L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 21 octobre 1999 - Vol. 36 N° 53

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. Il manque du monde, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous aimeriez qu'on suspende quelques instants?

M. Brassard: Oui, je souhaiterais qu'on suspende quelques instants, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 4)

(Reprise à 10 h 11)


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous débutons les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. Alors, on peut commencer maintenant, M. le Président, d'abord par l'article 24.


Projet de loi n° 5


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 24 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 5, Loi concernant l'harmonisation au Code civil des lois publiques. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi n° 5? Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi n° 5, qui est intitulé Loi concernant l'harmonisation au Code civil des lois publiques, a franchi, le 5 octobre dernier, l'étape de son étude détaillée parmi la commission des institutions. Son adoption permettra d'assurer l'harmonisation de l'ensemble des lois aux nouvelles dispositions du Code civil du Québec.

Le projet constitue ainsi la dernière opération majeure d'implantation du Code. Il s'inscrit dans le processus amorcé avec l'adoption, en 1992, de la Loi sur l'application de la réforme du Code civil. Vous vous souviendrez, M. le Président, que le Code civil du Québec, qui a été adopté le 18 décembre 1991, est entré en vigueur le 1er janvier 1994, et il comporte d'importants changements tant au niveau des concepts que de la terminologie, lesquels nécessitent une révision de l'ensemble des lois publiques. Une première étape d'intégration a été franchie par la Loi sur l'application de la réforme du Code civil adoptée le 18 décembre 1992. Toutefois, compte tenu de l'ampleur des modifications de concordance et de la nécessité d'assurer l'entrée en vigueur simultanée du Code civil et de la loi d'application, seules les concordances nécessaires ont été apportées dans cette dernière, étant alors entendu que les autres modifications de concordance seraient effectuées ultérieurement.

Afin que ces modifications soient intégrées dans l'ensemble des lois, il fut jugé opportun de procéder globalement au moyen d'une loi omnibus. Une première loi visant à harmoniser l'ensemble des lois fiscales a été adoptée en 1997. Le projet de loi n° 5, deuxième loi omnibus en la matière, vise essentiellement à compléter l'harmonisation des lois publiques afin d'assurer la cohérence et la concordance de l'ensemble des lois publiques avec les modifications conceptuelles et terminologiques effectuées lors de la réforme du Code civil du Bas-Canada.

Ce projet ne comporte aucun changement quant au droit substantif. La difficulté du projet réside plutôt dans sa grande complexité technique, ainsi que dans le grand nombre et la diversité des modifications qu'il contient. De fait, il propose des modifications conceptuelles ou terminologiques à plus de 8 000 articles répartis dans plus de 350 lois.

Afin de faciliter l'étude d'un projet de cette nature et de cette ampleur, il a été décidé de le présenter sous une forme exceptionnelle, en regroupant sous un même article l'ensemble des modifications apportées à une loi et en subdivisant celui-ci selon la nature des modifications. Cette méthode a permis de regrouper sous la première occurrence de chacune des lois l'ensemble des modifications similaires à plusieurs dispositions. Elle a également permis aux membres de la commission des institutions de procéder à l'étude détaillée du projet de loi d'une manière peut-être inédite mais très efficace et elle a été adoptée à l'unanimité.

Cette étude a été précédée d'échanges cordiaux et fructueux entre les légistes du ministère et les membres de la commission. La collaboration des membres de la commission, dont celle du député de Marquette, critique de l'opposition, a été exemplaire. Et je profite de l'occasion, M. le Président, pour le remercier sincèrement.

Le projet de loi n° 5, M. le Président, je tiens à le rappeler, est le fruit de travaux méticuleux effectués au cours des cinq dernières années par un comité de coordination institué au sein du ministère de la Justice et par une cinquantaine de juristes oeuvrant dans l'ensemble des services juridiques des ministères et de l'organisme de l'État. Il a également fait l'objet de consultations préalables, tant auprès du Barreau du Québec que de la Chambre des notaires du Québec, consultations qui ont permis de le bonifier.

Par ailleurs, M. le Président, il m'apparaît opportun de souligner: Contrairement à l'adoption du Code civil, l'adoption du projet de loi n° 5 ne nécessite pas de formation particulière des membres de la communauté juridique, puisque les modifications en droit substantif ont été apportées déjà par le Code civil ou soit par l'application des lois sur la réforme du Code civil. Les modifications qu'il propose sont attendues depuis 1994 et l'ensemble des juristes les attend avec beaucoup de patience.

Cependant, depuis ce temps, le ministère de la Justice, qui a été chargé de publiciser ce projet, une fois qu'il sera adopté, tant auprès de la communauté juridique qu'auprès de l'ensemble des juristes qui oeuvrent d'une façon ou d'une autre à l'élaboration et à l'étude des projets de loi... de donner un service adéquat aux citoyens et, d'autre part, d'assurer la cohérence des futurs projets de loi.

En terminant, M. le Président, il me semble utile de rappeler que l'ensemble de ces modifications qui ont été apportées par le projet de loi n° 5 de même que les modifications de concordance qui s'imposent de façon purement automatique et sans adaptation seront intégrées dans les Lois refondues du Québec dans un délai d'au plus trois ans à compter de l'entrée en vigueur du présent projet de loi. Afin qu'il ne se produise pas certaines ambiguïtés d'ici à ce que cette intégration soit complètement complétée, je prendrai donc les dispositions nécessaires pour qu'un avertissement soit imprimé en regard de chacun des volumes et des lois visés lors de la mise à jour des Lois refondues qui couvrira la session d'automne 1999.

Enfin, je profite de l'occasion pour remercier tous ceux et celles qui ont participé à un moment ou à un autre à l'élaboration du projet de loi n° 5 et pour souligner plus particulièrement la haute qualité de travail professionnel fournie par M. Paul Bernard et Me Aldé Frenette du ministère de la Justice, Me Sophie Auger-Giroux et Me Rachel Turgeon du Secrétariat du comité de législation ainsi que Mme Louise Auger de la Direction des affaires juridiques et législatives de l'Assemblée nationale pour l'excellent travail qu'ils ont fait pour que l'on puisse enfin adopter ce projet de loi de concordance. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en matière de justice et député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, merci. D'entrée de jeu, je remercie les députés ministériels de m'avoir applaudi. Ce n'est pas souvent que ça arrive.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Lorsque ça arrive, M. le Président, on accepte les félicitations avec grand plaisir. Je remercie également la ministre de la Justice pour ses paroles fort élogieuses à mon endroit. Je lui avais dit effectivement que ma collaboration était acquise, et elle a pu constater, de même que l'ensemble de ses collègues, que nous avons tenu parole à cet égard.

M. le Président, c'est un projet de loi qui vise à harmoniser 335 lois publiques avec le Code civil du Québec en leur apportant des modifications techniques, conceptuelles ou de terminologie qui découlent de la réforme du Code civil de 1994. Les lois fiscales et les lois qui ont déjà été harmonisées avec le Code civil ne sont pas visées par le projet de loi n° 5.

Le projet de loi contient des dispositions transitoires qui permettent aux personnes morales qui ont été constituées sous une désignation qui est modifiée par le présent projet de loi de poursuivre leurs activités sous leur nom constitutif. On se rappelle, M. le Président, que le Code civil du Québec a été adopté le 18 décembre 1991 et est entré en vigueur le 1er janvier 1994 et il a apporté un grand nombre de changements de concept et de terminologie au droit québécois que nous connaissions à l'époque.

Compte tenu de l'ampleur des modifications de concordance nécessaires, seules les concordances essentielles, notamment en matière de priorité et d'hypothèque, ou les modifications requises pour éviter l'incompatibilité entre les lois particulières et le Code civil du Québec ont été apportées lors de la réforme, et ça, via la Loi sur l'application de la réforme du Code civil. Les autres modifications nécessaires mais non essentielles et qui visaient plusieurs milliers d'articles ont été reportées.

(10 h 20)

Les articles 423 et 424 de la Loi d'application, qui étaient des dispositions interprétatives, ont permis l'application de la réforme jusqu'à maintenant. Le projet de loi n° 5 vise donc à procéder aux milliers de modifications de concordance qui n'avaient pas été faites jusqu'à présent. Il est important de noter que les modifications dans ce projet de loi sont celles qui ont fait l'objet d'un consensus de la part des intervenants consultés par le ministère et, comme l'indiquait la ministre de la Justice, il n'y a aucune modification de fond au niveau de la loi. Donc, les modifications qui faisaient l'objet de divergence d'opinions ou qui pouvaient être perçues comme étant un changement du droit actuel ont été écartées.

Ce projet de loi est de nature donc très technique et vise à compléter les dispositions d'application et de concordance obtenues dans la Loi sur l'application de la réforme du Code civil du Québec. Donc, le présent projet n'opère que la concordance des notions et des termes sans modifier la substance du droit actuel. Les catégories de modifications proposées sont soit conceptuelles, soit terminologiques, soit structurelles, ou encore linguistiques.

Le Code civil du Bas-Canada, M. le Président – et je sais que vous avez une formation de juriste, cela vous intéressera sûrement – établissait deux catégories de présomptions légales: la présomption appelée juris tantum, simple ou encore réfragable, et la présomption juris et de jure, c'est-à-dire absolue ou irréfragable. Le projet de loi n° 5 propose d'éliminer les expressions latines ainsi que les mots «réfragable» et «irréfragable» et d'instaurer une règle d'interprétation à l'effet que, si le législateur a utilisé le mot «réputé», c'est qu'il réfère à une présomption absolue, alors que, s'il a utilisé le mot «présumé», c'est qu'il réfère à une présomption simple. Le projet propose la suppression des termes «considéré» et «censé» ou encore leur remplacement.

Dans ce projet de loi, les concepts de nullité absolue et de nullité relative sont maintenant codifiés dans le sens qui leur était reconnu au moment de la réforme. La nullité absolue est réservée à la sanction d'une condition de formation essentielle ou qui s'impose pour une protection d'un intérêt général ou public. C'est le cas, par exemple, de la célébration du mariage. La nullité relative, quant à elle, sert à sanctionner les conditions de formation qui s'imposent pour la protection d'intérêts particuliers ou privés.

Le Code civil du Bas-Canada ne réglementait que la fiducie créée par testament ou par donation. Le Code civil du Québec prévoit maintenant des règles permettant la création de fiducies à toutes autres fins. L'absence de règles au Code civil du Bas-Canada pour ces fiducies d'inspiration de common law a engendré l'utilisation sans distinction dans les lois particulières de plusieurs concepts pour traduire une véritable fiducie ou une simple relation de mandant-mandataire ou encore les activités d'une personne qui fait l'administration des biens d'autrui.

Le projet de loi propose donc plusieurs modifications pour remédier à la situation actuelle et établir la concordance entre le Code civil et les lois publiques. Les termes «couronne», «Sa Majesté» sont remplacés par le terme «État» dans le Code civil du Québec et dans le Code de procédure civile. Pour maintenir le sens actuel des dispositions visées dans les lois sectorielles, les termes «couronne» et «Sa Majesté» sont remplacés par les termes soit «État», «gouvernement» ou «Procureur général».

Le projet vient aussi faire les modifications rendues nécessaires dans les lois particulières suite au remplacement lors de la réforme du Code civil du terme «corporation» par celui de «personne morale». Il en est de même pour les modifications concernant le terme «officier». Le projet vise enfin à faire des modifications terminologiques nécessaires en matière de publicité des droits.

La troisième catégorie de modifications résulte des modifications de structure du Code. Il s'agit de la modification de tout le renvoi au Code civil du Bas-Canada mentionné dans les diverses lois particulières afin de leur substituer la référence aux dispositions équivalentes du Code civil du Québec. Le projet propose donc des modifications aux versions française et anglaise dans les lois particulières. Ainsi, si une bonne partie des modifications sont proposées aux deux versions, celles visant à remédier à certains anglicismes contenus dans le texte français actuel ne doivent être apportées qu'à la version française, alors qu'un certain nombre doivent être apportées pour corriger certaines imprécisions ou certains termes incorrects qui n'apparaissaient que dans la version anglaise.

Alors, en terminant, M. le Président, vous avez maintenant l'illustration des propos que tenait le chef de l'opposition à l'effet que nous étions une opposition fort constructive. Lorsqu'il s'agit de projets de loi qui visent le bien public, qui font avancer les choses, la collaboration de l'opposition au gouvernement sera toujours acquise et nous ferons en sorte également d'accélérer les processus d'adoption du projet de loi, comme ça a été le cas dans le cadre du projet de loi n° 5.

Il faut bien voir, M. le Président, pour les gens qui ne le savent pas, que c'est un projet de loi qui contient des centaines et des centaines d'articles, qui contient 295 pages, et nous avons réussi à faire adopter ce projet de loi là dans un temps record. Alors, M. le Président, c'est avec plaisir que j'ai recommandé à ma formation politique d'adopter le projet de loi n° 5. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette et également critique officiel de l'opposition en matière de justice. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 5?


Mise aux voix

Le projet de loi n° 5, Loi concernant l'harmonisation au Code civil des lois publiques, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, quelle admirable collaboration. J'espère que ça va continuer ainsi pendant toute la session. Voyons voir si ce sera la même chose avec l'article 20 du feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 38


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 20 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant le Code civil relativement à la publication de certains droits au moyen d'avis. Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission des institutions? Y a-t-il des interventions? Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci. Alors, M. le Président, sur ce projet de loi, évidemment, nous avons eu la collaboration, jusqu'à maintenant. J'ose espérer qu'elle sera jusqu'à la fin.

M. le Président, si vous me permettez, pour la prise en considération, est-ce qu'on le fait tout de suite ou... Pour la prise en considération, est-ce qu'on peut la faire tout de suite?

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui.

Mme Goupil: Alors, rapidement, juste pour vous dire que ce projet de loi n° 38 propose des mesures qui visent à assurer une plus grande protection des intérêts légitimes des citoyens et des entreprises du Québec dans l'application du régime de la publicité des droits. Le projet de loi n° 38 a été adopté à l'unanimité par les membres de la commission des institutions, et c'est pour cette raison que nous osons croire que la collaboration, nous pourrons l'avoir jusqu'à l'adoption complète. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de justice et député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Vous voyez, nous sommes des gens de parole, comme je l'indiquais tantôt. Bien sûr, notre collaboration est acquise à la ministre de la Justice. D'ailleurs, nous avons été un peu étonnés, de ce côté-ci de la Chambre, compte tenu que nous avions fait nos travaux, nos devoirs de façon fort diligente lors de la dernière session, nous étions quelque peu surpris de voir que le projet de loi n° 38 n'a pas été adopté. Ça a été un peu une surprise de notre part, mais, bon, mieux vaut tard que jamais, M. le Président.

(10 h 30)

Je tiens à souligner également la collaboration assez exceptionnelle du député de D'Arcy-McGee, mon collègue, qui a été d'une collaboration fort précieuse pour comprendre ces dispositions de la loi. Parce que c'est un projet de loi qui vise à permettre la publication des droits résultant d'un bail non résidentiel par un avis dont le contenu est déterminé par la loi, qui assure la confidentialité des clauses relatives au loyer qui sont stipulées par les parties. Il établit donc la validité, depuis 1994, de toute publication dans les registres fonciers ou des documents concernant les mentions requises par le nouvel avis.

Il précise également que la publication des désignations ou remplacements de liquidateurs de successions se fait au moyen d'un avis dans le registre de la publicité des droits. Or, voilà, M. le Président, que, suite à la réforme du Code civil en 1994, certains ajustements sont demandés par le milieu en ce qui concerne la publication de certains droits au moyen d'un avis. Ce projet de loi, fort simple, de trois articles, qui est plutôt technique, vise à faire ces corrections.

L'article 777 du Code civil du Québec accorde aux liquidateurs la saisie des héritiers et légataires sur tous les biens de la succession pour le temps nécessaire à la liquidation. L'ajout d'un troisième alinéa apporte la précision que la publication des désignations ou remplacements de liquidateurs de successions sur les registres de la publicité des droits se fait par un avis qui identifie la succession, le liquidateur, l'acte de désignation ou de remplacement et les immeubles visés.

L'ajout d'un article 2999.1 permet l'inscription des droits résultant d'un bail immobilier autre qu'un bail relatif à un logement par la présentation d'un avis au bureau de la circonscription foncière où l'immeuble est situé. Cet avis, qui fait évidemment référence au bail auquel il se rapporte, identifie le locateur et le locataire, la désignation de l'immeuble, la date du début et de la fin du bail et autres éléments nécessaires à la détermination de l'immeuble. L'attestation de vérification quant à l'exactitude de l'avis doit être faite par un avocat ou un notaire.

Ce projet vient donc valider l'inscription des droits résultant d'un bail immobilier autre que celui relatif à un logement, de même que toute cession d'un tel bail qui est constatée par un acte ou document qui contient au moins les mentions requises par le nouvel article 2999.1 et qui fait l'objet d'une inscription pour les registres fonciers publiés depuis le 1er janvier 1994.

Alors, c'est avec plaisir que j'ai recommandé à ma formation politique, à la dernière session, d'adopter ce projet de loi. Et, M. le Président, nous sommes prêts à procéder.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette et critique officiel de l'opposition en matière de justice. Autres intervenants?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 38, Loi modifiant le Code civil relativement à la publication de certains droits au moyen d'avis, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, on peut maintenant passer, M. le Président, à l'article 18 du feuilleton.


Projet de loi n° 31


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 18 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile.

Y a-t-il des interventions sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions? Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Alors, d'emblée, je tiens à remercier les membres de la commission des institutions qui ont siégé lors de l'étude article par article du projet de loi n° 31. Alors, parmi ceux-ci, il y a une question qui a été posée par le député de Chapleau, à l'égard de laquelle j'ai promis d'apporter une réponse lors de l'adoption du projet de loi et même, si nécessaire, de présenter un amendement afin d'assurer le respect des droits des justiciables.

La question avait trait à la modification proposée à l'article 274 du Code de procédure civile par l'article 4 du projet de loi. Il s'agit, en l'occurrence, de la disposition qui prévoit l'obligation pour chaque partie de déposer au greffe la liste de ses témoins et l'objet de leur témoignage, sauf si un juge l'en dispense pour raison valable. Alors, la question visait à déterminer si le refus par un juge d'accorder une dispense peut faire l'objet d'un appel.

Alors, après vérification auprès des experts et de la magistrature, je suis en mesure de confirmer que la partie qui se verrait ou qui se serait vu refuser une dispense pourra effectivement se pourvoir en appel en vertu de l'article 29 du Code, et plus particulièrement en vertu du paragraphe 2 du premier alinéa de cet article, qui permet un appel lorsque le jugement interlocutoire «ordonne que soit faite une chose à laquelle le jugement final ne pourra pas remédier». Alors, dans les circonstances, M. le Président, aucun amendement additionnel ne s'est avéré nécessaire. Dans les circonstances, nous souhaitons qu'il puisse être adopté. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de justice et député de Marquette. Alors, M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Voici un projet de loi, maintenant, qui pose une certaine difficulté, dans le sens suivant, puis c'est la même chose par rapport à la réforme du Code de procédure civile amorcée par le gouvernement. La ministre a mis sur pied un comité constitué des fonctionnaires de son ministère, des représentants de la magistrature et des représentants du Barreau du Québec, qui se sont entendus pour effectuer plusieurs modifications au niveau du Code de procédure civile. Jusqu'à date, ça va.

Le problème, c'est que le public, les représentants du public, les représentants des consommateurs, des représentants de personnes qui doivent aller devant les tribunaux, bien ces gens-là ne sont aucunement consultés dans le processus. Ces gens-là, la ministre va les consulter ultérieurement, une fois que son comité aura terminé l'ensemble de ses travaux, et leur seul choix comme contribuables sera de dire oui ou non par rapport à l'ensemble des travaux qui auront été effectués par le comité.

Alors, M. le Président, comme critique en matière de justice, ça me pose un certain problème. Au moment où les frais d'avocat, les frais de cour, l'ensemble des frais... lorsque les citoyens doivent se présenter devant les tribunaux soit pour faire valoir leurs droits ou encore pour se défendre suite à des poursuites engagées contre eux, eh bien, ces gens-là n'auront pas voix au chapitre, et pourtant le système judiciaire est là précisément pour ces personnes-là. La ministre, dans sa réforme, n'a pas jugé opportun de faire en sorte qu'il y ait des représentants du public sur le comité.

Ça me pose problème, M. le Président, parce que je me demande: La réforme qui sera effectuée, la réforme qui s'en vient et la petite réforme que nous avons sous les yeux au niveau du projet de loi n° 31, je peux comprendre qu'il y a convergence de points de vue entre les avocats du ministère de la Justice, les avocats du Barreau du Québec et les représentants de la magistrature, mais qu'en est-il du point de vue des citoyens, du point de vue des personnes qui doivent aller devant les tribunaux, où il y a une crise de confiance à l'endroit du système judiciaire et également une crise de confiance au niveau des représentants, des différents acteurs qui interagissent au niveau des tribunaux?

Il y a une crise de confiance, ça a été manifesté dans le cadre du colloque du Barreau du Québec, l'année passée, où les sondages démontrent que les gens ne font pas confiance à l'appareil judiciaire, les gens n'ont pas confiance dans les avocats. Les sommes d'argent qui sont chargées... Il arrive, M. le Président, des tristes réalités. Des gens vont devant les tribunaux. Leur action est une action en recouvrement pour peut-être un montant de 10 000 $ ou de 12 000 $. Les gens vont se prévaloir du processus judiciaire. Et, au bout du compte, pour obtenir leur 10 000 $ ou 12 000 $, de poursuite, ça leur aura coûté souvent beaucoup plus cher que 10 000 $ ou 12 000 $, de telle sorte que les gens en ressortent perdants.

(10 h 40)

Alors, il y a une crise de confiance importante, et j'aurais espéré que la ministre aurait su adéquatement et de façon compétente adresser ce problème en disant: Il serait important que les justiciables soient non seulement consultés en bout de processus, mais qu'ils soient partie prenante dès le début du processus qui vise à effectuer, semble-t-il, une réforme en profondeur du Code de procédure civile du Québec, c'est-à-dire l'ensemble des règles qui régissent les débats devant les tribunaux et les relations entre les procureurs, les avocats, les clients, les juges, les cours de justice.

Alors, M. le Président, c'est une belle occasion ratée par la ministre de la Justice, alors qu'il est manifeste depuis plusieurs années qu'il y a une crise de confiance à l'endroit des tribunaux. Les gens, lorsqu'ils savent ça, vont trop souvent choisir d'abandonner leurs droits, d'abandonner leur réclamation parce que les coûts engendrés par le processus judiciaire sont trop excessifs, sont exorbitants. Et les gens ne savent jamais quel sera le processus en bout de compte, mais ils savent une chose, c'est que la facture va être fort salée. On aurait pu facilement demander à des représentants – par exemple, d'Option consommateurs – de désigner deux personnes qui auraient pu siéger sur le comité central mis sur pied par la ministre de la Justice pour donner leurs points de vue. Parce qu'on est en train de réformer un système, réformer un Code de procédure civile, mais on n'a même pas daigné demander l'opinion des gens qui seront les premiers concernés.

Alors, on peut facilement comprendre ce qui va se passer au bout du processus, il va se passer la même chose qu'avec le projet de loi n° 31: ça sera une affaire d'experts, pour les experts, qui répond aux besoins des experts. Mais, en bout de ligne, est-ce que ça va répondre aux préoccupations des citoyens et des citoyennes que nous représentons tous ici, à l'Assemblée nationale? Notre premier mandat comme parlementaires, c'est de représenter les gens qui nous ont élus. Les représenter signifie également de faire entendre leurs préoccupations ici même, à l'Assemblée nationale. Et, quand l'Exécutif met sur pied des mécanismes, des comités qui font en sorte d'écarter les citoyens au niveau de leurs préoccupations, je me dis que ce n'est pas sain pour la démocratie.

J'invite la ministre de la Justice à réfléchir à mes propos. J'invite la ministre de la Justice, avant qu'il ne soit trop tard, à réfléchir à la possibilité d'inviter, au niveau de son comité qui vise à faire la réforme du Code de procédure civile, des représentants soit de consommateurs ou des représentants de publics qui auraient à coeur pas les intérêts des avocats, ni les intérêts des juges, ni les intérêts du ministère de la Justice, mais les intérêts des contribuables, les intérêts des citoyens qui, lorsqu'ils vont se prévaloir du système judiciaire, vont rencontrer un certain nombre de problèmes qui font en sorte qu'aujourd'hui, malheureusement, le système judiciaire est en crise, et il y a une crise de confiance à l'endroit du système que la ministre prétend vouloir réformer. Alors, comment va-t-elle réussir cette réforme? Comment va-t-elle réussir à redonner confiance, que les citoyens puissent avoir confiance dans le système judiciaire, alors qu'elle a décidé d'écarter les représentants du public alors qu'elle procède à une réforme qui est censée être majeure?

Alors, j'espère que la ministre va être sensible à mes propos. Je pense que le témoignage que je lui livre aujourd'hui lui a déjà été livré par d'autres personnes. Elle a décidé de faire la sourde oreille, elle a décidé plutôt de faire plaisir aux gens qui lui ont dit: Il ne faut pas que tu impliques des représentants du public à ce moment-ci. Je comprends leurs raisons, M. le Président, mais je dis que, comme élue, elle a une responsabilité de tenir compte des préoccupations des citoyens et des citoyennes, c'est sa première responsabilité à l'Assemblée nationale, de représenter les électeurs de sa circonscription électorale, de faire entendre leurs points de vue.

Et, à plus forte raison lorsqu'elle occupe un poste de responsabilité au niveau de l'Exécutif, elle doit être très sensible à cela. Et je pense, M. le Président, qu'elle devrait modifier son comité pour faire en sorte qu'on puisse faire une place à des représentants du public pour qu'au bout du compte la réforme du Code de procédure civile puisse tenir compte des préoccupations, des inquiétudes et des besoins de la population. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Marquette et critique officiel de l'opposition en matière de justice. Mme la ministre de la Justice, est-ce que vous désirez vous prévaloir de la prérogative de l'article 253? Vous avez un droit de réplique de cinq minutes. Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, M. le Président, j'aimerais rappeler en cette Chambre que le député de Marquette a raison de mentionner que notre premier devoir est de nous préoccuper de ce que nos concitoyens et concitoyennes pensent. C'est le plus grand privilège que nous avons et c'est ce qui fait en sorte que nous sommes tous ici membres de cette Assemblée.

Cependant, j'aimerais ramener le député de Marquette un peu dans le contexte du dossier qui est ici, c'est-à-dire le projet de loi n° 31. Alors, dans un premier temps, j'avais cru comprendre qu'ils étaient en accord et que nous avions leur collaboration pour aller de l'avant. Alors, ça, c'est bien acquis. Alors, je veux rassurer la population.

Le député en a profité pour nous amener sur un autre sujet qui est celui de la réforme du Code de procédure civile. Alors, évidemment, j'avais déjà informé le député de Marquette, dans le cadre de l'étude de nos crédits, comment nous allions procéder dans le cadre de la réforme du Code de procédure civile. Mais je pense que lui qui me dit que je fais la sourde oreille, c'est peut-être lui qui n'a pas compris. Mais je vais lui rappeler encore une fois en cette Chambre ce que je lui avais déjà dit.

D'abord, dans un premier temps, la réforme du Code de procédure civile, c'est vrai que c'est un grand chantier, M. le Président. Cette réforme-là, nous osons croire qu'elle apportera des outils pour simplifier le Code de procédure civile, ce qui permettra ainsi une plus grande accessibilité à la justice.

Il est vrai également qu'à ce comité siègent des femmes et des hommes compétents, des gens qui émanent du Barreau, qui émanent de la magistrature, de l'administration de la justice. D'abord, nous avons procédé de cette façon-là pour justement travailler en amont. Avant d'arriver avec un projet de loi qui est tout à fait fait, nous avons décidé d'amener des gens avant pour qu'ils puissent nous dire ce que l'on devrait retrouver dans ce projet de loi là pour, justement, réformer le Code de procédure pour qu'il devienne plus simple et qu'il y ait moins de procédure dans ce Code-là. Et, s'il y a moins de procédure, évidemment ça devrait réduire les délais.

Alors, ce que j'avais mentionné au député de Marquette pendant l'étude des crédits, c'est que le comité mènera des consultations auprès de plusieurs groupes de citoyens, y compris des organismes représentant des consommateurs. Au moment où on va consulter les gens, le projet de loi ne sera même pas rédigé. Je vous dirais que c'est un plan de travail que le comité s'est donné où on va proposer certaines mesures pour simplifier la procédure. Et le comité s'est engagé à aller consulter des groupes de personnes pour leur dire: Voici comment nous voyons les choses. Comment, vous, vous percevez cela? Justement pour qu'il puisse y avoir cet échange. Et, s'il y a un problème, il sera toujours temps de réajuster, puisque la rédaction même du projet de loi ne sera pas complétée.

Alors, M. le Président, je peux rassurer le député de Marquette et je peux rassurer toute cette Chambre qu'il est de notre devoir d'avoir à coeur la préoccupation des citoyens et citoyennes. Et il est vrai que les choses ne sont pas parfaites, mais nous tentons, avec les moyens que nous avons... Parce qu'il faut se rappeler que nous sommes dans un contexte budgétaire où nous avons pris l'engagement, dans le cadre de notre gouvernement, de ne pas dépenser plus que les sommes d'argent que nous avions. Mais nous faisons, je pense, en toute humilité, en partenariat avec les hommes et les femmes qui travaillent dans ces comités, il faut le dire, bénévolement... pour faire en sorte que nous trouvions des solutions pour nous permettre d'avoir des outils qui répondent le mieux possible aux besoins des citoyens et citoyennes. Et je suis très heureuse du travail qui a été effectué jusqu'à maintenant par ce comité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la ministre de la Justice.

M. Ouimet: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le critique officiel.

(10 h 50)

M. Ouimet: Un petite question de règlement. Dans l'esprit de courtoisie dans lequel nous travaillons, en vertu de l'article, je pense, 215 ou 222, la ministre me permettrait-elle de lui adresser une question?

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre. Oui? Alors, veuillez procéder.

M. Ouimet: Alors, la question, M. le Président: La ministre ne trouverait-elle pas préférable de faire participer les citoyens à l'élaboration du projet, au lieu de les placer devant un fait accompli? Lorsque tout le travail sera terminé, leur seul choix véritable sera de dire oui ou non par rapport à l'ensemble du projet qui sera présenté devant eux. Ne serait-il pas préférable de leur permettre, avec les juristes, d'élaborer le projet qui faciliterait une plus grande accessibilité à la justice?

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je répète encore une fois, parce que je pense que le député de Marquette n'a pas entendu ma réponse, que le comité qui est en place élabore actuellement un plan de travail pour répondre à la demande qui est celle de simplifier le Code de procédure civile.

Le projet de loi n'est pas rédigé. Et les consultations que le comité s'est engagé à faire, c'est justement pour présenter des choses avec les gens et discuter avec eux. Alors, à moins que le député de Marquette n'ait jamais participé à ce genre de comité, c'est peut-être possible, mais j'ai déjà participé moi-même à ce comité-là comme citoyenne, et, lorsque nous émettons nos opinions, il est évident que les représentants du ministère les prennent en considération. Et c'est justement ce que les citoyens demandent, que l'on puisse les informer de la direction que l'on s'apprête à prendre et que, si justement ça ne correspond pas aux attentes des gens, il sera possible d'échanger avec eux.

Et souvent, M. le Président, c'est une question d'incompréhension. Parce que c'est vrai, c'est vrai, la société, la population québécoise, elle a raison. Dans le ministère de la Justice, tout ce qui touche les lois, les règlements, la jurisprudence, les termes qui sont utilisés sont souvent fort complexes. Et, oui, nous avons un travail à faire pour simplifier les choses pour que les citoyens et les citoyennes comprennent ce langage, qui peut être compris par tout le monde dans la mesure où on le simplifie. Et j'ai confiance que les membres du comité qui rencontreront ces groupes de personnes auront toute l'écoute nécessaire pour que les gens se sentent bien.

Et, M. le Président, si jamais il y avait des gens qui n'auraient pas été compris ou qui me soulèveraient des inquiétudes, je serais très vigilante. Mais j'ai confiance aux gens qui sont en place, ce sont des gens compétents. Et leur seule préoccupation, M. le Président, c'est de faire en sorte que l'on puisse se doter d'un Code de procédure qui soit beaucoup plus simple et qui nous permette de simplifier les coûts et les délais de la justice.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Y a-t-il d'autres intervenants sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions? Alors, le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je vous réfère maintenant, M. le Président, à l'article 1.


Projet de loi n° 54


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 1 de votre feuilleton, Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 54? Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Alors, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 54, que nous abordons aujourd'hui à l'étape de l'adoption du principe, modifie la Loi sur les substituts du procureur général afin d'y supprimer une disposition vétuste qui empêche les substituts du Procureur général d'autoriser, dans le cours normal de leurs fonctions, certaines poursuites au nom du Procureur général, tel que le permettent les dispositions du Code criminel.

Pour bien situer la modification proposée, je voudrais dire quelques mots sur l'exercice du droit de poursuite, M. le Président. La responsabilité de superviser et de consentir aux poursuites criminelles incombe au Procureur général du Québec. Par ailleurs, la Cour suprême du Canada, dans l'affaire Regina contre Harrison, reconnaissait déjà en 1977 que les responsabilités du Procureur général, comme celles de tout autre ministre, sont si nombreuses qu'il serait exagéré de s'attendre qu'il remplisse personnellement toutes les fonctions. Il est donc normal qu'il puisse déléguer l'exercice de ses responsabilités à des personnes expérimentées et fort compétentes, M. le Président.

Au Québec, ce sont les substituts du Procureur général qui, quotidiennement, examinent les procédures qui se rapportent aux infractions commises à l'encontre du Code criminel et autorisent également les poursuites contre les contrevenants. Ils agissent sous l'autorité du Procureur général, qui est responsable de leurs actes devant l'Assemblée nationale et qui encadre l'exercice de leurs fonctions au moyen de directives claires.

Ce rôle leur est d'ailleurs expressément reconnu par l'article 4 de la Loi sur les substituts du procureur général. Le Code criminel reconnaît lui-même cette réalité, puisque la définition qu'il donne des mots «Procureur général» comprend également son substitut légitime. On ne peut certes pas nier que les substituts du Procureur général, qui sont régis par une loi spécifique qui encadre l'exercice de leurs fonctions, soient des substituts légitimes du Procureur général et qui peuvent donc à ce titre agir en son nom pour autoriser des poursuites, sauf les cas où la loi le prévoit autrement.

Le Code criminel ne contient que deux exceptions à cette règle en stipulant expressément que la décision en matière de poursuites criminelles ne peut être prise que par le Procureur général ou le sous-Procureur général, c'est-à-dire le sous-ministre de la Justice. Dans ces deux cas, le Code criminel requiert d'eux un consentement personnel écrit les empêchant de déléguer à quiconque cette responsabilité. Il s'agit de l'article 577 relatif à la présentation d'un acte d'accusation que l'on dit privilégié, c'est-à-dire un acte d'accusation présenté sans qu'il y ait eu une enquête préliminaire ou, si une telle enquête a eu lieu, la présentation d'un acte d'accusation même si le prévenu a été libéré à la suite de cette enquête.

L'autre cas est prévu à l'article 485.1 du Code criminel et concerne le dépôt d'une nouvelle accusation lorsque la poursuite initiale a été rejetée. On voit qu'il s'agit d'actes de procédure d'un caractère très exceptionnel et il est alors normal que le consentement dans ces cas ne puisse être délégué aux substituts du Procureur général ni même aux substituts en chef. Je souligne d'ailleurs, M. le Président, que le projet de loi ne modifiera pas cette règle d'aucune façon et que, dans ces deux cas, le consentement requis continuera d'être donné par le Procureur général ou le sous-Procureur général personnellement.

Alors, par ailleurs, on retrouve au Code criminel d'autres dispositions qui prévoient que la poursuite ne peut être intentée sans le consentement du Procureur général sans exiger toutefois que ce consentement soit donné personnellement par lui. On compte une douzaine de ces dispositions au Code criminel. C'est le cas notamment lorsque la dénonciation concerne les témoignages contradictoires, la corruption d'enfants, l'enlèvement d'enfants par un parent en l'absence d'une ordonnance de garde ou la violation criminelle de contrats. Dans ces cas, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le Code criminel n'exige pas que le consentement soit donné personnellement par le Procureur général. Normalement, il devrait donc être donné par un substitut.

Toutefois, la Loi sur les substituts du procureur général comporte, elle, une importante réserve. L'article 4 précise en effet que le substitut ne peut autoriser les poursuites dans les cas où l'autorisation préalable du Procureur général est requise par une disposition du Code criminel. C'est cette exception qui empêche la délégation prévue au Code criminel de s'appliquer en faveur des substituts. À vrai dire, la réserve qui est prévue à l'article 4 remonte à l'adoption de la Loi sur les substituts, en 1969, époque à laquelle le Code criminel ne comportait pas l'actuelle définition du Procureur général. On voit donc que la réserve prévue à l'article 4 est vétuste.

(11 heures)

Faute par les substituts de pouvoir autoriser eux-mêmes le dépôt des dénonciations, l'exercice de ce pouvoir a été délégué le 18 mars 1993 aux substituts en chef et aux substituts en chef adjoints par le Procureur général en vertu de l'article 6 de la Loi des substituts et qui permet à ce dernier de nommer des substituts en chef et de déterminer leurs fonctions. Ce sont donc les substituts en chef qui, jusqu'à récemment, autorisaient ces poursuites. J'ai bien dit «jusqu'à récemment», car, le 9 mars 1999, un jugement de la Cour du Québec venait confirmer que l'article 4a de la Loi sur les substituts du procureur général ne permet pas aux substituts d'autoriser les poursuites prises en vertu de l'article 283 du Code criminel, lequel exige le consentement du Procureur général. Alors, la portée de ce jugement n'est pas limitée au seul cas de l'article 283, il s'applique également aux quelque 12 dispositions du Code criminel qui exigent aussi le consentement du Procureur général.

Alors, qui plus est – c'est là l'élément nouveau apporté par le jugement – la Cour a conclu que les substituts en chef et les substituts en chef adjoints ne sont pas non plus habilités à autoriser ces poursuites en dépit de la délégation qui leur avait été expressément faite. Le tribunal a en effet considéré que la réserve prévue à l'article 4 s'appliquait également aux substituts en chef et à leurs adjoints.

Alors, depuis ce jugement, M. le Président, seuls le Procureur général du Québec, le sous-procureur général et le sous-procureur général adjoint, c'est-à-dire trois personnes, peuvent, aux termes de la Loi sur le ministère de la Justice, donner le consentement préalable requis par la douzaine de dispositions du Code criminel dont j'ai fait état tout à l'heure.

Une telle situation, M. le Président, entraîne de sérieux inconvénients car le Procureur général ainsi que le sous-procureur général adjoint ne sont pas toujours facilement accessibles à brève échéance, et ce, compte tenu de l'ampleur de nos responsabilités. Or, des urgences peuvent survenir en tout temps, y compris la nuit et les fins de semaine. C'est notamment le cas en matière d'enlèvement d'enfant, M. le Président – ce sont des événements malheureux, mais encore tout récemment nous avons eu un cas de cet ordre-là – dans le cas d'enlèvement soit par un parent qui n'avait pas la garde et qui n'avait pas d'ordonnance pour pouvoir amener son enfant à l'extérieur du pays... Vous comprendrez donc qu'il est impératif que l'on puisse autoriser le dépôt de la dénonciation dans les heures qui suivent la réception de la plainte d'enlèvement international en vue d'obtenir rapidement un mandat d'arrestation afin que l'enfant et le responsable de son enlèvement soient retracés immédiatement, avant qu'ils n'aient quitté le Canada.

En outre, le Procureur général, le sous-procureur général et le sous-procureur général adjoint ne peuvent consentir au dépôt de la dénonciation sans prendre connaissance du dossier, ce qui alourdit le processus décisionnel et entraîne des délais, M. le Président, qui, vous comprendrez, dans de telles circonstances, sont inacceptables. Force est donc de constater qu'il est souvent impérieux que l'on obtienne une autorisation préalable du Procureur général ou du sous-procureur général adjoint dans les meilleurs délais possible.

On voit donc que la situation actuelle ne peut continuer plus longtemps et qu'il devient urgent, et je dis bien très urgent, si l'on veut écarter les inconvénients dont je viens de parler, de modifier la Loi sur les substituts du procureur général afin que plus rien ne fasse obstacle à l'application du Code criminel et que ces poursuites soient de nouveau autorisées avec toute la célérité voulue et nécessaire.

Il ne faut pas oublier, M. le Président, que les substituts, dans le cours normal de leurs attributions, autorisent déjà le dépôt d'accusations relatives à des actes criminels d'une gravité certaine comme, par exemple, un meurtre au premier degré. Cette dernière accusation est susceptible, comme vous le savez, d'entraîner l'emprisonnement à perpétuité, comportant en certains cas l'inadmissibilité à une libération conditionnelle avant d'avoir purgé au moins 25 ans de détention. On ne voit donc pas pourquoi un substitut ne pourrait pas, lui aussi, donner les consentements requis par les dispositions spécifiques du Code criminel, comme il l'a fait jusqu'à tout récemment.

C'est pourquoi, M. le Président, je propose de modifier l'article 4 de la Loi sur les substituts du procureur général de façon à supprimer la disposition qui empêche les substituts d'autoriser les poursuites. C'est là le seul objet du projet de loi n° 54. Je l'ai déjà mentionné et je le mentionne à nouveau en cette Chambre pour que le député de Marquette comprenne bien que le seul objet de ce projet de loi n° 54 est de pouvoir permettre aux substituts de continuer à faire ce qu'ils ont fait jusqu'à maintenant. Ainsi, M. le Président, nous pourrions continuer à travailler avec toute la latitude nécessaire pour que l'on puisse agir efficacement et avec célérité, le tout conformément à la lettre et à l'esprit du Code criminel.

Ce faisant, comme Procureur général, M. le Président, je ne me départis d'aucune de mes responsabilités. Tout au contraire, je conserverai la responsabilité ultime, puisque les substituts agissent en mon nom et sous mon autorité. Ils pourront donc validement consentir au dépôt des dénonciations et le feront conformément aux directives qui gouvernent déjà l'exercice de leur discrétion en matière d'autorisation de poursuite.

Si, à l'usage – je dis bien: «si, à l'usage» – le besoin de directives particulières se fait sentir, je n'hésiterai pas à recourir au pouvoir que la Loi sur les substituts me donne de déterminer les devoirs et fonctions des substituts pour encadrer davantage l'exercice de leurs pouvoirs, comme tous mes prédécesseurs l'ont fait avant moi et comme je viens de le faire récemment en matière de demande de déclaration judiciaire de délinquants dangereux à contrôler.

Tel est donc, M. le Président, l'objet du projet de loi n° 54. Son objectif essentiel est de remédier à une difficulté réelle et récemment soulevée dans une décision judiciaire en permettant aux substituts d'accomplir pleinement les fonctions que le Code criminel leur confère. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière de Justice, M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, ce projet de loi là demeure suspect. Il demeure suspect parce que la ministre refuse toujours de nous donner accès à une partie du mémoire qui est normalement accessible au public. Alors, si tout ce que la ministre dit est vrai, pourquoi refuse-t-elle de nous donner accès à la partie du mémoire qui est normalement accessible au public? Je veux bien la croire, M. le Président, je veux bien me rendre à ses arguments, si tel est le cas, très bien, mais je demanderais que, à tout le moins, la partie du mémoire qui est normalement accessible au public puisse nous être accessible.

Je ne comprends pas pourquoi elle a refusé au mois de mai et au mois de juin et pourquoi elle continue de refuser de nous donner accès à cette partie du mémoire. À moins qu'elle se soit ravisée, je ne le sais pas, je n'ai pas l'impression qu'elle ait changé d'avis à ce niveau-là. Ça demeure quand même, M. le Président, un projet de loi qui est suspect et auquel, pour l'instant, nous ne pouvons pas donner notre appui parce que nous ne disposons pas de suffisamment d'informations.

Pour le public qui nous écoute, il faut bien comprendre que normalement, dans le cadre des projets de loi qui sont présentés à l'Assemblée nationale, il y a une partie du mémoire qui est ouverte au public pour que le public puisse mieux comprendre les buts visés par le législateur, en l'occurrence par la ministre de la Justice, et normalement l'opposition prend toujours connaissance de ces dispositions-là; ça fait partie du dossier, entre guillemets.

C'est ce que nous avions demandé au mois de mai dernier. Pour des raisons qui demeuraient obscures, la ministre a refusé. Nous sommes revenus à la charge au mois de juin, la ministre a continué de refuser de nous donner accès. Et là le même projet de loi revient à la mi-octobre et, encore une fois, je n'ai pas senti de la part de la ministre de la Justice cette volonté, cette transparence. Vous savez comment c'est important, la transparence, M. le Président. Nous avons vécu une expérience ensemble en Allemagne de l'Est où, suite aux grandes réformes qui ont été effectuées, ils ont décidé de faire en sorte que leur parlement soit entièrement vitré afin que les gens puissent voir ce qui se passe dans l'administration de leurs affaires et que le parlement soit ouvert et accessible à tous.

(11 h 10)

Je demande à la ministre de la Justice, si elle veut accélérer le processus, faciliter et favoriser l'adoption du projet de loi, qu'elle soit également transparente, qu'elle dévoile la partie qui est normalement accessible non seulement au public, mais, bien sûr, aux parlementaires, cette partie du mémoire qu'elle a déposé au Conseil des ministres. Il faut bien s'entendre, là. On ne demande pas d'avoir accès à la partie qui est réservée uniquement à l'Exécutif. Ça, c'est la prérogative de l'Exécutif, nous le comprenons, bien que ça soit difficile dans certaines circonstances. Mais, semble-t-il, c'est la règle. Mais, en ce qui concerne la partie qui est normalement accessible au public, si tout ce que la ministre vient de nous dire est vrai, pourquoi hésite-t-elle à donner accès à des informations qui permettraient tout simplement d'éclairer les parlementaires, d'éclairer l'ensemble des députés des deux côtés de la Chambre et particulièrement d'éclairer l'opposition sur les véritables fins poursuivies par la Procureur général?

Parce que, M. le Président, ça demeure un projet de loi suspect. J'ai eu l'occasion de faire certaines vérifications avec des experts en la matière, et eux aussi ont de la difficulté à comprendre les buts et les objectifs poursuivis par la Procureur général. Lorsqu'il s'agit de se dessaisir de certaines responsabilités qui lui sont conférées par le Code criminel, qui est de juridiction fédérale, on a des craintes, on a des craintes à cet égard-là.

Donc, j'indique à la ministre que, pour l'instant, il est impossible pour nous d'adopter le principe de ce projet de loi, il est impossible de donner notre accord tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas réussi à éclaircir certains volets, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas réussi à obtenir la partie du mémoire qui est normalement accessible au public. La ministre n'en a pas fait état dans sa présentation, mais j'aimerais savoir pourquoi elle refuse de nous donner accès à ces informations-là qui sont normalement disponibles pour le public. Pourquoi est-ce que ça demeure caché? Pourquoi est-ce que ça demeure obscur? Qu'est-ce que ça cache, M. le Président?

Une fois qu'on aura réussi à mettre un certain éclairage là-dessus, alors, là, ça pourra faciliter notre compréhension, faciliter la compréhension également des gens que nous consultons, qui ont une expertise certaine dans ce domaine-là. Alors, j'espère que la ministre va se raviser et va nous donner accès à ces informations-là, sinon, je le lui signale d'emblée, ça va être extrêmement difficile d'obtenir notre collaboration pour l'adoption de ce projet de loi. Alors, je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette et également critique officiel de l'opposition en matière de justice. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 54? Madame, est-ce que vous désirez vous prévaloir de votre droit de réplique? Mme la ministre de la Justice.


Mme Linda Goupil (réplique)

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je suis surprise d'entendre le député de Marquette encore revenir avec le même discours, les mêmes propos qu'il nous avait tenus à la précédente session. Parce que, quand on parle de collaboration, moi, concrètement, ce que ça signifie, c'est de s'asseoir avec les gens puis de regarder ce que cela signifie. Je suis d'autant plus surprise que le député de Marquette, qui est lui-même avocat, sait très bien que, lorsque l'on parle de dossiers avec le Procureur général... Il est évident que c'est un dossier qui est très délicat et que justement il n'y a rien de suspicion ou quoi que ce soit.

Ce qui a été transmis au Conseil des ministres, j'ose espérer qu'évidemment je vais le partager avec mes collègues avant de... et qu'il puisse être adopté ici. Et nous avons tenté vraiment... Parce qu'à mon cabinet on a appelé au cabinet du député de Marquette. On a même offert à lui et à deux de ses collègues – d'ailleurs, il y a un ancien substitut qui fait même partie de l'opposition – on leur a offert notre collaboration pour que l'on puisse s'asseoir les trois ensemble et pouvoir en discuter, et ça nous a été refusé, M. le Président.

Alors, je vais vous dire, je trouve ça assez scandaleux qu'on arrive aujourd'hui puis qu'on essaie de vouloir faire de la suspicion alors que c'est très clair, ce que nous demandons tout simplement, c'est de pouvoir continuer à travailler comme nous l'avons fait. Il y a eu un jugement qui vient donner une interprétation qui pourrait amener des problèmes pour l'administration, pour la saine administration de la justice. Et ça, M. le Président, ça a été dit de l'autre côté. Et, s'il veut – malgré qu'il n'a pas voulu le faire à la session précédente – je suis encore prête, avec mon cabinet, à m'asseoir avec le député de Marquette et avec les deux, trois autres spécialistes de son côté, et ça va me faire plaisir. Il n'y a absolument rien à cacher, je suis très transparente. Je vous dis, la raison pour laquelle nous l'avons demandé, c'est tout simplement pour nous permettre de continuer à travailler correctement comme ça a été fait jusqu'à maintenant. Et je ne me décharge d'aucune de mes responsabilités.

Alors, j'invite encore une fois... Mais, pour moi, la collaboration, ce n'est pas juste de le dire avec des beaux mots, c'est aussi de le pratiquer quand on sort d'ici, M. le Président, puis j'invite le député de Marquette.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice.

M. Ouimet: Dois-je comprendre de la ministre de la Justice...

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous désirez vous prévaloir de l'article 223?

M. Ouimet: Oui, oui, pour faciliter l'avancement de nos travaux.

Le Vice-Président (M. Pinard): Madame, est-ce que vous accepteriez de recevoir une question?

Mme Goupil: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Dois-je comprendre, dans ce cas-là, que la ministre va nous donner accès à la partie qui est réservée pour le public, au niveau du Conseil des ministres? Je veux bien qu'elle comprenne là, on ne veut pas la partie qui est réservée pour ses collègues au Conseil des ministres, on veut juste la partie qui est normalement réservée et accessible au public. C'est la partie que nous lui demandons. Si elle me répond oui et qu'elle me transmet la documentation, c'est avec plaisir que je vais rencontrer ses officiers.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre de la Justice.

Mme Goupil: M. le Président, vous savez, je suis contente d'avoir eu la chance d'avoir le député de Marquette pour cette période de questions que nous avons connue depuis bientôt un an parce que ça nous permet de savoir un petit peu jusqu'à quel point il veut mêler toute la population pour essayer de mêler les pommes avec les carottes alors que c'est très clair.

Ce que j'ai mentionné au député de Marquette – je l'ai dit et je l'ai redit – nous allons continuer à travailler comme nos gouvernements l'ont toujours fait jusqu'à maintenant, et je vous invite, encore une fois, à venir vous-même avec vos deux autres collègues qui semblaient être intéressés pour qu'on puisse vous expliquer, en long et en large, ce que je viens de dire en cette Chambre. Il n'en tient qu'à vous de venir après, et on pourra répondre à toutes les questions concernant ce projet de loi là qui se veut un projet pour faciliter l'administration de la justice, purement et simplement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Justice. Alors, je regrette, M. le critique officiel de l'opposition, vous avez entendu tout comme moi la réponse de Mme la ministre de la Justice. À ce stade-ci...

M. Ouimet: Question de directive.

Le Vice-Président (M. Pinard): Question de directive. Alors, allons-y.

M. Ouimet: La ministre m'a permis de lui adresser une question sur le fond de l'affaire. C'est un projet de loi qui semble important. J'ai posé une question très précise, la ministre m'a donné une réponse. Je n'ai pas saisi qu'elle avait répondu oui à la demande que nous avons formulée. Je la répète là: La partie qui est accessible au public nous sera-t-elle accessible? Je veux juste savoir si c'est oui ou non.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, vous savez très bien que, lorsqu'il y a des questions qui sont posées, le règlement n'oblige pas à ce que le questionneur soit satisfait de la réponse.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Concernant l'article 1 de votre feuilleton, est-ce que le principe du projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général, est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des institutions

M. Brassard: M. le Président, je voudrais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des institutions pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je voudrais vous référer à l'article 29 du projet de loi.


Projet de loi n° 50


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 29 de votre feuilleton, nous en sommes à l'adoption du projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants. Ce projet de loi a été présenté par la ministre du Travail le 13 mai 1999. Le principe a été adopté le 25 mai 1999. Le rapport de la commission de l'économie et du travail a été adopté le 11 juin 1999. Y a-t-il des intervenants sur l'adoption du projet de loi n° 50?

(11 h 20)

Mme la ministre du Travail.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci. Alors, M. le Président, lors de l'adoption du principe du projet de loi modifiant la Loi sur les normes du travail concernant le travail des enfants, le 25 mai dernier, comme vous l'avez rappelé, et puis lors des travaux de la commission de l'économie et du travail, j'ai expliqué les motifs qui sous-entendent une telle législation. Aujourd'hui, je rappelle rapidement à quel point la loi n° 50 répond à un objectif important de notre gouvernement, celui de respecter les droits et responsabilités des enfants par rapport au travail, tout en leur accordant la protection à laquelle ils ont droit pour assurer leur bien-être et leur développement.

Le projet de loi n° 50 donne suite à des travaux importants de la commission de l'économie et du travail. Pour fins de mémoire, je rappelle que l'Assemblée nationale avait déjà adopté un projet de loi sur le travail de nuit des enfants de moins de 16 ans. Il s'agit du projet de loi n° 172, sanctionné en décembre 1997. Au moment de l'étude du projet de loi n° 172, la commission de l'économie et du travail s'était donné un mandat d'initiative pour examiner en profondeur toute la problématique du travail des enfants. La commission s'est réunie en mars 1998 pour procéder à des consultations particulières et à des audiences publiques.

Les représentants des associations patronales et syndicales étaient venus, à ce moment, nous faire part de leur opinion, mais aussi des représentants des parents et d'autres organismes qui s'intéressent aux enfants d'une manière ou d'une autre. Comme nous avons pu le constater pendant ces audiences, cette préoccupation à l'égard des enfants interpelle le sens des valeurs de tous les membres de la société.

En mai 1999, la commission s'est de nouveau réunie, cette fois pour étudier le projet de loi n° 50, qui allait au-delà des problématiques soulevées plus tôt et des opinions émises lors des audiences publiques. De façon générale, la loi n° 50 propose de mieux protéger les enfants qui travaillent. Une première mesure interdit donc à un employeur de faire effectuer par un enfant un travail disproportionné à ses capacités ou susceptible de porter atteinte à son éducation, à sa santé ou à son développement physique et moral.

Au-delà de ce principe et pour en assurer l'application effective, la loi n° 50 propose trois mesures. La première exige que l'employeur ait obtenu le consentement écrit d'un des parents ou du titulaire de l'autorité parentale avant de faire effectuer un travail par un enfant de moins de 14 ans.

La deuxième mesure s'inscrit résolument dans une perspective visant à favoriser la réussite scolaire. Ainsi, la loi interdit à un employeur de faire effectuer un travail par un enfant durant les heures de classe. Cette interdiction existait déjà dans la Loi sur l'instruction publique. Cependant, le transfert de cette disposition dans la Loi sur les normes du travail devrait la faire mieux connaître et plus efficacement appliquer. Compte tenu de l'importance de la réussite scolaire, cette mesure sera renforcée par l'obligation qu'aura désormais un employeur d'aménager les heures de travail de manière à ce que l'enfant puisse être à l'école durant les heures de classe.

Enfin, la troisième mesure interdit à un employeur de faire effectuer un travail de nuit par un enfant, sauf exception. L'employeur doit aménager les heures de travail de façon à ce que l'enfant puisse être, à la nuit, à la résidence familiale.

La loi n° 50 est donc le résultat d'une réflexion sérieuse, concertée et approfondie. On y reconnaît l'autonomie des enfants dans la mesure où elle ne compromet pas leur intégrité physique ou morale. On consacre également la responsabilité des employeurs mais aussi celle des parents à l'égard de leurs enfants.

Pour bien démontrer la volonté de notre gouvernement dans ce dossier, je tiens à souligner que la loi n° 50 prévoit la création d'une seconde vice-présidence à la Commission des normes du travail, qui est chargée, donc, d'appliquer cette loi. C'est un ajout important qui vise à assurer que la Commission puisse remplir adéquatement son rôle et satisfaire les exigences de qualité de service et de résultat auxquelles elle est tenue.

En terminant, je tiens à rappeler que la loi n° 50 s'inscrit dans un mouvement international initié par l'Organisation internationale du travail et l'ONU visant à encadrer et, dans certains cas, à rendre illégal le travail des enfants. Bien sûr, le Québec ne vit pas les mêmes problèmes face au travail des enfants que les pays en voie de développement. Mais il faut bien comprendre que toute charge de travail imposée à un enfant peut, si elle est exagérée, avoir des effets pernicieux sur son développement physique et moral à long terme. C'est pourquoi nous adoptons aujourd'hui le projet de loi n° 50, qui vient encadrer le travail des enfants, eux qui représentent notre plus grande richesse. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Bourget et également ministre du Travail. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en matière de travail, M. le député de LaFontaine. Alors, M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Dans ce cas-ci, ce ne sera pas un travail de critique mais un travail d'approbation. Car, en effet, le projet de loi n° 50 est un projet qui interpelle l'ensemble de notre société, car il s'agit de voir quel genre de société nous voulons faire pour les jeunes, en particulier pour nos enfants.

On sait, M. le Président, que le travail des enfants est un phénomène qui interpelle de plus en plus les gens et les gouvernants à travers le monde non seulement lorsqu'il s'agit de travaux rémunérateurs, comme on peut voir actuellement dans des entreprises, mais dans différentes autres circonstances. On sait qu'il y a des pays dans le monde où les enfants sont tout bonnement exploités et servent de main-d'oeuvre à très, très bon marché à des multinationales qui trouvent là le moyen d'avoir des productions à vil prix afin de pouvoir inonder les marchés de leurs produits.

Et, M. le Président, on sait que les Nations unies actuellement font des campagnes très importantes pour venir justement réglementer ou du moins faire de la prévention dans ce domaine-là. On voyait aussi dernièrement des rapports qui sont sortis et qui nous parlent non pas du travail, mais des enfants soldats. On sait que, dans certains pays du monde, et malheureusement force est de constater qu'on en retrouve dans les pays occidentaux, des pays du G 7, des enfants de 17 ans sont utilisés dans les armées pour aller à la guerre. Alors, M. le Président, ce sont là des réalités qui nous interpellent.

Nous, au Québec, nous n'avons pas cette problématique d'enfants soldats ou d'enfants exploités à vil prix dans des manufactures très importantes ou des usines appartenant à des multinationales. Nos lois du travail sont relativement faites étanches à ce niveau-là. Mais, quand même, nous nous devions d'apporter un certain nombre de changements et de précisions dans la loi afin de mieux encadrer cette problématique.

En passant, j'aimerais mentionner le travail qui avait été commencé par le prédécesseur de la ministre, le député de Matane, à l'époque ministre du Travail, qui est celui qui avait initié ce projet de loi. Nous en avions discuté lorsqu'il avait pris son mandat et que j'avais eu le mien à titre de critique de l'opposition à cette époque-là. Et je vois que la ministre actuelle a donné suite aux engagements du député de Matane, ministre du Travail à l'époque.

M. le Président, nous avons contribué, nous aussi, à ce projet de loi là en commission parlementaire. Certaines recommandations faites par l'opposition ont été retenues et se retrouvent maintenant à l'intérieur du projet de loi. Nous sommes donc à même de constater que c'est un projet qui reçoit l'assentiment assez général des parties concernées ou des gens qui ont eu à travailler sur ce dossier-là.

Certains pourront dire qu'on peut toujours aller plus loin. Certes, on peut toujours aller plus loin. Mais, M. le Président, il faut faire aussi attention, car, des fois, en allant plus loin, on crée des effets pervers. À titre d'exemple, une législation trop rigide fait en sorte que les gens trouvent des échappatoires et sortent, là, complètement du contrôle normal ou de la vigilance qu'on peut mettre sur eux. À titre d'exemple, si on interdisait complètement le travail aux enfants de 14 ans – et là, dans le projet de loi, ça prend l'autorisation et le consentement écrit des parents – l'interdire complètement nous exposerait à ce que ces enfants puissent, sans le dire, aller travailler au marché du travail au noir, par exemple, sans être déclarés. À ce moment-là, bien, nous encouragerions une économie parallèle. Nous encouragerions aussi ces enfants à sortir du cercle normalisé ou du cercle réglementé de notre société, et là ils pourraient être encore certainement plus sujets à certains abus.

(11 h 30)

Dans le projet de loi, on retrouve aussi – et c'était là une des propositions que nous avions faites – le travail des enfants au niveau des organismes – comment dirais-je? – bénévoles. On sait qu'un certain nombre d'organismes bénévoles ou pseudobénévoles utilisent des enfants pour faire certains travaux. On le sait, entre autres, ces compagnies qui vendent du chocolat utilisent des enfants puis disent: Voilà, vous vendez du chocolat pour une oeuvre quelconque et les profits iront, ou une partie des profits, à cette oeuvre, ou à cette école, ou à cet organisme. La compagnie, bien sûr, ramasse la plus grande partie des profits. Là aussi, il faudra qu'un organisme communautaire ou à but non lucratif qui veut faire faire ce genre de travail là par des enfants obtienne, de la part des parents des enfants concernés, une autorisation. Et je crois que c'est là certainement, M. le Président, quelque chose qui méritait la peine d'être rajouté au projet de loi parce que l'actualité des dernières années et particulièrement des derniers mois nous a montré que ces situations-là existaient dans différentes régions du Québec.

Alors, voilà, M. le Président, nous sommes donc satisfaits avec ce projet de loi. Ce n'est pas tout le temps le cas en ce qui concerne les projets de loi de Mme la ministre du Travail. L'avenir nous montrera qu'on a certainement des divergences de vues dans d'autres domaines. Mais, dans celui-là en particulier, je dois dire que, pour avoir initié cela avec le député de Matane et l'avoir continué avec la ministre actuelle, je ne peux que souscrire au projet et donner bien sûr l'accord de l'opposition officielle à son adoption.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le critique officiel de l'opposition en matière de travail et député de LaFontaine. Mme la ministre, est-ce que vous désirez vous prévaloir de l'article 256, qui vous permet un droit de réplique de 20 minutes? Mme la ministre du Travail.


Mme Diane Lemieux (réplique)

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, j'aimerais profiter de cette période pour introduire un amendement au projet de loi n° 50, amendement qui a été discuté avec l'opposition officielle. Nous nous sommes entendus sur la nature de cet amendement-là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'effectivement, M. le député de LaFontaine, il y a eu entente concernant les amendements?

M. Gobé: Oui, M. le Président, il y a eu entente. Nous l'amenons maintenant parce que, à cause des délais de session, on n'a pas pu l'amener avant. Alors, nous avons convenu de le faire à ce stade-ci. C'est un amendement technique, de toute façon, qui devait être apporté et que nous convenons d'apporter avec la ministre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons procéder aux écritures tout comme si nous étions en commission plénière?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Mme la ministre, si vous voulez compléter.


Amendements adoptés en commission plénière

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, rapidement, le sens de l'amendement... Et je remercie d'ailleurs la collaboration de l'opposition. Alors, très rapidement, ce qui est proposé, c'est que le projet de loi n° 50 modifie la Loi sur les normes du travail concernant l'ajout d'une vice-présidence à la Commission des normes du travail. Cette modification-là s'inscrit dans un besoin de réorganisation administrative qui découle de trois éléments.

D'abord, il y a une évolution très importante du mandat de la Commission des normes du travail. Et cette évolution-là doit tenir compte que les mandats qui sont dévolus à la Commission des normes du travail en matière d'inspection, de vérification, de médiation, de représentation de salariés victimes de congédiement et d'autres mandats aussi qui sont actuellement, présentement, à l'étude – notamment, je pense justement au travail des enfants, à l'introduction de normes dans le secteur de l'industrie du vêtement – font en sorte qu'il y a là des motifs qui nous disent que le mandat de la Commission des normes du travail prend beaucoup d'importance et qu'il y a lieu, administrativement parlant et dans les postes de haute fonction et de haut niveau, d'ajouter une personne.

Par ailleurs, il y a actuellement aussi toute une révision des processus opérationnels de la Commission des normes du travail qui vise à mieux intégrer l'ensemble de ces mandats-là. Et ça met en cause des grandes fonctions de services à la clientèle qui doivent s'intégrer dans un processus beaucoup plus continu.

Finalement, dans le but aussi de développer de manière encore plus accélérée et plus soutenue l'expertise de la Commission des normes du travail dans la surveillance, notamment, et dans son rôle d'inspection, cette personne aura aussi des fonctions importantes.

Alors, je pense que l'ajout de cette vice-présidence répond à des objectifs évidemment contenus dans le projet de loi n° 50 mais aussi dans le cadre d'une fonction publique axée sur les résultats. Et je rappelle que cette réorganisation n'entraîne aucun impact au plan budgétaire. Il y aura toutes sortes de rationalisations qui feront en sorte que l'intégration de cette nouvelle vice-présidence se fera dans le cadre budgétaire qui a été convenu avec le gouvernement. Voilà, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre du Travail. Je vous demanderais, à ce stade-ci, de bien vouloir déposer les amendements. Vous allez transmettre les amendements?

Alors, comme nous avons écouté la réplique de Mme la ministre du Travail, à ce stade-ci, est-ce que le projet de loi n° 50 et les amendements, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants, sont...

M. Brassard: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je pense qu'il faudrait peut-être, sur le plan réglementaire, procéder à l'adoption des amendements et convenir de procéder aux écritures avant d'adopter formellement le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Effectivement. Alors, comme nous en avons convenu, le critique officiel de l'opposition était d'accord, les amendements sont adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Les amendements sont adoptés. Alors, est-ce que le projet de loi n° 50, tel qu'amendé, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, M. le Président, je vous demande maintenant de suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons donc nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 36)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir un moment.

Très bien, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons aborder immédiatement les affaires courantes de notre séance.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

À l'étape de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous réfère d'abord à l'article c du feuilleton.


Projet de loi n° 74

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet de loi n° 74, Loi concernant le mandat des administrateurs de certains établissements publics de santé et de services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Ce projet de loi prolonge jusqu'au 30 novembre 2000 le mandat des membres du conseil d'administration de certains établissements publics qui, à la date de la sanction de la loi, n'auront pas été remplacés. Le projet de loi prévoit en conséquence que la procédure d'élection et de nomination prévue par la loi ne s'appliquera pas à l'égard de leurs postes.

Le projet de loi prévoit, par ailleurs, que le mandat des personnes élues ou nommées en octobre ou en novembre 1999 à ces conseils d'administration prendra fin le 30 novembre 2000.

Le projet de loi précise également que le mandat de ces personnes pourra être renouvelé pour une période se terminant au plus tard le 30 novembre 2001. Il indique aussi la façon de combler une vacance.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Maintenant, l'article f, M. le Président.


Projet de loi n° 73

Le Président: Alors, à l'article f de notre feuilleton, M. le ministre de l'Environnement présente le projet de loi n° 73, Loi visant la préservation des ressources en eau. M. le ministre.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi a pour but de préserver les ressources en eau du Québec en interdisant le transfert hors du Québec des eaux de surface ou souterraines prélevées au Québec.

Le projet de loi prévoit cependant des cas où cette interdiction ne sera pas applicable. Il énonce également dans quels cas le gouvernement sera habilité à lever cette interdiction, par exemple pour des motifs d'urgence ou humanitaires. Ce projet de loi prévoit enfin qu'il est d'application temporaire.


Mise aux voix

Le Président: Alors, l'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader de l'opposition, maintenant.

M. Paradis: Oui. M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article j de notre feuilleton.


Projet de loi n° 198

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, M. le député de D'Arcy-McGee présente le projet de loi n° 198, Loi proclamant le Jour commémoratif de l'Holocauste-Yom Hashoah au Québec. M. le député de D'Arcy-McGee.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: C'est un grand privilège de faire la présentation du projet de loi n° 198, Loi proclamant le Jour commémoratif de l'Holocauste-Yom Hashoah au Québec. Ce projet de loi a pour objet de proclamer, au Québec, le Jour commémoratif de l'Holocauste-Yom Hashoah tel qu'il est fixé chaque année selon le calendrier lunaire juif.

Bill 198, An Act to proclaim Holocaust-Yom Hashoah Memorial Day in Québec. The objective of this bill is to proclaim Holocaust-Yom Hashoah Memorial Day in Québec as determined each year by the Jewish Lunar Calendar.


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi. Très bien.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Rapport annuel du Centre régional de santé et de services sociaux de la Baie-James, et rapport sur la procédure d'examen des plaintes de la Régie régionale de la santé et services sociaux de Lanaudière

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1998-1999 suivants, soit celui du Centre régional de santé et de services sociaux de la Baie-James et celui de la Régie régionale de la santé et services sociaux de Lanaudière, sur l'examen des plaintes.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. J'invite maintenant le ministre des Transports et ministre responsable de la Faune et des Parcs.


Rapport annuel de la Fondation de la faune du Québec

M. Chevrette: Je dépose le rapport annuel 1998-1999 de la Fondation de la faune du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre de la Sécurité publique.


Rapport annuel du Bureau du coroner

M. Ménard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1998 du Bureau du coroner.

Le Président: Ce document est aussi déposé. Mme la ministre de la Justice et responsable de l'application des lois professionnelles.


Rapports annuels de l'Office des professions du Québec, de la Société québécoise d'information juridique et de certains ordres professionnels

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je dépose les rapports annuels 1998-1999 suivants: l'Office des professions du Québec, la Société québécoise d'information juridique, ainsi que les rapports annuels 1998-1999 des ordres professionnels suivants, soit les comptables agréés, les comptables généraux licenciés, les dentistes, les pharmaciens, les technologistes médicaux ainsi que les traducteurs et interprètes agréés.

Le Président: Alors, tous ces documents sont déposés. M. le ministre de la Solidarité sociale, maintenant.


Rapport annuel du Secrétariat à l'action communautaire autonome du Québec

M. Boisclair: Oui. M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998-1999 du Secrétariat à l'action communautaire autonome du Québec.

Le Président: Ce document est déposé. Et, finalement, M. le leader du gouvernement.


Réponse à une question inscrite au feuilleton

M. Brassard: Alors, M. le Président, je dépose la réponse à la question numéro 14 inscrite au feuilleton du 19 octobre dernier par le député de Nelligan.

Le Président: Très bien.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, j'invite le président de la commission de l'aménagement du territoire et député de Richmond.


Étude détaillée du projet de loi n° 55

M. Vallières: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 24 août 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.


Audition de la Commission de la capitale nationale du Québec et de la Commission municipale du Québec dans le cadre du mandat de surveillance des organismes publics

Qu'il me soit également permis, M. le Président, de déposer un second rapport, celui de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 13 octobre afin de procéder, en vertu de l'article 294 du règlement, à un mandat de surveillance d'organismes à l'égard de la Commission municipale du Québec. La commission a également tenu des séances de travail sur ce mandat les 11 juin et 13 octobre 1999.

Puis, finalement, un troisième rapport, M. le Président, de la même commission qui a siégé le 13 octobre afin de procéder, en vertu de l'article 294 du règlement, à un mandat de surveillance d'organismes à l'égard de la Commission de la capitale nationale du Québec. La commission a également tenu des séances de travail sur ce mandat les 11 juin et 13 octobre 1999.

Le Président: Alors, ces rapports de la commission de l'aménagement du territoire sont déposés.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition officielle.


Cesser les compressions budgétaires dans le domaine de l'éducation

M. Paradis: M. le Président, je sollicite le consentement pour déposer deux pétitions. La première se lit comme suit:

Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 276 pétitionnaires du comté de Brome-Missisquoi.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Whereas the 1999-2000 budget cuts to the Eastern Township School Board have resulted in a loss of 1.62 teachers at Knowlton Academy;

«Whereas the numbers are down from 19 teachers to 17.38 teachers for the upcoming academic year;

«Whereas the student population has not changed dramatically;

«Whereas this translates into much larger classes at all levels, particularly in Kindergarten [...];

«Whereas this situation has resulted in split level Grades 1/2, and 2/3 classes;

«Whereas this puts every pressure on teachers given that the Ministry of Education has mandated full integration of all special needs students and has not provided the support necessary to accommodate the needs of these children;

«Whereas it puts the regular students in these classrooms at risk when so much time is devoted to the integrated student;

«Whereas none of the students receive the attention they deserve.

«L'intervention réclamée se résume comme suit:

«Consequently we, the undersigned, demand that the National Assembly of Québec request that the Minister of Education of Québec put an immediate end to the ongoing cuts to education funding and the resulting diminishment in the quality of public education.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Il y a une deuxième pétition, M. le Président, adressée par 623 pétitionnaires du comté de Brome-Missisquoi.

«L'intervention réclamée se lit comme suit:

«We, the undersigned, can no longer accept the financial cutbacks in education which have a direct impact on the students of today, who are our future generation.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

(14 h 10)

Le Président: Alors, ces deux pétitions sont déposées. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: M. le Président, je sollicite le consentement pour déposer l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 26 pétitionnaires, les étudiants de Compétences 2000.

Le Président: Il y a consentement, M. le député.


Demander à Emploi-Québec de réviser les dossiers des étudiants du centre de formation Compétences 2000

M. Marsan: Merci.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant le non-respect de notre gestion de parcours suite à des coupures budgétaires;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons une révision de tous nos dossiers et dans l'éventualité de la non-révision de nos cas, nous nous verrons dans l'obligation de demander au gouvernement fédéral d'intervenir auprès du gouvernement provincial afin qu'une enquête soit mise en cours sur la gestion des fonds manquants qui nous empêchent de poursuivre notre gestion de parcours au niveau de nos études. Si nos demandes ne sont pas réévaluées dans un délai respectable, nous nous verrons contraints de consulter la justice dans un recours collectif.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Frontenac.

M. Boulianne: Merci, M. le Président. Alors, je demande le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement.


Résoudre le conflit avec les enseignants entraînant un boycott des activités parascolaires

M. Boulianne: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition présentée à l'Assemblée nationale par 1 750 pétitionnaires. Désignation: l'école polyvalente de Disraéli, l'école secondaire Albert-Carrier, l'école secondaire Joseph-Fecteau et la polyvalente de Black Lake.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que les élèves de ces écoles sont actuellement privés d'activités parascolaires;

«Attendu que ces activités sont importantes et font partie intégrante du profil scolaire des élèves;

«Attendu que le climat général de ces écoles est perturbé;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«En conséquence, les étudiants et les étudiantes de ces quatre institutions scolaires demandent au gouvernement du Québec de négocier une entente dans les plus brefs délais avec les enseignants du Québec afin qu'ils cessent leurs moyens de pression, que les activités parascolaires soient rétablies et que, par conséquent, ils ne soient plus les otages de ces moyens de pression.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: C'est bien. Alors, cette pétition est également déposée.


Questions et réponses orales

Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous abordons immédiatement la période de questions et de réponses orales. Alors, je cède la parole au chef de l'opposition officielle.


Dépassement du budget d'Emploi-Québec


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, c'est à partir du 1er avril 1998 que le gouvernement du Québec prenait possession de la juridiction de la main-d'oeuvre. Du 1er avril 1998 jusqu'au 30 novembre, c'est-à-dire le jour de l'élection, l'argent coulait à flots. Le ministère se serait fait dire d'aller de l'avant et de dépenser.

La ministre peut-elle nous confirmer aujourd'hui que ce n'est qu'après la réélection du gouvernement du Parti québécois, la réélection de son gouvernement, que la Commission des partenaires a été informée qu'il y avait un dépassement de budget de l'ordre de 80 000 000 $ et qu'il fallait, à partir de ce jour, couper?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'ai rencontré à plusieurs reprises, depuis que je suis en fonction, la Commission des partenaires. Alors, vous allez comprendre que je ne peux pas me souvenir de chaque sujet de discussion à chacune des réunions, parce que j'ai eu de nombreuses rencontres avec la Commission des partenaires. Et, à chaque fois que les ai rencontrés, il y a différents sujets qui ont été abordés. Alors, écoutez, oui, il y a eu un dépassement l'année passée – il n'y a pas de secret – de l'ordre de 80 000 000 $. Il y a plusieurs raisons qui l'expliquent, notamment le fait qu'Emploi-Québec ne disposait pas des outils de gestion pour permettre de suivre le budget au fur et à mesure. Ces situations-là sont corrigées, et j'en suis fort heureuse. Nous essayons maintenant de trouver le bon rythme de croisière. Et, je le rappelle, le 80 000 000 $, il a été utilisé pour desservir des personnes. Nous avons desservi un plus grand nombre de personnes que prévu.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, la ministre va sans doute comprendre que c'est difficile pour les victimes d'Emploi-Québec d'accepter sa réponse et sa version quand elle dit qu'il y avait 80 000 000 $ de plus de dépensés, donc plus de services ou de gens servis, alors que le bilan d'Emploi-Québec à ce jour, c'est des coupures au programme Coup de pouce, coupures au programme de soutien aux travailleurs autonomes, coupures aux organismes externes de développement de l'employabilité, coupures dans les inscriptions de cours dans les commissions scolaires et dans les cégeps, coupures au niveau des groupes d'alphabétisation, coupures dans le programme d'insertion sociale puis des coupures aux groupes communautaires.

Elle prétend aujourd'hui qu'ils ont dépensé 80 000 000 $ de plus puis qu'il y a plus de gens qui auraient reçu des services. Tous ces gens-là, résultat net, se sont fait couper. Et la ministre nous dit aujourd'hui qu'elle ne se rappelle pas de la réunion de la Commission des partenaires où ils auraient été informés qu'il y avait un dépassement de budget de 80 000 000 $, comme si c'était un fait anodin qui aurait peut-être été mentionné dans une réunion plutôt que l'autre, alors que je sais très bien, M. le Président, que c'est au mois de janvier, c'est après l'élection que la Commission des partenaires a été informée. Mais ce qu'il y a de plus gros dans la réponse de la ministre, c'est qu'elle dit que c'est un problème d'outil de gestion. Elle oublie de mentionner que son propre gouvernement a coupé, de 1995 à l'année 2000, les budgets pour les mesures actives pour la formation de la main-d'oeuvre. Son gouvernement a coupé les budgets de 50 %. Son gouvernement savait le 1er avril 1998 que l'argent n'était pas là. Et son gouvernement a exploité les rêves et les espoirs des plus démunis dans le seul but de se faire réélire. Et la ministre devrait avoir honte d'être associée à une opération comme celle-là.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je suis extrêmement fière d'être associée à un gouvernement qui a eu l'énergie, qui a eu la vision, qui a eu le courage de mettre en place des services publics d'emploi, alors qu'on sait que le rapatriement de la main-d'oeuvre au Québec est un dossier qui tient à coeur aux Québécois depuis fort longtemps. Et, à ce que je sache, l'opposition officielle, lorsqu'elle était au pouvoir, n'a rien fait pour qu'on puisse récupérer cette main-d'oeuvre. Et c'est le gouvernement du Parti québécois qui a réussi ce rapatriement.

Deuxièmement, je rappellerai, lorsqu'on parle de baisse des fonds du Québec, qu'il y a bien des raisons qui expliquent ça. Mais j'aimerais beaucoup que l'opposition soit aussi vigoureuse lorsque je fais des plaidoyers et que mon gouvernement fait des plaidoyers pour que le gouvernement fédéral injecte les 500 000 000 $ qui dorment actuellement en mesures actives dans l'assurance-emploi. Il y a 500 000 000 $ actuellement qui sont non utilisés, pour les provinces, pour pouvoir soutenir des mesures actives au marché du travail. J'ai fait ce plaidoyer récemment à une rencontre des ministres responsables de l'emploi. Il y a 500 000 000 $ qui dorment actuellement au fédéral. J'aimerais ça que l'opposition soit aussi vigoureuse pour nous aider à récupérer notre part.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: La ministre n'est pas gênée un petit peu de faire la leçon puis la morale aux autres après avoir démontré son incompétence dans le dossier d'Emploi-Québec, justement après avoir plaidé pendant des années pour le rapatriement de cette juridiction, avoir fait la démonstration d'autant d'incompétence qui vient gêner aujourd'hui le Québec? Mais, en plus de ça, elle en ajoute aujourd'hui en demandant au gouvernement fédéral d'ajouter plus d'argent, alors que le gouvernement fédéral a transféré son 550 000 000 $. Il a augmenté, lui, ses budgets de 70 000 000 $. Son gouvernement à elle a coupé ses budgets de 50 %, M. le Président.

(14 h 20)

Comment peut-elle, avec un peu de crédibilité, demander aux autres de mettre plus d'argent, alors que son propre gouvernement a coupé, son propre gouvernement a exploité les rêves des plus démunis, sachant qu'il avait coupé? Quand est-ce qu'elle va se lever debout puis qu'elle va admettre que son gouvernement a fait une erreur, qu'il a fait ça pour exploiter ces gens-là pour une élection, et qu'elle devrait avoir honte, puis qu'ils devraient corriger l'erreur immédiatement?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, j'espère que le chef de l'opposition réalise que le Québec en fait beaucoup, notamment, entre autres, parce qu'il y a des resserrements très importants dans les règles de l'assurance-emploi et que, nous, dans nos propres budgets en matière d'aide sociale, par exemple, nous recevons des gens qui, dans le fond, sont des chômeurs, mais, parce que l'assurance-emploi s'est rétrécie, eh bien, c'est nous, le Québec, qui absorbons les besoins de ces personnes. Là aussi, j'aimerais ça que l'opposition officielle soit aussi vigoureuse et qu'elle la pose, cette question-là du resserrement des critères d'accès à l'assurance-emploi, parce que c'est catastrophique. Il y a des hommes et des femmes qui devraient actuellement avoir accès à l'assurance-emploi qui n'y ont pas accès, et c'est les Québécois qui absorbent ces resserrements du fédéral.

Le Président: En question principale, M. le député de Robert-Baldwin.


Recentrage de la mission d'Emploi-Québec


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. La ministre de l'Emploi, qui refuse de voir les conséquences désastreuses de ses décisions, pourrait-elle écouter ses alliés échaudés? Et je cite, M. le Président: «Proches du gouvernement péquiste depuis le sommet économique de l'automne 1996, Françoise David et Nancy Neamtan désapprouvent profondément le virage d'Emploi-Québec vers des mesures à court terme, tel qu'annoncé par la ministre. L'orientation qu'on donne à Emploi-Québec, c'est la brisure d'un contrat moral. Québec laisse tomber les personnes assistées sociales.»

M. le Président, la population veut savoir si la ministre de l'Emploi va, oui ou non respecter, sa signature.

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, qui a dit qu'il y avait un changement de mission à Emploi-Québec? Qui a dit cela? Moi, je crois profondément à la mission d'Emploi-Québec. Je crois profondément à la mission d'Emploi-Québec. Il y a eu des débordements, et c'est parce que je crois à la mission d'Emploi-Québec qu'il y a cette opération de recentrage. Et, pour moi, il est très clair à mon esprit que tous les gens, tous les hommes et les femmes qui sont en recherche d'emploi, peu importent les barrières qu'ils ont à franchir pour obtenir un emploi, qu'ils soient des gens sur l'assurance-emploi, qu'ils soient des prestataires de la sécurité du revenu, font partie de la mission d'Emploi-Québec. Alors, qu'on cesse de dire qu'il y a un changement de mission. Au contraire, on est en train de se concentrer sur cette mission.

Le Président: Mme la députée Saint-Henri–Sainte-Anne, en principale ou en complémentaire?

Mme Loiselle: En principale, s'il vous plaît.

Le Président: Très bien.


Services d'Emploi-Québec aux prestataires de la sécurité du revenu


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Dans le beau gâchis d'Emploi-Québec et afin de rafraîchir la mémoire aux élus ministériels, et particulièrement à la ministre de l'Emploi, permettez-moi de vous lire les belles paroles, vides et creuses, du premier ministre du Québec lors de son discours inaugural au mois de mars de cette année. Le premier ministre du Québec disait ceci: «...tous les chercheurs d'emploi qui ont besoin de l'aide financière de l'État seront traités sur un même pied [...] sans étiquette, sans stigmates.» Le premier ministre disait également: «La formation constituera le principal outil stratégique d'Emploi-Québec.» Il disait également, notre premier ministre: Pour les plus démunis, c'est désormais «l'exclusion zéro». Et pour les organismes communautaires, il disait: «...les activités [...] communautaires seront également soutenues et encouragées.» Deux seuls mots, deux seuls mots sont vrais dans ce discours: le mot «exclusion» et le mot «zéro». Exclusion, parce que, c'est vrai, les plus démunis sont exclus d'Emploi-Québec; zéro, M. le Président, parce que c'est la note, la note pour l'incompétence de la ministre pour gérer Emploi-Québec.

Ma question à la ministre, qui soutenait hier, M. le Président, qu'elle était guidée par la loi de la rigueur... Je lui demande si elle trouve ça normal, acceptable et respectueux qu'un organisme communautaire en alphabétisation attende plus de 20 mois avant d'obtenir son aide financière. Je demande le dépôt de deux lettres: la lettre des prestataires de l'aide sociale...

Le Président: Écoutez, je voudrais simplement qu'on se comprenne. Vous demandez le dépôt, ça va, mais je ne voudrais pas que vous commenciez à les lire.

Mme Loiselle: ...

Le Président: D'accord. Alors...

Mme Loiselle: Le dépôt de deux lettres: du Collectif plein de bon sens, les prestataires de l'aide sociale qui attendent, et la lettre d'Emploi-Québec, qui est arrivée après une année et demie, au mois de juin, ça faisait un an et demi qu'ils attendaient. Puis, depuis ce temps-là, juin, on est rendu au mois d'octobre, et l'argent n'est pas toujours arrivé. Alors, si c'est ça, de la rigueur, chapeau, M. le Président!


Documents déposés

Le Président: Alors, il y a consentement pour le dépôt? Alors, les deux lettres sont déposées. M. le ministre de la Solidarité sociale.

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, lorsque je suis entré dans cette Assemblée nationale, j'ai entendu des discours, j'ai entendu de nombreux discours de députés de l'opposition qui appuyaient le rapatriement. Et, à l'époque, les propos du député de Laporte et de ses autres collègues qui l'ont suivi demandaient une chose: qu'on traite les assistés sociaux d'abord et avant tout comme des chômeurs et qu'on cesse de distinguer les services qu'on leur offre en fonction de la couleur des chèques qu'ils recevaient. C'est ce que nous avons fait avec Emploi-Québec.

Et, s'il y a quelque chose qui mérite d'être recentré, c'est la ligne d'attaque de l'opposition libérale. Parce que, M. le Président, lorsque le gouvernement du Québec parle de recentrage, ce n'est pas d'un recentrage de la mission d'Emploi-Québec, c'est un recentrage sur la mission d'Emploi-Québec. Et ce recentrage sur la mission, c'est la lutte au chômage et c'est la lutte à l'exclusion. Et soyons très, très, très clairs: il n'a jamais et il ne sera jamais question de mettre les assistés sociaux, y inclus ceux qui sont des assistés sociaux de longue date, sur une voie de garage. Emploi-Québec demeure le guichet unique, et nous continuerons, en priorité, à offrir des mesures à des gens qui sont à risque de chômage prolongé. Et ça inclut d'abord les femmes chefs de famille monoparentale, les jeunes, indistinctement de leur statut. C'est une grande victoire pour le Québec. Réjouissons-nous, M. le Président.

Le Président: Je voudrais rappeler à tout le monde les dispositions de l'article 32 concernant le décorum. Je pense que le texte est clair, et non seulement les députés doivent demeurer assis, mais surtout garder le silence. Et leur fair play fait en sorte que, d'un côté ou de l'autre, on a la parole en alternance et on respecte le droit de parole.

M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Je voudrais simplement, avec tout le respect que j'ai pour l'institution présidentielle, vous dire que l'expression «à tout le monde», dans vos propos, n'était pas justifiée.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, vous auriez pu ajouter qu'on dispose de microphones et qu'il n'y a pas de nécessité de crier – à l'intention du ministre qui vient de répondre.

Le Président: Non, c'est vrai, mais je crois qu'en l'occurrence je dois donner raison au leader du gouvernement en ce qui concerne sa remarque.

M. le député de Richmond.


Services de formation en agriculture offerts par Emploi-Québec


M. Yvon Vallières

M. Vallières: Oui, M. le Président. La ministre d'État à l'Emploi est en train d'abandonner plusieurs régions du Québec dont l'agriculture est souvent le moteur économique, tant au plan local que régional, et qui sont aux prises avec des besoins importants de formation visant à préparer des travailleurs, des travailleuses en agriculture.

Voyons ce que fait la ministre, M. le Président. Au Centre régional de formation en agriculture de Coaticook, il y a annulation du cours en production porcine suite aux décisions d'Emploi-Québec, alors que le taux de placement est de l'ordre de 100 %. À l'École d'agriculture de Nicolet, de nombreux abandons dans les programmes suite au retrait du financement par Emploi-Québec. Là encore, dans les production animales, le taux de placement est de l'ordre de 100 %. Au centre d'agriculture de la MRC d'Asbestos, il y a fermeture du Centre d'emploi agricole et forestier.

M. le Président, au Forum des décideurs, en mars dernier, j'ai vu, j'ai entendu également la ministre, le ministre de l'Agriculture, le premier ministre qui, à tour de rôle, manquaient de mots pour nous dire jusqu'à quel point la formation en agriculture était un élément important.

Comment, M. le Président, la ministre peut-elle maintenant expliquer qu'elle fait le contraire, qu'elle vient priver des dizaines et des dizaines de jeunes en région d'avoir accès à un emploi en agriculture, et en particulier quand le taux de placement au niveau des productions animales est de 100 % dans plusieurs écoles dans les régions du Québec?

(14 h 30)

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, il y a, au Québec et dans la structure d'Emploi-Québec, une procédure extrêmement intéressante depuis un certain nombre d'années qui s'appelle les comités sectoriels de main-d'oeuvre, et il y en a un dans le secteur agricole. C'est un comité très actif. J'ai eu l'occasion d'ailleurs d'en rencontrer plusieurs qui ont vraiment pour objet d'essayer de bien planifier les besoins de la main-d'oeuvre versus les besoins dans ce secteur d'activité. Alors, ces besoins-là sont identifiés à ce niveau-là.

Il est bien évident – et ça, je ne m'en cache pas – il n'y a pas de surprise là-dedans, c'est clair que, les derniers mois, on avait besoin de clarifier un certain nombre de choses et qu'il y a eu un ralentissement. Mais ce type de formation là est toujours pertinent. Je l'ai dit hier, vous devez vous en souvenir. Vous savez que, dans les prochains mois, nous allons introduire au moins 2 500 nouvelles personnes dans des activités de formation. Je vous le rappelle, si vous ne l'avez pas compris, c'est à peu près 2 000 personnes nouvelles que nous allons inscrire par mois. Alors, il y aura donc des gens qui vont être aussi dirigés dans ce type d'activités là. Mais sachez que nous avons ce qu'il faut, notamment parce que nous avons un instrument intéressant qui regroupe tous les acteurs de l'industrie. Nous avons ce qu'il faut, par ce comité sectoriel, pour bien planifier les besoins de la main-d'oeuvre.

Le Président: M. le député de Richmond.


M. Yvon Vallières

M. Vallières: M. le Président, est-ce que la ministre, qui nous parle de comités et de structures, de plans, peut nous indiquer comment elle concilie ses propos avec la vraie vie? Dans le quotidien, là, il y a des gens qui sont présentement privés d'un emploi. Il est démontré que, s'ils appliquent à la formation requise, ils se trouvent un emploi. Dans la vraie vie, le geste qu'a posé la ministre prive des dizaines et des dizaines de jeunes... Indépendamment du nombre de comités qu'elle met en place, ça ne donne pas d'emplois, sauf que les mesures précises qu'elle a retirées privent ces jeunes, dans les différentes régions du Québec, d'avoir accès à des emplois dans les productions animales. Pourquoi ne reverrait-elle pas les actions qu'elle s'est proposée de faire afin de permettre à ces jeunes d'avoir un accès valorisant dans leur milieu, en région, dans les différentes régions du Québec? C'est possible de le faire.

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, c'est très simple, oui, il y a eu un ralentissement. Bien oui, il y a eu un ralentissement, mais ces dizaines et dizaines de personnes feront probablement partie des 2 000 personnes qui vont avoir accès à des mesures de formation au cours des prochains mois.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata et, par la suite, M. le député de Bertrand.


Respect par Emploi-Québec des ententes en matière de formation


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Malgré la garantie de 40 000 000 $ annoncée le 19 août 1999 pour qu'Emploi-Québec respecte les ententes de formation signées, il semble qu'il s'agit d'une autre opération qui n'est pas respectée. En effet, M. Dany Dessurault, un résident de Trois-Rivières, s'est vu annoncer par Emploi-Québec le 21 septembre qu'il refusait de poursuivre son plan initial de formation de 24 mois, en disant finalement qu'on avait changé les règles du jeu. D'ailleurs, M. Dessurault ne s'est pas fait évacuer seulement d'Emploi-Québec, il s'est aussi fait mettre à la porte du bureau de comté de son député-ministre, le député de Trois-Rivières.

M. le Président, est-ce que la ministre de l'Emploi peut admettre que les ententes de formation, malgré cette annonce-là, ne sont pas respectées et que le fait de changer les règles du jeu en cours de route, finalement, met fin aux ambitions de milliers de Québécois et en font les victimes de ce que Le Devoir qualifiait, le 14 octobre dernier, «les victimes de l'opération délestage à Emploi-Québec»?

Le Président: Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, il y a, suite à l'opération de l'été, au cours du mois d'août, 4 200 personnes qui ont été remises en action. Celles qui ne l'ont pas été, c'est pour toutes sortes de motifs: des gens sont déménagés, ont changé d'avis, se sont trouvé un emploi, etc. Il y a 4 200 personnes qui ont été remises en action, et la plupart d'entre elles ont été remises en action dans une activité de formation.

Maintenant, le député fait appel à une situation individuelle. Je voudrais le mettre en garde. D'abord, je pourrais lui suggérer qu'il suggère aux commettants qu'il représente de s'adresser au Bureau des renseignements et plaintes du ministère, première chose. Eh bien, oui, nous devons dire aux citoyens où ils peuvent s'adresser. Deuxièmement, j'imagine que le député comprend qu'on ne peut pas débattre ici d'une situation personnelle, ce n'est pas le lieu. Et je ferai remarquer, M. le Président, à l'opposition officielle que l'opposition officielle est très sensible sur la manipulation des renseignements personnels. Alors, là, il tombe sur un terrain glissant.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire?

M. Béchard: En complémentaire.

Le Président: M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, est-ce que la ministre se rend compte que, finalement, la personne avait signé une entente, un contrat en bonne et due forme avec Emploi-Québec? Elle ne s'est pas trouvé un emploi, on lui a demandé de laisser son emploi pour suivre une formation, à laquelle on met fin après l'annonce du 40 000 000 $.

Alors, M. le Président, comment la ministre peut-elle être à l'aise de dire que les gens laissent Emploi-Québec parce qu'ils se sont trouvé un emploi, alors que c'est l'inverse? Emploi-Québec leur a demandé de laisser leur emploi pour suivre une formation, et, en cours de route, on les laisse tomber. C'est ça, la vraie situation. Il y en a même 6 700 qui ont signé une pétition qu'on a déposée ici mardi. Qu'est-ce qu'elle répond à ces plus que quelques centaines de personnes là?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, je réitère que le député fait appel ici à une situation personnelle, que tous les dossiers pour lesquels il y avait eu des engagements ont été examinés, ils l'ont été correctement, j'en ai vu plusieurs personnellement, que, suite à cette opération-là, il y a 4 200 personnes qui ont été remises en action, dont la plupart sont dans des activités de formation actuellement, et que, si le député veut débattre d'une situation personnelle, il n'est pas dans le bon endroit et il est sur un terrain glissant.

Le Président: M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Juste pour rassurer la ministre, sur le terrain glissant, là, je veux juste l'informer qu'elle doit se rendre compte...

Le Président: Non. Vous êtes en question complémentaire. Vous avez accepté de poser une question complémentaire, M. le député, je vous invite à le faire de façon réglementaire.

M. Béchard: M. le Président, puis-je signifier à la ministre que la personne dont il est question est prête à venir ici, à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, pour parler de son dossier, comme les milliers d'autres qui étaient en avant du parlement cette semaine et qui ont signé des pétitions sont prêts à venir? Ouvrez les portes du parlement et vous allez en avoir, des témoignages.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, à chaque fois que j'ai pu régler des situations, je l'ai fait. Je suis dans l'action. S'il y a des cas problématiques, les députés savent très bien le cheminement qui peut être pris pour ces personnes-là. Ils savent très bien qu'il y a des processus. Il y a des processus de révision dans tous les centres locaux d'emploi, il y a le Bureau des renseignements et plaintes au ministère et il y a aussi mon cabinet. Alors, je m'excuse, ce qui n'est pas réglé, c'est parce que des députés n'ont pas fait leur travail.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Bertrand.

M. Paradis: M. le Président...

Le Président: Question de règlement?

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Au printemps dernier...

(14 h 40)

M. Paradis: M. le Président, je pensais que vous étiez...

Le Président: Un instant, s'il vous plaît. Sur une question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle?

M. Paradis: Oui. Je pensais que vous étiez debout pour rappeler à l'ordre Mme la ministre qui vient d'attaquer l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale.

Le Président: Vous saviez bien que ce n'était pas une question de règlement. Vous êtes un habile parlementaire, M. le député de Brome-Missisquoi, mais ce n'est pas une question de règlement. C'est un commentaire que vous faites, habilement.

M. le député de Bertrand, s'il vous plaît.

M. Paradis: ...

Le Président: Non. M. le député de Bertrand. M. le député de Bertrand. Ce n'est pas une question de règlement, M. le leader, et vous le savez très bien.

M. Paradis: M. le Président...

Le Président: M. le député de Bertrand.

M. Paradis: M. le Président, question de règlement.

Le Président: Sur une question de règlement? Une véritable question de règlement?

M. Paradis: Oui, M. le Président.

Le Président: Très bien. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement faire la lecture du cinquième alinéa de l'article 35 de notre règlement, qui dit que le député qui a la parole ne peut «attaquer la conduite d'un autre député». Elle a attaqué la conduite de tous les autres députés de l'Assemblée nationale.

Le Président: C'est votre prétention. Ce n'est pas la façon dont j'ai compris l'intervention.

M. le député de Bertrand.

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Au printemps dernier, le ministre d'État à l'Économie et aux Finances présentait le premier budget équilibré depuis 40 ans. En plus de la très grande solidarité des Québécois et des Québécoises, un des motifs qui a permis d'atteindre cet objectif ambitieux reste la vigueur et l'importance de nos exportations pour notre économie. On apprenait d'ailleurs que le Québec...

Le Président: Est-ce que je pourrais inviter mes collègues de la gauche à permettre à un député ministériel de poser une question, avec le même fair play qu'on a permis à d'autres collègues de poser des questions? Je pense que n'importe qui ici, y compris un député ministériel d'arrière-ban, a le droit de poser une question et d'être correctement entendu. M. le député de Bertrand... M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, le chef de l'opposition, qui a promis avant le début de la session d'être positif, pourrait l'être justement en écoutant un député...

M. Paradis: Est-ce qu'on peut connaître quel article, de quel règlement, M. le Président? C'est une question de règlement, ça?

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Brassard: C'est une question de règlement parce que ça porte sur le comportement tout à fait indiscipliné et inacceptable du chef de l'opposition et de son équipe.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que vous considérez que ça constitue une question de règlement, suite à l'intervention que vous aviez faite?

Le Président: Je considère que le leader du gouvernement, manifestement, avec les explications qu'il vient de donner, intervenait sur l'article 32 du règlement, qui est une question de décorum. Et, avant qu'il intervienne, j'étais intervenu et j'avais rappelé... Bon.

Alors, M. le député de Bertrand.


Niveau des exportations québécoises


M. Claude Cousineau

M. Cousineau: Merci, M. le Président. Je vais reprendre mon préambule.

Au printemps dernier, le ministre d'État à l'Économie et aux Finances présentait le premier budget équilibré du Québec en 40 ans. En plus de la très grande solidarité des Québécois et des Québécoises, un des motifs qui a permis d'atteindre cet objectif ambitieux reste la vigueur et l'importance de nos exportations pour notre économie. On apprenait d'ailleurs que le Québec exportait déjà, l'an dernier, plus de 50 % de son PIB, ce qui est remarquable.

Ma question s'adresse au ministre d'État: Le ministre peut-il informer cette Chambre de l'état actuel de nos exportations et, s'il y a lieu, de toute modification à la hausse ou à la baisse de celles-ci?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, si je comptais sur l'opposition officielle pour me poser des questions économiques, j'aurais le destin ennuyeux d'un réparateur de Maytag.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Heureusement que, de ce côté-ci de la Chambre, nous nous préoccupons d'une chose aussi fondamentale pour nos concitoyens. Et je comprends, en un sens, pourquoi l'opposition officielle est obsédée par certaines difficultés de gestion et de départ que nous avons eues à Emploi-Québec, parce que ça ne pouvait pas leur arriver dans leur temps, il n'y avait pas d'emplois. Le taux de chômage était à 14 %, puis il ne s'était pas créé un emploi pendant quatre ans. Ils ne se rappelaient même plus du mot. Alors, là, ils sont obsédés maintenant qu'il y en a, de l'emploi. Et il y en a, comme l'a dit le député, grâce à une activité extrêmement vigoureuse de notre commerce extérieur et de nos exportations.

On voyait encore hier que les exportations canadiennes haussent très rapidement, dopées par l'industrie de l'automobile, hein. Tout le monde sait ça, c'est Ford, GM, Chrysler qui font la prospérité de l'Ontario. Mais, nous, sans l'automobile, en 1998, la croissance de nos exportations a été 8,8 %, et celle du Canada, avec l'automobile, 6,9 %.

Depuis le début de l'année, nos exportations augmentent de 6,5 %. Notre croissance économique globale en 1998, 2,9 %, est la meilleure des 10 dernières années. Et, depuis le début de l'année, la croissance économique du Québec, de 3,7 %, plus rapide qu'au Canada. C'est pour ça qu'on entend parler juste des difficultés d'Emploi-Québec et jamais des prodigieuses performances de notre économie.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.


M. Claude Cousineau

M. Cousineau: En complémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre peut nous dire quels sont les secteurs d'activité les plus présents dans nos exportations à l'extérieur?

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, quand on reste au pouvoir suffisamment longtemps, on peut recueillir des consolations assez réconfortantes. J'ai eu l'honneur de fonder le ministère québécois du Commerce extérieur et de publier à la même époque Le virage technologique . Et mon ami Gérald Tremblay, en dépit de la mauvaise gestion du gouvernement auquel il appartenait, a tenté de continuer ces politiques, et nous en avons les résultats aujourd'hui.

Quand, il y a 30 ans, j'enseignais l'économie à des jeunes Québécois et des jeunes Québécoises...

D'ailleurs, mes étudiants comprenaient très bien puis ils écoutaient. Ceux-là, ils n'écoutent pas puis ils ne comprennent rien.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Alors, dans ces temps reculés, nos exportations, les grandes vedettes, c'étaient habituellement... les grandes vedettes, c'étaient: lingots d'aluminium, pâtes et papiers, concentrés de cuivre, de fer, de zinc. Aujourd'hui, les grandes vedettes, qui témoignent de ce qu'est devenue notre économie nationale, c'est: technologies de l'information, aérospatiale, industrie pharmaceutique...

Une voix: ...fédéral.

M. Landry: Qui a dit «fédéral»?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Aïe!

Le Président: Bien. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: M. le Président, celui qui a dit «fédéral», il a révélé sa vraie nature. Et on a bien vu qu'il n'avait pas choisi le Québec, comme il l'a écrit. Celui qui a crié «fédéral», il vient de prouver que, quand on illustre une formidable réussite québécoise, il n'a tellement pas confiance au Québec qu'il crie «fédéral». C'est ça qu'il a fait.

Et en plus, M. le Président, la frustration extrême de l'opposition officielle devant les succès québécois n'est pas terminée, parce que nos grandes exportations, elles sont toutes dans des secteurs en croissance. Une faible proportion de l'espèce humaine a pris l'avion, une faible proportion de l'espèce humaine a utilisé du matériel sophistiqué de télécommunications, et, à cause du vieillissement de la population, nos industries de la santé et de... de la vie sont promises à un avenir exceptionnel. Alors, la frustration, en face, va monter de plus en plus et ils vont crier «fédéral» de plus en plus souvent, jusqu'au jour où ça ne sera plus une réalité, le fédéral.

(14 h 50)

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.


Bilan de la réforme de la santé et des services sociaux


M. Jean J. Charest

M. Charest: Je note l'intérêt qu'a le vice-premier ministre pour le secteur de la santé et son intérêt continu pour le vieillissement de la population.

Ma question est à la ministre de la Santé, qui, il y a sept mois – elle s'en rappelle peut-être – donnait une entrevue, entrevue où on annonçait un exclusif dans le Journal de Montréal , c'étaient les confidences de Pauline Marois: Santé: Ça va changer .

Eh bien! Nous voilà, M. le Président, sept mois plus tard. Ça a changé effectivement, ça s'est aggravé, la crise dans le domaine de la santé, depuis qu'elle est aux commandes. Et la ministre se rappellera que son gouvernement avait imposé une réforme de la santé basée sur le virage ambulatoire. Et les résultats, bien, ils sont connus. C'étaient des mises à la retraite de médecins, mises à la retraite de médecins spécialistes, mises à la retraite d'infirmières, puis, aujourd'hui, bien, on a des pénuries de médecins spécialistes, pénuries de médecins dans les régions, pénuries d'infirmières. Il y a une absence de soins de longue durée, il y a des crises dans ce domaine-là. Les urgences du Québec sont en crise permanente. Il y a des listes de soins qui se sont allongées, puis on envoie des patients se faire soigner aux États-Unis.

Il y a quelques semaines, la ministre de la Santé nous annonçait, M. le Président, que, depuis ce temps-là, elle a changé d'idée et que la pierre angulaire de la réforme, qui devait être le virage ambulatoire, eh bien, ça n'existe plus, que le gouvernement a changé d'idée.

M. le Président, la ministre, lors d'une entrevue qu'elle donnait justement au Nouvel Observateur , disait, et je cite: «Je connais la situation dont j'ai hérité.» Fin de la citation. Et elle disait: Il faudra de un à deux ans avant de rétablir la paix médicale.

Est-ce que la ministre peut nous dire aujourd'hui, peut-être informer son collègue qui nous annonce un avenir prometteur dans le domaine médical, quand va-t-elle mettre fin à ce virage ambulatoire, à cette espèce de simulacre de réforme, et quand vont-ils traiter les vrais problèmes de la santé et recommencer à zéro, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Nous n'avons pas à recommencer à zéro, parce que justement nous avons investi dans une réforme majeure des services sociaux et de santé au Québec. Mon collègue le député de Charlesbourg est maintenant ministre responsable de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Il a mis une énergie importante, tous ses talents, et nous avons réussi à procéder à cette réforme qui nous a permis d'offrir des services de meilleure qualité, au meilleur endroit, à l'ensemble de la population québécoise.

Cependant, nous l'avons fait sur une période courte à cause de l'incurie dans laquelle nous avions trouvé les finances publiques et à cause, bien sûr, du fédéral, qui avait réduit de façon considérable l'ensemble des transferts, et particulièrement dans le secteur de la santé. D'ailleurs, le chef de l'opposition se rappellera que lui-même reconnaissait que le travail se faisait au Québec et que, si Ottawa avait assumé ses responsabilités, nous aurions, nous, été capables et plus en mesure d'offrir et d'améliorer nos services de santé. Non seulement cette réforme n'est pas remise en question, elle se consolide, M. le Président.

Dans les faits, cependant, dans le cas des centres ambulatoires, nous évaluons la possibilité de faire en sorte que les espaces dans les hôpitaux, les équipements soient mieux utilisés, que les instruments diagnostiques soient rendus disponibles sur de plus longues périodes, nous évitant ainsi de faire à ce moment-ci certains investissements qui peuvent être reportés de quelques années.

Par ailleurs, il y a un certain nombre de centres ambulatoires – et je pense entre autres au CHARL, et je pense entre autres à celui du Lakeshore – qui sont actuellement en bonne voie, d'une part, soit d'opérationalisation ou soit éventuellement d'investissement. Cependant, M. le Président, malgré la situation difficile que nous vivons en santé – et c'est vrai – faut-il rappeler aussi au chef de l'opposition que l'Institut Fraser a constaté que le Québec avait, malgré tout, la meilleure performance sur l'ensemble des listes d'attente?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Ça doit être pour ça, M. le Président, que les médecins du Québec déménagent en Ontario! Mais je veux remercier la ministre, qui rappelle que, oui, quand c'était le temps de défendre les intérêts du Québec, j'ai toujours défendu les intérêts du Québec. Elle pourra renseigner son collègue à ce sujet-là, qui semblait vouloir dire le contraire il y a une minute.

Mais la ministre a de la difficulté à nous donner, je pense, des leçons de gestion avec un peu de crédibilité, alors que, quand elle était ministre de l'Éducation, elle coupait les postes en sciences infirmières; c'est elle-même qui coupe les postes. Eux-mêmes mettent à la retraite des médecins et des médecins spécialistes, entre autres. Et, son propre gouvernement ayant contribué à la pénurie, il paie maintenant pour envoyer des patients se faire traiter aux États-Unis. Avouons que c'est un petit peu difficile de donner des leçons aux autres dans ce temps-là.

Mais elle pourrait peut-être nous éclairer sur un sujet, entre autres. Est-elle d'accord avec le vice-premier ministre, qui disait que dépenser pour un hôpital, faire ça, évidemment, hélas, ça ne rapporte pas? Est-ce que ce n'est pas ça, le problème de son gouvernement?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: D'abord, M. le Président, sur la question de la pénurie dans certaines spécialités ou au niveau des soins infirmiers, j'aimerais peut-être rappeler aux membres de cette Assemblée que c'est autour des années 1996, 1997 que l'Ordre des infirmières, appuyé par une étude de la firme SECOR, qui est une firme assez sérieuse, on en convient, avait recommandé que nous réduisions d'une façon très importante l'entrée en sciences infirmières parce qu'on prévoyait un surplus significatif pour l'an 2000, et beaucoup plus élevé que le nombre d'infirmières que nous avons dû, dans les faits, remplacer pour mise à la retraite. Donc, en ce sens, avec les outils que nous avions, avec les informations que nous possédions, nous avons pris les décisions les plus pertinentes à ce moment-là.

Par ailleurs, vous savez qu'actuellement il y a un rehaussement significatif de l'entrée en sciences infirmières. Il y a aussi un rehaussement significatif de l'entrée en médecine, puisque nous avons augmenté de 65 le nombre de nouvelles places en médecine. Et, quant aux investissements dans le secteur de la santé, qu'il s'agisse d'investissements dans les hôpitaux, qu'il s'agisse d'investissements dans les équipements, je crois que nous devons évaluer pour choisir les meilleurs investissements en toute circonstance. Parfois, cela peut être un hôpital, parfois, cela peut être...

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Beauharnois-Huntingdon, dernière question, rapidement.


Situation de l'école Saint-Michel, dans le comté de Beauharnois-Huntingdon


M. André Chenail

M. Chenail: M. le Président, ma question pourrait s'adresser au ministre de l'Éducation, mais je vais adresser ma question à la ministre de la Santé, ancienne ministre de l'Éducation. Le 13 mai 1988, l'école Saint-Michel, l'agrandissement, 300 enfants qui dînent au sous-sol avec pas de toilette. Rien n'a changé depuis ce temps-là.

Compte tenu de ce qu'on apprenait dans les journaux dernièrement, des agrandissements pour des toilettes silencieuses de 400 000 $, je voudrais que la ministre me promette qu'elle va me transférer ses bruyantes à mon école, à Saint-Michel, pour régler mon problème. C'est ça, de la bonne gestion. Merci, M. le Président.

(15 heures)

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je savais, M. le Président, qu'à un moment ou l'autre, évidemment, on ne pourrait se priver de cette attitude démagogique sur la question de certains réaménagements au ministère de la Santé et des Services sociaux. Je pense que tous les membres de cette Assemblée vont être de bon compte pour accepter que, lorsqu'un nouveau ministre est nommé – il s'agit en l'occurrence du ministre délégué aux Services sociaux et à la Jeunesse – il a une équipe qui l'accompagne, et nous devons donc réaménager certains locaux. Nous le faisons et nous le faisons en étant très responsables quant à l'utilisation des fonds publics. Alors, il ne s'agit pas évidemment d'une toilette ou d'un élément de transformation mais du réaménagement de l'ensemble d'un étage. Ça va accommoder 25 personnes. Je ne sais pas si le chef de l'opposition, lui, dans ses réaménagements, accommodera autant de personnes. Il était nécessaire de les faire.

Quant à la question de l'école, évidemment, vous comprendrez que c'est le ministre de l'Éducation qui a la responsabilité de répondre à cette question.

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée.


Motions sans préavis

Nous allons immédiatement aux motions sans préavis. Mme la députée de Sauvé.


Souligner la Semaine des bibliothèques publiques

Mme Beauchamp: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que les membres de l'Assemblée nationale se joignent à moi afin de souligner la Semaine des bibliothèques publiques et rendre hommage à tous ceux et celles qui, partout au Québec, oeuvrent dans les bibliothèques publiques et contribuent à développer le goût et les habitudes de lecture chez les Québécoises et les Québécois.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion? M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui, avec un intervenant de chaque côté.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: À ce moment-ci, il y aurait moyen d'élargir, compte tenu que l'agenda de cet après-midi, qui nous a été communiqué par le bureau du leader, nous permet, dans le temps, deux intervenants de part et d'autre, à moins qu'il y en ait seulement un du côté ministériel.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Deux intervenants, d'accord.

Le Président: Eh bien, d'abord, Mme la députée de Sauvé.


Mme Line Beauchamp

Mme Beauchamp: M. le Président, il me fait plaisir de souligner la Semaine des bibliothèques publiques et de profiter de l'occasion pour mettre en lumière le rôle important que jouent les bibliothèques publiques dans nos vies et dans nos communautés. La bibliothèque publique est le symbole par excellence de la démocratisation de la culture. Entrer dans une bibliothèque, c'est accepter la découverte et l'ouverture sur le monde.

En tout premier lieu, permettez-moi de rendre hommage à ceux et celles à qui on doit souvent ces découvertes, ces coups de coeur, ces habitudes de trimballer un livre dans une salle d'attente ou d'en avoir un en permanence sur sa table de chevet: je pense bien sûr à ceux et celles qui travaillent dans les bibliothèques publiques, et qui...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît! Ceux qui ont à discuter, là, il y a des salons pour ça. Alors, Mme la députée, si vous voulez poursuivre, je vous écoute attentivement.

Mme Beauchamp: ... – merci, M. le Président – façonnent le goût et les habitudes de lecture des Québécois et Québécoises, et qui le feraient mieux encore s'ils étaient plus nombreux et s'ils en avaient vraiment le temps, car il faut rappeler la situation paradoxale qui sévit dans plusieurs bibliothèques publiques du Québec où des boîtes de livres neufs attendent depuis plusieurs mois qu'il y ait suffisamment de personnel pour les déballer, les classer et bien sûr pour enfin les offrir à la lecture.

Nous avons eu, au Québec, une politique du livre basée sur l'objet en tant que tel, mais nous avons raté une vraie politique de la lecture. Les intervenants du milieu vous diront qu'une véritable politique de la lecture passe avant tout par le soutien d'une main-d'oeuvre qualifiée qui peut offrir les livres et guider la lecture et les découvertes. La situation des bibliothécaires professionnels est à cet égard assez probante. Des études tendent à démontrer que la présence de bibliothécaires professionnels est un facteur déterminant dans la quantité de livres qui sortiront d'une tablette de bibliothèque, car le bibliothécaire établit une relation avec ses usagers, fait des suggestions, guide ses lecteurs, qui en viennent à emprunter plus de livres. Plus de livres sortis des tablettes signifie, M. le Président, plus de lecture au Québec. Ça m'apparaît normal. Pourtant, au Québec, le nombre de bibliothécaires professionnels ne cesse de diminuer dans les bibliothèques publiques et dans les bibliothèques scolaires aussi, il faut le souligner. Veut-on vraiment encourager la lecture au Québec? La question se pose.

Au Québec, la fréquentation des bibliothèques publiques accuse un retard par rapport aux autres provinces canadiennes. Rappelons que, dans la plupart des cas, les bibliothèques publiques sont sous la responsabilité du palier municipal. Certains pointeront du doigt la tarification des services comme un frein important à la fréquentation, mais il est difficile de blâmer les municipalités de tarifier l'accès aux bibliothèques publiques quand on sait que ces mêmes municipalités ont dû faire des tours de force pour équilibrer leur budget après avoir été forcées de verser au gouvernement plus de 1 000 000 000 $ dans la poursuite du déficit zéro. On peut, par contre, pointer du doigt une politique du livre qui dit favoriser l'accès gratuit aux bibliothèques publiques mais qui offre, pour ce faire, des incitatifs financiers si timides que les municipalités n'y trouvent pas leur compte et doivent choisir de maintenir la tarification. Ces mêmes municipalités attendent aussi avec impatience la levée du moratoire sur les équipements culturels imposé par ce gouvernement depuis 1996. Des municipalités, telles Châteauguay, Saint-Lazare, Saint-Anicet, sont prêtes à construire ou à agrandir de nouvelles bibliothèques publiques, mais elles ne réussissent pas obtenir l'engagement du gouvernement pour ce faire, malgré la promesse électorale du premier ministre de lever le moratoire sur les équipements culturels.

La levée du moratoire fait l'objet d'un consensus important au Québec, tant du côté des organismes culturels que du côté des municipalités. D'ailleurs, l'Union municipale du Québec a voté une résolution en ce sens lors de son dernier congrès, et bien sûr aussi du côté du Parti libéral. La ministre de la Culture nous invite à la patience; disons simplement que la Semaine des bibliothèques publiques nous apparaissait comme un moment très opportun pour annoncer la levée du moratoire, et que la ministre a créé, par son silence, beaucoup de déceptions.

La Semaine des bibliothèques publiques nous amène aussi à penser inévitablement au rôle que jouera la Grande Bibliothèque du Québec auprès des bibliothèques publiques en région. Après l'émission Le Point d'hier soir, on peut affirmer que les inquiétudes sont grandes, mais les attentes sont grandes aussi et il faudra obtenir très bientôt des réponses sur les actions que mènera à court terme et à moyen terme la Grande Bibliothèque du Québec pour jouer son rôle de locomotive auprès des bibliothèques publiques du Québec.

En terminant, j'aimerais souligner le travail fait par l'Association des bibliothèques publiques du Québec et par la Corporation professionnelle des bibliothécaires du Québec qui, avec des moyens trop souvent limités, réussissent un tour de force pour offrir à la population du Québec de la lecture. J'inviterais finalement la population du Québec à aller en famille faire un tour dans ses bibliothèques publiques. Ils pourront participer à une série d'activités, se faire raconter des histoires, rencontrer des auteurs et surtout faire la connaissance de ceux et celles qui travaillent dans nos bibliothèques publiques et qui ne demandent qu'à partager leur passion: les livres et la lecture. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Sauvé, de votre intervention. Alors, sur ce même sujet, je suis prêt à reconnaître Mme la ministre de la Culture et des Communications. Mme la ministre, la parole est à vous.


Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, je remercie la députée de Sauvé de cette motion. C'est effectivement la Semaine des bibliothèques publiques et c'est un moment important. C'est le moment de souligner bien sûr et de rendre hommage à l'immense travail qui se fait dans les bibliothèques, par les bibliothèques, bibliothécaires, mais aussi au merveilleux partenariat qui s'est instauré effectivement entre les municipalités et le gouvernement du Québec, particulièrement depuis que ce gouvernement, en 1998, a posé un geste fondamental, extrêmement important, qui est la balise de tout le travail qu'on fait aujourd'hui, c'est-à-dire la politique de la lecture et du livre.

Que sont devenues les bibliothèques, aujourd'hui, maintenant qu'on a cette politique? D'abord, des carrefours, des places publiques. Les gens ont besoin de lieux de rassemblement, surtout dans le pays où on est, M. le Président. Ne sommes-nous pas dans un pays parfois d'hiver, parfois d'automne, de climat un peu douteux? Alors, on a besoin de lieux de rassemblement, on a besoin de carrefours, on a besoin de places publiques. Les bibliothèques publiques, aujourd'hui, sont ces carrefours. On y trouve non seulement l'atmosphère feutrée, l'atmosphère calme des bibliothèques – les bibliothèques sont des puits de savoir, des puits de science, des puits d'information – mais ce sont aussi des lieux modernes, des lieux contemporains. Il y a des endroits pour les petits, il y a effectivement, la députée de Sauvé le soulignait bien, diverses animations, il y a aussi, maintenant – et ça, c'est grâce à la politique de la lecture et du livre et aux investissements qu'on a faits – des bibliothèques informatisées, il y a des bibliothèques en réseau à travers tout le Québec, il y a des grandes têtes de pont, dont l'une sera la Grande Bibliothèque du Québec, effectivement – merci de le souligner – il y a donc tout un immense travail de réseautage.

Savez-vous qu'aujourd'hui le Québec compte 163 bibliothèques publiques autonomes, 800 bibliothèques affiliées dans les réseaux du CRSBP, que nous avons 1 057 points de services sur le territoire et que 91,5 % du territoire du Québec est couvert par le réseau des bibliothèques? Les coins qui ne sont pas couverts, c'est genre la baie d'Ungava, quelques points de services. Dans les villes de plus de 5 000 habitants, il n'y a que 15 villes sur 203 qui n'ont pas encore de bibliothèque; dans les villes de moins de 1 000 habitants, il n'y en a que le tiers. Donc, il y a un immense travail qui s'est fait dans les dernières années. Et pourquoi ce travail s'est-il fait? Grâce aux investissements massifs qu'on a faits, M. le Président.

(15 h 10)

Dans les dernières années, nous avons investi, depuis la politique de la lecture et du livre, en à peine deux ans, 100 000 000 $ dans le monde du livre, dont 46 000 000 $ dans les bibliothèques publiques. C'est magnifique! Nous sommes en rattrapage, mais nous rattrapons à un rythme accéléré grâce à l'immense confiance qu'a le gouvernement du Québec au potentiel de développement, mais pas seulement de développement économique, de développement des citoyens et des citoyennes du Québec par la culture et par les bibliothèques, et les bibliothèques sont, pour l'accessibilité, pour la démocratisation de la culture, un des plus beaux instruments que nous ayons. La bibliothèque, c'est la voisine d'à côté, M. le Président. Vous savez, pour la nourriture, un peu de café, du sucre le matin, on va voir la voisine d'à côté et on lui emprunte. Eh bien, la bibliothèque, c'est la voisine d'à côté qui nous offre la nourriture spirituelle, et on a accès à ce puits immense, à ces merveilleux carrefours que sont les bibliothèques publiques.

Mme la députée de Sauvé a souligné à juste titre le rôle fort que devrait jouer la Grande Bibliothèque du Québec. Elle le jouera. Rappelons-nous ce qu'était la Grande Bibliothèque, quel est le besoin qu'on a eu de la Grande Bibliothèque du Québec: c'était que la Bibliothèque centrale de Montréal avait besoin d'agrandir ses locaux. Il y avait un sérieux problème à Montréal et il y avait aussi un besoin de mettre quelque part la collection de diffusion de la Bibliothèque nationale. Alors, ça va bientôt être réalisé, on va investir dans une grande bibliothèque et on va pouvoir desservir toute la grande région métropolitaine de Montréal, premièrement. Deuxièmement, effectivement, elle a raison de le souligner, la députée de Sauvé, ce sera une tête de pont, ce sera un phare, ce sera une tête de réseau pour tout le réseau des bibliothèques au Québec.

Donc, de grands travaux ont été faits, effectivement. Il en reste beaucoup, toutefois. J'avoue que, grâce à la politique de la lecture et du livre, grâce aux investissements – je répète, 100 000 000 $ sur deux ans, c'est magnifique – qui ont été faits à la Grande Bibliothèque qui s'en vient, on a fait un bon bout de chemin. Oui, il y a du rattrapage à faire, c'est vrai, et il y a beaucoup de petites municipalités qui ont besoin de voir arriver leur bibliothèque – ça viendra – mais il faut rappeler que nous avons, même en période de moratoire, investi quand même dans des immobilisations dans les bibliothèques. Voulez-vous que je vous cite quelques municipalités – que je salue en passant, ainsi que leurs bibliothécaires – qui ont eu droit à des projets financés en service de dette simplement en 1997-1998? Loretteville, Saint-Boniface-de-Shawinigan, Masson, Grand-Remous, Pontiac, Ragueneau, Saint-Côme, Crabtree, Mascouche, Saint-Jacques, Ferme-Neuve, Valleyfield. Voilà, nous avons continué malgré tout, malgré tout, M. le Président, et nous continuerons, et nous continuerons!

Une voix: Châteauguay!

Mme Maltais: Châteauguay viendra à son tour, comme les autres. Châteauguay a été retardée, et le député a raison. C'est un bon député, il se préoccupe de la bibliothèque municipale. Bravo, c'est un bon député, il m'interpelle souvent là-dessus. S'il n'y avait pas eu le moratoire imposé par la municipalité elle-même à l'époque, en 1992, Châteauguay serait probablement réalisée. Alors, Châteauguay est peut-être un peu à la traîne des autres, mais ça viendra, ne nous inquiétons pas.

Alors, oui, nous sommes en rattrapage, de formidables travaux ont été faits, et on continuera dans le même sens. Bravo, donc, à tous les employés, bravo à tous les gens, à tous les bibliothécaires qui travaillent actuellement dans les bibliothèques. J'appuie la motion de la députée de Sauvé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Sur le même sujet, je reconnais le whip en chef de l'opposition officielle et député de Châteauguay. M. le député, la parole est à vous.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. J'interviens avec plaisir et je remercie ma collègue d'avoir déposé cette motion. J'en profite pour saluer tous les intervenants du monde du livre, qu'ils soient administrateurs, bibliothécaires, usagers, et, si vous me permettez, je vais surtout en profiter pour saluer ceux qui le font avec des moyens fort limités.

Mme la ministre parlait tantôt de ceux qui attendent leur tour. Je dois juste la corriger un peu à l'égard de Châteauguay. Si elle remonte aux années quatre-vingt-dix auxquelles elle faisait référence, il est vrai que le gouvernement libéral de l'époque avait offert les sommes d'argent et que la ville, alors, n'était peut-être pas à ce point prête mais que maintenant, depuis très longtemps, la ville est prête, et le ministère se cache derrière 10 années pour refuser d'accepter la proposition de Châteauguay, alors que j'ai compris qu'il l'acceptait ailleurs. Je me demande d'ailleurs ce que veut dire ce mot, «moratoire», si tant est qu'il y ait un moratoire pour Châteauguay. Mais, pour d'autres villes, ça a l'air qu'il n'y en a pas. Alors, je ne suis pas sûr que je vois de la justice là-dedans.

Mais, ceci étant, j'interviens sur la motion pour saluer les gens qui travaillent, qui oeuvrent dans le domaine du livre, qui font un excellent boulot, et je me permets de rappeler à nouveau à Mme la ministre qu'il y a des promesses qui ont été faites, promesses par le premier ministre durant la campagne électorale. C'était le 1er novembre dernier, c'était à Sainte-Adèle, et on avait alors dit, le premier ministre en tête, que le moratoire serait levé. La ministre nous a dit qu'elle était d'accord avec nous pour que le moratoire soit levé, mais que c'était le premier ministre qui était contre la levée du moratoire.

M. le Président, elle nous a suggéré, en commission parlementaire, de lui fournir des appuis. Le Parti libéral du Québec, son aile parlementaire, à sa critique, lui a dès ce moment-là dit que, comme aile parlementaire, nous l'appuyions. Mais on est allés plus loin. Au Conseil général du Parti libéral du Québec, c'est le parti tout entier qui a donné cet appui pour la levée du moratoire. Je sais qu'au Conseil national du PQ on a préféré parler d'hymne national, mais chez nous on a proposé que la levée du moratoire se fasse.

J'insiste, ici, aujourd'hui pour rappeler à la ministre qu'il y a un consensus, et pas seulement celui du Parti libéral du Québec. Je vais lui citer quelques passages d'une lettre que lui ont fait parvenir les personnes suivantes: Josée Saint-Marseille, présidente de la Corporation des bibliothécaires professionnels du Québec; Denis Boisvert, président de l'Association des bibliothèques publiques du Québec; Gilles Deschâtelets, directeur de l'École de bibliothéconomie et des sciences de l'information de l'Université de Montréal; Hélène Dion, présidente du Regroupement des centres régionaux de services aux bibliothèques publiques; Marc Dion, président de l'Association professionnelle des techniciennes et techniciens en documentation du Québec; Yvon Joubert, président de l'Association du personnel des services documentaires scolaires. Ça fait pas mal de vos partenaires à qui vous refusez d'accepter les demandes qu'ils vous font.

Je lis deux passages – parce que, si je le fais pour le comté de Châteauguay, si je le fais pour des demandes qui viennent de mon comté, je ne suis pas sans savoir que ces demandes-là viennent aussi d'autres comtés, et je m'étonne que la ministre fasse encore la sourde oreille: «Pour plusieurs municipalités, le moratoire sur la construction et la rénovation d'équipements culturels constitue un obstacle à l'atteinte des objectifs visés par la politique de la lecture. Nous aurions espéré – ce sont vos partenaires, ce sont les partenaires de la ministre, M. le Président, qui le disent – à la suite de l'annonce que vous aviez faite lors de la dernière campagne électorale, soit le 1er novembre 1998 à Sainte-Agathe-des-Monts, que votre gouvernement aurait levé le moratoire dès cette année. Actuellement, en plus de maintenir le moratoire, il semble que votre gouvernement ait décidé de réduire le budget du ministère de la Culture et des Communications au chapitre de l'immobilisation pour les équipements culturels, et ce, d'environ 20 %. Nous espérons nous tromper dans notre évaluation lorsque nous constatons que votre gouvernement a décidé de freiner la mise en place de nouvelles bibliothèques publiques plus adéquates ou leur rénovation, et ce, dans l'intérêt des citoyens du Québec au moment où il investit massivement dans la Grande Bibliothèque du Québec.»

M. le Président, ce n'est pas le député de Châteauguay, ce n'est pas le Parti libéral du Québec, ce n'est pas la critique, c'est les partenaires de la ministre qui dénoncent le fait que nous soyons en train de pénaliser toutes les régions du Québec. Et, lorsqu'il y a un lien qui est fait ici, dans cette lettre, avec la Grande Bibliothèque, j'entends la ministre qui se lève tantôt et qui rappelle que la mission de cette Grande Bibliothèque, c'est d'être un phare pour le réseau. Mais je m'aperçois que, pour la ministre, ce phare est aveuglant et qu'elle ne voit plus le réseau. Je veux bien que la Grande Bibliothèque soit un phare, mais encore faut-il que tout le monde puisse bénéficier de ce phare, qu'il y ait des réseaux.

J'écoutais encore Le Point d'hier, M. le Président. On ne peut pas dire que ça va très bien, Mme la ministre. J'espère que vous allez poser des questions à la P.D.G. de la Grande Bibliothèque, parce que, en ce moment, toutes les promesses qui étaient faites dans le réseautage ne semblent pas tenues, et tout ce qu'il y a de bibliothécaires qui entourent une institution qui s'appelle une bibliothèque est en train de dénoncer la façon dont ça avance.

Alors, Mme la ministre, je vous dis que, en cette Semaine des bibliothèques publiques où on invite les gens à aller à leur bibliothèque de quartier, à leur bibliothèque de ville... Elle dit: Une bibliothèque, c'est comme la voisine qui nous offre le café. Dans des bibliothèques comme celle de Châteauguay, M. le Président, il n'y a pas de place pour mettre du café dans les armoires. Le problème, c'est le suivant: on a bien beau faire des politiques pour acheter des livres, les livres s'en vont dans les boîtes et les boîtes dans des entrepôts. Pensez-vous que c'est comme ça qu'on va inviter les citoyens à la bibliothèque du coin? C'est ça, le problème. Je sais que la ministre me fait non de la tête. Elle connaît le projet d'au moins une bibliothèque, celle de Châteauguay. Elle sait que c'est ça, le problème. Elle sait que la difficulté est la suivante: les villes ont été incitées par la politique de lecture à investir dans l'achat de livres. Où sont-ils? Savez-vous où ils sont, les livres? Ils sont dans des entrepôts. Alors, si, aujourd'hui, cette semaine, on invite les gens à les visiter, les bibliothèques, à aller voir ces carrefours...

Je sais que Gabrielle-Roy, c'est une belle bibliothèque, j'y suis allé. Il y en a, des belles bibliothèques, je le sais, mais nous payons tous des taxes et on devrait tous avoir accès à des services. J'entends la ministre qui me dit que, même s'il y a un moratoire, certaines villes ont eu le bénéfice d'avoir des services. Dans mon comté, nous avons été préjudiciés parce que vous maintenez ce moratoire, parce que vous refusez de voir qu'il y a là un problème, et nous ne sommes pas la seule localité où il y a un problème. Chez nous, je ne peux pas voir ça, je ne peux pas comprendre que la ministre fasse des grands élans comme si tout allait bien, alors qu'en cette Semaine, si on voulait vraiment séduire...

(15 h 20)

Parce qu'il y avait cet article que je voyais, cette semaine, où on disait: Les bibliothèques publiques veulent vous séduire pour amener les gens dans ces carrefours, pour qu'ils puissent voir tous les services qui sont offerts. Bien, dans une localité comme la mienne, Mme la ministre, eh bien, les services ne sont pas au rendez-vous au même niveau qu'ils devraient l'être, et j'en appelle à un esprit de justice de votre part pour comprendre que nous devrions tous avoir droit à des services équivalents.

Je comprends que Gabrielle-Roy, ce soit bien, il est possible que la Grande Bibliothèque, si on finit par comprendre les mandats de la Bibliothèque nationale et de la Bibliothèque centrale et qu'on réussit à offrir des services, puisse être utile pour les Montréalais; mais ce que je sais, c'est que nous sommes tous, au Québec, peu importe la région qu'on occupe, des payeurs de taxes et que nous avons tous le droit de participer à cette démocratisation de la culture. Ça ne devrait pas être limité à certaines régions ou à certaines élites, sinon ce ne serait pas la démocratisation de la culture. Alors, j'en appelle à votre bon sens.

Vous aviez demandé à l'opposition de vous fournir des appuis; je pense que vous les avez maintenant tous. Il ne reste qu'un seul espoir, en cette Semaine des bibliothèques publiques, c'est que, d'ici le prochain exercice financier, d'ici le prochain budget, vous puissiez, forte de cet appui, convaincre le premier ministre, qui est en ce moment le seul qui s'érige devant le consensus, que ce moratoire doit être levé pour que, dans des localités comme la mienne, nous puissions aussi bénéficier des services qui sont offerts et faire en sorte que les livres actuellement dans des boîtes et dans des entrepôts reprennent le chemin de l'endroit qu'ils doivent occuper, la bibliothèque de notre ville. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Châteauguay, de votre intervention. Une dernière intervention sur ce même sujet. Je cède la parole à M. le leader adjoint du gouvernement et député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. M. le député, la parole est à vous.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Je vais, oui, inévitablement féliciter la députée de Sauvé d'avoir eu l'heureuse initiative de proposer une telle motion. Quant à la remercier pour ses propos, eh bien, c'est un pas que je ne franchirai pas, un pas que je ne franchirai pas également pour les propos du député de Châteauguay.

Il est de toute évidence que les deux députés de l'opposition qui viennent d'intervenir sur le sujet manquent de culture politique. Ils ont tendance à oublier des années fort tristes. Lorsque je suis arrivé à cette Assemblée nationale, pour la première fois, le gouvernement du Québec coupait dans le budget du ministère des Affaires culturelles – telle était son appellation, à l'époque. C'était un gouvernement libéral, la ministre était Lise Bacon et les coupures s'étaient portées massivement vers le réseau des bibliothèques. Ah! ah! voilà! Et puis n'est-ce pas ce gouvernement, à l'époque – et belle contribution pour les bibliothèques, M. le Président, vous allez l'apprécier avec moi – qui allait, si ce n'eût été de la vigilance du milieu et d'un appui inconditionnel du porte-parole de l'opposition, c'est-à-dire votre humble serviteur, imposer une taxe de vente sur le livre? Taxer le livre, c'est imposer l'ignorance. Mais, grâce à la bataille que nous avons pu faire, eh bien, nous avons fait reculer le très lettré ministre des Finances de l'époque, Gérard D. Levesque.

Mais, M. le Président, la taxe fédérale existe encore sur le livre. Le fédéral comprend bien, et notamment dans le cas du livre francophone, qu'il faut imposer l'ignorance parce qu'un peuple qui lit trop est un peuple dangereux. Quand entendons-nous ces braves gens d'en face dénoncer le gouvernement fédéral qui maintient une taxe qui est dénoncée de partout? Dans la majorité des pays du monde – je pourrais vous ressortir les documents – le livre a un taux de taxation zéro. Zéro! On en est même rendu à taxer les journaux dans ce pays, vous imaginez? Enfin, bon.

Ceci dit, je ne peux pas franchir le pas d'approuver les propos qu'ils ont tenus parce qu'il y avait forcément un manque de culture politique – culture politique dans le sens de mémoire – et Dieu seul sait que, quand on ne sait pas d'où on vient, on ne sait pas où on va. C'est patent dans le cas de l'opposition libérale actuelle, d'ailleurs. Elle ne sait pas d'où elle vient, donc elle ne sait pas où elle va.

Elle devrait peut-être aussi se rappeler que, s'il y a eu une première politique du livre au Québec, elle est due à l'ancien député de Trois-Rivières, ministre de la Culture à l'époque, que j'ai eu le plaisir de rencontrer il y a quelques jours et qui continue d'être très présent dans le domaine de l'édition, Denis Vaugeois. Il faut aussi se rappeler, M. le Président, que la toute première politique de la lecture et du livre a été déposée par une ministre de la Culture issue d'un gouvernement du Parti québécois, la prédécesseure de ma collègue et amie l'actuelle ministre députée de Chambly, Mme Beaudoin, et que poursuit d'ailleurs avec un enthousiasme incroyable l'actuelle ministre de la Culture, députée de Taschereau. On semble oublier cela. Et puis, dans ce domaine comme dans d'autres, il y a des attentes. Je peux comprendre la frustration du député de Châteauguay qui attend pour sa bibliothèque, mais, dans ce domaine comme tant d'autres, nous sommes encore condamnés à réparer vos erreurs. Voilà. Je ne dis pas qu'à votre époque il n'y a pas certaines bonnes choses qui ont été faites à la Culture – une politique culturelle par mon amie l'ancienne députée de Marguerite-Bourgeoys, Liza Frulla – mais, même encore là, l'appui le plus massif qu'elle avait lui venait toujours de l'opposition, jamais de son propre parti. C'était patent, c'était évident.

Et, quand j'entends la députée de Sauvé qui dit qu'il y a des livres qui sont dans des caisses, ce n'est peut-être pas la solution la plus idéale, j'en conviens, mais ça signifie que, nous, on en achète, des livres, comme gouvernement, alors que, eux, ils n'en achetaient pas. Je vous l'ai rappelée, M. le Président, cette période triste où on coupait dans le budget de la Culture sous le régime libéral et où on coupait notamment au niveau des bibliothèques et de l'achat de livres. Alors, nous, on en a acheté, des livres, durant les deux dernières années parce qu'on a un vice-premier ministre, ministre d'État à l'Économie et aux Finances, que la chose préoccupe et qui a bien vu dans le budget qu'il a déposé à y mettre les provisions nécessaires afin d'être capable d'aller acheter des livres. Eh bien, au niveau des bibliothèques scolaires – c'est important, les bibliothèques scolaires – en deux ans, nous en aurons acheté pour 15 000 000 $. Ça, ça bat tous les records des 10 années du régime libéral précédent. Et puis, dans le cas des bibliothèques publiques, eh bien, en deux ans, nous en aurons acheté pour plus de 23 000 000 $.

Nos bibliothèques ont été, grâce à l'action de toutes celles et de celui... Parce que, il y a un certain temps, le ministre de la Culture a été masculin. Il est à prédominance féminine, et je ne m'en plains pas. Eh bien, grâce à la persévérance de celui et de celles qui ont assumé, dans un gouvernement du Parti québécois, la responsabilité de ministre de la Culture, et autant ma collègue de Taschereau, ministre de la Culture et des Communications, autant dans le cas du vice-premier ministre, ministre d'État à l'Économie et aux Finances, que de la députation ministérielle, nous pouvons vous assurer que nous allons continuer.

(15 h 30)

Le livre ne sera jamais remplacé par ces moyens de technologie moderne dont un de nos collègues fait usage actuellement, et j'en fais, moi aussi, largement usage. Mais jamais on ne remplacera le support papier, cette espèce de sensation charnelle de toucher un livre, de sentir un livre, de sentir l'odeur. Ceux qui entrent dans cet édifice par la porte de la Bibliothèque, est-ce que vous sentez cette odeur des livres qui vous provient de la Bibliothèque? Moi, c'est un plaisir que j'ai tous les jours en arrivant à l'Assemblée nationale, puisque j'entre par la porte de la Bibliothèque. Il y a cette bouffée, il y a cette senteur de papier, de cuir, cette senteur de beaux livres. C'est une richesse.

Alors, oui, je vais féliciter la députée d'avoir présenté cela, en souhaitant qu'elle fasse la bataille avec nous pour que... sur les 23 000 000 de livres que nous avons dû acheter pour les bibliothèques publiques, on a dû donner 1 600 000 $ au «federal». C'est la TPS. 1 600 000 $! C'est 1 600 000 $ dont la ministre de la Culture aurait pu profiter pour s'occuper de votre bibliothèque. Rendez-vous donc compte que vos ennemis sont à Ottawa. Rendez-vous en compte.

Alors, 1 500 000 $ de taxe fédérale sur l'achat des livres pour les bibliothèques publiques vous privent d'une bibliothèque dans votre municipalité. Regardez Ottawa cette fois-ci, mais changez vos lunettes. Ne mettez pas des lunettes d'éloignement, mettez des lunettes de rapproche, la laideur vous apparaîtra plus évidente. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion présentée par Mme la députée de Sauvé, motion pour souligner la Semaine des bibliothèques publiques, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


Souligner les Journées québécoises de la solidarité internationale

M. Boulerice: M. le Président, je présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la troisième édition des Journées québécoises de la solidarité internationale, célébrées du 21 au 31 octobre 1999, et qu'elle réaffirme son engagement profond à promouvoir l'établissement de rapports égalitaires entre les femmes et les hommes de notre planète.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a consentement, si je comprends bien, avec une intervention de chaque côté. Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, c'est votre motion.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui. M. le Président, en cette fin de siècle – je sais que le mot est galvaudé, mais c'est la réalité – notre monde est soumis à de profondes mutations sociales. Est-il besoin de rappeler combien la compassion est devenue une condition essentielle à la bonne marche de l'ensemble de nos sociétés modernes et que toutes nos forces vives sont conviées à un rendez-vous essentiel, celui de la solidarité?

En soulignant dans cette enceinte le lancement de la troisième édition des Journées québécoises de la solidarité internationale, le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois veut assumer son rôle de leader à l'égard des enjeux de la solidarité internationale et apporter sa contribution à l'établissement de nouveaux rapports plus égalitaires entre les habitants de cette planète.

Les Journées québécoises de la solidarité internationale, organisées par l'Association québécoise des organismes de coopération internationale, constituent une occasion unique de mobilisation de l'ensemble de la population québécoise face à ces enjeux importants.

M. le Président, en cette année marquée par une mobilisation extraordinaire de toutes les femmes de la planète en vue de la marche mondiale des femmes qui aura lieu en octobre de l'an 2000, il était tout à fait naturel que les organismes québécois de coopération internationale veuillent amener les Québécoises et les Québécois à se familiariser avec l'action de celles qui, bien souvent, sont à l'origine des initiatives les plus prometteuses pour assurer à tous et à toutes des conditions de vie décentes dans nos sociétés.

Les Journées québécoises de la solidarité internationale, sous le thème Est-ce ainsi que les femmes vivent face à la violence, à la pauvreté? , seront donc le lieu où la population de toutes les régions du Québec sera appelée à réfléchir sur différents aspects du problème complexe que constituent les relations égalitaires entre hommes et femmes.

Est-il besoin de préciser que, dans leur action quotidienne dans le secteur de l'aide au développement international, tous les gouvernements et tous les organismes de coopération internationale sont confrontés à cet épineux problème?

En soutenant l'Association québécoise des organismes de coopération internationale dans la réalisation des Journées québécoises de la solidarité internationale, le ministère des Relations internationales et le gouvernement du Québec veulent une nouvelle fois manifester de façon tangible leur intérêt à l'égard de la solidarité internationale, concrétisé d'ailleurs il y a trois ans par la création du Secrétariat à l'aide internationale, un secrétariat établi à l'initiative de l'ancien ministre des Relations internationales et député de Richelieu, M. Sylvain Simard, que je salue, d'ailleurs.

Les Journées québécoises de la solidarité internationale s'amorcent donc demain. Si l'on se fie à la ténacité et au dévouement peu communs déployés par tous ceux et celles qui ont accepté de s'engager dans cette magnifique entreprise qui vise le progrès et l'amitié entre les peuples et le respect entre toutes les femmes et tous les hommes de notre planète, elles seront, ces Journées, M. le Président, un succès.

Je dis donc: Longue vie aux Journées québécoises de la solidarité internationale, mes félicitations à nos ministres successifs des Relations internationales, dont notamment le député de Richelieu qui a beaucoup fait dans ce sens. Et je dis: Longue vie à ces Journées québécoises de la solidarité internationale! Et je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. La prochaine intervenante, Mme la députée de La Pinière et porte-parole de l'opposition officielle en matière du dossier de l'autoroute de l'information et des services gouvernementaux. Mme la députée de La Pinière, la parole est à vous.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, au nom de l'opposition officielle, je voudrais joindre ma voix à celle du gouvernement du Québec pour souligner la troisième édition des Journées de la solidarité internationale qui seront célébrées du 21 au 23 octobre prochains.

Je suis également très fière, M. le Président, d'être associée à un parti qui, tant dans l'opposition qu'au gouvernement, a toujours supporté l'action internationale, un parti qui, lors du dernier gouvernement libéral, M. le Président, avait adopté la première politique internationale intitulée Le Québec, le monde pour exemple .

Mes premiers mots, M. le Président, à ce moment précis où on célèbre les Journées internationales de la solidarité, c'est d'abord pour féliciter les organismes non gouvernementaux – et ils sont très nombreux – qui oeuvrent depuis plusieurs années et de façon constante au bien-être de la population, et particulièrement dans les pays du Sud, et plus spécifiquement avec les groupes de femmes. Par leur engagement dans la coopération internationale, le développement démocratique, le respect des droits humains, l'amélioration de la condition féminine et la consolidation de la paix dans le monde, ils contribuent à rehausser l'image du Québec et du Canada au plan international.

Depuis le forum des femmes qui s'est tenu à Beijing, la mondialisation de la solidarité a enregistré une grande avancée. L'année prochaine, du 8 mars au 17 octobre se tiendront des événements majeurs, notamment la Marche mondiale des femmes de l'an 2000 qui donnera lieu à des rassemblements et à des manifestations de solidarité partout dans le monde. Dans cet esprit, l'an 2000 est un moment privilégié pour rappeler et faire valoir la cause de l'égalité des femmes dans le monde. Comme parlementaires, nous sommes donc appelés à nous approprier ce débat et à soutenir les projets concrets mis de l'avant par nos organismes non gouvernementaux, particulièrement ceux qui ont une incidence directe sur l'amélioration de la qualité de vie des femmes.

Il ne se passe pas, M. le Président, un mois sans que je sois invitée à prendre la parole ou à participer à des activités de solidarité internationale. À titre d'exemple, le 29 août dernier, j'ai participé au forum sur les droits de la personne organisé par un ensemble d'organismes communautaires en marge du Sommet de la francophonie de Moncton. Dans mon propre comté, j'ai eu l'occasion, pas plus tard que la semaine dernière, de soutenir financièrement et participer à un événement organisé par Développement et Paix en faveur des populations déshéritées au Pérou. Le 26 septembre dernier, j'ai participé à un événement organisé à Montréal en faveur de la Fondation Lambi d'Haïti qui oeuvre auprès des femmes et des groupes communautaires et qui les aide à prendre en main, à concevoir et à réaliser leur propre développement.

(15 h 40)

Voici des exemples concrets, M. le Président, qui nous indiquent que durant toute l'année il y a des événements, il y a des manifestations de solidarité. J'ai eu l'occasion de rencontrer des groupes de femmes qui oeuvrent dans une multitude de projets en Afrique, en Amérique latine et en Asie. À chaque fois, je suis impressionnée par l'importance de ces projets en termes d'amélioration de la qualité de vie des populations défavorisées. À chaque fois, je constate que de plus en plus de Québécoises et de Québécois de toutes origines, de tous les âges et de différentes conditions sociales s'impliquent de plus en plus dans les activités de solidarité internationale. Ce faisant, ils s'enrichissent au contact des autres cultures et développent une conscience planétaire qui les rend sensibles aux enjeux de la mondialisation et des rapports Nord-Sud.

M. le Président, à l'occasion des Journées de la solidarité internationale, je voudrais féliciter et remercier tous les bénévoles, tous les organismes communautaires qui oeuvrent à rapprocher chaque jour les communautés entre elles, les solidarités au niveau international. Et félicitations, M. le Président, d'avance à la troisième édition de ces Journées. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière, de votre intervention. Est-ce que la motion présentée par M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Nous sommes toujours aux motions sans préavis. Mme la députée de Mégantic-Compton et présidente de la commission de l'éducation.

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Québec la tenue d'une consultation publique élargie pour entendre les chômeurs, les personnes assistées sociales, les chercheurs d'emploi, les groupes communautaires et les entrepreneurs des différentes régions du Québec sur la gestion et l'administration d'Emploi-Québec.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Est-ce que j'ai bien compris, M. le Président, que le gouvernement ne voulait pas entendre ceux et celles qui ont été largués par la réforme d'Emploi...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader, on m'a fait signe qu'il n'y avait pas de consentement.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous sommes maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Oui, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des finances publiques poursuivra les consultations générales sur la réduction de l'impôt des particuliers le mardi 26 octobre 1999, de 9 heures à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif.

J'avise aussi cette Assemblée que la commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations générales sur le document intitulé Réforme du transport par taxi – Pour des services de taxi de meilleure qualité le mardi 26 octobre 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, vos avis sont déposés.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Je vous rappelle qu'un débat de fin de séance sera tenu aujourd'hui sur une question adressée hier par Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne à Mme la ministre du Travail concernant le gâchis d'Emploi-Québec et ses conséquences sur les plus démunis.

J'avise que l'interpellation prévue pour le vendredi 29 octobre 1999 portera sur le sujet suivant: L'inaction du gouvernement péquiste quant aux personnes handicapées. M. le député de Nelligan s'adressera alors à Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Juste pour qu'on se comprenne bien. Je n'ai pas tout à fait la même compréhension pour un débat de fin de séance. Je comprends que le débat qui devait se faire entre Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne et ma collègue députée de Bourget est reporté à mardi et que, après cette période de questions, il y avait un débat de fin de séance entre le député de Kamouraska-Témiscouata et la députée de Bourget.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, il y a consentement pour que le débat de fin de séance entre Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne et Mme la ministre du Travail soit reporté à mardi prochain, à 18 heures? Et je vais revenir avec ça. Il y a consentement?

M. Paradis: Oui. Et ce débat s'ajoutera aux débats normalement prévus à notre règlement, s'il y a lieu.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Aux débats, c'est-à-dire qu'il pourrait y avoir quatre débats de fin de séance. Consentement?

M. Boisclair: ...que le débat d'aujourd'hui se fera immédiatement après qu'on aura terminé les discussions sur l'adoption du projet de loi n° 56.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a un consentement? Je vais annoncer le débat de fin de séance d'aujourd'hui. Alors, la présidence a reçu dans les délais requis la demande du député de Kamouraska-Témiscouata demandant un débat de fin de séance à la ministre de l'Emploi sur le gâchis d'Emploi-Québec et ses conséquences sur les plus démunis.

Alors, il y a donc débat de fin de séance. Est-ce qu'il y a consentement pour que ce débat ait lieu avant la période des affaires courantes, si nous en sommes rendus à ce moment-là? C'est ça que vous vouliez me demander, M. le député?

M. Boisclair: Je comprends que le débat entre le député de Kamouraska-Témiscouata et la députée de Bourget se fera lorsque nous aurons terminé les débats sur l'adoption du projet de loi n° 56, donc possiblement avant 18 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Il y a consentement pour que le débat de fin de séance ait lieu avant 18 heures, si les affaires du jour se terminent avant? Alors, il y a consentement.


Affaires du jour

Alors, nous en sommes maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Article 30, M. le président, du feuilleton de ce jour, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, article 30. M. le ministre des Finances propose l'adoption du principe du projet n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adoption du projet de loi, je m'excuse. Je vais recommencer. Quand ça fait un certain temps qu'on n'a pas siégé, des fois on lit trop vite.


Projet de loi n° 56


Adoption

Alors, M. le ministre des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre d'État à l'Économie et aux Finances et vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, en effet, il s'agit du projet de loi créant la zone de commerce international de Mirabel, ce qui me permet de revenir sur un événement de la période de questions qui doit faire réfléchir les Québécois et les Québécoises et les députés dans cette Chambre.

Quand j'ai énuméré, en réponse à une question d'un député, les succès du Québec, j'ai mentionné l'aérospatiale. Le chef de l'opposition lui-même, au vu et su de tout le monde de cette Chambre, a crié «fédéral». Je lui ai dit pendant qu'il était là, puis je le redis puis je vais le dire d'une façon un peu plus élaborée, qu'il a montré sa vraie nature politique. Il a écrit un livre pour dire: J'ai choisi le Québec. C'est drôle, moi, je n'ai pas eu à en écrire. Ça va de soi. Et, quand on énumère un prodigieux succès industriel québécois, celui de l'aéronautique, quand on souligne que le Québec à lui seul est la cinquième puissance aérospatiale du monde, le chef du Parti libéral du Québec et chef de l'opposition officielle crie «fédéral». Ça dénote sa vraie nature, où sont ses sentiments d'admiration, où est son estime pour les travailleurs et les travailleuses du Québec. Ça dénote aussi une ignorance profonde de l'histoire de l'industrie aérospatiale et de son développement contemporain.

Je voudrais rappeler au chef de l'opposition officielle que la Chaire Armand-Bombardier, elle est à l'École polytechnique, un des fleurons de notre industrie nationale et de notre éducation nationale, que l'Institut d'aérotechnique du Québec, c'est une institution québécoise qui fait partie de notre réseau d'éducation, que les 40 000 travailleurs et travailleuses de l'aérospatiale – dont trois de mes neveux, soit dit en passant, et j'en suis très fier – sont des Québécois et des Québécoises. Et, sans risque de me tromper, j'affirme que, en raison du vote massif des travailleurs et des travailleuses du Québec à chaque référendum pour la cause du Québec, ils sont profondément insultés que le fruit de leur labeur, de leur travail et de leur génie soit attribué par le chef de l'opposition officielle et chef du Parti libéral au gouvernement fédéral.

(15 h 50)

C'est ne pas connaître non plus l'histoire de Bombardier. Joseph-Armand Bombardier, fondateur de Bombardier, a été en butte avec le gouvernement fédéral d'une façon inimaginable. C'est rapporté dans les ouvrages relatant sa vie. Et Joseph-Armand Bombardier, lui qui n'était pas un ingrat... Et je suggère au chef de l'opposition officielle de lire le testament de Joseph-Armand Bombardier. Joseph-Armand Bombardier dit dans son testament: Il ne faut pas oublier que tous ces succès que nous avons – parce que déjà, au moment où il a rédigé ce document, le succès se dessinait – nous les devons à notre entourage, les travailleurs et les travailleuses de Valcourt.» Alors, ceux qui, devant le succès Bombardier et le succès aérospatial... parce que Bombardier a 11 000 emplois dans l'aérospatiale, mais on en a 40 000 au Québec. Alors, il y a aussi Héroux là-dedans, puis il y a Messier–Dowty, puis il y a Sextant, une compagnie française qui vient de s'implanter, puis il y a Pratt & Whitney, puis il y a tous les autres. Ce n'est vraiment pas rassurant pour la population du Québec de savoir que l'un de ses dirigeants, le chef de l'opposition, devant un de nos fleurons nationaux les plus indiscutables, ne peut qu'avoir une attitude de soumission et de flagornerie à l'égard du gouvernement central.

Parce que, déjà, parler d'un gouvernement fédéral avec leurs agissements des dernières années, c'est déjà un peu abusif. C'est un gouvernement central et centralisateur, surtout si on en parle dans l'optique du commerce extérieur. S'il y a eu une grande tragédie économique dans le fonctionnement du fédéralisme canadien, c'est bien celle du commerce extérieur.

En effet, le Canada a été fondé économiquement sur une idée rétrograde, sur l'idée de faire économiquement l'Amérique britannique du Nord. D'ailleurs, la Constitution du Canada, ça s'appelle comme ça: British North America Act, qui consistait à faire un grand axe économique de Londres à Halifax, à Montréal, à Toronto, à Winnipeg, éventuellement à Vancouver un peu plus tard. Comment réaliser cette Amérique britannique du Nord? Par un procédé artificiel et rétrograde qui consistait à mettre un mur douanier entre cette Amérique britannique du Nord et la formidable aventure économique qui se dessinait au sud et qui fut ultimement celle des États-Unis d'Amérique.

Pensez, M. le Président, à l'absurdité de la fondation d'un pays contre les lois les plus naturelles de l'économie et du commerce Nord-Sud. Ça s'appelait de «The National Policy». Le héros de cette «National Policy» s'appelait John A. Macdonald. Et d'ailleurs, un grand Québécois, né à Saint-Lin dans les Laurentides, qui a été premier ministre du Canada, qui s'appelait Wilfrid Laurier, a voulu mettre fin à cette aberration en préconisant la réciprocité, donc le libre-échange, en 1911. Et Laurier a été défait. Et on a eu cette politique rétrograde jusqu'en 1989, quand on a signé le traité de libre-échange avec les États-Unis. Durant toute cette période de temps, de la fin du siècle dernier jusqu'à 1989, une politique nationaliste canadienne protectionniste et absurde. Alors que le traité de Rome avait été signé en Europe en 1957 et que la voie était claire, que c'est la libre circulation des biens, des services, des capitaux et des personnes qui allait faire la prospérité des peuples, le gouvernement d'Ottawa, et singulièrement celui qui est aujourd'hui le premier ministre du Canada, s'est opposé au traité de libre-échange, on s'en souvient, et a fait au Québec un tort incalculable.

En effet, on avait un commerce Nord-Sud déjà florissant avec les États-Unis en 1865. Depuis, d'ailleurs, 1855, on avait le libre-échange. La frontière était ouverte. Ça veut dire qu'un produit fabriqué à Trois-Rivières, disons, pouvait être embarqué à bord d'un bateau qui se rendait jusqu'à Sorel, prenait le canal Richelieu, le lac Champlain, la rivière Hudson et arrivait dans le formidable marché de New York, qui était déjà un marché populeux et en grande expansion. Le canal Richelieu, là, ça n'a pas été bâti pour permettre aux classes moyennes d'aujourd'hui d'amener leur bateau au lac Champlain. Ça a été fait pour le commerce.

Or, imaginez-vous l'horreur de la situation. John A. Macdonald et la naissance du Canada économique mettent un mur douanier qui nous bloque de notre commerce nord-sud et qui nous force à aller vendre dans des places où il n'y avait même pas de monde, c'est-à-dire à Winnipeg, voire à Toronto. Parce que Toronto, c'est beau, c'est gros, Toronto, mais, à côté de Big Apple puis à côté de la grande métropolis de Boston, de Philadelphie, de Washington et de New York, en tout respect, économiquement, ce n'était pas grand-chose.

Savez-vous quelle tragédie ça a déclenché, ça, M. le Président? C'est peut-être arrivé même dans votre famille: un Québécois sur trois a pris le chemin de l'exil. En effet, bloquer notre marché naturel, c'était à coup sûr sécréter ici la pauvreté. Alors, les Québécois, ils ont voté avec leur pied, ils ont quitté le British North America country and land, puis ils sont allés vers la grande république du Sud tout simplement pour gagner leur vie. S'il n'y avait pas eu cette politique canadienne absurde, au lieu que les manufactures soient à Woonsocket puis à Lowell et Dieu sait où en Nouvelle-Angleterre, elles auraient été dans les villes québécoises, et on aurait vendu nos produits plutôt que de déplacer notre population.

J'espère que le chef de l'opposition officielle, qui a eu son cri du coeur fédéral, va relire un peu l'histoire économique du Canada. Il est allé à Harvard, paraît-il, quelques semaines, là. Ça va lui faire du bien. Sauf que ce n'est pas un progrès pour le Parti libéral. Parce que l'ancien chef du Parti libéral, il avait un M.B.A. de Harvard, lui, puis ça paraissait dans ses questions aussi, puis il connaissait l'économie. Je ne pense pas que deux, trois semaines à Boston ou dans la région, même si c'est une ville très intellectuelle, puissent rescaper quelqu'un qui dénote une ignorance aussi profonde de l'histoire et de l'économie du Québec.

Alors, pour réparer ces erreurs du passé, nous allons... et nous avons mis en place une série d'institutions québécoises, je l'ai dit à la période de questions: le ministère du Commerce extérieur en particulier, un réseau commercial québécois qu'avec nos faibles moyens nous avons déployé à travers le monde. Et nous allons rajouter un instrument qui est, en passant, pour réparer un gâchis fédéral. J'ai entendu quelqu'un – puis ça dit bien, ça aussi, quelle est la mentalité des gens d'en face: Si vous avez des problèmes avec Emploi-Québec, vous ne pouvez pas être indépendants. Bien, si tous les pays qui ont des problèmes administratifs ne pouvaient pas être indépendants, l'immeuble des Nations unies se viderait en moins de deux semaines, je vous le garantis, puis le premier pays qui sortirait, puis qui sortirait vite, c'est le Canada. Ça fait 15 ans qu'ils vont d'un gâchis à l'autre avec leur armée.

Il y a un avion qui a été appelé d'urgence, il n'y a pas longtemps, sur un terrain d'opération, il a été obligé de revenir quatre fois à la base avant de commencer son voyage. Ça a été une série de cafouillages à déshonorer même les plus valeureux des généraux, dont ce n'était pas toujours la faute. Puis même les simples soldats, ce n'était pas drôle pour eux autres non plus. Ça marche comme c'est mené, ces affaires-là.

Alors, un autre gâchis, là, c'est celui de Mirabel. Ça a été plus d'un quart de siècle de mauvaise gestion. Ils ont commencé par exproprier puis mettre 10 000 personnes dehors. Mon ami Elliot Feldman, qui était un spécialiste de Harvard – précisément un vrai, lui, qui avait un Ph.D. de Harvard, pas un gars qui est allé là deux semaines l'été – il a écrit un livre où il a comparé le gâchis de Mirabel, en termes de déplacement de population, à l'exode. Ils ont foutu le monde dehors; ils ont exproprié 90 000 acres alors qu'ils en avaient besoin de 5 000, ou à peu près. Puis là, normalement, après tous ces sacrifices, ces déplacements de population dans le comté précisément de notre ami d'en face, qui est de ceux qui daignent nous écouter aujourd'hui... Ils ont déplacé des gens, ils ont fait faire des sacrifices énormes, il y a eu les associations d'expropriés de Mirabel – j'ai eu l'honneur, comme jeune avocat, d'aller les seconder – puis, quand tout ça a été fini, au lieu d'en faire un prodigieux instrument de développement économique, ils ont laissé Dorval ouvert, puis ils ont laissé végéter ça. Si la négligence administrative était assez pour quitter les Nations unies, le Canada aurait été éjecté après les cinq premières années des tentatives de Mirabel.

Alors, là, on va essayer de réparer. Et puis on va créer, suivant les suggestions du comité Tardif, présidé par un de nos anciens collègues qui a fait un travail admirable et qui nous a battu la voie pour sortir de l'impasse de Mirabel, cette zone spéciale de commerce international de Mirabel. Et, dans la foulée des travaux de cette commission, la commission Tardif, on s'est engagé dès 1998, à l'été, dans un processus qui menait, le 9 mars dernier, dans le budget, à l'annonce de la Zone de commerce international de Mirabel.

(16 heures)

La stratégie gouvernementale mise de l'avant au budget s'appuie sur de puissants incitatifs fiscaux. On imite un peu ce qui s'est fait dans un certain nombre d'autres pays dans des situations analogues – à Shannon, en Irlande, en particulier, un cas qu'on a beaucoup étudié, la république irlandaise, petite république indépendante, mais de plus en plus dynamique, de plus en plus prospère – pour d'abord donner des congés fiscaux aux entreprises, impôt sur le revenu, taxe sur le capital et contribution au Fonds des services de santé, crédit d'impôt remboursable pour les salaires versés à des employés admissibles, crédit d'impôt remboursable pour l'acquisition de matériel admissible, aide à la construction de bâtiments, assistance aux entreprises pour les aider à opérer dans une zone franche, exemption d'impôt sur le revenu pour les employés étrangers spécialisés qui vont venir travailler dans cette Zone.

Évidemment, ce projet va être ciblé, ce n'est pas ouvert à toutes sortes d'activités. On ne pourra pas faire un entrepôt d'agroalimentaire destiné au marché local dans la Zone en profitant des avantages de la Zone. Ça va s'adresser à la logistique internationale, qui comprend, en particulier, les centres de distribution continentaux.

Vous avez entendu parler, M. le Président, du commerce électronique, comme tout le monde – ça traîne dans tous les journaux. Mais, derrière le commerce électronique, il y a un commerce matériel, c'est-à-dire qu'il faut livrer les biens qu'on aurait commandés par l'Internet. Alors, dans une stratégie de logistique internationale, Mirabel pourrait être un aéroport qui reçoit les gros porteurs avec leurs cargaisons, refractionne ces cargaisons pour les diverses villes où les commandes ont été passées et, par des moyens courriers, redistribuer. C'est un exemple. Cette activité-là sera encouragée.

L'entretien et la réparation des avions également. Il y a des transporteurs aériens qui n'ont pas les moyens, parce que pas assez gros ou parce qu'ils considèrent que ce n'est pas leur «core business», comme ils disent, ou que ce n'est pas payant, de réparer leurs avions eux-mêmes. Alors, il y aura dans cette Zone des ateliers d'entretien spécialisés qui pourront réparer des avions et les entretenir, qui seront venus du bout du monde. Donc, c'est des activités qui ne se seraient pas faites ici et qu'on appelle l'«offshore», là, dans le langage, c'est-à-dire que ce n'était pas chez nous, ça vient chez nous. Alors, il n'y a aucun coût pour nous à les encourager. On leur donne des déductions d'impôts, mais, s'ils n'étaient pas ici, ils ne paieraient pas d'impôts, il ne se passerait rien du tout.

Également, la formation complémentaire pour le personnel navigant ainsi que pour le personnel aéroportuaire. Des balises précises ont été prévues pour encadrer étroitement le processus d'approbation des projets de façon à s'assurer que la mise en valeur des installations de Mirabel ne se traduise pas par des déplacements d'activités déjà réalisées ailleurs. On ne voudrait pas que quelqu'un qui est dans le parc industriel de Saint-Laurent se désimplante de Saint-Laurent pour aller s'installer à Mirabel. On ne veut pas de désimplantation, alors chaque cas va être scruté au mérite. Il faut que ça soit vraiment du «offshore» et il ne faut pas que ça prive quelque autre région du Québec d'un investissement auquel il aurait pu normalement s'attendre.

La Société de développement de la Zone – nous créons une société de développement pour la gérer – contribuera à l'atteinte de cet objectif. En effet, de par ses mandats, cette Société aura notamment comme rôle de conseiller le ministre des Finances sur l'admissibilité, justement, des projets présentés par les entreprises et de s'assurer que ces dernières continuent de respecter leurs engagements durant la phase d'opération, et les mandats de la Société iront cependant au-delà de ses activités de surveillance et de recommandation.

Comme son nom l'indique, la Société s'attachera à assurer le développement de la Zone de commerce international et, pour ce faire, elle aura comme mandat de favoriser l'implantation d'entreprises dans la Zone, d'assurer la coordination des actions de ses partenaires dans les activités de prospection et promotion, comme la Société de promotion des aéroports de Montréal, ADM, le CLD de Mirabel, une institution locale bien implantée, Montréal international, Emploi-Québec et Investissement-Québec.

Elle aura également pour mandat d'accueillir les entreprises, alors une gestion intégrée des propositions d'investissement et d'implantation de ces entreprises. La Société administrera des programmes d'aide financière élaborés par le gouvernement pour favoriser le développement de la Zone. La Société sera aussi le lieu où pourront se coordonner les différents intervenants qui peuvent offrir une aide aux entreprises: Aéroports de Montréal, Investissement-Québec, Société générale de financement, Emploi-Québec.

Également, la Société fournira une assistance technique et financière pour opérer en zone franche. Au Canada, il y a trois programmes douaniers qui doivent être utilisés pour approximer les fameuses «foreign trade zones» américaines. La Société de développement de la Zone aidera les entreprises à surmonter cette difficulté.

La Société aidera à la formation et au recrutement de la main-d'oeuvre. Il y aura un bureau d'Emploi-Québec sur place, qui collabore avec la Société de développement. Il y aura des services de présélection de candidats, d'aide à la formation de la main-d'oeuvre et de gestion et de planification des ressources humaines. Seule une société située sur place peut s'acquitter efficacement de tous ces mandats; elle sera donc située sur place et le fera. Parce qu'aucun des organismes existants ne pourrait assurer à lui seul les mandats de la nouvelle Société, c'est pour ça qu'on aura cette espèce de guichet unique. Les affaires de la Société seront administrées par un conseil d'administration – c'est ce que la loi prévoit – de 11 membres, dont un directeur général nommé par le gouvernement. La composition du conseil d'administration reflétera les forces vives du milieu du développement économique, tant celles de la région de Mirabel elle-même que celles du Grand Montréal et de l'ensemble du Québec. Sa structure sera légère: moins d'une dizaine de personnes travailleront à la Société, qui disposera d'un budget de fonctionnement de l'ordre de 1 000 000 $ annuellement.

Alors, les moyens en dépenses directes sont modestes. On ne veut pas créer un monstre. Il y en avait déjà assez, de choses monstrueuses d'accumulées dans cette partie du Québec. Créer une société efficace et légère, mais les moyens fiscaux, eux, sont importants. On met le paquet. C'est extrêmement stimulant. Et nous pensons, avec la population des Basses-Laurentides, puisque tout ce secteur en profitera au premier chef, mais aussi avec la population de l'ensemble de la grande région métropolitaine, plus la population du Québec, qu'enfin le cafouillage de Mirabel, les souffrances infligées aux populations, la désarticulation de territoires seront corrigés, et d'une façon grandiose. Nous pensons que les enfants et les petits-enfants des expropriés pourront dire: Oui, il y a eu un grand dérangement, mais qui va finir, nous l'espérons, par une grande prospérité. La région le mérite, et le gouvernement national du Québec le reconnaît et pose les gestes qui sont nécessaires pour que la prospérité découle enfin de l'aventure Mirabel.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre des Finances. Alors, nous poursuivons l'étude de l'adoption du projet de loi n° 56, et je cède la parole à M. le député d'Argenteuil.


M. David Whissell

M. Whissell: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, j'aimerais saluer les citoyens et citoyennes du comté d'Argenteuil qui nous écoutent, également les gens et les résidents de l'ensemble des Laurentides.

M. le Président, parmi mes fonctions à l'Assemblée nationale et comme député, j'ai également celle de porte-parole de Faune et Parcs, mais j'ai également celle de député responsable des Laurentides. Et j'écoutais le ministre des Finances nous faire un cours d'histoire sur le Canada. Ce fut très intéressant. Mais, dans les Laurentides, le scénario et la réalité que le Parti québécois nous fait subir sont vraiment contraires à ce que le ministre nous laisse entendre. Que ce soit en matière de santé, en matière d'éducation, en affaires municipales, le constat est très pénible. Et c'est le même gouvernement, avec le même ministre des Finances que nous venons d'écouter, qui tente d'imposer des regroupements forcés à de nombreuses municipalités. Ce même gouvernement qui nous dit: Il faut se séparer du Canada pour être autonome, pour s'épanouir. Et le même gouvernement tend à appliquer une directive contraire et à imposer des fusions forcées aux municipalités.

En matière de santé, M. le Président, dans les Laurentides, le constat est triste, très, très triste. Nous avons des enfants qui souffrent de maladies, et ces enfants-là doivent attendre plus de deux ans pour recevoir les soins de réadaptation nécessaires pour qu'ils aient un avenir décent. Encore hier, un père de famille est venu à mon bureau et a rapporté qu'il devait attendre encore six mois avant d'obtenir des soins pour son enfant.

(16 h 10)

Le ministre des Finances nous a fait tout un élan oratoire, mais le dossier de l'usine General Motors à Sainte-Thérèse, dans les Laurentides, je crois qu'il est un bel exemple. Le ministre des Finances a lancé un ballon, est arrivé, sans vraiment consulter la compagnie, et a mis 360 000 000 $ sur la table, alors que la compagnie GM se dirige cette année vers des profits de 3 000 000 000 $.

Vous savez, M. le Président, c'est quand même très désolant. On pourrait en rajouter en matière de travail... Et je vous dirais que, comme député responsable des Laurentides, j'ai de plus en plus d'appels provenant de comtés représentés par des députés péquistes. Ces gens-là m'appellent et sont sans recours, et leur députation ne réagit pas, faute de moyens et faute de pouvoir ramener à l'ordre le gouvernement. Alors, concrètement, M. le Président, pour reprendre l'expression de notre président hier, les députés péquistes sont en train de se zigouiller eux-mêmes. Et «zigouiller» est maintenant un terme parlementaire, nous allons l'utiliser.

Je me dois de faire un bref historique sur Mirabel. Le ministre a parlé d'une catastrophe pour la région, mais il faut quand même se rappeler que les installations sont existantes, elles sont là, elles rapportent des revenus à la municipalité de Mirabel, et que le dossier de Mirabel a commencé en 1971 avec des prévisions qui avaient été faites, à l'époque, pour construire un aéroport pour desservir la population du Québec, suivant des projections de développement pour la province. Malheureusement, les projections ne se sont pas réalisées, et je pense que les gens qui sont en face de nous en sont la cause.

Vous savez, j'écoutais le ministre, qu'a-t-il vraiment fait pour empêcher le transfert des vols vers Dorval? Aucune intervention. Absolument jamais. Les députés des Laurentides sont restés silencieux. Ils ont regardé le train passer. Et maintenant, on vient nous faire des discours et la morale sur l'implication du fédéral. Il en va de même des députés bloquistes des Laurentides, qui malheureusement, à Québec, n'ont aucun pouvoir d'influence. Et je me dois de le rappeler, c'est une partie du problème.

Alors, lors d'une élection partielle dans les Laurentides, une promesse du premier ministre: tenir une commission. Alors, les mois ont passé et, tout à coup, la commission Tardif a vu le jour. Savez-vous, M. le Président, chez nous, on l'appelle la commission «tardive» parce qu'elle a pris beaucoup de temps à être mise en place. Et, le Parti libéral, nous avons fait des représentations lors de ces auditions et nous avons mis des propositions sur la table.

Suite au rapport de la commission, le ministre des Finances a annoncé, lors de son discours du budget, des mesures fiscales pour la région de Mirabel. Et je m'en réjouis. J'avoue, je m'en réjouis. Et il était grand temps que le gouvernement du Québec réagisse dans ce dossier. Et, le 13 mai, nous avons fait l'adoption de principe du projet de loi; le 25 mai, le principe a été adopté; et le projet de loi n'a jamais été adopté.

Je rappelle la position du Parti libéral du Québec et de l'opposition officielle qui en tout temps a été favorable au projet de loi. Malgré qu'on a des fois laissé vouloir paraître des différends, nous entérinons le projet de loi. Par contre, nous avons eu certaines réserves, que nous avons exprimées lors des travaux en commission.

La composition du conseil d'administration de cette Société qui sera créée par l'adoption du projet de loi est très ambiguë. Nous mentionnons que 11 membres seront nommés par le vice-premier ministre sur cette Société. Nous avons questionné en commission le vice-premier ministre, à savoir qui constituerait ce conseil d'administration. M. le Président, nous avons simplement demandé, exigé qu'il y ait une forte proportion de citoyens et citoyennes émanant des Laurentides. Le ministre n'a jamais voulu concéder l'amendement. M. le Président, je vais prendre ici une citation du ministre. Il nous dit: «Il se peut qu'on veuille un Américain là-dessus, aussi. Puis il y a 11 places. On peut vouloir un Européen ou un Américain.» Alors, la représentativité, encore une fois, des gens des Laurentides au sein de cette Société porte vraiment à questionnement.

Alors, M. le Président, nous sommes prêts pour l'adoption. Mais je me dois quand même de rappeler que les mesures fiscales ont été annoncées il y a maintenant plus de huit mois – huit mois – et le projet de loi permettra seulement la création de la Société. Rien aujourd'hui n'empêche une entreprise de s'implanter dans la région. Vous savez, M. le Président, dans cette affaire, nous avons même tenté de discréditer l'opposition officielle; et, à la fin de la session parlementaire du printemps, la députée péquiste de Papineau a fait une sortie à mon égard: «L'opposition libérale saborde le dossier de la Zone de commerce de Mirabel». M. le Président, je viens de vous le dire, nous sommes en faveur du projet de loi. Et je me dois de citer certains extraits de ce communiqué. Et d'ailleurs, M. le Président, je demande le consentement de la Chambre pour déposer copie du communiqué émis par la députée de Papineau... de Prévost, pardon!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: ...


Document déposé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Juste une petite question, M. le député: Est-ce que vous agissez comme porte-parole dans le dossier, dans ce dossier-ci?

M. Whissell: Non.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ce n'est pas vous qui êtes le porte-parole? Alors, je vous indique qu'il vous reste 30 secondes.

M. Whissell: Trente secondes. Alors, écoutez, je vais lire un extrait rapidement: «L'opposition libérale a ainsi retardé l'implantation d'entreprises dans cette Zone et la création d'emplois résultante dans la région.»

M. le Président, je tiens à rappeler et à dire publiquement que l'opposition n'est pas maître des travaux parlementaires et que si, à la fin de la session dernière, le projet de loi n'a pas été adopté, c'est que le gouvernement et les députés qui le constituent ont décidé de partir en vacances et de mettre fin aux travaux de la session. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député d'Argenteuil, de votre intervention. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants?


Mise aux voix

Le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement... Alors, il n'y a pas d'autres demandes, alors je vais suspendre les travaux pour quelques instants, pour commencer le débat de fin de séance... Ah! le député est ici, ça va.


Débats de fin de séance


Respect par Emploi-Québec des ententes en matière de formation

Alors, nous allons passer maintenant à la demande de débat de fin de séance à la demande du député de Kamouraska-Témiscouata. Il y a eu une demande qui a été faite pour un débat de fin de séance sur une question qu'il posait cet après-midi à la ministre de l'Emploi sur le gâchis d'Emploi-Québec et ses conséquences sur les plus démunis.

Je rappelle à Mme la ministre et à M. le député que le temps de parole est de cinq minutes de chacun des côtés et que M. le député a un droit de réplique de deux minutes. Il s'agit de temps de parole restrictifs, donc je me dois que ces cinq minutes soient respectées. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. M. le Président, le débat de fin de séance a été demandé parce que la question que j'ai adressée à la ministre de l'Emploi et du Travail cet après-midi n'a, selon moi, pas été éclaircie. La situation est la suivante.

La question que je demandais à Mme la ministre, c'est de savoir comment il se faisait que, suite à l'annonce du 40 000 000 $ annoncé le 19 août pour faire en sorte que tous les gens qui avaient un contrat signé avec Emploi-Québec pour suivre un parcours de retour au travail, de savoir pourquoi ces gens-là, dans certains cas, leur contrat comme tel n'était pas respecté. Et le cas que j'ai cité, M. le Président, et je tiens à le redire, la personne dont nous traitons le dossier a donné son autorisation pour que nous traitions de ce dossier et est même prête à venir en commission parlementaire, si une commission parlementaire a lieu, pour dire exactement quelle est la situation.

(16 h 20)

La situation est la suivante. Dans une lettre, suite à l'annonce qui a été faite au mois d'août, une lettre du 21 septembre, Emploi-Québec annonce à M. Dessurault qu'Emploi-Québec refuse de poursuivre le plan initial, pour les raisons suivantes: «Nos disponibilités budgétaires ne nous permettent pas pour le moment d'entreprendre de nouvelles mesures de formation. De plus, nos mesures de formation ont également subi des modifications majeures au 1er avril 1999, particulièrement concernant les études collégiales. Il est maintenant obligatoire que la personne ait déjà complété plus de la moitié des cours d'un programme avant qu'Emploi-Québec puisse s'engager dans des programmes de D.E.C.» On mentionne, l'autre paragraphe: «Nos ressources limitées prévoient un repérage de clientèle. Conséquemment, nous avons décidé d'aider en priorité des clients qui n'avaient pas terminé d'études de niveau secondaire et qui n'ont pas de métier.»

Le problème, M. le Président, c'est que, dans ce cas-là, l'entente entre M. Dessurault et Emploi-Québec qui a été signée prévoyait une démarche en deux temps. Premier temps, bien sûr, d'acquérir les crédits académiques pour lui permettre de poursuivre, au niveau collégial, un D.E.C. en instrumentation et automatisation. Et c'est une entente signée en février 1999, une entente qui prévoit 27 semaines, donc un peu plus de six mois, de formation académique et, par la suite, 17 mois pour un D.E.C. en instrumentation et automatisation, pour un total de 23 mois. Ce que M. Dessurault s'est fait dire par Emploi-Québec, c'est qu'en cours de route les règles ont changé et que dorénavant on vous exclut de la formation. On va vous permettre de finir vos cours académiques comme tels, mais on ne vous permettra pas de suivre le cheminement jusqu'à la fin.

Donc, on vient de dire à M. Dessurault, comme on l'a mentionné dans la lettre: «Nous refusons de poursuivre le plan initial.» Il faut faire bien attention, parce que je suis convaincu que la ministre va se lever et va dire qu'il y a eu un respect de l'entente et qu'on va lui permettre d'acquérir les préalables. Mais la question est que c'est une démarche en deux temps, et qu'alors que M. Dessurault atteignait la deuxième étape de sa formation, bien, on est en train de le couper.

Et je vous dirais, M. le Président, que c'est encore plus dommage, parce que le premier ministre avait mentionné clairement à l'Assemblée nationale, lors de son discours inaugural: «...tous les chercheurs d'emploi qui ont besoin de l'aide financière de l'État seront traités sur un même pied [...] sans étiquette, sans stigmates.» Il disait également: «La formation constituera le principal outil stratégique d'Emploi-Québec.» C'est dur d'être plus en contradiction que ça, parce qu'on vient justement de dire à M. Dessurault qu'on lui collait une étiquette et que, vu qu'il n'avait pas terminé ses études au niveau secondaire, on vient de le délester des services d'Emploi-Québec.

Il n'est pas seul. Il n'est pas seul, parce que, cette semaine, nous avons reçu une pétition, à l'Assemblée nationale, de plus de 6 700 noms des gens de l'Association nationale des étudiants et étudiantes adultes des commissions scolaires du Québec. Ces gens-là aussi ont été laissés de côté par Emploi-Québec.

Alors, M. le Président, quand la ministre vient nous dire que les contrats sont respectés et que, s'ils ne sont pas respectés, c'est parce qu'il y a un problème, parce que les gens se sont trouvé un autre emploi, ce n'est pas vrai. Et ce qui est encore plus dommage, c'est que, cet après-midi, la ministre a dit, dans le cas de M. Dessurault de Trois-Rivières, que, si son cas n'était pas réglé, c'était de la faute de son député. Il aurait bien voulu le voir, son député, M. Dessurault de Trois-Rivières, mais son député ministre de Trois-Rivières l'a mis à la porte de son bureau et lui a dit qu'il ne réglerait pas son dossier. Donc, est-ce que la ministre peut nous dire maintenant quelles sont les alternatives qui restent à M. Dessurault?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Alors, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi, la parole est à vous.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, d'abord je vais réitérer qu'il n'est aucunement question pour moi d'entrer dans une discussion autour d'un cas précis. Il y a beaucoup de raisons pour lesquelles un parcours peut être modifié. Je n'ai pas ces renseignements-là personnels en main. Je vous ferai remarquer que je suis tenue, moi, par le respect, notamment, de la Loi sur l'accès à l'information, et je ne pense pas que c'est le lieu, et je pense que ce n'est pas sage de débattre d'un cas particulier. Je vous dis que... et des députés de l'opposition ont un peu réagi. Mais il reste que, si l'intention de l'opposition est de régler des cas particuliers, c'est louable, je n'ai pas de problème avec ça, mais la meilleure manière de le faire, ce n'est certainement pas ici.

D'abord, il y a des renseignements personnels qui sont en cause. Deuxièmement, il y a plusieurs raisons qui peuvent faire en sorte qu'il y ait des changements au niveau du parcours. Je ne dispose pas de toute cette information-là et ce n'est pas le lieu. Si l'opposition veut régler des cas particuliers, il existe un certain nombre de mécanismes, dont le Bureau des renseignements et plaintes du ministère, dont le mandat est essentiellement de traiter ce type de cas. Et ce Bureau des renseignements et plaintes du ministère de la Solidarité sociale est reconnu pour la qualité de son intervention, notamment par le Protecteur du citoyen. Alors, moi, je pense que le plus grand service qu'on peut faire à des personnes qui ont des situations comme celle-là, c'est de bien les acheminer, aux bons endroits.

Par ailleurs, bien sûr que la formation est un geste prioritaire pour amener les gens à réintégrer le marché du travail. Ce n'est pas la seule stratégie dans laquelle on doive diriger les gens, parce que ce n'est pas toujours ces besoins-là que les gens ont, mais, oui, c'est une stratégie importante, mais, oui, nous avons aussi le défi d'identifier les mesures de formation qui vont nous mener à l'emploi et qui vont nous permettre d'avoir le chemin le plus court pour mener à l'emploi. Et, oui, j'ai donné des indications que le plus grand service que nous pouvions rendre aux personnes qui s'adressent à Emploi-Québec, c'est d'aider à trouver le chemin le plus court, y compris en matière de formation, pour les mener à l'emploi. Et ça, ça veut dire que je veux aussi qu'on réserve les parcours, les cheminements plus intenses et plus longs aux personnes qui ont plus d'obstacles à franchir. Et, oui, j'ai constaté dans les derniers mois qu'il est arrivé que nous ayons administré une recette trop lourde à des gens qui avaient des besoins trop légers, et ça fait en sorte qu'on ne peut pas réserver des parcours plus longs, qui demandent beaucoup plus d'efforts, à des personnes qui ont plus d'obstacles à franchir pour intégrer le marché du travail. Notre défi, c'est d'identifier la bonne mesure d'aide à l'emploi, qui va permettre à toutes les personnes qui recherchent un emploi de retrouver leur place sur le marché du travail.

Et ce que je dis là, ce n'est pas juste une pensée que j'ai eue un matin en me levant. Tout ça est documenté, analysé. Il y a eu des tonnes de recherches, notamment au ministère de la Solidarité sociale, qui a une longue histoire sur l'intégration des personnes dans le marché du travail. À l'OCDE aussi, je pourrais vous sortir toute sa littérature. Il est clair que, lorsque nous n'administrons pas le bon chemin à une personne pour intégrer le marché du travail, on rate notre coup. Il est clair que, lorsque nous entraînons des gens dans des parcours trop longs alors que ce n'est pas là les besoins, c'est contreproductif.

Alors, j'espère que le représentant de l'opposition officielle saisit que nous sommes en train de mettre en place des services publics d'emploi – c'est un instrument extrêmement important pour les Québécois et les Québécoises – et que nous avons intérêt à faire en sorte que, lorsque nous intervenons auprès des gens, nous regardions avec eux le meilleur chemin à emprunter pour intégrer définitivement et de manière durable le marché du travail.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, en vertu de votre droit de réplique, M. le député, vous avez un droit de parole de deux minutes.


M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. Sur les renseignements comme tels, on va tirer ça au clair. Que la ministre fasse une commission parlementaire comme tous les groupes au Québec le lui demandent, comme les groupes communautaires le demandent, comme les gens en formation le demandent, ils vont venir lui dire en personne quels sont les problèmes et les situations qu'ils vivent. Et ça, M. le Président, c'est une demande fondamentale. Elle dit qu'elle veut faire un débat public, relancer, recentrer Emploi-Québec. Qu'on le fasse en commission parlementaire, en toute transparence. C'est ce que l'opposition demande, c'est ce que des centaines de personnes que nous avons rencontrées dans les derniers mois demandent aussi.

Dans le cas de M. Dessurault, la situation, c'est un chômeur saisonnier. Il avait un emploi, il essaie d'améliorer son sort. Emploi-Québec lui dit: Oui, vas-y, améliore ton sort. Et, en plein milieu de parcours – il a signé une entente, il voit enfin la bouée arriver pour s'en sortir – on lui retire cette bouée-là et on le laisse en plein milieu de l'eau sans lui envoyer aucun signal, quel qu'il soit.

M. le Président, quand la ministre parle de recentrage, de replacer les gens et qu'elle dit que la formation n'est pas une fin en soi, comme elle le mentionnait cette semaine, et que, malgré l'impression qu'on peut en avoir, ce n'est pas toujours efficace et fructueux de mettre quelqu'un dans une activité de formation à long terme... M. le Président, on entend depuis des mois dans cette Chambre le premier ministre, le ministre de l'Éducation, le ministre à l'Économie et aux Finances dire que la formation, c'est l'outil majeur pour retourner.

(16 h 30)

La ministre nous dit que ce n'est plus son travail. C'est du ressort de qui? Qui va s'occuper de ces gens-là? Et, quand on parle de gestes prioritaires, quand on parle de gestes importants à poser et à envoyer comme signal aux Québécois et aux Québécoises, c'est de dire que la formation est importante et cesser de dire qu'on est en plein recentrage. On ne joue pas avec des chiffres, Mme la ministre, on joue avec des individus, avec des contribuables et avec des citoyens qui méritent d'être traités avec respect.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député. Ceci met fin à ce débat de fin de séance. M. le leader adjoint du gouvernement, je vous cède la parole.

M. Boisclair: Je vous remercie, M. le Président. Je pense que, dans les circonstances, je ferais motion pour que nous ajournions le débat et pour que nous reprenions nos travaux mardi, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, les débats de cette Assemblée sont ajournés au mardi 26 octobre, à 10 heures. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Cette motion est adoptée. Alors, je vous remercie de votre collaboration, et bonne soirée à tous.

(Fin de la séance à 16 h 32)