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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 9 novembre 1999 - Vol. 36 N° 60

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Quatorze heures deux minutes)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes


Présentation de projets de loi

Alors, nous abordons immédiatement les affaires courantes. À l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je voudrais vous référer d'abord à l'article d.


Projet de loi n° 82

Le Président: Très bien. À cet article du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor présente le projet de loi n° 82, Loi sur l'administration publique. Alors, M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi instaure, en vue d'affirmer la priorité accordée à la qualité des services aux citoyens, un nouveau cadre de gestion de l'administration gouvernementale qui est axé sur l'atteinte de résultats, sur le respect du principe de la transparence et sur une imputabilité accrue de l'administration devant l'Assemblée nationale.

Le projet de loi prévoit de nouvelles responsabilités pour l'administration gouvernementale. C'est ainsi que les ministères et organismes qui fournissent des services aux citoyens devront faire une déclaration sur leurs objectifs quant au niveau et à la qualité de ces services. De plus, chaque ministère ou organisme devra établir un plan stratégique qui orientera son action sur une période de plusieurs années. Chacun d'eux aura aussi à rendre compte des résultats atteints, notamment par la production d'un rapport annuel de gestion.

Le projet de loi permet la conclusion d'une convention de performance et d'imputabilité qui prévoira, à l'égard d'une unité administrative d'un ministère ou d'un organisme, un cadre de gestion plus flexible, adapté à sa situation, et une reddition de comptes portant sur des résultats spécifiques auxquels l'unité s'engage. Cette convention sera conclue entre le ministre responsable et le dirigeant de l'unité et comprendra, le cas échéant, une entente de gestion convenue avec le Conseil du trésor.

Tous ces documents émanant de l'administration gouvernementale auront un caractère public et seront déposés à l'Assemblée nationale.

Également, ce projet reprend ou révise, selon une approche d'allégement, les règles de gestion des ressources humaines, budgétaires, matérielles et informationnelles applicables à l'administration gouvernementale et actuellement prévues par la Loi sur l'administration financière et par la Loi sur la fonction publique.

Par ailleurs, le projet de loi assure la continuation du Conseil du trésor en lui confiant toutefois des fonctions adaptées aux caractéristiques du nouveau cadre de gestion. Le projet de loi contient, enfin, des dispositions modificatives et des dispositions transitoires.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, l'article c, maintenant, M. le Président.


Projet de loi n° 78

Le Président: Alors, en rapport avec l'article c du feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles présente le projet de loi n° 78, Loi modifiant de nouveau la Loi sur le développement de la région de la Baie James. M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur le développement de la région de la Baie James afin de préciser la mission de la Société de développement de la Baie James et de réviser les règles concernant la composition du conseil d'administration de la Société et ses modalités de fonctionnement.

Ce projet prévoit également des modifications concernant l'administration et le financement de la Société, notamment en ce qui concerne les autorisations gouvernementales exigées à l'égard de certains engagements financiers ou d'autres formes d'interventions de la Société.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Rapport annuel et rapport sur la procédure d'examen des plaintes de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de l'Outaouais

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1998-1999 suivants, soit celui de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de l'Outaouais sur l'examen des plaintes et celui de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de l'Outaouais.

Le Président: Bien. Ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.


Renvoi du rapport annuel de la régie régionale à la commission des affaires sociales pour examen

M. Brassard: Oui, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que, conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le rapport annuel 1998-1999 de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de l'Outaouais soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude; et

«Que la ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Bien. La motion est-elle adoptée? Elle est adoptée. Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole, et de la Société d'habitation du Québec également.


Rapport annuel de la Société d'habitation du Québec

Mme Harel: Alors, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998 de la Société d'habitation du Québec.

Le Président: Bien. Ce document est déposé. M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


Rapport annuel du Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement

M. Legault: Oui. M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 du Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Rapport annuel du Conseil des relations interculturelles

M. Perreault: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1997-1998 du Conseil des relations interculturelles.

Le Président: Alors, le document est déposé. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.


Rapports annuels du CRIQ, de la Société du parc industriel et portuaire de Bécancour, et de la Société Innovatech du sud du Québec

M. Julien: M. le Président, je dépose les rapports annuels 1998-1999 suivants: Centre de recherche industrielle du Québec, Parc industriel et portuaire de Bécancour, Innovatech du sud du Québec, et le rapport annuel 1997-1998 d'Innvotach du sud du Québec.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Le Président: Alors, les documents sont déposés.

Pour ma part, j'ai reçu dans les délais prescrits préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie de ce texte de préavis.


Rapport spécial du Vérificateur général intitulé La gestion par résultats – Les conditions favorables à son implantation

Et je dépose également le rapport spécial du Vérificateur général à l'Assemblée nationale portant sur la gestion par résultats dans l'administration gouvernementale.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des institutions et député de Portneuf.


Étude détaillée du projet de loi n° 65

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 27 octobre 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 65, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif en matière d'affaires autochtones. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Bien. Alors, le rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, maintenant, M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de déposer un extrait d'une pétition non conforme.

Le Président: Alors, y a-t-il consentement? Il y a consentement. M. le député.


Injecter les fonds nécessaires pour que le Centre montérégien de réadaptation puisse assurer l'accès à ses services

M. Geoffrion: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 7 049 pétitionnaires, recueillie par le Comité de parents utilisateurs du Centre montérégien de réadaptation de la sous-région Valleyfield-Châteauguay.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le Centre montérégien de réadaptation – CMR – a le mandat de dispenser des services d'adaptation-réadaptation et d'intégration sociale aux personnes âgées de zéro à 99 ans présentant une déficience motrice, auditive ou des troubles graves du langage et de la parole;

(14 h 10)

«Considérant qu'actuellement les budgets du CMR leur permettent de desservir seulement la petite enfance, soit de zéro à six ans;

«Considérant qu'après l'âge scolaire les enfants n'ont plus accès aux services du CMR et qu'ils doivent s'expatrier dans les grands centres spécialisés afin d'obtenir des services;

«Considérant que le gouvernement péquiste nous a démontré au cours des dernières années son manque de volonté politique pour corriger définitivement la situation, et ce, en dépit de nos...

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le député de La Prairie.

M. Geoffrion: ...et ce, en dépit de nos demandes maintes fois répétées;

«Donc, l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à la ministre de la Santé d'agir rapidement afin d'injecter les fonds nécessaires au budget actuel du CMR pour que ce dernier assure un véritable accès à ses services de réadaptation.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Bien. Alors, cette pétition est déposée.


Questions et réponses orales

Alors, nous allons immédiatement aborder la période de questions et de réponses orales. En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.


Pouvoirs de la Régie de l'énergie


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, en 1996, l'Assemblée nationale adoptait unanimement la loi constitutive de la Régie de l'énergie, qui devait être un organisme indépendant du gouvernement, qui entre autres avait le mandat ou devait avoir le mandat d'établir publiquement les coûts de production de l'électricité. Comme les tarifs d'électricité aux consommateurs et surtout leur caractère raisonnable peuvent dépendre de ces évaluations, l'indépendance de la Régie, M. le Président, vous comprendrez, est absolument fondamentale. D'ailleurs, l'opposition libérale avait présenté une motion en ce sens-là au mois de mai 1999 qui se lisait comme suit: «Que l'Assemblée nationale s'assure que le gouvernement du Québec donne dans les faits à la Régie de l'énergie toute l'indépendance nécessaire à l'exercice de son mandat initial.»

Comment explique-t-il, le premier ministre, aux consommateurs québécois le fait qu'il s'apprête à retirer à ce chien de garde qu'est la Régie de l'énergie les dents qu'il lui avait données dans la loi et qui garantissaient aux consommateurs québécois des tarifs raisonnables d'électricité, M. le Président?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, d'abord, avant de considérer la Régie comme étant parfaitement édentée, il faudrait quand même attendre que le gouvernement rende publiques des décisions ou des orientations à cet égard, ce qui n'est pas le cas pour le moment, là. Ce sont des rumeurs concernant une réduction substantielle des compétences ou des pouvoirs de la Régie. On est dans le domaine des rumeurs.

Cependant, il est vrai que le gouvernement a en main un avis de la Régie qui date de l'été 1998 portant sur le tarif de fourniture et la façon d'établir et de mettre en oeuvre le tarif de fourniture d'électricité. On a ça entre les mains, on a consulté un certain nombre d'experts à cet égard, et, comme c'est très complexe, évidemment on a pris le temps qu'il faut pour en faire le tour, faire le tour de cette question, et le Conseil des ministres aura à trancher et à prendre une décision à cet égard.

Ceci étant dit, toutefois, M. le Président, le chef de l'opposition peut être assuré que le gouvernement est toujours fortement préoccupé de maintenir pour les consommateurs québécois d'électricité des tarifs bas.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, justement, la période de questions, c'est l'occasion pour le gouvernement de sortir du monde des rumeurs et d'entrer dans la réalité et de nous dire s'il a, oui ou non, l'intention de respecter la loi qu'il a lui-même votée en 1996, qui a été adoptée unanimement à l'Assemblée nationale. Il me semble que ce n'est pas très compliqué. L'Assemblée nationale vote des lois, est-ce que le gouvernement a l'intention de les respecter? C'est aussi simple que cela. Est-ce que le gouvernement a l'intention, oui ou non, de faire preuve de transparence, de donner à la Régie de l'énergie la capacité d'exécuter le mandat qu'il a lui-même défini pour la Régie en 1996? Il y a une raison fort simple pour cela. On veut savoir si le gouvernement du Parti québécois se sert des tarifs d'électricité pour taxer davantage les Québécois ou s'il va vraiment leur rendre justice et permettre aux Québécois de payer les vrais coûts d'électricité au lieu de les taxer davantage?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je ne peux pas, au moment où on se parle, rendre publiques des décisions qui ne sont pas prises par le gouvernement. Est-ce que le chef de l'opposition peut comprendre ça? Le gouvernement n'a pas pris de décision relativement à l'avis de la Régie concernant le tarif de fourniture d'électricité. Il n'y a pas de décision de prise, alors je ne peux pas en inventer. Le gouvernement, le Conseil des ministres va en discuter, va en débattre, et, quand des décisions seront prises, elles seront rendues publiques.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je vais essayer d'aider le ministre et le premier ministre, puisqu'ils veulent absolument rester dans le domaine public. Une loi, c'est dans le domaine public, ça. Il y a une loi qui a été votée par le gouvernement, une loi qui dit que la Régie de l'énergie devrait pouvoir faire l'évaluation. C'est le domaine public, ça, à ce que je sache. D'ailleurs, c'est tellement vrai qu'il y a eu des requêtes de faites devant la Régie de l'énergie par l'Association québécoise des consommateurs industriels d'électricité et l'Association des industries forestières du Québec. – ça a été fait au mois de décembre 1998 – demandant justement à la Régie d'exercer ses pouvoirs dans le domaine public. Parce que ce n'est pas de la rumeur, je lui demande juste de respecter sa propre loi.

Il y a également une proposition qui a été faite au Conseil national du Parti québécois, les 25 et 26 septembre 1999, où on disait ceci: «Il est proposé que le Conseil national demande au gouvernement de: a) confirmer la pérennité de l'autorité de la Régie de l'énergie; b) mettre en vigueur dès maintenant, intégralement, tous les articles sans exception de la loi de la Régie.»

Ça, M. le Président, c'est dans le domaine public. Alors, s'il ne veut pas écouter l'opposition officielle, est-ce qu'il va au moins écouter ses propres militants du Parti québécois qui lui demandaient de respecter sa propre loi?

Et ce qu'on veut savoir, c'est: Est-ce que le gouvernement du Parti québécois a l'intention d'utiliser Hydro-Québec comme vache à lait pour taxer davantage les contribuables québécois, ou est-ce qu'il va faire preuve, pour une fois, de transparence en permettant à la Régie de l'énergie de faire son travail?

Le Président: M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, c'est un bel exemple de procès d'intention. Le chef de l'opposition avance toutes sortes d'allégations, alors que le Conseil des ministres n'a pas tranché, n'a pas pris de décision.

Ceci étant dit, je comprends de l'intervention du chef de l'opposition que, lui, il est d'accord pour faire une évaluation publique devant la Régie des coûts de production et que par conséquent, donc, on revoie et on réexamine les décisions prises par un gouvernement libéral de dépenser, par exemple, un demi-milliard pour un projet qui ne s'est pas fait à Grande-Baleine, qu'on réexamine aussi la décision prise par un gouvernement libéral d'aménager la Sainte-Marguerite 3 avec un coût de 0,07 $ à 0,08 $ du kilowattheure. C'est ça, sa position? On va refaire tout ca? Vous voulez qu'on refasse le procès des décisions du gouvernement libéral?

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, on veut juste connaître la position du gouvernement. C'est aussi simple que ça. Il nous parle de rumeurs, de décisions qui n'ont pas été prises. Nous, on pensait qu'il y avait eu une décision de prise à l'Assemblée nationale en 1996. C'est consigné dans une loi. C'est quoi, la position du gouvernement, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Je ne peux que lui répéter, M. le Président, qu'elle sera connue et rendue publique quand le gouvernement, et le Conseil des ministres, l'aura prise.

Le Président: Mme la députée Bonaventure, en question principale.

Mme Normandeau: Non, en additionnelle, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, très bien.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Alors donc, comment le ministre des Ressources naturelles peut-il aujourd'hui se dégager de sa responsabilité sociale et renier le vaste consensus issu des consultations qui ont mené justement, en 1996, à la création de l'énergie la Régie de l'énergie en 1997? Et le ministre des Ressources naturelles, aujourd'hui, qu'est-ce qu'il a à répondre aux consommateurs, aux producteurs, aux industriels, aux écologistes qui s'inquiètent de voir le gouvernement saper les pouvoirs de la Régie de l'énergie? Qu'est-ce qu'il a à dire à ces gens-là?

(14 h 20)

Le Président: M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, la députée de Bonaventure poursuit le procès d'intention intenté par le chef de l'opposition. Non, mais elle allègue des choses, fait des affirmations alors que le Conseil des ministres n'a pas décidé. Alors, avant d'accuser le gouvernement de trahir et d'amputer la Régie de ses compétences et de ses responsabilités, attendez donc de voir comment le Conseil va décider. Soyez donc un peu patients.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Bourassa.


Campagne de vaccination des personnes âgées


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors que la ministre a annoncé à deux reprises une vaste campagne de vaccination pour les personnes âgées, on apprend aujourd'hui que des personnes âgées sont refusées par des CLSC et que d'autres n'auraient rendez-vous qu'à la fin décembre. Comment se fait-il que la ministre refait toujours les mêmes erreurs? Pourquoi cherche-t-elle à gagner du temps en annonçant et en réannonçant les mêmes campagnes de dépistage, les mêmes campagnes de prévention, sans d'abord, comme elle devrait le faire, s'assurer que le réseau de la santé a les moyens concrets de donner les services?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je croyais que la députée de Bourassa semblait quand même relativement satisfaite des mesures qui étaient annoncées hier; du moins, c'est ce que j'avais cru comprendre dans ses premiers commentaires. Je veux la rassurer en ce qui a trait au programme de vaccination. Nous avions annoncé, oui, que nous mènerions une campagne intensive de vaccination, mais je voudrais rappeler aux membres de cette Assemblée de même qu'à ma collègue que nous n'avions pas annoncé la hauteur des sommes que nous investirions à cet égard; et nous passons de 1 000 000 $, consentis l'an dernier à cette campagne, à 4 600 000 $. C'est une somme considérable que nous ajoutons.

Quant à la disponibilité d'abord des vaccins... parce qu'on m'a signalé que certains établissements semblaient dire qu'il n'y avait pas de disponibilité de vaccins. Or, c'est faux. Les vaccins sont disponibles dans des centres régionaux de distribution de même que dans un centre national. Et nous avons même des ententes pour acquérir de nouveaux vaccins si tant est que la demande soit plus importante que prévue. Et il semble que ce soit le cas. Et c'est heureux, c'est ce qu'on souhaite.

Pour ce qui est de la disponibilité donc de ces vaccins dans les CLSC ou ailleurs, il s'agit de s'assurer qu'on renouvelle les stocks, qu'on achète les vaccins. Ils sont disponibles, M. le Président. Et je suis très heureuse que les gens d'ailleurs se présentent aussi nombreux pour les obtenir, même si cela cause certaines petites difficultés d'ajustement, parce que, sans doute, d'abord, un, ça permettra à ces gens d'avoir une meilleure qualité de vie pendant quelques mois et d'éviter d'avoir à consulter l'urgence en janvier ou en février, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Bourassa.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la ministre de la Santé ne me comprend pas, on ne parle pas ici de disponibilité de vaccins mais de capacité, pour les établissements, de les donner.

Alors, Mme la ministre, savez-vous qu'aujourd'hui des personnes âgées sont refusées par des CLSC qui n'ont pas la capacité de les donner? Et savez-vous que des personnes âgées n'auront rendez-vous qu'à la fin de décembre parce que d'autres CLSC n'ont pas la capacité, au moment où vous lancez votre vaste campagne, de donner concrètement les vaccins?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, on se souviendra, il y a quelques semaines à peine, qu'un CLSC, entre autres, disait ne pas avoir les disponibilités nécessaires pour offrir le vaccin et avait plafonné son nombre de vaccins à un certain montant – je ne souviens pas exactement du chiffre – et avait dit, donc, qu'il ne pouvait pas le faire. C'était d'ailleurs dans ma région et même dans ma ville, à Longueuil, et, dans les faits, après avoir évalué la situation avec ce CLSC, on a convenu que tous les vaccins seraient disponibles et qu'on procéderait dans tous les cas, M. le Président. Et, si tant est que dans certains CLSC il y a certaines difficultés, on peut discuter avec la Régie et le ministère pour voir comment nous pouvons le rendre disponible, dans les temps nécessaires pour que ce soit utile – voyons donc, M. le Président, ça va de soi – aux personnes âgées qui le demanderaient.

Le Président: Mme la députée.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, la ministre de la Santé réalise-t-elle qu'elle vit dans une bulle? Elle est complètement déconnectée de la réalité. Est-ce qu'elle réalise qu'elle ne pourra pas leurrer tout le monde tout le temps avec ses belles campagnes médiatiques? Et réalise-t-elle, comme l'écrit Jean-Marc Samson...

Une voix: Jean-Jacques Samson.

Mme Lamquin-Éthier: ...Jean-Jacques, pardonnez-moi, dans son éditorial – oui, Jean-Jacques Samson, pardonnez-moi, M. Samson – de ce matin...

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lamquin-Éthier: Est-ce que vous êtes là, M. Samson?

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Lamquin-Éthier: «Pareilles tentatives d'utilisation des médias pour leurrer la population sont particulièrement odieuses quand on joue avec la santé des citoyens.»

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je ne voudrais pas, à mon tour, M. le Président, choquer M. Samson qui a commis un éditorial ce matin, mais je l'inviterais cependant à prendre connaissance du plan d'action qui prévoit une série de mesures permettant de corriger la situation qui se vit dans les urgences. Et la preuve en est que nous avons d'abord commencé par ce qui était le plus pressant, nous assurer qu'il y ait un plan pour couvrir la pointe de l'hiver, nous assurer, cependant, que des gestes plus structurants allaient être posés pour former, soutenir, aider dans les urgences, faire en sorte qu'on considère que le service dans les urgences soit un service au même titre que d'autres services dans l'hôpital, qu'on prépare le personnel à assumer ses fonctions. C'est ce qu'on retrouve dans le plan d'urgence et le plan d'action à moyen et à long terme que nous avons adoptés, M. le Président.

Et, en ce sens, peut-être que la députée de Bourassa devrait communiquer avec ceux et celles qui sont responsables, à l'Association des hôpitaux, à l'Association des CLSC ou des centres locaux des services communautaires, chez les urgentologues, à leur association, auprès des professionnels, des médecins, pour savoir s'ils croient que, eux et moi, nous vivons dans une bulle. Je ne crois pas, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Bourassa.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, est-ce que Mme la ministre de la Santé réalise la différence entre un beau plan d'action sur papier et la présence physique d'une infirmière qui a la capacité de donner un vaccin à une personne âgée qui en a besoin?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, le plan que nous avons déposé hier est un plan qui tient compte essentiellement des situations problématiques qui nous ont été soulevées et qui découle d'une discussion en profondeur et d'un engagement des différents partenaires du réseau de la santé et des services sociaux à résoudre ce problème que l'on connaît dans nos urgences, ces difficultés que l'on connaît aussi dans les campagnes de prévention – la vaccination est un exemple de ces campagnes de prévention. Nous savons que l'une des composantes majeures de l'amélioration de l'ensemble de nos services, c'est évidemment la question du personnel. Nous avons fait des efforts considérables à cet égard, et cela fait partie du plan d'action: améliorer et la formation et le recrutement et constituer des équipes, je dirais, plus régulières pour offrir les services dans les urgences et ailleurs, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Mégantic-Compton, en question principale.


Barème de contribution des personnes à faibles revenus au régime d'assurance-médicaments


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. La ministre de la Santé et des Services sociaux déclarait la semaine dernière au sujet de l'assurance-médicaments, et je cite: «On peut être âgé et avoir des revenus très bas, trop bas pour nous permettre d'assumer nos besoins, et, à ce moment-là, la contribution, dit-elle, est infime.» Nous pouvons comprendre que, pour la ministre, une contribution de plus de 500 $ par année, c'est un montant infime, mais ce qu'elle oublie, c'est que 50 % des personnes âgées ont un revenu inférieur à 12 000 $.

M. le Président, la ministre pense-t-elle toujours qu'une contribution de 500 $ par année, pour des personnes qui gagnent aux environs de 12 000 $, est une contribution infime?

(14 h 30)

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je n'ai pas dit qu'une contribution de 500 $ était infime. Ça, c'est ce que la députée conclut de mes propos. J'ai dit que, dans certains cas, des contributions demandées aux personnes âgées pouvaient être infimes lorsqu'elles avaient des difficultés à assumer financièrement le coût des médicaments. D'ailleurs, c'est l'objet du régime d'assurance-médicaments qui permet de couvrir les besoins de personnes qui n'ont pas des revenus importants. C'est vrai si son revenu provient de la sécurité du revenu, c'est vrai si son revenu provient du supplément au revenu garanti pour les personnes âgées, et c'est vrai aussi si son revenu provient d'un travail mais qu'il est très bas, M. le Président. Et, à ce moment-là, on a plafonné la contribution de ces personnes de telle sorte qu'elles aient accès aux médicaments sans par ailleurs ne pas être capables de répondre à leurs besoins essentiels. Je crois que nous avons un excellent régime d'assurance-médicaments. Il mérite d'être amélioré, d'être corrigé, puisque dans les faits il coûte plus cher que ce qui était prévu compte tenu de la couverture plus grande du nombre de personnes qui ont accès maintenant à ce régime, ce qui initialement n'était pas prévu.

Le Président: Mme la députée de Mégantic-Compton.


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: M. le Président, la ministre réalise-t-elle qu'une personne âgée, handicapée, avec des troubles respiratoires, dont le revenu familial est de 15 000 $, doit payer 3 000 $ pour l'oxygène par année, 2 880 $ par année pour son transport à l'hôpital et, en plus, ajouter environ 650 $ pour ses médicaments? La ministre trouve-t-elle que c'est toujours une contribution minime? Et je peux dire, M. le Président, que c'est un cas réel, cette personne-là, qui paie ces frais-là.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, encore une fois, la députée ne peut pas me prêter des propos que je n'ai pas tenus. Elle peut, elle, soulever un certain nombre de questions, identifier certains problèmes qui sont vécus par des personnes, qu'elles soient âgées ou handicapées, mais ne pas me faire dire à moi que j'ai dit ou tenu les propos qu'elle tient. Il peut y avoir des situations exceptionnelles et particulières, et je ne veux pas discuter spécifiquement de ce cas, puisqu'il y a des lieux pour le faire, que ce soit à la Régie de l'assurance-maladie ou même auprès d'ombudsmans dans l'ensemble de notre réseau de la santé et des services sociaux, pour démontrer des cas pathétiques, des cas pénibles et difficiles. Et, si ce sont des cas qui se généralisent, à ce moment-là, ça pourrait commander des changements pour améliorer la couverture de certains besoins de ces personnes. Mais je ne crois pas qu'il soit pertinent que, spécifiquement sur ce cas, je donne ici un avis qui ne serait pas éclairé, de toute façon, et qui risquerait de leurrer les gens, et je veux pas faire ça.

Le Président: Mme la députée de La Pinière, en question principale.


Processus d'attribution des contrats pour l'agrandissement du Palais des congrès de Montréal


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Dans l'incroyable saga du Palais des congrès de Montréal, les Québécois n'en reviennent pas de l'incapacité de ce gouvernement de gérer convenablement le processus d'attribution des contrats. Est-ce que le ministre responsable des Services gouvernementaux peut confirmer l'information publiée dans La Presse du 4 novembre dernier à l'effet que, et je cite: «Le nouveau comité d'experts n'a examiné en totalité qu'une seule des trois propositions soumises et [...] deux des trois enveloppes de prix ne furent jamais ouvertes»?

Est-ce que la ministre peut nous confirmer cette information?

Le Président: Alors, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, c'est à la satisfaction générale que le processus de sélection a eu lieu. Le jury, à l'unanimité, en fait, s'est constitué en comité d'évaluation, a établi des critères prédéterminés et préalablement transmis aux trois soumissionnaires et a donc à la fois évalué d'abord la conformité, par la suite, la qualité, et il s'est avéré que, des trois soumissionnaires, une seule firme a relevé le défi de correspondre aux critères de conformité et aux critères de qualité, suite à quoi une seule enveloppe a été ouverte, comme cela avait été prévu.

Le Président: Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre comprend qu'en excluant l'analyse complète des deux soumissionnaires dont on n'a même pas ouvert les enveloppes de prix, elle viole le processus d'attribution des contrats et que, dans le fond, on se retrouve devant un concours paqueté d'avance, une unanimité sur un seul soumissionnaire, le seul dont on a étudié la proposition, M. le Président, la seule proposition qui a été soumise au Conseil des ministres?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, c'est faire beaucoup injure aux personnes qui ont accepté de siéger sur ce comité d'évaluation et qui sont notoirement connues dans leur profession respective comme architecte, ingénieur, urbaniste. Est-ce que Mme la députée de La Pinière peut comprendre qu'avant de discuter du prix il fallait d'abord satisfaire aux critères de conformité? Une fois cela fait, il fallait satisfaire aux critères de qualité en atteignant la note de passage, qui était à 65 %, et, une fois cela fait, l'enveloppe de prix était ouverte.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Saint-Laurent.


Suites législatives au rapport de la commission Poitras sur le fonctionnement de la Sûreté du Québec


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: M. le Président, le rapport Poitras est déposé depuis près d'un an. Or, ce matin, contre toute attente, le ministre de la Sécurité publique, avec la clarté qu'on lui connaît, informe un journaliste du journal The Gazette qu'il entend déposer d'ici la fin de l'année un projet de loi devant cette Assemblée, qui ne contiendra pas et qui ne donnera pas suite aux principales recommandations du rapport Poitras, mais surtout à la principale recommandation du rapport Poitras qui était celle de créer un comité de contrôle permanent. Par contre, du même souffle, le ministre de la Sécurité publique confie à ce journaliste-là que les suites à donner au rapport Poitras, ça, là, c'est le défi politique de sa carrière.

Compte tenu de l'insignifiance du projet de loi annoncé et compte tenu du fait qu'il entend le vider de la principale recommandation du rapport Poitras, qui est celle de créer un comité de contrôle permanent, on peut-u savoir, le défi, là, il est où?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Serge Ménard

M. Ménard: À écouter les questions du député de Saint-Laurent, M. le Président, on doute qu'il vienne d'une profession où l'on étudie d'abord les faits avant de porter un jugement. Alors, voilà que comme d'autres, n'est-ce pas, de ce côté de la Chambre, il pose un jugement avant de connaître un projet de loi, sur un projet de loi qu'il qualifie d'insignifiant. Qu'il attende de le voir, le projet de loi s'en vient, nous avons dû travailler sérieusement dessus au cours de l'été.

Ce que j'ai dit au journaliste de The Gazette n'est pas différent de ce que j'ai dit à de nombreux autres journalistes qui n'ont pas cru bon de le rapporter, mais ça a été dit à plusieurs reprises. Je ne peux pas dévoiler tout à cet stade-ci, mais je peux vous dire que nous appliquerons le principe, plutôt, du contrôle aux élus et du conseil aux experts. Et, sur ces principes-là, qui sont d'ailleurs importants pour tous les partis politiques qui aspirent à prendre le pouvoir et à avoir, à un moment donné, un contrôle... il est important que le contrôle des autorités civiles soit mené, je pense, par des gens élus, sur les forces, quelles qu'elles soient, et particulièrement sur les forces policières. J'ai dit aussi qu'il tenait compte de nombreux autres rapports, et c'est l'ampleur du travail qui fait que ça a pris tout ce temps pour rédiger un projet de loi. Mais on verra, justement, quand le projet de loi sortira, qu'il est loin d'être insignifiant, comme il le prétend dans l'ignorance où il en est.

Le Président: M. le député de Saint-Laurent.


M. Jacques Dupuis

M. Dupuis: Compte tenu de la réponse que le ministre vient de me donner, M. le Président, est-ce qu'on n'est pas en droit de se demander si le vrai défi du ministre aujourd'hui n'est pas celui d'essayer de sauver la face plutôt que de donner suite, tel que recommandé par la commission Poitras, aux recommandations qu'elle a faites?

(14 h 40)

Le Président: M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Bien, d'abord, la majorité des recommandations faites par la commission Poitras sont déjà en application actuellement à la Sûreté du Québec. Ce qu'il reste à faire, c'est les dispositions législatives, entre autres. Et les dispositions législatives, je l'ai expliqué, je crois encore que le rapport Poitras n'a pas eu le temps de les élaborer, de telle façon qu'il a fallu, nous, après un examen de plusieurs régimes dans d'autres pays, que nous nous fassions une idée originale sur les suites législatives à donner. Elles sont à peu près prêtes. C'est vrai que j'en suis à examiner les dernières versions sur lesquelles nous avons travaillé depuis effectivement près d'un an maintenant et qu'elles seront présentées à l'Assemblée nationale, et on verra, à l'importance des modifications qui sont suggérées, à l'intelligence des solutions que nous avons trouvées, à leur originalité et à la façon dont elles répondent précisément aux problèmes soulevés par le rapport Poitras avec efficacité, on jugera à ce moment-là de leur valeur. Mais j'espère qu'il sortira d'un préjugé basé sur son ignorance.

Le Président: M. le député de Bellechasse, d'abord. Puis, par la suite, M. le député de Marquette.


Bilan de l'identification obligatoire des électeurs lors des élections municipales


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre responsable de la Réforme électorale. Dimanche dernier, plusieurs milliers de citoyens et citoyennes du Québec sont allés voter pour choisir leur maire ou leurs conseillers municipaux pour les quatre prochaines années. Pour la première fois, en cette occasion, les électeurs et électrices devaient obligatoirement présenter une carte d'identité avec photo pour exercer leur droit de vote.

Le ministre peut-il nous faire part de son évaluation quant à l'application de cette nouvelle obligation faite aux électeurs?

Le Président: M. le ministre responsable de la Réforme électorale.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, quand on pense à tous les malheurs qu'on nous avait prédits et à toute l'argumentation négative qu'on a subie pendant de nombreuses heures en commission parlementaire, je me réjouis, au nom des citoyens québécois, au nom de toute la population, de s'être soumis à un nouveau mode, à de nouvelles exigences et qui n'ont créé aucune entrave. Et je voudrais en profiter pour féliciter les élus municipaux et remercier également le leader de l'opposition qui reconnaît, dans une entrevue, hier: Oui, on est content. L'expérience d'hier, au Parti libéral, on trouve que c'est une expérience positive. Comme quoi il y a seulement que les fous qui ne changent pas d'idée.

Le Président: M. le député de Bellechasse.


M. Claude Lachance

M. Lachance: En complémentaire, M. le Président, concernant le vote d'hier. Le ministre peut-il nous indiquer s'il est prêt à recommander l'utilisation du vote électronique dans une ou plusieurs circonscriptions québécoises lors d'un prochain scrutin, comme l'ont expérimenté les électeurs et électrices de trois villes du Québec, dont ceux de Rivière-du-Loup?

Le Président: M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, j'ai eu la même question tantôt par un journaliste et je crois qu'il faudra la soumettre au Comité consultatif, effectivement, pour voir comment on peut aborder cette question. Mais je pense que le monde municipal a pris de l'avance sur nous. Déjà, Hull l'a expérimenté. Je crois que Sherbrooke l'a expérimenté. Il y avait deux autres villes en fin de semaine. Donc, moi, je pense qu'on devra, au Comité consultatif, regarder le tout pour voir si on ne doit pas y aller soit par des expériences-pilotes lors de complémentaires, comme on a déjà fait, ou encore en déterminant des circonscriptions électorales où on pourrait vivre cette expérience. Mais il va falloir évoluer, nous aussi, car la technique évolue passablement rapidement.

Le Président: M. le député de Marquette en question principale.


Écoute électronique de conversations téléphoniques entre des agents de recouvrement et des débiteurs de l'État


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, par le biais des médias, nous avons appris ce matin que le gouvernement du Québec a exigé l'écoute électronique de conversations téléphoniques entre des agents de recouvrement et certaines des quelque 37 000 personnes débitrices auprès de l'État, dont des étudiants, des conducteurs et des prestataires de la sécurité du revenu. En effet, l'article rapporte que les conversations téléphoniques sont enregistrées à l'insu des agents de recouvrement et des débiteurs. De telles pratiques constitueraient une infraction au Code criminel qui interdit dans ces cas l'interception de communications privées à l'insu des parties. Et de telles pratiques violeraient également le droit fondamental au respect de la vie privée des parties qui sont victimes d'écoute électronique, et ça, suite à une décision rendue par la Cour d'appel cet été.

Alors, M. le Président, la question que j'adresse à la ministre de la Justice: Si les faits sont exacts, rapportés dans le journal, peut-elle nous dire en vertu de quel principe de droit elle peut cautionner des écoutes clandestines?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Oui, M. le Président. Je comprends que le député fait référence à un contrat qui a été signé en 1998 et renouvelé cette année. Je dois l'informer que la Commission d'accès à l'information a été consultée sur le sujet et a donné son accord.

Les fonctionnaires ont sollicité un avis de la Commission au mois de juillet, le 6 juillet dernier, et une rencontre s'est tenue le 3 août dernier entre un fonctionnaire du ministère des Finances, un fonctionnaire du ministère de l'Éducation, un fonctionnaire des Services gouvernementaux et un fonctionnaire de la Commission, Mme Castonguay, en l'occurrence. La Commission a émis un avis positif sur toute cette question, et il n'y a rien d'illégal qui ait été fait ou commis dans le dossier. J'ajoute au surplus qu'il n'y a eu jusqu'ici aucune écoute électronique d'aucune sorte et qu'une directive a été émise immédiatement après la connaissance de l'article à l'effet qu'il n'y en aurait pas.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, est-ce que le ministre responsable peut déposer l'avis de la Commission d'accès à l'information? Peut-il également déposer l'avis de la Commission des droits de la personne du Québec à cet égard-là? Est-ce que la ministre de la Justice peut nous dire également si elle cautionne de telles pratiques? Ce sont des clauses qui ont été inscrites dans le contrat signé.

Le Président: M. le ministre.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, les documents ont tous été révisés par la Commission. Ils sont couverts par l'article 67.2, qui n'exige pas d'avis préalable de la Commission, même si nous l'avons consultée. Et son avis oral a été donné devant trois fonctionnaires témoins. Et d'autre part, on vient de me...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: Oui, M. le Président. On vient de me remettre à l'instant un communiqué de la Commission d'accès à l'information, qui dit ceci: «La Commission d'accès à l'information a effectivement été consultée début juillet par le Conseil du trésor au sujet du projet de contrat en vue de récupérer à l'extérieur du Québec des créances dues à certains ministères et organismes. C'est à la suite d'une erreur administrative que le secrétariat de la Commission a transmis à ce sujet une information erronée au quotidien The Gazette

Voilà ce que vient de déclarer le président, et M. Comeau tient à préciser qu'un avis verbal avait été signifié au Conseil du trésor selon l'appréciation de l'analyste au dossier. Le projet en question relève de l'article 67.2 de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. En vertu de cette disposition, un ministère ou organisme peut transmettre un renseignement personnel sans le consentement des personnes concernées dans le cadre d'un mandat confié en bonne et due forme à une personne ou à une entreprise. Le Conseil du trésor s'est soumis aux exigences de cette disposition de la loi en confiant ce mandat par écrit et en précisant que ces renseignements personnels ne peuvent être utilisés qu'aux seules fins de ce mandat.

Le Président: M. le député de Marquette.


Avis de la CAI sur l'écoute électronique de conversations téléphoniques entre des agents de recouvrement et des débiteurs de l'État


M. François Ouimet

M. Ouimet: En principale, M. le Président, pour bien exposer, là, les faits de ma question. Ma question ne porte pas sur la légalité de la transmission des renseignements personnels et confidentiels. C'est tout autre chose. Ma question porte sur la légalité de l'écoute électronique cautionnée apparemment par la ministre de la Justice et par le président du Conseil du trésor. Est-ce que l'avis de la Commission d'accès à l'information portait sur la légalité de l'écoute électronique, la clause qui est dans le contrat que vous avez signé?

(14 h 50)

Le Président: Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, si le député de Marquette posait ses questions claires, on pourrait répondre clairement.

M. le Président, mon collègue du Conseil du trésor a exprimé ici, en cette Chambre, comment ce contrat a été accordé. D'abord, le ministère de la Justice a fait partie de cette entente, sous le couvert de cette entente, en octobre 1998 également. Le protocole d'entente a été prolongé jusqu'en octobre 1999. Les documents qui sont transmis ne sont pas de nature fiscale, ce sont des informations publiques par l'effet des jugements.

Alors, M. le Président, eu égard à la question de l'écoute électronique, de façon particulière, nous n'avons aucune information qui confirme que de telles écoutes ont été faites. Cependant, vous avez entendu, le président le Conseil du trésor a exprimé qu'il n'y aurait pas d'écoute électronique qui serait faite.

Le Président: M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la ministre de la Justice peut-elle bien saisir la portée de la question que je lui adresse comme Procureur général et jurisconsulte de son gouvernement? Un contrat a été signé par le président du Conseil du trésor, dans lequel contrat on exigeait qu'il y ait de l'écoute électronique entre les agents de recouvrement du gouvernement, par le biais de leurs mandataires, et également les débiteurs.

La question que je lui pose: Est-ce que cette écoute électronique est légale?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, le président du Conseil du trésor a répondu qu'il n'y avait pas eu d'écoute électronique.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, en question principale.


Sort des jeunes employés occasionnels d'Emploi-Québec


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Pour financer les dépassements électoraux et la mauvaise administration du régime péquiste, la ministre de l'Emploi reniait sa signature et celle de son gouvernement envers plusieurs jeunes contractuels à Emploi-Québec: 254 jeunes de moins de cinq ans d'ancienneté ont perdu leur emploi depuis le 8 octobre, et ce, malgré des contrats dûment signés, coupure unilatérale de 20 % sur le revenu des autres contractuels de plus de cinq ans d'ancienneté. Hier, Force Jeunesse, un organisme à la défense des jeunes, disait ceci: «Ces mesures sont un bel exemple du double langage que tient le gouvernement québécois à l'endroit des jeunes.»

Ma question à la ministre de l'Emploi, M. le Président : Est-ce que la ministre peut confirmer que, pendant qu'elle renie sa signature et celle de son gouvernement envers plusieurs jeunes contractuels à Emploi-Québec, la Ville de Montréal, qui gère Emploi-Québec sur son territoire au nom de la ministre, embauche à moindre coût, au moyen d'une clause orphelin, des employés dits auxiliaires pour remplacer ceux d'Emploi-Québec?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, d'abord, j'aimerais préciser d'entrée de jeu une information extrêmement importante. Il y a 738 000 000 $ qui sont affectés à ce qu'on appelle les mesures actives, qui sont donc mis à la disposition des gens qui ont besoin d'être en action pour intégrer le marché du travail, et d'aucune manière les mesures administratives qui ont trait aux frais de fonctionnement d'Emploi-Québec ne touchent ce montant. Il y a 738 000 000 $ d'affectés, 738 000 000 $ disponibles pour les personnes, et on ne touche pas, d'aucune manière, à ces sommes-là pour les personnes.

Deuxièmement, c'est vrai qu'il y a eu des fins de contrats d'occasionnels. Je rappellerais qu'au début de la création d'Emploi-Québec, en avril 1998, il y avait à peu près 220 personnes qui avaient un poste occasionnel, que quelques mois plus tard il y en avait plus de 400 – c'était un peu normal, les occasionnels, en général, vont absorber des périodes de travail plus intenses – et qu'on a dû réajuster le nombre d'occasionnels disponibles.

Et je vous dirais aussi qu'il y a eu des efforts particuliers qui ont été faits. On a, entre autres, étendu les périodes dans lesquelles les gens pouvaient adhérer à un programme d'aménagement et de réduction du temps de travail pour éviter au maximum ces bris de contrat. Dans certains cas, ça a été possible de le faire, dans d'autres cas, ça n'a pas été possible.

Le Président: M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: M. le Président, je vais reposer ma question, je voudrais que la ministre y réponde: Est-ce que la ministre de l'Emploi peut confirmer que la Ville de Montréal, qui gère Emploi-Québec sur son territoire, et ce, au nom de la ministre... Est-ce que c'est vrai que la Ville embauche à moindre coût, au moyen d'une clause orphelin, des employés dits auxiliaires pour remplacer ceux qu'elle a congédiés à Emploi-Québec? Oui ou non, madame?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'ai dit souvent ici, en cette Chambre, qu'à Emploi-Québec ça a été la fusion de trois cultures, et il est vrai que, sur le territoire de Montréal, c'est quatre organisations que nous avons dû mettre ensemble: l'organisation de la Direction des ressources humaines Canada, la SQDM, les centres Travail-Québec et, effectivement, des employés de la Ville de Montréal qui, depuis des années, gèrent des programmes de la sécurité du revenu.

Alors, nous avons devant nous un défi à la fois qui n'est pas simple, mais qui est aussi extraordinaire, c'est que ces organisations-là ont aussi leurs propres règles du jeu. Et c'est clair que nous avons des bilans à faire sur l'agencement, par exemple, des différentes conventions collectives qui sont en cause, parce que les employés de la Ville de Montréal sont régis par les conventions collectives de la Ville de Montréal, alors que, nous, nous sommes régis par nos propres conventions collectives.

Dans l'entente que nous avons eue avec la Ville de Montréal, il est prévu un bilan pour voir comment cet agencement des conventions collectives va se faire. Alors, c'est un bilan que je ferai au cours des prochaines semaines, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, en complémentaire, au premier ministre. Est-ce que le premier ministre réalise qu'il y a un an, en campagne électorale, lui s'engageait, au nom de son gouvernement, à améliorer la place des jeunes dans la fonction publique puis qu'en pratique, aujourd'hui, son ministre et président du Conseil du trésor dépose un projet de loi sur un nouveau cadre de gestion de l'administration publique où il n'y a pas un mot sur la présence des jeunes, puis qu'à Emploi-Québec, les jeunes, c'est dehors?

Est-ce qu'il n'est pas en train de se rendre compte qu'il nie ses engagements électoraux, qu'il ne les respecte pas, puis qu'en préparation du Sommet de la jeunesse ce n'est pas de très bon augure?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, parlant du cadre de gestion du gouvernement, nous n'avons exclu personne, et surtout pas les jeunes parce que, ce que nous faisons là, nous le faisons pour eux, et dans tous les gestes que nous avons posés nous avons porté une attention particulière aux jeunes. Et, lorsqu'il y a eu un programme de départs assistés en particulier, qui a connu le double de ce que nous avions visé, il y a eu beaucoup de jeunes qui en ont bénéficié, en particulier en éducation, en particulier aussi chez les infirmières, et en particulier un peu partout ailleurs, M. le Président.

D'autre part, nous avons mis sur pied le programme de Stages pour nouveaux diplômés qui a connu un immense succès. Et, M. le Président, ce sont des gestes que nous avons posés, concrets. Pas des discours, des gestes concrets.

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée aujourd'hui.


Motions sans préavis

Je vais maintenant, aux motions sans préavis, donner la parole à Mme la députée de Sauvé.

Mme Beauchamp: M. le Président, considérant que la diversité des cultures est un droit fondamental et qu'il est vital d'en assurer la sauvegarde et la promotion à l'heure de la mondialisation des marchés, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin d'adopter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec offre son appui unanime à la Coalition pour la diversité culturelle qui sera dorénavant présente et active à travers le Canada pour mener plus efficacement des actions concertées à la veille de la nouvelle ronde de négociations internationales de l'Organisation mondiale du commerce.»

Le Président: Y a-t-il consentement pour débattre de la motion? Alors, il n'y a pas consentement pour débattre de cette motion.

Une autre motion, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.


Féliciter tous ceux et celles qui ont été élus lors des dernières élections municipales

Mme Harel: Alors, M. le Président, je voudrais présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale félicite tous ceux et celles qui ont été élus maires, mairesses, conseillères ou conseillers municipaux lors des élections du 7 novembre dernier et ceux qui l'ont été par acclamation le 15 octobre;

«Qu'elle remercie également les personnes qui ont présenté leur candidature de même que tous ceux et celles qui se sont retirés après plusieurs années au service de leurs concitoyennes et concitoyens.»

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. Alors, Mme la ministre d'abord.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, dimanche dernier, des hommes et des femmes se sont prêtés à un exercice électoral au niveau municipal, qui aura permis à leurs concitoyens de choisir en toute confiance des représentants.

(15 heures)

Au total, 234 postes de maire ont été soumis au processus électoral, dont 119 postes renouvelés ou confirmés lors du scrutin de dimanche et 115 postes déjà comblés sans opposition. Je voudrais donc les féliciter, les maires et les mairesses du Québec ainsi que les conseillères et conseillers qui ont remporté l'élection de dimanche dernier et qui se sont vu confier le mandat de veiller aux intérêts de leur population au cours des quatre prochaines années. Au nom du gouvernement du Québec, je leur souhaite tout le succès possible, les assure de ma collaboration dans l'intérêt des citoyens et des contribuables.

Je tiens également à remercier tous les candidats et candidates qui ont, avec courage et détermination mais sans succès, proposé leurs services à leur communauté. Je veux en particulier rendre hommage, M. le Président, à Mme Jacinthe Simard, qui s'est dévouée avec intensité pour l'avancement de la cause municipale durant les dernières années, également à M. Bosco Bourcier que j'ai eu l'occasion de rencontrer à quelques reprises et qui fut aussi membre du conseil d'administration de l'Union des municipalités du Québec.

Une élection municipale se situe à un point de jonction: là où finit la démocratie de représentation commence la démocratie de participation. Le 7 novembre, des élus ont été choisis parce que leurs concitoyens les croient capables d'exercer un mandat dans la transparence et d'apporter une attention particulière aux projets qui leur tiennent à coeur. M. le Président, le rôle d'élu au niveau municipal devient d'autant plus stratégique que les défis qui se présentent aux villes à la fin de ce siècle et à la veille d'entamer un nouveau millénaire sont des défis inégalés dans l'histoire récente. Les maires, mairesses, conseillers, conseillères savent très bien qu'ils doivent en même temps être capables de travailler au niveau du développement économique, du développement social et du développement culturel de leur collectivité, et, plusieurs d'entre eux le disent eux-mêmes, ils sont à la fois des conseillers industriels, des conseillers tout court, puisque souvent leurs concitoyens viennent demander conseil pour des questions relatives à l'amélioration de la collectivité. Alors, cet engagement est d'autant plus louable que les élus municipaux doivent composer avec un niveau de plus en plus élevé d'attente de la part de la population et des exigences de plus en plus lourdes au niveau de cette fonction.

La réalité municipale se remodèle au fil des ans. La municipalité est vraiment devenue une assise importante en matière de développement durable, de protection de l'environnement, de développement de services qui s'offrent à des personnes souvent en difficulté, diminuées ou vieillissantes. Alors, M. le Président, je pense que le moment est choisi de rendre hommage à ces personnes qui, d'une manière agissante, rendent vivante la démocratie dans notre société. À tous et toutes, cette motion vient signaler l'appui de l'Assemblée nationale. Je vous remercie.

Le Président: M. le ministre des Transports et ministre responsable de la Réforme électorale.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais me joindre à ma collègue, à mon tour, pour féliciter bien sûr les élus municipaux. On sait qu'on exige beaucoup maintenant des élus municipaux, contrairement aux années 1965, 1970, 1975. Depuis l'avènement des lois, par exemple, du zonage agricole, sur l'aménagement du territoire, on demande de multiples réunions, de multiples comités, de multiples séminaires de toute nature. Nos élus municipaux sont conviés d'une façon régulière à siéger des heures et des heures contre une très faible rémunération. Je vous avoue que j'ai beaucoup d'admiration pour ceux et celles qui ont consacré 10, 15 ans de leur vie et qui ont vu leur carrière au niveau politique municipal se terminer. Je voudrais les remercier, moi aussi, les féliciter, et je suis convaincu qu'on reconnaîtra dans quelques années tout le travail que ces personnes ont pu opérer et ont pu réaliser.

Je voudrais, d'autre part, aussi nous féliciter tous, dans cette Chambre, d'avoir adopté de nouvelles règles démocratiques pour le monde municipal. On sait que, de plus en plus, les élections scolaires et municipales seront assujetties aux mêmes règles du jeu que celles que nous connaissons depuis que M. René Lévesque nous a fait l'honneur d'implanter la Loi sur les élections et les référendums. On a une législation qui s'est améliorée au cours des ans. Avec ma collègue des Affaires municipales, on a renchéri, à part ça, sur ces lois existantes, on a mis beaucoup plus de rigueur, beaucoup plus de resserrement au niveau de l'application des finances, par exemple, tant au niveau scolaire que municipal et aujourd'hui on voit le fruit de cela. L'identification de l'électeur, c'était un monstre, il y a à peine quelque mois, il y a à peine quelques semaines, et aujourd'hui ça a été appliqué. Le citoyen, là, il faut toujours se le rappeler, il a du gros bons sens. Et je voudrais souhaiter bonne chance, M. le Président, à tous les élus, à quelque niveau que ce soit.

Le Président: M. le député de Hull, toujours sur la même motion.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, dimanche dernier, 615 municipalités du Québec étaient touchées par des élections municipales. Tout d'abord, je voudrais féliciter tous ceux et celles qui ont été élus pour la première fois ou réélus pour un nouveau mandat. Leur engagement et leur dévouement dans la cause municipale méritent certainement d'être soulignés, car ils ont de grandes responsabilités à remplir pour les quatre prochaines années. Les attentes sont souvent énormes de la part de ceux qu'ils représentent. Ils auront des gestes importants à poser dans un monde continuellement en ébullition et où le gouvernement du Parti québécois ne se gêne pas pour les traiter de créatures plutôt que de les respecter comme partenaires.

Les élections produisent toujours des gagnants et, malheureusement, des perdants. Je m'en voudrais, M. le Président, de ne pas avoir une pensée bien spéciale pour ceux et celles qui ont essuyé un revers dimanche dernier. Le seul fait d'avoir posé sa candidature à un poste électif mérite une grande considération de la part de tous les Québécois, de toutes les Québécoises. Merci aussi à ceux et celles qui ont servi pendant un ou plusieurs mandats. Votre grand dévouement aura certainement contribué au bien-être de vos concitoyens et concitoyennes. Merci à ceux qui tentaient leur chance pour la première fois. Le simple geste de vous présenter devant l'électorat peut servir d'exemple pour les futures générations. J'aimerais également remercier les citoyens et citoyennes du Québec qui, dimanche dernier, ont exercé leur droit de vote en ayant la ferme conviction que leur choix démocratique sera respecté. On ne le répétera jamais assez, votre geste a été important et il est à la base de notre démocratie qui nous est si chère et qui doit demeurer telle que nous la connaissons actuellement.

M. le Président, les élections municipales du 7 novembre auront été une autre preuve de cette belle démocratie, une démocratie qui n'est pas toujours respectée, par contre, par le parti d'en face, j'irais même jusqu'à dire bafouée par ce gouvernement à quelques reprises à travers les années. Permettez-moi aujourd'hui de m'interroger sur l'avenir de cette belle démocratie alors que le gouvernement du Parti québécois est en train de vouloir ignorer le résultat de référendums pour provoquer des fusions non souhaitées, des fusions forcées, qu'on pense à celle de Mont-Tremblant et de Saint-Jovite. Quand une population impliquée comme celle de Tremblant dit non à 96 %, ça veut tout dire. La démocratie, à mon humble avis, en prend pour son rhume.

On se doit de respecter l'engagement d'une population. Ça augure très mal pour l'avenir de la démocratie au Québec. Tous les yeux seront rivés vers ce beau coin de pays alors que le gouvernement s'apprête à bulldozer son projet de réforme, un projet qui est loin de faire l'unanimité. De tels gestes servent d'avertissement pour toutes les autres municipalités québécoises. Les prochaines semaines et les prochains mois seront très importants dans l'échiquier municipal, et je demande au gouvernement aujourd'hui de bien vouloir respecter les vrais enjeux. La démocratie est la base de notre système et elle se doit d'être respectée dans son entité. Merci, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Je pensais que Mme la ministre était déjà intervenue sur cette motion.

Le Président: Je comprends que Mme la ministre voudrait répliquer à votre collègue de Hull, mais je comprends donc que vous voudriez intervenir avant cette réplique.

(15 h 10)

M. Paradis: C'est-à-dire que le premier élément que j'ai à vous soumettre, M. le Président, c'est qu'il y a eu une entente entre les bureaux des leaders qu'il y avait deux intervenants du côté ministériel et un intervenant du côté de l'opposition, sans droit de réplique, comme le veut la tradition au niveau de ces ententes. Maintenant, si on est pour briser l'entente, il n'y a plus rien qui tient, c'est-à-dire que chaque député a un droit de parole de 20 minutes.

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, pour une fois que le leader de l'opposition s'en tient au strict respect des ententes, je ne vais pas le désavouer.


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que, dans ce cas-là, Mme la ministre des Affaires municipales va respecter l'entente, qui n'était pas un ordre de la Chambre, incidemment, puisque finalement cette entente était restée quelque chose de privé entre les leaders.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, très bien. S'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission des finances publiques poursuivra les consultations générales sur la réduction de l'impôt des particuliers demain, le mercredi 10 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des institutions, quant à elle, entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 75, Loi sur les heures d'exploitation de certains établissements le 1er janvier 2000, demain, le mercredi 10 novembre 1999, de 11 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira en séance de travail aujourd'hui, le mardi 9 novembre 1999, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de préparer les séances des 10 et 11 novembre 1999 concernant l'audition du Curateur public et la vérification des engagements financiers du ministère de la Sécurité publique.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira demain, le mercredi 10 novembre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'entendre le Curateur public concernant le suivi des recommandations du Vérificateur général et de la commission de l'administration publique sur la gestion du Curateur public.

Je vous avise, de plus, que la commission des finances publiques se réunira en séance de travail demain, le mercredi 10 novembre 1999, de 8 h 30 à 9 h 30, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de discuter du rapport du Comité sur l'examen de l'activité du lobbying au Québec et de soumettre la proposition de report du mandat de surveillance de Loto-Québec.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique Renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Châteauguay. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale du Québec exige du gouvernement péquiste qu'il mette immédiatement fin au gaspillage de l'argent des contribuables.»

Alors, ceci termine les affaires courantes.


Affaires du jour

Nous allons donc immédiatement passer aux affaires du jour. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Nous souhaitons procéder à l'adoption du projet de loi n° 47, donc je vous réfère à l'article 20 du feuilleton.


Projet de loi n° 47


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 20 de votre feuilleton, Mme la ministre du Travail propose l'adoption du projet de loi n° 47, Loi concernant les conditions de travail dans certains secteurs de l'industrie du vêtement et modifiant la Loi sur les normes du travail. Y a-t-il intervention sur l'adoption du projet de loi n° 47? Alors, Mme la ministre du Travail et députée Bourget.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Alors, nous sommes donc au terme d'une très longue démarche. Je me permets de rappeler quelques étapes, parce qu'on parle de presque une décennie. Alors, on se rappellera que, au début des années quatre-vingt-dix, il y a eu un forum sur les relations de travail dans l'industrie du vêtement qui traitait de l'avenir de ce régime de décrets dans l'industrie du vêtement. Par la suite, il y a eu une commission parlementaire sur la révision de la Loi sur les décrets de convention collective parce qu'on sait que plusieurs secteurs...

M. le Président, c'est extrêmement difficile de m'adresser à cette Chambre, il y a des bruits de fond partout. Est-ce que je peux vous demander d'intervenir?

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre du Travail, puisque vous me le demandez, je vais immédiatement demander aux gens qui ont des travaux à effectuer en commission parlementaire de bien vouloir libérer les lieux, le salon bleu, et également à ceux qui n'ont pas ces travaux à effectuer de s'asseoir à l'Assemblée nationale et de diminuer un peu le nombre de décibels, ce qui permettra à Mme la ministre du Travail de poursuivre son allocution. Alors, Mme la ministre du Travail, s'il vous plaît.

Mme Lemieux: M. le Président, je vous remercie parce que je pense que c'est des sujets importants, et je veux essayer de le faire dans un minimum de sérénité. Je disais donc que c'est une longue démarche que nous allons conclure. On doit se reporter au début des années quatre-vingt-dix. Il y avait eu, à ce moment, un forum sur les relations de travail dans l'industrie du vêtement qui traitait de l'avenir de ce régime de décrets dans l'industrie du vêtement. Un peu plus tard, il y a eu une commission parlementaire importante sur la révision de la Loi sur les décrets de convention collective, parce que nous savons qu'il y a plusieurs secteurs – une bonne vingtaine – qui sont couverts par ce régime particulier de convention collective, ce qui a permis, entre autres, de préciser de nouveau les problèmes de l'industrie du vêtement.

Rappelons-nous aussi qu'il y a eu ce grand Sommet sur l'économie et l'emploi en 1996 où il y a été question notamment des décrets dans le secteur du vêtement. Il y a eu toutes sortes de consultations très spécifiques et de discussions dans l'industrie avec les principaux partenaires, les principaux acteurs de cette industrie-là. Des ententes ont été amorcées au début des années quatre-vingt-dix. Il y a eu une proposition, en 1994, de contrat social, des rapports internes du ministère du Travail, une grande révision du secteur de l'industrie du vêtement. Eh bien, nous devons conclure une chose de l'ensemble de ces démarches-là, c'est qu'il y avait et il y a encore absence de consensus pour résoudre ces problèmes d'encadrement de l'industrie du vêtement. Un des éléments majeurs qui expliquent ces difficultés, c'est le fait que le paritarisme, qui était le fondement du régime des décrets dans le secteur du vêtement et qui est le fondement de tout régime de décrets, n'existe plus dans le secteur du vêtement. Alors, d'un côté, les associations d'employeurs demandaient purement et simplement l'abrogation des quatre décrets qui couvrent le secteur du vêtement; de l'autre côté, on demandait un renforcissement des décrets du vêtement. Je pense qu'il y a une chose qui est claire à mes yeux, c'est que le statu quo n'était plus acceptable et qu'il nous fallait donc trouver une nouvelle manière d'encadrer les emplois qui sont dans le secteur du vêtement.

En l'absence de consensus entre les différents acteurs de ce secteur-là, il fallait donc que le gouvernement agisse – c'est ce que nous faisons par ce projet de loi – pour préserver deux choses: évidemment, la compétitivité de l'industrie, mais aussi les conditions de travail, des conditions de travail correctes pour l'ensemble des travailleurs et travailleuses de ce secteur. Nous avons donc déposé, au printemps dernier, le projet de loi n° 47, et je rappelle les principaux éléments de ce projet de loi.

D'abord, le projet de loi émet l'idée clairement que nous mettrons fin aux quatre décrets de l'industrie du vêtement, mais qu'ils seront remplacés par un régime de normes spécifiques dans la Loi sur les normes du travail. Mais, d'ici là, le projet de loi prévoit la prolongation de ces quatre décrets et des comités paritaires pour une période de transition de 18 mois. Et, pendant cette période de transition, les taux horaires minimaux de chacun de ces décrets, la durée de la semaine normale de travail de chacun de ces décrets, les congés annuels, les jours fériés, les congés pour événements familiaux et les périodes de repas seront reconduits comme il est prévu dans les décrets, donc durant cette période de transition. Comme je l'ai mentionné aussi durant l'étude du projet de loi en commission parlementaire, les conditions de travail seront prévues par règlement et vont s'apparenter, à l'exception de la rémunération et de la durée de la semaine normale de travail, à celles en vigueur dans le Décret de l'industrie de la confection pour hommes.

(15 h 20)

À la fin de la période de transition, comme je le disais, nous abolirons ce régime de décrets du vêtement, mais nous le remplacerons par des normes spécifiques applicables aux quatre secteurs assujettis, qui devraient prendre effet après avoir été fixées par règlement. Au cours aussi de cette période de transition, un organisme jugé représentatif par les intervenants de l'industrie des secteurs concernés formulera des propositions de modifications aux conditions de travail édictées, qui seront donc la base de l'établissement des normes spécifiques pour le secteur dans la Loi sur les normes du travail.

Au cours et après la période de transition, je rappelle que la Commission des normes du travail a été mandatée pour veiller à la surveillance de l'application des conditions de travail et de ses normes sectorielles. À cet effet, la Commission des normes du travail va se doter d'un programme adapté de surveillance et elle devra aussi travailler avec l'organisme jugé représentatif qui aura été constitué pour conseiller le gouvernement et la Commission des normes. Le projet de loi prévoit également que les inspecteurs actuels des comités paritaires seront intégrés au personnel de la Commission des normes du travail.

Un autre élément du projet de loi n° 47 concerne le fonds de vacances. Vous savez qu'historiquement s'est constitué un fonds pour permettre le paiement des vacances aux employés. Ce fonds prendra fin le 30 juin 1999. Les contributions des employeurs qui ont déjà été versées pour la période de mars à juin, enfin qui seront versées au cours des prochains mois, seront donc remises aux salariés. Le projet de loi prévoit aussi une solution pour résoudre un problème important. Ce fonds de vacances a accumulé, au fil des ans, un déficit de l'ordre de 2 000 000 $. Il est donc prévu dans le projet de loi une cotisation spéciale, qui sera exigée aux employeurs du secteur pour dames, permettant de résorber cette période de déficit. Le comité paritaire va demeurer responsable du versement des indemnités de vacances...

C'est extrêmement difficile, M. le Président. Est-ce qu'on peut en convenir?

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vais suspendre quelques instants. Je suspends.

(Suspension de la séance à 15 h 22)

(Reprise à 15 h 23)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Nous allons poursuivre, maintenant, Mme la ministre, et je vous garantis que vous allez pouvoir poursuivre dans le calme. Allez-y, madame.

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je vous remercie de faciliter ma tâche. Alors, je disais donc, pour reprendre le fil, que, évidemment, tant que le Comité paritaire pour vêtements pour dames existera, c'est-à-dire jusqu'à la fin de la période de transition, c'est le Comité paritaire qui sera responsable de payer les indemnités de vacances pour la période de juillet à décembre 1999. Après la période de transition, c'est la Commission des normes du travail qui assumera ces obligations.

Je rappelle aussi qu'un des éléments importants de ce projet de loi concerne le fait qu'il est prévu qu'au plus tard le 30 juin 2004 le ministre du Travail devra faire un rapport sur l'application de ce nouveau cadre réglementaire. Je pense que c'est une disposition qui est importante parce que, évidemment, nous changeons les paramètres dans lesquels les conditions de travail de ce secteur du vêtement... les paramètres, donc, d'encadrement de ce secteur. Il est important de se donner un moment à partir duquel nous nous donnons l'obligation d'évaluer les effets de ce nouveau cadre réglementaire.

Alors, c'était donc en substance le projet de loi n° 47 lorsqu'il a été déposé au printemps dernier. Maintenant, depuis, il s'est passé aussi un certain nombre de choses. Nous avons, si vous me permettez l'expression, mis au jeu ce projet de loi n° 47, nous avons procédé à de multiples consultations formelles et informelles, et ça a donné lieu à un certain nombre de modifications qui ont été discutées d'ailleurs dans la commission parlementaire article par article. D'abord, je rappelle qu'il y a eu une consultation générale en septembre dernier, les 14 et 15 septembre dernier, une consultation qui a été menée par la commission de l'économie et du travail, où 11 organismes représentant des groupes de femmes, des groupes de salariés, des groupes d'employeurs se sont adressés à la commission. Les commentaires évidemment ont été soigneusement écoutés, plusieurs recommandations ont été faites et nous avons pris soin de bien décortiquer la nature des commentaires qui nous ont été faits pour en tirer la substance et apporter des corrections relativement importantes au projet de loi n° 47. Et je rappelle que c'est des exercices qui sont importants. Comme législateur, on met sur la table des projets, et je pense que c'était extrêmement important que des gens du milieu viennent nous faire des recommandations. Je remercie les gens de l'avoir fait. Ce n'est pas des exercices qui sont simples, mais ils l'ont fait et c'était important de le faire.

Alors, je rappelle les principales modifications qui sont apportées au projet de loi n° 47, qui sont donc le résultat de l'intégration de ces commentaires – rapidement. Nous avons replanifié, si je peux m'exprimer ainsi, la prolongation des décrets. Évidemment, comme le projet de loi avait été déposé au printemps dernier, nous avions prévu une période de transition d'à peu près deux ans. Il aura donc fallu revoir un peu notre calendrier d'application du projet de loi. Alors, les décrets seront prolongés jusqu'au 30 juin 2000. La période de transition va donc débuter le 1er juillet 2000 pour une période de 18 mois, soit jusqu'au 31 décembre 2001.

Le fonds de vacances. La fin du fonds de vacances dans l'industrie pour dames est prévue pour le 29 février 2000. Les articles relatifs à ce fonds seront donc supprimés à partir de mars 2000. Il est toujours prévu un versement de l'indemnité de vacances de 8 % de l'an 2000 pour les salariés de la confection pour dames, nonobstant la durée de leur congé annuel.

Et une des modifications qui ont été introduites, c'est l'étalement de la période pour résorber le déficit. Alors, comme je vous le disais tout à l'heure, il y a un déficit de 2 000 000 $ qui s'est accumulé au fil des ans. Initialement, le projet de loi n° 47 prévoyait une période de quatre mois pour que les employeurs puissent résorber ce déficit. Nous avons étendu cette période de résorption du déficit sur 12 mois, c'est-à-dire du 1er mars 2000 au 28 février 2001, si bien que le taux de contribution de ces employeurs va s'élever à 1,85 % des gains bruts des salariés. Et les employeurs qui seront appelés à contribuer à la résorption du déficit sont ceux assujettis au décret pour dames au moment de la sanction de la loi.

Il est toujours convenu que la Commission des normes du travail prenne la relève du Comité paritaire au sujet de la réception de cette contribution spéciale pour résorber le fonds de vacances et pour évidemment la redistribution de ces sommes. Ce sera donc à partir de juillet 2000 que la Commission des normes prendra la relève, et elle sera responsable de verser des indemnités de vacances de décembre 2000 et de toute autre réclamation qui pourrait survenir.

Nous avons aussi apporté un changement, en ce sens que nous apportons une modification au pouvoir réglementaire de la Commission des normes. Il y a beaucoup de préoccupations qui ont été exprimées par les différents intervenants qui se sont adressés à nous au moment de la consultation générale, notamment sur toute la question de ce qu'on appelle le «rapport mensuel». On sait que les employeurs dans le secteur du vêtement avaient l'obligation de transmettre à chaque mois au comité paritaire un relevé contenant un certain nombre d'informations permettant de détecter le nombre d'heures que chacun des employés avait travaillées dans l'entreprise. Alors, nous avons pris les dispositions qu'il fallait pour faire en sorte que la Commission des normes puisse toujours continuer à obliger un employeur à lui transmettre un rapport contenant différentes informations sur l'emploi d'un salarié. La fréquence et la durée de l'obligation de cette transmission seront précisées ultérieurement, mais nous avons au moins prévu dans la loi que la Commission des normes puisse le faire.

Nous avons également prévu – ce qui n'était pas prévu dans la version originale du projet de loi n° 47 – qu'à compter du 1er janvier 2000 tous les dossiers et documents d'un comité paritaire deviendront la propriété de la Commission des normes du travail pour lui permettre, à la Commission des normes, d'exercer ses nouvelles responsabilités, parce que, il faut bien le comprendre – et je sais qu'il y a beaucoup d'inquiétudes qui ont été exprimées par différents intervenants – la Commission des normes du travail a le mandat, dans cette loi, de développer un programme de surveillance, de voir à l'application des conditions de travail dans ce secteur-là. Il nous fallait donc prévoir pour la Commission des normes tous les outils pour le faire. La transition entre les instruments dont disposaient les comités paritaires qui avaient l'habitude de travailler dans ce dossier-là, il fallait donc prévoir une bonne transition entre ces responsabilités assumées par les comités paritaires et les nouvelles responsabilités assumées par la Commission des normes du travail.

(15 h 30)

En conclusion, je dirais que, dans un monde idéal – parce que je sais que l'opposition officielle et je suis persuadée que le député de LaFontaine vont y revenir – il aurait été extraordinaire que les gens du milieu s'entendent, qu'il y ait émergence d'un certain consensus. Ç'aurait pu ne pas être un consensus parfait, mais au moins le début d'un consensus entre les gens qui représentent les employeurs, les entreprises, entre ceux qui représentent les salariés, d'autant plus qu'il y a là des considérations importantes. Ce sont des milieux qui ne sont pas toujours syndiqués massivement – c'est inégal, dépendamment du secteur – alors, dans le meilleur des mondes, ç'aurait été extraordinaire d'avoir le début d'un consensus. Or, ça ne s'est pas produit et ça fait une bonne dizaine d'années que ce dossier-là est sur la table. Il y a eu toutes sortes de tentatives, de bonne foi, pour essayer de faire des pas, essayer de moderniser les décrets, il y a eu des tentatives en ce sens-là qui n'ont pas donné lieu à des résultats intéressants. Je dois vous dire qu'à un moment donné il faut décider, et là le gouvernement a pris ses responsabilités, il a tiré la ligne.

Le gouvernement, je dois le dire, a fait preuve d'une certaine imagination, parce que, il y a quelques mois, on n'aurait pas pu imaginer qu'on trouve ainsi une troisième voie. Parce que, entre l'abolition pure et simple des décrets et des décrets blindés, difficiles à découdre, il nous fallait trouver une troisième voie. Or, cette troisième voie là, c'est d'utiliser un instrument qui est cher aux yeux des Québécois et des Québécoises, la Loi sur les normes du travail. La Loi sur les normes du travail, beaucoup de gens en comprennent le sens. Ça couvre des salariés qui, en général, ne sont pas syndiqués. C'est un peu l'état des consensus sur quelles sont les conditions de travail les plus importantes que nous devons préserver et surveiller de manière particulière. Alors, on a donc trouvé cette voie d'utiliser ce véhicule-là qui est bien connu, qui dispose aussi d'un instrument important, la Commission des normes du travail, pour essayer évidemment de donner de l'espace à ce secteur de l'industrie du vêtement, mais en même temps protéger des conditions de travail qui sont, dans certains cas, très fragiles.

Et je dois vous avouer que, lorsque nous avons procédé notamment à la commission parlementaire et à l'étude article par article, quand je suis revenue... C'est une anecdote, mais, quand je suis revenue au ministère du Travail, il y a des gens qui travaillent au ministère du Travail depuis très longtemps, certains depuis une dizaine, une douzaine d'années, et certains m'ont dit: Mme la ministre, enfin! Enfin, ça aura pris 10 ans à trouver une voie et à la fixer et à faire en sorte que nous nous enclenchions tous et toutes... Que ce soient les gens du secteur de l'industrie, que ce soient les gens du côté des salariés, nous nous engagions dans une nouvelle manière de préserver l'essentiel, mais en même temps de développer ce secteur-là. Alors, pour plusieurs, effectivement, c'est l'aboutissement de va-et-vient, de hauts et de bas, de tentatives, d'échecs et de déceptions, d'espoirs en désespoirs. Alors, je pense qu'il faut mettre fin à ce cycle-là et tous s'engager dans une voie constructive.

Par ailleurs, donc, ce projet de loi là concrétise la nécessaire recherche d'équilibre dans cette industrie comme dans toutes les industries. À la fois, il nous faut maintenir une position concurrentielle des entreprises québécoises... Et ça, c'est assez intéressant de constater à quel point il y a eu beaucoup de développement d'emplois ces dernières années dans le secteur du vêtement, mais il y a encore tellement de possibilités devant nous. Donc, un nécessaire équilibre entre une position concurrentielle des entreprises, mais aussi des conditions de travail adéquates, correctes et décentes.

L'autre élément, je pense, intéressant du projet de loi n° 47, quoi que certaines personnes en disent, c'est qu'on procède quand même à un certain allégement réglementaire. Évidemment, il y a des employeurs qui auraient voulu en avoir plus, mais je pense qu'on procède à une plus grande fluidité des règles du jeu dans ce secteur-là et qui va certainement permettre le développement de l'industrie et la préservation d'emplois et, je l'espère, le développement de nouveaux emplois.

Nous avons en même temps à la fois réussi à dégager, donc, un régime particulier, spécifique par l'intégration à la Loi sur les normes du travail de normes de travail spécifiques au secteur du vêtement. Alors, c'est comme je le disais tout à l'heure, il nous fallait trouver une autre voie. C'est la voie que nous avons privilégiée, et je pense que c'est un modèle qui risque de donner des résultats fort intéressants.

Il a aussi été convenu... Et ça, ça m'apparaît très important à mes yeux que, même s'il n'y a pas eu de consensus, une fois qu'on est au clair sur le cadre réglementaire dans lequel nous sommes tous, il faut par la suite interpeller et mettre autour de cette table les gens les plus concernés par le secteur pour nous aider à identifier les normes sectorielles le plus clairement possible. Alors, je vais donc prendre soin – et c'est prévu dans la loi – de constituer ce groupe que nous appellerons je ne sais pas comment encore, mais un groupe représentatif des grandes composantes du secteur de l'industrie du vêtement, que ce soit du côté patronal ou du côté des salariés. J'en prends l'engagement, nous allons le constituer correctement, avec la complicité notamment de la Commission des normes du travail.

L'autre élément par lequel, pour moi, c'est vraiment une valeur ajoutée, ce projet de loi là, c'est le renforcement de la surveillance, de l'inspection des normes du travail par l'établissement d'un programme adapté à l'industrie. Et ce programme élaboré par la Commission des normes du travail, moi, j'y mets beaucoup d'espoir. D'abord, il y a des gens qui ont été très critiques à certains moments sur la Commission des normes, et je pense que nous mettons à la disposition des travailleurs et des travailleuses du secteur du vêtement une organisation qui, quand même, a une crédibilité, qui a une histoire, qui a un certain nombre de moyens. Alors, nous mettons toute cette organisation-là à la disposition d'une plus grande surveillance, un plus grand respect des normes du travail dans le secteur du vêtement.

Et j'ai même pris la peine de solliciter une collaboration bien particulière entre la Commission de la santé et de la sécurité du travail et la Commission des normes du travail. Il ne s'agit pas de travestir les missions de personne, mais, comme j'ai entendu et j'ai vu beaucoup de préoccupations aussi en matière de santé et sécurité, je pense qu'il y a moyen de développer un programme de surveillance minimalement coordonné entre ces deux organisations-là qui couvrent finalement des réalités qui préoccupent les gens, avec raison. Les gens se demandent: Est-ce que je vais avoir tout ce qu'il faut pour que mes normes minimales de travail dans ce secteur-là – le salaire, la semaine normale de travail, etc. – soient respectées? Les gens ont aussi des préoccupations en matière de santé et sécurité. C'est souvent des travaux qui sont très répétitifs, par exemple. Alors, j'ai demandé qu'il y ait une bonne complicité entre ces deux organisations-là pour que vraiment cette industrie-là devienne un modèle, dans un certain sens. Je pense que toutes les entreprises dans le secteur du vêtement ne se comportent pas de manière malsaine, mais il y a des cas où, oui, il y a des difficultés. Je pense qu'il y a moyen d'augmenter nos standards, les standards dans l'industrie quant à la qualité de ces emplois-là, et le respect, aussi, des normes du travail dans ce secteur-là. Alors, pour moi, je mets beaucoup d'espoir dans l'intervention de la Commission des normes du travail, et je pense que c'est vraiment un plus.

Je terminerais très simplement, d'abord en réitérant comment les interventions, notamment à la consultation générale, des différents groupes – syndicats, associations d'employeurs, groupes de femmes – ont été utiles. Elles ont donné lieu à des changements importants. Elles nous ont signalé des problèmes qui avaient été jaugés de manière différente. Elles nous permettent donc d'avoir un projet de loi beaucoup plus efficace, je le crois. Je veux aussi saluer très, très chaleureusement... Il y a toute une équipe de fonctionnaires au ministère du Travail qui ont vraiment très à coeur ce dossier des décrets dans le secteur du vêtement. Et ce n'est pas un mauvais jeu de mots quand je dis ça: Il y en a plusieurs qui se sont faits les gardiens que les solutions que nous trouverions via ce projet de loi soient correctes, soient acceptables. Et je dois vraiment souligner à quel point ils ont mis du coeur dans la recherche de cette voie nouvelle. Je veux aussi saluer les parlementaires qui, depuis de nombreuses années, ont contribué d'une manière ou d'une autre à ce qu'on finisse par franchir des étapes, même si elles n'ont pas été concluantes à chaque fois. Nous en franchissons une à ce moment-ci, qui est importante.

(15 h 40)

Et j'aurais peut-être une dernière pensée pour les travailleurs et les travailleuses de l'industrie. J'en ai rencontré, j'ai eu beaucoup de correspondance, je sens très bien les inquiétudes des gens, je peux les comprendre. Mais, très honnêtement, nous allons faire ce qu'il faut pour que les choses se passent correctement. Et c'est la raison pour laquelle nous avions prévu une période de transition. Je ne veux pas faire de la politique partisane bas de gamme, mais je rappellerais qu'à une certaine époque il y a des membres de l'opposition libérale qui ont préconisé l'abolition pure et simple des décrets, sans rien du tout, sans filet, rien, des membres de l'opposition officielle, du Parti libéral, qui ont dit: On ne comprend pas la nature de ce régime-là. Il n'y a plus d'arguments qui justifient ce régime-là. Aujourd'hui, ils ont une position, quant à moi, assez mitigée, confuse, ambiguë. Moi, je suis très fière que nous ayons trouvé une voie pour à la fois encadrer les conditions de travail, faire en sorte que les gens ne se retrouvent pas complètement pris à eux-mêmes, sans filet, mais en même temps donner un peu d'oxygène à ce milieu-là qui a besoin, qui a un potentiel de création d'emplois.

Alors, j'ai une pensée pour ces hommes et ces femmes qui travaillent dans l'industrie. C'est un travail assez dur, répétitif. C'est des gens qui doivent gagner leur vie, et je veux les assurer que nous avons mis tous les ingrédients qu'il fallait pour que les prochaines conditions de travail soient des conditions de travail respectueuses, correctes et, surtout, qu'elles soient respectées. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et également députée de Bourget. Alors, nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de travail, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Alors, merci, M. le Président. Tout d'abord, je ne vous cacherai pas que c'est une des rares fois où j'entends des parlementaires applaudir à l'annonce de la coupure de salaires et d'avantages sociaux et de conditions de travail de travailleuses au Québec. Car, en effet, que retrouvons-nous dans ce projet de loi n° 47? Mme la ministre nous a fait part de sa version officielle du projet de loi n° 47, une version qui tend à édulcorer ce qu'elle est en train de faire, ce qu'elle fait et ce qu'elle va créer comme situation pour des milliers de travailleuses dans des régions du Québec, car, en effet, ce projet de loi s'adresse à 22 000 travailleurs et travailleuses de l'industrie de la couture au Québec sur un potentiel, un bassin de 85 000. Et que retrouve-t-on dans ces 22 000 travailleuses, travailleurs et travailleuses? Selon Statistique Canada, dans Perspectives , au printemps 1997, une analyse très exhaustive de cette industrie nous démontre les faits suivants: les trois quarts des emplois sont occupés par des femmes; 50 % des effectifs sont des immigrants; 8 % ne parlent ni l'anglais ni le français; 54 % n'ont pas terminé leurs études secondaires; et 5 % travaillent à domicile. Voilà la clientèle à laquelle ce projet de loi s'adresse.

Donc, on parle de gens, de travailleurs et de travailleuses, qui ont des salaires entre 13 000 $ et 16 000 $ par année, pour des semaines de 40 heures de travail, des travailleurs et des travailleuses qui ont à faire face à des cadences extrêmement difficiles, des cadences extrêmement exigeantes de production dans des positions et des postures d'application pas toujours très confortables. Voilà, M. le Président, un peu le portrait de ces travailleuses et ces travailleurs. On parle de 75 % de ces gens qui sont des travailleuses qui sont régies actuellement par cette loi du décret. Et je vois ici la ministre qui vient nous annoncer qu'elle fait un progrès, un pas vers l'avenir, vers le futur en faisant en sorte que ces travailleuses, à partir du moment où le projet de loi sera adopté, donc dans quelque temps, eh bien, vont commencer par perdre une à deux semaines de leurs vacances, alors qu'elles travaillent depuis de nombreuses années dans cette industrie, vont se retrouver sans autre protection que celle du gouvernement, alors qu'avant elles avaient ce qu'on appelait «un comité paritaire» avec lequel elles devaient ou faisaient affaire, qui représentait aussi bien les employeurs que les travailleuses.

Alors, M. le Président, on nous dit aujourd'hui que, pour l'avancement de l'économie du Québec, pour le textile, pour la couture, il faut abroger ça, il faut sabrer ça, il faut rapatrier ça au niveau gouvernemental, parce que le grand gouvernement, notre grand protecteur, le gouvernement, lui, il décide que ce qui se faisait au niveau paritaire entre les gens, entre les parties intéressées dans ces 22 000 travailleuses et les employeurs qui y participaient, entre autres la Guilde des manufacturiers d'habillement, qui sont partie prenante et qui tenaient à conserver ce régime-là en le modifiant, probablement, et en l'ajustant, en le modernisant...

Eh bien, M. le Président, voilà où nous nous retrouvons. Et l'argument évoqué, c'est: il faut relever la compétition, il faut relever la nouvelle organisation des marchés. Certes, nous en sommes, sauf qu'il faut regarder les chiffres, il faut regarder qu'est-ce qu'ils sont. Et, selon les mêmes études qui ont été dans cette commission parlementaire, les deux que nous avons eues... Nous avons eu cette commission parlementaire qui a fait qu'il y avait des audiences publiques où des groupes sont venus témoigner, sont venus nous rencontrer, des représentants d'employés, de travailleurs et de manufacturiers, d'exportateurs, de chambres de commerce. Eh bien, il y a un certain nombre de chiffres quand même qui sont restés. Il faut regarder les faits.

Lorsqu'on nous dit qu'il faut abolir ou changer complètement ce régime-là parce qu'il est en problème, il faut relever les défis de la croissance parce que sinon il ne survivra pas, il faut regarder que depuis 1999, alors que le Québec a connu un ralentissement économique très important, jusqu'à 1997, l'année qui vient, la part des exportations du Québec est passée de 28 % du marché canadien à 56 %. Pour un secteur qui est en difficulté soi-disant à cause de sa rigidité ou son organisation trop désuète, il me semble que sa progression est 10 fois supérieure au reste du secteur manufacturier québécois. Alors, il y a quelque chose qui ne tient pas. Quels sont les arguments réels qui nous amènent à faire cela?

On nous a dit, M. le Président, aussi, on nous a fait miroiter – et la ministre elle-même en cette Chambre l'avait repris avant de se rétracter devant l'absence de faits qui l'indiquaient – qu'il fallait abroger ces décrets pour créer 8 000 emplois au Québec dans le secteur de la couture. Le problème, c'est que ça, ça a été dit en 1996 lors du Sommet de l'emploi où le premier ministre Bouchard et son gouvernement étaient. Alors, les décrets n'ont pas été abolis en 1996 ni en 1997 ni en 1998, ils ne le sont pas encore en 1999 et ils ne le seront pas avant le 30 juin 2000.

Mais, entre-temps, alors qu'on nous faisait miroiter 8 000 emplois, jusqu'à aujourd'hui, si on abolissait les décrets, il s'est créé dans ce secteur d'économie là 8 500 emplois. Alors, que vient-on nous dire, que vient-on nous raconter? Ce qui apparaît, M. le Président, évident, c'est qu'en 1996, lorsque l'on a annoncé ça, on savait déjà que la progression de ce secteur de l'industrie, en tenant compte des marchés, en tenant compte de la baisse du dollar, en tenant compte de facteurs comme la taxation de la laine aux États-Unis...

Car, vous savez tous, ici, qu'aux États-Unis – ou ceux qui ne le savent pas, ça me fait plaisir de vous le préciser – la laine est taxée de 36 % à 38 %, dépendant des endroits, pour protéger le coton, selon le Cotton Act aux États-Unis. Vous savez que les États-Unis sont des producteurs de coton très importants et, la laine venant de l'extérieur, eh bien, pour protéger leur industrie, ça fait en sorte qu'on a mis des barrières tarifaires extrêmement importantes. Au Québec, c'est 9 %. Alors, c'est ce qui explique qu'une partie de nos entrepreneurs, bien sûr, vendent leur production à l'étranger.

Alors là, on est loin des décrets, on est loin des salaires. Et, quand des employés qui ont négocié depuis des décennies des conditions de travail de plein accord avec leur entreprise, eh bien, sont capables d'avoir cette progression au niveau de la productivité, au niveau, bien sûr, de la qualité... Parce que qu'est-ce qui caractérise le Québec dans cette industrie-là? C'est le haut de gamme et le moyen de gamme. Il est vrai, il est exact que nous avions au Québec antérieurement des productions, dans la couture, dans l'habillement, entre autres, de bas de gamme et que ces entreprises-là ont dû ou se reconvertir ou ont fermé leurs portes. Et on sait tous aujourd'hui que les productions de bas de gamme sont maintenant bien souvent localisées dans les pays de tiers-monde, avec la main-d'oeuvre qu'on va trouver au Mexique, qu'on va trouver en Thaïlande, qu'on peut trouver dans certains pays d'Asie ou d'Afrique. Alors, ce qui caractérise le Québec, c'est la qualité de la main-d'oeuvre, c'est la qualité de la production des travailleurs et des travailleuses québécois dans ce domaine-là.

Abolir les décrets, selon les rapports et le mémoire que la ministre a présentés à son Conseil des ministres, c'était pour dire que, lorsque les employeurs produisent des vêtements pour hommes ou pour dames, ceux-ci sont contraints de payer à leurs salariés deux taux de salaire horaire différents. Ce qu'on voulait dire, ce qu'on avait amené comme argument, c'était: Bien, dans une entreprise, lorsqu'ils font des vêtements pour hommes, c'est un taux de salaire, puis lorsqu'ils font des vêtements pour dames, c'est un autre taux de salaire. Mais tout le monde sait bien que l'organisation dans cette industrie-là fait en sorte que ce genre de production là, de double production, est très marginal, parce que, pour produire des vêtements pour hommes, des vestes et des pantalons, ce n'est pas le même équipement, ce n'est pas les mêmes organisations du travail que pour produire des robes ou produire des ensembles pour femmes. Tout le monde sait ça. Et c'est pour ça qu'il y a l'industrie de la couture pour hommes et l'industrie de la couture pour femmes.

(15 h 50)

Et lorsque c'est arrivé, l'ancien ministre du Travail, le député de Matane, avait fait en sorte de changer la loi et fait en sorte, M. le Président, qu'il y ait un article dans la loi qui permettait la production prépondérante, ce qui veut dire que, lorsqu'une entreprise produisait d'une manière pas marginale, d'une manière majoritaire un certain nombre de productions – à titre d'exemple, dans l'industrie pour femmes – et qu'elle devait, pour satisfaire un contrat, avoir une partie de sa production minoritaire qui était du vêtement pour hommes, ou inversement, eh bien, c'est la règle de la prépondérance qui s'appliquait, c'est-à-dire qu'on payait les salaires et les conditions de travail qui s'appliquaient dans le secteur qui faisait la production la plus prépondérante. Alors, c'est faux de voir que dans un mémoire au Conseil des ministres on invente cet argument-là. Je tiens à le révoquer à pleine ligne, ça ne tient pas debout. C'est comme si on cherchait à justifier l'injustifiable.

M. le Président, on nous dit aussi qu'à cause de la modernisation, de la mondialisation de l'économie les délais suite aux applications des normes des comités paritaires sont lourds, ne sont pas souples. Là-dessus, il y a des employeurs et il y a des travailleurs sur un comité, ensemble. Hein? On ne parle pas d'autre chose, que c'est compliqué puis que c'est difficile à appliquer. Ça, c'est dans le mémoire du gouvernement.

Mais on va remplacer ça par des normes sectorielles gouvernementales. Et tout le monde sait bien que, lorsque c'est des normes gouvernementales, c'est dans la loi, c'est dans les règlements, et qu'avant de les bouger pour les adapter au marché c'est bien plus compliqué que lorsqu'il y a des travailleurs et des patrons sur le même comité, qui discutent ensemble de leurs priorités. Alors, ça encore, c'est un autre argument fallacieux. C'est comme si on avait voulu, dans ce mémoire, justifier des engagements au sommet. C'est comme si on avait dit: Faisons des choses pour démontrer qu'on fait des choses.

Puis qui est-ce qu'on va toucher? On ne touchera pas les employés du secteur public, on ne touchera pas les employés syndiqués, on ne touchera pas les cols bleus de la Ville de Montréal, les employés municipaux qui gagnent 28 % de plus que l'ensemble des salariés du secteur public, qui eux ont déjà un petit salaire plus élevé que les employés du secteur privé. Non. On va toucher des gens parmi les plus démunis. 80 % des travailleurs et travailleuses de cette industrie sont dans des entreprises qui ont entre cinq et 10 employés éparpillés partout à travers le Québec, des gens qui ont peu de scolarité, immigrants, des femmes monoparentales, supports de famille. C'est eux qu'on va toucher, c'est à eux qu'on va dire: C'est vous qui allez porter le poids de la symbolique que le gouvernement veut donner de la déréglementation, alors que, dans plein d'autres secteurs au Québec, on ne le fait pas. Dans plein d'autres secteurs au Québec, on a de la misère à le faire.

Le gouvernement nous avait annoncé, à titre d'exemple, la réforme du Code du travail pour faire en sorte que les municipalités puissent avoir accès à de la sous-traitance plus facilement, faire en sorte que les municipalités auraient plus de souplesse pour organiser le travail et la gestion de leurs activités. Diantre! Ça n'a pas été fait. Et pourtant, les citoyens de ces municipalités sont encore écrasés par les taxes parce que les municipalités et les maires élus au suffrage universel et qui demandent ces changements n'ont pas été capables de les avoir et de réorganiser leur travail, de réorganiser leur mission. Mais on le fait pour les 22 000 petites dames de la couture parce qu'on sait qu'elles sont éparpillées, elles ne sont pas syndiquées puis que ça ne criera pas fort. Et je trouve ça inadmissible. On a un gouvernement qui se targue de représenter le progrès social. On ne représente pas le progrès social, là, on représente certainement le plus gros opportunisme politique à ce moment-ci.

D'un autre côté, M. le Président – et c'est là le paradoxe de ce projet de loi – non seulement on va frapper les travailleurs et travailleuses... Et dans beaucoup de comtés de députés, qu'ils soient du gouvernement ou de l'opposition, des groupes de femmes, des travailleuses, leurs représentantes qui ont fini par se regrouper un peu sont venues nous rencontrer. Prenons un exemple: les travailleuses de la Barmish dans les Cantons-de-l'Est sont venues nous parler en commission. Il y a eu des députés qui étaient présents à cette commission, qui sont ici, en cette Chambre. Qu'est-ce qu'elles nous ont dit? Elles ont dit: Nous avons des conditions minimales, des conditions difficiles. On travaille des heures à des cadences insoutenables, des salaires à la limite une fois qu'on a payé nos déductions sociales de ce qui peut rester pour vivre, des pauses d'une heure par jour, avec une toilette, deux toilettes pour 30 ouvrières dans une entreprise. On peut seulement y aller le midi parce que, si on arrête la production sur la ligne, bien, on bloque toute la ligne en arrière. Peut-être que ça peut faire sourire certains, mais c'est ce qu'elles nous disaient, ces femmes. Elles avaient de la difficulté à l'exprimer parce que peu habituées à venir en ces chambres, en ces cénacles où, nous, nous avons une facilité pour parler. C'est ce qu'elles sont venues nous dire, nous expliquer. Elles ne sont pas venues pour rien, elles sont venues parce qu'elles sont touchées par cela. Elles savent que ça touche leurs conditions de travail, elles savent qu'elles vont se retrouver dans une situation qui va être encore plus précaire que celle où elles sont maintenant.

Je le disais tout à l'heure, dès l'adoption du projet de loi, tous les employés, les travailleuses du secteur de la confection pour femme vont passer de trois semaines à deux semaines de vacances automatiquement. Automatiquement. Est-ce que vous trouvez normal... Est-ce qu'on trouve normal en cette Chambre que, nous, nous décrétions, nous votions aujourd'hui un projet de loi qui fait en sorte qu'on baisse le salaire des travailleuses, premièrement, et, deuxièmement, leurs vacances, en sachant comment elles les ont obtenues puis dans quelles circonstances elles travaillent, qu'on les baisse de trois semaines à deux semaines? Qui sommes-nous? C'est la question qu'elles vont se poser ce soir: Qui êtes-vous, vous, pour décider que, moi, mes vacances, de trois semaines que j'avais, elles deviennent maintenant deux semaines? Qui êtes-vous, M. le député Untel? Qui êtes-vous Mme la ministre? Qui êtes-vous, vous, à Québec pour décider ça? De quelle autorité? De quel droit? Comment ne me laissez-vous pas, moi, négocier moi-même puis avoir le pouvoir et la latitude de tenter de conserver, même dans votre démarche de déréglementation, mes avantages? Bien, c'est ce que nous faisons. Et, ce soir, avant de nous coucher, chacun d'entre nous, je vous encourage à penser à cela.

Je vous encourage à penser que, dans nos comtés, dans nos familles, il y a peut-être des gens qui sont touchés. Puis il y a peut-être des gens qui vont nous regarder dans le visage un jour qui vont dire: Pourquoi? Qu'est-ce que je vous avais fait, moi? Bien, moi, elles ne m'ont rien fait, ces dames. Au contraire, elles ont fait progresser l'industrie, M. le Président, de 28 %, en 1989, à 56 % de ce qui se fait au Canada. Il n'y a pas une industrie manufacturière au Canada qui a eu une telle progression. Alors qu'ils sont payés... dans le reste, manufacturier, la moyenne de salaire est de 16,95 $, elles, la moyenne de salaire est entre 7,15 $ et 8,25 $. Voilà de quoi on parle, M. le Président. Déplorable. Inadmissible. Malheureux.

Bon, on a pu entendre Mme la ministre nous faire des grands débats. Il faut que je trouve un équilibre. Ça fait longtemps. Personne ne veut s'entendre. La nouvelle justicière: J'arrive. L'équilibre. L'équilibre, on le fait vers le bas, sur la tête des femmes. C'est ça qu'on fait. Bel équilibre! Bel équilibre que ça! Elle dit: J'ai écouté en commission parlementaire, tout le monde est venu me voir puis... Elle ne les a pas écoutés, parce que, si elle les avait écoutés, elle n'aurait pas fait ça même si elle a des obligations de son gouvernement d'arriver avec un changement, une réforme dans ce secteur-là. Et tout le monde en convient que tous les cadres de travail qui régissent les activités ont besoin de modernisation et d'évolution. Il n'y a personne qui est contre ça ici, tout le monde en est conscient, mais c'est dans la manière de le faire puis dans la manière qu'on laisse aux gens la possibilité de pouvoir décider eux-mêmes et s'organiser eux-mêmes et non pas de décider de mettre en bas les normes au départ. En commençant, on dit: On baisse la barre, puis c'est à partir de maintenant qu'on va négocier vers le bas. Qu'on laisse donc comme c'est, puis que les gens s'organisent entre eux autres, et que le libre rapport de force se fasse. Au moins, elles auront la fierté et la satisfaction d'avoir pu elles-mêmes décider si elles acceptaient ce qu'on leur offre ou ce qu'on ne leur offre pas.

Maintenant, rappelons-nous qu'au départ la promesse, l'engagement de ce gouvernement était d'abolir les décrets. Plus de décrets, ce n'est plus bon, on abolit ça. Les mêmes normes pour tout le monde, c'était ça, là, en 1996. Nous nous retrouvons aujourd'hui avec un système hybride. Non seulement il baisse vers le bas les salaires et les conditions de travail des employés unilatéralement, comme si le gouvernement se substituait à la négociation, à l'industrie, à l'entreprise, mais en même temps il renie la promesse en partie – ou il complique les choses – qu'il avait faite aux employeurs.

(16 heures)

Parce que, M. le Président, la prémisse qui l'a amené à faire ça, le gouvernement, et à accepter cette demande, c'était que ça créerait de l'emploi, que ça faciliterait la concurrence en abolissant les décrets. Là, il coupe la poire en deux, c'est-à-dire qu'il va créer des normes sectorielles. Un peu comme si on prenait les décrets, comités paritaires qui existent actuellement, on récupère tout ça, y compris les cotisations, y compris les inspecteurs, qu'on amène à la Commission des normes, et on refait un mini-décret sous l'égide de la Commission des normes du travail du Québec qui est un organisme gouvernemental qui a de la misère à faire son propre travail. Actuellement, il y a au-delà de 2 000 causes pendantes pour congédiement sans cause justifiée qui n'ont pas été réglées. Deux mille causes pendantes, imaginez le bourbier administratif qu'il y a dans cet organisme. Imaginez ça.

Et, quand ça ne devient pas, bien souvent, des organismes où on retrouve des nids de patronage, où on nomme des gens issus de partis politiques à des vice-présidences ou à des postes d'administration. C'est à ça qu'on veut redonner. On coupe quelque chose, alors qu'il y avait d'autres solutions, pour le donner au gouvernement. On étatise, en d'autres termes. Et là, bien sûr, le discours des entreprises ne tient plus non plus parce que, si vraiment les décrets n'étaient pas bons, s'il fallait mettre tout le monde aux normes minimales du travail, hein, c'est-à-dire au salaire minimum, à 7 $ puis 2 % de vacances par année, s'il fallait mettre tout le monde, pourquoi alors créer des normes sectorielles différentes pour cette industrie? Alors, ou c'est bon ou ce n'est pas bon. Ça ne peut pas être bon à moitié d'un bord, bon à moitié de l'autre bord.

De plus, M. le Président, dans l'industrie, je le disais précédemment, il y a à peu près 85 000 travailleurs et travailleuses; encore là, une majorité de travailleuses. Eh bien, il y en a seulement 22 000 qui vont être assujettis aux normes différentes de la ministre. On ne met pas tout le monde sur le même pied d'égalité. C'est-à-dire, en d'autres termes, ceux qui ne sont pas assujettis actuellement continueront d'avoir, eux, des conditions de travail différentes de celles qui vont être décrétées par le gouvernement dans l'autre secteur. Ça fait que, là encore, bien, force est de constater que le déséquilibre qui était invoqué au départ est maintenu.

Alors, ça nous amène à la question suivante: Pourquoi le gouvernement a-t-il décidé de faire ça? Je le disais précédemment, c'est parce que le gouvernement, M. le Président, bien sûr, ne voit pas d'autre endroit où il peut justifier, à cette époque, de création d'emplois en disant: On va créer 8 000 emplois, en agissant. Ce n'est pas vrai, les emplois ont déjà été créés. Le gouvernement agit, et ça crée des problèmes aux citoyens.

Il y a d'autres solutions qui ont été proposées. À titre d'exemple, M. le Président – et je pense qu'on en a parlé longuement – j'ai là un rapport du ministère du Travail qui avait été fait en 1996 et qui, lui, préconisait d'autres solutions – et c'est des experts du ministère du Travail – d'autres avenues, des avenues qui avaient été travaillées déjà sous l'ancien ministre du Travail, sous l'ancienne ministre même qui l'avait précédé avant, et qui avaient comme avantage de faire en sorte de maintenir ces rapports de force, ces rapports d'équilibre qu'il y avait entre les travailleurs et les employeurs, ce qu'on ne retrouve pas dans son projet de loi. Ah! le patronat est contre. Bon, le patronat est contre, il n'est pas d'accord. La semaine dernière, les dernières discussions que j'ai pu avoir avec certains représentants des organisations patronales ont été très claires: Pour nous, ce projet de loi est inacceptable. On reconduit, par une loi, des normes administratives. En plus de ça, on va nous charger plus cher. C'est-à-dire que non seulement on reconduit les décrets, mais on va leur charger une cotisation annuelle qui est 250 fois plus élevée que celle des autres manufacturiers.

À titre d'exemple, un manufacturier qui n'est pas assujetti aux normes que la ministre veut mettre en place va payer 0,08 % de cotisation par 100 $ de sa masse salariale à la Commission des normes du travail. Eh bien, ceux qui seront assujettis, les 22, le quart, hein, à peu près de ceux qui auront un régime spécial, eux, les employeurs, vont payer 0,2 %. On parle quasiment de 250 % plus élevé. Alors, est-ce que c'est là des entreprises qui vont être en compétition de bonne manière? Je ne suis pas sûr, lorsqu'on sait que les donneurs d'ouvrage, lorsqu'ils arrivent, demandent un prix et disent: Voilà, nous, on veut de la qualité, on veut du prix, hein? Bon, bien, un pourcentage de 1 % ou 2 % sur le prix peut faire des fois la différence dans un marché.

En plus, c'est très mauvais pour les relations dans cette industrie parce que, lorsqu'un règlement de travail n'est pas librement consenti entre les deux, eh bien, il y a toujours des gens mécontents, d'un côté comme de l'autre, et il n'y a pas là un climat propice à une dynamique de progression, à une dynamique d'innovation. On le voit dans toutes les entreprises ou tous les organismes d'État où le gouvernement, à un moment donné, légifère et oblige les retours au travail ou vote des règlements, on l'a vu chez les infirmières encore il y a quelques mois. Il s'agit de voir dans les hôpitaux un peu le climat qui prévaut quand on rencontre ces dames, à tort ou à raison. Je ne porterai pas de jugement, dans cette discussion-là, sur cela, je fais juste constater le fait.

Bien, c'est un peu un principe comme celui-là où on dit aux gens: Vous, on vous baisse puis, vous, on vous met des normes que vous ne voulez pas. Alors, le résultat, c'est quoi? L'équilibre de la ministre. Mais de quelle mission se croit-elle investie pour aller à l'encontre des parties d'une même industrie pour y trouver un équilibre malgré elles? Serait-ce la nouvelle sauveure de l'industrie de la couture, qui n'en a pas besoin parce que son augmentation a été de 28 % à 56 % de la production canadienne?

M. le Président, encore une fois, ce gouvernement n'a pas fini de surprendre. Encore une fois, la ministre nous démontre son côté – je fais attention aux mots que je vais dire parce qu'elle pourrait employer certains vocables – amateur dans le domaine, qui est celui-ci, actuellement. Je crois qu'elle oublie une chose, c'est que, dans les relations de travail, dans l'industrie privée en particulier, il n'y a rien de mieux que des ententes librement consenties entre les parties et quand l'État ne doit y intervenir que lorsqu'il y a injustice ou lorsqu'une partie plus forte va écraser une partie plus petite, et non pas encore pour décider à la place ni pour mettre un cadre qui permet à tout le monde d'avoir l'égalité des chances. C'est là le rôle de l'État dans l'entreprise privée, et non pas de décider, décréter à la place des gens.

M. le Président, beaucoup de députés de l'opposition sont intervenus ou ont été confrontés à des représentations de leurs électeurs. Nous avons eu en particulier le député de Richmond qui a fait en sorte de nous sensibiliser parmi les premiers parce que rencontré par les travailleuses dans sa région, et on sait que, dans la région de Richmond, il y a beaucoup de travailleuses, quelques milliers de travailleuses qui vont être touchées par cela. Les travailleuses de la région de Sherbrooke ont sensibilisé leurs députés. Dans la Beauce, il y a des travailleuses qui ont sensibilisé leurs députés, qui sont intervenues ou qui ont fait valoir ce point de vue là. Il y a aussi, dans la région de Montréal, un grand nombre de travailleuses immigrées qui sont touchées par ces mesures. Nous avons espéré jusqu'à la fin que la ministre révise, ne serait-ce que pendant les périodes transitoires, sa loi et l'application de cette loi, qu'elle fasse en sorte qu'elle laisse les gens aller eux-mêmes au bout d'une démarche.

Nous croyons qu'il y a dans cette industrie-là le potentiel d'une négociation et d'une entente libre. Nous croyons que ce n'est pas au gouvernement à négocier à leur place. Si le gouvernement a cette prétention-là pour elles, il doit le faire pour les autres, il doit le faire pour les fonctionnaires municipaux vis-à-vis des maires, parce que, si on dit que les travailleuses du textile sont des nuisances par le salaire de 7,15 $ ou 8,00 $ qu'elles gagnent dans l'industrie québécoise du textile, qui est en progression, alors pourquoi, avec le même raisonnement, les travailleurs de la ville de Montréal, du syndicat des cols bleus, qui gagnent des salaires énormes par rapport à la capacité de payer des contribuables montréalais, ne devraient pas être révisés de la même manière par le gouvernement? A-t-on peur d'eux? A-t-on peur? Je crois qu'on a peur. Pourquoi on n'ose pas y toucher? Il y a des raisons politiques à cela.

Le Parti libéral croit aussi à l'organisation du travail moderne. Il croit qu'une organisation du travail moderne passe par la formation professionnelle continue qui fasse en sorte que, dans les industries, les entrepreneurs, les entreprises fassent une formation, permettent aux employés d'acquérir des habiletés sans cesse nouvelles. Il pense aussi que, dans nos industries, la modernisation... Et on sait que les entreprises dans l'industrie textile québécoise, particulièrement dans la couture, ont un problème de modernisation. Un des grands problèmes que nous avons, c'est de faire en sorte de remoderniser cette industrie qui ne l'a pas fait dans les dernières années. Certains commencent à la faire et ils donnent des très bons résultats. Mais, lorsqu'on modernise, bien, il faut former le personnel en conséquence. Il faut les adapter pour qu'ils puissent conserver leur emploi, conserver une productivité, eux autres aussi. C'est ce genre de choses auquel le gouvernement peut participer, peut aider. Ce n'est pas en sabrant dans les conditions de travail.

(16 h 10)

Notre gouvernement se prépare à donner 5 %, 1 %, 2 % et 2 %, d'augmentation de salaire aux employés de l'État. On ne se prépare pas à couper une semaine de vacances aux employés de l'État québécois, on se prépare à les augmenter. Dans le cas des travailleuses du textile, dans le propre mémoire de la ministre, elle nous dit que les salaires des travailleuses seront baissés de 2 %. C'est dans son mémoire au Conseil des ministres. Ce n'est pas le député de LaFontaine qui le dit. 2 %. Puis elle leur coupe une semaine de vacances. Oh, oh! belles négociations! Je serais curieux de voir, le même genre de proposition au front commun des syndiqués, qu'est-ce que ça donnerait. On ne le fera pas; alors, pourquoi le faire pour ces dames?

On nous fait croire que cette industrie est en perte, je le disais, alors qu'elle est en progression. On nous fait croire que c'est là la seule solution, alors qu'il y a d'autres solutions qui ont été documentées, qui ont été étudiées par les experts du ministère, par des collègues à la ministre. On nous fait croire qu'on ne peut rien faire d'autre, alors qu'il y a des possibilités en termes de modernisation de l'industrie, en termes de recherche, de développement, en termes de design, en termes de réorganisation du travail. Tout ce qu'on fait, eh bien, c'est toucher aux travailleuses, et tout ce qu'on fait aussi, bien sûr, en même temps, c'est imposer les entreprises, parce que, la cerise sur le gâteau, dans sa recherche d'équilibre, Mme la ministre a décidé que les entreprises paieraient une somme de 3 000 000 $ pour le fonds de vacances, un déficit de fonds de vacances dans un de ses comités paritaires. Elle ne demande pas aux entreprises qui étaient présentes de le faire, mais à toutes celles qui seront dans cette industrie le jour où on va adopter la loi. Par contre, les autres qui vont venir après ne seront pas assujetties à payer cette nouvelle taxe sur la masse salariale. C'est ça qu'on organise. Donc, là encore, on va créer une dichotomie en termes de coûts de compétition.

Nous avons un mot, ou une phrase, pour ce genre de situation: C'est un projet de loi que personne ne veut, c'est un projet de loi qui n'est bon ni pour les travailleurs et les travailleuses ni pour le patronat. Lorsqu'un gouvernement en est rendu à présenter des projets de loi qui ne sont bons ni pour un côté ni pour l'autre auquel il s'adresse, eh bien, nous croyons qu'il doit le retirer. Il doit le retirer, réunir les gens et leur dire: Voilà, j'ai essayé, j'ai cru, de ma grande connaissance – même si Mme la ministre est relativement récente au ministère du Travail; on parle d'à peine un an – pouvoir faire ce que vous n'avez jamais réussi à faire, vous faire entendre, vous donner un cadre dans lequel vous vous retrouveriez tous, mais je n'ai pas réussi.

Il n'y a pas de mal à reconnaître qu'on n'a pas réussi quelque chose lorsqu'on touche à des être humains, lorsqu'on touche à des entreprises, lorsqu'on touche à des travailleuses. Il n'y a pas de mal à ça, le reconnaître, et faire un pas en arrière, et dire: Voilà, eh bien, nous allons reprendre l'exercice, d'autant plus que, lorsque la ministre nous parlait avant la commission parlementaire, il fallait agir d'urgence parce que la date légale des décrets se terminait le 23 décembre. Et là on n'est plus là, on est rendu au 30 juin 2000 dans le projet de loi. Le projet de loi se termine le 30 juin 2000, ce qui nous donne... Et puis il y a une période de transition de deux ans, après, de 18 mois, après, parce qu'on a coupé six mois. Eh bien, est-ce qu'il n'est pas temps pour que Mme la ministre se retire de ses diktats, de son projet de loi qui ne plaît à personne, qui a été décrié par tout le monde, et de laisser les gens et les parties s'entendre?

Je le répète, ce n'est pas là un plan de sauvetage pour faire croire aux gens que l'industrie va périr, va tomber, va péricliter si on ne fait rien. Ce n'est pas ça. Cette industrie est en hausse, c'est la plus haute progression de l'industrie manufacturière au Québec. Alors, il ne s'agit pas de dire: Il fallait agir d'urgence pour sauver cette industrie. Ce n'est pas vrai, c'est un faux discours. C'est un faux discours, un discours qui ne correspond pas à la réalité des chiffres et qui ne tient pas la route lorsqu'on l'aborde de ce côté-là. Donc, c'est simplement un problème d'organisation de travail interne. Eh bien, vu qu'il n'y a pas d'urgence... Parce que, s'il y avait urgence, on n'aurait pas créé 1 500 emplois depuis les trois dernières années et on en aurait perdu.

Si la ministre était arrivée aujourd'hui en nous disant: Il s'est perdu 8 000 emplois depuis les trois dernières années, il y a urgence d'agir, on n'arrive pas, personne ne veut s'entendre, peut-être là prêterais-je une oreille, et certainement une oreille plus attentive. Mais c'est l'inverse qui se produit, c'est l'inverse: on va au secours du succès. Elle se vantait, avant le projet de loi, qu'en abolissant les décrets elle créerait 8 000 emplois; il s'en est créé 8 500 sans elle. Elle n'a pas été capable de l'expliquer. Et, quand je lui ai posé la question en cette Chambre, elle a répondu: C'est de notoriété publique. Depuis quand est-ce qu'on légifère avec la notoriété publique? Ce qu'elle voulait dire à ce moment-là, c'est que tout le monde savait que la croissance de l'industrie, sans qu'on y touche, en la laissant faire elle-même, serait d'à peu près 8 000 emplois. Ce que les chiffres nous ont démontré, c'est que ça a été 8 500. Elle a voulu récupérer quelque chose pour s'en tirer une gloire, une gloriole. Voilà ce qu'elle a essayé de faire, puis aujourd'hui elle est prise avec, puis elle n'ose pas le dire, puis elle va sacrifier les travailleuses pour ce faire, et je trouve ça malheureux.

Ce n'est pas le premier domaine et ce n'est pas le premier projet de loi que la ministre fait dans ce sens-là, et je le déplore, et les Québécois et les Québécoises qui travaillent dans ce domaine-là le déplorent et vous le reprocheront, madame. Un jour, vous aurez à en rendre compte parce que ce ministère qui vous a été confié est un ministère par lequel vous devrez rendre des comptes à la population, mais aux travailleurs et aux travailleuses du Québec. Cela peut vous faire rire, mais, eux, ça ne les fait pas rire quand ils paient le prix du peu de sérieux ou du peu d'application que vous mettez à ce travail, madame. Voilà la réalité. C'est pourquoi nous, ici, du côté du Parti libéral, parce que les travailleuses sont injustement touchées dans ce projet de loi là, parce que le gouvernement n'a rien fait pour trouver d'autres solutions, parce que les employeurs s'opposent aussi à ce projet de loi là, parce que, pour eux aussi, il n'y a pas eu, de la part du gouvernement, un message d'envoyer cette volonté qu'ils trouvent une entente avec le reste de l'industrie, parce que ça crée une double norme dans l'industrie aussi – 22 000 vont être assujettis, 85 000 n'y seront pas – parce que, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député de LaFontaine. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je pense que le député de LaFontaine, qui siège quand même dans cette Assemblée depuis plusieurs années, sait fort bien qu'il y a des propos qu'on ne peut tenir en cette Assemblée. Même s'il met toute la fougue qu'il veut pour défendre son point de vue, de dire, comme il l'a dit, «le peu de cerveau dont la ministre fait preuve» est un langage, à mon point de vue, grossier. Alors, je vous demanderais de demander au député de retirer cette phrase. Elle ne lui sied pas, d'abord.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Gobé: M. le Président, je n'ai pas – je ne sais pas si c'est l'acoustique ou quelque chose comme ça – bien compris la phrase que mon collègue désirait que je retire ou que je modifie. Alors, si peut-être il pouvait la répéter, je comprendrais qu'elle est antiparlementaire. C'est évident que je verrai à changer...

Le Vice-Président (M. Pinard): Non, la phrase n'est pas antiparlementaire, mais cette phrase suscite quand même un débat, entre nous, qui n'est pas de mise dans cette Assemblée, le fait de mentionner «le peu de cerveau de la part de la ministre». Alors, moi, je vous écoutais religieusement, et pourtant je n'ai pas... M. le député de LaFontaine, je vous écoutais religieusement et je n'ai pas cru entendre ces propos. Voudriez-vous expliquer à l'Assemblée quels étaient les propos, effectivement, que vous teniez?

M. Gobé: Alors, M. le Président, vous avez raison, en cette Chambre, je n'ai pas employé de mots antiparlementaires. Peut-être que mes propos soulèvent le débat, mais c'est là certainement le lieu pour ce faire, ce parquet, cette Assemblée. Depuis 14 ans, je crois, que ça soit de ce côté-ci de l'Assemblée comme de celui-ci, que ça a toujours été l'endroit pour ce faire.

Maintenant, en ce qui concerne le mot «cerveau», je n'ai pas, d'après moi, employé ce mot-là et je souhaiterais, si vous voulez absolument que je retire ça, que nous suspendions et qu'on fasse venir les transcripts. Si je l'ai dit, c'est malgré moi, et je verrai à le retirer. Mais je ne l'ai pas dit et je ne crois pas, autour de moi, que j'aie employé ce mot-là, car j'ai rarement... Ou j'aimerais qu'en 14 ans de vie parlementaire on trouve dans un de mes discours ce genre de propos qui pourrait porter à méprise et qu'on me le mette, et je verrai, à ce moment-là, à le retirer. Mais je n'ai certainement pas employé ce mot.

Alors, peut-être que le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques pourrait préciser, parce que, là, vous mettez aussi en cause mon intégrité de parlementaire. Je demanderais donc que l'on fasse la lumière sur cet incident-là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, comme vous le demandez, je vais respecter votre volonté et je vais suspendre pour aller entendre les transcripts.

(Suspension de la séance à 16 h 20)

(Reprise à 16 h 35)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Je vais de nouveau suspendre quelques instants; je désire que le député de LaFontaine soit présent pour entendre exactement ce que j'ai visionné.

(Suspension de la séance à 16 h 36)

(Reprise à 16 h 37)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à la demande, sur un point de règlement de la part du leader adjoint du gouvernement, le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques, j'ai été visionner le ruban magnétique, j'ai écouté une partie très importante du discours du député de LaFontaine, et le député de LaFontaine a effectivement prononcé: «...ils paient le prix du peu de sérieux ou du peu d'application», exactement les propos que j'avais bel et bien entendus.

Alors, à ce stade-ci, je crois que, sur le point de règlement, vous n'aviez point à intervenir, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, et je vais demander, à ce stade-ci, à ce que le député de LaFontaine veuille bien poursuivre son intervention. M. le député de LaFontaine.

M. Boulerice: M. le Président, j'avais cru comprendre. Vous me donnez la preuve que j'ai mal entendu, et je présente mes excuses à M. le député de LaFontaine.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît.

M. Gobé: M. le Président, je vous remercie, et je dois dire qu'il est vrai qu'à l'occasion la virulence ou la force avec laquelle on peut prononcer certaines paroles ou certains propos, et peut-être aussi la rapidité, et peut-être la prononciation peuvent porter, à l'occasion, phonétiquement, à confusion. Et c'est vrai, il est tout à fait légitime de la part du leader adjoint du gouvernement de faire ce travail parce que, nous aussi, de notre côté, nous ne saurions accepter que ce genre d'échanges qui attaquent les personnes se développe en cette Chambre parce que qui peut en être victime aujourd'hui, et l'auteur peut en être demain la victime, ou d'autres, et je crois que ça ne serait pas rendre service à nos concitoyens de laisser le débat descendre à ces niveaux-là. Mon collègue – c'est sûr que j'étais un peu surpris qu'il intervienne – qui me connaît assez, sait qu'autant je peux être virulent autant j'essaie toujours de rester correct, poli et dans la limite du respect des individus. Alors, voilà.

M. le Président, j'apprécie aussi beaucoup la manière avec laquelle vous avez tranché cette question. C'est là tout à votre honneur. Vous n'avez pas hésité à suspendre la Chambre et aller vérifier, faire diligence, et ça nous permet de continuer le débat. Personnellement, je tiens à vous en remercier, et certainement aussi au nom des autres collègues parce que ce que vous avez fait démontre sans aucune équivoque que c'est les choses qui doivent être faites lorsqu'il y a ce genre de situation.

Où j'en étais, M. le Président, je le disais, c'est un projet de loi malheureux. C'est un projet de loi qui ne réglera rien, qui n'apporte rien à personne, qui va créer préjudice à des travailleuses, qui ne créera pas d'avantages supplémentaires aux entreprises, alors un projet de loi... Je le disais juste avant de m'interrompre: Lorsqu'un projet de loi n'est bon pour personne, pourquoi l'amener, pourquoi ne pas le retirer, pourquoi ne pas recommencer?

Sommes-nous ici, en cette Chambre, obligés d'avoir le dernier mot pour avoir le dernier mot, ou sommes-nous obligés de respecter l'engagement que nous avons envers nos concitoyens lorsque nous nous présentons aux élections, lorsque nous leur disons: Faites-nous confiance, on va aller administrer, on va aller gouverner dans le meilleur de vos intérêts? Je crois que c'est ce côté-là, cette obligation-là que nous avons, M. le Président.

(16 h 40)

Et, lorsque quelque chose que nous faisons... Lorsque nous nous rendons compte en cours de route, dans un processus parlementaire, administratif, gouvernemental, que nous faisons fausse route, que ce que nous amenons n'apportera rien mais au contraire créera des désagréments, eh bien, il ne devrait pas y avoir d'hésitation à le retirer, à reculer, quitte à revenir avec quelque chose qui corresponde mieux à l'intérêt des gens.

La ministre va nous dire: Oui, mais il y a longtemps, vous savez, que j'ai fait ça, puis, en fait, ça a déjà été essayé, puis il y a des dizaines d'années... Oui, mais on ne fait jamais assez pour trouver le meilleur des arrangements. On ne peut pas se laver les mains en disant: Bien, j'ai essayé, ça a déjà été essayé par d'autres, puis là, bien, je l'ai assez fait, je n'ai plus de temps à perdre, je décide. Je le rappelle, nous touchons là des conditions de travailleuses, de travailleurs parmi les plus sensibles de notre société, parmi les moins favorisés, parmi les conditions de travail des plus difficiles.

Et, s'il est vrai, comme elle le dit, s'il est exact, comme elle le dit, que c'est pour aider les entreprises, alors, à ce moment-là, je crois que le meilleur moyen d'aider les entreprises, c'est de faire en sorte que dans cette industrie il y ait une concertation. Nous avons fait notre marque au Québec. On ne retrouve pas ça dans beaucoup de sociétés, ce qu'on retrouve chez nous, ici: la concertation, la discussion entre les gens, entre les parties. Le Québec est toujours sorti gagnant de ces situations-là. Il est toujours sorti perdant des conflits, qu'ils soient dans la fonction publique, dans les entreprises, avec les gouvernements autres que celui du Québec. C'est là une des forces que, moi, quand je suis arrivé ici il y a 30 ans, j'ai découvert chez les Québécois et les Québécoises, cette capacité d'aller chercher une entente qui finisse par satisfaire tout le monde. Et ça existe. Et c'est notre devoir, à nous, les gouvernants, de continuer à la rechercher, de continuer à favoriser ce processus, à favoriser cette façon de faire. Parce que, sans cela, nous allons bâtir quoi? Une société qui ne serait ni juste ni équitable.

Et, comme gouvernants, quand même que nous aurions l'impression sur papier d'avoir passé des projets de loi qui nous satisfassent personnellement ou collectivement dans nos partis politiques, nos caucus, si à la fin de tout ça ils ne correspondent pas à une réalité acceptée par les citoyens, ça n'a servi à rien parce qu'il faudra recommencer un jour. Il faudra revenir, il faudra revoir. Et on le voit dans d'autres projets de loi, on le voit dans d'autres législations, on le voit dans d'autres débats, qu'ils soient des débats constitutionnels, des débats sur le travail, des débats sur les municipalités, dans la fonction publique, l'organisation des hôpitaux.

Nous avons une obligation, dans les temps modernes, une obligation que nos concitoyens nous demandent de respecter, c'est celle de trouver des ententes, des consensus, parce qu'il n'est pas vrai qu'une société comme la nôtre peut fonctionner en étant scindée en deux, en se déchirant, en ayant des forces contraires qui s'affrontent. Le seul avenir d'une société comme la nôtre, de 7 000 000 de personnes, dans le continent nord-américain et dans l'économie mondiale, c'est la cohésion sociale, c'est la cohésion économique. C'est juste à ces conditions-là que nous traverserons. Sinon, nous allons éparpiller nos efforts. Et ça aura certainement, M. le Président, des impacts qui seront, à court terme et à moyen terme, contre-productifs, contre ce que nous disons que nous recherchons.

Et on a le meilleur exemple avec ce projet de loi là, l'exemple le plus parfait, où deux groupes sensés être en cohésion... parce qu'on ne peut pas avoir, dans une industrie comme celle de la couture comme dans toutes les autres industries, des employeurs puis des travailleurs qui se chicanent tout le temps. Il faut qu'ils soient en bonne cohésion. Ce n'est pas les travaux forcés, travailler dans l'industrie de la couture, hein, on ne peut pas obliger les gens. Et puis les employeurs ne peuvent pas passer leur temps à obliger les gens. Donc, il faut que tout le monde y trouve son dû, particulièrement en région, où une grande partie des entreprises sont établies, dans les petites villes: Saint-Georges-de-Beauce, Saint-Joseph-de-Beauce, Richmond, Bedford, Sherbrooke, Granby, et des plus petits villages aussi.

Eh bien, il faut qu'il y ait dans ces industries une volonté de tout le monde de réussir. Et on sait qu'au salaire où elles sont payées, ces dames, aux conditions de travail qu'elles ont, elles sont à la limite des revenus. Lorsqu'on compare ceux qui sont sur l'aide sociale, sur la sécurité du revenu, comme on peut appeler ça, la différence est minime et mince entre rester à la maison ou aller travailler dans une manufacture de vêtements pour dames, si on compare l'effort et le travail qui vont être fait. Et notre devoir est d'encourager ces travailleuses et ces travailleurs-là à rester dans ces travaux-là, à progresser, à faire en sorte que l'industrie, l'entreprise prenant plus d'envergure, plus d'affaires, plus de profits, bien, puisse mieux payer encore, mieux traiter encore ses salariés pour qu'ils soient plus satisfaits, qu'ils soient plus productifs, qu'ils soient plus imaginatifs. C'est ça, les défis qui nous attendent. Sortons des vieux sentiers battus.

Et on n'a pas, nous, la prétention, les élus, d'aller régler les conditions de travail dans les secteurs importants comme l'industrie de la couture nous-mêmes. Mais pourtant on a la Commission des normes. On dit: Allez gérer ça à la place du comité paritaire. Allez-y. On va voir les patrons: Allez, hop! vous allez payer une cotisation supplémentaire aux autres manufacturiers. Pas grave. Moi, je décide que c'est l'équilibre. Quel équilibre! Équilibre de quoi? L'équilibre d'un constat d'échec. L'échec de ne pas avoir réussi à faire en sorte que ces gens-là s'entendent ensemble, le voilà. Alors, un constat d'échec dans une industrie comme celle-là va être contre-productif, donc il est mal venu, il ne correspond pas aux critères de cohésion, aux critères d'organisation, de dynamisme dont les entreprises ont besoin, dont nos travailleurs et nos travailleuses ont besoin pour relever ces fameux défis qui sont mentionnés dans le mémoire de la ministre et qui sont la compétition, l'ouverture internationale, l'ouverture sur le monde, nouvelles manières, nouvelles technologies. Il ne correspond pas à ça.

On aurait pu voir aussi dans ce projet de loi quelques lignes qui faisaient en sorte que le gouvernement s'engageait à créer un institut de recherche ou un institut de technologie... de travail pour faire en sorte que cette industrie ait ses propres organisations puis puisse aller vers de nouvelles avenues, vers de nouveaux produits, de nouveaux concepts. On aurait pu voir ça dans le projet de loi. On aurait pu y voir... Si on veut redynamiser, si le but est de redynamiser... Bien non, voyons, redynamiser, elle l'est dynamique, elle a eu le plus haut pourcentage de progression du secteur manufacturier de tout le Québec depuis 1989, et particulièrement depuis 1996. Alors, on ne peut pas redire qu'on va la redynamiser, elle l'est dynamisée, elle l'est dynamique, elle est performante et elle est à la pointe des industries. Mais, si vous voulez encore la rendre plus en avant, si vous voulez la rendre plus dynamique, plus forte, au lieu de sabrer le salaire des dames à 15 000 $ par année puis leur sabrer leurs vacances, eh bien, entre autres choses, entre autres solutions, on aurait dit: On va mettre à la disposition de cette industrie des moyens pour qu'il se crée des centres de recherche, des centres d'excellence pour leur permettre de moderniser leur production, de travailler sur leurs exportations, de trouver des nouveaux débouchés, de trouver de nouveaux designs.

C'est ça qu'on devrait faire, c'est plus par là, et c'est dans le rapport. Et, lorsque l'on prend le rapport de Statistique Canada, Perspectives 2000 , c'est ce que l'on retrouve, et je vais en faire lecture d'un petit passage: Les auteurs constatent un retard par rapport aux États-Unis et à l'Europe en ce concerne l'adoption de nouvelles technologies de production. Les auteurs considèrent la faiblesse des conditions de travail comme un problème qui mène à une pénurie de main-d'oeuvre spécialisée. Voilà ce qu'on retrouve. C'est ce qu'on retrouve dans les rapports de cette industrie, puis les rapports de 1996. On ne dit pas dans ces rapports-là: Il faut couper le salaire des petites dames à 7,15 $, à 7 $ ou leur couper une semaine de vacance. Ce n'est pas ça qu'on dit. Elle ne l'a pas lu, la ministre, le rapport. Et, si elle l'avait lu puis qu'elle l'avait compris, bien, elle ne ferait pas ce qu'elle fait là, elle aurait fait d'autres choses, elle aurait agi différemment, et c'est cela que nous lui reprochons. C'est avec ça que nous en avons. C'est avec ça que nous ne sommes pas d'accord.

Nous en voulons une industrie, nous, prospère, une industrie dynamique, encore plus dynamique que ce qu'elle est maintenant. Nous voulons lui donner les moyens, l'oxygène pour ce faire, mais pas sur le dos des salariés puis des travailleuses puis pas sur le dos des entreprises non plus, parce qu'on leur fait payer le prix à elles aussi. Et vous verrez qu'un jour nous serons obligés de revenir sur cela. Nous reviendrons sur ça. Il y a un rapport qui va être fait, là, dans trois ans, sur l'application, vous verrez, sur ce projet, et on verra, on constatera, comme dans d'autres domaines, que tout ce qu'on a créé, c'est des embûches et des tourments et des brimades – des tourments surtout, j'aime bien le mot «tourment» – pour ces travailleuses qui les subissent depuis plusieurs mois.

(16 h 50)

M. le Président, dans ce même rapport, lorsqu'on dit: «La faiblesse des salaires contribue également à une pénurie chronique de la main-d'oeuvre spécialisée qui accable l'industrie», ce qui accable l'industrie, c'est une main-d'oeuvre spécialisée. Parce que je reviens là-dessus: pour faire des robes que madame, ma voisine ou que mon épouse ou que Mme la ministre achète, eh bien, ce n'est pas n'importe qui qui peut faire ça. La qualité des travailleuses de l'industrie du vêtement au Québec est reconnue. C'est ce qui fait que nous sommes maintenant des exportateurs dans le moyen et le haut de gamme au niveau de la couture. On ne fait pas des bébelles à Miracle Mart, là, au Québec, on fait de la couture qu'on exporte sur les marchés américains, sur les marchés européens. Nous sommes devenus des spécialistes. Et ce n'est pas en coupant dans les conditions salariales de ces spécialistes-là qu'on va les encourager à continuer et qu'on va surtout encourager des jeunes à venir prendre la relève.

Vous êtes-vous posé la question pourquoi un pays industrialisé comme le nôtre est devenu un spécialiste dans la couture, dans la mode moyen de gamme et haut de gamme? Ce n'est pas les pays du tiers-monde, alors que les salaires sont plus bas. Parce que, avec ce même raisonnement, pourquoi ne pas aller dans des pays où on les paie 8 $ par jour au lieu de les payer 8 $ de l'heure? Les bateaux, ça ne coûte pas cher pour amener le matériel, ça ne coûte pas cher pour amener le produit fini, pour le distribuer. Alors, pourquoi? Il faut se poser la question. Bien, parce que notre main-d'oeuvre est spécialisée, parce que les Québécoises sont des gens qui sont capables d'avoir développé ce créneau-là, cette habileté-là dans ce domaine très particulier. Et le gouvernement devrait les encourager par les mesures dont je parlais précédemment, entre autres l'investissement, la formation professionnelle, la recherche, les centres d'excellence, l'aide à l'exportation, l'innovation, des conditions de travail intéressantes pour pouvoir attirer les jeunes filles qui vont sortir des écoles techniques, pour faire en sorte qu'elles aient le goût d'aller travailler dans ces domaines-là.

D'autres pays connaissent la même situation que la nôtre. L'Allemagne, qui est un des carrefours de la mode en Europe, eh bien, connaît ce problème-là et a trouvé cette manière de faire aussi, a rendu cette profession, ce métier de la couture pour femmes et pour hommes un métier prestigieux, un métier intéressant, valorisant, pas un métier où on va chercher à engager les gens au salaire le plus faible possible pour faire de la production parce que, immanquablement, si on fait ça, la qualité de la production va s'en ressentir et, immanquablement, M. le Président, le genre de production que nous faisons va se trouver changé.

Et les défis nous attendent parce que c'est vrai actuellement que nous payons... Nous avons un avantage par rapport aux États-Unis à cause du Cotton Act, la Loi sur la protection du coton aux États-Unis, qui fait qu'on taxe la laine qui est importée directement aux États-Unis, à l'état brut – bien, à l'état brut, à l'état non fini – de presque 38 % pour protéger l'exploitation de coton et que nous, au Canada, nous payons seulement 9 %. On a un avantage, mais, à un moment donné, ça pourrait changer, tout ça, là. Et, si on n'est pas préparé au niveau de la qualité, au niveau du haut de gamme, au niveau du raffinement et de la technologie, eh bien, on va se retrouver dans une situation extrêmement précaire. Et, quand même qu'on aurait coupé le salaire avec les vacances des petites dames d'une semaine et puis de 1 $ ou de 0,50 $ de l'heure, ce n'est pas ça qui va régler notre problème. On va souffrir encore d'un manque chronique, mais plus que chronique, d'un manque fondamental de technologie, de recherche, d'excellence et de qualifications professionnelles. Voilà ce qui va nous arriver.

Il ne semble pas que la ministre ait compris ça. Moi, je me serais attendu à qu'elle comprenne ça parce que c'est quelque chose qui semble découler du bon sens, c'est quelque chose qui nous a été expliqué par tout le monde qui est venu nous voir, toutes ces travailleuses qui sont venues. Puis, de toute façon, même les gens de la Guilde des manufacturiers de l'habillement, eux aussi en sont et se posent des questions. Et, en plus de ça, les 22 000 qui vont être assujettis à ces normes sectorielles différentes des autres alors qu'un autre secteur ne le sera pas, encore là on va se trouver dans une confusion.

Le gouvernement est là pour gouverner. L'opposition, un jour, sera peut-être le gouvernement, et il est souhaitable qu'elle le soit lorsqu'on voit la conjoncture actuelle. Et, M. le Président, nous saurons à ce moment-là prendre les mesures qui s'imposent et faire en sorte, si ce n'est malheureusement pas trop tard, de réparer les décisions mauvaises qui auront été prises par le gouvernement précédent. Parce qu'à la fin de tout, et je le disais à la ministre, le ministère qui lui a été confié est redevable devant les travailleurs et les travailleuses du Québec, et non seulement devant les travailleurs et travailleuses, mais devant les entrepreneurs, mais aussi devant toute la population du Québec. Et, un jour, le peuple québécois, dans une élection, lui demandera des comptes à elle et à son gouvernement. Et, ce jour-là, la preuve sera faite qu'elle aura failli à sa tâche, failli à son devoir et failli à son engagement d'élection envers la population du Québec, M. le Président. Et, nous, nous sommes contre ce projet de loi là pour toutes les raisons que j'ai indiquées.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine et critique de l'opposition officielle en matière de travail.

Avant de céder la parole à d'autres intervenants, ou encore au droit de réplique de Mme la ministre, tel que le requiert notre règlement, je vous avise qu'il y aura un débat de fin de séance entre Mme la députée de Bourassa et Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux concernant la capacité des établissements de santé de donner des vaccins. Il y aura également un second débat de fin de séance, entre Mme la députée de Mégantic-Compton et Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, concernant les contributions de nos aînés au régime d'assurance-médicaments. Il y aura également un troisième débat de fin de séance, entre Mme la députée de La Pinière et Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, concernant les soumissions pour l'agrandissement du Palais des congrès. Je vous informe également que la séance de travail de la commission des finances publiques, que j'ai annoncée préalablement pour demain, le mercredi 10 novembre 1999, débutera à 8 heures et non pas à 8 h 30, tel qu'annoncé précédemment.

Alors, nous poursuivons maintenant le débat sur l'adoption du projet de loi n° 47. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 47? Alors, puisqu'il n'y a pas d'autre intervenant, je cède maintenant la parole à Mme la ministre du Travail pour son droit de réplique. Mme la ministre, vous avez droit à un temps de parole de 20 minutes.


Mme Diane Lemieux (réplique)

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. Je n'en prendrai que quelques-unes, parce que le député de LaFontaine a dit beaucoup de choses, beaucoup de choses, quant à moi, d'éléments inexacts, mais, comme ça fait 100 fois que je répète et que je tente de lui expliquer la même chose, je pense que c'est inutile que je reclarifie ces informations-là.

Deuxièmement, je pose la question, un peu, de l'attitude du député de LaFontaine dans ce dossier du Parti libéral. Je me demande ce qu'il défend. Visiblement, il défend une espèce de statu quo, et je pense que c'est bien démontré que c'est une position qui n'est pas tenable. Je me demande aussi qui il défend. Il me fait de graves reproches sur l'impact de ce projet de loi pour les travailleuses et les travailleurs. Il m'en fait autant du côté des employeurs. Il me reproche entre autres de gérer le déficit accumulé du fonds de vacances dans l'industrie de la confection pour dames. Je trouve que ce sont des propos qui frisent l'irresponsabilité.

(17 heures)

Je terminerais en disant une simple chose: Je suis très heureuse que ce débat sur l'avenir d'un cadre réglementaire dans le secteur du vêtement ait été mené par le gouvernement du Parti québécois. Je suis très heureuse que nous ayons été guidés par la recherche de l'équilibre. Je suis consciente que ce n'est pas un régime qui est parfait, mais je pense que nous avons ce qu'il faut pour progresser de manière intéressante et pertinente et moderne dans ce dossier-là. Et je suis d'autant plus heureuse que ce soit un gouvernement du Parti québécois qui boucle la boucle de ce dossier qui traîne depuis une bonne décennie. Parce qu'il y a quelques années – et c'est pour ça que je suis un peu perplexe par rapport à la position, enfin, aux nombreuses positions contradictoires véhiculées par le député de LaFontaine – le Parti libéral a véhiculé des propos assez troublants sur l'avenir du régime des décrets dans le secteur du vêtement, et je vous en rappelle quelques éléments.

On y a dit entre autres que l'impact du régime des décrets constituait une puissante barrière à l'expansion et à l'innovation, qu'il était impossible de trouver une argumentation cohérente pour justifier l'application d'une réglementation économique au secteur en question. Alors, je suis très heureuse que le gouvernement du Parti québécois réussisse à faire atterrir correctement ce dossier-là, parce que visiblement, si ça avait été l'opposition officielle, ce serait encore plus catastrophique. C'est tout, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre du Travail. Le projet de loi n° 47, Loi concernant les conditions de travail dans certains secteurs de l'industrie du vêtement et modifiant la Loi sur les normes du travail, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

M. Gobé: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division? Merci, M. le député de LaFontaine. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous réfère à l'article 22 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 55


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 22 de votre feuilleton, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole propose l'adoption du projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 55? Alors, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, à vous la parole.


Mme Louise Harel


Motion d'amendement aux références contenues dans le projet de loi conformément à l'entrée en vigueur de la mise à jour des Lois refondues

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, je crois que je dois à ce moment-ci faire la présentation d'une motion qui nous permettra d'introduire un papillon de façon telle que l'Assemblée puisse répondre à une demande qui me fut exprimée par le député de Limoilou. Alors, la motion se lit comme suit:

«Procéder à l'ajustement des références contenues dans les articles du projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, afin de tenir compte de l'entrée en vigueur, le 1er novembre 1999, de la mise à jour arrêtée au 1er avril 1998 et au 1er mars 1999 dans le cas des chapitres D-17, I-2, I-3, I-4, L-3, M-31, R-20.1, T-0.1 et T-1 de l'édition sur feuilles mobiles des Lois refondues du Québec.»


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on déroge à l'article 257 de notre règlement? Consentement? Consentement. Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, ce qui a eu l'air d'un langage assez ésotérique, j'en conviens, que je viens de lire, porte sur l'amendement qui, à ce stade-ci, pourra être introduit dans le projet de loi n° 55, loi portant sur diverses dispositions législatives dans le domaine municipal, de façon à ce que la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, nonobstant donc le premier alinéa de l'article 335 de cette loi... La vacance au poste de conseiller du district 3 de la ville de Beauport n'a pas à être comblée d'ici la tenue de la prochaine élection régulière.

En fait, ce dont il s'agit, c'est d'un décès qui est survenu, d'une conseillère municipale. D'ailleurs, je saisis l'occasion pour offrir mes condoléances à la famille. Ce décès est récent, il est intervenu en octobre. Et cette conseillère municipale avait été élue dans un district qui n'existera plus, compte tenu des changements qui seront apportés à la carte électorale municipale de Beauport.

Alors, compte tenu des délais et du fait que l'élection pour remplacer cette personne n'aurait pu avoir lieu que dans les mois qui viennent, c'est-à-dire vraisemblablement février... Janvier évidemment, après les fêtes du millénaire, enfin l'entrée dans le millénaire, n'est pas toujours indiqué pour ce genre de convocation aux urnes. Alors, disons qu'on peut anticiper que l'élection aurait eu lieu en février. Donc, la personne qui aurait occupé le poste n'aurait siégé que quelques mois, six ou sept tout au plus, puisque le district électoral dans lequel elle aurait été élue, il était déjà prévu qu'il n'existerait plus. Alors, voilà la raison de cet amendement qui est introduit aujourd'hui.

M. le Président, quelques mots à l'égard de ce projet de loi n° 55, notamment pour vous parler des modifications qui ont été apportées...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre...

Mme Harel: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...vous traitez actuellement d'une motion d'amendement. Nous avons adopté tout à l'heure la dérogation à l'article 257 de notre règlement qui est la motion de refonte de votre projet de loi.

Maintenant, vous nous parlez et vous nous avez fait lecture d'un amendement à votre projet de loi, est-ce qu'il y a actuellement consentement pour qu'on discute sur la motion d'amendement? Et, si oui, s'il y a consentement, est-ce que vous pourriez nous la déposer, s'il vous plaît?


Amendement déposé

Alors, il y a consentement. Alors, il y a dépôt, maintenant, de l'amendement. Et est-ce qu'on procède aux écritures, Mme la ministre, ou si on doit procéder par commission plénière? M. le député de Limoilou, est-ce que vous avez en possession actuellement... On va vous transmettre le projet d'amendement et, par la suite, on va déterminer si effectivement on procède en commission plénière ou si on procède aux écritures.

Ça va aux écritures? Ça fonctionne? Bon. Alors, est-ce que vous voulez déposer une copie de l'amendement... Vous en avez une copie? Alors, est-ce qu'il y a consentement pour procéder aux écritures?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement. Est-ce que la motion de Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole proposant que l'Assemblée se constitue à partir de maintenant en commission plénière est adoptée? Adopté.


Commission plénière


Étude de l'amendement de la ministre

Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, je vous prierais de lire votre motion d'amendement, s'il vous plaît. Nous allons vous en redéposer une copie. M. le député de Hull, c'est une question de règlement?

M. Cholette: Oui, simplement pour éclaircir la situation. Est-ce qu'on doit aller en plénière ou est-ce qu'on n'avait pas entente pour passer directement à l'ensemble du projet?

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est qu'actuellement nous avons un procédé qui consiste à lire quand même toute notre procédure pour faire en sorte que le tout soit bel et bien inscrit dans le procès verbal de l'Assemblée. Et actuellement ce que je comprends, c'est que, de part et d'autre, il y a consensus pour qu'on procède aux écritures. C'est bien ça?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. Alors, Mme la ministre, je vous prierais maintenant de lire l'amendement, s'il vous plaît.

Mme Harel: Alors, l'amendement se lit comme suit. Le projet de loi n° 55 est amendé par l'insertion, après l'article 45.1 introduit par amendement, du suivant:

«45.2. Malgré le premier alinéa de l'article 335 de la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la vacance au poste de conseiller du district numéro 3 de la ville de Beauport n'a pas à être comblée d'ici la tenue de la prochaine élection régulière.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Notre secrétaire me demandait si effectivement j'avais fait adopter tout à l'heure la motion de refonte. Alors, moi, je me souviens de l'avoir fait adopter. Est-ce que, de part et d'autre, il y a eu effectivement adoption? Parfait. Alors, Mme la secrétaire, vous allez pouvoir l'inscrire au procès verbal? Merci.


Mise aux voix du rapport de la commission

Alors, l'amendement déposé par Mme la ministre est bel et bien adopté. Est-ce que le rapport de la commission plénière est adopté? Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

En conséquence, nous allons maintenant poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 55 et l'amendement. Alors, Mme la ministre.


Mme Louise Harel (suite)

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, je disais donc que, parmi les modifications apportées par cette loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, une des modifications importantes concerne la charte de la ville de Montréal. Dorénavant, il y aura donc possibilité de remplacement en cours de mandat d'un membre du comité exécutif de la ville de Montréal sur la recommandation du maire.

(17 h 10)

Cependant, cet amendement à la charte ne donne pas au maire un pouvoir discrétionnaire, comme l'ont prétendu certains journaux durant la dernière fin de semaine. Il ne s'agit donc pas d'un pouvoir discrétionnaire, c'est au conseil municipal que revient le pouvoir de remplacer un membre du conseil exécutif. Le changement introduit est qu'actuellement un membre du conseil exécutif nommé en vertu de la charte de la ville de Montréal est inamovible durant tout le mandat, alors que dorénavant le conseil municipal, sur recommandation du maire... c'est au conseil municipal que reviendra le pouvoir de remplacer un membre du conseil exécutif.

Les autres modifications à la charte de la ville de Montréal visent à donner à l'administration de Montréal plus de pouvoirs quant à sa gestion quotidienne. Par exemple, parmi ces modifications, certaines permettent à la ville de Montréal d'accorder des subventions ou des crédits de taxes aux exploitants de gîtes touristiques de moins de quatre chambres. Alors, on dénombre 60 établissements de ce genre, donc 60 gîtes touristiques de moins de quatre chambres sur tout le territoire de la ville de Montréal. Et il en coûtait plus cher d'installer un système pour prélever la taxe que de donner un crédit de taxe. Alors, c'est donc une question de bon sens, n'est-ce pas, M. le Président.

Parmi ces modifications, certaines permettent au comité exécutif aussi de subventionner des organismes à but non lucratif, jusqu'à concurrence, cependant, d'un plafond de 50 000 $. Les modifications à la charte permettent par ailleurs à la Cour municipale de Montréal de siéger le soir en vue de rendre plus accessible la justice aux citoyens et aux citoyennes. Et le nombre de juges municipaux, conséquemment, qui est fixé à 12 dans la charte de la ville de Montréal, pourra être modifié en fonction des nouveaux besoins, puisqu'il sera maintenant possible de rendre justice le soir. Je pense que ce sont les citoyens et citoyennes de Montréal qui vont bénéficier de ces modifications à la charte de la ville de Montréal, et les modifications facilitent la prise de décision des élus montréalais.

En plus, dans ce projet de loi, il y a également des modifications qui vont permettre aux municipalités locales, aux municipalités régionales, aux régies intermunicipales, aux communautés urbaines, aux villages nordiques, à l'Administration régionale Kativik et à toutes les sociétés et corporations de transport en commun de se procurer des biens et des services auprès du directeur général des achats du gouvernement ou par son entremise, et ce, afin de profiter des avantages que procure le regroupement des achats et services.

La nouvelle loi vient aussi clarifier les pouvoirs des MRC et des communautés urbaines à l'égard des parcs régionaux ou de tout corridor aménagé pour la pratique d'activités récréatives et sportives. La nouvelle loi accorde de plus à la Communauté urbaine de Québec le pouvoir de confier à un organisme à but non lucratif la gestion de ses pistes cyclables.

La loi accorde également de nouveaux pouvoirs aux municipalités en matière de réhabilitation de l'environnement. Les municipalités, à l'instar de Québec et Montréal qui détenaient déjà ce pouvoir, pourront dorénavant participer au programme du gouvernement du Québec de réhabilitation des terrains contaminés en milieu urbain et disposer à cette fin d'aide financière.

La nouvelle loi donne de plus la latitude à la Communauté urbaine de l'Outaouais de répartir ses dépenses entre les municipalités selon d'autres critères que le potentiel fiscal, ce que réclamait la Communauté urbaine de l'Outaouais.

La loi modifie également la Loi sur la Régie des installations olympiques pour lui laisser une plus grande marge de manoeuvre quant à la gestion et à la rentabilisation des installations existantes. Ainsi, la RIO pourra aliéner un immeuble faisant partie des installations olympiques – en l'occurrence, il s'agit d'un terrain à proximité du métro Viau – pour implanter une attraction au Stade olympique. Il s'agit d'un investissement de 18 000 000 $, et c'est là le premier investissement réalisé à partir de fonds privés depuis plus de 20 ans. C'est un projet qui viendra bonifier l'offre touristique métropolitaine.

Enfin, la nouvelle loi modifie la charte de la ville de Montréal afin de lui accorder plus de pouvoirs quant à sa gestion quotidienne. Elle incorpore donc, comme je l'ai décrit tantôt, une formule permettant le remplacement en cours de mandat d'un membre du comité exécutif. Alors, voilà, M. le Président, l'essentiel des dispositions qui sont contenues dans le projet de loi n° 55.

Vous allez me permettre, M. le Président, puisque j'ai l'occasion d'intervenir ici même, en cette Assemblée, aujourd'hui, d'aborder des questions d'actualité, je dirais de brûlante actualité, qui sont soulevées à chaque fois qu'il a l'occasion de prendre la parole par le député de Hull. Et peut-être que j'anticipe à tort, mais j'imagine qu'à la fin de l'intervention que je terminerai bientôt le député de Hull, à nouveau, se lèvera et, entre autres choses, abordera la question des regroupements ou des fusions. Peut-être même abordera-t-il la question des consultations par voie de référendums municipaux qui sont organisés dans les municipalités du Québec, souvent à des fins de refuser d'examiner des scénarios de regroupement.

M. le Président, j'ai eu beaucoup d'intérêt aujourd'hui parce que je me suis fait sortir l'ensemble de la revue de presse au moment de l'adoption dans cette Assemblée du bill 63 créant la fusion des 14 municipalités de l'Île-Jésus. Et je recommande à tous les députés de cette Chambre la lecture d'un ouvrage extrêmement intéressant qui s'intitule La saga de Laval , ouvrage qui a été rédigé par un député, le député de Laval, M. Jean-Noël Lavoie, qui a d'ailleurs siégé là où vous êtes maintenant et qui fut président de l'Assemblée nationale. Donc, ce livre a été écrit par M. Jean-Noël Lavoie en collaboration avec Charles Denis. Peut-être certains dans cette Chambre se rappelleront que M. Denis fut pendant bien des années un collaborateur dévoué du premier ministre Robert Bourassa. Et c'est extrêmement intéressant. Ça a eu lieu il y a 35 ans. Nous allons souligner de façon appropriée, n'est-ce pas, ce 35e anniversaire, puisque c'est en 1965 que le regretté Pierre Laporte, alors ministre des Affaires municipales, avec l'entière collaboration du premier ministre Jean Lesage, déposait le bill 63.

Alors, je faisais lecture, M. le Président – et j'imagine que cela peut vous intéresser et intéresser plusieurs des membres de cette Assemblée – des déclarations qui avaient été faites ici même, dans ce Parlement, et de cette mobilisation conduite par nul autre que Réal Caouette. En fait, le grand leader antifusionniste fut Réal Caouette, qui aura organisé de grands rassemblements qui iront chercher jusqu'à 5 000 personnes à Montréal contre la fusion de l'Île-Jésus.

(17 h 20)

Vous voyez, c'était une époque qui aura permis cependant que des décisions se prennent. Par exemple, il y avait une adversité comme on peut difficilement l'imaginer: 70 % de toute la population concernée s'était prononcée, dans le cadre de référendums, contre la fusion. Sept des 14 maires des villes concernées par la fusion étaient farouchement opposés. Il y avait même eu un processus d'élection, tel que prévu à tous les quatre ans, où des antifusion s'étaient fait élire. Et évidemment les injures fusaient, comme vous pouvez vous imaginer, notamment celles prétendant que cette fusion des 14 municipalités sur l'Île-Jésus pour créer ville Laval portait atteinte aux libertés démocratiques et personnelles. On disait même que c'était la mesure la plus dictatoriale depuis la Confédération. Il y en a comme ça une liste. En fait, je n'en lis que quelques-unes.

Et le ministre Pierre Laporte, ministre des Affaires municipales, avait répondu à ses détracteurs par la déclaration suivante, et je cite: «Ce n'est pas la popularité ou l'impopularité d'un projet de loi qui sert de critère au gouvernement dans la préparation de sa législation, mais le bien commun.» Et Jean Lesage avait d'ailleurs lui-même repris ces déclarations en disant que, en fait, l'ensemble des conflits d'intérêts et tout devaient être subordonnés à cet arbitrage du bien commun. Et ça, ça m'amène, M. le Président, à vous signaler quelque chose qui est connu mais qui vaut la peine d'être répété, à savoir que, en vertu de l'article 92, paragraphe 8°, de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867, les provinces sont les seules responsables de la création, de la fusion...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre. M. le député de Hull. Question de règlement?

M. Cholette: Bien, une question de règlement, là, avec une très bonne suggestion du côté ministériel. Moi, je veux bien offrir une tribune à la ministre pour qu'elle nous explique pourquoi elle veut forcer des fusions au Québec. Puis elle peut toujours retourner 35 ans dans l'histoire. Mais je vous soulèverais bien humblement, M. le Président, la question de la pertinence avec le projet de loi n° 55.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Écoutez, M. le Président, je sais bien que c'est un bill omnibus. Vous savez, le projet de loi n° 55, on l'appelle de façon populaire «un bill omnibus». Et, en général, dans un bill omnibus, on met des choses un peu dépareillées. Mais j'arrêterai là ma comparaison du passé. Je ne voudrais pas cependant que le député de Hull pense que c'est vers le passé seulement que mes yeux sont tournés. J'ai aussi, comme lui, n'est-ce pas, quand il retourne chez lui, de l'autre côté de la rivière Outaouais, l'exemple de ce que vit la ville d'Ottawa-Carleton, qui est actuellement dans un projet de fusion également forcée par le gouvernement ontarien. Je termine tout ça pour dire que, de toute façon, c'est un préambule et que nous aurons l'occasion de parler de toutes ces questions pendant cette session. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole et également députée d'Hochelaga-Maisonneuve. Alors, nous allons maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, il me fait grand plaisir d'intervenir à cette étape-ci sur le projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. C'est un projet de loi omnibus qui vient modifier 16 lois déjà existantes et qui a donc des implications sur le milieu municipal et, partant, sur les citoyens en général. Sur le fond, j'ai eu l'occasion, le 24 août dernier, lorsque nous avons entamé l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire, de soulever un certain nombre de préoccupations. Mon collègue le député de Laurier-Dorion, qui était critique en la matière, a également travaillé avec l'ensemble des membres de la commission pour le bonifier. Donc, je constate que le projet de loi a cheminé et qu'un certain nombre de questionnements ont été pris en considération. Donc, sur le principe, nous sommes d'accord avec l'idée même de l'autonomie des municipalités.

D'ailleurs, je vous rappellerais que, lors de la dernière campagne électorale, en octobre dernier, notre chef M. Jean Charest, l'équipe libérale a fait connaître notre plan pour les municipalités autonomes. Et j'ai eu alors l'occasion moi-même de rencontrer les maires de la rive sud de Montréal pour leur présenter ce plan. J'ai pu alors constater l'intérêt qu'ils ont manifesté positivement à l'égard de notre orientation politique et qui s'articulait dans notre plan autour de huit points. Le gouvernement du Parti libéral du Québec s'engage, dans les meilleurs délais, dès son élection, à redéfinir, dans une entente-cadre renouvelable après cinq ans, les rapports entre les municipalités et le gouvernement du Québec selon les principes suivants:

Une refonte des lois municipales donnant aux municipalités une véritable autonomie au plan décisionnel, en particulier en matière d'organisation du travail;

Une révision de la fiscalité fondée sur la diversification des sources de revenu des municipalités afin de réduire une trop forte dépendance de l'impôt foncier, comprenant notamment un véritable mécanisme de péréquation et de transfert qui tiendra compte des situations particulières des villes-centres, desdites villes d'agglomération, de Québec comme capitale et de Montréal comme métropole, tout en considérant une réduction du fardeau fiscal global des contribuables;

Accorder aux municipalités régionales de comté, les MRC, la possibilité de créer leur propre corps de police;

Faciliter la mise sur pied des partenariats public-privé-travailleurs afin de construire ou de rénover les infrastructures publiques ou pour adopter des modes plus efficaces et au meilleur coût possible de livraison et de gestion des services publics;

Mettre fin aux mesures punitives découlant des fusions projetées par le gouvernement actuel afin de rétablir le programme de fusion volontaire appuyé par des mesures incitatives;

Et, enfin, définir dans la loi le mandat de la Table Québec-municipalités de manière à prévoir des rencontres statutaires, notamment dans le but de tenir des consultations publiques prébudgétaires.

Voilà, M. le Président, les grands principes sur lesquels reposent la réflexion et l'orientation du Parti libéral du Québec. Donc, nous sommes entièrement en faveur de l'autonomie du monde municipal. Il ne faut cependant pas oublier qu'en leur accordant de nouvelles responsabilités il faut également – et cela, ils le réclament – leur allouer les ressources financières qui s'y rattachent. Or, à date, tout ce que les municipalités ont reçu du gouvernement péquiste, c'est des factures. Des factures, d'ailleurs, qu'on a justifiées par l'objectif de l'atteinte du déficit zéro, et on a pelleté en avant parce que le déficit, M. le Président, il est ailleurs. De 1995 à 1999, c'est un total de 1 146 000 000 $ que le gouvernement péquiste a transféré aux municipalités sous forme de factures ou de coupures de toutes sortes.

Le projet de loi n° 55 vient aussi légaliser une situation problématique sur laquelle les tribunaux ont eu à se prononcer. On a déjà vu ça avec la ligne Hertel– des Cantons où le gouvernement a dû passer une loi rétroactive pour légaliser une pratique jugée illégale par les tribunaux. Dans le cas du projet de loi n° 55, il s'agit d'une problématique qui touche les corridors verts aménagés, considérés comme des parcs régionaux. Le projet de loi vient donc contourner le jugement de la Cour supérieure du Québec qui a donné raison à des riverains de Portneuf, lesquels ont contesté le tracé d'une piste cyclable, alléguant qu'il s'agit d'une voie de circulation et non d'un parc régional. Ce pouvoir, M. le Président, est désormais dévolu aux municipalités par le projet de loi n° 55.

J'ai communiqué avec ma MRC, la MRC de Champlain, comme je le fais toujours, parce que, quand on adopte des projets de loi ou des politiques, il faut toujours s'assurer que les partenaires clés qui sont concernés par ces projets de loi ont quelque chose à dire et sont d'accord ou en désaccord. Et ma MRC, la MRC de Champlain, M. le Président, m'a sensibilisée à une problématique particulière: celle de la piste cyclable qui longe plusieurs villes de la rive sud de Montréal.

(17 h 30)

Actuellement, il y a quatre municipalités sur 13 qui ne veulent pas contribuer, alléguant que leurs citoyens ne se rendent pas à Saint-Lambert, là où se trouve la passerelle qui relie la rive sud à Montréal. Des recommandations ont d'ailleurs été proposées pour régler ce problème en tenant compte de deux facteurs: la population, d'abord, et le critère de l'éloignement. Comme la contribution des villes à ces équipements est faite sur une base volontaire, le projet de loi pourrait régler ce problème, et je le souhaite vivement, M. le Président.

Il va sans dire que l'élargissement des pouvoirs des MRC dans ce dossier de parcs régionaux, de pistes cyclables ne peut s'appliquer concrètement que dans la mesure où les différents partenaires municipaux ont décidé d'un commun accord de se doter d'équipements dits régionaux – c'est la base de la démocratie – compte tenu des besoins de leur propre population et en tenant compte du principe fondamental de l'équité fiscale.

Alors, M. le Président, pour toutes ces raisons, je joins ma voix à celles de mes collègues pour voter en faveur de ce projet de loi, le projet de loi n° 55. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Nous allons maintenant céder la parole... Nous allons prendre quelques instants...

Mme Houda-Pepin: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, Mme la députée de La Pinière, je vais prendre quelques instants pour permettre à un de nos collègues d'intégrer son fauteuil. Et nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales, M. le député de Hull. M. le député.


M. Roch Cholette

M. Cholette: Merci, M. le Président. Alors, ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 55, projet de loi qui essentiellement vient régler un paquet de petits problèmes qu'on avait dans le monde municipal. Alors, tout de go, je vous affirme que l'opposition officielle sera d'accord avec ce projet de loi là. D'ailleurs, le député de Laurier-Dorion avait, lors de l'étude article par article, en commission parlementaire et bien au début, mis son input là-dedans pour justement favoriser et bonifier ce projet de loi.

Évidemment, le projet de loi, l'essentiel là-dedans, c'est de donner plus de flexibilité aux municipalités, plus d'autonomie. Comme ma collègue vient de l'expliquer, c'est exactement dans la visée de notre programme politique en termes de municipalités, et d'ailleurs je dois reconnaître que le côté ministériel a accepté avec beaucoup d'attention certaines recommandations qui ont été faites par mon collègue de Laurier-Dorion.

Ce projet de loi n° 55 est un projet de loi très technique à plusieurs égards et qui a fait aussi l'objet de plusieurs papillons tout au long de son adoption et, comme ma collègue le disait, un projet de loi qui modifie 16 différentes lois, particulièrement la charte de la ville de Montréal, par exemple sur la question de la Cour municipale ou même sur le comité exécutif. Et aussi un amendement qui touche la Communauté urbaine de l'Outaouais, donc dans mon coin, qui va permettre de calculer les prorata de dépenses en utilisant autre chose que le potentiel fiscal. C'est quelque chose que la Communauté exigeait depuis fort longtemps, alors je me réjouis aujourd'hui de voir que finalement on peut répondre favorablement à la demande de la Communauté urbaine.

Bien qu'étant en accord avec l'essentiel du projet de loi, il n'en demeure pas moins, je pense, qu'il faut souligner quelques éléments qui, là-dedans, pour le moins, suscitent un peu de questionnements de notre part, ont suscité pour le moins quelques questionnements de notre part. Et je fais référence particulièrement à deux dispositions: la première, c'est la question des corridors et parcs régionaux; et, le deuxième élément, ce qui a trait à la RIO, la Régie des installations olympiques.

Si je prends le premier point, lorsqu'on regarde dans les notes explicatives, pas besoin d'aller très loin, le troisième paragraphe, on dit: «Ce projet de loi apporte des précisions quant aux pouvoirs que les municipalités régionales de comté et les communautés urbaines possèdent à l'égard des parcs régionaux. Il assimile à un parc régional tout corridor aménagé pour la pratique d'activités récréatives et sportives. Il prévoit, de plus, que cette assimilation législative est déclaratoire.» Bien, ça, encore une fois, la question de déclaratoire, comme on l'a vu dans Hertel, bien, essentiellement, c'est un projet de loi rétroactif, et ça, il faut toujours utiliser ça avec beaucoup de parcimonie parce qu'on est en train de régler après coup un problème que les tribunaux avaient soulevé.

En ce qui a trait à la Régie des installations olympiques, je me réjouis de voir finalement un investissement dans l'est de Montréal, région extrêmement frappée par la situation économique du Québec, de Montréal en particulier. La ministre faisait référence aux longues années sans investissement dans ce secteur-là. Je me joins à elle pour décrier cette situation et pour souligner l'apport, maintenant, de Famous Players qui investira près de 18 000 000 $ pour développer ce secteur-là.

Cependant, il faut quand même regarder avec lucidité ce que la Régie est en train de faire. Elle est en train de céder, aliéner un terrain sans appel d'offres public, un terrain qui s'en va directement à une entreprise privée. Je pense qu'il faut quand même regarder ça avec beaucoup d'attention. C'est un geste important que le gouvernement est en train de poser en donnant ce pouvoir-là, et j'ose espérer que le milieu en entier se dit d'accord avec cette pratique parce qu'il peut y avoir des conséquences extrêmement graves.

Mais, essentiellement, comme je vous l'ai souligné dès le départ, ce projet de loi fait notre affaire. On va voter avec le gouvernement sur ce projet de loi là, d'autant plus que, pour une fois, on est en train de redonner de la flexibilité aux municipalités, plus d'autonomie, un peu ce qui est à l'inverse de l'habitude gouvernementale. Prenons l'exemple du pelletage de 375 000 000 $ qu'on a vu dans les dernières années. J'étais au conseil municipal, j'ai vu le chèque qu'on a dû émettre, nous, au gouvernement pour boucler le budget. Alors, ça, on n'appelle pas ça de l'autonomie municipale mais plutôt un pelletage de factures.

Et j'ose espérer que la grande lucidité gouvernementale dans le projet de loi n° 55, en respectant le monde municipal, sera aussi cette lucidité le 22 novembre prochain, lorsque le nouveau ministre des Affaires municipales, le premier ministre, en fait, le tuteur de la ministre actuelle, réglera ce dossier avec le monde municipal. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Hull. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption? Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique? Non.


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 55 dûment amendé, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Compte tenu, M. le Président, qu'il y aura des débats de fin de séance, pour ce qui est de la présente partie de nos travaux, eh bien, je fais motion que nous ajournions à demain, le mercredi 10 novembre, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons actuellement nos travaux jusqu'à 18 heures, puisque nous avons trois débats de fin de séance. Et, bien entendu, par la suite, nous reprendrons nos travaux demain matin, à 10 heures, comme convenu en vertu de notre règlement. Pour l'instant, il est 17 h 40, alors nous suspendons donc nos travaux jusqu'à 18 heures.

(Suspension de la séance à 17 h 38)

(Reprise à 18 h 3)


Débats de fin de séance

Campagne de vaccination

des personnes âgées

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez vous asseoir. Alors, nous débutons nos trois débats de fin de séance. Le premier débat aura lieu entre Mme la députée de Bourassa et Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant la capacité des établissements de santé de donner des vaccins. Alors, Mme la députée de Bourassa, vous avez un temps de parole de cinq minutes.


Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. Alors que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux annonçait à deux reprises – la première fois, vous vous souviendrez, c'était dans le cadre du Forum sur les urgences, donc les 4 et 5 octobre, la deuxième fois, c'était hier – une vaste campagne de vaccination pour les personnes âgées, on apprenait aujourd'hui que des personnes âgées se sont présentées dans des CLSC où elles se sont fait refuser de se faire vacciner, faute d'avoir les moyens, et d'autres personnes âgées se sont fait confirmer qu'elles ne pourraient avoir rendez-vous qu'à la fin du mois de décembre. Alors, vous conviendrez que, d'ici ce temps-là, elles ont le temps d'avoir la grippe et malheureusement de se représenter à l'urgence.

Alors, l'interrogation que nous avons, c'est comment il se fait que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux refait toujours les mêmes erreurs? Comment peut-elle annoncer et réannoncer les mêmes campagnes de dépistage, les mêmes programmes de prévention sans d'abord vérifier auprès du réseau de la santé si les établissements ont la capacité de donner les services dont il est question? Et là je ne vous rappellerai pas les délais d'attente pour le programme de dépistage pour le cancer du sein, vous êtes tout aussi bien informés que moi.

Alors, Mme Marois nous répond aujourd'hui. Bon. D'abord, elle commence par rappeler que, sans avoir directement annoncé la hauteur des sommes qu'elle était pour investir à cet égard, elle serait passée de 1 000 000 $, consentis l'année dernière à cette campagne-ci, à 4 600 000 $. Bon. Si vous me permettez, j'aimerais remettre les chiffres dans l'ordre. En 1998-1999, pour ce qui en est de la vaccination pour l'influenza, c'était 1 400 000 $ et donc pas 1 000 000 $. Alors, première différence. Deuxièmement, pour 1999-2000, toujours en ce qui a trait à l'influenza, c'est 2 000 000 $. Alors donc, on passe, si vous comprenez bien l'équation, de 1 400 000 $ l'année dernière à 2 000 000 $ cette année. Donc, c'est 600 000 $ que Mme la ministre met pour le programme d'influenza. Deuxièmement, elle ajoute 2 000 000 $ pour ce qui est de la vaccination pour le pneumocoque. Pour l'influenza, c'est 1 000 000 de personnes qui sont visées et, pour le pneumocoque, c'est 250 000 personnes qui sont visées.

Mme la ministre nous répond, elle a choisi de nous répondre – puis elle a bien fait dans le fond – parce qu'elle nous parle de la disponibilité d'abord des vaccins. Alors, elle nous dit que les vaccins sont disponibles dans des centres régionaux de distribution de même que dans un centre national. Encore une fois, Mme la ministre, par la réponse qu'elle donne à la question que je formulais, nous confirme qu'après coup, parce qu'elle a été informée que certains établissements semblaient dire qu'il n'y avait pas de disponibilité de vaccins, donc qu'après avoir lancé le programme de vaccination à grande échelle elle aurait été informée, à l'occasion d'une question que je formulais en Chambre pour un CLSC qui était dans ses régions, qu'il y avait des problèmes. Elle serait donc allée vérifier. Et, à la faveur de cette vérification-là, elle a pu confirmer aujourd'hui qu'il y avait des vaccins qui étaient disponibles dans des centres régionaux de même qu'au centre national. Donc, encore une fois, après avoir annoncé sur une grande échelle le programme, elle est allée vérifier. Donc, madame confirme qu'elle fait la même erreur, c'est-à-dire qu'elle annonce d'abord sans s'être assurée au préalable de la capacité des établissements de pouvoir offrir les services. Et c'est dommage parce que les vaccins s'adressent à des personnes âgées, donc des personnes vulnérables, des personnes qui n'ont pas toujours le temps – et elles n'ont pas toujours de voiture – de faire les frais.

Aujourd'hui, au CLSC de la Basse-ville à Québec, on a téléphoné, et c'est: On n'en a plus et on n'aura plus de vaccins. Je ne sais pas si Mme la ministre de la Santé est au courant que le CLSC de la Basse-ville disait aujourd'hui: On n'en a plus, on n'en aura plus. Donc, encore une fois, une belle annonce, une belle annonce qui peut être difficilement suivie dans les faits parce qu'au CLSC de la Basse-ville on n'a pas les moyens.

Mme la ministre nous dit aussi qu'elle a évalué la situation de son CLSC dans sa région. Encore une fois, une belle annonce. Et, encore une fois, on peut vérifier que cette annonce-là n'avait pas été au préalable vérifiée auprès de son CLSC, dans sa région, pour s'assurer de la capacité financière.

Mme Marois invitait M. Jean-Jacques Samson à prendre connaissance du plan d'action. Bien, je pense que, si M. Samson a choisi de faire son éditorial...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Bourassa. Malheureusement, votre temps imparti est terminé. Nous cédons maintenant la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre, vous avez cinq minutes.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Bon, alors, je pense qu'il est peut-être nécessaire d'expliquer comment nous procédons lorsqu'une décision est prise à l'intérieur du gouvernement et comment nous pouvons compter, lorsque nous prenons cette décision, sur un certain nombre de collaborateurs et de collaboratrices qui sont les fonctionnaires au ministère de la Santé et des Services sociaux, qui sont le personnel des régies de la santé et des services sociaux, et qui sont le personnel dans les établissements.

Alors, quand j'annonce un plan, que ce soit un plan de vaccination, un plan d'investissement, un plan d'intervention à l'égard d'une activité ou l'autre qui concerne la santé, c'est parce que des gens, avant que j'annonce cela, ont fait un travail préalable pour s'assurer de la disponibilité des ressources, du personnel, de la disponibilité des établissements et des sommes pour assumer leurs fonctions.

Alors, dans le cas présent, nous investissons... Et, effectivement, j'accepte la correction parce que, cet après-midi, j'y allais de mémoire, je n'avais pas le papier devant moi, et j'ai indiqué qu'on avait mis l'an dernier 1 000 000 $ en vaccination contre l'influenza, mais c'est effectivement 1 400 000 $. Ça ne change pas pour le reste, nous ajoutons 4 600 000 $ pour la vaccination contre l'influenza, contre le pneumocoque, pour inciter à la vaccination et pour organiser des services de vaccination.

(18 h 10)

Mme la députée disait avec pertinence qu'il était important de se rendre disponible auprès des gens qui n'avaient pas nécessairement la capacité de se déplacer, quand on est âgé en particulier. Comme ce programme s'adresse directement aux personnes âgées, nous avons prévu cela, puisque, dans les faits, on se rendra dans les sous-sols d'église ou dans les centres communautaires, dans les cas de municipalités en régions éloignées, pour offrir ce vaccin. On ira dans les centres d'accueil et d'hébergement et de soins de longue durée, là où se trouvent des centres de jour. Dans les hôpitaux comme tels, on procède auprès des personnes qui viennent déjà dans les urgences ou qui obtiennent des services de l'hôpital pour les informer, dans les CLSC. Alors, il y a vraiment un travail important qui est fait en étroite collaboration avec tous les intervenants et tous les décideurs pour s'assurer que le vaccin soit disponible au bon moment et pour couvrir le plus de personnes possible.

Et actuellement, l'information qu'on me donne est à l'effet que c'est très appuyé, la demande est là. Donc, on réussira l'opération, et tant mieux. Et je ne me suis pas informée ce matin ou hier du fait qu'il y ait disponibilité ou pas de vaccins, que nos services soient prêts à l'offrir. Tout ce travail préalable est fait par l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux dont c'est la responsabilité et le mandat. La ministre ne peut pas se substituer... Qu'on soit très ou pas du tout talentueux, on ne peut pas se substituer de toute façon aux personnels qui sont là sur le terrain.

Maintenant, remettons-nous dans la perspective. C'est 1 300 000 personnes qui seront vaccinées sur une période de 40 jours ouvrables. Avez-vous pensé, ça, M. le Président, que ça fait... Si on prend seulement 1 000 000 avec le vaccin contre l'influenza, c'est 25 000 personnes par jour qui doivent être vaccinées. Alors, oui, c'est possible que des gens n'aient pas le vaccin demain matin et qu'ils doivent se présenter à leur CLSC dans une semaine, dans deux semaines, dans trois semaines. Il y a un temps de prévu, et on essaie d'accélérer le processus pour le faire le plus rapidement possible, bien sûr, mais par ailleurs il faut aussi avoir la disponibilité du vaccin. Nous l'avons, mais il faut le préparer, ce vaccin-là. Il faut le garder dans des conditions correctes de conservation.

Je pense qu'au contraire c'est une opération extraordinaire qui va permettre à des gens pas seulement d'éviter d'aller à l'urgence, je le dis, mais surtout d'éviter d'être malades. Et, quand on est en santé, c'est plus agréable, la vie nous semble plus belle de toute façon. Alors, notre objectif, c'est de rejoindre un grand nombre de personnes; nous atteindrons cet objectif.

Qu'il y ait des problèmes ici et là, c'est normal, et on ne peut pas blâmer l'un ou l'autre CLSC d'avoir quelques difficultés. Cet après-midi, cependant, j'ai demandé qu'on refasse le tour de l'ensemble des régions du Québec pour m'assurer que tout était opérationnel, et on m'a indiqué que, dans quelques endroits, il y avait certaines difficultés, mais ce n'était pas la règle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Nous vous cédons maintenant la parole pour votre droit de réplique de deux minutes, Mme la députée de Bourassa.


Mme Michèle Lamquin-Éthier (réplique)

Mme Lamquin-Éthier: Merci, M. le Président. M. le Président, on ne doute pas qu'il y ait de la demande, ce qu'on soulève ici, c'est qu'étant donné qu'on sait qu'il va y en avoir... c'est d'avoir les moyens pour pouvoir y répondre. Alors, on donnait des exemples aujourd'hui qui démontraient qu'à défaut d'une vérification préalable des CLSC, aujourd'hui, notamment le CLSC de la Basse-ville... Au CLSC de la Basse-ville, là, ce ne sont pas des personnes, mais c'est tout le monde. On a dit: On n'en a plus, on n'en aura plus. Donc, on ne pourra pas procéder à la vaccination: on n'en a plus, de vaccins, et on n'aura plus de vaccins.

Vous savez, il faut toujours distinguer, M. le Président, entre un beau plan d'action et la réalité. La réalité, c'est qu'à défaut de moyens ou à défaut d'une capacité réelle, concrète, les établissements de santé, malgré une bonne volonté évidente, ne peuvent pas donner les services que Mme la ministre annonce et réannonce. Dans le cas qui nous occupe, c'est un programme de vaccination. Ça prend de l'argent. Beaucoup d'établissements font face à un déficit à l'heure actuelle. Quand on n'a pas d'argent, on coupe, on coupe dans les CLSC. Le CLSC Longueuil-Ouest, c'est ce qu'il faisait: il était obligé de couper des bains, réduire de 85... et aussi dans les vaccins. D'autres CLSC n'auront pas plus d'argent. Donc, ils vont aussi être obligés de couper, de réduire en quelque part.

Alors, c'est bien important de dissocier la réalité évidemment des grandes annonces. On peut comprendre qu'on veuille annoncer à grande échelle, avec grand renfort médiatique, des programmes. Ces programmes-là doivent être, pour avoir le succès voulu, arrimés à la réalité. La réalité, c'est qu'il y a eu des coupures qui sont dévastatrices, les établissements n'ont pas de marge de manoeuvre ou font carrément face à des déficits, sont déjà en train de couper des services. Comment voulez-vous qu'ils en offrent en plus? Déjà, ils ne sont pas capables de répondre à la demande. Alors, c'est dommage que le gouvernement répète la même erreur, qu'il axe plus sur l'annonce que sur la réalité.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bourassa. Ceci met fin à notre premier débat de fin de séance.


Barème de contribution des personnes à faibles revenus au régime d'assurance-médicaments

Nous allons donc passer à notre second débat, entre Mme la députée de Mégantic-Compton et Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, concernant les contributions de nos aînés au régime d'assurance-médicaments. Alors, Mme la députée de Mégantic-Compton, vous avez un temps de parole de cinq minutes.


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. La semaine dernière, à une question posée par la députée de Bourassa sur les coûts et dépassements du régime d'assurance-médicaments, la ministre a répondu qu'elle était victime de son succès et que le régime a donné les résultats escomptés et même davantage. Mais ce que la ministre ne veut pas admettre, c'est que ce sont les personnes âgées qui ont été les plus pénalisées dans ce régime. La ministre peut-elle admettre que c'est un peu plus de 500 000 000 $ qu'elle a puisés dans les poches des personnes âgées?

Aujourd'hui, dans une question que je posais à la ministre, je suis revenue sur une de ses citations de la semaine dernière, et elle nie avoir tenu de tels propos. Alors, M. le Président, j'aimerais lui rafraîchir la mémoire et citer de nouveau la ministre: «On peut être âgé et avoir des revenus très bas, trop bas pour nous permettre d'assumer nos besoins, et à ce moment-là la contribution, elle est minime.» Laissez-moi rappeler à la ministre que la contribution pour les personnes ayant un revenu de 12 000 $ est de 500 $, ce qui comprend la prime annuelle de 87,50 $, la coassurance, plus la franchise de 500 $, ce qui fait un total de 587,50 $.

Permettez-moi de réitérer ma question et de lui demander comment explique-t-elle que des milliers de personnes âgées choisissent de ne pas prendre les médicaments nécessaires et essentiels à leur santé parce qu'elles n'ont pas les moyens de se soigner et de payer la contribution infime de la ministre? Comment explique-t-elle les conclusions du rapport des chercheurs du Centre universitaire de santé McGill du 29 mars 1999 qui affirment qu'une baisse de consommation des médicaments pour les prestataires du supplément du revenu est de 14,7 %, et celle des autres personnes âgées avec un peu plus de moyens, de 7,7 %, et que ce manque de consommation de médicaments a provoqué une augmentation de fréquentation des urgences chez les personnes âgées de 50 %, augmentation des visites chez le médecin de 13 %, et que finalement ça a provoqué des événements indésirables tels que séjours à l'hôpital ou en institution et des décès à plus de 35 %? Ça, M. le Président, ce ne sont pas mes statistiques, mais le rapport des chercheurs du Centre universitaire de santé McGill.

M. le Président, vous vous souviendrez, lorsque le Parti libéral était au pouvoir, nous avons instauré un pauvre petit 2 $ sur les prescriptions des personnes âgées. Cette mesure se voulait une participation de tout le monde, comme le disait M. Bourassa. L'opposition péquiste, à ce moment-là, déchirait sa chemise sur la place publique et dénonçait cette mesure inhumaine envers les personnes les plus démunies de notre société, soit les personnes âgées. Vous vous souviendrez – la ministre doit s'en souvenir parce qu'elle était présente dans cette Chambre – que la députée de Johnson, Mme Juneau, alors qu'elle avait fait venir la FADOQ dans les galeries, harcelait le premier ministre de questions, le sommant d'abolir ce régime qui pénalisait les personnes âgées.

(18 h 20)

M. Bourassa avait alors tenté de faire comprendre à la députée de Johnson et à l'opposition péquiste qu'une telle mesure était justifiée et ne mettait pas en péril la santé de nos aînés. C'est à la suite de la réponse de M. Bourassa que nous avons eu droit à une pluie de 2 $ venant de la galerie de l'Assemblée nationale, avec le slogan suivant: Un gouvernement qui taxe la maladie est un gouvernement malade . M. le Président, à ce compte, on pourrait affirmer que le gouvernement péquiste est très malade.

M. le Président, comment un gouvernement péquiste qui déchirait sa chemise pour un 100 $ par année, qui d'ailleurs était remboursé aux personnes ayant le supplément du revenu garanti, peut-il affirmer que 500 $ est une contribution infime? Comment la ministre peut-elle affirmer que son régime d'assurance-médicaments est équitable et ne pénalise pas les personnes âgées, alors qu'à chaque semaine, dans mon bureau de comté, je reçois ces mêmes personnes âgées qui me disent ne pas pouvoir acheter les médicaments nécessaires à leur santé? Comment la ministre peut-elle se glorifier d'être la victime de son succès, alors que des personnes âgées souffrent de cette mesure injuste et doivent choisir entre les médicaments et l'épicerie?

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Mégantic-Compton. Nous allons maintenant céder la parole à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Est-ce qu'il ne serait pas utile, à ce moment-ci, de rappeler aux membres de cette Assemblée, et à ma collègue la députée de Mégantic-Compton en particulier, que nous avons fait une véritable révolution en implantant le régime d'assurance-médicaments au Québec, de telle sorte que nous couvrons maintenant tous les enfants de zéro à 18 ans qui ne paient pas pour leurs médicaments, nous couvrons les jeunes adultes qui sont aux études à temps plein et qui ne paient pas pour leurs médicaments, les enfants devenus adultes qui ont eu des handicaps avant 18 ans ont une couverture spéciale. C'est un ensemble d'avantages et de bénéfices nouveaux qui ont été offerts à la population, mais dans une perspective d'équité.

Et nous avons appuyé la recherche de l'équité sur la contribution au régime en fonction des revenus, de telle sorte que nous avons tenté de faire peser plus lourdement le poids du régime d'assurance sur les gens avec un revenu plus élevé, de telle sorte que les gens à plus bas revenu, à un revenu moins élevé, qu'on soit âgé ou plus jeune d'ailleurs, on s'est appuyé sur la question du revenu. Et je crois que c'est équitable, M. le Président. Qu'on trouve la somme un peu élevée, on peut en convenir. C'est élevé, 500 $ par année. Quand on la ramène par ailleurs à 40 $ par mois, bien, ça se paie, si on veut, progressivement, de telle sorte qu'on contribue aussi à ce régime.

La députée faisait référence au fait que les personnes âgées contribuaient donc au régime, et c'est vrai qu'elles y contribuent. Cependant, le montant moyen par personne inscrite pour la prime, il est à 135 $. Le montant maximum de la prime est à 200 $. Et c'est vrai que, pour certaines personnes, cela peut aller jusqu'à 500 $, et pour les personnes qui ont un revenu plus important, ça peut aller jusqu'à 750 $, M. le Président. Mais, avec tous les avantages que l'on peut tirer par ailleurs du régime... Parce que, pour beaucoup de personnes âgées, ce n'est pas les premiers dollars qu'elles devaient débourser pour couvrir leurs médicaments qui étaient un poids lourd, pas les personnes âgées, mais les personnes avec de lourds problèmes... À 62 ans, 63 ans, 64 ans, on pouvait être dans une situation difficile au plan du revenu et, passé un certain niveau, on ne pouvait plus se les payer, les médicaments, et on y renonçait, alors qu'actuellement bien sûr on contribue une prime, bien sûr on participe par une coassurance, mais on a plafonné de telle sorte que ce soit moins lourd et onéreux pour les gens.

Et, à partir de là, même si la maladie exige des sommes considérables en médicaments – et on sait que, dans certains cas, c'est de l'ordre de 5 000 $, 6 000 $, 7 000 $, 8 000 $, jusqu'à 20 000 $, 30 000 $ par année de médicaments pour une personne – je pense qu'il y a un avantage avec le régime que nous avons mis en place. La preuve en est qu'un certain nombre ont trouvé suffisamment d'avantages pour passer de leur régime privé, lorsqu'il s'est terminé, vers le régime public. 1 200 000 personnes devaient être couvertes par le régime public; nous sommes maintenant à hauteur de 1 535 000 personnes, allant vers les 1 600 000 personnes. L'entreprise privée devait couvrir les besoins des personnes en médicaments à la même hauteur que le régime public. Donc, ils n'ont pas changé de régime parce qu'ils ont accès à plus de médicaments. Mais, cependant, le régime privé est nettement au-dessus, pour ces personnes, du coût du régime public, ce qui explique en partie, évidemment, ce glissement. Et la hausse, donc, de participants, qui au départ n'était pas prévue à ce niveau, a des impacts considérables sur les coûts du système.

Et nous devrons nous poser un certain nombre de questions quant à des correctifs à apporter à ce régime, M. le Président. Déjà, nous en avons apporté en cours d'année. Nous prévoyons une évaluation du régime dans les semaines qui viennent et, à partir de là, on devra voir comment faire en sorte que la qualité de ce régime soit préservée, mais que nous nous assurions cependant soit qu'il fasse ses frais ou que... D'abord, le régime d'assurance doit faire ses frais. À mon point de vue, c'est une condition pour assurer un régime qui soit sain, ça va de soi. Et un certain nombre d'autres contributions doivent venir du gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux. Pour terminer, Mme la députée de Mégantic-Compton, vous avez un droit de parole de deux minutes.


Mme Madeleine Bélanger (réplique)

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. J'aimerais rappeler à la ministre que, lorsqu'on avait instauré le 2 $ sur les prescriptions, ça a récolté 36 000 000 $, alors que le PQ est allé chercher, avec l'assurance-médicaments, en 1997-1998, 257 000 000 $, et, en 1998-1999, 275 000 000 $. Alors, je me demande, M. le Président, en cette Année internationale des aînés, comment la ministre explique son inertie totale et l'inertie de son gouvernement pour les personnes les plus défavorisées que représentent les personnes âgées.

Il y a des études qui prouvent que les personnes âgées sont mal nourries et que des milliers souffrent de malnutrition, et ce, même lorsqu'elles sortent d'un long séjour à l'hôpital. M. le Président, des études prouvent aussi que les personnes âgées sont mal logées et littéralement laissées à elles-mêmes dans des centres d'hébergement de longue durée. Ces études prouvent aussi que les personnes âgées sont victimes de violence, qu'elles sont souvent maltraitées et qu'elles n'ont aucun recours véritable pour les protéger. On sait que les personnes âgées représentent une grande partie des personnes vivant sous le seuil de la pauvreté au Québec car plus de 50 % de celles-ci ont recours au supplément du revenu garanti. En d'autres mots, M. le Président, les personnes âgées du Québec sont laissées à elles-mêmes et sont complètement abandonnées par ce gouvernement et par la ministre de la Santé et des Services sociaux. Ce gouvernement fait preuve d'une grande irresponsabilité en bafouant les droits fondamentaux de ces femmes et de ces hommes, ce qui est totalement inacceptable dans une société comme la nôtre.

Qu'est-ce que la ministre compte faire concrètement aujourd'hui pour aider ces personnes...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Mégantic-Compton. Merci, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Processus d'attribution des contrats pour l'agrandissement du Palais des congrès de Montréal

Nous allons passer maintenant au troisième débat de fin de séance qui aura lieu entre Mme la députée de La Pinière et Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole concernant les soumissions pour l'agrandissement du Palais des congrès. Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, aujourd'hui, j'ai interrogé le ministre des Services gouvernementaux, et c'est la ministre des Affaires municipales qui s'est levée pour répondre. C'est au sujet d'un dossier extrêmement important pour le développement de la grande région de Montréal et surtout c'est au sujet du cafouillis, un autre cafouillis du gouvernement péquiste.

M. le Président, on apprenait dans La Presse du 4 novembre dernier que, dans le dossier du contrat de l'agrandissement du Palais des congrès de Montréal, le gouvernement a décidé de procéder d'une façon pour le moins ambiguë et dénoncée généralement de tous. Permettez-moi donc de vous faire un rappel très rapide.

(18 h 30)

Le projet d'agrandissement du Palais des congrès de Montréal est dans l'air depuis au moins trois ans. Le gouvernement s'est laissé traîner les pieds, n'a pas priorisé le projet dans le cadre des programmes d'infrastructures. Il a fallu attendre juin 1998 pour faire une demande formelle à Ottawa pour la contribution, dans le cadre de programmes d'infrastructures, où on a demandé une contribution de l'ordre de 60 000 000 $, plus exactement 58 700 000 $. Le Conseil des ministres, M. le Président, ne s'est prononcé que le 3 juin 1998.

On se rappellera, M. le Président, que le fédéral avait déjà contribué à hauteur de 24 000 000 $ en 1983 pour la construction du Palais des congrès de Montréal. Il s'agit là d'un projet structurant pour l'économie régionale. On parle d'un agrandissement qui ferait passer la superficie du Palais des congrès de 10 000 pi² à 20 000 pi², 50 salles de réunion. Enfin, on va pouvoir, M. le Président, se mesurer avec des villes comme Toronto et Vancouver pour attirer des grands événements chez nous.

On a estimé de façon très réservée à 185 300 000 $ la valeur totale de ces travaux. Trois mille emplois temporaires sont liés à ce projet, et, donc, la construction prendrait à peu près trois ans. Ça générerait des revenus pour le gouvernement du Québec de 28 100 000 $. L'agrandissement devait être terminé à l'été 2002. On parlait de ce projet comme étant l'un des plus grands chantiers de construction à Montréal, M. le Président, et on risquait de perdre des ententes, 16 ententes majeures potentielles au niveau des réservations pour le Palais des congrès.

Finalement, le gouvernement a décidé d'intervenir. Le 8 octobre 1998, lancement du premier appel d'offres, qui a suscité un tollé généralisé de protestations entraînant le boycott par 74 firmes d'architectes et 34 firmes d'ingénieurs, M. le Président, qui ont été obligées, face au cafouillis, d'écrire au premier ministre le 15 octobre 1998 pour lui demander une intervention. La Société immobilière du Québec, à laquelle le mandat a été confié, a annoncé un premier report de l'appel d'offres au 7 janvier 1999. La SIQ a également reporté une deuxième fois au 18 février l'appel d'offres, puis, une troisième fois, au 25 février 1999, et à chaque fois la saga s'élargit.

Au centre du conflit, la mauvaise gestion des appels d'offres et du processus d'attribution des contrats qu'on a avec ce gouvernement dans ce contrat et dans bien d'autres contrats. La SIQ a voulu imposer un nouveau mode de gestion qui repose sur le seul critère du plus bas soumissionnaire comme condition pour avoir une soumission acceptable, M. le Président. Il y a eu des annonces de la part du gouvernement, notamment le 4 février 1999, pour dire que la date de tombée pour la clôture est mars 1999, mais, le 23 avril 1999, trois firmes ont été retenues: Hervé Pomerleau, Groupe Axor et Gespro. On a établi le délai à fin juillet 1999. Le 4 septembre, la SIQ annonce que les trois propositions sont non conformes, alors que le comité d'experts constitué par la SIQ avait recommandé unanimement la firme Axor. Contre toute attente, la SIQ, elle, décide autrement. Alors, on est devant une situation où la SIQ refuse la recommandation de son propre comité. Et le gouvernement reconstitue un autre comité...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je regrette, Mme la députée de La Pinière, votre temps est maintenant écoulé. Vous aurez le droit de revenir pour une réplique de deux minutes. Alors, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Contrairement à ce qu'a dit Mme la députée de La Pinière, le premier jury n'avait recommandé aucune firme et avait considéré qu'aucune de ces firmes n'avait déposé un projet conforme. Alors ce ne fut pas étonnant, en fait, pour personne, je pense, cet après-midi, que je réponde à la question, étant donné que le ministère des Affaires municipales et de la Métropole a été chargé de composer le nouveau comité d'évaluation qui était composé de personnes reconnues pour leur expertise professionnelle, notamment quatre spécialistes en architecture, en génie et en urbanisme. Je parle de M. Guy Desbarats, architecte très connu dans le domaine; de Mme Marie Lessard, urbaniste, professeure titulaire à l'Institut d'urbanisme, vice-doyenne également aux études à la Faculté de l'aménagement de l'Université de Montréal; de M. Roger Nicolet, président de l'Ordre des ingénieurs du Québec et ingénieur lui-même; et de M. Jean-Claude Careau, ingénieur également; de même qu'un représentant et membre du conseil d'administration de la Société du Palais des congrès de Montréal; d'un représentant de la Société immobilière du Québec; et du sous-ministre adjoint au ministère des Transports, qui est également urbaniste, M. Paul Saint-Jacques.

Alors, ce comité d'évaluation, qui a été composé suite aux travaux du ministère des Affaires municipales et de la Métropole, a déterminé au préalable le processus d'évaluation. L'évaluation des nouvelles propositions des trois soumissionnaires a été faite conformément à des critères qui leur avaient été transmis dans le document contractuel. Le comité a procédé par consensus. Alors, M. le Président, c'est à la satisfaction générale.

Mme la députée de La Peltrie fabule quand elle dit que ça été dénoncé – excusez-moi, La Pinière – par tout le monde. En fait, ça n'a été dénoncé par personne. Depuis l'annonce mercredi dernier – donc ça va faire une semaine demain – je pense que tous conviennent que le processus a été irréprochable, que l'impartialité, l'équité et la transparence ont été des objectifs qui ont été atteints et donc que nous pouvons être fiers du projet d'agrandissement du Palais des congrès qui est retenu. C'est donc là une décision stratégique importante.

Je suis bouche bée devant l'absolution que Mme la députée de La Pinière donne au gouvernement fédéral, son parti pris aveugle dans cette injustice. Il faut vraiment être un peu masochiste, là, de penser que le gouvernement du Québec va investir 239 000 000 $, que c'est le plus grand chantier qui verra des grues s'élever dans le ciel de Montréal, que ça crée 2 732 emplois directs durant l'année et demie où les travaux vont se réaliser, que ça permet d'intégrer le Palais des congrès dans l'ensemble du futur quartier international, que ça permet de corriger de graves erreurs d'aménagement commises dans les années soixante-dix par le gouvernement Bourassa qui a creusé une tranchée en plein coeur de Montréal et qui a mis une frontière entre le Vieux-Montréal et le centre-ville, et qu'on va donc à la fois financer l'agrandissement, recouvrir l'autoroute, y construire un tablier, aménager l'ensemble du réseau souterrain.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, ce 239 000 000 $ que le gouvernement du Québec est seul à injecter parce que le gouvernement fédéral qui avait financé le Centre des congrès de Toronto a refusé de le faire pour celui de Montréal, ça devrait être dénoncé par tous les membres de cette Assemblée nationale. Je me dis que c'est inacceptable de voir à quel point, finalement, c'est encore Québec qui écope quand les lunettes roses de l'opposition libérale, du côté fédéral, viennent finalement, de façon très injuste, comme l'a fait Mme la députée de La Pinière, rendre compte de ce projet.

M. le Président, les retombées économiques sont extrêmement importantes. On prévoit 38 000 visiteurs de plus...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je regrette, Mme la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de La Pinière. Vous avez un temps de parole de deux minutes.


Mme Fatima Houda-Pepin (réplique)

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je comprends pourquoi c'est la ministre qui s'est levée pour parler d'un dossier qu'elle ne connaît pas, parce que, comme il s'agit d'un processus d'attribution des contrats, si elle avait laissé son collègue, peut-être que lui, il aurait expliqué la mécanique, comment ça marche.

(18 h 40)

Mais toujours est-il, M. le Président, que nous sommes devant une situation où il y a un comité d'experts qui a été constitué par la SIQ, composé à 50 % d'experts qui n'ont aucune attache avec le gouvernement, et qui ont recommandé à l'unanimité... c'est une compagnie du nom Axor qui avait retenu à l'unanimité leur choix, et le président de la SIQ, monsieur, de sa propre autorité et de façon à unanime et unilatérale, il décide, lui, qu'il écartait le jury de 13 personnes pour accorder le contrat à Gespro, M. le Président. Ça, c'est un problème. C'est un fait, ça a été rapporté, et, si la ministre dit qu'il n'y a pas de problème avec ce dossier-là, elle n'a qu'à regarder la revue de presse, ça ne parle que du Palais des congrès et ça lui illustrerait de façon éloquente ce qu'a dit Jean-Claude Marsan qui est un architecte et un urbaniste professeur titulaire à l'École d'architecture de l'Université de Montréal.

Il ne travaille pas pour la SIQ, lui, et il dit: «Mais M. Vézina – on parle ici du président de la SIQ – est un être têtu. Comme il n'a rien à cirer de la qualité d'un projet d'architecture et d'aménagement urbain, il a décidé, au mépris de l'éthique la plus élémentaire, de faire fi des recommandations du comité des experts.» Donc, il y a eu recommandation, et la ministre ne le sait même pas. Et ce que M. Marsan ajoute, M. le Président: «Sans questionner le réalisme de son projet de 185 000 000 $ par rapport au programme imposé, il a jeté son dévolu sur la proposition de Gespro.» Gespro, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, Mme la députée de La Pinière. Mme la ministre, pour une question de règlement.

Mme Harel: M. le Président, est-ce que Mme la députée de La Pinière accepterait de répondre à une question en vertu de notre règlement?

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que, Mme la députée, vous acceptez de répondre à une question?

Mme Houda-Pepin: Elle veut prendre un autre deux minutes, M. le Président, je ne le lui donnerai pas.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ceci met fin à nos trois débats de fin de séance, et nous allons ajourner nos travaux au mercredi 10 novembre, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 43)