(Dix heures six minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.
Merci. Si vous voulez vous asseoir.
Affaires du jour
Aux affaires du jour, M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Boisclair: Oui, bonjour, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 5 du feuilleton, s'il vous plaît.
Projet de loi n° 26
Reprise du débat sur l'adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 5. L'Assemblée reprend le débat, ajourné le 31 octobre 2001, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil. Et, lorsque l'Assemblée a été ajournée, la parole était au député de LaFontaine, et il reste 15 minutes à son intervention. Alors, je cède maintenant la parole à M. le député de LaFontaine pour un maximum de 15 minutes.
M. Jean-Claude Gobé (suite)
M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Tout d'abord, vous me permettrez de saluer et de dire bonjour à tous les téléspectateurs, tous les citoyens qui nous écoutent sur le canal de l'Assemblée nationale aujourd'hui, ainsi qu'à tous les collègues qui sont en cette Chambre, en commençant cette journée parlementaire.
M. le Président, lorsque nous avons, hier soir, mis fin aux travaux, j'étais en train d'essayer d'expliquer que le projet de loi n° 26 qui a été déposé est certainement un projet de loi qui va permettre de régler, sa forme actuelle en tout cas, de régler un certain nombre de détails ou un certain nombre de situations en ce qui a trait au logement, à la location, au bail et à la révision de loyers. C'est à peu près ce que l'on peut retrouver dans ce projet de loi là. Mais le projet de loi n° 26, M. le Président, ne s'attaque aucunement... non seulement il ne s'attaque pas, mais, en plus de ça, il n'apporte rien de nouveau en ce qui a trait à résoudre le problème de la crise du logement que nous connaissons actuellement au Québec, et plus particulièrement dans la grande région de Montréal.
On sait, M. le Président, que, dans la grande région de Montréal, eh bien, nous avons connu, cet été et au cours du printemps dernier, des situations extrêmement difficiles pour un grand nombre de Québécois et de Québécoises qui n'arrivaient pas à trouver de logement correspondant à leurs besoins. Il y avait là des familles avec des enfants, il y avait là des néo-Canadiens, des néo-Québécois qui arrivaient et cherchaient à se loger avec leur famille aussi bien sûr, M. le Président, dans différents secteurs de la grande région de Montréal, et plus particulièrement dans l'île de Montréal.
Or, M. le Président, on se serait attendu à ce que ce projet de loi là, bien sûr, apporte un certain nombre de solutions à cette situation qui, je le crois... En cette Chambre, aucun député ne peut être d'accord avec le fait que les Québécois et les Québécoises ne se trouvent pas de logement.
J'avais, hier, l'occasion de dire ? et je le rappellerai juste pour l'information de mes collègues qui sont ici ? que j'ai rencontré, j'ai parlé avec, il y a une dizaine de jours, M. François Saillant, qui est le président du FRAPRU, l'organisme qui oeuvre beaucoup dans la région de Montréal pour le logement social. Eh bien, M. Saillant me disait encore, il y a une dizaine de jours, que 250 familles n'avaient pas trouvé de logement dans Montréal. Alors, 250 familles qui sont ballottées de gauche et de droite avec tous les problèmes que ça peut occasionner pour les enfants qui ne sont pas capables d'être inscrits dans une école parce qu'ils ne résident pas dans un secteur ou ne résident pas dans l'autre. Des gens qui n'ont pas, bien souvent, de véhicule, qui sont des gens parmi... des citoyens qui ne sont pas les plus favorisés, sans forcément être défavorisés complètement non plus, mais des gens qui doivent se déplacer en transport en commun, ne sachant pas comment faire pour amener les enfants dans un endroit, dans l'autre, les garderies, le lieu de travail du père et de la mère lorsque cela se présente pour ces familles-là.
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(10 h 10)
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Alors, M. le Président, s'il est vrai que ce projet de loi là va... Bon, ce qu'il va faire, il va empêcher les locateurs, M. le Président, d'avoir certaines informations. On va demander maintenant au locateur... alors l'obliger à demander, pour louer un appartement, à demander uniquement le nom, l'adresse, la date de naissance de la personne qui veut louer l'appartement. Bon. La ministre nous expliquait qu'elle veut apporter cela pour empêcher des abus sur la protection des renseignements personnels.
Mais je rappellerai à Mme la ministre et à ses collègues que, lorsque vous allez acheter une voiture, un véhicule, eh bien, on vous demande plus d'informations que ça, et vous le remplissez parce que ça permet de faire une enquête de crédit, ça permet de vérifier l'emploi que vous avez, parce qu'un locateur de voitures ou une institution financière avec laquelle vous vous préparez à signer un contrat pour 36 mois, ou 24 mois, ou 48 mois pour une voiture, bien, M. le Président, veut savoir si vous serez capable de remplir vos obligations, si vous avez un contrat de travail, si vous avez un emploi stable, si votre crédit, vos histoires de crédit antérieures sont satisfaisantes. Et, si ce n'est pas le cas, avec les renseignements que vous lui donnez, eh bien, M. le Président, il ne vous fera pas de contrat de location ou de vente de véhicule parce qu'il présumera que vous ne pouvez pas remplir ces obligations.
Il est vrai que le logement, c'est différent. On ne peut pas quand même comparer le logement et un véhicule automobile, quand même, bien qu'ici l'automobile peut-être est très souvent quelque chose de première nécessité pour se rendre à son travail, pour pouvoir amener les enfants à l'école, enfin, ou faire différentes choses. Mais le principe est sensiblement le même, M. le Président. Je crois qu'un locateur devrait être capable, lorsqu'il va louer son appartement, eh bien, d'avoir le portrait et l'information la plus complète pour pouvoir prendre une décision éclairée sur le bail qu'il va signer avec la personne, sur le genre de contrat qu'il veut faire. Est-ce qu'il va le louer à tel taux, à tel autre taux? Est-ce que la personne est capable de remplir ses obligations? Est-ce qu'elle ne le sera pas? Parce que, après tout, un appartement, M. le Président... un locateur qui a un appartement, c'est son bien, c'est quelque chose qu'il finance lui-même avec son argent, avec ses économies.
Bien souvent, on sait qu'au Québec et à Montréal en particulier, contrairement à d'autres endroits en Occident, la majorité des propriétaires sont des petits propriétaires, des petits locateurs, des gens qui ont six, quatre, deux, 10 appartements, maximum. Et je sais, moi, dans ma circonscription électorale, dans Rivière-des-Prairies, et Pointe-aux-Trembles, et maintenant Montréal-Nord, eh bien, nous voyons une multitude de petits propriétaires qui louent deux, ou trois, ou quatre appartements dont ils sont propriétaires. Et je suis certain, M. le Président, que, dans la circonscription de Jeanne-Mance, dont vous êtes le député depuis maintenant 20 années, eh bien, vous avez la même situation. Et ça, ça démontre très bien la situation à Montréal.
Alors, bon, la crise du logement. Pourquoi ça ne réglera pas, pourquoi ce projet de loi ne réglera pas la crise du logement? Bien, ce n'est pas en empêchant les propriétaires d'aller chercher de l'information dont ils ont besoin ou de restreindre l'information qui va faire en sorte qu'ils vont construire plus d'appartements. Ce qu'on a besoin, M. le Président, c'est faire en sorte de stimuler le marché locatif, parce que pourquoi les locateurs...
Moi, j'en ai rencontré, des gens. Qu'est-ce qu'ils me disent? Ils disent: M. Gobé, nous, on ne construit plus, on ne veut plus en avoir, d'appartements, on veut s'en débarrasser, c'est trop compliqué. C'est trop compliqué avec la Régie, c'est compliqué avec certains locataires. Ce n'est pas tous les locataires, la très vaste majorité des locataires sont des gens raisonnables, des gens sérieux, mais il y a une catégorie de locataires, M. le Président, qui causent des problèmes, et cela a des répercussions sur l'ensemble de l'intérêt des propriétaires à investir ou à reconstruire d'autres appartements.
Alors, il aurait été intéressant à cet effet-là d'écouter les groupes. Je crois que la ministre, quand même une ministre, une parlementaire d'expérience avant d'être ministre, aurait eu intérêt à faire en sorte que des groupes puissent venir ici, en cette Chambre, ou en commission parlementaire, au salon rouge, afin de nous exprimer quelles étaient leurs préoccupations, et des groupes pas seulement de propriétaires, pas seulement de locateurs, mais aussi des groupes de locataires, le FRAPRU, hein, le Front d'action populaire en réaménagement urbain de M. Saillant, dont je ne partage pas forcément toutes les orientations mais dont je sais que foncièrement l'objectif qu'ils poursuivent est de faire en sorte que les Québécois et les Québécoises, mais les Montréalais et Montréalaises, eh bien, puissent avoir accès à des logements qui correspondent à leurs besoins, leur capacité de payer, aient un niveau de confort, de tranquillité, de sécurité nécessaire.
Et on aurait pu demander à ces gens-là de venir. Et je suis certain que les parlementaires en cette Chambre, qui sont concernés par ces problèmes à cause des circonscriptions dans lesquelles ils sont, qui ont un certain nombre de propriétaires, bien, ces députés-là, ces parlementaires auraient été heureux d'aller participer à ces audiences, questionner les groupes, écouter leurs revendications, écouter leurs suggestions, écouter leurs propositions, au lieu d'avoir un projet de loi de quelques pages, qui ne règle rien, hein, qui est quelque chose qui semble donner l'impression qu'on s'occupe du logement. C'est ça, on donne l'impression, mais on ne fait rien. Ça ne règle pas la problématique. Et, si vous regardez le projet de loi, le projet de loi a été déposé au mois de juin, hein. Alors, déposé au mois de juin, à la fin du printemps, là, hein, au tout début, là, de... à la fin de la session parlementaire et alors que nous étions en pleine crise du logement. Donc, on dépose un projet et là on envoie un message aux gens, en disant: Nous nous en occupons. Mais on ne s'en occupe pas vraiment.
Alors, est-ce que la ministre va comprendre ça? Est-ce qu'après l'adoption du principe elle va enfin consentir à écouter les groupes? Ça aurait été préférable qu'on les écoute avant, parce que pourquoi écrire un projet de loi, et puis après ça écouter les groupes, puis dire: Bien, le projet de loi n'est plus bon, on va l'amender? Je sais que c'est la manière de faire du gouvernement. On a déjà vu des projets de loi de 250 articles avec 300 amendements. Est-ce que c'est comme ça que l'on fait?
Moi, je crois que, dans la sagesse normalement d'un gouvernement, eh bien, on doit d'abord écouter les citoyens, prendre note, prendre acte de la situation. Et, lorsqu'on a vraiment une volonté ferme, une volonté politique de régler les situations, de mettre fin à des états de fait qui ne sont pas bons, qui sont négatifs, contre-productifs pour une société, ou pour un groupe, ou une partie de la société, eh bien, à ce moment-là, une fois qu'on a écouté les gens, eh bien, on passe à l'action, on fait un projet de loi. Et il arrive après ça, à l'étude article par article, en commission parlementaire, que des parlementaires, particulièrement généralement de l'opposition mais aussi du gouvernement ? et ce n'est malheureusement pas assez souvent le cas ? eh bien, fassent des remarques, fassent des recommandations ou font valoir aux autorités gouvernementales et à la ministre en particulier ou au ministre en particulier, dépendant le cas, eh bien, qu'un certain nombre de dispositions dans le projet ne correspondent pas ou ne sont pas encore tout à fait celles qui devraient être pour avoir un projet de loi qui colle le mieux à la réalité et qui colle le mieux aux changements et aux améliorations que l'on doit faire. Et à ce moment-là on l'amende, mais ça devient des amendements peu nombreux si on a pris la peine de faire le processus avant. Ce n'est pas ce qui est le cas.
Alors, nous, ce que nous croyons, au Parti libéral, M. le Président, c'est qu'il ne doit pas y avoir de crise du logement à Montréal. On ne peut pas accepter ça. Nous croyons... Les députés, mes collègues de l'aile parlementaire, les membres de notre parti, les gens de la Commission politique du Parti libéral du Québec sont tous unanimes pour dire: Tout Québécois et toute Québécoise doit avoir un logement, un logement à prix raisonnable, un logement confortable, un logement qui lui permette de vivre dignement sans pour autant grever son budget de vie, de fonctionnement, d'une manière tellement lourde et grosse à cause du loyer qu'ils doivent se priver ou qu'ils doivent vivre misérablement à côté. Nous croyons ça, nous sommes en faveur. Mais nous croyons aussi, M. le Président, nous, du Parti libéral, que tout propriétaire et tout locateur, toute personne qui décide d'investir et d'oeuvrer dans le marché immobilier a droit aussi à un juste retour de son investissement comme chacun dans cette société, qui est une société en Amérique du Nord de type libéraliste, de libéralisme, M. le Président.
Alors, il faut trouver l'équilibre. Il faut trouver l'équilibre. Et, pour ce faire, eh bien, il ne faut pas pencher plus d'un côté que de l'autre. Il faut faire en sorte, M. le Président, que les réglementations ne soient pas trop lourdes, trop abusives, trop restrictives sur le dos de ces investisseurs, ces propriétaires, mais il faut faire en sorte aussi, eh bien, que, s'il y a, parmi ces gens-là, des gens, un petit groupe qui est généralement très minoritaire, comme dans tous les groupes, qui veulent abuser ou profiter des situations, eh bien, ils ne le puissent pas.
De l'autre côté, c'est pareil pour les locataires, M. le Président. Tous les locataires, on le sait... Moi-même, j'ai déjà été locataire. Bon, j'en connais beaucoup, de gens dans ma circonscription, qui louent leur maison, qui louent leur maison à l'occasion ou leur appartement. Eh bien, il ne faut pas appliquer la norme de coercition aussi envers eux, très forte, parce qu'un petit groupe, lui, décide de jouer avec le système ou de ne pas respecter ses engagements.
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(10 h 20)
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Alors, M. le Président, nous croyons à cette situation-là, nous, au Parti libéral du Québec, et nous exhortons la ministre à agir dans cette voie-là, parce que c'est la seule voie qui va être capable de faire en sorte que les investisseurs, les propriétaires, ceux qui veulent acheter ou construire des appartements, bien, vont revenir sur le marché. Et, en le faisant, M. le Président, ils vont construire des immeubles, ils vont construire des appartements, et ça va faire en sorte d'enlever la pression sur le loyer. Si on construit de nouveaux appartements, eh bien, la pression du prix va se retrouver un peu plus... un peu moins serrée et, aussi, M. le Président, il y a aura plus d'appartements à louer, donc tous les groupes, toutes les composantes de la société, eh bien, verront à pouvoir se loger.
Il y a aussi tout le parc locatif qui est vieillot au Québec. On a un parc locatif qui date de 25, 30, 40, 50 ans dans certains cas, et même plus. Alors, est-ce que le gouvernement ne devrait pas porter lui-même aussi une attention particulière et faire en sorte de voir s'il n'y a pas moyen, de concert avec les propriétaires, à ou moderniser, ou restaurer, ou rénover, ou même simplement démolir ces édifices et en reconstruire de nouveaux? Je n'ai pas la solution exacte tout de suite, mais je crois que ça fait partie des réflexions que nous pourrions avoir en commission parlementaire si la ministre invite les groupes à venir témoigner, à venir parler. Et cela, M. le Président, permettra de trouver une solution, cela permettra, M. le Président, peut-être d'avoir un déblocage significatif dans l'industrie de l'immobilier, de la location de logements, tout en respectant bien sûr ceux qui devraient être les principaux et les premiers bénéficiaires, qui sont les familles québécoises qui ont besoin de se loger.
Alors, M. le Président, devant cette absence de consultation, je ne peux que demander, en terminant, à Mme la ministre, l'exhorter à revenir sur sa décision et faire en sorte que, très prochainement, on invite tous les groupes qui voudront venir à cette Assemblée, qui sont concernés par ce problème, cette problématique, eh bien, qu'on les invite à venir s'exprimer devant nous. Et il me fera plaisir, moi, d'aller les écouter et, par la suite, d'intervenir pour essayer d'avoir enfin un vrai projet de loi qui correspond aux problèmes que nous connaissons actuellement dans la problématique du logement à Montréal et dans le Québec aussi partout, M. le Président. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, nous poursuivons le débat. Nous en sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et je cède la parole au porte-parole officiel de l'opposition en matière de protection du consommateur et d'application des lois professionnelles, M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député, la parole est à vous.
M. Lawrence S. Bergman
M. Bergman: Merci, M. le Président. Comme toujours, je suis heureux d'être devant vous et de prendre la parole aujourd'hui concernant le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, Bill 26, An Act to amend the Act respecting the Régie du logement and the Civil Code.
M. le Président, comme on le sait, les notes explicatives de ce sujet qui est ici devant nous aujourd'hui nous disent que le projet devant nous va modifier la Loi sur la Régie du logement afin de donner à la Régie une compétence exclusive en matière d'offre de location préalable à la conclusion du bail d'un logement. Le projet de loi crée la fonction de greffier auquel sont attribuées des compétences restreintes et attribue au greffier spécial une compétence élargie. Le projet de loi introduit des dispositions pour régir la collecte de renseignements personnels tant au moment de l'offre de location que lors de la conclusion du bail et, aussi, le projet de loi interdit au locateur d'exiger d'un candidat locataire le versement d'une somme d'argent.
M. le Président, le projet de loi devant nous comporte beaucoup de modifications à la Loi sur la Régie du logement en matière de conciliation, en matière de moyens d'audience, en matière de résiliation du bail en cas de non-respect d'une ordonnance émise par la Régie du logement ou d'un accord intervenu lors d'une séance de conciliation. M. le Président, ce projet de loi vient aussi modifier le Code civil pour préciser les règles applicables quand le locataire désire éviter la résiliation du bail en payant le loyer avant jugement.
Il y a aussi des modifications pour régir la collecte des renseignements personnels au moment de l'offre de location et au moment de la signature du bail et aussi pour interdire au locateur d'exiger du candidat locataire le versement d'une somme d'argent. Dans les modifications prévues au Code civil, le locataire pourra s'adresser au tribunal pour faire fixer le loyer à la suite d'une réduction du montant des taxes ou du coût de l'énergie. Finalement, comme nous l'indiquent les notes explicatives, le projet de loi réduit les délais pendant lesquels le locateur peut transmettre au locataire un avis modifiant les conditions du bail.
M. le Président, ce projet de loi nous propose des modifications majeures à la Loi sur la Régie du logement et le Code civil du Québec en ce qui concerne l'habitation et le logement. Nous, comme législateurs, avons premièrement le devoir de prendre le temps de recevoir et d'écouter en commission parlementaire toute personne et groupe de personnes qui désirent exposer leurs commentaires à ce sujet.
M. le Président, le projet de loi affecte l'élément le plus important de notre société: l'habitation de nos concitoyens et concitoyennes comme locataires dans un logement. M. le Président, notre habitation dans une maison unifamiliale ou multifamiliale comme propriétaire ou locataire est la base de notre vie, notre vie en famille. C'est l'essence même de notre vie en famille. Nous devons nous assurer que nos locataires sont protégés pour qu'ils habitent en paix et en sécurité dans le logement qu'ils ont choisi. Ils ne doivent pas souffrir d'aucun préjudice et d'aucune difficulté.
M. le Président, si l'occupant est le propriétaire de son logement, il est à la fois le locateur et le locataire. Il peut donc établir les règles qui lui semblent les plus convenables pour son bien-être. Mais, M. le Président, si l'occupant est locataire, le locataire n'est pas le propriétaire du logement, alors le locataire doit avoir un arrangement et un bail avec le locateur.
M. le Président, même dans un marché libre, c'est à nous, comme législateurs, d'établir un juste équilibre entre, un côté, le locateur et, l'autre côté, le locataire. On doit établir des règles qui permettent au locateur d'avoir un minimum de sécurité économique sur son investissement tout en offrant un logis convenable au locataire.
Comment débuter la relation entre le locateur et le locataire? Quelles sont les informations que le locateur a le droit d'obtenir avant d'accepter de louer le logement en question au locataire? Si on respecte le droit de propriété du locateur, si on respecte le fait que le locateur ne loue pas un logement comme un service public mais pour recevoir une compensation monétaire, on doit accepter qu'il ait le droit de porter un jugement, un jugement sur la compétence économique du locataire de payer son logis et d'occuper le logement comme un bon père de famille. Le locateur a toujours le droit de faire et porter un jugement sur la compétence économique du locataire de payer son logis.
De l'autre côté de la médaille, M. le Président, nous avons la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Quels sont les renseignements nécessaires que le locateur est en droit d'obtenir du locataire? Quels renseignements le locataire ne devrait pas divulguer au locateur? On doit trouver, M. le Président, un juste équilibre pour la protection, d'un côté, du locataire et, sur l'autre côté, du locateur.
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(10 h 30)
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L'article 21 du projet de loi nous explique, et je cite: Ce Code est modifié par l'ajout, après l'intitulé précédant l'article 1894, des articles suivants:
«1893.1. Sont seuls considérés comme étant nécessaires au sens de la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé:
«1° en ce qui concerne la collecte de renseignements préalablement à la conclusion d'un bail, les renseignements suivants:
«
? les nom, date de naissance, adresse et numéro de téléphone du candidat locataire,
«
? lorsque le candidat locataire est déjà lié par le bail d'un logement, les nom, adresse et numéro de téléphone du locateur, ainsi que le nombre de mois ou d'années pendant lesquels il a occupé le logement;
«2° en ce qui concerne la collecte de renseignements au moment de la conclusion du bail, les renseignements suivants:
«
? les nom, date de naissance, adresse et numéro de téléphone du locataire,
«
? lorsqu'un espace de stationnement est attribué au locataire, le numéro d'immatriculation de son véhicule.
«La violation des droits découlant du présent article donne ouverture à des dommages-intérêts punitifs.» Mr. Speaker, Bill 26 contains amendments to the Act respecting the Régie du logement and the Civil Code of Québec. The amendments to the Act respecting the Régie du logement grant exclusive jurisdiction to the Rental Board over an offer to lease out a dwelling prior to the signing of the lease.
In this respect, Mr. Speaker, the bill makes new provisions in the Civil Code by regulating the collection of personal information before and on the signing of the lease and prohibits the lessor from requiring any amount of money whatsoever from a prospective tenant.
Mr. Speaker, the key to these new provisions is to achieve a balance, to achieve a sense of equity between the lessor and the lessee. On the one hand, we have the lessor, and we have the lessor whose goals, roughly speaking, are a return on his investment. The tenant, on the other hand, requires a dwelling ? the basis of family life ? the tenant requires a dwelling which suits his budget, meets his needs and, as the Civil Code explains, offers him peaceful enjoyment which must be given to him by the lessor.
Mr Speaker, what we're concerned with in Bill 26, article 21, is the question of the meeting of the minds between the lessor and the lessee at the offer stage to a lease. The lessor must determine if the lessee will have the economic means to fulfill his financial obligations under the terms of the lease and if he will be a suitable tenant in the dwelling in question.
Mr Speaker, providing there is no discrimination as to race, color or religion, the lessor is free to determine, decide and make a decision as to whether he wishes or not to accept an individual as his tenant. However, it is understandable that he requires information with respect to the new prospective tenant, and the prospective tenant can decide whether or not he wants to reveal the information required of him by the lessor. The individual, the lessee, is guided by the Act respecting the protection of personal information in the private sector. Mr Speaker, we, as legislators, have to be able to offer a guidance and a valid and just balance, between the lessor and the lessee.
Je vous ai cité l'article 21 qui ajoute à l'article 1893.1 et 1893.2 du Code civil. L'article 1893.1 nous dit que les seuls renseignements jugés nécessaires lors de la conclusion du bail sont le nom, la date de naissance, l'adresse et les numéros de téléphone du candidat locataire. Et, lorsque le candidat locataire est déjà lié par un bail d'un logement, l'information sur son présent bail, c'est-à-dire le nom, adresse, numéro de téléphone du locateur ainsi que le temps qu'il a occupé le lieu où il est au moment présent.
M. le Président, le but de l'opposition officielle est de trouver un juste équilibre pour satisfaire le locataire et, par le fait même, protéger sa vie privée et donner au locateur la protection dont il a besoin pour faire un jugement et une décision.
M. le Président, ce projet de loi nous présente un défi d'équilibre extraordinaire entre deux concepts de base dans une société libre et démocratique. M. le Président, la qualité de vie dans notre société démocratique serait grandement améliorée si nous pouvions atteindre le bon résultat.
Sur l'autre face de la médaille, nous devons tenir compte de la vie privée de nos citoyens parce que la vie privée est liée à l'indépendance individuelle, et la vie privée est la base et la définition même de la liberté des citoyens dans notre société. La vie privée est partie de qu'est-ce qu'on appelle la dignité humaine. Mais, en défendant cet important principe, nous savons qu'il y a eu des abus et des fautes commises par les locataires envers le locateur, et nous devons être certains, dans un marché économique libre, qu'il y a une mesure de protection pour nos locateurs. Combien d'informations peuvent-ils soutirer pour satisfaire l'entente et s'assurer que le futur locataire va payer son loyer? M. le Président, nous, de l'opposition officielle, voulons entendre des groupes en commission parlementaire afin de nous éclairer sur ce sujet.
M. le Président, l'opposition a demandé formellement, dès le dépôt de ce projet de loi au mois de juin, la tenue d'une consultation avant ce débat sur le principe de ce projet de loi, ce que refuse sans raison ce gouvernement. M. le Président, c'est important qu'on ait cette consultation avec tout groupe qui veut faire représentant devant nous en commission parlementaire. En écartant ainsi une véritable consultation, ce gouvernement prive l'opposition et il se prive lui-même de l'opportunité de faire la lumière publique sur l'enjeu et les conséquences des modifications qu'il propose.
M. le Président, le gouvernement, en plus de semer la chicane au lieu de chercher à trouver des solutions justes et équitables pour tous les acteurs dans notre présence, en agissant ainsi, il décourage tous ceux qui offrent des logements et qui mettent leurs économies dans la gestion d'immeubles à logements. Il porte un dur coup aux centaines de milliers de propriétaires québécois, souvent des ouvriers et des travailleurs, qui ont bâti le parc de logements locatifs et qui fait nécessité dans notre société. Il risque d'accentuer la crise du logement qui affecte en premier lieu les personnes les plus démunies de notre société, les femmes et les familles avec des enfants. M. le Président, je prie le gouvernement d'avoir cette consultation pour qu'on puisse faire une décision raisonnable. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil. Et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Mme la députée de Mercier, la parole est à vous.
Mme Nathalie Rochefort
Mme Rochefort: Merci, M. le Président. La loi modifiant la Régie du logement et le Code civil a créé un tollé dans mon comté, M. le Président, un tollé de la part des propriétaires, un tollé de la part des locataires, de leurs regroupements, un tollé parce que ces gens-là veulent être consultés. Ils travaillent très souvent de concert à trouver des solutions locales et ils veulent être entendus sur les solutions qu'ils mettent de l'avant, ils veulent être entendus sur les problèmes qu'ils vivent au quotidien. Et ces problèmes-là, selon tous les appels que j'ai eus de la part de mes locataires et de mes propriétaires, ne vient rien régler. Ce projet de loi là, M. le Président, n'amène rien de neuf et ne fait que mettre de l'avant la pénurie de logements, ne fait que créer des situations encore plus tendues entre les propriétaires et les chercheurs de logement.
n(10 h 40)n Dans mon comté, M. le Président, le taux de vacance est un des plus bas au Québec; le taux de vacance est à 0,9 %. Ça veut dire, chez nous, ça, qu'une femme monoparentale, par exemple, avec trois enfants ? j'en ai eu une il n'y a pas très longtemps ? qui cherche un logement ne trouve strictement rien. Je me souviens du désespoir de cette dame-là qui me disait: Nat, j'ai trois gars, ils ont 8, 12 et 16 ans; mon plus vieux travaille; je travaille pour être capable d'arriver, mais mes revenus ne sont pas suffisants pour continuer de vivre dans le quartier; je n'ai pas les moyens de me payer un logement à 8, 900 $. La crise du logement, M. le Président, on la vit au quotidien dans nos comtés. Je la vis au quotidien dans le mien et je suis convaincue que tous les députés sont conscients de cette crise.
Ce que je ne comprends pas, par exemple, c'est le refus du gouvernement d'entendre les groupes, le refus qu'ils ont de tenir une consultation, une véritable consultation sur le projet de loi, oui, mais sur les manques qu'il y aurait à ce projet de loi là. Et ces manques sont évidents pour plusieurs, et plusieurs des propriétaires, comme je vous disais, et... pour les locataires, ont des solutions. Pourquoi on ne veut pas les entendre? Je ne comprends pas. Je pensais, en entrant en politique, que le rôle d'un gouvernement était d'écouter ses citoyens. Je me rends compte que le gouvernement actuel, faute d'avoir écouté ses citoyens, ces locataires et ces propriétaires, depuis qu'ils sont arrivés au pouvoir, n'a fait que créer la crise du logement actuelle en ne soutenant pas la construction de nouveaux logements locatifs. C'est plus simple de soutenir de la création de condos, ça augmente les comptes de taxes. Mais, pour les personnes les plus démunies de notre société, ils n'ont pas les moyens de se payer un condominium, M. le Président. Ils en sont réduits à essayer de se trouver un logement, logements qui sont de plus en plus rares.
Et en se privant d'une véritable consultation, M. le Président, ce qui est dommage, c'est qu'on se prive de l'opportunité de faire publiquement la lumière sur tous les enjeux et les conséquences des modifications proposées par le projet de Loi sur la Régie du logement et le Code civil. On ne peut pas comprendre toutes les dynamiques des relations entre les propriétaires et les locataires si on refuse de les écouter. Il me semble que, si on veut vraiment comprendre un problème, il faut d'abord écouter les personnes qui vivent ce problème-là, écouter les solutions qu'ils ont à proposer, M. le Président. Il me semble que c'est une question de gros bon sens. J'ai l'impression que l'usure du pouvoir éloigne les gens du gros bon sens? J'ai nettement l'impression que, en ne comprenant pas la dynamique des relations, ce gouvernement-là qui refuse d'écouter risque de semer la chicane entre les différents acteurs, entre les propriétaires et les locataires et les chercheurs de logement, M. le Président. En agissant ainsi aussi, le gouvernement porte un coup dur aux centaines de milliers de petits propriétaires qui ont des duplex, des triplex, qui vivent au quotidien des situations pas faciles, qui n'ont pas une armée d'avocats pour les supporter. Les petits propriétaires, c'est la madame qui a décidé d'investir ses économies, de s'acheter un duplex pour être capable de prendre une bonne retraite, être capable de s'assurer un revenu pour ses vieux jours. C'est le couple qui décide d'investir dans un petit immeuble, un triplex, ou un duplex encore, et ces gens-là ont des choses à dire, vivent des problèmes au quotidien, vivent des solutions, vivent des réussites. Et je pense que ces gens-là, aussi bien les locataires que les propriétaires, doivent être entendus.
Ce projet de loi là, M. le Président, est réclamé... Non, plutôt, pas ce projet de loi, un projet de loi réaliste qui correspond aux besoins des gens est réclamé par les associations de locataires et réclamé par les associations de propriétaires pour éviter les abus, diminuer la discrimination aussi. Mais ce projet de loi là, M. le Président, ne vient rien régler. Il vient juste de mettre de l'huile sur le feu.
Ce projet de loi, M. le Président, selon ce qu'on en comprend et selon tous les appels qu'on reçoit dans nos bureaux de comté, ne règle pas le problème de construction du logement. Je me permettrais de citer un éditorialiste du Devoir, en juin dernier, qui disait: «Il est important d'ajouter que les amendements proposés par la ministre Harel ne touchent pas... ne touchent qu'à quelques symptômes de la crise du logement, pas aux causes. S'il y a crise, c'est que trop peu de logements ont été construits depuis 10 ans, faute de rentabilité dans cette industrie et du nombre élevé de nouveaux ménages.» Je continue avec la citation, M. le Président: «Avant d'aller plus avant dans les mesures de contrôle, le gouvernement du Québec doit procéder à un examen exhaustif des caractéristiques de cette industrie pour qu'elle reprenne de la vigueur et qu'un plus grand nombre de ménages ? un plus grand nombre de femmes, un plus grand nombre d'hommes et surtout un plus grand nombre de jeunes ? aient un toit sur la tête.» M. le Président, la crise est telle que des centaines de personnes ne trouvent rien pour se loger, ne trouvent pas de logement et se ramassent dans les rues de Montréal, se ramassent dans les rues de Québec. Ce gouvernement-là, au lieu de supporter les gens pour qu'ils se trouvent un logement, crée de plus en plus d'itinérance. Je pense que le gouvernement se doit d'être responsable et prenne en considération le sort des plus démunis de notre société.
D'entrée de jeu, je dirais que le nombre de jeunes qu'on retrouve de plus en plus dans les rues est causé en bonne partie par ce manque de logement. Il y a quelques années ? petite anecdote, M. le Président ? un gros propriétaire était prêt à louer à des jeunes marginaux, des jeunes différents. Il leur trouvait des quatre et demie dans son parc de logements, en disant: Je fais ma part, je vais essayer de les aider; si on en réchappe un, tant mieux, on l'aura aidé, on l'aura sorti de sa misère. Ce même propriétaire, M. le Président, au 1er juillet, il ne lui restait que quatre un et demie à louer. Il n'avait plus... même s'il reste toujours sensible à la situation des plus démunis, il n'avait plus l'énergie, il n'avait surtout plus de logements nécessaires pour leur offrir un toit.
Est-ce qu'on va attendre, M. le Président, qu'il y ait encore des morts dans les rues de Montréal, des personnes qui vont mourir de froid faute d'avoir un toit sur la tête, faute d'avoir un lieu qui leur appartient, une maison, un foyer, pour réagir? Ce projet de loi là, M. le Président, n'amène rien de neuf. Mais surtout, ce qui est le plus dommageable, à mon sens, c'est le refus d'écouter, le refus d'entendre les groupes de locataires, les groupes de citoyens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Mercier, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales, pour l'opposition officielle, et député de Hull. M. le député, la parole est à vous.
M. Roch Cholette
M. Cholette: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir ce matin de parler sur un projet de loi important, le projet de loi n° 26, qui a été déposé en juin dernier à l'Assemblée nationale par la ministre des Affaires municipales, un projet de loi donc qui modifie la Loi sur la Régie du logement ainsi que le Code civil.
Vous savez qu'au Québec, essentiellement, la relation locataire-locateur est gérée non seulement par une loi, mais aussi par une régie, et puis, essentiellement, il y a des balises d'établies pour que, d'une part et d'autre, on puisse comprendre les relations, avoir des relations correctes entre ces deux groupes. C'est-à-dire, quelqu'un qui investit de l'argent pour bâtir des unités de logement décide de louer ces unités, donc les met sur le marché, et il y a des gens qui décident d'être locataires et louent ce bien privé de la part donc d'un particulier. Évidemment, il ne s'agit pas ici, particulièrement dans le projet de loi n° 26, il ne s'agit pas de regarder la relation qui existe entre un locataire et l'État qui serait, par exemple, propriétaire de logements et qui met ces logements à la disposition du public comme, par exemple, les HLM, mais particulièrement la relation qui existe entre le secteur privé, soit quelqu'un qui prend du capital de sa poche, construit des logements et les loue à quelqu'un d'autre du secteur privé, c'est-à-dire un locataire.
n(10 h 50)n Alors, cette relation d'affaires est régie, comme je le disais, entre autres, par une Régie du logement, Régie du logement qui est très sollicitée pour toutes sortes de situations. Dans mon bureau de comté, on a souvent des gens qui viennent nous voir, tant des locataires que des locateurs, qui nous expliquent les problèmes, hein, qu'ils vivent en termes de relations d'affaires. Premièrement, la Régie du logement, c'est un organisme qui n'est pas facile d'approche. On sait qu'il y a des listes d'attente, on sait que c'est assez hermétique comme organisation. Et, avant de se rendre à cette étape-là, on souhaite qu'on puisse avoir un dialogue fructueux.
Mais, M. le Président, avant d'embarquer dans le vif du sujet puis vous parler notamment, là, des dispositions législatives, parce qu'il y a deux dispositions législatives dans le projet de loi n° 26 qui me font particulièrement sourire, soit l'article 24 ainsi que l'article 21... L'article 24 parle de taxes municipales et scolaires et l'article 21 parle de protection de renseignements personnels. Et là je suis très préoccupé, considérant la feuille de route du Parti québécois en matière de protection de renseignements personnels, hein. Vous allez acquiescer avec moi que ce n'est pas leur meilleur cheval de bataille, la protection de renseignements personnels. Et, quand on parle de taxes municipales, on aura la chance de parler, M. le Président, du projet de loi n° 170, puis on va parler de ça, des taxes municipales.
Mais, avant de parler de ça, avant de parler de la relation qui existe ? bonjour ? la relation qui existe entre un locataire et un locateur, il faut quand même qu'il y ait des logements disponibles. Et le problème, c'est justement qu'au Québec ? d'un côté, ce n'est pas bon, puis, d'un autre côté, c'est pas mal bon ? c'est qu'il n'y a pas de logements disponibles. Je vais prendre ma région, dans mon comté, le taux de vacance est à peu près à zéro. Mais ça, ça veut dire qu'il y a un plein-logement, hein. En termes d'économie, on dirait un plein-emploi, tout le monde avait une job. Mais, dans le domaine du logement, on dirait qu'il y a un plein-logement. Un plein-logement, ça, c'est bon pour les propriétaires, les valeurs augmentent, puis il y a du monde dans les logements, il n'y a pas de mois qui se perdent. Ça, c'est très bon. Mais pour celui qui n'a pas de logement, ça, ce n'est pas bon. Parce que, lui, il est pris à courir après un logement parce qu'il n'y en a pas sur le marché, le stock immobilier n'est pas disponible.
Alors, est-ce que, quand on regarde ça, est-ce qu'on voit dans le projet de loi n° 26 quelque chose d'incitatif là-dedans? Est-ce qu'on dit: Ah! bien, là, par exemple, le gouvernement fait tout en son pouvoir pour inciter des propriétaires, des gens qui ont un petit peu de capital, à investir dans du béton, dans du mortier pour faire des fondations, pour ériger des logements, pour permettre à des citoyens d'avoir accès à des logements? Est-ce que donc, 26, le projet de loi n° 26 répond à cet impératif du Québec qu'on a maintenant? Bien, la réponse, c'est non. Bien, la réponse, c'est non, puis c'est dommage.
M. le Président, prenez pas ma parole. Prenez pas ma parole là-dedans, prenez simplement un éditorial qu'on a de Jean-Robert Sansfaçon, du jeudi 21 juin 2001, et je vous lis ce que Sansfaçon dit à propos justement de ce problème-là. Il dit ceci: «Il importe d'ajouter que les amendements proposés par la ministre des Affaires municipales ne touchent qu'à quelques symptômes de la crise du logement, mais pas aux causes. S'il y a crise, c'est que trop peu de logements ont été construits depuis 10 ans, faute de rentabilité dans cette industrie et du nombre élevé de nouveaux ménages.» C'est clair, là. Sansfaçon, lui, attribue au fait qu'il n'y a pas assez de logements... C'est que ce n'est pas assez rentable de bâtir, d'hypothéquer, d'investir, avec toutes nos lois, que ce soit la CCQ, que ce soient toutes nos règles du Québec pour construire un logement, puis, quand ça vient le temps de louer ça à quelqu'un après ça, la Régie du logement s'en mêle. Lui, Sansfaçon, il dit: Ce n'est pas rentable, puis c'est pour ça qu'on a une pénurie de stock, parce que les propriétaires immobiliers, fonciers, n'ont pas avantage à prendre de l'argent de leurs poches puis investir ça, faute de rentabilité. «Le prix très bas des maisons et des loyers au Québec ? parce qu'il est vrai qu'il coûte moins cher au Québec pour se loger que, par exemple, mon voisin d'en face, l'Ontario, Ottawa, donc plus bas qu'ailleurs en Occident ? décourage la construction d'immeubles locatifs.» En se contentant de corriger quelques abus causés par la rareté des logements, M. le Président, le gouvernement se donne bonne presse, se donne bonne presse, mais nous prépare des jours plus difficiles encore. Tant qu'il sera plus intéressant de construire des condos que des immeubles locatifs, tant que la Régie du logement limitera au taux d'inflation, et même encore, les augmentations de loyer permises, la qualité et le volume du parc locatif iront en s'amenuisant. Surtout si la situation économique continue de se maintenir au beau fixe. Depuis qu'il a écrit donc cet éditorial le 21 juin, on sait très bien... et j'imagine que la ministre aujourd'hui des Finances nous dira que ça ne va pas... ce n'est pas au beau fixe en termes d'économie, bien au contraire. On a depuis plusieurs mois senti un ralentissement économique. Même si le gouvernement ne s'entend pas sur la définition, j'espère qu'aujourd'hui ils vont être capables de s'entendre sur la définition d'une récession technique.
Peut-être que la fin de la récréation a été sonnée du côté gouvernemental pour qu'on s'entende, là, à savoir où est-ce qu'on s'en va en termes d'économie. Et ça aurait été bien avantageux pour tous les parlementaires d'avoir l'état de la situation de l'économie au Québec, de nos finances publiques, avant de déposer un budget. C'est presque, M. le Président, ce qui va se passer aujourd'hui. C'est presque comme vous, M. le Président, qui ne connaissez pas votre salaire et vous nous déposez un budget personnel en disant que vous voulez mettre 500 $ par mois sur le logement, M. le Président; vous voulez mettre 200 $ pour vous vêtir, puisque vous êtes un homme élégant, 200 $ par mois, donc, et quelques autres dollars pour la nourriture, pour le transport, etc. Mais tout ça, M. le Président, tout ça sans connaître vos revenus. Or, c'est un peu à l'envers, hein, de ce qu'on va vivre aujourd'hui au salon bleu de l'Assemblée nationale. C'est nous dire: Voici le budget, mais je vous cache la réalité des finances.
Alors, puisque Sansfaçon disait: Même si c'est au beau fixe, il y aura pénurie de logement parce que le climat n'est pas propice à l'investissement, eh bien, on réalise que depuis ce temps-là l'économie s'est détériorée, depuis les attentats du 11 septembre bien évidemment ça s'est détérioré. Or, on peut donc comprendre, avec la logique de Sansfaçon, qu'il y aura une crise supplémentaire dans le stock de logements.
Et je veux être bien clair, M. le Président, Sansfaçon est catégorique là-dessus, il y a des circonstances au Québec qui font en sorte qu'il n'est pas... ce n'est pas rentable, ce n'est pas payant de construire des immeubles locatifs malgré le taux de vacance très bas. Et ces circonstances québécoises là, il y a un seul responsable. Il y a un seul responsable de ces circonstances-là, c'est la gouvernement qui est en place. Avec nos structures par-dessus structures et nos contraintes par-dessus contraintes et avec le fait qu'on attache les mains notamment des promoteurs, des locateurs, on fait en sorte que ce n'est pas incitatif à construire des logements.
M. le Président, cela étant dit, il est clair qu'on doit trouver un équilibre. Est-ce qu'il est sain au Québec d'avoir une sorte de balancier qui permet notamment, M. le Président, de protéger le locataire pour ne pas avoir à subir la mauvaise humeur du propriétaire qui déciderait d'augmenter de façon astronomique les loyers? Est-ce qu'on devrait avoir une structure en place qui va permettre, par exemple, à garder un minimum, par exemple, de température dans les logements, la salubrité des logements? Est-ce qu'on doit avoir ce genre de mécanisme là? La réponse, c'est: Oui. Tout le monde s'entend, même les propriétaires s'entendent. Mais encore faut-il que ces mécanismes soient suffisamment malléables, flexibles, adaptés à la réalité pour que ça fonctionne rapidement, que ça fonctionne efficacement. Et on connaît des ratés, on connaît... Et notre porte-parole dans ce dossier-là a fait ressortir justement, avec ardeur, la problématique qui existe justement dans le fonctionnement de la Régie. Et 26 vient-il corriger ça? La réponse, c'est: Non. Bien au contraire, on donne de nouvelles responsabilités aux greffiers et greffiers adjoints de la Régie.
Mais, M. le Président, l'opposition officielle, ça a été clair, on veut contribuer à ce projet de loi là parce qu'il y a des affaires là-dedans qui ont du bon sens. Il y en a qui ont bien du bon sens. On pense qu'on ne s'attaque pas suffisamment pour créer justement ce stock immobilier ? ça, c'est une faiblesse ? mais il y a des choses là-dedans qui nous sourient. Ça nous sourit.
Mais ce qu'on aurait souhaité, c'est qu'on puisse entendre des groupes venir nous parler justement de leur compréhension du projet de loi. Mais ça, avant d'entreprendre le débat. Parce que, moi, je me lève aujourd'hui, M. le Président, et je vous parle de ma propre connaissance de tout cela, de mon vécu dans mon comté. Mais j'aurais aimé, par exemple, entendre des groupes comme des associations de locataires, comme, par exemple, François Saillant, que j'ai vu hier, à TQS, hier soir, à TQS, avec Jean Lapierre, par exemple des groupes comme le CORPIQ, la Corporation des propriétaires immobiliers du Québec, l'Association des propriétaires du Québec, la Ligue des propriétaires de Montréal et le Regroupement des propriétaires d'habitations locatives, par exemple, en Estrie. Puis il y en a aussi en Outaouais, M. le Président.
n(11 heures)n Et pourquoi j'aurais aimé entendre ces groupes-là? Bien, savez-vous, c'est parce qu'ils nous ont écrit au mois de juin et ils ont écrit à la ministre, en disant: Mme la ministre, on pense que vous faites fausse route. D'ailleurs, un communiqué de presse a été émis, et je veux vous lire des extraits de ce communiqué de presse là parce que... Et là, je parle vraiment du contenu du projet de loi. Le projet de loi, à l'article 21, parle de l'information qu'un propriétaire pourrait exiger à un locataire potentiel.
Je veux qu'on se remette dans le contexte, M. le Président. Vous investissez de vos épargnes 250 000 $ dans un bloc. Dans vos nombreuses épargnes, M. le Président, vous en prenez une faible proportion et vous investissez donc 250 000 $ pour construire un immeuble locatif. Cet immeuble est votre propriété, M. le Président, et vous décidez de le louer, de louer ces espaces à des citoyens. Il est clair que vous avez à coeur votre investissement, vous voulez protéger votre investissement. Ça fait votre affaire, c'est correct, mais ça fait aussi l'affaire des locataires qui ont accès donc à un logement. Mais, M. le Président, il y a des choses que vous pouvez demander pour protéger votre investissement, puis il y a des choses que vous ne pouvez pas demander parce qu'on considère, du côté gouvernemental, que c'est outrepasser la bonne marche des choses et c'est outrepasser notamment le genre d'informations qui est nécessaire pour que vous puissiez dormir l'esprit en paix, en sachant très bien que votre investissement est protégé.
Alors, la CORPIQ dit essentiellement ceci. Ce n'est pas compliqué, première phrase: Le projet de loi n° 26 est un projet de loi tout à fait inacceptable. Le projet de loi n° 26, qui modifie justement la Loi sur la Régie du logement ainsi que le Code civil, est une autre intervention tout à fait inacceptable de l'État dans les relations propriétaire-locataire du secteur privé. Par ce projet de loi, M. le Président, l'État veut imposer une fois de plus au propriétaire des règles qui ne s'appliquent même pas à ses propres organismes. Quand le gouvernement, lui, agit comme propriétaire, lui a plus de droits que le secteur privé quand il agit dans le même genre de choses.
D'ailleurs, quand on regarde les informations que l'État peut demander à un locataire lorsqu'il loue, par exemple, un HLM, il est clair que l'État peut demander une copie du bail actuel, factures de chauffage s'il y en a, la carte d'assurance maladie ainsi que les rapports d'impôts et des relevés TP4, TP5. Ça, l'État se donne le droit de réclamer ce genre d'informations là. Bien évidemment, ces informations-là ne sont pas disponibles pour le secteur privé qui voudrait s'informer du genre de locataire qui s'en irait dans le logement. Or, dans un logement privé, l'État veut imposer au propriétaire privé de louer avec simplement le nom, la date de naissance, l'adresse et le numéro de téléphone. S'il y avait un historique de location, certaines informations seraient également disponibles.
Alors, pour la CORPIQ, «adopter une telle loi est un encouragement à l'irresponsabilité ? et ils vont loin, M. le Président, là, c'est la CORPIQ qui parle ? et à la fraude. Les propriétaires en ont assez d'être régis par l'État et exigent du gouvernement les mêmes droits qu'il s'accorde à lui-même ou à ses créatures, dont les OMH et Hydro-Québec.» Alors, la CORPIQ s'est faite assez virulente du projet de loi n° 26. Je pense que c'est une opinion, c'est une opinion qui mérite tout au moins d'être entendue avec des consultations particulières. On pourrait les entendre avant la fin des débats sur l'adoption du principe. Et je vois ma porte-parole qui acquiesce à cette demande, elle qui s'est fait un cheval de bataille, qui a réclamé justement ces consultations, parce que, à la différence du gouvernement, nous, on est ouverts à l'écoute, hein. Nous, on n'est pas fermés à ça. Puis je pensais, moi, bien que, après le 1er octobre, avec nos promesses du premier ministre et même du ministre responsable des élections... Suite à ce qui s'est passé le 1er octobre, le gouvernement nous a dit: J'ai compris le message, on va davantage. Bien, ils ont la chance de le faire, là, M. le Président. On vous dit: Écoutons-les. Qu'on les convoque en commission parlementaire pour les écouter qu'est-ce qu'ils ont à dire sur le projet de loi n° 26. Eh bien, non. À ce jour, et ma collègue me le confirme, à ce jour, c'est absolument triste de constater que le gouvernement ne veut rien savoir d'entendre des groupes qui auraient des choses à dire, tant des locataires qui ont tout à gagner à venir faire connaître leur point de vue sur les dispositions du projet de loi n° 26 que des locateurs qui, eux, se disent, notamment par communiqués et par une étude d'une firme d'avocats, Lavery, de Billy, bien, bien légitime, tout à fait opposés à des dispositions notamment contenues à l'article 21. Et je pourrais vous lire un long plaidoyer de ces avocats concernant l'article 21 qui restreint de façon beaucoup trop sérieuse la capacité d'un locateur d'obtenir de l'information.
Le temps file, M. le Président. Je n'ai malheureusement que 20 minutes pour m'exprimer sur ce projet de loi là. Je ne voudrais certainement pas passer sous silence un article qui me fait bien sourire parce qu'il sera absolument inapplicable, M. le Président. Vous avez bien compris, là: inapplicable. C'est l'article 24.
C'est dans la politique-fiction complètement, l'article 24 du projet de loi. C'est inutile de mettre ça là-dedans. Pourquoi? Parce qu'on parle de baisse de taxes municipales. Non, ne partez pas à rire, M. le Président, je vous en prie. Je le comprends, je comprends très bien que vous avez une grave, une grave réserve par rapport à des baisses de taxes municipales. Vous savez très bien que je partage votre avis, que ça n'a pas de bon sens de faire penser au monde que, avec des fusions forcées, le projet de loi n° 170, on risque d'avoir des baisses de taxes. Ça ne se peut pas.
Même le projet de loi n° 170 dit dans la loi que les taxes vont augmenter. Il faut le faire, là, M. le Président! Même le gouvernement, par bâillon... On pourrait parler de ça aussi, le bâillon, l'élastique, les amendements, alouette! Même le gouvernement confirme, dans le projet de loi n° 170 et ensuite le projet de loi n° 29, qu'il y aura pour les contribuables du Québec, eh bien, des augmentations de taxes.
Le projet de loi n° 26 s'en va dire donc à un de ses articles: Si jamais il y avait une baisse de taxes municipales, les citoyens pourraient faire la demande à la Régie pour en bénéficier. C'est louable, c'est un beau clin d'oeil, M. le Président. Bien, c'est de bonne guerre, mais soyons réalistes quelques instants, là. On a eu des fusions de commissions scolaires. On parle de taxes scolaires aussi là-dedans. Je veux dire, on a eu des fusions de commissions scolaires. Moi, dans mon comté, mes taxes ont augmenté de 22 %, de commission scolaire. Et la loi n° 170 prévoit que les taxes vont augmenter.
Là, vous allez entendre le gouvernement dire: Oui, mais on va les plafonner à 5 %. J'ai une petite nouvelle pour vous, M. le Président: Ce n'est pas vrai. Il y a tellement d'échappatoires puis de portes là-dedans, ce n'est plus le compte de taxes, c'est le taux puis, le taux, c'est par rapport à une année que tu n'as pas baissé les taxes, puis ça, ça va s'appliquer juste à des dépenses reliées à la nouvelle ville. Puis, si ce n'est pas la nouvelle ville parce qu'il fallait de toute façon qu'il change son ordinateur, ça ne sera pas applicable.
M. le Président, au net-net, là, il n'y en a pas, de plafond sur les taxes. Les conventions collectives vont frapper le top. Jean Lapierre et tout le monde de ses acolytes vont se réjouir d'une convention collective beaucoup plus étoffée. Les gens de Montréal vont être aux prises avec un syndicat très fort comme partout ailleurs au Québec. Voyons donc! Si c'est sérieux, dans un projet de loi, de dire et de faire espérer au monde une baisse de taxes en disant: Si jamais il y en avait une, vous pourrez vous en prévaloir.
Comme je vous dis, M. le Président, c'est un beau clin d'oeil, mais tellement déconnecté de la population. C'est assez dommage. Alors, M. le Président, ce n'est pas compliqué. Nous sommes ouverts à discuter du projet de loi n° 26. Mais, dans sa forme actuelle, puisque le gouvernement refuse, M. le Président, refuse catégoriquement d'entendre raison et d'entendre surtout les groupes pour s'exprimer là-dessus, bien, on n'a pas d'autres choix que de s'opposer sur le principe de ce projet de loi là, mais en ayant en tête qu'il faut garder un équilibre entre les droits des locataires et les responsabilités des locataires. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Hull. Alors, nous poursuivons nos débats sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et je reconnais le leader adjoint de l'opposition officielle et porte-parole de l'opposition en matière d'industrie et commerce et député de Chomedey.
M. Thomas J. Mulcair
M. Mulcair: Merci, M. le Président. À mon tour, il me fait plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 26 qui, rappelons-le, est une loi qui modifie la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, une loi, M. le Président, qui poursuit un but avoué de la part du gouvernement qui prétend que le but, c'est d'améliorer la situation du logement locatif, parce que, comme tout le monde le sait, on vit une crise du logement, notamment dans les grands centres comme Montréal et Québec.
Le Québec en entier est un des endroits en Amérique du Nord où on a toujours la plus haute proportion de locataires. Dans nos grands centres, par exemple, on a beaucoup plus de gens qui louent leur logement que c'est le cas dans d'autres villes canadiennes notamment et ailleurs en Amérique du Nord. Cette situation fait en sorte que, depuis les années cinquante maintenant, on avait une succession de lois qui portaient souvent un titre long et assez original, c'était, à chaque année, une loi pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires, puis c'était une loi qui, à chaque année, était appelée à être changée parce que, avec chaque édition de cette loi-là, et les propriétaires et les locataires trouvaient de nouveaux trucs, peut-être, d'un côté, et de nouvelles réponses ou récriminations de l'autre.
n(11 h 10)n Mais, au fond, ce projet de loi là permet encore une fois de comprendre une différence de fond ? c'est le cas de le dire ? entre le gouvernement du Parti québécois et l'opposition libérale, car, M. le Président, bien au-delà de nos différences biens connues par tout le monde en matière constitutionnelle, il y a quand même des façons de voir le rôle du gouvernement qui diffère des deux côtés.
Le gouvernement du Parti québécois, c'est un gouvernement touche-à-tout. On le voit dans les programmes qu'il lance à tout bout de champ, un ministre qui se lève et dit: Ça y est, on vient de découvrir qu'au Québec on était une des places en Amérique du Nord les moins branchées sur l'Internet, on va créer un programme pour brancher les familles sur l'Internet. Avec beaucoup de roulements de tambour, ils annoncent qu'ils vont encore faire un programme du gouvernement. Mais le problème de base, pourquoi on n'était pas assez branchés sur l'Internet, c'est qu'on est les gens les plus taxés en Amérique du Nord. Pourquoi est-ce qu'on est les gens les plus taxés en Amérique du Nord? Parce qu'on a plus de fonctionnaires, plus de programmes, plus de dépenses du gouvernement que tout autre gouvernement en Amérique du Nord.
C'est quoi, la solution des péquistes quand ils constatent un problème comme ça? Est-ce qu'ils baissent les taxes? Est-ce qu'ils laissent plus d'argent dans les poches du monde? Non, ils créent un autre programme, avec d'autres formules, avec d'autres fonctionnaires, puis ils dépensent l'argent du public. Même si c'est louable que les familles soient branchées sur l'Internet, partout ailleurs en Amérique du Nord les gens se branchent sur l'Internet parce que c'est leur choix libre de le faire. Et, s'ils choisissent librement de se brancher sur l'Internet ou d'acheter des espadrilles ou des affaires nouvelles pour leur cuisine, c'est leur argent.
Mais de la manière dont le gouvernement du Parti québécois intervient dans les dossiers, on jurerait, M. le Président, qu'ils sont convaincus que c'est pas l'argent des payeurs de taxes, c'est leur argent. Écoutez-les bien dans leurs réponses en Chambre, ils utilisent plus souvent que d'autre chose la première personne: J'ai alloué tel budget, j'ai décidé telle somme ? comme si c'était leur argent à eux autres ? j'ai fait un surplus. Tout ce que le «j'ai» en question a fait, c'était de trop taxer le monde quand il a un surplus. On est déjà les plus taxés en Amérique du Nord. Mais cet interventionnisme, cette tendance de vouloir mettre le nez dans tout, que ça soit en construisant la soi-disant Cité du commerce électronique, qui est une folie, une folie en soi...
La définition même du commerce électronique et le génie de cette nouvelle façon de faire des affaires, c'est que ça n'a pas besoin d'être concentré dans le centre d'une ville comme on faisait avec le commerce et avec les affaires auparavant. Le génie du commerce électronique, c'est que tu peux être en dehors des grands centres et payer beaucoup moins cher de loyer, tout ça. Qu'est-ce qu'ils font, les péquistes? Ils prennent des centaines de millions de dollars de l'argent des payeurs de taxes pour mémèrer dans le commerce électronique.
Qu'est-ce qu'ils font là-dedans? Ils déménagent des jobs d'un bout de la ville à l'autre, ils ne créent pas d'emplois. Puis ils font des conférences de presse, ils se tapent les bretelles, ils se disent: Qu'est-ce qu'on est bons! Entre-temps, ils détruisent des investissements privés dans le marché locatif à Montréal dans le secteur du commerce, faisant mal même à la Caisse de dépôt puis une de ses importantes filiales, la SITQ, parce que c'est un des plus grands propriétaires d'espaces locatifs commerciaux à Montréal.
Mais c'est ça quand le gouvernement, au lieu de s'occuper d'éducation, au lieu de s'occuper de santé et de services sociaux pour les membres de notre société, plutôt que d'avoir des routes qui ont de l'allure... M. le Président, vous voyagez. Prenez la route, allez vers la frontière, juste New York, juste de l'autre côté. On pourrait pas croire que l'hiver, juste de l'autre côté de la ligne, est tellement différent que notre hiver. Et pourtant les routes ne se comparent pas. Partez en Europe, allez en France, allez dans les Alpes, allez dans d'autres endroits dans le monde où ils ont des hivers rudes, vous allez le voir, ils savent faire des routes. Ici, c'est du patchage.
Et c'est ce qu'est le projet de loi n° 26, c'est du patchage social, parce que le gouvernement touche-à-tout vient de se rendre compte qu'il y a une crise du logement. Plutôt que de se rendre compte que son interventionnisme est une des causes de la crise du logement et de décider de donner un peu une chance à ce que les entrepreneurs, les gens qui peuvent construire des logements et améliorer la situation dans cette crise du logement, au lieu de lâcher lousse et donner un petit peu plus d'air et un break, ils décident qu'ils vont intervenir davantage.
Et vous savez ce que ça va faire? La ministre, qui est vraiment la plus grande interventionniste de tous, qui se trouve bonne, puis elle touche dans les élections municipales, puis elle a une opinion sur tout, puis on va voir, quand ça foire dimanche, les élections municipales, comment elle est bonne dans son travail, eh bien, elle a décidé que maintenant elle va rendre la vie encore plus difficile pour un propriétaire. Et, par le fait même, elle va dissuader une personne qui aurait de l'argent pour faire un investissement... elle est en train d'envoyer un signal à cette personne: La dernière chose que vous devriez faire au Québec avec votre argent, c'est de construire d'autres logements locatifs.
M. le Président, c'est assez rare que quelqu'un de ce côté de la Chambre puisse citer le journal secret... le journal Le Devoir, mais, le jeudi 21 juin 2001, dans un éditorial, Jean-Robert Sansfaçon disait ceci: «Par ailleurs, au chapitre plus controversé des renseignements personnels exigés par les propriétaires lors d'une demande de location, la loi limiterait au strict minimum ce qu'un futur locataire serait obligé de fournir: son nom, sa date de naissance, son adresse et son numéro de téléphone actuels. Un propriétaire pourrait toujours demander d'autres renseignements comme le nom de l'employeur, le numéro de permis de conduire ou d'assurance sociale, mais le locataire ne serait pas obligé de répondre, pas plus d'ailleurs qu'à l'heure actuelle. Et ? M. Sansfaçon poursuit ? tout en comprenant le dilemme dans lequel se trouve le législateur, avouons qu'il est tout de même ridicule ? dit Le Devoir ? qu'une banque ou un locataire de voiture ait accès à tous les renseignements personnels qu'il désire, mais pas le propriétaire d'une maison qui confie son bien à un inconnu pour plusieurs années. À quoi serviront, dans six mois, l'adresse et le numéro de téléphone actuels d'un candidat locataire qui déménagerait le mois prochain? ? il répète: Ridicule.» Ce qui est intéressant, M. le Président, ce n'est pas le ridicule, mais l'hypocrisie, parce que je suis effectivement une des personnes ici qui a suivi le plus le dossier de l'accès à l'information et de la protection de la vie privée. Je me souviens, quand Hydro-Québec est venue en commission parlementaire pour nous expliquer pourquoi Hydro-Québec avait besoin des mêmes informations qu'on veut maintenant refuser aux propriétaires le droit d'obtenir. Devinez quoi? Avec l'appui du même gouvernement, Hydro-Québec a eu gain de cause.
Les mêmes informations que les locataires... les propriétaires, les locateurs aimeraient avoir, seront refusées avec le projet de loi n° 26. Hypocrisie, M. le Président, parce que, quand le propriétaire, c'est le gouvernement, là, il n'y a pas de problème, il est capable de comprendre, il a une écoute plus active des besoins pour des renseignements pour pouvoir réaliser sur son actif. Hydro-Québec n'aime pas quand les gens déménagent et qu'ils ne peuvent pas les trouver. Donc, eux, ils ont le droit au numéro d'assurance sociale, mais pas les propriétaires privés. Ça, ça s'appelle deux poids, deux mesures. Faites ce que je dis puis pas ce que je fais.
Mais c'est ce dans quoi se spécialise ce gouvernement généralement, et plus particulièrement la ministre de la Métropole, la ministre d'État à la Métropole et aux Affaires municipales, celle qui fait des leçons de morale à satiété dans cette Chambre. Elle est en train d'en faire d'autres aux propriétaires: Ce n'est pas normal. Même si c'est à vous, ce n'est pas normal de savoir si la personne a saccagé son appartement antérieur. Ce n'est pas normal. Vous n'allez pas tenir des listes de gens qui régulièrement se faufilent sans payer leur loyer. Ce n'est pas normal, ça. Le numéro d'assurance sociale, vous pouvez toujours le demander, mais s'il ne vous le donne pas, vous n'avez pas le droit de l'exiger, contrairement à Hydro-Québec qui a le droit maintenant, pour des nouveaux branchements, de l'exiger. Ça, M. le Président, il y a un mot pour ça et c'est l'«hypocrisie».
M. le Président, il y a un débat de fond qui doit avoir lieu au Québec, pas juste en matière de logement, mais en matière d'économie en général. Si on regarde le dossier de l'industrie et commerce, on comprend que le gouvernement du Parti québécois a vraiment perdu le nord. C'est la démesure. On intervient avec des cités commerce électronique, des cités multimédia, des dépenses sur toute la ligne.
n(11 h 20)n Lors de quatre élections partielles, en investissements et promesses de toutes sortes, on était rendu à 500 millions de dollars. Il paraît que le gouvernement du Parti québécois pense que ça marche encore. J'ai hâte de voir quelle sorte de joyaux vont sortir du «lockup» pour le budget qui va être annoncé aujourd'hui. Il y a fort à parier que ça va être encore une question de saupoudrer des millions pour essayer de faire du tape-à-l'oeil, pour montrer que le gouvernement s'occupe.
Entre-temps, est-ce qu'on peut avoir un remplacement d'une hanche dans un hôpital, par un médecin compétent, dans un délai raisonnable, dans une salle d'opération où il n'y a pas une telle tension qu'il risque d'y avoir des accidents? Non. Est-ce que notre enfant qui vient de se briser un bras peut être soigné à l'urgence immédiatement et pas attendre des heures et des heures et des heures en train de souffrir? Non. Non, ça, ce n'est pas des priorités pour le gouvernement du Parti québécois. La qualité de l'enseignement? Non, ça, ce n'est pas une priorité non plus. Le fait que 40 % des parents décident aujourd'hui de payer de leurs poches pour une école privée secondaire, est-ce que ça a allumé quelque voyant rouge sur leur tableau de bord? Non. Non, ça va bien, on est en charge, on est des péquistes, on n'a jamais tort.
Ça va être la même chose ici. Des propriétaires, des gens qui ont investi de leur propre argent et, très souvent, de leur propre temps ? parce que les propriétaires, ce n'est pas toujours des personnes qui ont des tours à 26 étages d'appartements de luxe... Un propriétaire moyen, c'est quelqu'un avec un triplex, avec un quadruplex, avec quatre, cinq, six logements. Quand je dis investir son temps, ça veut dire que la personne a souvent fait la peinture elle-même, fait souvent les réparations elle-même, essaie avec cet avoir de se constituer quelque chose pour son futur, le futur de ses enfants. On dit en blague ? parce qu'il y en a beaucoup de ces logements-là dans le comté de Chomedey que j'ai l'honneur de représenter ici, à l'Assemblée ? que c'est leur REER. C'est souvent le petit commerçant qui n'a pas de fonds disponibles pour justement contribuer d'année en année, n'a pas un salaire fixe, doit vraiment en arracher. Mais ils en mettent, ils achètent, ils trouvent la manière de faire leur premier acompte, puis c'est hypothéqué, puis ils trouvent des gens pour vivre là-dedans. Puis c'est comme ça que ça marche dans une société où on respecte les règles du marché, une économie libérale.
Mais, quand tu es péquiste puis qu'il y a un problème, ça doit être la faute de quelqu'un. Alors, une crise du logement au Québec, ça ne peut pas être la faute du gouvernement, un péquiste n'a jamais tort. Ça ne peut pas être la faute des gens, de certains groupes qui viennent voir la ministre, qui contribuent au problème. Ça ne peut pas être la législation actuelle qui soit en cause. Non, il faut que ça soit la faute de quelqu'un, ça doit être la faute des propriétaires. Qu'est-ce qu'on va faire pour régler le problème? On va rendre ça encore moins attrayant, au Québec, d'être propriétaire, que ça ne l'était avant. Mais avant, on avait la crise du logement parce qu'on n'avait pas construit assez de logements locatifs, puis il y en aura encore moins. Alors, comment est-ce que ça peut, en toute logique, M. le Président, comment est-ce que ça peut être une solution au problème? Ça ne l'est pas, c'est une manière de faire du patchage comme on fait sur nos routes. Pas de planification à long terme, pas d'analyse de fonds pour regarder le problème tel qu'il est et essayer de développer des réactions basées sur une information complète et des approches constructives. Non. C'est du pur péquiste. On va assigner des torts ? c'est la faute des propriétaires ? une petite claque sur la gueule puis ça va être encore plus difficile pour toi de savoir à qui tu vas louer.
La semaine dernière, M. le Président, un ami m'a amené visiter un triplex qu'il songeait à acheter. Et il y avait des aspects juridiques là-dedans qu'il voulait que je l'aide à regarder, et c'était assez triste à voir parce que, dans un des trois logements, le locataire, parce qu'il faut utiliser le terme librement, locataire, parce que la personne ne payait jamais son loyer et c'était toujours le cycle d'aller devant la Régie du logement, de ressortir, de donner des avertissements, et ainsi de suite, c'est la roue qui tourne, alors la personne, en toute simplicité, avant d'être finalement expulsée, avait pris un énorme marteau, une masse, et avait détruit la baignoire, l'évier et les WC, les toilettes, avec des coups de masse, a mis quelques bons coups bien placés dans certains murs et a fracassé la plupart des fenêtres. Vous savez qu'est-ce que le méchant propriétaire peut avoir comme récompense? 0,00 $. Ça ne sert à rien qu'il coure après cette personne-là, pas capable de payer son loyer, pas saisissable. Vous connaissez la rengaine, M. le Président, vous savez comment ça marche. Calculs faits, ça pouvait être un investissement intéressant.
Et dans la petite ville en question, trois autres logements à louer auraient été les bienvenus. Mais là on a commencé à regarder les aspects juridiques et les difficultés pour un propriétaire de pouvoir savoir à qui il ou elle fait affaire, et c'était un des éléments déterminants dans l'esprit de cet ami, de ne pas acheter le triplex en question et le rénover. C'est ça, le résultat concret, avec un exemple réel et récent. Ça, c'est le résultat concret de ce qui est proposé ici aujourd'hui. Au lieu de favoriser la conciliation, c'est-à-dire de comprendre qu'il doit y en avoir des deux côtés, on alourdit, on rend plus compliqué. Il y a certains aspects qui vont permettre aux greffiers, lorsqu'il n'y a pas de contestation, de faire un certain nombre de choses sans nécessairement aller devant le commissaire.
Mais, à la base, est-ce qu'on ne s'aiderait pas plus si on regardait à neuf, si on remettait ça sur la table et on disait: C'est ce système-là, d'interventionnisme et de contrôle, et de régisseurs, et de tout le reste, qui a conduit à une crise du logement? Si on regardait les choses autrement, si on laissait le marché beaucoup plus libre, il y aurait beaucoup plus de logements construits. Il y aurait de la concurrence.
M. le Président, c'est une notion étrangère pour un péquiste, ça, un marché libre où il y a de la concurrence, où le marché détermine les prix du loyer. C'est une notion vraiment étrangère pour les gens d'en face. Et pourtant, M. le Président, partout on est en train d'abandonner l'interventionnisme, qui date d'après la Deuxième Guerre mondiale. C'est sûr qu'avec le retour des troupes il y avait eu une crise épouvantable puis de l'abus dans les loyers, ce qui a donné naissance à ce contrôle des loyers qu'on connaît au Québec et qui existait auparavant dans beaucoup plus d'autres juridictions. Mais il y en a beaucoup plus qui ont compris que la manière de résorber la crise du logement locatif, ce n'était pas par plus d'interventionnisme 50 ans plus tard, c'est en lâchant un peu prise.
Alors, je termine, M. le Président, en disant que de notre côté on va regarder attentivement le projet de loi n° 26. On va s'assurer que les éléments qui peuvent aider reçoivent une écoute attentive de notre côté. Mais on souhaiterait faire comprendre au gouvernement que la réponse à tous les problèmes dans la société, ce n'est pas plus de fonctionnaires, ce n'est pas plus d'interventionnisme, ce n'est pas plus de restrictions pour le marché libre, c'est plus de liberté. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Chomedey. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant ou intervenante. Alors, je reconnais Mme la présidente de la commission de l'éducation, porte-parole officielle de l'opposition en matière de Protecteur du citoyen et des aînés et députée de Mégantic-Compton. Mme la députée, la parole est à vous.
Mme Madeleine Bélanger
Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole dans le projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, présenté par la ministre des Affaires municipales, projet de loi qui devra apporter, selon la ministre, une solution à la pénurie de logements que l'on connaît présentement dans plusieurs régions du Québec.
Il est vrai, M. le Président, que le Québec vit une crise du logement sérieuse depuis les cinq dernières années dans plusieurs régions dont Québec, Montréal et l'Outaouais. La ministre a apporté des amendements, et les amendements qu'elle a proposés par le projet de loi ne touchent qu'à quelques symptômes de la crise du logement, pas aux causes. S'il y a crise, c'est que trop peu de logements ont été construits depuis 10 ans faute de rentabilité et du nombre élevé de nouvelles familles, mais le peu de rentabilité décourage la construction d'immeubles locatifs.
n(11 h 30)n De plus, M. le Président, la pénurie de logements a créé une situation tendue entre les propriétaires et les chercheurs de logement. Le projet de loi n° 26 vise à élargir la compétence de la Régie du logement afin de lui permettre d'avoir juridiction sur les rapports entre les propriétaires et les candidats locataires dans la période précédant la conclusion du bail. Ce projet introduit des dispositions encadrant la collecte d'informations tant au moment de l'offre de location qu'au moment de la conclusion du bail. Il interdit au locateur d'exiger d'un candidat locataire le versement d'une somme d'argent. Le projet de loi n° 26 précise que les recours des candidats locataires insatisfaits seront dorénavant sous la juridiction exclusive de la Régie du logement.
M. le Président, qu'est-ce que ça donnera de plus aux locataires? Les plaintes à la Commission des droits de la personne et de la jeunesse pour discrimination ont pratiquement doublé par rapport à l'an dernier. Bon, La Presse de jeudi le 28 juin 2001 dit que «entre le 1er janvier et le 26 juin 2001, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse enregistre 107 plaintes, alors qu'elle en avait reçu 56 à pareille date l'an dernier». M. le Président, ces plaintes sont-elles justifiées? Et, si on compare ces plaintes à toutes celles enregistrées par les citoyens et les citoyennes du Québec depuis la réforme de la santé, M. le Président, c'est très peu. Des associations de locataires réclament un encadrement juridique pour éviter les abus et diminuer la discrimination dont sont victimes les familles avec enfants, les personnes à faibles revenus et les femmes chefs de famille monoparentale.
Toutefois, M. le Président, il y a lieu de se questionner sur la réponse du gouvernement et sur sa façon de procéder. Est-ce que le projet de loi n° 26 propose des solutions à cette crise du logement qui sévit au Québec depuis quelques années? Est-ce que les Québécois et les Québécoises auront davantage le goût d'investir dans ce secteur d'activité? Est-ce que le projet de loi, M. le Président, favorisera plus d'investissements dans la construction de logements locatifs absolument nécessaires pour loger nos familles? Et encore, on peut encore se poser la question: Est-ce que le projet de loi permettra des rapports plus justes et équitables entre les propriétaires et les locataires du Québec?
L'opposition a demandé la tenue d'une consultation avant le débat sur le principe, ce que refuse sans raison le gouvernement. On sait qu'il n'écoute personne, ce gouvernement, qu'il ne veut pas écouter tous les acteurs du secteur de l'habitation locative. On n'a qu'à se rappeler le comportement de ce gouvernement et de la ministre lors des fusions municipales forcées. En écartant ainsi une véritable consultation, ce gouvernement prive l'opposition et se prive lui-même de l'opportunité de faire la lumière publiquement sur les enjeux et les conséquences des modifications qu'il propose. Il ne comprend pas; ce gouvernement ne comprend pas la dynamique des relations entre propriétaires et locataires. Il risque de semer la chicane au lieu de chercher à trouver des solutions justes et équitables pour tous les acteurs en présence.
M. le Président, dans l'éditorial de Jean-Jacques Samson du 21 juin, M. Samson disait: «Les associations de locataires ont raison de dénoncer le comportement abusif de quelques propriétaires profiteurs. Ce n'est pourtant pas un motif suffisant pour restreindre le droit de tous les propriétaires à savoir à qui ils louent un logement dont ils ont, par la loi, l'obligation de voir à ce que ses nouveaux habitants respectent la tranquillité des voisins. La quête de renseignements sur la personne n'a donc pas pour seul objectif de s'assurer de la capacité de payer du futur locataire, comme le prétend de façon simpliste la Commission des droits de la personne, mais aussi de savoir à qui un propriétaire confie son bien pour des années à venir.» De plus, M. le Président, en agissant ainsi, la ministre décourage tous ceux qui offrent des logements et qui mettent leurs économies dans la gestion d'immeubles à logements. Il porte un dur coup aux centaines de milliers de propriétaires québécois, souvent des ouvriers et des travailleurs, qui ont bâti le parc de logements locatifs à la sueur de leur front. Et il risque d'accentuer la crise du logement qui affecte, en premier lieu, les personnes les plus démunies de notre société, soit les femmes et les familles avec des enfants.
Avec le projet de loi n° 26, le gouvernement improvise encore. Que cherche-t-il par ce projet de loi? À semer la chicane entre les propriétaires et les locataires ou tout simplement à faire diversion sur tous les autres problèmes vécus par ce gouvernement? On gouverne à la pièce, on improvise. C'est une coutume chez ce gouvernement. Les projets de loi sont préparés à la hâte et ils n'apportent, pour la plupart, rien de bon pour les citoyens et citoyennes du Québec.
Le projet de loi n'apporte aucune solution, ni aux locataires ni aux propriétaires. Le propriétaire ne pourra gérer son entreprise sans la réglementation du gouvernement. Car c'est bien de cela qu'on parle, M. le Président, le gouvernement veut s'ingérer dans la gestion d'une entreprise privée. Les propriétaires comme les locataires désirent le respect, la paix chez eux, et les deux ont droit à une qualité de vie et une jouissance paisible des lieux où ils habitent et le respect également des biens qu'ils possèdent. Ce que les propriétaires et les locataires veulent, M. le Président, c'est la justice et l'équité pour tous.
Avec le projet de loi n° 26, M. le Président, on a l'impression que la ministre ne veut pas vraiment régler le problème de pénurie du logement. On a l'impression que la ministre ne sait pas trop pourquoi il y a un problème de logement au Québec depuis quelques années. Ce serait quand même important qu'elle s'informe. On a aussi l'impression que la ministre nous livre un projet de loi incomplet, improvisé, qui ne rend service à personne et qui ne pourra créer que des tensions entre les propriétaires et les locataires.
Pourquoi la ministre refuse-t-elle la tenue d'une consultation particulière en commission parlementaire? Les problèmes de logement au Québec sont réels, mais je ne crois pas que le projet de loi viendra corriger tout ça. La ministre aurait intérêt à écouter les citoyens ou les groupes de citoyens qui désirent s'exprimer et qui connaissent et qui vivent ce problème, mais on sait que la ministre n'est pas intéressée à écouter les citoyens et les citoyennes du Québec.
Comme je le disais plus tôt, je ne crois pas que ce projet de loi va favoriser plus d'investissements dans la construction de logements locatifs au Québec. Il favorisera plutôt le découragement de nos investisseurs qui ne voudront plus mettre d'énergie, de leur énergie et de leurs économies dans ce genre d'entreprise. Ces travailleurs qui ont acquis au fil des années et souvent très difficilement des immeubles locatifs et qui ont réussi à maintenir une bonne qualité de vie pour les locataires n'auront peut-être plus le goût de continuer. C'est ce que ce projet de loi risque de provoquer, et je ne crois pas que c'est rendre service aux personnes à la recherche d'un logement et aux plus démunis de notre société, souvent les femmes et les familles avec jeunes enfants.
La ministre devrait réfléchir et accepter la tenue d'une consultation avant de poursuivre avec ce projet de loi. Sans ces consultations, M. le Président, l'opposition officielle va voter contre le principe du projet de loi n° 26. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Mégantic-Compton, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur la Régie du logement et le Code civil, et je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant.
M. Boisclair: M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Boisclair: Je voudrais proposer l'ajournement du débat à ce moment.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion d'ajournement du débat proposée est adoptée? Adopté.
M. Boisclair: Je propose qu'on suspende jusqu'à 14 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix: ...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement? Alors, suite à cette suggestion, la présidence suspend les travaux de cette Assemblée jusqu'à 14 heures.
(Suspension de la séance à 11 h 40)
(Reprise à 14 h 5)
Le Président: Bien. À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir un moment.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Alors, nous allons immédiatement aborder les affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
À l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: L'article a, M. le Président.
Projet de loi n° 49
Le Président: Bien. À cet article, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole présente le projet de loi n° 49, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec. Mme la ministre.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, M. le Président, le projet de loi modifie la Loi sur la Société d'habitation du Québec afin de déterminer les pouvoirs d'intervention des offices municipaux et des offices régionaux d'habitation.
Le projet de loi introduit un pouvoir permettant à la Société d'habitation du Québec de mettre en place, lorsque des circonstances exceptionnelles l'imposent et sous réserve d'une autorisation du gouvernement, des programmes ou mesures spéciales afin de tenir compte de ces circonstances exceptionnelles. La Société devra faire état de l'utilisation de ce pouvoir d'exception dans son rapport annuel.
Le projet de loi introduit de nouvelles dispositions qui rendent obligatoire la création par chaque office d'habitation d'un comité consultatif de résidents. De plus, il prévoit que chaque office gérant plus de 2 000 logements à loyer modique devra constituer des comités de secteur.
Le projet de loi habilite également la Société d'habitation du Québec à déléguer à un tiers l'administration de ses programmes ou ceux qui pourraient lui être confiés. À cet effet, la Société peut conclure une entente avec un ministère ou un organisme du gouvernement, une municipalité ainsi qu'avec toute personne ou organisme.
En outre, aux fins de l'administration de tout accord conclu avec le gouvernement du Canada relativement à des programmes de logements coopératifs, le projet de loi permet au gouvernement de créer une agence et de déterminer les conditions relatives à sa mise en place et à son fonctionnement.
Enfin, le projet de loi modifie le Code municipal du Québec relativement à la déclaration de compétence des municipalités régionales de comté dans le domaine de la gestion du logement social.
Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Mme la députée de La Pinière.
Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre peut nous assurer qu'il y aura des consultations par rapport à ce projet de loi?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Oui. M. le Président, il n'est pas exclu qu'il y ait des audiences particulières.
Le Président: Bien. M. le leader.
M. Paradis: ...qu'il n'y en ait pas?
Une voix: ...
M. Paradis: Est-ce qu'il est exclu qu'il n'y en ait pas?
M. Brassard: Et il n'est pas exclu qu'il n'y en ait pas non plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: Alors, trêve de plaisanterie, M. le Président, une fois le principe adopté, je pense qu'on peut fort bien envisager des audiences particulières.
Le Président: Alors...
M. Paradis: M. le Président, on remarque que c'est la tendance d'un gouvernement qui tire à sa fin de prévoir des audiences après l'adoption du principe, alors qu'il est beaucoup plus profitable pour l'ensemble des députés et pour l'institution qu'est l'Assemblée nationale que les audiences, les consultations aient lieu avant l'adoption de principe. Est-ce que le leader serait prêt à reconsidérer le temps où se tiendront les consultations?
M. Brassard: M. le Président, ce n'est pas une nouvelle tendance, il est coutumier que... En ce qui a trait, à tout le moins, à des audiences particulières, il est coutumier que cela se fasse après l'adoption du principe.
Mise aux voix
Le Président: Bien. L'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi.
Dépôt de documents
Alors, au dépôt de documents, maintenant, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.
Rapport annuel de la Commission
municipale du Québec
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, je dépose le rapport annuel 2000-2001 de la Commission municipale du Québec.
Le Président: Alors, ce document est déposé. Maintenant, M. le ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale.
n(14 h 10)nRapports annuels du ministère
de l'Emploi et de la Solidarité sociale et
d'Emploi-Québec, contrat de services
de la Régie des rentes, entente d'échange
de renseignements entre le ministère
de l'Emploi et de la Solidarité sociale et
le ministère de l'Éducation, et avis de la CAI
M. Rochon: Moi, M. le Président, je dépose les rapports annuels 2001-2002 du ministère de l'Emploi et de la Solidarité et d'Emploi-Québec, de même que le contrat de services de la Régie des rentes du Québec et l'entente, finalement, l'entente de renseignements concernant les prestataires d'assurance emploi et la clientèle universitaire entre le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale et le ministère de l'Éducation, de même que l'avis favorable de la Commission d'accès à l'information portant sur cette entente.
Le Président: Alors, tous ces documents sont déposés. M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
Entente d'échange de renseignements
entre la Régie de l'assurance maladie et
le ministère de la Justice, et avis de la CAI
M. Trudel: M. le Président, je dépose une entente de communication de renseignements entre la Régie de l'assurance maladie du Québec et le ministre de la Justice, ainsi que l'avis favorable de la Commission d'accès à l'information portant sur celle-ci.
Rapports sur la procédure d'examen
des plaintes des régies régionales
de la santé et des services sociaux
de l'Abitibi-Témiscamingue et de l'Outaouais
Je dépose également les rapports 2000-2001 sur l'application de la procédure d'examen des plaintes des régies régionales de la santé et des services sociaux de l'Abitibi-Témiscamingue et de l'Outaouais.
Rapports annuels des régies régionales
de la santé et des services sociaux
de Montréal-Centre et de l'Outaouais
Et je dépose finalement les rapports annuels des régies régionales de la santé et des services sociaux de Montréal et de l'Outaouais.
Le Président: Alors, ces documents sont également déposés. M. le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission
des affaires sociales pour examen
M. Brassard: Oui. Alors, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:
«Que, conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, les rapports annuels 2001-2002 des régies régionales de la santé et des services sociaux suivantes: Montréal-Centre et Outaouais, soient déférés à la commission des affaires sociales pour étude;
«Que le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»Le Président: Bien. Est-ce que la motion est adoptée? Elle est adoptée. Maintenant, M. le ministre d'État aux Régions et ministre de l'Industrie et du Commerce.
Rapport annuel de la Société
Innovatech Régions ressources
M. Baril (Berthier): M. le Président, je dépose le rapport annuel 2000-2001 de la Société Innovatech Régions ressources.
Le Président: Alors, ce document est déposé. Maintenant, Mme la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance.
Rapport annuel du Conseil
du statut de la femme
Mme Goupil: M. le Président, je dépose le rapport annuel 2000-2001 du Conseil du statut de la femme.
Le Président: Bien. Alors, ce document est déposé.
Dépôt de pétitions
Au dépôt de pétitions, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de déposer un extrait d'une pétition non conforme.
Le Président: Il y a consentement, Mme la députée.
Remettre en fonction le transport
en commun sur la Rive-Sud de Québec
Mme Carrier-Perreault: Merci, M. le Président. Alors, je dépose donc l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 311 pétitionnaires. Désignation: collège de Lévis.
«Les faits invoqués sont les suivants:
«Considérant que la grève qui a débuté le 25 septembre à minuit prive 5 000 usagers, dont 125 étudiants du collège de Lévis... Nous avons récolté plusieurs signatures;
«L'intervention réclamée se résume ainsi:
«Nous espérons bien obtenir votre appui pour remettre en fonction le transport en commun trans-Sud.» Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président.
Le Président: Bien. Merci, Mme la députée. Cette pétition est déposée.
Bien. Avant d'aborder la période de questions et de réponses orales, je vous avise qu'après celle-ci il y aura deux réponses différées: d'abord, M. le ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale va répondre à une question posée le 31 octobre, c'est-à-dire hier, par Mme la députée de La Pinière concernant le financement du programme de formation des adultes de l'école Lemoyne-d'Iberville; et puis M. le ministre de l'Environnement répondra à une question posée également hier par le député d'Orford concernant la consultation de groupes environnementaux lors de l'adoption du projet de loi n° 184.
Questions et réponses orales
Maintenant, nous abordons la période de questions et de réponses orales. M. le député de Châteauguay, en question principale.
Utilisation des services d'une compagnie
pharmaceutique à l'Hôpital
du Saint-Sacrement, à Québec
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. Merci, M. le Président. Le 19 octobre dernier, on apprenait que l'Hôpital Saint-Sacrement, faute de financement public suffisant, financement public suffisant, a été forcé de faire le virage du privé. La pharmacienne en chef du CHA a déclaré, et je cite: «Il nous fallait engager un pharmacien de plus pour la clinique d'anticoagulothérapie. Nous avons demandé un budget à l'administration, pas de réponse ? pas oui, pas non, rien, pas de réponse. Nous nous sommes donc tournés vers une compagnie privée. Aventis a sauvé la clinique.» Et elle continue: «C'est sûr qu'on va privilégier leurs produits.» Ma question est simple, M. le Président: Est-ce que le ministre se rend compte qu'il y a un problème de conflit d'intérêts, et pas juste à l'égard des produits de la clinique d'anticoagulothérapie mais à l'égard de tous les produits pharmaceutiques utilisés dans l'hôpital? Quelle est la réponse du ministre?
Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, j'ai été moi-même aussi très inquiété par cette information qui nous est apparue dans le cours de l'examen de la situation à l'Hôpital Saint-Sacrement, et je dois tout de suite indiquer que, en vertu de l'article 268 de la Loi sur la santé et les services sociaux, les pratiques de contribution du secteur privé à notre système de santé et de services sociaux sont très bien encadrées et doivent répondre à un certain nombre de critères. Et, dans ce contexte-là, j'ai demandé un avis juridique très ferme à mon ministère pour donner la suite et, la semaine prochaine, je disposerai de cet avis juridique à l'égard de la situation qui prévaut dans le cas qui est soulevé à l'Hôpital Saint-Sacrement.
Le Président: M. le député.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte qu'on n'a pas besoin... D'ailleurs, je croyais comprendre de sa réponse que lui non plus n'avait pas besoin d'un avis juridique pour voir qu'il y a réellement un problème de conflit d'intérêts et d'éthique là-dedans. Est-ce qu'il se rend compte que, si nous sommes dans cette situation-là, c'est parce que le gouvernement du Parti québécois a refusé de financer convenablement la santé? La pharmacienne, elle, qui est là, elle n'a pas le choix, elle veut servir la population. Et, en plus, il s'agit d'une clinique qui est rentable parce qu'elle fait économiser des jours d'hospitalisation.
Ma question est simple: Comment ça se fait que, pendant que vous nous laissez croupir à la dernière position en termes de financement per capita à la santé, on voit ce genre de chose qui se présente? Ce n'est pas d'un avis juridique que vous avez besoin, c'est d'un appui du premier ministre, puis de la ministre des Finances, puis de l'ensemble du Conseil des ministres pour financer convenablement la santé. Le problème, il est chez vous.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, à l'égard de la situation à l'Hôpital Saint-Sacrement, je répète que ces pratiques sont encadrées très clairement dans la loi. Il nous faut procéder aux vérifications nécessaires pour s'assurer que les règles sont bien suivies et que nous pourrons aussi assurer la population qu'il n'y a pas de conflit d'intérêts et que, s'il y en avait, la situation sera redressée. D'autant plus, M. le Président, que, quand on constate que l'Institut canadien, ce matin, publie des chiffres auxquels fait référence le député de l'opposition et qu'ils prennent les mauvais chiffres en énumérant que nous ne consacrons que 14,8 milliards de dollars à la santé quand, dans les faits, tout le monde sait à l'Assemblée nationale que le budget de la santé, c'est 16,7 milliards de dollars, qu'il n'y a pas de reconnaissance du statut et de la façon particulière dont le Québec, en termes de santé, donne des services à la population, en incluant la promotion, la prévention et les CLSC... Il part d'un chiffre tronqué. Et, à l'Institut canadien, on fait par exprès pour faire en sorte de faire du classement du Québec à un certain rang, à partir d'une donnée qui n'est pas réelle, puisqu'on ne prend pas en considération la situation du Québec qui, lui, se conforme aux orientations de l'Organisation mondiale de la santé. La santé, c'est physique, moral et psychologique, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: Oui. Est-ce que le ministre va nier son propre rapport de son propre ministère, publié en juin 2000, que le Québec était en dixième position en 1999, que l'Institut canadien rappelait que, pour l'an dernier, on était en neuvième position? Ils regardent les chiffres de cette année puis ils disent qu'on est en dixième position. Il essaie d'attaquer l'Institut canadien, mais, M. le Président, il devrait lire son rapport Clair. C'est le rapport Clair qui disait que son gouvernement devrait s'associer à l'Institut canadien. Participez donc aux activités, ça vous est suggéré. À moins que vous ne l'ayez pas lu, le rapport Clair.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: Vous, vous préférez croire l'Institut canadien au lieu de croire les documents de l'Assemblée nationale. Et c'est pourquoi, M. le Président, le porte-parole de l'opposition devrait y regarder avec une plus grande attention, parce que, à la même date l'an passé, l'Institut canadien, avec les mêmes méthodes tronquées, a publié à peu près les mêmes chiffres sur le Québec et a été obligé de retirer son rapport dans les deux mois suivants, M. le Président.
n(14 h 20)nDes voix: Bravo!
Le Président: M. le député.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte que ça nous cause beaucoup de problèmes comme Québécois, pour tous les citoyens du Québec, d'avoir un ministre de la Santé qui n'est même pas au courant de l'état grave dans lequel nous sommes en termes de sous-financement? Lui-même est en train de faire la plaidoirie du ministère des Finances qui plaide pour les citoyens, pour la santé. Son document du Conseil du trésor auquel il réfère, qui parle des chiffres de 1998, savez-vous à quoi ça fait référence? Regardez en bas de page, ça fait référence à l'Institut canadien. Les chiffres dont il nous parle viennent de l'Institut canadien. C'est de là qu'ils viennent, mon ami. Puis, dans le rapport Clair, qui ne date même pas d'un an, ils vous disaient d'embarquer dans l'Institut canadien. Vous refusez parce que vous n'aimez pas ça, le mot «canadien». Vous, c'est «national». Appelez-le comme vous vous voulez, mais participez donc aux activités puis défendez donc la santé. Regardez les vrais chiffres. C'est pour ça qu'on a des problèmes, c'est pour ça qu'il y a Aventis puis c'est pour ça que les citoyens du Québec sont pénalisés par le Parti québécois.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, quand est-ce que, de l'autre côté, on va se mettre à défendre le Québec, pour une fois, plutôt que de s'appuyer sur l'Institut canadien? Pourquoi, M. le Président, pourquoi défendre...
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Trudel: Merci, M. le Président. La question qui se pose, c'est: Pourquoi ils s'acharnent tant à défendre des chiffres faux du gouvernement fédéral et d'un institut qui ne prend pas les chiffres qui ont été déposés ici, à l'Assemblée nationale, et qui ont fait l'objet de la vérification de la part du Vérificateur général du Québec? S'ils tiennent tant que ça à défendre la position canadienne, au moins, qu'ils s'alignent sur la position de Roy Romanow qui dit que l'expérience des CLSC, qui ne sont pas comptés dans les statistiques ici, eh bien, c'est une réussite et ça séduit les autres provinces, parce que, nous, on a pris 30 ans d'avance en se conformant et en prenant l'optique de l'Organisation mondiale de la santé, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Maintenant, en question principale, M. le député de Shefford.
Compressions budgétaires au
Centre hospitalier de Granby
M. Bernard Brodeur
M. Brodeur: Merci, M. le Président. Au Centre hospitalier de Granby, près de 1 000 personnes sont sur la liste d'attente du bloc opératoire. On annonce qu'il n'est plus question d'ouvrir des lits, même si le besoin est évident. Par ricochet, M. le Président, les civières vont s'aligner de plus en plus dans les corridors. L'hôpital annonce qu'il n'ajuste plus ses services en fonction de sa clientèle. On annonce que la physiothérapie, l'inhalothérapie, la chirurgie d'un jour, le bloc opératoire et le laboratoire seront frappés de coupures. Pour assurer des services déjà déficients, M. le Président, il manque déjà 10 millions de dollars par année. La réponse du ministre, M. le Président: couper encore 7 millions.
Ma question au ministre de la Santé: Compte-t-il maintenir cette décision?
Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: À mi-parcours de l'année financière en santé et services sociaux, M. le Président, sur 348 établissements, 300 ont réussi à atteindre le point d'équilibre. Quarante-cinq d'entre elles, de ces institutions, ont des déficits à mi-période qui varient entre 1 et 4 % de leur budget, et nous allons, dans chacun des cas, à Granby comme ailleurs au Québec, accompagner ces établissements, parce que la règle qui doit prévaloir, c'est qu'il y a des budgets, ils doivent être gérés avec grande rigueur, et s'assurer qu'il n'y ait pas de réduction de services. C'est ce qu'on appelle rigueur et compassion en santé et services sociaux, M. le Président.
Le Président: M. le député.
M. Bernard Brodeur
M. Brodeur: M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte de l'impact d'une telle mesure? Même les employés disaient: Ça a été une bombe pour nous, M. le Président. Le directeur général, lui, disait: L'hiver va être tough. M. le Président, le PQ est bien plus tough que l'hiver pour la santé.
M. le Président, le ministre est-il conscient que sa décision de couper 7 millions alors qu'il manque déjà 10 millions n'a carrément pas de bon sens?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, bien sûr qu'on se rend compte des difficultés dans un certain nombre d'établissements. C'est pourquoi, quand il arrive le moment de faire en sorte qu'on termine les 12 mois, l'ensemble des périodes en équilibre, nous sommes en accompagnement de ces établissements et nous réussissons ensemble...
Ce n'est pas le ministère de la Santé et des Services sociaux, ce n'est pas uniquement la régie régionale, ce n'est pas uniquement l'établissement; nous devons tous ensemble faire en sorte d'analyser de façon extrêmement précise chacun des épisodes de soins dans un hôpital particulièrement et de faire en sorte d'en arriver à un résultat équilibré. Ça, M. le Président, c'est la méthode difficile, la méthode rigoureuse, qui demande de l'énergie, qui demande de la détermination. La méthode facile, la méthode facile est celle qui est adoptée généralement par le Parti libéral, c'est: On laisse tout faire puis on impose des taxes. Ce n'est pas ça, de ce côté-ci.
Le Président: M. le député de Châteauguay, en complémentaire.
M. Jean-Marc Fournier
M. Fournier: En complémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre pourrait utiliser la méthode compétente pour s'occuper des coûts du financement des hôpitaux, à Granby notamment? D'ailleurs, je vais lui en offrir, une belle solution. À Granby, ils en ont une, proposition au ministre. En ce moment, à Granby, ça coûte 600 000 $ pour prendre les patients et les emmener à l'Hôpital du Haut-Richelieu pour les examens en médecine nucléaire parce qu'il leur manque d'équipement, deux caméras gamma. La Fondation de l'hôpital est prête à payer le million que ça coûte pour les deux caméras gamma. Alors, pour payer le budget de fonctionnement, c'est 400 000. Si le gouvernement payait le budget de fonctionnement de 400 000, il économiserait 600 000 pour les frais qui sont envoyés au Haut-Richelieu qui... Soit dit en passant, au Haut-Richelieu, bien, il y a encore plus de monde, hein, ils sont deux hôpitaux qui vont sur un équipement, alors que là il y aurait deux équipements pour les populations. On servirait plus de monde puis, en même temps, on sauverait 200 000 $.
Êtes-vous à ce point incompétent pour ne pas voir le gros bon sens?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, au centre hospitalier à Granby, pour les années 2000 et 2001, on a ajouté 9,4 millions de dollars dans la base de financement de cet hôpital pour répondre aux besoins en termes de services aux patients. Et ce n'est pas 9,4 millions de dollars une année; à chaque année va donc être dans le budget de cet établissement cette somme de 9,4 millions de dollars.
Deuxièmement, l'organisation et la planification des services de santé et des services sociaux dans une région, il faut aussi que ça procède d'une planification régionale avec la régie régionale de la santé et des services sociaux ? en Montérégie, le cas échéant, ici ? et il y a des développements. Oui, faut le dire, il y a des développements dans ce centre hospitalier qui n'avaient pas été autorisés par les responsables au niveau de la région, de la planification des services, et ensemble nous allons trouver les solutions pour qu'il n'y ait pas de coupure de services à la population, un ajustement au niveau des déboursés, des ajustements au niveau budgétaire de façon à ce que nous puissions en arriver en équilibre à la fin de l'année avec d'immenses efforts qu'il faudra consentir pour y arriver.
Le Président: Mme la députée de Laviolette, en question principale.
Pénurie de médecins en Mauricie
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: Merci, M. le Président. Depuis longtemps, notre région, la Mauricie et le Haut-Saint-Maurice, éprouve de sérieux problèmes d'effectifs médicaux. Le fait que l'on soit désigné région intermédiaire fait en sorte qu'on ne peut bénéficier de la proximité des équipements et des technologies de pointe des grands centres ni des avantages monétaires accordés aux médecins qui pratiquent dans les régions éloignées. Par conséquent, M. le Président, notre région se retrouve dans une impasse, une impasse qui la place dans une position plus que défavorable quant au recrutement de ses médecins. Nous sommes donc la région la moins bien desservie, c'est-à-dire la pire de toute la province au niveau de ses effectifs médicaux.
Au quotidien, M. le Président, cela signifie que le centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie accuse une pénurie de 33 médecins ? pas un, pas deux, pas trois, mais bien 33 médecins ? pour être opérationnel, ou encore le centre hospitalier de La Tuque, à qui le gouvernement demande de diminuer son budget d'opération de 500 000 $ quand on sait très bien que cet établissement est en rupture de services perpétuelle et qu'il doit avoir recours à des médecins dépanneurs...
n(14 h 30)n Les citoyens de ma région veulent savoir quelles mesures concrètes le ministre de la Santé envisage adopter pour corriger rapidement le problème d'effectifs médicaux. Et qu'attend-il pour donner à la Mauricie et au Haut-Saint-Maurice la désignation de région éloignée?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, il sied à l'Assemblée nationale de féliciter la nouvelle députée pour sa première question à l'Assemblée nationale.
Des voix: Bravo!
M. Trudel: Mais il faut aussi la prévenir d'un autre élément, c'est qu'il faut qu'un de mes collègues aujourd'hui additionne l'ensemble des dollars que va coûter la période de questions, tel que vous soulevez comme questions, parce que ça finit par coûter des milliards, des milliards. On pourra vous dire, M. le Président, on pourra vous dire...
Des voix: ...
Le Président: M. le député de Joliette, s'il vous plaît!
Une voix: ...
Le Président: Oui, mais, le problème, c'est moi qui vous reconnais.
M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.
M. Trudel: M. le Président, sur le fond de la question, parce que c'est une question de dépenses publiques, il faudra aussi additionner, suite aux réponses et surtout à vos questions, tout ce que ça va coûter à la population du Québec, puis on pourra vous traduire ça sur comment vous allez augmenter les taxes et les impôts de la population par votre mauvaise gestion des services.
Deuxièmement, M. le Président, j'ai eu l'occasion de me rendre, au cours du mois dernier, au centre hospitalier régional Centre-Mauricie et, M. le Président, j'ai été heureux de constater, avec l'équipe de médecins de l'hôpital, avec la direction générale et le président du conseil d'administration, que les efforts donnent des résultats, que des spécialistes déjà, compte tenu des efforts qui ont été réalisés, déjà deux spécialistes, de mémoire, se sont joints à l'équipe du centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie. Et, par ailleurs, à La Tuque, au niveau du carrefour, vous devez probablement connaître, je l'imagine, le fait que le gouvernement a consenti 350 000 $ supplémentaires pour le budget et que, troisièmement... Quelles mesures allons-nous prendre? J'indique à la députée qu'à compter du 5 novembre prochain ? c'est dans quelques jours ? sera mis en oeuvre le Centre national médecins Québec, qui va assurer qu'il n'y aura pas de discontinuité de services médicaux dans les régions du Québec, là où il y a des situations problématiques, M. le Président.
Le Président: Mme la députée.
Mme Julie Boulet
Mme Boulet: M. le Président, est-ce que M. le ministre réalise que sa réponse ne règle en rien les problèmes du centre hospitalier du Centre-de-la-Mauricie et du centre hospitalier de La Tuque, ni ceux également du CLSC de Saint-Tite qui, malgré un travail considérable de recrutement, se retrouve à peine avec 17 heures par semaine, ou encore une journée et demie à peine de couverture médicale pour la population environnante? Alors, c'est totalement inacceptable.
C'est pourquoi je réitère ma question, à savoir: Qu'est-ce que le ministre entend faire pour aider notre région?
Le Président: M. le ministre.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, je pense ici qu'il faut que les choses soient mises en relation et dans leur contexte. La députée nous indique que Shawinigan, Saint-Tite, Sainte-Thècle, c'est des régions éloignées. Je pense qu'il faut prendre la mesure des choses, là, au Québec. Si on parle d'une région comme la Gaspésie, l'Abitibi-Témiscamingue, qui sont des régions, oui, géographiquement plus éloignées, il y a des mesures spécifiques qui doivent être prises, et qui sont déjà prises en termes, par exemple, de rémunération des médecins, pour s'assurer non seulement de l'attraction, mais que ces médecins demeurent sur place.
Dans le contexte de la Mauricie, dans le contexte de la Mauricie, je pense qu'avec la Régie régionale de la santé et des services sociaux et les établissements nous pouvons faire en sorte que la juste part des 248 millions de dollars que l'on consacre aux soins à domicile, en particulier pour les personnes âgées, on puisse s'assurer que la Mauricie, et en particulier dans la région de la députée, qu'on ait sa part équitable, et je l'assure que c'est déjà le cas.
Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata, question principale.
Mesures envisagées pour solutionner
la crise dans l'industrie du bois d'oeuvre
M. Claude Béchard
M. Béchard: Merci, M. le Président. M. le Président, le conflit sur le bois d'oeuvre a pris une ampleur catastrophique hier, on peut le dire, avec l'imposition de nouvelles taxes antidumping qui viennent non plus seulement ralentir nos entreprises et nos économies régionales, mais qui maintenant remettent carrément en question la survie de certaines entreprises et remettent en question aussi plusieurs emplois dans nos régions. Et là on va pouvoir le sentir directement, là; des pertes d'emplois dans les régions vont commencer à se faire sentir.
M. le Président, hier, j'ai demandé au ministre des Ressources naturelles ? et d'ailleurs ça fait un an qu'on lui demande ça ? s'il a un plan pour faire face à cette crise, parce qu'on la sentait venir, et elle s'additionnait aussi aux diminutions de volumes dans certaines régions. Est-ce qu'il avait un plan pour aider les travailleurs?
Peut-être qu'hier il avait d'autres positions à défendre, mais aujourd'hui, là, est-ce qu'il peut nous dire clairement, tenter de rassurer les travailleurs et les travailleuses de l'industrie forestière au Québec, qu'il a un plan, qu'il a commencé à regarder cette question-là avec son collègue de l'Emploi et qu'il a quelque chose à proposer aux travailleurs, pas dans six mois, pas dans un an, mais dans les prochains jours, pour permettre à ces gens-là de passer à travers la crise et faire en sorte qu'une fois le conflit réglé il y aura encore des travailleurs forestiers, il y aura encore des travailleurs dans nos usines de sciage en région?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, la principale accusation des Américains à l'égard de notre façon de gérer la forêt et à l'égard de notre régime forestier et de notre système de tarification, la principale accusation des Américains, qui est fausse, soit dit en passant, qui n'est pas fondée, c'est que nous subventionnons l'industrie, nous subventionnons l'industrie du bois d'oeuvre, et que par conséquent ça entraîne ainsi selon eux une situation inéquitable où les lois de la concurrence ne sont pas respectées.
Alors, évidemment, à partir du moment où cette accusation est au coeur de l'argumentation des Américains, on ne commencera pas, hein, à envisager toutes sortes de programmes de subvention à l'industrie. Là on va se placer en porte-à-faux et en situation où l'accusation pourra être considérée comme étant justifiée.
n(14 h 40)n Ce qu'il est important de faire justement pour que les travailleurs puissent conserver leur emploi ? et c'est une préoccupation constante, je dirais, obsessive de la part du gouvernement ? ce qu'il faut faire, c'est justement d'appliquer la stratégie dont j'ai parlé hier, c'est-à-dire qu'en même temps qu'on a entrepris, avec l'appui du gouvernement fédéral, des démarches sur le plan juridique auprès de l'OMC, en même temps intensifier nos discussions, nos pourparlers avec les Américains pour trouver une solution durable à cette problématique et ainsi en arriver à éliminer ces contraintes majeures, là, que nous imposent les Américains sur la libre circulation du bois d'oeuvre entre le Québec et les États-Unis.
Le Président: M. le député.
M. Claude Béchard
M. Béchard: M. le Président, je veux être bien clair. Je ne veux pas que le ministre pense qu'on lui demande d'aider des entreprises. Ça, c'était le député de Rivière-du-Loup hier. Moi, ce que je lui demande aujourd'hui et depuis un an... On le sait c'est quoi, le conflit. On le sait, ce que nous reprochent les Américains. Moi, ce que je lui demande, c'est: Est-ce qu'il a quelque chose pour aider les travailleurs ? pas les entreprises, les travailleurs ? pour faire en sorte que ces gens-là, devant leur perte d'emploi, par exemple, ne seront pas obligés de tout liquider ce qu'ils ont comme avoir pour avoir la sécurité du revenu, qu'il y ait des mesures avec Emploi-Québec pour améliorer la formation de ces gens-là?
Donc, pas aider les entreprises, mais les travailleurs, et pour faire en sorte qu'on profite de cette crise-là pour améliorer la situation, la formation des travailleurs et avoir des entreprises et des gens encore plus compétitifs après. C'est ça qu'on lui demande, au ministre des Ressources naturelles. Je veux bien qu'il s'allie au fédéral, qu'il devienne un grand fédéraliste, c'est bien dans ce cas-là, mais ce que les travailleurs veulent, M. le Président, c'est savoir quel est le plan du ministre des Ressources naturelles pour leur venir en aide et faire en sorte qu'ils passent l'hiver avec du pain puis du beurre sur la table.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Je comprends bien le message du député, qui souhaite évidemment qu'on envisage des mesures au cas où il y aurait des mises à pied pendant une longue période, qu'on envisage des mesures pour s'assurer qu'on améliore la formation de ces travailleurs, qu'ils soient en mesure ainsi de se trouver un emploi avec une formation améliorée.
Bien, je n'ai pas besoin de l'inventer, ce plan-là, ça existe déjà. Ça existe déjà. Il y a des ressources à Emploi-Québec, dans chacune des régions du Québec, on peut y recourir, on peut les utiliser à cette fin, aussi bien pour les travailleurs de l'industrie du bois d'oeuvre que pour les travailleurs d'autres secteurs de l'économie.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Beauce-Sud.
Mme Diane Leblanc
Mme Leblanc: Alors, merci, M. le Président. Le ministre des Ressources naturelles peut-il nous dire quelles démarches ? quelles démarches ? il a effectuées pour s'assurer que les scieries frontalières qui s'approvisionnent en bois aux États-Unis, qui paient leur bois en dollars américains, qui le revendent aux États-Unis en dollars américains, pourront bénéficier d'une mesure d'exemption, puisque, dans le cas contraire, c'est des milliers et des milliers d'emplois qui sont en péril et c'est des fermetures d'usines qu'il faut envisager?
Le Président: M. le ministre.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, on connaît très bien la situation de certaines usines dans ce secteur-là qui effectivement s'approvisionnent aux États-Unis, et, évidemment, c'est évident que, dans la démarche concernant cette problématique, on s'efforce d'obtenir que ces industries soient exclues.
Si, encore une fois, dans la perspective où les droits compensateurs deviennent permanents, c'est clair qu'on va s'assurer que ces industries ou ces entreprises soient exclues.
Le Président: En question principale, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous remercie...
Des voix: ...
Le Président: Question de règlement? M. le leader de l'opposition officielle, question de règlement.
M. Paradis: Oui. M. le Président, sauf erreur, il y a eu trois questions principales de ministériels... Il y en a eu quatre dans les quatre derniers jours?
Une voix: ...
M. Paradis: Trois dans les quatre derniers jours, plus une question additionnelle hier. Je vous demande simplement à ce moment-ci de maintenir l'équilibre. De plus, là, c'est un quasi-ministre. Ce serait la première fois qu'un ministre s'interroge lui-même en cette Chambre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: M. le Président, comme je l'ai déjà indiqué la semaine dernière, je crois que le temps est venu de la bonne question.
Le Président: M. le leader du gouvernement, ce n'est pas le critère qu'ils utilisent. Mais, le critère, c'est qu'il y a des règles, qui sont établies depuis longtemps, qui permettent ? heureusement, je l'espère, parce qu'ils sont aussi députés à part entière de l'Assemblée nationale ? aux députés ministériels de poser des questions. Et il y a... Dans le cas qui nous occupe actuellement, j'ai le regret de dire, pour certains, qu'un secrétaire d'État n'est pas membre du Conseil des ministres. Il assiste au Conseil des ministres, mais il n'a pas prêté serment. Il y a déjà une décision de la présidence à cet égard qui confirme que, dans l'occurrence, le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques peut poser une question.
M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques.
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président, d'avoir...
Des voix: ...
Le Président: M. le député.
Exercice du droit de vote
lors des élections municipales à Montréal
M. André Boulerice
M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président, d'avoir trouvé pour moi le bon véhicule pour poser ma question. M. le Président, le leader de l'opposition a raison, je m'interroge, et mon interrogation va se porter vers ma collègue ministre des Affaires municipales.
Dimanche prochain, nous élirons la nouvelle administration de la nouvelle ville de Montréal, et est-ce que la ministre peut donner en cette Chambre l'assurance à la population de l'île de Montréal que à la fois le nombre d'électeurs inscrits dans les bureaux de vote et la nouvelle mécanique d'élection ne freineront pas cette participation enthousiaste que nous souhaitons?
Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, sa question, cela permettra certainement de rassurer ceux qui dans cette Chambre étaient inquiets que ce vote électronique qui va se réaliser, avec un nombre plus élevé d'électeurs par poll, ne facilite pas le vote. Bien au contraire, j'ai fait réaliser un inventaire exhaustif et je peux vous dire, M. le Président, que la municipalité de Mont-Royal en 1999, celle de Kirkland en 1999, celle de ville LaSalle, dans le comté de Marquette, en 1999, de Verdun en 1999, de Pointe-Claire ont utilisé ce vote électronique, avec une moyenne d'électeurs par section de vote de 770, M. le Président.
Mais je voudrais terminer en vous mentionnant que la première ville au Québec qui a utilisé le vote électronique, c'est la ville de Hull, et que...
Des voix: ...
Mme Harel: Alors, M. le Président, sur les 40 municipalités qui l'ont utilisé à date, Hull a été la première municipalité, par une résolution unanime de son conseil municipal où siégeait à l'époque le député de Hull comme conseiller municipal, et le nombre...
Des voix: ...
Mme Harel: M. le Président, après vérification, ce vote électronique a eu lieu avec un nombre de 2 000 à 2 500 électeurs par section de vote.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Mont-Royal, en question principale.
Conflit de travail affectant le transport
en commun sur la Rive-Sud de Québec
M. André Tranchemontagne
M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Depuis plus de cinq semaines, les citoyens de la Rive-Sud de Québec sont pris en otages par la grève de 14 employés de garage de la société de transport trans-Sud. D'ailleurs, il y a eu une pétition de déposée aujourd'hui de la part des citoyens. Après les citoyens, les organismes communautaires, les maires et la régie intermunicipale, c'est au tour de Jean Garon, ancien collègue du ministre du Travail, comme on le sait, de manifester son ras-le-bol dans ce dossier.
n(14 h 50)n Et, ce matin, M. le Président, voici ce qu'il déclarait: «Nous sommes pris avec un ministre du Travail...»Des voix: ...
Le Président: Je m'excuse, M. le député, mais je ne vous comprends pas. M. le député de Mont-Royal.
M. Tranchemontagne: Alors, M. le Président, je vous rappelle que je parlais du ras-le-bol de M. Jean Garon, qui est un ancien collègue du ministre du Travail et qui déclarait ce matin dans le journal: «Nous sommes pris avec un ministre du Travail qui n'est pas plus sensible qu'il ne l'était alors qu'il était ministre de la Santé.»
M. le Président, dans ce dossier-là, le ministre est isolé. Il est seul à avoir le pas. Qu'est-ce qu'il attend pour assujettir trans-Sud aux services essentiels et faire preuve de compassion afin de régler une fois pour toutes ce problème qui dure depuis trop longtemps?
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale.
M. Jean Rochon
M. Rochon: Bon. Alors, M. le Président, la situation de la grève légale qui est présentement en cours entre la Corporation intermunicipale de transport de la Rive-Sud de Québec, ce qu'on appelle le Réseau trans-Sud, et son syndicat est suivie... je la suis de très près, en tant que ministre du Travail, depuis un peu plus d'un mois, d'ailleurs en étroite collaboration avec mes collègues la députée de Lévis, qui est aussi la ministre responsable de la région Chaudière-Appalaches, et la députée des Chutes-de-la-Chaudière, qui sont en contact régulièrement avec toutes les parties impliquées dans ce conflit, y compris des groupes communautaires.
Il s'agit évidemment d'une grève légale, et le ministère du Travail, par un médiateur, est présent au dossier depuis le début. Il y a plus d'une semaine, j'ai donné un mandat de conciliation spécial avec obligation d'un rapport sur la situation, le 7 novembre, pour intensifier les négociations et trouver une voie pour régler ce conflit. Voilà pour ce qui est du conflit, et j'ai confiance que les parties vont finir, avec le conciliateur et l'intensité des travaux présentement, par trouver une voie pour s'en sortir.
En ce qui regarde les services essentiels, il faut bien comprendre que, avec le Code du travail que nous avons présentement, la situation de services essentiels, contrairement à ce que beaucoup de gens ont dit, dans ce dossier, n'est pas du tout à la discrétion du ministre du Travail ni du gouvernement. La loi est très claire à ce sujet et la Commission des services essentiels peut intervenir dans le cas de transport en public et est intervenue dans des situations où elle avait jugé que l'intensité de la circulation causée par la grève pouvait mettre en difficulté la circulation de véhicules prioritaires: les ambulances, les pompiers, en cas d'incendie ou des choses du genre, ce qui n'est pas le cas pour la Rive-Sud.
Maintenant, je pense que la question est importante...
Des voix: ...
Le Président: M. le député de Mont-Royal, en complémentaire.
M. André Tranchemontagne
M. Tranchemontagne: M. le Président, merci. Est-ce que le ministre peut arrêter de regarder la situation à travers ses vitres de limousine teintées? Est-ce qu'il peut regarder la réalité? Il parle de danger: il y a du danger public, M. le Président. Est-ce qu'il réalise... Est-ce qu'il réalise, par exemple...
Des voix: ...
Le Président: M. le député.
M. Tranchemontagne: Est-ce que le ministre réalise, par exemple, qu'il y a des gens âgés qui ne peuvent pas se rendre à leur rendez-vous chez le médecin, à l'hôpital, des étudiants qui ne peuvent pas se rendre à l'école et des travailleurs qui ne peuvent pas se rendre à leur travail? Si ça, ce n'est pas urgent, M. le Président, je ne sais pas qu'est-ce qui va l'être. Alors, qu'est-ce que le ministre attend? Parce qu'il a dans ses mains le pouvoir et l'obligation de régler ce problème-là.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Jean Rochon
M. Rochon: M. le Président, le ministre, il n'attend pas. Il a déjà agi, le ministre, parce que, même si la loi est ce que je vous expliquais en ce qui regarde les services essentiels, devant les allégations de certains groupes, j'ai demandé à la Commission des services essentiels de faire enquête, ce qu'elle a fait, et j'ai reçu le rapport hier soir sur la situation, pour voir s'il n'y avait pas d'autres choses non prévues dans nos lois qui mettraient en péril la santé et la sécurité des gens. J'ai reçu ce rapport qui confirme qu'il n'y a pas présentement... après que l'enquêteur ait rencontré les gens qui avaient fait les allégations, vérifié sur le terrain qu'il n'y avait pas de situation où la santé et la sécurité pouvaient être en péril.
Malgré ça, j'ai demandé aux parties, et je répète cette demande à l'Assemblée nationale aujourd'hui, d'assumer leurs responsabilités ? syndicats, employeurs et groupes communautaires ? en mettant ensemble en place, ce qu'ils peuvent faire, un service de navettes pour aider les gens qui subiraient des inconvénients trop importants dus à cette situation, et j'ai confiance que les parties vont pouvoir bouger dans ce sens-là pendant qu'on intensifie les négociations, toujours.
Alors, je pense que j'inviterais mon collègue le député à nettoyer ses lunettes, à regarder vraiment la situation plutôt que d'écouter des humeurs et des expressions d'humeur, qu'on a bien connues par ailleurs, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la députée de Sauvé, en question principale.
Budget de Télé-Québec
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. En juillet dernier, dans une entrevue dans le journal La Presse, le président du Conseil du trésor donnait une opinion bien tranchée sur Télé-Québec, je le cite: «Il faudrait sabrer dans les budgets de Télé-Québec.» Le 15 octobre, dans le journal Le Soleil, la vice-présidente du Conseil du trésor, parfois ministre de la Culture et des Communications mais sûrement, on le sait maintenant, prétendante au poste de chef du Parti québécois, affirmait ceci, et je cite: «Dans un monde idéal, j'aimerais ajouter du budget pour Télé-Québec.» À quelques heures du prochain budget, le ministre qui a eu gain de cause peut-il se lever?
Des voix: Bravo!
Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: M. le Président, je pense que le gouvernement du Parti québécois a donné jusqu'à maintenant un appui extrêmement fort à cette télévision formidable qu'est Télé-Québec, que bien sûr nous sommes tous dans un contexte qui est assez troublant du point de vue financier. Nous avons besoin de faire des choix. Il y a toutes sortes de manières d'apporter un soutien à une télévision publique comme Télé-Québec. Alors, à partir des sommes qui sont affectées au ministère de la Culture, à partir d'un certain nombre d'investissements qui vont être annoncés à l'occasion du budget, je pense qu'on fera les choix judicieux pour Télé-Québec et pour l'avenir de Télé-Québec.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Papineau, en question principale.
Financement des services de garde
en milieu familial dans la région de l'Outaouais
M. Norman MacMillan
M. MacMillan: Merci, M. le Président. La majorité des responsables des services de garde en milieu familial dans la région de l'Outaouais sont victimes d'inéquité dans le versement des subventions du gouvernement du Parti québécois. Mardi matin, près de 200 garderies ont fermé leurs portes afin de dénoncer l'écart entre les montants des subventions accordées d'un milieu de garde à un autre.
M. le Président, qu'est-ce que la ministre de la Famille et de l'Enfance répond aux parents de l'Outaouais qui, mardi, ont été privés de services à cause de son inaction?
Le Président: Mme la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance.
Mme Linda Goupil
Mme Goupil: D'abord, M. le Président, de façon plus globale, ce n'est pas la journée au complet que les parents ont subi un préjudice, mais c'est une demi-journée. Et on m'a informée qu'il y a eu des arrangements qui ont été pris...
Des voix: ...
Mme Goupil: ...M. le Président, on m'a informée qu'il y a eu des arrangements, semble-t-il, qui ont été faits avec les parents pour s'assurer qu'ils puissent bénéficier de services de garde. De façon plus globale, nous avons convenu avec le milieu familial qu'il y avait bien sûr des ajustements qui devaient être faits.
n(15 heures)n J'ai convenu également avec le milieu familial qu'il y avait des ajustements que nous pouvions faire rapidement, et que nous allions le faire par modifications au règlement. Nous avons... Ça fait rire le député de... j'essaie de vous répondre, monsieur. Alors, M. le Président, on a convenu également que, au niveau du milieu familial, elles étaient des partenaires dans l'ensemble du réseau, pour que l'on puisse répondre aux besoins, le plus rapidement, des parents. Donc, nous avons convenu, tout le monde ensemble, que nous devions, le plus rapidement possible, consolider le réseau pour faire en sorte que tous les parents du Québec aient des services de garde, et c'est ce que nous nous efforçons de faire, en partenariat bien sûr avec le milieu familial, et nous allons continuer de le faire, M. le Président.
Réponses différées
Extinction du financement
par Emploi-Québec d'un programme
de formation des adultes à Longueuil
Le Président: Bien. Maintenant, nous allons passer à deux réponses différées. D'abord, M. le ministre d'État au Travail, à l'Emploi et à la Solidarité sociale va répondre à Mme la députée de La Pinière qui posait, hier, une question sur le financement du programme de formation des adultes de l'école Lemoyne-d'Iberville. M. le ministre d'abord.
M. Jean Rochon
M. Rochon: M. le Président, hier, la députée de La Pinière a laissé entendre sinon affirmé directement dans sa question que des étudiants du centre d'éducation des adultes Lemoyne-d'Iberville se verraient dans l'impossibilité de compléter un programme de formation à la suite de coupures faites par Emploi-Québec, ce qui est totalement faux. La situation est la suivante. Il s'agit d'un projet expérimental qui avait été mis en place pour une année et qui voulait vérifier l'effet de différents ratios étudiants-formateur. Ce projet était prévu pour une année, il se termine à la fin de l'année, mais les cours sont toujours disponibles, les cours réguliers. Les résultats de cette expérience seront analysés, et on verra si ça nous amène à faire des modifications éventuellement dans les ratios formateur et étudiants. Mais les cours sont disponibles, les gens peuvent suivre leurs cours.
Et cette région de la Montérégie d'ailleurs est parmi celles qui consacrent la plus importante proportion de son budget à la formation. C'est 56 %, alors que la moyenne au Québec des budgets consacrés à la formation dans les CLE est de 46 %. Alors, ça reste une priorité pour la région, compte tenu du marché du travail local, des besoins de main-d'oeuvre et des entreprises... pour les entreprises et pour les travailleurs, et les gens dans ce programme de formation vont continuer comme prévu à avoir leur formation.
Alors, j'inviterais la députée à aller vraiment voir où les choses se passent sur le terrain pour voir quelle est la réalité, et pas nous arriver, là, avec des questions qui sont une distorsion complète de la situation actuelle. C'est faux.
Le Président: Mme la députée.
Mme Fatima Houda-Pepin
Mme Houda-Pepin: M. le Président, j'avise le ministre que j'ai assisté à une rencontre avec les 150 étudiants concernés par la coupure d'Emploi-Québec et que j'ai été à la manifestation qu'ils ont organisée où ils ont dit au ministre: Reprendre, c'est voler, parce que c'est ça qu'Emploi-Québec a fait, M. le Président.
Est-ce que le ministre peut comprendre que le programme de formation de base de l'école Lemoyne-d'Iberville est un projet qui a été priorisé par le centre d'emploi de Longueuil-Est pour deux ans, que le financement promis était pour deux ans, que l'entente que j'ai ici, de services, M. le Président, rédigée par la coordonnatrice du projet d'Emploi-Québec, est prévue pour deux ans, du 30 juillet 2001 au 28 juin 2002, et que la coordonnatrice a expédié cette entente à la commission scolaire, leur demandant de la signer de toute urgence pour qu'ils puissent donner l'argent? Et, entre le moment où la lettre est envoyée et le moment où elle est arrivée à Emploi-Québec, le couperet est tombé, M. le Président, et on a coupé le budget, et on laisse sur le pavé 150 étudiants qui réclament aujourd'hui du ministre, M. le Président, 90 000 $, alors qu'ils ont 5 millions de dollars pour la propagande de la souveraineté, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Jean Rochon
M. Rochon: Il faudrait que la députée écoute, là, puis regarde les faits. Ce qui est important, c'est que les gens aient accès à la formation dont ils ont besoin. Ce que je vous dis, c'est que tous les gens qui ont besoin de cette formation l'ont et l'auront, M. le Président. Si un projet de nature expérimentale a été fait et a donné les réponses qu'on voulait par ce projet expérimental et qu'on utilise l'argent à meilleur escient pour donner accès à plus de gens, à plus de formation, moi, je pense que ça s'appelle de la bonne gestion, ça, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Consultations en matière
d'aménagement du territoire agricole
Le Président: Alors, c'est au tour maintenant du ministre de l'Environnement qui va répondre au député d'Orford qui a posé hier une question concernant les consultations de groupes environnementaux lors de l'adoption du projet de loi n° 184. M. le ministre de l'Environnement.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, le député laisse entendre que le gouvernement travaille en vase clos, ne consulte pas les gens. Je voudrais réfuter cette allégation, M. le Président, et vous dire que je suis très heureux d'appartenir à un gouvernement où tous les ministres et tous les députés intéressés sur les questions de l'environnement et préoccupés s'assoient et discutent avec des gens de l'environnement et particulièrement l'Union québécoise de conservation de la nature. J'en veux pour preuve, M. le Président...
Des voix: ...
Le Président: Je m'excuse. M. le ministre.
Des voix: ...
Le Président: M. le ministre, j'aimerais bien être capable de vous entendre, alors je vais attendre que le silence revienne.
Des voix: ...
Le Président: Bien. M. le ministre.
M. Boisclair: M. le Président, j'étais boutonné en jaloux parce que j'étais jaloux de ne pas avoir eu de question aujourd'hui du député de Marquette.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Boisclair: M. le Président, je vous disais donc...
Des voix: ...
M. Boisclair: M. le Président, j'aurais lu une lettre d'ingénieurs qui dit la chose suivante, datée du 18 janvier...
Des voix: ...
Le Président: Non, non, non, non. Alors, je m'excuse, mais, à la période de questions et de réponses orales, on peut naviguer peut-être un peu plus large, mais vous êtes à l'étape des réponses différées et vous répondez au député d'Orford et non au député de Marquette.
M. Boisclair: Oui, oui, mais... s'intéresse beaucoup à ce que dit son collègue d'Orford puis il voudrait savoir...
Le Président: Mais, M. le ministre, je vous invite à répondre au député d'Orford.
M. Boisclair: ...M. le Président. C'est qu'il faut rappeler...
M. Paradis: M. le Président. M. le Président.
Le Président: Question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Question de règlement. Compte tenu que le ministre n'était pas parmi nous hier, il y a consentement pour le dépôt de sa lettre.
Le Président: Non, mais...
Des voix: ...
Le Président: Certainement pas à cette étape-ci, puisque j'ai donné la parole au ministre pour qu'il réponde au député d'Orford.
M. Boisclair: M. le Président, j'en étais donc à vous dire que nous sommes très fiers de collaborer le plus souvent qu'on peut avec les gens des groupes environnementaux et particulièrement l'UQCN. J'en veux pour preuve, M. le Président, les déclarations que l'UQCN a faites dans Le Devoir le 23 octobre 2001 sur le règlement sur la pollution d'origine agricole. Et je vous le montre pour que tout le monde soit bien conscient: L'UQCN est favorable aux changements proposés dans le milieu agricole. C'est pas pire, ça, comme consultation. Ils sont d'accord avec ce qu'on fait dans le milieu agricole, et je suis très fier, M. le Président.
Cet après-midi, la ministre des Finances se lèvera pour présenter un budget et, pour la première fois dans un processus de consultation prébudgétaire, la ministre des Finances se sera assise avec les représentants d'une vingtaine de groupes environnementaux pour préparer son budget. En termes de consultation, M. le Président, on n'a pas de leçons à recevoir.
Le Président: M. le président d'Orford, en question complémentaire.
M. Robert Benoit
M. Benoit: Oui. M. le Président, on s'attend à ce qu'il y ait des augmentations de ce côté-là. Il y a eu une diminution de 50 % depuis sept ans en environnement; ce serait normal qu'il y ait une légère augmentation, et on espère vraiment qu'il y en aura.
M. le Président, comment se fait-il que, ce dit document public, quand nous avons appelé, quand nos recherchistes ont appelé au ministère, au nom et à l'adresse, au numéro de téléphone pour obtenir le document, il y a une semaine, on nous a dit: On ne le distribue pas et on le distribuera pas? Comment se fait-il que, quand nous parlons à l'UQCN, elle nous dit: Oui, les unions municipales ont été consultées, oui, l'Union des producteurs agricoles a été consultée, mais, nous, le CRE, nous, l'UQCN, n'avons pas été consultés, M. le Président? Qu'est-ce que le ministre a à dire? Et ce document, qui n'est plus public depuis hier ? la consultation est terminée ? ces gens-là, maintenant, ils ne pourront plus s'exprimer.
Le Président: M. le ministre.
M. André Boisclair
M. Boisclair: Je voudrais d'abord dire aux membres de cette Assemblée que ce document n'a pas été encore adopté par le Conseil des ministres, première des choses; deuxièmement, qu'il reste encore du temps devant nous pour discuter avec les gens. Et je veux donner l'assurance, M. le Président, à l'ensemble des membres de cette Assemblée qu'on va se comporter de façon correcte, qu'on va agir de façon responsable et que, sur cette question, on sera heureux de constater que les propositions de ma collègue des Affaires municipales, appuyée par les gens de l'agriculture et par les gens de l'environnement, seront un plus pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises et particulièrement un plus pour ceux et celles qui se préoccupent d'environnement.
n(15 h 10)nLe Président: M. le leader de l'opposition officielle.
M. Paradis: Oui. En vertu de 214, M. le Président, vu que le ministre, dans sa réponse, a fait référence à un document, une lettre d'ingénieurs, il pourrait la déposer à ce moment-ci.
Le Président: M. le ministre.
M. Boisclair: Oui, oui, écoutez, puis elle va être dans le journal demain: «Après vérification des efforts de la structure, nous sommes d'avis qu'il est sécuritaire de...»Des voix: ...
Le Président: La période de questions et de réponses orales est terminée. Le ministre avait la parole pour répondre au député d'Orford et non pas pour revenir sur une autre question. Alors, je crois que, à cette étape-ci, s'il y a un dépôt de documents à faire, il se fera à une autre séance.
M. Paradis: ...
Le Président: Non, mais je m'excuse, M. le leader de l'opposition officielle. Dans le cas qui vous intéresse, le ministre a fait une allusion, et j'ai indiqué que je n'autorisais pas qu'il poursuive. Si le ministre veut rendre public... il le fera à l'extérieur de la Chambre, parce que maintenant nous allons passer à une autre étape. La période de questions différées et de réponses différées n'est pas pour engager un débat connexe. La période de questions et de réponses orales permet une latitude plus grande. Mais, s'il y a consentement, ça, je n'ai pas de problème.
M. Brassard: M. le Président, de consentement, il s'agit de dépôt d'une lettre, nous consentons au dépôt.
Le Président: Un dépôt, pas une lecture. M. le ministre.
Document déposé
Alors, très bien. Alors, le document est déposé.
Motions sans préavis
Nous allons maintenant aller à une motion sans préavis.
Des voix: ...
Le Président: Alors, une motion de notre collègue la députée de Saint-François.
Hommage à Mme Solange Chaput-Rolland
et condoléances à sa famille
Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Je souhaiterais obtenir le consentement de cette Chambre pour la motion sans préavis suivante:
«Que l'Assemblée nationale offre ses sympathies à la famille et aux proches de Mme Solange Chaput-Rolland, décédée ce matin.»Le Président: Je crois qu'il y a consentement, Mme la députée.
Mme Monique Gagnon-Tremblay
Mme Gagnon-Tremblay: Alors, M. le Président, aujourd'hui, le Québec et le Canada perdent une très grande citoyenne, une femme de tête, une femme de coeur estimée de tous et de toutes. De plus, nous perdons, M. le Président, une ancienne collègue de l'Assemblée nationale.
Mme Solange Chaput-Rolland aura marqué la vie civile et politique de plusieurs façons. Elle sera reconnue pour son engagement non seulement pour les causes des femmes, mais également pour celle de la liberté. D'ailleurs, dans une entrevue qu'elle accordait au magazine du Cercle des fermières en 1991, elle disait, et je cite: «Je pense que les jeunes femmes d'aujourd'hui réalisent qu'elles profitent d'une liberté que, nous, nous sommes allées leur chercher à coups de goupillons sur la tête.» Et fin de la citation.
Faisant référence au contexte des années soixante, elle ajoutait, et je cite: «Les femmes étaient là. Je pense à Simonne Chartrand, à Thérèse Casgrain, à Lise Hénault, à Madeleine Dubuc, je pense à toutes ces femmes qui ont presque mon âge ? au moment de l'entrevue, elle avait 72 ans. Nous étions toutes dans des mouvements parce que ça nous regardait beaucoup. Ça regardait encore plus les femmes que les hommes. Il y avait, à cette époque, une solidarité hommes-femmes qu'on semble avoir perdue, je le crains. Pour conquérir nos libertés individuelles, il fallait qu'il y ait un couple, pas nécessairement couple marié, mais couple dans le sens d'homme et de femme.» Fin de la citation.
Mme Chaput-Rolland était une femme de son temps. Avec d'autres, elle a défendu et fait la promotion de l'implication des femmes dans la société québécoise à une époque, on se le rappellera, où cela n'était pas évident. Avec d'autres, elle a ouvert la voie à d'autres femmes du Québec. Elle a étudié à la Sorbonne et à l'Institut catholique de Paris, elle a été nommée observateur du Canada aux Nations unies pour l'UNESCO en 1969, elle est décorée Officier de l'Ordre du Canada en 1975 et sa carrière politique s'amorce avec sa nomination comme commissaire de la commission Pepin-Robarts en 1977. Elle voyagera d'un bout à l'autre du Canada, qu'elle connaissait bien, d'ailleurs, et qu'elle chérissait.
Elle a fait son entrée à l'Assemblée nationale en novembre 1979, à une époque où nous étions, comme femmes, peu nombreuses à siéger à cette Assemblée. Dans son premier discours, prononcé ici le 22 novembre de la même année, elle disait: «Les citoyens de Prévost savent que je suis venue à la politique avec un peu d'appréhension et beaucoup d'hésitation.» Elle ajoutait: «Je sens cet après-midi que jamais je ne parviendrai à détester la terre canadienne pour mieux aimer la terre québécoise.» Fin de la citation.
Son départ de la politique québécoise aura été difficile. Elle a quitté, je dirais, avec un peu d'amertume, mais la vie électorale est ainsi faite, ce sont les électeurs qui décident en bout de ligne. C'est elle qui lancera, d'un cri du coeur, lors de la campagne référendaire de 1980, le fameux: Le Québec, ma patrie; le Canada, mon pays. En 1983, elle devenait la seule femme au Québec à recevoir un Doctorat honoris causa en droit de l'Université Queen's. Elle sera décorée de l'Ordre national du Québec en 1985. M. le Président, elle sera nommée au Sénat en septembre 1988.
Je suis retournée voir ce qui l'animait, ce qu'elle avait dit lors de son premier discours, et je me permets d'en citer un extrait: «Depuis plus de 35 ans, je vis au coeur des communications, dit-elle. Je suis une journaliste, je suis fière de mon métier comme vous l'êtes du vôtre. Je suis fière qu'il m'ait donné la chance de rencontrer des centaines de milliers de Canadiens d'un océan à l'autre, de leur parler, de les entendre et de tenter de toute mon âme de les comprendre. Pour moi, la carte géographique du Canada n'est pas un simple dessin que l'on retrouve dans les manuels d'histoire; ce sont des visages, des sourires, ce sont des gens qui souffrent et qui cherchent.» Fin de la citation. Elle soulignait: «Ce sont des citoyens qui sont las de nos luttes et qui vous demandent et nous demandent des solutions à leurs problèmes plutôt que de nouveaux problèmes politiques à leurs problèmes quotidiens.» En 1994, elle demandait une loi sur la protection de la vieillesse, des aînés. Jusqu'au bout, elle se battra pour que la justice soit faite.
Durant toutes ces années, elle aura servi ses concitoyens et ses concitoyennes. Elle les aura fait lire, elle les aura fait rire et pleurer. Authentique jusqu'à la fin, elle aura été profondément québécoise, et, comme elle le disait: «Je ne suis pas et ne deviendrai jamais indépendantiste. Ce pays me fait mal, mais j'y suis profondément attachée.» Au nom du chef de l'opposition officielle et de tous mes collègues, j'offre à la famille nos plus sincères condoléances dans ces moments difficiles.
Le Président: Mme la ministre d'État à la Culture et aux Communications.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je souhaite joindre ma voix à celle de mes collègues de l'Assemblée nationale pour déplorer la disparition de Mme Solange Chaput-Rolland. Nous avons appris avec tristesse ce décès aujourd'hui même. Mme Chaput-Rolland représentait pour nous tous une figure très familière des grands débats politiques et sociaux qui ont agité et qui ont fait grandir le Québec. Sa contribution à titre de journaliste, de communicatrice, d'auteur ne peut aujourd'hui se mesurer pleinement. Il nous faudra un certain temps avant de cerner l'influence qu'elle a eue sur le tissu social, politique, culturel du Québec.
Mme Chaput-Rolland est née à Montréal en 1919. Elle a fait ses études au couvent d'Outremont. À 18 ans, elle fréquente la Sorbonne et, plus tard, l'Institut catholique de Paris. De retour au Québec, elle consacre tout son talent et son amour profond de la langue française au métier de journaliste, d'auteur, d'animatrice d'émissions d'affaires publiques à la radio et à la télévision. Elle est entrée dans cette Chambre en 1979, à l'aube de ses 60 ans, alors que le Québec se préparait à écrire une page importante de son histoire contemporaine.
Mme Chaput-Rolland, inspirant encore les femmes qui tentent de faire entendre leur voix dans les hauts lieux du pouvoir, elle était, bien qu'elle ne s'en réclamait pas de façon directe, parmi les meilleures porte-parole du mouvement féministe. «Je n'ai pas eu le temps de devenir féministe, confiait-elle, ma génération était trop occupée.» Elle s'est pourtant battue pour le divorce, l'école laïque, le droit à la syndicalication, la liberté de religion, toutes causes qui militaient en faveur d'un plus grand respect des femmes.
n(15 h 20)n Ses amis disent encore à son sujet qu'elle ne reculait devant aucun obstacle. Mme Chaput-Rolland était une battante, toujours prête à confronter ses adversaires avec des arguments subtils, une pensée claire et un sens de la communication hors du commun. Elle était une oratrice talentueuse et convaincante, une animatrice habile, alerte, une journaliste rigoureuse. À titre de ministre d'État à la Culture et aux Communications et en mon nom personnel, je tiens à faire part de mes sympathies à sa famille et à ses proches.
Le Président: Mme la députée de Sauvé, maintenant.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci. M. le Président, c'est avec beaucoup de tristesse mais avant tout avec beaucoup de respect que je joins ma voix à celle de mes collègues pour souligner le départ de Mme Solange Chaput-Rolland qui aura été une figure marquante non seulement de la scène politique, mais également de la scène journalistique et artistique du Québec et du Canada.
Après des études à la Sorbonne, Mme Solange Chaput-Rolland revient à Montréal en 1937 où elle amorce sa carrière comme critique littéraire. Elle collabore à plusieurs périodiques, dont L'Écho du Nord, L'Avenir du Nord, La Revue moderne, Amérique française, Le Devoir, et Le Canada. Elle devient journaliste et commentatrice politique à la télévision et à la radio. Elle fut d'ailleurs présidente du Cercle des femmes journalistes en 1974, puis présidente de la Presse internationale féminine, de même que membre du Cercle des journalistes et du Media Club. Elle a également été éditorialiste au réseau Télémédia et animatrice d'émissions d'affaires publiques et, vous vous en souviendrez, des émissions, par exemple, Les gens qui font l'événement ou encore l'émission Ni noir ni blanc qu'elle a coanimée avec M. Claude Charron jusqu'en 1987. Elle a fondé et dirigé un journal mensuel ? ce qui n'était pas chose facile pour une femme, à l'époque ? qui s'appelait Point de vue. Elle a écrit des romans et aussi de nombreux ouvrages analytiques sur l'actualité politique au Canada et au Québec. En 1984, elle publiait Le mystère Québec, dixième et dernier tome de son journal politique, commencé en 1964 par le livre Chers ennemis. Essayiste et romancière, elle aura publié plus de 25 livres durant sa carrière.
Plusieurs distinctions ont souligné la vigueur et la qualité de ses écrits. Elle a été élue femme de l'année par La Presse canadienne en 1968 et a remporté le Memorial Award du Media Club en 1972 pour ses éditoriaux ainsi que le Don McArthur Award en 1975 pour ses reportages radiophoniques sur la guerre en Israël. Elle a été membre du Conseil des arts du Canada, des conseils d'administration de l'Université de Montréal et de la Fondation Lionel-Groulx. En 1974, elle fonda le célèbre prix Judith-Jasmin qui couronne les meilleurs écrits politiques dans les médias d'information. Elle a été nommée Officier de l'Ordre du Canada en 1975. Tous se souviendront du téléroman qu'elle a co-écrit et co-scénarisé avec Mme Michèle Bazin, le fameux téléroman Monsieur le ministre, diffusé de 1981 à 1985 sur les ondes de Radio-Canada.
M. le Président, ceux qui ont côtoyé Mme Solange Chaput-Rolland de près vous diront qu'un des mots-clés pour mieux la décrire est le mot «création». Mme Chaput-Rolland était dotée d'une grande force créatrice. Elle était une intuitive très inspirée, et son talent immense aura su être une source d'inspiration très puissante pour toute une génération de femmes, de journalistes et de créateurs.
M. le Président, je tiens à souligner que la disparition de Mme Chaput-Rolland nous attriste tous très profondément. Mais, heureusement, elle demeurera à jamais parmi nous grâce à son oeuvre. J'offre, en mon nom personnel et au nom de mes collègues, nos plus sincères condoléances à sa famille, à ses collègues et à ses amis. Merci, M. le Président.
Le Président: Mme la ministre d'État à la Famille et à l'Enfance et ministre responsable de la Condition féminine.
Mme Linda Goupil
Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, c'est bien sûr avec beaucoup d'émotion que je joins ma voix également à mes collègues ainsi qu'à l'opposition pour rendre un hommage à cette grande dame. Comme ministre responsable de la Condition féminine, il est évident que Mme Solange Chaput-Rolland a été celle qui, pour plusieurs d'entre nous, a été un modèle, une femme intègre, d'une grande intelligence, qui, par ses propos, nous a toujours donné le goût d'aller plus loin, de nous engager dans des causes. Alors, il est évident, M. le Président, qu'aujourd'hui c'est un moment qui nous empreint de tristesse. Mais une femme d'une grande envergure comme cette dame, il y a beaucoup de choses qui vont rester, et elle continuera de nous inspirer pour nous engager dans les causes qui nous interpellent au plus haut point et qui nous interpellent dans nos valeurs.
Cette femme remarquable, qui était préoccupée par le sort des individus et par les causes sociales tant au Québec qu'aux Nations unies, où elle a été nommée observateur du Canada à l'UNESCO en 1969... Sa sensibilité à la condition humaine s'est manifestée également à travers son oeuvre littéraire et son engagement, comme nous venons de le mentionner.
Alors, M. le Président, en mon nom personnel, comme ministre de la Condition féminine, au nom de notre premier ministre, M. Bernard Landry, et au nom de mes collègues, j'offre mes plus sincères condoléances, bien sûr, à sa famille, à ses petits-enfants. Et le Québec, comme je l'ai dit, vient de perdre une grande dame de son histoire. Merci, M. le Président.
Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, leader de l'opposition officielle.
M. Pierre Paradis
M. Paradis: Oui. M. le Président, Mme Chaput-Rolland a été nommée Officier de l'Ordre du Canada en 1975 et Officier de l'Ordre national du Québec en 1985. J'ai eu le privilège, avec quelques autres membres de cette Assemblée, de siéger en sa compagnie dès 1979. Je me souviens de ses premiers mots dans cette enceinte. Elle a pris le temps de saluer le premier ministre de l'époque et de lui offrir ses respects. Je le dis, M. le Président, parce que son décès coïncide avec le décès de M. René Lévesque.
Ce matin, le premier ministre, plusieurs membres du gouvernement ainsi que des amis de René Lévesque se sont rendus témoigner de notre fidélité, de notre admiration pour l'oeuvre qu'il a accomplie comme premier ministre du Québec. Mais, à l'occasion de ce premier discours, parce que c'était aussi une politicienne engagée et d'une éloquence frappante, à l'occasion de ce premier discours, M. le Président, elle terminait comme suit. Et il faut se rappeler qu'un premier discours à l'Assemblée nationale, qui qu'on soit, ça nous impressionne. Mme Chaput-Rolland, et je la cite, s'adressait à vous comme suit:
«M. le Président, un dernier mot. Je suis désormais en politique active à ce moment de ma vie parce que c'était aussi l'année référendaire. L'Assemblée nationale deviendra, si elle ne l'est déjà, le creuset dans lequel se fondront bientôt les deux courants d'idées qui inspirent ceux qui croient au Canada et ceux qui y croient moins. Mais les gens de Prévost y croient, M. le Président, la plupart d'entre eux me l'ont signifié, mais ils ne croient pas, et moi non plus, qu'il soit nécessaire de mépriser ceux qui ne partagent pas leurs opinions.
«M. le Président, à la minute où l'Assemblée nationale avalisait la tenue d'un référendum dans tout le Québec, tous les citoyens comprenaient que les tenants du Oui et du Non avaient la même dignité, la même qualité d'être, le même souci de démocratie. Au nom de tous les citoyens de Prévost, M. le Président, je défendrai leur foi dans un Canada renouvelé, dans une fédération rajeunie et restructurée, au nom de ce Québec qui devient de plus en plus conscient de la richesse de son héritage, de la grandeur de ses traditions qui ont germé au cours des âges dans la terre de nos aïeux.» C'était sa façon à elle d'exprimer sa foi dans sa patrie qu'était le Québec et dans son pays qu'était le Canada.
Mais je l'ai connue, M. le Président, comme personne qui était proche des gens dans tous les comtés du Québec. J'ai eu l'avantage de la connaître à l'occasion des élections partielles dans Brome-Missisquoi en 1980. Elle a consacré plusieurs journées à visiter des usines où travaillaient majoritairement des femmes. Elle avait, comme l'a souligné ou l'ont souligné les députées qui se sont exprimées, cet attachement à l'avancement des femmes dans la société québécoise. Je l'ai connue également comme une femme très à l'aise dans toutes les fermes de la circonscription électorale que nous avons visitées ensemble. Elle était à l'aise avec les gens issus du milieu agricole.
Je l'ai connue, M. le Président, et je l'ai vue s'émouvoir en visitant des résidences pour personnes âgées. Elle était saisie des conditions, même à cette époque-là, dans lesquelles les gens vieillissaient au Québec. Et, si elle s'est engagée en politique, c'est pour améliorer la condition de ces personnes âgées qu'on oublie souvent dans les foyers auxquels on les confine.
M. le Président, lorsqu'elle a quitté l'Assemblée nationale, elle a occupé plusieurs fonctions dans sa vie, mais elle a occupé également la fonction de sénatrice, et j'ai eu l'avantage, cet avant-midi, de prendre connaissance des derniers propos qu'elle a prononcés au moment où elle quittait le Sénat. C'est en 1994, M. le Président. À ce moment-là, on tentait de lui faire dire si elle était davantage Québécoise que Canadienne, parce que, à certaines occasions, elle manifestait un attachement tellement indéniable à la société québécoise que des gens se sont mis à colporter qu'elle pouvait promouvoir une autre option. Elle a répondu très habilement et elle a dit: «C'est la dernière fois que je m'exprime sur cette question.» Elle a dit: «Je vais laisser à mes enfants et à mes petits-enfants un pays aussi grand que celui que mon père m'a laissé.» C'est son testament politique sur la place constitutionnelle.
n(15 h 30)n M. le Président, le Québec, le Canada perd aujourd'hui une femme de tête, une femme de coeur. Que nous perdions cette femme le 1er novembre, à la même date où nous avons perdu une autre personne de tête et de coeur, René Lévesque, nous inspire tous et toutes. Merci, M. le Président.
Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole et députée d'Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Jeune femme, j'ai connu Solange Chaput-Rolland et j'avais établi avec elle des contacts chaleureux malgré nos divergences d'opinions. Elle était une femme de son temps, de son époque et de sa génération, et je crois que l'occasion est propice pour nous rappeler que cette époque ? ce temps et cette génération ? était celle de femmes qui étaient dignes, fortes, combatives, cultivées et qui se voulaient des citoyennes à part entière. Elle était d'ailleurs déconcertante de lucidité. En 1994, au moment où elle quittait le Sénat, elle disait, et je la cite: «J'ai perdu presque toutes mes batailles: celle de Pepin-Robarts, celle de Meech, celle de Charlottetown. Pierre Elliott Trudeau s'est chargé de démantibuler le pays.» Fin de la citation.
C'était une femme qui était choyée par la vie mais qui voulait en redonner à la société. Et, à la manière des Thérèse Casgrain, des Simonne Monet-Chartrand, qui étaient comme elle issues de milieux bourgeois et qui étaient comme elle aussi passionnées de justice, Solange Chaput-Rolland a pris le flambeau des luttes sociales. Elle était une pionnière parmi les pionnières, et je crois qu'elle nous a fait comprendre, avec d'autres de sa génération, que la vaste marche des femmes vers leur égalité dans la société en était une de course au flambeau. Chaque génération faisait un pas de plus, rapportait progrès et permettait à celles qui suivaient d'en faire encore plus. Et pour cela, M. le Président, je lui dis aujourd'hui merci.
Mise aux voix
Le Président: Alors, je crois que la motion est adoptée et je vous prierais de vous lever pour un moment de recueillement.
n(15 h 33 ? 15 h 34)n Bien. Veuillez vous asseoir.
Alors, toujours à l'étape des motions sans préavis, Mme la députée de Saint-François, je crois que vous en avez une seconde. Mme la députée de Jonquière, d'abord?
Hommage à l'écrivaine Arlette Fortin,
récipiendaire du prix Robert-Cliche
Mme Gauthier: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour adopter la motion suivante:
«Que les membres de l'Assemblée nationale rendent hommage à Mme Arlette Fortin, originaire de Jonquière, qui a reçu, le 29 octobre dernier, le prix Robert-Cliche 2001 pour son roman C'est la faute au bonheur.»Le Président: M. le leader.
M. Brassard: Il y a consentement, M. le Président. Et quelques interventions, quelques remarques de part et d'autre pour...
Le Président: Alors, Mme la députée de Jonquière d'abord.
Mme Françoise Gauthier
Mme Gauthier: Alors, M. le Président, dans la soirée de lundi, 29 octobre dernier, Mme Arlette Fortin, native de Jonquière, s'est vu attribuer le prix Robert-Cliche 2001 pour son roman C'est la faute au bonheur. On le sait, le prix Robert-Cliche prétend être le prix le plus prestigieux de la relève du roman québécois.
C'est la quatrième fois qu'un écrivain de la région du Saguenay?Lac-Saint-Jean remporte ce prix. On se rappelle que Mme Danielle Dubé l'avait gagné avec son roman Les olives noires, M. Jean-Alain Tremblay, avec La nuit des perséides, et M. André Girard, avec Deux semaines en septembre. Chez VLB éditeur, on parle du roman de Mme Fortin comme étant d'un grand cru qui contribuera à rehausser la réputation de ce prix littéraire.
Mme Fortin, je vous le rappelle, est originaire de Jonquière, où elle a vécu 20 ans, puis elle a vécu quelques années dans la Beauce où elle a pratiqué le journalisme. Aujourd'hui, elle vit à Saint-Michel-de-Bellechasse avec son mari, le peintre Jocelyn Belley. Elle a entrepris la restauration d'une maison centenaire, projet qui éventuellement pourra déboucher sur la création d'un atelier d'artistes ouvert au grand public.
Si C'est la faute au bonheur constitue un premier roman pour Mme Fortin, il n'en demeure pas moins que l'écriture a toujours fait partie de sa vie. En effet, Mme Fortin, en plus d'avoir été journaliste à La Voix du Sud et à L'Éclaireur-progrès, a écrit des pièces de théâtre, dont deux jouées devant public. Elle a écrit et publié plusieurs nouvelles et poèmes, de même qu'un conte pour enfants. Aujourd'hui, Mme Fortin anime un café littéraire à la bibliothèque de Saint-Romuald ainsi que quelques soirées de poésie. On peut dire que l'essentiel de son temps est consacré à la poésie. C'est pourquoi, M. le Président, il nous apparaît important que cette Chambre témoigne son hommage à cette grande dame de l'écriture. Merci.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Jonquière. Et, sur cette même motion, je cède la parole à Mme la ministre d'État à la Culture et aux Communications.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je joins ma voix à ma collègue de l'opposition pour offrir mes chaleureuses félicitations à Mme Arlette Fortin qui a remporté, donc, lundi dernier le prix Robert-Cliche du premier roman pour C'est la faute au bonheur. La consécration de cet ouvrage parmi les quelque 50 manuscrits soumis constitue une belle marque de reconnaissance du talent et de la rigueur de Mme Fortin. On dit que c'est la langue inventive et la singulière fraîcheur de ce roman qui a conquis le jury présidé par Victor-Lévy Beaulieu, l'un de nos grands romanciers québécois. Le roman de Mme Fortin, qui relate la vie d'un couple, se veut fantaisiste et joyeux. «C'est du bien beau monde. J'avais envie de rencontres de beau monde. La bonté humaine, ça fait du bien», disait-elle en entrevue. Bien, M. le Président, c'est vrai que les gens apprécient qu'on leur raconte des histoires où le bonheur triomphe. On n'a qu'à penser au succès colossal remporté à travers le monde cette année par une histoire simple et attachante comme Le fabuleux destin d'Amélie Poulain.
Arlette Fortin en est à son premier roman, mais elle n'en est pas à ses premières armes dans le domaine littéraire. En plus d'écrire des nouvelles et des pièces de théâtre, elle a notamment exercé la profession de journaliste puis animé un café littéraire et des soirées de poésie. Je souhaite que ce prix de la relève, qui compte parmi ses récipiendaires notamment la romancière Chrystine Brouillet, permette à Mme Fortin non seulement d'entrer dans le paysage littéraire québécois, selon ses paroles, mais d'y faire sa niche pour les prochaines années. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Est-ce que cette motion présentée par Mme la députée de Jonquière est adoptée?
Des voix: Adopté.
Avis touchant les travaux des commissions
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: Alors, M. le Président, je voudrais aviser cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 27, Loi sur le Protecteur des usagers en matière de santé et de services sociaux et modifiant diverses dispositions législatives, le mardi 6 novembre 2001, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Papineau;
Que la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 35, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique, le mardi 6 novembre 2001, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ces avis sont déposés. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira le mardi 6 novembre 2001, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale contenus dans les listes des mois d'avril 1999 à mars 2001 pour le volet solidarité sociale.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Je vous avise qu'à la suite de la période de questions d'hier nous avons reçu deux demandes pour la tenue d'un débat de fin de séance: le premier, sur une question adressée par M. le député de Limoilou à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant l'absence de ressources pour les élections municipales du 4 novembre prochain; le second, sur une question adressée par M. le député d'Argenteuil à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant les consultations sur les orientations découlant de l'adoption de la loi n° 184 sur le droit de produire; et troisième débat de fin de séance, suite à la question de Mme la députée de Sauvé aujourd'hui qu'elle a posée à la ministre de la Culture et des Communications concernant le budget de Télé-Québec. Alors, ces trois débats de fin de séance auront lieu après les affaires courantes, à 18 heures... après les affaires du jour, à 18 heures.
n(15 h 40)n Je vous rappelle que l'interpellation prévue pour demain, vendredi le 2 novembre 2001, portera sur le sujet suivant: L'état des finances publiques. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys s'adressera alors à Mme la ministre d'État à l'Économie et aux Finances.
Je vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 9 novembre 2001 portera sur le sujet suivant: L'état du système et du réseau des services préhospitaliers d'urgence. M. le député de Nelligan s'adressera alors à M. le ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Ceci met fin aux affaires courantes.
Nous allons passer maintenant aux affaires du jour.
M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais de suspendre nos travaux jusqu'à 16 heures.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, à votre demande et de consentement, je suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 16 heures.
(Suspension de la séance à 15 h 41)
(Reprise à 16 h 2)
Le Président: À l'ordre! Alors, chers collègues, veuillez vous asseoir, nous allons reprendre la séance.
Affaires du jour
Alors, nous allons aborder maintenant les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.
M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais de reconnaître la ministre d'État à l'Économie et aux Finances et vice-première ministre.
Des voix: Bravo!
Affaires prioritaires
Discours sur le budget
Le Président: Alors, je vais céder la parole à Mme la ministre d'État à l'Économie et aux Finances et vice-première ministre. Mme la ministre.
Mme Pauline Marois
Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. Le 11 septembre 2001, le monde a connu un moment particulièrement douloureux de son histoire. Des attentats d'une ampleur inédite jusque-là ont brisé la vie de milliers de nos voisins américains, semant ainsi l'angoisse, la douleur et la mort. Les événements de New York nous touchent directement, ils resteront à jamais inscrits dans nos mémoires. L'an dernier, pourtant, nous avions fêté l'arrivée d'un nouveau siècle avec espoir et confiance, en étroite communication avec l'ensemble de la planète.
Cependant, nous ne devons pas nous laisser gagner par les craintes et les peurs. Nous devons réagir sans nous replier sur nous-mêmes. Nous devons réaffirmer qui nous sommes, défendre avec détermination nos valeurs de tolérance, de liberté pour tous, tout en étant conscients et modestes quant à notre capacité d'influer sur ces événements dont l'ampleur nous dépasse. Mais nous appartenons aussi, à notre échelle, à ce nouveau monde planétaire qui se bâtit. Soyons confiants, l'être humain porte en lui la force de relever chaque fois les grands défis de l'histoire.
Nos valeurs comme Québécoises et comme Québécois s'incarnent dans cette solidarité et cette lucidité qui se sont manifestées après les attentats du 11 septembre. Notre solidarité doit d'abord s'adresser à nos amis américains, dont nous partageons pleinement la douleur. Cette solidarité et cette lucidité passent également par la lutte contre le terrorisme, à laquelle nous participons pour défendre nos valeurs de démocratie et de liberté. Cette solidarité doit aussi prévaloir contre l'exclusion des peuples moins favorisés qui constitue souvent le terreau où naît le terrorisme. Cette solidarité, sur laquelle s'est bâtie la nation québécoise, se fonde sur la cohésion et le respect mutuel de chacun de ses membres, qu'ils soient d'ici ou d'ailleurs.
L'économie mondiale dans son ensemble subit les conséquences directes de ce qui s'est produit le 11 septembre à Manhattan et elle devra s'adapter résolument aux nouvelles réalités géopolitiques et militaires nées des attentats. La société québécoise fait également face à ce nouveau défi. Tout d'abord, il est évident que le Québec doit être plus conscient des dangers, renforcer ses mesures de sécurité, et nous sommes en train de le faire. Il est également évident que nous devons agir résolument. En protégeant nos acquis, nous nous assurons d'être plus forts quand viendra le temps de la relance. Il n'est de moment plus opportun que maintenant, parce que c'est maintenant qu'il faut agir.
Ce discours sur le budget, prononcé avec cinq mois d'avance, est l'illustration directe de cette résolution dans l'action. Il était de ma responsabilité et de celle du gouvernement du Québec de prendre les initiatives requises afin que le Québec traverse avec un minimum de turbulence les difficultés actuelles. Nous le faisons aujourd'hui, aujourd'hui même, dans le cadre du budget 2002-2003.
Je veux m'appuyer sur les forces vives de la société québécoise. Au cours des dernières semaines, j'ai donc rencontré les spécialistes et les principaux leaders économiques et sociaux. Nous avons d'abord partagé nos diagnostics de l'évolution actuelle et future de la conjoncture économique du Québec. Nous avons également discuté d'un certain nombre d'actions à entreprendre dans le but d'assurer la sécurité économique et sociale des Québécoises et des Québécois. Nous avons tous convenu de l'urgence d'agir, et nous agissons maintenant. Cette action ne doit cependant pas être isolée. La nécessité de se concerter est essentielle, et cette concertation, elle doit comprendre, à mon point de vue, le gouvernement fédéral. Je l'ai déjà indiqué au ministre canadien des Finances: Avec les moyens substantiels qui sont les siens, le gouvernement fédéral peut et doit intervenir de façon majeure, lui aussi.
Je présente donc aujourd'hui à l'Assemblée nationale un budget qui permet tout à la fois de définir dès maintenant la politique budgétaire 2002-2003, en vue de répondre à la conjoncture présente et de mettre en oeuvre immédiatement un plan d'action dans le but de faire face à cette même conjoncture.
Le plan d'action que je propose aujourd'hui, M. le Président, s'articule autour de cinq grands objectifs. D'abord, il renforce les moyens dont dispose le Québec pour assurer la sécurité des personnes. Il vise à soutenir la confiance des consommateurs en mettant l'accent sur les personnes à faibles revenus qui risquent d'être les premières à souffrir de la conjoncture actuelle. Il a pour objectif de préserver l'emploi et l'activité économique, qui sont à la base même de notre société. Il permet à notre gouvernement de poursuivre le travail accompli pour renforcer et diversifier l'économie québécoise. Et, enfin, il maintient les politiques d'assainissement des finances publiques appliquées avec constance par notre gouvernement.
Ce plan d'action comprend des gestes majeurs qui visent à soutenir l'emploi et la croissance et à aider ceux et celles qui en ont le plus besoin, sans remettre en question pour autant la politique de déficit zéro instaurée par notre gouvernement.
n(16 h 10)nDes voix: Bravo!
Mme Marois: Avec ce plan d'action, le gouvernement agit maintenant, et par ce geste, il réaffirme la volonté de maintenir tout à la fois les emplois et une base économique solide pour l'avenir.
Depuis le début de l'année, M. le Président, et cela, avant même les attentats du 11 septembre, la conjoncture économique internationale connaissait un ralentissement perceptible, et cela, après une période de très forte croissance. Les attentats ont accentué ce ralentissement, et l'ampleur de ce ralentissement n'est pas facile à anticiper, mais elle est suffisante pour justifier une action économique prompte et appropriée des gouvernements. Il est d'ailleurs remarquable de constater que le moins interventionniste d'entre eux, le gouvernement américain, vient de s'engager dans une série d'initiatives d'importance visant à soutenir l'emploi et l'activité économique. En ce qui concerne le Québec, notre État peut agir sur des leviers économiques qui ont déjà démontré leur efficacité mais qui demandent un certain délai avant d'avoir leur plein effet. Nous devons donc mettre en place une réponse adaptée, rapide, et cela, même si la conjoncture reste incertaine.
La conjoncture dans laquelle nous nous trouvons découle essentiellement des difficultés que traverse l'économie américaine. En mars dernier, au moment de la présentation du budget 2001-2002, les experts anticipaient déjà un ralentissement marqué de l'activité économique aux États-Unis. Ce ralentissement de l'économie américaine se reflétait dans la prévision économique pour le Québec que je présentais dans le discours du budget 2001-2002.
Nous ne pouvions en effet éviter d'être atteints, car le Québec, qui exporte hors du Canada l'équivalent de 40 % de son PIB, expédie vers le marché américain 86 % de ces exportations ? qui représentent donc à elles seules 35 % de notre PIB. En fait, nos liens avec l'économie américaine n'ont jamais été aussi étroits, les États-Unis étant devenus depuis 1993 le premier partenaire économique du Québec, à la place de l'ensemble des provinces canadiennes.
À la veille des attentats terroristes du 11 septembre, ce ralentissement économique des États-Unis s'était déjà accentué, provoquant une diminution de nos exportations. Cependant, la performance de l'économie québécoise était alors loin d'être inquiétante. En fait, notre économie demeurait fondamentalement solide, en raison particulièrement du taux élevé de confiance des ménages. C'est ainsi que l'indice de confiance des consommateurs gardait à peu près le même niveau qu'en 1999 et 2000. Cette confiance se manifestait notamment par une bonne progression des ventes au détail et des mises en chantier, ce qui contrebalançait le repli des exportations vers les États-Unis.
Le Québec continuait par ailleurs à créer beaucoup d'emplois, comme l'ont confirmé les statistiques publiées au début du mois d'octobre. Au cours des neuf premiers mois de 2001, ce sont en effet 45 000 emplois qui avaient été créés par l'économie québécoise, alors que seulement 27 000 emplois avaient été créés au net dans l'ensemble du Canada au cours de la même période.
Pour ce qui est du cadre financier de l'État, nous recevions des signaux que j'ai alors qualifiés de mitigés. Nos rentrées fiscales atteignaient le niveau prévu initialement. Par contre, nous subissions des pressions sur les dépenses de programmes, tandis que le service de la dette était moins coûteux, en raison bien sûr de la diminution des taux d'intérêt. Le cadre budgétaire demeurait donc globalement équilibré. Dans ces circonstances, il n'était aucunement question d'un budget. Pas plus la performance de l'économie québécoise que celle de nos finances ne l'auraient justifié.
Les événements du 11 septembre ont profondément modifié les choses. Chez nos voisins et amis américains, certains secteurs ont été immédiatement affectés par les attentats terroristes, ce qui a entraîné d'importantes mises à pied. L'aéronautique, le secteur financier et le tourisme ont ainsi été touchés par l'impact des événements.
Toujours aux États-Unis, la confiance des ménages et des entreprises a été ébranlée, tandis que les marchés boursiers, déjà affectés par la correction importante de la dernière année, connaissaient des baisses supplémentaires. Les autorités américaines ont rapidement réagi en mobilisant des moyens majeurs: à ce jour, le président Bush a ainsi débloqué plus de 130 milliards de dollars américains afin de venir en aide aux victimes, de soutenir le secteur des transports, d'entamer les travaux de reconstruction et de relancer l'économie, ce qui correspond bien aux capacités de la première puissance économique mondiale.
Les experts prévoient maintenant une croissance de 1 % pour l'économie américaine en 2001, soit un point de pourcentage de moins qu'au moment de notre budget de mars dernier. Selon ces mêmes analystes, la croissance de l'économie américaine s'établirait à 1,2 % en 2002, ce qui représente 2,3 points de pourcentage de moins que lors du dernier budget.
L'économie québécoise est, bien entendu, directement affectée par l'aggravation du ralentissement observé aux États-Unis. Notre économie est d'autant plus concernée que certains des secteurs sensibles sont également des domaines d'activité où le Québec est très présent. Il en est ainsi de l'aérospatiale, où le Québec occupe le sixième rang au monde et où Montréal est devenue la deuxième métropole internationale, après Seattle et avant Toulouse. Notre secteur du tourisme est également directement touché.
Il est évident qu'à moyen terme, cependant, notre économie pourra profiter des injections massives de fonds décidées par le gouvernement américain. Le Québec est l'un des premiers fournisseurs de l'État de New York, et les entreprises québécoises vont ressentir l'impact des énormes dépenses de reconstruction déjà enclenchées.
Dans l'immédiat, cependant, nous devons tout faire pour maintenir le niveau d'activité des entreprises, permettre aux PME créatrices d'emplois d'avoir les liquidités nécessaires en ces temps difficiles et stimuler les investissements. C'est ainsi qu'il nous sera possible de préserver les emplois créés au cours des dernières années.
Pour maintenir et consolider l'activité économique, nous disposons de plusieurs atouts majeurs. La santé financière du Québec s'est grandement améliorée depuis 1994. En mars 1999, et pour la première fois depuis 40 ans, le ministre des Finances du Québec, devenu depuis notre premier ministre, déposait un budget équilibré, mettant ainsi un terme à la spirale de l'endettement.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: La fin des déficits et l'équilibre des finances publiques constituent un acquis que nous allons tout faire pour conserver. J'annonce donc qu'à l'instar du budget 2001-2002 le budget 2002-2003 sera un budget équilibré.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Cet assainissement des finances publiques, obtenu grâce à l'effort collectif des Québécoises et des Québécois et à notre bonne gestion des finances publiques, m'a permis de procéder en mars dernier à une réduction de la dette de 502 millions de dollars et à la création d'une réserve de 950 millions de dollars, ce qu'aucun gouvernement n'avait pu réaliser.
n(16 h 20)n J'ai également pu annoncer, toujours en mars, une réduction substantielle de l'impôt des particuliers. Nous admettrons, M. le Président, qu'elle tombe à point dans la conjoncture actuelle. En deux ans, nous avons en effet réduit de 20 % la charge fiscale des particuliers, ce qui représente une diminution totale des impôts de 11 milliards de dollars pour la période 2000-2004 et une augmentation correspondante du revenu disponible des contribuables. Cela nous change des hausses régulières et même parfois rétroactives d'impôt auxquelles nous avaient hélas accoutumés le gouvernement précédent.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: En fait, l'économie québécoise est plus forte et plus diversifiée qu'elle ne l'a jamais été. Le niveau de vie des Québécoises et des Québécois s'est significativement amélioré, augmentant plus rapidement que dans l'ensemble du Canada au cours des cinq dernières années. Le taux de chômage a atteint des planchers historiques, que nous n'avions pas connus depuis les grands chantiers de 1976, tandis que nos entreprises ont réussi, et cela de façon magistrale, le virage vers l'économie du savoir. Les activités de savoir élevé représentent maintenant près du quart de la création de richesse des entreprises. Dans le seul domaine des technologies de l'information, 4 000 entreprises sont implantées au Québec, assurant plus de 100 000 emplois.
Nous avons donc d'excellents atouts pour traverser les difficultés actuelles et préserver l'emploi des travailleuses et des travailleurs du Québec. Il est essentiel de soutenir la confiance des citoyens et de l'ensemble des décideurs économiques. Et, pour relever ce défi, l'État national des Québécois agit maintenant et dans la bonne direction.
M. le Président, la présentation d'un plan d'action sur l'économie tout en maintenant le déficit à zéro va requérir un certain nombre de gestes difficiles. En effet, le budget du 29 mars dernier tablait sur une croissance de l'économie québécoise de 2,7 % en 2001 et de 2,6 % en 2002, et cela après avoir connu une progression remarquable de 4,7 % durant l'année 2000. Nous anticipions donc, à l'instar des autres prévisionnistes, un certain ralentissement pour 2001-2002. Mais, comme je l'ai expliqué précédemment, divers éléments ont depuis quelque temps aggravé le ralentissement et retardé la reprise.
Le plan d'action que je propose aujourd'hui à l'Assemblée nationale du Québec viendra en partie faire contrepoids à cette conjoncture négative. Nous prévoyons en effet que ce plan d'action permettra d'accroître de 0,7 % le PIB du Québec l'an prochain et viendra ainsi créer ou maintenir quelque 16 000 emplois. En fait, je prévois maintenant que l'économie québécoise connaîtra une croissance réelle de 1,1 % cette année et de 1,7 % en 2002.
Cette nouvelle prévision de croissance économique constitue une révision à la baisse des prévisions que j'avais présentées le 29 mars dernier. Cela ne sera pas sans affecter le niveau des rentrées fiscales. En septembre dernier, le ministère des Finances a publié la synthèse des opérations financières au 30 juin qui ne comportait aucune modification majeure de nos prévisions de revenus. Mais la conjoncture nouvelle nous oblige aujourd'hui à réviser nos prévisions de revenus à la baisse de façon importante: 1,8 milliard de dollars pour 2001-2002 et 2002-2003.
Une partie de cette révision provient de la chute des titres boursiers qui est venue affecter le portefeuille de placement d'un certain nombre de sociétés d'État. À titre d'exemple, la Commission de la santé et de la sécurité au travail a vu sa situation se détériorer de 351 millions de dollars.
Heureusement, par contre, pour le Québec, les banques centrales ont réduit significativement les taux d'intérêt depuis le début de l'année. Pour les deux années évoquées précédemment, il devrait en résulter une réduction de nos coûts, pour le service de la dette, de 944 millions de dollars. Dans ces conditions, le Québec aurait facilement pu se retrouver en déficit. J'ai donc voulu utiliser tous les moyens à ma disposition pour respecter l'équilibre budgétaire.
Lors du dernier budget, j'avais annoncé la création d'une réserve de 950 millions de dollars, à partir des surplus réalisés en 2000-2001. Cette réserve, elle devait servir à financer des dépenses non récurrentes dans des secteurs prioritaires. Nous devons aujourd'hui répondre à un autre besoin prioritaire d'importance, et c'est-à-dire celui d'empêcher que le ralentissement de l'économie ne ramène le Québec en déficit.
À ce jour, nous avons mis de côté 280 millions de dollars pour de nouvelles dépenses, à même la réserve. Il reste donc 670 millions de dollars. J'annonce que nous allons nous en servir immédiatement pour équilibrer le budget. Je proposerai un amendement à cette fin au projet de loi sur la réserve. M. le Président, j'invite les membres de l'opposition à donner leur approbation à ce projet de loi, faisant preuve ainsi d'un sens des responsabilités compatible avec la situation actuelle.
Au départ, les 950 millions de dollars devaient servir à effectuer des investissements dans la santé, dans l'éducation, dans la recherche et dans la lutte contre la pauvreté. En réalité, le budget d'aujourd'hui déclenche des investissements nettement plus importants que ceux prévus initialement dans ces mêmes domaines, et cela, tout en respectant le déficit zéro.
Comme vous pouvez le constater, la prévoyance dont nous avons fait preuve au printemps dernier nous est très utile aujourd'hui.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: La préservation du déficit zéro va cependant nécessiter l'adoption de mesures un peu plus contraignantes. Lors de mes consultations prébudgétaires, il est apparu clairement que nous devions éviter toute augmentation du fardeau fiscal susceptible de nuire à la compétitivité du Québec. En conséquence, nous n'avons retenu dans ce budget que des mesures de revenus qui n'affectent pas notre compétitivité.
La taxe sur le tabac du Québec est aujourd'hui parmi les plus faibles au Canada. Il en est ainsi parce que notre société tient absolument à éviter une reprise de la contrebande sur le tabac. Je dois dire que je surveille attentivement l'évolution de la situation, à ce chapitre. Je me préoccupe de l'équilibre budgétaire mais je me préoccupe aussi de la santé publique. Le tabagisme est en effet la cause de maladies importantes, qu'il s'agisse du cancer du poumon ou de troubles coronariens. Parmi nos moyens de prévention, l'augmentation du prix des cigarettes s'avère être l'un des plus efficaces.
Nous avons procédé à une augmentation de 2 $ la cartouche il y a quelques mois, sans provoquer de hausse perceptible de la contrebande. Il m'apparaît donc approprié de procéder à une autre augmentation. C'est pourquoi j'annonce une augmentation de la taxe sur le tabac de 2,50 $ la cartouche, qui prendra effet à compter de minuit, ce soir. Cette augmentation, elle rapportera 125 millions de dollars, sur une pleine année.
Pour sa part, le ministre du Revenu mettra en place de nouvelles mesures visant à réduire l'évasion fiscale. Ces initiatives, notamment pour contrer la réclamation frauduleuse de remboursement de taxe sur intrants, permettront de récupérer 100 millions de dollars par année auprès de contribuables fautifs. Vous comprendrez et vous admettrez, et nous sommes d'accord, qu'il est important plus que jamais que tous paient leur dû à la société.
Il fallait agir rapidement pour empêcher la détérioration de l'économie, ce qui est évident. Le faire tout en préservant l'équilibre budgétaire, c'est beaucoup moins évident.
Voilà pourquoi je suis particulièrement fière de présenter aujourd'hui à l'Assemblée nationale un plan d'action qui a le mérite de s'autofinancer. Le coût brut de ce plan se limite en effet à 641 millions de dollars pour les années 2001-2002 et 2002-2003, et, s'il en est ainsi, c'est parce que le plan est composé principalement d'investissements dont les coûts vont s'étaler sur plusieurs années.
Notre plan d'action permet d'injecter plus de 3 milliards de dollars dans l'économie, et il s'ensuivra ainsi des retombées fiscales additionnelles de 306 millions de dollars, ce qui constitue une des premières sources d'autofinancement de ce plan. Une autre source d'autofinancement proviendra d'une réallocation des dépenses de 281 millions de dollars.
La société québécoise a réussi à sortir du cercle vicieux du déficit par une gestion serrée des dépenses. C'était et c'est toujours la seule façon de léguer un héritage valable à nos enfants et à nos petits-enfants. La situation actuelle nous invite à poursuivre nos efforts. Et, à cet égard, il ne faut pas se méprendre. La tâche de gérer les dépenses en ces temps difficiles où il faut stimuler l'économie à court terme tout en respectant les objectifs à long terme, ce n'est pas de tout repos. Étant donné que nous ne pouvons contrôler l'impact de la conjoncture sur nos revenus, la gestion serrée des dépenses est notre seule garantie du maintien du déficit zéro.
n(16 h 30)n Pour l'année 2001-2002 comme pour l'année 2002-2003, nous avons adopté une stratégie semblable. Elle consiste, cette stratégie, à nous en tenir à la cible de dépenses de programmes que nous avions envisagée en mars dernier, soit 41 929 000 000 $ et 43 223 000 000 $ respectivement. Certains analystes avaient craint de notre part une éventuelle réduction des dépenses. Je confirme que nous respecterons l'engagement pris lors du dernier budget en matière de dépenses. C'est un engagement qui représente une augmentation annuelle appréciable de 2,8 % en 2001-2002 et de 3,1 % en 2002-2003.
Pour compenser le coût additionnel de 281 millions de dollars du présent budget et respecter les cibles de dépenses convenues, le gouvernement devra donc effectuer une réallocation budgétaire de la même ampleur.
Le maintien des dépenses au niveau qui avait été ciblé en mars dernier représentera un défi très exigeant. Le président du Conseil du trésor est celui qui est chargé de cette mission essentielle pour préserver le déficit zéro. Il pourra compter sûrement sur l'appui du premier ministre, sur mon appui, mais aussi sur celui de mes collègues du Conseil des ministres pour la réaliser avec succès ? nous n'avons aucun doute, M. le Président ? et il fera rapport à l'Assemblée nationale à cet égard lors du dépôt des crédits en mars prochain.
La gestion responsable des dépenses de l'État est devenue la marque de commerce de notre gouvernement. Cette tâche, elle est rendue plus difficile en raison d'un déséquilibre fiscal majeur entre Ottawa et le Québec. La commission d'étude mise sur pied par le gouvernement pour étudier cette question, et que préside M. Yves Séguin, devrait bientôt nous éclairer sur les solutions à apporter à ce problème.
En attendant, nous sommes déterminés à préserver le déficit zéro autant en 2001-2002, en 2002-2003 qu'au cours des années suivantes. Les prévisions budgétaires que je dépose aujourd'hui témoignent de notre engagement à cet égard.
Alors, M. le Président, je dépose les tableaux suivants qui présentent les prévisions révisées des opérations financières du gouvernement pour 2001-2002 ainsi que les prévisions des équilibres financiers du gouvernement pour 2002-2003. Je dépose en même temps les Renseignements supplémentaires sur les mesures du budget et le Plan budgétaire du gouvernement ainsi que le document Le Plan d'action et la politique économique du gouvernement. (Voir annexes).
Je suis fière, M. le Président, d'annoncer maintenant la mise en oeuvre d'un plan d'action destiné à soutenir l'emploi et l'activité économique au Québec, et dont les effets devront se manifester à court terme. Ce plan d'action, il est basé sur une prémisse essentielle: il est important d'agir tout de suite avec les différents instruments dont le gouvernement du Québec dispose afin de préserver les emplois et de soutenir l'économie.
J'ai rencontré un grand nombre de décideurs économiques et sociaux. Je leur ai bien sûr demandé leur avis sur les moyens que le Québec devait utiliser afin de faire face à la situation actuelle. J'ai reçu de leur part un grand nombre de suggestions; elles étaient fort pertinentes. Tous s'entendaient cependant sur une chose: l'urgence d'agir pour soutenir l'économie. Et c'est ce que nous faisons en posant d'abord comme préalable la sécurité des personnes. Il est en effet essentiel que la sécurité collective des Québécoises et des Québécois soit assurée, et nous prenons les initiatives nécessaires à cette fin.
En fait, le plan d'action proprement dit s'inscrit de façon cohérente dans l'ensemble de la politique économique que notre gouvernement applique avec succès depuis 1994. Cette politique économique, elle a permis de moderniser, de consolider, et cela, de façon remarquable l'économie québécoise.
Document déposé
Je dépose donc le document intitulé Le Plan d'action et la politique économique du gouvernement, dans lequel les initiatives définies dans le cadre du budget sont explicitées et mises en perspective, afin bien sûr de les relier à la performance économique du Québec et à la politique économique gouvernementale.
Cependant, je pose ce prérequis, soit la sécurité personnelle et collective de nos concitoyens. En premier lieu, notre plan d'action comprend un volet qui va s'adresser aux consommateurs. En effet, nous nous adressons directement aux personnes en injectant 400 millions de dollars en faveur des consommateurs. En deuxième lieu, c'est le secteur public qui est mobilisé. J'annonce que nous allons devancer pour près de 3 milliards de dollars d'investissements à ce niveau. Et, en troisième lieu, le gouvernement s'adresse aux entreprises. Nos leviers d'action économique sont utilisés pour maintenir l'emploi. Nous aidons les petites et moyennes entreprises à traverser la conjoncture actuelle grâce à des liquidités supplémentaires et nous visons à amener l'ensemble du secteur privé à déclencher aussi des investissements additionnels.
Maintenant, un préalable, celui de la sécurité des personnes. En fait, les Québécoises et les Québécois sont en ce moment davantage préoccupés par leur sécurité personnelle et collective. C'est un besoin fondamental, et il requiert aujourd'hui une attention encore plus soutenue de la part de notre gouvernement. Ainsi, le 27 septembre dernier, le premier ministre du Québec annonçait la création d'un comité ministériel spécial, appelé Comité du 11 septembre 2001, afin de répondre aux besoins et aux inquiétudes de la population québécoise. Et ce Comité a déjà identifié des priorités, proposé des actions concrètes pour répondre à la situation de crise provoquée par les attentats terroristes de New York et de Washington. J'annonce donc que nous injecterons 8 millions de dollars en 2001-2002 et 35 millions de dollars en 2002-2003 dans des actions concrètes pour maintenir le milieu de vie sécuritaire souhaité par la population du Québec.
Un volet de notre action concerne la prévention du bioterrorisme. Pour répondre à un incident de nature biologique, le réseau de la santé du Québec dispose actuellement d'un plan des urgences infectieuses et de médecins sentinelles couvrant tout le Québec, et ces médecins sont disponibles 24 heures par jour, sept jours par semaine. Le présent budget permet d'accroître nos capacités de décontamination de personnes éventuellement infectées par une substance chimique ou biologique.
Le secteur bioalimentaire mérite aussi une attention particulière. Il faut donc consolider notre réseau d'alerte et d'information zoosanitaire. Et, pour ce faire, nous mettrons à niveau les équipements existants, nous ajouterons des équipements plus sophistiqués et nous mettrons sur pied un laboratoire répondant à des exigences très élevées en termes de niveau de confinement.
Des ressources additionnelles seront dégagées afin d'améliorer les activités de renseignement et d'enquête sur les groupes terroristes potentiels et pour accroître la capacité de réponse de nos services de police spécialisés. Je suis assurée que mon collègue le ministre de la Sécurité publique saura les utiliser à bon escient.
Nous procéderons en outre à un resserrement des critères d'émission des certificats de naissance, comme l'a annoncé mon collègue le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.
Le Québec désire également participer à un périmètre de sécurité nord-américain. La fluidité des échanges entre le Québec et les États-Unis est en effet essentielle pour notre développement économique. Le premier ministre du Québec défend l'idée d'un tel périmètre, tout comme celui de la Colombie-Britannique. Nous ne pouvons qu'espérer que le premier ministre canadien s'y montrera favorable lui aussi.
Le présent budget vient mettre en place plusieurs autres mesures d'amélioration de la sécurité de nos concitoyens. J'en mentionne quelques-unes seulement: le déploiement accéléré, sur tout le territoire québécois, des plans d'intervention en matière de sécurité civile; la mise en place d'équipes d'intervention spécialisées, notamment en matière de risques chimiques et bactériologiques; et, enfin, l'accroissement de la sécurité des édifices gouvernementaux au Québec et à l'étranger. Voilà pour la sécurité des personnes.
n(16 h 40)n Maintenant, abordons le plan d'action. Celui que nous annonçons aujourd'hui comprend tout d'abord l'injection de 400 millions de dollars en faveur des Québécois et des Québécoises pour soutenir l'activité économique en agissant sur la confiance des consommateurs. J'annonce donc un versement de 250 millions de dollars, dès décembre prochain, pour renforcer cette confiance. Le versement s'effectuera par le biais d'un montant supplémentaire de 100 $ par adulte à tous les bénéficiaires du crédit d'impôt pour la TVQ. Nous avons choisi ce moyen de soutenir la consommation parce qu'une partie de ces bénéficiaires n'avait pas pu profiter des baisses d'impôts annoncées le printemps dernier, ils n'en payaient pas pour un grand nombre d'entre eux. Il s'agit de plus d'un moyen qui pouvait être très rapidement mis en oeuvre. Le montant de 100 $ sera en effet versé dès le mois de décembre prochain avec le deuxième versement du crédit d'impôt pour la TVQ. Cette mesure, elle profitera à 2,5 millions de consommateurs. Elle profitera notamment aux jeunes et aux personnes âgées.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Par ailleurs, j'aurais aimé procéder à de nouvelles réductions d'impôts. Dans la conjoncture actuelle, il m'a cependant semblé plus prudent de ne pas procéder à de telles réductions dont les effets seraient par définition permanents alors même que la conjoncture est marquée par l'incertitude. J'y ai donc renoncé avec regret, en décidant cependant de ne pas remettre en cause la baisse de juillet dernier ni l'indexation annoncée lors du dernier discours du budget. Comme nous nous y étions engagés, le régime d'imposition sera donc pleinement indexé le 1er janvier prochain. Nous réviserons cependant à la hausse le taux d'indexation qui était prévu à 1,8 %. J'annonce que nous le porterons à 2,7 %. Cette révision aura un impact financier supplémentaire de 77 millions de dollars en faveur des contribuables.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: J'annonce également deux autres mesures concernant spécifiquement les personnes à faibles revenus. Dès le 1er janvier 2002, nous procéderons à l'indexation des prestations d'aide sociale pour les personnes ayant des contraintes sévères à l'emploi. Il s'agit d'une somme additionnelle de 29 millions de dollars en faveur de ces bénéficiaires. Toujours le 1er janvier 2002, nous indexerons les prestations d'aide sociale pour les personnes aptes au travail. Ces prestations seront ainsi majorées de 46 millions de dollars. Pour ces citoyens, il s'agit d'une deuxième augmentation en un peu plus de six mois.
Ces montants, ils sont significatifs et ils viennent confirmer la priorité donnée par notre gouvernement à la lutte contre la pauvreté. Dans le budget que j'ai présenté devant l'Assemblée nationale le 29 mars dernier, des initiatives importantes avaient déjà été mises en oeuvre à cette fin. Je vous assure, M. le Président, que nous les poursuivrons, et même dans une conjoncture difficile, aussi dans une conjoncture où le sort des personnes à faibles revenus prend une dimension particulièrement cruciale. Au total, donc nous injectons aujourd'hui un peu plus de 400 millions de dollars en faveur des consommateurs. Tous les citoyens en bénéficieront, mais principalement les personnes à faibles revenus.
Concrètement, en tenant compte de tous les effets de la pleine indexation, un couple ayant deux enfants, deux revenus totalisant 35 000 $ bénéficiera d'une hausse de son revenu disponible de 229 $. Dans le cas d'un couple de personnes âgées de 65 ans ou plus ayant un revenu total de 35 000 $, la hausse du revenu disponible sera de 342 $. Pour un couple ayant deux enfants, un revenu de 35 000 $, l'augmentation du revenu disponible sera de 369 $. Et, pour ce qui est d'un couple sans enfants bénéficiant de l'aide de dernier recours, la hausse du revenu disponible atteindra 460 $.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: En même temps que nous injectons 400 millions de dollars pour soutenir la consommation, nous accélérons les investissements consacrés au logement. Une part significative des investissements que j'annonce aujourd'hui va être consacrée au logement des particuliers, ce qui confirme les priorités de notre gouvernement aussi, encore là, en vue de lutter contre la pauvreté.
Au cours des récentes années, le gouvernement québécois a en effet soutenu avec constance le secteur de l'habitation, principalement le logement destiné aux ménages à revenus modestes. En dépit de ces efforts, nous savons que les besoins sont considérables. Dans certaines régions du Québec, nous sommes actuellement en pénurie de logements locatifs. De plus, plusieurs de nos concitoyennes et de nos concitoyens éprouvent toujours de la difficulté à se loger de façon adéquate.
J'annonce donc que notre gouvernement va soutenir la construction de 13 000 nouveaux logements et la rénovation de 27 000 autres, un investissement de près de 500 millions de dollars qui permettra d'améliorer les conditions de vie d'un bon nombre de ménages à revenus modestes.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Une bonne partie des nouvelles habitations proviendra d'un nouveau programme destiné à stimuler l'offre de logements à prix abordable pour atténuer la pénurie de logements. Étant donné la participation attendue du gouvernement fédéral et des municipalités, la contribution financière du Québec permet de réaliser des investissements d'une ampleur beaucoup plus grande.
À l'origine, la Société d'habitation du Québec avait pensé réaliser les 6 500 logements prévus sur les quatre prochaines années. Le présent budget devance les choses et ramène ce calendrier à deux ans. Et, à moins de difficultés imprévues, l'entente avec le gouvernement fédéral devrait se conclure sous peu. Dans un esprit de collaboration, je souhaite que ce dernier se joigne à l'effort de devancement du Québec, particulièrement pertinent, croyons-nous, dans la conjoncture actuelle.
L'autre moitié des nouvelles unités d'habitation proviendra du programme AccèsLogis. Ce programme permettait, depuis sa création, de construire quelque 1 300 logements par année dans des coopératives et dans des établissements à but non lucratif, et ce programme, il devait prendre fin au cours des prochains mois. J'annonce, au contraire, son maintien pour les cinq prochaines années, à hauteur de 50 millions de dollars par année.
Nous appuierons également la rénovation de plus de 27 000 logements grâce à deux programmes qui ont fait leurs preuves: le programme Revitalisation des vieux quartiers et le programme RénoVillage. Nous bonifions les budgets qui leur sont consacrés jusqu'à hauteur de 111 millions de dollars sur deux ans afin d'aider les locataires mais aussi les petits propriétaires à mieux se loger. Si on ajoute les nouveaux logements à ceux que nous rénoverons pour des ménages à revenus modestes, c'est un total de plus de 40 000 logements que nous mettrons à leur disposition.
Au cours des dernières semaines, lorsque j'ai rencontré les principaux leaders économiques et sociaux, il est apparu à tous que la meilleure façon d'intervenir massivement pour préserver les emplois serait de devancer des investissements publics. Nous savons en effet à quel point ? on ne le dira jamais assez ? l'atteinte d'un budget équilibré nous a demandé collectivement d'efforts et de concessions et à quel point cela a exigé une gestion serrée des dépenses gouvernementales. Comme je l'ai expliqué précédemment, je suis déterminée à préserver ces acquis, et cela, en dépit de la conjoncture actuelle plus contraignante.
n(16 h 50)n Or, nous savons aussi que les investissements publics ont le double avantage d'améliorer les services à la population et d'avoir relativement peu d'impact à court terme sur les dépenses gouvernementales. Ils constituent l'instrument le plus approprié à la fois pour injecter utilement des fonds dans l'économie et pour améliorer la qualité de vie de nos concitoyens.
Selon la planification triennale des immobilisations approuvée cette année, nous devions réaliser 7,1 milliards de dollars d'investissements publics au sein du gouvernement et de ses réseaux. En y incluant les investissements dans les logements à prix réduit, j'annonce aujourd'hui que nous ferons pour 2,5 milliards de dollars d'investissements de plus, soit une augmentation de 35 %.
La moitié de ces devancements se réalisera au cours de l'année qui vient et une autre moitié subséquemment. En outre, les sociétés d'État se sont, elles aussi, engagées à devancer des investissements pour 500 millions de dollars, ce qui, au total, fait 3 milliards de dollars d'investissements devancés au cours des prochaines années. Il faut donc... Et il s'agit à la fois d'agir rapidement sur la conjoncture, de mieux répondre aux besoins de la population comme de l'économie du Québec. Avec nos investissements dans la santé, dans l'éducation, dans la culture, dans les services de garde et dans l'habitation, nous répondons mieux aux besoins des citoyens. Avec les investissements des sociétés d'État et avec ceux effectués dans la recherche, dans l'environnement, dans le réseau routier et dans les infrastructures municipales, nous améliorons en plus la compétitivité de l'économie québécoise. Ces 3 milliards d'investissements auront un effet de levier. Ils auront un effet de levier dans la mesure où le gouvernement fédéral, les municipalités et, dans certains cas, des investisseurs privés se joindront à nous. C'est là une injection plus que nécessaire dans la conjoncture actuelle de l'économie.
Une grande partie des investissements annoncés aujourd'hui s'effectuera dans le réseau de la santé et des services sociaux. Nous avions déjà autorisé cette année de nouveaux investissements pour 360 millions de dollars dans ce réseau. J'annonce aujourd'hui que nous allons en débloquer pour 500 millions de dollars de plus.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Nous pourrons ainsi, M. le Président, mieux loger nos aînés en perte d'autonomie grâce à la construction et à la rénovation de centres d'hébergement et de soins de longue durée. Nous pourrons également procéder au réaménagement de plusieurs urgences d'hôpitaux. Ces investissements vont profiter aussi bien à des régions comme celles de l'Abitibi-Témiscamingue, de Lanaudière qu'à celles de Montréal et de Québec. De plus, nous allons doter nos installations d'équipements qui font trop souvent défaut à l'heure actuelle, par exemple de nouveaux lits électriques, des lève-personnes, des bains thérapeutiques, qui vont permettre d'améliorer la qualité de vie des personnes hébergées mais aussi les conditions de travail des membres du personnel.
Ces nouveaux investissements en santé permettront également de parachever l'informatisation des centres jeunesse et de moderniser les systèmes de traitement et de circulation de l'information entre les laboratoires, les établissements de première ligne, les hôpitaux et les cliniques de radiologie. Ainsi, il sera possible de recourir davantage à la télémédecine, d'améliorer les diagnostics privés, de permettre une meilleure circulation de l'information entre les équipes soignantes. Bref, cela voudra dire améliorer l'efficacité et la qualité de notre système de santé et de services sociaux.
Le défi de toute société est d'amener les jeunes à devenir des citoyens autonomes, responsables, engagés. Pour nous donner les moyens de réaliser cette ambition, j'annonce aujourd'hui le devancement de projets dans le domaine de l'éducation pour une valeur de 400 millions de dollars.
À court terme, nous réaliserons des projets d'amélioration de la qualité des lieux d'enseignement aux niveaux primaire, secondaire, collégial et universitaire. Nous procéderons à la construction de nouvelles écoles, de nouveaux pavillons universitaires. Nous aménagerons de nouvelles installations pour l'enseignement professionnel et technique. J'annonce d'ores et déjà que nous procéderons à des réfections importantes à l'Institut de technologie agricole de Saint-Hyacinthe et à l'Institut de technologie agricole de La Pocatière.
Au cours des dernières décennies, la société québécoise a développé un système de recherche et d'innovation de plus en plus performant qui soutient aisément la comparaison avec ce qui se fait ailleurs. Le chemin parcouru est le résultat d'une collaboration intime entre tous les acteurs de ce système et d'un appui déterminé du gouvernement national des Québécoises et des Québécois. Dans cet esprit, j'annonçais, lors du dernier budget, l'octroi de 250 millions de dollars pour mettre en oeuvre divers projets d'investissement dans le domaine de la recherche et de l'innovation.
J'annonce aujourd'hui l'ajout d'un montant de 100 millions de dollars pour de nouveaux projets dans le domaine de la recherche, de la science et de la technologie, portant ainsi à 350 millions de dollars les sommes allouées à des projets d'investissement tels que l'agrandissement de l'Institut de recherches cliniques de Montréal, la construction d'un centre de recherche en optique-photonique à l'Université Laval et la création d'un centre de recherche sur les biotechnologies marines à Rimouski. Mon collègue le ministre délégué à la Recherche, à la Science et à la Technologie verra, j'en suis certaine, à la réalisation rapide de l'ensemble de ces investissements structurants pour la recherche et l'innovation.
En 1997, notre gouvernement mettait de l'avant une politique familiale faisant une large place à des services de garde éducatifs à contribution réduite. Cette mesure novatrice, elle vise à faciliter la conciliation de la vie familiale et du travail des parents et à favoriser l'égalité des chances des enfants.
Depuis lors, nous avons mis en branle un immense chantier qui a permis de créer 60 000 nouvelles places, 12 000 emplois. Dans la foulée du processus d'accélération du développement des places en services de garde déjà enclenché, j'annonce aujourd'hui que le gouvernement du Québec allouera un budget d'investissement additionnel de 50 millions de dollars pour la construction de centres de la petite enfance.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Ma collègue la ministre de la Famille et de l'Enfance annoncera bientôt comment elle entend continuer de développer les centres de la petite enfance.
Les routes principales et secondaires au Québec représentent un actif économique primordial. Un État ? un État ? ne peut se développer adéquatement s'il ne peut compter sur un réseau routier en bon état, un élément important du développement de l'emploi en région. C'est donc l'ensemble des Québécoises et des Québécois qui gagnent à avoir un meilleur réseau de transport.
Nous avions prévu réaliser 1 milliard de dollars de travaux routiers en 2002-2003, notamment pour amorcer la mise en oeuvre du plan de gestion des déplacements de Montréal, du plan de transport de la capitale nationale et du programme d'intervention dans les régions annoncé dans le dernier budget. Déjà, ce montant, 1 milliard de dollars, était nettement supérieur au rythme observé au cours des dernières années. J'annonce néanmoins que nous devancerons pour 400 millions de dollars de travaux en 2002-2003, pour un montant total de 1,4 milliard de dollars.
Des voix: Bravo!
n(17 heures)nMme Marois: Les investissements additionnels annoncés aujourd'hui représentent la première phase du plan d'intervention de 3 milliards de dollars sur 10 ans qu'entend réaliser mon collègue le ministre des Transports et qui s'ajoutent aux investissements normaux déjà prévus. Celui-ci annoncera d'ailleurs sous peu le détail des travaux en question.
J'aimerais signaler que nous avons mis en place, pour faciliter l'accélération d'un tel plan, une procédure d'appel d'offres et d'octroi de contrats accélérée. Nous serons donc en mesure de déclencher très tôt ce printemps des investissements dans toutes les régions du Québec.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: En collaboration avec les municipalités et le gouvernement fédéral, le Québec s'est engagé dans un effort considérable en vue de rénover les infrastructures municipales. L'intervention porte à la fois sur le traitement et la distribution de l'eau potable à nos concitoyens, sur l'assainissement des eaux et sur l'amélioration de la voirie municipale. Elle comporte aussi des projets à incidences économiques, urbaines ou régionales. Nous savons tous que ces interventions sont nécessaires pour améliorer la qualité de vie de nos concitoyens.
À ce jour, en incluant la contribution de nos partenaires, nous nous étions engagés dans des travaux de plus de 1,9 milliard de dollars, mais nous devons faire davantage. J'annonce donc aujourd'hui la création d'un nouveau programme conjoint Québec-municipalités en réfection des infrastructures, qui sera doté d'une enveloppe de 350 millions de dollars. Nous attendons évidemment des municipalités qu'elles contribuent pour une somme équivalente. Je crois, de plus, qu'il serait approprié que le gouvernement fédéral participe au tiers des dépenses, tout comme il l'a fait dans le programme d'infrastructures Canada-Québec. Il bénéficie après tout des retombées économiques de ces projets dans une proportion aussi élevée que le Québec. Je fais donc appel à sa collaboration.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Avec ce nouveau programme d'infrastructures municipales, nous pourrons surtout apporter une contribution significative à la protection de l'environnement et au développement durable du Québec. La plus grande partie des fonds servira en effet à financer la rénovation et la mise aux normes des systèmes d'alimentation en eau potable ainsi que l'amélioration des systèmes de traitement des eaux usées.
Un projet intéressant se réalisera dans la région de la Capitale-Nationale, dont nous connaissons bien l'importance. C'est ainsi que nous procéderons à la première phase des travaux d'assainissement de la rivière Saint-Charles, une initiative dont mon collègue le ministre délégué responsable de la Capitale-Nationale sera sûrement très heureux.
De plus ? de plus ? des fonds de 30 millions de dollars seront débloqués au bénéfice des collectivités rurales et des petites municipalités pour les aider à traiter les eaux usées des entreprises.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Nous investirons également dans l'expérimentation de nouveaux traitements des sols contaminés par des métaux lourds, dans le traitement des lisiers ainsi que dans le traitement et la réutilisation des eaux des piscicultures.
De plus, un montant de 1,9 million de dollars ? près de 2 millions de dollars ? servira à la réalisation d'un banc d'essai de trois éoliennes en Gaspésie pour adaptation aux conditions climatiques du Québec et au contexte nord-américain. Cela permettra la mise en valeur de l'expertise québécoise avec un fort contenu gaspésien.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Le gouvernement entend par ailleurs créer un programme national visant à développer un réseau d'aires protégées. Pour ce faire, nous nous associerons à parts égales avec des organismes et des entreprises de conservation de la nature dans un effort de conservation sans précédent. Mon collègue le ministre de l'Environnement s'assurera du suivi de ces initiatives en environnement, en concertation avec les autres ministres concernés.
Le Québec s'est résolument inscrit dans la modernité et doit continuer d'être un acteur de premier plan dans la nouvelle économie qui repose pour une bonne part sur la créativité et l'innovation culturelle. Déjà, les grandes orientations et les choix stratégiques du gouvernement ont imprimé le mouvement. La culture, si on lui en donne les moyens, peut être un formidable atout sur lequel le Québec doit continuer de miser. Nous devons faire des investissements significatifs dans des lieux de mémoire, mais aussi dans ceux où s'exercent la créativité et l'innovation culturelle, porteuses de l'identité nationale et de la qualité de la vie dans les diverses communautés partout au Québec. J'annonce aujourd'hui un investissement de 100 millions de dollars à cette fin. Quelques grands ensembles de projets pourront être ainsi réalisés. Le gouvernement...
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Le gouvernement du Québec contribuera à construire ou à rénover des lieux culturels, qu'il s'agisse de bibliothèques, de musées, de salles des spectacles, de centres de formation, de production ou de diffusion, et contribuera aussi à moderniser le parc des équipements spécialisés soutenant les activités de formation, de programmation, de diffusion et de conservation.
Le patrimoine bâti du Québec, et singulièrement celui qui s'illustre à travers les lieux de culte et les couvents religieux, est une composante importante de l'identité culturelle, un élément fondamental de l'attrait touristique et un facteur très significatif de la qualité de vie des populations. Le plan d'accélération des investissements publics permettra d'effectuer un rattrapage pour un ensemble de travaux de restauration afin d'assurer la sauvegarde, la protection et la mise en valeur de ce patrimoine national.
Le gouvernement du Québec entend poursuivre l'importante politique de la lecture et du livre dont l'un des axes majeurs est le développement des habitudes de lecture de la population, et cela, dès la petite enfance. Pour ce faire, l'enrichissement des collections de livres, de documents multimédias ainsi que d'autres ouvrages de savoir est indispensable. Le plan d'accélération prévoit un investissement additionnel à ce titre.
Le monde rural et ses communautés locales constituent une partie essentielle de l'identité du peuple québécois. Ces communautés, elles ont un rôle prépondérant dans l'occupation dynamique du territoire. C'est pourquoi, dans ce budget, j'ai voulu qu'une partie importante de l'investissement se fasse dans les régions rurales du Québec. Lors du budget 2001-2002, j'ai déposé une stratégie de développement économique des régions-ressources permettant l'émergence de nouveaux secteurs d'activité dans les grands espaces miniers, forestiers, agricoles et maritimes qui caractérisent notre territoire national.
Dans l'esprit qui a inspiré ces mesures et afin de faire de nos collectivités rurales des municipalités d'avenir, j'annonce tout d'abord le démarrage d'un nouveau programme intitulé Villages branchés du Québec, doté d'une enveloppe budgétaire de 75 millions de dollars. L'objectif de ce programme, c'est de relier les écoles du Québec par un réseau de télécommunications à la fine pointe de la technologie. Ces infrastructures serviront également à d'autres organismes agissant à titre de partenaires, tels que les municipalités, permettant d'établir les bases solides d'une véritable autoroute nationale de l'information. Avec le présent budget, nous offrons aux régions rurales un moyen de plus pour prendre en main leur avenir, et cela, de manière autonome.
Afin d'augmenter le pouvoir d'attraction des collectivités rurales, de contribuer ainsi à la revitalisation de ce milieu, j'annonce en outre le lancement d'un programme d'embellissement des villages, doté d'une enveloppe de 9 millions de dollars par an au cours des deux années qui viennent. Nous demanderons aux municipalités intéressées par ce programme de contribuer à parts égales à l'effort réalisé par notre gouvernement, ce qui permettra de réaliser pour 36 millions de dollars de travaux.
Ces montants s'ajouteront à ceux injectés dans le programme RénoVillage évoqué précédemment, qui permet d'accorder une aide financière aux propriétaires à faibles revenus pour corriger des défectuosités majeures à leur logement. Nous ajouterons 16 millions de dollars dans ce programme au cours des deux prochaines années. La participation du gouvernement fédéral et des propriétaires permettra des travaux de 45 millions de dollars.
n(17 h 10)n Plusieurs acteurs du monde rural attendent la politique de la ruralité depuis longtemps. Je leur confirme que mon collègue le ministre d'État aux Régions et ministre de l'Industrie et du Commerce la déposera d'ici peu.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Dix millions de dollars seront consacrés à cette politique, que le ministre puisera à même les enveloppes budgétaires dont il est responsable, et j'ajouterai que les mesures annoncées aujourd'hui et les mesures favorisant les régions-ressources s'inscrivent dans le sens de cette politique.
Maintenant, pour soutenir davantage l'investissement au Québec, notre gouvernement national dispose d'un levier stratégique, à savoir ses sociétés d'État à vocation commerciale. Non seulement ces entreprises apportent-elles une contribution très positive à l'économie et à la société québécoise, mais elles réalisent aussi de manière continue des investissements dans l'économie québécoise. Les projets réalisés ou soutenus par ces entreprises constituent des projets rentables et économiquement viables. Le gouvernement leur a donc demandé de devancer un certain nombre de projets en ayant une préoccupation particulière pour les projets situés en région.
Le plan d'accélération des investissements de ces entreprises comprend aujourd'hui une enveloppe totalisant 500 millions de dollars. À titre d'exemple, la Société des établissements de plein air du Québec devancera des investissements dans les parcs, les réserves fauniques et les centres récréotouristiques du Québec, pour un montant total de 40 millions de dollars.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Le troisième volet du plan d'action gouvernemental vise à soutenir l'emploi et l'activité économique en fournissant aux PME des liquidités supplémentaires et en amenant le secteur privé à déclencher des investissements additionnels, notamment en réduisant le poids de sa fiscalité.
La croissance des investissements privés, cela constitue l'objectif prioritaire de la politique économique du gouvernement. Notre gouvernement est en effet convaincu que les entreprises, qu'elles soient en milieu rural ou urbain, constituent, en investissant, le principal moteur de création d'emplois et de richesse. Nous avons mis en place des moyens de soutien et d'appui fort efficaces, au cours des dernières années, afin d'atteindre cet objectif. Les résultats obtenus démontrent la justesse de nos choix. Il s'agit maintenant, dans la conjoncture délicate que nous devons traverser, d'utiliser ces différents moyens de soutien pour stimuler de façon additionnelle le déclenchement des investissements privés.
Le présent budget renforce et adapte les leviers utilisés pour stimuler les investissements privés, et cela, en intervenant prioritairement dans quatre directions. En premier lieu, le gouvernement apporte une aide immédiate aux petites et moyennes entreprises en leur fournissant des liquidités additionnelles et en facilitant leur financement. En deuxième lieu, le gouvernement stimule les investissements des entreprises en réduisant la taxe sur le capital et en bonifiant le financement des grands projets. En troisième lieu, le gouvernement accentue et amplifie l'effort effectué en faveur des régions-ressources en bonifiant l'aide aux investissements. Et, en quatrième lieu, le gouvernement met en place d'autres mesures de soutien aux investissements en faveur de l'industrie agroalimentaire.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: La conjoncture actuelle affecte directement les PME dont le financement est rendu encore plus délicat, et, pour cette raison, dans les jours qui ont suivi les attentats du 11 septembre, j'ai pris une première initiative en faveur des PME afin de les aider à surmonter une situation difficile pouvant conduire à des mises à pied. J'ai annoncé que les entreprises ayant moins de 15 millions de dollars de capital versé auraient six mois supplémentaires pour envoyer au gouvernement les acomptes provisionnels d'impôt et de taxe sur le capital qui devaient être remis le mois dernier. Il s'agissait d'une mesure provisoire fournissant aux PME des liquidités supplémentaires de 175 millions de dollars.
J'annonce aujourd'hui que deux autres mois pourront faire l'objet d'un tel report, soit novembre et décembre. Les entreprises concernées bénéficieront ainsi d'une aide au fonds de roulement représentant, au total, 525 millions de dollars.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Globalement, ce sont des milliers d'emplois qui pourront être conservés. Ces mesures visent à donner plus de marge de manoeuvre à ce moteur économique que constituent les PME québécoises et leurs employés.
J'annonce de plus qu'à partir du 1er janvier 2002 les employeurs dont les retenues mensuelles n'excèdent pas 1 000 $ ne seront plus obligés de verser chaque mois leurs remises au titre des déductions à la source. Ils pourront effectuer ces versements une fois par trimestre, ce qui les aidera sur le plan de la trésorerie tout en allégeant leurs tâches administratives. On évalue en effet à 800 000 le nombre de formulaires que les petits employeurs seront dorénavant dispensés de produire.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Je suis certaine que mon collègue le ministre du Revenu agira avec diligence pour mettre cette mesure en vigueur. D'ailleurs, les renseignements supplémentaires sur les mesures du budget, qui font partie intégrante du présent discours, donnent plus de détails sur cette mesure.
Les PME. Elles ont actuellement accès à une offre restreinte de financement sur le marché. Ce problème affecte particulièrement les jeunes entreprises, les entreprises installées en région et les entreprises appartenant à la nouvelle économie, ce qui rejaillit sur les emplois qu'elles peuvent offrir.
Pour aider les PME à se financer, j'annonce la création de La Financière du Québec. Ce nouvel organisme sera rattaché à Investissement-Québec et remplace Garantie-Québec. C'est ainsi que La Financière du Québec aura un mandat élargi, puisqu'elle pourra octroyer des prêts aux entreprises et non plus essentiellement des garanties de prêts, comme c'était le cas avec Garantie-Québec. La Financière du Québec fera appel à des formules novatrices de financement établies sur une base d'affaires, afin de répondre de façon souple et flexible aux besoins de plus en plus diversifiés des petites et moyennes entreprises.
Des moyens supplémentaires sont dégagés afin que La Financière du Québec puisse s'engager dans un certain nombre de nouvelles initiatives. J'annonce ainsi que des crédits budgétaires additionnels de 13,2 millions de dollars sont dégagés en 2002-2003, permettant d'octroyer 140 millions de dollars de prêts ou de garanties de prêts supplémentaires.
C'est ainsi que La Financière du Québec aura l'important mandat de fournir une aide au fonds de roulement des entreprises qui éprouvent des difficultés temporaires. L'objectif, c'est d'octroyer 100 millions de dollars de prêts ou de garanties de prêts, d'ici le 31 mars 2003.
La Financière du Québec aura immédiatement la possibilité de prêter à des entreprises en démarrage ayant des difficultés à se financer en raison de la conjoncture actuelle. Une enveloppe de prêts de 25 millions de dollars est dégagée à cette fin, jusqu'au 31 mars 2003.
Pour les petites coopératives et les entreprises d'économie sociale, La Financière du Québec pourra offrir des prêts de capitalisation et autres produits financiers de quasi-équité. L'objectif est d'octroyer 15 millions de dollars dans le cadre de ce financement. Par ailleurs, en raison de son expertise, La Financière du Québec aura le mandat d'assurer la gestion pour l'accroissement de l'investissement privé et la relance de l'emploi, plus communément appelé le programme FAIRE.
En prenant cette importante initiative, le gouvernement souhaite offrir aux PME québécoises la possibilité de collaborer avec un réel partenaire financier dont c'est le mandat principal. La Financière du Québec pourra, dans les faits, jouer le rôle d'une banque d'affaires des PME, en complémentarité avec les institutions financières commerciales.
Les investissements privés et donc les emplois dépendent en bonne partie du traitement fiscal auquel sont soumises les entreprises. Le plan d'action que j'annonce aujourd'hui prévoit un allégement significatif et graduel de la taxe sur le capital, afin de maintenir la compétitivité de notre régime fiscal des entreprises.
n(17 h 20)n Le Québec a pu offrir jusqu'ici un régime fiscal globalement compétitif pour les entreprises. Cependant, les signaux se sont multipliés récemment pour laisser prévoir une remise en cause de cette compétitivité. C'est, évidemment, si nous ne prenons pas les initiatives appropriées. En particulier, notre taxe sur le capital est actuellement la plus élevée en Amérique du Nord. Si nous ne faisons rien, l'écart va encore s'accroître, puisque plusieurs juridictions ont annoncé la suppression totale de cette charge fiscale. Cette disparité au plan de la taxe sur le capital soulève déjà d'ailleurs de sérieuses difficultés. De grandes entreprises peuvent être incitées à déplacer leurs activités à l'extérieur du Québec. Par ailleurs, les PME québécoises souffrent d'une disparité encore plus grande, puisque plusieurs juridictions exemptent déjà leurs concurrentes de toute charge fixe.
Le plan d'action que j'annonce aujourd'hui vise à s'attaquer de front au problème de la lourdeur de la taxe sur le capital. J'annonce donc que le gouvernement s'engage dans un plan de réduction de la taxe sur le capital. Le taux général de cette taxe sera graduellement réduit de plus de la moitié d'ici 2007, passant de 0,64 % à 0,30 %.
J'ai voulu aller encore plus loin dans le cas des PME. Dès le 1er janvier 2003, les PME québécoises seront exemptées de la taxe sur le capital pour la première tranche de 250 000 $ de capital versé. À compter du 1er janvier 2004, le seuil de l'exemption sera porté à 500 000 $. Il sera par la suite augmenté progressivement pour atteindre 1 million de dollars en 2006. En fait, M. le Président, grâce à cette mesure, près de 60 % des entreprises québécoises ne paieront plus de taxe sur le capital dès le 1er janvier 2003.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: À terme, ce sont 210 000 petites et moyennes entreprises, soit 75 % de toutes les entreprises québécoises, qui seront exemptées de la taxe sur le capital.
Ces mesures envoient immédiatement, dès maintenant, un message très clair aux investisseurs: le gouvernement du Québec prend des engagements précis afin de maintenir la compétitivité de son régime fiscal appliqué aux entreprises. Après avoir allégé la taxe sur la masse salariale, il allège maintenant la taxe sur le capital, ce qui réduira significativement l'importance des charges fixes.
Le plan d'action mis en place aujourd'hui pour soutenir la confiance des entreprises et des particuliers comporte un volet spécifique en faveur de la nouvelle économie. Des succès remarquables ont été obtenus au cours des dernières années dans ces nouveaux secteurs d'activité, ce qui a permis au Québec de se positionner au plan international. Le succès des sites désignés de la nouvelle économie, telle la Cité du multimédia à Montréal, en est l'illustration frappante.
L'ensemble des sites désignés dans le cadre des mesures fiscales définies par le gouvernement ont profité, à ce jour, à 350 entreprises. Je voudrais d'ailleurs souligner l'ampleur du succès ainsi obtenu. Depuis leur installation sur les sites désignés, les entreprises bénéficiaires ont presque doublé leur nombre d'emplois, et cela, donc, sur une période de moins de trois ans. On estime que, d'ici 2004, plus de 20 000 emplois auront été créés ou soutenus dans le cadre de ces sites visant essentiellement les technologies de l'information et des communications. Il s'agit d'un résultat remarquable que quelques esprits chagrins se refusent à reconnaître.
Dans certains créneaux cependant, la conjoncture actuelle fragilise les entreprises et pourrait remettre en cause nos acquis, particulièrement dans le domaine du commerce électronique. J'annonce ainsi un renforcement de l'aide à la nouvelle économie qui aura un effet immédiat sur les investissements. Nous procédons en effet à la prolongation, jusqu'au 31 décembre 2013, des différents programmes actuellement existants. J'annonce par ailleurs un élargissement au soutien apporté aux entreprises de commerce électronique implantées à Montréal. Ce soutien est étendu à un territoire adjacent à la Cité, dans le centre-ville de Montréal, ainsi que sur le site du Centre national des nouvelles technologies de Québec, et cela, selon des paramètres redéfinis. Cet élargissement du soutien apporté au commerce électronique n'engendrera aucun coût supplémentaire pour le gouvernement, car j'annonce simultanément une réduction significative de la taille du projet initialement prévu pour la Cité du commerce électronique.
Toujours afin de stimuler les investissements privés, le gouvernement mobilise de nouveaux moyens pour les financer en utilisant à cette fin les leviers d'action qui ont fait leurs preuves, tels que le programme FAIRE. Le gouvernement procède à la bonification du programme FAIRE afin de permettre le déclenchement rapide de nouveaux investissements majeurs de la part du secteur privé. Le programme FAIRE a permis au Québec de participer à la compétition que se livrent les différentes juridictions pour attirer des investissements d'envergure sur leur territoire. Au cours des dernières années, plusieurs projets majeurs pilotés par le secteur privé ont effectivement contribué à la performance de l'économie québécoise. Dans la conjoncture actuelle, nous nous donnons les outils pour attirer rapidement de nouveaux grands projets et accroître ainsi les investissements assurés par le secteur privé.
J'annonce ainsi que l'enveloppe du programme est majorée de 150 millions de dollars pour l'exercice financier en cours et de 200 millions de dollars pour l'exercice 2002-2003, la portant ainsi respectivement à 400 millions de dollars et à 300 millions de dollars. Le seuil minimal des projets d'investissement admissibles au programme est abaissé de 10 millions à cinq millions de dollars afin d'en élargir les possibilités d'application.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: J'annonce que les modalités du programme FAIRE sont améliorées afin d'en accroître la force de frappe. Dorénavant, ce programme pourra s'arrimer aux dispositions fiscales en vigueur afin de stimuler davantage la réalisation de projets majeurs. Une entreprise pourra, par exemple, se qualifier pour l'obtention d'un congé fiscal pour projets majeurs et se prévaloir en même temps des dispositions du programme FAIRE. Cette mesure s'appliquera à la fois aux projets majeurs et aux projets en région qui bénéficient d'encouragements fiscaux.
J'annonce que le programme FAIRE, qui devait normalement prendre fin le 31 mars 2003, est prolongé jusqu'en 2004-2005. Le programme FAIRE pourra être utilisé pour faciliter le financement de nouveaux projets d'éoliennes. Cet appui permettra à la fois de soutenir des interventions en région et de contribuer à la lutte pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre, améliorant ainsi notre environnement.
Je suis très heureuse d'annoncer que la bonification du programme FAIRE permet d'enclencher immédiatement plusieurs projets majeurs d'investissement. Parmi ces projets, j'aimerais, M. le Président, en mentionner quelques-uns: l'agrandissement de Wilco inc., de Candiac, une entreprise spécialisée dans l'emballage de produits cosmétiques, qui représente un investissement de 18 millions de dollars dans la région de la Montérégie; l'expansion de Cyberseanix Technologie, une entreprise d'assemblage d'ordinateurs, pour un investissement de 3,2 millions de dollars dans la région de la Capitale-Nationale; l'expansion de Hyperchip inc., une entreprise de télécommunications, un projet de 131 millions de dollars, dans la région de Montréal.
Le troisième volet de notre action en faveur de l'emploi et de la croissance vise spécifiquement les régions. Lors du dernier discours sur le budget, j'annonçais la mise en place de la stratégie de développement économique des régions-ressources, pour laquelle le gouvernement dégageait des crédits de 800 millions de dollars. Cette stratégie, elle est maintenant entrée en application et commence à porter fruit. Environ 200 entreprises se sont déjà prévalues à ce jour des mesures de soutien qui leur sont offertes, ce qui est extrêmement encourageant.
On doit cependant constater que la conjoncture actuelle touche spécifiquement les économies des régions et appelle une réponse de notre part. D'ailleurs, lors des rencontres que j'ai eues à l'occasion de la préparation de ce budget, de nombreux messages m'ont été transmis concernant l'impact spécifique de la conjoncture actuelle sur les régions-ressources.
n(17 h 30)n J'annonce aujourd'hui quatre mesures de bonification en faveur des régions-ressources afin de tenir compte de l'impact de la conjoncture actuelle. J'annonce une bonification du congé fiscal de 10 ans pour les PME manufacturières des régions-ressources éloignées. Nous doublons la taille des entreprises qui peuvent bénéficier de ce congé fiscal. Ce congé fiscal s'appliquera à toutes les PME concernées dont le capital versé est inférieur à 30 millions de dollars au lieu du 15 millions de dollars initialement prévu.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: J'annonce des modifications importantes au crédit d'impôt remboursable pour les activités de transformation dans les régions-ressources ainsi qu'aux crédits d'impôt concernant la Vallée de l'aluminium et la Gaspésie?les-Îles-de-la-Madeleine et applicables aux nouveaux emplois. Le calcul des nouveaux emplois, il est assoupli pour tenir compte de la conjoncture économique actuelle.
Par ailleurs, la formule de détermination du crédit d'impôt est temporairement modifiée afin de faire bénéficier les entreprises qui maintiennent leur niveau d'emploi d'une aide fiscale s'appliquant à 10 % de leurs emplois déjà existants. Ce coup de pouce supplémentaire vise à soutenir le maintien des emplois en ces temps difficiles dans les régions-ressources du Québec.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: De plus, le crédit d'impôt remboursable pour l'activité d'exploration est élargi au secteur de la pierre de taille, afin de soutenir la diversification d'une industrie déjà très performante sur les marchés d'exportation. Cette mesure devrait avoir des effets directs sur les activités d'exploration se déroulant sur la Côte-Nord, en Gaspésie et dans la Haute-Gatineau.
Enfin, SOQUEM, de concert avec des partenaires privés, se verra dotée d'une enveloppe de 12 millions de dollars qui permettra de réaliser des travaux d'exploration pour un total de 20 millions de dollars. Cela constitue une autre bonne nouvelle pour les régions-ressources.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Les productrices et producteurs agricoles du Québec sont au coeur d'une industrie prospère et moderne. Leur contribution à notre économie est essentielle. Pour soutenir la croissance de ce secteur à la suite du budget 2001-2002, notre gouvernement et les partenaires de ce milieu ont procédé à la création de La Financière agricole. Il s'agit d'une institution unique et innovatrice dotant les producteurs du Québec d'un levier financier d'avant-garde destiné à répondre aux besoins de protection de revenus, d'assurance et de financement.
En octobre dernier, le premier ministre et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation ont participé au Rendez-vous sur l'agriculture et l'agroalimentaire québécois. Ce fut l'occasion pour le gouvernement d'annoncer l'injection de près de 200 millions de dollars dans cette industrie stratégique.
Lors de ce forum, l'une des préoccupations des participants était la sécurité alimentaire, soit la traçabilité des aliments et l'adoption de normes plus sévères de salubrité, normes appelées communément HACCP. J'ai donc le plaisir d'annoncer un budget additionnel de 5 millions de dollars pour financer l'implantation de ces normes dans toutes les régions du Québec.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Le plan d'action que je propose aujourd'hui répond à une conjoncture bien précise, ce qui nous crée une double obligation. Nous devons nous assurer qu'il s'applique sans délai. Nous devons être prêts à le réajuster si la conjoncture se modifie.
C'est une tâche dont je m'occuperai personnellement à titre de ministre responsable du groupe de travail sur la sécurité économique à l'intérieur du Comité du 11 septembre 2001 formé par le premier ministre. Je désire en effet m'assurer que les investissements annoncés aujourd'hui se réalisent, et se réalisent le plus rapidement possible. Je désire en outre qu'ils se réalisent partout sur le territoire du Québec, en cohérence avec la politique de soutien aux régions-ressources. Et je sais que mon adjoint parlementaire, le député de Lotbinière, saura m'appuyer dans cette tâche.
Des voix: Bravo!
Mme Marois: Mes collègues membres du groupe de travail et moi-même allons surveiller de très près la situation de l'emploi et, si nécessaire, nous mettrons en place les actions de rétention des entreprises qui pourraient s'imposer pour préserver l'emploi des travailleuses et travailleurs du Québec.
M. le Président, comme je l'ai souligné au début de ce discours, le gouvernement du Québec agit de façon exceptionnelle pour répondre à une conjoncture elle-même exceptionnelle. Nous le faisons afin d'assurer la sécurité des personnes, de soutenir la confiance des consommateurs et de préserver l'emploi et l'activité économique. Nous le faisons. Nous le faisons pour poursuivre le travail accompli en vue de renforcer et diversifier l'économie québécoise. Nous le faisons en maintenant des politiques d'assainissement des finances publiques appliquées avec constance.
De toutes les personnes que j'ai rencontrées au cours de mes consultations prébudgétaires, j'ai reçu le même avis: Il faut passer rapidement à l'action, ce que nous faisons de façon tout à fait significative avec le présent budget.
Ce budget, il n'a pas été facile à définir. Nous n'avions accès qu'aux moyens limités d'un gouvernement qui ne dispose encore que de la moitié des impôts et taxes versés par les contribuables du Québec. L'autre moitié est à Ottawa, et il m'apparaît évident que le gouvernement fédéral doit faire sa part afin de se joindre à notre effort et d'en amplifier la portée.
Dans quelques semaines, le ministre fédéral des Finances déposera, lui aussi, un budget devancé. Comme je le lui ai indiqué cette semaine, je souhaite que son budget renforce l'action que nous entreprenons aujourd'hui, par exemple, en contribuant, comme il devrait le faire, aux projets d'investissements publics dans lesquels nous nous engageons. La véritable marge de manoeuvre est à Ottawa, et elle devrait être utilisée pour assurer notre sécurité économique et financière.
J'ai commencé ce discours du budget en soulignant que, face aux difficultés actuelles, nous devions réagir et nous mobiliser collectivement en faisant preuve de cette solidarité qui nous a permis de surmonter tant de défis.
Je souhaite que ce budget aide les Québécoises et les Québécois à relever ce nouveau défi, à vaincre les difficultés du présent et à envisager l'avenir avec sérénité et enthousiasme, un avenir où bientôt, je l'espère, le Québec participera pleinement au concert des nations. Parce que nous sommes confiants en l'avenir, en notre avenir, nous allons agir maintenant.
(Applaudissements)
Des voix: Bravo!
n(17 h 40)nLe Président: Je crois qu'il vous reste une motion à présenter, madame.
Motion proposant que l'Assemblée
approuve la politique budgétaire du gouvernement
Mme Marois: Oui. Je propose, M. le Président, que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement.
(Applaudissements)
Des voix: Bravo!
Commentaires de l'opposition
Le Président: Alors, je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, porte-parole de l'opposition officielle en matière de finances.
Mme Monique Jérôme-Forget
Mme Jérôme-Forget: M. le Président, nous avons eu droit à deux budgets à l'intérieur de six mois. Il faudra attendre 17 mois avant le prochain, soit en mars 2003. Pourtant, ce qui nous a été présenté aujourd'hui, est-ce vraiment un budget ou plutôt une opération de relations publiques pour éviter d'en présenter un en mars prochain, lorsque la situation pourrait être encore moins reluisante qu'aujourd'hui?
Il y avait, selon le gouvernement, urgence de produire un budget, y compris un budget pour l'an 2002-2003. Outre le fait qu'on a changé la couverture du document, du vert au bleu, et qu'on a pris soin d'écrire en gros caractères «2002-2003», je vous dirai, M. le Président, qu'il y a bien peu dans ce budget pour justifier une telle parade aujourd'hui. Incapable de nous fournir un bilan à jour de la situation financière, la ministre des Finances croit pouvoir lire dans sa boule de cristal ce que nous réserve à l'avenir et nous soumet aujourd'hui un plan d'action jusqu'en mars 2003. Est-ce de la témérité, de l'ignorance ou du désespoir?
Cet exercice manifestement médiatique est un énorme ballon publicitaire pour essayer de nous faire oublier le cauchemar du 1er octobre 2001. Parce que, vous savez, M. le Président, il fallait se refaire une image, il fallait redorer notre blason.
Depuis quelques jours, nous invoquions la ministre des Finances de nous transmettre la synthèse des opérations financières pour nous permettre de mieux mesurer l'ampleur des changements au niveau des revenus du gouvernement. Or, la ministre des Finances nous a répété que la démarche que requiert la production de la synthèse des opérations financières devait se faire selon un processus bien défini et qu'il lui était impossible d'en accélérer le processus. Pourtant, M. le Président, l'ancien premier ministre, lui, avait obtenu la synthèse des opérations financières, un 24 octobre 1996, pour discuter de façon plus intelligente lors du Sommet économique. Cette demande, en 1996, fut remplie en deux temps, trois mouvements. Mais, aujourd'hui, impossible pour la ministre des Finances d'en faire de même. Qu'a à cacher ce gouvernement? Pourquoi cette hésitation à nous donner les vrais chiffres?
Depuis quelques jours, on suivait la saga de la CSST par l'intermédiaire des journaux. Le sous-ministre des Finances conspirait une recette avec le président de la CSST pour faire disparaître un trou de 400 millions de dollars. Et, par un tour de force, on le fera disparaître par le biais de la réserve actuarielle. Sans que l'on s'en rende trop compte ou presque, ce 400 millions va fondre comme neige au soleil. Il n'est plus que de 65 millions cette année et, loin de le distribuer sur cinq ans, il disparaîtra l'an prochain. Pourtant, c'était bien ce surplus qu'on s'était empressé d'aller chercher pour effacer le déficit, un an plus tôt. Pas question alors d'absorber ce surplus sur cinq ans.
Hélas pour la ministre des Finances et son prédécesseur qui ont tous deux eu la témérité de se vanter, dans cette Chambre ou en commission parlementaire, d'avoir atteint le déficit zéro un an plus tôt... On a tous applaudi. Eh bien, M. le Président, aujourd'hui que ça ne fait plus notre affaire, on va changer encore une fois les règles comptables pour cacher la vérité aux citoyens.
Nous sommes encore témoins d'un manque de transparence, comme nous a habitués ce gouvernement. Il nous faut deviner les intentions du gouvernement tant qu'il n'y aura pas de dépôt de crédits supplémentaires pour l'an 2001-2002 et les crédits pour l'année 2002-2003, soit en mars prochain. Quant à nous, M. le Président, nous demandons à la ministre des Finances d'arrêter de s'inspirer d'une boule de cristal et de s'engager à déposer un budget au printemps prochain, comme le veut la coutume.
La ministre des Finances nous informe aujourd'hui qu'elle utilise toute sa marge de manoeuvre pour faire face à la détérioration de l'économie. Encore une fois, le gouvernement s'attend absolument à une courte récession et à une reprise très rapide, l'an prochain. Il ne prévoit aucune réserve pour des éventualités, ce qui représente un manque total de prudence et un manque de prévoyance. Ce gouvernement a épuisé les marges identifiables. Il a épuisé la réserve fédérale en fiducie pour la santé sans améliorer les services à la population. Si la situation économique se détériore davantage, le gouvernement n'a tout simplement pas de marge de manoeuvre pour y faire face.
Nous nous réjouissons, par ailleurs, que le gouvernement ait finalement réalisé qu'il fallait ajuster les prestations d'aide sociale à l'indice du coût de la vie, comme il a déjà annoncé lors du dernier budget, en mars 2001. Pour ce gouvernement, les plus pauvres... Pour ce gouvernement, M. le Président, les plus pauvres occupaient peu d'espace sur l'écran de radar, malgré les belles paroles contenues dans le discours inaugural du premier ministre en mars dernier. Rappelons-nous, M. le Président, que ce gouvernement avait donné à une seule entreprise qui n'était même pas déménagée dans la Cité du commerce électronique un montant presque analogue à ce qu'il accordait pour l'indexation des prestations d'aide sociale. Nous avons raison de nous questionner à savoir quelles sont les vraies priorités du gouvernement.
Même en acceptant certaines prévisions que fait la ministre des Finances, elle a oublié de nous parler du programme de l'assurance médicaments, qui manifestement terminera l'année à nouveau par un déficit qui, cette fois, sera de 109 millions de dollars. Rappelons-nous, M. le Président, que ce gouvernement avait prévu qu'il en coûterait 175 $ par personne pour offrir à l'ensemble des Québécois un régime d'assurance médicaments. Or, cette somme est largement dépassée, on en est aujourd'hui à 350 $ par personne et on estime qu'il en coûtera plus de 400 sous peu.
La ministre des Finances a oublié aussi de nous rappeler la hausse de 4,5 % pour le loyer à payer pour les centres d'hébergement de longue durée. Et on a oublié de nous parler aussi de la hausse des cotisations à la Régie des rentes du Québec, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2002, soit 350 millions de plus. Si on ajoute la taxe sur le tabac, les contribuables paieront 600 millions de plus en taxes cette année.
On nous a annoncé en grande pompe une baisse de la taxe sur le capital qui débutera non pas cette année, non pas l'an prochain, mais en 2003 et s'échelonnera sur cinq ans, jusqu'en 2007. Comme ce gouvernement manque de modestie et qu'il a pris la mauvaise habitude d'étaler ses baisses d'impôts sur cinq à 10 ans, il ne semble pas avoir entendu le message clair et sans équivoque que lui ont lancé les citoyens du Québec le 1er octobre dernier. Faisant fi du verdict, on se terre, on maquille les chiffres et on annonce sans hésitation des baisses d'impôts, des baisses de taxes dans deux, trois, quatre et cinq ans.
n(17 h 50)n Chers concitoyens, ces gens du gouvernement sont devenus sourds, complètement sourds. Ce gouvernement a nombre de fois vanté les vertus de son propre interventionnisme. Eux savaient, et en particulier son premier ministre, qui ne s'est jamais gêné pour manipuler des astuces, comme, par exemple, de délimiter un périmètre géographique pour octroyer un boni à certaines entreprises qui acceptaient un de ces jours de déménager dans un espace spécifique déterminé. Quant à nous, il s'agissait d'un plan Panneton, 15 000 $ de crédit d'impôt seulement, M. le Président, et aujourd'hui on n'a plus droit à la Cité du commerce électronique, on aura droit à la zone électronique.
Malheureusement, M. le Président, le gouvernement a raté deux virages passés. Au lieu de baisser les impôts en 1999-2000 et 2000-2001, le gouvernement, aujourd'hui, se voit incapable de réduire l'écart fiscal qui nous sépare de nos partenaires commerciaux. De plus, M. le Président, on ne fait plus de déficit, on fait désormais de la dette: 2 milliards de plus en 2000-2001. Les déficits des sociétés d'État, notamment de la CSST et de la SAAQ, sont tout simplement cachés.
Ce budget a quelques relents de magie. On espère qu'en balayant sous le tapis les déficits de la CSST et de la SAAQ ceux-ci vont disparaître comme par enchantement. Hélas pour ce gouvernement, cette triste histoire le rattrapera, car, à le pelleter en avant, le mur devant nous nous rejoint inévitablement.
(Applaudissements)
Le Président: Alors, j'aimerais avoir une indication des leaders. Il reste encore quelques instants, puis nous avons trois débats de fin de séance aujourd'hui. Alors, on s'entend, nous allons suspendre les travaux jusqu'à 18 heures. Et je voudrais...
Des voix: ...
Le Président: ... ? un instant, s'il vous plaît! ? rappeler la nature des trois débats de fin de séance que nous aurons. Le premier portera sur une question adressée par M. le député de Limoilou à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant l'absence de ressources pour les élections municipales du 4 novembre prochain; le second, sur une question adressée par M. le député d'Argenteuil à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant les consultations sur les orientations découlant de l'adoption de la loi n° 184 sur le droit de produire; et le troisième, sur une question posée à la ministre de la Culture et des Communications concernant le budget de Télé-Québec. Ce débat est soulevé par Mme la députée de Sauvé.
Alors, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 18 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 53)
(Reprise à 18 h 4)
Débats de fin de séance
Capacité d'accueil des bureaux de scrutin
lors des élections municipales
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons entreprendre les débats de fin de séance. Le premier portera sur une question adressée par M. le député de Limoilou à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant l'absence de ressources pour les élections municipales du 4 novembre prochain. Alors, M. le député de Limoilou, je vous cède la parole pour cinq minutes.
M. Michel Després
M. Després: Je vous remercie beaucoup, M. le Président, de me donner la parole suite, au fond, à une question que j'ai posée à la ministre des Affaires municipales hier, en ce qui concerne les ressources pour l'élection municipale, M. le Président, parce que beaucoup de monde sont inquiets. Les parlementaires de cette Assemblée et de notre formation politique, nous sommes inquiets parce que nous avons vu dans toutes les régions du Québec, pas juste à Québec ? je vais vous parler de Québec, M. le Président ? mais dans toutes les régions du Québec... Mes collègues de Montréal sont aussi intervenus à la période de questions, mes collègues de l'Outaouais sont intervenus auprès de la ministre des Affaires municipales, parce que c'est quelque chose d'important, M. le Président, c'est une élection qui a lieu lundi prochain dans le monde municipal, dans les cinq grandes municipalités au Québec.
On est inquiets parce que ? je vais vous parler de l'exemple de Québec ? il y a eu par vote... au vote anticipé, dimanche dernier, M. le Président, le 28, il y a eu jusqu'à 1 h 30 min d'attente. Je comprends que Pierre-F. Côté peut nous déclarer ce soir au bulletin de nouvelles que la démocratie, c'est la patience, M. le Président, mais, moi, je suis inquiet. J'ai moi-même attendu 40 minutes de temps. 40 minutes, M. le Président! Peut-être qu'à une heure... une certaine heure d'affluence, on peut se permettre d'attendre cinq minutes, 10 minutes, M. le Président, mais d'attendre plus de 1 h 30 min, savez-vous ce que ça fait? Ça fait des citoyens qui se sont tannés et qui sont partis de la file, M. le Président. C'est ça que ça a créé, M. le Président. Et normalement, aux élections, selon la loi, on a environ, en moyenne, dans un poll ? Mme la ministre, vous le savez très bien, depuis le temps que vous faites des élections ? nous avons environ 300 à 350 noms. Puis, quand on arrive au-dessus de 350 noms, habituellement, le jour même, on décide sur-le-champ de créer un nouveau poll.
Mais la ministre va nous parler de son vote électronique, M. le Président. Les gens ne votent pas eux-mêmes électroniquement. Ils doivent s'enregistrer. Le problème, M. le Président, c'est le nombre de personnes qui vont se rapporter à la table de votation pour s'enregistrer. Il y a plus de 1 000 noms, M. le Président, dans la région de Québec. Je peux vous donner arrondissement par arrondissement, M. le Président, mais il y en a huit, arrondissements. Ce qu'il est important de reconnaître, c'est que, dans les huit arrondissements, il y a, dans plus de 14 districts, M. le Président, des endroits où il y a plus de 1 000 personnes d'enregistrées par table ou, si vous voulez, M. le Président, par ordinateur, parce que la ministre va nous parler de son vote électronique. Dans tous les arrondissements, on retrouve cette dynamique, M. le Président.
Je vais vous dire, la ministre m'a répondu hier de ne pas m'inquiéter, parce qu'elle avait reçu une belle lettre en date du 7 juillet, M. le Président. Je vais vous dire, je ne sais pas si quelqu'un lui a passé la lettre, parce que je connais la ministre depuis longtemps ? je la connais depuis dans le temps qu'elle a déjà été elle-même dans l'opposition ? puis elle a la réputation, M. le Président, de lire sa correspondance. Mme la ministre, j'ai lu votre correspondance que vous avez déposée hier. Je suis allé lire le décret auquel réfère la lettre. Je vais vous dire, il n'y a aucun lien. Il n'y a aucun lien avec le financement de la votation. Il n'y en a pas. Il y a huit points dans le décret. Lisez le décret, là, Mme la ministre, puis, quand on vous écrit une belle lettre pour vous dire, de la part de M. Pierre-F. Côté... Il ne parle pas, nullement... il réfère à un décret qui n'a aucun rapport avec le financement le jour du vote. Mme la ministre, je ne sais pas si on vous a passé une lettre à la dernière minute et vous n'avez pas pris le temps de la lire, mais, je vais vous dire, il n'y a aucun rapport. Il n'y a aucun rapport, puis, je vais vous dire, ça va un petit peu plus loin que ça, parce que Pierre-F. Côté qui, lui-même ? vous avez cité parce qu'il vous a déposé une lettre, mais qui n'a aucun rapport avec le financement, on va se comprendre, M. le Président ? dit lui-même que sa marge de manoeuvre est très courte parce qu'il n'a reçu que 7,80 $ par électeur ? c'est peut-être ce qu'il a demandé, mais il n'y a aucun rapport avec la lettre que la ministre nous a déposée ? et on dit, M. le Président, que ça prend, en moyenne, selon le Directeur général des élections, 10 $ par électeur pour faire une élection qui est convenable.
Donc, il est évident que, suite à l'expérience que nous avons eue par le vote par anticipation, probablement... peut-être que tout le monde aura le temps de voter, M. le Président, mais, si ça prend, à certains endroits, une heure, une heure et demie d'attente, c'est inadmissible.
Aujourd'hui, tout à l'heure, au bulletin de nouvelles de Radio-Canada télévision, plusieurs candidats à l'élection de Québec viennent de manifester aujourd'hui même leur inquiétude, M. le Président, et le maire de Québec a dit lui-même qu'il était soucieux et inquiet du vote de lundi prochain.
n(18 h 10)n Et savez-vous ce qu'a déclaré Pierre-F. Côté? Bien, il dit: Écoutez, j'ai 28 machines mobiles. Mme la ministre, il y a 437 endroits de votation à l'élection de Québec. Il y a 28 machines mobiles. Je vais vous dire une chose: Ça va être pratique, la journée même, de prendre la machine parce qu'il y a un engorgement dans un endroit de votation puis, au bout d'une demi-heure, on va la déploguer, on va la remettre dans l'auto, on va repartir puis on va aller la reploguer dans un autre endroit de votation. Mme la ministre, ça n'a pas de bon sens.
Ce qu'on veut que vous assuriez, les gens qui vont aller voter dimanche, c'est qu'il n'y aura pas de problème, qu'il va y avoir les ressources nécessaires. Parce que, pour terminer, M. le Président, Pierre-F. Côté nous a déclaré que la démocratie, c'est la patience. Je ne pense pas que les citoyens du Québec vont attendre une heure, une heure et demie...
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Limoilou. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Mme la ministre.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. M. le Président, le député de Limoilou a confondu beaucoup de choses. D'abord, il a confondu ce qu'on appelle le BVA, le bureau de vote par anticipation, et ce bureau de vote par anticipation, qui se déroule une semaine avant le scrutin régulier, a eu lieu dimanche dernier. Et, exceptionnellement, je dois vous dire que c'est vraiment la première fois que ça se produit, et ça, je pense, manifeste un signe évident de l'intérêt maintenant que les citoyens portent à la chose municipale. Mais, d'une manière très, très exceptionnelle, le taux de participation à ce bureau de vote par anticipation a été très, très élevé, et il y a une caractéristique particulière au vote par anticipation. C'est qu'il faut assermenter et inscrire dans un registre avec le nom et l'adresse chaque personne qui requiert un vote par anticipation.
D'autre part, il faudrait rappeler, M. le Président, que ceux-là mêmes parmi les députés de l'opposition qui veulent soulever des paniques, là, sur cette question du vote compilé électroniquement devraient certainement s'intéresser, là, à ce vote qui a eu lieu dans 40 municipalités au cours des six dernières années.
Ici même, dans la région de Québec, Cap-Rouge. Alors, à Cap-Rouge, il y a eu un vote en 1999, un vote... une élection, plutôt, municipale par un vote électronique, et le nombre d'électeurs par section de vote était l'équivalent à ce moment-là qu'il sera dimanche prochain, lors de l'élection municipale qui va se dérouler dans un peu plus de 635 municipalités au Québec. C'est donc dire, M. le Président, que non seulement cette question de vote électronique a été brandie en Chambre par des députés... Et j'ai cité d'ailleurs cet après-midi, à la période de questions, le premier vote électronique au Québec, qui a eu lieu à Hull, où siégeait déjà l'actuel député de Hull qui était à ce moment-là conseiller municipal et qui avait adopté ce mode de compilation du vote par une résolution unanime du conseil municipal où il siégeait, qui a donc approuvé ce vote électronique avec un nombre de 2 000 à 2 500 électeurs par section de vote, alors que dans toutes les autres municipalités où ça a eu lieu, Mont-Royal, Kirkland, LaSalle, Verdun... Je vous rappelle que Pointe-Claire et toutes les autres municipalités qui sont représentées ici même, à l'Assemblée nationale, par des députés de l'opposition, le vote électronique a eu lieu, en 1999, avec un nombre d'électeurs par section de vote de 780 à Mont-Royal, 703 à Kirkland, et ainsi de suite.
Alors... Et, de plus, M. le Président, j'ai le rapport du greffier, qui était président d'élection à la ville de Hull lors même de l'élection comme conseiller municipal du député de Hull, qui nous a fait des démonstrations complètement dérisoires ici même en période de questions, à l'Assemblée nationale, et le greffier, alors président d'élection, conclut ceci de son rapport: «Les services de hauts fonctionnaires de la ville ont été retenus pour observer le processus électoral. Le rapport indique que les électeurs étaient fiers et enthousiastes de ce nouveau mode de scrutin. L'utilisation de ces appareils a permis de réaliser une première au Québec. Ce mode de scrutin est voué à un bel avenir.» Alors, M. le Président, vous voyez bien que c'est une tempête dans un verre d'eau qui vient encore une fois, là, s'ajouter à toute cette campagne systématique depuis un an pour essayer de discréditer les nouvelles grandes villes du Québec, pour essayer de discréditer le processus d'élection de ceux qui présideront aux destinées de ces nouvelles grandes villes. Bientôt, ils feront partie de la ligue des anciens combattants contre les regroupements au Québec et ils radoteront, M. le Président, d'une manière incantatoire, comme ils le font depuis un an. Ils radoteront, M. le Président, en ne voyant pas la nécessité, comme cela s'est passé d'ailleurs dans les autres provinces canadiennes, de renforcer les pôles urbains qui ont plus que jamais des défis majeurs à relever dans notre société. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Limoilou pour sa réplique de deux minutes. M. le député.
M. Michel Després (réplique)
M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis content de voir que la ministre n'a pas ramené sa lettre, voyez-vous, comme je l'avais dit, parce qu'il n'y avait aucun rapport avec la lettre, le décret... puis entre la situation financière à laquelle... les budgets qui ont été alloués au Directeur général des élections, M. le Président.
Autre chose, M. le Président, c'est la ministre qui fait paniquer tout le monde, c'est elle qui ne prend pas ses responsabilités, M. le Président. Parce que, c'est drôle, hein, voyez-vous, là, c'est le maire de Québec aujourd'hui qui fait une déclaration. C'est les candidats à l'élection qui viennent la sensibiliser. C'est les organisateurs de parti, Mme la ministre, qui déclaraient ce matin: Nous voulons éviter le cafouillage. L'organisateur du maire de Québec lui-même: «Nous voulons éviter le cafouillage et les abus que nous avons observés au moment du vote par anticipation, dimanche dernier, a dit Clermont Côté, responsable de la campagne de M. L'Allier. Nous avons rencontré hier Pierre F. Côté, nous le rencontrons encore aujourd'hui. Nous espérons qu'il mettra les ressources en branle.» Bien, on l'a eue, la réponse de Pierre F. Côté: il y a 28 ordinateurs de disponibles, mobiles, il y a 437 endroits de votation, Mme la ministre. Y pensez-vous? On va ploguer l'ordinateur pour une demi-heure, on va apprendre quelque part qu'il y a un engorgement, on va repartir avec l'ordinateur, on va le mettre dans la voiture, on va aller le reploguer?
Mme la ministre, ce qu'on veut, c'est qu'on ne veut plus qu'il y ait des délais d'attente comme il y a eu au vote par anticipation, Mme la ministre. Jusqu'à 1 h 30 d'attente, c'est inadmissible. Et le Directeur général des élections, pour nous rassurer, au bulletin de nouvelles, vient nous déclarer: Vous savez, la démocratie, la démocratie, c'est la patience. Mme la ministre, on est au Québec. On est au Québec, les élections se sont toujours assez bien déroulées. J'espère bien pour vous, lundi, que le lendemain, les élections, ça se sera bien déroulé. Mais je voulais juste vous dire que les inquiétudes viennent des candidats, viennent des maires, viennent de l'opposition officielle, viennent des organisateurs, elles viennent de tout le monde. Il y a juste vous qui croyez que ça va bien se dérouler. Je vous demande juste, en terminant ? vous avez jusqu'à dimanche ? d'allouer les ressources nécessaires pour s'assurer que le vote se déroule très bien. Merci.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Limoilou. Ceci met fin au premier débat.
Consultations en matière
d'aménagement du territoire agricole
Le deuxième débat portera sur une question adressée par M. le député de Limoilou... non, excusez, le second, sur une question adressée par M. le député d'Argenteuil à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole concernant les consultations sur les orientations découlant de l'adoption de la loi n° 184 sur le droit de produire.
Mme la députée de Sauvé... Excusez, je suis tout mêlé, là, c'est le troisième! M. le député d'Argenteuil, on est au deuxième, c'est à vous. Ha, ha, ha!
M. David Whissell
M. Whissell: Alors, merci, M. le Président. On vous excuse. Alors, Mme la ministre, chers collègues, alors, comme vous le disiez, hier, nous avons interpellé la ministre sur une question très importante qui est tout l'établissement des orientations gouvernementales en matière d'aménagement du territoire.
Je pense que, M. le Président, c'est important de rappeler les faits. C'est que le gouvernement du Parti québécois, au cours des dernières années, tout particulièrement en 1997, a mis en place une loi qu'on avait appelée à l'époque la loi n° 23, et cette loi était sensée permettre une cohabitation harmonieuse entre les gens qui utilisent et qui vivent à l'intérieur de la zone agricole permanente. Alors, M. le Président, on se souvient très bien que cette loi n° 23 s'était soldée par un fiasco monumental. Et, pour l'information envers la ministre, je tiens à lui rappeler que, pour la loi n° 23, on avait fait des consultations. Une fois que la loi n° 23 avait été adoptée, le gouvernement était retourné en consultations publiques pour établir ses propres orientations.
M. le Président, pour bien saisir la mécanique, la loi n° 184, qui a été adoptée en juin 2001, vient suspendre le droit aux municipalités de faire de nouveaux règlements en matière de zonage agricole, c'est-à-dire des règlements qui viennent restreindre le développement de nouvelles unités pour des productions animales en particulier, mais également qui permettra de faire des zonages dits de production.
M. le Président, comme parti politique, on a à défendre les intérêts du monde rural. Le monde rural, pour nous, c'est les gens qui y habitent, qui produisent des biens et services pour la population, pour nourrir le Québec, mais également pour alimenter les transformateurs qui, eux aussi, nourrissent nos citoyens, mais également qui font de l'exportation.
n(18 h 20)n M. le Président, il y a des problèmes réels qui existent. Alors, comme je vous le disais, la loi n° 184 a été adoptée, on suspendait le droit aux municipalités de faire de nouveaux règlements, mais également on disait aux MRC qu'ils devraient, dans un avenir très, très proche, faire de nouveaux règlements de contrôle intérimaire qui devraient être en accord avec les orientations gouvernementales. Et, une fois ces RCI, ces règlements de contrôle intérimaire, adoptés, les municipalités devraient, dans un délai également très court, s'assurer que leur réglementation existante soit mise à la norme des règlements de contrôle intérimaire. Alors, M. le Président, je pense que la ministre a peut-être oublié le fonctionnement de notre Parlement.
Il y a eu des consultations, oui, pour le projet de loi n° 184. Ce projet de loi, il faut se le rappeler, le ministre à l'époque, le ministre Trudel, avait déposé un avant-projet de loi, pensant que tout était beau, tout était rose, et plusieurs groupes, à la demande de l'opposition libérale, étaient venus à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, dire que le projet de loi n° 184 était incohérent à plusieurs égards. Et je tiens peut-être à le dire pour le bénéfice de la ministre, le Barreau du Québec qui disait que, et je cite: «Le Barreau du Québec invite le législateur à viser un meilleur équilibre entre le droit de produire des agriculteurs, la protection de l'environnement, le droit individuel. Le projet de loi n° 184 n'atteint pas cet équilibre recherché.» M. Pellerin, le représentant de l'UPA, son président, qui nous disait, et je cite: «Ce qui est proposé dans le projet de loi n° 184 est incomplet, puisqu'il manque l'essentiel.» Alors, M. le Président, on connaît la suite. Le gouvernement a déposé des amendements, amendements qui étaient plus élevés en nombre que le nombre d'articles qu'il y avait dans le projet de loi, et nous avons adopté le projet de loi n° 184 à 4 heures du matin, dans cette Chambre, sans même avoir pu faire l'étude article par article, donc sans avoir fait la lecture du projet de loi. Et, M. le Président, aujourd'hui on commence à réaliser qu'il y a de sérieuses lacunes.
Alors, M. le Président, la ministre, je pense qu'elle ne peut nous dire, comme elle l'a fait hier, qu'il y a eu des consultations. Et c'est quand même surprenant qu'il y ait un document qui a été déposé à certains groupes, en particulier l'UMQ, la FQM, l'UPA, et ce document, je vais vous lire le paragraphe ici, nous disait: «Le document énonce les orientations gouvernementales révisées qui sont proposées. Elles sont rendues publiques aux fins de consultation dans le but d'obtenir la réaction et les commentaires des principaux intéressés au plus tard le 31 octobre.» Alors, M. le Président, que la ministre nous dise quels groupes ont été consultés.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, le député d'Argenteuil nous a parlé de la loi n° 23, mais il y a eu l'adoption, en juin dernier, de la loi n° 184, et en conséquence certaines dispositions de cette loi n° 184 étaient prévues s'appliquer au 1er octobre dernier. Et il nous faut donc ajuster les directives qui sont transmises aux MRC dans l'élaboration de leur schéma d'aménagement pour s'assurer que ces directives sont conformes à la législation telle qu'elle existe suite à l'adoption de la loi n° 184.
Nous avions, dès cet été, préparé un bulletin municipal, qu'on appelle Muni-express, dans le but d'informer les municipalités locales et régionales des modifications qui avaient des incidences sur l'exercice de leurs pouvoirs et responsabilités. Et ce bulletin municipal avait été transmis à 1 400 municipalités à travers le Québec et aux 96 MRC, et ça a été préparé en collaboration avec le ministère de l'Environnement et le ministère de l'Agriculture.
M. le Président, je crois que certains veulent refaire le débat de la loi n° 184. C'est légitime, sauf qu'elle est déjà adoptée. Alors, le développement de l'agriculture, quand on lit certains textes, quand on entend certaines déclarations, le mot «développement de l'agriculture» est devenu comme un objet de discrédit.
J'en veux à preuve l'article paru dans le journal Le Devoir, en première page, aujourd'hui. C'est comme un objet de discrédit, alors qu'on nous présente les choses comme si tout était nouveau. Mais les MRC ont, depuis l'adoption de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, il y a 21 ans, le pouvoir de... c'est-à-dire plus que le pouvoir, l'obligation de préparer un schéma d'aménagement et d'accompagner ce schéma d'aménagement d'un plan d'action en vue de la mise en oeuvre du schéma. C'est sur ça qu'on a insisté.
Qu'est-ce que ça vaut, M. le Président, un schéma d'aménagement qui protège les zones agricoles mais qui les laisse en friche? Puis, le député d'Argenteuil sait de quoi je parle, parce que, sur la couronne nord, dans sa région, il y a beaucoup de très bonnes terres agricoles qui finalement sont laissées comme ça, en friche, et après il y a une très forte pression sur le dézonage, parce qu'on vient nous dire: Oui, mais elles ne produisent pas, ces terres; elles sont en friche depuis longtemps. Pourquoi ne pas nous permettre de faire du développement sur ces bonnes terres agricoles? Alors, moi, je pense que...
Regardez, M. le Président, j'ai présenté à la Table Québec-municipalités, au mois de mai dernier, j'ai présenté les grandes lignes, avec la collaboration de mon collègue le ministre de l'Agriculture et la collaboration de mon collègue le ministre de l'Environnement. Nous avions rencontré la Table Québec-municipalités et, à cette occasion-là, à la mi-mai, nous avions convenu de nous revoir sur les modifications qui devaient être apportées aux orientations gouvernementales avant qu'elles ne soient soumises au gouvernement pour adoption, suite à l'ajustement. Ce n'est pas une législation. Ce n'est pas une réglementation. C'est un ajustement du fait de cette législation n° 184, adoptée en juin dernier.
Alors, pour ce faire, j'ai transmis aux parties concernées, j'ai transmis un document pour connaître leur avis, ce même document que cite le député d'Argenteuil. Mais le processus, M. le Président, est en cours au gouvernement; c'est loin d'être complété.
Ce matin même, ma chef de cabinet rencontrait M. Roméo Bouchard, le porte-parole de l'Union paysanne. Je sais que mon collègue de l'Environnement rencontre aussi des organismes, et on est très ouverts à ces rencontres. Et l'UMQ, que je consultais ? l'Union des municipalités du Québec ? m'écrivait ceci: «Un plan de développement de la zone agricole», et son président signait cette lettre, Me Bernard Gagnon, en disant: «Je me réjouis que les orientations révisées proposent une démarche aux MRC qui désirent se doter d'un plan ou d'une stratégie de développement de leurs zones agricoles pour une planification efficace du territoire agricole. Pour l'UMQ, il s'agit là d'un gain attendu depuis longtemps et qui a fait l'objet de commentaires et de représentations politiques de sa part au cours de la dernière année. J'appuie donc favorablement que les MRC soient encouragées à se doter d'un tel outil de planification qui leur permettra d'intégrer, sur la base d'une démarche consensuelle...»Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est terminé, s'il vous plaît!
Mme Harel: Alors, M. le Président, je pense que tout ça correspond à justement des attentes nombreuses qui avaient été exprimées.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Argenteuil pour sa réplique de deux minutes.
M. David Whissell (réplique)
M. Whissell: Oui, merci, M. le Président. Alors, je pense que c'est très surprenant d'entendre les propos de la ministre. Je pense que c'est également très, très... Il faut se questionner comme individus. Je vais prendre un terme que la ministre utilise souvent, «le bien commun», nous sommes les gardiens du bien commun... Et comment se fait-il qu'on fait un exercice aussi important qui est d'établir les orientations, M. le Président?
Dans le document en question, on dit qu'il s'agit d'un document public et que... et je vais relire la partie, «dans le but d'obtenir la réaction et les commentaires des principaux intervenants intéressés au plus tard le 31 octobre». Ce n'est pas l'opposition libérale qui le dit, ce n'est pas le député d'Argenteuil, c'est un document qui est écrit «Gouvernement du Québec», qui a été préparé par le ministère de la ministre qui vient d'être interpellée. Nous avons parlé à Mme Jutras, on n'a pas voulu nous donner copie du document, en nous disant que c'était une consultation secrète.
Qu'est-ce que le gouvernement a à cacher? Qu'est-ce que le gouvernement a à cacher? Dans le document, on parle de distances séparatrices, on parle de façons de calculer les distances séparatrices. Il y a les orientations, on parle d'îlots déstructurés, on parle d'une foule de choses qui sont complémentaires à la loi n° 184. Alors, que la ministre ne nous dise pas: Le 184, on veut continuer le débat. C'est fini, ils l'ont adopté dans le bâillon, et ils vivront avec les conséquences de leur décision. Mais nous, ici, comme parlementaires, on a à s'assurer que les droits des citoyens, tout particulièrement ceux des producteurs agricoles, mais également des autres personnes qui habitent et qui contribuent au développement du monde agricole, que les droits de ces individus soient protégés.
n(18 h 30)n M. le Président, c'est bizarre, la ministre nous fait état de consultations qui ont eu lieu aujourd'hui, qui ont eu lieu hier en fin de journée. On a posé la question hier à deux heures, et il n'y avait pas eu de consultations, à part quelques groupes restreints, de façon cachée. Alors, M. le Président, je pense qu'il y a 24 groupes qui avaient été consultés en 1997, ça aurait été intéressant de savoir quel sera l'impact des distances séparatrices, des normes sur la santé publique, de savoir ce que les environnementalistes avaient à dire, ce que les citoyens du monde...
Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le député, mais... Merci, merci beaucoup. Alors, ceci met fin au deuxième débat.
Budget de Télé-Québec
Maintenant, j'entreprends le troisième débat. Il portera sur une question adressée par Mme la députée de Sauvé à la ministre de la Culture et des Communications concernant le budget de Télé-Québec. Mme la députée de Sauvé, pour une intervention de cinq minutes.
Mme Line Beauchamp
Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je vais vous rappeler, M. le Président, l'objet de ma question. Cet après-midi, en période de questions, j'ai rappelé à l'attention de tous certaines déclarations du président du Conseil du trésor, qui, dans une entrevue donnée au journal La Presse au mois de juillet dernier, disait, et je le cite: «Il faudrait sabrer dans les budgets de Télé-Québec», alors que, au mois d'octobre, dans une entrevue donnée au journal Le Soleil, la vice-présidente du Conseil du trésor, ministre de la Culture et des Communications, elle, affirmait ceci, et je cite: «Dans un monde idéal, j'aimerais ajouter du budget pour Télé-Québec.» Donc, j'ai tout simplement demandé au ministre qui avait eu gain de cause de se lever, et c'est la ministre de la Culture et des Communications qui s'est levée, et je vous la cite, M. le Président. Elle nous disait ceci, et c'était d'importance, elle a dit, cet après-midi, à peine une heure et demie avant le dépôt du budget de sa collègue, et je la cite, M. le Président: «À partir des sommes qui sont affectées au ministère de la Culture, à partir d'un certain nombre d'investissements qui vont être annoncés à l'occasion du budget, je pense qu'on fera les choix judicieux pour Télé-Québec et pour l'avenir de Télé-Québec.» M. le Président, depuis ce temps, on a eu l'occasion d'écouter le discours du budget, de lire les livres, les passages concernant le secteur de la culture et des communications qui accompagnaient le discours sur le budget, et, M. le Président, tout ce que je peux affirmer, c'est que nulle part je retrouve les mots «Télé-Québec», nulle part il est directement question de Télé-Québec.
Donc, je me demande bien qu'est-ce que la ministre a voulu dire lorsqu'elle a dit que «dans le budget, dans les sommes annoncées, je pense qu'on fera des choix judicieux pour Télé-Québec et pour l'avenir de Télé-Québec». Est-ce à dire que de ne pas prévoir jusqu'en 2003 ? parce que ce budget-là couvre une période jusqu'en 2003, M. le Président ? de ne rien prévoir pour Télé-Québec jusqu'en 2003, elle appelle ça faire des choix judicieux pour Télé-Québec et pour l'avenir de Télé-Québec? C'est la question que je lui pose.
Surtout, M. le Président, qu'il faut mettre le dossier de Télé-Québec dans son bon contexte. Je vous rappelle qu'un bras financier du gouvernement, la Caisse de dépôt et placement ? on ne peut plus dire «Québec», ils ont retiré ce mot-là de leur nom officiel ? donc la Caisse de dépôt et de placement a fait un investissement de 2,2 milliards de dollars dans Quebecor Média qui, entre autres, possède une chaîne privée de télévision. Et, à l'époque, le premier ministre a souligné, a applaudi pour cette transaction.
Pendant ce temps-là, comment se comporte le même gouvernement par rapport à sa télévision, sa télévision publique? Eh bien, M. le Président, depuis l'arrivée du Parti québécois au pouvoir, Télé-Québec a connu des baisses dramatiques de budget. Nous convenons que c'était dans l'effort d'atteindre le déficit zéro, mais rappelons également que donc, depuis cet effort de déficit zéro, Télé-Québec a connu annuellement des coupures de budget ? je dis bien annuellement, à chaque année ? de 10 à 12 millions de dollars, ce qui fait qu'alors qu'en 1994 le budget de Télé-Québec s'élevait à 65 millions de dollars, aujourd'hui même, M. le Président ? et je fais fi même de l'indice de l'inflation ? le budget de Télé-Québec se résume à 53,8 millions de dollars, M. le Président.
Ça m'amène à dire que Télé-Québec a fait son effort définitivement dans la poursuite de l'atteinte du déficit zéro et que, maintenant, Télé-Québec est vis-à-vis des enjeux. Si on en veut une, vraiment, une télévision éducative, une télévision culturelle, une télévision qui couvre les régions, bien, il faut lui donner les moyens alors que cet univers des télécommunications se structure autour de grands joueurs, puis que, nous, on reste avec un Télé-Québec qui est devenu un petit joueur.
Rappelons les enjeux qui confrontent Télé-Québec actuellement. Il y en a un, majeur, M. le Président; c'est tout l'enjeu de la numérisation de ses équipements et de ses archives. Je vous lis un extrait de ce que nous disait la présidente de Télé-Québec, Mme Doris Girard, récemment, lors de l'étude du plan triennal de Télé-Québec. En passant, je vous souligne que Mme Girard est maintenant devenue la sous-ministre du ministère de la Culture et des Communications. C'est quelqu'un de crédible, M. le Président.
Elle nous disait: «25 millions...» Parce que non seulement il y a un manque à gagner de 10 à 12 millions, mais voici les besoins de Télé-Québec, M. le Président, selon sa présidente: «25 millions de dollars, c'est ce qui avait été prévu en 1995 comme étant le Fonds des partenaires, mais c'est un 25 millions qui nous manque toujours.» Et je lui pose la question: Est-ce que c'est un 25 millions récurrent, Mme la présidente? Et elle me répond: Bien oui.
Donc, selon la présidente de Télé-Québec, l'ancienne présidente maintenant sous-ministre du ministère de la Culture, c'est un 25 millions récurrent qui manque à Télé-Québec. D'ailleurs, je souligne que le poste de président de Télé-Québec n'a toujours pas été comblé par la ministre. C'est peut-être un indice de l'intérêt qu'elle porte à la chose. Mais, chose certaine, M. le Président, en ce moment, nous avons besoin, à la lumière de ce budget où nulle part il n'est question de Télé-Québec, on a besoin d'un son de cloche clair de la vision de la ministre, de sa volonté pour le développement de Télé-Québec.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Sauvé. Je vais céder la parole maintenant à Mme la ministre de la Culture et des Communications. Mme la ministre.
Mme Diane Lemieux
Mme Lemieux: Alors, M. le Président, comment peut-on dans une même journée demander et s'attendre à plus d'investissements en santé, plus en éducation, plus en transport, plus en tout ce que vous voulez... Parce que tous les jours dans cette salle, dans cette Assemblée, M. le Président, le Parti libéral se fait une spécialité de demander toujours plus d'argent et à la fois demander des baisses d'impôts. Notre budget personnel, M. le Président, quand on a à gérer notre budget personnel, on s'assure que nos revenus puissent absorber nos dépenses. C'est la même chose pour le budget du Québec.
Alors, je tiens à commencer mon intervention de cette manière-là, M. le Président, parce que l'opposition est terrible à ce sujet-là. Il faut toujours en mettre plus, il ne faut jamais faire de choix, et on gère les finances publiques, M. le Président, comme si c'était un club sandwich. Et c'est pour ça, M. le Président, que, lorsque ce gouvernement, en 1994, est rentré, il a eu toute une pente à remonter pour remettre de l'ordre dans les finances publiques, pas juste pour le plaisir de remettre de l'ordre dans les finances publiques, pour faire en sorte que les Québécois, ils aient un État qui soit gérable et que les Québécois aient un gouvernement qui utilise de manière judicieuse et pertinente les impôts qu'ils versent à l'État québécois. Alors, je me permets d'introduire mon intervention de cette manière-là.
Je voudrais également rappeler que le budget ? et la ministre des Finances a été très claire à ce sujet à ce moment-ci ? 2001-2002, qui comportait un certain nombre d'ajustements et d'ajouts de sommes d'argent, notamment à Télé-Québec mais également à d'autres secteurs d'activité culturelle, est respecté, et ça, là, c'est un miracle, M. le Président, dans le contexte actuel. On a une baisse de la croissance économique, et là, la députée de Sauvé nous dit: Pourquoi qu'on rajoute pas ceci et cela? Un instant! C'est un miracle qu'on ait pu faire en sorte que les dépenses qui étaient prévues vont être effectuées tel que convenu dans le dernier budget.
Télé-Québec, c'est une organisation qui est importante dans le paysage télévisuel québécois. Ça, je n'ai aucun doute à ce sujet-là. Et, en plus, Télé-Québec ? parce que c'était le point de départ de l'intervention de la députée de Sauvé ? a, à partir des budgets qu'elle a, cette capacité d'assurer une présence en région originale, si on compare à d'autres grands réseaux de télévision. En fait, la présence régionale de Télé-Québec en région, la présence régionale est beaucoup plus diversifiée que d'autres grands réseaux qui ont des moyens très importants.
Alors, M. le Président, oui, c'est une télévision importante, une télévision qui bénéficie de 54 millions de dollars, en incluant les services de dette, une télévision qui a une présence importante, diversifiée en région, une télévision qui fait la différence dans la manière de faire la télévision au Québec. Mais, M. le Président, je crois que, dans le contexte actuel, il nous faut faire les choix les plus judicieux.
Je ne peux m'empêcher de dire, M. le Président, qu'il y a quelques minutes de cela la vice-première ministre et ministre des Finances a procédé à la lecture du budget et qu'elle a annoncé des investissements très importants, très significatifs; je crois que c'est du jamais vu dans le domaine des équipements culturels.
Et, M. le Président, je vais le réexpliquer à la députée de Sauvé, dans un contexte aussi difficile comme le nôtre, dans un contexte où il faut contrôler nos dépenses, dans un contexte où on sait qu'il est fort possible que nos dépenses soient plus importantes, comme l'économie, étant dans une situation plus difficile, va donc créer de la pression sur certaines dépenses publiques, dans ce contexte-là, il fallait faire d'autres choix que d'ajouter strictement des sommes d'argent dans les dépenses. Nous avons fait le choix d'accélérer des investissements et, ce qui est formidable, c'est que la vice-première ministre a été convaincue, comme moi, que le milieu culturel pouvait occuper un espace dans ce plan de relance de l'emploi et de l'économie québécoise.
n(18 h 40)n Alors, la ministre des Finances a donc annoncé 100 millions de dollars de plus ? de plus ? que les budgets déjà attribués au ministère de la Culture et des Communications pour les équipements culturels. Je rappelle les grands secteurs: d'abord, nous aurons un peu plus de moyens pour continuer à construire et à rénover nos lieux culturels, qu'il s'agisse de bibliothèques, de musées, de salles de spectacle, de centres de formation. Nous pourrons moderniser nos équipements spécialisés; nous allons également investir au sujet du patrimoine bâti et particulièrement pour le patrimoine religieux. Nous allons faire des efforts pour la politique de la lecture et du livre. Alors, c'est là des gestes qui seront extrêmement importants. Et, lorsque j'annoncerai l'ensemble de ce plan d'action détaillé, bien, on pourra, là, discuter de ces choix. Il nous faut faire les choix les plus judicieux, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de Sauvé pour sa réplique de deux minutes. Mme la députée.
Mme Line Beauchamp (réplique)
Mme Beauchamp: M. le Président, là, ce que tout le monde a entendu, c'est la ministre de la Culture et des Communications affirmer que le choix le plus judicieux jusqu'à la fin de l'année financière 2002-2003, c'est de ne pas donner de moyens à Télé-Québec, pas pour lui donner plus de moyens... même si on veut que Télé-Québec établisse des partenariats, comme le président du Conseil du trésor l'a affirmé, comme à l'unanimité des membres de la commission de la culture l'ont proposé, Télé-Québec n'a pas de marge de manoeuvre pour le faire.
Je rappelle à la vice-présidente du Conseil du trésor qu'un des principaux enjeux de Télé-Québec, c'est la numérisation, entre autres, de ses équipements. Ça s'appelle aussi des immobilisations, ça. Ça se traitait en service de la dette, Mme la vice-présidente du Conseil du trésor. Mais le choix que vous avez fait, c'est de ne pas donner aucune marge de manoeuvre à Télé-Québec. Ça veut dire, ça, que la phrase qu'elle nous disait cet après-midi même, là, je lis bien, là: «Je pense qu'on fera les choix judicieux pour Télé-Québec et pour l'avenir de Télé-Québec», c'était du blablabla, ça, à une heure et demie du budget. Ça, ça veut dire que la personne qui aurait dû se lever en cette Chambre, à ma question: Qui a raison? Est-ce qu'on va sabrer les budgets, est-ce qu'on va les augmenter? C'est le président du Conseil du trésor qui aurait dû se lever à ma question.
M. le Président, ça signifie pour moi que la ministre semble accorder, selon moi, assez peu d'intérêt à Télé-Québec. D'ailleurs, je tiens à souligner qu'elle a fait la demande pour qu'on reporte le débat de fin de séance aujourd'hui. Ça me fait dire que, sûrement, elle aurait préféré... on dirait qu'elle est plus occupée à se comporter comme vice-présidente du Conseil du trésor et comme candidate potentielle à la course à la chefferie du Parti québécois plutôt que de se comporter véritablement comme ministre de la Culture et des Communications. On l'a peut-être empêchée d'aller au cocktail qui suit le budget; peut-être qu'elle voulait aller y chercher des appuis pour la course à la chefferie du Parti québécois qui va avoir lieu prochainement.
Mais je terminerai en lui rappelant le message que lui envoie Michel David, dans le journal Le Devoir, aujourd'hui: «Avant tout, là, la lionne devrait rentrer dans ses terres puis aller s'occuper de son comté de Bourget. Ça se peut qu'elle ait des difficultés à la prochaine élection.»Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Sauvé.
Ceci met fin au troisième débat, à nos travaux de la journée. Nous sommes bien jeudi soir, donc nous ajournons à mardi prochain, 10 heures.
Ajournement
(Fin de la séance à 18 h 43)