très claire, c'est de poursuivre l'expérience SIPA? Est-ce que vous pouvez nous garantir que vous allez poursuivre l'expérience SIPA et ne pas envoyer ces personnes-là dans des centres d'hébergement?

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: Mme la Présidente, je regrette même d'avoir à me lever. Vous-même avez rappelé les dispositions du règlement. On en est à la troisième question additionnelle dans une même question complémentaire. À l'évidence, le règlement est enfreint. À l'évidence, Mme la Présidente, c'est votre autorité qu'on attaque.

La Présidente: Alors, M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, je le répète, et je pense que c'est ce qu'il y a de plus important, on avait 300 personnes âgées dans ce projet expérimental. On va s'assurer du maintien de l'intensité des services qu'ils avaient pendant les trois ans du projet, une par une, une par une, Mme la Présidente. Et, pour ce qui est des investissements, on a augmenté nos investissements en santé de 32 % depuis 1998. On va continuer à gérer selon nos besoins. Mais, s'il vous plaît, les gens d'en face, parlez à vos petits amis à Ottawa pour qu'ils nous aident à bien financer nos services de santé et services sociaux au Québec.

Des voix: Bravo!

La Présidente: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Merci, Mme la Présidente.

M. Mulcair: Mme la Présidente, question de règlement.

La Présidente: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui. Mme la Présidente, c'est la journée pour, mais je veux juste vous rappeler que, selon les précédents, le député indépendant, le député de Rivière-du-Loup, passe normalement avec la quatrième question principale. Vous avez reconnu jusqu'à date le chef de l'opposition, ma collègue la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne. Maintenant, un autre député de l'opposition voulait poser une question, puis, normalement, vous auriez pu reconnaître le député de Rivière-du-Loup après lui. Ils étaient debout en même temps.

La Présidente: Alors, je rappelle aux membres de cette Chambre que le règlement prévoit que l'octroi de la possibilité de poser des questions est laissé à l'initiative de la présidence. Alors, je cède la parole au député de Rivière-du-Loup.

Mode de rétribution du Groupe Vaugeois
pour l'obtention de crédits d'impôt
destinés à des entreprises

M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, Mme la Présidente. Les faits qui entourent la façon dont des entreprises de lobbying ou d'activités connexes sont rémunérées troublent de plus en plus de gens. Henri Massé, le président de la FTQ, disait hier: «Ça manque de transparence. On a beau dire que ce n'est pas contraire à la loi, c'est un manque d'éthique[...]. Quand des entreprises se sentent obligées de les prendre, eux ? les lobbyistes ? pour avoir plus de chances d'avoir des subventions ou des crédits d'impôt, ça commence à être le bout du bout. Ce n'est pas normal.»

n(14 h 30)n

Le gouvernement, dans l'affaire Vaugeois, semble avoir fait verser à des gens qui sont très, très proches du premier ministre, de son entourage, des sommes considérables. D'aucuns pourraient même penser que le programme de crédits d'impôt a été créé sur mesure pour des gens. À Investissement Québec, la porte-parole, visiblement mal à l'aise, disait, sur la rémunération à pourcentage, la rémunération au fur et à mesure des résultats: Personne à l'interne n'était au courant d'une telle pratique.

Alors, ma question au premier ministre: Est-ce que, au moment de mettre en place le crédit d'impôt en question, est-ce que lui était au courant qu'une pratique de rétribution à pourcentage allait amener des retombées directement pour des gens de son entourage? Et, deuxièmement, est-ce que le premier ministre peut nous donner, ou la ministre de l'Économie et des Finances, un ordre de grandeur de millions ou de dizaines de millions qui ont été versés à ce jour?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je trouve le député de Rivière-du-Loup plus perspicace quand il appuie les motions d'intérêt national que quand il cherche à créer de faux scandales. Mais sa question mérite réponse. Je vais essayer d'être le plus méthodique possible. Il a parlé d'Henri Massé. Henri Massé dit qu'il n'est pas normal que les entreprises pensent qu'il faut un intermédiaire pour avoir des subventions. Il a parfaitement raison. Cela n'est pas normal et cela n'est pas le cas non plus, et c'est ce qu'Investissement Québec a dit très clairement. C'est ce que les faits démontrent. L'immense majorité des entreprises qui ont reçu des crédits d'impôt, Cité du multimédia, CDTI, CNE, n'ont jamais utilisé d'intermédiaires ou de lobbyistes. La règle au Québec, c'est qu'on va, si on en est capable, directement au gouvernement, on négocie, et ce sont des programmes normés, ce qui arrive dans la plupart des cas de grandes entreprises, d'ailleurs, parce qu'ils ont un vice-président ou une vice-présidente qui s'occupe de ça.

L'exception, c'est l'entreprise étrangère qui n'a aucun contact à Montréal ou à Québec et qui engage une firme locale pour la guider vers les programmes. C'est une règle universelle et ça se pratique régulièrement. Et c'est aussi la PME qui a deux employés qui sont employés à la production et qui n'ont pas le temps de remplir des formules ou d'examiner les programmes gouvernementaux. C'est le cas le moins répandu, je le redis, grandes entreprises ou PME qui emploient un intermédiaire.

Effectivement, des intermédiaires, une fois le programme mis sur pied, comme c'est le cas, disons, pour les avocats depuis la nuit des temps et pour beaucoup d'autres professions, se sont fait rémunérer au résultat. Ça ne viole pas nos lois, ça ne viole pas nos traditions, sauf que ça choque l'esprit de la population que de l'argent venant des taxes pourrait servir à rémunérer des intermédiaires pour obtenir pour les entreprises cet argent des taxes.

C'est la raison pour laquelle, prenant acte de cette situation, nous allons présenter sous peu une loi exemplaire qui mettra fin à cette pratique et qui la rendra illégale. Cependant, nous sommes dans une société avancée, une société de droit, et on ne va pas dire à une entreprise allemande ou française venue ici dans un contexte juridique qu'on en crée un nouveau pour essayer de les faire passer pour malhonnêtes ou autrement.

J'ai une autre petite chose à dire. La question est importante, Mme...

La Présidente: M. le premier ministre...

M. Landry: Oui. S'il y a une autre question, j'en profiterai pour...

La Présidente: ...vous aurez l'occasion à l'occasion d'une complémentaire. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. La question est très précise: Est-ce que Sylvain Vaugeois a eu une influence sur le design de la politique, sur la préparation de la politique de crédits d'impôt? Et est-ce que le premier ministre, ce faisant, savait qu'en établissant le programme de crédits d'impôt des retombées iraient au Groupe Vaugeois? Question très précise, très simple.

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je remercie le député d'être revenu, parce que... Il pose des questions précises, il a droit à des réponses élaborées.

Il a mentionné le mot «entourage» tout à l'heure, je lui dis que M. Sylvain Vaugeois ne fait pas partie de mon entourage. Je le connais, il connaît beaucoup de monde. Il laisse tomber le nom de Paul Martin, il dit qu'il est même un camarade de jeunesse du chef de l'opposition officielle.

O.K. D'accord. O.K. Il dit ça, et c'est faux. Alors, quand on dit qu'il est de mon entourage, on va s'entendre, M. le chef de l'opposition officielle, c'est faux aussi. Est-ce que...

La Présidente: M. le premier ministre, en conclusion.

M. Landry: Quant au rôle qu'il a joué, Sylvain Vaugeois... Et ça, des dizaines de commentateurs lui ont rendu hommage, il a eu l'idée géniale d'induire la transformation d'un programme existant, que nous avions, de lui donner de l'expansion, ce qui a créé 10 000 emplois à travers le Québec.

Alors, qu'il ait fait des choses qui ne seront plus possibles dans notre nouveau contexte juridique, c'est vrai. Mais qu'il ait eu une très bonne idée, c'est vrai. Et il ne l'a pas vendue au gouvernement. Savez-vous ce qu'il a fait? On a eu rien qu'à lire les journaux. Il a eu sa bonne idée, il a rempli les pages des journaux de chroniques sur le multimédia, il a écrit un livre; on a lu ses pages, on a lu le livre puis on a extensionné le programme. Savoir qu'il allait par la suite se faire rembourser ses services au rendement, il aurait fallu être prophète pour ça. Et c'était déjà beau de fonder le programme, pour être intelligent, mais prophète, non.

La Présidente: En complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, une dernière complémentaire. Est-ce que le premier ministre, ou peut-être la ministre de l'Économie et des Finances, peut confirmer ou infirmer l'idée que cette personne qui visiblement avait une influence, sinon un membre de l'entourage, une personne de grande influence dans le gouvernement pour pousser le gouvernement dans un programme aussi bien précis et si bien «designé» pour lui... est-ce qu'il peut confirmer ou infirmer que cette petite entreprise aurait en quelques années, à partir d'un programme du gouvernement, empoché des millions, probablement des dizaines de millions? Est-ce que vous avez un ordre de grandeur des chiffres?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: D'abord, quand il dit «grande influence sur le gouvernement», il faudrait qu'il dise «les gouvernements», parce que ce programme, il a été instauré pour la venue d'une firme française qui s'appelle Ubi Soft, la deuxième plus grande multinationale des jeux vidéo, et je dis «les gouvernements» parce que c'était un programme partagé par Ottawa et par Québec. J'en déduis qu'à Ottawa ils ont lu aussi le livre de Vaugeois, puis ils ont lu les nombreux articles qu'il a écrits dans les journaux.

Quant à son chiffre d'affaires, franchement, là, ce n'est pas de notre ressort de savoir quel est le chiffre d'affaires des firmes, on ne le leur demande pas quand elles viennent nous voir, et, si elles sont publiques, on lit les rapports annuels. Mais, dans le cas de Vaugeois, qui n'est pas une entreprise publique, son vice-président finances dit que son chiffre d'affaires est de 3 millions de dollars par année, ce qui n'en fait pas encore une transnationale, à ce que je sache.

La Présidente: En principale, M. le...

M. Dupuis: En additionnelle.

La Présidente: En additionnelle. En complémentaire, M. le député de Saint-Laurent.

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si M. Vaugeois, soit par lui-même ou par son Groupe, a été conseiller ou consultant du gouvernement?

La Présidente: M. le premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Je crois qu'il l'a été du temps de Robert Bourassa, oui. Mais, de notre temps, M. Vaugeois ou son Groupe n'a jamais reçu, à ma connaissance et sous réserve de vérifier tous les comptes publics, le moindre contrat du gouvernement, la moindre subvention du gouvernement. Et toujours M. Berlinguette, son vice-président finances, a dit il y a quelques jours que le Groupe Vaugeois avait voulu avoir le contrat pour faire la promotion de la Cité du multimédia dans le monde entier, ce que nous avons refusé. C'est Investissement Québec qui fait la promotion, c'est les délégations générales du Québec. Alors, d'aucune façon M. Vaugeois n'a été conseiller ou consultant du gouvernement, de quelque ministère que ce soit. Je vous l'ai dit, relisez les journaux de l'époque, relisez les commentateurs du Devoir, comme du Journal de Montréal, comme du Soleil. Vaugeois, gratuitement, a étalé sa pensée dans tous les journaux puis, en plus, il a écrit un livre. Alors, qu'on ait acheté le livre ? je crois qu'il devait se vendre 2 ou 3 $ ? ça se peut, mais c'est tout.

n(14 h 40)n

La Présidente: En question principale, M. le député de Saint-Laurent.

Identification de M. Sylvain Vaugeois
à titre de conseiller ou de consultant
auprès du gouvernement

M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Le premier ministre, Mme la Présidente, ne peut pas ignorer que, le 4 octobre 2000, nous avons demandé au ministère des Finances, qu'il dirigeait alors, d'obtenir copie de l'ensemble de la correspondance échangée entre le ministère, M. Sylvain Vaugeois ou le Groupe Vaugeois depuis trois ans. Je déposerai, si vous voulez, cette demande qui est datée du 4 octobre 2000. Le premier ministre...

Document déposé

La Présidente: Consentement pour le dépôt? Consentement.

M. Dupuis: Le premier ministre ne peut pas ignorer non plus bien sûr que, le 6 novembre 2000, nous recevions de la part du ministère des Finances une réponse négative nous refusant l'obtention de la correspondance échangée entre le ministère, M. Sylvain Vaugeois et/ou le Groupe Vaugeois. Or, dans cette lettre-là qui est une lettre de refus, on allègue entre autres un article, Mme la Présidente, l'article 37, qui se lit, au deuxième paragraphe, ainsi: «Il ? en parlant du ministère des Finances ? peut également refuser de communiquer un avis ou une recommandation qui lui ont été faits à sa demande depuis moins de 10 ans par un consultant ou par un conseiller sur une matière de sa compétence.»

Dans les circonstances, comment le premier ministre peut-il soutenir aujourd'hui que M. Vaugeois n'a jamais été conseiller ni consultant, alors que son propre ministère nous refuse d'obtenir la correspondance en alléguant entre autres le fait qu'on ne rend pas publiques les communications d'un consultant ou d'un conseiller?

Des voix: Bravo!

La Présidente: Mme la vice-première ministre et ministre d'État aux Finances.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci beaucoup, Mme la Présidente. Comme nous connaissons la mauvaise habitude du député de Saint-Laurent, qui va à la pêche, qui fait des sous-entendus et qui souvent ne se vérifient d'aucune façon, je prends avis de la question ou du commentaire fait par le député de Saint-Laurent et je reviendrai devant cette Chambre, Mme la Présidente.

La Présidente: En principale, Mme la députée de Jonquière.

Existence d'un avis juridique motivant
le refus d'accès à un document du ministère
de la Santé et des Services sociaux

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Merci, Mme la Présidente. Mme la Présidente, on se rappellera qu'à la dernière session le ministre de la Santé et des Services sociaux de l'époque avait été questionné sur son refus de fournir un document demandé en vertu de la loi d'accès à l'information par l'opposition. Le 28 novembre dernier, le ministre affirmait en cette Chambre, et je le cite: «La personne responsable au ministère de la Santé et des Services sociaux a fait toutes les vérifications nécessaires, a pris les avis du contentieux.»

À une réponse... À une question additionnelle qui lui était posée, le ministre réaffirmait, Mme la Présidente, et je le cite à nouveau: «Il n'y a aucun motif apparent de croire que l'opinion juridique qui a été donnée à ce fonctionnaire dans l'exercice de ses fonctions était complètement en dehors des dispositions de nos lois.» Fin de la citation.

Or, Mme la Présidente, un rapport final de vérification de la Commission d'accès à l'information a été rendu public lundi dernier, et dans le rapport, Mme la Présidente, on y affirme, à la page 12, et je le cite: «Dans les circonstances, le responsable n'a pas consulté les services juridiques du ministère avant de signer sa réponse.»

Mme la Présidente, ma question, c'est: Comment le ministre responsable de l'application, maintenant, de la loi à l'information peut-il avoir dit en cette Chambre, le 28 novembre dernier, qu'il y avait un avis juridique préalable à la réponse qui refusait l'accès aux documents demandés, alors que le rapport d'enquête de la Commission d'accès à l'information révèle le contraire?

La Présidente: M. le ministre d'État à la Santé.

M. François Legault

M. Legault: Oui. Mme la Présidente, on sait que, avant hier, la Commission d'accès à l'information a rendu son rapport public concernant ce dossier. Il y avait dans son rapport six recommandations, et, si on lit bien le rapport, on voit, entre autres, à la page 15 du rapport, on nous dit, et je cite: «Le traitement des demandes d'accès au ministère se fait conformément à la loi.»

Malgré ça, la Commission fait six recommandations et, sur ces six recommandations ? je cite encore une fois les conclusions de la commissaire au dossier: «Elle constate avec satisfaction que le ministère s'est rapidement et entièrement conformé aux prescriptions des recommandations 1, 2 et 6 et elle constate que le ministère s'est engagé en des termes satisfaisants à exécuter les recommandations 3, 4 et 5.» Fin de la citation.

Donc, Mme la Présidente, je pense qu'on peut dire que maintenant cette affaire est réglée, que tout est mis en place au ministère de la Santé et des Services sociaux pour que la loi soit respectée intégralement, et j'invite la députée à bien lire tout le rapport, à ne pas en faire seulement une lecture sélective, elle verra des passages très louangeurs.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Jonquière.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: Mme la Présidente, est-ce que je peux avoir réponse à ma question principale? Comment le ministre aujourd'hui responsable de l'application de la loi sur l'accès à l'information... Ce n'est pas banal, là...

Il nous a dit en cette Chambre que le refus était obtempéré, Mme la Présidente, par le fait qu'il y avait un avis juridique qui cautionnait ce refus. Or, le rapport dit que c'est faux, il n'y a pas, il n'y a pas eu d'avis juridique. Je veux savoir du ministre responsable de la loi d'accès à l'information comment, comment il a pu nous répondre ça le 28 novembre dernier.

La Présidente: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Alors, Mme la Présidente, je pense que le rapport est très clair. Le rapport est très clair. Le ministère en question a effectué correctement son travail. On a demandé, de la part de la Commission d'accès à l'information, qu'il y ait renforcement et correction de certaines procédures, et en notant surtout dans ce rapport qu'il n'y a jamais eu aucun type de pression fait par le cabinet du ministre de l'époque pour la décision qui avait été rendue. Voilà la conclusion, M. le Président.

La Présidente: Toujours en complémentaire?

Mme Gauthier: Toujours en complémentaire, Mme la Présidente.

La Présidente: Mme la députée de Jonquière.

Mme Françoise Gauthier

Mme Gauthier: J'imagine que je m'exprime mal. Je veux savoir: Est-ce que le ministre est capable de nous dire comment il se fait qu'il nous ait répondu que le refus aux documents était basé sur une opinion juridique, alors que le rapport d'enquête nous dit qu'il n'y en a pas eu, d'opinion juridique? La question est assez simple. Est-ce que je dois le dire dans une autre langue, Mme la Présidente?

La Présidente: M. le ministre.

M. Rémy Trudel

M. Trudel: Mme la Présidente, les responsables de l'application de la loi, dans quelque ministère que ce soit, ont à faire les vérifications normales, usuelles, et nous vérifions par ailleurs ces informations et, en cas de différence, de dissension au niveau de la décision prise, on fait appel à la Commission d'accès à l'information. C'est ce qui a été fait, et la réponse est que tout cela s'est effectué en respect de la loi, mais qu'il y a des renforcements qui doivent être apportés au ministère de la Santé et des Services sociaux, et le ministre a bien indiqué que cela a été fait ou est en voie d'être réalisé, M. le Président.

La Présidente: En principale?

Mme Leblanc: En principale, Mme la Présidente.

La Présidente: Mme la députée de Beauce-Sud.

Traitement des documents
confidentiels par le ministère du Revenu

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: En 1997, la Commission d'accès à l'information faisait plusieurs recommandations au ministère du Revenu concernant la transmission de données par fax, dont celle de vérifier l'urgence de communiquer de tels renseignements personnels et, deuxièmement, de remplir une page de mise en garde en y indiquant clairement le caractère confidentiel de l'information.

Or, récemment, nous apprenions que le ministère du Revenu avait encore une fois, Mme la Présidente, fait fi de ces recommandations en envoyant par fax des renseignements personnels et confidentiels de M. Marcel Routhier chez son employeur, portant ainsi atteinte à sa vie privée. Ce document, faxé chez son employeur, a été vu, malheureusement, par plusieurs employés qui ont pris connaissance du document en question, puisque, Mme la Présidente, les renseignements personnels étaient inscrits sur la page de mise en garde. De plus, M. Routhier n'avait nullement été mis au courant de cet envoi par fax chez son employeur.

Alors, Mme la Présidente, est-ce que le ministre du Revenu peut nous expliquer pourquoi, malgré la politique de tolérance zéro dans la protection des données confidentielles, malgré la déclaration de discrétion signée par tous les employés, à chaque année, malgré la directive SM-56 de son ministère, on continue de traiter les renseignements confidentiels avec autant de négligence au ministère du Revenu?

n(14 h 50)n

La Présidente: M. le ministre du Revenu.

M. Guy Julien

M. Julien: Mme la Présidente, je vous dirais que le ministère du Revenu respecte toutes les règles dans la confidentialité. Et même, je reviens souvent pour demander: Est-ce qu'on a un avis de la Commission d'accès à l'information? pour s'assurer que tout ce qui est transmis soit concordant avec la loi. On va même plus loin, dans le projet de loi n° 14, Mme la députée de Beauce-Sud le sait très bien, l'établissement de la concordance entre la loi du ministère du Revenu et la loi de la Commission d'accès à l'information pour s'assurer qu'on ait la même interprétation...

Le cas cité par la députée de Beauce-Sud, j'aimerais en avoir une copie pour faire les vérifications, parce que, vous savez, à 5 500 000 personnes, je suis obligé de vous dire bien humblement que je ne les connais pas tous par coeur. Alors, j'aimerais beaucoup avoir une copie. Je ferai les vérifications et je transmettrai l'information à Mme la députée de Beauce-Sud.

La Présidente: En complémentaire, Mme la députée de Beauce-Sud.

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Oui. Alors, Mme la Présidente, compte tenu que le document qui a été faxé en question contient des renseignements personnels, nominatifs, ça va me faire plaisir de le déposer au ministre lui-même, parce que je sais que c'est dans ses fonctions de le faire. Mais je peux vous assurer que ça a vraiment été bel et bien fait.

Et, en ce cas-là, j'aimerais savoir quelle sanction le ministre entend appliquer au responsable de cette nouvelle bévue?

La Présidente: M. le ministre du Revenu.

M. Guy Julien

M. Julien: Alors, Mme la Présidente, effectivement, la politique du ministère du Revenu, c'est tolérance zéro. Il y a effectivement des sanctions de prévues, de différents niveaux, même jusqu'au congédiement, dépendant de l'importance de cette faute. Alors, on va regarder le dossier. S'il y a lieu d'avoir des sanctions ? parce que je veux vérifier avant de porter un jugement ? on prendra les mesures nécessaires. Mais je tiens à rappeler ceci: Oui, il y a tolérance zéro. 96 % des gens font de l'autocotisation. Pourquoi? Parce qu'ils ont confiance au système qui est établi, et on s'assure qu'il soit respecté.

La Présidente: M. le député de Westmount? Saint-Louis.

Études de caractérisation des terrains
du futur siège social de la Société des alcools

M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, Mme la Présidente. Ma question s'adresse ? je le dis à l'avance pour lui permettre de se préparer ? à la ministre des Finances, qui est aussi responsable de la Société des alcools du Québec. Elle se souviendra qu'elle m'a dit, à la fin de la session passée, que le terrain sur lequel on érigera le futur siège social, l'agrandissement du siège social de la Société des alcools, est un terrain contaminé.

Alors, Mme la Présidente, ma question est la suivante: Est-ce que la ministre a demandé des études de caractérisation pour la contamination des sols du futur terrain, ou du terrain du futur siège social de la Société des alcools du Québec? C'est mieux dit?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chagnon: Et, deuxièmement, évidemment, Mme la ministre, j'en profite, puisque notre temps est écoulé, je lui demanderais: Quand... elle a reçu ces études de caractérisation, quand compte-t-elle les rendre publiques? Et aussi: Quels ont été les coûts de décontamination, s'ils ont été commencés?

La Présidente: Mme la vice-première ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, Mme la Présidente. Mon collègue le leader et ministre des Affaires municipales aurait souhaité, je crois, que notre collègue le questionne sur ce qui se passe à Montréal, ça aurait été particulièrement intéressant. Ça reviendra plus tard.

Mme la Présidente, je vais répondre à toutes les questions techniques soulevées par notre collègue dès que l'occasion m'en sera présentée, demain ou mardi prochain.

La Présidente: Alors, c'est donc la fin de la période de questions et de réponses orales.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée
déplore le manque de vision et de leadership
du gouvernement dans la mise en oeuvre
des recommandations du rapport Clair

Aux votes reportés... Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de M. le député de Châteauguay présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale déplore vivement le manque de vision et de leadership du gouvernement du Parti québécois dans la mise en oeuvre des recommandations du rapport Clair.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Charest (Sherbrooke), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Rochefort (Mercier), M. Gobé (LaFontaine), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), Mme Beauchamp (Sauvé), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), Mme Boulet (Laviolette), Mme Gauthier (Jonquière), M. Cholette (Hull),

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

La Présidente: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Landry (Verchères), M. Boisclair (Gouin), Mme Marois (Taillon), M. Simard (Richelieu), Mme Beaudoin (Chambly), M. Charbonneau (Borduas), M. Legault (Rousseau), Mme Goupil (Lévis), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Ménard (Laval-des-Rapides), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Jutras (Drummond), M. Julien (Trois-Rivières), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Rochon (Charlesbourg), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Baril (Arthabaska), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Bertrand (Portneuf), M. Legendre (Blainville), M. Simard (Montmorency), M. Morin (Nicolet-Yamaska), Mme Lemieux (Bourget), M. Facal (Fabre), Mme Maltais (Taschereau), M. Côté (La Peltrie), M. Boucher (Johnson), Mme Charest (Rimouski), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Caron (Terrebonne), M. Geoffrion (La Prairie), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Bertrand (Charlevoix), M. Côté (Dubuc), M. Kieffer (Groulx), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Lachance (Bellechasse), M. Paré (Lotbinière), M. Beaumier (Champlain), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Rioux (Matane), Mme Doyer (Matapédia), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), Mme Blanchet (Crémazie), M. Cousineau (Bertrand), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Lelièvre (Gaspé), M. Bergeron (Iberville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Boulianne (Frontenac), Mme Barbeau (Vanier), M. Pagé (Labelle), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Désilets (Maskinongé).

La Présidente: Y a-t-il des abstentions?

M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour: 39

Contre: 58

Abstentions: 0

La Présidente: La motion est rejetée.

Motions sans préavis

Et nous en sommes aux motions sans préavis. Mme la ministre d'État aux Relations internationales et ministre responsable de la Francophonie.

Souligner la Journée
internationale de la francophonie

Mme Beaudoin: Oui, Mme la Présidente. Cela fait quelques années que cette Assemblée souligne la Journée internationale de la francophonie. En proposant la motion suivante... Est-ce que je dois la lire immédiatement, Mme la Présidente?

Des voix: Oui.

La Présidente: Oui.

n(15 heures)n

Mme Beaudoin:«Que l'Assemblée nationale souligne le caractère particulier pour le Québec de la Journée internationale de la francophonie, qu'elle réaffirme son attachement aux institutions de la

francophonie et qu'elle exprime sa solidarité à l'égard des peuples qui ont le français en partage.»

Et vous me permettrez, Mme la Présidente, de souligner la présence de plusieurs des consuls, consuls généraux de pays membres de la francophonie qui sont soit à Québec soit à Montréal mais qui sont venus pour la journée ici fêter avec nous.

La Présidente: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? J'entends bien qu'il y a consentement pour qu'il y ait deux interventions de chaque côté. Alors, Mme la ministre d'État.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, Mme la Présidente. Donc, en proposant cette motion, j'invite l'Assemblée à poursuivre cette tradition, cette journée ayant indéniablement pour le Québec une signification particulière. En effet, elle marque pour nous une date historique, celle du 20 mars 1970, jour de la création, à Niamey, au Niger, de l'Agence de coopération culturelle et technique, amorçant le processus par lequel le Québec devint membre de plain-pied d'une organisation internationale lui permettant un dialogue direct avec 54 autres États et gouvernements.

La francophonie s'avère ainsi une des applications les plus parlantes de la doctrine Gérin-Lajoie sur le prolongement externe des compétences internes du Québec. S'agissant d'un lieu où le Québec agit directement sur le plan international, la francophonie compte pour le Québec, et c'est pourquoi le Québec s'y investit, ayant à coeur une francophonie dynamique, moderne et engagée envers la démocratie et le dialogue des cultures dont notre monde a un si profond besoin.

La Journée du 20 mars vient aussi rappeler aux Québécois et aux Québécoises le fait que leur langue officielle, le français, est non seulement une langue internationale, mais que, dans la diversité humaine, elle figure parmi ces grandes langues qui ont vocation à l'universel. C'est pourquoi l'Organisation internationale de la francophonie doit jouer un rôle primordial dans la promotion de la langue française en s'appuyant sur des membres capables d'assurer le rayonnement et le développement du français dans leur pays et sur le plan international.

Les pratiques démocratiques et le respect des droits et libertés de la personne sont une autre grande préoccupation qui doit accompagner l'action de la francophonie. Le Québec, vu son expérience et ses réformes, vu la force de ses institutions, a beaucoup à offrir en ces matières. J'ai souligné devant l'Association des parlementaires de la francophonie, réunie en juillet 2001 ici, à Québec, que cette Association a un rôle primordial à jouer dans la mise en oeuvre des engagements de Bamako. J'invite les députés de l'Assemblée nationale à poursuivre leur action dynamique au sein de ce forum des parlementaires, d'autant plus que le Québec en assume la présidence cette année.

En juin 2001, dans la foulée du Sommet de Moncton de 1999, la francophonie s'est enrichie de la Déclaration de Cotonou sur la diversité culturelle, un geste qui la place à l'avant-garde des organisations internationales dans ce dossier d'une extrême importance. Depuis, l'UNESCO a adopté, le 2 novembre 2001, la Déclaration universelle sur la diversité culturelle. Au Forum social mondial de Porto Alegre en février dernier, la nécessité de sauvegarder cette diversité fut au coeur du message du Québec, de même qu'à Munich, en janvier, lors de la Conférence des chefs de gouvernement organisée par la Bavière, à laquelle Conférence assistait le Québec.

La diversité culturelle s'avère la condition première du dialogue des cultures, thème du Sommet de Beyrouth qui se tiendra en octobre prochain. La francophonie est un lieu naturel pour ce dialogue, car elle se veut depuis longtemps respectueuse des différences entre ses membres, le Nord, le Sud, l'Orient et l'Occident s'y rencontrant. L'apport de la francophonie au dialogue entre les cultures et les civilisations a d'ailleurs été souligné dans une résolution de l'Assemblée générale des Nations unies adoptée en décembre 2001. Lors du Sommet de Beyrouth, le Québec continuera son travail en vue d'une meilleure protection de la diversité culturelle, car il faut, en cette matière, que soit créé un traité, une convention, un instrument international contraignant qui consacre le droit des États à promouvoir la culture française, bien évidemment, mais la culture de chacun des États et des gouvernements.

Récemment, le président de la France, M. Jacques Chirac, souhaitait que la Déclaration universelle sur la diversité culturelle de l'UNESCO, et je le cite, «forme le point de départ d'une convention internationale». La déclaration de Cotonou affirme l'appui de la francophonie au principe d'un cadre réglementaire international, à caractère universel, favorable à la promotion de la diversité culturelle. La francophonie participe donc activement à l'un des grands débats de ce siècle visant à humaniser la mondialisation. Voilà un bon exemple d'une francophonie dynamique.

Il faut également une francophonie moderne, et le Québec se réjouit de pouvoir contribuer à cette modernité en appuyant l'insertion des pays francophones dans la société de l'information. La maîtrise de la modernité constitue l'une des grandes priorités qui guident l'action du Québec en francophonie, avec la promotion du français, le droit des cultures à l'existence et l'affirmation des principes de la démocratie.

M. le Président, c'est avec joie et fierté qu'on fête aujourd'hui l'appartenance du Québec à la francophonie, organisation où le Québec est en mesure de parler de sa propre voix. Cette fête se traduit par une multitude d'activités de par le monde et au Québec, dans les grandes villes comme en région. Nous avons fêté, ce midi, la députée de Jean-Talon et moi-même, en compagnie d'un groupe de théâtre provenant d'Afrique. En fait, ce sont de jeunes étudiants africains qui sont à l'Université Laval qui nous ont entretenus pendant une quinzaine de minutes et qui nous ont fait connaître la poésie de Léopold Senghor et d'Aimé Césaire. Il y avait aussi une jeune pianiste et chanteuse d'origine arménienne et libanaise vivant au Québec, et Laurence Jalbert. Nous avons donc passé une heureuse heure du midi.

Alors, cette fête de la francophonie représente une occasion de rayonnement pour la langue française et pour toutes ces identités culturelles qui peuplent une francophonie plurielle. J'invite donc, M. le Président, l'Assemblée à appuyer la motion que je présente aujourd'hui. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant la porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations internationales. Mme la députée de Jean-Talon, la parole est à vous.

Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: M. le Président, merci. Alors, il me fait plaisir, au nom de l'opposition officielle, d'appuyer cette motion qu'a présentée la ministre des Relations internationales et qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale souligne le caractère particulier pour le Québec de la Journée internationale de la francophonie, qu'elle réaffirme son attachement aux institutions de la francophonie et qu'elle exprime sa solidarité à l'égard des peuples qui ont le français en partage.»

J'aimerais, M. le Président, profiter de cette Journée internationale de la francophonie pour approfondir quelque peu sa signification et sa portée à un moment de l'histoire du Québec et de celle des autres partenaires aussi qui ont à coeur l'avenir de la langue française aussi bien dans sa dimension humaine que communautaire. Cette Journée est aussi le moment que choisissent les francophones et les francophiles pour exprimer leur amour et leur grand attachement à la culture et à la langue française. La Journée internationale de la francophonie est devenue l'occasion dans l'année de témoigner de notre engagement à garder vivante cette langue magnifique, cette culture si riche, et en assurer son rayonnement.

Le Parti libéral du Québec désire partager cette grande fête avec tous ceux et celles dont le souci de la qualité de la langue française constitue un véritable défi de société. Le Québec tout entier a toujours ressenti ce désir de protéger et de promouvoir sa langue, sa culture, ses valeurs en partie fondées sur un sentiment de devoir se battre pour conserver ses acquis culturels afin d'en transmettre l'essentiel aux générations qui suivront.

La population québécoise a toutes les raisons d'être fière de sa langue. Elle a constitué une bonne partie de son histoire, de ses batailles et, enfin, nous rassemble dans un milieu commun qu'est notre manière de vivre, notre façon de penser, bref notre manière d'être. Elle témoigne également de notre passé, car notre lutte pour sa survie, sa protection et sa promotion en est une de tous les instants.

Des débuts de la colonisation à l'époque moderne dans laquelle nous évoluons aujourd'hui, nous sommes passés par tous les niveaux de passion, d'émotivité et d'acharnement à vouloir, comme société, défendre et promouvoir ce qui nous est le plus cher au monde, la langue française. Avec raison, nous n'acceptons aucun compromis qui puisse mettre en péril notre sens de fierté et notre position sans cesse menacée de minorité au sein de l'Amérique du Nord. Cette fierté de francophonie, nous voulons toujours l'occuper à part entière. C'est à une véritable croisade que furent historiquement appelés ceux et celles qui ont à coeur les intérêts culturels du Québec.

n(15 h 10)n

Le Québec a assisté depuis sa naissance à des débats marqués au coin de la passion et de l'émotivité sur les questions reliées à la langue française. La culture québécoise constitue en soi tout un défi pour chacun et chacune d'entre nous, et ce, à plusieurs moments donnés dans notre vie. Tous et chacun, nous partageons cette volonté de vivre dans un contexte où la langue française ne disparaîtra jamais. Et, pour mieux vivre notre culture, pour s'assurer de la pérennité de notre langue, pas de doute que nous continuerons, à titre de société et à titre d'individus, d'en améliorer le contenu et la qualité de ce mode d'expression que nous partageons tous et toutes.

Mme la Présidente... M. le Président, pardon, je rappelle que c'est le 20 mars 1970, à Niamey, au Niger, que fut signé le traité créant la première organisation intergouvernementale de la francophonie. On l'appelle l'Agence de coopération culturelle et technique. Depuis 1988, cette date est choisie pour célébrer la Journée internationale de la francophonie. Nous nous devons de souligner également que la francophonie, c'est la communauté des peuples parlant le français ou l'utilisant à des degrés divers dans leurs pays respectifs ou dans le cadre de leurs relations internationales. Aujourd'hui, la présence, et l'affirmation, de la francophonie est portée sur la scène mondiale. La communauté francophone constitue un ensemble regroupant près de 600 millions de personnes dispersées dans 55 pays et gouvernements et réparties sur cinq continents. Elle comprend des pays riches comme des pays moins nantis, des pays aux régimes politiques différents et aux cultures fort variées. De plus, parmi les 500 langues et idiomes mondiaux, le français occupe la place de deuxième langue étrangère après l'anglo-américain. Langue officielle des nouveaux États africains d'après la décolonisation, il est aussi une langue internationale largement pratiquée.

Tous les partenaires de la francophonie maintiennent un dialogue constructif en réitérant la justesse d'accord passés mais aussi en inaugurant d'autres types d'accords qui répondent aux priorités d'aujourd'hui et de demain. Ils tentent d'innover par des projets encore mieux adaptés aux réalités d'ici et d'ailleurs. Par exemple, l'ouverture des frontières de communications a pris diverses formes, comme celle de l'Internet, qui exigent de tous les francophones de la planète de se positionner sur ce nouveau mode d'expression. La bataille pour que le français occupe une place de choix est tout aussi difficile à mener sur la toile mondiale que celle qu'avaient entreprise nos ancêtres pour que ne disparaisse pas notre langue ici, au Canada et au Québec. Qu'on se rappelle la tenue des sommets de la francophonie qui ont suivi un cheminement intéressant en ce qu'ils ont pu rassembler les pays dont la langue d'usage est le français vers une plus grande cohérence au niveau de sa vision et de sa philosophie d'action. Il a fallu près d'un demi-siècle pour que la francophonie devienne une réelle institution politique.

Avant 1986, date de la tenue du premier Sommet à Paris, les organisations et les associations se sont lentement mises en place. De 1960 à 1970, sous l'impulsion de Léopold Senghor, Hamani Diori et Habib Bourguiba, les pays nouvellement indépendants ont manifesté leur désir de tisser entre eux, à travers une langue commune ? le français ? des relations d'échanges culturels et linguistiques, et c'est lors de la Conférence de Niamey, en 1970, que le premier organisme intergouvernemental de la francophonie a été mis sur pied.

M. le Président, je m'en voudrais de ne pas souligner le rôle joué par le Canada et le Québec en 1987 lors du deuxième Sommet de la francophonie à Québec, où fut établie la cadence bisannuelle des sommets. De nouveaux champs de coopération se sont développés en matière d'agriculture et d'énergie. On se rappellera aussi que Québec fut l'hôte d'un important rendez-vous au printemps 2001 alors que les chefs de gouvernement démocratiquement élus de 34 pays de l'Amérique du Nord, de l'Amérique centrale, de l'Amérique du Sud et des Antilles se réunirent dans la ville de Québec dans le cadre du troisième Sommet des Amériques. À cette occasion, non seulement les élus de ces 34 pays ont-ils eu l'occasion de s'exprimer, mais également ceux et celles qui se sont donné le mandat de faire valoir leur point de vue en organisant ce qu'on se rappellera être le Sommet des peuples, et ce, en français. On a alors réclamé «d'autres Amériques» basées non sur la libéralisation du commerce et des investissements, mais sur la démocratie, la justice sociale et le développement durable.

M. le Président, la question des francophones hors Québec mérite également une attention toute particulière. Depuis longtemps, les données statistiques sont alarmantes. Le défi pour les francophones hors Québec pour la survie de la langue française, c'est une bataille de tous les instants. Qu'il suffise de savoir qu'en 1991 on comptait 976 415 francophones minoritaires qui forment, si on inclut le Québec, 15 % de la francophonie canadienne. Ce nombre est supérieur à la population totale de chacune des provinces suivantes: Terre-Neuve, Île-du-Prince-Édouard, Nouveau-Brunswick et Saskatchewan. La moitié des francophones hors Québec habitent en Ontario et constituent de ce fait la plus grande minorité francophone au Canada, bien qu'elle ne forme seulement que 5 % de la population de cette province.

Mais le contexte global de la lutte des francophones hors Québec pour faire valoir leurs droits n'est ni simple ni facile et les moindres victoires sont perçues, avec raison, comme de grandes réalisations. Qu'on pense à la bataille remportée par la communauté franco-ontarienne dans le cas des services en français à l'hôpital Montfort; qu'on pense aussi à la récente décision qui oblige le gouvernement du Nouveau-Brunswick à traduire toutes les décisions dans les deux langues, qu'elles soient en anglais ou en français, pour permettre aux citoyens d'obtenir les services dans leur langue. M. le Président, la vigilance s'impose partout au Canada, et ce, au nom de la survivance et de la promotion de la langue française.

Je ne peux terminer cette allocution, M. le Président, sans vous parler de la vision qu'a le Parti libéral du Québec à l'égard de la francophonie et de son affirmation en Amérique du Nord. Le Parti libéral du Québec constate d'abord que le Québec a un destin particulier en Amérique du Nord: il doit promouvoir et défendre la langue française et la culture québécoise tout en se montrant ouvert et accueillant aux larges segments de sa population qui originent de tous les coins de la planète. En ce sens, pour nous, l'identité québécoise est à la fois singulière et plurielle, et, cette identité, M. le Président, les gouvernements libéraux qui se sont succédé l'ont encouragée sous toutes ses formes en donnant au gouvernement un rôle de soutien et d'accompagnateur à tous les intervenants intéressés de près ou de loin à cette cause qui nous tient tant à coeur.

Le Québec a tissé, au fil des ans, avec les francophones de toutes les provinces et ceux de la cinquantaine d'autres pays, des liens afin de consolider cette solidarité entre les communautés qui croient en cette collaboration et cette entraide pour promouvoir la cause de la langue française. Nos gouvernements ont démontré qu'il était possible à toutes les communautés francophones de se bâtir une identité collective et à bâtir une nation inclusive et pluraliste.

M. le Président, je ne peux terminer cette allocution sans féliciter les récipiendaires de l'Ordre des francophones d'Amérique qui ont été décorés tout récemment. Et, si vous me permettez, je vais les nommer: il s'agit de l'Acadien Gérald Boudreau, du Franco-Ontarien Guy Matte, de la Franco-Manitobaine Maria Chaput, de l'Américain Warren Perrin, de MM. André Marier et Jean Paré, du Québec, et du recteur des sciences humaines à l'Université de Moscou, Youri Afanassiev. Toutes ces personnes, à leur manière, se sont impliquées dans la francophonie et ont mis à contribution toutes leurs énergies et leurs compétences pour s'assurer de l'émancipation et du rayonnement du français dans leur propre milieu.

Alors, M. le Président, c'est avec plaisir que j'appuie cette motion qui est proposée par la ministre des Relations internationales. Je joins ma voix à tous ceux et celles qui aujourd'hui célèbrent le fait français dans le monde et je leur souhaite une agréable fin de journée.

Des voix: Bravo!

n(15 h 20)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Jean-Talon. Alors, je cède maintenant la parole à M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et ministre responsable des Relations avec les communautés francophones et acadiennes. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jean-Pierre Charbonneau

M. Charbonneau: Merci, M. le Président. Cette Journée est à la fois une journée de rappel et une journée d'appel. C'est d'abord une journée de rappel parce qu'il faut bien voir quelle est notre situation ici, au Canada, sur le continent et au plan planétaire pour comprendre l'importance de cette Journée de la francophonie et des institutions de la francophonie qui ont été mises en place depuis un certain nombre d'années.

Dans un des quotidiens importants du Québec, aujourd'hui ?Le Devoir, pour ne pas le nommer ? on a trois quarts de page, à la page des idées, d'un texte de Boutros Boutros-Ghali qui est le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie. Le titre, c'est La langue française, une espèce menacée? Si, dans le fond, on a organisé la francophonie il y a un certain nombre d'années, c'est parce qu'il y a déjà un certain nombre d'années que beaucoup de gens à travers le monde, et particulièrement au Québec, ont compris que notre situation de francophones, la langue que nous parlons ici, au Québec, pour la très grande majorité d'entre nous, est une langue qui est passablement minoritaire sur la planète.

On dit dans un texte, celui dont je parlais il y a quelques instants, qu'il y a 170 millions de personnes qui sont des locuteurs de la langue française; mais, en fait, ce n'est pas exact, c'est 170 millions de personnes qui vivent dans des pays de la francophonie. Mais, dans les pays de la francophonie, une bonne partie, surtout dans la francophonie en voie de développement, des pays où la majorité des gens n'ont pas le français comme langue maternelle, ce n'est pas la majorité de la population qui parle français. Même si, dans certains cas, on a le français comme langue officielle de l'État et de l'organisation étatique, la réalité humaine, sociologique, ethnique, culturelle de ces peuples-là, de ces pays-là, c'est une réalité où le français est une langue seconde, une langue apprise. Et, quand on regarde la réalité de 6 milliards à peu près d'habitants sur la planète, on se rend compte que la réalité des gens qui parlent français tous les jours dans leur vie quotidienne, qui le parlent à la maison, qui le parlent au travail, qui le parlent à tout instant, qui rêvent en français est beaucoup plus limitée.

Et c'est vrai aussi pour le Québec. On vit dans un continent, si on parle de l'Amérique du Nord, où nous sommes entourés de deux grands peuples qui ont l'anglais comme langue d'usage, langue maternelle, la grande langue, et qui est également la langue de l'empire aujourd'hui et de la grande civilisation qui domine la planète depuis déjà un certain nombre de temps. Et notre réalité, c'est qu'à peine 2 % des habitants de l'Amérique du Nord parlent français, à peine 1 % des habitants de l'ensemble des Amériques, et on est à une époque où on parle de la continentalisation des Amériques, on parle du regroupement des 34, 35 pays des Amériques dans une zone de libre-échange hémisphérique où inévitablement il n'y aura pas que des échanges économiques, il y aura aussi des échanges culturels et autres. À peine 1 % des presque 700 millions de gens qui vivent dans les Amériques parlent français.

Et, au Canada, quelle est la réalité? La réalité, c'est qu'il y a 90 % des gens qui parlent français à tous les jours, qui rêvent en français, qui ont le français comme langue d'usage, langue maternelle, mais surtout langue d'usage. La réalité, c'est que 90 % de ces gens-là vivent au Québec. Et c'est parce qu'on était déjà très conscients de cette situation et qu'on était aussi très conscients il y a déjà un certain nombre d'années qu'on était dans un processus de déclin. Les statistiques sur la démographie sont sorties la semaine dernière pour nous rappeler que la situation des francophones et celle du Québec, entre autres, est en déclin démographique. Et ça existait, cette situation, déjà quand on a organisé la francophonie institutionnelle il y a plusieurs années. Et on voyait poindre l'avenir. Quand on pense que, dans ce pays, quand il a été créé, cette fédération a été créée, il y avait presque 40 % de la population qui parlait français, qui se disait francophone, et aujourd'hui moins de 24 % ou autour de 24 % à peine qui parlent français... Et 90 % de ces francophones, de ces parlant français, ils vivent au Québec, ici. Alors, ça nous a, nous, donné une responsabilité particulière et ça nous a donné un intérêt particulier.

Quand la motion de ma collègue la ministre parle du caractère particulier pour le Québec, pour le Québec, c'est parce que notre situation de minoritaires et de locuteurs francophones dans une planète où le français est minoritaire est de plus en plus menacée et où notre situation nord-américaine, continentale et même notre situation au Canada est fragile, fragilisée. Alors, voilà la raison pour laquelle c'est si particulier pour nous, parce que cette situation de fragilisation de notre identité, de notre langue et la minorisation de notre réalité, de notre langue, chez nous comme partout au monde, évidemment, ça doit nous préoccuper et ça nous a préoccupés depuis très longtemps, et c'est ce qui fait qu'on a mis sur pied cette francophonie institutionnelle.

Elle a commencé par l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, qui était une association, mais elle a commencé d'abord par l'idée de quelqu'un qui n'avait pas le français comme langue maternelle, qui était allé à l'école, qui était un colonisé du Sénégal de l'Empire français, à l'époque, Léopold Sédar Senghor, et qui, malgré ça, malgré le combat qu'il a fait pour l'indépendance de son peuple et de son pays et, par la suite, ayant reconnu le caractère à la fois universel et civilisationnel de la langue française et de ce qu'elle peut apporter comme richesse et comme solidarité, a passé par-dessus ses rancoeurs, ses rancoeurs à l'égard d'un passé colonial qui était dur pour lui puis pour son peuple, et il a fait la promotion de l'usage du français et d'une solidarité entre ceux qui sont de langue maternelle française et ceux qui ont le français malgré tout en partage comme langue seconde et qui sont conscients de l'importance de la réalité francophone. Et c'est Léopold Sédar Senghor qui, le premier, a fait l'invitation, a lancé l'idée de la francophonie organisationnelle et institutionnelle et qui a finalement aussi indiqué que les parlementaires que nous sommes devraient s'organiser.

Et les parlementaires, avant les gouvernements, se sont organisés, se sont donné une association, l'Association internationale des parlementaires de langue française, qui est devenue, quand la francophonie institutionnelle a connu une nouvelle vigueur parce que les gouvernements ont décidé de s'intéresser ou de s'engager plus profondément à organiser des sommets de la francophonie, des sommets gouvernementaux, à ce moment-là cette Association est devenue l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, que j'ai eu le plaisir, et l'honneur, et le privilège de présider jusqu'à il y a quelques semaines alors que j'ai été appelé au Conseil des ministres et que j'ai dû démissionner de ma fonction de président de l'Assemblée nationale. Mais je crois que c'est important, ici, à l'Assemblée nationale, qu'on se rappelle qu'une des premières organisations de la francophonie, ça a été une organisation de parlementaires, d'individus d'abord, mais appuyés par leurs institutions, et qui est devenue une véritable assemblée parlementaire par la suite.

Et à un moment donné est arrivé enfin ce qui devait arriver, c'est-à-dire qu'il y avait une structure internationale qui balisait ou encadrait la coopération internationale à l'intérieur de la francophonie. À un moment donné, on a senti qu'il fallait aller plus loin. Il fallait l'impulsion des gouvernements, il fallait que les chefs d'État de chacun des pays et des États qui avaient le français comme langue importante dans sa société s'assoient régulièrement les uns avec les autres, discutent et, finalement, donnent des directions, des orientations, des ressources et des moyens pour faire en sorte qu'on puisse stopper le processus de fragilisation et stopper le processus de minorisation, et, tout au moins, maintenir les acquis, et faire en sorte que le français reste une des grandes langues civilisationnelles de notre époque.

Il faut se rappeler, et ce n'est peut-être pas toujours agréable pour certains de l'entendre, mais, que n'eût été du combat québécois et des solidarités ailleurs qu'au Canada, on n'aurait pas été partie prenante du club de la francophonie comme membre à part entière. C'est pour ça aussi que c'est si particulier pour nous, parce que la France nous a aidés, parce que les Africains nous ont aidés, parce que d'autres nous ont aidés à faire comprendre à Pierre Elliott Trudeau, à l'époque, qui ne voulait pas comprendre... Il ne voulait pas comprendre que le Québec, qui représente 90 % des francophones du Canada, avait, comme État fédéré, sa responsabilité d'être à la place... au concert des nations de la francophonie. C'est ça qui est arrivé. Et ça, je comprends que ça puisse agacer certains, mais la Journée internationale de la francophonie, je l'ai dit, c'est une journée de rappel, de rappeler pourquoi on est dans ce club-là, pourquoi c'est si important pour nous, parce qu'on a failli ne pas y être. Il a fallu se battre pendant longtemps et développer beaucoup d'alliances, beaucoup d'amitiés pour que, à un moment donné, au niveau fédéral, quand il y a eu un changement de premier ministre, et même un changement de parti à Ottawa...

n(15 h 30)n

Ce n'est pas le Parti libéral du Canada qui nous a fait ce cadeau-là, c'est un autre premier ministre. C'est un premier ministre conservateur qui venait du Québec, lui aussi, puis qui, curieusement, était d'origine irlandaise, qui a compris cette réalité et qui a accordé la possibilité au Québec d'être partie prenante comme un État, au même titre que les autres, et de parler au nom, finalement, de sa responsabilité qui est d'être le coeur de la francophonie non seulement du Canada, mais des Amériques.

Et maintenant c'est aussi, comme je le disais, M. le Président, une journée d'appel. Parce qu'après les rappels de notre situation puis un peu du passé qui nous amènent à nous exprimer aujourd'hui, il faut se rendre compte que, si on veut stopper ce processus de minorisation et si on veut stopper ce processus de fragilisation, il y a une responsabilité d'abord des individus, de ceux qui ont le français comme langue maternelle, de ceux qui ont le français comme langue seconde, qui sont solidaires et qui font du français quelque chose d'important dans leur vie à eux et dans la vie de leur société, de leur communauté. Nous avons la responsabilité, dans nos actions de tous les jours, privées comme publiques, de faire en sorte que le français reste la langue importante pour nous et reste une langue importante pour les gens qui pensent que cette langue-là n'a pas d'avenir, y compris dans nos sociétés respectives, qui pensent que ou bien le combat est perdu d'avance ou encore que le combat n'est pas à faire parce que nous sommes très majoritaires.

C'est le cas parfois au Québec parce que la majorité de la population québécoise est dans une réalité francophone. On oublie qu'on a des responsabilités de protection et des réflexes à conserver de protection, pour éviter qu'on tombe sur une passe défensive. Je vois notre ami et mon bon ami le Consul général de France à Québec. Il sait très bien que, lui aussi, dans son pays, la situation est telle que les Français, souvent, sont inconscients de la fragilité du français parce qu'ils sont majoritaires, une grosse société majoritaire dans son pays. Mais, souvent, nos cousins Français adoptent aussi un langage qui met en danger la réalité française et l'usage du français en France et ailleurs.

Et si ce n'était que des individus, mais parlons des organisations maintenant. Et c'est ce que Boutros Boutros-Ghali nous disait ce matin: Les organisations dans le domaine de la recherche, dans le domaine du développement économique, dans le domaine de la vie publique, et sociale, et communautaire et économique, un peu partout, beaucoup de gens en francophonie abandonnent, et ça, c'est dramatique. C'est rendu à un point où même les organisations internationales où on avait de l'avance, comme l'Union européenne, où le français est la langue qui était la plus parlée, est devenue une langue moins parlée, parlée par une minorité de délégations, y compris par des délégations francophones.

Et, dans ce sens-là, M. le Président, je crois que, quand le secrétaire général de l'Organisation internationale de la Francophonie nous interpelle et nous dit: Est-ce que la langue française n'est pas une espèce menacée, et qu'il plaide pour la diversité, la préservation de la diversité... Souvent, nos compatriotes, qui sont très sensibles maintenant aux questions écologiques, sont rapides sur la gâchette pour s'émouvoir de la disparition possible de telle ou telle espèce végétale ou animale. Mais on nous dit aujourd'hui qu'à toutes les deux semaines une langue disparaît sur la planète. Et le français, encore une fois, je rappelle ce que j'ai dit au début, n'est pas une langue à ce point parlée par un si grand nombre dans le monde qu'on puisse penser que, pour l'éternité, elle est protégée et sauvegardée.

Et c'est dans ce sens-là que nous avons la responsabilité, lors d'une journée comme celle-ci, c'est-à-dire la Journée de la francophonie, non seulement de nous rappeler de l'importance des institutions que nous avons mises en place pour organiser la coopération intergouvernementale ou interétatique ou intersociétés à l'égard de la francophonie, mais nous avons aussi la responsabilité d'interpeller nos compatriotes et nos concitoyens et concitoyennes, ici comme ailleurs, pour leur rappeler que cette langue-là et cette réalité-là sera toujours menacée et qu'il y aura toujours des efforts considérables à faire pour faire en sorte qu'elle soit maintenue et protégée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires intergouvernementales canadiennes et député de Chapleau. M. le député, la parole est à vous.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. M. le Président, il me fait plaisir, sur un autre ton probablement, mais il me fait plaisir de joindre ma voix à tous ceux et celles qui veulent souligner la Journée internationale de la francophonie.

La solidarité entre les francophones dans le monde est une nécessité, ne serait-ce que pour continuer à imposer la langue française dans un contexte de mondialisation. D'ailleurs, on ne saurait trop insister sur l'importance de la diversité culturelle et de la diversité linguistique, de nos jours.

M. le Président, en français, on fait une habile distinction entre la mondialisation et la globalisation. La mondialisation implique que chaque culture et chaque langue ait une place bien à elle, implique aussi un partage entre les cultures et les langues, alors que la globalisation renvoie à un modèle unique et ouvre la porte à l'américanisation de la planète. Le Québec, étant voisin des États-Unis, est particulièrement exposé à l'influence américaine. Face à cette menace, nous devons miser sur l'amélioration de la qualité de la langue française au Québec et nous devons aussi, au Québec, faire en sorte que le français consolide sa vocation comme langue de convergence dans un environnement pluraliste au plan culturel.

M. le Président, il incombe à toutes les sociétés francophones dans le monde, dont la nôtre, d'assurer l'épanouissement de la langue française. Cette tâche n'est pas facile, certes, mais elle est exaltante et rejoint sans aucun doute un objectif fondamental ? et je termine avec cet objectif précisément: continuer à faire de la langue française un outil privilégié de communication au Québec, au Canada et sur la scène internationale. Bonne fête, donc, à la langue française! Et il me fait plaisir de célébrer avec tous les membres de cette Assemblée la Journée internationale de la francophonie. Merci.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Chapleau. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la ministre d'État aux Relations internationales, je vous cède la parole pour une autre motion sans préavis.

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Donc, une autre motion sans préavis.

À l'occasion du discours inaugural du 22 mars 2000, le premier ministre faisait part à cette Assemblée de l'engagement suivant du gouvernement, et je le cite: «De présenter dorénavant à cette Assemblée pour approbation tout traité international qui concerne l'une ou l'autre des responsabilités constitutionnelles du Québec.» Alors, M. le Président, à titre de ministre d'État aux Relations internationales, je me réjouis de donner suite à cet engagement du premier ministre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...votre motion.

Mme Beaudoin: Ah non?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, ça va. Juste me présenter votre motion. Après ça, on va commencer les...

Approuver le Protocole facultatif à la Convention
sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination à l'égard des femmes

Mme Beaudoin: Ah, c'est vrai! M. le Président, je suis désolée. Ça ne fait que sept ans et demi que je suis en cette Chambre. Ha, ha, ha! Alors, je suis toute nouvelle.

Alors, M. le Président, je sollicite le consentement donc de cette Assemblée afin que soit présentée la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale approuve le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, lequel instrument international...»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bien. Ça va. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? On m'informe que c'est 2-2. Oui? Alors, Mme la ministre, je suis prêt à vous entendre.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. Donc, je ne recommencerai pas, je vais continuer tout simplement en disant que nous sommes très heureux de donner suite à cet engagement du premier ministre et de contribuer ainsi à créer une nouvelle tradition dans nos travaux parlementaires, soit l'étude et l'approbation de conventions internationales relevant des compétences constitutionnelles de l'Assemblée nationale du Québec.

Je rappelle par ailleurs, M. le Président, que ceci constitue le principe fondateur du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales, qui a été présenté le 14 novembre 2001, et le principe de ce projet de loi sera étudié incessamment en cette Chambre. Il vise, ce projet de loi, à établir justement la procédure législative d'examen des protocoles et traités internationaux qui ont des incidences pour le Québec. Dans le contexte international actuel où le conflit en Afghanistan, par exemple, notamment, nous rappelle la situation très difficile vécue par les femmes dans plusieurs pays du monde. je me réjouis de soumettre donc à l'attention de cette Assemblée, pour approbation, ce Protocole.

Rappelons qu'au cours des dernières décennies les Nations unies ont adopté plusieurs textes et conventions d'importance en matière de protection des droits de la personne, notamment la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, qui a été adoptée le 18 décembre 1979, entrée en vigueur en septembre 1981 et pour laquelle le Québec s'est déclaré lié par décret le 20 octobre 1981.

n(15 h 40)n

Le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes a été adopté par l'Assemblée générale des Nations unies et est entré en vigueur en décembre 2000. À l'instar du Protocole, il vise à instituer un mécanisme de plaintes qui a pour objet d'assurer le plein exercice par les femmes, dans des conditions d'égalité, de tous les droits fondamentaux et libertés fondamentales stipulés à la Convention de 1979 et de prendre des mesures efficaces pour prévenir la violation de ces droits et libertés.

Cette nouvelle procédure permettra dorénavant à des particuliers ou à des groupes de particuliers de porter plainte au Comité pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Il est utile de préciser, M. le Président, que le Protocole ne confère pas de nouveaux droits en regard de la Convention, mais bien un nouveau recours international. En approuvant ce Protocole, le Québec joindrait sa voix aux 28 États qui y sont partie et aux 42 autres qui l'ont signé à ce jour. Il nous apparaît fondamental qu'un mécanisme tel que celui contenu dans ce Protocole soit mis en place, car il permettra donc dorénavant à des groupes de femmes de tous les horizons à travers le monde d'avoir recours à des instances internationales pour améliorer la condition des femmes.

Le Québec a d'ailleurs mis en place, depuis plusieurs décennies, de multiples politiques et programmes pour favoriser l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes. Bien qu'il reste beaucoup à faire, de grandes choses ont été accomplies comme, par exemple, l'adoption de la Loi sur l'équité salariale.

En approuvant ce Protocole et en s'y déclarant ultérieurement lié, le Québec marque sa solidarité à l'égard de cet engagement international et de la cause des femmes. Outre le bénéfice démocratique, une telle procédure va justifier encore davantage une revendication historique et commune de tous les partis réunis dans cette Assemblée, à savoir que, dans l'élaboration des accords internationaux qui le concernent, le Québec puisse faire valoir ses compétences en relation avec ses intérêts.

Nous, parlementaires, avons donc aujourd'hui l'occasion de réaffirmer l'importance que nous attachons aux droits, à l'égalité et au respect dus aux femmes ainsi que de rappeler le rôle essentiel du Québec à toute ratification effective par le Canada des instruments internationaux ressortissant de la compétence constitutionnelle du Québec.

Je tiens à rappeler qu'en matière de protection de la condition des femmes le Québec s'affirme à chaque fois qu'il en a l'occasion dans les forums internationaux auxquels il participe. Par exemple, du 5 au 9 juin 2000, lors de la conférence internationale de New York intitulée Les femmes en l'an 2000, égalité, développement et paix pour le XXIe siècle, une délégation québécoise dirigée par ma collègue ministre responsable de la Condition féminine y avait activement participé, ce dont nous pouvons être fiers, M. le Président. En approuvant le Protocole et en s'y déclarant lié, le Québec marque sa solidarité à l'égard de cet engagement international à la cause des femmes.

Voilà pourquoi, M. le Président, nous proposons, je propose l'adoption de cette motion.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, nous poursuivons le débat sur cette motion, et je cède la parole à la responsable de l'opposition officielle en matière de relations internationales et députée de Jean-Talon. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. J'ai un peu l'impression que c'est l'abondance aujourd'hui, avec les interventions que nous avons à faire, dans le cas de nos responsabilités respectives, pour ce qui est des relations internationales.

Alors, M. le Président, il me fait plaisir, à mon tour, au nom de l'opposition officielle et à titre de députée responsable pour l'opposition du dossier des relations internationales, de joindre ma voix à celle de la ministre des Relations internationales pour que ma formation politique puisse approuver le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, lequel instrument international relève, par son contenu, de la compétence constitutionnelle du Québec.

Je pense, M. le Président, qu'il faudrait, d'entrée de jeu, expliquer aux citoyens et aux citoyennes qui nous écoutent, là, quel est l'objet de la démarche que nous faisons aujourd'hui. Il est vrai, lorsque l'a souligné la ministre, que le premier ministre, en mars 2002, avait souhaité ouvrir un peu la démarche démocratique et permettre aux députés qui siègent en cette Assemblée nationale de pouvoir se prononcer sur les accords, ou les traités, ou les ententes importantes qui sont signées entre le Québec et certains pays, ou avec les Nations unies, ou aussi toute entente qui serait signée entre le Canada et ces mêmes pays ou ces Nations unies et qui ont une incidence, finalement, sur nos affaires internes ou la gestion des affaires internes du Québec.

Alors, dans le cas qui nous occupe, c'est pour la deuxième fois que l'Assemblée nationale aura à se prononcer sur ce type de protocole. On l'avait fait il y a bientôt un an en ce qui avait trait à la Convention n° 29 qui touchait finalement le travail forcé, je pense, chez les jeunes. Alors, cette fois-ci, ça touche évidemment la discrimination à l'égard des femmes, puis je peux vous dire que, juste pour ces raisons-là, je pense que c'est important qu'on puisse s'exprimer là-dessus. C'est la tolérance zéro, dans mon livre à moi, en ce qui a trait à la violence faite aux femmes, et j'ai la chance, comme la plupart des femmes dans cette Assemblée, de vivre dans un pays qui nous permet de s'exprimer, qui nous permet d'agir, de travailler, d'avoir une vie normale, une vie de couple, une vie professionnelle où on peut vivre un tel épanouissement, ce qui n'est pas le cas évidemment de nombreuses femmes dans d'autres pays. Et cette marche vers cette libéralisation, vers cette liberté, je pense qu'on doit, nous, comme parlementaires, non seulement dénoncer ces états de fait, mais aussi travailler pour enrayer le plus possible cette violence faite aux femmes.

Donc, dans le cadre de cette démarche, il faut se rappeler que les Nations unies avaient adopté une déclaration sur l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, le 7 novembre 1967. En 1979, l'Organisation des Nations unies adoptait la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Je vous rappelle que le 3 septembre 1981, c'était l'entrée en vigueur de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, et le 10 décembre de cette même année, le Canada ratifiait cette Convention, à laquelle nous, évidemment, accédions soit par décret ou soit par entente, au niveau du gouvernement.

Je veux rappeler à cette Assemblée que le gouvernement ou les gouvernements avaient convenu qu'une fois tous les quatre ans il y aurait remise à jour des politiques et des décisions que les gouvernements prenaient afin de s'assurer d'enrayer cette violence faite aux femmes. Et, au cours des années, on s'est aperçu, M. le Président, que des individus et même des groupes d'individus logeaient des plaintes auprès des Nations unies pour justement dénoncer cette discrimination à l'égard des femmes. Donc, l'Organisation des Nations unies a décidé d'ajouter ce Protocole facultatif ? comme vous pouvez voir, j'ai fait mes devoirs, parce que je n'avais aucune idée quelle était la différence entre un protocole facultatif et la Convention; donc que le Protocole facultatif est arrivé par la suite ? pour permettre justement ce mécanisme de plaintes, pour permettre ces recours, ces nouveaux recours à ces groupes ou à ces individus, auprès de l'Organisation des Nations unies. Donc, voilà la raison pour laquelle aujourd'hui on revient... en fait, on sollicite l'approbation du gouvernement du Québec dans le cas de ce Protocole facultatif.

Je veux souligner que, dans les minutes qui vont suivre, on aura à débattre du principe du projet de loi qui a été déposé par la ministre des Relations internationales sur cette nouvelle mécanique de transparence ou de démocratie ? on peut l'appeler comme on veut ? à l'égard de laquelle les parlementaires auront l'opportunité de s'exprimer sur les protocoles ou sur les ententes ou sur les traités internationaux importants qui pourront être signés soit par le Canada, et qui ont des incidences dans les juridictions provinciales, ou les ententes qui seront signées par le gouvernement du Québec.

n(15 h 50)n

Donc, il me fait plaisir aujourd'hui de réitérer que le Parti libéral du Québec, en ce qui nous concerne, la violence faite aux femmes, c'est tolérance zéro. Toute politique qui permettra d'enrayer cette violence ou qui permettra également de faire valoir finalement l'épanouissement des femmes à l'intérieur de leur milieu, on sera d'accord avec ça, et j'appuie à nouveau cette motion qui est déposée par la ministre des Relations internationales.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Jean-Talon, de votre intervention. Et je reconnais maintenant Mme la secrétaire d'État à la Condition féminine et députée de Terrebonne. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, c'est avec beaucoup de plaisir que je me joins à ma collègue la ministre d'État aux Relations internationales, ministre responsable de la Francophonie et ministre responsable de l'Observatoire de la mondialisation, et à nos collègues évidemment, puisque c'est une motion qui sera unanime, pour appuyer et affirmer la volonté de notre Assemblée nationale face au Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. Évidemment, nous souhaitons par cette motion approuver ce nouveau recours international afin de faire respecter les droits des femmes et ainsi améliorer leurs conditions de vie dans le monde entier.

Comme vous le savez, M. le Président, la mondialisation, les changements démographiques, les mutations qu'on connaît au niveau du travail ont des impacts importants sur les conditions de vie des femmes, sur leurs droits sociaux et politiques. Mais c'est aussi une façon de connaître et d'apprendre les conditions de vie des femmes dans le monde entier. À cet égard, je dois dire qu'il nous faut faire preuve plus que jamais de vigilance au niveau international afin de s'assurer du respect des droits des femmes, de faire respecter les principes d'égalité, d'autonomie, de respect de leur intégrité physique et psychologique.

À cet égard, rien n'est acquis. Lorsqu'on regarde la situation internationale, M. le Président, on doit malheureusement constater que les femmes constituent plus de la moitié de la population, mais qu'elles possèdent uniquement 10 % des revenus. Lorsqu'on regarde l'ensemble des personnes analphabètes dans le monde entier, les femmes constituent 70 % des personnes analphabètes. Et, lorsqu'on pense à la violence, évidemment les statistiques sont dramatiques. Et ici même... Ma collègue, tantôt, de Jean-Talon disait que nous avons la chance de vivre dans un pays où nous avons des lois, où nous avons des possibilités de liberté, et c'est bien vrai, mais, même dans une société comme la nôtre où nous avons adopté des lois importantes pour contrer la violence, pour contrer les discriminations, même dans un pays comme le nôtre, M. le Président, une femme sur cinq est victime de violence conjugale au Québec. C'est pourquoi plus que jamais nous devons unir nos efforts afin d'améliorer les conditions de vie des femmes d'ici et d'ailleurs. Je tiens à rappeler que le Québec, par son gouvernement, mais aussi par sa société civile, a déjà amorcé le pas: des échanges internationaux, de nombreux échanges internationaux qui nous permettent de partager nos savoirs et nos expertises en vue d'améliorer la qualité de vie des femmes.

D'ailleurs, comme je l'ai déjà mentionné, j'ai eu le privilège de rencontrer Dre Sima Samar, vice-première ministre et ministre responsable de la Condition féminine dans le gouvernement intérimaire afghan. La situation vécue par les femmes afghanes, qui étaient complètement brimées de leurs droits les plus fondamentaux, le droit de travailler, le droit à l'éducation, le droit de recevoir des soins de santé, le droit de sortir en toute liberté, nous rappelle que la discrimination à l'égard des femmes est omniprésente et que les avancées qui ont été faites à l'échelle internationale sont toujours fragiles. Comme nous le rappelions le 8 mars dernier, nous avons besoin d'une solidarité internationale, d'une solidarité des femmes et des hommes pour pouvoir continuer à agir et que les femmes ne soient plus victimes de discrimination.

Vous le savez, M. le Président, le Québec a été précurseur à bien des égards au niveau de la mondialisation et de la mobilisation qui s'est créée autour de la situation de vie des femmes. Ma collègue rappelait la Conférence de New York, je rappellerai notre participation à la Conférence mondiale des Nations unies sur les femmes, à Beijing, en 1995, qui a été un événement majeur sur la scène internationale pour la reconnaissance des droits des femmes à l'égalité. Une dynamique internationale s'est mise en place à partir de ce moment, et le Québec y participe activement.

Outre la Marche mondiale des femmes ? et il faut le dire ? qui était organisée par la Fédération des femmes du Québec et qui nous a sensibilisés à la situation de vie des femmes dans le monde entier, nous avons eu aussi le Sommet des peuples qui a été l'occasion pour beaucoup de Québécoises et de Québécois de partager les mêmes préoccupations face aux réalités vécues tant par les femmes que par les hommes du monde entier.

Le travail amorcé doit être approfondi pour que les efforts déployés se traduisent par des résultats tangibles. Cette discrimination dont les femmes sont trop souvent victimes est inacceptable. Il importe donc de mettre l'accent sur la prévention et la promotion d'un rapport égalitaire entre les femmes et les hommes en agissant sur les changements de mentalité et de comportement et en utilisant tous les outils mis à la disposition des États et des gouvernements pour éliminer les discriminations existantes.

La motion que nous déposons aujourd'hui est un excellent moyen de réaffirmer notre volonté de se mobiliser, de se concerter afin d'établir une égalité de fait et non seulement de droit pour les femmes du monde entier en approuvant un outil, le Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Ce Protocole, rappelons-le, vise à instituer un mécanisme international de plaintes, donc de se doter de mesures efficaces afin d'assurer le plein exercice des droits fondamentaux et des libertés fondamentales des femmes, inscrit à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, et de prévenir la violation de ces droits et de ces libertés.

Je le rappelle, nous pouvons avoir des conventions, nous pouvons avoir des chartes, nous pouvons avoir des lois, mais c'est important de se donner aussi des outils, des mesures pour pouvoir les appliquer. Et c'est ce que nous approuvons aujourd'hui par cette motion: un recours international.

Parce que la violence contre les femmes constitue une atteinte à leurs droits fondamentaux, à leur intégrité physique et psychologique, parce que la discrimination dont elles sont victimes est un obstacle majeur à leur autonomie et à l'égalité entre les femmes et les hommes, parce que la discrimination dont elles sont victimes n'est pas l'apanage d'une classe sociale ni d'une société ou d'un pays en particulier et que cette situation entraîne de lourdes conséquences sur nos sociétés tout entières, nous devons poursuivre nos actions et utiliser le pouvoir de notre Assemblée nationale sur un sujet de la compétence constitutionnelle du Québec pour approuver cet instrument international important pour assurer l'égalité et le respect des droits des femmes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la députée.

Mme Vermette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

Mme Vermette: Compte tenu du temps qui nous est imparti et compte tenu du temps que nous avons pris pour les motions sans préavis, il y a des gens qui nous attendent au niveau des commissions parlementaires. Donc, je vous demanderais si possible de donner avis pour les commissions parlementaires.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a consentement? Ah, il n'y a pas de consentement.

Alors, je cède maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière, porte-parole de l'opposition en matière d'habitation et d'autoroute de l'information. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est avec un vif intérêt et beaucoup de compassion que je prends la parole sur cette motion qui invite l'Assemblée nationale du Québec à approuver le Protocole consultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Ce Protocole a été proclamé par l'Assemblée générale des Nations unies le 16 octobre 1999 et mis en vigueur l'année suivante, et ce, dans le sillage des instruments juridiques existants, notamment la Déclaration des Nations unies sur les droits de l'homme et les pactes internationaux sur l'élimination de la discrimination sous toutes ses formes.

Près d'un demi-siècle après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, les droits de la personne sont loin d'être garantis partout dans le monde. Cette Charte, M. le Président, ainsi que les pactes et conventions qui ont suivi, ne sont pas parvenus à protéger les femmes dans leur dignité et leurs droits fondamentaux, et ce, dans bien des pays.

n(16 heures)n

Le 14 mars dernier, je suis intervenue devant cette Assemblée pour faire appel aux citoyennes et aux citoyens du Québec ainsi qu'aux collègues parlementaires, leur demandant d'exprimer leur solidarité avec les femmes afghanes. Les femmes afghanes ont vécu sous le règne des talibans, M. le Président, qui les ont privées de leurs droits les plus élémentaires et qui leur ont imposé un code de comportement vestimentaire et social avec des restrictions extrêmement sévères: interdiction de travailler, interdiction de circuler, interdiction de sortir sans être accompagnées par un homme, sans être vêtues de la burqa, et ainsi de suite. Malgré tout ça, M. le Président, plusieurs femmes afghanes ont réussi, malgré ce régime de terreur, à survivre et à développer un semblant de réseau de solidarité et ainsi donner une voix à ces femmes opprimées.

Mais l'Afghanistan n'est pas le seul pays où les islamistes radicaux ont imposé leur loi. Au nom d'une certaine idée de Dieu, des hommes conçoivent des systèmes juridiques issus d'un autre âge pour soumettre les femmes à leur autorité en les enfermant dans des tenues vestimentaires qui limitent leur liberté et leurs mouvements d'action. Pire, dans plusieurs pays musulmans, c'est le retour à la charia, c'est-à-dire le droit dit islamique où les femmes sont violées, torturées, emprisonnées et lapidées, toujours au nom de Dieu, M. le Président.

C'est le cas, entre autres, d'une petite fille au Pakistan, une jeune fille de 15 ans, aveugle, qui a été violée et qui est tombée enceinte, Sofia Habibi. On se rappellera, M. le Président, que le gouvernement du Pakistan avait introduit la charia comme Code civil et criminel. Sofia Habibi a été jugée par le tribunal dit islamique comme ayant commis un crime capital en vertu duquel elle a été condamnée à la peine capitale, c'est-à-dire la lapidation. Dans ce cas précis, les bourreaux de la charia ont exigé, comme preuve de son innocence, un témoignage de huit hommes. Évidemment, le témoignage de la jeune fille elle-même qui a été violée était inadmissible parce qu'elle était une femme. Imaginez le comble de l'injustice, une jeune fille de 15 ans, aveugle, violée, donc atteinte dans sa dignité humaine et dans son intégrité physique, qui est condamnée à mort au nom d'une certaine idée de la moralité, une moralité archaïque, une moralité d'un autre âge. Et, de surcroît, elle ne peut même pas témoigner à son propre procès. Et, pendant ce temps, M. le Président, le violeur, lui, il court les rues, il n'y a aucune accusation qui pèse contre lui.

Les femmes pakistanaises, dans ce cas précis, M. le Président, se sont mobilisées, elles ont fait des manifestations, elles ont parlé aux médias, elles ont alerté l'opinion publique. Cette mobilisation n'a malheureusement pas infléchi la volonté des bourreaux de la charia, puisque Sofia n'a certes pas été lapidée, mais elle a été condamnée à 100 coups de fouet et 10 ans de prison.

Cette bataille menée de haute lutte il y a quelques années par les femmes pakistanaises n'a malheureusement pas permis d'abroger le code de la charia ni au Pakistan ni ailleurs dans différents pays où ce code est appliqué. Depuis, des centaines de femmes, dans différents pays où la charia est appliquée, ont vu leurs droits les plus fondamentaux bafoués. Pas plus tard qu'hier, La presse nous apprenait que la police religieuse en Arabie Saoudite avait empêché le sauvetage de plusieurs dizaines d'adolescentes dans une école en feu parce qu'elles ne portaient pas la tenue islamique de rigueur. Cette accusation, M. le Président, faisait suite à un incendie survenu le 11 mars dernier dans un collège où des jeunes filles, à La Mecque, ont péri. On parle ici de 15 filles qui y ont trouvé la mort. La Presse d'ailleurs relate, et je cite: «La presse saoudienne a accusé les membres du Comité pour la propagation de la vertu et la prévention du vice, police religieuse, d'avoir empêché des tentatives de sauvetage par des pompiers et auxiliaires médicaux masculins parce que des adolescentes ne portaient pas la longue robe et la pièce d'étoffe destinées à couvrir le corps et le visage dont le port est obligatoire en public.» Imaginez, M. le Président, on laisse périr des jeunes filles tout simplement parce qu'on ne veut pas que des hommes pompiers puissent avoir un contact avec des jeunes filles qui ne sont pas habillées selon une tenue vestimentaire réglementaire.

M. le Président, au moment où l'on se parle, la vie d'une femme est en danger au Nigéria. Il s'agit de Safiya Husseini, une musulmane de 35 ans dont le seul crime est d'avoir eu une petite fille en dehors du mariage. Safiya a été condamnée à mort par lapidation par le tribunal islamique de Sokoto, dans le nord-ouest du Nigéria. En guise de clémence, le tribunal islamique a reporté l'exécution de la sentence jusqu'à ce que le bébé soit sevré. La petite Adama a aujourd'hui 13 mois, et les bourreaux de la loi dite islamique sont revenus à la charge. Ils veulent que Safiya soit enterrée vivante jusqu'à la taille et lapidée publiquement. Les talibans, en Afghanistan, avaient trouvé le moyen de faire souffrir les femmes lapidées dans le stade de Kaboul en choisissant des pierres pas trop grosses afin de faire durer leur plaisir et surtout faire souffrir les femmes le plus longtemps possible. C'est ce qui attend Safiya au Nigéria si rien n'est fait pour la sauver.

L'adoption du Protocole facultatif à la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes qui fait l'objet de cette motion est certainement un geste qui nous honore tous, comme parlementaires. Mais, au-delà de la ratification protocolaire, il y a l'obligation d'agir, agir pour les droits de la personne et les droits des femmes en particulier, et surtout celles qui, parmi nous toutes, souffrent le plus parce qu'elles sont aux prises avec un fanatisme radical et inhumain. Il faut aller au-delà des symboles, M. le Président. Il faut mettre en oeuvre ce Protocole, donc donner les outils aux organismes de promotion des droits humains ici, au Québec, au Canada et ailleurs dans le monde pour permettre aux citoyens et aux organismes non gouvernementaux de mettre en application véritablement la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes.

Je saisis, en terminant, M. le Président, cette occasion pour lancer un appel à la solidarité pour Safiya Husseini. On ne peut pas rester indifférent. Merci, M. le Président.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière, de votre intervention. Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Je voudrais, au nom de vous tous, souhaiter un bon anniversaire au bon député de Gaspé qui est ici avec nous. Bonne fête, M. le député!

Nous en sommes maintenant aux avis touchant... Non, motions sans préavis? Il y a une autre motion.

Mme Vermette: Oui, oui, M. le Président, il y a une motion sans préavis.

n(16 h 10)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Substituer le nom du député de La Peltrie
à celui du député de Montmorency comme
parrain du projet de loi n° 239

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je fais motion afin que le nom du député de La Peltrie, M. Michel Côté, soit substitué à celui du député de Montmorency, M. Jean-François Simard, à titre de parrain du projet de loi d'intérêt privé suivant: projet de loi n° 239, Loi concernant la Régie d'assainissement des eaux usées de Boischatel, L'Ange-Gardien et Château-Richer.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bien. Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, avis touchant les travaux des commissions, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je vous demanderais...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Les avis tantôt que vous vouliez faire, là.

Mme Vermette: J'avise, M. le Président, que la commission des affaires sociales poursuivra la consultation générale à l'égard de l'avant-projet de loi intitulé Loi sur la carte santé du Québec, demain, le jeudi 21 mars 2002, de 11 heures à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 49, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec, demain, le jeudi 21 mars 2002, de 11 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont déposés.

Pour ma part, je vous avise que la commission de la culture se réunira aujourd'hui, mercredi 20 mars 2002, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin de poursuivre l'audition de la présidente-directrice générale de Télé-Québec. Cette audition sera suivie d'une séance de travail dans la même salle afin de préparer le rapport final sur cette audition.

Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira cet après-midi, après les affaires courantes jusqu'à 16 h 30, et demain, jeudi 21 mars, de 11 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau. L'objet de cette séance est d'entendre les dirigeants d'universités sur leurs rapports annuels 1999-2000 déposés à l'Assemblée nationale en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. La présidence a reçu dans les délais requis une demande de Mme la députée de Bellechasse... députée de Sauvé... députée de Beauce-Sud, plutôt, suite à une question qu'elle a posée aujourd'hui au ministre du Revenu concernant la transmission par fax de données personnelles et confidentielles effectuées par son ministère. Ce débat de fin de séance aura lieu demain, à 18 heures, après les affaires du jour, aux débats de fin de séance. Alors, ceci met fin à la période des affaires courantes.

Nous en sommes rendus maintenant aux affaires du jour. Alors, nous allons suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 13)

(Reprise à 16 h 14)

Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous en sommes maintenant aux affaires du jour. Si vous voulez vous asseoir. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Merci. Alors, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 7 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 52

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 7. Mme la ministre des Relations internationales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Louise Beaudoin

Mme Beaudoin: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de présenter à cette Assemblée le projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives.

Ce projet de loi propose une réforme qui a pour principal objet de démocratiser le processus de conclusion des engagements internationaux et de donner à l'Assemblée nationale du Québec une voix dans ce processus. La réforme qui vous est proposée aujourd'hui vise d'ailleurs à donner suite à un engagement formulé par le premier ministre lors du discours inaugural du 22 mars 2001 et à l'occasion duquel celui-ci rappelait, je le cite, que «la mondialisation des marchés exigera que nous nous donnions de nouveaux instruments d'action» et qu'il était opportun, je le cite à nouveau, que, «dans le prolongement des gestes qui ont été posés au cours des 40 dernières années, le gouvernement du Québec prenne l'engagement de présenter dorénavant à cette Assemblée pour approbation tout traité international qui concerne l'une ou l'autre des responsabilités constitutionnelles du Québec». Fin de la citation. Il ajoutait d'ailleurs ? je recite ? que «cela permettrait aux députés de participer au débat et à nos concitoyennes et concitoyens d'être mieux informés sur les grandes questions des relations internationales qui affectent notre société». Fin de la citation.

L'objectif de participation des députés et d'information des citoyens devrait être atteint par les modifications proposées à la Loi sur le ministère des Relations internationales du Québec ainsi qu'à d'autres lois connexes. Celles-ci visent à conférer aux membres de l'Assemblée une compétence d'approbation préalable des engagements internationaux importants et à faire de l'Assemblée nationale l'une des premières institutions parlementaires de type britannique à codifier législativement une compétence d'une telle nature. En agissant de la sorte, notre Assemblée sera pionnière et pourra s'enorgueillir d'avoir cherché à répondre aux préoccupations exprimées sur le phénomène de la mondialisation en confiant aux élus du peuple québécois des responsabilités nouvelles à l'égard des accords internationaux du Canada et des ententes internationales du Québec.

Bien qu'il soit important de rappeler que notre Assemblée nationale a approuvé, dans la logique du projet de loi à l'étude, la convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail sur le travail forcé ainsi que le Protocole facultatif sur la discrimination par rapport aux femmes, que nous venons d'adopter aujourd'hui, la conclusion des accords internationaux du Canada et des ententes internationales du Québec a relevé à ce jour de la seule action des gouvernements. Ainsi, pour que le Québec se déclare lié par un accord international du Canada ou qu'il signe une entente internationale lui-même, aucune intervention préalable de l'Assemblée nationale du Québec n'est requise et ne précède l'action gouvernementale.

Pourtant, les matières visées par ces accords et ententes, ressortissant d'ailleurs à la compétence constitutionnelle du Québec, n'étaient pas et ne seront pas dans l'avenir sans intérêt pour l'Assemblée nationale et ses membres. Qu'il s'agisse d'accords de commerce international relatifs aux droits et libertés de la personne, à l'environnement, à la sécurité sociale, ou aux questions fiscales, ou à la culture, les règles contenues dans ces instruments internationaux méritent d'être non seulement connues des élus de l'Assemblée nationale, mais aussi d'être approuvées par l'Assemblée, car le respect de l'obligation d'exécuter de bonne foi ces engagements balise nécessairement l'exercice du pouvoir législatif.

Dans cette perspective, il vous est donc proposé de conférer aux membres de l'Assemblée nationale un tel pouvoir d'approbation, lequel s'exercerait à l'égard d'engagements internationaux importants et se ferait par le biais d'une procédure transparente et flexible tout en étant complémentaire à une action gouvernementale assurant le respect et la diffusion des engagements internationaux. M. le Président, bien que le Canada et le Québec concluent de multiples accords et ententes de nature internationale, plusieurs de ces accords et ententes portent sur des questions techniques et ne justifient pas, pour cette raison, l'intervention de l'Assemblée nationale. Le projet de loi n° 52 propose dès lors de faire appel à la notion d'engagements internationaux importants pour identifier les accords et ententes qui requièrent l'intervention de l'Assemblée et l'approbation préalable de celle-ci.

Après avoir prévu qu'un engagement international important doit faire l'objet d'un dépôt à l'Assemblée nationale et être accompagné d'une note explicative, le nouvel article 22.2 de la Loi sur le ministère des Relations internationales dit de l'expression «engagement international important» qu'elle désigne pour l'essentiel l'entente internationale du Québec ou l'accord international du Canada qui requiert, pour sa mise en oeuvre par le Québec, soit l'adoption d'une loi ou la prise d'un règlement, soit l'imposition d'une taxe ou d'un impôt, soit l'acceptation d'une obligation financière importante concernant les droits et libertés de la personne ou concernant le commerce international.

Les autorités du ministère des Relations internationales ont par ailleurs évalué le nombre d'engagements internationaux importants qui auraient dû être approuvés au préalable au cours des 40 dernières années. Une moyenne annuelle de trois engagements internationaux auraient ainsi dû faire l'objet d'une approbation par l'Assemblée nationale du Québec. Cette fonction nouvelle dévolue aux membres de notre Assemblée saura s'insérer aisément, par conséquent, dans l'agenda de nos travaux, d'autant que la procédure d'approbation sera caractérisée par sa souplesse et sa flexibilité.

n(16 h 20)n

S'agissant de la procédure d'approbation des engagements internationaux importants, le projet de loi n° 52 propose que le dépôt d'un engagement international important soit suivi par la présentation d'une motion proposant que l'Assemblée nationale approuve ou rejette un engagement international important déposé à l'Assemblée. Ainsi, une motion ne pourrait pas avoir pour résultat de modifier le contenu d'un engagement international qui a déjà fait l'objet d'une négociation par les gouvernements et dont le texte a d'ailleurs déjà été arrêté. En revanche, elle donne à l'Assemblée le pouvoir de l'adopter, ou de le rejeter en bloc, ou encore d'en reporter l'approbation.

Cette procédure a le mérite de la transparence, puisqu'elle prévoit que le débat sur la motion, d'une durée de deux heures, ne pourra commencer que 10 jours après le dépôt de l'engagement, ce qui aura comme conséquence de permettre aux députés d'examiner avec sérieux et rigueur l'engagement international sur lequel il faudra se prononcer. La flexibilité de la procédure d'approbation résulte du fait que l'Assemblée pourrait décider de procéder à une étude approfondie d'un engagement international important si telle était la volonté de l'ensemble des membres. Il pourrait être envisagé de soumettre l'examen d'un engagement international important à une étude en commission parlementaire et d'inviter les citoyens et les groupes à présenter leurs vues sur l'opportunité pour l'Assemblée nationale d'approuver un tel engagement. Ainsi pourrait-il en être d'un projet d'accord, par exemple, instituant une zone de libre-échange des Amériques dont le contenu ferait l'objet d'une étude détaillée et de commentaires émanant, par exemple, de la société civile.

L'intervention parlementaire qu'instaurerait le projet de loi n° 52 n'aurait pas pour effet de réduire l'importance de l'action gouvernementale dans le domaine de la conclusion des engagements internationaux. Elle s'inscrirait plutôt dans une telle action et verrait le gouvernement continuer d'assumer ses responsabilités avant et après la saisine de l'Assemblée nationale à l'égard d'un projet d'engagement international important.

Par ailleurs et dans des cas d'urgence, le gouvernement se voit reconnaître par le projet de loi n° 52 le droit de poser, sans approbation parlementaire préalable, une action à l'égard d'un engagement international important. Ainsi, le nouvel article 22.5 de la Loi sur le ministère des Relations internationales prévoirait-il que le gouvernement pourrait, et je cite, «lorsque l'urgence le requiert, ratifier une entente internationale importante ou prendre un décret [...] d'assentiment relatif à un accord international important avant son dépôt à l'Assemblée nationale ou son approbation par celle-ci». Il devrait toutefois déposer l'entente ou l'accord, comme le prévoira ce même article 22.5, «avec un exposé des motifs d'urgence, dans les 30 jours suivant la ratification ou la prise du décret ou, si l'Assemblée nationale ne siège pas, dans les 30 jours de la reprise des travaux».

Pour ce qui est de l'action gouvernementale, il faut également souligner que le gouvernement n'aura pas à rechercher l'approbation parlementaire pour les engagements internationaux autres que ceux importants visés par le présent projet et qu'il agira donc, dans ces circonstances, sans intervention parlementaire.

Je tiens également à ce que le gouvernement fasse montre de transparence et qu'il procède à une diffusion exemplaire des ententes internationales et des accords internationaux, de façon à ce que les citoyennes et les citoyens du Québec connaissent les tenants et aboutissants de ces engagements. Le projet de loi prévoit dès lors la publication d'un recueil d'engagements internationaux, et je compte rendre disponibles tous les nouveaux engagements internationaux sur le site électronique du ministère des Relations internationales, tout en tenant à jour de façon régulière et en affichant également sur ce site le répertoire des engagements internationaux.

Le projet de loi contient également certaines modifications à la Loi sur la mise en oeuvre des accords de commerce international rendues nécessaires par l'adoption de la nouvelle procédure d'approbation parlementaire. Elles feraient en sorte qu'une fois un accord de commerce international approuvé par l'Assemblée nationale en vertu du mécanisme proposé il ne soit plus nécessaire de saisir à nouveau l'Assemblée nationale avec une loi modificatrice de la Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. Nous proposons plutôt que cette loi reconnaisse au gouvernement le pouvoir de rendre la loi applicable par décret ou tout autre accord de commerce international ayant fait l'objet d'une approbation par l'Assemblée. C'est donc une simplification de la procédure d'approbation.

M. le Président, en adoptant le projet de loi n° 52, notre Assemblée deviendra, sinon la première, tout au moins une des premières Assemblées parlementaires de type britannique à jouir d'un authentique pouvoir d'approbation des engagements internationaux. Ses députés seront dorénavant investis d'un rôle significatif à l'égard d'instruments qui vont jouer un rôle de plus en plus essentiel dans l'exercice de la gouverne d'un État québécois influencé par le phénomène de la mondialisation, un phénomène de mondialisation auquel le Québec s'attaque de façon concrète et positive en démocratisant la procédure de conclusion des engagements internationaux et auquel le Québec répondra par d'autres mesures qui verront à démontrer que le Québec pense, comme tant d'autres, qu'une autre mondialisation, qu'un autre monde est possible. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la ministre. Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives, et je reconnais la porte-parole de l'opposition en cette matière, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir d'intervenir au nom de l'opposition officielle sur le projet de loi qui modifie la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives, et c'est à titre évidemment de porte-parole de l'opposition en matière de relations internationales que je le fais.

M. le Président, avant de vous parler du projet de loi, je pense que c'est important de rappeler ici aux gens qui nous écoutent et aux parlementaires qui sont très intéressés, je m'en doute bien, par ce projet de loi là qu'il y a des ententes commerciales, il y a des ententes internationales, il y a des accords, il y a des traités qui sont signés à la fois par le Canada et par le Québec. Il y a des ententes qui sont signées par le Canada et qui touchent uniquement la juridiction fédérale, mais il y en a d'autres qui touchent également... dont les répercussions peuvent être au niveau des compétences provinciales. Il y a également des ententes qui sont signées par le Québec et qui évidemment touchent uniquement les compétences constitutionnelles du Québec.

Au fil des ans, il y a eu ? la ministre d'ailleurs en a parlé tout à l'heure ? à peu près 120 ententes internationales signées par le Québec, des ententes importantes, là, je ne parle pas d'ententes techniques, là, mais plutôt importantes qui ont été signées depuis 40 ans, et je vous avoue que ces ententes-là, les parlementaires en ont rarement ou presque jamais entendu parler. Alors, il faut saluer la décision du gouvernement actuel de vouloir démocratiser le processus et de vouloir permettre aux parlementaires de débattre en cette Assemblée nationale les motifs, les raisons qui poussent un gouvernement à signer des ententes avec certains États, avec certains pays. Donc, je salue cette initiative et je sais que mes collègues s'en réjouissent également.

Je voulais aussi signaler, pour les gens qui se questionneraient sur la légitimité du Québec de pouvoir signer des ententes, que la Constitution canadienne n'a jamais été très claire sur cette répartition des compétences à cet égard-là, et c'est un avis du Conseil privé, en 1937, qui a tranché puis qui a dit: Écoutez, le Canada signera ses ententes dans les domaines qui lui conviennent bien en vertu de la Constitution, mais les provinces pourront également s'ouvrir sur ces marchés et pourront signer, dans le domaine de leurs compétences, des ententes. Et c'est ce qui explique l'objet évidemment des discussions aujourd'hui et ce qui permet évidemment au gouvernement de déposer un projet de loi qui nous permettra, nous, de débattre, lorsque ce sera nécessaire, de ces ententes qui seront signées par le gouvernement du Québec avec d'autres pays signataires.

n(16 h 30)n

Donc, le projet de loi vise principalement à modifier la Loi sur le ministère des Relations internationales afin d'établir un mécanisme d'approbation d'un traité international par l'Assemblée nationale. Le projet de loi vise également à modifier la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. Si vous vous questionnez, M. le Président, sur la pertinence d'amender ces deux autres lois, c'est que, pour votre information, il y a des ententes qui sont signées et qui touchent justement ces ministères. Et, vous me permettrez, je vais parler uniquement de quelques exemples d'ententes qui touchent ces différents ministères.

Qu'on pense à l'entente complémentaire de sécurité sociale, entre autres, qui a été signée entre le gouvernement du Québec et l'Autriche, dans le domaine des allocations familiales, santé, accidents de travail et maladies professionnelles. Il y a une entente de sécurité sociale qui a été signée entre le gouvernement du Québec et Malte dans le domaine des rentes. Il y en a une autre qui a été signée entre le gouvernement du Québec et l'Organisation de l'aviation civile internationale, concernant les exemptions et les prérogatives de courtoisie consenties à l'Organisation et à ses fonctionnaires, aux États membres et aux membres d'une représentation auprès de l'Organisation. Donc, il y a une multitude d'ententes de ce type qui sont signées avec les divers ministères, et je trouve très intéressant qu'on puisse éventuellement débattre de toute proposition ou de toute entente qui sera signée dans l'avenir.

La conclusion des traités internationaux relève du pouvoir exécutif. Toutefois, on le sait, une coutume s'est développée à l'effet que, dans le cas des traités importants, ces derniers étaient soumis à la Législature pour application. Ce n'est pas toujours comme ça que ça se passe, mais ça l'était. Pour qu'un traité puisse avoir un effet juridique, on dit que ce droit interne doit être modifié. Le pouvoir exécutif est donc obligé de soumettre au pouvoir législatif les traités qui ont été conclus.

Il s'agit donc de la mise en oeuvre d'un traité. Les parlementaires adoptent une loi qui intègre les principes du traité international dans le droit interne. Au Canada, le gouvernement s'assure que le traité sera mis en oeuvre par les parlementaires ? ça se fait déjà ? avant de conclure officiellement le traité avec les autres États. Chez nous, il n'existait, jusqu'à ce jour, jusqu'à ce que le projet de loi soit débattu, aucune disposition qui nous permettait de faire ça, et il y aura évidemment le projet de loi qui nous permettra de le faire au moment où il sera adopté.

Il faut se rappeler que, dans les années soixante, c'est le gouvernement du Parti libéral qui consacrait sa capacité de conclure des traités internationaux avec la Loi sur le ministère des Affaires internationales, qui est par la suite devenu le ministère des Relations internationales. Toutefois, le processus de conclusion et de mise en oeuvre n'était pas changé et continuait de relever du gouvernement. Dans le cas des traités conclus par le gouvernement fédéral qui touchent les compétences provinciales, le ministère des Affaires internationales a la responsabilité de recommander au gouvernement du Québec la ratification ou non de ce traité.

Selon la loi actuelle, le processus qu'on suit, c'est que le gouvernement approuve un traité, le gouvernement du Québec approuve un traité, et, dans ce cas-ci, la ministre des Relations internationales le signe. Le projet de loi va faire en sorte qu'il y aura une motion qui sera déposée, la ministre aura signé, le gouvernement aura approuvé, puis ensuite l'Assemblée nationale approuve, et, par la suite, bien, ça sera ratifié par le gouvernement.

Donc, je réitère que la démocratisation, finalement, du processus permettra évidemment aux parlementaires qui le souhaitent d'intervenir et de débattre de sujets tout aussi importants que celui dont on a discuté tout à l'heure, qui touchait la discrimination faite aux femmes par le biais de la violence. On a déjà, le printemps dernier, débattu en cette Chambre de la Convention n° 29, convention de l'Organisation des Nations unies qui touche le travail forcé. Donc, j'imagine qu'on aura le plaisir de parler d'autres ententes dans les mois qui viendront. Donc, la ratification de ce traité sera soumise à l'approbation de l'Assemblée nationale.

La ministre des Relations internationales a tout à l'heure donné une brève description de chacune... peut-être pas de chacun des articles de loi que l'on retrouve dans le projet de loi n° 52, mais elle en a quand même brossé un tableau assez descriptif. Qu'il suffise de rappeler que l'opposition, tout en donnant son aval à cette adoption du principe, M. le Président, verra évidemment à poser les questions d'usage et à s'assurer que le gouvernement du Québec respecte évidemment les compétences qui sont les siennes dans ce domaine-là, et s'assurera évidemment, en questionnant la ministre, de la bonne mise en oeuvre de cette nouvelle mécanique.

Je répète donc que cette démarche nous permettra, comme parlementaires, de jouer un rôle plus pertinent et plus spécifique. Je pense aussi que ça va nous permettre d'ajouter notre nom à la liste des Parlements qui ont déjà pris l'habitude de consulter et de faire approuver ces ententes par les parlementaires. Je pense ici au Royaume-Uni, à l'Australie, la Nouvelle-Zélande et même en France où, nous dit-on, il y a certaines mécaniques d'approbation de ces ententes.

Donc, M. le Président, il me fait plaisir, au nom de l'opposition, de donner notre accord de principe, tout en vous avisant que, lors de l'étude article par article en commission parlementaire, nous aurons des questions. On s'attend bien à avoir les bonnes réponses, et on verra pour la suite des choses. Merci.

Le Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Y aurait-il d'autres interventions sur le projet de loi n° 52? M. le député de Chapleau, en vertu de nos règles d'alternance, je vais reconnaître le député de Gaspé et porte-parole du gouvernement... et adjoint parlementaire, pardon, en matière de relations internationales. M. le député de Gaspé.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Merci, M. le Président. Je comprends, M. le Président, que vous m'avez confié un mandat additionnel, mais je dois m'en référer au mandat qui m'a été attribué. Ha, ha, ha! Alors, M. le Président, je suis très heureux d'intervenir en cette Assemblée concernant le projet de loi n° 52 et dans mes toutes nouvelles fonctions à titre d'adjoint parlementaire à la ministre responsable des Relations internationales. Et le Québec, M. le Président, occupe une place très importante à l'échelle des relations internationales, en ce qui a trait à notre rayonnement.

Vous le savez, par le biais de l'Assemblée nationale, les députés ont l'occasion de faire de nombreuses missions au niveau des parlementaires, mais également, le ministère des Relations internationales a un mandat très particulier: un mandat de conseiller le gouvernement dans ses relations avec les autres nations, de coordonner les activités du Québec en matière de relations internationales, de doter aussi le gouvernement d'une politique à cet égard. Et c'est un ministère qui, à plusieurs égards, peut être méconnu par beaucoup de membres de cette Assemblée, en ce qui a trait à ses responsabilités. La ministre responsable aujourd'hui nous a présenté un projet de loi qui, dans le cadre de la réforme de nos procédures et de nos institutions ici, à l'Assemblée, vient rehausser considérablement le rôle d'un député à l'Assemblée nationale. M. le Président, en soumettant les accords internationaux importants à l'approbation et à la discussion par l'Assemblée nationale, c'est un moment important, mais aussi, c'est une mécanique qui va nous permettre de statuer sur les grands enjeux qui attendent le Québec dans le futur.

On sait que nous sommes dans des courants de changements très importants, au niveau mondial. On a déjà connu un premier accord de libre-échange, du temps du gouvernement conservateur ? l'Accord de libre-échange avec les États-Unis ? qui a fait l'objet d'un débat important au Québec et ailleurs dans les autres provinces canadiennes. Par la suite, on a eu d'autres accords qui ont été signés.

Et, ce qui est très intéressant aussi, c'est que le Québec, dans le cadre de ces accords internationaux, pourrait aussi enregistrer une certaine dissidence sur certains aspects auxquels nous ne souscrirons pas, compte tenu des remarques ou des commentaires qui pourront être apportés à cette Assemblée. Le gouvernement, naturellement, peut le faire, et on aura, à l'Assemblée nationale, tous partis confondus, la possibilité de voter, d'accepter ou de rejeter en bloc une proposition qui nous serait soumise en vertu d'un... à considérer un accord international.

n(16 h 40)n

Alors, M. le Président, la population va en tirer aussi de nombreux bénéfices. Vous vous souvenez, lorsque nous avons eu les débats au cours des dernières années concernant l'AMI, l'Accord multilatéral des investissements, qui a fait l'objet de beaucoup de prises de position et même de beaucoup de manifestations à l'échelle internationale... Et cet Accord prévoyait que les gouvernements devenaient subalternes dans les États et que le commerce et les grandes entreprises dirigeaient, à toutes fins pratiques, l'organisation des sociétés. Alors, en regardant un accord de cette nature, les députés de cette Assemblée seront appelés à se prononcer et à donner leur avis.

Alors, c'est un bel exemple, M. le Président, aussi de transparence, parce que, si nous avons à débattre d'un accord... Et la ministre nous dit que tous ces accords qui seront proposés feront partie d'un registre, un registre qui pourra être consulté par la population, et, dans son discours de présentation du projet de loi, nous indiquait que le site Internet du ministère des Relations internationales rendra l'accessibilité encore plus facile à quiconque à partir de nos maisons et de n'importe quel bureau ou de n'importe quelle entreprise qui s'intéresse au commerce international ou autre.

Alors, M. le Président, dans ce contexte, je me réjouis que l'opposition accueille favorablement ce projet de loi qui s'inscrit dans une démarche, depuis de nombreuses décennies, à l'effet que le Québec, dans le cadre de ses juridictions, veut s'assurer du respect intégral de ses compétences et, d'autre part, dans les juridictions partagées, que le Québec aussi ait son mot à dire. Naturellement, il y a des compétences exclusives que le gouvernement canadien, que le gouvernement fédéral possède ou encore s'est arrogé avec les années, hein, à la suite de nombreux conflits juridiques et de recours à la Cour suprême et au Conseil privé, même. Qu'on pense, par exemple, à l'aviation dans les années trente, donc, les communications, etc.

Alors, c'est sûr que le Québec ne peut pas adhérer à des principes qui sont contraires à ses valeurs non plus. Alors, toutes ces représentations-là, M. le Président, nous amènent à considérer aussi ce qui se passe dans les différents pays. Et, lorsque le Canada signerait au nom... le gouvernement canadien signerait, au nom du Canada, des ententes qui lieraient le Québec, bien, à ce moment-là, on peut aussi inscrire notre dissidence. Il y a des régimes dictatoriaux qui existent dans le monde. Le Québec est une société ouverte, démocratique, respectueuse des droits des citoyens, des droits et libertés des citoyens, et, à des nombreuses reprises, on a eu l'occasion de prendre position pour dénoncer la violence, la torture. Encore tout à l'heure, j'ai écouté la députée de La Pinière qui, sur une autre motion, faisait état des droits des femmes en Afghanistan. Alors, c'est sûr que cet instrument, qui est le processus législatif, la présentation d'un projet de loi, auquel nous aurons à participer au niveau de l'analyse et des échanges, permettra aussi de perpétuer l'image du Québec comme une société démocratique, ouverte sur le monde, M. le Président.

Alors, j'ai bien hâte que nous allions en commission parlementaire pour procéder à l'étude article par article de ce projet de loi, avec la collaboration presque assurée ou déjà assurée de nos amis de l'opposition. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Gaspé. J'invite maintenant le député de Chapleau et porte-parole de l'opposition officielle en matière de relations intergouvernementales canadiennes à nous adresser quelques mots. M. le député.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. M. le Président, l'opposition officielle accueille favorablement ce projet de loi, mais il faudrait préciser que c'est le principe même du projet de loi que nous approuvons aujourd'hui. Il restera à voir évidemment quelle attitude nous adopterons par rapport aux modalités du projet de loi éventuellement, suite évidemment aux différentes discussions qui seront tenues en commission parlementaire. Mais, donc, le principe du projet de loi, nous l'appuyons, et c'est un projet de loi qui vise essentiellement à modifier la Loi sur le ministère des Relations internationales de façon à prévoir que, pour certains traités internationaux, non pas tous, mais donc pour certains traités internationaux, éventuellement, il va falloir obtenir, donc, l'approbation de l'Assemblée nationale, avant même que le gouvernement du Québec ratifie ledit traité.

Alors, pour comprendre un peu la dynamique, pour comprendre un peu la problématique face à laquelle nous nous retrouvons aujourd'hui avec ce projet de loi n° 52, il serait peut-être utile de rappeler que dès 1937, dans une très importante décision, soit l'Avis sur les conventions de travail, le comité judiciaire du Conseil privé de Londres a décidé ? qui était à l'époque, donc, le tribunal de dernier ressort en ce qui concerne les affaires canadiennes, un tribunal londonien mais qui tranchait donc, en dernier ressort, sur des affaires canadiennes ? a décidé que la conclusion des traités internationaux relevait essentiellement du gouvernement fédéral, mais, par contre, que la mise en oeuvre des traités internationaux pouvait relever des provinces, dans la mesure où ces mêmes traités touchent des compétences provinciales.

Donc, le comité judiciaire du Conseil privé a fait une distinction subtile mais néanmoins évidente entre la conclusion des traités, d'une part, et, d'autre part, la mise en oeuvre des traités ou, disons, l'application concrète des traités. Et, tout en reconnaissant, je dirais, une prépondérance fédérale en matière de conclusion des traités internationaux, le comité judiciaire a reconnu que les provinces devaient être partie prenante au processus d'application des traités internationaux, de mise en oeuvre des traités internationaux, dans la mesure, je répète, où les compétences provinciales sont en cause.

Or, M. le Président, même en ce qui concerne la question de la conclusion des traités internationaux, il y a encore une certaine zone grise, il y a encore une certaine zone grise. Parce qu'il est très clair que la conclusion des traités internationaux, qui relève de relations de pays à pays, bon, et, donc, qui requiert l'existence d'une souveraineté étatique, il est très clair que la conclusion de tels traités internationaux va relever essentiellement du gouvernement fédéral. Mais il y a un grand nombre de traités internationaux, d'ententes internationales qui, elles, en fin de compte, ne font pas appel à une relation de pays à pays, et où, vraisemblablement, le Québec peut donc jouer un rôle, peut même jouer un rôle accru, et donc, peut en soi devenir signataire du traité en tant que tel, peut donc conclure le traité dans la mesure, encore une fois, où le traité ne met pas en cause des relations de pays à pays.

Alors, ça veut dire que non seulement le Québec a un rôle à jouer en matière de mise en oeuvre de traités internationaux qui sont conclus par le fédéral ? qui sont conclus par le fédéral ? dans la mesure où lesdits traités affectent des compétences provinciales et des compétences québécoises plus particulièrement, mais, en plus, ce que je suis en train de vous dire, c'est que le Québec peut même revendiquer un rôle accru en matière de négociation de traités et d'ententes qui, en soi, ne relèvent pas, donc, de relations de pays à pays et ne relèvent pas, en fin de compte, des attributs qui, donc, découlent de l'acquisition de la souveraineté étatique.

D'ailleurs, le Québec signe déjà un certain nombre d'ententes, de traités avec d'autres pays. On pense notamment à la France, mais il y en a plusieurs autres qui sont également partenaires avec le Québec, au sein de traités internationaux. Le Québec signe déjà un certain nombre d'ententes, de traités qui ont un effet, en droit international privé, de contrat, et le Québec peut, je le répète, également revendiquer d'être partenaire dans des traités internationaux qui ont un impact non seulement en droit international privé, M. le Président, mais aussi en droit international public.

Alors, puisque le Québec a un rôle à jouer en matière de relations internationales qui découle de l'Avis sur les conventions de travail de 1937, puisque le Québec a un rôle, même, à jouer au niveau de la conclusion de traités internationaux et pas seulement que de la mise en oeuvre de traités internationaux, sous les réserves que j'apportais précédemment, eh bien, le gouvernement du Québec a eu l'idée que cette participation du Québec dans des traités internationaux soit, dans certains cas, éventuellement approuvée par, donc, l'Assemblée nationale.

n(16 h 50)n

Et, pour l'opposition officielle, ça nous semble être une mesure qui est extrêmement intéressante. C'est une mesure que nous saluons, nous le disons, d'abord parce que ce n'est pas une matière dans laquelle il faut faire preuve de partisanerie. Il faut mettre les intérêts supérieurs du Québec à l'avant-plan. Il nous fait plaisir de dire que donc le principe même de ce projet de loi est un principe qui répond, en fin de compte, également aux intentions et aux ambitions de l'opposition officielle.

J'ai bien dit, M. le Président, que c'est certains traités internationaux qui seraient approuvés par l'Assemblée nationale avant d'être ratifiés par le gouvernement. Ce sont les traités internationaux les plus importants. Je pense ici aux traités internationaux qui portent sur les droits et libertés de la personne, qui portent sur le commerce international, qui requièrent l'approbation d'une loi, l'adoption d'une loi ou qui nécessitent l'imposition d'une taxe importante. Alors, cela va de soi donc que les traités les plus importants soient donc soumis à la ratification de l'Assemblée nationale.

Par ailleurs, M. le Président, je dois vous dire que les relations internationales sont historiquement ? sont historiquement ? une prérogative de l'Exécutif. Alors, traditionnellement, on estime que c'est le gouvernement, c'est l'Exécutif qui a donc le rôle principal à jouer en ce qui concerne la négociation, la conclusion des traités internationaux. Mais, lorsque ces traités internationaux là doivent être intégrés dans le droit interne, à ce moment-là, il faut une loi qui intègre donc le contenu des traités internationaux, et c'est donc, bien entendu, l'Assemblée nationale qui peut le faire lorsque les compétences du Québec sont en cause. Raison de plus donc pour impliquer l'Assemblée nationale dans tout le processus, finalement, de ratification des traités internationaux.

Et j'ajouterai ceci et même, en fait, je terminerai avec ceci. Je vous dirai qu'il n'y a absolument rien qui empêche que l'on associe une assemblée législative, comme l'Assemblée nationale, à un processus de ratification de traités internationaux, bien que, comme je vous le disais, c'est normalement une prérogative de l'Exécutif. Il n'en demeure pas moins qu'à travers le monde, de plus en plus, on voit des situations où les assemblées législatives sont partie prenante au processus. C'est le cas, si je ne m'abuse, c'est le cas en Angleterre. C'est le cas également en Belgique. C'est le cas pour la France. C'est le cas, vraisemblablement, pour certains traités qui sont signés par le gouvernement américain, lesquels traités doivent être ratifiés par le Sénat. C'est le cas également, semble-t-il, pour la Nouvelle-Zélande. Bref, un peu partout, ici et là dans le monde, nous voyons des situations où les traités internationaux sont ratifiés par l'assemblée législative dûment élue, dûment constituée, et, dans le cas qui nous occupe, bien entendu, c'est l'Assemblée nationale du Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Chapleau. Y a-t-il d'autres collègues qui souhaiteraient intervenir sur ce projet de loi? M. le député de Verdun.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Alors, j'ai deux types de remarques à faire sur le projet de loi. Premier type de remarques, d'emblée, je salue l'initiative du gouvernement de faire participer les parlementaires à ce qui, traditionnellement, est une prérogative de l'Exécutif. Jusqu'à maintenant, il y a eu des ententes, des accords, et elles n'étaient ratifiées que par voie de décret. Actuellement, avec ce projet de loi, on associe l'ensemble des parlementaires aux accords internationaux. Je signale ici que ça va tout à fait dans la ligne du rapport que la commission des institutions avait fait dans le cadre de la ZLEA, des négociations sur la ZLEA, pour associer les parlementaires à la ratification des ententes et informer les parlementaires sur ces ententes.

Néanmoins, M. le Président ? c'est le deuxième niveau de mon intervention ? le projet de loi est un peu... Il faut le décortiquer pour bien comprendre les implications de chacun des mots, parce qu'on utilisera le terme «engagement», on utilise le terme «accord», on utilise le terme «engagement international important» et on utilise le terme «entente internationale». Et, à chaque fois, on couvre des réalités qui, si elles sont semblables dans la langue française ? et j'ai pris la peine de regarder dans Le Petit Robert, où les termes «accord», «entente» étaient relativement considérés comme des synonymes ? au sens de cette loi, ne sont pas des synonymes et ont des implications bien différentes.

On considère par le mot «accord international» une entente essentiellement entre le gouvernement du Canada et des gouvernements étrangers ou des ministères étrangers pour lesquels nous pouvons être concernés lorsque ça touche les compétences constitutionnelles du Québec. Ça, c'est le concept d'accord.

Indépendamment du concept d'accord, donc, qui est fait par le gouvernement fédéral, vous avez le concept d'entente internationale, je m'excuse. Le concept d'entente internationale, le concept d'entente internationale, c'est une entente qui est négociée par le gouvernement du Québec et un gouvernement ou un ministère étranger. C'est défini à l'article 19 de la Loi sur le ministère des Relations internationales. Le concept d'entente, c'est, dans notre champ de juridiction: le gouvernement du Québec peut passer une entente avec un gouvernement étranger ou un ministère, peut passer une entente avec un ministère étranger. Donc, on comprend bien, «accord» va toucher réellement ce qui se passe au niveau fédéral; «entente», c'est ce qui se passe au niveau réellement de la province de Québec.

Et on introduit ensuite un nouveau concept qui est «engagement», «engagement international important», qui est le terme avec ces trois... «Engagement» avec ces deux substantifs, «international» et «important», qui couvrent... Donc, dans «engagement international»... Et, vous l'avez défini à l'article 22.2, «engagement international» va couvrir la partie des accords qui sont donc négociés par le gouvernement fédéral. La partie des accords qui sont de la juridiction du Québec, dans son champ constitutionnel, va couvrir les ententes internationales et peut couvrir, et peut couvrir, M. le Président, d'autres choses, c'est-à-dire tout autres instruments qui sont de la juridiction du Québec et sur lesquels on décide, comme gouvernement, ou comme Parlement, ou comme société... auxquels nous décidons d'adhérer. Donc, le concept d'engagement international est un concept plus vaste, puisqu'il va intégrer le concept d'accord, le concept d'entente, M. le Président, et, je me permets de vous lire, «tout autre instrument se rapportant à l'un et à l'autre».

Alors, ceci étant dit, on comprend bien les trois objets, M. le Président. Alors, l'article central et les articles centraux sont les articles... l'article 6 qui introduit dans la Loi du ministère des Relations internationales les articles 22.1, 22.2 et 22.3 et 22.4 et 22.5 et 22.6. Alors, ces articles disent quoi? Ils disent essentiellement que «tout engagement international important incluant [...] les réserves s'y rapportant, fait l'objet d'un dépôt à l'Assemblée nationale». Donc, tout engagement international fait l'objet d'un dépôt à l'Assemblée nationale.

Il reste néanmoins un petit bémol que je voulais soulever à la ministre ici, à l'heure actuelle, lorsqu'on va définir «engagement international». Il y a deux éléments, «engagement international»... Rappelons-nous ce que ça veut dire, «engagement international important». Ça inclut évidemment les accords passés, donc, par le gouvernement fédéral dans les champs de juridiction du Québec ? ça, c'est clair ? ça inclut les ententes internationales ? ça, c'est clair ? mais ça inclut aussi tout autre instrument.

n(17 heures)n

Et il y a un bémol qui est «de l'avis du ministre». Et ceci veut dire: Si le ministre considère que ce n'est pas pertinent, il ne le déposera pas. J'ai un peu de réticence à laisser seulement au ministre la possibilité de dire qu'est-ce qui est un engagement international important. Surtout, M. le Président, que, si vous continuez la phrase, vous précisez ce qu'est un engagement international, parce qu'on dit «de l'avis du ministre», c'est quoi. C'est qu'on a quatre éléments pour préciser, et je veux en suggérer un cinquième. Il y a quatre éléments. Ça peut requérir, pour sa mise en oeuvre, l'adoption d'une loi ou la prise d'un règlement qui implique des dépenses ? donc, ça, c'est un engagement qui devient un engagement international important; concerne les droits et libertés de la personne ? et vous savez qu'on peut, par exemple, adhérer à des grands principes internationaux qui concernent les droits et les libertés; concerne le commerce international; et devrait faire l'objet d'un dépôt à l'Assemblée nationale.

J'ai un peu de difficultés sur le 4°, puisque, dans le fond, l'importance de ceci, c'est juste... Qu'on définit en tant qu'engagement international ça a principalement pour effet de devoir en faire le dépôt à l'Assemblée nationale.

Je me permets donc de suggérer à la ministre de ne pas nécessairement laisser ça dans les mains du seul avis de la ministre, premièrement. Deuxièmement, il existe un champ d'engagement qui pourrait être... et qui touche des questions culturelles et éventuellement scientifiques sur lesquelles je crois qu'il pourrait être intéressé de l'inclure dans cette définition d'«engagement international important». Comprenons-nous bien, il n'a simplement pour effet que d'entraîner le dépôt à l'Assemblée nationale de l'engagement.

Alors, par contre, comprenons-nous bien. Et, très sagement, on laisse parfaitement à l'exécutif le choix, une fois que le dépôt a été fait... Donc, moi, je vais être assez restrictif pour obliger le dépôt ici, à l'Assemblée nationale, mais je ne voudrais pas obliger automatiquement le débat, c'est-à-dire la nécessité de passer une loi. Il est clair que le ministre «peut présenter», donc il est clair qu'il n'a pas l'obligation de présenter une motion pour approuver ou rejeter un engagement international. Et vous regardez, après, à 22.4, et, très sagement, on fait encore la distinction entre «engagement international» et «entente internationale», entente internationale, M. le Président, demandant la ratification par le gouvernement; l'engagement, c'est strictement un engagement du gouvernement. Pour la ratification d'une entente, ceci demande évidemment un débat à l'Assemblée nationale. Donc, je me permets... si vous me permettez, M. le Président... Et vous voyez qu'il y a la possibilité de ratifier une entente, en cas d'urgence, par voie de décret et dépôt de l'entente après que l'Assemblée nationale va siéger, ce qui est tout à fait normal, ce qui est sain, ça permet de fonctionner même si on est dans une situation où l'Assemblée ne siège pas.

Mais je tiens à préciser, donc, que, dans 22.2, la définition d'«engagement international important» n'a strictement comme implication que le fait d'être déposé à l'Assemblée nationale. Alors, j'aurais tendance à suggérer de ne pas dire que ce doit être «de l'avis du ministre» qu'on dépose les choses. Je comprends bien que la ratification... c'est le rôle de l'exécutif de décider quand est-ce qu'il va y avoir un débat, un vote, etc., mais ça ne touche simplement que les ententes. Mais les engagements, c'est un peu plus large. Vous comprenez bien, M. le Président, les engagements, c'est plus large, ça touche les accords, ça touche les ententes et d'autres choses. J'aurais tendance à suggérer qu'on supprime «de l'avis du ministre» et qu'on inclue, dans ce qu'on considère comme un engagement international important, un 5°, tout ce qui touche d'abord, évidemment, la culture. Il semble que la culture est une caractéristique importante de notre société, qu'on ne doit pas nécessairement ne pas être informé s'il y a des ententes qui sont là. Et j'inclurais aussi, probablement par un biais personnel, compte tenu de ma discipline d'origine, si je puis dire, la culture et les disciplines, les questions scientifiques.

Alors, vous comprenez, M. le Président, nous saluons ici l'initiative du gouvernement d'étendre et de faciliter la participation des parlementaires à la ratification et à la vie internationale comme telle. Mais j'aimerais suggérer à la ministre qu'elle prenne en considération les deux points que je lui ai soulevés, dans le cas de l'article 22.2, c'est-à-dire de manière à, disons, élargir ou assouplir en quelque sorte son projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Verdun. Y a-t-il d'autres intervenants sur le projet de loi? Mme la députée de La Pinière, vous avez la parole.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président. Alors, je voudrais joindre ma voix à celle de mes collègues qui m'ont précédée, ma collègue la députée de Jean-Talon, qui est porte-parole pour l'opposition officielle en matière de relations internationales, mon collègue le député de Chapleau et le député de Verdun, qui vient de nous faire, M. le Président, un discours sur la sémantique, qui est très, très importante pour savoir comment distinguer les termes et qu'est-ce qui se cache derrière ces termes-là.

Et je sais, M. le Président, que, vous-même, vous êtes très sensibilisé aux questions internationales. Ça vous préoccupe, vous avez aussi oeuvré dans ce domaine et, donc, vous comprenez l'importance pour le Québec d'avoir le monde pour horizon et de pouvoir prendre notre place dans le vaste monde d'aujourd'hui, surtout que nous sommes en train de vivre une mondialisation des marchés qui est extrêmement importante. Mais, avec cette mondialisation des marchés, il y a aussi une mondialisation de la culture, il y a une mondialisation des flux migratoires, et ainsi de suite, et cela a un impact sur le Québec et surtout sur les compétences du Québec qui lui sont reconnues.

Rappelons, M. le Président, que cette ouverture du Québec sur le monde s'est opérée dans les années soixante, justement sous un gouvernement libéral, ce qu'on a appelé à l'époque la doctrine Paul Gérin-Lajoie, qui finalement instaurait un principe simple qui est pour affirmer la place du Québec au niveau international et qui est le prolongement des compétences du Québec sur le plan international. Et cette doctrine, M. le Président, a permis au Québec de jouer un rôle important et de prendre sa place notamment dans les instances de la francophonie mais aussi dans les autres instances du Commonwealth. Et, nous, comme parlementaires, aussi, on participe à ces différents forums, notamment le dernier en date, celui de la COPA, auquel d'ailleurs vous avez participé vous-même. Et on a eu l'occasion d'accueillir même ici, au Québec, un certain nombre de parlementaires des Amériques.

Alors, M. le Président, ce projet de loi, donc, de 13 articles, il vient modifier trois lois, la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux, la Loi sur le ministère des Relations internationales et la Loi concernant la mise en oeuvre des accords de commerce international. Treize articles, mais, comme l'a dit mon collègue le député de Verdun tantôt, il y a effectivement un certain nombre de clarifications qui devraient être apportées. Et je pense que, ça, c'est un travail qu'on va amorcer en commission parlementaire, lors de l'étude article par article; c'est le moment pour effectivement aborder ce type de questions.

Mais j'ajouterais, M. le Président, que nous avons vécu, au Québec, particulièrement lors du Sommet des Amériques, un temps fort, un temps fort où nous nous sommes questionnés sur la place du Québec dans le monde, sur la place du Québec dans les Amériques et toute la question qui a entouré la Zone de libre-échange des Amériques, notamment la question de la transparence, la transparence des débats, la transparence des enjeux, et la possibilité pour les citoyens et pour leurs représentants légitimement élus, c'est-à-dire les parlementaires, d'être au fait de ces enjeux-là et d'être au coeur aussi de ces dossiers.

On se rappellera, M. le Président, qu'en commission des institutions nous avons fait un débat et nous avons même amorcé un mandat d'initiative sur la Zone de libre-échange des Amériques, lequel mandat d'initiative nous a amenés à organiser des consultations. Nous avons entendu une quarantaine de groupes, de mémoire, qui sont venus nous dire à quel point c'est important pour le Québec non seulement de participer dans cette Zone, mais de s'assurer que nous avons notre place et que, en même temps, nous avons un contrôle sur les enjeux qui nous affectent.

Et je pense que ce projet de loi, le projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives, est un pas dans la bonne direction qui va nous permettre justement, ici même, comme parlementaires, d'aborder les traités, d'aborder les ententes, d'aborder les accords importants qui ont une signification pour le Québec. Et ça va nous permettre aussi, M. le Président, de nous inscrire dans cette dynamique internationale et aussi ça va rehausser le rôle des parlementaires en démocratie.

n(17 h 10)n

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, nous, de l'opposition officielle, on souscrit au principe de ce projet de loi. Je pense que c'est un pas dans la bonne direction. Et c'est aussi important pour les parlementaires que nous sommes de pouvoir nous saisir de ces enjeux-là, de pouvoir les traduire aussi au niveau de l'impact sur les citoyens qu'on représente. Parce que, très souvent, les questions internationales, M. le Président, sont entourées d'une grande ambiguïté. Souvent, on pense que l'international est ailleurs. Et de plus en plus, à la faveur de la mondialisation, à la faveur de l'interdépendance croissante des marchés, des sociétés, des pays, on constate que ces enjeux-là, ils sont beaucoup plus près de nous qu'on ne le pense. Et donc, c'est très important, M. le Président, comme parlementaires, lorsque le gouvernement fédéral signe des traités, qu'on puisse, comme parlementaires à l'Assemblée nationale et non seulement au niveau du gouvernement ? parce que, ça aussi, ça nécessité un autre niveau de transparence ? que l'on puisse participer à ces débats, que l'on puisse exprimer nos réserves, s'il y a lieu, mais aussi notre appui, le cas échéant, dépendamment des enjeux.

Nous avons eu l'occasion aujourd'hui même, devant cette Assemblée, M. le Président, de nous prononcer sur un protocole facultatif en rapport avec une convention touchant l'élimination de la discrimination sous toutes ses formes, discrimination faite aux femmes et, des deux côtés de la Chambre, nous avons pu présenter nos arguments, nos opinions. Et nous avons convenu que c'était dans l'intérêt du Québec, M. le Président, de pouvoir nous inscrire dans cette convention-là.

Il y aura certainement d'autres enjeux, parfois plus difficiles, parfois plus problématiques pour le Québec, ne serait-ce que par rapport, par exemple, à nos relations avec les États-Unis. C'est des relations très importantes sur le plan économique et ça crée une certaine dépendance, voire une certaine indépendance sur le plan économique. On n'a rien qu'à penser, par exemple, à tout le débat sur le bois d'oeuvre, et tout ça. Et des ententes comme ça sont nécessaires, M. le Président, pour nous permettre à nous, les parlementaires, de nous inscrire dans la dynamique internationale, prendre notre part dans ce débat. Et je l'espère, M. le Président, que l'on puisse redorer un petit peu le blason des parlementaires qui vont s'approprier ces enjeux et qui vont pouvoir les traduire à l'ensemble de la population qu'on représente. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de La Pinière. Y aurait-il d'autres collègues qui souhaiteraient intervenir?

Mise aux voix

Puisqu'il n'y a pas d'autres intervenants, le principe du projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Relations internationales et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Renvoi à la commission des institutions

Mme Vermette: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des institutions et pour que la ministre des Relations internationales en soit membre.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Vermette: Je vous demanderais d'appeler l'article 10 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 65

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Beaulne): Certainement. Alors, à l'article 10 de notre feuilleton, M. le ministre du Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 65, Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires. M. le ministre du Revenu.

M. Guy Julien

M. Julien: Alors, M. le Président, je soumets à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 65 intitulé Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires.

Ce projet de loi, M. le Président, a été présenté le 13 décembre 2001. Il modifie 15 lois, dont la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et la Loi concernant l'impôt sur le tabac, afin de donner suite principalement au discours sur le budget de la ministre des Finances du 29 mars 2001 et à plusieurs bulletins d'information émis par le ministère des Finances. De manière accessoire, il donne suite à certaines mesures prévues au discours sur le budget de la ministre des Finances du 14 mars 2000.

Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts principalement afin d'y modifier ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec. Ces mesures sont regroupées en différents sujets. Ces sujets concernent notamment:

1° l'amélioration de l'aide fiscale accordée aux personnes ayant recours à la voie médicale ou à l'adoption pour devenir parents;

2° la bonification du crédit d'impôt remboursable pour le maintien à domicile d'une personne âgée;

3° l'instauration d'une exemption d'impôt sur le revenu et de la taxe sur le capital, relativement à la réalisation d'un projet majeur d'investissement;

4° l'instauration d'un crédit d'impôt dont pourront bénéficier, premièrement, les particuliers qui acquièrent des actions de Capital régional et coopératif Desjardins; les sociétés établies dans la Cité du commerce électronique, dans la Cité de la biotechnologie et de la santé humaine du Montréal métropolitain et dans le Centre de développement des biotechnologies de Laval; les sociétés établies en Gaspésie et dans certaines régions maritimes du Québec et oeuvrant notamment dans le domaine de la transformation des produits de la mer, de la biotechnologie marine et de la fabrication d'éoliennes; et les sociétés qui construisent des bâtiments stratégiques dans la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

M. le Président, ce projet de loi modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec, principalement afin d'y modifier ou d'y introduire quelques mesures fiscales propres au Québec. De façon particulière, l'une de ces mesures concerne l'introduction de règles visant à favoriser l'observation des règles fiscales dans l'industrie du vêtement.

Par ailleurs, M. le Président, ce projet de loi apporte des modifications à la Loi concernant l'impôt sur le tabac, afin que les montants d'impôt applicables à l'égard des produits du tabac soient augmentés.

Je vais m'abstenir d'énumérer les autres mesures qui composent le projet de loi n° 65, puisque ses notes explicatives en font état et que nous aurons l'occasion de l'examiner plus en détails, en commission parlementaire. Alors, j'invite donc, M. le Président, les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 65. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le ministre. J'invite maintenant la députée de Beauce-Sud et porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu à prendre la parole.

Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, merci, M. le Président. On est à l'adoption de principe du projet de loi n° 65, qui s'appelle Loi budgétaire n° 1 donnant suite au discours sur le budget du 29 mars 2001 et à certains énoncés budgétaires.

Alors, je vois que le ministre a synthétisé beaucoup le projet de loi et les notes explicatives. Et d'ailleurs je me rappelle que, lorsqu'il a déposé le projet de loi ici, en cette Chambre, M. le Président, on ne lui avait même pas laissé le temps de tout lire les notes explicatives tellement il y avait de contenu dans ce projet de loi là. Alors, on lui avait dit: C'est correct, on vous donne carte blanche, déposez-le, O.K., c'est beau, vous l'appellerez après.

Mais vous me permettrez quand même, M. le Président, comme c'est ma coutume, de vous expliquer un peu plus en détail qu'est-ce que ça contient, le projet de loi n° 65. Je suis sûre que ça intéresse tout le monde ici parce que ça concerne tous les citoyens, tous les contribuables, tous ceux qui paient de l'impôt. Puis, M. le Président, je suis sûre que, dans cette salle, là, tout le monde paie des impôts au Québec, et c'est important de savoir comment ça va affecter la vie des citoyens et des contribuables du Québec, ce projet de loi là. Alors, débutons.

Ce projet de loi a pour but de modifier la législation fiscale québécoise afin de donner suite à de nombreuses mesures fiscales annoncées par le gouvernement du Québec. Il modifie 15 lois, mais les principaux changements touchent surtout la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et la Loi sur la taxe de vente du Québec. Ce sont les trois principaux véhicules par lesquels le gouvernement va chercher des recettes dans la poche des contribuables du Québec.

Le projet de loi n° 65 donne suite au discours du budget du 29 mars 2001, je l'ai dit tantôt, mais aussi, de façon plus accessoire, à celui du 14 mars 2000. Il faut mentionner, M. le Président, qu'on est en train d'étudier un projet de loi dont toutes les mesures sont déjà en application. Il faut qu'on comprenne ça parce qu'on peut perdre tout le monde, là, dans le décor à dire des choses pour lesquelles ils savent que c'est déjà en application.

n(17 h 20)n

Donc, le projet de loi vient inscrire dans les lois des mesures fiscales annoncées aussi par le biais des bulletins d'information du ministère des Finances qui ont été publiés entre le 14 avril 2000 et le 5 juillet 2001. Il s'agit des bulletins d'information 2000-2 à 2000-10 inclusivement et ceux de 2001-1, 2001-2, 2001-4 et 2001-6. Alors, la plupart des contribuables du Québec n'ont jamais lu aucun de ces bulletins d'interprétation, j'en suis certaine, mais ce sont surtout les comptables, les fiscalistes qui s'intéressent à ces questions-là.

De façon accessoire, M. le Président, le projet de loi introduit également un certain nombre de modifications afin d'harmoniser les lois fiscales provinciales avec celles du fédéral, comme c'est la coutume. Le projet de loi n° 65 comporte également un grand nombre de modifications à caractère technique, de concordance ou de terminologie qui sont apportées à diverses lois. Ça aussi, c'est coutumier dans les projets de loi du ministère du Revenu.

Alors, pour tout vous dire, le projet de loi n° 65 contient pas moins de 174 articles et modifie 15 lois. C'est un des plus petits, M. le Président, que j'aie eu à étudier, depuis que je suis la critique ou la porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, et qui fait suite à un budget. Mais, ce ne serait pas juste de dire simplement ça, il faut aussi que je vous mentionne qu'il y a un autre projet de loi qui va suivre et qui va contenir la suite des mesures qui ont été annoncées dans le cours du budget du 29 mars 2001. Alors, je pensais que c'était un cadeau qu'on nous faisait, cette année, d'avoir moins d'articles à étudier. Mais, bien au contraire, comme le projet de loi aurait contenu plus de 400 pages, on l'a scindé en deux et le deuxième devrait être déposé au cours de cette session-ci.

Alors, le projet de loi modifie la Loi sur la fiscalité municipale afin de réunir sous les mêmes taux de taxation les entreprises membres de réseaux de câblodistribution et les entreprises membres d'autres types de réseaux de télécommunication afin d'uniformiser les montants à payer par les exploitants de réseaux de télécommunication à titre de taxe foncière. Ainsi, les taux de taxation seront uniformisés pour tous. Et les taux sont les suivants: pour la partie du revenu imposable n'excédant pas 5 millions, on parle de 2 %; pour la partie supérieure à 5 millions sans toutefois excéder 35 millions, 3,5 %; et, pour la partie du revenu imposable excédant 35 millions, on parle d'un taux de taxation de 8 %.

Le projet de loi n° 65 modifie aussi la Loi concernant l'impôt sur le tabac afin d'introduire dans les lois l'augmentation des prix du tabac effective, on le rappelle, depuis le 5 avril 2001. Alors, ce n'est pas nouveau, ce qu'on vous annonce, ça a déjà été annoncé, c'est déjà en vigueur.

Le projet de loi n° 65 modifie également la Loi sur les impôts mais principalement afin d'introduire ou de modifier certaines mesures fiscales. Et, pour ce qui concerne la Loi sur les impôts, il y en a 15 mesures.

La première, il bonifie l'aide fiscale accordée aux personnes ayant recours à l'insémination artificielle, à la fécondation in vitro ou à l'adoption pour devenir parents, avec un crédit d'impôt pouvant atteindre jusqu'à 6 000 $ pour les différents frais reliés à une telle démarche.

Deuxième point, il précise les règles d'éligibilité au crédit d'impôt remboursable pour le maintien à domicile d'une personne âgée. Ce qu'on vient faire ici, c'est qu'on vient préciser que le crédit d'impôt peut s'appliquer dorénavant à une habitation collective d'unités de logements ou de chambres et à une chambre située dans un établissement hôtelier ou dans une maison de chambres. Il assouplit également les normes relatives à la facturation.

En troisième point, le projet de loi n° 65 prévoit des assouplissements aux critères d'admissibilité au congé fiscal pour experts étrangers oeuvrant au sein d'une entreprise qui réalise des activités de recherche scientifique et de développement expérimental afin que les activités d'un expert étranger puissent être réalisées et reconnues dans le cadre d'un projet de recherche-développement, que ce soit avant, pendant ou après la réalisation d'un projet de recherche-développement. En concordance, la définition d'«employeur admissible» est également ajustée. Et je sais, M. le Président, par expérience, que ce sujet-là concerne ou, si vous voulez, attire beaucoup notre critique en matière de recherche expérimentale, le député de Verdun.

En quatrième point, le projet de loi n° 65 étend aux spécialistes étrangers à l'emploi des sociétés établies dans la Cité du commerce électronique ou encore au Centre de développement des biotechnologies de Laval les mêmes avantages déjà consentis aux spécialistes étrangers oeuvrant dans un centre de développement des technologies ? ou, si vous voulez, un CDTI ? soit un congé fiscal de cinq ans.

En cinquième point, il instaure un crédit d'impôt non remboursable pouvant atteindre 1 250 $ pour l'acquisition d'actions émises par Capital régional et coopératif Desjardins. Alors, ça, on sait encore que c'est en vigueur, et les premières personnes qui l'ont utilisé devaient le faire pour l'année... jusqu'au 31 décembre 2001, pour que ça puisse passer sur leur déclaration d'impôts de cette année.

En sixième lieu, il propose des modifications au régime d'épargne-actions en introduisant le concept de continuation d'entreprise et en modifiant de façon technique les dispositions relatives aux sociétés en croissance.

En septième lieu, il modifie les règles entourant l'exemption d'impôt sur le revenu et de la taxe sur le capital pour la réalisation d'un projet majeur d'investissement, notamment en ajoutant le secteur des services financiers à titre de secteur d'activité admissible et en assouplissant les critères portant sur la croissance de la masse salariale. Alors, tout le monde se souviendra, M. le Président, de l'épisode de L'Industrielle-Alliance qui a fait parler beaucoup de monde, qui a fait couler beaucoup d'encore, parce qu'ils se sont rendus admissibles à ce généreux crédit d'impôt pour les projets d'investissement majeurs et la création d'emplois.

En huitième lieu, le projet de loi n° 65 crée la Cité du commerce électronique sur le même modèle que la Cité du multimédia, c'est-à-dire qu'il instaure un crédit d'impôt remboursable pour les sociétés qui sont établies dans un périmètre géographique donné, alors la Cité elle-même. Une société admissible qui va s'établir dans la Cité du commerce électronique peut donc bénéficier jusqu'en 2010 d'un crédit d'impôt remboursable égal à 25 % des salaires admissibles, jusqu'à concurrence de 10 000 $ par salaire et par employé.

En neuvième lieu, le projet de loi n° 65 instaure un crédit d'impôt remboursable de 40 % relatif aux salaires versés aux analystes financiers spécialisés dans les titres de sociétés québécoises oeuvrant dans les petites et moyennes entreprises. Alors, dans ce cas-là, le montant du salaire admissible est limité à 75 000 $ par analyste. Par conséquent, donc, le crédit ne peut excéder 30 000 $ par analyste.

En dixième lieu, M. le Président, suite à la création de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, le projet de loi instaure une aide fiscale pour la construction de bâtiments stratégiques dans cette Zone. Alors, je suis sûre que ça intéresse beaucoup les gens de l'autre côté qui demeurent à proximité. Cette aide consiste en un crédit d'impôt remboursable de 25 % sur les frais de construction. Les bâtiments stratégiques sont les constructions érigées pour accueillir des entreprises admissibles aux divers avantages fiscaux à la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

En onzième point, le projet de loi instaure un crédit d'impôt remboursable pour la Gaspésie et certaines régions maritimes du Québec à l'égard d'activités spécifiques dans les secteurs de l'exploitation des ressources maritimes ou éoliennes afin de compenser les coûts liés à la création ou à l'expansion d'une entreprise dans ces secteurs. Alors, ce crédit d'impôt, bien entendu, touche la masse salariale... la hausse de la masse salariale.

En douzième point, il instaure un crédit d'impôt remboursable pour les entreprises du secteur des biotechnologies qui s'établiront dans la Cité biotechnologique ? de Laval ? et de la santé humaine du Montréal métropolitain. Ce crédit d'impôt, pouvant atteindre 40 % des salaires des nouveaux emplois créés, est le même, M. le Président, que celui consenti aux CDTI ou, si vous voulez, aux centres de développement des technologies de l'information.

n(17 h 30)n

En treizième lieu ? on est toujours dans la Loi sur les impôts, je vous le répète, le projet de loi n° 65 ? alors on peut dire que ce même crédit là est également instauré pour les sociétés qui sont établies au Centre de développement des biotechnologies de Laval.

En quatorzième lieu, il bonifie le crédit d'impôt remboursable pour la construction ou la transformation navale en augmentant les taux du crédit d'impôt remboursable applicable aux dépenses de construction ou de transformation et il majore par le fait même les plafonds basés sur le coût de construction ou de transformation.

En quinzième lieu, il ajuste, modifie et bonifie plusieurs crédits d'impôt remboursables dans le domaine de la culture, dont notamment celui pour la production cinématographique ou télévisuelle québécoise, celui pour les productions régionales pour la production de spectacles musicaux.

Le projet de loi n° 65 modifie également la Loi sur les licences afin de modifier le calcul des taxes applicables à la bière fournie pour consommation dans un établissement. Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président? On aura l'occasion de le voir lors de l'étude détaillée du projet de loi n° 65 en commission parlementaire.

Le projet de loi modifie aussi la Loi sur le ministère du Revenu pour permettre une remise dans le cadre de l'instauration d'exemptions fiscales relativement à la réalisation d'un projet majeur d'investissement. Aussi, on apporte une précision à l'égard des renseignements et des documents pouvant être exigés dans le cadre du recouvrement d'un montant dont une personne est redevable en vertu d'une loi fiscale.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec afin d'introduire une exonération des cotisations d'employeur au Fonds des services de santé dans les cas de réalisation d'un projet majeur d'investissement.

Le projet de loi, M. le Président, modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'introduire ou de modifier trois mesures fiscales.

La première. Il introduit des mesures visant à favoriser l'observation des règles fiscales dans l'industrie du vêtement, dont notamment l'obligation de produire les déclarations de taxe de vente du Québec mensuellement et de joindre à celles-ci une déclaration de renseignements concernant les fournitures relatives à la fabrication de vêtements effectuée au Canada. On se rappellera, M. le Président, que j'avais questionné le ministre du Revenu ici, en cette Chambre, sur cette question-là parce que, ici, afin d'éviter ou de contrer un problème de fraude fiscale, le ministère du Revenu a choisi de pénaliser tout le monde en leur imposant d'avoir à produire mensuellement une déclaration de TVQ au lieu de la faire à tous les trois mois, six mois ou une fois par année, selon l'importance de la taille de l'entreprise en question. Alors, j'ai décrié ce problème-là, mais on devrait être capable d'au moins, par le projet de loi n° 14, modifier certaines choses qui vont être à l'avantage des personnes, des entrepreneurs qui oeuvrent dans le secteur de la fabrication de vêtements.

En deuxième point ? on parle toujours de la taxe de vente du Québec, M. le Président ? le projet de loi n° 65 fait en sorte d'abolir les remboursements de la taxe de vente du Québec pour les touristes étrangers. Alors, ça, ce n'est pas nouveau, on le sait, c'est en application déjà. Il n'y a plus possibilité au Québec, M. le Président, qu'un étranger en visite chez nous puisse réclamer le retour de la taxe de vente du Québec. On peut toujours le faire, par exemple, pour réclamer le retour de la TPS, mais pas celui de la taxe de vente du Québec.

Toujours concernant la taxe de vente du Québec, le projet de loi n° 65 modifie les règles relatives à la vente d'un véhicule routier usager entre des particuliers qui sont liés.

De plus, le projet de loi n° 65, concernant la taxe sur les carburants... modifie, plutôt, la Loi sur la taxe sur les carburants afin d'apporter des précisions au remboursement de la taxe accordée à l'égard du carburant servant à alimenter un moteur utilisé aux fins non propulsives de l'équipement d'un véhicule. Alors, ça veut dire quoi? On va voir tout ça à l'étude détaillée du projet de loi n° 65 en commission parlementaire.

Également, le projet de loi modifie la Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives et également ? et là je ne me répète pas, M. le Président ? il modifie la Loi modifiant de nouveau ? et c'est «de nouveau» qui est important ? la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives ? c'est des termes qui se ressemblent, deux lois qui se ressemblent beaucoup dans leur titre, il y a le mot «nouveau» qui est différent ? alors tout ça afin d'exclure les règles relatives au mandat et à l'échange de véhicules routiers aux fins de la détermination du statut de petite ou moyenne entreprise d'un inscrit.

Finalement, le projet de loi n° 65 introduit un grand nombre de modifications à caractère technique, de concordance ou de terminologie, qui sont apportées à diverses lois et qui sont toujours coutume dans les projets de loi du ministère du Revenu.

Alors, comme on peut le voir, M. le Président, ce projet de loi est bien semblable aux autres projets de loi de ce ministère, il est très technique. Et, pour ça, laissez-moi vous en donner un aperçu en vous lisant un extrait de l'un des articles du projet de loi. Et je dois vous avouer que je m'amuse toujours en faisant ça, et écoutez bien ça. M. le Président, je fais référence à l'article 12, c'est écrit:

1. Cette loi est modifiée par l'insertion, après l'article 733.0.4, édicté par l'article 44 du chapitre 39 des lois de 2000, du suivant:

«733.0.5. Aux fins de déterminer le montant de la perte autre qu'une perte en capital, de la perte agricole, de la perte nette en capital et de la perte comme membre à responsabilité limitée à l'égard d'une société de personnes, pour une année d'imposition d'une société qui exploite une entreprise reconnue dans l'année ou qui est membre d'une société de personnes qui exploite une telle entreprise reconnue dans un exercice financier de celle-ci qui se termine dans l'année, relativement à un projet majeur d'investissement de la société ou de la société de personnes, selon le cas, à l'égard duquel le ministre des Finances a délivré une attestation d'admissibilité annuelle pour l'année d'imposition de la société ou l'exercice financier de la société de personnes, l'excédent du montant déterminé en vertu du paragraphe a du deuxième alinéa de l'article 737.18.17 à l'égard de la société pour l'année, sur le montant déterminé en vertu du paragraphe b de cet alinéa à son égard pour cette année, et la part de la société de l'excédent du montant déterminé en vertu du paragraphe d du deuxième alinéa de l'article 737.18.17 à l'égard de la société de personnes pour l'exercice financier, sur la part de la société du montant déterminé en vertu du paragraphe e de cet alinéa à l'égard de la société de personnes pour l'exercice financier, sont réputés nuls.»

Alors, vous comprendrez, M. le Président, que je n'ai rien compris puis vous non plus, hein? Puis c'est probablement le cas de tous ceux qui sont ici. Ha, ha, ha! Mon collègue m'a dit que le 13 est encore mieux. Donc, il est encore pire. Alors, ce que je veux dire par... Vous comprenez, là, ce que je veux dire par «technique» et par-dessus tout par «complexe». Et ce que je viens de vous lire à l'article 12, M. le Président, ça tient dans une seule phrase. Et le plus drôle, là, c'est que ça se poursuit à la page suivante, à la page 12, suivante. Ce n'est pas terminé. Mais je pense que vous avez déjà compris là où je voulais en venir, c'est que les lois sont très drôlement faites et à peu près incompréhensibles pour le commun des mortels.

D'ailleurs, en 1994, le rapport du groupe de travail sur l'amélioration des relations entre le ministère du Revenu, les contribuables et les mandataires, qu'on appelait, M. le Président, le rapport Vallerand... Vous étiez ici à l'époque, je suis sûre que vous vous rappelez de M. Vallerand. Alors, il définissait une série de problèmes dont la complexité des lois et des politiques fiscales tout autant que celle des formulaires et des guides qui sont émis par le ministère du Revenu du Québec. Alors, dans ce rapport-là, il était également fait mention que, selon des études menées sur l'inobservance fiscale ? vous savez, ceux qui aiment frauder ? une des causes importantes qui expliquent les cas de fraude, bien c'est la lourdeur administrative. Alors, force est de constater que huit ans plus tard, M. le Président ? on est en 2002 aujourd'hui ? rien n'a changé. Après huit ans de gouvernement du Parti québécois, le problème de complexité des lois fiscales reste entier.

n(17 h 40)n

Par ailleurs, dans le cadre du mandat que s'est donné le Vérificateur général du Québec en l'an 2000, ce dernier a consulté des experts afin d'obtenir leur avis sur la lisibilité des principaux documents relatifs à l'impôt des particuliers. Les travaux, M. le Président, ont mené à la conclusion que les principaux documents du ministère du Revenu du Québec relatifs à l'impôt des particuliers pour l'année 2000 comportent des difficultés de lecture majeures et généralisées.

D'après l'indice SATO-CALIBRAGE ? je ne connais pas trop comment ça s'opère, mais ça a été établi sous forme de logiciel par un universitaire ? les textes évalués seraient destinés... Les textes évalués, c'est-à-dire les documents produits par le ministère du Revenu, les documents qu'utilisent M. et Mme Tout-le-monde pour faire sa déclaration d'impôts ? on parle du guide d'impôts, on parle du formulaire d'impôts ? ces textes-là seraient destinés à une personne qui termine ses études secondaires. Toutefois, compte tenu du niveau moyen de scolarisation de la population du Québec, l'indice observé est trop élevé pour le lecteur visé. Alors, il faut constater que le ministère n'adapte pas suffisamment sa rédaction à la capacité de lecture des contribuables. Notons que les résultats présentés sont prudents parce que l'analyse ne tient pas compte de la longueur des textes. Alors, si elle l'avait prise en considération, les indices présentés auraient été encore beaucoup plus élevés.

L'indice Gunning, quant à lui, est une autre mesure servant à évaluer le niveau de lisibilité des textes. Il augmente selon la longueur moyenne des phrases et le pourcentage de mots de plus de neuf lettres. Un indice de 13 et plus correspond à un texte qu'on dit «spécialisé». Or, tous les textes, M. le Président, tous les textes analysés ont un indice excédant ce niveau.

M. le Président, vous conviendrez avec moi que, si les documents tels que la déclaration et le guide d'impôts sont difficiles à comprendre pour les contribuables ayant un niveau moyen de scolarisation, alors qu'en est-il de la très grande complexité des articles de la Loi sur les impôts? Pourtant, M. le Président, on le sait, ces lois-là sont faites pour le monde, et ça inclut tous les contribuables du Québec. Et dire que le législateur nous dit que nul ne peut ignorer la loi! Aïe! M. le Président, de toute évidence, ce n'est pas une question d'ignorer la loi, c'est tout simplement une question d'incompréhension de la loi. Alors, je pense que là c'est la responsabilité du ministère du Revenu de faire en sorte de présenter des articles de loi qui sont plus facilement compréhensibles par le commun des mortels.

C'est ce qui a fait dire à M. Lambert, qui écrivait au journaliste Claude Picher de La Presse, samedi dernier, que de nombreux fonctionnaires, patrons y compris, confient très certainement la production de leur déclaration à des spécialistes, et je ne serais pas surprise que le ministre du Revenu lui-même confie sa déclaration d'impôts à un spécialiste. Quant à Mme Landry, toujours dans le même article de La Presse, de Claude Picher, de samedi dernier, elle s'exprimait ainsi: «Le système est tellement rendu compliqué qu'il n'est plus fait pour le peuple, mais pour la classe qui en profite le plus, c'est-à-dire les comptables, les fonctionnaires, les fiscalistes, les agents du Revenu, etc.» Pour sa part, M. Baillargeon dit ceci: «Je suis diplômé universitaire, j'ai suivi des cours de comptabilité, je suis assez âgé pour avoir suivi l'évolution des formulaires depuis les années 1950, je produis toujours mes propres déclarations et celles de ma conjointe et j'enrage.»

M. le Président, nous, du côté de l'opposition officielle, vous savez, nous sommes traditionnellement contre le principe des projets de loi du ministère du Revenu qui font suite au budget, pas tellement parce que nous sommes contre les mesures déposées, malgré que ce soit le cas pour les mesures annoncées pour la Cité du commerce électronique comme ce fut le cas pour les mesures annoncées pour la Cité du multimédia. M. le Président, si nous sommes en désaccord avec le projet de loi, c'est surtout en raison des mesures qu'il ne contient pas.

En effet, malgré les 174 articles qu'il contient, les citoyennes et les citoyens du Québec seront toujours les plus taxés en Amérique du Nord. Également, du côté de la santé, il y a de nombreux besoins qui ne sont pas comblés. Par exemple, dans les centres hospitaliers de soins de longue durée de la Beauce, chez nous, le taux de satisfaction des besoins est encore en dessous de la moyenne provinciale. M. le Président. Il est facile de comprendre pourquoi ce gouvernement tarde à régler ce problème que j'ai décrié à maintes reprises ici, au salon bleu, et de même en commission parlementaire, parce que je vous rappelle que notre premier ministre désigné, lui, a dit que ça ne donnait rien de mettre de l'argent dans les hôpitaux parce que ça ne rapporte pas.

De plus, le gouvernement, on se rappelle, l'année dernière, avait les moyens de baisser les taxes en raison de la vigueur de notre économie. Eh bien, moi, j'aimerais vous rappeler ? parce qu'il l'a fait, baisser les taxes ? que ce gouvernement-là a créé, bon an mal an, depuis ses huit années au pouvoir, 17 nouvelles taxes. Et je me permets de prendre quelques instants pour vous en faire la litanie: hausse des primes d'assurance médicaments, y compris pour les personnes âgées, primes doublées, passant à 385 $; hausse de 6,5 % à 7,5 % du taux de la taxe de vente du Québec ? bien, ça, ça représente une augmentation de 15 %; hausse de la taxe sur les produits du tabac ? on parle de 189 millions depuis 1997 et on vient encore de l'augmenter avec le projet de loi n° 65; financement des investissements routiers ? alors, pour ça, on est allé chercher 28 $ de plus par immatriculation, ça a rapporté 105 millions de dollars annuellement; également la taxe sur les pneus neufs, qui rapporte 14 millions au gouvernement; la taxe sur les véhicules de luxe, c'est-à-dire 2 millions depuis 1998; la non-indexation des tables d'impôt, qui représente 167 millions de dollars par pourcentage d'inflation ? alors, pour l'année 1999, par exemple, ça veut dire 400 millions de dollars; la taxe pour le Fonds de lutte contre la pauvreté; la taxe sur l'essence de 0,15... c'est-à-dire 0,015 $ par litre à Montréal; la taxe de 2 $ par nuitée dans des chambres d'hôtel, ce qui représente 25 millions de dollars annuellement depuis 1997; la taxation des forfaits touristiques ? on parle ici de 10 millions annuellement depuis 1997; l'introduction à l'essai du revenu familial net. Ça veut dire qu'on prend le revenu familial des conjoints, des deux conjoints, alors que, pour certains crédits, auparavant on ne prenait que le revenu du conjoint qui souvent avait le revenu plus bas. Ça veut dire que les couples perdent dorénavant des crédits, beaucoup de crédits, lorsque leur revenu familial ? familial, il faut retenir «familial» ? lorsque le revenu familial excède 26 000 $.

Également, on récupère des crédits d'impôt non remboursables à partir d'un revenu de 26 000 $. Il y a une compensation de plafonnement. Il y a l'abolition du remboursement de la taxe de vente du Québec pour plusieurs personnes. Il y a une hausse des taxes scolaires. La taxe sur la valeur ajoutée, qui a été déléguée aux municipalités, que le gouvernement du Québec a, lui, récupérée. Les municipalités, elles ? on se le rappelle ? se sont vu forcer d'accepter des responsabilités additionnelles en plus d'une facture.

Alors, finalement, quand on fait le décompte, on se rend compte, M. le Président, que ça représente 8,3 milliards de plus que le gouvernement du Québec, le gouvernement Bouchard-Landry, a pigés dans nos poches. Alors, ce n'est pas peu dire. Et, quand on regarde le revenu disponible des Québécois par rapport à celui des Ontariens ou de l'ensemble des Canadiens, eh bien, l'écart s'est agrandi depuis que le Parti québécois est au pouvoir. Alors, est-ce là une façon d'aider le Québec? Est-ce là une façon de dire qu'on a baissé les taxes réellement? Moi, je ne crois pas ça.

Pour conclure, M. le Président, il est évident que ce projet de loi là consacre l'approche économique interventionniste de ce gouvernement en créant notamment la Cité du commerce électronique. Une fois de plus, le gouvernement saupoudre les entreprises de généreux crédits d'impôt parce qu'il est incapable de les attirer d'une autre façon en raison de la lourdeur du fardeau réglementaire et fiscal québécois. Pourtant, ce n'est pas ce que les entreprises, le Conseil du patronat, qu'on a rencontré hier, recommandent. Ce n'est pas ce que eux demandent. Ils demandent tout simplement, comme le Parti libéral du Québec le propose, l'abolition de la taxe sur le capital.

n(17 h 50)n

De plus, ce projet de loi ne change absolument rien au fait que les Québécois sont toujours les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord. D'ailleurs, entre 1996 et 2002, les dépenses fiscales, c'est-à-dire la générosité du gouvernement reliée à l'impôt des sociétés est passée de 800 millions à 1,8 milliard de dollars. C'est beaucoup d'argent dont les Québécois se privent pour la santé, M. le Président.

Alors, il faut également noter que ce projet de loi nous est présenté avec un décalage tel que non seulement les mesures qu'il contient sont déjà en application, mais, en plus, plusieurs ont déjà été modifiées ou bonifiées. Il s'agit donc d'un projet de loi qui n'est pas à jour, et je m'attends à ce que le ministre nous dépose plusieurs amendements. En d'autres mots, ce projet de loi, M. le Président, consacre le gaspille de millions de dollars alors que des investissements en santé auraient certainement constitué une meilleure façon de dépenser ces sommes.

Alors, c'est pour toutes ces raisons, M. le Président, que nous, de l'opposition officielle, sommes contre le principe de ce projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, Mme la députée de Beauce-Sud. Y a-t-il d'autres intervenants sur le projet de loi? M. le député de Lotbinière.

M. Jean-Guy Paré

M. Paré: M. le Président, c'est sans hésitation que je me joins aujourd'hui à mon collègue député de Trois-Rivières et ministre du Revenu pour appuyer l'adoption du principe du projet de loi n° 65 qui touchera plusieurs aspects de la fiscalité québécoise en modifiant, de façon importante, notamment la Loi sur les impôts.

Ne soyez pas inquiet, M. le Président, je ne vais pas réciter le chapelet, là, que la députée de Beauce-Sud nous a fait. Je vais m'attarder... Parmi ces modifications, je retiens plus particulièrement celles relatives à deux mesures qui visent à appuyer de façon vigoureuse le développement économique des régions, soit le crédit d'impôt pour la Gaspésie et certaines régions maritimes du Québec mal en point et le crédit d'impôt relatif à l'acquisition d'actions émises par Capital régional et coopératif Desjardins.

Comme vous le savez, M. le Président, le gouvernement du Québec a rendu publique une stratégie de développement économique des régions-ressources à l'occasion du discours du budget du 29 mars 2001. Au cours de l'année précédente, le gouvernement avait cependant déjà posé les premiers jalons de cette stratégie en mettant de l'avant un ensemble de mesures qui visent à soutenir le développement économique des régions dans les créneaux porteurs d'avenir.

En instaurant un nouveau crédit d'impôt remboursable pour la Gaspésie et certaines régions maritimes du Québec, le projet de loi n° 65 poursuit cet objectif. À cet égard, il donne suite d'une manière plus particulière aux modifications annoncées par le premier ministre, alors ministre d'État à l'Économie et aux Finances et au Revenu, en date du 17 novembre 2000.

Je me permets, M. le Président, de décrire sommairement les principales composantes de ce nouveau crédit. Ainsi, de façon générale, une société qui oeuvre dans certaines régions maritimes du Québec, soit les Îles-de-la-Madeleine ou la Gaspésie, la Côte-Nord et la MRC de Matane, dans le secteur de la transformation des produits de la mer, de la biotechnologie marine, de l'énergie éolienne ou de la mariculture, se qualifie à ce crédit d'impôt. À cette fin, la société doit cependant démontrer qu'elle créera en région au moins trois emplois à temps plein. Le crédit d'impôt, dont le taux est de 40 %, est accordé à l'égard de la hausse de la masse salariale attribuable aux employés de la société qui oeuvrent dans l'un des secteurs visés. Cette aide fiscale qui vise à soutenir la création d'emplois dans ces secteurs est d'une durée maximale de cinq ans.

D'autre part, l'un des axes d'intervention privilégiés par le gouvernement dans le cadre de la stratégie de développement économique des régions-ressources consiste à faciliter le financement des petites et moyennes entreprises québécoises et ainsi favoriser la création d'entreprises dans les régions-ressources. À cette fin, le projet de loi n° 65 instaure le crédit d'impôt relatif à l'acquisition d'actions émises par Capital régional et coopératif Desjardins. Ce crédit d'impôt, qui appuie une initiative du Mouvement Desjardins, facilite la levée de capital de risque dont les PME des régions-ressources et les coopératives ont besoin pour assurer leur croissance.

Afin de soutenir cette mission, M. le Président, un particulier qui acquiert des actions de Capital régional et coopératif Desjardins peut bénéficier d'un crédit d'impôt de 50 %, sans toutefois excéder 1 250 $. Sur une période de 10 ans, Capital régional et coopératif Desjardins pourra ainsi recueillir un maximum de 1,5 milliard de dollars, à raison de 150 millions de dollars par année. Au 31 décembre dernier, la vente des actions de Capital régional et coopératif totalisait 79 millions de dollars, dont 21 % doit être investi dans les PME des régions-ressources et dans les coopératives. Je suis heureux de pouvoir affirmer, M. le Président, que l'accès à ces nouveaux crédits stimulera la croissance des entreprises oeuvrant en région, d'une part en appuyant celles qui créent des emplois dans des secteurs jugés stratégiques et, d'autre part, en leur facilitant l'accès au capital de risque dont elles ont besoin.

Ces mesures constituent deux des éléments du plan d'ensemble dont le gouvernement s'est doté afin de favoriser la croissance de l'investissement et de la création d'emplois en région. Les sommes qui lui sont consacrées, de l'ordre de 800 millions de dollars, constituent une autre preuve de l'importance des efforts faits par notre gouvernement à cet égard. La vice-première ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances nous disait hier que 300 millions de dollars sont déjà engagés, de ces sommes de 800 millions de dollars, dans les régions.

En conséquence, M. le Président, je n'ai aucune hésitation à appuyer l'adoption du principe du projet de loi n° 65. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci. Merci, M. le député de Lotbinière et président de la commission des finances publiques. Y a-t-il d'autres intervenants?

M. Gautrin: Bien sûr, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Beaulne): M. le député de Verdun, en vous indiquant que, malheureusement, il ne vous reste que trois minutes, puisque, comme vous le savez très bien, nous devrons suspendre à 6 heures.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je comprends, M. le Président, mais il me restera donc ensuite 17 minutes dans une autre session. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Je dois d'abord signaler à cette Chambre à quel point j'ai été impressionné par le discours de ma collègue de Beauce-Sud. Enfin, nous avons quelqu'un qui comprend quelque chose dans les lois du Revenu, ce qui n'est pas le cas de la majeure partie des parlementaires. Et, sans vouloir insulter le ministre, je l'inclurai dans l'ensemble des parlementaires à cet effet-là. Je crois que, dans cette Chambre, seule la députée de Beauce-Sud est capable de démêler l'imbroglio des lois fiscales actuellement, M. le Président, et nous devons réellement nous féliciter, de ce côté-ci de la Chambre, d'avoir une telle experte. D'ailleurs, elle a réussi à soulever un certain nombre de points qui ont été corrigés après par le ministère du Revenu, et c'est rare d'avoir une telle experte dans notre formation politique.

Comme elle l'a rappelé, M. le Président, nous allons être contre, contre ce projet de loi. Je comprends bien que le projet de loi n'essaie strictement qu'à mettre en oeuvre les mesures du budget. Je vous rappellerai que ces mesures du budget étaient mauvaises et je vais vous le démontrer, comme on l'a fait dans le dernier discours. Et, je vais vous dire, c'est la raison pourquoi nous sommes contre ce projet de loi.

À l'intérieur du projet de loi, il existe quelques petites mesures qui sont acceptables, d'autres qui posent des problèmes et beaucoup de mesures éminemment contestables, M. le Président. Alors, je vais prendre la première mesure qui est acceptable. Après la fleur, vous aurez le pot, ne vous inquiétez pas. Mais, néanmoins, je trouve utile qu'on maintienne les crédits d'impôt pour chercheurs étrangers. Ça a permis d'attirer ici un certain nombre de chercheurs qui, compte tenu de la faiblesse du dollar, n'auraient pas pu venir travailler dans nos centres de recherche. Je trouve avec intérêt qu'on étende ce crédit d'impôt aussi aux gens qui travaillent dans d'autres secteurs que les secteurs de recherche.

Mais je me permets de vous dire, M. le Président, strictement pour terminer mon petit trois minutes là-dessus, qu'on vote ici ce que, exactement, a annoncé hier dans le budget la ministre des Finances en croyant que c'était une grande nouveauté. Alors, vous permettrez, M. le Président... qu'on refait deux fois ou trois fois la même annonce, mais ça, c'est habituel dans ce gouvernement.

n(18 heures)n

Le Vice-Président (M. Beaulne): Merci, M. le député de Verdun, et je puis vous assurer que vous pourrez continuer votre intervention avec le temps qu'il vous reste lorsque l'étude, la prise en considération du projet de loi sera resoumise à cette Chambre.

Sur ce, compte tenu de l'heure... Oui, Mme la leader adjointe.

Mme Vermette: Alors, M. le Président, je fais... Vous avez voté, c'est sur division?

Une voix: ...

Mme Vermette: Ah! vous n'avez pas terminé.

Des voix: ...

Ajournement

Le Vice-Président (M. Beaulne): Non. Mme la leader adjointe, je pense que, compte tenu de l'heure et comme le prévoient nos règlements, nous suspendons les travaux de cette Chambre jusqu'à demain, jeudi le 21 mars, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 1)