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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 18 juin 1998 - Vol. 35 N° 197

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons débuter par un moment de recueillement.

Très bien, si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons immédiatement débuter les affaires courantes.


Déclarations ministérielles

Il y a une déclaration ministérielle du ministre de la Justice. Alors, M. le ministre de la Justice.


Harmonisation des concepts de conjoints de fait de sexe différent et de même sexe


M. Serge Ménard

M. Ménard: M. le Président, au cours des dernières décennies, les unions de fait sont devenues une forme courante d'union. Ce choix d'un mode de vie relève entièrement du domaine de la vie privée. Cependant, le développement de cette forme d'union suscite des interrogations non seulement sur les aspects juridiques, mais aussi sur l'évolution de nos modèles sociaux.

Au Québec comme ailleurs, le droit reconnaît plus ou moins les conjoints de fait. Le législateur québécois leur a accordé certains droits dans différentes lois à caractère social. Il a adapté certaines de ses pratiques à cette réalité. Cependant, la reconnaissance de ces unions n'est qu'accessoire dans le droit civil québécois.

Cette situation n'est pas fortuite. Lorsque le législateur a révisé le droit de la famille, tant en 1980 qu'en 1991, il s'est interrogé sur l'opportunité de prévoir des conséquences civiles aux unions de fait. S'il s'est abstenu de le faire, c'est par respect pour la volonté des conjoints: quand ils ne se marient pas, c'est qu'ils ne veulent pas se soumettre au régime légal du mariage.

D'ailleurs, le législateur a, en 1980, levé les obstacles juridiques qui empêchaient la pleine reconnaissance des conventions entre conjoints de fait.

À cette dynamique récente de l'union de fait s'ajoute aujourd'hui une autre dimension, les unions de fait où les conjoints sont de même sexe. Le gouvernement du Québec a décidé d'intervenir pour remédier à certaines situations juridiques, puisqu'elles ne reflètent plus les valeurs sociales actuellement acceptées par l'ensemble des citoyens.

Aussi, j'annonce aujourd'hui, ce 18 juin 1998, qu'il est de l'intention du gouvernement de réviser l'ensemble de la législation publique du Québec afin de revoir son application aux conjoints de fait de sexe différent ou de même sexe. C'est ainsi qu'il faudra revoir, par exemple, les lois portant sur l'assurance automobile, sur les régimes de rentes ou sur l'assurance-médicaments.

Cette démarche consiste, en premier lieu, à harmoniser dans la législation la notion juridique de «conjoint». Les critères de reconnaissance de l'union de fait, notamment quant à la durée de la vie commune, devront, dans la mesure du possible, être uniformes. En second lieu, elle inclura les conjoints de fait de même sexe.

Cette démarche vise les lois particulières du Québec. Il n'est pas de l'intention du gouvernement de bouleverser l'institution du mariage et d'y assimiler les unions de fait ou de donner le statut d'époux aux conjoints de fait. Toutefois le gouvernement est ouvert à la possibilité de prévoir un mécanisme pour assurer, en droit privé, la reconnaissance juridique et sociale des unions de fait. Ce mécanisme ne s'adresserait qu'aux conjoints de fait qui veulent officialiser leur union et lui donner des effets civils particuliers.

De manière générale, la présence de deux éléments est exigée pour que les personnes puissent être considérées comme des conjoints de fait: premièrement, le comportement conjugal, c'est-à-dire le fait de se comporter comme des époux en faisant vie commune; deuxièmement, la stabilité de l'union, laquelle est généralement assurée par une exigence de cohabitation continue depuis une certaine période de temps, période plus ou moins longue selon qu'il y ait ou non présence d'enfant. Dans certaines législations s'ajoute l'élément de notoriété, c'est-à-dire le fait d'être publiquement représentés comme conjoints.

Nous devrons donc choisir les éléments essentiels pour que l'union de fait devienne un fait juridique et déterminer la durée de la cohabitation requise pour s'assurer d'une certaine stabilité de l'union.

L'intention gouvernementale exprimée se concrétisera sur deux plans. Tout d'abord, à titre d'employeur, le gouvernement veut accorder le plus tôt possible le même statut aux conjoints de fait de même sexe que celui qu'il accorde aux conjoints de fait de sexe différent. Dans cette optique, il entreprendra des discussions avec les représentants des employés des secteurs public et parapublic afin d'assurer cette reconnaissance. Après entente, il apportera en conséquence les modifications nécessaires aux définitions de conjoint de fait prévues à leurs conditions de travail et à leur régime d'assurance collective.

Ensuite, comme législateur, le gouvernement se propose, dans les lois, les règlements et les autres actes juridiques qu'il prend, de compléter sa cueillette d'informations afin d'harmoniser les notions de conjoints de fait. Ainsi seront considérés conjoints de fait deux personnes majeures, dont aucune n'est mariée, et qui se comportent comme des époux en faisant vie commune depuis un certain temps, à être déterminé. Lorsque le couple a un enfant, par naissance ou par adoption, les conditions de durée de vie maritale pourraient varier.

Dans sa démarche, le gouvernement devra nécessairement tenir compte de certains éléments extérieurs. Ainsi, le gouvernement du Québec entamera des discussions avec le gouvernement fédéral pour qu'il modifie sa loi sur les impôts, afin de conserver l'enregistrement des régimes de retraite qui reconnaissent les conjoints de même sexe.

Par ailleurs, comme je l'ai indiqué précédemment, le gouvernement va examiner l'instauration d'un mécanisme pour assurer une reconnaissance sociale et juridique des unions de fait et leur permettre de produire des effets civils. Ce mécanisme pourrait, par exemple, consister en l'inscription du contrat d'union dans un registre public, comme le Registre des droits personnels et réels mobiliers. Toutefois, la détermination des effets d'un tel contrat, et des droits et obligations qui en découlent, soulève diverses questions.

(10 h 10)

Enfin, comme il importe de dégager une politique d'état sur les conjoints de fait, il est de l'intention du gouvernement de procéder à la tenue d'une consultation publique sur les questions nécessitant des modifications législatives. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Chomedey, pour vos commentaires.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. La déclaration ministérielle donne suite à une demande formulée par de nombreux groupes au cours des dernières années et à une promesse faite en réponse à une demande provenant de l'opposition lors de l'audience publique sur un projet de loi qui avait été présenté par le prédécesseur de l'actuel ministre de la Justice dans le domaine, justement de la reconnaissance de certains droits pour les couples qui vivent en union libre mais qui n'ont effectivement pas le lien de mariage ou, dans certains cas, ne pourraient pas l'avoir pour des raisons légales que le ministre vient de nommer.

De notre côté de la Chambre, on entend collaborer étroitement lors de cette consultation. La description qu'a faite le ministre est exacte, c'est-à-dire que notre législation prévoit beaucoup trop de définitions différentes pour une même réalité. La même chose s'applique dans les conventions collectives. On ne sait jamais si on va être reconnu comme union de fait, comme couple, pour les prestations qui viennent en vertu d'une assurance, d'une convention collective ou d'une législation sectorielle. Pour cette raison, M. le Président, on entend, comme je le mentionnais tantôt, collaborer, on va être présent lors des commissions parlementaires. Il s'agit d'actualiser une institution dans notre société et de l'adapter à une réalité.

En terminant, M. le Président, on voudrait aussi que cette consultation publique constitue l'occasion pour réfléchir profondément sur les causes qui font que c'est au Québec qu'on trouve le plus haut taux d'unions libres, c'est-à-dire de gens qui vivent maritalement sans lien de mariage.

Comment ça se fait qu'au Québec on connaît un des plus hauts taux de divorce pour les gens qui se marient? Est-ce qu'il y a des choses structurelles dans nos lois? Est-ce qu'il y a des phénomènes qui n'ont pas encore été touchés?

Je pense, M. le Président, que, si on veut rendre plus facile la reconnaissance des unions de fait, il faut par la même occasion regarder plus profondément ces autres aspects de la réalité sociale de notre société, notre société québécoise. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de la Justice, pour votre réplique.


M. Serge Ménard (réplique)

M. Ménard: Je me réjouis évidemment de la collaboration offerte par l'opposition. Je pense que cela démontre que, dans son ensemble, le Québec est une des sociétés les plus ouvertes d'Amérique.

Je voudrais juste corriger. Ce n'est pas au Québec que c'est le plus haut taux, c'est dans les Territoires du Nord-Ouest et au Yukon, mais, enfin, c'est quand même la province où c'est le plus élevé. Mais, pour marquer cette appréciation, on dit que la parole est d'argent, mais que le silence est d'or. Alors, je me tairai. Merci.

Des voix: Ha, ha, ha!


Présentation de projets de loi

Le Président: Très bien. Au niveau de la présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, veuillez reconnaître le ministre responsable de l'application des lois professionnelles en prenant en considération l'article a.


Projet de loi n° 454

Le Président: Très bien. Alors, à cet article, justement, le ministre responsable de l'application des lois professionnelles présente le projet de loi n° 454, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie le Code des professions et plusieurs lois constitutives des ordres professionnels en vue principalement de faciliter l'administration du système professionnel québécois.

C'est ainsi que le projet de loi modifie diverses règles concernant l'utilisation de certains titres professionnels, prévoit un assouplissement des conditions de délivrance des permis par un ordre professionnel et précise certains aspects de la procédure applicable en matière disciplinaire et réglementaire.

Le projet de loi accorde de plus des pouvoirs supplémentaires au Bureau d'un ordre professionnel en matière de formation continue et interdit expressément le cumul des fonctions de président et de secrétaire d'un ordre professionnel.

Par ailleurs, le projet de loi modifie les règles relatives à l'exercice de certaines activités par les membres d'ordres professionnels. C'est ainsi qu'il vient permettre, à certaines conditions, la vente libre de lunettes de lecture prêtes à porter, qu'il vient préciser le droit des podiatres de fabriquer, transformer, modifier ou vendre des orthèses podiatriques et qu'il vient régir les conditions d'exploitation d'un laboratoire de prothèses dentaires.

Le projet de loi contient enfin des dispositions visant à assurer l'harmonisation, la cohérence et la concordance de certaines dispositions du Code des professions et des lois professionnelles.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Oui.

Le Président: Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.


Consultation générale

M. Jolivet: Oui. J'aimerais, conformément à l'article 235 du règlement de l'Assemblée nationale, faire motion pour:

«Que la commission des institutions procède à une consultation générale et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 454, Loi modifiant le Code des professions et d'autres lois professionnelles, à compter du 6 octobre 1998;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 25 septembre 1998;

«Que le ministre de la Justice soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a consentement, d'abord, pour déroger aux articles 53 et 188 de notre règlement? Il y a consentement. Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien.


Dépôt de documents

Alors, au dépôt de documents, maintenant, M. le ministre de la Justice.


Avant-projet de loi modifiant la Loi sur les ingénieurs et d'autres dispositions législatives

M. Ménard: Alors, M. le Président, il me fait plaisir de déposer un avant-projet de loi cherchant à modifier la Loi sur les ingénieurs et d'autres dispositions législatives. Cet avant-projet de loi redéfinit d'abord le champ de pratique des ingénieurs en révisant les actes que seuls ceux-ci peuvent poser et en déterminant à l'égard de quels ouvrages ces actes sont ainsi réservés.

L'avant-projet attribue de plus au Bureau de l'Ordre des ingénieurs les pouvoirs nécessaires afin de régir les personnes morales habilitées à exercer la profession d'ingénieur.

L'avant-projet de loi apporte aussi d'autres modifications à cette loi, notamment en matière pénale.

Le Président: Bien. M. le leader du gouvernement.


Consultation générale

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission des institutions procède à une consultation générale et tienne des auditions publiques sur l'avant-projet de loi intitulé Loi modifiant la Loi sur les ingénieurs et d'autres dispositions législatives à compter du 20 octobre 1998;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 8 octobre 1998;

«Que le ministre de la Justice soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Très bien. Comme précédemment, est-ce qu'il y a d'abord consentement pour déroger aux articles 53 et 188 du règlement? Il y a consentement. Et la motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, toujours au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport annuel de la Société de développement industriel du Québec

M. Landry (Verchères): Oui. M. le Président, je dépose le rapport annuel 1997-1998 de la Société de développement industriel du Québec.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Rapport annuel de la Société québécoise d'initiatives pétrolières

M. Chevrette: Oui. Je dépose le rapport annuel 1997-1998 de la Société québécoise d'initiatives pétrolières. Et, M. le Président, est-ce que vous me permettez par la même occasion de faire une série de dépôts?

Le Président: Bien sûr.


Documents relatifs au coût de la présentation du projet hydroélectrique de Churchill Falls

M. Chevrette: En réponse à la question du député de l'Acadie, il y a une note signée de Mme Marie-José Nadeau, destinée à mon chef de cabinet, M. Charles Larochelle, qui dit qu'il n'y a aucun tournage réalisé spécialement pour des présentations.

Également, Hydro-Québec avait omis un nom... Non. L'autre question, c'était: Est-ce que, à Place Desjardins, avec le vice-premier ministre, c'était un compte particulier? La facturation démontre que c'est, dans la facture globale, déjà facturé.

Maintenant, pour ce qui est de la liste des membres, Hydro-Québec avait oublié un nom, qui était Mme Jacqueline Aubé; Mme Jacqueline Aubé qui est membre du bureau de National à Québec. Je dépose donc une liste corrigée, M. le Président.

Le Président: Très bien. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Strictement une précision. Le ministre vient de nous dire qu'il n'y a pas eu de tournage de vidéo pour des fins de présentation comme telle. Est-ce qu'il y en a eu pour d'autres fins?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, les seules présentations qui ont eu lieu, c'était du tournage pour les médias d'information qui n'avaient pas pu aller en hélico prendre la photographie du site. Ceci a été des vidéos qui ont été remis aux médias pour faire leur montage de nouvelles le soir.

Le Président: Très bien. Mme la ministre de la Culture... Écoutez, hier, j'ai indiqué... J'ai permis au leader une question de renseignement, mais, si jamais il y a des questions, je pense que la période des questions et des réponses est faite expressément pour questionner les membres du gouvernement sur des documents ou même sur des affaires...

Alors, à ce moment-ci, nous allons poursuivre les dépôts de documents. Mme la ministre de la Culture et des Communications, maintenant.

(10 h 20)


Rapports annuels de la Bibliothèque nationale du Québec, de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs et de la Régie du cinéma

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1997-1998 de la Bibliothèque nationale du Québec, de la Commission de reconnaissance des associations d'artistes et des associations de producteurs et de la Régie du cinéma.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de la Justice, je crois que vous avez un autre document.


Rapport annuel de l'Ordre des pharmaciens du Québec

M. Ménard: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1997-1998 de l'Ordre des pharmaciens du Québec.

Le Président: Très bien. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Plan d'action jeunesse 1998-2001 et répertoire des programmes jeunesse du gouvernement du Québec

M. Boisclair: M. le Président, je dépose en cette Assemblée la première politique jeunesse gouvernementale 1998-2001. Je dépose de plus le répertoire des programmes jeunesse du gouvernement du Québec 1998-1999.

Le Président: Alors, ce document, comme le précédent, est déposé. Mme la ministre déléguée au Revenu, maintenant.


Rapport d'activité résultant de la comparaison, du couplage ou de l'appariement des fichiers de renseignements du ministère du Revenu

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, je dépose le rapport d'activité résultant de la comparaison, du couplage ou de l'appariement des fichiers de renseignements au 31 mars 1998.

Le Président: Alors, ce document est également déposé.


Rapport d'accueil de la VIIIe assemblée générale de l'Association parlementaire Ontario-Québec

Pour ma part, je dépose deux rapports concernant l'Association parlementaire Ontario-Québec. Le premier est relatif à l'accueil de la VIIIe assemblée générale de cette Association tenue à Québec les 6 et 8 mai dernier et à laquelle j'ai participé en compagnie des députés suivants: Mme la députée de Marie-Victorin, M. le député de Marguerite-D'Youville, M. le député de Rousseau, Mme la députée de Chapleau, M. le député de D'Arcy-McGee, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, M. le député de Bellechasse, M. le député de Bonaventure, M. le député de Robert-Baldwin et M. le député de Nelligan.


Rapport de mission de la réunion du Groupe de travail sur les problèmes frontaliers de l'Association des parlementaires Ontario-Québec

Le deuxième rapport est relatif à la mission effectuée à la réunion du Groupe de travail sur les problèmes frontaliers de l'Association des parlementaires Ontario-Québec tenue à Ottawa le 1er juin dernier. Cette mission était sous la responsabilité de M. le député de Marguerite-D'Youville qui était alors accompagné de Mme la députée de Chapleau.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Laurier-Dorion.


Consultations particulières sur le projet de loi n° 445

M. Sirros: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 11 juin 1998 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des audiences publiques sur le projet de loi n° 445, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction.


Étude détaillée du projet de loi n° 445

Et j'ai également le plaisir, M. le Président, de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 15, 16 et 17 juin afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 445, Loi modifiant diverses dispositions législatives relatives au bâtiment et à l'industrie de la construction. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Très bien, ces deux rapports sont déposés. M. le président de la commission des affaires sociales et député de Charlevoix.


Consultations particulières sur le projet de loi n° 439

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer deux rapports de la commission des affaires sociales qui a d'abord siégé le 15 juin 1998 afin de procéder à des consultations particulières et de tenir des auditions publiques sur le projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec.


Étude détaillée du projet de loi n° 439

Elle a, de plus, siégé le 17 juin 1998 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 439, Loi sur l'Institut national de santé publique du Québec. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Très bien, ces rapports sont aussi déposés.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le leader de l'opposition officielle et député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, M. le Président, deux pétitions, une première qui requiert un consentement et qui émane de 1 423 personnes de la circonscription électorale de Lotbinière, particulièrement des municipalités de Lotbinière, Leclercville, Sainte-Emmélie et Saint-Édouard, ainsi qu'une lettre du maire Jean Bergeron qui certifie que la pétition avait été remise au député de Lotbinière. Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Oh!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Jolivet: ...un problème, j'essaie de vérifier une chose, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je m'attendais à ce que le leader, suite à la discussion qu'on avait eue hier, nous en fasse mention. Je n'ai eu aucune nouvelle. C'est la première nouvelle. On me demande aujourd'hui un consentement. Je dois vous dire que je suis un peu surpris parce que, normalement, on s'en parle avant, quand ça demande consentement. La preuve, on en a un autre qu'on va déposer où ça demande consentement. Alors, à ce moment-ci, je suis dans l'obligation de dire non.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Au moins, qu'on dépose la lettre du maire qui contredit clairement les propos tenus en cette Chambre, hier, par le député de Lotbinière.

Le Président: Est-ce qu'il y a, oui ou non, consentement? Il n'y a pas de consentement. Très bien.

Alors, nous allons passer à une autre pétition. M. le député de Brome-Missisquoi.


Mettre fin aux pénalités pour toute forme d'entraide aux bénéficiaires de la sécurité du revenu

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 700 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la province de Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que tout être humain possède des droits et libertés intrinsèques, destinés à assurer sa protection et son épanouissement;

«Considérant que tous les êtres humains sont égaux en valeur et en dignité et ont droit à une égale protection de la loi;

«Considérant que l'article 10 de la Charte québécoise interdit toute discrimination, dont celle fondée sur la condition sociale;

«Considérant que les personnes sociales survivent avec un montant d'environ 57 % sous le seuil de la pauvreté, selon Statistique Canada, janvier 1997, plus les pénalités, montant ne couvrant pas les besoins de nécessité première, tels nourriture, logement et conditions de vie;

«Considérant qu'un ensemble d'articles de loi et règlements de la loi 37 et de la future loi n° 186 briment les droits fondamentaux des personnes assistées sociales en les pénalisant par des coupures pour toute forme d'aide ou d'entraide reçue ou offerte de leur famille, de leurs proches, de leurs amis et de leur entourage, limitant ainsi les possibilités d'améliorer leurs conditions de vie;

«L'intervention réclamée se résume comme suit:

«Nous, soussignés, nous demandons à l'Assemblée nationale, comme premier pas pour lutter contre la pauvreté, de mettre fin à ces pénalités (bénévolat volontaire, transport, aide alimentaire, partage du logement, échange de services), d'abolir une telle discrimination et de rétablir le droit à l'entraide dans le respect de la Charte québécoise.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Johnson, maintenant.

M. Boucher: M. le Président, deux pétitions non conformes. Donc, je demande l'autorisation de cette Chambre.

Le Président: Alors, il y a consentement?

M. Paradis: Par respect, M. le Président, pour les signataires, il y a consentement.

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député de Johnson.


S'opposer à la construction d'une ligne à haute tension sur le territoire de la MRC du Val-Saint-François

M. Boucher: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 2 155 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de l'Estrie, de la Montérégie, de Montréal et de Laval.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que nous contestons le bien-fondé de la ligne haute tension 735 kV devant être érigée sur le territoire de la MRC du Val-Saint-François[...];

«Attendu que la rapidité des délais réduit à néant tout processus de consultation véritable et d'évaluation crédible des impacts sociaux et environnementaux ainsi que des impacts sur la santé et le bien-être des éventuels riverains;

«Attendu que les contraintes physiques d'une telle ligne (80 m de largeur et 65 m de hauteur) sont incompatibles avec le paysage rural de la région, sa richesse patrimoniale, ses richesses naturelles et porteraient atteinte à son potentiel écotouristique pour les générations futures;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, nous opposons fermement à la construction d'une ligne à haute tension sur le territoire de la MRC du Val-Saint-François. Nous dénonçons l'attitude arrogante d'Hydro-Québec qui, forte des décrets, va de l'avant sans tenir compte de la population. De plus, nous réclamons la tenue de véritables audiences publiques et des études d'impact crédibles par le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, cette pétition est déposée, M. le député de Johnson. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Simplement une question d'information dans le sens... Est-ce que le député a signé la pétition?

Une voix: Non.

Le Président: M. le député de Johnson, pour votre autre pétition.


Décréter un moratoire de cinq ans sur la partition du territoire de Saint-Isidore-de-Clifton

M. Boucher: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition par 247 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de Saint-Isidore-de-Clifton.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Nous, citoyens et contribuables de la nouvelle municipalité de Saint-Isidore-de-Clifton, créée le 24 décembre 1997, désirons vous informer que nous n'accepterons pas la partition de notre territoire.

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons un moratoire de cinq ans afin de protéger la stabilité de notre territoire.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, et j'aimerais qu'on m'applaudisse de l'autre côté de la Chambre.

Des voix: Ha, ha, ha!

(10 h 30)

Le Président: Cette pétition est également déposée, bien sûr.


Questions et réponses orales

Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la période des questions et des réponses orales. Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, en principale.


Fermeture du centre jeunesse Boscoville

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. M. le Président, suite aux déclarations que le ministre de la Santé a faites hier en ce qui a trait à la fermeture de Boscoville, j'ai reçu de nombreux appels de parents et d'intervenants du milieu m'informant que les propos du ministre ne reflétaient en rien la réalité.

En effet, quand le ministre de la Santé me dit qu'il a convenu d'une rencontre, la semaine prochaine, avec les promoteurs du projet pour sauver Boscoville, après vérification, on m'informe que c'est faux, aucun contact n'a été fait dans ce sens.

M. le Président, quand le ministre de la Santé m'a dit hier, et je le cite: «Il y a un travail qui se fait pour s'assurer que, à Boscoville ou ailleurs, les enfants vont être à l'endroit qui convient le mieux à leurs besoins», après vérification, on m'informe que c'est faux, parce qu'il y a une directive qui indique clairement que Boscoville ne doit pas faire partie des options ni du choix qu'on offre aux parents et aux enfants.

Mais pire encore, M. le Président, comment le ministre de la Santé a-t-il pu affirmer hier que les décisions sont prises en accord avec la famille quand les parents me disent qu'ils se sentent manipulés, et que, dans une lettre adressée hier au ministre de la Santé, les parents lui demandent de mettre un frein à cette confusion qui règne, et que ces mêmes parents seront dans la rue, samedi prochain, devant les bureaux du ministre, pour démontrer leur mécontentement et leur désaccord?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je vais devoir inviter la députée à vérifier ses sources d'information, je vais vérifier les miennes, parce que c'est clair que c'est même ce matin, pour le choix d'une date, possiblement la semaine prochaine, avec les promoteurs du projet. Et là je veux rappeler là-dessus que, quand il y avait eu tout le débat l'année passée, il y a presque un an, sur Boscoville, des employés de Boscoville et la CEQ avaient demandé de leur laisser le temps de préparer un projet; on leur a laissé presque un an. Ils auraient maintenant convenu de quelque chose, d'un concept, qu'on m'a dit, qui pourrait mener à un projet.

Il y a eu communication avec mon cabinet, je le réaffirme, on a convenu qu'il y aurait une rencontre le plus rapidement possible après la session intensive, et, encore ce matin, il y a des contacts qui sont en cours pour voir si ça ne peut pas se faire la semaine prochaine, pas seulement avec la CEQ, mais avec les autres promoteurs du projet. Ça, je le dis, je le réaffirme, puis il va falloir qu'on vérifie nos sources d'information parce que ça, c'est très clair. Première chose.

Deuxièmement, en ce qui regarde les enfants, j'ai eu aussi la confirmation que ce que j'ai dit, c'est ce qui se passe. On s'occupe des enfants pour qu'ils aillent à l'endroit qui correspond le mieux et le plus à leurs besoins, et ça veut se faire par les éducateurs avec les parents.

Maintenant, on me dit ce matin que certains parents auraient refusé de participer aux rencontres où ils ont été invités. Alors, si c'est le cas, je leur demande d'aller à ces rencontres-là, de discuter avec les éducateurs parce que c'est beaucoup plus en parlant avec ceux qui s'occupent de leurs enfants et qui veulent travailler avec eux que ça va se régler et non pas dans la rue, avec des démonstrations. Ça va se régler en travaillant en tête-à-tête entre des gens qui veulent trouver des solutions. C'est ça qu'on va faire puis c'est à ça qu'on va continuer à se dévouer, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, comment le ministre de la Santé a-t-il pu affirmer dans cette Chambre, hier et encore ce matin – il vient de le faire – que les décisions se prennent pour le bien-être et l'intérêt de l'enfant quand les enfants qui résident actuellement à Boscoville ont écrit personnellement au ministre de la Santé, M. le Président?

Et permettez-moi de vous lire un extrait de leur lettre adressée au ministre, c'est les enfants qui parlent: «Ici même, à Boscoville, on peut développer notre autonomie d'une bien meilleure façon que dans un cadre sécuritaire. Ici, notre développement se fait à deux pas de la liberté.» Et les enfants continuent, M. le Président, quant au transfert à Cité des Prairies: «Cité des Prairies, pour nous, est perçue comme une prison, un lieu de détention. L'enfant qui est orphelin – parce qu'il faut savoir qu'à Boscoville il y a des orphelins qui n'ont pas de parents – n'arrive pas à vivre dans un lieu de peur, de clôtures et de menaces. Ce n'est pas un lieu propice pour devenir autonome et responsable.»

M. le Président, sincèrement, est-ce que le ministre de la Santé soutient toujours que les décisions qui se prennent actuellement, en ce qui a trait à Boscoville, c'est dans l'intérêt et le bien-être des enfants qui y vivent?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je réaffirme, à moins qu'on me démontre que les dirigeants du centre jeunesse et que les gens qui travaillent sur le terrain, par le centre jeunesse et par la Régie régionale, ne me donnent pas les informations que j'ai eues, à moins qu'on me démontre ça, je pense que je vais croire plus ce qu'on me dit de la Régie régionale et du centre jeunesse que ce que vient me raconter en Chambre la députée, parce qu'on a déjà eu pas mal de cas où j'ai pu démontrer que ses sources d'information étaient pour le moins pas mal incomplètes. Pas mal incomplètes!

Alors, il est entendu, et ça m'a été confirmé à plusieurs reprises, que des jeunes qui sont à Boscoville dans ce qu'on appelle des mesures volontaires ou qui sont là pour différentes raisons et qui n'ont pas besoin d'un milieu sécuritaire ne seront pas envoyés dans un milieu sécuritaire. Ça, c'est les éducateurs sur le terrain, c'est les gens du centre jeunesse, c'est la Régie régionale qui me confirment ça. Alors, qui faut-il croire? Il ne faudrait pas qu'on se mette à utiliser les enfants en les gardant sous un régime de crainte, alors qu'on est là pour les protéger et pour les aider, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé peut comprendre que, moi, je préfère croire les parents, les intervenants du milieu, les responsables de Boscoville, les enfants, que croire un technocrate comme le ministre de la Santé?

Des voix: ...

Le Président: Mme la députée, je vous inviterais à être prudente dans le choix des termes pour le... M. le ministre.

M. Rochon: J'aime mieux être démocrate que démagogue, M. le Président.

Des voix: Bravo!

M. Rochon: Alors, tout ce que je peux redire, et, s'il y a vraiment des éducateurs, s'il y a vraiment des gens du milieu, du centre jeunesse qui disent le contraire de ce qu'on m'a donné par les moyens de transmission formels et réguliers qu'on a avec le ministère, je leur demanderai de s'identifier et de venir me le dire personnellement, ce qu'ils ont à dire, pas via l'opposition, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Loiselle: M. le Président, si le ministre de la Santé est vraiment sincère, peut-il se lever dans cette Chambre, aujourd'hui, ce matin, et confirmer qu'il va prolonger le moratoire afin de prendre le temps nécessaire pour étudier et analyser le projet, la proposition, pour sauver, pour la survie de Boscoville? Et, s'il ne le fait pas, M. le Président, on devra conclure que l'ouverture du ministre de la Santé et du premier ministre, l'année dernière, de déposer un projet n'était que de la foutaise et de la frime.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je vais redire ce que j'ai dit. Le projet, c'est les gens du milieu qui se sont engagés à le déposer. Là, ils ont un concept, un an après, et je leur ai dit que je suis prêt à le voir. Alors, on va procéder de façon logique, étape par étape. Je vais d'abord les rencontrer – on essaie de faire ça la semaine prochaine – on va voir de quoi il en est. Pendant ce temps-là, les éducateurs continuent à travailler avec les jeunes, avec leurs familles, offrent la collaboration de tout le monde et s'occupent des jeunes. Ça va se faire, tout ça, dans le courant de la semaine prochaine. Et les décisions vont être prises quand ça va être le temps de les prendre et dans l'intérêt des enfants, M. le Président.

Le Président: Mme la chef de l'opposition officielle, en complémentaire.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Étant donné la confusion qui règne actuellement et l'inquiétude des parents et des enfants, est-ce que le premier ministre peut s'engager à accepter le moratoire qui lui est demandé actuellement par les parents et les enfants, dans le but, bien sûr, de rassurer tout le monde?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, on est tous engagés dans un processus qui nous amène à une décision correcte pour les enfants. De crier au moratoire quand on ne connaît même pas tous les détails d'une situation et toujours s'ingénier à tout retarder et à ne pas prendre de décisions, ça, ils connaissent ça. Ça, ils connaissent ça. À chaque fois qu'ils ont rencontré des difficultés... Quand ça a été clair, dans les années 1992-1993, qu'il fallait qu'ils entreprennent une réorganisation du système de santé, ils ont fait des moratoires. Puis, de moratoire en moratoire, ils nous ont mis dans les situations de difficultés qu'on a aujourd'hui. Alors, s'il faut retarder, s'il faut modifier des décisions, on l'a fait puis on va continuer à le faire, mais on ne marchera pas à coup de non-décisions qui nous ont menés dans la situation qu'on connaît aujourd'hui, M. le Président.

(10 h 40)

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, en principale, maintenant.


Coût de la présentation du projet hydroélectrique de Churchill Falls

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Dans l'affaire du show son et lumière à Churchill Falls, ce matin, les chroniqueurs...

Des voix: ...

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: Dans le spectacle son et lumière, M. le Président, de Churchill Falls, ce matin, nous voyons ce qu'en disent les éditorialistes et chroniqueurs. L'éditorial du Nouvelliste , au titre de Scandale et gaspillage , dit ceci: «Les deux provinces les plus pauvres du Canada, Québec et Terre-Neuve, ne regardent pas à la dépense quand vient le temps de bien paraître: 1 400 000 $ pour une conférence de presse ratée au Labrador. Il y a malheureusement plus ici qu'un dérapage, il y a manifestement scandale. Elle ternit la fin de mandat du gouvernement Bouchard et la crédibilité même du premier ministre.»

Mme Lysiane Gagnon dans La Presse , ce matin: «Le scandale est réel...»

Des voix: ...

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Disait, ce matin, Mme Lysiane Gagnon: «Le scandale est réel: il s'agit d'un cas patent de patronage et de détournement de fonds publics à des fins partisanes.»

M. le Président, est-ce que le ministre des Ressources naturelles, qui déposait mardi dernier cette liasse de documents, peut nous indiquer si toutes les factures à National relatives à Churchill Falls ont été déposées? Pour l'instant, nous sommes à 1 400 000 $ de dépenses sans les taxes. Nous avons passé de 500 000 $, à 700 000 $, à 1 100 000 $, on est rendu à 1 400 000 $ sans les taxes aujourd'hui. Nous voudrions savoir si cela résume la facturation finale.

Est-ce qu'il y a d'autres documents qui couvrent tous les frais de la firme National encourus jusqu'à aujourd'hui et qui ne sont pas dans cette liasse-là?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, depuis le début, j'ai déposé tout ce qu'on m'a donné et j'ai demandé l'ensemble de la facturation. Et, si jamais il y en avait d'autres, c'est parce qu'on ne me les aura pas fournis parce que je peux vous dire que je déposerai tout. Je n'ai pas l'intention de cacher quoi que ce soit dans ce dossier, d'autant plus que, si je me mettais à faire des comparaisons, M. le Président, avec d'autres dossiers qui ont été traités par cette firme, toutes proportions gardées, ce contrat n'est pas plus cher, par exemple, que le show de Charlesbourg ou il est encore beaucoup moins cher que celui du 29 du 10, 1993, où un contrat de 10 000 000 $ était donné à National par la même Hydro-Québec et sous votre gouverne, 10 000 000 $.

M. Chagnon: En additionnelle.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Merci, M. le Président. En additionnelle. Est-ce que le ministre pourrait regarder sur les factures qu'il a déposées? Il a déposé celles qui ont eu lieu après le fiasco, la conférence de presse fiasco du 9 mars dernier. Six semaines plus tard, la compagnie National, le 30 avril, envoyait une facture pour des services professionnels rendus jusqu'au 27 mars 1998 pour 209 000 $. Le 25 mai, une nouvelle facturation de la même compagnie, plusieurs semaines après la conférence de presse fiasco, pour des services professionnels rendus jusqu'au 24 avril 1998. Or, vous avez, M. le ministre, suspendu le contrat le 15 juin. Il manque les déboursés des services professionnels entre le 25 avril et le 15 juin. Nous voudrions les connaître.

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, conformément aux questions qui m'avaient été posées, j'ai demandé l'ensemble des frais encourus par la firme National pour ce contrat en deux phases, la phase conférence de presse et la phase post-conférence de presse, pour un plan d'action en vue d'exposer le projet et de le vendre, à toutes fins pratiques, parce que c'est un projet très d'envergure, de 10 000 000 000 $ à 11 000 000 000 $, pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

Donc, j'ai demandé la facturation totale et globale. On m'a dit qu'il restait environ 158 000 $ ou 168 000 $ à payer; le reste avait été payé. C'est ce que j'ai dit en cette Chambre, c'est ce que j'ai répondu à une question. Je ne vois pas, ce matin, qu'est-ce qu'on cherche à trouver. S'il y a des facturations qui ne m'ont pas été remises, j'enjoins Hydro-Québec immédiatement de me les envoyer et je vais les déposer. Je vais les déposer.

Parce qu'on a fait les gorges chaudes hier, en disant, à une réponse du premier ministre, qu'il connaissait M. Lavoie, mais Mme Bacon connaissait très bien M. Benoît, de National aussi, à l'époque du 10 000 000 $.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, devons-nous comprendre que le ministre s'engage à déposer d'ici demain toutes les facturations du mouvement ou de la compagnie National jusqu'au 15 juin pour le même contrat et jusqu'au moment où le contrat a été suspendu? Vous allez les déposer d'ici demain?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai dit que je déposerais tout, tout ce qu'on me donnerait. J'ai écrit à Hydro-Québec pour qu'on me donne tout, tout. Je peux même ajouter le détail de votre show de 700 000 $ à Charlesbourg, ici, et établir une comparaison pour voir qu'est-ce qui est plus dispendieux. Et je pourrais même déposer, si vous le désirez, l'ensemble du contrat de 10 000 000 $ et tous les liens. M. le Président, je suis convaincu, à ce moment-là, que le député, qui est président de la commission du budget et de l'administration, des comptes publics, pourra faire les comparaisons et peut-être constater que, tout compte fait, c'est des dépenses assez comparables. Mais c'est quand même trop dispendieux pour nous, c'est ce qu'on a dit.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre s'engage à déposer d'ici demain, puisque la fin de la session sera probablement demain, tous les restants de factures qui ne sont pas contenus là-dedans, jusqu'au 15 juin, moment de la suspension, et, deuxièmement, tant qu'à y être, à déposer aussi, malgré le fait que le ministre disait qu'il n'y avait pas de vidéo pour présentation, les vidéos que l'on retrouve à la page 24 de la facture FM98058: digitalisation de deux clips vidéo, compression de deux clips vidéo en AVI, page 24? Est-ce que vous pourriez les déposer demain, s'il vous plaît?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je vous ai dit tantôt que, oui, il y avait eu... J'ai déposé une lettre en cette Chambre en vous disant qu'il y avait eu du tournage du site, sur le site, précisément parce que les médias d'information n'ont pu aller filmer le site potentiel, et ça a été remis, ces vidéos-là ont été remis à Radio-Canada. Et vous devez croire Mme Marie-José Nadeau, qui est ancienne chef de cabinet de Mme Bacon, qui vous écrit cette note ce matin. Tâchez de lire au moins ce qu'on vous donne, parce qu'à vouloir... Je peux même la convoquer pour qu'elle vous dise ce qu'elle a écrit et vous la croirez peut-être plus que moi, mais c'est ça qu'elle a écrit.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que, oui ou non, le ministre déposera demain les documents que je lui ai demandés?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, je viens de dire que, s'il y a d'autres factures, qu'Hydro-Québec me les donne. Depuis le début, j'en ai déposé plus que vous en avez demandé. Vous n'aviez pas demandé la facturation du 19 décembre parce que la conférence de presse avait été cancellée; je l'ai déposée sans que vous me la demandiez. Je vous ai tout déposé les documents, à date. Je vous dis: L'information que j'ai, c'est qu'il n'y a pas d'autre facturation. Mais, au cas où il y en aurait l'ombre d'une, facture, et qu'elle serait de 0,39 $ ou de 39 $, je demanderai à Mme Nadeau, que vous connaissez bien, de me la fournir, et il me fera plaisir de vous la déposer.

(10 h 50)

Le Président: M. le député de Laurier-Dorion, en principale.


Connaissance par des membres du cabinet du premier ministre du coût de la présentation du projet de Churchill Falls

M. Sirros: En principale, M. le Président. Hier, le premier ministre n'a pas répondu à ma question sur ce qu'il aurait fait si un de ses ministres avait agi de la même façon dans le dossier de la gestion scandaleuse du dossier de Churchill Falls. Pourtant, on sait tous ce qui serait arrivé: il aurait été limogé. Point.

On sait aussi depuis hier, M. le Président, que son cabinet, au plus haut niveau – soit son conseiller principal, Jean-Roch Boivin, et son chef de cabinet – était présent de A à Z dans ce dossier. Les deux, d'ailleurs – le premier ministre nous l'a confirmé hier – sont présents à la réunion où le premier ministre décide qu'Hydro-Québec donnera le contrat de 1 400 000 $ à National et Luc Lavoie.

On sait aussi, M. le Président, que, le 5 décembre, National et Luc Lavoie soumettent une estimation révisée des coûts à Hydro-Québec. Mais on sait aussi que, le 7 décembre, il y a eu une rencontre directement entre National et le cabinet du premier ministre, c'est-à-dire minimalement avec Jean-Roch Boivin et Hubert Thibault. Il faut être naïf, et pas à peu près, pour ne pas savoir que Jean-Roch Boivin et son chef de cabinet, au premier ministre, étaient parfaitement au courant que le mégaspectacle qu'ils planifiaient pour le premier ministre allait coûter les yeux de la tête aux contribuables.

Comment le premier ministre, qui nous disait qu'avoir su il ne l'aurait pas fait, maintenant qu'il le sait, peut expliquer qu'il a encore à son emploi deux membres de son cabinet qui étaient au courant des coûts, Jean-Roch Boivin et Hubert Thibault, et qu'attend-il pour congédier, au nom de la décence pour les contribuables, ces conseillers qui ont failli à leur tâche?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, à titre de déformation des faits et d'affirmations gratuites, on n'a jamais vu pire. À aucun moment ni mon cabinet ni moi-même n'avons été informés des coûts. Même que, après la conférence de presse, des gens de mon cabinet ont essayé de savoir de Mme Nadeau, essayé de savoir d'Hydro les factures, les coûts, puis on ne les a pas eus avant le mois de juin, M. le Président. Donc, nous ne savions pas. Nous l'avons appris en même temps que tout le monde.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Sirros: Est-ce que, M. le Président, le premier ministre comprend que le commun des mortels, quand on organise un party, on demande combien ça va coûter? Personne à son cabinet, ni lui-même, ne s'est soucié 30 secondes de savoir combien ça aurait coûté, personne?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, rappelons les faits. Négociations d'une importance capitale avec Terre-Neuve; définition d'un projet de l'ordre de 10 000 000 000 $ à 11 000 000 000 $ qui va créer 60 000 emplois-année; réconciliation entre Terre-Neuve et le Québec; définition d'un projet, en plus, qui comporte des aspects environnementaux extrêmement complexes; tous les aspects des relations avec les autochtones; donc, nécessité, vers la fin des négociations, dont nous convenons tout le monde, avec toutes les parties intéressées, de faire de l'information puis d'expliquer le projet.

À ce moment-là, M. le Président, au cours d'une réunion de travail avec Hydro, lorsqu'il s'est agi de savoir qui ferait l'information, j'ai – puis je l'ai dit, puis je le répète – dit: Trouvons une bonne firme. Il y a évidemment National, qui est une firme reconnue, parmi les meilleures. Il y en a d'autres qui sont très bonnes, mais c'en est une qui compte parmi les meilleures. On a convenu que National, oui, ce serait bien. J'ai mentionné aussi: Puis il se trouve d'ailleurs que je connais quelqu'un qui est là, qui est M. Lavoie, qui est un très bon communicateur, et je pense qu'on aurait de très bons services dans le contexte délicat où nous sommes, parce qu'il faut que ce soit discret, et ainsi de suite, et très professionnel.

Les coûts, M. le Président, il n'en a pas été question. Le contrat était géré par Hydro. C'est Hydro qui a donné le contrat. Elle a des milliers de personnes à son emploi. Il y a des gens pour contrôler les coûts. Ce n'est pas au cabinet du premier ministre à aller contrôler les coûts.

Après la conférence de presse ratée, les gens se sont demandé... C'est venu jusqu'à moi. Entre autres, je pense que c'est Mme Lawrence qui m'a dit: Les journalistes trouvent que ça a dû coûter cher, cette affaire-là. Alors, à ce moment-là, on a essayé d'avoir les coûts. On a essayé d'avoir les coûts, puis on ne les a pas sus, M. le Président, les coûts, avant le 10 – enfin, à peu près le 10, là – et même que les documents qui ont été remis par l'Hydro au journaliste M. Thivierge à la suite de sa demande d'information ont été remis d'abord au journaliste puis ensuite à nous, M. le Président. C'est ça, la vérité. C'est ça, les faits, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Sirros: M. le Président, est-ce qu'il faut poser la question sept fois pour avoir la réponse? Est-ce que, pendant six mois...

Le Président: M. le député.

M. Sirros: M. le Président, est-ce que le premier ministre ne convient pas que, si, pendant six mois, personne dans son entourage, et encore moins lui-même, ne s'est préoccupé des coûts, c'est un exemple d'une incompétence patente dans ce dossier? Et, au niveau de ses conseillers, est-ce qu'il maintient sa confiance en eux parce que, justement, ils n'ont pas failli à leur tâche qui était justement de couvrir le patronage pour le premier ministre?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il s'affirme des choses extrêmement gratuites. Je veux réitérer ici toute la confiance que j'éprouve envers les gens qui m'entourent, qui sont de très bons serviteurs de l'État et qui ne méritent absolument pas le genre d'insultes démagogiques qu'on vient de leur assener.

Deuxièmement, je voudrais rappeler, M. le Président, que l'opposition aime bien frapper sur l'Hydro aussi. Mais l'Hydro d'aujourd'hui, ce n'est pas l'Hydro de leur temps, et l'Hydro d'aujourd'hui, c'est une Hydro qui est renouvelée, qui est en train de produire des fruits considérables grâce à la gestion rigoureuse qui est la sienne. Il y a, à la tête de l'Hydro, une direction remarquable, et je demanderais à l'opposition de ménager un peu ces grands serviteurs de l'État et de la population que sont aussi les dirigeants de l'Hydro.

Le Président: En principale, Mme la députée de Mégantic-Compton.


Campagne de financement du Parti québécois dans le comté de Mégantic-Compton

Mme Bélanger: Merci, M. le Président. J'aimerais vous lire l'extrait d'une lettre envoyée à l'un de mes commettants. Et vous comprendrez, M. le Président, en prenant connaissance de cette lettre, que je me dois de taire le nom de cette personne, car elle ne voudrait pas être pénalisée.

L'objet: campagne de financement. «Monsieur, dans le passé, nous avons pris connaissance de votre implication auprès du Parti libéral du Québec dans le cadre d'une campagne de financement. Vous êtes un hommes d'affaires averti et non un politicien et vous êtes pour le respect des règles démocratiques de financement. Bien qu'il semble que nous soyons adversaires idéologiques, le Parti québécois fait aujourd'hui appel à votre sens démocratique dans le cadre de sa campagne électorale. Non seulement en politique, mais aussi en...» Je m'excuse, de sa campagne de financement 1998.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bélanger: C'est en prévision de la campagne électorale. Alors: «Non seulement en politique, mais aussi en affaires, le sens démocratique s'applique et fait son oeuvre dans le but de développer le Québec. Votre entreprise a su profiter, il y a quelques années, d'une relance grâce à un investissement substantiel de la part du Fonds de solidarité de la FTQ. Avons-nous besoin de rappeler que les dirigeants du fonds qui ont permis cet investissement ne sont pas apparentés au Parti libéral, mais qu'ils ont plutôt des affinités avec le Parti québécois?»

Des voix: Oh!

Mme Bélanger: «Cela ne les a pas empêchés d'investir temps et argent pour faire progresser votre entreprise. C'est dans ce sens non partisan que nous faisons appel à vous dans le cadre de notre campagne de financement. Nous apprécierions que vous sachiez reconnaître les actions posées par des personnes qui, idéologiquement, avaient peu de liens avec vous, mais qui sont quand même venues en aide à votre entreprise.

(11 heures)

«Nous comptons sur votre soutien personnel et/ou sur celui de certains de vos dirigeants qui souhaiteraient apporter leur contribution au Parti québécois.

«Veuillez agréer, monsieur, l'expression de nos meilleurs sentiments.»

Et c'est signé Roger Garant, président du Parti québécois de Mégantic-Compton.

«P.S. Veuillez effectuer le ou les chèques à l'ordre du Parti québécois en incluant les coordonnées du donateur afin que nous puissions retourner les reçus pour fins d'impôt.»

M. le Président...

Le Président: Votre question.

Mme Bélanger: Je ne comprends pas, M. le Président, qu'on applaudisse du chantage...

Le Président: Alors, votre question, Mme la députée, rapidement.

Mme Bélanger: Ma question, M. le Président, s'adresse au premier ministre qui est aussi le président du Parti québécois: Lui qui a l'habitude de se décharger de ses responsabilités, va-t-il encore se défiler en faisant porter la responsabilité sur son président de Mégantic-Compton, M. Roger Garant?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous avons tous entendu la lecture de la lettre. Je pense que nous sommes tous en mesure de juger de sa pertinence. Je pense aussi que nous devons d'abord noter qu'il y a beaucoup de transparence, n'est-ce pas? C'est signé par quelqu'un qui s'identifie, qui envoie une lettre et qui se propose d'émettre les reçus qui sont requis par la loi si la contribution est versée. Ce n'est peut-être pas la lettre la plus habile, la plus persuasive qu'on puisse imaginer, mais c'est la lettre d'un militant à quelqu'un qui n'est pas de son parti pour essayer de le convaincre par des arguments qui sont corrects et qui... Il y a quelque chose, même...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on est loin d'une sollicitation de 3 000 $ pour prendre un petit-déjeuner, n'est-ce pas? C'est la lettre un peu naïve d'un militant qui fait état du fait qu'on n'est pas des gens partisans et qu'on demande à des gens de l'autre côté de ne pas l'être aussi et de nous aider, s'ils le veulent, M. le Président. Et c'est fait par écrit et publiquement.

Le Président: M. le député des Îles-de-la-Madeleine, en complémentaire.

M. Farrah: M. le Président, le premier ministre réalise-t-il qu'encore une fois il fuit ses responsabilités, qu'il est en train de banaliser un geste très grave qui va à l'encontre de nos moeurs de financement politique et que finalement il trahit l'héritage du père fondateur du Parti québécois, René Lévesque...

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: Oui. M. le Président, je voudrais remercier le député des Îles-de-la-Madeleine de reconnaître que c'est le fondateur de notre parti qui a effectivement mis de l'ordre dans le financement des partis politiques.

Des voix: Bravo!

M. Chevrette: M. le Président, j'ai écouté la lecture de la lettre et j'ai remarqué que, contrairement à ce qui arrivait avec nos amis d'en face, ce n'est pas a priori qu'on a demandé de l'argent à un individu, c'est a posteriori. Donc, ce n'est pas du chantage pour l'octroi, mais c'est bien pour dire: Avez-vous une certaine reconnaissance démocratique?

Je ne vous dis pas que c'est le plus habile...

Des voix: ...

Le Président: Bon. M. le ministre.

M. Chevrette: La lettre dit «je souhaiterais», il y a un souhait, ils ne sont pas obligés d'y répondre, d'abord. Deuxièmement, on demande les coordonnées pour un reçu; c'est exactement ce que la loi dit. Mais, au-delà de cela, M. le Président, au-delà d'un vocabulaire qui pourrait sembler naïf, comme disait le premier ministre, il y a au moins une chose: tout se fait de façon ouverte, transparente. Y a-t-il plus compromettant qu'une lettre? M. le Président, 1 000 $ pour aller manger une toast.

Des voix: ...

M. Chevrette: 3 000 $ pour aller manger une toast et pour avoir...

Le Président: Bien! M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, quand on regarde la bonne foi – en tout cas, je présume de la bonne foi jusqu'à preuve du contraire – et quand on compare ça à 3 000 $ la toast avec Jean Charest, il n'y a rien pour affoler, c'est une balloune gonflée, ça, complètement. M. le Président, nous allons faire notre devoir. Mais, nous, toutes les déclarations... On demande même des chèques personnels, c'est ça qu'on dit dans la lettre. Ça démontre que l'esprit est rentré, de ce côté-ci, l'esprit du respect de la loi. Quant à vos 3 000 $ la toast avec votre chef, là, vous n'avez pas de leçons à donner à personne, personne.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: Le premier ministre, M. le Président, est-il d'accord avec la teneur de la lettre à l'égard du Fonds de solidarité de la FTQ, qui dit clairement qu'il est apparenté au parti au pouvoir, puis que, s'il veut en avoir d'autres subventions, il est mieux de donner? Alors, il est en train de discréditer un organisme important au Québec, qui est le Fonds de solidarité, en politisant le Fonds de solidarité de la FTQ, M. le Président.

(11 h 10)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que nous allons tous reconnaître que ce n'est pas la lettre la plus délicate qui puisse s'envoyer. On va reconnaître ça. C'est évident. C'est une lettre qui est naïve, qui fait part de beaucoup de candeur politique. Je pense, en effet, qu'il n'était pas forcément opportun de rappeler un prêt obtenu du Fonds de solidarité et d'établir des similitudes politiques entre le Fonds... Il y a beaucoup de monde au Fonds, je suis convaincu qu'il y en a de tous les partis. C'est le Québec, ça.

Et je suis convaincu que quelqu'un qui lit la lettre et qui voit qu'elle est... bien sûr, comme ça le dit, c'est un pléonasme, qu'elle est écrite, qu'elle est signée par celui qui l'a préparée, qui s'identifie très clairement... On ne voit rien, et je ne pense pas qu'il y a rien d'illégal là-dedans. Qu'il puisse y avoir une indélicatesse, une malhabileté, on pourrait le penser. Je pense que c'est ce que l'opposition pense, si j'ai bien jugé, mais en exagérant et en tentant de faire mal paraître des gens qui sont d'honnêtes militants qui essaient de travailler pour le financement démocratique et bénévole de leur parti. Et, dans cette mesure, je pense qu'on devrait présumer de la bonne foi des gens, M. le Président.

Le Président: M. le député de Chomedey, en principale.


Mention du Fonds de solidarité dans la campagne de financement du Parti québécois dans le comté de Mégantic-Compton

M. Mulcair: En principale, oui, M. le Président. Le Fonds de solidarité existe en vertu d'une loi dûment votée par l'Assemblée nationale. L'argent en question a été accumulé grâce à des exemptions d'impôts. C'est de l'argent des payeurs de taxes, ça, parce qu'on donne des grosses exemptions d'impôts pour constituer ce fonds-là, en vertu de la loi.

M. le Président, le député de Joliette vient de dire que c'est bien correct parce qu'on demande de l'argent après... De l'argent, c'est nouveau, là, c'est une nouvelle terminologie, il appelle ça «une certaine reconnaissance démocratique», de l'argent qu'on essaie de sortir des gens qui ont eu un prêt du Fonds de solidarité.

M. le Président, le trafic d'influence est défini à l'article 121 du Code criminel. Le chantage est défini à l'article 346. Mardi de cette semaine, le Procureur général a dit, et je le cite textuellement: «C'est parfaitement normal que les procureurs sachent – les procureurs de la couronne – ce qui doit monter dans la hiérarchie pour que des décisions politiques soient prises.» Dixit notre Procureur général.

Dans le cas qui nous occupe, M. le Président, il est assez évident qu'il y a un message clair qui a été envoyé: Il faut que tu nous dises merci pour ce que tu as reçu et watche-toi la prochaine fois si tu ne paies pas.

M. le Président, lorsque ce joli paquet va sortir de l'ascenseur après avoir monté dans la hiérarchie du ministère de la Justice du Québec, c'est quoi la décision politique que le Procureur général va prendre avec ça?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Ménard: À ma souvenance, M. le Président, j'ai dit «décision de politique» et j'ai immédiatement suivi ces mots par un exemple qui est clair. Par exemple, quelle attitude devons-nous avoir avec les sentences avec sursis? Lesquelles devons-nous porter en appel ou lesquelles devons-nous garder telles que les juges les ont rendues? Il s'agit là de politique gouvernementale, pas de politique dans le sens de politique partisane. Et vous avez là un exemple de plus, M. le Président, de la façon dont l'opposition en général, mais ce député en particulier, travestit les mots que nous avons donnés.

Quant à la lettre qui est là, c'est peut-être parce que j'ai eu l'habitude, quand je me suis présenté en politique, de recevoir des contributions de gens de plusieurs partis... D'ailleurs, récemment encore, quelqu'un écrivait dans l'Hebdo de Laval : J'ai trop de respect pour Serge Ménard pour me présenter contre lui. Un des collaborateurs de Jean Charest.

Personnellement, je crois qu'il est normal que l'on fasse appel à l'ouverture d'esprit des gens dans un système qui est bipartite, à l'occasion. J'ai écouté attentivement la lettre qui a été lue et je ne vois rien d'autre dans cette lettre, personnellement, que quelqu'un qui cherche à établir que nous, de notre parti, on est assez ouverts, quand on est aux commandes, quand on a des décisions à prendre, pour les rendre selon la qualité des dossiers qui nous sont présentés, peu importe la couleur politique de celui qui bénéficiera des décisions que nous aurons à prendre. Et c'est comme ça que j'entendrai toujours gouverner, quant à moi, et que je l'ai toujours fait.

Mais, si justement vous êtes d'opinion différente, je crois qu'il y a au fond un officier parfaitement impartial qui pourrait en décider, et ce serait le Directeur général des élections. Pourquoi ne lui soumettez-vous pas cette lettre et ne lui demandez-vous pas son opinion?

Quant à moi, c'est vrai, je vous dis, mon opinion est déjà faite, après l'avoir lue. Je pense, comme le premier ministre, qu'elle est peut-être maladroite, peut-être naïve, et ça, c'est un défaut que j'ai déjà eu, alors... et que j'ai... pourquoi?

Des voix: ...

M. Ménard: Encore, encore!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Ha, ha, ha! Il paraît que c'est Bruno Fortier...

Des voix: ...

M. Ménard: Hein? Mais des fois, vous savez, mieux vaut la naïveté que la malhonnêteté.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, la période des questions et des réponses orales est terminée pour aujourd'hui. Un instant. La période des questions et des réponses orales est terminée. Mme la députée de Mégantic-Compton.


Document déposé

Mme Bélanger: ...pour le dépôt de la lettre, parce que peut-être que les membres du Parti québécois...

Le Président: Alors, il y a consentement, Mme la députée de Mégantic-Compton. Nous allons maintenant, si tout le monde veut retrouver un peu son calme, passer aux motions sans préavis. Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.


Motions sans préavis

Mme Harel: Alors, M. le Président, je dépose la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale réclame le redressement des paiements de transfert au titre du transfert social canadien pour les coûts accrus encourus à l'aide de dernier recours à la suite des modifications apportées au régime d'assurance-emploi en 1992, 1994 et 1996 et pour les coupures de près de 1 000 000 000 $ effectuées depuis 1994;

«Que toutes les sommes ainsi obtenues servent en totalité à améliorer le sort des personnes démunies.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Paradis: M. le Président, compte tenu que le texte de cette motion de Mme la ministre nous est parvenu quelques minutes avant la période de questions, plutôt que de refuser à ce moment-ci un consentement, est-ce qu'il pourrait y avoir entente avec le leader du gouvernement à l'effet que cette motion puisse être représentée demain matin?

Le Président: M. le leader.

M. Jolivet: M. le Président, à ce moment-ci, oui ou non, puis on pourra continuer la discussion s'il le faut. Est-ce que vous voulez, demain, de ça? Si vous voulez...

Une voix: ...

M. Jolivet: Non, non, ce n'est pas ça ma...

Le Président: Non, non, mais écoutez, un instant. D'abord, on demande le consentement; il y a une condition qui, je pense, est posée par le leader de l'opposition officielle de reprendre cette motion demain. Est-ce qu'il...

M. Jolivet: Je comprends et je suis d'accord. La question est: Est-ce que je peux avoir à ce moment-ci, après les discussions, le consentement de l'opposition pour la déposer demain et la discuter demain?

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, dans les circonstances, vous comprendrez que les décisions qui seront arrêtées demain seront arrêtées demain après que nous aurons pris connaissance complètement du texte, du libellé de la motion, et à ce moment-là nous donnerons une réponse demain.

Le Président: Un instant, là. Je comprends l'échange, mais je ne comprends pas finalement le résultat final. Est-ce qu'il y a, oui ou non, consentement pour la présentation aujourd'hui ou c'est demain?

Très bien. Alors, aux autres motions sans préavis, Mme la députée de Chapleau.

Mme Vaive: Merci, M. le Président. J'aimerais présenter la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale procède à des auditions publiques sur l'état du système de santé au Québec, notamment en ce qui concerne les conséquences des compressions budgétaires et de la réforme du ministre de la Santé sur l'accessibilité et la qualité des services offerts aux Québécois et Québécoises et qu'à cette fin elle entende les individus et organismes représentant les malades, les infirmiers et infirmières, les médecins, les administrateurs, le personnel de soutien, les professionnels de la santé, les bénévoles;

«Que le gouvernement convoque donc, à compter du 25 juin prochain, la commission des affaires sociales et demande aux individus et aux organismes de transmettre au Secrétariat des commissions leur mémoire au plus tard le lundi 22 juin prochain.»

(11 h 20)

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre? Il n'y a pas consentement, Mme la députée de Chapleau. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'ai quelques motions... Excuse! Je vais laisser le leader adjoint, d'abord...

Le Président: Une autre motion sans préavis... Madame, j'avais d'abord reconnu, du côté gouvernemental, le leader adjoint.


Voeux de succès à M. Gilles Normand, courriériste parlementaire pour La Presse , dans la poursuite de sa carrière à Montréal

M. Boulerice: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante.

«Je fais motion pour que l'Assemblée nationale souhaite beaucoup de succès à Gilles Normand, journaliste au quotidien La Presse , qui poursuivra sa carrière à Montréal, et le remercie pour tout le travail accompli pendant les 10 années passées dans l'enceinte du parlement.»

Je retrouve un citoyen dans ma circonscription.

Le Président: Très bien. Est-ce que je comprends qu'il y a consentement à la fois pour la présentation et que la motion est adoptée? Il y a des interventions? Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, vous voulez faire une intervention?


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, j'ai très souvent l'habitude de dire à la blague que, s'il n'y avait pas de politiciens, il n'y aurait pas de journalistes et que, s'il n'y avait pas de journalistes, il n'y aurait pas de politiciens, ceci, dans le sens qu'il s'établit toujours une espèce de complicité, de compagnonnage complice entre les gens de la presse et les parlementaires. Ils sont en mesure d'apprécier le travail, les longues heures des hommes et des femmes politiques parce que nous sommes également en mesure de voir la somme de travail, ces immenses heures que doivent passer les journalistes afin de couvrir l'activité parlementaire, ici, à notre Assemblée nationale.

Nous faisons très souvent partie, comme politiciens, de ce club très sélect des mal cités et nous leur attribuons la plupart du temps le défaut de nous avoir mal cités. Mais, au-delà ce ces petits incidents qui peuvent nous arriver, je crois que nous sommes en mesure d'apprécier ce travail énorme qui est fait par la presse parlementaire et, en l'occurrence, par M. Normand qui est ici depuis 10 ans. Rigueur, recherche et surtout une façon tellement agréable d'interpeller un ministre, un député pour obtenir un supplément d'information sur un sujet. Jamais je n'ai pu constater de sa part une attitude inutilement agressive. Au contraire, c'était toujours avec le sourire et la main tendue qu'il cherchait à connaître un peu plus l'opinion du ministre ou l'opinion du député sur un sujet qui se discutait ici, au Parlement.

Dix années passées à Québec, c'est quand même tout un bail. Et je sais que, dans ce plus ancien quotidien de langue française en Amérique, La Presse , il pourra, à Montréal, suivre l'activité intense – il retourne à la maison mère, si je peux employer l'expression – au moment où Montréal se lancera dans une campagne électorale municipale. Mais je suis persuadé que, au-delà de l'attraction qui sera faite par l'élection municipale, il pourra à l'occasion suivre un peu les actions de son député, dans sa circonscription, à Montréal, puisque – j'en suis très fier – M. Normand habite à Montréal, dans ma circonscription.

Cher Gilles, si vous me permettez de vous interpeller par votre prénom, merci pour cet exceptionnel travail et tous nos voeux, en étant assuré que, autant pour mes collègues que pour moi, nos chemins vont se recroiser. Vous serez peut-être invité à une célèbre émission de télévision qui prendra l'affiche bientôt. Je vous le souhaite ardemment. Merci. Ha, ha, ha!

Le Président: Sur la même motion, Mme la chef de l'opposition officielle.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, nous souscrivons d'emblée à la motion de notre collègue le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques visant à souligner le travail réalisé par le journaliste de La Presse , M. Gilles Normand. Avec nous sur la colline parlementaire depuis 1988, c'est-à-dire maintenant depuis 10 ans, nous avons pu côtoyer M. Normand. Journaliste rigoureux, aguerri, M. Normand oeuvre dans le journalisme depuis plus de 30 ans. Il a été journaliste au Nouvelliste de Trois-Rivières, où il a pu connaître et apprécier un ex-collègue, M. Gérald Godin. Et une des toutes premières affectations pour La Presse a été de couvrir l'Expo 67. Amateur de voile, il ne s'est pas fait prier trop longtemps pour couvrir Québec 1984. Depuis, il est passé du bateau à la course à pieds, au golf. Et, malgré son nouveau lieu de travail, Montréal, il ne négligera pas, j'en suis persuadée, son île d'Orléans où il pourra s'y retrouver à toutes les fins de semaine.

M. le Président, nous souhaitons bonne chance à M. Gilles Normand dans ses nouvelles fonctions. Et au plaisir de se revoir.


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que la motion est adoptée. Alors, vous me permettrez de saluer mon ancien collègue de La Presse et de lui souhaiter également bonne chance.

Alors, Mme la députée de La Pinière, maintenant, sur une autre motion sans préavis.

Mme Houda-Pepin: Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale procède à l'étude du document La démocratie parlementaire à l'ère de la mondialisation – Éléments d'une politique de relations parlementaires internationales de l'Assemblée nationale du Québec déposé hier par le président de l'Assemblée nationale pour que les parlementaires puissent en débattre avant que ledit document ne soit distribué à l'extérieur.»

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais mieux que la députée, compte tenu que ç'aurait pu être une question qui est apportée aux travaux de l'Assemblée, le fasse au moment où elle pourrait demander plutôt au comité directeur de sa commission d'étudier cette question-là et de faire une recommandation en conséquence.

Le Président: Alors, il n'y a pas consentement pour la présentation de cette motion. M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, je sollicite le consentement de l'Assemblée pour adopter une motion pour offrir nos sympathies aux victimes du terrible accident d'avion qui s'est produit ce matin à Mirabel. Est-ce qu'on a le consentement?

Le Président: Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?


Condoléances aux familles des victimes de l'accident d'avion à l'aéroport de Mirabel

M. Trudel: M. le Président, je veux simplement présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec offre ses sympathies aux familles des victimes de l'accident de ce matin, le 18 juin 1998, à Mirabel;

«Que l'Assemblée nationale demande aux autorités gouvernementales d'assurer leur pleine collaboration aux propriétaires de l'entreprise, la famille Pronovost de l'Abitibi-Témiscamingue, pour identifier les causes de ce drame et les correctifs à y apporter, s'il y a lieu.»


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Alors est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien. Alors, je pense qu'à ce moment-ci, compte tenu les circonstances, on pourrait prendre une minute de recueillement pour toutes les victimes.

(11 h 27 – 11 h 28)

Très bien, si vous voulez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.


Procéder à des consultations particulières sur le développement de la région Nord-du-Québec

M. Jolivet: Oui. J'ai quelques motions sans préavis pour des commissions qui vont avoir lieu à l'intersession, M. le Président. Alors, je vais demander votre patience.

Je sollicite d'abord le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de l'aménagement du territoire procède à des consultations particulières sur l'étude globale du développement de la région Nord-du-Québec à compter du 29 septembre 1998 et, à cette fin, entende les organismes et individus suivants: le Conseil régional Nord-du-Québec, le Conseil régional de la Radissonie, le Conseil régional Kativik, l'Administration régionale crie, la Société de développement de la Baie James, la municipalité de la Baie-James, Hydro-Québec, le Syndicat des employés d'Hydro-Québec pour le secteur des grands réservoirs, le comité de suivi sur la présence d'Hydro-Québec dans le Nord, la Société québécoise d'exploration minière, la commission scolaire de la Baie-James conjointement avec la commission scolaire Kativik et la commission scolaire crie, la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Radissonie conjointement avec la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Nunavik et le Conseil régional de la santé cri, la localité de Radisson, la ville de Chapais, la ville de Chibougamau, la ville Lebel-sur-Quévillon, la ville de Matagami, le Centre d'études collégiales de Chapais-Chibougamau, M. Bruno Jean, professeur de l'Université du Québec à Rimouski, M. Bernard Vachon, professeur de l'Université du Québec à Montréal, M. Marc-Urbain Proulx, professeur de l'Université du Québec à Chicoutimi, Fonds de solidarité régionale;

(11 h 30)

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 18 septembre 1998 et que le ministre responsable du Développement des régions et ministre responsable de la région Nord-du-Québec soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

La motion est donc adoptée, M. le Président. Je passerai à la deuxième.


Mise aux voix

Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement, je comprends que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Très bien.


Procéder à une consultation générale sur le projet de loi n° 451

M. Jolivet: La deuxième, c'est: Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission de la culture procède à une consultation générale et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 451, Loi modifiant la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, la Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé et d'autres dispositions législatives, à compter du 8 septembre 1998;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 28 août 1998;

«Que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation de la motion et pour l'adoption de la motion? Alors, la motion est adoptée.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 443

M. Jolivet: Et la dernière motion sans préavis, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission des institutions procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 443, Loi modifiant le Code de procédure civile en matière notariale et d'autres dispositions législatives, à compter du 22 septembre 1998 et, à cette fin, entende les organismes suivants: l'Association des hôpitaux, l'Association pour la défense des personnes et biens sous curatelle publique, le Barreau du Québec, la Chambre des notaires, le Collège des médecins, le Comité des personnes atteintes du VIH, le Comité provincial des malades, la Commission des droits de la personne, le Conseil des aînés, le Curateur public, la Fédération des familles et amis de la personne atteinte de maladie mentale, la Fédération de l'âge d'or du Québec, l'Office des professions, le Protecteur du citoyen et l'Ordre des psychologues;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 11 septembre 1998;

«Que le ministre de la Justice soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour la présentation? Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Très bien. Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'éducation entendra et procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 278, Loi concernant des programmes d'enseignement supérieur dispensés par les Prêtres de Saint-Sulpice de Montréal, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 448, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, alimentaires et de la pêche concernant la mise en marché de la fourrure des animaux sauvages, aujourd'hui, de 16 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des affaires sociales entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 268, Loi concernant le Pavillon du Parc Inc., aujourd'hui, de 15 heures à 16 heures à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine; et

Que la commission de l'aménagement du territoire entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi d'intérêt privé suivants: le projet de loi n° 277, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Bellechasse et la Municipalité régionale de comté des Etchemins; le projet de loi n° 279, Loi concernant la Ville de Val-d'Or; le projet de loi n° 275, Loi concernant la Ville de Bois-des-Filion; et finalement le projet de loi n° 271, Loi remplaçant la Charte de la Ville de Sainte-Foy, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau; et

Que la commission des finances publiques entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants: le projet de loi n° 221, Loi concernant la Société de fiducie TD et Compagnie Trust Central Guaranty; le projet de loi n° 247, Loi concernant la Société de fiducie Banque de Nouvelle-Écosse, Compagnie Montréal Trust du Canada et Compagnie Montréal Trust; le projet de loi n° 270, Loi concernant La Société de Fiducie Banque de Nouvelle-Écosse et Compagnie Trust National; le projet de loi n° 276, Loi autorisant Loeb inc. à continuer son existence en vertu de la Partie IA de la Loi sur les compagnies du Québec; et finalement le projet de loi n° 394, Loi concernant le régime de retraite pour certains employés de la Commission des écoles catholiques de Québec, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Très bien. Ça complète les avis touchant les travaux des commissions.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, M. le leader adjoint de l'opposition officielle.

M. Fournier: Oui, M. le Président, en rapport avec la discussion que nous avons eue hier concernant le document publié sous votre autorité, La démocratie parlementaire à l'ère de la mondialisation – Éléments d'une politique de relations parlementaires internationales , vous avez dit hier, à l'égard du questionnement que je faisais sur la ratification ou la discussion que les parlementaires peuvent avoir, et je cite: «À cet égard-là, je pourrais même vous soumettre des avis juridiques, si vous y tenez absolument.» Et je vous invitais à le faire, un peu plus loin, en vous disant: «Vous me dites que vous avez des opinions juridiques, j'aimerais les voir.» Ce matin, je reviens à la charge pour que j'aie une compréhension dans un cadre ouvert et dans un dialogue. J'aimerais pouvoir vous demander ces avis juridiques, pour une meilleure compréhension pour l'ensemble des parlementaires.

Le Président: Très bien. Alors, ce que je vais faire, c'est... Je vais vous faire parvenir les avis, mais, à la limite, je vais voir si même je ne les déposerai pas demain à l'Assemblée. Il s'agit des avis juridiques du directeur des affaires juridiques de l'Assemblée et du directeur en recherche en procédure parlementaire. Les deux, d'ailleurs, ont signé le document.

M. Fournier: Puisque nous avons eu tantôt une courte discussion, qui malheureusement s'est terminée avec un défaut de consentement sur la motion, comme il est possible que nous en discutions encore demain, d'un forum pour la discussion, serait-il possible de vous demander que cette opinion juridique puisse me parvenir à mon bureau aujourd'hui plutôt que d'attendre le dépôt demain, de manière à ce qu'on puisse avoir une meilleure préparation dans ce dialogue constructif que nous voulons mener?

Le Président: Oui, je n'ai pas d'objection, mais je voudrais vous dire, à cet égard, puisque tantôt je ne pouvais pas intervenir et qu'à ce moment-ci je peux le faire, qu'à mon avis il y a plusieurs façons à partir desquelles l'Assemblée pourrait se saisir, outre les familles parlementaires dont j'ai parlé hier, de toute façon, à qui j'ai déjà demandé de se saisir du document pour finalement alimenter la discussion. Par la suite, la commission de l'Assemblée nationale pourrait être un de ces forums. L'Assemblée pourrait même se transformer en commission plénière.

Quand, par exemple, à des moments donnés, il y a quelques années, le président de l'Assemblée défendait ses crédits, à ce moment-là, on avait un exercice public, et c'était l'occasion où le président pouvait finalement répondre à des questions et défendre sa politique administrative. De la même façon, moi, je n'aurais aucune objection à me prêter à cet exercice, de faire en sorte que l'Assemblée se transforme en commission plénière et que nous puissions faire un exercice qui permettrait au président aussi d'y participer, tout comme la commission de l'Assemblée nationale que je peux convoquer également. Et il n'y a rien qui empêche...

Mais je pense qu'en l'occurrence la commission des institutions, qui a des mandats sur les affaires internationales, a priori a des mandats concernant la politique gouvernementale. Alors, je pense que, néanmoins, la commission plénière ou la commission de l'Assemblée nationale pourraient être deux forums où on pourrait facilement étudier ce document, et j'espère qu'il va l'être effectivement.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je suis heureux qu'aujourd'hui nous partagions tous cet espoir que cette discussion puisse avoir lieu. Vous parlez de commissions. On pourra en débattre. Je tiens simplement à mentionner une autre dimension. Dans le document, on fait état de la projection internationale de l'ensemble des secteurs d'activité étatique. Et bien sûr que, si la commission des institutions a le mandat à l'égard des relations internationales, il y a de nos membres, notamment de l'opposition officielle, qui ne sont pas membres de cette commission et qui souhaiteraient peut-être pouvoir partager aussi cette discussion.

Donc, jusqu'ici, si vous me permettez, M. le Président, en tout respect, sans vouloir écarter aucun forum possible, j'aimerais qu'on se réserve simplement la possibilité aussi que l'Assemblée, que l'ensemble des parlementaires puissent avoir l'occasion... Je ne dis pas que tous le feront, je ne veux pas dire que tout le monde veut participer, mais qu'on offre la possibilité à chacun des parlementaires de pouvoir discuter et – si vous me permettez, je termine là-dessus – ce qui malheureusement n'a pas pu recevoir le consentement ce matin, demander aussi – parce que peut-être qu'il pourrait être bonifié, suite à cette discussion – si ce document pourrait ne pas être distribué tant que nous n'ayons pas ce dialogue.

(11 h 40)

Le Président: Je vais vous dire – juste un instant, M. le leader du gouvernement – deux choses. Si vous consultez votre leader parlementaire, je pense que le meilleur forum, si on veut que tous les membres puissent y participer et que le président puisse répondre aussi, parce que, finalement, si vous voulez bâillonner le président, on peut faire un débat où le président n'aura pas à intervenir et ne pourra pas intervenir, mais la commission plénière de l'Assemblée est, je pense, le forum tout désigné pour permettre à tous les députés de n'importe quelle commission et de n'importe quelle famille parlementaire de participer à l'exercice.

Quant à la deuxième question sur la distribution, j'en ai parlé il y a quelques instants avec la chef de l'opposition officielle, je lui ai indiqué, et je peux vous donner l'assurance que, quand le document sera communiqué, par exemple, à mes collègues présidents d'autres assemblées pour finalement... C'est un document d'une politique que j'avais la responsabilité d'établir. Je n'en ai pas honte, d'une part, et je ne pense pas que j'accepterais de me faire bâillonner quant à la capacité que j'ai et le privilège que je peux avoir de distribuer cette documentation-là un peu partout où je pense que ça doit être fait.

Mais je peux m'engager, comme je l'ai indiqué tantôt à la chef de l'opposition, que chaque fois ça sera accompagné d'une lettre qui explique le processus dans lequel on s'engage, qui ferait en sorte qu'il n'y a pas de confusion. D'ailleurs, le titre du document, encore une fois, je le rappelle, c'est Éléments d'une politique de relations parlementaires internationales de l'Assemblée nationale du Québec ; dans ce sens-là, ce n'est pas la politique de l'Assemblée nationale. Voilà.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Ni même celle du gouvernement. Je pense que vous devez... Là, c'est une discussion qui est amorcée à ce moment-ci sur les travaux de l'Assemblée. Aux travaux de l'Assemblée, à ma connaissance, vous avez le droit de distribuer, comme président, des choses, mais ça ne veut pas dire que l'Assemblée veuille s'en saisir. Si elle veut s'en saisir, il y a des moyens. Il y a celui de la commission des institutions qui pourra regarder avec son comité directeur comment s'en saisir, il y a la commission de l'Assemblée nationale qui pourrait le faire aussi. Alors, laissons plutôt la discussion se faire là où elle doit se faire.

Puis ce n'est pas parce que j'étais contre l'idée qui était lancée par le député. Je ne veux pas qu'à ce moment-ci ce soit une décision d'ici. Je veux qu'elle soit mieux étudiée et par d'autres moyens que ceux qu'on a actuellement. Donc, allons à la commission des institutions, allons à la commission de l'Assemblée nationale, regardons quel forum on pourrait avoir. Je donne un exemple. Si un mandat d'initiative est donné, on sait très bien qu'au bout de la course il peut y avoir un débat ici, en cette Assemblée. Mais on peut élargir le débat de consentement. Donc, à partir de ça, allons voir dans ces commissions qui existent comment on pourrait faire le débat qui est là.

Le Président: M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: M. le Président, rapidement, sur les points que vous avez soulevés. Je tiens à le préciser parce que, hier, j'ai relu le transcript et, je dois vous le dire en tout respect, je considère qu'il y a eu un peu de débordement. Je veux vous dire ceci. Il n'a jamais été question de la part du député de Châteauguay – je ne peux pas parler pour les autres – de bâillonner la présidence, jamais. J'ai relu le transcript et j'ai vu qu'à certains endroits on pouvait comprendre que peut-être les députés n'avaient pas vraiment leur mot à dire. Je comprends que maintenant tout est clair, il y a la possibilité pour les députés d'avoir un forum pour discuter de la chose.

Je dois vous dire qu'hier ce qui m'a désolé, je n'en ai pas fait de motion d'atteinte au privilège, c'est que jamais je n'ai parlé du fond du dossier. Et vous avez dit à quelque part que je ne m'étais peut-être jamais assez intéressé aux relations internationales. Je ne sais pas où vous avez pris ça, M. le Président, dans mes discours que j'ai pu faire et encore moins dans nos présentations. Au contraire, j'ai lu le document et j'interviens aujourd'hui pour que l'Assemblée puisse en discuter. Donc, je considère que, jusqu'à un certain point, il y a une certaine communion d'esprit entre la présidence et le député de Châteauguay pour dire que c'est important.

Mais ce que je voudrais que vous notiez, c'est que ce n'est pas nécessaire d'imputer des motifs aux gens qui se lèvent lorsqu'ils veulent partager, bonifier des pièces qui sont au dossier et qu'ils se disent: Peut-être qu'il y a lieu d'ajouter des choses qui pourraient l'améliorer. Je ne veux mettre personne sur la défensive quand je dis que, comme parlementaire, j'ai le droit de m'exprimer, et, si quelqu'un se sent sur la défensive, on a un problème, dans notre Parlement, M. le Président.

Le Président: Écoutez. Je pense que, si j'ai pu vous blesser, hier, vous prêter des motifs que vous n'aviez pas, je m'en excuse. De toute façon, je crois qu'à ce moment-ci les choses sont claires. Il y a des processus, il y a des mécanismes qui sont utilisables, et, encore une fois, je pense que le meilleur mécanisme, c'est la commission plénière. Cette commission plénière pourrait être préparée par le travail des familles parlementaires, parce qu'on a, quoi, une douzaine de groupes ou une quinzaine de groupes interparlementaires qui sont très actifs, et je pense qu'en tout respect pour ces collègues on devrait leur permettre de faire un exercice, d'abord, d'appropriation du document et de discussion. Et je pense que ceux-là, ces collègues-là, ainsi que les autres comme vous, par exemple, avec le mécanisme de la commission plénière pourraient participer.

Et l'avantage de ce forum, c'est que le président aussi peut y participer, c'est-à-dire que, comme c'est la politique que le président propose, bien, dans la mesure... Un peu comme quand on le faisait à l'époque pour les crédits. Un, de défendre les éléments que j'ai proposés puis, dans certains cas, écoutez, comme dans n'importe quelle discussion sur une politique, de recevoir aussi les commentaires, les suggestions, les bonifications pour faire en sorte que, finalement, c'est mon souhait, ça devienne non seulement les éléments d'une politique que le président de l'Assemblée nationale met sur la table et à partir desquels il entend continuer d'assumer sa responsabilité, mais, si ça devenait aussi la politique de l'Assemblée, alors, à ce moment-là, vous m'en verriez ravi. Alors, je suis content de voir le dénouement. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Dans le sens de vos propos, il y a peut-être deux façons de fonctionner, la première étant toujours un consensus parmi les députés de l'Assemblée nationale. Nous vous indiquons, dès ce moment-ci, que le forum qui a été discuté, une commission plénière comme telle, je pense que c'est le meilleur forum dans ce qui existe actuellement dans la réglementation de l'Assemblée nationale.

Maintenant, ça nécessite un consentement de tous les députés. S'il n'y avait pas ce consentement, M. le Président, à une certaine étape, je vous le soumets pour fin d'analyse par le Secrétariat ou même par la présidence, le règlement prévoit vos fonctions à l'article 2: «Outre les pouvoirs que la loi lui confère, le président – au huitième alinéa – exerce les autres pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions.» Comme vous avez déterminé qu'il s'agit de vos fonctions dans l'international, à ce moment-là, pour exercer ces pouvoirs-là, vous pourriez, d'office, convoquer une commission plénière, convoquer les parlementaires.

Je comprends un petit peu la position du leader du gouvernement. Elle est plus délicate que la mienne. Le ministre des Relations internationales est à ses côtés. Il n'a peut-être pas toute la marge de manoeuvre sur le plan de l'indépendance de l'institution que nous avons de ce côté-ci ou que vous avez comme président de l'Assemblée nationale. Mais, malgré ces contraintes, je l'inviterais à souscrire à ce voeu pour qu'il soit unanime que la commission plénière soit saisie du dossier.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'entends très bien l'appel du leader de l'opposition, mais je lui rappellerai que ma responsabilité, elle est au niveau ministériel. Ma responsabilité au niveau ministériel... Celle que vous me demandez dépasse énormément la mienne. Ça demande consultation. C'est pour ça que je dis qu'une discussion entre parlementaires sur la façon dont doivent être menées les relations interparlementaires au point de vue national et international de l'Assemblée nationale est bien différente de ma responsabilité que j'ai comme leader qui, lui, demande des commissions parlementaires ou autres forums possibles pour discuter de la politique gouvernementale sur les relations internationales.

Donc, dans ce contexte-là, M. le Président, je ne peux accéder à cette demande sans qu'il y ait eu d'abord une préparation de ce forum potentiel entre députés d'une position de l'Assemblée nationale, qui est autre chose que la position gouvernementale, dans un contexte soit de la commission des institutions ou soit de la commission de l'Assemblée nationale, où tous les présidents de commission se trouvent.

Le Président: Je crois, M. le leader, en vous écoutant, qu'il y a une confusion. Je voudrais la dissiper. Parce que, à deux reprises, vous venez d'intervenir, et vous avez à chaque fois mentionné les deux mécanismes. Ce n'est pas de celui-là qu'on parle. Autrement dit, ce n'est pas la commission de l'Assemblée nationale ni la commission des institutions, mais la commission plénière. La commission plénière, je crois que, effectivement, c'est le forum approprié, à ce moment-là, dans le fond. Effectivement, si je trouvais qu'il y avait impasse, je pourrais moi-même d'office convoquer la commission. De toute façon, quand, à une époque, on étudiait les crédits de l'Assemblée nationale, on utilisait ce mécanisme-là. Maintenant, finalement, on s'en remet au Bureau, qui a, de toute façon, la responsabilité, contrairement aux autres ministères, non seulement d'étudier, mais d'approuver la politique budgétaire de l'Assemblée. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Je sais très bien, M. le Président, que votre position, elle est aussi délicate que la mienne, et celle du leader de l'opposition est moins délicate que les nôtres. Mais je vous rappellerai qu'un des forums aussi qui peuvent être discutés de la façon dont on détermine les choses, c'est une rencontre entre les leaders et vous-même. Dans ce contexte-là, ça pourrait être un lieu où on pourrait discuter de quelle façon on pourrait arriver à une conclusion heureuse des demandes qui sont faites à ce moment-ci.

Le Président: Écoutez, voyant les signes d'acquiescement du leader de l'opposition officielle, je pense que, pour préparer peut-être ce mécanisme, on pourrait convenir de faire cette rencontre. Si possible, on pourrait essayer de voir si on peut le faire aujourd'hui ou demain avant d'ajourner nos travaux parlementaires.


Affaires du jour

Alors, nous allons maintenant passer, s'il n'y a pas d'autres renseignements sur les travaux de l'Assemblée, aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous allons prendre en considération l'article 25.

Le Président: L'article 25, avez-vous dit?

M. Jolivet: Oui.


Projet de loi n° 438


Adoption

Le Président: Alors, à cet article, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance. Est-ce qu'il y a des interventions?

(11 h 50)

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je dois d'abord faire... Compte tenu qu'il y aura des discussions à ce niveau-là, le ministre gardant son droit de réplique, le député de l'opposition faisant son intervention, je dois cependant faire l'annonce suivante. L'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée, puisqu'il y aura des amendements qui viendront obliger cette présentation, M. le Président.

Le Président: À ce moment-ci, je suis prêt à reconnaître une première intervention. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui.

Le Président: Très bien.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. On arrive à l'étape finale du projet de loi n° 438, la Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance. We are at the final stages of Bill 438, An Act respecting Héma-Québec and the haemovigilance committee.

M. le Président, Héma-Québec n'est pas nécessaire telle que proposée par ce gouvernement. Rien n'empêche le gouvernement du Québec de faire son programme pour le système sanguin dans le système canadien. Rien n'empêche le gouvernement du Québec de faire ce programme, M. le Président. Mais le gouvernement a décidé d'abord et avant tout de mettre les raisons politiques avant les raisons de santé. Héma-Québec, la loi n° 438, est une décision purement politique, nettement politique. Il n'y a aucune raison de créer une autre structure isolée, différente du reste du Canada. Il y a juste une seule raison: le ministre de la Santé et des Services sociaux est un prisonnier de son option pour la séparation. La seule et unique raison pour laquelle il recommande Héma-Québec, c'est parce qu'il veut dire que le Québec est déjà séparé. Ce n'est pas vrai, ça! C'est une raison purement politique derrière Héma-Québec.

M. le Président, pendant le premier débat, pendant la commission parlementaire sur Héma-Québec, nous n'avons jamais entendu, par la voix du ministre, la raison d'avoir Héma-Québec. Et c'est assez bizarre que lui-même ait créé Héma-Québec, le 25 mars cette année, avec les lettres patentes avant même de déposer le projet de loi. Ça démontre un manque de respect de ce Parlement et de tous les parlementaires de ce côté et de l'autre côté.

M. le Président, je ne sais pas la raison, je ne connais pas la raison pourquoi le ministre de la Santé et des Services sociaux n'a pas respecté une des recommandations fondamentales de la commission Krever, une des recommandations les plus fondamentales. Et laissez-moi citer ça: «Il est recommandé que le Canada se dote d'un système national pour la collecte et la distribution de constituants sanguins et de produits sanguins. Il faut éviter d'avoir une multitude de systèmes d'approvisionnement en sang locaux ou régionaux, et ce, pour plusieurs raisons. Un système national d'approvisionnement en sang permet l'application des normes nationales grâce auxquelles toutes les personnes – toutes les personnes – au Canada qui ont besoin de constituants sanguins ou des produits sanguins auront accès à des produits de qualité uniforme. Un système national nous permettra de disposer d'un stock de constituants sanguins et de produits sanguins pour tout le pays. De cette façon, les personnes de différentes régions du Canada bénéficieront d'un accès égal à ces constituants et produits.»

M. le Président, la commission Krever a recommandé un système, un système pour tout le Canada, pas un système québécois isolé, séparé. Ce séparatisme sanguin met notre système en péril. Et potentiellement, j'espère que non, mais potentiellement il met la santé des Québécois et Québécoises en danger, en péril. Le sang ne connaît pas les frontières. Les virus ne connaissent pas les frontières. Nous avons besoin d'un système qui va assurer partout au Canada que nous allons avoir accès à du sang de haute qualité.

M. le Président, je suis tellement déçu que le ministre ait décidé de mettre les raisons politiques avant toutes les autres raisons. Est-ce que mettre une autre structure, une fleur de lys sur cette structure est aussi important qu'il peut risquer une mauvaise communication ou qu'il est prêt à risquer que nous ayons des problèmes dans le futur? Je n'accepte pas ça, M. le Président. Les Québécoises et les Québécois n'accepteront pas ça.

Comme être humain, comme député, comme père – vous avez tous une famille – on doit s'assurer que notre système est bel et bien protégé. Mais qu'est-ce que le ministre est en train de faire? Non. Avec son option pour la séparation, son obsession pour la séparation, il va créer un autre système complètement différent. Est-ce que notre sang est aussi différent que le reste du Canada? Voyons donc, M. le Président! On doit s'assurer que nous allons tous, tous les Canadiens et les Canadiennes, avoir accès au meilleur système.

Mais le ministre va dire: Ne vous inquiétez pas, nous allons faire exactement la même chose que le reste du Canada. Il va dire fort probablement plus tard, M. le Président: Héma-Québec va utiliser le même logiciel. Il va dire qu'ils vont utiliser le même système de surveillance – parce qu'on doit faire une analyse veine à veine entre le donneur et le receveur de sang – que le reste du Canada, qu'ils vont utiliser les mêmes normes et standards. Il va dire: Ah! ne vous inquiétez pas sur les questions de prix. Parce que c'est tellement clair que l'économie d'échelle est plus efficace avec 30 000 000 $ qu'avec 7 000 000 $. Il dit: Ne vous inquiétez pas, nous allons utiliser une police d'achat en commun.

Avec ça, M. le Président, s'ils font exactement la même chose, nous n'avons pas besoin d'Héma-Québec. Et, si ce n'est pas exactement la vérité, ce que le ministre a dit, et qu'Héma-Québec est différent, c'est quoi, la différence? Est-ce que c'est mieux que l'autre système ou est-ce que c'est pire que l'autre système? Bien, d'une façon ou de l'autre, nous sommes les perdants, parce que le sang ne connaît pas les frontières, les virus ne connaissent pas les frontières.

M. le Président, on doit s'assurer que le Québec, s'il a d'autres idées, si le Québec a des idées qui sont potentiellement plus efficaces que le reste de la province, je voudrais qu'il soit à la table décisionnelle et pas à la remorque des autres. Parce que maintenant le ministre dit: Nous allons accepter aveuglément toutes les décisions du service canadien – qui peut prendre des bonnes décisions, mais... Pourquoi le Québec est en train d'abdiquer toute sa responsabilité dans ce domaine? Je pense que les députés, dans le coin, commencent à comprendre qu'il y a un danger potentiel avec Héma-Québec.

M. le Président, jusqu'à quel point ce gouvernement va aller pour avancer son option, son obsession de la séparation? Jusqu'à quel point? Nous avons entendu ce matin, M. le Président, avec les lettres, quel niveau de chantage, de harcèlement ils sont prêts à faire. Nous avons tous appris, pendant le référendum, que le gouvernement a caché des milliards de dollars, s'il avait gagné...

M. le Président, nous avons entendu cette semaine que ce gouvernement est capable de dépenser au moins 1 400 000 $ pour une conférence de presse pour faire avancer son obsession pour la séparation. Et maintenant on apprend aujourd'hui qu'il est capable de mettre toute la commission Krever de côté, ou au moins les recommandations fondamentales de la commission Krever de côté parce qu'il veut dire qu'ils sont séparés déjà.

(12 heures)

Nous sommes partie d'un système canadien. Notre sang n'est pas aussi différent que le reste du Canada. N'oubliez pas, M. le Président, que nous sommes ici, dans cette Chambre, en train de faire un débat sur le nouveau système sanguin parce que nous avons eu une tragédie humaine à un niveau que je ne voudrais jamais voir encore. Et nous sommes parmi les chanceux et les chanceuses qui n'ont pas été contaminés pendant les années précédentes. Nous sommes chanceux. Je pense qu'on connaît tous quelqu'un qui a été moins chanceux que nous. Avec ça, nous n'avons pas, M. le Président, le droit de faire les mêmes erreurs du passé, et c'est exactement ça que le gouvernement est en train de faire.

Le juge Krever a dit qu'on doit avoir... quatrième recommandation: «Que les fonctions principales du système national d'approvisionnement en sang soient exécutées par un seul exploitant et qu'elles ne soient pas imparties à d'autres.» Encore une fois, qu'est-ce que le gouvernement péquiste est en train de faire? Il est en train d'avancer son obsession pour la séparation maintenant dans notre système de santé, plus particulièrement dans notre système de sang. C'est inacceptable. Et, dans tout le projet de loi – et vous pouvez lire ça – on peut faire tout ce que le ministre veut faire dans le système sanguin, mais comme membre du service canadien. Mais, non, c'était trop important pour lui politiquement de mettre une fleur de lys sur Héma-Québec et créer une autre structure qui va potentiellement coûter peut-être 40 000 000 $ de plus – on verra sur les coûts, M. le Président. Il est prêt à faire encore des dédoublements.

Mais le message que tout le monde a reçu pendant le débat sur la commission Krever, c'est: Arrêtez de faire des dédoublements, nous avons besoin d'un système de communication simple, d'une façon d'agir vite. Il y a quelques pistes intéressantes dans le système proposé par le ministre après le rapport Gélineau. Il va discuter un peu plus tard – les 20 hôpitaux désignés – de la responsabilisation du réseau. C'est des pistes intéressantes, et on peut continuer à discuter de ça après le vote sur ce projet de loi, M. le Président. Mais rien n'empêche le Québec de faire ça comme membre du service canadien. Mais il ne veut pas montrer qu'il peut être membre avec ses partenaires canadiens, incluant le dossier d'indemnisation des victimes de l'hépatite C, où, à la toute dernière minute, il a trouvé de la compassion. N'oubliez pas, c'est la semaine où le gouvernement, une journée avant, ils ont annoncé le nouveau programme, il a dit: Pas un sou de plus pour les personnes contaminées, pas un sou de plus pour les personnes avant 1986 et après 1990. Pas un sou.

Le même gouvernement qui dépense 1 400 000 $ pour une conférence de presse, le même gouvernement qui dépense 11 000 000 $ pour les campagnes de publicité du ministre de la Santé et des Services sociaux, le même gouvernement qui donne aux banques des crédits d'impôt de 8 000 000 $ ou 10 000 000 $, le même gouvernement qui donne des subventions pour l'hippodrome et les chevaux, 60 000 000 $, il n'a pas eu un sou de plus pour les victimes. Tout de suite, en 24 heures, un autre virage, une autre volte-face, le premier ministre a dit: Non, viens ici, maintenant, on doit montrer que nous avons compris le message. Et finalement ils ont trouvé, en 24 heures, supposé, un autre 75 000 000 $; 150 000 000 $ pour les victimes du sang contaminé. Mais à ce temps-là, il dit: Nous n'allons pas participé comme membre officiel du comité qui va travailler sur le sang contaminé, le Québec a décidé d'être un observateur. M. le Président, on mérite mieux que ça.

Si nous avons de bonnes idées – et nous avons de bonnes idées chez les personnes qui mènent le système sanguin – je voudrais qu'elles soient là, à la table décisionnelle, pas comme observateurs et observatrices. C'est inacceptable, ce que le gouvernement est en train de proposer. Et le dernier jour avant la fin de la session, qu'est-ce que le gouvernement a fait pour les victimes du sang contaminé? Est-ce que j'ai entendu une annonce aujourd'hui, une déclaration ministérielle? Non, il se cache en arrière des autres. Il n'a pas mis d'argent sur la table. L'Ontario a dit: D'une façon ou de l'autre, nous allons avancer le programme d'indemnisation pour les victimes du sang contaminé. Pas le Québec, il veut se cacher en arrière des autres. M. le Président. C'est inacceptable comme approche.

Pendant le débat en commission parlementaire sur la mission, la raison d'être d'Héma-Québec, j'ai essayé d'ajouter un amendement, j'ai essayé d'ajouter les mots «de qualité»: Héma-Québec a pour mission d'assurer aux établissements de santé et de services sociaux du Québec, à la population, un approvisionnement suffisant en sang et en produits et constituants sanguins de qualité. C'était mon amendement: «de qualité». Je présume qu'on ne veut pas juste avoir l'accès au sang, on veut avoir accès à un sang de qualité. Vous autres – ils ont voté contre – vous avez voté contre pour des raisons techniques, juridiques. Vous pouvez sortir les galées.

Mais, M. le Président, c'est une chose de dire, puis de bonne foi: Je voudrais faire le meilleur possible, je voudrais assurer que le sang est de haute qualité. Vous avez voté contre ça dans la description du premier alinéa de la mission d'Héma-Québec, pour des raisons juridiques, de Code civil, etc. Vous pouvez lire ce que les avocats ont dit. Mais les citoyens et citoyennes veulent avoir un système qui garantit la qualité du sang. Vous avez voté contre, contre la notion d'assurer que la première description de la mission, la raison d'être d'Héma-Québec... la notion de qualité.

M. le Président, comment les résidents du Québec peuvent-ils avoir confiance en ce gouvernement? C'est assez clair, M. le Président, c'est un gros problème de crédibilité. C'est le ministre qui, pour des raisons purement politiques, a essayé de déménager la greffe pulmonaire Montréal-Québec. Finalement, tout le monde a dit que ce n'était pas logique, que c'était dangereux. C'est le même ministre qui a coupé aveuglément dans le système de santé, et maintenant nous avons une pénurie de professionnels partout et il y a des listes d'attente partout. C'est le même ministre qui a plié devant le lobby des compagnies de tabac, et il n'a pas assuré que tout le projet de loi antitabac ait avancé. Avec ça, comment quelqu'un peut-il avoir confiance en ce ministre quand il parle du système sanguin?

M. le Président, c'est complètement inacceptable, Héma-Québec. Je répète et je vais continuer de répéter: Il peut faire exactement ce qu'il veut faire, mais être membre des Services canadiens. Parce que qu'est-ce qui se passe, M. le Président, quand il y a une pénurie de sang? Qu'est-ce qui va se passer? Mais il va dire cet après-midi: Il y a une entente signée déjà d'un échange. Oui, effectivement, s'il y a une pénurie de sang au Québec et qu'il existe un surplus en Ontario, il peut faire un échange, mais qu'est-ce qui se passe s'il y a une pénurie de sang, un certain produit, partout au Canada? Est-ce que le reste du Canada va donner ce produit à ses membres associés ou à ses membres? Je pense que c'est assez évident: il doit partager ça avec ses membres.

Avec ça, on tourne en rond, comme logique, M. le Président. Il va dire: C'est le même, nous allons utiliser les mêmes standards, la même surveillance, les mêmes logiciels, le même système d'achat en commun. Si ça va être le même, pourquoi avons-nous besoin d'Héma-Québec? Et, si ce n'est pas le même, c'est quoi la différence? Et qui va avoir le meilleur? Parce que c'est inacceptable d'avoir une différence. Si nous avons compris une chose à cause de cette tragédie, on doit s'assurer que nous allons avoir un système pancanadien de haute qualité.

M. le Président, il va dire: Tout va bien, comme d'habitude. Mais c'était nécessaire d'ajouter dans la loi, article 37, que, s'il y a un certain produit qui cause des risques de santé, Héma-Québec peut retirer ça du marché. Il n'y a pas eu une notion dans le projet de loi d'une obligation de communiquer ce risque avec le reste du Canada. Je présume, c'est de bonne foi que les personnes en charge de ça vont le faire, mais on doit avoir une obligation. Un des problèmes du passé, c'est que la communication n'a pas marché.

Avec ça, c'est le Parti libéral qui essaie d'ajouter la notion de qualité dans la raison d'être d'Héma-Québec et c'est le Parti libéral qui a ajouté la notion d'obligation de communication des produits contaminés avec le reste... Avec ça, M. le Président, je n'ai pas confiance, je n'ai pas du tout confiance que ce ministre est en train de créer quelque chose de bon pour les Québécois.

(12 h 10)

M. le Président, dans le projet de loi, vous ne trouvez pas les grand principes que nous avons demandés, de s'assurer que le sang est une ressource fondamentale, de s'assurer que ça reste comme un don gratuit. Vous n'avez pas, dans le projet de loi, M. le Président, les concepts d'autosuffisance. De plus en plus, on doit s'assurer que le Québec et le reste du Canada ont un système qui peut assurer que nous n'allons jamais avoir une pénurie de sang.

M. le Président, on ne trouve pas, non plus, les notions de don autologue. De plus en plus, les personnes veulent donner du sang à eux-mêmes. On ne trouve pas nécessairement, aussi, un échéancier qui est tellement raisonnable. Vous savez, M. le Président, qu'il veut mettre tout ça en place pour le 1er septembre, cette année. Est-ce qu'il va avoir tous les permis, tous les agréments, toutes les licences d'Ottawa et de la FDA, à ce moment-là? J'ai des forts doutes, M. le Président. Sinon, est-ce que nous allons créer un système pas nécessairement sous le contrôle des propres instances? J'ai beaucoup de questions sur ça.

M. le Président, on peut aussi trouver une série d'amendements en toute dernière minute qui donnent le pouvoir d'exproprier la Croix-Rouge. Tout le monde a demandé plus de transparence et de collaboration. Mais ils ont caché tout ça. Et, à la toute dernière minute, ils ont déposé à 23 h 30, vendredi soir, une série d'amendements qui disent qu'il peut exproprier la Croix-Rouge. C'est assez intéressant que la directrice générale d'Héma-Québec soit l'ancienne directrice de la Croix-Rouge Québec. Avec ça, elle va s'exproprier elle-même. Qui va protéger qui? Une fois que le gouvernement aura saisi tous les biens de la Croix-Rouge, s'il y a un recours collectif, les victimes, après ça, elles vont réclamer quoi? M. le Président, j'ai beaucoup de questions.

C'est une autre structure. Le ministre a déposé beaucoup de projets de loi maintenant pour créer une structure. Bientôt, nous allons continuer de bâtir l'Institut national de santé publique. Est-ce que nous avons besoin de créer toujours une autre structure? Sa réponse, toujours, à un problème: créer un comité ou une structure. Il ne répond pas à des vrais problèmes.

M. le Président, il y a le Comité d'hémovigilance qui, j'espère, ne sera pas sous la tutelle du ministre. J'espère qu'il va avoir la flexibilité et l'autonomie de questionner le ministre. J'espère qu'il pourra agir d'une façon efficace. M. le Président, dans tout ce débat, je n'ai pas compris la raison d'Héma-Québec.

From day one, Mr. Speaker, I've been trying to get this Government understand that the principal recommendation of the Krever Commission is to create a seamless Pan-Canadian blood system. If they would bother to read the report that took millions of dollars and years to develop, they would understand that Judge Krever said: «It is recommended that Canada have a national system for the collection and delivery of blood components and blood products.» Point. Not two systems!

Don't practice your politics of separation in the blood system. We don't need to have politics in the blood system. But the Minister, for his politics, thinks it's too important to put a «fleur de lys» on his new box, to say: Am I proud, I've created something. We're that different! Is our blood that different from the rest of Canada? Are we going to take risks that we'll have communication problems between the Canadian Blood Service and Héma-Québec? That's a risk I don't want to take. It's a risk that we shouldn't take. We do not have the right to make the same mistakes we did in the past. We're here today to debate a new blood system because there was a terrible tragedy. What's the Government doing here? We're going to create a new structure, and, for communications, we're going to put an observer on each other's boards. I don't want an observer. I want a full member.

Les absents ont toujours tort. Si nous ne sommes pas à la table décisionnelle, comment peut-on influencer les décisions? Est-ce que nous serons toujours à la remorque des autres? M. le Président, ce n'est pas une bonne façon de bâtir un système qui doit répondre aux besoins de la population population québécoise.

Pourquoi n'avez-vous pas plus entendu les oppositions contre le projet de loi? J'ai eu la chance de parler avec plusieurs professionnels. Ils disent: Je suis contre, mais j'ai peur de sortir. Si je sors, ils vont harceler mon institution, ils vont peut-être couper des subventions, ils vont faire du chantage – comme nous avons vu dans la lettre du comté de Mégantic aujourd'hui – ils vont faire du harcèlement. C'est dangereux. Quand j'ai entendu ça, des professionnels: Je ne peux pas publiquement parler contre quelque chose parce que le gouvernement péquiste va me causer des problèmes si je fais ça... C'est inquiétant.

Le ministre de la Santé fédéral a écrit au ministre provincial. Allan Rock, le ministre de la Santé, écrit qu'il y a des grandes questions sur la sécurité et la qualité d'Héma-Québec. Est-ce que toutes ces questions sont réglées? Je ne sais pas, M. le Président, parce que d'abord et avant tout on doit créer un système sécure, de haute qualité.

I'm trying to convince this Government, Mr. Speaker, that they're on a political roll they shouldn't be on. You do not risk people's health care, you do not risk the blood system to play politics. This is clearly a political decision. Mr. Speaker, this will cost more money. You know and I know: you create a new system, it's going to cost money. Will they be able to be as effective? I don't know. But what I want to do... I want it as effective as the rest of the country.

Because I have a serious problem, here. If, in fact, Québec has some good ideas, some better ideas than the Canadian Blood Service, I want those ideas established in the Canadian Blood Service. Because I travel, you travel, your family travels; you can get blood anywhere. And it's not just giving a pint of blood. Blood is put together, fused, mixed. Many times, one blood gift goes to four people. So we have to make sure... It is simple, and I don't know why the Government is taking such a great risk in this area. It's so simple. We need the exact same controls and qualities as anywhere else. But that's not what this Government is doing. Except, later on, it's going to say: It is the same. Well, if it is the same, why are we creating Héma-Québec? We go round and round on this, Mr. Speaker.

M. le Président, en terminant, je voudrais vous assurer que je serai vigilant si le projet de loi est adopté. J'espère que finalement le gouvernement va comprendre que c'est un mauvais projet de loi. Mais je serai certainement vigilant pour m'assurer, aussitôt que le premier rapport d'Héma-Québec sera déposé à l'Assemblée nationale que nous allons avoir un débat. Nous allons avoir un débat sur ça. M. le Président, je sonne une cloche, à vous et à tous les autres parlementaires. Ce gouvernement est en train de créer un précédent tellement dangereux.

Il y a deux projets de loi de ce ministre, cette session, qui créent deux institutions différentes, mais deux institutions qu'ils ont créées avant le dépôt du projet de loi. Héma-Québec a été créé dans les lettres patentes à la fin de mars, déjà légalement créé, avant même qu'ils aient déposé le projet de loi. L'Institut national de santé publique, ils ont annoncé ça dans le mois de novembre. Avec ça, M. le Président, j'ai déjà questionné sur des questions de violation de droit et privilège. Je trouve ça inacceptable, M. le Président, qu'on arrive devant cette Chambre avec des faits accomplis comme ça. Avec les tragédies du passé, le Québec mérite un débat de société et un débat beaucoup plus large, un débat qui est ouvert et où les personnes qui veulent faire des interventions peuvent faire des interventions et questionner ce gouvernement d'une façon protégée où elles n'ont pas besoin d'avoir peur du chantage et des menaces de ce gouvernement.

(12 h 20)

M. le Président, la Société canadienne de l'hémophilie, qui représentante beaucoup de receveurs des dons de sang, a questionné fortement, sérieusement ce projet de loi. Ils disent – ce n'est pas moi, ce n'est pas le Parti libéral: Ce n'est pas logique. Ils questionnent la sécurité d'Héma-Québec. Ils mettent en doute la capacité d'Héma-Québec de fournir tout le sang. M. le Président, il y a beaucoup de personnes à questionner ce projet de loi. Je peux citer beaucoup d'articles, mais aujourd'hui je n'ai pas assez de temps. À quelle limite est-ce que ce gouvernement va aller pour avancer sa cause de séparation? Nous avons vu qu'il était capable de cacher des milliards de dollars: il dépense 1 400 000 $ pour une conférence de presse; il dépense 11 000 000 $ pour l'image du ministre. Et aujourd'hui il dit non, il veut créer Héma-Québec, malgré que tous les experts, que tout le monde, pas juste au Canada, a dit: Nous avons besoin d'un système pancanadien.

In English, we talk about a «seamless system» that ensures that there will be flow of information and control. What happens, Mr. Speaker, if there's a contaminated blood product on the market? Who rings the alarm? Who takes charge? In Bill 438, they hadn't even thought of a legal obligation to inform the rest of the country. They probably would have done it, but there's no legal obligation to immediately inform the rest of the country. That, to me, I think, shows a great weakness in what Héma-Québec stands for and what the Government has proposed.

M. le Président, j'espère que je peux convaincre ce gouvernement que rien n'empêche le gouvernement du Québec de faire le programme tel qu'il veut le proposer, avec des hôpitaux désignés, un comité d'hémovigilance, etc., mais d'être aussi membre du Service canadien. Il n'a pas besoin de créer une autre structure, une autre boîte, une autre administration qui va coûter plus cher. Le Québec n'est pas séparé, ne se séparera pas non plus. Nous avons besoin d'un système unifié. Nous avons besoin d'un système qui ait comme mission, comme raison d'être d'assurer que la population ait accès à du sang, à des produits sanguins de qualité. Je ne veux pas avoir une réponse du ministre qui dit: Pour des raisons légales, on ne peut pas mettre ça dans le premier alinéa de la raison d'être d'Héma-Québec. Je voudrais qu'on dise qu'effectivement nous sommes en train de créer un système qui va garantir du sang de haute qualité.

M. le Président, je voudrais que le Québec soit un plein membre, «full participant», dans le Service canadien. Je ne veux pas avoir des dédoublements. Je trouve ça inacceptable que nous ayons devant nous un gouvernement qui va mettre ses priorités politiques avant les priorités de santé. Je pense qu'Héma-Québec ne respecte pas les victimes du sang contaminé, leur situation, parce que, comme je l'ai dit, nous n'avons pas le droit de faire les mêmes erreurs du passé. Comme législateurs, on doit mettre toute la politique de côté dans cette question, on doit s'assurer que... Peut-être que ça va faire mal au gouvernement péquiste de dire qu'ils sont capables de travailler avec le reste du Canada, «but just too bad». Pour le bien-être de la population québécoise et de tous les autres citoyens pancanadiens, on doit s'assurer que nous avons un système pancanadien.

Quelle partie de cette recommandation est-ce que le gouvernement ne comprend pas? «Il est recommandé que le Canada se dote d'un système national pour la collecte et la distribution des constituants sanguins et des produits sanguins.» «It is recommended that Canada have a national system for the collection and delivery of blood components and blood products.» C'est assez clair. Il n'est pas dit d'en créer deux, il n'est pas dit de jouer à la politique sur le dos des populations québécoises, il n'est pas dit de mettre la population à risque, il n'est pas dit de mettre la santé à risque.

M. le Président, je suis contre le projet de loi. Je pense qu'une fois que la population comprendra mieux ce que ce gouvernement est en train de faire, ils vont être tous contre. Notre sang n'est pas aussi différent que ça. On peut être fiers de notre système de santé. Si ça marche et si nous avons les bonnes idées, ce n'est pas juste mon choix de passer ce message au reste du Canada, c'est mon obligation, ma responsabilité. Si nous avons un système qui est plus efficace pour contrôler la qualité du sang, c'est notre obligation d'assurer le reste du Canada de faire ça. Parce que je pense que vous comprenez, M. le Président, que, si je donne le sang à Toronto ou si je reçois le sang de Toronto, ou Halifax, ou Vancouver, je voudrais m'assurer que c'est la même qualité. C'est simple, logique. Et vice versa. Si on ne peut pas regarder la population dans les yeux et dire: Oui, aucun doute, il y a une garantie qu'on utilise le même système, je pense qu'on fait une grave erreur. Si nous sommes capables de dire ça aujourd'hui, nous n'avons pas besoin d'Héma-Québec.

M. le Président, je vois qu'effectivement, l'autre côté, ils commencent à comprendre que ça ne marche pas. Ils ont compris que ce n'est pas une bonne façon de bâtir le système. J'espère que le ministre va dire bientôt qu'effectivement Héma-Québec, ce n'est pas le modèle qu'il veut privilégier, qu'il va accepter qu'il doit retourner à la table, parce que, comme je l'ai dit, il peut avancer la cause d'un nouveau système sanguin au Québec, mais, en même temps, il peut être membre du système canadien. J'espère que maintenant ce gouvernement comprend qu'il est sur une fausse route. C'est dangereux, ce qu'il est en train de faire. Ce dédoublement, c'est des raisons politiques et ce n'est pas nécessaire, et je vais voter contre. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Je voudrais à mon tour joindre ma voix à celle de mon collègue le député de Nelligan, porte-parole au dossier. J'ai eu l'occasion d'intervenir sur ce projet de loi, le projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec et sur le Comité d'hémovigilance, à l'adoption de principe. Si je reviens à la charge aujourd'hui, c'est parce que j'ai encore bon espoir que le ministre va pouvoir peut-être écouter les arguments qu'on lui apporte et les considérer dans l'intérêt des citoyens.

Un projet de loi, M. le Président, doit d'abord et avant tout répondre aux besoins des citoyens. Or, lorsqu'on le lit, ce projet de loi, on constate que c'est une structure de plus et rien d'autre. Que dit le projet de loi lorsqu'on regarde les notes explicatives? Héma-Québec a pour mission d'assurer notamment à la population un approvisionnement en sang et en produits et constituants sanguins. La question qui se pose est de savoir si, ici, au Québec, on a besoin d'une structure de plus pour répondre à cette mission-là.

Également, dans le projet de loi, on note qu'il prévoit qu'«Héma-Québec devra financer ses activités, particulièrement à l'aide des sommes qui lui seront payées par les établissements de santé et de services sociaux pour la fourniture de ses produits. Le projet de loi crée, de plus, le Comité d'hémovigilance, dont la principale fonction est de donner au ministre de la Santé et des Services sociaux des avis sur l'état des risques reliés à l'utilisation du sang, des produits et des constituants sanguins. Ce Comité sera composé de personnes nommées par le ministre.»

(12 h 30)

Rappelons, M. le Président, que ce projet de loi a été présenté le 12 mai dernier dans l'improvisation la plus totale, parce qu'on se rappellera qu'il y avait aussi un débat plus général sur le scandale du sang. Je voudrais saisir cette occasion pour rendre hommage à M. Johnson, Daniel Johnson, l'ancien chef du Parti libéral du Québec et chef de l'opposition officielle, qui s'est tenu debout dans cette Assemblée et qui a défendu les victimes de l'hépatite C et qui a pu leur donner une voix afin que ces victimes, et toutes les victimes sans exception, soient considérées et indemnisées. M. le Président, l'intervention que Daniel Johnson a faite dans cette Assemblée a eu un écho marquant dans les autres Législatures et cela a amené même le gouvernement fédéral à reconsidérer la position qu'il avait adoptée initialement.

Donc, on a vu tout un débat sur le scandale du sang contaminé qui a amené le juge Krever à déposer son rapport avec les recommandations qu'on connaît. Et on s'attendait, suite au dépôt de ce rapport, M. le Président, à ce que le gouvernement et le ministre de la Santé en particulier puissent proposer une solution qui s'inscrirait dans le cadre des recommandations de ce rapport. Or, M. le Président, ils nous amènent une autre structure séparée, contrairement aux recommandations du rapport Krever.

M. le Président, le sang des Québécois n'est pas différent du sang des autres Canadiens. Et la cohérence même nous dicte qu'il était plus raisonnable, plus justifiable que l'on puisse s'inscrire dans le cadre de l'Agence nationale du sang plutôt que de faire bande à part, comme le ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec a décidé de le faire. Il a décidé de créer Héma-Québec au lieu de s'inscrire dans la démarche de partenariat dans laquelle participent le gouvernement fédéral et les neuf autres provinces.

Donc, on connaît et on peut s'interroger sur les motivations réelles qui ont amené le ministre de la Santé à nous séparer, en quelque sorte, par ce projet de loi et par cette structure de l'ensemble des autres Canadiens quant à l'approvisionnement du sang et des produits sanguins.

L'opposition officielle ainsi que les représentants des personnes atteintes d'hémophilie ont amplement exprimé leurs critiques, leurs réserves, leurs questionnements pour faire entendre raison au ministre et lui dire que c'est extrêmement dangereux de se lancer sur la piste qu'il nous propose par ce projet de loi, d'autant plus qu'on est face à un ministre qui est en rupture de confiance par rapport à la population, un ministre de la Santé qui a fait la démonstration qu'il était insensible aux besoins des citoyens, un ministre qui a effectué des coupures de l'ordre de 2 200 000 000 $ depuis que le PQ est au pouvoir. Rien que cette année, M. le Président, les coupures sont de l'ordre de 158 000 000 $ dans le système de santé et services sociaux.

Bien entendu, face à la pression générale qui s'est effectuée dans la population, dans les organismes, chez les médecins, chez les infirmières et partout dans la population, on a assisté à une opération de dernière minute où le gouvernement a décidé d'injecter des fonds. Par exemple, cette année, on aura une injection de 110 000 000 $, mais le ministre oublie qu'il y a eu une coupure de 158 000 000 $. Donc, il y a un manque à gagner, pour cette année, de 48 000 000 $.

Ça, c'est la réalité. Et le ministre de la Santé et des Services sociaux, malgré toutes les louanges que peuvent lui adresser et le premier ministre et le président du Conseil du trésor, il a présidé au saccage de notre système de santé et de services sociaux et il est loin d'être le meilleur ministre de la Santé que le Québec ait connu, comme le dit le premier ministre.

Alors, le projet de loi n° 438, loi sur Héma-Québec, c'est encore des dépenses de plus, des dépenses supplémentaires qui vont aller chercher dans les 40 000 000 $ pour les trois prochaines années. Une telle structure va à l'encontre des recommandations du rapport Krever.

Et permettez-moi de citer, M. le Président, le rapport Krever qui dit: «Il faut éviter d'avoir une multitude de systèmes d'approvisionnement en sang locaux ou régionaux, et ce, pour plusieurs raisons. Un système national d'approvisionnement en sang permet l'application des normes nationales grâce auxquelles toutes les personnes au Canada qui ont besoin de constituants sanguins ou de produits sanguins auront accès à des produits de qualité uniforme. Le système national nous permettra de disposer d'un stock de constituants sanguins et de produits sanguins pour tout le pays. De cette façon, les personnes des différentes régions du Canada bénéficieront d'un accès égal à ces constituants et produits.»

Voilà, M. le Président, les raisons qui ont motivé le rapport Krever à insister pour qu'il y ait un seul système national. Et les cinq principes fondamentaux sur lesquels repose cette recommandation, c'est que: le sang doit être une ressource fondamentale; les donneurs ne devraient pas être rémunérés, sauf dans des cas exceptionnels; le Canada devrait s'autosuffire; le sang et les produits sanguins devraient être gratuits et accessibles à tous; et la sécurité est d'une importance capitale.

Oui, M. le Président, la sécurité est d'une importance capitale. Or, le Comité d'hémovigilance, qui est un organisme chargé de surveiller les produits sanguins, n'a pas hésité à soumettre son avis au ministre sur les risques potentiels reliés à l'utilisation du sang selon la formule proposée par le ministre de la Santé et des Services sociaux en créant Héma-Québec.

Le ministre de la Santé a décidé de passer outre. Et permettez-moi de citer un extrait d'un article signé par Lysiane Gagnon: Un gros problème de crédibilité , publié dans La Presse du 2 avril 1998. «Le lancement de Héma-Québec a certainement été improvisé – il y a deux semaines, la décision finale n'était pas encore arrêtée! En plus, il s'est ouvert sur une grosse entorse à la vérité.

«Le système de gestion du sang du Québec respecte les recommandations de la commission Krever, proclame le communiqué du ministre. Faux. La commission Krever recommandait l'établissement d'un système d'approvisionnement centralisé. Mais c'est une option que le ministre Rochon a manifestement écartée dès le début, pour des raisons qui ont probablement à voir avec la politique et un insatiable besoin de contrôle.»

M. le Président, voici un commentaire qui vient d'une journaliste observatrice et objective, qu'on pourrait dire. Pour toutes ces raisons, je voterai contre le projet de loi n° 438, Loi sur Héma-Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme le député de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. J'interviens à nouveau sur le projet de loi, parce que je suis déjà intervenu. Lorsqu'on se lève en Chambre à différentes étapes de l'étude d'une projet de loi, on souhaite toujours, je ne sais pas si c'est de la naïveté, je ne sais pas si c'est la naïveté à laquelle le ministre de la Justice référait ce matin, qu'on va finir par convaincre, que les autres membres de l'Assemblée vont se rendre à l'évidence, se rendre à la force des arguments qu'on présente. Je voudrais peut-être tenter à nouveau ma chance encore aujourd'hui, parce que, de toute évidence, le gouvernement du Parti québécois n'a pas souhaité donner suite aux différents arguments et aux interventions qu'on a faits à l'égard d'Héma-Québec.

Je voudrais d'abord procéder par la lecture succincte de deux articles de journaux, des extraits. Le 11 mars dernier, on pouvait lire... et je pense que c'est important de le mettre dans le contexte pour ne pas faire en sorte que les gens viennent dire: Bien, ça, c'est l'opposition officielle à Québec; c'est normal qu'ils critiquent, c'est normal qu'ils s'opposent, qu'ils chialent. Je veux juste qu'on comprenne comme il faut que les propos que je vais tenir se font l'écho du sens commun et l'écho de ce que les gens impliqués, les intervenants disent eux-mêmes.

Le 11 mars dernier, c'est la Société canadienne de l'hémophilie, section Québec, qui dit croire «que la volonté du ministre Jean Rochon d'aller de l'avant avec son propre système d'approvisionnement sanguin est une question politique qui se fait au détriment de la santé et de la sécurité des Québécois».

M. le Président, il ne s'agit pas de la position du critique de l'opposition officielle, il s'agit d'une position, d'une compréhension de la part, si on peut dire, de l'intervenant le plus important à l'égard du dossier d'Héma-Québec, la Société canadienne de l'hémophilie, section Québec, qui dit: Voilà, dans ce cas-là, il y a certainement une décision politique qui se fait au détriment de la santé et de la sécurité des Québécois.

Je vois difficilement comment le gouvernement peut maintenir la cible qu'il s'est fixée, puisque les premiers intervenants, les premiers intéressés ont déjà identifié qu'elle se faisait au détriment de la santé et de la sécurité.

C'était le 11 mars, M. le Président. Un peu plus tard, à la fin mars, on pouvait lire, dans le Journal de Québec , ce titre: La nouvelle agence coûtera 39 000 000 $ de plus aux Québécois .

(12 h 40)

Voilà les deux thèmes que je voudrais aborder avec vous ce matin, M. le Président, à l'égard, d'abord, de la décision politique qui a été prise au gouvernement du Québec de créer une section à part en termes d'approvisionnement de la santé, de décider finalement que le sang qui coule dans les veines des Québécois est bien différent du sang qui coule dans les veines des autres Canadiens.

Je voudrais juste vous dire, M. le Président, que je ne partage absolument pas ce constat ou ce prérequis qui a formé l'idée du régime péquiste de dire qu'il fallait absolument diviser les deux agences. C'est une décision purement politique, tel que le témoigne la Société canadienne de l'hémophilie, section Québec, parce que, pour le gouvernement du Parti québécois, de ne pas avoir le mandat de faire la séparation, qui lui a été refusé en octobre 1995, ne l'empêche pas de tout faire en sorte pour que les actions qu'il mène s'inscrivent selon cette logique de séparation.

Et je le dis en toute bonne foi, M. le Président, moi, je veux bien croire, et je le crois, que les partis politiques sont là pour défendre leur programme ou leur projet, et je n'enlève pas le droit au Parti québécois d'avoir un projet, ce qui me désole, c'est de voir que, lorsque ce parti impose son programme à la population alors que la population lui a refusé le droit d'aller dans ce sens-là, il me semble qu'on est en train de passer à côté de la démocratie. Si la Société canadienne de l'hémophilie, section Québec, dit qu'il y a là une décision purement politique qui ne s'inscrit que dans la poursuite incessante du dogme de la séparation entretenu par les chicanes et les humiliations inventées, j'ai déjà dit que ce n'était ni plus ni moins que de l'autoflagellation pour ensuite pouvoir regarder les marques qu'on peut avoir et les imputer aux autres, alors que c'est le gouvernement lui-même qui pratique cette politique d'autoflagellation.

Cette politique a le désavantage, comme le dit la section québécoise de la Société canadienne de l'hémophilie, de desservir la santé et la sécurité des Québécois. Là, ce qu'on est en train de faire, c'est d'essayer de forcer la séparation dans chacun des ministères, dans chacune des étapes, de la forcer sur le dos de nos concitoyens que nous devons représenter. Je peux vous dire une chose, M. le Président, on ne l'oubliera pas, on n'oubliera pas que ce gouvernement a choisi de forcer son agenda sur le dos de la santé, sur le dos de la sécurité des Québécois et, qui plus est, sur le dos des finances des Québécois.

Comme je le disais, la nouvelle agence va coûter... Et ça, je me fie ici à un article de journal qui n'a pas été réfuté: La nouvelle agence coûtera 39 000 000 $ de plus aux Québécois . M. le Président, pourquoi ça va coûter 39 000 000 $ de plus aux Québécois? C'est parce qu'on a choisi de passer d'un régime unifié dans lequel nous avions notre mot à dire à un régime divisé, un régime séparé où il y a deux têtes, et une qui se trouve à être la queue de l'autre, ni plus ni moins, parce qu'on va faire ce que les autres vont décider. Mais on se coupe nous-mêmes toute influence qu'on pourrait jouer à cet égard-là. Dédoublement, donc, en divisant, en créant deux structures, deux systèmes, dédoublement des coûts, des problèmes de communication, un manque de coordination. En fait, en plus de mettre en danger la santé et la sécurité de nos concitoyens, on est en train de dire: On veut votre argent pour faire notre programme de séparation.

Selon l'analyse des coûts, le nouveau système va coûter plus cher. Le budget passera de 86 000 000 $ à 110 000 000 $, un montant additionnel de 17 000 000 $ en trois ans sera consacré à la mise en place, et l'agence québécoise va nécessiter un budget annuel de quelque 125 000 000 $, 1998-1999, comparativement à 86 000 000 $ en 1997-1998 versés à la Croix-Rouge.

Il s'agit d'un projet, ici, qui normalement, lorsqu'il arrive sur la table du Conseil des ministres, devrait avoir comme première question: Est-ce que les Québécois vont être plus pauvres ou plus riches avec ce projet-là? Vous savez, ça, c'est le genre de question que le Conseil des ministres doit se demander avant de déposer des projets ici. La réponse à ça, c'est que ça va coûter plus cher, les Québécois vont être plus pauvres. Qu'est-ce que le gouvernement du Parti québécois décide de faire? Pas de problème, on va y aller, on va les appauvrir encore. C'est comme une politique usuelle commune, c'est la règle de tous les jours pour passer l'idée que nous sommes dans un régime déjà séparé d'avec le reste du Canada. Pourquoi s'économiser des sous, M. le Président, et des moyens? Alors, le gouvernement a choisi d'aller dans ce sens-là.

Les systèmes, comment vont-ils fonctionner? Bien, il y a un membre de l'organisme québécois qui va siéger au conseil d'administration des Services canadiens du sang, et, vice et versa, il y aura un représentant canadien à Héma-Québec. En adoptant un système travaillant en parallèle avec l'agence canadienne, un système qui n'est ni transparent ni imputable, ça va créer des barrières entre les deux services. Et c'est bien le point que je veux faire ici. Ce qui est le plus grave, c'est que nous allons maintenant agir à titre d'observateurs et non pas à titre de décideurs. Ce qu'on est en train de faire dans ce cas-ci, M. le Président... Vous connaissez l'expression qui dit «regarder passer le train». C'est cette vieille expression où on a quelqu'un sur le quai de la gare, le train est en train de passer, et il décide de ne pas embarquer dans le train; il laisse les autres y aller, puis, lui, il dit: Moi, je vais rester dans ma situation.

Ça ne fonctionne plus comme ça dans le monde moderne, M. le Président. Avec la compétitivité, avec les interrelations, les interdépendances, dorénavant il n'y a plus personne qui reste sur le quai de la gare, tout le monde est dans le train. La question qui se pose, c'est: Où on est dans le train? Est-ce qu'on est dans la locomotive et, avec d'autres, on choisit la destination où on va ou bien si on s'installe confortablement dans le wagon de queue, on regarde où les autres s'en vont, puis après ça on dit: C'est donc pas là que j'aurais voulu aller? Et, comme projet de société, c'est un projet de société de plaintes et de complaintes, sans jamais aucune responsabilité qui n'est prise, sans jamais aucun rôle moteur qui n'est joué par le gouvernement. Et, dans ce dossier-ci comme dans bien d'autres dossiers, M. le Président, je voudrais dénoncer la politique de ce gouvernement.

Aujourd'hui même – aujourd'hui même – le ministre des Relations intergouvernementales canadiennes est en train de se réunir avec ses homologues. Par chance, ça fait sa deuxième participation dans un dossier sur l'union sociale, qui existe depuis 1995, où il a manqué toutes les autres réunions. Là, tout à coup, il commence à y aller parce qu'on a mis de la pression sur lui. Tant mieux! Que le gouvernement commence à entendre la voix de la raison. Il faut participer à ces rencontres, il faut faire entendre sa voix de manière à ce que nous soyons nous aussi dans la décision, que la vision québécoise, en terme social comme dans d'autres secteurs, lorsqu'on y participe, puisse rayonner partout.

Ce n'est pas en s'assoyant dans le wagon de queue, au prix de millions de dollars des Québécois, au prix de la santé et de la sécurité des Québécois, qu'on va doter le Québec d'un avenir prometteur. Et je voulais intervenir pour dire, M. le Président, que le gouvernement du Québec a encore une chance de reculer et de donner raison au bon sens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Alors, M. le ministre de la Sécurité publique, vous voulez intervenir? Je vous cède la parole.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, merci. Je fais motion pour que nous ajournions le débat, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 23.


Projet de loi n° 440


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 23 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement du territoire sur le projet de loi n° 440, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par M. le ministre des Affaires municipales. Ces amendements sont déclarés recevables.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur ces amendements? Sur ce rapport, M. le député de LaFontaine?

M. Gobé: M. le Président, c'est parce que vous venez d'ajourner le débat, et notre collègue qui est porte-parole de ce dossier étant actuellement à l'extérieur n'a pas eu le temps de venir nous rejoindre. Et je vous demanderai donc qu'on prenne le temps pour qu'elle puisse arriver pour répondre à ce projet de loi.

C'est un peu paradoxal. J'étais prêt à faire une intervention sur Héma-Québec, on ajourne et on appelle un autre...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, bien, enfin, c'est une question de règlement. Alors, si vous ne voulez pas intervenir, je m'en vais céder la parole à M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous avions une discussion qui permettait au député qui était responsable du dossier de pouvoir parler sur Héma-Québec, pour lui permettre de quitter pour 13 heures. Compte tenu de ça, nous avons demandé l'ajournement du débat. Nous allons le reprendre en temps et lieu. Et, dans le cas de la prise en considération, le ministre n'ayant pas l'intention d'intervenir, il le fera, comme la députée de Jean-Talon, sur l'adoption du principe, comme on s'est entendu.

(12 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Habituellement, les travaux sont mieux planifiés. Les critiques sont prévenus. Dans le cas de Mme la députée de Jean-Talon, tantôt elle était au bureau, elle voulait savoir à quel moment... J'ai été dans l'impossibilité de lui indiquer à quel moment le projet de loi serait appelé, compte tenu que nous n'avions pas été avertis de cette suspension sur l'autre projet de loi. Dans les circonstances, il y aurait lieu de suspendre quelques instants pour que Mme la députée de Jean-Talon, qui n'a pas renoncé à son droit de parole sur la prise en considération du rapport, puisse l'exercer correctement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, là on va laisser faire les considérations du leader de l'opposition officielle comme accusation. Je dis simplement: L'entente que nous avions était à l'effet que le ministre préservait son droit de parole et on permettait, à ce moment-ci, au député de Nelligan de faire son intervention, mais il est arrivé que l'on ait décidé de faire des interventions de l'autre côté. Et la députée de Jean-Talon et le ministre se sont parlé. Donc, ils étaient bien au courant de la façon qu'on procèderait, d'autant plus que nous avions l'intention de le faire au moment de l'adoption de ce projet de loi du député... ministre des Affaires municipales, M. le Président.

Donc, à ce moment-ci, j'ai appelé l'article qui est devant nous. Le ministre peut commencer, s'il le veut. S'il ne veut pas parler, on attendra la décision de la députée de Jean-Talon. S'il veut nous permettre de continuer après 13 heures, moi, je n'ai pas de problème, d'autant plus que la députée est avec le ministre en commission parlementaire cet après-midi. Et c'est pour ça qu'on le faisait ce matin, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, moi, sur ça, soit que vous vous entendiez sur une façon de faire, et, si vous n'arrivez pas à vous entendre, bien là, moi, je dois, si vous voulez, appeler... Alors, M. le ministre.

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Question de règlement? Quel article et quel point?

M. Williams: Sur le point qu'il n'a pas le droit de dire des choses qui ne sont pas vraies...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il n'y a pas de règlement qui prévoit une intervention sur ce point-là.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que votre propos, c'était sur l'intervention qu'il a tenue antérieurement?

M. Jolivet: Je n'ai pas...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Brièvement, M. le leader. Après ça, on...

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Tout ce que j'ai dit... Nous avons demandé l'ajournement du débat parce que ce que l'on avait entendu... ça ne veut pas dire que d'autres ne peuvent pas parler, là, ce n'est pas ça que ça veut dire, sur l'adoption finale du projet de loi, ce que j'ai dit: Nous avons voulu accommoder... à la demande du député de Nelligan, nous lui avons permis de faire son intervention immédiatement, en sachant que le ministre n'avait pas l'intention d'intervenir et que le ministre lui-même avait dit cependant: Préservez mon droit de réplique.

C'est ce que j'ai dit en commençant, M. le Président. Ce que j'ai dit... j'ai même fait, au nom du ministre lui-même, l'intervention, puisque dans les amendements apportés il y avait des conséquences, qu'il fallait avoir l'accord du lieutenant-gouverneur. Ce que j'ai fait. Et le député a commencé son droit de parole, ce qui était correct. Il avait une heure. Il aurait pu prendre une heure s'il le désirait. On était bien conscient de ça.

La deuxième chose, c'est qu'entre temps d'autres personnes de sa formation sont venues parler, et j'ai le droit de demander à un de mes ministres de faire l'ajournement du débat, sans enlever le droit de parole à qui que ce soit, tout en protégeant le droit de parole du ministre de la Santé. Et j'avais l'intention de revenir à un autre sujet, qui est celui qui est devant nous, pour lequel il y a eu des discussions entre le ministre des Affaires municipales et la critique, la députée de Jean-Talon, sur la prise en considération du rapport, en sachant qu'il y avait des amendements à cette étape-là et que nous avions l'intention, dans les deux cas, de prendre le droit de parole au moment de l'adoption finale du projet de loi, qui serait demandée en prise en considération.

C'est tout ça qu'on veut faire. Donc, je n'ai pas en aucune façon accusé le député de Nelligan d'avoir fait quoi que ce soit, je dis simplement que c'était pour l'accommoder qu'on l'avait fait comme ça.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon, alors, sur ce point-là... Puis il ne faut pas engager un débat qui va durer une heure sur ce point-là. Une rectification brève, s'il vous plaît.

M. Williams: Le leader parlementaire ministériel prétend, avec ses paroles, que je n'ai pas respecté ma parole. Et laissez-moi expliquer ce qui s'est passé...

Des voix: ...

M. Williams: Laissez-moi expliquer ce qui s'est passé. J'ai écouté votre intervention, laissez-moi expliquer ce qui s'est passé. Il y a eu des discussions dans le couloir, O.K., c'est vrai, entre les deux leaders. Nous avons décidé qu'après la période de questions – tu n'as pas le droit de dire des demi-vérités – 438 serait être appelé. Le projet de loi n° 438, c'est Héma-Québec et le Comité d'hémovigilance, c'est vrai. Mais le ministre – ce n'est pas le député de Nelligan – a dit qu'il ne peut pas participer au débat parce qu'il a un autre engagement. C'est lui qui a demandé les changements à ce temps-là, il est...

Une voix: ...

M. Williams: J'ai besoin d'expliquer comme il faut. Il...

Une voix: ...règlement de compte.

M. Williams: Avez-vous quelque chose à dire? Je sais que vous voulez quitter la politique, là...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Oui, bien, faites-le rapidement, puis...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît! M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Au moment où le député de Nelligan tentait de fournir des explications, il a été interrompu par d'autres députés qui siègent dans le poulailler. L'article 32 prévoit que, lorsqu'un député...

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je demanderais, s'il vous plaît, aux autres de ne pas intervenir. Et terminez, s'il vous plaît, le plus rapidement possible, M. le député.

M. Williams: Le ministre m'a demandé s'il pouvait partir. Je peux continuer mon intervention et il garde son droit de réplique. Nous avons eu une discussion après. Il ne m'a jamais demandé si je serai le seul intervenant. Il a...

Une voix: ...

M. Williams: M. le Président, excusez, j'essaie de... Je n'ai jamais dit que je suis seul. J'ai eu droit à 60 minutes. Le fait que j'aie parlé, je pense, 35 minutes... Avec ça, si nous laissons tous mes collègues continuer, nous allons terminer le débat. C'est ce côté de la Chambre qui, un, met ma parole en doute et, deux...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Écoutez! Un point, c'est tout! Terminé, sur ça! C'est qu'il faudrait que vous relisiez... Vous relirez, chacun de votre côté, les galées. Ce que j'ai compris, moi, c'est qu'il a simplement, M. le leader, dit qu'il a ajourné le débat, tout simplement, alors c'était son droit, pour réserver le droit de réplique du ministre qui n'a pas pu être là. Puis, à ce moment-là, on est passé à l'autre point à l'ordre du jour. Alors...

M. Jolivet: Je n'ai jamais accusé...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Plus vous vous levez, de part et d'autre, moins c'est clair. Alors, allez-y.

M. Jolivet: Non, mais ça va être clair, M. le Président. Si vous me laissez parler, vous allez voir, ça va être clair.

La première de choses que j'ai dites... Je n'ai jamais mis en doute la parole du député. Je ne l'ai jamais accusé de rien. Et, si je l'ai fait, c'est par malencontreuse... En tout cas, moi, je ne l'ai pas fait. Ce que j'ai dit au député, j'ai simplement dit que l'entente que nous avions était que le ministre ne prenait pas son droit de parole mais que je lui préservais son droit de réplique. C'est ce que j'ai dit. C'est à ce moment-là que le député qui est le porte-parole avait droit à une heure. Ce qu'il avait le droit de faire, on en était conscients.

Cependant, je croyais qu'il était le seul. Et ce que j'ai dit... Quand j'ai vu que d'autres députés de sa formation commençaient à parler, je les ai laissé parler, mais, devant ce phénomène-là, compte tenu que je voulais appeler d'autres choses, j'ai demandé, M. le Président, tout simplement d'ajourner le débat, sans enlever le droit de parole du député qui veut parler ou d'autres qui voudraient le faire, jusqu'à ce que, à la fin, quand il n'y aura plus d'intervenants, le ministre utilise son droit de réplique. C'est tout ce que j'ai dit.

Compte tenu que je voulais passer à l'étape qui est celle du ministre, qui doit être en commission parlementaire cet après-midi, et qu'il y avait eu des discussions entre lui et la porte-parole de l'opposition sur cette question, nous en avions convenu que nous appelions son item et qu'il prendrait le droit de parole sur les amendements au moment de l'adoption finale du projet de loi. C'est tout ce que j'ai dit. Jamais, je n'ai accusé personne.

M. Paradis: M. le Président, si je peux...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il reste encore une minute avant le dîner, alors...

M. Paradis: Je peux offrir mon consentement au leader du gouvernement, M. le Président. Compte tenu des événements tragiques qui sont survenus à Mirabel aujourd'hui et qui affectent des gens dans la région du ministre des Affaires municipales, on va faire preuve de tous les consentements possibles pour tenter de faciliter l'aménagement de son agenda personnel aujourd'hui. Ceci étant dit, M. le Président, de brèves discussions peuvent nous permettre d'en arriver à une entente qui ferait en sorte que le ministre des Affaires municipales puisse disposer d'un agenda correct compte tenu des circonstances.


Mise aux voix des amendements du ministre

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, à ce moment-là, je vais – il reste quelque 30 secondes – ici mettre aux voix... les amendements proposés par M. le ministre des Affaires municipales sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

(13 heures)

Des voix: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'aménagement du territoire portant sur le projet de loi n° 440, Loi modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, sur ce, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 1)

(Reprise à 15 h 14)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article 21.


Projet de loi n° 115


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 21 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 115, Loi modifiant la Loi sur la voirie et d'autres dispositions législatives.

Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission des transports et de l'environnement? Nous cédons maintenant la parole au député de Pontiac et critique officiel de l'opposition en la matière. M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Vous allez me permettre, dans un premier temps, de déplorer que j'aie des gens qui soient venus de mon comté aujourd'hui parce qu'on m'avait cédulé, le même leader qui veut m'avoir ici m'avait cédulé dans une commission parlementaire pour un projet de loi privé. Malheureusement, on n'a même pas eu le temps de débuter. Puis ça aurait été de courte durée, là, ça aurait duré peut-être 15, 20 minutes pour régler le problème du Pavillon du parc à Aylmer. Mais, malheureusement, tout d'un coup on a réalisé qu'on voulait faire l'adoption du rapport de la commission. J'espère qu'on gère mieux la province qu'on gère les travaux de l'Assemblée nationale, parce que c'est déplorable.

En tout cas, M. le Président, le projet de loi n° 115, ça, c'est un projet de loi qui avait été présenté au mois de mai 1997. Le gouvernement, avec tout ce qu'il a pelleté aux municipalités, a décidé de ne pas procéder avec le projet de loi. Finalement, on a fait le principe la semaine passée et on a fait en commission parlementaire cette semaine un projet de loi qui contient 27 articles. Sur les 27 articles, on a décidé d'en abroger deux, donc on finit avec un projet de loi de 25 articles.

Dans ce projet de loi, M. le Président, ce qu'il y a de malheureux, c'est que l'Union des municipalités du Québec avait demandé au ministre des Transports de ne pas abroger l'article 604.3 de la Loi sur les cités et villes. C'est un article qui dégageait les municipalités de responsabilités... perte de responsabilités, disons, s'il y avait des travaux qui étaient faits et qu'un commerce avait une perte de revenus. Malheureusement, ni le ministre ou le ministère des Transports n'a jugé bon d'accepter cette demande de la part de l'Union des municipalités, ce qui a eu comme effet de m'obliger à m'objecter à deux articles dans le projet de loi, à cause du refus que le ministère, sans justification... On a dit: Regarde, nous autres on ne croit pas que ç'aurait des conséquences. Pourtant l'Union des municipalités du Québec avait envoyé tout un dossier au ministre pour lui démontrer l'inquiétude que les municipalités avaient encore pour se protéger contre des réclamations en cas de perte de revenus.

Il y avait aussi dans ce projet de loi la levée de droits de non-accès. Si vous vous souvenez – probablement que vous n'étiez pas ici à ce moment-là, M. le Président – c'est que, lorsque l'on a transféré le réseau routier tertiaire aux municipalités, en avril 1993, et, donc, avec le transfert du réseau routier, il y a eu certainement des droits de non-accès qui faisaient partie de ce réseau de routes. Donc, dans le projet de loi, on a voulu – et je pense que ça fait du sens – on a dit: Regardez, ces droits d'accès là, avant qu'une municipalité puisse lever un droit d'accès, ça va prendre l'approbation du ministre des Transports. Et je crois que c'est bien, parce que les réserves de droits d'accès, souvent, c'est pour des raisons de sécurité.

(15 h 20)

Et je sais qu'au ministère des Transports, en plus, il y a une politique que, lorsqu'on lève un droit d'accès... Et souvent c'est que la levée d'un droit de non-accès aussi peut permettre à des propriétaires de terrains d'obtenir une survaleur. Parce que, par exemple, souvent il y a des terrains, M. le Président, qui ne sont pas accessibles, disons, d'une route principale à cause d'un droit d'accès et, en le levant, on donne une plus-valeur au terrain. Donc, le ministère des Transports aujourd'hui exige, et avec raison, que, si un individu augmente la valeur de son terrain parce que le ministère des Transports, le gouvernement du Québec permet un accès où il n'y en avait pas, à ce moment-là, il est tout à fait normal...

Et j'en avais profité pour soulever le cas de la levée du droit de non-accès sur l'autoroute 40 et la 341 pour donner accès à l'école Félix-Leclerc. Vous connaissez ça, probablement que vous passez là lorsque vous allez à Montréal de chez vous, M. le Président. Il y en avait un, droit d'accès, qui a été levé. Et je me souviens, au moment où j'étais au ministère des Transports, c'est qu'on avait évalué à 1 000 000 $ de plus pour les terrains si on levait le droit, le non-accès.

Il a été levé, le non-accès, mais malheureusement il semblerait que, pour une raison ou une autre, la cour aurait jugé à propos, M. le Président, que le gouvernement n'avait pas droit à ce 1 000 000 $. C'est malheureux et j'espère qu'on va, au ministère des Transports, regarder et voir c'est quoi, la cause de ça, pour ne pas que ça devienne une jurisprudence et que dorénavant tous les gens qui seront demandés de payer pour la levée d'un non-accès parce que ça donne une plus-valeur à leur terrain, ne seront pas aussi chanceux que ceux-là près de l'école Félix Leclerc, dans le comté de L'Assomption. M. le Président, ça avait été un peu... La levée s'est faite quelques jours après l'élection de 1994 et c'est pour ça que ça avait l'air un peu anormal, M. le Président, que, tout de suite après l'élection, on change ça dans le comté du premier ministre. Donc, ça, c'était...

Il y a autre chose dans le projet de loi, M. le Président, c'est que le ministère des Transports, encore avec le transfert du réseau routier, a aussi transféré des belvédères, des postes de vérification. Ce projet de loi là permet au ministère des Transports de demeurer propriétaire de ces terrains dans l'éventualité où ces terrains un jour soient en demande et, à ce moment-là, les produits de la vente reviendraient au ministère des Transports au lieu d'appartenir aux municipalités.

Il y a aussi, M. le Président, dans ce projet de loi là, et peut-être que c'est sur note positive, l'Union des municipalités régionales de comté qui avait demandé au ministère des Transports, concernant les cimetières d'automobiles – ça devenait une responsabilité municipale et non plus la responsabilité du ministère des Transports – d'attendre ou de retarder la mise en vigueur de ces articles-là parce que plusieurs municipalités n'ont pas de réglementation. M. le Président, et vous le savez – si je ne me trompe pas, vous êtes un ancien maire – si la municipalité n'a pas de réglementation pour réglementer les cimetières d'autos, et ainsi de suite, ça pourrait lui causer d'énormes problèmes. Donc, le ministre a accepté la demande de l'Union des municipalités régionales de

comté et va permettre de retarder la mise en vigueur de ces articles-là pour donner une chance à ces municipalités qui n'ont pas de réglementation de se doter d'une réglementation.

Aussi, dans ce projet de loi, et ce qui est une conséquence du transfert du réseau routier... À ce moment-là, il y avait deux catégories de ponts. Il y avait les ponts qui étaient qualifiés de normaux, mais il y avait des ponts complexes, «complexes» dans le sens où la structure était complexe et aussi le coût de réparation, peut-être pas complexe, mais très élevé. Donc, à ce moment-là, il avait été décidé qu'il y aurait 9 000 000 $ qui seraient mis pour ces ponts-là, mais qu'au bout de quatre ans le ministère des Transports, le gouvernement du Québec regarderait pour voir s'il n'y aurait pas une solution pour transférer les structures aux municipalités, mais aussi avec une enveloppe pour leur permettre d'être capables de faire les réparations nécessaires.

Vous pouvez vous imaginer, une petite municipalité, des fois, qui a quelques cents citoyens a peut-être une structure qui pourrait coûter 500 000 $ de réparation. Ça serait extrêmement difficile pour cette municipalité-là et les citoyens de payer le coût. De toute façon, ces ponts-là, normalement, M. le Président, ce n'est pas pour l'usage local. Ça a une vocation des fois régionale ou interrégionale, intermunicipale. Donc, il semblerait qu'il y a une entente qui a été faite avec les municipalités, qu'elles vont devenir les propriétaires des ponts, mais un engagement de la part du gouvernement de leur donner l'aide technique. Parce qu'il n'y a pas seulement que le coût, il y a l'aide technique. Certainement, ces municipalités-là, M. le Président, ne peuvent pas se permettre d'avoir l'expertise ou, même, d'avoir les sous pour engager un bureau d'ingénieurs experts dans le domaine des ponts. Donc, il semblerait qu'il y ait un protocole d'entente ou une entente avec les municipalités. Donc, ça va régler cette partie-là.

Donc, M. le Président, on a fait l'étude du projet de loi. On a apporté quelques amendements au moment de la commission parlementaire. Et, comme je l'ai dit au tout début, une des choses que je regrette, c'est que le ministre n'a pas pu accéder à la demande de l'Union des municipalités concernant l'article 604.3 de la Loi sur les cités et villes qui, d'après les municipalités, va les rendre responsables de dommages, de pertes économiques lorsqu'il y a des travaux routiers qui sont faits.

Donc, c'est pour ça que, en commission parlementaire, le projet de loi a été accepté sur division. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Pontiac et critique officiel de l'opposition en matière de voirie. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du rapport de la commission des transports et de l'environnement?


Mise aux voix

Alors, le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 115, Loi modifiant la Loi sur la voirie et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, l'article 22, qui est une autre prise en considération de rapport.


Projet de loi n° 430


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 22 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des transports et de l'environnement sur le projet de loi n° 430, Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds.

Y a-t-il des interventions sur l'adoption du rapport de la commission des transports et de l'environnement? Je cède la parole au critique officiel de l'opposition et député de Pontiac. M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Oui, merci, M. le Président. Le projet de loi n° 430, Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds, ce projet de loi, dans un premier temps, et peut-être l'élément le plus important, est pour assurer une plus grande sécurité sur nos routes. Et ceci, ça concerne les véhicules lourds, soit les camions de transport de marchandises, aussi les autocars, on a même étendu ça maintenant à des minifourgonnettes, ainsi de suite. Donc, l'élément principal de ce projet de loi, c'est la sécurité, et dans le but d'améliorer notre bilan routier.

(15 h 30)

Aussi, M. le Président, dans un second temps, qui n'est pas aussi important, c'est de la conservation de notre patrimoine routier. Comme vous le savez, c'est certainement les véhicules lourds qui ont le plus d'effets négatifs sur la chaussée, sur nos routes. Plus la charge est élevée et plus il y a de répétitions de passages de camions lourds, plus de dommages peuvent être causés à la chaussée et à nos routes. Et vous savez comment dispendieux est le coût de maintenir un réseau routier en parfaite condition, et l'importance d'avoir un réseau routier qui est carrossable, dans un premier temps aussi, M. le Président. Si le réseau routier n'est pas en bonne condition, à ce moment-là, l'élément sécurité aussi est affecté. En plus, c'est que ce réseau routier... Et ce genre de véhicules, normalement, se fait pour les entreprises. Ça fait partie de notre économie. Donc, pour l'économie de la province, pour l'économie de nos entreprises et pour qu'on puisse demeurer compétitifs, il est réellement très important qu'on s'assure de la qualité de notre réseau routier.

Et, dans un troisième temps, M. le Président, surtout avec les changements dans la déréglementation du transport, plusieurs des associations, plusieurs des individus se sont plaints et se plaignent qu'avec la déréglementation ce n'est pas tout le monde qui est imputable pour son rôle dans le milieu des transports et que, à cause de cette situation, il y a plusieurs transporteurs qui disent qu'ils sont forcés des fois peut-être de prendre un travail à un moindre prix parce qu'il y a toujours quelqu'un qui ne suit pas la réglementation, qui ne se soumet pas à toutes les exigences, qui néglige de faire l'entretien préventif pour s'assurer que ses véhicules sont en bonne condition de sécurité. Il y a aussi le problème peut-être d'être trop exigeant pour les opérateurs, les chauffeurs de ces véhicules lourds.

M. le Président, après l'étude du principe, nous avons eu, et heureusement, l'occasion de rencontrer des groupes, des associations de propriétaires exploitants de camions, les gens qui sont les premiers affectés, les premiers à qui on demande de respecter les lois qui vont garantir la sécurité sur nos routes. Je pense qu'il ne faut pas, certainement, oublier la tragédie de l'automne dernier aux Éboulements. Et, si on se fie sur tous les témoignages qui ont été rendus à l'enquête du coroner Malouin par tout le monde, il semblerait que c'est à cause d'une défectuosité de l'autocar que nous avons eu cette tragédie, et donc toute l'importance de ce projet de loi n° 430 pour s'assurer...

Parce que c'est bien beau, là, on peut bien dire, aux Éboulements: On va changer la côte, on va dépenser 8 000 000 $, mais il y en a d'autres, côtes, il y en a d'autres, courbes, dans le restant de la province de Québec qui offrent les mêmes difficultés, la même géométrie, des pentes aussi abruptes, M. le Président. Et c'est certain que nous ne pouvons pas tous les corriger. Mais il y a certainement une chose: si on s'assure que les véhicules lourds qui se promènent sur notre réseau routier sont en bonne condition, sécuritaires et que ceux qui les opèrent – les chauffeurs, les conducteurs qui opèrent ces véhicules-là – ils sont bien entraînés et conscients et aussi travaillent des heures normales, bien, on vient dans un premier temps de s'assurer d'une meilleure performance, d'améliorer aussi la sécurité sur nos routes.

Donc, les associations, M. le Président, sont venues aussi nous le dire... et leur plus grosse préoccupation... Et heureusement que nous avons pu avoir ces consultations particulières, parce qu'ils nous ont fait comprendre qu'aujourd'hui, dans le transport comme dans bien d'autres choses, il y a toujours des intermédiaires, des courtiers qui eux ne font seulement que s'engager vis-à-vis d'une compagnie qui a besoin de transporteurs, et ensuite ils trouvent des transporteurs pour faire ce transport. Et souvent, ça se fait avec des négociations qui sont assez serrées sur le prix, le taux ou le coût, le prix que le transporteur va être payé pour faire ce transport, et aussi sur le temps qui va être permis pour faire la livraison de A à B. Et ça, c'est là où, si c'est de longues distances, que malheureusement la personne accepte de faire ce transport et qu'elle est obligée de travailler plus que les heures normales, ça aussi, ça a une conséquence assez importante sur la sécurité.

Donc, M. le Président, c'est pour ça que les associations nous ont indiqué que ces courtiers-là devraient être rendus, dans la loi aussi, imputables. En d'autres mots, si le transporteur, le propriétaire, l'exploitant, si tout le monde qui oeuvre au sein du domaine du transport est imputable, à ce moment-là, c'est certain que les règles du jeu vont être – tout le monde va être obligé – serrées. Et à ce moment-là, il n'y a personne qui va être tenté ou qui va tenter de faire du travail à moins cher, parce que lui aussi...

Parce que ce qui arrive si ce n'est pas serré, serré, il y a des gens qui vont dire: Bien, moi, je ne ferai pas l'entretien de mon véhicule; ça va coûter moins cher, donc je vais être capable de le faire moins cher. Mais c'est là qu'est le danger. Et c'est pour ça que c'est un projet de loi d'une grande importance, tellement d'une grande importance que j'ai posé la question à tous les gens qui sont venus nous présenter leur mémoire. J'ai dit: Est-ce que vous croyez qu'on devrait attendre le rapport de l'enquête Malouin avant de procéder? Croyez-vous qu'il y a des éléments qui pourraient nous être suggérés qui auraient comme effet de bonifier ce projet de loi? Ils ont dit: Regardez, là, c'est tellement important pour la sécurité, tellement important pour la conservation du patrimoine routier et aussi important pour que l'industrie du transport se place puis que tout le monde travaille au même niveau. Et, à ce moment-là, je pense que les individus eux-mêmes vont être plus heureux. Peut-être que le gagne-pain va être mieux, M. le Président, et on va tous réellement en bénéficier.

(15 h 40)

Mais ces gens-là ont dit: M. Middlemis, regardez, on croit... Premièrement, ils m'ont dit: En réalité, si le gouvernement avait voulu... Il y a un rapport du même coroner Malouin, M. le Président, qui date de 1991 et qui recommande de faire ce que nous avons là. Et ça, je l'avais dit au ministre. Je déplore que ça ait pris trois ans avant de mettre en vigueur ou en pratique ou de procéder à faire les changements que le coroner Malouin avait faits en 1991, au moment de plusieurs accidents sur la route 138. Et je peux vous dire que les recommandations de ce rapport, qui touchaient l'amélioration, la correction sur la route 138 pour prévenir d'autres accidents comme ceux qui ont existé, ces travaux-là ont été faits. M. le Président, comme je vous indiquais, donc, on aurait pu le faire avant.

Et la chose que je déplore aussi... Et, pendant qu'on est en train de préparer ce projet de loi... Et je l'ai dit au ministre: Regardez, le projet de loi, c'est bien beau, là, c'est un peu être un beau parleur, mais un petit faiseur. C'est que, des fois, les projets de loi sont beaux, sont bien écrits, ça se lit bien, mais, si on ne peut pas les appliquer, ou si on ne les applique pas avec la rigueur nécessaire, ou si nous n'avons pas suffisamment d'inspecteurs routiers pour faire cette vérification-là... Tu sais, c'est bien beau, là, on aura parlé longuement ici, on se sera pété les bretelles qu'on fait des choses, mais c'est dans son application qu'on va voir si nous avons réussi, et c'est ça qui va nous permettre d'améliorer le bilan routier. Mais je n'en suis pas convaincu lorsque je lis... Même aujourd'hui, le 18 juin: «Il manque des contrôleurs routiers, admet un responsable de la Société de l'assurance automobile du Québec»; «Les témoins de la SAAQ éludent les questions.» Et aussi: «Manque de contrôleurs routiers, tragédie des Éboulements.» Ça, c'est des choses qui ont été dites, M. le Président, à l'enquête du coroner Malouin.

Donc, on a un projet de loi. Est-ce qu'on va s'assurer d'être capable de l'appliquer, de le mettre en vigueur le plus tôt possible avec la rigueur nécessaire pour éviter d'avoir des tragédies? Et, en plus, M. le Président, je ne sais si vous le saviez ou non, c'est que le Code de la sécurité routière ne s'applique pas, aujourd'hui, sur les chemins forestiers. Et je suis d'accord, M. le Président, qu'avec cette loi-là le Code de la sécurité routière va aussi s'appliquer sur les chemins forestiers.

Et on ajoute 50 000 kilomètres, on va ajouter 50 000 kilomètres de route où on va être obligé d'appliquer le projet de loi n° 430. Et, quand je dis «les chemins forestiers», je suis totalement d'accord, parce qu'il y a beaucoup, beaucoup d'accidents. Et encore plusieurs rapports de coroners ont recommandé au gouvernement d'appliquer le Code de la sécurité routière sur les chemins forestiers. Je ne sais pas si vous le saviez ou non, M. le Président, quelqu'un peut conduire un véhicule sur un chemin forestier, et malheureusement aujourd'hui la police ne peut rien faire. Ce projet de loi va permettre de faire une surveillance. Mais, si déjà on a des problèmes à surveiller le réseau que nous avons, comment est-ce qu'on va faire pour s'assurer d'un autre réseau de 50 000 kilomètres de plus?

C'est un projet de loi de 169 articles, et je pourrais dire qu'il y a eu des amendements, pas trop sérieux, sur au moins la moitié des articles de ce projet de loi. Donc, ce projet de loi, nous sommes d'accord pour procéder, mais je pense que la préoccupation que j'ai et que mes collègues avaient, c'est que c'est beau, c'est un bon projet de loi, mais est-ce qu'on va être capable réellement de l'appliquer avec rigueur? Est-ce qu'il va s'adapter, est-ce qu'on va être capable de l'adapter à la réalité qui existe? Plus le fait qu'on va ajouter 50 000 kilomètres de route dans les chemins forestiers, est-ce qu'on va être capable de faire... Et c'est là... C'est bien beau, on peut discourir puis on peut s'engager, de dire: C'est un projet de loi qui est bon, on a tout couvert, mais, si on ne peut pas le mettre en vigueur et s'assurer que le projet de loi va atteindre le but visé...

Donc, M. le Président, j'espère que, si par hasard le nouveau rapport d'enquête du coroner Malouin sur Les Éboulements apporte des éléments qui, malheureusement, ont été omis dans ce projet de loi, on ne sera pas obligé d'attendre – le rapport du coroner Malouin était en 1992 – un autre six ans avant d'apporter les changements nécessaires pour atteindre le but visé. Et, comme je le disais au tout début, le premier élément, c'est d'assurer une plus grande sécurité sur notre réseau routier, et surtout que ceci, ça vise les véhicules lourds, ça veut dire les gros camions, les autocars. Donc, ça, c'est l'élément le plus important.

Le deuxième élément, c'est aussi la conservation de notre patrimoine routier. Vous savez comment coûteux c'est, M. le Président. Je pense que, chaque année, c'est 1 000 000 000 $ que ça coûte pour faire l'entretien du réseau, plus les améliorations; on parle de 644 000 000 $. Si on voit, là, on dépense 644 000 000 $, cette année, sur le réseau routier pour l'améliorer et le conserver.

Troisièmement, maintenant que ça va être encadré, le transport, ça devrait permettre aux transporteurs d'éviter d'avoir des gens qui vont travailler à moindre prix, dû au fait qu'aujourd'hui ce n'est pas encadré et qu'il y en a, des propriétaires de véhicules lourds qui négligent l'entretien et qui, de cette façon-là, peuvent peut-être réussir à offrir un moindre coût pour le même transport. Donc, avec ce projet de loi qui va rendre imputables tous les gens qui sont impliqués dans le transport, à partir de l'opérateur jusqu'au courtier de transport...

M. le Président, espérons que ce projet de loi, une fois en vigueur, pourra avoir le nombre, qu'on pourra avoir tous les inspecteurs nécessaires pour faire la vérification des camions sur la route, des autocars aussi, parce que je lisais encore dans le journal l'autre jour que les autocars, personne, personne ne fait des inspections des autocars. Pourtant, il y en a plusieurs qui se promènent et qui se promènent dans des endroits extrêmement dangereux. Donc, j'espère qu'on pourra régler ça et, en bout de piste, s'assurer que notre bilan routier continue à s'améliorer. Mais on ne devrait pas hésiter, s'il y a des choses dont on s'aperçoit qu'elles devraient être changées, on ne devrait pas attendre un autre six ans ou une autre tragédie avant de procéder à faire les changements qui s'imposent. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Pontiac. Y a-t-il d'autres intervenants sur la prise en considération du rapport de la commission?


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission des transports et de l'environnement portant sur le projet de loi n° 430, Loi concernant les propriétaires et exploitants de véhicules lourds, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, comme vous le savez, nous sommes dans notre fin de session, et, à ce moment-ci, je vous demanderais un moment de suspension.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je suspends donc nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 50)

(Reprise à 16 h 8)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Vous savez à quel point les bruits circulent dans ce parlement. J'ai ouï dire qu'on est sur une motion éventuelle de suspension des règles et je me sens profondément offusqué. Offusqué pourquoi? Parce que nous étions, après un travail sérieux, proches d'arriver à une conclusion quant à l'étude article par article du projet de loi n° 441.

Alors, je sollicite actuellement le consentement de cette Chambre pour que la commission des finances publiques puisse se réunir ce soir, de 20 heures à minuit, et terminer un travail sérieux qu'on avait commencé, le président du Conseil du trésor et moi-même, et terminer l'étude du projet de loi n° 441, Loi sur l'Institut de la statistique du Québec. M. le Président, je crois que, avec de la bonne volonté de part et d'autre et une étude sérieuse article par article, en quatre heures, en y mettant, bien sûr, un peu dans notre vin, on sera en mesure d'arriver à terme. Alors, je solliciterais le consentement du leader du gouvernement pour permettre à la commission des finances publiques de se réunir ce soir, de 20 heures à minuit, afin de continuer l'étude article par article du projet de loi n° 441. Je ne sais pas si je pourrais avoir consentement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. M. le leader du gouvernement, vos commentaires sur cette requête.

M. Jolivet: M. le Président, je suis très, très à l'aise d'accepter une telle invitation de la part du député de Verdun, qui semblait tellement offusqué à ce moment-ci, d'autant plus que les discussions qui ont eu lieu sur un tel sujet nous permettent d'accéder à sa demande et d'être en commission parlementaire pour terminer les travaux de cette commission, pour pouvoir prendre ensuite en considération le rapport et finalement, dans la journée de demain, adopter le projet de loi. Donc, nous allons accéder à sa demande et convoquer, à ce moment-là, de 20 heures à minuit... La seule chose, c'est que je dois la convoquer... au salon rouge? Salon rouge.

Une voix: Au salon rouge.

(16 h 10)

M. Jolivet: Oui.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui. Alors, bien entendu, vous êtes d'accord pour qu'il y ait effectivement un consentement afin de déroger à notre règlement, ce qui va nous permettre d'avoir une quatrième commission parlementaire qui va siéger.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, il ne s'agit pas d'une quatrième commission parlementaire, c'est une troisième commission qui pourra siéger, compte tenu que les autres commissions...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Pour bien clarifier la situation, nous avons donc une entente avec le député de Verdun... qui est actuellement, à ce moment-là, en commission parlementaire au salon rouge. On sait qu'il va avoir le temps d'étudier en même temps que tous les autres projets de loi ce projet de loi. Et, en conséquence, M. le Président, ce qui est ordonné par la Chambre à ce moment-ci, c'est l'assurance que la commission terminera ses travaux. Nous prendrons en considération demain, avec le consentement de l'opposition, le rapport de la commission et l'adoption de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader du gouvernement. Effectivement, M. le secrétaire général vient de m'informer que c'est tout simplement les travaux qui vont se poursuivre, les travaux de la commission parlementaire dont vous avez énuméré l'ordre ce matin. Alors, à ce stade-ci, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Compte tenu de l'habituelle demande que je vous fais depuis quelques instants, M. le Président, suspension encore une fois pour finaliser l'ensemble de nos travaux, suite aux rumeurs dont le député de Verdun faisait mention.

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, nous allons de nouveau suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 12)

(Reprise à 16 h 14)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.


Motions du gouvernement


Motion d'urgence proposant la suspension de certaines règles de l'Assemblée afin de permettre la présentation et l'adoption du projet de loi n° 453, et l'adoption des projets de loi n°s 186 et 188

M. Jolivet: Oui. M. le Président.

«Qu'en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre la présentation et l'adoption du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, et l'adoption des projets de loi suivants: projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale; projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers;

«Le premier paragraphe de l'article 19, les articles 20 à 22, les mots "ou sur un fait personnel" au quatrième paragraphe et le septième paragraphe de l'article 53, les premier, deuxième, troisième et cinquième paragraphes de l'article 54, les articles 71 à 73, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les mots "ou à la demande d'un député" au premier alinéa de l'article 86 ainsi que le deuxième alinéa du même article, les deuxième, troisième et huitième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 94, 100 et 101, 105 à 108, 110 à 114, 157, 164 et 165, 175 et 176, les mots "et, le cas échéant, de ses observations, conclusions et recommandations" à l'article 177, les articles 194 et 195, 205 à 210, les articles 212, 213, 215, 216, 220, 222, 230, 232, les mots "à l'étape des affaires courantes" de l'article 233, les article 236 et 237, le deuxième alinéa de l'article 239, les articles 240 et 241, 243, le deuxième alinéa de l'article 244, les articles 245 et 246, 247, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au deuxième alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, le premier alinéa de l'article 252 ainsi que les premier et troisième alinéas de l'article 253, l'article 254, les deuxième et troisième alinéas de l'article 256, l'article 257 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption desdits projets de loi et que;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des affaires sociales mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des finances publiques mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Il soit permis à un ministre de procéder à la présentation du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, à l'étape des affaires du jour, malgré l'article 53;

«Par la suite, la durée du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, soit fixée à un maximum de 40 minutes, dont 15 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 15 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes aux députés indépendants et une réplique de cinq minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du principe soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée de l'étude détaillée des projets de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur...»

M. Paradis: Question de règlement. M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement. À ce stade-ci, M. le leader de l'opposition, un point de règlement?

M. Paradis: Oui, sur deux points, M. le Président. Le premier concerne le ministre d'État à la Métropole. Je ne sais pas s'il écoute son leader ou s'il lit Le Devoir , un article de Josée Legault. Le deuxième, est-ce que vous auriez l'obligeance de vérifier le quorum?

Le Vice-Président (M. Pinard): Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. Alors, M. le leader du gouvernement, si... M. le leader de l'opposition, point de règlement?

M. Paradis: Oui. Strictement, M. le Président, comme il n'y avait pas le quorum depuis le début, est-ce que le leader aurait l'obligeance de reprendre pour que ses députés s'aperçoivent du geste qu'il est en train...

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous le permettez, on va essayer de poursuivre nos débats dans l'ordre; je crois que nous en avons pour plusieurs heures. Alors, M. le leader du gouvernement, si vous voulez bien poursuivre.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Donc, que:

«La durée de l'étude détaillée du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, en commission plénière soit fixée à un maximum de 30 minutes après le début de ses travaux et que les articles étudiés ainsi que les amendements proposés en cours d'étude soient mis aux voix sans appel nominal;

«Le président de la commission plénière, à l'expiration de ce délai, mette aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude mais dont il saisira le président de la commission à ce moment, le titre et autres intitulés du projet de loi et fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultés ni la commission, ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix sans appel nominal;

(16 h 20)

«Tout député puisse, au plus tard 30 minutes après le dépôt des rapports concernant l'étude détaillée des projets de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, et n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer;

«La durée du débat sur la prise en considération d'un rapport d'une commission permanente ainsi que les amendements déjà transmis ou transmis conformément à la présente motion soit fixée à un maximum de 14 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération d'un rapport d'une commission permanente, les amendements déjà transmis ou transmis conformément à la présente motion soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi dont la commission permanente n'aurait pas disposé, le titre et autre intitulé du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption d'un projet de loi soit fixée à un maximum de 40 minutes, dont 15 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 15 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, cinq minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre qui présente un projet de loi; le vote sur l'adoption des projets de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«Au cours du débat sur l'adoption d'un projet de loi, un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse faire motion pour qu'il soit envoyé en commission plénière, en vue de l'étude des amendements qu'il indique; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; en commission plénière, l'étude soit limitée aux amendements proposés; la durée du débat en commission plénière soit fixée à un maximum de 15 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes pour les députés indépendants et deux minutes de réplique au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis aux voix immédiatement et sans appel nominal, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude; après quoi le président de la commission plénière fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultées ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix immédiatement sans débat et sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse proposer que l'Assemblée se constitue en commission plénière; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse, plus d'une fois au cours d'une même séance, proposer de faire rapport à l'Assemblée que la commission plénière n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement du débat puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement de l'Assemblée puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Le retrait d'une motion puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Outre les dispositions prévues à la présente motion, tous les votes soient faits à main levée à moins qu'un ministre ou un leader adjoint du gouvernement n'exige un vote par appel nominal;

«L'Assemblée puisse siéger tous les jours, à compter de 10 heures, jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux;

«Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières à la période de travaux intensifs soient appliquées.

«Les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption des projets de loi suivants: projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections; projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale; projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Strictement, M. le Président, une question au leader du gouvernement: Pourquoi, dans sa motion, suspend-il les articles 249 à 251?

M. Jolivet: Vous aurez l'occasion de l'étudier. Le leader va probablement nous demander à ce moment-ci une demande d'analyse du dossier. On pourra y répondre en temps et lieu, lorsqu'il aura fait son exercice de vérification, M. le Président.

M. Paradis: M. le Président, je ne veux pas, là, inverser les rôles, mais, à partir du moment où, oui, nous allons vérifier l'ensemble pour savoir si, sur le plan de la forme et de la recevabilité, c'est conforme, maintenant, de façon à faciliter cette étude, j'aimerais simplement de brèves explications de la part du leader du gouvernement sur ce qui le motive à suspendre les articles 249 à 251. Peut-être y aurait-il moyen d'éviter la suspension de ces articles, donc nous n'aurions pas besoin d'étudier, s'il changeait d'idée ou s'il n'a pas d'explication raisonnable à fournir à l'Assemblée.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader.

M. Jolivet: Nous introduisons, comme les motions le prévoient, de nouvelles règles. En conséquence, les numéros du règlement qui sont précités dans le cadre de ce qui est les rapports des commissions sont suspendus, dans la demande que l'on fait.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Je ne parle pas de l'application de nouvelles règles, M. le Président, je parle de la suspension des articles 249 à 251. Je vais les rappeler brièvement pour le bénéfice des membres de l'Assemblée: «Le leader du gouvernement peut demander au président de convoquer les leaders des groupes parlementaires pour qu'ils s'entendent sur le moment où le rapport de la commission devrait être déposé à l'Assemblée. Le président fait part à l'Assemblée s'il y a eu ou non accord des leaders.»

Je pense que ça ne donne rien de suspendre cet article-là. Ça suspend, finalement, des pouvoirs de la présidence, parce que, s'il n'y a pas eu entente, c'est le président qui se trouve à agir. Moi, je trouve qu'on a suffisamment d'odieux, de l'autre côté, à suspendre des droits des parlementaires sans suspendre de vos propres droits, M. le Président. Moi, je demande tout simplement au leader du gouvernement: Pourquoi s'attaque-t-il ainsi à la présidence et à ses pouvoirs?

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Cette motion telle que présentée, je ne veux pas aller sur le fond. Il va avoir le temps de la regarder puis de faire valoir quant à la recevabilité de la motion. C'est une motion habituelle que l'on fait. Nous introduisons, à ce moment-là, des règles différentes par rapport à ce que le règlement prévoit. Et, dans ce contexte-là, M. le Président, comme il ne trouve rien à dire contre la motion, il se trouve à poser des questions alors qu'il aura l'occasion de les regarder. S'il veut parler de la recevabilité, il le fera en temps et lieu. Alors, j'attends donc qu'il demande, comme de coutume, la suspension pour aller l'analyser.

M. Paradis: Oui, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. La question que je veux poser à ce stade-ci, c'est: Est-ce que vous êtes maintenant prêts à plaider sur cette motion ou si vous désirez prendre quelques instants pour l'étudier et l'analyser? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Deux éléments, M. le Président. Dans le but d'en faire une meilleure analyse, nous aurions souhaité obtenir de la part du leader du gouvernement les motifs pour lesquels il suspend des pouvoirs de la présidence. Il se refuse à le faire.

Deuxièmement, M. le Président, et ça traduit habituellement la mentalité d'un gouvernement de fin de régime, dans ces motions qui sont habituelles, il ne s'agit pas – et je pense que la présidence, là-dessus, va prendre la défense des droits et des privilèges des parlementaires – lorsqu'on parle de motion de suspension des règles, de quelque chose qui se doit d'être habituel à l'Assemblée nationale du Québec. Le fait que le leader du gouvernement, dans son vocabulaire...

M. Jolivet: Évidemment, M. le Président, à ce moment-ci...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, si vous permettez, M. le leader du gouvernement...

M. Jolivet: ...qu'il prenne le temps d'aller l'analyser. Il fera valoir ses points de vue en temps et lieu.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, M. le leader de l'opposition, à ce stade-ci, comme la motion vient d'être déposée, je vais vous permettre, à moins que le...

M. Jolivet: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous allez convenir que j'avais posé cette question-là il y a environ deux minutes. Alors, M. le leader de l'opposition, est-ce que vous désirez un temps de délibéré pour analyser la motion qui vous est déposée ou si vous êtes prêt immédiatement à plaider sur le fond?

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader.

M. Paradis: Vous aurez compris que, si nous avions obtenu des réponses aux questions que nous avons adressées au leader du gouvernement, le temps requis serait d'autant raccourci. Comme nous n'avons pu obtenir aucun éclaircissement de la part du leader du gouvernement, dans les circonstances et compte tenu de l'ensemble des articles qui affectent les droits de tous les parlementaires d'un côté comme de l'autre de la Chambre, vos droits comme président de l'Assemblée nationale également, M. le Président, nous demandons d'avoir un temps raisonnable, dans les circonstances, pour pouvoir vous faire part des motifs qui font en sorte qu'on n'est pas dans une situation habituelle, que nous nous retrouvons dans des circonstances exceptionnelles et qu'il y a de la part du leader du gouvernement, ce qui est caractéristique d'un gouvernement de fin de régime, des abus de droit et des abus de pouvoir.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, ça dépasse un peu les bornes, mais, si le leader de l'opposition a besoin de cours accélérés sur la façon de faire des motions, on peut bien lui en donner. Mais, entre-temps, la coutume veut que vous ayez environ une demi-heure, alors...

(16 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition...

M. Paradis: Moi, je ne dis jamais non...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...vous êtes prêt à prendre du temps?

M. Paradis: M. le Président, je ne dis jamais non aux cours qui pourraient m'être offerts; mais, quand ça m'est offert par un élève qui a failli la session, je suis un peu inquiet.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, M. le leader de l'opposition, dois-je en conclure que vous avez besoin d'un temps avant de plaider? Oui?

Alors, je vais maintenant suspendre nos travaux durant 20 minutes, afin de permettre aux parlementaires de prendre connaissance de la motion et du projet de loi.

(Suspension de la séance à 16 h 31)

(Reprise à 16 h 59)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. M. le leader de l'opposition, je serais maintenant prêt à vous entendre sur la recevabilité de la motion déposée par le leader du gouvernement.


Débat sur la recevabilité


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Deux arguments qui tirent leur source du même principe, mais qui s'appliquent différemment dans les deux cas que je vais vous soumettre.

(17 heures)

La règle veut que, lorsqu'un leader du gouvernement suspend les règles, il se doit de suspendre les articles du règlement qui créent ces règles avant de pouvoir les remplacer par de nouvelles règles. Dans le cas qui nous préoccupe, je vous avais indiqué, avant le court délai que vous nous avez accordé pour procéder à l'examen d'une motion fort complexe, que le leader du gouvernement ne s'attaquait pas simplement aux droits et aux privilèges qui touchent les membres de l'Assemblée, mais que la présidence était également attaquée par la motion présentée par le leader du gouvernement.

En se voulant subtil, le leader du gouvernement n'a pas suspendu le huitième alinéa de l'article 2 du règlement de l'Assemblée nationale ni aucun de ses alinéas, tous les pouvoirs de la présidence, parce qu'il ne voulait pas que ça paraisse qu'il s'attaquait à votre personne. Il n'a suspendu aucun des alinéas de l'article 2, tant et si bien que les fonctions, les pouvoirs et les droits de la présidence n'ont pas été directement attaqués par la suspension de l'article 2. Il aurait pu le faire. Il ne recule devant rien, même pas devant les fonctions que sont les vôtres.

Maintenant, si on se reporte à l'article 222 du règlement comme tel, là il le fait indirectement, par la bande, M. le Président. L'article 222 confère à la présidence... Et je vous en fais lecture: «À moins que le texte n'ait été distribué aux députés, le président, au moment du vote sur un amendement, donne successivement lecture de la motion, de l'amendement et de la motion telle qu'elle se lirait une fois amendée. Il procède de même pour un sous-amendement.» Ce sont des pouvoirs qui appartiennent à la présidence.

S'il avait voulu donner ou créer du droit nouveau en enlevant à la présidence et en créant une nouvelle façon de procéder, non seulement aurait-il fallu que le leader du gouvernement suspende l'article 222, mais il aurait dû, au même moment, M. le Président, suspendre les pouvoirs... Et je ne l'incite pas à le faire, mais, pour être rigoureusement bête dans l'application de sa motion, il aurait fallu qu'au même moment il suspende les dispositions de l'article 2 du règlement de l'Assemblée nationale.

Deuxième élément, M. le Président. Je vais en convenir avec vous, ça n'est pas facile à arbitrer. Le gouvernement possède sans doute des informations que l'opposition ne possède pas, à ce moment-ci. Moi, je vous soumets respectueusement que, pour rendre sa décision, la présidence, à moins qu'elle ne possède de façon intuitive les renseignements, ça va être une décision qui va demander la collaboration du gouvernement avant d'être rendue de façon à ce que le gouvernement mette ses cartes sur la table.

La motion touche le projet de loi n° 186, le projet de loi n° 188, mais touche également le projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections. M. le Président, moi, je pense que tout le monde va en convenir, c'est une première que, pour nommer un Directeur général des élections au Québec, on procède par un bâillon, on enlève aux parlementaires le droit de se prononcer. Je ne connais pas de précédent dans aucune autre Assemblée nationale ou Législature dans le système parlementaire britannique. C'est du jamais vu. C'est un précédent. Il faut donc, M. le Président, être très, très, très, très prudent. Nous ne sommes pas dans le cadre d'une loi habituelle. Il s'agit d'une loi qui, habituellement, doit recevoir le consensus de tous les membres de l'Assemblée nationale. Je sais qu'on parle des deux tiers des membres de l'Assemblée nationale, mais la tradition – vous devez vous en inspirer, M. le Président – ce sont tous les membres qui doivent convenir.

Retrouver des dispositions de la Loi électorale dans un bâillon, je ne pense pas qu'il y ait personne qui, dans d'autres Parlements, ailleurs, ait assisté à une telle démarche gouvernementale. Le projet de loi est très simple, M. le Président. Ce qu'on nous dit...

Une voix: ....

M. Paradis: Je m'excuse, là. Si vous avez des remarques à faire, tantôt je vais me rasseoir, à la demande du président, et vous pourrez, M. le leader du gouvernement... Je sais que c'est un précédent, que vous en avez peut-être honte, que vous préférez parler en dehors des caméras plutôt que devant la caméra, et je vous comprends.

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je suis habitué à la façon dont le leader de l'opposition fonctionne. Je faisais simplement mention: Est-ce qu'on est sur le fond de la motion ou si c'est sur la recevabilité? C'est simplement ça que je demandais. Alors, je le fais publiquement: Est-ce qu'on est sur le fond ou sur la recevabilité?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, je vous inviterais à poursuivre.

M. Paradis: Si jamais vous décidiez qu'elle était recevable, d'autres collègues plaideront sur le fond. Moi, je demeure sur la forme à ce moment-ci, et j'indiquais que, sur le plan de la forme, il n'y a pas d'autres Parlements, dans ce qu'on appelle le système parlementaire britannique, qui ont soumis à un bâillon une loi électorale. Ça va à contre-sens de tout ce qui soutient nos institutions démocratiques, et je vous invitais à ce moment-là, M. le Président, à faire preuve d'un maximum de prudence, à interpréter l'argument que je vais vous soumettre non pas en faveur d'un gouvernement qui se doit de gouverner dans des lois usuelles qui affectent les citoyens, mais d'avoir une distinction pour une loi qui s'appelle la Loi électorale. Et j'étais à vous citer...

Il y a deux articles; je vais en citer simplement un, M. le Président, de la Loi électorale. Ce qu'on nous dit: «Malgré l'article 478 de la Loi électorale, l'Assemblée nationale peut, au plus tard le 23 juin 1998 – date prévue au règlement pour la fin de nos travaux parlementaires – nommer une personne qui n'est pas un électeur au sens de cette loi.»

Ça veut dire, ça, là, pratiquement parlant, que ce qu'on nous demande, c'est de nommer quelqu'un qui n'est pas un électeur du Québec pour surveiller les élections au Québec. «La personne ainsi nommée – parce qu'il y a une balise, M. le Président – doit toutefois acquérir la qualité d'électeur dans les neuf mois qui suivent la date de son entrée en fonction – et là on connaît la proximité probable des élections – sans quoi son mandat prend fin, malgré l'article 479 de cette loi, un an après cette date.»

M. le Président, moi, j'attirerais votre attention particulièrement, oui, sur l'article 478 qui prévoit, dans la Loi électorale, que «sur proposition du Premier ministre, l'Assemblée nationale nomme, par résolution approuvée par les deux tiers de ses membres, le directeur général des élections choisi parmi les électeurs et elle fixe sa rémunération et ses autres conditions de travail.»

D'abord, c'est un article qui est bien connu, mais est-ce que le gouvernement, pour saisir cette Assemblée sur le plan de la forme, n'aurait pas dû soit suspendre à ce moment-ci les dispositions du troisième alinéa de l'article 1 de la Loi électorale, Loi électorale qui dit: «Possède la qualité d'électeur, toute personne qui [...] est domiciliée au Québec depuis six mois – ça ne semble pas être le cas, on pense que ce n'est pas le cas, mais vous avez le pouvoir de le vérifier, M. le Président – ou, dans le cas d'un électeur hors du Québec, depuis 12 mois.»? À ce moment-ci, M. le Président, si on veut nommer un électeur hors Québec, dans un bâillon, par loi spéciale, Directeur général des élections du Québec, peut-être que, d'autorité, le gouvernement peut le faire. Mais aurait-il dû suspendre l'application du troisième alinéa de l'article 1?

De façon à compliquer – et je ne le fais pas par exprès, c'est la motion du leader du gouvernement qui me condamne à le faire – davantage le débat ou votre décision, M. le Président, j'attire votre attention également sur l'article 293 de la Loi électorale du Québec:

«Est admissible à exercer son droit de vote hors du Québec pendant les deux ans qui suivent son départ, l'électeur qui quitte temporairement le Québec et qui remplit les conditions prévues par la présente sous-section.

«Toutefois, le délai de deux ans ne s'applique pas:

«1° à l'électeur qui est affecté à l'extérieur du Québec à une fonction pour le compte du gouvernement du Québec ou du Canada.»

M. le Président, est-ce que quelqu'un qui présentement serait à l'emploi d'Élections Canada est quelqu'un qui oeuvre pour le compte du gouvernement du Canada? Pas clair, parce que quelqu'un qui oeuvre au bureau du Directeur général des élections oeuvre pour le Parlement canadien, pour l'Assemblée nationale du Québec. En tout cas, moi, c'est une prétention que je vous soumets, vous pourrez en décider. Et, compte tenu de la décision que vous rendrez, à ce moment-là, est-ce que l'article 293 aurait dû ou n'aurait pas dû être suspendu par le leader du gouvernement? On se retrouve dans la bizarre des situations où, par une motion de suspension des règles, dans un bâillon, on s'apprête à permettre ou à autoriser la nomination de quelqu'un qui n'est pas un électeur, de quelqu'un qui n'est pas du Québec pour superviser notre travail électoral.

(17 h 10)

M. le Président, il y a des gens qui diraient que ça sent la république de bananes, le fait que quelqu'un qui n'est pas un électeur, quelqu'un qui est de l'extérieur vienne superviser les élections au Québec, et on met ça à l'intérieur d'un bâillon où on enlève aux parlementaires des deux côtés de la Chambre le droit de s'exprimer sur un tel sujet. Je pense que le leader du gouvernement, dans un débordement d'abus de pouvoir, vous demande de considérer comme étant recevable sa stratégie parlementaire qui vise à faire en sorte qu'on ne trouve personne au Québec assez compétent, avec la qualité d'électeur, pour faire entre nous autres les choses qu'on a à faire. Et, comme si ce n'était pas suffisant, on vous dit: Vous, là, vos pouvoirs, on ne les suspendra pas directement parce qu'on ne veut pas avoir l'air de vous faire affront, mais on le fait en suspendant l'article 252 du règlement où on en élimine, de vos pouvoirs.

Moi, je plaide tout simplement au nom de tous les parlementaires des deux côtés de la Chambre qui ne souhaitent voir personne de l'extérieur du Québec venir nous dire comment on va faire nos élections, surtout pas à partir d'Ottawa. Je plaide au nom de la présidence et là je sais dans quelle situation délicate vous vous retrouvez pour rendre cette décision. Quand la présidence est elle-même attaquée sournoisement – pas directement, M. le Président, sournoisement – quand on vous retire des pouvoirs, ça vous place dans une situation très délicate, mais je fais confiance à votre traditionnel sens de l'équilibre pour que la décision appropriée soit rendue dans les circonstances, malgré le fait que je suis conscient du calendrier dans lequel nous nous retrouvons et des pressions gouvernementales que subit le leader du gouvernement. Mais je ne voudrais pas que ces pressions-là se transposent sur la présidence. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. Je cède maintenant la parole, sur la motion, à M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Sur la recevabilité de la motion, je vais abonder dans un sens qui se rapproche de celui du leader de l'opposition parce que je pense que, selon le huitième alinéa de l'article 2, concernant les droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres que vous avez à protéger, vous devez tenir compte, dans votre rôle, de la nature des droits, des privilèges qui sont liés à un certain nombre de législations qui peuvent être votées par l'Assemblée. Or, dans certains pays, la Loi électorale, elle est constitutionnalisée, elle fait partie de l'ordre constitutionnel parce que la Loi électorale est au-dessus de toutes les lois. C'est la loi qui permet aux gens d'élire, de choisir les personnes qui vont ensuite voter les lois, donc de constituer le Parlement par élections.

Dans la Loi électorale, il y a un article – et je suis convaincu que vous avez à en tenir compte dans votre décision – qui est l'article qui nomme le Directeur général des élections. Donc, non seulement on parle de la loi qui préside à l'organisation des élections, mais au choix de celui qui est au-dessus de tout ça. Le Directeur général des élections va administrer le vote, va présider...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...M. le député de Rivière-du-Loup.

Considérant l'importance de la Loi électorale du Québec, je vous demanderais, s'il vous plaît, votre plus minutieuse attention et j'ai besoin également du plus d'attention possible avant de rendre une décision. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Donc, on choisit le Directeur général des élections, et le principe que j'énonce, M. le Président, est très clair. Dans l'article 478 de la Loi électorale, parce qu'on prévoit que c'est une nomination qui se fait aux deux tiers de l'Assemblée nationale, donc il n'y a pas un vote du gouvernement qui peut se faire de façon régulière.

Alors, là – question que je pose – est-ce que, en vertu du huitième alinéa de l'article 2, le gouvernement peut aller jouer par bâillon, est-ce que le gouvernement est légitime d'aller jouer par bâillon – et ça, de le faire par bâillon, donc sans avoir les deux tiers de l'Assemblée – dans un article qui vient modifier les règles qui sont derrière la nomination? Parce que la nomination elle-même du Directeur général des élections doit se faire aux deux tiers.

Là, le gouvernement vient de nous dire qu'un critère qui semble être un critère fondamental, c'est celui d'être un électeur. On dit: Est-ce qu'on choisirait un scrutateur, un greffier qui ne soit pas électeur? Bien là, on va choisir le Directeur général des élections – le grand boss en haut – qui ne sera pas un électeur. Est-ce qu'on peut le faire sans les deux tiers, par bâillon, alors qu'on ne pourrait pas nommer la personne, même une personne qui aurait toutes les qualifications? Qu'on prenne, qu'on aille chercher dans la rue, ici à Québec, un électeur qui aurait toutes les qualifications, on ne pourrait pas le nommer sans les deux tiers, mais on pourrait changer les critères qui sont derrière la nomination sans les deux tiers. Alors, il me paraît, M. le Président – et je reprends les termes du leader de l'opposition – que c'est en soi un abus de pouvoir et que, si vous voulez protéger les droits et privilèges des parlementaires, il ne me paraît pas qu'à l'intérieur d'une motion de suspension des règles...

Je comprends qu'il y ait un certain caractère d'urgence qui puisse être affecté, mais dans ce cas-ci je considère que l'urgence est un faux prétexte et que le prétexte réel, la motivation réelle, c'est un abus de pouvoir de la part du gouvernement pour bousculer le Parlement dans des nominations qui vont ensuite présider au choix de ceux qui vont composer le prochain Parlement, donc qui vont voter toutes les législations futures. Toutes les législations qui vont être adoptées dans le Parlement durant trois, quatre ans après la prochaine élection générale, quelle que soit la composition de la Chambre, vont être faites sous un bâillon, sous une nomination qui va avoir été faite par bâillon, des critères qui vont avoir été passés par suspension des règles, alors que dans la Loi électorale on dit qu'on ne peut même pas en nommer un si on n'a pas le consentement des deux tiers de l'Assemblée. Puis là je ne vous parle pas de la tradition, la tradition qui est d'avoir l'unanimité quand vient le temps de nommer le Directeur général des élections.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. J'entendrais, en terminant, M. le leader du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Il faut le faire. D'abord partons de l'article 22 dont faisait mention le leader de l'opposition. Qu'on regarde les décisions qui ont été rendues le 18 décembre 1997, prenez les décisions qui ont été rendues le 18 juin 1997, et à toutes les fois vous avez compris que cette motion était jugée recevable même si l'argumentation apportée par le leader de l'opposition a pour but de dire qu'elle n'est pas recevable. Donc, je vous rappelle à vos décisions.

On sait très bien que, si on veut amener de nouvelles règles, il faut d'abord soustraire du règlement les numéros de règlement que l'on veut soustraire pour ensuite lui donner des mesures supplétives, des règles supplétives. Et, dans ce contexte-là, M. le Président, je n'ai point besoin de reprendre toute l'argumentation que l'on a eue depuis nombre d'années sur l'article 22, puisque cette motion renferme les mêmes éléments au niveau du règlement que les motions qui ont été jugées par vous-même et par d'autres qui vous représentent à la présidence comme étant recevables.

Sur la question maintenant de la Loi électorale, il faut avoir la mémoire très courte, de la part des deux qui sont en face de moi, pour oublier qu'il y a eu – on s'en souvient – une décision du même genre pour adopter le projet de loi 40 qui parlait de la liste électorale permanente. Vous vous souvenez, tout dernièrement, de la loi n° 407, et le député qui vient de parler, le député de Rivière-du-Loup, était lui-même en face de moi lorsque nous avons étudié le projet de loi n° 407 qui avait pour but de régler le problème au niveau électoral scolaire. Donc, M. le Président, cette mémoire fait défaut, j'en suis assuré, aux deux députés d'en face.

Quant à la validité du projet de loi, qui est un projet de loi sur la Loi électorale, il faut se souvenir que c'est aux tribunaux de juger de la pertinence de la validité d'un tel projet de loi. Quant au projet de loi déposé, M. le Président, contrairement à ce qu'affirment les deux députés – le leader de l'opposition et le député de Rivière-du-Loup – ils sont allés jusqu'à dire que le projet de loi avait pour but de nommer en dehors de la règle habituelle de l'Assemblée nationale, qui est des deux tiers, le Directeur général des élections, c'est faux, M. le Président, ce n'est pas réel. Demain, il y aura, selon les procédures habituelles à cette Assemblée, une proposition qui sera faite, laquelle aura à prendre la valeur des deux tiers et, si possible, l'unanimité, comme il se fait dans la nomination des personnes en vertu des lois qui nous gouvernent.

(17 h 20)

Alors, M. le Président, le but de la proposition que nous faisons n'est pas de nommer un Directeur général des élections, il est d'amener un amendement à la Loi électorale, tel que nous le permet le règlement, comme on l'a fait dans bien d'autres occasions, pour arriver à permettre, peut-être, cette nomination si on désire le faire. Et ça, les députés de l'Assemblée nationale, par la consultation qui a eu lieu entre les chefs de parti politique...

Cette discussion-là a été faite à un autre niveau, mais, si jamais on avait l'intention de nommer cette personne, tel que le règlement le prévoit, demain, M. le Président, il fallait apporter un amendement à la Loi électorale. Nous en avions fait mention aux partis politiques représentés à cette Assemblée. Cependant, il y a eu quelqu'un qui s'est objecté. C'est son droit le plus strict, jamais je ne lui enlèverai ce droit. Tout simplement, nous le faisons et nous le plaçons dans les décisions que nous avons pour la suspension des règles nous permettant de l'adopter, et ça, permettant demain d'agir en vertu de la loi pour la nomination.

Donc, il est faux de prétendre, M. le Président, qu'à ce moment-ci le but de ce projet de loi est de nommer quelqu'un. Il est de faciliter la décision que nous aurons à prendre demain, et ça, c'est autre chose. Et, comme c'est un amendement à la Loi électorale, comme toutes les lois ici à l'Assemblée, elle demande non pas l'unanimité ou les deux tiers, elle demande, dans tous les cas, la décision prise par le Parlement à la majorité, comme on connaît.

Alors, M. le Président, devant ces faits, je vous implore de regarder attentivement les argumentations apportées, mais en vous rappelant que la motion qui est présentée devant nous est du même effet que les autres motions qui ont été jugées recevables par vous et vos prédécesseurs depuis nombre d'années et, en particulier, j'en faisais mention, au mois de décembre et au mois de juin 1997.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Un complément d'information que vous voulez me donner, M. le leader de l'opposition?

M. Paradis: Oui, très rapidement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Allez-y.

M. Paradis: Deux éléments. Le leader du gouvernement vous indique que l'objectif du projet de loi sur la Loi électorale est de faciliter la nomination d'un Directeur général des élections. Ce n'est pas vrai. Présentement, pour nommer un Directeur général des élections, la loi prévoit qu'il faut qu'il s'agisse de quelqu'un qui a la qualité d'électeur au Québec. Ça n'est pas de le faciliter, c'est de l'autoriser légalement et législativement, M. le Président, dans un bâillon. Distinction.

Deuxième élément, M. le Président. Je sais que la jurisprudence est imposante. L'article 183 de notre règlement stipule que «la motion ne requiert pas de préavis si le motif invoqué est l'urgence». Je n'ai pas entendu le leader du gouvernement plaider sur l'urgence. Je sais que plusieurs de vos prédécesseurs ont déjà jugé qu'à partir du moment où l'urgence est invoquée la présidence n'a pas à s'immiscer dans le débat, et cette jurisprudence-là est constante depuis un certain nombre d'années.

Je vous soumets quand même, M. le Président, que la présidence demeure toujours libre de reconsidérer ses décisions quant à ce critère et que, le jour où la présidence le fera, la présidence accroîtra son rôle et son importance dans le cadre de nos travaux parlementaires. Et, si jamais la présidence en arrivait à la conclusion que le moment est arrivé, malgré la jurisprudence précédente, de statuer sur l'urgence, moi, j'aimerais entendre, pour que vous le fassiez de façon éclairée, le leader du gouvernement sur l'urgence qu'il y a à appauvrir les plus démunis de la société, j'aimerais entendre le leader du gouvernement sur l'urgence qu'il y a à fermer des bureaux de courtiers d'assurances au Québec.

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, si on n'a pas plaidé l'urgence, je voudrais que vous preniez votre décision en sachant qu'on aura l'occasion de revenir sur le débat de fond. Mais ne commençons pas le débat de fond à ce moment-ci sur la question de l'urgence, c'est la jurisprudence qui fait effet.

Quant à la deuxième partie concernant le Directeur général des élections, M. le Président, je vous rappelle que le but du projet de loi est de permettre la possibilité, mais, si jamais les gens ne voulaient pas, malgré toutes les discussions qui ont eu lieu jusqu'à maintenant sur la nomination du Directeur général des élections, tenir l'engagement qu'ils ont pris, à ce moment-là, c'est à eux de le faire valoir demain.

Le Vice-Président (M. Pinard): En terminant, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, très brièvement, en insistant sur la juridiction qui est la vôtre et sur la discrétion qui est la vôtre. Vous pouvez choisir, M. le Président, à ce moment-ci, comme président de l'Assemblée nationale du Québec, de statuer sur l'urgence. Le leader du gouvernement vient de confirmer, par son absence d'argument sur l'urgence, qu'il a invoqué l'urgence, mais qu'il n'y avait pas d'urgence pour appauvrir les Québécois et pour fermer des bureaux de courtiers d'assurances comme tels. Je veux simplement, à ce moment-ci...

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement.

M. Paradis: Est-ce que je peux terminer, là? Est-ce que je peux terminer?

M. Jolivet: Non, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, messieurs! À ce stade-ci, j'ai eu le privilège de vous entendre pendant 25 minutes et je suis maintenant prêt à me retirer pour rendre ma décision concernant la recevabilité de la motion. Alors...

M. Paradis: M. le Président, simplement une question de... Est-ce que l'article en vertu duquel s'est levé le leader du gouvernement sur une question de règlement a été suspendu ou pas?

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, je vous annonce immédiatement que je suspends les travaux jusqu'à 20 heures. Et, à 20 heures, je rendrai ma décision concernant la recevabilité de la motion.

(Suspension de la séance à 17 h 26)

(Reprise à 20 h 8)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Décision du président sur la recevabilité

Tel que je vous l'avais mentionné à la fin des affaires du jour, à 18 heures, nous avons pris la décision en délibéré et nous sommes maintenant prêt à la rendre. Après avoir analysé l'argumentation qui m'a été soumise par les leaders parlementaires et le député de Rivière-du-Loup, j'en viens à la conclusion que cette motion est tout à fait recevable.

Tout d'abord, la présidence n'a pas à se prononcer sur l'opportunité, pour le gouvernement, d'inclure dans la motion de suspension des règles de procédure la présentation et l'adoption du projet de loi n° 453, et ce, même si ce dernier a pour objet de modifier une loi qui, dans l'esprit des députés, est fondamentale. D'ailleurs, le règlement ne fait aucune distinction quant à la nature des projets de loi pouvant être visés dans une motion de suspension des règles de procédure. De plus, à cet égard, la présidence n'a pas à se prononcer sur la légalité ou non des dispositions contenues dans un projet de loi, pas plus qu'elle n'a à se prononcer sur la conformité ou les effets juridiques d'un projet de loi avec d'autres dispositions législatives . En cette matière, le rôle du président consiste uniquement à déterminer si la motion est recevable, c'est-à-dire si elle répond aux exigences de la procédure contenues dans le règlement. Aussi, le rôle de la présidence n'est pas, en l'espèce, mis en cause. En fait, tout ce que prévoit la motion de suspension des règles de procédure, c'est la suspension d'articles du règlement, comme d'ailleurs l'article 182 de notre règlement le permet.

(20 h 10)

Une motion de suspension des règles de procédure n'est pas une atteinte aux droits et aux privilèges de l'Assemblée et de ses membres ni une atteinte à l'autorité de la présidence, puisque c'est l'Assemblée qui a adopté unanimement les dispositions qui rendent possible la présentation d'une telle motion. La motion peut donc prévoir la suspension de l'article 222 de notre règlement sans pour autant prévoir la suspension du paragraphe 8 de l'article 2, en vertu duquel le président exerce tous les pouvoirs nécessaires à l'accomplissement de ses fonctions. L'article 222 traite d'une fonction spécifique du président, alors que l'article 2 est un article qui porte sur des pouvoirs généraux du président.

Enfin, selon une abondante jurisprudence, il est clairement établi que la présidence ne se prononce pas sur l'urgence de présenter une motion de suspension des règles de procédure. En fait, cette urgence n'a qu'à être invoquée dans la motion. Il revient à l'Assemblée elle-même, lors du vote sur la motion, de se prononcer sur cette question.

Par ailleurs, je vous rappelle que le président de l'Assemblée a soumis en avril dernier une proposition de modification au règlement qui prévoit une révision en profondeur des règles qui gouvernent la suspension des règles de procédure.

Compte tenu que la motion est jugée recevable, je vais maintenant suspendre de nouveau les travaux afin de tenir une réunion avec les leaders pour répartir le temps de parole du débat restreint auquel donne lieu une motion de suspension des règles de procédure.

Alors, nous allons suspendre pour quelques instants, et j'inviterais les leaders à me suivre.

(Suspension de la séance à 20 h 13)

(Reprise à 20 h 16)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous allons entreprendre immédiatement le débat sur la motion de suspension des règles, le débat restreint de deux heures. Il y aura quatre minutes de réservées pour chacun des députés indépendants; le reste du temps, des deux heures, des 120 minutes, sera réparti également; et le temps non utilisé par une des parties pourra être réparti équitablement. Il n'y a pas de limite dans les interventions individuelles à l'intérieur de ce cadre du temps réparti.

Alors, je suis prêt maintenant à reconnaître, à céder la parole... Est-ce que vous avez une directive ou une...

M. Gobé: M. le Président, une question de directive. Vous avez dit qu'il y aura quatre minutes pour les députés indépendants et que le reste du temps, 120 minutes, sera divisé entre les deux formations. Ce n'est pas sur ça que nous nous sommes entendus. Nous avons dit qu'il y aurait quatre minutes pour les indépendants, pour chacun des trois indépendants, le reste du temps étant divisé entre les deux formations et le temps non utilisé étant réparti entre les deux formations. Alors, selon vous, selon ce que vous venez de dire, ça ferait 134 minutes. Alors, peut-être rectifier.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, c'est bien ce que j'ai dit, je crois. Alors, je n'ai pas dit le temps que ça représentait pour chacun, mais vous avez à faire le décompte. Je vais le calculer, moi: vous avez 120 moins 12; on partage ce qui reste à deux; et la partie du 12 non utilisée sera répartie équitablement. Et si, dans l'autre partie, 50-50, un groupe parlementaire n'utilise pas tout son temps, il pourra être accordé à l'autre. C'est bien?

M. Gobé: Parfait.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je suis prêt à céder la parole au premier intervenant. M. le leader du gouvernement, je vous cède la parole.


Débat sur la motion


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Nous sommes donc devant une décision qu'il fallait prendre et pour laquelle, d'ailleurs, vous nous donnez raison, comme de coutume. D'ailleurs, c'est devenu une habitude de donner raison à la motion telle que présentée, puisque celle que nous avions présentée, M. le Président, était équivalente à celle du 18 juin dernier et du 18 décembre dernier, qui étaient des motions semblables.

Aujourd'hui, nous sommes devant la décision qu'il appartient au gouvernement de prendre pour présenter, dans cette motion de suspension des règles, trois projets de loi. Nous allons regarder chacun par les gens qui auront à défendre les raisons pour lesquelles nous croyons qu'il est utile et important d'agir.

Nous avons d'abord le dossier qui est le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. M. le Président, il y a eu beaucoup de discussions: il y a eu des discussions dans des projets de loi antérieurs; on a fait des consultations avant le projet; on a fait des consultations sur le projet; on a fait des discussions sur le projet. Il y a eu, de la part de la ministre responsable de ce dossier, beaucoup de discussions avec les membres de la commission mais aussi avec d'autres groupes venant de partout à travers le Québec, et je crois qu'il était important à ce moment-ci, si on veut faire profiter ces personnes des bienfaits d'une telle loi, de l'adopter à cette session-ci.

On aurait pu dire: Écoutez, le projet de loi vient juste d'être présenté puis, en conséquence, on devrait le reporter à plus tard. Je dois vous dire, M. le Président, qu'il est très important et très urgent de l'adopter à ce moment-ci parce qu'il y a des personnes qui vont pouvoir profiter des bienfaits d'une telle loi. C'est une loi qui, dans le contexte de l'ensemble des discussions qu'on a eues, à travers les mois et les semaines où les gens ont eu à discuter de ce sujet, beaucoup de demandes qui, avec les derniers amendements que la ministre a présentés, auront, je suis sûr, des effets bénéfiques pour les citoyens et les citoyennes qui malheureusement doivent demander de l'aide à ce ministère.

(20 h 20)

Je vous rappellerai, M. le Président, que ne pas le faire à ce moment-ci puis retarder à la session suivante aurait été, quant à moi, désastreux pour l'ensemble des personnes qui auront à avoir des bienfaits de cette loi. Alors, ce pourquoi nous le faisons à ce moment-ci, c'est l'insistance des gens de l'opposition à vouloir l'étudier tellement tranquillement qu'on savait qu'on ne l'adopterait pas, au rythme où c'était parti. Il fallait agir. D'ailleurs, M. le Président, la ministre, dans les derniers jours, a fait des présentations d'amendements qui, j'en suis assuré, seront pour le bien-être des gens.

Vous avez le deuxième projet de loi, qui est le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers. Je sais que le ministre responsable, qui est ici, aura l'occasion d'en faire mention, des raisons pour lesquelles on doit l'adopter. Mais je ferai mention de mes collègues qui ont travaillé avec le ministre, de tous les gens qui, même de l'autre côté, ont eu des échanges avec le ministre, avec toutes les organisations qui représentent ce secteur, et qui en sont arrivés à la conclusion qu'il était très important et très urgent de l'adopter à cette session-ci.

Parce que ce n'est pas la première fois qu'on en parle; c'est depuis nombre de mois que ces discussions étaient sur le chantier, M. le Président, et, au bout de la course, ne pas l'adopter aujourd'hui serait, à mon avis, quelque chose qui ne serait pas responsable de la part d'un gouvernement. Et, dans ce contexte-là, le ministre, qui en fera mention tout à l'heure, vous indiquera les raisons pour lesquelles nous devons adopter à ce moment-ci ce projet de loi pour l'économie québécoise.

Le dernier concerne un dossier qui est la loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections. Il est évident, M. le Président, que nous avions eu la démission du président-directeur général des élections, M. Pierre-F. Côté, qui avait été suivie par un intérim, qui était M. Casgrain, et qui, dans le cadre de nos fonctions, a été renouvelé pour un six mois, on s'en souvient, l'automne dernier, à la fin de la session du mois de décembre. Nous étions dans la décision de remplacement ou de nomination définitive de ce Directeur général des élections. Nous avons fait des consultations – et le ministre responsable aura l'occasion d'en faire mention – qui ont abouti à l'acceptation, du côté de l'opposition, de la personne qui sera suggérée.

Cependant, il y a eu une obligation que nous avions, et ne pas le faire à ce moment-ci serait, encore une fois, incorrect de la part d'un gouvernement qui doit prendre des décisions. Il est évident qu'on peut faire des gorges chaudes, comme on l'a fait pendant la discussion sur la recevabilité de cette motion, M. le Président. Mais il faut savoir aussi en même temps reconnaître qu'on ne peut pas avoir deux langages: l'un qui est fait lorsque l'on a des discussions en privé pour aboutir à une décision finale et l'autre qui se fait devant l'Assemblée.

Je suis capable d'accepter les blâmes, mais je ne suis pas capable d'accepter la façon dont on a fait la discussion avant le souper sur cette question-là. D'autant plus qu'il y avait un député qui représente une formation politique qui était en désaccord, et c'est son droit. Il nous l'a dit. On a essayé de discuter avec lui, mais finalement il a dit qu'il ne voulait pas, pour des raisons qui lui appartiennent. Ce n'est pas à moi de l'expliquer, c'est à lui de le faire. Mais, devant ces faits, il fallait quand même prendre une décision.

La décision que nous avons prise importe dans la mesure où la personne qui pourrait être choisie... Parce qu'il faut se le rappeler, cette personne-là doit être nommée, en vertu de nos lois, en regard d'une décision de l'Assemblée nationale qui aura lieu demain matin et qui sera supportée, je l'espère, par la majorité des membres de cette Assemblée, aux deux tiers. D'autant plus que ce serait encore mieux si elle l'était à l'unanimité, ce qui se fait normalement dans des postes comme ceux-là.

Alors, dans le contexte actuel, il y avait un problème. On avait fait mention aux gens d'en face de cette question-là. Et, pour des raisons qui leur appartiennent – puis ça, je suis prêt à accepter qu'ils aient des réticences... ce n'est pas, cependant, ce que nous avions, en termes de discussion. Ce qui fait qu'au bout de la course la personne, qui était au Québec, qui travaillait dans le service au niveau des élections du Québec, à un moment donné, a décidé, pour des raisons qui lui appartiennent, d'aller travailler à l'extérieur, se trouve à ne pas être quelqu'un qui est électeur au sens de la loi, au niveau du Québec. Il s'agit simplement de passer cette loi-là lui permettant des délais pour accéder à son droit et, en conséquence, de pouvoir quand même le nommer président-directeur général des élections.

Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, je vais laisser les gens de l'opposition faire leurs représentations sur la motion qui est devant nous, déchirer leur linge s'ils le désirent, faire un peu de démagogie; on est habitué à ça. Ce qui est important, c'est qu'au bout de la course on ait quelqu'un capable de faire la job, et on pense, jusqu'à maintenant, et on pensait, de notre côté, jusqu'à maintenant – je suis sûr que ce sera la même chose demain – que c'est une personne capable de faire la job qu'on va lui demander de faire au nom de tous les citoyens du Québec.

Alors, dans ce contexte-là, M. le Président, je vous dis que nous allons voter en faveur de la motion de suspension des règles telle que présentée, et nous aurons l'occasion, lorsque viendra le temps en vertu de cette motion, d'étudier plus précisément chacun de ces projets de loi selon les modalités prévues par la motion de suspension. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader du gouvernement et député de Laviolette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci beaucoup. M. le Président, j'entendais le leader du gouvernement prédire qu'on allait déchirer notre chemise puis, en tout cas, faire de la démagogie, tout ce qu'il vient de dire par rapport à ce projet de loi qui vise à amender la Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections. Mais ça devient presque une habitude pour ce gouvernement, à la fin de chaque session, d'adopter par bâillon, pour une raison ou une autre, une loi qui modifie la Loi électorale.

La Loi électorale, je n'en ferai pas des gorges chaudes, parce qu'il s'agit tout simplement de dire très calmement que c'est la loi fondamentale qui gère le processus d'élection, qui établit les règles du jeu. S'il y a une loi sur laquelle tous les parlementaires doivent être d'accord pour ce qui est de ses modifications, c'est la Loi électorale. Alors, M. le Président, depuis les quatre années que le gouvernement est au pouvoir, pour la première fois de l'histoire du Québec, des choses essentielles dans la Loi électorale ont été modifiées par bâillon.

Aujourd'hui, ce n'est pas exactement le même contexte au niveau des changements et de ce qui amène le gouvernement à l'adopter par bâillon, mais il n'en demeure pas moins que le gouvernement nous présente un bâillon pour faire adopter une modification à la Loi électorale. Il faut donc se poser la question: Pourquoi on arrive ici, comment ça se fait qu'on est obligé, encore une fois, de faire une entorse au processus démocratique normal pour qu'on adopte une modification à la Loi électorale par bâillon, M. le Président, pour permettre, demain, la nomination du Directeur général des élections?

Ça fait un an, pas un jour, pas 12 jours, pas 12 semaines, 12 mois que le poste du Directeur général des élections est ouvert pour être comblé. Plus que ça, parce que le 12 mois représente le moment où le mandat du dernier Directeur général des élections prenait fin. On savait bien avant, plusieurs mois avant, qu'il ne serait pas renouvelé, parce qu'il avait annoncé qu'il allait démissionner. Et on se rappellera, l'année passée, du cafouillage devant lequel le gouvernement a été obligé, à la dernière minute, d'adopter une loi spéciale pour nommer par intérim un Directeur général des élections. Du jamais fait: un Directeur général des élections par intérim nommé il y a un an pour six mois.

(20 h 30)

Ils avaient donc un autre six mois à ce moment-là pour régler le dossier, trouver un candidat valable, suggérer le nom à l'opposition officielle, consulter l'opposition officielle, parler aux autres membres ici, en cette Chambre, qui ne font pas partie, pour des raisons qui leur appartiennent, de l'opposition officielle, M. le Président. Ils ne l'ont pas fait. Ils ont, encore une fois, été incapables de gérer ce dossier comme du monde responsable. Et ils n'ont pas voulu nommer celui qu'ils avaient trouvé bon pour six mois, le nommer de façon permanente après son six mois. Ils ont donc été obligés, à ce moment-là aussi, d'adopter une loi à l'aveuglette pour extensionner la nomination par intérim de celui qui avait été nommé à l'expiration du mandat de l'autre, pour un autre six mois ou jusqu'à la fin de cette session.

Là, ils avaient un autre six mois durant lequel ils auraient pu faire le travail correctement, débusquer des candidats, trouver quelqu'un de compétent, d'objectif, qui aurait fait l'accord de tout le monde ici, dans ce Parlement. Parce que, je vous rappelle, c'est la fonction la plus importante que nous avons dans le déroulement de nos élections. C'est l'arbitre, c'est celui qui dit: Ça, c'est correct, ça, ce n'est pas correct, qui applique la loi qui a été adoptée ici, en cette Chambre. Donc, il faut que ça soit quelqu'un en qui nous avons confiance. Et c'est pour ça, d'ailleurs, que c'est une des rares personnes de notre système parlementaire qui est nommée par l'Assemblée nationale, non pas par le gouvernement, non pas par une majorité des députés, mais par une majorité aux deux tiers. On estime que c'est une décision importante qui doit refléter un haut niveau de consensus et d'acceptation par les gens qui sont députés en cette Assemblée, M. le Président, parce que celui qu'on va nommer va gérer le processus électoral.

Alors, pendant 12 mois et plus, le gouvernement – quelqu'un dirait tataouinait – il ne faisait rien. Ils n'ont pas été capables de mener un dossier correctement. Et là, non seulement ça, mais, au mois de décembre passé, ils ont adopté d'autres modifications législatives à la Loi électorale pour modifier un processus électoral qu'on vient de connaître, celui des élections scolaires, en refilant des responsabilités avec très, très peu d'avis à celui qu'ils avaient nommé comme Directeur général des élections par intérim extensionné, comme je le disais, par un projet de loi au mois de décembre. Et là on a vu le cafouillage qui a résulté, que la confiance de beaucoup de personnes a été ébranlée dans le système électoral, dans la Loi électorale, et nécessairement par la suite, pour plusieurs, ça a déferlé un peu sur toute l'institution du Directeur général des élections, du DGE, M. le Président.

Et c'est peut-être pour ça qu'ils ont dit: Qu'est-ce qu'on va faire? Est-ce qu'en plein milieu de tout le déroulement des élections scolaires, avec le cafouillage qu'on connaît, on va procéder à la nomination de quelqu'un? Il faudrait laisser passer le temps. Et, M. le Président, le temps passe, la session termine – elle termine demain, la session – et, ô miracle! finalement ils ont trouvé quelqu'un qu'ils ont suggéré à l'opposition, qui semble faire le consensus. On est en train de faire les vérifications en termes de références, en termes de comprendre, d'analyser le c.v. de la personne, de voir quelles ont été ses expériences, qu'est-ce qu'il apporte avec lui au poste très névralgique qu'il va occuper.

À première vue, ça nous semble quelqu'un de compétent, quelqu'un qui a une longue expérience en la matière, quelqu'un qui a oeuvré au Québec dans le bureau du Directeur général des élections, qui a une longue expertise et qui, depuis nombre d'années, travaille au bureau d'Élections Canada, M. le Président. Alors, à première vue, ça nous semble être une personnalité puis une personne avec des références impeccables au niveau de ses qualifications professionnelles. Alors, M. le Président, ce n'est pas que la personne qui est ici peut-être remise en cause, parce que, avoir à adopter une loi modifiant la Loi électorale avec un bâillon, vous comprendrez, M. le Président, qu'on ne peut pas être pour ça. Indépendamment du fond ou non, il est impossible pour l'opposition officielle de dire au gouvernement: C'est correct. Adoptez donc la loi et on va vous donner notre consentement à l'intérieur d'un bâillon. Donc, on va voter contre l'adoption de cette loi, M. le Président, par bâillon.

Mais il faut quand même s'assurer qu'on comprenne une chose. Si on est ici aujourd'hui, c'est parce que le gouvernement a failli à sa tâche dans un autre aspect des relations qu'il doit entretenir avec tous les parlementaires ici pour ce qui est de la nomination du DGE. Il y a, semble-t-il, un député indépendant qui siège ici, à cette Assemblée, qui, député comme tous les autres, ne fait pas partie du gouvernement, ne fait pas partie de l'opposition officielle, et, après que le gouvernement ait consulté l'opposition officielle, comme c'est normal... Et loin de moi de penser que ça devrait être fait autrement. C'est entre le gouvernement et l'opposition officielle d'avoir les échanges fondamentaux au niveau de la nomination qui sera faite. Mais il n'est que normal, et poli, et correct, je dirais, de tout au moins informer les autres députés, avoir leur point de vue, les aviser que c'est un tel ou un tel qui sera nommé ou suggéré à l'Assemblée nationale, parce que eux aussi auront à voter, M. le Président. Mais il faut faire ça avant que ça sorte dans les nouvelles, avant que des journalistes apprennent aux députés qui siègent ici qu'un tel ou un tel sera suggéré.

Alors, peut-être qu'on aurait pu éviter de se retrouver ici avec une loi modifiant la Loi électorale, encore une fois, dans le bâillon, si le gouvernement, ou son leader, ou je ne sais pas qui mène ce dossier, avait été un peu plus développé dans le sens des relations, M. le Président, pour avoir pu parler au député indépendant ici et lui dire: Voici la personne qu'on va nommer, etc. Et peut-être que le député – peut-être, parce qu'on ne sait pas trop, des fois, avec ce député-là, M. le Président, il fait des choses qui sont assez imprévisibles des fois – il aurait pu dire qu'effectivement, un, il faut nommer un Directeur général des élections; deux, il faut avoir un candidat compétent, sur le fond, quelqu'un qui a un esprit et un sens de la justice, qui connaît l'application des lois électorales, qui peut inspirer confiance de la part de tous les intervenants dans le dossier et qu'on peut librement et franchement accepter comme quelqu'un qu'on nommera pendant sept ou 10 ans, je pense – ce n'est pas pour un ou deux ans, c'est pour une période de temps assez longue – comme Directeur général des élections, responsable de gérer les élections et d'appliquer les règles.

Or, il s'avère, M. le Président, que la personne qu'on veut nommer, techniquement, ne peut pas occuper ce poste parce que, pendant plusieurs années, elle travaille à Ottawa, au bureau d'Élections Canada, donc en plein dans le domaine qui nous préoccupe et en pleine application pratique des lois électorales. C'est aussi une personne qui a déjà travaillé ici, au bureau du Directeur général des élections du Québec, quelqu'un qui est du Québec et qui avait déménagé pour des raisons personnelles, au niveau de son emploi, à Ottawa, ce qui fait que, techniquement, la personne n'a pas la qualité d'électeur au Québec.

Et, comme il s'agit d'élections au Québec, bien, il faut faire une de deux choses, soit se passer de ses compétences, et se passer de ses compétences strictement parce qu'il habite à l'extérieur des frontières du Québec... Il me semble que c'est normal qu'on puisse avoir recours à des gens qui ont une expertise qui habitent dans le reste du Canada. On fait partie de la même famille, M. le Président. Alors, dans ce sens-là, on aurait pu dire que, non, il ne faut pas prendre quelqu'un... On interpréterait ça très strictement: Ce n'est pas possible, il n'est pas Québécois parce qu'il n'habite pas ici, et c'est fini. Ou on aurait pu dire: Oui, il est Québécois, et on va lui demander de venir s'établir ici très, très rapidement.

Encore une fois, je le répète, si le gouvernement avait agi correctement, à temps, on n'aurait pas été dans l'obligation, et lui non plus, d'avoir un projet de loi pour corriger techniquement le problème auquel il est confronté. Alors, la faute, sans démagogie aucune...

Une voix: ...

M. Sirros: Où est-elle, la démagogie? C'est les faits que je relate, M. le Président. Parce que ceux qui sont aux commandes de l'appareil, c'est ceux qui nous amènent un projet de loi avec un bâillon. Et, normalement, on prend nos responsabilités. Je sais que ce gouvernement développe l'habitude de ne pas prendre ses responsabilités, on le voit à tous les jours avec le premier ministre, que même quand il dit qu'il est responsable politiquement pour quelque chose – je me réfère à Churchill Falls – il dit: Je m'en lave les mains, j'ai dit que j'étais responsable, que voulez-vous de plus? Comme si on devrait juste prendre des excuses comme ça, comme un substitut aux scrupules! Ce n'est pas vrai, M. le Président. Les excuses ne remplacent pas les scrupules. Et il y a des conséquences à des gestes qu'on pose, normalement.

Alors, voilà. C'est le gouvernement qui est responsable du fait que nous sommes ici ce soir à adopter encore une fois un projet de loi par bâillon pour modifier la Loi électorale.

Sur le fond, si les vérifications sur les références de la personne concernée sont concluantes et qu'effectivement nous avons une personne ici qui peut faire le travail de Directeur général des élections en ayant au départ la confiance de l'ensemble des députés ici, tant mieux. C'est ce que ça nous prend, M. le Président, c'est ce qu'il faut; il nous faut quelqu'un envers lequel on pourrait tous exprimer notre confiance. Et j'espère, moi aussi... Je ne comprends pas, M. le Président, quel est le brouhaha de l'autre côté.

(20 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, je vous inviterais à ne pas dépasser le seuil tolérable. Alors, très bien. Alors, je vous inviterais à poursuivre, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Alors, les excuses sont acceptées, M. le Président. Alors, dans ce sens-là il me semble que, sur le fond, demain, je souhaite à mon tour qu'on puisse tous trouver en la candidature de la personne qui nous est suggérée une personne qui nous permette, tous et chacun, de nous lever ici et exprimer notre confiance en la personne, parce que la loi qu'il aura à appliquer est la loi la plus fondamentale que nous ayons comme députés: c'est la loi sur les élections, M. le Président.

Et je regrette profondément, encore une fois, que nous soyons dans l'obligation de faire ce choix dans le cafouillage auquel ce gouvernement nous a habitués, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, je vous cède la parole.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Après avoir lu très attentivement les galées d'avant le souper, du leader de l'opposition, après avoir entendu les propos ronflants du député de Laurier-Dorion, je vais tout d'abord vous décrire ce qui s'est passé, et je permettrais à la population de juger de la nature des propos de ces gens-là. Je vais essayer d'expliquer en détail comment ça fonctionne, une nomination par l'Assemblée nationale, de sorte que vous allez comprendre, M. le Président, que les mots «sépulcres blanchis» sont insuffisants pour qualifier ces gens, parce que, si je me laissais aller à mes propos habituels, vous me demanderiez trois fois de retirer mes paroles et probablement que vous m'expulseriez de la Chambre.

Tout d'abord, M. le Président, voici comment ça marche, une nomination de l'Assemblée nationale. Le chef du gouvernement appelle le chef de l'opposition et lui fait des suggestions. Par exemple, il dit: Le sous-ministre de la Justice, M. Bouchard, pourrait-il devenir un excellent DGE? Il pose la question, on attend la réponse. La réponse ne vient pas. On attend. On rappelle, la réponse vient: On n'en veut pas. Et on continue à suggérer des noms, M. le Président, jusqu'à temps que l'opposition dise: Oui, bien, celui-là, je n'en veux pas.

Moi, je me souviens, par exemple – je vais vous en conter juste une petite courte, vite – que le député de Laurier-Dorion, qui vient de parler, était au Comité consultatif avec moi il y a à peine 15 jours, trois semaines. Il promettait, quasiment publiquement, en présence du député de Laviolette, qui m'accompagnait, que M. Casgrain, qui était DGE par intérim, pourrait devenir éventuellement DGE, parce que sa formation politique, disait-il, pourrait l'appuyer. Bon! Il a dit ça même en toute présence de plusieurs députés, plusieurs ressources, et même le député de Laviolette, pour apprendre par le chef de cabinet de Mme la députée de Saint-François, qui est actuelle chef de l'opposition, qu'ils n'en voulaient pas. Alors, le chef de cabinet du premier ministre suggéra un autre nom, en l'occurrence M. Girard.

Il a fallu appeler je ne sais pas combien de fois, parce qu'à tous les jours, comme porte-parole, ministre d'État à la Réforme électorale, je m'informais: Ça «vient-u»? Ça «vient-u»? Est-ce que M. Pilon t'a appelé pour te dire qu'il acceptait la suggestion? Parce qu'on veut avoir les deux tiers, ça prend les deux tiers de la Chambre pour élire quelqu'un. Pas de réponse, et pas de réponse jusqu'au moment où le chef de cabinet du premier ministre appelle la chef de l'opposition elle-même pour dire: Mais coudon, allez-vous nous répondre? On arrive à la fin de la présente session! On ne pouvait pas aller consulter le député de Rivière-du-Loup tant et aussi longtemps qu'on ne savait pas ce que l'opposition officielle acceptait ou n'acceptait pas, c'était aussi simple que ça.

Hier après-midi, en désespoir de cause, on appelle le député de Rivière-du-Loup pour lui dire: Bien, écoutez, si les libéraux fonctionnent, là, ça devrait être M. Girard. Lui, ne le connaissant pas, a décidé de se donner un pouvoir puis il a dit: Je peux refuser mon consentement. Donc, si je refuse mon consentement, on sera en loi spéciale. Un gros, gros pouvoir; ça va lui faire gagner à peu près 0,01 % du vote, probablement! Mais c'est un gros pouvoir. Il a dit: À 4,2 %, je pourrai monter à 4,21 %. Et voilà que le député de Rivière-du-Loup, gonflé d'orgueil, s'approprie le pouvoir de bloquer un consentement entre les deux formations politiques. Mais, au moment où le député de Rivière-du-Loup a annoncé qu'il ne consentait pas, l'opposition officielle avait consenti. C'est ça, la différence. L'opposition officielle a consenti à ce que M. Girard soit nommé DGE et qu'il soit nommé demain.

M. Girard, imaginez-vous, c'est un gars qui arrive d'une république de bananes, au dire du leader de l'opposition. Il arrive directement d'Élections Canada. Ha, ha, ha! Je ne pensais pas que le Parti libéral avait tourné sur un dix-cents de même et que le Canada était devenu une république de bananes! J'en suis complètement...

Des voix: Ébahi.

M. Chevrette: Non! Abasourdi, abasourdi, abasourdi, M. le Président, parce que ça n'a pas de bon sens. Ça n'a pas de bon sens qu'un leader de l'opposition qui, imaginez-vous, a de l'expérience, a du métier... Ou bien il ne sait pas que M. Charest, par l'intermédiaire de Mme la députée de Saint-François, actuelle chef parlementaire, a accepté de nommer demain un DGE. Ça n'a pas de bon sens, ça. Où est-ce qu'on s'en va? Mais quel est le fair-play parlementaire?

J'ai été leader assez longtemps en cette Chambre pour vous dire que, quand on donne notre parole comme formation politique, on ne dit pas des affaires de même. Depuis quand, disait-il, nommer un Directeur général des élections au Québec, ça relève d'un bâillon? Il sait très bien que ce n'est pas par rapport à eux autres ni à nous autres, c'est par rapport au député de Rivière-du-Loup qui s'est approprié temporairement un pouvoir. On a les heures de gloire qu'on a ou les secondes de gloire qu'on a, ça, c'est clair.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Bien, M. le Président, regardons les faits concrètement. Qui est M. Girard? Ça, au moins, on va en parler un petit peu. M. Girard est un gars dont l'expérience en matière de loi électorale et de démocratie a été prise au Québec. C'est au Québec, avec M. Pierre-F. Côté, qu'il a tout acquis son expérience, c'est au Québec que ce bonhomme-là s'est fait connaître sur le plan de ses capacités d'organiser les élections et les consultations populaires, c'est au Québec que ce gars-là a pris l'expérience et l'expertise et c'est du Québec qu'il fut recruté pour aller à Élections Canada.

Il arrive là-bas, il donne de loyaux services comme citoyen compétent, et, devant le vide qu'on a présentement, on dit: Ce bonhomme-là qui a une expertise, qui a des connaissances qu'il a acquises ici, on va le chercher, on le ramène au Québec. Sauf que c'est depuis plus que deux ans qu'il est parti du Québec. Donc, parce qu'il n'y a pas consentement, on est obligés d'aller en loi spéciale.

(20 h 50)

Imaginez-vous ce qu'on entend. Je vais vous en lire des petits bouts, de ce que le brillant député de Brome-Missisquoi a dit: «M. le Président, si on veut nommer un électeur hors Québec, dans un bâillon, par loi spéciale, Directeur général des élections, peut-être que, d'autorité, le gouvernement peut le faire, mais aurait-il dû suspendre l'application du troisième alinéa de l'article 1?» Quelle compétence! Il sait très bien que, si on est en suspension des règles, c'est parce que la loi nous oblige à nommer un Directeur général des élections et que c'est une compétence qui est reconnue. Elle est reconnue puisque vous avez donné le consentement pour le nommer demain. C'est quoi, le spectacle actuellement? C'est quoi? C'est pourquoi, tout ce show actuel? Pourquoi parler de république de bananes?

«M. le Président, il y a des gens qui diraient que ça sent la république de bananes, disait le député de Brome-Missisquoi, le fait que quelqu'un qui n'est pas électeur, quelqu'un qui est de l'extérieur vienne superviser les élections au Québec, et on met ça à l'intérieur d'un bâillon.»

Une voix: Il n'a pas dit ça pour vrai?

M. Chevrette: Il a dit ça pour vrai. C'est le mot à mot. M. le Président, alors que, ce matin, la chef parlementaire acceptait qu'il y ait un vote demain des deux tiers de l'Assemblée pour le nommer, c'est quoi, ce spectacle-là? C'est quoi? Est-ce que c'est parce qu'on n'a rien à dire? Est-ce que vous jugez tout d'un coup que la compétence de cet homme est mise en cause? Comment se fait-il que, dans une consultation qui a été longue... C'est vrai que ça a été long. Il aurait voulu arriver, M. le Président... Il pensait faire un coup fumant avec ça, là. Tu sais, le Protecteur du citoyen, on n'a pas eu d'entente; le DGE, il n'y aura pas d'entente; Mme la curatrice, il n'y aura pas d'entente. Tout ça, là, il aurait voulu nous faire un coup fumant.

Ça a l'air de quoi, pour ceux qui vous liront et qui sauront très, très bien que la consultation est préalable avant d'arriver avec un nom, qui savent très, très bien que ça prend un consentement minimum pour ne pas faire niaiser une personne, dans notre société, qui accepte de jouer un rôle, que ça prend des consultations préalables entre les deux formations politiques officielles? Il y a bien assez qu'il y a des pouvoirs temporaires de quelques minutes, de quelques secondes, puis je vous dirai que je ne sais pas jusqu'où ça peut conduire, là, mais, en tout cas.

Moi, M. le Président, je vous dirai que, quand j'ai lu ceci... Et j'écoute le député de Brome-Missisquoi: «Moi, je plaide tout simplement, dit-il, au nom de tous les parlementaires des deux côtés de la Chambre qui ne souhaitent voir personne à l'extérieur du Québec venir nous dire comment on va faire nos élections, surtout pas à partir d'Ottawa.» Quand je vois ces tapis de porte à quatre pattes, à genoux, à plat ventre, ramper en dessous des portes quand on parle d'Ottawa, ils s'en viennent nous dire que c'est épouvantable d'aller chercher un Québécois qui a pris son expertise ici, qui a bâti son expérience ici, qui a bâti tout le savoir ici, qui a été travailler dans votre petit pays auquel vous vous attachez comme à la prunelle ou comme à un joyau de la reine d'Angleterre.

C'est un homme du Québec qui est allé là et à qui on offre une possibilité de revenir donner ses compétences ici, qui a pu les exercer, qui a rendu de loyaux services à Élections Canada, précisément parce qu'il avait pris des connaissances ici. Puis les règles démocratiques, dans l'ensemble canadien, les plus correctes, où on a une Loi électorale et une loi sur les consultations populaires dans les meilleures au monde, qu'on est cité en exemple, imaginez-vous, même par la tour de Pise, par la Cour suprême, imaginez-vous, ces gens-là viennent nous dire aujourd'hui: «C'est-u» épouvantable, un gars qui a été à Ottawa. Mais il est né au Québec, il a travaillé au Québec, il a grandi au Québec, il a une expertise au Québec, il a une expérience au Québec puis il veut revenir au Québec.

Et vous aviez dit oui ce matin. Donc, imaginez-vous ce que je dois penser de vous autres. Je n'ose même pas le dire, parce que, s'il fallait que le président me permette de le dire quelques minutes sans m'arrêter, je «peux-tu» vous dire que j'aurais au moins du plaisir, j'aurais un soulagement personnel. De voir du monde, M. le Président, qui, le matin, à peine 12 heures après avoir dit qu'ils étaient d'accord avec la nomination et qu'ils voteraient demain en faveur d'un DGE, lire des phrases comme celles que je viens de vous lire, qu'est-ce que vous voulez qu'on pense de vous autres? Comment voulez-vous que les citoyens aient une crédibilité dans certains parlementaires quand on lit des affaires de même?

Quand on sait, par exemple, que le député de Brome-Missisquoi, si on a le malheur de dire qu'on n'est pas d'accord avec le fédéral ou avec Ottawa, il en a la chair de poule, il est rendu qu'il les traite comme une république de bananes! Il faudrait dire ça à Chrétien. Il va retourner peut-être voir Jean Chrétien avec le député de Frontenac, là... Vous vous en rappelez, la grande délégation qui a voulu avoir la peau d'à peu près tout le monde au Québec, incluant leur propre chef, qu'ils ont poignardé très facilement puis qui a dû quitter? Je parle de Daniel Johnson fils.

Une voix: Ils l'ont eu.

M. Chevrette: Puis ils l'ont eu, à part de ça. Il faudrait peut-être dire que leur chef revient d'une république de bananes et qu'il a nommé une chef parlementaire sans doute inspirée d'une vraie autorité de république de bananes, qui, à 9 heures, ce matin, en république de bananes, nous a dit qu'elle acceptait et, à 9 heures le soir, on se fait traiter de tous les maux. Franchement, M. le Président, s'ils ont du temps à perdre, on n'en a pas. Moi, je serais prêt à voter. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député, pour un quatre minutes d'intervention.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Alors, d'abord, je ne peux pas m'empêcher de m'étonner, de m'attrister un peu aussi – pas de m'attrister personnellement mais au nom des députés du gouvernement péquiste – d'entendre le leader du gouvernement qui commence en disant: Bien, j'étais sûr, M. le Président, que vous alliez rendre une décision favorable à notre bâillon, parce qu'il est comme le bâillon de la session d'avant puis il est comme le bâillon de la session d'avant. Voilà qu'il se fait une fierté de dire que, là, son bâillon repose sur un bâillon – parce qu'on en fait à toutes les sessions, on est rendu habitué, on est sûr de notre coup – alors que ces gens-là, en campagne électorale de 1994, ils se faisaient dire: Une fois élus, vous allez être comme les autres, une fois rendus là, vous allez appliquer les mêmes règles que les autres. Ce que vous nous dites que vous ne ferez plus, vous allez le faire. Parce que le député de Joliette, dans les journaux, à pleines pages, à l'époque, disait: Nous autres, les bâillons, ça va être fini, on va rétablir la démocratie. Puis là, hein, chaque session parlementaire, c'est un bâillon. Mais c'est devenu une fierté, parce que maintenant on se vante de l'expertise en matière de suspension des règles.

Mais on va un peu plus loin que ce que tous les gouvernements précédents avaient fait pour banaliser la suspension des règles, le bâillonnement de l'Assemblée nationale, parce que maintenant on l'utilise pour la Loi électorale. Dans certains pays, et je l'ai dit tout à l'heure, je l'ai soumis au président, la Loi électorale, on ne peut pas jouer avec ça, c'est dans la constitution du pays. Il y a des pays dans le monde où on n'a même pas le droit de tripoter dans la Loi électorale parce que c'est dans la constitution du pays. À plus fort titre la nomination d'un directeur général des élections, donc de l'arbitre des élections, c'est dans la constitution du pays. Alors, tu ne peux pas, au Parlement, entre 21, 22 heures et minuit, le soir, tripoter là-dedans puis aller jouer là-dedans. C'est fondamental, c'est ce qui préside aux élections.

Puis là on constate qu'il y avait un deal, hein. Le député de Joliette vient d'en parler. Puis le député de Laurier-Dorion est mal à l'aise parce que, là, il était pour, il n'est plus pour. Parce que là il y avait un deal: on s'était choisi un Directeur général des élections, tout le monde était à l'aise, puis on allait adopter les règles ensuite, tout le monde était heureux là-dedans.

Mais je pense que c'est peut-être nécessaire de rappeler au gouvernement actuel que... Prenons l'exemple de 1973. En 1973, parce qu'ici on en fait une question de deux-tiers de l'Assemblée au sens strict, on aurait très bien pu, sans le consentement des cinq députés indépendants, qui sont le député de Bourget actuel... les cinq députés indépendants, comme ils disent si bien, qui représentaient le Parti québécois, nommer un Directeur général des élections. On n'aurait pas eu les deux-tiers de l'Assemblée, puis ils se seraient arrangés avec, puis on aurait pu leur passer ça en bâillon selon les mêmes règles strictes.

Mais, étant donné qu'on vit dans ce qu'on appelle ou ce qu'on appelait une démocratie, il y a eu une tradition à l'Assemblée, qu'on faisait ces nominations-là par consentement unanime ou, en tout cas, qu'on faisait le maximum, qu'on déployait tous les efforts nécessaires pour aller chercher le consentement unanime. Une des façons de le faire, c'est d'utiliser le temps, de mettre des noms sur la table, de faire des propositions. Et, contrairement aux propos très antidémocratiques du député de Laurier-Dorion – très antidémocratiques! – qui en fait simplement une question de gouvernement et d'opposition officielle, alors qu'on ne parle pas d'affaires parlementaires, on parle d'affaires démocratiques....

Si on prend le mandat de Pierre-F. Côté, on parle d'un mandat de quelque 20 années. Sur 20 ans, l'opposition officielle, le gouvernement – qui est le gouvernement, qui est l'opposition officielle? – ça peut changer. Il y a peut-être des partis qui ne sont pas encore fondés aujourd'hui puis qui vont former l'opposition officielle puis qui vont relever, en termes d'élections, de l'actuel Directeur général des élections, de celui qu'on va nommer supposément demain. Alors, il serait minimal, je pense, que cette nomination-là se fasse d'une façon éminemment démocratique, avec le consensus le plus large possible.

(21 heures)

Or, il n'y a eu aucun effort pour aller chercher un consensus. On fait les matamores, on se dit: On est au pouvoir puis on fait un deal avec l'opposition. Mais l'opposition, guidoune un peu, comme d'habitude, ça, on est habitué. Parce qu'ils sont bien partis en vue de l'élection, ils donnent de l'argent: Les pauvres, il y a de l'argent; les médecins, il y a de l'argent; ça fait qu'on fait un deal avec le gouvernement puis le lendemain on est content. Mais il n'en demeure pas moins que c'est une façon très antidémocratique de faire la nomination que le gouvernement devrait se faire reprocher pendant longtemps. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour de participer au débat sur la suspension des règles fondamentales de notre Assemblée. J'ai écouté le show du ministre d'État des Ressources naturelles, Énergie. Je vais tenter de traiter d'un autre sujet, peut-être d'une façon un peu plus sérieuse que lui a traité le sujet immédiatement précédent.

M. le Président, je ne peux m'empêcher de constater, comme le député de Rivière-du-Loup, l'autre façon de gouverner qui a été le slogan du Parti québécois, l'autre façon de gouverner. Là, on est dans la huitième session de ce mandat. Huitième session, huitième bâillon. Huit sur huit. On dirait en anglais «they're batting 100 %», huit sessions, huit bâillons. M. le député de Maskinongé est fier. Il est fier, comme parlementaire, que sur huit sessions son gouvernement soit obligé de faire huit bâillons. L'autre façon de gouverner, il peut bien être fier. On verra si ses électeurs sont fiers.

M. le Président, je vais parler quelques minutes du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. C'est la loi sur la réforme de l'aide sociale promise par le Parti québécois lors de l'élection de 1994. Cette loi a eu un long cheminement, l'accouchement a été très dur, très difficile. Il y a eu un livre vert présenté par la députée actuelle de Chicoutimi, il y a eu des consultations générales sur le livre vert, une centaine de groupes, pour aboutir à la présentation du projet de loi le 18 décembre, l'année passée, 18 décembre l997. Le débat sur le principe a été fait aux mois de mars et avril.

Je me souviens très bien, M. le Président – parce que le cheminement de tout ça est très important – qu'il y avait à peu près une vingtaine d'intervenants de notre côté de la Chambre, puis le débat a été ajourné. Et nous avons attendu à peu près une dizaine de jours pour avoir la réplique de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Dix jours où le projet de loi on n'en discutait pas, n'était pas référé pour des consultations, n'était pas référé à la commission des affaires sociales; il y a eu un temps mort d'à peu près 10 jours. La raison qui nous a été donnée: il a fallu que la ministre discute avec ses collègues de certains amendements au Conseil des ministres. Alors, une période de temps de 10 jours, temps mort où rien ne se passe.

Là, le principe, après la réplique de la ministre, est adopté le 9 avril, et on convient avec le gouvernement de faire des consultations particulières. Imaginez-vous, M. le Président, il y a le budget, les crédits du gouvernement entre-temps. Je ne veux pas déformer non plus le calendrier parlementaire. Il y avait un temps où le gouvernement ne pouvait pas procéder à cause du budget et des crédits, tout à fait normal. Mais il y avait une autre semaine de temps mort où le gouvernement aurait pu commencer les consultations particulières. Alors, elles ont été retardées d'une autre semaine de temps. Les consultations particulières ont eu... du 19 au 27 mai, cinq jours de temps. Le rapport déposé le 29 mai et l'étude détaillée sur le projet de loi, une étape qualifiée d'essentielle par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, a commencé le 2 juin, et effectivement, M. le Président, ça a duré huit jours, du 2 juin au 16 juin.

M. le Président, c'est un projet de loi fondamental, le projet de loi n° 186, un projet de loi qui touche à peu près 700 000 personnes, Québécois et Québécoises, qui sont des prestataires de la sécurité du revenu: à peu près 500 000 adultes et 200 000 enfants. Ça, c'est un Québécois sur 10, M. le Président, qui vit de l'aide sociale. Alors, ça a un impact absolument fondamental sur la population du Québec, sur 700 000 Québécois et Québécoises.

C'est un projet de loi qui est vivement contesté, M. le Président. Vivement contesté. Si le gouvernement actuel a réussi à faire l'unanimité sur quelque chose, c'était la quasi-unanimité contre le projet de loi n° 186. Je vais énumérer quelques groupes, M. le Président, qui s'opposent au projet de loi sur la réforme de l'aide sociale: là, les amis notoires, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, la Confédération des syndicats nationaux, la Centrale de l'enseignement du Québec – c'est des amis du régime péquiste – s'opposent farouchement au projet de loi; la Coalition des organismes communautaires, qui sont membres de la Commission des partenaires du marché du travail, des gens qui travaillent avec des prestataires, des gens du communautaire, M. le Président, s'opposent au projet de loi; le Front commun des personnes assistées sociales du Québec s'oppose; la Confédération des organismes de personnes handicapées du Québec s'oppose; l'Alliance québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées s'oppose; l'Assemblée des évêques du Québec s'oppose et demande le retrait du projet de loi n° 186; la Fédération des femmes du Québec s'oppose, Mme Françoise David; le Conseil permanent de la jeunesse, qu'est-ce qu'ils font? ils s'opposent au projet de loi; la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse s'oppose.

Apprenez le refrain si ça vous aide, les ministériels, là. Ça va rentrer, peut-être. Le ministre de la Santé et d'autres disent souvent: Répétez, répétez, ça va rentrer un jour. Alors, je répète, là, pour le bénéfice des ministériels. La Coalition nationale sur l'aide sociale s'oppose au projet de loi; le FRAPRU, qui regroupe les organismes sociaux en matière de logement, s'oppose, c'est un peu plus que 25 % en totalité; les professionnels en santé s'opposent au projet de loi.

Qui sont pour? Le Conseil du patronat du Québec et l'Alliance des manufacturiers et exportateurs. C'est magnifique, ça! Ça, c'est deux groupes qui appuient le parti social-démocrate au Québec sur une réforme de l'aide sociale: le Conseil du patronat du Québec et l'Alliance des manufacturiers et exportateurs. C'est quelque chose, ça. «The firebrand social democrat.» Elle a eu les appuis du Conseil du patronat puis de l'Alliance des manufacturiers et exportateurs. Fantastique, M. le Président.

M. le Président...

M. Gobé: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de LaFontaine, sur une question de règlement.

M. Gobé: Oui, merci, M. le Président. Déjà que nous sommes sous l'emprise d'un bâillon, je pense que la moindre des choses serait que, lorsqu'un député qui est bâillonné a un dossier important à défendre, il puisse le faire dans la quiétude, la tranquillité et le respect des collègues. Déjà que le bâillon est difficile à vivre pour lui, au moins qu'on ait le respect des députés en cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous inviterais à prendre en considération ces remarques et à permettre à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce de terminer, si vous voulez, dans la sérénité son intervention. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

(21 h 10)

M. Copeman: Merci, M. le Président. Et je veux tenter de rétablir un peu les faits en ce qui concerne la Coalition nationale sur l'aide sociale. Parce que la ministre a apporté certains amendements récemment, certaines bonifications. Moi, je n'ai jamais été gêné de dire, M. le Président, que de temps en temps des ministres de ce gouvernement sont capables d'améliorer des projets de loi. Ils le font. Mme la ministre de l'Emploi l'a fait. Elle a marqué certaines améliorations face à son projet de loi initial. Est-ce que c'est suffisant? C'est là, la question, M. le Président.

La Coalition nationale sur l'aide sociale indique que, sur l'obligation pour les jeunes, le moratoire qui est prolongé d'une autre année, même si le principe de l'obligation demeure inscrit dans le projet de loi – ce que nous contestons vivement – l'ajout d'un an de moratoire déjà annoncé nous permet d'espérer que ce principe ne serait jamais mis en vigueur. La Coalition, plus tard, dans son communiqué de presse d'hier, M. le Président, déplore les très petits montants additionnels consentis par le gouvernement pour atténuer la pauvreté des prestataires de l'aide sociale. Pour les prestataires qui ont été coupés de centaines de millions depuis deux ans, ces mesures sont dérisoires. Ça, c'est la Coalition nationale sur l'aide sociale, M. le Président, et elle conclut de cette façon: «Cependant, la Coalition note que la lutte contre la pauvreté n'est pas une priorité pour l'actuel gouvernement du Québec.» Alors, M. le Président, de prétendre que la Coalition nationale sur l'aide sociale accepte le projet de loi, même avec des propositions d'amendements amenées par la ministre, ce n'est pas exact. C'est faux, M. le Président.

M. le Président, quelques minutes sur l'étude détaillée en commission parlementaire. Quand j'ai énuméré tantôt les diverses étapes, ce que je voudrais démontrer aux gens qui nous écoutent, c'est que ce gouvernement n'était pas trop pressé de procéder avec la loi n° 186. Une période morte de 10 jours où rien ne se passait. Une autre période d'une semaine où rien ne se passait, et, en étude détaillée, comme je l'ai indiqué, l'étape peut-être la plus cruciale pour un projet de loi, que la ministre a qualifiée, à plusieurs reprises...

J'ai un excellent souvenir, M. le Président, de la ministre qui me disait: J'espère qu'on va avoir le temps de passer à travers le projet de loi. C'est ça qu'elle a dit. J'étais et je demeure entièrement d'accord avec la ministre. J'espérais avoir le temps, avec elle, de passer à travers le projet de loi. Parce que je reconnais, comme parlementaire, que l'étape de l'étude détaillée est critique et fondamentale dans notre processus d'adoption des projets de loi.

Nous avons, M. le Président, passé 30 heures ensemble, avec la ministre de l'Emploi et de la Solidarité sur l'étude détaillée. J'exclus les consultations, 30 heures. De ces 30 heures là, il y avait une totalité d'une heure et demie de suspension...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: ...où rien ne se passait, pour une raison ou une autre, normale. De temps en temps, on suspend un petit 10 minutes là, un petit 10 minutes ici. Ça veut dire, M. le Président, qu'en réalité nous avons passé 28 heures et demie en étude détaillée d'un projet de loi si fondamental, projet de loi qui contient 218 articles qui touchent la vie de tous les jours de 700 000 Québécois et Québécoises.

M. le Président, dans 28 heures et demie d'étude, nous avons pris en considération 128 articles. Le travail se faisait correctement, 13 minutes et demie par article, en moyenne. Tout ce que j'espère, quand la ministre se lèvera après moi pour parler, qu'elle donne, avec sa franchise habituelle, l'heure juste sur le travail de la commission des affaires sociales. Il n'y avait aucune obstruction systématique. Il n'y avait aucune obstruction systématique. Si la ministre vient nous dire ça, là, elle ne dirait pas toute la vérité.

Il y avait quelques moments, M. le Président, peut-être, où la ministre trouvait que c'était long, quelques moments limités sur les 28 heures, mais de façon générale je crois que la ministre est d'accord avec moi que nous avons fait un excellent travail ensemble en commission parlementaire.

Il nous manque à peu près 90 articles, M. le Président, avec à peu près 10 articles en suspension. Je ne mets aucun blâme sur le dos de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité en ce qui concerne l'aménagement du travail de la commission des affaires sociales. Le leader du gouvernement, qui n'a pas voulu nous donner, aux parlementaires, le temps nécessaire pour faire une étude détaillée et sérieuse, c'est pour ça qu'il amène le bâillon, et ça dessert tous les Québécois et Québécoises qui vivent de l'aide sociale au Québec, les 700 000. Ce n'est pas un service que le leader du gouvernement leur rend, ce soir, au contraire. Le gouvernement aurait dû nous laisser le temps nécessaire et souhaité pour faire le travail comme il faut, pour améliorer, tenter de bonifier un projet de loi qui avait déjà beaucoup de failles et beaucoup de difficultés.

M. le Président, nous nous opposons à quelques aspects fondamentaux du projet de loi, nous allons continuer de nous opposer à ces aspects fondamentaux du projet de loi et je décrie personnellement la décision du gouvernement, du leader de ne pas permettre à la commission des affaires sociales le temps nécessaire pour faire une étude studieuse et sérieuse d'un projet de loi qui touche 700 000 Québécois et Québécoises. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité. Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Je comprends qu'il n'y a pas eu d'obstruction systématique au début de nos travaux, mais que, manifestement, à la fin de ces travaux la semaine passée, il est apparu très clairement que l'opposition n'avait pas l'intention de permettre l'adoption du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, avant la fin de notre session. Le meilleur exemple de ça, c'est que la commission des affaires sociales, qui siégeait de façon prioritaire sur le dossier du projet de loi n° 186, donc du projet de loi sur l'aide sociale, cette commission des affaires sociales n'a pas pu passer à travers un projet de loi qui était prioritaire pour le gouvernement, prioritaire pour la commission, alors que, concernant le projet de loi antitabac déposé par mon collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux qui devait se contenter des heures qui n'étaient pas utilisées pour l'étude du projet de loi sur l'aide sociale, eh bien, pourtant ils ont réussi, avec la collaboration de l'opposition, non seulement à faire l'étude article par article, mais à faire l'adoption de ce projet de loi parce que l'opposition y tenait.

Là, il faut vraiment sortir de cette espèce d'hypocrisie que j'entends ici, les fins de session appartiennent à l'opposition. J'ai été assez longtemps dans cette Assemblée dans l'opposition – neuf années, M. le Président – j'ai à côté de moi d'ailleurs le député de Joliette et ci-devant ministre d'État à bien des choses qui le sait aussi et qui l'a répété à bien des occasions, les fins de session appartiennent à l'opposition. Et c'est tellement vrai que l'opposition, dans le fond, peut décider des projets de loi qu'elle donne puis de ceux qu'elle ne donne pas.

(21 h 20)

C'est bien évident que ce soir on est réunis sur les projets de loi que l'opposition n'a pas donnés, comme on dit, donc le projet de loi sur les assureurs, celui sur l'aide sociale et puis, je pense, celui avec la nomination du président-directeur général des élections. Bon. Alors, pourquoi est-ce qu'on laisserait l'opposition, qui n'est pas élue par le gouvernement pour gouverner, décider ultimement? Elle peut manifester ses choix, mais à un moment donné il faut que le gouvernement décide. Vraiment, moi, je ne me scandalise pas, dans la mesure où le processus parlementaire a été mené jusqu'à sa conclusion finale. Ce qui était de l'ordre du scandale, c'est lorsque, moi, j'étais dans l'opposition et que le gouvernement libéral nous présentait un bâillon avec des lois, 28 lois, à une certaine occasion, 28, dont certaines qui n'avaient même pas été adoptées en deuxième lecture.

Alors, imaginez-vous, là, on est présentement, à l'égard du projet de loi n° 186, dans un processus qui est le suivant. Parce que c'est à peu près à tous les 10 ans, vous voyez. J'ai refait le calcul, et c'est à peu près à tous les 10 ans. Depuis 30 ans, il y a eu une grande réforme de l'aide sociale, en 1964 ou 1965, et ça a été le fondateur du Parti québécois, René Lévesque, qui l'a faite. Il y en a eu une très importante aussi en 1977, et ça a été le ministre de l'époque du Développement social, Pierre Marois, qui l'a faite. Il y en a eu une autre il y a 10 ans, et c'est l'actuel député de Laporte, qui était alors ministre dans le gouvernement précédent, qui l'a faite. Donc, on peut dire que c'est à tous les 10 ans.

Et, quand on compare le projet de loi qui est devant nous, il a été déposé avant Noël, de manière à laisser le temps d'un examen très approfondi. Il a été déposé à la précédente session. Il a donné lieu à des auditions particulières. Nous avons entendu 23 groupes pendant presque 25 heures. Je rappelle, M. le Président, que le gouvernement précédent avait refusé de tenir des auditions particulières sur son projet de loi 37, qui portait sur l'aide sociale; aucune audition, aucun groupe entendu. Nous y avons mis 25 heures. Nous avons débuté l'étude article par article. Au total, sur les 218 articles que contient le projet de loi, 127 articles ont reçu un examen très attentif, 107 amendements, au total, portant sur l'ensemble du projet de loi, ont été déposés, dont au moins une trentaine suite à des représentations faites par l'opposition.

Et, ici, je dois signaler, pour rendre compte de ce qui s'est passé en commission, qu'il y a un travail utile et sérieux qui a été fait, et je veux en féliciter tous les membres de la commission parlementaire et, bien évidemment, le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je pense qu'on peut dire ce qu'on veut, mais le travail s'est fait vraiment dans la perspective de rendre le plus possible aidant pour ceux et celles qui, dans notre société, ont à recourir à l'aide de leurs concitoyens...

Rappelons-le, l'aide sociale, c'est une aide de dernier recours. J'aurai l'occasion de revenir sur la philosophie qui préside maintenant. C'est faux de dire que c'est l'extinction de la sécurité du revenu, c'est complètement faux, M. le Président, parce que, finalement, ce que ce projet de loi introduit, c'est la fin de l'exclusion des chômeurs, qui, sur l'aide sociale, tournaient en rond dans des mesures d'employabilité qui les confinaient et les stigmatisaient, alors qu'ils étaient exclus des mesures et des services de main-d'oeuvre qui étaient offerts à l'ensemble des chômeurs.

Ce que ce projet de loi introduit, c'est une égalité de traitement entre les personnes qui sont à la recherche d'emploi dans notre société pour qu'elles obtiennent, au moment où elles en ont besoin, le coup de pouce nécessaire. Donc, nous avons introduit cette idée fondamentale, cette idée importante que c'était d'abord d'appui, de support, d'aide, d'un coup de pouce que ces gens-là avaient besoin, et non pas d'abord de contrôle. Et on va mettre fin, je le dis bien honnêtement... Parce que, pour être honnête, en cette Assemblée, il faut que les membres de cette Assemblée, y compris le député de Notre-Dame-de-Grâce, reconnaissent que le procès qui a été fait, lorsque nous avons entendu des mémoires en commission parlementaire, c'était le procès de la loi actuelle et non pas le procès de ce qui s'en venait.

J'ai même, moi personnellement, revu par la suite, à mon bureau de comté, un groupe qui était venu présenter un mémoire en commission à qui j'ai appris ce que contenait le projet de loi. Ils ne l'avaient jamais lu auparavant, mais ils dénonçaient ce qui se passait, notamment pour des jeunes en difficulté qui ne pouvaient pas compter sur l'aide de leurs parents, qui se retrouvaient dans des Auberges du coeur, des maisons d'hébergement pour jeunes et qui étaient souvent sans aucune ressource et tenus, notamment lorsqu'il y avait eu des situations de violence familiale, malgré tout de réclamer des parents une contribution, à tous égards qu'ils n'allaient pas accorder.

Alors, M. le Président, c'était évident que, quand le député de Notre-Dame-de-Grâce dit: S'opposent, je pourrais, à cette liste qu'il a faite, ajouter: s'opposent à ce qui se vit présentement sur l'aide sociale. Et je crois que ça a été un des héritages très lourds que j'ai eu à porter comme une croix, un héritage très lourd qui est celui d'une décennie de 10 années finalement de contrôle des pauvres et non pas de support pour se sortir de la pauvreté.

Alors, moi, je pense, M. le Président, que nous avons fait un travail suffisamment important pour être capables, ce soir, de déposer ces 107 amendements, dont une quarantaine sont substantiels, ce qui prouve que, jusqu'à la fin, nous aurons pu améliorer ce projet de loi parce que nous en connaissons l'importance, nous en savons l'importance. Mes collègues du Conseil des ministres ont accepté, hier, d'être saisis à nouveau – ce n'est pas faute évidemment d'avoir à plusieurs reprises inscrit cette question à l'ordre du jour du Conseil des ministres cette année – ils ont accepté d'être saisis à nouveau et de faire de nouvelles ouvertures.

Je vous rappelle que le total des bonifications annoncées depuis le dépôt du projet de loi, en décembre dernier, s'élève à 104 000 000 $. Dans les circonstances, M. le Président, budgétaires qui sont les nôtres, dans les circonstances des réductions de transferts fédéraux au titre de l'aide sociale, qui totalisent environ 1 000 000 000 $ de moins, c'est 1 000 000 000 $ de moins dans les paiements de transfert au titre des transferts canadiens pour l'aide sociale, dans ces circonstances-là, quand on sait aussi l'arrivée assez massive évaluée par les professeurs Fortin et Crémeux, je pense, de l'Université du Québec à Montréal – Crémieux, plutôt – à presque 194 000 personnes depuis le début de la décennie...

M. le Président, reconnaissons que quelque chose d'important va se passer avec l'adoption de ce projet de loi, quelque chose dont nous pouvons, je pense sincèrement, être fiers, et cela va consister à reconnaître le fait qu'il y a des chômeurs à l'aide sociale, qu'ils sont de plus en plus nombreux et que ces chômeurs ont besoin d'être traités comme on traite des chômeurs, c'est-à-dire des personnes qui ne sont pas responsables du chômage – quand on est chômeur, on est involontairement chômeur – et donc de se voir offrir des formations, des accompagnements, des qualifications pour se réinsérer sur un marché de l'emploi de plus en plus exigeant. Et je pense, M. le Président, que ce qui a été controversé va, dans les mois qui viennent, puisque nous avons décidé d'un délai supplémentaire qui amènera au 1er septembre 1999 l'application de cette obligation pour les 18-24 ans qui n'ont pas d'enfant, pas de handicap, qui n'étudient pas et ne travaillent pas, de faire un parcours individualisé, je pense que les mois qui viennent vont nous permettre de bien expliquer, de bien nous y préparer aussi, et, de tout façon, l'opinion publique, elle est de notre côté.

(21 h 30)

J'ai encore refait faire une consultation par la même maison de sondage, SOM, pour ne pas la nommer, qui l'avait faite il y a un an, il n'y a pas eu de fléchissement. C'est de 78 %, 80 %, 81 % des appuis qui se manifestent à l'égard de ces éléments que le député de Notre-Dame-de-Grâce considère comme controversés dans le projet de loi. Est-ce que c'est parce qu'il y a des préjugés dans la population? C'est ce que l'opposition m'a dit quand j'ai fait valoir cet appui dans l'opinion publique. Est-ce que c'est parce qu'il y a des préjugés? En tout cas, certainement pas parce qu'on les a alimentés de ce côté-ci, M. le Président, certainement pas.

Jamais nous n'avons associé les personnes à l'aide sociale à des fraudeurs, comme l'avait fait le gouvernement précédent, jamais. Nous avons dit: Ce sont des chômeurs et il faut, en priorité, leur offrir les outils dont ils ont besoin. Et nous avons fait plus que ça, puis j'en suis fière aussi. Le projet de loi maintenant va contenir des dispositions nouvelles qui sont introduites par amendements et qui vont faire reconnaître le travail bénévole exercé auprès d'un organisme sans but lucratif comme donnant droit à une allocation de participation avec frais de garde et frais supplémentaires pour favoriser l'insertion sociale, compte tenu justement qu'il est possible que des personnes qui longtemps ont été exclues du marché du travail ou qui, pour toutes sortes de raisons, ne sont pas en mesure de franchir tous les handicaps pour répondre aux qualifications qui sont exigées sur le marché du travail... Ces personnes-là vont pouvoir se rendre utiles aussi à elles-mêmes, vont pouvoir également, je crois, non seulement se rendre utiles à elles-mêmes, mais obtenir la reconnaissance de leur société pour ce qu'elles réalisent. Et je pense que c'est là une des dispositions qui est importante.

Oui, nous avons modifié substantiellement le projet de loi, mais nous y avons gardé la même philosophie. C'est à la fois une philosophie d'assistance-emploi, c'est-à-dire cette philosophie qui consiste dorénavant à considérer qu'Emploi-Québec va offrir des services aux personnes indépendamment de leur statut, indépendamment de leur étiquette, n'est-ce pas, mais selon les besoins, et puis, en même temps, de reconnaître qu'il y a des contraintes temporaires à l'emploi et qu'il y a des contraintes permanentes à l'emploi qui doivent, dans un cas comme dans l'autre, trouver compensation sous forme d'allocation.

Nous avons prévu qu'à partir de 55 ans, compte tenu de ce qu'est l'état du marché du travail, il puisse être possible dorénavant de se faire reconnaître une situation où il n'y a plus d'insertion facile sur le marché de l'emploi. Ça va donc donner lieu à une compensation à partir de l'âge de 55 ans.

Et puis je pense qu'un des éléments majeurs également, M. le Président, c'est que dorénavant les personnes qui vivent une déficience intellectuelle, un problème de santé mentale ou qui vivent avec une infirmité, qu'on appelle un handicap, ne seront plus exclues des services publics d'emploi, puisque nous avons spécifiquement prévu pour ces personnes le libre choix de recevoir à part entière les services d'Emploi-Québec en étant inscrites sur le Programme d'assistance-emploi ou librement de faire reconnaître des contraintes sévères et donc de faire reconnaître leur situation d'invalidité.

Je ne sais pas si mon temps est...

Une voix: Est parti.

Mme Harel: ...oui – parti et terminé? Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je ne sais si d'autres doivent intervenir, mais il reste encore du temps au groupe parlementaire.

Mme Harel: Bon. Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais calculer et je vous dirai dans quelques instants le temps qu'il vous reste.

Mme Harel: Alors, je vais peut-être en profiter pour vous signaler que, depuis un an, nous avons déployé des efforts tels, conjugués bien évidemment à la reprise économique, qui nous permettent, depuis juin dernier, de constater le départ de 78 000 personnes qui ont quitté la sécurité du revenu, alors que le nombre de ménages augmentait de 90 000, pour un total de 220 000 personnes de plus lors du dernier mandat du gouvernement libéral.

M. le Président, je pense qu'on peut bien dire: C'est la conjoncture économique, n'est-ce pas? Alors, c'était la conjoncture économique, mais cette conjoncture économique, on sait qu'elle était aussi neutralisée par les resserrements à l'admissibilité à l'assurance-emploi et que c'est donc un nombre encore plus impressionnant de chômeurs sur l'aide sociale qui auraient dû quitter, n'eût été du fait de ces politiques fédérales qui ont vraiment déménagé, transféré littéralement des personnes qui cotisent à l'assurance-emploi et qui continuent de cotiser, parce que des personnes qui, dans notre société, sont des travailleurs et des travailleuses occasionnels ou sur appel, il y en a des centaines de milliers qui cotisent et qui continuent de cotiser à l'assurance-emploi, mais qui ne peuvent plus s'y qualifier, compte tenu des conditions qui se sont resserrées.

Alors, moi, M. le Président, je pense que nous avons bien travaillé, mais il était manifeste que l'opposition n'avait pas l'intention de satisfaire l'agenda pour que ce projet soit adopté. La preuve en est que nous sommes à la veille de la clôture de nos travaux et qu'il nous faut procéder ainsi. Ce n'est pas de gaieté de coeur, bien évidemment, mais je crois que cela fait partie de notre démocratie. C'est vraiment non pas un outil antidémocratique, il ne ferait pas partie de notre règlement si tel était le cas, et je comprends que nous l'utilisons à bon escient après avoir épuisé à peu près tous les moyens qui étaient à notre disposition. Et, dans le cas du projet de loi n° 186, je peux dire que nous avons bien travaillé et que nous pouvons être fiers de ce que nous avons fait. Merci.

Une voix: Bravo!

(Applaudissements)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, et je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je peux dire que ce qui se passe ici ce soir, il est triste, il est inacceptable et ne fait pas honneur à cette Chambre.

J'ai écouté tout à l'heure la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui disait, à un certain moment: M. le Président, on est ici parce que l'opposition, elle ne nous a pas donné les projets de loi. Ce sont les mots qu'elle a prononcés: On est ici, dans cette situation, parce que, la députée de Hochelaga-Maisonneuve disait, l'opposition, elle ne nous a pas donné ces projets de loi. Est-ce que l'opposition, elle est là pour donner des projets de loi? L'opposition, elle est là pour faire écouter la voix des citoyens, pour dire au gouvernement qu'il est en train de faire fausse route. Nous sommes là pour dire au gouvernement: Il faut aller dans cette direction parce que les citoyens, c'est ça qu'ils veulent. On n'est pas là pour donner des projets de loi, autrement l'opposition, elle ne devrait même pas être là. Si on est là pour les donner, qu'est-ce qu'on fait ici?

(21 h 40)

Et c'est la raison pour laquelle, dans ces projets de loi là, M. le Président, il y a le projet de loi n° 188. Le projet de loi n° 188, pourquoi on se retrouve, ici, ce soir, sur le bâillon? On se retrouve sur le bâillon parce que le ministre des Finances, il n'a pas voulu écouter les intervenants qui sont venus deux fois devant les commissions parlementaires. Son idée était déjà faite, son idée, il ne l'a pas changée, il a essayé, je dirais, quasiment de manipuler l'opinion des gens qui sont venus honnêtement devant la commission, mais il n'a jamais pris en considération ces propos, et ces décisions, je dirais, ces propos qu'ils sont venus nous exposer devant la commission.

M. le Président, c'est tellement vrai qu'on a eu, on se rappellera, avec ce projet de loi là, une commission en octobre 1996 et on est sorti avec un rapport unanime de la commission. On se rappellera qu'avec ce rapport, qui porte encore le nom du président de la commission des finances, le rapport Baril, pour la première fois dans l'histoire du Québec, on a réussi à faire l'unanimité et à faire des recommandations au gouvernement. Je ne pense pas que c'est l'opposition qui avait fait ça, c'est l'opposition avec les députés ministériels. On a dit au ministre: Voilà dans quelle direction il faudrait aller avec le projet de loi n° 188. Le ministre, hautain comme il est, des fois même arrogant, a pris le rapport de la commission, le rapport Baril, puis il l'a rejeté du revers de la main. En ce faisant, il n'a pas rejeté l'opinion des députés de l'opposition, il a rejeté l'opinion des députés de l'opposition et des députés ministériels. Il a dit quasiment: Je m'en fiche, mon opinion est meilleure que celle de tout le monde.

Et on se rappellera, M. le Président, que le vice-président de Desjardins, M. Harbour – et c'était le président de la commission des finances qui l'avait fait remarquer à l'Assemblée nationale – avait dit à un certain moment, M. Harbour avait dit: Ce n'est pas important que la commission ait pu dire: Il faut s'en aller dans cette direction; l'important, c'est d'être ami avec le ministre des Finances. C'est ça, M. le Président. L'important, c'était d'être ami avec le ministre des Finances. Et c'est la situation dans laquelle on se retrouve: après avoir eu cette commission parlementaire, le ministre a déposé le projet de loi n° 188 qui allait complètement à l'encontre des recommandations de la commission, complètement à l'encontre, M. le Président.

À ce moment-là, on a eu encore une autre commission, parce qu'à un certain moment le ministre des Finances, il était coincé aussi avec ses députés. Parce qu'on sait très bien, M. le Président, qu'une bonne partie des députés ministériels, ils ne sont pas d'accord avec le projet de loi n° 188. Mais, malheureusement, ils sont obligés – et je dis «malheureusement» parce que, s'il y avait un vote libre, je suis convaincu que ces gens-là ne voteraient pas en faveur du projet de loi n° 188 – malheureusement, ces gens-là, au moment où va arriver le vote sur le 188, vont se lever à cause de la situation qu'on vit actuellement ici, spécialement à l'intérieur du Parti québécois.

M. le Président, on a eu une deuxième consultation, la consultation du mois de février et du mois de mars derniers. Il y a encore 35 ou 36 organismes qui sont venus devant la commission pour exprimer leurs voeux à l'intérieur... de voir leurs voeux à l'intérieur du projet de loi n° 188. Le ministre, encore une fois, il était assis là, il a pris bonne note, mais il ne les a pas transcrits à l'intérieur du projet de loi. Il a répété encore: Moi, je connais la vérité, seulement moi, et c'est seulement moi qui vais décider. Et c'est ça qui est arrivé. Parce que, comme la députée de Hochelaga-Maisonneuve disait tantôt: La majorité des gens sont en faveur du projet de loi n° 186. Mais je peux dire à la députée de Hochelaga-Maisonneuve que la très grande majorité des organismes et des personnes qui sont venus devant la commission des finances publiques sont contre le projet de loi n° 188. Alors, si le raisonnement tient pour le 186, il devrait tenir pour le 188. Et, à ce moment-là, le ministre des Finances devrait le retirer, son projet de loi, parce qu'il y a au-delà de 60 % ou 70 % des organismes qui sont venus devant la commission qui ont dit non au projet de loi n° 188.

C'est ça, la réalité, c'est ça, la vérité, M. le Président, et on ne peut pas le laisser passer comme ça. On sait que, dans deux ou trois ans, tout est terminé. Et terminé pourquoi? Parce que ce gouvernement et ce ministre, il n'a jamais voulu écouter la raison, il n'a jamais voulu écouter les citoyens qui sont venus s'exprimer sur le 188. M. le Président, on se rappellera toujours, pour vous dire que ce gouvernement-là et ce ministre-là, il ne dit pas la vérité, qu'au moment du dépôt du projet de loi n° 188, la raison pour laquelle ce dépôt a été fait, ça a été laquelle? Les propos du ministre étaient: La protection du consommateur. C'était la raison du projet de loi n° 188. On l'a cru, M. le Président. On l'a cru, et on a travaillé de bonne foi.

Qu'est-ce qui est arrivé, M. le Président? Il est arrivé qu'à un certain moment les associations de consommateurs, qui avaient donné un appui de principe au projet de loi n° 188, parce qu'elles voulaient avoir des modifications à l'intérieur du projet de loi n° 188... Aujourd'hui, toutes les associations de protection du consommateur et le Protecteur du citoyen demandent au ministre de retirer le projet de loi n° 188. M. le Président, la raison d'être, comme je le disais, c'était la protection du consommateur. Aujourd'hui, toutes les associations, toutes, pas 90 % ou 60 %, 100 % de toutes les associations de consommateurs ont envoyé une lettre au ministre en disant: Ton projet de loi, il faut le retirer parce qu'il ne protège pas le consommateur.

Qu'est-ce qui est arrivé? Le ministre a dit: Je me fiche de vous, je vous ai pris en otages au moment où j'en avais besoin; j'ai justifié le dépôt du projet de loi n° 188 pour la protection du consommateur, mais ce n'était pas mon but. C'est ça qu'il vient de dire, actuellement. Mais il n'a pas eu la franchise de le dire honnêtement au moment du dépôt du projet de loi n° 188. Il les a pris en otages, M. le Président, parce que, à un certain moment, il a justifié ou il a essayé de justifier ce projet de loi avec l'appui des associations de protection du consommateur.

Aujourd'hui, M. le Président, tout ce monde-là demande au ministre de le retirer. Le ministre s'est gargarisé en commission encore en disant: J'ai réussi à avoir l'appui de deux organismes sur trois, l'AIAPQ et le Regroupement des courtiers. Il l'a répété des dizaines et des dizaines de fois. Spécialement, il disait: Le Regroupement des courtiers. Parce qu'il avait réussi, d'une certaine manière, à diviser pour régner, M. le Président.

Qu'est-ce qui est arrivé? C'est ça, quand on ne travaille pas avec sincérité, avec honnêteté, avec franchise. Le Regroupement des courtiers, hier, a retiré l'appui au projet de loi n° 188. Pas un mot de la part du ministre! Pas un mot, parce qu'il savait très bien qu'il avait essayé d'acheter la paix avec des arguments et avec des changements qui étaient uniquement des changements cosmétiques, M. le Président. Il n'y avait pas de changements de fond. Et c'est là qu'est arrivé que le président du Regroupement des courtiers a été obligé de démissionner parce que le tollé de tout ce monde-là s'est exprimé et a demandé au président du Regroupement, qui avait donné un appui de principe, de démissionner.

Voilà, M. le Président, la situation réelle dans laquelle on se trouve. Ce projet de loi là, et il n'a jamais voulu le dire, le ministre, il y avait une raison seulement pour laquelle il avait été déposé, c'était pour favoriser les institutions de dépôts. C'est tout! Et, pire encore, pour favoriser les institutions de dépôts au détriment du consommateur – au détriment du consommateur!

(21 h 50)

Mme Plamondon est venue ici jeudi dernier pour dire au ministre: Retire ton projet de loi, laissez-nous le regarder parce que nous ne sommes plus d'accord avec le projet de loi que nous avons devant nous. M. le Président, ce projet de loi a été fait à l'aveuglette. Après un projet de loi de 490 articles, il y a eu pas loin de 300 amendements qui ont été déposés. Et, pire encore, pire! des amendements qu'on ne connaît même pas encore n'ont pas été déposés, M. le Président. Comment on peut travailler si des amendements de fond n'ont même pas été déposés encore? Ils ont été concoctés un peu en catimini, mais ils n'ont jamais été déposés. On ne les connaît pas encore. Que le ministre soit franc! Il faut lui demander, M. le Président: Est-ce que tous les amendements ont été déposés? S'il est franc, s'il est sincère, s'il a l'honnêteté, il va le dire, que pas tous les amendements ont été déposés.

On a été en commission parlementaire combien d'heures? On a été en commission parlementaire, M. le Président, 13 ou 14 heures sur un projet de loi de 490 articles et près de 300 amendements. Même pas le temps de pouvoir les lire, même pas le temps de pouvoir les lire. C'est ça, la façon de gouverner de ce gouvernement. C'est ça, la façon de se comporter de ce ministre. Mais, M. le Président, la population, les citoyens, ils se rappelleront de ce gouvernement et particulièrement de ce ministre.

M. le Président, on ne peut pas accepter, dans un pays comme celui-ci, un pays où on essaie toujours de dire aux gens: On est à l'écoute, on essaie de refléter ce que vous aimeriez avoir à l'intérieur des projets de loi que nous avons, que ce ministre soit en train de dire: Non, moi, je ne veux rien savoir. C'est moi qui connais la vérité, c'est uniquement moi, et c'est moi qui vais décider ce que je vais faire.

M. le Président, c'est tellement vrai, comme je le disais tout à l'heure, que, quand le rapport Baril est sorti, il a dit: Vous l'avez fait, mais, moi, je ne veux rien savoir. Et, pourtant, comme je vous disais, M. le Président, c'était un rapport unanime, pas un rapport de l'opposition, mais un rapport de tous les membres, que ce soit du côté ministériel et du côté de l'opposition.

M. le Président, c'est en face de cette situation qu'on se retrouve aujourd'hui. Et, à la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui disait que la majorité des gens étaient en faveur du projet de loi n° 186, moi, je lui réponds que la très grande majorité des gens qui sont venus en commission et qui se sont exprimés sur le 188, ils sont contre ce projet de loi là.

M. le Président, le ministre, avec son entêtement, avec sa façon de se comporter, avec sa façon d'agir, et tout le monde le connaît, il nous a amenés dans une situation où aujourd'hui il va avoir l'odieux... Il va l'avoir, et les gens se rappelleront de son geste. On a l'odieux que, dans deux heures, on va adopter un projet de loi qu'on n'aura même pas eu l'occasion de regarder, M. le Président. C'est ça, la situation.

C'est un projet de loi qui est en train de mettre en péril, M. le Président, au-delà de 1 500 petites PME à travers le Québec, et particulièrement en région. C'est ça, la situation. Il est en train d'enlever le pain de la bouche de beaucoup de familles québécoises qui vivent avec ça, et des familles, comme je disais tantôt, spécialement en région. On ne peut pas se permettre de faire ça, mais le ministre, il le fait. Il le fait contre toute responsabilité, M. le Président. C'est un ministre qui ne veut pas écouter, mais les gens vont se rappeler de lui et ils vont se rappeler de ce gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, la démocratie, c'est très certainement l'univers des débats, des discussions, des confrontations les plus civilisées possible. Et, des fois, elles finissent par l'être moins, mais, de toute manière, c'est de l'essence des choses qu'une société avancée doit débattre, le plus longuement possible et le plus en profondeur possible, les choses importantes qui la concernent. Mais la démocratie, c'est aussi, fort heureusement, le lieu de l'action. Et, quand les débats ont assez duré, il faut que les gouvernements élus agissent. Alors, c'est ce que notre gouvernement s'apprête à faire dans un univers économique et social important, celui de la distribution des produits financiers et du contexte de travail, du contexte réglementaire et législatif des hommes et des femmes qui sont les intermédiaires entre ceux qui produisent ces divers produits financiers et les consommateurs.

Pourquoi est-ce qu'un débat de cette nature a été si important dans notre société et a duré si longtemps, parce qu'en vérité on peut dire qu'il s'est amorcé il y a quatre ou cinq ans? Le législateur avait prévu, du reste, que la loi régissant les intermédiaires de marché devait être modifiée de temps à autre, faire l'objet d'observations, de rapports, d'amendements et de refontes majeures. Pourquoi est-ce que le législateur avait prévu une telle chose? Parce que cet univers de l'assurance et des produits financiers est en mouvement, s'est modifié très rapidement, s'est internationalisé, mais, indépendamment de ses composantes internationales, a pris une ampleur qui était tout à fait inconcevable il y a 25 ou 30 ans. Même le monde de l'assurance – et nous ne parlons pas que d'assurance – comparé à il y a 25 ans s'est modifié de façon radicale. Mais autour des produits d'assurance sont venus se greffer des produits financiers de plus en plus variés, de plus en plus complexes, ce qui implique, comme pour l'assurance d'ailleurs, que les qualifications professionnelles doivent être de plus en plus élevées, que des formations de base de plus en plus poussées sont nécessaires et qu'on doit les compléter par des formations d'appoint et des formations permanentes.

Ce n'est donc pas surprenant que ce débat ait eu lieu, qu'il ait pris cette ampleur, et notre Assemblée nationale a fait, de ce point de vue, ce qu'elle devait parce qu'elle l'a traité comme un débat exceptionnellement important. Nous avons réuni en commission parlementaire à deux reprises nos collègues de la majorité ministérielle et de l'opposition pour écouter très attentivement un long défilé d'intervenants qui sont venus dire ce qu'ils pensaient du fond des choses, ce qu'ils pensaient de la loi, et c'est ce qui nous a poussés, dans ce dialogue avancé, à modifier des conceptions qui étaient celles de l'exécutif au départ.

Pour que le débat commence, il faut mettre une proposition sur la table. Le gouvernement en a mis une, qui découlait d'ailleurs de travaux antérieurs même à notre prise du pouvoir, parce que ce rapport quinquennal sur les intermédiaires de marché il était en route avant même le mois de septembre 1994. Alors, de tous ces travaux, il découlait une proposition qui était une ébauche, qui était très imparfaite au départ et qui a subi, avec les intervenants et leur contribution au débat, des transformations profondes qui ont donné lieu à des amendements.

(22 heures)

Le mauvais signe aurait été que ce projet ne soit pas changé et qu'il ne soit pas amendé. Ça aurait donné l'image d'un gouvernement qui se croyait en possession tranquille de la vérité, un gouvernement rigide qui n'écoute pas. Nous avons eu l'attitude contraire, M. le Président. On a étudié en commission parlementaire au vu et su de l'ensemble de la population et comme après ces deux commissions parlementaires à audiences publiques certains intervenants voulaient encore s'exprimer, voulaient encore parler, nous avons continué des négociations pendant des centaines et des centaines d'heures avec les divers groupes, que ce soit au niveau des fonctionnaires qui ont participé activement à ce processus, au niveau de certains députés de la majorité ministérielle, qui ont pris cette chose à coeur – le député d'Abitibi-Ouest en particulier, le député d'Arthabaska, le député de Crémazie – et de toutes ces discussions est résulté un processus d'affinement du projet tel que je vais citer maintenant, deux interlocuteurs majeurs, crédibles, qui démontrent hors de tout doute raisonnable que le temps de l'action est venu, qui démontrent hors de tout doute raisonnable que le gouvernement a été attentif, a été souple, a fait son profit des observations qui lui ont été faites, plutôt que d'essayer de les rejeter et de les contrer.

Le premier intervenant majeur dont je vais parler, c'est l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec. Cette Association, la plus importante association professionnelle du métier – sans vouloir minimiser la vertu des autres, mais c'est la plus importante en nombre, d'une part, et, à cause des moyens que lui donne le nombre, elle a pu se doter d'un personnel permanent extrêmement qualifié, soit administratif ou de direction, ou soit juridique – et cette Association a joué un rôle vital dans le débat; au début, comme c'était normal – et on ne peut aucunement en faire grief – d'une manière plutôt négative, mais une négation qui s'est toujours voulue constructive au point de chercher des solutions pour améliorer le projet de loi.

Alors, que nous dit cet intervenant majeur, l'Association des intermédiaires en assurance de personnes du Québec? D'ailleurs, sur son papier à lettres extraordinairement bien fait, on voit: «13 000 planificateurs d'avenir». C'est des gens qui planifient l'avenir, ce n'est pas des gens accrochés au passé ou à des conceptions passéistes. On dit d'ailleurs aussi, sur leur papier à lettres: «On vous protège comme personne», ce qui est une très belle utilisation de la langue française dans toutes ses subtilités. On vous protège comme personne, les assureurs de personnes, mais on vous protège aussi comme personne ne peut vous protéger. Alors, ils m'ont écrit une lettre comme personne ne peut m'en écrire, qui est la suivante – je ne la cite pas au complet: «Dans le contexte de l'étude détaillée du projet de loi n° 188 et des récentes orientations que vous nous avez confirmées ce matin, il nous fait plaisir de vous témoigner notre satisfaction à l'égard du transfert des pouvoirs d'encadrement de la pratique professionnelle des agents et courtiers d'assurance de personnes et sa reconnaissance implicite au sein de la Chambre de la sécurité financière. C'est donc avec enthousiasme que nous nous engageons à collaborer aux travaux de la commission parlementaire afin de permettre l'adoption du projet de loi n° 188 d'ici la fin de la présente session.»

Alors, cet intervenant majeur est clair. Il croit que le débat a assez duré. Il croit de plus, comme il l'a dit dans un communiqué publié quelques jours après, «que le ministre a amélioré le projet de loi n° 188 en favorisant un encadrement professionnel pour faire contrepoids aux intérêts commerciaux. L'AIAPQ estime qu'il s'agit d'une amélioration majeure». Là, il s'agit d'un témoignage crucial, parce que ces gens-là ne sont pas des observateurs lointains du monde de l'assurance, ce sont des intervenants quotidiens, ces hommes et ces femmes gagnent leur vie de ce métier. Ces hommes et ces femmes, par leur association professionnelle en particulier, ont mené des recherches approfondies. Ils connaissent bien la question et savent que le temps d'agir est venu.

Je vais citer également un autre intervenant majeur, lui, qui ne gagne pas sa vie dans l'assurance, qui n'est pas du tout lié particulièrement à l'intermédiation financière non plus, c'est le président de la Commission d'accès à l'information. Vous vous souvenez, M. le Président, qu'il a suivi nos travaux, qu'il est venu en commission parlementaire, mais que nous avons par la suite entretenu avec lui un dialogue poussé par écrit et par diverses rencontres. Alors, M. Paul-André Comeau nous écrit ceci: «Au terme des travaux menés par la commission parlementaire, les membres de la Commission d'accès à l'information ont été appelés à prendre connaissance de propositions d'amendements que vous entendez apporter au projet de loi. Ces propositions d'amendements donnent suite à toutes les recommandations formulées par la Commission. Cette dernière ne peut donc que se montrer favorable à la présentation de tels amendements.» Alors, voilà un interlocuteur majeur qui n'est pas partie directement aux effets de cette loi. C'est un fonctionnaire et une équipe désignés par l'Assemblée nationale pour se prononcer sur la délicate question de l'utilisation des renseignements personnels. Et c'est vrai que c'est une question qui était au coeur de nos discussions à l'occasion de l'étude de ce projet de loi.

J'ai cité ces intervenants. Je serais injuste si je n'en citais pas un autre qui a participé très activement au débat, qui est une grande institution québécoise et qui s'appelle le Mouvement des caisses populaires Desjardins. J'ai été fasciné par le débat que nous avons eu. J'ai écouté nos collègues de l'opposition, qui ont dit, ma foi, des choses sensées. On a même accepté certaines de leurs vues. Mais ils ont dit des choses qui étaient beaucoup moins sympathiques et beaucoup moins assises sur la logique et beaucoup moins marquées au sceau de la profondeur qu'en certaines autres circonstances.

Mais il y a une chose qui m'a peiné, presque blessé dans ce débat. C'est des gens qui sont venus s'acharner, avec une injustice incroyable et pour des motifs difficiles à pénétrer, contre une des plus belles institutions de l'économie québécoise, le Mouvement Desjardins. Le Québec a été un pionnier de la coopération au sens large, et pas rien que dans le domaine de l'épargne et du crédit. Les coopératives agricoles, par exemple, la Coopérative fédérée qui regroupe presque l'ensemble des cultivateurs du Québec et qui est une véritable coopérative, puisque, pour être membre du conseil d'administration de la Fédérée, il faut être producteur agricole. Donc, excellent succès en agriculture. Mais, sans faire de peine aux agriculteurs, rien de comparable à ce succès fabuleux en collecte de l'épargne populaire et de réinvestissement dans notre économie comme a réussi à le faire le Mouvement Desjardins. Et on dirait, le Mouvement Desjardins, qui n'est pas parfait d'ailleurs, pas plus que ne l'est la Banque Royale, sauf que le Mouvement Desjardins ne peut pas faire de superprofits parce que ce qu'il fait, le Mouvement Desjardins, ce sont des trop-perçus qu'il redistribue à ses membres – ses membres, donc ses utilisateurs – sous forme de ristournes, ce qui n'est pas précisément la caractéristique de la Banque Royale. Mais je ne veux pas m'acharner sur quelque institution, ce serait aussi injuste pour la Banque Royale que ceux qui ont été injustes vis-à-vis du Mouvement Desjardins.

Et ça a été une longue lutte obsessionnelle, directe ou indirecte, contre la venue du Mouvement Desjardins dans ce domaine de l'assurance des personnes. Ça, ça n'a pas été beau à voir. Mais je veux quand même, comme j'ai rendu hommage à l'AIAPQ pour sa profondeur et sa hauteur de vues et sa souplesse de discussion, je veux rendre aussi hommage au grand Mouvement Desjardins, qui a participé à ce débat, qui a fait des concessions, qui a pris l'intérêt de la société, qui a pris l'intérêt de ses membres, qui sont d'ailleurs une majorité dans notre société, et qui sort grandi de ce débat, contrairement à certains autres qui ont tout abordé par le petit côté et qui ont tout abordé par leur intérêt économique direct plutôt que par leur intérêt économique légitime, oui, mais que par l'intérêt de la société.

(22 h 10)

Je voudrais aussi dire que ce projet de loi est appuyé par des organisations très importantes dans notre société et qui, elles aussi, sont à connotation populaire et de masse. Le Mouvement Desjardins, organisation populaire et de masse. Qui d'autre appuie le projet de loi, M. le Président? La Confédération des syndicats nationaux, la Fédération des travailleurs du Québec. Ça n'enlève aucun mérite aux opposants, ça ne diminue en rien les opposants. La Standard Life de M. Garcia est contre. Ça ne m'enlève aucune estime ni pour l'institution ni pour l'individu. L'Industrielle-Alliance de M. Garneau est contre aussi. C'est leur droit le plus sacré de faire ça. Ils ont participé au débat. Ils nous ont peut-être aidés, d'ailleurs, en nous forçant à préciser certains arguments.

Mais là le débat, M. le Président, il est terminé. Il est temps que le monde de l'assurance, avec une nouvelle loi moderne, une nouvelle loi claire et équilibrée, se consacre maintenant, dans les mois qui viennent, à l'assurance et non pas aux querelles internes et aux débats, qui ont assez duré. Il y a des gens qui n'ont pas d'assurances, au Québec, dans des proportions fabuleuses. Des petits propriétaires, des locataires, des centres-villes entiers sans assurances, c'est à ça que le monde de l'assurance doit s'occuper maintenant et non plus à un débat qui, dans notre Assemblée nationale, s'est bien fait, a peut-être été exemplaire à certains égards, mais a assez duré.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État de l'Économie et des Finances. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député, il vous reste 12 minutes d'intervention... 11 minutes, excusez-moi!


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. On voit que non seulement il y a un bâillon, mais, en plus de ça, vous chronométrez à la minute près.

M. le Président, nous sommes ce soir, en cette Chambre, encore une fois, à une fin de session, devant le même geste de ce gouvernement, c'est-à-dire finaliser une session avec un bâillon, un bâillon en particulier – et c'est le premier bâillon, il pourrait y en avoir peut-être d'autres, on a déjà vu ça, avec ce gouvernement, deux bâillons en fin de session – sur trois projets de loi.

Premier projet de loi, le projet de loi n° 453, un projet de loi qui vise, pour une première fois dans les annales du Québec, à cause de la lenteur de ce gouvernement à agir, à passer une loi qui fait en sorte qu'un citoyen résidant en dehors du Québec pourra devenir directeur des élections du Québec, donc celui qui va gérer le scrutin à l'intérieur du Québec.

J'écoutais le député de Joliette, qui en même temps est ministre responsable de la Réforme électorale, dans son discours de présentation de ce bâillon, nous dire que c'était la faute de l'opposition. M. le Président, comment se pourrait-il que ce soit la faute de l'opposition, alors que c'est le gouvernement qui a la responsabilité de présenter les candidats? Comment se fait-il que, depuis six mois que le mandat du directeur des élections actuel a été reconduit à titre provisoire, à titre temporaire, nous n'ayons pas eu de suggestions valables? Comment se fait-il qu'il n'y ait pas eu de dialogue qui se soit engagé entre le ministre et l'opposition? Pourquoi, M. le Président? Parce que le gouvernement attendait jusqu'à la fin, la dernière minute, pour essayer de passer son candidat, un candidat que l'opposition récusait à juste titre. Et c'est ça, le problème, et c'est ça, la vraie réalité.

Alors qu'est-ce que l'on fait? On fait traîner les choses, on fait traîner les choses et on espère qu'à la fin l'opposition acceptera, de peine et de misère, ce qu'on veut lui proposer. Eh bien, non, M. le Président, nous n'avons pas accepté. Ils sont arrivés avant-hier avec un dernier candidat. Avant-hier, deux jours avant la fin de la session, est-ce que c'est un temps normal et légitime? Est-ce qu'on n'aurait pas pu le faire avant? Eh bien, oui, on aurait pu le faire avant. Et le gouvernement savait très bien ce qu'il faisait. Mais ça n'a pas marché.

Et là il se retrouve avec un candidat qui réside à l'extérieur du Québec, certes un candidat valable, un candidat qui a des états de service intéressants, raisonnables, respectables, mais qui réside à l'extérieur du Québec et qui n'a pas été averti suffisamment longtemps à l'avance qu'il serait le candidat. Alors que, si on l'avait dit il y a quelques mois, il aurait eu le temps de venir s'installer au Québec, s'établir ici et retrouver certainement sa résidence québécoise du moins assez rapidement. Et c'est ça, M. le Président, la responsabilité du gouvernement. Et c'est pour ça qu'ils passent un bâillon, parce qu'ils ont trop tardé, ils ont trop traîné.

L'autre projet de loi, le projet de loi n° 186, projet de loi qui traite du soutien à l'emploi, de l'aide sociale, de l'intégration des gens sur l'aide sociale à l'emploi. M. le Président, c'est un projet de loi extrêmement important: 700 000 personnes, 700 000 Québécois et Québécoises vivent de l'aide sociale, 700 000 Québécois et Québécoises sont sans emploi, ont de la difficulté à subvenir à leurs besoins et à assurer leur autonomie. Ça, M. le Président, c'est la situation, c'est la réalité.

Et pourquoi? Parce qu'il ne se crée pas d'emplois au Québec, parce que la crise économique, qui est terminée depuis maintenant trois ans, n'a pas donné ses fruits ici, alors que partout ailleurs elle les a donnés: au-delà de 300 000 emplois créés en Ontario, 66 000 au Québec; depuis le 1er janvier, moins 2 500 emplois au Québec, alors qu'au Canada il s'en est créé 140 000. Voilà le vrai résultat.

Alors, ce n'est pas étonnant que nous nous retrouvions avec des législations sur l'aide sociale, parce que les gens n'ont pas d'autre choix, avec ce gouvernement, que d'être sur l'aide sociale, alors que, normalement, leur aspiration légitime ne serait même pas d'être soumis à cette loi de l'aide sociale, elle serait d'être soumis au Code du travail, soumis au salaire minimum ou soumis à un salaire raisonnable et responsable, parce qu'ils auraient un emploi, parce qu'ils travailleraient, parce qu'ils seraient autonomes, parce qu'ils pourraient assumer eux-mêmes en travaillant, par leur labeur, leur autonomie et celle de leur famille. Et c'est ça, M. le Président, le grand dilemme, le grand problème.

La ministre responsable de ce dossier disait: L'opposition n'a pas fait son travail. C'est pour ça qu'on passe un bâillon, parce qu'ils n'ont pas été assez rapides. Mais, M. le Président, si l'opposition n'est pas assez rapide, c'est justement parce qu'elle fait son travail, c'est parce qu'elle consulte les groupes, c'est parce que les citoyens lui parlent. Et, lorsque les citoyens lui parlent, lorsqu'elle les consulte et qu'ils ne sont pas d'accord avec un projet de loi, eh bien, l'opposition, en faisant son travail, essaie de convaincre les ministres de changer le projet de loi, d'enlever des articles, de les amender, de les modifier. Et, bien sûr, quand le gouvernement, aveuglé en fin de mandat, en fin de règne, fatigué, en manque d'initiative, s'y refuse, nous prenons le temps nécessaire pour essayer de le convaincre.

Lorsqu'on n'y arrive pas, lorsque la population n'est pas d'accord, lorsque l'opposition continue de s'opposer, à essayer de leur faire entendre raison, que font-ils? Eh bien, M. le Président, ils font un bâillon. Ce qu'ils font, ils bâillonnent les députés et ils décident d'adopter des projets de loi très rapidement, en dedans de deux heures, trois heures, des projets de loi de 200, 300 articles, sans consultation, d'une manière autoritaire et autocratique. Ça, c'est pour le projet de loi n° 186, M. le Président.

L'autre projet de loi, le projet de loi n° 188, le projet de loi qui traite, bien sûr, d'une réforme importante dans le domaine des intermédiaires de marché et des assurances, un projet de loi qui va toucher la vie de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, parce que tout le monde au Québec ou quasiment tout le monde, un jour ou l'autre, a à prendre une assurance, que ce soit pour son automobile, l'assurance sur la vie, pour son habitation, sa maison, pour garantir son hypothèque, pour son entreprise. Tout le monde au Québec, donc, a à faire et a à voir avec les assurances.

Et qu'est-ce que le gouvernement fait, M. le Président? Sous le couvert d'une loi pour favoriser le consommateur, il passe un projet de loi qui a juste pour but de permettre aux caisses populaires Desjardins de vendre de l'assurance à l'intérieur des caisses Desjardins, cela en compétition directe avec les courtiers et en faisant en sorte de créer rapidement un monopole, de faire en sorte que cette entreprise, cette institution financière, par ses prix qu'elle baisserait, par ses prix qu'elle va se permettre de faire, va compétitionner et faire fermer des milliers de courtiers et de petits entrepreneurs en assurance au Québec. Et que va-t-il arriver lorsque ces courtiers-là, lorsque ces assureurs-là vont être fermés, M. le Président?

Eh bien, cette entreprise-là aura le monopole et pourra amener non seulement les prix qu'elle voudra, mais les couvertures qu'elle voudra et le service qu'elle voudra. Et on sait, à travers le monde, que les monopoles, ce n'est jamais intéressant, M. le Président, pour les consommateurs. Juste à titre... On se rappellera, il y a quelques années, aux États-Unis, le gouvernement américain, qui est pourtant le gouvernement qui est le champion de la libre entreprise, a obligé une entreprise de téléphone qui s'appelait American Telephone and Telegraph, AT&T, à se scinder en plusieurs unités parce qu'il considérait justement que le monopole qu'elle avait était nuisible aux consommateurs. Et c'est le même cas, c'est un de ces cas-là.

Le ministre n'a pas voulu écouter. Il se réclame de consensus. Il citait, il y a quelques minutes, une lettre d'un regroupement de courtiers qui approuvent une partie du projet de loi, mais qui ne sont pas forcément en accord avec l'ensemble du projet de loi. Bien, M. le Président, il y a d'autres gens qui ne sont pas d'accord avec le projet de loi du ministre, il y a d'autres personnes. Je me permettrai de les lire, parce que, eux aussi, ils ont droit à la vérité, les citoyens ont le droit de savoir qu'il y a beaucoup de Québécois et de Québécoises qui ne sont pas d'accord avec la loi du ministre.

Je vais vous les nommer, M. le Président: le Service d'aide au consommateur, Option consommateurs, l'Association des consommateurs du Québec, la Fédération nationale des associations de consommateurs, la Fédération des ACEF, le Conseil des assurances de personnes, le Conseil des assurances de dommages, le Protecteur du citoyen, payé par le gouvernement, nommé par l'Assemblée nationale, les 18 000 membres de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les 5 200 courtiers membres de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec, les 7 280 employés des courtiers d'assurances, les 131 sociétés d'assurance de personnes membres de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, les 20 400 employés basés au Québec des sociétés d'assurance de personnes, les 60 compagnies d'assurance de dommages qui sont membres du BAC, Bureau d'assurance du Canada, et les employés, bien sûr, des compagnies d'assurances Standard Life et Industrielle Alliance.

On se rend compte, M. le Président, à la lecture de cette liste, que ce n'est pas vrai qu'il y a un consensus, que, s'il y avait un consensus, le ministre ne mettrait pas un bâillon, l'opposition aurait fait en sorte que, si le projet de loi était compatible avec l'ensemble des intervenants, il soit adopté. Mais, malheureusement, ce n'est pas le cas, les gens ont d'énormes craintes, d'énormes réticences, et on est en train de sacrifier une partie complète de la société québécoise, soit celle des courtiers d'assurances et du monde de l'assurance indépendant.

Alors, M. le Président, ce n'est pas vrai qu'il y a consensus. Et c'est pour ça que le ministre, par son bâillon... Parce qu'il n'a pas d'autre choix que de nous l'enfoncer dans la gorge et de l'enfoncer dans la gorge des courtiers d'assurances du Québec. Et un jour, les Québécois et les Québécoises paieront le prix du manque de concurrence et de compétition qui a été imposé par ce ministre.

M. le Président, un bâillon, c'est le signe avant-coureur de la déchéance d'un gouvernement, c'est le signe d'un gouvernement qui manque d'imagination, d'un gouvernement qui est en fin de mandat, d'un gouvernement qui n'a d'autre choix que de gouverner et que de gérer autoritairement. Et qu'arrive-t-il quand un gouvernement est rendu là? Eh bien, il arrive que la population demande des élections générales parce qu'elle a hâte de les renvoyer chez eux, elle a hâte de le mettre dehors et de mettre une autre équipe à la place, qui va gérer intelligemment, qui va gérer avec imagination et avec innovation. Et, ce soir, c'est le signe avant-coureur de ce qui les attend bientôt à la prochaine élection, c'est une défaite électorale, où les Québécois vont les renvoyer chez eux pour mettre une autre équipe à leur place.

Des voix: ...

(22 h 20)

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Sur ces paroles prend fin le débat restreint de deux heures sur la motion de suspension des règles.

Alors, je vais mettre aux voix la motion de suspension des règles. M. le député de LaFontaine...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez... Vote à main levée?

Une voix: ...nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, oui, mais demandez le vote nominal, si vous le voulez.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, que l'on appelle les députés. Nous allons suspendre les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 22 h 21)

(Reprise à 22 h 29)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, mesdames, messieurs, je vous invite à prendre vos places. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, je vais mettre aux voix la motion de censure dont nous venons de débattre.

(22 h 30)

Une voix: Hein? Censure?


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, la motion de suspension. Que les députés en faveur de cette motion de suspension veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Bélanger (Anjou), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Jutras (Drummond), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Gautrin (Verdun), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:20

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion est adoptée. Conformément à la motion que nous venons d'adopter, j'inviterais maintenant la commission permanente des affaires sociales...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ah! écoutez, d'après la motion, vous venez en troisième lieu, M. le ministre. On présente les rapports et, après ça, c'est la présentation de projets de loi.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 186

Alors, j'inviterais le porte-parole de la commission permanente des affaires sociales à présenter le rapport de la commission quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale.

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé les 2, 3, 4, 5, 9, 11, 12 et 16 juin 1998 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. L'étude de ce projet de loi n'a pas été complétée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le rapport est déposé.


Dépôt du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 188

J'inviterais maintenant le porte-parole de la commission permanente des finances publiques à déposer le rapport de l'étude détaillée du projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

M. Baril (Arthabaska): Merci, M. le Président. En effet, je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé les 10, 11, 16 et 17 juin 1998 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers. La commission n'a pas complété l'étude de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le rapport est déposé.


Projet de loi n° 453


Présentation

J'inviterais maintenant celui qui doit présenter le projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, à nous présenter le projet de loi. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de permettre la nomination d'un directeur général des élections même si celui-ci n'est pas un électeur au sens de la loi.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi.

M. Chevrette: M. le Président, oui.


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 453 qui vient d'être présenté. Le débat est de 40 minutes, dont 15 minutes pour le groupe formant le gouvernement. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, M. le Président.

M. Paradis: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, bien qu'il y ait suspension des règles, vous vous êtes arrêté au moment où vous avez indiqué qu'il y avait 15 minutes pour un représentant du côté gouvernemental. Simplement pour spécifier qu'il y a également un 15 minutes du côté de l'opposition et également un droit de parole pour les députés indépendants, malgré la suspension des règles. Je ne voulais pas, là, que votre décision soit interprétée comme un bâillonnement total et complet de tous les parlementaires qui ne forment pas le gouvernement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous ferai remarquer, M. le leader de l'opposition, que j'avais mentionné que le débat durait 40 minutes. Il en restait pour les autres: donc, 15 pour le groupe formant l'opposition et, effectivement, cinq pour les indépendants et cinq de réplique pour le parti ministériel. Alors, nous revenons aux 15 minutes du ministre. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. D'ailleurs, le leader de l'opposition fait bien de se lever pour dire qu'il aura 15 minutes parce que j'ai l'intention de parler de lui au moins quelques minutes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: M. le Président, si nous sommes ici à cette heure, c'est d'abord grâce au génie incomparable du député de Rivière-du-Loup, parce qu'il ne connaissait pas la suggestion du Directeur général des élections. Il ne la connaît pas. Ordinairement, quand on ne connaît pas, on s'abstient, on ne s'oppose pas. On s'abstient, c'est un minimum, ça. Mais, lui, il a dit: Mon heure de gloire, parti reconnu à l'Assemblée nationale, parti affranchi par le Directeur général des élections, faut que je lui montre que j'existe, et il s'est opposé à un consentement des deux partis.

Le Parti libéral, ce matin, M. le Président, avait consenti à voter, demain, en faveur du Directeur général des élections, et le député de Rivière-du-Loup a dit: Bah! écoutez, vous savez, moi, je n'ai pas grand chance de me faire valoir, donc, en m'opposant, on parlera de moi; c'est ce que je vais faire. Et je vais le faire très brièvement pour arrêter de parler de lui, justement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Je vais plutôt parler du Parti libéral parce que, M. le Président, le Parti libéral, comme à son habitude, a décidé de parler contre puis de voter pour. C'est ordinairement le propre du Parti libéral en cette Chambre: il parle contre les gens, il parle contre tout ce qui se fait, puis il vote pour. Puis, quand il parle pour, il vote contre.

Je vous demanderais de bien écouter, M. le Président, et en particulier ceux du Parti libéral qui ne connaîtraient pas l'essentiel des propos de leurs représentants durant tout le débat d'urgence. Tout d'abord, ce fut le leader de l'opposition qui s'est levé en cette Chambre, sachant que, depuis 9 heures ce matin, le bureau de la chef parlementaire, la députée de Saint-François, digne représentante d'un parti venant d'Ottawa qui a été qualifié comme étant une république de bananes par le leader de l'opposition... Il s'est levé – et je vais vous citer le leader de l'opposition pour vous montrer la cohérence des propos, c'est assez impressionnant; je pense qu'un élève de sixième année, peut-être même de niveau c, ne réussirait pas à commettre une telle incohérence – et il a dit ceci: «Moi, je plaide au nom de tous les parlementaires des deux côtés de la Chambre – il s'est permis de parler pour nous autres, à part de ça – qui ne souhaitent voir personne de l'extérieur du Québec venir nous dire comment on va faire nos élections, surtout pas à partir d'Ottawa.»

(22 h 40)

J'avoue, une première réaction, ça a été le sourire, parce que, si on dit un mot ici contre le fédéral ou un mot contre Ottawa, vous entendez des tollés de l'autre côté. La succursale d'Ottawa est insultée qu'on aille chercher quelqu'un d'Ottawa. Imaginez-vous si ça paraît bien, ça. Et, soyez sans crainte, les Québécois ne préparent pas pour M. Girard qui reviendra au Québec ce que les Ontariens ont préparé à M. Devine à Ottawa.

Une voix: Levine.

M. Chevrette: M. Levine, excusez. Et je dois vous dire, M. le Président, que c'est faire injure à l'intelligence des gens. Parce que M. Girard s'est formé ici, au Québec, c'est ici qu'il a commencé à travailler pour la Direction générale des élections, c'est ici qu'il a pris son expérience, c'est ici, au Québec, que ce monsieur s'est bâti une notoriété au point que Élections Canada est venu le demander pour aller travailler là-bas, et il y est allé, de loyaux services pendant six ou sept ans.

Nous, voilà qu'on a un vide. Depuis deux mois, on essaie de leur suggérer des noms. On a suggéré le sous-ministre de la Justice, M. Bouchard. Ils ont dit: Non, non, on n'en veut pas. On aurait cru qu'ils auraient nommé M. Casgrain intérimaire. Mais je me rends compte que le député de Laurier-Dorion n'a pas réussi dans sa tentative, parce que, dès qu'on a appelé le chef de cabinet de Mme la députée de Saint-François, ce dernier a dit: On ne prend pas M. Casgrain, avant même qu'on lui pose la question. Donc, on a suggéré M. Girard. Et ça a pris des téléphones, des téléphones et des téléphones jusqu'à temps que... Ça ne marchait pas avec Alfred Pilon, me dit-on. Il a fallu qu'on parle à Mme Gagnon-Tremblay, la chef de l'opposition. La chef de l'opposition, ce matin, a fait dire que ça marchait. Tout offusquée depuis ce temps-là: Il ne faut pas prendre un gars d'Ottawa. Ils ont accepté ça à 9 heures ce matin. On se croirait dans une république de bananes. C'est à peu près ce qu'ils prônent puis ce qu'ils cherchent, avec leur option politique. Donc, M. le Président, ça fait...

Des voix: ...

M. Chevrette: M. le Président, s'il vous plaît! Je «peux-tu» avoir la paix? M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, s'il vous plaît! Considérant que le débat est restreint, je vous prierais, s'il vous plaît...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député, pourriez-vous, s'il vous plaît, merci – M. le député d'Outremont, s'il vous plaît – prendre place? Et je demanderais également aux députés qui ne sont pas à leurs sièges respectifs de bien vouloir réintégrer leurs sièges respectifs, s'il vous plaît. Alors, on va poursuivre nos débats en respectant notre décorum. Et je vous demanderais, s'il vous plaît, de prendre place. M. le ministre.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, des fois, c'est vrai que ça fait mal un petit peu, quand on les touche de près, qu'on dise la vérité. Mais ce n'est pas moi qui parle, c'est le leader de l'opposition qui a parlé; c'est le transcript. Que vous n'acceptiez pas ce qu'il a dit, je n'en disconviens pas. Parce que plusieurs n'ont pas assisté. Ils ont été même surpris quand je l'ai cité au niveau du temps imparti pour plaider l'urgence. Il y en a même qui se bidonnaient. Ils ne nous croyaient pas, ils n'osaient pas croire que leur leader avait dit ça. Mais, moi, j'ai les transcripts, noir sur blanc.

Donc, M. le Président, de deux choses l'une: ou l'opposition officielle ne savait pas quoi dire sur le projet de loi... Au lieu de s'en prendre à celui qui provoque un débat inutile de suspension des règles sur ce projet de loi puis qui se pense fin en le faisant, ils ont plutôt préféré attaquer une personne qu'ils avaient, ce matin, à 9 heures, accepté de reconnaître comme étant un candidat valable. Ça, je ne trouve pas ça très, très brillant, je ne trouve pas ça très, très intelligent, M. le Président.

Le projet de loi, il vient faire quoi? En quelques minutes, je vais vous l'expliquer. C'est que cet homme, qui a appris au Québec, qui a pris son expérience au Québec puis qui est allé travailler pendant quelques années à Élections Canada, a accepté de revenir ici. Mais, au sens de notre loi, parce qu'il a vécu plus de deux ans à l'extérieur du Québec, il perd automatiquement son droit de vote. Donc, au sens de la loi, il fallait lui donner l'opportunité de reprendre son droit de vote, et c'est ce qu'on lui demande de faire dans les neuf mois de sa nomination, sinon il perdrait son poste. C'est tout simplement ça que dit la loi, ce n'est pas trop, trop compliqué. Et j'espère que c'est compréhensible, sinon on aura une demi-heure pour essayer de vous expliquer mot à mot tantôt. C'est vrai qu'à l'impossible nul n'est tenu; je ne suis pas sûr que vous me comprendrez, mais on essaiera en tout cas, M. le Président.

Je vous rappelle que ce projet de loi aura deux articles et je vais les lire au cas où ça pourrait commencer à pénétrer. Ma profession en étant une d'enseignant, je suppose qu'avec une certaine pédagogie je réussirai à vous faire comprendre ces deux paragraphes suivants.

«Malgré l'article 478 de la Loi électorale, l'Assemblée nationale peut, au plus tard le 23 juin 1998, nommer une personne qui n'est pas un électeur au sens de la loi.» Au sens de la loi, pour être un électeur, il faut être citoyen canadien et vivre depuis un certain nombre de mois dans le Québec.

«La personne ainsi nommée doit toutefois acquérir la qualité d'électeur dans les neuf mois qui suivent la date de son entrée en fonction – donc, dans les neuf mois où il sera nommé, il faudra qu'il ait déménagé en territoire québécois – sans quoi son mandat prend fin, malgré l'article 479 de cette loi, un an après cette date.»

En d'autres mots, il n'a pas le choix. S'il ne déménage pas à l'intérieur de neuf mois, il ne pourra pas avoir un mandat plus long que 12 mois subséquents, ça veut dire 21 mois. C'est ça, la loi, c'est très, très clair. Je suis convaincu que le whip pourra l'expliquer à certains de ses collègues. S'il a de la difficulté, de toute façon, on pourra arrêter quelques minutes. Normalement, un projet de loi aussi clair que ça devrait prendre quelques minutes à peine pour être compris.

Je suis persuadé qu'à ce moment-là demain, au lieu de faire des farces sur ce poste très important, parce qu'au Québec... oui, M. le député de Rivière-du-Loup, plutôt de rire, vous pourriez considérer que le Québec, c'est probablement l'endroit sur le continent nord-américain, je dirais même à la grandeur de la planète, où les règles démocratiques sont probablement dans les meilleures, M. le Président. On donne même droit de parole, un droit de parole démesuré à certains individus en cette Chambre, et ça, on le fait de façon démocratique pour permettre l'expression d'opinions.

M. le Président, cet héritage de René Lévesque, sur le plan électoral, sur le plan des finances publiques, c'est dû à une structure qu'on s'est donnée en 1977. C'était Robert Burns qui était alors leader et ministre responsable de la réforme électorale, et on s'est voté une direction générale des élections, avec des règles très correctes, enviées et enviables. On a été demandé à la grandeur de la planète, dans plusieurs pays qui voulaient passer de l'État dictatorial à un régime démocratique. Et qui allait présenter les différentes législations? C'était le Québec qui était appelé à travers le monde. Dans les pays africains, dans des pays même européens, on a réussi à aller démontrer que nos règles démocratiques sont très bien. Nos règles démocratiques sont enviées. Et, même dans l'arrêté Libman, la Cour suprême reconnaît que nos lois sont exemplaires et sont citées en exemple.

(22 h 50)

Je comprends que ça peut faire mal, mais je regarde des individus qui se bidonnent puis qui ricanent, puis qui ont adopté le Québec comme terre d'accueil précisément parce qu'il y avait un régime démocratique, et tellement démocratique, ce régime-là, qu'il permet à tout individu qui a acquis la citoyenneté canadienne d'être représenté en cette Chambre. On ne rira pas de nos règles démocratiques, M. le Président, qui que ce soit. On a une législation enviable, citée à travers le monde, et je suis persuadé que c'est tout à l'honneur du Québec, c'est tout à l'honneur de René Lévesque qui nous a laissé un héritage extraordinaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre responsable de la Réforme électorale. Nous allons maintenant céder la parole... Je disais donc que je vais céder maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en la matière, M. le député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Le ministre a fait un discours... Comme c'est son habitude, il s'est gonflé, il s'est livré à un discours qui n'avait pas de rapport avec la réalité, il a pris quelques mots ici et là, il a pris quelques extraits et il a conclu en parlant de la Loi électorale et de l'héritage de René Lévesque.

Mais, quand je lis notre loi, quand je l'étudie, je n'ai jamais vu dans notre loi aucune référence à une reconnaissance démocratique, comme disait le ministre ce matin, que c'était normal... Pour ne pas utiliser le mot «patronage», on l'appelait «reconnaissance démocratique» dans les lettres du Parti québécois, M. le Président. Et, si, effectivement, René Lévesque avait été ici, il aurait vite dit: Ce n'est pas comme ça que ça marche.

Mais là, de l'autre côté, aujourd'hui on a trouvé ça normal. On a applaudi la teneur d'une lettre qui disait à un électeur: Écoutez donc, là, vous avez eu des largesses de nos amis, le Fonds de solidarité, donnez-nous donc quelques sous à notre caisse électorale. Et, quand on a soulevé ça ici, de l'autre côté on nous a dit: Bien, c'est normal, c'est la reconnaissance démocratique.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: On en revenait tout simplement pas. Le premier ministre lui-même... Le vice-premier ministre a commencé la ronde d'applaudissements, et le premier ministre s'est levé pour dire: Tiens, tiens, tiens, il n'y a rien là, c'est normal. Et aujourd'hui le ministre responsable de la Réforme électorale nous parle de l'héritage de René Lévesque, ça, pour cette affaire-là, M. le Président.

Si on revient à la loi que nous avons ici, le ministre, qui parlait de mon collègue le leader qui aurait parlé non pas sur le projet de loi, mais sur le bâillon qui a été proposé en référence à un projet de loi... Parce que ça devient une habitude pour ce gouvernement d'adopter des lois qui touchent la Loi électorale par bâillon. Je répète, la Loi électorale, c'est la loi qui gère les élections et qui doit avoir la confiance par consensus unanime des membres ici, à l'Assemblée, pour qu'on ait l'expression de notre confiance en la personne et en l'institution qui est chargée d'appliquer la loi sur les élections. On peut se chicaner, on peut faire toutes sortes de choses après, mais une chose doit être claire: on ne remet pas en question la valeur de la loi qui gère les règles du jeu, qui établit les règles du jeu.

Alors, le ministre, par exemple, peut prétendre que mon collègue référait, quand il parlait d'une république de bananes, à un autre gouvernement, mais, quand il va lire les galées, il va voir que mon collègue référait au comportement de ce gouvernement face à ça. Petit détail: ne pas toujours prendre les choses hors question.

Je suis d'accord avec le ministre, par exemple, quand il parle de ce que le député de Rivière-du-Loup fait par rapport à ce projet de loi. C'est complètement inutile qu'on soit ici, M. le Président, à moins que le député nous dise que la personne qui est suggérée n'est pas la bonne personne, qu'il n'a pas confiance en cette personne. Nous, effectivement, on a dit ce matin, après avoir reçu l'avis du gouvernement que ça serait le nom qui serait proposé, puis on est en train de faire les vérifications, les finaliser... À première vue, ça semble quelqu'un de compétent, qui a fait ses classes, si je peux parler ainsi, ici, au Québec, au bureau du Directeur général des élections, qui a continué, qui est allé un peu plus loin dans ses études, si on peut le dire ainsi, M. le Président, qui est allé à Ottawa travailler pour le bureau d'Élections Canada, donc a élargi un peu ses expériences, et il est intéressé à revenir.

Et, étant donné qu'on semble trouver, au niveau des références, etc., que l'expérience acquise pourrait être mise à profit ici correctement, on serait prêt à voter demain en ce sens. Sauf que, et je le répète, si on est dans l'obligation, aujourd'hui, de faire l'ajustement technique nécessaire pour permettre à cette personne d'occuper le poste de DGE quand il n'a pas techniquement la qualité d'électeur étant donné que son domicile, à l'heure actuelle, est à l'extérieur du Québec... Ça prend quelque chose pour accommoder cette situation.

Mais, si on est ici aujourd'hui, c'est parce que pendant un an... Et on ne parle pas des dernières deux semaines où, finalement, le gouvernement avait mis l'actuel Directeur général des élections dans une situation intenable en lui jetant tout un processus de gestion des élections scolaires avec un laps de temps impossible à gérer, avec des changements fondamentaux dans les règles de fonctionnement, ce qui a fait en sorte que, effectivement, ça a causé des problèmes d'approuver le poste – non pas la personne, mais le poste – du Directeur général des élections durant l'exercice de ce processus. Et c'est ça, la vérité, M. le Président, parce que, effectivement, la vérité, dans cette Chambre, doit avoir ses droits. Et on le voit trop souvent, comme à la période de questions quand on est obligé, à cause de nos règles, de prendre, des fois, la parole, entre guillemets, de ceux qui nous répondent.

Mais, M. le Président, pour revenir à cette question-ci, nous sommes dans une situation où, effectivement, on va parler pour, mais on va voter contre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Sirros: Le ministre disait qu'on parlait contre, mais qu'on votait pour. Dans cette situation, M. le Président – et je vous répète le contexte...

Une voix: On est cohérent.

M. Sirros: Je vous répète le contexte. Le contexte, M. le Président, c'est qu'il y a une Loi électorale qui est encore une fois adoptée par une suspension des règles. On ne peut pas décemment, de ce côté-ci, même si on doit avoir la franchise d'expliquer notre pensée sur le fond, accepter qu'on vote pour une loi dans le bâillon quand on sait que le bâillon est une mesure extrême de suspension des règles et quand on sait que la loi dont on suspend les règles pour l'adopter est une loi qui est centrale dans le système parlementaire.

Alors, M. le Président, on a été effectivement placé dans cette situation, et, des fois, il y a des situations qu'on doit assumer, mais le député de Rivière-du-Loup qui va suivre... Je dois être d'accord que, finalement, 124 députés dans cette Chambre se sont mis d'accord, semble-t-il, 124 députés. Parce que le vote demain n'est pas un vote de parti nécessairement, chaque député est libre de se lever demain, parce que c'est les deux tiers des votes qui seront requis. Alors, celui qui est le un sur 125, semble-t-il, s'est senti offusqué parce qu'il y a eu d'abord consultation entre le gouvernement et l'opposition, et information à son égard par la suite, qui est venue après qu'il ait lu les journaux. Sur ça, c'est peut-être dommage que le gouvernement n'ait pas pu arranger les choses de telle façon de l'informer après avoir consulté l'opposition et avoir eu l'assentiment de l'opposition. Mais, encore une fois, il y a eu toute une série d'événements qui sont arrivés.

Ça étant dit, M. le Président, on est donc dans la situation où on est et on votera comme on devra voter, dans le contexte où cette loi nous est présentée. En prenant bien soin de dire encore une fois qu'en ce qui nous regarde la nomination qui est proposée semble être la nomination d'une personne compétente, qui a les qualités nécessaires pour donner l'assurance de l'objectivité de la personne qui va occuper ce poste-là, de l'application rigoureuse de la loi dans une impartialité parfaite et un travail harmonieux, on l'espère, en continuité au Comité consultatif, pour qu'on puisse constamment améliorer nos lois et nous assurer que, dans l'avenir, il n'y aura jamais la possibilité de voir le principe de cette reconnaissance démocratique que le ministre de la Réforme électorale semble trouver tout à fait normale quand il s'agit du financement des partis politiques.

Parce que je suis sûr que celui qui a oeuvré pour changer et nettoyer plus, je dirais, au Québec la question du financement des partis politiques n'aurait jamais accepté de concevoir qu'aujourd'hui quelqu'un avec lequel il avait siégé aurait pu dire que ce n'est que normal d'avoir un processus de reconnaissance démocratique, entre guillemets, M. le Président, qui fait les manchettes partout, parce que tous les gens sensés trouvent que ça n'a pas de bon sens, même si le ministre des Finances applaudissait.

(23 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous allons maintenant céder la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député, vous avez un temps de parole de cinq minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Bien oui, malheureusement, contrairement à ce que sembleraient souhaiter nos collègues, on est encore, peut-être pour un certain temps, dans un système parlementaire où les gens qui sont élus par la population ont le droit de s'exprimer, ont le droit de parole.

C'est un joli spectacle ce soir. On a un gouvernement qui se targue qu'on est le pays le plus démocratique, qu'on a les meilleures règles, pendant qu'il est en train de nous présenter – parce que là il s'en fait une fierté – une loi sous le bâillon pour modifier – la veille d'une nomination, parce que là on est rendu à la dernière journée – les critères qui rendent admissible une personne à être Directeur général des élections: il n'a plus besoin d'être électeur. Puis on a l'opposition qui est pour parce qu'ils sont dans le deal, mais qui va voter contre.

Alors, M. le Président, dans mes lectures qui me sont venues en voyant ça, je n'ai pu m'empêcher de tomber sur le mot «pitre» dans le dictionnaire, qui originellement, le mot «pitre», voulait dire «bouffon chargé d'attirer le public à un spectacle de foire ou de cirque», mais qui, dans son terme plus courant, faire le pitre, c'est faire des facéties, et faire des facéties, c'est faire des plaisanteries burlesques, des balivernes, des bouffonneries. Alors, évidemment, loin de moi l'idée de tenir des propos antiparlementaires et de dire que c'est fait dans notre Parlement, mais curieusement c'est des termes qui me sont venus à l'esprit à écouter les débats qui ont cours.

On se retrouve avec un Directeur général des élections qui va être chargé de faire appliquer la loi, parce que là le projet de loi, c'est ce qu'il nous dit, «le directeur général des élections même si celui-ci n'est pas un électeur au sens de la Loi électorale». Je comprends que, a priori, le type vient du Québec, le type a travaillé au Québec. Là, il va devoir faire appliquer la loi. Alors, si un électeur habite au Québec depuis cinq mois et qu'il s'essaie de voter à la prochaine élection, le citoyen s'essaie de voter, ça va être ce Directeur général des élections là qui va devoir aller lui taper sur les doigts puis dire: Ce n'est pas correct, alors que lui va avoir fait régulariser sa situation par l'Assemblée nationale par une loi de dernière minute.

Neuf mois, on donne neuf mois à la personne en question pour devenir citoyen du Québec, résident du Québec, pour acquérir, donc, la qualité d'électeur. À l'intérieur des neuf prochains mois, il y a des chances que l'élection soit passée. Donc, il y a des chances, au moment de l'élection, que celui qui va appliquer les lois électorales du Québec ne soit pas soumis aux règles électorales du Québec parce que, lui, il n'est pas un résident. Alors, sans rien enlever aux qualifications de la personne, il me semble qu'il y aurait au moins là des questionnements démocratiques suffisants pour qu'on ait pu faire le débat à l'Assemblée nationale autrement que par un bâillon.

Pour revenir sur un certain nombre des arguments qui ont été présentés... Je comprends qu'on a deux partis politiques en place qui se sont échangé le pouvoir depuis quelques années et qui se sont voté des lois électorales assez avantageuses pour piger dans les fonds. Puis là, ce matin, les libéraux accusaient le Parti québécois pour ses méthodes de financement, parce que, eux autres, ils aimeraient bien être au pouvoir, parce que, eux autres aussi, quand ils étaient au pouvoir, ils avaient les deux mains dans l'assiette au beurre. Parce qu'on veut être au pouvoir pour être capable de piger dedans, puis là on s'échange le pouvoir puis tout le monde est heureux.

Le député de Joliette, quand il sent un malaise avec la démocratie, avec les lois électorales, à chaque fois, il tombe dans les insultes. Je les prends, M. le Président. Quels que soient les pourcentages dans les pires sondages que mon parti peut obtenir, je suis bien heureux d'y appartenir aujourd'hui, puis je n'ai aucune tentation de tomber dans la joute pitoyable qu'on voit ce soir, de tomber dans la joute pitoyable de gens qui veulent aller se mettre les mains dans l'assiette au beurre, qui ont hâte, tellement hâte d'être du côté du pouvoir, parce qu'eux autres aussi ils veulent piger dans le sac, puis ils veulent envoyer des lettres, des meilleures lettres, pour aller chercher plus d'argent puis plus de financement, comme si la Loi électorale ne les finançait pas déjà assez.

Le dernier questionnement que je veux amener: en termes de démocratie, c'est quoi, la prochaine étape? Si on utilise le bâillon pour changer les règles de nomination du Directeur général des élections, c'est quoi, la prochaine étape? On va utiliser le bâillon pour changer la durée des mandats. On va utiliser le bâillon pour changer les règles parlementaires. Du point de vue démocratique, si on est prêt à changer, par bâillon, unilatéralement, si le gouvernement est prêt à changer les règles de joute électorale – et pas avec un député sur 100, non; à la prochaine élection, il va y avoir trois partis politiques dans les comtés qui vont présenter des candidats – avec un parti politique sur trois qui dit: Écoutez, là, ce choix-là, on ne l'entérine pas...

Pour répondre à la question du député de Laurier-Dorion: Non, je ne donnerai pas mon approbation à la nomination du Directeur général des élections. Il me semble qu'il y aurait des questionnements démocratiques un peu plus profonds qu'à régler par des insultes. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Nous cédons maintenant la parole au député de LaFontaine, en vous mentionnant, M. le député, qu'il vous reste un temps de parole de six minutes. Au parti ministériel, il reste un temps de parole de deux minutes avant la réplique du ministre, de cinq minutes. Alors, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 453 est certainement un projet de loi qui est assez particulier, car c'est la première fois, à ma connaissance, en 13 ans de vie parlementaire, que je vois un gouvernement amener une loi, en plus, l'amener sous l'emprise du bâillon, c'est-à-dire en dépit des règles normalement établies, qui fait en sorte de changer des règles qui touchent la démocratie. Et je m'explique, M. le Président. Car, en effet, s'il y a quelque chose de plus important ici, au Québec, qui existe, pour nous, les parlementaires et pour les citoyens qui votent, c'est bien l'organisation des élections et le Directeur général des élections du Québec. Pour nous, c'est quelque chose de très fondamental. L'ensemble des députés et des parlementaires et des citoyens doivent donc donner leur confiance la plus entière à cette personne et aussi aux règles et à l'institution qui régissent cette personne. Et qu'est-ce qu'on est en train de faire actuellement? On est en train de voir le gouvernement qui change par une loi des règles établies.

Et moi, je ne suis pas à mettre en cause la personne qui va être nommée à ce poste-là suite aux changement de règles. Ce que je trouve dommage ou déplorable, c'est que, depuis six mois, alors que nous avons un directeur général intérimaire – donc, s'il était intérimaire, le gouvernement, le ministre savaient très bien qu'un jour il faudrait ou le renommer ou en nommer un autre... Alors, je pense que depuis six mois, lorsqu'il a été nommé d'une manière intérimaire, eh bien, on aurait dû commencer à trouver un successeur, ce qui n'a pas été fait.

On a certainement laissé traîner les choses et aujourd'hui on se rend compte qu'à la dernière minute il faut modifier les règles, car la personne qui va être nommée demain ou qui pourrait être nommée – je ne présume pas, mais qui pourrait être nommée par l'ensemble des députés – si elle avait été approchée il y a quatre, cinq, six mois, trois mois, certainement qu'elle aurait déjà pu s'installer au Québec, et là on n'aurait pas la situation un peu particulière où on va chercher auprès d'Élections Canada, un organisme électoral différent de celui d'Élections Québec, quelqu'un pour aller surveiller des élections à travers le monde.

J'entendais le ministre tout à l'heure qui parlait de république de bananes, essayer de mettre un peu le problème sur le leader de l'opposition qui, lui, fait juste son travail. Ce qu'il voulait dire certainement, c'est que ça donne un peu l'impression, des fois... il l'a dit en termes colorés, comme vous savez, en fin de session, mais le fond de ce qu'il voulait dire, c'est qu'on agit en changeant des règles un peu comme dans certains pays, que je ne qualifierai pas peut-être de bananes, mais de certains pays en émergence de démocratie où l'on envoie des observateurs étrangers pour vérifier à ce que les élections se déroulent correctement.

Et alors, là, on va se retrouver nous, Québécois, à aller chercher dans l'organisation électorale du fédéral une personne qui n'a pas le droit de vote ici au Québec. On change la loi pour lui, pour qu'il vienne surveiller nos élections à nous, au Québec, un peu comme il l'a fait en Haïti, comme il l'a fait en Afrique, selon le curriculum vitae qu'on a pu voir. Alors, c'est vrai qu'à ce moment-là les règles canadiennes de démocratie sont très fortes, et le ministre l'a dit, nous avons ici des règles démocratiques très fortes. Le Canada certainement en est le gardien ou le créateur parce que, nous-mêmes, on va chercher quelqu'un qui travaille à Élections Canada pour l'amener au Québec superviser nos élections à nous autres. Alors, c'est un peu paradoxal comme situation, et je trouve que, encore une fois, le gouvernement s'est traîné les pieds. Il n'a pas fait son boulot.

Le ministre s'est promené avec Hydro-Québec. Le ministre était à l'étranger, il s'occupait d'autres choses. Il n'était pas présent ici pour s'occuper de ses dossiers, il n'était pas présent ici pour faire son boulot, et, aujourd'hui, eh bien, c'est les parlementaires et c'est le Parlement tout entier qui en paient le prix parce qu'on chamboule les règles du Parlement et on chamboule en plus une règle fondamentale qui touche au fonctionnement du bureau ou au fonctionnement de la Loi électorale. Et c'est fondamental. Et on le fait par un bâillon. Et, après ça, on dit: On est démocratiques. Oui, nous sommes démocratiques, mais nous ne donnons pas l'exemple de l'être.

(23 h 10)

Alors, j'ai écouté aussi le ministre, et il disait: Il y a des députés ici, en cette Chambre qui sont d'origine extérieure, étrangère. Je ne sais pas comment il a dit ça, mais c'est ça que ça voulait dire. Il dit qu'il voit la grande démocratie québécoise qui leur permet, s'ils sont citoyens canadiens, de voter ici. Mais ça, on le doit aussi aux citoyens canadiens, on le doit au Canada, c'est une loi canadienne, une loi fédérale qui fait que tout citoyen canadien qui réside dans une province a le droit de vote dès qu'il est citoyen et peut se présenter aux élections, contrairement à ce que le ministre nous dit. Ça n'a rien à voir avec le charabia du ministre qui nous parle de démocratie. C'est sa démocratie à lui quand ça fait son affaire. C'est juste ça qu'il veut.

Alors, M. le Président, nous, malheureusement, nous allons voter contre le projet de loi, alors que nous aurions pu certainement trouver un consensus, trouver une manière élégante de nommer un nouveau Directeur général des élections au Québec plutôt que de procéder de cette façon-là. Et ça, la responsabilité en incombe au ministre qui n'a pas fait son travail, qui était à l'étranger et puis qui se traînait les pieds.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Nous allons maintenant céder la parole à M. le ministre responsable de la Réforme électorale. M. le ministre, vous avez un droit de réplique de cinq minutes.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je m'aperçois que le député de LaFontaine, ou bien il n'y a pas lu le projet de loi ou, s'il l'a lu, il ne l'a pas «gobé», c'est clair. Parce que, M. le Président, je voudrais lui poser quelques questions: Sait-il que, depuis deux mois, le cabinet du premier ministre a demandé et suggéré des noms à sa formation politique? Sait-il que, depuis deux mois, vous n'avez pas donné de réponse, vous avez refusé des individus? Sait-il que, ce matin, c'est le chef de cabinet de M. le premier ministre qui a dû appeler la chef parlementaire de sa formation politique et qu'elle a dit oui à ce M. Girard? Sait-il que M. Girard était à l'emploi de la Direction générale des élections du Québec pendant de nombreuses années? Sait-il qu'il s'est expatrié à Ottawa pour travailler pour Élections Canada à cause de ses compétences acquises ici? Sait-il que c'est un spécialiste de l'organisation électorale? Sait-il que, à dire que ce qu'il a dit pendant deux, trois, quatre, cinq, six minutes, c'est complètement incohérent, innocent et inintelligent? Sait-il, M. le Président, que demain ce même individu va se lever puis il va voter pour le Directeur général des élections, ou bien il va s'absenter puis il va aller aux toilettes? Sait-il ça?

Sait-il, dans cette Chambre, que, lorsqu'on consulte pour quelqu'un puis qu'une formation politique donne son aval, sait-il que ça a l'air fou de parler contre quelqu'un qu'on a accepté à peine 12, 13 heures avant? Qu'est-ce que ça a l'air, si ce n'est pas ça, enlever de la crédibilité aux hommes et aux femmes politiques, de dire le contraire de ce que notre formation politique a dit? M. le Président, si le ridicule tuait, on aurait une élection partielle dans LaFontaine.

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! Alors, merci, M. le ministre de la Réforme électorale.

Nous en arrivons maintenant à la mise aux voix.

M. Gobé: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Oui, M. le Président, il existe un règlement dans notre...

M. Jolivet: M. le Président!

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il me semble que, en vertu de la décision qu'on a prise, de la motion qu'on a votée, il n'y en a pas, de question de règlement?

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le secrétaire général, voulez-vous, s'il vous plaît, venir me voir?

(Consultation)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le secrétaire général. Est-ce que c'est une question en vertu de 212? C'est ça?

M. Gobé: Oui, c'est ça, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est ça? Alors, l'article 212 a été suspendu. Nous allons maintenant procéder, nous en arrivons maintenant à l'étape du vote.

M. le député, s'il vous plaît! MM. les députés! MM. les députés! M. le député de Frontenac, s'il vous plaît!

Nous en sommes maintenant à l'étape du vote sur l'adoption du principe. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: On demande un vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 23 h 15)

(Reprise à 23 h 21)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

S'il vous plaît, afin de faciliter le travail des gens de la table, je vous demanderais de garder le silence le plus possible.

Nous allons maintenant procéder à l'adoption du principe du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un Directeur général des élections. Que ceux qui sont en faveur veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Bélanger (Anjou), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Jutras (Drummond), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Gautrin (Verdun), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Whissell (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions?

Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:59

Contre:21

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le principe du projet de loi n° 453 est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je fais motion pour que notre Assemblée se transforme en commission plénière pour l'étude détaillée de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, nous suspendons quelques instants afin de nous transformer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 23 h 25)

(Reprise à 23 h 28)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): Alors, nous débutons. Excusez-moi, comme nous sommes en commission plénière, ceux qui n'ont pas affaire ici ou ceux qui ont des discussions à faire, des caucus, s'il vous plaît, je vous prierais de vous retirer dans l'antichambre. O.K.? Bon.

Alors, nous avons 30 minutes à faire en commission plénière sur l'étude détaillée du projet de loi n° 453, qui est la Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections. Ce que je vous propose comme formule, nous allons essayer d'être le plus équitable possible dans le temps, 30 minutes...


Remarques préliminaires

M. le ministre de la Réforme électorale, si vous avez des remarques préliminaires, je vous inviterais à les faire immédiatement. Par la suite, le critique de l'opposition officielle pourrait également faire ses remarques préliminaires, ainsi que le député de Rivière-du-Loup qui s'est adjoint à nous pour l'étude détaillée en commission. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, le projet de loi a deux articles qui sont les suivants.

Le premier article, c'est: «Malgré l'article 478 de la Loi électorale, l'Assemblée nationale peut, au plus tard le 23 juin 1998, nommer une personne qui n'est pas un électeur au sens de cette loi.

«La personne ainsi nommée doit toutefois acquérir la qualité d'électeur dans les neuf mois qui suivent la date de son entrée en fonction, sans quoi son mandat prend fin, malgré l'article 479 de cette loi, un an après cette date.» Il ne peut donc pas être plus longtemps que neuf mois, dans le fond, président-directeur général des élections.

Le deuxième article, c'est: «La présente loi entre en vigueur le jour de la sanction.» C'est aussi simple que cela.

(23 h 30)

Donc, M. le Président, vous savez très, très bien que, si on passe un projet de loi comme celui-ci, c'est parce que, antérieurement, il y a eu consultation avec l'opposition, et la personne qui fut désignée par l'opposition et par le gouvernement, M. Girard, il travaillait ici antérieurement, mais, depuis qu'il travaille à Élections Canada, il avait déménagé à Ottawa. Comme il a habité plus que deux ans à Ottawa, il avait perdu la qualité d'électeur au sens de la loi, et on lui dit: Tu dois revenir dans les neuf mois de la date de la présente loi. C'est tout simplement ça.

L'opposition officielle a accepté ce matin, à 9 heures, que demain on puisse voter pour le DGE, donc l'habiliter. C'est un membre qui a été vice-président de la Direction générale des élections pendant de bonnes années ici, au Québec, qui a une grande expertise, qui est un excellent bonhomme pour l'organisation électorale. Et voilà que c'est simplement cela, le projet de loi. Pas plus, pas moins, rien que ça.

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, M. le député de Laurier-Dorion et critique officiel de l'opposition en la matière, vos remarques préliminaires.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Oui, M. le Président. Moi, j'ai une courte question. Je présume que le neuf mois est là à cause du fait qu'on donne trois mois à peu près pour le déménagement de la personne puis six mois qui sont requis pour la résidence. Donc, le maximum, c'est neuf mois, et c'est pour ça que le neuf mois est là. Est-ce que le ministre peut juste me le confirmer?

M. Chevrette: C'est exactement ça.

M. Sirros: Pourquoi c'est neuf plutôt que huit?

M. Chevrette: Quand on dit, par exemple, qu'il doit acquérir la qualité d'électeur dans les neuf mois qui suivent la date, ça veut dire: prenons trois mois pour déménager puis le six mois normal pour être qualifié électeur, effectivement.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: On peut imaginer que la qualité d'électeur serait acquise possiblement même... au plus court, ce serait six mois si la personne déménage immédiatement.

M. Chevrette: Même s'il louait ici, par exemple, ou s'il achetait immédiatement, ça deviendrait son domicile principal et, après six mois, il serait immédiatement électeur, effectivement.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Rivière-du-Loup, vos remarques préliminaires.

M. Dumont: On est à l'étape des remarques préliminaires, c'est parce que je n'ai pas beaucoup de remarques préliminaires à faire, simplement peut-être essayer de voir pourquoi la notion de la qualité d'électeur a été inscrite dans la loi. Je présume que c'est parce qu'on calculait que, pour faire appliquer une loi, de façon légitime, pour dire à des gens qu'ils ne sont pas corrects, il faut soi-même être dans une situation qui est régulière. Il faut que la loi s'applique à soi-même d'une façon irréprochable.

Moi, je me demande dans quelle position... Par exemple, si la situation n'était pas régularisée... exemple, si on avait une élection cet automne, dans quelle situation le Directeur général des élections se retrouverait pour taper sur les doigts des gens, leur dire: Votre situation est irrégulière, vous n'avez pas le droit, vous n'êtes pas résidents; vous avez voté, vous n'êtes pas résidents, vous allez payer une amende, alors que lui-même aurait eu sa situation régularisée par la loi, par une loi de l'Assemblée nationale, une loi d'exception, une loi unique? En termes de légitimité démocratique, moi, être celui qui reçoit une amende de quelqu'un qui est dans une situation irrégulière, légitimée par l'Assemblée nationale qui a fait une loi unique, je serais mal à l'aise.

M. Chevrette: Avant 1989...

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Chevrette: ...le Directeur général des élections ne votait pas au Québec. C'est seulement depuis 1989. Le Directeur général des élections à Ottawa ne vote pas en vertu de leur loi. Puis, s'il ne vote pas, puis il n'a pas la qualité d'électeur, il ne votera pas. En quoi ça lui enlève l'objectivité de travail, ça? Vous faites un procès d'intention a priori, ce qui m'apparaît incorrect. C'est de la compétence qu'on recherche, ce n'est pas quelqu'un qui peut ou pas avoir le droit de vote. C'est parce qu'on voulait le rendre conforme à l'amendement législatif de 1989. Le député de Rivière-du-Loup, après trois ans, doit comprendre ça, ces effets législatifs là.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

M. Dumont: Juste pour comprendre les effets législatifs, on adopte... le gouvernement, je devrais dire, adopte la loi ce soir. Demain matin, on procède à une nomination. Juste pour comprendre l'effet législatif. Si on choisit quelqu'un qui n'a jamais vécu au Québec, qui est originaire du Zaïre, qui habite au Zaïre, est-ce que la loi nous permet de le faire?

M. Chevrette: On n'est pas... Le législateur ne parle pas pour rien dire, et je suppose que ça vaut également pour le député de Rivière-du-Loup. On ne veut pas fabuler ici, là. On le sait très bien, on a nommé la personne tout au cours de la soirée. On peut jouer à l'innocent, mais pas tout le temps.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

M. Dumont: Mais est-ce que la loi rendrait ça possible?

Le Président (M. Pinard): Est-ce que la loi – la question...

M. Dumont: Moyennant qu'au bout d'un an il serait destitué.

M. Chevrette: Bien, à moins que le député de Rivière-du-Loup se lève demain puis il nomme un Zaïrois qui viendrait au Québec dans quelques mois. Mais l'objectif, c'est de nommer M. Girard, sur lequel on a consulté l'opposition, sur lequel on vous a avisé hier. Donc, ce soir, le nom n'a pas changé, M. le député de Rivière-du-Loup, et on suppose que ça va être le nom qui va être proposé demain.

M. Dumont: Pour bien comprendre encore mieux, je dois comprendre que la loi nous permettrait aussi, demain matin, parce que là on adopte la loi... demain, le gouvernement pourrait toujours changer d'idée. Cette loi-là, si je comprends bien, nous permettrait de nommer Monique Simard aussi.

M. Chevrette: Ça aurait été une bonne candidature si vous l'aviez suggérée.


Étude détaillée

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, voilà qui met fin aux remarques préliminaires.

À l'article 1: «Malgré l'article 478 de la Loi électorale (L.R.Q., chapitre E-3.3), l'Assemblée nationale peut, au plus tard le 23 juin 1998, nommer une personne qui n'est pas un électeur au sens de cette loi.

«La personne ainsi nommée doit toutefois acquérir la qualité d'électeur dans les neuf mois qui suivent la date de son entrée en fonction, sans quoi son mandat prend fin, malgré l'article 479 de cette loi, un an après cette date.»

Est-ce que vous avez d'autres commentaires à apporter ou si vous êtes prêts à l'adopter immédiatement? Alors, est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division? Adopté sur division, M. le greffier. Article 2: «La présente loi entre en vigueur...», alors ça va être la date de sa sanction, probablement demain, le 23 juin. Adopté sur division. Est-ce que le titre du projet de loi, Loi concernant la nomination d'un directeur général des élections, est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Adopté sur division. Alors, je vous remercie. Nous allons maintenant suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 23 h 38)

(Reprise à 23 h 41)


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, Mme la présidente de la commission, s'il vous plaît, votre rapport.

Mme Malavoy: M. le Président, je dépose le rapport de la commission plénière qui a étudié en détail le projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un Directeur général des élections, et l'a adopté.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup.

Alors, nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un Directeur général des élections. Je vous rappelle que la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 453 sera d'une durée de 40 minutes: 15 minutes seront octroyées au groupe parlementaire formant le gouvernement; 15 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; cinq minutes pour les députés indépendants; et également une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre responsable de la Réforme électorale.

Alors, je serais prêt maintenant à céder la parole au ministre responsable de la Réforme électorale.

M. Chevrette: M. le Président, je m'abstiendrai d'utiliser mon droit de parole, j'utiliserai seulement mon droit de réplique.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Nous allons maintenant céder la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je vais utiliser mon temps de parole sur le projet de loi qui permet la nomination d'un Directeur général des élections – même si celui-là n'est pas électeur au sens de la Loi électorale – pour revenir sur cette nomination-là comme geste posé par le gouvernement dans nos institutions. Parce que, du point de vue institutionnel, je l'ai dit tout à l'heure, le Directeur général des élections, c'est la plus haute fonction qu'on a dans l'État québécois. On a symboliquement ici un lieutenant-gouverneur, on a évidemment tous les élus qui ont une hiérarchie de fonction, mais il y a au-delà de tout ça le Directeur général des élections parce que c'est lui qui préside aux élections, donc au choix que va faire la population des élus futurs.

Pour cette raison-là, au fil des années, on a toujours été très délicat dans la nomination du Directeur général. En fait, on ne l'a pas toujours été, hein? À l'époque de Duplessis, la façon dont on nommait le greffier, on pourrait dire, avec nos moeurs électorales d'aujourd'hui, que c'était rock'n'roll. Et, avec la nomination de Pierre-F. Côté, la plus récente qu'on avait eue, on avait été prudent, on était allé chercher l'unanimité. On avait fait une nomination de Directeur général des élections qui était à la hauteur des attentes – et le ministre en a parlé tout à l'heure – de René Lévesque et des attentes démocratiques d'un parti qui venait d'arriver au pouvoir, qui avait encore des principes démocratiques, qui venait probablement aussi de vivre une période de six ans où il y avait eu sept députés, six députés qui avaient eu le temps de voir l'importance de la démocratie dans notre système. Et je dois dire que, depuis les 10, 15 dernières années, c'est un peu triste, le bilan du gouvernement, et surtout depuis son élection en 1994. C'est un peu triste, l'historique du Parti québécois en matière démocratique.

D'abord, c'est un parti qui, dans sa constitution, dans les premiers principes, le Parti québécois, nous parle du pluralisme des partis. Ils ont inscrit dans leurs principes de base le pluralisme des partis au Québec comme un donnée fondamentale. Aujourd'hui, on les entend parler de la restriction autant que possible des partis, de maintenir ça dans un système où ils vont s'entendre avec l'opposition officielle, où ils vont s'échanger le pouvoir, puis ça va bien aller.

Dans les principes de base, hein, ils parlaient de l'élection à la proportionnelle. Eux-mêmes se mettaient en garde, dans leur propre programme – très sage de la part de leurs militants: Si on ne le fait pas dans la première année du mandat, on ne le fera jamais. C'est leur programme qui dit ça, pour arriver ensuite, puis laisser passer du temps, puis ne pas agir, même pas se questionner là-dessus.

Le mode de financement, combien René Lévesque en a parlé? Comment des améliorations ont été amenées concrètement, mais qu'aujourd'hui on se défend puis on s'applaudit quand les présidents de comté utilisent, réfèrent à des acquisitions de fonds publics pour aller chercher de l'argent, ce qu'ils ont tant dénoncé dans les années soixante-dix? L'équité du financement public, des beaux principes qui ont été défendus par ce parti-là. Une fois rendu au pouvoir, là, on s'accroche au fric qui vient de l'État puis on est bien heureux de ça.

Puis là, maintenant, du point de vue des institutions, la nomination du Directeur général des élections, dont on s'enrobait dans des principes démocratiques dans la nomination de Pierre-F. Côté, pour laquelle on avait mis le plus grand soin, et là, comme décor, bien, en fin de session, après avoir reconduit quelqu'un par intérim qui a finalement fait un an... De façon... il va avoir tourné une année complète comme Directeur général des élections. Là, il n'est plus bon, puis, à l'avant-dernière journée de la session, on fait une nomination, on joue unilatéralement dans la Loi électorale, puis on est fier, puis on reproche à ceux qui posent des questions, puis on reproche à ceux qui s'expriment... Puis ça ne devrait pas exister, d'autres partis, il devrait y avoir juste deux partis. Ça, c'est le bilan démocratique, c'est le bilan démocratique du gouvernement du Parti québécois.

C'est malheureux. Sûrement que les parlementaires, entre autres, qui ont vécu la période de 1970 à 1976, qui parlaient régulièrement de démocratie dans cette Assemblée, doivent vivre des déceptions, des frustrations, des frustrations très grandes. Mais je pense qu'il y a un clou dans ce cercueil-là qui est en train d'être posé, et c'est comme ça qu'on se retrouve avec un parti qui perd ses idéaux démocratiques, qui embarque dans le circuit, qui, quand les libéraux étaient au pouvoir, leur reprochait des façons de procéder parce qu'ils avaient hâte, d'après ce qu'on peut voir, eux-mêmes de les adopter. Puis, quand ils se le font dire, bien, évidemment ça touche au coeur, ça pince les cordes sensibles, puis là on tombe dans les insultes, on tombe à questionner le droit de parole des gens.

Bien, M. le Président, c'est une réalité, c'est une réalité que leurs propres militants voient, c'est une réalité que la population, de plus en plus, va voir et c'est une réalité que malheureusement, j'ai l'impression, il y a bien des députés qui ne peuvent pas... Parce que eux autres aussi sont bâillonnés, des députés d'arrière-ban, des gens qui sont dans le Parti québécois probablement depuis longtemps. C'est une réalité qu'ils doivent, eux aussi, voir bien durement. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Nous allons maintenant céder la parole au ministre responsable de la Réforme électorale et parlementaire pour son droit de réplique. M. le ministre, vous avez un droit de parole de cinq minutes.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Ce sera très bref, M. le Président. Je dirai au député de Rivière-du-Loup que c'est très démocratique. Il n'était pas obligé de prendre son cinq minutes, mais on lui a laissé le prendre puis on l'a prévu également dans les règles d'exception pour qu'il puisse parler. Il a pris cinq minutes pour dire qu'il avait de la misère à parler. Aurait fallu qu'il dise sur le fond qu'est-ce qu'il avait contre.

Fondamentalement, un directeur général des élections, c'est quelqu'un de compétent qui a à juger des gestes à respecter durant la procédure démocratique. Ce n'est pas le fait qu'il soit électeur ou pas. Pourquoi on arrive avec le projet de loi? Je voudrais lui réexpliquer, en espérant, cette fois-ci, qu'il va comprendre. La qualité d'électeur se perd après deux ans en dehors du Québec. Ça fait quelques années, ça fait plus que deux ans qu'il travaille à Ottawa. Il est intéressé à occuper ce poste qu'il a occupé parce qu'il en a occupé, des postes similaires ou presque similaires, comme vice-président à la Direction générale des élections du Québec. Il est intéressé à revenir occuper ce poste-là. Comme il a perdu sa qualité d'électeur à cause du deux ans, la loi vient dire: Revenez ici parce que, depuis 1989, faut avoir la qualité d'électeur pour occuper ce poste-là.

(23 h 50)

Avant, il ne votait pas. Il aurait pu venir puis ne pas voter. J'espère qu'il comprend ça, là. Ce n'est qu'une technicalité du droit de vote. C'est un Québécois qui est allé travailler ailleurs. Ce n'est pas un Zaïrois, comme il disait tantôt, ce n'est pas un Jamaïcain, ce n'est pas une personne du Madagascar qui rentre ici pour travailler, c'était quelqu'un du Québec qui a travaillé dans ce domaine pendant des années, qui est allé travailler en dehors mais qui, à cause d'une technique de la loi, a perdu sa qualité d'électeur, qu'on réhabilite, puis on lui dit: Tu dois déménager dans les neuf mois, sinon tu perds ton poste. C'est très, très clair, ça. Ce n'est pas trop, trop dur à comprendre. Si c'est la qualité de l'homme qu'il remet en question, je pense qu'il est seul à le faire en cette Chambre. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Merci, M. le ministre responsable de la Réforme électorale. Nous en sommes maintenant rendus à l'étape de l'adoption du projet de loi. Alors, est-ce que le projet de loi n° 453, Loi concernant la nomination d'un Directeur général des élections, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Sur division? Alors, adopté sur division, M. le greffier.

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous en sommes donc rendus à la prise en considération des rapports des commissions qui ont traité des projets de loi n° 186 et n° 188. Nous allons commencer par le n° 186.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement, je me vois dans l'obligation, à ce stade-ci, de suspendre nos travaux, considérant que nous n'avons point encore entre les mains les amendements

concernant le projet de loi n° 186. L'opposition ne les a pas non plus entre les mains, et il faut absolument que le travail préliminaire soit fait par les juristes de la présidence. Alors, nous suspendons.

(Suspension de la séance à 23 h 52)

(Reprise à 0 h 9)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, je vous annonce que nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 0 h 45; c'est un minimum, je vous avertis tout de suite. Alors, vous allez attendre que je donne l'ordre de sonner les cloches avant que les travaux recommencent.

Je vous annonce tout de suite que nous travaillons actuellement sur les amendements qui ont été déposés en vertu du projet de loi n° 188. Nous n'avons pas commencé à regarder les amendements du 186. D'accord, M. le leader? M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, ça va?

Alors, je suspends, minimum 0 h 45, mais attendez le son de la cloche.

(Suspension de la séance à 0 h 10)

(Reprise à 1 h 18 )

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, mesdames, messieurs, si vous voulez prendre place. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Projet de loi n° 188


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements du ministre

Alors, nous poursuivons nos travaux selon la motion qui a été votée antérieurement. Nous sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi que les amendements transmis par M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des finances, aux articles – je demanderais à la table de bien suivre aussi pour qu'on n'en oublie pas un – 2.3, 3.1, 4, 5, 8, 11, 12, 13, 14, 16, 17, 17.1 à 17.4, 18, 19, 19.1, 21, 21.1, 22, 22.1, 23, 25, 25.1, 26, 27, 28, 28.1, 29, 31, 32, 34, 36, 36.1, 39, 41, 43, 45, 45.1, 46, 48, 52, 53, 54, 58, 59, 59.1, 62, 63, 63.1, 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 72, 73, 73.1, 74, 74.1, 75, 76, 76.1 à 76.3, 78, 78.1, 81, 83, 86, 86.1, 88, 90, 95, 99, 109, 110, 111, 112, 112.1, 114, 115, 116, 116.1, 117, 117.1, 118, 118.1, 119, 119.1, 120, 121, 122, 124, 124.1 à 124.11, 127, 129, 131, 143, 144, 146 à 148, 152, 154, 156, 156.1, 156.2, 157, 157.1, 157.2, 157.3, 158, 159, 160, 161, 162, 163, 164, 166, 167, 168, 169, 170, 171, 175, 175.1, 175.2, 178, 179, 180, 181, 182, 183, 183.1, 185, 186, 189, 189.1, 190, 191, 192, 193, 194, 195, 201, 202, 203, 205, 208, 209, 210, 217, 223, 225 à 236, 237 à 250, 251 à 262, à l'intitulé du chapitre II... du titre II, à l'intitulé du titre V, aux articles 263, 265, 266, 277, 279, 280, 281, 283 à 290, 290.1, 292, 293, 294, 298, 300, 304, 309, 315, 315.1, 315.2, 316, 317, 317.1, 318, 320, 321, 323, 324, 325, 325.1, 329, 329.1 à 329.26, 329.26, 329.27 à 329.43, 329.44, 329.44.1, 329.48, 329.48.1, 329.49, 329.53, 330, 333, 339, 340, 341, 342, 345, 347, 353, 353.1, 356, 356.1, 357, 360, 360.1, 364, 366, 367, 368, 369, 369.1, 370, 372, 372.1, 373, 374, 374.1, 375, 376, 377, 378, 378.1 à 378.4, 379, 380, 381, 382, 383, 384, 385, 386, 390, 390.1, 392, 392.1, 393, 394, 395, 395.1, 395.2, 397, 398, 399, 399.1, 399.2, 400, 401, 405, 405.1, 405.2, 406, 406.1, 407, 410, 410.1, 411, 411.1, 412, 412.1, 413, 414, 415, 416, 417, 423, 423.1, 423.2, 432, 434, 434.1, 436, 438, 439, 443, 445, 451, 451.1, 452, 452.1, 453, 455, 456, 457, 458, 459, 460, 460.1 à 460.5, 461, 462, 463, 464, 464.1, 466, 469, 470, 471, 472, 473, 475, 475.1, 479, 480, 481, 481.1, 482, 482.1 à 482.4, 483 et la motion de renumérotation du projet de loi.

(1 h 20)

Tous les amendements présentés par M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances sont recevables, sauf les amendements aux articles 2, 7, 17.1 à 17.4, 22.1, 76, 83 et 194 que je retire pour le motif qu'ils ont été adoptés en commission; ils sont donc répétitifs. Ça vous rassure, M. le ministre.

Je vous rappelle que conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur le rapport de la commission des finances publiques concernant le projet de loi n° 188 et sur les amendements proposés est de 14 minutes dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et deux minutes aux députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes. Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur ses amendements?

M. Landry (Verchères): Moi, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Landry (Verchères): Après deux ans de discussions publiques et de société et de longs travaux, je crois que je vais me contenter de mon droit de réplique, à ce stade-ci, puisque j'ai encore un autre 20 minutes – 15-5 – à la troisième lecture. Alors, je vais me réserver mon droit de réplique au cas où mon honorable ami dirait des choses non conformes à la vérité.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. Alors, M. le député de Viger.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. On a suspendu à 23 h 45, il est 1 h 30 de la nuit, et vous savez pourquoi, une heure et trois quarts? Parce que le gouvernement et le ministre des Finances, ils n'avaient même pas déposé encore tous les amendements et que le secrétaire général du Parlement, il a eu beaucoup de problèmes à déceler tous ces amendements-là. Un projet de loi de 490 articles, il y a presque 300 amendements. On n'a pas eu l'occasion de les étudier en commission parlementaire parce qu'on a eu seulement 13 heures en commission parlementaire pour étudier 490 articles avec près de 300 amendements.

C'est sûr que, probablement à l'intérieur de ça, il y a quelques amendements qui sont raisonnables, mais la très grande majorité de ces amendements-là sont uniquement des amendements cosmétiques, M. le Président. Et c'est ça que je disais dans mon intervention antérieure, c'est ce gouvernement-là, par l'entremise du ministre des Finances, qui est en train de tout déboussoler complètement ce qui est le domaine des assurances actuellement à cause justement de son entêtement et de son arrogance.

M. le Président, on se rappellera que le ministre a toujours dit, et je le répète encore, que la raison d'être de ce projet de loi là, c'était la protection du consommateur. Aujourd'hui, il n'a même pas le courage, pour ne pas dire autre chose, de dire exactement que ce n'était pas ça, la raison d'être du projet de loi n° 188, parce que, en réalité, actuellement, toutes les associations de protection du consommateur, à 100 %, pas à 99 %, tout le monde qui représente les consommateurs a demandé au ministre de retirer le projet de loi. Il ne l'a pas retiré. Pourquoi il ne l'a pas retiré, si son objectif c'était celui de protéger les consommateurs?

Aujourd'hui, il n'a plus l'appui des consommateurs. M. le Président, le Service d'aide au consommateur, Option consommateurs, l'Association des consommateurs du Québec, la Fédération des ACEF, le Conseil des assurances de personnes, le Conseil des assurances de dommages, le Protecteur du citoyen, tous ces organismes-là ont demandé au ministre par lettre de retirer le projet de loi parce que ça ne protège pas le consommateur. Et voilà la raison. Il n'a jamais voulu dire la raison, il n'a jamais dit la vérité parce que, même en commission, dernièrement, quand on était là, on lui a posé la question pourquoi, pourquoi il faisait ça.

(1 h 30)

À l'intérieur de l'article 22, M. le Président, le ministre, il se laisse la possibilité de décréter n'importe quoi, de ramener même les changements qu'il avait apportés, de les ramener encore. On lui avait posé la question pourquoi il faisait ça, il avait dit: C'est à cause que le gouvernement fédéral va probablement donner la possibilité aux banques d'aller dans la vente d'assurances.

Je l'ai pris au mot, M. le Président. Je l'ai pris au mot, j'ai déposé un amendement, en disant: Alors, si le gouvernement fédéral donne la possibilité aux banques d'aller faire de l'assurance, nous, on appuie l'amendement du ministre, en disant: À ce moment-là, le gouvernement du Québec, il peut prendre un décret pour sauvegarder la possibilité que le Mouvement Desjardins le fasse. M. le Président, il ne l'a jamais accepté.

Savez-vous pourquoi il ne l'a pas accepté? Parce que ce n'est pas ça, la vérité, ce n'est pas ça la raison. La raison, c'est uniquement parce que le ministre s'est entêté, il avait déjà pris sa décision. Il a fait parader devant lui des groupes de bonne foi qui sont venus donner leur opinion, qui sont venus pour essayer de convaincre le ministre, mais il n'y a rien eu à faire parce que le ministre avait pris sa décision, et la décision, c'était uniquement pour ouvrir l'assurance aux institutions de dépôts. C'est ça, la vérité. Ce n'est pas le consommateur. Il s'en fiche, du consommateur, parce que toutes les associations lui ont demandé de retirer ce projet de loi, il ne l'a pas fait et il ne le fera pas non plus. Et, moi, je vous dis que le ministre des Finances, ce gouvernement, ils vont en subir les conséquences tout à l'heure, parce qu'on n'agit pas comme ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Il y a le droit de réplique de M. le ministre, deux minutes, si vous voulez utiliser votre droit.

M. Landry (Verchères): J'ai bien fait de ne pas prendre le cinq minutes, parce qu'il s'est donné la réplique à lui-même durant son cinq minutes, en prouvant l'absurdité de sa thèse.

Des voix: Voyons donc!

M. Landry (Verchères): Il a brandi... Il faut que ça soit un vrai deux minutes, par ailleurs, M. le Président; lui, il a eu un vrai cinq, hein!

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Papineau! Je vous inviterais, s'il vous plaît, à respecter le droit de réplique de deux minutes. Je crois que, quand le député de Viger a parlé, son droit de parole a été respecté. Alors, M. le ministre, votre droit de réplique.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): Alors, en cinq minutes, il s'est suffisamment contredit pour qu'il me suffise de deux pour dire que, malheureusement, mon honorable ami a fait ce que j'avais peur qu'il fasse. Il brandit une pile d'amendements pour illustrer mon intransigeance; si j'avais été intransigeant, je n'aurais pas amendé. J'ai amendé pourquoi? Parce que le gouvernement et mes collègues de Crémazie, d'Abitibi-Ouest et d'Arthabaska avons consulté pendant des centaines et des centaines d'heures. On a écouté le monde, on a modifié notre projet de loi pour l'avantage des consommateurs. Le député de Viger a dit qu'il y aurait des conséquences à ce projet de loi. Toute son argumentation depuis des mois, qui est un long plaidoyer contre le Mouvement Desjardins, aura des conséquences aussi. Les 13 000 courtiers de l'AIAPQ, qui sont des vrais professionnels de l'assurance, des gens qui connaissent la question, ont un discours pas mal plus éloquent que ce tournage en rond intellectuel qu'on entend depuis des mois et des mois, qui ne réussit qu'à camoufler une impuissance à trancher en faveur des consommateurs et des professionnels de l'assurance.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission des finances publiques.

M. le député de Papineau, je vous avertis pour une première fois!

Alors, je reprends: Ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi que des amendements transmis par M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Mise aux voix des amendements du ministre

Les amendements de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Les règles spéciales ne prévoyaient pas la possibilité de vote par appel nominal. À main levée. Adopté sur division.


Mise aux voix des articles amendés

Les articles du projet de loi, amendés, sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Les articles du projet de loi dont la commission des finances publiques n'a pas disposé et qui n'ont pas été amendés par les votes précédents et le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. La motion de renumérotation du projet de loi est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Le rapport de la commission des finances publiques sur le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, ainsi amendé est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Maintenant, le vote nominal sera possible sur l'adoption du projet de loi. Là, nous sommes au niveau de l'acceptation du rapport.


Adoption

Alors, maintenant, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances propose l'adoption du projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Je vous rappelle, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, que la durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 188 est d'au plus 40 minutes, dont 15 au groupe parlementaire formant le gouvernement, 15 au groupe parlementaire formant l'opposition, cinq minutes aux députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de cinq minutes au ministre qui présente le projet de loi.

Alors, je suis prêt à céder la parole au prochain intervenant. M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, je vous cède la parole.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, j'ai eu l'occasion de dire, à d'autres étapes de notre débat, que le monde de l'assurance et des produits financiers, donc du travail des intermédiaires, s'était beaucoup modifié au cours des cinq dernières années, avec accélération, d'ailleurs, au cours des toutes dernières années sinon des tous derniers mois, parce qu'on voit que des transactions électroniques se font maintenant d'un continent à l'autre. De grandes institutions financières étrangères sont à l'oeuvre sur nos marchés sans même y être présentes physiquement. On voit aussi, de mois en mois, s'inventer de nouveaux instruments d'épargne, de nouveaux produits d'épargne.

Alors, une loi se périme rapidement dans ces conditions et les dispositions qui ont été votées il y a un certain nombre d'années, il y a sept ou huit ans, qui pouvaient apparaître modernes à l'époque, sont devenues rapidement désuètes. C'est la raison pour laquelle, en particulier au nom de la protection du consommateur qui risque d'être ballotté évidemment par ces changements économiques rapides... était absolument nécessaire. Alors, nous les avons faits, en particulier pour un certain nombre de chapitres qui ont été l'objet d'amendements substantiels. Il y a beaucoup d'amendements de concordance dans ce qu'on a déposé, mais qui ont fait l'objet d'amendements substantiels et pour lesquels nous avons eu vraiment la coopération de tous les intervenants. Même certains intervenants qui ne sont pas d'accord globalement avec le projet de loi sont profondément d'accord avec ce qui concerne la protection des consommateurs.

D'ailleurs, je ferais remarquer qu'une association de consommateurs spécialisée, celle de protection des épargnants du Québec, c'est-à-dire ceux qui sont visés par les produits financiers et les produits de l'intermédiation, nous appuie fortement parce qu'elle a très bien compris jusqu'à quel point nous avions augmenté, contre des périls nouveaux, la protection des consommateurs et des consommatrices du Québec. Et c'est pourquoi des grandes associations neutres, qui ne sont pas dans l'assurance, comme la CSN, la FTQ, mais qui représentent des centaines de milliers d'hommes et de femmes qui sont évidemment, par définition, des consommateurs ont appuyé le projet de loi.

(1 h 40)

De façon spécifique, en particulier sur un problème qui n'est pas un problème contemporain – c'est vieux, depuis que le commerce existe – mais qui s'est aggravé au cours des dernières années, c'est ce qu'on appelle les fameuses ventes liées... Il est tentant pour un intermédiaire, comme pour un commerçant dans n'importe quelle autre branche de l'activité économique – ce n'est pas pire en finances qu'ailleurs – de dire: Je vais te vendre tel produit dans telles conditions si tu achètes tel autre et de façon obligatoire. Une vente liée, ce qui est contraire aux ventes croisées. Les ventes croisées, ça aussi, c'est vieux comme le commerce et ce n'est pas considéré forcément comme déloyal. Si tu en prends cinq au lieu d'en prendre trois, ça va coûter moins cher à l'unité; ça, c'est archiconnu et c'est respectable. Mais, si tu ne prends pas cela, je ne te vends pas cela, ou, si je te vends cela, tu es obligé d'acheter a plus b plus c, ça, c'est une chose intolérable et qui était déjà réprouvée d'une façon générale et en principe.

Mais, avec ce projet de loi, après des heures et des heures de travail avec les juristes les plus pointus et les plus avancés, y compris ceux du monde de l'assurance – et je pense que je vais en nommer un en particulier, Me André Bois, qui est archiconnu pour sa grande spécialité dans ces matières... Je vais en nommer un autre, Mme Anne-Marie Beaudoin, qui travaille pour l'AIAPQ. Et je commets des injustices en ne nommant pas les nombreux juristes du ministère des Finances et ceux du ministère de la Justice qui nous ont aidés – nous avons maintenant, je crois, les articles les plus avancés au Canada en matière de protection du consommateur contre les ventes liées. Et mon pronostic, c'est que plusieurs autres juridictions au Canada et aux États-Unis vont nous imiter dans les mois et dans les années qui viennent, à cause du formidable effort intellectuel qui a été fait pour ça.

Même chose au chapitre de la protection des renseignements personnels. À l'ère de l'électronique, à l'ère de la multidisciplinarité, où, dans un cabinet de courtage ou dans une institution bancaire, on vend toute une gamme de produits et récolte toute une gamme d'informations pertinentes à ces produits et nécessaires à ces produits, il devient extrêmement dangereux que des gens indélicats ou des gens qui ne sont pas trop conscients de ce qu'ils font utilisent à tort et à travers ces renseignements à des fins commerciales, ce qui mettrait le consommateur dans un état de vulnérabilité inacceptable. Nous avons donc effectué en commission un travail très patient et très minutieux et, en dehors des commissions, un travail très patient et très minutieux pour faire en sorte que la plus grande étanchéité possible soit établie entre les renseignements qui doivent être connus et ceux qui ne doivent pas l'être, et nos travaux ont été couronnés de succès. Encore une fois, à l'aide des juristes que j'ai mentionnés et d'autres, et aussi à l'aide, je l'ai bien dit, de la Commission d'accès à l'information, dont les spécialistes, après s'être penchés sur le problème, nous ont dit par écrit – et j'ai cité plus tôt au cours de cette séance, M. le Président, la lettre de M. Comeau, président de la Commission, qui dit que nous avons satisfait à toutes ses exigences, et on sait que c'est un homme exigeant... Alors, encore là, je crois que nous avons maintenant une loi exemplaire.

Durant le débat sur cette loi, mon courtier – parce que, moi, je fais affaire avec un courtier pour mes assurances, comme beaucoup de monde d'ailleurs, je ne vais pas dans les institutions financières, parce que j'aime bien le contact personnel du courtier – m'a écrit pour me décrire toute une série de pratiques et de ventes liées et d'informations croisées qu'il dénonçait dans le monde de l'assurance aujourd'hui. Et il avait raison. Mais là, maintenant, la loi le protège. Il me décrivait justement ce que la loi avait pour but de combattre et il m'a rendu service de cette façon. D'habitude, il me rend service dans le domaine de l'assurance, mais là il m'a rendu service dans mon métier de législateur, parce qu'il m'a montré des exemples pour lesquels il fallait justement prendre certaines précautions. Nous les prenons.

Le consommateur est également protégé d'une troisième manière, parce qu'il a un choix plus grand. Il a un choix plus grand parce que, maintenant, une institution financière québécoise sera en mesure d'affronter la globalisation et la mondialisation, comme la plupart des institutions financières dans les grands pays occidentaux, en Europe pour la plupart des pays de l'Union européenne, aux États-Unis d'Amérique pour la plupart des États, ce qui, ultimement, permet au consommateur de choisir avec qui il veut faire affaire, suivant le rapport qualité-prix qui lui convient, suivant le rapport personnel qu'il veut avoir ou ne veut pas avoir avec les intermédiaires de marché.

Le 1er janvier 1999, on le sait, le Canada ayant signé l'Accord de l'Organisation mondiale du commerce sur la libéralisation de l'activité bancaire, une vague de concurrence va s'abattre sur à peu près tous les pays du monde, et le gouvernement du Québec, qui n'est pas responsable de toutes les institutions financières à cause de sa juridiction, comme on le sait, limitée dans ce domaine, est quand même responsable d'une série d'institutions financières. Il ne sera pas dit que les institutions financières dont le gouvernement du Québec est responsable ne seront pas dans un contexte de modernité comparable à ceux des autres pays avancés et des espaces économiques que j'ai nommés. Et ça, contrairement à ce qu'on peut croire, il serait dans l'intérêt des institutions financières et des forces commerciales que la concurrence soit moindre. Si la concurrence est plus grande, ça ne peut jouer que dans les mains du consommateur, et c'est pour ça qu'on l'a fait.

Évidemment, cette loi, qui avait pour principal objet la protection du consommateur, n'avait pas pour objet unique cette protection. En effet, il y a au Québec des milliers d'hommes et de femmes qui, travaillant en cabinets de diverses dimensions, travaillant seuls, travaillant pour des institutions financières, exercent le métier de l'intermédiation financière, dans le monde de l'assurance comme dans d'autres univers plus spécialisés de produits financiers.

J'ai l'honneur d'affirmer, M. le Président, en reprenant d'ailleurs largement le message que j'ai lu précédemment dans la séance, de l'AIAPQ: Les professionnels de l'assurance du Québec ont, à partir de maintenant, un des statuts professionnels les plus avancés, les plus clairs et les plus respectables de tous les espaces économiques qui nous entourent. Ils auront l'honneur de faire partie des chambres professionnelles spécialisées soit pour la personne, soit pour les biens matériels, le tout coordonné comme organisation législative et réglementaire par un Bureau, un guichet unique pour le consommateur. Et les experts me disent, et je crois, encore une fois, qu'ils ont raison, que tout ce travail qui a été fait, ah, avec difficulté, je n'en disconviens pas, tout ce travail qui a été fait, parfois dans la confrontation, je n'en disconviens pas, tout ce travail qui aboutit à un accouchement difficile sera tellement exemplaire qu'il sera imité. Alors, je dis à nos amis qui ont collaboré avec nous, qui ont passé des nuits dans des négociations pénibles et difficiles, qui ont fait des avances et des reculs et qui ont fait des compromis, que je suis persuadé que ces compromis vont aider non seulement le Québec, mais vont aider le métier d'intermédiaire financier partout où il se pratique, tellement nous avons été au bout de notre logique, au bout de notre pensée, pour faire un pas en avant, aller dans la modernité.

Ça me fait penser un peu aux conventions comptables que nous avons changées au cours du dernier budget. Le Vérificateur général, depuis 20 ans, demandait qu'on change les conventions comptables; on l'a fait. Ça a été un accouchement extrêmement difficile, ça a été pénible. Il y avait des pour, il y avait des contre, il y a eu des compromis à faire. Le Vérificateur général a discuté avec nous. On a eu un comité spécial. Résultat: le Québec est la juridiction la plus avancée du Canada en matière de conventions comptables. Je suis sûr qu'il en est de même en matière de statut professionnel des intermédiaires de marché. Et enfin, M. le Président, c'est toute l'économie qui va profiter de cette modernité. Le monde financier a pris une place énorme dans les économies modernes. Ça fait partie du tertiaire, comme on dit. Et, virtuellement inexistant au début du siècle sauf sous forme de dépôts assez simples et de contrats d'assurance pour des usages spécialisés, comme les assurances maritimes, aujourd'hui, ce monde financier de l'assurance et des produits financiers a pris une place importante dans la vie de tout le monde.

(1 h 50)

Une économie qui n'aurait pas une loi moderne en ces matières risquerait de se nuire considérablement, risquerait de se faire mal, risquerait de tirer de l'arrière. Ça n'arrivera pas à l'économie du Québec. Et je suis tellement convaincu de ce que je dis, M. le Président que, dès que cette loi sera adoptée par notre Assemblée nationale, ceux et celles qui ont conduit à son adoption, y compris ceux et celles qui étaient contre, seront conviés à vivre le nouveau contexte, seront conviés à regarder l'avenir, seront conviés à vivre une nouvelle expérience, seront conviés à enterrer les anciens antagonismes pour que les forces non pas s'annulent dans des luttes stériles, mais s'additionnent pour le progrès des consommateurs et des consommatrices et s'additionnent pour le Québec. C'est l'esprit dans lequel le gouvernement va travailler.

Alors, j'annonce, d'avance d'ailleurs, ça ne surprendra personne, je l'ai dit tout au cours de ce débat pour lequel, d'ailleurs, nous pouvons nous féliciter de n'avoir jamais employé, nous, de la majorité ministérielle, un langage qui aurait été choquant pour personne, même pour ceux qui s'opposaient à nous avec le plus d'ardeur... D'ailleurs, s'opposer avec ardeur à une chose que l'on croit devoir combattre, ce n'est rien de déshonorant; au contraire, ça dénote d'un sens des responsabilités civiques qu'on a retrouvé partout.

Alors, ayant apprécié ce sens des responsabilités civiques, je dis aux divers intervenants de l'assurance qu'à partir de maintenant nous ne regarderons pas par derrière et par dessus notre épaule nous regarderons droit devant, nous ne ferons pas de discrimination entre ceux qui ont été pour ou entre ceux qui ont été contre, nous traiterons tout le monde sur le même pied de façon à ce que tout le monde soit enfin, dans la dignité, au service de l'économie, au service des consommateurs et au service du Québec.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je ne voulais pas le faire, mais je suis obligé de le dire. La marque de commerce du ministre des Finances est celle d'être démagogue, arrogant, hautain et de ne pas dire la vérité. C'est exactement ça, M. le Président...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Viger...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Papineau, là, je vous avertis pour une deuxième fois. Alors, M. le député de Viger, vous avez dépassé la limite; je vous inviterais, s'il vous plaît, à surveiller vos propos et les termes que vous employez. M. le député de Viger, je vous cède la parole.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Parce que, quand on ne dit pas la vérité, c'est ça qui arrive. Il disait tout à l'heure, le ministre... et je le prends encore au mot, parce que, tout le long du processus du projet de loi n° 188, ça a été toujours la marque de commerce du ministre, et je vous explique. Il vient encore d'affirmer que le projet de loi n° 188 appuie les consommateurs et que la raison principale du projet de loi n° 188, c'était la protection du consommateur. Ce sont les mots du ministre.

Pourtant, comment il peut affirmer ça quand – et je vais vous lire la liste – dans un communiqué, et je le lis: «Tous ces groupes exigent un moratoire sur l'adoption du projet de loi n° 188.» Je vous fais l'énumération des groupes: le Service d'aide aux consommateurs, Option consommateurs, l'Association des consommateurs du Québec, la Fédération nationale des associations de consommateurs, la Fédération des ACEF, le Conseil des assurances de personnes, le Conseil des assurances de dommages, le Protecteur du citoyen, les 18 000 membres de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, les 5 200 courtiers membres de l'Association des courtiers d'assurances de la province de Québec, les 7 280 employés des courtiers d'assurances, les 131 sociétés d'assurances de personnes membres de l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes, les 20 400 employés basés au Québec des sociétés d'assurance de personnes, les 600 compagnies d'assurance de dommages membres du Bureau d'assurance du Canada, les 14 000 employés des compagnies d'assurance de dommages, les 22 membres de l'Association des cabinets de gestionnaires en courtage d'assurance de personnes du Québec, Standard Life, l'Industrielle-Alliance, seulement pour faire... pas la totalité des gens, M. le Président.

Comme vous avez pu le constater, M. le Président, toutes les associations qui représentent les consommateurs ont demandé au ministre de retirer ou un moratoire. Comment il peut affirmer encore aujourd'hui que la principale préoccupation du ministre dans le projet de loi n° 188, c'était la protection du consommateur? Ça, c'est prendre les gens ou pour des imbéciles ou je ne sais pas trop quoi. C'est ça, la réalité. C'est ça, la vérité, M. le Président.

Comme je dis, depuis le début – depuis le mois de septembre 1996 – le ministre n'a jamais été sincère sur ce projet de loi là. On se rappellera, comme je le disais l'autre fois, c'est qu'on a eu un rapport, le rapport Baril, un rapport unanime, M. le Président, où il y avait des gens de l'opposition et des gens du côté ministériel. On a fait un rapport unanime avec des recommandations précises pour le ministre. Qu'est-ce qui est arrivé à ce moment-là? La première réponse du ministre, ça a été: On rejette ça du revers de la main. On ne prend même pas ça en considération. Et on a eu à ce moment-là, si on se rappelle bien, M. le Président, le vice-président de Desjardins, M. Harbour, dénoncé par le président de la commission des finances, qui avait dit: Oh! La commission, les députés de la commission des finances, ce n'est pas important, ça, ça ne vaut rien. L'important, c'est d'être ami du ministre. C'est ça, la déclaration: L'important, c'est d'être ami du ministre. Les députés, là, les députés qui avaient fait un travail remarquable, qui avaient travaillé des heures et des heures pour arriver à un consensus, pour arriver à l'unanimité, pour faire des recommandations au ministre, mais non, ce n'est pas important, c'est des gens qui n'ont aucun pouvoir. C'est des gens qui ne comptent en rien. L'important, c'est d'être ami, ami du ministre. C'est uniquement ça, M. le Président.

Et quand on me dit... Tout à l'heure, il m'a parlé, le ministre. Il a parlé de son courtier qui lui a donné des renseignements, puis, si j'ai pu comprendre, il lui a dit même qu'il était content du projet de loi. M. le Président, il n'y en a pas un. Il n'y en a pas un qui est content. Et il avait réussi, à un certain moment, M. le Président – je ne sais pas par quelle sorte de magie – à avoir le consentement du Regroupement des courtiers d'assurances. Je me suis posé tout de suite des questions en disant: Mais comment ça se fait qu'il a réussi à avoir l'adhésion du Regroupement des courtiers d'assurances? Le ballon s'est dégonflé dans l'espace de 24 heures. Le ballon s'est dégonflé dans l'espace de 24 heures, parce que, qu'est-ce qui est arrivé, le président du Regroupement des courtiers d'assurances a été obligé de démissionner, a été obligé de démissionner. Pourquoi il a été obligé de démissionner? Parce que tous les courtiers qu'il représentait, tous les cabinets de courtiers qu'il représentait lui ont demandé une conférence téléphonique d'urgence. Ils ont demandé la démission du président parce qu'il avait accepté des choses qui étaient complètement irresponsables et des choses qui n'étaient vraiment pas dans l'intérêt des courtiers. C'est ça qui est arrivé.

Et, à ce moment-là, qu'est-ce qui est arrivé, que le ministre... Hier, à 15 heures, il avait reçu la lettre. Il n'a même pas eu le courage de la déposer, la lettre. Il n'a même pas eu le courage de la déposer. Ça a été moi qui ai été obligé de déposer la lettre et de dire au ministre: Est-ce que vous êtes au courant que vous avez reçu une lettre qui dit que le Regroupement retire son appui au projet de loi? Il ne l'a même pas déposée. Il n'avait pas le courage. Il n'avait pas le courage de le faire.

M. le Président, c'est ça, la réalité. On me parle de mondialisation. «Mondialisation», c'est le mot magique du ministre, c'est le mot de ce gouvernement. Mondialisation, mais pourtant le ministre, il ne dit jamais que, dans des pays comme la France, la Suisse, l'Allemagne, le Japon – il nous parle des pays occidentaux; pourtant, je pense que la France, la Suisse, l'Allemagne, le Japon sont des pays occidentaux – elle n'est pas permise, la vente d'assurances dans les banques. M. le ministre, ce n'est pas permis.

(2 heures)

Et, plus près de chez nous, aux États-Unis, le gouvernement fédéral vient de passer une loi qui empêche la vente d'assurance dans les succursales bancaires. Ici, pas loin de chez nous, pas loin de chez nous, M. le Président.

On se gargarise avec la mondialisation, on se gargarise avec toutes sortes de mots, mais la vérité, on ne veut pas la dire. C'est ça qui est malheureux. Spécialement un projet de loi qui concerne des milliers et des milliers de familles, un projet de loi qui met en péril au-delà de 2 000 PME québécoises. Et, M. le Président, ce qui est le plus tragique, c'est que celles qui sont mises en péril sont plus celles qui sont en région. Des petits bureaux, avec un ou deux courtiers, avec trois, quatre personnes qui travaillent là-dedans, comment voulez-vous qu'ils fassent face justement à la concurrence, à une concurrence qui, à un certain moment, est déloyale? C'est ça, M. le ministre, de la concurrence déloyale, parce que, si c'était au moins une concurrence réelle, une concurrence équitable, je l'accepterais, M. le Président, comme tout le monde l'accepterait. Est-ce qu'on est prêt – c'est ça qu'il faut se poser comme question – à mettre en danger la survie de ces PME là uniquement parce qu'on avait un objectif? Le seul objectif, c'était d'ouvrir l'assurance aux institutions financières. C'est ça, M. le Président.

Et ce que le ministre ne réalise pas, c'est que, en ouvrant la porte comme ça, nous, le fédéral n'aura pas d'autres raisons de dire aux banques: Non, je vais vous empêcher de le faire, comme il l'a fait jusqu'à maintenant. C'est ça qui va arriver, M. le Président. C'est devant ça qu'on va se retrouver dans quelques mois. On va se retrouver avec des gens qui vont être dans la rue, des familles qui ont des responsabilités. Et, pourtant, on l'a dit, on l'a dit maintes et maintes fois au ministre.

Et ce qui est, je dirais, le plus déprimant, c'est que le ministre a eu le courage d'appeler deux commissions parlementaires, de faire venir des gens devant les commissions parlementaires, de demander l'opinion de ces gens-là, mais, comme son idée était déjà faite, il n'a quasiment rien changé. Rien. Rien, M. le Président. Ça, c'est vraiment prendre les gens pour des valises. C'est ça qu'on veut faire et c'est ça qui est regrettable. C'est parce que ces gens se sont déplacés avec des moyens probablement très minimes. Ils n'avaient probablement même pas la possibilité de le faire. Ils sont venus. Ils y ont cru. Ils ont essayé de comprendre et probablement qu'ils ont essayé de dire: Probablement que c'est vrai. On peut collaborer, on peut donner notre opinion, on peut essayer d'influencer le ministre. Peine perdue! Comme le disait M. Harbour, l'important, c'est d'être l'ami du ministre. C'est tout.

Et les changements qu'il a apportés, c'est sûr qu'il y a quelques changements qui sont bons, mais la très grande majorité, c'est complètement à côté, M. le Président, et c'est du cosmétique. Le ministre s'était gargarisé que le Conseil des assurances de personnes... On se rappellera M. Massé, c'était lui qui, d'une certaine manière, avait ouvert la voie au ministre, que ça soit à RDI, que ça soit à TVA, que ça soit dans les postes de radio un peu partout, parce qu'il disait qu'il fallait le faire, ce changement.

Et pourtant, M. le Président, comme je le disais tout à l'heure, on a déjà parlé des consommateurs. Tout le monde n'est pas d'accord non plus avec le projet de loi. Mais M. Massé, du Conseil des assurances de personnes, qu'est-ce qu'il a fait, le Conseil des assurances de personnes? Il a demandé la semaine dernière au ministre de retirer le projet de loi n° 188 parce que le projet de loi n° 188 ne correspond plus à ce qu'était l'objectif que le ministre avait dit poursuivre.

M. le Président, le Conseil des assurances de personnes a demandé au ministre de retirer ce projet de loi, mais le ministre fait la sourde oreille, comme d'habitude; c'est sa marque de commerce. C'est sa marque de commerce de ne pas écouter, d'être là: Moi, je connais la vérité, c'est seulement moi qui connais la vérité, et vous allez la subir, ma vérité. C'est sa façon de faire. C'est la façon avec laquelle ces gens sont obligés de composer, M. le Président.

Et moi, je dis que ces milliers et milliers de personnes, ces milliers et milliers de familles québécoises – spécialement en région, M. le Président, on parle d'au-delà de 80 000 familles – elles vont se rappeler du ministre des Finances, elles vont se rappeler de ce gouvernement et elles vont le trouver sur leur chemin, et ça, c'est sûr, oui, M. le député de Joliette, oui. Vous allez les trouver sur votre chemin et vous allez voir, quand vous aurez le courage de déclencher la prochaine élection, vous pouvez être sûrs que vous allez les trouver sur votre chemin. C'est clair, je peux vous le garantir. Parce qu'on ne peut pas berner les gens comme ça, on ne peut pas les prendre pour des valises. Ces gens ont une conscience. Ils ont cru mais ils se sont fait berner, ils se sont fait avoir parce qu'ils n'ont pas eu l'écoute qu'il fallait du ministre là-dedans. M. le Président. C'est ça, la situation. Et je vous dis que, nous, de ce côté-ci, nous sommes à l'écoute des citoyens et nous allons travailler en collaboration avec les citoyens, parce que nous sommes ici pour représenter les citoyens et nous allons les défendre jusqu'au bout.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Je vais céder la parole maintenant à M. le député de Rivière-du-Loup. Une intervention de cinq minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je vais être relativement bref. Je n'ai pas eu l'occasion de participer au quotidien au très long débat qui a mené au projet de loi n° 188. À ce que j'ai compris, à ce que j'ai suivi, c'est qu'on a parlé tout au long du projet de loi de la protection des consommateurs. Ce que je vois aussi, c'est que l'impulsion de base du projet de loi, ce n'était pas nécessairement que les consommateurs se plaignaient et ce n'était pas nécessairement que les consommateurs descendaient dans la rue pour réclamer un projet de loi comme celui-là.

Et je pense que les gens qui ont eu l'occasion, l'opportunité de travailler avec le ministre dans le cadre de ce projet là, ont vu qu'il y avait des engagements autres qui avaient été contractés. Tout en reconnaissant que dans ce domaine-là il y a sûrement des améliorations, des assouplissements qui peuvent être amenés, tout en reconnaissant aussi qu'au fur et à mesure que les travaux ont avancé, il y a eu des progrès qui se sont faits... Puis il y a un certain nombre de gens pour qui c'est leur gagne-pain, qui se sont ralliés ou en tout cas qui ont vu le projet comme moins pire. Moi, je ne me sentirais sûrement pas à l'aise, d'abord à cette heure-ci, avec une pile d'amendements qui ont été déposés, comme parlementaire, pour appuyer – et je ne sais pas si les collègues vont se sentir à l'aise de le faire – un projet de loi qui...

Bien, là, je suis drôlement impressionné, M. le Président. Je savais que le député de Dubuc était un homme d'action, mais, là, je comprends que, dans l'espace de 15 minutes, il a eu le temps de lire une couple de 100 amendements. Ça l'honore au plus haut point. C'est sûrement des cours de lecture rapide qu'il a eu l'occasion de suivre, à un moment donné dans sa carrière. Mais, compte tenu qu'il s'agit du gagne-pain – je sais que le député de Dubuc prend ça à la légère – d'hommes et de femmes du Québec qui, pendant que, nous, en pleine nuit, on adopte ça... Il y a des gens qui, demain matin, vont se lever pour travailler dans ce domaine-là. Je pense que ce n'est pas une façon très appropriée de régler leur sort. Ce n'est pas une façon très appropriée de conclure un débat comme celui-là. Et certainement que je vais m'opposer à l'adoption du projet de loi. Merci, M. le Président.

(2 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Maintenant, je vais céder la parole à M. le ministre pour sa réplique. Maximum de cinq minutes.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): J'espère qu'il y a un très grand nombre d'intermédiaires de marché qui ont regardé la fin de notre débat et qui ont surtout entendu l'intervention du député de Viger pour voir jusqu'à quel point l'opposition officielle a mal défendu les intérêts du monde de l'assurance et des consommateurs.

Le député de Viger a parlé pendant 15 minutes pour défiler des injures personnelles – tout le monde les a entendues – des anecdotes qui n'avaient rien à voir avec le fond du sujet, de la tactique, de la stratégie, des additions ridicules. Je vous donne un exemple: il a additionné les membres des associations qui, soi-disant, partagent son point de vue. Est-ce que ça ajouterait beaucoup au fond du débat si je disais qu'il y a plus de monde dans la FTQ qui nous appuie que dans tous ceux qu'il a nommés et multiplié par quatre? Non. Véritablement pas. Le député de Viger n'a pas compris et il vient de le prouver à toute la population et au monde de la finance et de l'assurance que ce n'est pas en additionnant des séries d'individus et d'associations qu'on aborde le fond des problèmes.

Tout le monde a entendu mes interventions ce soir. Tout le monde a vu à quel niveau j'ai tenté de les situer. Est-ce que, dans ce qu'a dit le député de Viger, le statut professionnel du monde de l'assurance a été évoqué une fraction de seconde? C'est au coeur du problème. Le député d'Abitibi-Ouest en particulier a poursuivi l'amélioration de ce statut d'une façon obsessionnelle depuis des mois et des mois. Le critique de l'opposition officielle n'en dit pas un seul mot.

Avez-vous entendu les mots «vente liée» dans la série d'anecdotes et d'injures personnelles et d'allusions partisanes qu'il a faites? «Vente liée» qui était au coeur du problème et que le député d'Arthabaska en particulier a fouillé avec une minutie digne de... plus efficace que bien des juristes n'auraient pu le faire. Avez-vous entendu une seule allusion à ça?

Avez-vous entendu parler, dans les propos ultimes du député de Viger, de la protection des renseignements personnels qui sont au coeur du débat et qu'en particulier le député de Crémazie a étudiés avec soin et pour lesquels il a produit des compromis extrêmement précieux dans la loi que nous présentons?

Alors, vous avez vu, M. le Président, de quel côté la majorité gouvernementale s'est dirigée dans ce dossier, de quelle façon nous l'avons abordée, avec souplesse, avec ouverture d'esprit, capables de changer d'idée s'il le fallait en cours de route et en se concentrant sur les objectifs essentiels.

Et vous avez vu comment l'opposition officielle qui aurait pu... et qui s'est targuée pendant des semaines et des semaines de vouloir jouer un rôle d'élévation du débat, de compromis, d'études et d'analyses, ça a fini dans les injures personnelles, dans les anecdotes, dans la tactique, dans la partisanerie. Alors, on les remercie, au fond. C'est d'excellents repoussoirs, d'excellents faire-valoir. Leurs interventions ont démontré ce qu'il ne fallait pas faire quand on se targue de servir l'intérêt public. Et ce n'était pas très facile, d'ailleurs, de nous servir de repoussoirs, le gouvernement ayant fait un travail remarquable, pénible, difficile et long sans pouvoir compter une fraction de seconde sur le moindre enrichissement intellectuel de la part de l'opposition officielle qui aurait pu le faire et qui aurait été la bienvenue de jouer son rôle au service du public plutôt qu'au service du Parti libéral.

Nous avons travaillé d'arrache-pied ici depuis des mois et, au lendemain de l'adoption de la loi, nous allons, avec la même ardeur, nous mettre au service, non pas d'un parti, non pas de tactiques, non pas de stratégies de bas étage et anecdotiques, mais au service du monde financier, des consommateurs, de l'assurance, des intermédiaires, au service de l'économie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin au débat sur l'adoption du projet de loi. Le projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le vote nominal est demandé. Nous allons appeler les députés. Nous allons suspendre les travaux pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 2 h 15)

(Reprise à 2 h 21)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons poursuivre nos travaux. J'inviterais tout le monde à s'asseoir.


Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant l'adoption du projet de loi n° 188, Loi sur la distribution de produits et services financiers.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Bélanger (Anjou), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Jutras (Drummond), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Maciocia (Viger), M. Gautrin (Verdun), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Whissell (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:54

Contre:13

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi est adopté.

Nous sommes rendus à la prise en considération du rapport de la commission permanente... des affaires sociales, oui. Maintenant, nous allons, s'il vous plaît... Nous attendons encore quelques détails concernant le rapport. Je crois que le rapport arrive. Bon. Alors, nous pourrons poursuivre sans suspendre.


Projet de loi n° 186


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis

Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, ainsi que les amendements transmis par Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Tous les amendements de la ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 2, 4, 5, 5.1, 5.2, 6, 11, 12, 13, 18, 23, 24, 25, 26, 27, 31, 34, 35, 37, 38, 40, 40.1, 41, 43, 44, 45, 46, 49, 49.1, 50, 52, 52.1, 54, 55, 56, 57, 59, 61, 62, 63, 65, 69, 70, 72, 77, 82, 84, 85, 91, 92, 95, 97, 98, 99, 100, 104, 105, 108, 109, 113, 115, 121, 123, 125, 129, 130, 133, 148, 153, 154, 155, 156, 157, 158, 159, 161, 160.1, 161 – j'ai bien dit «160.1», mais 161 revient deux fois, alors vous verrez... – et je poursuis, 167, 172, 171.1, 171.2, 172, 173, 175, 176, 177, 180, 181, 185, 189, 190, 194, 197.1, 198, 198.1, 199, 199.1, 200, 201, 202, 205, 205.1, 205.2, 206, 206.1, 206.2, 209, 209.1, 211, 214, 214.1, 215, 218 de la version française, ainsi que les articles 27, 53, 85 et 182 de la version anglaise du projet de loi, l'ajustement des références contenues dans les Lois refondues du Québec et la motion de renumérotation du projet de loi.

Les amendements présentés par Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité sont irrecevables pour le motif qu'ils ont déjà été adoptés en commission – ils sont donc répétitifs – les suivants que je vais mentionner: 2, 4, 5, 5.1, 5.2, 6, 11, 12, 13, 18, 23, 24, 25, 26, 31, 34, 35, 37, 38, 40.1, 41, 43, 44, 45, 46, 47, 49, 56, 57, 59, 61, 62, 63, 65, 69, 70, 72, 77, 82, 84, 85, 91, 92, 95, 97, 99, 100, 104, 105, 108, 109, 113, 115, 200, 200.1, 200.2 et 214.1. Sont déclarés irrecevables les amendements transmis par M. le député de Notre-Dame-de-Grâce aux articles 53, 54 et 55 du projet de loi.

Je vous rappelle que, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée du débat sur le rapport de la commission des affaires sociales concernant le projet de loi n° 186 et sur les amendements proposés est de 14 minutes, dont cinq au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq au groupe parlementaire formant l'opposition, deux aux députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de deux minutes.

(2 h 30)

Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur ces amendements? Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, je vous cède la parole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Alors, j'ai l'honneur de participer à la dernière étape de ce débat avec l'appui de collègues députés membres de l'Assemblée et également de la commission parlementaire des affaires sociales. Trois d'entre eux interviendront lors du débat sur l'adoption du projet de loi, je veux les en remercier. Je vais, M. le Président, rapidement, puisque j'ai à peine cinq minutes, compléter la première intervention que j'ai faite plus tôt ce soir, puisque maintenant nous en sommes à l'étape de considération du rapport.

M. le Président, pour un débat aussi important, aussi solennel, aussi fondamental, je suis quand même surprise que les banquettes de l'opposition soient vides et je suis obligée de constater qu'à peine le tiers des membres de l'opposition votaient tantôt. On verra pour le prochain vote nominal. Il me semble que c'est gênant, du côté de l'opposition, que de réclamer un vote nominal. M. le Président, deux mots... S'il vous plaît, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Revenons à l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, deux mots, puisque c'est de ça dont il s'agit avec le temps qui m'est imparti, sur ce que n'est pas le projet de loi n° 186 et sur ce qu'il est.

Ce qu'il n'est pas, M. le Président, je pense qu'il est nécessaire de le dire étant donné qu'il s'est dit bien des choses dont bon nombre inexactes. Non, le projet de loi n° 186 ne porte pas et ne modifie pas à la baisse les barèmes de la sécurité du revenu. Les montants affectés aux barèmes sont fixés par règlement, ils ne sont pas dans la loi, ils ne font pas l'objet de discussions et, je le dis clairement, d'aucune façon il n'est question de les modifier à la baisse. Je comprends que ça puisse dissiper une certaine confusion qui a pu être alimentée par différents porte-parole qui ont prétendu le contraire dernièrement.

M. le Président, c'est donc le résultat de plusieurs étapes importantes qui ont été franchies depuis 1995, des étapes qui ont débuté à l'initiative de ma prédécesseure, Mme la députée de Chicoutimi, qui avait demandé deux rapports aux professeurs Fortin et Bouchard, lesquels rapports ont été déposés en mars 1996, suite à quoi la publication du livre vert sur la réforme de la sécurité du revenu, en décembre 1996, a amené la tenue d'une consultation publique à l'occasion de laquelle 99 organismes ont été entendus, 145 mémoires ont été déposés, une des plus importantes et des plus longues consultations parlementaires tenues au cours des quatre dernières années, suite à quoi nous avons également mis en place la consultation qui eut lieu sur le projet de loi n° 186 déposé en décembre 1997.

C'est également l'aboutissement de réformes importantes, notamment celle qui a créé la Commission des partenaires du marché du travail et qui a institué le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, qui a vu, d'ailleurs, la signature de l'Entente Canada-Québec relative au marché du travail et qui a permis la réorganisation des services d'emploi. Dorénavant, je rappelle que les prestataires de la sécurité du revenu, au même titre que toutes les personnes à la recherche d'un emploi, ont accès à des services de qualité adaptés à leur situation, des services diversifiés, M. le Président, comme on le sait, décloisonnés, et qui auront permis, je pense, de déstigmatiser ces personnes qui, jusqu'à maintenant, étaient confinées à des mesures désignées qui les faisaient tourner en rond.

Alors, M. le Président, c'est un total de 107 amendements qui sont présentés dans le cadre de cette prise en considération du rapport, 107 amendements dont une trentaine qui sont significatifs. J'aurai l'occasion certainement, en réplique, de revenir sur cette question. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Le prochain intervenant sera le député de Notre-Dame-de-Grâce, pour cinq minutes. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, j'en passerai des premiers commentaires indignes d'un ministre de ce gouvernement. On va s'en passer, à 2 h 35 le matin de discuter d'un projet de loi qui touche 700 000 Québécois et Québécoises. Ils sont nombreux, M. le député de Richelieu. Et j'en profite... Parce que franchement je ne trouve rien de drôle dans un débat qui porte sur l'avenir de 700 000 Québécois et Québécoises qu'on fait à 2 h 35 du matin, M. le Président, absolument rien.

M. le Président, le processus qu'on vit ce soir n'a pas plus ni moins l'air de broche à foin: 107 amendements apportés par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, 107. Je vous avise tout de suite: on va voter contre en bloc...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: ...encore une fois – c'est très drôle, oui, oui, c'est très drôle, M. le Président – nous allons voter contre les amendements. Il y en a peut-être là-dedans qui améliorent le projet de loi, il y en a peut-être, mais...

Des voix: Ah!

M. Copeman: ...avec un dépôt de 107 amendements à minuit le soir, je n'ai pas eu l'occasion de passer à travers, faire l'analyse studieuse et nécessaire avant qu'on vote sur des amendements. Alors, je suis, dans l'opposition, obligé de voter contre tous les amendements déposés par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité.

M. le Président, processus broche à foin, vraiment, à côté de toutes les normes parlementaires, quant à moi, qui devraient s'appliquer à un projet de loi de cette envergure.

M. le Président, j'ai parlé tantôt des groupes qui s'opposent au projet de loi. J'ai mentionné la FTQ; CSN; CEQ; la Coalition des organismes communautaires membres de la Commission des partenaires du marché du travail; le Front commun des personnes assistées sociales du Québec; Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec; Alliance québécoise des regroupements régionaux pour l'intégration des personnes handicapées du Québec; l'Assemblée des évêques du Québec; la Fédération des femmes du Québec; le Conseil permanent de la jeunesse; la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; Coalition nationale sur l'aide sociale; la FRAPRU; les professionnels en santé.

M. le Président, tantôt lors du débat restreint, la ministre a dit quelque chose d'absolument inconcevable. Elle a dit que bon nombre de ces groupes-là, quand ils sont venus en commission parlementaire, ils ne s'opposaient pas à la loi n° 186, mais ils s'opposaient à la loi actuelle. Franchement! Ça démontre un mépris total pour les groupes qui ont témoigné devant la commission parlementaire. Mépris total! Les gens qui témoignaient devant la commission parlementaire savaient la différence entre le projet de loi n° 186 puis la loi actuelle. Bien, voyons donc! L'Assemblée des évêques sait la différence. Dans un article écrit dans Le Devoir , le 10 janvier, signé par Vivian Labrie, cosignataire du rapport Bouchard, François Saillant, de la FRAPRU, Jean-Yves Desgagnés, du Front commun, ils disent: «Aucune personne pauvre ne peut sentir, à travers le projet de loi n° 186, qu'on l'apprécie, qu'on lui fait confiance, qu'on tient compte d'elle.»

Les professionnels appuient les assistés sociaux. Les médecins, diététistes et travailleurs sociaux dénoncent la réforme de l'aide sociale. L'Assemblée des évêques du Québec demande que soit retiré le projet de loi n° 186 sur la réforme de l'aide sociale. M. le Président, la ministre ne nous fera pas croire que toutes ces personnes-là ne savaient pas de quoi elles parlaient. Elles savaient exactement de quoi elles parlaient: elles parlaient du projet de loi n° 186, elles en demandaient le retrait. Et c'est avec un mépris total que la ministre vient tenter de convaincre les membres de cette Assemblée que ces groupes-là ne savaient pas de quoi ils parlaient quand ils réclamaient, dans plusieurs cas, le retrait, carrément, du projet de loi n° 186.

(2 h 40)

M. le Président, les cinq minutes étant épuisées, je ne peux faire autrement que d'arrêter, à ce moment-ci, à cause du bâillon. On va reprendre, je vous assure des arguments de fond lors de l'adoption finale du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, s'il n'y a plus d'autres intervenants, je vais céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique de deux minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: M. le Président, si l'opposition avait accepté d'étudier sérieusement en commission parlementaire, nous ne serions pas ici à 2 h 45 de la nuit et nous aurions pu finaliser l'étude du projet de loi et l'adopter sur division. Ça nous aurait permis d'aller au-delà de l'article 125 où nous nous sommes rendus en faisant un excellent travail, et un travail qui s'est d'ailleurs concrétisé avec l'appui du député de Notre-Dame-de-Grâce. Il y a au moins une trentaine d'amendements parmi les 107 déposés qui sont inspirés des interventions faites par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Mais vous savez très bien ce qui s'est passé. Il s'est passé qu'au beau milieu de l'étude en commission parlementaire le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui depuis le début était à travailler comme porte-parole, seul, en commission, il a eu du renfort. Pour faire quoi, vous pensez, M. le Président, le renfort? Bien, pas du renfort pour aider nos travaux studieux, du renfort pour s'assurer qu'on ne puisse pas terminer le travail studieux qu'on avait commencé.

Alors, je pense que, n'eut été de l'obstruction dans les dernières heures de la commission parlementaire, nous aurions pu faire encore un meilleur travail. Je le crois sincèrement. Mais qu'est-ce que vous voulez? À un moment donné, il était évident, manifeste, que l'opposition avait décidé qu'elle allait faire de l'obstruction. Ils ont décidé ça, là, pas au début de la commission, ils ont décidé ça mercredi après-midi dernier; jeudi, il n'y avait plus moyen d'avancer, puis vendredi non plus.

Alors, voilà, c'est comme c'est ça que ça s'est passé. Et j'étais contente d'entendre le député dire que, dans plusieurs cas, ils ont demandé le retrait. Pas dans tous les cas des groupes qu'il a mentionnés, M. le Président. Je comprends que plusieurs avaient des réserves importantes sur un certain nombre de questions importantes, y compris des articles que nous avons totalement modifiés, ceux qu'on appelle les articles 42 à 53 d'un projet de loi, qui portaient sur la question des obligations. Alors, nous l'avons modifié pour clarifier la situation. Elle est améliorée par rapport à ce qui se passe maintenant. Puis j'y reviendrai, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Ceci met fin à la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales et des amendements de Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.


Mise aux voix des amendements de la ministre

Les amendements de Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, sauf ceux que j'ai retirés parce que répétitifs, sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des amendements du député de Notre-Dame-de-Grâce

Les amendements de M. le député de Notre-Dame-de-Grâce aux articles 53, 54 et 55 sont-ils adoptés?

Des voix: Rejeté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rejeté, sur division, je suppose?


Mise aux voix des articles amendés

Les articles du projet de loi amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Les articles du projet de loi dont la commission des affaires sociales n'a pas disposé et qui n'ont pas été amendés par les votes précédents et le titre et les intitulés du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.

La motion de renumérotation du projet de loi est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le rapport de commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, ainsi amendé, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Adoption

Maintenant, Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité propose l'adoption du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale. Je vous rappelle que les temps de parole sont les mêmes que pour l'autre projet de loi, 40 minutes au total: 15 pour un groupe parlementaire, 15 pour l'autre, cinq pour les indépendants et cinq pour la réplique. Alors, je suis prêt à céder à parole au prochain intervenant. Mme la députée de Sherbrooke, je vous cède la parole.


Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: Merci, M. le Président. Je vous signale tout de suite que le 15 minutes va être divisé en trois fois cinq minutes. J'ai deux autres collègues qui me suivront. Et je pense que nous voulons témoigner par là que plusieurs députés et, finalement, l'ensemble du caucus a suivi de très près ce dossier. C'est un dossier présenté par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, mais dans lequel nous avons passé de très nombreuses heures à essayer de comprendre de quoi il s'agissait et à travailler pour présenter le meilleur projet de loi qui soit dans les circonstances.

J'aimerais, puisque je n'ai que quelques minutes, rappeler – il me semble que c'est important de le faire – quel est le problème au départ auquel ce projet de loi cherche à trouver une solution, et quelle est cette solution, ou plutôt quelle est la pierre angulaire du projet de loi. On ne rappellera jamais suffisamment que le point de départ de ce projet de loi – c'est un constat assez effrayant, il faut dire – que 80 % des adultes qui sont à l'aide sociale sont, de fait, des chômeurs et des chômeuses. Cela veut dire que, d'un système qui est un système de protection pour des gens pas en mesure de travailler, on est passé à un système où se retrouvent en très grande majorité des gens qui souhaitent travailler et qui en ont les capacités.

C'est pourquoi la pièce maîtresse de ce projet de loi, c'est ce qu'on appelle le parcours d'insertion vers l'emploi. C'est ça, la pièce maîtresse. Qu'est-ce que ça veut dire essentiellement? Une chose relativement simple. C'est qu'au lieu de donner simplement une assistance financière à des gens, en reconnaissant – ce que, moi, je refuse de faire – qu'il n'y a pas de place pour tout le monde dans la société... Moi, je pense que c'est la pire chose que l'on peut faire, c'est de voter des projets de loi qui consacrent qu'il y a un certain nombre de nos concitoyens et de nos concitoyennes qui n'ont pas de place. Je pense que, au contraire, ce que nous avons cherché à faire dans le projet de loi n° 186, c'est de dire: Il y a une place qu'il faut trouver pour tout le monde et, pour aider les gens à trouver cette place, il faut leur permettre de s'inscrire dans un parcours vers l'emploi, les accompagner, les encadrer, leur donner un certain nombre d'outils qui, bien sûr, ne créeront pas de l'emploi par magie, mais qui leur donneront plus de chances, plus de moyens, plus de perspectives pour occuper des emplois que, par ailleurs, nous nous employons à créer. C'est ça, la pièce maîtresse de ce projet de loi.

En même temps, on a essayé – et la ministre l'a déjà annoncé, mais je crois qu'il faut le rappeler, parce que c'est un élément sur lequel on a beaucoup travaillé – d'améliorer les conditions des personnes qui doivent s'inscrire à un parcours ou qui, malheureusement, sont dans une situation de pauvreté et se retrouvent à la sécurité du revenu. On a pris un certain nombre de moyens. Je conviens avec vous que peut-être ça n'est pas suffisant et que, si on avait des moyens financiers additionnels, on pourrait faire plus. On est capable de rêver plus et de croire qu'on pourrait faire encore mieux, mais il y a toutefois des choses importantes que l'on a faites.

Quand on a dit: On va donner une somme de 500 $ à chaque personne qui sort de la sécurité du revenu pour se trouver un emploi, je pense qu'on a fait quelque chose d'intelligent. Quand on a aboli la coupure du logement pour les familles monoparentales, je pense qu'on a fait quelque chose d'intelligent. Je ne dis pas que c'est suffisant à tout jamais, mais je pense que ça va dans le bon sens. De la même manière, quand on a haussé de 60 000 $ à 80 000 $ l'exemption pour une résidence, on a été, là encore, dans le bon sens. Et il faut comprendre que les gens dont on parle sont des gens qui ont de très petits moyens et que la moindre amélioration peut changer leur vie. Quelqu'un qui peut garder sa maison à cause de ce changement, c'est quelqu'un dont l'horizon de vie est beaucoup plus intéressant.

C'est certain qu'il y a aussi de la part du gouvernement – je crois que les gens en sont bien conscients – des efforts à faire pour que ces parcours soient bien instaurés, des efforts à faire pour réorganiser aussi les ressources qui récemment ont été mises ensemble à Travail-Québec, à la SQDM et à la Direction des ressources humaines Canada. Tout ça qui devient sous le grand chapeau Emploi-Québec le partenaire principal pour aider les gens à se faire des parcours. Bien sûr, tout ça est fondamental, et nous avons à livrer la marchandise, M. le Président, et je suis convaincue qu'avec l'énergie qui se développe, avec les idées qui circulent, nous allons être en mesure de livrer la marchandise.

(2 h 50)

Je voudrais simplement terminer en disant que ce projet de loi, il est important, qu'il marque une étape majeure, parce qu'une étape qui est orientée vers un problème fondamental qui est que des gens sont exclus du marché de l'emploi. Et c'est ça que nous voulons corriger, sans prétendre que nous avons réglé tous les problèmes aujourd'hui, mais en prétendant tout de même que l'enlignement est le bon et que, si on fait l'expérimentation de ce projet de loi à partir de demain matin, on se retrouvera bientôt pour faire un rapport qui montrera qu'on avait bien fait et qu'on avait tracé le bon sentier. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Sherbrooke. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Hyacinthe. M. le député.


M. Léandre Dion

M. Dion: Merci, M. le Président. J'ai souhaité pouvoir prendre la parole sur ce projet de loi parce que c'est un projet de loi dans lequel je crois profondément. Pourquoi je crois dans ce projet de loi, M. le Président? J'y crois parce que c'est un projet de loi qui vise fondamentalement à contrer l'exclusion sociale dans laquelle les a plongés toute l'époque des boubous macoutes où on se plaisait à les taxer de tous les maux que la société peut contenir.

Ce projet de loi là, M. le Président, veut faire en sorte que les gens qui sont à l'aide sociale soient vraiment considérés comme des citoyens à part entière. Que l'on transforme leur statut de bénéficiaires en un statut de travailleurs. Des travailleurs momentanément exclus de l'aide sociale mais en transition vers une position respectée dans la société, une position dans laquelle ils peuvent vraiment apporter quelque chose à l'économie du milieu, peuvent apporter leur part à l'économie de la société.

On sait que, actuellement, la situation des personnes à l'aide sociale est une situation vraiment difficile à vivre. C'est une situation infantilisante, une situation dans laquelle on les plonge, une situation dans laquelle ils sont considérés comme des citoyens à part des autres, comme des citoyens qui ne sont pas vraiment des citoyens au même titre que les autres. C'est pour ça que différents articles de la loi visent à contrer cette exclusion sociale.

Je veux parler, en particulier, d'une série d'articles qui parlent de l'obligation d'effectuer un parcours. Pourquoi je veux parler de ça, M. le Président? Parce qu'on a décrié ça de toutes sortes de façons. L'opposition a été d'accord avec un certain nombre de groupes de pression qui s'opposent à l'obligation d'un parcours.

D'abord, de quoi s'agit-il au juste? Pour nous, un parcours, ça semble simple, ça semble clair, ça semble évident. Mais pour quelqu'un qui est à l'aide sociale depuis un an, deux ans, trois ans, peut-être que l'histoire du parcours, ça ne veut pas dire grand-chose. En termes simples, le parcours c'est ceci, M. le Président. Le parcours, c'est un cheminement qui est fait à partir d'une situation précise d'une personne; c'est un parcours individualisé.

Par exemple, M. Jean a quitté l'école après son secondaire II. Ça fait depuis cinq ans, sept ans, qu'il n'est pas retourné à l'école et qu'il n'a pas travaillé. Comment va-t-il faire pour accéder au marché du travail? Peut-être devra-t-il étudier, peut-être devra-t-il suivre des stages en entreprise, effectuer certains travaux, tout ce qui peut faire en sorte qu'il devienne plus employable, donc plus apte à occuper en emploi dans la société. C'est ça qu'est le parcours. Donc, c'est un cheminement à travers, soit des cours, soit des stages, soit toutes autres expériences qui peuvent en faire des gens plus utiles, plus en demande par les entreprises.

Alors donc, l'obligation de parcours, M. le Président, c'est l'obligation de ne pas refuser d'entreprendre un cheminement pour devenir plus apte à occuper une place dans la société. On a dit que l'obligation du parcours s'appuyait sur des préjugés à l'effet que les assistés sociaux étaient des paresseux. M. le Président, je vous dis, moi, que l'obligation du parcours s'appuie sur le contraire de cela.

Pourquoi est-ce qu'on dit que les gens qui ont besoin d'aide doivent, sont obligés de faire un parcours? Parce qu'on les considère comme des citoyens à part entière. M. le Président, ce soir, bien qu'il soit 3 heures du matin, vous êtes obligé d'être là. Je suis obligé d'être ici. Nos amis, dans la société, qui travaillent, tous les travailleurs sont obligés d'être au travail. Et, s'ils ne vont pas au travail, qu'est-ce qu'ils font? Ils perdent leur emploi, ils perdent leur salaire, M. le Président. Ce que nous voulons, c'est que les gens qui sont à l'aide sociale soient considérés comme des citoyens comme tout le monde, qui ont des droits mais qui ont aussi des obligations. De les considérer comme des gens qui n'ont que des droits – je parle des assistés sociaux qui sont en état de travailler – et pas d'obligations, c'est de les considérer comme des petits, comme des enfants, c'est de les infantiliser. C'est pour ça que nous sommes pour l'obligation, parce que la vraie compassion consiste à leur restituer leur vraie dignité.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Hyacinthe. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Rimouski.


Mme Solange Charest

Mme Charest: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 186 est un projet de loi qui a été attendu, et qui est attendu depuis très longtemps, à la fois par les prestataires et par tous les partenaires du marché de l'emploi. Vous savez, de l'avant-projet de loi que nous avons déposé il y a déjà presque deux ans à celui que nous nous apprêtons à voter cette nuit, je dirais tout bonnement qu'il y a eu beaucoup d'eau qui a coulé sous les ponts, tout simplement parce qu'il y a eu un processus qui a été long mais qui a été très, très profitable pour améliorer, bonifier le projet de loi.

Ces consultations qui se sont faites durant tous ces mois par des auditions d'au-delà une centaine de groupes, qui sont venus nous dire ce qu'ils voulaient et surtout ce qu'ils ne voulaient plus dans le système de sécurité sociale – parce qu'ils avaient connu justement la réforme Bourbeau et c'est de celle-là qu'ils ne voulaient plus – ils sont venus nous dire de quelle façon ils voulaient qu'on l'outille pour qu'il soit un support social adéquat qui réponde réellement à leurs besoins... Alors, je pense que là-dessus le projet de loi actuel, sur lequel nous nous apprêtons à voter, a profité non seulement des suggestions et des amendements proposés par l'opposition officielle, mais également par ces différents partenaires, par les députés ministériels. Et je pense que le projet de loi actuel que nous avons est le fruit d'un large consensus.

C'est vrai que ce n'est pas l'unanimité, mais c'est quand même un large consensus au sein de la société pour que dorénavant les citoyens et les citoyennes qui doivent avoir recours à la sécurité du revenu puissent le faire la tête haute, parce qu'ils sont avant tout des travailleurs et des travailleuses à la recherche d'un emploi susceptibles d'avoir besoin de support, d'aide, pour pouvoir réintégrer, dans les plus brefs délais, le marché du travail. Ce que nous avons comme projet de loi, c'est un projet de loi qui nous permet de passer d'un régime d'assistance sociale à un régime d'assistance-emploi. M. le Président, permettez-moi de vous dire que je considère que le meilleur service que l'on puisse rendre à un chômeur ou à une chômeuse, c'est de l'outiller pour qu'ils puissent réintégrer le marché du travail. Et je pense que le projet de loi n° 186 va permettre, par ses différentes mesures, de faciliter la réinsertion sur le marché du travail des personnes qui ont recours à l'aide sociale.

Avant de vous parler, moi, également, du parcours, j'aimerais quand même dire que la réforme proposée, qui a déjà certaines dispositions qui s'appliquent depuis le 1er juin dernier, permet quand même d'injecter des dizaines de millions de dollars qui sont prévus pour faciliter le support aux personnes, et ça, malgré un contexte budgétaire difficile. Je voudrais attirer votre attention, M. le Président, sur certaines réformes que l'on retrouve à l'intérieur de ce projet et qui m'apparaissent importantes. Le projet de réforme abolit la réduction pour le partage du logement pour les familles monoparentales, ce qui n'était pas prévu au départ dans l'avant-projet de loi, dans le livre vert, et on répond ainsi aussi à une promesse que nous avions faite, en 1994, comme gouvernement du Parti québécois, qui était d'abolir la pénalité pour le partage du logement pour les familles monoparentales. Mission accomplie, M. le Président.

(3 heures)

Nous avons également apporté des améliorations au calcul de la contribution parentale afin de l'harmoniser avec le régime d'aide financière pour les étudiants. Je pense que cette bonification est drôlement avantageuse, surtout pour les jeunes et également pour les parents qui supportent ces jeunes.

Il y a également l'exemption pour la valeur nette d'une résidence, qui passe de 60 000 $ à 80 000 $. Moi, comme d'autres députés, dans chacun de nos comtés, lorsque nous faisons du bureau de comté le lundi, le vendredi nous recevons souvent des personnes qui, à cause de la restructuration du marché du travail, se retrouvent à l'aide sociale, mais elles ont accumulé au cours de leurs années de travail une maison. Elle vaut 60 000 $, 70 000 $, 80 000 $. Et, parce qu'elle dépassait 60 000 $, ces gens-là n'avaient pas droit à la sécurité du revenu. Maintenant, ils y auront droit parce que nous avons écouté leurs doléances. Nous avons bonifié la valeur de leurs biens et nous passons de 60 000 $ à 80 000 $.

Je vois, M. le Président que vous me dites que c'est tout. J'aurais beaucoup de choses à vous dire. Et j'invite tous mes collègues de l'Assemblée nationale à voter pour le projet de loi n° 186.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Rimouski. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, j'aimerais reconnaître immédiatement la ténacité et la persévérance d'un groupe de personnes assistées sociales qui représentent un groupe de défense de la région de l'Outaouais, qui sont venues ici assister à nos débats. Le chemin a été long, le retour va être encore plus long, mais ils sont ici, comme je dis, avec ténacité et persévérance. Et je suis profondément convaincu qu'ils vont tirer leurs propres conclusions sur le débat, ce soir. À eux autres de juger. Ils vont porter le jugement qui leur appartient.

M. le Président, je suis profondément déçu des commentaires de la ministre de l'Emploi et de la Solidarité quant à ces prétendues obstructions systématiques, à partir de mercredi passé, de la loi n° 186. Tout ce que je peux dire à cet égard, c'est que c'est faux. Et la preuve en est que la dernière journée de travail, le mardi 16 – parce que je vous rappelle, M. le Président, que la commission n'a pas été convoquée le mercredi 17, ça n'a pas été convoqué; c'était au loisir du leader du gouvernement de convoquer cette importante commission sur cet important projet de loi, il ne l'a pas fait mercredi – la commission a travaillé deux heures de temps, suite aux ordres de la Chambre, encore une fois, du leader du gouvernement. Pendant, semble-t-il, que j'avais des renforts pour faire de l'obstruction, nous avons adopté six amendements et cinq articles dans deux heures de temps. La ministre appelle ça de l'obstruction, adopter six amendements et cinq articles dans deux heures de travail? Et la ministre a le culot de dire que c'est de l'obstruction? C'est faux. C'est faux et c'est archifaux.

M. le Président, la vérité a quand même sa place dans cette Chambre. L'étude détaillée du projet de loi a duré une totalité de huit jours, 28 heures et demie d'étude détaillée. Nous avons pris en considération 128 articles. Ça fait une moyenne de 13 minutes et demie par article. Comment est-ce que la ministre peut prétendre qu'il y avait de l'obstruction? C'est faux, M. le Président. La ministre elle-même, dans l'étude détaillée, a suspendu une trentaine d'articles suite aux interventions qui avaient été faites de notre côté de la table. C'est la ministre qui a suspendu une trentaine d'articles suite à nos commentaires. C'est ça, de l'obstruction de l'opposition? Il va falloir que les péquistes redéfinissent le mot «obstruction» parce que ça ne concorde aucunement à la réalité de qu'est-ce qui s'est passé à la commission des affaires sociales. La ministre le sait! Elle le sait.

M. le Président, oui, des amendements ont été apportés, oui, les bonifications ont été faites au projet de loi, oui; je n'ai jamais prétendu le contraire. Certaines bonifications ont été faites, certains amendements qui ont apporté des bonifications ont été adoptés. Je me réjouis des gains. On ne peut pas ignorer certains gains, mais ils sont nettement insuffisants.

La Coalition nationale sur l'aide sociale, hier, a émis un communiqué de presse dans lequel elle disait, entre autres: «La Coalition déplore les très petits montants additionnels consentis par le gouvernement pour atténuer la pauvreté des prestataires de l'aide sociale. Pour des prestataires qui ont été coupés de centaines de millions depuis deux ans, ces mesures sont dérisoires. Cependant, la Coalition note que la lutte contre la pauvreté n'est pas une priorité pour l'actuel gouvernement du Québec.»

Et, au sujet de l'obligation pour les jeunes: «Même si le principe – c'est la Coalition qui parle, M. le Président – de l'obligation demeure inscrit dans le projet de loi, ce que nous contestons vivement, l'ajout d'un an de moratoire déjà annoncé nous permet d'espérer que ce principe ne sera jamais mis en vigueur.» C'était ça, la réaction du milieu.

M. le Président, la loi n° 186, oui, fait le décloisonnement des services en employabilité pour des clientèles et de l'aide sociale et de l'assurance-emploi. Oui, ce décloisonnement est souhaitable, oui, c'est une bonne chose. Mais le cafouillage dans l'implantation des nouvelles mesures d'employabilité, l'intégration des programmes du fédéral, l'intégration de ce qui était anciennement la Société québécoise pour le développement de la main-d'oeuvre et le réseau Emploi-Québec... vit des ratés importants dans l'implantation des nouveaux programmes d'employabilité. Et j'en prends comme preuve le simple fait que, depuis des mois maintenant, le nombre de participants à des mesures d'employabilité est à la baisse. Pourquoi? Parce qu'il y a un cafouillage dans l'arrimage des trois réseaux, cafouillage prédit par la Commission des partenaires du marché du travail.

M. le Président, on s'objecte à beaucoup d'éléments punitifs dans le projet de loi, des éléments punitifs qui ont fait en sorte qu'Alain Noël, professeur agrégé au Département des sciences politiques de l'Université de Montréal, qui est reconnu comme une expert dans l'aide sociale, a écrit que le projet de loi n° 186 représente la fin de la sécurité du revenu: «L'approche retenue a plus à voir avec l'évolution américaine. On introduit la pénalité d'abord, et on verra après pour l'insertion. Dans un contexte de chômage élevé, cette approche ne réduira pas les rangs de l'aide sociale.» Ce n'est pas moi qui le dis, je ne m'appelle pas Alain Noël. C'est l'expert. C'est un expert reconnu dans le domaine de l'aide sociale qui le dit.

M. le Président, l'obligation pour les jeunes, nous avons déposé un amendement pour éliminer cette obligation, pour trois raisons fondamentales. Dans un premier temps, c'est une mesure discriminatoire, même selon la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. C'est une mesure qui est complètement inefficace. Il y a beaucoup, beaucoup de preuves que des mesures volontaires sont plus efficaces que des mesures obligatoires. Et, troisièmement, l'État n'est pas en moyen de fournir assez de parcours pour le nombre de jeunes qui y sont éligibles.

(3 h 10)

M. le Président, il y en a parmi nous, même, dans la société québécoise qui prétendent que les changements apportés à l'aide sociale vont aussi loin que ça frôle le non-respect de la Déclaration universelle des droits de l'homme – qui a maintenant 50 ans, M. le Président, qui a été écrite par un Québécois – qui indique, à l'article 22: «Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité.» M. le Président, il est suggéré, au Québec, que les changements apportés à la Loi sur l'aide sociale frôlent le non-respect même de cet article de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

M. le Président, la crédibilité des politiciens est souvent liée au respect de nos engagements politiques. Préparez-vous à applaudir, les députés ministériels, là, votre programme Des idées pour mon pays . À la page 172, on peut lire à 2.1 que «le barème actuel sera maintenu et indexé en fonction de l'indice du coût de la vie». Est-ce que ça a été fait, ça, indexé au coût de la vie? Non, M. le Président, ça n'a pas été fait.

«2.4 Les prestations de l'aide sociale seront accordées avec les mêmes exigences, quel que soit l'âge de la personne qui les reçoit.» M. le Président, le projet de loi n° 186 va complètement à l'encontre de cet engagement du Parti québécois en ce qui concerne la parité pour les jeunes. Je répète: «Les prestations de l'aide sociale seront accordées avec les mêmes exigences, quel que soit l'âge de la personne.» Est-ce que la ministre oserait dire que l'obligation pour les jeunes de participer à un parcours respecte les engagements du Parti québécois dans son programme? J'espère qu'elle n'osera pas le dire, M. le Président. Je l'espère.

M. le Président, j'aimerais terminer sur quelques commentaires à l'égard du rapport du groupe de travail du Parti libéral du Québec sur la pauvreté, le comité présidé par M. Claude Ryan. M. Ryan souhaitait que Mme la ministre reçoive une copie le plus vite possible, ce qui a été fait vendredi. La réaction de la ministre est parvenue à M. Ryan hier, le 17, où elle indique par lettre: «Le député de Notre-Dame-de-Grâce, M. Russell Copeman, m'a remis vendredi dernier un exemplaire du rapport du groupe de travail du Parti libéral du Québec sur les politiques gouvernementales et pauvreté. Ce rapport était accompagné d'une note que vous avez eu l'amabilité de m'adresser. Je vous en remercie. Je me permets de partager avec vous et vos collègues du groupe de travail une première évaluation qui, bien que partielle, donne une idée des implications financières des propositions qui concernent le ministère de l'Emploi et de la Solidarité. Les coûts afférents aux ministères de la Santé et des Services sociaux et de l'Éducation n'y sont pas mentionnés.»

M. le Président, également, le 16 a paru dans Le Soleil ... «Je vous prie d'agréer, monsieur, l'expression de mes sentiments distingués.»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Copeman: C'est vrai, j'ai échappé une autre phrase: «Je vous assure de ma collaboration si vous souhaitez examiner plus à fond ces questions financières qui concernent la sécurité du revenu à l'emploi.»

M. le Président, on a vu la réaction dans Le Soleil . La ministre est citée comme quoi – parce que les coûts dépassent, selon le ministère, 2 100 000 000 $ – que ça n'ira pas plus loin que le papier sur lequel il est écrit. C'est ça, les mots de la ministre.

M. le Président, M. Ryan a répliqué aujourd'hui et a envoyé une missive de quatre pages à la ministre. Je vais simplement en citer quelques extraits: «Je m'attendais de votre part à une appréciation du rapport sous l'angle des besoins des personnes qui vivent dans la pauvreté. J'ai malheureusement été déçu de ne rien trouver de tel dans votre envoi. Celui-ci ne traite en effet que de chiffres. Même à ce niveau, vous déformez dangereusement la pensée et les intentions des auteurs du rapport.»

M. Ryan continue: «En déformant par vos calculs et en omettant de mentionner que plusieurs ajustements du montant des prestations d'aide sociale seraient appelés à se réaliser par étape suivant l'état des finances publiques, vous versez dans une...»

Des voix: ...

M. Copeman: Ça a toujours été là, messieurs dames, je vous apprends quelque chose. Vous avez juste à lire un peu. Ça va être intéressant pour vous.

M. le Président, M. Ryan conclut à la ministre de l'Emploi: «Vous versez dans une démagogie facile qui me paraît indigne de vous.»

Finalement, M. le Président, je vous rappelle simplement que le groupe du rapport sur la pauvreté a très bien indiqué qu'il s'agit de propositions et que le Parti libéral du Québec va définir sous peu des engagements concrets à l'égard de l'aide sociale. Et on va les respecter une fois que la population nous portera au pouvoir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Je vais voter contre le projet de loi n° 186 pour différentes raisons. J'aurai l'occasion de revenir sur le rapport sur la pauvreté qui va faire aussi partie de mon intervention.

D'abord, parce que l'obligation de parcours... Et j'étais heureux d'entendre le député de Saint-Hyacinthe qui parlait en bien de la nécessité d'avoir des obligations, pas seulement des droits. Moi, je suis un grand partisan de ça, et c'est pour ça que l'obligation de parcours, à mon avis, ne devrait pas être inscrite comme une clause orphelin, une clause qui concerne strictement les jeunes, mais devrait être un atout ou un acquis dans l'ensemble du système, si telle est la façon dont on devait procéder.

Je veux aussi intervenir sur la question du décloisonnement. On peut seulement être favorable à l'intégration des programmes. Je profite de l'occasion qui m'est offerte ce soir pour constater ce qui se passe sur le terrain. C'est que, quand le gouvernement du Québec reprend des affaires qui se faisaient par le fédéral, nonobstant les considérations politiques, dans la pratique, le nombre de formulaires, il augmente, le nombre d'autorisations nécessaires, de paperasse que les gens ont à montrer augmente. De là à dire qu'on est plus bureaucratisé au Québec, je n'en suis pas certain, mais on aurait intérêt à être prudent là-dessus. Parce que, pour l'instant, l'idée de décloisonnement, elle doit être regardée avec toute la prudence, parce que, dans la pratique, là, tout le monde me dit que les choses sont nettement plus compliquées.

Il est évident que je vais voter contre le projet aussi parce que je suis contre le régime d'aide sociale tel qu'on le connaît. D'ailleurs, la nécessité de le réformer aussi souvent qu'on le fait... Le fait que, dans bien des cas, l'aide sociale est considérée par beaucoup de gens comme un système qui dévalorise le travail, où c'est plus payant de refuser du travail que d'en accepter, m'amène nécessairement à la conclusion qu'un revenu minimum du citoyen serait probablement ou sûrement un régime beaucoup plus applicable et beaucoup plus susceptible de revaloriser le travail, de remettre le travail comme une valeur de société.

(3 h 20)

Cela étant dit, M. le Président, on ne peut pas parler, à ce moment-ci, de l'aide sociale sans constater le ridicule du débat. Le député de Notre-Dame-de-Grâce a fait la moitié de la démonstration en démontrant que le Parti québécois ne respecte pas ses engagements, parce que personne n'ose, avant l'élection – nous, en tout cas, on le fait – parler de la nécessité d'inclure des obligations. Avant l'élection, là, tout le monde est du bord des pauvres, hein? Avant l'élection, on va en donner plus aux pauvres, une fois élu, puis tout ça. Puis là, quand on arrive au pouvoir, on dit: On regarde les finances, puis il n'y a plus d'argent dans les coffres. Faut arrêter, à un moment donné, de raconter des histoires aux gens.

Et c'est triste de voir l'opposition officielle, le rapport... Je pense que c'est le député de Notre-Dame-de-Grâce qui citait Alain Noël, tout à l'heure, puis ensuite il a cité le rapport du Parti libéral. Ça, c'était le Père Noël, je suppose.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Dumont: Mais il faut arrêter de faire croire aux gens, tomber dans cette facilité-là, et je trouve déplorable l'idée de dire: On va donner des milliards de plus; si on est élus, nous autres, c'est des milliards qu'on va donner de plus aux pauvres. La solution à la pauvreté: on va remettre plus d'argent dans les programmes d'aide sociale. La solution à la pauvreté, c'est d'arrêter l'hypocrisie du Code du travail qu'on a au Québec, c'est d'arrêter l'hypocrisie des lois sur la construction qu'on a au Québec puis de faire travailler le monde.

Plutôt que d'en protéger une gang puis de garder les autres sur l'aide sociale, qu'on ait le courage de déréglementer, de faire le ménage dans nos structures comme d'autres l'on fait, de faire travailler le monde. Ce n'est pas en remettant de l'argent dans l'aide sociale, en faisant toutes sortes d'accroires à la population, en faisant toutes sortes d'accroires aux pauvres pour essayer de se faire élire qu'on va régler les problèmes. C'est déplorable, c'est triste de voir des gens qui sont prêts à vendre leur âme pour faire croire, avant l'élection, aux pauvres que, là, on va vous donner de l'argent puis que, si nous autres, on est élus...

Les médecins, vous voulez de l'argent? On en a, de l'argent pour les médecins. Puis les infirmières, on en a, de l'argent pour vous autres. Puis, le lendemain de l'élection, ils vont faire comme tous les autres avant, ils vont ouvrir les coffres puis ils vont ouvrir les livres, ils vont dire: Hé! de l'argent, on n'en a pas tant que ça! Les gens vont s'apercevoir qu'ils leur ont conté des histoires pour se faire élire puis que, le lendemain, il n'y a plus rien de ça qui tient. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre pour son droit de réplique de cinq minutes.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Vous comprendrez, M. le Président, que ce n'est pas dans cinq minutes que j'aurai l'occasion de reprendre les thèmes qui ont été abordés par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Mais peut-être, en fait, allons à l'essentiel et disons que le projet de loi fera obligation à une personne de ne pas refuser ou abandonner un emploi. Mais encore faut-il signaler que, contrairement à ce qui existe présentement, le défaut de cette obligation va au moins être balisé, puisque le projet de loi introduit la notion d'emploi convenable qui peut aussi être abandonné ou refusé pour des motifs sérieux.

Vous comprendrez que, quand le député me brandit, M. le Président, des textes de professeur d'université, je crois que le député s'éloigne complètement de la réalité de sa formation politique et du Québec. Il a, d'une manière suggestive, laissé entendre que le projet de loi pourrait aussi être contraire aux chartes des droits. Ça, là, c'est quasiment gênant d'entendre ça de la part d'un membre de l'Assemblée nationale. Si c'était le cas, on ne le voterait pas, ce projet de loi là, et ce n'est pas le cas. La Commission des droits de la personne est venue en commission parlementaire et n'a jamais dit que c'était contraire aux chartes.

M. le Président, je trouve ça assez incroyable quand on pense à ce qui s'est fait en Ontario avec la réforme Harris, puis à ce qui s'est fait au Nouveau-Brunswick, puis à ce qui s'est fait en Alberta. On est à 100 lieues de ça. Alors, je ne pense pas qu'on a de leçons à recevoir. Moi, j'ai fait vérifier toute la littérature de ce qui se passe dans tous les pays industrialisés démocratiques, les 29 membres de l'OCDE, et je dois vous dire, là, que ce qui est introduit ici, c'est complètement un parcours qui est volontaire, sauf pour les moins de 24 ans, et je vais m'en expliquer. Sauf pour les 18-24 ans, il n'y aura aucune pénalité, même pour l'abandon ou le refus d'un parcours. Mais, pour les 18-24 ans, pour la bonne raison... Et encore faut-il dire aussi qu'il y a un amendement qui a été apporté et qui prévoit d'ailleurs que le jeune peut avoir un motif valable de refuser ou d'abandonner un parcours lorsque les activités proposées ne sont pas appropriées à sa situation.

Non, on ne fera plus comme maintenant, avec des mesures désignées où la personne n'a pas un mot à dire si elle accepte ou pas, sinon elle est pénalisée, alors qu'il y a maintenant des droits. Oui, il y a des devoirs, mais il y a une réciprocité, il y a des recours. Il y a maintenant une révision qui va être dans un processus impartial et transparent.

Alors, je comprends, M. le Président, que, à part cette obligation fondamentale qui, à mon point de vue, constitue un devoir civique, le projet de loi va quand même exiger que l'emploi soit convenable avant d'appliquer la réduction faute d'un motif sérieux pour l'abandonner ou le refuser. Et rien d'autre, dans le projet de loi n° 186, n'introduit des occasions de sanctionner les prestataires. Au contraire, les nombreuses dispositions de la loi actuelle n'ont pas été reconduites. Ça, le député de Notre-Dame-de-Grâce le sait très bien, tout ce qu'on a abrogé et biffé de ce qui s'applique depuis 10 ans, précisément parce que c'était contraire à ce que je crois comme philosophie, qui est la suivante, bien simplement: Il y a des gens qui ont besoin d'estime, de valorisation, d'accompagnement, d'encouragement. Ils ont besoin d'avoir la certitude qu'ils sont capables. Ça vaut pour les sociétés, d'être capables, et ça vaut aussi pour les individus.

Et, en terminant le débat qui est amorcé depuis maintenant presque deux ans, je le dis bien sincèrement, bien simplement, je crois que ce que l'on fait va pouvoir préserver notre filet de sécurité sociale, va pouvoir non seulement le préserver, M. le Président, mais en assurer la pérennité. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Le projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale, est-il adopté?

Des voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal? Alors, que l'on appelle les députés. Nous allons suspendre quelques instants.

(3 h 27 – 3 h 31)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Mise aux voix

Je mets maintenant aux voix la motion de Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité proposant l'adoption du projet de loi n° 186, Loi sur le soutien du revenu et favorisant l'emploi et la solidarité sociale.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Campeau (Crémazie), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Bélanger (Anjou), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Jutras (Drummond), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Maciocia (Viger), M. Gautrin (Verdun), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Whissell (Argenteuil), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:51

Contre:13

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le projet de loi n° 186 est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à ce matin, le vendredi 19 juin, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée. Nous ajournons nos travaux à ce matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 3 h 34)