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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le jeudi 13 mai 1999 - Vol. 36 N° 30

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de représentants de la communauté juive du Québec

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, bon matin. Si vous voulez prendre place. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: En vous souhaitant à mon tour, M. le Président, un bon matin.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Dix-huit ans et un mois aujourd'hui.

M. Boisclair: Ça me fait plaisir. Dix-huit ans de vie politique, et un mois?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Dix-huit ans et un mois.

M. Boisclair: Et un mois? Toutes mes félicitations, M. le Président.


Affaires du jour

Je vous demanderais de prendre en considération l'article 9 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 26


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 9, Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance propose l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Merci, M. le Président. Alors, nous entendons proposer l'adoption du principe du projet de loi n° 26 qui vient modifier la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Ce projet de loi vise à apporter certains assouplissements à la loi régissant le secteur des services de garde éducatifs principalement en regard des services en milieu familial.

Ce projet de loi démontre bien que le gouvernement demeure à l'écoute des besoins des familles et de ses partenaires de milieu de garde, d'où notre proposition d'adapter davantage la législation existante à la réalité que vit, depuis sa création en 1997, le réseau des centres de la petite enfance et autres services de garde.

Rappelons que le gouvernement du Québec a mis en place ce réseau afin d'offrir des services de garde éducatifs qui soient plus accessibles et pour lesquels les parents auront à jouer un rôle déterminant, notamment par leur implication dans les conseils d'administration. Ce réseau contribue ainsi à un meilleur soutien aux parents en matière de conciliation travail-famille de même qu'en plein développement des enfants, grâce à l'application systématique d'un programme éducatif de qualité et à la prévention précoce des obstacles à l'apprentissage.

Outre la création d'un réseau de centres de la petite enfance, M. le Président, le gouvernement a mis en place un programme de places à contribution réduite, mieux connu par l'appellation «places à 5 $». Cette implantation progressive permettra, dès septembre 2000, de rendre ce programme accessible à tous les groupes d'âge. Actuellement, ce sont les enfants de trois ans et quatre ans qui ont accès à ce programme. À la lumière du succès remporté par les places à 5 $, il nous apparaît indéniable que celles-ci répondent à un besoin réel des familles. À tel point que plusieurs provinces canadiennes sont tentées d'imiter le Québec, alors qu'est citée en exemple notre politique familiale par des instances telles que le Conseil de la santé et du bien-être du Canada.

M. le Président, nous nous engageons maintenant dans une phase de consolidation des services de garde éducatifs autant en installation qu'en milieu familial. Un des gestes que nous allons poser pour atteindre cet objectif est la signature d'ententes avec les centres régionaux de développement, CRD, en collaboration avec le ministère des Régions et le ministère de la Métropole. Ces protocoles permettront la mise en place des conditions de réussite pour un développement optimal des services de garde éducatifs et leur adaptation à la réalité de chaque communauté.

Un autre geste que nous sommes à poser est l'implantation d'un mode de financement qui va simplifier et alléger les différents processus administratifs qui sont demandés aux services de garde. Par ailleurs, l'amélioration des conditions de travail des travailleuses et travailleurs en service de garde fait l'objet de discussions intensives au sein de groupes de travail qui ont été créés à ma demande et auxquels participent des représentants des principales instances syndicales et associations professionnelles ainsi que des employeurs que sont les centres de la petite enfance.

M. le Président, le projet de loi que nous nous proposons d'étudier aujourd'hui s'inscrit donc dans cette démarche de consolidation des services de garde éducatifs. Il découle d'une révision administrative et réglementaire entreprise par le ministère de la Famille et de l'Enfance afin d'adapter davantage ses interventions à la réalité des milieux de garde.

C'est dans ce sens que des modifications sont proposées pour actualiser la notion de milieu familial et tenir compte des enfants de la personne responsable d'un service de garde en milieu familial ou de celle qui l'assiste ainsi que des enfants habitant ordinairement avec la responsable d'un service de garde.

Sous réserve de certaines restrictions, on donnera alors accès aux places à contribution réduite en milieu familial aux enfants de la personne responsable d'un service de garde en milieu familial et de la personne qui l'assiste et aux enfants habitant ordinairement avec elle. Ceci va requérir un investissement de l'ordre de 3 300 000 $ en 1999-2000, de 3 700 000 $ en 2000-2001 et de 4 300 000 $, en 2001-2002.

Nous précisons également dans ce projet de loi le pouvoir d'un détenteur de permis de centre de la petite enfance de révoquer ou de suspendre la reconnaissance d'une personne responsable d'un service de garde en milieu familial. Et, afin d'assurer un recours pour celle-ci, le responsable d'un service de garde dont la reconnaissance a été suspendue ou révoquée disposera d'un droit de contestation auprès du Tribunal administratif du Québec.

Par ailleurs, le projet de loi accordera au ministre un pouvoir de dérogation à certaines normes établies par la loi ou les règlements dans les cas exceptionnels et lorsque l'intérêt public le justifie. Cette disposition vise à faciliter le développement des places de services de garde éducatifs et à mieux répondre aux besoins des parents, notamment en permettant la mise sur pied de projets-pilotes selon certaines conditions. Ces projets-pilotes s'inscriront dans un contexte de diversification des services afin de répondre aux besoins en matière de garde non usuels. Cette modification commandera un investissement de 2 000 000 $ en 1999-2000, de 3 000 000 $ en 2000-2001 et de 3 000 000 $ en 2001-2002. Pour les dispositions concernant l'accès aux places à contribution réduite et les projets-pilotes, les sommes requises seront prises à même le budget de transfert qui est alloué au fonctionnement des services de garde régis par le ministère de la Famille et de l'Enfance.

Finalement, comme il se doit, ce projet de loi comporte des modifications de concordance et des dispositions transitoires.

M. le Président, la politique familiale québécoise a acquis une maturité telle qu'il est maintenant nécessaire de l'adapter aux nouvelles réalités et d'élargir l'éventail des services de garde qui en découlent. Je fais notamment référence aux services particuliers que requièrent les horaires de travail non usuels de certains parents. Nous devons permettre aux centres de la petite enfance de diversifier leur offre de service et ainsi répondre aux besoins de nos parents.

(10 h 10)

Le projet de loi contribue également à la qualité des services de garde éducatifs en milieu familial en clarifiant certains aspects de mesures de surveillance et de contrôle applicables aux responsables des services de garde en milieu familial. Les modifications proposées dans ce projet de loi tiennent compte non seulement de l'expérience acquise par le ministère de la Famille et de l'Enfance, mais aussi des éléments soulevés dans le cadre de la concertation avec nombreux partenaires concernés.

Mentionnons les regroupements et les associations suivantes: Concertaction interrégionale des centres de la petite enfance du Québec, qu'on appelle aussi CIRCPEQ, la Fédération des centres de la petite enfance du Québec, anciennement la Fédération de la garde en milieu familial du Québec, l'Alliance des intervenantes en milieu familial (CEQ), l'Association des professionnels des services de garde en milieu familial, le regroupement Edenfa et la commission scolaire de Montréal.

En conclusion, M. le Président, le projet de loi que nous soumettons pour examen contribuera à assurer l'adéquation du cadre légal des services de garde éducatifs et de leur évolution dans le réseau. Je m'en réjouis, car il nous apparaît plus que jamais important de créer le cadre le plus propice au bon fonctionnement des services de garde éducatifs dans l'intérêt des enfants à qui nous devons fournir toutes les chances de réussite et des familles qui demeurent le jalon de notre société. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la ministre. Simple rappel pour vous informer que nous sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance. Et je cède la parole au porte-parole officiel de l'opposition en matière de dossiers de famille et de l'enfance, le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. C'est pour moi un grand honneur de participer au débat qui entoure l'adoption du principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, Bill 26, Mr. Speaker, an Act to amend the Act respecting childcare centres and childcare services.

C'est la première fois, M. le Président, que je m'adresse à la Chambre au sujet d'un projet de loi en tant que nouveau porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille et enfance. Je serais négligent de ne pas prendre quelques secondes du temps de la Chambre pour remercier le travail tout à fait exceptionnel qu'a fait mon prédécesseur le député de Jacques-Cartier pendant quatre ans comme porte-parole de l'opposition officielle en matière de famille et enfance. Le député de Jacques-Cartier a mené le dossier avec brio. Il connaissait son dossier. Il défendait le point de vue de divers intervenants avec acharnement et avec beaucoup de succès. Je suis très reconnaissant, comme on devrait l'être tous, je crois, du travail qu'il a accompli pendant tout près de quatre ans.

M. le Président, le contexte actuel est assez clair. Le gouvernement amène un projet de loi qui apporte certains changements, quelques-uns qui sont de nature technique, d'autres qui sont plus importants, qui touchent l'organisation des services de garde à la fois en installation et à la fois en milieu familial au Québec.

M. le Président, je suis également très réconforté, suite aux propos de la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, parce que souvent la ministre, d'autres membres du gouvernement, le premier ministre lui-même, à plusieurs occasions, parlaient de notre système de garde, des places à contribution réduite, mieux connues par le nom «places à 5 $», comme d'un système universel. Le premier ministre l'a dit à plusieurs reprises.

Et je cite un exemple, M. le Président. C'est toujours bien d'avoir de la preuve à la portée de la main. Alors, le mercredi 21 avril de cette année, M. le premier ministre du Québec a dit, en réponse à une question, et je le cite au texte, M. le Président: «...en faisant en sorte que le programme de garde à 5 $ par jour soit universel.» C'est les mots qu'a utilisés le premier ministre du Québec, c'est la phrase qui est utilisée souvent par les députés ministériels et, malheureusement, c'est la phrase qui est utilisée aussi parmi beaucoup de chroniqueurs et de journalistes.

Aujourd'hui, la ministre a pris soin d'éviter cette phrase. Je suis très content, M. le Président. La ministre a parlé d'un programme accessible à tous les groupes d'âges à partir du 1er septembre de l'an 2000. Enfin, M. le Président, on appelle les choses comme elles sont, et c'est clair. Et je m'explique facilement, M. le Président.

Le mot «universel». Vous savez, M. le Président, la langue française n'est pas ma langue maternelle, alors, de temps en temps, je fais un peu de recherche, je vais voir dans un dictionnaire la portée des mots. C'est bien, je pense, M. le Président, n'est-ce pas? Alors, «universel». Qu'est-ce que ça signifie quand on dit que quelque chose est universel? Selon Le Petit Larousse Illustré , édition 1998, quelque chose est universel quand il embrasse la totalité des êtres et des choses ou qu'il s'applique à tous les cas.

Quelque chose est universel, M. le Président, quand il s'applique à tous les cas. Bien, ce n'est manifestement pas la situation avec les services de garde à 5 $. La ministre déléguée ne peut pas se lever en Chambre et dire que la garderie à 5 $ s'applique à tous les cas. Ce n'est manifestement pas exact, M. le Président. Et je ne parle même pas de la question de l'âge des enfants! Même pas de la question de l'âge des enfants, parce que, M. le Président, lors de nos 10 heures ensemble à l'étude des crédits, ça sort très clairement qu'à la fin de cette année même avec le développement impressionnant des places à contribution réduite, à date, il y a à peu près un Québécois sur deux, une famille sur deux qui n'aura pas l'accès aux places à 5 $ faute de places, M. le Président, pas parce que leurs enfants ne sont pas éligibles en raison de l'âge, mais c'est faute de places.

D'ailleurs, une récente étude, une vaste enquête entreprise par le Bureau de la statistique du Québec, qui s'appelle Enquête sur les besoins des familles en matière de services de garde , démontre très clairement qu'à peu près un enfant sur trois qui est éligible au programme, c'est-à-dire qui tombe dans les tranches d'âge qui leur donnent l'éligibilité et dont les parents veulent avoir une place, seulement un sur trois est capable de dénicher une place, faute de places.

Alors, M. le Président, on m'a déjà dit: La pédagogie, c'est la répétition. Je suis excessivement content que la ministre ait arrêté de parler d'un programme universel. Je souhaite que ses députés fassent la même chose, je souhaite que le premier ministre du Québec fasse la même chose et qu'il arrête de parler d'un programme universel quand ce n'est manifestement pas le cas, quand il manque 100 000 places, selon cette étude, pour combler les besoins qu'il faut d'ici l'an 2005-2006. Alors, on fait du progrès, et c'est très bien. Ça indique que, même à n'importe quel âge, dans n'importe quelle situation, on peut apprendre des choses. N'est-ce pas? C'est tout à fait approprié, M. le Président.

(10 h 20)

Alors, on a, depuis un certain temps, beaucoup de développement, et c'est vrai. Le gouvernement en est fier. C'est raisonnable qu'ils en soient fiers, M. le Président. Ils ont mis beaucoup d'argent là-dedans. Le rythme de développement des places est accéléré à cause des places à contribution réduite qui changent le comportement des familles québécoises.

Le gouvernement est largement victime de ses propres actions en ce qui concerne les périodes d'attente, les listes d'attente importantes dans chacune des régions du Québec. Il n'y a pas une région qui est épargnée. Dans l'Outaouais, on indique que ça va prendre 2 000 places dans la seule ville de Gatineau pour combler des besoins. Dans mon quartier de Notre-Dame-de-Grâce, les intervenants eux-mêmes, sur le territoire, évaluent la liste d'attente à peu près à 600 places. Ça, c'est parmi les enfants qui sont éligibles. Alors, on laisse planer dans la population que c'est accessible à tout le monde. On lève les espoirs, on crée des attentes qu'on ne peut pas malheureusement satisfaire.

M. le Président, il y a eu des développements de places et en installation et en milieu familial. Et même cette année le gouvernement compte créer à peu près 19 700 places, dont la vaste majorité est en milieu familial. Ce n'est pas compliqué, la raison pour ça est assez simple: à un moment donné, créer plus de places en installation devient de plus en plus difficile. Des places en installation, ça ne se crée pas du jour au lendemain. Ça prend une bâtisse, ça prend des éducatrices, ça prend des normes, ça prend des projets, ça prend du financement, ça prend un directeur ou une directrice. Il y a beaucoup d'éléments qui sont impliqués dans la création des places en installation, M. le Président. Tandis que, en milieu familial, le processus est un peu moins compliqué. Il est assujetti aux mêmes règles et mêmes normes, on s'entend, mais de part sa nature il est plus facile de créer les places en milieu familial, plus vite, qu'en installation.

Et, dans un deuxième temps, M. le Président, la création de places en milieu familial est plus appropriée dans plusieurs régions du Québec aussi. Dans les milieux urbains ou semi-urbains, il est plus facile d'avoir la masse critique d'enfants pour qu'une garderie – ce qu'on appelait une garderie, qu'on appelle maintenant une installation, un centre à la petite enfance – soit efficiente. On a évalué ça, M. le Président: le minimum d'enfants requis, c'est à peu près 30; le point à peu près optimal d'enfants, c'est à peu près 50, en termes d'efficience, d'utilisation des ressources. Alors, il devient difficile, dans plusieurs régions du Québec, dans des villages, dans des régions rurales, de rassembler la masse critique d'enfants pour faire fonctionner une garderie ou un CPE en installation. Alors, on se tourne vers le milieu familial pour délivrer des services. Et, d'ailleurs, M. le Président, ce développement est reflété dans les statistiques.

À la fin de l'année fiscale 1998, c'est-à-dire au 31 mars 1998, les places de centres de petite enfance en installation représentaient 45 % de toutes les places disponibles. En garderies à but lucratif, c'est-à-dire une autre forme d'installation mais, cette fois-ci, à but lucratif et non pas à but non lucratif, des CPE, les places représentaient 25 %. Puis, en milieu familial, ça représentait 26,4 %. Ça, c'est au 31 mars 1998.

Au 31 mars 1999, M. le Président, les proportions ont beaucoup changé. Le pourcentage des places représentées en installation, en centres de petite enfance, installation, c'est-à-dire garderies à but non lucratif, les proportions ont tombé de 45 % à 40 %, M. le Président – 41 %, chiffre arrondi. Les garderies à but lucratif, la proportion a baissé de 27 % à 24,2 %. L'augmentation se fait évidemment, en termes de proportions, M. le Président, au niveau du milieu familial, où on passe de 26 % à 34 %. C'est-à-dire, M. le Président, que la nature des services, le type des services offerts au Québec a tendance à changer, à évoluer avec le temps, ce qui est tout à fait normal, et on mise beaucoup plus sur le milieu familial.

Mr. Speaker, I spoke briefly about the various problems that are associated with the system as we know it today. One of the most significant problems is obviously the shortage of spaces for children where it is very, very clear that the Government is unable currently to respond, to satisfy the tremendous demand created by the day-care places at $5 a day, Mr. Speaker. This is probably quite normal because, as you well know, Mr. Speaker, the introduction of $5 a day day care has changed the way in which parents look at childcare services in Québec. If one has to pay $150 a week, $200 a week to have a baby sitter at home with all the advantages and disadvantages that entails versus the possibility of obtaining quality, the question is there, the question of quality day-care services in a day care at $5 a day, $20 a week, $25 a week versus $200, it's quite evident, Mr. Speaker, that there is a financial incentive to use the $5 a day program.

Alors, M. le Président, ce manque d'espace est criant, malgré le développement important qui a été fait dans les années récentes.

L'autre problème qui est fondamental, M. le Président, qui va à la question de la qualité des services, c'est la question des conditions de travail des éducatrices et éducateurs, des directeurs de garderies, des responsables de services de garde et des assistantes, M. le Président.

Là, la question salariale et la question des conditions de travail, ces deux questions-là sont liées évidemment, mais elles sont également liées intimement à la question de la qualité des services qui sont offerts dans les services de garde au Québec. Je vous cite simplement quelques extraits d'une étude sur les ressources humaines en garde à l'enfance au Canada, rédigée pour le compte du Comité de direction de l'étude sur le secteur de garde à l'enfance. Ça s'appelle: De la reconnaissance à la rémunération de sa main-d'oeuvre.

M. le Président, ce comité d'experts indique très clairement, et je cite le rapport: «Les interactions positives entre les intervenantes et les enfants reposent sur la connaissance du développement de l'enfant chez les intervenantes, des connaissances habituellement accréditées par des études postsecondaires.»

Le deuxième élément, M. le Président: «Une interaction positive entre intervenantes et enfants en garderie est également favorisée par le ratio intervenante-enfants et la taille de groupes.»

Troisième élément, M. le Président, la question salariale et la question des conditions de travail sont intimement reliées à ça: «Il est démontré que la réglementation gouvernementale, particulièrement en ce qui a trait à la formation des éducatrices, influe sur la qualité des services offerts aux enfants en garderie.»

(10 h 30)

Alors, le lien est très clair, M. le Président. Le lien est très clair. Si les intervenants en garderie sont satisfaits de leurs conditions de travail... Je devrais dire: Plus les intervenants sont satisfaits de leurs conditions de travail, plus la relation avec les intervenantes sont de haute qualité – ce n'est pas le seul facteur, c'est évident, M. le Président, on se comprend, mais c'est un facteur qui influence le tout – plus les interactions sont positives, plus la personne se sent valorisée dans une société, plus les interactions sont positives, plus on obtient des services de garde de qualité.

Alors, M. le Président, les travailleurs et travailleuses en garderie tombent dans plusieurs catégories. Il y a les directrices, directeurs; le personnel de soutien, cuisiniers et autres; les éducateurs et éducatrices, tous en milieu, en installation, M. le Président, soit en garderie, en CPE. Il y a une autre catégorie de personnes, les responsables des services de garde visés largement par le projet de loi n° 26. Eux sont des travailleurs autonomes, M. le Président. Ils reçoivent jusqu'à un maximum de six enfants chez eux, normalement, neuf avec une assistante. Ils sont payés par le biais de tarification du ministère. Ils ne sont pas payés à l'heure. Ils ne sont pas salariés. Ils ne travaillent pas à l'heure. Ils reçoivent, comme travailleurs autonomes, une tarification du ministère de la Famille et de l'Enfance par nombre d'enfants qu'ils reçoivent: maximum de six s'ils sont seuls, maximum de neuf s'ils ont une assistante.

Les assistantes, par contre, M. le Président, sont des employées salariées, elles travaillent pour un salaire selon l'heure. Alors, on a trois différents types de rémunération: l'assistante salariée en milieu familial, la responsable du service de garde en milieu familial, qui est une travailleuse autonome, puis les salariées en installation.

M. le Président, pendant la campagne électorale, le gouvernement actuel, son premier ministre, sa ministre en titre de la Famille et de l'Enfance, la ministre déléguée ont créé certaines attentes quant à toute la question des conditions de travail de ces personnes-là. Les attentes étaient très claires. Le gouvernement, le Parti québécois s'engageait à regarder la question salariale, à redresser la question salariale parce qu'il reconnaissait, comme tout le monde le reconnaît d'ailleurs, que les gens qui travaillent dans nos services de garde sont sous-rémunérés. Ça, c'est un constat qui est général, M. le Président. Tout le monde partage ce constat, je crois. C'est le gouvernement actuel, le Parti québécois qui a dit en campagne électorale: On va travailler là-dessus, ça devient urgent, fiez-vous sur nous, faites-nous confiance. C'est ça qu'ils ont dit: Faites-nous confiance.

Bien, M. le Président, je suis obligé de constater aujourd'hui que ça ne va pas très bien, dans le dossier. Il y a eu une série de journées d'études, de grèves, dans le mois d'avril. Une grève générale illimitée par les éducatrices syndiquées avec la CSN a été évitée à 24 heures d'avis par la formation d'un groupe de travail, plusieurs tables de travail qui étudient présentement la question.

L'explication de la ministre, c'était que c'était nécessaire parce que la situation est complexe. Bien, oui, M. le Président, la situation est complexe, je suis d'accord avec la ministre déléguée. Si elle apprend, par contre, le 15 avril que la situation est complexe, il y a un problème, M. le Président. Ils se sont engagés à travailler dessus depuis la campagne électorale, au mois de novembre. Là, ils se lèvent, en avril, la ministre déléguée se lève: Ah! la situation est complexe, c'est compliqué, mon affaire! Bien, oui, c'est compliqué! On le savait, tout le monde le savait.

J'imagine, quand le premier ministre a dit: On va créer une table centrale de négociation, il savait que c'était complexe. Il a une certaine expérience dans les relations de travail, M. le Président. On ne peut pas plaider six mois plus tard que ça va lentement parce que c'est complexe. Novembre, décembre, janvier, février, mars, avril – j'ai vu la ministre compter sur ses doigts – moi, j'arrive à tout près de six mois, là. Cinq et demi, pour faire plaisir à la ministre déléguée.

M. le Président, grève générale illimitée évitée, nouvelle date butoir, le 21 mai. Aujourd'hui, on constate... l'article dans La Presse : Les travailleuses en garderie ne salivent pas pour des miettes , en manchette. «Nous sommes un peu déçues.» Bien, écoute... Le leader adjoint n'est pas d'accord. Je veux bien, là, mais je cite des extraits de journaux.

«Nous sommes un peu déçues – M. le Président, elles disent ça, c'est les travailleuses – nous aurions souhaité avoir des offres chiffrées du gouvernement sur la table. Nous trouvons que le temps passe très rapidement, a expliqué la vice-présidente des travailleuses en garderie de Montréal, Mireille Bénard[...]. Nous n'accepterons pas n'importe quoi, Mme Bénard dit. Nous allons nous préparer à une grève illimitée s'ils ne nous présentent rien de concret. Présentement, il n'y a même pas de consensus sur l'application d'une échelle salariale unique, souligne Mme Bénard.» Ce n'est pas mes paroles, M. le Président. Je comprends que, quand je dis des choses, les députés ministériels sont sceptiques, peut-être, mais là ce n'est pas moi qui parle, c'est la vice-présidente des travailleuses en garderie de Montréal.

Alors, M. le Président, on indique, en cours de route – la date butoir est très près, le 21 mai – que ça ne va pas si bien que ça, qu'il y aura des problèmes. Il faudrait que le gouvernement se penche sur la question, démontre la volonté nécessaire. Oui, oui, mais la ministre va vous dire: On s'y est penché, on a créé un autre comité de travail. Ce gouvernement a le don de créer des comités de travail. Quand ils ont un problème important, là, on crée des comités, on met en place une structure, on pellette en avant. On pellette en avant des choses, pourtant des choses auxquelles ils se sont engagés pendant la campagne électorale, des questions précises, des engagements pris en campagne électorale. Là, on pellette en avant pour éviter d'avoir des problèmes. Mais il y a une nouvelle date butoir, M. le Président, le 21 mai. Ça s'approche très vite, et j'ai peur, j'ai peur pour la stabilité de nos services de garde au Québec.

M. le Président, les conditions de travail des responsables des services de garde visées, entre autres, par le projet de loi n° 26, il y a des problèmes là-dedans. J'ai rencontré la Fédération des intervenantes en petite enfance du Québec, j'ai parlé avec la Fédération des centres de la petite enfance au Québec qui me parlent des conditions de travail difficiles des responsables des services de garde, la tarification insuffisante, le manque de valorisation de leur rôle dans la société. Ça, c'est le même groupe de personnes auxquelles on se fie pour assurer un développement important dans les services de garde. Ce beau monde là travaille dans des conditions excessivement difficiles.

Si on commence à calculer leur taux horaire, parce qu'ils sont obligés d'être ouverts 10 heures par jour, consécutives, de 8 heures à 18 heures, cinq jours-semaine – ça, c'est 50 heures – si on commence à calculer leur taux horaire en fonction de la tarification, ce n'est pas très élevé, M. le Président, pour des gens qui se dévouent à la garde des enfants chez eux. Ils ne sont pas là-dedans pour faire des millions. On s'entend là-dessus. Et on se fie de plus en plus sur ces personnes-là pour prendre la relève, pour assurer le développement des places au Québec. Il y aura des difficultés là-dedans, M. le Président. Le projet de loi n° 26 ne s'adresse pas, grosso modo, aux conditions de travail des responsables d'un service de garde.

(10 h 40)

M. le Président, regardez de près le projet de loi. Le projet de loi comporte essentiellement cinq éléments. À notre lecture, de ce côté de la Chambre, trois de ces éléments sont positifs, il y en a un qui est questionnable puis le cinquième qui pose énormément de problèmes pour nous.

D'inclure les enfants qui demeurent ordinairement avec la responsable d'un service de garde dans les ratios nous apparaît tout à fait normal et souhaitable. On ne peut pas échapper au maximum, parce que l'enfant n'est pas l'enfant légal ou à la charge d'une responsable d'un service de garde. Alors, d'inclure la phrase «des enfants qui habitent ordinairement avec elle», quand on parle d'un nombre maximum d'enfants qu'une responsable d'un service de garde peut recevoir ou de la tarification ou de l'accès aux places à contribution réduite, m'apparaît tout à fait normal et conforme aux réglementations et aux normes des services de garde dont on s'est doté au Québec.

M. le Président, il est vrai que les responsables de services de garde vont avoir accès à des places à contribution réduite pour leurs propres enfants mais uniquement à l'extérieur de leur domicile ou du lieu où ces services sont offerts. Je sais que ça ne fait pas l'unanimité, cette notion. Il y en a, des responsables de services de garde, qui m'ont dit qu'il serait plutôt plus normal qu'on puisse recevoir la tarification et l'accès aux places à contribution réduite pour nos enfants même si on les garde chez nous. Je sais que c'est un débat à faire. Il y a des pour et des contre, mais je pense que le gouvernement va être obligé de se pencher là-dessus de façon claire.

J'ai cru comprendre qu'il y aura une plainte devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse à cet égard. Et cette plainte-là pourrait causer certaines difficultés au gouvernement, dépendamment évidemment de la décision éventuelle de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Alors, on va suivre cet aspect du projet de loi très attentivement.

Le deuxième élément très positif: maintenant les enfants des assistantes en milieu familial vont être éligibles aux places à contribution réduite et vont être éligibles à la tarification aussi, M. le Président. Ça, c'est une bonne nouvelle. C'est très positif, parce qu'on m'a déjà dit que des responsables de services de garde avaient une certaine réticence à engager des assistantes qui avaient des enfants parce que l'assistante évidemment voulait amener les enfants à son lieu de travail, mais ils n'étaient pas éligibles aux places à contribution réduite et à la tarification. Alors, la présence d'un enfant d'une assistante auparavant était, d'une certaine façon, néfaste, ça nuisait au financement des services de garde en milieu familial; c'est corrigé avec le projet de loi n° 26, et c'est une bonne nouvelle.

Le troisième élément, M. le Président: il accorde à la personne responsable d'un service de garde dont la reconnaissance a été suspendue ou révoquée un droit de contestation de cette décision devant le Tribunal administratif du Québec. M. le Président, en principe, sur papier, c'est une bonne chose. On me rapporte qu'il y a des cas où un centre de la petite enfance a révoqué la reconnaissance d'une responsable d'un service de garde, et le seul moyen d'appeler de la décision était d'aller devant les tribunaux du Québec, ce qui évidemment était coûteux, prenait beaucoup de temps, un exercice à évaluer avant de l'entreprendre. À cause simplement de la complexité de la situation, il a fallu avoir des avocats dans le dossier, et ainsi de suite.

Le recours devant le Tribunal administratif du Québec est une bonne chose, en principe, M. le Président, et je dis bien «en principe», parce que je mets en garde la ministre déléguée. Si elle pense que ça va accélérer le processus, elle est mieux de vérifier avec la ministre de la Justice. Parce que, M. le Président, on m'a dit, suite à l'étude des crédits, qu'il y a présentement 17 000 dossiers devant la Division des affaires sociales du Tribunal administratif du Québec; 17 000 dossiers en attente, M. le Président, présentement, au moment où on se parle.

Si la ministre déléguée croit que donner le pouvoir d'aller en appel à des responsables de services de garde devant le Tribunal administratif du Québec, ça va accélérer le processus, on a des questionnements, M. le Président. Parce que, avec 17 000 dossiers à traiter en attente, le délai peut, en effet, être excessivement long. Il est peut-être moins onéreux du côté de la procédurite, M. le Président; pas besoin d'avocats, puis il n'y aura pas de frais judiciaires nécessairement. Mais, si le but est de raccourcir le temps de délai avant qu'un appel soit entendu, il y a des problèmes.

M. le Président, deux autres éléments qui soulèvent plus de questionnements. Toute la question des projets-pilotes, les projets-pilotes qui sont en soi souhaitables, il faut qu'on développe des services de garde flexibles qui rencontrent les besoins des parents qui, peut-être, travaillent en dehors des heures de 8 heures le matin à 18 heures. On peut en concevoir beaucoup, M. le Président, des gens qui travaillent le soir: des infirmières, des agents de police, et ainsi de suite, qui ont besoin des services de garde en dehors du huit à six, M. le Président. C'est très concevable. Le fait de vouloir procéder à des projets-pilotes pour être plus flexibles m'apparaît raisonnable et normal.

Ce qui est plus discutable, M. le Président, c'est les pouvoirs de dérogation que la ministre se donne. Je me permets de lire, et on va en discuter en commission parlementaire: «Le ministre peut élaborer des projets-pilotes visant à expérimenter ou à innover en matière de services de garde à l'enfance ou à étudier, améliorer ou élaborer des normes applicables en matière de services de garde à l'enfance – très bien, on s'entend sur la nécessité de faire ce genre de chose; il peut également autoriser, dans le cadre de ces projets-pilotes, toute personne ou organisme à offrir des services de garde selon des normes différentes de celles prévues par la présente loi et ses règlements.»

Là, ça soulève du questionnement, M. le Président. Si on a des normes et règlements, c'est pour assurer des services de garde de qualité au Québec, assurer la sécurité des enfants, assurer un projet éducatif, assurer qu'ils sont gardés dans un milieu sain et sauf.

De vouloir se doter d'un pouvoir de dérogation aussi vaste, il va falloir que la ministre le justifie en commission parlementaire avant qu'on l'accepte, M. le Président. Il y a peut-être des raisons précises, et, comme je dis, c'est moins grave, quant à moi, pour les projets-pilotes parce qu'ils ont une durée limitée et la ministre doit établir, «par directives, les normes applicables dans le cadre de ces projets-pilotes». Alors, il y a un certain encadrement qui pourrait me convaincre de la nécessité de procéder ainsi, surtout, et j'insiste là-dessus, M. le Président, pour les projets-pilotes. Alors, c'est questionnable, mais on va regarder avec la ministre l'utilité, la nécessité de procéder ainsi.

(10 h 50)

Il y a un deuxième pouvoir de dérogation qui est, quant à moi, M. le Président, plus majeur et plus vaste. À l'article 8 du projet de loi, on indique: Le ministre peut – ça, c'est hors du cadre des pilotes – dans un cas exceptionnel et s'il le juge d'intérêt public, autoriser l'application d'une mesure différente d'une norme prévue à la présente loi ou à ses règlements à l'exception d'une certaine norme. M. le Président, comme législateur, quand j'entends, comme justification, les mots «dans un cas exceptionnel», qui va évaluer le cas exceptionnel? C'est la ministre.

Une voix: C'est sa job.

M. Copeman: Oui, c'est sa job, qu'on me dit à ma gauche, M. le Président, mais sa job est également d'appliquer les lois du Québec, c'est sa job de faire respecter les lois du Québec. Alors, on ne peut pas dire que c'est sa job de faire respecter les lois du Québec puis de se doter de pouvoirs de dérogation importants. Il y a des limites, M. le Président, à l'incohérence, même pour le parti ministériel.

Alors, dans un cas exceptionnel, la ministre peut faire ça. «Et s'il le juge d'intérêt public». «D'intérêt public», M. le Président, est une notion tout à fait passionnante. N'importe qui qui a pris un cours en sciences politiques se souvient de longues discussions de qu'est-ce que c'est, de l'intérêt public. Qui détermine l'intérêt public, au nom de qui et pour qui? C'est des questions tout à fait légitimes. Mais ça ouvre très vaste le pouvoir de la ministre, «s'il le juge d'intérêt public». Moi, mon devoir, M. le Président, c'est de m'assurer que le tout, autant que possible, se passe dans une transparence, en respect des lois de l'Assemblée nationale et en respect de nos pouvoirs comme législateurs, comme 125 représentants de la population québécoise.

Quand on enlève des pouvoirs législatifs puis qu'on en donne à l'exécutif, je questionne beaucoup cette façon de faire, M. le Président. Et je vous fais remarquer simplement là-dessus, entre autres, qu'avec ce pouvoir de dérogation la ministre peut déroger au nombre maximum d'enfants permis dans les installations. S'il y a une chose, quant à moi, M. le Président, qui devrait être sacro-sainte, c'est le nombre maximal d'enfants dans nos services de garde, parce que c'est là un deuxième élément, comme je l'ai mentionné tantôt, de la qualité. On ne peut pas offrir des services de qualité avec trop d'enfants dans les garderies, c'est impossible.

Alors, la ministre se dote d'un pouvoir de déroger au nombre maximum d'enfants. C'est excessivement questionnable, M. le Président. On s'oppose, de ce côté de la Chambre, à cette notion. Il va falloir que la ministre s'explique en long et en large, pourquoi elle a besoin de ces pouvoirs de dérogation généraux, comparés aux projets-pilotes, pourquoi est-ce qu'elle a besoin de ça. Elle va nous dire: C'est pour assurer une certaine flexibilité, qu'il y a peut-être certaines normes et règlements présentement en vigueur qui ne sont pas vivables dans la pratique, dans le quotidien.

Mais, si c'est le cas, que la ministre change les règlements et la loi à cet égard. Si la ministre reconnaît qu'il y a des règlements qui sont difficilement applicables dans le jour au jour dans des installations, qu'elle change la loi et qu'elle change les règlements. Qu'elle procède par la voie normale, qui est par décret gouvernemental au sujet des règlements, qu'elle amende sa loi pour changer certaines normes et règlements, mais qu'elle ne se dote pas d'un pouvoir de le faire elle-même, parce que ça enlève un pouvoir de surveillance aux législateurs québécois, qui devrait préoccuper autant les ministériels que les députés de l'opposition.

C'est une concentration de pouvoirs dans l'exécutif, dans la main des fonctionnaires au ministère, pour lesquels j'ai beaucoup de respect, M. le Président, mais qui n'ont pas la fonction d'imputabilité devant cette Chambre qu'on a comme législateurs. Alors, M. le Président, on se questionne beaucoup sur ce pouvoir de dérogation vaste, et on va s'y opposer.

Mr. Speaker, they are some major flaws in this bill that we see. There are some positive aspects. The inclusion of the notion of children who ordinarily live with people who are responsible for day-care services in a family setting strikes us as being completely normal and appropriate. But these children should not escape from the maximums in the ratios that the Ministry of the Family has established and that we, as legislators, have established, Mr. Speaker.

The fact that people who assist someone who's responsible for childcare services in a family setting will now have access to $5 a day day care is also appropriate and that those children will be eligible for the amounts paid by the Ministry of the Family to the person responsible for the delivery of childcare services in a family setting is also appropriate, Mr. Speaker.

And the ability to appeal decisions of a «centre à la petite enfance», the ability of a person responsible for the delivery of services in a family setting, their ability to appeal decisions of the «centre à la petite enfance» with regard to their recognition as people responsible for services to the Administrative Tribunal of Québec is also a positive development, Mr. Speaker, with the caveat that Administrative Tribunal of Québec already has un backlog of 17 000 cases before its Social Affairs Division, Mr. Speaker.

If the Minister believes that she's going to accelerate the process by taking the appeal out of the hands of the Court, where it currently resides, and shifting it to the Administrative Tribunal of Québec, where there is a backlog of 17 000 cases, I believe she's making an error. If it's to simplify the process, in terms of avoiding lawyers fees, etc., there may be some benefits there, absolutely. The cost of the measure will be quite a bit smaller for the individual. It will in theory open up access to the appeals, and I say again «in theory», Mr. Speaker, much more easily than before the Québec Court. However, with 17 000 cases as a backlog, it's not going to accelerate the process.

There are two powers that the Minister is attributing to herself that cause some concern, Mr. Speaker. One is the power to proceed with pilot projects. And it's not that that causes problems. Pilot project as such are a positive development. We can very easily anticipate the need for certain childcare services outside of 8:00 a.m. to 6:00 p.m. time slot, on weekends, in the evenings and at night. So the need for pilot projects is there, Mr. Speaker. But when we indicate that such pilot projects may be organized according to standards – and I'm quoting article 8 of the bill – that are different from those established by this Act and the regulations, this causes us some difficulty. The regulations and the Act are there to protect the safety of children, to protect their health, to ensure that there are quality services in day cares, and when we begin to give the Minister powers to organize day-care services according to standards other than those that are indicated in the Act, it causes some problem. It may be necessary for the organization of pilot projects, Mr. Speaker, and we will see with the Minister, I assume, in parliamentary commission, what her defense of this particular measure is.

(11 heures)

The other element, that is more troubling, Mr. Speaker, is a general power to derogate from the normal standards in the law, contained also in article 8, and I'll simply quote it to you, Mr. Speaker: «In an exceptional case and where the Minister considers it warranted in the public interest, the Minister may authorize the application of a measure that departs from a standard established by this Act or the regulations...» Mr. Speaker, when we begin, as legislators, to give powers to a Minister to establish childcare services that deviate from the standards established by this Act and by the regulations, we're going down a slippery slope, Mr. Speaker. Especially when the only justification that is required is that it'd be an exceptional case, as determined by the Minister, and when the Minister considers it warranted in the public interest.

Mr. Speaker, you will well know, you, with your long experience in politics, that the whole debate, at various levels of government I may add, both in municipalities and federal level and here of course in the National Assembly, for fifteen years now I believe, Mr. Speaker, almost, that the notion of what is in the public interest is a debatable notion and it is something that has escaped legislators for decades. So we have to examine this very carefully, Mr. Speaker, before we give any powers to a Minister based on such – I would suggest – flimsy argumentation.

Alors, M. le Président, pour conclure, le gouvernement a des défis importants auxquels il doit faire face au chapitre de l'accessibilité, de la création de places, du développement des places, des conditions de travail des travailleurs et travailleuses, des directeurs, directrices, du personnel de soutien en installation, des conditions de travail des responsables des services de garde, de l'organisation des services flexibles sur le territoire du Québec. Ça, c'est tous des défis pour le gouvernement.

M. le Président, nous croyons que le projet de loi n° 26 corrige certaines lacunes mais soulève beaucoup de questionnements également. Alors, pour cette raison, M. le Président, nous allons appuyer le projet de loi. Je vais également, évidemment, solliciter les opinions des intervenants, qui sont généralement très favorables au projet de loi mais qui émettent également certaines réserves.

Alors, nous allons appuyer le projet de loi, avec les réserves que j'avais indiquées dans ma présentation. Et surtout au niveau des pouvoirs de dérogation, M. le Président, on s'oppose au pouvoir de dérogation générale. Il va falloir que la ministre s'explique beaucoup en commission parlementaire, à savoir pourquoi elle a besoin de ce pouvoir. Et je vous le dis d'avance, M. le Président, il ne sera pas suffisant de simplement dire: On a besoin de ça parce que quelques-uns de nos règlements sont inapplicables. Mais, s'ils sont inapplicables, ils devraient être abrogés. Au lieu de donner le pouvoir à la ministre de dévier, ils devraient être abrogés de la façon normale dont on fonctionne, M. le Président, c'est-à-dire soit par décret ou par voie législative. Alors, je vous remercie, M. le Président. Thank you very much, Mr. Speaker.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur le principe du projet de loi n° 26? Est-ce que madame veut exercer un droit de réplique? Non.


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 26, Loi modifiant la Loi sur les centres de la petite enfance et autres services de garde à l'enfance, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des affaires sociales pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Veuillez prendre en considération l'article 8 du feuilleton de ce jour.


Projet de loi n° 24


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 8. L'Assemblée reprend le débat ajourné le 11 mai 1999 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Je reconnais Mme la députée de La Pinière. Mme la députée, la parole est à vous.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, il me fait plaisir, M. le Président, d'intervenir sur le projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives.

Mon collègue le député de l'Acadie et porte-parole dans le dossier a eu l'occasion, M. le Président, d'expliquer les réserves que l'opposition officielle exprime à l'égard de ce projet de loi. Et, dans les notes explicatives, on lit ceci: Ce projet de loi modifie la Loi sur l'assurance automobile dans le but principalement de réviser le régime d'indemnisation des victimes d'accidents de la route.

M. le Président, il faudrait se rappeler d'abord, dans le contexte, qu'avant 1978 le régime de l'assurance automobile souffrait de plusieurs lacunes et que près de 28 % des victimes des accidents d'automobiles n'avaient accès à aucune indemnité. Le système était à ce point injuste qu'une personne qui souffrait de séquelles suite à un accident d'automobile n'avait droit à aucune indemnisation.

Avec l'introduction en 1978 d'un nouveau régime d'assurance automobile administré par la Société de l'automobile du Québec, les personnes accidentées qui avaient subi des pertes réelles attribuables à des dommages corporels avaient droit à des indemnités et pouvaient aussi être compensées. La Loi sur l'assurance automobile définissait alors le type d'indemnité auquel les accidentés avaient droit, et ils sont de trois ordres: premièrement, l'indemnité de remplacement du revenu, l'indemnité forfaitaire pour séquelles permanentes et l'indemnité de décès.

À titre d'exemple, selon les sources du rapport du Vérificateur général du Québec, à la page 67 du tome I du rapport du Vérificateur général, le rapport portant sur l'année 1997-1998, on peut lire ceci, M. le Président, et je cite au texte: «Au cours de l'exercice 1997, la Société – on entend par là la Société de l'assurance automobile – a reçu 28 388 nouvelles demandes d'indemnité de victimes d'accidents d'automobiles, elle a versé un total de 504 000 000 $ en indemnités, dont 192 600 000 $ en indemnités de remplacement du revenu, 107 700 000 $ pour les séquelles permanentes, 31 300 000 $ en frais de réadaptation et 24 900 000 $ en aide personnelle.» Donc, M. le Président, nous avons déjà un système qui fonctionne.

Le Vérificateur général a eu également l'occasion d'intervenir sur ce dossier en 1998 lors de la commission de l'administration publique qui a tenu une audition du président-directeur général de la Société de l'assurance automobile en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics. Lors de cette audition, le Vérificateur général a relevé un certain nombre de lacunes qui ont été constatées dans le traitement des dossiers d'indemnisation des victimes des accidents d'automobiles. Ces défaillances du régime d'indemnisation touchaient particulièrement l'évaluation médicale des personnes accidentées, l'encadrement des interventions en réadaptation et la détermination du montant de certaines indemnités. Les constats du Vérificateur général ont amené la Société de l'assurance automobile à corriger les grilles sur lesquelles on se basait pour déterminer les montants des indemnités.

C'est en gros, M. le Président, en parlant du contexte, l'état de la situation du dispositif législatif et réglementaire qui régit le régime des indemnités des victimes d'accidents d'automobiles.

Alors, le projet de loi que nous propose le ministre des Transports apporte des modifications substantielles à ce régime. Je vous en cite quelques exemples. Le projet de loi a pour principal objectif donc de réviser le régime d'indemnité des victimes d'accidents d'automobiles. Une des modifications proposées vise à augmenter l'indemnité maximale accordée pour un préjudice non pécuniaire et pour une victime qui décède sans personne à charge.

(11 h 10)

Il propose aussi que les accidentés ayant des souffrances et autres inconvénients temporaires pourront être indemnisés. Il est aussi prévu à l'intérieur de ce projet de loi de modifier les conditions d'admissibilité relatives à l'indemnité pour frais de garde, à l'indemnité lors du préjudice matériel et des ajustements à certaines dispositions pour mieux refléter la perte économique.

Le projet de loi introduit des nouvelles dispositions financières pour énoncer explicitement la possibilité d'utiliser des revenus de placements comme source de financement et pour permettre à la SAAQ, avec autorisation du gouvernement, d'utiliser les surplus non affectés pour des remises sur les contributions d'assurance, M. le Président.

Au surplus, le projet de loi de loi 24 suscite à nos yeux, de l'opposition officielle, plusieurs interrogations. Il suscite plusieurs interrogations, tant en raison de son importance que de son caractère technique. Entre autres, il est difficile d'évaluer les conséquences réelles de ce projet de loi sur les coûts qu'il entraînera pour le gouvernement ainsi que sur le nombre de personnes qui seront affectées par les nouvelles conditions d'admissibilité.

Il faut donc, M. le Président, prendre le temps d'analyser attentivement ce projet de loi pour en déterminer l'impact réel sur les personnes accidentées. Il faut, dans cet exercice, s'assurer que les victimes des accidents d'automobiles en sortent gagnantes, parce que c'est l'objectif d'un projet de loi d'améliorer la qualité de vie, d'améliorer la qualité des services au citoyen.

C'est pourquoi, M. le Président, à ce stade-ci de l'étude en première lecture du projet de loi 24, il nous paraît justifié de demander que des consultations soient tenues au préalable en commission parlementaire afin d'entendre les différents groupes et les citoyens qui sont affectés ou concernés par l'impact de ce projet de loi.

Au moment où on se parle, les groupes concernés par ce débat n'ont même pas été informés du dépôt de ce projet de loi. C'est le cas notamment de la Fondation des accidentés de la route et de l'Alliance des regroupements des usagers des transports adaptés du Québec. Voilà deux organismes clés qui sont concernés au premier chef; ils n'ont même pas été informés et impliqués dans ce débat. Il y a, bien entendu, d'autres organismes qui sont concernés et qui doivent intervenir pour nous donner leur éclairage, leur point de vue, et voir comment, eux qui sont sur la ligne de front perçoivent ce projet de loi.

Mais, M. le Président, au-delà des aspects techniques et pécuniaires du projet de loi, il y a une dimension extrêmement importante qui est introduite dans ce projet de loi. Et elle est tellement importante, M. le Président, à nos yeux, mais, malheureusement, elle ne figure même pas dans l'énoncé des notes explicatives. Et cet aspect du projet de loi qui nous inquiète touche spécifiquement les articles 35 et 40, qui touchent à l'échange des renseignements nominatifs entre la Société de l'assurance automobile du Québec et le ministre de la Santé et des Services sociaux.

Alors, la modification qu'apporte le projet de loi de loi 24 ouvre la voie à toutes sortes d'abus, à toutes sortes d'arbitraires, considérant, M. le Président, que la Commission d'accès à l'information, si elle refuse de donner son approbation pour l'échange de ces informations nominatives, eh bien, le gouvernement nous dit qu'il va passer outre et qu'il va, unilatéralement, procéder à l'échange des informations nominatives.

Alors, quand on sait comment ce gouvernement traite les données personnelles et les informations nominatives – et je n'ai pas besoin, M. le Président, de rappeler tous les dossiers qui ont fait les manchettes depuis un certain temps et qui démontrent de façon très éloquente les défaillances du système et la gravité aussi de la situation qui a été révélée par l'opposition officielle mais aussi par d'autres intervenants – quand on regarde ce qui se passe devant nos yeux avec le dossier des informations nominatives, il y a lieu de s'inquiéter et de s'interroger sur la pertinence d'introduire les dispositions qui ont été amenées à l'intérieur du projet de loi n° 24, notamment en ce qui a trait aux articles 35 et 40. Alors, pour ces raisons-là, il y a lieu de s'inquiéter.

Et, si vous le permettez, M. le Président, j'aimerais citer les modifications qui sont apportées dans le projet de loi n° 24 à l'article 35. Alors on lit ceci, à la page 10 du projet de loi: «Les parties visées au présent chapitre peuvent échanger les renseignements nominatifs[...]. Elles concluent alors une entente précisant notamment les renseignements transmis, les moyens mis en oeuvre pour en assurer la confidentialité ainsi que les mesures de sécurité. Cette entente est soumise pour avis à la Commission d'accès à l'information.» Puis on lit un peu plus tard: «En cas d'avis défavorable, l'entente peut être soumise au gouvernement pour approbation; elle entre alors en vigueur le jour de son approbation.»

Alors, M. le Président, moi, je ne suis pas prête à aller dans cette direction et permettre au gouvernement l'échange des informations nominatives en ce qui a trait aux accidentés de l'automobile. Cette disposition permet au gouvernement, si elle est adoptée telle quelle, d'avoir accès à des échanges de renseignements personnels qui touchent des individus bien ciblés, bien identifiés, parce qu'ils sont identifiés comme accidentés de l'automobile. Elle est d'autant plus dangereuse qu'elle n'offre aucune protection à ces personnes-là quant à leur vie privée et quant aux informations qui les concernent au plan personnel.

De plus, en signant une entente entre la Société d'assurance automobile et le ministère de la Santé et des Services sociaux, la Commission d'accès à l'information n'aura qu'un avis, qu'un rôle d'aviseur finalement, puisque son refus, si le refus est donné, n'arrêtera pas le gouvernement d'agir et de transiger les données nominatives, les renseignements personnels et confidentiels qui touchent les accidentés d'automobiles.

Et c'est assez, M. le Président, pour nous alerter et nous inquiéter quand on sait comment le gouvernement se comporte dans ce dossier et le peu, je dirais, de souci qui est accordé depuis un certain temps à cette question. On a vu la saga dans laquelle était impliquée la Commission d'accès à l'information, toutes les contradictions, les révélations. On a vu aussi comment les choses se sont passées au ministère du Revenu et ont amené la ministre et la sous-ministre à démissionner. On assiste encore aujourd'hui à des transferts d'informations à une compagnie de sondage par le Bureau de la statistique du Québec, qui sont aussi des informations nominatives. Ce n'est pas très rassurant.

On ne peut pas, M. le Président, aller dans cette direction tel que le ministre le propose dans le projet de loi n° 24. Dans le mémoire au Conseil des ministres qui a été présenté le 25 février 1999 – j'ai ici la partie accessible au public – on lit que le gouvernement a vraiment l'intention d'aller dans cette direction, qu'il veut absolument continuer à transiger, à échanger des informations nominatives sans aucun contrôle. Il veut qu'on lui donne le bon Dieu sans confession; on n'est pas prêts pour ça, M. le Président.

(11 h 20)

Alors, dans le document en question, le mémoire au Conseil des ministres, on peut lire, au point 3.6 intitulé Accès aux renseignements détenus par la Régie de l'assurance-maladie du Québec , on peut lire ceci: «Afin de permettre l'évaluation de ces coûts – on entend par là les coûts inhérents aux accidents d'automobiles – l'article 155.4 – ici, dans le projet de loi n° 24 – prévoit la possibilité d'échanger des renseignements nominatifs détenus par les parties concernées.» Or, la Régie de l'assurance-maladie du Québec n'a pas le pouvoir de transmettre à la Société de l'assurance automobile du Québec de tels renseignements.

M. le Président, le législateur d'avant, dans sa grande sagesse, avait bien compris que la Régie de l'assurance-maladie n'avait pas d'affaire à transmettre des données nominatives. Et aujourd'hui le projet de loi qui nous est proposé veut modifier, lever le verrou pour permettre au gouvernement d'échanger, de transiger, de transmettre des informations personnelles, confidentielles et nominatives. Et ça, M. le Président, c'est une pente qu'il ne faut pas prendre. Et je pense que ce gouvernement se trompe s'il veut aller dans cette direction.

Nous, en tout cas, on n'est pas prêts à le suivre parce que, pour nous, M. le Président, les informations nominatives, les informations confidentielles, les informations personnelles, c'est quelque chose d'extrêmement fondamental au niveau des droits et des libertés de la personne, et on ne peut pas laisser ça entre les mains de l'État pour les transiger à sa convenance pour des raisons de comptabilité. Parce que c'est ça qui est l'objectif.

Alors, le ministre, dans son document qu'il a soumis au Conseil des ministres, la solution proposée: modifier la Loi sur l'assurance-maladie afin de permettre à la Régie de l'assurance-maladie du Québec de transmettre les renseignements nécessaires à l'application des ententes conclues. Ça, M. le Président, il n'en est pas question, en tout cas, de notre part. On trouve que c'est extrêmement dangereux de permettre au gouvernement de s'immiscer dans la vie privée des gens et de pouvoir disposer des informations qui les concernent, surtout les informations nominatives.

Alors, pour toutes ces raisons qui ont été invoquées éloquemment par mon collègue le député de l'Acadie, nous sommes ouverts à discuter de ce projet de loi. On souhaiterait que le ministre puisse être à l'écoute des propositions qui viennent de l'opposition officielle et qu'il comprenne aussi les réserves et les inquiétudes qu'on a par rapport à ce projet de loi, afin de le bonifier, afin de le modifier et de s'assurer qu'ultimement ce projet de loi va servir les intérêts des citoyens et plus particulièrement les citoyens qui sont accidentés de l'automobile.

Vous le savez, M. le Président, que, comme députés, dans nos comtés, on reçoit souvent des gens qui sont aux prises avec la Société de l'assurance automobile du Québec. C'est souvent des dossiers très complexes, très épineux, difficiles, parfois qui prennent des années à être réglés, des mois à être réglés. Et la question des renseignements personnels, c'est une question fondamentale. On ne peut pas suivre le gouvernement et le ministre dans cette voie-là.

C'est pourquoi, compte tenu de l'importance du projet de loi, compte tenu de sa complexité, de sa portée immédiate et à long terme, on souhaiterait, M. le Président, et on propose qu'il y ait une commission parlementaire afin que tous les intervenants puissent se faire entendre, dire leur mot sur ce projet de loi, amener les propositions qui sont les bienvenues et le bonifier dans le sens des intérêts des citoyens du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de La Pinière. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Chevrette: En réplique, je voudrais...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Un instant! Il n'y a pas d'autres interventions? Alors, en vertu de votre droit de réplique, je vous cède la parole, M. le ministre.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Tout d'abord, M. le Président, je n'avais pas l'intention de réagir, mais, après avoir entendu les quatre intervenants de l'opposition officielle, et plus particulièrement la dernière, la député de La Pinière, qui est devenue le casier postal des documents passéistes, périmés, vétustes et dépassés, je voudrais au moins apporter une certaine réponse, parce que l'opposition libérale s'apprête à voter contre un projet de loi, projet de loi qui fait quoi?, qui améliore sensiblement, pour les citoyens victimes ou des familles victimes d'accidents, les indemnités, qui, en diminuant une indemnité... C'est qu'on ne paiera plus dorénavant dans le cas de ce qu'on appelle communément les «hit-and-run» ou, en bon français, des délits de fuite. Eh bien, dorénavant, ceux-là, ils paieront par leur assurance, comme fait une ville, une grosse compagnie comme Bell Canada, Hydro-Québec. On payait... C'était rendu que c'étaient les propriétaires de permis de conduire qui correctement assument leur pitance qui payaient pour des délits de fuite. Ils ne sont pas plus responsables pour les délits de fuite que n'importe quelle société, n'importe quelle ville, n'importe quelle structure. C'est la seule chose qu'on baisse, mais on ne le fait pas pour l'individu qui aurait un délit de fuite par rapport à sa propre propriété. Par exemple, quelqu'un frapperait dans une entrée de cour l'automobile d'un individu ou des biens d'un individu sur sa propre propriété, pour les individus, on garde la clause de portée générale comme elle était avant.

Qu'est-ce qu'il y a de mal, à ce moment-là, dans un projet de loi qui fait passer une indemnité, par exemple, de 138 000 $ à 175 000 $? Les libéraux votent contre ça, en principe. J'ai hâte de voir comment ils vont s'expliquer. D'ailleurs, ils ne vont probablement pas exiger de vote nominal, parce que les voir se lever pour voter contre une loi qui améliore les indemnités de façon substantielle comme on le fait... Aie! On indemnise dorénavant les souffrances, les pertes de jouissance de la vie, comme on dit. Ce n'était pas le cas avant; on le fait. Les libéraux votent contre ça. Je ne sais pas qui ils représentent. J'ai hâte de voir qui ils représentent.

On fait porter, par exemple, aussi une victime de décès sans personne à charge de 18 000 $ à 40 000 $. Ils votent contre ça. Il faudrait qu'ils nous expliquent pourquoi, quels sont les motifs qui les incitent à voter contre une amélioration tangible de la législation. Avez-vous remarqué qu'ils n'ont rapporté... Un seul point sur lequel ils ont essayé de dire que c'était très dangereux, c'est les renseignements personnels. C'est vrai qu'on a le droit de lire, puis ce n'est pas donné à tout le monde de comprendre. Je suis convaincu que la députée de La Pinière a lu, mais n'a pas compris.

Savez-vous ce qu'on fait? C'est pour protéger les 3 500 000 propriétaires de permis de conduire qu'on dit: Dorénavant, la RAMQ et la Société de l'assurance automobile, vous allez évaluer comment coûtent les accidents de la route, parce qu'on oblige la Société de l'assurance automobile à payer le montant que ça représente, les accidents de la route. C'est pour aider précisément à ce qu'on paie notre dû correctement et que les citoyens, eux, qui n'ont pas nécessairement de permis de conduire reçoivent les pitances correctes à la Régie de l'assurance-maladie. C'est juste l'évaluation globale. Vous avez remarqué qu'avant il n'y avait rien? Il n'y avait pas de mécanisme pour en arriver à cela. On dit à la Société de l'assurance automobile: Vous allez être obligés de vous asseoir avec la RAMQ puis dire: Si ça coûte 80 000 000 $, la Société de l'assurance automobile devra verser 80 000 000 $ à la Régie de l'assurance-maladie. C'est ça, les échanges de renseignements confidentiels, nominaux.

Vous avez remarqué qu'ils sont traumatisés, eux, de faire connaître leur nom, leur adresse, leur numéro de téléphone et leur date de naissance? Ils sont traumatisés par ça. Vous avez remarqué toute la lutte qu'ils ont faite sur l'identification de l'électeur? Rappelez-vous de... Ils s'érigent en vierges offensées. Les yeux fermés, ils disent: C'est dangereux, M. le Président. Ils se lèvent en Chambre, c'est eux autres mêmes qui citent des cas de renseignements spéciaux, puis ils font les vierges offensées parce qu'on dit: Pas de renseignements spéciaux sur les données fiscales, des renseignements tout simplement nous permettant d'être équitables envers les différents usagers de la société, que ce soit au niveau de l'assurance automobile ou au niveau de la Régie de l'assurance-maladie.

(11 h 30)

C'est ça qu'il dit, l'article 40 sur lequel ils s'appliquent, ils se sont assis tous les quatre pour faire voir qu'ils connaissaient quelque chose. Et il y a le député de Chomedey qui s'est levé puis qui a donné une leçon de très grande moralité, lui qui connaît ça, les tribunaux, il a déjà fait face à ça, lui. Il sait ce que c'est qu'un notaire, il sait tout ça. Donc, ce n'est pas ça qu'on demande. Quand on lit l'article 40, là, c'est très bien dit, là, puis je vais le lire juste pour le renseignement, je pense, de la population, pour montrer que, quand on veut faire voir ou bien qu'on ne comprend pas réellement – mais j'espère que c'est parce qu'ils font voir qu'ils ne comprennent pas... Je vais vous lire le paragraphe: «Il n'interdit pas non plus de révéler un renseignement obtenu pour l'exécution de la présente loi à la Société de l'assurance automobile du Québec et au ministère de la Santé et des Services sociaux aux fins – seulement – de l'établissement du coût de financement des services de santé fournis à la suite d'un accident d'automobile.» Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que t'as 2 000 accidents d'automobiles par année, 3 000, je ne sais pas, 50 000. Ça coûte combien en ambulance puis en frais de santé? Ils vont s'asseoir ensemble puis ils vont dire: C'est 82 000 000 $ ou c'est 83 000 000 $. Il n'y avait rien pour établir ça avant. C'est une mécanique pour établir ça, pour dire à l'assurance automobile: Vous paierez la RAMQ du Québec. C'est juste ça que ça dit, et pour ces seules fins là.

Mais, quand on est pernicieux puis qu'on ne veut absolument pas comprendre, eh bien, on essaie de dire à la population: Ils veulent divulguer des renseignements. Je ne sais pas quel avantage ils ont à se cacher, certains individus; peut-être que c'est leur propre. Mais, moi, je travaille dans des dossiers, là... On parle de l'identification de l'électeur, on va avoir à voter ça très prochainement, là. Il y en a qui ont honte de se montrer la binette. Il y en a qui ont honte de donner des renseignements qui sont de nature à améliorer...

Et l'équité, à part de ça, entre les assurés de l'automobile et la société québécoise, qui est représentée par la RAMQ. Je n'ai aucune honte à faire ça. C'est pour une plus grande équité, à part ça, si on fait ça. Puis surtout que ces magistraux libéraux ont été les seuls à amputer l'assurance automobile de 2 000 000 $, les seuls qui ont pigé dans la caisse d'assurance collective 2 000 000 $, qui auraient pu être retournés, soit dit en passant, aux assurés qui paient leur pitance chaque année puis qui paient leur plaque d'immatriculation puis leur permis de conduire.

Donc, M. le Président, ce qu'on vise par cette loi, nous, c'est, parce qu'on a des surplus, des surplus accumulés, d'améliorer les indemnités. Ce qu'on vise, c'est qu'on paie notre quote-part, véritablement, à la Régie de l'assurance-maladie, et ce qu'on vise, c'est de faire en sorte qu'on ait une plus grande qualité de vie dans l'épreuve. Il y en a qui souffrent, qui sont astreints, contraints de ne pas pratiquer des activités qu'ils aimaient; il n'y avait rien. Aujourd'hui, pour ce genre de souffrance morale, ce qu'on appelle les pertes de jouissance de la vie, il y aura des indemnités. En quoi le Parti libéral peut-il s'objecter à cela? Si je ne me retenais pas, je demanderais à mon leader... je dirais: Demandez donc un vote nominal pour les voir voter contre l'amélioration d'une loi, contre le fait que les usagers, les propriétaires ne puissent pas bénéficier pleinement, et on verrait Mme la députée de La Pinière se lever et voter probablement sur un document qui existait en l'an 1902.

Donc, je voudrais tout simplement inviter les parlementaires à voter pour cette loi, qui est réaliste et puis qui sera la bienvenue pour tous les détenteurs de permis de conduire, pour tous les détenteurs de véhicules au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: M. le Président, en vertu de l'article 213, est-ce que le ministre me...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une minute. Oui. En vertu de 213, M. le ministre, est-ce que vous permettez que le député de l'Acadie vous pose une question brève?

M. Chevrette: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui? Alors, votre question doit être brève, et la réponse également. M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Comme le ministre des Transports semble très fier de son projet de loi, est-ce que le ministre des Transports va consentir à ce que nos concitoyens qui ont vécu les conséquences d'un accident de la route viennent partager son enthousiasme lors d'une consultation générale, en leur permettant de dire eux-mêmes ce qu'ils ont à dire et non pas de se fier à ce que le ministre interprète comme leur position?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, ils ont été neuf ans à le dire sans que personne écoute. Aujourd'hui, on a un ministre et un gouvernement qui écoutent et qui transposent exactement leurs demandes, que vous n'avez jamais comprises. Donc, on n'a pas besoin de les faire venir, on réalise les actes qu'ils nous ont demandé de poser.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ceci met fin à cette intervention. Le principe du projet de loi n° 24, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des transports et de l'environnement

M. Boisclair: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des transports et de l'environnement pour son étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boisclair: Il faudrait donner la parole à ma collègue de la Justice en appelant l'article 13 du feuilleton de ce jour, s'il vous plaît, M. le Président.


Projet de loi n° 31


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 13. Mme la ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile. Mme la ministre de la Justice, je vous cède la parole.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile, qui nous est soumis aujourd'hui pour l'adoption de principe, propose diverses mesures de nature à faciliter l'administration de la justice civile. Afin de mieux saisir la portée du projet de loi, vous me permettrez tout d'abord de préciser le contexte dans lequel il se situe.

Vous n'êtes pas sans savoir que, depuis plusieurs années, la simplification et l'allégement des procédures judiciaires sont des préoccupations constantes du ministère de la Justice, lequel ne cesse d'examiner le fonctionnement de notre système judiciaire pour le rendre plus simple et plus accessible et notre justice civile plus rapide, plus efficace et moins coûteuse tant pour les citoyens que pour l'État.

À cet égard, une révision en profondeur de la procédure civile est actuellement en cours non seulement afin d'intégrer toutes les procédures nouvelles qui se sont superposées depuis l'adoption du Code de procédure civile, en 1965, mais également pour en limiter le nombre, les simplifier et les alléger. De plus, cette révision doit tenir compte des nouveaux modes amiables de règlement de litiges ainsi que des nouvelles tendances modernes à la déjudiciarisation. Enfin, elle doit assurer un meilleur équilibre entre les parties et le tribunal, et ce, tout en prenant en considération les attentes et les besoins des magistrats, des avocats, des intervenants de la justice et, d'abord et avant tout, des justiciables.

Il va de soi, M. le Président, qu'une telle révision ne peut se faire en vase clos ni être l'apanage d'un seul groupe. C'est pourquoi le comité de révision de la procédure civile est formé de représentants de la magistrature, du Barreau, des facultés de droit et du ministère de la Justice. Il s'agit là d'un travail de longue haleine qui nécessite de multiples études, discussions et échanges entre les intervenants. Il nécessite aussi du temps afin que les changements envisagés soient dûment analysés et les conséquences potentielles mûrement pesées. En d'autres termes, malgré tous les efforts déployés par les intéressés, il faut prendre le temps nécessaire pour effectuer une réforme solide, et il passera encore quelques années avant que le Québec puisse se doter d'un Code de procédure civile reflétant les valeurs et les besoins contemporains.

Entre-temps, notre procédure actuelle doit cependant continuer de répondre aux exigences de modernisation d'aujourd'hui. C'est pourquoi, lorsque l'idée de la formation du comité a vu le jour, il a été convenu avec la magistrature et le Barreau que les travaux de révision du Code de procédure civile ne devraient pas empêcher, le cas échéant, de faire des améliorations ponctuelles ou d'apporter des correctifs pressants ou des ajustements à la pratique quotidienne des tribunaux. À cet égard, un comité ad hoc constitué des représentants de la magistrature, du Barreau et du ministère a été formé afin d'identifier ces améliorations, ces correctifs ou ces ajustements qui s'avéraient nécessaires. C'est ainsi qu'il a recommandé d'apporter immédiatement certaines modifications au Code, et c'est là l'objectif du projet de loi n° 31.

Ceci dit, il est important, M. le Président, d'examiner de plus près certaines de ces modifications. Je dis certaines parce qu'il serait fastidieux de toutes les analyser ici, d'autant plus que nous aurons tout le loisir de le faire lors de l'étude article par article en commission parlementaire.

D'abord, j'aimerais attirer votre attention sur les modifications proposées à la procédure devant la Cour d'appel. Les articles 491 à 524 du Code précisent quelles sont les règles auxquelles sont soumis tous les appels à la Cour d'appel. Rappelons que, règle générale, un appel doit être formé dans les 30 jours de la date du jugement, et ce, par le dépôt d'un exemplaire et de deux copies d'une inscription signifiée à l'autre partie. De plus, pour que l'appel soit régulièrement formé, il doit être déposé au greffe dans les 45 jours du jugement une attestation écrite certifiant que le mandat a été donné de traduire les notes sténographiques. L'intimé doit ensuite comparaître dans les 10 jours de l'inscription en appel. L'appelant dispose alors de 120 jours pour déposer son mémoire, et, dans les 90 jours suivants, l'intimé doit faire de même.

Afin d'alléger et d'accélérer le processus d'appel, et ce, dans un domaine particulièrement sensible pour les citoyens, il est proposé que, dans les matières familiales, les parties procèdent par une voie accélérée plutôt que par la voie ordinaire. En substance, il s'agit de remplacer, en matière familiale, le mémoire d'appel actuellement prévu aux articles 503 et 507 du Code par une argumentation écrite conforme aux modalités prescrites par les règles du Code de procédure de la Cour d'appel en matière civile.

(11 h 40)

De plus, il appartiendra au juge ou au greffier de déterminer le moment de l'audition du pourvoi et d'établir avec les parties une échéance pour la production de leur argumentation et des autres documents pertinents. À noter que cette modification prévoit également la possibilité qu'un pourvoi en matière familiale puisse procéder selon la procédure ordinaire si le juge de la cour en décide ainsi en raison soit de la complexité de l'affaire ou des circonstances particulières. Par ailleurs, l'article 509 du Code de procédure civile prévoit qu'en appel il y a ouverture notamment à intervention, reprise d'instance, constitution d'un nouveau procureur, récusation, désaveu et désistement dans les mêmes cas qu'en première instance.

Cependant, seuls certains incidents sont de la compétence d'un juge seul, les autres relevant du banc de la cour siégeant au nombre de trois juges. Le banc de la cour doit donc régler des incidents qui, dans des juridictions de première instance, sont de la compétence d'un juge seul. Ainsi en est-il, par exemple, de la réunion d'actions. Il est donc proposé d'étendre la compétence du juge siégeant seul afin de libérer d'autant le banc de la cour, qui, normalement, est de trois, et de réduire les délais.

Avec cette modification, en appel, un juge sera compétent pour entendre tous les incidents prévus aux articles 199 à 273.2 du Code, dans la mesure où ils sont applicables. Ces incidents pourront être soulevés par requête, et la procédure sera la même qu'en première instance, à moins de règles de pratique contraires.

Dans la même optique, la compétence du greffier de la Cour d'appel est actuellement très limitée. Il y aurait avantage à enrichir sa fonction en lui permettant d'entendre tant les requêtes pour cesser d'occuper et pour substitution de procureur que les requêtes pour prolonger le délai de production des mémoires, ou encore pour autoriser la production d'un énoncé supplémentaire à l'avis d'inscription. Toutefois, s'il estime que l'intérêt de la justice le requiert, le greffier de la Cour d'appel pourra déférer la requête qu'on lui présente à un juge de cette Cour. Dans tous les cas, la décision du greffier pourra, à l'instar de ce qui se fait en première instance, être révisée par un juge de la Cour.

Enfin, l'article 503 du Code prévoit, entre autres, que dans les 120 jours du dépôt de l'inscription d'un jugement en appel l'appelant doit produire au greffe son mémoire en sept exemplaires et qu'il doit en signifier deux autres exemplaires à l'intimé. Ce dernier doit également, dans le délai imparti, produire au greffe son mémoire en sept exemplaires et en signifier deux autres exemplaires à l'appelant.

La production des mémoires d'appel constitue une masse documentaire énorme que nous nous devons de réduire par l'utilisation des moyens technologiques modernes. En effet, le seul examen des dossiers d'appel que les plaideurs déposent régulièrement à la Cour, comme les expériences vécues lors de certaines auditions, indiquent que les méthodes de production et de consultation des mémoires d'appel sont désuètes. Il est donc souhaitable que les mémoires d'appel puissent, en tout ou en partie, être préparés et produits par un support informatique. Puisqu'il s'agit toutefois d'une nouvelle manière de faire, l'utilisation du support informatique ne vaudra que si toutes les parties y consentent et qu'un juge de la Cour d'appel l'autorise.

Toujours en ce qui concerne la procédure devant la Cour d'appel, il y a lieu de mentionner la modification suggérée à l'article 26 du Code. Cet article, M. le Président, prévoit quels sont les jugements qui peuvent faire l'objet d'un appel à la Cour d'appel. Cet appel peut être de plein droit ou sur permission d'un juge de cette Cour. La modification proposée ajoute un troisième alinéa à cet article. Ce nouvel alinéa stipule que l'appel d'un jugement de la Cour supérieure qui rejette une demande en évocation ou une demande en révision, et ce, en application de l'article 846 du Code, requerra dorénavant la permission d'un juge de la Cour d'appel qui pourra l'accorder si l'intérêt de la justice le requiert.

Actuellement, un tel jugement bénéficie d'un appel de plein droit. Or, afin d'améliorer l'efficacité de la Cour d'appel, puisque les demandes prévues ont déjà fait l'objet d'une décision d'un organisme administratif suivie d'une confirmation par la Cour supérieure, l'on estime que la modification ainsi apportée au droit d'appel ne nuirait absolument en rien aux parties et servirait mieux les intérêts de la justice.

Il m'apparaît également important de souligner que des modifications sont proposées à la procédure par voie de requête en matière familiale. Ces modifications ont pour but de limiter la preuve par affidavit et d'uniformiser le régime applicable à toutes les procédures par voie de requête en matière familiale. À cet égard, il convient de souligner que la cueillette d'affidavits donne lieu présentement, et particulièrement en droit de la famille, à des scènes assez tristes telles que la production par chacun des parents d'affidavits contradictoires signés par des enfants souvent dépassés par les événements, M. le Président. En outre, les affidavits des parents et amis de chacun des conjoints sont rarement utiles, faute d'objectivité. De plus, l'intervention par affidavit des membres de la famille élargit le conflit entre deux conjoints et alimente souvent l'hostilité et donc l'agressivité des justiciables.

En conséquence, il est proposé que la preuve par affidavit détaillé en matière familiale ne soit plus la règle et que les parties puissent avoir le choix, la liberté de choisir, de procéder de façon ou de présenter une preuve orale sans autorisation du tribunal. Dans ce nouveau régime applicable à toutes les requêtes pour pension alimentaire et garde d'enfant, les parties pourront, si elles le désirent, faire leur preuve au moyen d'un seul affidavit chacune, suffisamment détaillé pour établir les faits au soutien de leurs prétentions. Si l'intimé procède de cette façon, le requérant aura alors le droit de lui signifier un seul affidavit détaillé en réplique. Tout autre affidavit détaillé devra être autorisé par le tribunal.

De plus, à défaut d'entente entre les parties sur le déroulement de l'instance, lors de la présentation de la requête, le tribunal, après examen des questions de droit et de fait en litige, pourra jouer un rôle plus actif dans la gestion du dossier, notamment décider sur les moyens propres à simplifier ou à accélérer la procédure et à abréger l'audition, ainsi que sur l'opportunité d'amender les actes de procédure, d'admettre quelque fait ou document ou encore de fixer, le cas échéant, les modalités et le délai de la communication des autres affidavits détaillés ainsi que des pièces que les parties entendent produire. Cette façon de procéder a déjà fait ses preuves, notamment en matière de respect de la réputation et de la vie privée ou encore de droits et obligations résultant d'un bail, et nous croyons que ces améliorations donneront d'aussi bons résultats en matière familiale.

La procédure en première instance fait également, M. le Président, l'objet de quelques propositions de modification. Je veux ici ne faire état que de trois d'entre elles concernant respectivement la liste des témoins des parties en litige, le préavis d'expulsion à l'égard d'un bien et le dépôt des rapports psychologiques et psychosociaux. L'article 275.1 du Code de procédure civile stipule que, «lorsque les règles de pratique prévoient la délivrance d'un certificat d'état de cause, chacune des parties peut, après inscription de la cause pour enquête et audition, déposer au greffe, conformément à ses règles, sa déclaration de mise au rôle d'audience. Ces déclarations doivent être signifiées aux deux parties». Présentement, cet article ne vise que les litiges portés devant la Cour supérieure.

Afin d'assurer une meilleure gestion des dossiers, il est proposé que chaque partie dépose au greffe, et ce, aussi bien en Cour du Québec qu'en Cour supérieure, la liste de ses témoins et l'objet de leur témoignage, sauf si le tribunal juge qu'il y a une raison valable de ne pas les divulguer. Ces listes seront déposées conformément aux règles de pratique de chaque cour.

Dans un autre ordre d'idées, lorsque la partie condamnée à livrer ou à délaisser un bien meuble ou immeuble ne s'exécute pas dans le délai imparti, le demandeur peut être mis en possession en vertu d'un bref ordonnant l'expulsion du défendeur ou de lui enlever les biens, selon le cas. L'article 565 du Code prévoit cependant qu'un bref d'expulsion ne peut être exécuté le samedi ni un jour non juridique et doit, avant d'être exécuté, avoir été précédé d'un préavis d'au moins 48 heures signifié au défendeur. Or, il arrive qu'un préavis d'expulsion soit signifié à la limite de l'heure de fermeture des bureaux d'avocats pour la fin de semaine, de sorte que le débiteur ne peut rejoindre un procureur pour contester le bref d'expulsion. Afin de corriger cette situation, il est proposé que le préavis soit signifié au moins deux jours juridiques francs plutôt que 48 heures, afin que le bref d'expulsion ne puisse être exécuté.

Enfin, en ce qui a trait à la modification concernant les rapports psychologiques ou psychosociaux, il convient de mentionner que, dans l'état actuel des choses, ces rapports sont parmi les plus utilisés devant les tribunaux, notamment en matière familiale. Or, l'article 294.1 du Code ne prévoit pas que ces rapports peuvent être produits pour tenir lieu de témoignage. Cette situation s'avère très onéreuse, tant pour le justiciable que pour l'appareil judiciaire, en termes de déplacements pour l'expert, de délais d'attente de la cause, de remises de témoignage, etc. Il est donc proposé de modifier cet article 294.1 afin de permettre le dépôt de ces rapports.

Ceci conclut, M. le Président, la présentation des principales modifications que propose le projet de loi n° 31. Quant aux autres modifications que nous y retrouvons, elles sont essentiellement de nature technique, de concordance ou encore de terminologie.

En terminant, j'aimerais rappeler que le projet de loi n° 31 est le fruit des travaux combinés de la magistrature, du Barreau et du ministère de la Justice. Des consensus dégagés entre ces trois intervenants du monde judiciaire et qui se traduisent dans le présent projet de loi sont la preuve d'une collaboration étroite et sont de bon augure pour l'entreprise ambitieuse que constitue la révision de notre procédure civile. Dans les circonstances, je souhaite que l'opposition nous offre également sa collaboration et qu'elle donne son accord au principe du projet de loi n° 31, Loi modifiant le Code de procédure civile, et ce, pour le meilleur intérêt de la justice et des justiciables. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Merci, Mme la ministre. Alors, sur le projet de loi n° 31, quant à son principe, je reconnais maintenant le porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, M. le député de Marquette.

(11 h 50)


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. La ministre demande la collaboration de l'opposition. Je lui dis à l'avance que, bien sûr, elle peut compter sur l'opposition pour faire avancer les dossiers à chaque fois qu'il s'agit d'alléger et de désengorger les tribunaux, que ce soit au niveau civil, criminel, pénal, mais également au niveau des tribunaux administratifs. Mais j'aimerais lui dire également... J'ai sollicité sa collaboration à plusieurs reprises pour qu'elle puisse me transmettre des documents dans le cadre de l'étude des crédits qui y a eu lieu au salon rouge. La ministre me disait: Avec plaisir, je vais vous les transmettre. Ça fait à peu près trois semaines que j'attends les documents; je ne les ai toujours pas reçus. La ministre aurait-elle la même gentillesse et la même courtoisie que je lui offre d'offrir mon entière collaboration pour qu'elle puisse respecter ses engagements? Il m'apparaît important que l'opposition puisse avoir les documents que la ministre s'était engagée d'offrir. Je ferme la parenthèse.

J'espère que le message sera fait, parce que, sur un autre volet, j'ai eu une discussion avec la chef de cabinet de la ministre, qui s'était engagée à donner à l'opposition la revue de presse du ministère de la Justice. Aucun problème, elle est colligée, elle est confectionnée, elle est disponible. Rapidement, on me répond: Avec plaisir. Trois semaines, un mois plus tard, je le dis, en commission parlementaire toujours: Écoutez, je n'ai pas encore reçu la revue de presse en question que vous m'aviez promis de me transmettre rapidement. Alors, là, la ministre a dit: Il n'y a aucun problème, on va vous la transmettre. Je contacte la chef de cabinet. Oups! J'ai une autre réponse: Il n'est pas question qu'on vous donne ce document-là. Pourquoi? C'est un document public. On trouve que vous en avez assez, de documents, dans l'opposition. Drôle de réponse! M. le Président, je prends des engagements; on refuse à l'opposition des outils de travail qui sont quand même des documents publics.

Je vois le ministre de la Solidarité sociale. Quelle solidarité! On pourrait très bien offrir, M. le Président... Ça a été une demande qui a été faite au même niveau, de tous mes collègues, pour obtenir des documents. Mais on vit dans un drôle de Parlement, dans un drôle de système parlementaire, M. le Président, quand le gouvernement veut donner le moins d'informations possible à l'opposition pour pouvoir faire son travail. Alors, je ferme la parenthèse là-dessus.

J'espère que la ministre et Procureur général, lorsqu'elle donne sa parole par rapport à des documents, que cette parole-là sera respectée. Parce que, aujourd'hui, elle fait appel à ma collaboration. Ce n'est pas la première fois, ça fait à plusieurs reprises. J'ai toujours offert ma collaboration à la ministre. Mais, en retour, lorsqu'elle prend un engagement, pourrait-elle de grâce le respecter?

En ce qui concerne, maintenant, le projet de loi modifiant le Code de procédure civile, si j'ai bien compris, il y a eu entente entre la magistrature, le Barreau et le ministère de la Justice. D'après nos informations, d'après notre compréhension, ce qu'on retrouve à l'intérieur du projet de loi ne porte pas à controverse. Donc, il ne devrait pas y avoir de difficultés ou de problèmes. Mais je signale à la ministre que, du point de vue de l'opposition, nous regardons les projets de loi avec l'intérêt suivant: Est-ce que les intérêts, les droits des citoyens sont protégés lorsqu'on propose des modifications législatives? Est-ce que c'est fait dans le but de protéger leurs droits ou même de leur donner plus de droits, mais de faire en sorte que les citoyens y retrouvent leur compte? Si la réponse est oui à cela, la ministre trouvera toujours la collaboration de l'opposition.

Mais je fais remarquer à la ministre de la Justice qu'on a soulevé des problèmes importants par rapport au fonctionnement du Tribunal administratif du Québec où il y a un engorgement important: il y a plus de 17 000 dossiers en attente au seul Tribunal administratif du Québec. Comment se fait-il que je n'aie pas de projet de loi devant moi qui pourrait régler ce problème-là? J'ai un projet de loi, M. le Président, qui s'inspire d'une vaste réforme au niveau du Code de procédure civile, très bien, mais il y a des problèmes urgents. Ils ont été signalés à plusieurs reprises, et par l'opposition et par d'autres personnes. Il n'y a pas l'ombre d'une solution par rapport à ces problèmes-là.

Et, en passant, si le Tribunal administratif du Québec a des besoins, comment se fait-il que vous ne renouvelez pas le mandat de juges administratifs jugés compétents? Comment se fait-il que, lorsqu'on pose des questions en commission parlementaire pour obtenir des informations, on ne permet pas au président du Tribunal administratif de fournir des réponses? Comment se fait-il que cet état de chose là existe?

Alors, M. le Président, je pense, le message pour la ministre de la Justice m'apparaît clair: Il y a des problèmes dans le système, la ministre devrait y consacrer toute son attention. Compte tenu qu'il y a plus de 17 600 dossiers en attente au seul Tribunal administratif du Québec, ce sont des citoyens qui sont en attente, des citoyens qui ont des recours à faire valoir devant le Tribunal, et la ministre semble dire: Ce dossier-là n'est pas prioritaire pour moi.

Il y a des gens qui sont en attente, ça a un impact, au niveau des affaires sociales, sur leur qualité de vie et leurs conditions de vie. Le ministre de la Solidarité sociale, il est là, il est à deux, trois banquettes de la ministre de la Justice. La ministre de la Justice nous a dit que le problème venait de son ministère: il n'a pas suffisamment d'effectifs pour permettre la préparation des dossiers. Il est juste là, pourrait-elle lui faire un signe et lui dire: À quand vas-tu t'occuper de tes affaires? Parce qu'il y a des citoyens qui sont lésés, hein? Il est là, il est juste à côté, M. le Président. Donc, devant moi, j'ai deux personnes qui pourraient apporter des solutions à un problème. Ces deux personnes-là se parlent-elles? Ces deux personnes-là ont-elles une sensibilité par rapport à des dossiers qui sont en attente? Parce que ce sont des milliers et des milliers de citoyens qui attendent.

Alors, M. le Président, ça a été soulevé en Chambre. Si le ministre a des réponses à fournir, qu'il se lève, qu'il prenne la parole après moi et qu'il explique pourquoi les dossiers, au niveau des affaires sociales, sont en attente. On était censé régler le problème, réduire les délais d'attente. Et je me souviens même, M. le Président, que la ministre de la Justice disait, dans le journal La Presse , à peu près au mois de janvier ou février: Le problème, il vient du ministère de la Solidarité sociale. Ils n'ont pas assez de personnes qui peuvent travailler les dossiers.

Et la ministre voulait également, M. le Président, favoriser la conciliation. Or, il y a une personne au Tribunal administratif du Québec qui a une expertise certaine en matière de conciliation, elle s'appelle Mme Louise Cobetto. Qu'attendez-vous pour régler son cas?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse, M. le député. Est-ce qu'il y a un consentement pour poursuivre? Il est 12 heures. Il est midi. Alors, conformément au règlement, s'il n'y a pas de consentement, je vais suspendre les travaux jusqu'à 14 heures. Est-ce qu'il y a consentement pour qu'il poursuive?

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non. Alors, il n'y a pas de consentement. Les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés! Nous allons nous recueillir un moment.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Présence de représentants de la communauté juive du Québec

Pour débuter, j'ai le plaisir de souligner la présence dans nos tribunes d'une délégation de représentants de la communauté juive du Québec, réunis aujourd'hui à l'occasion d'une mission parlementaire de cette communauté à l'Assemblée nationale.


Affaires courantes

Nous débutons les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Mais je crois qu'il y a plusieurs projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Une bonne liste, M. le Président, et commençons par l'article c.


Projet de loi n° 56

Le Président: Alors, à l'article c, M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances présente le projet de loi n° 56, Loi sur la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Ce projet de loi, M. le Président, est vraiment intéressant. Il constitue la Société de développement de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel. La Société a principalement pour mission de favoriser la mise en valeur des infrastructures aéroportuaires de Mirabel par le développement et l'exploitation de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

À cette fin, la Société fera notamment la promotion de l'implantation d'entreprises dans la Zone de commerce international. Elle suscitera, accueillera et évaluera les projets d'investissement susceptibles de favoriser le développement de la Zone et participera, seule ou avec des partenaires du secteur privé et du secteur public au financement de ces projets.

La Société a en outre pour fonction de formuler des recommandations au ministre des Finances sur les demandes d'attestation d'admissibilité aux mesures d'incitation fiscales prévues à la loi à l'égard des activités des entreprises exercées à l'intérieur de la Zone de commerce international de Montréal à Mirabel.

De plus, la Société administre notamment les programmes d'aide financière élaborés par le gouvernement pour favoriser le développement de la Zone de commerce international, ceux prévus à son plan d'affaires ainsi que tout autre programme dont l'administration lui sera confiée par le gouvernement.

Elle exécutera également tout mandat que lui confie le gouvernement lorsqu'un projet de développement dans la Zone de commerce international présente un intérêt économique important pour le Québec.

Ce projet de loi contient de plus des dispositions financières précisant les modalités d'exercice des engagements financiers que la Société et ses filiales sont autorisées à prendre.

Il comportera enfin des dispositions transitoires.

Et vu, M. le Président, une présence exceptionnelle dans nos galeries, je veux souligner que l'artisan intellectuel de ce projet de loi est un sous-ministre des finances qui s'appelle Abraham Assayag et qui est un fier membre de la communauté séfarade du Québec.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article d, M. le Président.


Projet de loi n° 53

Le Président: Alors, à cet article du feuilleton, M. le leader, au nom de Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux, présente le projet de loi n° 53, Loi sur la Corporation d'hébergement du Québec. M. le leader.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, ce projet de loi donne suite à la réforme de la comptabilité gouvernementale annoncée par le ministre des Finances dans le discours du budget du 31 mars 1998 et, à cette fin, prévoit que la Corporation d'hébergement du Québec, constituée le 10 septembre 1974 suivant les dispositions de la partie III de la Loi sur les compagnies, devient une personne morale à fonds social mandataire de l'État.

La Corporation a pour mission d'offrir aux intervenants du secteur de la santé et des services sociaux l'expertise technique et financière ainsi que le financement nécessaire à la gestion, la construction, l'entretien et l'acquisition d'immobilisations, d'équipements et d'infrastructures requis dans ce secteur d'activité. Elle a également pour mission de posséder des biens utilisés ou devant être utilisés par les organismes du secteur sociosanitaire.

Ce projet de loi prévoit les modalités de fonctionnement de la Corporation, détermine les règles de son organisation et contient des dispositions financières, notamment le fonds social autorisé de la Corporation ainsi que les modalités d'exercice des engagements financiers que la Corporation et ses filiales sont autorisées à prendre.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions modificatives et des dispositions de nature transitoire et finale.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article e.


Projet de loi n° 51

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor présente le projet de loi n° 51, Loi modifiant la Loi sur la fonction publique et la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics. M. le ministre.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la fonction publique afin de permettre la nomination d'un fonctionnaire parmi tous les candidats déclarés aptes à la suite d'un concours, supprimant ainsi le regroupement des candidats par niveau. Le projet de loi modifie également la Loi sur la fonction publique afin d'obliger les ministères et les organismes à rendre compte, sous une rubrique particulière de leur rapport annuel, des résultats obtenus par rapport aux objectifs d'un programme d'accès à l'égalité et d'un plan d'embauche de personnes handicapées qui leur était applicable.

Enfin, le projet de loi modifie la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics afin d'indiquer expressément que les résultats obtenus par rapport aux objectifs d'un programme d'accès à l'égalité et d'un plan d'embauche de personnes handicapées pourront être discutés en commission parlementaire conformément à cette loi.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: Article g.


Projet de loi n° 43

Le Président: À l'article g, M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse présente le projet de loi n° 43, Loi concernant certaines dispositions dérogatoires dans les lois relatives à l'éducation. M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: M. le Président, ce projet de loi renouvelle jusqu'au 1er juillet 2001 les déclarations de dérogation au paragraphe a de l'article 2 et l'article 15 de la Loi constitutionnelle de 1982 à l'égard des dispositions de la Loi sur le Conseil supérieur de l'éducation, de la Loi sur l'instruction publique, de la Loi sur l'instruction publique pour les autochtones cris, inuit et naskapis et de la Loi sur le ministère de l'Éducation qui accordent des droits et privilèges à une confession religieuse.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

(14 h 10)

M. Brassard: Article h.


Projet de loi n° 47

Le Président: Alors, à cet article de notre feuilleton, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et ministre responsable de l'Emploi présente le projet de loi n° 47, Loi concernant les conditions de travail dans certains secteurs de l'industrie du vêtement et modifiant la Loi sur les normes du travail. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, ce projet de loi prolonge jusqu'au 31 décembre 1999 les quatre décrets de convention collective en vigueur dans les secteurs de l'industrie du vêtement. Après cette date, le gouvernement pourra édicter, par règlement, pour une période de transition n'excédant pas deux ans, des conditions minimales de travail applicables à ces secteurs de l'industrie du vêtement. Par la suite, le gouvernement pourra édicter des normes du travail qui seront applicables aux quatre secteurs de l'industrie du vêtement visés par ces décrets de convention collective. Ces normes pourront porter sur le salaire minimum, la semaine normale de travail, les jours fériés, les congés annuels, les périodes de repas et les congés pour événements familiaux.

Le projet de loi prévoit aussi que la Commission des normes du travail se dote d'un programme adapté de surveillance applicable à l'industrie du vêtement et qu'à cet égard elle consulte un organisme représentatif. Pour l'application du programme, le projet de loi prévoit que la Commission peut imposer auprès des employeurs des secteurs de l'industrie du vêtement une cotisation supplémentaire.

Enfin, le projet de loi prévoit des dispositions concernant le fonds de vacances de l'industrie de la confection pour dames afin notamment d'en absorber le déficit.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, M. le Président. Étant donné que c'est un projet de loi qui vise à abroger les décrets dans l'industrie du vêtement pour femmes, que 24 000 femmes sont touchées, qu'il y a certaines discussions qui ne font pas consensus, on demandera donc qu'il y ait non seulement des études d'impact sur les effets du projet sur la création d'emplois et les conditions de ces travailleuses-là, mais aussi une vaste consultation publique auprès des intéressés.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Il y aura des consultations. La forme qu'elle prendra, on verra.

Le Président: Bien. M. le leader.

M. Brassard: L'article i, M. le Président.


Projet de loi n° 50

Le Président: Alors, à cet article, Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi présente le projet de loi n° 50, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail et d'autres dispositions législatives concernant le travail des enfants. Mme la ministre.


Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les normes du travail afin d'interdire à un employeur de faire effectuer par un enfant un travail disproportionné à ses capacités ou susceptible de porter atteinte à son éducation, à sa santé ou à son développement.

Par ailleurs, le projet de loi interdit à un employeur qui poursuit des fins lucratives de faire effectuer un travail par un enfant de moins de 14 ans sans le consentement écrit du titulaire de l'autorité parentale ou du tuteur.

Ce projet de loi interdit également l'emploi d'un enfant durant les heures de classe. Il oblige en outre un employeur à aménager les heures de travail d'un enfant de façon qu'il puisse être à l'école durant les heures de classe.

De plus, le projet de loi interdit à un employeur de faire effectuer un travail de nuit par un enfant, sauf exceptions. Il oblige aussi un employeur à aménager les heures de travail d'un enfant de façon qu'il puisse être la nuit à la résidence familiale, sauf exceptions.

Ce projet de loi comporte enfin des modifications de concordance.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi?

Une voix: Oui.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article j.


Projet de loi n° 61

Le Président: À l'article j du feuilleton, M. le ministre responsable de la Faune et des Parcs présente le projet de loi n° 61, Loi sur la Société de la faune et des parcs du Québec. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Ce projet de loi prévoit la création de la Société de la faune et des parcs du Québec.

Il prévoit que la Société a pour mission, dans une perspective de développement durable, de s'assurer de la conservation et de la mise en valeur de la faune ainsi que du développement et de la gestion des parcs.

Ce projet de loi établit, de plus, les règles relatives au fonctionnement de la Société et à la composition de son conseil d'administration.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune afin de transférer à la Société certains pouvoirs du ministre responsable de l'application de cette loi, notamment en ce qui concerne l'élaboration des normes et la surveillance de leur application, de même qu'en ce qui concerne la délivrance des autorisations et des permis.

Il modifie également la Loi sur les parcs et la Loi sur le parc marin du Saguenay–Saint-Laurent afin de transférer à la Société certains pouvoirs du ministre responsable de l'application de ces lois en ce qui concerne la délivrance des autorisations et des permis ainsi que le contrôle de l'application des normes.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions de nature transitoire ainsi que des modifications de concordance... pour des dizaines de lois. Merci.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article b.


Projet de loi n° 48

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation présente le projet de loi n° 48, Loi sur le Bureau d'accréditation des pêcheurs et des aides-pêcheurs. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Ce projet de loi propose la création du Bureau d'accréditation des pêcheurs et des aides-pêcheurs.

Le Bureau a pour mission d'élaborer et de mettre en oeuvre un régime de reconnaissance de la compétence professionnelle des pêcheurs et des aides-pêcheurs. À ce titre, il peut notamment leur délivrer un certificat attestant leur qualification à exercer leur métier selon les exigences de la pêche commerciale.

Le Bureau est composé de personnes nommées par le gouvernement, dont la majorité sont des pêcheurs et des aides-pêcheurs choisis après consultation des associations les plus représentatives.

Ce projet de loi prévoit, par ailleurs, les pouvoirs que pourra exercer le Bureau ainsi que les dispositions financières qui lui sont applicables.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: Je reviendrais à l'article a.


Projet de loi n° 55

Le Président: Alors, à l'article a, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole présente le projet de loi n° 55, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'accorder de nouveaux pouvoirs aux municipalités et aux organismes supramunicipaux ou de préciser la portée de pouvoirs qu'ils exercent actuellement. À cet égard, il modifie plusieurs lois qui concernent le domaine municipal.

Ce projet de loi habilite les municipalités locales, les municipalités régionales de comté, les régies intermunicipales, les communautés urbaines, les villages nordiques, l'Administration régionale Kativik et les sociétés et corporations de transport en commun à se procurer des biens meubles et certains services auprès du directeur général des achats du gouvernement ou par l'entremise de celui-ci. Dans les cas où cette voie d'acquisition est autorisée, il exempte ces municipalités et organismes municipaux des règles applicables en matière de soumissions publiques ou sur invitation.

D'autre part, ce projet de loi apporte des précisions quant aux pouvoirs que les municipalités régionales de comté et les communautés urbaines possèdent à l'égard des parcs régionaux. Il assimile à un parc régional tout corridor aménagé pour la pratique d'activités récréatives et sportives. Il prévoit, de plus, que cette assimilation législative est déclaratoire.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie la Loi sur les immeubles industriels municipaux afin de permettre à une municipalité d'emprunter à son fonds de roulement toute somme requise pour couvrir ses dépenses relatives aux immeubles industriels municipaux et aux bâtiments industriels locatifs. Il modifie également cette loi pour préciser que le pouvoir d'une municipalité locale d'accorder une subvention à un organisme à but non lucratif pour l'aider à exploiter un bâtiment industriel locatif ou le pouvoir de se porter caution d'un tel organisme peut être exercé à l'étape de la construction d'un tel bâtiment ou de la transformation d'un immeuble en un tel bâtiment.

Ce projet de loi modifie la Loi sur le traitement des élus municipaux en supprimant l'obligation imposée à une municipalité locale d'obtenir l'approbation des personnes habiles à voter pour mettre en force un règlement qui permet le versement d'une compensation aux membres du conseil pour la perte de revenus occasionnée par l'exercice de leurs fonctions dans des circonstances exceptionnelles.

Ce projet de loi modifie plusieurs autres lois municipales relativement à divers sujets, dont les suivants: il supprime l'obligation de l'organisme responsable de l'évaluation d'obtenir l'autorisation du ministre des Affaires municipales et de la Métropole pour reporter le dépôt d'un rôle; il accorde aux régies intermunicipales le pouvoir de décider, à la majorité des deux tiers des voix exprimées, d'utiliser à toute fin de sa compétence les surplus d'un exercice financier; il permet aux villages nordiques d'attribuer une rémunération additionnelle à la personne qui occupe le poste de maire suppléant; il prévoit que le taux de la compensation pour services municipaux qu'une municipalité locale peut imposer à l'égard d'un pacte régional appartenant à un organisme supramunicipal ne peut excéder 0,50 $ par 100 $ d'évaluation; il accorde à la Communauté urbaine de Québec le pouvoir de confier la gestion de ses pistes cyclables à un organisme à but non lucratif; il instaure une règle permettant le maintien, après le 8 mai 1999, de certaines ententes relatives à l'exploitation d'un système de gestion de déchets; il permet à la municipalité régionale de comté de Caniapiscau de tenir des séances de son conseil à distance par téléphone ou autre moyen de communication.

(14 h 20)

Ce projet de loi modifie aussi la Loi sur le bâtiment afin de permettre qu'une société d'économie mixte dans le secteur municipal puisse être titulaire d'une licence d'entrepreneur dans les cas où les activités qu'elle exerce l'assujettissent à une telle licence.

Enfin, ce projet de loi modifie la Loi sur la sécurité dans les sports afin d'accorder la protection contre toute poursuite judiciaire aux personnes habilitées en vertu de cette loi à exercer des fonctions spécifiques. Il modifie également cette loi pour permettre au ministre chargé de son application d'allouer une rémunération à l'organisme à but non lucratif à qui est confiée la responsabilité de la qualification des plongeurs et des moniteurs en plongée subaquatique.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Est-ce que je peux m'enquérir auprès de la ministre si elle entend consulter les unions municipales en commission parlementaire sur ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: On verra. On verra.

Le Président: Bien. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. Je vous signale que c'est juste les notes explicatives que la ministre a lues.

Le Président: Je vous signale, M. le leader, que les ministres pourraient prendre note qu'il n'est pas nécessaire de lire toutes les notes, dans certains cas.

M. Brassard: Ah oui? On peut faire une synthèse?

Le Président: Je pense que, j'en ai parlé d'ailleurs aujourd'hui avec le secrétaire général, et effectivement il n'est pas nécessaire de lire toutes les notes. Je pense que ce qui est important, c'est que la synthèse soit compréhensible pour les membres de l'Assemblée. Mais l'objectif, c'est que finalement les membres de l'Assemblée soient saisis et qu'à la lecture des notes explicatives ils soient en mesure de comprendre ce qu'ils acceptent de prendre en considération pour la suite. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, si nous sommes pour changer les us et coutumes... J'ai constaté, à la réaction de la ministre des Affaires municipales et de la Métropole, qu'elle s'acquittait de son devoir... À ce moment-là, lorsqu'on rédige des notes explicatives, qu'on fasse son travail plus consciencieusement, j'en suis. Mais, à partir du moment où, dans un ministère, un ministre a décidé que, pour que l'Assemblée nationale comprenne la portée d'un projet de loi à l'occasion de son dépôt, on devrait respecter cette transparence qui s'impose au moment du dépôt... Autrement, si on ne comprend pas, M. le Président, vous savez ce qui va arriver? Le dépôt ne sera pas accepté. Il y aura un vote par appel nominal à chaque cas. Et je pense que, cet après-midi, si on procédait de cette façon-là, on pourrait veiller tard ce soir.

Le Président: Ce que je veux, je voudrais vous rappeler, dans le fond, les dispositions de l'article 233, qui est clair à l'égard des notes explicatives: «À l'étape prévue des affaires courantes, un député présente le projet à l'Assemblée en donnant lecture des notes explicatives qui l'accompagnent ou en les résumant – ou en les résumant. Celles-ci doivent exposer sommairement l'objet du projet de loi et ne contenir ni argumentation ni exposer de motif.»

C'était un rappel des dispositions de l'article 233. Parce que, écoutez, soyons clairs, quand les notes explicatives sont très techniques ou trop longues, il y a à peu près juste la personne qui les lit qui écoute, là.

M. Brassard: Il faut quand même... M. le Président, il faut quand même que l'opposition comprenne, aussi. Alors, donc...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Continuons, M. le leader.

M. Brassard: ...les notes explicatives doivent être compréhensibles.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: À l'article f.


Projet de loi n° 59

Le Président: À cet article, Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole présente le projet de loi n° 59, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires municipales et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Très bien. Alors, ce projet de loi abroge la Loi sur le ministère de la Métropole et modifie la Loi sur le ministère des Affaires municipales pour transférer les pouvoirs du ministre d'État à la Métropole au ministre des Affaires municipales et de la Métropole. Enfin, il modifie la désignation du ministre et du ministère des Affaires municipales pour celle de ministre et de ministère des Affaires municipales et de la Métropole.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader.

M. Brassard: C'est bien compris? Oui? Article k.


Projet de loi n° 52

Le Président: Alors, à l'article k, maintenant, M. le ministre de la Sécurité publique présente le projet de loi n° 52, Loi modifiant la Loi concernant les enquêtes sur les incendies. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Quelques notes courtes. Ce projet de loi modifie la Loi concernant les enquêtes sur les incendies de façon à redéfinir les pouvoirs et les obligations du commissaire-enquêteur sur les incendies en matière de recherches et d'enquêtes, essentiellement pour s'assurer que cette loi soit conforme à la constitutionnalité à la lumière de la jurisprudence récente.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: Article l.


Projet de loi n° 54

Le Président: Alors, à l'article l, Mme la ministre de la Justice présente le projet de loi n° 54, Loi modifiant la Loi sur les substituts du procureur général. Mme la ministre.


Mme Linda Goupil

Mme Goupil: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les substituts du procureur général afin de supprimer une disposition qui empêche les substituts du Procureur général d'autoriser, conformément aux dispositions du Code criminel, certaines poursuites au nom du Procureur général.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: Oui. L'article m.


Projet de loi n° 60

Le Président: À l'article m de notre feuilleton, M. le ministre de l'Environnement présente le projet de loi n° 60, Loi sur l'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill. M. le ministre.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de permettre, par la voie d'une entente, la mise en oeuvre d'un processus unifié d'évaluation environnementale du projet de parachèvement du développement hydroélectrique de la rivière Churchill.

Ce projet prévoit également les matières sur lesquelles peut porter l'entente ainsi que l'effet des dispositions de l'entente sur l'application de la Loi sur la qualité de l'environnement et de ses règlements.

Enfin, le projet de loi assure les modalités de financement de l'entente.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: L'article o.


Projet de loi n° 39

Le Président: À l'article o, M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce présente le projet de loi n° 39, Loi concernant la Société nationale du cheval de course. M. le ministre.


M. Guy Julien

M. Julien: Alors, M. le Président, ce projet de loi vise à établir un nouvel encadrement administratif de la Société de promotion de l'industrie des courses de chevaux, dont il remplace le nom par celui de «Société nationale du cheval de course».

Ce projet de loi prévoit que la Société sera composée de membres provenant du milieu de l'industrie des courses de chevaux, soit les propriétaires, les éleveurs, les entraîneurs et les conducteurs de chevaux de course.

Le Président: Je comprends qu'il y ait quelques amateurs d'équitation dans l'Assemblée, mais, néanmoins, je pense que le ministre mérite d'être entendu. M. le ministre.

M. Julien: Merci, M. le Président. Ce projet de loi propose, par ailleurs, la constitution d'un comité appelé «Comité des membres» qui procédera à l'élection du conseil d'administration de la Société.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions de nature transitoire.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? M. le leader.

M. Brassard: M. le Président, je vous signale qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi sur l'emblème chevalin du Québec. Ce n'est pas de ça dont il s'agit.

Article s.


Projet de loi n° 195

Le Président: À l'article s, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques présente le projet de loi n° 195, Loi modifiant la Loi constituant Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi. M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer ce projet de loi qui propose diverses modifications à la Loi constituant Fondaction, le Fonds de développement...

Une voix: ...

M. Boulerice: Je vous remercie, cher collègue. ...le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi afin notamment d'assouplir certaines normes de placement applicables à ce Fonds.

Des voix: Bravo! Belle initiative.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Article t.

Le Président: Article t?

M. Brassard: Article t.


Projet de loi n° 196

Le Président: Très bien. Alors, toujours à cet article, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques présente le projet de loi n° 196, Loi concernant le régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal. M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, ce projet de loi a pour but de permettre des modifications à certaines dispositions du régime de rentes pour le personnel non enseignant de la Commission des écoles catholiques de Montréal sans entraîner d'augmentation des cotisations salariales, les coûts résultant de ces modifications étant défrayés par le surplus actuariel du régime.

Ainsi, le projet de loi modifie le mode de calcul de la pension ainsi que les prestations de décès accordées au conjoint survivant ou à la succession d'un participant. Il modifie de plus la formule d'indexation actuelle et revalorise les rentes payées ou payables le 31 décembre 1998 pour les années de retraite antérieures à l'année 1989.

(14 h 30)

Le projet de loi contient aussi des mesures d'application temporaire. C'est ainsi qu'il offre notamment aux participants, jusqu'au 31 décembre de l'an 2002, la possibilité de prendre leur retraite sans réduction à partir de 56 ans ou après 31 ans de participation au régime. Il permet également le versement à certains participants d'une rente additionnelle équivalente à la pension payable en vertu de la Loi sur la sécurité de la vieillesse et pour une période maximale de quatre ans, ce versement devant toutefois cesser lorsque le participant atteint l'âge de 65 ans.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Oui. Alors, quelques projets de loi d'intérêt privé. Article u.


Projet de loi n° 208

Le Président: Alors, en rapport avec cet article du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 208, Loi concernant la Ville de Saint-Basile-le-Grand. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Alors, je dépose le rapport.

Et, à ce propos, M. le député de Saint-Hyacinthe présente le projet de loi d'intérêt privé n° 208, Loi concernant la Ville de Saint-Basile-le-Grand.


Mise aux voix

Est-ce que l'Assemblée accepte d'abord d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: La motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader.

M. Brassard: Article v.


Projet de loi n° 210

Le Président: En ce qui concerne l'article v, j'ai reçu également le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 210, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Le rapport est déposé.

Et Mme la députée de Vanier présente le projet de loi d'intérêt privé n° 210, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Ça va? M. le leader.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Alors, la motion est adoptée. M. le leader.

M. Brassard: ...


Projet de loi n° 212

Le Président: En regard de cet article du feuilleton, j'ai également reçu un rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 212, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Vaudreuil-Soulanges. Le directeur de la législation a constaté, encore une fois, que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.

À ce propos, le député de Salaberry-Soulanges présente le projet de loi d'intérêt privé n° 212, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Vaudreuil-Soulanges.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'abord d'être saisie du projet de loi? M. le leader.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: La motion est adoptée. M. le leader.

M. Brassard: Article y.


Projet de loi n° 213

Le Président: Alors, j'ai reçu aussi le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 213, Loi modifiant la Loi concernant le Mouvement des caisses Desjardins. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.

M. le député de Bellechasse, dans ce cas-ci, présente le projet de loi d'intérêt privé n° 213, Loi modifiant la Loi concernant le Mouvement des caisses Desjardins.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'abord d'être saisie du projet de loi? M. le leader.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Brassard: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que le ministre d'État à l'Économie et aux Finances et ministre de l'Industrie et du Commerce en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: La motion est adoptée.

M. Brassard: Et j'épuise l'alphabet avec l'article w.


Projet de loi n° 214

Le Président: Bien, alors, avec cet épuisement, j'ai aussi le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 214, Loi concernant la Ville de Saint-Hubert. Le directeur de la législation a constaté, là aussi, que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé.

Et le député de Vachon présente le projet de loi d'intérêt privé n° 214, Loi concernant la Ville de Saint-Hubert.


Mise aux voix

L'Assemblée accepte-t-elle d'abord d'être saisie du projet de loi? M. le leader.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Brassard: Alors, je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que cette motion est adoptée? Bien.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


Rapport annuel de la Société générale de financement du Québec

M. Landry: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1998 de la Société générale de financement du Québec.

Le Président: Bien. Le document est déposé. M. le leader du gouvernement.


Réponses à des questions inscrites au feuilleton

M. Brassard: Oui, je voudrais déposer la réponse aux questions 3 et 4 inscrites au feuilleton du 10 mars 1999 par le député de Richmond.

Le Président: Très bien. Les documents sont déposés.

Au dépôt de rapports de mission, Mme la députée de Saint-François.


Rapport de mission de la réunion de la Commission de la coopération et du développement de l'Assemblée parlementaire de la francophonie à Hô Chi Minh-Ville, au Viêt-nam

Mme Gagnon-Tremblay: Je dépose le rapport de la mission que j'ai effectuée à la réunion de la Commission de la coopération et du développement de l'Assemblée parlementaire de la francophonie tenue à Hô Chi Minh-Ville, Viêt-nam, du 15 au 18 mars 1999.

Le Président: Très bien, le rapport est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail et députée des Chutes-de-la-Chaudière.


Étude détaillée du projet de loi n° 8 et du projet de loi n° 25

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer deux rapports de la commission de l'économie et du travail, un premier à l'effet que la commission a siégé le 11 mai 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 8, Loi concernant la location d'une partie des forces hydrauliques de la rivière Shipshaw. La commission a adopté ce projet de loi avec un amendement.

Et un deuxième rapport, M. le Président, à l'effet que la commission a siégé aussi les 11 et 12 mai 1999 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 25, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction. La commission a adopté le projet de loi.

Le Président: Alors, les deux rapports, Mme la présidente de la commission de l'économie et du travail, sont déposés.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Richmond.


Revenir sur la décision d'abolir le Comité paritaire de l'industrie du vêtement pour dames

M. Vallières: Oui. M. le Président, je voudrais déposer l'extrait d'une pétition adressée à la ministre d'État au Travail et à l'Emploi par 178 pétitionnaires de Confection de l'Or blanc, Confection Isabelle, Confection Saint-Adrien, Confection M.G., Confection Mario Audy, Confection Yvon Leroux, Confection Notre-Dame-de-Ham, Confection Jeanne d'Arc, Confection Bellerose, Centre de couture de Wotton, toutes des entreprises du comté de Richmond.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Le gouvernement du Québec déposera bientôt un projet de loi...»

M. Brassard: M. le Président.

Le Président: Question de règlement, M. le député de Richmond. M. le leader...

M. Brassard: Ah, c'est parce que je voudrais simplement, à mon bon ami le député de Richmond, accorder le consentement, parce qu'elle est non conforme.

Le Président: Très bien.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Je comprends que c'était un signe d'amitié de la part du leader du gouvernement, mais le député de Richmond agissait un peu dans la normalité sinon dans les règles de l'Assemblée, puisque la majorité de nos pétitions sont maintenant non conformes à nos règles. M. le député de Richmond.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Vallières: Oui, M. le Président. Compte tenu que je connais l'amitié du leader du gouvernement à mon endroit, j'avais pris pour acquis que j'aurais son approbation, son assentiment.

«Les faits invoqués, M. le Président, sont les suivants:

«Le gouvernement du Québec déposera bientôt un projet de loi – ce fut fait tout à l'heure – qui abolira le Comité paritaire de l'industrie du vêtement pour dames. Les conséquences seront:

«1° retour à la Loi sur les normes du travail pour toutes ces employées;

«2° perte de conditions de travail pour toutes ces employées;

«3° accroissement de la concurrence entre les entreprises de couture de façon à réduire les coûts le plus possible, et perte d'emplois pour nous et pour notre région;

«C'est pourquoi il faut faire quelque chose.

«Et l'intervention réclamée, M. le Président, se résume ainsi:

«En signant cette pétition qui sera remise à la ministre d'État au Travail et à l'Emploi, nous dirons clairement au gouvernement que nous voulons conserver nos conditions de travail et nos emplois. Nous signons cette pétition pour empêcher l'abolition du Comité paritaire de l'industrie du vêtement pour dames.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition et souhaite, M. le Président, que la recommandation du député de LaFontaine de tenir des auditions publiques soit suivie par cette Chambre.

Le Président: Très bien. La pétition est déposée. Il y a une autre pétition. Mme la députée de Mégantic-Compton.

Mme Bélanger: M. le Président, est-ce que je peux avoir l'autorisation de déposer une pétition non conforme?

Le Président: Est-ce que votre bon ami le leader du gouvernement consent?

M. Brassard: M. le Président, la députée de Mégantic-Compton a droit à toute mon amitié également, et j'y consens.

Des voix: Ha, ha, ha!


Revenir sur la décision d'abolir les décrets de l'industrie du vêtement

Mme Bélanger: Je vous remercie beaucoup, M. le leader du gouvernement. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 41 pétitionnaires, travailleuses et travailleurs de l'industrie du vêtement, citoyennes et citoyens de Mégantic-Compton.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement du Québec entend abolir les décrets de l'industrie du vêtement au Québec à compter du 31 décembre 1999;

«Considérant que ce geste unilatéral du gouvernement aura comme conséquence directe la détérioration de nos conditions de travail;

«Considérant que seuls les employeurs de l'industrie pourront bénéficier d'une telle décision faite sur le dos des travailleuses et des travailleurs;

«Considérant que près de 80 % de la main-d'oeuvre de l'industrie est féminine, fréquemment soutien de famille monoparentale;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, travailleuses et travailleurs de l'industrie du vêtement, nous opposons formellement à l'abolition des décrets qui protègent nos conditions de travail depuis près de 60 ans.»

Et, à l'instar de mon collègue de Richmond, je demande à la ministre des audiences publiques.

(14 h 40)

Le Président: Bien. Alors, la pétition est déposée.

Alors, il n'y a pas d'interventions, aujourd'hui, portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Nous allons donc aborder la période de questions et de réponses orales. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en question principale.


Effectif de la Commission des valeurs mobilières


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances, c'est au sujet de la Commission des valeurs mobilières. Pendant qu'on s'interroge à Québec sur le nombre d'effectifs qu'on peut accorder à la Commission des valeurs mobilières du Québec, l'Ontario Securities Commission, elle, passe à l'action – c'est l'équivalent de la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario – et a augmenté son personnel de 42 %. Il y a un an, l'éminent journaliste Miville Tremblay écrivait un article, et je vais citer, il y a un an, ce qu'on disait de la Commission des valeurs mobilières. Le président de la Bourse de Montréal, M. Gérald Lacoste, disait ceci: «La Bourse de Montréal aimerait lancer de nouveaux produits dérivés, mais personne à la Commission des valeurs mobilières ne comprend ces instruments complexes.» Un an plus tard, j'ai vérifié auprès de la Commission des valeurs mobilières, il n'y a toujours aucun expert sur les produits dérivés.

Il y a un an, on disait également – Guy Jolicoeur, de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières: «On joue avec des allumettes et de la dynamite. C'est la crédibilité du secteur financier dans la population qui est en jeu quant au risque d'un scandale boursier qui prendrait les autorités au dépourvu.» M. le Président, un an plus tard, Miville Tremblay fait un autre article, et alors là il nous rappelle...

Le Président: Mme la députée. Alors, s'il vous plaît, rapidement.

Mme Jérôme-Forget: Vous comprendrez, M. le Président, c'est qu'il y a des gens qui font du travail et qui nous rappellent des faits qui sont importants à souligner, parce qu'il s'agit de l'épargne des Québécois, et il y a de plus en plus de gens qui utilisent ces mécanismes pour faire progresser leurs épargnes.

M. le Président, le président de la Commission des valeurs mobilières a démissionné vendredi dernier et, dans des propos laconiques, il a dit qu'il allait relever de nouveaux défis. On peut présumer qu'il était épuisé, finalement.

La question, M. le Président, est la suivante: Comme le ministre des Finances déclarait, le 28 avril 1999, à la commission des finances publiques, lors de l'étude des crédits: «Le gouvernement n'a pas à être convaincu que les besoins matériels de la Commission doivent être augmentés, on a procédé par étapes, on leur a donné la liberté», de quelle liberté s'agit-il?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, la critique de l'opposition officielle est une personne généralement polie, mais il peut lui arriver, par inadvertance, de heurter profondément certaines gens. Elle vient de le faire pour deux catégories, pour une personne en particulier, le président. Moi, il n'a pas eu des propos laconiques avec moi, il est venu me voir pendant des heures pour m'expliquer sa décision, et, sa décision, c'est qu'il va devenir la cheville ouvrière, en droit commercial, d'une grande firme d'avocats-conseils à Montréal dont je ne pense pas qu'elle aurait eu l'absurdité d'engager quelqu'un d'épuisé. Premièrement.

Deuxième catégorie de personnes qui seront lésées dans la communauté financière montréalaise, c'est à Montréal que se trouvent toute l'expertise canadienne et l'intelligence en matière de produits dérivés. C'est tellement vrai que, dans ce projet de fusion des bourses qui est organisé, on a choisi Montréal pour être le lieu des transactions les plus sophistiquées. Au moment même où nos centres financiers internationaux, à cause d'un programme judicieux qu'on a établi il y a deux budgets, sont en expansion constante, au moment même où Montréal est la capitale du capital de risque au Canada, à hauteur de 50 %, je suis proprement stupéfait par les propos de ma critique officielle.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Le ministre des Finances peut être stupéfait, M. le Président, mais la réalité est que la question...

Le Président: Très bien. Je pense que vous avez compris, Mme la députée, en question selon les règles.

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que le ministre des Finances sait qu'il y a plus de 300 dossiers d'enquête ouverts à la Commission des valeurs mobilières, près de deux fois ce qu'il y a en Ontario?

Le Président: M. le ministre des Finances.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, la députée a parlé de la liberté que nous avions donnée à la Commission. En effet, nous sommes fiers d'avoir modernisé cette Commission et de lui avoir donné la liberté. Il m'arrive de faire aussi quelques petites remarques conjoncturelles. J'ai parlé d'Abraham Assayag, mon sous-ministre, digne représentant de la communauté juive. Bien, je vais me servir aussi de l'occasion de la présence de nos amis juifs et juives dans cette salle pour dire que j'ai nommé un éminent avocat montréalais à la Commission des valeurs mobilières, mon ami Me Mark Rosenstein, qui est un excellent serviteur de l'État et qui travaille très bien dans cette Commission.

Je veux ajouter également que la deuxième phase de liberté consiste à ajouter des effectifs; elle est déjà réalisée en partie. Mon collègue du Trésor en a déjà approuvé quelques dizaines, des concours ont été faits, des employés ont été engagés et une première phase se prépare. Et il y a aussi une troisième phase, pour laquelle nous avons des objections profondes. Pour mettre à niveau le salaire du président de la Commission des valeurs mobilières du Québec avec celui de l'Ontario, il faudrait probablement doubler son salaire, disons, passer de moins de 200 000 $ à autour de 400 000 $. Si on n'avait pas hérité d'un déficit de 6 000 000 000 $ et si on n'avait pas été mis dans la dèche...

Des voix: ...

Le Président: En terminant, M. le ministre.

M. Landry: ...M. le Président, j'étais en train de rappeler que nous sommes des progressistes, comme les travaillistes anglais de Tony Blair. Sauf que, nous, on a eu comme prédécesseure une Mme Tatcher insouciante et dévergondée qui a ruiné nos finances publiques.

Une voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Mme la députée.


Mme Monique Jérôme-Forget

Mme Jérôme-Forget: Est-ce que le ministre des Finances sait qu'il s'agit d'un organisme extrabudgétaire et qu'il va chercher 12 000 000 $ en surplus à la Commission, 12 000 000 $ que la Commission ne peut dépenser?

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Si c'était un organisme aussi extrabudgétaire que ça, la députée n'aurait pas à poser de questions en cette Chambre. Ils auraient réglé leurs problèmes eux-mêmes avec leurs entrées et avec leurs sorties. La vérité, c'est qu'ils émargent aux lois et règlements du gouvernement du Québec et de cette Assemblée pour collecter les fonds qui leur reviennent. Ce qui donne une responsabilité au Conseil du trésor d'en faire la surveillance.

Et je vais continuer ma démonstration. Une augmentation de 200 000 $, pas un salaire, une augmentation de 200 000 $ à quelque individu que ce soit dans le secteur public ne se fera pas tant que ce gouvernement sera ici et qu'une telle augmentation équivaudra à 10 fois le salaire d'une gardienne d'enfants.

Des voix: Bravo!

(14 h 50)

Le Président: Mme la députée de Beauce-Sud, en question principale.


Transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Le 27 avril dernier, la députée de Rosemont a démissionné comme ministre du Revenu après avoir reçu avis que son ministère avait enfreint la loi. Aujourd'hui et encore la semaine dernière, le vice-premier ministre a admis que la loi a également été enfreinte alors qu'il était le ministre titulaire du Revenu. Alors, M. le Président, qu'attend le vice-premier ministre, ministre du Revenu, pour démissionner?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, le premier ministre a eu la bonté de me nommer ministre du Revenu...

Une voix: L'honneur.

M. Landry: ...et l'honneur. Et il a été informé dans les heures qui précèdent des motifs futiles pourquoi l'opposition voudrait réclamer ma démission. Il m'a fait la bonté et l'honneur de me dire qu'il me laissait à ma place. Et comme je suis ministre du Revenu, je vais m'acquitter d'un devoir qui découle d'un incident survenu à la séance d'hier: à la séance d'hier – et ça tombe bien que ce soit la députée de Beauce-Sud qui pose sa question...

Une voix: Ho!

M. Landry: ...car elle a dit des propos qui sont proprement stupéfiants, et j'espère, à son crédit, pouvoir les mettre au crédit de la distraction. Et je vais la citer au texte. Contrairement à ceux qui travestissent mes paroles quand je suis absent de la Chambre et qui disent n'importe quoi, moi, je vais parler entre guillemets. La députée a dit: «Mais lorsqu'on prend conscience de la fiscalité répressive appliquée par ce gouvernement, on comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table.»

Des voix: ...

M. Landry: C'est incroyable qu'une parlementaire...

Le Président: Alors, M. le ministre, en terminant.

M. Landry: Alors, je n'oserais pas réclamer sa démission, c'est ses électeurs qui l'ont envoyée ici. Et, encore une fois, je présume qu'elle a dit ça de bonne foi, mais qu'elle me permette de faire allusion au fait qu'elle est dans cette Assemblée depuis moins longtemps que moi. Moi, ça fait 15 ans. J'aimerais vivre le passé à l'envers, mais, hélas, ce n'est pas possible. Sauf que, M. le Président, je crois qu'un parlementaire ne doit jamais dire, dans un État avancé, qu'il comprend très bien que les contribuables fassent tout pour gagner de l'argent en dessous de la table. L'opposition officielle et le gouvernement ont le devoir strict, qu'on soit assis d'un côté de la Chambre ou de l'autre, non pas de comprendre très bien le travail au noir, mais de le combattre très bien, comme nous avons fait de ce côté-ci.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, j'aurai l'occasion de remettre les pendules à l'heure une autre fois, mais en ce qui concerne...

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée.

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, je ferai remarquer que le vice-premier ministre et ministre du Revenu n'a pas répondu à ma question. Je me permets donc...

Le Président: Mme la députée.

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, est-ce qu'il existe deux règles dans ce gouvernement: une pour les femmes et une pour les hommes? Qu'attend le ministre pour démissionner?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, je n'irai pas dans ce genre de considérations. Je vais me contenter de rester dans la chronologie, c'est moins discriminatoire. Quand j'étais nouveau dans cette Assemblée, moi aussi, mon temps de réaction était un peu plus lent. Alors, si la députée veut s'expliquer plus tard – comme elle l'a dit: Plus tard, je vais mettre les pendules à l'heure – j'espère qu'elle le fera, parce que ses propos, qu'elle y réfléchisse bien...

Le Président: La règle parlementaire n'oblige personne à aimer les propos d'un adversaire politique, mais la règle parlementaire oblige de faire en sorte qu'il n'y ait qu'une personne qui parle à la fois et de l'écouter. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: M. le Président, je me suis...

Le Président: M. le leader de l'opposition, sur une question de règlement?

M. Paradis: Oui. Est-ce que les dispositions de l'article 35.4 s'appliquent également au vice-premier ministre?

Le Président: Évidemment. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Je me suis résigné depuis longtemps, M. le Président, à me passer de leur amour.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry: Bon. Alors, pour revenir au ministère du Revenu dont j'assume la charge après le geste extrêmement noble posé par la députée de Rosemont, qui s'était, en plus, illustrée par une lutte constante et réussie au travail au noir et qui a épargné à notre État national des milliards de dollars que le Vérificateur général considérait comme perdus et gaspillés... Alors, non seulement elle est noble, mais elle est efficace. Et ce n'est pas parce que c'est un homme ou une femme, c'est parce que c'est une personne extraordinaire, M. le Président.

Le Président: En terminant, M. le ministre.

M. Landry: Alors, je reviens à la question principale. Je reviens à la question principale. Depuis que je suis arrivé dans ce ministère, en toute transparence, en déposant dans cette Chambre tous les documents qu'il faut, en m'adressant à la presse encore à 11 h 30 ce matin, j'ai eu comme stratégie celle du «trop fort casse pas», c'est-à-dire que j'ai décidé de ne plus poser un seul des gestes qui auraient pu être objet d'interprétation négative dans le passé sans l'avis de la Commission d'accès à l'information. J'ai rendu publiques, dans un registre que j'ai déposé hier, des informations qui auraient dû l'être depuis 1985, depuis que nous avons eu l'honneur de voter la Loi d'accès à l'information. Ils ont eu 10 ans pour publier ce registre, ils ne l'ont jamais fait. On a eu cinq ans pour le faire, on l'a fait. Ça prouve qu'on est deux fois plus rapide qu'eux, premièrement...

Le Président: M. le vice-premier ministre, je m'excuse, mais votre temps est largement écoulé. Si vous le permettez, je vais céder la parole à l'autre côté.

(15 heures)

Mme la députée de Beauce-Sud.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, puis-je faire remarquer au ministre du Revenu et vice-premier ministre qu'à l'époque où les actes sont reprochées, il était, en vertu du décret gouvernemental 1089-97, le responsable, puisque, dans le décret, on y lit: «Que la ministre déléguée au Revenu ait pour fonction de seconder le ministre d'État à l'Économie et aux Finances dans la mise en oeuvre des lois à portée fiscale et dans l'amélioration de la qualité des rapports entre le ministère et les contribuables, et que la ministre déléguée au Revenu exerce donc sous la direction du ministre d'État à l'Économie et aux Finances.» Quand va-t-il admettre sa responsabilité vis-à-vis le fait que la loi a été enfreinte?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: D'abord, premièrement, ce n'est ni dans ces circonstances ni dans ces raisons que notre collègue d'Outremont a démissionné.

Une voix: Rosemont.

M. Landry: De Rosemont. C'est pour d'autres raisons, et à une époque où elle était ministre en titre du Revenu, bien entendu. Mais, si l'opposition veut jouer à ce jeu absurde, puis-je lui rappeler que depuis 1985 cette pratique est constante au ministère du Revenu du Québec, et de bonne foi? Ça veut dire que l'opposition nous met dans la situation absurde de réclamer la démission de MM. Vallerand et Savoie, qui ont quitté la vie publique depuis longtemps. C'est à ça que mènent des raisonnements de ce genre.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Beauce-Sud.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: M. le Président, puis-je faire remarquer qu'il n'y a pas d'avis d'infraction à la loi pour tout ce qui a été fait à partir de 1985, que présentement...

Le Président: Je m'excuse. «Puis-je faire remarquer», c'est vraiment une façon d'émettre une opinion et pas de poser une question. Posez votre question, Mme la députée.

Mme Leblanc: Alors, je vais y aller en principale, M. le Président.

Le Président: Très bien, Mme la députée.


Responsabilité du vice-premier ministre quant à la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, je veux faire remarquer au ministre... à M. le président que les actions de 1985 jusqu'au moment où il est devenu ministre titulaire du Revenu, en 1994, il n'y a pas d'avis disant qu'on a enfreint la loi. Par contre, on a, aujourd'hui et la semaine dernière, un aveu du ministre à l'effet qu'il a, lorsqu'il était ministre du Revenu, ministre titulaire, enfreint la loi. Et, ce matin – il aime ça, là, me citer au texte, alors je vais le citer au texte moi-même – à la question d'un journaliste qui lui demandait s'il avait contrevenu à la loi, il a répondu: «Technically, I think».

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, la députée vient de ruiner sa propre thèse en disant précisément qu'il n'y avait pas eu d'avis, alors que tous les drames qu'on a connus, c'est parce qu'il y avait eu un avis. Et savez-vous pourquoi, M. le Président, il n'y a pas eu d'avis? Parce que nos prédécesseurs n'ont pas eu la transparence et le courage d'en demander. Nous, on a joué à visière relevée. On a eu un avis, il était négatif, on en a pris acte et on a fait ce qui était à faire. Puis on va continuer à le faire, en plus.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, puisque le ministre admet encore une fois qu'il a enfreint la loi, quand va-t-il démissionner?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, moi, j'ai cité les paroles de la députée, je les ai citées au texte. Même pendant le débat, j'étais tellement étonné qu'elle dise ça que j'ai fait venir les galées immédiatement. Elle ne me cite pas au texte, elle triture mes paroles, elle travestit ma pensée, puis elle l'a fait pendant que j'étais absent, en plus. Le texte, il est clair. Je l'ai ici.

Le Président: Sur une question de règlement?

M. Paradis: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Vous venez d'entendre comme moi le vice-premier ministre, ministre du Revenu, dire que la députée ne l'avait pas cité au texte. Le texte est là, et c'est exactement ce qu'elle...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, ce n'est pas une question de règlement. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Bien, oui. M. le Président, je l'ai, mon texte, là. Elle a bien dit – c'est aux galées, là – que j'avais admis avoir violé la loi. Je vais me citer moi-même, ce que je n'aime pas faire, mais...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Il n'y a parfois, M. le Président, des défauts d'entendement qui exigent les grands moyens.

Alors, ce que j'ai dit, c'est ceci: «Alors, encore une fois, qu'on parle du viol de la loi, qu'on parle du viol des procédures, bien sûr, mais qu'on ne parle pas de secrets fiscaux répandus dans le décor, c'est une exagération et, pour le moins qu'on puisse dire, c'est insignifiant.» Et là je citais un grand auteur en disant: «Tout ce qui est exagéré est insignifiant.»

C'est exactement ce que l'opposition est en train de faire. Elle pourrait contribuer utilement à rétablir des procédures mal assurées, instaurées dans son temps. Ils ont eu 10 ans pour les régler. Elle pourrait nous aider à les régler. Au lieu de faire ça, elle exagère et elle sombre dans l'insignifiance.

Le Président: Mme la députée de Beauce-Sud.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, je veux ramener les pendules à l'heure encore une fois, parce que je veux vraiment citer la question qui a été posée par un journaliste ce matin. Vous me permettrez? «Did they contravene the Access to Information Act?» Et le ministre de répondre: «Technically, I think.»

Le Président: M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Premièrement, il y a déjà deux réserves supplémentaires, là. «Technically, I think», on est déjà loin des affirmations fanfaronnes. Et, deuxièmement...

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Et, en plus, M. le Président, là, ça a fait la une de tous les journaux, que ma collègue de Rosemont a démissionné – je l'ai entendu à la télévision – parce qu'elle croyait que ses fonctionnaires et que le ministère... et que la loi du ministère avait été violée. Alors, qu'est-ce qu'il y a de neuf là-dedans? Il n'y a rien de neuf. Il est arrivé, au ministère du Revenu, une série de quiproquos amorcés, je vous le dis, en 1985 et maintenus par ceux qui sont assis en face de nous aujourd'hui.

Nous avons eu, par souci de transparence, le courage de demander les avis qu'il fallait à la Commission d'accès à l'information. Nous les avons eus et nous en avons pris acte, et la Commission d'accès à l'information pense que la loi a été violée. C'est exactement ce que j'ai dit dans tous les débats, c'est exactement ce que la députée de Rosemont a dit. Et, quand on cherche la nouveauté, faut faire des recherches un peu plus approfondies que de ratiociner les mêmes notions et, à la limite, de faire perdre le temps de cette Chambre. On a passé toute la période de questions là-dessus.

Le Président: M. le député de Hull, en question principale.


Avis de la CAI concernant la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. Roch Cholette

M. Cholette: Principale. Puisque, M. le Président, le vice-premier ministre vient de reprocher à ce côté-ci de la Chambre de ne pas avoir demandé d'avis à la Commission d'accès à l'information, puis-je lui rappeler que ses propos de la semaine dernière faisaient état qu'aux fins du sondage 2 100 coordonnées personnelles ont été fournies au Bureau de la statistique du Québec et qu'il n'y avait pas eu d'avis demandé à la Commission d'accès à ce niveau-là? Est-ce qu'il peut s'engager aujourd'hui à demander un avis à la Commission d'accès dans le dossier du Bureau de la statistique du Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Vraiment, on est plus vite que l'opposition. Non seulement j'ai demandé l'avis, mais j'ai reçu la réponse.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, M. le ministre.

(15 h 10)

M. Landry: En plus, M. le Président, vous avez subodoré que c'est une bonne réponse. En effet, le président de la Commission m'écrit que le registre, celui que j'ai déposé hier en cette Chambre – vous vous en souvenez, M. le Président – dûment complété, répond aux prescriptions de l'article 67.3 de la Loi sur l'accès. C'est une chose qui aurait dû être faite il y a 15 ans. Nous l'avons fait et nous avons l'approbation de la Commission depuis hier.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi.


Responsabilité ministérielle lors de la communication de renseignements nominatifs


M. Pierre Paradis

M. Paradis: En principale, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut comprendre que son ministre des Finances vient de répondre encore une fois à côté de la question qui lui est posée? La situation est très simple. Dans le cas de la fuite de renseignements à l'agence SOM, lorsqu'il y a eu un doute dans son esprit, la ministre du Revenu de l'époque a demandé un avis à la Commission d'accès à l'information, un avis qui a conclu à l'illégalité, et, devant cette situation, elle a posé le geste de responsabilité ministérielle qui s'imposait.

Dans le cas de la fuite de renseignements au Bureau de la statistique du Québec, ce n'était pas la députée de Rosemont qui était ministre à ce moment-là, c'était le vice-premier ministre qui était responsable du ministère du Revenu. Pourquoi lui, au lieu de faire ce que la députée de Rosemont a fait, pourquoi se cache-t-il derrière un comité qu'il a créé? Pourquoi tente-t-il de créer un écran de fumée? Pourquoi ne suit-il pas le même chemin? Pourquoi ne demande-t-il pas l'avis de la Commission d'accès à l'information? Et, lorsqu'il le recevra, il posera le geste qu'il aura à poser, s'il a autant d'honneur que la députée de Rosemont.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: J'ai beaucoup d'estime pour la députée de Rosemont et j'espère avoir autant d'honneur qu'elle. Mais l'honneur exige aujourd'hui... L'honneur du ministère du Revenu, quand il était présidé par les gens d'en face comme de notre côté... qu'il n'y a pas eu dans ce cas de fuite d'information, c'est des tactiques destinées à ameuter le public pour des événements qui n'ont pas eu lieu. Des procédures n'ont pas été suivies, c'est vrai! Mais il n'y a eu aucune fuite, à l'occasion de ce dont on parle, de renseignements confidentiels du ministère du Revenu du Québec. Il y a des précautions qui n'ont pas été prises. Il y a des choses qui n'ont pas été faites convenablement, peut-être parce qu'une loi n'était pas assez précise. Mais c'est en ce sens...

Des voix: ...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry: Bon, d'abord, c'est un transfert interne au Bureau de la statistique. Et j'ai consulté les galées de la commission parlementaire, c'est l'article k – je le dis de mémoire – il a été adopté à l'unanimité. Le président a pris la précaution de dire: Sur division? Non. Le critique de l'opposition officielle était là et a dit: Pas sur division, à l'unanimité. Alors, je redis que ce qui est allé au Bureau de la statistique n'a fait l'objet d'aucune fuite.

Mais j'étais en train de dire que la loi avait peut-être besoin d'être clarifiée. Vous m'avez bien entendu, M. le Président?

Bien, j'ai beaucoup de courrier de ce temps-là. J'ai eu une lettre aujourd'hui du président de la Commission d'accès à l'information, et voici ce qu'il dit, que l'on m'écoute bien: «C'est pourquoi la Commission souscrirait à l'adoption par l'Assemblée nationale d'une modification législative pour clarifier la situation.» C'est ça que vous auriez dû faire et que vous n'avez jamais fait. Vous n'avez clarifié ni les lois ni l'administration. Nous avons bien l'intention de faire l'un et l'autre.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Chomedey.


Ministre titulaire lors la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: M. le Président. Ce qui doit être clair pour tout le monde qui nous écoute aujourd'hui, c'est qu'il y a eu deux contrats: le contrat avec SOM, qui a mené, comme on vient de le mentionner à plusieurs reprises, à la démission effectivement honorable de la députée de Rosemont comme ministre. Il y a eu un autre contrat, cette fois-ci avec le Bureau de la statistique du Québec. C'est seulement pendant un bref interregnum, entre l'élection du 30 novembre 1998 et le jour de sa démission, le 27 avril 1999, qu'elle était la ministre titulaire. Lors du contrat avec le Bureau de la statistique du Québec, l'actuel ministre des Finances était le ministre titulaire du Revenu.

Ce sont les mêmes faits. C'est effectivement tout aussi illégal, et la question, M. le Président, est la suivante: Comment ça se fait que le ministre des Finances vante l'importance de l'honneur de suivre nos règles parlementaires lorsqu'il s'agit de la députée de Rosemont et que, dans son propre cas à lui, il nous fait son comité à lui, pour enquêter sur lui? Il nous dit en conférence de presse ce matin: «J'ai téléphoné au président de la Commission d'accès à l'information.» Et là il dit: «J'ai une lettre disant que la loi n'était pas assez claire.»

M. le Président, est-ce qu'il peut juste nous dire ceci? Si c'est la faute de la loi, comment ça se fait que la ministre, députée de Rosemont, devait démissionner? Pourquoi, lui, il a le droit de se lever aujourd'hui dans cette Chambre et blâmer la loi pour le fait que, lui, il a enfreint la loi, finalement?

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Premièrement, il est curieux comme en peu de temps les opinions peuvent changer. L'opposition officielle a vilipendé la députée de Rosemont tout le temps qu'elle a été ministre, à l'Assemblée comme en commission, et aujourd'hui, d'une façon que je n'ose qualifier parce que je prendrais une expression non parlementaire, ils la louent et la vantent. Il faut avoir un peu de consistance et de cohérence dans la vie. Ce n'est pas vrai que la députée de Rosemont a changé de ce point-là!

Des voix: ...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry: M. le Président, puisqu'il faut aller dans la mémoire historique et que l'opposition aime ça, il y en a déjà eu, des renseignements qui ont fui pour vrai, hein, et ça s'est terminé, dans leur temps, devant les tribunaux, par une poursuite pénale, un plaidoyer de culpabilité et des amendes. C'est pas mal différent de ce qu'on a ici, qui est basé sur la bonne foi, mais des lois qui doivent être clarifiées et, sans doute, des erreurs dont nous nous occupons.

J'ai dit à la conférence de presse et je le redis devant cette Chambre: Nous sommes prêts, s'il le faut, à aller en référer devant la Cour supérieure du Québec pour obtenir des éclaircissements. En effet, notre stratégie est basée sur la transparence. Notre stratégie est basée sur la bonne foi, et la bonne foi, M. le Président, dans nos lois, elle se présume, sauf quand un juge déclare que quelqu'un n'a pas été de bonne foi.

Le Président: En question principale, M. le député de Marquette?


Demande d'un nouvel avis juridique concernant la transmission de renseignements nominatifs par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. François Ouimet

M. Ouimet: Principale, M. le Président. Le ministre a annoncé en conférence de presse ce matin qu'il sollicitait un nouvel avis parce que l'avis de la Commission d'accès à l'information ne faisait pas son affaire, qui a mené à la démission de la députée de Rosemont.

M. le Président, le vice-premier ministre demande, dans une affaire qui est hautement politique, à un sous-ministre – à un sous-ministre – qui relève du gouvernement, qui n'a ni l'autonomie ni l'indépendance pour faire ce que lui demande le vice-premier ministre... Qu'est-ce qu'il lui demande, le vice-premier ministre? Ses propos sont fort révélateurs, et je le cite au texte: «En plus, j'ai demandé au jurisconsulte du gouvernement, la ministre de la Justice, un avis juridique formel sur l'interprétation des articles 69 et suivants de la Loi sur le ministère du Revenu. Pourquoi? Parce que les avis préliminaires disent qu'il n'est pas sûr que l'avis, l'interprétation de la Commission d'accès à l'information est la bonne.»

Ce que le vice-premier ministre tente de faire, M. le Président, c'est de chercher un avis de complaisance qui va dire...

(15 h 20)

Des voix: Ah!

Le Président: M. le député de Marquette, je demande de retirer vos propos, s'il vous plaît.

M. Ouimet: Alors, je remplace «un avis de complaisance» par un avis qui serait...

Le Président: D'abord, retrait des propos, s'il vous plaît, M. le député de Marquette, et, par la suite, reformulez comme vous le souhaitez.

M. Ouimet: Alors, M. le Président, le vice-premier ministre...

Des voix: ...

M. Ouimet: J'ai retiré, M. le Président...

Le Président: Très bien. Alors, si le retrait...

M. Ouimet: ...j'ai retiré «avis de complaisance».

Mais ce qui est clair, le vice-premier ministre cherche un nouvel avis juridique. Celui de la Commission d'accès à l'information, manifestement, ne fait pas l'affaire du gouvernement. Pourquoi? Parce qu'il a entraîné la députée de Rosemont dans une démission et pourrait entraîner également, si ça n'était de l'entêtement du vice-premier ministre, sa propre démission.

M. le Président, il prend trois moyens, le vice-premier ministre. Premièrement, il demande au sous-ministre de la Justice, qui n'a ni l'indépendance ni l'autonomie voulues pour donner un avis objectif et clair, il dit un peu plus loin: Si ce n'est pas satisfaisant, il va s'adresser aux tribunaux. Et si jamais la décision du tribunal allait dans le même sens que la Commission d'accès à l'information, à ce moment-là, il va demander une modification législative. Tout ça, M. le Président, pour abrier des gestes, pour tenter de venir neutraliser l'avis de la Commission d'accès à l'information.

Et ma question au vice-premier ministre: Si c'est vrai que trop fort ne casse pas, pour reprendre ses propres propos, pourquoi ne donne-t-il pas le dossier à un enquêteur spécial qui aurait toute l'autonomie et l'indépendance pour véritablement faire la lumière dans cette affaire une fois pour toutes?

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: Je le redis, M. le Président, et c'est bien clair, notre stratégie est basée sur la transparence et sur le fait de ne rien négliger. Et quand on ne néglige rien, en matière de santé comme en matière juridique, on requiert divers avis. On a celui de la Commission, on a celui de la jurisconsulte du gouvernement qui viendra, et éventuellement celui d'un juge de la Cour supérieure. Le député est avocat, il doit bien savoir que, devant tous les tribunaux du Québec ce matin... D'un côté, il y a un avocat qui dit blanc puis l'autre qui dit noir, puis au milieu il y a un juge, généralement vêtu de rouge, qui essaie de départager les deux. Ce qui prouve qu'en droit, à moins...

Le Président: M. le député de Joliette, s'il vous plaît! M. le vice-premier ministre.

M. Landry: À moins que les études de droit n'aient laissé aucune trace dans l'esprit du député, il devrait savoir que c'est une science complexe, subtile. C'est pour ça qu'il y a des avocats de la poursuite et de la défense, qu'il y a des tribunaux de première instance, de cassation et d'appel.

Le Président: En question principale, M. le député de Châteauguay.


Avis du jurisconsulte concernant la transmission de renseignements par le ministère du Revenu au Bureau de la statistique du Québec


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Il est bien évident, M. le Président, que devant les tribunaux il y a deux parties, mais lorsqu'il y a une jurisprudence, normalement, on la suit. Et dans ce cas-là, pour des faits exactement les mêmes, il y a un avis de la CAI qui a fait en sorte que la députée de Rosemont a démissionné de son poste de ministre. On se serait attendu que le vice-premier ministre, ministre titulaire du Revenu, pour les mêmes raisons, les mêmes gestes avoués par lui-même, avec le même avis, normalement, démissionne. Mais, oh! surprise, sa stratégie, qu'il appelle, qui n'est rien d'autre que deux poids deux mesures, sa stratégie commence par un premier élément, et c'est lui qui le dit aujourd'hui: Allons chercher du jurisconsulte, sous-ministre Bouchard, un avis sur l'avis juridique de la CAI, parce que, coudon, ça a l'air que ce n'est pas si sûr que ça. Ça a quand même fait tomber la députée de Rosemont, mais, pour lui, ce n'est pas si sûr que ça.

Or, M. le Président, Michel Bouchard, le sous-ministre chez qui on va chercher l'avis, il a déjà participé à des avis, et je n'en cite rien qu'un exemple: l'affaire Le Hir. Le 6 décembre 1995, dans un avis juridique de deux paragraphes, qu'est-ce qu'il nous dit? Il nous dit: Il n'y a rien là. Après lecture et analyse des documents tels que soumis à la lumière du droit en pareil matière, la Direction des affaires criminelles ne recommande pas l'implication des forces policières. Or, M. le Président, vous savez comme moi que ça a entraîné la chute d'un ministre, des accusations, et on a appris récemment des déclarations de culpabilité.

Ma question est bien, bien simple au premier ministre: Comment peut-il accepter le petit tour de passe-passe du vice-premier ministre, qui est échec et mat selon la règle pour la députée de Rosemont mais qui, pour lui, ne vaut pas, et maintenant il va changer les règles? Comment peut-il accepter la position du vice-premier ministre? Pourquoi ne lui demande-t-il pas sa démission?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry: M. le Président, si le droit n'a pas laissé de trace sur le questionneur précédent, j'ai l'impression que le dernier questionneur, lui, n'a pas fait son droit du tout. Il a commencé sa question en parlant de la députée de Rosemont comme étant de la jurisprudence. Un étudiant en droit, première journée – même pas première année – sait que seul un tribunal peut établir la jurisprudence. Et, s'il y a une jurisprudence à établir, ce n'est pas l'opposition officielle qui le fera ni le gouvernement, ça sera les tribunaux.

Alors, je pense que l'opposition a largement démontré son incapacité à faire décoller son lourd volatile malgré tous les efforts et malgré la participation de presque toute leur députation. Quoique leur chef n'étant pas là, peut-être qu'il aurait pu faire mieux s'il y avait été. Savez-vous ce que je soupçonne, M. le Président? La période de questions est finie... L'opposition a appris que j'étais un ami de la communauté juive. Ils ont voulu me faire ma fête parce que les gens étaient là. Mais j'ai fait mon possible pour leur faire leur fête à eux.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée.

Des voix: ...

Le Président: Alors, est-ce que tout le monde peut prendre note que la période de questions et de réponses orales est terminée? Merci.

Alors, il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.


Avis touchant les travaux des commissions

À l'étape des motions sans préavis, s'il n'y a pas de motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions ou... Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Bon. Alors, j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail entreprendra les consultations particulières relativement à la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête de verglas de janvier 1998, le mardi...

Le Président: S'il vous plaît, ceux qui ont à quitter l'enceinte du salon bleu, vous êtes priés de le faire rapidement pour que les avis puissent être donnés de façon audible. M. le leader.

M. Brassard: ...18 mai 1999, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle du Conseil législatif; et

Que la commission de la culture procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 6, Loi modifiant la Loi sur la Société de la Place des Arts de Montréal et la Loi sur la Société du Grand Théâtre de Québec, le mardi 18 mai 1999, de 10 heures à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Président: Bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira en séance de travail aujourd'hui, le jeudi 13 mai 1999, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, afin de préparer les séances d'imputabilité, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

(15 h 30)

Je vous avise également que la commission de l'administration publique va se réunir mardi prochain, le 18 mai, de 9 h 30 jusqu'à midi, à la salle 1.38 également dans l'édifice Pamphile-Le May, afin de procéder à l'audition annuelle du Vérificateur général du Québec et de procéder à la vérification de ses engagements financiers compris dans la liste des mois de janvier 1997 à mars 1999.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Je vous avise également que, conformément à l'entente intervenue aujourd'hui entre les leaders, le débat de fin de séance prévu pour aujourd'hui, concernant la question du député de Châteauguay à Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux sur le centre hospitalier Anna-Laberge, a été reporté à la fin de la séance de mardi prochain, le 18 mai, et que ce débat ne sera pas comptabilisé aux fins de l'application de l'article 312 du règlement.

Je vous rappelle aussi que l'interpellation prévue pour le vendredi 14 mai portera sur le sujet suivant: La fiscalité municipale. À ce moment-là, le député de Laurier-Dorion s'adressera à Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole;

Je vous informe aussi que l'interpellation prévue pour le vendredi 21 mai portera sur le sujet suivant: Le développement de l'emploi et de la main-d'oeuvre. Le député de Robert-Baldwin s'adressera alors à Mme la ministre d'État au Travail et à l'Emploi et ministre responsable de l'Emploi.

Alors, nous allons aller aux affaires du jour, s'il n'y a pas d'autres questions.

M. Brassard: M. le Président.

Le Président: Oui.

M. Brassard: Avant d'appeler l'article 22 portant sur le projet de loi n° 42 sur Hydro-Québec, il nous faut, selon nos règlements, je pense, ajourner le débat de ce matin sur le projet de loi n° 31 sur le Code de procédure civile afin que le député de Marquette puisse poursuivre son intervention lors de la reprise du débat sur ce projet de loi.

Le Président: Le débat a été ajourné par le député de Marquette. Très bien?

M. Brassard: Ah bon. C'est fait?

Le Président: C'est fait.

M. Ouimet: Le débat n'était pas terminé, loin de là.

Le Président: Non, je sais, mais il est ajourné par vous.

M. Ouimet: Oui.

Le Président: Donc, vous pourrez le reprendre.

M. Ouimet: O.K.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques minutes avant d'aborder l'article 22.

Le Président: Alors, très bien. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 32)

(Reprise à 15 h 39)


Affaires du jour


Projet de loi n° 42


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous débutons les affaires du jour. À l'article 22, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 42, Loi concernant la construction par Hydro-Québec d'infrastructures et d'équipements par suite de la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998.

Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 42? M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président. Alors, comme on le sait, l'annonce du dépôt de ce projet de loi a été faite le 11 mars dernier en cette Chambre, au moment où je faisais, au nom du gouvernement, une déclaration ministérielle que j'ai prononcée ici même.

(15 h 40)

Si on prend connaissance du projet de loi n° 42, à la lecture du projet de loi n° 42, on constate qu'il est conforme, tout à fait conforme aux intentions que j'ai exprimées, aux orientations que j'ai rendues publiques le 11 mars 1999 au nom du gouvernement. C'est-à-dire que les travaux effectués avant le 11 mars 1999, qui sont d'ailleurs décrits à l'annexe du projet de loi, sont protégés par une autorisation rétroactive. Donc, par rapport à la déclaration ministérielle du 11 mars, il n'y a pas de surprise à cet égard. C'est tout à fait conforme. Et pour ce qui est des travaux qui restent à faire et qui sont également décrits dans l'annexe II, ces travaux vont respecter toutes les lois et tous les règlements en vigueur, sans exception.

Ce projet de loi est nécessaire, M. le Président, suite à la décision de la Cour supérieure qui a – c'est Mme la juge Rousseau qui présidait la Cour – invalidé, comme on le sait, la procédure d'autorisation utilisée de bonne foi dans des circonstances, dans un contexte d'urgence, donc la procédure d'autorisation qu'a utilisée le gouvernement.

Après les efforts sans précédent que nous avons réalisés pour assainir les finances publiques, atteindre le déficit zéro, et Dieu sait que cela s'est fait en imposant, je dirais, des sacrifices à tout le monde... L'état des finances publiques, on le sait, au moment où on est arrivé au gouvernement, était lamentable. C'était le fruit de l'incurie du gouvernement libéral qui nous avait précédés. Donc, dans un tel contexte, vous comprendrez que la population du Québec n'aurait pas accepté que nous puissions être dans l'obligation ou placés dans une situation telle que nous ayons à démolir ou à démanteler des infrastructures qui représentent des investissements de près de 300 000 000 $. Je pense qu'il faut se rappeler ces circonstances et cette situation. La population québécoise n'aurait pas non plus accepté que nous refusions de maintenir des équipements nécessaires pour renforcer la sécurité, pour augmenter le niveau de sécurité de l'alimentation électrique des régions qui ont été touchées par la tempête de verglas de janvier 1998. Il s'agit donc, dans ce contexte et compte tenu des circonstances que je viens de vous rappeler brièvement, d'un projet de loi présenté par un gouvernement responsable, qui agit de façon responsable.

Je pense qu'il n'est pas futile aujourd'hui, au moment de l'adoption du principe du projet de loi n° 42, de rappeler un certain nombre de faits.

Au lendemain de la tempête de verglas du 5 au 9 janvier 1998, qui a privé d'électricité en plein hiver près de 3 000 000 de personnes pendant plusieurs jours, certains pendant un mois, le gouvernement demandait à Hydro-Québec un rapport proposant des moyens qui permettraient d'améliorer la sécurité, de renforcer le réseau, d'améliorer la sécurité d'approvisionnement électrique des populations touchées par ces événements. Entre-temps, le 14 janvier 1998, le gouvernement adoptait notamment les décrets suivants: d'abord, le décret 34-98 qui autorisait Hydro-Québec à utiliser à des fins autres qu'agricoles des lots situés en zone agricole pour les fins de construction ou de reconstruction d'équipements de transport, de répartition et de distribution électrique; le décret 35-98 concernant la soustraction de la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement – c'est l'article 33 de la Loi sur la qualité de l'environnement – des projets, soustraire à cette procédure des projets de lignes de transport et de répartition d'énergie électrique ainsi que des projets de postes de manoeuvre ou de transformation requis à la suite de la tempête de verglas; et, enfin, le décret 50-98 qui autorisait Hydro-Québec à construire les infrastructures et les équipements nécessaires pour les besoins de son réseau suite à la tempête de verglas.

Le 21 janvier 1998, le président-directeur général d'Hydro-Québec, M. Caillé, déposait un rapport intitulé Rapport sur l'état du réseau électrique , ce qu'on appelle familièrement le rapport Warren parce qu'il était constitué... Ce rapport a été le fruit d'un groupe de travail présidé par M. Warren et associé à des experts venant de tous les horizons sur ces questions fort complexes. Et c'est sur la base de ce rapport Warren que le président-directeur général d'Hydro-Québec mettait de l'avant les recommandations suivantes, proposait au gouvernement, au Conseil des ministres les recommandations suivantes avec comme objectif d'augmenter de façon significative et substantielle le niveau de sécurité d'approvisionnement électrique des régions touchées.

Et les recommandations étaient les suivantes. C'est là qu'on a commencé à parler de bouclage. C'est sûr que, moi, comme bien de mes concitoyens... Je suis sûr que, avant cette date ou avant cette époque, on ne savait pas trop, trop ce que ça signifiait, le bouclage. On l'a appris par la suite. C'est là, donc, qu'on a commencé à parler de bouclage, et c'est ainsi qu'Hydro-Québec nous recommandait le bouclage des réseaux haute tension de la Montérégie à 735 kV, de l'Outaouais à 315 kV et du centre-ville de Montréal à 315 kV, bouclage signifiant – je le répète, je l'ai dit la semaine dernière en cette Chambre, pour bien comprendre ce que ça signifie – d'ajouter un autre axe d'alimentation pour une région donnée, un autre axe d'alimentation dans un autre corridor géographique, de telle sorte que, si des événements malheureux ou exceptionnels comme la tempête de verglas de janvier 1998 se reproduisaient, les régions affectées, puisqu'il y aurait plusieurs axes d'alimentation, se retrouveraient avec un niveau de sécurité beaucoup plus élevé, accru. Donc, réaliser le bouclage dans trois régions: Montréal, Outaouais et Montérégie.

Augmenter, également, de 500 MW le transit d'électricité dans le couloir Québec–Mauricie–Montréal, ce qui nécessitait des travaux autour du poste Jacques-Cartier dans la région de Portneuf.

Réaliser une interconnexion avec le réseau haute tension de l'Ontario, ce qui permettrait évidemment, à ce moment-là, dans des circonstances semblables à celles vécues en janvier 1998, d'approvisionner l'Outaouais.

Et enfin, le P.D.G. d'Hydro-Québec, sur la base du rapport Warren, recommandait d'accroître la robustesse des lignes de transport haute tension, notamment en insérant ce qu'on appelle des pylônes anticascades à certains points stratégiques des lignes haute tension, ce qui, au moment de la reconstruction des lignes de transport endommagées, s'est fait. Ceux qui peuvent jeter un coup d'oeil sur ce qu'Hydro-Québec a reconstruit pourront voir ce genre de pylône. Ils sont plus robustes, et donc, s'il y avait un événement comme celui de janvier 1998 et que des pylônes soient renversés, ces pylônes plus robustes, dits anticascades, stopperaient les dégâts, empêcheraient plus de dégâts.

Alors, devant ces propositions, le gouvernement, évidemment, en a pris connaissance, les a examinées. Et je le dis d'emblée – j'étais présent, comme plusieurs de mes collègues du Conseil des ministres – je le dis puis je suis encore convaincu aujourd'hui, parfaitement convaincu que les décisions sur le fond des choses... Je parle sur le fond des choses. Les questions de droit, bon, c'est une autre dimension qui a été, comme on le sait, traitée par la Cour supérieure. Mais, sur le fond, je demeure convaincu que les décisions qu'on a prises étaient bonnes et sont encore bonnes. C'est-à-dire que, pour assurer plus de sécurité d'alimentation des régions touchées, il était nécessaire de réaliser des bouclages, donc d'ajouter des axes d'alimentation à ces régions concernées: Montréal, Outaouais, Montérégie.

(15 h 50)

C'est ce qui fait que, le 28 janvier 1998, le gouvernement du Québec adoptait un certain nombre de décrets: d'abord le décret 85-98 qui autorisait Hydro-Québec à utiliser à des fins autres qu'agricoles des lots situés en zone agricole, pour les fins de construction de la ligne Hertel–des Cantons et du poste Montérégie, près de Saint-Césaire; le décret 93-98 concernant la soustraction de la procédure d'évaluation prévue à la section 4.1 du chapitre I de la Loi sur la qualité de l'environnement le projet de construction de la ligne de transport d'énergie électrique à 735 kV Hertel–des Cantons et du poste de transformation Montérégie–Saint-Césaire à 230 kV; le décret 108-98 qui autorisait Hydro-Québec à construire des infrastructures et des équipements nécessaires pour satisfaire les besoins en électricité de l'ensemble des citoyens des régions affectées par la tempête de verglas, notamment dans les régions administratives de la Montérégie, de l'Outaouais, de Montréal et de Québec.

Le 13 mai l998, le gouvernement du Québec adoptait les décrets 652-98 et 653-98 aux fins d'exempter la construction de la phase I de la ligne Hertel–des Cantons à l'autorisation du gouvernement et d'éviter ainsi l'obligation pour Hydro-Québec d'obtenir les avis de conformité au schéma d'aménagement des municipalités régionales de comté concernées. Plusieurs personnes ont alors – on s'en souvient – manifesté leur mécontentement, leur désaccord et aussi leur sentiment d'impuissance devant les projets de bouclage d'Hydro-Québec. De façon générale, ces personnes ne remettent pas ou ne remettaient pas en question la justification même des projets mais plutôt l'absence d'une consultation en bonne et due forme telle que prévue dans la procédure d'évaluation environnementale, avec évidemment l'intervention du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, le BAPE, en particulier.

Le tronçon des Cantons–Saint-Césaire – c'est la première phase de la ligne Hertel–des Cantons – a fait l'objet d'une contestation qu'on peut qualifier de forte, pour ne pas dire à certains moments de virulente, de la part d'un certain nombre de citoyens de la région de Val-Saint-François. Entre autres, une dizaine d'individus et une personne morale, la Coalition des citoyens et citoyennes du Val-Saint-François, se sont adressés à la Cour supérieure pour lui demander de déclarer illégaux les huit décrets précités, que je viens d'énumérer, adoptés par le gouvernement et en conséquence d'ordonner la cessation des travaux du projet Hertel–des Cantons.

Puis, c'est à partir de cette démarche devant le tribunal que, le 23 février 1999, la Cour supérieure, qui était présidée par Mme la juge Rousseau, émettait une ordonnance d'injonction ordonnant l'arrêt immédiat des travaux pour le projet Hertel–des Cantons et, surtout, qui déclarait nuls, qui déclarait illégaux les décrets adoptés par le gouvernement du Québec, donc qui donnait raison à la requête des citoyens de Val-Saint-François. C'est à partir de ce moment-là évidemment que le gouvernement a entamé, je dirais, une réflexion, une analyse et des discussions sur ce qu'il convenait de faire à partir du jugement de Mme la juge Rousseau nous ordonnant d'arrêter les travaux et déclarant nuls et illégaux les décrets que nous avions adoptés en janvier, février et en mai 1998.

Dans ma déclaration ministérielle du 11 mars 1999, dont j'ai parlé au tout début, j'indiquais que le gouvernement du Québec avait décidé d'abord de ne pas interjeter appel du jugement prononcé par la Cour supérieure. C'était un scénario que nous avons examiné. C'est un scénario possible aussi. C'est une possibilité. Il arrive parfois qu'on décide d'interjeter appel d'un jugement du tribunal. Mais, dans ce cas-là, après réflexion et analyse, on a décidé qu'il n'y avait pas lieu d'aller en appel. Nous avons décidé de ne pas aller en appel du jugement prononcé par la Cour supérieure concernant le projet Hertel– des Cantons et donc que nous allions nous y soumettre, arrêter les travaux, suspendre les travaux, et pas seulement sur la ligne Hertel–des Cantons, mais également partout; partout, partout, puisque, même si l'ordonnance d'injonction ne portait que sur les travaux sur la ligne Hertel–des Cantons, à partir du moment où les décrets étaient jugés illégaux, bien, ça signifiait, à ce moment-là, que les travaux que nous avions faits à Montréal et dans l'Outaouais, et même à Québec, au nord de Québec, se trouvaient également entachés d'illégalité, et on a décidé de les arrêter aussi. On a demandé à Hydro-Québec de les arrêter.

Je confirmais aussi que le gouvernement souhaitait que la suite des opérations de bouclage et de sécurisation du réseau puisse s'effectuer dans le cadre des procédures usuelles prévues par les lois, notamment les trois lois concernées par le jugement de Mme Rousseau; la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et la Loi sur la protection du territoire et des activités agricoles, tout en reconnaissant cependant que nous demeurions convaincus de la nécessité des bouclages. Je pense que c'est important encore une fois de le signaler. La juge Rousseau, d'ailleurs, n'a pas traité de cette question, n'a pas traité de la justification des projets; la juge Rousseau a rendu un jugement sur des questions de droit. Nous nous y soumettons, mais nous continuons d'affirmer que ces bouclages pour augmenter le niveau de sécurité d'alimentation des régions touchées demeurent nécessaires.

Je spécifiais aussi que, des infrastructures déjà construites, il y en avait quand même pas mal. Je vous les donne rapidement: on avait terminé ou presque le tronçon des Cantons–Saint-Césaire; on avait pratiquement terminé la ligne 315 kV entre le poste Atwater et le poste Aqueduc sur l'île de Montréal; nous avions terminé la ligne Duvernay–Anjou, mais, celle-là, il faut dire qu'elle avait franchi toutes les étapes prévues dans les lois, y compris les audiences publiques devant le BAPE; nous avions aménagé une interconnexion temporaire avec l'Ontario avec évidemment comme objectif de construire une interconnexion permanente; nous avions à peine commencé le déboisement du corridor pour la ligne de l'Outaouais, le bouclage de l'Outaouais.

Donc, c'est ça, les travaux qui ont été faits. On les estime à tout près de 250 000 000 $, plus un certain nombre d'achats d'équipement qui s'y ajoutent. Ça veut dire qu'on s'approche du 300 000 000 $, comme je l'ai souvent mentionné, ce qui n'est pas rien. Alors donc, c'est dans ce contexte-là que le gouvernement a dit: C'est évidemment impensable qu'on se place dans la possibilité de devoir démanteler ces infrastructures déjà construites, déjà mises en place. Ça veut dire des investissements de quelque 300 000 000 $. Il n'y a pas un gouvernement le moindrement responsable qui sérieusement, là, envisagerait une pareille éventualité. Et, s'il fallait qu'un gouvernement envisage une pareille éventualité puis même en arrive au démantèlement de ces infrastructures, en se rappelant les investissements requis, je pense que la population ne l'accepterait pas.

(16 heures)

Donc, nous avions indiqué ici, en cette Chambre, publiquement que nous allions déposer un projet de loi dit conservatoire, et c'est ce que nous faisons.

Et enfin, j'annonçais aussi la tenue d'une commission parlementaire sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par le verglas, et c'est ce que nous allons faire la semaine prochaine. À partir de mardi, nous allons entendre un certain nombre d'intervenants, dont Hydro-Québec, bien sûr, mais également la commission Nicolet – M. Nicolet a été invité, il sera présent aussi – et un certain nombre d'intervenants qui ont été invités à cette consultation, pour qu'on fasse le point sur toute la question de la sécurité des approvisionnements électriques dans les régions touchées.

Qu'est-ce qu'on y retrouve? Ce projet de loi confirme une exemption rétroactive de l'autorisation prévue par la Loi sur Hydro-Québec, par la Loi sur la qualité de l'environnement, par la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et par la loi sur la protection des territoires et des activités agricoles. C'est la technique législative qu'on a retenue. Les légistes, évidemment, à partir des intentions et des orientations du gouvernement, ont choisi cette façon de faire pour redonner une pleine sécurité juridique aux infrastructures déjà construites. C'est donc l'exemption rétroactive.

Cela veut dire, en clair, que le gouvernement va ainsi mettre à l'abri de toute poursuite visant, par exemple, le démantèlement des infrastructures, les travaux effectués avant le 11 mars 1999, date de la déclaration ministérielle, de même que les travaux faits après cette date en matière de conservation, de sécurité et de remise en état du réseau d'Hydro-Québec. Parce qu'il y a eu beaucoup de travaux de remise en état, particulièrement suite à des demandes pressantes de la part d'un certain nombre de producteurs agricoles qui voyaient venir le temps des travaux agricoles et qui réclamaient des interventions de remise en état, ce qui a été fait à la suite d'une entente avec l'Union des producteurs agricoles. L'entente, c'est que les producteurs agricoles procèdent aux travaux requis et envoient la facture à Hydro-Québec. Mais la loi, quand même, prévoit ou donne une pleine force, je dirais, légale à ces travaux, aussi, de remise en état pour éviter possiblement des poursuites éventuelles.

L'article 5 de la loi conservatoire confirme aussi que les travaux à faire, à venir, les travaux qui ne sont pas encore faits vont s'effectuer, vont se faire dans le cadre des procédures prévues aux lois précédemment nommées: la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, entre autres.

Quant à l'article 6, il porte sur la reconnaissance des actifs des projets de bouclage et sur la validité des actes conclus par Hydro-Québec. On y indique, entre autres, les actifs considérés comme prudemment acquis et utiles pour l'exploitation du réseau de transport d'Hydro-Québec aux fins de l'établissement de la base de tarification. À l'article 9, on spécifie qu'aucun recours ne pourra être reçu ou maintenu contre le gouvernement ou Hydro-Québec.

M. le Président, la bonne foi du gouvernement et d'Hydro-Québec ne peut être remise en cause quant aux décisions de procéder rapidement afin de rétablir et de sécuriser le réseau d'alimentation électrique. Il y a eu erreur de droit que le tribunal a mise en lumière, avec les suites qu'on sait, le jugement qu'on sait, c'est vrai. Mais je pense, il faut le dire encore une fois, que ces décisions-là ont été prises de bonne foi, avec l'intention de sécuriser davantage des milliers et des centaines de milliers de personnes. Donc, pas d'intention malicieuse ou perverse, d'aucune façon, de la part du gouvernement.

L'opposition constatera, les membres de cette Assemblée ont sûrement constaté que, dans les projets qui sont décrits à l'annexe, rien, absolument rien ne concerne les exportations, si ce n'est l'interconnexion de l'Outaouais. C'est bien connu, mais cette interconnexion, on la met en place non pas, d'abord, pour des fins d'exportation ou de vente d'électricité en Ontario, mais d'abord et avant tout pour augmenter le niveau de sécurité d'approvisionnement de la région de l'Outaouais.

D'ailleurs, relativement aux interconnexions, je vous signale que – petit aparté à ce sujet – le rapport Nicolet est très louangeur à l'égard des interconnexions, parce que, évidemment, les interconnexions entre les États-Unis, par exemple, et le Québec ou le Nouveau-Brunswick, ou l'Ontario, c'est, dans certains milieux, très mal vu. Les interconnexions, ça veut dire des exportations, bon, puis il y en a qui ne sont pas très favorables à la vente d'électricité en dehors du Québec. Mais la commission Nicolet, cependant, met très bien en relief le fait que les interconnexions, en soi, c'est une infrastructure qui a pour effet d'augmenter considérablement le niveau de sécurité des régions du Québec tout entier, et elle demande presque d'en ajouter ou, en tout cas, de faire en sorte que les interconnexions existantes soient conçues de telle façon ou réaménagées de telle façon qu'on puisse recevoir, si vous voulez, de l'électricité des sociétés environnantes, soit particulièrement du nord-est des États-Unis. Fin de l'aparté.

La critique de l'opposition, qui va tantôt prendre la parole, qui cite souvent certaines pages ou certains extraits du rapport de la commission Nicolet, je vous ferais remarquer et je lui ferais remarquer que le rapport Nicolet contient 1 500 pages et 500 recommandations. Alors, c'est beaucoup de texte, il ne faut pas s'accrocher... C'est un peu simpliste de s'accrocher à une ou deux phrases, je pense qu'il faut regarder le rapport Nicolet dans son ensemble, regarder ses recommandations dans leur ensemble également.

Mais je vous dirais cependant qu'il y a une recommandation qu'il m'apparaît important de signaler à cette Chambre. Dans le rapport Nicolet, on lit ce qui suit: «Le sinistre de janvier 1998 ne doit pas conduire, selon l'avis de la commission, à une remise en cause des choix historiques effectués en faveur de l'électricité. Cela ne veut cependant pas dire que les orientations gouvernementales doivent rester inchangées comme si aucun événement n'était venu affecter la sécurité de nos approvisionnements à la suite du verglas.

«La commission est persuadée qu'il est possible de mieux prendre en compte la sécurité des approvisionnements tout en respectant les grandes orientations définies dans la dernière politique énergétique gouvernementale. Donc, il est nécessaire d'élargir la notion de sécurité des approvisionnements telle qu'elle est véhiculée dans les orientations gouvernementales, et le verglas de janvier 1998 confirme l'importance, si je puis dire, de mieux utiliser l'énergie. Et, dans le dossier de la déréglementation, le gouvernement devra porter une attention particulière aux implications des éventuelles initiatives qu'il prendra au plan de la sécurité des approvisionnements.»

On le sait, ça va commencer tout à l'heure, l'opposition libérale, par la voix de son chef, le député de Sherbrooke, a pris l'engagement de nous faire une lutte sans répit sur ce projet de loi. Alors, nous aurons l'occasion de voir la force de leurs arguments. Jusqu'à maintenant, je dois dire cependant que ces arguments sont plutôt faibles et difficiles à saisir. Jusqu'au débat de la semaine dernière, où on a fait une motion... où il y a eu un débat sur la motion sur une consultation particulière – débat d'une heure, débat restreint – l'opposition libérale était plutôt confuse sur la question. La semaine dernière, le député d'Orford et porte-parole de l'opposition en matière d'environnement a été clair sur un point: le Parti libéral du Québec favorise le démantèlement de la ligne des Cantons–Saint-Césaire. Ça, ça m'apparaît très clair et découler des propos du député d'Orford. C'est une position, c'est leur position, mais je dois dire que c'est une position irresponsable. Heureusement, ils sont dans l'opposition, ils ne sont donc pas en mesure de la mettre en oeuvre.

(16 h 10)

La semaine prochaine, nous aurons l'occasion d'entendre divers groupes sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec. La majorité des groupes invités ont accepté l'invitation, y compris la Coalition de Val-Saint-François. Alors, nous souhaitons et nous espérons, parce qu'on ne le sait pas trop encore, que l'opposition va participer à cet exercice de bonne foi. Et elle va ainsi aussi pouvoir être en mesure de comprendre l'importance des travaux qui ont été amorcés l'an dernier puis l'importance des travaux qui restent à faire.

Alors, M. le Président, encore une fois, je rappelle que ce projet de loi est un projet de loi responsable. Un gouvernement ne pouvait pas se retrouver dans une situation telle, où des investissements de quelque 300 000 000 $ auraient pu être, d'une certaine façon, anéantis, annulés. C'était impensable et inacceptable pour un gouvernement le moindrement responsable. C'est ce qui fait que nous avons donc été dans l'obligation de déposer ce projet de loi n° 42, projet de loi dit conservatoire, à la suite du jugement de la Cour supérieure, pour sécuriser sur le plan juridique les infrastructures déjà construites.

Et je dirais aussi, M. le Président, que le gouvernement est parfaitement convaincu, encore une fois, de la nécessité des bouclages. On ne peut pas se retrouver... Et c'est un risque réel, il faut le dire. À la suite de ce qu'on appelle les changements climatiques, qui sont une réalité... Il y a encore un débat scientifique sur les causes des changements climatiques, c'est vrai. C'est vrai que le débat se fait, et on peut même dire qu'il y a une certaine controverse à cet égard. Mais, sur le fait des changements climatiques, je pense que maintenant tout le monde s'entend: nous sommes face à des changements climatiques, ce qui risque d'entraîner des événements qu'autrefois on qualifiait d'exceptionnels, d'entraîner la répétition d'événements météorologiques, tel qu'on l'a vécu en janvier 1998. Ce risque est maintenant plus élevé. Par conséquent, le gouvernement, Hydro-Québec se doivent à la fois de renforcer les réseaux de transport et de distribution déjà existants, mais en même temps d'ajouter des axes d'alimentation électrique pour éviter que des millions de personnes se trouvent carrément, en plein hiver, plongées dans le noir pendant des semaines et des semaines. Ce n'est pas possible de... Si on ne faisait pas ça, on serait accusé d'irresponsabilité, avec raison, par nos concitoyens.

Alors, ce projet de loi s'inscrit dans ces orientations, et j'espère qu'il franchira allègrement toutes les étapes du processus législatif et qu'il sera adopté le plus rapidement possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député du Lac-Saint-Jean, leader du gouvernement et ministre des Ressources naturelles. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Bonaventure, également critique officielle de l'opposition en matière de richesses naturelles. Alors, Mme la députée.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. M. le Président, nous vivons aujourd'hui en cette Chambre un jour sombre pour la démocratie au Québec. Par un projet de loi dit conservatoire, le gouvernement péquiste amorce un processus visant à sanctionner des gestes qui ont été reconnus illégaux par l'honorable juge Aline Rousseau de la Cour supérieure du Québec, jugement auquel a fait abondamment référence le ministre, rendu public donc le 23 février dernier, dans l'affaire Hertel–des Cantons.

M. le Président, ce gouvernement, le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles rejettent du revers de la main les conclusions du tribunal, pourtant très claires, quant à l'illégalité des décrets et au non-respect des lois en vigueur. Depuis plusieurs semaines, nous assistons à un exercice qui nous donne droit à toutes sortes d'acrobaties sur le plan législatif, et la déclaration ministérielle qu'a prononcée le ministre des Ressources naturelles le 11 mars dernier est patente à cet égard. Dans un dossier de cette nature, l'ensemble des membres de cette Chambre doivent prendre leurs responsabilités de parlementaires et de législateurs et se questionner. Lorsque nous sommes confrontés à un projet de loi de cette nature, qui est déposé dans la controverse, qui a suscité le mécontentement d'une partie de la population au Québec, je me questionne sur le sens de nos valeurs et de l'éthique que nous devons voir en cette Chambre.

M. le Président, ce gouvernement invite aujourd'hui l'ensemble des parlementaires à cautionner un projet de loi qui vient approuver une démarche jugée illégale. Pour cette raison, le malaise que nous ressentons de ce côté-ci de cette Chambre, il est profond et légalement légitime. Ce dont il s'agit ici, c'est de respect à la fois de nos lois et à la fois de cette institution que représente l'Assemblée nationale. Donc, dans cette optique, vis-à-vis d'un projet de loi de cette nature, qui a été présenté dans la controverse, et cette controverse, elle se poursuit, et j'aurai l'occasion d'élaborer un peu plus sur le sujet tout à l'heure... Alors, dans ce contexte, pour le respect de nos institutions démocratiques, j'invite l'ensemble des parlementaires, et plus particulièrement les collègues d'en face et députés péquistes, à voter en leur âme et conscience dans l'exercice de l'adoption de principe du projet de loi n° 42.

M. le Président, l'exercice auquel nous sommes invités, auquel nous sommes conviés cet après-midi, commande de notre part de vous rappeler certains faits et de se replonger pour quelques instants dans le passé, un passé qui n'est pas si lointain. Il est donc important de mettre en relief toute la portée du jugement Rousseau, un jugement d'une très grande importance, un jugement complet, cinglant, non équivoque, qui ne renferme aucune ambiguïté quant au caractère illégal des gestes qui ont été posés par ce gouvernement lors de la crise du verglas. Il s'agit bien sûr de l'adoption, le 14 janvier 1998, d'une première série de quatre décrets: les décrets 34-98, 35-98, 50-98 et 51-98; l'adoption d'une deuxième série de décrets le 28 janvier, soit les décrets 85-98, 93-98 et 108-98. Et enfin, le gouvernement y allait de l'adoption de deux autres décrets le 13 mai 1998, les décrets 652-98 et 653-98. Donc, au total, huit décrets qui ont été adoptés dans la hâte et au mépris des lois et institutions en place, ces décrets qui ont permis de passer outre aux lois en vigueur et qui ont permis la construction, nous en convenons, d'importants équipements et d'infrastructures dans cette région du Québec.

Le jugement Rousseau conclut que ces décrets sont illégaux, inapplicables, inopérants et sans effet. La juge Rousseau, M. le Président, a tellement été claire et explicite que ce gouvernement n'a pas osé aller en appel de peur de perdre la face à nouveau devant la justice, devant les tribunaux. Comme ce jugement, il est important de le rappeler, est à l'origine du projet de loi n° 42, celui qui nous intéresse, vous me permettrez donc, en commençant, d'en citer quelques extraits, des extraits qui témoignent de la manière cavalière dont ce gouvernement a procédé dans l'adoption de ces décrets, démontrant un mépris évident de ses propres lois et de l'Assemblée nationale et, surtout, une indifférence totale et honteuse à l'égard des préoccupations des citoyennes et des citoyens des secteurs concernés. J'ai déjà eu, dans le passé, l'occasion d'ailleurs de citer plusieurs extraits du jugement Rousseau, mais, de toute évidence, M. le Président, le gouvernement et le ministre des Ressources naturelles refusent de saisir toute la portée de ce jugement d'importance.

(16 h 20)

D'abord, dans un premier temps, à la page 15, la juge Rousseau reconnaît l'unicité du projet, et vous me permettrez une fois de plus de la citer. Elle dit ceci: «Il apparaît clair au tribunal qu'il s'agit ici d'un seul projet qui n'atteindra sa complétion et dont la finalité ne sera respectée que lorsque la dernière étape sera terminée. La preuve établit que c'est une ligne à 735 kV avec un nouveau poste de transformation que construit Hydro-Québec, non pas une ligne de 230 kV, et ce n'est qu'à la fin de la troisième étape qu'il existera une ligne à 735 kV à exploiter, pas avant ni à la fin de la première étape ni à la fin de la deuxième étape.» Alors, il s'agit, M. le Président, d'un élément très important sur l'unicité du projet.

Ce que la juge nous dit, c'est qu'on ne peut pas, comme le font en ce moment ce gouvernement et le ministre des Ressources naturelles, scinder ce projet, le fractionner en deux ou en trois étapes pour justifier des décisions passées et soumettre seulement et uniquement la première portion du projet à des consultations particulières et les autres étapes à l'ensemble du processus d'évaluation environnementale prévu par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. Donc, M. le Président, il nous apparaît clair à nous que le projet de loi n° 42 va à l'encontre des conclusions de la juge Rousseau sur l'unicité du projet. Je me permets encore une fois de mettre le gouvernement en garde contre les gestes qu'il s'apprête à poser, qui pourraient bien une fois de plus l'amener devant les tribunaux. On se souviendra que les citoyens du Val-Saint-François ont envoyé une seconde mise en demeure au gouvernement, et, de toute évidence, le gouvernement n'a pas cru bon de répondre à cette mise en demeure qui conduira probablement à une poursuite devant les tribunaux.

Alors, je me permets, M. le Président, de vous ramener à nouveau au jugement Rousseau, qui en rajoute sur l'unicité du projet. La juge base d'ailleurs son argumentation pour ordonner la fin des travaux du projet Hertel–des Cantons sur un élément très important, soit l'intention du gouvernement de fragmenter les étapes d'évaluation environnementale. Je vais relire cet extrait du jugement, à la page 137: «Il s'agit là, nous dit-elle, d'un processus de fragmentation qui se rapproche de celui dénoncé dans d'autres circonstances par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sinclair.» Et je vais citer cette jurisprudence: «On ne peut se soustraire aux exigences de l'article 133 au moyen de la fragmentation artificieuse du processus législatif en une série d'étapes distinctes pour ensuite prétendre que chaque étape étudiée séparément n'est pas de nature législative.» Alors, évidemment, nul besoin d'être devin pour présumer de la conclusion que tirerait la Cour suprême si elle était appelée à se prononcer sur le projet de loi n° 42.

Je me permets encore de revenir à la page 15 du jugement. On y fait mention du profond désaccord de la MRC du Val-Saint-François quant à l'absence de respect des lois à teneur environnementale, et, là encore, les propos du tribunal sont sans équivoque et sans ambiguïté. Donc, la citation: «Ce quasi-mépris de ses lois, nous dit la juge, se manifestait par l'imposition d'un délai très court, mais aussi par l'attitude d'Hydro-Québec qui voulait imposer les conclusions qu'elle désirait avant même que ces conclusions n'aient été étudiées conformément à la loi.» Avec une affirmation comme celle-là, il apparaît clair que tout ce qui a été fait... Et toutes les démarches, donc, qui vont suivre ont été et seront téléguidées. Elles ont été et seront décidées d'avance, M. le Président, et ce n'est pas nous qui le disons, c'est l'honorable juge Jeannine Rousseau dans le jugement qu'elle a rendu public le 23 février dernier.

À la page 32 du jugement, la déclaration assermentée de la présidente de la Coalition du Val-Saint-François, Mme Monique Fournier, nous en apprend beaucoup sur la façon dont le ministre des Ressources naturelles de l'époque traitait le dossier après que son collègue des Finances eut proposé la tenue de miniaudiences publiques du BAPE. La citation est la suivante, M. le Président. On nous dit: «Le ou vers le 16 juillet 1998, le député Claude Boucher m'apprend lors d'une conversation téléphonique que le ministre Guy Chevrette estime que toute forme d'audiences publiques constituerait pour lui un désaveu et qu'il s'y objecte.» M. le Président, comme attitude égoïste, arrogante et antidémocratique, on a rarement vu pire.

Et, à la page 34, on se rend compte que le ministre des Ressources naturelles de l'époque avait le bras long, puisque le député Boucher avouait à Mme Fournier, en début d'août 1998, et je cite...

Une voix: ...de Johnson.

Mme Normandeau: Excusez, le député de Johnson, du nom de M. Boucher, donc, avouait à Mme Fournier au début d'août 1998, et je cite, que «le bureau du premier ministre l'avait sommé de ne plus parler d'audiences publiques et de ne pas envoyer à M. Lucien Bouchard le dossier qu'il désirait donc soumettre à cet effet».

Et pour ceux, bien sûr, qui souhaiteraient mettre en doute la déclaration assermentée de Mme Fournier – parce que je suis convaincue que la tentation est grande – la juge Rousseau s'est montrée catégorique, elle nous dit que «le contre-interrogatoire de Mme Fournier n'a en rien diminué la portée de ses affirmations, au contraire».

Alors, on peut encore continuer longtemps, M. le Président. À la page 47, on dit ceci: «Le gouvernement devrait agir en conformité avec les lois. Il ne pouvait s'autoriser de la situation de crise pour les ignorer, y passer outre ou ne les respecter qu'en apparence.»

On y formule également aussi deux sources de reproche, sources de reproche, bien sûr, qui sont formulées à l'endroit de ce gouvernement: premièrement, la façon illégale dont le gouvernement a, de fait, soustrait le projet aux mesures de contrôle prescrites par des lois d'ordre public; et, dans un second temps, le remplacement par des mesures moindres.

Mais, M. le Président, la perle des citations du tribunal, celle qui témoigne le mieux de l'attitude méprisante du gouvernement, c'est celle-ci. Elle est tirée de la page 77 du jugement, elle nous dit: «Il s'agit d'un tour de passe-passe documentaire avec pour résultat un embrouillamini désolant pour corriger un vice évident, c'est-à-dire le non-respect d'une condition préalable essentielle, au coeur même du régime particulier que l'Assemblée nationale a prévu pour le gouvernement. Le gouvernement a voulu se frayer un chemin à travers ce régime particulier de la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur Hydro-Québec et son décret de 1981. Or – nous dit la juge – il s'y est perdu et n'a pas atteint son objectif.»

Alors, M. le Président, lorsque j'ai fait lecture de cet important passage dans le jugement, tout comme vous, je me suis interrogée sur ce qu'on entend par «embrouillamini». Et vous me permettrez de vous lire la définition qu'en fait Le Petit Larousse . Donc, «embrouillamini», M. le Président, signifie «grande confusion, désordre». Alors, de ce côté-là, je crois que la juge Jeannine Rousseau a utilisé exactement le bon terme et le bon concept pour décrire, donc, les actions entreprises par ce gouvernement lors de la crise du verglas. Évidemment, avec la définition de ce concept, nous venons d'enrichir notre culture. Et, à voir la façon dont ce gouvernement agit dans ce dossier, on aura bien besoin de se servir, donc, de ce concept dans l'avenir.

(16 h 30)

M. le Président, cet embrouillamini dont parle la juge Jeannine Rousseau, c'est exactement ce que le gouvernement est en train de faire en voulant adopter le projet de loi n° 42, projet de loi dit loi conservatoire. Tout comme lors de la déclaration ministérielle du 11 mars dernier, nous faisons face ici aujourd'hui à un exercice de haute voltige verbale qui n'a pour seul but que de préserver l'image de ce gouvernement au détriment des valeurs de base de notre démocratie et de nos institutions.

M. le Président, on ne peut pas dire aujourd'hui, on ne peut pas affirmer, le ministre ne peut pas affirmer que son gouvernement respecte les lois, alors que par le passé, et ce passé n'est pas si lointain, on ne l'a pas fait. Le ministre des Ressources naturelles et le premier ministre – il l'a également fait dans le passé – ont tenté de nous émouvoir avec l'urgence de la situation relativement à la crise de verglas. On sait que la crise du verglas a laissé dans le noir des centaines de milliers de Québécoises et de Québécois, et certains de nos collègues – et la députée de La Pinière est ici pour en témoigner – ont même vécu cette crise qui est passée à l'histoire. Même si ce gouvernement prétexte que c'est l'urgence de la situation qui l'a poussé à agir, cette même urgence ne justifiait en rien que ce gouvernement se situe au-dessus de ses propres lois, laissant ainsi place au doute dans la tête des Québécoises et des Québécois quant aux véritables intentions qui l'ont motivé en adoptant à toute vapeur des décrets qui ont été jugés illégaux.

D'ailleurs, M. le Président, à la page 83, la juge Rousseau répond à cette notion d'urgence si souvent évoquée par le gouvernement. Elle nous dit: Qu'en est-il de l'urgence? Les millions de personnes dont la vie a été perturbée, les centaines de milliers de personnes évacuées, les décès, les problèmes de santé et de sécurité, dont l'alimentation en eau potable, les pertes économiques, le désir, bref, de se prémunir contre une catastrophe appréhendée, elle nous dit que ces faits ne sont pas oubliés. Mais elle prend le soin de souligner que d'autres moyens existaient pour permettre une action rapide, en toute légalité, entre autres une loi spéciale. Et cette loi spéciale, elle en fait mention à la page 84 de son jugement. Elle nous dit qu'il eut fallu, bien sûr, rappeler l'Assemblée nationale et y débattre des mesures envisagées. Cette approche législative aurait pu régler toutes les embûches techniques et autres. Le ministre des Ressources naturelles a fait référence à cette fameuse loi spéciale. Cette fameuse loi spéciale, comme la juge Rousseau en a fait mention, pour qu'elle soit conforme à nos lois et à notre institution, aurait dû, donc, être adoptée au moment de la crise du verglas et non pas aujourd'hui.

M. le Président, si le gouvernement continue à parler d'urgence, nous, de ce côté-ci, nous préférons parler de panique. Ce gouvernement a littéralement paniqué devant l'ampleur de la crise, et sa décision d'adopter les décrets illégaux témoigne d'une réaction de panique. Et certains ont profité de cette détresse psychologique pour berner les Québécoises et les Québécois qui ne demandaient, eux, que des solutions immédiates à la crise dans laquelle ils étaient plongés. On a berné les citoyens et citoyennes de tout le Québec en profitant de cette grande noirceur pour des buts qui dépassent de beaucoup, de beaucoup le simple bouclage des zones sinistrées.

M. le Président, des audiences publiques du BAPE, du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement, sur l'ensemble du projet permettrait d'ailleurs à tous de connaître les véritables justifications du projet Hertel–des Cantons. Ce que nous voulons connaître, c'est toute la vérité dans cette histoire. Mais le gouvernement, malheureusement, s'entête. Le gouvernement refuse car il sait bien, et je dirais qu'il sait trop bien que le seul bouclage de la Montérégie ne justifiait pas un projet de l'ampleur de Hertel–des Cantons. Il sait qu'il est allé trop loin et que le BAPE pourrait conclure que le projet ne se justifiait pas pour les seuls prétextes annoncés par ce gouvernement. C'est pourquoi il a décidé de tenir des consultations particulières, qui se tiendront la semaine prochaine, du 18 au 20 mai, sur la première, sur uniquement la première portion du projet, afin d'éviter, bien sûr, les questions embarrassantes que pourraient soulever les commissaires du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement et la population.

Et, M. le Président, parlons-en, de ces fameuses audiences qui se tiendront du 18 au 20 mai prochains, d'une commission parlementaire dont les conclusions sont connues d'avance. Parce qu'il ne faut quand même pas, M. le Président, s'attendre à ce que l'ensemble ou pratiquement la majorité des intervenants ne fassent autre chose qu'encenser, donc, les actions, les gestes du gouvernement. Il s'agit, bien sûr, de consultations particulières téléguidées d'avance par le gouvernement.

Est-ce que le gouvernement accepterait de modifier ce qui a été construit si la commission parlementaire de l'économie et du travail, dans ses conclusions lors des consultations particulières, arrivait à une conclusion différente de celle qui est déjà implantée sur le terrain? La réponse est non, M. le Président, puisque le gouvernement a déjà choisi de soustraire volontairement la portion Saint-Césaire–des Cantons aux audiences du BAPE. Et l'adoption du principe du projet de loi n° 42 dont nous discutons cet après-midi nous prouve, bien sûr, que le gouvernement a déjà fait son lit.

Les consultations qui s'amorceront la semaine prochaine, M. le Président, sont un exercice futile et bidon. Pourtant, depuis le jugement Rousseau, nous avons assisté à de nombreux aveux de la part de ce gouvernement. Tout d'abord, le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles ne cessent de répéter, de clamer haut et fort qu'ils respectent le jugement Rousseau. Et vous me permettrez de les citer, M. le Président: «Le jugement nous ordonne de cesser les travaux, et c'est ce que nous avons fait.» Pas plus tard que la semaine dernière, le 5 mai, le ministre des Ressources naturelles nous disait en cette Chambre: «Ces investissements-là vont être maintenus, ces infrastructures vont être maintenues et on va en garantir les assises juridiques par une loi.» Donc, M. le Président, dans ce contexte, on se demande bien à quoi vont servir les consultations particulières.

Le ministre, aussi, a voulu se montrer rassurant, bon citoyen, en affirmant que, pour les portions 2 et 3 du projet Hertel–des Cantons, le projet serait soumis à l'ensemble des lois et règlements en vigueur. Comme il s'agit, M. le Président, d'affirmations très importantes, vous me permettrez de citer quelques-unes des déclarations du ministre des Ressources naturelles à ce sujet.

D'abord, dans la déclaration ministérielle du 11 mars dernier, une déclaration qui est très longue, qui a été très longue à pondre par ce gouvernement, et on le comprend tellement elle regorge de prouesses verbales pour sauver la face de ce gouvernement qui a été vertement rabroué... Donc, dans ce qu'on doit qualifier d'alambic ministériel du 11 mars dernier, le ministre des Ressources naturelles affirme, et je cite: «Le gouvernement souhaite que la suite des opérations de bouclage puisse s'effectuer dans le cadre des procédures usuelles prévues par nos lois.»

Dans sa réplique au chef de l'opposition, M. Jean Charest, le ministre des Ressources naturelles poursuit. Il nous dit: «Les travaux sont arrêtés et nous allons les réaliser, ces travaux-là qui restent à faire, conformément aux procédures qu'on retrouve dans les lois en vigueur au Québec.» Le 28 avril dernier, M. le Président, à la suite du dépôt du rapport Nicolet, lors de la période de questions à l'Assemblée nationale, le ministre abondait dans le même sens. Il nous disait: «Il y a donc beaucoup de travaux qui restent à faire, et la décision du gouvernement, c'est d'assujettir tous ces travaux, tous ces projets à toutes les procédures régulières qu'on retrouve dans les lois pertinentes, y compris la Loi sur la qualité de l'environnement et la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.»

(16 h 40)

Le mercredi 5 mai, lors du débat sur la motion décrétant les fameuses consultations particulières, le ministre des Ressources naturelles s'est montré encore plus catégorique à ce sujet. Et vous me permettrez, M. le Président, de le citer à nouveau. Il nous a dit: «Et enfin, j'annonçais également aussi que nous allions respecter intégralement, totalement toutes les dispositions législatives et réglementaires que l'on retrouve dans les lois concernées, comme la Loi sur la qualité de l'environnement, la Loi sur la protection du territoire agricole, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, pour tous les travaux qu'il reste à faire. Donc, ces travaux restant à faire dans les trois projets de bouclage, et c'est toujours le ministre qui parle – quatre, même, parce qu'on peut parler aussi de Québec – tous ces travaux restant à faire seraient désormais assujettis aux procédures régulières qu'on retrouve dans les lois pertinentes.»

M. le Président, il y a lieu de s'interroger sur les propos du ministre des Ressources naturelles. Quand il nous dit que les travaux restants seront soumis à l'ensemble des lois régulières, on parle bien sûr de l'ensemble de toutes les lois votées par cette Assemblée. Alors, en ce sens, le projet de loi n° 42 déposé par le ministre des Ressources naturelles ne respecte pas les paroles pourtant maintes fois répétées par le ministre lui-même. Le projet de loi n° 42 nous prouve encore une fois que ce gouvernement est prêt à faire toutes les pirouettes possibles et inimaginables pour arriver à ses fins, même de soustraire le reste des travaux prévus par les décrets à l'application des lois régulières de l'Assemblée nationale. Le projet de loi n° 42, par ses principes, en est un qui est honteux parce qu'il ne correspond pas, encore une fois, au discours public de ce gouvernement.

Et je vous invite à prendre connaissance de l'article 5 du projet de loi n° 42. Et je ne sais pas si le ministre, tout à l'heure, dans sa présentation, l'a fait sciemment, mais il n'a pas parlé de cette référence à laquelle, donc, je vais vous référer dans quelques minutes, soit l'article 73 de la Régie de l'énergie. Donc, la toute fin de cet article est très éloquente, pertinente et témoigne encore une fois du manque de respect de ce gouvernement à l'endroit de nos lois et de l'Assemblée nationale. Alors, l'article 5 se termine comme ceci, et je cite textuellement le texte de loi. On peut y lire, donc: «La poursuite de ces constructions est subordonnée à l'autorisation du gouvernement, laquelle tiendra lieu de celle prévue au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 73 de la Loi sur la Régie de l'énergie.» Je prends soin de répéter la fin de cet article. On nous dit: «Laquelle tiendra lieu de celle prévue au paragraphe 1° du premier alinéa de l'article 73 de la Loi sur le Régie de l'énergie.»

M. le Président, comment le ministre peut-il répéter à quatre reprises en cette Chambre que le reste des travaux va être soumis à l'ensemble des lois en vigueur et soustraire honteusement, en catimini, par la porte d'en arrière, ce qui reste à faire de l'application de la Loi sur la Régie de l'énergie? On assiste malheureusement, et nous le déplorons vivement, à la répétition de la même histoire d'horreur. Est-ce que le ministre des Ressources naturelles et ce gouvernement prennent les Québécois et les Québécoises pour des naïfs? Est-ce que le ministre des Ressources naturelles va encore avoir le culot de répéter en cette Chambre qu'il agit de façon responsable, tout en sachant très bien qu'il a tenté, à au moins quatre reprises, d'induire les parlementaires en erreur? Comment pourra-t-on croire le ministre des Ressources naturelles dans l'avenir? Je ne peux bien sûr utiliser le mot qui convienne en cette Chambre pour illustrer mes pensées, puisque ce serait un langage antiparlementaire, mais j'espère que les collègues du ministre sauront le ramener à l'ordre, en dehors de cette enceinte, pour sa conduite inadmissible.

M. le Président, nous savons pourquoi le gouvernement veut soustraire la poursuite des travaux de l'application de l'article 73 de la Loi sur la Régie de l'énergie. Et, pour que tous les parlementaires de cette Chambre aient l'heure juste quant à la portée de l'article 5 du projet de loi n° 42, vous me permettrez de lire, puisque ça en vaut la peine, les principaux éléments de l'article 73 de la Loi sur la Régie de l'énergie. Cet article 73, il nous dit ceci: «Hydro-Québec doit obtenir l'autorisation de la Régie, aux conditions et dans les cas qu'elle fixe par règlement, pour, dans un premier temps, acquérir, construire ou disposer des immeubles ou des actifs destinés à la production, au transport ou à la distribution d'électricité ou de gaz naturel.»

Deuxièmement, elle nous dit: «étendre ou modifier son réseau de distribution.»

Quatrièmement: «changer l'utilisation de son réseau de distribution.»

Et finalement: «exporter de l'électricité hors du Québec, sous réserve de la Loi sur l'exportation de l'électricité.»

«Lorsque la Régie étudie une demande visée au paragraphe 1°, elle doit tenir compte notamment de la justification des besoins énergétiques.» Et je suis toujours dans l'article 73 de la Régie de l'énergie.

«Lorsqu'elle étudie une demande visée au présent article, elle doit tenir compte des préoccupations économiques, sociales et environnementales que peut lui indiquer le gouvernement.

«Une autorisation visée au présent article ne dispense pas Hydro-Québec [...] de demander une autorisation par ailleurs exigée en vertu d'une loi.»

Alors, M. le Président, le chat sort du sac. Le gouvernement ne peut pas soumettre le reste des travaux à effectuer parce que Hydro-Québec aurait été tenue de les justifier devant la Régie de l'énergie. M. le Président, cet article dans la loi n° 42 est important. Il nous prouve que ce gouvernement n'était pas justifié d'agir comme il l'a fait dans le dossier Hertel–des Cantons, que l'empressement dont il a fait preuve dans l'adoption de ces décrets illégaux camoufle la réalité, une réalité que le ministre des Ressources naturelles tient à tout prix à garder dans la noirceur, cachée au plus profond de cette crise qu'a été la crise du verglas, une crise qui a servi de paravent aux intentions réelles de ce gouvernement.

Et maintenant, M. le Président, le rapport Nicolet sur le verglas. Ce gouvernement a mis en place une commission scientifique et technique chargée d'analyser les événements relatifs à la tempête du verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998. Le gouvernement a préféré une commission scientifique et technique à une véritable commission d'enquête publique pour éviter que les commissaires n'aient à répondre de certaines questions qui auraient pu se révéler très embarrassantes pour ce gouvernement. Le rapport Nicolet a été bien accueilli. Il s'agit, il faut le dire, M. le Président, d'un rapport bien fait, complet, fait avec un professionnalisme exemplaire. La commission a donc bien rempli son mandat, dans l'ensemble. Malheureusement, encore une fois, nous craignons que ce rapport ne s'ajoute à la longue liste des avis, des recommandations qui traînent déjà depuis plusieurs mois sur le bureau du ministre des Ressources naturelles et auxquels il tarde à donner une suite.

Le projet de loi n° 42 en est une preuve flagrante. En effet, le rapport Nicolet met en garde le gouvernement quant à la manière de traiter la population dans ce genre de démarche. Et à la page 276 du rapport, les commissaires ont été plutôt explicites sur les bavures de ce gouvernement. On nous dit: «Le déroulement des événements dans le Val-Saint-François met douloureusement en évidence les difficultés qu'il faudra prévoir surmonter à l'avenir pour mettre en oeuvre tout projet de ligne à haute tension en milieu habité.» Et on poursuit en disant: «La commission, forte des témoignages entendus en audience, est convaincue que la population est consciente de cette réalité. Il faudra toutefois l'associer à une démarche transparente et publique qui permette, dans la logique du cadre législatif en vigueur, le débat des options en regard des objectifs et des incidences de chacune d'elles.»

Alors, M. le Président, comment le ministre a réagi à cette recommandation du rapport Nicolet? En faisant tout le contraire, puisque sciemment, à l'article 5 du projet de loi n° 42, on soustrait les travaux restants à l'application de la Loi sur la Régie de l'énergie, et en évitant, bien sûr, un véritable débat sur sa justification. Donc, c'est de cette façon malheureuse, que nous déplorons, M. le Président, que le ministre répond à une recommandation l'enjoignant de mener ses démarches d'une façon claire et transparente.

(16 h 50)

M. le Président, avec autant de mépris pour la population, avec autant d'arrogance, comment ce gouvernement espère-t-il avoir l'appui de l'opposition officielle dans sa démarche visant à adopter le projet de loi n° 42? S'il continue à aller de l'avant avec son projet de loi n° 42 en dépit de nos lois, le réveil risque d'être brutal pour le gouvernement, puisque – j'y ai fait référence tout à l'heure – une autre menace pèse, et je fais bien sûr référence à la deuxième mise en demeure qu'ont fait parvenir au gouvernement les citoyens du Val-Saint-François le 26 avril dernier.

M. le Président, vous me permettrez de lire un extrait de cette mise en demeure. À la page 4, les citoyens soulignent: «Depuis maintenant un an, la Coalition véhicule une demande constante et fondamentale, soit l'assujettissement du projet Hertel–des Cantons au complet à la procédure d'évaluation et d'examen des impacts sur l'environnement, prévue à la Loi sur la qualité de l'environnement, donnant ouverture aux audiences publiques devant le Bureau des audiences publiques sur l'environnement. Le respect de la loi à cet égard est plus nécessaire que jamais afin d'assurer un minimum de transparence et la reprise de confiance des Québécois dans les décisions du gouvernement et d'Hydro-Québec. En effet – et je termine sur ça, donc – bien que le Conseil des ministres conserve un pouvoir décisionnel de dernier ressort, cette procédure doit servir à éclairer ses décisions.»

Malheureusement le gouvernement n'a pas cru bon répondre à cette mise en demeure. Si j'étais à la place du ministre des Ressources naturelles, j'aurais tout lieu de m'inquiéter, lorsque nous savons que c'est la première mise en demeure qui a été envoyée par les citoyens du Val-Saint-François qui a conduit au jugement Rousseau du 23 février dernier.

M. le Président, de ce côté-ci de cette Chambre, nous voyons clair dans le jeu du gouvernement et nous dénonçons donc avec vigueur le processus téléguidé et honteux qui nous est imposé par le Conseil des ministres pendant que le reste de la députation péquiste ferme les yeux, malheureusement, sur ce dossier. Nous voyons bien peu d'espoir que la lumière jaillisse de nouveau de l'autre côté de cette Chambre, puisque le premier ministre et le ministre des Ressources naturelles s'entêtent à refuser d'admettre qu'ils sont débranchés de la réalité québécoise. Il est éloquent de voir ce que cette grande noirceur a provoqué dans les médias depuis la crise du verglas. Les journalistes, bien sûr, ont bien fait leur travail et leurs devoirs et se sont tenus au courant de ce qui se tramait du côté du gouvernement, et ils ont mis, heureusement, eux aussi, en lumière les aberrations de ce gouvernement dans ce dossier.

Vous me permettrez, M. le Président, de citer quelques titres des articles de journaux qui ont paru depuis ce temps. Ils témoignent avec éloquence de la perception qu'a aujourd'hui le public des faits et gestes qu'a posés ce gouvernement dans le dossier Hertel–des Cantons. Dans Le Devoir du 30 janvier 1998, on titre: Soupçons de complaisance . Dans Le Devoir du 11 février 1998, on peut lire en titre: Les Américains exigeaient depuis des années la ligne Hertel–des Cantons . Dans le journal La Presse du 2 septembre 1998, on peut y lire: Hydro conspuée pour ses entorses à la démocratie . De quelques abus de pouvoir , M. le Président, disait un éditorial de Lysiane Gagnon dans La Presse du 25 février 1999. Et on se demande, dans La Presse du 27 février dernier: Y avait-il urgence? Dans un éditorial paru dans le Progrès-Dimanche du 28 février, on y lit: Ou comment faire fi de ses propres lois . Et, en terminant, dans le journal Le Soleil du 16 mars dernier: Québec échoue le test des verts . Verts: v-e-r-s-t.

Et, en parlant de test, vous me ferez le plaisir et l'honneur de vous faire part d'un prix qu'a remporté Hydro-Québec, prix qui nous est rapporté dans le journal, ou plutôt dans la revue Commerce de février 1999. Pour ce numéro, M. le Président, l'équipe de la revue Commerce a fait appel à des spécialistes en publicité et en relations publiques, et on décerne le prix citron à Hydro-Québec. En fait, c'est M. Bernard Dagenais qui le fait. M. Bernard Dagenais est un spécialiste en relations publiques au Département d'information et de communications de l'Université Laval. Il est également président de l'agence Préambule communication et consultant en communications, donc un spécialiste en matière de relations publiques. M. Dagenais décerne donc le prix citron à Hydro-Québec. Pourquoi? Il nous dit ceci: « Hydro-Québec et les décrets pour contourner le plan d'évaluation environnementale . Il est un principe que connaissent bien les conseillers en relations publiques: lorsqu'on triche avec la réalité et avec la vérité, on finit par se faire prendre.» Et d'ajouter, M. le Président: «Pour avoir voulu profiter sournoisement de la crise et faire en sorte que ses projets de développement échappent au contrôle environnemental, Hydro-Québec a démontré qu'elle n'était pas digne de confiance.»

M. le Président, on constate donc que l'ensemble des titres dont je viens de faire mention sont assez éloquents sur la façon dont le gouvernement a traité cette affaire, mais je me suis bien, donc, gardée de vous faire part de cette autre citation suite au jugement qui a été rendu public par la juge Jeannine Rousseau le 23 février dernier. En fait, cette citation, elle vient du journal Le Soleil du 25 février, et c'est le très illustre Jean-Jacques Samson qui titrait son éditorial comme suit: La revanche des gosseux de poils de grenouille . Les fameux gosseux de poils de grenouille, ce sont les citoyens du Val-Saint-François, des citoyens qui avaient osé s'élever contre le ministre des Ressources naturelles de l'époque, malheureusement, qui les avait traités avec autant de mépris sur la place publique. Notre position, de ce côté-ci de la Chambre, est claire depuis le début et elle le restera jusqu'à la fin de ce dossier. Notre position repose sur le souci de la transparence et du respect de nos institutions publiques et sur l'obligation qu'a ce gouvernement, qu'importe la situation, de respecter ses propres lois. M. le Président, je n'insisterai jamais assez sur ce dernier élément: l'importance, l'obligation qu'a ce gouvernement de respecter ses propres lois, qu'il transgresse malheureusement d'une façon éhontée dans cette saga.

La semaine dernière, nous énoncions notre position quant à la tenue de consultations particulières qui s'amorceront le 18 mai prochain. En présentant cette motion, le gouvernement péquiste a fait preuve d'un mépris encore jamais vu envers le système de justice et nos tribunaux en annonçant la tenue de consultations bidon sur la sécurisation du réseau de transport et de distribution d'Hydro-Québec dans les régions touchées par la tempête du verglas de janvier 1998. M. le Président, alors qu'on croyait avoir atteint le pire la semaine dernière, le ministre des Ressources naturelles dépose le projet de loi n° 42. L'ensemble de ces mesures, les consultations particulières, la loi n° 42, donc loi dite conservatoire, sont malheureusement des procédés faits sur mesure, et c'est justement ce qu'a condamné avec force et vigueur le 23 février dernier l'honorable juge Jeannine Rousseau.

Alors, je le répète haut et fort: Non, M. le Président, nous n'appuierons pas le principe du projet de loi n° 42. Pour toutes les raisons que j'ai invoquées durant mon exposé, pour le respect de la démocratie, pour le respect de nos institutions, pour le respect des Québécoises et des Québécois, nous ne pouvons pas, en notre âme et conscience, appuyer le principe du projet de loi n° 42 qui représente tout le contraire de ce que nous devons représenter en siégeant en cette Chambre. Je vous remercie, M. le Président.

(17 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Bonaventure. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Johnson. M. le député.


M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci, M. le Président. Je suis très heureux de pouvoir intervenir aujourd'hui à la suite du dépôt du projet de loi n° 42 par notre collègue le ministre des Ressources naturelles. Ce projet de loi représente, pour moi comme pour la population de mon comté, qui est traversé par la ligne, comme vous le savez, dans le Val-Saint-François, l'aboutissement d'un long processus. C'est un processus difficile, qui a été difficile pour les citoyens de mon comté, de ma région, les personnes qui ont contesté le projet de loi, c'est-à-dire l'action du gouvernement, qui a été difficile aussi pour moi, comme député, qui ai eu à travailler avec la Coalition comme avec l'ensemble des citoyens de mon comté. Ça a été, je vous dirais, dans ma vie politique, le dossier le plus difficile que j'ai eu à vivre. Le gouvernement a pris une décision, que nous connaissons tous, une décision qui est fondée sur un certain nombre de paramètres que j'aimerais vous rappeler, M. le Président.

Il y avait, du point de vue du gouvernement, une situation d'urgence, et nous avons même frôlé la catastrophe. Le gouvernement a agi de bonne foi, j'en suis parfaitement convaincu, et a déployé tous les moyens pour venir en aide aux populations touchées. Et nous savons très bien tous les efforts qui ont été déployés, tous les moyens qui ont été mis de l'avant par le gouvernement et les différents ministères pour assurer à la population une qualité de vie pendant ces jours, pendant ces 30 jours à toutes fins pratiques, de misère et de difficultés pour plus de 1 000 000 de population dans la région de la Montérégie et de l'Estrie. Le gouvernement a pris la décision sur la base aussi d'un paramètre qu'on nomme «les changements climatiques», qui peuvent entraîner d'autres crises semblables et qui sont de plus en plus imprévisibles. D'autres tempêtes de verglas ont eu lieu ailleurs au Québec. Toutes sortes d'événements, comme les événements qui ont frappé le Saguenay–Lac-Saint-Jean, les inondations, qui ont aussi frappé ma région d'ailleurs, en Estrie. Ça a été moins connu, mais un village qui s'appelle La Patrie, dans ma région, a été durement touché par les inondations qui ont eu lieu le même été que celles qui ont détruit, vous savez, une partie du territoire du Saguenay–Lac-Saint-Jean.

Les paramètres, aussi, ont consisté à regarder les travaux effectués et ceux à venir avec l'objectif de sécuriser le réseau de distribution de transport d'Hydro-Québec. Il est évident, M. le Président, que le gouvernement était de bonne foi – et l'est toujours – lorsqu'il a construit cette ligne ou désiré la construction de cette ligne par Hydro-Québec en imaginant que c'était de cette façon-là qu'il allait sécuriser la Montérégie et la région de Montréal et de ce fait aussi notre région, l'Estrie. Le gouvernement suit un autre paramètre qui est de respecter le jugement Rousseau. Et, contrairement à ce qu'a dit la députée de Bonaventure tout à l'heure, le gouvernement reste dans la totale légalité en prenant l'orientation qu'il prend. Le gouvernement est autorisé à prendre l'orientation qu'il prend, à déposer cette loi qui suspend l'application d'autres lois et de façon rétroactive. C'est tout à fait légalement que ces gestes-là sont posés, contrairement à ce que la députée de Bonaventure dit.

La loi conservatoire viendra protéger les équipements construits. Une commission parlementaire nous éclairera sur l'état de sécurisation du réseau. Et les travaux qui restent à faire se feront dans le respect de toutes les lois et tous les règlements en vigueur. Ce sont donc des paramètres – et je peux en témoigner puisque je vis dans cette région – qui reçoivent l'assentiment et l'appui de la population non seulement de l'ensemble du Québec, c'est facile à comprendre, non seulement de la Montérégie, qui a été durement touchée par la crise du verglas, mais aussi des citoyens de mon comté à travers lequel traverse la ligne Hertel–des Cantons.

M. le Président, pour moi, comme député, la crise du verglas a une signification que peu de députés ont pu vivre, qui n'ont pas été dans ce fameux triangle, le triangle noir, le triangle du verglas, celui-là dans lequel ont vécu plus de 1 000 000 de personnes.

Ce vendredi 9 janvier, je suis parti en vacances, M. le Président, et, trois jours après, j'ai dû revenir à cause de la situation que vivaient les citoyens et les citoyennes de mon comté, particulièrement ceux qui vivent en Montérégie, mais aussi les citoyens et les citoyennes du Val-Saint-François, qui ont été terriblement touchés, eux aussi, par le crise du verglas.

Ce que j'ai vu pendant cette période, suite à mon retour – deux, trois jours après avoir quitté pour des vacances, j'ai dû revenir pour assumer mes responsabilité de député – ce que j'ai vu là, ce sont des gens qui étaient touchés par le chômage, par la perte de leur emploi, quelques-uns qui ne l'ont jamais retrouvé. J'ai vu des gens qui ont eu froid, des personnes qui sont mortes, des gens qui ont eu faim, des gens qui venaient dans des centres communautaires et qui dormaient au centre communautaire. À Acton Vale, par exemple, dans mon comté, plus d'une centaine de personnes y ont dormi pendant des jours et des jours. Et on peut savoir ce que signifie dormir dans un endroit comme ça quand on est habitué d'avoir son logement, habitué d'avoir sa maison, habitué d'avoir sa liberté d'action, être soumis là à des règles, des règles de groupe, au respect que ceci exige, et toutes les difficultés, finalement, que ceci occasionne aux familles qui ont été, pour plusieurs, séparées, l'insécurité que ces gens-là ont vécue par rapport à leur propriété – ils avaient peur qu'elle soit envahie. Malgré tous les efforts qui ont été déployés par le gouvernement, ce que les gens ont vécu, c'est vraiment une tragédie humaine que le gouvernement a comprise, et il n'a pas voulu prendre de chance qu'elle se répète.

M. le Président, quatre des MRC de mon comté ont été touchées par la crise du verglas: la MRC d'Acton Vale qui a été complètement touchée, la MRC du Val-Saint-François et des citoyens qui y habitent, la MRC de Drummond – cinq des municipalités de la MRC de Drummond se retrouvent dans mon comté – et la MRC des Maskoutains, où quelques municipalités de mon comté se retrouvent dans cette MRC dont le chef-lieu est à Saint-Hyacinthe, représentée par notre collègue, ici, le député de Saint-Hyacinthe.

Ce que, évidemment, il faut souligner à travers ces souffrances, ces difficultés, ces angoisses, ces insécurités qu'ont vécues les gens, il faut quand même souligner, M. le Président, la grande solidarité qui s'est établie entre tous les intervenants et la population. Et, dans ce sens-là, le gouvernement du Québec a agi en toute solidarité avec la population. Et je pense que tous les députés ici, de cette Chambre, même s'il sont en désaccord avec le projet de loi, reconnaissent l'action formidable qu'a menée notre premier ministre dans ce dossier, de même que le P.D.G. d'Hydro-Québec. Les gens reconnaissent jusqu'à quel point ces gens-là ont géré une crise extrêmement difficile. M. Bouchard lui-même, notre premier ministre, a annulé ses vacances pour pouvoir la gérer; il a été constamment présent et en toute solidarité avec la population du Québec. Rien n'a été négligé, et les gens le reconnaissent aussi aujourd'hui, que rien n'a été négligé pour qu'on puisse gérer cette crise.

J'ai été surpris que la députée de Bonaventure parle de panique dans le gouvernement. Je sais que les jeunes... Moi, j'ai vu un gouvernement, le sien, le gouvernement libéral, dans les années soixante-dix, parce qu'une poignée de jeunes militants un peu de gauche et peut-être un peu trop radicaux qu'on a appelés les militants du FLQ ont provoqué une crise, une crise qui n'était pas celle qu'a artificiellement gonflée le gouvernement fédéral et le gouvernement libéral du temps dirigé par l'ex-premier ministre du Québec, ils ont paniqué au point qu'ils nous ont imposé des mesures de guerre, suspendu les droits démocratiques, écrasé des centaines de personnes. Ça, c'est une situation où un gouvernement a paniqué. Ça, c'est ça qu'on appelle un gouvernement qui panique.

Notre gouvernement n'a pas paniqué dans la situation. Notre gouvernement a géré la crise d'une façon responsable. Il l'a gérée d'une façon responsable. Et c'est de bonne foi, suite à la gestion de cette crise, à toutes les expériences qui ont été vécues et aux conseils que le gouvernement a reçus de la part d'Hydro-Québec, que les décrets ont été adoptés. Donc, on ne peut pas penser que le gouvernement du Québec a paniqué. Le gouvernement du Québec, avec les informations qu'il avait, a pris les décisions qui, à partir de son point de vue, s'imposaient.

(17 h 10)

Vous savez, M. le Président, et mes collègues de cette Chambre le savent, j'ai été en désaccord avec la position du gouvernement et j'ai pris les moyens qui sont à la disposition d'un député, même ministériel, pour expliquer ma position au gouvernement. J'ai souhaité dès le départ qu'il y ait consultation publique. J'ai pris les moyens qui s'imposaient et je profite de l'occasion pour dire que, contrairement à ce qui a été dit et relevé par la députée de Bonaventure, jamais, d'aucune façon, le premier ministre ou des ministres ou des attachés politiques du premier ministre n'ont posé quelque geste que ce soit pour m'empêcher de dire ce que j'avais à dire et de me battre pour mes convictions. Jamais.

La réponse du gouvernement n'a pas été dans le sens que je souhaitais, bien sûr, mais c'était le gouvernement qui devait prendre ces décisions-là et non pas moi, qui n'étais pas au Conseil des ministres. J'étais un député, je représentais les citoyens de mon comté, notamment les citoyens de la Coalition, et j'ai pris tous les moyens à ma disposition, et on m'a laissé les prendre pour que les citoyens puissent avoir accès à des audiences publiques.

Le vice-premier ministre, et ministre des Finances, et ministre d'État à l'Économie et aux Finances est venu, après la crise, rencontrer les citoyens du Val-Saint-François. Le gouvernement lui-même est venu écouter ce que les gens avaient à dire. Le vice-premier ministre a écouté, a fait son rapport au gouvernement et, suite aux analyses qui ont été faites par les ministres, par le premier ministre, il a été quand même décidé d'aller de l'avant sans procéder à des consultations publiques formelles. Évidemment, je n'étais pas très heureux de cette décision-là, mais je l'ai acceptée en toute solidarité puisque c'est le choix que j'avais à faire pour rester avec le caucus du Parti québécois et du gouvernement actuel.

M. le Président, lorsque j'ai pris connaissance du jugement Rousseau, j'ai constaté qu'il avait été dit des choses, de moi, d'ailleurs, par la présidente de la Coalition, des choses que, moi, je n'ai pas eu l'occasion, puisque je n'ai pas été convié à témoigner lors des audiences qui ont été tenues dans la foulée de la poursuite qui a eu lieu par les citoyens du Val-Saint-François contre le gouvernement... Je n'ai pas été témoigner. Mais je vous le dis et je vous le répète, jamais, d'aucune façon, je n'ai dit à la présidente du comité de citoyens du Val-Saint-François que j'avais été bâillonné par le gouvernement ou qu'on m'avait empêché de parler. Ce que j'ai dit à la présidente, c'est que le gouvernement n'avait pas accepté ma position. C'est parfaitement vrai. Le gouvernement n'a pas accepté ma position, mais c'était son droit de le faire, comme c'était le mien de faire valoir la mienne.

Dans ce dossier, M. le Président, il faut imaginer que ce sont les intérêts de la population en général dont le gouvernement a tenu compte. Quand j'entends l'opposition officielle dire: Les citoyennes et les citoyens du Québec, vous savez, ils sont scandalisés par l'action du gouvernement, ou: Les citoyens et les citoyennes du Québec ne suivent pas le gouvernement, je pense que la représentante du comté de Bonaventure, la députée, ne vit pas dans mon territoire et visiblement n'a pas écouté ce que les citoyens avaient à dire dans ce dossier. Les citoyens ont parlé, dans ce dossier, à l'élection du 30 novembre, ils ont parlé clairement. Dans mon comté, j'ai été envahi par les députés libéraux qui venaient défendre les pauvres citoyens du comté de Johnson qui ont été bafoués dans leurs droits démocratiques, les pauvres citoyens du comté de Johnson, vous savez, que le gouvernement a foulés aux pieds par les décrets qu'il a adoptés pour construire cette ligne-là. Ils ont envahi mon comté, disant ces choses-là. Pourtant, même dans le territoire de la MRC du Val-Saint-François, même dans ce territoire, ma majorité a augmenté.

Une voix: Bravo!

M. Boucher: Pour la première fois, un député bleu a gagné son élection dans Racine, tout près de Valcourt, municipalité qui n'est pas réputée pour être de notre côté politiquement, n'est-ce pas? Même dans le canton de Melbourne, même dans Kingsbury, ma majorité a augmenté, là où la ligne a passé. Et je vais vous dire pourquoi, M. le Président, elle a augmenté. Elle a augmenté parce qu'il y a des citoyens de ce territoire-là, où passe la ligne, d'ailleurs, qui m'ont dit, à moi: M. Boucher, nous voulons cette ligne parce que nous savons ce que nous avons vécu.

Dans mon comté, vous savez, ce n'est pas tout le monde, M. le Président, qui a son petit poêle à combustion lente. Ce n'est pas tout le monde qui a accès à toutes sortes de moyens pour se chauffer lorsque parvient une crise. Il y a des citoyens qui vivent en appartement, qui n'ont aucun autre moyen de chauffage que l'électricité. Les gens les plus pauvres, ceux qui travaillent à Brown Shoe, ceux qui travaillent dans des industries de tabac, ceux qui travaillent dans des petites entreprises dans mon comté, ces gens-là qui ne gagnent pas des salaires énormes, qui ont des petites maisons, souvent qui sont en appartement, n'avaient pas les moyens d'autres pour se sortir de la crise qu'ils ont vécue.

Et ces gens-là me disaient: On vous appuie. Ils nous appuyés à tel point, vous le savez, M. le Président, que j'ai remporté l'élection malgré que le critique qui a précédé la députée de Bonaventure soit venu dans mon comté et ait fait plein de discours, malgré le fait que le chef de l'opposition – qui l'est demeuré, d'ailleurs; qui ne l'était pas mais qui l'est devenu et qui, semble-t-il, va le demeurer longtemps – soit venu dans mon comté à deux reprises dire aux gens: Ne votez pas pour le député de Johnson qui est avec un gouvernement qui a bafoué vos droits. De quels droits parlait-on? Qui bafouait les droits de qui? Les droits des citoyens de la MRC d'Acton qui ont besoin d'électricité, qui ont besoin d'être sécurisés? Les droits des citoyens de la région de Shefford? Les droits des citoyens de toute la Montérégie? De quels droits ils ont été bafoués?

M. le Président, l'opposition officielle s'est comportée dans ce dossier-là... C'est presque ignoble, de la façon qu'ils l'ont fait. La première réunion des citoyens, qui a eu lieu à Richmond, dans le comté de notre collègue du comté de Richmond, dans la ville de Richmond, il y avait 300 personnes. La première réunion où il y eu une mobilisation, il y avait un seul député dans la salle pour prendre la défense des citoyens, et c'était moi, M. le Président. Il n'y avait aucun autre député de l'opposition qui était là. C'est quand ils ont vu que peut-être il pourrait y avoir un espoir d'une espèce de... vous savez, d'une poigne politique, comme on dit, quand ils ont vu que ça serait peut-être possible qu'ils puissent capitaliser sur ça politiquement, c'est là qu'ils ont commencé à s'intéresser à la chose. Ce n'est pas aux besoins des citoyens de mon comté qu'ils s'intéressaient, c'est aux votes qu'ils pourraient obtenir si ça décollait. Malheureusement pour eux, ça n'a pas décollé. Ça n'a tellement pas décollé qu'ils sont restés dans l'opposition malgré le fait qu'ils ont voulu en faire un dossier électoral majeur.

Une voix: Ils sont restés collés.

M. Boucher: Oui, c'est ça. Comme notre collègue le dit, ils sont restés collés, oui, à leurs chaises sur l'opposition.

M. le Président, le tracé de la ligne a été fait suite à des études qui ont été proposées, une firme qui a été retenue par la MRC du Val Saint-François, une firme qui a été retenue, payée par Hydro-Québec mais choisie par la MRC du Val Saint-François et qui a établi cinq corridors pour passer, c'est-à-dire un grand corridor, mais cinq tracés possibles pour la ligne. Il a été convenu que le tracé de moindre impact serait choisi, et tous les critères avaient été mis en place pour ça.

Imaginez-vous que, pendant ce débat-là, j'ai osé dire que peut-être on pourrait envisager que cette ligne, même si ça coûtait 40 000 000 $ de plus, pourrait peut-être passer par l'autoroute 10 et, de ce fait, traverser le comté d'Orford. Alors, là, le défenseur de la veuve et de l'orphelin de ce comté s'est levé, n'est-ce pas, il s'est levé et il a dit: Jamais je ne laisserai la ligne passer dans mon comté. Jamais le beau comté d'Orford, entre le mont Orford, vous savez, puis le mont Giroux, puis peut-être un peu à côté du lac Orford, puis longeant le lac Memphrémagog, puis passant, c'est vrai, dans le territoire du député de Brome-Missisquoi, qui me rappelle que la ligne a passé chez... D'ailleurs, la ligne qui va sécuriser aussi son comté. Il le sait.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Pas le député.

M. Boucher: Pas le député, bien sûr, mais la ligne.

M. le Président, la position du Parti libéral, de l'opposition officielle dans ce dossier est ineffable. Ils ont essayé de se faire du capital politique et ils ont complètement raté leur coup. La députée de Bonaventure a une approche strictement légaliste de la situation. Elle n'a pas une approche responsable, elle ne prend pas en considération les intérêts globaux des citoyens du Québec. Elle a une approche strictement légaliste, mais son approche légaliste ne sied pas à la situation, parce que le gouvernement est parfaitement légitimé de poser les gestes qu'il pose.

(17 h 20)

Je ne vous dis pas, M. le Président: Je suis très heureux de la décision. Je ne pense pas que le gouvernement soit très heureux d'être obligé de procéder de cette façon-là. Il n'y a pas un gouvernement qui aime procéder de cette façon-là. Il n'y a pas un gouvernement qui aime procéder de cette façon-là. Mais il y aura quand même des audiences publiques, des audiences publiques qui sont importantes pour permettre aux citoyens et aux citoyennes... Et je les avais réclamées et je les ai obtenues, heureusement. Il y aura des audiences publiques. Ces audiences publiques sont extrêmement importantes, contrairement à ce que la députée libérale dit, parce qu'elles vont permettre aux citoyens enfin de dire publiquement ce qu'ils auront à dire.

Je vais terminer en vous disant ceci: Les citoyens du Val-Saint-François, représentés par la Coalition, seront aux audiences publiques, alors que l'opposition officielle, elle, n'y sera pas. C'est là la vraie réponse du peuple à la décision du gouvernement. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Johnson. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, je voudrais à mon tour intervenir sur le projet de loi n° 42, Loi concernant la construction par Hydro-Québec d'infrastructures et d'équipements par la suite de la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998.

Mais auparavant, M. le Président, permettez-moi de faire quelques répliques, très rapidement, au discours que je viens d'entendre du député de Johnson. Je pense qu'il a saisi cette tribune pour régler ses comptes, régler ses comptes avec son propre gouvernement, régler ses comptes avec les citoyens de Val-Saint-François et se justifier. Il a raté l'occasion de se prononcer sur le projet de loi en tant que tel. Et ça, c'est très regrettable.

Deuxièmement, M. le Président, le député de Johnson s'est évertué à vanter le gouvernement et la façon dont il a géré cette crise. Or, s'il y a des gens à qui il faut attribuer le mérite, c'est bien les citoyens, et plus particulièrement les citoyens de la Montérégie, qui ont été affectés par cette crise, qui ont fait preuve de courage, de solidarité et d'abnégation. J'ai eu l'occasion de me rendre compte personnellement de cette solidarité à l'oeuvre, puisque j'ai été moi-même sinistrée, j'ai vécu parmi ma population, j'ai sillonné plusieurs comtés de la Montérégie et j'ai vu à quel point la population, y compris les maires, ne comptait plus sur le gouvernement, mais elle comptait sur ses propres moyens. Et, pour ça, il faut reconnaître le mérite de ces gens-là.

Le député de Johnson aussi disait dans son intervention que ma collègue députée de Bonaventure, qui est critique pour l'opposition officielle en matière de ressources naturelles, n'était pas à l'écoute des citoyens. Or, s'il s'était donné la peine d'écouter son discours, M. le Président... Elle n'a fait que cela. Elle a fait écho aux inquiétudes et au questionnement des citoyens, principalement ceux qui sont directement concernés. Et il a terminé en disant qu'elle a présenté une vision légaliste plutôt que responsable. Venant de la bouche d'un député qui est aussi législateur et qui ne reconnaît pas l'exigence pour un député de respecter la loi, c'est extrêmement inquiétant.

Alors, ceci étant dit, permettez-moi, M. le Président, d'intervenir sur le projet de loi n° 42 et de vous dire ceci, parce que, le gouvernement, il tente par ce projet de loi de légaliser, en fait, un processus, de maquiller un processus par lequel la population a été bernée et par lequel le gouvernement a agi, on le sait aujourd'hui, dans l'illégalité.

La ligne Hertel–des Cantons qui fait l'objet – entre autres, elle n'est pas la seule – de ce projet de loi a une signification particulière pour moi, M. le Président, et pour l'ensemble des citoyens de la Montérégie qui ont vécu, comme moi, la crise du verglas. Et, parce que nous avons vécu cette crise, nous sommes à même de constater la vulnérabilité des citoyens face à notre système d'approvisionnement énergétique et notre dépendance par rapport à l'énergie électrique en particulier. Tout le monde s'est rendu compte de ça. Tout le monde s'est rendu compte de ça, M. le Président, à telle enseigne que les gens en Montérégie, et je m'inclus également, on ne voit plus les pylônes de la même façon, parce que, quand on les a vus tomber comme un château de cartes, on a réalisé la vulnérabilité des citoyens. Parce que la crise du verglas, ce n'est pas à cause du verglas, mais c'est à cause de la vulnérabilité de notre réseau hydroélectrique que les citoyens ont été pénalisés.

Alors, au plus fort du verglas, alors que la population était préoccupée par sa survie et par l'intendance du quotidien, le premier ministre a décidé d'adopter, en toute hâte et à toute vapeur, le 28 janvier 1998, trois décrets qui permettaient à Hydro-Québec la construction de lignes électriques sans respecter les normes environnementales ni la loi du Québec. C'est ainsi que, sur recommandation d'Hydro-Québec du 21 janvier 1998, le gouvernement péquiste a adopté les décrets 85-98, 93-98 et 108-98, invoquant, bien entendu, l'état d'urgence. En vertu de ces décrets, Hydro-Québec s'est empressée de passer à l'action pour la construction de trois nouvelles lignes d'approvisionnement en électricité.

Premièrement, la construction, dans l'axe de la ligne Duvernay–Anjou, de la ligne à 315 kV entre le poste de Duvernay et le point de raccordement à la ligne Duvernay–Langelier–Notre-Dame situé à Anjou. Deuxièmement, la construction, dans l'axe de la ligne Hertel–des Cantons, de la ligne à 735 kV entre les postes des Cantons et Saint-Césaire. Troisièmement, la construction, dans l'axe de la ligne Outaouais–Masson, d'un poste temporaire à 315-230 kV et d'autres ouvrages de raccordement. Quatrièmement, la construction, dans l'axe de la ligne Aqueduc–Atwater, de la ligne à 315 kV entre les postes d'Aqueduc et Atwater. Cinquièmement, la construction, dans l'axe de la ligne Jacques-Cartier et Mauricie, de six pylônes de la ligne à 315 kV entre le poste Jacques-Cartier et les lignes existantes entre le poste Jacques-Cartier et Mauricie. M. le Président, ces décisions ont été prises à la hâte, dans l'illégalité, avec un manque flagrant de transparence et de démocratie.

Et pour illustrer l'incohérence de ce gouvernement, je me concentrerais sur le cas de la ligne Hertel–des Cantons. L'article 5 du projet de loi n° 42 spécifie la nature des travaux projetés par Hydro-Québec, particulièrement la construction d'une ligne Hertel–Saint-Césaire à 735 kV, les modifications au poste Hertel pour permettre le raccordement et l'exploitation temporaire à 230 kV, la construction d'un poste de transformation Montérégie 735-120-230 kV et les modifications aux postes des Cantons et Hertel pour permettre le raccordement et l'exploitation de la ligne à 735 kV.

M. le Président, tout ça s'est fait par décret, dans les violations les plus strictes de la loi. En autorisant dans la hâte et l'improvisation la construction de ces lignes, le gouvernement péquiste s'est attiré les foudres de la population directement affectée par sa décision. Il a, dans ce sens-là, outrepassé les lois, invoquant l'urgence. Or, l'alibi de l'urgence sonnait tellement faux que de nombreux observateurs se sont élevés contre la façon unilatérale d'agir de ce gouvernement et de son premier ministre.

(17 h 30)

D'ailleurs, l'argument de l'état d'urgence qui a été avancé par le gouvernement et par le premier ministre en personne ne tient pas la route, puisque la ligne Hertel–des Cantons ne sera pas complétée avant trois ans. En effet, cette année, Hydro-Québec n'a construit qu'une ligne de 230 kV, et pour cause, le matériel nécessaire pour la construction de la ligne à 735 kV, qui faisait l'objet justement de l'urgence invoquée, eh bien, ce matériel n'était pas encore disponible. La Coalition des citoyens du Val-Saint-François s'est organisée pour faire entendre sa voix et s'opposer au processus antidémocratique adopté par le gouvernement. Le gouvernement a refusé d'entendre ces citoyens qui réclament depuis le début un débat public et transparent sur la pertinence et les choix des tracés imposés par le gouvernement et Hydro-Québec.

Quels sont les arguments qui ont été invoqués par la Coalition des citoyens du Val-Saint-François pour motiver son opposition à la construction de la ligne Hertel–des Cantons? Au coeur du conflit qui l'oppose au gouvernement, il y a d'abord la façon d'agir de ce gouvernement et son non-respect des lois et des normes en vigueur. Il n'y a eu aucune consultation publique, et le BAPE, qui est censé intervenir dans ce genre de situation, a été tenu volontairement à l'écart. Une deuxième raison qui a été invoquée par la Coalition des citoyens du Val-Saint-François et par plusieurs observateurs touche les intentions cachées d'Hydro-Québec qui profite d'une situation de crise – celle du verglas – et de l'urgence de boucler la Montérégie pour mettre en place une infrastructure qui, en fait, lui permettrait et vise spécifiquement à exporter de l'énergie aux États-Unis.

M. le Président, j'ai eu l'occasion de participer aux travaux de la commission de l'économie et du travail sur l'étude du rapport d'Hydro-Québec et, lors de ces consultations, j'ai questionné le président d'Hydro-Québec à quelques reprises, et il a à chaque fois nié le fait qu'Hydro-Québec aurait des visées exportatrices. Or, force est de constater, quand on voit les ouvrages que le gouvernement veut entreprendre, leur ampleur, leur potentiel, que la nécessité et les besoins de la région de la Montérégie, qui ont été utilisés comme alibi, ne concordent pas au potentiel d'infrastructures dont le gouvernement veut doter Hydro-Québec.

Donc, M. le Président, au coeur de ce débat, il y a le fait qu'Hydro-Québec est une entreprise d'utilité publique qui a pour mandat de servir d'abord et avant tout les citoyens du Québec. Or, de façon détournée, on essaie d'utiliser les équipements et les infrastructures invoqués dans une situation d'urgence pour faire avec Hydro-Québec autre chose que ce pour quoi elle a été créée. Or, lors des travaux de cette commission de l'économie et du travail, il a été clairement dit que les parlementaires n'étaient pas contre le fait qu'Hydro-Québec exporte ses surplus, mais ils ne voulaient pas qu'Hydro-Québec s'engage prioritairement dans l'exportation au détriment du service à la population et aux entreprises québécoises dont la production dépend de l'approvisionnement en électricité.

Troisième point, M. le Président, l'opposition officielle de même que la Coalition des citoyens du Val-Saint-François n'ont pas fait que critiquer le gouvernement et Hydro-Québec, ils ont aussi proposé des solutions alternatives, mais le gouvernement a refusé encore une fois d'entendre raison. Au contraire, le gouvernement péquiste a poursuivi dans son entêtement en adoptant, le 5 août 1998, un autre décret portant sur l'expropriation de terrains et de biens immeubles et procédé ainsi à la première phase des travaux. La Coalition des citoyens du Val-Saint-François n'avait d'autre choix que de recourir aux tribunaux en s'adressant, le 31 août 1998, à la Cour supérieure pour demander qu'elle ordonne la cessation des travaux du projet Hertel– des Cantons. Le 23 février 1999, l'honorable juge Jeannine Rousseau a rendu son verdict et, comme on s'y attendait, le gouvernement et Hydro-Québec ont été déboutés. En effet, le jugement de la Cour supérieure stipulait clairement que les décrets adoptés par le gouvernement étaient illégaux, ultra vires, nuls et sans effet. Le jugement émet également une injonction et une ordonnance obligeant Hydro-Québec à cesser ou à faire cesser immédiatement tous les travaux et les interventions sur le terrain reliés à la mise en chantier et à la construction du projet Hertel– des Cantons.

Mais, encore une fois, M. le Président, au lieu de respecter la loi et de se conformer au jugement de la Cour supérieure, ce qui était la chose la plus honorable à faire, le gouvernement péquiste a poursuivi dans son entêtement. Aussi, le 11 mars 1999, le ministre des Ressources naturelles a informé cette Assemblée, via une déclaration ministérielle, qu'il n'interjettera pas appel. Et pour cause, le gouvernement sait pertinemment qu'il n'a pas de cause et qu'il risque de se faire débouter à nouveau.

Le projet qui est devant nous, le projet de loi n° 42, M. le Président, qui se veut une loi conservatoire, s'inscrit dans une démarche de refus. Le gouvernement refuse une fois de plus d'entendre raison. Le chef de l'opposition a eu l'occasion d'expliquer ici, à l'Assemblée, et d'expliquer également en dehors de cette Chambre la position de l'opposition officielle. Il a eu également à dénoncer le gaspillage de fonds publics à hauteur de 300 000 000 $, alors que le gouvernement savait pertinemment qu'il agissait dans l'illégalité.

M. le Président, comme députée responsable de la Montérégie, ayant vécu la crise de verglas, ayant vu comment les citoyens se sont mobilisés pour s'entraider, je constate, avec l'ensemble de la population, qu'il est nécessaire de sécuriser le réseau d'Hydro-Québec. Il est nécessaire de le sécuriser pour assurer l'approvisionnement et l'énergie à l'ensemble de la population et à la population de la Montérégie en particulier qui a été durement affectée durant cette crise.

Mais, M. le Président, un gouvernement ne peut pas se permettre d'outrepasser la loi. On peut faire les choses légalement, on peut les faire dans la transparence. M. le Président, le gouvernement a fait preuve d'une irresponsabilité inimaginable dans ce dossier. Même les rapports qui ont été émis par la commission Nicolet en font état. Et permettez-moi, M. le Président, de citer quelques extraits d'un des rapports de la commission Nicolet qui a été rendu public le 16 avril 1999.

Je cite: «Le poste Saint-Césaire doit être sécurisé. Cependant, le choix de la solution devrait être fait dans une plus large perspective que celle qui a été retenue au cours des derniers mois.» On fait ici référence, de façon explicite, à l'option du gouvernement. On ajoute aussi que «le bouclage n'est qu'une solution partielle à la sécurisation du réseau. Sur cette question, en l'absence de renseignements confirmés, les experts de la commission ont été réduits à interpréter un faisceau non pas de preuves mais de présomptions.» M. le Président, le gouvernement agit par décrets sur la base de présomptions.

(17 h 40)

«Il n'en demeure pas moins que, sur cette base, continue le rapport de la commission Nicolet, la puissance énergétique de la boucle prévue entre Hertel et des Cantons se comprend mal dans la seule perspective de la croissance anticipée du marché de la Montérégie. Le projet de nouvelles lignes de transport en direction nord-sud et attribué à Vermont Electric Power Corporation laisse en fait présager de nouvelles interconnexions avec le Québec.» Ça, M. le Président, si la parole de l'opposition officielle ne suffit pas au ministre et au gouvernement, on a ici le point de vue d'une commission qui a été créée par ce gouvernement et sur laquelle se sont prononcés des experts. Et, comme jugement, c'est assez grave, c'est aussi grave que le jugement qui a été rendu par l'honorable juge Rousseau.

Alors, encore une fois, on demande au gouvernement de se conformer à la loi, de respecter les normes et les procédures en la matière parce que ce qui est en jeu, c'est au coeur même de la démocratie. Il faut, oui, sécuriser le réseau, il faut, oui, prioriser les services à la population, mais pas à n'importe quel prix et surtout pas en adoptant la voie de la violation des lois. C'est grave, c'est extrêmement grave. Il est temps que ce gouvernement se réveille, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.

Une voix: Bravo!


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. Vraiment, les gens de chez nous, les gens de Saint-Hyacinthe qui écoutent ce qui se passe présentement ne comprennent pas l'opposition. Ils ne comprennent pas que l'opposition dise, d'un côté: Oui, oui, oui, il faut sécuriser, mais il ne faut pas construire de ligne. Ah oui, il faut construire une ligne, mais il ne faut pas la construire là. Il faut construire là, mais il ne faut pas la construire de cette façon-là. Alors, qu'est-ce qu'ils veulent, les gens de l'opposition? Seulement faire de l'obstruction? Empêcher qu'on réalise l'objectif réel? Les gens de chez nous ont l'impression que l'opposition parle des deux côtés de la bouche en même temps, ce qui est une prouesse.

Des voix: Bravo!

M. Dion: M. le Président, les gens de chez nous s'en souviennent, de janvier 1998, le 5 janvier au soir, alors que le courant a été complètement coupé. C'étaient les ténèbres chez nous, à Saint-Hyacinthe. Il n'y avait pas de lumière du tout autour, on entendait craquer les arbres, et on entendait toutes sortes de bruits, et les gens étaient tous isolés, chacun chez eux, sans pouvoir communiquer. Et, le lendemain matin, quand j'ai essayé de décrocher le téléphone, il n'y avait plus de téléphone chez nous, la glace avait coupé le fil. Alors, qu'est-ce que j'ai fait? Je suis sorti, j'ai pris mon automobile, et à peine le moteur avait commencé à tourner que le téléphone a sonné. Qui est-ce qui m'appelait? C'est le bureau du premier ministre qui m'appelait pour avoir des nouvelles, pour savoir qu'est-ce qui se passait, pour essayer d'établir des moyens de secourir la population.

Je suis sorti et j'ai fait toute la journée sur la glace, dans les rues, dans mon auto parce que c'était le seul endroit où je pouvais avoir le téléphone pour travailler. Je suis passé d'un endroit à l'autre. J'ai guidé les gens vers les centres d'accueil et j'ai travaillé toute la journée comme ça. Et le soir, la pluie continuait toujours, la glace s'accumulait dans les rues et elle s'accumulait aussi sur les fils de téléphone. Et, dans la soirée, qu'est-ce qui est arrivé? Ce sont les poteaux de téléphone qui sont tombés les uns après les autres et qui bloquaient à bien des endroits les fils électriques de haute tension qui bloquaient les entrées. Les gens n'osaient pas passer par-dessus, ne connaissant pas la situation. C'était vraiment lugubre, c'était tragique, M. le Président. Je me souviens, le lendemain, pendant que je circulais pour m'occuper des gens, avoir rencontré un monsieur qui avait l'air complètement désolé et qui cherchait un endroit où aller. Alors, je m'arrête et je l'interroge. Il me dit: Mais où est-ce que je peux aller avec ma famille? Alors, je lui indique la polyvalente. Mais il dit: Je n'ai pas de voiture pour aller là, moi. Mais j'ai dit: prenez un taxi, mon cher monsieur. Mais, mon cher monsieur, je n'ai pas le moyen de prendre un taxi, moi, je suis un pauvre et j'ai trois enfants à la maison, une femme, trois enfants. On n'a rien à manger, il fait froid chez nous. Qu'est-ce qu'on fait? Alors, je suis allé chez lui. Sa famille, ses enfants sont montés dans mon auto, et je les ai conduits à la polyvalente, où il y avait un centre d'accueil.

Des voix: Bravo!

M. Dion: C'était ce que faisaient tous les Maskoutains et toutes les Maskoutaines qui pouvaient faire quelque chose pour les autres. Il y a eu un mouvement de solidarité extraordinaire. Et, au bout de quatre jours, il y avait 4 000 personnes dans les quatre centres d'accueil de Saint-Hyacinthe. Mais, écoutez bien cela, M. le Président, après le recensement, on s'est rendu compte qu'il y en avait 27 000 réfugiés chez des parents ou des amis, en ville ou à la campagne, des gens qui avaient un foyer, des gens qui avaient un poêle à combustion lente ou des gens qui avaient une génératrice et qui accueillaient leurs voisins, leurs amis, leur parenté ou des gens du rang. C'était la solidarité, M. le Président.

Et, pendant ce temps-là, évidemment, peu à peu je me suis mis à recevoir d'autres appels, des appels, par exemple, de l'ex-député de Bonaventure, M. Marcel Landry. C'était lui qui était député dans ce temps-là. Lui, il avait de la considération pour les gens de chez nous. Lui, c'était quelqu'un qui était sensible envers les gens de chez nous. Et puis les députés de toute la belle région du Saguenay–Lac-Saint-Jean qui m'appelaient les uns après les autres, le député de Gaspé, les députés de l'Abitibi qui m'appelaient pour m'offrir du bois, des génératrices, toutes sortes de choses pour les gens de chez nous. Il y a eu une solidarité extraordinaire des gens du Québec envers les gens de ma région, et j'en profite une nouvelle fois pour leur dire un grand merci au nom des gens de Saint-Hyacinthe. Pardonnez-moi de parler de Saint-Hyacinthe uniquement, mais nous étions au coeur du triangle noir.

Et là, pendant quatre semaines, on a été dans l'obscurité. Les gens se réfugiaient dans des centres d'accueil. Je me souviens, un jour, j'arrivais de nouveau au centre d'accueil et je rencontre, dans une salle de classe où il y avait une vingtaine de lits, des grabats par terre, les gens vivaient là, une dame de 82 ans, une petite dame, toute petite, elle ne faisait pas 50 kg, toute petite, âgée, 82 ans, pensons-y, toute menue, avec son beau sourire, et qui me disait: Lâchez pas, M. Dion, ça nous fait plaisir quand vous venez nous voir. Ne lâchez pas, on va s'en sortir. Je n'en revenais pas. Une personne de cet âge qui était dans des situations aussi pitoyables et qui disait: Lâchez pas, on va s'en sortir, et qui encourageait les gens autour d'elle. C'est extraordinaire, M. le Président.

Alors, grâce à la solidarité du Québec, on s'en est sorti, grâce à la solidarité des gens de chez nous aussi, on s'en est sorti, mais ça n'a pas été facile. Ça n'a pas été facile. Et les gens s'en souviennent. Les gens sont sortis traumatisés par cela. Et demandez-leur, aux gens de chez nous, s'ils veulent que ça recommence, M. le Président. Demandez-leur s'ils accepteraient que le gouvernement tergiverse à étudier toutes sortes de possibilités théoriques qui pourraient peut-être se réaliser un jour.

Non. Les gens de chez nous, ce n'est pas ça qu'ils veulent. Parce que beaucoup de gens de chez nous n'avaient pas le chauffage, comme l'a si bien dit le député de Johnson, n'avaient pas de génératrice chez eux. Ils étaient à la merci de tout. Et ils voudraient se replonger dans cette situation-là, M. le Président? Non. Ils ne veulent pas ça. Ils ne veulent pas qu'on tourne en rond et qu'on se pose 56 questions, alors qu'il y a un problème grave. Tout le monde sait qu'avec les changements de température il se pourrait... on souhaite que ça ne se produise plus, mais il se pourrait que ça se reproduise. Et maintenant que ça s'est produit une fois, est-ce qu'on aurait l'excuse de ne pas trop savoir, maintenant que les lignes sont déjà tombées une fois? C'est sûr qu'elles ont été remontées dans les meilleures conditions, avec les meilleurs matériaux, en faisant en sorte qu'elles soient encore plus solides qu'avant, mais il n'y a rien qui résiste à des choses comme ce qu'on a vécu à l'hiver 1998.

(17 h 50)

Alors, M. le Président, il était très important qu'on s'assure qu'à l'avenir on sera en mesure de faire face à une situation comme celle-là. Il faut absolument assurer la sécurité de l'approvisionnement énergétique. Il faut absolument l'assurer, et l'assurer au moindre coût possible, aussi, parce que les coûts de construction de lignes d'électricité, ça se répercute dans nos prix, dans nos tarifs d'électricité. Et moi, quand je parle de tarifs, moi comme les autres, je n'aime pas ça payer trop cher pour l'électricité. Mais ce n'est pas ça qui est très grave, M. le Président. Il y a parmi nous, il y a au Québec des gens qui ne sont pas riches, qui sont pauvres, qui vivent de très petits budgets et, pour eux, une augmentation de tarif, c'est dramatique, M. le Président. Alors, la reconstruction doit se faire dans les meilleures conditions. Qu'on prenne des précautions pour faire le moins de difficultés à qui que ce soit, ça, ça va, mais qu'on ne le fasse pas à n'importe quel prix, M. le Président.

Alors, moi, je pose la question suivante: Si le gouvernement disait: Bien, dans le fond, là, puisqu'on s'est trompé d'après l'opinion du juge qui nous a rendu une décision, et que nous respectons, puisqu'on s'est trompé, bien, peut-être qu'il faudrait démanteler tout ça. Que diraient les gens de chez nous? Que diraient les gens de Saint-Jean? Que diraient les gens de Longueuil? Que diraient les gens de Saint-Hilaire, de Sorel, de Granby, de Saint-Césaire? Pensez-vous qu'ils seraient d'accord? Non, M. le Président, ils ne seraient pas d'accord. Alors, il faut absolument conserver l'équipement qui est en place. Pourquoi? Pour toutes sortes de raisons, M. le Président, mais principalement pour assurer la sécurité, la sécurité de l'approvisionnement.

Bon. On a construit, du moins on a commencé la construction d'une ligne, et maintenant elle n'est pas tout à fait terminée. Mais on sait que, si jamais il y avait une catastrophe comme celle qu'on a vécue, bien, dans l'espace de quelques jours, on pourrait la compléter rapidement. Donc, il faut la conserver parce qu'elle est une sécurité; pas une sécurité absolue, pas une sécurité comme on veut l'avoir, mais une certaine sécurité qui fait que les gens maintenant peuvent respirer. Et peut-être qu'on peut se donner le temps de discuter s'il n'y a pas certains aménagements pour faire encore mieux que ce qu'on a fait. Mais, au moins, on a une base de sécurité qui est là. Alors, il faut conserver ce qu'on a, il faut conserver ce qui a été construit.

Bon, peut-être que ce qui a été construit a eu certains inconvénients, admettons-le. Quand on a une très belle montagne et qu'on fait un corridor, qu'on bûche les arbres dans la montagne, c'est moins beau, je l'admets. Et Félix Leclerc... vous vous souvenez de la belle chanson, de la belle litanie dans laquelle on répète: «Oui, mais on a une belle vue»? Eh bien, dans ce cas-là, on a une moins belle vue, c'est vrai.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Dion: C'est vrai. Ensuite, M. le Président, c'est sûr qu'en construisant la ligne il se peut qu'on ait abattu des érables, et vous savez comment les érables sont précieux pour des Québécois et des Québécoises, hein? C'est un patrimoine de beaux érables. Bon. Il se peut qu'il y ait eu du dommage. Il se peut aussi qu'en construisant certaines personnes pressées par le temps, tout ça, aient eu certains comportements moins délicats qui aient été frustrants pour certaines personnes qui vivent dans la région du Saint-François. Bon. C'est possible. On peut comprendre que certaines personnes soient fâchées, que certaines personnes soient frustrées, qu'elles soient mal à l'aise avec ça, qu'elles veuillent protester. On peut le comprendre. Le comprendre, c'est une chose, mais s'écraser devant ça, c'est une autre chose. Je pense que ce que la population nous demande, ce n'est pas de manquer de compréhension, mais c'est de ne pas manquer de responsabilité face à la population. C'est ça que la population nous demande.

Alors, M. le Président, la ligne Hertel–des Cantons, elle est là pour quoi? Pour doubler une autre ligne. Pourquoi? Parce qu'on sait maintenant qu'on peut avoir des situations de verglas comme celle qu'on a connue. Le verglas peut tomber dans la région de Saint-Hyacinthe, mais il peut tomber aussi dans la région de Sherbrooke. Alors, c'est la raison pour laquelle on fait des lignes diverses de façon que, s'il y en a une qui tombe, l'autre restera en place pour s'assurer que les gens seront approvisionnés. Alors, oui, peut-être qu'on a une moins belle vue, mais on a plus de sécurité. Ça, c'est important.

Maintenant, M. le Président, vous vous souvenez, comme moi, il y a une dizaine d'années... Moi, je comprends un peu l'opposition de sa réaction actuelle parce que, il y a une dizaine d'années, il y a eu un problème à Grondines. On avait une belle maison ancestrale sur le bord du fleuve, et je dois vous dire que, moi, je suis sensible à cette chose-là, le patrimoine, pour moi, c'est quelque chose de très important. Le patrimoine bâti, les meubles qui ont été utilisés par nos ancêtres, les belles forêts, les belles montagnes, pour moi, c'est très important. J'ai la chance d'être l'adjoint parlementaire de Mme la ministre de la Culture et des Communications et je me permettrai l'expression suivante: je communie à son intérêt pour protéger le patrimoine québécois. Bon. Maintenant, si je lui posais la question suivante à Mme la ministre de la Culture et des Communications: Seriez-vous prête, Mme la ministre de la Culture et des Communications, à mettre plus de 100 000 000 $ pour sauver chacune des vieilles maisons du Québec? Seriez-vous prête à mettre plus de 100 000 000 $ pour sauver chacune de nos belles vieilles églises du Québec? Je pense que, si je lui posais la question, elle dirait non. Parce que est-ce qu'il y aurait beaucoup de Québécois et de Québécoises qui accepteraient de sauver chaque maison ancestrale au prix de plus de 100 000 000 $? Eh bien, c'est ce que le gouvernement du Parti libéral a décidé de faire à Grondines. Il a investi plus de 100 000 000 $ pour une ligne parce qu'il fallait sauver une maison ancestrale. Ça, c'est de l'incohérence. Ça, c'est de l'irresponsabilité que je dénonce violemment, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Dion: Après ça, l'opposition vient en Chambre et se plaint qu'au Québec on paie trop d'impôts. Bien, quand on prend n'importe quelle décision, des décisions irréfléchies, des décisions abusives, eh bien, ça se répercute sur l'impôt, sur la fiscalité, tôt ou tard. Alors, je pense que, dans cette question-là, oui, il faut protéger le plus possible notre patrimoine, oui, il faut protéger le plus possible les intérêts non seulement du groupe de citoyens du Val-Saint-François, mais de tous et de chacun des citoyens. Mais à n'importe quel prix? Non, M. le Président, pas à n'importe quel prix. Ce n'est pas possible. Ça nous fait de la peine, mais ce n'est pas possible. Il faut qu'ils comprennent que 1 300 000 personnes en Montérégie, un autre nombre aussi considérable de personnes dans la région de Montréal, c'est-à-dire près de la moitié du Québec, ça doit avoir une certaine importance aussi. Leur sécurité d'approvisionnement hydroélectrique doit avoir une certaine importance aussi. C'est pour ça qu'il faut conserver la ligne qui est bâtie, quitte à l'améliorer grâce aux auditions publiques qui auront lieu.

Alors, M. le Président, pour moi, c'est important. Les décisions ont été prises par le gouvernement de bonne foi. Les décrets ont été pris de bonne foi, n'est-ce pas?

Une voix: Oui.

M. Dion: Bon. À la suite de cela, des gens se sont sentis brimés personnellement, ils sont allés devant les tribunaux. Ils avaient le droit. On respecte ça, on est dans un pays démocratique, un pays où c'est la règle de droit qui compte. Et là le juge a dit: Oui, c'est vrai, vous avez raison, le gouvernement s'est trompé; il croyait avoir le droit, mais ce n'était pas conforme à sa loi; donc, je demande l'arrêt des travaux. Et les travaux ont arrêté. Nous nous sommes inclinés devant cette décision de la cour parce que nous respectons la règle de droit. Mais est-ce que le juge a dit: Il faut détruire la ligne qui est construite? Il n'a pas dit cela.

Alors, pour s'assurer qu'on n'ira pas faire 56 procès pour détruire un équipement dont on a besoin pour assurer la sécurité des gens du triangle noir, eh bien, on passe cette loi pour s'assurer que la situation va rester telle quelle tant que les auditions publiques ne seront pas terminées. Tant qu'on n'en aura pas discuté à profusion, ça va rester tel quel, et, ainsi, après on pourra utiliser les investissements publics qui ont été faits grâce à la contribution de tous les Québécois et de toutes les Québécoises, on pourra utiliser ces investissements publics de la façon qui soit la plus rentable possible, et la plus sécuritaire possible, et la plus convenable possible eu égard aux besoins de la population.

(18 heures)

Alors, moi, je félicite le gouvernement, mon gouvernement, qui agit avec responsabilité. S'il fait une erreur, il a l'honnêteté et la transparence de le reconnaître, de corriger, mais de surveiller les investissements de la population parce que c'est important. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Ceci met fin à nos travaux, et nous allons ajourner à mardi prochain – je crois que c'est le 18, mardi; c'est ça? – à 10 heures. Mardi prochain.

(Fin de la séance à 18 h 1)