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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 15 juin 2000 - Vol. 36 N° 123

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Table des matières

Présence d'une délégation de parlementaires de la république de Bulgarie

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures cinq minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Bonjour à vous tous! J'espère que vous allez avoir une bonne journée. Alors, nous allons nous recueillir quelques instants.

Si vous voulez vous asseoir. Merci beaucoup.


Présence d'une délégation de parlementaires de la république de Bulgarie

J'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes d'une délégation de parlementaires de la république de Bulgarie. Bienvenue à l'Assemblée nationale.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: D'abord, l'article a, M. le Président.


Projet de loi n° 142

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article a, M. le ministre des Transports présente le projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère des Transports pour permettre au ministre des Transports d'exiger d'une association titulaire d'un permis de courtage qu'elle dispense le service de courtage, aux conditions qu'il détermine, aux abonnés d'une association qui a demandé un permis de courtage et également leur permettre de participer à la réalisation d'un contrat de voirie jusqu'à ce que la décision de la Commission des transports relative à la demande du permis de courtage de leur association devienne exécutoire. En outre, il permet au ministre de délivrer, aux conditions qu'il détermine, à l'association qui a demandé le permis de courtage un permis temporaire pendant cette période.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, maintenant, l'article b, M. le Président.


Projet de loi n° 138

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article b, M. le ministre du Revenu présente le projet de loi n° 138, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives. M. le ministre du Revenu.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi a pour objet principal d'harmoniser la législation fiscale du Québec avec celle du Canada. À cet effet, il donne suite principalement à certaines mesures d'harmonisation prévues dans les discours sur le budget du ministre d'État à l'Économie et aux Finances du 31 mars 1998 et du 9 mars 1999.

Ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts principalement afin d'y apporter des modifications semblables à une partie de celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par le projet de loi fédéral C-28 du 18 juin 1998. La Loi sur les impôts est également modifiée de façon accessoire afin d'y apporter des modifications semblables à une partie de celles qui ont été apportées à la Loi de l'impôt sur le revenu du Canada par le projet de loi fédéral C-72 sanctionné le 17 juin 1999 et par le projet de loi fédéral C-61 sanctionné le 25 mars 1999, et à une partie de celles qui ont été apportées à la Loi sur la marine marchande du Canada par le projet de loi fédéral C-15 sanctionné le 11 juin 1998. Ces modifications concernent notamment:

1° les mesures visant à ajuster le traitement fiscal des prêts douteux d'institutions financières et d'autres contribuables exploitant des entreprises de prêt d'argent, en tenant compte des nouvelles normes de comptabilité établies par l'Institut canadien des comptables agréés;

2° les règles relatives au calcul du revenu provenant des titres détenus par les institutions financières;

3° l'introduction de nouvelles règles visant à restreindre la déductibilité de certaines dépenses en étalant la déduction sur toute la durée de vie économique d'un droit à un revenu futur;

4° l'introduction de nouvelles dispositions qui permettent, dans le calcul du coût ou de la dépense se rapportant à l'acquisition d'un abri fiscal, de réduire ce coût ou cette dépense du principal impayé d'une dette qui est relative à l'abri fiscal ou du montant de rajustement à risque à son égard;

5° les changements techniques relatifs aux règles qui servent à établir la fraction à risque de l'intérêt d'un commanditaire dans une société de personnes aux fins de calculer les pertes déductibles qui sont attribuées au commanditaire;

6° le regroupement, l'amélioration et l'uniformisation des règles portant sur la limitation des pertes résultant de l'aliénation d'une action à l'égard de laquelle un actionnaire a déjà reçu des dividendes en franchise d'impôt;

7° l'introduction de nouvelles règles visant à permettre aux sociétés de placement qui deviennent des sociétés d'investissement à capital variable de se prévaloir des règles concernant les dividendes sur les gains en capital;

8° les mesures relatives à la fixation des prix de transfert;

9° les règles qui s'appliquent lorsqu'un associé détient une participation résiduelle, de même que les règles de limitation de pertes résultant de l'aliénation d'une participation dans une société de personnes.

Ce projet de loi modifie également la Loi sur les impôts afin d'y apporter diverses modifications à caractère technique, de concordance ou de terminologie.

(10 h 10)

Il modifie enfin diverses autres lois principalement pour tenir compte de certaines modifications apportées à la Loi sur les impôts et pour leur apporter diverses modifications à caractère technique.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Rapport sur les plaintes des usagers de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre et rétrospective

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose le rapport annuel de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Montréal-Centre sur les plaintes des usagers 1998-1999 et rétrospective.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le document est déposé. M. le ministre de la Solidarité sociale et ministre responsable de la Régie des installations olympiques.


Rapport annuel de l'Office de la sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris

M. Boisclair: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 de l'Office de la sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.


Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Brassard: M. le Président, je dépose la réponse à la question n° 24 inscrite au feuilleton du 6 avril 2000 par la députée de Sauvé.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ce document est déposé. Au dépôt de rapports de missions, M. le député de Saint-Jean.


Actes du 48e séminaire de Westminster sur les pratiques et procédures parlementaires de type britannique

M. Paquin: M. le Président, j'ai le plaisir de déposer les actes du 48e séminaire de Westminster sur les pratiques et procédures parlementaires de type britannique qui a eu lieu du 3 au 12 mars 1999. Cette activité s'est tenue au Royaume-Uni, en partie au Parlement de Westminster, à Londres, et aussi dans le South Staffordshire. J'étais le seul participant du Québec lors de cette rencontre de la Commonwealth Parliamentary Association.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce rapport est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de la culture et député de Matane.


Consultation générale sur le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés

M. Rioux: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de la culture qui a siégé les 14, 15, 16 et 22 mars 2000 afin de procéder à une consultation générale et tenir des auditions...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci de votre collaboration. M. le député de Matane, la parole est à vous.

M. Rioux: ...et tenir des auditions publiques sur le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur le Conseil des aînés. La commission s'est également réunie en séance de travail à neuf reprises, et le rapport que je dépose contient huit recommandations.


Actes du colloque intitulé Mondialisation de l'économie et diversité culturelle: Les enjeux pour le Québec , tenu à l'Assemblée nationale du Québec

Je dépose également, M. le Président, les actes du colloque qui s'est tenu ici, à l'Assemblée nationale du Québec, le 8 mai dernier et qui avait pour titre Mondialisation de l'économie et diversité culturelle: Les enjeux pour le Québec . Ce document ne constitue qu'une première étape du mandat d'initiative sur les enjeux culturels de la mondialisation que s'est donné la commission de la culture. Le document sera remis à tous les membres de cette Assemblée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce document est déposé. M. le président de la commission de l'administration publique et député de Jacques-Cartier.


Audition du Vérificateur général dans le cadre de l'examen de son rapport annuel et vérification de ses engagements financiers

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'administration publique qui a siégé le 10 mai de l'an 2000 afin d'entendre le Vérificateur général du Québec dans le cadre de l'examen de son rapport annuel d'activité et de procéder à la vérification de ses engagements financiers pour les mois d'avril 1999 à mars de l'an 2000.


Vérification des engagements financiers du ministère de la Solidarité sociale, du ministère de la Justice et de la ministre responsable la Condition féminine

J'ai également le plaisir, M. le Président, de déposer le rapport de la commission de l'administration publique qui a siégé le 10 février et le 4 avril de l'an 2000 afin de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de la Solidarité sociale pour les mois d'avril 1997 à mars 1999 et du ministère de la Justice et de la Condition féminine pour les mois d'avril 1997 à mars 1999.


Auditions en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics

Finalement, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'administration publique qui a siégé afin de procéder aux auditions ci-dessous énumérées, en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics: le 8 février de l'an 2000, le sous-ministre de la Santé et services sociaux concernant la gestion des laboratoires de biologie médicale; le 9 février de l'an 2000, le sous-ministre de la Famille et de l'Enfance concernant les nouvelles dispositions de la politique familiale; le 24 février de l'an 2000, le secrétaire du Conseil du trésor concernant les programmes de départs volontaires; le 15 mars 2000, le président-directeur général de la Régie des rentes du Québec concernant le rapport de gestion 1998-1999; le 5 avril, le sous-ministre de la Santé et des Services sociaux et le sous-ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie concernant la coordination et le financement de la recherche en santé et la recherche sociale. La commission a également tenu des séances de travail le 26 janvier, les 8, 9, 23, 24 février, les 14 et 22 mars, le 5 avril, le 24 mai et le 1er juin de l'an 2000. Et ce rapport que je viens de déposer contient 15 recommandations. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ces rapports sont déposés.


Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de LaFontaine.


Assurer que les besoins des patients de l'hôpital Rivière-des-Prairies seront pris en compte dans les changements envisagés

M. Gobé: M. le Président, je désire déposer l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 6 138 pétitionnaires des syndicats CSN et de l'Association des parents de l'hôpital Rivière-des-Prairies dont une délégation est présente dans les tribunes de cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt de cette motion? Consentement. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que l'hôpital Rivière-des-Prairies a décidé de ne pas être le maître d'oeuvre et le gérant de l'opération "réinsertion sociale en cours" et donc de ne pas demander l'ensemble des sommes nécessaires à sa réalisation;

«Considérant que l'hôpital Rivière-des-Prairies évacue de sa mission d'hébergement de longue durée pour une clientèle adulte lourdement hypothéquée sur le plan comportemental et psychologique – automutilation, agressivité, fugue chronique, etc.;

«Considérant qu'aucune ressource financière additionnelle n'a été jusqu'à présent consentie à l'amélioration de l'environnement physique et social de la clientèle; à l'augmentation du ratio personnel-patients tel qu'il a été recommandé par les experts de l'hôpital Robert-Giffard;

«Considérant que l'administration doit, pour dégager des ressources financières, compter sur le transfert rapide de sa clientèle adulte vers d'autres réseaux; la réaffectation de ses cadres supérieurs; la rationalisation de ses effectifs déjà insuffisants;

«Considérant en somme que les préalables à l'opérationnalisation de son plan stratégique 1999-2002 sont loin d'être réunis: ressources financières additionnelles, augmentation du ratio intervenant-patients, amélioration de l'environnement physique, recrutement de nouveaux médecins;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous exigeons:

«Que le ministère de la Santé et des Services sociaux se prononce publiquement sur le virage amorcé par l'hôpital Rivière-des-Prairies;

«Que la mise en oeuvre des orientations stratégiques de l'établissement soit suspendue;

«Que le processus de transfert de la clientèle soit discontinué;

«Que l'on réintroduise dans la mission redéfinie l'hébergement et l'hospitalisation de longue durée;

«Que l'on établisse avec la collaboration des parents, pour chaque patient, un plan de services individualisé prévoyant l'ensemble des soins et des services requis;

«Tout cela afin que la clientèle, les parents, les tuteurs et le personnel soignant soient assurés de façon nette et vérifiable que les besoins réels des patients seront scrupuleusement respectés tout au long de cet important processus et seront maintenus après les changements.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, votre pétition est déposée, M. le député. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Oui, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer une pétition non conforme.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt de cette pétition? Consentement, M. le député, vous pouvez procéder.


Abaisser immédiatement les taxes provinciales sur l'essence

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 1 113 pétitionnaires qui représentent la population de Kamouraska-Témiscouata.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le prix de l'essence atteint des sommets inégalés au Québec;

«Attendu que cette hausse des prix de l'essence entraînera inévitablement une augmentation de l'inflation;

«Attendu que les taxes sur l'essence représentent près de la moitié du prix de l'essence;

«Attendu que le gouvernement du Québec refuse de diminuer ses taxes sur l'essence;

«Attendu que la hausse des prix de l'essence risque d'avoir un effet très négatif sur l'économie du Québec;

«Attendu que le gouvernement du Québec dispose de la marge de manoeuvre nécessaire pour diminuer les taxes sur l'essence;

«Attendu que les Québécois et les Québécoises sont les plus taxés sur l'essence au Canada et en Amérique du Nord;

«Attendu que le Parti libéral du Québec [...] réclame une baisse des taxes sur l'essence;

«Attendu que la population de la région de Kamouraska-Témiscouata en a assez d'être utilisée pour gonfler les surplus de l'État;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale qu'elle exige du gouvernement du Québec qu'il cesse d'empocher les bénéfices sur le dos des contribuables du Québec et qu'il baisse immédiatement les taxes provinciales sur l'essence.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, votre pétition est déposée. M. le député de Mont-Royal.

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Je sollicite l'autorisation de déposer une pétition non conforme.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député, vous pouvez procéder.


Encourager la population à préserver l'environnement en utilisant d'autres médias que les journaux pour s'informer

M. Tranchemontagne: Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 5 669 pétitionnaires citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Afin de ralentir jusqu'à son arrêt complet la destruction de nos forêts, pour l'atteinte d'un meilleur équilibre climatique planétaire;

«Afin de réduire la pollution causée par les substances chimiques utilisées dans la fabrication du papier journal, qui sont déversées dans les rivières, et par les encres d'imprimerie;

«Afin de diminuer l'intoxication humaine des lecteurs par ces encres sournoises qui nuisent à leur santé;

«L'intervention réclamée est ce qui suit:

«Nous, signataires, contre la déforestation occasionnée par la fabrication du papier pour journaux quotidiens, demandons au gouvernement du Québec d'encourager par les moyens appropriés les citoyens et citoyennes du Québec à privilégier l'utilisation d'Internet, de la radio et de la télévision pour s'informer des nouvelles quotidiennes.»

(10 h 20)

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, votre pétition est déposée, M. le député.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je cède la parole maintenant à M. le député de Vaudreuil.

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt d'une pétition? M. le leader, consentement? M. le député, vous pouvez procéder.


Voter contre toute augmentation de prime d'assurance médicaments pour les personnes âgées

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 542 pétitionnaires représentant la population de la région de Vaudreuil-Dorion.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que le gouvernement péquiste et la ministre de la Santé ont pris la décision de doubler les primes d'assurance médicaments versées annuellement via le rapport d'impôts, les faisant passer de 175 $ à 350 $ par année;

«Attendu que le gouvernement péquiste impose une autre taxe déguisée aux Québécois et Québécoises qui sont déjà les plus taxés en Amérique du Nord;

«Attendu qu'avant l'entrée en vigueur du régime d'assurance médicaments les personnes âgées ne déboursaient que 2 $ par prescription jusqu'à concurrence de 100 $ annuellement pour leurs médicaments;

«Attendu que, depuis l'entrée en vigueur du nouveau régime d'assurance médicaments, le gouvernement péquiste est allé chercher dans les poches des personnes âgées un montant total de 836 millions depuis trois ans;

«Attendu que les personnes âgées ont le droit le plus légitime de se procurer tous les médicaments nécessaires pour une bonne santé et que toute augmentation de prime a des conséquences néfastes sur la santé des personnes âgées;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale de voter contre toute augmentation de prime de l'assurance médicaments pour les personnes âgées.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Nous passons maintenant à un petit 45 minutes pas facile pour la présidence, mais on va essayer de bien faire ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, questions et réponses orales des députés. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Accessibilité des médicaments et des thérapies de pointe


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Encore hier, la ministre de la Santé niait que des patientes qui luttent contre le cancer du sein devaient acheter et apporter leurs médicaments à l'hôpital afin d'obtenir leurs traitements. Il va sans dire qu'il est plus facile pour la ministre de la Santé de rejeter du revers de la main les affirmations des comités de patients du Centre universitaire de McGill; plus facile aussi de rejeter du revers de la main les affirmations de l'Association des pharmaciens des établissements de santé du Québec qui la désavouait publiquement; plus facile de rejeter du revers de la main le dépôt des factures que j'ai fait en cette Chambre, de rejeter du revers de la main la directive du département de pharmacie quant au remboursement des coûts de chimiothérapie administrée à l'hôpital et payés par l'assurance privée; plus facile également de rejeter du revers de la main les deux témoignages bouleversants et troublants parus dans le journal The Gazette .

M. le Président, si les membres des comités de patients le disent, si les pharmaciens en établissement le disent, si les patientes le disent, si les parents et les conjoints des victimes le disent, pourquoi la ministre de la Santé continue-t-elle à nier la vérité?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous allons reprendre les explications, puisque, à sa face même, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne n'a pas compris les réponses que j'ai données jusqu'à maintenant à l'Assemblée nationale, M. le Président. J'ai dit très clairement que ce n'était pas permis que de charger des frais à des patients lorsque les médicaments étaient offerts, prescrits dans les hôpitaux, un certain nombre de médicaments, M. le Président. Je l'ai dit à plusieurs reprises, je le redis ici.

Je dis par ailleurs, et la députée sait très bien qu'elle confond toutes les informations et essaie de confondre surtout les membres de l'Assemblée, j'ai dit qu'un certain nombre de médicaments, dont elle a parlé au début de ses interventions il y a quelques semaines, n'étaient pas chargés aux patients et ne devaient pas l'être. Et elle a laissé entendre que certains de ces médicaments même étaient chargés aux patients parce que l'hôpital croyait qu'ils étaient trop chers et ne voulait pas les donner aux patients alors que c'étaient les meilleurs. Faux, M. le Président, ce n'est pas le cas.

Cependant, j'ai dit aussi, et je le répète – est-ce qu'on va bien me comprendre? – que notre système n'est pas parfait. Il y a eu dans certains cas, et il semble que ce soit le cas pour un des médicaments dont on parle depuis quelques temps, l'Aredia, il semble dans certains cas qu'on l'ait fait. On n'a pas le droit de le faire, M. le Président. Si on l'a fait, la situation doit être corrigée et le sera, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. En question complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Si c'est faux et ce n'est pas le cas – je reprends les propos de la ministre – que répond la ministre de la Santé à l'oncologue, le Dr Brian Leyland-Jones, professeur de médecine et d'oncologie à l'Université McGill et médecin oncologue à l'Hôpital général de Montréal, au Royal Victoria et à l'hôpital Sainte-Marie, qui dit ceci: «L'oncologue doit décider s'il prescrira le nouvel agent à un nouveau patient ou l'agent conventionnel plus ancien, moins coûteux à 10 patients. Il s'agit ici d'une situation terrible pour l'oncologue et pire encore pour le patient.»? Que répondez-vous à cet oncologue?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. D'abord, je ne suis pas oncologue. Et nous savons que, dans toutes ces questions, il y a des querelles d'écoles et des querelles d'interprétation.

Des voix: ...

Mme Marois: Non. L'opposition peut faire des gorges chaudes, mais elle sait très bien que c'est le cas dans toute utilisation, d'ailleurs, de médicament et particulièrement dans les nouveaux médicaments.

Dans ces discussions qu'il y a entre spécialistes, certains spécialistes nous indiquent qu'il n'est pas utile de prescrire un médicament plus avancé ou plus coûteux nécessairement, compte tenu de l'état d'avancement de la maladie de la personne. Cependant, c'est au professionnel à prendre la décision à ce sujet; je n'ai pas à me substituer, comme ministre, ni personne ici n'a à le faire. Cependant, ce que je dis, c'est que l'hôpital doit rendre disponibles les médicaments les meilleurs, de la plus grande qualité possible, et c'est au professionnel à prendre sa décision professionnelle, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que la ministre de la Santé peut cesser aujourd'hui de se défiler devant une situation aussi dramatique? Comment la ministre peut-elle continuer de nier qu'en raison des compressions budgétaires des patientes se voient privées des meilleurs médicaments?

Et que répond-elle au docteur oncologue Brian Leyland-Jones, qui dit ceci, M. le Président: «Au Québec, les oncologues font face à des choix constants et à un budget extrêmement limité. Ce n'est pas juste de forcer les oncologues à prescrire les médicaments les moins coûteux et les moins efficaces à de nombreux patients tout en privant les patients des derniers progrès de la médecine.»?

C'est un oncologue réputé de Montréal qui parle, M. le Président. Que répond la ministre aux femmes du Québec qui se voient offrir des médicaments moins coûteux, moins efficaces à cause des compressions budgétaires qu'a faites ce gouvernement dans le système de santé?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Est-ce qu'il ne serait pas utile qu'ensemble on se rappelle que nos hôpitaux à travers le Québec ont connu des dépassements de l'ordre de 700 millions de dollars, dans les dernières années, année après année, en termes de déficits. S'ils ont dû rencontrer de tels déficits, que nous avons couverts par ailleurs, c'est parce que, effectivement, ils ont autorisé un certain nombre de dépenses nécessaires et assuré un certain nombre de services qu'ils devaient rendre, et ils l'ont fait professionnellement et consciencieusement, M. le Président. D'ailleurs, nous avons réaugmenté les bases budgétaires en conséquence.

Les professionnels ont la responsabilité de choisir et de prescrire les médicaments les plus adéquats compte tenu des problèmes qu'ils doivent soigner ou des malades auxquels ils doivent offrir des services. Je ne vais pas décider à la place des professionnels le type de médicaments qu'ils peuvent choisir. Et, quand la députée cite l'Association des pharmaciens, elle ne peut pas me citer, dans ce document qu'a rendu public l'Association des pharmaciens d'hôpitaux, elle ne peut pas citer un fait qui dit qu'on n'a pas prescrit le bon médicament aux personnes concernées, M. le Président.

(10 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question principale, M. le chef de l'opposition.


Maintien de l'équilibre budgétaire des établissements du réseau de la santé


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Je ne veux pas manquer l'occasion de souligner que c'est la première fois, à ma connaissance, qu'un député de l'opposition préside la période de questions. Je vous en félicite et j'espère que ce n'est pas un putsch à la présidence.

Des voix: Bravo!

M. Charest: J'ai écouté attentivement la réponse que la ministre vient de donner au sujet des dépassements budgétaires, M. le Président. J'aimerais savoir pour quelle raison la ministre plaide aujourd'hui contre le projet de loi n° 107 qu'elle propose à l'Assemblée nationale du Québec?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je ne plaide pas contre le projet n° 107, je pense que le chef de l'opposition l'aura bien compris. Au contraire, je m'assure que les conditions existent pour que le projet n° 107 puisse s'appliquer correctement.

Ce que nous avons fait, nous avons d'abord couvert les déficits accumulés de l'ensemble des établissements. Nous avons par la suite redressé la base budgétaire, c'est-à-dire, nous avons augmenté les budgets de fonctionnement de l'ensemble de nos institutions, autant les hôpitaux, les CLSC que les centres d'hébergement et de soins de longue durée. Nous avons augmenté en sus les budgets pour couvrir les résultats des négociations de nos conventions collectives de telle sorte qu'on puisse rémunérer, correctement bien sûr, nos employés, à la hauteur des ententes qui étaient intervenues entre nous, M. le Président.

Une fois ces bases rétablies, une fois ces budgets rehaussés, nous proposons d'adopter une loi qui doit empêcher les établissements de faire des déficits. Cette loi, cependant, prévoit que, si certains établissements ont des problèmes, ont besoin d'aide, le ministère se rendra disponible pour le faire. Nous l'avons d'ailleurs déjà commencé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.


Paiement de médicaments par des patients atteints de cancer


M. Jean J. Charest

M. Charest: Ma question s'adresse au premier ministre, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En principale.

M. Charest: ...en principale, et c'est au sujet justement de citoyens, de personnes qui sont diagnostiquées avec un cancer et qui sont victimes d'une pratique qui n'est pas permise, de les obliger à aller acheter leur propre médicament pour se le faire administrer dans l'établissement.

M. le Président, les faits sont les suivants. Le premier ministre était à l'Assemblée hier lorsque sa ministre a affirmé devant tous ses collègues qu'elle n'a eu connaissance de cette pratique, en ce qui touche l'Aredia, que depuis la semaine dernière. Elle continue de nier aujourd'hui, dans le cas du Taxoter, qu'il y avait une pratique qui était connue à l'effet que les médecins oncologues prescrivaient le médicament. Les faits nous apprennent également qu'une enquête exhaustive avait été lancée par la Régie de l'assurance maladie du Québec depuis environ deux ans et que cette pratique remontait à 1997. On a appris également qu'une directive, qui est du domaine public, a circulé dans une régie régionale il y a huit mois, en 1997, dans la région de la Mauricie.

On a appris que, le 31 mars dernier, Marc Saint-Pierre, de la Régie de l'assurance maladie du Québec, écrivait une lettre à la sous-ministre adjointe de la ministre de la Santé l'informant que cette pratique était courante, qu'il fallait agir, que cette pratique n'était pas permise et qu'elle pénalisait des gens qui étaient victimes de cancer. J'ajouterais, M. le Président, que cette pratique continue. Je pourrais dire au premier ministre qu'il y a au moins un patient qu'on connaît, à Trois-Rivières, qui se rend à la pharmacie sur la rue Sainte-Julie pour acheter son Aredia, traverse la rue pour se le faire administrer à l'hôpital.

M. le Président, tout ça met en cause la responsabilité ministérielle de sa ministre de la Santé. J'aimerais savoir si le premier ministre va agir en conséquence en demandant à la ministre de faire ce qu'elle doit faire dans les circonstances.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je voudrais rappeler au chef de l'opposition que, pour mettre en cause la responsabilité ministérielle d'un membre du gouvernement, il faut établir commission d'une faute ministérielle. Or, son raisonnement pèche à la base même, puisqu'il s'est dépêché la semaine dernière de demander, de façon inconsidérée, la démission d'une ministre remarquable sans avoir justement les conditions pour le faire. Aujourd'hui, il tente de justifier après coup cette demande frivole qu'il a fait entendre.

Parce que, M. le Président, il n'y a pas de faute de la ministre là-dedans. Tous les faits que vient de rapporter le chef de l'opposition ne mettent pas en cause la responsabilité de la ministre. Ces faits-là ont été mentionnés hier. La ministre nous a dit en cette Chambre qu'elle n'avait pas eu connaissance des incidents relatifs au médicament Aredia avant la semaine dernière ou il y a deux semaines.

Le chef de l'opposition nous dit – ils ont, je pense, déposé le document hier – qu'il y a des documents qui établissent que, dès 1997, la pratique qui est dénoncée par l'opposition, dénoncée par le gouvernement aussi, a déjà été mentionnée et que, même, il y a eu des échanges de correspondance entre une régie régionale avec des instances de la région concernant cette affaire, et il ajoute que, même, il y a une lettre qui était adressée en mars dernier à un sous-ministre adjoint du ministère qui faisait état de cette pratique condamnable. Mais la ministre nous dit, M. le Président, qu'elle ne l'a su qu'il y a une ou deux semaines.

Est-il possible encore, dans notre société puis dans une Assemblée nationale, de croire à l'intégrité d'un ministre quand il dit qu'il ne le savait pas? Puis, en plus, c'est très vraisemblable, le ministère de la Santé est un immense ministère qui dépense près de 15 milliards de dollars par année, avec des milliers d'établissements, des milliers de fonctionnaires dans le public et le parapublic. Comment peut-on s'attendre à ce qu'un ministre, occupé et préoccupé comme l'est ce ministre présentement, connaisse la totalité des échanges de correspondance, des millions de documents par année? C'est impossible. Nous le savons, M. le Président. Faisons donc acte de reconnaissance de l'honneur d'un de nos collègues et acceptons que la parole qu'elle nous donne soit véritable, ce que je fais personnellement et toute l'équipe ministérielle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, «même si elle n'est pas responsable subjectivement, même si elle n'avait aucune indication à l'effet qu'il y avait des choses illégales qui avaient été faites contrevenant aux exigences de la loi, elle doit assumer sa responsabilité objective de ministre». C'est les paroles que le premier ministre a prononcées à l'Assemblée nationale le 28 avril 1999 au sujet de la députée de Rosemont.

M. le Président, lorsque ces faits-là ont été soulevés, la ministre a nié les faits. Lorsque les faits ont été prouvés, elle a finalement répondu qu'elle ne le savait pas. Alors, la démonstration est faite qu'elle avait effectivement été informée.

Est-ce que le premier ministre va reconnaître enfin ce qu'il a fait dans le cas de sa députée de Rosemont et agir correctement en reconnaissant le fait que la ministre de la Santé, lorsqu'elle évoque des erreurs, ce n'est pas des erreurs à des caisses d'épicerie, c'est des patients qui souffrent de cancer, c'est des gens dont la vie tient aux décisions de médecins qui ont besoin de moyens pour prendre les bonnes décisions? Alors, on ne parle pas d'une erreur insignifiante ou d'une responsabilité qui est insignifiante; bien au contraire, on parle de la responsabilité d'une personne qui a des pouvoirs exceptionnels sur la vie de personnes qui souffrent de cancer.

(10 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, la ministre de la Santé est une personne qui assume des responsabilités en effet extrêmement lourdes et qui le fait de façon admirable et avec beaucoup de courage.

Et, pour revenir au fond des choses, le gouvernement, la ministre a admis dès qu'elle l'a su, et le système également a reconnu que ces pratiques, dans la mesure où elles se sont reproduites, étaient inacceptables, contraires à la loi et qu'il fallait les réprimer.

Et je crois comprendre qu'avant même que les faits aient été portés à la connaissance de la ministre déjà les hauts fonctionnaires, la Régie, avaient commencé à intervenir – je parle de la RAMQ, puis peut-être même la Régie régionale, dont on a cité un texte hier – avaient commencé tout de suite à intervenir pour mettre fin à cette chose et s'assurer que les droits des patients seraient respectés.

Au fond, M. le Président, il s'agit de savoir jusqu'où va la responsabilité ministérielle. Il est très difficile de faire des comparaisons, très difficile, nous le savons, c'est un sujet qui est extrêmement délicat. Mais, en l'espèce, je crois qu'il faut d'abord rappeler que la ministre du Revenu n'avait commis aucune faute et que c'était à cause de la proximité puis de la gravité des infractions qui avaient été commises qu'elle s'est sentie, dans l'honneur de sa fonction et de sa réputation, dans la situation de remettre sa démission. Et je veux répéter qu'elle n'a commis aucune faute et que personne n'a pu mettre en cause son intégrité, au contraire, qu'elle l'a démontrée en posant les gestes qu'elle a posés.

Ceci étant dit, en l'espèce, de quoi s'agit-il? Il s'agit d'un niveau subalterne qui, en effet, semble-t-il, on ne sait pas qui précisément, a commencé à mettre en vigueur une procédure qui s'avère inacceptable, qui a été condamnée et que, depuis, les services ont mise de côté. Et la ministre, dès qu'elle l'a su, a fait en sorte que tout cela ne se représente plus.

M. le Président, je ne lance pas un appel à la compréhension de l'opposition. Mais je voudrais conclure en disant que les tâches ministérielles sont tellement difficiles, il y a plusieurs personnes de l'autre côté de la Chambre qui savent à quel point c'est difficile puis qui ont assumé ce genre de fonctions. Je pense qu'en l'espèce on doit reconnaître que cette ministre n'a commis aucune faute et, au contraire, qu'il faut la louanger d'avoir agi aussi rapidement et aussi énergiquement.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! M. le chef de l'opposition officielle, la parole est à vous, seulement qu'à vous.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je rappellerai au premier ministre que c'est sa ministre de la Santé qui a dit à la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne qu'elle était indigne de ses fonctions de parlementaire, son leader en Chambre qui à deux reprises disait vouloir affronter la vérité.

Eh bien, la vérité, une fois connue, nous apprend que le lien de proximité évoqué par le premier ministre remontait jusqu'à la sous-ministre adjointe, Mme Fillion, informée par lettre le 31 mars 2000, il y a trois mois, au sujet d'une pratique qui touche 800 personnes au moins, touchant seulement ceux qui sont susceptibles d'avoir recours au système d'assurance médicaments.

La ministre aujourd'hui continue de nier, dans le cas du Taxoter, qu'il y avait une pratique. Ça, on en prend bonne note, elle nie. Et, dans le cas de l'Aredia, elle continue de nier qu'elle avait une connaissance ou une responsabilité, et, je le rappelle, c'est une responsabilité envers des gens qui apprennent qu'ils souffrent de cancer, M. le Président, dont la vie est en danger et qui sont dépendants d'hommes et de femmes qui vont agir de manière responsable politiquement pour tout mettre en oeuvre pour sauver leur vie.

Est-ce que le premier ministre aujourd'hui peut au moins nous dire ce qu'il va faire pour les 800 personnes qui, à toutes fins pratiques, sont victimes d'une politique de taxation parce qu'ils sont victimes de cancer, M. le Président? Ils se sont fait taxer en se faisant envoyer au régime d'assurance privée ou assurance médicaments, ils ont été obligés de payer de l'argent de leur poche, parce qu'ils sont victimes de cancer, parce que ce gouvernement, et cette ministre, n'a pas été capable d'assumer ses responsabilités.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je reprendrai intégralement les propos que j'ai déjà tenus jusqu'à maintenant concernant les interventions de la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, parce que ça n'a pas de bon sens de faire croire aux gens qu'on va les traiter à rabais. Et je ne crois pas que les professionnels de la santé font ça.

Je reviens sur la différence et sur la distinction qu'il y a entre le Taxol et le Taxoter. Ce sont des médicaments qui doivent être obligatoirement prescrits et donnés aux patients à l'hôpital, ils ne peuvent pas être donnés à l'extérieur. Donc, l'hôpital n'a pas le droit, il n'a pas le droit, c'est illégal et c'est défendu, de demander à une personne d'aller chez son pharmacien au coin de la rue et de faire payer le médicament. S'il l'a fait, ça n'a pas de bon sens, il ne doit pas le faire et il doit compenser les personnes qui auraient été ainsi amenées à payer leur médicament. C'est clair? Et ça, c'est important de le dire, puis on est d'accord sur ce point de vue là.

Quant à l'Aredia, il doit, pour la première fois, être administré sous surveillance à l'hôpital parce qu'il y a un certain nombre de risques de complications – je ne me substituerai pas aux pharmaciens et aux médecins pour vous expliquer ça. Cependant, par la suite, il peut être prescrit et être utilisé et consommé à domicile ou dans un CLSC. On ne peut pas dire que 800 personnes, ou 500, ou 400, ou 300 ont payé alors qu'elles ne devaient pas payer, ces personnes. Si le médicament était administré chez elles, elles devaient le payer en utilisant le régime d'assurance médicaments. S'il est administré à l'hôpital, elles ne doivent pas le payer, l'hôpital a l'obligation de le payer, et ils le feront, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Oui, parce que c'est gros, ce qu'elle vient de dire, la ministre. Elle vient de dire qu'elle ne sait pas si c'est 800 personnes ou si ce n'est pas 800 personnes.

Je vais lui relire la lettre adressée à Mme Fillion, signée par Marc St-Pierre, qui commence en disant ceci: «Mme la sous-ministre adjointe», qui travaille, je présume, à tous les jours avec la ministre. Ça commence avec les mots suivants: «Après une enquête exhaustive, la Régie a démontré qu'un peu plus de 800 personnes assurées ont dû se procurer en pharmacie communautaire un médicament oncologique appelé Aredia et habituellement administré sous supervision médicale en milieu hospitalier.»

Ce n'est pas de la spéculation. Elle a la lettre devant les yeux. Si elle n'est pas capable de reconnaître aujourd'hui ce fait-là, on n'est pas surpris du fait qu'elle n'est pas capable de nous donner des réponses honnêtes sur tous les autres faits, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Charest: Comment la ministre peut-elle prétendre le contraire?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, jusqu'à maintenant, votre présence avait eu des effets bénéfiques sur l'opposition, mais là, maintenant...

Une voix: On se dissipe.

M. Brassard: On se dissipe, en effet. Le chef de l'opposition vient d'utiliser des propos, à mon avis, qui ne sont pas parlementaires à l'égard de la ministre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, c'est établi depuis longtemps qu'une réponse honnête est une réponse complète, et nous n'avons encore eu ni une réponse honnête ni une réponse complète.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, la parole est à vous.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je donne des réponses honnêtes, je réponds avec honnêteté et je donne des réponses les plus complètes possible compte tenu de l'information que je possède, M. le Président.

Alors, on va relire ensemble le paragraphe, c'est toujours intéressant: «...un médicament oncologique appelé Aredia et habituellement – habituellement – administré sous supervision médicale en milieu hospitalier.»

(10 h 50)

Cela a été même tellement vrai que, jusqu'en 1997, ce médicament ne pouvait être administré qu'en hôpital. Depuis ce temps-là, il peut être administré – et c'est ce que je m'évertue à dire au chef de l'opposition, à ses collègues – en externe, en soins ambulatoires. Donc, dans les personnes qui ont dû payer ce médicament, certaines devaient le faire compte tenu que ce médicament leur était administré à la maison ou au CLSC. Et donc, par ailleurs, je conviens qu'un certain nombre de ces personnes ont dû sans doute le payer et se le faire administrer à l'hôpital, ce que l'hôpital ne pouvait faire, M. le Président. Il n'avait pas le droit de le faire, il n'a toujours pas le droit de le faire. Des sanctions seront prises. Des règles ont été édictées très clairement. On tente d'interpréter le plus clairement et le plus complètement possible...

Une voix: ...remboursement.

Mme Marois: Oui, remboursement, aussi, des personnes qui auraient été lésées, M. le Président, dans une telle circonstance. Clarifier les directives. C'est ce que je m'évertue à dire au chef de l'opposition. C'est la vérité, la stricte vérité. Je ne peux en inventer, M. le Président, c'est ça. Qu'est-ce que vous voulez que j'ajoute de plus?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, M. le chef de l'opposition, en question complémentaire.


M. Jean J. Charest

M. Charest: La lettre adressée à Mme Fillion, signée par M. St-Pierre, dit ceci: «Toutefois, l'enquête a aussi démontré que certains centres hospitaliers ont établi des protocoles d'administration à domicile ou en CLSC», ce qu'elle évoque. «Il nous apparaît que, dans ce cas, nonobstant la circulaire numéro 1997-033 de votre ministère, le médicament pourrait être obtenu en officine privée et donc défrayé en partie, franchise et coassurance – parce qu'il s'agit de payer, c'est ça, la taxe que paient les gens – par la personne assurée et par le régime d'assurance médicaments. La Régie devrait donc récupérer de certains centres hospitaliers les sommes qu'elle a dû débourser pour l'achat de l'Aredia en officine privée lorsque ce médicament est administré en centre hospitalier [...] il nous apparaît important que le ministère clarifie auprès des établissements ses directives concernant la gratuité des médicaments qui sont administrés sous sa responsabilité.»

Il parle de victimes qui sont pénalisés, M. le Président. Elle va faire quoi pour les 800 personnes qui sont recensées sous l'assurance médicaments? Elles seront remboursées à quel moment? Et est-ce que les gens qui, eux, étaient sous le régime privé seront également remboursés pour avoir été taxés pour la simple raison suivante, parce qu'ils souffraient de cancer, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je suis heureuse d'entendre le chef de l'opposition qui a lu complètement la lettre et qui rappelle justement que, là où ce médicament a été payé par les gens, il y aura des remboursements, la Régie elle-même procédera à se rembourser auprès des hôpitaux, puisque la Régie aussi a assumé une partie du coût par le régime d'assurance médicaments, et donc que toutes les corrections vont être apportées. C'est justement l'objet de l'autre lettre que j'ai lue hier au chef de l'opposition, écrite, cette lettre, par le directeur général des affaires institutionnelles et secrétaire général, qui nous dit: Une fois qu'on a fait une enquête, ensuite on procède évidemment pour corriger, pour rembourser, pour nous assurer que les gens ont été traités équitablement. Et les personnes le seront, M. le Président. Les directives, nous allons tenter de les rendre les plus claires possible pour qu'il n'y ait aucune espèce d'ambiguïté.

Je ne veux pas, ni comme le chef de l'opposition, ni comme ses collègues, ni les miens ici, que l'on oblige des gens à payer des médicaments qu'ils devraient être en droit de recevoir dans les centres hospitaliers. D'ailleurs, nous voulons tellement cela, M. le Président, que nous nous sommes assurés que, même à l'extérieur du centre hospitalier, ce soit moins cher pour les gens les plus mal pris.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci. En question principale, Mme la députée de Bonaventure.


Coûts de production d'électricité


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Dans le rapport Merrill, Lynch, cité abondamment par le ministre des Ressources naturelles pour justifier sa décision de retirer des pouvoirs importants à la Régie de l'énergie, pour la première fois Hydro-Québec révèle ses coûts de production. Normalement, M. le Président, on doit s'attendre à ce que le coût de production d'électricité à la sortie d'un barrage soit le même pour tous les consommateurs, qu'ils soient Québécois ou Américains.

Dans ce contexte, comment le ministre des Ressources naturelles peut-il expliquer qu'à la page 83 du rapport on apprend que la production d'un kilowattheure produit par un même barrage coûte deux fois plus cher pour le marché québécois que pour le marché américain?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: D'abord, premièrement, je suis heureux d'entendre la députée de Bonaventure admettre enfin, contrairement à ce que bien des intervenants propagent un peu partout au Québec, que les coûts de production d'Hydro-Québec sont désormais connus. Il suffit d'ouvrir le rapport de Merrill, Lynch, ils sont là, tous les coûts de production. Alors, l'accusation voulant qu'on cache et qu'on camoufle les coûts de production d'Hydro-Québec, bien, cette accusation-là n'est pas fondée, hein. On connaît désormais les coûts de production d'Hydro-Québec. Je n'ai pas le rapport entre les mains, mais il y a une chose qui est certaine, c'est que le coût de production du parc d'équipements actuels d'Hydro-Québec se situe et sera fixé à 0,0279 $ le kilowattheure, une moyenne. Ça varie d'une catégorie de consommateurs à l'autre, mais c'est la moyenne. Et ce sera fixé dans la loi.

Une voix: ...patrimoine.

M. Brassard: Oui, c'est le patrimoine. Exactement, M. le député de Chomedey, le patrimoine.

Une voix: Ce n'est pas lui.

M. Brassard: Ah non?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader, adressez-vous à la présidence, s'il vous plaît.

M. Brassard: Je veux bien m'adresser à la présidence, à condition que mes amis d'en face cessent de m'interpeller.

Des voix: Oh!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, je vous cède la parole. Si vous voulez conclure rapidement.

M. Brassard: M. le Président, quant aux ventes à l'étranger, la démonstration a été faite – la députée de Bonaventure était présente en commission parlementaire lorsqu'on a reçu Hydro-Québec – et elle est sans équivoque: vendre de l'électricité sur les marchés nord-américains, ou en Ontario, ou au Nouveau-Brunswick, c'est payant et c'est rentable. Et ce n'est pas vrai de prétendre que ce sont les consommateurs québécois qui financent les exportations. C'est complètement faux. La démonstration est faite.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la députée de Bonaventure, en question additionnelle.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Comment le ministre des Ressources naturelles, sur la base des chiffres fournis par Hydro-Québec, peut continuer d'affirmer que les consommateurs québécois ne subventionnent pas les exportations, alors que la société d'État elle-même prétend qu'il en coûte deux fois plus cher pour produire l'électricité qui est destinée aux Québécois plutôt que celle qui est destinée aux Américains?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, au lieu de perdre notre temps sur des motions dilatoires en commission pendant des heures, on aurait pu consacrer ce temps-là à examiner justement les données du rapport de Merrill, Lynch, puis on aurait mieux compris, puis la députée de Bonaventure aurait sans doute mieux compris. En matière de vente d'électricité sur les marchés étrangers, aussi bien aux États-Unis que dans les provinces voisines, je le répète, la démonstration est faite – elle était présente en commission parlementaire – les exportations, c'est payant, c'est rentable. Et Hydro-Québec, quand ce ne l'est pas, ne vend pas, tout simplement. Alors, les consommateurs québécois ne sont d'aucune façon pénalisés par les exportations. Bien au contraire, ça constitue une bonne partie des bénéfices nets et donc des dividendes d'Hydro-Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, Mme la députée de Bonaventure.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: M. le Président, de toute évidence, le ministre des Ressources naturelles n'a pas compris ma question. Comment il peut expliquer qu'à la page 83 du rapport de Merrill, Lynch on apprend que les coûts de production au kilowattheure sont deux fois plus élevés pour le marché québécois que pour le marché américain? La démonstration est faite, les consommateurs d'électricité au Québec subventionnent les exportations d'électricité!

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je n'ai pas sous la main la page 83, mais il y a une chose qui est hors de tout doute: les consommateurs québécois ne financent d'aucune façon les exportations. Bien au contraire, les exportations sont rentables. On vend nettement plus cher l'électricité aux Américains et aux Ontariens qu'on la vend aux Québécois. Ça, c'est absolument irréfutable. Et je ne comprends pas que la députée de Bonaventure, qui était présente pendant toute une journée en commission parlementaire avec les autorités d'Hydro-Québec et plusieurs de nos collègues, je ne comprends pas qu'elle revienne avec cette affirmation absolument injustifiée. Je comprends que c'est véhiculé de nouveau par la multinationale écolo Greenpeace, mais ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai. C'est faux. C'est faux.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, Mme la députée de Bonaventure.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Ressources naturelles se rend compte qu'il est complètement isolé? Il tente de s'autoconvaincre. Mais il y a plusieurs groupes qui réclament le retrait du projet de loi n° 116: 31 associations péquistes de Montréal, le Comité national sur l'environnement du PQ, 35 associations de consommateurs, le Barreau du Québec, les industriels, les environnementalistes, les éditorialistes et plusieurs de ses propres collègues, M. le Président.

Est-ce que le ministre des Ressources naturelles, plutôt que de nous servir des réponses préparées d'avance par son cabinet, peut nous dire les véritables intentions avec son projet de loi?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: D'abord, une dernière remarque sur les exportations. Je conseillerais à la députée de Bonaventure de lire un excellent livre, de Robert Bourassa, L'énergie du nord , où il est démontré hors de tout doute qu'exporter de l'électricité, c'est payant pour les Québécois aussi bien que c'est payant pour Hydro-Québec.

(11 heures)

M. le Président, quant au projet de loi n° 116, je répète très simplement les objectifs poursuivis par le gouvernement. Après une longue réflexion, après avoir consulté de nombreux experts, les objectifs, c'est de faire en sorte que les bas tarifs dont bénéficient les Québécois depuis des décennies soient maintenus et sauvegardés et que l'interfinancement, favorable aux clients résidentiels, qui perdure également, un phénomène qui perdure depuis des décennies, soit également garanti et maintenu. Ce sont là les objectifs poursuivis par le gouvernement. Donc, c'est dans l'intérêt des consommateurs québécois en tant que citoyens comme en tant que consommateurs d'électricité.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question principale, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: En additionnelle, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En additionnelle, je m'excuse. En question additionnelle, M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, que répond la ministre de la Justice à la lettre expédiée il y a quelques jours par le Barreau du Québec sur le même sujet, concernant le projet de loi n° 116, où le nouveau bâtonnier dit ceci: «Nous sommes d'avis qu'à la longue ce type de législation – la loi n° 116 – qui affecte les causes pendantes et annule les effets de jugement est de nature à envoyer un mauvais message aux citoyens dans une démocratie comme la nôtre. Ceux-ci peuvent finir par penser qu'il est inutile de contester devant les tribunaux les décisions du gouvernement, puisque celui-ci peut toujours et à tout moment changer les règles du jeu par voie législative»?

Va-t-elle se lever, assumer ses responsabilités, conseiller à son collègue de retirer son projet de loi afin que des victoires durement acquises par les citoyens devant les tribunaux ne soient pas bafouées par son gouvernement?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mme la ministre de la Justice.

Mme Goupil: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député! Mme la ministre de la Justice, la parole est à vous.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, c'est de bien mal connaître la fonction de la ministre de la Justice que de penser – parce que le Barreau, pour lequel nous avons un grand respect et avec lequel je travaille en collaboration constante – que c'est à partir d'une lettre que je vais indiquer à mes collègues ce qu'ils ont à faire.

La lettre était adressée au ministre des Ressources naturelles, et c'est à lui de répondre à cette question, puisque la lettre est adressée au ministère des Ressources naturelles. Il n'est pas de la fonction de la ministre de la Justice d'intervenir dans tous les dossiers, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question complémentaire, M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la ministre est-elle toujours jurisconsulte au sein du gouvernement ou a-t-elle été relevée de ces fonctions-là par le premier ministre?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, il est évident que le Barreau envoie couramment des lettres aux différents ministères pour poser des questions. Le Barreau a exprimé une opinion, et nous ne sommes pas obligés de la partager dans tous les cas. La lettre était adressée au ministre des Ressources naturelles. Et il est le rôle de cette Assemblée de légiférer justement pour adopter des projets de loi. Nous n'abdiquerons pas nos obligations. Ce n'est pas parce qu'il y a une lettre qui a été écrite... Nous la recevons avec grand respect, mais ce sont aux législateurs en cette Chambre de décider des projets de loi qu'ils vont déposer, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. En question principale, M. le député de l'Acadie.


Réorganisation de l'industrie du taxi


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Le ministre des Transports nous confirmait la semaine dernière son intention de procéder, à l'automne, à l'abolition des ligues de taxis et à la mise en place d'une association professionnelle unique dans l'industrie du taxi.

Le ministre, qui a personnellement participé à la consultation sur le taxi, a été à même de constater que cette hypothèse d'association unique n'a pratiquement jamais été demandée par le milieu du taxi. De plus, il a été à même de constater récemment que plus de 1 500 propriétaires de taxi de la région de Montréal ont manifesté devant le bureau du premier ministre contre cette association que veut imposer envers et contre le milieu le ministre des Transports. Rappelons enfin que, dimanche dernier, l'équipe de direction de la principale ligue de taxis du Québec, celle de Montréal, qui s'oppose incidemment au projet d'association forcée du ministre, a été réélue en entier avec plus de 75 % d'appui.

Or, M. le Président, le gouvernement ne peut s'empêcher de tout réglementer et d'appliquer des mesures mur à mur à tout le monde, le ministre des Transports ne laissant pas sa place dans ce type d'opération.

Est-ce que le ministre pourrait nous dire comment il peut expliquer son entêtement à vouloir imposer sa solution en refusant de tenir compte de l'opposition largement exprimée par les membres du Regroupement québécois du taxi, qui représente plus de 75 % des propriétaires chauffeurs de taxi du Québec?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. M. le ministre des Transports.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais remercier le député de sa question, parce que ça va nous permettre de clarifier certains points. Tout d'abord, oui, j'ai annoncé une orientation qui était à l'effet de créer une association professionnelle pour les gens du taxi qui regrouperait non seulement les chauffeurs locataires, mais aussi les chauffeurs propriétaires, parce qu'il y a beaucoup plus d'artisans dans tout cela que de propriétaires multiples.

Donc, je dois vous dire que ça a été demandé. Et le député, qui dit avoir assisté à la commission parlementaire, doit se rappeler qu'à la fin j'ai carrément dit qu'il y aurait une association professionnelle, non pas un syndicat, comme le font courir certains dirigeants de ligues. Mais, M. le Président, mon prédécesseur a fait des enquêtes sur certaines ligues de taxis...

Des voix: ...

M. Chevrette: Oui, il a fait faire des enquêtes administratives. Il est temps que ça change dans ce domaine. Et on va offrir à l'ensemble des chauffeurs propriétaires et à l'ensemble des chauffeurs locataires une véritable association professionnelle qui va leur appartenir à eux. Ils vont choisir de se donner des services qu'ils voudront bien se donner, et ce sera contrôlé par l'ensemble des conducteurs et non pas par une petite poignée d'individus qui n'ont rien offert, au dire même des chauffeurs de taxi, comme services à rendre à l'ensemble de cette collectivité qui a besoin d'améliorer son sort.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): En question additionnelle, M. le député de l'Acadie.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Tout en reconnaissant que le ministre nous confirme qu'effectivement c'est lui qui a proposé la solution à la fin de la commission parlementaire et que ça n'a pas été demandé par le milieu, est-ce que le ministre ne reconnaît pas qu'il est en train, comme il veut le faire indirectement pour les routiers, de livrer l'industrie du taxi au milieu syndical, qui a d'ailleurs annoncé lui-même – le milieu syndical – publiquement les intentions du ministre au lendemain d'une réunion entre le ministre et la FTQ?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je me demande où le député de l'Acadie siège, quelquefois. La ministre du Travail, ma collègue, a déposé la loi n° 68 il y a au moins un an, qui créait une association pour les chauffeurs locataires. Ce qu'on fait comme orientation, on dit: Non seulement il y aura les chauffeurs locataires, mais il y aura les chauffeurs propriétaires dans une même association professionnelle. C'est loin du syndicalisme, ça, M. le Président, parce que le statut syndical est octroyé à un individu salarié qui dépend d'un employeur, alors que l'association professionnelle qui est présentée l'est pour à la fois les propriétaires artisans mais aussi pour les chauffeurs locataires. Donc, M. le Président, j'inviterais le député à bien se rendre compte que, loin de là, on est en train non pas de légiférer...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez conclure, M. le ministre.

M. Chevrette: ...en matière de syndicalisme, mais on est en train de légiférer en matière d'association professionnelle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin à la période de questions et de réponses orales des députés.

Il n'y a pas de réponses différées.

Il n'y a pas de votes reportés.


Motions sans préavis

Motions sans préavis. M. le député d'Orford.


Souligner la Traversée internationale du lac Memphrémagog

M. Benoit: Oui, M. le Président, j'aimerais saluer, dans la tribune, la présence de Mme Yuko Matsuzaki, du Japon, qui nagera plus de 80 kilomètres cet été, qui passera plus de 32 heures en eau, traversant deux fois le lac Memphrémagog pour établir un nouveau record. Alors, la motion se lit:

«Que l'Assemblée nationale souligne la 22e édition de la Traversée internationale du lac Memphrémagog et souhaite bonne chance à tous les participants et participantes, et félicite tous les organisateurs de cet événement.»

Merci, M. le Président.

(11 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Consentement. Et cette motion est sans débat?

Une voix: Sans débat.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Sans débat. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Procéder à une consultation générale sur le projet de loi n° 122

M. Brassard: M. le Président, je voudrais solliciter le consentement des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que la commission de la culture procède à des consultations générales sur le projet de loi n° 122, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, le Code des professions et d'autres dispositions législatives, et ce, à compter du 12 septembre 2000;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 25 août 2000;

«Que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration soit membre de ladite commission pour la durée de ce mandat.»


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 137

M. Brassard: Oui. Alors, je sollicite de nouveau le consentement des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 137, Loi sur la Communauté métropolitaine de Québec, les 16, 17 et 18 août 2000, et à cette fin qu'elle entende les organismes suivants.» Et je solliciterais le consentement pour être dispensé d'énumérer la liste. Il y a eu une entente entre les partis sur la liste des intervenants à entendre.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de la motion et consentement pour que la liste soit déposée tout simplement? Consentement. Avez-vous terminé?

M. Brassard: Bien, évidemment, il y a les éléments habituels:

«Que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole ainsi que la ministre d'État au Travail et à l'Emploi soient membres de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée.

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, avis touchant les travaux des commissions. Non? D'accord.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, motions sans préavis. Projet de loi n° 225?


Révocation du renvoi à la commission de l'aménagement du territoire du projet de loi d'intérêt privé n° 225

M. Brassard: Je sollicite de nouveau le consentement des membres de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Qu'en vertu de l'article 195 de notre règlement soit retiré l'avis fait le mardi 13 juin dernier afin que la commission de l'aménagement du territoire entende les intéressés et procède à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 225, Loi concernant l'annexion d'un territoire à celui de la Ville de Lachute, le mardi 20 juin 2000, immédiatement après les affaires courantes, à la salle Louis-Joseph-Papineau.»

Donc, que cette motion soit en quelque sorte annulée, retirée.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion de révocation est adoptée? Adopté sur division.


Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, M. le Président. Je voudrais aviser cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 228, Loi modifiant la Loi sur la charte de la Coopérative fédérée de Québec, aujourd'hui, immédiatement après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des transports et de l'environnement entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé n° 227, Loi concernant La Société Aéroportuaire de Québec, aujourd'hui, immédiatement après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre: projet de loi n° 231, Loi concernant la Municipalité de Deauville; projet de loi n° 232, Loi concernant la Municipalité de Saint-Mathias-sur-Richelieu; projet de loi n° 234, Loi modifiant la Loi concernant la Ville de Varennes; projet de loi n° 233, Loi concernant la Ville de Verdun; et projet de loi n° 235, Loi concernant la Ville de Sainte-Thérèse, aujourd'hui, immédiatement après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont déposés. Pour ma part, je vous avise que les commissions parlementaires suivantes se réuniront en séance de travail aujourd'hui, jeudi 15 juin 2000, de 13 heures à 15 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine: la commission des transports et de l'environnement, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation, la commission de l'aménagement du territoire, la commission de l'économie et du travail.

L'objet de ces séances est la présentation du document sur la réforme des commissions préparé par le Comité de réflexion sur le travail des commissions. Les membres de la commission des finances publiques de même que les membres de la commission de la culture sont invités à participer à l'une ou à l'autre des séances organisées pour les autres commissions parlementaires.

Je vous avise de plus que la commission de l'aménagement du territoire se réunira en séance de travail demain, le vendredi 16 juin 2000, de 9 heures à 10 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de discuter de l'organisation des travaux de la commission.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Alors, ceci met fin à la période des affaires courantes. Nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et je vais demander à M. le vice-président... M. le vice-président, si vous pouvez venir me remplacer, j'ai des choses à faire et je ne peux pas attendre.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, vous aurez tous compris que la nature a des besoins que même l'homme ne peut retenir.

Alors, nous en sommes maintenant aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je vous réfère d'abord à l'article 4, M. le Président.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Le Vice-Président (M. Pinard): Renseignements sur les travaux. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. Au sujet du projet de loi n° 140, au niveau des renseignements des travaux de la Chambre, j'aimerais demander auprès du leader du gouvernement si... Parce que, à la suite des discussions qu'on a eues en cette Chambre, la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux et ministre de la Famille et de l'Enfance avait indiqué d'une certaine façon qu'elle était disposée à entendre, faire des consultations sur cet important projet de loi sur l'assurance parentale. J'aimerais savoir, de la part du leader du gouvernement, si on peut concrétiser ce voeu commun, je pense, de tous les députés, de procéder à des consultations sur cet important projet de loi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, s'il vous plaît.

M. Brassard: M. le Président, c'est l'intention, oui, du gouvernement de donner suite à cette consultation. Ça pourra se faire demain. On en discutera pour déterminer les dates du début, puisqu'il s'agira de consultation générale, et on pourrait faire la motion demain.

Le Vice-Président (M. Pinard): Ça vous convient?


Affaires du jour

Alors, M. le leader du gouvernement, aux affaires du jour, maintenant.

M. Brassard: Je vous réfère à l'article 4.


Projet de loi n° 102


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 4 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 13 juin 2000 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

Alors, y a-t-il des interventions? Lors du dernier débat, M. le député de Mont-Royal avait effectivement terminé son intervention. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 102? Il y a quelques députés qui sont debout, désirent-ils participer à nos débats?


Mise aux voix

Donc, à partir de ce moment-là, le principe du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, est-il adopté?

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Brassard: Je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Avant de vous demander si cette motion est adoptée, il y a eu une décision qui a été rendue le 24 mai 2000 à l'effet que nous n'avons pas le droit, aux affaires du jour, sauf s'il y a consentement. Y a-t-il consentement? Donc, il y a consentement. Est-ce que la motion est adoptée?

Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Uniquement pour déférer. Là, c'est la motion de déférence que je viens de faire. Pas besoin de consentement pour déférer. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude détaillée. Tout à l'heure, j'aurai une motion qui effectivement va demander un consentement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Très bien. Alors, est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Brassard: Je voudrais aviser cette Assemblée, et là je sollicite un consentement parce qu'il s'agirait d'une quatrième commission, que la commission des affaires sociales entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 102, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, aujourd'hui, immédiatement après le présent avis jusqu'à 13 heures, à la salle 1.38-B de l'édifice Pamphile-Le May, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, il y a consentement? Consentement. Alors, M. le leader du gouvernement.

(11 h 20)


Motions du gouvernement


Motion d'urgence proposant la suspension de certaines règles de l'Assemblée afin de permettre l'adoption de certains projets de loi

M. Brassard: M. le Président, alors j'aurais une motion à déposer. Je ne pense pas avoir le consentement beaucoup cette fois-ci.

Alors, M. le Président, je voudrais faire la motion suivante:

«Que, en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre l'adoption des projets de loi suivants: n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux; n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec; n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives; n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal; n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives...

Le Vice-Président (M. Pinard): La 116, c'est la Régie?

M. Brassard: ... – de l'énergie, alors donc, cinq projets de loi:

«Le premier paragraphe de l'article 19, les articles 20 et 21, les mots "ou sur un fait personnel" au quatrième paragraphe et le septième paragraphe de l'article 53, les premier, deuxième, troisième et cinquième paragraphes de l'article 54, les articles 71 à 73, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les mots "ou à la demande d'un député" au premier alinéa de l'article 86 ainsi que le deuxième alinéa du même article, les deuxième, troisième et huitième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 94, 100 et 101, 105 à 108, 110 à 114, 157, 164 et 165, 175 et 176, les mots "et, le cas échéant, de ses observations, conclusions et recommandations" à l'article 177, les articles 194 et 195, 205 à 210, les articles 212, 213, 215, 216, 220, 222, 230, 236, le deuxième alinéa de l'article 239, les articles 240 et 241, 243, le deuxième alinéa de l'article 244, les articles 245 à 247, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au deuxième alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, le premier alinéa de l'article 252 ainsi que les premier et troisième alinéas de l'article 253, l'article 254, les deuxième et troisième alinéas de l'article 256, l'article 257 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption desdits projets de loi; et,

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des affaires sociales mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée des projets de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, et n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, et dépose lesdits rapports à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente de l'aménagement du territoire mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente de l'économie et du travail mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt des rapports concernant l'étude détaillée des projets de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer; que les travaux de l'Assemblée soient alors suspendus jusqu'à l'expiration de ce délai;

«L'Assemblée poursuive le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives. La durée du débat sur l'adoption du principe du projet de loi soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 12 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 12 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes au député indépendant et une réplique de trois minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du principe soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée de l'étude détaillée du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, en commission plénière, soit fixée à un maximum de 45 minutes après le début de ses travaux et que les articles étudiés ainsi que les amendements proposés en cours d'étude soient mis aux voix sans appel nominal;

«Le président de la commission plénière, à l'expiration de ce délai, mette aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ou la ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude, mais dont il saisira le président de la commission à ce moment, le titre et autres intitulés du projet de loi et fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultées ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur la prise en considération d'un rapport d'une commission permanente ainsi que sur les amendements transmis conformément à la présente motion soit fixée à un maximum de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes pour le député indépendant; le ou la ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération d'un rapport d'une commission permanente les amendements transmis conformément à la présente motion soient mis aux voix successivement, sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi dont la commission permanente n'aurait pas disposé, le titre et autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption d'un projet de loi soit fixée à un maximum de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes pour le député indépendant et une réplique d'une durée maximale de deux minutes au ministre qui présente un projet de loi; le vote sur l'adoption des projets de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«Au cours du débat sur l'adoption d'un projet de loi un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse faire motion pour qu'il soit envoyé en commission plénière en vue de l'étude des amendements qu'il indique; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; en commission plénière, l'étude soit limitée aux amendements proposés; la durée du débat en commission plénière soit fixée à un maximum de 15 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes pour le député indépendant et deux minutes de réplique au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis aux voix immédiatement et sans appel nominal, y compris les amendements que le ou la ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude; après quoi le président de la commission plénière fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultées ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix immédiatement sans débat et sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse proposer que l'Assemblée se constitue en commission plénière; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse, plus d'une fois au cours d'une même séance, proposer de faire rapport à l'Assemblée que la commission plénière n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau; une telle motion requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement du débat puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement de l'Assemblée puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Le retrait d'une motion puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Outre les dispositions prévues à la présente motion, tous les votes soient faits à main levée à moins qu'un ministre ou leader adjoint du gouvernement n'exige un vote par appel nominal;

«L'Assemblée puisse siéger tous les jours, à compter de 10 heures, jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux;

«Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières à la période de travaux intensifs soient appliquées;

«Les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption des projets de loi suivants: projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux; projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec; projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives; projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal; et n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, cette motion est donc déposée. M. le leader de l'opposition officielle.

(11 h 30)

M. Paradis: M. le Président, au-delà du jargon parlementaire du leader du gouvernement, est-ce qu'on doit comprendre qu'il est de l'intention du gouvernement de doubler les taxes sur les médicaments, d'interdire aux institutions de santé de soigner la population au-delà d'un certain budget, qui est insuffisant dans la majorité des cas, de bafouer la démocratie – des centaines de maires se sont exprimés, des centaines de milliers de citoyens sont allés voter – également d'enlever toute protection aux consommateurs d'électricité en les livrant pieds et poings liés au gourmand ministre des Finances – et on sait ce qui va arriver avec les tarifs d'électricité...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, est-ce qu'à ce stade-ci vous plaidez sur la recevabilité ou si vous me demandez un temps pour examiner, comme une certaine tradition existe actuellement au niveau de la présidence de suspendre nos travaux, pour vous permettre d'analyser la motion qui est présentée? M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition.

M. Brassard: Oui. Alors, il a posé des questions. Évidemment, ce n'était pas très pertinent cependant, parce que c'est des questions qui portent sur le fond des projets de loi. Alors, les opinions qu'il a exprimées, il pourra les faire connaître et les exprimer de nouveau quand viendra le temps de discuter de ces projets de loi à quelque étape que ce soit, mais pas à ce stade-ci, M. le Président. Ce n'est pas le temps de se prononcer sur le fond. Pour le moment, il y a une motion de suspension des règles. Et, comme vous le savez, la tradition et la coutume veut qu'il y ait un certain temps de suspension suivant le dépôt d'une telle motion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous désirez vous en prévaloir, M. le leader, ou si vous...

M. Paradis: M. le Président, je voudrais comprendre. Si j'ai mal compris le jargon parlementaire de mon vis-à-vis, à ce moment-là, pourquoi empêcher les députés de parler sur ces projets de loi?

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, si vous permettez, messieurs, de deux choses l'une: ou bien on est prêts immédiatement à argumenter sur la recevabilité de la motion de suspension des règles ou bien je peux très bien vous émettre un temps pour analyser la motion qui est actuellement déposée, parce que vous ne l'avez sûrement pas déjà vue, c'est la première fois qu'elle est déposée, cette motion. Est-ce que vous désirez vous prévaloir d'un certain temps pour l'analyser, l'examiner avant de revenir devant cette Assemblée pour plaider sur la recevabilité ou si vous êtes immédiatement prêts à plaider sur le recevabilité?

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Juste pour solliciter votre avis: Est-ce que vous pensez que c'est raisonnable qu'un texte rempli de jargon, qu'il a pris 10 minutes à lire, qu'il nous dépose à la dernière minute, vous, vous soyez prêt déjà à vous prononcer là-dessus?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci... M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Maintenant que la recevabilité peut être plaidée en tout temps, alors on peut ne pas suspendre, si tel est l'avis du leader de l'opposition. Commençons le débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Est-ce que le leader du gouvernement propose que l'on commence un débat qui enlève des droits fondamentaux aux parlementaires sans que l'on vérifie s'il a correctement, sur le plan réglementaire, pendant que le règlement continue de s'appliquer, bien fait ses devoirs? On sait, M. le Président, et j'invoque les nombreux précédents, ça fait partie des usages maintenant, que, dans la majorité des cas, le gouvernement se trompe dans ses libellés de motion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, pour vous permettre d'examiner en profondeur la motion qui est déposée, je vous accorderais une période de 30 minutes – selon la coutume actuelle, nous en sommes à cette moyenne – pour vous permettre de prendre connaissance de la motion de suspension des règles. Donc, nous pourrions nous revoir à 12 h 5. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 12 h 5.

(Suspension de la séance à 11 h 34)

(Reprise à 12 h 9)

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous reprenons les affaires du jour.


Débat sur la recevabilité

Je serais maintenant prêt à recevoir l'argumentation de part et d'autre, s'il y a lieu, effectivement, bien entendu. Alors, concernant la motion...


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, c'est une motion qui n'est pas inédite, c'est une motion qui découle de l'application des articles 182 et 183 de notre règlement. Lorsque le gouvernement estime qu'il y a urgence de faire adopter des projets de loi qu'il juge essentiels, majeurs et que ces projets de loi sont enlisés dans la procédure parlementaire, sont l'objet d'une opposition telle qu'on ne peut leur faire franchir toutes les étapes appropriées, eh bien, il y a ces dispositions de notre règlement qu'on peut utiliser, auxquelles on peut recourir. C'est ce que j'ai fait dans cette motion. Donc, elle est, à mon avis, parfaitement recevable, comme bien d'autres motions l'ont été auparavant sous notre gouvernement comme sous ceux qui nous ont précédés.

(12 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: M. le Président, ce n'est peut-être pas le moment approprié pour le faire, mais, lorsque le leader du gouvernement utilise des termes qui nous y invitent, nous ne pouvons laisser passer l'occasion. Des projets de loi enlisés dans la procédure parlementaire, deux heures dans le cas d'un projet de loi en commission parlementaire, ça varie à peu près de deux heures à 10 heures. Je pourrais vous donner le minutage exact, vous pouvez le vérifier. C'est la première fois que j'entends un leader – ça, c'est inédit – dire qu'un projet de loi est enlisé dans la procédure parlementaire quand la commission parlementaire a siégé à peine deux heures, ou pas du tout dans d'autres cas.

Nous en revenons à la recevabilité comme telle de cette motion, M. le Président. Deux points à vous soulever. Si vous vous référez à la motion telle que présentée par le leader du gouvernement, vous constatez, à la page 2, que le traitement accordé à la loi n° 124 est différent de celui accordé aux autres législations comme tel. Au quatrième paragraphe de la page 2, le leader prévoit l'adoption de principe, au paragraphe suivant, la constitution d'une commission plénière, par la suite, à l'expiration de ce délai, qu'on mette aux voix, etc.

Jusque-là, M. le Président, ça semble être conforme à ce qui peut être fait dans des motions d'exception comme telles, sauf que, là, on arrive à un problème. Au haut de la page 3 de la motion, le leader du gouvernement a oublié, ou omis – ou il veut procéder différemment, je ne le sais pas; je cherche à comprendre sa tactique, ou sa stratégie, ou son omission, ou son erreur – il n'a pas prévu l'ordre dans lequel les quatre autres projets de loi vont être appelés. À ce moment-là, il peut nous répliquer – et je pense que c'est ce qu'il va faire – qu'il n'a pas suspendu ou qu'il ne prévoit pas suspendre les dispositions de l'article 96 du règlement qui lui permet, comme leader, à ce moment-là, d'intervenir.

L'article 96, comme vous le savez, M. le Président, se lit comme suit: «Sous réserve des dispositions de l'article 97, le leader du gouvernement indique l'affaire inscrite au feuilleton qui fera l'objet d'un débat.» J'imagine que c'est ça qu'il avait en tête en ne suspendant pas 96. Mais il n'a ni suspendu 96 ni indiqué l'ordre. Donc, si on se réfère à 96, nous nous retrouvons au feuilleton de l'Assemblée nationale du Québec qui, lui, n'est pas suspendu. Et j'attire votre attention qu'au feuilleton, lorsqu'on parle des projets de loi nos 107, 117, 134 et 116, on se réfère aux articles 18, 21 et 24 du feuilleton. Or, ces articles, vous les retrouvez à votre feuilleton à l'item Étude détaillée en commission. Donc, ce qu'il pourra faire, à ce moment-là, c'est de référer à une étude détaillée en commission dans l'ordre qu'il déterminera à ce moment-là, et nous n'avons aucune objection, surtout dans le cas d'un projet qui n'y est pas allé ou d'un projet de loi qui a déjà deux heures.

Les parlementaires sont ici pour travailler, notre règlement prévoit que nos travaux doivent se terminer le 23. Ça me semble, M. le Président, être une erreur stratégique ou, je vais donner le bénéfice du doute à mon collègue, une erreur démocratique. Si on renvoie ces projets-là en commission et qu'on continue à les étudier article par article, les députés de l'opposition continueront à faire leur travail correctement. Je vous indique que, si vous deviez en arriver à la conclusion que le leader a omis de prendre les dispositions qui doivent s'appliquer à cette étape-là, à ce moment-là, c'est l'ensemble de la motion qui doit être jugé irrecevable, compte tenu de l'application de l'article 194 de notre règlement. C'est un point qui est d'une simplicité à comprendre.

Le deuxième point, c'est peut-être un éclaircissement, mais j'indique qu'à ce moment-ci la présidence se doit de protéger les droits des parlementaires et, par le fait même, les droits de la population dans ce type de débat. Il relève de l'interprétation que l'on doit donner au troisième paragraphe et au quatrième paragraphe de la page 2 de la motion du leader. Très rapidement, M. le Président, troisième paragraphe, que tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt des rapports concernant l'étude détaillée du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments, celle qui double la prime, la taxe aux médicaments, de la Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé, celle qui va empêcher les établissements de donner des services – ça va rendre ça illégal, de soigner le monde, passé un budget qui est déjà inadéquat dans une institution de santé – de la Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, qui ne respecte pas la démocratie de centaines de milliers de personnes qui sont allées voter pour s'opposer à des fusions forcées, et de la Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie, la loi qui enlève toute protection aux consommateurs d'électricité – nous en sommes tous – et qui nous livre pieds et poings liés au ministre des Finances avec les augmentations que ça va entraîner sur nos tarifs d'électricité...

Et là on conclut en disant: «Les travaux de l'Assemblée soient alors suspendus jusqu'à l'expiration de ce délai» de 30 minutes, puis on reprend immédiatement, dans le paragraphe qui suit: «L'Assemblée poursuive le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124.» Est-ce que ça doit être interprété comme le fait que c'est suspendu une demi-heure pour les autres mais que l'Assemblée continue quand même sur le 124? Je vous le soumets, M. le Président, comme des dispositions qui sont contradictoires. Je ne sais pas de quelle façon vous pouvez en disposer ou que le leader du gouvernement peut s'amender ou clarifier, mais ça m'apparaît quelque chose qui est impossible à faire en même temps.

Ce sont les deux points, M. le Président, que nous voulions vous soumettre à ce moment-ci. Maintenant, le leader adjoint de l'opposition aurait un autre point à vous faire valoir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous écoute, monsieur.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. La suspension de certaines règles est évidemment prévue aux termes de notre réglementation. Et, pour citer un livre que vous connaissez bien, qui vient d'être déposé en Chambre hier, La procédure parlementaire du Québec , on cite là-dedans le président Lorrain dans une décision rendue en 1988 – pour votre référence, je dis que c'est à la page 317 de l'oeuvre en question – et on dit que, si le motif invoqué est l'urgence, ce qui est le cas aujourd'hui, ça donne au gouvernement presque l'entier contrôle de la procédure parlementaire. Mais, dans la décision, on explique pourquoi il faut que ce soit ainsi en cas d'urgence, et on donne l'exemple suivant: «Le pouvoir de présenter une motion de suspension à quelque période que ce soit d'une séance pour raison d'urgence est bien compréhensible. Si un événement fortuit emportant des conséquences désastreuses survenait après que les affaires du jour furent appelées, en soirée, disons, faudrait-il comprendre qu'on ne pourrait procéder immédiatement à l'étude de la question?» Bien sûr que non. Par contre, il n'y a strictement aucune possibilité valable pour le gouvernement de plaider l'urgence dans le cas qui nous occupe.

M. le Président, je vous réfère à la même oeuvre, à la page 316, et je vous lis le paragraphe 12.2 in fine, dernière phrase: «Cela est surtout vrai en période de travaux intensifs – pour la suspension des règles – où le gouvernement veut s'assurer de pouvoir faire adopter son programme législatif avant l'ajournement de juin.» Ça, ça se comprend, c'est pour ça que ça existe. Mais le fait de mentionner ici qu'une motion ne requiert pas de préavis si le motif invoqué est l'urgence ne veut pas dire qu'un gouvernement peut impunément suspendre les droits démocratiques juste en se levant. Comme un jouet d'enfant, on tourne la crinque, on dit: Urgence! on se lève! puis on dit: Ça y est, on suspend les règles démocratiques, l'Assemblée nationale n'existe plus, on est là pour mettre un «rubber stamp» sur le travail du gouvernement.

M. le Président, on est à une semaine complète, il nous reste encore une semaine de travail, une semaine au cours de laquelle on pourrait siéger pour savoir pourquoi le premier ministre permet à la ministre de la Santé de présenter un projet de loi qui va dire aux hôpitaux d'arrêter de soigner le monde. Ce n'est pas une urgence, ça. On a une semaine pour l'analyser. Il n'y a pas un article de ce projet de loi qui a encore été étudié à quelque niveau que ce soit. Le gouvernement ne peut pas prétendre qu'il y a urgence, le budget vient d'être voté à partir du 1er avril. Il n'y a pas d'urgence.

(12 h 20)

M. le Président, je fais appel à vous dans votre rôle crucial dans cette institution. On en parle souvent, des institutions, on a les différents organismes qui doivent surveiller les élections, les dépenses publiques, mais c'est ici, à partir de cette Assemblée nationale, que les règles fondamentales de la démocratie jouent. Je vous demande, en analysant l'ensemble de la recevabilité de ce qui est devant vous, de vous pencher en même temps sur la question suivante: Suffit-il pour un gouvernement d'utiliser le mot «urgence» pour justifier le fait qu'il s'agit d'une urgence? Nous soumettons que non. Nous soumettons que votre jugement doit porter aussi sur les faits qui sont devant vous. Est-ce qu'on est au dernier jour ou à l'avant-dernier jour? Est-ce que ça met en péril l'adoption? La réponse, c'est non.

L'opposition officielle souhaiterait utiliser le temps qui est disponible à nous tous comme élus. C'est pour ça qu'on est là, M. le Président, c'est pour ça qu'on est payés, c'est pour ça que ça existe, pour qu'on représente les gens qui nous ont mis là, pour raisonner, analyser, débattre de projets de loi. Il reste encore une semaine. Pour des motifs internes de son caucus, que le leader du gouvernement sait aussi bien que nous, ça chire depuis mercredi soir. La ministre de la Santé doit démissionner, il le sait. Il a reçu l'ordre de tirer la plug le plus rapidement possible.

M. le Président, en conclusion, leurs problèmes internes ne sont pas une urgence nationale, et c'est pourtant ce dont ils essaient de vous convaincre. En l'absence de la moindre motivation justifiant pourquoi, à une semaine de la fin normalement prévue, il y a urgence, je vous soumets très respectueusement que votre devoir de président – de vice-président mais qui préside les travaux en ce moment – vous commande d'exiger des justifications du gouvernement pour son invocation de l'urgence. Et, à défaut de ces justifications, nous soumettons que c'est votre devoir d'informer le gouvernement que les travaux vont continuer à se dérouler selon l'horaire prévu dans notre loi et notre règlement qui est si souvent invoqué par vous et par le président Charbonneau lorsqu'il siège.

On dit souvent «les règles que nous nous sommes données». M. le Président, les règles que nous nous sommes données exigent qu'on justifie l'urgence et pas qu'on utilise les mots comme une incantation magique qu'on met là puis on dit: Bien, maintenant que j'ai invoqué l'urgence, personne n'a plus un mot à dire. C'est ce que nous disons, que ça fait partie d'un ensemble d'arrogance de la part de ce gouvernement-là et qu'il a des comptes à rendre, et ce n'est pas parce qu'il veut se faufiler et tomber plus vite en vacances pour des raisons internes que ça devient une urgence.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, bien, quelques remarques très brèves, M. le Président, sur les points soulevés par le leader de l'opposition et son adjoint. D'abord, le premier point soulevé par le leader de l'opposition, portant sur l'ordre de prise en considération des projets de loi, l'ordre de l'étude des projets de loi. Effectivement, 96 n'est pas suspendu. Par conséquent, c'est le leader du gouvernement qui va en décider et appeler, comme ça a toujours été le cas lorsqu'il y avait plusieurs projets de loi inclus dans une motion de suspension des règles, comme ça a toujours été le cas, les projets de loi, et les cinq, jusqu'à ce que les cinq soient adoptés. C'est un point de la motion d'ailleurs qui était tout à fait identique à celle qui avait été présentée en cette Chambre en décembre 1997. Donc, ce n'est pas du droit nouveau, d'aucune façon.

Deuxième point, bien, oui, après le délai de 30 minutes accordé aux députés pour qu'ils puissent soumettre des amendements, après ce délai, la Chambre, de nouveau, est appelée à siéger, et on amorce et on complète, on termine le débat sur le principe du projet de loi n° 124, et la motion s'applique, après ça, au fur et à mesure de ces éléments.

Pour ce qui est de l'urgence, bien, écoutez, c'est un vieux sujet puis un vieux débat, mais la jurisprudence, elle, cependant, est on ne peut plus limpide pour ce qui est de la notion d'urgence, il y a une abondante jurisprudence qui a bien établi que le président ne doit pas se prononcer sur cette question qui est du ressort de l'Assemblée. Le président ne saurait s'arroger les prérogatives qui appartiennent à l'Assemblée nationale et donc à l'ensemble des parlementaires. L'urgence, ça va se traiter comme sujet de débat au cours du débat restreint de deux heures qui suit avant l'adoption d'une motion de suspension des règles. Le gouvernement va évidemment plaider qu'il y a urgence, apporter des arguments pour justifier l'urgence. J'imagine que l'opposition va plaider le contraire, et après il y aura un vote. C'est l'Assemblée qui décide. Mais ça, la jurisprudence est très abondante à cet égard, ce n'est pas au président de statuer sur cette question-là, c'est à l'Assemblée à l'occasion d'un vote après un débat restreint sur la motion de suspension.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, une dernière intervention, M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Avant-dernière, M. le Président. Je vais faire l'intervention sur les deux points soulevés, et le leader adjoint va faire l'intervention sur le point qu'il a soulevé. Quand au premier point, je constate que le leader du gouvernement nous indique qu'il est lié par les dispositions de l'article 96. Je vous soumets qu'il se peinture lui-même dans un coin où ça devient impossible, compte tenu du feuilleton qui, lui, n'est pas suspendu...

L'article 96 est clair: «Sous réserve des dispositions de l'article [...] le leader parlementaire indique l'affaire inscrite au feuilleton.» Si on se réfère au feuilleton, les affaires sont effectivement inscrites, en ce qui concerne quatre des affaires, au niveau de l'étude détaillée en commission. Donc, il peut les appeler puis les envoyer en commission permanente de l'Assemblée nationale du Québec, et, si c'est ça qu'il souhaite faire, M. le Président, il n'y a aucun problème de notre côté, nous sommes prêts à continuer, à poursuivre et, dans certains cas, à entreprendre les travaux.

En ce qui concerne le deuxième point, M. le Président, moi, je veux bien que le leader arrive à l'Assemblée nationale et nous dise: Moi, j'interprète la motion que j'ai déposée de la façon suivante. Ce n'est pas de même que ça doit se passer, surtout dans des motions d'exception qui visent à suspendre des règles de procédure parlementaire qui permettent à la démocratie de s'exprimer normalement, habituellement, dans cette Assemblée. Si je prends ses propos à témoin de ce qu'il veut faire, il aurait dû – je le lui suggère bien bonnement, il est toujours temps de se reprendre – non pas qu'il débute le paragraphe 4° par «L'Assemblée poursuive le débat», il aurait fallu qu'il dise tout simplement: «À l'expiration de ce délai, l'Assemblée poursuive le débat.» Il a omis de le dire. À partir du moment où il a omis de le dire aux membres de l'Assemblée, ça devient un ordre de l'Assemblée que l'on continue à l'Assemblée nationale pendant ce 30 minutes. S'il souhaite le modifier, on peut, sur ce point, convenir qu'il dépose une nouvelle motion.

En ce qui concerne le premier point, M. le Président, on est vraiment dans une impasse. Le leader n'a pas suspendu le feuilleton, il est lié comme tous les parlementaires par le feuilleton. Il pourra s'y référer, comme il l'a indiqué. Il a indiqué l'ordre, mais l'ordre, c'est de faire siéger, à ce moment-là, la commission parlementaire. Il ne peut pas faire indirectement ce que la loi lui interdit de faire directement. Ce n'est pas inscrit ailleurs qu'à l'étude détaillée en commission, en ce qui concerne les quatre autres projets de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. M. le leader du gouvernement.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Juste là-dessus, quand même, quand la motion de suspension va être adoptée, au moment où l'Assemblée votera et adoptera la motion de suspension, il y a des dispositions dans la motion de suspension qui indiquent aux commissions, aux quatre commissions où se retrouvent ces quatre projets de loi, de faire rapport à l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Sur ce point très précis, habituellement, ce qu'on fait lorsqu'on est pris dans une telle situation, M. le Président, ce qu'on prévoit, c'est qu'on suspend l'article 96, et là on le remplace par des dispositions que le gouvernement souhaite voir adopter. Mais on ne peut à la fois conserver l'article 96, qui continue de s'appliquer, qui nous réfère au feuilleton de l'Assemblée nationale, et se doter d'un droit particulier que l'on dicte, il faut faire le travail complètement. Je sais que c'est un travail totalement déplaisant et antidémocratique, mais ça nécessite une base de compétence.

(12 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition officielle.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. J'aimerais revenir sur le point qu'on a soulevé concernant l'urgence. L'article 183 prévoit ceci: «La motion – de suspension des règles – ne requiert pas de préavis si le motif invoqué est l'urgence.» Vous savez mieux que quiconque qu'en vertu de l'article 188 un préavis est la règle, n'est-ce pas? Il faut donner un préavis dans le texte, il faut que ça apparaisse, et le lendemain on peut en débattre. Mais on s'est donné, dans notre règlement, une exception, on a dit: S'il y a urgence.

Le leader du gouvernement a donné l'argument auquel on s'attendait, et ceci dit avec beaucoup d'égard pour le leader du gouvernement, qui est un parlementaire chevronné, et son expérience mérite notre respect. Et il a aussi beaucoup de respect pour la procédure et le parlementarisme. Et c'est ressenti, ce que je dis là, M. le Président. Peut-être que c'est cette vaste expérience qui lui joue un tour aujourd'hui. Il se lève, tantôt, et il dit: Bien non, ce n'est pas maintenant qu'on parle de la pertinence de plaider l'urgence, c'est tantôt, quand on va être dans les deux heures. Mais je veux tenter de faire appel à votre sens des responsabilités et à votre rôle, parce que c'est extrêmement important.

Contrairement aux autres bâillons – pour utiliser notre jargon – qui viennent souvent la veille, l'avant-veille et qui correspondent à la définition qui est incluse ici, à la page 316 de cet important ouvrage que le président nous a envoyé hier, qui vient juste d'être publié, où on dit justement «lorsqu'on a besoin de ça avant l'ajournement»... Là, on peut comprendre qu'il devient un peu plus facile d'invoquer la jurisprudence à laquelle il fait référence, les précédents, si on est juste à la veille de l'ajournement. Mais, M. le Président – j'insiste, en terminant, sur un point – on n'est pas à la veille de l'ajournement, on est à une semaine de l'ajournement.

S'il voulait suspendre les règles cette semaine, il pouvait le faire – c'est important de retenir ça dans votre délibération. Il pouvait le faire, il n'avait qu'à faire une seule chose: aller dans son règlement, donner le préavis requis pour toute motion, la règle générale dans les règles que nous nous sommes données, et, demain, impunément, sans avoir besoin de s'expliquer, de se justifier, d'invoquer l'urgence ou quelque autre motif que ce soit, c'est son droit le plus strict, on n'aurait pas pu dire un mot là-dessus.

Demain, là-dessus, sur l'urgence, on ne serait pas en train d'en parler. Il n'avait qu'à donner son préavis et on aurait pu en débattre demain. Il n'a pas fait ça, et je crois que c'est à cause de son expérience énorme. Il se dit: Bon, ça se passe comme ça, mon staff me prépare la liste des choses que je vais suspendre, je vais me lever, Paradis va me beurrer, ils vont essayer de trouver quelque chose à dire au président, puis ça va finir là. Mais il y a plus que ça, M. le Président...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Mulcair: Oui, je n'arrive pas à faire l'accent régional. Mon accent anglais vient un peu par-dessus. Mais il a compris le sentiment, qui était, encore une fois, dit avec amitié et respect pour le leader du gouvernement.

M. le Président, sa vaste expérience, à notre point de vue, l'a fait glisser sur la barre de savon. Sa vaste expérience lui a fait dire: Pfft! j'ai le droit, je le fais. Mais il y a un prérequis: il y a une analyse subjective et une analyse objective. L'analyse subjective, il a raison, c'est à nous de débattre ça après, puis il aurait suspendu les règles. Ça, c'est la partie subjective, et c'est ça qui fait l'objet de la jurisprudence dont il parle. Mais il y a aussi un aspect objectif, et ça appartient à vous de le vérifier. À une semaine, alors qu'il aurait pu présenter très facilement son préavis aujourd'hui puis en débattre demain, avec encore six jours à faire, s'il le fallait, est-ce qu'il y a, objectivement, urgence?

Et je dis, M. le Président: Nous faisons appel à votre sens de votre rôle et responsabilité dans ce Parlement, qui existe comme fondement de notre démocratie, au Québec. Est-ce que vous allez les laisser faire? Est-ce que vous allez les laisser dire: J'ai rien qu'à dire le mot «urgence» puis personne ne peut m'en empêcher? Une fois que j'ai dit le mot magique – ouvre, Sésame – c'est fait. J'ai prononcé le mot magique – abracadabra – «urgence», et vous n'avez plus un mot à dire; nous, on n'a plus un mot à dire.

Il se trompe, M. le Président. Il avait l'obligation de suivre la règle générale. Il peut tomber dans l'exception, s'il peut objectivement – c'est le sens de ce qui est dit ici – montrer que le gouvernement ne pouvait pas faire adopter son agenda législatif autrement.

Ce sont d'autres facteurs qui sont en cause, et je ne vous demande pas de les juger. Ce n'est pas parce que le premier ministre a engueulé ses troupes pour leur dire qu'ils ne méritaient pas une augmentation de salaire que vous allez vous mêler de ça. Je laisserai le leader adjoint du gouvernement le rappeler aussi souvent qu'il l'a fait hier.

Mais, M. le Président, il y a un devoir d'État ici, il y a quelque chose qui va au-dessus de la simple considération partisane qui fait en sorte que le Parti québécois veut tirer la plug sur le fondement même de notre démocratie, au Québec. C'est vrai que notre règlement et notre loi vont nous donner du temps pour débattre de ces importantes questions, mais, sur le fond de cette seule question là, vous devrez rejeter ce qui est proposé ici aujourd'hui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, MM. les leaders. Nous allons suspendre, et je vous rendrai la décision sur la recevabilité de la motion de suspension à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 36)

(Reprise à 15 h 20)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes les députées, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Décision du président sur la recevabilité

Tout d'abord, je tiens à m'excuser du retard, j'avais annoncé qu'à 15 heures nous pourrions rendre notre décision. Alors, nous sommes maintenant prêts. Je rends ma décision sur la recevabilité de la motion de suspension des règles de procédure, présentée par le leader du gouvernement, invoquant l'urgence de la situation.

La motion vise à permettre l'adoption de cinq projets de loi, soit le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux; le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec; le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives; le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal; le projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives.

Le leader et le leader adjoint de l'opposition officielle ont soulevé trois motifs d'irrecevabilité de la motion de suspension des règles.

D'abord, le leader de l'opposition est d'avis que la motion est irrecevable pour le motif qu'elle ne comporte pas de séquence précise pour l'étude des quatre projets de loi visés par la motion, qui sont actuellement à l'étape de l'étude détaillée en commission, soit les projets de loi nos 107, 117, 134 et 116.

En outre, le leader de l'opposition officielle mentionne que l'article 96 du règlement, qui permet au leader du gouvernement d'indiquer l'affaire inscrite au feuilleton qui fera l'objet d'un débat, ne pourra en l'espèce être utilisé par le leader pour déterminer l'ordre dans lequel seront abordées les affaires prévues à la motion.

En fait, selon le leader de l'opposition, le leader du gouvernement ne pourra pas se référer au feuilleton de ce jour pour que l'Assemblée procède aux étapes de la prise en considération du rapport et de l'adoption des quatre projets de loi précités, et ce, parce que ces projets de loi sont inscrits au feuilleton à l'étape de l'étude détaillée en commission.

Si je comprends bien l'argumentation du leader de l'opposition officielle, le leader du gouvernement ne pourrait pas, à titre d'exemple, indiquer à l'Assemblée de procéder au débat sur l'adoption du projet de loi n° 107, puisque ce projet de loi n'est pas inscrit à cette étape au feuilleton mais plutôt à celle de l'étude détaillée. En toute déférence, je ne peux accueillir ce motif d'irrecevabilité.

Il importe dans un premier temps de préciser que le feuilleton de l'Assemblée est un document en constante évolution. D'une certaine manière, l'ouverture d'une séance est le seul moment de la journée où le contenu du feuilleton est susceptible de coïncider parfaitement avec l'état de la législation. Par la suite, les projets de loi inscrits au feuilleton sont susceptibles de franchir d'autres étapes, ce qui, en conséquence, modifie l'état du feuilleton.

Ceci dit, le pouvoir du leader du gouvernement prévu à l'article 96 ne peut être limité à l'étape telle qu'elle se retrouvait au feuilleton à l'ouverture de la séance. À titre d'exemple, l'article 230 du règlement prévoit que l'adoption du principe et l'étude détaillée d'un projet de loi peuvent avoir lieu au cours de la même séance. C'est donc dire qu'un projet de loi qui est inscrit au feuilleton à l'étape de l'adoption du principe est forcément susceptible de se retrouver à l'étape de l'étude détaillée.

Comme deuxième motif d'irrecevabilité, le leader de l'opposition officielle mentionne que les paragraphes 3° et 4° de la page 2 de la motion sont d'une certaine manière contradictoires. Le paragraphe 3° prévoit un délai de 30 minutes pour transmettre des amendements, au rapport des commissions. La motion prévoit également une suspension des travaux de l'Assemblée pendant cette période. Pour sa part, le paragraphe 4° prévoit que l'Assemblée poursuivra le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124.

Selon le leader, la motion aurait dû prévoir, au début du quatrième paragraphe, que, à l'expiration de ce délai de 30 minutes, l'Assemblée poursuive le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124. Autrement dit, selon le leader, on donne l'impression qu'on doit à la fois suspendre les travaux de l'Assemblée et procéder en même temps au débat sur le principe du projet de loi n° 124. Je ne peux également accepter ce motif d'irrecevabilité.

Pour comprendre la portée d'une motion de suspension des règles, il faut interpréter chacun de ces paragraphes les uns par rapport aux autres. Or, en prévoyant une suspension des travaux au paragraphe 3°, il va de soi que l'Assemblée ne peut procéder au débat prévu au paragraphe 4° avant la fin de cette suspension.

Au surplus, compte tenu que la motion ne prévoit pas de séquence précise pour l'étude des cinq projets de loi, c'est le leader du gouvernement qui devra indiquer à la présidence l'affaire qui sera prise en considération par l'Assemblée. En somme, la présidence doit s'en remettre au texte de la motion. Dans certains cas, la motion est très précise quant à l'ordre d'étude des affaires qu'elle contient; dans le cas présent, la motion laisse au leader le soin d'indiquer, en vertu de l'article 96 du règlement, l'affaire qui sera débattue.

Enfin, le leader adjoint de l'opposition officielle soutient que la présidence devrait refuser la motion pour le motif qu'il n'y a pas d'urgence d'adopter les projets de loi qu'elle vise. On sait qu'une abondante jurisprudence a établi qu'il n'appartient pas au président de déterminer si l'urgence invoquée comme motif de la présentation d'une motion de suspension des règles de procédure est réelle ou non. Seule l'Assemblée peut décider, lors d'un vote à la fin d'un débat restreint sur la motion, s'il y a urgence de suspendre certaines règles de procédure. L'urgence n'a pas à être prouvée par l'auteur de la motion ni appréciée par le président, elle n'a qu'à être invoquée dans la motion ou lors de sa présentation. Il ne m'appartient pas aujourd'hui de m'octroyer des pouvoirs que le règlement ne me confère pas. Si on veut changer les choses, c'est par la voie du processus de la réforme parlementaire qu'il faut procéder. Je déclare donc que la motion est recevable.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, deux petites précisions, M. le Président. Vous avez indiqué que le feuilleton était quelque chose qui était en constante évolution. Est-ce qu'on doit comprendre de votre décision que si, au moment où on en arrive à l'étape qui a été discutée, ça n'a pas évolué, la motion, à ce moment-là, serait déclarée irrecevable, puisque vous pouvez la déclarer irrecevable en tout temps?

Le Vice-Président (M. Pinard): Je considère que le pouvoir de l'article 96 conféré au leader, c'est qu'actuellement le feuilleton a envoyé nos commissions parlementaires au travail, et, dès l'adoption de la suspension des règles, automatiquement on vient de modifier en profondeur les ordres qui ont été donnés ce matin, pour maintenant s'ajuster à un nouveau feuilleton qui fait en sorte que nous aurons dans le cours de la journée cinq projets de loi qui vont être apportés par le gouvernement et qui seront débattus ici, en ces lieux.

Donc, ça revient constamment à dire que... Je prends, par exemple, un exemple très clair que j'ai eu à traiter hier où on a adopté un rapport de commission et, immédiatement, de par consentement, nous avons adopté le projet de loi. Et vous savez très bien, en vertu des règles, que notre règlement stipule qu'habituellement il y a au moins 24 heures entre l'adoption du rapport d'une commission et l'adoption du principe d'un projet de loi.

Alors, le feuilleton qui est déposé le matin, il est précis au moment de son dépôt. Mais, tout au long de la journée, de consentement ou de par les travaux qui sont institués ici, au salon bleu ou en commission parlementaire, le feuilleton est sujet à un chambardement continuel.

M. Paradis: D'autres éléments de précision, M. le Président. La nombreuse jurisprudence que vous avez évoquée ou citée quant à la notion d'urgence comme telle: Est-ce que vous auriez l'obligeance de m'indiquer si, dans des précédents, on se retrouvait à une semaine de la date prévue de la fin de la session, à huit jours, comme tel, ou si c'est un précédent dans lequel on se retrouve présentement?

Et, deuxième élément, on sait que, lorsque l'opposition demande un débat d'urgence, la présidence, quand la demande vient de l'opposition, statue quant à l'urgence. Quand la demande vient du gouvernement, la présidence ne statue pas. Pouvez-vous m'indiquer en vertu de quel principe vous faites la distinction?

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, c'est effectivement un excellent point, mais, comme je l'ai mentionné, actuellement, nous avons vérifié la jurisprudence, et la jurisprudence est très abondante sur ce sujet, et la jurisprudence a établi une ligne de conduite...

(15 h 30)

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...si vous permettez. Depuis que nous avons été nommés, nous avons quelques décisions à cet effet. Et je peux vous assurer qu'actuellement la décision est toujours au même effet, c'est que c'est à l'ensemble des membres ici présents à déterminer si, oui ou non, il y a urgence, de par le vote, que les membres de l'Assemblée auront à déterminer si effectivement il y a urgence ou pas, et ça n'est pas à la présidence. L'urgence n'a pas à être prouvée par l'auteur de la motion ni appréciée par le président, elle n'a qu'à être invoquée dans la motion lors de la présentation. Et, comme on le mentionnait, ce n'est pas à la présidence à modifier le règlement de l'Assemblée nationale. Et de nouveau je fais requête pour qu'effectivement on procède le plus rapidement possible à une réforme parlementaire qui serait, je pense, très utile dans le futur pour améliorer la qualité de nos travaux. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, je suis au fait de la nombreuse jurisprudence que vous évoquez et que vous citez, qui va dans le sens de la décision que vous avez rendue. Je veux simplement une précision – vous disposez des ressources pour le faire – parce que, dans le document de la procédure parlementaire qui nous a été distribué hier par la présidence, on mentionne la notion d'urgence avant l'ajournement de juin ou de décembre comme tel.

Simplement une précision: Dans cette nombreuse jurisprudence, est-ce qu'il y a une seule cause que vous pouvez nous citer qui est huit jours avant, comme tel, la fin prévue des travaux? Et la deuxième question demeure, M. le Président: Quelle est la différence entre l'urgence... Lorsqu'elle est invoquée par l'opposition, le président l'apprécie. Lorsqu'elle est invoquée par le gouvernement, le président n'a plus d'appréciation?

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Notre secrétaire général et les membres qui nous appuient dans notre travail me présentent notamment une jurisprudence du 3 juin 1999, alors il y a de cela un an, où il restait 20 jours à la période des travaux intensifs, et l'urgence n'a pas été discutée en termes de jours. Et on me dit également qu'à plusieurs reprises on a présenté des motions antérieurement à cinq jours ou à six jours d'activités parlementaires selon le calendrier rigoureux de notre règlement.

Vous savez, le règlement de l'Assemblée nationale est là pour fixer une date ultime de fin des travaux. Le règlement de l'Assemblée nationale est là pour fixer une date ultime de fin des travaux. Alors, nous ne pourrions pas, en vertu de notre calendrier, siéger, par exemple, le 26 juin, le 27 juin, sauf en vertu d'un ordre exprès qui nous proviendrait du premier ministre. Toutefois, le règlement de l'Assemblée nationale stipule qu'il y a une date ultime de fin des travaux, mais c'est au gouvernement de gérer sa période de travaux. Si le gouvernement décide de suspendre les travaux de cette session demain soir ou lundi ou mardi prochain, il n'en demeure pas moins qu'ils ont une latitude, alors que le règlement ne prévoit qu'une date ultime.

M. Paradis: M. le Président, le 3 juin, de mémoire, il est arrivé des projets de loi de véritable urgence, et, à ce moment-là, le règlement prévoit que le projet de loi est distribué en même temps. Vous pouvez en retrouver au mois de mai. Mais, dans le cadre d'une fin de session, j'aimerais avoir encore une fois...

Une voix: Une décision.

M. Paradis: ...une décision huit jours avant la fin pour terminer la session comme telle. Et la deuxième question demeure, M. le Président: Comment se fait-il que, quand c'est l'opposition qui invoque l'urgence, la présidence use de son jugement, mais, quand c'est le gouvernement, la présidence n'a plus de jugement à exercer?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader, je vais de nouveau vous rappeler certaines règles auxquelles la présidence se doit de se plier, et une des règles est à l'effet qu'à date, au niveau de l'urgence, jamais la présidence n'a eu à apprécier si, oui ou non, il y a urgence. Le gouvernement n'a qu'à soumettre qu'il y a urgence, et la présidence la met au vote pour établir de par les membres de l'Assemblée nationale si effectivement ils jugent – l'ensemble de la députation – qu'il y a urgence ou pas. Et, de par la jurisprudence actuelle, ce n'est pas le président qui doit déterminer si effectivement il y a urgence ou pas.

Concernant le délai – parce que je comprends très bien votre argumentation, et nous l'avons très bien saisie ce matin – l'argumentation à l'effet: Est-ce que le fait de déposer une motion de suspension des règles quelques jours avant la date ultime des travaux parlementaires... La date ultime est fixée au 23 juin. Est-ce que la question d'urgence doit s'établir en fonction du nombre de jours précédant la date ultime apparaissant au calendrier parlementaire pour déterminer s'il y a urgence ou pas? Bien, à ce moment-là, ce n'est pas à la présidence à déterminer si les travaux doivent être nécessairement conduits jusqu'au 23 juin mais bel et bien au gouvernement qui a le contrôle, si vous voulez, du délai législatif. Alors, si le gouvernement prévoyait, par exemple, une session qui serait raccourcie de 15 jours, trois semaines, un mois, il pourrait très bien s'exécuter de cette façon-là, et le règlement de l'Assemblée nationale ne prévoit qu'une chose, c'est qu'il y a une date ultime de fin des travaux.

Et ce n'est pas à la présidence à déterminer le calendrier législatif apporté par le gouvernement, c'est au gouvernement à établir quand est-ce qu'il veut terminer ses travaux législatifs. Si le gouvernement avait décidé de terminer ses travaux le 31 mai, bien, à ce moment-là, on aurait pu très bien procéder. L'article du règlement spécifie qu'il n'y a qu'une date ultime de fin des travaux, et celle-ci est fixée pour le 23 juin pour la session.

M. Mulcair: M. le Président, juste une question de clarification...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le leader adjoint.

M. Mulcair: ...suite à votre décision. Évidemment, on ne met pas en doute votre décision, mais, quand on reçoit un livre comme celui qui a été préparé avec des experts augustes comme Michel Bonsaint qui le signe, c'est important pour nous de comprendre pourquoi, dans la décision que vous êtes en train de rendre, vous déviez de ce qui est prévu ici. Alors, j'essaie de reprendre. On n'est pas en train de mettre en doute le droit pour un gouvernement, à tout moment, que ce soit au début de juin ou au mois d'avril, de faire une motion pour suspendre les règles, ce qu'on est en train de dire, c'est que, pour invoquer l'urgence... Et on ne vous demande pas d'apprécier l'aspect subjectif de l'urgence mais de regarder un aspect objectif.

Dans le livre que mon collègue vient de citer, le leader de l'opposition, à la page 316 du livre déposé hier, on dit que, «pour faire adopter le programme législatif, on peut invoquer l'urgence, si c'est juste avant la fin de la session». Vous dites avec raison que la session n'a pas besoin de finir le 23, que ça peut être avant. Tout ce que nous sommes en train de dire, c'est qu'ils peuvent faire suspendre les règles par motion, auquel cas ils doivent en donner un préavis en vertu de l'article 188. C'est tout. S'ils invoquent l'urgence, vous vous devez de regarder cet aspect objectif. Et, jusqu'à date, dans l'exemple que vous nous avez donné, sauf erreur, concernant les chèques de remboursement de la TPS, le gouvernement s'est levé et a dit: Si on n'adopte pas cette loi-là maintenant, le monde n'aura pas son chèque. Ils ont donné un élément subjectif, ils ont rencontré le test qui est prévu aux termes de la loi.

(15 h 40)

Ici, vous êtes en train de nous dire: Écoutez, j'ai une abondante jurisprudence qui dit que c'est la Chambre et pas le président qui décide de l'urgence, et vous avez strictement raison sur cet aspect subjectif. Par contre, M. le Président, comme gardien de notre règlement, comme gardien des règles régissant notre Parlement et l'adoption des lois, je vous suggère qu'à moins de trouver dans cette abondante jurisprudence que vous citez un exemple où un gouvernement, sans donner quelque motif que ce soit... Parce que c'est ça, le cas, ici, aujourd'hui. Il se retrouve donc dans la situation où il doit dire: Avant l'ajournement, on doit procéder en invoquant l'urgence, parce que sinon notre législation ne peut pas être adoptée. C'est ce qui est prévu à la page 316 du livre.

Nous sommes à huit jours de la fin possible de cette session. En d'autres mots, on dispose d'encore huit jours sans avoir besoin d'invoquer d'urgence, de reconvoquer d'urgence, comme on a fait l'été dernier dans le cas de la grève des infirmières. Ça, c'est des vrais cas d'urgence. Mais, ici, il ne suffit pas d'utiliser cette incantation, ces mots magiques: Écoutez, c'est une urgence, on s'assoit puis on passe à d'autres choses. Avec respect, M. le Président, peut-être que ça vaut la peine pour vous de regarder la question que nous avons, cette abondante jurisprudence.

Vous remarquerez, il y a un leitmotiv là-dedans, c'est qu'on n'a pas besoin de justifier, effectivement; on se rend jusqu'au premier but, en d'autres mots, lorsqu'on est à la toute fin de la session. En d'autres mots, le gouvernement n'a pas besoin de donner l'avis prévu à l'article 188. Ici, le gouvernement, sauf tout le respect qu'on doit pour l'avis contraire, ne se rend pas jusqu'au premier but. Le premier but consiste à dire: J'ai une urgence parce que je ne me rends pas là; si je ne suspends pas les règles, je ne peux pas adopter ma législation. C'est faux. Ils peuvent encore faire des commissions parlementaires. On peut siéger ce soir jusqu'à minuit, on peut siéger demain soir jusqu'à minuit sur des importantes questions comme l'assurance médicaments, comme la loi antiservices dans les hôpitaux. Ils ne se rendent pas jusqu'au premier but. Ils n'ont pas le droit, dans notre Parlement, juste de se lever et de vous dire: C'est urgent, ce n'est pas urgent.

Objectivement, c'est vous qui êtes le gardien de ce but-là, parce que sinon il faut faire très attention à l'argument du leader de l'opposition, il est en train de vous demander comment il se fait que c'est le président qui dit à l'opposition si sa demande d'un débat d'urgence est fondée ou pas, et c'est le gouvernement qui décide pour lui-même s'il y a urgence. Je veux bien. Il va y avoir un vote, et je serais fort surpris que l'opposition gagne le vote – c'est de même – lorsque viendra le temps de faire le débat sur l'urgence. Mais on parle de vous et de votre rôle de président.

M. le Président, je termine là-dessus, dans la jurisprudence abondante à laquelle vous faites référence, je vous soumets qu'il n'y a pas de cas où, avec huit jours encore à sa disposition, un gouvernement peut suspendre les règles sans même donner le préavis requis à l'article 188. Donc, je veux que ce soit très clair, on n'est pas en train de dire que le gouvernement ne peut pas suspendre les règles à huit jours de la fin, à 18 jours de la fin ou à 30 jours de la fin, ce n'est pas ça, le point. Mais, pour pouvoir invoquer l'urgence, il faut qu'ils se rendent jusqu'au premier but, et ils ne l'ont pas fait dans le cas qui nous occupe. Et, celui ou ceux qui vous ont conseillé du contraire, nous nous permettons respectueusement de suggérer qu'ils n'ont pas regardé cet aspect-là adéquatement.

En d'autres mots, M. le Président, nous concédons le point. Et, si votre décision, si on l'interprète bien, porte sur le fait que le gouvernement peut suspendre sans qu'on puisse invoquer la question de l'urgence avant le débat, vous avez raison, lorsqu'on est à la fin de la session, c'est ce qui est inclus dans le livre à la page 316. Mais ceux qui vous conseillent auraient dû lire le livre de Michel Bonsaint qui a été déposé ici hier, qui est très clair là-dessus. C'est difficile de comprendre comment les gens ont pu vous conseiller du contraire, alors que le livre même déposé hier ici, en Chambre, dit qu'il faut qu'on soit à la limite, qu'on n'ait pas d'autre choix, et ça, en soi, ça devient urgent. C'est correct, ça. C'est ça, la jurisprudence à laquelle vous faites référence. Mais ils ne peuvent pas se rendre à cet argument d'urgence et il n'y a pas de présomption d'urgence si on est encore à huit jours de la fin. Il n'y a strictement rien, en d'autres mots, qui les aurait empêchés de donner le préavis, qui est la règle normale.

Avant d'accepter qu'on puisse si allégrement suspendre les règles normales régissant notre vie parlementaire et démocratique au Québec, je vous suggère, M. le Président, qu'il y ait une importante distinction à faire, une nuance qui, à notre point de vue, respectueusement, n'est pas tenue en ligne de compte dans votre décision. Alors, tout en respectant la première partie de votre décision, avec laquelle on est d'accord et qu'on peut suivre, est-ce que c'est possible qu'il y ait un deuxième aspect que vous n'avez pas regardé complètement dans votre décision? Je crois que oui. C'est notre position. Nous pensons que c'est possible que ce deuxième aspect n'ait pas été suffisamment regardé. Encore une fois, on vous invite à regarder attentivement cette particularité-là, parce qu'il y va des fondements mêmes de notre vie parlementaire et démocratique ici, au Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, très simplement, je pense que votre décision n'a pas à être, d'aucune façon, remise en cause. Elle s'appuie – vous l'avez indiqué avec raison – sur une abondante jurisprudence, d'une part. D'autre part, il y a plein d'exemples dans nos travaux parlementaires où la motion de suspension des règles invoquant l'urgence a été présentée avant la fin de la session prévue au calendrier, prévue au règlement. C'est arrivé très fréquemment. À ce compte-là, si on suit le raisonnement du leader adjoint de l'opposition, il faudrait attendre le 21 décembre, d'une part, puis il faudrait attendre le 23 juin, d'autre part, pour être en mesure d'invoquer l'urgence puis de pouvoir présenter une motion de suspension des règles.

Une motion de suspension des règles peut être présentée en tout temps pendant la session, pendant que l'Assemblée siège, en tout temps, et il n'y a aucune indication puis il n'y a aucune jurisprudence qui nous incite à croire ou à penser qu'il faut attendre la fin prévue au règlement de la session pour s'estimer habilité à présenter une motion, d'aucune façon.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le...

M. Mulcair: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui. Je vais vous céder la parole.

M. Mulcair: Très brièvement, M. le Président, il y a méprise. Le leader du gouvernement croit comprendre, par notre propos, que nous disons qu'il doit attendre une certaine date pour suspendre les règles. Ce n'est pas ce que nous disons. Nous disons tout simplement ceci: Il peut suspendre les règles à tout moment de toute session, sauf, à moins d'avoir l'élément objectif d'urgence auquel on fait référence, qu'il doit tout simplement donner un préavis d'un jour comme pour toute autre motion. C'est ça, la règle que nous nous sommes donnée.

Il peut par ailleurs même passer outre à cette exigence-là s'il y a urgence, auquel cas il doit se lever ici et dire: M. le Président, il y a urgence, le monde n'aura pas son chèque TPS, il y a urgence, on n'adoptera pas nos lois avant la session, puis après on fait notre débat. Mais, pour se rendre jusque-là, pour avoir son ticket pour dire que c'est urgent, il faut que vous soyez convaincu qu'à sa face même ce n'est pas une manière juste d'éviter de faire notre travail. La règle que nous nous sommes donnée, la règle ordinaire, c'est qu'on peut aller jusqu'au 23, et, avant de dire que c'est urgent de le faire huit jours à l'avance, eh bien, il a un fardeau qu'il n'a pas rencontré.

Le Vice-Président (M. Pinard): Pour terminer ce débat, je voudrais vous lire les pages 322 et 323 de notre nouveau recueil de procédure parlementaire du Québec, La notion d'urgence et le rôle du président :

«Comme la motion de suspension des règles ne requiert pas de préavis si le motif invoqué est l'urgence, la plupart des motions de suspension des règles présentées à l'Assemblée le sont pour cette raison. Une abondante jurisprudence a établi qu'il n'appartient pas au président de déterminer si l'urgence invoquée comme motif de la présentation d'une motion de suspension des règles de procédure est réelle ou non. Seule l'Assemblée peut décider, lors d'un vote à la fin du débat restreint sur la motion, s'il y a urgence de suspendre certaines règles de procédure. Ainsi, l'urgence n'a pas à être prouvée par l'auteur de la motion ni appréciée par le président. Elle n'a qu'à être invoquée dans la motion ou au moment de sa présentation. La motion de suspension des règles de procédure n'a pas à contenir d'exposé de motifs lorsque l'urgence est invoquée. En somme, l'urgence est un motif en soi.

(15 h 50)

«Contrairement à la demande de débat d'urgence et à la motion de mise aux voix immédiate où le règlement accorde au président certains pouvoirs d'intervention et d'appréciation, la présentation d'une motion de suspension ne donne ouverture à aucune discrétion de la part de la présidence, si ce n'est la vérification des aspects de la motion touchant sa forme. À cet égard, il doit notamment vérifier, si, sur le plan technique, les articles du règlement suspendus coïncident avec les nouvelles règles de procédure.»

Alors, je pense qu'avec toutes ces informations, toute cette discussion que nous avons eue, la décision que j'ai rendue, j'accepte donc la motion, la recevabilité de la motion, et j'inviterais maintenant les...

M. Paradis: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, une dernière intervention, mais, immédiatement après, si vous le permettez, je vous inviterais à venir me rejoindre à la Salle des drapeaux pour qu'on puisse procéder à l'établissement du temps de parole, parce que nous avons un débat restreint de deux heures sur cette motion. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. M. le Président, en souscrivant à votre volonté de réformer notre Parlement de façon à ce que les droits parlementaires puissent s'exprimer beaucoup plus librement, simplement une remarque finale. Il faudrait s'assurer que les documents qu'on nous a distribués hier, comme l'excellent livre sur la procédure parlementaire et la rédaction des décisions que vous rendez, puissent quand même concorder, sinon ça n'aura pas de bon sens, ici, là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci. Nous allons donc suspendre quelques instants afin de permettre à la présidence ainsi qu'aux deux leaders d'établir le temps de parole pour ce débat restreint de deux heures. S'il vous plaît, messieurs.

(Suspension de la séance à 15 h 52)

(Reprise à 15 h 54)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le temps de parole est le suivant: il y a cinq minutes réservées pour le député indépendant, il va y avoir 50 % du temps restant à chacune des formations politiques, et le temps non utilisé par l'une des formations est utilisé par l'autre. Le temps non utilisé par le député indépendant est partagé équitablement, et il n'y a pas de limite d'intervention à l'intérieur du temps réparti pour chaque intervenant.


Débat sur la motion

Alors, nous commençons donc le débat restreint. J'inviterais M. le leader du gouvernement à intervenir.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je sais que dans peu de temps on va de nouveau m'accuser avec vigueur de fouler aux pieds la démocratie, sans doute.

Une voix: La piétiner.

M. Brassard: La piétiner. Bon, c'est encore pire. C'est un peu un passage obligé lorsqu'on a l'obligation de présenter une motion de suspension des règles pour faire adopter un certain nombre de projets de loi jugés majeurs par le gouvernement et la formation ministérielle. Je pense que tout le monde reconnaît dans notre système parlementaire que le gouvernement peut faire des choix, établir des priorités en termes de projets de loi et manifester sa volonté de les voir adoptés dans des délais raisonnables et dans une session donnée. C'est, je pense, tout à fait normal. Ce n'est pas quelque chose de rarissime ou d'inédit, les gouvernements antérieurs – et ça fait presque 24 ans que je siège en cette Chambre, M. le Président – ont également agi de cette façon. Un gouvernement établit ses priorités, un gouvernement détermine, je dirais, sélectionne les projets de loi qu'il juge fondamentaux et essentiels de faire adopter par l'Assemblée nationale. Ça, c'est, je pense, tout à fait normal, c'est dans l'ordre des choses.

C'est tout à fait normal aussi – puis ça ne me scandalise pas non plus – que l'opposition, sur certains projets de loi, ait un point de vue diamétralement opposé, s'oppose farouchement sur le fond à certains projets de loi, c'est la règle. C'est ça, notre système parlementaire, et c'est ça, la démocratie. Alors, il n'y a rien de scandaleux à ce que l'opposition ait décidé de s'opposer, par exemple, au projet de loi que j'ai présenté, le projet de loi n° 116 portant sur la Régie de l'énergie. Il n'y a rien de scandaleux là-dedans. Mais, cependant, l'opposition peut choisir aussi – et c'est relativement facile – d'utiliser certaines mesures ou certaines procédures pour bloquer l'évolution et le cheminement législatif d'un projet de loi. C'est monnaie courante également. Ça, ça ne m'étonne pas puis ça ne m'indigne pas non plus outre mesure parce que je dois vous dire, M. le Président, que, toutes ces techniques et toutes ces tactiques, je dirais, visant à retarder l'adoption d'un projet de loi, à empêcher son cheminement normal, la plupart de ces tactiques, ou de ces techniques, ou de ces procédures, c'est nous qui les avons mises au point et perfectionnées.

Parce qu'il faut se rappeler que le règlement qui nous régit date de 1984, sous la présidence de Richard Guay. Nous étions au gouvernement à ce moment-là, le Parti québécois, mais pas pour longtemps. On a perdu le pouvoir quelques mois plus tard et, par conséquent, on s'est retrouvés dans l'opposition avec un nouveau règlement qu'on venait finalement d'adopter, et c'est dans l'opposition, c'est au cours de nos neuf années d'opposition qu'on a imaginé toutes ces procédures d'obstruction que l'opposition, le Parti libéral actuel, maintenant utilise avec autant de brio que nous. Bon. Alors, il n'y a pas à s'en indigner, c'est comme ça.

Je donne un exemple, à l'époque où on était dans l'opposition, pour empêcher qu'on puisse arriver en commission parlementaire à étudier même l'article 1, on avait imaginé de présenter motion sur motion pour inviter des groupes à venir se faire entendre en commission. Alors, à partir du moment où vous avez une motion pour demander à la commission d'inviter tel groupe, tel intervenant pour venir exprimer son point de vue sur le projet de loi, bien là c'est 30 minutes, l'auteur de la motion, puis les autres défilent, et puis, après ça, bon, bien, il y a vote, et puis une autre motion suit, et ainsi de suite. Ça défile de sorte que vous pouvez passer des jours, et des jours, et des heures, et des heures en commission parlementaire sans avoir à aborder l'article 1 du projet de loi. C'est devenu très facile. Alors, quand on s'oppose à un projet de loi de façon systématique, qu'on veut le bloquer, qu'on veut empêcher son cheminement législatif normal, bien, il y a toutes sortes de trucs, je dirais, procéduriers ou de techniques réglementaires pour y arriver. Alors, c'est ce qu'on a fait sur les projets de loi qu'on retrouve dans la motion de suspension des règles. Bon.

(16 heures)

Alors, c'est ce qui arrive à mon projet de loi, moi, celui que j'ai présenté, le projet de loi n° 116 sur la Régie de l'énergie. C'est ce qui arrive. Ça a été très agréable, remarquez, là. Je vois le député de Shefford qui est devant moi, ça n'a pas été des heures ennuyeuses, pas du tout, ça a été très agréable. Je dirais même qu'on s'amusait. Mais on est dans la futilité, là. On n'est pas sur la substance des choses, on est dans le domaine de la futilité et de la légèreté, ce qu'un certain écrivain appelait l'«insoutenable légèreté de l'être». Alors, c'est dans ce domaine-là qu'on est.

Évidemment, sur le projet de loi n° 116, je vous signale qu'après une dizaine d'heures en commission, très agréables... On était en agréable compagnie, M. le député de Shefford, la députée de Bonaventure, bon, le député de Laurier-Dorion aussi et plusieurs députés de l'opposition. Ça a été très, très, très agréable. Il n'y avait pas d'agressivité ou d'hostilité particulière, mais on n'avançait pas. Ça n'avançait pas, pas d'un pouce, pas d'un poil, M. le Président, et il est clair qu'on aurait pu passer ainsi des semaines et des semaines sans avoir à aborder l'article 1.

Alors, bon, dans un tel contexte, un gouvernement qui veut faire adopter un projet de loi parce qu'il estime que c'est un projet de loi majeur, important, qui doit être adopté, bien, il a une seule solution, c'est de recourir aux articles 182 et suivants, c'est-à-dire de présenter ce dont on discute maintenant, une motion de suspension des règles, pour accélérer, pour désembourber, je dirais, le projet de loi et le faire cheminer de façon accélérée pour arriver à son adoption. C'est ce qu'on fait, M. le Président.

Je vais laisser le soin à mes collègues de la Santé et des Affaires municipales d'indiquer, lors de ce débat, pourquoi il importe de faire adopter les projets de loi qui les concernent. Mais, pour moi en tout cas, en ce qui me concerne, le projet de loi n° 116 doit être adopté. Ça fait maintenant presque deux ans qu'on examine cette question sous tous ses angles, qu'on réfléchit, qu'on consulte sur la portée de la Loi sur la Régie de l'énergie, particulièrement en matière de tarifs, particulièrement en matière de tarifs pour les clients résidentiels. Ça fait donc plusieurs mois, et le temps est maintenant venu de trancher et d'adopter le projet de loi n° 116. Il n'y a pas lieu de laisser traîner les choses et de prendre encore plus de temps.

Je vous signale que ce projet de loi vise à sauvegarder et à maintenir ce qu'on appelle le pacte social qui existe depuis presque 40 ans et qui constitue une espèce de contrat liant le peuple québécois à l'État du Québec depuis des décennies. Je vous rappelle les éléments majeurs de ce pacte social: des tarifs stables; des tarifs uniformes; le choix de la filière hydroélectrique; et des tarifs bas, particulièrement pour les clients résidentiels, parce que ces clients résidentiels bénéficient de ce qu'on appelle l'interfinancement c'est-à-dire donc qu'ils ont des tarifs qui ne correspondent pas aux coûts qui leur sont attribués, ce sont d'autres catégories de consommateurs qui assument une partie de ces coûts. C'est ce qu'on appelle l'interfinancement. Ça a eu comme résultat évidemment de faire en sorte que les tarifs pour les clients résidentiels au Québec sont parmi les plus bas en Amérique du Nord. Il fallait préserver cette réalité. Il fallait préserver ce pacte social et c'est l'objectif poursuivi par le projet de loi n° 116.

M. le Président, c'est après une longue réflexion que nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il fallait faire adopter à cette session-ci ce projet de loi portant sur la Loi de la Régie de l'énergie. Certains ont prétendu que la loi actuelle, si on la mettait en oeuvre complètement, dans toutes ses dimensions, n'aurait pas pour effet d'affecter lourdement le pacte social et n'aurait pas non plus pour effet d'atténuer et d'abolir l'interfinancement en faveur des clients résidentiels. C'est le cas de certaines instances de mon parti, le Parti québécois, qui, par communiqué, ont exprimé ces prétentions.

Je veux de nouveau encore aujourd'hui affirmer de façon très claire que nous avons examiné de façon approfondie ce qu'on pourrait appeler les impacts tarifaires de la mise en oeuvre de la Loi de la Régie de l'énergie telle qu'elle existe – telle qu'elle existe. Nous avons fait un examen approfondi des impacts tarifaires, suite à une décision du Conseil, et nous avons consulté maints experts sur cette question. La conclusion, elle est très claire. On peut bien l'ignorer, s'aveugler là-dessus, mais elle est très claire, la conclusion: Si vous mettez en oeuvre la loi actuelle de la Régie de l'énergie, en matière tarifaire, vous allez aboutir inéluctablement à des augmentations substantielles, pour les clients résidentiels, de l'ordre de 25 % à 30 %. C'est ça, l'impact tarifaire de la mise en oeuvre, de la mise en vigueur de la Loi sur la Régie de l'énergie telle qu'elle existe présentement. Vous imaginez que des augmentations tarifaires, pour les clients résidentiels, de l'ordre de 25 % à 30 %, ça signifie que le pacte social vole en éclats. C'est la mise au rancart du pacte social conclu il y a près de 40 ans, c'est évident. Un des éléments fondamentaux de ce pacte social vient d'être complètement pulvérisé – pulvérisé – M. le Président, c'est-à-dire des bas tarifs pour les clients résidentiels.

Le gouvernement ne pouvait pas accepter ça. Une fois qu'on a eu sous les yeux les impacts tarifaires, particulièrement concernant les clients résidentiels, c'est évident que ma conclusion puis la conclusion aussi du gouvernement et de la formation ministérielle, ça a été de dire: Bien, on ne peut pas laisser aller les choses de cette façon. Il faut apporter des modifications à la Loi de la Régie de l'énergie, pas abolir la Régie, pas la faire disparaître, mais apporter des modifications pour empêcher que ces impacts tarifaires négatifs puissent apparaître et survenir. C'est ça, la décision qu'on a prise.

(16 h 10)

D'autre part, si on laisse la loi actuelle sur la Régie de l'énergie et qu'elle est mise en vigueur complètement et totalement, il est clair aussi que, à terme, l'interfinancement va être d'abord atténué, sans doute, puis ensuite disparaître. C'est, je dirais, une dynamique qu'on ne peut pas arrêter. C'est clair que, à partir du moment où la Régie de l'énergie applique sa loi, recherche l'équité entre les catégories de consommateurs, recherche la neutralité tarifaire, elle est dans l'obligation de s'attaquer à l'interfinancement et de le faire disparaître à terme, avec évidemment comme résultat des augmentations tarifaires substantielles pour les clients résidentiels. Si vous abolissez l'interfinancement qui existe présentement, qui est une réalité depuis des décennies, si vous l'abolissez, c'est évident que la catégorie de consommateurs qui va écoper, ce sont les clients résidentiels. Ça aussi, c'est une réalité.

J'entends encore certains intervenants prétendre qu'on peut l'empêcher par le pouvoir de directive prévu dans la loi. Bien, depuis un certain jugement qui est intervenu il y a quelques semaines d'un tribunal précisément sur cette question du pouvoir de directive, je ne pense pas qu'on puisse demander au gouvernement de recourir au pouvoir de directive pour protéger l'interfinancement. En tout cas, ça serait très risqué que de nouveau un tribunal déclare que le gouvernement est allé trop loin et a utilisé à mauvais escient le pouvoir de directive. Parce que l'interfinancement est de nature tarifaire, c'est un élément tarifaire, et le jugement du tribunal, ça a été de dire: Le gouvernement ne peut pas utiliser le pouvoir de directive de cette façon-là parce qu'il a des effets sur la grille tarifaire. C'était ça, la décision du tribunal. Et utiliser le pouvoir de directive à propos de l'interfinancement, bien, on se place dans une situation où on risque de se retrouver avec un jugement de même nature. Donc, le pouvoir de directive n'est pas la bonne façon pour protéger et sauvegarder l'interfinancement, il fallait le faire par des amendements législatifs. C'est ce qu'on retrouve dans le projet de loi n° 116, M. le Président.

Par conséquent, en ce qui me concerne comme en ce qui concerne les autres projets de loi qu'on retrouve dans la motion de suspension des règles, pour le gouvernement, oui, nous invoquons l'urgence. Il y a urgence d'adopter ces projets de loi.

Parmi les dizaines et les dizaines de projets de loi qui ont été examinés et débattus par cette Assemblée, il y en a cinq qui, selon le gouvernement et selon la formation ministérielle, doivent être adoptés à cette session-ci. Il y a un caractère d'urgence à cette adoption et, comme l'opposition a décidé de s'opposer de façon systématique à l'adoption de ces projets de loi, d'empêcher leur cheminement normal sur le plan législatif, eh bien, il a fallu évidemment, après examen de la situation, en arriver à la conclusion qu'il n'y avait qu'un seul moyen de faire adopter ces projets de loi – un seul – qui est un moyen qui se retrouve dans nos règles, dans notre règlement. La motion de suspension des règles, je ne l'invente pas, c'est à partir de dispositions du règlement. Il n'y avait qu'un seul moyen pour faire adopter ces projets de loi, c'est par cette motion de suspension des règles que je demande à l'Assemblée d'adopter pour qu'on puisse, après, en arriver à adopter les cinq projets de loi concernés de façon rapide et diligente. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Énergie et des Ressources...

Une voix: Des Ressources naturelles.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...des Ressources naturelles – ce qui comprend l'énergie – et leader du gouvernement. Je vous remercie bien. Et je vais céder la parole maintenant à M. le député de Saint-Laurent.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Brièvement, M. le Président. L'objet de la motion pour laquelle nous sommes réunis cet après-midi, ce n'est pas compliqué, hein. Le premier ministre, il peut faire taire ses députés. Ça, il est capable de faire ça. Le premier ministre, à son caucus, quand ses députés expriment le désir d'être traités équitablement par rapport aux fonctionnaires, par rapport aux membres de la fonction publique, quand ses députés, en groupe, lui disent: M. le premier ministre, on chercherait à être respectés. L'une des façons dont on peut être respectés, c'est évidemment par la façon dont on traite les émoluments qui nous sont dus. Le premier ministre, il peut les faire taire. On l'a vu, il les a fait taire: Taisez-vous! Taisez-vous sur le salaire. Parlez pas de ça, je ne veux pas entendre parler de ça. Puis, il envoie la ministre de la Santé comme estafette pour préparer le terrain. Puis, la ministre de la Santé, parce qu'il dit d'elle régulièrement que c'est une femme remarquable à la Santé, elle comprend le message. La dernière fois qu'il a dit ça d'un ministre de la Santé, le premier ministre, le ministre de la Santé, c'est le député de Charlesbourg, il a perdu sa job. Alors, quand le premier ministre dit qu'un ministre fait un travail remarquable, il faut faire attention, notre job est en jeu. Alors donc, il a envoyé la ministre de la Santé comme estafette à son caucus pour préparer le terrain sur le salaire des députés, puis, elle, elle n'avait pas le choix d'y aller, parce qu'elle a peur de perdre sa job. Il dit régulièrement que c'est une femme remarquable. Alors, il peut faire taire ses députés, il peut faire ça.

Le premier ministre, il peut faire taire le député de Saint-Jean, qui va à son caucus avec une cause noble, une cause juste. Le premier ministre le fait taire parce que ce n'est pas bon pour son orgueil que le député de Saint-Jean réussisse à faire changer la décision du premier ministre, parce que le premier ministre s'est étampé en Chambre sur la question des orphelins de Duplessis. Alors, taisez-vous, M. le député de Saint-Jean. Puis, le député de Saint-Jean, il plie l'échine, il baisse la tête, il rondit le dos et il se tait. Taisez-vous. Le premier ministre, il peut faire ça.

Le premier ministre, il peut faire taire le député de Marguerite-D'Youville, M. le Président, qui n'a qu'une seule ambition depuis les élections, c'est celle – ambition légitime – d'accéder à votre banc. Alors, il voudrait, lui aussi, être dans la liste des candidats pour la présidence de l'Assemblée nationale. En 1998, le député de Marguerite-D'Youville, M. le ministre de l'Énergie, souvenez-vous, quand le premier ministre lui a dit: Taisez-vous, M. le député de Marguerite-D'Youville, mon candidat, c'est le député de Borduas. Taisez-vous! Il peut faire ça, le premier ministre.

Le premier ministre, il peut faire taire la ministre de l'Emploi. Le premier ministre, en campagne électorale... conférence de presse avec la ministre de l'Emploi. Les journalistes posent une question à la ministre de l'Emploi. Elle commence à répondre. Le premier ministre répond à sa place. Elle lui dit: Non, non, M. le premier ministre, je suis capable de répondre, laissez-moi aller. Il ne l'a jamais oublié. Et il l'a nommée ministre de l'Emploi, puis là il l'a regardée aller. Puis, de la minute qu'elle a fait des gaffes à Emploi-Québec – le fiasco d'Emploi-Québec – il lui a tiré la plug: tuteur. On va lui mettre un tuteur, M. Louis Bernard. Il savait ce qu'il faisait, le premier ministre, il la faisait taire. Taisez-vous, ministre de l'Emploi! Il peut faire ça, le premier ministre.

Le premier ministre, il peut faire taire les directeurs d'hôpitaux qui disent au gouvernement: Les bases budgétaires que vous nous imposez pour les hôpitaux, ce n'est pas suffisant. On ne pourra jamais arriver avec ça. Rencontre des directeurs d'hôpitaux avec la ministre de la Santé: Taisez-vous! Il dit aux directeurs d'hôpitaux de se taire. Il peut faire ça, le premier ministre.

Mais, le premier ministre, il n'a pas de contrôle – Dieu merci! – sur l'opposition. Le premier ministre ne peut pas faire taire l'opposition comme il veut. La seule façon de faire taire l'opposition, pour le premier ministre, c'est le bâillon, la motion de censure. Taisez-vous, l'opposition! On ne veut pas vous entendre. Sauf que ce que le premier ministre n'a pas considéré, n'a pas réalisé, c'est qu'en faisant taire l'opposition aujourd'hui, M. le Président, le premier ministre, là, il va faire une bien petite victoire que celle de réussir à faire taire l'opposition. Parce que, ce que l'opposition aurait fait et ferait s'il ne s'agissait d'un bâillon, l'opposition ferait valoir la voix des malades qui vont faire les frais de la loi antidéficit que ce gouvernement-là veut faire passer en faisant taire l'opposition. Les malades et les personnes âgées vont faire les frais de la Loi sur l'assurance-médicaments que ce gouvernement-là veut faire passer à l'intérieur de sa motion de censure, à l'intérieur du bâillon, en faisant taire l'opposition qui, elle, ferait valoir la voix des citoyens.

(16 h 20)

Ce que le premier ministre n'a pas réalisé, M. le Président, c'est que, en faisant taire l'opposition, il fait taire les maires d'une très grande majorité de municipalités au Québec; que, faisant taire les maires d'une très grande majorité de municipalités au Québec, il fait taire les populations qui ont élu ces maires-là et la volonté de ces populations-là qui s'exprime – on pense, par exemple, au dernier référendum qui a eu lieu dans la couronne nord de Montréal. C'est ça qu'il ne réalise pas, le premier ministre, il fait taire ces gens-là.

Finalement, M. le Président, donc, la motion de censure, elle fait quoi? La motion de censure, c'est l'arme dont le premier ministre a décidé de se munir aujourd'hui pour faire taire ceux qu'il ne contrôle pas; ceux qu'il ne contrôle pas dans cette Chambre, c'est-à-dire l'opposition. Le premier ministre fait un mauvais calcul. Le premier ministre n'a pas réalisé que, ce faisant, il fait taire la population du Québec, la population du Québec qui est intéressée par les projets de loi que le gouvernement veut faire adopter dans le bâillon: services de santé, les services auxquels la population est en droit de s'attendre; fait taire les payeurs de taxes qui veulent avoir le droit de continuer à vivre dans les communautés qu'ils auront choisi d'habiter, pas que le gouvernement aura choisi pour eux mais qu'ils auront choisi d'habiter; et il fait taire aussi les payeurs de comptes d'électricité qui auraient souhaité que le gouvernement respecte sa parole de faire en sorte que la Régie de l'énergie, un organisme indépendant, pas contrôlé, puisse scruter la façon dont Hydro-Québec établit ses comptes d'électricité.

Alors, M. le Président, c'est certain que le temps qui nous est imparti pour discuter de la motion de bâillon... c'est certain que l'opposition officielle va prendre le temps qui lui est imparti, parce que c'est la dernière chance pour la population qui est affectée par les projets de loi que le premier ministre a décidé de faire passer en dépit du voeu de la population, c'est la dernière chance qui nous est donnée de faire valoir la voix de ces populations-là qui nous ont élus pour que nous les représentions, pour que nous fassions valoir à l'Assemblée nationale les représentations qu'ils veulent faire, et les représentations qu'ils veulent faire sont toutes à l'encontre des projets de loi que le gouvernement veut faire adopter.

M. le Président, le gouvernement péquiste, le premier ministre péquiste, les ministres péquistes, les députés péquistes porteront le poids politique de cette décision. Et, quand ils se retrouveront de ce côté-ci, à ce moment-là, ils auront compris, mais ce sera trop tard, et ce sera à la prochaine élection, M. le Président. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Laurent. Le prochain intervenant, M. le député de Hull. Excusez. Mme la ministre...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Bon. Alors, M. le député de Hull, je vous cède la parole.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Alors, merci, M. le Président. Pourquoi est-ce qu'on est ici? Parce qu'on parle d'une suspension des règles. Ça veut dire quoi, ça? Moi, je suis un nouveau parlementaire, ça fait un an et demi que je suis ici, puis, quand je suis arrivé, voici ce qu'ils m'ont remis: ce livre-là, un cartable avec les règlements de l'Assemblée nationale. Eh bien, aujourd'hui, le gouvernement me demande de faire ceci avec le livre.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Cholette: Voilà! C'est ce qu'on fait avec le livre des règlements, M. le Président. Pourquoi? Parce que ce gouvernement est incapable de faire face à la musique, incapable de faire face à l'opposition, incapable de faire face aux citoyens et aux citoyennes du Québec, incapable de faire face aux malades du Québec, incapable de faire face aux gens qui sont contre les projets à la Régie de l'énergie, incapable de faire face aux maires et conseillers municipaux du Québec et surtout incapable de faire face aux citoyens du Québec.

Le gouvernement veut s'en aller en vacances une semaine plus tôt que prévu. Ils en ont assez. C'est fini, le travail, allons nous reposer. Ça, c'est le message que le gouvernement lance à la population. Ils ont assez travaillé. Et, de toute façon, les projets de loi qui sont sur la table, ce n'est pas vraiment important, c'est des projets de loi antidémocratiques, dans le monde municipal, qui empêchent de soigner le monde dans les hôpitaux, puis c'est un projet de loi qui fait en sorte que nos montants de facture, à Hydro-Québec, vont augmenter, mais ce n'est pas grave! Il ne faut pas en discuter à l'Assemblée nationale. Il ne faut surtout pas que le monde connaisse les véritables motifs de ce gouvernement. Et, M. le Président, les motifs invoqués sont des motifs d'urgence. Voyons donc! Aie! on va repasser pour la logique là-dedans, des motifs d'urgence!

Un des projets de loi dans le bâillon, c'est le projet de loi n° 134. Ça, c'est la création de la Communauté métropolitaine de Montréal. On nous dit qu'on ne peut plus continuer le débat sur le projet de loi n° 134, il faut mettre ça dans le bâillon parce que c'est urgent. M. le Président, la Communauté métropolitaine ne verra le jour que le 1er janvier 2001, dans six, sept mois. Où est l'urgence? Ça, c'est le motif invoqué. On dit: M. le député de Hull, oubliez ça, ce règlement-là. Vous avez appris, vous, que vous avez des règles parlementaires, vous avez des règles à suivre. Mais là le gouvernement dit: On ne le regarde plus, ce livre-là. C'est fini. Puis on bâillonne l'opposition, on bâillonne la population puis on invoque un motif d'urgence, alors qu'un des projets de loi dans le bâillon, c'est un projet de loi qui fait en sorte que la Communauté métropolitaine verra le jour le 1er janvier 2001. Voyons donc! Ça n'a aucun bon sens, d'autant plus que ça n'a pas de bon sens pour ce propre projet de loi... le projet de loi d'application viendra à l'automne.

En ce qui a trait au monde municipal – et on reviendra tantôt là-dessus – je vois que la ministre des Affaires municipales est ici et nous parlera certainement de l'avantage de mettre un projet de loi comme celui-là dans le bâillon, le projet de loi n° 124, où on va forcer des fusions municipales partout au Québec. Ça, c'est pressant, c'est urgent, M. le Président. Bâillonnons la population! Dites-lui: Vous n'avez pas d'affaire à vous exprimer sur l'avenir de vos municipalités. Et ça, on va faire ça à toute vapeur. On n'a pas commencé à étudier la première virgule de la première page de ce projet de loi, on n'a même pas terminé, en Chambre, de discuter du principe de ce projet de loi là, et on le met dans le bâillon. On n'a pas ouvert la première page du projet de loi et, ce n'est pas grave, on le met dans le bâillon. Des impacts incroyables sur les relations de travail, sur les coûts aux citoyens, sur la qualité et la quantité de services offerts par les municipalités aux différents citoyens du Québec. Alors, vraiment, c'est un projet de bâillon qui est absolument inacceptable pour les gens du Québec, inacceptable pour l'opposition, puisque non seulement on est en train de bâillonner l'opposition, mais on est en train de bâillonner particulièrement les citoyens du Québec qui, eux, disent: Ça n'a pas de mosus de bon sens qu'on puisse passer des projets de loi comme ça à toute vapeur alors qu'il y a des sujets importants à débattre.

Prenons l'exemple du projet de loi n° 134. Et je m'inscris en faux contre les propos du leader du gouvernement à l'effet que nous utilisons des mesures dilatoires. Je prends pour fait et cause l'étude très sérieuse que nous avons faite du projet de loi n° 134 jusqu'à minuit hier soir, en commission. Les motions qui ont été présentées, de report ou de suspension, ont été présentées par la ministre des Affaires municipales elle-même parce qu'elle n'avait pas eu l'aval du Conseil des ministres. Nous avons étudié près de 70 articles sur 250 de ce projet de loi et nous avons bonifié. Si la ministre se lève aujourd'hui, j'espère qu'elle pourra le dire que, grâce à l'opposition, le projet de loi a été bonifié. Mais là il reste près de 200 articles à regarder. Prenons le temps de les regarder tranquillement, à tête reposée, une fois que le comité aviseur aura fait son travail à Montréal. Bien, non, on s'en va mettre le projet de loi n° 134 dans le bâillon. Et je répète: La création de la Communauté métropolitaine n'est prévue que pour l'an prochain.

(16 h 30)

Elle est où, l'urgence, M. le Président? Est-ce qu'on peut nous expliquer ça? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui va être capable de se lever, du côté gouvernemental, pour nous dire où est l'urgence dans le projet de loi n° 134? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui est capable de nous dire aussi où est l'urgence dans le fait qu'on ne respecte pas l'avis et l'opinion du monde municipal et des citoyens du Québec? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut nous dire où est l'urgence de doubler les montants d'assurance médicaments? Est-ce qu'il y a quelqu'un qui peut nous montrer l'urgence d'adopter une loi qui va empêcher les établissements de santé de soigner le monde? Vraiment, là, ça prend un gouvernement déconnecté, arrogant pour en arriver à de telles manoeuvres. Vraiment, il faut être loin du monde pour décider qu'à une semaine de la fin on arrête tout ça, là, pour faire autre chose, pour aller en vacances, pour jouer au golf, pour aller faire de la pêche, comme la plupart s'apprêtent à le faire du côté ministériel, alors que...

Mme Doyer: La pêche au saumon.

M. Cholette: Et la pêche au saumon, Mme la députée. Alors, c'est ça, la priorité du gouvernement, aller à la pêche au saumon. La députée de Matapédia nous indique cela. Plutôt que de s'occuper du monde dans les hôpitaux, plutôt que de respecter la population dans le monde municipal, ils s'en vont à la pêche au saumon. Ça, ça va aider les gens les plus démunis au Québec! Ça, ça va aider le monde municipal aux prises avec des crises financières! Ça, ça va aider le monde dans les hôpitaux, dans les urgences, dans les civières, dans les corridors! Au lieu d'assumer des fonctions de gouvernement, et de légiférer, puis de régler des problèmes jusqu'à la fin de la session, et même de l'extensionner s'il le fallait, la session, le gouvernement s'en va en vacances une semaine plus tôt pour partir à la pêche au saumon.

Alors, mon collègue tantôt le disait, ce gouvernement va être jugé par ses gestes, par ses actions, mais, vous savez, avec les périodes des questions que l'on vit présentement, avec la difficulté évidente du gouvernement à répondre à des questions, notamment sur le fait que l'on taxe les malades, les malades de cancer au Québec, qu'on les force à aller dans des pharmacies se chercher des médicaments alors que c'est les gens les plus fragiles de la société, qu'ils paient pour ces médicaments, moi aussi, si j'étais premier ministre, j'aurais donné la commande à mon leader: Tu vas faire tout ce qu'il faut pour qu'on sorte de l'Assemblée nationale, parce que c'est intenable. Je ne suis plus capable de défendre ça, moi, des politiques comme ça qui font en sorte que je taxe du monde parce qu'il est malade. Alors, leader, c'est ça, ma commande. Après avoir fait taire tout le monde, là tu vas faire taire l'Assemblée nationale. Puis arrange-toi, va voir le leader de l'autre bord puis dis-lui: Les folies, c'est fini, on ferme ça, l'Assemblée nationale, parce que je ne veux plus de périodes de questions la semaine prochaine, il n'est pas question qu'on revienne là-dessus. Là, ma gang, elle n'est plus tenable. On a eu des discussions au caucus, ils veulent des augmentations de salaire. Moi, je ne suis pas intéressé à leur en donner. Ça va mal au caucus, ça va mal à la période de questions, ça va mal au cabinet, ça va mal dans mes projets de loi, là j'en ai assez. Je veux m'en aller en vacances, puis on s'en va à la pêche au saumon, à part ça.

Aïe! c'est ça, le gouvernement qu'on a. C'est ça, le gouvernement qu'on mérite. Et la seule chose qu'il mérite, c'est de revenir du côté de l'opposition pour que le Québec soit géré de façon efficace et surtout humaine, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie beaucoup, M. le Président, de me permettre d'intervenir à ce moment-ci pour expliciter pourquoi il m'apparaît important que nous puissions adopter les deux projets de loi dont j'assume la responsabilité devant cette Assemblée et comme ministre, bien sûr, de façon plus générale, soit la loi qui permet de corriger le régime d'assurance médicaments et la loi qui prévoit que les établissements de santé et de services sociaux devront respecter l'équilibre budgétaire, comme le gouvernement s'est obligé lui-même à le faire en s'assurant que les citoyens et les citoyennes du Québec pourraient continuer d'avoir accès à des services de qualité dans ces mêmes institutions.

J'entends depuis le début de la session l'opposition sur ces deux lois. Nous avons fait des débats ici, à l'Assemblée, nous avons essayé, tenté d'en faire en commission parlementaire. On connaît un peu les procédures, l'opposition a manifesté son opposition en souhaitant qu'on entende des groupes dans certains cas, dans d'autres, en proposant que nous scindions les lois qui étaient devant nous pour les voter en deux temps de telle sorte qu'on prenne un peu plus de temps pour en débattre, etc. En fait, on se trouve, M. le Président, devant une opposition incohérente, complètement incohérente, et j'en ai pour preuve...

Quand je les écoute intervenir, poser des questions, proposer – enfin, il faut voir – la quadrature du cercle, j'essaie de trouver le fil conducteur, j'essaie de réconcilier toutes leurs attentes puis je me dis: Non, ça ne va pas. Ça ne va pas, on n'y arrive pas, M. le Président. Et je pense bien qu'eux-mêmes, quand ils se retrouvent devant leur miroir, seuls, chacun d'eux, chacune d'elles, ils ne doivent pas s'y retrouver non plus puis ils doivent se dire: On a un petit problème de cohérence. Parce que j'entends les gens se lever et me dire: Ah! on devrait ajouter des sommes supplémentaires dans le réseau de la santé et des services sociaux, c'est inadmissible qu'on demande aux personnes capables de le faire de contribuer un peu plus au régime d'assurance médicaments qui risque d'être dans une situation déficitaire impossible à rétablir.

Alors, mettre plus d'argent en santé, ne pas toucher au régime d'assurance médicaments pour demander une contribution juste et équitable en fonction de services obtenus, M. le Président, de consommation obtenue, investir en éducation, investir du côté des transports, ne pas toucher aux questions des affaires municipales et surtout, surtout, même si les municipalités, elles, sont en bonne santé, ne pas exiger d'elles une contribution supplémentaire, donc plus d'argent de la part du gouvernement, puis là ce n'est pas notre argent, hein? Je pense que tout le monde ici sait bien ça, hein, c'est l'argent des citoyens et des citoyennes du Québec qu'ils nous confient. Ils nous demandent de gérer cet argent de façon responsable en assurant qu'ils aient des réponses à leurs besoins essentiels, donc que nous assurions les services essentiels: santé, éducation, système de justice adéquat, protection de notre environnement, etc. C'est l'argent des citoyens et des citoyennes du Québec que nous gérons, dont nous assumons la responsabilité, et devant eux nous devons répondre.

Alors, l'opposition nous dit: Plus, plus, plus, partout, sans jamais nous proposer quelque changement que ce soit, sans jamais imaginer quelque avenue nouvelle que ce soit, simplement plus, plus, plus. Ça fait bien, ça, M. le Président. Et en même temps ils nous disent: Moins d'impôts, moins, moins, moins, il faut payer moins d'impôts, il faudrait qu'on réduise l'effort fiscal des citoyens et des citoyennes. Ils ont raison, il faut pouvoir faire ça. Il faut pouvoir faire ça en maintenant, oui, l'accès à des services de qualité nécessaires et essentiels et pour lesquels le gouvernement du Québec a pris des engagements à l'égard de ses concitoyens et de ses concitoyennes. Alors, plus d'argent partout, moins d'impôts, pas de déficit au gouvernement, mais peut-être, oui, des déficits dans les établissements – là ça serait moins grave – en même temps qu'ils nous ont dit il y a un an, il y a six mois: Ah! le gouvernement camoufle ses déficits dans les déficits des universités, dans les déficits des hôpitaux. Ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de déficit, il le camoufle là.

J'essaie, encore là, de trouver le fil conducteur. Quel est le fil conducteur qui anime et qui préside aux prises de position de l'opposition, M. le Président? Je ne le trouve pas. Je trouve qu'il y a plutôt de la contradiction, de l'incohérence. Si, à la limite, on me disait: Pour faire ça, on pense que le gouvernement devrait faire des déficits, bon, je me dirais, je pourrais me dire puis les citoyens et les citoyennes du Québec pourraient de façon intelligible comprendre leur position. Ah! ils veulent mettre plus d'argent dans les services, mais ils acceptent qu'on s'endette un peu plus. Je n'ai entendu personne dire ça de l'autre côté. Là, aujourd'hui, ils voudraient peut-être que les institutions s'endettent un peu plus et fassent des déficits, puis dans trois jours, puis dans trois semaines, ils vont nous dire: C'est des déficits cachés du gouvernement, ça, hein, puis baissez donc les impôts.

(16 h 40)

Ils ont raison, il faut les baisser, les impôts, c'est tout à fait nécessaire que nous puissions le faire pour permettre à nos concitoyens et à nos concitoyennes d'avoir un peu plus de ressources pour assumer la réponse à leurs besoins d'une façon autonome, en même temps, oui, que nous avons la responsabilité de respecter nos engagements à l'égard de la population québécoise et avec les sommes que cette même population nous confie à travers les taxes et impôts pour que nous puissions rendre disponibles des services de qualité et qui sont des services qui répondent à des besoins essentiels de nos concitoyens et de nos concitoyennes: la santé et les services sociaux, l'éducation, aider les familles pauvres, les enfants pauvres, s'assurer qu'il y a un système de justice qui a de l'allure, équitable, s'assurer qu'on vit dans un environnement qui va respecter la santé de la population, qui va s'assurer que la santé de la population va être bien préservée, s'assurer d'une préservation de nos ressources à long terme, de la durabilité de notre développement.

C'est notre responsabilité, et nous l'assumons. Mais nous l'assumons de façon responsable, M. le Président, et nous pensons toujours qu'un gouvernement responsable ne doit pas faire de déficit, qu'il doit vivre selon ses moyens. Ça a été difficile d'arriver là. On a demandé des efforts considérables à toute la population québécoise, et c'est vrai que ça a demandé des sacrifices, comme on dit parfois, des sacrifices partout. D'abord, on n'a pas pu les baisser, les impôts, pendant un certain temps, ou on les a très légèrement baissés pour améliorer la situation des plus pauvres. On a dû demander à des gens partout dans les services de réorganiser autrement ces services-là, de remettre en question certaines façons de faire, de rationaliser, oui, de remettre en question des aspects administratifs du fonctionnement dans les institutions. Tout le monde à travers le Québec a fait l'effort, et on peut se dire aujourd'hui: Mission accomplie.

Nous avons une base saine, nous pouvons faire deux choses: dire à nos concitoyens et à nos concitoyennes d'abord merci, bien sûr, mais leur dire: Parce que nous avons fait cela ensemble, nous pouvons assurer la pérennité d'un certain nombre de nos services sociaux, de nos services de santé, de nos services éducatifs, et nous allons continuer à le faire. Ça ne nous enlèvera pas cependant l'obligation, M. le Président, de continuer à gérer ces services avec rigueur, cela va de soi. Et, oui, cela nous permet, cette situation plus saine, en plus, de recommencer à réinvestir dans ces mêmes services pour continuer de les améliorer, pour nous assurer que l'accessibilité va être en tout temps assurée pour certains services essentiels et que d'autres responsabilités qu'a à assumer l'État vont l'être de façon raisonnable, de façon correcte.

Quand on est un petit peuple de parlant français, une minorité en Amérique du Nord, il y a des choses essentielles que l'on doit préserver – qu'on pense à notre langue, qu'on pense à notre culture – et, à cet égard, bien sûr, il faut soutenir autant la création, autant nos artistes, préserver autant notre patrimoine, autant ce qui fait la richesse de ce que nous sommes et notre différence, et donc là aussi il faut songer à pouvoir investir. Donc, réinvestir dans ce qui est essentiel, s'assurer que les sommes que nous réinvestissons soient bien gérées et permettre à nos concitoyens et à nos concitoyennes d'avoir un petit peu plus de ressources pour répondre à leurs besoins essentiels, cela veut dire baisser les impôts. Jusqu'à maintenant, nous avons choisi – et je pense que c'est judicieux, M. le Président, de l'avoir fait – de ne pas toucher à la réduction de la dette parce que l'on sait très bien que, si, au moins, elle cesse d'augmenter et que la richesse collective, elle, croît, la dette prendra de moins en moins de place dans notre économie par rapport aux sommes que nous avons de disponibles pour en assurer le remboursement, si on veut. Toutes proportions gardées, elle deviendra de plus en plus petite, et je pense que, jusqu'à maintenant, c'est un choix adéquat, c'est un choix correct. Nous pourrons éventuellement requestionner le tout, mais nous n'en sommes pas là parce qu'il y a d'autres matières plus urgentes qui nous interpellent.

Alors, dans cette perspective et dans cette foulée, il y a devant nous deux projets de loi que je parraine, que j'assume. Le premier, c'est celui qui concerne les budgets équilibrés de nos établissements de santé et de services sociaux. Nous avons voulu faire une loi qui était une loi prévoyant une série de moyens pour aider d'abord nos établissements qui se trouveraient dans des situations difficiles éventuellement pour amener nos établissements à chercher des mesures correctrices si la situation les amenait à devoir constater un risque de déficit, et si, par ailleurs, tout cela étant fait, un établissement ne devait pas respecter la loi, la possibilité pour le gouvernement d'aller jusqu'à la tutelle.

Nous avons commencé à travailler avec nos établissements dans l'esprit de la loi pour voir quels étaient les éléments dans leur budget qui méritaient d'être regardés d'une façon particulière, parce que, effectivement, cela représente une pression à la hausse sur leurs coûts de fonctionnement pour être justes, pour être équitables et pour ne pas pénaliser des institutions qui, tout en gérant de façon remarquable et exceptionnelle, des personnes, des gestionnaires qui, tout en gérant leurs institutions, en dirigeant leurs institutions de façon absolument remarquable et exceptionnelle, se voyaient confrontés à des hausses de coûts – prenons, par exemple, les médicaments, cela fait l'objet de quelques discussions entre nous actuellement – où on pourrait voir comment compenser une telle hausse dans certains cas, M. le Président, donc appliquer une loi d'une façon intelligente et respectueuse de ceux et de celles à qui elle s'applique. Mais elle devra s'appliquer parce que nous avons une obligation à respecter à l'égard de nos concitoyens et de nos concitoyennes, c'est de nous assurer que les finances publiques du Québec vont demeurer saines.

Je sais que, du côté de l'opposition, ça ne leur importe pas beaucoup, parce que, dans les faits, ils nous ont laissé une situation tellement dramatique lorsqu'ils ont quitté le pouvoir que c'est nous qui avons dû, comme on dit, essuyer les plâtres, c'est nous qui avons dû réparer les pots cassés, c'est nous qui avons dû demander à chacune des citoyennes et à chacun des citoyens du Québec de faire l'effort que nous avons fait depuis quatre ans, depuis cinq ans, c'est nous qui, comme gouvernement, avons agi de façon responsable, sans oublier, sans oublier, M. le Président, bien sûr le fait que nous essuyons en même temps de la part d'Ottawa une réduction considérable des sommes qui étaient transférées pour couvrir les besoins en matière de santé, d'éducation, d'enseignement supérieur et de lutte à la pauvreté.

Alors, le gouvernement qui nous a précédés nous a laissé un gâchis, un déficit de près de 6 milliards de dollars. Le gouvernement d'Ottawa, où siègent les grands frères, en termes de parti, de l'opposition, lui a décidé d'affamer les provinces pendant qu'il accumulait année après année des surplus de plus en plus importants, en même temps, M. le Président – il ne faut pas l'oublier – qu'il a adopté des lois concernant l'assurance maladie, l'assurance hospitalisation. Ils ont défini des principes, ils ont pris des engagements lorsqu'ils ont adopté ces lois. Ils ont pris des engagements à l'effet de soutenir les provinces à hauteur de la moitié des coûts concernant les services sociaux et les services de santé. Cette année, c'est de l'ordre de 0,04 $ dans chaque dollar dépensé au Québec qui sera une contribution d'Ottawa. Je n'entends pas beaucoup mes amis de l'opposition, de l'autre côté, faire des représentations à Ottawa, je ne les entends pas beaucoup dénoncer cette situation-là.

Il y en a d'autres qui les ont précédés et qui avaient le verbe un peu plus haut. Je me souviens du député de Bonaventure, ancien ministre des Finances, qui avait parlé des prédateurs d'Ottawa. Ils n'ont pas changé d'attitude, à Ottawa, c'est pire que c'était. Mais je n'entends pas de tels propos de l'autre côté de cette Assemblée puis ça m'inquiète un peu. Non, ils préfèrent de beaucoup blâmer notre gouvernement pour avoir été respectueux à l'égard de la population québécoise, pour avoir assumé ses responsabilités. Alors, ils blâment notre gouvernement, ils proposent tout et n'importe quoi, aucune espèce de solution, puis ils oublient de rappeler à Ottawa qu'il est très largement responsable des efforts que nous avons dû faire et aussi des efforts qu'on devra continuer à faire dans le réseau de la santé et des services sociaux, M. le Président.

Moi, je le fais régulièrement. Lors de toutes nos conférences fédérales-provinciales, je rappelle au ministre fédéral de la Santé qu'il a des engagements à l'égard du Québec comme à l'égard d'ailleurs d'autres provinces ailleurs et qu'il doit les respecter. D'ailleurs, à chaque fois que je participe à ces mêmes conférences, l'opposition en profite pour poser des questions. Ils pourraient au moins avoir la décence de m'attendre, il me semble que ce serait un peu respectueux. Mais enfin, c'est leur attitude, je le constate. Je ne peux que le déplorer, M. le Président.

(16 h 50)

Alors donc, une loi, oui, qui va demander à nos établissements de respecter un équilibre budgétaire. Nous allons travailler avec eux pour les aider à atteindre cet objectif, et, plus que cela, pendant l'année, M. le Président, j'ai prévu travailler avec les établissements, leur association, pour voir comment et sur quelle base nous allouons les crédits budgétaires, les budgets qui leur sont alloués, de telle sorte qu'on le fasse d'une manière plus équitable et que l'on pose certaines exigences en termes de performance de la part de nos établissements. Je pense que c'est normal dans une société qui a des ressources limitées mais qui a des besoins, elle, illimités.

L'autre projet de loi vise à nous assurer un régime, un bon régime d'assurance médicaments que nous avons mis en place dans la perspective de tous les changements que nous avons apportés dans l'ensemble de notre réseau de la santé et des services sociaux, changements rendus nécessaires – ça aussi, c'est une chose qui n'avait pas été faite de la part de nos amis d'en face – pour nous assurer que les services rendus allaient l'être aux bons endroits, qu'ils allaient dans notre réseau – si on a besoin de services plus spécialisés, c'est à l'hôpital qu'on va aller les chercher – des services plus généraux, des services de première ligne qui sont normalement obtenus dans nos CLSC, dans les cliniques privées, auprès des médecins, des services sociaux, généraux et spécialisés accessibles dans les CLSC plus spécialisés auprès des jeunes, entre autres, dans nos centres jeunesse, nous assurer, donc, que nos services allaient être mieux adaptés, nos institutions, aux réalités d'aujourd'hui, aux technologies modernes qui apparaissent dans le domaine de la santé.

Pour ce faire, évidemment, les personnes fréquentant moins l'hôpital pendant moins longtemps se retrouvaient très souvent chez elles, en phase de convalescence, devant consommer des médicaments coûteux mais n'ayant pas d'assurance. Pour être capable d'avoir accès à ces médicaments, on a décidé qu'il était important que toute la population québécoise, peu importe son niveau de richesse, peu importe sa capacité de payer, ait accès à un régime universel d'assurance médicaments, en partie privé lorsque disponible dans le milieu de travail où cette personne oeuvre, et l'autre partie public, offert par la Régie de l'assurance maladie à l'intérieur d'une loi concernant le régime d'assurance médicaments.

Cela est fait, M. le Président. Ça a permis à des millions de personnes – et je n'exagère pas – d'avoir accès à un prix raisonnable à des médicaments en payant, oui, une franchise, en contribuant par une prime, mais on s'est rendu compte que, le prix des médicaments augmentant, les consommateurs étant plus nombreux, le régime ne faisait pas ses frais. Alors, on a dit: Ça n'a pas de bon sens. On est des gens raisonnables, on va corriger cela. On a voulu le faire en étant raisonnables mais équitables. C'est vrai que pour certains c'est un peu élevé, on l'augmente d'une façon importante, mais on s'est assurés que la moitié des gens qui participent au régime, qui ont moins de revenus, n'allaient pas voir leur contribution changer d'un demi-sou. Donc, pour la moitié des gens environ qui participent au régime, ça ne paraîtra pas, demain matin, les changements que nous apporterons. Pour l'autre partie, certains verront leur prime augmenter légèrement et d'autres d'une façon plus importante.

C'est une façon d'agir qui est responsable, M. le Président. Malheureusement, c'est un discours que l'opposition ne prône pas beaucoup, mais surtout c'est qu'elle ne le pratique pas. De façon complètement irresponsable et complètement incohérente, on veut une chose et son contraire. Je vais vous dire que cela ne mène nulle part. Cela fait perdre généralement la crédibilité des personnes qui tiennent un tel discours, et le risque qu'elles encourent, c'est de continuer à nous critiquer en proposant tout et rien à la fois mais en n'agissant jamais de façon responsable. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant sur cette motion de suspension des règles. Je reconnais la porte-parole de l'opposition officielle en matière de ressources naturelles et députée de Bonaventure. Mme la députée, la parole est à vous.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, aujourd'hui, le gouvernement péquiste a choisi encore une fois de bâillonner l'opposition pour passer en toute hâte, en toute vitesse, des projets de loi plutôt compromettants pour le gouvernement, et, je vais vous dire, comme députée qui est ici, à l'Assemblée nationale, depuis un an et demi, c'est la deuxième fois en un an et demi que le ministre des Ressources naturelles fait appel au bâillon pour faire adopter en toute vitesse des projets de loi.

On se souviendra tous du fameux projet de loi n° 42, la loi conservatoire, hein, Hertel–des Cantons, qui a fait couler beaucoup d'encre, et on a vu à quel point le gouvernement péquiste n'a pas hésité sur les moyens à prendre pour mépriser un groupe de citoyens qui ont eu le courage de livrer une bataille contre l'arrogance du gouvernement actuel. Deux fois, M. le Président, en un an et demi. Alors, j'ai en face de moi le ministre spécialiste des lois contestées et le spécialiste des bâillons. Bon, on comprendra, il est ministre des Ressources naturelles puis, en plus, il est le leader du gouvernement.

Alors, aujourd'hui, le gouvernement péquiste, avec le projet de loi sur la Régie de l'énergie, a choisi, donc, de faire taire l'opposition, a choisi de bâillonner ses propres militants, ses propres militants péquistes qui à plusieurs reprises ont demandé, ont interpellé le ministre des Ressources naturelles pour qu'il retire le projet de loi n° 116 qui, c'est important de le rappeler, est un projet de loi qui ampute d'une façon incroyable des pouvoirs importants à la Régie de l'énergie, un organisme, on doit se le rappeler, qui a été créé par le gouvernement péquiste en 1997 et pour lequel l'Assemblée nationale, l'opposition a donné son consentement pour qu'on puisse créer cette fameuse Régie tant attendue, une régie de l'énergie qui était demandée par l'ensemble des intervenants du domaine énergétique au Québec, une régie de l'énergie qui allait nous permettre – et c'est l'espoir qu'on formulait à cette époque-là – d'avoir un droit de regard transparent, un droit de regard indépendant sur toute la question de la tarification du domaine énergétique au Québec, notamment dans le secteur électrique.

Alors, aujourd'hui, le gouvernement péquiste a choisi la voie de la facilité. Le projet de loi n° 116, c'est un projet de loi d'importance. C'est un projet de loi d'importance non pas, bien sûr, par son contenu, mais par le fait que la Régie de l'énergie est un organisme par lequel et pour lequel les intervenants avaient un espoir que tout le domaine énergétique allait donc maintenant, au Québec, être géré d'une manière transparente et indépendante du Conseil exécutif et du gouvernement du Québec.

M. le Président, si j'étais députée péquiste aujourd'hui, je serais très inconfortable, et je vais vous dire pourquoi. Il y a le Comité national sur l'environnement et le développement durable qui a émis un communiqué le 26 mai dernier. De ce côté-ci de la Chambre, évidemment, on a fait lecture de ce communiqué d'importance, et le ministre s'est empressé, le ministre des Ressources naturelles, hein, de mépriser les initiateurs du communiqué, à l'époque, sans aucune gêne, en leur disant littéralement qu'ils faisaient fausse route en demandant au ministre, donc, de retirer son projet de loi.

Tout récemment, M. le Président, les 31 associations péquistes de Montréal ont demandé au ministre de retirer son projet de loi, et, si j'étais députée péquiste et ministre péquiste aujourd'hui, je serais très inconfortable parce que, sur 31 associations péquistes de Montréal, huit députés siègent ici, à l'Assemblée nationale, dont cinq ministres: la ministre de l'Emploi, la députée de Bourget; le ministre de la Solidarité sociale, le député de Gouin; la ministre des Affaires municipales, la députée d'Hochelaga-Maisonneuve; le ministre responsable de la relation avec les citoyens, le député de Mercier; la ministre responsable du dossier de la famille et de l'enfance, la députée de Pointe-aux-Trembles; l'ex-ministre du Revenu, la députée de Rosemont; le leader adjoint, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques; et, finalement, la députée de Crémazie. Tous ces gens-là sont représentants, donc, d'une association qui leur a signifié très clairement qu'elle n'était pas d'accord avec le projet de loi n° 116.

(17 heures)

Alors, comme à son habitude, le gouvernement a dit: Écoutez, vous avez complètement tort avec le projet de loi n° 116, c'est un bon projet de loi, et, nous, on y tient, et peu importe ce qui arrivera, nous, on fonce, c'est le bulldozer, et on bâillonne l'opposition, on bâillonne les militants péquistes et on bâillonne surtout, M. le Président, la Régie de l'énergie. Imaginez le sentiment qu'ont les régisseurs aujourd'hui à la Régie de l'énergie. Imaginez le sentiment que ces gens-là ont. On a plusieurs régisseurs qui ont accepté de relever le défi de construire et de bâtir cette nouvelle instance au Québec qui, en principe, devait nous garantir une grande transparence et une intégrité dans la gestion du domaine électrique au Québec. Ces gens-là ont investi de l'énergie et à chaque jour accomplissent leur travail avec beaucoup de conviction. Aujourd'hui, le gouvernement, en adoptant le projet de loi n° 116, leur dit: Écoutez, vos compétences, votre expertise, on n'en a pas besoin, c'est nous qui allons décider maintenant dans le domaine électrique, donc c'est nous qui allons prendre les décisions, et c'est très grave. C'est très grave, M. le Président, le fait qu'on bâillonne l'opposition. On bâillonne aussi les groupes, plusieurs groupes qui souhaitaient se faire entendre en commission, et ces groupes, ils ont participé en 1996 à un vaste exercice de consultation dans le domaine énergétique, un vaste exercice qui a débouché sur l'adoption de notre fameuse politique énergétique dont à peu près tous les députés en cette Chambre sont très fiers.

M. le Président, l'ex-ministre des Ressources naturelles, qui est aujourd'hui ministre des Transports, le député de Joliette, a donné beaucoup de crédibilité à l'exercice à l'époque. Il a donné beaucoup de crédibilité à l'exercice, pourquoi? Parce qu'il a fait confiance aux groupes qu'il a interpellés pour participer à l'exercice. Ces groupes, ils étaient d'à peu près tous les secteurs: les industriels, les environnementalistes, les écologistes, les organismes qui s'occupent quotidiennement de la défense des droits des consommateurs. Tous ces organismes-là ont consacré presque un an à échanger, à débattre sur leur vision, quelle était la vision de ces gens-là pour que le Québec puisse se doter d'une politique énergétique crédible et porteuse d'avenir.

Alors, ces gens-là ont fait confiance à la démarche, à ce moment-là, ont fait confiance au gouvernement péquiste, et je dois vous dire aujourd'hui que ces gens-là sont très amers, M. le Président, parce qu'on a leur a joué un sacré tour. On leur a promis, à l'époque, de créer une régie de l'énergie indépendante du pouvoir exécutif, indépendante du gouvernement. Ces gens-là ont accepté volontiers de participer à l'exercice et ont cautionné l'ex-ministre des Ressources naturelles à l'époque en lui donnant toute leur confiance, et aujourd'hui ces gens-là se sentent littéralement trompés.

Et il y a une chose qui est encore plus grave et qui témoigne du mécontentement qu'on retrouve au sein du caucus des députés du Parti québécois, M. le Président. De ce côté-ci de la Chambre, nous avons obtenu les notes qui sont préparées par le personnel de cabinet du ministre. Donc, nous avons obtenu ce qu'on appelle communément le «briefing book» du ministre. J'ai ça ici, là. Il y a 13 thèmes qui sont abordés. Alors, c'est donc vous dire que le caucus des députés péquistes est extrêmement inconfortable avec le projet de loi n° 116. C'est un cahier intéressant. Il a, quoi, une trentaine de pages, et toutes les réponses du ministre sont contenues dans ce fameux «briefing book». C'est intéressant parce qu'on connaît toutes les réponses du ministre. À toutes les questions que je lui ai posées jusqu'à maintenant en Chambre – effectivement, il a bien appris sa leçon – il se référait toujours à son cahier de notes.

Mais aujourd'hui le ministre s'est fait prendre au piège. À une question que je lui ai posée au niveau des exportations, de toute évidence, le ministre n'a pas compris quel était le sens de ma question. Et j'ai lu il y a quelques minutes évidemment un article qui va être publié demain dans La Presse , écrit par le journaliste Pierre April qu'on connaît tous, et il rapporte, dans le fond... Je demandais au ministre, M. le Président, je l'interpellais ce matin sur les coûts de production d'Hydro-Québec qui se retrouvent bien sûr dans le fameux rapport à partir duquel le ministre s'est inspiré pour élaborer le projet de loi n° 116 qui ampute à la Régie de l'énergie des pouvoirs importants. Je lui disais: Écoutez, M. le ministre, c'est aberrant, dans le rapport, on constate que les coûts de production pour le marché québécois versus le marché américain sont deux fois plus élevés pour le marché québécois, ce qui est totalement inadmissible. Un coût de production, ça demeure un coût de production. Quand c'est turbiné, là, quand on est au barrage, c'est le même coût de production, qu'on soit ici, au Québec, ou qu'on soit sur le marché américain.

Alors, le ministre évidemment s'est référé à son cahier qu'on a ici, M. le Président, pour répondre, mais, de toute évidence, il n'a pas compris. Je lui parle de coût de production, et le ministre nous répond en nous disant la chose suivante: Quand on vend notre électricité évidemment aux Américains et aux Ontariens, on la vend plus cher, notre électricité. Mais là le ministre n'a pas compris. Lui, il me parle de prix; moi, je lui parle de coût de production. Le ministre a tenté de ne pas répondre à la question, mais ça signifie, une réponse comme celle-là, que le ministre ne comprend absolument pas les enjeux qui sous-tendent l'adoption d'un projet de loi comme celui-là, le projet de loi n° 116.

Tout à l'heure, je faisais référence, M. le Président, aux militants péquistes qui sont absolument scandalisés de l'attitude actuelle de leur gouvernement, et je peux vous dire qu'au prochain Conseil national du PQ ça va brasser. Ça va brasser parce qu'il y en a qui en ont gros sur le coeur à l'heure actuelle. Il y en a qui en ont gros sur le coeur.

Et le Conseil régional du Parti québécois de Montréal–Ville-Marie, dans un communiqué qu'il a émis récemment, le 13 juin, a pris la peine de démolir un à un les arguments du ministre des Ressources naturelles. Il a pris la peine de démolir les arguments du ministre parce que, lorsqu'on regarde la couverture médiatique et tout le tollé de protestations qu'a suscité le dépôt du projet de loi n° 116 du ministre des Ressources naturelles, ce qu'on constate, M. le Président, c'est que le ministre est complètement seul à livrer la bataille pour justifier la pertinence et la nécessité d'adopter le projet de loi n° 116. Il est seul, il tente de s'autoconvaincre, mais, malheureusement, ses arguments ne portent pas parce que nous avons de sérieux doutes sur les objectifs, les intentions que poursuit le ministre des Ressources naturelles. Et il y a des joueurs qui sont importants dans ce projet de loi là: le premier ministre, le ministre des Finances et le président d'Hydro-Québec, le nouveau triumvirat, les trois hommes forts qui dorénavant vont décider des tarifs qui seront consentis aux consommateurs d'électricité du Québec.

Pendant que le ministre des Ressources naturelles se pète les bretelles comme quoi les consommateurs bénéficient d'un gel de tarifs jusqu'en 2004, M. le Président, il y a d'autres groupes très crédibles qui ont fait la démonstration que, comme consommateurs, nous pourrions bénéficier d'une baisse de tarifs allant jusqu'à 10 %. Vous et moi, pendant ce temps-là, on paie, on paie Hydro-Québec. Hydro-Québec empoche des profits. On n'est pas contre les profits, mais le problème, c'est: Où ça va s'arrêter? Et, comme consommateurs, on nous impose une autre taxe déguisée. Une autre taxe!

Si la Régie de l'énergie pouvait faire sont travail correctement, elle déterminerait quel est effectivement le taux de rendement acceptable pour Hydro-Québec. Ce ne serait plus au ministre des Finances. Et vous savez comme moi que l'appétit vorace du ministre des Finances n'augure pas très bien pour l'ensemble des consommateurs d'électricité au Québec. Je vous garantis que le débat qui nous occupe aujourd'hui va revenir sur le plancher. C'est un débat qui va continuer parce qu'il y a des groupes au Québec qui sont animés d'une ferme conviction à l'effet que le ministre des Ressources naturelles prend la mauvaise direction, que le ministre y va d'un projet de loi avec une gestion à court terme, une vision à court terme.

Le choix que son gouvernement et que lui, le premier ministre et le ministre des Finances font aujourd'hui, bien sûr, c'est un projet de loi qui, premièrement, donne une très grande satisfaction à Hydro-Québec, laisse tout le champ libre à Hydro-Québec pour faire à peu près ce que la société d'État veut, M. le Président. Mais, nous, ce dont a besoin, c'est d'un processus transparent dans lequel toute la population est impliquée aujourd'hui. Et, je vous dis, le choix qui est fait aujourd'hui va coûter cher aux consommateurs d'électricité au Québec. C'est un choix qui va nous coûter très, très cher.

Il y a des groupes qui ont entamé une bataille, qui vont poursuivre la bataille. Je ne serais pas surprise de voir le projet de loi n° 116, tout comme le projet de loi n° 42, se retrouver encore une fois devant les tribunaux, ce qui me laisse croire que j'ai devant moi le ministre des Ressources naturelles, un ministre qui est devenu le spécialiste des lois contestées, un ministre spécialiste des lois contestées parce qu'il fait les mauvais choix, M. le Président. Ce n'est pas normal que des organismes aussi crédibles que le Barreau du Québec, qui, je vous le rappelle, a émis un avis aussi dans le cadre de projet de loi n° 42, mettent en garde le ministre. Mais, encore une fois, même le Barreau du Québec n'a pas raison, l'opposition n'a pas raison, les militants péquistes n'ont pas raison. Il n'y a personne qui a raison lorsqu'on regarde la façon de faire du gouvernement péquiste.

(17 h 10)

Alors, M. le Président, je suis très déçue évidemment que le ministre choisisse la voix de la fermeté, que le ministre des Ressources naturelles, avec l'expérience qu'il a comme parlementaire, ne donne pas une tribune à tous les groupes pour s'exprimer. Ça aurait été quoi de prendre quelques jours pour qu'on puisse permettre à des groupes de se faire entendre là-dessus? Le ministre aurait pu s'inspirer des suggestions de ces groupes pour peut-être amender son projet de loi. Le ministre a eu une commande. La commande, elle lui est venue du premier ministre qui est en lien direct avec le président d'Hydro-Québec. Le ministre a fait des choix, livre une commande qui lui a été passée par le ministre des Finances, c'est clair. Le ministre des Finances vous a dit quoi dernièrement? On veut faire d'Hydro-Québec la nouvelle machine à imprimer de l'argent du gouvernement, ça, c'est clair.

Alors, le ministre des Ressources naturelles aujourd'hui, sur la base de ses responsabilités, devrait s'interroger un peu plus, et je peux vous dire, M. le Président, que ce n'est sûrement pas le ministre des Ressources naturelles qui va passer à l'histoire pour un ministre visionnaire; au contraire, les décisions qu'il prend aujourd'hui seront préjudiciables pour l'ensemble des consommateurs d'électricité au Québec. Et, contrairement à Robert Bourassa qui était un très grand premier ministre auquel évidemment le ministre des Ressources naturelles fait souvent référence, contrairement à Robert Bourassa qui a fait les bons choix à une certaine époque, nous nous souviendrons d'un ministre des Ressources naturelles qui a préféré s'écraser devant le premier ministre, devant le ministre des Finances et devant le président d'Hydro-Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant sur cette motion de suspension des règles. Alors, M. le député de Vaudreuil, la parole est à vous.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, encore une fois, le gouvernement fait adopter une motion de suspension des règles parlementaires pour faire passer cinq projets de loi sous ce qu'on appelle le «bâillon», et des projets de loi qui vont affecter de façon importante la vie des citoyens et également la santé des citoyens.

Quelques commentaires sur les deux projets de loi dans le domaine des affaires municipales, d'abord le projet de loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, le projet de loi n° 134, qui encore une fois, vous savez, a été improvisé – on est arrivé en commission parlementaire avec une foule de modifications – et projet de loi également où la ministre a décidé de ne pas tenir compte de l'opinion exprimée par des citoyens. On se rappellera les consultations qui ont été tenues dans la couronne nord, M. le Président, et également dans ma propre région, dans la municipalité régionale de comté de Vaudreuil-Soulanges, où les citoyens de plusieurs municipalités se sont exprimés avec un fort pourcentage de votes contre l'adhésion à la Communauté métropolitaine de Montréal dans le contexte qui était proposé, et la ministre, évidemment, du revers de la main, va rejeter cette expression d'opinion de la part des citoyens, d'autant plus, vous savez, que le territoire de la MRC de Vaudreuil-Soulanges serait couvert en partie par la Communauté métropolitaine et qu'une autre partie ne serait pas couverte. Comment ça va fonctionner, M. le Président? On ne le sait pas. Donc, les citoyens de la région ont exprimé de façon très forte leur opinion pour dire: Écoutez, dans ces circonstances-là, on ne veut pas être inclus dans la Communauté métropolitaine de Montréal. Mais, si je comprends, la ministre fait fi de ces expressions d'opinion.

On peut dire la même chose, M. le Président, sur le projet de loi n° 124 qui est un projet de loi pour forcer les fusions de municipalités, projet de loi où encore une fois on vient mettre de côté la démocratie et bafouer l'expression d'opinion des citoyens. Les citoyens, on les juge assez matures, capables de réflexion, vous savez, pour voter aux élections provinciales, voter aux élections fédérales, mais, lorsque vient le temps de décider du sort de leur municipalité, du sort du territoire où ces citoyens-là ont choisi d'aller vivre avec leur famille et leurs enfants, on leur dit: Non, là, dites ce que vous voulez, le gouvernement, lui, va décider, va choisir ce qui est le bien commun pour vous autres. C'est tout à fait incroyable d'avoir une telle conception de la démocratie municipale et surtout du rôle que jouent les élus municipaux, les maires, les conseillers et sans tenir compte des impacts que ça pourrait avoir sur les citoyens.

Vous savez, on a justifié, au point de départ, les fusions au municipal en disant: Ça coûte moins cher. Et, lorsque beaucoup d'études, beaucoup d'analyses ont été publiées, indiquant que, non, ce n'était pas vrai, là, maintenant, on a dit: Il y a trop de municipalités au Québec. M. le Président, il n'y a pas de fil conducteur dans ce raisonnement, et on vient mettre de côté, bafouer la démocratie au niveau municipal, et on ne tient pas compte de l'impact, d'abord, que ça peut avoir sur les citoyens. Je pense que c'est ça, lorsqu'on prend des décisions, lorsqu'on légifère, ce que ça va donner aux citoyens.

M. le Président, je voudrais vous parler de façon plus spécifique de deux projets dans le secteur des affaires sociales, soit, d'abord, le projet de loi n° 117 qui vient doubler, augmenter de 100 % les primes d'assurance médicaments pour les faire passer de 175 $ par année à 350 $ par année et, deuxièmement, qui vient inclure dans la loi un mécanisme d'indexation automatique annuelle de la prime sans savoir selon quels critères cela sera fait. Ce sera déterminé par règlement encore une fois du gouvernement, et on ne sait pas comment, sur quelle base ce sera fait pour les prochaines années. Donc, 100 % d'augmentation dans une seule année, et, après ça, annuellement, d'autres augmentations. Donc, peut-être que, au 1er janvier 2001, la prime sera rendue à 400 $.

La ministre nous disait tout à l'heure: Vous savez, c'est un bon régime. On va simplement se rappeler que ce régime-là a été mis en place en 1996 en disant: C'est une mesure d'ordre social, alors que, fondamentalement, c'était pour aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables pour encore une fois atteindre le déficit zéro qui était, rappelons-nous, une condition gagnante à ce moment-là. Donc, depuis 1996, le gouvernement est allé chercher dans les poches des personnes âgées près de 900 millions. Donc, près de 900 millions, M. le Président. Individuellement, la moyenne individuelle que payait une personne âgée avant 1996 pour ses médicaments, c'était 50 $. Aujourd'hui, la moyenne que paie une personne âgée pour ses médicaments, c'est 300 $, donc, une augmentation de 600 %. Avant 1996, rappelons-nous, une personne âgée ne payait qu'un maximum de 100 $ par année – 2 $ par prescription, avec un maximum de 100 $ par année – et maintenant les personnes qui sont couvertes par le régime commencent à payer des franchises, une coassurance et des primes à partir d'un revenu de 10 860 $. Est-ce que la ministre considère que c'est un revenu important, 10 860 $?

Je voudrais simplement vous donner un exemple: une personne âgée qui a un revenu fixe, des rentes de retraite – vous en avez dans votre comté, M. le Président – de 15 235 $ annuellement et le revenu, pas le revenu imposable, ce qu'elle reçoit comme une rente, avant 1996, elle payait 100 $ maximum par année pour ses médicaments; aujourd'hui, elle paie jusqu'à 925 $ par année. Donc, 100 $ avant 1996, jusqu'à 925 $ aujourd'hui. Une personne avec un revenu de 18 360 $ – il faut le faire! – encore un revenu fixe, une personne âgée, payait 100 $ avant 1996, paie jusqu'à 925 $ actuellement et, avec la nouvelle loi, cette personne-là va payer jusqu'à 1 100 $ par année. Donc, en l'espace de quatre ans, une personne pouvait payer jusqu'à un maximum de 100 $, et maintenant 1 100 $ par année avec un revenu de 18 860 $.

M. le Président, je pense que c'est un projet de loi qui est uniquement financier. Le seul objectif, encore une fois, c'est d'aller chercher de l'argent dans les poches du monde, surtout dans les poches des personnes âgées, des plus démunis, pour les fins du ministre des Finances. Les groupes qui sont venus devant la commission parlementaire des affaires sociales – il y a beaucoup de groupes qui sont venus au mois de février – ont indiqué qu'il y avait des ajustements à faire au régime parce que, le régime, son application, ça a été un fiasco, en 1996. Il a fallu attendre un rapport du Dr Tamblyn en 1999 pour dire que des gens devaient choisir entre payer leur loyer puis acheter leurs médicaments pour que le gouvernement décide de rendre gratuits pour une certaine partie des assistés sociaux les médicaments. Et le rapport Tamblyn dit: Même avec ça, ça ne règle pas le problème, il y a encore des gens et beaucoup de personnes âgées qui se privent, qui doivent se priver de médicaments essentiels et qui font des visites médicales, qui retournent à l'hôpital, qui rentrent aux urgences. On fait supporter aux plus démunis et aux personnes âgées qui ont des revenus, vous le savez comme moi, qui ne sont pas très élevés un coût des compressions gouvernementales et on dit: Bien, on va aller chercher de l'argent dans vos poches puis on va donner ça au ministre des Finances.

M. le Président, simplement un dernier point là-dessus, c'est la Coalition sur l'assurance médicaments, qui représente 200 groupes qui oeuvrent dans des milieux comme les personnes âgées, les personnes les plus démunies, les gens en santé mentale, avec la désinstitutionnalisation, qui nous dit: Le projet de loi n° 117 augmentera les primes d'une façon très importante pour des centaines de milliers de personnes à faibles et moyens revenus. Ce n'est pas l'opposition officielle qui dit ça, c'est des gens qui à chaque jour travaillent avec des personnes âgées et les plus démunis. Il s'agit là d'une mesure appauvrissante pour des personnes qui ont déjà de la difficulté à boucler leurs fins de mois. Voilà pourquoi on ne peut accepter un tel projet de loi.

(17 h 20)

D'ailleurs, vous savez, la ministre met le bâillon pour ce projet de loi alors que, en commission parlementaire, on a discuté de ce projet de loi uniquement pendant 2,32 heures. On en a discuté pendant 2,32 heures seulement, et là on dit: Bien, écoutez, on a assez discuté. Les gens nous disent qu'on ne devrait pas le faire, on va le mettre dans le bâillon et on va le passer par la force de la majorité gouvernementale.

M. le Président, sur le projet de loi n° 107, projet de loi antidéficit qui est en train de devenir le projet de loi antiservices, la ministre nous dit: Écoutez, les déficits des hôpitaux, il ne faut plus qu'ils en fassent, c'est comme le gouvernement. Je voudrais seulement lui rappeler, si elle ne le sait pas, qu'il y a une différence fondamentale entre les revenus du gouvernement et les revenus des hôpitaux puis des autres établissements de la santé: le gouvernement lève des taxes, il peut aller chercher des revenus. D'ailleurs, il y a des exceptions qui sont prévues à la loi sur les déficits gouvernementaux, où le gouvernement, dans certaines circonstances, s'il arrivait un désastre, par exemple, pourrait justement faire un déficit, et ça ne va pas à l'encontre de la loi. Dans le cas des hôpitaux, les seuls revenus qu'ils ont, ce sont les crédits qui leur sont alloués par le ministre des Finances puis par la ministre de la Santé. Ils n'ont pas d'autres revenus. Donc, d'un côté, la ministre de la Santé dit: On vous donne tel budget, arrangez-vous avec ça, vous n'avez pas d'autres revenus. Si votre volume augmente, si vous avez plus de cas à l'urgence, bien... Écoutez, ne faites pas de déficit.

M. le Président, les déficits dans les établissements hospitaliers ont commencé quand le gouvernement a commencé à couper, en 1996 et 1997, 2,4 milliards dans le réseau de la santé – c'est ça, les coupures, plus que partout ailleurs au Canada – de sorte que maintenant le Québec est la province où l'on dépense le moins en santé. En 1999, les provinces canadiennes ont investi en moyenne 2 815 $ par habitant dans la santé; le Québec, à peine 2 453 $. C'est une différence importante par habitant. Donc, malgré ça, vous savez, on dit: Bien, les hôpitaux ne feront pas de déficit. La ministre nous dit: C'est la faute, dans le fond, des administrateurs. Ne faites pas de déficit. Or, si on regarde les gestes qui ont été posés par le gouvernement depuis les trois, quatre dernières années, en plus des coupures majeures, on a mis du monde à la retraite, on a mis près de 1 500 médecins à la retraite, on a payé jusqu'à 300 000 $ individuellement par médecin pour dire: Allez-vous-en, prenez votre retraite, quittez la profession, cessez de soigner les malades. Bien, c'est rendu qu'il y a une pénurie de médecins partout dans la province, et maintenant, là, l'hôpital de Sorel devra fermer son département d'obstétrique le 1er juillet s'il ne réussit pas à recruter un gynécologue obstétricien. On a payé 300 000 $ individuellement pour mettre des spécialistes à la retraite. Maintenant, on en manque puis on devra fermer des départements d'obstétrique.

Les infirmières, parlons-en, des infirmières, 4 000 infirmières à la retraite tout d'un coup. Et là, l'année précédente, la ministre, qui était ministre de l'Éducation, avait restreint les entrées au cégep dans les disciplines infirmières. Cette année, la plus petite cohorte de diplômées infirmières depuis 20 ans au Québec. Bien, évidemment, on en manque partout. On devra fermer 1 250 lits à Montréal pour l'été; on en avait fermé à peu près 700 l'an dernier. À Québec, c'est la même chose, c'est la même chose dans les autres régions. Les patients et les malades vont vivre un été d'enfer, M. le Président.

Vous savez, le Dr Lamontagne, le président du Collège des médecins – ce n'est pas l'opposition officielle qui le dit – il dit: Mettre à la retraite des milliers d'employés, de médecins, de techniciens, d'infirmières d'expérience, ce fut la pire erreur. Les politiciens ont toujours une vision de courte vue. Aujourd'hui et pendant plusieurs années, on en paiera le prix dans le réseau québécois de la santé. M. le Président, on a massacré le réseau. Quand la ministre nous disait tantôt: Vous savez, l'administration publique, lorsque nous avons pris le pouvoir, c'était un gâchis, bien, présentement, le secteur de la santé, c'est un gâchis, et ce sont les patients, les malades et les personnes âgées qui en font les frais.

Les urgences. Vous savez, déjà on est rendu, dans la région de Montréal, avec des taux à l'urgence qui dépassent de 180 %; 200 % hier à Montréal dans les urgences. Nous connaissons une situation qui correspond normalement aux pires pointes hivernales. Mais, écoutez, avec la loi antidéficit, qu'est-ce que vont faire les dirigeants hospitaliers? Est-ce qu'ils vont dire: On ferme la porte à l'urgence, arrêtez, n'entrez plus parce qu'on va faire un déficit?

M. le Président, hier, j'ai posé la question à la ministre qui a dit: Écoutez, les urgences, oui, je travaille avec mes partenaires, je fais de la formation, c'est important, il faut faire de la formation. Mais qu'est-ce qui va se passer cet été pour les gens qui ont besoin d'aller à l'urgence? La ministre nous dit: On a augmenté les bases budgétaires des hôpitaux, des autres établissements. Bien, elle est la seule à dire ça. Tous les intervenants dans le réseau de la santé, que ce soient les hôpitaux, les CLSC, les médecins, les professionnels de la santé, disent: Il n'y a pas eu de rehaussement réel des bases budgétaires. La ministre est la seule encore à maintenir ce discours-là, et on le voit par les budgets que les hôpitaux adoptent présentement un peu partout dans les régions où, malgré ce que nous dit la ministre, pour maintenir les services, on n'a pas d'autre choix que d'avoir un budget qui n'est pas équilibré, autrement nous allons être obligés de couper dans les services.

Hier – simplement quelques exemples – Sainte-Justine, 10 millions, et aujourd'hui ce sont les médecins à Sainte-Justine qui demandent: Devrons-nous transférer nos petits patients hors du Québec pour satisfaire les exigences comptables du gouvernement? Est-ce que nous en sommes rendus là dans notre réseau de la santé? Est-ce que nous en sommes rendus à transférer nos enfants à l'extérieur du Québec parce qu'on doit respecter une loi antidéficit? Dans d'autres cas, à Québec, le centre hospitalier affilié L'Enfant-Jésus dit: Les salles d'urgence débordent, du jamais vu. Qu'est-ce qu'on va faire? On ne le sait pas. Donc, la ministre continue de dire: Ce n'est pas grave, nous allons appliquer une loi antidéficit. Et tantôt elle a dit: On a passé cette loi-là pour aider les établissements, comme si, vous savez, ça devait se légiférer, ça, la collaboration entre le ministère de la Santé, et les établissements hospitaliers, et les autres établissements de santé.

M. le Président, tous les intervenants, depuis une semaine, confirment ce que nous avions dit au début, c'est que ça ne marche pas. Ils demandent à la ministre de reporter l'adoption du projet de loi. Ils disent: Mme la ministre, vous nous dites que vous allez revoir les bases budgétaires, que vous créez un comité pour ça. Ça ne s'applique pas cette année, ça pourra s'appliquer pour l'an prochain. Cette année, il manque au moins 200 millions si on veut continuer de donner les services aux patients et aux malades. L'Association des hôpitaux dit: Mme la ministre, s'il vous plaît, retardez l'adoption de votre projet de loi d'au moins un an. C'est la même chose pour l'Association des CLSC, c'est la même chose pour les trois fédérations de médecins au Québec qui demandent de retarder l'adoption de ce projet de loi là parce qu'il aura des effets pervers vis-à-vis les gens, les patients, les malades et les personnes âgées également, tout ceci au moment où la ministre, dans un grand souci de cohérence, dit-elle, va nous annoncer la composition d'une commission pour analyser, revoir l'orientation de notre système de santé au Québec et, entre autres, le financement. Bien, s'il y a de l'incohérence, c'est bien ça, de dire: On adopte à toute vapeur, on passe le rouleau compresseur pour adopter un projet de loi antidéficit qui ne fonctionnera pas, où les malades et les patients, vous savez, vont en faire les frais, vont être pénalisés, les personnes âgées, puis en même temps on dit: Bien oui, mais on va créer une commission qui va regarder tout ça.

S'il y avait de la logique et de la cohérence, on attendrait, pour passer un tel projet de loi, de revoir tout le financement comme le demandent les intervenants. Je veux dire, on fait ça avant de créer une commission qui va revoir les modalités de financement, parce que, autrement, ce sont les patients, les malades, les personnes âgées qui vont voir couper les services, et je pense que, la santé, chacun y tient, et on doit continuer de maintenir ces services-là pour assurer la qualité de vie à notre population. Merci, M. le Président.

(17 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, il reste à la formation de l'opposition sept minutes, incluant le temps du député indépendant, et à la formation ministérielle 17 min 30 s. Alors, si vous voulez poursuivre, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Dans un geste théâtral qui lui est habituel, le député de Hull a fermé le code de procédure et les règlements de l'Assemblée nationale prétendant que notre règlement était bafoué. Je l'invite au contraire à ouvrir ce règlement à l'article 182 qui prévoit la suspension de certaines règles. Si c'est dans notre règlement, cette motion de suspension des règles, c'est parce que cela fait aussi partie de ce qui est considéré comme parlementaire. Or, cela fait 19 ans que je siège à l'Assemblée nationale du Québec, donc deux fois des fins de session à chaque année, hiver et été, c'est donc à 38 fins de session auxquelles j'ai participé, et je comprends que, à chaque fin de session, il y a eu une motion de suspension des règles, que je sois d'un côté ou l'autre de l'Assemblée nationale. Pourquoi? Pour une raison très simple. C'est qu'il en est ainsi, l'opposition peut décider qu'elle va utiliser tous les moyens à sa disposition, y compris des mesures dilatoires, pour tenter de faire dérailler les réformes que le gouvernement veut réaliser ou encore empêcher les décisions que le gouvernement peut prendre. Et, à l'inverse, le gouvernement a à sa disposition l'article 182 du règlement pour justement s'assurer que les décisions se prennent.

Et je crois, M. le Président, que, en l'occurrence, à l'égard de ces cinq projets de loi qui font l'objet de cette motion de suspension des règles, il est évident que l'opposition a cherché à bloquer ces législations. Évidemment, la tactique consiste parfois à ralentir toutes les étapes d'un projet de loi qui n'est pas nécessairement litigieux, controversé ou qui n'est pas nécessairement refusé par l'opposition, mais c'est une façon en amont, si vous voulez, d'empêcher que des projets de loi auxquels tient le gouvernement puissent être adoptés.

Je crois qu'il en est ainsi notamment à l'égard du projet de loi n° 134 créant la Communauté métropolitaine de Montréal, puisque l'opposition, me direz-vous, a voté en faveur de ce projet de loi en deuxième lecture, mais cependant, M. le Président, la tactique utilisée, le temps qui a été retenu, l'était, je pense, essentiellement pour empêcher aussi l'adoption du projet de loi n° 124 qui réunit les conditions pour favoriser les regroupements de municipalités au Québec.

Pourquoi, M. le Président? Parfois, l'explication très simple, c'est que l'opposition, ayant été incapable de bouger pendant les neuf années où elle a été au gouvernement sur ces questions où pourtant l'opinion publique québécoise juge nécessaire de faire une réforme en profondeur... Je n'ai pas à rappeler, dans le peu de temps qui m'est imparti, que nous vivons en l'an 2000 avec le même niveau d'organisation que nous avions il y a à peu près 50 ans. Alors que, au niveau scolaire, nous sommes passés de 1 500 commissions scolaires à 72, nous avons toujours un record inégalé du nombre de municipalités au Québec, un peu plus de 1 300 municipalités, quand on compare avec notre voisin ontarien qui, avec 4 000 000 de population de plus, en compte trois fois moins, puisque, en Ontario, on retrouve autour de 580 municipalités seulement.

Alors, M. le Président, il faut, oui, une vraie réforme municipale, et je dois tout de suite, en entrée de jeu, vous indiquer qu'elle n'est pas improvisée. Elle est loin d'être improvisée. Pour vous dire la vérité, vous ne me verriez pas si j'additionnais devant moi toutes les études, les rapports qui, au fil des dernières années, les 10 dernières années, se sont accumulés pour justement nous indiquer à quel point cette réforme était nécessaire.

Pensez au groupe de travail mis en place par le ministre des Affaires municipales, M. Ryan, du gouvernement précédent, un groupe de travail dont le président, M. Pichette, est venu en commission parlementaire le 25 mai dernier pour nous dire: Osez maintenant. Ça a été ça, son message. Il était accompagné des membres de ce groupe de travail mis en place le 2 avril 1992 et qui a remis son rapport en décembre 1993. Et ils nous ont dit: Osez maintenant, et en évoquant d'ailleurs un proverbe chinois qui dit que le premier pas, c'est la moitié du chemin. Alors, ils nous ont dit: Faites ce premier pas, de grâce. Alors, le GTMR, Groupe de travail Montréal et sa région, mis en place par le gouvernement précédent, avait tenu 58 séances de travail, reçu 200 personnes lors de ces consultations et rendu ce rapport en janvier 1993. Suite à quoi le ministre des Affaires municipales créait une table des élus municipaux sur laquelle siégeaient 21 élus, dont les 12 préfets et les maires des trois principales villes. Et tout cela a accouché du statu quo, de l'immobilisme, de rien du tout.

Et, M. le Président, suite à quoi d'autres consultations eurent lieu, et je fais référence ici aux travaux qui ont été réalisés par mes prédécesseurs, l'actuel ministre de la Sécurité publique et le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. M. le ministre de la Sécurité publique, en septembre 1996, réunissait plusieurs leaders et lançait un document de consultation intitulé Vers une commission de développement de la Métropole , ensuite présidait un grand forum de consultation: 700 personnes issues de différents milieux métropolitains y ont assisté, 87 mémoires ont été soumis. Et je remercie à la fois l'actuel ministre de la Sécurité publique, comme le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration, comme le ministre des Affaires municipales qui m'ont précédée parce que les travaux qu'ils ont réalisés ont inspiré la réforme qui est maintenant en voie de réalisation. Et c'est parce que justement... Et je cite aussi, évidemment, les travaux réalisés par mon prédécesseur aux Affaires municipales, l'actuel ministre de l'Agriculture, qui avait mis en route le volet I de la Politique de consolidation des communautés locales s'adressant à 406 villages, paroisses et cantons du Québec.

M. le Président, c'est grâce à toutes ces initiatives que j'ai pu, en un temps relativement bref... Quand on pense que, de plus, le gouvernement avait créé la Commission sur les finances et la fiscalité locales, présidée par M. Denis Bédard, appelée communément le rapport Bédard, qui remettait un rapport il y a un an, après avoir également consulté des personnes, des organismes, des individus, reçu 118 mémoires et entendu en audiences 100 experts et organismes. Est-il nécessaire d'en ajouter?

M. le Président, le temps est à l'action. Il faut oser maintenant agir. Et c'est ce que le gouvernement a annoncé le 3 mars dernier en ouvrant le plan de match en cinq phases: la première phase étant l'annonce de la création de trois communautés métropolitaines dans les régions de Montréal, Québec et Hull; la deuxième phase étant la publication du livre blanc, le 25 avril dernier, sur les grandes orientations du gouvernement pour renforcer le Québec urbain sur tout le territoire du Québec; la troisième phase annoncée étant celle du dépôt de législations, projet de loi n° 134, projet de loi n° 124 et la mise en place de comités d'élus sur les territoires métropolitains. Accompagnés de mandataires – MM. Bernard à Montréal, Grégoire à Hull et Lapointe à Québec – ces comités d'élus doivent, pour le 30 juin, faire rapport sur les équipements, activités et services à portée métropolitaine qui doivent être partagés, et, le 30 septembre prochain ou plus tôt si tant est que leurs travaux se terminent plus tôt, faire rapport sur les regroupements souhaitables sur les territoires métropolitains. Alors, voilà, M. le Président.

(17 h 40)

Et l'opposition, depuis le 24 mai dernier, a clairement indiqué ses couleurs par une motion déposée le mercredi 24 mai dernier par laquelle elle exigeait, en fait, que l'on mette de côté ces interventions que nous faisons maintenant. Alors, voilà. Pourquoi y a-t-il nécessité maintenant? D'abord, parce que est-il nécessaire de rappeler à nouveau à quel point ces questions ont été très longuement mûries, réfléchies, discutées, étudiées et parce que, aussi, M. le Président, dans le milieu, il y a beaucoup d'intervenants qui attendent presque désespérément qu'enfin les outils leur soient donnés pour renforcer leur collectivité.

Et je voudrais immédiatement d'abord citer mon prédécesseur aux Affaires municipales, M. Ryan, qui, dans une allocution prononcée le 13 mai dernier, disait ceci: «Toutes les commissions, tous les groupes d'étude qui se sont penchés sur la situation des municipalités depuis un quart de siècle ont été unanimes à conclure que nous avons trop de municipalités au Québec. Par respect pour l'importance que revêtent les institutions municipales dans notre vie démocratique, il fallait d'abord tenter de résoudre ce problème en faisant appel à l'initiative des municipalités elles-mêmes, et c'est ce qu'ont fait tous les gouvernements jusqu'à ce jour, y compris celui dont j'ai fait partie. Les municipalités furent cependant prévenues, à diverses reprises, qu'en l'absence de résultats satisfaisants il faudrait envisager le recours à des moyens plus énergiques. La méthode incitative a malheureusement fait la preuve de ses limites. Les choses évoluent désormais trop vite pour que le Québec puisse s'en remettre entièrement autant à la bonne volonté des intéressés pour ramener le nombre des municipalités à un niveau plus réaliste.»

Alors, M. le Président, voilà l'opinion d'une personne qui a occupé le siège que j'occupe maintenant. Mais mon intention, c'est de ne pas avoir de regrets quand, moi, je quitterai la responsabilité que j'occupe présentement. Mon intention, c'est de faire en sorte que je ne renonce pas à cette tâche qui n'est pas facile, j'en conviens, mais qui est essentielle et qui consiste à faire en sorte que notre organisation municipale soit à la hauteur des défis de l'époque dans laquelle nous sommes. Nous sommes organisés comme il y a 50 ans, avant que la Révolution tranquille ne nous rattrape.

Et je voudrais vous lire simplement des extraits de deux lettres que je recevais aujourd'hui même, soit celle du maire de la ville de Saint-Georges, dans la région de Beauce... Alors, le maire écrivait ceci, et je pense que cela sera publié dans les grands quotidiens du Québec incessamment, et je cite: «Dans quelques jours, le législateur québécois devra faire un choix historique pour le développement du Québec et l'espoir à donner aux jeunes dans l'équité ou de permettre que perdurent en ces matières l'évasion des responsabilités, le maintien de privilèges ou le parasitisme chronique, il devra légiférer sur l'organisation municipale. Nous ne pouvons qu'espérer, ajoute-t-il, que les députés légitimement élus et mandataires des Québécois aient, de part et d'autre de la Chambre, le courage de la vision qu'obligent les responsabilités qu'elles et ils ont estimé être capables d'assumer.» Il continue: «Qui dira oui à la question tordue: Voulez-vous payer plus de taxes? Ou à celle-ci: Voulez-vous abandonner vos privilèges fiscaux au nom de la justice et de l'équité, par surcroît sans disposer de l'essentielle information?»

M. le Président, dans le même sens, je recevais également une lettre adressée en copie au porte-parole de l'opposition en matière d'affaires municipales, et cette lettre dit ceci: «Demandez à une organisation si elle veut disparaître entraîne inévitablement une résistance qui est, à bien des égards, compréhensible, mais, eu égard aux nécessaires changements que nous impose la réalité, cette résistance est nuisible à l'intérêt général. Il y a des moments dans l'histoire d'une collectivité où l'intérêt général doit transcender les intérêts partisans et les intérêts individuels. Nous sommes, je crois, à un de ces moments. Il serait tellement plus facile de continuer dans les sentiers battus, dans ce qui est connu, mais c'est impossible. Je souhaite que le plus grand nombre acceptera d'envisager des changements avec la seule préoccupation de mieux servir celles et ceux que nous prétendons représenter.» Et c'était signé du maire de Mont-Laurier.

Alors, vous voyez bien, M. le Président... Et je terminerai, puisque vous m'indiquez qu'il y a trop peu de temps à ma disposition. J'avais évidemment des déclarations du maire de Sherbrooke, du maire de Hull. Alors, le maire de Sherbrooke qui, en commission parlementaire, est venu appuyer le projet de loi n° 124 et le maire de Hull qui disait ceci: «Le gouvernement a toujours eu le pouvoir de forcer des fusions. De fait, les gouvernements qui se sont succédé, notamment en 1975, ont utilisé cette prérogative et ont forcé la fusion de plusieurs municipalités. Nous applaudissons ce projet de loi parce qu'il confère au gouvernement les moyens nécessaires pour initier les regroupements, forcer la discussion, amener les municipalités à partager leurs idées, partager les richesses qui sont contenues dans chacune de leurs entités respectives. Ce projet de loi dresse la table pour que nous puissions faire en sorte de partager nos ressources, nos expertises, notre potentiel pour définir la ville de demain. Agissons. Nous considérons qu'il y a urgence d'agir parce que nous considérons que le débat a assez attendu.» Est-ce assez suffisant, M. le Président? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, je cède la parole au whip en chef de l'opposition, lui indiquant qu'il lui reste 7 min 45 s.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. La ministre vient de faire état de ce qu'il y a de plus beau dans les doubles discours en se plaignant qu'elle n'avait pas assez de temps alors que c'est elle-même et le gouvernement qui décident de passer un bâillon pour nous empêcher justement de discourir et de présenter des arguments. Je dirais que c'est la marque de commerce de ce gouvernement dirigé par le premier ministre actuel, premier ministre, M. le Président, qui se fait fort à chaque jour de plaider son courage et de venir nous dire combien il est courageux.

Bien, je pense qu'on peut se poser la question – et on n'est pas les seuls à se poser la question: Il est où, le courage, quand ce premier ministre dit aux malades du Québec: «Toé, tais-toé»? C'est ce qu'il fait avec le projet de loi n° 107: moins de services pour les soins de santé dans les hôpitaux, dans les CLSC, les CHSLD. Il est où, le courage, quand on dit: «Toé, tais-toé», avec le 117 où tout ce qu'on fait, c'est d'augmenter la taxe médicaments qu'on nous a déjà imposée il y a deux ans? Il est où, le courage, quand il dit aux citoyens des villes du Québec, des villes et villages du Québec: Fusions, intégrations forcées, plus de taxes? Il est où, le courage, quand il dit aux consommateurs d'électricité du Québec: «Toé, tais-toé», puis paie?

Le Parti québécois, M. le Président, se demande – dans son dernier congrès, c'est ce qu'il a fait – s'il est social-démocrate. Bien, la réponse, on la connaît. Qu'il arrête de se la poser. Il n'est plus social puis il n'est plus démocrate. Double les médicaments, diminue les services de santé, augmente les frais d'électricité puis, en même temps, Hydro-Québec refuse de respecter l'entente qu'elle avait avec le ministère de la Solidarité sociale, dans laquelle les gens qui sont démunis avaient un moyen pour respecter leurs engagements quand ils avaient un petit pépin au bout du mois. C'est fini. Le social, l'aide aux démunis, l'aide aux personnes âgées, le PQ passe à côté de ça.

La démocratie, M. le Président. Un autre bâillon, encore une fois, mais ce bâillon-ci, du Parti québécois, il est un petit peu différent. On les a faites où, nos études en commission? Il n'y en a même pas eu. Un bâillon sans étude en commission, un bâillon même sur le projet de loi n° 116 qui va à l'encontre du Parti québécois lui-même. Le Québec, c'est rendu un tout petit groupe de personnes: le premier ministre; des fois, le leader, il est dans le groupe; le ministre des Finances, il est là tout le temps. Ils sont deux, trois, peut-être quatre autocrates qui passent à côté de la démocratie, même à côté de leurs propres résolutions passées au Parti québécois.

(17 h 50)

Il est où, le courage, M. le Président, quand le premier ministre dilapide notre héritage social? Le premier ministre veut mettre le bâillon pour dire à 124 députés des deux côtés de la Chambre, même ceux qui parlent de salaires, l'autre côté, il leur dit: «Toé, tais-toé.» Il dit à ses députés, dans son caucus, à deux reprises: C'est moé, le boss. Je n'ai pas besoin de vous autres. Ah! les hauts fonctionnaires, j'en ai besoin. D'ailleurs, j'ai fait un comité. Aussitôt le rapport du comité déposé, aussitôt la position adoptée, 12 à 24 % d'augmentation. Mais les députés péquistes qui en parlaient, les députés libéraux qui lui ont dit... Moi-même, j'ai pris position dans les journaux puis j'ai dit: On pourrait en avoir un, comité, comme les hauts fonctionnaires, qui va étudier ça. Ah non! M. le Président, le boss, il a dit: Vous autres, je n'ai pas besoin.

Mais, moi, la question que je me pose, M. le Président, c'est: Il est où, le courage, pour vrai? Parce que le vrai courage, là-dedans, ce n'est pas de gagner des points politiques en passant pour un leader populiste qui dit non aux députés en discréditant la fonction que nous avons ici. Dans le cas du premier ministre, M. le Président, c'est l'histoire de sa vie, c'est comme ça qu'il a gagné des points politiques, avec le populisme qui a des effets contraires. C'est son populisme à lui qui s'est dit: Tiens, c'est peut-être le temps de partir du Parti conservateur. C'était difficile. Il fallait se battre pour essayer de sauver Meech, mais, lui, il est parti avant. Il a contribué à ce que Meech tombe pour gagner des points. Il appelle ça du courage. Ça a des effets pervers, le courage de ce premier ministre là, M. le Président. Ça a fait reculer le Québec. Ce premier ministre là, son courage nous coûte, aux Québécois. Son courage, ça a été quoi? Après qu'il ait fait le coup à son ami, à son gouvernement conservateur, il a fait le coup à son allié, le premier ministre Parizeau. Il l'a mis dehors. Ah, il est courageux! C'est son style, c'est l'histoire de sa vie: planter son monde, M. le Président. C'est comme ça qu'il a réussi à gagner des points.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: Ils trouvent ça drôle, de l'autre bord. Ça fait deux caucus qu'ils ont où ils se font planter, puis ils vont encore se faire planter.

Bien, M. le Président, il est temps que nous autres, comme députés, des deux côtés de la Chambre, on dise: C'est assez, ce style de populisme. Nous avons une occasion, vous avez tous une occasion, des deux côtés de la Chambre, on a la possibilité par ce vote que nous allons avoir sur un bâillon. Et puis je le dis tout de suite pour les députés du Parti québécois, vous avez la possibilité de vous lever debout pour la dignité de la fonction législative que nous avons. Dans quelques minutes, il y a un vote historique qui va se tenir ici. Et, je le dis, je ne veux pas mettre de la partisanerie là-dedans. Le leader pourra demain en présenter une autre, motion de suspension, s'il veut. On partira un petit peu plus tard, mais on va avoir fait au moins une bonne chose pour l'Assemblée nationale du Québec, pour notre fonction de législateur. On va avoir refusé d'avoir plié l'échine, de s'être agenouillé devant la personne qui fait reculer le Québec à tout bout de champ pour gagner un petit point pour lui, lui qui se dit courageux. Ce n'est pas du courage, il n'y a aucun courage là-dedans, c'est juste essayer d'être populaire en pilant sur le monde. C'est ça qu'il fait.

Alors, moi, j'invite nos collègues des deux côtés de la Chambre à saisir cette occasion. Je sais qu'il y en a qui ont été un peu surpris, ébranlés quand ils ont appris qu'à 16 heures le premier ministre du Québec, appuyé du Conseil des ministres pour une décision d'hier, n'avait pas attendu une fraction de seconde pour entériner un rapport qui donnait une augmentation de 12 % à 24 % aux hauts fonctionnaires. Je le dis à tous les députés qui sont ici, nous avons une occasion de nous lever, d'affirmer notre dignité, de dire au premier ministre du Québec, ton «toé, tais-toé» pour ce soir, pour 18 heures, pour un vote: Non. Je me lève debout à l'appel des contre et je dis: Ce bâillon-là, il ne passera pas. Et je ne le fais pas dans un caractère partisan, je le fais pour la fonction que j'ai comme député de ma circonscription, parce que je veux me battre pour les Québécois. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je vais mettre aux voix la motion de suspension des règles présentée par M. le leader du gouvernement, conformément aux articles 182, 183.

Est-ce que cette motion de suspension des règles est adoptée?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le vote nominal est demandé. Qu'on appelle les députés.

(17 h 55 – 18 h 6)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez prendre place, s'il vous plaît. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le député de Mont-Royal, si vous voulez prendre place.


Mise aux voix

Alors, je mets aux voix la motion présentée par M. le leader du gouvernement, motion de suspension des règles. Que ceux et celles qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles)...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): ...votre collaboration, vous savez que tout vote est un moment sérieux à l'Assemblée nationale.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Alors, si vous voulez négocier, vous l'appellerez au numéro de téléphone... Vous le savez.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si on veut poursuivre le débat.

La Secrétaire adjointe: M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

(18 h 10)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Y a-t-il des abstentions? Aucune abstention.

Le Secrétaire: Pour:63

Contre:41

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Cette motion est adoptée.

Conformément à la motion de suspension des règles que nous venons d'adopter, nous allons maintenant procéder au dépôt de rapports de commissions. M. le vice-président de la commission des affaires sociales et député de Champlain.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 107

M. Beaumier: M. le président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé le 25 mai 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. La commission n'a pas terminé l'étude du projet de loi.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 117

Également, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé le 13 juin 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. La commission n'a pas terminé l'étude du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ces rapports sont déposés. Je vais patienter quelques instants.

Mme la vice-présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Deux-Montagnes. Mme la députée, la parole est à vous.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 134

Mme Robert: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé les 13 et 14 juin 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal. La commission n'a pas complété l'étude détaillée du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce rapport est déposé. Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail et députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée, la parole est à vous.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 116

Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 7 et 14 juin 2000 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives. La commission n'a pas complété évidemment l'étude du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée. Ce rapport est déposé.

Toujours conformément à la motion de suspension des règles que nous avons adoptée, je suspends les travaux de l'Assemblée afin que tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt des rapports de commissions, transmettre au Bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer aux projets de loi nos 117, 107, 134 et 116.

Je suspends donc les travaux pour 30 minutes. Nous reprendrons à 18 h 45.

(Suspension de la séance à 18 h 14)

(Reprise à 18 h 55)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît, nous allons reprendre nos travaux. J'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer le projet de loi à l'ordre du jour.

M. Brassard: Alors, M. le Président, conformément à la motion que nous avons adoptée, je vous demanderais que l'on poursuive le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124.


Projet de loi n° 124


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons donc procéder au débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives.

Je vous rappelle que la durée de ce débat a été fixée à un maximum de 30 minutes réparties comme suit: 12 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 12 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes au député indépendant et une réplique d'une durée maximale de trois minutes pour la ministre qui présente le projet de loi. Alors, Mme la ministre, je vous cède la parole.

M. Brassard: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Mme la ministre a déjà parlé sur le principe. Je vous demanderais de reconnaître le député de Saint-Jean.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, M. le député de Saint-Jean, je vous cède la parole.


M. Roger Paquin

M. Paquin: Bonjour, M. le Président. Ça me fait plaisir de prendre la parole sur un projet de loi...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Saint-Jean, excusez-moi une minute. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une précision. Est-ce que Mme la ministre ne peut plus parler parce qu'elle a déjà parlé et que l'article n'aurait pas été suspendu? À ce moment-là, M. le Président, on aurait un problème avec les droits de parole qui sont limités à 12 minutes. On aurait oublié de suspendre l'article qui consacre les droits de parole à 20 minutes, puis je ne pense pas que ce soit le cas. Donc, Mme la ministre aurait encore son droit de parole.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ça semble être un choix, de laisser la parole à M. le député de Saint-Jean. M. le député.

M. Paquin: Alors, M. le Président, j'allais dire que je pense que c'est un projet de loi important à ce moment-ci pour les différentes municipalités, mais aussi les citoyens un peu partout sur le territoire du Québec qui sentent le besoin de consolider leurs communautés. En fait, on est dans une période de l'histoire de l'humanité où les grands ensembles cherchent à faire en sorte de s'ajuster aux nouvelles réalités, et ces nouvelles réalités, c'est en même temps que les nouvelles technologies, c'est les nouveaux impératifs de la vie économique.

Aujourd'hui, la région du Haut-Richelieu, par exemple, a comme concurrentes des régions qui sont situées ailleurs dans le monde, pas essentiellement au Québec, d'ailleurs, mais de l'autre côté de la frontière, du côté de l'État de New York, du côté d'autres États américains, en Ontario. Et les communautés, selon les vocations qu'elles ont développées au fil des ans, ont des particularités qui font en sorte qu'il est important qu'elles se donnent des outils modernes pour faire face à ces nouveaux enjeux, à ces nouvelles réalités.

Ces consolidations, on a assisté à ça dans le milieu des affaires, on a assisté à ça dans les groupes, dans tous les milieux, et, à quelque part, les municipalités sont en retard sur ces sujets-là. Ce n'est pas partout qu'il est nécessaire de faire des regroupements municipaux. En fait, des regroupements si nécessaire mais pas nécessairement des regroupements. L'important, M. le Président, c'est qu'on consolide nos communautés. Et la meilleure façon de le faire, c'est de s'outiller pour permettre à nos différentes régions de rejoindre la réalité actuelle.

Le projet de loi n° 124 nous donne un certain nombre d'éléments d'un coffre d'outils qui nous permettent d'arriver à ces fins. Vous savez, M. le Président, dans le Haut-Richelieu, on vit une belle expérience actuellement parce que cinq municipalités d'importance sont en train de cheminer vers un regroupement. Vous avez ailleurs, dans le territoire du Haut-Richelieu, des villes-paroisses, aussi, qui cheminent et des municipalités contiguës qui ont des vocations analogues et qui également cheminent.

Par contre, il y a toutes sortes de difficultés qui se présentent sur le cheminement. Vous avez des municipalités, par exemple, où il y a un avantage à ne pas se regrouper parce que, artificiellement, selon la façon dont la fiscalité est vécue, ces municipalités trouvent un avantage à ne pas aller de l'avant. Vous avez d'autres lieux où, au contraire, on assume, en plus du fardeau normal d'une certaine municipalité, des responsabilités qui devraient être partagées entre tous. En fait, il y a une question d'équité qui n'est pas nécessairement rencontrée partout sur le territoire. Donc, quand une communauté prend acte des nouvelles réalités...

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

(19 heures)

M. Paradis: Oui. Je m'excuse d'interrompre le député de Saint-Jean, mais, à moins que je sois mal informé, la présence de nos collègues pour écouter un important discours, surtout dans une motion où on suspend les règles, s'impose. Je ne voudrais pas qu'il parle devant des banquettes péquistes désertées.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, j'observe que... Oui, le quorum, c'est bien 21 étant donné qu'il n'y a pas de commission qui siège présentement. Et, d'un coup d'oeil rapide de part et d'autre, je m'aperçois qu'il nous manque quelques figurants pour avoir le quorum.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah! J'ai... La commission commence à 20 heures. C'est pour ça que j'avais soulevé le point. Alors, on va accorder quelques instants pour que la situation se corrige. Alors, je m'en vais commencer à calculer lentement par ma gauche et je terminerai vers la droite.

Alors, écoutez, je pense qu'on va sonner quelques coups de cloche pour permettre à nos députés qui sont occupés à d'autres fonctions de se rendre pour assurer le quorum et qu'on poursuive le débat.

Alors, je vais suspendre quelques minutes pour attendre que...

(19 h 2 – 19 h 3)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons poursuivre nos travaux, et j'inviterais M. le député de Saint-Jean à poursuivre.

M. Paquin: Alors, je disais tantôt, M. le Président, qu'il y a des communautés qui sentent le besoin à ce moment-ci de se donner une même vision du développement local, une vision organique, une vision organisée, une vision cohérente. Il y a aussi la nécessité d'aller vers une plus grande équité fiscale. Et, dans tous ces cas-là, l'objectif qui est visé, au fond, c'est la qualité de vie, parce que c'est dans les municipalités que sont les services de première ligne pour les citoyens et les citoyennes du Québec.

Alors, quand on chemine comme ça, même avec beaucoup de bonne volonté et dans un cheminement le plus volontaire possible et que la population souhaite que des regroupements soient faits, il arrive que des inconvénients se présentent dans le décor. J'ai déjà mentionné des problèmes d'iniquité fiscale qui favorisent le maintien du statu quo et je pense aussi qu'il y a des enjeux bien compréhensibles de la part d'élus qui souhaitent demeurer des élus, et évidemment il y en aura moins une fois qu'un regroupement aura eu lieu.

Si vous prenez une municipalité qui regroupe, dans Le Haut-Richelieu, cinq des villes actuelles, où il y a six conseillers dans quatre villes et huit dans une ville, donc 32 conseillers et cinq maires, bien des gens qui vivent en première ligne à offrir des services à leur population, c'est quelque chose dont ils sont fiers, c'est quelque chose qu'ils aiment faire, c'est quelque chose de très honorable, et je pense qu'il faut comprendre que, à un moment donné, il y ait des réticences et qu'on veut s'assurer que tout soit parfait. Mais, en commandant la perfection, il arrive, M. le Président, qu'on prenne des mesures dilatoires et qu'on en verse dans la procrastination, ce qui fait qu'au bout du compte il y a des choses qui ne se font pas et que la population souhaite, et qu'il faut aider, qu'il faut nantir, en termes d'outillage, pour qu'elle puisse aller de l'avant. Alors, l'objectif du projet de loi n° 124, M. le Président, c'est ce genre d'instrumentation, c'est ce genre d'instruments qu'on met dans un coffre à outils pour les municipalités.

Je disais tantôt, M. le Président, avant l'intermission, qu'il n'est pas nécessaire de faire des regroupements dans tous les cas, mais, dans les cas où ils sont nécessaires et où ils sont voulus par la population, le projet de loi va permettre d'aller de l'avant. Et ça va permettre, par exemple, à la ministre, dans le cas du Haut-Richelieu... Le cas qui m'occupe le plus à ce moment-ci, ainsi que le député d'Iberville, c'est celui de cette agglomération de Saint-Athanase, L'Acadie, Saint-Jean-sur-le-Richelieu, Saint-Luc et Iberville pour lequel le cheminement est très avancé, mais ça achoppe sur des descriptions, par exemple, des différents nouveaux quartiers, le nombre de ces quartiers, des choses comme celles-là. Le reste est très avancé, et la volonté est affirmée.

Alors, la ministre pourra donc, au lendemain de la sanction de cette loi, qui sera dans les jours qui viennent, demander de son autorité, exiger, si elle y est autorisée par le gouvernement, que nos municipalités du Haut-Richelieu lui présentent, dans le délai qu'elle prescrira, une demande commune de regroupement et prendre les instruments et les moyens pour que ce délai soit court, comme le souhaite la population. Et ça, M. le Président, ça va être salué dans le Haut-Richelieu, au-dessus des lignes de parti, par tous les résidents et par tous ceux qui composent le tissu social du milieu.

Mais il y a d'autres instruments que nous donne le projet de loi n° 124, parce que les réalités ne sont pas les mêmes partout au Québec. Ainsi, la Commission municipale pourra, de par ses nouvelles prérogatives qui entreront en vigueur, elles, au 1er janvier 2001, entreprendre, de son initiative ou à la demande du gouvernement, des études sur l'opportunité, dans certaines communautés, d'utiliser la voie du regroupement pour se consolider.

Par ailleurs, le projet va aussi autoriser le gouvernement à décréter, après la production du rapport du conciliateur de la Commission dans ces cas-là, faire la recommandation de constituer une nouvelle municipalité locale qui sera issue de cette volonté du milieu qu'aura pu repérer la personne mandatée par la Commission pour le faire.

D'autre part, il y a d'autres entraves qui interviennent. Par exemple, les difficultés qui surgissent, quand on veut être concret et que les élus municipaux se heurtent à ce genre de situation, comment on va organiser les arrimages syndicaux. Vous avez compris que, dans cinq municipalités de l'importance de celles que j'ai décrites tantôt, où vous avez plus de 80 000 habitants, vous avez là des gens dévoués dans la fonction publique de différentes municipalités dont il faudra faire l'arrimage. Il y a des difficultés, et on ne peut pas remettre ça indéfiniment. Alors, il y a des dispositions, dans ce projet de loi là, qui vont faciliter les arrimages entre les différentes unités syndicales de façon à faire en sorte que, dans les meilleurs délais, on pourra fonctionner dans l'harmonie au niveau des services à la population. Parce qu'il faut se rappeler que c'est ça, le premier objectif visé.

D'autre part, au niveau de l'équité fiscale aussi, il y a des fois où on se pose la question. Certains instruments, certains lieux qui soit amènent certaines retombées économiques dans la communauté mais qui sont perçus, par exemple, en termes de taxes dans une ville plutôt que dans une autre à cause des hasards de la géographie ou, dans d'autres cas, des dépenses qui sont encourues par une municipalité du simple fait qu'elle joue un rôle particulier au sein de l'ensemble de cette communauté, ça amène des inéquités. Alors, le projet de loi va faire en sorte que l'on établisse dans des délais raisonnables une liste des équipements à caractère supralocal, ou les services ou les activités, et aussi qu'on détermine quel organisme sera le mieux placé pour pouvoir gérer ces éléments-là de la façon la plus adéquate pour l'équité entre les citoyens. Enfin, M. le Président, il y a des ajustements au programme de péréquation à l'égard de certaines municipalités, dont les effets pervers sont ceux que j'ai décrits tantôt et font en sorte qu'il y a des regroupements naturels qui sont retardés actuellement à cause de ces inéquités.

En somme, M. le Président, nous sommes devant un projet de loi important, attendu, souhaité, qui va nous nantir d'instruments, qui va nous donner la possibilité de parachever des volontés de la population dans les différents coins du Québec en utilisant l'un ou l'autre des mécanismes, qui fera en sorte qu'enfin ces communautés vont pouvoir se consolider quand il sera opportun de le faire, quand ça aura été constaté par les personnes mandatées pour le faire. Meilleure vision commune, meilleure organisation locale, meilleure équité et surtout meilleure qualité de vie pour les citoyens du Québec.

(19 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Hull.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Nous assistons à un spectacle désolant, un spectacle désolant parce que la ministre a honte de se lever debout et de défendre un projet de loi qu'elle nous présente. Elle fait faire la job de bras par le député de Saint-Jean, celui-là même qui s'est fait faire un coup impensable par la même ministre, l'an passé, au mois de mai, lorsque ce député a déposé un projet de loi, le n° 194, où les municipalités de son comté étaient d'accord pour une fusion volontaire, et que la ministre a refusé d'appeler, a refusé de passer.

La ministre est en train de dire non aux fusions volontaires dans le comté du député de Saint-Jean mais est d'accord pour forcer les fusions. Et le théâtre de l'absurde, c'est que le député de Saint-Jean se lève et applaudit la ministre. On peut comprendre que le député de Saint-Jean reçoive le titre de «maverick», M. le Président. Ça, ça veut dire quelqu'un qui n'est pas conformiste. Mais là c'est vraiment le théâtre de l'absurde: un député qui se lève pour applaudir quelque chose qu'il aurait voulu faire de façon volontaire et que la ministre a tout fait pour ne pas que ça se passe l'an passé et, maintenant, elle lui fait faire la job de bras. C'est absolument incroyable.

D'ailleurs, tellement incroyable que ce n'est pas la première fois que le député de Saint-Jean n'est pas d'accord avec son premier ministre. Maintenant, le nouvel apôtre des fusions forcées va à contre-courant parce que son premier ministre a dit ceci: «Je ne pense pas que le législateur doive intervenir pour forcer les villes à fusionner. Vous savez, un mariage forcé n'est jamais bon.» Ça, c'est le premier ministre qui dit ça. Puis on est rendu avec le député de Saint-Jean qui est à côté de moi et qui, lui, dit: Bravo aux fusions volontaires, même si mon monde est d'accord pour fusionner. Allez comprendre ça. Il s'expliquera lors des prochaines élections. Ça, c'est son problème.

M. le Président, on est pris avec un projet de loi, n° 124, où on n'a pas commencé à ouvrir la première virgule de la première page du projet de loi pour une étude approfondie. La ministre a été incapable d'amener ce projet de loi en temps opportun pour qu'on puisse l'étudier. Et là elle veut forcer toutes les villes du Québec, par le projet de loi n° 124, à fusionner de force. Et ça, c'est l'autre grande constatation que je dois faire, malheureusement, le député de Saint-Jean n'a pas compris le projet de loi, parce qu'il s'est levé puis il nous a dit: Le projet de loi permet la fusion forcée lorsque les citoyens sont d'accord. Faut-u pas être capable de lire un projet de loi pour dire ça, M. le Président? Au contraire, je tiens à le rassurer, là, peu importe ce que les citoyens du Québec pensent, peu importe s'ils s'expriment via un référendum, peu importe s'ils sont d'accord ou pas d'accord avec un projet de fusion, le projet de loi n° 124 que nous avons devant nous va permettre à la ministre, seule, en arrière de portes closes, via un décret, de forcer des fusions partout au Québec, peu importe ce que les gens de Saint-Jean en pensent. J'espère que le député va reconnaître qu'il a commis une erreur lorsqu'il a induit la Chambre en erreur de façon involontaire, sûrement involontaire, parce qu'il a mal compris le projet de loi n° 124.

Alors, M. le Président, le projet de loi, en plus de ça, dit une énormité en introduction, il dit que ça va permettre de diminuer les coûts. Je vous invite à chercher un seul endroit dans le projet de loi n° 124, et j'invite le député de Saint-Jean en particulier, à trouver un endroit où on sera capable de diminuer les coûts au niveau de la gestion municipale. Et j'aimerais surtout entendre ses commentaires à la lecture de l'article suivant: «Les fonctionnaires et employés de la municipalité dont le territoire est annexé totalement deviennent, sans réduction de traitement, des fonctionnaires et employés de la municipalité annexante et conservent leur ancienneté et leurs avantages sociaux. Ils ne peuvent être mis à pied ou licenciés du seul fait de l'annexion.» On va sauver quoi avec ça, M. le Président? C'est quoi, l'objectif? Ah, c'est drôle, le député de Saint-Jean ne se lève pas pour nous expliquer ça.

Alors, M. le Président, il est clair que ce projet de loi est un projet de loi absolument inutile qui fait un accroc total à la démocratie municipale qui a reçu des avis juridiques qui disent que ce n'est pas correct, que ce n'est pas légal. Comment se fait-il que, dans le monde municipal, les citoyens soient capables de s'exprimer via un référendum pour l'annexion d'un territoire, pour l'approbation d'un règlement d'emprunt ou pour des modifications au zonage, alors que, quand vient le temps de changer l'ensemble des conditions dans lesquelles ils vivent, soit changer leur municipalité, on les bâillonne comme on nous bâillonne aujourd'hui? M. le Président, pour défendre les intérêts des citoyens du Québec, j'ai 12 minutes. J'ai 12 minutes pour faire valoir que ça n'a pas de bon sens de faire ça, alors qu'il y a plein de groupes qui l'on dit, et je vais vous lire.

L'UMBM nous dit ceci dans le mémoire qu'elle a déposé: «Aujourd'hui, nous nous ferons de farouches opposants à la Loi modifiant la Loi sur la réorganisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives. L'UMBM et chacune de ses 26 villes membres se sont toujours opposées aux fusions forcées, par opposition aux fusions volontaires.» Dans la longue liturgie de citations de la ministre, jamais elle ne va citer l'UMBM. Et savez-vous quoi? Elle ne cite pas non plus la présidente de la CUM, Mme Danyluk, qui disait, et je cite – alors c'est elle qui parle: «J'estimais que la gestion de nos milieux de vie et des dossiers municipaux se passe mieux quand les citoyens ont affaire à de petits gouvernements municipaux et à un petit nombre d'élus ou de fonctionnaires. Je le pense encore. Voilà pourquoi je suis opposée aux fusions municipales forcées.» Pas quelqu'un qui est complètement déconnecté du monde, ça, c'est la présidente de la Communauté urbaine de Montréal qui approuve le principe d'une communauté métropolitaine mais qui dit: Mme la ministre, s'il vous plaît, ne menacez pas les villes du Québec de la façon dont vous le faites avec le projet de loi n° 124. C'est négocier avec un fusil sur la tempe, ça, M. le Président, ce n'est pas soumettre des conditions gagnantes pour que le monde municipal puisse se parler. Ce que la ministre tente de faire, c'est forcer des mariages.

D'ailleurs, l'ancien premier ministre était aussi d'avis qu'il était très imprudent de procéder à des fusions municipales forcées. Il disait: «Il y a toujours eu des appétits, dans les administrations gouvernementales, pour fusionner par commodité pour le gouvernement, pas pour les citoyens. Les gouvernements sont toujours en faveur de fusions. C'est plus commode pour le ministère des Affaires municipales de faire affaire avec 200 municipalités plutôt que 1 400. Il est inutile de chercher à les justifier, ces fusions, en disant que c'est pour le bien du citoyen.» Ça, c'est Jacques Parizeau qui a dit ça en 1997.

Je vous ai cité le premier ministre qui, lui, dit essentiellement: Jamais je ne vais accepter ça pour Jonquière et Chicoutimi, puis le reste du Québec, arrangez-vous. Puis, si j'ai des députés, comme le député de Saint-Jean, qui se lèvent pour dire que c'est une bonne idée, qu'ils s'arrangent avec ça. Mais, moi, comme député responsable, je ne le ferai pas dans Jonquière-Chicoutimi. C'est ça qu'il nous a dit, le premier ministre.

Le ministre des Transports disait: «Les fusions forcées, c'est prouvé, ça ne donne rien de bon. Ça ne fait qu'engendrer la haine et les chicanes stériles.» C'est déjà commencé, M. le Président. On a déjà semé cette haine et ces chicanes stériles dans le monde municipal, simplement en disant: Voici ce que le gouvernement a l'intention de faire. Ce n'est même pas adopté, ce projet de loi là, puis on voit les conséquences sur le terrain.

Le député de Borduas et président de l'Assemblée nationale, qui est le gardien de la démocratie au Québec, nous disait: Moi, j'ai eu la ferme conviction, l'assurance de la ministre qu'elle va respecter les référendums chez moi. Pourquoi chez eux? Pourquoi pas ailleurs?

Le député de Saint-Jean nous disait: «Bien sûr, des regroupements municipaux, ça ne peut pas se faire par inadvertance, de façon involontaire, ça doit se faire par volonté. Les gens doivent adhérer au projet, ça doit être leur volonté, on doit avoir leur consentement.» Le député de Saint-Jean, le 2 juin 1999. Aujourd'hui, il se lève, il nous dit le contraire. Facile à suivre.

Le député d'Iberville nous a dit la même chose, le député de Marguerite-D'Youville, le député de Blainville. «Je pense aux citoyens, lançait le député de Blainville. Si ça se traduit par une augmentation de taxes, je ne suis pas sûr que je leur rends service.» Est-ce que ça va augmenter les taxes? La ministre est incapable de nous dire l'inverse, que ça va les réduire, incapable. Le citoyen est où, là-dedans?

Le député de Masson nous disait: «On fait notre travail de député. On est conscient des réticences de notre population et, à partir de ça, on fait valoir notre point de vue.» Les gens sont inquiets. J'ai une mauvaise nouvelle: votre point de vue, ça ne compte pas. La ministre a fait la sourde oreille. Le point de vue de tous les citoyens du Québec qui s'opposent aux fusions forcées, ça ne compte pas. L'opinion de tous les maires et conseillers municipaux du Québec qui se disent: Voyons donc, on ne peut pas faire ça, ça n'a pas de bon sens, ça ne compte pas. Ce qui compte, c'est l'opinion de seule la ministre. Peu importe, le premier ministre, ses députés, ses collègues ministres, ce qu'ils pensent, la ministre, elle, a décidé: il y aura des fusions municipales forcées au Québec avec le projet de loi n° 124. Et, si elle avait été sérieuse pour vraiment soumettre ça à un débat, on ne serait pas dans un bâillon aujourd'hui, je n'aurais pas 12 minutes, M. le Président, pour discuter d'un projet de loi aussi important.

(19 h 20)

Le député de Frontenac nous disait... «Estimant que c'est à la population de décider de son regroupement, le député de Frontenac se dit d'accord avec les regroupements proposés dans le comté à la condition que les études faites, soit par la municipalité soit par la Commission municipale du Québec, présentent un rapport positif des avantages que la population retirera d'un tel regroupement tant au niveau du développement économique que de l'équité fiscale. Du même coup, le député se dit en désaccord avec les fusions forcées.» Le journal La Tribune , 3 juin 2000.

C'est pas mal facile, dans le comté, de dire: Non, non, moi, je ne suis pas pour ça, les fusions forcées, puis ici, à l'Assemblée nationale, de se lever comme des moutons pour appuyer le projet de loi n° 124. Ça, c'est facile, faire ça. Ce qui est pas mal moins facile, c'est d'avoir le courage de ses convictions. Si c'est vrai qu'il est contre les fusions forcées dans le comté, il devrait être contre les fusions forcées ici, M. le Président. Mais ce n'est pas vraiment le courage de l'autre côté qu'on voit quand on a présenté, nous, la motion qui disait de retirer le principe des fusions forcées au Québec.

Et je veux terminer avec quelque chose. Ça fait plusieurs fois que la ministre utilise mon comté et ma ville comme exemple, en disant que le maire de Hull est d'accord. Je veux lui dire une fois pour toutes: Le maire de Hull est d'accord. Le conseil de Hull est contre. La ville parle par résolution. Dans un article du journal Le Droit , le 7 janvier: «Au moins six conseillers hullois sur 10 se disent contre les fusions forcées et exigent un référendum avant que le gouvernement n'autorise une fusion en Outaouais.» Le maire de Hull n'est même pas capable de convaincre son propre conseil des bienfaits d'une fusion forcée, et elle va nous faire la leçon pour la grandeur du Québec à l'effet que c'est ça que ça prend. M. le Président, c'est irrespectueux du monde municipal, c'est irrespectueux des conseils municipaux et c'est au détriment de la population du Québec. Et jamais l'opposition libérale ne va accepter une telle arrogance du gouvernement du Parti québécois. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Hull. M. le député de Rivière-du-Loup, vous avez une intervention de trois minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. On est à l'adoption du principe du projet de loi n° 124, et, quand on est à l'adoption du principe... Évidemment, il y a d'autres étapes dans le processus législatif. L'étude article par article permet de regarder les moyens que le gouvernement veut utiliser pour accomplir quelque chose. Mais le principe, il faut regarder qu'est-ce que le gouvernement souhaite accomplir, quelle est l'intention gouvernementale à l'intérieur du projet de loi?

Alors, c'est très difficile de comprendre, dans le projet de loi n° 124, quel est exactement le principe parce qu'on comprend... Bon. Si le but du gouvernement en place – qui est devenu un peu loin des citoyens – c'est de gouverner pour le gouvernement, de prendre des mesures pour le gouvernement lui-même, on peut peut-être comprendre. Mais, du point de vue des citoyens, jamais la ministre, ni le premier ministre, ni aucun de leurs collègues n'a pu, d'une façon très claire, très précise, expliquer à la population du Québec qu'est-ce qu'ils essayaient d'accomplir. Quand la question a été posée: Est-ce que le but, c'est d'en arriver, pour l'ensemble des citoyens du Québec, à avoir des services à moindres coûts...

Moi, si le premier ministre ou la ministre avait déposé le projet de loi n° 124 puis, au moment du dépôt du projet de loi, qu'il y avait eu un livre blanc qui avait dit: Objectif, moins 20 %, on veut que d'ici, je ne sais pas, cinq ans, huit ans, le fardeau fiscal, sur le plan local, sur le plan municipal, de l'ensemble des citoyens soit réduit d'une certaine proportion, j'aurais dit: Oh! on va regarder ça attentivement. Là, on a un objectif. On parle de libérer de l'argent dans le portefeuille de nos concitoyens. On a un objectif précis. En tout cas, on peut être d'accord ou pas d'accord, mais on sait au moins ce que le gouvernement veut accomplir. Il a une cible, il a un objectif.

Là, j'ai entendu durant le débat des exemples, donnés par la ministre, donnés par d'autres, aussi aberrants que: Oui, l'Ontario, elle a tant de millions de population de plus que le Québec puis elle a tant de municipalités de moins. Oui, puis! Parce que, je veux dire, en soi, ce n'est pas un plan de société, ce n'est pas un projet de société. Il n'y a pas un ratio de municipalités par population qui assure un bonheur national supérieur. Il faut gérer ça d'une façon qui est la plus adéquate possible pour livrer les services à la population. Alors, ce n'est pas un objectif en soi. Le fait de réduire le nombre de municipalités pour l'amener à celui de l'Ontario, ce n'est pas un objectif.

Alors, moi, j'ai essayé de comprendre tout au long du débat qu'est-ce qu'on veut accomplir pour les citoyens. Parce que, moi, dans un certain nombre de cas, je pense que l'idée de regroupement... Par exemple, entre autres, on l'a fait en Ontario, on avait un objectif précis, on voulait que Toronto devienne une plus grande, une plus forte métropole. Alors là on savait où le gouvernement s'en allait. On savait ce qu'il voulait accomplir. Et ils l'ont accompli. Les gens pouvaient être pour ou contre. Mais, dans le cas du Québec, on ne sait même pas quelle est l'intention du gouvernement. Surtout pour les citoyens, pas pour la machine, pour les citoyens, qu'est-ce qu'ils veulent accomplir, on n'en a pas la moindre idée. Alors, comment voter pour le principe d'un tel projet de loi, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais céder la parole maintenant à Mme la ministre pour son droit de réplique de trois minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: M. le Président, j'invite le député de Rivière-du-Loup à ouvrir les pages du projet de loi n° 124, à l'article 1, faire lecture de cet article 1 qui établit l'objectif qui est recherché, et je lis, soit celui de «favoriser l'équité fiscale et de fournir aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût égal».

Alors, M. le Président, ce qui se retrouve dans le projet de loi n° 124, c'est une démarche qui va permettre aux citoyens d'ouvrir les livres. La constatation que l'on peut faire à ce moment-ci, c'est qu'il y a beaucoup d'élus municipaux, comme des maires, qui ne veulent pas ouvrir les livres en matière de ce qui serait souhaitable comme organisation municipale au Québec. Alors, le projet de loi permet à une municipalité, dans la mesure où elle représente la majorité de la population sur un territoire visé, ou à deux, parce qu'elle est associée avec une municipalité voisine et qu'à deux elles représentent la majorité des municipalités sur le territoire, de déposer une requête devant la Commission municipale du Québec qui va devoir faire une étude. Et, dans les amendements que nous avons déposés, il y a obligation pour la Commission municipale du Québec d'entendre les citoyens. Alors, il y aura donc un forum pour se faire entendre.

Mais, en même temps, il faut être conscient que l'opposition, systématiquement, depuis 20 ans, dans cette Assemblée nationale, a mené un combat d'arrière-garde chaque fois qu'il a été question du territorial. Ils ont voté contre la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, ils ont voté contre la création des MRC il y a 20 ans, ils s'étaient engagés à les abolir. Ils ont voté contre la Loi de la protection du territoire agricole. Ils ont récemment voté contre la création des centres locaux de développement.

M. le Président, j'ai été surprise des propos du député de Rivière-du-Loup qui, pourtant, est allé à l'hôtel de ville de Montréal il y a quelques mois se prononcer, sans qu'il y ait d'étude pourtant, en faveur du projet d'une île, une ville.

M. le Président, ce que nous avons mis en place, c'est trois comités d'élus avec des mandataires sur les territoires métropolitains de Montréal, Québec et Hull. C'est une nouvelle compétence à la Commission municipale pour la bonne raison que nous ne pouvons plus continuer dans l'immobilisme qui a paralysé pendant neuf ans le gouvernement précédent. Il y a des outils qui sont maintenant à la disposition de ceux et celles qui veulent du changement. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.

Est-ce que le principe du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, il faudrait que l'Assemblée se transforme en comité plénier, en plénière, pour faire une étude détaillée, pendant 45 minutes, du projet de loi n° 124.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a la motion de référer à la commission plénière. C'est bien. Cette motion est adoptée, puis aussi la motion pour se constituer.

Alors, nous allons nous constituer en commission plénière afin d'étudier article par article le projet de loi dont nous venons d'adopter le principe. Alors, je suspends quelques minutes.

(Suspension de la séance à 19 h 30)

(Reprise à 19 h 37)


Commission plénière


Étude détaillée

M. Brouillet (président de la commission plénière): Alors, mesdames, messieurs, conformément à l'ordre que nous avons reçu de l'Assemblée, nous sommes réunis pour étudier article par article le projet de loi n° 124 et nous allons commencer immédiatement. Et je crois que Mme la ministre a quelques amendements à nous déposer, alors...

Mme Harel: Voilà, M. le Président. Alors, je dépose donc les copies qui pourront être distribuées.

Le Président (M. Brouillet): Nous allons débuter par l'article 1, et, à chacun des articles, Mme la ministre, s'il y a un amendement à l'article, vous pourrez me le souligner à ce moment-là, et je pourrai faire la lecture de l'amendement.

M. Gautrin: ...M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Brouillet): Oui, oui. Donc, l'article 1: La

Loi sur l'organisation territoriale municipale est modifiée par l'insertion, après l'article 125, de la section suivante:

«Section IX

«Initiatives du ministre ou de municipalités locales

« – Paragraphe 1 – Objet

«125.1 Les sous-sections 2 à 4 ont pour objet la constitution de municipalités locales issues de regroupements afin notamment de favoriser l'équité fiscale et de fournir aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût égal.

« – Paragraphe 2 – Délai pour la production d'une demande commune

«125.2. Le ministre peut, avec l'autorisation du gouvernement, exiger, au moyen d'un écrit transmis par courrier recommandé ou certifié à certaines municipalités locales dont les territoires peuvent faire l'objet d'un regroupement, qu'elles lui présentent, dans le délai qu'il prescrit, une demande commune de regroupement.

«Aux fins d'aider les municipalités à remplir cette obligation, le ministre peut nommer un conciliateur.

«125.3...

Mme Harel: M. le Président?

Le Président (M. Brouillet): Oui, Mme la ministre.

Mme Harel: J'ai un amendement à introduire à 125.2.

Le Président (M. Brouillet): C'est très bien. Vous permettez que... Je vais peut-être vous le lire, là, il y a un amendement.

L'article 125.2 de la Loi sur l'organisation territoriale municipale, proposé par l'article 1 du projet de loi n° 124, est amendé:

1° par l'insertion, dans la cinquième ligne du premier alinéa et après le mot «regroupement», des mots «accompagné de tout document qu'il indique»;

2° par l'addition, après le deuxième alinéa, du suivant:

«Le ministre peut, à la demande d'une municipalité ou du conciliateur, accorder un délai additionnel aux municipalités.»

(19 h 40)

Alors, nous allons disposer de l'amendement puis nous reviendrons après ça à l'article. Mme la ministre.

M. Gautrin: M. le Président, selon vous, il est recevable?

Le Président (M. Brouillet): Oui, prima facie, il est recevable.

Mme Harel: M. le Président, nous avons tenu une commission parlementaire à l'occasion de laquelle des représentations ont été faites, et ces amendements viennent donner satisfaction à certaines de ces représentations qui nous furent faites. Alors, en l'occurrence, le délai additionnel est accordé aux municipalités, le délai de production d'une demande commune de regroupement peut donc être accordé à une municipalité.

M. Cholette: Là, je voudrais juste avoir... Une question de directive, là. On est rendu à discuter de l'amendement à 125.2, alors qu'on n'a pas discuté de 125.1 encore.

Le Président (M. Brouillet): Non, vous prenez connaissance. Alors, j'ai...

M. Cholette: Puisqu'il y a une suite logique dans ces articles, il me semble qu'avant de discuter sur l'amendement à 125.2 il serait préférable que l'on puisse discuter de 125.1, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): C'est parce que j'ai procédé par article. L'article 1 est en haut, là, alors j'ai lu un peu l'ensemble. C'est vrai que l'article comprend plusieurs sous-paragraphes. Alors, si vous voulez... moi, de toute façon, on a 45 minutes, alors, on peut procéder comme vous l'entendez. Si vous trouvez que c'est préférable pour vous, alors, à ce moment-là, je peux revenir à 125.1.

M. Cholette: Très bien.

Le Président (M. Brouillet): Alors, le 125.1, est-ce que vous avez des commentaires ou des observations ou si...

M. Cholette: Très certainement.

Le Président (M. Brouillet): Alors, vous pouvez... très bien, sur 125.1.

M. Cholette: Oui. Merci, M. le Président. Alors, on voit ici l'incohérence du gouvernement. Dans le premier article d'un projet de loi, on nous indique essentiellement l'objectif poursuivi. Alors, on dit, là, essentiellement: Nous allons forcer des fusions municipales partout au Québec. Nous ne respecterons pas la volonté des citoyens. Nous ne consulterons pas via des référendums. Les citoyens ne pourront s'exprimer sur l'avenir de leur municipalité. Et l'on invoque ici l'objectif «afin de favoriser». Les mots sont importants. On utilise «afin de favoriser l'équité fiscale et de fournir aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût égal».

M. le Président, nous poursuivons, dans ce projet de loi, après cet important article, pour 17 pages, 16 articles au total, et il n'y a pas un iota d'information qui puisse nous permettre de croire que des services pourront être rendus à coût moindre ou que de meilleurs services puissent être rendus à coût égal. C'est un voeu pieux, c'est absolument impossible à démontrer. Le gouvernement, à maintes reprises, a été questionné en disant: Est-ce que le citoyen y trouvera son compte? Est-ce qu'il y aura une réduction sur le compte de taxes? Jamais le premier ministre n'a pu répondre oui à cette question et jamais la ministre des Affaires municipales n'a pu répondre oui à cette question. Les exemples qu'on nous donne, par exemple dans la région de Toronto, montrent l'inverse. Toutes les études sérieuses montrent l'inverse, et, pour espérer avoir un résultat positif, toutes les études indiquent également qu'il faut avoir une réforme du Code du travail. Le premier qui dit cela, c'est le rapport Bédard. Le rapport Pichette a parlé de ça et la ville de Montréal a aussi parlé de ça. Et qu'est-ce qu'on a à ce niveau-là? Rien. Rien n'est dans le projet de loi pour permettre plus de latitude au monde municipal.

Alors, j'aimerais bien...

Le Président (M. Brouillet): Oui, Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, nous n'en sommes plus à l'étape des discours de deuxième lecture; ils sont terminés. Nous en sommes à l'étape de l'étude article par article. Mais je crois qu'il faudrait le rappeler au député de Hull, qui semble l'avoir oublié, et je vous demanderais, question de directive...

Le Président (M. Brouillet): Écoutez, ça peut prendre...

Mme Harel: ...comment entendez-vous procéder?

Le Président (M. Brouillet): Enfin, les échanges sur les articles, ça peut prendre plusieurs formes, mais c'est évident qu'il y a un temps limite qu'on répartit équitablement entre les différentes parties. De toute façon, on a 45 minutes au total. Chacun a à voir à utiliser le temps au meilleur de sa connaissance, tout en alternant. Effectivement, vous avez pris un temps sur cet article, et maintenant je pourrai céder la parole, en référant à cet article-là, à Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, je dois comprendre que le 45 minutes se répartit équitablement moitié-moitié.

Le Président (M. Brouillet): Oui. À peu près.

Mme Harel: Bon. Alors, ceci étant dit, M. le Président, ce que le député de Hull prétend démontrer, c'est ce qu'il dit être impossible à démontrer. Lui fait grief au premier ministre et à moi-même de ne pas avoir dit, d'une façon péremptoire, que, dans tous les cas théoriques de regroupement, il devait y avoir une diminution du compte de taxes. Il prétend, à l'inverse, lui, pouvoir dire que, dans tous les cas théoriques, il va y avoir une augmentation du compte de taxes.

Alors, M. le Président, c'est purement démagogique, je regrette, là, et ce qui est inscrit dans le projet de loi, c'est justement une démarche pour s'assurer que la demande de production d'une demande commune de regroupement ou encore l'étude de la Commission municipale du Québec se fasse et se conclue dans la mesure où cela favorise l'équité fiscale et cela fournit aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût égal.

Alors, M. le Président, il faut être très clair. Il y a donc la possibilité maintenant offerte par le projet de loi de déposer une requête d'étude de regroupement en Commission municipale du Québec qui aura cette compétence. Il y a aussi possibilité pour le gouvernement de permettre à la ministre d'exiger une demande commune de regroupement de municipalités, mais la décision finale se prendra dans la mesure où ça favorise l'équité fiscale et où cela fournit aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût égal.

Et, M. le Président, je crois que cela est extrêmement important parce que, contrairement à ce que prétend le député de Hull qui invente que les citoyens peuvent actuellement décider par référendum de se regrouper ou pas, c'est faux. Depuis 1988, le gouvernement précédent a retiré des lois municipales le droit à la consultation des citoyens. Et j'ai une liste exhaustive de consultations qui ont eu lieu où les citoyens ont majoritairement dit oui, et les conseils de ville ont refusé de donner suite à cette volonté de regroupement des citoyens parce que, actuellement, la loi prévoit que c'est par résolution du conseil de ville seulement que le processus se met en branle, mais qu'au bout du compte, aujourd'hui comme hier, comme demain, comme cela fut dans toutes les époques antérieures avec des gouvernements libéraux qui ont précédé, ça se termine par un décret du gouvernement. Les municipalités ne sont pas sui generis, ce ne sont pas des peuples, ce ne sont pas des États. Elles sont créées par décret des gouvernements ici, comme en Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, en Ontario, partout. Alors, ne nous inventez pas quelque chose de nouveau, M. le député de Hull.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous proposerais ceci, là. Parce que l'article 1 a à peu près 11 grands paragraphes. Si vous aviez, sur l'ensemble de ces paragraphes, des choses à dire, et après ça, on verra les amendements qui s'y réfèrent, puis on votera les amendements puis l'article tel qu'amendé. Parce que, là, si on prend paragraphe par paragraphe, il faudrait autant que possible s'en tenir au paragraphe. Alors, je vous suggère cela. Voyez-vous, l'article 1, vous avez de 125.1 à 125.11. Alors, sur cet ensemble-là, est-ce qu'il y aurait encore des observations à faire avant d'en arriver aux amendements proposés en référence à ces paragraphes?

M. Cholette: J'ai encore des commentaires sur 125.1.

Le Président (M. Brouillet): Alors, ça, que voulez-vous? Vous disposez du temps. Vous avez 45 minutes. Il n'y a pas de limite pour chaque article, il y a une limite pour l'ensemble. Alors, si vous voulez passer tout votre temps sur un même article, moi, ça ne me dérange pas du tout, j'applique les normes qu'on s'est votées tantôt. Alors, M. le député de Hull.

(19 h 50)

M. Cholette: Merci, M. le Président. L'article 1 est le coeur de ce projet de loi, c'est l'objectif du projet de loi. Quel est l'objectif? C'est de permettre, selon la prétention à 125.1, d'offrir des services à coûts moindres. La ministre a reconnu tantôt qu'il est impossible de faire cette démonstration, absolument impossible.

Et d'ailleurs je ne suis pas surpris des propos de la ministre parce que les premières paroles de la ministre ont été à l'effet de vous poser une question en vous demandant: Comment je fais pour limiter le temps de parole de l'opposition? Première question. Exactement ce qu'elle fait aux citoyens du Québec, elle enlève le droit de parole.

Elle peut dire jusqu'à demain matin que les villes sont des créatures et, légalement, elle a raison. Mais les citoyens ne sont pas des créatures, il n'y a personne qui va croire ça. Et, lorsqu'elle invente des arguments légaux pour dire qu'on peut changer une municipalité d'un trait de crayon par décret, il n'y a pas un citoyen du Québec qui va accepter ça couché sur le dos. Parce que c'est bien plus pour eux qu'un simple trait de crayon, une municipalité, c'est leur qualité de vie, c'est où ils vivent, où ils ont choisi de vivre, et, peu importent les arguments légaux qu'elle va invoquer aujourd'hui, la ministre n'est quand même pas capable de dire aux citoyens du Québec qu'ils ont tort d'avoir choisi des villes où ils habitent. Alors, les premières paroles, c'est pour dire: Combien de temps je suis capable d'enlever à l'opposition?

Ensuite, on se ramasse ici en bâillon. C'est quoi, le bâillon, M. le Président? C'est qu'on limite les débats. Plutôt que d'avoir un débat ouvert et transparent, nous n'avons que 45 minutes pour parler du projet de loi qui va changer le cours de l'histoire dans le monde municipal. Puis ça, on ne devrait pas dire un mot puis on devrait dire: Ça a bien du bon sens.

Puis le premier article, on nous dit que l'objectif, c'est de réduire les coûts, mais ils sont incapables de démontrer ça. Au contraire, tout au long, notamment à l'article 2, on est en train de démontrer qu'il n'y a personne qui peut perdre sa job, il n'y a pas un employé qui peut diminuer de salaire. Tout le monde garde ses conditions, puis on nous prétend que ça va coûter moins cher. C'est de la pure magie.

Et savez-vous ce qui est aussi étonnant, M. le Président? C'est que la ministre utilise des mots comme «démagogie» pour parler de ceux qui ne pensent pas comme elle. Mais ça, c'est un peu symptomatique, hein, du gouvernement: il ne faut pas ne pas penser comme eux. Ce n'est pas des bons Québécois. On est démagogique. On invente des choses.

Il y a beaucoup de gens qui ne pensent pas comme eux. Ce n'est pas des mauvais Québécois. Il y a plein de monde qui pense que le monde municipal devrait avoir la liberté de choisir ses frontières, le genre de services, la qualité de services qu'on offre. Je vous ai cité, notamment, tantôt, Mme Danyluk, la présidente de la Communauté urbaine. La ministre nous a parlé de la Commission municipale...

Le Président (M. Brouillet): ...

M. Cholette: Oui, très bien.

Le Président (M. Brouillet): ...trois, quatre minutes à chacun.

M. Cholette: Oui. Alors, la ministre nous a parlé de la Commission municipale en disant qu'il y aura recours puis étude. Elle s'est bien gardée de dire l'ensemble du portrait. Il y a des villes qui n'auront pas recours à la Commission municipale, c'est les villes les plus importantes du Québec situées dans les trois communautés métropolitaines. Mais ça, elle ne nous l'a pas dit.

Alors, dans la région de Québec, dans la région de Montréal et dans la région de l'Outaouais, c'est derrière des portes closes, avec des mandarins de l'État nommés par l'État, que ça va se décider, puis le citoyen n'a pas un mot à dire. Merci.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Mme la députée...

Le Président (M. Brouillet): Oui, il y avait M. le député qui avait demandé tantôt, mais on va commencer par Mme la députée de Matapédia.

Une voix: On reviendra.

Mme Doyer: Merci, M. le Président. Nous n'aurions plus à répéter les objectifs du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, que propose mon gouvernement. Tous les États modernes se donnent des structures modernes et poursuivent les mêmes objectifs que la réforme actuelle.

Ma collègue députée, la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, déclarait le 10 mai dernier: «Un des objectifs visés par le regroupement des municipalités locales est de fournir aux citoyennes et aux citoyens des services à un coût moindre ou de meilleurs services à un coût équivalent.»

Vous me permettrez de revenir sur les motifs et les principes qui ont conduit le gouvernement à cette politique. Le découpage territorial de nos municipalités remonte au siècle dernier. En milieu rural, au fil des ans, les communautés se sont scindées en villages et paroisses sans toujours que cela corresponde aux communautés historiques de base. En milieu urbain, le processus d'urbanisation a engendré un déplacement des populations vers les agglomérations entourant nos villes-centres, conduisant ainsi à un éparpillement et à un fractionnement des communautés de départ. Il en a résulté une certaine inadéquation des centres de décision des territoires et des milieux de vie. De ce fait, des difficultés de gestion et d'équité sont apparues.

Aujourd'hui, ces découpages sont devenus désuets. Il faut maintenant renforcer les communautés municipales, les outiller davantage pour qu'elles deviennent des partenaires plus efficaces en matière de développement économique, qu'elles puissent assumer de nouvelles responsabilités et fournir à leurs citoyens et citoyennes des services au meilleur rapport qualité-prix. Il est impératif d'améliorer la capacité financière et administrative des municipalités, de favoriser une utilisation optimale des ressources du milieu, comme des fonds en provenance du gouvernement, et de viser à un meilleur partage des ressources et des coûts. Tels sont les objectifs du gouvernement.

La consolidation des municipalités par le regroupement ne doit pas être regardée uniquement sous l'angle des économies d'échelle possibles. On doit plutôt y voir, pour des municipalités formant des communautés naturelles, l'occasion d'organiser un nouveau milieu de vie, de créer une nouvelle dynamique, d'offrir de meilleurs services, d'assumer des mandats nouveaux. Trop de municipalités de petite taille ont des difficultés à offrir à leur population des services de base, telles l'alimentation en eau potable, la gestion des déchets ou la protection contre les incendies.

L'objectif visé est de renforcer nos communautés locales pour qu'elles offrent de meilleurs services à tous. Le temps est venu de nous pencher sérieusement sur la pertinence de garder des structures héritées du siècle dernier. C'est ce que nous faisons. Quels que soient les journaux que nous feuilletons, il y a unanimité pour convenir que le statu quo n'est plus acceptable. Le statu quo ne répond pas à la réalité. M. le Président, en préambule, M. Pierre Vallée écrit dans Le Devoir du 21 mai dernier: «Qu'il y ait nécessité d'une refonte dans le domaine municipal, tous les intervenants semblent d'accord. L'initiative de la ministre Harel est donc bien reçue.» Pourquoi d'un côté des applaudissements et de l'autre des hauts cris? Qu'y a-t-il à perdre à ce qu'une analyse se fasse objectivement?

Je représente, M. le Président, un comté fortement rural. Nous savons toutes et tous que la Fédération québécoise des municipalités représente 1 050 municipalités locales, soit 80 % des municipalités, et que ces 1 050 municipalités comptent 30 % de la population. L'ex-président de la FQM, M. Florian Saint-Onge, disait, il y a peu de temps, comme à peu près tout le monde dans le milieu municipal: «Nous ne voulons plus du statu quo qui ne répond plus à la réalité. En ce sens, la réforme est une amorce au changement.» Il ajoute: «Elle nous inquiète.» C'est évident que les changements peuvent paraître menaçants. Les élus ne veulent pas du mur-à-mur. Toutefois, personne ne veut du statu quo. Nous ne pouvons pas faire du changement pour faire du changement, mais amener cette réforme municipale pour que le Québec atteigne l'âge moderne.

J'ai cité précédemment des propos de M. Florian Saint-Onge, je vais maintenant avec ceux de M. Frank Zampino, vice-président de l'Union des municipalités de banlieue de l'île de Montréal, qui dit en conclusion d'une entrevue: «Le temps est venu d'agir.» M. Zampino pense qu'il reste beaucoup à faire mais demeure confiant que la réforme municipale portera ses fruits. Peut-on demander que chacun mette l'épaule à la roue?

Dans d'autres sphères de notre vie, des changements sont nécessaires. On pouvait lire dernièrement: Églises à vendre: Québec facilitera les fusions de paroisses . On n'a plus besoin depuis longtemps de faire une heure à cheval pour se rendre d'une église à l'autre. Dans ce domaine spécifique, la nécessité fait loi. Pourquoi prendre autant de temps pour agir dans le domaine municipal? Là aussi nécessité fait loi. La décision du gouvernement est prise. La réforme municipale est un fait. Il est temps que tous travaillent à ce qu'elle soit le plus profitable à chacune de nos communautés et aux citoyens de l'ensemble du Québec.

Comment comprendre, M. le Président, que deux municipalités de même taille, Luceville, Sainte-Luce, soeurs jumelles, ne puissent convenir de l'urgence d'un regroupement? Les citoyens de l'une disent oui à 85 %, les citoyens de l'autre refusent à 85 %. Qui exerce pouvoir ou chantage? La démocratie n'est-elle pas l'exercice d'un droit suite à la connaissance éclairée d'une situation, non suite à des pressions ou à de la désinformation? Comment comprendre que 6 500 personnes dans une municipalité disent oui, que ces personnes soient contrées par 3 000 de trois villages autour, dans un processus démocratique? Une majorité souhaitait le regroupement. Je représente chaque citoyen et citoyenne de mon comté. À quelques kilomètres de distance, les décisions des uns sont annulées par la décision des autres. Il faut qu'à un moment donné le bon sens l'emporte, que le bien commun prévale dans notre société.

(20 heures)

M. le Président, en conclusion, ce n'est pas d'hier que le projet de réforme est sur la table. Le gouvernement libéral précédent, avec la réforme Ryan, a entrepris certains changements. Il faut du courage politique, de la détermination, le soutien de tous les membres d'un gouvernement pour réaliser les changements dérangeants et qui occasionnent, veux veux pas, des désagréments à quelques-uns en quelque part. Dans une intervention faite par M. Ryan le 7 octobre dernier, une septième et dernière proposition se lit comme suit: «Aux termes de la période fixée pour le mandat de la table de transition, il appartiendra au gouvernement de prendre les décisions qu'il jugera appropriées, de les soumettre à l'Assemblée nationale.» C'est fait.

M. le Président, la réforme sera en place le 1er janvier 2001. Elle est incontournable, indispensable. La vraie question, selon la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, Mme Harel, est la suivante: Quelles sont les conditions optimales de développement économique et social au Québec? Poser la question, c'est donner la réponse. Il faut renforcer le Québec urbain sur tout le territoire, pas seulement à Montréal, Québec, Hull, mais sur tout le territoire, partout en région où des municipalités supportent des fonctions de services qui existent pour elles, mais aussi pour de plus petites municipalités gravitant autour d'elles.

Oui, M. le Président, la réforme est entreprise. Il faut que le Québec compte sur des gens proactifs dans la réorganisation municipale. Que chaque acteur prenne la place qui est la sienne pour que cette réforme, une fois mise en place, ne compte que des gagnants. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Bien, merci. Alors, c'était une intervention de 7 min 32 s. Alors, ça change un peu le rythme de l'alternance.

Je vais accorder la parole à M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci. Alors, M. le Président, vous allez me permettre d'être surpris des propos de la députée, et je vais relever quatre éléments de son discours. Premièrement, elle nous parle de courage politique. Ça prend pas mal de courage politique pour mettre fin à un débat aussi important, puis de mettre ça dans le bâillon. C'est pas mal une démonstration de courage politique de ne pas vouloir étudier correctement chaque article de ce projet de loi là. C'est un immense courage politique de bâillonner l'opposition quand vient le temps de parler du projet de loi n° 124. Alors, pour le courage, là, on repassera.

La députée décide de citer Florian Saint-Onge en disant qu'il est d'accord avec la réforme, qu'il faut une réforme municipale. Mais, s'il y a quelqu'un qui s'est battu contre les fusions forcées, c'est Florian Saint-Onge, et la députée nous le cite en prenant comme témoin qu'il est d'accord avec son gouvernement. Il n'y a rien de plus faux.

Elle nous cite l'UMBM. M. le Président, l'UMBM a dit ceci de la réforme proposée sur les fusions forcées: «Aujourd'hui – c'est l'UMBM qui parle – nous nous ferons de farouches opposants à la Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives. L'UMBM et chacune de ses 26 villes membres se sont toujours opposées aux fusions forcées par opposition aux fusions volontaires.» La députée nous cite l'UMBM comme des partenaires dans la réforme, alors que c'est l'inverse. J'espère que le gouvernement ne pense pas que c'est leur alliée, là, parce qu'on a un problème.

Ensuite, on nous cite M. Ryan, M. Ryan qui a dit plein de choses, mais qu'on a oublié de citer au complet, en disant que c'est une réforme mal ficelée, que c'est dicté d'en haut puis que ça ne marchera pas si c'est dicté d'en haut. Mais la députée n'a pas cité ses collègues, n'a pas cité le premier ministre, n'a pas cité le ministre des Transports, n'a pas cité Jacques Parizeau, n'a pas cité le député de Saint-Jean, le député d'Iberville. C'est bizarre, hein, on choisit qui on cite. On choisit qui on cite.

Les seules personnes qu'elle n'a pas citées, ce sont les citoyens. Est-ce qu'ils vont y gagner? Est-ce qu'ils ont un droit au chapitre? Non. Est-ce que c'est important? Non. L'important, c'est ce que le gouvernement pense. L'important, c'est le choix gouvernemental. Tellement vrai qu'on a un article, 125.2, qui est absolument l'article le plus insultant pour les municipalités. Je vais vous l'expliquer avant de vous le lire. Ça dit quoi? Ça dit que, par courrier recommandé, une ville va recevoir une commande, une commande d'envoyer au gouvernement une demande de regroupement, qu'elle soit d'accord ou non. Pas insultant pas à peu près, ça?

Alors, le maire va être dans son bureau. Ses citoyens lui ont donné un mandat, ils lui ont dit: On ne veut pas se fusionner de force, on veut un débat. Alors, le maire est dans son bureau, il reçoit la lettre, il ouvre la lettre, puis on dit: M. le maire, envoyez-moi une demande de regroupement. Signé Mme la ministre. Et ça, c'est supposé être une demande de regroupement. Et on continue: Si vous ne le faites pas, je vais le faire à votre place. Vous allez me faire une demande forcée de regroupement.

Je vous lis l'article: «Le ministre peut, avec l'autorisation du gouvernement – ça, ça veut dire un décret – exiger, au moyen d'un écrit transmis par courrier recommandé ou certifié à certaines municipalités locales dont les territoires peuvent faire l'objet d'un regroupement, qu'elles lui présentent – qu'elles, ces municipalités, lui présentent – dans le délai qu'il prescrit – pas trop longtemps – une demande commune de regroupement.»

Ça, c'est pas pire, le gouvernement va forcer les municipalités à présenter une demande commune de regroupement même si elles ne sont pas d'accord. Quelle arrogance! Quelle arrogance, M. le Président! Et on est en train de continuer avec des amendements qui continuent à donner des pouvoirs à la ministre. La véritable chose à faire, c'est de retirer le projet de loi n° 124, retirer cet accroc à la démocratie, cette attaque directe aux élus municipaux, cette attaque au pouvoir des populations de décider de leur avenir.

La chose à faire, c'est de permettre de libres discussions. Bien oui, il y a des choses à régler! J'en ai proposé, des choses à régler. Réglez donc le pacte fiscal, enlevez donc la ponction de la TGE, redonnez le 356 millions par année, diversifiez les sources de revenus, payez vos «en lieu» de taxes. Ce sont toutes des choses possibles. Commençons par là.

Non, ce n'est pas ça qu'on va faire. On va continuer à puiser dans les poches des citoyens du Québec, on va forcer des fusions pour mieux pelleter des responsabilités. C'est ça que le gouvernement veut faire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, merci, M. le député de Hull. Le prochain intervenant, c'est M. le député de Roberval.

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Laprise: Juste une intervention bien courte pour rassurer mon collègue de l'opposition concernant les fusions. Le bénéfice des fusions, autant pour les citoyens que sur le plan financier, j'en ai réalisé quatre dans mon comté depuis 1994 et je peux vous dire que le maire de Dolbeau-Mistassini, justement, dans un article qu'il publiait dans sa région, nous faisait part de l'intérêt de la population face à la fusion, de la satisfaction également, également du taux de taxe qui a baissé de 0,16 $ après deux ans.

Le taux de taxe a baissé de 0,16 $, il est parti de 1,89 $, il est rendu à 1,73 $. Puis, en plus, on a donné, je crois, des meilleurs services. Quand on va rencontrer cette population-là, elle semble très satisfaite de la fusion qui a été réalisée en collaboration avec les officiers du ministère qui ont fait l'étude. Et je peux vous dire que les résultats dépassent les résultats de l'étude en termes de rentabilité au niveau de la fusion Dolbeau-Mistassini. Ça s'est fait dans l'harmonie.

Une voix: Bravo!

M. Laprise: C'est pour ça que c'est important que les municipalités demandent un support, un encadrement de la part du ministère des Affaires municipales, il vient les aider à réaliser ces choses-là, et les services sont là.

Le Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Est-ce que... Mme la ministre, quelques minutes.

Mme Harel: Est-ce que je peux demander, M. le Président, où nous en sommes dans le décompte du temps?

Le Président (M. Brouillet): Le temps, c'est à peu près... Là, il y a une couple de minutes, 14 min 30 s et 13 min 40 s, à peu près.

Mme Harel: Oui, mais comment cela se répartit-il jusqu'à maintenant?

Le Président (M. Brouillet): À peu près moitié-moitié actuellement. Alors, comme vous voulez peut-être encore intervenir, Mme la ministre, ou quelqu'un d'autre, étant donné que ça a été très bref pour... Après ça, nous reviendrons à M. le député de Hull. M. le député de Saguenay.

(20 h 10)

M. Gagnon: Oui. Juste quelques mots pour rappeler d'abord que tous conviennent que le statu quo dans le monde municipal, c'est rendu inacceptable, il faut maintenant procéder à une réforme. Beaucoup ont abordé le sujet dans les récentes décennies, mais on n'a jamais franchi les pas qui étaient nécessaires pour favoriser ces regroupements. Pourquoi? Parce qu'il y a toutes sortes d'intérêts locaux tout à fait légitimes qui viennent prendre le dessus trop souvent dans chacun de ces débats-là, de telle sorte qu'on en oublie l'avantage pour le plus grand nombre, pour l'ensemble de notre milieu, de nos régions.

J'ai beaucoup entendu des propos concernant les taux de taxe et la façon... Quels sont les avantages immédiats qu'un semblable regroupement pourrait apporter? C'est une façon d'aborder le sujet, mais ce n'est pas la seule. Vous savez, pour moi, le taux de taxe, c'est directement relié au niveau de services qu'un conseil désire donner à sa population. Si les administrés en veulent un peu plus, le conseil adaptera le niveau de services en conséquence, et le taux de taxe qui sera décrété va résulter justement de cette demande-là. Sauf que le regroupement va permettre une meilleure répartition, une meilleure équité dans l'utilisation des ressources du milieu, une mise en commun qui va permettre de satisfaire les besoins du plus grand nombre.

Ce qui s'est passé à venir jusqu'à maintenant, ce sont des considérations ultralocales qui ont empêché l'avènement de ces regroupements-là. Puis ça, c'est un peu, je dirais, c'est dramatique un peu, mais je voulais rester plus nuancé. Mais, moi, je regarde dans des régions comme les nôtres, il y a une décroissance démographique phénoménale, et ce qu'il faut constater, c'est que nous sommes de moins en moins de personnes pour payer un peu plus d'infrastructures. Quand tu es gestionnaire des deniers publics, je pense que ça, ça interpelle. Est-ce qu'on n'aurait pas intérêt à mieux utiliser l'ensemble des ressources, tant humaines que matérielles, pour nous assurer qu'on pourra dispenser des services les plus corrects possible pour nos concitoyennes, nos concitoyens?

Alors que tout le monde convient que cet objectif est louable, on ne se donne pas les moyens pour l'atteindre. La beauté que nous avons dans le projet de loi qui est devant nous, c'est que ça donne beaucoup de latitude pour nous adapter à chacune de nos réalités régionales. Et, dans ce sens-là, je pense qu'il faut voir comment ce projet de loi là, les effets seront féconds pour chacune de nos régions et les modèles qui pourront être adaptés répondront aux préoccupations qui sont exprimées dans nos milieux. Les baisses de taxes vont résulter de ce niveau de services que tu décideras de te donner, et c'est l'équité dans la répartition des ressources du milieu.

Je voudrais relever un dernier aspect qui est toujours un peu... non, ça, il n'est pas un peu, il est très démagogique. Quand on parle du droit à s'autodéterminer, nulle part, il n'y a personne qui est en mesure d'appuyer... Ça n'existe pas, un droit des villes à l'autodétermination. Partant de là, c'est biaiser tout le débat pour arriver à des conclusions qui empêchent de s'occuper des véritables problèmes de nos localités. Parce que, moi, quand je pense aux regroupements, je pense au développement de ma région, le développement économique, le développement culturel, le développement social. Et ça, le conseil qui administrera la localité regroupée aura à ce moment-là plus d'outils pour atteindre ces objectifs-là.

Aujourd'hui, quand on assiste à l'émiettement municipal, à cet éparpillement de ressources, il y a des intérêts louables, des actions louables qui se manifestent très localement et qui empêchent une meilleure mise en commun, et ça nous conduit à la paralysie, au statu quo, dont tout le monde reconnaît qu'il est inacceptable. Et maintenant il faut faire le pas qui est nécessaire pour briser cet immobilisme, cette paralysie dans laquelle on est tous enferrés depuis un trop grand nombre d'années.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saguenay. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Hull.

M. Cholette: Merci, M. le Président. J'ai écouté avec beaucoup d'attention les deux intervenants. Dans un premier cas, on nous a vanté le résultat d'une fusion fructueuse. Je m'en réjouis. Vous avez oublié de dire par contre, M. le député, que c'est une fusion volontaire, les gens étaient d'accord. Puis un mariage forcé, ce n'est jamais bon. Puis, quand ça marche, un mariage, c'est parce que les deux étaient d'accord. Alors, vous êtes un excellent exemple de ce qu'on prône. Je vous remercie d'avoir fait notre démonstration, M. le Président.

Le député de Saguenay maintenant, je l'écoutais aussi attentivement, et il nous a parlé de synergie, de concertation, tout ça, et j'ai été sensible. Écoutez, je me suis dit: Il doit avoir d'autres exemples, parce que ça, c'est théorique. Il doit avoir des exemples. Et la ministre a dû trouver cet exemple-là. Et effectivement elle nous parle de Toronto, elle nous parle d'Ottawa, beaucoup, bien qu'il n'y ait rien de prouvé, à Ottawa, ce n'est pas fait. Ils ont beaucoup de problèmes, notamment linguistiques. On me cite Mirabel. Oui, je suppose que ça va très bien à Mirabel, c'est pour ça que le gouvernement a été obligé de la décréter comme zone franche. J'imagine que c'est pour toutes ces raisons-là que ça va bien à Mirabel. Mais on reviendra sur Mirabel.

Mais, si on poursuit sur les exemples de Toronto, c'est intéressant, parce que je ne suis pas expert, moi, à Toronto et je me suis intéressé à l'opinion des députés au pouvoir à Toronto, qui sont venus nous rencontrer. Alors, ils sont venus nous dire, justement dans le cadre d'un échange avec les parlementaires québécois... Sur la question du monde municipal, les parlementaires de l'Ontario sont venus nous dire des choses extraordinaires. Je vais vous en citer quelques-unes et je vais vous citer les députés de l'Ontario.

«Il faut cesser de présenter les fusions comme une source d'économies, c'est souvent le contraire qui se produit.» Ils ont fusionné six municipalités à Toronto. Le gouvernement de l'Ontario a investi près de 800 millions pour favoriser les fusions. Ils n'étaient pas aux prises avec le Code du travail qu'on a au Québec, il n'y avait pas d'articles 45 et 46 là-bas. Ce n'est encore pas réglé, les conditions de travail, notamment des pompiers, et il n'y a pas un citoyen de la nouvelle ville de Toronto qui paie moins de taxes municipales. Pas un.

Ça poursuit. «Deux ans après la création de la mégaville de Toronto, l'enthousiasme de plusieurs députés de l'Assemblée législative ontarienne pour les fusions municipales s'est refroidi.» Ils sont plus froids. «Entre une rage de dents et de nouveaux regroupements, plusieurs choisiraient sans hésiter la première option: une rage de dents.» Les députés de l'Ontario qui nous disent ça. Pourtant la ministre nous cite ça, là, chaque jour.

«À quelques nuances près, quelle que soit leur étiquette politique, les députés ontariens s'entendent sur une chose, il est illusoire de regrouper des municipalités en pensant réaliser des économies, du moins à court terme. Selon eux, une fois passée dans le tordeur des innombrables conventions collectives à uniformiser – soit dit en passant, les régimes de retraite étaient uniformisés dans le monde municipal en Ontario, ce qui n'est pas le cas au Québec – la nouvelle ville se retrouve avec une facture plus imposante qu'avant. À Toronto, il n'y a pas eu de réduction du personnel ni de réduction de coûts.» Et c'est le président de l'Assemblée qui nous a dit ça.

Son collègue le député de Glengarry–Prescott –Russell, un de mes voisins, abonde dans le même sens. «Il faut cesser de dire qu'il s'agit d'une économie, ça entraîne plutôt une augmentation de taxes.»

Le Président (M. Brouillet): Vous avez à peu près le même temps d'utilisé. Il reste cinq minutes à peine, je vous donnerais encore deux minutes, et Mme la ministre conclurait pour trois minutes. Alors, j'aime mieux vous avertir tout de suite. Vous le voyez comme moi au tableau, c'est sur 45 minutes puis... Alors, encore deux minutes pour vous, monsieur.

M. Cholette: C'est ça. Essentiellement, M. le Président, chaque argument qui a été invoqué, que ce soit sur les objectifs de réduction de coûts, que ce soit sur les exemples ailleurs, de toute évidence le gouvernement est incapable de démontrer la logique qu'il utilise pour forcer le monde municipal à fusionner, et le dernier à être considéré et à être consulté, évidemment, c'est le citoyen du Québec.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je vous le dis avec sincérité, ce que j'ai beaucoup apprécié dans les travaux qui ont été menés par le gouvernement depuis la publication des orientations gouvernementales, c'est l'esprit d'équipe qui s'est développé, notamment au sein de l'équipe parlementaire. Et je dois remercier mes collègues qui sont des députés issus de différentes régions du Québec et qui ont, au départ, compris que l'intention était de renforcer le Québec urbain dans le Québec tout entier et qu'il ne s'agissait pas d'opposer Montréal ou la ville de Québec aux autres villes, au contraire, qu'il s'agissait de se donner des conditions optimales pour favoriser, comme l'a si bien dit le député de Saguenay, le développement économique, social, culturel, mais aussi démographique.

(20 h 20)

Il y a une tendance lourde au Québec, nous vivons présentement sous une statistique de croissance démographique d'augmentation nette de 0,3 %, et ça, pour les prochaines années, alors que nous savons que, en 2010, l'augmentation démographique sera de 0,1 %. Ce que ça signifie pour toutes les régions du Québec, c'est une décroissance démographique, sauf la région de l'Outaouais, la région métropolitaine de Montréal où l'augmentation nette de population prévue sera de 11 000 personnes par année. Alors, vous vous rendez compte que, s'il n'y avait l'immigration au Québec, nous serions en chute libre sur le plan démographique.

Alors, dans ce contexte, M. le Président, comme gouverner, c'est prévoir et avoir le sens des responsabilités, c'est bien évident qu'il nous faut certainement prévoir comment nous allons être capables, en région, d'offrir des emplois scolarisés, de plus en plus scolarisés parce que les jeunes le sont de plus en plus; comment nous allons être capables d'offrir des services à des aînés qui restent de plus en plus longtemps âgés; comment nous allons être capables de développer la nouvelle économie du savoir, pas seulement dans la métropole ou dans la capitale. C'est des questions qui sont essentielles comme l'est aussi cette question de la protection de l'environnement.

Comment imaginer protéger l'eau, l'air autrement qu'en regardant au-delà des frontières municipales? Il y a 250 usines de traitement d'eau potable qu'il faudra mettre à niveau, compte tenu de notre nouvelle réglementation en matière d'eau potable. Est-ce qu'on peut, comme auparavant, être devant des élites municipales qui réclament d'avoir chacune leur usine de traitement d'eau potable? Est-ce qu'on peut imaginer une gestion des matières résiduelles avec, dans chaque municipalité, une usine de traitement des matières résiduelles, de recyclage, de récupération?

L'aménagement du territoire, la protection de l'environnement, le développement économique, le développement social, le développement récréotouristique, le développement culturel, le développement démographique, M. le Président, exigent de nous la capacité de nous organiser pour faire face aux défis des prochaines années. Nous sommes organisés, au niveau municipal, comme nous l'étions il y a 50 ans.

Au niveau scolaire, il y a 50 ans, il y avait 1 500 commissions scolaires. Nous en comptons maintenant 72. Au niveau municipal, il y a 50 ans, il y avait 1 400 municipalités, il y en a à peu près autant maintenant.

Le Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre, le temps est écoulé.

M. Chagnon: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Oui, M. le député.

M. Chagnon: Mme la ministre... un petit peu de temps. Alors, j'aimerais tout simplement demander à la ministre si elle a l'intention de désassujettir la Communauté métropolitaine de Montréal de la loi n° 124.

Mme Harel: M. le Président, je ne sache pas que cette question se pose, puisque la loi n° 124 s'applique à l'ensemble du territoire du Québec.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, ceci met fin au débat. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements qu'on vous a remis tantôt, présentés par la ministre. Est-ce que les amendements sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Est-ce que les articles, tels qu'amendés, sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Et tous les autres articles non amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Est-ce que les intitulés et les titres des chapitres, des sections et des sous-sections du projet de loi sont adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Est-ce que l'annexe du projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Et je dois vous soumettre une motion de renumérotation du projet de loi. Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, conséquemment, je crois que nous n'avons rien oublié, mesdames? Oui, c'est complet.

Alors, ceci met fin à nos travaux. Nous avons atteint l'objectif. Je remercie tous les gens qui ont participé et, afin de pouvoir poursuivre la séance de l'Assemblée, j'inviterais les gens qui ont à se retirer à le faire, et je vais suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 24)

(Reprise à 20 h 26)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, j'inviterais M. le député de Roberval à présenter le rapport de la commission.

M. Laprise (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, et qu'elle l'a adopté avec ses amendements.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci. Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, nous sommes maintenant rendus à l'étape du projet de loi. M. le leader, oui.

M. Brassard: On va passer maintenant à l'étape de l'adoption du projet de loi, M. le Président.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives. Conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée de ce débat est limitée à un maximum de 14 minutes réparties comme suit: cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes au député indépendant. Une réplique d'une durée maximale de deux minutes est réservée à la ministre qui présente le projet de loi. Alors, Mme la ministre des Affaires municipales, je vous cède la parole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion cet après-midi de faire écho à des commentaires écrits qui m'ont été transmis par des élus municipaux qui souhaitent ardemment l'adoption de ce projet de loi. Je voudrais encore citer la lettre que m'a transmise, en copie, le maire de Mont-Laurier, lettre adressée au député de Hull, où il dit ceci: «Nous ne sommes pas ici dans un processus où seulement quelques joueurs sont en cause, mais au coeur d'une réforme où l'ensemble de notre société est en cause. Les spécialistes appellent ça le "sens de l'histoire". Sur une question qui fait appel à des intérêts évidents, il doit y avoir une instance capable de faire la part des choses et de faire ressortir l'intérêt général.» Il ajoutait: «Sortir d'une dynamique de repli sur soi vers une dynamique de perspective, c'est ce qui est en cause dans le projet de loi n° 124.»

M. le Président, il n'y a pas d'agenda caché, il n'y a pas de liste préétablie de municipalités obligées de se regrouper. Ce qu'il y a, cependant, c'est une démarche qui maintenant est encadrée législativement et, dans cette démarche, qu'on ne vienne pas prétendre que cette démarche n'est pas démocratique parce que, à ce moment-là, le mot «démocratie» est utilisé comme synonyme du mot «anarchie», parce que, à ce moment-là, ce qu'on prétend, c'est que chacun peut décider pour soi. C'est le règne du chacun pour soi. Les autres, ça ne me préoccupe pas, et je peux, en utilisant un droit de veto, maintenir le statu quo.

Quand le député de Hull parle de référendum, je l'ai dit à maintes reprises, mais c'est une pure invention, cela n'a jamais existé. Il n'y a que des consultations qui n'ont pas de caractère décisionnel. Cela a toujours été, cela ne change pas, cela n'est pas changé dans le projet de loi. Et ces consultations n'ont aucun caractère décisionnel parce que les villes ne sont pas des républiques et qu'on ne peut pas décider comme si le voisin n'existait pas, M. le Président. La société n'est pas l'addition des intérêts particuliers. La société, il y a heureusement le bien commun.

Nous avons ici, pas parce que nous sommes meilleurs que les autres, mais parce qu'il en est ainsi dans la démocratie puis qu'il y a un équilibre qui se forme, la responsabilité d'arbitrer le bien commun, effectivement. C'est ce qui nous est confié par nos concitoyens et c'est ici que la responsabilité nous amène à devoir faire les choix qui s'imposent pour relever les défis que l'avenir nous présente.

(20 h 30)

Alors, je crois, M. le Président, que ce projet de loi va, pour les années à venir, nous permettre justement de bâtir, avec les outils qui nous seront offerts maintenant, un Québec urbain capable de cesser de se concurrencer pour être mieux outillé pour affronter la concurrence, la rude, la dure concurrence internationale.

Vous ne pouvez pas imaginer combien de fois, comme ministre des Affaires municipales et de la Métropole, j'ai été interpellée par des élus municipaux qui cherchaient à obtenir un dézonage agricole pour élargir leur parc industriel. Et, ces élus à qui je faisais valoir que chez le voisin il y avait encore beaucoup d'espaces non zonés agricoles, la réponse qu'on me donnait était: Oui, mais ce n'est pas dans ma municipalité. Il faut être capable de se donner une vision du développement qui soit à l'échelle, n'est-ce pas, M. le Président, des outils nécessaires pour faire face aux changements. Alors, pour toutes ces raisons, avec l'équipe gouvernementale qui a été étroitement associée durant tous les mois que nous en avons discuté – loin d'être improvisé, vous le savez, ce projet de loi est depuis un an l'objet de très intenses discussions à tous les niveaux du gouvernement – je suis très fière qu'on puisse l'adopter ce soir.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Hull.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Depuis maintenant trois mois, la ministre a décidé de partir en croisade pour le bien commun et elle seule a décidé la définition du bien commun. Le bien commun, c'est pour les gens qu'elle l'a décidé, c'est la sélection sur le volet de certains individus au Québec, et ça, dans la définition du gouvernement du Parti québécois, c'est le bien commun. Tous les autres qui ne pensent pas comme ce gouvernement, eux autres, le bien commun, c'est la dernière des priorités. Le bien commun, c'est l'affaire de ceux qui pensent comme le gouvernement. Et, quand on ne pense pas comme lui, eh bien, le bien commun, ce n'est pas important.

La ministre me répète qu'une consultation, c'est consultatif, ou que les référendums sont consultatifs. Elle a raison, je n'ai pas de problème avec ça, selon la loi, mais la valeur morale d'une consultation, la valeur du vote des citoyens, ça, c'est plus que consultatif. Ça, c'est sacré, un vote au Québec. Quand quelqu'un décide, plutôt que de bloquer des routes, de voter avec un crayon dans un isoloir, qu'il dit: Moi, je ne suis pas d'accord avec le projet de loi, on ne l'écoute pas, de ce côté du gouvernement. On a décidé de bafouer ce droit démocratique de s'exprimer via un référendum.

C'est vrai que, dans le texte de loi, ça ne dit pas: Aussitôt que le référendum est fini, voici ce qui arrive, c'est vrai, ça, mais c'est la même personne qui va voter au référendum qui a voté pour les hommes et les femmes ici, à l'Assemblée nationale, pour les députés du Parti québécois. C'est drôle, ils l'ont accepté, ce vote-là. Ils ont trouvé ce vote-là bien bon. Quand ils ont gagné par 100 ou 200 de majorité ou ont gagné comme par 8 000, ça, ce vote-là, il était bon. Mais, quand ce vote-là s'exprime pour décider de l'avenir de leurs municipalités, là ce n'est plus bon parce que c'est des créatures, puis des créatures, ça n'a pas un mot à dire. C'est ça que le gouvernement dit.

On parle des voisins comme s'ils n'existaient pas. Mais, quand la ministre, elle, décide de fusionner un voisin qui ne veut pas se fusionner, est-ce qu'elle pense qu'il existe, ce voisin-là? Est-ce qu'elle le respecte? Bien sûr que non. Pour la ministre, il y a juste une sorte de voisins: les bons, ceux qui pensent comme elle. Ce n'est pas comme ça, la démocratie au Québec. Je ne peux pas croire qu'on est rendu là. Je ne peux pas croire que l'Assemblée nationale va être reléguée à de l'estampillage de projets de loi qui vont bafouer les droits démocratiques des citoyens du Québec. Je ne peux pas croire ça. En tout cas, comme parlementaire, je suis gêné, aujourd'hui. Je suis gêné d'être devant un projet de loi aussi méprisant pour les citoyens, qui attaque aussi directement leur droit de déterminer où ils veulent vivre.

Puis, même quand le projet de loi va être adopté, parce que le gouvernement nous a bâillonnés, le citoyen qui reste en banlieue de Québec, est-ce qu'il va changer de place automatiquement? Bien non. La ministre parlait de la démographie, tantôt. Est-ce qu'on va avoir plus de bébés demain matin? Bien non. C'est de la pure folie de prétendre qu'on va changer les limites territoriales puis que ça va tout régler les problèmes au Québec. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas la solution.

M. le Président, les citoyens du Québec, quand ils magasinent pour une maison dans une municipalité, ils choisissent une municipalité en fonction de ce qu'elle leur offre, de la qualité de vie qui est offerte, du genre de services qui y sont offerts, du niveau de taxation, du service de loisirs, de la qualité de la fonction publique, de la qualité du conseil, des atomes crochus avec cette municipalité-là. Si la ministre s'imagine qu'aujourd'hui, après nos travaux, ça va changer parce qu'on va changer le contour des municipalités, elle se trompe. Le danger avec l'attitude gouvernementale, c'est qu'elle fasse déraper tous les efforts pour régionaliser des choses à un niveau supérieur, comme par exemple les conseils métropolitains qui sont en train d'être formés. Le risque est important, le risque est évident.

M. le Président, ce gouvernement-là devrait retirer le projet de loi n° 124, devrait respecter l'opinion des citoyens, devrait dire: Je fais confiance aux citoyens parce qu'un vote, ça compte, que ce soit pour élire un conseil municipal, pour élire un député ou pour décider de l'avenir de leurs municipalités. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Hull et critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales. À ce stade-ci, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, vous avez un droit de réplique de deux minutes. Mme la ministre.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Merci. Alors, ce sera bref, M. le Président. Le député de Hull a terminé son intervention en disant: Un vote, ça compte. Il nous avait dit précédemment: C'est sacré, un vote, pour nous donner l'impression que ce vote peut décider en tout temps sur tous les sujets. C'est un sophisme. Est-ce que, à ce moment-là, le vote que les résidents de l'île des Soeurs ont tenu l'été passé pour se séparer de la ville de Verdun et former leur propre municipalité, il est sacré? Est-ce que, en conséquence, je devrais demander au gouvernement, par décret, de créer la nouvelle municipalité de l'Île des Soeurs? Est-ce qu'un vote qui amènerait les résidents du West Island, donc de l'Ouest-de-l'Île de Montréal, à décider qu'ils veulent s'annexer à la province voisine devrait nous amener à considérer qu'un vote, c'est sacré et à considérer qu'un vote, ça, c'est important? C'est du sophisme. Un sophisme, c'est ça. En fait, c'est glisser, c'est de partir d'un principe dans une société et de glisser vers une application qui est exactement le contraire de ce qui est recherché.

Alors, M. le Président, je voudrais terminer sur la définition du bien commun. Le député de Hull m'a fait grief d'avoir ma propre définition. Je lui...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. À moins d'avoir manqué un communiqué du bureau du premier ministre, le député qui se retrouve à la droite de Mme la ministre n'a pas encore gradué au Conseil des ministres.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je demanderais également au député qui était à votre droite... Alors, je prierais tous les députés qui ne sont pas à leurs banquettes respectives de bien vouloir le faire.

Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, Mme la ministre, il vous reste encore un temps de parole de 30 secondes.

(20 h 40)

Mme Harel: Très bien. Qu'il me soit simplement permis de rappeler que l'opposition, qui était au gouvernement, a non seulement escamoté la consultation par référendum, mais, en plus, elle a abrogé cette loi en 1988 pour la remplacer par l'actuelle Loi sur l'organisation territoriale municipale où il n'existe plus aucune obligation de consultation. C'est là l'état de notre droit depuis 12 ans, et cette indignation de façade, là, M. le Président, est déplorable. Et je termine en vous disant simplement...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre.

Mme Harel: Merci. Très bien.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. M. le leader en chef de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Très brièvement, M. le Président, il y aurait eu consentement, mais je pense que c'est interdit dans le cadre d'une motion de suspension des règles. Mme la ministre pourrait se plaindre à son leader.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce que le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Qu'on appelle les députés, s'il vous plaît. Nous allons suspendre quelques instants.

(20 h 41 – 20 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je demanderais au député de Papineau de bien vouloir s'asseoir. Nous avons tous pris connaissance, M. le député... S'il vous plaît! Alors, nous revenons.

Est-ce que le projet de loi n° 124, Loi modifiant la Loi sur l'organisation territoriale municipale et d'autres dispositions législatives, est adopté?


Mise aux voix

Alors, je mets maintenant aux voix l'adoption du projet de loi n° 124. Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Sirros (Laurier-Dorion), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:62

Contre:42

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Le projet de loi n° 124 est donc adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. le leader du gouvernement, est-ce que vous désirez que nous prenions le vote du député d'Abitibi-Ouest?

M. Brassard: S'il y a consentement, oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il y a consentement? M. le leader...

M. Paradis: M. le Président, le résultat du vote ayant déjà été annoncé et connaissant l'état d'esprit du député d'Abitibi-Ouest, je crois qu'il est préférable à ce moment-ci de ne pas accorder un consentement.

Des voix: Bravo!

M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Le leader de l'opposition fait un procès d'intention, le député d'Abitibi-Ouest est pour le projet de loi n° 124. Là-dessus, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous remercie de votre collaboration. Je vous remercie de votre collaboration. Alors, pour la suite des choses... S'il vous plaît. S'il vous plaît! Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demande de procéder au débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi n° 134.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, ainsi que les amendements transmis par Mme la ministre des Affaires municipales...

Des voix: ...

(21 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Je tiens à aviser les membres de cette Assemblée qu'il n'y a pas eu de suspension de travaux. Alors, ceux qui ont à quitter ces lieux pour caucus ou autres occupations, veuillez le faire immédiatement, s'il vous plaît, pour qu'on puisse débuter avec la loi n° 134. S'il vous plaît, M. le député.


Projet de loi n° 134


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis

Je disais donc: L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, ainsi que les amendements transmis par Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole et par M. le député de Westmount–Saint-Louis.

Tous les amendements de la ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 6, 15, 16, 17, 31, 67, 87, 100, 101, 105, 110, 122 à 126, 128, 129, 130, 131, 132, 135 et suivants, 139, 142, 144, 160, 162, 172, 174, 183, 185, 186, 202, 223, 224, 249.1, 249.2, 249.3, 251.1, 251.2, 252, l'Annexe V, la motion de renumérotation de la version française du projet de loi ainsi que les articles 25, 26, 50, 71, 83, 131, 174, 215 et 251 de la version anglaise du projet de loi. L'amendement de M. le député de Westmount–Saint-Louis concernant l'article 105.1 est déclaré recevable.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 134 et sur les amendements proposés est de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes au député indépendant. La ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes.

Alors, y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur ses amendements? Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, suite aux discussions qui ont eu cours au sein du comité des élus qui travaille depuis quelques mois maintenant sur le territoire métropolitain de Montréal, suite aux consultations particulières également qui se sont tenues pendant deux jours, les 25 et 26 mai dernier, nous avons donc identifié des amendements qui ont été déposés et qui seront donc partie intégrée, là, du projet de loi n° 134, notamment sur la composition du conseil de la Communauté métropolitaine et du comité exécutif.

Dans le projet original, initial, le conseil était composé de 31 membres, alors qu'avec l'amendement qui est introduit la nouvelle composition sera de 28 membres. Outre les trois membres nommés d'office, à savoir les maires de Montréal, Laval et Longueuil, il y aura six autres membres du conseil de la ville de Montréal, désignés d'ailleurs par ce conseil, deux membres du conseil de Laval et également il y aura six maires de la couronne sud et quatre maires de la couronne nord. Alors, on voit que, M. le Président, cela fera un total de 28 membres. Et le maire de Montréal sera président d'office du conseil de la Communauté métropolitaine avec vote prépondérant en cas d'égalité des voix.

Le comité exécutif est également modifié. L'amendement prévoit une composition de huit membres; il était précédemment de neuf. Donc, huit membres, dont deux de Montréal, évidemment comprenant le maire de Montréal, le maire de Laval, deux de la Rive-Sud, dont le maire de Longueuil, deux des banlieues de l'île de Montréal et un de la couronne nord. Alors donc, un comité exécutif de huit membres, un conseil de 28 membres, avec présidence au maire de Montréal et vote prépondérant en cas d'égalité des voix.

Les amendements qui sont introduits prévoient également que, en matière d'aménagement du territoire, il est proposé de modifier de manière à ce que l'on puisse introduire une période de transition. Il aurait été prématuré de faire entrer des dispositions concernant le schéma d'aménagement métropolitain sans cette période de transition. L'objectif n'étant pas un collage, là, des schémas des MRC déjà existants avec celui de la Communauté urbaine de Montréal, en fait, durant cette période de transition de cinq ans, les MRC vont conserver leur compétence, vont donc pouvoir modifier ou réviser leur schéma d'aménagement, le faire approuver par la ministre des Affaires municipales et de la Métropole qui aura cependant à requérir un avis de la CMM. Je pense que, dorénavant, on va s'habituer dans le langage populaire à appeler la Communauté métropolitaine de Montréal la CMM.

Pendant, donc, ces cinq années, la Communauté va démarrer un processus d'élaboration d'un schéma d'aménagement et de développement métropolitain. Le démarrage devra se faire six mois après la création de la CMM, donc en juillet 2001. Et elle aura ensuite jusqu'au 1er janvier 2002 pour se doter d'une vision stratégique qui sera soumise à la consultation publique. Par la suite, la Communauté aura à élaborer un projet de schéma d'aménagement et de développement métropolitain. Et ce schéma, c'est tout un défi, c'est bien évident. Donc, il devrait être finalisé au plus tard le 31 décembre 2005.

Évidemment, M. le Président, je crois que, dans ce défi, il y a justement de créer ce sentiment d'appartenance très fort, puisque les amendements introduisent également cette notion simple d'un développement harmonieux de toutes les composantes de la région métropolitaine et d'un développement qui doit se faire dans l'objectif de combler les besoins spécifiques des populations de chacune des composantes. M. le Président, je profite de l'occasion qui m'est donnée pour vous rappeler qu'il s'agit d'une interdépendance. Le tout n'est pas d'être centré sur la ville de Montréal ou l'île de Montréal, mais de se donner un schéma et un développement harmonieux. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Nous cédons maintenant la parole au président du caucus de l'opposition officielle et député de Westmount–Saint-Louis. Vous avez un temps de parole de cinq minutes, M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci beaucoup, M. le Président. Ce soir, pour toutes sortes de raisons qui ne sont pas facilement compréhensibles, nous devrons étudier dans le bâillon, c'est-à-dire une fois bâillonnés, le projet de loi n° 134, un projet de loi qui a été déposé il y a trois semaines, un projet de loi de 252 articles, donc un projet de loi qui, pour nous, était important, un projet de loi sur lequel on avait dit qu'on voterait pour le principe d'avoir une société, une Communauté métropolitaine de Montréal qui serait un organisme léger et souple et qui ferait de la planification pour l'ensemble du territoire de la grande région de Montréal et particulièrement pour... Enfin, on voyait, nous, dans ce projet de loi là, la possibilité de l'améliorer pour en faire un projet de loi qui pourrait être celui que nous recherchions.

Toutefois, on est obligés de constater que, après à peine deux demi-journées de commission parlementaire, nous nous sommes rendus à l'article 75 de ce projet de loi là. Il en reste donc encore un peu plus de 175 à étudier, malgré le fait que nous ayons déposé une dizaine d'amendements qui ont d'ailleurs été reçus, que le gouvernement a modifiés, que le gouvernement a lui-même déposés pour les adopter de façon à améliorer ce projet de loi là.

M. le Président, je suis un peu malheureux ce soir parce que nous perdons une belle chance de faire de la Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal une loi qui aurait pu être adoptée avec, en fait, le consentement de l'Assemblée nationale, une loi qui aurait pu améliorer le sort des citoyens et des concitoyennes de la grande région de Montréal. Mais, par contre, on est bien obligés d'admettre ce soir que les 56 amendements qui nous sont proposés par la ministre vont effectivement modifier le projet de loi. Mais, imaginez-vous, c'est un projet de loi qui a été déposé il y a trois semaines, et il y a déjà 56 amendements proposés par le gouvernement.

(21 h 10)

Et, au moment où on parle – au moment où on parle, c'est quand on aura adopté ce projet de loi là, eh bien – ce projet de loi sera caduque le lendemain matin parce que ce projet de loi là ne prévoit, par exemple, aucun élément, ne prévoit rien pour la continuité de la CUM. Et, au moment où on se parle, il y a des comités aviseurs qui travaillent sur l'élaboration des mandats que cette future organisation sur la base de l'île de Montréal aura. Et puis, au moment où on se parle, nous adopterons, probablement bâillonnés, ce projet de loi là, mais les comités aviseurs continueront de travailler une partie de l'été et même jusqu'en septembre, me disait-on cet après-midi. Donc, ils arriveront à des conclusions qui nous forceront à modifier ce projet de loi là.

En deux mots, M. le Président, c'est un travail bâclé auquel nous convie la ministre et un travail bâclé auquel nous convie le gouvernement, et c'est très malheureux. C'est très malheureux parce que, en plus d'avoir bâclé ce devoir, nous avons voté il y a quelques minutes un autre projet de loi, le projet de loi n° 124, qui va donner à la ministre le pouvoir de pouvoir décréter des fusions forcées sur le territoire du Québec et particulièrement sur le territoire de la Communauté métropolitaine de Montréal. J'ai posé la question à la ministre tout à l'heure si elle désassujettirait la Communauté métropolitaine de Montréal de la loi n° 124. Et elle nous a dit: La loi n° 124 va s'appliquer sur tout le territoire du Québec.

Eh bien, malheureusement, je suis obligé de constater qu'elle aura probablement, elle-même, réussi à saborder ces comités aviseurs qui verront, entre autres les maires de la couronne nord, de la couronne sud, de Laval, de Longueuil, de la banlieue de Montréal... faire en sorte de se retirer des comités aviseurs. Parce que, dans le fond, on aurait pu penser que la mise sur pied d'une Communauté métropolitaine de Montréal aurait pu certainement régler des problèmes, que ce soit de fiscalité d'agglomération, que ce soit d'autres genres de problèmes.

Or, nous nous retrouvons dans la situation, M. le Président, où ce soir nous sommes dans la situation où nous devrons obligatoirement voter sur un projet de loi qui n'aura pas été étudié en commission parlementaire, malgré le fait que nous ayons eu des meilleures dispositions pour avancer dans le dossier. Malgré tout, le bâillon, le couperet, la guillotine tombe après avoir étudié 75 des articles de ce projet de loi. Nous aurions pu continuer à étudier ce projet de loi sans qu'il soit dans le bâillon, mais, malheureusement, le gouvernement a choisi le bâillon. Le gouvernement a choisi la manière forte. Le gouvernement va vivre avec les conséquences du choix qu'il a fait. Et, malheureusement, nous aurons tous à vivre avec ce mauvais choix.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Nous allons maintenant céder la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député, vous avez un temps de parole de deux minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, on est devant le projet de loi n° 134. J'abonde tout à fait dans le même sens que le député de Westmount–Saint-Louis pour un point, je pense que tout le monde sera d'accord, c'est l'inexplicable empressement, la bousculade dans laquelle on introduit un projet de loi qui touche une centaine de municipalités, qui touche des millions de nos concitoyens et pour lequel le gouvernement... Puis, au Québec, on a vu des consultations générales. On a même vu des commissions itinérantes pour parler de notre avenir collectif. Et, dans ce cas-ci, c'est des audiences très limitées, dans une courte période de temps, qui ont permis à peine de faire le tour de la question. Sur une question, on pourrait dire: Bon, on a consulté peu parce que l'idée des gens est faite, mais l'idée n'est pas faite. Et c'est là-dessus que je veux intervenir, sur le malaise qu'on a devant un tel projet de loi; c'est l'incohérence du gouvernement.

On va prendre les gens... On va prendre une des régions qui est touchée, la région de Lanaudière. Les gens de la région de Lanaudière se font dire par la ministre des Affaires municipales: Nous, on sait où on s'en va, le gouvernement du Québec. On a la loi n° 134. Vous allez faire partie de la Communauté métropolitaine de Montréal. On sait où on s'en va. Puis ils s'en vont s'asseoir dans une autre structure, au niveau régional, qui s'appelle la région administrative de Lanaudière, puis là leur ministre régional, le ministre des Transports, leur dit: On fait partie de la région de Lanaudière puis on veut se donner, au niveau de la région de Lanaudière, du fonctionnement interne dans la région. On veut que les gens s'identifient à leur région. Le même gouvernement qui a créé des régions administratives, qui a dit aux gens: Essayez de vous retourner vers votre région, Joliette, c'est votre capitale régionale, même chose dans les Laurentides, même chose en Montérégie: Organisez-vous sous forme d'une régie régionale, vos services de santé, ils vont être intégrés sur une base régionale, le même gouvernement arrive aujourd'hui avec un projet de loi qui intègre finalement des régions rurales, des régions agricoles à l'intérieur d'une Communauté métropolitaine où les gens, au moment où on l'adopte, n'ont même pas pu se prononcer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Maintenant, en réplique, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, un temps de parole de deux minutes.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Ce sera bref. La recommandation de créer une Communauté métropolitaine à Montréal a été faite dans le cadre du rapport Pichette, déposé en décembre 1993. Il y a donc déjà de cela sept ans. Et je devrais rappeler que cette commission avait à l'époque tenu 58 séances de travail, consulté 200 personnes, elle avait reçu en audiences publiques 97 mémoires, tenu 70 séances additionnelles.

Alors, dans une première étape, le rapport Pichette concluait à la nécessité d'une Communauté sur le territoire de la région métropolitaine de recensement de Montréal. Pourquoi? Parce que, M. le Président, ce n'est pas là une invention de la commission Pichette, ni du ministre Ryan de l'époque, ni de moi-même ou du gouvernement, mais c'est là un critère, un standard international utilisé par tous les pays industrialisés pour définir l'interdépendance au sein d'un territoire à vocation métropolitaine, c'est-à-dire 400 habitants par kilomètre carré et 50 % des gens de ce territoire qui se déplacent soir et matin hors leur lieu de résidence pour gagner leur vie.

Alors, il y a six régions métropolitaines de recensement qui ont plus de 100 000 habitants. Et, quand les régions ont les mêmes caractéristiques mais moins de 100 000 habitants, on les appelle des agglomérations de recensement, et il y en a 25 au Québec. Alors, M. le Président, ce territoire qui est un même bassin d'emplois, qui est un même espace économique, c'est sur ce territoire que s'établissent les relations entre les gens. J'ai eu souvent à répéter que, chaque matin, le bulletin de circulation nous rappelle l'existence de ce territoire métropolitain, puisque c'est 540 000 personnes qui se déplacent soir et matin. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, et des amendements de Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.


Mise aux voix des amendements de la ministre

Les amendements de Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, tels que déposés, sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Chagnon: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix de l'amendement du député de Westmount–Saint-Louis

L'amendement de M. le député de Westmount– Saint-Louis est-il adopté?

Des voix: Rejeté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Rejeté.


Mise aux voix des articles amendés

Les articles du projet de loi, ainsi amendés, sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Chagnon: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Les articles du projet de loi dont la commission de l'aménagement du territoire n'a pas disposé et qui n'ont pas été amendés par les votes précédents et le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

M. Chagnon: Sur division.


Mise aux voix des annexes

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Les annexes I à IV du projet de loi sont-elles adoptées?

Des voix: Adopté.

M. Chagnon: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Alors, le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, ainsi amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Chagnon: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demande maintenant de procéder au débat sur l'adoption du projet de loi n° 134.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole propose l'adoption du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 134 est d'au plus 14 minutes dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant et une réplique d'une durée maximale de deux minutes au ministre qui présente le projet de loi.

(21 h 20)

Alors, y a-t-il des intervenants? Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, la Communauté métropolitaine de Montréal aura des compétences en matière de planification, de coordination et de financement dans un certain nombre de domaines. Ces domaines névralgiques sont ceux de l'aménagement du territoire, du développement économique, du logement social, des équipements, services et activités à caractère métropolitain, du transport en commun, de la planification et de la gestion des matières résiduelles et de la fiscalité d'agglomération que l'on appelle souvent le «partage de la croissance de l'assiette foncière».

Je vous disais donc, M. le Président, que de nombreuses études, au cours des dernières années, sont venues documenter la nécessité de doter la région métropolitaine de Montréal d'une autorité qui pense globalement même si les gens qui la composent agissent localement. J'ai parlé des travaux du rapport Pichette. J'aimerais également parler des travaux de mon collègue l'actuel ministre de la Sécurité publique qui, au moment où il a assumé la responsabilité de ministre de la Métropole, a lancé un document de consultation intitulé Vers une commission de développement de la métropole et a tenu un forum de consultation où ont participé 700 personnes issues de tous les milieux métropolitains et où 87 mémoires ont été présentés. Également, M. le Président, il faut ajouter les travaux substantiels de la commission Bédard qui remettait son rapport il y a un peu plus d'un an maintenant, commission qui, au total, avait entendu plus d'une centaine d'experts, d'organismes et d'individus à l'occasion de 13 journées d'audiences et qui avait reçu un peu plus de 118 mémoires.

Alors, s'il y a une évidence, M. le Président, c'est que, de tous côtés, cette question de la métropolisation du territoire de Montréal et sa région a été très longuement discutée depuis une décennie. Et j'ai en tête les propos de M. Pichette, qui fut président du groupe d'étude, qui, récemment, en commission parlementaire, a dit aux membres de la commission: Osez maintenant.

Et l'adoption du projet de loi n° 134, qui est une loi-cadre, va nous permettre de démarrer le compte à rebours de la loi d'application qui viendra, l'automne prochain, introduire toutes les modalités quant à la succession de la Communauté urbaine de Montréal de manière à ce qu'au 1er janvier 2001 nous puissions être dotés, à l'instar de toutes les grandes agglomérations métropolitaines dans le monde, de cet outil important que deviendra certainement la Communauté métropolitaine de Montréal.

M. le Président, j'ai dit quelques mots sur l'aménagement du territoire, je voudrais également vous signaler que nous avons encore du travail considérable à réaliser. C'est une première étape qui est franchie, et l'étape qui suit sera aussi déterminante. Mais j'ai bon espoir qu'avec la collaboration qui, jusqu'à maintenant, s'est manifestée... Et aussi, je le souhaite et je fais un appel aux élus de la couronne nord, M. le Président, je crois qu'ils ne peuvent plus laisser les sièges vacants, ceux destinés aux représentants de la population de la couronne nord. Alors, je fais un appel pour qu'ils joignent les rangs des élus qui seront désignés pour dorénavant nous permettre de progresser dans cette vision métropolitaine qui nous sera indispensable. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Alors, nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, je répète qu'il s'agit d'un travail bâclé, d'un travail qui aurait pu être sérieux, d'un travail qui aurait pu permettre à l'ensemble de la Communauté métropolitaine de Montréal de pouvoir jouir d'un projet de loi qui aurait pu faire l'objet d'une étude un peu sérieuse. Malheureusement, la ministre et le gouvernement ont décidé de couper court à toute étude et à tout travail sur le fond dans ce dossier-là.

Malgré tout, malgré les amendements que nous y avons apportés, malgré les 56 amendements dans un projet de loi qui a été apporté par le gouvernement il y a trois semaines, malgré tout, nous considérons, puis nous sommes obligés de le constater ce soir, qu'il n'y a aucune modification dans les structures supramunicipales qui seront en dessous de cette nouvelle structure qui englobera toute la région de Montréal. En deux mots, le gouvernement a choisi la voie de la sédimentation. Toutes les structures resteront en place. Il y aura encore trois sociétés de transport, il y aura encore plusieurs MRC, il y aura encore 14 CIT, 18 autres organismes qui s'occupent de transport en commun, il y aura encore cinq régies régionales, il y aura encore cinq divisions administratives. Et, pendant ce temps-là, le gouvernement vient appliquer une autre superstructure sur l'ensemble des autres.

Le gouvernement, encore une fois, nous annonce qu'il méprise l'opinion publique qui, dans plusieurs des municipalités, a posé un geste important, c'est des gens qui sont allés voter pour dire qu'ils avaient, à tout le moins, une circonspection quant à cette vision de la région de Montréal, une vision, laquelle la ministre n'a pas cru le besoin de défendre. Elle a préféré rester à l'écart au lieu de convaincre ses concitoyens, par exemple, de la région nord, au lieu de convaincre ses concitoyennes et ses concitoyens de la région de Vaudreuil, au lieu de convaincre ses concitoyennes et ses concitoyens de la région de la MRC de Lajemmerais.

On se retrouve aujourd'hui avec un projet qui n'aura pas été étudié, qui aura été étudié à peine quelques heures, sur lequel le gouvernement va avoir décidé de décréter son bien-fondé. On décrète le bien-fondé du monde. Maintenant, les amendements que nous avons vus, ils n'auront pas été étudiés. Ceux qu'on a adoptés tout à l'heure à la vitesse, là, n'auront pas été étudiés. Les gens, entre autres les parlementaires, n'ont même pas eu la chance d'avoir les amendements avant ce soir officiellement. Les parlementaires même du gouvernement ont été assez surpris hier soir de constater que, malgré les nombreuses demandes que nous avions faites, et qui ont été refusées par le gouvernement, à l'effet de recevoir les amendements à l'avance, les amendements avaient déjà été distribués dans les différents comités aviseurs. Le gouvernement a même méprisé les membres de l'Assemblée nationale. Si le gouvernement méprise les membres de l'Assemblée nationale, comment ne méprisera-t-il pas les maires et les élus des municipalités, des 105 municipalités de la Communauté métropolitaine de Montréal?

L'avenir n'est pas rose pour ce monde-là, M. le Président, d'autant plus que nous venons d'adopter à la vapeur, sans l'avoir étudié en commission parlementaire, pas cinq secondes, pas cinq secondes d'étude article par article, le projet de loi n° 124, le projet de loi n° 124 qui va donner à la ministre et au gouvernement le pouvoir de décréter des fusions forcées dans n'importe quelle région. La ministre regrettait que les municipalités de la couronne nord aient adopté une question qu'elle ne jugeait pas à propos. Elle trouvait que les mots «regroupement de municipalités» ne prévalaient pas pour la situation de la couronne nord. Elle disait: Ça a trop d'apparence avec des fusions, puis des fusions, les gens n'aiment pas ça. Malheureusement, la ministre s'est donné le pouvoir, il y a quelques minutes, de faire ces regroupements comme elle le jugera à propos. Nous ne sommes pas capables ce soir de déterminer ce qu'elle fera du pouvoir qu'elle vient de s'autoriser et du pouvoir que l'Assemblée nationale vient de lui déléguer.

M. le Président, ce soir, on nous demande d'adopter le projet de loi n° 134, un projet de loi qui est, encore une fois, je le répète, un travail bâclé, un projet de loi que des parlementaires ont cherché raisonnablement, sans faire d'obstruction aucune, d'améliorer. Le gouvernement a choisi de dire non aux parlementaires, non à ses propres membres.

(21 h 30)

Le député de Saguenay connaît bien le droit municipal. On l'a vu en commission parlementaire. L'éclairage qu'il nous proposait puis qu'il nous fournissait était de loin supérieur à ce qu'on pouvait entendre souvent du côté du gouvernement. La même chose venant du côté du député de Bertrand et aussi du côté du député de Hull. Ces trois personnes sont des spécialistes en question municipale, ils ont été élus, sauf le député de Saguenay qui était un haut fonctionnaire municipal, M. le Président. Mais ces gens-là et la députée de La Pinière ont été capables de nous donner des opinions éclairées sur ce qui devrait se passer.

En deux mots, le gouvernement a choisi la voie la moins sûre pour un projet de loi qui sera lui-même contestable et qui sera justement, probablement, malheureusement contesté parce qu'il ne changera rien, finalement, aux structures que nous connaissons, à la pléthore de structures avec lesquelles nous vivons.

M. le Président, c'est un projet de loi qui demeure un travail bâclé. Nous subirons tous les conséquences de ce problème.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Nous allons maintenant céder la parole pour un deux minutes au député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Au moment d'adopter le projet de loi n° 134, je pense qu'il est important de jeter un regard sur le bilan du gouvernement du Parti québécois, depuis son élection en 1994, sur les questions qui entourent la métropole. Tout le monde reconnaît que, sur le plan économique, sur le plan du positionnement nord-américain du Québec, sur le plan du positionnement mondial du Québec, à Montréal, c'est fondamental, la visibilité, l'organisation de Montréal, c'est absolument fondamental. Le bilan de ce gouvernement-là sur toutes les questions qui entourent la métropole, c'est absolument affreux. Ça a été des cafouillages, ça a été un ministère de la Métropole à l'intérieur duquel on a mis plus ou moins de contenu. Ça a été une commission de la métropole. Mais là quel gâchis! Je me souviens des débats à l'Assemblée nationale, des débats identiques qu'on avait, où tout le monde prévenait le gouvernement que le problème de la métropole, ce n'est pas qu'il manque de structures, c'est qu'il y en a trop.

Et le gouvernement répète de façon identique – ce n'est pas croyable, M. le Président – ses erreurs, recommence le même genre de structure, recommence à placer sur un pied d'égalité les problématiques des gens qui habitent Westmount, à quelques minutes du centre-ville, avec une fiscalité fort différente de leurs voisins de Montréal, on les place dans la même communauté puis sur un pied d'égalité avec les gens qui sont dans une région rurale à quelque part à Mirabel puis qui ont une ferme, là. On met tout ça dans le même...

C'est évident, M. le Président, que les erreurs que le gouvernement a faites, qu'il répète, sa volonté de ne pas s'attaquer aux véritables problématiques de la métropole, de les contourner par la création de nouvelles structures, c'est évident que ça va mener à nouveau à l'échec, que c'est déjà commencé. Et je l'ai dit tout à l'heure, c'est tout à fait incohérent avec ce que chacun des ministres régionaux, de la Montérégie, des Laurentides, de Lanaudière, dit à sa région où, là, il tient le discours de création, de consolidation d'une région Lanaudière, d'une région Laurentides, une région Montérégie. Comment la population peut se démêler là-dedans quand le gouvernement lui-même pose des gestes incohérents de session en session?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Rivière-du-Loup. En terminant, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, une réplique de deux minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Oui. M. le Président, la très grande majorité des intervenants qui sont venus présenter leur position en commission parlementaire se sont prononcés très favorablement pour la création de la Communauté métropolitaine de Montréal. Ils l'ont même appelée de tous leurs voeux. Et je crois que la réalité de la Communauté métropolitaine de Montréal, qui a été adoptée en 1969 ici même, à cette Assemblée nationale, est dépassée depuis longtemps. Lorsque la CUM était créée sur l'île de Montréal, il y a 30 ans, la métropole correspondait aux limites de l'île de Montréal. Il y a longtemps que cela a débordé des deux côtés. Et, en écoutant le député de Rivière-du-Loup, j'ai l'impression qu'il ne s'en est pas rendu compte encore.

Mirabel, M. le Président, est agricole mais n'est pas rurale. Ça, il va falloir arrêter au Québec de semer la confusion entre l'agricole et le rural. Laval est à 40 % zonée agricole. Est-ce qu'avec ses trois prochaines stations de métro Laval est rural? Non. Alors, il faut réconcilier l'urbain et l'agricole parce que c'est ça le défi de notre époque et c'est le défi de notre décennie puis du siècle qui commence maintenant.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois a été à la hauteur des responsabilités qu'il a voulu assumer à l'égard de Montréal. La création de la Communauté métropolitaine de Montréal ne signifie pas renoncer à nos responsabilités. Le Fonds de développement de la métropole, doté d'un montant de 100 millions de dollars, aura permis l'effet de levier de centaines et de centaines de projets. La construction, l'agrandissement plutôt du Palais des congrès que le gouvernement du Québec assume seul avec un coût de 250 millions de dollars... Déjà, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous savez, le temps passe si vite, madame.

Des voix: ...


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le vote nominal est demandé. Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. Nous allons suspendre.

(21 h 36 – 21 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous reprenons nos travaux en mettant maintenant aux voix la motion de Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole proposant l'adoption du projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. St-André (L'Assomption), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Vice-Président (M. Pinard): Je tiens à vous rappeler qu'il est excessivement difficile pour celui qui prend le vote... dans le tumulte, c'est excessivement difficile pour celui qui prend le vote. Alors, s'il vous plaît!

Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions?

Des voix: ...

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Monsieur...

M. Paradis: Avant que nous n'annonciez le résultat, j'ai cru comprendre, de mon vis-à-vis le leader du gouvernement, qu'il y aurait consentement pour reconnaître les votes des députés d'Anjou et de Papineau, sans considérer qu'il s'agisse d'un ralentissement de travail.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: Oui, oui. Ah! je vois le député de Papineau qui avait une affiche avec 12 %. C'était le taux de chômage du temps du gouvernement libéral.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous acceptez?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. Alors, j'inviterais les députés à se rendre à leur banquette respective et j'inviterais notre secrétaire à prendre leur vote.

M. Paradis: Dois-je comprendre des députés péquistes qui n'ont pas applaudi leur leader qu'ils ont interprété autrement le 12 %?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, permettez que je termine le vote, s'il vous plaît. Alors, monsieur.

Le Secrétaire adjoint: M. MacMillan (Papineau), M. Lamoureux (Anjou).

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le secrétaire général?

Le Secrétaire: Pour:64

Contre:42

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le projet de loi n° 134, Loi sur la Communauté métropolitaine de Montréal, est adopté.

Alors, j'inviterais...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! Veuillez continuer et finaliser vos caucus à l'extérieur de cette enceinte, s'il vous plaît! M. le député, s'il vous plaît!

Une voix: De quel côté, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): De part et d'autre.

Une voix: De part et d'autre?

Le Vice-Président (M. Pinard): De part et d'autre, je prierais les députés qui n'ont plus à s'exécuter en cette enceinte de bien vouloir se retirer pour qu'on puisse compléter. Bon. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais maintenant de procéder au débat sur la prise en considération du rapport de la commission qui a étudié le projet de loi n° 107.


Projet de loi n° 107


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements de la ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): Le projet de loi n° 107. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, ainsi que les amendements transmis par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Les amendements de la ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 9.1, 13 ainsi que la motion de renumérotation du projet de loi.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales concernant le projet de loi n° 107 et sur les amendements proposés est de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant. La ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes. Alors, y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur ces amendements? Alors, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez un droit de parole de cinq minutes.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Effectivement, nous terminons le processus nous permettant d'adopter le projet de loi n° 107 concernant l'équilibre budgétaire dans les établissements de santé et de services sociaux. J'ai déjà expliqué, un peu plus tôt aujourd'hui, comment le gouvernement avait dû, au moment où il était arrivé au pouvoir – notre formation politique était arrivée au pouvoir, formant le gouvernement – comment ce gouvernement que nous avons formé avait été mis devant de dures réalités, soit celles d'un déséquilibre financier majeur, un véritable gâchis. D'ailleurs, je le dis souvent ici, devant les membres de cette Assemblée, un véritable gâchis, M. le Président, puisque nous nous trouvions devant un déficit de près de 6 milliards de dollars, ce qui n'avait aucune espèce de sens.

(22 heures)

Donc, nous nous sommes retroussé les manches et surtout nous avons demandé à tous nos partenaires et à tous les citoyens et à toutes les citoyennes du Québec de contribuer à l'effort collectif pour redresser les finances publiques de l'État québécois. Et nous avons réussi à le faire. Ça s'est fait difficilement, ça s'est fait à la dure, ça s'est fait en demandant des sacrifices un peu partout à travers le Québec. Nous y sommes arrivés.

Maintenant que nous sommes arrivés à cet objectif que nous poursuivions, pas parce que c'est intéressant d'avoir un beau bilan, parce que c'est intéressant, ayant un beau bilan, de pouvoir préserver l'essentiel des services auxquels nous croyons pour répondre aux besoins essentiels des Québécois et des Québécoises, parce que nous pensons que la population québécoise nous demande d'être capable de lui offrir les services auxquels elle a droit, pour répondre aux besoins des enfants malades, aux besoins des familles qui ont, doivent et veulent avoir accès à des services de santé de qualité, parce que nous pensons que l'éducation de nos enfants, c'est essentiel et que leur formation à l'école, il faut pouvoir s'en occuper.

Donc, un équilibre budgétaire, pas pour le plaisir de dire: On a un beau bilan, mais parce que nous savons que, cela étant atteint, ça nous permet de préserver les investissements importants auxquels nous procédons année après année pour offrir à la population québécoise des services publics qui répondent à ses besoins essentiels. Cela a été fait à la dure, je le répète, mais l'objectif a été atteint.

Nous nous retrouvons donc dans une perspective où nous pouvons réinvestir dans nos services sociaux, dans nos services de santé, en éducation, à l'égard de la lutte contre la pauvreté, M. le Président. Donc, nous avons recommencé à investir concrètement dans nos institutions pour les aider à atteindre cet objectif d'un service meilleur et de meilleure qualité.

Pour ce faire, nous avons couvert les déficits accumulés, nous avons rehaussé les bases budgétaires et nous pensons maintenant qu'ayant atteint cet équilibre, bien sûr fragile dans certains cas, et bien sûr qu'il devra être revu dans d'autres parce que certains établissements ont des difficultés à l'égard de la demande nouvelle qui se présente à eux, à l'égard du coût plus élevé de certaines fournitures dans l'hôpital, à l'égard, oui, du coût plus élevé de certains médicaments qui doivent être offerts à l'hôpital ou ailleurs, dans les CLSC ou à domicile, M. le Président... Donc, ce que nous disons maintenant, c'est que, cet équilibre budgétaire étant atteint, nous pensons qu'il faut le préserver. Et la loi que je propose que nous adoptions, M. le Président, est une loi qui essentiellement vise l'équilibre budgétaire dans les établissements, en tout respect cependant pour les services à rendre auxquels ont droit les citoyens et les citoyennes du Québec, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre, de votre intervention. Nous sommes sur la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales. Je cède la parole au porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé, M. le député de Vaudreuil. M. le député, la parole est à vous.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Évidemment, je pense que la journée d'aujourd'hui demeurera une journée bien triste pour les malades, les patients et les personnes âgées du Québec. Le gouvernement a décidé en effet de bâillonner l'opposition, qui est à peu près la seule à pouvoir parler, pour faire adopter à toute vapeur, avec un rouleau compresseur, une loi de rationnement des services de santé, une loi antiservices. Ce sont les malades aux urgences, ce sont les patients sur les listes d'attente, ce sont les personnes âgées qui déjà n'ont qu'un bain par semaine qui vont payer le prix de cette proposition du gouvernement.

Vous savez, la ministre nous mentionne: Il faut préserver les services essentiels. Or, vous savez, depuis une couple de semaines, on voit déjà les ravages que fait ce projet de loi dans le réseau de la santé. Évidemment, la ministre n'aime pas ça qu'on en parle et demande également aux établissements de ne pas en parler. On se rappellera que le premier ministre et elle-même avaient rencontré un certain nombre d'hôpitaux, le 11 mai, en disant: Écoutez, ne parlez pas trop fort, et en disant: Non, si on parle de 200 millions de déficit, c'est fort exagéré.

Or, ce qui se confirme depuis, M. le Président, et tous les intervenants... c'est que le déficit appréhendé, malheureusement, à cause des coupures budgétaires et du non-rehaussement des bases budgétaires – parce que c'est faux, ce que la ministre mentionne lorsqu'elle dit qu'elle rehausse les bases budgétaires – eh bien, ça se traduit par un déficit de 200 millions.

Quels sont les effets? Seulement quelques-uns, M. le Président. Ça commence. Sainte-Justine: 10 millions de déficit, fermeture de lits, bloc opératoire au ralenti, 2 800 enfants sur la liste d'attente. Et aujourd'hui les médecins nous disent, les médecins de Sainte-Justine: Avec ce déficit-là, devrons-nous transférer nos petits patients hors du Québec pour satisfaire les exigences comptables du gouvernement? M. le Président, c'est ça, la compassion envers les malades.

La Cité de la santé de Laval, 9,6 millions de déficit, couper dans l'hémodialyse, l'oncologie, le dépistage du cancer du sein; L'Enfant-Jésus, Saint-Sacrement, laboratoires, soins infirmiers, fermeture de lits, déjà les urgences débordent; l'Hôtel-Dieu de Roberval, on met fin au programme du dépistage du cancer du sein, les délais d'attente s'allongeront; le CLSC de Sherbrooke, les services de maintien à domicile pour les personnes handicapées seront coupés; le CLSC-CHSLD du Haut-Saint-François, coupure de postes centre de jour, repas de services à domicile; le CLSC du Richelieu, coupure de services; le CLSC Les Forges à Trois-Rivières, couper le maintien à domicile pour personnes âgées et handicapées; Dolbeau-Mistassini, diminution directe des services à la clientèle, M. le Président; Haut-Richelieu, 6,9 millions de déficit, coupures de services; Sainte-Croix de Drummondville, services de gériatrie en danger et peut-être même les services d'oncologie.

M. le Président, c'est une liste partielle de ce qui est en train de se passer présentement dans le réseau à cause de cette loi antiservices que la ministre veut nous faire approuver à toute vapeur. Elle n'a pas rehaussé les bases budgétaires, M. le Président, et c'est pour ça qu'on s'en va vers des déficits appréhendés et des coupures de services avec la loi antidéficit.

Vous savez, la ministre nous parlait de courage en disant: Il faut être courageux pour faire ça. Certainement qu'il faut être courageux pour se baser sur une loi, vous savez, pour diriger les établissements par des directives à distance. M. le Président, de dire: On ne vous donne pas plus de budget; on ne vous donne pas plus de budget pour être capable de faire face à des services, à une demande accrue, pour être capable de faire face à des personnes en plus grand nombre qui viennent aux urgences – et on le voit dans la région de Montréal, encore les urgences débordent déjà comme si nous étions dans la pointe hivernale, parce qu'on a fermé des hôpitaux il y a quatre ans en disant: On va ouvrir des centres ambulatoires et on ne l'a pas fait...

Eh bien, M. le Président, de se dire: On va passer un projet de loi et dire aux hôpitaux, aux établissements, aux CLSC, aux centres d'hébergement pour les personnes âgées: On ne vous donne pas plus de budget, on vous en donne même moins, sur une base comparative, que l'année dernière; votre volume de patients va s'accroître, il y a des clientèles plus lourdes, les médicaments augmentent, les équipements médicaux, mais continuez de fournir les mêmes services, écoutez, c'est important; mais cependant ne faites pas de déficit, autrement on va vous mettre en tutelle ou on va vous envoyer des directives pour vous dire: Écoutez, ce n'est pas comme ça qu'il faut faire les choses... Alors que ce sont ces gens-là qui sont sur le terrain qui doivent donner à chaque jour, à chaque heure du jour, chaque jour de la semaine, des services aux gens qui arrivent aux urgences, des gens qui doivent se faire opérer, des personnes âgées qui attendent des soins dans les centres d'hébergement.

M. le Président, on veut faire porter l'odieux à la fois sur les administrateurs et à la fois sur les patients, l'odieux de cette loi-là. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vaudreuil. Sur ce même sujet, je cède la parole maintenant au député de Rivière-du-Loup. M. le député, la parole est à vous.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Vous voulez savoir si on est mal géré, au Québec? Alors, lisez ce projet de loi et regardez l'approche qui est utilisée par le gouvernement dans ce projet de loi là. Vous allez comprendre qu'on est drôlement mal géré, au Québec, et que les citoyens ont le droit de se poser des questions et même le devoir de se poser des questions.

(22 h 10)

On est dans un domaine, celui du réseau de la santé, où, c'est bien connu, les établissements n'ont pas de moyens. Les conventions collectives sont décidées de façon centrale, les masses salariales sont à peu près figées, les taux de rémunération, toutes les négociations se font de façon centralisée. En contrepartie, on dit aux établissements: Dorénavant, vous ne pourrez plus faire de déficit.

Alors, c'est bien évident, si tu ne contrôles pas tes moyens, tu ne contrôles pas tes leviers, toutes tes normes sont centralisées puis qu'on te fixe un budget qui est limité, là il reste à réduire les services, et c'est la façon de gérer du gouvernement du Parti québécois. On édicte le principe, on dit: Là, c'est une loi... Par une loi, on édicte le principe qu'il n'y aura plus de déficit. Plutôt que de responsabiliser les gens, leur donner les moyens, parce qu'on ne veut pas évidemment déplaire à ses amis des centrales, des establishments syndicaux, on ne veut pas déplaire à un, on ne veut pas déplaire à l'autre... Mais, à force de ne pas vouloir déplaire à ces gens-là, M. le Président, c'est les patients qui vont payer pour l'incompétence, l'incapacité de gérer du Parti québécois.

Puis on le voit tout de suite aujourd'hui. Le Parti québécois, la ministre de la Santé, ce matin, a eu la chance d'avoir l'indulgence des gens de l'opposition officielle dans un dossier qui est celui de l'hôpital Sainte-Justine, où le conseil d'administration a refusé d'adopter un budget, parce que adopter un budget tel que le demande le gouvernement, ça voudrait dire fermer le quart des salles d'opération pour les enfants du Québec, réduire le nombre de lits de soins intensifs. Je pourrais continuer à dire quelles seraient les conséquences, dans un des meilleurs hôpitaux pour enfants en Amérique du Nord, de ce que le gouvernement du Parti québécois est en train de faire par son incapacité de gérer le système de santé comme du monde.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, en fonction de votre droit de réplique, vous avez deux minutes, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Mme la ministre, la parole est à vous.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous offrons, au Québec, des services de santé de très grande qualité parce qu'il y a dans nos institutions des professionnels compétents, consciencieux et qui sont capables de mettre tous leurs talents pour soigner, pour traiter, pour soutenir les gens.

Nous investissons, dans l'ensemble de nos services de santé et de nos services sociaux, des sommes considérables, aussi importantes, toutes proportions gardées, que ce qui se fait ailleurs dans le reste du Canada, compte tenu de notre richesse collective. Nous pourrions vouloir mettre davantage; à ce moment-là il faudra être capable d'accepter aussi que ça pourrait coûter plus cher aux citoyens et aux citoyennes du Québec. On ne peut pas vouloir une chose et son contraire. On ne peut pas vouloir une chose et ne pas assumer les conséquences que cela peut avoir, M. le Président.

Mes collègues d'en face rappelaient que certaines négociations avec les employés des secteurs public et parapublic dans le domaine de la santé et des services sociaux étaient négociées centralement. C'est vrai, M. le Président. Mais, en conséquence, cependant, les sommes nécessaires pour couvrir les résultats de ces négociations sont fournies aux établissements. Alors, là aussi, contrairement à ce que disait le député de Vaudreuil, nous avons non seulement rehaussé les bases budgétaires, mais nous avons aussi couvert les résultats de ces négociations que nous avons eues avec nos employés. Les besoins illimités, les ressources limitées, et nous croyons que nous pouvons arriver à l'équilibre budgétaire. M. le Président, merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales et des amendements de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mise aux voix des amendements de la ministre

Les amendements de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix des articles amendés

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Les articles du projet de loi amendés sont-ils adoptés?

M. Marcoux: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Je m'excuse. Les articles du projet de loi amendés sont-ils adoptés? Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Les articles du projet de loi dont la commission des affaires sociales n'a pas disposé et qui n'ont pas été amendés par les votes précédents et le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

M. Marcoux: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. Le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, ainsi amendé, est-il adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division.


Adoption

Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux. Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 107 est d'au plus 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant et une réplique d'une durée maximale de deux minutes au ministre qui présente le projet de loi. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Dumont: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Je voudrais simplement vérifier que, pour priver les enfants de l'hôpital Sainte-Justine de soins, on ait au moins le quorum dans l'Assemblée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je pense qu'on va regarder si c'est suspendu, là. Qu'on appelle les députés.

(22 h 15 – 22 h 16)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, nous poursuivons sur l'adoption du projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, et je reconnais Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux pour un droit de parole d'un maximum de cinq minutes.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. J'écoutais les remarques de mon collègue le député de Rivière-du-Loup, et il sait très bien que notre intention, ce n'est pas de priver personne de services, ni les enfants soignés par le personnel remarquable de l'hôpital Sainte-Justine, ni les personnes qui souffrent de cancer, ni les personnes qui ont des problèmes cardiovasculaires, ni tout autre citoyen qui a un problème de santé et qui veut avoir accès aux services de santé.

Pour ce faire, nous pensons que ce qui est important, c'est que les ressources soient utilisées au mieux, soient partagées de façon équitable pour nous assurer d'être capables de répondre aux besoins de ces personnes sans pour autant, M. le Président – et c'est ça, l'objectif du projet de loi – devoir nous enfoncer jour après jour dans un endettement qui, ensuite, nous coûte tellement cher à rattraper.

Est-ce qu'on ne peut pas faire autrement, agir en collaboration avec nos partenaires du réseau de la santé et des services sociaux? Quand on est dans un hôpital, c'est avec le CLSC d'à côté. Quand on est au CLSC, c'est avec l'organisme communautaire, c'est avec l'hôpital du quartier, de la ville, de la région dans laquelle on se trouve, M. le Président.

Je demeure persuadée qu'avec les injections importantes de fonds auxquelles nous avons consenti depuis quelques années... Et ce n'est pas moi, comme ministre de la Santé, qui ai fait ça, ce n'est pas nécessairement même mon gouvernement qui l'a fait, nous sommes l'intermédiaire, nous sommes la courroie de transmission de nos concitoyens et de nos concitoyennes qui nous confient leurs ressources, qui nous confient une partie de leur dur labeur gagné, de leurs revenus, de leur salaire puis ils nous disent: Nous, on vous confie cette somme – pas toujours volontairement, quand on paie des taxes, on n'a pas toujours le goût de les payer – parce qu'on veut avoir des services, mais on veut que ce soit efficace, on veut que ce soit bien géré, on veut s'assurer que, lorsque vous allez prendre des décisions, vous allez faire en sorte que vous ne nous mettiez pas dans le pétrin.

Ce qu'on propose comme loi, c'est de s'assurer que les sommes qui nous sont confiées, oui, vont être versées aux gens qui dirigent nos institutions, que ce soit à Sainte-Justine, que ce soit à Sacré-Coeur, que ce soit au Centre hospitalier universitaire de Québec, que ce soit à Joliette, que ce soit à Hull, s'assurer qu'on va répartir équitablement les ressources, que ces ressources vont être bien utilisées, mais qu'on va faire ça en essayant au mieux de ne pas défoncer les budgets qui nous sont consacrés, que l'on gère pour éviter de mettre le Québec dans le trouble puis dans le trou. C'est ça qu'on se dit ensemble. Puis on demande à nos institutions, oui, de faire un effort parfois pour réorganiser des services, parfois pour intégrer certaines façons de faire, pour faire autrement ce qu'on faisait par le passé.

Mais cette fois-ci, M. le Président, on ne l'a pas fait dans un moment où on avait à demander des réductions budgétaires dans nos établissements, mais on l'a fait suite à des réinjections majeures dans nos établissements de santé et de services sociaux, rehaussant les bases budgétaires, reconnaissant la hausse salariale consentie à nos employés, de telle sorte que cela est couvert dans les nouveaux budgets qu'ont les établissements. Et j'ajoute ceci: Dans des cas exceptionnels, lorsque soit la demande soit certains services ou certaines fournitures, des médicaments par exemple, progressent de façon plus rapide que la hausse des sommes consenties pour reconnaître la progression des coûts, qu'on puisse reconnaître ces situations exceptionnelles et éventuellement les corriger.

(22 h 20)

Je pense que c'est une loi raisonnable, et raisonnablement nous devrions être capables de l'accepter, de l'assumer. À moins que le député de Vaudreuil ou le député de Rivière-du-Loup ne nous proposent d'autres avenues intéressantes, stimulantes à envisager, à proposer à la population québécoise, cette loi doit être adoptée, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, je reconnais maintenant le porte-parole de l'opposition en matière de santé, M. le député de Vaudreuil. Je vous écoute, M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis assez surpris d'entendre le discours de la ministre qui, d'une part, nous dit: On gère bien l'argent des citoyens, d'autre part, évidemment on veut que ça soit bien géré dans le réseau. Je suis entièrement d'accord avec elle.

Je voudrais simplement lui rappeler cependant: Qui a coupé 2,4 milliards dans le réseau de la santé plus que partout ailleurs au Canada, de sorte que maintenant les dépenses totales dans la santé sont moindres qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, M. le Président? Qui a mis en oeuvre les programmes de mise à la retraite pour le personnel infirmier, où le Vérificateur général nous a dit que ça a coûté 2,3 milliards en fumée, là, les mises à la retraite dans la fonction publique?

Qui a décidé de mettre des médecins à la retraite, près de 1 500 médecins à la retraite, où on a payé jusqu'à 300 000 $ à chaque médecin pour prendre leur retraite, pour dire: Arrêtez de soigner le monde? Et on apprenait hier que, à l'hôpital de Sorel, on pense fermer le centre d'obstétrique parce qu'on n'aura pas de spécialistes, alors qu'on les a payés, les spécialistes, jusqu'à 300 000 $ pour prendre leur retraite. Est-ce que ce sont les gestionnaires du réseau qui ont pris ça?

Qui a décidé de mettre tout d'un coup 4 000 infirmières à la retraite, M. le Président, et ça, contre l'avis des gestionnaires du réseau de la santé à ce moment-là, à l'automne 1996 ou au printemps 1997, qui avaient dit au ministre: Ça n'a pas de bon sens, ne faites pas ça de cette façon-là, on va le planifier comme on le fait dans les entreprises? Mais, pour répondre à des impératifs de réduction puis atteindre du déficit zéro rapidement, parce que c'était une condition gagnante, on a dit: Non, non, vous ne connaissez pas ça, vous autres, les gestionnaires du réseau, on va faire ça. Eh bien, maintenant, nous avons la plus grande pénurie d'infirmières qu'on n'a jamais eue, M. le Président, au Québec à cause de cette mauvaise décision prise par le gouvernement. Ce ne sont pas les gestionnaires du réseau, ce ne sont pas les professionnels qui ont pris cette décision-là et qui aujourd'hui fait que nous ne sommes plus capables de fournir des services. Nous allons connaître un été d'enfer, comme on dit, dans les urgences, dans les hôpitaux, parce qu'on ferme des lits: 1 225 lits seulement à Montréal.

On dit: Bien, écoutez, gérez, vous autres, les gestionnaires du réseau. On vous donne moins d'argent que vous en aviez l'année passée. La ministre est la seule à prétendre qu'elle a rehaussé les bases budgétaires. Elle n'a payé que 90 % du déficit de l'année passée puis elle nous dit: Ce déficit-là a été encouru pour donner des services qui étaient nécessaires. Bien, on vous en donne moins et on ne rehausse pas vos bases budgétaires. Cependant, on reconnaît que le volume d'activité augmente, qu'il y a plus de personnes, mais, s'il vous plaît, ne coupez pas les services. Mais, en même temps, ne faites pas de déficit. Et, si vous le faites, bien, moi, je vais vous gérer à distance, je vais vous envoyer des directives, les conseils d'administration, pour dire: C'est ça que vous devriez faire et c'est ça que vous devriez faire.

Je pense que, M. le Président, nous sommes vraiment en face d'un projet de loi qui va amener à une coupure de services, à des rationnements de services, et c'est déjà commencé – on en a donné des exemples tout à l'heure – un peu partout à travers le Québec. Lorsqu'on dit... Les médecins se demandent: Devrons-nous transférer nos petits enfants hors du Québec pour satisfaire les exigences comptables du gouvernement? M. le Président, est-ce que nous en sommes rendus là, dans un système de santé qu'on dit avoir planifié dans les moindres détails, il y a trois ou quatre ans, pour donner les meilleurs services? Bien, je pense que ça, ça indique que les décisions qui ont été prises par le gouvernement ont un impact négatif et que c'est un gâchis qu'on a fait dans le réseau, et on n'est pas capable de le réparer actuellement.

C'est le Dr Yves Lamontagne qui disait, le président du Collège des médecins: «Ça a été la pire erreur, cette décision de gérance du gouvernement.» Et aujourd'hui on en paie le prix et on va en payer le prix pendant plusieurs années, M. le Président. Et ce sont les patients, les malades et les personnes âgées dans le besoin qui vont payer le prix.

D'ailleurs, c'est assez curieux de voir que la ministre nous dit: «Écoutez, il faut faire ça tout de suite.» Or, tous les intervenants, les gestionnaires, les employés par les syndicats, les fédérations de médecins demandent à la ministre de surseoir à l'adoption d'un tel projet de loi, d'un projet de loi antiservices. La ministre dit: Non, ce n'est pas vous autres qui avez raison. Vous savez ce qui se passe dans le milieu. J'agis en collaboration, mais je décide ce que je veux, et vous n'avez pas raison de demander de reporter ce projet de loi là, qui va, selon tous ces intervenants, avoir des impacts épouvantables sur les patients, sur les malades et sur les personnes âgées, M. le Président. Et c'est faire porter sur ces gens-là l'odieux des décisions de mauvaise gérance du gouvernement du Parti québécois.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vaudreuil. Je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député, je vous écoute.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, je continue à parler d'un projet de loi assez surprenant. La ministre tout à l'heure nous disait: Ça va bien, dans le système de santé québécois. Les gens sont bien traités parce qu'on a des professionnels consciencieux. Bien oui, on a des professionnels consciencieux qui ont des quotas, qui, pendant des longues périodes, ne peuvent même plus travailler au Québec. On a des professionnels consciencieux devant des salles d'opération fermées. Ce n'est pas la question du caractère consciencieux des professionnels qu'on a, c'est leurs conditions de pratique qui font qu'on a un système de santé qui est souhaitable.

Je veux amener le gouvernement du Parti québécois encore sur la question de l'hôpital Sainte-Justine, parce que c'est majeur. Ce soir, on est réuni ici pour adopter un projet de loi pour lequel, à pareille heure hier soir, le conseil d'administration de l'hôpital Sainte-Justine... Ce n'est pas des fous, ce monde-là, c'est les gens qui administrent un hôpital où l'ensemble des Québécois et des Québécoises qui ont le malheur d'avoir des enfants malades doivent les faire soigner. Et ce conseil d'administration là a dit non. Ce conseil d'administration là a défié le gouvernement, a dit: «Nous ne voulons pas annoncer aux enfants du Québec qu'on va allonger les listes d'attente, qu'on va réduire le nombre de lits, qu'on va réduire le nombre de greffes, qu'on va prendre des retards dans l'achat de l'équipement de pointe.» Le conseil d'administration a dit non.

Si le projet de loi était au moins honnête, le projet de loi dirait: Quand le conseil d'administration dit non, c'est la ministre qui prend la tutelle, c'est la ministre qui fera ces annonces-là aux parents. Alors, ça, ça serait courageux, que la ministre elle-même dise que, en cas de refus du conseil d'administration, elle, elle prend le mandat et, elle, elle va l'annoncer aux gens, elle va prendre la décision, qu'est-ce qu'elle coupe comme services. Non, là, elle va faire porter des réductions de soins sur le dos des gens qui sont dans le réseau.

Alors, M. le Président, c'est... Puis ça, c'est le même gouvernement qui tient les discours sur la social-démocratie, la générosité sociale, puis qui fait peur au monde: En Ontario, c'est la droite. Les gens de Sainte-Justice rappellent que l'Hôpital pour enfants de Toronto, entre autres, a deux fois plus de ressources que l'hôpital Sainte-Justine. Bien, c'est ça, la réalité du gouvernement du Parti québécois.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. En conformité avec votre droit de réplique de deux minutes, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Mme la ministre, je vous écoute.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. J'écoutais le député de Vaudreuil et il disait: Qui a coupé les budgets? Ottawa, M. le Président. C'est simple, c'est Ottawa qui a coupé les budgets. Qui nous a mis dans le trou? Le Parti libéral du Québec, M. le Président. Voilà.

Des voix: Bravo!

Mme Marois: Alors, Ottawa nous a coupé les transferts sociaux pendant qu'il accumule des surplus, M. le Président. Il ne sait qu'en faire d'ailleurs. Il essaie d'imaginer toutes espèces de façons de les dépenser plutôt que de respecter les engagements qu'il a pris à l'égard de la population québécoise. Non seulement il ne fait pas ça, mais il affame la population québécoise et il fait en sorte que, nous, comme gouvernement, nous devions supporter l'odieux de ces compressions. Ça, c'est la première chose.

(22 h 30)

La deuxième, le gouvernement qui nous a précédés nous a mis dans le trou, puis il a fallu s'en sortir. Et on s'en est sorti. Oui, ça fait six ans, puis ça a pris cinq ans à le faire parce que c'était tellement profond, M. le Président, ça n'avait tellement pas d'allure. Et puis ça a été complexe, ça a été difficile, ça a été exigeant. Ça a demandé des sacrifices de la population québécoise. Nous l'avons réussi. Nous recommençons à investir dans la santé et services sociaux. C'est une année de transition. J'espère que nous pourrons continuer à ajouter des ressources supplémentaires, M. le Président, autant pour soigner les enfants que les cancéreux et que les gens qui ont des problèmes de coeur, des problèmes de santé en général, ça va de soi. Et il me semble que et l'opposition et le chef de l'ADQ auraient dû être capables de constater que la priorité des priorités dans notre gouvernement a été et demeure actuellement la santé.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux, est-il adopté?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote nominal? Alors, qu'on appelle les députés.

(22 h 31 – 22 h 38)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Si vous voulez vous asseoir. Mme la députée de La Pinière, s'il vous plaît.


Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix la motion de Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux proposant le projet de loi n° 107, Loi sur l'équilibre budgétaire du réseau public de la santé et des services sociaux.

Que ceux et celles qui sont en faveur veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

(22 h 40)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui sont contre ce projet de loi veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:66

Contre:42

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Le projet de loi n° 107 est adopté, et je vais suspendre quelques instants pour permettre aux députés qui ont d'autres vacations d'y aller avant de continuer l'Assemblée.

(Suspension de la séance à 22 h 43)

(Reprise à 22 h 44)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, veuillez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je vous demanderais, M. le Président, de procéder maintenant au débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires sociales relativement au projet de loi n° 117.


Projet de loi n° 117


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales concernant le projet de loi n° 117 est de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes au député indépendant. La ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport? Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. D'abord, nous rappeler très brièvement – puisque, de toute façon, nous avons peu de temps pour le faire à ce moment-ci – que des milliers de Québécois n'avaient pas accès à un régime d'assurance médicaments au Québec depuis, en fait, tout temps, bien sûr. Alors, on avait accès à un régime d'assurance médicaments parce que son syndicat l'avait négocié si on était dans une entreprise assez grosse pour pouvoir se permettre cela. Si donc on pouvait participer à un régime, c'était parce qu'on était dans une grande entreprise ou que dans une entreprise on avait un syndicat qui nous représentait et qui avait défendu pour nous un certain nombre de conditions de travail, dont celle de pouvoir participer à un régime d'assurance médicaments. Mais, pour 1,2 million de Québécois, il n'y avait rien de cela. Si le médicament coûtait 1 000 $, il fallait le payer. S'il coûtait 2 000 $, il fallait le payer. Évidemment, quand on a des revenus très élevés, pas de problème, mais ce n'est pas le cas de la majorité des personnes concernées dans le cas présent, et c'est plutôt l'inverse qui se passe.

Donc, dans la perspective où il nous apparaissait important que l'on puisse donner en toute équité accès à des médicaments qui de plus en plus prennent une place importante dans les thérapies, dans les outils disponibles pour soigner les personnes aux prises avec des problèmes de santé sérieux, c'était un avantage fort important que nous proposions aux Québécois et Québécoises. Nous le faisions aussi dans une autre perspective où se transformaient l'ensemble des services de santé du Québec, de telle sorte qu'il était moins nécessaire de rester très longtemps à l'hôpital ou de rester plus longtemps à l'hôpital parce que des nouvelles thérapies, des nouvelles façons de faire nous permettaient de nous retrouver plus rapidement à la maison, dans son milieu naturel, pour pouvoir y vivre sa convalescence et souvent guérir plus rapidement, M. le Président. Or, nous savons fort bien que, lorsqu'une personne est traitée à l'hôpital, ses médicaments sont payés, lorsqu'elle se retrouve à la maison, c'est à elle d'assumer ses médicaments.

L'assurance médicaments est venue bien sûr faire en sorte qu'on soit en toutes circonstances plus équitable à l'égard des personnes qui avaient besoin de tels médicaments et qui, en payant cette assurance, pouvaient être assurées en bout de piste qu'elles ne payaient pas plus qu'un certain montant, au maximum 750 $ par année, s'ajoutant la prime, M. le Président, cela va de soi. Et je dis bien «au maximum» parce que nous avions prévu – et nous avons toujours prévu – dans le régime d'assurance médicaments de nous assurer que les personnes aux plus bas revenus, les personnes avec peu de ressources, même les personnes les plus démunies d'entre nous, celles qui sont à la sécurité du revenu avec des contraintes sévères à l'emploi, donc des personnes qui peuvent difficilement avoir accès à un emploi leur permettant de gagner un revenu, sont actuellement complètement et parfaitement exemptées du paiement de prime et même d'une franchise ou de quelque contribution que ce soit lorsqu'elles ont besoin, ces personnes, de médicaments.

Nous avons donc implanté un régime dans ce contexte, couvrant ainsi 1,2 million de personnes qui ne l'étaient pas, offrant gratuitement l'accès à des médicaments aux enfants de zéro à 18 ans, aux jeunes adultes à l'université ou au cégep, étudiants jusqu'à l'âge de 25 ans, sauf que ce régime, il a été à ce point populaire que ce n'est pas 1,2 millions de personnes qui y ont adhéré mais plutôt 1,5 million de personnes, allant vers le 1,6 million de personnes, en même temps que le coût des médicaments augmentait, bon an, mal an, de près de 15 %.

C'est dans ce contexte que, si nous voulions conserver ce régime, il fallait pouvoir le corriger dans son financement, et c'est ce que la loi nous permet, c'est-à-dire le corriger en augmentant la prime, en ne touchant à aucun autre aspect du régime et surtout en nous assurant que, pour préserver l'essentiel de ce régime, même en augmentant la prime, nous ne changions pas la situation de la moitié des personnes qui adhèrent au régime et qui n'auraient pas les moyens d'augmenter leur contribution, M. le Président.

(22 h 50)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Sur la prise en considération du rapport, je reconnais maintenant le porte-parole officiel de l'opposition en matière de santé, M. le député de Vaudreuil. La parole est à vous, M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Merci, M. le Président. Alors, encore une fois, nous sommes devant un projet de loi que le gouvernement veut nous faire adopter à toute vapeur, avec le rouleau compresseur, pour aller chercher de l'argent dans les poches des personnes les plus démunies et des personnes âgées. On se rappellera qu'en 1996 le régime d'assurance médicaments avait été vendu comme étant une mesure sociale, alors que c'est devenu une mesure fiscale.

Je voudrais vous rappeler ce qui existait avant 1996. Vous savez, les personnes âgées payaient 2 $ par prescription pour leurs médicaments, jusqu'à un maximum de 100 $ par année. C'était le maximum que payaient les personnes âgées. Et, au moment où cette mesure avait été introduite, en 1992, vous savez, les députés du Parti québécois avait déchiré leurs chemises, incluant le président du Conseil du trésor dans le temps qui parlait d'une taxe déguisée surtout pour les personnes âgées qui avaient des revenus très fixes. Alors, maintenant, depuis 1996, avec le régime d'assurance médicaments, soi-disant une mesure sociale qui a été approuvée, qui a été passée pas le gouvernement du Parti québécois, on est allé chercher dans les poches des personnes âgées près de 900 millions de dollars. Neuf cents millions de dollars!

La contribution moyenne d'une personne âgée, le coût individuel moyen avant 1996 pour les médicaments, c'était 50 $. Bien, le coût individuel moyen aujourd'hui, avec le régime, pour une personne âgée, c'est 300 $, M. le Président, une augmentation en trois ans de 600 %. Je pense que vous comprendrez et que vous conviendrez avec moi que c'est une augmentation épouvantable.

Lorsqu'on regarde ce qui est proposé, quand la ministre nous dit: Les plus démunis, vous savez, on les protège dans ce système-là, je voudrais vous faire remarquer qu'une personne âgée avec un revenu fixe, des rentes fixes, commence à payer ses médicaments, la franchise, la coassurance, jusqu'à 200 $, plus commence à payer la prime avec un salaire de 10 860 $. M. le Président, quand elle a un revenu net fixe de 10 860 $, une personne âgée commence à payer la prime, paie la franchise et la coassurance. Avec un salaire de 15 235 $ – simplement pour vous donner l'évolution, voir comment le Parti québécois, gouvernement social-démocrate, traite nos personnes âgées et les personnes les plus démunies – une personne avec un revenu de 15 235 $ payait, au début de 1996, 100 $ maximum pour ses médicaments. Aujourd'hui, elle paie jusqu'à 925 $ et, avec le changement apporté, elle va payer, cette année, 950 $. Une personne âgée avec un revenu de 18 360 $ – c'est tout ce qu'elle reçoit, là – 100 $ en 1996, 925 $ maintenant, 1 100 $ dorénavant avec ce qui est proposé dans le projet de loi. On passe en quatre ans d'un maximum de 100 $ à 1 100 $.

Je pense qu'il est normal, donc, que le régime, la mise en place ait créé des problèmes énormes, pour les personnes âgées et les plus démunis, qui ont été confirmés par tous les rapports, les analyses qui ont été faites. Le rapport Tamblyn, par exemple, a indiqué que des personnes âgées et des assistés sociaux également devaient se priver de médicaments pour payer leur loyer puis payer leur nourriture, M. le Président. C'est ça qui est arrivé, l'impact que ça a eu, le régime.

Et il faut noter qu'en même temps qu'on introduisait ce régime d'assurance médicaments, une taxe déguisée, il y a eu une attaque en règle contre les personnes âgées par le gouvernement du Parti québécois, gouvernement social-démocrate: abolition du crédit d'impôt pour personnes vivant seules, récupération des crédits d'impôt en raison de l'âge et des revenus, limitation aux crédits d'impôt pour les frais médicaux, augmentation de 17 % à 10 % pour les coûts d'hébergement, et j'en passe.

M. le Président, lorsqu'on additionne tout ça, ça veut dire que, les personnes les plus démunies, les personnes âgées – et puis il va y en avoir de plus en plus, de personnes âgées dans notre société – on va les affecter extrêmement négativement. Et le rapport Tamblyn dit que ça ne règle rien, vous savez. C'est vrai que, pour les personnes âgées, le problème va continuer, et on assistera à une baisse de consommation de médicaments et à des choix déchirants qu'ils devront faire.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vaudreuil. Alors, sur la considération du rapport des affaires sociales, M. le député de Rivière-du-Loup, je vous écoute.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Au moment de modifier la Loi sur l'assurance médicaments, un premier commentaire qu'on peut se faire, c'est qu'on se souvient tous, il y a quelques années, que c'était un petit peu plus tard, c'était sous le bâillon de la même façon, il était environ 5 heures du matin, puis on adoptait l'assurance médicaments, puis il y a un certain nombre de députés, dont j'étais, à l'Assemblée qui disaient: C'est un régime qui est adopté de façon improvisée, c'est un régime dont les coûts risquent d'exploser, au lieu de dire: Il n'y a pas de problème, tout est calculé. Et puis, quelques années plus tard, on s'aperçoit que les coûts, c'est plus qu'une explosion, les coûts vont doubler. Ce que les gens vont avoir à payer sur leur rapport d'impôts, ça va doubler.

Une des explications que le gouvernement nous a données – et c'est une des réflexions que je veux amener aujourd'hui pour les concitoyens – c'est que le gouvernement nous a dit: C'est un régime d'assurance; donc, un régime d'assurance, il faut que ça se paie, il faut couvrir les risques qui sont associés aux coûts des médicaments, donc il faut qu'on assure que, par l'augmentation des primes que les gens vont payer, ils vont couvrir les coûts du régime.

Dans la même session parlementaire, le même gouvernement, par la voix du ministre des Transports, quand il y a eu des surplus à l'assurance automobile, nous a appris en cours de session qu'il y avait un 200 millions et quelques de surplus dans la caisse de l'assurance automobile. On se serait attendu que, selon le même raisonnement, le gouvernement du Parti québécois immédiatement dise: C'est un régime d'assurance; s'il y a un surplus qui se dégage dans la caisse, on va s'assurer que tout de suite l'année prochaine, à partir de maintenant, les primes pour les gens soient réduites. Bien, non! Parce que, quand la caisse de régime d'assurance fait un déficit, on double les primes, puis on fait payer le monde, puis on va en chercher dans la poche du contribuable. Mais, quand les mêmes régimes d'assurance publics gérés par le Parti québécois font des surplus, alors là on trouve toutes sortes de façons, on va redépenser cet argent-là à gauche puis à droite, puis on va faire d'autres choses, puis on ne retourne pas...

M. le Président, un régime d'assurance, là, c'est une taxe déguisée. C'est ça, pour le Parti québécois, un régime d'assurance, parce que, quand il l'applique à son avantage, c'est correct, quand c'est à l'avantage des...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, nous en sommes maintenant au droit de réplique. Je cède la parole à Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. D'abord, une première chose sur la dernière intervention du député de Rivière-du-Loup. Si nous appliquions son principe, la prime devrait être à plus de 500 $, parce que, effectivement, il y a une contribution, dans le cas présent, au régime d'assurance sous une forme d'assistance qui s'assume par l'ensemble de nos taxes. Alors, si on le chargeait comme un régime d'assurance, dans le cas présent, ça coûterait plus de 500 $ aux adhérents. Alors, on va convenir qu'à 350 $ on est pas mal loin du compte. Donc, dans ce cas présent, ça joue à l'inverse de ce que nous faisait comme démonstration le député de Rivière-du-Loup.

Le député de Vaudreuil, lui, a dit: C'est catastrophique, c'est terrible, on demande une contribution aux personnes âgées. Si on est âgé et qu'on a des ressources considérables, est-ce que ce n'est pas normal que, par solidarité, qu'on ait 55, 60, 80, on contribue à un régime à hauteur de ses ressources? Il me semble que ça n'a pas à voir avec l'âge, M. le Président, il me semble que ça a plutôt à voir avec les ressources. Et c'est dans ce sens-là que le programme d'assurance médicaments a été conçu, a été imaginé.

C'est vrai qu'il y a une contribution importante qui est demandée aux personnes âgées. Si on pouvait leur en demander un peu moins pour ceux et celles dont le revenu est un peu plus bas, ce serait préférable et j'aimerais mieux ça. Mais convenons que la contribution des personnes âgées est beaucoup moins importante que la valeur que constituent les médicaments auxquels ils ont accès, et c'est de façon considérable, M. le Président. Nous préserverons donc ce régime.

(23 heures)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Les articles du projet de loi dont la commission des affaires sociales n'a pas disposé, le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés? Adopté sur division.


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, est-il adopté? Adopté sur division.


Adoption

Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec. Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 117 est d'au plus 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant et une réplique d'une durée maximale de deux minutes au ministre qui présente le projet de loi.

Alors, je suis prêt à reconnaître Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je vais reprendre un peu là où je l'ai laissé.

Nous avons devant nous un régime d'assurance, c'est-à-dire où on paie collectivement une somme, qu'on a jugée la plus équitable possible, pour nous permettre d'avoir accès à des médicaments en toutes circonstances, peu importe l'âge de nos enfants, peu importe l'âge des gens dans la famille, peu importe la maladie à laquelle sont confrontées les personnes qui veulent avoir accès au régime.

Alors, oui, c'est vrai, nous avons voulu respecter les principes d'une assurance, mais en même temps, parce que nous savons que certains de nos concitoyens et que certaines de nos concitoyennes ont moins de moyens pour ce faire, nous avons prévu dans le régime une partie qui est plus une assistance aux personnes en difficulté qui, autrement, ne pourraient pas se payer les médicaments qui sont nécessaires pour soigner leurs maladies, pour soigner les problèmes auxquels ces mêmes personnes sont confrontées, M. le Président.

Alors, le régime est ainsi fait que, si on est, par exemple, à l'aide sociale, à la sécurité du revenu et qu'on ne peut avoir accès au marché du travail parce qu'on a des limitations majeures pour ce faire, au plan physique, au plan social, au plan mental, toutes ces personnes actuellement ont accès gratuitement, sans aucune espèce de contribution, à tous les médicaments qui leur sont nécessaires pour soigner les problèmes qu'elles ont en termes de santé, que ces médicaments coûtent 300 $ par année ou que ces médicaments coûtent 25 000 $ par année.

Parce que souvent les gens sont étonnés d'apprendre que certaines thérapies s'appuient sur des médicaments fort intéressants en termes d'effets pour soigner la maladie, mais qui sont très coûteux parce qu'ils ont exigé aussi des investissements en recherche, parce qu'ils sont consommés par un petit nombre de personnes, et que ce coût est très élevé pour de tels médicaments. Donc, nous avons exempté les personnes très mal prises, les personnes qui sont les plus mal prises de notre société et qui, malheureusement, risquent de rester dans une situation où elles devront toujours compter sur l'aide de l'État.

Ensuite, on s'est dit, et c'est l'autre partie de l'assistance dans ce régime-là: Il ne faut pas faire payer à des gens qui n'ont pas les moyens des sommes tellement considérables qu'ils ne pourraient pas avoir accès à leurs médicaments, compte tenu de la maladie dont ils sont affectés. Alors donc, il y a une proportion importante des gens qui participent au régime qui paient de petites contributions, qui, chaque mois, équivalent à 16,80 $ – enfin, mettons 17 $, pour faire un chiffre rond – même si les médicaments leur coûtent 100 $, 200 $, 300 $, 500 $. C'était voulu, nous l'avons fait, M. le Président. Eh oui! Ensuite, à une certaine tranche de revenu, on commence à payer un peu plus et, plus tard, à un plus haut revenu, on paie la somme maximale bien sûr, qui est assez élevée, mais pour un bénéfice qui est particulièrement important quand c'est la question de la santé qui est en cause, M. le Président.

Alors, c'est ce régime-là que nous avons mis en place. Il comporte une portion assurance, il comporte une portion assistance. Il a permis à un nombre considérable, à un grand nombre de Québécois et de Québécoises de pouvoir enfin être assurés, d'avoir donc accès à des médicaments de grande qualité, les derniers sur le marché. Nous sommes le seul endroit d'ailleurs à travers le Canada où cela est possible, M. le Président, d'avoir accès aux derniers médicaments découverts sans avoir aucune espèce de restriction, payés et assumés par notre régime d'assurance. Nous voulons préserver cela. Pour pouvoir préserver cela, il fallait nous assurer que le régime avait une certaine viabilité, une certaine solidité financière, et c'est la raison pour laquelle, oui, nous demanderons à des Québécois et des Québécoises de payer davantage en termes de prime pour qu'ils puissent continuer à avoir accès à ce régime, mais que l'ensemble de la population aussi puisse avoir ce même service, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Je reconnais maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé, M. le député de Vaudreuil. M. le député.


M. Yvon Marcoux

M. Marcoux: Alors, merci, M. le Président. Je dois vous dire que je suis un peu étonné d'entendre la ministre nous dire, vous savez, qu'elle a rendu service en instaurant un régime d'assurance. Les personnes âgées payaient jusqu'à un maximum de 100 $ par année pour leurs médicaments avant juillet 1996. Et, lorsque ce 2 $ avait été introduit quelques années auparavant jusqu'à un maximum de 100 $, le gouvernement du Parti québécois de maintenant, qui était alors l'opposition officielle, avait jeté les hauts cris: C'était épouvantable, c'était un scandale. Le collègue de la ministre, le président du Conseil du trésor, avait déchiré sa chemise. Lui pourtant qui est un homme calme, il avait dit: Mais, 2 $, ça n'a pas de bon sens, c'est une taxe déguisée épouvantable! Jamais on ne va accepter ça, nous sommes bien trop sociaux-démocrates pour accepter une chose comme celle-là. Ça, c'était horrible, c'était le discours. Et, maintenant, on vient dire: On vous rend service, les personnes âgées, nous avons mis en place un régime d'assurance pour vous.

À compter de 10 860 $ maintenant, vous allez payer des franchises, des coassurances puis des primes. Vous en avez, des personnes âgées, M. le Président, dans votre comté, j'en suis convaincu. À 15 235 $ de revenus, ces personnes-là, simplement, ils reçoivent une rente, point, pas d'autre chose, puis c'est fixe pendant plusieurs années. Ils payaient, avant juillet 1996, 100 $, maximum; maintenant, ils vont payer jusqu'à 950 $ par année. C'est ça, le régime d'assurance qui rend service aux personnes âgées qui ont des bas revenus. Comment on peut expliquer un tel langage de la part de la ministre?

Et, à ce point où, en 1996, quand le régime avait été mis en place, l'opposition libérale avait dit: Vous allez avoir des problèmes énormes d'application, des personnes devront choisir entre leurs médicaments, la nourriture ou leur logement, évidemment, non, le ministre du temps, il a dit: Écoutez, là, vous exagérez, vous êtes démagogues, vous faites peur au monde! Deux ans et demi après, un rapport d'un professeur d'université vient dire: Des assistés sociaux et des personnes âgées ont dû se priver de médicaments pour payer leur nourriture et payer leur logement. Est-ce que c'est nous qui sommes les démagogues, M. le Président?

Ce rapport du professeur Tamblyn dit: Pour les personnes âgées, il y a des effets pervers avec les dispositions actuelles – et là on vient augmenter la prime – des effets pervers qui font que les personnes âgées ont augmenté les visites médicales, les retours à l'hôpital, le retour à l'urgence. Les gens en santé mentale qu'on a désinstitutionnalisés... Tous les groupes qui travaillent avec les gens, vous savez, dans les milieux défavorisés, sont venus nous dire en commission parlementaire, au mois de février: N'augmentez pas les primes, ça va avoir un impact majeur sur les personnes les plus démunies. Alors, la ministre nous dit: Non, ça, ces gens-là n'ont pas raison, on va augmenter les primes. Dorénavant, vous gagnez 18 360 $, vous allez payer jusqu'à 1 100 $ pour vos médicaments, alors qu'avant juillet 1996 vous ne payiez que 100 $.

(23 h 10)

Et, en plus, on nous parle évidemment des adhérents, d'autres parties des gens. Encore en 1998, lors de la campagne électorale, évidemment, ce n'était pas le temps d'avoir des mauvaises nouvelles, à ce moment-là, c'est bien évident, le ministre du temps avait dit: Écoutez, il n'y a pas de problème, la prime, 175 $, c'est correct, ça va payer tous les coûts du régime, il n'y a pas de problème. D'ailleurs, on conviendra, puis les analyses indiquent que bien des gens ont transféré à ce régime-là parce qu'ils ont dit: Bien, écoute, c'est vrai, à 175 $, là, ça va avoir... Non, bien, là, écoutez, un an et demi après, on dit: Non, ça ne marche plus, c'est rendu 350 $. On double, on augmente de 100 %, la prime. Jamais ça ne se fait dans les régimes privés. Et là on dit: Maintenant, on s'en va vers l'inconnu. On va avoir dorénavant une clause d'indexation automatique. Donc, à chaque année, là, les personnes âgées: Attelez-vous, comme on disait dans la Beauce, vous allez payer plus. Le gouvernement évidemment va dire: Bien, écoutez, c'est le coût du régime. Pourtant, les personnes âgées n'ont rien à voir avec ça.

Alors, M. le Président, vous comprendrez qu'on ne peut cautionner une telle mesure qui va aller à l'encontre des intérêts des personnes âgées et des plus démunis dans notre société.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vaudreuil. Alors, sur ce même sujet, je reconnais maintenant le député de Rivière-du-Loup. M. le député, la parole est à vous.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, ce qu'on nous demande ce soir, c'est d'adopter un projet de loi dans un contexte assez particulier, on en conviendra, un projet de loi qui va faire doubler les primes d'assurance médicaments, instaurer un mécanisme automatique d'augmentation. Je regarde l'augmentation qu'il y a eu au cours des dernières années. Si on fait un ratio d'augmentation, une courbe d'augmentation statistique, on double de trois ans en trois ans. On est en droit de se demander: Est-ce qu'adopter le projet de loi actuel ça veut dire que les primes vont être aux alentours de 700 $ en l'an 2003, que les primes vont être d'environ de 1 400 $ en l'an 2006? Alors, on va se retrouver, là...

Le gouvernement du Parti québécois a fait une performance spectaculaire pour ce qui est de faire augmenter les revenus de l'État provenant des loteries. Il pourrait faire une performance spectaculaire pour ce qui est de faire augmenter les revenus de l'État du côté de l'assurance médicaments. Ça va devenir une nouvelle vache à lait du gouvernement. Comment, comme parlementaires, on peut adopter un projet de loi sur un programme dont les coûts visiblement sont en explosion, sont hors de contrôle, un programme pour lequel le gouvernement, il y a quelques années à peine, a, sous le bâillon, fait une adoption qui était une erreur? Il nous a dit: À 175 $, ça va marcher. Ça n'a pas marché. Puis là il nous redemande de lui faire confiance sous le bâillon, exactement dans les mêmes circonstances, en disant: À 350 $, cette fois-ci, plus un mécanisme d'augmentation automatique, on vous dit: Ça va marcher. Bien, la réponse, c'est: Non. Et tellement de nos concitoyens s'aperçoivent de plus en plus que ce qui devait être supposément un nouveau programme social – c'était un nouveau programme social qui était adopté – bien, s'il a été adopté la nuit puis s'il est modifié encore une fois la nuit, c'est un drôle de programme social que celui du PQ.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Maintenant, nous allons céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique de deux minutes. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. D'abord, je vais corriger le chef de l'ADQ, là. Il ne s'agit pas d'augmenter les revenus de l'État mais de s'assurer qu'un régime d'assurance va en partie faire ses frais. En partie, on se comprend bien? Parce que le reste est supporté...

Une voix: ...

Mme Marois: ...oui, le reste est supporté par les impôts. Et donc, effectivement, il coûte plus cher que ce qu'on ne charge aux citoyens pour leur offrir les services, M. le Président. Alors, ce ne sont pas les revenus de l'État que nous augmentons, ce sont les services aux citoyens. Et l'État, par ses revenus qui sont les impôts des citoyens, contribue à améliorer l'accessibilité aux médicaments. Alors, il faudrait refaire ses classes à cet égard parce qu'on est dans l'erreur.

Maintenant, de la part du député de Vaudreuil, mais là c'est le pur pharisaïsme, M. le Président, c'est extraordinaire, extraordinaire! Tous les jours, depuis deux semaines, on me questionne sur l'accessibilité aux médicaments, sur le fait qu'il est absolument essentiel qu'on ait accès aux meilleurs médicaments. Je suis d'accord, c'est ce que je prône, c'est ce que le régime prône, sauf que, pour ce faire, il ne faut quand même pas se mettre la tête dans le sable comme une autruche, n'est-ce pas. Ça coûte cher, les nouveaux médicaments, très cher. Et disons que ce n'est pas vraiment la faute du gouvernement. On va en convenir: Ça coûte cher. Et donc, nous pensons qu'il est important que le régime puisse en tenir compte. Mais, pour s'assurer, cependant, que ça n'allait pas être les gens les plus mal pris qui allaient devoir payer davantage, on s'est assuré de l'équité du régime, M. le Président. Ils n'aiment pas ça, l'équité, ils ne savent pas ce que c'est, de toute façon.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin au débat. Le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal. Alors, que nous appelions les députés. Nous allons suspendre quelques instants.

(23 h 16 – 23 h 25)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir, pour ceux qui ne l'ont pas encore fait.


Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix la motion de Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux proposant l'adoption du projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec.

Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Rioux (Matane), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Président: Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:65

Contre:43

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi n° 117, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et la Loi sur la Régie de l'assurance maladie du Québec, est adopté.

S'il vous plaît. Alors, nous allons procéder, et j'inviterais peut-être les députés qui ont à quitter de... Nous allons suspendre deux minutes pour permettre à ceux qui ont à quitter de quitter.

(Suspension de la séance à 23 h 30)

(Reprise à 23 h 32)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît!

Avant de poursuivre nos travaux, j'inviterais M. le leader à nous indiquer l'ordre du jour.

M. Brassard: Alors, il reste un projet de loi, M. le Président. Je vous demanderais de procéder au débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente de l'économie et du travail qui a étudié le projet de loi n° 116.


Projet de loi n° 116


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre des Ressources naturelles. Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 25, 26, 45, 55 et 70 du projet de loi.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 116 et sur les amendements proposés est de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes. Alors, il y a-t-il des interventions? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, simplement une précision. Est-ce que les amendements proposés par le ministre répondent aux demandes du comité environnemental du Parti québécois?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader.

M. Brassard: M. le Président, pas tout à fait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Très bien. Alors, merci du renseignement. Alors, pour les interventions je suis prêt à céder la parole au premier intervenant, M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, ce premier cinq minutes, je voudrais le consacrer au sujet qu'on a abordé en période de questions, c'est-à-dire les exportations ou les ventes d'électricité d'Hydro-Québec sur les marchés externes. La députée de Bonaventure, en période de questions, a fait référence à la page 83 du rapport Merrill, Lynch, et je ne l'avais pas sous les yeux évidemment, mais elle a surtout fait état des coûts pour ce qui est de l'électricité vendue sur les marchés externes par rapport aux coûts de l'électricité vendue sur le marché interne.

Je pense que la première chose qu'il faut dire, M. le Président, c'est qu'il ne faut pas comparer seulement les coûts de deux marchés différents. Il faut aussi comparer les revenus découlant de ces marchés, et c'est de cette façon-là d'ailleurs qu'on calcule le taux de rendement, le rendement qui s'établit par la différence entre les revenus générés sur un marché et les coûts à assumer sur ce même marché.

Alors, quand on ne fait pas que comparer les coûts et qu'on compare aussi les revenus, on se rend compte que les ventes sur les marchés externes, c'est extrêmement profitable et rentable pour Hydro-Québec, et donc par conséquent aussi pour le gouvernement et pour l'ensemble des Québécois, qui sont actionnaires d'Hydro-Québec.

Prenons l'année 1999, par exemple. Si on regarde les ventes régulières portant sur des contrats à long terme, il y en a de moins en moins, mais il y en a encore un certain nombre qui sont toujours en vigueur. Et, si on examine également les achats-ventes à court terme de l'électricité, sur les marchés externes toujours, et qu'on examine les ventes, les revenus générés par ces ventes, on se rend compte évidemment encore une fois de l'extrême rentabilité découlant des exportations d'électricité d'Hydro-Québec.

Par exemple, pour ce qui est des ventes régulières, la marge entre ce qui serait généré si on vendait l'électricité au tarif L, le tarif L étant de 0,035 $ du kilowattheure, alors que, les ventes régulières de contrat à long terme, le revenu unitaire est de 0,049 $ du kilowattheure, il y a donc une différence de 0,014 $ du kilowattheure, ce qui veut dire une marge supplémentaire de 122 millions. Donc, c'est 122 millions de plus. Si vous regardez les achats–ventes à court terme, la marge est de 11 millions, ce qui veut dire que, en vendant sur les marchés externes, Hydro-Québec – donc l'État québécois aussi – se trouve à avoir rentré dans ses coffres, en plus, 133 millions, ce qui équivaut, pour l'année 1999, à 15 % des bénéfices nets.

Donc, la démonstration a été faite. Quand on examine les chiffres d'Hydro-Québec, qui ont d'ailleurs été rendus publics et révélés en commission parlementaire alors qu'on a étudié le plan stratégique d'Hydro-Québec 2000-2004 – la députée de Bonaventure était présente – démonstration irréfutable, vous prenez tous les chiffres concernant les ventes d'électricité sur les marchés externes et la conclusion, c'est que ça rapporte, c'est rentable et ça contribue à augmenter et les bénéfices nets et, forcément aussi, les dividendes versés à l'État. C'est ça, la conclusion.

Il y en a encore qui continuent de faire circuler et de propager la thèse qui veut que ce soient les consommateurs à l'interne, donc les Québécois et les Québécoises de toutes catégories, qui financent les exportations d'Hydro-Québec. C'est une fausseté, tous les chiffres d'Hydro-Québec démontrent le contraire. Alors, à tout le moins, je voudrais profiter de ces quelques minutes pour démontrer que cette thèse n'est pas fondée, qu'elle est fausse, que tous les chiffres démontrent, au contraire, que les exportations, c'est extrêmement rentable et pour Hydro-Québec et pour l'ensemble, évidemment, de la société québécoise.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bonaventure.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, dans son argumentaire de cinq minutes, le ministre des Ressources naturelles vient me donner raison. Il confond encore une fois deux choses. Je lui parle de coûts de production, et le ministre nous parle de ventes. Les chiffres qui sont contenus dans le rapport de Merrill, Lynch sont des chiffres qui ont été fournis par Hydro-Québec. Et c'est clair, à la page 83, le coût de production au kilowattheure sur les marchés québécois est établi à 0,0205 $; pour le marché américain, 0,014 $. Donc, Hydro-Québec prétend elle-même, en soumettant les chiffres qu'elle a soumis, Hydro-Québec, que les Québécois subventionnent les exportations d'électricité. Le ministre ne m'a pas encore répondu. Comment se fait-il que le coût de production au sortir d'un même barrage soit différent pour le marché interne versus le marché américain? Je n'ai pas encore eu de réponse, M. le Président.

Le projet de loi n° 116 pour lequel le ministre a imposé un bâillon aujourd'hui, c'est une arnaque monumentale depuis la nationalisation de l'électricité en 1962. C'est une énorme arnaque. En fait, l'opposition a 13 bonnes raisons de demander au ministre des Ressources naturelles le retrait du projet de loi n° 116.

Première raison, le fait que la Régie de l'énergie n'ait plus aucun droit de regard sur le volet de production. L'impact sur les tarifs sera le suivant: il sera impossible dorénavant de connaître les véritables coûts de production. Alors, si on ne peut pas connaître les coûts de production, le gouvernement peut à peu près nous passer n'importe quoi.

(23 h 40)

Autre impact, M. le Président, les consommateurs vont payer pour le financement de tous les nouveaux projets hydroélectriques, même ceux qui ne sont pas justifiés par les besoins énergétiques du marché québécois, exemple, les exportations.

Troisième impact, sur les tarifs, parce que la Régie perd tout le volet production, les Québécois et les consommateurs du Québec ne bénéficieront plus des avantages du remboursement de la dette contractée par Hydro-Québec pour la construction des barrages. Et on sait très bien que les coûts d'amortissement vont diminuer d'une façon importante. Alors, qui va empocher les bénéfices liés à l'amortissement de la dette d'Hydro-Québec? C'est le gouvernement, c'est le ministre des Finances.

Autre raison qui milite en faveur du retrait du projet de loi n° 116, c'est le fait que la Régie de l'énergie perd tout droit de regard sur les exportations. L'impact sur les tarifs se situe à trois niveaux.

Aucune garantie pour les clients du Québec qu'ils ne subventionneront pas les exportations. Ce matin, à la période de questions, j'ai questionné le ministre, et le ministre n'a pas réussi à nous livrer tous les arguments, à nous faire une démonstration claire, nette et précise qu'effectivement les consommateurs du Québec ne subventionnent pas les exportations.

M. le Président, les bénéfices liés aux exportations seront dorénavant réservés au gouvernement. Et, pour ça, nous n'avons aucune garantie que les bénéfices que va retirer le gouvernement, liés aux exportations, ne se traduiront pas par une hausse des tarifs pour les consommateurs d'électricité au Québec. En d'autres termes, il se peut fort bien que les consommateurs au Québec se voient imposer une taxe déguisée sous prétexte que les exportations, c'est payant.

Troisième impact pour les consommateurs d'électricité au Québec, aucune protection de notre patrimoine hydraulique. On va vendre carrément à rabais notre électricité, évidemment pour faire des bénéfices rapides. Et le ministre l'a dit, ce qui est important, c'est le taux de rendement. Et le marché de l'exportation, c'est payant.

Autre impact sur les tarifs, M. le Président, le fait que la Régie de l'énergie perdra tout le volet des préoccupations sociales, environnementales et économiques. On fait fi du principe du développement durable, pour lequel évidemment tous les intervenants du domaine énergétique s'étaient entendus.

Trois impacts sur les tarifs pour les consommateurs. La Régie de l'énergie, dans le futur, ne sera plus obligée de viser un objectif de tarifs bas pour les volets de transport et distribution parce que, justement, la Régie n'aura plus à tenir compte des préoccupations sociales qui sont à la base du fameux pacte social qu'ont scellé les Québécois en 1962.

Autre impact sur les tarifs, la perte de transparence. Qui va décider dans l'avenir? Le premier ministre, le président d'Hydro-Québec et le ministre des Finances.

Et, bien sûr, en terminant, un autre impact sur les tarifs des consommateurs, le fait qu'on rejette tout le consensus qui a permis de créer cette instance d'importance pour le Québec, la Régie de l'énergie.

Alors, en plus de ça, le projet de loi qui est déposé en cette Chambre se fait dans un contexte où le ministre ne laisse aucune place à aucun intervenant pour que ces gens-là puissent se prononcer et puissent nous livrer leurs impressions, M. le Président. Alors, pour ces quelques secondes qu'il me reste, je vais vous dire, M. le Président, et vous rappeler que le projet de loi n° 116, qui est déposé par le ministre des Ressources naturelles, est la plus grande arnaque depuis 1962, depuis la...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le prochain intervenant, M. le député de Rivière-du-Loup, pour une intervention de deux minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, depuis le début de la soirée, on a l'occasion de voir des projets de loi où le gouvernement du Parti québécois est pour le moins dans l'incohérence. On a vu des projets de loi sur le monde municipal, où le même gouvernement, il y a quelques années, avait créé une commission de la métropole, maintenant il crée une autre structure du même genre. Il n'apprend pas de ses erreurs. On a vu tout à l'heure un projet de loi sur l'assurance médicaments, où, il n'y a pas longtemps, quelques années, le gouvernement instaurait le régime en nous disant: À 175 $, ça va très bien aller, puis il vient aujourd'hui nous démontrer qu'il avait tort à l'époque.

Là, on a une incohérence qui est un peu plus sentie. Le créateur de la Régie de l'énergie, le gouvernement qui a instauré une régie de l'énergie, qui a tenu un débat public sur les questions énergétiques et qui a conclu à la nécessité d'une régie de l'énergie vient modifier la Loi sur la Régie de l'énergie pour lui enlever des pouvoirs qui pourtant étaient au coeur de sa propre argumentation au moment de la créer.

Alors, il va de soi que, sans consultation, sans plus de discussion, pour des raisons évidentes de volonté et de contrôle, hein... C'est un réflexe assez habituel des ministres, des conseils des ministres que d'accroître le contrôle direct sur les choses. Pourtant, , la conclusion à laquelle on est arrivé, c'est que, dans l'encadrement d'un monopole, l'idée d'une régie de l'énergie pouvait être d'une certaine utilité. Mais le gouvernement, M. le Président, est directement en contradiction avec les argumentations qu'il tenait lui-même au moment de mettre en place sa Régie. Et je ne vois pas comment les parlementaires peuvent à ce moment-ci, sous le bâillon, dans un contexte où l'ensemble des intervenants s'opposent, incluant des gens de son propre parti, au projet de loi, comment on peut suivre le gouvernement, suivre le ministre dans une telle vague d'incohérence.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais céder la parole à M. le ministre pour son deux minutes de réplique.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Juste deux minutes, M. le Président, pour dire d'abord que c'est étonnant la façon dont on perçoit Hydro-Québec de l'autre côté puis en certains milieux. On a l'air de considérer Hydro-Québec comme l'Alcan, ou Abitibi-Consol, ou Bombardier, enfin une société privée.

Quand Alcan fait des profits puis des bénéfices, bien ça va à ses actionnaires sous forme de dividendes. Mais, dans le cas d'Hydro-Québec, c'est une société d'État à part entière. Ça nous appartient. Ce n'est pas dur à comprendre, ça. Ça nous appartient. Les actionnaires d'Hydro-Québec, c'est les 7 millions de Québécois puis de Québécoises. Et, quand Hydro-Québec fait des bénéfices... L'an passé, en 1999, plus de 900 millions de bénéfices et 50 % de ces bénéfices sont allés en dividendes dans les coffres de l'État, donc à peu près 450 millions de dollars de dividendes. Ça, ça va dans les coffres de l'État, puis c'est géré au nom du gouvernement par le ministre des Finances.

Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que le ministre des Finances n'a pas à imposer sous forme d'impôts et de taxes un fardeau de 450 millions de dollars aux Québécois et aux Québécoises. Quand Hydro-Québec fait des profits, c'est bon pour les Québécois et les Québécoises. Et, quand Hydro-Québec verse des dividendes, c'est bon pour les Québécois et les Québécoises. Ce n'est pas difficile à comprendre, ça. C'est une société qui nous appartient.

Alors, quand je vois les libéraux et ailleurs dans d'autres milieux s'indigner et se scandaliser que le taux de rendement d'Hydro-Québec est en croissance, que le niveau des bénéfices est en croissance de même que celui des dividendes, s'indigner de cela, il n'y a rien à comprendre, M. le Président. C'est absurde comme comportement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, et des amendements de M. le ministre des Ressources naturelles.


Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements de M. le ministre des Ressources naturelles sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.


Mise aux voix des articles amendés

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Les articles du projet de loi amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Les articles du projet de loi dont la commission de l'économie et du travail n'a pas disposé et qui n'ont pas été amendés par le vote précédent et le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, ainsi amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

(23 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Adoption

Alors, M. le ministre des Ressources naturelles propose maintenant l'adoption du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 116 est d'au plus 14 minutes: cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, deux minutes au député indépendant et une réplique d'une durée maximale de deux minutes au ministre qui présente le projet de loi. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, pour votre intervention.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Alors, M. le Président, je vais essayer très brièvement de rappeler l'origine de ce projet de loi n° 116 portant sur la Régie de l'énergie.

Le gouvernement m'a mandaté pour analyser et identifier les impacts tarifaires résultant de la mise en application de la Loi de la Régie de l'énergie telle qu'elle existe actuellement. Bien, c'est ce que j'ai fait. J'ai consulté plusieurs experts, ça a pris un certain temps, même plusieurs mois, plusieurs experts, dont en particulier Merrill, Lynch, et je leur ai donné un mandat. Le mandat était très clair: Faites des scénarios, des simulations de mise en vigueur de la loi telle qu'elle existe et identifiez les impacts sur le plan tarifaire. Bien, c'est ce qu'ils ont fait, Merrill, Lynch.

Selon leur analyse, le régime actuel, qui prévoit l'adoption d'une tarification reposant sur le coût du service en attribuant pleinement les coûts par catégories de consommateurs, combinée avec une modification de l'interfinancement dont bénéficient les clients résidentiels, provoquera une majoration importante des tarifs des clients résidentiels d'Hydro-Québec. L'analyse indique que, selon les deux scénarios retenus par Merrill, Lynch, une augmentation des tarifs des clients résidentiels de l'ordre de 27 % à 31 % serait possible alors que les autres classes tarifaires connaîtraient des réductions tarifaires de l'ordre de 6 % à 23 %. De plus, la réduction du taux de rendement de l'avoir propre en production, le plafonnement de la base de tarification et le risque de non-reconnaissance de certains actifs dans un cadre de réglementation sur la base des coûts réduiraient la rentabilité et les revenus futurs d'Hydro-Québec.

C'est-à-dire, donc, qu'il se produirait deux choses si on applique la Loi de la Régie de l'énergie telle qu'elle existe actuellement. Tarification sur la base des coûts, production, distribution, transport, il se produit quoi? Il se produit deux choses: des augmentations substantielles de 27 % à 30 % pour les clients résidentiels; des baisses pour les autres. Pourquoi vous pensez que les grands consommateurs industriels font partie de la Coalition Arc-en-ciel? Ce n'est pas par grandeur d'âme et magnanimité. Ils veulent des baisses de tarifs, c'est ça qu'ils veulent. Ils veulent abolir l'interfinancement qui favorise les clients résidentiels. C'est ça qu'ils veulent. C'est ça qui se produirait sur le plan tarifaire.

Puis, en même temps, parce qu'on plafonnerait le taux de rendement en production à 10 %, 12 %, bien là ça aurait pour effet de réduire les revenus d'Hydro-Québec, donc de réduire ses bénéfices et, par conséquent, ses dividendes. Deux choses combinées: des hausses de tarifs substantielles pour les clients résidentiels, l'éclatement de l'interfinancement, puis donc du pacte social; puis, en même temps, Hydro-Québec verrait ses revenus diminuer, et donc ses bénéfices et ses dividendes.

Alors, quand j'ai vu ça puis qu'on en a discuté au Conseil des ministres, on a conclu que ça ne pouvait pas arriver comme ça, il ne fallait pas laisser faire comme ça les choses. Il fallait apporter des amendements à la Loi sur la Régie de l'énergie pour empêcher les hausses substantielles des tarifs résidentiels puis pour empêcher Hydro-Québec de voir ses revenus diminuer substantiellement, puis donc ses bénéfices. C'est ça, l'objet du projet de loi.

Évidemment, on amende la Loi sur la Régie de l'énergie, mais où est-il écrit dans la Bible ou le Coran que la Loi sur la Régie de l'énergie doit demeurer intouchable, immuable, intangible, gravée dans la pierre comme les dix commandements sur le mont Sinaï? C'est écrit où, ça? Parce que, en certains milieux, on considère la Loi sur la Régie de l'énergie comme une espèce de texte sacré qu'on ne doit pas toucher. On passe notre temps, à l'Assemblée nationale, à amender des lois. C'est ça qu'on fait constamment, on amende des lois qui existent. Je ne vois pas pourquoi on n'amenderait pas la Loi sur la Régie de l'énergie.

D'où lui vient ce statut unique et extraordinaire d'être une loi qu'on ne peut pas toucher? Voyons donc! Surtout qu'en la touchant on empêche des hausses de tarifs pour les clients résidentiels substantielles puis qu'on permet en plus à Hydro-Québec de continuer d'avoir un taux de rendement intéressant puis de faire des profits, des bénéfices dans l'intérêt des Québécois, c'est-à-dire nous-mêmes, les actionnaires d'Hydro-Québec.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Bonaventure.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, j'aimerais peut-être rafraîchir la mémoire du ministre des Ressources naturelles parce que, de toute évidence, il a certaines absences. Je tiens à lui rappeler que la Régie de l'énergie, c'est une instance qui a été créée par son propre gouvernement en 1997. C'est l'ex-ministre des Ressources naturelles, le ministre actuel des Transports, qui a créé la Régie de l'énergie. La fameuse Bible à laquelle fait référence le ministre des Ressources naturelles, c'est la politique énergétique, M. le Président, la politique énergétique du Québec, pour laquelle tous les intervenants du domaine énergétique se sont concertés pour avoir des orientations claires et fermes en matière de développement énergétique au Québec, M. le Président, pour mettre le Québec sur la voie de la modernité en matière d'énergie.

Qu'est-ce que le ministre des Ressources naturelles fait aujourd'hui? Hein? Il pousse du revers de la main tout ce qui avait été établi par son gouvernement et par son propre collègue le ministre des Transports. Et je dois vous dire, M. le Président, que c'est très rare qu'on voit un gouvernement défaire ses propres lois, défaire des consensus qui ont été établis. Absolument. Et on l'a vu avec l'exemple du cours de conduite obligatoire pour les motocyclistes; on le voit aujourd'hui pour la Régie de l'énergie.

Le ministre des Ressources naturelles nous a dit tantôt: Hydro-Québec, ça nous appartient. Oui, Hydro-Québec, ça nous appartient. Si ça nous appartient, est-ce qu'on peut décider collectivement de ce qu'on veut pour notre société d'État? M. le Président, ce qu'on refuse, c'est de remettre l'avenir d'une société d'État d'importance aux mains de trois personnes: le président d'Hydro-Québec, le premier ministre et le ministre des Finances. Parce que leur intention est claire, ce qu'on veut faire d'Hydro-Québec, c'est une machine à imprimer de l'argent, c'est le ministre des Finances qui nous l'a dit publiquement, il s'est compromis, il nous a fait état de ses véritables intentions. Évidemment, depuis...

Des voix: ...

Mme Normandeau: Alors, M. le Président, ça suscite énormément de réactions de l'autre côté de la salle. Et ce que je constate et ce que je sens, c'est un inconfort total de la part des députés qui sont en face de nous, un total inconfort. Et je vais vous dire pourquoi. Il y a 31 associations péquistes de Montréal qui ont demandé au ministre des Ressources naturelles de retirer son projet de loi. Il y a huit députés qui sont ici, en cette Chambre, qui représentent ces associations de Montréal. De ces huit députés, trois sont ministres.

Alors, il serait peut-être intéressant qu'ils puissent ce soir voter sur le projet de loi n° 116 évidemment avec toute la liberté que pourraient leur consentir le ministre des Ressources naturelles et le premier ministre. Mais on sait comment ça marche, M. le Président, chez les péquistes, on sait comment ça marche, chez les péquistes, on l'a vu ce soir avec la réforme municipale, on le voit encore avec l'assurance médicaments et on le voit encore avec la Régie de l'énergie.

Ce projet de loi là, M. le Président, c'est un vrai scandale qui hypothèque les consommateurs d'électricité au Québec. Le ministre choisit la mauvaise voie, M. le Président. Il tente de s'autoconvaincre que le projet de loi n° 116, c'est un bon projet de loi. Tous les intervenants, partout au Québec, ont décrié le projet de loi n° 116, les militants péquistes. Il y a des députés qui sont inconfortables avec le projet de loi, et j'imagine qu'il y a eu des guerres épiques au Conseil des ministres entre le ministre des Transports, évidemment, et le président du caucus, le député d'Abitibi-Ouest...

Lui, il doit être très inconfortable avec ce projet de loi là, parce que, lui aussi, comme ex-ministre des Ressources naturelles, il a cru que le Québec pouvait faire les bons choix en créant la Régie de l'énergie. Le ministre de l'Environnement, M. le Président, on l'a vu en cette Chambre qu'il a préféré s'écraser devant le ministre des Ressources naturelles plutôt que de défendre les préoccupations environnementales de tous les citoyens du Québec.

Alors, M. le Président, l'opposition a fait la démonstration, depuis que le projet de loi n° 116 a été déposé, que ce projet de loi est un mauvais projet de loi, qui sert très mal les Québécois. Et je peux vous assurer que les impacts sur les tarifs, on pourra constater que les impacts sur les tarifs seront très importants. Après le gel tarifaire, M. le Président, accordé par Hydro-Québec jusqu'en 2004, là on pourra déjà mesurer les impacts de l'adoption du projet de loi n° 116.

M. le Président, l'opposition libérale évidemment se fait le porte-parole de tous les intervenants qui ont été bâillonnés dans le débat jusqu'à maintenant, qui ont dû faire appel aux médias pour se faire entendre. On l'a vu avec la Coalition des citoyens du Val-Saint-François. Ça fait un an et demi que je suis ici et c'est la deuxième fois en un an et demi que le ministre des Ressources naturelles fait appel au bâillon pour adopter son projet de loi. Ça fait deux fois en moins de deux ans que le ministre des Ressources naturelles se fait rabrouer par la Cour supérieure du Québec, M. le Président. Je n'ai jamais vu ça. Pour cette raison, nous voterons contre le projet de loi n° 116.

Des voix: Bravo!

(minuit)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Je vais céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup pour une intervention de deux minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur l'incohérence du gouvernement par rapport à son projet de loi puis son revirement. Et je veux revenir sur ce qu'a dit le ministre tout à l'heure, parce qu'il y a un raccourci dans le raisonnement, sur le plan économique, tout à fait.

Quand le ministre dit que, parce que les Québécois sont actionnaires à 100 % d'Hydro-Québec, ça veut dire que les profits d'Hydro-Québec leur sont automatiquement favorables, ça semble vrai, mais ça ne l'est pas. Moi, je suis un grand fervent du développement hydroélectrique, puis, effectivement, quand on vend à l'exportation puis qu'on rentre des revenus qui arrivent de l'extérieur au Québec, c'est des profits, c'est des profits nets. Ce qu'on a en surplus de nos coûts de production, c'est des profits nets dans nos coffres. Maintenant, à partir du moment où on a un certain niveau de tarifs chargés aux consommateurs du Québec, c'est à partir de là qu'on génère des profits. Demain matin, on pourrait augmenter de 5 % les tarifs pour tout le monde au Québec, puis tout le monde ici va être d'accord, à la fin de l'année, les profits d'Hydro-Québec vont avoir grossi. Est-ce que le Québec va être enrichi? La réponse est non, parce que ça va être une taxe, on va avoir pris de l'argent dans les poches des gens, elle va se retrouver dans les coffres du gouvernement, tout le monde reconnaît ça.

Mais de quelle façon les gens vont être taxés? Bien, je m'excuse, M. le Président, c'est une des façons les plus pernicieuses de taxer que des tarifs hydroélectriques trop chers. Parce que faire cuire du Kraft Dinner ou faire cuire n'importe quoi qui coûte bien cher, ça coûte le même prix. Le rond, quand il est ouvert, ça coûte le même prix. Puis chauffer un appartement qui ne coûte pas cher – pour les gens les plus démunis, on le sait, c'est des appartements mal isolés, dans bien des cas – ça coûte plus cher à chauffer qu'un appartement luxueux. Ça, c'est la réalité.

C'est tout à fait faux, le raisonnement que le ministre a tenu sur le fait que, parce qu'on est 100 % actionnaire, ça veut dire automatiquement que les profits vont être profitables. Il faut faire très, très, très attention parce que des tarifs hydroélectriques trop élevés, ça peut devenir une des façons les plus pernicieuses de taxer les plus démunis de notre société, qui sont obligés, eux aussi, de dépenser en frais d'hydroélectricité. Je demanderais au ministre d'être extrêmement prudent là-dessus. Et c'est pour ça qu'il y a du monde aujourd'hui qui demande au gouvernement, pas grand-chose, d'être cohérent avec ce qu'il a voté lui-même il y a quelques années.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles pour son droit de réplique.


M. Jacques Brassard (réplique)

M. Brassard: Il a juste oublié une chose, le député de Rivière-du-Loup, c'est que les tarifs sont gelés depuis 1998, puis ils vont l'être jusqu'en 2004.

Des voix: ...

M. Brassard: Les tarifs sont gelés!

Des voix: ...

M. Brassard: Oui, mais, mettons que, dans votre temps, ils ne baissaient pas puis ils ne gelaient pas, ils montaient, vos tarifs, hein!

Des voix: ...

M. Brassard: Oui! Parce que, dans votre temps, Hydro-Québec ne faisait pas d'argent, alors vous augmentiez les tarifs puis, en plus, vous augmentiez les impôts. Dix milliards, en quatre ans, d'impôts imposés aux contribuables québécois, ce n'est pas rien, hein! Ce n'est pas rien! Alors, c'est ça, votre bilan énergétique, le gouvernement libéral: Hydro-Québec ne fait pas d'argent, on augmente les tarifs puis, en plus, on augmente les impôts! C'est ça, la situation du régime libéral. Alors, laissez faire les leçons, hein!

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Ça va faire, les leçons!

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Il reste une minute. Je vous demanderais de ne pas intervenir, de part et d'autre, mais de revenir aux normes...

Des voix: ...

M. Brassard: Ça me fait plaisir, ça me stimule, moi, quand ils me parlent...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Moi, ce qui me stimule, c'est le respect des règles. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît...

M. Brassard: Alors, M. le Président, ce que le député de Rivière-du-Loup ne comprend pas non plus, c'est que, s'il n'y avait pas 450 millions de dividendes dans les coffres de l'État, il faudrait les trouver ailleurs. C'est comme quand vous demandez des réductions de la taxe sur l'essence de l'ordre de 500 millions, bien, ça fait un trou de 500 millions, il faut les trouver ailleurs. Évidemment, ça ne vous dérage pas, vous autres, parce que vous avez toujours vécu avec des déficits astronomiques, hein! Six milliards, le dernier, ça ne vous dérange pas?

Des voix: Bravo!

M. Brassard: Bien, nous, ça nous dérange. Les déficits, on n'en veut pas. On veut l'équilibre puis, en même temps, on veut des dividendes puis on veut des tarifs bas.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Le projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): On demande le vote par appel nominal? Nous allons appeler les députés. Nous allons suspendre quelques minutes.

(00 h 5 – 00 h 13)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, mesdames, messieurs, si vous voulez prendre place, nous allons procéder au vote. Je mets maintenant aux voix la motion de M. le ministre des Ressources naturelles proposant l'adoption du projet de loi n° 116, Loi modifiant la Loi sur la Régie de l'énergie et d'autres dispositions législatives.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Landry (Verchères), M. Legault (Rousseau), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Rochon (Charlesbourg), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), Mme Maltais (Taschereau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Cliche (Vimont), M. Jolivet (Laviolette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Perreault (Mercier), M. Bertrand (Portneuf), M. Julien (Trois-Rivières), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Baril (Berthier), M. Boisclair (Gouin), Mme Caron (Terrebonne), M. Facal (Fabre), Mme Goupil (Lévis), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Simard (Richelieu), M. Bertrand (Charlevoix), M. Lachance (Bellechasse), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Payne (Vachon), M. Beaumier (Champlain), Mme Charest (Rimouski), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Laprise (Roberval), M. Paré (Lotbinière), M. Jutras (Drummond), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Pelletier (Abitibi-Est)...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, je vous inviterais, s'il vous plaît, là, à être un peu plus calmes pour ne pas crier trop fort et permettre à monsieur de bien faire son travail. Alors, nous allons poursuivre.

Le Secrétaire adjoint: M. Boucher (Johnson), M. Kieffer (Groulx), Mme Doyer (Matapédia), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Lelièvre (Gaspé), M. Gagnon (Saguenay), M. Côté (La Peltrie), Mme Barbeau (Vanier), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Montmorency), M. Cousineau (Bertrand), Mme Blanchet (Crémazie), M. Paquin (Saint-Jean), M. Désilets (Maskinongé), Mme Signori (Blainville), M. Duguay (Duplessis), M. Geoffrion (La Prairie), M. Bédard (Chicoutimi), Mme Papineau (Prévost), M. Bergeron (Iberville), M. Boulianne (Frontenac), M. Labbé (Masson), M. Côté (Dubuc).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Benoit (Orford), M. Laporte (Outremont), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Després (Limoilou), M. Williams (Nelligan), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Brodeur (Shefford), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Mulcair (Chomedey), M. Fournier (Châteauguay), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Bordeleau (Acadie), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Lafrenière (Gatineau), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Pelletier (Chapleau), M. Ouimet (Marquette), Mme Beauchamp (Sauvé), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Normandeau (Bonaventure), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Whissell (Argenteuil), M. Cholette (Hull), M. Tranchemontagne (Mont-Royal), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lamoureux (Anjou).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, peut-être qu'avant que le vote... Oui, peut-être...

M. Brassard: Oui, c'est parce qu'il y a la députée de Bourget, M. le Président, qui pourrait peut-être voter, s'il y avait consentement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, il y a consentement. Il y aura également consentement pour que le vote des deux prédécesseurs du ministre de l'Énergie, soit le député de Joliette et actuellement ministre des Transports et le député d'Abitibi-Ouest et whip du parti puissent également enregistrer leur vote.

Une voix: Le président du caucus.

M. Paradis: Le président du caucus?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons nous contenter de ceux qui sont présents pour le moment.

Le Secrétaire: Pour:63

Contre:43

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi n° 116 est adopté. Ayant terminé l'ordre du jour, nous allons ajourner nos travaux à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 0 h 19)