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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 21 novembre 2000 - Vol. 36 N° 140

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de l'ambassadeur de la République turque, M. Erhan Ögüt

Affaires courantes

Affaires du jour

Ajournement

Journal des débats

heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires du jour

Nous entreprenons nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'item à l'ordre du jour.

M. Brassard: Je vous réfère, M. le Président, à l'article 6 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 136

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 6 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 15 novembre 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives. Alors, je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant. Alors, il n'y a plus d'intervenants. Maintenant, est-ce que le ministre veut exercer son droit de réplique? Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: Merci, M. le Président. M. le Président, vous savez, ce projet de loi vise à apporter un certain nombre d'amendements et de modifications, certaines substantielles, au régime forestier mis en place au milieu des années quatre-vingt, la Loi sur les forêts ayant été adoptée en 1986, donc au début du premier mandat du deuxième gouvernement Bourassa.

À cet égard, je pense qu'il est bon de mentionner que cette loi, à l'époque, avait été adoptée à l'unanimité et que, également, elle avait été précédée de la publication d'un livre blanc qui avait été présenté et déposé en cette Chambre par le député de Laviolette, mon collègue aujourd'hui ministre des Régions, qui était à l'époque ministre des Forêts. Dans ce livre blanc, qui avait été le fruit d'une consultation, on y retrouvait les assises mêmes, les fondements mêmes du régime forestier mis en place par Albert Côté, qui a pris le relais, ministre libéral dans le gouvernement Bourassa, et qui a fait adopter la loi. Donc, je pense qu'il est bon de rappeler ces événements historiques pour bien montrer que, s'il est vrai qu'Albert Côté a joué un rôle déterminant en faisant adopter la Loi sur les forêts, il est également vrai que le gouvernement du Parti québécois est aussi responsable d'un progrès considérable et d'avoir mis en branle la réforme du régime forestier.

Et j'écoutais, la semaine dernière, certains intervenants libéraux faire l'éloge d'Albert Côté, sans doute avec raison, mais je me permets, moi aussi, de mon côté, de compléter l'éloge en signalant le travail accompli par le député de Laviolette à l'époque. Ce n'est que justice, je pense, et qu'équité que ainsi de rétablir les faits.

Souvent, quand j'entends les intervenants, les députés libéraux, ici même, à l'Assemblée, ou parfois en région, je suis obligé de constater qu'ils ont bien de la misère à ne pas céder à la tentation démagogique en matière de gestion de la forêt, y compris le chef, d'ailleurs, de l'opposition, le chef du Parti libéral, qui, lui, y cède sans vergogne quand il arrive parfois à se promener en région.

Je leur dis simplement de faire attention et de faire preuve d'un peu de prudence, parce que le nouveau régime forestier, il a été mis en branle, il a été mis en place par les libéraux, le gouvernement libéral. Et, pendant 10 ans, il a été géré par des ministres libéraux, à commencer par Albert Côté, mais il y en a d'autres qui ont suivi également. Alors, quand des députés libéraux présents, pour faire bonne figure, cèdent à la tentation démagogique et se lancent dans des diatribes sur la mauvaise gestion de la forêt au Québec, ils devraient faire attention parce que ça englobe les 10 ans de gestion libérale, ça les englobe. Il faut être bien conscient de ça.

Si François Gendron... excusez-moi, si le député d'Abitibi-Ouest, qui a été ministre des Ressources naturelles, si le député de Joliette, qui a été aussi ministre des Ressources naturelles, si moi-même, comme ministre des Ressources naturelles, nous avons mal géré la forêt et que les députés libéraux sont fortement tentés de faire des discours dans ce sens-là, bien, ça veut dire à ce moment-là qu'Albert Côté a mal géré la forêt puis ça veut dire aussi que Christos Sirros, pardon, le député de Laurier-Dorion, a mal géré la forêt aussi.

n(10 h 10)n

Il n'y a pas de distinction; c'est le même régime, les assises et les fondements n'ont pas été changés ni modifiés depuis 13 ans, et, s'il y a mauvaise gestion de la forêt, bien, elle n'est pas exclusive aux ministres péquistes, comme disent les libéraux, aux ministres du Parti québécois, elle appartient aussi aux ministres libéraux. Alors, je les incite à la prudence et à ne pas céder à la tentation démagogique, et à considérer qu'au Québec la forêt a été bien gérée depuis 13 ans et que le régime forestier mis en place à l'époque, avec l'appui unanime de l'Assemblée nationale, est à toutes fins utiles un bon régime. Ses fondements sont bons.

Et, avec le projet de loi n° 136 d'ailleurs, je ne modifie pas, je ne change pas les assises du régime forestier en place. J'y apporte des modifications, certaines substantielles, mais les assises demeurent, les assises n'ont pas à être changées. Et d'ailleurs, à quelques exceptions près, la très grande majorité des intervenants, aussi bien ceux qui sont venus en commission parlementaire tout récemment que ceux qui ont participé à la vaste consultation régionale il y a deux ans, en 1998, donc la très grande majorité des intervenants ne veut pas remettre en cause les fondements du régime, considère que ces fondements-là sont bons, sont sains et qu'on doit les maintenir.

Je rappelle, entre autres, que l'un des fondements du régime forestier mis en place au milieu des années quatre-vingt, c'est de faire en sorte que l'intervenant ou l'entreprise qui fait la récolte, qui récolte la matière ligneuse pour son entreprise, pour son usine de transformation est également responsable de l'aménagement forestier, responsable de faire en sorte que la forêt continue de produire, continue d'avoir un rendement qu'on appelle soutenu pour faire en sorte que les générations futures puissent également avoir accès à des ressources forestières en volume et en quantité suffisants. C'est l'un des fondements du régime. Personne ne l'aura mis en cause, sauf quelques intervenants mais très minoritaires. Personne n'a remis en cause ce fondement-là.

L'autre fondement du régime forestier, c'est que la forêt doit se régénérer naturellement. La régénération naturelle est largement privilégiée. Ça ne veut pas dire qu'on ne fait pas de reboisement, ça ne veut pas dire qu'on ne met pas en terre des millions de plants par année ? 150 millions, pour tout dire, par année, annuellement, qui sont remis en terre: 50 millions en forêt privée, 100 millions en forêt publique. C'est à peu près ça. Mais ça, ça vaut pour à peu près 20 % de la production nouvelle. Le reste largement relève et dépend de la régénération naturelle. C'est un des fondements du régime, contrairement à ce qui s'est fait dans bien des pays forestiers. Je pense aux pays scandinaves, où on a largement privilégié presque exclusivement la plantation, le reboisement. Je pourrais en ajouter d'autres, mais c'est simplement pour vous dire que l'ensemble des intervenants considéraient que les fondements du régime, les assises du régime forestier n'avaient pas à être remises en cause, remises en question.

Et puis, M. le Président, tous ces amendements qu'on retrouve dans le projet de loi n° 136, c'est le fruit d'un processus de consultation très large, assez long, parce que ça a duré plus de deux ans, justement pour être bien certain que les amendements que l'on apporterait au régime s'appuieraient sur de larges consensus des divers intervenants consultés. Alors, je vous rappelle, entre autres, qu'il y a eu dans les régions des consultations régionales, avec l'appui des CRD, plus de 500 mémoires; ça s'est fait à l'automne 1998. C'est à partir de ces consultations régionales qu'on a d'abord fait une synthèse puis qu'ensuite on a identifié des amendements et des modifications qu'il conviendrait d'apporter à la Loi sur les forêts, et ça a donné lieu au projet de loi que j'ai déposé l'automne dernier à l'Assemblée nationale... le printemps plutôt, le printemps dernier.

Et puis, ça a donné lieu encore à une autre consultation, cette fois-ci en commission parlementaire, consultation qui a été une grande réussite, puisque nous avons reçu 133 mémoires, nous en avons entendu 113. Comme proportion de mémoires entendus par rapport aux mémoires reçus, je ne sais pas si c'est un record, mais en tout cas c'est certainement parmi les commissions parlementaires qui ont entendu la plus grande proportion de mémoires par rapport aux mémoires reçus, aux mémoires déposés. Et la plupart de ceux qu'on n'a pas entendus, les mémoires qu'on n'a pas entendus, contrairement à ce que pense la députée de Bonaventure, c'est parce que très souvent, dans la plupart des cas, ils se sont désistés, pour toutes sortes de raisons qui sont les leurs, ou, dans bien des cas aussi, ils ne voulaient pas. Dès le départ, ils déposaient un mémoire, mais ils ne voulaient pas se faire entendre. Alors donc, on a entendu vraiment tous les mémoires et tous les intervenants qui ont manifesté l'intention de se faire entendre. Et ce n'est pas une consultation bidon, là, comme certains intervenants libéraux l'ont prétendu au cours de ce débat. Cette consultation sera utile, elle va permettre d'apporter de nouveaux amendements à la loi n° 136. Alors, ce n'est pas une consultation inutile, futile, c'est une consultation qui va donner des fruits, et j'aurai l'occasion, en temps et lieu évidemment, d'apporter d'autres amendements au projet de loi.

M. le Président, le projet de loi en question va nettement améliorer la transparence en matière de gestion forestière. Non pas qu'actuellement tout se fait en cachette en matière de gestion forestière, que ça se fait en catimini. Bien au contraire, toutes les informations qu'on souhaite obtenir sur la gestion forestière, à condition qu'on le veuille, qu'on veuille faire l'effort, sont disponibles. Quand j'entends des intervenants, ici comme ailleurs, prétendre qu'on gère la forêt en catimini, qu'on cache des informations, qu'on n'a pas toutes les informations pertinentes, c'est une affirmation qui ne résiste pas à l'analyse. Si vous voulez des informations, il y en a des quantités de disponibles, et le ministère les a, dans la plupart des cas, rendues publiques. Puis, quand ce n'est pas le cas, vous n'avez qu'à les demander et vous les obtenez. Le meilleur exemple, c'est que les adversaires du régime forestier, qu'on retrouve dans la Coalition dirigée par M. Dubois, les adversaires, toutes les informations dont ils disposent, ils les prennent dans des documents du ministère, sont issues des... se retrouvent dans les documents du ministère. Et puis, quand j'entends Pierre Dubois, d'ailleurs je me dis: Certainement pas besoin d'une enquête publique, quand on l'entend. S'il y en a un qui ne se pose pas de questions sur la gestion de la forêt, qui proclame et déclame des affirmations péremptoires nombreuses les unes à la suite des autres, c'est bien lui. Alors, je ne vois pas en quoi une enquête publique, pour sa part en tout cas, améliorerait ses connaissances, il connaît tout. Il connaît tout et il ne se pose pas de questions. Pour lui, c'est clair qu'il y a rupture des stocks, qu'il y a surexploitation, ça ne fait pas l'ombre d'un doute. Alors, il n'y a certainement pas besoin d'enquête publique pour M. Dubois.

Transparence, cependant, qui va être améliorée. On va encore améliorer la transparence. Il y aura une politique de consultation qu'on va concevoir et mettre en oeuvre. Il y a une plus grande participation de nombreux intervenants à l'élaboration des plans d'aménagement forestier qui sont prévus dans la loi. Les plans annuels seront rendus publics. Les rapports annuels seront rendus publics. Le bilan faisant état des travaux dans chaque unité d'aménagement, tout cela sera rendu public à chaque cinq ans. On va savoir ce qui se passe. À chaque cinq ans, on va publier ? je le déposerai ici, à l'Assemblée nationale ? un rapport sur l'état des forêts, sur l'ensemble de la gestion des forêts publiques. Les informations sur le mesurage seront rendues publiques. Les infractions seront rendues publiques aussi. Donc, transparence il y a, transparence il y aura encore davantage lorsque le projet de loi n° 136 entrera en vigueur.

n(10 h 20)n

Il y a beaucoup d'inflation verbale souvent de l'autre côté en matière de forêt. J'écoutais en particulier le député d'Orford. Lui, il est impayable. Il cède à chaque fois à la tentation de l'inflation verbale et des propos démagogiques. C'est lui qui disait que c'était effrayant, qu'à chaque année le volume de matière ligneuse, de bois coupé, c'était l'équivalent de 10 stades ? il n'a pas inventé ça, il a pris ça dans un certain film ? olympiques remplis de bois, à chaque année. C'est effrayant. Il présente ça comme une espèce de tragédie. Mais il faut relativiser les choses, M. le Président. Sur la base des inventaires forestiers les plus récents, ce n'est pas 10 stades qu'on pourrait remplir, c'est 1 300 stades, et 1 000 rien qu'en résineux, 1 000 stades. Alors, si on en coupe 10 stades par année, ça veut dire 1 %, c'est parfait, gestion tout à fait correcte et prudente de la forêt publique québécoise. Vous récoltez 1 % par année de la matière ligneuse disponible et attribuée à des entreprises forestières, alors il n'y a rien de dramatique, il n'y a rien de tragique là-dedans. Évidemment, ça fait une image-choc, hein, de dire que c'est épouvantable, on récolte l'équivalent de 10 stades olympiques de bois par année. C'est sûr que, pour un citadin, ça peut paraître à la fois dramatique et angoissant, mais rien de plus normal, et ça s'inscrit parfaitement dans le cadre d'une gestion prudente de la forêt.

Il y a aussi une chose qu'il faut dire, je le rappelais au tout début: La forêt se régénère naturellement. Évidemment, on a réussi à faire entrer dans l'esprit de bien des Québécois des images troublantes de parterres de récoltes récentes en prétendant ou en laissant clairement voir qu'on était en face d'un désert, qu'il s'agissait là d'un désert, qu'il n'y a plus rien qui se passerait là, qu'on se retrouverait face à un désert. Bien non. La forêt repousse, la forêt se régénère, et, si vous revenez 20 ans ou 25 ans ou 30 ans plus tard, vous allez voir une forêt nouvelle là où on a récolté. C'est comme ça que ça se passe.

Dans la réserve faunique des Laurentides, M. le Président, on fait des opérations forestières actuelles, et la forêt qu'on récolte, c'est une forêt de seconde venue, c'est une deuxième forêt. On l'a déjà récoltée il y a 60 ans et on revient maintenant pour la récolter. Alors, qu'est-ce qui s'est passé? Ce n'est pas le désert, là, qui est apparu après la première récolte, c'est une nouvelle forêt qui est apparue. La régénération naturelle, encore une fois, je le répète, est un des fondements du régime forestier, et c'est ça qu'on privilégie, puis c'est ça qu'on va continuer de privilégier, et toutes nos méthodes de coupe, nos façons de faire en forêt visent à soutenir, et à favoriser, et à privilégier la régénération naturelle.

Alors, M. le Président, il me reste quelques secondes pour conclure en invitant l'opposition ? je sais que ça a été le cas du député de Kamouraska-Témiscouata ? à collaborer de façon positive et de façon constructive à l'étude détaillée de ce projet de loi pour en arriver à un régime forestier amélioré, bonifié et mieux adapté aux réalités nouvelles. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Le principe du projet de loi...

M. Béchard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, vous avez une question?

M. Béchard: Oui, M. le Président, si vous me permettez, juste avant l'adoption du principe comme telle, est-ce que le ministre accepterait de répondre à une courte question en vertu de l'article 213, ce qui nous aiderait peut-être à prendre une meilleure décision sur le vote qui s'en vient?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, vous acceptez de répondre à la question?

M. Brassard: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Très bien.

M. Béchard: Oui, bien, M. le Président, afin d'avoir justement, comme il l'a mentionné, une approche constructive, est-ce que le ministre peut nous dire s'il a l'intention de revenir sur sa décision, notamment au niveau de deux éléments, c'est-à-dire d'enlever le droit d'arbitrage dont peuvent se prévaloir les bénéficiaires en cas de désaccord avec le ministère ? il enlève ce droit-là dans son projet de loi ? est-ce qu'il a l'intention de revenir sur cette décision-là?

Et, deuxièmement, est-ce qu'il a l'intention, comme l'ont demandé plusieurs intervenants en commission parlementaire, d'envisager la mise en place d'un audit externe ou d'un vérificateur général des forêts ? peu importe le nom ? quelqu'un pour venir valider toutes les données qui sont diffusées par le ministère des Ressources naturelles?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, je vais présenter au Conseil des ministres un certain nombre d'amendements, mais je n'ai pas l'intention de revenir sur la question de l'arbitrage, et j'expliquerai pourquoi en commission parlementaire. Et, de la même façon, je n'ai pas l'intention non plus de faire en sorte que l'État se désiste de ses responsabilités en faveur d'un tiers, que ce soit un inspecteur général des forêts ou tout autre intervenant.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon, alors, ceci met fin donc aux discussions sur le débat d'adoption du principe.

Mise aux voix

Le principe du projet de loi n° 136, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission
de l'économie et du travail

M. Brassard: Alors, je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: L'article 37, maintenant, M. le Président.

Projet de loi n° 99

Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 37, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes propose l'adoption du projet de loi n° 99, Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec. Je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant, et ce sera M. le ministre des Affaires intergouvernementales.

M. Joseph Facal

M. Facal: Merci beaucoup, M. le Président. Nous entreprenons aujourd'hui la dernière étape qui nous conduira à l'adoption du projet de loi n° 99. En fait, aujourd'hui, l'Assemblée nationale se porte à la défense des droits fondamentaux du peuple québécois, mais à la défense aussi de ses propres pouvoirs et prérogatives.

L'Assemblée nationale, confrontée à la dérive antidémocratique du gouvernement fédéral, n'a d'autre choix, face à la loi C-20, que d'intervenir pour parer à cette atteinte sans précédent au droit fondamental du peuple québécois de disposer librement de son avenir politique.

M. le Président, comme l'ont très clairement indiqué les résultats du référendum du 30 octobre 1995, le régime politique canadien vit une crise politique profonde. Sans la volonté, sans la capacité d'apporter les réformes nécessaires à un renouvellement qui tiendrait compte des demandes historiques du Québec, la fédération canadienne n'a plus d'autres avenues, pour maintenir son unité, que de recourir à l'argument de la raison d'État et à la manipulation des règles démocratiques. Et cela transparaît, transpire de cette inique loi C-20 qui, à sa face même, non seulement transgresse le principe fédéral, mais écarte en outre du revers de la main des règles démocratiques universellement reconnues et appliquées.

n(10 h 30)n

Au nom de la raison d'État, la loi C-20 cherche à priver le peuple québécois du libre exercice de son droit inaliénable de disposer comme il l'entend de son avenir politique. Au nom de la raison d'État, cette loi cherche à assujettir l'Assemblée nationale, la seule qui soit exclusivement représentative du peuple québécois, l'assujettir à un droit de regard du Parlement fédéral, portant ainsi atteinte aux pouvoirs et aux prérogatives qui appartiennent à notre Assemblée depuis toujours. Au nom de cette même raison d'État, le gouvernement fédéral s'est abstenu de soumettre à la consultation publique, tant au Québec que dans le reste du Canada, sa loi C-20. Toujours au nom de cette même raison d'État, il a eu recours à une série de moyens procéduriers qui lui ont permis, en comité, dans l'anonymat du début des vacances estivales, de limiter les débats.

M. le Président, le gouvernement fédéral affirme que sa loi C-20 colle au texte de l'avis de la Cour suprême du Canada. M. le Président, rien n'est plus inexact, rien n'est plus faux. Je l'ai déjà dit à plusieurs reprises et je le redis encore aujourd'hui parce qu'il est important que l'on comprenne que le gouvernement fédéral désinforme, trompe sciemment la population lorsqu'il affirme que C-20 vise à donner effet à l'avis de la Cour suprême du Canada. Je rappelle encore une fois que nulle part, nulle part dans son avis consultatif la Cour suprême vient conférer au Parlement fédéral un droit de regard sur le contenu de la question référendaire. Nulle part. Je rappelle que nulle part dans son avis la Cour suprême vient imposer, sous prétexte de clarté, une question simpliste qui devrait expressément exclure de son champ toute référence à un partenariat politique ou économique. Je rappelle que nulle part dans son avis la Cour suprême vient réserver au Parlement fédéral l'autorité de fixer seul, unilatéralement, a posteriori, à son gré, le seuil de majorité requis. Je rappelle encore que nulle part dans son avis la Cour suprême vient permettre au Parlement fédéral de dicter, de fixer seul le contenu des négociations postréférendaires.

Alors, pourquoi, peut-on se demander, le gouvernement fédéral cherche-t-il à induire délibérément la population en erreur? Encore une fois, pour cause de raison d'État, car, imaginez, M. le Président, l'avis consultatif que le gouvernement fédéral a lui-même demandé est venu déclarer rien de moins que la divisibilité du Canada. Pour en rajouter, la Cour suprême prend même le soin de préciser que cette éventuelle divisibilité s'effectuera, le cas échéant, par le détachement d'une entité territoriale de la fédération, pas d'une entité amputée de ce territoire nordique ou amputée de ses territoires limitrophes, non. Non, la Cour suprême parle d'une entité déjà territorialement délimitée au sein de la fédération, autrement dit un détachement qui s'effectuerait dans le respect de l'intégrité territoriale de l'État à naître, en l'occurrence dans le respect de l'intégrité territoriale du Québec, comme le stipulent les règles du droit international, comme cela s'est d'ailleurs fait au moment de la reconfiguration récente d'autres grandes fédérations à travers le monde.

L'avis de la Cour suprême précise en outre que le rejet clairement exprimé par le peuple du Québec de l'ordre constitutionnel existant conférerait légitimité aux revendications souverainistes et imposerait au reste du Canada l'obligation de prendre en considération et de respecter cette expression de la volonté démocratique en engageant des négociations que la Cour conçoit comme devant se dérouler d'égal à égal entre deux majorités légitimes, l'une ne pouvant l'emporter sur l'autre.

M. le Président, on comprend donc aisément le désarroi du gouvernement fédéral qui, selon les conclusions d'un renvoi qu'il a lui-même initié auprès du plus haut tribunal du pays, se voit non seulement imposer l'obligation de reconnaître la légitimité du fait que le peuple québécois puisse, dans le cadre fédératif actuel, revendiquer l'accession à la souveraineté, mais qui se voit aussi imposer l'obligation de négocier cette accession à la souveraineté, chose qu'il n'avait jamais voulu auparavant reconnaître.

Comble du dépit pour le gouvernement fédéral, la Cour suprême définit en outre la sécession unilatérale comme une sécession effectuée sans négociation préalable, confirmant ainsi la position du gouvernement du Québec qui n'a jamais proposé autre chose qu'une accession à la souveraineté réalisée à la suite de négociations menées d'égal à égal avec le reste du Canada et suivies d'une période de transition.

On comprendra aussi le désarroi du gouvernement fédéral qui voit la Cour suprême ignorer le concept de majorité qualifiée et parler plutôt d'un concept de majorité claire au sens qualitatif du terme. Les épouvantails périodiquement évoqués par M. Chrétien ou M. Dion faisant tantôt état, selon l'humeur du jour, de 55 %, de 60 %, de 66 % et même plus, le gouvernement fédéral ne peut plus les brandir. Et ses atteintes aux principes démocratiques de l'égalité de droit de tous les électeurs, il ne peut plus maintenant tenter de les faire passer pour légitimes.

Je ne m'appesantirai pas non plus, M. le Président, sur l'obligation de bonne conduite désormais imposée aux parties, y compris donc à la partie fédérale. Encore une fois, on peut comprendre le désarroi du gouvernement fédéral obligé désormais de pondre cette inique loi C-20 dont les termes mêmes traduisent, à mon sens, pour reprendre les mots mêmes de l'avis de la Cour, ce type d'«intransigeance injustifiée» évoquée par la Cour suprême comme facteur pouvant ouvrir la voie à une accession de facto du Québec à la souveraineté. Un autre pan de l'argumentation fédérale traditionnelle qui s'écroule à ses pieds alors que la Cour suprême envisage elle-même la possibilité d'une telle accession de facto, réduisant ainsi en cendres toutes ces idées de supposé trou noir qui avalerait le Québec tout entier au lendemain d'une déclaration unilatérale d'indépendance. Il n'en sera rien, M. le Président. Comme la Cour suprême elle-même le reconnaît, cette voie existe et elle est désormais bien balisée.

n(10 h 40)n

On vient de voir, M. le Président, en quelques mots pourquoi le gouvernement fédéral tenait tellement à réécrire cet avis consultatif du 20 août 1998 et comment la loi C-20 vient participer à cet exercice de travestissement et de réécriture. Et je crois, M. le Président, que, pour le Québec, il ne saurait y avoir d'ambivalence, la loi C-20 doit être énergiquement dénoncée et contrée par une loi forte votée par l'Assemblée nationale du Québec. C'est précisément ce que propose de faire le projet de loi n° 99, et il le fait dans le respect du fédéralisme, de la démocratie, de la primauté du droit et des droits des minorités.

Quant au principe du constitutionnalisme, nul ne peut ignorer le fait que la Loi constitutionnelle de 1982 reste, pour le Québec et pour le peuple québécois, gravement teintée d'illégitimité. Il s'agit d'ailleurs là ? je le souligne au passage ? d'un aspect regrettable de l'avis consultatif de la Cour suprême. Bien que cet aspect soit de nature essentiellement politique, il m'apparaît qu'il ne peut pas, n'aurait pas dû être passé sous silence par les juges de la Cour suprême.

Il est clair aussi que le gouvernement du Québec ne peut, par une acceptation sans réserve de l'intégralité du renvoi, cautionner cette rupture de 1982 et surtout ne peut cautionner l'application d'une formule d'amendement mise en place sans son accord ni celui d'un des deux peuples fondateurs du Canada. Jamais un gouvernement du Québec ? en tout cas pas le nôtre, M. le Président, je vous l'assure ? ne pourrait accepter que l'application de cette formule puisse se traduire un jour par l'octroi, à n'importe laquelle des neuf autres provinces, d'un droit de veto sur l'avenir politique du Québec et du peuple québécois.

En ce sens, le projet de loi n° 99 réitère les principes politiques et juridiques qui constituent déjà les assises de la société et de la démocratie québécoise. Il consacre donc, notamment, le droit fondamental du peuple québécois à disposer librement, sans ingérence, de son avenir politique. Il réaffirme la souveraineté de l'État du Québec dans tous ses domaines de compétence, tant à l'interne que sur la scène internationale, ainsi bien sûr que l'intégrité du territoire québécois. Il affirme de plus avec force qu'aucun autre Parlement ou gouvernement ne peut réduire les pouvoirs, l'autorité, la souveraineté et la légitimité de l'Assemblée nationale. Il réitère également les principes sous-jacents de la Charte de la langue française. Et il précise enfin que la règle de la majorité de 50 % plus un des votes validement exprimés ? règle universellement reconnue et appliquée ? est celle qui continuera de prévaloir dans l'interprétation des résultats de tout référendum tenu en vertu de la Loi sur la consultation populaire et par lequel le peuple québécois exercera son droit à disposer de lui-même.

Je rappelle, M. le Président, que le projet de loi n° 99, à la différence du projet de loi fédéral C-20, aujourd'hui devenu loi, a fait l'objet d'une consultation populaire ouverte et d'audiences publiques. Soixante-six mémoires ont été reçus provenant de tous les horizons de la société civile québécoise. Une soixantaine d'entre eux ont fait l'objet d'auditions. Plusieurs citoyens ont comparu à titre individuel. Le gouvernement a tenu compte des arguments des intervenants, et plusieurs changements ont été apportés au contenu initial du projet de loi.

Je rappelle que plusieurs intervenants entendus par la commission des institutions nous ont demandé, ont insisté même, nous ont pressés de mettre au rancart nos divisions partisanes le temps de répondre à l'atteinte perpétrée par le gouvernement fédéral contre nos droits fondamentaux. C'était, je crois, une attente parfaitement légitime de la part de ceux et celles que nous représentons, et j'estime qu'il est toujours de notre devoir de député d'y répondre positivement.

Aussi, je me permets, M. le Président, de réitérer au chef de l'opposition officielle et aux députés de sa formation politique qu'il n'est peut-être pas encore trop tard pour forger un consensus autour de ce projet de loi. Et je les invite encore une fois, le temps d'un vote, à se ranger résolument, solidairement du côté des intérêts supérieurs du Québec en se portant à la défense du droit collectif le plus fondamental de notre peuple, qui est celui de décider librement et sans ingérence de son avenir politique.

Mais, M. le Président, j'ai beau formuler cette invitation, je vous avoue que je n'ose pas trop y croire. Je n'ose pas trop y croire parce que, depuis le dépôt du projet de loi n° 99, j'ai vu l'opposition officielle manoeuvrer autour de cette question. On se rappellera qu'au début l'opposition officielle reprochait au projet de loi n° 99 de passer sous silence l'appartenance du Québec à la fédération canadienne et de ne pas être plus explicite à l'égard de l'avis de la Cour suprême du Canada. L'opposition reprochait également au projet de loi n° 99 la formulation de certains de ses articles. Ça, M. le Président, c'était le discours de l'opposition officielle au moment de l'ouverture des audiences publiques, le 8 février dernier. À ce moment-là, on n'entendait pas beaucoup l'opposition nous parler du véhicule.

Alors, le gouvernement a écouté. Il a écouté non seulement le public, mais il a écouté aussi l'opposition officielle. Le libellé de certains articles a été modifié. Le gouvernement a aussi fait une ouverture significative en ajoutant deux considérants portant précisément sur l'avis consultatif dont le projet de loi reconnaît l'importance politique et sur l'appartenance du Québec à la fédération canadienne. L'opposition officielle conservait en outre la possibilité de proposer des amendements encore plus importants si elle désirait. Elle n'en fit rien.

n(10 h 50)n

En commission parlementaire, au moment de l'étude article par article, on aurait au moins pu s'attendre à ce que l'opposition officielle se prononce au moins en faveur des dispositions les plus générales réaffirmant les droits fondamentaux et les prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec. Encore une fois, elle n'en fit rien, voyant partout des mises en scène et des complots souverainistes. Je crois, M. le Président, que le Québec a regretté cette attitude de l'opposition officielle et je pense qu'elle en paiera le prix.

Alors, évidemment, à court d'arguments pour contester le contenu même du projet de loi, l'opposition officielle a dû changer de stratégie et, à ce moment-là, plutôt que de s'en prendre au fond, elle s'en prit à la forme. N'ayant rien à dire de substantiel sur le contenu, elle fit apparaître cet argument sur le véhicule. C'est à ce moment-là, pas au début des audiences, à la fin des audiences, que l'opposition commença à s'en prendre à l'idée même d'une loi pour s'opposer à une autre loi. C'est là, pas avant, qu'elle se mit à parler de véhicule. Selon l'opposition officielle, le principal défaut de ce véhicule, de ce projet de loi est de donner prise à une éventuelle contestation des droits et prérogatives qui y sont énoncés. N'ayant plus rien à dire sur le fond, après les audiences et après la modification du libellé de certains articles, mais refusant de venir à l'appui, on changea le fusil d'épaule: du fond on passa à la forme; du contenu on passa au véhicule.

M. le Président, si vous me permettez un jeu de mots facile, je vous dirais que cet argument du véhicule ne tient pas la route. Il est évident qu'à une loi il était tout à fait préférable de répondre par une autre loi. Ce n'était pas, j'en conviens, la seule option. Nous en avons regardé d'autres, nous en avons même discuté avec l'opposition. Mais, sans être la seule option, répondre à une loi par une autre loi était la meilleure option. Pourquoi? Parce que, si les choses restent telles qu'elles sont, lors du prochain référendum québécois vont se faire face deux lois. Il y aura donc un jour nécessité d'un arbitrage. Et, pour se gouverner, il faut que les citoyens et les citoyennes sachent quelles normes auront préséance, lesquelles seront applicables. Et, à ce moment-là, il sera important, il sera essentiel que ces normes aient, au départ, un statut comparable, un statut comparable. Reconnaissez avec moi, M. le Président, que, face à tout le poids symbolique que peut avoir une loi, une déclaration, une motion de l'Assemblée nationale, fut-elle qualifiée de solennelle, n'aurait pu, à ce chapitre, offrir le même poids qu'une loi.

Cet argument du véhicule souffre également du fait que l'opposition officielle semble postuler au départ que les droits et les prérogatives énoncés dans le projet de loi n° 99 auraient un caractère incertain qui les rendrait donc vulnérables à une contestation judiciaire. M. le Président, le gouvernement du Québec récuse totalement, totalement ce genre de raisonnement qui ne vise qu'à rapetisser l'État québécois, l'Assemblée nationale, le peuple du Québec et les droits et prérogatives qui sont les nôtres. Je le récuse d'autant plus fortement qu'il n'y a rien de nouveau ? il n'y a rien de nouveau ? dans les droits et prérogatives énoncés par le projet de loi n° 99. Il n'y a rien là qui n'ait pas été dit et réitéré à satiété à de multiples reprises par tous les gouvernements du Québec avant nous, y compris, donc, des gouvernements qui n'étaient pas d'obédience souverainiste. Ces droits, ces prérogatives sont ceux qui ont été dans le passé, qui sont actuellement et qui seront bien sûr dans le futur exercés par le peuple et par l'État québécois.

Que l'opposition officielle se détrompe et surtout, si elle en est encore là, qu'elle se rassure, ces droits et prérogatives du peuple québécois et de son Parlement national, ils existent. Ils existent, ces droits-là. On les a. Ils n'ont rien de fictif, ils n'ont rien d'incertain, ils sont réels. Ce qu'il y a de nouveau dans 99 et de différent, c'est simplement que, pour la première fois, ils se trouvent réunis et formellement énoncés dans un texte législatif de l'Assemblée nationale. L'énumération de ces droits n'est pas exhaustive, mais les principaux y sont.

C'est pour ça, M. le Président, que cet argument de la judiciarisation d'une question politique est, si vous me permettez le jeu de mots, une sorte de faux procès, un argument cousu de fil blanc de la part de l'opposition. Le Parti libéral du Québec, d'un côté, déplore que le projet de loi n° 99 judiciarise, nous dit-il, une question qui n'est que politique et, de l'autre côté, nous demande d'embrasser dans sa totalité un avis de la Cour suprême qui est précisément cela, une judiciarisation, nuancée il est vrai, d'une question politique. L'opposition officielle est dans une complète confusion intellectuelle. Autrement dit, il est légitime que le gouvernement fédéral s'adressant à la Cour suprême ait, lui, voulu judiciariser une question politique, mais il n'est pas légitime, il n'est pas responsable, il n'est pas prudent que le Parlement du peuple québécois, lui, par la voix de ses représentants élus, se donne une loi réaffirmant ce qu'ont toujours été nos droits et nos pratiques. Allons donc! Allons donc!

C'est très simple, M. le Président, c'est très simple: ou bien notre peuple a des droits ou bien il n'en a pas; ou bien on croit qu'il en a ou bien on ne le croit pas. Si notre peuple a réellement des droits, si notre Parlement représente réellement notre peuple, pourquoi notre Parlement devrait-il craindre d'affirmer ses droits? À moins évidemment que l'opposition officielle ait des doutes sur la solidité des droits du peuple québécois. Auquel cas, elle est priée de nous le dire.

n(11 heures)n

Je n'étais pas ici, mais plusieurs de nos collègues étaient dans cette Chambre lorsqu'un gouvernement, libéral celui-là, a fait voter une loi ? oui, oui, c'était une loi, pas une motion, une loi ? qui s'appelait la loi 150, qui prévoyait la tenue d'un référendum sur la souveraineté du Québec, qui disait même entre quelle date et quelle date celui-ci devrait se tenir. C'est drôle, hein, c'est une loi. Et je ne me rappelle pas avoir entendu l'opposition, plutôt le Parti libéral, qui était à cette époque le gouvernement, donc l'initiateur de la loi, je ne me rappelle pas de l'avoir entendu à ce moment-là s'émouvoir du fait que l'on adoptait une loi sur une question touchant à l'avenir politique d'un peuple. Autrement dit, quand c'est le Parti libéral qui adopte de telles lois, c'est légitime; quand c'est un autre parti que le sien qui le fait, ah! là on a des problèmes de véhicule. Comprenez-vous? On pourrait se retrouver devant les tribunaux. Il y a là, M. le Président, une grave confusion intellectuelle qui n'est pas innocente.

Et puis, M. le Président, si une motion, si une déclaration, c'est aussi fort qu'une loi, pourquoi le gouvernement fédéral, lui, a décidé de procéder par loi et pas par motion? En fait, on sait ce que ça pèse, les motions, dans l'esprit du gouvernement Chrétien. On se rappellera de son insignifiante et rachitique motion sur la société distincte, qui a permis à M. Chrétien de dire qu'il avait livré la marchandise, rempli ses engagements et que dorénavant le magasin général était fermé. C'est ça, le poids que ça a, les motions, pour l'actuel gouvernement fédéral. La vérité, M. le Président, la vérité, c'est que tous ces ronds sur la glace de l'opposition officielle sont en fait une façon de tenter de masquer son impuissance, sa division et son nouveau statut maintenant pleinement assumé de satellite et de succursale du Parti libéral du Canada.

Probablement que dans quelques minutes l'opposition va s'étendre longuement sur la portée vigoureuse, tangible de la déclaration solennelle qu'elle avait proposée. Je rappellerai simplement, brièvement, M. le Président, que, tout au long des échanges qui ont eu lieu entre le gouvernement et l'opposition à ce sujet, tout au long aussi des audiences en commission parlementaire et du travail de réécriture et de bonification du projet de loi n° 99, tous les compromis ? tous les compromis ? ont été faits par le gouvernement. Il est intéressant de voir comment l'opposition officielle a vacillé tout au long des semaines lorsque le gouvernement lui a dit: Pour accepter de considérer votre déclaration, il faudrait minimalement qu'elle comporte certains ajouts.

Au début, par exemple, nous avons dit: Soyons sérieux, il faudrait minimalement qu'elle comporte, cette déclaration, une référence au fait que les Québécois forment un peuple. M. le Président, j'aimerais vraiment savoir, du côté de l'opposition officielle, si chacun de ses députés était interrogé isolément, combien d'entre eux pensent que les Québécois forment un peuple, forment une nation, et quels sont ceux qui pensent qu'au Canada il n'y a qu'une nation canadienne, les Québécois étant une grosse minorité ethnique. J'aimerais vraiment connaître le fond de la pensée de chaque député, plutôt que la ligne du parti ou les positions, honorables au demeurant, du député de Chapleau.

Nous avions aussi, au tout début, dit: Écoutez, soyons sérieux, dans votre déclaration il faudrait minimalement une affirmation forte de l'inviolabilité du territoire québécois. Il y a quelques semaines, l'opposition officielle a dit: Ah, on accepterait peut-être de considérer cela. Au début, on nous avait dit: Non, on ne peut pas mettre cette assurance; au lendemain d'un oui, c'est le trou noir, tous les points de repère ne tiennent plus.

Nous avons aussi dit: Soyons sérieux, il faudrait minimalement un rappel de la non-adhésion du Québec à la Loi constitutionnelle de 1982. Et on nous a dit: Bien, non, écoutez, le Québec n'a peut-être pas adhéré, mais elle s'applique tout de même. Nous avons dit également: Si vous y tenez, nous pourrions regarder une formulation qui ferait référence à l'avis de la Cour suprême, pour autant que cette affirmation soit balisée par la réaffirmation du droit du peuple québécois à décider de son avenir sans ingérence.

Ah, là, évidemment, l'opposition avait un problème, là, l'opposition nous disait: Ah, bien, cette Loi constitutionnelle de 1982, que nous ne reconnaissons pas, nous reconnaissons qu'elle s'applique. Ce qui, en langage codé, veut dire quoi, M. le Président? Ce qui, en langage codé, signifie que l'opposition est tout à fait pour le droit du peuple québécois à décider de son avenir, pour autant que ce droit suit les prescriptions de la formule d'amendement imposée en 1982. Autrement dit, au Parti libéral du Québec, on est pour le droit du peuple québécois à décider, mais on est aussi pour le droit de l'Île-du-Prince-Édouard à dire: Ah, non, moi, je ne suis vraiment pas d'accord, et donc ça s'arrête là.

En fait, M. le Président, ce que nous avons toujours aussi souhaité, c'est qu'il y ait, de la part de l'opposition officielle, une dénonciation forte, aussi solennelle que leur déclaration, du caractère illégitime de C-20. Non, non, on s'est contenté de dire que C-20, c'était inutile, inapproprié, on n'a jamais dit que c'était illégitime, inacceptable et odieux. Pourquoi? Pourquoi le Parti libéral n'a jamais été jusque là? Parce que le Parti libéral est divisé; il est divisé.

Pour des gens comme le député de Chapleau, dont je ne mets absolument pas en doute le fait que, dans son for intérieur, il sait que C-20 est une ignominie, combien d'autres... Ah, bien, je vais vous dire combien, je vais vous les citer. Les députés de Laurier-Dorion, de Jacques-Cartier, de Notre-Dame-de-Grâce, de Viger, de Westmount?Saint-Louis, eux ont endossé C-20, l'esprit de C-20, ce que M. Bourassa aurait appelé la «substantifique moelle» de C-20. Bien oui! Bien oui. M. le Président, écoutez ça, c'est vraiment bon, c'est fantastique.

Le député de Laurier-Dorion, l'acolyte du député de Chapleau, lui, disait...

Une voix: Le surveillant.

M. Facal: Oui, le garde-chiourme en matière constitutionnelle du Parti libéral du Québec. Le député de Chapleau, je ne le sais pas, il est peut-être soupçonné de nationalisme au sein du Parti libéral du Québec.

Une voix: Déviationnisme.

M. Facal: De déviationnisme. Alors, le député de Laurier-Dorion, lui, disait: «Certains peuvent voir une intrusion dans le fait que le Parlement décidera avant que la question ne soit adoptée à l'Assemblée nationale, mais, pour moi, ce n'est pas la fin du monde, même si ce n'est pas la meilleure chose non plus.» Quelle vigoureuse défense du peuple québécois, hein!

C'est à peu près aussi bon que ce qu'avait dit le député de Jacques-Cartier. Lui, vraiment, il était en grande forme ce jour-là, quand il a dit ? écoutez ça, M. le Président: «C'est mieux de s'entendre sur la clarté avant, car il y a en principe 23 millions de personnes qui doivent réagir par l'entremise de leurs représentants aux Communes.» Regardez bien le choix des mots, M. le Président: «C'est mieux de s'entendre sur la clarté». C'est drôle, pour s'entendre, il faut être deux, il faut négocier. Le gouvernement fédéral, il ne s'entend pas, il impose unilatéralement de nouvelles règles.

En fait, M. le Président, pour un M. Ryan, qui, lui, qualifiait C-20 de véritable, je cite, «régime de tutelle», de nombreux autres députés de l'opposition officielle sont en parfait accord avec le fait d'imposer un verrou législatif au droit des Québécois à décider librement et sans ingérence. Alors, évidemment, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, dans des régimes parlementaires comme les nôtres, quand il y a division au sein d'un parti, on se tourne vers le chef, c'est lui qui est supposé indiquer la voie à suivre. Alors, évidemment, j'ai pendant longtemps cherché à savoir quel était le fond de la pensée du chef de l'opposition. Je devais avoir, comme M. Dion me l'a dit au Mont-Tremblant, un problème de recherchiste, parce que je n'ai pas trouvé moi-même, c'est le député de Viger, l'impayable député de Viger, qui est venu à ma rescousse. Au journaliste Denis Lessard qui lui posait la même question: Qu'est-ce que le député de Sherbrooke pense de C-20? le député de Viger ? c'était vraiment une grande cuvée, celle-là ? a déclaré: «Honnêtement, je ne peux pas vous dire ce qu'il en pense, la discussion n'est pas allée jusque-là.» C'était merveilleux. Vous avez dû avoir un beau caucus après ça, hein!

Et d'ailleurs, dans un élan de franchise, le député de Viger, il a répondu à ma question. Je m'étais demandé: Pourquoi est-ce que le Parti libéral utilise un terme aussi pâlot et faiblard que «inutile» pour qualifier C-20? Vous auriez pu avoir une réponse un peu plus musclée. Pourquoi ce mot-là, «inutile», sachant évidemment l'importance du choix des mots en politique? Ah! le député de Viger, mon meilleur, qui dit que, «pour éviter des déchirements, on ne s'est pas prononcé sur C-20», se contentant de le qualifier d'«inutile» pour éviter les déchirements. Comme ça, ceux qui trouvent que c'est maladroit mais pas une mauvaise idée étaient d'accord, pouvaient être ralliés à la position de ceux qui vraiment trouvent que c'est une fort mauvaise idée, particulièrement odieuse, inutile. Je ne savais pas que nous avions un agent dans le caucus libéral. On en a un, le député de Viger. Lui, il nous dit ce qui se passe. Ils étaient divisés; pour ne pas se diviser, on a trouvé «inutile», plus petit commun dénominateur entre les nationalistes et les satellites de Stéphane Dion.

En fait, M. le Président, lors de l'étude article par article du projet de loi n° 99 ? lors de l'étude article par article, rappelez-vous ? il a fallu passer à des votes, l'opposition officielle demandait souvent le vote article par article. Alors, sans présumer de ce que sera son vote au moment de l'adoption finale, je note qu'en commission parlementaire, lors de l'étude article par article, le Parti libéral du Québec a voté contre la reconnaissance du peuple québécois. Contre. Le député de Chapleau me dit que lui est pour; peut-être, mais son parti a voté contre. Le Parti libéral du Québec a voté contre l'article explicitant la règle du 50 % plus un. Le Parti libéral du Québec a voté contre l'article réaffirmant l'intégrité territoriale du Québec. Le Parti libéral a voté contre le considérant blâmant, dénonçant la loi fédérale C-20.

En fait, M. le Président, ce n'est pas compliqué, quand on regarde comment ont voté les députés du Parti libéral, je dis que, si Stéphane Dion avait été assis là, en commission parlementaire, il aurait voté comme vous, il aurait voté comme vous. Il aurait voté contre le peuple québécois, contre le 50 % plus un, contre l'intégrité territoriale du Québec. En fait, vous vous seriez écartés de lui sur un point, il aurait voté probablement pour C-20.

n(11 h 10)n

En fait, M. le Président, quand je vois comment le Parti libéral du Québec s'enferre, laboure la mer sur toutes les questions constitutionnelles, je ne peux m'empêcher d'avoir un profond élan de sympathie pour le député de Chapleau. Je me dis à son sujet: Mais il doit bien se demander certains jours dans quelle galère il est tombé.

En fait, M. le Président, je... Ah oui! je m'étais gardé pour la fin la meilleure. À défaut d'une pensée claire de la part du chef de l'opposition, peut-être que le président du caucus, lui, aurait pu indiquer la voie. Et là j'ai trouvé ce que je cherchais. Le député de Westmount?Saint-Louis disait: C'est clair que le projet de loi C-20 n'est pas illégitime. Le fédéral peut avoir l'opinion qu'il veut à l'endroit de la clarté référendaire, cela reste un débat politique. Vous voyez, M. le Président, le président du caucus nous dit: C'est clair que le projet de loi C-20 n'est pas illégitime. Ah, mon Dieu!

Autrement dit, une loi qui, dans les faits, vise à rendre impossible la souveraineté du Québec en donnant un droit de tutelle à un Parlement au sein duquel 75 % des députés sont de l'extérieur du Québec n'est pas illégitime, nous dit-il. Une loi qui déforme grossièrement l'avis de la Cour suprême n'est pas illégitime. Une loi qui, bafouant le principe du 50 % plus un, nous dit donc que certains votes valent plus que d'autres n'est pas illégitime. Une loi fédérale qui véhicule des faussetés sur la divisibilité du territoire québécois n'est pas illégitime. Une loi qui infantilise les Québécois en disant que les 2 308 360 personnes qui ont voté oui en 1995 étaient toutes confuses n'est pas illégitime.

En fait, M. le Président, il y a autant de Québécois qui ont voté oui en 1995 qu'il n'y a d'habitants dans l'ensemble du Manitoba, la Saskatchewan, Terre-Neuve, l'Île-du-Prince-Édouard, la Nouvelle-Écosse. Tous confus! Ils ne savaient pas ce qu'ils faisaient. Et c'est pour ça qu'il était absolument urgent que C-20 vienne donner à un député fédéral de la Saskatchewan ou du Manitoba qui, lui, évidemment est plus mature que les Québécois, le droit de protéger les Québécois contre eux-mêmes. Et ça, le président du caucus du Parti libéral nous dit que ce n'est pas illégitime.

C'est drôle, M. le Président, c'est drôle, mais tous ces milliers de Canadiens qui étaient venus nous dire qu'ils nous aimaient, dans le centre-ville de Montréal, ils avaient l'air d'avoir compris l'enjeu, ça avait l'air d'être clair à ce moment-là. Je ne sais pas si vous vous rappelez, M. le Président, quelques jours avant le référendum, au moment où vraiment la panique régnait à tous les étages du Conseil privé, le premier ministre du Canada, M. Chrétien, va à la télévision, nous regarde dans le blanc des yeux et dit aux Québécois: Pensez-y avant de faire ce que vous vous apprêtez à faire. Vous vous apprêtez, disait-il, à prendre une décision définitive et irrémédiable. Je me rappelle même ses mots. M. Chrétien disait: Partir ou rester, c'est le choix que vous avez à faire. C'est drôle, ça avait l'air d'être clair à ce moment-là: partir ou rester.

n(11 h 20)n

Et puis, ça me fait tellement rire, souvent j'entends des députés du Parti libéral dire: Vous, les souverainistes, vous vous entêtez, vous vous êtes fait dire non deux fois puis vous continuez. Et là ils s'enferrent dans leur propre piège, ils disent: Deux fois déjà, les Québécois vous ont dit qu'ils choisissaient clairement le Canada. C'est drôle, lors des précédents référendums, les Québécois, disent-ils, auraient clairement choisi le Canada, et là on sent le besoin d'adopter une loi pour clarifier les choses sous prétexte que ça n'aurait pas été clair avant. Alors, c'est ça, une question pas claire peut donner un résultat clair. Ça, c'est de la belle logique!

En fait, ce que ces mêmes disent... voudraient nous dire, c'est que dorénavant les citoyens ne sont plus égaux au Québec. Bien oui! Supposons que vous fixez la barre à 66 %, mettons, ça, ça veut dire qu'il vous faut deux votes pour le oui pour égaler un vote pour le non. Ça veut dire que tous les votes n'ont pas le même poids. Moi, on m'avait dit qu'un vote fédéraliste puis un vote souverainiste dans l'urne, ça a le même poids. Non! Bien non! À 66 %, ça serait comme l'affichage, du deux pour un.

M. le Président, trouvez-moi un référendum au Canada qui se serait tenu en vertu d'une règle autre que 50 % plus un. C'est même aussi la règle qui s'est appliquée ? mais je ne vous en ferai pas la nomenclature ? lors du référendum de l'an dernier, en Australie, sur la monarchie, en Irlande du Nord, sur le processus de paix, à Porto Rico en 1998, en Nouvelle-Calédonie, aux Bermudes, et aussi lorsque ce sont les Nations unies qui elles-mêmes organisent des référendums pour superviser l'accession d'un territoire à sa souveraineté nationale. Vous connaissez les trois cas classiques depuis le début des années quatre-vingt-dix: l'Érythrée, le Timor et le Sahara, cette année ou très prochainement.

En fait, M. le Président, je termine simplement en vous disant que le serment que j'ai prêté, que nous avons tous prêté comme députés de l'Assemblée nationale va nous enjoindre dans peu de temps à nous lever et à nous porter par notre vote, par mon vote, à la défense des intérêts fondamentaux des citoyennes et des citoyens qui nous ont accordé le privilège de les représenter.

Je sais que mes collègues des banquettes ministérielles vont voter comme moi. Je crois comprendre que le député de Rivière-du-Loup et chef du parti de l'Action démocratique fera également preuve de la même solidarité. Il reste maintenant à savoir ce que feront les députés membres de l'opposition officielle. Est-ce qu'ils auront un dernier sursaut de dignité nationale? C'est ça qui est en cause. Est-ce qu'ils auront un dernier sursaut de dignité nationale? C'est ça qui est en cause.

Je conclus simplement, M. le Président, par les mêmes mots que j'avais utilisés il y a quelques mois dans mon intervention lors du débat sur l'adoption de principe. J'avais dit à l'époque que le peuple québécois existe, tout simplement, et qu'il veut par cette loi affirmer son existence et, conséquemment, qu'il entend désormais se prévaloir de tous les droits, de tous les attributs, de toutes les prérogatives que son statut de peuple lui confère. Et le projet de loi n° 99 s'inscrit dans cette démarche, ni plus ni moins.

Ce projet de loi inaugure donc une ère qui verra le Québec et le peuple qui l'habite occuper en toute amitié, en toute égalité, sans animosité ni hostilité envers qui que ce soit, la place que l'histoire réserve et doit réserver à ceux et celles qui sont conscients de leur passé, qui sont engagés dans le présent, qui sont tournés vers l'avenir et qui, de ce fait, affirment leur existence. Rien de plus et rien de moins. Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires intergouvernementales. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chapleau.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Nous n'avons pas réussi en cette Chambre, malheureusement, à nous entendre sur le moyen à prendre pour affirmer et réaffirmer le droit des Québécois de choisir leur avenir. C'est dommage. Ce n'est pas faute, pour l'opposition officielle, d'avoir cherché à obtenir le consensus en cette Assemblée sur justement la façon de reconnaître et d'affirmer le droit qu'ont les Québécois de contrôler eux-mêmes leur destin national et le droit qu'ont les Québécois de décider eux-mêmes finalement et de disposer démocratiquement de leur propre avenir constitutionnel et politique. Ce n'est pas faute, pour l'opposition officielle, d'avoir cherché à obtenir un consensus, que nous n'avons pu en obtenir un, puisqu'il est important de rappeler qu'à trois reprises en cette Chambre l'opposition officielle a soumis des motions qui n'ont pas été acceptées par le gouvernement. Et c'étaient des motions qui reconnaissaient essentiellement trois principes fondamentaux qu'il est important que je rappelle aujourd'hui.

D'abord, nous reconnaissions l'autorité et la légitimité de l'Assemblée nationale du Québec en ce qui concerne l'exercice du droit des Québécois de choisir leur avenir, et plus particulièrement en ce qui concerne, donc, les modalités de la tenue d'un référendum portant sur la sécession du Québec. Deuxièmement, dans ces motions que nous avons soumises ici, nous reconnaissions et acceptions d'emblée le principe démocratique fondamental du 50 % plus un. Et, troisièmement, nous reconnaissions également l'autorité et la légitimité du jugement de la Cour suprême, le renvoi relatif à la sécession du Québec, jugement qui a été rendu au mois d'août 1998.

À trois reprises, le gouvernement a refusé d'appuyer cette motion, ce qui fait donc que la motion n'a pu être adoptée. Ça aurait été une très belle occasion, M. le Président, d'obtenir un consensus en cette Chambre, sur la base des principes dont je viens de vous parler, un consensus portant sur le droit des Québécois de choisir leur avenir. Mais le gouvernement a refusé d'appuyer ces motions que nous lui proposions.

Alors, nous sommes revenus à la charge, M. le Président. Nous sommes revenus à la charge au mois de mai 2000 avec une déclaration solennelle qui, cette fois, était fort élaborée et reprenait les principes qui sont véhiculés par le projet de loi n° 99. Et nous espérions vraiment que le gouvernement, cette fois, approuverait notre déclaration solennelle, appuierait notre déclaration solennelle, ce qui nous permettrait d'obtenir le compromis, ici, au sein de l'Assemblée nationale, tant recherché. Mais, une fois de plus, le gouvernement a refusé d'appuyer la déclaration solennelle de l'opposition officielle.

Il y a eu des négociations qui ont porté sur cette déclaration solennelle. Il y a eu des négociations entre le gouvernement et l'opposition officielle. Et nous espérions que, sur la base de la déclaration solennelle, nous puissions en arriver à un compromis honorable qui aujourd'hui aurait pu permettre à cette Chambre finalement de s'exprimer de façon unanime en faveur de la déclaration solennelle, en faveur des principes que cette déclaration contenait, en faveur du droit des Québécois de choisir leur propre destinée. Mais le gouvernement a finalement fait en sorte que ces négociations échouent, de façon à ce qu'il puisse revenir à son projet initial, c'est-à-dire la passation du projet de loi n° 99.

J'en profite, moi aussi, M. le Président, pour tendre la main au gouvernement, et je le fais aujourd'hui in extremis, je sais très bien que nous sommes en bout de piste. J'ai tendu la main à maintes reprises au gouvernement. Je le fais à nouveau aujourd'hui afin d'éviter finalement qu'une erreur soit commise par cette Assemblée. Je tends la main au gouvernement pour que nous réussissions à nous entendre sur la base de la déclaration solennelle de l'opposition officielle, quitte à ce que cette même déclaration solennelle fasse l'objet d'un certain nombre d'amendements qui satisfassent le gouvernement du Québec actuel.

n(11 h 30)n

Bien sûr, M. le Président, pour l'opposition officielle, la loi sur la clarté du fédéral est non seulement inopportune, elle est aussi inacceptable et futile. Et ça, c'est le point de vue de l'opposition officielle et c'est le point de vue qui est partagé par tous les membres du caucus libéral. La loi sur la clarté du fédéral est inopportune, je répète, est inacceptable et futile. Bien sûr, il y a ce que nous appelons l'État du Québec. L'État du Québec existe. D'ailleurs, Jean Lesage, dès 1960, utilisait l'expression «État du Québec». Jean Lesage, qu'on ne peut certainement pas soupçonner d'avoir eu, je dirais, des préoccupations qui soient souverainistes, Jean Lesage qui était un fédéraliste, qui était un grand homme d'État, qui a été un grand Québécois, reconnaissait, lui aussi ? et, au surplus, qui était un grand libéral ? donc, d'emblée, qu'il y avait au Québec un État, l'État du Québec, et nous sommes prêts à le mentionner dans la déclaration solennelle de l'opposition officielle, si c'est ça, la volonté du gouvernement.

Bien sûr, M. le Président, qu'il y a un peuple québécois. Nous sommes prêts, ça aussi, à le mentionner dans la déclaration solennelle. Bien sûr qu'il est important que soit maintenu et que soit défendu en toutes circonstances le principe de l'intégrité territoriale du Québec. Nous sommes prêts, ça aussi, à le mettre dans la déclaration solennelle. Bien sûr, l'Assemblée nationale n'a pas adhéré à Loi constitutionnelle de 1982 et n'y adhère toujours pas. Nous sommes prêts, ça aussi, à le mettre dans la déclaration solennelle. Alors, qu'attend ce gouvernement, donc, pour entamer à nouveau des négociations avec l'opposition officielle sur la base de la déclaration solennelle, sur la base de tout ce que nous pouvons ajouter par ailleurs à la déclaration solennelle que j'avais moi-même soumise en mai 2000 à l'Assemblée nationale? Qu'attend donc le gouvernement du Québec pour rouvrir les négociations et pour que finalement l'Assemblée nationale puisse d'une seule voix réexprimer le principe même voulant que le peuple québécois ait le droit inhérent et le pouvoir souverain de décider de son propre statut politique et constitutionnel?

La réalité, M. le Président, c'est que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes est un très mauvais négociateur, et, dès le moment où ont commencé à surgir un certain nombre de problèmes lors des négociations qui ont eu cours entre le gouvernement et l'opposition officielle sur la base de la déclaration solennelle, le ministre a fermé la porte, le ministre a rompu les négociations, le ministre s'en est allé finalement en clamant partout que l'opposition officielle n'était pas capable de reconnaître qu'il y avait un État québécois, qu'il y avait un peuple québécois, que la loi sur la clarté était inacceptable, et que l'Assemblée nationale n'adhérait toujours pas à la Loi constitutionnelle de 1982, puis que le principe de l'intégrité territoriale du Québec était vraiment un principe sacré.

Le ministre Facal clamait partout que nous n'étions pas capables de reconnaître ça, après avoir, en fin de compte, négocié avec l'opposition officielle d'une façon qui était tellement molle, d'une façon qui a été tellement mollassonne que j'espère que, si un jour il fallait, par pure hypothèse, qu'il y ait une négociation qui porte sur un partenariat entre le Québec et le reste du Canada suite à un référendum qui donc soit favorable au Oui, ce ne sera pas le ministre des Affaires intergouvernementales qui ira négocier le partenariat avec le reste du Canada, parce que, dès le moment où il va y avoir un petit problème dans le dossier, je peux vous dire ce qu'il va faire, moi. Ce qu'il va faire, c'est qu'il partir, va claquer la porte, puis à ce moment-là il va conclure que les négociations sont rompues puis qu'il n'y a plus rien à faire pour faire avancer le dossier. C'est une très, très, très mauvaise attitude, et je peux vous dire que, en soi, j'estime que le ministre des Affaires intergouvernementales du Canada ne nous a pas démontré ses talents de négociateur, hein, pas du tout, dans tout le dossier qui entourait justement le projet de loi n° 99 et, au surplus, qui entourait la déclaration solennelle qui a été soumise par l'opposition officielle.

Maintenant, vous allez me dire: Est-ce dire, donc, que l'opposition officielle approuve entièrement le projet de loi n° 99, enfin approuve entièrement les principes contenus dans le projet de loi n° 99 mais ne souscrit pas à l'idée que ces principes-là soient reconnus dans une loi et préfère donc que ces principes-là soient reconnus dans une déclaration solennelle? Bien, je vais vous répondre ceci, M. le Président: nous sommes surpris de voir que, dans le projet de loi n° 99, il y a une référence au renvoi relatif à la sécession du Québec du mois d'août 1998, mais cette référence-là ne se trouve que dans le préambule du projet de loi et non pas dans le corps même du texte. Le préambule a très, très peu d'impact, comme vous le savez, et le gouvernement n'a pas eu le courage de réaffirmer l'autorité du renvoi relatif à la sécession du Québec dans le texte même du projet de loi n° 99, s'est tout simplement contenté d'y faire une allusion extrêmement générale dans le préambule du projet de loi.

Mais ce qui nous étonne davantage, M. le Président, c'est que, dans le projet de loi n° 99 ? et je pense que ça, c'est une honte pour le gouvernement actuel ? il n'y a aucune référence à l'importance qu'une question référendaire soit claire, aucune référence à la clarté de la question. Est-ce dire que le gouvernement est contre la clarté? Bien, moi, j'en suis convaincu, puisque, si ce gouvernement était pour la clarté dans le contexte d'un prochain référendum au Québec, il l'aurait écrit noir sur blanc dans le projet de loi n° 99. Il se serait engagé noir sur blanc, lors d'un prochain référendum toujours hypothétique, bien entendu, mais néanmoins possible, à poser une question claire, à tout le moins, et on n'en retrouve aucune mention, malheureusement, dans le projet de loi n° 99.

Alors, nous, dans l'opposition officielle, nous ne pouvons accepter qu'il n'y ait aucune allusion, aucune référence au fait que le gouvernement du Québec s'engage à poser une question claire dans un prochain référendum. Nous ne pouvons pas accepter ça pour la simple et bonne raison, M. le Président, que nous croyons que les Québécois et les Québécoises ont le droit ? ont le droit ? à ce que toute consultation populaire porte sur un objet précis et comporte une question claire. Mais, malheureusement, c'est ce droit-là qui est ignoré, c'est ce droit-là qui est bafoué dans la version actuelle du projet de loi n° 99. Et, ne serait-ce que pour ce motif ? mais ce n'est pas le seul ? l'opposition officielle ne peut pas appuyer le projet de loi n° 99.

Cela dit, M. le Président, le Parti libéral du Québec entend réaffirmer auprès de la population du Québec qu'il est soucieux de défendre ardemment les intérêts historiques et nouveaux des Québécois et Québécoises. En ce sens, nous entendons rappeler que nous approuvons un certain nombre de principes qui pour nous sont vraiment des principes fondamentaux pour l'ensemble de la population du Québec. Bref, nous croyons en un certain nombre de valeurs qui rejoignent essentiellement la protection de l'identité particulière et des institutions du Québec. Ainsi, nous considérons qu'il est extrêmement important que les institutions démocratiques québécoises puissent contribuer pleinement au rayonnement de la spécificité du Québec à l'intérieur de la fédération canadienne mais aussi sur le plan international.

Nous reconnaissons que les Québécois et Québécoises sont habilités à déterminer eux-mêmes leur régime politique et leur statut juridique. Nous estimons que les institutions politiques québécoises ont le droit exclusif ? je dis bien «exclusif» ? de statuer sur les modalités et conditions d'un référendum tenu en vertu de la Loi sur la consultation populaire et portant sur l'avenir politique et constitutionnel du Québec. Aucun autre Parlement ou gouvernement ? aucun autre Parlement ou gouvernement ? ne peut mettre ce droit en cause ni le restreindre.

Nous reconnaissons par ailleurs l'applicabilité et l'autorité du renvoi de la Cour suprême du Canada du mois d'août 1998, notamment en ce qui a trait au lien intrinsèque qui existe entre la légitimité démocratique et la légalité constitutionnelle. Nous reconnaissons également la valeur du renvoi de la Cour suprême du mois d'août 1998 en ce qui concerne l'exigence d'une question claire et dénuée de toute ambiguïté, et ça, pour nous, je répète, M. le Président, que c'est quelque chose qui est extrêmement, extrêmement important. Nous réitérons la règle de la majorité absolue des voix, soit la règle du 50 % plus un, en tant que principe démocratique fondamental, même dans un processus sécessionniste. Nous réitérons l'importance que soit sauvegardée l'intégrité territoriale du Québec en toutes circonstances. Nous reconnaissons par ailleurs l'autorité et la légitimité de l'Assemblée nationale du Québec pour décider seule des conditions et modalités entourant la tenue éventuelle d'un référendum québécois portant sur l'avenir du Québec.

n(11 h 40)n

Comme vous pouvez le voir, M. le Président, ce ne sont pas des petits principes que nous exprimons, ce sont des principes fondamentaux. Ce sont sans aucun doute des principes auxquels adhèrent par ailleurs les membres du parti ministériel, les députés du parti ministériel. Eh bien, ces principes que je viens d'énoncer, ces principes fondamentaux auxquels le Parti libéral du Québec et auxquels l'opposition officielle au Québec adhèrent sont tous des principes que nous retrouvons dans la déclaration solennelle que j'ai eu l'honneur de soumettre en cette Chambre en mai dernier. Alors, je pose la question: Pourquoi donc le gouvernement n'approuve-t-il pas la déclaration solennelle en question, puisque nous nous entendons sur les principes? Nous nous entendons sur les principes! Nous sommes capables de faire consensus sur les principes. Mais, pour faire consensus sur les principes, encore faudrait-il qu'il y ait de la bonne volonté de la part du parti ministériel, encore faudrait-il que nous négociions un certain nombre d'amendements à la déclaration solennelle, de bonne foi, de part et d'autre, encore faudrait-il que nous acceptions donc que le véhicule par lequel nous exprimerons le droit des Québécois de choisir démocratiquement leur avenir collectif, c'est une déclaration solennelle et non pas une loi.

Alors, me direz-vous, pourquoi donc une déclaration solennelle serait-elle préférable à une loi pour exprimer le principe voulant que le peuple québécois ait le droit de disposer démocratiquement lui-même de son avenir constitutionnel et politique? Bien, M. le Président, la raison est très simple, très simple à comprendre, c'est qu'une loi, c'est attaquable devant les tribunaux; une déclaration solennelle, ça ne l'est pas. Voilà ce qui fait la différence entre la position du gouvernement du Québec actuel et la position de l'opposition officielle, et c'est toute une différence. Nous ne nous entendons pas sur le véhicule, nous ne nous entendons pas sur le moyen à prendre pour affirmer et réaffirmer des principes sur lesquels, par contre, nous nous entendons tous. Mais ce problème qui est celui que pose le choix du véhicule, ce problème qui est celui relié au moyen à prendre pour affirmer les principes auxquels nous croyons est un problème majeur et c'est un fossé, un fossé quand même extrêmement creux, un fossé extrêmement profond qui sépare à l'heure actuelle le parti ministériel de l'opposition officielle.

Vous savez, M. le Président, ce qui est ironique, c'est qu'en adoptant le projet de loi n° 99 le gouvernement du Québec va plonger des droits qui sont essentiellement des droits politiques, va plonger, donc, des droits politiques dans l'arène juridique et va livrer ces mêmes droits en pâture à ceux qui veulent et qui voudront en contester la légalité et la constitutionnalité jusqu'en Cour suprême du Canada. En adoptant une loi plutôt qu'une déclaration solennelle, le gouvernement du Québec risque de compromettre notre avenir, risque de mettre les droits des Québécois, les droits fondamentaux des Québécois et Québécoises en péril, risque de fragiliser et d'affaiblir ces droits que le gouvernement entend affirmer avec force, ces droits que l'opposition officielle accepte d'emblée, et nous ne pouvons pas souscrire à une démarche d'affaiblissement du Québec, nous ne pouvons pas souscrire à une démarche qui vise essentiellement à compromettre l'avenir des Québécois et des Québécoises, nous ne pouvons pas souscrire à une démarche qui risque éventuellement de mettre en péril les droits fondamentaux des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, nous ne devons pas ? et je lance un appel au gouvernement, aujourd'hui; je l'ai fait à maintes reprises, mais en vain jusqu'à présent; je le fais à nouveau aujourd'hui ? judiciariser une question qui est purement politique et nous ne devons pas adopter un projet de loi qui sera éventuellement attaquable devant les tribunaux. Le projet de loi n° 99 a le défaut majeur de judiciariser, c'est-à-dire de porter dans l'arène judiciaire un certain nombre de questions qui sont mieux servies lorsqu'elles sont énoncées par le Parlement même et lorsqu'elles sont énoncées dans l'arène politique, et c'est pourquoi nous privilégions fortement une déclaration solennelle pour réaffirmer le droit des Québécois et des Québécoises de choisir eux-mêmes leur avenir, de choisir eux-mêmes leur propre destinée collective.

Alors, vous allez me dire, M. le Président, dans un premier temps: Mais y a-t-il des gens qui donc cherchent à contester la légalité du projet de loi n° 99? Lorsque ce projet de loi va être en vigueur, lorsque ce projet de loi va être adopté, comme vraisemblablement il le sera, étant donné la majorité dont dispose le gouvernement en Chambre, y a-t-il des gens qui ont l'intention d'attaquer devant les tribunaux le projet de loi n° 99? Bien, je peux vous dire que oui parce que nous savons déjà que les groupes autochtones, les nations autochtones du Québec ont l'intention ? elles l'ont dit en commission parlementaire, elles l'ont répété sur la place publique, elles l'ont dit à maintes reprises ? de contester devant les tribunaux le projet de loi n° 99. C'est la même chose pour Alliance Québec qui, en commission parlementaire, nous a dit qu'il avait l'intention... Donc, cet organisme-là nous a dit qu'il avait l'intention, dès l'adoption du projet de loi n° 99, de le contester devant les tribunaux.

Ce qui est intéressant, M. le Président, c'est de constater qu'il n'y a pas rien qu'Alliance Québec et qu'il n'y a pas rien que les autochtones ? et, quand je parle des autochtones, je pense aux Cris en particulier; non seulement à eux, mais je pense aux Cris en particulier ? qui ont découvert que le projet de loi n° 99 comportait des vices qui le rendaient inconstitutionnel, comportait des dispositions qui, en soi, étaient a priori inconstitutionnelles et étaient a priori illégales. Il n'y a pas rien que les autochtones et Alliance Québec, il y a les souverainistes aussi qui l'ont découvert. Je vais vous citer ici un article de M. Denis Lessard, journaliste, dans le journal La Presse du 28 mars 2000. Écoutez bien, parce que c'est important. Je cite donc au texte: «Déjà, Alliance Québec a annoncé que, dès l'adoption du projet de Québec, il serait contesté en cour. Le projet de loi n° 99 est très vulnérable devant les tribunaux, convient-on rapidement du côté souverainiste. Il est plein de choses correctes politiquement mais qui, sous l'angle juridique, s'appuient difficilement sur la Constitution actuelle.» Fin de la citation.

Ça veut dire quoi? Et là on parlait du 28 mars 2000. Ça veut dire qu'il y a des gens, du côté souverainiste, qui savent très bien qu'il y a, dans le projet de loi n° 99, des mesures qui sont inconstitutionnelles, des mesures qui risquent d'être invalidées par les tribunaux éventuellement, lorsque les premières poursuites judiciaires, donc, amèneront le tout dans l'arène judiciaire, devant les tribunaux, des dispositions, donc, qui risquent d'être invalidées, des dispositions qui risquent d'être déclarées inconstitutionnelles. Ça va être très humiliant pour l'ensemble des Québécois, j'en ai bien peur. Ça va, je répète, fragiliser ces droits-là mêmes que nous voulons exprimer et réexprimer haut et fort dans cette Chambre.

n(11 h 50)n

Mais ça fait rire le ministre, ça fait rire pourtant le ministre des Affaires internationales qui ne tient pas compte, mais là pas du tout, des nombreux avertissements qui lui sont servis, y compris de la part des souverainistes, quant au caractère illégal et quant au caractère inconstitutionnel d'un certain nombre de dispositions contenues dans le projet de loi n° 99.

Vous allez me dire, au surplus, M. le Président: Oui, mais une déclaration solennelle, est-ce le bon moyen pour affirmer des droits qui sont aussi fondamentaux que ceux qui sont actuellement en cause? Bien, je vais vous dire que oui parce que c'est par une déclaration solennelle qu'en 1985 l'Assemblée nationale a reconnu les droits des nations autochtones au Québec, c'est par une déclaration solennelle qu'en 1986 l'Assemblée nationale a reconnu, donc, un certain nombre de principes relatifs aux relations interethniques et interraciales au Québec et c'est par une motion et non pas une loi ? ça, c'est important, c'est par une motion et non pas une loi ? qu'en 1981 l'Assemblée nationale s'est opposée au rapatriement de la Constitution. Ce n'est pas rien, ça. On n'a pas jugé, à l'époque, qu'il fallait une loi pour s'opposer au rapatriement qui pourtant était effectué par une loi. On n'a pas dit à l'époque: Loi pour loi. Ce qu'on a fait tout simplement, c'est qu'on a utilisé une motion, dont personne ne remet en cause d'ailleurs la très grande autorité, une motion qui a été adoptée par cette Assemblée et qui est encore en vigueur aujourd'hui, qui n'a jamais été finalement révisée, ou qui n'a jamais été corrigée, ou qui n'a jamais été abolie ou abrogée. Donc, c'est par une motion que, en 1981, le Québec s'est opposé à l'adoption d'une loi comportant le rapatriement de la Constitution canadienne, cette loi-là étant la Loi constitutionnelle de 1982.

Alors, vous allez me dire, M. le Président, que nous aurions dû faire bien attention, de la part du côté ministériel, avant d'aller de l'avant avec le projet de loi n° 99, on aurait dû y penser à maintes reprises et opter plutôt pour la déclaration solennelle de l'opposition officielle, et, bien entendu, ç'aurait évité que, éventuellement, on se retrouve devant les tribunaux, ç'aurait évité des jugements d'inconstitutionnalité. Malheureusement, les jugements d'inconstitutionnalité, ce n'est pas moi qui les souhaite, je ne les souhaite pas. Malheureusement, il faut prévoir qu'il puisse y en avoir.

Je vais vous citer ici un extrait d'un article de Robert Dutrisac du 25 avril 2000, donc un article qui a paru dans le journal Le Devoir où M. Dutrisac nous dit ceci, et vous allez voir, M. le Président, que c'est d'une très, très grande importance. Je cite: «Que ce soit dans l'ancienne ou la nouvelle mouture, le projet de loi n° 99 reprend les grands principes politiques développés au cours des 40 dernières années, notamment, qui ont forgé le Québec moderne. Mais, alors que Joseph Facal soutient que l'avenir du peuple québécois est une affaire strictement politique, le projet de loi n° 99, paradoxalement, plonge ces droits politiques fondamentaux dans l'arène juridique, les livrant en pâture à ceux qui veulent en contester la validité devant la Cour suprême.»

Et Robert Dutrisac continue, et là vous allez voir, M. le Président, que ça va devenir d'un intérêt tout à fait particulier pour les membres de cette Assemblée et pour l'ensemble de la politique québécoise. Je cite: «Le constitutionnaliste Henri Brun a proposé que la riposte du gouvernement au projet de loi fédéral C-20 soit bien différente du projet de loi n° 99. À ses yeux, le projet de loi n° 99 prête flanc à une contestation juridique en règle. Il aurait été préférable, selon lui, que le projet de loi québécois se rive davantage à C-20, le déboulonne en se collant à l'avis de la Cour suprême sur la sécession, une entreprise relativement facile, inattaquable par les Guy Bertrand et Alliance Québec de ce monde.» Fin de la citation.

Ça veut dire quoi? Ça veut dire que le ministre sait pertinemment et qu'il savait même avant le 25 avril 2000 qu'il y a des dispositions du projet de loi n° 99 qui sont inconstitutionnelles. Le constitutionnaliste Henri Brun d'ailleurs le lui a souligné, mais le ministre n'en tient pas compte, M. le Président. C'est une attitude qui est tout à fait répréhensible, c'est une attitude qui est tout à fait risquée pour l'avenir du Québec. Le ministre va devoir en porter l'entière responsabilité. Le gouvernement du Québec actuel va devoir subir l'odieux de la judiciarisation de principes qui sont purement politiques, et nous prévenons aujourd'hui le gouvernement ? et ça va faire partie, bien entendu, des procès-verbaux de cette Chambre, ça va faire partie des registres de cette Chambre ? qu'il subira l'odieux de la judiciarisation de droits qui non seulement risquent d'être contestés devant les tribunaux, mais qui, au surplus, comme l'a dit le constitutionnaliste Henri Brun et comme le croient un bon nombre de souverainistes, comme l'a affirmé M. Denis Lessard le 28 mars 2000, risquent donc de contenir un bon nombre de dispositions qui sont tout à fait inconstitutionnelles.

M. le Président, laissez-moi vous dire que le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes se fourvoie en insistant comme il le fait pour adopter le projet de loi n° 99. Il prend des risques, le ministre prend des risques inutiles avec notre avenir. Le ministre s'entête à mettre nos droits en péril, et cela, l'opposition officielle doit le dénoncer, et à cela l'opposition officielle ne saurait d'aucune façon souscrire ou être complice. C'est la raison pour laquelle nous entendons nous opposer à l'adoption du projet de loi n° 99.

Alors, me direz-vous, M. le Président, si le ministre sait qu'il y a des dispositions du projet de loi n° 99 qui sont inconstitutionnelles, pourquoi persiste-t-il dans sa démarche visant à faire adopter ce projet de loi? N'y a-t-il pas là quelque chose de la part du gouvernement qui est suicidaire? N'y a-t-il pas là quelque chose qui est étonnamment risqué de la part d'un gouvernement qui, en fin de compte, prétend être le défenseur exclusif ? prétend à tort, devrais-je dire, être le défenseur exclusif ? des intérêts des Québécois et des Québécoises? Eh bien, je vais vous expliquer, moi, pourquoi le ministre insiste encore pour faire passer le projet de loi n° 99, bien qu'il sache que ce projet de loi là est en partie inconstitutionnel. La réponse nous a été donnée par M. Michel David dans un article du journal Le Soleil du 8 juin 2000. Dans cet article, M. David dit ceci, et je cite: «Le recours aux tribunaux pourrait très bien faire partie de ces moyens. Ainsi, en insistant pour répliquer par un projet de loi de son cru au bill C-20 sur la clarté référendaire, malgré l'avis de plusieurs juristes ? malgré l'avis de plusieurs juristes ? le gouvernement a sciemment ouvert la porte à une nouvelle contestation du droit à l'autodétermination des Québécois, ce qui pourrait avoir pour effet de stimuler la ferveur nationaliste.»

Alors, on comprend, M. le Président, pourquoi le ministre insiste pour faire passer le projet de loi n° 99. C'est que le ministre espère que des parties de ce projet de loi là seront éventuellement déclarées inconstitutionnelles par les tribunaux parce que, pour lui, ça va devenir un moyen finalement de mousser la ferveur nationaliste au Québec, ce qui, espère-t-il, va donc aider la cause de la stratégie souverainiste du gouvernement du Québec actuel. Encore une fois, nous ne pouvons souscrire à une telle démarche manichéenne, nous ne pouvons souscrire finalement à une telle démarche qui est tout à fait irresponsable et qui, me semble-t-il, est tout à fait inacceptable.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous pourrez poursuivre au retour.

M. Pelletier (Chapleau): Parfait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous avez encore 25 minutes auxquelles vous avez droit pour votre intervention. Alors, étant donné qu'il est midi, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

 

(Reprise à 14 h 3)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.

Présence de l'ambassadeur
de la République turque, M. Erhan Ögüt

Alors, avant de débuter la séance, j'ai le plaisir de souligner la présence, dans nos tribunes, de l'ambassadeur de la République turque, Son Excellence M. Erhan Ögüt.

Affaires courantes

Alors, nous débutons les affaires courantes. Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.

Dépôt de documents

Au dépôt de documents, d'abord, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Rapports sur la procédure d'examen
des plaintes des régies régionales
du Bas-Saint-Laurent et de Lanaudière

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1999-2000 des régies régionales de la santé et des services sociaux ? sur l'examen des plaintes ? du Bas-Saint-Laurent et de Lanaudière.

Le Président: Alors, ces deux documents sont déposés. Mme la ministre des Relations internationales et ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française.

Rapports annuels du Conseil de la langue
française, de l'Office de la langue française
et du ministère des Relations internationales

Mme Beaudoin: M. le Président, je dépose les rapports annuels 1999-2000 suivants: le Conseil de la langue française, l'Office de la langue française et le ministère des Relations internationales.

Le Président: Bien. Alors, ces documents sont aussi déposés. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.

Rapport annuel de la Société
Innovatech Régions ressources

M. Julien: Alors, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1999-2000 de la Société Innovatech Régions ressources.

Le Président: Alors, ce document est aussi déposé. M. le leader du gouvernement.

Réponses à des questions inscrites au feuilleton

M. Brassard: M. le Président, je dépose la réponse n° 28 inscrite au feuilleton du 16 juin 2000 par le député de Nelligan et la réponse n° 35 inscrite au feuilleton du 13 novembre 2000 par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Le Président: Alors, ces deux réponses sont aussi déposées. Pour ma part, j'ai reçu dans les délais prescrits préavis d'une motion qui va être dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie de ce préavis.

Alors, il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions ni de pétitions aujourd'hui.

Je vous avise qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de censure de M. le député de Châteauguay débattue jeudi dernier, le 16 novembre.

Décision du président à la suite de demandes
de directive du leader de l'opposition
sur la gestion du temps lors de la période
de questions et de réponses orales

Et, avant d'aborder la période de questions et de réponses orales aujourd'hui, je vais rendre une directive au sujet de la gestion de la période de questions et de réponses orales. Alors, c'est une décision qui n'est pas trop longue, mais qui a quelques pages néanmoins. Alors, je vous demanderais votre indulgence une fois de plus. Alors, je vois, aux signes approbateurs du premier ministre et du chef de l'opposition officielle, que j'aurai cette indulgence. Je vous remercie.

Alors, le leader...

Une voix: ...

Le Président: Non, vous n'avez pas le choix. Alors, le leader de l'opposition officielle m'a adressé deux demandes à ce sujet qui portent essentiellement sur les critères qui guident la présidence eu égard à la répartition des questions. Alors, je profiterai de l'occasion pour traiter également de la durée des questions et des réponses ainsi que du rang des questions posées par les députés indépendants ou ministériels.

Tout d'abord, il importe de rappeler de façon générale qu'il incombe à la présidence de diriger la période des questions. Toutefois, dans l'exercice de cette responsabilité, il y a des critères à observer, certains sont prévus expressément au règlement, alors que d'autres ont été élaborés par la jurisprudence parlementaire et la pratique.

Ces critères sont bien résumés d'abord dans une décision rendue par le président Jean-Pierre Saintonge, le 12 décembre 1989, et j'en rappelle aujourd'hui quelques-uns. D'abord, tous les députés peuvent poser des questions, y compris les députés ministériels. La période des questions est principalement dévolue à l'opposition dans son ensemble, non seulement à l'opposition officielle.

La reconnaissance d'un parti comme groupe parlementaire constitue un principe qui doit être conjugué aux deux premiers et ces principes sont complétés par des facteurs laissés à l'appréciation du président, comme le rôle de premier plan reconnu à l'opposition officielle lors des contrôles parlementaires et la composition également de l'assemblée dans une législature.

En ce qui a trait à la répartition des questions, la présidence s'est toujours refusée à définir péremptoirement des règles très rigides. La présidence s'est plutôt donné, en ces matières, des guides. C'est ainsi que mon prédécesseur, le député de Portneuf, déposait à l'Assemblée, le 21 juin 1995, un document concernant l'attribution et le rang des questions principales pour la Trente-cinquième Législature. Comme il l'a mentionné au moment du dépôt, il s'agit de balises qui servent à la présidence et qui sont basées sur des principes qui ont été observés au cours des précédentes législatures.

Au chapitre de la répartition des questions principales, ce document prévoyait au plus une question par trois séances pour les députés indépendants et un maximum de deux questions par trois séances pour les députés ministériels. Quant au rang des questions principales, la pratique observée au cours des dernières législatures est la suivante. Lorsqu'un député indépendant a droit à une question principale, ce n'est pas avant la quatrième qu'il est reconnu par la présidence. Lorsqu'un député ministériel veut poser une question, ce n'est pas avant la cinquième que le droit de parole lui est accordé. Dans le cas où la quatrième question a été accordée à un député indépendant, ce n'est pas avant la sixième question qu'un député ministériel peut intervenir. Toutes les autres questions bien sûr sont accordées aux députés de l'opposition officielle.

Il découle de ce qui précède qu'une seule question principale peut être accordée à un député indépendant ou à un député ministériel au cours d'une même séance. Il est toutefois possible qu'un député indépendant et qu'un député ministériel posent chacun une question durant la même période de questions. Il faut en convenir, cette situation arrive néanmoins très peu souvent en pratique. Et, dans ces cas, la présidence doit évaluer s'il est pertinent de permettre deux questions principales de la part de députés qui ne sont pas membres de l'opposition officielle.

n(14 h 10)n

Je vous signale que ces lignes directrices portant sur la répartition et le rang des questions principales sont celles dont s'inspire encore la présidence dans la gestion de la période de questions. Je souligne également que, lors d'une réunion que j'ai tenue le 18 mars 1999 avec les leaders parlementaires actuels concernant la gestion de la période de questions pour la Trente-sixième Législature, il avait été convenu que la pratique qui concerne l'octroi d'une question principale à toutes les trois séances au député indépendant pouvait encore servir de guide à la présidence, sans toutefois en faire une règle absolue.

Depuis le début de la Législature, il ressort des statistiques actualisées le 16 novembre dernier que les députés ministériels ont posé une question principale par 7,5 séances, ce qui est loin des deux questions à toutes les trois séances auxquelles ils auraient en principe droit selon les critères précités. Quant au député indépendant, il s'est vu accorder une question à toutes les 2,8 séances. Cela respecte sensiblement le ratio d'une question par trois séances. En ce qui concerne les députés de l'opposition officielle, ils ont posé en moyenne huit questions principales par séance.

En regard des questions complémentaires, l'article 78 du règlement précise qu'il appartient au président d'en déterminer le nombre. À cet égard, je préfère ne pas être limitatif, car je considère qu'il appartient aux députés et au groupe parlementaire de l'opposition de choisir l'importance qu'il faut accorder aux différents sujets. Ma seule règle de conduite est de permettre au député indépendant et aux députés ministériels d'exercer leur droit de participer au questionnement du gouvernement, qui est l'un des plus importants et des plus visibles exercice de contrôle parlementaire du pouvoir exécutif exercé par certains membres de l'Assemblée. Quant aux statistiques, depuis le début de la Législature, la présidence a accordé en moyenne 1,3 question complémentaire par question principale.

Relativement au temps des questions et des réponses, le document déposé par mon prédécesseur, auquel je faisais précédemment référence, prévoyait également des balises. Lors de la réunion du 18 mars 1999 avec les leaders, il a été convenu que les temps que l'on y retrouve seraient ceux qui pourraient toujours guider la présidence. Cependant, il a été aussi convenu que la présidence gardait toute la possibilité d'analyser la particularité de chaque situation. Et je l'avoue sans détour, c'est sur cet aspect de la gestion de la période de questions que j'ai exercé mon rôle avec le plus de latitude, mais toujours avec le même souci d'équité.

Je ne gère pas, de façon rigide et dogmatique, la durée des questions et des réponses. Dans certains cas, en tenant compte de l'actualité politique ou de la nature du sujet, je peux être plus ou moins large. Je suis, incidemment en cette matière, très tolérant, surtout lorsqu'il s'agit d'un échange entre le chef de l'opposition officielle et le premier ministre.

Par ailleurs, selon un calcul du temps consacré à chaque groupe parlementaire et au député indépendant, nous constatons que, depuis le commencement de la législature actuelle, 93 % du temps utilisé lors de la période de questions a été occupé par des échanges initiés par des députés de l'opposition officielle, alors que 4,7 % et 1,4 % des échanges émanent respectivement du député indépendant de Rivière-du-Loup et des députés ministériels.

Ces statistiques coïncident presque parfaitement avec celles qui prévalaient au cours des deux dernières législatures. Elles établissent, sans l'ombre d'un doute, que l'opposition officielle jouit bien de la place prépondérante qui doit être la sienne. Donc, depuis que j'occupe cette fonction, tout en suivant certaines balises, j'ai voulu éviter de créer un carcan qui cadre mal avec la nature même de la période de questions, qui doit être la plus dynamique possible.

C'est d'ailleurs pourquoi je préfère, le plus possible, signaler moi-même les manquements à nos règles plutôt que de laisser les leaders parlementaires soulever de nombreuses questions de règlement et ainsi gruger une partie importante du temps alloué au débat de procédure. Cette pratique fait en sorte d'ailleurs qu'en moyenne nous utilisons maintenant 82 % du temps pour les échanges sur les contenus, et même parfois nous atteignons, comme jeudi dernier, 90 % du temps sur les discussions sur les contenus plutôt que sur les questions de procédure.

À cet égard, je tiens à rappeler que la présidence tend à sévir avec à-propos, pondération et équilibre; tout cela, dans la mesure du possible, en tenant compte des contextes souvent très variables, sans compter le fait que le député investi de la responsabilité présidentielle ne jouit pas du don d'infaillibilité. Il y a donc parfois des erreurs d'appréciation et de réaction. Mais l'important, c'est de savoir, en définitive, que la présidence agit toujours avec la neutralité et avec la conviction que le Parlement doit être à la fois efficace, respectable et respecté. Alors, j'espère que cela convient aux uns et aux autres.

Questions et réponses orales

Si cela ne suscite aucune interrogation, nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales pour aujourd'hui, et je cède la parole, pour une première intervention, au chef de l'opposition officielle.

M. le chef de l'opposition officielle, en question principale.

Déclarations de membres du gouvernement
concernant les fusions municipales
et la campagne électorale fédérale

M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. La partie concernant le chef de l'opposition officielle puis le premier ministre nous convient parfaitement. Pour le reste, je laisserai le soin à vos officiers parlementaires de commenter.

M. le Président, nous avons pris connaissance, depuis les derniers jours, de déclarations faites du côté ministériel qui manifestent un degré d'intolérance inacceptable au Québec. C'est d'autant plus navrant, M. le Président, que jeudi dernier, il y a environ cinq jours, à l'Assemblée nationale, le gouvernement présentait une motion pour la Journée internationale de la tolérance. Alors, la contradiction n'est pas à peu près.

Cela étant dit, M. le Président, dans la même lignée, puisque ça semble être un état d'esprit du côté du gouvernement, la ministre des Affaires municipales a donné une entrevue au journal Le Devoir, qui est titrée de la façon suivante: C'est la faute aux maires! Dans l'article en question, on dit ceci: «Les maires de banlieues ont creusé leur propre tombe. S'ils avaient été un tant soit peu coopératifs, a indiqué la ministre Louise Harel en entrevue hier, les arrondissements de la mégaville de Montréal auraient pu hériter de pouvoirs accrus et d'une plus grande autonomie.»

Alors, ma question est au premier ministre, M. le Président: À défaut d'avoir rendues publiques des études, à défaut d'avoir donné des raisons justement pour faire des fusions forcées, à défaut d'avoir un mandat de la part de la population pour le faire, à défaut de vouloir consulter la population, est-ce qu'on doit comprendre que la loi n° 170 et la politique de fusions forcées de son gouvernement sont issues d'un sentiment de vengeance envers les élus municipaux du Québec?

Le Président: Bien. M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, avant d'aller plus loin, je voudrais relever une expression qui est apparue dans le préambule du chef de l'opposition officielle. Il a parlé de déclarations de la part du gouvernement, qui manifesteraient de l'intolérance. Alors, je voudrais être certain de bien comprendre de quelles déclarations il s'agit. Bon. Alors, s'agirait-il des commentaires qui ont été faits sur le bilan du premier ministre du Canada? J'imagine que c'est ça qui fait l'objet du reproche.

M. le Président, je voudrais dire à ce sujet que n'importe qui, ou à peu près, qui jette un coup d'oeil sur le bilan politique de M. Jean Chrétien ne peut faire autrement que de constater qu'il s'est opposé constamment aux intérêts profonds du Québec et que nous l'avons toujours trouvé sur le chemin du Québec quand le Québec a voulu aller de l'avant.

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: Et, quand je dis «n'importe qui», j'inclus évidemment le chef de l'opposition officielle qui lui-même a déclaré déjà, au sujet du premier ministre Jean Chrétien, que c'était «a yesterday's man». C'était en 1993 qu'il disait ça, dans le Globe and Mail, M. le Président. Il a également déclaré, en 1997, au Devoir, le 21 février ? et j'appuie ce qu'il dit, là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: ...je vais citer une déclaration avec laquelle je suis tout à fait d'accord, M. le Président, j'aimerais la faire mienne en même temps ? et je cite: «Celui qui a toujours voulu contenir, retenir, réduire l'élan des Québécois demande maintenant de se rallier derrière lui pour qu'on puisse ensemble reculer encore plus vite.» Le chef de l'opposition officielle.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le premier ministre, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Bouchard: M. le Président, je sais et je conçois, et c'est ce à quoi nous nous astreignons, de ne pas attaquer l'homme, la personne mais le dirigeant politique, M. le Président, sa carrière politique...

Une voix: Toute sa carrière politique.

M. Bouchard: ...son action politique. Et je citerai encore une fois ? je ne suis, de mémoire, jamais allé aussi loin ? le chef de l'opposition, qui, dans La Presse, du 11 février 1997, accusait M. Jean Chrétien de trahison par rapport à l'accord du lac Meech en particulier.

Des voix: Oh!

Une voix: Trahison!

M. Bouchard: Alors, ça me fait conclure, M. le Président, avec le chef de l'opposition officielle qui déclarait cela au Soleil, le 11 février 1997, qu'«être un allié de Jean Chrétien au Québec est une job risquée.» Fin de la citation.

Une voix: Voilà!

Des voix: Bravo!

n(14 h 20)n

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, j'ai eu l'occasion, justement, d'être actif au palier fédéral ? d'ailleurs, avec celui qui est premier ministre aujourd'hui ? et je pense ne pas avoir rencontré quelqu'un qui, au niveau fédéral ou ailleurs, a fait une déclaration similaire à celle de son vice-premier ministre, qui va dans le même sens que la déclaration que ce premier ministre a faite pendant la campagne de 1998 alors qu'il me reprochait de ne pas aimer le Québec, hein? Mais, à ce moment-là, on pensait peut-être que c'était la fin puis que la leçon avait été comprise, sauf que son vice-premier ministre disait qu'il fallait haïr le Québec pour voter pour quelqu'un. Si le premier ministre est d'accord avec les paroles de son vice-premier ministre qui est assis à côté de lui, qu'il se lève donc, aujourd'hui, en Chambre, et qu'il nous dise qu'il est d'accord avec ce que son vice-premier ministre a dit.

Des voix: Oh!

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

Des voix: ...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: C'est difficile d'aller plus loin que de traiter quelqu'un de traître, car la trahison, c'est la traîtrise et c'est le fait des traîtres. Évidemment, je n'ai pas fait ça avec le premier ministre du Canada. Je trouve sa carrière odieuse du point de vue québécois, je le dis et je le redis. Et, dans cette phrase qui est citée, ce que le chef de l'opposition ne cite pas, mais que plusieurs journaux avaient cité, la Gazette, par exemple, j'avais très bien dit, avant de prononcer la phrase fatidique, qu'il fallait la prendre comme une figure de style dans un contexte où je venais de rappeler toutes ses gaffes et sous l'angle humoristique. J'ai pensé que, prenant cette précaution oratoire de dire à Jean Chrétien d'avance que c'était une farce, il la comprendrait.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Erreur.

M. Landry: Erreur, il l'a prise au premier degré. Alors, je vais la répéter d'une façon plus positive: Pour l'amour du Québec et pour l'amour du Canada, ne votons pas pour Jean Chrétien, il est néfaste pour l'un comme pour l'autre. Et c'est l'histoire de plus de 30 ans de vie politique. C'était un faucon, un «hawk», quand il a été question d'arrêter 500 innocents au Québec en 1970, dont le doux poète Gérald Godin et sa compagne, la chanteuse Pauline Julien. C'en était un autre... Les minutes du cabinet fédéral ? il a été là assez longtemps ? sont rendues publiques, allez vérifier quand il s'agissait de déployer l'armée sur le territoire québécois pour influencer les populations, particulièrement les gens les plus vulnérables. Il a saboté l'accord du lac Meech, il a changé de façon unilatérale la Constitution du Canada. Alors, si j'avais été mieux inspiré, j'aurais peut-être, oui, fait comme le chef de l'opposition, employé le mot «trahison».

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, on connaît bien la feuille de route du vice-premier ministre, comme on connaît la déclaration de son ancien chef, M. Parizeau, le soir du référendum, comme on connaît bien la déclaration et l'invective qu'il a réservées à une citoyenne du Québec le soir du référendum, on se rappelle très bien. Alors, sur ce plan-là, il faut donner une chose au vice-premier ministre: il a été constant.

Mais, M. le Président, ma question, puisqu'il s'agit de ses alliés, au premier ministre est la suivante: Est-ce qu'il est d'accord avec la déclaration d'un citoyen du Québec qui disait ceci: «Le gouvernement du Québec aurait-il pu procéder autrement dans ce dossier municipal? Silence, dit le citoyen en question, ou ledit... C'est évident. Mario Laframboise se retient à deux mains pour ne pas répondre. J'ai une position, mais je ne peux pas en parler à ce moment-ci, laisse-t-il tomber. Pour lui, une chose est sûre: le gouvernement du Québec va s'engager à ne plus procéder à des réformes municipales de cette ampleur, tout comme à d'importants délestages financiers, sans consulter les citoyens.»?

Il continue dans le même article ? c'est publié samedi dernier ? en disant ceci: «Le gouvernement du Québec est sur le terrain glissant des fusions municipales.» Il dit: «Ça me fait suer que le gouvernement dise que les municipalités sont des créatures du gouvernement du Québec. Un jour, il faudra que les municipalités soient plus autonomes.» Ça, c'est un candidat du Bloc québécois anciennement président de l'Union des municipalités du Québec, M. le Président, qui déclare cela au sujet des fusions forcées pour lesquelles son gouvernement n'a pas de mandat.

Est-ce que c'est pour ça que sa ministre des Affaires municipales dit que c'est une vengeance, la loi n° 170? Est-ce que ça explique le mépris qu'a ce gouvernement envers les citoyens du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, nous allons répondre à la question, mais je voudrais... Et, si on me permet de revenir un instant sur l'avant-dernier échange avec le chef de l'opposition, je ne voudrais pas qu'il y ait de façon définitive, sans nuance et sans les propos que je vais tenir, la transcription de la question tout à l'heure du chef de l'opposition qui citait un propos de la campagne électorale de 1998 où en effet, dans une phrase, j'ai dit que je ne croyais pas que le chef de l'opposition aimait le Québec.

Cette phrase, M. le Président, je l'ai regrettée aussitôt après l'avoir prononcée. Je l'ai dit, d'ailleurs, je m'en suis expliqué publiquement et je voudrais que tout le monde sache, indépendamment de nos différends politiques, que j'ai le plus grand respect pour le dévouement du chef de l'opposition à l'endroit du Québec et je voudrais qu'on cesse de revenir sur cette question qui, pour moi, est fermée.

Ceci étant dit, M. le Président, j'ai noté qu'en fin de semaine le chef de l'opposition a opéré la confusion de l'élection fédérale avec la question municipale qui nous préoccupe présentement au Québec. Et le chef de l'opposition a invité les Québécois et les Québécoises à aller voter au fédéral avec cette question en tête. Moi, je dirai plutôt aux Québécoises et aux Québécois d'aller voter, et d'aller voter lundi prochain en se prononçant sur ce qu'ils pensent du bilan politique de M. Jean Chrétien au Québec.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, le premier ministre a agi de façon honorable aujourd'hui en se levant à l'Assemblée nationale pour nous dire qu'il regrettait les propos qu'il a prononcés pendant la campagne électorale de 1998, et j'accepte ce qu'il dit.

Dans le même esprit, il a également le devoir, comme premier ministre du Québec, aujourd'hui, puisqu'il accepte de reconnaître le tort de 1998 et le corrige ? et on doit accepter, et j'accepte ce qu'il dit ? il a le même devoir aujourd'hui envers tous les citoyens du Québec, en particulier envers son propre caucus. Son vice-premier ministre a fait une déclaration qui est inacceptable. Il ne s'est pas levé pour dire aux Québécois si, oui ou non, il endosse cette déclaration. Dans le même esprit, je fais appel au même devoir, au même sens de l'honneur que le premier ministre vient de nous témoigner actuellement, je lui demande de nous dire et de dire à tous les députés de l'Assemblée nationale aujourd'hui puis à tous les citoyens du Québec qu'il rejette les propos que son vice-premier ministre a prononcés la semaine dernière. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le vice-premier ministre vit au Québec une vie collective, un engagement collectif dans la vie politique depuis sa toute jeunesse, sa prime jeunesse, lorsqu'il est rentré d'Europe avec un doctorat, et tout le monde lui reconnaît le sens de l'honneur, le sens de la dignité et le sens du respect des autres. Et je pense que l'Assemblée nationale vient d'entendre le vice-premier ministre expliquer le contexte humoristique ? humoristique ? dans lequel il a voulu situer la déclaration. Nous savons tous cependant qu'il est extrêmement périlleux de faire de l'humour en politique, parce que le deuxième degré, ça passe rarement dans les dépêches, ça passe rarement dans la compréhension, et je voudrais que nous nous en rappelions tous.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Jean J. Charest

M. Charest: Je retiens que le premier ministre a raté l'occasion, je pense, d'assumer ses devoirs de premier ministre et de citoyen et de dire clairement qu'il rejetait ces propos-là. Peut-être que ça prendra encore deux ans, mais ça voudra dire que, pendant cette période-là, il y aura encore de l'ambiguïté.

n(14 h 30)n

Le premier ministre, dans la réponse précédente, disait qu'il n'y a pas de lien entre l'élection provinciale et l'élection fédérale. J'ai entre les mains, moi, M. le Président, une lettre envoyée sur le papier à lettres du Parti québécois, signée de sa main, où il incite les citoyens à faire des contributions au Bloc québécois. Vous ne pouvez pas avoir un lien plus étroit entre le Bloc québécois et le Parti québécois, qu'il a qualifié lui-même de courroie de transmission. C'est tellement vrai que sa ministre de la Santé fait des événements de financement pour le Bloc québécois. Je présume que c'était pour leur expliquer qu'il n'y avait pas de lien entre les deux niveaux de gouvernement. Alors, ça devait être ça, la raison, elle a dû faire le tour des tables, rencontrer tous les convives pour leur expliquer qu'il n'y avait pas de lien. Eh bien, si la courroie de transmission est si réelle que ça, à un point tel où on utilise le papier à lettres du Parti québécois puis les frais du Parti québécois pour faire du financement pour le Bloc québécois, je ne vois pas pourquoi les citoyens du Québec, le 27 novembre prochain, diraient à ce gouvernement du Parti québécois, via le Bloc québécois, non aux fusions forcées!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, c'est vrai que j'ai utilisé le papier à en-tête du Parti québécois. Je n'étais pas pour utiliser le papier à en-tête du Parti libéral, je suis le président du Parti québécois. Et, en effet, le Parti québécois, lui, ne s'est jamais caché pour dire qu'il appuierait et qu'il appuie fortement, de toutes ses forces, de toutes ses énergies, la campagne du Bloc québécois pour que les Québécois et les Québécoises puissent rendre le jugement que mérite M. Chrétien, le lundi 27 novembre prochain. Du côté du Parti libéral du Québec, on nous a reproché de participer à la campagne électorale, on nous a fait des leçons de morale: Ah! il ne faut pas mêler les choses, n'allez pas faire de confusion entre le Québec et les campagnes fédérales, alors qu'en fin de semaine le chef de l'opposition, lui, est allé beaucoup plus loin, il a confondu des enjeux du Québec avec des enjeux de campagne électorale fédérale, ce que nous n'avons jamais fait.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Shefford.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Est-ce que la ministre de la Santé peut nous confirmer que le souper-bénéfice qui a eu lieu à Dorval a été organisé par l'association du comté de Shefford?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. J'ai accepté de donner un coup de pouce pour le financement du Bloc québécois de Shefford et je ne le regrette pas parce que ce parti politique est notre parti frère et poursuit le même objectif que nous poursuivons, qui est la souveraineté du peuple québécois.

Par ailleurs, il me semble que le Parti libéral, qui organise régulièrement des activités de financement où se retrouvent d'ailleurs des représentants de l'industrie pharmaceutique, ne devrait pas se fâcher de cette question, puisque j'imagine que ça ne le fait pas changer d'avis lorsqu'il entend des points de vue de cette industrie, comme, moi de même, je garde tout à fait ma liberté d'agir et de penser à cet égard, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Shefford.

Réorganisation de l'industrie du taxi

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Le ministre des Transports a déposé la semaine dernière le projet de loi n° 163, projet qui répond aux demandes de la FTQ concernant l'industrie du taxi. Il y aura dorénavant un syndicat réunissant patrons et employés déguisés sous l'appellation «association professionnelle», ce qui constitue du jamais vu. Pire encore, le gouvernement du Parti québécois a décidé de saisir rétroactivement au 15 novembre 2000 tous les biens des ligues de taxis du Québec. Il nomme un liquidateur, il tient les administrateurs responsables au cas où ils auraient la mauvaise idée de remettre le reliquat des cotisations aux cotisants. C'est des sommes amassées à même les deniers des chauffeurs de taxi. À titre d'exemple, la Ligue de Montréal possède environ un demi-milliard de dollars en valeurs. Ces sommes seront livrées à une association dirigée par la FTQ.

Ma question au ministre des Transports: Tout en étant conscient, M. le Président, qu'il faut respecter le règlement pour qualifier ce geste, le ministre peut-il nous dire s'il compte faire un examen de conscience et revoir son projet de loi avant que l'impensable se produise en démocratie?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Tout d'abord, M. le Président, manifestement, le député de Shefford n'a pas lu la loi n° 163, parce qu'il apprendrait, d'abord, comme député en cette Chambre, que, pour être syndiqué, il faut l'avoir, la notion de «salarié», et que, dans l'industrie du taxi, contrairement à loi n° 68 ou 69 qui était sur la table, la loi n° 163 prévoit de regrouper dans une association professionnelle dont les dirigeants seront élus par les membres des associations de taxi et non pas par la FTQ, contrairement à ce que vous dites... Le député de Shefford se fait le porte-parole de M. Farès Bou Malhab, et, je m'excuse, M. Bou Malhab n'a jamais compris la différence entre un syndicat et une association professionnelle.

Deuxièmement, je dirai également au député de Shefford: Qu'il ouvre le Code du travail québécois pour bien comprendre que, dans l'industrie du taxi, la notion de «salarié» ne peut exister que pour un propriétaire qui a de multiples autos et qui engage ? qui engage ? des chauffeurs. Mais la grande majorité des chauffeurs de taxi sont des gens qui marchent à pourcentage ou qui louent leur auto pour une journée.

Et, de plus, dans cette loi n° 63, pour bien démontrer comment le député de Shefford peut errer, M. le Président, c'est à la fois les propriétaires et les chauffeurs locataires qui font partie de cette association professionnelle qui vont élire leurs dirigeants, qui vont se donner les services qu'ils voudront bien, et je le prierais de ne pas faire de procès pour la FTQ. Il est complètement dans l'erreur, il erre complètement.

Le Président: M. le député.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: En complémentaire, M. le Président, comment le ministre des Transports, outre l'amélioration du service de taxi ? avec laquelle tout le monde est d'accord ? juge-t-il le niveau de démocratie de son forum du taxi qui est composé, et tenez-vous bien, d'un membre nommé par le gouvernement et de neuf membres nommés par le ministre lui-même? On a intérêt à être ami du régime dans l'industrie du taxi. Comment peut-il justifier telle action aux centaines de chauffeurs de taxi qui se rassemblent ce soir à Montréal, si ce n'est de livrer 17 000 cotisations à la FTQ et toutes les économies des chauffeurs de taxi?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, le député de Shefford non seulement n'a pas lu le projet de loi, mais il ne comprend même pas les articles qu'on a tenté de lui expliquer. Ça, c'est plus grave un petit peu. L'association professionnelle va devoir voter d'abord des cotisations entre eux. Il n'y en aura pas, de cotisation obligatoire, si les chauffeurs de taxi et les propriétaires autonomes de leur automobile ? propriétaires de leur auto ? n'en veulent pas, de cotisation obligatoire. Lisez la loi, s'il vous plaît, plutôt que de répéter des petites phrases d'un dirigeant de taxi qui veut absolument garder son poste et qui compte 53 ligues de taxi au Québec. La majorité des chauffeurs de taxi ne savent même pas à quelle ligue ils appartiennent, et ils doivent payer des cotisations. Il faut que ces cotisations-là aillent véritablement pour qu'il puisse se donner des services professionnels. Tout le monde est d'accord pour que ça change, et il y a seulement le député de Shefford qui voudrait qu'on garde les petits groupuscules actuels.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Est-ce que le ministre des Transports peut nous confirmer que, à sa réunion de vendredi soir dernier avec les chauffeurs de taxi, il a dit à son attaché politique, M. Frédéric Dubé, qu'il n'était pas au courant de toute la loi?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Il y avait probablement un stool dans la salle. Ha, ha, ha!

Des voix: ...

M. Chevrette: Oui, oui. Mais, encore là, on ne lui a même pas rapporté exactement ce qu'on a dit. Je vais vous expliquer. L'avocat de la couronne...

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, ce que j'ai dit en public... Et je n'ai jamais eu honte de ce que je dis en public, moi. Puis j'essaie... Je comprends quand on me passe des messages. Sur la technique, comment va s'organiser toute leur association professionnelle, j'ai dit qu'on était en discussion, qu'on était ouvert. C'était l'association des services ? qu'on ne touche même pas dans la loi, pour votre information ? qu'on rencontrait, mercredi.

Si le député de Shefford veut être sérieux et être pris au sérieux par les chauffeurs de taxi, ne représentez pas que les 600 contestataires, regardez les 9 000, 10 000 chauffeurs de taxi qui veulent une protection, puis qui veulent se donner des services, puis qui veulent un régime démocratique. Ils ne veulent plus des ligues pour leur imposer des cotisations sans aucun service de quelque nature que ce soit et, dans certains cas, avoir des administrations douteuses. Mon collègue qui m'a précédé aux Transports a été obligé de faire des enquêtes, et on sait très, très bien qu'il est temps qu'on mette de l'ordre, qu'on mette des règles démocratiques dans cela et que les chauffeurs se donnent les services qu'ils voudront bien se donner dans cette industrie. J'ose espérer que le Parti libéral, au lieu de vouloir allumer des feux, prenne le temps de lire la loi correctement et de travailler de façon constructive en commission parlementaire.

n(14 h 40)n

Le Président: En question principale?

M. Tranchemontagne: En additionnelle, s'il vous plaît, M. le Président.

Le Président: En complémentaire sur le même sujet, M. le député de Mont-Royal.

M. André Tranchemontagne

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Comment la ministre du Travail peut-elle accepter que son collègue le ministre du transport veuille regrouper dans un seul et même syndicat et les patrons et les employés du domaine du taxi?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, merci, M. le Président. Le ministre des Transports a fait toute une démarche à partir d'une consultation qui dure depuis plusieurs mois, cherchant à mieux organiser ce secteur d'activité. Il a trouvé un mode d'organisation, qui existe d'ailleurs dans d'autres secteurs d'activité, par exemple dans le camionnage, où la majorité des gens qui y travaillent ne sont pas des salariés au sens du Code, mais, tout de même, ces gens ont besoin d'avoir des lieux pour se donner des services. Alors, moi, je pense que c'est un mode qui est extrêmement intéressant.

Le ministre est allé en consultation au préalable, il le fera également sur ce projet de loi ci. Alors, pour moi, il nous faut trouver des modes différents, et, dans ce cas-ci, considérant les composantes et la réalité du secteur du taxi, il m'apparaît que c'est une organisation qui est intéressante et pertinente.

Le Président: En question principale, M. le député de Nelligan.

Aide accordée aux personnes
sourdes et malentendantes

M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Écoutez, s'il vous plaît, le son. Voici le son d'un appareil auditif qui ne fonctionne pas. Pourquoi les personnes sourdes et malentendantes doivent payer pour la réparation des aides auditives? La ministre de la Santé a promis de payer pour les réparations, mais, comme à son habitude, rien ne se passe.

La question est fort simple, M. le Président: Pourquoi la ministre ne respecte pas sa parole? Et quand va-t-elle respecter sa parole?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous apportons régulièrement des améliorations au Programme d'aide technique aux personnes handicapées, autant les malentendants que des personnes qui ont d'autres limitations fonctionnelles, et cet engagement a effectivement été pris et il sera tenu, compte tenu des ressources que nous dégagerons pour investir à nouveau auprès de l'aide aux personnes ayant un handicap.

Le Président: M. le député.

M. Russell Williams

M. Williams: Est-ce que la ministre est au courant qu'il y a un autre groupe de personnes sourdes qui est mal surveillé par le gouvernement péquiste, 125 personnes, dont la moitié sont des enfants, sur une liste d'attente de plus d'un an pour avoir un implant cochléaire? Pourquoi la ministre empêche l'accès à ces services tout en sachant que ces jeunes perdent à chaque jour d'attente des compétences d'acquisition de langage? Pourquoi elle empêche l'accès à ces services?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Non seulement nous n'empêchons pas l'accès à ces services, nous le souhaitons et nous le favorisons. En fait, cette année ? le député de Nelligan devrait être de bon compte ? nous avons ajouté une somme de 250 000 $, soit une augmentation de 400 %, pour améliorer et augmenter le nombre de chirurgies au Centre hospitalier universitaire de Québec, en particulier en ce qui a trait aux implants cochléaires, et il n'y a pas 100 personnes qui attendent. Malheureusement, il y en a encore trop, mais on parle de 63 personnes dont la moitié sont des enfants et la moitié sont des adultes.

Quant aux évaluations médicales qui sont faites, je me fie et je fais confiance, et cela va de soi, M. le Président, aux médecins qui sont en charge d'une telle opération et d'une telle intervention. D'ailleurs, je dois souligner la qualité exceptionnelle des professionnels que nous avons dans ce domaine et qui sont peu nombreux à pouvoir procéder à des implants de ce genre, puisque c'est une technique hautement spécialisée. Donc, nous avons amélioré la situation et d'une façon considérable. J'espère pouvoir continuer dans ce sens dans les mois et les années qui viennent.

Le Président: Question principale, M. le député de Vaudreuil.

Fermeture de la succursale montréalaise
du Collège des sourds du Québec

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. À la fin du mois d'août dernier, le ministre de l'Éducation a renouvelé pour trois ans le permis du Collège des sourds du Québec, une école située à Québec qui est opérée et financée totalement par la Fondation des sourds, sans subvention du ministère de l'Éducation. Par ailleurs, le ministre a refusé un permis et exigé la fermeture d'une annexe ouverte par le Collège des sourds du Québec à Montréal pour desservir les parents et les enfants de la région montréalaise. Le ministre a pris cette décision sans consulter les parents, des parents qui veulent se prendre en main et fournir à leurs enfants les services dont ils ont besoin.

M. le Président, pourquoi le ministre continue-t-il de refuser un permis au Collège des sourds du Québec pour l'ouverture d'une installation à Montréal afin de desservir les besoins des parents et tel que le demandent les parents?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.

M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. La Commission consultative sur l'enseignement m'a effectivement recommandé de ne pas accorder de permis pour l'ouverture d'un collège des sourds à Montréal, et la Commission explique sa recommandation en disant qu'il y a une école déjà à Montréal, l'école Gadbois, qui relève de la commission scolaire de Montréal, qui offre un service comparable à celui que souhaiterait offrir le Collège des sourds à Montréal, et l'école Gadbois peut en ce moment accueillir les sept élèves ? parce qu'on parle de sept élèves, ici ? qui souhaiteraient fréquenter le Collège des sourds, et déjà des arrangements ont été pris avec la commission scolaire de Montréal pour ces sept élèves.

Le Président: M. le député.

M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: M. le Président, est-ce que le ministre reconnaît que la Commission consultative de l'enseignement privé n'a pas consulté les parents? Et est-ce que le ministre réalise également qu'il y a une différence majeure entre les services offerts par le Collège des sourds du Québec et les services offerts par l'école Gadbois, tel d'ailleurs que le confirme Mme Colette Dubuisson, une professeure à l'Université du Québec à Montréal, qui a fait une évaluation du Collège des sourds à Québec? Et, dans ce contexte-là, est-ce que le ministre peut s'engager à revoir la décision qu'il a prise pour donner des services aux parents, permettre aux parents d'avoir des services qu'ils considèrent comme étant les plus favorables pour le développement de leurs enfants atteints de surdité?

Le Président: M. le ministre.

M. François Legault

M. Legault: M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que j'ai présenté, au mois de janvier dernier, une politique d'adaptation scolaire. Le gouvernement du Québec s'est engagé, à terme, à investir 150 millions de dollars par année pour donner des services à tous les enfants qui ont des handicaps ou qui ont des difficultés d'apprentissage ou de comportement. Nous offrons aux sourds des services appropriés. Il ne faut pas non plus dédoubler les services au risque de nuire à la qualité des services qui sont offerts. Je pense que la Commission consultative sur l'enseignement fait bien son travail, et nous allons continuer à offrir des services à tous les enfants qui en ont besoin.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa.

Rénovation du palais de justice de Trois-Rivières

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. La population de Trois-Rivières attend depuis 1994 l'agrandissement et la rénovation de son palais de justice. Tous les ministres de la Justice du gouvernement au pouvoir l'ont promis. En 1998, le ministre de la Justice d'alors déclarait, et je le cite au texte: «Ce n'est pas une promesse mais une décision ferme.» Il ajoutait même: «Les travaux seront entrepris en 1999 pour être complétés au cours de l'année 2001.»

n(14 h 50)n

M. le Président, nous sommes à l'automne 2000, à l'orée de l'hiver. Or, pas une pelletée de terre n'a été soulevée, pas le moindre petit grain de sable n'a été déplacé, à tel point que même le député de Trois-Rivières se déclare impuissant dans ce dossier, et le dossier, convenons-en, est devenu une véritable saga.

M. le Président, est-ce que la ministre peut nous le dire, c'est pour quand, la première pelletée de terre?

Le Président: Mme la ministre de la Justice.

Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, la question de notre collègue de l'autre côté, elle est fort pertinente parce que, dès ce matin, j'ai demandé d'avoir un état de la situation parce que, au niveau de l'échéancier, effectivement, il y a des engagements qui ont été pris, et il s'avère actuellement qu'il semble y avoir un retard. On m'a informée de cela à mon retour, et, dès cette semaine, nous avons une rencontre qui est prévue au ministère avec les différents intervenants, parce que ça interpelle également le ministère d'autres collègues, et nous allons avoir une rencontre pour préciser exactement à quelle date les travaux pourront débuter. Je répondrai avec précision au moment où j'aurai l'état exact, l'état de la situation expliquant pour quelles raisons les travaux n'ont pas encore débuté.

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Brassard: Ma collègue ministre de la Santé m'informe qu'elle a, évidemment involontairement, induit la Chambre en erreur tout à l'heure en transmettant une information. Elle voudrait corriger cette erreur.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. M. le Président, il y a une disposition à notre règlement, que vous connaissez bien et que le leader du gouvernement connaît bien, qui va permettre à la ministre de s'amender tantôt.

Le Président: Alors, est-ce qu'on convient qu'on peut faire ça après la période de questions?

Une voix: ...

Le Président: Très bien. Alors, question principale, M. le député de Gaspé?

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, le...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je suis prêt à reconnaître un député ministériel, mais je ne veux pas arbitrer entre les deux. Alors, si les deux se lèvent, je vais reconnaître celui que j'ai vu le premier, sinon... Alors, M. le député de Gaspé.

Mesures fiscales particulières pour
les entreprises de l'Est du Québec

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: M. le Président, vendredi dernier, le ministre d'État à l'Économie et aux Finances annonça des mesures fiscales particulières pour la région de la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, la Côte-Nord...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je pense que j'ai été assez clair avant la période de questions et de réponses orales. J'ai rappelé les règles que mes prédécesseurs et moi suivons et j'ai indiqué que non seulement ces règles n'ont pas été abusées, mais qu'en fonction de ces règles des députés ministériels peuvent avoir le droit et ont le droit de poser des questions. Ceci étant, je pense qu'ils ont droit aussi au même respect et à la même considération que les autres. M. le député de Gaspé.

M. Lelièvre: M. le Président, je constate que l'opposition, qui aime beaucoup parler de régions, n'aime pas entendre les questions qu'on veut poser concernant les régions.

Des voix: Bravo!

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, je comprends que les...

Des voix: ...

Le Président: Bon. Alors, M. le député de Gaspé, je vous invite à lire votre question et non pas à vous laisser tenter par des réponses sur des quolibets qui peuvent surgir.

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, j'aimerais bien la faire en toute quiétude, ma question. Je disais donc que, vendredi dernier, le ministre d'État à l'Économie et aux Finances est venu en Gaspésie annoncer des mesures fiscales particulières pour la région de la Gaspésie, les Îles-de-la-Madeleine, la Côte-Nord, le Bas-Saint-Laurent. Ces mesures fiscales touchent les biotechnologies marines, la transformation des produits marins, l'éolien.

J'aimerais savoir, M. le Président, de la part du ministre des Finances quand les modalités d'application seront connues de la part des entreprises pour qu'on puisse faire la promotion des mesures qui ont été annoncées.

Le Président: Alors, M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.

M. Landry: M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, connaissant le député de Verchères, je pense qu'il n'a pas besoin de votre inspiration.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry: M. le Président, vous n'avez pas trahi ma pensée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bernard Landry

M. Landry: Non seulement ces mesures extrêmement particulières qui donnent à la Gaspésie le statut que notre solidarité québécoise lui doit, c'est-à-dire un statut tout à fait spécial dans quatre secteurs vitaux de son économie... Les mesures qui s'appliquent, par exemple, à la Cité du multimédia, à Montréal, qui ont connu le succès que l'on sait, s'appliquent à la Gaspésie et plus encore dans quatre secteurs vitaux qui vont lui servir d'arme très puissante dans le combat qu'elle fait contre sa détresse actuelle.

Le député me demande: Quand ces mesures sont en vigueur? De façon rétroactive, depuis le 1er janvier 2000.

Des voix: Bravo!

Le Président: Rapidement, une question complémentaire. M. le député.

M. Guy Lelièvre

M. Lelièvre: Oui. Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais savoir quand les modalités d'application seront connues pour que nous puissions en faire la promotion. C'est-à-dire, est-ce qu'il y a des demandes à faire de façon particulière au ministère des Finances? Est-ce que nous devons...

Des voix: ...

Le Président: Je m'excuse. J'aimerais bien pouvoir reconnaître également Mme la députée de Bonaventure, mais, si ça continue comme ça, je ne serai pas en mesure de le faire.

Des voix: ...

Le Président: Alors, rapidement. M. le député.

M. Lelièvre: M. le Président, je pensais que chaque député avait le droit de s'exprimer dans cette Assemblée pour...

Des voix: ...

Le Président: Votre question.

Une voix: En anglais.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lelièvre: Alors, M. le Président, la région reçoit très bien les mesures qui ont été annoncées, mais quand le ministre des Finances... Et quelles sont les modalités d'application qui seront connues pour qu'on puisse faire la promotion de ces excellentes mesures?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Bernard Landry

M. Landry: Permettez-moi de dire, M. le Président, que mon voeu le plus profond, c'est que ces compagnies qui naîtront de ces mesures puissent s'inscrire à Nasdaq dont le premier ministre et moi avions annoncé...

Une voix: Ah, c'est vrai!

M. Landry: ...à Montréal ce matin même.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre, vous allez comprendre que je vais donner une question à Mme la députée de Bonaventure, maintenant.

Des voix: ...

n(15 heures)n

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée.

Réponses différées

Aide accordée aux personnes
sourdes et malentendantes

Je vais maintenant donner la parole, puisque cela a été convenu entre les leaders, à Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai indiqué au député de Nelligan que nous avions réinvesti une somme de 250 000 $ pour aider aux enfants sourds, en particulier lorsqu'ils reçoivent des implants cochléaires. En fait, je faisais référence à un 250 000 $ investi dans un centre de réadaptation spécialisé à cet égard. Mais, pour les chirurgies, nous avons augmenté le budget de 800 000 $. Donc, au total, c'est un effort additionnel de 1 050 000 $ qui a été reconsenti à cet égard.

Des voix: Bravo!

Le Président: J'accorde une question complémentaire au député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Oui. Est-ce que la ministre peut confirmer qu'elle a aussi induit en erreur la Chambre avec la liste d'attente? Est-ce qu'elle peut confirmer qu'il y a 63 personnes sur les listes d'attente, évaluées en attente, et un autre 62 qui est en attente d'une évaluation? Avec ça, la liste d'attente, c'est 125 pour ceux et celles qui ont besoin d'un implant cochléaire.

Est-ce qu'elle peut accepter que, effectivement, il y ait 125, dont la moitié sont des enfants, sur la liste d'attente pour l'implant cochléaire?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: C'est faux de dire qu'il y a autant d'attente pour les implants cochléaires. Il y a effectivement 63 personnes en attente au CHUQ à cet égard. Quant aux autres, elles sont en attente d'évaluation. Cela ne veut pas dire, M. le Président, que celles-ci, que ces personnes sont en attente d'un implant avant qu'on ait évalué si elles peuvent recevoir un implant cochléaire. On ne peut pas dire n'importe quoi, là.

Document déposé

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt d'un document? Alors, il y a consentement pour le dépôt d'un document, M. le député de Nelligan.

Votes reportés

Motion de censure proposant que l'Assemblée
blâme le gouvernement pour son manque
de planification et de transparence
en matière de financement des services
de santé et des services sociaux

Alors, je vous avais indiqué, avant la période des questions et des réponses orales, que nous avions un vote reporté. Je voudrais vous rappeler qu'il s'agit d'un vote sur une motion de censure. Cette motion de censure a été présentée jeudi dernier par M. le député de Châteauguay et elle se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois et, plus particulièrement, sa ministre de la Santé et des Services sociaux pour son manque total de planification et de transparence notamment en ce qui concerne les ressources financières et les marges de manoeuvre dont va disposer le Québec dans les prochaines années en matière de financement des services publics de santé et de services sociaux.»

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Chagnon (Westmount?Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Lemieux (Bourget), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), M. Chevrette (Joliette), M. Baril (Arthabaska), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie?Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Létourneau (Ungava), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour: 42

Contre: 67

Abstentions: 0

Le Président: Alors, en conséquence la motion de censure présentée par le député de Châteauguay est rejetée.

Nous allons aller aux motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: la ville de Montréal-Ouest et Démocracité.

«That the Committee on Planning and Infrastructures, which will hold special consultations on Bill 170, the bill on Forced Municipal Mergers, also hear, beginning on December 7th 2000, the following groups: the town of Montréal West and Démocracité.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de la motion, M. le leader du gouvernement?

M. Brassard: M. le Président, il n'y a pas de consentement. C'est la première fois que j'en entends parler, d'une part, et, d'autre part, ils avaient une heure de débat pour nous faire des suggestions, ils n'ont pas utilisé leur temps.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je me demande comment le leader du gouvernement peut affirmer une telle chose. Il n'a sans doute pas pris connaissance de la liste que nous avions déposée auprès du Secrétariat et des remarques qui accompagnaient cette liste à l'effet qu'on se réservait le privilège, comme parlementaires, d'ajouter à cette liste. Donc, ça ne peut pas être la première fois qu'il en entend parler.

Deuxième élément, il y a des individus et des groupes qui étaient déjà incorporés à la liste. Il ne peut plaider être pris par surprise. Est-ce qu'à ce moment-ci il nous dit, étant donné qu'il le savait, qu'il n'est pas pris par surprise, que c'est par absence d'esprit démocratique qu'il refuse son consentement?

Le Président: Alors, je ne veux pas qu'il y ait de débat, mais je comprends qu'il n'y a pas consentement, chacun ayant marqué son point. Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis... M. le député de Verdun?

n(15 h 10)n

M. Gautrin: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour présenter la motion suivante, conformément à l'article 235 du règlement de l'Assemblée nationale:

«Que la commission de l'aménagement du territoire procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, Loi portant réforme de l'organisation territoriale municipale des régions métropolitaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais, et ce, à compter du 28 novembre 2000 et qu'à cette fin elle entende les organismes suivants: la ville de Verdun, le Conseil verdunois d'initiative et d'intervention communautaire et le Forum économique de Verdun.»

Je suis sûr qu'il y aura consentement de la part des ministériels.

Le Président: Y a-t-il consentement?

Des voix: ...

Le Président: Il n'y a pas consentement, M. le leader. Alors, autre motion, M. le député de Saint-Laurent.

M. Dupuis: Comme le premier ministre du Québec a dit non sept fois, M. le Président, alors que nous savions tous qu'il s'agissait de oui, je vais solliciter le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion sans préavis suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170 sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre de l'année 2000: les autorités municipales de ville Saint-Laurent, bien sûr; M. Robert Petit, président du Regroupement des citoyens de Saint-Laurent contre les fusions forcées; la Fédération des policiers municipaux du Québec; l'Association des policiers provinciaux du Québec; et la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour la présentation? Il n'y a pas consentement, M. le député de Saint-Laurent.

Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis... Il y a une autre motion? Mme la députée de La Pinière.

Mme Houda-Pepin: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: le CLD Champlain, la Société de transports de la Rive-Sud, la commission scolaire Marie-Victorin, la commission scolaire des Patriotes et le CRD Montérégie.»

Le Président: Alors, y a-t-il consentement pour la présentation de la motion? Il n'y a pas consentement. Mme la députée... Mme la députée de Jean-Talon. Je m'excuse, madame, c'est un oubli, un blanc de mémoire. Alors, Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Je sollicite, M. le Président, le consentement de cette Chambre pour déposer la motion sans préavis suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire, qui procédera à des consultations particulières sur le projet de loi n° 170, loi ? mieux connue ? sur les fusions forcées, puisse également entendre les organismes suivants, et ce, à compter du 7 décembre 2000: le Comité de citoyens de Sillery, le Comité de citoyens de Saint-Augustin, Comité de citoyens de Cap-Rouge, le Comité de citoyens de l'Ancienne-Lorette, Comité de citoyens de ville Vanier, le maire de Sillery, la mairesse de Sainte-Foy ainsi que la Ligue de taxis coop Sillery?Sainte-Foy.»

Le Président: Y a-t-il consentement pour la présentation de cette motion? M. le leader? Il n'y a pas consentement.

Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons aller donc, dans ce cas-là, aux avis touchant les travaux des commissions, maintenant. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je voudrais aviser cette Assemblée, M. le Président, que d'abord la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 115, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives relativement à la publicité foncière, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des transports et de l'environnement procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 152, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune et la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie James et du Nouveau-Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 150, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le mercredi 22 novembre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont déposés. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance de travail demain, mercredi, le 22 novembre, de 8 heures à 9 heures, au salon Johnson du restaurant Le Parlementaire. L'objet de cette séance est d'organiser les travaux de la commission.

Je vous avise également que la commission de la culture se réunira en séance de travail demain, mercredi, le 22 novembre, à compter de 9 h 30, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'étudier le projet de rapport final dans le cadre du mandat portant sur le plan triennal de Télé-Québec.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, au feuilleton d'aujourd'hui, nous trouvons, sous la partie 4, Travaux des commissions, la commission des institutions qui tiendra une interpellation vendredi prochain qui vient, le 24 novembre. Et cette interpellation, au nom du député de Chomedey, au ministre de la Sécurité publique portera sur le sujet suivant, je cite le feuilleton: «Le mandat donné à la police de Laval concernant l'enquête sur l'effondrement du viaduc sur l'autoroute 15.»

Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, qu'un coroner effectue présentement, actuellement, une enquête publique sur ledit sujet. De même, d'ailleurs, le député de Chomedey, qui est aussi leader adjoint, vous le savez, dans le libellé même de son interpellation, reconnaît qu'il y a enquête. Le recueil de la jurisprudence à cet effet, de l'Assemblée nationale, nous apprend que... et c'est M. Pierre Laurin, ancien président, qui nous le dit, il a décidé qu'une enquête du coroner, telle que constituée par la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès, doit être assimilée à une affaire devant un organisme quasi judiciaire...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À ma droite, je vous demanderais un peu d'attention, là. M. le leader.

M. Brassard: ...doit être assimilée à une affaire devant un organisme quasi judiciaire.

Alors, ma question, très simple: En vertu des règles qui régissent notre Assemblée, qui régissent aussi les commissions et en vertu des pouvoirs de la présidence découlant de l'article 2 de notre règlement, est-ce que la présidence entend, en quelque sorte, donner des directives sur les balises de l'interpellation qui est demandée, pour vendredi qui vient, par le député de Chomedey?

Nous savons pertinemment que le président de la commission des institutions est indépendant. Cependant, vous vous devez, en vertu de l'article 2, M. le Président, faire observer le règlement. Alors, la question est simple: Qu'est-ce que vous comptez nous indiquer comme marche à suivre pour vendredi?

Et, en tout cas, quant à nous, nonobstant votre décision, je vous informe qu'il n'est pas dans notre intention de transgresser l'article 35.3 du règlement lors de cette interpellation. Donc, les interventions des ministériels respecteront scrupuleusement notre règlement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, sur cette question, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, à une question simple, M. le Président, est-ce qu'il me serait permis de vous suggérer une réponse simple?

Ces travaux seront présidés par un président de séance, à ce moment-là, et le règlement de l'Assemblée nationale, y inclus le troisième alinéa de l'article 35, va s'appliquer. Et, de notre côté, il n'est pas question, non plus, de transgresser les dispositions du troisième alinéa de l'article 35, et nous comptons bien nous en remettre à la sagesse légendaire de la présidence.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, compte tenu de cette demande aux renseignements sur les travaux, nous allons prendre cette question en délibéré et nous ferons rapport de la décision de la présidence demain, à la période des affaires courantes.

Alors, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Laurier-Dorion. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement du Québec de procéder à l'adoption d'une loi-cadre visant l'élimination de la pauvreté sur la base des objets, principes et des objectifs de la proposition mise de l'avant par le collectif pour l'élimination de la pauvreté.»

Alors, ceci met fin à la période des renseignements sur les travaux et à la période des affaires courantes.

Affaires du jour

Nous en sommes maintenant aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je vous réfère maintenant à l'article 37 du feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 99

Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 37, l'Assemblée poursuit le débat sur l'adoption du projet de loi n° 99, Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec.

Je vais céder maintenant la parole au député de Chapleau, porte-parole officiel de l'opposition en ces matières. Et je lui indique qu'il lui reste 25 minutes à son temps de parole. M. le député de Chapleau, la parole est à vous.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Je mentionnais ce matin qu'il était préférable d'utiliser une déclaration solennelle pour réaffirmer le droit des Québécois de choisir leur avenir plutôt qu'une loi comme le projet de loi n° 99. Et je dois vous dire que l'une des raisons pour laquelle la déclaration solennelle est un meilleur moyen, c'est que la déclaration solennelle n'est pas attaquable devant les tribunaux.

Or, en adoptant le projet de loi n° 99, le gouvernement du Québec risque de commettre une grave erreur et risque de judiciariser un ensemble de questions qui sont de nature essentiellement politique.

n(15 h 20)n

Mais, dans le fond, M. le Président, ce qu'il y a d'ironique, c'est qu'au moment même où il y a eu l'affaire Bertrand au Québec... On se souviendra de cette affaire-là, évidemment, qui avait cours en 1995, en 1996, et qui s'est même poursuivie dans les années qui ont suivi, qui s'est même poursuivie en 1997. Dans l'affaire Bertrand donc, le gouvernement du Québec n'a pas voulu faire des représentations jusqu'au bout, se contentant de faire tout simplement quelques représentations devant la cour mais, par la suite, s'est retiré du litige en prétendant qu'il n'appartenait pas aux tribunaux de trancher une question politique de la nature de celle qui est en cause lorsque l'on parle du droit des Québécois de choisir leur avenir.

À titre d'exemple, dans le journal Le Soleil, M. le Président, du 12 août 1995, le ministre des Affaires municipales de l'époque, M. Guy Chevrette, a dit espérer que Jean Chrétien et Daniel Johnson se dissocieront des propos de Me Bertrand, et je cite: «Les tribunaux n'ont rien à voir dans la détermination de l'avenir d'un peuple.» Et c'est la même chose que l'on retrouve, des affirmations qui ont été faites par différents, donc, acteurs politiques, différentes personnes qui provenaient du gouvernement du Québec, différents avocats qui représentaient en cour le gouvernement du Québec dans l'affaire Bertrand, qui ont dit qu'il n'appartenait pas aux tribunaux de se prononcer sur des questions qui sont essentiellement politiques. Laissons plutôt les choses être réglées, disait-on, dans l'arène politique et plus particulièrement dans l'arène parlementaire.

Alors, M. le Président, je dois vous dire que je suis étonné aujourd'hui de voir que le gouvernement du Québec s'apprête à adopter une loi qui va être contestée devant les tribunaux, ce qui l'obligera, c'est ironique, à défendre devant les tribunaux les mêmes principes qu'il a refusé de défendre devant les tribunaux dans l'affaire Bertrand. Extrêmement ironique.

Même chose pour le renvoi relatif à la sécession du Québec, M. le Président. Vous savez, c'est cette cause qui a été portée devant la Cour suprême du Canada, la Cour suprême ayant rendu sa fameuse décision au mois d'août 1998. Même chose, même principe. À toute époque pertinente, le gouvernement du Québec a dit: Nous ne voulons pas aller devant les tribunaux, et nous ne voulons pas y aller parce que les questions qui sont en cause, qui ont trait au droit des Québécois de choisir leur avenir, ne sont pas des questions juridiques, ne sont pas des questions justiciables, ne sont pas des questions qui relèvent de l'arène judiciaire, mais sont, au contraire, des questions politiques.

Or, moi, ce que je dis, c'est que, si vraiment ce sont des questions politiques et si ça doit rester des questions politiques, et s'il faut faire en sorte que les tribunaux n'aient pas leur mot à dire par rapport à ces principes-là, à ces questions-là, la meilleure façon de procéder, c'est de procéder par une déclaration solennelle et non pas par l'adoption d'un projet de loi qui, sitôt qu'il deviendra loi, sitôt sanctionné, sera vraisemblablement attaqué par différents groupes d'intérêts ou par différents individus devant les tribunaux.

Alors, M. le Président, vous allez me dire: Oui, mais, en fait, la motion ou la déclaration peut ne pas être un moyen approprié pour faire valoir un droit aussi fondamental que le droit des Québécois de choisir leur destin, de choisir leur destinée. Bien, à cela je vous répondrai ceci, je vous répondrai que c'est par une motion qu'en 1995 le premier ministre du Québec de l'époque, M. Jacques Parizeau, entendait réaffirmer le droit des Québécois de décider de leur avenir.

À cet égard, je vous cite, M. le Président, donc, un extrait d'un article de M. Donald Charette dans le journal Le Soleil du 6 septembre 1995. Je cite: «En annonçant hier que la Chambre serait rappelée plus tôt que prévue, soit demain, le premier ministre Parizeau a également mentionné que l'Assemblée nationale pourrait être forcée de réaffirmer ses privilèges et prérogatives et se mettre à l'abri des tribunaux ? et se mettre à l'abri des tribunaux.» Je continue la citation, M. le Président: «Concrètement, cette motion ? et, donc, c'est ce qu'avait en tête le premier ministre Parizeau de l'époque, c'était l'adoption d'une motion réaffirmant le droit des Québécois de choisir leur avenir ? réaffirmerait le préambule de la Loi de l'Assemblée nationale qui dit notamment que le Parlement québécois est l'organe suprême et légitime d'expression et de mise en oeuvre de ces principes, que les députés ont le devoir de défendre ses pouvoirs inaliénables contre toute tentative de l'en spolier ou d'y porter atteinte et que finalement il convient d'affirmer la pérennité, la souveraineté et l'indépendance de l'Assemblée nationale et de protéger ses travaux contre toute ingérence.» M. le Président, ce sont exactement les principes-clés que l'on retrouve dans le projet de loi n° 99.

Or, il s'avère qu'en 1995 le premier ministre Parizeau songeait à affirmer ces principes-là et à les réaffirmer dans le cadre non pas d'une loi, mais bien dans le cadre d'une motion qui serait adoptée par l'Assemblée nationale.

Même chose pour le premier ministre du Québec actuel, qui avait pris le pouvoir et qui était au pouvoir au Québec donc en date du 14 mai 1996. Figurez-vous, M. le Président, que le premier ministre du Québec actuel, le 14 mai 1996, a déposé une motion à l'Assemblée nationale, non pas un projet de loi, une motion portant sur l'autodétermination et sur le statut politique futur du Québec. C'est extrêmement intéressant parce qu'on entend aujourd'hui le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes nous dire qu'une motion, ce n'est pas approprié, nous dire que c'est insuffisant, nous dire que ce n'est pas le bon véhicule pour exprimer le droit des Québécois de choisir leur avenir, niant par le fait même ce qu'a fait M. Parizeau en 1995 et ce qu'a fait le premier ministre du Québec actuel en 1996.

Avouez, M. le Président, que, s'il y a quelqu'un qui me semble être tout à fait déconnecté de l'histoire de son parti, c'est le moins que je puisse dire, un homme déconnecté de l'histoire de son parti, c'est bien le ministre des Affaires intergouvernementales actuel. Et je poursuis en soulignant à quel point le jugement de la Cour suprême du Canada, le renvoi de la Cour suprême donc du mois d'août 1998, à quel point ce jugement-là a été chaudement applaudi et a été chaudement approuvé à l'époque par les grands ténors souverainistes, les grands ténors du Parti québécois. Et on y reconnaîtra des gens qui étaient ministres à toute époque pertinente et qui sont encore ministres aujourd'hui.

Le ministre des Finances d'aujourd'hui disait, le 24 novembre 1999, en parlant du jugement de la Cour suprême du Canada sur la sécession du Québec, ceci: «La Cour suprême a eu un jugement équilibré et magnanime. Nous étions très satisfaits de cette dimension du jugement.» C'est le ministre des Finances actuel qui parle. Le premier ministre, dans le journal La Presse, le 22 août 1998... on voit le titre suivant: Bouchard et Chrétien heureux du jugement. On cite le premier ministre du Québec actuel: «Une condition gagnante pour un prochain référendum.» Imaginez, ce dont on parle, c'est du jugement de la Cour suprême, ce même jugement là dont le ministre des Affaires intergouvernementales ne veut pas reconnaître aujourd'hui l'autorité pleine et entière. C'est ce même jugement là qui, à l'époque, a été applaudi, a été acclamé, a été finalement tout à fait mis sur un piédestal par les grands ténors du Parti québécois.

Je continue, M. le Président. Dans Le Devoir du 10 novembre 1999... Écoutez, c'est le premier ministre du Québec actuel qui parle, et je cite: «La Cour suprême a tracé la voie», estime le premier ministre. Je pourrais prononcer ces mêmes paroles, personne ne serait étonné de les entendre sortir de ma bouche. Eh bien, elles ne sortent pas de ma bouche, mais bien de celle du premier ministre du Québec actuel.

Je continue encore, parce que c'est important que nous établissions, en bout de piste, la force finalement des arguments qui ont été avancés tout au long du cheminement qui entoure le projet de loi n° 99 par l'opposition officielle. Donc, le 22 et le 23 août 1998: «La souveraineté est renforcée», croit Bouchard. Et de quoi parle-t-il en disant que la souveraineté est renforcée? Il parle du jugement de la Cour suprême. Dans Le Soleil du samedi 22 août 1998: Bouchard applaudit le jugement. Dans le journal Le Devoir des 22 et 23 août 1998, là, c'est un article de Lucien Bouchard, le premier ministre du Québec actuel, M. le Président, qui dit ceci: «La démarche souverainiste est légitime. La Cour ébranle ainsi les fondements de la stratégie fédéraliste, sape les arguments de la peur et du refus de négocier.» Ça, c'est le premier ministre du Québec qui parle.

n(15 h 30)n

Même chose dans un article du journal Le Soleil du 22 août 1998, toujours le premier ministre du Québec qui parle du jugement de la Cour suprême, en disant: «Les mythes fédéralistes enterrés.» On retrouve exactement la même chose dans Le Journal de Québec du 22 août 1998.

Le 21 août 1998 ? ah, ça, c'est intéressant, M. le Président ? là c'est le leader du gouvernement en Chambre qui parlait, le leader du gouvernement actuel qui parlait, le ministre des Ressources naturelles qui disait ceci: L'arroseur arrosé, Brassard se réjouit de la cause qu'il a boycottée. Le 21 août 1998, toujours le même leader du gouvernement en Chambre qui parlait: Satisfaction à Québec, Brassard s'est même réjoui d'un certain nombre de nouveautés. On parle du jugement de la Cour suprême, bien entendu. Le 21 août 1998, là, c'est le ministre des Finances qui parlait, le ministre des Finances actuel qui disait ceci: Ça peut changer l'atmosphère au Canada, croit Landry. Et enfin, la cerise sur le sundae, les 21 et 23 août 1998, c'est l'ex-premier ministre Parizeau qui, parlant du jugement de la Cour suprême du Canada, disait qu'il considérait sa démarche réhabilitée.

Alors, vous voyez, M. le Président, que les grands ténors souverainistes ont applaudi, ont acclamé le renvoi de la Cour suprême du Canada, ce même renvoi qu'aujourd'hui ils dénoncent, et, nous, nous demandons au gouvernement de reconnaître l'autorité et la légitimité, donc, de ce même renvoi de la Cour suprême, et c'est pourquoi nous voulons que le renvoi à la Cour suprême soit mentionné dans la déclaration solennelle qui, je l'espère encore, fera l'objet d'un appui unanime de la part de tous les parlementaires qui sont réunis en cette Chambre.

M. le Président, vous me permettrez par ailleurs de mentionner ce qui suit, vous me permettrez sans doute de mentionner que le gouvernement du Parti québécois a considéré la possibilité d'adhérer à la déclaration solennelle de l'opposition officielle. Ça, c'est un fait qui est extrêmement important dans le débat qui nous occupe. Pourquoi? Parce que nous avons entendu et nous entendons le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes dire qu'une déclaration, ce n'est pas suffisant pour répondre à la loi sur la clarté du fédéral. Or, la réalité, c'est qu'il y a eu des négociations, il y a eu des rencontres entre le ministre, moi-même et d'autres personnes du parti ministériel, d'autres personnes de l'opposition officielle, des négociations, des rencontres qui ont porté sur la base de la déclaration solennelle de l'opposition officielle.

Alors, à partir de là, je pose, dans le fond, deux questions. Ou bien le gouvernement, dès le départ, ne considérait pas la déclaration solennelle de l'opposition comme étant un moyen valable de répondre à la loi sur la clarté et, alors, il a négocié de mauvaise foi, ou bien il considère la déclaration solennelle comme étant un moyen valable de répondre à la loi sur la clarté et, alors, le ministre a eu tort de dire en cette Chambre, un peu plus tôt, que ladite déclaration solennelle n'était pas un moyen approprié pour répondre à ce qu'il appelle l'«assaut du fédéral». C'est l'un ou l'autre. Mais, dans les deux cas, M. le Président, qui fait erreur? C'est le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes.

Bien entendu, si le ministre considérait que la déclaration solennelle n'était pas un moyen approprié pour répondre à la loi sur la clarté, il avait rien qu'à le dire dès le départ, il n'y aurait jamais eu de rencontre entre les gens du parti ministériel et puis les gens de l'opposition, M. le Président. On n'aurait jamais négocié, et, forcément, donc, il aurait fallu convenir qu'il n'y avait pas moyen de s'entendre. Mais non, le ministre cherchait à négocier sur la base de la déclaration solennelle. C'est donc dire ou qu'il était de mauvaise foi dans sa négociation ou encore qu'il a considéré à quelque part que la déclaration solennelle pouvait être un moyen légitime et approprié de répondre à la loi sur la clarté du fédéral. Alors, voilà pourquoi j'estime que tous les parlementaires ont le devoir d'appuyer la déclaration solennelle de l'opposition officielle. Non seulement est-ce un moyen approprié de répondre à la loi sur la clarté du fédéral, mais c'est le moyen le plus approprié parce que c'est le seul moyen qui n'est pas attaquable devant les tribunaux.

Permettez-moi d'ailleurs de vous dire que la grande majorité des journalistes et des commentateurs de la scène publique ont appuyé l'opposition officielle dans ce dossier et ont considéré, effectivement, que la déclaration solennelle de l'opposition officielle était préférable au projet de loi n° 99 du gouvernement du Québec actuel.

Dans Le Devoir, M. le Président, du 21 avril 2000, M. Michel Venne dit ceci: «Le ministre Joseph Facal soutient que l'avenir du Québec est une question politique. Le droit du peuple québécois de disposer de lui-même est une question politique. Or, en affirmant dans une loi le droit du peuple du Québec à l'autodétermination, il fait sortir cette question du champ politique pour la faire entrer dans le champ juridique, car le premier effet juridique d'une loi est de rendre contestable devant les tribunaux le contenu de cette loi. Quel avantage, de dire Michel Venne, avons-nous à ce que la Cour suprême du Canada se prononce un jour sur ce droit? Il n'y en a aucun. Une telle éventualité comporte par contre des risques. Pour cette raison, le gouvernement devrait appuyer le projet de déclaration solennelle qui est soumis par l'opposition officielle.»

Même chose de la part de Normand Girard, M. le Président, dans un article du 22 avril 2000. Je cite: «Qui plus est, le projet de loi n° 99 réécrit ? parce qu'il faut se souvenir qu'il y a une réinscription du projet de loi n° 99 ? donne prise, par son article 1, à une contestation devant les tribunaux.» Alors, il ajoute ceci: «Le projet de loi n° 99, sitôt adopté par la majorité péquiste à l'Assemblée nationale, ne manquera pas d'être contesté devant les tribunaux, ne serait-ce que sur ce seul aspect. Il n'y aura aucun avantage pour le Québec à ce que la Cour suprême se prononce un jour sur ce droit. Quoi qu'il en soit, le gouvernement Bouchard aurait-il voulu provoquer une deuxième fois le refus des libéraux d'adhérer au projet de loi n° 99 qu'il n'aurait pas agi autrement. Lorsque l'on recherche le consensus, d'ordinaire, on n'agit pas unilatéralement, contrairement à ce qu'a fait le gouvernement du Québec actuel, on consulte ses interlocuteurs. Or, l'opposition officielle n'a jamais été consultée quant à la réécriture du projet de loi.»

Michel C. Auger, dans un article dans Le Journal de Montréal du 25 avril 2000, disait ceci: «Et, si le gouvernement péquiste voulait vraiment embarrasser les libéraux ? ah, ça, c'est intéressant; écoutez bien ça, M. le Président ? et les amener à voter avec lui, il pourrait tout simplement abandonner le projet de loi n° 99 et procéder par voie de résolution, d'abord, parce que répondre par une loi est au mieux inutile et au pire potentiellement dangereux, puisqu'elle pourrait être contestée en cour avec des résultats qu'on ne peut prédire par le premier Guy Bertrand venu.»

Très intéressant, parce que, le 25 avril 2000, M. Michel C. Auger disait aux gens du Parti québécois: Aïe, si vous voulez vraiment mettre les libéraux dans l'embarras, procédez non pas par le biais d'une loi mais procédez par l'intermédiaire d'une résolution. Or, M. le Président, au début du mois de mai 2000, qui arrive avec une résolution en cette Chambre? Qui arrive avec une déclaration solennelle élaborée, n'est-ce pas? C'est l'opposition officielle, et non pas le gouvernement lui-même qui n'a pas compris qu'en fin de compte, en persistant à vouloir procéder par le projet de loi n° 99, il risquait de mettre en péril, de mettre en cause et de remettre en question les droits les plus légitimes du peuple québécois.

n(15 h 40)n

Michel Venne, qu'on ne peut pas soupçonner d'allégeance fédéraliste, quand même, disait, dans le journal Le Devoir, le 5 mai 2000, ceci: «...sans compter qu'une loi ? et il parlait de quoi, M. le Président, il parlait du projet de loi n° 99 du ministre des Affaires intergouvernementales ? serait contestable devant les tribunaux, ce qui n'est pas le cas d'une déclaration ? ce qui n'est pas le cas d'une déclaration. En outre, affirmer dans une loi que le Québec a droit à l'autodétermination n'a guère plus de poids politique que d'affirmer la même chose ou à peu près dans un texte solennel adopté à l'unanimité. Or, nous parlons ici d'un droit politique. L'occasion est trop belle pour qu'on la laisse passer. Après tout, MM. Bouchard et Charest s'entendent, comme ils l'ont affirmé lors du lancement du livre du Devoir sur la nation québécoise, sur le fait que cette nation existe et que celle-ci a le droit de décider de son avenir politique et constitutionnel.»

M. le Président, Michel Venne nous dit donc, dans le journal Le Devoir: «Optons non pas pour le projet de loi n° 99 mais pour la déclaration solennelle de l'opposition officielle.» Il peut bien neiger, aujourd'hui. Il peut bien neiger.

Je poursuis, M. le Président, avec Pierre Bourgault, maintenant. Pierre Bourgault, encore une fois, on ne peut quand même pas le soupçonner de frayer dans les milieux fédéralistes, c'est le moins qu'on puisse dire. Dans Le Journal de Montréal du 6 mai 2000, il disait ceci, et le titre est intéressant: Jean Charest a raison. Pierre Bourgault: Jean Charest a raison. Il affirmait ceci: «Or, c'est Jean Charest qui a trouvé la solution: plutôt que de proposer l'adoption d'une loi contestable devant les tribunaux, il propose l'adoption d'une déclaration solennelle portant sur le droit des Québécois de décider de leur avenir politique et constitutionnel.» Il nous donne raison.

Michel C. Auger, même chose dans Le Journal de Québec, le 16 mai 2000, qui affirme ceci: «Or, voici que, après avoir considéré la question comme essentiellement politique pendant des années, le gouvernement Bouchard se sent obligé de répondre projet de loi pour projet de loi au Clarity Bill. C'est jeter par-dessus bord toute sa logique ? qui lui permet de penser tenir un autre référendum sur la souveraineté ? et c'est dangereux.

«Parce qu'une loi, cela se conteste devant les tribunaux avec des résultats pas toujours évidents. Ainsi, le gouvernement de René Lévesque était allé devant les tribunaux peu après le rapatriement de la Constitution, en 1982, pour faire valoir le droit de veto traditionnel du Québec.»

Et on connaît la suite, M. le Président, ça a été une triste histoire que ce recours devant les tribunaux. Ça a été une triste histoire que ce renvoi sur le droit de veto du Québec. Alors, comme mot de la fin, je serais tenté de citer la motion, et je sais que les gens du parti ministériel sont tout à fait avides d'histoires et avides d'en savoir le plus possible sur les faits historiques. Je vais vous citer la motion qui a été présentée par le premier ministre du Québec actuel ? par le premier ministre du Québec actuel ? en mai 1996. D'accord? Alors, motion proposant que l'Assemblée réaffirme la liberté du Québec de déterminer son statut politique:

«Que l'Assemblée nationale réaffirme que le peuple du Québec est libre d'assumer son propre destin, de déterminer sans entraves son statut politique et d'assurer son développement économique, social et culturel.»

Bien, ce que M. le premier ministre du Québec proposait de faire par une motion en 1996, nous proposons aujourd'hui de le faire par le biais d'une déclaration solennelle qui, j'espère, aura le consentement unanime des parlementaires de cette Assemblée. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Chapleau, de votre intervention.

La présidence a reçu dans les délais requis trois demandes de débat de fin de séance. Le premier est demandé par M. le député de Shefford à une question qu'il a posée aujourd'hui à la ministre de la Santé et des Services sociaux sur le financement du Bloc québécois du comté de Shefford; une demande également du député de Nelligan à la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant l'inaction dans le dossier des malentendants; et le député de Shefford, suite à une question qu'il a posée aujourd'hui au ministre des Transports concernant le dossier du taxi. Ces trois débats de fin de séance auront lieu après les affaires du jour, à 18 heures.

Je vais reconnaître un prochain intervenant. M. le député de Dubuc. La parole est à vous, M. le député.

M. Jacques Côté

M. Côté (Dubuc): Alors, merci, M. le Président. À l'instar de mes collègues, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 99, Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec. J'utiliserai le temps qui m'est accordé à faire avancer le débat et je ne vous lirai pas des articles de journaux comme a fait mon collègue de Chapleau pendant 30 minutes, je prendrai plutôt 10 minutes. Et, avant d'aborder certaines remarques et de regarder plus en profondeur le contenu du projet de loi, il faut se demander ? et il m'apparaît essentiel de le faire: Pourquoi le gouvernement a-t-il déposé ce projet de loi?

Les principes soulevés par ce projet de loi sont de la plus haute importance, eu égard au respect des droits démocratiques fondamentaux du peuple québécois et également au respect des institutions démocratiques qui lui appartiennent en propre. Le Québec se devait de répondre fermement et sans ambiguïté au projet de loi fédéral intitulé Loi donnant effet à l'existence de clarté formulée par la Cour suprême du Canada dans son avis sur le Renvoi sur la sécession du Québec, communément appelé loi C-20.

D'aussi loin que je me souvienne, il y a toujours eu de larges consensus historiques au Québec sur le droit inaliénable de décider nous-mêmes de notre avenir. Il fallait donc un geste positif et ferme de la part du gouvernement du Québec, une réponse qui transcende les intérêts partisans, une réponse qui se porte à la défense de ce que nous chérissons le plus sur le plan politique, une réponse que tous les Québécois et toutes les Québécoises sont unanimes à préserver du plus profond de leur coeur, nos institutions nationales, ces institutions, M. le Président, qui sont et qui seront nécessaires à notre existence comme peuple.

On nous a accusés d'utiliser le projet de loi n° 99 pour faire de la partisanerie politique. L'opposition libérale refuse d'appuyer le projet de loi parce que, dit-elle, le gouvernement veut s'en servir comme d'un instrument de partisanerie. J'ai eu, M. le Président, l'occasion de siéger en commission parlementaire sur ledit projet de loi, j'ai eu également l'occasion d'entendre le député de Chapleau à plusieurs reprises, un homme d'une grande intégrité, un professeur de droit émérite, compétent, articulé, qui croit au Québec, qui croit au peuple du Québec, mais qui refuse, au nom de l'opposition officielle, d'appuyer le projet de loi. Tout cela m'apparaît incompréhensible. On nous donne la raison de la judiciarisation. S'il fallait que le gouvernement, par peur que ses lois soient contestées, ne passe pas lesdites lois, nous ne passerions jamais de lois et nous n'en adopterions jamais.

Mais où est-elle donc, cette partisannerie? Ne serait-elle pas du côté de l'opposition officielle qui refuse tout simplement d'appuyer le projet de loi pour se faire aimer davantage du grand frère fédéral, pour ne pas toucher aux susceptibilités de certaines personnes, de certains quartiers, pour ne pas nuire à leur chef, à leur cote? Voilà des gestes qui pourraient coûter cher à l'opposition libérale. Pourtant, il n'est pas trop tard, et c'est pourquoi je demande à tous les députés d'être loyaux envers nos institutions nationales, d'en faire la promotion et de les défendre. C'est le gouvernement fédéral qui nous force à agir ainsi. Voilà pourquoi il était primordial de répondre à une loi par une autre loi.

Suite au dépôt du projet de loi n° 99, nous avons entendu en commission parlementaire plusieurs groupes, associations, personnes qui sont venus nous livrer leurs commentaires. Nous avons écouté avec sérieux tous les intervenants et intervenantes. Qu'en est-il résulté de ces consultations? Un projet de loi bonifié avec des amendements qui ont été intégrés et la réimpression dudit projet de loi, une écoute attentive du ministre qui a fait que, suite à ces consultations, ce projet de loi est renforcé dans son principe même, à savoir le droit inaliénable du peuple québécois de disposer librement, démocratiquement de son avenir politique.

Quel est donc le contenu principal de ce projet de loi? Tout d'abord, M. le Président, le projet de loi établit une série de considérants, rappelant en quelque sorte l'histoire politique du peuple du Québec et des consensus qui ne sont pas remis en question. Je crois cependant qu'il est important de citer en cette Chambre un de ces considérants parce qu'il donne en partie réponse au dépôt du projet de loi. Ce considérant se lit comme suit:

«Considérant que le Québec fait face à des gestes du gouvernement fédéral, dont une initiative législative, qui mettent en cause la légitimité, l'intégrité et le bon fonctionnement de ses institutions démocratiques nationales.»

Voilà, M. le Président, une des raisons d'être de ce projet de loi.

Le projet de loi lui-même ne contient que 14 articles, mais 14 articles majeurs. Dans le chapitre I qui traite du peuple québécois, il y est mentionné à l'article 4 que la majorité requise en cas de référendum sur la souveraineté est la majorité des votes déclarés valides, soit 50 % plus un. Cet article était nécessaire pour faire contrepoids au principe de la majorité renforcée établi par la loi C-20, qui vient, par le fait même, ouvrir une brèche importante dans les principes démocratiques qui ont toujours existé et dont j'aurai d'ailleurs l'occasion de reparler dans quelques instants.

n(15 h 50)n

Au chapitre II de la loi, soit les articles 5 à 8, on y aborde l'État du Québec, son Assemblée nationale, le peuple québécois. À l'article 8, on fait même référence à la langue française. Cet amendement nous avait été suggéré en commission parlementaire. Le gouvernement y a acquiescé. Cette référence, M. le Président, est faite toutefois dans le respect des droits consacrés de la communauté québécoise d'expression anglaise.

Le chapitre III traite du territoire du Québec, de ses frontières, de son inaliénabilité. Je vous réfère ici à la déclaration du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes d'alors, M. Jacques Brassard, qui déclarait, le 12 novembre 1997, et je cite: «L'intégrité territoriale du Québec est donc garantie, avant l'accession à la souveraineté, par les règles constitutionnelles canadiennes et, après l'accession à la souveraineté, par les principes bien établis et impératifs du droit international général. Il n'y a pas de place, selon l'opinion d'experts, pour une situation intermédiaire dans laquelle s'appliqueraient des règles différentes, puisque l'accession à la souveraineté est un fait instantané qui exclut toute possibilité de vide juridique. Avis, donc, aux intéressés et aux personnes empreintes de société distincte.»

Plusieurs intervenants nous avaient également demandé en commission parlementaire de faire référence aux nations autochtones. Le chapitre V y fait référence spécifiquement. Enfin, M. le Président, dans les dispositions finales dudit projet de loi, l'article 13 affirme ceci: «Aucun autre Parlement ou gouvernement ne peut réduire les pouvoirs, l'autorité, la souveraineté et la légitimité de l'Assemblée nationale ni contraindre la volonté démocratique du peuple québécois à disposer lui-même de son avenir.» Voilà donc un projet de loi sérieux, non partisan, qui touche tous les Québécois et toutes les Québécoises. Il répond également aux préoccupations de l'opposition officielle, préoccupations qui nous avaient été manifestées lors de la commission parlementaire. Il fait référence à l'entrée du Québec dans la fédération canadienne de 1867, de même qu'une référence à l'avis de la Cour suprême.

J'écoutais le député de Chapleau tout à l'heure parler du jugement de la Cour suprême. Je voudrais lui dire qu'il s'agit d'un avis de la Cour suprême et que c'est un avis de nature politique dont il faut reconnaître cependant l'importance au point de vue politique. Ce que le projet de loi affirme haut et fort, c'est le droit fondamental du peuple québécois de disposer librement de son avenir. L'opposition est d'accord avec ce principe; alors, qu'elle soit conséquente avec elle-même et qu'elle appuie le gouvernement.

Avant de terminer ces quelques minutes qui me sont attribuées, j'aimerais dire quelques mots sur cet avis de la Cour suprême. Il faut dire, tout d'abord, que le Québec n'a pas l'obligation de s'y conformer parce que le Québec ne reconnaît pas la légitimité de la Constitution de 1982, une constitution qui nous a été imposée et que le Québec n'a jamais signée. Comme, à partir de cet avis, en a découlé le projet de loi C-20, il m'apparaît alors important d'en tenir compte. J'aimerais donc parler ici d'un aspect de ce projet de loi C-20 qui statue que la majorité nécessaire, ou requise, lors d'un référendum ne pourrait être la majorité absolue. Le gouvernement fédéral affirme en effet qu'il prendra en considération l'importance de la majorité des voix validement exprimées en faveur de la proposition de sécession. Autrement dit, si les Québécois se prononcent en faveur de la souveraineté, il faut qu'il y ait un écart important entre le vote du Oui et le vote du Non. C'est la négation même de la majorité absolue. Cela est-il conforme à l'avis de la Cour? J'aurais aimé, M. le Président, vous dire que cet avis de la Cour suprême n'est pas respecté par la loi C-20, puisque la loi C-20 parle de majorité renforcée, alors que la Cour suprême insistait sur une majorité qualitative et non quantitative, c'est-à-dire qu'une question claire, une question claire...

Alors, je termine, M. le Président. Je sais que mon temps est expiré. Et je voudrais que cet acte d'intimidation contre le Québec... Je voudrais que tous les partis ici, en Chambre, se lèvent debout et de façon unanime votent en faveur de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Dubuc. Oui.

M. Pelletier (Chapleau): M. le Président, je me lève debout non pas pour les fins d'approuver le projet de loi mais pour invoquer l'article 213.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que M. le député de Dubuc permet au député de Chapleau une question en vertu du règlement, de l'article 213?

M. Côté (Dubuc): Non, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non? Alors, il n'y a pas de question, M. le député de Chapleau. Nous poursuivons le débat. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du projet de loi n° 99, Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec, et je reconnais M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député, la parole est à vous.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. On se retrouve donc, presque un an après le dépôt du projet de loi sur la clarté du gouvernement Chrétien, du gouvernement fédéral, à discuter d'une réplique qui, au fil des mois, a bien pâli. Aux premières heures, on se serait attendu à ce que l'Assemblée nationale, à ce que le Québec réponde. Les citoyens du Québec ont compris que, malheureusement, avec, à l'Assemblée nationale, un gouvernement du Parti québécois qui vit dans ses rêves et avec une opposition libérale dont la fidélité au Québec est toujours pâlotte, la capacité de réplique de leur Assemblée nationale s'en trouvait fort entachée, et ça, les citoyens du Québec l'ont bien compris. Et, quel que soit le résultat ou le fait qu'on adopte ce projet de loi à ce moment-ci, je ne pense pas qu'on va changer grand-chose et qu'on va répondre, qu'on va répliquer, qu'on va exprimer au nom des Québécois et des Québécoises l'indignation qui aurait été normale, qui aurait dû d'ailleurs être exprimée beaucoup plus rapidement au lendemain des décisions, des gestes qui ont été posés par le gouvernement du Québec.

Lors de la prochaine campagne électorale, M. le Président, sans doute que le Parti québécois, lors de la prochaine campagne électorale au Québec, nous redira sa stratégie. Ils inventeront une autre bulle. La dernière fois, c'était la bulle des conditions gagnantes. Alors, ils inventeront une autre bulle pour exprimer leur nostalgie du passé, pour exprimer leur rêve. Mais il faudra faire leur bilan, faire le bilan de l'affaiblissement du Québec dans le concret, de l'affaiblissement du Québec dans le réel qui a été le résultat, le fruit du travail, de la faiblesse du Parti québécois.

Maintenant, au moment d'adopter le projet de loi n° 99, en pleine campagne électorale fédérale, on ne peut pas, M. le Président, le faire sans se questionner sur la position que prend le Parti libéral du Québec. Je pense que le député de Chapleau a habillé sous des arguties juridiques et techniques la position du Parti libéral. Il n'en demeure pas moins, aujourd'hui encore... Et ce sont les dépêches de presse qui nous arrivent aujourd'hui. Le premier ministre Chrétien est aujourd'hui à faire la promotion de son projet de loi sur la clarté. Le premier ministre Chrétien, aujourd'hui, dans ses attaques de campagne électorale fédérale, se lance dans une attaque contre Joe Clark, contre le chef du Parti conservateur qui, lui, d'une façon courageuse malgré les dissensions à l'intérieur de son caucus, a défendu les droits de l'Assemblée nationale, les prérogatives des provinces devant un gouvernement fédéral centralisateur, devant un gouvernement Chrétien arrogant et irresponsable, et ce qui est étonnant, c'est de voir que le Parti libéral du Québec, dont on pourrait penser que son chef, qui est issu du Parti conservateur, qui a été un collègue de Joe Clark...

On penserait que, alors que Jean Chrétien aujourd'hui s'attaque à Joe Clark pour avoir défendu le Québec, on s'attendrait à ce que le chef du Parti libéral du Québec, au moins, mette des bretelles à ses culottes ou une ceinture, ou une des deux, pour défendre le Québec et défendre ceux qui furent ses alliés et qui, à un moment critique, eux ont décidé de prendre une position courageuse en faveur du Québec, et ce qu'on voit à la place, c'est une position molle, c'est une opposition libérale un peu en couleuvre, qui se faufile, qui se faufile dans le rang, entre les roches, qui se faufile entre Stéphane Dion puis Jean Chrétien comme les couleuvres se faufilent entre les roches. Ça, c'est la position de l'actuel chef du Parti libéral du Québec et de son parti alors que le Québec est en campagne électorale, alors que les citoyens du Québec sont en droit de se questionner sur celui qui les gouverne et sûrement s'étonneront de l'incapacité, parce qu'on est en campagne.

n(16 heures)n

On l'entend parfois. Pour avoir l'air d'un pseudonationaliste, on entend le chef du Parti libéral du Québec faire des déclarations pour se dissocier un peu du gouvernement fédéral. Mais, lorsque Jean Chrétien est en élection, lorsque le Parti libéral du Canada a son nom sur les bulletins de vote, on sent que le Parti libéral du Québec et son chef au premier chapitre sont bien silencieux, et sont bien tranquilles, et se font complices de la réélection pourtant d'un gouvernement qui, à Ottawa, à toutes les occasions, a démontré son incompréhension du Québec, son incompréhension des provinces. Parce qu'il ne faut pas seulement en faire une affaire avec le Québec. On a vu, avec l'Alberta, on a menacé autant en Alberta qu'au Québec de couper les vivres en matière de santé durant la campagne.

Et j'aurais aimé, moi, entendre le chef de l'opposition officielle à l'Assemblée nationale être un peu plus courageux, nous parler d'une façon un peu plus courageuse des positions, comment, lui, il voyait, en l'an 2000, les positions de Jean Chrétien, comment il voyait la façon dont les relations entre ce gouvernement fédéral et les provinces devaient se conduire. Et peut-être qu'il les compare avec, par exemple, ce que son ami, celui qui lui a toujours été fidèle, Joe Clark, prend comme position et ce que Stockwell Day peut prendre comme position avec l'Alliance canadienne en matière de décentralisation. Il me semble qu'il y a suffisamment de différences entre des partis qui ont une vision sur comment l'avenir du Canada pourrait se définir, il me semble qu'il y a suffisamment de différences entre ces partis-là et le Parti libéral du Canada pour qu'on s'attende à ce que le chef du Parti libéral du Québec, au nom des intérêts du Québec, nous donne des indications, des réflexions sur des différences qu'il voit ou qu'il se refuse de voir.

Et, le projet de loi sur la clarté, on va être obligé de se souvenir que, bien qu'il l'ait mis mal à l'aise, bien que ça ait créé pour le Parti libéral du Québec des petites chairs de poule à certains moments puis des petites indignations, dans les faits, lorsque est venu le temps à l'Assemblée nationale de se lever, quand le chef du Parti libéral va se lever de sa chaise, il va le faire au moment qui fait plaisir à Jean Chrétien. C'est ce dont on va se souvenir au lendemain du débat. Il y aura eu 1 001 déclarations, mais le chef du Parti libéral du Québec nous a annoncé qu'il allait prendre ici, à l'Assemblée nationale, le vote qui fait l'affaire du Parti libéral du Canada, et je pense que les citoyens du Québec auront à un certain moment l'occasion de se questionner sur la capacité de quelqu'un qui se fait complice de la centralisation, la capacité de quelqu'un qui se fait complice d'un projet de loi comme celui sur la clarté, de quelqu'un qui se fait, bon, je comprends, par 1 001 ficelles qui l'accrochent, à la fois, peut-être malgré lui... mais qui se retrouve baigné dans un plan B qu'il dénonçait il n'y a pas si longtemps, mais qui se retrouve aujourd'hui, en pleine campagne électorale fédérale, au moment où ça compte ? parce que c'est souvent là qu'il faut juger les gens, c'est au moment où ça compte ? à baigner dans toute la suite du plan B du gouvernement fédéral.

Pourtant, pour tous ceux qui souhaitent un Canada qui fonctionne d'une façon un peu plus souple, pour tous ceux qui souhaitent que ça signifie quelque chose, des provinces respectées, on se serait attendu à ce que ces gens-là ? puis il y en a beaucoup, au Québec, de gens qui souhaitent qu'on commence à avoir une coopération à l'intérieur du système, qu'on arrête la vision d'un gouvernement fédéral qui approche les choses sous l'angle de l'affrontement ? au Québec, durant la campagne électorale, s'expriment. Et, moi, je m'étonne, compte tenu de son cheminement politique, compte tenu de son passage lui-même chez les conservateurs...

L'actuel chef de l'opposition officielle à l'Assemblée nationale faisait quand même partie de ceux qui, pendant une bonne période, défendaient Meech, faisait partie de ceux qui ont vu, comme moi... J'étais à l'époque au Parti libéral du Québec, l'actuel chef de l'opposition était au Parti conservateur fédéral, et nous avons vu conjointement Jean Chrétien aller torpiller les accords du Lac Meech. Pas surprenant aujourd'hui de le retrouver enrubanné, ficelé dans les suites des actions de ce même Jean Chrétien qui, de son côté, n'a jamais cessé ses luttes, n'a jamais cessé ses offensives, n'a jamais modifié sa philosophie par rapport à la place des provinces dans le système. Il l'a redit, d'une façon beaucoup plus claire d'ailleurs au débat en anglais que dans le débat en français, tristement, comment la vision d'un gouvernement central fort et des provinces qui prennent leur place, qui prennent leur trou, qui ne disent pas un mot, à quel point c'est sa vision.

Alors, M. le Président, voilà qui met fin à un débat, tout en sachant ? je voulais faire ces quelques remarques ? bien certainement que, s'il y avait eu une réplique digne de l'Assemblée nationale et digne de ce que les citoyens attendaient qu'il se fasse dans cette Assemblée nationale, elle n'aurait pas dû se faire à ce moment-ci, elle aurait dû se faire bien avant, elle aurait dû se faire dans un autre mode qui n'est pas possible, ce mode d'affirmation de l'Assemblée nationale, compte tenu des forces qui à l'heure actuelle dirigent l'Assemblée nationale. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, sur ce même sujet, je vais céder maintenant la parole au député de Frontenac. M. le député de Frontenac, la parole est à vous.

M. Marc Boulianne

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, à titre de membre de la commission des institutions, je suis très heureux d'intervenir sur le projet de loi n° 99 réimprimé qui reconnaît le droit du Québec de disposer librement de son avenir et qui réaffirme avec conviction ce principe sacré de la reconnaissance de notre identité nationale qui a toujours été la préoccupation historique du Québec dans le temps et dans l'espace.

En effet, M. le Président, en 1867, lorsque les Pères de la Confédération décidèrent de créer le Dominion du Canada, le sentiment général, tant chez les chefs nationalistes que dans la population du Québec, fut effectivement d'obtenir cette garantie de retrouver inscrits dans la nouvelle Constitution l'existence et les droits des peuples fondateurs. D'ailleurs, les journaux de l'époque n'ont pas manqué de souligner cet engagement. Ce fut le cas notamment de La Minerve de Montréal qui, à propos de la nouvelle Constitution, écrivait ceci: «La population y voit la reconnaissance de la nation canadienne-française comme une nationalité distincte et séparée. Elle y voit de plus la reconnaissance formelle de notre indépendance nationale.»

Malheureusement, M. le Président, dès le lendemain de la Confédération, la réalité se révéla cependant moins glorieuse, car le premier ministre du Canada de l'époque, John A. Macdonald, se chargea rapidement de remettre les pendules à l'heure et de ramener le Québec à une triste réalité en démontrant que la notion de peuple avait fait place à un étalement de pouvoirs provinciaux et que le Canada uni d'alors n'avait pas été scindé pour permettre au Québec de s'épanouir, mais bien plutôt pour répondre au désir unitaire des Ontariens.

Pour plusieurs observateurs, la question demeure toujours d'actualité, à savoir que l'Acte de l'Amérique du Nord britannique ne fut-il pas une constitution basée sur une fausse représentation en laissant croire à la population du Canada-Est de l'époque que ses droits à titre de peuple seraient reconnus? Une chose est certaine, M. le Président, et notre histoire nationale nous le démontre, le Canada fut et est un éternel compromis qui se fait en faveur de la majorité démographique. Et on ne se gêne pas pour faire fi des règles même du fédéralisme pour mieux servir les intérêts des «Canadians» et refuser de reconnaître le peuple québécois.

M. le Président, aujourd'hui, en l'an 2000, plus que jamais cette hantise de nier la notion de peuple et de chambouler les droits du Québec en limitant les revendications québécoises spécifiquement à des revendications provincialistes domine encore le paysage politique québécois. Malheureusement, dans un Québec prêt à vivre sa modernité, nous l'avons vu, les attaques viennent de partout, orchestrées encore d'une façon outrancière par le gouvernement fédéral, appuyé en cela par le Canada anglais, les fédéralistes, les organismes et associations anglophones du Québec, les autochtones et, enfin, par le Parti libéral du Québec qui ferme cette procession d'opposants. De toute évidence, M. le Président, le gouvernement fédéral, reprenant aujourd'hui le bâton du pèlerin John A. Macdonald, veut s'arroger le contrôle de la question et de la majorité nécessaire à la place des députés de l'Assemblée nationale en nous retirant d'une façon pour le moins humiliante, à nous, les députés dûment élus par le peuple du Québec, ce droit fondamental de décider de notre destin.

La loi C-20, M. le Président, puisqu'il faut l'appeler par son nom, loi qualifiée par Jean Chrétien comme la loi la plus importante que le Parlement ait adopté en 25 ans, est une loi futile, inconstitutionnelle et n'a pas de légitimité. Claude Ryan lui-même, un bon libéral, l'a qualifiée d'inutile et d'antidémocratique. Il faut se rappeler, M. le Président, que la loi C-20, dite «loi sur la clarté», vise à encadrer un prochain référendum sur la souveraineté du Québec au niveau de la question et du pourcentage et, de plus, donne au Parlement fédéral le pouvoir de s'immiscer entre la Législature du Québec et son électorat pour juger d'un acte de l'Assemblée nationale. Alors, ce n'est pas seulement une insulte à l'intelligence des citoyens québécois, comme l'écrivait Michel Venne dans Le Devoir du 24 mars 2000, mais c'est également une tentative d'intimidation et d'inhibition des Québécois.

En plus de se donner le pouvoir d'intervenir dans le processus référendaire avant même que les électeurs aient eu la possibilité de se prononcer, le Parlement fédéral nie au Québec le droit à l'autodétermination que lui confère d'ailleurs la Cour suprême du Canada dans le renvoi de 1998.

n(16 h 10)n

C'est honteux, M. le Président, que le gouvernement fédéral libéral canadien ait adopté la loi C-20, indigne d'un pays démocratique, comme prétend l'être le Canada. C'est honteux aussi, M. le Président, ceux qui continuent de perpétrer ce mépris historique envers le Québec, et honte à ces politiciens et leur ambition personnelle qu'ils cherchent à satisfaire sur le dos des Québécois, sur ceux qu'ils considèrent encore non pas comme un peuple, mais comme des porteurs d'eau. Il faut s'opposer avec fermeté à la loi C-20, il faut la dénoncer avec vigueur. Il faut défendre le projet de loi n° 99 envers et contre tous.

En ce qui concerne les opposants au projet de loi, j'ai choisi deux catégories: les autochtones et le Parti libéral.

En ce qui concerne l'attitude des autochtones, la question qui s'impose et qui nous vient à l'esprit, d'une façon spontanée, invite à la réflexion. En effet, est-ce que le fait de dénoncer, comme le font actuellement les autochtones ? et on l'a vu d'ailleurs en commission ? avec vigueur la démarche souverainiste du Québec comme un acte de spoliation et de disgrâce, est-ce que cette dénonciation va mieux servir leur démarche autonomiste? Au contraire, ne devraient-ils pas, M. le Président, au nom des idées qu'ils ont toujours défendues et que le peuple québécois aussi défend, s'unir dans un même combat pour la reconnaissance des peuples, comme ils l'ont déjà fait dans le passé?

En ce qui a trait à l'opposition officielle, M. le Président, le député de Rivière-du-Loup en a parlé tout à l'heure, et tous reconnaissent que son comportement est déroutant, d'autant plus qu'il contredit la position traditionnelle et historique du Parti libéral face à la situation d'une telle gravité. Son leitmotiv de se dire contre la loi C-20 et de voter contre la loi n° 99 commence à s'effriter, étant donné la contradiction flagrante d'une telle position. L'histoire juge sévèrement ces contradictions qui défendent mal les intérêts d'une nation.

M. le Président, la loi n° 99 concernant le droit du peuple du Québec de disposer de son avenir sera adoptée prochainement à l'Assemblée nationale. Elle consacrera, une fois pour toutes, le droit du Québec à se prendre en main et à refuser de se faire imposer, de l'extérieur, un cadre à l'intérieur duquel le Québec pourra exercer sa souveraineté.

En terminant, M. le Président, dans le contexte de la loi n° 99, la déclaration de René Lévesque trouve toute sa signification, et je le cite: «Nous avons la maturité et la taille pour assumer nous-mêmes notre destin.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Frontenac. M. le leader... Oui, M. le député de...

M. Pelletier (Chapleau): Oui, selon l'article 213, M. le Président, j'aimerais poser une question au député.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que M. le député de Frontenac permet au député de Chapleau de lui poser une question?

M. Boulianne: Non, je refuse, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous refusez. Alors, il n'est pas possible de vous poser une question. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je voudrais faire motion pour ajourner le débat.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion du leader du gouvernement, de l'ajournement du débat, est adoptée? Adopté. Donc, la motion d'ajournement est adoptée.

M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je voudrais vous référer maintenant à l'article 8 de notre feuilleton, M. le Président.

Projet de loi n° 140

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 8, Mme la ministre de la Famille et de l'Enfance propose l'adoption du principe du projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale.

Alors, compte tenu que la porte-parole de l'opposition officielle en cette matière... Je vais suspendre quelques instants les travaux.

(Suspension de la séance à 16 h 14)

(Reprise à 16 h 15)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...assurance parentale, et je cède la parole à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre, vous avez la parole.

Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, nous franchissons aujourd'hui une nouvelle étape en vue de doter les Québécoises et les Québécois d'un régime d'assurance parentale adapté à la réalité québécoise. Il s'agit en fait d'accorder à tout travailleur admissible des prestations pour un congé de maternité, un congé de paternité et un congé parental pris consécutivement à la naissance d'un enfant ainsi qu'un congé d'adoption d'un enfant mineur.

Le projet démontre bien que le gouvernement est à l'écoute des besoins des familles québécoises et des revendications des divers milieux, tant des associations patronales et syndicales que des groupes de femmes. Il propose en conséquence un véritable régime québécois d'assurance parentale, un régime dont le besoin fait consensus au sein de la société québécoise. Le projet de loi répond en outre aux demandes historiques formulées par divers groupes sociaux. De plus, à l'automne 1996, lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, et en février 2000, lors du Sommet du Québec et de la jeunesse, ces mêmes groupes avaient réitéré leur souhait d'obtenir un programme québécois de congés parentaux bonifiés.

Le régime d'assurance parentale proposé par le projet de loi n° 140 se veut plus généreux à l'égard des parents comparativement à ce qui existe déjà au pays, voire même dans toute l'Amérique du Nord. Il présente un relèvement substantiel du soutien accordé par l'actuel régime fédéral d'assurance emploi afin de mieux répondre aux besoins des familles d'aujourd'hui et de tenir compte des réalités nouvelles du monde du travail.

Voici comment cette générosité se concrétise dans le cadre du projet de loi n° 140 que le gouvernement du Québec, d'une part, veut mettre sur pied pour le 1er janvier 2002. L'actuel régime fédéral d'assurance emploi, qui assure ce congé de maternité présentement, n'est pas aussi avancé que celui du Québec, malgré que le fédéral fasse fi du consensus québécois pour ce projet de loi n° 140 et décide d'améliorer un peu le sien ? si peu.

Au niveau de l'accessibilité, M. le Président. Sur le plan de cette accessibilité, les travailleurs autonomes auront désormais accès à un programme de congés parentaux. Donc, c'est nouveau, dans le nouveau régime québécois d'assurance parentale, de donner accès à ces travailleurs autonomes, quand on sait d'ailleurs que beaucoup de travailleurs autonomes se retrouvent chez les femmes. Il s'agit d'une importante disposition du régime, puisqu'elle tient compte de la récente évolution du marché du travail. En effet, en 1996, plus de 14 % des Québécoises et des Québécois étaient des travailleurs autonomes. De plus, nous savons qu'en 20 ans le nombre de travailleurs autonomes a augmenté de plus de 235 %, alors que le nombre de salariés n'augmentait, lui, que de 28 %.

Au niveau des heures minimales, donc le plancher d'heures minimales, l'accessibilité sera également améliorée pour les travailleurs à temps partiel. Le régime fédéral, qui entrera en vigueur le 1er janvier prochain, exigera d'avoir travaillé un minimum de 600 heures afin d'être admissible ? actuellement, c'est 700 heures ? à des prestations de maternité ou de paternité. Nous jugeons que cette mesure discrimine trop de couples québécois. C'est la raison pour laquelle nous avons convenu que le seuil du revenu annuel admissible ne sera plus que de 2 000 $. Alors, au lieu de 700 heures, et que le fédéral arrive avec 600 heures au 1er janvier prochain, on croit que c'est plus admissible que le seuil du revenu soit plutôt de 2 000 $; en dollars plutôt qu'en heures.

n(16 h 20)n

L'élimination aussi du délai de carence. Le projet de loi prévoit que Québec verserait le revenu dès le moment d'un congé. La notion de délai de carence évoque bien pourquoi un régime d'assurance emploi est incompatible avec un programme d'assurance parentale. Il est compréhensible qu'un gouvernement exige une certaine période, c'est-à-dire deux semaines, afin d'inciter un travailleur à entreprendre des démarches pour se trouver un emploi. Mais, dans le cas d'un congé parental, cette logique ne tient plus et elle pénalise indûment les couples qui choisissent d'avoir des enfants, et c'est ce qu'on appelle ce délai de carence.

Le soutien particulier au rôle du père. Comme je le mentionnais plus tôt, le régime d'assurance parentale que nous désirons mettre en place est adapté à la réalité de la vie moderne des familles québécoises. Une autre de ces réalités est l'implication de plus en plus importante des pères dans les soins et l'éducation de leurs enfants. On voit de plus en plus ces jeunes pères s'impliquer. Dans le futur régime d'assurance parentale québécois, ils seront désormais éligibles à un congé de paternité variant de trois à cinq semaines. Je souhaite vous rappeler que rien n'est prévu spécifiquement pour les pères dans le régime proposé par Ottawa.

Au niveau du taux de la prestation. Il n'y a pas que l'accessibilité qui est déficiente dans le régime fédéral actuel; l'aide financière, également. Comme chacun sait, l'assurance emploi prévoit un niveau de remplacement du revenu de travail dans une proportion de 55 % du salaire assurable. Il vaudrait sans doute la peine de rappeler qu'un grand nombre de pays européens offrant des programmes d'assurance parentale leur garantissent, aux nouveaux parents, des taux variant entre 75 % et 100 %. Actuellement, notre régime d'assurance emploi, je le répète, est à 55 % du revenu assurable. Donc, si vous avez un salaire, actuellement, de ? je vous donne comme exemple ? 35 000 $, c'est à 55 % de votre salaire pour un congé, actuellement, de maternité ou parental.

Un régime avec deux options. Alors, c'est ce qui est nouveau dans le nouveau régime québécois d'assurance parentale. Il était impératif de redresser la situation également sur le plan de la souplesse afin de mieux convenir aux besoins de chacun. Les parents pourront donc choisir, entre deux options, celle qui leur convient le mieux, soit un congé plus long, de 50 semaines, avec un taux de remplacement moindre, ou un congé plus court, de 40 semaines, en fait, avec un taux de remplacement supérieur.

Regardons maintenant le détail de chacune de ces options. Avec l'option A du régime proposé, le montant des prestations équivaudrait à 70 % du revenu hebdomadaire moyen pour les 25 premières semaines de congé ? maternité, paternité ou parental ? et le taux des prestations serait de 55 % pour les semaines restantes du congé parental ou du congé d'adoption. Donc, l'option A, c'est 25 semaines à 70 % de ton revenu assurable, et un autre 25 semaines à 55 %, ce qui fait un total de 50 semaines.

Par ailleurs, celles et ceux qui choisiront l'option B verront leur niveau de prestations couvrir, quant à elles, 75 % de leur revenu brut, et ce, pendant 40 semaines. Donc, l'option A est celle d'avoir 70 % pour 25 semaines, et 55 %, pour le dernier 25 semaines; l'option B, quant à elle, c'est de couvrir 40 semaines à 75 % du revenu, quand on sait qu'actuellement, dans le régime actuel, c'est 25 semaines à 55 %.

Le travailleur de classe moyenne. Nous croyons qu'il est aussi important d'améliorer la situation des travailleurs à moyen revenu. Le revenu maximal que nous assurerions sera donc maintenant fixé à 52 500 $, l'équivalent de celui en usage à la Commission de la santé et de la sécurité du travail ? la CSST ? soit 13 500 $ de plus que la limite fixée par le régime fédéral. Donc, nous, notre régime actuel est de 39 000 $ ? le revenu assurable; nous l'augmenterions jusqu'à 52 500 $. Donc, si vous avez un revenu de 80 000 $, le maximum qu'on pouvait assurer dans le régime actuel était jusqu'à 39 000 $; donc, vous aviez 55 % du 39 000 $. Maintenant, vous auriez 55 %, si vous choisissez celle-là, à 52 500 $. De plus, la récupération fiscale, pour ceux et celles qui gagnent plus de 48 750 $, sera abolie dans le régime québécois.

Alors, c'est un geste concret aussi de soutien à la famille. Il était temps d'agir, M. le Président, il était temps de mettre fin définitivement à une aberration contre laquelle d'aucuns protestent et qui perdure depuis un quart de siècle. Il était temps de cesser d'assimiler l'arrivée d'un enfant à la perte d'un emploi. Il est impensable qu'encore de nos jours les femmes et les hommes qui doivent s'absenter du travail pour la naissance d'un enfant ou pour en prendre soin pendant les premiers mois soient traités ici comme ceux qui se retrouvent en chômage.

Il ne faut surtout pas se méprendre sur la motivation du Québec. Peu importe les ouï-dire et les qu'en-dira-t-on, le Québec ne cherche pas ici à se quereller avec le fédéral, il cherche plutôt à offrir une bonne façon de doter les parents québécois d'un véritable congé parental en remplacement d'une mauvaise adaptation de l'assurance emploi.

Tous ici sont d'accord avec le fait que le Québec doit être le maître d'oeuvre de sa politique familiale. Qui oserait nier la pertinence du projet de loi et refuser d'améliorer le sort des parents québécois dans un contexte démographique où plusieurs indices montrent combien impérieuse est la nécessité d'agir? Le Québec a besoin d'enfants. En effet, en une décennie, la proportion des naissances au Québec par rapport à l'ensemble du Canada est tombée de 24,2 % à 21,3 %. Le taux de natalité au Québec est à 1,47 %. Ça fait partie de l'ensemble des difficultés que vivent les pays occidentaux.

Alors, bien sûr, quand on se donne une politique familiale, cette politique familiale là peut aider et peut donner le petit coup de pouce aux parents pour avoir des enfants. On sait très bien que ce n'est pas nécessairement des politiques natalistes dont les sociétés ont besoin ? elles se sont avérées en général très peu aidantes ? mais des politiques sociales qu'une société peut se donner pour aider, soutenir les familles à avoir des enfants. Donc, évidemment, le régime d'assurance parentale ne peut pas en lui-même renverser cette tendance démographique, mais mieux appuyer les jeunes familles qui font le choix d'avoir des enfants. Alors, pour mieux soutenir les parents, l'État doit poser des gestes concrets, un meilleur congé parental en est un.

Le régime proposé ne devrait surprendre personne, M. le Président, cela fait trois ans que le Québec, dans le plus strict respect de ses compétences constitutionnelles et de l'état de la législation en vigueur au Canada, propose la mise en place d'un tel régime. Nous avons cru, sincèrement, malgré la difficulté des négociations, qu'Ottawa saurait éventuellement faire preuve d'ouverture. Pour notre part, nous avons tenté par le passé et nous tentons toujours de négocier de bonne foi avec les autorités fédérales.

Nous demandons bien raisonnablement, M. le Président, une réduction du taux de cotisation à l'assurance emploi basée sur la moyenne nationale. Ottawa s'y objecte, comme il s'objecte au fait que le Québec veuille se doter de son propre régime d'assurance parentale. Il semble donc que le désaccord tiendrait plus à une question de principe qu'à un calcul des compensations. D'ailleurs, la loi fédérale sur l'assurance emploi prévoit une option de retrait. Si Ottawa s'entêtait à ne pas vouloir négocier de bonne foi, nous n'hésiterons pas comme gouvernement à faire valoir notre point devant les tribunaux.

Vous l'aurez compris, M. le Président, le régime d'assurance parentale proposé ici nous tient particulièrement à coeur, s'inscrivant dans le cadre d'une politique familiale globale que le Québec continue de développer. Grâce à ce régime, le Québec sera en mesure d'ajouter un autre volet essentiel à sa politique familiale, complétant ainsi la mise en oeuvre du réseau des services de garde et l'instauration d'une nouvelle allocation familiale couvrant l'ensemble des besoins essentiels des enfants.

n(16 h 30)n

On se souvient de la politique familiale qui a été, de longue haleine, je pourrais dire, le travail de tous nos groupes et de toutes les associations et de tous ceux qui ont eu intérêt à ce que le Québec se dote d'une politique familiale. Évidemment, lors du Sommet sur l'économie et l'emploi, le gouvernement du Parti québécois, M. Bouchard, en voulait davantage, parce que les acteurs sociaux et tous les acteurs économiques et communautaires du Québec qui se sont retrouvés là ont vu une des priorités, celle de la conciliation famille-travail. On a de plus en plus de femmes sur le marché du travail, on a de plus en plus de familles où tous les deux travaillent sur le marché du travail, on a de plus en plus, d'ailleurs, de familles monoparentales aussi; il était important de se doter d'une politique familiale qui était attendue depuis plusieurs années au Québec.

C'est pourquoi notre politique familiale se dote de trois dispositions, particulièrement celle de l'allocation familiale, celle des services de garde à 5 $ et, bien assurément, ce dont nous parlons aujourd'hui, celle de l'assurance parentale. Alors, nous en sommes aujourd'hui à vouloir adopter ce principe d'assurance parentale. Alors, grâce à ce régime, le Québec sera en mesure d'ajouter un autre volet essentiel à sa politique familiale.

En se dotant d'un tel régime, M. le Président, d'assurance parentale, le Québec ne fait pas que consolider sa position de leader en matière de politique familiale déjà largement reconnue par la mise en place des services de garde à 5 $, comme en témoignent d'ailleurs plusieurs articles dans divers quotidiens canadiens et américains, mais il contribue à améliorer de façon concrète et tangible la vie de millions de Québécois.

Nous savons, M. le Président, combien la présence de la mère et du père auprès de leurs enfants, et ce, dès les premières semaines suivant la naissance ou l'adoption, importe pour le développement des enfants. Le régime proposé est aussi souhaité par tous les Québécois et Québécoises, presque sans exception. Nous avons entendu plusieurs groupes en commission parlementaire, et les gens appuient... les groupes appuient le projet de loi que nous présentons ici aujourd'hui, notre projet de loi n° 140. Nous avons aussi l'opposition qui a appuyé en commission parlementaire.

Alors, M. le Président, grâce à lui, nous atteindrons les objectifs que nous nous sommes collectivement donnés quant à la conciliation des responsabilités familiales et du travail. C'est donc pour répondre à des besoins que tous jugent essentiels au Québec que nous proposons aujourd'hui l'adoption de principe du projet de loi n° 140 sur l'assurance parentale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance et également députée de Pointe-aux-Trembles. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en semblable matière, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour de prendre la parole au niveau de l'adoption de principe du projet de loi n° 140, Loi sur l'assurance parentale, Bill 140, An Act respecting parental insurance.

M. le Président, il est clair que le projet de loi n° 140, tout le programme d'assurance parentale, est un projet de loi et un programme d'envergure, d'une importance capitale à plusieurs niveaux pour les Québécois et Québécoises.

Je vais faire un bref résumé, M. le Président, du programme tel que proposé par le gouvernement. Le projet de loi met en place un programme de congé parental qui sera mis en vigueur le 1er janvier 2002. C'est un programme québécois conçu par le gouvernement du Québec afin de répondre à des besoins particuliers des familles québécoises.

M. le Président, la proposition devant nous élargit effectivement l'accessibilité aux congés parentaux comparé au régime actuel d'assurance emploi du gouvernement du Canada. L'accessibilité est élargie à cause de l'inclusion des travailleurs autonomes, qui ne sont pas couverts présentement dans le programme canadien d'assurance chômage, par le biais de l'assurance emploi pour les congés de maternité. Les travailleurs autonomes ne sont pas couverts par ce programme, on propose de les couvrir dans le programme québécois.

On propose également, M. le Président, de couvrir tout salarié qui a des revenus de travail de 2 000 $ ou plus dans l'année de référence précédente. Alors, effectivement ça élargit beaucoup l'application des congés parentaux québécois, ça touche beaucoup plus de monde.

Le programme de congé parental est composé de quatre éléments: le congé de maternité, qui est pris uniquement par la mère; le congé de paternité, qui serait réservé au père; le congé parental, qui peut être divisé entre un des deux parents; et le congé d'adoption, pour les familles font le choix d'adopter un enfant. Alors, c'est les quatre grands éléments: congés de maternité, de paternité, parental et d'adoption. La période des congés varie selon la catégorie et selon les options choisies, mais elle varie de 40 à 55 semaines, selon l'option choisie et selon la catégorie des congés. Et le taux de remplacement de salaire, M. le Président, varie de 70 % à 55 %, également dépendamment du choix, dépendamment de la période à laquelle réfèrent les divers éléments du programme.

Pour l'option B, c'est ça qui est décrit comme l'option B dans les tableaux du gouvernement... l'option la plus longue, le taux de remplacement sera de 70 % du salaire brut pendant 30 semaines et 55 % pendant les autres 25 semaines, pour le total possible de 55 semaines. Si on choisit la période la plus longue, M. le Président, alors 70 % de taux de remplacement de salaire pendant 30 semaines et 55 % pendant les autres 25 semaines. L'option B, qui est l'option un peu plus courte, plus intense, le taux de remplacement de salaire est de 75 % pendant 40 semaines. Et le congé d'adoption est établi à 35 semaines. Tel qu'a indiqué la ministre, le maximum de revenu assurable, c'est-à-dire le plafond qui est actuellement avec le programme d'assurance emploi, fixé à 39 000 $, est porté à 52 500 $, c'est-à-dire que le remplacement de salaire est plus important non seulement dans le taux de remplacement, c'est-à-dire le 70 %, mais également dans la partie de salaire assuré entre 39 000 $, présentement, et 52 500 $, proposé.

Alors, ça décrit un peu les paramètres du programme, M. le Président. C'est clair que le programme proposé dans le projet de loi n° 140 a des avantages nets sur le programme d'assurance emploi, le programme de congé de maternité existant, même bonifié par le biais du programme d'assurance emploi. Et on se rappelle que ce programme va passer de 26 semaines à 52 semaines à partir du 1er janvier 2001, mais le taux de remplacement de salaire reste à peu près le même, à 55 %, et, pour se qualifier, les conditions restent à peu près les mêmes, elles sont adoucies un peu. Mais c'est clair que le programme qui est devant nous, contenu dans le projet de loi n° 140, bonifie à plusieurs égards le programme de congé de maternité sous le régime de la Loi sur l'assurance-emploi du gouvernement du Canada.

n(16 h 40)n

M. le Président, il est également un programme, une proposition d'envergure à cause des ressources consacrées à ce programme. On parle d'un coût annuel de l'ordre de 666 millions de dollars. 666 millions de dollars, c'est deux tiers de milliard, c'est beaucoup, beaucoup, beaucoup d'argent. Et il faut se rappeler de temps en temps en cette Chambre que ce n'est pas notre argent, le 666 millions de dollars, ce n'est pas l'argent du gouvernement du Québec, c'est l'argent des contribuables. C'est ça qui est à la base de tous nos gestes, ici, en ce Parlement.

Alors, comment est-ce qu'il est financé, ce 666 millions de dollars par année de coût? Le gouvernement estime qu'il faut aller chercher à peu près 576 millions de dollars en cotisation, et, un peu plus loin, j'expliquerai comment on va décortiquer ces sommes, M. le Président. Mais, essentiellement, la part du lion de ces 666 millions de dollars vient des cotisations des Québécois et Québécoises qui sont sur le marché du travail.

Le gouvernement du Québec va injecter 60 millions de dollars en argent neuf, chaque année, jusqu'à ce que le fonds, peut-être, se balance ou se mette en équilibre; en tout cas, on verra l'évolution de cette contribution gouvernementale. Alors, 60 millions de dollars d'argent neuf, par le gouvernement du Québec, et le gouvernement va réinvestir 30 millions de dollars d'économies générées par leurs programmes.

Les économies sont générées, M. le Président, par l'abolition du programme PRALMA, qui comble le délai de carence de deux semaines, et par les économies générées avec des conventions collectives des employés, même du gouvernement du Québec. Alors, comme employeur, le gouvernement du Québec va sauver de l'argent, et, en abolissant le programme PRALMA, on va réinvestir cet argent qui est estimé à l'ordre de 30 millions de dollars par année dans leur programme pour arriver à 666 millions de dollars. So, you see, Mr. Speaker, that this program is a major, major development here, in Québec. We are talking about a program that broadens accessibility to parental-leave benefits, that improves the indemnity paid to parents. And, as you know, Mr. Speaker, you and I, of course, both have children, there are some lighthearted conversations around the table occasionally ? certainly on our side of the room ? as to whether or not these proposals could apply retroactively. There would be a number of us in this House who, as I say, tongue in cheek, Mr. Speaker, would be interested in having these benefits apply retroactively. I think of my colleague, the MNA for Jacques-Cartier, with five children. Had these types of benefits been in place when his children were born, it would have represented a great deal of money and source, probably, of comfort to his family, as it would have to mine. But we know full well that these programs cannot apply retroactively, and as I say, Mr. Speaker, these comments are made tongue in cheek, of course. We always are careful about making these types of comments tongue in cheek because they can be misinterpreted by people who, perhaps, have «un esprit un peu plus malin», M. le Président.

And so, we are always careful about these types of comments. But, as I say, Mr. Speaker, it broadens accessibility, it improves the indemnity paid to parents. It broadens the period of coverage from the current 26 weeks; it will be 50 weeks via the federal program, as of January 1, 2001. But it goes a little further than that; it brings in a series of leave for the father, for the mother, a leave that can be shared by one or both parents, and adoption.

Of course, associated with that, Mr. Speaker, is the fact that it is a costly program, it is expensive. No one can deny the expense of the program. I'm not suggesting, Mr. Speaker, that it's too expensive. I don't want to really get into that debate. I don't want my remarks to be interpreted as necessarily negative, under these circumstances. But there is a cost, a high cost associated with this program at $666 million, and which is, of course, the money that is given to us to administer as Parliamentarians, Mr. Speaker, from Quebeckers.

Alors, un débat s'impose, M. le Président, sur le projet de loi comme tel. Je comprends, il y a un consensus; je dirais, oui. Je partage cette opinion qu'il y a un consensus, au Québec, quant à la mise en application d'un tel projet de loi, d'un tel programme. Mais il n'empêche pas qu'il faut examiner, je pense, de très près toutes les modalités du projet de loi, tous les impacts du projet de loi, M. le Président, afin de s'acquitter correctement de nos responsabilités comme parlementaires.

M. le Président, je ne vous surprendrais pas en disant que l'opposition officielle est d'accord sur les principes du projet de loi n° 140. On s'est affichés en ce sens lors de la présentation du projet de loi en juin dernier, lors des conférences de presse, en commission parlementaire. Pourquoi est-ce qu'on est d'accord, M. le Président? Bien, c'est très clair. Nous avons un taux de natalité très inquiétant au Québec, très inquiétant. On ne réussit pas à régénérer, si je peux utiliser ce terme-là, on ne réussit pas à atteindre un taux de natalité pour maintenir ou même imposer une certaine croissance démographique au Québec. D'ailleurs, je lisais tout récemment, je pense que c'était hier ou avant hier, que l'année 1999 était la pire année en termes de naissances au Québec depuis 1910, n'est-ce pas, avec 93 000 naissances au Québec. La pire année depuis 1910 en termes de naissances au Québec. Et on a le phénomène du vieillissement de la population. Alors, c'est clair qu'il faut encourager de jeunes Québécoises et Québécois à avoir des enfants. Ça, c'est clair.

La ministre a parlé des politiques natalistes qu'on a essayées dans le passé avec des résultats mitigés. La ministre parle de la politique familiale de son gouvernement dans le sens que ça devrait encourager un taux de natalité plus important. On va voir, M. le Président. Mais c'est sûr qu'il faut faire quelque chose pour concilier les responsabilités familiales avec la réalité québécoise d'aujourd'hui. Et la réalité québécoise d'aujourd'hui, c'est que deux femmes sur trois, même avec des jeunes enfants, sont sur le marché du travail. On ne peut pas reculer en disant simplement: C'était d'autant plus facile il y a une trentaine d'années ou une cinquantaine d'années quand les femmes restaient à la maison pour élever les enfants. Il y a des éléments de la société québécoise qui vont peut-être vouloir dire cela, M. le Président, mais on ne peut pas retourner en arrière. Il faut admettre ce qui se passe au Québec. Ce qui se passe au Québec, c'est que deux jeunes femmes sur trois avec des jeunes enfants sont sur le marché du travail.

Et on a le choix soit de mettre la tête dans le sable et de dire: Bien, qu'elles s'arrangent avec leurs troubles. Elles ont fait le choix. J'entends ça de temps en temps, M. le Président. C'est leur choix qu'elles font. On peut dire qu'on ne bouge pas, on ne fait rien pour les aider, ou on peut prendre une attitude un peu plus progressiste et dire: On va tenter d'aider ces familles-là. Parce que, M. le Président, avoir des enfants et élever des enfants, c'est un atout pour tous les Québécois et toutes les Québécoises. C'est un atout pour la société québécoise. Notre ressource naturelle la plus chère, c'est les enfants, M. le Président, n'est-ce pas? Ce n'est pas l'électricité, ce n'est pas d'autres genres de ressources naturelles. Ce n'est pas l'amiante, ce n'est pas le mazout, ce n'est pas le gaz naturel, c'est les enfants. La ressource naturelle la plus importante, c'est les enfants, les ressources humaines. Alors, il faut, quant à moi, encourager, c'est clair, il faut encourager et supporter des gens dans leur choix de vivre.

Alors, nous sommes d'accord, M. le Président, avec le principe. Nous sommes également d'accord, de ce côté de la Chambre, que le Québec doit être le maître d'oeuvre du projet. Ça, il n'y a pas de doute là-dessus. Il n'y a tellement pas de doute là-dessus que j'ai eu l'honneur de présenter, le 13 juin passé, une motion, conjointement avec la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux et ministre de la Famille et de l'Enfance. Et la motion disait ceci, et je cite au texte:

n(16 h 50)n

«Dans l'intérêt des familles québécoises, l'Assemblée nationale demande instamment:

«1° au gouvernement du Québec de tout mettre en oeuvre pour reprendre les négociations sur la question de l'assurance parentale en vue d'en arriver à une entente avec le gouvernement du Canada permettant l'implantation d'un programme québécois qui répond aux besoins des familles québécoises financé, notamment, par une réduction juste et équitable des cotisations pour les employeurs et les travailleurs québécois au programme d'assurance emploi du gouvernement du Canada; et

«2° au gouvernement du Canada qu'il participe de bonne foi à ces négociations et qu'il fasse preuve de plus de souplesse et d'ouverture à l'égard des besoins des familles québécoises et de la maîtrise d'oeuvre du Québec en matière de politique familiale.» Fin de la citation.

Ça ne peut pas être plus clair que ça, M. le Président. Nous pensons fondamentalement que le Québec doit rester, doit être le maître d'oeuvre de la politique familiale et d'un programme d'assurance parentale mieux adapté aux réalités des familles québécoises.

Et, M. le Président, ça va un peu de soi, le Canada est un grand pays, n'est-ce pas, où il y a des variétés régionales importantes dans l'économie, dans le taux de natalité, dans l'organisation du travail, dans le type de travail. C'est un vaste pays, mais un vaste pays comme le nôtre impose de temps en temps des variations dans des programmes sociaux dans le pays en autant qu'on respecte certains standards minimaux, et la Loi sur l'assurance emploi est assez claire là-dessus, M. le Président. Le programme québécois est plus avantageux à bien des égards que le programme de congés de maternité de l'assurance emploi fédéral. Mais c'est un dossier qui ne sera pas réglé par la partisanerie, c'est un dossier qui va être réglé, je pense, du bon vouloir et de la bonne collaboration des deux côtés, des deux parties, c'est-à-dire le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec.

M. le Président, nous avons tenu, la commission des affaires sociales, des consultations publiques sur le projet de loi n° 140, des consultations générales, et on a reçu 26 mémoires et nous avons entendu 21 groupes, des groupes qui ont manifesté des appuis au projet de loi de façon assez généralisée, mais des groupes qui ont également soulevé des réserves à certaines modalités d'application du projet de loi. Mais, nous aussi, de ce côté de la Chambre, l'opposition officielle, le Parti libéral du Québec, on a aussi des réserves sur le projet de loi.

Ça vaut la peine, M. le Président... Et la ministre a fait appel à nos souvenirs pour en parler des trois grands éléments de la réforme de la politique familiale entamée par le Parti québécois: les services de garde, les allocations familiales et les congés parentaux. Ce sont les trois éléments majeurs de la politique familiale du gouvernement actuel. Je pense très humblement que nous avons raison d'être inquiets à certains égards quant à l'implantation du programme d'assurance parentale compte tenu de l'historique de ce qui s'est passé avec les autres éléments de la politique familiale.

Je prends comme exemple les services de garde. La ministre vient, il y a à peine quelques minutes, de parler des articles positifs dans les journaux canadiens et américains au sujet des services de garde au Québec. Oui, je suis obligé de constater qu'il y a de tels articles, mais, par contre, il y a également beaucoup, beaucoup, beaucoup d'articles publiés dans des quotidiens québécois qui sont sévèrement critiques à l'égard de la politique de places à 5 $ par le Parti québécois. Peut-être que le ministre des Régions veut applaudir à ce moment-ci aussi, mais c'est sûr qu'il y a un côté de la médaille, qui est la fierté du gouvernement du Parti québécois, qui est reflété de temps en temps dans des journaux de l'extérieur du Québec au sujet des places à 5 $. Mais, à l'intérieur du Québec, il y a une grogne importante.

Une voix: ...

M. Copeman: Oh! le ministre des Relations internationales, il n'aime pas ça, mais je vais lui citer... J'ai amené des preuves, M. le Président. Je sais qu'il est sceptique de nature, le ministre des Relations... des Relations avec les citoyens. Il est sceptique de nature, et je vais lui citer des exemples.

Une voix: ...

M. Copeman: M. le Président, un peu de patience. C'est sûr qu'il y a un manque criant de places en services de garde. Même le gouvernement est obligé d'admettre qu'il ne peut répondre qu'à 60 % de la demande présentement. Ça veut dire qu'il y a quatre enfants sur 10 qui n'ont pas accès à des places en garderie, depuis l'instauration, qui en veulent ? qui en veulent ? quatre sur 10 qui en veulent et qui n'ont pas accès. Et, de l'autre côté de la Chambre, ils pensent être capables de satisfaire la demande en 2005-2006. Et même à ça... Ça, c'est basé sur une estimation de besoins qui a été faite il y a maintenant plusieurs années, qu'on est en train d'actualiser. Et la ministre a déjà indiqué, elle a fait une certaine mise en garde, a nuancé ça: Peut-être la demande va être encore plus élevée en 2005-2006. Peut-être.

Une voix: Peut-être.

M. Copeman: Bien, oui. Elle a dit: Peut-être. Peut-être, M. le Président. Alors, peut-être, en 2005-2006, on ne réussira pas à satisfaire aux besoins. Je vous prédis, je vais sortir ma boule de cristal, c'est dangereux pour un politicien, mais je vais ressortir ma boule de cristal, je vais prédire que, si nous sommes encore là en 2005-2006, les députés qui seront ici en cette Chambre, on va arriver à la conclusion, la démonstration qu'on ne peut pas satisfaire aux besoins des enfants en places en services de garde.

M. Jolivet: ...

M. Copeman: Le ministre des Régions ne sera pas là, il ne sera pas là pour faire face à la musique à ce moment-là. Mais il y en a peut-être d'autres qui vont être là, et je vais leur rappeler, M. le Président, parce que, moi, j'espère être là, je vais leur rappeler à ce moment-là leur pronostic sur toute cette satisfaction des besoins qui, je suis convaincu, ne s'avérera pas exacte à l'avenir. Manque criant d'espace.

Là, le ministre des Relations avec les citoyens semblait être sceptique quand je lui disais qu'il y a des articles dans des journaux qui sont un peu critiques face aux services de garde. Mais, voyez-vous, le ministre a oublié de lire Le Soleil d'aujourd'hui, semble-t-il, aujourd'hui même, M. le Président. On oublie, dans le passé, des manchettes, la loi de la jungle qui s'impose au niveau des places à 5 $. Alors, aujourd'hui même, dans Le Soleil, un article qui s'appelle: S.O.S. Garderies. Je ne sais pas si le ministre des Relations avec les citoyens a pris connaissance de l'article ? je peux peut-être lui envoyer copie ? publié par Mme Julie Lemieux. Je peux peut-être le déposer pour qu'il en prenne connaissance. Et cet article est très éloquent. Ce n'est pas un agent du Parti libéral du Québec, alors je ne la connais pas, cette personne-là, elle écrit dans Le Soleil, elle est journaliste. Elle dit ceci dans l'article, aujourd'hui le 21 novembre, je la cite au texte: «Malgré tout le ridicule de la situation, peu de familles partent au combat pour dénoncer cette pénurie de gardiennes provoquée par le gouvernement.» Elle continue: «On le répète ? je la cite au texte: C'est le cafouillis le plus total.»

Une voix: ...

M. Copeman: Bien, écoutez, je cite ? la ministre n'aime pas ça. Bien, ce n'est pas moi qui invente des affaires, je cite un article de journal paru aujourd'hui: «C'est le cafouillis le plus total dans les centres de la petite enfance de la région. Des places en garderie, oubliez ça! Ça n'existera pas avant un an ou deux. Qu'elles soient subventionnées ou pas.» Et un peu plus tard, M. le Président, elle décrit de façon très éloquente le dilemme d'une jeune mère, parce qu'elle est une jeune mère puis elle dit, à un moment donné: Est-ce qu'il faut arrêter de travailler? Et je la cite au texte:  «Plusieurs mamans y pensent sérieusement. J'en connais même certaines qui ont dû retarder leur retour au travail, refuser des contrats, faute de gardienne. C'est quand même incroyable qu'on en soit rendu là! En regardant la société aller, on a l'impression de revenir 50 ans en arrière, à l'époque où les femmes n'avaient d'autres choix que de rester à la maison pour s'occuper des enfants et des malades.» Fin de la citation.

n(17 heures)n

Elle continue plus tard en parlant des garderies à 5 $, et je la cite: «L'initiative était sûrement fort louable.» C'est le temps d'applaudir, là, de l'autre bord; applaudissez-vous. «Cinq petits dollars par jour pour faire garder son enfant. C'était merveilleux! Mais c'était aussi trop beau pour être vrai. Aujourd'hui, bien des parents n'en ont rien à foutre de la garderie à rabais. Tout ce qu'ils veulent, c'est trouver un endroit fiable où on s'occupera de leurs enfants.»

Et elle termine cette chronique en disant ceci dans Le Soleil d'aujourd'hui. Ce n'est pas le Suburban, ce n'est pas quelque chose qui s'est passé dans le West Island. Ça doit être un chroniqueur respecté par les ministériels, c'est Le Soleil. Je la cite au texte, M. le Président: «Oui. Il y a sûrement quelque chose à faire. Mais quoi? Monopoliser les lignes téléphoniques du ministère, solliciter encore une fois l'appui des députés, marcher... Je laisse spéculer les expertes en matière de manifestations, mais chose certaine, il faut que ça bouge. Il faut sortir de notre torpeur, mettre un terme à notre résignation. Parce que si ça continue, c'est la carrière de milliers de mères qui sera remise en question.» Fin de la citation. Alors, ce n'est pas ça qu'on voit dans le New York Times, ce n'est pas ça que la ministre cite, ce n'est pas ça qu'on voit dans le Toronto Star, mais c'est la réalité pour des milliers de parents québécois.

M. le Président, la FTQ, lors de son passage devant la commission, a même fait référence au lien possible entre l'implantation d'un programme de congé parental et ce qui s'est passé, par ce gouvernement, dans le passé. Je la cite, à la page 5 de son mémoire, la FTQ. La FTQ, ça intéresse le ministre des Relations avec les citoyens; la FTQ, ce n'est pas nécessairement l'allié le plus connu du Parti libéral du Québec. Est-ce que la ministre ose dire que c'est un agent provocateur du Parti libéral du Québec, la FTQ? Je ne pense pas. Quelle était son observation à la page 5 du mémoire? Je la cite au texte: «Il faut éviter le cafouillage du régime de l'assurance médicaments ? je vais en parler tantôt, M. le Président ? du Québec ou même celui des garderies à 5 $, où le gouvernement avait nettement sous-évalué le niveau de cotisation ou le niveau de besoin.»

Le ministre des Relations avec les citoyens a dit tantôt: On a un programme tellement populaire. Mais un devoir, il me semble, d'une administration responsable, M. le Président, c'est une obligation de planifier comme il faut. N'est-ce pas? Ce n'est pas de lancer des programmes comme on lance, je ne sais pas trop, la neige, quand on est en train de pelleter de la neige. Il faut planifier. Et est-ce que le gouvernement a bien planifié dans la réforme des services de garde? Je dis: Non, ils n'ont pas bien planifié. Ils ont lancé un programme hâtif, ils ont sous-estimé les besoins, ils ont sous-estimé les réactions, ils n'ont pas fait des études préalables. Le tout a été condamné par le Vérificateur général, ce qui a donné le cafouillis qu'on vit présentement et qu'on va vivre jusqu'en 2005-2006.

L'autre élément de la réforme de la politique familiale du gouvernement du Parti québécois: les allocations familiales. Bien, là aussi, M. le Président, je constate, comme beaucoup d'autres Québécois et Québécoises, que la réforme des allocations familiales a porté un effet très néfaste à des milliers, des dizaines de milliers de familles au Québec: 300 000 familles de moins qui reçoivent des allocations familiales; des allocations qui commencent à diminuer autour d'un revenu familial de 20 000 $. Pour le gouvernement du Parti québécois, semble-t-il, un revenu familial avec un enfant, on est riche à 20 000 $. C'est une nouvelle définition de la richesse en tout cas. Alors, on commence à diminuer autour de 20 000 $. À 50 000 $, il n'y a plus d'allocations familiales.

M. le Président, là aussi, la grogne s'installe. La Régie des rentes du Québec est obligée d'ajouter des agents d'information, de doubler les coûts d'administration parce que le monde n'est pas content, et ça donne des éléments très néfastes dans la population, une grogne chez les familles, les familles monoparentales, les familles sur l'aide sociale, les familles de la classe moyenne qui travaillent, qui ne reçoivent plus d'aide par le biais des allocations familiales. C'est le deuxième élément de la réforme de la politique familiale. Alors, quant à moi, M. le Président, des ratés importants sur deux des trois éléments, et on arrive avec l'assurance parentale.

Mais ça ne s'arrête pas là, M. le Président, il y a l'exemple de l'assurance médicaments. Le ministre de la Santé d'alors est ici, en Chambre. On se souvient des discussions, lui et moi, lui avec d'autres membres de la commission des affaires sociales, ici, en cette Chambre, on disait: On n'est pas convaincus qu'à 175 $ par année vous allez couvrir les coûts, pas convaincus que, même en imposant ça puis en prenant de l'argent de la poche des personnes âgées puis des personnes assistées sociales, vous allez atteindre l'objectif que vous visez. Et, en effet, avant l'élection de 1998, prime de 175 $ par personne adulte au Québec; après l'élection, on est presque en faillite, le Fonds de l'assurance médicaments, il faut doubler la prime à 350 $.

Puis je sors une autre prédiction, M. le Président, ma boule de cristal: 350 $ ne seront pas suffisants, il va falloir... parce qu'on a vu récemment le rapport annuel de la RAMQ, les coûts importants au niveau des médicaments. Alors, ce n'est pas assez d'aller piger dans la poche des personnes âgées, d'aller piger dans la poche des personnes assistées sociales, il faut maintenant doubler la prime de 175 $ à 350 $. Je vous prédis que ça ne sera pas assez. Et, nous, on l'avait décrite dans le temps, la loi sur l'assurance non pas médicaments, mais impôt médicaments, parce que, je l'ai dit, quant à moi, c'est une mesure fiscale et non pas une mesure sociale.

Alors, l'assurance médicaments, ratée. La réforme de la santé, ratée. La réforme municipale, on vit présentement le déboire de cette réforme. M. le Président, le gouvernement du Parti québécois a donné une très mauvaise connotation au mot «réforme». À chaque réforme qu'ils ont entreprise, ils ont manqué la cible, ils ont mal planifié, ils ont sous-estimé, sous-évalué, et ça a coûté cher aux Québécois. Et la crainte qu'on a, M. le Président, c'est qu'il y a une possibilité qu'ils fassent la même chose avec les congés parentaux.

Nous avons également, M. le Président, des préoccupations quant au coût et au financement du système. Pour financer un programme qui est un peu plus bonifié, qui est plus généreux, il faut aller chercher de l'argent en quelque part. Les employeurs vont payer 14 millions de dollars de plus en cotisations si le programme d'assurance parentale est implanté et si on est capable de récupérer des cotisations, c'est évident, au niveau que souhaite le gouvernement. Quand même, les employeurs vont payer 14 millions de plus, les travailleurs vont payer 10 millions de plus, les travailleurs autonomes vont payer 20 millions de plus.

Ces augmentations s'expliquent très facilement, M. le Président, il n'y a pas de cachette. J'admets qu'il n'y a pas d'augmentation dans le taux de cotisation ? on se comprend bien ? sauf pour les travailleurs autonomes, parce que c'est un nouveau programme pour eux autres, ils ne se qualifient pas présentement. Mais la contribution supplémentaire des employeurs de 14 millions et des employés de 10 millions vient du fait qu'on augmente le maximum des revenus assurables de 39 000 $, dans le régime actuel, à 52 500 $ à l'avenir. Alors, c'est clair que pour ce 13 000 $ de plus, dépendamment de l'entreprise, dépendamment de la salariée, dépendamment de quelle est la masse salariale de l'employeur, il y a des coûts additionnels à ça: 14 millions de dollars de plus pour les employeurs, 10 millions de dollars pour les travailleurs et une nouvelle cotisation de 20 millions pour les travailleurs autonomes.

n(17 h 10)n

Et pourtant, M. le Président, parmi ces trois groupes-là, on estime, il y a une possibilité que les employeurs fassent des économies au niveau de la contribution à la CSST, des économies qui sont même potentiellement évaluées à 14 millions de dollars. C'est-à-dire que le coût net pour un employeur peut être à peu près égal, quand on calcule l'augmentation de 14 millions et la possibilité, selon l'employeur, d'une réduction de contribution à la CSST d'à peu près 14 millions de dollars, pour un effet nul.

Mais le travailleur, M. le Président, va payer 10 millions de dollars de plus; ça, c'est sûr, parce que, lui, il n'y a pas d'économies générées par la CSST pour lui, il ne paie pas de cotisation à la CSST. Alors, les travailleurs québécois, les travailleuses québécoises vont payer 10 millions de dollars de plus, et les travailleurs autonomes.

Outre ces évaluations, M. le Président, il y a toute la question de l'augmentation potentielle des coûts dans le régime. Si on suit l'exemple de l'assurance médicaments, 175 $ de prime avant l'élection, 350 $ après. Il faut se fier, dans le calcul des coûts, à des actuaires, à la Régie des rentes du Québec, aux autorités du ministère. C'est le même ministère qui a planifié les places à 5 $, hein? Il faut se fier à eux autres pour arriver à la conclusion que les coûts sont bien estimés, que la demande est bien estimée, que le taux de natalité est projeté assez en avant, selon une courbe réelle qui reflète la situation. Il y a beaucoup de variables et, quand on a beaucoup de variables, il y a la possibilité pour des erreurs, pour de la mauvaise planification.

L'autre élément qui est problématique évidemment, M. le Président, c'est les négociations avec le fédéral. La ministre, tantôt, a tenté de dire qu'on achoppe sur les principes. En tout cas, c'est une évaluation possible, on n'est pas partie de ces négociations.

We are a little bit on the sidelines, hey, Mr. Speaker? It's like watching the Alouettes and the Winnipeg Blue Bombers, on Sunday. We're not really part of the game. We enjoyed it, we watched it from somewhere else. We hope it finishes in the same way, but we're really not part of it. We're spectators, on this side of the House, interested spectators. We watch the quarterback and the running backs, the wide receivers, we hope they do their job correctly.

I presume the Minister for Family and Child Welfare, in this instance, is the quarterback, and we hope that she does her job well. The Minister of Health and Social Services, we hope that the Member for Taillon does her job well, doesn't fumble the ball, doesn't throw any interceptions, but we can only hope that, Mr. Speaker. We have no control over that. We just sit in the sidelines and watch.

M. Simard (Richelieu): That's your problem.

M. Copeman: Well, it could be the problem of all Quebeckers. The Minister of Relations with Citizens says it's my problem. It's not necessarily my problem, Mr. Speaker, because it involves all Quebeckers ? all Quebeckers. If the Minister has any other more constructive comments to make, I'll be very pleased to receive them.

It is the problem of all Quebeckers if they don't do their job well, if they throw an interception, because it's not seven points that we could loose, it's millions of dollars, it's hundreds of millions of dollars, and that's where it affects all of us.

Alors, on ne peut pas estimer, nous autres, si c'est vraiment un manque de volonté sur les principes, sur les modalités, sur le financement. Tout ce qu'on sait, tout ce que je sais, M. le Président, c'est que, en 1997-1998, il y a eu des négociations, il y avait des propositions du fédéral qui ont été rejetées par le gouvernement du Québec. Le litige, à ce moment-là, n'était pas sur les principes mais sur les sommes consenties. Et, moi, tout ce que je souhaite, c'est qu'on prenne ces négociations très au sérieux, qu'on soit responsable comme gouvernement, qu'on réclame notre juste part mais pas plus que notre juste part, parce qu'on a une obligation de résultat. On ne veut pas faire achopper les négociations à cause d'un litige qu'on peut éviter. Nous avons, le gouvernement a une obligation de résultat.

M. le Président, la ministre fait référence aux possibilités de recours aux tribunaux. Je laisse ça au gouvernement. Tout ce que j'en sais ? je ne suis pas constitutionnaliste ? mais les recours aux tribunaux, ça prend des années à régler ? des années, hein? Tandis que, peut-être avec une attitude un peu plus constructive des deux côtés ? des deux côtés, M. le Président ? parce que notre motion était claire. Chaque côté a une partie de la responsabilité dans ce débat. Alors, oui, nous avons sommé le gouvernement fédéral de participer de bonne foi dans ces négociations, et on va le faire encore. Ça ne donne pas grand-chose de le faire présentement, nous sommes dans une campagne fédérale. Même les ministres de l'autre côté, je pense, diraient qu'en campagne fédérale on ne peut pas négocier avec un gouvernement. Le tout est suspendu pour un bout de temps, n'est-ce pas? Mais je souhaite, après la formation du gouvernement fédéral, qu'on soit capable de reprendre les négociations sur les bases de notre motion. C'est ça que je souhaite.

D'autres réserves, M. le Président. Il y a la problématique des travailleurs autonomes et il y a des réserves quant à l'application du programme pour les travailleurs autonomes. La Fédération canadienne de l'entreprise indépendante a fait un sondage auprès de ses membres. Elle a commandé un sondage d'une maison de marketing bien connue au Québec, une maison de marketing très fiable, j'imagine, pour la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, n'est-ce pas? C'est le Groupe Léger & Léger qui a fait le sondage de marketing. La ministre doit être capable de se fier sur le Groupe Léger & Léger quand il fait des sondages. C'est un groupe renommé au Québec, elle a même peut-être une connaissance assez bien développée entre les dirigeants du Groupe Léger & Léger, elle. Alors, j'imagine que c'est fiable pour elle, le Groupe Léger & Léger.

Alors, le Groupe Léger & Léger a effectué un sondage, au niveau des dirigeants des PME, mais je vais parler plutôt des travailleurs autonomes. Je cite le mémoire de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante sur le projet de loi n° 140, à la page 2: «Chez les travailleurs autonomes sans employés, une proportion de 57,6 % d'entre eux est défavorable à la création d'un régime de congé parental qui les inclurait. Les femmes travailleuses autonomes et les répondants âgés de 18 à 34 y sont, par contre, favorables dans une proportion de 48,7 % et de 66,2 % respectivement.» M. le Président, le moins qu'on puisse dire, c'est que le monde des travailleurs autonomes est partagé sur la question de leur inclusion dans le projet de loi et des modalités qui sont proposées dans le projet de loi. Alors, leur participation est remise en question, c'est partagé. Je dis bien «partagé», parce qu'il y a d'autres groupes qui favorisent absolument... qui représentent les travailleurs et qui favorisent leur inclusion, c'est sûr, mais l'opinion est partagée.

La durée du congé pose problème, je pense, presque pour tout le monde dans le milieu des travailleurs autonomes. Est-ce qu'un travailleur autonome peut se permettre de se prévaloir d'un congé qui varie entre 40 et 50 semaines? La question se pose. Et j'irais plus loin, M. le Président: Poser la question, c'est y répondre. Un travailleur autonome ne peut pas se permettre de s'absenter de son travail pendant 40 ou 50 semaines. La nature du travail fait en sorte que cette durée de congé est problématique pour les travailleurs autonomes. Alors, ils se posent la question: «Si on ne peut pas bénéficier du programme à de tels niveaux...» Ça remet en cause leur adhésion au projet, c'est sûr. Le taux de cotisation inquiète aussi. Je comprends qu'ils vont payer... La cotisation du salarié est la moitié de la cotisation de l'employeur et, au maximum, ça peut représenter 237,26 $ avant la déduction pour la cotisation et à peu près 150 $ par année. Ce n'est pas des chiffres faramineux, mais, quand on sait d'avance ou qu'on a une crainte d'avance qu'on ne peut pas bénéficier d'un tel programme, on ne pourra jamais... De par sa nature, ça remet en question l'adhésion.

n(17 h 20)n

Alors, nous allons peut-être proposer d'autres options au gouvernement pendant la commission parlementaire, M. le Président. Oui, on va tenter d'être constructifs parce que, si le gouvernement accepte qu'il y ait deux options, il y a peut-être une possibilité, pour les travailleurs autonomes, d'une troisième option. Je comprends, c'est complexe à gérer, la ministre fait un peu des grimaces. Je comprends la complexité de ça, mais, si le gouvernement peut gérer deux options, pourquoi pas une troisième, qui serait mieux taillée aux besoins des travailleurs autonomes. En tout cas, c'est une perspective. Je ne dis pas qu'on est absolument figés avec cette idée, mais on va l'examiner. On va soumettre d'autres possibilités.

Il y a la problématique des étudiants, M. le Président, qui a été soumise en commission parlementaire. Ils sont exclus du régime s'ils sont des bénéficiaires du programme d'aide et bourses. Je comprends que le ministre de l'Éducation a déposé en cette Chambre un projet de loi n° 162, qui lui donne le pouvoir réglementaire de regarder la période sur laquelle un prêt est remboursé, qui pourrait varier selon des circonstances, comme la grossesse. Alors, la loi, c'est le projet de loi n° 162, Loi modifiant la Loi sur l'aide financière aux études. Nous allons voir si ce projet de loi répond vraiment aux besoins des étudiants.

Il y a une autre problématique, qui est le congé pour responsabilité parentale, qui déborde, j'en conviens, le projet de loi n° 140. Mais personne, je pense, n'est resté insensible, la ministre incluse, à la présentation du groupe LEUCAN sur ce que les familles des enfants gravement malades vivent avec leurs enfants, des familles avec des enfants qui, dans ces circonstances, vont mourir, avec des maladies mortelles. Mais, dans les brefs jours que ces enfants sont avec leurs parents, il y a une problématique concernant une qualité de vie pour ces enfants. Comment une famille peut concilier les responsabilités envers son enfant gravement malade et continuer de travailler ou minimalement d'être capable de retourner au travail par la suite? Personne n'est indifférent à ça et, je comprends, ça déborde les paramètres du projet de loi n° 140. Mais le congé pour responsabilité parentale est également un élément qu'on va suivre de très près parce que, vous le savez très bien, les responsabilités parentales n'arrêtent pas un an après la naissance. Elles continuent et dépassent même les 18 ans, n'est-ce pas, M. le Président? On se sent responsables pour nos enfants, même quand ils ont l'âge de la majorité. Et, de temps en temps, ça implique une certaine flexibilité dans le monde du travail afin d'être capable de concilier ces choses.

Il y a également la question des pouvoirs réglementaires, M. le Président. C'est important pour nous, de ce côté de la Chambre, de s'assurer que le gouvernement ne se dote pas de trop de pouvoirs réglementaires, que le gouvernement ne soit pas capable de changer des paramètres du projet de loi par décret, par simple décret et, nous, on privilégie la possibilité qu'on mette dans la loi les paramètres du projet de loi afin d'être obligé de faire un débat ici, à l'Assemblée nationale, quand on veut changer la loi.

Et il y a, de façon un peu accessoire, M. le Président, la question de l'harmonisation de notre Loi sur les normes du travail avec, éventuellement, le projet de loi qui rentre en vigueur le 1er janvier 2002, je le rappelle, mais aussi une harmonisation avec les modifications du régime de congé de maternité du fédéral qui rentre en vigueur le 1er janvier 2002. J'étais frappé par le mémoire de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, là-dessus, qui a indiqué très clairement qu'il y a un travail d'harmonisation à faire avec notre Loi sur les normes du travail en ce qui concerne l'implantation du nouveau régime de congé de maternité fédéral, à partir du 1er janvier 2001.

Pour conclure, M. le Président, nous avons, comme parlementaires, une obligation de résultat dans ce dossier-là. L'obligation de résultat n'est pas pour notre bilan politique. L'obligation de résultat est pour les familles québécoises qui ont besoin d'un soutien accru dans le domaine de la conciliation des responsabilités de travail et des responsabilités familiales.

Mr. Speaker, we have an obligation to come to a positive result in this file. And that positive result... that obligation exists not for our report card, if you will, not so that we can look back and say: We did this for our own glory or our own benefit. But we have an obligation to produce positive results for tens of thousands of Québec families. And our focus should be on those families, Mr. Speaker. And that's why we have that obligation.

Mais nous avons également une obligation de faire une étude sérieuse du projet de loi. Et je réitère, en terminant, M. le Président, la demande que j'ai faite en commission parlementaire. J'en profite pour passer le message au leader du gouvernement. Oui, il y a consensus sur le projet de loi. Oui, il y a consensus sur le fait qu'il faut aller de l'avant, et rapidement, mais je somme le leader de permettre à la commission des affaires sociales la possibilité de faire une étude sérieuse et détaillée du projet de loi.

Ce projet de loi, M. le Président, ne peut pas être bousculé dans l'atmosphère de la fin de session, au mois de décembre. On a tous vécu ce que ça donne. Quant à moi, quand on est bousculé, ça donne de mauvaises lois par la suite. Alors, j'implore le leader ? c'est mieux, il aime ça, oui ? du gouvernement de prendre acte de cette volonté, de ce côté de la Chambre, de travailler soigneusement et sérieusement dans le dossier afin... Oui, on va collaborer à l'adoption du projet de loi d'ici la fin de session, mais il faut qu'on nous donne, comme parlementaires des deux côtés de la Chambre, la possibilité de bien faire notre travail en commission parlementaire. Et je pense que, si on travaille bien ensemble, on est capables, possiblement même, d'améliorer le projet de loi, d'apporter des éclaircissements qui vont bénéficier à toutes les familles québécoises.

Alors, obligation de résultat. Et on est prêts, de ce côté de la Chambre, à collaborer dans le projet de loi, avec les préoccupations que j'ai déjà énoncées, afin d'améliorer, de corriger et de clarifier le projet de loi pour le bénéfice de toutes les familles québécoises. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce et critique officiel de l'opposition en matière d'enfance et de famille. Alors, est-ce qu'il y d'autres... Avant de procéder à l'autre intervenant, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je voudrais obtenir le consentement pour revenir aux avis touchant les travaux des commissions, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement? Consentement, M. le leader.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Brassard: Alors, je voudrais aviser cette Assemblée que la commission de l'aménagement du territoire, qui devait poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 150, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, demain, le mercredi 22 novembre 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, est annulée.

Projet de loi n° 140

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader. Alors, nous cédons maintenant la parole, toujours sur l'adoption du principe du projet de loi n° 140, au député de Chapleau. M. le député.

M. Benoît Pelletier

M. Pelletier (Chapleau): Merci, M. le Président. Vous savez, c'est un plaisir pour l'opposition officielle d'appuyer le projet de loi n° 140 portant sur l'assurance parentale. Bien que nous ayons quelques réserves, qui ont d'ailleurs été éloquemment exprimées par mon collègue, par rapport à certains aspects du contenu du projet de loi, il n'en demeure pas moins que nous appuyons le principe du projet de loi, d'une part, et, d'autre part, que nous appuyons aussi l'initiative qui, donc, a donné lieu à la soumission à cette Assemblée du projet de loi n° 140.

n(17 h 30)n

Je dois vous dire que, pour l'opposition officielle, la question est très simple, il s'agit pour nous tout simplement de mettre au-dessus de tout, et au-dessus des intérêts partisans plus particulièrement, les intérêts supérieurs du Québec. C'est ça que nous entendons faire. L'idée, c'est que, si nous avions voulu, nous aurions très bien pu trouver différentes raisons pour nous opposer au projet de loi n° 140. Nous aurions sans doute pu faire preuve d'astuce. Nous aurions sans doute pu faire preuve de subtilité aussi pour nous opposer au projet de loi n° 140. Mais là je pense qu'ici, dans ce dossier-là, l'intérêt supérieur de la population du Québec commande que l'opposition officielle fasse front commun avec le gouvernement afin que le Québec puisse se doter, je dirais, d'un régime d'assurance parentale qui soit valable, qui fonctionne bien et qui, finalement, réponde vraiment aux besoins des Québécois et des Québécoises.

D'abord, j'aimerais dire, M. le Président, que, en matière d'assurance parentale, la compétence de l'Assemblée nationale, la compétence législative de l'Assemblée nationale me semble être tout à fait indiscutable. Je n'en dirais pas autant, cependant, de la compétence du fédéral en la même matière. Je dois vous dire que, lorsque le fédéral, donc, au nom de l'assurance chômage, qui est devenue par la suite l'assurance emploi, décide d'investir le champ, en quelque sorte, de l'assurance parentale, j'avoue que, à mon avis, ça pose un certain nombre de problèmes de constitutionnalité. Donc, s'il y a un fardeau de la preuve qui doit être relevé en ce qui concerne la constitutionnalité de la démarche, ce fardeau-là doit être relevé par le fédéral et non pas par le Québec, parce que, dans le cas qui nous occupe, je répète que la compétence québécoise en matière d'assurance parentale me semble être tout à fait indéniable, tout à fait incontournable, tout à fait indiscutable.

Par ailleurs, j'ajouterai que, pour l'opposition officielle et sans doute pour l'ensemble de la population du Québec, il est important que le Québec se dote de politiques familiales. Nous sommes tous conscients du problème absolument manifeste, absolument considérable que représente la dénatalité au Québec. J'avoue que, moi, pour un, je suis très sensible au problème de la dénatalité qui affecte la population québécoise. Je suis extrêmement inquiet. Je pense que toute personne qui est sensible à l'avenir du peuple québécois devrait par ailleurs être extrêmement inquiète par rapport à cette dénatalité qui atteint, nous dit-on, des sommets presque jamais égalés dans notre histoire. J'entendais mon collègue nous dire un peu plus tôt que la dernière fois qu'on a eu un si faible taux de natalité, c'est en 1910, si je ne m'abuse. Alors, c'est dire que nous vivons donc un problème qui est criant, nous vivons une situation qui est particulièrement inquiétante, et je pense qu'il est tout à fait normal que l'opposition officielle se fasse un point d'honneur d'aider ici le gouvernement dans une démarche visant à rétablir, si on veut, le taux de natalité au Québec, et ça passe notamment ? pas seulement, mais notamment ? par des politiques familiales qui soient, disons, adéquates, et qui soient bien conçues, puis qui vraiment soient aussi bien articulées.

Par ailleurs, je dois dire qu'il me semble clair que le Québec a toutes les raisons du monde de revendiquer, en matière d'assurance parentale, la maîtrise d'oeuvre. Le mot «maîtrise d'oeuvre», c'est un mot important. Ça veut dire ceci. Ça veut dire que le Québec doit s'assurer qu'en matière d'assurance parentale ce soient ses objectifs qui soient respectés, ce soient ses priorités qui soient respectées ? vis-à-vis lesquels? ? vis-à-vis les objectifs et les priorités du fédéral. Bon, c'est aussi simple que ça. C'est ça que ça veut dire, la maîtrise d'oeuvre du Québec. Ça veut dire faire en sorte que le Québec, d'abord, soit respecté dans le dossier de l'assurance parentale. Et je dois vous dire que c'est un principe auquel nous tenons, nous, dans l'opposition officielle, et c'est un principe que nous entendons défendre avec ardeur.

Nous sommes conscients, cependant, que le fédéral a, lui aussi, pris des initiatives en matière d'assurance parentale, bien entendu. Cependant, le régime québécois est censé entrer en vigueur en janvier 2002, en 2002, ce qui laisse quand même passablement de temps pour Québec et Ottawa de négocier. Et j'espère vraiment que, des deux côtés, il y aura des négociations de bonne foi. Et, ici, je ne m'adresse pas qu'au gouvernement du Québec, je m'adresse aussi au gouvernement du Canada dont on attend, nous, fédéralistes du Québec, un signal qu'ils sont prêts à négocier de bonne foi dans le dossier de l'assurance parentale. Et je peux assurer les membres du gouvernement qu'ils auront mon entier appui pour faire pression auprès de nos partenaires fédéraux afin que, dans le dossier de l'assurance parentale, il y ait une négociation qui respecte les priorités, les objectifs puis les droits des Québécois et des Québécoises, et du gouvernement du Québec, et les compétences du gouvernement du Québec aussi. Je peux vous dire que nous entendons donc mettre du nôtre dans ce dossier-ci pour collaborer avec le gouvernement afin que nous atteignions des objectifs collectifs qui, vraiment, je crois, nous tiennent tous à coeur.

Il serait dommage, M. le Président, il serait même très dommage qu'en bout de piste ce soient les citoyens du Québec qui aient à payer le prix d'un conflit politique stérile. Cela doit être, à tout prix, évité. Si, vraiment, on devait se rendre compte que c'est l'aboutissement ultime vers lequel nous devions nous diriger, à cause soit de l'attitude du gouvernement du Québec soit de l'attitude du gouvernement du Canada, nous nous ferions l'obligation morale de dénoncer une telle situation. Parce que, je répète, les citoyens, les femmes du Québec notamment, et les hommes aussi, les parents, ne doivent pas payer le prix d'un conflit politique qui risquerait de dégénérer.

Donc, je dis au gouvernement du Québec: Continuez à négocier, continuez à négocier de bonne foi. Rendez des comptes de vos négociations. Faites-nous part de la conduite des autres partenaires, également, dans le dossier. Continuez à négocier, et peut-être que, comme ça a été le cas en matière de santé récemment, sans même qu'on ait pu le prédire, l'on parviendra à une entente. Parce que, n'oubliez pas que, il y a quelques semaines à peine, il y a quand même eu une entente fédérale-provinciale, incluant le Québec, dans un domaine aussi névralgique et, je dirais, aussi controversé que le domaine de la santé. Et je me réjouis du fait qu'une entente soit intervenue dans le domaine de la santé, pour le mieux-être des Québécois et des Québécoises, et j'espère simplement qu'il en sera de même en ce qui concerne toute la question des politiques familiales.

Je dois vous dire que je suis conscient que, néanmoins, il y a un certain fossé qui sépare le gouvernement du Québec, actuellement, du gouvernement fédéral dans les négociations. Le fossé est relativement important. Le fossé porte sur une somme aussi qui est significative. On parle vraisemblablement d'au-delà de 650 millions de dollars, si je ne m'abuse, qui donc sépare les deux gouvernements d'une entente.

Du côté du Québec, du gouvernement du Québec, d'après ce que je comprends, M. le Président, on veut avoir la portion des cotisations d'assurance emploi qui sont déjà consacrées aux congés parentaux. Alors, ça veut dire qu'on veut avoir la portion des cotisations, cotisations payées par les salariés, cotisations payées par les employeurs, portion donc des cotisations d'assurance emploi qui sont déjà versées par le fédéral au titre des congés parentaux.

Du côté fédéral, on répond qu'on est prêt à donner une somme au Québec, mais on est prêt à donner au Québec la somme qui est versée chaque année aux nouveaux parents. Donc, ce n'est pas relié aux cotisations en tant que telles; c'est plutôt relié finalement aux sommes qui sont versées aux parents réels, c'est-à-dire aux gens qui réclament, de façon annuelle, le congé parental.

Bien entendu, ça peut sembler technique pour nous tous et toutes, et y compris pour les citoyens qui nous écoutent, mais il faut savoir qu'entre ces deux conceptions-là du débat la différence, c'est de 660 millions de dollars. Et ce n'est pas rien. Ce n'est pas non plus un fossé qui est infranchissable si toutes les parties font preuve de bonne foi, mais c'est un fossé qui est réel.

Et, moi, je dis au Québec: Bien, tenez votre bout, encore une fois, faites-nous part des résultats, faites-nous part du développement de votre démarche, et on va tout faire pour que, dans le processus ? et l'opposition officielle vous le garantit ? nous allons tout faire, nous aussi, pour que les contribuables québécois ne soient pas doublement imposés, ou pénalisés, ou doublement taxés ou aient à cotiser à deux régimes finalement qui s'appliqueraient en même temps. Nous allons tout faire, donc, pour que le Québec puisse récupérer les sommes qui lui permettent d'aller de l'avant avec son projet d'assurance parentale, tel que ce projet, j'imagine, sera modifié suite aux recommandations que l'opposition officielle formulera en commission parlementaire cependant.

n(17 h 40)n

Vous me permettrez, en terminant, M. le Président, de vous dire néanmoins ceci, de vous dire que, à mon avis, dans le dossier auquel nous sommes confrontés, l'accent doit être mis sur la collaboration entre les deux ordres de gouvernement. Il faut éviter à tout prix une lutte politique entre gouvernements, qui servirait peut-être la cause de l'option souverainiste du parti ministériel mais qui néanmoins se ferait aux dépens des parents eux-mêmes et aux dépens des Québécois et des Québécoises. Il faut éviter cela. Et ici je ne veux pas prêter d'intentions au gouvernement. Ce n'est pas ça, mon but. Ce que je dis, c'est qu'on va suivre l'évolution du dossier, on va juger de l'attitude de chacun des acteurs en fonction de ce que l'on verra, en fonction de ce que l'on constatera au cours des deux prochaines années, mais bien entendu je pense que l'accent doit être mis sur la collaboration.

Cela étant dit, en conclusion, M. le Président, j'invite le gouvernement à ne considérer des poursuites judiciaires qu'in extremis, et je vais vous dire pourquoi. Tout simplement, il y a deux motifs pour lesquels j'invite le gouvernement à être très prudent avec l'idée d'engager des poursuites judiciaires dans le dossier qui nous intéresse. En fait, il y a deux bonnes raisons pour lesquelles les poursuites judiciaires ne devraient être envisagées qu'en bout de piste. La première raison, c'est que, dans le fond, on n'est peut-être pas loin d'un règlement politique de ce dossier-là. Donc, des poursuites judiciaires risqueraient de faire échouer des négociations qui ont encore, je dois le dire, des chances raisonnables d'aboutir. Première raison.

La deuxième raison, qui est peut-être encore plus importante, c'est que l'argument sur lequel se fonde le gouvernement du Québec pour invoquer la récupération des sommes d'argent qui sont entre les mains du fédéral en matière de congés parentaux et d'assurance parentale, l'argument que soulève le gouvernement du Québec, il est fondé sur l'article 69 de la Loi sur l'assurance-emploi. La Loi sur l'assurance-emploi, M. le Président, c'est une loi fédérale. Or, je dois vous dire que j'ai examiné l'article 69 de la Loi sur l'assurance-emploi, je l'ai examiné avec le regard critique dont je peux être capable en tant que juriste, et il me semble qu'ici l'argument du gouvernement du Québec risque d'être beaucoup plus fragile que certaines personnes le croient à première vue.

Je ne suis pas certain que l'article 69 permette un règlement global à la satisfaction du Québec du dossier de l'assurance parentale. Ce qui est visé par l'article 69, c'est davantage du cas par cas, c'est davantage le cas où un employeur lui-même se doterait ? un employeur, dis-je bien, et non pas tous les employeurs du Québec ? de son propre régime de congés parentaux. À ce moment-là, les employés pourraient donc, grâce à l'article 69, éviter d'être pénalisés. Il y aurait donc une possibilité pour les employés concernés et pour l'employeur concerné d'être, je dirais, exemptés de la cotisation auprès du régime fédéral, mais pour le motif que l'employeur lui-même met sur pied son propre régime qui est à peu près équivalent au régime fédéral. Mais de là à dire que le Québec en entier pourrait revendiquer le bénéfice de l'article 69 et que le gouvernement du Québec lui-même pourrait invoquer cet article-là et s'en faire un cheval de bataille pour imposer un régime global et demander, de gouvernement à gouvernement, une compensation financière qui soit reliée finalement à ce dont le Québec a besoin pour mettre de l'avant son propre régime, il y a une marge. Entre les deux, il y a une marge, M. le Président.

Je dois vous dire que l'article 69... Et c'est important que je le dise aujourd'hui, parce que nous sommes en Chambre, et bien entendu ce que nous disons est retenu dans les archives, dans les registres de cette Chambre, dans les journaux de la Chambre, en quelque sorte. Il est important que le gouvernement sache que l'opposition officielle considère, en ce jour, que l'argument fondé sur l'article 69 est un argument fragile. Je ne dis pas que c'est un argument qui ne vaille... que ça ne vaut pas la peine de le défendre devant les tribunaux. Ça vaut peut-être la peine de le défendre devant les tribunaux, mais il faut le faire avec beaucoup de précaution. Il ne faudrait surtout pas être surpris que cet article-là ne porte pas tous ses fruits, ne donne pas les fruits escomptés. Il ne faudrait surtout pas en être surpris.

Alors, j'en informe le gouvernement, je lui dis: Prudence quand vous parlez de contestation judiciaire. Évidemment, c'est peut-être une façon de vous donner un peu de force dans une négociation qui s'amorce, mais c'est risquer de mettre en péril le programme québécois. Mieux vaut opter pour la négociation politique, mieux vaut opter pour la collaboration entre les deux ordres de gouvernement. J'espère que vous ferez preuve de bonne foi dans cette collaboration, j'espère que le gouvernement aussi fera preuve de bonne foi dans cette négociation, et, si tel devait être le cas, évidemment c'est l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui en profiteraient. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Chapleau. Nous allons maintenant céder la parole...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous désirez répondre à une...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la question, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: En connaissant le passé impressionnant comme juriste de notre collègue le député de Gatineau, est-ce qu'il peut nous informer, selon lui, qu'un litige juridique... Quelle serait l'échéance d'un litige juridique? Est-ce que c'est quelque chose, selon lui, qu'on peut régler rapidement, rapidement, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): Réponse rapide.

M. Pelletier (Chapleau): D'abord, je remercie le député pour son préambule fort élogieux. Je vous remercie, fort élogieux. Je n'ai pas à juger de l'exactitude du préambule, cependant, M. le Président, par rapport à mon passé de juriste, mais j'apprécie le commentaire qui a été fait. Je dois dire qu'un litige comme celui-ci se terminerait, aboutirait ultimement en Cour suprême du Canada, et on devrait compter au minimum 10 ans.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Alors, je cède maintenant la parole au député d'Anjou. M. le député.

M. Jean-Sébastien Lamoureux

M. Lamoureux: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait plaisir à ce stade-ci de prendre la parole concernant le projet de loi n° 140, projet de loi qui touche l'assurance parentale. Vous savez, M. le Président, c'est certainement un sujet qui touche de près bon nombre de nos citoyens et citoyennes.

J'ai eu l'occasion, en fin de semaine, dimanche... C'était la deuxième fois que c'était organisé dans mon comté par l'organisme Carrefour Solidarité Anjou, on a organisé une fête des nouveaux-nés. Carrefour Solidarité Anjou, d'ailleurs, j'en profite pour le souligner, qui fait un excellent travail au niveau de l'intégration des immigrants au niveau de la communauté à Anjou, organise deux fois par année une fête des nouveaux-nés. Ça fait que c'était une très belle occasion qui nous était offerte pour se réunir. Au-delà de 35 jeunes, très jeunes enfants, des jeunes nouveaux-nés, et on avait des gens qui proviennent de partout de la terre et qui ont décidé de fonder des familles ici, au Québec. Je dois vous dire, M. le Président, que c'est une occasion qui est unique, comme député, de voir ça. Je pense que c'était une belle occasion de voir que ces gens avaient décidé de s'établir et de s'implanter au Québec.

Moi, j'ai participé à cette cérémonie-là, on leur a remis des certificats, et j'avais en tête le fait qu'on devait prendre la parole aujourd'hui au niveau de la Loi sur l'assurance parentale. Je me sentais interpellé comme député, d'une part. Je me sentais également interpellé comme citoyen, parce que je pense que, comme société, on doit se poser des questions par rapport à des enjeux aussi importants que la natalité et que les mesures que l'on se donne comme société pour faciliter justement ce genre de choses là. Puis je me sentais interpellé également tout simplement comme jeune qui aspire un jour à pouvoir fonder une famille.

Je ne suis pas embarqué en fin de semaine sur un débat de juridiction, pas du tout. Dans le fond, la question qui doit nous animer comme parlementaires, c'est de se dire: Est-ce que les gens que j'avais en face de moi, qui ne demandent qu'une chose, c'est que le député provincial, que le député fédéral, que les paliers de gouvernement qui collectent des impôts auprès de ces gens-là puissent leur assurer le meilleur environnement possible, leur faciliter la vie dans une société, M. le Président, qui est en évolution... La société qu'on a aujourd'hui, pas besoin de vous le dire, n'est pas la même que celle qu'on retrouvait il y a 20, il y a 30 ans. Aujourd'hui, il y a une prolifération de travailleurs autonomes. On a des familles qui sont différentes. Les modes de vie sont différents. Bien souvent, les deux conjoints travaillent. Ça implique évidemment que, comme société, comme Assemblée nationale, on se doive d'analyser les situations à travers une nouvelle grille d'analyse qui est celle de la famille québécoise d'aujourd'hui.

n(17 h 50)n

Qu'est-ce qu'on peut faire pour les aider? Je suis convaincu, M. le Président, et je le crois sincèrement, que l'assurance parentale constitue un pas intéressant, un pas positif. Maintenant, c'est quelque chose d'important, de fondamental. Je pense qu'on se doit quand même, comme parlementaires, et le gouvernement se doit de le faire également, de s'assurer que tout le monde y trouve son compte, qu'il n'y ait pas de mauvaise surprise au niveau des coûts.

On en a parlé tout à l'heure, mon collègue député de Chapleau nous l'a indiqué, il faut, en quelque part, s'assurer d'en arriver à une entente. On se retrouve dans une situation aujourd'hui où il y a des différends, M. le Président. Ce n'est pas une surprise, il y aura toujours des différends. Mais ce n'est pas une raison pour ne pas continuer pour trouver une solution concrète, une solution qui va satisfaire toutes les parties et surtout une solution qui, ultimement, va bénéficier aux citoyens et aux citoyennes du Québec, à ces jeunes familles qui tentent de joindre les deux bouts tout en élargissant le cadre de leur famille, en ayant des enfants.

Il y a un différend. M. le Président, on a, du côté de l'opposition, enjoint le gouvernement du Québec à faire preuve de bonne foi dans cette négociation-là. Mais la bonne foi, c'est à deux, et on a été les premiers à le reconnaître. Ce n'est pas seulement au gouvernement du Québec de mettre de l'eau dans son vin, c'est également au niveau du gouvernement fédéral. Vous savez, puis c'est quelque chose... je l'ai dit souvent puis je vais le redire, la chose en commun entre le député fédéral, le député provincial, les gens du municipal ? du moins pour ce qu'il va en rester ? et les gens du scolaire, c'est qu'on va toujours piger dans les mêmes poches. On a ça en commun, M. le Président, c'est qu'on va tout le temps chercher l'argent chez les mêmes personnes. Ils nous connaissent, parce qu'ils savent que c'est vers eux qu'on se retourne pour aller chercher l'argent. Mais, eux, ils ont des attentes, c'est que tous ces paliers de gouvernement là fassent des efforts pour s'entendre.

Qu'il y ait des divergences d'opinions, j'en conviens. Qu'il y ait des différences au niveau des évaluations des sommes d'argent qui devraient être échangées, j'en conviens. J'en conviens, M. le Président, et j'appelle les deux parties, tant au niveau du gouvernement du Québec qu'au niveau du gouvernement fédéral, à s'asseoir, parce que les deux, je pense, s'entendent sur le principe qui est d'instaurer cette caisse d'assurance parentale, ce régime-là, qui est un régime qui serait un pas positif pour les jeunes familles. Bon, bien, je pense, M. le Président, que, une fois que cette chose-là est acquise, une fois qu'on s'est entendu là-dessus, il est possible, il est non seulement possible, mais souhaitable que les paliers de gouvernement s'entendent. Puis je reviens aux jeunes familles que j'ai rencontrées dimanche. C'est exactement à ça qu'elles s'attendent. Elles ne s'attendent pas à se faire donner des cours ? et n'en déplaise à mon collègue le député de Chapleau ? de droit constitutionnel. Les gens veulent que ça fonctionne, les gens veulent en avoir pour leur argent. Et c'est pour ça, M. le Président, que, durant cette journée-là, ce n'est pas cette approche-là que j'ai eue. Mais c'est plutôt de dire: Qu'est-ce qu'on peut faire comme législateurs? Qu'est-ce que je peux faire, moi, évidemment, quand je reviens ici, à l'Assemblée nationale, à Québec? Qu'est-ce que je peux faire au niveau des projets de loi qui sont devant nous, au niveau des solutions qui sont apportées? Parce que c'est de ça que les gens veulent entendre parler, c'est des solutions; ce n'est pas des conflits, ce n'est pas d'entendre parler de débats devant les tribunaux.

Et je pense que le député de Chapleau nous l'a démontré. On gagnerait quoi, M. le Président, à judiciariser un débat ou une question? Pendant tout ce temps-là, est-ce que les familles s'en trouveraient mieux? Pas du tout. Au contraire, elles auraient devant elles le spectacle suivant: du gouvernement du Québec qui utilise l'argent des impôts pour aller devant les tribunaux, devant le gouvernement fédéral qui va prendre les mêmes impôts des mêmes contribuables pour se défendre. On va faire du surplace, et je suis convaincu que ce n'est pas l'intention du gouvernement du Québec. L'intention du gouvernement du Québec n'est certainement pas de judiciariser inutilement un débat. On doit plutôt s'assurer d'obtenir notre juste part, de poursuivre la négociation, et cette négociation-là doit se faire de bonne foi, des deux parties.

J'espère, M. le Président, que ça rassure le gouvernement du Québec de voir que l'opposition, dans ce dossier-là comme dans tous les dossiers d'ailleurs, tente d'y apporter des solutions et apporte son appui au niveau du gouvernement quand les solutions proposées ont de l'allure puis se tiennent debout. Et on pense que, dans ce dossier-là, le fond est très juste. On est d'accord avec ces principes-là. Maintenant, on en conjure le gouvernement: S'il vous plaît, ne transformons pas ce beau projet en un débat qui s'éternise devant les tribunaux.

Il est important, M. le Président, de s'assurer par contre... Et c'est pour ça qu'au niveau du député de Notre-Dame-de-Grâce, notre collègue député a fait un travail là-dessus et va continuer à le faire au niveau de la commission parlementaire. On doit s'assurer, et je l'ai mentionné tout à l'heure, que le projet de loi s'assure de couvrir la nouvelle réalité de bon nombre de ces familles-là. Je l'ai mentionné, on parle des travailleurs autonomes. Les travailleurs autonomes, c'est une réalité qui, évidemment, n'était pas aussi présente il y a 10, 15 ans. Ça implique qu'on a beau prévoir des choses, face à la réalité, comment ces gens-là vont-ils pouvoir s'adapter au niveau du financement? Ça, c'en est une autre, chose, c'en est une autre, et c'est important. Il ne faudrait pas que, dans ce dossier-là ? comme dans d'autres dossiers ? qui part d'un très bon principe, l'on se retrouve au bout de deux ou trois ans face à un régime où le financement, finalement, n'est pas celui auquel on s'attendait.

Ce matin, M. le Président, en m'en venant à Québec, j'ai été un peu estomaqué d'apprendre que, malgré le fait qu'on ait doublé les primes d'assurance médicaments ? en fait, on les a doublées ici, mais les gens n'ont pas commencé à les payer ? on annonçait ce matin, sur les ondes de CKAC, qu'une étude démontrait que les médicaments avaient... on avait pu constater une hausse, je pense que c'était de 16,5 % déjà. Et le commentateur de la radio faisait allusion au fait que, dans l'avenir ? d'ailleurs on n'avait pas eu beaucoup de débats ici, en Chambre; ça avait été passé, je pense, dans le bâillon au niveau de la hausse ? il n'y aurait pas de débat au niveau de la hausse, qu'on suivrait tout simplement la hausse des coûts. Bon, bien, les gens qui s'en venaient ce matin, qui se rendaient à leur travail, ont appris, j'imagine à leur grand désarroi, que non seulement ils n'ont même pas commencé à payer la prime qui a été doublée, mais que des études et des analyses font déjà état, malheureusement, d'une nouvelle hausse possible de 16,5 %.

Bon, bien, ça, c'en est un bel, exemple: ça nous avait été présenté comme étant une mesure sociale, ça s'est rapidement transformé en mesure fiscale. Et on veut, de ce côté-ci de la Chambre, éviter que l'assurance parentale subisse le même sort, et dans le fond pas tellement le programme, mais surtout les citoyens. Les citoyens, je pense, ont des attentes élevées à ce niveau-là. Les jeunes familles que j'ai rencontrées souhaitent obtenir l'aide de l'État, ne souhaitent pas rentrer dans des chicanes, mais souhaitent plutôt obtenir un appui, un encadrement qui va faciliter les prochaines années, lorsque ces jeunes familles auront des enfants.

Je pense que c'est un projet qui est éminemment louable, mais assurons-nous, M. le Président, d'en vérifier tous les paramètres pour éviter de faire en sorte que, dans un an d'ici, dans deux ans d'ici, on se retrouve encore devant cette Assemblée à être obligé de réviser à la hausse les coûts d'une mesure qui, au début, était fort appréciée au niveau des citoyens et citoyennes du Québec.

Je ne sais pas s'il me reste énormément de temps, mais j'invite le gouvernement à collaborer. Nous allons, nous, du côté de l'opposition, comme ça a toujours été le cas, collaborer, appuyer le gouvernement du Québec dans les intérêts supérieurs des Québécois et des Québécoises pour s'assurer que nos citoyens et citoyennes obtiennent le maximum pour chaque dollar qu'ils versent, peu importe le palier auquel ils s'adressent. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député d'Anjou. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 140? Alors, Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique?

M. Mulcair: ...est-ce que vous pouvez nous dire, étant donné l'heure, qu'est-ce que vous êtes en train...

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous arrivons tout près de 18 heures et des débats de fin de séance, mais, si Mme la ministre désire se prévaloir de son droit de réplique, à ce moment-là, je vais...

Une voix: ...

n(18 heures)n

Le Vice-Président (M. Pinard): À ce moment-là, écoutez, moi, là, si vous avez d'autres intervenants... M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je sais qu'il y en a d'autres de l'autre côté, mais on en a ici également de notre côté. Alors...

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. Donc, à partir de ce moment, je mets fin aux affaires du jour, et nous allons procéder...

M. Lamoureux: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Ah! excusez-moi, M. le député d'Anjou, est-ce que vous désirez poursuivre votre intervention? Il vous resterait environ huit minutes.

M. Lamoureux: ...

Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous avez complété. Alors, nous allons inscrire au procès-verbal qu'effectivement votre allocution est terminée. Nous terminons les affaires du jour et nous passons immédiatement aux trois débats de fin de séance.

Financement du Bloc québécois
dans la circonscription de Shefford

Le premier débat aura lieu entre M. le député de Shefford et Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux concernant le copinage entre... concernant les milieux pharmaceutiques ontariens et le Bloc québécois du comté de Shefford. Alors, vous avez un temps de parole, M. le député, de cinq minutes, réplique cinq minutes et conclusion de deux minutes. Oui, M. le leader?

M. Brassard: Je viens tout juste de lire, là, en vertu de notre règlement, l'avis...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, j'ai mentionné... Excusez-moi, M. le ministre, j'ai mentionné que le débat aura lieu entre Mme la ministre et le député de Shefford concernant les milieux pharmaceutiques ontariens et le financement du Bloc québécois dans le comté de Shefford. C'est ce que j'ai mentionné, d'accord?

M. Brassard: C'est ce que vous avez mentionné, mais, moi, je viens de lire la lettre, et la lettre utilise des termes qui ne sont pas parlementaires, qui ne sont pas conformes à nos règles.

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est la raison pour laquelle, M. le leader, en tant que président des débats, j'ai la possibilité de modifier certains termes pour faire en sorte que tout ce qui se dit ici soit le plus parlementaire possible. Donc, le mot en question, je ne l'ai tout simplement pas prononcé.

Alors, M. le député de Shefford, en vous en tenant bien entendu à votre règlement, que vous connaissez, M. le notaire, alors allez-y.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Vous vous souviendrez, cet après-midi, de la période de questions où le chef de l'opposition a parlé d'une organisation bénéfice qui a eu lieu au mois d'octobre, tout près de l'aéroport de Dorval. Donc, ça a été une organisation de financement qui était organisée par des gens du comté de Shefford, avec un orateur qui est Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, qui était accompagnée de son attaché politique et probablement aussi, si on me nommait des noms, d'un tas de militants péquistes de Shefford pour accueillir des gens du milieu pharmaceutique, des gens qui venaient de l'Ontario, des gens qui payaient 350 $ le couvert pour entendre Mme la ministre provinciale de la Santé et des Services sociaux.

Donc, M. le Président, jusque-là, il n'y a pas de problème jusqu'à un point. Lorsqu'on se sert d'une ministre provinciale pour faire une activité de financement, lorsqu'on fait tout ça dans un sens pour, en fin de compte, attirer peut-être une clientèle au Parti québécois et des fonds au Parti québécois, il devient illégal d'accepter des chèques de compagnies, ce que l'on a fait. Donc, cette activité-là s'est tenue dans l'illégalité. En plus de ça, cet argent-là est allé pour financer leurs amis du Bloc québécois dans Shefford. Donc, à la face même du dossier, je pense qu'il serait de mise que le Directeur général des élections fasse enquête sur une activité de financement qui s'est tenue de cette façon-là. On ne sort pas ça de n'importe où. La ministre a confirmé, cet après-midi, à ma question que c'était bien des gens du comté de Shefford et ici ma question n'était pas adressée à une ministre fédérale, mais adressée à une ministre provinciale qui a confirmé que, oui, c'était pour l'association du comté de Shefford, au fédéral.

Donc, M. le Président, c'est sorti, ça, puis je m'inspire d'un article de Lysiane Gagnon qui a paru aujourd'hui, et j'en cite quelques mots, des mots très durs à l'endroit de l'association. Parce qu'on ne peut pas utiliser le mot «copinage», que vous m'avez dit, donc j'utilise le mot «association» entre le Bloc et le Parti québécois.

Mme Gagnon dit: «Dans la combine, tout le monde a trouvé son compte. Le Bloc, qui n'est pas lié par la loi québécoise de financement des partis politiques, a empoché quelque 20 000 $. L'accès au dîner-bénéfice était de 350 $ par personne, et les lobbyistes ont eu la chance de rencontrer l'unique conférencière invitée, soit la ministre de la Santé, qui a la main haute sur la liste des médicaments remboursables aux personnes âgées et aux assistés sociaux.» Elle rajoute également: «Tout avait été habilement calculé pour que la chose passe inaperçue.» Malheureusement, M. le Président, ça n'a pas passé inaperçu. «Le dîner-bénéfice a eu lieu en semaine, avant le déclenchement des élections, a été organisé par l'association du comté de Shefford. Pourquoi Shefford, alors que le dîner a eu lieu à Lachine?» C'est ce qu'on lui demande aussi. On ignore la raison, mais il y en a sûrement une. «Or, c'est la beauté de l'affaire, les dons faits aux associations de comtés ne sont pas rendus publics.»

Donc, M. le Président, ça pose énormément de questions ici. D'ailleurs, on en pose, plus que des questions, sur les organisations de soirées-bénéfice possiblement illégales. Le chef de l'opposition nous a montré, aujourd'hui, une lettre signée par Lucien Bouchard, président du Parti québécois, qui demande des fonds à ses partisans pour financer le Bloc québécois.

Donc, M. le Président, on fait fi des lois. En plus, on tient un double discours. On entendait, en fin de semaine, quand on parle de fusions municipales, les gens du Bloc disaient: Bien, aïe! Touchez pas à ça, c'est provincial, ça; c'est provincial. Mais ce qu'on sait, ce que tout le monde sait, c'est que le Bloc québécois, c'est les porte-bagages du Parti québécois, ici, comme dans mon comté, encore plus dans mon comté parce qu'on voit que les gens du Bloc se financent par l'entremise du Parti québécois. Donc, M. le Président, il semble que, dans le comté de Shefford, s'il y avait élection éventuelle ? il n'y en aura pas, d'élection éventuelle, du candidat du Bloc québécois ? bien, je pense qu'une élection éventuelle dans Shefford du candidat du Bloc québécois serait, si elle est légalement acceptable, ne serait pas moralement acceptable à cause non pas de ce copinage, je cherche un...

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît.

M. Brodeur: ...cette association...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Shefford.

Alors, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux et députée de Taillon, vous avez une réplique de cinq minutes.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je dois vous dire que j'ai été très heureuse de pouvoir aider mes amis du Bloc québécois qui sont mes amis, et c'est un parti ami dont il s'agit. Et nous n'avons aucune honte à le dire et aucune honte à les appuyer.

Je l'ai fait, d'ailleurs, pour d'autres futurs collègues du Bloc québécois, qu'il s'agisse du comté de Portneuf ou qu'il s'agisse du comté de Louis-Hébert où j'ai participé à des activités de financement pour le Bloc québécois, dans un autre contexte, où c'était des militants du Bloc qui avaient été invités, M. le Président.

D'abord, je vais rassurer le député de Shefford qui s'inquiète de cela. Le tout est strictement et parfaitement légal, M. le Président, parce que vous savez très bien que les partis fédéraux peuvent recevoir des sommes d'entreprises. Par ailleurs, je ne voulais pas effectivement me mettre dans une situation de conflit avec les entreprises pharmaceutiques ? cela va de soi ? et ça aurait été indécent, finalement, de les recevoir de cette façon-là, en demandant une contribution, par exemple, qui serait allée à mes propres fonds politiques. Et, en créant cette distance avec, justement, une contribution qui allait au Bloc, il était très clair, et il n'y a eu aucune espèce d'ambiguïté, pour ceux et celles qui participaient à l'activité, que cet argent allait être versé à la campagne électorale du Bloc québécois.

Et, si nous l'avons fait dans la circonscription de Notre-Dame-de-Grâce?Lachine, c'est essentiellement parce que c'était plus pratique, pour les militants de Shefford et un candidat pressenti qui devait venir de ce milieu-là, d'organiser cette activité là-bas. Et, pour moi aussi, très concrètement, cela était moins loin, compte tenu de distances importantes à parcourir.

n(18 h 10)n

Je vais rassurer le député de Shefford. Je rencontre les compagnies pharmaceutiques québécoises, ontariennes, européennes quelquefois pendant l'année, et on ne leur demande aucune espèce de contribution. Sûrement qu'un certain nombre d'entre eux viennent dans nos cocktails de financement à titre individuel, comme ils le font pour le Parti libéral. On me dit que le député de Nelligan le fait à l'occasion, invite les gens des sociétés pharmaceutiques. C'est normal. Il y en a dans son comté qui viennent à titre d'individus et paient comme tout le monde le prix du cocktail. Ils l'on fait chez le député de Nelligan. Ils l'ont fait aussi chez le vice-président de la Chambre. Ils l'ont fait en s'adressant au chef de l'opposition. C'est normal, c'est sain.

Mais, cependant, de façon systématique, je rencontre l'industrie pharmaceutique dans mes bureaux, à l'occasion d'échanges que j'ai avec eux lorsqu'ils m'invitent à leur rencontre annuelle, pour leur expliquer quelles sont les positions du Québec, quelles sont les orientations du Québec et, surtout, pas pour me faire convaincre d'inscrire leurs médicaments sur les listes. D'ailleurs, le député de Nelligan va convenir, lui qui a suivi un peu le dossier, qu'il y a eu trois médicaments qui ont été inscrits sur la liste en dehors d'une recommandation ferme du Comité consultatif de pharmacologie: un par la ministre de la Santé de l'époque, Mme Lavoie-Roux, un autre par M. Marc-Yvan Côté et un autre par moi-même. Et les coûts afférents à l'inscription de ce médicament ont été assurés par le ministre des Finances parce que c'était dans la perspective d'une politique économique. D'ailleurs, c'est comme ça pour la différence de coûts que représentent les nouveaux médicaments que nous inscrivons sur la liste. Alors, les compagnies pharmaceutiques non seulement n'ont pas d'avantages, mais doivent plutôt essayer de me convaincre qu'elles devraient, en fait, en faire plus pour améliorer leur participation aux coûts de la santé et, entre autres, de l'assurance médicaments au Québec, M. le Président.

Et vous allez voir dans les prochaines semaines que ceux et celles qui sortent gagnants d'échanges que je peux avoir avec les compagnies pharmaceutiques, ce sont d'abord les Québécois et les Québécoises parce que je voudrais que ces compagnies contribuent davantage à des programmes de recherche, à des programmes de soutien à la bonne utilisation du médicament et non pour qu'elles s'en mettent davantage dans leurs poches, parce qu'à mon point de vue elles en font trop, d'argent. Puis, dans le fond, elles auraient peut-être pu payer davantage à ce souper-bénéfice, ça aurait permis d'appuyer leur rôle social à cet égard. Alors, dans les faits d'ailleurs, une fois déduit évidemment le coût du repas ? parce que nous sommes très rigoureux aussi à cet égard ? ce sera une contribution de l'ordre de 265 $ à mes amis du Bloc québécois souverainistes, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux et députée de Taillon. Votre dernier droit de réplique de deux minutes, M. le député de Shefford.

M. Bernard Brodeur (réplique)

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Je ne suis pas surpris que la ministre ait noyé le poisson. Elle est en train de nous parler de programmes de recherche, etc. Elle a dit qu'elle était heureuse d'aider ses amis. Nous sommes contents qu'elle soit heureuse. Mais, quand on aide quelqu'un, il faut l'aider dans la légalité. C'est la question que je lui posais. Donc, M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre, on pense que ce financement-là, cette méthode de financement là est douteuse. Les candidats bloquistes sont les premiers à dénoncer, par exemple, que le Parti libéral du Québec les implique dans les fusions. Donc, de toute évidence, le parti du Bloc québécois est une courroie de transmission pure et simple du Parti québécois.

Lysiane Gagnon disait ce matin: «C'est là qu'on voit que le Bloc peut avoir son utilité. C'est la courroie de transmission qui permet au PQ de jouer sur les deux tableaux, puisque le Bloc, parti fédéral, échappe aux lois provinciales.» Donc, en échappant aux lois provinciales, le candidat du Bloc québécois dans Shefford va faire son élection avec de l'argent des compagnies pharmaceutiques ontariennes. Je l'entendais pas plus tard qu'hier, dans un débat dans Shefford, dire que les fusions municipales, puis le fédéral, puis le Bloc québécois, ça n'a aucun rapport. Donc, M. le Président, on voit tout simplement que, dans le discours et dans les actes, les candidats du Bloc québécois, comme le Parti québécois, tiennent le même discours puis un discours qui n'a aucunement rapport avec la réalité.

Donc, ce qu'on questionne aussi... Puis on se souviendra que René Lévesque avait instauré des lois très nettes, très claires pour permettre un financement sain des partis politiques, et les premiers à les transgresser, ce sont les gens du Parti québécois. Et, dans ce cas-là, ce sont peut-être... ce sont sûrement les candidats du Bloc québécois qui devront payer pour cette façon de faire du Parti québécois. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Shefford. Ceci termine le premier débat de fin de séance.

Aide accordée aux personnes sourdes
et malentendantes

Nous passons maintenant à notre second débat entre le député de Nelligan et Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant l'inaction dans le dossier des malentendants. Alors, M. le député de Nelligan.

M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai questionné la ministre aujourd'hui sur deux groupes de malentendants, deux groupes de personnes sourdes. Le premier groupe, c'est ceux et celles qui attendent le décret du gouvernement québécois dans le programme d'aides auditives. Le gouvernement a promis en juillet 1998, effectivement, avant la ministre actuelle, de payer pour la réparation. Comprenez-vous, comme j'ai dit aujourd'hui en Chambre, qu'une fois que vous avez une aide auditive, et ça ne marche pas, ce n'est pas payé par l'État? M. le ministre, à l'époque, en juillet 1998, a promis ? a promis ? de payer pour ça. Le 18 mars 1999 ? 1999 ? la ministre actuelle a promis de payer pour ça. C'est injuste, c'est discriminatoire, c'est un des seuls groupes handicapés, les personnes handicapées ou les personnes malentendantes, qui doivent payer pour leurs réparations. Franchement, M. le Président, c'est discriminatoire. Mais elle a dit: Vous avez raison, je vais payer, ou l'État va payer.

Encore une fois, pendant les études des crédits en commission parlementaire, j'ai demandé à la ministre, finalement, est-ce qu'elle va respecter sa parole. Elle a dit oui, elle va déposer un programme, supposé, d'une valeur de 3 millions de dollars. Trois millions de dollars, c'est beaucoup d'argent, mais c'est un petit pourcentage dans les grands budgets du ministère de la Santé et des Services sociaux. Pourquoi elle ne peut pas livrer la marchandise? Je comprends pourquoi mon collègue le député de Châteauguay a fait une motion de blâme, quand la ministre ne peut pas respecter sa parole, ne peut pas arriver avec les 3 millions de dollars. On peut dire clairement que c'est injuste, c'est discriminatoire pour ceux et celles qui souffrent, qui sont les malentendants, qui ne peuvent pas avoir accès aux réparations gratuites. M. le Président, c'est tout à fait inacceptable, inhumain que ces personnes doivent continuer de payer pour leurs réparations. Mais la ministre, encore aujourd'hui, elle a juste dit qu'elle fait son possible, etc. Ce n'est pas assez bon, les personnes attendent depuis 1998 pour ça. C'est discriminatoire, elle doit corriger ça dans les plus, plus brefs délais. Mais, malheureusement, la ministre a juste sorti ses notes de briefing et elle a dit qu'elle fait son possible. Ce n'est pas assez bon.

D'autres dossiers, M. le Président, les implants cochléaires. Ça existe, une liste d'attente de 125 personnes. La moitié sont des enfants. La moitié de ce groupe attend une évaluation. C'est ça que la ministre va discuter. Ils sont très malentendants ou sourds. Un grand, grand pourcentage de ces personnes a besoin ou peut avoir un implant cochléaire. Il y a déjà une liste d'attente de 63 personnes ? 30 personnes qui sont des enfants ? qui attendent un implant cochléaire, et le gouvernement ne fait pas assez. La liste est en train de doubler depuis quelques années. Avec ça, la ministre peut dire qu'elle a augmenté le budget, mais ce n'était pas assez bon. Les faits sont assez clairs que les listes d'attente sont de plus en plus longues. Un an et demi pour avoir un implant cochléaire, c'est inhumain, M. le Président. Les jeunes, les petits enfants qui attendent un implant cochléaire perdent leur capacité linguistique, perdent leurs acquisitions de langage. Je trouve ça inacceptable que le gouvernement ait décidé de ne pas trouver les sous pour ces personnes-là.

Et aussi la Régie de l'assurance maladie du Québec commence à hausser les barrières, ils commencent à refuser à cause de l'âge, à cause d'une incapacité intellectuelle. Moi aussi, M. le Président, j'ai deux cas que nous avons présentés devant la Commission des droits de la personne. C'est inacceptable comme approche.

Et aussi pourquoi le gouvernement insiste que tout le monde doit se déplacer à Québec? Il y a les services disponibles à Montréal. La ministre, depuis plus d'un an, a reçu les projets, ça vient de Montréal, qui disent: Ils sont capables aussi de faire les implants cochléaires. Et, c'est assez clair, les études démontrent que, si on peut mettre un investissement maintenant pour ces jeunes, on peut faire cet implant cochléaire. Oui, c'est un peu d'argent, quelques mille dollars, oui, M. le Président, mais on peut augmenter leur qualité de vie, on peut sauver de l'argent pour l'État aussi, parce qu'il y a moins de services.

Plus que ça, je demande que le gouvernement commence tout de suite un programme de dépistage au niveau de la naissance, parce que, comme il est fait aux États-Unis, c'est la façon de trouver tous les problèmes tout de suite. Et la réponse de la ministre était complètement inacceptable. Merci beaucoup, M. le Président.

n(18 h 20)n

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Nous cédons maintenant la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux et députée de Taillon.

Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, c'est avec plaisir que je vais aborder ce débat, mais il y a un argument que j'avais oublié dans le débat précédent, étant entendu que M. Charest était un peu dans l'embarras, s'étant fait payer un voyage au Mexique...

M. Mulcair: M. le Président, question de règlement!

Mme Marois: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Mulcair: On peut commencer par dire que la ministre a cité un député par son nom, ce qui est carrément interdit en vertu de notre règlement. Il y a aussi une règle de la pertinence. Elle annonce d'emblée qu'elle est en train de sortir du sujet. Auriez-vous, s'il vous plaît, l'obligeance d'appliquer le règlement comme il se doit, en vertu de notre règle justement?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je ne vois pas pourquoi on s'énerve tant, ma collègue n'a fait que citer un article de journal.

Mme Marois: Un titre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre, vous connaissez les règles: vous n'avez pas le droit de citer le nom des députés en cette Chambre, mais bel et bien les comtés. Alors, madame, tout en respectant, bien entendu, la pertinence de notre sujet.

Mme Marois: Je vais revenir à la pertinence du débat, mais, comme ceux-ci s'enchaînaient l'un l'autre, je croyais utile et pertinent de citer cette information. Et je n'ai pas voulu citer le nom du député, qui est en l'occurrence le chef de l'opposition, mais c'était le journal qui le faisait. Alors, j'ai simplement lu le titre du journal.

Alors, M. le Président, si nous revenons maintenant à cette question très sérieuse, qui est l'aide aux personnes malentendantes, je dois vous dire que notre gouvernement a fait, depuis les dernières années, un effort considérable pour essayer d'aider autant des enfants que des adultes, sachant cependant que, dans le cas des enfants, plus nous intervenons tôt dans certaines circonstances particulières, plus les taux de réussite sont élevés. J'ai eu la chance d'ailleurs de rencontrer des parents, des gens qui ont vécu une expérience positive du côté, entre autres, des implants cochléaires et qui ont donc ainsi pu voir leur enfant grandir en entendant ce qui se passait autour d'eux et leur permettant, évidemment, de mieux participer aussi à la société dans laquelle ils se retrouvent.

Alors, le député de Nelligan a soulevé deux questions, M. le Président. La première, c'est le programme des aides auditives, soit que nous puissions réparer les aides auditives à un rythme plus grand que ce que nous faisions par le passé. C'est un engagement qu'a pris mon collègue qui a occupé cette fonction, le député de Charlesbourg et maintenant ministre responsable de la Science et de la Technologie, que j'ai à mon tour réitéré. Nous avons travaillé autant avec des représentants de l'Office des personnes handicapées qu'avec les régies régionales, l'Ordre des orthophonistes et audiologistes, la Régie de l'assurance maladie du Québec, l'Association des centres de réadaptation en déficience physique du Québec, et nous avons travaillé, donc, avec ces organismes à la préparation d'un projet de règlement qu'éventuellement nous devrions soumettre à consultation, pour, par la suite, être capables de corriger cette difficulté à laquelle sont confrontés les gens qui ont des appareils auditifs, des aides auditives, pardon, et qui ne peuvent les faire réparer au rythme où ce serait nécessaire de le faire. Alors, nous tiendrons cet engagement.

L'autre volet soulevé par notre collègue, c'est la question des implants cochléaires. Il faut savoir que c'est un service surspécialisé, un programme qui a débuté en 1984. Peu de médecins peuvent procéder à une telle implantation. En fait, on parle de deux grands spécialistes ici, au Québec, qui peuvent le faire, dont un en particulier ici, au CHUQ. Nous avons augmenté le budget prévu de l'ordre de 1 050 000 $ pour l'année en cours, nous permettant de traiter un plus grand nombre de cas, et nous espérons être capables d'augmenter encore, dans les années futures, le nombre de cas traités.

Quand le député dit qu'il y a une liste d'attente, c'est vrai, mais elle n'est pas de 125, comme celui-ci le dit; elle est en fait de 63. Une partie sont des enfants, une autre partie sont des adultes. Il y a aussi une liste d'attente pour une évaluation, c'est-à-dire pour qu'on pose un diagnostic à l'effet que c'est pertinent, d'implanter ou non cet appareil. Parce qu'on peut vouloir implanter un appareil, mais on peut constater que, médicalement parlant, ça ne donnera pas les effets escomptés. Alors, ce n'est pas, à ce moment-là, utile de faire subir une chirurgie à quelqu'un qui n'en bénéficiera pas, par la suite, comme résultat positif.

Alors, il y a donc 62 personnes en évaluation, il y a réellement 63 personnes en attente, dont 30 enfants. On me dit qu'entre autres le Dr Ferron est capable ici, à Québec, de réaliser près de 36 cas par année, au rythme où il peut le faire, parce que ce sont des opérations assez spécialisées, et donc, en ce sens-là, nous allons continuer de l'appuyer parce que nous croyons qu'il est important d'aider les gens qui vivent de telles difficultés, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Alors, M. le député de Nelligan, une réplique de deux minutes.

M. Russell Williams (réplique)

M. Williams: Oui. Je suis tellement choqué et fâché par la réponse de la ministre qui a utilisé son temps à jouer à la petite politique ici, dans cette Chambre, quand j'essaie de plaider la cause des malentendants, des personnes sourdes.

Des voix: Oui. Bravo!

M. Williams: Elle préfère jouer juste la petite politique. Quelle incompétence! Ce gouvernement est en train de forcer les familles à aller devant la Commission des droits avec les dossiers pour défendre leurs enfants. Je mentionne juste la famille Duchesnay ? Frank Duchesnay ? avec son fils Ryan qui, maintenant, défend son fils devant la Commission des droits de la personne avec quelques autres personnes parce qu'il y a discrimination à cause de vos règles.

C'est incompétent, qu'est-ce que la ministre est en train d'expliquer. Elle dit que, ah, oui! elle va faire son possible. On parle de discrimination pour ceux et celles qui attendent de l'argent pour payer la réparation des aides auditives, 3 millions de dollars, c'est tout. That's it, M. le Président, ce n'est pas beaucoup.

Cette ministre n'a rien fait, 3 millions de dollars. Elle n'est pas capable de convaincre le Conseil du trésor, là. Elle est capable de convaincre le Conseil du trésor pour 842 000 $ pour les toilettes silencieuses. Elle n'est pas capable de convaincre le Conseil du trésor pour 3 millions de dollars pour les aides auditives.

Des voix: Bravo!

M. Williams: M. le Président, je trouve ça inacceptable, et elle continue. Elle a insulté les spécialistes de Montréal; elle a dit que juste à Québec, on peut faire ça. Voyons donc, M. le Président, on peut faire ça à Québec! J'espère qu'on peut faire ça à Montréal, à Trois-Rivières, à Sherbrooke, à Hull. J'espère que, comme en Ontario, on peut avoir cinq centres. Mais, non, la ministre a décidé d'insulter les médecins, elle a décidé de ne pas respecter sa parole.

Il y a trois ans que le gouvernement a promis de payer pour les aides auditives; ils n'ont pas livré la marchandise. Et aussi, pour les implants cochléaires, c'est inacceptable, c'est impensable que ce gouvernement se traîne les pieds et, jour après jour, quand nos enfants attendent des implants cochléaires, ils perdent les compétences, ils perdent les acquisitions de langage. C'est inacceptable que ce gouvernement décide de balancer les livres sur le dos des malentendants...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Ceci met fin à notre second débat de fin de séance.

Réorganisation de l'industrie du taxi

Nous allons maintenant procéder à notre troisième débat de fin de séance entre M. le député de Shefford et M. le ministre d'État aux Transports et député de Joliette, concernant le dossier du taxi. Alors, M. le député de Shefford, un temps de parole de cinq minutes.

M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Cet après-midi, j'ai posé une question sur le projet de loi n° 163 qui concerne l'industrie du taxi.

M. le Président, pour vous mettre en situation, c'est un projet de loi qui, dans un premier temps, fait en sorte qu'on puisse voir des voitures de taxi plus propres, plus sûres, avec un meilleur service. Ça, d'entrée de jeu, je vous dis qu'on est d'accord. Tout le monde est d'accord, les chauffeurs de taxi aussi sont d'accord, on est tous pour la vertu.

Deuxième partie du projet de loi. Le projet de loi fait en sorte qu'on appelle un syndicat une association professionnelle. Parce que, lorsqu'on lit le texte et qu'on regarde l'historique du dossier, M. le Président, il est de toute évidence qu'on veut livrer les chauffeurs de taxi à un groupe syndical. On dit de ce côté-ci: Lorsque l'on parle d'associer des patrons et des employés, c'est un mélange explosif. C'est le droit fondamental des salariés de se réunir en syndicat, et ça, nous le maintenons. Mais, dans le cas qui nous occupe, si on recommence en 1988, par exemple, lorsque le Syndicat des métallos a fait signer des cartes aux chauffeurs de taxi, ils ont fait une demande d'accréditation, ils sont allés d'appel en appel, en appel jusqu'à la Cour supérieure où on leur a dit: C'est impossible, ce sont des travailleurs autonomes, en grande partie des travailleurs autonomes.

M. le Président, la FTQ a fait des demandes répétées au gouvernement du Parti québécois. On se souviendra que M. Jean-Roch Boivin avait promis à la FTQ un syndicat pour les chauffeurs de taxi. Donc, il est arrivé au début du mois de mai, le ministre rencontre Henri Massé de la FTQ et il lui a promis qu'il y aurait, entre guillemets, une association professionnelle, mais en relation avec un contrat de services, peut-être, avec le syndicat des métallos. D'ailleurs, M. le Président, deux citations pour prouver mes dires. Un communiqué de presse du 1er mai 2000: «La FTQ obtient du ministre Guy Chevrette la création d'une association professionnelle unique pour les 17 000 chauffeurs de taxi du Québec.» Le syndicat, la FTQ se dit très, très heureuse, là, que le ministre ait accepté leur demande.

La même journée, André Tremblay, directeur adjoint du Syndicat des métallos, lui, il dit: Elle pourrait être rattachée aux métallos, parlant de l'association professionnelle. Imaginez-vous, une association professionnelle rattachée aux métallos. Si ce n'est pas de la syndicalisation déguisée, on ne sait pas ce que c'est. Donc, rattachée aux métallos en vertu d'un contrat de services. Ayoye! M. le Président. Un contrat de services comme l'offre que nous avons faite aux camionneurs indépendants, des distributeurs de produits alimentaires, nous pourrions offrir à l'industrie du taxi des services, etc. Donc, ça démontre clairement qu'en fin de compte l'association professionnelle, il faut lire «syndicat».

n(18 h 30)n

Donc, à partir de ce moment-là, il faut se poser des questions. Comme je vous disais, il n'y a pas de problème de ce côté-ci pour augmenter la qualité du service, mais, dans un projet de loi qui, d'autant plus, semble un peu contraire à de la démocratie... Je le disais cet après-midi au ministre. Puis il m'accusait de ne pas avoir lu le projet de loi, je l'ai lu de A à Z deux fois, M. le Président. Je pense qu'il aurait avantage à lire puis à regarder tout ce qu'il y a dans ce projet de loi là.

Donc, M. le Président, il crée un forum des intervenants de l'industrie du taxi. Bon, bien, ça, c'est bien simple, la patente pour arranger ça, c'est, un, le gouvernement va nommer le président ? le gouvernement, c'est le Conseil des ministres ? et puis les autres neuf membres, au maximum, seront nommés par le ministre. C'est pour ça que je disais cet après-midi que, quand on est chauffeur de taxi, on a tout intérêt à être des amis du régime, parce que, sinon, on est en mauvaise posture.

Ensuite de ça, M. le Président, en plus, j'oubliais d'ajouter que c'est le ministre, dans la loi, qui détermine le mode de fonctionnement du forum. Donc, c'est contrôlé entièrement, il pourra faire ce qu'il veut avec ça. Pire que ça ? puis ça, c'est la première fois que je vois ça puis j'espère que le ministre va reculer au moins là-dessus, ça n'a pas de bons sens ? on s'approprie le bien des ligues actuelles. Il y a 57 ligues de taxis au Québec, et la loi nous dit que, à partir du 15 novembre, pas à partir de l'adoption du projet de loi, là, on saisit les biens ou on en prend la saisine, comme on dit en droit ? vous savez, M. le Président, vous êtes notaire. On tient responsable le conseil d'administration au cas où il lui prendrait l'idée de remettre ces biens-là aux chauffeurs de taxi qui ont cotisé de leurs poches, de leurs propres deniers, on prend cet argent-là puis on l'envoie à la nouvelle association professionnelle, il faut lire aussi «syndicat». Je pense que c'est la politique de l'ère de l'URSS. Ça n'a aucun, aucun, aucun bon sens, puis je suis convaincu que le ministre...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Shefford. Une réplique, M. le ministre? Cinq minutes.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je comprends que... Je pensais cet après-midi qu'il ne l'avait pas lu, mais, s'il l'a lu deux fois, c'est encore pire, il n'a rien compris. Et je vous dirai que ça fait pitié. Ça fait pitié parce qu'il ne fait pas la distinction... Un syndicat, il faudrait que les propriétaires ne soient pas avec les chauffeurs, voyons! Il n'a pas compris ça. Ce n'est pas de ma faute, je m'excuse. Je ne pouvais pas lui donner un cours sur le Code du travail. La dernière année d'enseignement à l'université, c'est ce que je faisais, et mes élèves avaient compris, il me semble. Mais je dois vous dire que ce n'est pas croyable de l'entendre.

L'association professionnelle, elle va se donner les services qu'elle voudra bien se donner. Et, même si la FTQ en offre, c'est eux qui vont décider s'ils en prennent ou pas de la FTQ. Mais c'est une association professionnelle dont les dirigeants vont être votés par eux, puis pour eux, et pour leurs intérêts, puis ils se donneront bien les services qu'ils voudront bien se donner. Ça, c'est de un. De deux. Il dit: Il va nommer les personnes. Le comité, le forum, il va y avoir un représentant qui va venir des chauffeurs de taxi; il va y en avoir un qui va venir des propriétaires de taxi; il y en a un qui va venir des intermédiaires des coops; il y en a un qui va venir de l'industrie spécialisée des limousines; il y a un représentant des usagers. Je ne suis toujours pas pour faire une élection universelle au Québec pour nommer un usager. Le gros bon sens, c'est ce qu'on retrouve ordinairement dans les lois quand on crée ces forums-là, on demande des propositions, ils nous envoient leurs noms, puis on les nomme. C'est ça qu'on fait dans les lois.

Le député, malheureusement, ne comprend pas ça. Et il s'est manifestement collé, M. le Président, sur un seul porte-parole, celui de la Ligue de taxis de l'Ouest de Montréal. Manifestement, il s'est collé sur ça puis il ne fait que répéter comme un ténor qui résonne ? r-é ? les propos carrément de M. Farès Bou Malhab et oublie les régions du Québec. Je vais lui demander d'appeler le président de la Ligue de taxis de Québec. Je vais lui demander d'appeler la Ligue de taxis de Longueuil. Je vais lui demander d'appeler le président du Conseil provincial de concertation et de développement en industrie du taxi. Je vais lui demander d'appeler les différents intervenants du transport adapté qui voient là une ouverture pour l'amélioration de la qualité des services. Et on va appeler les chauffeurs un peu partout à travers le Québec qui paient pour des ligues puis qui ne reçoivent aucun service de quelque nature que ce soit. Et je pourrais lui déposer, s'il veut bien le garder secret, un certain rapport sur la gestion de certaines ligues. Et, comme ancien notaire, il doit savoir que ça prend de la rigueur dans la gestion.

En fait, M. le Président, ce même député qui se lève a voté pour la loi n° 135 créant le Forum du camionnage. C'est la même chose que l'on crée. On sait qu'on ne peut pas syndiquer un propriétaire artisan, celui qui est propriétaire de son taxi, celui qui est propriétaire de son camion, rappelez-vous l'ANCAI, on sait tout ça, sauf le député de Shefford. Je m'ennuie du député de l'Acadie. Au moins, lui, il lisait ses lois et les comprenait. Manifestement, j'ai un critique ou bien qui lit puis il ne comprend pas ou bien qui n'a pas lu puis qui fait voir qu'il a lu. Mais, M. le Président, ses propos dénotent carrément de l'ignorance en ce qui regarde les faits véritables.

Le projet de loi sur le taxi crée une association professionnelle, puis ça ne sera pas rien qu'une question de beaux chars, comme il a dit, là, belles automobiles, ça va être une question de qualité de services, de formation, de connaissance des lieux, de gentillesse dans l'industrie, relever le standard de l'industrie, faire le ménage dans les «pocket numbers». Ils sont peut-être 18 000 qui ont des petits permis non utilisés. On va faire le ménage dans la question des limousines. On va abolir, par exemple, également la question des permis pour les baptêmes, pour les mariages. On va simplifier les choses puis on va faire en sorte que ces gens-là puissent un jour se prendre en main avec un code de déontologie puis qu'ils puissent véritablement donner une image tout autre à la profession de chauffeur de taxi. Ce sont des gens qui méritent ça. Et je ne ferai pas l'erreur de me coller sur une seule ligue dont le président ne veut absolument pas perdre son poste.

Je suis là pour essayer d'offrir une qualité de services aux citoyens du Québec. C'est le premier coup d'oeil... Bien souvent, quand on débarque à l'aéroport de Dorval, c'est souvent un taxi délabré que l'on voit. Il n'y aura pas de chicane entre les chauffeurs. Il va y avoir des règles. Ils vont se donner une discipline. Ils vont améliorer cette industrie-là, M. le Président. Et le député de Shefford aurait avantage, à ce moment-là, à écouter l'ensemble des intervenants et non pas uniquement le président de la Ligue de l'Ouest de Montréal, qui craint pour son poste. On est capable de mettre des règles où les employeurs auront leur système et où les chauffeurs pourront aussi décider de leur point sans se contredire les uns les autres.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Transports et député de Joliette. Alors, M. le député de Shefford, votre dernière réplique, deux minutes.

M. Bernard Brodeur (réplique)

M. Brodeur: Merci, M. le Président. Le ministre des Transports est impayable, je le reconnais. Hier, j'ai rencontré des présidents de ligues de partout au Québec. Il y avait des gens de Drummondville, de Saint-Hyacinthe, de Saint-Eustache, de la région justement du ministre. Il y en avait 12 autour de la table, jusqu'à Sainte-Foy. Il nous parle de deux personnes tantôt, de Claude Dumais puis de Michel Lévesque, ces deux personnes-là qui sont, en fin de compte, les porte-parole du syndicat de la FTQ ici, au Québec. C'est eux autres, les groupuscules. Allez voir ce soir, à Montréal, là, il y a des centaines sinon des milliers de chauffeurs de taxi, là, qui sont insultés de l'attitude du ministre.

M. le Président, c'est assez simple, ce qu'on fait, là, c'est un peu un holdup des ligues. Prenez la Ligue de Montréal, par exemple. La Ligue de Montréal a environ un demi-million de dollars de biens qui sont le résultat d'une bonne administration des cotisations des chauffeurs de taxi. C'est incroyable, on prend cet argent-là, on leur enlève puis on donne ça à une autre association. Ça n'a aucun, aucun bon sens. On livre, pieds et mains liés, des chauffeurs de taxi à la FTQ, propriétaires et salariés confondus, des gens qui n'ont pas les mêmes intérêts. Il y a 7 880 voitures de taxi au Québec qui circulent, et la plupart de ces taxis-là sont la propriété d'une personne, un travailleur autonome. Et là j'ai parlé à tout le monde, y compris des gens que le ministre a nommés, des gens... M. Couture, qui était là la semaine passée, il dit: Aïe! c'est bon, ce projet de loi là. En passant, je me présente, M. Gilles Couture, du Syndicat des métallos.

n(18 h 40)n

M. le Président, de toute évidence, le lobby vient du Syndicat et la grande majorité, la très grande majorité est contre ce projet de loi là. Le ministre se cache sous le couvert de tout à fait autre chose. Je me demande même s'il ne se cache pas sous un couvert d'en vouloir à certaines communautés culturelles qui sont chauffeurs de taxi.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député. Alors, merci, M. le député de Shefford. Ceci met fin à nos trois débats de fin de séance. J'ajourne donc nos travaux au mercredi 22 novembre, à 10 heures.

Ajournement

(Fin de la séance à 18 h 41)



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