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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mercredi 22 novembre 2000 - Vol. 36 N° 141

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Table des matières

Affaires du jour

Présence du président de la Chambre des députés de la dernière Législature
de l'Assemblée nationale de la république d'Haïti, M. Vasco Thernelan

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

heures une minute)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour, mesdames, messieurs. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Si vous voulez prendre place.

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande
au gouvernement de procéder à l'adoption
d'une loi-cadre sur l'élimination de la pauvreté

Alors, aux affaires du jour, à l'article 63 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député de Laurier-Dorion présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté sur la base des objets, des principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

À la suite d'une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat, le partage du temps a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées au député indépendant; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement; et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes pourra être utilisé par l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par le député indépendant sera redistribué entre les deux groupes parlementaires. Les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Je suis prêt maintenant à entendre le premier intervenant, M. le député de Laurier-Dorion. M. le député, la parole est à vous.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. La motion que vous avez devant vous est l'aboutissement d'une idée qui a pris racine il y a à peu près trois ans et demi, en 1997, quand un groupe de personnes qui travaillent de près avec des personnes touchées directement par la pauvreté, des gens qui oeuvrent dans des associations et des groupes communautaires, qui sont issus de ce milieu et qui connaissent très bien la réalité que vivent ces gens-là, ont commencé à réfléchir à des idées sur le comment on peut faire en sorte de faire reculer la pauvreté et viser l'élimination de la pauvreté au Québec. Et c'est une idée qui a été travaillée par des centaines et je dirais même des milliers de citoyens à travers le processus qui a été déclenché à ce moment-là.

Une adoption symbolique a eu lieu l'année passée, au mois de mai, on se rappellera, lors d'un regroupement, une manifestation qui s'est organisée ici. Ce projet de loi qui est mis de l'avant par le Collectif a été adopté de façon symbolique au mois de mai. Par la suite, il y a eu des rencontres qui ont eu lieu avec les caucus respectifs de nos partis politiques, avec les chefs des partis politiques, et, quant à nous, du côté de l'opposition officielle, nous avons par la suite entrepris un dialogue continu avec les membres du Collectif, qu'on rencontre quotidiennement... pas quotidiennement, mais de façon déterminée, à périodes fixes, pour qu'on puisse justement discuter et examiner le contenu et d'autres éléments qui touchent cette question de la pauvreté, M. le Président.

Cette démarche de l'adoption d'une loi, qui est proposée par le Collectif, se veut aussi une tentative de brancher le citoyen plus directement sur le processus de la vie parlementaire et démocratique et de nous brancher aussi, nous, des représentants de ces citoyens, plus directement avec les préoccupations les plus immédiates tout au moins de cette partie de la population qui est directement touchée et concernée par la question.

Je suis donc, M. le Président, particulièrement heureux de pouvoir proposer, au nom de mon caucus, qui a discuté et entériné la démarche, et de mes collègues de l'opposition officielle, cette motion qui nous demande tout simplement de prendre position. Je le fais dans l'esprit de la démarche, une approche qui veut que le débat ait lieu par rapport à l'objet recherché et l'instrument proposé, et éviter ainsi de prendre le chemin de la joute politique partisane habituelle dont vous témoignez souvent, M. le Président.

Je le fais également avec le désir de recueillir l'unanimité autour de l'idée d'un projet de loi-cadre, M. le Président, qui vise à éliminer la pauvreté au Québec d'ici une période de 10 ans. C'est ainsi qu'il n'y a rien dans la motion qui attaque ou qui blesse, il n'y a rien non plus qui vise à blesser la fierté de l'autre partie ou mettre en doute sa sincérité. Il y a dans la motion, M. le Président, simplement un positionnement de chacun d'entre nous, qui est recherché. C'est le propre de ce que nous sommes ici pour faire: prendre des positions pour faire avancer des enjeux de la société.

Donc, examinons brièvement... Et je tiens à être bref, M. le Président, parce que je sais qu'il y a un bon nombre de mes collègues qui voudront intervenir aujourd'hui mais qui ne pourront pas étant donné que nous sommes très limités dans le temps dont nous disposons. Donc, je serai bref, pour ma part, afin de permettre au plus grand nombre de mes collègues d'intervenir, si ce n'est que brièvement.

Commençons avec une lecture de la motion, pour ceux qui nous écoutent. La motion demande la chose suivante:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté sur la base des objets, des principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

Pourquoi une loi? Parce que, M. le Président, il n'y a rien de plus solennel. Pourquoi une loi? Parce qu'il n'y a rien non plus de plus concret dans la vie démocratique et de notre travail parlementaire et parce que ça serait la démonstration la plus évidente de notre volonté de donner un vrai sens au discours qu'on tient.

Une loi-cadre, M. le Président, sur la base des objets, des objectifs et des principes de la proposition mise de l'avant par le Collectif. Vous remarquerez, M. le Président, qu'il s'agit d'une démarche qui réserve aux parlementaires la responsabilité de choisir les moyens. Ce n'est que normal, ce n'est qu'à la suite des analyses, des débats, des évaluations que ces moyens devront être décidés. Mais, d'ores et déjà, nous pouvons, je crois, nous mettre d'accord sur l'idée d'une loi-cadre comme véhicule pour atteindre les objectifs visés et sur les objets et principes qui devraient guider notre conduite.

Alors, examinons donc aussi très brièvement les objets, les principes et les objectifs auxquels la motion réfère. Au coeur de la démarche, il y a trois principes.

Premièrement, l'élimination de la pauvreté est une priorité de l'action gouvernementale. Le dire, le faire entériner par l'adoption d'une loi serait la démonstration évidente que ce n'est pas juste des mots qui peuvent être mis de côté, parce que, effectivement, il n'y a rien de plus solennel que l'adoption d'une loi.

Deuxièmement ? et c'est important, ceci ? l'amélioration du revenu du cinquième le plus pauvre de la population prime sur l'amélioration du revenu du cinquième le plus riche. C'est important, M. le Président, parce que réduire les écarts, et des écarts qui grandissent... On le voit, quand on regarde et on examine de plus près les statistiques qui touchent la question du revenu par répartition au niveau des différentes strates de la population, que les écarts grandissent. Les riches deviennent plus riches, les pauvres deviennent plus pauvres. Est-ce qu'on ne peut pas s'entendre que les actions que le gouvernement va adopter auront comme objet d'essayer de réduire ces écarts non pas en réduisant nécessairement les revenus des uns, mais en augmentant les revenus des autres, avec un accroissement de la richesse et une distribution appropriée? Et, si on se donne un véhicule pour examiner les décisions qu'on prend comme gouvernement et comme société, nous pourrions, à ce moment-là, viser juste par rapport au principe qui est énoncé dans la proposition que nous avons.

Et, troisièmement, troisième principe, associer les plus concernés à la démarche. Nous le faisons tout le temps avec toutes sortes de groupes d'intérêts. Que ça soit des groupes d'entreprises, que ça soit des hommes d'affaires, que ça soit des représentants des milieux syndicaux, que ça soit des représentants de travailleurs dans certains secteurs ? et je pense au secteur forestier ? nous le faisons. Mais faisons-le plus concrètement par rapport à la question de la pauvreté et reconnaissons le travail colossal qui a été fait par des milliers et des milliers de personnes qui ont oeuvré pour qu'on arrive ici aujourd'hui.

n(10 h 10)n

Je soulignerais que, dans quelques heures, nous allons recevoir une pétition ici, à l'Assemblée nationale, qui est signée et appuyée par 215 000 pétitionnaires, 215 000 personnes à travers le Québec; et ça aurait pu, j'en suis convaincu, être davantage. Mais 215 000 personnes ont pris la peine d'inscrire leur nom, de signer, de mettre leur adresse, en appui à la demande de l'adoption d'une telle loi. C'est donc quelque chose qu'on devrait avoir à l'esprit dans l'avenir. Travaillons pour éliminer la pauvreté, mais associons aussi les personnes les plus immédiatement concernées à cette démarche.

M. le Président, voilà les trois principes qu'on trouvera, qu'on devrait trouver dans une loi. L'objet fondamental de la loi, parce que la motion parle de l'objet, serait d'instituer, et je cite, «un programme permanent» ? et je souligne le mot «permanent» ? et c'est de là que découle la signification d'une loi, M. le Président. Non pas une politique, non pas un programme parallèle, mais une loi adoptée par l'Assemblée nationale, qui établirait un programme permanent, gouvernemental, visant l'élimination de la pauvreté.

Ce programme, quant à nous, devrait être global et être priorisé par le gouvernement. Global parce que les effets de la pauvreté se font sentir partout: ils se font sentir en santé, en éducation, sur le marché du travail, M. le Président. Et les conséquences de la pauvreté ont des coûts réels sur la société et des coûts réels qui sont touchés et qui touchent nos budgets. Donc, si on va viser à éliminer la pauvreté, on va le faire aussi parce qu'on va pouvoir mieux utiliser les deniers que nous avons et libérer ainsi de la richesse pour justement viser le principe qu'on avait mis de l'avant au départ, M. le Président: améliorer le revenu du cinquième le plus pauvre de la population.

M. le Président, les objectifs, il y en a cinq; je ne les lirai pas tous, ils sont contenus... Mais, oui, je peux les lire, M. le ministre, je n'ai pas de problème, pas du tout. Au contraire, ça me fera plaisir de prendre les 30 secondes de plus d'un de mes collègues pour vous les lire.

Les objectifs du programme, au terme du second plan d'action, sont les suivants, et c'est les objectifs qu'on devrait viser. La pauvreté est éliminée en tant qu'obstacle à l'exercice effectif des droits et libertés de la personne; l'atteinte de cibles le démontrant, établissons des cibles, mesurons, et c'est ça qu'on devrait viser comme objectif. Les revenus et la qualité de vie des personnes constituant le cinquième le plus pauvre de la population se sont substantiellement améliorés, l'atteinte de cibles de revenus et d'indicateurs de développement humain le démontrant. Les écarts de revenus privés et le revenu disponible entre le cinquième le plus pauvre de la population et le cinquième le plus riche ont été réduits, l'atteinte d'une cible le démontrant. Les particuliers et les entreprises relèvent d'un régime fiscal intégré fondé sur un principe d'équité générale et de progressivité qui inclut toutes les personnes dans la redistribution de la richesse. Et, cinquièmement, les inégalités génératrices d'une pauvreté plus grande, notamment chez les femmes, les jeunes et la population de certaines parties du territoire, ont été éliminées, l'atteinte de cibles le démontrant. On voit là, M. le Président, qu'il y a des cibles qui sont mises de l'avant, des objectifs qu'on se donne et une façon de pouvoir mesurer l'atteinte de ces objectifs.

M. le Président, j'invite tout sincèrement et simplement ? parce que, déjà, j'ai dépassé le temps que je me suis alloué, parce que je veux, comme je dis, permettre au plus grand nombre de mes collègues de prendre part à ce débat ? tous les parlementaires à participer à l'adoption de cette motion pour qu'on puisse justement faire avancer le débat qui a été entamé par des centaines et des milliers de personnes à travers le Québec et qu'on puisse effectivement se donner un Québec où la destination, c'est pauvreté zéro, pas seulement déficit zéro, mais pauvreté zéro également. Un Québec sans pauvreté, ça donnerait aussi un sens à nos affaires. Et, si on me dit que ce n'est pas possible, regardez ailleurs. Il y a des sociétés qui réussissent à éliminer la pauvreté.

Et, M. le Président, je suis convaincu que, si nous entamons ce débat avec l'adoption de cette motion, nous pourrions effectivement faire avancer cette question de la façon la plus concrète et la plus correcte, si vous voulez, par rapport au travail que nous avons à faire ici comme parlementaires. Alors, M. le Président, je vous remercie de m'avoir écouté. Et je suis convaincu que nous recevrons ? j'espère, en tout cas ? l'appui de tous les parlementaires ici. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Laurier-Dorion. Sur cette même motion, je cède maintenant la parole au ministre de la Solidarité sociale. M. le ministre, la parole est à vous.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, c'est avec enthousiasme que j'accueille l'initiative du député de Laurier-Dorion qui aujourd'hui nous convie à un débat important sur la pertinence de poursuivre une réflexion parlementaire dans l'Assemblée nationale sur le projet de loi qui a été proposé par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté. En effet, aujourd'hui, les parlementaires seront saisis d'une pétition signée par plus de 200 000 Québécois et Québécoises et qui sera déposée, faut-il en convenir, d'une façon un peu originale, puisque l'ensemble des formations politiques ont convenu de déposer une partie des pétitions, ce qu'on appelle un extrait de pétition. Et c'est donc de concert que les formations politiques présentes à l'Assemblée nationale, que les parlementaires manifesteront leur intention de continuer à lutter avec ardeur contre la pauvreté et travailleront aussi dans chacune de nos commissions parlementaires, dans chacun des forums où nous avons l'occasion de nous exprimer, prendront dans les faits l'engagement d'avoir constamment en tête l'objectif de la réduction de la pauvreté.

Je veux vous dire, M. le Président, d'entrée de jeu: De ce côté-ci de l'Assemblée, nous sommes tout à fait favorables à une stratégie globale et structurante de lutte à la pauvreté. Et c'est à partir de cette réflexion que je veux aujourd'hui intervenir et que je veux aussi tracer un peu une perspective dans laquelle la société québécoise a évolué au cours des dernières années.

D'abord, M. le Président, les premiers mots vont à ceux qui ont initié les travaux du Collectif pour l'élimination de la pauvreté, à ces hommes et ces femmes qui ont organisé le Parlement de la rue puis qui ont mené une action citoyenne, qui ont pris la parole et qui, de façon bien concrète, nous interpellent aujourd'hui.

Je le répète, M. le Président, de ce côté-ci de cette Chambre, nous sommes convaincus que les organisations de ce genre, les organisations communautaires dans leur ensemble jouent un rôle important de transformation sociale et que nous avons comme parlementaires un grand intérêt à nous associer à ces personnes pour réfléchir sur les politiques qui sont développées par les gouvernements, pour les enrichir, pour les bonifier, pour les transformer. Il y a donc là un dialogue citoyen qui est engagé, il est certainement porteur pour l'avenir, il va d'ailleurs dans le sens de l'ensemble des initiatives que de nombreux groupes communautaires ont prises au cours des dernières années. Il s'agit de voir la participation active des groupes communautaires, des groupes progressistes au débat sur l'égalité entre les hommes et les femmes, la présence des groupes au Sommet du Québec et de l'économie, la participation massive des groupes communautaires à l'occasion des travaux menés par M. Gérald Larose au sujet d'une politique de reconnaissance de l'action communautaire autonome. Donc, il y a une société québécoise qui est en effervescence, qui est en foisonnement.

M. le Président, il faut, pour apprécier la motion du député de Laurier-Dorion, un peu voir de quelle façon les choses ont progressé au cours des dernières années. J'ai la conviction, comme membre de cette Assemblée et au nom du gouvernement du Québec, que l'ensemble des gouvernements, au-delà de toute allégeance politique, ont, chacun à leur façon, poursuivi la recherche du bien public, de l'intérêt commun. Le gouvernement du Parti libéral, qui a occupé les banquettes du pouvoir pendant plus de neuf ans, le Parti québécois auparavant, notre gouvernement aujourd'hui, je pense que l'ensemble des parlementaires, où qu'ils soient dans cette Assemblée, ont d'abord en tête cet objectif de recherche du bien commun, de l'intérêt public et d'une redistribution la plus équitable de la richesse. Il faut donc apprécier la proposition d'aujourd'hui dans un contexte où la société québécoise ne part pas de zéro. Les gouvernements de tous les temps ont mené des actions énergiques pour lutter contre la pauvreté et ont toujours eu en tête cet objectif.

n(10 h 20)n

Il est vrai que, dans la société québécoise, il y a eu un certain nombre de grands bonds et d'efforts lourds concertés pour lutter contre la pauvreté. Et je voudrais rappeler, si nous faisons une appréciation du contexte dans lequel nous devons débattre de cette proposition, ce que des spécialistes du Conseil des affaires sociales écrivaient au sujet de la Révolution tranquille. Parce que je pense que, si nous voulons aujourd'hui débattre de la qualité et d'un effort nouveau à faire pour lutter contre la pauvreté, il faut l'apprécier dans un contexte québécois. Ce que le Conseil des affaires sociales dans Deux Québec dans un, publié en 1989, qui est pour moi véritablement un outil de référence, ce qu'ils écrivaient au sujet de la Révolution tranquille, à la page 109, et je cite, M. le Président:

«Les grandes politiques mises en place durant la Révolution tranquille avaient déclaré la guerre à la pauvreté. C'est ainsi que plus personne ne devait souffrir de pénurie pour l'acquisition de biens essentiels; l'aide sociale y verrait. Plus personne ne devait être privé de soins; la consultation du médecin et l'accès à l'hôpital seraient gratuits. Plus personne ne pourrait invoquer l'impossibilité de se faire instruire. Au fond, comme dans la Constitution américaine, l'État s'était donné comme objectif le bonheur du citoyen. Vingt ans plus tard, où en sommes-nous?» Voilà la question que se posait le Conseil des affaires sociales.

En somme, dans notre histoire, nous avons pu franchir un très grand bond quantitatif et qualitatif. L'État québécois s'est développé. L'entrepreneurship des Québécois francophones s'est développé. Nous nous sommes dotés d'institutions publiques modernes, entre autres d'un ministère de l'Éducation. Nous avons fixé donc la barre très haute et, dans un effort concerté, avons véritablement fait un bond dans la modernité et avons rompu avec certaines pratiques du passé.

Je pense qu'il faut partir de cette réflexion pour comprendre que les Québécois et les Québécoises, qui vivent dans le quotidien des choses cette solidarité entre eux, entre leurs différentes communautés, avaient à ce moment-là bien compris les impératifs qui s'imposaient dans un Québec où la pauvreté, particulièrement la pauvreté des personnes aînées, particulièrement la pauvreté des femmes, était une chose vécue trop souvent au quotidien.

Dans ce contexte, M. le Président, de grandes lignes de force se sont développées. Et nous ne pouvons aujourd'hui parler de lutte à la pauvreté sans parler de l'importante, de l'impérieuse question de l'éducation. Le meilleur programme pour lutter contre la pauvreté demeure l'éducation, l'éducation, toujours l'éducation et encore l'éducation, puisqu'il est vrai que nous ne naissons pas tous égaux dans notre société. Il y a des gens qui, à cause d'une plus grande chance que d'autres, vont compter sur des parents qui auront peut-être davantage d'habilités ou, dans bien des cas, davantage de moyens, qui vont avoir davantage de possibilités d'appuyer le cheminement d'un jeune enfant. Et c'est là une réalité de la vie.

Mais collectivement nous avons fait le choix de nous doter d'institutions publiques d'enseignement pour faire en sorte que tous aient des chances égales et que nos institutions publiques soient là pour combler des inégalités qui, dans les faits, sont bien présentes dans nos sociétés. L'éducation est donc le grand vecteur à travers lequel la société québécoise, au cours des 30, 40 dernières années, a fait le choix de lutter contre la pauvreté. D'autres stratégies sont aussi apparues, qu'on pense à l'importance de la prévention dans le domaine de la santé et des services sociaux, l'importance d'agir et de soutenir les familles. Donc, toutes sortes d'autres stratégies sont apparues. Mais il y a d'abord là un élément important qui est celui de l'éducation.

Deuxièmement, M. le Président, il faut voir que ces institutions que nous avons développées au profit de la Révolution tranquille nous ont amenés un peu à développer une vision centralisatrice des choses et que des gens qui s'intéressaient à l'importance du développement local, des communautés locales, ont interrogé ces façons de faire et ces pratiques qui avaient été retenues au milieu des années soixante.

C'est le même Conseil des affaires sociales qui écrit, en 1992, au sujet du développement local, de l'importance du développement local, qui critique certains acquis de la Révolution tranquille de 1960 et qui nous dit: «La mise en place de ces conditions signifie que les gouvernements centraux doivent modifier leur attitude et faire confiance aux communautés locales et leurs instances élues, confiance à leur capacité d'assumer de nouvelles responsabilités et gérer des outils qui puissent développer des solidarités locales et augmenter les chances des entrepreneurs et des personnes sans emploi de participer à la création de la richesse. Ces communautés se réjouissent de l'intention de l'État de se faire accompagnateur plutôt que tuteur de leur développement.» Voilà ce qu'on écrivait en 1992, en critiquant les acquis de la Révolution tranquille auxquels j'ai fait référence tout à l'heure.

Donc, un nouveau plaidoyer, fort, en faveur du développement local, ce qui a donné lieu à toutes sortes de politiques. Pensons au député Picotte, alors ministre responsable des Régions, qui, un des premiers en cette Assemblée, avait déposé une politique et une stratégie de développement local qui a par la suite été reprise par l'actuel gouvernement, enrichie, puis qui encore aujourd'hui fait l'objet de discussions dans notre société. Donc, acquis importants de la Révolution tranquille, mais choix importants aussi du développement local.

Et ça, c'est une ligne de fond importante de l'action du gouvernement du Québec. Nous ne pouvons pas aujourd'hui, si nous voulons intensifier nos efforts sur la lutte à la pauvreté pour soutenir la plus grande participation de tous et toutes au développement de la société, nous ne pouvons pas, M. le Président, oublier cette importance que constitue le développement local. Et, si nous pensons à un État bien organisé, cet État doit aussi adopter des politiques qui sont efficaces.

Grand vecteur de développement de nos efforts de lutte à la pauvreté, la question de l'incitation au travail.

Et je reviens, M. le Président, à 1984, livre blanc sur la fiscalité, alors présenté par le ministre des Finances, qui, sur la question de la lutte à la pauvreté, en faisant référence à l'incitation au travail, nous disait la chose suivante: «Le régime de taxation et de transfert peut influencer l'efficacité d'une économie de nombreuses façons. Si l'on se réfère à la situation actuelle, où l'impôt sur le revenu est devenu le principal moyen de prélever des taxes chez les particuliers, il apparaît que le régime de taxation diminue l'efficacité de l'économie et désincite au travail en rendant moins rémunérateur le fait de gagner un revenu. Cette situation est encore plus vraie lorsqu'on intègre à la taxation la dimension apportée par les programmes de transfert, plusieurs d'entre eux taxant à leur façon le revenu, puisque leurs bénéfices sont inversement reliés au niveau de revenu des bénéficiaires.» Constatation importante faite par le gouvernement du Québec. Et j'ajoute: «Comme on l'a vu précédemment, un autre frein qui s'ajoute aux taux marginaux de réduction des prestations du programme d'aide sociale est la crainte de perdre totalement sa prestation pour besoins spéciaux lorsqu'on accepte un emploi à un niveau de revenu plus élevé que la prestation d'aide sociale.»

M. le Président, il a fallu 14 ans, il a fallu le retour d'un gouvernement du Parti québécois pour mettre en force des recommandations du livre blanc sur la fiscalité et faire clairement le choix de l'incitation au travail, la supplémentation des travailleurs et des travailleuses à faibles revenus et faire en sorte que l'État accorde des avantages aux citoyens ou des bénéfices aux citoyens non pas en fonction de leur statut d'assisté social ou pas, mais bien en fonction de leurs revenus. Il y a donc là une autre ligne de force très claire qui s'est développée et qui s'ajoute à celle de l'éducation, à celle du développement local. La question de l'incitation au travail est une clé. Et cette question d'incitation au travail, elle a pu se concrétiser grâce à l'adoption d'une politique familiale dans laquelle le gouvernement du Québec est venu développer de nouveaux services et de nouveaux transferts aux populations.

La question, donc, qui se pose aujourd'hui, lorsqu'on étudie l'opportunité d'adopter la motion du député de Laurier-Dorion, c'est de voir: Est-ce que le Québec a fait un bon chemin? Est-ce que le Québec a une stratégie claire, efficace, de lutte à la pauvreté? M. le Président, je pense que oui. Je pense que la pauvreté régresse au Québec. Et de nombreux résultats sont là pour le confirmer. Je n'en rappelle que deux, puisque je pourrais faire une longue liste des succès du Québec. Je ne veux pas ici m'engager dans un débat qui serait partisan, où le gouvernement tenterait de mettre en évidence ses résultats et la pertinence de ses réformes. Mais, essentiellement, tout le monde au Québec sait que le chômage diminue. Le taux de chômage est passé de 12,6 %, en 1996, à 8,5 %, le mois dernier. Le nombre de personnes à l'aide sociale a diminué de 30 %. Et le taux d'emploi des personnes qui ont de 25 à 54 ans est plus élevé qu'il ne l'a jamais été, il est à 75 %, ce qui constitue un sommet historique.

n(10 h 30)n

Donc, le Québec a une formule qui est gagnante. Le modèle québécois, à bien des égards, produit des résultats. Donc, aujourd'hui, est-ce qu'il faut s'asseoir sur ces résultats ou, comme nous le suggèrent les gens du Collectif pour l'élimination de la pauvreté, est-ce qu'il faut aujourd'hui penser à un nouveau bond quantitatif et qualitatif? M. le Président, je le répète à nouveau, sans aucune hésitation, nous disons oui à une stratégie globale, à un effort concerté entre les différents ministères, avec les groupes sociaux, avec l'entreprise. Nous disons oui à un effort global et à un effort concerté. Parce que les succès dont je vous parlais tout à l'heure ne devraient pas nous éblouir au point de nous faire oublier qu'il y a des gens qui encore, et encore trop nombreux aujourd'hui, ont encore de la difficulté à joindre les deux bouts, pour toutes sortes de raisons. Il y a des gens, par exemple, qui sont davantage loin du marché du travail que d'autres. Il y a des gens qui sont aux prises avec des problèmes de santé ou des problèmes bien réels, des contraintes pour l'accès à l'emploi. Il y a des gens qui parfois sont victimes de discrimination ou de racisme; le chômage, par exemple, des jeunes Noirs est une catastrophe, un taux de chômage deux fois supérieur à la moyenne nationale. Il y a donc des obstacles encore réels, M. le Président.

Malgré le plaisir que j'ai à rappeler les succès de l'économie québécoise, de la force de l'économie et des effets que cela peut avoir sur la lutte à la pauvreté, je dis très clairement qu'il ne faut pas se laisser éblouir par ces succès, et il n'est certainement pas question, dans un contexte de croissance, de s'asseoir sur nos lauriers. Au contraire, M. le Président, c'est dans un contexte de croissance que nous devons nous poser la question des moyens nouveaux pour rejoindre des chômeurs de longue durée, pour aller rejoindre des gens qui, autrement, auraient de la difficulté à avoir accès au marché du travail.

En somme, notre engagement, M. le Président, c'est très certainement de faire en sorte que la croissance économique profite au plus grand nombre. Et c'est dans ce contexte que nous sommes favorables à l'idée d'une action globale concertée qui pourrait nous amener à faire un bond important vers l'avant. Le premier ministre d'ailleurs a eu l'occasion de l'exprimer à la rentrée parlementaire, à l'occasion d'une motion débattue entre parlementaires à l'occasion de la Journée internationale de lutte à la pauvreté. Le premier ministre, aussi, s'est exprimé de façon très claire à l'occasion d'un discours prononcé au Conseil national du Parti québécois sur ces questions.

Maintenant, dans le contexte d'une volonté puis d'une conscience bien réelles, d'une lecture réelle de la société québécoise, se pose la question de la façon dont on va procéder. M. le Président, les gens du Collectif pour l'élimination de la pauvreté nous demandent l'adoption d'une loi-cadre. Il est clair que l'adoption d'une loi fait figure de symbole très puissant. Il est clair aussi qu'une loi qui contiendrait des objectifs nous condamne à des résultats. Nous adoptons... nous n'adoptons pas... j'allais dire rarement, mais nous n'adoptons pas, M. le Président, des lois à l'Assemblée nationale qui ne veulent rien dire, qui n'ont pas de conséquences pour un temps. Une loi, c'est quelque chose de contraignant et qui nous lie.

Donc, à ce moment-ci, M. le Président, ce que nous tentons et ce que nous voulons dire, ce que je répète, ce que j'ai déjà dit aux gens du Collectif et ce que je veux partager avec les membres de l'Assemblée nationale, c'est que l'idée d'une loi n'est certainement pas à rejeter du revers de la main. Il est clair, par exemple, que nous aurons, au cours des prochaines semaines et au cours des prochains mois, à modifier certaines lois, et concrètement, dans des domaines bien précis, nous agirons dans le sens de nos efforts de lutte à la pauvreté. Donc, nous ne fermons certainement pas la porte, M. le Président, à des amendements législatifs. Mais ce que je souhaite faire, et je pense que là où le débat serait utile, si on veut être sérieux devant nos compatriotes, c'est de rappeler un certain nombre d'éléments de fond puis voir qu'est-ce qu'on veut faire.

Le débat, à mon avis, M. le Président, doit porter sur des moyens, le débat doit porter sur des résultats à atteindre, et c'est là que les débats vont apparaître. Parce que le Collectif sur l'élimination de la pauvreté souhaite un débat non partisan, large puis qui nous appelle, tout le monde, à discuter. Je tiens à le dire avec simplicité et en toute amitié pour les gens qui nous interpellent de cette façon, la vie est beaucoup plus complexe, et nous avons, dans les faits, des opinions très différentes entre nous tous; l'Action démocratique plaide un point de vue, le Parti libéral en plaide un, le Parti québécois en plaide un autre. Nous avons des visions bien différentes sur les moyens que nous devrions prendre pour lutter contre la pauvreté.

Par exemple, on a proposé une augmentation de 0,10 $ du salaire minimum. Les députés libéraux ont dit non, ils n'étaient pas d'accord. Petit exemple, M. le Président, pour rappeler tout simplement qu'il y a des...

Des voix: ...

M. Boisclair: Est-ce que ce n'est pas un fait?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Si vous voulez, on va poursuivre le débat. J'écoute attentivement puis je vais écouter tous les orateurs attentivement, puis je vous demande votre grande collaboration. M. le ministre.

M. Boisclair: Bien, écoutez, on a tous entendu les déclarations du chef de l'opposition. Peut-être que le leader de l'opposition a, lui, un point de vue et puis qu'il n'a pas réussi à convaincre son chef. C'est une autre paire de manches; il le fera quand il sera dans d'autres responsabilités.

Mais je veux tout simplement, par un petit exemple, M. le Président, illustrer que, sur les moyens, il y a des divergences de vues qui sont importantes. Donc, on ne peut pas soudainement penser que, dans un grand effort de solidarité, tous vont convenir des moyens à prendre. Et ce serait malsain, que nous soyons toujours unanimes sur tout dans cette Assemblée, parce que personne ne pense détenir la vérité et qu'à chaque jour un membre du gouvernement, un membre de l'opposition, est susceptible de se faire critiquer sur ses positions et va aussi cheminer dans sa réflexion.

Donc, l'appel à la non-partisanerie tient, d'une certaine façon, d'une utopie, qui est sans doute une belle utopie, mais qui est dans les faits quelque chose d'impraticable, puisque nous avons des partis pris à l'Assemblée nationale. Nous avons une vision de ce que devrait être le Québec, nous avons une vision des choix qu'il nous faut faire et nous débattons entre nous de ces choix à l'occasion de débats à l'Assemblée nationale, et particulièrement à l'occasion des élections.

Puis, s'il faut donner d'autres exemples pour s'en convaincre, rappelons tout simplement le débat sur la caisse d'assurance emploi. Unanimement, à l'Assemblée, nous avons dénoncé les réformes fédérales, l'ensemble des parlementaires étaient contre ces modifications. Nous avons fait un combat solidaire contre la réforme Axworthy, puis le gouvernement fédéral a tranché avec un autre point de vue. Je ne veux pas ici reprendre les mérites du dossier, mais tout simplement rappeler que, dans nos sociétés, il y a des débats. Et c'est une bonne chose qu'il y ait des débats et qu'en bout de course la population puisse trancher.

Donc, M. le Président, il faut revenir sur les moyens, il faut revenir sur les objectifs. Et je pense que, sans rejeter une proposition d'amendement législatif, sans rejeter l'idée d'une loi, le débat que nous devons faire si nous voulons le faire avancer, c'est sur le fond des choses et que, la façon d'apporter des amendements et de les traduire dans le concret, bien suivra sa route. Puis il est clair qu'une des façons dont une assemblée prend des décisions, c'est en adoptant des lois. Ça peut être des décrets, ça peut être des programmes, mais une loi peut aussi être quelque chose qui peut être retenu.

Maintenant, M. le Président, je veux aussi aller un pas plus loin. Le député de Laurier-Dorion nous a rappelé le sens de sa motion, mais a sans doute évité ? puis je comprends que nombreux de ses collègues veulent s'exprimer sur le projet de loi ? d'une certaine façon de s'exprimer sur le contenu du projet de loi, parce que, au-delà des objectifs, il y a des moyens. Et je tiens à en rappeler quelques-uns. Le député s'est exprimé sur des objectifs, il nous a lu les principes, mais il n'a pas parlé des articles du projet de loi. Je pense que la population doit savoir un certain nombre de choses, et les rappeler... Les gens qui ont signé la pétition sont bien au fait, mais je pense que nos auditeurs doivent aussi connaître la nature de ce projet de loi.

D'abord, on y dit que le gouvernement relève, conformément à la Loi sur les normes du travail, le salaire minimum à 8,50 $ en 1999 ? là, je présume qu'il faudrait apporter un amendement: en 2000 ou 2001. Dans les trois années suivant l'entrée en vigueur de la présente loi, le revenu minimal que garantissent les lois sur le soutien du revenu des personnes est progressivement apporté au niveau correspondant au seuil de couverture des besoins essentiels ? ça, ça veut dire 200 $ de plus par mois par personne seule sur le chèque d'aide sociale. Toute personne admissible à la prestation versée au titre de la Loi sur la sécurité du revenu doit avoir accès à un revenu plancher ? ça, ça veut dire l'impunité pour des gens qui ne feraient pas l'ensemble des déclarations; on voudrait, finalement, qu'on ne pénalise plus les fraudeurs.

n(10 h 40)n

Alors, à moins que nous ayons une mauvaise compréhension du projet de loi, il y a certainement des choses dont il faut discuter. Et je veux dire, M. le Président, de façon très claire que toute proposition qui nous amènerait à devoir procéder à une augmentation des impôts ou toute proposition qui devrait nous conduire à faire des dépenses inconsidérées est, au départ, difficilement acceptable. Il faut donc poursuivre avec les gens du Collectif et poursuivre avec ceux et celles qui ont initié cette discussion, il faut poursuivre le dialogue, M. le Président.

Il est certainement beaucoup trop tôt pour que je puisse, de façon sérieuse et de façon crédible, sachant le contexte historique des efforts qu'on a fournis comme société pour lutter contre la pauvreté, affirmer un appui favorable, comme le rappelle le député de Laurier-Dorion, si on relit sa motion, à l'ensemble, par exemple, des objets qui sont mis de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté. Il parle des objets, des principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le Collectif. Il faut, je pense, faire un débat plus sérieux. Je ne pense pas que les gens du Collectif soient ici pour faire des débats de symboles; ils sont là pour faire des débats bien concrets. Puis, quand on rentre dans le concret du projet de loi, moi, je veux vous dire bien honnêtement, comme citoyen, comme membre d'un gouvernement qui sait jusqu'à quel point les Québécois et Québécoises ont fait des efforts pour redresser les finances publiques, je ne suis pas prêt, moi, à mettre à risque les efforts que les Québécois ont faits ces dernières années. Et je ne suis pas prêt, avec la compréhension que j'ai du projet de loi puis des études sommaires, j'en conviens, que nous avons faites, des discussions que nous devons poursuivre avec les gens du Collectif, à donner un chèque en blanc sur ce qui est là.

Il faut, au contraire, en discuter. Puis, à première vue, il y a des choses qui me font peur. Et je le répète, M. le Président, de façon claire, le gouvernement dit que nous ne sommes pas prêts. Je reprends plutôt ma formulation. Le gouvernement dit haut et fort que des propositions qui nous amèneraient à augmenter les impôts ou des propositions qui nous amèneraient à avoir une augmentation inconsidérée des dépenses sont difficilement recevables. À la limite... Ce n'est pas de gaieté de coeur que je vous dis ça, moi. Nous souhaiterions tous faire plus, nous souhaiterions tous être capables de faire mieux. Mais si, pour y arriver, si, pour faire un gain politique facile, nous mettons en péril les grands équilibres sur lesquels le gouvernement a fondé ses espoirs et ses efforts des dernières années, je n'agis pas correctement, je n'agis pas de façon responsable. Et une de nos jobs ici, dans cette Assemblée, c'est d'être responsables aussi en sachant que nous gérons un patrimoine qui n'est pas le nôtre puis qu'on ne doit pas le gérer uniquement à court terme, qu'on doit le gérer aussi à moyen terme.

Je m'exprime, en terminant, M. le Président, sur une chose. Je suis membre d'un parti politique qui fait le promotion de la souveraineté. Je ne m'en cache pas, j'en suis fier. Et je veux dire à nouveau jusqu'à quel point, si nous voulons apprécier nos efforts dans la lutte à la pauvreté, nous, dans cette Chambre, comme d'autres gens dans cette Assemblée, nous avons aussi un projet de société puis nous avons aussi une vision politique sur ce que ça devrait être sur le moyen et le long terme. Et je pense que nous ne pouvons faire fi du contexte dans lequel nous oeuvrons à l'heure actuelle, si on veut faire un bon quantitatif et qualitatif sur nos efforts de lutte à la pauvreté.

Et, M. le Président, les députés libéraux, comme le député de l'Action démocratique et comme l'ensemble des parlementaires, vont reconnaître les conséquences néfastes pour le Québec du déséquilibre fiscal qui nous prive de moyens pour agir en santé, en éducation et à la sécurité du revenu, tout l'ensemble des programmes sociaux. Les députés libéraux réclament des points d'impôts, ils le font avec force, vigueur et à leur façon, dans leurs institutions puis dans les débats publics qui sont les leurs. Nous réclamons la même chose, M. le Président. Nous avons fait un débat, et le premier ministre du Québec aussi, avec d'autres premiers ministres de provinces, a soulevé cette importante question. Pourquoi? Parce que le champ de taxation du gouvernement fédéral par rapport à ses responsabilités est disproportionné. Le fédéral fait des transferts aux provinces, fait des pensions de vieillesse, s'occupe de la défense et perçoit beaucoup plus dans la poche des contribuables que les gouvernements de province qui, eux, font de la santé, de l'éducation, de l'aide sociale, donc, des services de proximité aux gens, puis on perçoit moins. Ce déséquilibre fiscal, il est admis par tous les parlementaires de cette Assemblée et il prend sens, M. le Président ? puis je voudrais déposer un tableau ? il prend sens dans ce tableau. Lorsqu'on regarde la part du financement fédéral dans les transferts sociaux, il est passé, en 1984-1985, à 22,7 % et il diminue en 2000-2001 à un peu moins de... environ 13 %, 14 %. Je n'ai pas la lecture exacte, là, mais le tableau parle par lui-même. Bien sûr, il remonte légèrement après l'entente sur la santé mais, à cause de l'augmentation des coûts de santé qui est exponentielle, il redescend très rapidement.

Ça, M. le Président, c'est une équation que nous avons aussi tous à résoudre si nous voulons lutter avec davantage de vigueur et d'énergie contre la pauvreté. Il nous faut résoudre cette question. Les partis politiques représentés dans cette Assemblée ont des points de vue différents.

Je ne sais pas, M. le Président, s'il y aurait consentement pour que je dépose...

Document déposé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt du document? Alors, ce document est déposé.

M. le ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Boisclair: Parce que, au-delà des intentions que nous pouvons avoir, encore faut-il regarder nos moyens. Moi, je peux bien dire aux gens que je veux faire ci, que je suis d'accord, que je souhaite travailler puis faire davantage, mais si je n'ai pas les moyens derrière, qu'est-ce que je fais? Je serais hypocrite, M. le Président, je mentirais aux gens. Et je veux juste que, comme Québécois, nous regardions cette question-là. Les gens du Collectif comprennent qu'il y a un débat sur cette question. Moi, je plaide une option dont je suis fier ? puis, je pense, c'est la meilleure ? qui est celle de la souveraineté. D'autres ont une autre option, mais tous admettent le problème et que nous ne pouvons pas soudainement, dans des efforts plus costauds de lutte à la pauvreté, penser que nous pourrons tout simplement, comme Parlement de l'Assemblée nationale, accepter par une loi des responsabilités alors que la moitié de la solution est à Ottawa.

Est-ce qu'on est prêts, nous, par une loi ? belle question à se poser ? à s'imposer des objectifs de résultat sachant que la moitié de la solution ou la moitié du problème ? mais, disons... soyons de bon compte, la moitié de la solution ? est à Ottawa? Il faut discuter de ces questions-là, M. le Président. Il faut continuer le dialogue avec les gens du Collectif, et je pense que ces discussions seront fructueuses et qu'elles nous amèneront, pour la suite des choses, à proposer des actions renouvelées de lutte contre la pauvreté.

M. le Président, je pourrais continuer longtemps. Je pourrais vous parler des orientations qui me guident dans ma réflexion en ce moment, des préoccupations qui me guident dans cette réflexion puis dans cette préoccupation que nous avons de lutter davantage contre la pauvreté puis de proposer de nouvelles initiatives. Je pense qu'il faudra toujours rappeler que la création d'emplois est la clé. La création et l'accès à l'emploi sont les deux éléments-clés d'une stratégie de lutte à la pauvreté. Il faudra rappeler que la prévention est un incontournable, aussi. Il faudra rappeler que l'éducation et l'aide à la petite enfance sont des incontournables. Et nous serons capables, je pense, avec les discussions que nous avons avec les gens du Collectif, avec l'ensemble des parlementaires aussi, de répondre aux attentes du Collectif et de faire ce bond quantitatif et qualitatif dont je parlais.

En conclusion, M. le Président, si, ce bond, nous avons à le faire, il faudra qu'il s'inscrive dans un contexte de développement social. Il devra s'enraciner dans les efforts que le Québec a faits ces dernières années. Je vous ai parlé de l'éducation, je vous ai parlé du développement local, je vous ai parlé de l'incitation au travail. Le Québec en a une, stratégie de lutte à la pauvreté. Il demeure toutefois pertinent aujourd'hui de prendre le temps, dans un contexte de croissance, de se poser... C'est là l'obligation que je nous fixe, c'est là où je mets la barre pour nous, les parlementaires: nous avons l'obligation de, nous, dire comment, dans un contexte de croissance, alors que les choses vont mieux, faire en sorte que la croissance profite au plus grand nombre et, pourquoi pas, comment faire pour que la croissance profite à tous.

Motion d'amendement

Je voudrais donc, M. le Président, proposer un amendement à la motion du député de Laurier-Dorion, et je fais motion pour que la motion du député de Laurier-Dorion soit amendée comme suit:

1° par le remplacement des mots «loi-cadre visant l'élimination de» par les mots «stratégie de lutte à»;

2° par le remplacement des mots «sur la base des objets,» par les mots «en prenant en considération certains»;

3° par le retrait des mots «et des objectifs».

Et la motion telle qu'amendée se lirait ainsi:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une stratégie à la lutte à la pauvreté en prenant en considération certains principes de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

n(10 h 50)n

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Pourriez-vous en faire des copies pour les gens de l'opposition officielle? Alors, est-ce qu'il y a des remarques sur la recevabilité de l'amendement? On va attendre quelques instants pour que vous puissiez en prendre connaissance.

M. Boisclair: M. le Président, moi, ce que je vous suggérerais: un petit commentaire sur la recevabilité de l'amendement et peut-être pourriez-vous, pendant l'heure du dîner, délibérer sur la recevabilité ou, en tout cas, prendre une décision au moment où vous le souhaiterez opportun, mais ça serait bien que le débat puisse se poursuivre. C'est ce que je vous suggère.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si vous avez autre chose, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, peut-être dans le sens des remarques du leader du gouvernement, M. le Président, j'aurais possiblement de brèves remarques à vous faire suite à l'intervention d'un prochain intervenant, le temps d'analyser les amendements soumis par le ministre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de...

M. Boisclair: M. le Président, si vous me permettez.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Boisclair: Est-ce qu'on ne pourrait pas plaider immédiatement? Parce que, moi, il faut que j'aille au Conseil des ministres. Est-ce qu'on peut suspendre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): C'est parce que c'est une motion du mercredi ? un instant ? il n'y a déjà pas beaucoup de temps pour discuter de la motion. J'ai bien compris qu'il y avait plusieurs intervenants qui voulaient intervenir. Et, évidemment, ce qui se passe en pratique, c'est qu'on écoute les commentaires sur la recevabilité, après ça le président se fait remplacer par un autre vice-président puis il va délibérer, s'il y a lieu. Alors, si vous voulez qu'il y ait des commentaires, moi, je n'ai pas de problème à les prendre tout de suite.

M. Paradis: Afin de faciliter le travail de tout le monde, M. le Président, y inclus la présidence, moi, j'accepterais, de façon très exceptionnelle, de vous soumettre de brèves notes écrites quant à l'argumentaire. Le leader du gouvernement pourrait faire de même. À ce moment-là, il pourrait aller au Conseil des ministres, les brèves notes écrites pourraient être prises en considération par la présidence avant de rendre sa décision.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il ne semble pas que ça fasse l'affaire. M. le leader du gouvernement.

M. Boisclair: Ayant eu la délicatesse de remettre les amendements hier à l'opposition, donc, écoutez, je pense qu'on pourrait procéder, là, M. le Président, très succinctement. J'ai quelques commentaires sur la recevabilité puis je souhaite que le plus grand nombre puisse s'exprimer, là. Est-ce que vous autorisez les commentaires sur la recevabilité?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Moi, habituellement, quand il y a un amendement comme ça qui est proposé... Au niveau de la responsabilité, ça se fait à ce moment-là, au moment où l'amendement est proposé. Évidemment, compte tenu que le leader de l'opposition... Sauf que vous me dites que l'amendement a été communiqué hier ? je ne suis pas au courant.

Débat sur la recevabilité de l'amendement

Alors, j'attends vos commentaires, je vais écouter vos commentaires.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, très simplement, je m'en référerai au guide que vous nous avez distribué, à tous les parlementaires, qui s'appelle La procédure parlementaire du Québec, et je veux tout simplement le citer: «Pour être recevable, un amendement doit concerner le même sujet que la motion et ne peut aller à l'encontre de son principe.» Je ne pense pas que nous allions là à l'encontre d'un principe parce que la stratégie à laquelle je fais référence n'exclut pas du tout une loi, c'est plus large. Je ne vais pas à l'encontre du principe, j'élargis le principe. Une stratégie n'exclut pas une loi, M. le Président. C'est important de le préciser. Je l'ai bien expliqué dans mon propos aussi.

«Le président doit de plus tenir compte de nombreux critères élaborés par la jurisprudence sur le sujet. Aussi, une motion d'amendement ne peut pas écarter, ni nier, ni dénaturer, ni contredire la motion principale.» Je ne fais rien de ça, je l'élargis, M. le Président. Une stratégie peut inclure une loi.

«Elle ne peut non plus introduire un nouveau principe ? nous ne faisons pas ça, parce que le principe, c'est la lutte à la pauvreté ? c'est-à-dire un sujet nouveau qui de ce fait pourrait être en lui-même l'objet d'une motion distincte.» C'est toujours dans le même sens, M. le Président.

«Par contre, la motion d'amendement peut atténuer la motion principale ou lui apporter certaines précisions.» C'est ce qu'on fait.

«Elle peut aussi donner lieu à un débat plus large ? un débat plus large, c'est ce qu'on fait, M. le Président ? et entraîner des changements même importants à la motion principale, qui permettront à un plus grand nombre de députés d'y adhérer.» C'est ce qu'on fait, M. le Président, parce qu'on veut adhérer à la motion, et c'est dans ce contexte que nous élargissons le sens.

Et je vous rappelle, en toute déférence, M. le Président, que le président n'a pas à déterminer si l'amendement peut être d'une importance telle qu'une fois adopté il pourra amener le député qui a proposé la motion principale à voter contre sa propre motion.

Et, pour vous renforcer dans vos convictions, M. le Président, je vous rappellerais, alors que vous siégiez comme président de l'Assemblée nationale, le 5 mai 1999, la décision 1997-25 au sujet d'une motion du mercredi où vous avez rendu la décision suivante: «Cette motion d'amendement est recevable, puisqu'elle ne va pas à l'encontre du principe. Certes, elle apporte des changements, mais c'est le propre d'une motion d'amendement d'apporter des changements.» C'est tautologique. «Il a été décidé à plusieurs reprises que ces changements pourraient être importants pourvu qu'ils ne dénaturent pas la motion. La motion n'écarte pas et ne nie pas la motion principale ? ma motion n'écarte pas, ne nie pas la motion principale ? elle vient la modifier et peut-être bien sûr l'atténuer, mais elle ne la contredit pas.»

Vous avez vous-même fixé ces critères, M. le Président. Et j'ai confiance que, en toute cohérence, vous accepterez de recevoir cet amendement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, très brièvement, M. le Président, deux points. Dans un premier temps, l'amendement proposé par le leader adjoint du gouvernement consiste à écarter la motion principale, à savoir qu'une loi-cadre serait remplacée par une stratégie de lutte à la pauvreté. Vous aurez compris, comme tous les parlementaires en cette Chambre, que cet amendement dénature complètement le sens même de notre motion et va à l'encontre de la motion principale, telle que proposée par le député de Laurier-Dorion.

Je vous réfère à trois décisions rendues par la présidence, et cette jurisprudence est constante. La première, Jean-Noël Lavoie, le 3 décembre 1975: «L'amendement ne peut écarter la motion principale, la motion de fond.» Une autre, rendue par le président Bissonnet ? vous êtes encore lié, M. le Président, par vos propres précédents ? le 27 octobre 1993: «La motion d'amendement ne peut avoir pour effet d'écarter, de nier ou de changer la nature de la motion de fond.» Et le président Pinard, le 13 novembre 1996: «La motion d'amendement ne peut aborder une question étrangère à la motion principale.»

Deuxième élément, M. le Président. L'amendement du ministre qui vise à remplacer la précision que nous apportons pour que la loi-cadre soit adoptée sur la base des objets, principes et objectifs de la proposition du Collectif pour l'élimination de la pauvreté... ça ne peut être remplacé par les mots «en prenant en considération certains principes de l'approche mise de l'avant par le Collectif». Cette partie de l'amendement n'apporte aucune précision à la motion principale et n'en élargit pas la portée. Au contraire, elle restreint le but recherché par la motion du député de Laurier-Dorion, qui est de s'assurer que cette loi-cadre sera rédigée avec des objets, des principes et des objectifs clairs et transparents. Il ne s'agit pas de repousser l'affaire aux calendes grecques, mais de se donner une vision cohérente de ce qui pourrait être une loi-cadre visant à éliminer la pauvreté.

M. le Président, vous aurez également compris, du discours du leader adjoint du gouvernement, qu'il a parlé lui-même d'une loi-cadre comme d'une valeur symbolique très forte. Sa motion vise à éliminer une loi-cadre. Il a également lui-même parlé ? il est son principal témoin à charge ? d'objectifs précis qui condamnent à des résultats. C'est ce que nous visons, M. le Président, et c'est pas tellement compliqué, là. Si le gouvernement est en faveur, si les ministériels sont en faveur d'une loi-cadre, la motion du député de Laurier-Dorion ne pose pas de problème. Si on veut condamner le gouvernement à des résultats, la motion du député de Laurier-Dorion vise justement à condamner le gouvernement à des résultats. Si, à ce moment-ci, on tente de dénaturer la motion du député de Laurier-Dorion, c'est qu'on est contre la loi-cadre, on est contre des résultats précis pour les plus démunis de la société.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de l'opposition officielle. Un bref commentaire, M. le leader du gouvernement?

M. André Boisclair

M. Boisclair: Très rapidement. M. le Président, avant que des lois soient adoptées, dans la très grande majorité des cas, elles sont précédées par soit un livre blanc, par une stratégie, par des intentions qui sont d'abord annoncées. Par exemple, la politique culturelle a fait l'objet d'une politique avant une loi. La loi est l'aboutissement d'une politique, est l'aboutissement d'une stratégie. Je vise plus large, ce n'est pas contraire. La politique peut conduire à l'adoption d'une loi, M. le Président, comme un livre blanc, comme un livre vert, comme des politiques qui sont adoptées conduisent à une loi. Un bel exemple, la politique sur le taxi qui conduit ensuite à une loi. Je ne restreins pas, j'élargis, M. le Président, le sens. Je rejette l'interprétation du leader de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais prendre ça en délibéré. J'ai besoin cependant de votre... Oui, rapidement.

M. Paradis: M. le Président, le leader adjoint du gouvernement n'a pas semblé saisir la portée du mot «loi-cadre». On ne peut pas être plus large que dans le cadre d'une loi-cadre, M. le Président.

Reprise du débat sur la motion principale
et l'amendement

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, j'ai besoin de votre consentement pour que nous poursuivions le débat sur la motion principale et sur l'amendement. Évidemment, quant à sa recevabilité, je vais la prendre en délibéré. Mais, pour permettre le débat, pour que les choses se passent bien, c'est un consentement qu'on requiert habituellement, qui est accordé à la présidence, compte tenu du temps du débat que nous avons pour cette motion.

n(11 heures)n

Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le whip de l'opposition officielle et député de Châteauguay.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup de plaisir que je joins ma voix à celle de mon collègue de Laurier-Dorion. Avec la motion qui a été déposée ce matin, je voudrais faire des commentaires concernant surtout un des aspects, un aspect fondamental de l'approche par une loi-cadre, c'est la pertinence d'insérer dans nos outils ? et je pense que je vais en témoigner selon certains indicateurs que nous avons... la pertinence d'adopter une approche globale.

Je pense qu'il est normal et facile de constater que, en termes de lutte contre la pauvreté, le mandat ne peut revenir qu'à une seule personne, un seul ministre. On ne peut pas dire à la Solidarité sociale: Voilà, toi, ton mandat, à toi, c'est de régler la pauvreté. Ça interpelle beaucoup plus d'acteurs qu'un seul ministre. Ça interpelle l'ensemble des acteurs et l'ensemble des secteurs de la société, et ça les interpelle tout le temps. Ce n'est donc pas l'affaire d'un seul ministre comme ce n'est pas l'affaire d'un seul forum ou d'états généraux qui durent trois, quatre jours, M. le Président. C'est beaucoup plus large que ça. À mon avis, il n'y aura de société plus juste que lorsqu'il y aura une préoccupation constante de tous les acteurs et de tous les secteurs de la société à l'égard de la pauvreté.

Je voudrais vous parler un peu du domaine de la santé, d'abord pour vous dire que, dans le domaine de la santé, il y a déjà un problème identique, c'est-à-dire que nous fonctionnons, la façon dont le système de santé fonctionne, c'est par silos. Alors, ce qui se fait dans un silo n'est comme pas perçu dans l'autre. Alors, par exemple, vous avez de plus en plus l'utilisation de médicaments qui sert de moyen de régler des problèmes de santé, et tout ce qu'on s'aperçoit, c'est l'augmentation des coûts des médicaments dans les budgets. Mais il faudrait qu'on soit capable de tenir compte des effets qu'ont les médicaments, par exemple, sur la baisse des séjours hospitaliers, donc sur l'économie qui peut être faite. Dans le domaine de la santé, on est pris avec des silos, et la plupart des intervenants veulent qu'on change d'approche.

À l'égard de la pauvreté, c'est la même chose. Les silos gouvernementaux doivent sauter pour permettre une interdépendance réelle et pour que chacun s'aperçoive de ce qui se passe dans la cour de l'autre. Les finances ont certainement un effet sur la pauvreté. Et la pauvreté a un effet sur la santé. La santé a un effet sur les finances.

M. le Président, je voudrais vous parler de certains de ces effets qui concernent la santé et les personnes qui sont démunies dans notre société pour s'apercevoir que justement ça ne peut pas être l'affaire d'une seule personne et qu'il y a lieu d'avoir une approche globale.

Je vais vous parler d'abord du rapport Tamblyn, à propos de l'assurance médicaments, qui a dressé un état de ce qu'il appelle les événements indésirables, les visites médicales et les visites à l'urgence attribuables à une baisse de consommation de médicaments essentiels chez les 450 000 personnes âgées et les 125 000 prestataires de la sécurité du revenu, qui consommaient régulièrement des médicaments essentiels au Québec en 1995-1996.

Le résultat, M. le Président, parce que les médicaments coûtent plus cher, que les gens n'ont pas les moyens de se les payer ? vous savez, avec l'assurance médicaments, il y a des primes à payer, il y a des gens qui n'ont pas les moyens de les payer ? c'est une augmentation de 71 % des visites à l'urgence, de 16 % des visites médicales et une augmentation de 93 % des événements indésirables. Les événements indésirables, ce sont des hospitalisations, des institutionnalisations et des décès.

Ce que je veux dire, c'est qu'entre la pauvreté et la santé il y a un lien direct qui a des effets sur les finances. On voit bien que tout ça est interrelié. Si vous n'avez pas les moyens de vous payer les médicaments, qu'est-ce qui vous arrive? Vous allez de plus en plus devoir reposer sur des visites à l'urgence ou être considéré événement indésirable et, dès lors, un poids additionnel au ministère des Finances.

Il y a d'autres effets aussi. Il y a une enquête sociale et de santé qui vient tout juste d'être produite par l'Institut de la statistique du Québec. Ça vient tout juste de sortir, et ce qu'on y dit, entre autres, c'est ceci: «L'enquête révèle que près du quart des ménages québécois vivent en situation de pauvreté ou d'extrême pauvreté ? ça fait du monde à la messe, comme on dit ? et, parmi les problèmes ? parce qu'il y en a plusieurs ? on note ? chez cette catégorie de personnes démunies ? le problème de l'insécurité alimentaire qui touche une personne pauvre sur cinq ? 20 % ? et quatre personnes très pauvres sur 10 ? près de 40 %.»

Qu'est-ce que c'est, cette insécurité alimentaire, M. le Président? C'est la restriction de l'apport alimentaire ou l'impossibilité d'offrir des repas équilibrés à ses enfants. Qu'est-ce que ça fait, ça, quand vous n'avez pas les moyens de bien vous nourrir? Il y aura des effets sur la santé et il y aura des effets sur les finances de l'État. Tout ça pour dire qu'il y a un lien et qu'il y a une cause à lutter contre la pauvreté, il y a des bénéfices à se battre contre la pauvreté. Il y a plein de statistiques comme celles-là, M. le Président, qui sortent de cette enquête. Je n'aurai pas suffisamment de temps pour faire le tour, puisque plusieurs de mes collègues veulent parler.

Mais je voudrais aussi attirer votre attention sur un autre document qui est paru l'an dernier, qui est un rapport statistique sur la santé de la population canadienne préparé par le Comité consultatif fédéral-provincial-territorial sur la santé de la population. Et, notamment au chapitre de l'indice de santé sociale, ce qu'on dénote ? il y a un graphique qui est assez éloquent: il y a une rupture qui se situe à peu près vers 1980, une rupture complète entre l'accroissement du PIB et l'accroissement de l'indice de santé sociale. Difficile à voir jusqu'ici, mais ce que démontre ce graphique, c'est que les deux lignes se suivent jusqu'en 1980. Autrement dit, lorsqu'il y avait accroissement de la richesse, l'indice de santé sociale lui aussi suivait le même rythme. Or, à partir de 1980, il y a eu une brisure, une cassure. La richesse collective continue de monter, mais l'indice de santé sociale périclite à partir de ce moment-là.

Il faut donc en tirer un certain nombre de conclusions et s'apercevoir, possiblement, qu'une des lacunes qui amènent ce portrait, c'est le fait qu'il n'y ait pas une approche globale, c'est le fait qu'il n'y ait pas une préoccupation constante de tous les acteurs et de tous les secteurs de notre société pour nous assurer une meilleure justice sociale. On l'approche souvent sous l'aspect du partage, sous l'aspect de la générosité, sous l'aspect de l'empathie. J'aimerais aussi soulever l'élément que c'est profitable à tous que ceux qui sont les plus démunis ne le soient plus. C'est à l'avantage de l'ensemble de la société que nous adoptions cette approche globale.

Je parlais, M. le Président, de la mission santé et de la pauvreté et du fait qu'il y a un lien entre les deux. Il y en a d'autres, liens, avec d'autres secteurs: l'éducation, par exemple. Il est bien évident que, lorsque vous êtes en situation difficile... Et je pense ici à certains cas de comté où il y avait des frais de surveillance du midi, des frais d'utilisation à plusieurs égards, il y a la rentrée scolaire qui coûte beaucoup, puis les gens viennent nous voir. Puis là, tout à coup, on s'aperçoit, à force d'entendre les gens, qu'il y en a qui ne mangent pas le matin. Il y a des groupes communautaires qui fournissent des muffins, qui font la distribution pour s'assurer que les jeunes qui sont dans les classes puissent avoir une réelle égalité des chances. Mais on s'aperçoit bien que la pauvreté a un effet sur l'éducation; l'éducation, ça a un effet sur l'économique; puis les politiques économiques ont un effet sur la pauvreté. Alors, il faut être capable d'adopter une approche qui nous réunit tous, qui nous rejoint tous.

Je n'ai pas beaucoup de temps, M. le Président, mais je voudrais terminer en prenant un peu l'exemple de la Marche des femmes qui a été une expérience québécoise et qui par la suite est devenue une expérience canadienne et internationale. Bien, je pense, M. le Président, et je le dis vraiment avec conviction, que le geste que nous allons poser est un geste qui ne s'adresse pas qu'aux limites du Québec, il ne peut pas en être ainsi. Nous devons être une image, un modèle pour l'ensemble de ceux qui nous entourent et avec qui nous sommes dans une situation d'interdépendance. J'ai souvent dit qu'entre être dans le wagon de queue et laisser les autres diriger le train je préférais que nous soyons plusieurs dans la locomotive et que nous puissions influencer la destination qui sera la nôtre. Et je pense que, dans ce cas-là, ces quelques mots étant une très courte réplique à ce que notre collègue faisait à l'égard de ses convictions souverainistes, je voudrais simplement dire que je crois que l'approche globale est une approche qu'on doit adopter au Québec et que cette approche globale doit même déborder nos frontières, que nous soyons capables de rayonner partout et que le nouveau modèle que nous voulons créer soit légué en héritage à chacun qui nous entoure.

n(11 h 10)n

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. On est aujourd'hui en face d'une motion, mais une motion, dans le fond, qui est simplement la suite de semaines, de mois, de plus d'une année, en fait, de travaux par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté, des travaux qui se sont déroulés dans toutes les régions du Québec, des travaux qui ont été certainement parmi les plus grands exemples, les plus grandes manifestations de travail de terrain, de travail populaire, d'expression de la démocratie de base qu'on ait vus au Québec depuis plusieurs années.

Maintenant, aujourd'hui, c'est l'heure où ces travaux qui se sont déroulés dans la population, ces consultations qui ont eu lieu à l'échelle populaire, nous sont ramenés ? ils vont l'être cet après-midi par la voie d'une pétition ? à l'Assemblée nationale pour nous inviter, comme parlementaires, à aller un peu plus loin, pour nous inviter à se questionner, pour nous inviter à étudier comment une loi-cadre pourrait nous donner des mécanismes de suivi, pourrait nous donner des obligations de résultat ? le ministre y a référé, une loi-cadre, c'est des obligations de résultat ? et comment est-ce que, ça, ça pourrait permettre à tous les partis à l'Assemblée nationale de travailler ensemble à faire un pas de plus dans cette lutte à la pauvreté ou ? si on prend les deux négatifs de ce que sont lutte et pauvreté ? cette participation à un enrichissement des citoyens parmi les nôtres qui sont les plus démunis, qui sont les plus dans le besoin.

Il faut, je pense, dès le départ, faire un constat. Et, là-dessus, je comprends que le ministre, comme représentant du gouvernement, doit participer à la présentation d'un bilan positif. Cependant, on sort ou on est encore dans la dixième année d'une croissance économique nord-américaine. Il faut quand même être assez lucides, comme citoyens du Québec, comme société, pour se dire que, si, à l'intérieur de la dixième année d'une période de croissance, d'une période de prospérité rarement vue à travers l'Amérique du Nord, des citoyens de toutes les régions du Québec se sont penchés sur la question de la pauvreté, ont constaté l'existence encore massive de personnes qui sont exclues de cette croissance, qui ne participent pas à l'amélioration des conditions économiques, c'est qu'on a un problème.

Et on ne peut pas dire, malheureusement, que les stratégies existantes fonctionnent bien, on ne peut pas dire que les politiques en place répondent aux besoins, parce que le réel, c'est qu'on vient de passer une année où un Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté a sillonné le Québec, a travaillé avec des citoyens. Puis on connaît les lois de la nature. Je veux dire, la nature a horreur du vide. Si le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté s'était retrouvé devant une problématique qui n'existe plus, si les stratégies en place, si la dernière décennie de croissance économique avaient permis que la lutte à la pauvreté soit déjà une réussite ou soit déjà sur la voie de la réussite, les gens n'auraient pas participé. Les citoyens du Québec, de toutes les classes de la société, de tous les groupes, de toutes les régions, n'ont pas de temps à perdre à travailler sur une problématique qui ne leur apparaîtrait pas réelle. Si des dizaines de milliers de personnes ont participé, signé, travaillé, si aujourd'hui un certain nombre de représentants d'entre eux vont être ici, à l'Assemblée nationale, s'ils nous amènent ces choses-là, c'est parce que ces gens-là constatent que la pauvreté est un problème et que les recettes en place n'ont pas fonctionné.

Et le plus grand risque, M. le Président, c'est le risque de l'oubli. Aujourd'hui, on aurait souhaité consacrer une journée à ça. Bien, le risque de l'oubli, c'est le risque, par exemple, que le débat de fond tombe dans l'oubli, derrière un débat de procédures. Puis là on a vu malheureusement que, du côté gouvernemental, on essaie un peu de faire dévier la motion. Si les gens du Collectif me disaient que la motion, telle qu'amendée, permet d'obtenir l'unanimité puis un consensus, l'initiative leur appartient, et je m'y rallierais, mais j'ai bien peur que ce soit senti comme une façon d'amoindrir l'effort. De la même façon que tout le monde a vu ce matin ce que l'analyste, le journaliste Jean-Marc Salvet, qui observe la scène politique, réalise, que, du côté de l'opposition officielle, on est sur deux initiatives la même journée. Et tout ça me fait craindre que l'initiative, malheureusement, tombe dans l'oubli. On va s'assurer que les gens continuent à travailler là-dessus durant toute la session. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Vanier. Mme la députée. Mme la députée, il reste 10 minutes à votre groupe parlementaire.

Mme Diane Barbeau

Mme Barbeau: Merci. Cet après-midi, M. le Président, les trois partis politiques de cette Chambre vont procéder au dépôt de la pétition de plus de 200 000 signatures réclamant une loi sur l'élimination de la pauvreté. La proposition d'une loi-cadre est le fruit de plus de trois années de travail, de centaines de rencontres à travers le Québec et de milliers de commentaires provenant de gens de tous horizons, dont plusieurs personnes vivant dans une situation de pauvreté. D'ailleurs, je me souviens du Parlement de la rue, auquel plusieurs parlementaires ici, des deux côtés de la Chambre, participaient il y a quelques années.

Je pense que c'est un travail colossal qui a été accompli par les membres du Collectif et qui présente non pas de simples revendications, mais des solutions très précises au problème de la pauvreté. Il s'agit d'une contribution au débat que nous ne pouvons ignorer, je dirais même une contribution incontournable. L'ensemble de la démarche du Collectif en est une de responsabilisation des citoyens face à leurs institutions démocratiques, notamment le Parlement. Cette démarche est originale et unique, elle est un bel exemple de l'exercice de citoyenneté.

Aujourd'hui, ces personnes s'adressent aux législateurs qu'ils ont élus en leur présentant une proposition sérieuse et précise et elles leur demandent: Qu'en pensez-vous? Personnellement, je souhaite que les parlementaires aient l'occasion de débattre de ces enjeux. Peut-être que le meilleur forum, ce n'est pas la motion de l'opposition du mercredi. Je ne crois pas. Je pense qu'il est important d'élargir le débat sur la question de la lutte à la pauvreté. En ce sens, le député de Châteauguay tout à l'heure avait raison quand il disait que tous les acteurs de la société doivent être interpellés, qu'on doit le faire de plusieurs façons, dans plusieurs forums.

Je pense que le gouvernement a mis en place de nombreuses mesures visant à soutenir les plus démunis de la société. Le gouvernement doit s'inspirer de la proposition faite par le Collectif afin d'aller encore plus loin dans la lutte que nous menons. Même s'il existe des instances telles que le Comité interministériel sur le développement social et que beaucoup de discussions se font sur cette question, le Collectif souhaite une stratégie horizontale de lutte à la pauvreté. Il souhaite que ce soit une priorité gouvernementale, que ce soit un programme permanent et qu'il résiste aux changements de gouvernement. Je partage ces objectifs.

Le gouvernement a mis de l'avant plusieurs mesures pour venir en aide aux plus démunis. Moi, personnellement, j'ai, comme membre de la commission des affaires sociales, participé à la réforme de la sécurité du revenu, la politique familiale et le Fonds de lutte, le 1 et le 2, la reconduction du Fonds de lutte, les budgets en économie sociale. Toutes ces mesures se doivent d'être concertées afin d'assurer une plus grande efficacité de l'action gouvernementale en matière de lutte à la pauvreté. Le gouvernement doit se demander, à chacun des gestes qu'il pose, quel impact cela aura sur les plus démunis de la société.

Malgré la bonne volonté du gouvernement, le fait est que les mesures pour lutter contre la pauvreté se retrouvent dans chaque ministère: la ministre des Affaires municipales est responsable du logement social; le ministre de la Solidarité sociale, de l'aide sociale; le ministre de l'Éducation, de l'éducation populaire autonome; le ministre des Régions, de l'économie sociale, etc. Alors, tout le monde s'en occupe, mais il n'y a pas vraiment un porteur. Chaque ministère regarde cette question sous l'angle spécifique qui lui est dévolu. Je pense, M. le Président, qu'il ne fait aucun doute qu'une vision plus horizontale de la question de la lutte à la pauvreté ferait en sorte que l'efficacité de ces mesures serait décuplée. Le Collectif suggère que le porteur soit le premier ministre du Québec. Je crois qu'effectivement ce dossier doit être porté par tout le gouvernement.

Ce projet de loi m'a été présenté ? d'ailleurs, j'ai eu la chance de voir l'évolution parce que je connais bien les gens qui mènent ce mouvement ? à plusieurs étapes, et c'est un projet de loi qui comporte énormément d'éléments de plusieurs natures qui méritent... Il y a des éléments en soi, des articles de loi qui méritent un large débat dans ce projet de loi. Il y en a plusieurs qui demandent une grande, grande réflexion parce que, dans ce projet de loi, on oblige, on permet, on interdit.

n(11 h 20)n

Ce projet de loi, il touche à plein, plein, plein de secteurs de la vie des citoyens et des citoyennes du Québec. Par exemple ? j'en nommerai juste quelques-uns, mais il y en a beaucoup ? il y a un article qui parle, entre autres, de l'accès à l'emploi, les revenus et conditions d'emploi. On élabore toutes sortes de façons d'améliorer les conditions d'emploi des gens. On demande aussi des sanctions. Il y en a d'autres qui visent les institutions financières. On remet aussi en question les fondements mêmes du système de l'aide sociale, de la façon dont ça fonctionne. Il y a des mesures d'envergure internationale.

Alors, je crois que les parlementaires, comme je l'ai fait avec les représentants du Collectif, sont prêts à discuter plus profondément du contenu de ce projet-là. Comme le disait le ministre de la Solidarité sociale, le gouvernement se doit d'être responsable et doit mesurer l'impact sur l'ensemble de la société de chaque mesure qu'il propose. Je crois que nous partageons les grands principes défendus par le Collectif et l'ensemble de la population également, mais maintenant nous devons décider par quels moyens atteindre ces objectifs. Je pense qu'il est très intéressant d'établir une stratégie globale qui n'exclut rien, y compris une loi-cadre, comme le disait le ministre.

Alors, je tiens, en terminant, à féliciter les membres du Collectif pour le travail de sensibilisation face aux problèmes vécus par les plus démunis de la société. Il est important de faire comprendre à la population qu'il s'agit d'une question fondamentale qui nous interpelle tous. Beaucoup de préjugés existent au sujet de la pauvreté. Lutter efficacement contre la pauvreté implique aussi lutter contre les préjugés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Vanier. Je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de Bonaventure. Il reste 23 minutes à votre groupe parlementaire.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je suis très heureuse ce matin de joindre ma voix à celle de mon collègue de Laurier-Dorion qui a déposé une motion interpellant le gouvernement du Québec pour qu'il procède dans les plus brefs délais à l'adoption d'une loi-cadre pour l'élimination de la pauvreté, une loi-cadre qui trouve son origine bien sûr dans le travail, la mobilisation qui a été effectuée par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté, et un travail qui s'appuie sur une lutte que mènent au quotidien les membres du Collectif pour l'élimination de la pauvreté. Alors, l'occasion est donc toute désignée ce matin pour les saluer et les féliciter pour les efforts qu'ils ont déployés pour l'élimination de la pauvreté. Et il est très facile d'imaginer à quel point le Collectif a dû déployer de l'énergie pour consulter, pour concerter, pour mobiliser les intervenants, ce qui a conduit au dépôt, donc, de cette fameuse loi-cadre sur l'élimination de la pauvreté.

Les membres du Collectif défendent avec beaucoup de conviction cet objectif dont ils ont fait une priorité, soit l'élimination de la pauvreté, M. le Président. Et je pense que nous devons faire nôtre cet objectif. Nous devons transformer cet objectif en cheval de bataille, M. le Président, parce que collectivement il est impensable que le fossé puisse continuer de s'agrandir entre les gens à faibles revenus et les gens qui sont mieux nantis dans notre société. Et, comme parlementaires, nous avons donc la responsabilité de prendre un leadership sur cette question et nous avons également la responsabilité d'agir sur cette question d'importance.

M. le Président, les membres du Collectif pour l'élimination de la pauvreté, dans leur travail au quotidien, sont à même de constater à quel point le phénomène de la pauvreté a évolué. Et cette évolution ne va pas nécessairement dans le sens que nous souhaitons, puisque le dépôt d'une loi-cadre témoigne avec éloquence à quel point il y a urgence d'agir. La pauvreté gagne du terrain. C'est un fait, M. le Président, et c'est un fait qui s'appuie sur plusieurs réalités. La pauvreté gagne du terrain et se présente aujourd'hui sous un autre visage. Le phénomène aujourd'hui est plus complexe. La pauvreté, malheureusement, ne se présente pas sous une forme monolithique ou homogène comme il y a 10, 15 ou 20 ans, M. le Président, la pauvreté aujourd'hui se présente sous des formes qu'on n'aurait pas soupçonnées il y a 10 ou 15 ans. La réalité aujourd'hui est plus diffuse, elle est également plus difficile à cerner et aussi plus difficile à contrer. Les remèdes traditionnels, M. le Président, que nous avons mis en branle ne sont plus adaptés, et nous devons obligatoirement et urgemment modifier nos approches pour contrer ce phénomène.

Alors, dans ce contexte, la proposition d'une loi-cadre, par sa vision globale, par sa vision inclusive face au phénomène de la pauvreté, M. le Président, nous permet de croire que nous pourrons répondre plus adéquatement aux nouvelles réalités auxquelles nous devons faire face. Et aucune région n'est épargnée par ce phénomène de la pauvreté. Aucune région n'est épargnée. Depuis 10 ans, depuis 15 ans, nous avons beaucoup réfléchi sur le phénomène, mais je pense qu'aujourd'hui il y a urgence d'agir. Et, collectivement, nous devons aujourd'hui passer à l'action et nous attaquer au problème de façon globale, M. le Président.

Pour les quelques minutes qu'il me reste, j'aimerais brièvement vous rendre compte de la mobilisation qui a été faite par les organismes communautaires de la Gaspésie, qui ont sonné l'alarme, M. le Président, dernièrement face au phénomène de la pauvreté. Et vous me permettrez de rendre compte, donc de vous témoigner les propos qui ont été tenus par la coordonnatrice du Regroupement des organismes communautaires de la Gaspésie, Mme Marie-Renée Tremblay, qui affirme la chose suivante: «Nous sommes persuadés et convaincus qu'investir dans le mouvement communautaire en Gaspésie et aux Îles, dans le contexte de la gestion de la décroissance sociale, économique et démographique, c'est investir dans un projet social axé sur l'équité, la solidarité, l'entraide, la justice sociale, la liberté et le respect des droits, dont la finalité est l'amélioration des conditions de vie de la population. Le mouvement communautaire autonome représente des intérêts, une valeur assurable inestimable pour notre collectivité.»

Donc, M. le Président, je pense que ces propos qui sont tenus par le Regroupement des organismes communautaires de la Gaspésie témoignent de l'urgence d'agir et de l'importance pour les groupes communautaires qui sont sur la ligne de front à chaque jour, qui répondent à des besoins des familles, et des femmes et des hommes qui sont en difficulté... Donc, nous devons absolument les supporter. Et le contexte dans lequel nous devons le faire, nous devons donc entamer une action qui s'inscrit sur des valeurs qui sont basées sur l'équité, la justice sociale et la solidarité. Et, en terminant, je pense qu'au-delà des statistiques sur le chômage, du taux d'emploi, M. le Président, il y a des réalités qui sont vécues par des hommes et des femmes qui vivent des réalités qui sont difficiles, qui sont confrontés à des situations qui nous interpellent aujourd'hui.

Alors, en terminant, je suis très heureuse de joindre ma voix à celle de mon collègue. Et j'espère, M. le Président, que nous ne serons pas tentés, comme l'ont fait certains collègues en face, d'avoir un débat qui soit teinté de partisanerie. Nous sommes ici 125 parlementaires qui avons la responsabilité d'agir. Je pense donc que nous devons prendre cette question très au sérieux et très rapidement donner suite à la demande qui est formulée par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Je vais céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, alors, moi aussi, j'aimerais joindre ma voix à mon collègue le député de Laurier-Dorion dans sa démarche pour inviter les parlementaires à adopter une loi pour, dans le fond, s'opposer à la pauvreté et à l'exclusion. Ce pour quoi j'ai demandé à mon collègue de me laisser un peu de temps pour parler, c'est qu'un tel projet de loi peut apparaître farfelu. Comment pouvons-nous être pour un projet de loi qui, dans le fond, s'attaque à une valeur sociale, que ce soit la justice, la pauvreté? Enfin, il y a toutes sortes de valeurs de fond, fondamentales qui existent. Pourquoi se pencher sur la pauvreté?

Eh bien, M. le Président, j'ai demandé d'avoir un droit de parole et de m'immiscer dans le temps qui nous est alloué pour vous faire part qu'il y a et la France, et la Grande-Bretagne, et l'Irlande qui ont voté de telles lois. C'est très intéressant de voir ça, parce que, en France, c'était le 9 juillet 1998, et il y avait quatre grands principes qui émanaient de ce projet de loi. Bien sûr, on peut dire que ce sont là des principes, mais, d'obéir à certains principes, ça nous force à remettre en valeur ce que nous faisons, ça nous force à nous interroger quant au choix que nous avons fait, notamment en passant, par exemple, de régimes universels à des régimes basés sur le revenu. Ça a apporté des changements importants dans la société que de tels changements. Et, par conséquent, c'est la raison pour laquelle on a opté, notamment en France, pour examiner quel était l'impact de toutes ces décisions qui ont été prises depuis les années quatre-vingt.

n(11 h 30)n

Par conséquent, qu'est-ce qu'on a inclus dans ce projet de loi? On a inclus dans ce projet de loi l'emploi. On sait, M. le Président, que l'exclusion du milieu du travail est probablement un élément déterminant pour décider si vous allez tomber dans la pauvreté ou si vous allez pouvoir participer à la société dans laquelle on vit. Il y a également le logement. Le logement, c'est un facteur également très important pour assurer que vous vivez dans des conditions salubres, décentes. La santé ? mon collègue en parlait antérieurement ? l'accès à des services de santé, et vraiment l'accès à des services de santé, la qualité des services est également un élément sur lequel s'est basé le gouvernement pour estimer la rencontre d'objectifs à établir. Et, bien sûr, le savoir, l'éducation. C'est probablement là l'élément le plus déterminant pour voir l'impact, pour avoir un impact sur le niveau de pauvreté d'une société.

Alors, qu'est-ce qu'a décidé de mettre dans sa loi-cadre le gouvernement français? Il a décidé d'établir des programmes spécifiques à chaque ministère pour essayer de contrer... des indicateurs, des valeurs, et de les analyser, ces valeurs et ces indicateurs. Voyons, par exemple, qu'est-ce que c'est que la pauvreté. Il y a des débats sur ça. Bien, finalement, à un moment donné, si les gens se penchent sur ce débat, si on ne fait pas tous semblant ici de s'intéresser mais qu'on ne prend pas le temps de mesurer ce que l'on fait, manifestement on risque de passer à côté. Manifestement, comme le disait ma collègue la députée de Bonaventure, bien, peut-être que, avec le temps, on a passé à côté.

Autre pays, M. le Président, qui a décidé de voter une loi le 10 février 1999, eh bien, c'était le gouvernement britannique, nul autre que Tony Blair qui a décidé qu'il fallait mettre en place une loi pour établir les paramètres à suivre pour rencontrer des objectifs spécifiques. D'ailleurs, pour mettre cette loi en place, M. Blair s'est inspiré d'un accord qui avait eu lieu à Copenhague et un accord qu'avait signé même un gouvernement conservateur antérieurement.

M. le Président, tout ça pour dire qu'il est possible de déterminer des objectifs, il est possible de mesurer notre rencontre d'objectifs, et je pense que c'était là un effort louable qu'a proposé mon collègue avec cette motion, et c'est la raison pour laquelle j'ai voulu y joindre ma voix. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Je vais céder la parole maintenant à M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président, très rapidement, pour des raisons de temps. Je voudrais dire deux choses d'abord. La question qui est débattue ce matin est majeure, est importante. Je crois que des parlementaires qui veulent apprécier comment contrer et réduire les phénomènes dus à la pauvreté et ses conséquences... je pense qu'on doit saluer les opinions qui sont émises à ce sujet-là.

Je veux rapidement aussi féliciter le travail gigantesque, colossal, qui a été fait par le Collectif sur la pauvreté. Je pense qu'il faut regarder l'évolution de leurs travaux avec énormément de respect. En tout cas, c'est mon cas. Moi, je l'ai regardé avec beaucoup de respect et j'ai beaucoup pris connaissance de leur documentation.

Une petite phrase... Parce que j'aurais donc voulu que ce débat-là ne soit pas partisan, mais ce n'est pas possible avec les gens de l'autre côté. On l'a vu tout de suite dans les propos de la députée de Bonaventure. Je viens d'entendre «il y a quelques pays qui l'ont fait». C'est évident qu'il y a quelques pays qui l'ont fait, mais il n'y a aucune province qui l'a fait. Alors, quand tu contrôles juste la moitié de ta fiscalité, tu as un méchant problème avec une loi-cadre. Je ne voulais pas embarquer là-dedans.

Je voulais tout simplement dire que, si les gens étaient sérieux de l'autre côté puis qu'ils voulaient rallier le plus grand nombre de parlementaires possible, c'est évident que, pour rallier le plus grand nombre de parlementaires possible, je suis profondément convaincu, et en conscience, on y gagnerait beaucoup plus à s'inspirer d'une série de moyens concrets que la Coalition pour la pauvreté a mis sur la table dans une stratégie de lutte sans précédent pour réduire la pauvreté, tenter d'éliminer des poches de pauvreté.

Mais faire disparaître à 100 % la pauvreté, ça voudrait dire qu'il n'y aurait plus de pauvres, et là on tombe dans de la démagogie. Moi, ça fait 25 ans que je fais de l'action politique. Depuis que je suis haut comme trois pommes, malheureusement j'ai toujours rencontré des gens affectés par la pauvreté, puis il y en aura toujours. Pas parce que je le souhaite, mais j'ai assez de vécu puis d'expérience, moi, penser qu'une société pourra... Parce qu'éliminer complètement la pauvreté, ça, c'est du rêve. Réduire, contrer puis travailler à mort avec des solutions concrètes... Et là, rapidement, parce qu'on est toujours pris, dans des motions de même, la preuve que ce n'est pas le forum pour débattre de ces questions-là, on est obligé de se sauver puis de survoler les affaires pendant quelques minutes.

Quand on arrive, par exemple, à travailler à mort contre le décrochage scolaire, je travaille, M. le Président, à lutter contre la pauvreté à mort. Quand je crée les garderies et que je dis que les jeunes, il faut dépister rapidement les problèmes sociaux qu'ils ont, de toute nature, je travaille concrètement à lutter contre la pauvreté. Parce que Piaget, qui est un grand pédagogue, disait: «Donnez-moi les six premières années de votre enfant, je ne saurai faire des autres.» Pourquoi disait-il ça? Parce qu'il sait très bien que c'est la base d'une vie, c'est la base de tout. Et, si on fait du dépistage honnête, sérieux pour s'assurer que les jeunes qui naissent sont dans des conditions plus facilitantes pour faire face à la vie, bien, ils ont plus de chance de ne pas tomber dans les poches de pauvreté. Et, si j'avais du temps...

Quand on s'occupe, par exemple, avec des agents de développement ruraux, dans des communautés rurales, c'est pour contrer la pauvreté. Quand il y a des maisons de jeunes au Québec ? moi, quand j'ai été élu député, j'en avais deux, présentement j'en ai 11 ? c'est pour contrer la pauvreté. Quand on fait la lutte aux drogues puis à toutes sortes de folies de société, c'est pour contrer la pauvreté. Quand on met un peu plus d'argent ? il n'y en a pas assez, je suis d'accord ? dans des programmes d'alphabétisation, c'est pour contrer la pauvreté. Quand on soutient les groupes communautaires... Je me rappelle, il y a à peu près une dizaine d'années, je m'en vais à un centre chez nous, bien important, qui regroupe tous les centres communautaires ? oui, j'achève, deux minutes ? il y en avait à peu près... au tout début, il y avait 30 groupes communautaires, là j'en ai 180. Puis le politique qui va soutenir l'action communautaire, c'est pour contrer la pauvreté. Les frais de scolarité les plus bas en Amérique du Nord, vous pensez que c'est quoi? C'est pour contrer la pauvreté.

Si nos amis d'en face étaient sérieux, ils accepteraient notre motion, parce que c'est évident que la motion qu'on a proposée, d'amendement, est beaucoup plus... elle reprend beaucoup plus ? je termine ? elle est plus englobante, puis elle dit tout simplement, par une stratégie... Parce que c'est ça que ça prend, des stratégies concrètes pour contrer la pauvreté, parce que, dans la loi-cadre, il y a des écueils qu'il faut éviter, et on serait pris avec ces difficultés-là. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député d'Abitibi-Ouest. Je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de Sauvé. C'est bien ça. Mme la députée de Sauvé.

Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, je considère extrêmement important ce matin d'intervenir pour appuyer la motion déposée par mon collègue le député de Laurier-Dorion, parce que, bien sûr, comme plusieurs d'entre nous, ici, dans cette Assemblée, je me sens, comme députée de Sauvé, directement interpellée par la question de l'élimination de la pauvreté.

Mes premières paroles seront une salutation au Collectif pour l'élimination de la pauvreté, pour ce travail non seulement de mobilisation, qui est déjà un travail énorme, on le sait, mais pour ce travail de sensibilisation qu'ils ont fait à l'échelle de toutes les régions du Québec, sensibilisation à la vraie couleur, à la vraie réalité de la pauvreté; pour le travail d'inclusion qu'ils ont mené, respectant en toutes lettres les grands objectifs, les grands mandats, cette mission qu'ils se sont donnée, par ce travail d'inclusion qu'ils ont mené à travers l'ensemble de leurs revendications, l'ensemble de leur travail de sensibilisation; et aussi, je tiens à le souligner, pour ce droit à la parole qu'ils ont accordé aux plus exclus de notre société.

Je tiens à souligner, par exemple, que le caucus du Parti libéral du Québec a eu la chance de rencontrer les porte-parole du Collectif pour l'élimination de la pauvreté, et ce qui, moi, m'a personnellement frappée, en même temps touchée et aussi enthousiasmée, c'est le fait que les principaux porte-parole de ce Collectif ont été accompagnés dans leur démarche par des gens directement concernés, des gens qui vivent la pauvreté et qui sont venus nous en parler. Je me sens concernée parce que le comté de Sauvé est malheureusement un comté qui comporte le quadrilatère qui a été désigné par Statistique Canada comme un quadrilatère de rues le plus pauvre au Canada. Je pense directement aux familles du comté de Sauvé, je pense aux enfants de ce quadrilatère, je pense aux femmes qui, encore aujourd'hui, vivent trop souvent le phénomène de la pauvreté, et plus particulièrement aux trois femmes chefs de familles monoparentales du comté de Sauvé.

n(11 h 40)n

M. le Président, ce matin, c'est un appel à une vraie solidarité, pas une solidarité de façade, mais à une vraie solidarité et un vrai engagement pour défendre des principes fondamentaux au Québec qui sont l'égalité des chances et une société plus juste. Quand je pense aux enfants de ce quadrilatère dont je vous parlais, une étude menée récemment par des chercheurs de l'UQAM, sous le couvert de l'organisme Un, deux, trois, go, a révélé que plus de 50 % des enfants de ce quadrilatère vivaient déjà, à l'âge de trois ans, un retard cognitif et que 17 % d'entre eux avaient déjà un retard cognitif sévère. Vous comprendrez que je suis inquiète, alarmée, parce que ça, c'est les citoyens du Québec de demain, et je pense que ça prend maintenant un vrai engagement pour répondre au phénomène complexe qu'est la pauvreté, et un vrai engagement, ça veut dire un cadre législatif mieux organisé, où chaque ministère sera directement interpellé, un cadre législatif dont on pourra bien sûr, aussi, finalement, faire le bilan à chaque année. C'est ce que nous revendiquons, tout comme le Collectif pour l'élimination de la pauvreté, M. le Président. Merci bien.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Sauvé. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je suis profondément déçu par les paroles du député d'Abitibi-Ouest qui vient de dire: S'ils étaient sérieux de ce côté de la Chambre, on appuierait la motion du ministre de la Solidarité sociale ? s'ils étaient sérieux. Ça veut dire que, pour le député d'Abitibi-Ouest, si on n'appuie pas, on n'est pas sérieux. Mais je regrette, M. le Président, je vais lui dire quelque chose, là. Ça fait maintenant trois ans que je, et d'autres collègues, travaille dans le dossier de la pauvreté. Ça fait maintenant six mois qu'on rencontre des organisateurs du Collectif, des représentants du Collectif. Nous avons ici, de ce côté de la Chambre, une approche sérieuse à la question. Et je regrette profondément la suggestion du député d'Abitibi-Ouest, qu'on n'est pas sérieux sur la question, parce que ce n'est pas vrai.

En 1997, le chef du Parti libéral du Québec, Daniel Johnson, a demandé à M. Claude Ryan de présider un groupe de travail sur toute la question de la pauvreté. Je faisais partie de ce groupe de travail avec ma collègue la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne et avec M. Alain Paquet, qui est professeur à l'UQAM. Nous avons entrepris une démarche. Et, au début, M. Johnson pensait qu'on aurait pu terminer nos travaux dans les quelques mois qui suivaient le mandat qu'il nous avait accordé. Mais on s'est vite rendu compte que, en discutant de la question de la pauvreté, on ne peut pas faire ça dans trois mois, on ne peut pas faire ça dans une très courte période...

Une voix: ...

M. Copeman: Oui, je vais y arriver, inquiétez-vous pas, de l'autre bord. On ne peut pas jouer ça de façon isolée. Ça, c'est l'autre observation qu'on a faite, M. le Président, qu'on ne peut pas simplement traiter de la question de la sécurité du revenu, on ne peut pas traiter ça en silo, en isolation. Il y a la question de la santé, il y a la question de l'éducation, il y a la question du travail, la question du logement, la question des organismes communautaires. Et d'ailleurs, M. le Président, quand on a commencé le travail, on a été les premiers à être surpris que ça nous ait pris neuf mois, un rapport de 158 pages, avec 176 recommandations. On n'a pas pu, évidemment, comme parti politique, comme formation politique, prendre tous les engagements qui étaient contenus là-dedans. Oui, oui, c'est normal. C'est normal. Que les gens de l'autre bord veuillent qu'on tombe dans cette partisanerie, M. le Président, je veux bien, mais je leur demande simplement de nous écouter. On ne pouvait pas prendre comme engagements électoraux toutes les propositions qui y étaient contenues. Et je le dis très humblement, ce n'était pas notre objectif non plus. Notre objectif était de lancer un débat sur la question et de lancer une réflexion sur la question. C'est ça qu'on a fait.

Les prochains exercices, le Parlement de la rue, auquel j'ai assisté, des rencontres avec le Collectif, nous amènent aujourd'hui à poser le geste que notre collègue le député de Laurier-Dorion a posé, c'est-à-dire de demander à l'Assemblée nationale de procéder à l'adoption d'une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté sur la base des objets, principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.

Ce qui est important là-dedans, M. le Président, c'est une réflexion parlementaire qu'on veut, pas une stratégie gouvernementale. Nous voulons une réflexion parlementaire. C'est ça que les gens du Collectif veulent, qu'on s'assoie ensemble et qu'on travaille ensemble si on peut, et, nous, on est prêts à le faire. Nous, on est prêts à le faire sur la base d'un projet de loi-cadre basé sur les objets, les principes et les objectifs du Collectif.

Ça ne veut pas dire non plus qu'on partage à 100 % tous les objets, principes et objectifs dans le projet de loi proposé par le Collectif. Je sais, M. le Président, je travaille avec le député de Laurier-Dorion actuellement, il y a des rencontres avec le Collectif, nous avons nos divergences d'opinions sur les détails dans le projet de loi. C'est sûr. Ah bien! c'est une révélation pour d'autres. Mais oui, on a des divergences d'opinions. Mais ce qu'on croit important de ce côté, et je pense qu'on croit tous à ça, c'est qu'on peut commencer des discussions sur la base de ce document-là.

Alors, le député d'Abitibi-Ouest est d'accord. Bien là il doit voter pour la motion s'il est d'accord, parce que tout ce que la motion dit, c'est qu'on propose l'adoption ? pas aujourd'hui, M. le Président, il n'y a pas un projet de loi devant la Chambre aujourd'hui ? on accepte le principe que, quand on arrivera à la question, on pourra déposer en Chambre un projet de loi visant l'élimination de la pauvreté sur la base de discussions de ce document-là. Le député d'Abitibi-Ouest opine du bonnet. Mais il doit voter pour, d'abord. C'est tout ce qu'on lui demande. Lui, il veut une stratégie; nous, on appuie la notion d'un projet de loi-cadre.

Alors, M. le Président, c'est ça qu'on trouve important. On est prêts à le faire. Et je me suis rendu compte très vite, quand j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité du revenu, à quel point les personnes pauvres souhaitent une stratégie non partisane. Plusieurs personnes pauvres sont venues me voir, plusieurs prestataires de la sécurité du revenu sont venus me voir pendant le Parlement de la rue puis ils ont dit: Pourquoi vous ne pouvez pas travailler ensemble, comme parlementaires, pour tenter de résoudre nos problèmes? N'êtes-vous pas capables de travailler ensemble? Bien, nous, on répond, de ce côté de la Chambre: Oui, on est prêts à tenter de travailler ensemble sur quelque chose. Là, on nous accuse de partisanerie, on nous accuse de toutes sortes de choses. Tout ce qu'on vous dit, M. le Président, et tout ce qu'on dit par votre message interposé à la population et au Collectif, c'est qu'on est prêts à travailler là-dessus. On ne partage pas tous les objectifs, toutes les mécaniques dans le projet de loi ? ils le savent, on a eu des bonnes rencontres ? mais on est prêts à s'asseoir et à travailler sur un projet de loi-cadre sur la base de ce document. C'est ça qu'on demande à l'Assemblée nationale de voter aujourd'hui, non pas une stratégie gouvernementale, mais une approche parlementaire qui touche les 125 députés à l'Assemblée nationale. Je vous remercie, M. le Président.

Décision du président sur la recevabilité
de l'amendement

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Alors, je vais rendre ma décision suite au délibéré que j'ai pris et je veux indiquer immédiatement à cette Chambre que, à la suite de ma décision, je vais permettre le droit de réplique de 10 minutes au député de Laurier-Dorion. Compte tenu du temps qu'on a pris, je voudrais qu'il ait droit à son droit de réplique tel que le règlement le prévoit.

Alors, je vais rendre ma décision concernant la recevabilité de la motion d'amendement présentée par le ministre de la Solidarité sociale. La motion est recevable. Le principe de la motion principale présentée par M. le député de Laurier-Dorion a trait à l'adoption d'une mesure visant l'élimination de la pauvreté, en l'occurrence d'une loi-cadre. La motion d'amendement comporte également une mesure à cet égard, soit l'adoption d'une stratégie à la lutte à la pauvreté. La mesure proposée dans la motion d'amendement ne nie pas, ne dénature pas et ne contredit pas la mesure proposée dans la motion principale, puisque l'adoption d'une stratégie de lutte à la pauvreté n'exclut pas la possibilité de présenter une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté.

n(11 h 50)n

La motion d'amendement n'apporte pas de nouveaux principes à la motion principale. Certes, elle pourrait permettre un débat plus large en traitant d'une stratégie plutôt que d'une loi, mais elle n'est pas en soi un motif d'irrecevabilité. À d'autres égards, la motion d'amendement pourrait atténuer la motion principale par le remplacement des mots «sur la base des objets» par les mots «en prenant en considération certains», par le retrait des mots «et des objectifs», mais on sait également qu'une motion d'amendement peut atténuer une motion principale dans la mesure où elle ne la nie pas, ne la dénature pas et ne la contredit pas.

On sait que la jurisprudence permet qu'une motion d'amendement apporte des changements importants. Je vais vous citer à cet effet deux décisions, l'une du vice-président Lefebvre, le 7 novembre 1990, qui remplaçait les mots «retirer la nouvelle taxe de vente» par «réexaminer la possibilité d'assujettir à la taxe de vente du Québec», et une décision de celui qui préside les débats présentement, en 1993: «un plan de relance de l'économie et de lutte au chômage, plus particulièrement par celui des jeunes» est remplacé par «les solutions pour répondre aux enjeux économiques, à la lutte au chômage, à la situation des jeunes et à la nécessité de procéder au réalignement administratif de l'État».

Reprise du débat sur la motion
principale et l'amendement

Sur ce, je suis prêt à vous céder votre droit de réplique, M. le député.

M. Christos Sirros (réplique)

M. Sirros: M. le Président, je suis évidemment un peu déçu de voir qu'on a procédé à des amendements de cette nature-là, parce que l'objectif visé par l'amendement finalement, c'est d'éviter de prendre le mot «loi-cadre» comme un élément incontournable de quelque stratégie que ce soit. Et il est important qu'on réitère le fait qu'une stratégie parlementaire est bien différente d'une stratégie gouvernementale. Une stratégie parlementaire découle nécessairement de l'adoption d'une loi, M. le Président, parce que c'est le Parlement qui est saisi par la loi. Ce n'est que l'exécutif d'un gouvernement qui est saisi par une stratégie gouvernementale. Comme c'est un enjeu sociétal et comme nous sommes les représentants du peuple, c'est le peuple qui devrait parler, M. le Président, par le biais de ses représentants, par l'adoption d'une loi-cadre.

Ça étant dit, M. le Président, j'espère pouvoir essayer une dernière fois par la suite de ramener le gouvernement à l'idée de l'adoption d'une loi-cadre. Mais permettez-moi tout simplement de prendre mon droit de réplique de quelques minutes pour répondre à quelques éléments du débat auquel on a participé.

D'entrée de jeu, je veux relever le point qui a été amené par le ministre de la Solidarité sociale en faisant son petit point partisan, la question du 0,10 $. Moi, si l'objectif, de l'autre côté, c'est de scorer des points faciles, si vous voulez, M. le Président, je lui concède tout de suite qu'il a scoré un point facile sur le plan politique, sur la question du 0,10 $ d'augmentation sur le salaire minimum. Je dirai tout simplement que ce n'est pas ici le contexte dans lequel on pourrait le reprendre, l'expliquer, l'analyser, etc., mais je dirai tout simplement: Faites-nous pas croire, personne, qu'un 0,10 $ d'augmentation du salaire minimum est une réponse véritable à la question de la pauvreté qu'on discute. Alors, je concède le point, M. le Président.

Plus fondamentalement, l'argumentation qui a été amenée ici, M. le Président, c'est le fait qu'on ne peut pas procéder à l'adoption d'une loi-cadre parce qu'on ne pourrait pas être d'accord avec tous les éléments de la loi qui sont là-dedans, tous les moyens qui sont là-dedans et que la vie est plus compliquée qu'un désir de non-partisanerie. Je pense que c'étaient les mots du ministre, il a essayé de nous dire que ça ne serait pas possible d'éviter la partisanerie parce qu'on aurait tous des moyens différents d'aborder la question.

Je concède tout de suite, M. le Président, que, sur la question des moyens, il est sûr et certain que des partis politiques différents vont avoir des moyens différents à proposer. C'est pour ça que la motion que nous avons devant nous ne demande pas d'adopter la loi telle quelle, avec ses moyens. Elle demande quoi, au juste? Elle demande, la motion, d'approuver l'objet de la loi. L'objet, il y a juste un objet: viser l'élimination de la pauvreté en faisant une loi-cadre qui aurait priorité sur les autres lois. Donc, permettre à toutes les autres actions du gouvernement d'être filtrées par un prisme qui aurait comme objectif l'atteinte de la cible pauvreté zéro. C'est ça, l'objet.

Les principes, je les ai énumérés, trois. Je pense qu'on peut se mettre d'accord sur les principes. Nous, on est, de ce côté-ci, prêts à dire: Dans une loi-cadre, on mettrait ces trois principes. Et les objectifs, il y en avait cinq, je les ai lus. Pourquoi on ne peut pas aujourd'hui demander au gouvernement, et c'est ce que la motion fait, de procéder à l'adoption d'une loi-cadre? J'ai pris soin dans mon intervention, M. le Président, de dire que, quant aux moyens, ça revient effectivement aux parlementaires de les analyser, les évaluer, les discuter, les débattre et les choisir.

Alors, nous avons devant nous deux ans avant la prochaine élection, minimalement. Dans deux ans, M. le Président, à partir de l'adoption de cette motion, qui exprime la volonté de l'Assemblée nationale de voir le gouvernement proposer une loi-cadre, il pourrait effectivement y avoir toute cette démarche d'analyse, d'examen, de débat, d'implication aussi des personnes qui ont si bien travaillé dans le contexte de la préparation de cette proposition par le Collectif, de les associer, parce que c'était aussi un des principes qu'on voudrait voir dans la loi.

Alors, en quoi ça serait impossible pour quelconque parlementaire en cette Chambre de se lever et de dire: Moi, je suis pour que le gouvernement procède à l'adoption d'une loi-cadre sur la base de cet objet, de ces principes et de ces objectifs, et qu'on puisse par la suite, effectivement, se donner les instruments d'examen des meilleurs moyens à choisir, faire nos débats, analyser les coûts, regarder du côté des revenus, voir qu'est-ce qu'on peut faire puis décider?

Mais ce n'est pas ça qu'on demande aujourd'hui. On ne demande pas aujourd'hui qu'on adopte le tout de A à Z, point à la ligne, fini, comme si on allait abolir la pauvreté demain matin. Personne n'a ça dans l'esprit. Ma collègue la porte-parole de l'opposition en matière de finances a pris elle-même le soin de venir dire: Je veux intervenir. Parce que ça se fait, ce genre de chose.

Et on peut servir ici, au Québec, de modèle pour le reste du pays et pour le reste du monde. Moi, l'argument de la souveraineté puis du fédéralisme, à ce moment-ci, M. le Président, je pense qu'on a eu en masse ces discussions et ces arguments. On peut faire des choses qu'on peut faire. Puis il y a des choses qui nous reviennent qu'on peut faire. C'est ce qu'on demande. M. le Président, il est important qu'on puisse, de temps en temps, ici, en cette Chambre, dépasser la joute parlementaire partisane. C'est sûr que, sur les moyens, on différera. Puis on va argumenter avec la passion qu'on peut, chacun de notre côté, que, pour nous, l'aspect de la solidarité pancanadienne puis le partage pancanadien nous offrent des meilleurs instruments et outils. D'autres vont nous dire le contraire, ils vont nous dire que, non, sans ces leviers-là, c'est trop de chicanes, je n'en peux plus, etc. Mais, M. le Président, on peut ici s'entendre, comme Québécois, tout le monde ensemble, que l'objectif qu'on va se donner comme société, c'est, d'ici 10 ans, éliminer la pauvreté. Par la suite, on ira chacun convaincre nos concitoyens que nos façons de faire sont les meilleures, que nos propositions sont les meilleures.

Mais ce n'est qu'à partir de la démonstration claire ici, au Parlement, que nous avons la volonté, comme parlementaires, d'agir non pas avec des choses qui nous dégagent de nos responsabilités de parlementaires, mais par le biais des lois, qui sont le propre de notre travail... Une loi-cadre permettrait à chaque parlementaire de pouvoir se lever puis de faire siens l'objet, les principes et les objectifs qui sont mis de l'avant par la proposition que nous avons entre les mains et qui va recevoir aujourd'hui... 215 000 pétitionnaires vont venir nous donner cette pétition pour qu'on la reçoive en Chambre. Donnons aujourd'hui une réponse qui donne un sens à cette démarche. Donnons aujourd'hui une réponse qui leur dit: Ce n'est pas vrai que la politique est déconnectée du monde réel. Tant l'opposition officielle que les ministériels, nous reconnaissons que vous avez fait un travail important et nous voulons répliquer de façon sérieuse et importante.

n(12 heures)n

C'est ce que, nous, on a fait de ce côté-ci, M. le Président, au niveau de notre caucus. On a pris la peine de discuter. Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce a bien expliqué comment on a procédé. Et on est très conscients, je suis très conscient qu'il y a des préjugés que certains ont par rapport au Parti libéral du Québec. C'est le parti de l'entreprise, c'est le parti des autres, c'est le parti des riches. Mais, moi, je tiens à vous dire que la seule façon dont l'action politique pour l'ensemble de mes collègues ? parce que c'est une décision solidaire du caucus ? a un certain sens, c'est si, ultimement, le développement économique qu'on vise tous, l'accroissement de la richesse qu'on vise tous donnent un résultat au niveau du développement social. Sans ça, ça n'a pas de sens d'être ici, M. le Président, et c'est pour ça qu'on tenait à ce qu'on amène la demande du Collectif ici, en termes d'une loi-cadre.

Motion de sous-amendement

Et, pour m'assurer que ces propos ne seraient pas en vain, j'aimerais proposer un sous-amendement à l'amendement que vous avez jugé recevable, M. le Président, pour qu'on puisse inclure la notion d'une loi-cadre dans la motion. Et je vous dirais que le sous-amendement se lirait comme suit: Remplacer, après le mot «stratégie», ce qui suit, en incluant après les mots «pauvreté», à la deuxième ligne, les mots «incluant un projet de loi cadre»; et en remplaçant les mots «en prenant en considération certains principes de la proposition» par les mots «sur la base des objets, principes et objectifs de la proposition». Et, si vous me donnez quelques secondes, on pourrait vous donner ça au propre. Mais le sens fondamental du sous-amendement, c'est de, oui, permettre l'adoption d'une stratégie, mais de faire en sorte que l'élément...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez terminé, M. le député. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, ce n'est pas à vous que je vais l'apprendre, puisque vous avez une longue expérience parlementaire, qu'un sous-amendement ne peut pas aller à l'encontre d'un amendement que vous avez déjà reçu. Vous l'avez jugé recevable tantôt. Donc, il n'y a pas d'autre alternative, M. le Président, et je sais que, dans votre sagesse, c'est ce que vous ferez, que de rejeter ce que le député de Laurier-Dorion a présenté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, je vais vous entendre, M. le leader, puis après je vais conclure.

M. Pierre Paradis

M. Paradis: ...M. le Président, le leader adjoint à l'adjoint a manqué une partie du débat. Vous avez jugé recevable, M. le Président, l'amendement proposé par le leader adjoint du gouvernement parce qu'il n'allait pas à l'encontre justement de la motion principale du député de Laurier-Dorion. En revenant à la charge et en sous-amendant, il vous donne raison dans l'acceptation de votre amendement et vous demande, cette fois-ci, de compléter finalement votre décision en disant que rien ne va à l'encontre de rien, le tout forme un tout, et que les gens pourront avoir une loi-cadre avec des objectifs précis.

Décision du président sur la recevabilité
du sous-amendement

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le leader de l'opposition officielle, M. le leader adjoint du gouvernement, nous sommes actuellement dans la motion de réplique. Et la question qu'il faut se poser: Est-ce qu'on peut proposer un amendement ou un sous-amendement lorsque nous en sommes au droit de réplique de l'auteur de la motion?

À ma connaissance, il n'y a pas de jurisprudence à cet effet-là, sauf qu'au niveau de la doctrine ? nous en sommes au niveau de la doctrine ? c'est un précédent, au moment où on se parle, qu'un député, au moment de sa réplique, propose un amendement ou un sous-amendement, parce que, lorsque le député utilise son droit de réplique, ça met fin au débat. Il n'y a plus de débat, donc on ne peut pas discuter sur l'amendement ou sur le sous-amendement parce que la réplique termine le débat.

Alors, en vertu de la doctrine, je vais vous lire quelques passages que j'ai ici avec moi: «En réplique, il n'est pas possible de présenter une motion.»«A member closing the debate by reply cannot propose an amendment or a sub-amendment.»«Le député qui exerce le droit de réplique doit se borner à répondre au préopinant et il ne lui est pas permis d'avancer des faits ou des arguments nouveaux à l'appui de la proposition en discussion. La réplique de l'auteur de la motion clôt le débat.»

Alors, avec ces considérations, je me dois de vous refuser votre motion de sous-amendement. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Personne ne blâmera la présidence, mais la décision de la présidence quant à la recevabilité de l'amendement du ministre est survenue immédiatement avant le droit de réplique du député de Laurier-Dorion. Il n'avait, dans un premier temps, absolument pas d'autre possibilité de sous-amender.

Deuxièmement, en réponse à la doctrine que vous venez de citer, M. le Président, il n'a pas apporté de faits nouveaux, il a repris des faits qui avaient été argumentés de part et d'autre au cours de ce débat à l'Assemblée nationale du Québec. Il n'a fait qu'enrichir à partir de sa proposition originale l'amendement gouvernemental.

La solution la plus simple serait, à ce moment-ci, que tous les parlementaires, dans un souci d'unanimité qui a été recherché tout au long de ce débat cet avant-midi, fassent en sorte que nous votions tantôt en faveur de l'amendement proposé par le gouvernement et que le gouvernement vote en faveur du sous-amendement proposé par le député de Laurier-Dorion, ce qui ferait en sorte que les gens qui se déplacent aujourd'hui à l'Assemblée nationale, les 215 000 pétitionnaires, verraient et la volonté gouvernementale et la volonté de l'opposition unanimes. Et je pense que c'est l'objectif qui était visé et par le ministre au moment de son discours et par le député de Laurier-Dorion, ce qui facilite d'autant plus le travail de la présidence. Maintenant, c'est au gouvernement qu'appartient cette décision ou à la présidence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, évidemment, s'il y a consentement... La présidence, quand il y a des consentements, elle est toujours très de bonne humeur. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Boulerice: M. le Président, le monsieur qui vient d'intervenir avant moi fait état de la propre turpitude de son aile parlementaire, puisque quatre, cinq ou même six députés sont intervenus; ils auraient eu le loisir de présenter ce que le député de Laurier a fait. Donc, c'est irrecevable, et il n'y a pas de consentement.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! J'ai compris qu'il n'y avait pas de consentement. Évidemment... a rendu sa décision. Et la présidence, après avoir pris cette question de l'amendement en délibéré ? évidemment, nous avons eu des discussions, la présidence et le groupe de travail, et nous avons pris le temps, le plus rapidement possible, c'est une question qui n'était pas facile ? et nous sommes revenus dans les meilleurs délais. Et vous savez que nous sommes dans une période de débat restreint de deux heures. Donc, moi, je suis revenu, puis rapidement, puis je n'ai pas pris toutes mes notes, puis j'ai donné ma décision pour permettre, en plus, que le député qui a proposé la motion ait son droit de réplique, parce que je trouve ça normal. Évidemment, compte tenu qu'il ne pouvait pas... Un autre intervenant aurait pu amender si j'avais proposé l'amendement à une période antérieure, mais je n'ai pas pu le faire. Et, sur ce, je vais mettre la motion aux voix.

Reprise du débat sur la motion
principale et l'amendement

La motion d'amendement proposée par M. le ministre de la Solidarité sociale proposant d'amender comme suit: 1° par le remplacement des mots «loi-cadre visant à l'élimination de» par les mots «stratégie à la lutte à»; 2° par le remplacement des mots «sur la base des objets,» par les mots «en prenant en considération certains»; 3° par le retrait des mots «et des objectifs», est-elle adoptée?

M. Paradis: Vote par appel nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote par appel nominal? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, conformément à l'article 223 du règlement, je vous demande de reporter le vote à la fin... à la période des affaires courantes de ce jour.

Votes reportés

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, le vote sur l'amendement et sur la motion telle qu'amendée sera reporté aux votes reportés, aujourd'hui, à la période des affaires courantes, à l'item Votes reportés. Et, sur ce, je vous souhaite un bon appétit. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 8)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir un moment d'abord.

Présence du président de la Chambre des députés
de la dernière Législature de l'Assemblée nationale
de la république d'Haïti, M. Vasco Thernelan

Bien, veuillez vous asseoir. Alors, pour débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes du président de la Chambre des députés de la dernière Législature de l'Assemblée nationale de la république d'Haïti, M. Vasco Thernelan.

Affaires courantes

Alors, nous débutons maintenant les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Avis de classement concernant les vestiges
de l'ancien canal de Beauharnois, Saint-Thimothée

Mme Maltais: M. le Président, je dépose l'avis de classement Vestiges de l'ancien canal de Beauharnois, Saint-Thimothée.

Le Président: Alors, ce document est déposé.

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.

Des voix: ...

Le Président: Un instant. Question de règlement, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, très brièvement, M. le Président. Au dépôt de documents, je vous demanderais de reconnaître le député de Hull qui désire solliciter un consentement à ce moment-ci.

Le Président: Au dépôt de documents, alors, M. le député de Hull.

Signatures de citoyens concernant la tenue
de référendums sur le projet de fusions municipales

M. Cholette: M. le Président, je souhaite obtenir le consentement de cette Assemblée pour déposer 200 000 signatures de citoyens et citoyennes du Québec qui s'opposent aux fusions municipales forcées.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, M. le député de Hull, je crois que votre demande d'autorisation, en fait, de consentement pour le dépôt de ces signatures devrait se faire au dépôt de pétitions, puisque, à l'étape où nous en sommes, il s'agit de documents et, selon notre règlement, il s'agit de documents gouvernementaux, comme je l'ai indiqué la semaine dernière.

Alors, je pense que, puisque...

Une voix: ...

Le Président: Oui, mais je pense que le consentement devrait être accordé au dépôt de pétitions, puisque, de toute façon, il s'agit de pétitions, de signatures d'individus, de citoyens qui demandent quelque chose à l'Assemblée ou au gouvernement, et, en l'occurrence, on verra à ce moment-là s'il y a consentement pour le dépôt de ces signatures. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Le député de Hull a pris l'initiative de demander le consentement à cette étape-ci. Vous l'aurez deviné, les signatures ne sont pas sur des documents qui sont conformes à ce qu'on appelle le dépôt de pétitions habituellement. Maintenant, si le gouvernement souhaite donner son consentement immédiatement, ça vous empêchera d'avoir la lourde tâche de trancher à ce moment-ci. Mais, si le gouvernement nous indique immédiatement qu'il y aura consentement au niveau du dépôt de pétitions, nous procéderons suivant vos recommandations.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Bien, M. le Président, comme le député de Hull a déjà fait son spectacle une fois, ça va suffire. Alors, consentement.

Le Président: Alors, il y a donc consentement, mais je rappelle que, dans les faits, même si c'est non conforme, il s'agit de pétition de citoyens du Québec. Alors, nous allons donc recevoir cette pétition comme il se doit, mais à cette étape-ci.

Dépôt de rapports de commissions

Donc, au dépôt de rapports de commissions maintenant, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.

Étude détaillée du projet de loi n° 152

M. Lachance: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 21 novembre 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 152, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, bien. Ce rapport de commission est déposé.

Dépôt de pétitions

Maintenant, au dépôt de pétitions, Mme la députée de Vanier.

Mme Barbeau: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de déposer un premier tiers d'un extrait d'une pétition non conforme.

Le Président: Alors, il y a consentement pour le dépôt d'une pétition non conforme? Oui? Alors, Mme la députée de Vanier.

Adopter une loi-cadre sur
l'élimination de la pauvreté

Mme Barbeau: Merci, M. le Président. Je dépose le premier tiers d'un extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par environ 216 000 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec:

«Nous sommes des milliers de personnes au Québec, vivant ou non la pauvreté, à dire non à la pauvreté, à la misère, à l'exclusion. En conséquence, nous proposons que le Québec se dote d'une loi-cadre sur l'élimination de la pauvreté. Cette loi aura pour but d'éliminer la pauvreté au Québec et de mettre en place des moyens de lutter contre l'exclusion sociale.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Elle reconnaîtra que la pauvreté et l'exclusion portent atteinte aux droits et libertés;

«Elle proposera des moyens pour que tout le monde puisse participer à l'activité sociale, culturelle, politique et économique en y exerçant des responsabilités reconnues;

n(14 h 10)n

«Elle s'attaquera aux causes de la pauvreté, aux inégalités et aux injustices qu'elle entraîne;

«Elle affirmera la responsabilité de tous et toutes vis-à-vis de la pauvreté et de l'exclusion;

«Elle prévoira des moyens précis de redistribuer mieux la richesse;

«Elle visera la satisfaction des besoins essentiels de tous et de toutes, en particulier l'accès à un revenu décent;

«Elle encadrera toutes les autres lois de même que l'ensemble des décisions politiques;

«Elle prévoira des mécanismes d'application et d'évaluation auxquels les personnes qui vivent la pauvreté et l'exclusion seront associées;

«Elle affirmera la responsabilité du Québec face à l'élimination de la pauvreté dans le monde.»

«Nous appuyons la démarche entreprise dans ce but par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de recevoir de façon non partisane le projet de loi qui lui sera déposé au terme de ce processus.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci.

Le Président: Merci, Mme la députée. Cet extrait de pétition est déposé pour un autre tiers. Alors, si j'ai bien compris, pour le deuxième tiers, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Vous avez bien compris, M. le Président. Alors, je dépose le deuxième tiers d'un extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par environ 216 000 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du Québec.

«Nous sommes des milliers de personnes au Québec, vivant ou non la pauvreté, à dire non à la pauvreté, à la misère, à l'exclusion. En conséquence, nous proposons que le Québec se dote d'une loi-cadre sur l'élimination de la pauvreté. Cette loi aura pour but d'éliminer la pauvreté au Québec et de mettre en place des moyens de lutter contre l'exclusion sociale.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Elle ? cette loi-cadre ? reconnaîtra que la pauvreté et l'exclusion portent atteinte aux droits et libertés;

«Elle proposera des moyens pour que tout le monde puisse participer à l'activité sociale, culturelle, politique et économique en y exerçant des responsabilités reconnues;

«Elle s'attaquera aux causes de la pauvreté, aux inégalités et aux injustices qu'elle entraîne;

«Elle affirmera la responsabilité de tous et toutes vis-à-vis de la pauvreté et de l'exclusion;

«Elle prévoira des moyens précis de redistribuer mieux la richesse;

«Elle visera la satisfaction des besoins essentiels de tous et toutes, en particulier l'accès à un revenu décent;

«Elle encadrera toutes les autres lois de même que l'ensemble des décisions politiques;

«Elle prévoira des mécanismes d'application et d'évaluation auxquels les personnes qui vivent la pauvreté et l'exclusion seront associées;

«Elle affirmera la responsabilité du Québec face à l'élimination de la pauvreté dans le monde.»

«Nous appuyons la démarche entreprise dans ce but par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de recevoir de façon non partisane le projet de loi qui lui sera déposé au terme de ce processus.»

Et je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette deuxième tranche de la pétition est déposée.

Maintenant, pour le dernier tiers, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Alors, je dépose le troisième tiers d'un extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par environ 216 000 pétitionnaires:

«Nous sommes des milliers de personnes au Québec, vivant ou non la pauvreté, à dire non à la pauvreté, à la misère, à l'exclusion. En conséquence, nous proposons que le Québec se dote d'une loi-cadre sur l'élimination de la pauvreté. Cette loi aura pour but d'éliminer la pauvreté au Québec et de mettre en place des moyens de lutter contre l'exclusion sociale.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Elle reconnaîtra que la pauvreté et l'exclusion portent atteinte aux droits et libertés;

«Elle proposera des moyens pour que tout le monde puisse participer à l'activité sociale, culturelle, politique et économique en y exerçant des responsabilités reconnues;

«Elle s'attaquera aux causes de la pauvreté, aux inégalités et aux injustices qu'elle entraîne;

«Elle affirmera la responsabilité de tous et toutes vis-à-vis de la pauvreté et de l'exclusion;

«Elle prévoira des moyens précis de redistribuer mieux la richesse;

«Elle visera la satisfaction des besoins essentiels de tous et toutes, en particulier l'accès à un revenu décent;

«Elle encadrera toutes les autres lois, de même que l'ensemble des décisions politiques;

«Elle prévoira des mécanismes d'application et d'évaluation auxquels les personnes qui vivent la pauvreté et l'exclusion sont associées;

«Elle affirmera la responsabilité du Québec face à l'élimination de la pauvreté dans le monde.

«Nous appuyons la démarche entreprise dans ce but par le Collectif pour une loi sur l'élimination de la pauvreté.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à l'Assemblée nationale de recevoir de façon non partisane le projet de loi qui lui sera déposé au terme de ce processus.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Bien. Alors, ce troisième tiers de la pétition est déposé. Donc, l'ensemble de cette pétition est reçu par l'Assemblée nationale.

Alors, avant d'aborder maintenant la période de questions et de réponses orales, je voudrais vous aviser qu'après celle-ci vont être tenus les votes reportés sur la motion de M. le député de Laurier-Dorion présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition ce matin ainsi que sur la motion d'amendement de M. le député de Gouin, ministre de la Solidarité sociale, à propos de la même motion principale.

Questions et réponses orales

Et maintenant, je vais donner la parole d'abord à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.

Application des mesures d'équité salariale
dans les municipalités faisant l'objet de fusion

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Le chef de l'opposition aurait souhaité poser cette première question. Malheureusement, il a dû s'absenter pour assister à des funérailles dans sa famille. Dans les circonstances, vous me permettrez d'adresser ma question au premier ministre.

En 1996, lorsque la Loi sur l'équité salariale a été adoptée, à l'unanimité d'ailleurs, le premier ministre avait fait cette déclaration, et je le cite: «Il est parfaitement raisonnable d'adopter cette grande mesure sociale qui s'est fait attendre si longtemps. C'est justice pour tous», disait-il. Fin de la citation.

L'échéance pour l'application des ajustements salariaux devait être le 21 novembre 2001. Encore hier, la ministre de l'Emploi confirmait qu'elle maintenait l'échéance du 21 novembre 2001.

M. le Président, le premier ministre peut-il confirmer que, dans son projet de loi sur les fusions forcées des municipalités, l'échéance prévue pour le 21 novembre 2001 est reportée de huit ans, c'est-à-dire jusqu'à l'an 2009, pour les municipalités qui font l'objet de fusions forcées?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, merci. D'abord, je rappellerais effectivement que l'ensemble des entreprises au Québec qui sont soumises aux dispositions de la Loi sur l'équité salariale ont effectivement un an devant elles pour réaliser cette démarche d'équité salariale et que nous mettons toutes les énergies pour les aider à réaliser ces objectifs.

Deuxièmement, je dirais qu'effectivement, dans le cadre de la réorganisation municipale, il nous a fallu faire preuve de bon sens et réaliser que plusieurs municipalités au Québec ne pouvaient pas s'engager à deux reprises dans un exercice d'équité salariale, puisque plusieurs d'entre elles pourraient être fondues dans une nouvelle organisation. Alors, ce qui a été prévu dans le projet de loi... ce qui a été prévu, c'est d'accorder effectivement un délai, puisque ça tombe sous le sens, une nouvelle municipalité qui regrouperait cinq, six ou sept municipalités déjà existantes se retrouve donc avec un nouveau système de classification, par exemple. Donc, c'est un exercice qui ne doit pas se faire de manière inutile.

Par ailleurs, nous avons aussi prévu dans cette loi que le moment où on calculerait les correctifs salariaux serait le même pour tout le monde, y compris pour les municipalités regroupées, c'est-à-dire le 21 novembre 2001, et que le paiement de ces correctifs arriverait pour tout le monde au Québec, les entreprises en général et les municipalités, c'est-à-dire, le 21 novembre 2005.

Le Président: Mme la députée.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je rappelle les propos du premier ministre à l'effet que cette grande mesure sociale s'est fait attendre depuis fort longtemps.

Et, M. le Président, comment le gouvernement peut-il dire aux entreprises à grands coups de publicité: Vous n'avez plus une minute à perdre? Comment peut-il dire aux entreprises qu'elles n'ont pas une minute à perdre, alors qu'on reporte à près de huit ans les ajustements salariaux? Comment le gouvernement peut-il faire financer pendant huit ans sa réforme de fusions forcées par les femmes qui gagnent entre 18 000 $ et 20 000 $? Comment, M. le Président, la ministre peut-elle passer, le gouvernement peut-il passer le rouleau compresseur sur ses propres principes? Les femmes n'ont pas à souffrir d'un délai additionnel à cause de l'improvisation du gouvernement.

Des voix: Bravo!

n(14 h 20)n

Le Président: Mme la ministre.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, c'est justement parce qu'on ne voulait pas que personne ne perde de droits, on ne voulait pas que personne soit envahi par toutes sortes de démarches, à savoir: Est-ce que c'est la démarche d'équité salariale de la municipalité non regroupée qui s'applique ou celle de la nouvelle municipalité? Alors, c'est faux de dire que des travailleuses vont y perdre. Tous les correctifs salariaux, dans ces nouvelles municipalités qui vont procéder à une démarche d'équité salariale, le point de départ de ces correctifs, ce sera le 21 novembre 2001, comme toutes les entreprises au Québec, et tous les versements seront faits en même temps ? sur une période plus courte, d'ailleurs, dans ce cas-là ? au 21 novembre 2005, comme c'est le cas pour les entreprises québécoises.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en question principale?

Versement des ajustements salariaux
aux employés des municipalités fusionnées

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Oui. Merci, M. le Président. Les femmes du Québec ont porté le virage ambulatoire, les femmes au foyer ont fait les frais de la réforme des allocations familiales. On se serait attendu que la ministre de la Condition féminine, qui doit être solidaire du sort réservé aux femmes, se lève et dénonce publiquement le report à 2009 de l'équité salariale contenue dans le projet de réorganisation municipale touchant les femmes travaillant dans ce domaine.

M. le Président, la ministre responsable de la Condition féminine peut-elle nous dire où elle était quand le Conseil des ministres et le comité législatif ont pris la décision, encore une fois, de faire porter par des femmes une autre réforme?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je le répète, je trouve dommage que l'opposition véhicule une information erronée et suscite des doutes quant à l'application de l'équité salariale dans les municipalités qui sont visées par la réorganisation municipale. Ces travailleuses vont également vivre une démarche d'équité salariale dans cette nouvelle municipalité. Si des correctifs salariaux devront leur être versés, ils le seront à la date du 21 novembre 2001, comme c'est le cas de l'ensemble des entreprises assujetties à la Loi sur l'équité, et les versements seront complétés au 21 novembre 2005, comme c'est le cas pour l'ensemble des entreprises au Québec.

Alors, je trouve dommage que l'opposition ne comprenne pas qu'on ne peut pas mobiliser à deux reprises toute une organisation, y compris des travailleurs, dans une démarche d'équité salariale, sachant que les unités d'accréditation vont changer, que le système de classification d'emplois va changer. Alors, nous avons agi de manière responsable, et c'est parce que nous voulions préserver les droits des travailleuses que nous avons apporté ces aménagements.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que la ministre de la Condition féminine peut nous dire si elle a défendu les femmes dans ce dossier? Et pourquoi, Mme la ministre, avez-vous accepté que les femmes, encore une fois, soient pénalisées?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, d'aucune manière les femmes n'ont été et ne sont attaquées par ces aménagements. Je le répète et je mets en garde l'opposition de créer des doutes sur ces aménagements-là. Toutes les travailleuses qui sont dans des organisations municipales qui seront regroupées auront droit au résultat d'une démarche d'équité salariale. Si des correctifs salariaux doivent être appliqués à leurs postes, ces correctifs compteront à compter du 21 novembre 2001, comme c'est, dans la loi actuelle, pour l'ensemble des entreprises du Québec.

Et les versements, au lieu de les faire en quatre tranches... Parce que c'est ça qui est prévu pour l'ensemble des entreprises au Québec: en 2001, les entreprises au Québec déterminent leur démarche, elles ont quatre ans pour verser les correctifs. Bien, dans le cas des travailleuses dans les organisations municipales, ça se fera en un seul versement, faisant en sorte que, au 21 novembre 2001, comme l'ensemble des travailleuses des entreprises québécoises, les correctifs leur seront payés, M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Saint-François.

Effets du projet de loi sur l'organisation
territoriale municipale sur l'application
des mesures d'équité salariale

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président, est-ce que la ministre reconnaît que justement, au lieu d'échelonner les paiements, en faisant un seul paiement, le gouvernement va récupérer près de 50 % tout simplement en impôts? Est-ce que la ministre peut aussi lire le projet de loi de sa collègue, de sa voisine, à l'article, entre autres, 102 du projet de loi des fusions forcées, qui modifie la Loi sur l'organisation territoriale, entre autres à l'article 176.28, alors qu'on dit «18 mois à compter du 16 juin 2004», dans certains cas, et «de 36 à 48 mois à compter du 21 novembre 2005», dans les autres cas, ce qui fait 2009?

Comment peut-elle s'attarder au 2005, M. le Président, alors que le gouvernement actuellement va faire financer la réforme des fusions forcées par les femmes en reportant l'équité salariale, qui était jugée importante? Le gouvernement est prêt à reculer sur ses propres principes, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: Alors, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je suis un peu étonnée. Visiblement, l'opposition se cherche des «chevals» de bataille...

Une voix: Des chevaux...

Des voix: Oh!

Mme Lemieux: ...des chevaux de bataille dans le dossier de la réorganisation municipale. Elle nous laisse entendre que des droits des travailleuses, quant à l'équité salariale, ne seront pas respectés.

Je le répète, M. le Président, il fallait convenir de certains aménagements. Écoutez, est-ce que je dois réexpliquer ce que veut dire une démarche d'équité salariale? Une démarche d'équité salariale, ça veut dire, entre autres...

Le Président: Je m'excuse. Mme la ministre.

Mme Lemieux: Par exemple, un des éléments importants d'une démarche d'équité salariale, c'est de comparer des emplois. Or, il est fort possible, dans le cas d'une nouvelle municipalité qui en regroupe d'autres, que le système de classification d'emplois ne soit pas le même.

Alors, nous disons que, pour toutes les municipalités qui seraient soumises à certains regroupements d'ici le 21 novembre 2001, il est inutile de faire cet exercice, qu'elles doivent le faire à partir du moment où elles ont toute l'information pour faire véritablement l'exercice d'équité, à partir du moment où elles sont une nouvelle municipalité.

Je le répète, M. le Président ? et je pense que l'opposition a tort de laisser croire que des droits ne seront pas respectés ? toutes les travailleuses dans le secteur municipal auront droit aux correctifs. Dans le cas où on a besoin de les faire, ces correctifs seront payés à partir du 21 novembre 2001, en un seul versement, jusqu'au 21 novembre 2005, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

Engagements en matière de lutte à la pauvreté

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Plus de 200 000 citoyens se sont exprimés à l'Assemblée nationale par une pétition, tout à l'heure. Certainement qu'on peut être heureux de l'engagement de citoyens qui est derrière cette démarche éminemment démocratique. On doit, par contre, regarder l'autre volet, que c'est quand même un peu triste, après une pleine décennie de croissance sur tout le continent nord-américain, de voir à quel point la pauvreté est encore bien présente au Québec, la pauvreté est encore bien présente dans des régions, dans des quartiers, d'une façon très sentie; que le Québec, que le gouvernement du Québec n'ait pas été capable de faire profiter pleinement l'ensemble des citoyens du Québec, pourtant, dans une poussée de croissance économique absolument phénoménale sur tout le continent.

Or, le Québec est loin de réaliser son plein potentiel, et beaucoup de citoyens du Québec en souffrent. Derrière 1 % de chômage de plus, c'est des dizaines de milliers de familles où il manque d'argent à la maison. C'est des dizaines de milliers d'enfants qui vont se faire dire non à Noël pour les cadeaux qu'ils espéraient. C'est ça, la réalité de la pauvreté.

Alors, ma question au premier ministre, elle est bien simple: Au-delà du débat qu'on a eu ce matin, au-delà des assouplissements d'une motion que ses collègues ministériels ont essayé d'obtenir, quels sont les engagements que le premier ministre entend prendre immédiatement?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je voudrais joindre ma voix à celle du député de Rivière-du-Loup, chef de l'ADQ, quand il salue cet effort de conscientisation qui a été déployé avec beaucoup de succès ? et il faut l'en féliciter ? par le Collectif, dont nous saluons la présence de représentants ici, dans les tribunes.

n(14 h 30)n

En effet, M. le Président, il est très important que tout le Québec se mobilise dans un engagement social, extrêmement nécessaire, pour lutter contre la pauvreté. Notre gouvernement est bien conscient de cette situation et de cet impératif, et nous nous sommes donné un agenda social important et déterminé. Et, même au moment où nous devions nous battre pour rétablir les finances publiques, nous avons trouvé moyen de mettre en oeuvre une politique familiale qui ajoute 900 millions de dollars par année de dépenses sociales au budget du Québec.

Nous avons, entre autres, mis en place les garderies à 5 $ par jour, nous avons adopté la clause de l'appauvrissement zéro pour les plus démunis, nous avons aboli la moitié de la pénalité pour partage du logement, nous avons ajusté les barèmes des aptes, nous avons dépensé 1 milliard de dollars au logement social depuis quatre ans, alors que personne ne l'a fait au Canada, ni au niveau fédéral ni au niveau des autres provinces, nous avons mis en oeuvre un programme d'économie sociale qui a ramené au travail 15 000 personnes qui en étaient privées jusque-là, nous avons diminué de 15 % le nombre des personnes qui touchent de l'aide sociale ? 207 000 personnes de moins à l'aide sociale depuis 1996. M. le Président, nous avons amélioré le niveau d'emploi considérablement.

Cependant, nous savons qu'il faut en faire plus. Je pense qu'aucun gouvernement, aucune société, aucun parti politique du Québec, personne ne doit faire relâche dans la lutte contre la pauvreté, et nous sommes déterminés à mettre en oeuvre une stratégie générale, une stratégie globale de lutte contre la pauvreté. Il y a un comité ministériel qui siège depuis déjà un bout de temps, présidé par le ministre de la Solidarité, et nous pensons en effet qu'il faut mettre en oeuvre toute une batterie de mesures qui vont nous permettre d'arriver à lutter contre la pauvreté. Mais, s'agissant de la proposition spécifique qui est faite par le Collectif...

Des voix: ...

M. Bouchard: Bien là j'aborde le principal noeud de ma réponse.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, M. le Président. Est-ce que, s'agissant du principal objet, qui est d'avoir une loi-cadre pour assurer justement des résultats, auxquels le premier ministre arrivait, il a l'intention de s'assurer, comme les gens le demandent, qu'on ait des résultats, qu'on arrive véritablement à une amélioration des conditions qui soit vérifiable par l'Assemblée comme par les citoyens? Puis est-ce que le premier ministre ne pense pas que, devant une telle démarche des citoyens, il faut dépasser ce à quoi on est habitué, la défense normale de son bilan de gouvernement, qui est dans l'ordre des choses, et prendre un virage qui est exigé par les citoyens?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Nous nous entendons sur les objectifs, nous croyons que c'est une obligation fondamentale d'un gouvernement comme de tout parti politique de travailler vers l'atteinte de ces objectifs. Quant aux moyens, il faut regarder, parce qu'une loi-cadre comme telle, c'est un concept qui n'existe pas dans notre législation. Et d'ailleurs le Collectif lui-même l'a bien perçu parce qu'il a fait part ? je cite la page 2 du projet ? et je cite: «Une loi n'est pas un manifeste mais un ensemble de règles possibles, applicables et conformes au système politique, législatif et parlementaire en vigueur. Elle exige donc une formulation précise, concrète, qui dit une seule fois ce qu'elle a à dire et rien d'autre.» Donc, il s'agit de savoir s'il faut adopter une loi et qui détermine les mesures proposées par le projet de loi en question.

Je crois que, si on examine bien ce projet de loi ? nous l'avons fait avec beaucoup d'attention et de sérieux, de nombreuses rencontres où nous avons posé des questions; nous avons obtenu une collaboration exemplaire de la part de ceux qui proposent le projet de loi ? il apparaît qu'il y a quand même des difficultés. Par exemple, il y a une motion qui a été présentée par l'opposition officielle afin que nous nous engagions à adopter cette loi. Je pense que l'opposition officielle devrait faire preuve d'un peu plus de rigueur, parce que, entre autres, il y a dans cette loi une disposition qui porte l'augmentation du salaire minimum de 7,00 $ à 8,50 $ l'heure. On sait que l'opposition officielle vient de nous blâmer, nous, le gouvernement, d'avoir accordé une hausse de 0,10 $ l'heure, M. le Président. Alors, il faudrait être clair avec les gens, il faudrait être responsable aussi.

Cette loi comporte des dispositions qui obéreraient les budgets du gouvernement du Québec de plusieurs milliards de dollars. Alors, je pense, M. le Président, que c'est une mine remarquable de propositions qui est faite. Il faut s'en inspirer, il faut travailler à l'intérieur de ces stratégies générales qui apparaissent dans le projet de loi, et le gouvernement va s'engager à fond du côté d'une définition d'une stratégie globale. Quant à la forme que ça pourra prendre, on verra, on pourra en discuter ensemble.

Le Président: Alors, dernière question complémentaire, M. le député.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que, sur la question fondamentale qui est à savoir est-ce qu'il y aura des changements dans la façon d'agir du gouvernement, le premier ministre partage l'opinion de son ministre qui disait ce matin que la stratégie actuelle du gouvernement en matière de lutte à la pauvreté est satisfaisante et donne des résultats, alors que le Québec est deuxième derrière Terre-Neuve au niveau de la pauvreté des enfants, parmi les derniers en matière de taux de chômage, parmi les derniers sur le niveau de vie? Est-ce que le premier ministre est d'accord avec son ministre que la stratégie actuelle donne de bons résultats ou est-ce qu'il est prêt à prendre le virage que des citoyens du Québec, de toutes les régions, lui demandent de prendre avec son gouvernement?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je pense que personne n'a nié que les efforts du gouvernement ont porté des fruits tout à fait évidents. Je viens d'en mentionner quelques-uns, tout à l'heure. Personne ne peut les contester. Je pense que, en effet, il faut quand même saluer les progrès que nous avons accomplis. Ils sont insuffisants parce qu'il y a encore trop de gens pauvres au Québec, et c'est dans ce sens, je crois, qu'il faut renouveler notre motivation, notre engagement à combattre la pauvreté, et, en effet, nous allons continuer dans notre motivation, mais je pense qu'il faut imaginer des mesures additionnelles, et c'est ce à quoi nous nous employons présentement.

Le Président: M. le député de Hull.

Une voix: Principale.

Le Président: Alors, sur une autre question principale, M. le député de Laurier-Dorion, d'abord.

Adoption d'une loi-cadre
sur l'élimination de la pauvreté

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Le premier ministre m'étonne. Il nous dit que le concept de loi-cadre n'existe pas. C'est quoi, la Charte des droits et libertés? C'est quoi, la loi sur l'accès à l'information? L'idée d'une loi-cadre, c'est une loi qui va permettre à toutes les autres actions du gouvernement de passer à travers le prisme de l'analyse vis-à-vis des objectifs précis, l'élimination de la pauvreté.

Est-ce que le premier ministre peut se dire d'accord avec cette façon de faire et arrêter de faire de la petite politique avec son affaire de 0,10 $ qui pourrait être discutée longuement? Est-ce que, de l'autre côté, on est prêt à adopter une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté? Et on discutera par la suite des moyens à prendre, M. le Président, suite à des débats, à des évaluations et à des analyses.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, vous me voyez très heureux de voir un député de l'opposition officielle se lever au soutien de la loi-cadre, et j'en profite donc pour demander directement au député de Laurier-Dorion si la position du parti est changée, s'il dénonce la position de son chef et s'il propose que le salaire minimum passe à 8,50 $. C'est ça qui apparaît dans le projet de loi. Soyons clairs! Soyons responsables!

Le Président: M. le député.

M. Christos Sirros

M. Sirros: M. le Président, est-ce que le premier ministre est capable de s'élever au-delà de cette capacité-là? La position du Parti libéral...

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: M. le Président, la position du caucus du Parti libéral a été mise de l'avant aujourd'hui par rapport à la loi-cadre. Si le premier ministre veut juste faire porter le débat sur le 0,10 $, est-ce qu'il est en train de nous dire que 0,10 $ d'augmentation élimine la pauvreté au Québec? Est-ce qu'il est prêt à faire un véritable examen de conscience sur cette question?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: Oui, M. le Président, oui, nous croyons que c'est un effort de conscience qu'il faut faire. Oui, en effet, ça procède de la conscience sociale que de travailler très fort pour lutter contre la pauvreté. C'est ce que nous faisons depuis 1996. Ce n'est pas les libéraux qui vont nous faire des leçons. Ils sont saisis depuis 1998 du rapport de M. Claude Ryan qui leur propose 170 mesures contre la pauvreté; il n'y en a pas une dans leur programme de parti.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Ce rapport produit en 1997, Aidez-nous à débarrasser de la... vous allez le voir appliqué.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, ils ne sont même pas capables de s'entendre pour le mettre dans le programme du parti, et vous croyez qu'il le serait au programme d'un gouvernement? Voyons donc! Et ce que je veux dire aussi, c'est qu'on vient d'avoir récemment la mesure de l'engagement social véritable du Parti libéral. C'est que nous avons décidé ? et beaucoup de gens ont trouvé que ce n'était pas suffisant ? qu'en faisant la réconciliation des aspects économiques et sociaux il fallait accorder une hausse de 0,10 $ de l'heure, ajuster de 0,10 $ de l'heure le salaire minimum, et le chef du Parti libéral nous a blâmés en disant que, lui, c'est zéro qu'il donnait. Voilà la mesure de l'engagement social du Parti libéral.

n(14 h 40)n

Le Président: Maintenant, en question principale, M. le député de Châteauguay.

Publicité dans les journaux faite
par les CLSC et les centres d'hébergement
et de soins de longue durée

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui. Merci, M. le Président. Les CLSC et CHSLD sont maintenant forcés de plaider leur cause à coups de publicité dans les journaux. Si on en est rendu là, c'est parce que la ministre de la Santé refuse de plaider la cause de la santé. Elle refuse de pousser le ministre des Finances dans les câbles, de l'amener à revoir ses politiques de coupure de rubans, de l'amener à rendre publiques les marges de manoeuvre du Québec. Comment les donneurs de soins, dévoués aux citoyens, peuvent-ils faire autrement, eux qui subissent la politique du Parti québécois? Depuis 1994, en termes d'investissements per capita, le Québec a reculé de la troisième place au Canada à la toute dernière place en matière de santé. En matière de soins à domicile, le Québec consent 33 $ per capita, alors que l'Ontario investit 91 $ per capita.

M. le Président, la question est très simple, c'est celle qui est posée par les partenaires de la ministre dont elle dit qu'elle est si fière de travailler avec eux et qui sont obligés de se battre contre elle dans les journaux: Quand est-ce que la ministre va s'occuper de la santé et plaider la cause des patients au Québec?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je crois que l'argent utilisé par les CLSC et les CHSLD aux fins de faire de la promotion serait mieux utilisé s'il était versé à la clientèle. Ces institutions connaissent d'ailleurs mon point de vue à cet égard, et je le leur ai fait savoir.

Par ailleurs, nous avons réinvesti des sommes considérables en matière de santé et de services sociaux. Il est vrai que nous avons un certain rattrapage à faire du côté de l'aide et des soins à domicile. Nous avons commencé à le faire et d'une façon significative depuis deux ans. J'ai eu, à cet égard, l'occasion d'annoncer des investissements de 128 millions de dollars en 1999-2000 et 2000-2001, dont 60 millions pour les personnes âgées en perte d'autonomie en 1999-2000 et 20 millions en 2000-2001, en plus du fait que nous avons travaillé à rehausser la qualité des services à rendre dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, sachant que nous devons continuer à travailler en ce sens. Alors, nous avons, au cours des dernières années, non seulement été sensibles à la situation vécue par ces personnes, mais nous avons agi très concrètement en rehaussant les budgets.

Est-ce que c'est assez? Sûrement pas. Est-ce que nous allons continuer à investir? Sûrement, M. le Président, pour accompagner les intervenants et aider les personnes âgées ou handicapées en perte d'autonomie qui comptent sur les services des professionnels qui oeuvrent dans ces établissements.

Le Président: M. le député.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, comment la ministre peut-elle critiquer ses partenaires, qui sont obligés de prendre parole par la voie des journaux parce qu'elle ne les défend pas, alors que c'est elle-même, c'est son gouvernement qui s'est payé des publicités du raisin, des poches de sang? Vous vous en souvenez, c'est avec l'argent de la santé que vous avez payé des publicités. C'est vous qui avez fait ça. Et maintenant vous voulez attaquer les partenaires qui ont besoin de crier?

Est-ce que la ministre se rend compte de ce que vivent les citoyens de la Montérégie, de Laval, de Lanaudière et des Laurentides? Les ressources des CLSC et des CHSLD de ces régions sont 42 % inférieures à la moyenne du Québec alors qu'on voit en ce moment tout le Québec qui crie à pleines pages de publicité les effets de la dernière position du Québec. Imaginez ce que vivent les régions encore plus affectées. Est-ce que la ministre comprend que les feux d'alarme clignotent de partout? Pourquoi laisse-t-elle le ministre des Finances partir avec la caisse?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Est-ce que je puis vous affirmer, M. le Président, que c'est plutôt le ministre des Finances qui trouve parfois que sa collègue de la Santé et des Services sociaux a l'air de partir avec la caisse?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Marois: Dans les faits, M. le Président, nous avons réinvesti la moitié de la marge de manoeuvre ? la moitié de toute la marge de manoeuvre ? du gouvernement du Québec dans le dossier de la santé et des services sociaux. Cela veut dire 4 milliards de dollars. Pourquoi avons-nous dû faire ce rattrapage? D'abord parce qu'à Ottawa on avait décidé de couper dans les paiements de transfert qui concernaient la santé sur le dos des personnes malades, et puis parce que, avant cela, on nous avait laissé une situation désastreuse au plan des finances publiques, ce que nous avons eu le courage de redresser. Maintenant, nous avons recommencé à investir en santé et en services sociaux.

Je sais qu'il y a encore des corrections à apporter, autant dans les CLSC et les centres d'hébergement et de soins de longue durée de la Montérégie, des Laurentides, de Lanaudière, de Chaudière-Appalaches, autant, c'est vrai, d'ailleurs, pour les centres jeunesse. Mon collègue le ministre délégué a confirmé cela lors de l'allocation des budgets les années dernières, et nous allons continuer à le faire.

Le Président: M. le député de Châteauguay.

Niveau des investissements en santé

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: En principale, M. le Président, d'abord pour rappeler à la ministre que le premier ministre qui est devant nous était d'accord avec les coupures qu'aujourd'hui elle veut maintenant crier. Et puis, je dois lui rappeler ? parce qu'elle nous parle des réinvestissements qu'elle a faits: Malgré les coupures, toutes provinces étant égales devant les coupures, quelle province a le plus reculé? Nous étions troisièmes, en termes d'investissements per capita dans la santé, en 1994, nous sommes rendus en dernière position. Elle peut parler puis se péter les bretelles des réinvestissements, on est passés de la troisième à la dernière position. Je ne pense pas que le ministre des Finances la trouve bien, bien achalante.

Est-ce que la ministre va enfin s'apercevoir que son refus de plaider la cause de la santé a amené justement le ministre des Finances à donner 15 000 $ de crédit d'impôt par emploi pour 4 000 emplois déménagés d'un quartier à un autre dans le multimédia? C'est autour de 60 millions juste cette année donnés à des compagnies, juste pour déménager. Elle peut arrêter les publicités aujourd'hui, elle peut mettre fin à l'inéquité régionale aujourd'hui si elle commence à travailler pour la santé aujourd'hui.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le...

Des voix: ...

Le Président: Bien.

Des voix: ...

Le Président: Je vous entends trop, M. le député de Saint-Laurent. M. le vice-premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: C'est dommage qu'on ne puisse aborder les questions économiques que par le biais de leur dérive, de leurs questions démagogiques sur la santé. Mais, quand même, toute occasion est bonne à saisir, et, alors qu'il y a cinq ans à peine et pendant plusieurs années l'image de la ville de Montréal correspondait à une espèce de montagne de poussière grise sur laquelle certains se plaignaient à en remettre, comme les débris miniers, aujourd'hui cette ville brille au firmament de la technologie non seulement de notre continent, mais du monde, et là ça se sait. La Gazette remettait de la poussière; là, le Washington Post en enlève. Écoutez bien ça.

Des voix: ...

Le Président: Bien. Peut-on revenir au calme, s'il vous plaît? M. le vice-premier ministre.

n(14 h 50)n

M. Landry: Bon! Alors, allons-y. C'est toujours le Washington Post, M. le Président: «Aided by generous tax credits ? justement ce dont ils parlent, donc on est pertinent à la question ? from the Québec Government, Montréal companies put more money into R and D than those elsewhere in Canada. Those efforts ? our efforts ? ...»

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: J'aurais le goût de vous répondre en anglais, M. le vice-premier ministre, mais vos efforts doivent maintenant porter fruit et aboutir.

M. Landry: M. le Président, dites-moi simplement: Go on.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Oui, mais je risque de vous dire: That's enough.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: ...

Le Président: Je pense, M. le leader, que je préférerais lui laisser finir sa phrase plutôt que de vous donner la possibilité de plaider pour ça. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Bon. Alors, j'en étais à: «...efforts have transformed Montréal into one of the most open economies in the world», et c'est des économies de ce genre qui peuvent se payer des systèmes de santé. C'est des finances publiques équilibrées qui permettent de réinvestir en santé, pas des désastres de 10 milliards d'augmentation de taxes en quatre ans comme on a connus avec vous et la ruine de notre réputation sur les marchés mondiaux.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bonaventure.

Des voix: ...

Le Président: Alors, Mme la députée de Bonaventure.

Plan de transport aérien pour les régions

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Chaque jour, le gouvernement péquiste nous fait la démonstration que le dossier des régions n'est pas une priorité, et je prends ici pour exemple, oui, le dossier du transport aérien pour lequel le gouvernement a été incapable de tenir ses promesses. Malgré l'engagement de quatre ministres, malgré la création d'un comité ministériel en mai dernier, les citoyens des régions attendent toujours des propositions concrètes. Résultat: Régionnair a quitté la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, Air Alma a quitté le Saguenay et les citoyens de Baie-Comeau...

M. Boulerice: ...

Le Président: M. le député de Sainte-Marie? Saint-Jacques, s'il vous plaît, j'aimerais entendre la députée.

Des voix: ...

Le Président: J'aimerais entendre Mme la députée de Bonaventure. Mme la députée.

Mme Normandeau: M. le Président, les citoyens de Baie-Comeau sont privés d'une liaison vers Québec.

Puisque le ministre des Régions est membre du comité ministériel, puisqu'il s'est lui-même engagé dans cette Chambre à faire des recommandations à ce comité, est-ce qu'il peut aujourd'hui, le ministre des Régions, nous dire quelles sont les recommandations qu'il a faites pour solutionner le problème du transport aérien en région?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Le comité ministériel continue son travail. Demain matin, justement, on aura une rencontre avec le ministre des Finances, demain soir je rencontre personnellement Regionnair et, la semaine prochaine, un mandat est donné de façon plus spécifique à un consultant de réunir d'autres transporteurs pour voir quel est le scénario le plus plausible, le plus rentable pour l'ensemble des citoyens des régions.

Mais Mme la députée de Bonaventure pourrait-elle nous appuyer quand on se bat pour qu'Air Canada, le ministre Collenette, du fédéral, maintiennent ce qu'ils ont dit durant toute la réforme du transport aérien en disant que jamais les régions ne seraient abandonnées, alors qu'Air Nova se fout des régions présentement? Cessons d'être des tapis de porte du fédéral puis battons-nous ici correctement.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: M. le Président, plutôt que d'accuser le fédéral, le ministre des Transports aurait intérêt à prendre ses responsabilités.

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée.

Mme Normandeau: M. le Président, si le ministre des Transports avait le courage, cet après-midi, il arrêterait d'accuser le fédéral et il prendrait ses responsabilités. Est-ce qu'il peut... Absolument, c'est votre responsabilité.

M. le Président, est-ce que le ministre des Transports peut nous expliquer pourquoi, le 26 mai dernier, dans le journal Le Devoir, il s'engageait à supporter le projet d'une coopérative, alors que, le 27 octobre dernier, dans le journal La Presse, il affirmait que la solution passerait par la création de plusieurs compagnies aériennes? Est-ce qu'il peut nous dire très clairement aujourd'hui quelle est sa solution pour l'avenir des régions au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, on prend nos responsabilités, on ne voudrait pas créer une structure qui pourrait être liquidée comme vous avez fait avec Quebecair. Ça, c'est clair. Il faut quand même être responsable. Il faut que le projet que nous allons accepter de financer, que ce soit par la voie d'une coopérative, que ce soit par la voie de la formation d'un consortium... Il faut absolument qu'on soit responsable. On n'engage pas 100 millions de dollars inutilement dans un projet qui n'assure pas la viabilité et la durabilité. Nous allons prendre nos responsabilités. Nous avons des spécialistes engagés, nous travaillons sur des scénarios et nous ne ferons sûrement pas comme les libéraux, nous allons prendre nos responsabilités, ici. Mais nous allons dire en même temps, même si ça vous fâche, même si ça vous agace, que le premier responsable dans l'aérien, c'est le fédéral puis qu'il se fout de tout.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de LaFontaine?

M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Question additionnelle. M. le Président, le ministre du Tourisme, responsable des Îles-de-la-Madeleine et député de cette région, doit savoir qu'il y a eu une baisse de 26 % du nombre de passagers aériens à destination des Îles-de-la-Madeleine. Il doit savoir que cela a entraîné une baisse du tourisme de 2 349, soit un nombre très important et primordial pour l'économie des Îles-de-la-Madeleine.

M. le Président, ma question au ministre du Tourisme: Devant ces baisses importantes et les demandes du milieu, aux Îles-de-la-Madeleine, qu'entendez-vous faire pour prendre vos responsabilités, pour rétablir un service aérien suffisant pour ne pas que les forfaits soient annulés comme ça a été fait aux Îles-de-la-Madeleine? Et entendez-vous prendre vos responsabilités rapidement? Les gens attendent.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le ministre délégué au Tourisme.

M. Maxime Arseneau

M. Arseneau: M. le Président, le gouvernement prend toujours ses responsabilités, et le ministre du Tourisme a rencontré tous les ministres du Tourisme du Canada, à Calgary, qui ont dit exactement la même chose que le ministre des Transports vient de dire dans cette Chambre, que le premier responsable... La situation est problématique dans toutes les régions du Canada, et ce que nous faisons, c'est de nous assurer qu'il y ait un minimum de service qui s'en va dans les régions.

Pour ce qui est du développement de l'industrie touristique, nous avons mis les efforts pour qu'on compense par la promotion que nous faisons, de sorte que le problème pour l'afflux de tourisme aux Îles-de-la-Madeleine n'est pas à la hauteur de 26 %, puisque les Îles ont encore bien performé cette année, puisqu'il y a des bateaux qui vont aux Îles. On s'occupe aussi de ça, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: En question principale, M. le député de Hull.

Tenue de référendums
sur le projet de fusions municipales

M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord souligner la présence de plus de 50 maires dans les tribunes, des maires qui sont ici, et, contrairement à ce que le gouvernement pense et véhicule, des maires qui sont ici pour protéger non pas leur job mais leurs citoyens.

M. le Président, en parlant de citoyens, s'il y a un mot qui est bien absent dans cette réforme bâclée de fusions municipales forcées, c'est bien le mot «citoyens».

J'ai une seule question: Est-ce que la ministre, oui ou non, avec 200 000 signatures, aujourd'hui, va écouter le voeu de la population et respecter le voeu démocratique dans les municipalités pour qu'une fois pour toutes les citoyens du Québec aient le droit au chapitre en matière de fusions municipales?

n(15 heures)n

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je craignais que le député de Hull ne puisse poser cette dernière question de la période de questions.

M. le Président, où étaient-ils, les maires et mairesses, en 1988, lorsque le gouvernement précédent ? l'actuel député de Laporte était alors ministre des Affaires municipales ? a modifié la Loi sur l'organisation territoriale municipale pour retirer la consultation des citoyens, qui se trouvait dans la loi jusqu'en 1988 et qui, depuis 1988, ne s'y retrouve plus, puisque dorénavant ce sont les seuls conseils de ville, par résolution ? alors donc un droit qui leur est réservé, aux conseils de ville ? qui peuvent enclencher un processus de fusion?

Où étaient-ils, M. le Président, lorsque les citoyens se sont prononcés en faveur d'un regroupement, à 63 %, à Port-Daniel, et que leur conseil de ville le leur a refusé, se sont prononcés à 52 %, à Sainte-Germaine-de-l'Anse-aux-Gascons, et que leur conseil de ville le leur a refusé, quand les citoyens de Notre-Dame-de-Portneuf se sont prononcés, à 52 %? Et j'en ai comme ça une liste impressionnante.

En d'autres termes, M. le Président, ça fait 12 ans que ce sont les conseils de ville qui ont le pouvoir de déclencher un regroupement par résolution, et il n'y a plus de consultation de citoyens.

Alors, les citoyens sont au coeur de nos préoccupations lorsque le gouvernement décide en Assemblée nationale, ici, au salon bleu, de prendre des décisions que des conseils de ville ont à maintes reprises refusées à des citoyens et que des conseils de ville avaient jusqu'à maintenant le pouvoir de prendre eux-mêmes.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, cet échange met fin à la période de questions et de réponses orales pour aujourd'hui. Je voudrais à cet égard, compte tenu de la dernière intervention, remercier les élus municipaux qui sont dans nos tribunes pour la dignité dont ils ont fait preuve aujourd'hui.

Votes reportés

Alors, maintenant, nous allons aller au vote reporté sur la motion de notre collègue le député de Laurier-Dorion. Alors, d'abord, je vais lire la motion...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vais d'abord lire la motion du député de Laurier-Dorion. Je vais par la suite lire la motion d'amendement de M. le député de Gouin, ministre de la Solidarité sociale, et par la suite nous passerons au vote d'abord sur les amendements puis, par la suite, sur la motion. M. le leader.

M. Paradis: Oui, simplement une précision, M. le Président, qui pourrait éviter à l'Assemblée nationale de voter deux fois. Est-ce qu'on doit décoder des réponses du premier ministre, à la période de questions, que le gouvernement est maintenant d'accord avec une loi-cadre comme telle et des moyens précis, ou si on ne doit pas décoder ça de la réponse du premier ministre? À ce moment-là, on devra procéder à deux votes qui, malheureusement, ne recueilleront pas l'unanimité de l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, aujourd'hui, il semble bien que l'opposition a d'énormes problèmes pour décoder les réponses du gouvernement, on l'a vu avec la ministre du Travail. Ils font preuve même d'une surdité presque totale. Alors, on va les aider à décoder la position du gouvernement, c'est la motion telle qu'amendée.

Le Président: Alors, d'abord nous allons... Je vais lire la motion principale du député de Laurier-Dorion:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté sur la base des objets, des principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

La motion d'amendement, maintenant, se lit comme suit, celle du député de Gouin. Alors, cette motion principale serait amendée par le remplacement des mots «loi-cadre visant l'élimination de» par les mots «stratégie à la lutte à», et par le remplacement des mots «sur la base des objets,» par les mots «en prenant en considération certains», et par le retrait des mots «et des objectifs», ce qui ferait que la motion telle qu'amendée se lirait comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une stratégie à la lutte à la pauvreté en prenant en considération certains principes de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

Motion d'amendement à la motion
de l'opposition proposant que l'Assemblée
demande au gouvernement de procéder
à l'adoption d'une loi-cadre
sur l'élimination de la pauvreté

Alors, comme je l'ai indiqué, nous allons d'abord voter sur la proposition d'amendement. Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda? Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Alors, que les députés contre cette motion d'amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount? Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 67

Contre: 42

Abstentions: 0

Le Président: Donc, la motion d'amendement du député de Gouin et ministre de la Solidarité sociale est adoptée, ce qui signifie que la motion, maintenant, sur laquelle nous allons voter, c'est la motion amendée du député de Laurier-Dorion. Alors, je la lis:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une stratégie à la lutte à la pauvreté en prenant en considération certains principes de la proposition mise de l'avant par le Collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

n(15 h 10)n

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Bien, comme elle a été amendée substantiellement, le député de Laurier-Dorion, après vérification auprès des gens qui ont amené les pétitions aujourd'hui à l'Assemblée nationale, considère qu'il ne s'agit plus de sa motion.

Le Président: Alors, je pense que l'Assemblée a pris note, et il s'agit donc d'une motion amendée.

Motion amendée

Alors, que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion amendée veulent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Brouillet (Chauveau), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), M. Pinard (Saint-Maurice), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Alors, que les députés contre cette motion amendée veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount? Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion)...

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 69

Contre: 42

Abstentions: 0

Le Président: Alors, la motion amendée est adoptée.

Motions sans préavis

Nous allons maintenant aller aux motions sans préavis.

M. le leader du gouvernement. M. le leader adjoint?

M. Boulerice: Oui. Si vous permettez, avant, Mme la whip en chef.

Le Président: Très bien. Mme la whip en chef.

Nomination de la députée de Rimouski
à titre de membre de la commission
de l'administration publique

Mme Caron: Oui, M. le Président. Conformément à l'article 129 du règlement de l'Assemblée nationale, qu'il me soit permis de faire motion afin que la députée de Rimouski, Mme Solange Charest, soit membre permanent de la commission de l'administration publique en remplacement du député de Johnson, M. Claude Boucher.

Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: ...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Simplement une vérification soit auprès de Mme la whip ou du leader du gouvernement: Est-ce que le gouvernement a l'intention de proposer la candidature de Mme la députée de Rimouski au poste de vice-présidente de la commission?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Ah, M. le Président, vous savez bien que c'est la commission qui décidera d'une pareille question.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. C'est pour ça que j'ai libellé la question: Est-ce qu'il est de l'intention de quelqu'un au gouvernement de proposer la candidature de madame comme vice-présidente de la commission?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Ah, M. le Président, connaissant les qualités extraordinaires de la députée de Rimouski, il est fort probable qu'un de ses collègues fasse cette proposition.

Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée, avec ces précisions? Elle est adoptée. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'ordre de renvoi du projet de loi privé n° 236, Loi modifiant la Loi concernant le Club de Golf de Beloeil, pour étude détaillée à la commission de l'aménagement du territoire soit révoqué;

«Que ledit projet de loi privé soit renvoyé pour étude détaillée à la commission des finances publiques; et

«Que le ministre d'État à l'Économie et aux Finances soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Maintenant, M. le Président...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais vous signaler, M. le leader adjoint du gouvernement, qu'il semble y avoir un petit problème de procédure, et il s'agit de la question suivante. En vertu de l'article 186 de notre règlement à l'égard des révocations: «Toute motion adoptée devient soit un ordre, soit sur une résolution de l'Assemblée: un ordre quand l'Assemblée enjoint à une commission, à un député ou à toute autre personne de faire quelque chose»... ta-ta-ta-ta... Bon.

«Un ordre ou une résolution ne peuvent être révoqués que sur motion sans préavis d'un ministre.»

Des voix: Ça s'en vient.

Le Président: Mais, comme ce n'est pas le cas, M. le député de Sainte-Marie?Saint-Jacques, je serai obligé de prendre cette motion présentée par un membre du gouvernement.

Une voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Paradis: M. le Président?

Le Président: Oui, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. À ce moment-ci, il y aurait consentement de notre côté à ce que vous suspendiez les travaux le temps nécessaire à ce que l'on procède à l'assermentation au Conseil exécutif...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Je vais en discuter avec le premier ministre.

Le Président: Entre-temps, je vais reconnaître le leader du gouvernement.

Révocation du renvoi
en commission parlementaire
des projets de loi  nos 236 et 239
et nouveau renvoi en commission

M. Brassard: Alors là, je voudrais reprendre la motion, M. le Président, parce que, en tout cas, jusqu'à nouvel ordre, je suis membre du Conseil des ministres. Ha, ha, ha! C'est pour ça que je vais la faire tout de suite, là. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'ordre de renvoi du projet de loi privé n° 236, Loi modifiant la Loi concernant le Club de Golf de Beloeil, pour étude détaillée à la commission de l'aménagement du territoire soit révoqué; et

«Que ledit projet de loi privé soit renvoyé pour étude détaillée à la commission des finances publiques;

«Que le ministre d'État à l'Économie et aux Finances soit membre de ladite commission pour la durée du mandat;

«Que l'ordre de renvoi du projet de loi privé n° 239, Loi modifiant la Loi concernant la Régie d'assainissement des eaux usées de Boischatel, L'Ange-Gardien, Château-Richer, pour étude détaillée à la commission des transports et de l'environnement soit révoqué; et

«Que ledit projet de loi privé soit renvoyé pour étude détaillée à la commission de l'aménagement du territoire;

«Que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Alors, cette motion est adoptée? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Je vous soumets respectueusement, M. le Président, que le leader du gouvernement vient de présenter plus d'une motion. Il y a une motion, sauf erreur, de révocation. Par la suite, il y a une nouvelle motion qui est présentée. Dans le premier cas, dans le cas de la motion de révocation, ou bien elle n'est pas complète ou on va se retrouver avec deux ministres en commission parlementaire, soit le ministre à l'Économie et aux Finances et la ministre des Affaires municipales et de la Métropole; ou la révocation est complète ou elle n'est que partielle. C'est une précision qui devrait être apportée, ou une correction, M. le Président.

Et je le soumets très respectueusement, on devrait procéder, dans un premier temps, à une motion de révocation et, par la suite, suivant les dispositions de notre règlement, à une nouvelle motion comme telle. Le leader adjoint n'aurait pas commis cette erreur, même s'il n'est pas ministre, M. le Président.

Le Président: Est-ce qu'on peut s'entendre, M. le leader de l'opposition officielle, si on veut simplifier les choses, qu'il y aurait donc, sur les écritures, une motion d'abord de révocation des deux ordres de l'Assemblée, les deux motions qui avaient été adoptées, de deux effectivement, et qu'il y aurait également deux nouvelles motions, en fait, concernant un nouvel ordre de l'Assemblée pour le renvoi?

Mise aux voix

Alors, c'est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien. Alors, maintenant, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement. Ah, un instant, il y a d'autres motions sans préavis. Je vais d'abord donner la parole au député de Westmount?Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je fais motion:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la Ville de Westmount et l'Association municipale de Westmount;

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, the bill on forced municipal mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following groups: City of Westmount and also the Westmount Municipal Association.»

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il consentement, M. le leader adjoint du gouvernement, pour débattre de cette motion?

M. Boulerice: M. le Président, au risque de voir l'opposition me retirer l'appui spontané qu'elle m'a offert, je ne peux donner mon consentement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, il n'y a pas consentement. M. le député de Limoilou.

n(15 h 20)n

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Je vais déposer une motion:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la ville de Lac-Saint-Charles, la ville de Saint-Augustin, la ville de Loretteville, la ville de Saint-Émile, la ville de Val-Bélair, la ville de Vanier, la ville de L'Ancienne-Lorette, la ville de Cap-Rouge, la ville de Beauport, la ville de Charlesbourg et le Comité des citoyens de Sainte-Foy», M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Pas de consentement. Alors, M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: M. le Président, je demande la consentement pour présenter une motion sans préavis:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre le groupe suivant, et ça, à compter du 7 décembre 2000: Outaouais Alliance», groupe de 46 000 de la communauté anglophone de l'Outaouais.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Pinard): Aucun consentement. Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, merci, M. le Président. Je demande le consentement ? je suis convaincu que je vais avoir ça ? pour:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la ville de Baie-d'Urfé ? et je voudrais saluer le maire de Baie-d'Urfé, qui est ici aujourd'hui ? la ville de L'Île-Bizard, la ville de Kirkland, la ville de Pierrefonds, la ville de Saint-Anne-de-Bellevue, la ville de Sainte-Geneviève ? et je voudrais aussi saluer le maire de Sainte-Geneviève, qui est ici aujourd'hui ? la ville de Senneville, et la Chambre de commerce de l'Ouest-de-l'Île de Montréal.»

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, the bill on forced municipal mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following groups: the city of Baie-d'Urfé, the city of Île-Bizard, the city of Kirkland, the city of Pierrefonds, the city of Sainte-Anne-de-Bellevue, the city of Sainte-Geneviève, the city of Senneville and the West Island Chamber of Commerce.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, y a-t-il consentement, M. le leader adjoint du gouvernement, pour débattre de cette motion?

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Alors, pas de consentement. Alors, M. le député de D'Arcy-McGee.

M. Bergman: M. le Président, j'aimerais présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organisations suivantes, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la ville de Côte-Saint-Luc et la ville de Hampstead.»

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, bill on forced municipal mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following groups: The city of Côte-Saint-Luc and the town of Hampstead.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Y a-t-il consentement, M. le leader adjoint du gouvernement, pour débattre de cette motion? Aucun consentement. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Chambre afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre l'organisme suivant, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la ville de Dollard-des-Ormeaux et son maire, M. Ed Janiszewski.»

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, the bill on forced municipal mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following group: City of Dollard-des-Ormeaux and its mayor, Ed Janiszewski.»

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Robert-Baldwin.

Y a-t-il consentement, M. le leader adjoint, pour débattre de cette motion? Aucun consentement.

Alors, je cède maintenant la parole, pour une motion sans préavis, au député de l'Acadie. M. le député.

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, dans le but de permettre au gouvernement de manifester un minimum de respect aux citoyens et aux élus, je désire faire la proposition suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170 sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre de l'année 2000: les autorités de ville Saint-Laurent, les représentants du Comité des citoyens de Saint-Laurent contre les fusions forcées, la direction de la Chambre de commerce de Saint-Laurent, le Syndicat des cols bleus de Saint-Laurent, le Syndicat des cols blancs de Saint-Laurent et le Syndicat des pompiers de Saint-Laurent», M. le Président. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de l'Acadie.

Y a-t-il consentement, M. le leader adjoint du gouvernement, pour débattre de cette motion? Pas de consentement.

Alors, je cède maintenant la parole, toujours aux motions sans préavis, au député de Mont-Royal. M. le député.

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Chambre afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi qui, comme vous le savez, est sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre de l'année 2000: la ville de Mont-Royal, le Regroupement des citoyens pour la sauvegarde de l'autonomie de la ville de Mont-Royal et le Conseil québécois des marchés publics.»

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, bill on forced municipal mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following groups: the Town of Mount Royal, le Regroupement des citoyens pour la sauvegarde de l'autonomie de la ville de Mont-Royal and le Conseil québécois des marchés publics.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Mont-Royal.

M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il consentement pour débattre de cette motion? Pas de consentement.

Alors, je cède maintenant la parole au député de Jacques-Cartier. M. le député.

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. On va changer la tendance, je suis certain.

Je veux présenter la motion sans préavis suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, la loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre de l'an 2000;

«That the Committee on Planning and the Public Domain, which will hold special consultations on Bill 170, the bill on forced mergers, also hear the following groups, beginning on December 7th 2000: la ville de Beaconsfield ? dont le maire, Roy Kemp, est ici aujourd'hui ? la cité de Dorval ? dont le maire, Peter Yeomans, est ici aujourd'hui ? la ville de Pointe-Claire ? dont le maire, Bill McMurchie, est ici aujourd'hui ? la ville de L'Île-Dorval et également le Rassemblement des citoyens Démocracité de Pointe-Claire.»

n(15 h 30)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Jacques-Cartier. M. le leader adjoint du gouvernement, y a-t-il... Est-ce que...

M. Boulerice: S'il y avait eu une certaine fusion des motions, j'aurais pu le considérer autrement, mais c'est non. Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, pas de consentement, M. le député de Jacques-Cartier. Je cède maintenant la parole... Bon, il n'y a plus de motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Nous allons maintenant passer à la rubrique Avis touchant les travaux des commissions parlementaires. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement, s'il vous plaît.

M. Boulerice: Oui. Alors, M. le Président, dans la pleine capacité de mes fonctions, cette fois-ci, j'avise cette Assemblée que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 115, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives relativement à la publicité foncière, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38b de l'édifice Pamphile-Le May;

Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 144, Loi sur La Financière agricole du Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le jeudi 23 novembre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 150, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le jeudi 23 novembre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et finalement

Que la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 146, Loi modifiant la Loi sur les élections scolaires et la Loi électorale, demain, le jeudi 23 novembre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader adjoint du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous allons maintenant passer à la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Décision du président sur la demande
de directive du leader du gouvernement
concernant l'impact de la règle du sub judice
sur l'interpellation du 24 novembre 2000

Alors, je vais rendre, au nom du président, la décision concernant l'interpellation du 24 novembre 2000. Lors de la séance d'hier, le leader du gouvernement a adressé une demande de directive à la présidence eu égard à l'impact de la règle du sub judice sur l'interpellation prévue pour le vendredi 24 novembre. Cette interpellation, qui doit avoir lieu entre le député de Chomedey et le ministre de la Sécurité publique, doit porter sur le sujet suivant: Le mandat donné à la police de Laval concernant l'enquête sur l'effondrement du viaduc sur l'autoroute 15.

Comme le leader du gouvernement l'a d'ailleurs souligné, l'effondrement du viaduc sur l'autoroute 15 fait présentement l'objet d'une enquête du coroner. Dans notre jurisprudence parlementaire, une enquête du coroner est assimilée à une affaire devant un organisme quasi judiciaire. Or, la règle du sub judice interdit de parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme judiciaire si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit. En matière criminelle, cette règle est absolue. En matière quasi judiciaire comme en matière civile, cette règle est moins absolue, en autant que les députés évitent de toucher au coeur de l'affaire. C'est pourquoi...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous me donniez une chance, ça pourrait peut-être aller mieux.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le leader. J'aimerais mieux, justement, ne point entendre quelque mot que ce soit plutôt qu'une sympathie. Je disais donc: C'est pourquoi, au cours de l'interpellation qui aura lieu vendredi, j'invite les députés à faire preuve de prudence afin que leurs paroles ne portent préjudice à qui que ce soit, et à s'en tenir au sujet de l'interpellation qui porte sur le mandat donné à la police de Laval dans cette affaire. De même, il appartiendra au président de la commission de s'assurer du respect de la règle du sub judice. Alors, voilà la décision rendue concernant l'interpellation qui doit avoir lieu vendredi, le 24 novembre de l'an 2000.

Affaires du jour

Alors, ceci met fin au affaires courantes, et nous allons maintenant plonger dans nos affaires du jour, et, à ce sujet, je demanderais au leader adjoint du gouvernement de bien vouloir m'indiquer la rubrique que j'appellerai.

M. Boulerice: Rassurez-vous, je ne vous en veux pas, M. le Président. Alors, je vous réfère à l'article 35 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 139

Prise en considération du rapport
de la commission qui en a fait l'étude détaillée
et des amendements de la ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement. La rubrique 35 de votre feuilleton. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 139, Loi sur le notariat, ainsi que les amendements transmis, en vertu de l'article 252 du règlement, par Mme la ministre responsable de l'application des lois professionnelles. Ces amendements ont été déclarés recevables.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport de la commission des institutions ainsi que sur les amendements qui ont été déposés? Alors, M. le député...

Une voix: ...

Mise aux voix des amendements de la ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Alors, comme il n'y a aucun intervenant, les amendements proposés par Mme la ministre responsable de l'application des lois professionnelles sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 139, Loi sur le notariat, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Merci, M. le Président. Je vous réfère à l'article 17 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 17 de votre feuilleton, M. le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 161, Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 161? M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Cliche: M. le Président, je suis prêt à intervenir dans un discours très intéressant, mais je comprends que le leader adjoint ait quelque chose d'autre à dire.

M. Boulerice: M. le Président, si M. le ministre me permet...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, nous allons céder la parole au leader adjoint du gouvernement. M. le leader.

M. Boulerice: M. le Président, je m'excuse, il y a eu légère confusion entre les articles 7 et 17 de ma part. Donc, nous allons plutôt passer à l'article 7 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 140

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Effectivement, M. le leader adjoint, c'est une dizaine. Alors, l'article 7 de notre feuilleton. L'Assemblée reprend le débat ajourné le 21 novembre 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale. Lors de l'ajournement des travaux hier, le député d'Anjou avait effectivement terminé son allocution. Alors, je serais prêt maintenant à reconnaître M. le député de Verdun. Vous avez un temps de parole de 20 minutes.

M. Gautrin: Est-ce que vous pourriez allumer l'horloge, s'il vous plaît? Ça me permettrait de voir le temps de parole. Vous seriez aimable, ça me permettrait... Il y a une pénalité? L'horloge ne marche plus? C'est bien ça? Ça va marcher?

Une voix: ...

M. Gautrin: Oui, là, je peux bien, mais c'est parce que je peux regarder à droite ou à gauche, enfin... Elle marche, votre horloge? Bien, je ne la vois toujours pas, M. le Président. Mais enfin, il y a quelques problèmes d'intendance.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député, puisque vous étiez habitué à travailler sans horloge...

M. Gautrin: Ah, vous savez, je peux travailler sans, avec horloge.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...je vous cède maintenant la parole, et nous allons reprendre la bonne vieille méthode du chronomètre.

M. Gautrin: Je peux travailler avec filet et sans filet. Je vois que vous avez l'amabilité de me donner 47 minutes; j'en suis très heureux.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons reprendre la bonne vieille méthode du chronomètre, M. le député de Verdun, et je vous ferai signe du temps écoulé.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci. Merci, M. le Président. Pour revenir sérieusement à la question, je dois dire que notre formation politique, au moment de l'étude du principe de la loi n° 140, va voter en faveur du principe de la loi n° 140. Je me dois de saluer l'énorme travail qui a été fait par mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce au moment des consultations sur le projet de loi. Il a travaillé énormément pour le bonifier, et je dois dire que le résultat que nous avons devant nous est un peu le travail consensuel qui a été fait avec la députée de Pointe-aux-Trembles, l'actuelle ministre déléguée à la Famille, et le travail du député de Notre-Dame-de-Grâce. Merci.

n(15 h 40)n

Ceci étant dit, M. le Président, à l'intérieur du projet de loi, il existe trois points auxquels je voudrais particulièrement accorder une certaine importance. Le premier point va toucher les travailleurs autonomes; le deuxième point va toucher comment on utilisera les cotisations; et le troisième point va être une interrogation quant au niveau de cotisation. Alors, abordons, d'abord, la question des travailleurs autonomes. Mme la ministre, je me permets de vous faire remarquer que, dans votre projet de loi, vous utilisez le concept de «travailleur autonome», puisque les travailleurs autonomes sont admis aux congés parentaux. Je trouve que c'est une démarche intéressante et j'y reviendrai un peu plus tard. Néanmoins, j'ai remarqué que ces mêmes travailleurs autonomes n'existent plus dans l'article 77 au moment où on parle du comité consultatif, mais qu'on ne parle simplement que d'un membre représentant les travailleurs dont les revenus proviennent d'une entreprise, et ce n'est pas le même concept exactement que le concept de «travailleur autonome».

J'aurais cru, M. le Président, puisqu'on leur donnait la possibilité et l'obligation de participer dans cette Loi sur l'assurance parentale, qu'on les aurait reconnus de plain-pied et qu'on leur aurait permis aussi de pouvoir avoir un siège au comité consultatif, parce que, malheureusement, actuellement on les assimile à l'intérieur des travailleurs dont les revenus proviennent d'une entreprise. Ça inclut bien sûr les travailleurs autonomes, mais ça peut inclure d'autres concepts. Puisque le législateur ne parle pas pour ne rien dire, s'il a utilisé le concept de «travailleur autonome» dans les articles 41 et 42 de la loi et qu'il a utilisé un texte différent dans l'article 77, c'est qu'il voulait couvrir une réalité différente. Je regrette, on n'accorde pas aux travailleurs autonomes la pleine possibilité de pouvoir siéger au comité consultatif, puisqu'on les inclut simplement parmi l'ensemble des personnes dont le revenu provient d'une entreprise, premier élément.

Deuxième point de vue. On va ici constituer un régime d'assurance parentale. Si vous regardez la manière dont va fonctionner ce régime d'assurance parentale ? et je fais référence, à ce moment-là, aux articles qui sont aux articles de la section VI ? les cotisations à ce régime d'assurance parentale sont transmises à la Régie et la Régie doit ensuite payer les prestations d'assurance parentale. Nulle part ? et c'est très important, ce que je vous dis, M. le Président ? n'est constitué un fonds à la Caisse de dépôt pour capitaliser les cotisations au régime d'assurance parentale. Si on choisissait ce mode de fonctionnement, c'est-à-dire si la ministre disait: La contribution initiale plus l'ensemble des cotisations sont versées dans un fonds à la Caisse de dépôt, qui continuerait à grossir en fonction des revenus moyens de la Caisse de dépôt, moins évidemment les sorties nécessaires pour payer les prestations, on serait assuré que l'ensemble des bénéfices qui viendraient des investissements possibles à ces cotisations seraient réellement consacrés pour les parents, seraient réellement consacrés pour les mères de famille, pour les personnes qui veulent prendre un congé parental, mais ce n'est pas le cas actuellement, la Régie ne fonctionne que comme un organisme payeur. Nulle part vous ne capitalisez le fonds d'assurance parentale.

Je me permets de rappeler à la ministre que déjà le Conseil du statut de la femme, dans le mémoire qu'il avait déposé devant la commission parlementaire, avait demandé que la Loi sur l'assurance parentale prévoie la constitution d'un fonds propre à l'assurance parentale, fonds qui aurait été, bien sûr, comme l'ensemble des fonds, géré par la Caisse de dépôt, l'objectif étant de s'assurer que les revenus perçus dans le cadre de la loi sont affectés uniquement à l'administration du régime et au versement des prestations parentales prévues par la loi. Actuellement...

M. Copeman: Pardon, j'aurais une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce sur une question de règlement.

M. Copeman: Sur une question de règlement, M. le Président. C'est un important projet de loi. Pouvez-vous vérifier le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Pinard): Effectivement, nous n'avons point le quorum, actuellement. Alors, veuillez appeler les députés, s'il vous plaît.

n(15 h 46 ? 15 h 47)n

Alors, nous avons maintenant le quorum. Je vous inviterais à demeurer parmi nous. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, c'est avec plaisir que je vois la députée de Terrebonne, et je peux lui rappeler à quel point il est important de capitaliser ? elle le sait parfaitement ? le fonds d'assurance parentale, parce qu'il faut bien comprendre que, si vous capitalisez le fonds d'assurance parentale, vous avez l'assurance que l'ensemble des cotisations que vous allez verser et qui sont versées par les employeurs, et les employés, et les travailleurs autonomes pour le but de l'assurance parentale ne seront utilisées qu'aux fins de l'assurance parentale, premièrement. Deuxièmement, si vous capitalisez ce fonds à l'intérieur d'un nouveau compte dans la Caisse de dépôt, les sommes qui seront versées en trop durant une année pourront porter intérêt au taux moyen de rendement de la Caisse comme ça se fait dans l'ensemble des autres fonds. Alors, ce n'est pas ce qui est prévu actuellement dans votre régime, et, moi, je plaide ici actuellement pour que vous capitalisiez, comme le demande, d'ailleurs ? c'est ce que j'ai rappelé au moment où mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce est intervenu ? à l'heure actuelle le Conseil du statut de la femme.

Donc, il me semble important que, si on met sur pied un tel régime, on fait un pas en avant, on fait un pas pour soutenir réellement les parents, on fait un pas pour soutenir les femmes qui doivent se retirer du marché du travail. Assurons-nous que toutes les sommes qui sont versées à cette fin soient utilisées à cette fin et que, si elles ne le sont pas dans une année durant, elles puissent porter intérêt pour être utilisées éventuellement dans ce régime-là, quitte à ce que les paramètres du régime soient bonifiés, si jamais le régime devient plantureux et a beaucoup de surplus. Mais, au moins, on aura fait un principe, c'est qu'on n'utilisera pas les cotisations versées pour l'assurance parentale à d'autres fins que l'assurance parentale, et, pour faire cela, il est nécessaire que non pas les cotisations soient versées à la Régie des rentes, mais que les cotisations soient versées dans un fonds, par la Régie, bien sûr, mais versées dans un fonds à la Caisse de dépôt, fonds qui serait semi-capitalisé. C'est-à-dire, il serait capitalisé avec le reliquat de ce qu'il resterait après chacune des périodes des exercices financiers. Ça, c'est un deuxième point, M. le Président.

n(15 h 50)n

Le troisième point. On a déposé en commission parlementaire une projection possible de cotisation. Vous savez, à l'heure actuelle, que les sommes maximales assurables sont de 50 000 $, qui sont actuellement dans le régime. Les projections de cotisation sont relativement modestes. Je vous dirais: Elles sont, au maximum, de 237,28 $ pour un travailleur autonome, sachant que le travailleur autonome ne va payer que la totalité de la part de l'employé plus la moitié de la part de l'employeur, la part de l'employeur étant de 140 %. Si l'employé paie 100 %, l'employeur paiera 140 %, et le travailleur autonome, à ce moment-là, va avoir une cotisation de 170 %. On se comprend, M. le Président, sur ces questions-là? Donc, cotisation qu'on pourrait, d'aucuns, considérer comme relativement modeste.

M. le Président, je me permets néanmoins de rappeler à ce gouvernement qu'il n'a pas déposé... Il a déposé. Comme il l'a fait d'ailleurs pour les fusions municipales, il dépose un tableau qui est un résultat de projections, il ne dépose pas une étude qui nous permettrait de conclure à la vraisemblance des projections qui sont incluses à l'intérieur du tableau. La ministre s'en rappellera certainement et les membres ici, dans cette Chambre, s'en rappelleront certainement, nous avons déjà débattu à l'intérieur de cette Chambre un projet de loi sur l'assurance médicaments. Je suis sûr que vous vous en rappelez. À l'époque, lorsque nous débattions le principe du projet de loi sur l'assurance médicaments, on nous assurait et la ministre de la Santé assurait avec sérieux et assurance que toutes les études avaient été faites. On ne nous les donnait pas, les études, à l'époque. On n'avait aucune manière de les vérifier, on n'avait aucune manière de pouvoir refaire nous-mêmes... voir s'il y avait une erreur dans les projections ou si les éléments qui étaient à la base des hypothèses des études étaient sérieux. Mais on nous affirmait que, absolument, il était sûr, l'assurance médicaments ne pourrait pas dépasser une cotisation de 175 $ par année. Je suis désolé de vous dire aujourd'hui que la ministre a été elle-même obligée de tenir une commission parlementaire sur l'assurance médicaments en disant: Le régime d'assurance médicaments n'arrive pas à s'autofinancer, il faut monter, à l'heure actuelle, les cotisations à 350 $.

Alors, M. le Président, l'expérience est toujours importante lorsqu'on doit regarder quelque chose pour le futur. L'expérience de l'assurance médicaments nous a démontré que les projections qui avaient été faites par ce gouvernement n'étaient pas sérieuses en ce qui touchait l'assurance médicaments. Je n'ai pas de raison de croire ? et j'insiste sur les mots que je vais vous dire ? que les projections faites par la ministre ici ne sont pas des projections sérieuses, mais je lui demande, si ces projections sont des projections sérieuses, qu'elle nous fasse l'amabilité non pas simplement de déposer le résultat des calculs mais l'intégralité de l'étude qui a mené aux éléments qui sont ici quant aux projections de cotisation.

Je ne conteste pas, à l'heure actuelle, ce qu'il y a dans le document. Je trouve ça, à première vue, relativement bas comme cotisation. Je voudrais savoir, par exemple, dans les projections qui ont été faites par la ministre, quel type de projections elle fait quant à l'évolution démographique. Elle doit savoir comme moi, à l'heure actuelle, que la situation au point de vue démographique est assez catastrophique au Québec. L'indice synthétique de fécondité est en chute, a été en chute, du moins, dans ces dernières années. Il est clair que, si elle projette une mesure de ce type-là, peut-être qu'une telle mesure pourrait avoir une influence sur l'indice synthétique de fécondité, je ne le sais pas. C'est possible, mais il est à remarquer qu'il serait intéressant pour nous d'avoir l'ensemble de l'étude, c'est-à-dire savoir quelles sont les hypothèses utilisées par le gouvernement pour projeter actuellement ces taux de cotisation. Alors, je me permets de lui demander si elle pourrait nous déposer cette étude-là. J'imagine que c'est une étude qui est du domaine public, et cette étude nous permettrait de mieux comprendre quelle est la portée des taux de cotisation.

En dernier lieu, je voudrais encore aborder une question un peu plus complexe qui est reliée aussi au travailleur autonome dans le projet de loi. La ministre doit savoir que la situation pour un travailleur autonome et pour une femme travailleuse autonome ou un parent travailleur autonome est différente, en quelque sorte, de celle pour un salarié. On ne peut pas quitter nécessairement aussi facilement ou pour une période de temps aussi longue son travail lorsqu'on est travailleur autonome. Vous avez été vous-même, M. le Président, notaire, vous aviez des clients. Si vous aviez été amené... À l'époque, ce n'était pas possible, mais si, à l'époque, vous aviez été amené à devoir prendre un congé parental, la durée de votre congé parental aurait été probablement limitée par la nécessité pour vous de maintenir un lien avec votre clientèle. Donc, je ne conteste pas, ici, qu'il peut y avoir ? et j'insiste ? une réalité différente pour les travailleurs autonomes et pour les travailleurs salariés.

Les besoins des travailleurs autonomes en matière de congés parentaux peuvent être différents des besoins des salariés en matière de congés parentaux. Si, en matière de congés parentaux, la longueur du congé est importante et le taux de remplacement du revenu est important, on pourrait envisager une plus grande flexibilité dans la loi où la personne pourrait choisir, par exemple, une période plus courte de remplacement du revenu mais avec un taux de remplacement du revenu plus important. Autrement dit, disons, la personne qui choisit de prendre un congé parental aurait la même ponction, en quelque sorte, sur la caisse d'assurance, ponction qu'elle pourrait étaler sur une certaine période de temps avec un certain taux de remplacement du revenu ou bien qu'elle pourrait concentrer sur une période plus courte mais avec un taux de remplacement du revenu plus important, et, à mon sens, M. le Président, il serait intéressant d'introduire dans sa loi ce type de flexibilité qui n'est pas présente actuellement dans la Loi sur l'assurance parentale.

Je me permets, M. le Président, de rappeler que déjà le Conseil du statut de la femme, dans le mémoire que le Conseil avait présenté devant la commission, avait rappelé que, en ce qui touchait la réalité des travailleurs autonomes, il recommandait qu'une réflexion soit entreprise le plus rapidement possible, en consultation avec les travailleurs autonomes, afin de voir si les modalités du régime d'assurance parentale proposé conviennent bien à la situation particulière des travailleuses et des travailleurs autonomes et s'il n'y a pas lieu d'envisager d'autres types de modalités. Je pense qu'il y a lieu actuellement d'envisager d'autres modalités et d'introduire dans le régime d'assurance parentale des flexibilités.

Alors, je vois que le temps passe, M. le Président, et je vais donc résumer les trois points qu'il me semble important de vous signaler. Oui, nous sommes d'accord avec le principe de l'assurance parentale. Soyons-en clairs, ici, l'opposition appuie le projet de loi. Je voudrais néanmoins soulever l'importance pour la ministre de prendre en considération la possibilité de créer un fonds capitalisé pour mettre les cotisations à l'assurance parentale de manière à s'assurer que toutes les cotisations à l'assurance parentale soient réellement utilisées pour les fins auxquelles elles sont versées, c'est-à-dire la possibilité pour les parents de prendre des congés lorsqu'ils ont des enfants. Et, si le fonds capitalisé était gros, ça permettrait d'augmenter même les prestations.

Je tiens aussi à plaider pour une plus grande flexibilité en ce qui a lieu à l'assurance parentale pour tenir compte de la réalité du marché du travail, qui est une réalité changeante aujourd'hui, où il y a bien sûr des salariés, et je pense qu'il y a une réalité pour les salariés mais qu'il y a aussi des travailleurs autonomes, M. le Président, qui sont amenés à avoir une réalité face au marché du travail et pour laquelle on pourrait considérer avoir des types de congés qui soient légèrement différents. Alors, plus de flexibilité, possibilité d'un fonds qui soit un fonds capitalisé à la Caisse de dépôt et, en fin de compte, sur le comité consultatif, de grâce, n'oubliez pas aussi l'existence des travailleurs autonomes. Ils existent, et ne les assimilez pas aux personnes qui tirent leur principal revenu des revenus d'une entreprise. Je vous remercie, M. le Président.

Une voix: Bravo!

n(16 heures)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Alors, Mme la députée.

Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Alors, merci, M. le Président. Je vois qu'il y a eu une certaine confusion dans les horaires.

Alors, c'est rare, à titre d'opposition, qu'on se réjouit, de façon presque unanime, à la présentation d'un projet de loi. Je pense que c'est le cas dans la présentation du projet de loi n° 140 sur l'assurance parentale, et je suis très heureuse de le faire, M. le Président, je suis très heureuse de le faire, parce que ce projet de loi arrive dans une continuité qui fait que c'étaient d'abord les femmes, c'était d'abord d'acquérir le congé de maternité, et là, aujourd'hui, on parle de congé de paternité et de congé parental. Je pense qu'on se rend compte qu'on a beaucoup évolué et que toute l'association à l'endroit de la famille, les responsabilités à l'endroit de la famille, les responsabilités à l'endroit des enfants, bien que ce soit majoritairement, encore de nos jours, la plus grande responsabilité des femmes, au moins, les gouvernements se penchent sur ce problème-là et essaient d'inviter les hommes, tous les hommes, à s'intéresser à élever les enfants et à s'occuper des enfants.

Alors, M. le Président, moi aussi, je joins ma voix à mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, qui a fait un travail extraordinaire sur ce projet de loi là et qui, lors des auditions, d'une consultation populaire, a joué un rôle déterminant pour entendre les parties. Alors, contrairement à, souvent, ce qu'on fait à l'Assemblée nationale, c'est l'intérêt supérieur, M. le Président, et c'est la raison pourquoi je suis très enthousiaste de ce projet de loi et que, évidemment, nous appuierons le principe et le projet de loi.

M. le Président, je mentionnais plus tôt, c'est peut-être à cause de mon âge, mais ça fait déjà 30 ans...

Des voix: ...

Mme Jérôme-Forget: Ha, ha, ha! Je suis très heureuse de voir mes collègues en face s'opposer, n'est-ce pas, à mes revendications. Mais ça fait 30 ans, dans le fond, qu'on milite pour obtenir des droits additionnels, pour obtenir une reconnaissance, à titre de personne dans une famille qui s'occupe et qui doit s'occuper des enfants.

Je fais un rappel en arrière parce qu'on a l'impression aujourd'hui qu'on a toujours vécu dans cet environnement-là. Rappelons-nous que, le congé de maternité, ça fait seulement 30 ans ? 1971, M. le Président ? qu'on a acquis le congé de maternité. Alors, ce n'est pas Mathusalem, là, ça fait bien sûr 30 ans, mais c'est quand même... ça a été un virage important, et depuis ce temps-là, année après année, il y a eu des améliorations.

J'ai eu le plaisir d'administrer une loi, alors que j'étais présidente de la CSST, qui avait effectivement ouvert au Québec un volet que seul le Québec avait et a toujours: le retrait préventif de la femme enceinte et qui allaite. Je reviendrai sur ce point-là plus tard, mais c'était là également un volet très important de la reconnaissance de la femme qui bien sûr est la porteuse d'enfants et la nourrice des enfants et, de plus, de la femme qui veut également travailler et qui veut maintenir des droits de travail et des droits d'emploi. Alors donc, au cours des années, depuis 1970, on est passé de 15 semaines, d'un congé de maternité, à 34 semaines, un congé sans solde, en 1991, et, en 1997, 52 semaines, par opposition à anciennement, aux 34 semaines.

Alors, M. le Président, pourquoi nous pencher aujourd'hui sur ce projet de loi? Pourquoi s'y intéresser? Parce qu'on se rend compte que la responsabilité d'élever des enfants, ce n'est pas une responsabilité qui appartient seulement aux parents, mais c'est également une responsabilité sociale. On fait donc appel à la collectivité pour partager, dans le fond, les coûts d'élever des enfants, de porter des enfants, de nourrir des enfants, et c'est les raisons pour lesquelles on décide aujourd'hui encore d'enrichir ce programme, histoire de protéger les grossesses, protéger les enfants et accorder une aide aux nouveaux parents.

Ce projet de loi là ? je pense que mon collègue le député de Verdun en a fait mention plus tôt ? a élargi la couverture des bénéfices que pourra recevoir un parent. C'est-à-dire, cette couverture, maintenant, n'est plus seulement aux salariés d'entreprises, mais c'est à tous les salariés, y compris les travailleurs autonomes. Autre volet très important de ce projet de loi, c'est qu'on a augmenté, M. le Président, le maximum assurable, le salaire maximum assurable, et qu'on l'a rapproché du salaire maximum assurable de ce que payait et que paie toujours d'ailleurs la CSST.

D'ailleurs, c'était très intéressant, parce qu'il y avait beaucoup d'employeurs qui avaient des réserves quant à ce programme, parce que, bien sûr, comme le maximum du salaire assurable était de 52 000 $ au niveau de la CSST et 39 000 $ au niveau du congé de maternité, vous imaginez les incitatifs pour aller d'un programme à l'autre. Or, aujourd'hui, ce que fait ce projet de loi, c'est qu'il tente d'harmoniser le retrait préventif de la femme enceinte et qui allaite au congé de maternité, au congé parental, et par conséquent de diminuer ces incitatifs.

D'ailleurs, c'est très amusant, je vais vous raconter une anecdote, M. le Président. Quand je suis arrivée présidente de la CSST ? c'était il y a plusieurs lunes de ça, plusieurs années ? le retrait préventif était basé sur le taux de cotisation. Donc, si vous étiez un employé de la construction, vous payiez 10 fois un employé qui travaillait, par exemple, dans un hôpital. Vous imaginez que les hommes n'étaient pas très heureux de ça. Vous imaginez que les patrons hommes n'étaient pas très heureux de ça, de voir que plus le risque était élevé... des domaines, manifestement, où il y avait peu de femmes, puisque c'étaient des risques très élevés... Donc, c'était le monde de la construction, c'était le monde de l'assemblage de métal, etc. Alors, ça se passait comme ça. Donc, on avait changé à l'époque et on avait mis un taux fixe, d'accord, pour que ce soit partagé par l'ensemble des employeurs. Et les employeurs avaient accepté ça. Ils avaient accepté ça de bonne grâce, un peu, bien sûr, trouvant que c'était là un programme social qui aurait dû être assumé par l'ensemble de la société et non pas seulement par les employeurs. Mais, par ailleurs, ils avaient accepté.

Je présume qu'aujourd'hui ils voient dans la démarche actuelle, avec le projet de loi n° 140, alors qu'on hausse, n'est-ce pas, le maximum du salaire assurable... Comme on hausse ça, j'imagine qu'ils voient ça de bonne grâce, parce que, comme ça se rapproche du maximum assurable de la CSST, ils voient là une avenue où, dans le fond, le congé de maternité ou le retrait préventif va être également assumé par l'ensemble de la société. Or, M. le Président, je pense qu'il y aura manifestement un transfert qui va se faire, mais je voudrais revenir également un peu plus tard, parce que je pense qu'il y a peut-être un leurre à cet égard. Et je reviendrai peut-être un peu plus tard sur pourquoi je pense qu'il y a un leurre dans cette démarche.

Je voudrais également, M. le Président, endosser les propos tenus par mon collègue le député de Chapleau, hier, à l'effet que ça appartient au Québec, ce programme-là, que c'est le Québec qui doit être maître d'oeuvre du programme et que, dans le fond, le fardeau de la preuve de supporter un tel programme appartient au gouvernement fédéral. D'ailleurs, si on retourne encore en arrière ? vous savez, la beauté, le seul avantage de vieillir, c'est que tout à coup on se rend compte qu'on a été à des moments propices où il se passait des choses intéressantes ? ce pourquoi le congé de maternité a été mis dans le programme de l'assurance chômage à l'époque, bien, c'était parce que le gouvernement fédéral ne pouvait pas le faire nulle part ailleurs. Donc, on l'a mis dans le programme d'assurance chômage parce que, sur le plan constitutionnel, il n'était pas permis au gouvernement fédéral de le mettre ailleurs. Et c'est pour ça qu'on l'a mis au niveau de l'assurance chômage.

n(16 h 10)n

Je supporte totalement les propos qu'a tenus mon collègue le député de Chapleau au niveau du besoin de négocier avec le gouvernement fédéral. Je pense que la ministre aura une année devant elle pour atteindre ses objectifs. L'écart entre ce qu'elle demande, ce qu'elle revendique, et ce que donne le gouvernement fédéral, si je sais bien compter, est à peu près 62 millions de dollars. Je pense que le gouvernement fédéral offre actuellement 470 millions de dollars et qu'elle demande et qu'elle réclame 532 millions de dollars. Donc, il y a un écart de 62 millions de dollars. C'est beaucoup. Mais, dans l'année qui vient, je présume qu'ils pourront manifestement et ultimement s'entendre sur les coûts à partager, suite à l'écart de 62 millions qui se dessine toujours.

Donc, je pense que la description du programme a été largement faite. Il y a le congé de maternité. Il y a le congé de paternité. Il y a le congé parental. Il y a le congé d'adoption. Et là, encore là, ce que j'aime bien de ce projet de loi, c'est qu'on offre différents programmes. On laisse une porte ouverte. On laisse une porte ouverte, par exemple, au niveau du congé de paternité. Bien, on peut prendre cinq semaines à 70 % du revenu assurable ou trois semaines à 75 % du revenu assurable. Alors, c'est là une latitude. Quelqu'un qui ne peut pas prendre plus que trois semaines, par exemple, bien, pourra obtenir davantage que quelqu'un qui prend les cinq semaines pour la même période. Et c'est la même chose pour le congé de maternité. Et c'est la même chose pour le congé d'adoption ou le congé parental.

Donc, il y a une possibilité de s'adapter, de s'ajuster selon les besoins des parents et selon les possibilités des parents. Comme le faisait remarquer mon collègue le député de Verdun, notamment les travailleurs autonomes, ils font face à des problèmes particuliers. Il a fait mention à votre carrière, M. le Président, à titre de notaire. On ne peut pas toujours s'absenter quand on veut et pour la durée qu'on souhaite, parce qu'on a des clients, on a des gens qu'on doit servir et que, par conséquent, on ne peut pas s'absenter. Alors, je pense que de donner, d'ouvrir des portes, d'ouvrir des alternatives aux parents, c'est là une avenue que je trouve très positive.

Maintenant, je voudrais revenir, M. le Président, à cet espoir que fondent les employeurs à l'effet que les cotisations de la CSST seront désormais assumées en partie par ce nouveau programme, puisque le revenu annuel assurable est désormais le même et qu'il n'y aura plus cet incitatif d'aller d'un programme à l'autre. Ils ont partiellement raison. Ils ont partiellement raison, parce qu'on peut imaginer qu'une personne qui faisait appel au programme de retrait préventif de la femme enceinte et qui allaite... au niveau de la Loi sur la CSST, on peut présumer qu'un bon nombre feront appel au congé de maternité. Donc, il est vrai qu'il y aura possiblement des économies.

Par ailleurs, rappelons-nous que le retrait préventif s'adresse aux femmes dès le premier jour, presque, de grossesse. Parce que d'ailleurs, au niveau de certains indicateurs de danger, c'est durant les trois premiers mois que sont les plus grands dangers pour certaines femmes, dans certains milieux, notamment lorsqu'on est exposé à des produits chimiques, M. le Président. Les trois premiers mois, ce sont des mois critiques. Et hélas, très souvent, bien sûr on le sait un peu en retard. Mais il est clair que le retrait préventif est souvent pris durant les trois premiers mois de grossesse et donc aura peu d'impact au niveau de ce congé parental, de ce congé de maternité où on donne désormais, pour le congé de maternité, 18 semaines à 70 % ou 15 semaines à 75 %. C'est donc dire que les femmes ? et peut-être tant mieux pour elles, M. le Président ? pourront faire appel au retrait préventif de la femme enceinte et qui allaite quand il y a un danger pour elles ou pour l'enfant et elles pourront faire appel, bien sûr, au congé de maternité, si elles n'allaitent pas, par la suite, lorsqu'elles auront eu le bébé. D'accord?

De croire, par ailleurs, qu'il y aura un transfert presque identique de coûts de la CSST au désormais congé parental, je pense que c'est là faire un pas qui est probablement risqué. Je pense qu'on aura probablement des surprises, et peut-être que la ministre va devoir réviser ses chiffres quant aux coûts qu'elle va devoir rencontrer, quant aux obligations. On connaît toutes les expériences de ce gouvernement pour prédire l'avenir. On sait combien ils se sont trompés de fois. Ils se sont trompés de façon magistrale au niveau de l'assurance médicaments, ils se sont trompés de façon magistrale au niveau des soins de santé, alors aujourd'hui qu'on nous dise qu'on va seulement mettre un autre 90 millions dans ce réseau, n'est-ce pas, dans ce programme et que ça va suffire à combler les attentes des femmes, des parents, des pères, moi, j'ai des réserves. J'ai des réserves parce que je ne sais pas quelles sont les études qui ont été faites pour estimer ces coûts-là. Peut-être que la ministre a des études et qu'elle pourrait nous les faire voir, histoire de préparer la population, n'est-ce pas? Surtout qu'elle a l'appui de l'opposition d'une façon enthousiaste, peut-être qu'elle devrait en profiter pour nous donner les chiffres qu'elle a estimés et voir si les chiffres, les estimations qu'elle a faites sont basées sur des hypothèses réalistes.

Alors, M. le Président, à titre de conclusion, j'invite donc tout le monde à supporter ce projet de loi, mais à nous assurer que nous avons, bien sûr, estimé les coûts, nous assurer que nous n'allons pas avoir de mauvaises surprises. Puisque nous sommes d'accord avec le projet de loi, il y a des gestes qu'il faut poser dans la vie parce qu'on y croit et que là il s'agit d'une mesure importante. D'ailleurs, récemment, on a pu voir à la télévision une émission très intéressante sur un programme analogue qui a été mis en place en Norvège. Je ne sais pas s'il y a des gens dans cette enceinte qui ont vu ce programme, mais c'était remarquable de voir qu'un programme avait changé les comportements des pères, notamment et en particulier, et que désormais on voyait plein de pères avec des landaus, qui poussaient des bébés, n'est-ce pas, et qui trouvaient ça très normal, un comportement qui n'existait pas, ma foi, il y a 25, 30 ans.

Alors, M. le Président, j'appuie ce projet de loi, ma formation politique va appuyer le principe de ce projet de loi. Nous l'appuyons de façon enthousiaste et nous souhaitons vivement avoir toutes les données pour être sûrs qu'il n'y aura pas de surprises désagréables dans l'avenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Avant de céder la parole à Mme la députée de La Pinière, je tiens à mentionner que nous avons reçu deux demandes de débats de fin de séance, qui auront lieu jeudi le 23 novembre: le premier entre le député de Châteauguay et Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux concernant le manque de ressources des CLSC et des CHSLD; et le second débat de fin de séance entre Mme la députée de Bonaventure et M. le ministre des Transports concernant l'incapacité du gouvernement de tenir ses promesses en matière de transport aérien régional.

n(16 h 20)n

Ces deux débats de fin de séance auront lieu jeudi à compter de 18 heures.

Je céderai maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée, vous avez un temps de parole de 20 minutes.

Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Je vais essayer d'être brève. Tout simplement joindre ma voix à celle de mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce et critique de l'opposition officielle en matière de politique familiale ainsi qu'à mes collègues qui m'ont précédée pour apporter mon appui au projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale.

Alors, M. le Président, en tant que mère, en tant que parent, en tant que députée représentant des citoyens, et particulièrement des femmes et des parents, des jeunes familles dans mon comté, je ne peux que me réjouir de ce projet de loi qui, sur le principe qu'on est en train de discuter en ce moment, fait consensus. Je pense qu'il témoigne aussi d'une certaine évolution des mentalités, puisqu'on ne parle plus de congé de maternité, mais on parle de congé parental.

Alors, en partant, à l'intérieur même de la sémantique qu'on utilise, on décode, M. le Président, une évolution des mentalités, parce que la responsabilité d'éduquer un enfant, c'est une responsabilité partagée. C'est une responsabilité qui appartient aussi bien aux hommes qu'aux femmes, même si, traditionnellement et encore aujourd'hui, chez nous comme dans bien des sociétés, c'est encore une responsabilité majoritairement féminine. Mais on dénote quand même avec beaucoup de plaisir qu'il y a là une volonté, du point de vue de la législation, qui accompagne aussi une évolution de société et, dans certains cas, qui la précède, parce que la législation a aussi ceci de particulier: c'est aussi la pédagogie.

Donc, M. le Président, il y a aussi un autre facteur qui vient corroborer et appuyer ce projet de loi, c'est également l'évolution et les changements fondamentaux qui se sont opérés dans le marché du travail, hein? Les femmes travaillent de plus en plus, les heures de travail sont flexibles, le télétravail, et tout ça, amènent la famille à vouloir s'organiser et s'adapter à ces changements-là, et le projet de loi n° 140 permet cette flexibilité et permet aux parents de remplir leur devoir, leur devoir vis-à-vis des enfants, à l'intérieur des paramètres prescrits par le projet de loi.

Donc, M. le Président, le projet de loi sur l'assurance parentale, projet de loi n° 140, dans les notes explicatives, c'est un projet de loi qui institue un régime d'assurance parentale ayant pour objet d'accorder à tout travailleur admissible des prestations pour un congé de maternité ou pour les congés familiaux suivants: un congé de paternité et un congé parental pris consécutivement à la naissance d'un enfant et un congé d'adoption d'un enfant mineur.

Donc, M. le Président, on constate que le congé parental dont il est question ici, il porte finalement sur quatre aspects: le congé de maternité, qui bénéficie essentiellement aux mères, le congé de paternité, qui est réservé aux pères, le congé parental, qui peut être divisé entre les deux parents, et le congé d'adoption. Par la même occasion, le projet de loi couvre un peu les différentes réalités de la famille d'aujourd'hui.

Il y a également un élément extrêmement important qu'il faudrait souligner derrière ce projet de loi. Lorsqu'on regarde le profil démographique du Québec, M. le Président, il y a lieu d'être inquiet et préoccupé, préoccupé du fait que le taux de natalité au Québec est parmi les plus bas. On n'arrive pas nécessairement, sur la tendance qui se dessine, à se renouveler à plus long terme, si cette tendance-là se maintient. Donc, un projet de loi de cette nature va donner un répit aux parents et va les encourager à assumer avec un peu plus de courage, je dirais, et de stimulation leurs responsabilités familiales.

Donc, M. le Président, ce programme de congé parental encourage les jeunes familles à avoir des enfants, ce qui est une très bonne chose. Il correspond à un besoin réel. On dit que deux jeunes femmes sur trois travaillent, sont sur le marché du travail. Alors, si on veut que, parallèlement à leur travail, à leur désir de réussir dans leur carrière professionnelle, de se promouvoir... mais en même temps de bâtir une famille, tout le fameux équilibre dont on parle et qui est toujours très fragile, il faut, M. le Président, les supporter.

C'est ce qui fait que l'opposition officielle, par la voix de notre porte-parole et de tous mes collègues, M. le Président, appuie le projet de loi n° 140, parce que ses objectifs sont des objectifs louables, sont des objectifs qui répondent à un besoin réel, tellement réel que l'opposition officielle a même été à l'initiative, puisque mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce a présenté une motion le 13 juin 2000 conjointement avec la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux et ministre responsable de la famille, et c'est très important. Moi, ça m'a beaucoup touchée, cette motion-là, parce que c'est rare, dans notre enceinte, qu'on arrive à s'entendre sur des enjeux, à s'entendre sur des objectifs ? parfois, la partisanerie politique crée un certain fossé ? et, dans ce dossier-là, l'opposition officielle a vu aux intérêts supérieurs du Québec. Et donc, il y a eu une motion conjointe qui a été présentée par mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce et la députée de Taillon, également ministre.

Je voudrais vous citer le titre de la motion, parce qu'elle est très pertinente:

«Dans l'intérêt des familles québécoises, l'Assemblée nationale demande instamment:

«1° au gouvernement du Québec de tout mettre en oeuvre pour reprendre les négociations sur la question de l'assurance parentale, en vue d'en arriver à une entente avec le gouvernement du Canada, permettant l'implantation d'un programme québécois qui répond aux besoins des familles québécoises financé, notamment, par une réduction juste et équitable des cotisations pour les employeurs et les travailleurs québécois au programme d'assurance emploi du gouvernement du Canada;

«2° au gouvernement du Canada qu'il participe de bonne foi à ces négociations et qu'il fasse preuve de plus de souplesse et d'ouverture à l'égard des besoins des familles québécoises et de la maîtrise d'oeuvre du Québec en matière de politique familiale.»

M. le Président, dans cette motion, tous les paramètres importants qui sous-tendent ce projet de loi y sont: on parle de la reconnaissance des besoins des familles québécoises; on parle de la nécessaire collaboration entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec pour pouvoir mettre de l'avant un programme qui soit dans l'intérêt des citoyens et des familles; et on souligne également que la maîtrise d'oeuvre de ce programme-là doit être assumée par Québec. Alors, voilà en ce qui a trait aux grands paramètres et aux grands principes. Pour ma part, je souhaiterais, en tout cas, que ce programme-là puisse se réaliser, surtout dans les échéances prévues, et qu'il puisse bénéficier aux familles québécoises. Le gouvernement estime que c'est un programme qui ira chercher dans les 666 millions, dont 60 millions d'argent neuf par année, et on sait que, par ailleurs, il y a l'abolition d'un certain nombre de programmes existants qui va générer des économies pour le gouvernement.

Précédemment, M. le Président, il y a eu en commission parlementaire, à la commission des affaires sociales, des consultations publiques sur ce projet de loi n° 140. Des mémoires ont été entendus, des groupes se sont présentés, et ce qu'on retient de cette consultation, pour ceux et celles qui l'ont suivie, c'est qu'il y a un large consensus autour de la politique qui est devant nous, l'assurance parentale. Mais, en même temps, comme toutes les bonnes choses, des fois, on peut s'entendre sur le principe parce qu'on partage les objectifs, mais, lorsqu'on regarde l'opérationnalisation, il y a lieu d'exprimer des réserves. Ces réserves ont été exprimées d'ailleurs lors de la commission parlementaire, et la lecture du projet de loi permet de constater effectivement que plusieurs de ces réserves-là sont fondées.

n(16 h 30)n

Il faut donc s'assurer que les difficultés d'implantation qu'on a connues dans les autres programmes, notamment dans le programme des garderies à 5 $... Et je sais, pour ma part, pour être responsable de la région de la Montérégie pour mon caucus, que, chez nous, dans notre région, on a un déficit au niveau des services de garde pour les garderies à 5 $, un déficit dont la ministre est parfaitement consciente, pour lui en avoir parlé. Et je sais qu'elle est aussi en contact avec les organismes du milieu, et on n'arrive pas encore, M. le Président. Malgré que ce programme parte de bonnes intentions et malgré que ce programme-là puisse être vanté aussi par certains écrits, il n'en demeure pas moins que dans le concret, dans la réalité, M. le Président, il y a des milliers et des milliers de places en déficit en services de garde, qui sont manquantes et qu'on n'est pas à la veille de combler, justement faute de ressources.

Il y a également dans ce projet de loi, M. le Président, toute la question des travailleurs autonomes, et ça aussi, c'est une réalité que, nous, les législateurs, les parlementaires, on est appelés à comprendre et à réaliser parce que ça fait partie de la réalité du marché du travail, d'abord parce que les emplois qui se créent, M. le Président, depuis au moins les cinq dernières années, la plupart des emplois qui sont créés au Québec sont créés dans la catégorie des travailleurs autonomes. Donc, c'est un segment d'employés qui est en pleine progression et c'est des gens qui n'ont pas de couverture comme telle.

Donc, le projet de loi apporte une réponse. Je ne sais pas, pour ma part, si c'est la bonne réponse, dans la mesure où je souhaiterais ? d'ailleurs, comme le Conseil du statut de la femme qui l'a recommandé ? que l'on puisse associer les travailleurs autonomes dans l'élaboration des modalités de ce régime d'assurance parentale pour s'assurer qu'il leur convient, parce que, en fait, les travailleurs autonomes, ce n'est même pas un groupe homogène. À l'intérieur de cette catégorie-là, on rencontre toutes sortes de monde qui travaillent dans toutes sortes de secteurs, à des conditions de travail complètement différentes, M. le Président, et ce qu'on pourrait penser d'entrée de jeu comme étant la solution peut éventuellement s'avérer pas tout à fait répondant aux besoins de cette catégorie de travailleurs, et je souhaiterais, pour ma part, que la ministre, le gouvernement puissent prêter une attention particulière à cette catégorie de travailleurs.

Alors, M. le Président, en terminant, je vous ai dit que je ne serais pas brève parce que je voulais marquer l'appui à ce projet de loi. J'y tenais personnellement et je voulais donc saluer cette initiative. Je voulais assurer le gouvernement qu'on va collaborer, M. le Président, pour bonifier ce projet de loi de façon à ce qu'il soit dans l'intérêt des familles québécoises et dans l'intérêt de toute la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Nous allons poursuivre notre débat, et je céderai la parole au député de Champlain. Alors, M. le député.

M. Yves Beaumier

M. Beaumier: Oui, merci. Merci beaucoup, M. le Président. Vous comprendrez que c'est avec beaucoup de fierté que, le 6 juin dernier, le gouvernement déposait le projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale, qui est, au fond, le troisième volet d'importance de sa politique familiale.

Le gouvernement du Québec a mis, depuis 1995-1996, en place de par sa propre volonté... a mis sur pied une politique familiale qui avait trois assises, trois grandes assises, trois fondements. Le premier était évidemment la révision quant à l'allocation familiale pour faire en sorte que, une fois révisée... faire en sorte que nos familles puissent avoir les revenus ou la reconnaissance concrète par les revenus... des coûts réels quant aux besoins essentiels des enfants. Alors, il a été établi par cette allocation familiale révisée, unifiée que désormais on tiendrait compte, pour l'affectation des allocations, certainement du revenu familial, également du nombre d'enfants et aussi des situations conjugales ou maritales, ce qui signifie que notre politique non seulement a été une politique... Ce volet-là a été d'ordre familial, mais il était aussi d'ordre social, parce qu'il a fait en sorte de réserver des argents ? toujours trop peu nombreux ? aux familles qui avaient des moyens moindres. Et, en fait, cette politique a été une politique progressiste, puisqu'elle permettait aux familles les plus démunies qui avaient des enfants de pouvoir se prévaloir des sommes disponibles quant aux allocations familiales. Premier volet.

Deuxième volet, évidemment, c'est en cours actuellement, c'est le grand développement des services de garde. On sait à quel point les parents, les mères, comme les pères d'ailleurs... jusqu'à quel point ils doivent concilier les responsabilités parentales et les responsabilités aussi du travail. Et je reprends à cet effet les paroles mêmes de la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, qui disait, le 26 septembre dernier, que, et je cite: «Tout en reconnaissant le rôle prépondérant des parents dans le développement de leurs enfants, la politique familiale du Québec veut faciliter la conciliation des responsabilités parentales et des exigences de travail et favoriser le développement des enfants et l'égalité des chances pour tous.»

À cet égard, c'est bien sûr que les services de garde qui sont en train d'être mis sur pied d'une façon accélérée et qui, si ma mémoire est bonne, constituent une augmentation de places disponibles de 18 000 places de plus par année, c'est ce qui fait que, dans une perspective de quelques années, tous les besoins, la plupart des besoins, de façon variée d'ailleurs, des parents pourront se voir doter d'un service de garde par le biais des centres de la petite enfance, soit dans le volet de garderies ou de services de garde en installation ou en milieu familial, ce qui fait que, dans quelques années, il y aura une forme d'équilibre entre les besoins exprimés par les parents quant aux services de garde et les places disponibles.

J'entendais, très justement d'ailleurs, hier l'excellent député de Notre-Dame-de-Grâce qui signalait qu'effectivement il manque de places. Mais c'est évident qu'il manque de places, parce que, si on avait commencé ça voilà sept, huit, neuf ans, 10 ans, aujourd'hui, bien, on serait arrivé à cet équilibre des demandes et des besoins. Mais nous avons commencé quand nous sommes arrivés et, quand nous sommes arrivés, nous avons fait en sorte que soit mis sur pied un développement accéléré, un développement, aussi, contrôlé, un développement où la qualité ? et je sais que la ministre déléguée est très sensible à ceci ? des services et de formation qu'on donne à nos jeunes en termes de sécurité, en termes de développement puisse être adéquate. Et c'est dans cet élan-là que nous allons. Et tout ça, M. le Président, dans une période ? il faut comprendre, hein! ? de redressement économique, qui fait que, malgré cette période difficile de redressement économique dont je n'élaborerai pas les causes, on a fait en sorte que le gouvernement, notre gouvernement, l'actuel gouvernement du Québec a mis sur pied l'une des plus belles mesures, des plus grandes mesures sociales qu'il puisse y avoir.

Et finalement, on arrive, le 6 juin dernier, avec le dépôt en Chambre de cette Loi sur l'assurance parentale, une loi qui était attendue, une loi qui est beaucoup plus complète et qui se compare très avantageusement avec tout ce qui se passe, tout ce qui se fait dans le monde, en Amérique bien sûr, mais aussi dans les pays européens, même les pays nordiques, ce qui fait que nous pourrons, si tout va bien, si la bonne foi qu'on espère et l'appui... D'ailleurs, l'appui du Parti libéral actuellement en Chambre, cet appui unanime fait en sorte que certainement ça va aider à des conclusions positives des discussions entre le gouvernement du Québec et le gouvernement d'Ottawa, pour s'assurer que la part que doit faire Ottawa, à partir des argents qui de toute façon sont de provenance du Québec au niveau de l'assurance emploi, puisse faire en sorte que, dès janvier 2002, je crois, nous pourrons avoir à ce moment-là un régime d'assurance parentale tout à fait adéquat.

Qu'en est-il de ce régime d'assurance parentale? Quelques points importants, quelques points aussi très révélateurs quant à la clientèle, par exemple. Actuellement, le régime actuel, le régime fédéral, par exemple, ne couvre pas les nouvelles clientèles ? tantôt, la députée de La Pinière y faisait allusion également ? au niveau des travailleurs autonomes. Alors, c'est très important, avec l'évolution de l'emploi, l'évolution des types d'emplois, que la politique, que le régime d'assurance parentale vise et atteigne les personnes qui sont des travailleurs ou travailleuses autonomes.

Deuxièmement, quant à l'admissibilité, notre régime proposé n'exige pas de temps ou d'heures minimums pour avoir accès à cette assurance parentale. Et si on exigeait, par exemple, 600 heures, comme actuellement le régime fédéral le propose, vous savez que c'est près de 50 % des futures mères qui seraient exclues de cette assurance parentale. C'est pour ça qu'à ce niveau nous n'exigeons aucune heure quant à notre propre régime d'assurance parentale.

Troisièmement, quant au revenu minimum, c'est sûr qu'il faut avoir un revenu minimum pour pouvoir avoir accès au régime d'assurance parentale. Nous l'établissons à 2 000 $ plutôt qu'à 4 800 $ pour permettre justement à plus de nos personnes, qui souvent, pour toutes sortes de raisons, entre autres le travail à temps partiel... de pouvoir y accéder dès ce revenu minimum de 2 000 $.

n(16 h 40)n

Également, nous avons un revenu maximum qui est proposé, de 39 000 $. Mais, nous, nous proposons que ce revenu maximum, sur lequel seront calculés les pourcentages de l'assurance parentale, monte à 52 500 $, que ce soit dans une option ou dans l'autre, donc de 39 000 $ à 52 500 $.

Pour ce qui est de la durée des prestations et comme il s'agit aussi des niveaux d'indemnisation, il faut les comparer, je pense, et les comprendre l'un par rapport à l'autre aussi. Alors, nous offrons quelque chose d'extrêmement nouveau, et tous les organismes qui sont venus, pour la plupart, ont considéré comme étant une chose extrêmement précieuse, extrêmement avantageuse le fait que nous offrions aux parents une double option. Sans entrer dans les détails, cette double option permet à des parents soit d'utiliser moins longtemps le congé d'assurance parentale, mais avec une compensation avec un niveau d'indemnisation plus élevé, ou encore de les prendre sur une plus longue période avec des niveaux d'indemnisation moindres, mais tout ça fonction des besoins, de la situation, du choix des parents.

Et également, nous, on a signalé, puis c'est tout à fait important, que le cumul des congés de maternité, de paternité et congé parental pourra aller jusqu'à, selon une option, 55, et selon l'autre, jusqu'à 43, selon qu'on prend l'option courte avec des niveaux d'indemnisation plus élevés ou l'option longue avec des niveaux d'indemnisation plus courts, fait en sorte que les parents pourront avoir le choix entre les deux options. Et, à l'intérieur de ces options, il pourrait y avoir aussi, de par le fait qu'il y a congé de maternité, bien sûr, de 18 semaines, dans un cas, et de 15 semaines, dans l'autre, il y aura aussi des congés parentaux, soit de 32 semaines ou 25 semaines, selon le cas, pour effectivement faire en sorte que ce congé parental puisse être utilisé par l'un des deux parents.

Mais, ce qui est quelque chose de plus original, très important, qui est en même temps à la fois un message éducatif, à la fois aussi certainement qui aura un effet réel, c'est de permettre à des pères de pouvoir se prévaloir de cinq semaines ou trois semaines, selon l'option qu'il peut prendre, et qui sont réservées, dans le sens suivant, au père. Parce que, comme on dit, si le père ne les prend pas, il les perd. Et ça, ça correspond certainement à une question d'éducation, de message et aussi d'encouragement à de plus en plus de pères qui, dans le milieu du travail, peut-être seront encouragés, puisque appuyés et puisque incités par une mesure, pourraient être encouragés à effectivement faire leur part dès la petite enfance, dès le lendemain, le surlendemain des naissances, de pouvoir s'occuper de leurs propres petits, adoptés ou qui viennent d'arriver nouvellement.

Alors, cet ensemble de régime d'assurance parentale équilibré, flexible, varié, plus généreux, plus adapté aussi aux besoins de nos parents fait en sorte que nous aurons, avec l'adoption de ce troisième volet, une politique familiale, qui n'est pas terminée, qu'il y a d'autres mesures déjà en cours, il y a d'autres mesures qui viendront, mais nous aurons pour nos parents, ceux qui sont les premiers gagnants dans ça, ceux qui décident d'avoir des enfants, ceux qui en ont... Ce n'est pas une politique nataliste, c'est une politique proparentale, au fond, c'est une politique profamiliale et qui fait en sorte que les parents se sentiront encouragés, appuyés très concrètement par le fait qu'ils assument une des charges les plus importantes dans notre société, la mise au monde et l'éducation de nos enfants. Alors, merci beaucoup, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Champlain.

Je vais maintenant céder la parole à M. le député de...

M. Tranchemontagne: Mont-Royal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mont-Royal, c'est bien ça. M. le député de Mont-Royal.

M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Vous avez deux chances, M. le Président. Ha, ha, ha!

Merci, M. le Président. La première chose que je voudrais dire, à l'exemple de mes collègues, c'est que je suis également totalement d'accord avec ce projet de loi sur l'assurance parentale, projet de loi qui répond, à mon point de vue, à un besoin fondamental au Québec présentement.

Vous êtes sûrement, sans doute au courant, M. le Président, que les familles québécoises, de nos jours, ont atteint un taux de natalité extrêmement bas, le plus bas qu'on ait jamais connu et sûrement le plus bas parmi les plus bas au monde. Et, à ce moment-là, je pense que le programme ou l'assurance parentale que nous présente aujourd'hui la ministre, assistée, je pense, de mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce... je crois que ce projet de loi correspond vraiment à un besoin et peut permettre, je pense, à la ministre d'essayer de voir ou d'encourager les jeunes familles d'aujourd'hui à avoir des enfants. Parce que, comme vous le savez, ce n'est pas facile pour des jeunes familles aujourd'hui d'arriver à avoir des enfants. Très souvent, pour arriver à survivre, les deux sont obligés de travailler, d'avoir des fonctions qui les amènent des fois même à l'extérieur de leur ville, de leur pays même, et, à ce moment-là, donc, ils doivent composer, travailler ensemble, et c'est pour ça que je crois que c'est important d'avoir élaboré un programme tel que celui que nous élaborons dans le projet de loi sur l'assurance parentale.

Je voudrais profiter de l'occasion d'ailleurs, M. le Président, pour souligner l'excellent travail du député de Notre-Dame-de-Grâce, qui est critique, comme vous le savez, dans le domaine de la famille et de l'enfance. Je pense, excellent travail, puisqu'il a apporté sa collaboration à la ministre. Et je m'en voudrais d'être trop partisan et je voudrais féliciter la ministre également pour son projet de loi ? elle en est toute heureuse ? parce que je pense que c'est un excellent projet de loi. Ceci étant dit, M. le Président, comme je vous ai dit, il répond à un besoin que l'on reconnaît dans la société québécoise d'aujourd'hui, un besoin qui correspond, dans le fond, à des jeunes familles, aujourd'hui, dont les deux parents travaillent et qui ont besoin d'aide pour les encourager à avoir une famille et à poursuivre la tradition de leurs parents, c'est-à-dire d'avoir, si possible, de nombreux enfants.

Alors, M. le Président, il y a certaines petites choses que j'aimerais, par contre, souligner. C'est des inquiétudes que j'ai et, je crois, qui sont également acceptées par mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce et peut-être même par la ministre. Je ne le sais pas, je verrai après avoir parlé. Alors, ma première inquiétude concerne d'abord les négociations avec le gouvernement fédéral. Dans le moment, on nous présente un projet de loi alors que ces négociations-là ne sont pas terminées et qu'on ne sait pas exactement où ces négociations-là vont se terminer exactement. Voici quelques exemples. Et, si j'ai bien compris la ministre, la ministre réclame 532 millions au fédéral et nous dit que son programme va coûter 666 millions, ce qui veut dire un écart de 134 millions. Et le 134 millions, bien, il est supporté par 90 millions qui viennent du gouvernement, dont seulement 60 % est en argent neuf, 14 millions des employeurs, 10 millions des employés et 20 millions des travailleurs autonomes. Alors, c'est ce qui constitue ce 134 millions qui représente, sur la demande de la ministre au fédéral, une augmentation ou une amélioration de 25 %.

Et, si on compare, par contre, ce que le programme fédéral offre et ce que le programme provincial offre, qui est supérieur au programme fédéral, je trouve que... J'essaie d'éclairer la ministre pour lui démontrer qu'il y a beaucoup de données qu'elle nous représente qui sont des augmentations supérieures à ce 25 % là, qui est, dans le fond, le chiffre qu'on essaie d'atteindre. Par exemple, au niveau du revenu maximum assurable, au fédéral, vous savez, il est de 39 000 $, et, au provincial, on nous propose dans le projet de loi un revenu maximum de 52 500 $. On n'a aucun problème avec le 52 500 $, sauf qu'il faut réaliser, Mme la ministre, que ça, c'est une augmentation de 34 % de plus que le 39 000 $ que le fédéral offre.

Autre item, vous abolissez le délai de carence de deux semaines, ce que le fédéral ne fait pas ou ne propose pas dans son programme. Alors donc, par rapport au programme fédéral, c'est là également un coût additionnel que, malheureusement, je n'ai pas les connaissances et l'expertise pour évaluer, mais je vous encourage à prendre quelques notes et à poser des questions à vos fonctionnaires à ce sujet.

n(16 h 50)n

Finalement, au niveau du congé de maternité, si on regarde la proposition de la ministre dans son option A, elle nous propose 18 semaines au lieu de 15 semaines comme le fédéral, c'est-à-dire 20 % de plus en termes de durée, et, en termes de salaire assurable, elle nous propose 70 % au lieu du 55 % dans le programme fédéral. C'est donc dire une augmentation de ce côté-là de 21 %. Alors, 20 % donc de plus de temps et 21 % de plus de revenu assurable. Si c'était l'option B, il n'y aurait pas d'augmentation, par comparaison fédérale, au niveau du nombre de semaines, mais, par contre, au niveau du revenu assurable, ce serait une augmentation de 36 %, c'est-à-dire 75 % du salaire au lieu de 55 %, comme le fédéral offre. Alors, ce que j'essaie de démontrer à la ministre, c'est que, par rapport aux 25 % dont elle nous parle, tous ces chiffres-là sont en haut du 25 %. Et c'est ce qui m'apporte, qui m'amène à avoir une certaine inquiétude sur le coût du programme.

J'aimerais rajouter autre chose. Les travailleurs autonomes, qui ne sont pas du tout, du tout couverts dans le programme fédéral et qui seraient couverts par le programme provincial ici, c'est inquiétant, parce que les travailleurs autonomes, c'est une quantité que l'on ne connaît pas. On ne sait pas ce qui va arriver avec les travailleurs autonomes, alors on connaît beaucoup moins... C'est beaucoup plus aléatoire, le résultat qui arrivera, dans le domaine des travailleurs autonomes. Alors donc, c'est aussi, là, une autre inquiétude que je voudrais manifester à la ministre, quand elle nous parle du 666 millions et surtout de la façon de le financer, par rapport aux 532 millions qu'elle essaie d'obtenir du fédéral. Donc, je suis particulièrement inquiet de ce côté.

Ce qui m'inquiète aussi, c'est l'expérience passée du Parti québécois dans le domaine des services sociaux. Permettez-moi de vous rappeler, par exemple, sous la ministre de la Santé et des Services sociaux, on nous a proposé l'assurance médicaments, l'assurance médicaments qui au départ devait coûter au maximum 175 $, et finalement, un an plus tard, si je ne me trompe pas, c'est à peu près un an plus tard, on nous annonce que le coût sera de 350 $. Et je vous prédis, M. le Président, que ça ne sera pas suffisant, si on se fie au rapport qui a été déposé récemment. Alors, une première expérience difficile, où je pense que le gouvernement du Parti québécois a sous-estimé les coûts de l'assurance médicaments. Puis là on parle au moins du simple au double, là: 175 $ par rapport à 350 $. Et, si je ne vous parle pas de plus que ça, c'est parce que je ne sais pas quel sera le prochain chiffre qu'ils vont nous proposer, qui sera sûrement supérieur à 350 $. Donc, première expérience difficile au niveau de l'estimation des coûts, coûts qui ont été sous-estimés par le gouvernement au pouvoir.

Deuxième expérience, et là ça relève plus de la ministre de la Famille et de l'Enfance: les garderies à 5 $. Ça, ce n'est pas le coût qu'on a sous-estimé, mais c'est bien les besoins. On a sous-estimé d'une façon, je pense, outrancière les besoins de la population au niveau des garderies à 5 $. Alors, c'est toujours sous le même chapeau, sous la même ministre, mais là sous la responsabilité, en plus, de la ministre déléguée.

Alors, deux occasions où, dans un récent passé, très récent, on a eu des expériences très difficiles à vivre au Québec. On a exigé des gens de passer d'une assurance de 175 $ à 350 $. Et là vous savez qu'on ne parle pas des gens les plus nantis de la société mais bien des gens démunis dans la société. Alors, c'est énorme, une augmentation du simple au double comme ça, et, comme je vous disais tantôt, ce n'est pas suffisant. Et finalement, la sous-estimation des besoins en garderie à 5 $ nous inquiète et nous fait dire au gouvernement du Parti québécois: De grâce, cette fois-là, s'il vous plaît, faites donc les calculs comme il faut. Et c'est pour ça que j'essayais de démontrer à la ministre que plusieurs des items qu'elle a mis dans son projet de loi, avec lesquels on est d'accord, plusieurs de ces items-là sont des augmentations qui sont de loin supérieures aux 134 millions de dollars qu'elle compte verser additionnellement, 134 millions qui ne seraient pas tout versés par le gouvernement mais qui seraient versés par le gouvernement, les employés, les employeurs et les travailleurs autonomes.

Autre item, M. le Président, que je voudrais souligner à la ministre, c'est tout le sujet des travailleurs autonomes. Je vous ai manifesté mon inquiétude sur les travailleurs autonomes. Ce qui est difficile, on n'a pas de vécu sur les travailleurs autonomes. Donc, c'est beaucoup plus difficile d'estimer quel sera le besoin du côté des travailleurs autonomes.

Mais il y a une chose qui m'inquiète, c'est que les travailleurs autonomes sont traités, dans ce projet de loi là, de la même façon que n'importe quel employé, si vous voulez. C'est-à-dire qu'on leur propose, selon le plan A ou le plan B, un certain nombre de semaines avec un certain pourcentage de revenus. Je suis sûr, M. le Président, absolument sûr et certain qu'aucun travailleur autonome n'acceptera de prendre 50 semaines de congé, même si on lui offre 70 % de son revenu pendant un bout de temps, sept semaines, et, après ça, 55 %. Aucun travailleur autonome. Par définition, un travailleur autonome est quelqu'un qui est seul, qui a des clients, par exemple, et qui a besoin, qui est à la remorque de ses clients. Si les clients appellent, il faut qu'il soit là. Donc, la période qu'un travailleur autonome peut prendre en congé de maternité, qui qu'il soit, que ce soit un homme ou une femme ? parce qu'on parle aussi de la section parentale de ce projet de loi là ? c'est sûr et certain qu'ils ne voudront pas aller à 50 semaines.

Et je voulais vous dire une chose: leur contribution sera, si mon estimé est bon, de 237 $ par année. Ce montant-là, ce n'est pas énorme, 237 $, sauf que, si on leur fait contribuer 237 $, en estimant qu'ils vont être absents de leur emploi pendant 50 semaines, c'est donc qu'on leur demande trop d'argent et qu'eux vont subventionner et le gouvernement et les employeurs et les employés.

Alors, ce que je voudrais suggérer à la ministre ? et je pense qu'en commission parlementaire il faudra y travailler ? ça serait de faire une section différente pour les travailleurs autonomes, où la période où ils seraient couverts ou assurés serait plus réaliste et répondrait beaucoup plus, je pense, aux besoins des travailleurs autonomes, parce qu'il faut vraiment reconnaître que ces gens-là n'ont pas énormément de temps à passer à l'extérieur de leur travail.

Donc, j'espère que la ministre prouvera qu'elle a la même ouverture d'esprit que mon confrère le député de Notre-Dame-de-Grâce a démontrée dans l'élaboration et sa contribution au projet de loi, et j'espère que nous aurons la chance de discuter à fond de ce projet de loi, projet de loi, comme je vous le disais il y a quelques instants, M. le Président, avec lequel nous sommes entièrement d'accord et qui correspond à un besoin de la société québécoise, un besoin pour essayer d'encourager les jeunes familles justement à avoir une famille, à avoir des enfants et continuer à faire prospérer la société québécoise. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Mont-Royal. Alors, je vais céder la parole maintenant à Mme la ministre. Je vous cède la parole.

Mme Nicole Léger (réplique)

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, je suis contente de constater l'intérêt de l'opposition à travailler avec nous dans ce défi de mettre en oeuvre ce régime d'assurance parentale, d'une part. Et vous me permettrez aussi de me joindre à l'opposition pour effectivement remercier le député de Notre-Dame-de-Grâce, moi aussi, à mon tour, pour sa collaboration et ses efforts à l'avancement de ce projet de loi, et que, ensuite, ensemble, évidemment, on puisse poursuivre les prochaines étapes à venir.

Alors, je vais utiliser mon droit de réplique, M. le Président, pour regarder et voir dans quel contexte le projet de loi aussi s'insère. Depuis l'automne 1997, le gouvernement du Québec déploie des efforts sans précédent pour mettre en oeuvre les trois dispositions majeures de la politique familiale. Ces dispositions reposent sur un principe de base, soit la reconnaissance du rôle prépondérant des parents dans le développement de leurs enfants et du rôle de soutien assumé par l'État. C'est en vertu de ce principe fondamental que la politique familiale vise, entre autres, à faciliter la conciliation des responsabilités parentales et des exigences du travail ainsi qu'à favoriser le développement des enfants et, par le fait même, l'égalité des chances pour chacun, comme le mentionnait mon collègue de Champlain.

n(17 heures)n

Le régime québécois d'assurance parentale projeté fait partie intégrante des diverses mesures qui, par leur caractère ciblé et complémentaire, contribueront à l'atteinte des objectifs de la politique familiale. Alors, je fais référence à l'effet de synergie amorcé par la mise en place simultanée de la maternelle gratuite accessible à temps plein pour les enfants de cinq ans et du réseau des centres de la petite enfance actuellement en plein essor. Dans cette foulée, je fais allusion au développement rapide, concerté, accompli avec un souci de qualité qui a fait passer le nombre des services de garde éducatifs de 80 000 places, M. le Président, à 125 000 places, et ce, dans un temps de deux ans et demi. Alors, c'est 45 000 places que nous avons développées de plus en deux ans et demi. Si on regarde précédemment, nous faisions ces efforts-là de 2 500 places par année. Alors, comparativement à 2 500 places par année, dans les années précédentes, à celles de 45 000 en deux ans et demi, je pense que ce n'est absolument pas comparable.

Pour poursuivre cet effet de synergie, il y a aussi, il ne faut quand même pas oublier, l'instauration systématique des services de garde en milieu scolaire. Je songe aussi à l'effet combiné de l'allocation familiale et des mesures fiscales du Québec favorisant les familles, particulièrement les plus démunies, les plus nombreuses et les familles monoparentales.

Alors, ce projet de loi de l'assurance parentale s'ajoute donc à toutes ces initiatives qui témoignent du parti pris du gouvernement du Québec en faveur des enfants et des familles québécoises et de sa préoccupation à l'égard de leurs besoins. Alors, sur ce point, je vous rappelle que les études sur le retour au travail après la naissance d'un enfant sont unanimes: elles recommandent d'encourager les parents à consacrer du temps à leur enfant durant sa première année de vie. Nous partageons l'avis selon lequel il est essentiel de permettre aussi aux nouveaux parents de consacrer davantage de temps à leur famille afin de mieux s'adapter aux réalités de la vie familiale et afin de jouer pleinement leur rôle auprès de leurs jeunes enfants.

À cette étape de la concrétisation du régime québécois d'assurance parentale projeté, il me paraît opportun de reconnaître la contribution de nos partenaires de la politique familiale du Québec pour leur appui au principe de ce projet crucial et aussi pour leur collaboration soutenue au fil de nos diverses consultations.

Ce projet de loi, M. le Président, signale très clairement que le Québec est déterminé à poursuivre le développement de sa politique familiale, et je prévois que sa sanction par l'Assemblée nationale donnera un nouveau souffle aux efforts déployés pour améliorer les services offerts aux enfants, aux parents et aux familles du Québec, de même qu'une impulsion renouvelée...

M. Copeman: Question de règlement, M. le Président.

Mme Léger: ...au développement des autres aspects de notre politique...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Question de règlement. Je suis convaincu que les députés ministériels veulent entendre la ministre sur cet important projet de loi. Pouvez-vous vérifier le quorum, s'il vous plaît, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il nous manque quelques députés. Encore un autre, je crois. Alors, c'est rétabli. Le quorum est rétabli, alors nous allons pouvoir poursuivre.

Mme la ministre, je vous cède la parole.

Mme Léger: Alors, j'étais simplement en conclusion, M. le Président, effectivement, pour le projet de loi n° 140.

Pour les familles du Québec, nous nous devons d'adopter le principe du projet de loi n° 140. Et cela nous permettrait de poursuivre aussi la prochaine étape de l'étude détaillée, article par article, afin d'améliorer le projet de loi, s'il y a lieu, et de l'étudier plus profondément pour le bien-être de toutes et tous. Et nous aurons le temps alors de relever certains questionnements de l'opposition et d'y apporter les réponses ou les bonifications requises.

Alors, allons de l'avant pour encourager les familles à avoir des enfants au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, ceci met fin à la discussion et au débat.

Mise aux voix

Alors, je vais donc mettre aux voix le principe. Le principe du projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Boulerice: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je vous réfère à l'article 17 du feuilleton de ce jour.

Projet de loi n° 161

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 17, M. le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 161, Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information.

M. le ministre, je vous cède la parole.

M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président; merci, chers collègues. C'est avec beaucoup de plaisir et de fierté que je m'adresse à vous tous aujourd'hui dans ce débat pour l'adoption du principe du projet de loi n° 161, Loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information. Cette loi est importante puisqu'elle viendra encadrer le développement des affaires électroniques. En même temps, elle préservera les acquis de notre société, soit la protection des renseignements personnels, la protection des consommateurs et le respect de la vie privée. Je compte utiliser les prochaines minutes pour démontrer que le projet de loi que je soumets à l'examen des membres de cette Assemblée permettra d'atteindre nos objectifs tant économiques que sociaux.

Le devoir du législateur est multiple. Il doit connaître la population qu'il a pour mission de protéger, de défendre, prévoir les changements sociaux et autres susceptibles d'instaurer des zones grises ou floues dans le décor juridique et, enfin, proposer des ajustements ou des modifications nécessaires au maintien d'un filet juridique cohérent.

La transformation que connaît le monde des communications depuis quelques années est prodigieuse. Nous sommes entrés très rapidement en contact avec de nouvelles réalités, technologiques surtout, qui imposent en tout premier lieu une analyse attentive de leurs conséquences possibles. Déjà en 1998, le gouvernement du Québec avait adopté la politique de l'autoroute de l'information, très justement intitulée Agir autrement. Dans la préface de la politique, le premier ministre a écrit ceci, et je le cite. Citation: «L'importance du changement suscité par le déploiement des inforoutes est telle que nous ne pouvons plus simplement fonctionner dans le balisé, le maîtrisé, le connu. Si ce mouvement suscite de la curiosité, de l'enthousiasme et de l'espoir, il provoque également des appréhensions face à un monde en accélération. Des choix s'imposent, donc qui nécessitent l'engagement de tous, citoyens, entreprises et gouvernement.» Fin de la citation. Cela signifie en clair qu'un gouvernement responsable n'a d'autre choix que d'être attentif aux mutations sociales et d'agir en conséquence.

C'est ce que nous avons fait avec la politique québécoise de l'autoroute de l'information et c'est ce que nous continuons à faire avec ce projet de loi. Déjà en 1994, le Code civil, assise de nos lois, avait été révisé précisément pour qu'il continue de refléter la réalité moderne et qu'il ne puisse laisser libre cours à l'interprétation du seul fait de son grand âge. Cette opération ambitieuse est désormais chose du passé, et nul n'a besoin aujourd'hui d'en défendre le principe. Le Code civil, qui avait été conçu pour un monde de papier, devait subir une cure de jeunesse, et le législateur ne pouvait se soustraire à cette réalité. D'ailleurs, ces changements nous ont grandement facilité la tâche au moment d'élaborer le présent projet de loi, notamment parce que la définition de «signature» que comporte le Code civil est déjà neutre. Il en va de même aujourd'hui des technologies de l'information, qui bouleversent des notions qui semblaient hier encore répondre à tous nos besoins. Devant cette flambée de réalités nouvelles, la terminologie s'est vue forcée de s'adapter pour pouvoir baptiser des concepts jusque-là inconnus. La législation n'a d'autre choix que d'en faire autant.

Les documents faisant appel à des technologies de l'information ? ce qu'on appelle «documents technologiques» dans le projet de loi ? ont pris une importance qu'on ne peut plus ignorer. Les articles de journaux, les livres, les magazines, les rapports et même ce projet de loi sont aujourd'hui produits à l'aide d'ordinateurs, conservés sur des supports magnétiques ou optiques et transmis grâce à des réseaux inforoutiers de plus en plus omniprésents. Ces réseaux, d'ailleurs, s'étendent à un rythme que peu d'experts avaient pu prévoir il y a seulement cinq ans.

Ici même, au Québec, avec le Réseau d'information scientifique du Québec, mieux connu sous le nom de RISQ, soutenus en cela par le Fonds de l'autoroute de l'information et le ministère de l'Éducation, nos établissements d'enseignement supérieur se sont dotés au cours des dernières années d'un réseau de communication informatique à très large bande qui fait aujourd'hui l'envie du reste de l'Amérique du Nord. Au cours de l'année qui vient, l'ensemble des universités, centres de recherche et cégeps du Québec seront reliés à un vaste réseau de communication par fibre optique qui permettra de décupler l'usage des inforoutes dans l'enseignement supérieur et la recherche.

Parallèlement, plusieurs commissions scolaires ont commencé à se doter de leur propre réseau de communication par fibre optique. On me permettra de citer ? et vous le comprendrez, M. le Président ? à cet égard l'exemple de la commission scolaire de Laval. Avec ses partenaires, dont ville de Laval, cette commission scolaire inaugurait il y a quelques jours, lundi ? et j'y étais ? un réseau de fibre optique ultraperformant qui relie 160 établissements scolaires et municipaux. Ce réseau, que le président de la commission scolaire, mon ami Pierre Bourgeois, qualifiait à juste titre de «nouvelle autoroute de l'éducation», s'inscrit dans la nouvelle réforme de l'éducation. Il permet ainsi d'innover en matière d'enseignement en favorisant les échanges de qualité entre les élèves et les enseignants des différentes écoles de la commission scolaire.

n(17 h 10)n

L'exemple de Laval démontre que les commissions scolaires visent l'intégration accélérée des technologies de l'information et des inforoutes dans la formation des élèves, car, dans l'enseignement comme ailleurs, on a rapidement pris conscience du prodigieux potentiel des inforoutes pour s'instruire, s'informer, communiquer, ce qui favorisera le passage vers l'économie du savoir. Grâce à ces mesures combinées à un effort important pour soutenir la création d'éléments de contenu en langue française et pour généraliser l'accès à Internet dans toutes les bibliothèques publiques du Québec et dans toutes les écoles, le Québec a maintenant rattrapé son retard par rapport aux États-Unis et au reste du Canada en matière d'Internet. Je vous rappelle que notre gouvernement a investi 320 millions de dollars pour équiper nos écoles d'ordinateurs performants branchés sur Internet. Nous avons atteint notre objectif d'un ordinateur branché par huit élèves dans toutes les écoles primaires et secondaires publiques du Québec. Avec près de 42 % des citoyens qui sont devenus des utilisateurs réguliers d'Internet, le Québec se situe maintenant, avec les États-Unis et le reste du Canada, dans le peloton de tête des populations les plus branchées de la planète, loin devant le Royaume-Uni ou l'Allemagne. Au sein de la francophonie, le Québec se situe un premier rang, bien devant la France.

D'ailleurs, en ce qui concerne le branchement à Internet, c'est au Québec qu'on a enregistré au cours de la dernière année la plus forte augmentation du nombre de foyers branchés. Ce taux est passé, en un an, de 29 % à 42 %, ce qui nous met au même niveau que nos voisins du Sud, les Américains. J'ose croire que l'engouement manifesté par les familles québécoises pour le programme Brancher les familles sur Internet, dans lequel nous avons investi 120 millions de dollars et auquel 100 000 foyers ont adhéré en quelques mois, n'est pas étranger à cette performance spectaculaire. Du côté des entreprises, plus de 60 % d'entre elles utilisent aujourd'hui Internet pour faire connaître leurs produits ou leurs services, faciliter les contacts avec leurs clients et leurs fournisseurs, vendre, acheter, bref pour faire des affaires électroniques. Là encore, notre performance est éclatante, puisqu'en deux ans nous sommes passés de 33 % à plus de 60 % pour ce qui est du taux de branchement des entreprises.

Ce que tout cela signifie, c'est que les transactions électroniques et les échanges des documents technologiques vont rapidement connaître une croissance dont on a encore peine à imaginer l'ampleur. Il devenait donc inévitable de légiférer afin de créer un climat de confiance dans l'usage des technologies qui contribuent de plus en plus à notre prospérité et à note enrichissement collectif. Les technologies de l'information influent sur tous les aspects de la vie courante: la communication des messages ou des documents, l'information de toute nature, le transfert de renseignements confidentiels et enfin les transactions financières et autres. Si l'on s'en tient au seul commerce électronique, il est facile de constater que les perspectives de marchés s'ouvrent désormais dans une proportion encore inimaginable il y a quelques mois, quelque temps.

Lorsqu'on évoque le commerce électronique, on parle d'une activité économique en croissance exponentielle. Certaines études américaines prévoient une augmentation mondiale du commerce électronique, interentreprises et grand public, d'environ 500 milliards de dollars actuellement à 8,3 billions en dollars américains d'ici 2003. Nous n'avons donc pas, comme entreprise, comme gouvernement ou comme société, les moyens de nous tenir à l'écart de cet immense marché. Il faut à tout prix demeurer dans le peloton de tête des sociétés branchées. C'est ce qu'a fait notre gouvernement jusqu'ici et c'est ce que nous allons continuer à faire. Le gouvernement du Québec a donc résolu d'encourager concrètement tant les entreprises que les citoyens à se rallier à ce nouveau monde des affaires. En effet, la vitalité économique du Québec ne saurait se maintenir bien longtemps si l'on refusait de participer au mouvement mondial des échanges électroniques. Nous qui sommes des champions du commerce extérieur, nous devons devenir les champions du commerce électronique.

Mais cet encouragement ne doit en aucun cas remettre en cause les instruments dont se sont dotés les Québécois en matière notamment de protection des consommateurs et de respect de vie privée, valeurs auxquelles tient particulièrement la population du Québec. Voilà donc la genèse du projet de loi qui vous est présenté aujourd'hui, M. le Président.

En quoi consiste vraiment ce projet de loi? Quelques minutes. Je l'ai déjà dit, la plupart des entreprises québécoises sont déjà branchées à Internet et les familles l'adoptent de plus en plus. Mais, pour qu'Internet devienne un véritable lieu de services, de commerce, il faut que les personnes et les entreprises aient pleinement confiance dans les moyens mis en oeuvre pour, notamment, contrôler l'accès aux services, identifier les partenaires d'une transaction et protéger les renseignements personnels et la vie privée des utilisateurs. Le gouvernement du Québec a donc décidé d'établir des assises juridiques qui permettront d'utiliser les documents technologiques et les transactions électroniques en toute confiance. Bref, le défi que le gouvernement du Québec devait relever était d'instaurer un climat de confiance, tant chez les particuliers que chez les entrepreneurs, face à la valeur juridique des transactions faites à l'aide des nouvelles technologies. En même temps, il s'agissait de veiller à ce que ce virage respecte les valeurs depuis toujours reconnues dans notre société, notamment le respect de la vie privée.

Nous avions donc pour mandat de faire de l'inforoute au Québec un modèle de sécurité, de fiabilité et de respect des droits de la personne. En conséquence, le projet de loi devait parvenir à extirper tout obstacle qui aurait pu nuire à l'adoption massive des nouvelles technologies par la société québécoise. Enfin, et conformément aux traditions établies au Québec, nous tenions à ce que cette législation reflète l'ouverture d'esprit et l'attitude accueillante de ses citoyens.

Plusieurs gouvernements ont légiféré au cours des derniers mois en matière de signature électronique, de données numériques et de responsabilité des intermédiaires dans les transactions électroniques. Pourtant, la plupart de ces législations ne sont pas parvenues à aménager un cadre juridique complet qui assure la neutralité de la loi face aux technologies utilisées pour produire des documents électroniques et communiquer ou transiger à l'aide de ceux-ci. L'une des principales difficultés qu'ont connues ces gouvernements qui ont déjà légiféré découle de modifications apportées à la pièce aux lois déjà existantes. Et, en procédant de la sorte, ils ont choisi un chemin parsemé d'embûches, du seul fait que la réalité technologique ne peut se contenter de quelques ajustements pour s'intégrer à un monde depuis toujours basé sur le papier.

Le gouvernement du Québec a donc préféré recourir à l'adoption d'une loi d'application générale qui établirait un parfait équilibre entre les anciennes et les nouvelles façons de transiger et de communiquer. En d'autres termes, c'est un peu comme si on donnait une extension à la notion de document, héritée d'un monde basé sur le papier, pour qu'elle puisse englober les divers documents utilisant des supports technologiques déjà connus et tous ceux que la créativité humaine nous réserve encore. C'est ainsi que le concept de document doit être modifié afin de mettre l'accent sur l'information qu'il comporte, qu'elle soit sous forme de textes, de données, de son, d'images, et non pas sur le support utilisé pour l'afficher, le communiquer ou encore le conserver.

Il faut pouvoir utiliser ces documents utilisant des supports technologiques comme des disquettes, des cédéroms, des DVD ou des réseaux électroniques sans que cela mette en cause, de ce simple fait, la validité juridique de ce document. Les documents utilisant des supports technologiques doivent pouvoir être traités de la même façon, ni plus ni moins, que les documents papier, ce principe important de l'équivalence fonctionnelle, fondement même de ce projet de loi qui veut qu'un document technologique bénéficie de la même reconnaissance juridique que le document sur papier lorsque le support utilisé fournit des garanties fonctionnellement équivalentes.

Comme on le sait, M. le Président, sans précautions particulières, certains documents technologiques ont la particularité de pouvoir être facilement reproduits ou modifiés sans qu'il soit possible aisément de distinguer l'original de la copie, le document intègre de sa version modifiée. Pour qu'il puisse acquérir une valeur probante comparable à celle du document sur papier, il faut utiliser des technologies susceptibles d'offrir une garantie suffisante que l'information n'a pas été altérée ou modifiée, volontairement ou encore accidentellement. C'est ce qu'on appelle l'intégrité de l'information. Car, s'il est facile de modifier certains documents technologiques sans laisser de trace apparente, il est tout aussi simple aujourd'hui d'utiliser des techniques qui comportent un degré de sécurité très supérieur à celui qu'offrent présentement les documents sur papier. D'ailleurs, il est paradoxal que nos lois continuent de s'appuyer sur des documents papier, alors qu'il n'a jamais été aussi facile de les reproduire ou même, malheureusement, de les falsifier à l'aide de méthodes pratiquement indétectables. Même la Banque du Canada a été contrainte de faire appel à des supports technologiques en insérant des hologrammes dans les nouveaux billets qu'elle émet.

n(17 h 20)n

Par ailleurs, le projet de loi prévoit les éléments de base nécessaires pour assurer la validité juridique des communications, par exemple une communication d'affaires, en établissant, premièrement, la valeur juridique d'un document technologique qui sert à effectuer la communication; deuxièmement, l'identité des personnes associées à un document; et, troisièmement, le lien entre un document et une personne.

Il va de soi que la pièce législative qui vous est présentée doit s'harmoniser avec les normes internationales, puisque l'un des principaux objectifs est de faciliter les échanges appelés à s'étendre au monde entier. La société québécoise doit être armée, si je peux m'exprimer ainsi, pour entretenir des relations faciles, en toute confiance, avec des interlocuteurs de partout même si leur culture est quelquefois différente de la nôtre. Ce faisant, nous incitons les citoyens du Québec à recourir aux nouvelles technologies dans tous les domaines de l'activité humaine.

Le gouvernement du Québec devait donc au point de départ respecter les principes que j'ai évoqués, de neutralité technologique et d'équivalence fonctionnelle, établis dans la loi type de la Commission des Nations unies pour le droit commercial sur le commerce électronique, adoptée en 1996, de même que dans ses règles uniformes sur les signatures électroniques. Par ailleurs, le projet de loi devait tenir compte de trois autres objectifs généraux afin que l'envergure de la nouvelle législation puisse couvrir un champ appelé à s'étendre de jour en jour. Ces principes sont les suivants et ils sont très importants.

D'abord, la neutralité médiatique, c'est-à-dire rendre les supports interchangeables en supprimant les exigences de forme, qui nécessitent l'utilisation d'un support en particulier. Toute personne doit pouvoir choisir le support qui lui convient, dans la mesure où ce choix respecte les règles de droit. Deuxièmement, la neutralité technologique, ce qui signifie que l'infrastructure juridique québécoise admet également les technologies de l'information qui font appel au papier, à l'électronique, à l'optique ou à d'autres procédés technologiques existants ou futurs ou encore à une combinaison de ces technologies. Et, troisièmement, la neutralité juridique, qui signifie qu'une règle de droit puisse s'appliquer quel que soit le support utilisé, ou, inversement, qu'une règle de droit puisse être satisfaite malgré l'utilisation des différents supports.

Enfin, le gouvernement du Québec désirait une loi réaliste, adaptée aux nouvelles technologies et toujours respectueuse des libertés individuelles. Comme on le voit, le projet de loi concernant le cadre juridique des technologies de l'information repose sur une analyse approfondie des besoins actuels et futurs de la population québécoise en cette matière. Mais il y a encore plus, M. le Président, le contexte politique du Québec, aussi bien que la volonté du gouvernement de protéger les citoyens, réclame de ce projet de loi qu'il permette d'atteindre des objectifs extrêmement variés: adapter nos lois aux nouvelles réalités; protéger notre droit privé des intrusions fédérales, ce qui est important; énoncer avec transparence les règles de jeu; assurer la continuité juridique et faciliter la preuve; et, finalement, appuyer le développement économique.

La nouvelle pièce législative doit assurer la continuité de l'application du droit afin que tous les documents, quel qu'en soit le support, soient soumis au même cadre juridique. Ainsi, la validité juridique d'un document sera établie et maintenue pour toute sa durée de vie, depuis sa création jusqu'à la fin de sa période d'utilité.

En résumé, le projet de loi présenté aujourd'hui possède les caractéristiques suivantes: il s'inscrit dans les courants internationaux en la matière; il s'appuie sur les mêmes principes qu'ont retenus la plupart des autres législations; il découle d'une vision globale ayant pour raison d'être d'enlever tout obstacle qui nuirait à une utilisation efficace des technologies de l'information et du commerce électronique.

Les avantages que l'on peut espérer de cette nouvelle loi sont nombreux. La valeur juridique des documents sera prévisible dès le départ, ce qui dispensera les tribunaux de devoir trancher sur une multitude de cas d'espèce. La notion de document est clarifiée et plus englobante, car elle s'étend à toute information intelligible portée par un support, qu'il soit sous forme de mots, de sons ou d'images. Les notions d'original et de copie sont adaptées aux nouvelles réalités technologiques. Une distinction claire est établie entre le support d'un document et l'information qu'il comporte. Des règles précises permettent de relier une personne et un document technologique. Les techniques d'identification et le repérage des personnes et des objets sont clairement encadrées, notamment celles qui font appel aux mesures biométriques. Des services de certification et d'accréditation peuvent émerger sans susciter la méfiance des consommateurs, puisqu'ils sont encadrés par une loi adaptée à ces nouveaux besoins.

Ce nouvel environnement juridique procurera au Québec un avantage économique indéniable, soit celui de s'afficher comme le lieu où le commerce électronique est soutenu par une infrastructure technologique et un encadrement légal qui garantissent sa sécurité. Le cadre légal proposé n'entraînera pas de coûts particuliers car il ne forcera personne à effectuer ses communications ou ses transactions au moyen de documents technologiques. Il reviendra à chacun d'investir dans un équipement technologique qui corresponde à ses besoins de sécurité technologique et juridique.

De surcroît, cette loi permettra de rentabiliser les investissements déjà faits et d'éviter des coûts supplémentaires importants en diminuant les risques juridiques liés à l'utilisation des technologies de l'information. Les entreprises et les citoyens québécois pourront compter sur un cadre juridique intégré qui leur fournira des garanties quant à la validité d'un document, quel qu'en soit le support. À moyen terme, les coûts de production, de communication et d'archivage documentaire devraient diminuer. Grâce à cette loi, le gouvernement du Québec pourra accélérer son recours aux technologies de l'information pour informer les citoyens, leur offrir des services personnalisés sur l'inforoute ainsi que la possibilité, pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises, de communiquer avec lui efficacement et en toute confiance.

Ce projet de loi a fait l'objet de consultations étendues et il a été soumis à la critique constructive de plusieurs groupes dont l'avis compte beaucoup dans la société québécoise. Tout d'abord, 16 organismes ont présenté un mémoire à la commission parlementaire chargée de l'étude de l'avant-projet de loi. Ces suggestions et recommandations regroupées ont apporté au projet initial une valeur ajoutée incontestable. Par la suite, les responsables de l'élaboration du document qui vous est présenté aujourd'hui ont tenu compte des notes et des lettres qui leur ont été adressées. Enfin, ils se sont entretenus ? et je tiens à le souligner ? avec des représentants d'entreprises ou d'associations tant québécoises que canadiennes.

Cet exercice hautement démocratique intègre donc les avis, les opinions et les commentaires provenant des milieux consacrés à la finance: pensons au Mouvement Desjardins, à la Banque Nationale, à l'Association des banquiers canadiens, au soutien du citoyen et du consommateur. Pensons à la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen, l'Office de la protection du consommateur, au respect des règles professionnelles. Pensons ici à l'Ordre des ingénieurs du Québec, à la Chambre des notaires, au Barreau du Québec, à l'Association canadienne d'assurance des personnes, au Bureau d'assurance du Canada, à la protection et à l'essor de l'entreprise privée. Pensons ici, plus spécifiquement, au Conseil du patronat, à la Chambre de commerce du Québec, à Bell Canada, à l'archivage et à la gestion documentaires. Pensons ici au Groupe responsable de la gestion des documents du gouvernement du Québec et à l'Association des archivistes du Québec. Et finalement, aux normes et aux standards: pensons ici au Bureau de normalisation du Québec, et plusieurs autres groupes ont été consultés dont les intérêts reflètent ceux de la population du Québec.

Le gouvernement du Québec a pris tous les moyens nécessaires pour que la nouvelle législation obtienne un consensus social sur les valeurs que nous tenons à protéger, afin que les technologies de l'information contribuent à notre épanouissement collectif et à la croissance de notre économie dans un climat de confiance établi.

n(17 h 30)n

Avant d'aborder la législation déjà existante en matière de nouvelles technologies dans divers pays du monde, il me semble essentiel d'expliquer le caractère d'urgence que revêt l'adoption du projet de loi. En l'absence d'un cadre législatif approprié, les particuliers, les entreprises ainsi que le gouvernement du Québec seraient privés des instruments nécessaires à leur engagement dans le commerce et les transactions électroniques. Tout retard en cette matière, M. le Président, défavoriserait et isolerait au profit de leurs concurrents, des autres États qui ont déjà légiféré. Ainsi, sans la consécration législative de la valeur juridique des documents ? quel qu'en soit le support, je répète ? et sans l'affirmation que les supports et les technologies sont interchangeables, les transactions faites avec l'aide des nouvelles technologies ne seraient pas garanties par la loi au même titre que celles qui utilisent le papier.

De plus, le gouvernement fédéral a déjà légiféré sur des questions de droit privé, par exemple la signature, empiétant directement ainsi sur le champ de compétence exclusive du Québec. Par voie de conséquence, si le gouvernement du Québec tardait à instaurer son propre cadre juridique en matière de technologies de l'information, il se trouverait bientôt assujetti aux lois fédérales sur des questions de droit privé. Nul besoin d'insister sur la nécessité de doter le Québec d'un outil législatif approprié à ses besoins et conforme à sa culture.

L'environnement géographique du Québec le prédispose, bien évidemment, à transiger surtout avec les autres composantes du Canada, les États-Unis et le Mexique. Il est donc primordial d'examiner ce que les autres gouvernements d'Amérique du Nord ont prévu pour garantir légalement les transactions de tous ordres qui reposent sur les nouvelles technologies. Ce premier examen a vite mené au constat qu'il n'est pas souhaitable de morceler la législation, c'est-à-dire d'émailler le corpus législatif existant de précisions qui se trouveraient de la sorte éparpillées dans tous les domaines où la loi étend ses ramifications. En effet, une loi d'application générale doit posséder les caractéristiques suivantes: ses dispositions peuvent s'intégrer harmonieusement au droit existant, ce qui est le cas; elle est accessible, de sorte qu'elle est moins susceptible d'être ignorée; elle s'adapte aux autres législations; elle utilise un seul cadre général, ce qui en fait un instrument succinct et complet.

Plusieurs législations déjà adoptées ailleurs reposent sur la conviction qu'une définition technique de la signature permet de régler la plupart des questions relatives à l'usage des technologies de l'information. Or, il n'en est rien. Le gouvernement du Québec a donc décidé, en toute connaissance de cause, de proposer une loi à la fois précise mais à la fois adaptable. L'État de New York, l'un de nos plus importants partenaires commerciaux, a légiféré pour encadrer l'ensemble des communications et des transactions effectuées par quiconque au moyen de technologies de l'information. Comme la législation new-yorkaise, la loi proposée bénéficierait à tous, qu'ils soient du secteur public ou privé ou qu'il s'agisse d'entreprises ou de particuliers.

Par ailleurs, la responsabilité des intermédiaires a notamment été traitée par la législation américaine et par une directive européenne sur le commerce électronique. Le gouvernement du Québec a tenu compte de cette réalité pour l'élaboration de son projet de loi. De la manière que les litiges puissent continuer à être réglés de la façon habituelle, il est en effet important que les gens d'affaires sachent à l'avance quelle est l'étendue de leurs responsabilités ainsi que la part de risque qu'ils devront assumer. D'ailleurs, il ne fait aucun doute que, dès l'adoption du présent projet de loi, l'esprit d'entreprise des Québécois fera naître très rapidement des services d'attestation de documents et de garantie de transactions.

Par ailleurs, le projet de loi traite de la création d'une banque de caractéristiques ou de mesures biométriques, ces banques qui colligent notamment des empreintes digitales, des tracés de l'iris, des mains, des codes génétiques ou autres. Le projet de loi propose que la création de telles banques de données soit préalablement divulguée à la Commission d'accès à l'information. Celle-ci pourra rendre toute ordonnance concernant de telles banques et même en interdire la mise en service ou en ordonner la destruction si elles ne respectent pas ces ordonnances ou si elles portent autrement atteinte au respect de la vie privée. De plus, le projet de loi propose que nul ne peut exiger, sans le consentement exprès de la personne, que la vérification ou la confirmation de son identité soit faite au moyen d'un procédé permettant de saisir des caractéristiques ou des mesures biométriques.

De son côté, la législation canadienne a retenu l'approche axée sur la sécurité des signatures électroniques, qui leur confère un statut juridique distinct de celui de la signature manuscrite, en adoptant, en avril dernier, une loi qui sera connue sous le titre de Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques. Le gouvernement du Québec est d'avis que l'approche axée sur les différentes signatures électroniques est parsemée de difficultés et qu'il est nettement préférable d'aborder les problèmes dans une perspective globale.

Or, le Québec fait partie de la délégation canadienne d'experts en technologies de l'information qui se réunissent dans le cadre des travaux de la Commission des Nations unies dont j'ai déjà parlé. En dépit des limites qu'impose cette participation, le Québec est tout de même parvenu à faire connaître et progresser son point de vue. La Conférence pour l'harmonisation des lois au Canada, dans le rapport qu'elle a adopté en octobre 1999, a retenu l'approche de la Commission des Nations unies qui apparaît dans la loi uniforme sur le commerce électronique. Il faut noter que cette prise de position ne s'applique que lorsque la loi exige une signature ou qu'elle prévoit des conséquences au fait de ne pas signer. Elle laisse donc sans solution tous les cas où une personne choisit de signer un document bien que la loi ne l'exige pas, ce qui est la situation la plus courante. De plus, cette loi soustrait à l'application de la loi notamment les testaments, les fiducies, les procurations, les effets négociables, les opérations immobilières et les droits réels immobiliers. Or, la loi exige une signature principalement pour ces documents. Je vous laisse le soin de tirer vos propres conclusions où une loi est si vide.

En outre, la loi comporte une partie qui traite des contrats et une autre qui aborde le transport des marchandises, champs de compétence qui relèvent en grande partie des provinces. S'y trouve une liste de documents qui en cette matière pourraient utiliser un support électronique. Il est facile d'imaginer les conséquences de la constitution d'une pareille liste. D'une part, on peut se demander si les documents qui n'apparaissent pas sur cette liste peuvent ou non utiliser un autre support que le papier. D'autre part, la confection de telles listes dans tous les domaines d'activité est impensable, et cette méthode constitue un véritable obstacle au commerce.

Il serait éminemment fastidieux d'énumérer ici toutes les pièces législatives qui ont été élaborées au Canada seulement. Qu'il me suffise de dire, pour la compréhension de chacun, que ces diverses dispositions ont fait l'objet de la part du gouvernement du Québec d'une étude minutieuse et objective. On comprendra en effet que l'intérêt politique, social et économique commande de ne pas se lancer en aveugle sur des sentiers déjà explorés et dont on a conclu qu'ils ne menaient pas là où l'on voulait bien aller.

Qui dit commerce électronique doit s'attendre à ce que des échanges aient lieu hors de nos frontières et même hors du continent. Le gouvernement a donc procédé à l'inventaire des mesures législatives prises dans les États d'Europe notamment. Il en découle que la nouvelle loi se compare avantageusement à ce qui se fait ailleurs. En résumé, voici ses principales qualités:

1° elle est véritablement neutre sur le plan technologique;

2° elle aborde les aspects propres à l'infrastructure essentielle à la mise en oeuvre du commerce électronique;

3° elle reconnaît la valeur juridique des documents, quels qu'en soient leurs supports, et consacre la liberté de choix de l'utilisateur à ce sujet;

4° elle établit des règles souples quant à l'identification des personnes et des objets qui servent aux communications;

5° elle accepte différentes méthodes pour établir un lien entre un document et une personne, notamment mais non exclusivement au moyen de la signature au sens juridique du terme;

6° elle reconnaît des processus de certification qui ne sont pas liés à une technologie en particulier.

Toutes ces caractéristiques de la nouvelle loi devraient servir à asseoir la confiance des utilisateurs.

Le projet de loi comporte enfin un autre élément non négligeable, c'est-à-dire que la personne qui recourt aux technologies peut choisir elle-même celle qui convient au niveau de sécurité et à la valeur juridique recherchés pour chacune de ses transactions. En d'autres termes, la législation ne se veut nullement contraignante, pas plus d'ailleurs que les règles actuelles mises en pratique dans notre société. Par exemple, certaines ententes s'appuient sur la parole et la bonne foi des interlocuteurs, tandis que, à l'inverse, des contrats seraient nuls s'ils n'étaient pas notariés. Il en ira de même avec la nouvelle loi, puisque ses assises ne font que confirmer divers niveaux de sécurité possibles. La gradation observable à présent sur le plan légal dans tous les contrats intervenus entre membres de la société québécoise sera identique même si le support retenu est technologique plutôt que papier.

En rédigeant ce projet de loi, le gouvernement a clairement établi certaines équivalences entre les documents technologiques et les écrits traditionnels auxquels font spécifiquement référence certaines lois ou certains règlements, comme la copie certifiée, le duplicata, le manuscrit, le dépliant ou même le chèque. S'il n'en était pas ainsi, la confiance indispensable à l'adhésion aux nouvelles technologies serait gravement compromise. Le projet de loi que je vous soumets aujourd'hui prend en compte le besoin légitime de la population de transiger autrement sans doute qu'auparavant, il faut le dire, mais toujours avec le sentiment de disposer d'une garantie légale.

n(17 h 40)n

Comme je l'ai dit tout à l'heure, M. le Président, le gouvernement du Québec a mené la démarche préalable au présent projet de loi avec le plus grand respect à l'endroit des citoyens et des entreprises du Québec qui désiraient se faire entendre. C'est ainsi que les divers commentaires recueillis en commission parlementaire et même après ont conduit au retrait de certains articles ainsi qu'à des modifications assez importantes et à des précisions. Je suis donc convaincu de vous présenter un projet de loi aussi limpide et précis que possible et adapté au contexte québécois moderne. Je suis d'ailleurs persuadé que les exemples qui suivent illustrent à merveille l'attention que le gouvernement a accordée aux commentaires qui lui ont été communiqués.

Certains disaient que le projet était trop ambitieux, que l'avant-projet de loi couvrait trop de domaines et qu'il aurait dû se limiter, selon certains, au commerce électronique entre entreprises et, selon d'autres, aux échanges avec l'État. Après l'analyse de cette objection, le gouvernement du Québec est arrivé à la conclusion qu'il serait injuste d'accorder une protection juridique à certains documents technologiques et, d'autre part, la refuser à d'autres. Voilà pourquoi le projet de loi adopte résolument une perspective globale sans distinguer entre les formes d'échange qui seront ainsi également garanties par la loi.

L'avant-projet de loi faisait mention de la cryptographie asymétrique étant donné que les dispositions de plusieurs législations actuelles sont orientées uniquement vers cette technologie. Il ne s'agissait d'ailleurs pas d'imposer cette technique, mais il est apparu que cette seule mention mettait en péril la neutralité technologique qu'il fallait maintenir. Le projet de loi remanié retranche donc toute référence à une quelconque technologie particulière.

Une autre remarque touchait la rédaction trop lourde, disaient-ils, le vocabulaire hermétique et l'absence de définition de certains termes techniques. En conséquence, le libellé du projet de loi a été repris et simplifié. Par exemple, afin d'uniformiser le vocabulaire, les notions de fiabilité et de prestataire ont été supprimées, et celles d'intégrité et d'intermédiaire également. Par ailleurs, il faut rappeler ici que des traditions de droit civil ne favorisent pas l'inclusion dans un texte de loi de définitions de termes ou de concepts connus.

D'autres commentaires faisaient état d'une crainte au sujet d'un changement éventuel des règles de preuve actuelles. En conséquence, le projet de loi n'a retenu que les règles compatibles avec le droit actuel.

Enfin, il a été prévu d'assurer la compatibilité des supports, des technologies, des normes et des standards permettant d'élaborer un document technologique, de le signer et de l'utiliser pour effectuer une communication. Le gouvernement a voulu éviter une réglementation lourde et pointilleuse qui, dans un domaine aussi changeant que les technologies de l'information, aurait tôt fait d'être désuète.

À la place, le projet de loi propose la création d'un comité multidisciplinaire dont la présidence et le secrétariat seront assumés par le Bureau de la normalisation du Québec. Ce comité fera appel à des personnes issues du milieu d'affaires, de l'industrie même des technologies de l'information, de la recherche scientifique et technique, à des personnes rattachées aux secteurs public, parapublic et municipal ainsi qu'à des membres des ordres professionnels qui possèdent une expertise relative au domaine des technologies de l'information.

Le comité aura notamment pour mission d'examiner les moyens susceptibles d'assurer la compatibilité et l'interopérabilité des supports et des technologies ainsi que des normes et des standards techniques; les moyens susceptibles également d'éviter la multiplication des étapes de la procédure, de favoriser la standardisation des certificats et des répertoires ainsi que la reconnaissance mutuelle des certificats; les moyens susceptibles également de garantir l'intégrité d'un document technologique par des mesures de sécurité et de gestion documentaire adéquates pour en assurer l'intégrité; et, finalement, les moyens susceptibles d'uniformiser les pratiques d'audit.

Ce comité élaborera des guides de pratique colligeant les consensus atteints sur les sujets prévus dans son mandat, guides qui seront publiés et mis à jour par le Bureau de la normalisation du Québec. C'est seulement si ces guides ne sont pas appliqués volontairement que le gouvernement pourra, après consultation du comité, y substituer des dispositions réglementaires. Il s'agit là d'une approche innovatrice qui s'appuie sur le sens des responsabilités des entreprises et des autres organisations et sur leur capacité de comprendre leur intérêt commun.

Par ailleurs, aux yeux de certains, il aurait mieux valu de s'en tenir à copier la loi type de la Commission des Nations unies, de crainte d'une incompatibilité entre notre loi et les autres législations. Mais, à cause de sa forme même, ce texte ne pouvait être intégré tel quel. Ses principes de neutralité technologique et d'équivalence fonctionnelle font cependant partie intégrante de la loi. Pour répondre à cette préoccupation bien légitime, l'actuel projet de loi prévoit que le gouvernement du Québec fera appel à un comité multidisciplinaire, dont j'ai déjà parlé, afin d'assurer l'harmonisation des systèmes, des normes et des standards techniques nécessaires à l'atteinte des objectifs du présent projet de loi.

Ce ne sont là que quelques échantillons des inquiétudes et des souhaits dont s'est préoccupé le gouvernement du Québec en préparant le projet de loi que vous avez aujourd'hui entre les mains. Mis à part les sessions de la commission parlementaire, le gouvernement a multiplié les rencontres avec les groupes intéressés ainsi que les discussions téléphoniques. Ainsi, le gouvernement du Québec peut à présent promouvoir un projet de loi amendé en fonction des commentaires reçus.

En terminant, M. le Président, je veux vous réitérer que je suis fier aujourd'hui de vous présenter le résultat de nos efforts conjugués à ceux de nombreux Québécois et Québécoises. À mon avis, cette loi permettra au Québec de conserver l'avance qu'il a déjà prise en matière de protection des renseignements personnels et de continuer d'aller de l'avant dans un domaine qui connaît une évolution accélérée. En outre, ce projet de loi répond aux besoins de la société québécoise et il marque un passage digne de mention entre les méthodes traditionnelles et des façons de faire considérées, hier encore, comme tout à fait futuristes.

Nous connaissons tous la créativité des citoyens du Québec, leur acharnement au travail, leur désir d'élargir leurs horizons, leur besoin de se démarquer. Je suis certain que vous êtes tous aussi heureux que moi de remettre entre leurs mains un outil nécessaire, attendu et bienvenu qui les amènera à de nouvelles réalisations et à de bien grandes réussites.

À titre d'élus du peuple, il convient de se rappeler les faits suivants: tous les gouvernements ont visé à maintenir sinon à étendre les compétences de l'État du Québec; tous les gouvernements ont adapté et fait évoluer le Code civil, ce qui en fait notre héritage collectif. L'actuel projet de loi a pour objectif de moderniser certaines facettes du corpus législatif. En accordant également une grande importance à la confidentialité des renseignements personnels et à la protection de la vie privée des personnes, à la liberté de choix des individus et des organisations ainsi qu'à la protection des consommateurs, ce projet de loi contribue à bâtir la confiance dans les technologies de l'information et les transactions électroniques. L'établissement de la confiance est la condition essentielle pour que ces moyens deviennent un tremplin pour le développement économique du Québec et l'enrichissement collectif de notre société. À l'inverse, l'insécurité ne peut que freiner l'épanouissement de notre société et de son accession à l'échange économique indispensable à sa survie.

En conclusion, cette nouvelle loi s'arrimera à coup sûr au corpus international même si le Québec est une société unique, en ce sens que nulle autre n'est aussi bien protégée en ce qui concerne les renseignements personnels et la vie privée. Nous serons donc parvenus au double objectif de poursuivre notre adhésion à la communication modernisée et, en même temps, d'adapter cette réalité nouvelle à notre conviction profonde que le citoyen québécois est libre de choisir, même en matière de technologies de l'information. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre délégué à l'Autoroute de l'information et aux Services gouvernementaux. M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Avec votre permission, M. le Président, compte tenu du fait que nous avons écouté respectueusement, pour ne pas dire religieusement, le discours du ministre et que ma collègue de La Pinière aurait un discours non moins intéressant à prononcer et encore tout à fait pertinent, je vous suggère, en vertu de l'article 100, l'ajournement du débat, puisque Mme la députée de La Pinière n'aurait que 10 minutes au moment où on se parle pour pouvoir débuter son discours. Comme nous savons qu'elle a de la suite dans les idées, nous ne voudrions pas l'interrompre au bout de 10 minutes.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez...

M. Boulerice: J'en conviens, M. le Président, et j'acquiesce.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il y a consentement, donc on n'aura pas de débat sur la motion, on va l'adopter à l'unanimité. Nous allons ajourner notre débat à demain, 10 heures.

Ajournement

(Fin de la séance à 17 h 50)



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