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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 21 avril 1998 - Vol. 35 N° 168

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de membres de la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures huit minutes)


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons reprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer l'item.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 21 du feuilleton.


Projet de loi n° 416


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 21, M. le ministre des Transports propose l'adoption du projet de loi n° 416, Loi modifiant la Loi sur les transports et la Loi sur le transport par taxi. Y a-t-il des interventions? M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président. Alors, nous en sommes à l'étape de l'adoption. Avant le congé pascal, nous avons adopté le principe du projet de loi n° 416 et nous avons examiné les articles de ce projet de loi en comité plénier. Et, comme je l'ai expliqué au moment de l'examen de l'adoption du principe, les modifications législatives proposées visent à attribuer à la Commission des transports du Québec la discrétion et les pouvoirs nécessaires pour fixer les tarifs de transport et valider les tarifs actuels, pour atténuer les conséquences d'un vide juridique suite à la décision de la Cour suprême.

Rappelons-nous que celle-ci a refusé, le 19 mars dernier, la demande de permission d'appeler du Procureur général du Québec d'un jugement rendu le 17 juillet 1997 par la Cour d'appel du Québec dans l'affaire Michel Raby, jugement qui accueillait favorablement la demande d'invalidation des taux et tarifs fixés par la Commission des transports dans l'industrie du camionnage en vrac.

(10 h 10)

Comme je l'ai invoqué précédemment, notre désir de combler ce vide juridique est motivé par notre volonté de préserver les conditions que nous avons négociées de dure lutte pour assurer la transition dans cette évolution vers un marché plus ouvert. Il aurait été inapproprié, inopportun d'adopter un tel projet de loi l'automne dernier, compte tenu que des discussions étaient en cours avec le gouvernement fédéral et les autres administrations canadiennes pour obtenir un report de la déréglementation dans le transport en vrac.

La démarche d'aujourd'hui est donc cohérente avec le cheminement poursuivi par le gouvernement dans le dossier du vrac au cours des derniers mois. Ce cheminement a été ponctué de difficultés et d'ententes successives à travers lesquelles le gouvernement et les partenaires du transport ont toujours recherché une évolution harmonieuse de cette activité cruciale dans l'économie.

Nous avons bien accueilli les commentaires des divers représentants de l'industrie qui nous ont fait connaître leur point de vue en commission parlementaire. Je tiens d'ailleurs à réitérer mes remerciements à ces organisations qui, très rapidement, se sont déplacées pour venir nous rencontrer et échanger avec les membres de la commission. Les groupes qui ont répondu à notre invitation sont venus nous porter des messages auxquels je demeure attentif quelles que soient les positions exprimées. Je vous en rappelle brièvement le contenu.

Parmi les cinq organismes qui se sont présentés en commission parlementaire, deux positions se sont manifestées. D'un côté, l'Association des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec et l'Association québécoise des entrepreneurs en égouts aqueducs ont insisté pour que le gouvernement dérèglemente les tarifs dans le transport en vrac et cesse de protéger ce secteur d'activité. Selon elles, l'artisan que le gouvernement croit protéger est, en fait, le plus souvent un entrepreneur. Ces deux associations croient qu'il est temps de définir clairement ce qu'est un camionneur artisan et qu'il pourrait être pertinent de conserver une certaine protection de base pour ce type de camionneurs.

Les trois autres organismes qui représentent l'industrie du transport endossent l'intention du gouvernement. L'Association du camionnage du Québec, l'Association des propriétaires de machinerie lourde du Québec et l'Association nationale des camionneurs artisans trouvent urgent de combler le vide juridique. De plus, ces associations veulent éviter que, au terme de la révision qui sera amorcée aux tables de concertation, on néglige l'aspect sécurité. Elles fondent toutefois de l'espoir dans la présentation prochaine d'un projet de loi sur l'encadrement du transport routier pour éviter que des camionneurs délinquants n'offrent une concurrence déloyale à ceux qui investissent dans la sécurité et le respect du patrimoine routier.

Plus particulièrement, face au projet de loi, l'Association des propriétaires de machinerie lourde se dit coincée entre la moitié de ses membres qui sont des entrepreneurs importants et qui veulent l'abolition de toute réglementation et l'autre moitié de ses membres qui font partie des postes de courtage et qui veulent maintenir la réglementation. Ces trois associations, M. le Président, sont favorables à mieux définir ce qu'est un vrai camionneur artisan et à revoir l'ensemble de la réglementation. Pour ce faire, elles sont d'avis qu'une période de transition s'avère nécessaire et que les tables de concertation que j'ai annoncées seront l'occasion unique pour bien préparer l'avenir.

J'estime donc que la majorité de nos partenaires de l'industrie des transports se montrent favorables à la démarche que nous poursuivons d'ici l'an 2000. Ils s'opposent ainsi à la brisure qui pourrait découler du maintien du vide juridique conséquent à la décision de la Cour suprême, puisque, les deux premiers jugements ayant donné raison au gouvernement, il allait de soi que nous poursuivions les procédures en Cour suprême compte tenu des impacts importants associés à un contexte d'absence de tarifs.

Par ailleurs, au cours des dernières années, nous avons multiplié les démarches et obtenu du gouvernement fédéral un délai jusqu'au 1er janvier 2000 pour déréglementer complètement le secteur du camionnage en vrac. L'initiative législative que nous prenons maintenant s'inscrit dans la continuité des actions entreprises auprès du gouvernement fédéral et des autres administrations canadiennes en vue d'obtenir une période de transition.

En conclusion, M. le Président, je crois que le gouvernement prend ses responsabilités, fait preuve d'une grande considération envers tous ses partenaires en proposant à l'Assemblée nationale ce projet de loi n° 416 qui permettra de combler le vide juridique évitant ainsi de briser le bel esprit de concertation qui anime l'ensemble des intervenants.

J'invite par ailleurs les membres de cette Assemblée à suivre de près la démarche de concertation que nous poursuivrons dans les prochains mois et à laquelle ont accepté de participer unanimement tous les partenaires. Ces tables, qui seront fonctionnelles très prochainement, me semblent être l'illustration la plus claire de ma préoccupation comme ministre des Transports à trouver le fonctionnement le plus harmonieux possible dans le domaine du transport en vrac dont tous tireraient les bénéfices. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Transports. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Pontiac. M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Nous sommes au stade de l'adoption du projet de loi n° 416, et le ministre, encore, indique l'urgence, le vide juridique. Toutefois, il semblerait que peut-être on aurait pu régler le problème des taux par une réglementation, une réglementation qu'on a déjà utilisée pour établir le 75-25 qui existe pour les contrats du gouvernement, du ministère des Transports surtout, et des municipalités.

M. le Président, il faut se demander c'est quoi, l'urgence. Je crois plutôt que c'est une urgence qui a été créée par l'inaction du ministre. Il semblerait que, depuis 1994, le ministère des Transports, au lieu de planifier, de faire des choses, il est toujours en réaction. Voici un exemple: En réaction à un jugement de la cour, jugement qu'on appelle jugement Raby... Et c'est à se demander: Est-ce qu'on aurait les tables de concertation que le ministre vient d'indiquer tantôt si la Cour suprême du Canada avait décidé d'entendre la cause? Est-ce que réellement on aurait eu ces tables de concertation? Et la raison pour laquelle je soulève ce point, M. le Président: je crois que les tables de concertation, c'est les tables les plus importantes pour régler le vrai problème.

Le problème des taux, c'est un problème qui est passager, M. le Président. Mais il y a un échéancier: l'an 2000, la déréglementation du transport. Et, à ce moment-là, il va falloir avoir en place tous les outils, tous les moyens possibles pour s'assurer que les transporteurs en vrac pourront avoir une saine concurrence et ne pas réduire la sécurité. Lorsqu'on parle d'urgence, M. le Président, on le sait, que ce gouvernement a des problèmes à gérer les urgences. C'est extrêmement notoire.

La réglementation. M. le Président, je l'indiquais tantôt, là, c'est réglementé. Des fois, le fait d'avoir une réglementation crée, pour les gens qui en bénéficient, une certaine assurance que peut-être ce n'est pas nécessaire, on ne doit pas nécessairement continuer à vouloir améliorer, à vouloir réussir à être le plus efficace possible.

(10 h 20)

M. le Président, ce n'est pas surprenant que le ministre a pris la position qu'il a prise. C'est très évident dans le mémoire qu'il a soumis au Conseil des ministres pour la présentation de ce projet de loi. C'était un vide juridique. C'était une urgence. Mais il n'a osé consulter personne d'autre que l'Association nationale des camionneurs artisans. M. le Président, c'est bien, mais il me semble que, si on a un problème, il faut certainement consulter tous les gens qui peuvent apporter la meilleure solution à ce problème. Mais le ministre a jugé bon de ne pas le faire, et c'était tellement évident, M. le Président, dans sa façon d'agir, son arrogance qui, malheureusement, a peut-être même débordé.

Et l'Association nationale des camionneurs artisans a senti que, elle aussi, elle devait avoir cette arrogance envers les gens, pas des gens qui sont contre, mais des gens qui disent: Il faut s'assurer de réellement le régler, le problème, pas juste temporairement, pas juste de créer une situation qui donne l'impression que tout est sous contrôle, parce que l'échéancier, je le disais, c'est l'an 2000. À ce moment-là, il faut être prêt. Il faut s'assurer que, d'ici l'an 2000... On dit: Bah! maintenant qu'on a réglé le problème des taux, on va s'asseoir tranquillement puis on ne fera rien. Et je crois que, au lieu de rapprocher ces gens-là, l'attitude du ministre a plutôt créé le contraire. Ça a réellement accentué une division qui est tout à fait naturelle entre ce qu'on peut appeler les donneurs de travail et les exécuteurs. Et on l'a dit de ce côté-ci puis on le répète: On cherche l'équité, la justice.

Et pourquoi a-t-on attendu si longtemps avant de former ces tables-là? C'est la solution. Le ministre l'indiquait tantôt que, là, c'est la grosse espérance. On espère que ces tables-là vont se réunir bientôt, que ces tables-là vont apporter des solutions à la situation que devra vivre l'industrie du camionnage en vrac au Québec et partout à travers le Canada à partir de l'an 2000. Il semblerait que, au moins, il y a quelque chose en commun. Les intervenants nous ont dit: On est tous pour la déréglementation, mais il faut certainement la préparer. Et ceci, c'est tellement important, il y va de la survie de l'industrie.

Si nous croyons qu'il y a un vide juridique présentement puis qu'il y a une urgence présentement, ce n'est rien comparé à ce qui va être nécessaire en l'an 2000. C'est l'avenir de toute l'industrie du camionnage qui est en danger, et, si on ne prend pas le temps et s'il n'y a pas de leadership... Et c'est là où c'est bien important. Il me semble que le ministre doit faire preuve de leadership, et, lorsqu'on veut faire preuve de leadership, il me semble qu'on ne fait pas de parti pris, on cherche à établir le juste milieu.

Il y a quelque chose à quoi le ministre n'a pas du tout répondu. L'Association des constructeurs de routes et de grands travaux du Québec a indiqué que le système actuel coûtait à la collectivité québécoise 44 000 000 $ de plus. On l'a nié, mais il y a une chose, c'est que le ministre et l'Association sont d'accord que le volume de travail ou le montant de travail qui est donné par le ministère des Transports est de l'ordre de 110 000 000 $ à 150 000 000 $. Est-ce que c'est vrai? Est-ce que c'est vrai qu'il y a une marge de profit de l'ordre de 44 000 000 $ de plus que nécessaire? Et, si oui, c'est la collectivité québécoise qui paie pour ça, M. le Président.

Il me semblerait que ça serait dans l'intérêt du gouvernement de nous dire exactement si c'est vrai ou si ce n'est pas vrai. Il me semble que c'est bien, de s'occuper des travailleurs, de s'occuper des donneurs de travail, mais aussi de la collectivité québécoise à qui on a demandé, ces dernières années, de faire d'immenses sacrifices au niveau des soins de santé, au niveau de l'éducation. Donc, il me semble, M. le Président, que, si ce n'est pas vrai, qu'on le dise donc! Qu'on le dise donc, au lieu, lorsqu'on n'est pas heureux, qu'on n'aime pas le message, de tirer le messager comme on l'a fait.

Et je disais tantôt, M. le Président: L'arrogance du ministre, elle a été acceptée par les camionneurs. On m'envoie une lettre dans laquelle on me dit: N'oubliez pas que le 21, ça serait une date propice pour l'adoption du projet de loi. Je sais que le ministre m'avait indiqué en cette Chambre, le Jeudi saint, que vendredi, samedi, il serait à la convention de l'Association nationale des camionneurs artisans et qu'il leur dirait qu'ils n'ont pas eu le projet de loi parce qu'il n'y avait pas eu le consentement de l'opposition.

Sur ça, M. le Président, j'aimerais bien indiquer, lorsqu'on avait, en premier lieu, consulté l'opposition sur le projet de loi n° 416, on nous avait indiqué dans un premier temps que le mardi on pourrait débuter le projet de loi. Suite à notre consentement de vouloir procéder avec le projet de loi, nous avons rencontré l'Association nationale des camionneurs artisans, et il semblerait que c'était à la suggestion du ministre. À la suggestion du ministre, ils sont venus nous voir, et, donc, à ce moment-là, M. le Président, on a échangé avec ces gens-là. Et on avait indiqué, et eux aussi nous avaient indiqué l'importance de consulter tous les gens qui sont impliqués dans le domaine du camionnage en vrac. Donc, on a suggéré au gouvernement, au bureau du leader du gouvernement d'avoir une consultation particulière, ce qui a été accepté.

Et la raison pour laquelle je fais ça, M. le Président, c'est pour vous démontrer que, lorsqu'on a planifié, on croyait, dans un premier temps, avoir les consultations particulières le mardi, qu'on pourrait ensuite procéder le mercredi au principe, à la commission parlementaire, et que le jeudi on pourrait adopter le projet de loi. Mais, malheureusement, le mardi, on n'a pas pu procéder ici aux consultations particulières; le ministre était occupé à d'autres activités. Le mercredi, on a eu nos consultations. Le jeudi, on n'a pas pu aborder le principe et la commission plénière... seulement après 15 heures. M. le Président, lorsqu'on avait donné notre consentement, on croyait qu'il y aurait amplement de temps, qu'il y aurait le mardi, le mercredi et le jeudi pour être capable réellement de faire l'étude appropriée de ce projet de loi.

Et j'aimerais bien que dans sa réplique le ministre puisse nous indiquer: Le chiffre de 44 000 000 $ qui circule, est-ce qu'il est véridique? Est-ce que c'est vrai que ça coûte à la collectivité québécoise 44 000 000 $? Est-ce que c'est vrai que ça coûte quelque chose? Si ça ne coûte rien, je pense que ça serait bien important, pour toutes les parties impliquées, qu'on donne l'heure juste. Parce que, lorsqu'on laisse des choses dans les airs et qu'on ne répond pas, souvent les gens sont portés à croire que, oui, il y a quelque chose là.

Donc, M. le Président, je voulais mettre les choses au clair. Ça fait que, si on n'a pas donné notre consentement le Jeudi saint, il me semblait que, rendu à 17 h 45, une fois qu'on avait terminé l'étude article par article, de vouloir, dans l'espace de 15 minutes, faire l'adoption, ne pas avoir l'occasion de dire ce que je dis aujourd'hui, de dire ce que le ministre nous a dit aujourd'hui... Parce qu'il semblerait que, là, nous sommes sur la même longueur d'onde, M. le Président. Il faut s'assurer que les tables de concertation se mettent en marche le plus tôt possible et qu'on réussisse à réellement se donner tout ce qui est nécessaire pour s'assurer qu'au moment de l'entrée en vigueur de la déréglementation tous les camionneurs artisans soient prêts à faire face à ça et sans que ça leur coûte des sous.

(10 h 30)

Il me semblerait qu'on en vit une, déréglementation, dans le camionnage général. Et M. Pigeon nous l'a indiqué au moment de la commission parlementaire, que, malheureusement, on n'était peut-être pas prêt. C'est qu'on a vécu des problèmes parce qu'on n'était pas prêt pour cette déréglementation-là et qu'à cause de la déréglementation il y a encore des gens qui, malheureusement, ne jouent pas selon les règles du jeu pour être capables d'obtenir des contrats parce que c'est le meilleur prix.

Et je suis convaincu que, si on est prêt à faire des choses de cette nature-là et qu'on va en bas des prix qui sont jugés les prix plancher, la sécurité des gens sur nos routes est mise en danger. Oublions le côté de l'aspect pécuniaire et les faillites possibles. Il me semble que la première chose dont on doit se préoccuper comme gouvernement, certainement moi-même comme député, c'est de s'assurer que sur les routes du Québec on ait la plus grande sécurité possible.

Oui, M. le Président, nous donnons notre appui à ce projet de loi. Et nous espérons que le ministre et toutes les associations qui sont venues présenter des mémoires ou nous sensibiliser aux problèmes que vit le camionnage au Québec, que ces gens-là pourront s'asseoir dans un esprit de coopération, de vouloir établir le plus tôt possible... se donner les outils nécessaires pour faire face à cette déréglementation qui va avoir lieu en l'an 2000.

Toutefois, M. le Président, ce que je déplore, c'est que la situation de ce projet de loi a créé, je pense, plutôt une grande division. C'est lorsque le ministre lui-même, avec son arrogance, pointe du doigt un certain directeur général parce que ce directeur général là... Il croyait, le ministre... Le ministre a dit qu'il y avait un vide juridique. Donc, s'il y a un vide juridique, il n'y a pas de taux minimum qui existe. Mais, parce que ce directeur général là disait à ses membres: Regardez, il n'y en a plus, de taux minimum... Donc, il me semble que de dire la vérité: Il n'y a pas de taux minimum, ça ne devrait certainement pas faire fâcher le ministre, qui a dit: Vous n'aviez pas d'affaire à dire ça. Le gouvernement a décidé qu'on était pour remplir ce vide juridique et, à ce moment-là, M. le Président, c'est un peu ça, cette arrogance-là. On n'aime pas le message, on tire le messager. Je trouve que ça n'a pas créé une situation qui va certainement... J'espère toutefois que ça ne se produira pas. J'espère qu'il peut y avoir un esprit de coopération, parce que c'est l'avenir de tous ces gens-là, autant les camionneurs que les constructeurs, les entrepreneurs. Si on veut s'assurer qu'après l'an 2000 il n'y aura pas de vide juridique, qu'il n'y aura pas d'urgence, et qu'il n'y aura certainement pas de perturbation de la paix sociale, et qu'à ce moment-là tout pourra se dérouler le mieux possible, donc, nous donnons notre appui pour favoriser le travail des tables et surtout pour accélérer le processus qui a déjà pris un retard important. Et c'est là où je me posais la question, tantôt: Est-ce que, si la Cour suprême avait décidé d'entendre cette cause, on aurait aujourd'hui nos tables de concertation? Est-ce qu'on aurait mis tout ça de côté? Peut-être que c'est une bonne chose, M. le Président, pour l'avenir du camionnage en vrac, que la Cour suprême ait décidé de dire: Regardez, la décision de la Cour d'appel, on ne prendra pas ça en délibéré. Donc, comme je le disais, il y a déjà un retard important.

M. le Président, en terminant, je demande à tous les gens, toutes les associations, tous les donneurs d'ouvrage ainsi que les exécuteurs, de bien vouloir le plus tôt possible s'asseoir à ces tables de concertation et de travailler de façon positive à trouver la solution qui va assurer qu'après l'an 2000 les camionneurs en vrac, les donneurs de travail pourront continuer à travailler dans l'harmonie et dans les meilleurs intérêts de la collectivité québécoise. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Pontiac.

Il n'y a pas d'autres intervenants ni répliques. Alors, le projet de loi n° 416, Loi modifiant la Loi sur les transports et la Loi sur le transport par taxi, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 3. Il s'agit d'un débat sur les rapports de commissions.


Débats sur les rapports de commissions


Prise en considération du rapport de la commission qui a procédé à une consultation générale sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 3 du feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture qui a procédé à une consultation générale sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée. Ce rapport contient des recommandations.

Je vous rappelle que, conformément aux dispositions de l'article 95 du règlement, cette prise en considération donne lieu à un débat restreint d'au plus deux heures et qu'aucun amendement n'est recevable. Suite à une réunion avec les leaders, je vous informe de la répartition du temps de parole établi pour la durée de ce débat restreint: cinq minutes sont allouées à chacun des députés indépendants; les deux groupes parlementaires se partageront également le reste de la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes ou par les députés indépendants pourra être redistribué, et les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Enfin, je vous rappelle que, en vertu du deuxième alinéa de l'article 95, ce débat n'entraîne aucune décision de l'Assemblée.

Je suis maintenant prêt à céder la parole à un premier intervenant. M. le député de Lévis, je vous cède la parole.


M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, nous avons déposé en Chambre le rapport de la commission de la culture sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée le 8 avril dernier, un rapport unanime des membres de la commission de la culture, qui ont travaillé pendant un grand bout de temps pour produire ce rapport.

C'est un rapport qui est intéressant, parce que, au point de départ, les membres de la commission de la culture ne partaient pas nécessairement d'un même point de vue. Il y avait des points de vue très partagés, très différents, au point de départ. Et pour ceux qui, parfois, se demandent si les gens écoutent ce qui se passe quand les gens viennent dans les commissions, je peux vous dire que tous les membres de la commission ont cheminé ensemble en écoutant les rapports, les représentations des 50 personnes ou groupes qui sont venus devant la commission présenter leur opinion, leur point de vue concernant les cartes d'identité.

Et, à la fin, les gens, en écoutant les gens, ont convergé de plus en plus vers un consensus de députés libres. Parce que, pour faire ces consensus, il faut que les députés agissent plus librement et sans esprit de parti, ce qui est rare, ce qui est terriblement rare, M. le Président. Ce qui a fait en sorte qu'on arrive aujourd'hui à un rapport unanime. Je pense qu'il reflète, en gros, ce que l'opinion publique pense au Québec à ce moment-ci et ce que pensent également les représentants du peuple, les députés qui font partie de cette commission.

Essentiellement, le mandat que nous nous étions donné, c'était de faire le point sur ce qu'est la situation à ce moment-ci de la pensée de la population du Québec, de la société québécoise concernant les cartes d'identité. Alors, M. le Président, ce rapport est intéressant, non pas par le nombre de recommandations, parce que, souvent, il y a tellement de recommandations qu'on ne voit plus les arbres, on voit seulement la forêt. Tandis qu'ici, comme il y a seulement deux recommandations, on peut voir exactement quelles sont les orientations, non pas les accessoires, non pas les queues de renard après les antennes des automobiles, mais la marque de la voiture. Et c'est très clair, quand on voit le rapport.

(10 h 40)

Alors, c'est à la lumière des nombreux projets en préparation au gouvernement – carte multiservices donnant accès à l'inforoute gouvernementale, carte-santé avec microprocesseur, carte d'électeur – et de l'éventualité d'un carte d'identité obligatoire que les membres de la commission de la culture – c'est culture et communications – ont considéré qu'il devenait urgent de tenir un véritable débat sur la question des cartes d'identité, notamment sous l'angle des menaces potentielles pour la vie privée des citoyens. Parce que souvent, les gens ne sont pas vraiment conscients à quel point ces cartes d'identité là, surtout lorsqu'elles sont reliées en réseau, peuvent faire d'une vie privée une vie publique – vous remarquez, d'ailleurs, quand vous allez acheter un appareil ménager dans un magasin, qu'est-ce qu'on vous demande? Votre numéro de téléphone. Pourquoi? Parce que, avec le numéro de téléphone, on peut voir si vous avez acheté auparavant, on peut faire votre portrait de consommateur et, à plus forte raison, quand il y a des achats à différents endroits, on trace le profil à partir des achats à différents endroits – et que la collecte de données sur des citoyens peut devenir une menace pour la vie de ces citoyens-là. Combien de personnes j'ai vues, personnellement, qui m'ont appelé et qui m'ont dit: J'ai eu des problèmes parce que les gens pensent que j'ai la sclérose en plaques parce qu'on a dit que je pourrais avoir des dispositions pour avoir la sclérose en plaques éventuellement, mais je ne l'ai pas. Il y a quelqu'un qui m'a appelé trois fois et qui a perdu son emploi parce que, à chaque fois qu'on voyait dans son dossier qu'il avait une disposition, la personne perdait son emploi.

Même chose aux États-Unis, dans le New York Times , on expliquait le cas d'une personne qui a eu un examen où on a fait son code génétique puis on disait qu'elle avait une prédisposition. Elle ne l'a pas déclaré à la compagnie et, quand, plus tard, elle a eu une maladie, on a dit: Vous n'avez pas fait de déclaration concernant votre code génétique. Parce que vous aviez ces renseignements-là quand vous avez fait faire l'examen et que vous ne nous les avez pas communiqués, donc on ne paie pas. Alors, je vais vous dire, s'il fallait faire des déclarations aux compagnies d'assurances à chaque fois qu'on passe un examen médical, je pense qu'il y a bien des gens qui seraient mal pris.

Aujourd'hui, il y a bien des gens... Puis on a remarqué, ceux qui sont venus nous voir devant la commission, 50 groupes, il y en a plusieurs qui voudraient qu'il y ait une carte, mais en particulier la leur. Remarquez que le groupe qui avait telle carte disait: La vraie carte, ça devrait être la nôtre. Puis un autre a dit: La vraie carte, ça devrait être la nôtre. Et on sait comment la bureaucratisation du système peut faire en sorte qu'on peut ficher tous les citoyens. On pourrait même les ficher par pièces comme une automobile, on pourrait dire: Bien, celui-là, il a un foie qui serait bon, s'il pouvait mourir, quelqu'un d'autre pourrait le prendre. Et quelqu'un d'autre a un coeur, quelqu'un d'autre a telle pièce. On pourrait ficher tous les corps de la société, au fond, quasiment dans un entrepôt de pièces comme pour les automobiles.

Heureusement, on n'en est pas là, mais il faut être vigilant si on ne veut pas en venir là, parce que je lisais justement un article du New York Times du mois de décembre où on demandait à des futurologues quelles vont être les principales questions, débats de l'an 2000, et les gens disaient: Les principales questions de l'an 2000, ça ne sera pas l'environnement – les gens sont plus conscients de l'environnement – le principal débat de l'an 2000, ça va être la protection de la vie privée parce qu'on va avoir les machines, on va avoir les outils, on va avoir les instruments, on va avoir les moyens de communication pour ficher tout le monde. Est-ce qu'on veut avoir une société comme ça, M. le Président, ou on veut avoir une société différente? Et, aujourd'hui, on a la capacité de ficher les gens parce qu'on a les machines, avec les ordinateurs, les appareils pour les ficher, communiquer les renseignements puis faire le portrait de quelqu'un qui n'est pas nécessairement le vrai portrait, mais on peut avoir le portrait de quelqu'un.

Quand je vois, par exemple, quelqu'un qui, à la Régie des alcools, achète avec sa carte de crédit, je me dis que, à un moment donné, on dira: Quels sont nos meilleurs clients? Et quelqu'un voudra avoir la fiche des meilleurs clients pour voir quels sont ceux qui prennent un coup, quels sont ceux qui ont des dispositions pour être alcooliques. Même si ce sont des gens qui se font une réserve dans une cave à vin et qu'ils vont boire sur 30 ans, à un moment, ils pourront être fichés parce qu'on a décidé de donner les possibilités de ficher des renseignements.

Moi, je pense que, aujourd'hui, au contraire, il faut que les gens soient davantage conscients. D'ailleurs, dans l'autre rapport qu'on a déposé, le rapport quinquennal sur la protection de la vie privée, on reviendra sur ces questions-là parce qu'on pense qu'il est important – et plusieurs membres de la commission l'ont mentionné à ce moment-là – de faire la promotion de la protection de la vie privée. Et on s'est rendu compte que personne ne l'avait formellement, ce pouvoir-là, nais que tout le monde avait à peu près le moyen de nous ficher sous différents aspects. Après avoir entendu plus de 50 personnes et organismes, dont plusieurs organismes gouvernementaux, qui prônent la création de nouvelles cartes d'identité et après avoir étudié la situation ailleurs, en Amérique du Nord et en Europe, les membres de la commission de la culture en viennent aux conclusions suivantes: La preuve des besoins à combler n'a pas été faite de façon convaincante et les garanties sont insuffisantes relativement à la protection de la vie privée des citoyens, au respect du droit à l'anonymat et au droit de chaque citoyen de contrôler l'information que détiennent, à son sujet, les administrations publiques et les entreprises privées.

Trop de personnes ont des inquiétudes à cause de la multiplication des échanges de renseignements et craignent que les cartes d'identité projetées en facilitent l'accroissement. L'omniprésence de l'État dans la vie privée des personnes et le spectre d'une société de surveillance en inquiètent plus d'un. De nombreux cas ont d'ailleurs été cités de citoyens qui considèrent avoir été victimes de certaines pratiques abusives des organismes publics et des entreprises privées qui exigent et recueillent à des fins d'identification des renseignements comme le numéro d'assurance sociale, le numéro de permis de conduire et le numéro d'assurance-maladie.

Par ailleurs, de nombreux citoyens souhaitent disposer d'un instrument qui leur permette, lorsque requis, de s'identifier sans avoir à produire des documents qui ne sont pas destinés à cet usage. De plus, les lois existantes conduisent parfois à des situations incongrues. Ainsi, les commerçants qui vendent des produits alcooliques et des cigarettes doivent vérifier l'âge de leurs jeunes clients mais ne peuvent exiger à cette fin les seules cartes d'identité véritablement fiables.

Les membres de la commission donc recommandent à l'unanimité que le Conseil des ministres étudie la pertinence de prévoir la délivrance d'une carte d'identité facultative – c'est-à-dire pas obligatoire – et neutre, c'est-à-dire qui n'est reliée à quelque autre identifiant que ce soit ou banque de données, justement pour ne pas compiler des renseignements sur la personne, permettant aux citoyens et citoyennes qui le désirent de s'identifier sans recourir à des cartes non prévues à cette fin, pour ceux qui le veulent.

Plusieurs pays d'Europe ont justement des cartes d'identité facultatives. Mais, facultatives, ça veut dire que la personne qui sent le besoin d'en avoir une peut la demander, mais cette carte ne serait reliée à aucun fichier, à aucun réseau pour ne permettre à aucun réseau de données ou banque de données... pour ne pas justement ficher la personne. Que ça soit une carte, si le Conseil des ministres en sent le besoin, pour la personne.

Dans cette analyse, la commission est partie des besoins des citoyens, non pas des besoins de l'administration, non pas des pseudo besoins de la bureaucratie, mais des besoins des citoyens. Alors, les besoins des citoyens ne sont pas si évidents. On a remarqué beaucoup plus qu'il y avait des gens qui voulaient faire des cartes, faire leur carte, l'imposer à tout le monde, que des citoyens qui ont dit: J'ai vraiment besoin d'une carte, je ne suis pas capable de m'identifier. On n'a pas vu beaucoup de gens qui sont venus nous dire ça, M. le Président.

En outre, la commission souhaite que la délivrance et l'usage d'une telle carte ne deviennent pas éventuellement obligatoires et qu'aucune démarche visant à instaurer cette carte, une carte multiservices, ne soit entreprise avant qu'on en ait démontré la nécessité.

Donc, M. le Président, les citoyens ont leur vie privée puis ont le droit à leur vie privée. Ils ont le droit de vivre comme citoyen sans être importunés par toutes sortes d'organismes qui veulent les ficher de quelque façon que ce soit, les mettre dans des listes qui vont être monnayées pour après ça servir à des fins commerciales ou autres. Les citoyens ont droit à leur vie privée, et c'est le grand enjeu des années à venir. C'est pourquoi la commission dans son rapport unanime a tenu compte de toutes les opinions, mais s'est rendue compte qu'il n'y avait pas vraiment de besoin pour une carte d'identité pour l'ensemble du Québec, que, si le Conseil des ministres considère que certaines personnes peuvent avoir besoin d'une carte d'identité, bien, on établisse une carte facultative qui n'est pas reliée à des réseaux, qui n'est pas reliée à un fichier, qui n'est pas reliée à un autre identifiant pour permettre à des personnes qui considèrent elles-mêmes qu'elles en ont le besoin de pouvoir utiliser cet instrument.

(10 h 50)

Par ailleurs, il y a beaucoup de gens qui sont venus se plaindre du fait qu'on leur demande des cartes qu'on n'a pas le droit d'exiger. Les gens sont venus nous dire, par exemple, qu'Hydro-Québec exige le numéro d'assurance sociale. Ils n'ont pas le droit d'exiger le numéro d'assurance sociale et ne devraient pas le faire. Ils devraient donner l'exemple. Hydro, ce n'est pas le fils de Napoléon. Alors, Hydro doit être soumise aux lois comme les autres, comme les autres, puis elle doit être au courant. S'il y a un organisme qui doit être au courant, c'est bien celui-là. Elle doit être au courant qu'elle n'a pas le droit d'exiger des numéros d'assurance sociale; le numéro d'assurance sociale n'est pas fait pour Hydro. Je comprends qu'elle ait des besoins de savoir où les gens sont déménagés, mais il y a d'autres moyens de le faire que de demander les numéros d'assurance sociale à tout le monde. Il y a de plus en plus de gens qui le demandent, à mon avis. On va le voir éventuellement dans d'autres questions. On devrait au fond mettre des pénalités beaucoup plus fortes pour les gens qui exigent des numéros qu'ils n'ont pas le droit d'exiger. La vie privée des citoyens leur appartient. On n'a pas le droit de fouiller dans leur vie privée sans leur consentement, sans qu'ils aient quelque chose à dire.

Et la commission s'est rendu compte, dans tous ces débats-là, qu'on avait fait un abus. Il y a une inflation verbale – l'inflation monétaire vient d'être réglée, l'inflation verbale ne l'est pas encore – alors, on a une inflation verbale terrible au Québec, où on pense qu'on a besoin de 50 patentes, dont on n'a pas besoin. Mais il y a des bureaucrates qui se chargent de veiller sur votre bien. Il y a des bureaucrates qui se chargent de veiller jour et nuit sur votre bien, M. le Président. Ils voudraient l'exiger puis le prendre quand ils veulent.

Heureusement, quand il y a des députés libres, comme ça a été le cas en commission parlementaire, sur la commission de la culture, les députés ont dit: Non, protégeons le citoyen, laissons faire les organismes aux tentacules qui se renouvellent sans cesse, tu en coupes une puis il en pousse 10, c'est comme les pieuvres. La pieuvre d'ailleurs est le meilleur symbole de la bureaucratie. C'est un symbole bureaucratique, ils veulent piger dans les... Je vois le député d'Arthabaska qui est convaincu des mêmes choses, lui, dans un autre sujet, où il ne veut pas que le fait qu'on fasse un dépôt en banque, que ça fasse qu'on ait notre fichier en banque également ou en caisse.

Alors, c'est très important. Et les parlements doivent être conscients que, dans les années qui viennent, ça va être le grand enjeu qu'ils vont devoir protéger, la vie privée des citoyens, pour qu'on ne vive pas... Parce que la liberté, il y a eu des centaines d'années de batailles, de millions de vies humaines perdues pour la liberté. Soyons assez conscients – dans notre génération, on n'a pas besoin de se battre pour la liberté – de la conserver, la liberté que nous ont léguée ceux qui nous ont précédés, de ne pas la laisser aller dans des gouffres bureaucratiques. Et après ça on se demandera: Comment ça se fait qu'on a laissé faire ça? Parce qu'on n'était pas clairvoyants.

Il y a un rapport, à mon avis, qui exprime une clairvoyance de l'Assemblée nationale, par sa commission de la culture, et je suis très fier d'avoir présidé ces travaux-là, M. le Président, parce que ça a été une belle commission où les gens se sont exprimés librement, où ils ont écouté les gens librement. Et ils ont conclu en disant deux recommandations qui, à mon avis, reflètent ce que les gens pensent à ce moment-ci dans le temps. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Lévis et président de la commission de la culture.

Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. À titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de protection de la vie privée, il me fait extrêmement plaisir, à mon tour, de parler pour notre formation politique à propos de ce récent rapport de la commission de la culture sur les cartes d'identité. Mon collègue le député de Lévis vient d'expliquer un peu la toile de fond, le background, si vous voulez, de ce travail, de cette commission, et je me permets justement de rajouter un peu là-dessus. Comme vous le savez, M. le Président, mon collègue le député de Lévis est un des membres les plus expérimentés de cette Assemblée, et ce fut pour moi un très grand plaisir de participer avec lui aux travaux de cette commission parlementaire.

Vous savez, M. le Président, le système parlementaire veut qu'effectivement on ait un gouvernement qui dispose normalement de la majorité des sièges – ça peut être à l'occasion une pluralité, mais, normalement, la majorité absolue – et une opposition qui est là pour répondre, au nom de la population, avec une critique constructive des actions gouvernementales. Dans un cas comme celui-ci, c'est tout autre. Ce sont les députés, de part et d'autre de cette Assemblée, qui s'assoient et regardent ensemble, au nom de la population, une problématique qui est d'intérêt public.

Les termes exacts tirés du règlement et des règles de procédure de l'Assemblée nationale, à son article 120, valent la peine d'être répétés ici: Un mandat d'initiative se produit lorsque, de leur propre initiative, une commission étudie les projets de règlement ou les règlements et les orientations, les activités et la gestion des organismes publics et, finalement, toute autre matière d'intérêt public.

Mr. Speaker, a little bit like the select Committee system in the British Parliament, parliamentary committees here, in Québec city, in the Québec National Assembly, have given themselves the authority to hear any issue of public interest and to come up with their own analysis and their own recommendations.

My esteemed colleague, the member of the National Assembly for Lévis, was the Chair of that committee, and I'm very proud – and it's one of the best memories and the fondest memories I'll take away from this Assembly – to have taken part in the work of the parliamentary committee on culture dealing with ID cards.

Mr. Speaker, the member for Lévis has just made it quite clear that, in his opinion, the pre-eminent issue of public policy for the coming years is going to be that of personal privacy in the face of increase capacity of computers and other information systems, to gather, to collect, to collate, and to store personal information. Whether it'd be about your health, whether it'd be about your credit situation, whether it'd be about your background and other aspects, all that information is out there and can be exchanged in the blink of an eye.

What the parliamentary Committee on Culture attempted to do in this work was to hear dozens of groups and individuals from across the province and, indeed, elsewhere in Canada, and to find out what if anything should be done in the way of the creation of a new identification card in the Province of Québec.

Donc, un travail en commission parlementaire, non partisan, c'est-à-dire que les membres du gouvernement et les membres de l'opposition siègent ensemble pour arriver à formuler des recommandations. Ce n'est pas décidé d'avance que les recommandations vont être unanimes; évidemment, chacun demeure libre de ses choix. Mais le fait est que, menés de main de maître par le député de Lévis, les travaux de cette commission parlementaire ont pu aboutir à des recommandations unanimes qui ont rallié des gens des deux côtés de la Chambre, et je pense que c'est tout à l'honneur du député de Lévis que les travaux de cette commission aient pu aboutir de la sorte. C'est une bonne chose pour nous tous, M. le Président, car ça permet à tout lecteur objectif externe d'aborder les recommandations de cette commission parlementaire sans craindre que ce soit empreint d'une partisannerie quelconque. Les gens vont dire: Ce sont des élus qui, au nom du public, ont mis de côté leurs batailles et leurs points de vue partisans, et ils se sont dit, bon: Qu'est-ce qu'il y a de mieux à faire dans l'intérêt du public?

Un dernier point en ce qui concerne le déroulement des travaux et la façon d'arriver avec ce rapport, M. le Président, et ça serait pour remercier M. Charles Thumerelle, du Service de la recherche de la Bibliothèque de l'Assemblée nationale. C'était, à mon sens, tout à fait approprié que, plutôt que de se fier au service de recherche qui existe bel et bien du côté du gouvernement ou au service de recherche qui existe bel et bien du côté de l'opposition, on ait eu recours à cet extraordinaire, excellent Service de recherche qui existe à la Bibliothèque de l'Assemblée nationale. Je prends la peine de souligner ça parce que ce service de recherche est, à mon point de vue, sous-utilisé par les parlementaires du Québec. On a, bien entendu, besoin d'avoir nos propres services de recherche pour faire des travaux proprement partisans. Il va sans dire que je ne me référerai pas au même service de recherche que le gouvernement lorsque je désire préparer une question à la période de questions – je pense que tout le monde peut se comprendre là-dessus, M. le Président – mais, pour le travail d'une commission parlementaire sur un mandat d'initiative, comme ce fut le cas lors de notre travail sur les cartes d'identité, il était à notre point de vue tout à fait indiqué de faire appel et d'avoir recours à ce service de recherche.

Et je dois juste dire à quel point M. Thumerelle, en particulier, et le Service de recherche, en général, nous ont vraiment sortis d'un pétrin et d'une difficulté énormes, car, à chaque fois qu'on essayait, avec diverses ressources qui avaient été proposées, de faire le tri approprié dans tous les documents, dans toutes les propositions qui ont été faites, on avait énormément de difficultés, parce qu'on avait la nette impression qu'on avait des gens qui essayaient de tirer les couvertes d'un côté ou de l'autre pour faire en sorte de chercher les bribes de citations qui leur donnaient raison dans leur propre analyse.

(11 heures)

Or, ce que les membres cherchaient de part et d'autre, c'était d'avoir l'analyse la plus neutre possible de ce qui avait été mis devant nous et de travailler nous-mêmes sur nos propres conclusions, chose que M. Thumerelle a réussi à faire vraiment d'une manière tout à fait brillante, à notre point de vue, et c'est une opinion partagée des deux côtés de la Chambre. Et, puisque, comme tout le reste dans notre société, les services de recherche et les autres services de la Bibliothèque de l'Assemblée nationale subissent des coupures de ce temps-ci, je trouvais que c'était vraiment important, et les membres ont demandé au président de la commission, le député de Lévis, de le souligner en particulier dans son rapport, ce qui fut fait. Et je tenais à nouveau, en Chambre aujourd'hui, à souligner l'apport considérable de ce service très important. Si on est capable de faire du travail ici, en Chambre, dans l'intérêt du public, c'est parce qu'on dispose de ressources adéquates et la Bibliothèque de l'Assemblée nationale est une ressource vraiment précieuse pour tous les parlementaires à cet égard, M. le Président.

Je tiens aussi à mentionner qu'une autre activité, dans le cadre de notre réflexion et de notre travail sur les cartes d'identité, fut l'organisation d'une table ronde où on a fait venir plusieurs acteurs principaux du gouvernement, surtout des gens qui jouent un rôle de chien de garde, de «watch dog», à l'égard des activités gouvernementales. Il s'agissait notamment, dans un premier temps, de M. Paul-André Comeau, le président de la Commission d'accès à l'information; Me Daniel Jacoby, le Protecteur du citoyen; M. Guy Breton, le Vérificateur général de la province de Québec; et de M. Claude Filion, le président de la Commission des droits de la personnes et des droits de la jeunesse. Alors, vous pouvez voir que ces quatre personnes-là représentent vraiment, dans leurs différentes sphères d'activité, essaient de représenter et de défendre les intérêts de la population. Et les résultats de cette table ronde sont publiés dans les annales, dans les transcriptions de l'Assemblée nationale et, pour quiconque voudrait savoir quelle était leur pensée, je les invite à prendre connaissance des échanges qui ont eu lieu avec les membres de la commission de la culture. C'est fort instructif et ça donne une excellente indication du cheminement des membres de la commission de la culture vers les recommandations qui ont été résumées tantôt par le député de Lévis.

Mr. Speaker, in preparing our report, the members of the committee had recourse to any number of experts and outside consultants, one of the most important of which, in our estimation, was the Research Service of the Parliamentary Library here, in Québec City, and I thought it appropriate to make a simple reference to that fact and to thank Mr. Charles Thumerelle, who is the researcher from the Library who helped us in this regard.

It's also worth noting that there was a roundtable discussion organized. Once all the witnesses have been heard, the dozens and dozens of groups and other witnesses who appeared before the parliamentary committee, once that work was over, we organized a roundtable discussion, the results of which are published in Hansard, and it's worth, I think, noting the participants. We had the pleasure of hearing the president, the chairman of the Access to Information Commission as well as Québec's Ombudsman, Daniel Jacoby, our Auditor General, Mr. Breton, as well as the chairman of the Human Rights Commission, Mr. Filion. The work of the commission was greatly assisted by their participation. Their reflections on these issues were of great assistance to us.

M. le Président, je crois que le député de Lévis, en terminant sa présentation, a soulevé vraiment la question la plus importante. Le député de Lévis est un grand démocrate. C'est aussi une personne qui a une profonde compréhension et appréciation des droits de la personne et de la liberté, et de ce que cela signifie. J'ai trouvé particulièrement important, fort de son expérience comme parlementaire et de ses autres expériences comme juriste, comme enseignant, comme universitaire, qu'il ait pris la peine de mentionner que c'est important pour nous tous de ne jamais prendre pour acquis ce que nous avons, que ce soit en matière de liberté ou autrement.

La société que l'on connaît aujourd'hui, avec ses libertés fondamentales, sa liberté d'expression, liberté de presse, liberté de conscience, liberté de religion, liberté de faire des assemblées, liberté de devenir membre d'un quelconque groupe, autant de libertés qui se répètent et qui s'écrivent dans des chartes parce que c'est comme ça, on a tendance à oublier tout ce que ça a pris au cours des derniers siècles pour en arriver là. Et, lorsque le député de Lévis parle de clairvoyance, il a raison. Ça prend absolument un travail d'histoire pour comprendre à quel point il est important de regarder dans l'avenir pour savoir ce que l'on doit préserver comme droits et libertés fondamentaux dans notre société.

Le travail de la commission de la culture, le travail non partisan, les recommandations unanimes s'inscrivent dans cette pensée-là. M. le Président, au moment où on se parle, vous et moi, on a le droit de se promener partout au Canada, partout au Québec, sans que quiconque puisse faire comme dans beaucoup d'autres pays, c'est-à-dire nous demander nos papiers d'identité. C'était une des choses que l'on craignait lorsqu'on voyait le Secrétariat de l'autoroute de l'information commencer à jouer avec l'idée d'une carte d'identité multiservices. C'est aussi la Commission d'accès à l'information qui a un peu lancé, en premier lieu, l'idée que les parlementaires devraient s'approprier ce sujet et commencer à l'étudier sereinement dans un forum non partisan. C'est ça qu'on a tenté de faire, M. le Président, parce qu'on était inquiet.

Alors, la première chose qu'on a constatée, c'est que le Secrétariat de l'autoroute de l'information et les autres experts qui regardent la question ont bien raison: il est bel et bien possible, de nos jours, avec les moyens de technologie d'information qui existent, d'avoir une carte d'identité multiservices. Je ne peux pas m'empêcher de renvoyer à ce qu'a dit tantôt le député de Lévis lorsqu'il a parlé de ces tendances tentaculaires de la part de la bureaucratie et de lui donner encore une fois raison, parce qu'on voit déjà comment on a essayé de nous vendre ça: c'est une «carte multiservices», hein?

C'est comme: On n'a plus des malades, on n'a plus des patients, on n'a plus des gens en attente dans les hôpitaux, on a des bénéficiaires. Lysiane Gagnon l'a bien dit dans La Presse , dans un article où elle a démoli ce langage bureaucratique. Elle dit: Des bénéficiaires, c'est comme s'ils étaient chanceux d'être là. Et c'est la même chose, on va vous faire une carte multiservices comme une carte multipoint, et le public va manger de ça, il ne va même pas se poser de questions. Une chance que le député de Lévis et les autres membres de la commission étaient là pour, justement, regarder la question un peu plus sereinement.

C'est quoi, ça, cette idée d'une carte multiservices? Ah, bien, les gens viennent vous voir et disent: Écoutez, il n'y a rien là, on va vous faire une belle carte avec votre photo, avec toute votre information vitale, avec une petite bande en arrière comme avec votre carte de crédit où va être inscrit sur des champs différents auxquels auront droit d'accès le pharmacien ou le médecin pour certains champs, les bureaucrates pour d'autres champs... On va pouvoir résumer votre identité personnelle en une identité numérique et électronique, et tout va être là, et ça va être pour votre bien. Comme le veut la vieille boutade: «On veut votre bien puis on va l'avoir!» On va l'avoir sous forme d'une bande magnétique en arrière d'une carte de crédit.

Alors, on a regardé ça avec un oeil critique, certes, mais un oeil critique au nom de l'intérêt du public, et on a conclu qu'il n'y avait rien à l'heure actuelle qui commandait la création d'une telle carte multiservices ou autre. Les risques pour la liberté étaient tout simplement trop grands. On craignait réellement, M. le Président, que le public soit exposé à des risques d'échange d'information qui compromettraient à tout jamais leur droit d'avoir une vie privée.

Par contre, on a aussi été obligé de constater que parfois on exige une chose qui est contradictoire avec une autre exigence législative, et l'exemple a été donné par le député de Lévis tantôt. Ça vaut la peine d'y revenir parce que les gens vont comprendre notre recommandation mieux avec ça. On demande aux propriétaires de dépanneurs, entre autres – toute autre personne qui vend de l'alcool ou du tabac – de s'assurer que la personne qui est en train d'acheter cet alcool ou ce tabac a bel et bien l'âge requis, l'âge de la majorité, soit, au Québec, 18 ans. On demande ça. Par la même occasion, dans les lois sectorielles qui couvrent tantôt la Loi sur l'assurance-maladie, par exemple, on dit: Pas le droit de demander la carte d'assurance-maladie pour une fin autre que celle pour laquelle ça a été conçu, c'est-à-dire de recevoir des soins de santé. Alors, dilemme. Ce n'est pas tout le monde qui a un permis de conduire. Au contraire, il y a à peu près le quart des adultes, au Québec, qui n'ont pas de permis de conduire. On n'a pas le droit de demander ça non plus. Alors, qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là? D'un côté, on leur dit: Faites attention, ne vendez pas d'alcool aux jeunes, sinon vous risquez de perdre votre permis d'alcool. Puis, d'un autre côté, on les prive de moyens pour faire de l'identification.

Ce qui sert souvent dans ces cas-là, c'est de regarder l'expérience qui existe ailleurs. Pour avoir moi-même travaillé pendant plusieurs années au Manitoba, au ministère du Procureur général, je me souvenais d'un exemple qui venait de là-bas, puis les gens au Manitoba ont eu la gentillesse de nous envoyer la documentation à cet égard. Il y a un autre modèle qui existe en Floride et dans certains autres États américains, et c'est une carte d'identité – si vous me passez l'expression anglaise, mais c'est comme ça qu'ils l'appelaient communément au Manitoba – «a no-hassle ID card». Pas de chicane avec cette carte d'identité là. C'est une carte délivrée par la Société des alcools du Manitoba. En Floride et dans certains autres États américains, c'est le Motor Vehicle Bureau, l'équivalent de la Société de l'assurance automobile du Québec, l'organisme qui délivre les permis de conduire, qui peut par ailleurs émettre une carte d'identité, mais qui n'est pas un permis de conduire, soit une carte d'identité pour une personne qui n'en possède pas.

(11 h 10)

Dans notre recommandation, on propose que le Québec étudie la pertinence d'instaurer un tel système, et nous avons tout lieu de croire que ça va être fait. On propose qu'une telle carte d'identité soit facultative. C'est un mot un peu bureaucratique en soi, mais qui veut tout simplement dire que ça soit au choix des gens, que ce soit le monde qui décide si ça fait leur affaire d'avoir une telle carte ou pas.

Que ça soit neutre et non relié à quelque autre identifiant, c'est un peu plus difficile d'expliquer ce qu'on entend par là. Mais, lorsqu'on dit «neutre et non relié à quelque autre identifiant», ce qu'on veut dire, c'est qu'on ne veut pas que, par le truchement d'un numéro comme le NAS, le numéro d'assurance sociale, ou le NAM, le numéro d'assurance-maladie, on puisse commencer à utiliser cette nouvelle carte d'identité pour se brancher et repérer dans d'autres banques de données, mais que ce soit une carte neutre, simple pour les gens qui désirent s'en procurer et qui sont tannés de donner d'autres cartes d'identité pour des fins autres que celles pour lesquelles elles ont été conçues. Alors, ça, c'est une des recommandations principales du rapport, en même temps qu'on conclut au fait que la démonstration n'a jamais été faite qu'il était nécessaire, au Québec, en 1998, d'avoir une nouvelle carte d'identité.

Je tiens, en terminant, M. le Président, à dire à quel point il est important pour nous de constater que cette conclusion, cette recommandation a fait l'objet d'une étude pendant plus d'un an et que c'est unanime, ce sont les députés, tantôt du gouvernement, tantôt de l'opposition, qui se sont entendus sur ces recommandations. C'est, pour nous, extrêmement important. Et, comme député dans son premier mandat à l'Assemblée nationale, je dois vous dire, très personnellement, que ce fut une des expériences les plus enrichissantes depuis que j'ai été élu. Il n'y a personne qui dirait que je manque de partisanerie, le temps venu, M. le Président. Par contre, dans le travail de cette commission parlementaire, c'était extrêmement enrichissant, pour le dire en anglais, «it was extremely rewarding» de voir à quel point les députés peuvent laisser de côté complètement toute idée partisane, toute ligne de parti, quand, au nom de l'intérêt du public, ils s'attardent à une tâche comme celle qui consiste à définir le besoin ou le manque d'icelui de la population en matière de carte d'identité.

Alors, je tiens, M. le Président, à nouveau à exprimer mes remerciements et mon admiration au député de Lévis pour son excellent travail en présidant cette commission parlementaire. Je pense que, comme parlementaires, on peut tous se réjouir du fruit de ce travail. Et j'espère qu'effectivement ça alimentera la réflexion du gouvernement actuel et de tout gouvernement à venir qui songerait à procéder à l'instauration d'une carte d'identité ici, au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Taschereau. M. le député.


M. André Gaulin

M. Gaulin: Merci, M. le Président. Le député de Lévis demandait tout à l'heure si, dans cette Assemblée et dans cette démocratie québécoise, nous écoutions les gens, et, évidemment, dans le sens où parlait le député de Lévis, la réponse était forcément oui. Oui, on écoute les gens, parce que, au préalable, quand notre commission de la culture a entrepris son mandat d'initiative, il y avait, si vous voulez, une sorte de tranchée entre celles et ceux qui favorisaient une carte d'identité obligatoire à microprocesseur et d'autres qui étaient même hostiles à ce type de carte là parce qu'ils considéraient que c'était une menace à la vie privée.

Finalement, nous avons entendu beaucoup de groupes, le président et député de Lévis, la vice-présidente et députée de Marguerite-Bourgeoys, la députée de Rimouski, moi-même – je vais dans l'ordre des gens indiqués ici – le député de Jacques-Cartier, le député d'Outremont, la députée de Pointe-aux-Trembles, le député de Nicolet-Yamaska, le député de Vachon et la députée de Chapleau qui ont participé à cette commission qui a duré plusieurs semaines et qui, comme le disait le député de Lévis, a entendu beaucoup de gens.

C'est peut-être intéressant, pour le rôle que jouent les parlementaires dans leur Parlement, de rappeler ici que justement le rôle des commissions, entre autres, c'est d'entendre des gens sur des mandats d'initiative, c'est-à-dire à partir d'idées que l'on va étudier pour savoir ce qu'on pourrait suggérer au gouvernement. Et le mandat d'initiative concernait donc, ici, la carte d'identité et la protection de la vie privée, et à cet égard-là la commission a entendu de nombreux groupes.

Je disais que c'était utile parce que je sais, par exemple, qu'à Radio-Canada, récemment, il y a eu une émission sur le rôle des députés, Député, jamais! , un point qui a été très intéressant et qui fait que certaines personnes dans la population se disent que finalement le rôle du député et de la députée dans un gouvernement est peut-être plus important que ce qu'on est porté à penser par stéréotype souvent. Et on le voit fort bien, dans une question comme celle-ci, qui relevait de la commission de la culture, qu'après avoir entendu des groupes nous avons fait différemment notre lit, comme commission; nous avons recommandé des choses qu'on a évoquées, de la part du député de Lévis et du député de Chomedey, déjà, qui font qu'on est arrivé à une sorte de moyen terme. J'y reviendrai.

Je voudrais dire, par exemple, qu'il y a 45 groupes qui ont été entendus, qui comprennent d'ailleurs des citoyens à titre privé. C'est intéressant, c'est une commission qui a reçu aussi des citoyens qui avaient une vision assez intéressante de par leur formation, et on a entendu des grands corps institués, des corps publics qui avaient des points de vue divergents là-dessus. Les gens pourront toujours référer aux mémoires que l'on a évoqués.

Alors, il y avait, par exemple, l'Association sur l'accès et la protection de l'information, l'Association de sécurité informatique de la région de Québec, le Secrétariat de l'autoroute de l'information, Bell Canada, le Groupe d'éthique appliquée du Collège de Chicoutimi – on voit d'ailleurs qu'il en vient de partout, de toutes les régions – des groupes nationaux comme la Régie des rentes du Québec, le Vérificateur général du Québec, le Parti québécois de l'Université Laval – c'est intéressant d'ailleurs d'avoir les points de vue même des groupes de partis politiques, que ce soit l'ADQ, le Parti libéral ou le Parti québécois, dans des commissions parlementaires parce qu'à ce moment-là ils viennent jouer un rôle qui appartient à la vie civique – la Société de l'assurance automobile du Québec, le Directeur de l'état civil, la Chambre des notaires. J'en passe, mais c'est juste pour montrer au fond que le rôle qu'on joue comme parlementaires n'est pas n'importe quel rôle et que c'est un rôle d'attention à la population, au point de vue de la population.

Comme disait tout à l'heure, le laissait entendre, le député de Lévis, nous écoutons les gens, nous écoutons les points de vue, et ça peut nous amener à changer éventuellement nos manières de voir, nos façons de voir à titre personnel, puisque nous représentons finalement comme élus des citoyens et citoyennes. Nous avons entendu la CEQ, la CSN, la FTQ, l'Association des détaillants en alimentation du Québec – tout à l'heure, le député de Chomedey évoquait les difficultés qui sont celles des marchands et des marchandes qui ont à faire s'identifier des gens qui viennent, par exemple, chercher des cigarettes ou des revues à caractère sexuel qui devraient ne pas être vendues à des mineurs – la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, le Barreau du Québec, le Directeur des élections, Hydro-Québec, le Protecteur du citoyen, la Conférence des régies régionales de la santé et des services sociaux, la Régie de l'assurance-maladie, l'Association québécoise des archivistes médicaux. Et je vous disais qu'on a aussi entendu des citoyens, comme par exemple Jacques Dufresne, pour n'en nommer qu'un, qui avaient un point de vue très intéressant.

(11 h 20)

M. le Président, je reviens au propos principal qui est la carte d'identité. Évidemment, dans les sociétés qui sont les nôtres, nous devons plus aller vers la protection de la vie privée, étant donné les moyens médiatiques et informatiques qui sont mis à la disposition des collectifs, pour protéger davantage. Nous devons avoir cette perspective de protéger davantage la vie privée. Je pense que c'est très important.

Et on voyait, d'ailleurs, que des groupes qui sont venus nous voir craignaient une espèce d'année «1984», là, qui ferait qu'on contrôlerait tous les citoyens. Nous le savons, nous sommes contrôlés, de toute façon, ne serait-ce que par un acte de naissance et un acte de décès. Nous sommes contrôlés aux deux bouts de nos vies humaines. Mais ça, c'est volens, nolens, M. le Président. Mais, entre ces deux bouts de la vie humaine, nous pouvons avoir, disons, une sécurité de la vie privée. Et c'est dans ce sens-là que le député de Lévis évoquait tout à l'heure les libertés que nous avons acquises, comme démocraties – et je dis démocraties au pluriel – à travers les âges pour protéger ces libertés-là.

Nous sommes arrivés à une formule de compromis, à savoir que nous avons recommandé... Nous avons exclu la carte obligatoire à microprocesseur qui pourrait être reliée à des banques de données, même si on nous dit que techniquement ces banques de données sont séparées les unes des autres et qu'on ne peut pas communiquer de l'une à l'autre sans qu'on mette des codes d'accès à ces banques-là. Mais, là-dessus, on sent que la population a peur, et parfois avec raison, d'ailleurs. Il y en a qui le savent; par exemple, quand ils ont un retour de rapport d'impôts, qu'ils s'attendaient à un retour de tant et qu'on a déjà saisi une partie de ça parce qu'il y a eu des communications entre un ministère et l'autre, qui sont autorisées par des lois, en principe.

Alors, vous avez donc, M. le Président, par ailleurs, des gens qui sont venus nous dire que ce serait utile d'avoir une carte d'identité non obligatoire d'utilisation facultative et neutre, et on définit ici ce que ça voulait dire «être neutre», c'est-à-dire non reliée à quelque autre identifiant ou banque de données et permettant aux citoyens et citoyennes qui le désirent de pouvoir s'identifier.

Même cette carte d'identité là, elle est donnée pour protéger la vie privée, dans notre optique, dans la mesure où, si les gens veulent l'utiliser, on n'aura pas à exiger d'eux – parce que ce sera une carte d'identité – la carte d'assurance-maladie qui, de soi, doit servir pour la santé; on n'aura pas à exiger d'eux le permis de conduire s'ils en ont un – parce que, là aussi, ce n'est pas tous les citoyens et citoyennes qui en ont – pour s'identifier.

Et vous le savez fort bien, M. le Président, ça nous arrive même quand nous entrons dans cette illustre enceinte, à l'Assemblée nationale, dans le parlement, dans l'hôtel du Parlement du peuple, on nous demande des identifiants. Et les identifiants qu'on nous demande très souvent, parce qu'on choisit toujours soit la carte-soleil, soit la carte du Canada qui s'appelle la carte d'assurance sociale – merci, M. le député de Chomedey – on nous demande généralement ces cartes-là, moins souvent le permis de conduire parce que tout le monde ne l'a pas. Ou, quand on va dans les caisses pop, pour avoir des pièces d'identification si on va par intercaisses, on n'aura plus à nous demander n'importe quelle carte d'identité. Il y en aura une qui est non officielle, mais qui est quand même une carte d'identité avec photo, avec un minimum d'identifiants, et qu'on pourra utiliser. Alors, je pense que c'est quelque chose d'heureux auquel on est arrivé.

Et on demande également au Conseil des ministres, dans un deuxième lieu – comme l'évoquaient tout à l'heure les deux députés qui ont parlé avant moi – de tenir compte de la préoccupation exprimée par plusieurs citoyens et citoyennes devant la commission de la culture, à l'effet que la délivrance et l'usage d'une telle carte facultative et neutre ne deviennent pas éventuellement obligatoires. Je pense que, dans l'état des choses, nous avons cru sage... Parce que c'est un résultat de sagesse et de prudence auquel nous sommes arrivés pour, dans les conditions, les circonstances actuelles, protéger la vie privée des citoyens et citoyennes.

Alors, il me reste, moi aussi, M. le Président, à remercier les citoyens et citoyennes qui ont bien voulu venir déposer devant notre commission. Je dis remercier parce que ce n'est pas évident. Vous savez, on travaille toujours et on fait toujours travailler les citoyens et citoyennes dans des délais qui sont très courts. Ça demande parfois même du courage et de la volonté pour venir déposer devant les commissions parlementaires. Je remercie les citoyens et les citoyennes qui le font, parce qu'il faut faire un effort pour produire un document qui arrive à temps. Il y a des dates de tombée, il y a des dates butoirs et on doit les produire suffisamment tôt. Et ça demande évidemment de se préparer et de venir. C'est toujours un petit peu aussi, selon qu'on est habitué ou pas de le faire, un moment qui est émouvant de venir déposer devant un certain nombre d'élus, hommes et femmes de ce Parlement qui comporte 125 députés.

Alors, merci aussi à celles et ceux qui ont contribué à la belle qualité rédactionnelle de ce rapport – on a évoqué tout à l'heure le nom de M. Thumerelle – et au président de notre commission, le député de Lévis. Merci à tous ces gens. Et j'espère que nos recommandations auront un suivi heureux auprès du gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Taschereau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Vachon.


M. David Payne

M. Payne: Merci, M. le Président. On se souvient que la commission de la culture a rendu public en juin 1996 un document de consultation qui était appelé Les enjeux du développement de l'autoroute de l'information québécoise . Et je vous rappelle que c'était à titre de président de la même commission que j'avais le plaisir de proposer à mes collègues un mandat d'initiative sur justement les enjeux de l'autoroute de l'information – et ça, c'était en 1995 – un mandat qui a reçu l'aval unanime des membres de la commission des deux côtés de la Chambre.

Comme plusieurs de mes collègues l'ont souligné, jusqu'à ce moment-ci, depuis donc maintenant quatre ans, cette commission s'est donné la tâche de travailler ensemble, d'une façon non partisane, pour l'intérêt de nos électeurs, le grand public, avec – je propose de le dire – des résultats des plus intéressants, parce que nous analysons quelque chose qui touche tout le monde de très près. Les membres de la commission ont voulu souligner l'importance d'avoir un débat aussi ouvert et complet que possible en vue d'obtenir des réponses à toute une série de préoccupations fondamentales dans notre société.

Comme arrière-plan, nous avons eu la possibilité de regarder les réflexions de la Commission d'accès à l'information dans un document qui est appelé Document de réflexion sur les cartes d'identité au Québec ou, par contre, les considérations, les réflexions mûries du Protecteur du citoyen qui, lui, avait déposé un rapport très intéressant, le rapport annuel, je pense, en 1996, 1995-1996, et finalement les suggestions proposées par le Vérificateur général lui-même dans son rapport annuel de la même année.

(11 h 30)

Donc, on peut très bien voir qu'il s'agit d'une discussion du moment, importante, impérative même pour notre considération, parce que ça touche la vie privée de tous et chacun d'entre nous. Je peux vous raconter une petite histoire qui peut peut-être... Nous en avons, tous et chacun. Le député de Lévis a rappelé tout à l'heure quelques histoires qu'il avait; moi, j'en ai une. Ma conjointe qui est d'origine chinoise dernièrement avait fait une demande pour une carte de crédit. La banque émetteuse n'avait pas de problème à la lui émettre. Ils lui ont envoyé une carte de crédit, mais, comme son nom est d'origine chinoise, la banque, évidemment, avait de la misère à statuer ou le préposé à l'accueil, des renseignements, n'avait pas su s'il s'agissait d'un homme ou d'une femme, parce que son nom était Li Wei. Ce n'est pas ça qui est d'intérêt, mais ce qui est d'intérêt, c'est que, quelques semaines plus tard, une autre banque, concurrente, celle-là, de la première, lui a envoyé l'invitation d'accepter une carte de crédit. La même erreur s'est produite: c'était M. Li Wei. Alors, le filon était très facile à tracer: de toute évidence, la première banque a confié l'information subjective au sujet d'un client, le cas échéant cette personne, à un autre, à un tiers. C'est assez extraordinaire, M. le Président, la façon dont les informations sont trafiquées – est-ce que je peux le dire? – entre les institutions bancaires.

Ça, c'est un exemple concret de nos soucis comme parlementaires pour nos électeurs: la protection de l'information. Il faut protéger les informations parce que ce qui arrive – et nous avons vu ça depuis quelques années à la commission – de plus en plus, les institutions se consultent, se parlent, même à l'encontre de la loi – de nos lois que, nous, nous avons adoptées ici, à l'Assemblée nationale – pour faire en sorte qu'il y ait toute une banque qui soit constituée sur chacun de nos amis, nos citoyens, à mesure que leur vie évolue, pour faire en sorte que ces informations soient trafiquées.

Je devrais peut-être dire, un peu plus doucement, sont «manipulées», sont quoi? «commercialisées», mais c'est les dangers auxquels on fait face. On voit à chaque fois qu'on veut, et je pense que c'est le député de Lévis encore qui en parlait semblablement, mais moi aussi... On nous demande tout le temps... Je m'en vais à, je ne nomme pas le gros dépanneur, mais il demande le numéro de téléphone. Puis un autre qui nous a demandé également le code postal. C'est assez incroyable. Tout cela, ce n'est pas dans notre propre intérêt, mais c'est pour constituer une banque d'informations sur nos habitudes de vie: ce qu'on fait, ce qu'on mange, nos façons de consommer, les quantités de consommation, et pas seulement pour savoir qui sont les clients mais surtout pour essayer d'en créer d'autres.

Qui ne s'est pas abonné à un journal, ou à un magazine, ou à une revue québécoise, ou autre, pour recevoir par la suite toutes sortes de demandes et d'invitations de souscrire, de s'abonner à d'autres revues? Et ça, c'est quelque chose évidemment qu'il faut protéger. Il faut, je pense, dans un premier temps, distinguer entre la situation actuelle qui existe et une carte, ce qu'on appelle une carte multiservices. Au moment où on se parle, bien malgré nous, on est obligé de produire un certain nombre de cartes dont on se sert comme cartes d'identité, que ça soit la carte-soleil qu'on appelle, que ça soit la carte d'assurance nationale, que ça soit une carte de crédit, souvent pour des fins autres que ce pour quoi ça a été conçu dans un premier temps.

Il faut distinguer cela d'une autre carte prévisible, dans un avenir... Ça existe dans certains pays, dans certaines provinces, dans certains États, où on utilise de plus en plus une carte multiservices, une carte pour plusieurs fins. Je voudrais dire que personnellement curieusement je suis d'accord avec l'existence d'une carte multiservices. Mais là où je me rallie facilement à l'opinion de l'ensemble de mes collègues, c'est que je ne suis pas convaincu, pour dire le moins – je suis plutôt convaincu du contraire – que les abus sont tels, tellement prévisibles.

Justement, en fonction de ce que nous avons entendu – et les insinuations qui étaient très évidentes lors des discussions – je pense que c'est beaucoup mieux qu'on puisse avoir une carte facultative. Je ne suis pas impressionné – et j'en fais part devant les témoins et la commission – de la position d'un certain nombre de compagnies de crédit comme, par exemple... bien, sans les nommer peut-être, là où les banques les consultent sur vous et moi et d'autres personnes, tout le monde systématiquement, pour avoir des informations sur eux d'une façon non limitative, et ça, à l'encontre de la loi qui dit: Personne, une banque ou une institution, ne peut consulter une entreprise de crédit sur les renseignements personnels sur quelqu'un sans que la personne – l'intéressé – soit consultée préalablement. Cela veut dire que jamais, jamais, une banque ne devrait communiquer avec une entreprise de crédit sans que le client soit avisé, pas seulement avisé, mais demandé. Manifestement, ce n'est pas le cas. Voilà nos soucis.

Donc, on revient à une prémisse unanime adoptée ou comprise par les membres de la commission, à savoir que nous sommes très craintifs que des gens qui puissent éventuellement avoir un intérêt pour avoir plus d'information sur une personne puissent, d'une façon ou d'une autre, arriver à l'avoir. Et c'est ça qu'on veut protéger. Donc, le fardeau arrive à l'intéressé, c'est-à-dire que les entreprises qui veulent offrir un service à la population puissent nous convaincre qu'elles sont capables de protéger les informations et les renseignements personnels et confidentiels qu'elles détiennent à notre sujet, et ça, ce n'est pas le cas actuellement.

Voilà les raisons pour lesquelles nous avons adopté une résolution que nous faisons au Conseil des ministres, à savoir que nous sommes tout à fait à l'aise avec l'existence d'une carte facultative, neutre qui puisse être mise à la disposition de quelqu'un.

Regardez la façon dont nous, aujourd'hui, on utilise... Je vois mon collègue à ma droite qui utilise un ordinateur tout simplement maintenant, un portatif sur son bureau. Mais est-ce qu'il sait vraiment que, à chaque fois qu'il taponne là-dessus, s'il était sur l'Internet, il communique de l'information? Si je communique avec un site qui s'appelle, par exemple, je ne sais pas, Branchez-vous, ou le site de l'Accès D de Desjardins où on peut engager des communications interactives, à chaque fois que je fais ça, je communique cette information. Cette information-là est récupérable de la part de l'autre personne à qui je fais référence. C'est assez spécial.

Donc, les habitudes du consommateur peuvent être tracées très facilement, très facilement. Il faut donc que nous, comme législateurs, soyons bien sûr très, très prudents face à toutes ces questions-là. C'est la raison pour laquelle nous ne somme pas prêts, au moment où on se parle, à aller de l'avant avec une carte multiservices obligatoire. Il y avait même des partenaires comme, par exemple, le Secrétariat de l'autoroute de l'information qui, eux, avaient bien voulu proposer qu'on devrait avoir une carte obligatoire. Ce n'est pas notre opinion.

Alors, voilà les constats que nous avons faits, le fruit de nos consultations. Maintenant, on voudrait faire en sorte que les débats publics puissent avoir lieu d'une façon plus diffuse à travers le grand public du Québec pour chercher un consensus bien québécois pour s'assurer que les renseignements confidentiels soient protégés et aussi balancer ça avec les droits de la société pour adopter les moyens de protection de la sécurité à la fois des personnes et des institutions qui offrent un service aux consommateurs.

Voilà, M. le Président. Pour moi, ce fut un grand plaisir de faire partie de cette commission-là. C'était un résultat très intéressant avec le rapport qui est déposé aujourd'hui et la prise en considération qu'on fait ce matin. Merci beaucoup. J'espère qu'on pourra continuer le débat avec la même teneur et le même résultat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Vachon. Il n'y a pas d'autres intervenants? Alors, s'il n'y a pas d'autres intervenants, ceci met fin au débat restreint de deux heures sur le rapport de la commission de la culture qui a tenu des consultations particulières sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée. Probablement que M. le leader adjoint du gouvernement aurait quelque proposition à me faire à cette heure-ci. Alors, je vous cède la parole, M. le leader adjoint.

M. Boulerice: M. le Président, compte tenu de l'heure, je vous demanderais d'ajourner nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 40)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien. Veuillez vous asseoir.


Présence de membres de la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française

Alors, chers collègues, j'ai le plaisir, pour débuter la séance, de souligner la présence dans nos tribunes des membres de la Commission de l'éducation, de la communication et des affaires culturelles de l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française.

La Commission est sous la présidence de M. Bernard Comby, député à l'Assemblée nationale suisse et ancien ministre de l'Éducation au gouvernement de la république du Canton du Valais.


Affaires courantes

Alors, nous abordons à ce moment-ci les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles ni de présentation de projets de loi.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


Rapport annuel du Comité consultatif pour l'environnement de la Baie-James

M. Bégin: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 du Comité consultatif pour l'environnement de la Baie-James.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Le Président: Alors, le document est déposé. En ce qui me concerne, j'ai reçu dans les délais prescrits préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 de notre règlement, je dépose copie de ce texte de préavis.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des finances publiques et député d'Arthabaska.


Poursuite du débat sur le discours sur le budget

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, je dépose le rapport de la commission des finances publiques qui a siégé le 8 et le 9 avril 1998 afin de poursuivre le débat sur le discours du budget conformément à l'article 275 du règlement.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Vous me permettrez, à votre instar, de souligner la présence dans les galeries de représentants du personnel soignant du Centre hospitalier de l'Université de Montréal. C'est eux qui ont acheminé la pétition suivante à l'Assemblée nationale, qui a été déposée, compte tenu de son volume, au Secrétariat de l'Assemblée cet avant-midi. Je dépose donc, M. le Président, l'extrait d'une pétition adressée...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Paradis: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Jolivet: Bien oui!

Le Président: Alors, il y a consentement. Ha, ha, ha! Vous pouvez la déposer.


Cesser les compressions budgétaires dans le domaine de la santé

M. Paradis: Merci, M. le Président. Je dépose donc l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 7 574 pétitionnaires de la région de Montréal.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Les soins de santé sont une très grande priorité pour moi. La dégradation et la diminution des soins et des services de santé ne sont plus tolérables. Il faut des services adéquats et du personnel en quantité suffisante. Lorsque je vais au Centre hospitalier de l'Université de Montréal, je veux être traité avec chaleur et empathie;

«Et l'intervention réclamée se résume comme suit:

«De rendre plus de lits disponibles à la population; de diminuer la liste et les délais d'attente pour hospitalisation; de désengorger les urgences; de traiter le personnel avec respect; de réclamer du gouvernement du Québec la fin des compressions budgétaires dans le domaine de la santé.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Je voudrais rappeler aux invités du député de Brome-Missisquoi qu'il est interdit de manifester dans les tribunes. Les seuls qui ont la possibilité de le faire, ce sont les membres de l'Assemblée.

Alors, il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise à ce moment-ci qu'après la période des questions et des réponses orales M. le ministre de l'Environnement et de la Faune répondra à une question posée le 7 avril dernier par M. le député de Laurier-Dorion concernant la qualité de l'eau potable.


Questions et réponses orales

À ce moment-ci, nous allons aborder la période des questions et des réponses orales. Mme la députée de...

Une voix: Jean-Talon.

Le Président: ...Jean-Talon. Je m'excuse, Mme la députée. Ha, ha, ha!


Heures d'ouverture de l'urgence de l'hôpital Chauveau

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Le retour des vacances est un peu dur? Ha, ha, ha! Il y a quelques mois à peine, le premier ministre assurait non seulement les membres de cette Assemblée, mais la population entière du Québec que, dans le domaine de la santé, les coupures, les perturbations, tout ça, c'était terminé. Ça, c'est un engagement, il l'a dit. On se rappellera que la population de la région de Québec s'était battue avec acharnement, il y a quelques années, pour conserver la vocation originale de l'hôpital Chauveau. On se rappellera aussi que la population a perdu cette bataille, mais que le ministre de la Santé nous avait dit à l'époque: Vous allez perdre votre hôpital, mais, en guise de prix de consolation, vous conserverez votre urgence ouverte 24 heures sur 24.

(14 h 10)

En juin dernier, le gouvernement du Québec annonçait en grande pompe des travaux de l'ordre de 5 500 000 $ à l'hôpital Chauveau, travaux qui devaient comprendre, entre autres, le réaménagement du secteur de l'urgence et clinique externe. On retrouve ça, d'ailleurs, sur le grand panneau qui figure devant le bâtiment depuis bientôt neuf mois. Ça fait neuf mois également qu'on a fait cette annonce-là, M. le Président, et il n'y a pas travaux qui ont commencé depuis.

Aujourd'hui, on apprend que l'urgence promise n'en était pas vraiment une. En effet, la régie régionale réfléchit sur la proposition du groupe CGO de fermer l'urgence de l'hôpital Chauveau entre 23 heures et 7 heures le matin. Et on sait ce qui arrive quand la régie réfléchit! Le gouvernement en est rendu à décider, M. le Président, pour le citoyen à quelle heure il a le droit d'être malade, et, dans le cas de l'hôpital Chauveau, il ne peut pas être malade la nuit.

Le ministre de la Santé peut-il aujourd'hui garantir, nous donner sa parole que l'urgence qu'il avait promise à la population de la région de Québec était bien une urgence à temps plein et qu'il ne s'agit pas encore d'une astuce pour calmer la population qui a vu son hôpital changer de vocation?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, la décision qui avait été prise était effectivement de modifier la mission de l'établissement, de l'hôpital Chauveau, d'un hôpital de soins de courte durée qui devienne un établissement de soins de longue durée, aussi avec l'ensemble des services de première ligne sur une base externe, y compris des services d'urgence qu'on appelle d'urgence mineure. C'est ce qui a été fait et c'est ce qui se met en opération présentement.

À ce moment-ci, à Québec comme dans toutes les régions, on fait le point, on termine le bilan de la transformation depuis trois ans pour voir comment on va consolider au cours des deux, trois prochaines années. Ce que la régie régionale fait, c'est de regarder l'ensemble du projet de Chauveau, qui n'est pas remis en question du tout. Tout ce qui regarde la mission de soins de longue durée et le service de première ligne, y compris l'urgence, n'est pas remis en question. Il y aurait même peut-être des aspects de développement intéressants, me dit-on, à cet égard.

Il y a une question qui se pose, quand on regarde l'ensemble de la carte des services d'urgence de la région de Québec, pour voir si les volumes depuis deux ans, depuis que la mission a changé, en pleine nuit, dans les différentes urgences de Québec, commandent une collaboration entre les urgences, pour qu'on soit sûr que, si à 2 heures du matin quelqu'un doit être transporté d'urgence pour une raison grave, on a des plateaux techniques d'urgence qui fonctionnent avec un volume régulier qui permet des équipes complètes en place.

Maintenant, là, la régie, effectivement, regarde la situation. La régie réfléchit. Ça a l'air à surprendre la députée, mais, oui, il y a du monde qui réfléchit. On ne va pas les empêcher de réfléchir. Il y aura une décision puis une recommandation qui sera prise par le conseil d'administration de la régie. À ce moment-là, quand on verra leur décision, leur recommandation, sur quelle base elle est prise, on prendra la décision finale qui s'impose, M. le Président.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, en complémentaire?

M. Paradis: Oui. Est-ce qu'on doit comprendre de la réponse du ministre de la Santé, qui nous a répété à cette Assemblée qu'il avait tout planifié dans le moindre détail, que, lorsqu'il a annoncé la fermeture de l'hôpital Chauveau, tel qu'on le connaissait, lorsqu'il a annoncé que ça deviendrait un centre de longue durée, lorsqu'il a annoncé qu'il y aurait une urgence, lorsqu'il a obligé l'hôpital à mettre une pancarte pour annoncer qu'il y aurait une urgence, il n'avait pas fait le point sur l'ensemble du dossier? Est-ce que le député de Chauveau va demeurer silencieux dans ce dossier-là? Est-ce que le ministre de la Santé va choisir d'écouter la population et de garantir à la population des services d'urgence 24 heures sur 24 ou, comme le titrait un média de Québec: «Chauveau est encore menacé dans ce qui lui reste après avoir transformé un hôpital qui était parmi les plus performants de la région de Québec»?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, je peux vous assurer, M. le Président, que mon collègue le député de Chauveau n'est pas du tout silencieux sur la question; on en a parlé beaucoup et il assure d'ailleurs une collaboration avec les gens du terrain, comme il l'a fait depuis le début dans cette affaire-là.

Ce qui a été dit pour la mission de Chauveau est maintenu: c'est un établissement de longue durée et de soins de première ligne, y compris des services d'urgence. Ce n'est pas du tout remis en question. Ce que la Régie regarde présentement, c'est comment on assure des services d'urgence de qualité pour faire face à toutes les situations à toutes les heures du jour. Et, si le volume de traitement qui est requis en urgence 24 heures par jour permet et justifie que les services soient ouverts aussi 24 heures par jour, ça va être fait. S'il fallait qu'il y ait une collaboration interétablissements... Parce que le réseau de la santé, ça existe et ça fonctionne comme un réseau, et savoir gérer et planifier, ça veut dire être capable d'ajuster aussi.

Alors, je pense que c'est complètement prématuré, hors contexte d'essayer de s'imaginer qu'on remet en question les décisions. Elles sont confirmées, les décisions, Chauveau garde sa nouvelle mission. Il y aura même des développements intéressants, compte tenu des besoins de la population. Quant aux heures d'ouverture de l'urgence la nuit, la Régie regarde la question, comme c'est son devoir de le faire, et j'attends d'avoir ses recommandations pour prendre une décision, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, est-ce que le premier ministre comprend de la réponse de son célèbre ministre de la Santé que l'urgence de l'hôpital de Chauveau va demeurer ouverte 24 heures par jour ou que l'urgence va demeurer fermée huit heures par jour?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Là, on a vraiment un genre de discours qui regarde plus du côté des structures...

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Ce qui est important là-dedans, comme dans tous les services de santé, c'est d'assurer que la population a accès à des services de qualité quand elle en a besoin. C'est ça qu'on est après faire et c'est ça qu'on va continuer de faire. Les services de qualité à toute la population qui est desservie par l'hôpital Chauveau vont lui être assurés dans la mesure, c'est simple à comprendre, dans la mesure où, depuis l'expérience d'un an et demi, deux ans que la nouvelle mission s'est développée, dans la mesure où le volume de services, le nombre de patients qui se présentent à l'urgence en pleine nuit dans les différentes urgences de Québec justifie qu'on les garde toutes ouvertes, elles vont être ouvertes.

Si le nombre de patients – et c'est juste un peu heureux qu'il y ait moins de consultations dans les urgences la nuit que le jour – qui ont besoin d'un service accessible de qualité la nuit justifie – la ville de Québec, ce n'est pas tellement grand – qu'il y ait deux, trois, quatre ou cinq urgences, c'est ça qui va être assuré. L'important, c'est de voir ça du côté et du point de vue du patient qui a besoin des services pour des conditions graves, à 2 heures, où c'est mieux qu'il soit envoyé pour avoir cette qualité de service. C'est ça qui va être fait et Chauveau va être mis à contribution dans toute la mesure du possible, à 100 %, pour l'ensemble de sa mission, M. le Président.

Le Président: En question principale, M. le député de Marquette.


Date des élections scolaires et services de garde en milieu scolaire

M. Ouimet: M. le Président, la ministre de l'Éducation fait-elle ses devoirs? Regardons quatre exemples récents. Premièrement, transport scolaire...

Des voix: ...

Le Président: Est-ce que je pourrais demander un peu de silence, chers collègues? J'ai l'impression qu'il y a beaucoup de caucus actuellement. Bien. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, quatre exemples, M. le Président. Premièrement, transport scolaire: coupures de 70 000 000 $; compensations prévues: économies découlant des fusions des commissions scolaires. Cependant, on ne découvre aucune économie avant 1999. La ministre doit corriger le tir. Les commissions scolaires devront emprunter.

Deuxièmement, garderies en milieu scolaire. La ministre annonce en grande pompe 41 000 000 $. Cependant, elle fait mal ses calculs. Elle doit corriger le tir et trouver 45 000 000 $ additionnels. Troisièmement, formation professionnelle. Décembre dernier, elle abolit le programme informatique du secondaire et elle abolit plusieurs autres programmes qui donnaient un diplôme et un emploi. Devant le tollé, la ministre change encore une fois d'idée. Le 4 avril dernier, on apprend que le programme informatique sera maintenu au secondaire et qu'il n'y aura aucune autre abolition de programme au secondaire. Ce n'est pas tout. Dans le dossier des élections scolaires, la ministre de l'Éducation propose la tenue du scrutin un lundi, qui est jour de classe et jour d'examen pour la majorité des enfants à travers la province.

(14 h 20)

Question à la ministre de l'Éducation: La ministre de l'Éducation réalise-t-elle que les dossiers en éducation, ils avancent lorsque la ministre recule? Et va-t-elle enfin reculer sur la tenue du scrutin scolaire pour un lundi, jour de classe, et laisser cette journée-là pour les enfants?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Non seulement je fais mes devoirs, mais en plus j'apprends mes leçons, et je souhaiterais à notre collègue, d'ailleurs, de faire de même. Dans l'une ou l'autre des situations qui sont mentionnées, c'est essentiellement dans une perspective où nous avons engagé le dialogue avec nos partenaires, qui nous ont permis de trouver des solutions qui étaient différentes de celles qu'on avait préalablement proposées dans certains cas; et, moi, je suis assez fière de ça parce que ça signifie que nous sommes à l'écoute des gens qui nous font des représentations et que, à partir d'hypothèses que nous faisons, d'analyses auxquelles nous procédons, il peut y avoir d'autres idées tout aussi pertinentes et intéressantes et que nous sommes capables de les prendre en compte. Je trouve que d'avoir une attitude dogmatique irait à l'encontre, à mon point de vue, de l'intérêt des gens que nous avons à servir.

Par ailleurs, en ce qui a trait à la question plus précise du député de Marquette et qui concerne la date des élections, j'aurai une discussion avec mes collègues du Conseil des ministres cette semaine quant à ce que je proposerai et retiendrai, M. le Président. Par ailleurs, avant, justement, de procéder à un choix définitif, j'ai souhaité avoir un éclairage de la Fédération des commissions scolaires. J'avais avancé et j'avance toujours certaines possibilités, croyant que le taux de participation devrait être augmenté à l'élection scolaire, puisque ça reste des institutions importantes, des élus qui gèrent des sommes considérables dans l'ensemble de notre système et surtout qui ont à s'assurer de la qualité des services offerts aux jeunes.

Alors, à la lumière de l'éclairage qui m'a été apporté, je proposerai une avenue et, lorsque la décision sera prise, j'en ferai état devant les membres de cette Assemblée et auprès de mes partenaires, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Dans le dossier des garderies scolaires, comment la ministre peut-elle expliquer la réponse qu'elle donne aujourd'hui, alors que ses fonctionnaires, pas plus tard que vendredi dernier, disaient que la ministre ne savait pas où elle allait trouver les 45 000 000 $ manquants et qu'il y avait fort à parier que les 20 journées pédagogiques du calendrier scolaire et la semaine de relâche, les parents devaient prévoir payer beaucoup plus que 5 $ la journée? Donc, la ministre serait en train de reculer par rapport à des engagements tenus, faute de financement, faute de bons calculs par rapport à un dossier qui a été improvisé, comme on l'a souvent démontré ici même, en cette Chambre.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Vous savez, M. le Président, je crois qu'on doit juger aux résultats. Or, les résultats que nous constatons actuellement, c'est que les parents qui utilisent les services de garde, autant en milieu scolaire que dans nos services, dans nos centres de la petite enfance, sont particulièrement satisfaits et heureux de ce à quoi ils ont droit par rapport aux coûts de plus qu'ils doivent défrayer.

Quant à la question plus précise de la garde en milieu scolaire, les règles budgétaires ne sont pas terminées, ne sont pas adoptées, M. le Président. Nous sommes en débat et en discussion avec les commissions scolaires. Comment peut-il conclure qu'il se passera telle ou telle chose? Je trouve que c'est un peu prématuré, et le député devrait prendre un peu plus de temps pour réfléchir à la question.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: La ministre peut-elle alors s'engager dans cette Chambre à ce que ça ne coûtera pas plus cher que 5 $ pour les journées pédagogiques, lorsque les enfants seront en garderie en milieu scolaire, et la même chose pour la semaine de relâche, M. le Président, et à ce que la plage horaire qui sera reconnue par le gouvernement ne sera pas une plage de quatre heures pour couper au niveau des ressources allouées, mais plutôt de six heures, comme c'est demandé? Qu'elle prenne ces trois engagements-là, M. le Président, et elle aura respecté ses engagements.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, un jour, on est en désaccord avec les politiques que je propose et, le lendemain, on veut qu'on en fasse plus encore que ce que je proposais. Je trouve ça pas mal intéressant, quand même, mais ça me rassure. Ça veut dire que le parti d'opposition est d'accord avec les politiques familiales que nous avons mises en place et les services que nous rendons disponibles auprès des familles. Et je les remercie de cet appui, parce que je ne l'ai pas senti comme ça au moment où je me suis engagée dans ce dossier.

En ce qui a trait à la garde en milieu scolaire, actuellement, on sait le cafouillis dans lequel se trouve le système d'aide aux familles, compte tenu d'une formule très complexe qui oblige chacun des parents à déclarer exactement son revenu, au sous près, avec un cafouillis, au plan administratif, inimaginable. Alors, j'ai souhaité soulager l'ensemble de nos administrations de cet aspect, de telle sorte que maintenant nous aurons un système unique qui va permettre, soit aux gens à très faibles revenus, d'avoir une aide par le programme APPORT ou, par ailleurs, de payer le 5$. Et, oui, M. le Président, les journées pédagogiques seront prévues dans la garde en milieu scolaire.

Cependant, il faut être clair, les dîners, pour lesquels les parents avaient des contributions à verser, continueront d'être assumés, bien sûr, par les parents. Alors, voilà, M. le Président, pour ce qui est de la réponse à cette question.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Reprise de la contrebande de cigarettes dans les réserves autochtones

M. Lefebvre: M. le Président, depuis que le ministre de la Sécurité publique est en poste, septembre 1997, à chaque fois qu'il a dû utiliser son jugement, il s'est trompé. Les deux dernières décisions: l'investissement de 1 000 000 $ pour la prison sur mesure pour le chef des Hell's – quelques éléments de cette décision-là étaient valables, mesures de sécurité, mais, pour l'essentiel, c'est une mauvaise décision – et, évidemment, j'en ai parlé la semaine dernière, 5 100 000 $ de compressions dans le réseau des centres de détention au Québec, en augmentant ainsi tout le climat de tension puis de violence potentielle.

M. le Président, or, depuis quelques jours, la contrebande de cigarettes a repris sur les réserves de Kahnawake et de Kanesatake. Les propriétaires des commerces qui opèrent, eux, de façon légale lancent un cri d'alarme au gouvernement en disant, en parlant des autochtones: Ils nous rient dans la face. C'est toujours les propriétaires de ces commerces légaux qui parlent, ils estiment que la police devrait agir contre ces crimes commis à la vue de tous. Ça fait un an et demi que les vendeurs illégaux – un an et demi – ont rouvert leurs portes, ça pousse comme des champignons. Les propriétaires honnêtes paient leurs taxes, ils sont furieux. Voici une situation où le ministre de la Sécurité publique n'a pas de marge d'erreur, il ne peut pas se tromper s'il agit.

Est-ce qu'on peut espérer que le ministre de la Sécurité publique, c'est ma question, M. le Président, va prendre ses responsabilités, va fouiller dans la loi de la sécurité publique, à l'article 8, où on lui dit qu'il a la responsabilité, lui, de faire respecter la loi? Est-ce qu'il va agir? En ayant la certitude cette fois-là, puis on lui garantit qu'on va l'appuyer, là, qu'il ne se trompera pas, est-ce qu'il va agir, est-ce qu'il va faire respecter la loi, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Ça me fait un peu sourire quand j'écoute le député de Frontenac qui parle de décision – il parle même d'article; il est allé voir dans la Loi de police l'article qui permettrait, à ce moment-là, au ministre de la Sécurité publique d'agir – parce qu'on se souviendra que la contrebande de cigarettes a connu son point culminant, son sommet quand les libéraux étaient au pouvoir, et qu'ils n'ont rien fait pour régler le problème.

Des voix: Bravo!

M. Bélanger: Alors, l'article 8, il était évident, il devait être là aussi à l'époque des libéraux, M. le Président. Le député de Frontenac, d'ailleurs, était ministre de la Justice, qu'a-t-il fait, qu'a-t-il dit à son ministre de la Sécurité publique, qui est maintenant assis à quelques banquettes, le député de Pontiac, M. le Président, si c'était si simple que ça?

Je crois, M. le Président, que, non, le problème de la contrebande, de l'activité économique souterraine est un problème qui est très sérieux, et nous en avons fait, au gouvernement, une priorité. Nous avons créé le comité Accès où plusieurs intervenants du milieu judiciaire, de la Régie des alcools, des courses et des jeux ont fait des actions concertées...

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le ministre de la Sécurité publique.

(14 h 30)

M. Bélanger: Je disais donc, M. le Président, que le comité Accès a fait des opérations concertées relativement à s'attaquer au réseau, à l'ensemble du réseau de la contrebande, tant au niveau de l'alcool que des cigarettes. Il faut comprendre que la composante autochtone est une des composantes de la contrebande et que c'est très divers, donc, les composantes de cette contrebande. Le directeur de la Sûreté du Québec m'a présenté un plan d'action relativement aux activités policières qui sont déjà en cours depuis plusieurs semaines, et qui vont continuer d'être en cours, et qui vont s'intensifier, relativement à la lutte à la contrebande des cigarettes en particulier, mais je crois que, si nous voulons une solution durable à ce problème, c'est avant tout une solution politique qui devra être apportée. On sait que toute la question de l'application de la taxation sur le territoire autochtone est un problème qui perdure depuis des décennies; donc, quand le député de Frontenac était ministre de la Justice, ça s'appliquait. Je devrais peut-être lui apprendre ça aujourd'hui, il n'était peut-être pas au courant.

Donc, c'est ça, la solution. Il va falloir travailler à la fois au niveau policier, à la fois aussi au niveau d'activités et d'ententes politiques sur le sujet, et je crois que c'est ainsi qu'on va réellement, une fois pour toutes, pouvoir mettre fin aux activités de contrebande sur le territoire québécois, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, où était le ministre de la Sécurité publique d'aujourd'hui, celui à qui je parle, en 1994? Est-ce qu'il ne se souvient pas qu'il était, lui, critique du ministre de la Justice et que c'est justement pour ça qu'il a arrêté de discuter de la contrebande de la cigarette, parce que, en 1994, ça a été arrêté net avec deux mesures très précises: la diminution des taxes et le renforcement des forces policières et de la surveillance policière? Est-ce qu'il se souvient de ça? La contrebande de cigarette a arrêté net, et c'est repris justement depuis un an et demi. Puis je veux donner le témoignage d'un commerçant – ce n'est pas l'opposition qui parle: Ça fait un an et demi que les vendeurs illégaux ont rouvert leurs portes le long de la route 132, dit M. Benoît Thibert, propriétaire d'un commerce, lui, légal. C'est lui qui le dit, c'est lui qui dit au ministre de la Sécurité publique: Depuis l'arrivée du député...

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, je pense que le député de Frontenac a une vision à très courte vue. Quand il dit que ça a arrêté net, il est en train de me dire qu'en 1994 ça a arrêté net, la contrebande. Non, les activités de contrebande n'ont pas arrêté net, ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai, ce n'est pas vrai. Oui, c'est évident qu'on assiste à un phénomène cyclique de hausse et de baisse de l'activité de contrebande, ça, c'est un fait. C'est un fait, mais je crois que, si on veut vraiment une solution durable au problème, je crois que ça va être une solution politique, en plus de certaines activités policières qui sont faites présentement, qui vont continuer à se faire. Dans les prochains jours, on verra le résultat de ces activités policières qui vont s'attaquer à l'ensemble de la problématique de la contrebande.

Donc, c'est dans ce sens-là, M. le Président, que je crois... Évitons la démagogie. Je crois que c'est un problème qui est sérieux, un problème qui est complexe. Les solutions si évidentes, si magiques que le député de Frontenac semble envisager, bien ça n'existe pas, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: Sur le même sujet, M. le Président.

Le Président: En complémentaire.

M. Lefebvre: En question principale, au premier ministre, sur le même sujet.

Le Président: Non, je m'excuse. J'avais indiqué tantôt que je reconnaîtrais le député. Alors, en complémentaire, mais en véritable complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, tout en rappelant au premier ministre que son...

Le Président: Sans préambule, M. le député de Frontenac. Vous avez assez d'expérience...

M. Lefebvre: Est-ce que, M. le Président, le premier ministre se souvient, le 25 mars 1996, lorsqu'il a remplacé le premier ministre Parizeau, d'avoir dit ceci – discours inaugural, le premier ministre, sûr de lui à ce moment-là, frondeur un peu: «Les seuls...»

Le Président: Je vous rappelle, M. le député de Frontenac, que vous êtes en complémentaire et que vous n'avez pas le même temps pour poser une question complémentaire que votre question principale où on ajoute un préambule. Alors, je vous invite à formuler votre question complémentaire directement. Je sais que vous avez formulé «est-ce que», mais je vous invite à faire en sorte que ça arrive, là.

M. Lefebvre: Alors, je rappelle que le premier ministre disait... Est-ce que le premier ministre se souvient d'avoir dit...

Des voix: ...

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le premier ministre se souvient d'avoir dit: «Les seuls qui ont raison d'être de mauvaise humeur au moment où, moi, j'arrive – c'est le député de Jonquière qui parle – partout au Québec sont les contrebandiers et les trafiquants. Nous avons l'intention que leur état d'esprit s'aggrave encore dans leur réseau.»?

Partant de ce qu'il a dit, comment le premier ministre explique-t-il que la contrebande d'alcool aura coûté cette année 135 000 000 $ de pertes fiscales, que les trafiquants ne peuvent même pas suffire à la demande dans la région de Montréal? Partant de là, est-ce que le premier ministre entend, lui – le premier ministre à la tête du gouvernement – agir pour freiner ce qui recommence, la contrebande de cigarettes?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Parlant des propos tenus par quelqu'un qui arrive, M. le Président, et qui se trouve nouvellement dans l'arène politique québécoise, je veux exprimer ma sympathie pour les membres de l'opposition qui ont livré un vaillant combat pour que le gouvernement puisse tenir ses positions pour l'atteinte du déficit zéro, qui, sous la direction de leur chef actuel, se sont montrés très responsables...

Des voix: Bravo!

M. Bouchard: ...qui ont voté unanimement l'atteinte du déficit pour l'année prochaine, qui même auraient souhaité, selon le député de Laporte, qu'on y arrive un an plus vite, j'ai donc beaucoup de sympathie de les voir essuyer la rebuffade que leur sert leur nouveau chef autodéclaré quand il dit que, lui, il va reculer indéfiniment l'atteinte du déficit zéro. Il y a une bonne chose là-dedans, M. le Président...

Des voix: ...

Le Président: Est-ce qu'on pourrait revenir maintenant au sens de la période des questions et des réponses orales qui n'est pas une foire d'empoigne?

Alors, M. le premier ministre, sur la question, s'il vous plaît.

M. Bouchard: Mais, M. le Président, ce qui est arrivé me console, d'abord, parce qu'on a vu cette manifestation totale, unanime de solidarité des Québécois qui se sont ressoudés autour de l'objectif et qui ont rappelé à l'ordre le futur chef du Parti libéral. Je me console aussi en me reposant sur l'aide et l'appui du député de Laporte qui, en novembre dernier, disait, M. le Président, et je cite...

Le Président: Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, simplement un rappel au règlement. L'article 79: Les réponses doivent s'adresser à la question qui a été posée. Que le premier ministre réponde donc de ses déclarations antérieures.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Il s'agissait des propos de quelqu'un...

Le Président: Écoutez, après une semaine de congé pascal, je ne voudrais pas être dans l'obligation de suspendre la séance parce que vous n'avez pas encore eu assez de repos, là.

M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la question portait sur des propos tenus par quelqu'un de fraîchement arrivé en cette Chambre. Alors, la réponse est d'autant plus pertinente qu'elle concerne des propos de quelqu'un qui va arriver bientôt, nous semble-t-il. Alors, je termine, je termine. J'en ai pour...

Ce qui me conforte dans l'idée que nous allons tous continuer d'atteindre le déficit zéro, c'est l'affirmation en cette Chambre du député de Laporte qui, le 7 novembre 1996, disait...

(14 h 40)

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, simplement pour que vous rappeliez au premier ministre – et je sais qu'il a une attitude en cette Chambre – les dispositions impératives de l'article 79 de notre règlement. Et, s'il ne veut pas répondre, lui rappeler les dispositions de l'article 82 qui lui permettent de se cacher et de ne pas répondre, ne pas faire des balivernes en cette Chambre.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je sais que le leader de l'opposition n'était pas là, la dernière fois, que c'était son leader adjoint. Je lui rappellerai l'article 81: «Aucun rappel au règlement ne peut être fondé sur l'opinion que la réponse à une question posée à un ministre est insatisfaisante.» Alors, contentez-vous de notre réponse.

Le Président: Au-delà du fait que l'histoire de la dernière décennie ou des dernières décennies pourrait nous indiquer que les premiers ministres ont beaucoup de latitude – parfois beaucoup, beaucoup – néanmoins je demanderais au premier ministre de faire en sorte que...

M. Bouchard: Je termine avec ces propos très responsables du député de Laporte: J'implore le ministre des Finances – j'implore, M. le Président, le ministre des Finances – je supplie, j'adjure le ministre des Finances – ah oui! – de ne pas céder aux pressions de ceux qui lui demandent de continuer à faire des déficits! Je peux assurer le ministre des Finances qu'il pourra toujours compter sur l'opposition officielle et sur le député de Laporte pour le soutenir envers et contre tous ceux qui...

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, comment se fait-il que le premier ministre, alors qu'en 1996 il arrivait sur son fauteuil de député de Jonquière, était si frondeur, si matamore avec les contrebandiers? Aujourd'hui, il baisse les bras, laisse passer 135 000 000 $ de pertes fiscales pour son déficit zéro, va chercher ça sur le dos des malades. Est-ce qu'il ne pourrait pas faire face aux contrebandiers?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai un peu de difficultés à saisir la cohérence des questions du député...

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: ...qui, d'une part, semble vouloir se plaindre du niveau de ressources affectées à la santé et qui, d'autre part, nous demande d'enlever les taxes sur la cigarette. C'est un peu contradictoire, vous en conviendrez.

Deuxièmement, je trouve particulièrement audacieux, de la part du député et de l'opposition, de vouloir faire des leçons à ce gouvernement sur les questions de la contrebande. Je me souviens qu'à l'époque où ce parti gouvernait le Québec on avait pour 500 000 000 $ de volume de contrebande de cigarettes. Plus de 60 % du marché était alimenté par la contrebande. C'était le chaos au Québec, à l'époque, M. le Président. C'était le chaos, à l'époque. Il a fallu le travail du Bloc à Ottawa pour forcer le gouvernement fédéral à imposer une taxe.

Des voix: Bravo!

Le Président: En terminant, M. le premier ministre.

M. Bouchard: C'était l'époque où le député de Lac-Saint-Jean restait assis sur son siège à la Chambre, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: Mais la question est fondamentale. Nous savons bien, M. le Président, elle pose la question fondamentale de savoir: Est-ce qu'il y au Québec une ou deux justices? Il n'y aura pas, au Québec, il n'y a pas deux justices. Tout le monde sera soumis à la même loi. Si le député avait bien écouté, il aurait entendu que le ministre de la Sécurité publique a annoncé qu'il y avait un plan d'action policier qui était en marche, qui était présentement en voie d'exécution et que bientôt les résultats pourraient être publiés. Qu'il donne donc la chance à la police québécoise de faire son travail.

Le Président: En complémentaire?

M. le député d'Abitibi-Ouest.


Quartier général d'Hydro-Québec à Rouyn-Noranda, en Abitibi-Témiscamingue

M. Pelletier: M. le Président, député d'Abitibi-Est. M. le Président, au cours des dernières décennies, Hydro-Québec a procédé aux plus importants travaux de son histoire au nord de l'Abitibi-Témiscamingue, plus précisément dans la région de la Baie-James. Ce vaste territoire s'est ouvert sur tout le Québec par la construction d'une route qui passe par l'Abitibi-Témiscamingue, entre autres par les villes de Val-d'Or, Amos et Matagami. L'Abitibi-Témiscamingue constitue donc la porte d'entrée de la région de la Baie-James et aussi son principal bassin de travailleuses et de travailleurs.

À partir de ces considérations et suite à une bataille historique qu'avait livrée alors mon collègue député d'Abitibi-Ouest avec l'appui de toute la population, Hydro-Québec implantait son quartier général au début des années quatre-vingt pour les travailleurs de la Baie James à Rouyn-Noranda en Abitibi-Témiscamingue. Cette décision logique a produit des résultats très positifs autant pour l'économie régionale que pour Hydro-Québec. En 1996...

Le Président: Je m'excuse. M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît, je pense que les règles minimum dans notre Chambre, c'est qu'on respecte tous les membres de l'Assemblée, y compris ceux qui, en général, ne posent pas beaucoup de questions. Alors, M. le député d'Abitibi-Est.

M. Pelletier: Merci, M. le Président. En 1996, certaines discussions avaient fait craindre pour le déplacement du quartier général d'Hydro-Québec de Rouyn-Noranda. Aujourd'hui, des informations laissent croire que nous sommes à nouveau menacés par le déplacement de notre quartier général.

M. le Président, ma question s'adresse au ministre d'État des Ressources naturelles et ministre responsable du Développement des régions: M. le ministre, le 13 mai 1996, lors d'une...

Le Président: M. le député d'Abitibi-Est, je vous invite maintenant à poser votre question. Alors, votre question, à ce moment-ci.

M. Pelletier: Ma question, M. le Président: À titre de ministre responsable du Développement des régions et ministre responsable d'Hydro-Québec, je vous demande, au nom de la population de l'Abitibi-Témiscamingue, de réitérer votre engagement de défendre les régions...

Le Président: Je m'excuse, M. le député d'Abitibi-Est. À ce moment-ci, la période de questions et de réponses orales, ce n'est pas une période d'interpellation du gouvernement. Alors, vous avez à poser une question et non pas à faire une demande.

M. Pelletier: M. le Président, est-ce que je pourrais demander au ministre de nous réaffirmer le maintien des opérations de notre quartier général d'Hydro-Québec pour les travailleurs de la Baie James à Rouyn-Noranda en Abitibi-Témiscamingue?

(14 h 50)

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

Puis-je rappeler qu'il y a encore deux députés qui ont indiqué à la présidence qu'ils souhaitaient poser des questions, et, comme c'est parti là, ils ne pourront pas le faire. M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. C'est la deuxième fois, je crois, que ce genre de rumeur circule dans la région de l'Abitibi-Témiscamingue. Le premier ministre lui-même a été interpellé sur le sujet et émettait un communiqué de presse très, très clair, en date du mois de novembre, je crois. Également, lors de mon passage à Rouyn-Noranda, avec le ministre des Affaires municipales, j'ai réitéré notre position à l'effet qu'on demanderait à Hydro-Québec de respecter le poste qui compte 159 travailleurs de l'Abitibi qui travaillent à la Baie-James et 45 travailleurs de l'extérieur de l'Abitibi mais qui sont affectés au poste de Rouyn-Noranda, donc qui doivent passer par là. Hydro-Québec a respecté cet engagement qu'on lui a demandé de respecter et compte le respecter. Donc, les rumeurs sont non fondées.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Pelletier: En additionnelle, M. le Président. M. le ministre, pour éviter que ces menaces se répètent...

Le Président: Directement, en complémentaire. Sans préambule, sans commentaire.

M. Pelletier: Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de prendre les mesures pour privilégier davantage l'embauche des gens de la région pour éviter que des situations comme ça se représentent?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, je pense qu'il y a un moyen. D'abord, c'est de respecter très clairement la politique énergétique qui demande précisément à Hydro-Québec de travailler avec les décideurs régionaux. Deuxièmement, nous avons également mis sur pied un comité, à Hydro-Québec et mon ministère, en vue de trouver des moyens de travailler au développement régional tout en respectant bien sûr la capacité d'Hydro-Québec de faire les redressements qui s'imposent, parce qu'on demande à Hydro-Québec d'être une société rentable pour l'ensemble des Québécois.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Remise d'un chèque par la députée fédérale de Louis-Hébert au nom de la ministre québécoise de la Culture et des Communications

Mme Delisle: M. le Président, dimanche qui vient de passer, en lisant l'hebdo régional L'Appel , région de Québec, quelle ne fut ma surprise d'apprendre, et je lis ce qui est dans le journal: «Au nom de la ministre de la Culture et des Communications du Québec, la députée fédérale de Louis-Hébert, Mme Hélène Alarie, a remis un chèque de 5 000 $ au directeur général de la salle Dina-Bélanger, le 8 avril dernier.»

M. le Président, on sait que le Bloc québécois puis le Parti québécois, c'est tricoté serré, mais de là à ce que les députés du Bloc québécois se promènent avec le budget discrétionnaire des ministres, il y a un pas que, je pense, il ne faut pas franchir. Vous avez bien entendu, M. le Président? Un député du Parlement fédéral a remis, au nom de la ministre de la Culture, un chèque qui provient des coffres du gouvernement du Québec.

Ma question au premier ministre désigné: Comment le premier ministre, qui prétend respecter... M. le Président, comment le premier ministre...

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement. Mme la députée.

Mme Delisle: Toujours au premier ministre désigné, M. le Président: Comment le premier ministre, qui prétend respecter les institutions parlementaires et qui dénonce à tour de bras la présence du Parlement fédéral dans les compétences provinciales, peut-il cautionner des situations aussi scandaleuses?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je ne suis pas au courant de la situation, Mme la ministre de la Culture non plus. Ça semble à première vue être un cas de coopération fédérale-provinciale, mais nous allons prendre avis de la question et vérifier ce qui est arrivé.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, la période de questions et de réponses orales est terminée.


Réponses différées

Il y a une réponse différée. Alors, à ce moment-ci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune va répondre à une question posée le 7 avril dernier par M. le député de Laurier-Dorion.

Alors, est-ce que je pourrais annoncer la réponse différée? Alors, à ce moment-ci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune va répondre à une question posée, comme je le disais précédemment, le 7 avril dernier par M. le député de Laurier-Dorion, concernant la qualité de l'eau potable. Alors, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


Qualité de l'eau potable au Québec

M. Bégin: Merci, M. le Président. Le 7 avril dernier, à la suite de la publication d'un article, dans le quotidien Le Soleil , concernant la qualité de l'eau potable à Saint-Gervais de Bellechasse, le député de Laurier-Dorion s'est inquiété de la qualité de l'eau potable au Québec. Il s'est adressé à mon collègue le ministre de la Santé pour lui demander ce qu'il fait actuellement pour que personne au Québec ne soit inquiet de l'eau qu'on boit. Avant d'aller plus loin, M. le Président, vous me permettrez de reprendre quelques éléments du préambule de la question du député, afin de corriger un certain nombre de faits.

D'abord, le député se questionne sur la désuétude du Règlement sur l'eau potable, affirmant même que la santé de la population est en danger. Sur cet élément, je voudrais seulement lui indiquer que le règlement a été adopté en 1984 par le gouvernement du Parti québécois et que, si la santé de la population avait été menacée de quelque manière que ce soit, je me demande pourquoi, pendant les 10 ans qu'ils ont été là, ils n'ont pas changé le règlement comme tel. On m'assure, par ailleurs, M. le Président, que les données du réseau de la santé publique du Québec... qu'il n'y a absolument aucun danger et que la santé n'est en aucun cas menacée.

D'autre part, dans son préambule, le député parle de 30 municipalités qui n'arriveraient pas à rencontrer les normes du règlement et qu'environ 900 000 personnes au Québec boivent de l'eau sans aucun traitement. Tout d'abord, M. le Président, il y a une municipalité au Québec qui a un problème avec les nitrates...

Le Président: Est-ce que je pourrais demander, s'il vous plaît, aux députés qui «caucussent» actuellement de le faire à l'extérieur de la salle de délibérations? Il n'y a qu'un débat, actuellement, et il y a un seul député qui a la parole. M. le ministre.

M. Bégin: Alors, je disais, M. le Président, qu'une seule municipalité ne rencontrait pas les normes concernant les nitrates, et c'était effectivement la municipalité de Saint-Gervais. Quelques-unes ne les rencontrent pas concernant les sous-produits du chlore, et quelques-unes pour le plomb.

Par ailleurs, en ce qui concerne les 900 000 personnes, je voudrais rappeler, M. le Président, que ce n'est pas 900 000 personnes qui boivent de l'eau sans traitement au Québec, c'est 27 000 personnes qui le font, et la situation sera corrigée très rapidement par des modifications que l'on fera au règlement.

Enfin, en ce qui concerne les modifications réglementaires qu'on aurait dû apporter, je demande au député de Laurier-Dorion, qui était membre du comité exécutif, pourquoi, sur la recommandation qui avait été faite par le ministère de l'Environnement à l'époque, le Conseil des ministres n'a pas adopté le projet de règlement qui était soumis à ce moment-là?

Alors, M. le Président, en bref, il y a une situation particulière à Saint-Gervais. Quant au reste, le règlement qui concerne l'eau potable sera adopté. Évidemment, il y a une question de débat public concernant l'eau et, aussitôt que ce débat sera terminé, les modifications réglementaires seront apportées.

Le Président: M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Si je comprends bien, M. le Président, le ministre se défend en disant: Nous faisons comme vous. Une autre façon de gouverner, d'après ce que je me rappelle.

Est-ce que le ministre se rappelle qu'effectivement les normes... – plus le temps passe, plus ça devient grave – que nous sommes de plus en plus en retard sur le reste de l'Amérique du Nord et l'Europe, et qu'effectivement il y a des dizaines de municipalités au Québec qui voient leur eau en bas des normes acceptables dans le reste? Est-ce que le ministre trouve ça acceptable, lui qui est en position de responsabilité?

Des voix: C'est ça.

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

(15 heures)

M. Bégin: Ce que je dis, M. le Président, c'est que nous avons adopté le premier Règlement sur l'eau potable. Nous allons adopter le deuxième règlement pour modifier celui qui existe présentement. Cependant, nous le ferons après avoir entendu ce que les gens ont à dire sur la question de l'eau dans l'ensemble du Québec, et vous savez que cette procédure sera entamée très prochainement, et c'est seulement après ça qu'on fera les modifications. Mais nous les ferons et nous tiendrons compte de toutes les normes, qu'elles soient nationales ou internationales, M. le Président.

Des voix: Bravo!


Motions sans préavis

Le Président: Nous allons maintenant passer aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.


Procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 405

M. Jolivet: Je vais y aller avec la mienne? O.K. M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission des transports et de l'environnement procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 405, Loi favorisant la protection des eaux souterraines, à compter du 12 mai 1998 et, à cette fin, entende les organismes suivants: Association des eaux souterraines du Québec, Association des embouteilleurs du Québec, Association des embouteilleurs de boissons gazeuses, Centre québécois du droit de l'environnement, Coalition Eau-Secours, INRS-Eau, Association des géologues et des géophysiciens du Québec, Regroupement national des conseils régionaux en environnement, Regroupement québécois des groupes écologistes, Réseau de l'environnement, Union des producteurs agricoles, Union des municipalités du Québec, Union québécoise pour la conservation de la nature, Union Saint-Laurent, Grands Lacs;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 15 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 30 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que les mémoires soient reçus au Secrétariat des commissions au plus tard le 5 mai 1998;

«Que le ministre de l'Environnement et de la Faune soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il y a consentement. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Jolivet: Adopté.

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale réitère solennellement son appui, exprimé dans un vote unanime le 19 décembre 1996, de sortir le Québec de la spirale de l'endettement et de l'appauvrissement collectif en éliminant définitivement, dès l'an prochain comme prévu, le déficit budgétaire et en interdisant aux futurs gouvernements, quels qu'ils soient, d'endetter à nouveau le Québec, de mettre par conséquent en grave péril le filet social des Québécois et de renier ainsi les efforts considérables consentis depuis trois ans par la population québécoise pour assainir ses finances et contribuer au dynamisme de son économie.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. En première lecture, M. le Président, il m'apparaît qu'il y aurait d'énormes problèmes de recevabilité quant à cette motion. Maintenant, dans le but de s'assurer que l'esprit qui sous-tend cette motion fasse l'objet d'un vote unanime de l'Assemblée nationale, on va refuser notre consentement, et je vous demanderais de reconnaître le député de Laporte qui a une motion dans le même sens.

Le Président: Alors, il n'y a pas consentement pour débattre de cette motion. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Oui. M. le Président, je propose la motion suivante:

«Que cette Assemblée réitère son appui à l'objectif de l'équilibre budgétaire du Québec originalement proposé par le gouvernement du Parti libéral du Québec dans son budget...»

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: Oui. M. le Président. Alors, je reprends:

«Que cette Assemblée réitère son appui à l'objectif de l'équilibre budgétaire du Québec originalement proposé par le gouvernement du Parti libéral du Québec dans son budget du 12 mai 1994 et dont le plan de réduction du déficit fut subséquemment récupéré par le gouvernement du Parti québécois ainsi qu'à...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: ...la Loi sur l'élimination du déficit et l'équilibre budgétaire dont le principe fut originalement proposé par le chef du Parti libéral du Québec en août 1994...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bourbeau: ...dont les modalités furent reprises par le présent gouvernement et qui fut adoptée par l'Assemblée nationale, le 19 décembre 1996, tout en condamnant les moyens pris par ce gouvernement pour y parvenir, soit l'appauvrissement des Québécois et la détérioration des services de santé et d'éducation ainsi que les stratagèmes du présent gouvernement pour soustraire à la comptabilité gouvernementale des dépenses d'environ 5 000 000 000 $ pour financer les départs de fonctionnaires et des travaux sur le réseau routier, de même que pour continuer à soustraire à la comptabilité gouvernementale les déficits passés et à venir des réseaux de la santé et de l'éducation.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il est de coutume renommée que les leaders, quand ils arrivent avec des motions comme celles-là, se les présentent. Comme elle n'a jamais été présentée à mon bureau, en conséquence, je ne peux pas accepter une telle motion à ce moment-ci.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Si c'est la seule raison, le seul motif invoqué, bien que le règlement stipule que ce soient des motions sans préavis, M. le Président, à ce moment-là, on lui donne 24 heures pour réfléchir et, demain, la même motion pourra être représentée.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, dans cette motion, il y a tellement de faussetés et de mensonges...

Des voix: ...

Le Président: Je pense, M. le leader du gouvernement, que vous savez que vous êtes allé trop loin; alors, à ce moment-ci, je vous demanderais de reprendre vos propos en retirant ce qui est inacceptable.

M. Jolivet: Comme il y a beaucoup d'exagérations et d'inexactitudes, M. le Président, c'est non. Et nous en avons une autre, M. le ministre des Finances pourra nous en proposer une meilleure.

Le Président: Alors, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Je vais en faire une plus courte et plus consensuelle.

«Que l'Assemblée nationale fasse siennes les paroles du député de Laporte, qui déclarait le 7 novembre 1996 vouloir soutenir le ministre des Finances "envers et contre tous ceux qui voudraient le faire dévier de son objectif" d'atteindre l'équilibre budgétaire pendant l'année fiscale 1999-2000, tel que décidé unanimement par l'Assemblée le 19 décembre 1996.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que le ministre des Finances peut indiquer à cette Chambre s'il avait communiqué le texte de cette motion à son leader, et pourquoi ce dernier ne nous l'a pas communiqué?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, non, mais je dois vous dire juste une chose, c'est qu'on était sûr que vous ne désavoueriez jamais votre collègue.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? Il n'y a pas de consentement.

Est-ce qu'il y a d'autres motion sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Sinon, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: J'avise cette Assemblée, M. le Président, que la commission des finances publiques entreprendra l'étude du projet de loi n° 415, Loi instituant le Fonds relatif à la tempête de verglas survenue du 5 au 9 janvier 1998, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation va se réunir en séance de travail aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement, afin de statuer sur une demande de la Fédération des producteurs de porc du Québec.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique va se réunir en séance de travail demain, le mercredi 22 avril, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de déterminer les conclusions et les recommandations de la commission à la suite de l'audition des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics en vertu de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Enfin, je vous avise que la commission de l'économie et du travail va se réunir en séance de travail également demain, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement, afin d'entendre à huis clos le Dr Pierre Couture.

S'il n'y a pas d'autres avis, nous allons passer aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Avis de sanction

En ce qui me concerne, je vous avise qu'il y aura sanction du projet de loi n° 416, Loi modifiant la Loi sur les transports et la Loi sur le transport par taxi, au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur, cet après-midi, à 16 heures.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Je vous informe également que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion de M. le député de Verdun qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale dénonce les compressions successives et aveugles faites par le gouvernement péquiste dans nos institutions postsecondaires, qui hypothèquent l'avenir collectif du Québec et étouffent le dynamisme de ces institutions.»


Affaires du jour

À ce moment-ci, nous allons aller aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

(15 h 10)

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Pour que les gens le sachent très bien, nous sommes rendus à la fin du débat sur le budget, et je vous demande de prendre en considération l'article 1 de notre feuilleton.


Affaires prioritaires


Reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure

Le Président: Alors, aux affaires prioritaires, à l'article 1 du feuilleton, conformément aux dispositions de l'article 87 du règlement, l'Assemblée reprend le débat suspendu le 8 avril dernier sur la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement ainsi que sur les motions de censure présentées à l'encontre de cette motion par M. le député de Laporte, M. le député de Rivière-du-Loup, M. le député de Verdun, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, M. le chef de l'opposition officielle et député de Vaudreuil, M. le député de Westmount–Saint-Louis ainsi que M. le député de Nelligan.

Conformément aux dispositions de l'article 276 du règlement, je vous rappelle qu'une intervention de 30 minutes est réservée à M. le député de Laporte, représentant l'opposition officielle, et que ce débat se terminera par la réplique de 60 minutes accordée au vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

À ce moment-ci, je suis prêt à reconnaître le prochain intervenant. M. le député de Laporte.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous en arrivons maintenant presque à la fin de ce qu'on appelle communément le discours sur le budget, avec la réplique de l'opposition officielle.

M. le Président, le ministre des Finances nous a proposé il y a quelques semaines un budget, un budget dans lequel le ministre nous a annoncé, en grande pompe et avec beaucoup de plaisir, semble-t-il, pour notre plaisir personnel, bien sûr, que ce budget ne contenait aucune nouvelle taxe. Aucune hausse de taxes et d'impôts, nous a-t-il annoncé. Comme si, M. le Président, c'était une bonne nouvelle, comme si nous avions besoin de nous faire dire, après cinq années de croissance économique soutenue un peu partout en Amérique, au Canada et un peu moins au Québec, que le mieux que le gouvernement pouvait faire, c'était aucune hausse d'impôts et de taxes!

Remarquez que, quand on a devant nous un gouvernement qui a imposé aux Québécois 2 500 000 000 $ de nouvelles taxes depuis son arrivée au pouvoir et que ça continue d'année en année en augmentant, probablement que d'annoncer qu'il n'y a aucune hausse de taxes et d'impôts, ça peut apparaître comme une bonne nouvelle. Mais, en réalité, c'est tragique de savoir que, après tant d'années de croissance économique, ce gouvernement-là n'a pas encore réussi à amorcer une baisse des impôts et des taxes. Et la question qu'on doit se poser, c'est: Comment se fait-il que, alors que partout en Amérique, partout au Canada, les gouvernements comme celui du Québec, dans la même situation que celui du Québec, sont capables de baisser les impôts et les taxes, ce gouvernement-là en est réduit à faire une annonce semblable: Aucune hausse d'impôts et de taxes?

M. le Président, nous avons frôlé la catastrophe. S'il avait fallu que ce gouvernement-là ajoute encore cette année d'autres hausses d'impôts et de taxes, les Québécois seraient littéralement mis en faillite. Parce que, en réalité, la déclaration du ministre des Finances, elle n'est pas exacte. Elle n'est pas exacte parce que, effectivement, il y en a, des hausses d'impôts et de taxes, dans le présent budget, dans l'année fiscale présente.

Qu'on se souvienne que, le 1er janvier dernier, 1998, il y a à peine trois mois et demi, ce gouvernement-là a imposé une hausse de taxes de 1 %, de la taxe de vente du Québec. On était à 6,5 %, on est passé à 7,5 %. C'est une hausse importante qui va rapporter au-delà de 600 000 000 $ par année de taxes dans le trésor québécois.

M. le Président, qu'on se rappelle les hausses de taxes sur le tabac. Bien sûr, on peut ne pas être en faveur du tabac – et je suis un de ceux, M. le Président, qui ne pratique pas ce sport de fumer – mais on doit reconnaître qu'il y a eu une hausse de taxes quand même. Et la hausse de taxes est devenue tellement importante qu'on voit, là, une recrudescence de la contrebande, la contrebande qui reprend. Pourquoi la contrebande reprend-elle? Parce que, justement, on hausse les taxes sur le tabac à un niveau qui rend intéressante la contrebande. C'est comme ça que ça fonctionne.

On avait tantôt le ridicule ministre de la Sécurité publique qui est venu nous dire que le problème du tabac a commencé avec les libéraux. C'est nous, semble-t-il, qui avons fait en sorte de déclencher le problème de la contrebande. M. le Président, en 1994, nous avions réglé le problème de la contrebande. La contrebande qu'on voit présentement, ce n'est pas le fait des libéraux. Nous avions baissé les taxes en 1994 justement pour mettre fin à la contrebande. Nous avions enlevé aux contrebandiers la possibilité de faire des profits et, ce faisant, nous avions tué la contrebande.

Or, ce gouvernement-là, avec ses hausses successives de taxes sur le tabac, a fait renaître la contrebande, M. le Président, ce qui veut dire que des jeunes maintenant peuvent se procurer des paquets de cigarettes dans la rue. Et vous savez que les contrebandiers ne respectent pas les règlements qui veulent que les jeunes ne puissent pas s'approvisionner en tabac dans les centres légaux de distribution. Les jeunes, évidemment, profitent de la contrebande pour se procurer des paquets de cigarettes. Alors, ça nuit à la santé des jeunes, ça nuit à la santé de tout le monde et, M. le Président, ça fait en sorte que le gouvernement perd des revenus.

Des hausses de taxes, il y en a dans ce budget-là. Prenez, par exemple, dans la santé, le ministre nous dit: On a ajouté 300 000 000 $ dans la santé. On a ajouté 300 000 000 $, M. le Président, mais les coûts du système de santé, l'augmentation normale des dépenses, par exemple les frais d'électricité, les augmentations de salaires, etc., qui ont été consenties dans le passé, tout ça fait en sorte qu'effectivement ce n'est pas une hausse de 300 000 000 $, c'est une baisse de 158 000 000 $ dans la santé.

M. le Président, est-ce qu'il y a une hausse de taxes? Qu'est-ce qu'on dit aux personnes âgées, qui ont vu dans le budget de l'an dernier une augmentation de taxes indirecte par l'abolition des crédits d'impôt? On avait aboli, dans le budget de l'an dernier, le crédit d'impôt pour personne seule, pour les personnes de 65 ans et plus, les revenus de retraite, etc. Il y a trois crédits d'impôt qui ont été abolis l'an dernier, dans le budget, et dont l'impact se fait sentir cette année. Donc, les personnes âgées le savent, elles qui sont en train de faire leur rapport d'impôts présentement, que ça leur coûte plus cher cette année parce que le gouvernement a réduit, justement, aboli ces crédits d'impôt.

Donc, M. le Président, quand on dit qu'il n'y a pas de hausse d'impôts dans le budget, ce n'est pas exact. Prenez, par exemple, les tables d'impôts qui ne sont pas indexées. On sait qu'il y a une augmentation du coût de la vie, il y a une inflation. Or, si les tables d'impôts restent toujours au même niveau puis que le coût de la vie augmente, forcément, les gens paient plus d'impôts. Donc, le gouvernement, qui n'a pas haussé les tables d'impôts, a indirectement haussé les impôts. Donc, la déclaration du ministre des Finances est erronée, M. le Président. Ce budget-là comporte beaucoup de hausses de taxes et d'impôts.

Deuxièmement, ce budget-là, M. le Président, comporte des choses assez exceptionnelles. Vous savez qu'à chaque année le gouvernement a dans son budget un fonds de réserve, qu'on appelle le Fonds de suppléance. C'est un fonds qui est constitué pour permettre au gouvernement de pallier aux situations d'urgence, comme, par exemple, une crise du verglas, des inondations, etc. Traditionnellement, le gouvernement a autour de 200 000 000 $, ça dépend des années, de réserve dans le budget. Cette année, il y avait 200 000 000 $, à peu près, mais, dans le budget, le ministre a dépensé dans son budget 96 % de son Fonds de suppléance en distribuant des bonbons à gauche et à droite, de sorte que le Fonds de suppléance, à toutes fins pratiques, est épuisé avant même que ne débute l'année financière du gouvernement. Alors là, le gouvernement ne s'est laissé aucune marge de manoeuvre pour l'année qui vient.

Les hypothèses du budget, M. le Président, sont plus élevées que celles de l'an dernier. L'an dernier, le ministre s'était donné une grande marge de manoeuvre dans son budget pour faire en sorte de pallier aux coups durs qui auraient pu arriver en cours d'année. Il avait un fonds de suppléance, il avait des hypothèses de croissance économique très modestes. Cette année, le ministre s'est donné des hypothèses plus élevées, de sorte que sa marge de manoeuvre est beaucoup plus restreinte que l'année dernière. On verra ce que ça va donner en fin d'année, mais je crois qu'il est intéressant de le dire quand même.

M. le Président, dans son budget, le ministre a poursuivi le plan de réduction du déficit de façon à atteindre, l'an prochain, ce qu'on appelle l'équilibre budgétaire ou le déficit zéro. On se souvient que cette proposition de réduire le déficit à zéro avait été introduite la première fois dans le budget du 12 mai 1994 par le dernier gouvernement libéral. J'ai devant moi, M. le Président, le texte de ce qu'on avait dit en déposant le plan de réduction du déficit à zéro. On disait: «Les objectifs budgétaires et financiers du budget 1994-1995 reflètent la ferme volonté du gouvernement – on parle du gouvernement libéral, le gouvernement Johnson, comme on disait – de poursuivre le redressement des finances publiques du Québec. Par les mesures annoncées, le gouvernement entend réaliser son engagement d'équilibrer rapidement les opérations courantes, d'éliminer ensuite le déficit budgétaire et de réaliser des surplus financiers.» M. le Président, c'était à l'annexe B, page 3 du budget du 12 mai 1994. Et le plan des opérations financières, le plan de réduction du déficit était annexé, ce qui faisait qu'on atteignait un surplus budgétaire en l'année 1998-1999, c'est-à-dire en l'année courante.

(15 h 20)

Le gouvernement du Parti québécois, lors du Sommet socioéconomique de novembre 1996, a prolongé d'un an le plan de redressement, de sorte qu'on arrivera au déficit zéro non pas cette année, mais l'an prochain. M. le Président, nous n'en faisons pas un plat. C'est le choix du gouvernement et il a été entériné par les partenaires sociaux lors du Sommet socioéconomique. Nous sommes d'accord avec ce plan-là, comme nous étions d'accord lorsque nous l'avions déposé.

Lors de la campagne électorale 1994, c'est le chef du gouvernement d'alors, le député de Vaudreuil, chef de l'opposition, qui avait proposé une loi pour interdire les déficits. Le premier ministre Parizeau avait refusé d'adopter la loi. Son successeur a convenu de le faire, a accepté de le faire. Et, l'an dernier, il y a environ un an et demi, nous avons voté, tout le monde ensemble, une loi qui dorénavant interdit au gouvernement de faire des déficits et qui fixe les modalités de l'atteinte de l'équilibre budgétaire. L'opposition non seulement a désiré cette loi-là, M. le Président, l'opposition a souscrit à la loi et a voté en faveur de cette loi-là.

Donc, tous ceux qui prétendent, M. le Président, que le Parti libéral du Québec n'est pas d'accord avec le déficit zéro se trompent. Les faits, les documents prouvent le contraire. Nous avons toujours voté pour, nous avons exhorté le gouvernement à maintenir le cap sur l'équilibre budgétaire et il n'y a pas de changement dans la politique du Parti libéral du Québec ou de l'opposition.

M. le Président, ce que nous déplorons cependant, c'est les moyens que le gouvernement a pris pour y arriver. Ce gouvernement-là a pris des moyens tels que, pour atteindre le déficit zéro, il a été obligé de punir les Québécois en matraquant littéralement le système de santé, en privant les écoliers de manuels scolaires, en coupant d'une façon éhontée dans le régime de l'éducation du Québec. Le gouvernement a, en plus, joué dans la comptabilité pendant très longtemps, créé des fonds spéciaux, caché des dépenses, camouflé des dépenses, tricoté la comptabilité de façon à tenter de faire croire qu'on s'en allait vers l'équilibre budgétaire, alors qu'on faisait des dépenses qui n'étaient pas comptabilisées dans la comptabilité gouvernementale.

Le Vérificateur général l'a reproché sévèrement au gouvernement. L'an dernier, le Vérificateur a déclaré que, dans le budget du Québec, on avait caché 1 500 000 000 $ de dépenses qui auraient dû faire partie des dépenses du gouvernement et qui étaient complètement escamotées. Bref, les Québécois savent que ce déficit zéro vers lequel le gouvernement se dirigeait était en fait un déficit zéro plus des centaines de millions de dollars qui étaient soustraits de la comptabilité gouvernementale. M. le Président, il s'agissait donc d'un faux déficit zéro, réellement, parce qu'il y avait tellement de dépenses qui n'étaient pas inscrites à la comptabilité gouvernementale qu'on pouvait raisonnablement dire, comme le Vérificateur général l'a dit, que la comptabilité du gouvernement était fausse. C'est les mots propres du Vérificateur général.

Alors, cette année, on nous annonce, M. le Président, que tout ça est réglé, que la comptabilité gouvernementale dorénavant va être consolidée. Ça veut dire que toutes les dépenses qu'on va faire en dehors du périmètre comptable du gouvernement vont être ramenées à l'intérieur de la comptabilité pour des fins de présentation des états financiers. Donc, si j'en crois ce que j'en entends dire, dorénavant, on devrait avoir des rapports financiers qui décriraient de façon correcte la situation budgétaire du gouvernement du Québec.

Mais qu'est-ce qui s'est passé? Ce qui s'est passé, M. le Président, c'est que le Vérificateur général a pris connaissance des actions de ce gouvernement-là. Il s'est rendu compte que ce gouvernement-là avait dépensé au-delà de 3 000 000 000 $ pour faire partir 30 000 fonctionnaires, pour acheter le départ de 30 000 fonctionnaires – ce n'est pas une petite somme, M. le Président, qu'au-delà de 3 000 000 000 $ – et aucune de ces dépenses-là n'a été inscrite dans la comptabilité gouvernementale, alors qu'en vertu des règles existantes elles auraient dû l'être. Et le Vérificateur général l'a sévèrement reproché au gouvernement.

Qu'est-ce qu'on a fait? On a dépensé le 3 000 000 000 $ et on a passé ça directement à la dette nette du gouvernement. On a passé ça sous le tapis. On a escamoté ça de la comptabilité, M. le Président, sans que ça passe dans les livres comptables du gouvernement. Vous conviendrez que c'est assez pratique de pouvoir agir de la sorte: On peut dépenser des milliards sans avoir à payer le prix politique d'un déficit accru du gouvernement dans ses états financiers.

Le gouvernement a fait 1 800 000 000 $ de travaux sur le réseau routier du Québec, surtout des travaux de pavage, d'entretien, et tout ça a été mis dans des fonds spéciaux. On n'a chargé dans la comptabilité, imputé qu'une légère fraction de ces dépenses-là; tout le reste a été passé à la dette nette du Québec, directement à la dette, sans que ça passe par les dépenses gouvernementales. Encore là, M. le Président, c'est pratique: Le gouvernement fait 600 000 000 $ de travaux par année, il en passe dans les dépenses un sixième peut-être, même pas un sixième, un dixième, à peu près 60 000 000 $, ou 75 000 000 $ sur les 600 000 000 $, et le reste, ça s'en va dans la dette du Québec et ça ne passe pas par la comptabilité gouvernementale.

Alors, sur le réseau routier, près de 2 000 000 000 $, les départs assistés, au-delà de 3 000 000 000 $. M. le Président, d'une façon générale, dans l'opération dont on parle, le gouvernement a ajouté 24 000 000 000 $ à la dette nette du gouvernement. Ce n'est quand même pas rien. La dette nette du gouvernement dorénavant va être de 24 000 000 000 $ plus élevée. Et ceux qui ne me croient pas n'ont qu'à regarder dans le document Réforme de la comptabilité gouvernementale , page 15, où on donne des incidences, des modifications. Il y a quatre paragraphes, ce n'est pas très long.

Dans le premier paragraphe, on nous apprend que la dette directe a été augmentée de 3 900 000 000 $ l'an dernier; dans le deuxième paragraphe, on nous apprend que la dette nette a été augmentée de 13 500 000 000 $ en vertu de ces arrangements-là; et, dans le quatrième paragraphe, on nous annonce que 1 500 000 000 $ de plus en dette nette du gouvernement, 5 300 000 000 $ pour les autres organismes, plus un petit 740 000 000 $ et 335 000 000 $. Le 335 000 000 000 $, ça, c'est pour les coûts de restructuration des réseaux de la santé et des services sociaux.

Tout ça, M. le Président, ce sont des dépenses qui ne sont pas apparues dans les états financiers du gouvernement mais qui ont été mises directement dans la dette du gouvernement, glissées sous le tapis, comme on peut dire. On efface. Le Vérificateur général a dit au gouvernement: Ce que vous avez fait, c'est répréhensible, c'est mauvais, ça ne décrit pas bien l'état des finances publiques, mais je vais vous donner l'absolution à condition que vous ne recommenciez pas. C'est ça qu'il a dit.

C'est très pratique pour le gouvernement d'avoir fait ça, très pratique, parce que le gouvernement peut dire: Dorénavant, le Vérificateur général est d'accord avec nous, la comptabilité gouvernementale est maintenant consolidée; dorénavant, à l'avenir, on ne fera plus ça. Mais on l'a fait, par exemple. Ça, on l'a fait, et pas à peu près, s'il vous plaît!

Toutes ces dépenses qui ont été faites qui n'ont jamais été comptabilisées, ça donne un portrait de la situation qui est déformé. Les Québécois pensent aujourd'hui que le gouvernement va arriver à l'équilibre budgétaire. Bien, il faudrait qu'ils se souviennent qu'on a passé 24 000 000 000 $ à la dette du gouvernement sans que ça passe dans les dépenses budgétaires du Québec.

Et dans ce ménage qu'on a fait, il reste quand même une chose qui n'est pas consolidée, ce sont les réseaux de la santé et de l'éducation. Pour le passé, on a effacé; comme pour le reste, l'absolution pour le passé. Pour l'avenir, la question qu'on doit se poser: Qu'est-ce qui va arriver à l'avenir si les hôpitaux continuent à faire des déficits comme ils font présentement? Il y en avait pour quelques centaines de millions de dollars encore récemment, de déficit dans les hôpitaux. Dans le réseau scolaire, qu'est-ce qui va arriver s'il y a encore des déficits, et on sait qu'il y en aura?

Ça, ce n'est pas consolidé, ça, c'est en dehors du périmètre comptable du gouvernement. Alors, on pourra continuer à l'avenir à faire des déficits dans le réseau de la santé, dans le réseau de l'éducation, et ça ne sera pas reflété dans la comptabilité gouvernementale. Donc, on a oublié le passé, mais, pour l'avenir, la sanction ne sera pas là, le gouvernement ne verra pas ses déficits, à l'avenir, inscrits dans sa comptabilité, dans ses dépenses.

Alors, M. le Président, ça m'apparaît un peu étonnant. On devrait avoir des explications là-dessus, parce que, si on veut bien oublier le passé, oublier toutes ces dépenses qui ont été faites dans le réseau de la santé et des commissions scolaires, ne pas les inscrire à la comptabilité gouvernementale, bien, il faudrait au moins que dans l'avenir on se corrige. Si on veut des états financiers qui divulguent correctement la situation du Québec, il faudra qu'à l'avenir on le fasse. Mais ce n'est pas ce qui a été convenu. Donc, à l'avenir, on ne sait pas ce qui va arriver.

(15 h 30)

M. le Président, ça me fait penser que dans les réseaux scolaires, pour prouver ce que je viens de dire, le gouvernement a envoyé des directives au réseau scolaire leur disant, à l'égard du transport scolaire, étant donné que les commissions scolaires n'ont pas le 40 000 000 $ requis pour faire le transport scolaire – mon collègue le député de Marquette a produit en Chambre le document, les instructions envoyées au réseau scolaire: Empruntez sur trois ans les coûts du transport scolaire de l'année courante. Faut le faire, financer du transport scolaire sur trois ans! Et le gouvernement dit: Je prendrai à ma charge les intérêts, les commissions scolaires prendront à leur charge le capital du remboursement. Alors, 40 000 000 $. Les commissions scolaires vont faire le transport scolaire de l'année courante, elles vont le financer sur trois ans comme on finance une télévision, un lave-vaisselle. Qu'est-ce qui va arriver, l'an prochain? Le transport scolaire, on aura trois ans à payer le transport de cette année; l'an prochain, on va faire quoi? Donc, on voit que le gouvernement n'est pas guéri. Il a décidé de faire en sorte de consolider sa comptabilité, mais pour le passé. Pour l'avenir, il n'y a aucune garantie que le gouvernement va corriger les défauts passés.

M. le Président, pourquoi en sommes-nous arrivés là? Comment se fait-il que le gouvernement a été obligé de faire tout ça, de punir les Québécois dans la santé, dans l'éducation, de jouer dans la comptabilité autant qu'il l'a fait dans le but de maintenir le cap sur le déficit zéro? Bien, la raison est simple, c'est que le gouvernement n'est pas capable de générer une croissance économique suffisante pour que les revenus du Québec soient suffisants pour payer pour toutes ces dépenses-là. On le voit, on parlait récemment du taux de chômage. Le ministre a parlé du taux de chômage, de l'écart entre le taux de chômage du Québec et de l'Ontario qui se serait rapproché, dit-il. Bien, la réalité, la réalité toute nue, c'est que, jusqu'en 1976 – et il y a un article très intéressant qui est paru dans le journal The Gazette la semaine dernière et qui l'expliquait très bien, avec graphiques à l'appui – la différence entre le taux de chômage de Montréal et de Toronto – prenons Montréal et Toronto, les deux métropoles – n'était que de 1 %, et c'était depuis plusieurs années comme ça. Jusqu'en 1976, on avait 1 % d'écart entre Montréal et Toronto. Or, à partir de 1976, qui est la date de l'élection du premier gouvernement du Parti québécois – on sait le nombre de sièges sociaux qui ont quitté le Québec en 1976, lors de l'élection du Parti québécois – l'écart a commencé à s'élargir entre Montréal et Toronto, et, depuis ce temps-là, depuis 21 ans, l'écart moyen entre Montréal et Toronto est de 4 % dans le taux de chômage.

C'est drôle, hein, avant 1976, 1 %; depuis 1976, sur une période de 21 ans, 4 %. C'est donc dire que, depuis que le Parti québécois est arrivé au pouvoir la première fois, M. le Président, il a fait fuir littéralement les sièges sociaux, qui sont allés à Toronto, des centaines – on le sait, il y a au-delà de 100 sièges sociaux qui ont quitté Montréal pour Toronto. Depuis ce temps-là, le taux de chômage, l'écart entre Montréal et Toronto, c'est incroyable comment ça s'est accru, et évidemment les Québécois paient le prix depuis ce temps-là, paient le prix, on l'a vu l'an dernier. La croissance économique du Québec, l'an dernier, a été de 2,4 %, alors que, dans le reste du Canada, elle a été de 75 % plus élevée.

Est-ce possible que dans le reste du Canada on ait eu une croissance économique de 75 % plus élevée qu'au Québec? Depuis deux ans, le gouvernement du Parti québécois n'a créé que 13 % de tous les emplois créés au Canada. Nous sommes presque 25 % de la population; pourquoi ne créons-nous que 13 % de tous les emplois depuis deux ans? On a vu, M. le Président, même depuis l'arrivée du Parti québécois, depuis les trois dernières années, si on retourne de trois ans, qu'on n'a créé que 16 % des emplois au Canada. On est 25 % de la population.

Les investissements au Québec ont chuté, depuis l'arrivée du Parti québécois. Les investissements privés ont chuté de 15 % depuis trois ans, depuis l'arrivée du Parti québécois, et on sait que, quand les investissements chutent, M. le Président, les emplois évidemment sont moins nombreux. C'est ça, le problème: moins d'investissements, moins d'emplois. Et, quand il y a moins d'emplois, les revenus du gouvernement sont moins importants. Le gouvernement est privé de centaines de millions de dollars de revenus à cause justement du fait que la croissance économique au Québec est moins importante qu'ailleurs.

M. le Président, évidemment ça fait en sorte que le gouvernement, étant privé de ces centaines de millions de dollars là, est obligé de couper plus dans l'éducation qu'il devrait, de couper dans la santé plus qu'il devrait, est obligé de jouer dans la comptabilité pour maintenir le cap sur l'équilibre zéro. Or, un gouvernement du Parti libéral n'aurait pas à faire ces choix douloureux là. Un gouvernement du Parti libéral peut parfaitement conserver l'objectif du déficit zéro l'an prochain, et c'est ce que nous ferions, évidemment, tout en permettant de réinjecter des sommes dans la santé, dans l'éducation, à même les revenus additionnels que générerait la croissance économique accrue inhérente à la venue d'un parti qui ne menace pas de séparer le Québec du Canada. Et c'est ça qui est le problème: tant qu'on va maintenir la menace de la séparation du Québec, la menace d'un référendum, tant que ce gouvernement-là qui est le gouvernement du statu quo référendaire va continuer à faire fuir les investissements, bien on aura un gouvernement qui n'aura pas d'argent et qui devra punir les Québécois pour ses propres carences à lui.

Un gouvernement du Parti libéral n'aurait pas ces problèmes-là, pourrait réduire le déficit à zéro l'an prochain tout en augmentant les investissements dans la santé et dans l'éducation. C'est ça, la grosse différence entre le Parti québécois et le Parti libéral. Nous ne voulons pas séparer le Québec du Canada. Nous ne voulons pas faire de référendum. En conséquence, M. le Président – les entreprises le savent, les investisseurs aussi – le climat serait beaucoup meilleur au Québec avec un gouvernement qui coopère avec le reste du Canada qu'avec un gouvernement qui ne cesse de faire la bataille et la lutte au reste du Canada.

M. le Président, ce gouvernement-là qui recherche le déficit zéro – vous me ferez signe, M. le Président, quand il me restera... O.K.? – ce gouvernement-là qui prétend atteindre le déficit zéro a réellement atteint un objectif zéro, zéro en termes de qualité dans la santé, zéro en termes de qualité dans l'éducation, en termes de fourniture de manuels scolaires. C'est un gouvernement qui a fait zéro en termes de transparence dans la comptabilité gouvernementale. C'est un gouvernement qui est obnubilé par le référendum, par la séparation du Québec. Le premier ministre nous a dit que ça prenait des conditions gagnantes pour pouvoir faire un référendum. Conditions gagnantes, bien sûr, c'est un déficit zéro. Donc, un déficit zéro qu'on va atteindre à tout prix, même si ce gouvernement-là semble incapable de générer les revenus suffisants pour y arriver.

M. le Président, c'est triste, c'est bien triste, parce que c'est les Québécois, dans le fond, qui doivent payer pour les lubies référendaires de ce gouvernement-là. Si on avait un gouvernement qui réalisait tout à coup le mal qu'il fait à l'économie du Québec depuis 20 ans, en fait, avec l'option séparatiste, s'il réalisait comment les Québécois ont souffert et vont souffrir encore en termes d'emplois, en termes de création d'emplois et en termes de hausses d'impôts inhérentes à ce manque d'emplois, si les Québécois réalisaient un jour ce que c'est et si les Québécois réalisaient comment, avec un gouvernement qui n'est pas séparatiste et qui ne veut pas faire de référendum, la situation serait meilleure, je pense qu'on verrait des jours meilleurs à venir.

M. le Président, c'est le voeu que je formule en terminant, j'espère que le gouvernement va réaliser son erreur, que le gouvernement va réaliser comment il a fait tort à l'économie québécoise depuis qu'il est là avec ses lubies référendaires, avec ses menaces de séparer le Québec et qu'il va s'amender. J'espère que le gouvernement va s'amender, mais je n'ai pas trop, trop d'espoir. Mais j'espère surtout que les Québécois vont réaliser le prix que nous avons dû payer depuis de nombreuses années pour soutenir le statu quo référendaire de ce gouvernement-là, ce gouvernement qui est incapable de redresser l'économie du Québec parce qu'il s'est attaché, lui-même, au pied un boulet qu'il traîne malheureusement, le boulet de la séparation.

M. le Président, c'est le message que je voulais vous laisser, le message d'espoir, en terminant, l'espoir de jours meilleurs, de jours nouveaux où on va évacuer du paysage québécois cette épée de Damoclès qui nous pend sur la tête et où on va pouvoir revivre des années d'investissement, des années de plein-emploi, des années où un gouvernement va avoir les moyens de réinvestir dans la santé, dans l'éducation et, en même temps, de baisser les taxes et les impôts.

Voilà, M. le Président, ce que nous proposons et voilà ce que nous pourrons réaliser si les Québécois nous font confiance. Je vous remercie.

(15 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Laporte et critique officiel de l'opposition. Nous allons maintenant céder la parole au vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances. Alors, M. le vice-premier ministre, je vous rappelle que vous avez droit à une réplique d'un maximum de 60 minutes. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry (réplique)

M. Landry (Verchères): Je vous remercie, M. le Président, de me rappeler la générosité de notre règlement qui me permettrait de répliquer longuement au député de Laporte. Par ailleurs, je pense que je n'irai pas jusqu'au bout des minutes qui me sont allouées parce que, pour l'ensemble de notre collectivité, le débat sur le budget, il est terminé déjà depuis quelques jours, et même de nombreux jours. Et un des signes qui ne démentent pas, c'est quand l'opposition ne pose pas de questions sur le budget. Ça veut dire qu'il leur a fait mal jusqu'à un certain point – je ne veux pas employer des mots trop forts – qu'il les a humiliés, parce que les gens sont capables de faire des comparaisons entre nos budgets et les leurs. Ça veut dire qu'il y a eu une série de commentaires élogieux, dans la presse, qui font que l'opposition a quand même peur de contredire de façon diamétralement opposée et la droite et la gauche qui ont supporté les mesures du budget.

Alors, plus qu'à plusieurs autres époques de notre histoire, l'opposition officielle a un rôle ingrat en matière de budget, particulièrement cette année et depuis quelques années. En effet, ce que nous faisons patiemment une année après l'autre – j'avais déjà employé l'image de certaines personnes qui se débarrassent de leur dépendance à certaines substances, jour après jour, un jour à la fois – une année à la fois, le gouvernement remet de l'ordre dans le désordre indescriptible et le chaos non créateur qui ont été laissés par ceux qui sont aujourd'hui l'opposition officielle lorsqu'ils étaient au gouvernement. Et ils ne font pas de discours très longs sur les questions budgétaires pour cette raison-là, puis, à leur place, je n'en parlerais pas trop longtemps non plus.

Une chose que le député de Laporte a coutume de faire, par ailleurs, c'est d'essayer de défendre, lui, sa dernière prévision budgétaire erronée. Vous savez qu'il a été le dernier ministre des Finances du Québec avant que notre formation politique ne revienne au pouvoir et il s'était trompé, dans ses prévisions, de 1 200 000 000 $, c'est-à-dire plus que le déficit qu'il nous reste. C'était sa marge d'erreur, et son déficit, c'était 6 000 000 000 $. Alors, c'est pour ça qu'il ne fait pas de longs discours dans cette Chambre et que la période des questions sur le budget a été assez clairsemée, et qu'il nous a même quittés physiquement...

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): ...après nous avoir quittés intellectuellement depuis déjà quelques semaines. Ce n'est pas par sympathie pour lui que je dis ça, ni par antipathie d'ailleurs. C'est la dure réalité de la vie publique et de la condition humaine que nos actes nous suivent et que, pendant toutes les années du dernier mandat libéral, on a vu un Québec, dans ses finances publiques, non crédible, presque tricheur, presque menteur, ou incapable de savoir compter, qui, d'une année sur l'autre, faisait des prévisions budgétaires fantaisistes. Alors, le député de Laporte, le dernier, s'était trompé de 1 200 000 000 $; l'année d'avant, l'erreur était de 749 000 000 $; l'année d'avant, de 1 142 000 000 $; l'année d'avant, de 711 000 000 $; et l'année d'avant, de 1 000 000 000 $, c'est-à-dire mille millions.

Quand je vois le député de Laporte défendre son année – qui n'est pas défendable, d'ailleurs – j'ai un petit pincement de coeur parce que ça veut dire qu'il laisse tomber toutes les années antérieures de ses prédécesseurs libéraux qui faisaient la même chose que lui. Pas pire, non, c'est lui qui a battu tous les records, mais il y a quand même eu une erreur de 1 075 000 000 $ en 1990-1991.

Alors, nous, M. le Président, on a décidé de faire le contraire de ça. Je veux réitérer dans cette Assemblée nationale, à l'endroit de notre population, les raisons qui nous ont motivés à le faire. Souvent, on me dit: Vous faites ça pour les agences. Un instant. Les agences viennent très, très, très bas dans la liste, mais elles y sont, parce que, quand on doit près de 100 000 000 000 $, on n'est pas en mesure de rudoyer ses créanciers, une politesse de bon aloi s'impose. Mais ce n'est pas pour les créanciers qu'on fait ça. C'est pour la jeunesse québécoise d'abord, c'est pour des raisons morales, profondes, que ce gouvernement trouve indécent de repousser vers nos fils et nos filles et nos petits-enfants les excès de nos propres consommations ou des consommations des générations qui nous ont immédiatement précédés. Comment peut-on regarder en face la jeunesse québécoise montante et lui dire: Vous devrez vous sacrifier pendant des années et des années et des années, parce que nous n'avons pas su le faire nous-mêmes? C'est ça, la première raison. Elle serait suffisante à elle seule.

Il y en a d'autres, particulièrement pour un gouvernement progressiste. Ceux qui nous ont précédés, ce sont des libéraux, c'est-à-dire, suivant la doctrine classique du libéralisme qu'ils épousent plus ou moins bien, d'ailleurs... Même ça, ils ne le font pas très, très bien. Ils auraient pu être des bons libéraux, ils auraient pu, puisqu'ils représentent la droite au Québec, nous donner un bon gouvernement de droite. On aurait pu s'attendre à ça d'eux, eux qui avaient fait le rapport Gobeil, vous vous souvenez: On va mener l'État comme une business. Mais ils ne nous ont donné ni le travail honnête de la droite et encore moins celui de la gauche.

Notre deuxième motivation après celle que j'ai évoquée pour la jeunesse, c'est la motivation des progressistes québécois que nous représentons, qui veulent considérer comme sacrés nos réseaux de santé, nos réseaux d'éducation, nos réseaux de solidarité sociale. Nous voulons que la santé soit traitée, conservée, que les maladies et les épreuves physiques soient guéries au Québec d'une façon universelle et juste et gratuite. Si on veut continuer à pouvoir faire ça, il faut que nos finances publiques soient en ordre. Il faut qu'on soit capable de payer les frais matériels de cette immense machine de solidarité qu'est notre système de santé.

Notre système de santé, ce n'est pas une aventure matérielle et capitaliste, c'est une aventure sociale, une aventure de solidarité, sauf qu'il faut que les salaires soient payés, il faut que les instruments soient payés, il faut que les hôpitaux soient construits. Ça consomme des sommes d'argent faramineuses, des milliards et des milliards de dollars par année, une dizaine et plus, pour être plus précis. Quand on gaspille, comme on le fait présentement, 6 000 000 000 $ en intérêts seulement, c'est la façon la plus sûre de torpiller nos solidarités. Alors, deuxième raison, nous voulons que le Québec reste une terre solidaire et nous voulons qu'il en ait les moyens.

Il y a une symbolique extraordinaire, depuis le début de ce mois, M. le Président, qui accompagne les chèques de paie que l'État envoie aux centaines et centaines d'hommes et de femmes qui sont à son service, en commençant d'ailleurs par les députés de cette Assemblée, mais évidemment aux infirmiers et aux infirmières, aux enseignants et aux enseignantes, aux fonctionnaires de toutes catégories, ceux qu'on appelle «hauts fonctionnaires» comme ceux qu'on appelle «fonctionnaires» – puis ça ne veut pas dire que les uns sont plus hauts que les autres. Tout ce monde-là, pour la première fois en 20 ans, a reçu son chèque d'avril avec de l'argent qui venait des Québécois et des Québécoises et qui n'était pas emprunté à New York, à Tokyo ou à Londres.

Des voix: Bravo!

M. Landry (Verchères): C'est ce que peuvent faire des gens qui sont à la fois progressistes et qui sont de bons gestionnaires. Et, pour des progressistes, être de bons gestionnaires, ça demande des efforts plus grands encore. On s'attend de la droite qu'elle soit raide. Quand la gauche est obligée de l'être, comme ça va contre son coeur, comme ça va contre ses instincts, c'est plus difficile. Mais, pour la sauvegarde de nos solidarités, et la dignité, et l'honneur du Québec, M. le Président, nous ne reculerons devant rien qui puisse heurter nos sentiments mais qui soit contre notre conscience. Être progressiste, c'est d'abord être consciencieux et être solidaire.

(15 h 50)

Il y a aussi cette raison des agences. Le Québec a été décoté à plusieurs reprises sous nos prédécesseurs. Pour les non-spécialistes, l'immense majorité des gens, d'ailleurs – fort heureusement qu'on n'est pas tous spécialistes de la finance, parce que ça ferait un univers assez compliqué à vivre – une décote, c'est une décote. C'est des nouvelles dans les journaux, c'est Standard & Poor's, et c'est Moody's, et c'est Canadian Bond Rating Service qui disent que ça ne va pas bien et qui nous font passer d'un niveau de cote au niveau inférieur. Ça, c'est écrit dans les journaux. En soi, ça ne vaut pas le papier sur lequel c'est écrit. Dans la réalité, ça vaut des centaines de millions de dollars parce que ces financiers dont l'approche est très, très mathématique, ils ajustent le taux d'intérêt à la cote. Si on est décoté, on paie plus cher. Ça veut dire qu'on gaspille encore plus et plus d'argent. Déjà, il y a un 6 000 000 000 $ en faux frais par année. C'est comme si on le jetait dans le fleuve parce qu'on est endetté jusqu'aux oreilles. Bien, à chaque fois qu'il y a eu une décote, on a rajouté de ces faux frais. Et ça prend du temps à remonter une côte.

Le désastre qu'ils ont fait dans les finances publiques qui a conduit aux décotes, il n'est pas encore réglé après déjà quatre budgets bien faits et bien calculés et bien accueillis. Il y a eu une petite embellie la semaine dernière, M. le Président. Une des agences a enlevé ce qu'on appelle la perspective négative, le «negative outlook» pour employer l'espéranto des temps modernes qui sert de langage à la finance. Alors, là, on enlève le «negative outlook». Quand on enlève ça, ça veut dire qu'on peut maintenant penser à être coté à un niveau supérieur, mais il faut d'abord que cette chose arrive.

C'est ce qui rend d'autant plus dramatique l'erreur grandiose qu'a faite l'aspirant à la chefferie libérale, M. Charest, quand il a été dire qu'on pourrait retarder d'un an l'atteinte du déficit zéro. Toutes les raisons que je viens de dire, qui sont connues de l'ensemble de la population du Québec, qui sont supportées, comme le disent les sondages, par 70 % des gens, n'avaient pas encore atteint l'esprit de celui qui veut devenir le chef des libéraux. Ce n'est pas un détail, là, ce n'est pas se tromper sur le redressement d'un ponceau ou le trajet d'une autoroute; c'est se tromper sur un débat qui est au coeur du débat québécois depuis quatre ans, qui a été amorcé dans le Sommet de Québec, qui...

Que faisait M. Jean Charest? On peut encore l'appeler comme ça. S'il décide de se présenter dans cette Chambre, on pourra dire M. le député de x, y ou z, s'il est élu, mais, pour l'instant, on peut dire M. Jean Charest et peut-être qu'on pourra dire ça, d'ailleurs, éternellement. S'il continue avec des déclarations comme ça, il va garder son nom, il va garder son patronyme. On ne l'appellera pas par le nom de son comté parce qu'il n'aura pas de comté. Écoutez, aller se tromper sur une chose de cette envergure, menaçant quatre ans d'efforts de la population, de tous les agents économiques, des syndicats, j'espère que ce geste qui a mis son parti dans l'embarras... On l'a bien vu, ils n'ont pas voulu se prononcer pour des motions qui reprenaient leurs propres paroles. Ça, c'est vraiment se faire mettre dans l'embarras d'avance. Imaginez-vous ce que ce sera quand il y sera, si jamais il y est. C'est déjà assez spectaculaire aujourd'hui.

Alors, il faut faire bien attention, alors que notre société retrouve la santé financière, la santé économique, la crédibilité, pour des raisons fantaisistes, opportunistes et de politicaillerie à court terme, de ne pas massacrer les efforts d'un gouvernement sérieux qui s'attache à faire des choses difficiles mais essentielles depuis déjà quatre ans. Et ça, je le dis à nos compatriotes du Québec, ce serait tragique si le message qu'on inscrivait dans les moeurs politiques du Québec était que, si un gouvernement fait des choses difficiles, il doit s'en aller. Ça veut dire qu'il n'y a plus de gouvernements qui feront les choses qui doivent être faites, et notre démocratie irait en se dégradant et en se dégradant.

Je ne crois pas que la chose arrive, puisqu'on a été très bien supportés par notre population jusqu'à ce jour dans les choses difficiles qu'on a eu à faire. Mais on ne châtie pas la jeune fille qui arrive à la maison en disant: Je suis première de la classe parce que j'ai travaillé fort et j'ai fait ce qu'il fallait faire. Parce que, si on la châtie, ça va démolir à jamais toute sa motivation académique, c'est entendu. Notre société ne fera pas cela. Ce qu'a fait l'aspirant au cours des derniers jours, de remettre en question cet objectif fondamental, arrive à point nommé, parce que là on peut le dire ouvertement, à la face du Québec: Il ne faut pas croire une fraction de seconde ceux qui, de façon démagogique, voudraient nous faire quitter les voies du sérieux que nous avons enfin empruntées et qui commencent à être reconnues à l'intérieur de nos frontières comme à l'extérieur.

L'opposition également, d'une façon récurrente... et là leur chef à venir ne les entraîne pas à ça, ils sont déjà entraînés. Leur chef à venir a dit, par exemple, que c'était parce qu'on recherche le statut que le Québec mérite sur le plan constitutionnel que notre économie ne performe pas au niveau de l'Ontario. C'était l'une de ses premières déclarations. Ça, c'est du vieux couplet; ils nous disent ça régulièrement, le député de Laporte l'a encore dit en cette Chambre cet après-midi. Alors, sur ce point, ils sont sur la même longueur d'onde et ils sont dans l'erreur les uns comme les autres.

Je sais que, pour une certaine presse, essayer d'établir ce préjugé a été l'une des priorité de leurs 25 dernières années, de dire: Le Québec doit prendre son trou, le Québec doit se taire, le Québec doit accepter ce qu'on lui impose, sinon son économie ira mal. C'est une arme extrêmement vicieuse, hein? une arme extrêmement vicieuse qui va notamment diamétralement à l'encontre d'une des plus belles déclarations qui a été faite dans cette Chambre par un ancien premier ministre, qui s'appelait Robert Bourassa, qui, reconnaissons-le – ce n'est pas faire injure à sa mémoire – avait bien des qualités mais n'était pas d'une éloquence fulgurante. Ce n'était pas sa marque de commerce. Mais, dans les grandes circonstances, il lui est arrivé d'être extrêmement éloquent.

Une fois, je l'ai citée, cette phrase de Robert Bourassa, après l'échec du lac Meech et je m'étais trompé d'un mot, involontairement. Et le député de Laporte, qui est en face, qui m'écoutait, qui est un bourassiste, je crois, qui aimait bien Robert Bourassa, m'a envoyé, de sa main, la citation exacte, et je la garde par-devers moi depuis ce jour parce que c'est l'une des belles phrases qui a été prononcée dans cette Assemblée. Robert Bourassa a dit, le 23 juin 1990, la veille de notre fête nationale et après la catastrophe de Meech: «Le Québec est aujourd'hui et pour toujours une société distincte et libre d'assumer son destin et son développement.»

Si le Québec est libre d'assumer son destin et son développement, comme je le crois, quels sont ces procédés vicieux qui disent qu'à chaque fois qu'on veut exercer notre liberté ça fait mal à notre économie? Est-ce que c'est acceptable? C'est par ce couplet discordant que M. Jean Charest a inauguré sa carrière politique québécoise, en disant que l'économie du Québec allait mal à cause du fait que le Québec recherche son destin constitutionnel dans la dignité. Si c'était vrai, ce serait déjà inacceptable. Je mets donc un «si» énorme, là. Si Jean Charest avait raison et si les libéraux avaient raison, c'est quand même la phrase de Robert Bourassa qui serait vraie: «...libre d'assumer son destin» comme il le veut.

Prenons des exemples étrangers pour sortir de notre contexte. Si on avait dit à David Ben Gourion, père de l'État d'Israël: Aïe, arrêtez ça, vous allez avoir des taux d'inflation énormes, votre économie n'ira pas bien, votre croissance économique va être affectée, que se serait-il écrié en hébreux ou yiddish ou dans toutes les langues qu'il connaissait? Que ça n'avait rien à voir avec la dignité de son peuple et son droit de faire partie du concert des nations, ce qu'il finit par faire et ce que le monde entier finit par reconnaître en reconnaissant la naissance et en célébrant la naissance de l'État d'Israël, qui a été célébrée au Québec comme ailleurs et qui a emballé toute la jeunesse québécoise, dont votre humble serviteur qui a suivi ces événements, qui sont survenus après la Deuxième Guerre mondiale, avec fascination et enthousiasme. Mais Israël en a eu, des problèmes économiques, et en a encore, et n'a pas le développement du Québec, tant s'en faut, et a été obligé de supporter de lourds frais liés à des guerres et liés à des mésententes, pour employer un mot faible, avec ses voisins immédiats.

(16 heures)

Donc, même quand c'est vrai, un peuple est un peuple, une nation est une nation, et ce ne sont pas des considérations matérielles de court et de moyen terme qui doivent empêcher les peuples d'être libres, parce que les peuples qui, pour des considérations matérielles de court terme, ont décidé de ne pas être libres, ont été condamnés à jamais à végéter et à ne jamais atteindre même leur potentiel économique.

Mais ce n'est pas vrai que le Québec, à cause de ces deux référendums et de son grand mouvement démocratique vers sa liberté, a diminué son rendement économique, son efficacité économique et sa capacité. Pourquoi est-ce que je peux affirmer ça aussi carrément? D'abord, parce que c'est mon métier d'étudier cette question. Le ministre des Finances et de l'Économie, ou le ministre d'État au Développement économique que j'ai été, du gouvernement Lévesque, a dû ressasser des milliers de fois tous les chiffres pertinents à cette affaire.

Et que disent les chiffres? Un des bons indicateurs en particulier, celui du chômage, dit que l'écart entre le Québec et l'Ontario était à peu près le même qu'aujourd'hui, du temps de Maurice Duplessis, c'est-à-dire en 1949. Et, jusqu'à ce jour, la différence est la même. Il y en a eu une dizaine, de premiers ministres, entre Maurice Duplessis et Lucien Bouchard, qui ont dirigé le Québec. La majorité d'entre eux, d'ailleurs, à commencer par Duplessis lui-même, n'étaient pas des souverainistes. Évidemment, Bourassa n'était pas souverainiste, c'est bien entendu, bien que, avec la question de Bruxelles, il se soit rapproché quand même singulièrement de concepts près de la souveraineté. Mais l'immense majorité n'ont pas été souverainistes, y compris le gouvernement qui nous a immédiatement précédé, le dernier gouvernement Bourassa-Johnson. Pendant les quatre dernières années où ils ont été là – plus fédéraliste que ça, c'était difficile, quand même, là, pour le député de Vaudreuil-Soulanges qui nous quitte, en particulier, «Canadian first and foremost» – leur taux de création d'emplois net pendant leur mandat: zéro. Zéro!

Le moment de notre histoire économique où le taux de chômage différencié Québec-Ontario a été le plus élevé, c'est neuf ans après le référendum de 1980, 1989, et donc plusieurs années avant celui de 1995, alors qu'un certain Robert Bourassa était au pouvoir. C'est là que l'écart a été le plus élevé. Donc, cette thèse réductrice qui voudrait manipuler notre peuple et l'empêcher d'accomplir ce qu'il doit accomplir sous la menace de chantage économique – parce que ce n'est rien d'autre que cela – elle est fausse et elle est déshonorante, et jamais nous ne l'accepterons. Et jamais un économiste québécois sérieux n'acceptera une chose qui non seulement n'est pas vraie, mais ne doit pas faire partie de la logomachie et de l'arsenal politique vicieux qui voudrait qu'on reste une province à jamais, alors que nous avons la responsabilité, dans cette Assemblée, de représenter un peuple et une nation qui doit être traité comme tel. Au contraire, M. le Président.

Si on regarde ces thèses de près – et c'est ma conviction profonde et c'est celle que je partage avec les élus de notre formation politique et ceux du Bloc, à Ottawa, et avec des millions de Québécois et de Québécoises – si nous avions eu la liberté d'action, nous aurions fait beaucoup mieux sur le plan économique, ça va de soi. Il en va de la vie des peuples comme dans la vie privée. Quand on laisse les autres s'occuper de son affaire et décider pour soi... On n'est jamais si bien servi que par soi-même, comme dit le vieil adage. Et on n'est jamais si mal desservi, surtout dans les rapports entre les nations, que de confier ses affaires nationales à la majorité d'une autre nation qui a ses priorités et qui fait dans son propre intérêt. Mais c'est ce que le Canada a fait.

Je ne le dis pas avec agressivité contre le Canada, je n'ai jamais eu d'agressivité contre le Canada. Surtout que le mot était à nous, hein, puis la chose était à nous. Et, sans nous, il n'y aurait jamais eu d'hymne national. Ça a été composé par un citoyen de Sainte-Théodosie de Verchères, dans mon comté, à quelques kilomètres de l'endroit où j'habite, Calixa Lavallée. C'était l'hymne national du Québec. De feuille d'érable, comprenez-vous, sur des drapeaux, comment est-ce que des gens de Saskatoon ou de Moose Jaw auraient pu en avoir l'idée, alors que cet arbre n'y pousse même pas? Tout le monde sait que toute l'aventure canadienne ne nous inspire pas agressivité, c'est à nous, le Canada!

J'ai raconté dernièrement une anecdote qui m'avait beaucoup marqué, parce qu'on faisait grand état d'un sondage où les Québécois se disaient Canadiens et Québécois en même temps. Je comprends, de plus en plus ils se disent Québécois, mais, il y a 50 ans, tout le monde se disait Canadien. L'anecdote, c'est celle que j'avais vécue en allant inaugurer la Délégation du Québec à Rome, où il y avait un groupe de soeurs qui participaient à la réception. Je suis allé leur parler – ce sont des personnes très gentilles et très affables – et je leur avais dit: D'où venez-vous, mes soeurs? Elles ont dit: Nous sommes toutes Canadiennes, sauf une de Calgary.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): C'était ça, le langage du temps chez certains Québécois et certaines Québécoises. Alors donc, M. le Président, je ne le dis pas avec agressivité, j'affirme, après 30 ans et plus d'observation des économies québécoise et canadienne, que notre appartenance au Canada nous a coûté très, très cher, par une série de politiques constantes et adverses au développement économique du Québec.

Un des plus grands malheurs qui peut arriver à un peuple, c'est de perdre une partie de sa population. Ça nous est arrivé dans le Canada. Au moment de la Confédération, en 1867, jusque vers 1935, les Québécois et les Québécoises se sont bien rendus compte que, après la pendaison de Riel, ils étaient mieux reçus aux États-Unis d'Amérique, où ils sont allés par millions. Comme on le sait, on a perdu pratiquement la moitié de notre population, dans ce Canada qui était un appendice économique de l'Empire britannique, avec un axe de Londres à Halifax, à Montréal, à Toronto, à Winnipeg et, plus tard, jusqu'à Vancouver. Déjà, donc, dans son histoire ancienne, le Canada nous a coûté cher.

Dans son histoire contemporaine, le Canada nous a coûté cher. Le Canada, par exemple, qui est contrôlé dans son gouvernement central. Ils appellent ça «gouvernement national», mais ils se déguiseront de toutes les façons, ce n'est pas un gouvernement national. Il n'y a qu'au Québec, ici, qu'il y a un gouvernement national, qui peut se réclamer national pour le Québec. Nous sommes dans l'Assemblée nationale et de cette Assemblée nationale découle un gouvernement national. Dans le gouvernement central, ils ont pris une série de décisions qu'ils ont pensé être les bonnes et qui souvent ont été les bonnes pour le Canada, en particulier une série de décisions qu'un des grands critiques de l'économie canadienne, Robert Bourassa, a condamnées 100 fois plutôt qu'une, et ça a été les décisions de la Banque du Canada.

Je résume comment ça se passait. Ça nous a coûté des centaines de milliers d'emplois. Robert Bourassa l'a dit à plusieurs reprises, je le redis brièvement. La Banque du Canada prend l'intérêt de l'ensemble du Canada. Il n'y a qu'une monnaie. C'est une monnaie unique et commune. L'Ontario, qui a été développé très rapidement par les Américains – parce que le coeur économique de l'Ontario, on sait c'est quoi, c'est Ford, GM et Chrysler – était souvent en état de surchauffe, c'est-à-dire que l'économie ontarienne tournait tellement près de sa capacité potentielle et même des fois un peu au-delà que ça développait de l'inflation, ça développait des tensions. La Banque du Canada, comme c'était son devoir parce qu'elle gère la monnaie pour tout le Canada, appliquait les freins avec une brutalité extrême, alors qu'au Québec on n'était pas encore rendu au potentiel. Bon. Alors, prenons une autre image. C'est comme si l'Ontario avait été enfiévré puis qu'on avait pris un grand sac de glace et on avait mis ça sur la tête de l'Ontario, mais on l'avait fait dépasser sur la tête du Québec, mais le Québec, lui, était gelé encore.

Ils ont fait ça 17 fois de suite par des mouvements conjoncturels. À chaque fois, à chaque fois, ils nous ont causé un tort économique considérable. La preuve est beaucoup plus forte et puissante que c'est notre appartenance au Canada qui nous a coûté cher, contrairement à ce que disent les libéraux, que c'est notre volonté de réorganiser nos rapports avec l'autre peuple. Alors, la gestion conjoncturelle, en particulier, est un de ces exemples. Mais ça, on peut dire que la Banque du Canada, en tout bien et tout honneur, gère la monnaie et n'a pas à s'occuper de telle région ou de telle autre, et c'est vrai. Sauf que le gouvernement fédéral, lui, qui aurait dû au moins compenser par une série d'actions étatiques dont il avait le contrôle, aurait pu le faire, il ne l'a pas fait. Il a accusé l'action et les méfaits des résultats de la politique monétaire de la Banque du Canada. Comment il a fait ça? Il a fait ça par les dépenses en recherche et développement. Depuis qu'on sait compter, les dépenses en recherche et développement, le Québec n'a jamais eu sa part. En général, il franchissait le 15 %, 17 %. Il y a quelques années, un de mes collègues d'Ottawa dit: Bien là, cette année, vous ne pouvez pas vous plaindre, vous avez 22 %, c'est à peu près l'équivalent de votre population. Il venait d'avouer qu'ils nous avaient roulés pendant 25 ans, alors qu'ils nous tenaient à 17 % puis qu'on aurait dû être à 22 %. Et même son 22 %, quand on l'a réexaminé, n'était pas exact.

(16 h 10)

Donc, recherche et développement, qui font la force des nations modernes, c'est le Québec, par ses politiques, qui a réussi à sauver les meubles, parce que le gouvernement du Canada a toujours fait porter son effort en dehors des frontières du Québec, même si c'est la seule province industrialisée, avec l'Ontario, et qu'elle comportait jusqu'à 30 % et 30 % et quelques de la population il n'y a pas si longtemps, avec 25 % aujourd'hui.

Dépenses de subventions aux entreprises. Jamais le Québec n'a eu sa part. Et le gouvernement du Canada a été très, très subventionnaire. Quand on sait qu'on subventionne, à Terre-Neuve, l'exploitation d'une richesse non renouvelable, le pétrole et le gaz, qui devrait être portée par les marchés. S'il y a quelque chose qu'on garde et qu'on attend qu'elle soit portée par les marchés, c'est bien une richesse naturelle. Subventionner la vente à un prix qui n'est pas celui des marchés d'une richesse non renouvelable, c'est vouloir piller soi-même son propre pays. Ça a été fait, ça a été fait à Terre-Neuve, ça a été fait dans diverses autres parties du Canada. On n'a jamais eu notre part des subventions.

On n'a jamais eu notre part des dépenses militaires. Une fois, on a failli les avoir, quand Marcel Masse était ministre de la Défense du Canada, dans le contrat des hélicoptères. Là, on aurait un peu renversé les choses. Vous savez comment ça s'est fini: le contrat a été annulé. Pour la seule fois, on aurait dû avoir notre part; on ne l'a pas eue.

Même chose, M. le Président, encore jusqu'à ce jour, là – ça fait 30 ans qu'on suit ça de près et que ça dure – pour les achats du gouvernement du Canada, les dépenses en biens et services. Le gouvernement du Canada est un très gros acheteur. Jamais le Québec ne vend sa part des achats du gouvernement du Canada.

Pour une chose, enfin, très simple: les fonctionnaires. Le gouvernement du Canada a évidemment – c'est le septième pays du G 7, un pays d'une trentaine de millions d'habitants – un très grand nombre de fonctionnaires. Jamais les Québécois et les Québécoises n'ont obtenu plus de 17 % environ des postes de fonctionnaires du gouvernement du Canada, alors qu'ils forment encore le quart de la population.

La voyez-vous, M. le Président, cette hémorragie économique? Hémorragie économique qui, à cause du chômage qu'elle a causé, a déterminé une hémorragie sociale, parce que le plus grand malheur social, c'est évidemment le chômage. Et les gouvernements du Québec, celui qui nous a précédés en particulier, au lieu de faire une lutte vigoureuse dans leur action de tous les jours contre ces méfaits de la gestion économique du gouvernement du Canada, en ont plutôt été un valet servile en l'accompagnant dans toutes ses grandes opérations politiques, en ne le dénonçant pas dans ses injustices.

Quand le député de Laporte s'est levé dans cette Chambre pour dire, contrairement à Robert Bourassa qui l'a fait à plusieurs reprises, pour condamner des politiques du gouvernement du Canada qui étaient diamétralement opposées aux intérêts du Québec? Robert Bourassa a eu le courage de le faire, je l'ai dit, pour la conjoncture. Il a été un de ceux qui ont compris le plus rapidement le phénomène et qui l'ont dénoncé le plus souvent.

Quand avez-vous entendu des banquettes de l'opposition officielle ou quand les avez-vous entendus, quand ils étaient au gouvernement, dénoncer le fait que le Québec n'a pas sa part de la recherche et développement au Canada? Dénoncer le fait que le Québec n'a pas sa part des achats gouvernementaux militaires ou civils? Dénoncer le fait que le Québec n'a pas sa part des hommes et des femmes qui travaillent dans la fonction publique fédérale? Jamais!

Servilité, servitude, complaisance! Mais ils sont prompts à se lever, par exemple, pour dénoncer le désir du Québec d'obtenir justice, d'obtenir sa place dans le concert des nations, d'obtenir sa place dans l'espace économique canadien, d'ailleurs, puisqu'il n'est pas question de le fragmenter, au contraire. On a vu encore, la semaine dernière, le gouvernement du Canada, par son premier ministre, qui veut non seulement faire un espace économique nord-américain, l'ALENA, dans lequel nous sommes déjà, mais qui veut en faire un pour les trois Amériques, incluant l'Amérique centrale et celle du Sud.

Ça, ça serait faire oeuvre utile de la part de l'opposition officielle du Québec, et ça aurait été faire oeuvre utile de la part du gouvernement du Québec, quand ils étaient au gouvernement, de vouloir inscrire, dans la justice et dans l'équité des dépenses publiques, le Québec dans ses relations avec le reste du Canada.

Non seulement ils n'ont pas fait ça, M. le Président, ils veulent, avec des arguments que j'ai qualifiés plus tôt dans mon intervention, nous empêcher, nous, de le faire et empêcher le Québec de régler ses problèmes économiques, ses problèmes sociaux et ses problèmes constitutionnels en même temps. Bien, c'est de ça qu'il s'est agi dans le présent budget.

C'est la raison pour laquelle il a été si bien accueilli, c'est la raison pour laquelle la confiance renaît au Québec, c'est la raison pour laquelle, au chapitre des investissements, le député de Laporte a dit – il n'a pas appris grand-chose à grand monde en disant ça – que les investissements déterminaient la création d'emplois future. Bien oui. Mais je vais lui en parler, d'investissement. C'est un tableau qu'il connaît, je le lui ai déjà montré en commission parlementaire. Alors, c'est un tableau qui lui fait honte. C'est pour ça qu'il essaie de ne pas écouter quand j'en parle. C'est le tableau des investissements non résidentiels privés au Québec de 1995 à 1998. Les investissements non résidentiels privés, c'est ça qui fait marcher l'économie, les investissements dans les usines. Une hausse de 33,1 %, donc une hausse du tiers. Qu'est-ce qui s'est passé immédiatement avant, à partir de 1990? Je vais vous donner des années très significatives et impressionnantes, 1990, 1991, 1992, 1993, 1994. Ça correspond au dernier mandat, en gros, de Robert Bourassa. Effondrement des investissements au Québec, moins 2,8 % en 1990. Ça veut dire que non seulement ça ne croît pas, ça décroît. Moins 14,7 % en 1991, moins 7,7 % en 1992, moins 5,8 % en 1993; petite reprise en 1994, 5,4 %. Disons qu'on peut la leur attribuer, parce qu'on est arrivés en septembre. Mais, quatre ans de suite...

M. Bourbeau: ...récession.

M. Landry (Verchères): ...les investissements s'effondrent. Le député de Laporte me crie: Récession. Non. Faut être cohérent. Ce n'est pas récession, dans son langage, c'est séparation. Il dit que c'est à cause de la séparation que les investissements baissent. Alors, quand les souverainistes sont revenus au pouvoir, notre première année complète, en 1995, déjà une hausse de 1,2 %; en 1996, hausse de 11,8 %; en 1997, hausse de 7,4 %; en 1998, hausse de 9,5 %. Effondrement, du temps des complaisants; effondrement, du temps des serviles; effondrement, du temps des à genoux; remontée fulgurante, du temps des debout.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): Ça veut dire, M. le Président, que le Québec, par sa recherche de souveraineté, par sa recherche d'égalité non pas avec les autres provinces, même si les autres provinces sont tout à fait estimables... On n'a rien contre le Nouveau-Brunswick et nos frères et soeurs d'Acadie, ni ceux qui ne sont pas Acadiens non plus. Il paraît que l'eau est chaude, en plus, alors on n'a rien contre ça, là...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): ...sauf que le gouvernement actuel du Québec ne cherche pas dans la servilité l'égalité avec les autres provinces, il cherche dans la dignité l'égalité avec les autres peuples. Et, ce faisant et à chaque fois que c'est arrivé, on a vu l'économie du Québec se restructurer, se redresser, les divers groupes prendre espoir.

L'opposition se dit amie des grands hommes d'affaires et femmes d'affaires, et c'est vrai dans certains cas. Ils ont des appuis très voyants, et très pondéreux, et très trébuchants en espèces sonnantes et trébuchantes, comme on dit. Tant mieux pour eux autres. On n'en disconvient pas. Nous autres, on a un système de financement populaire, ouvert, transparent, bien connu. C'est un héritage de René Lévesque, et puis j'espère qu'ils le respectent, eux aussi. Mais, même ces gens d'affaires qui sont leurs amis, dans leurs discussions au sujet des finances publiques, de la gestion du Québec, de la gestion du présent gouvernement, sont tellement heureux que ce ne soient pas leurs amis qui gouvernent le Québec, ils sont tellement heureux de voir que c'est le gouvernement du Parti québécois qui enfin remet de l'ordre dans les finances publiques, remet de l'ordre dans la gestion de l'État et, par conséquent, favorise le retour de la prospérité et le retour de la croissance, ce que ce tableau des investissements démontre bien, même à ceux qui regardent à la télévision. Ils ne l'auront pas en couleurs, parce que c'est une photocopie que j'ai, mais ce qui est en bas de la ligne, là, ce qui est en rouge, c'est du temps des rouges, ça. Ce n'est pas des fonctionnaires facétieux qui l'ont fait exprès. Les couleurs du déficit, les couleurs en dessous de la ligne, c'est rouge. Bon! Alors, on était dans le rouge.

(16 h 20)

Ce qui est en haut de la ligne, bien, c'est depuis que nous sommes là. Et là nous voyons l'économie du Québec se restructurer d'une façon vigoureuse.

Le député de Laporte, toujours en essayant de diminuer ce qu'est le Québec, de diminuer nos efforts, faisait des comparaisons Montréal-Toronto pour la croissance à partir de 1976. C'est très, très vicieux comme approche. Il s'est bien gardé de faire des comparaisons Québec-Ontario, comme je les fais moi-même. Pourquoi est-ce qu'il a pris Montréal-Toronto, pensez-vous? Pour essayer de faire son petit point partisan à l'encontre de la souveraineté. Tout simplement parce que la croissance dans la grande région de Montréal, et je suis le premier à le regretter, pour la ville de Montréal, s'est faite à Longueuil, à Laval, à Brossard. Mascouche, qui dans ma jeunesse était un village de 2 500 habitants à peu près, est devenue pratiquement aussi importante que la ville de Joliette aujourd'hui, enfin, ou presque. La ville de Laval, qui était un ramassis de 26 villages, est devenue la deuxième plus grande ville du Québec avec 300 000 habitants, avec une croissance économique fulgurante.

Alors, c'est vrai que Montréal était en difficulté. On pourrait en parler longtemps et chercher les causes, mais personne utilisant des journaux de propagande qui présentent toujours les choses de la même façon n'ira attribuer au présent gouvernement les malheurs de Montréal, qui ont commencé à se dessiner vers 1955 et qui vont se régler un jour, je l'espère. Mais la restructuration de l'économie du Québec, elle s'est faite, elle se fait et elle continue à se faire.

Je n'ai jamais compris la frilosité de nos amis d'en face par rapport à l'économie du Québec. L'économie du Québec, c'est la quinzième puissance économique du monde, la quinzième; pour l'aéronautique et l'espace, c'est la sixième. Bombardier est le troisième avionneur de la planète et M. Laurent Beaudoin, c'est quelqu'un de très important, je n'en disconviens pas, il est très important dans Bombardier. D'ailleurs, j'ai eu l'occasion de faire une lutte fabuleuse à ses côtés. C'est la seule qu'on a faite du même bord, par ailleurs, mais c'était pour le libre-échange. Et contre qui est-ce qu'on se battait? On se battait contre Jean Chrétien, puis on se battait contre les libéraux, puis on se battait contre des gens qui vont se battre les flancs aujourd'hui pour dire qu'ils vont faire... Non, pas notre ami le député d'en face. Non. C'est vrai, les libéraux provinciaux, comme ils aiment à le dire, n'étaient pas en accord avec la maison mère ce coup-là, mais la maison mère n'était pas au pouvoir. Et on se battait contre John Turner, et, enfin... Bon.

Alors, je reviens à M. Laurent Beaudoin, qui est sûrement un très grand chef d'entreprise. Il ne sera pas fâché si je lui dis que mes trois neveux qui travaillent dans son entreprise sont des gens très importants aussi pour l'économie et que les milliers et les milliers de travailleurs de l'aéronautique et de l'espace, qui nous ont généralement supportés massivement au dernier référendum, comme dans toutes les élections, ont un rôle à jouer dans le succès économique du Québec, aussi. Il ne faut pas l'oublier.

Des voix: Bravo!

M. Landry (Verchères): On a des grands chefs d'entreprise. Il y en a qui sont contre nous; il y en a qui sont pour nous. Le regretté Pierre Péladeau, par exemple, n'a jamais fait mystère de sa pensée et de son coeur vis-à-vis du destin du Québec. Pierre Péladeau, c'est ce jeune homme qui a emprunté 1 500 $ à sa mère il y a 25 ans et qui a construit une entreprise qui aujourd'hui est le deuxième imprimeur de la planète Terre. Il a toujours dit que son entreprise s'était construite comme le Québec devait se construire: dans l'enthousiasme et non pas dans la peur, dans l'audace et non pas dans la soumission et l'écrasement. Ça aussi, c'est un chef d'entreprise respectable et respecté.

Ce qui fait que, contre vents et marées, malgré tout ce que j'ai dit de l'influence néfaste du gouvernement du Canada, le gouvernement du Québec et l'économie québécoise ont réussi, malgré des errements et des erreurs comme on en voit partout, à construire aujourd'hui la base d'un prodigieux espoir. Et ce que j'appelle parfois le paradoxe québécois, et j'en ai parlé dans le budget, est sur le point, à mon avis, de se dissiper. Le paradoxe québécois, c'est qu'on a tout pour réussir, tout est en place, on a les richesses naturelles, on a la main-d'oeuvre, on a les chefs d'entreprise, on a les moyens de financement, on a maintenant les investissements qui sont repris vigoureusement depuis quatre ans, comment se fait-il qu'on ait un taux de chômage aussi élevé? La réponse à ça, c'est que, d'abord, le taux de chômage, il a baissé très sérieusement au cours des dernières années. On était à 10,1 %, M. le Président. Eux, quand ils étaient au pouvoir, ils ont connu des 13 % et des 14 %. Ils ont connu des 10,1 %; 10,1 % le mois dernier, il faut remonter à pratiquement 10 ans.

Et j'espère et je crois, et tous mes collègues du Conseil des ministres, et le premier ministre en tête, qui partagent cette ardeur, j'espère qu'on va aller à en bas de 10 %, à cause de l'action de nos entrepreneurs, de nos travailleurs, à cause aussi du soutien puissant que donne le gouvernement du Québec – qui n'est pas un gouvernement libéral – à notre économie. Et les nombreuses mesures du budget sont là pour le prouver.

Et ce n'est pas rien que les mesures. C'est l'atmosphère que ce budget établit, c'est la croyance en la solidité de la gestion de leur gouvernement national qui fait que les Québécois et les Québécoises ont repris espoir, qui fait que les étrangers... Parce que, dans les investissements dont j'ai parlé, il y en a plusieurs, évidemment, qui sont d'origine étrangère, des investissements spectaculaires qu'on a vus à Montréal, comme dans toutes les autres régions du Québec, souvent en très haute technologie. Au cours des dernières années, et largement à cause des efforts du gouvernement, Montréal est devenue une capitale du multimédia, comme vous le savez.

Il y avait évidemment de grands esprits et des gens qui étaient capables de faire naître cette industrie, mais qui avaient besoin d'un support puissant, que nous leur avons donné. Montréal se consolide dans ces disciplines les plus pointues, les plus avancées. Mais les régions du Québec aussi – dont notre capitale nationale – sont aussi engagées vigoureusement dans les mêmes avenues.

Il y a des entreprises de haute technologie dans toutes les régions du Québec maintenant, dans toutes les capitales régionales, souvent autour de l'Université du Québec, qui a joué un rôle déterminant – une des grandes institutions de la Révolution tranquille – autour des collèges, mais autour des PME, autour de cette tradition d'entrepreneurship qui est plus vigoureuse parfois même en région qu'elle ne l'est à Montréal, qui, s'étant industrialisée plus rapidement, a aussi connu sa décadence plus rapidement.

Mais on peut dire maintenant que le soleil économique et le soleil de la prospérité luit partout, même à Montréal où on a vu un redressement assez spectaculaire au cours des dernières années et qui devrait se continuer.

C'est la raison pour laquelle, M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que nous avons présenté ce budget à la population du Québec. C'est la raison pour laquelle il a été généralement très bien accueilli. C'est la raison pour laquelle l'opposition n'a pratiquement pas posé de questions. L'opposition n'a pas pu structurer de critique vraiment sérieuse du budget. C'est la raison pour laquelle, en particulier, la transparence des nouvelles méthodes comptables, qui aurait dû être acquise depuis quelques décennies, complique encore la tâche de l'opposition et la tâche de la critique.

Je le sais. Je le sentais. Je les avais vu venir dans diverses publications, dans les questions de notre ami le député de Laporte en Chambre. Il pensait qu'il allait démolir le budget à l'aide des méthodes comptables et à l'aide du Vérificateur général. Parce que le Vérificateur général, depuis 20 ans, effectivement, disait que certaines choses ne devaient plus se faire et que des réformes étaient requises. Nos amis d'en face n'ont pas fait ces réformes mais auraient été bien aise de se servir des propos du Vérificateur général pour essayer de démolir le formidable effort de remise en ordre de nos finances que nous avons fait. Et ce dernier espoir leur fut enlevé.

La dernière capacité technique qu'ils auraient pu avoir d'attaquer notre marche vers le déficit zéro leur fut enlevée par un rapport préparé par le ministère des Finances, par le Vérificateur général et le Contrôleur général, et signé par toutes les parties, qui a doté, en plus, le Québec des méthodes comptables les plus avancées, les plus modernes du Canada et, comme l'a dit le Vérificateur général et pour reprendre son expression, a mis le Québec en avant de la parade en matière de méthodes comptables.

(16 h 30)

Alors, la forme est puissante, de la comptabilité. Elle est claire. Elle est transparente. Elle est transparente pour nos administrés, pour les contribuables du Québec, qui peuvent savoir ce que l'on doit, ce que l'on ne doit pas, ce que l'on rentre, ce qu'on sort. Elle est transparente pour nos créanciers. C'est nécessaire, quand on doit ces sommes d'argent – comme je l'ai dit – d'avoir la plus grande transparence, de façon à payer les taux d'intérêt les plus bas possible. Effectivement, dans les jours qui ont suivi le budget, les taux d'intérêt payés par le gouvernement du Québec ont relativement baissé par rapport aux autres titres, ce qu'on appelle l'écart, le «spread», pour employer toujours le vocabulaire anglo-saxon de la finance, s'est resserré.

Ça, il n'y a pas de discours de l'opposition qui peuvent aller contre une réalité aussi puissante, c'est celle des marchés. Les marchés ont arbitré. Les marchés ont accueilli le budget. Mais encore une fois – et c'est ce que je dis en terminant – on ne fait pas le budget pour les marchés, on ne fait pas le budget pour les financiers, on fait le budget pour les hommes et les femmes qui habitent le Québec, on fait le budget pour que les sommes qu'ils nous confient en impôts et taxes soient bien gérées, on fait le budget pour que le plus rapidement possible la ponction que l'on fait de leurs revenus en impôts et taxes soit enfin baissée.

Et vous savez qu'on a commencé à baisser. Nos contribuables, cette année, paient 500 000 000 $ d'impôts et de taxes de moins, incluant la taxe de vente – parce que c'est vrai qu'il y a eu une hausse de la taxe de vente l'an dernier – mais incluant cette hausse, la somme algébrique, tout compté, comme on dit, les gens ont 500 000 000 $ de plus dans leurs poches. Et ce que nous leur promettons dans le présent budget... à moins que des démagogues opportunistes ne viennent retarder le jour où on atteint le déficit zéro, ce qui ne se peut, ce qui ne se peut! À moins que cette chose, hypothèse impossible...

Une voix: ...

M. Landry (Verchères): C'est vrai. On peut compter sur l'appui de l'aile parlementaire du Parti libéral provincial pour nous prémunir des excès de leur futur chef. C'est ça que j'ai compris, hein?

Des voix: ...

M. Landry (Verchères): Oui, écoutez bien, s'il reste encore quelque démocratie dans ce parti, par ailleurs, parce que là, ils se font imposer leur chef par le Canada anglais, et par le Parti libéral et par le Parti conservateur. Avant, on disait que c'était une filiale du Parti libéral d'Ottawa; c'est une filiale des deux, des conservateurs et des libéraux. Si jamais il leur reste encore quelque chose à dire. Il n'y avait personne dans leurs rangs pour occuper le poste de dirigeant, mais ça ne veut pas dire que, parce qu'on n'est pas chef, on n'a pas le droit de parler, hein, n'est-ce pas?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Landry (Verchères): De notre côté, en tout cas. Alors, vous pourrez nous imiter. Si jamais votre futur chef voulait ruiner les espoirs du Québec en matière de retour à la salubrité des finances publiques, nous comptons sur le député de Laporte et ses quelques autres collègues pour empêcher qu'une telle aberration ne se produise.

Et je conclus donc en disant qu'on ne fait pas le budget pour les financiers, on ne fait pas le budget pour l'opposition officielle, ni pour le gouvernement d'ailleurs, on le fait pour les hommes et les femmes qui habitent le Québec. Et je suis non pas satisfait, car on ne l'est jamais dans ce genre d'oeuvre, mais je suis fier de dire que notre gouvernement, autant sur le chemin de la solidité financière et budgétaire que sur le chemin de la solidité économique du Québec, a fait ce qu'il fallait faire, que la population s'en rend compte et que nous continuerons à faire ce que nous avons fait jusqu'à ce jour. Mais maintenant l'heure de la récolte approche; nous continuerons à gérer le Québec sérieusement, mais nous récolterons les fruits des années sérieuses et des années de labeur.

C'est déjà commencé. Ce sera déjà beaucoup mieux l'an prochain. Je crois que les 12 prochains mois, en matière de création d'emplois, en matière d'investissements, fracasseront des records de plus d'une décennie. L'an dernier, c'était la meilleure année des 10 dernières; je présume que cette année nous pourrons remonter encore plus loin. Mais qu'on se dise bien que cet État national qui est le nôtre, qui ne possède qu'une partie de ses moyens financiers, qui ne possède qu'une partie de ses moyens juridiques ne pourra jamais donner aux Québécois et aux Québécoises les services impeccables qu'ils mériteraient d'un gouvernement national complet, ce qu'ils auront un jour.

Et, s'il ne dépend que de nous, ce jour sera bientôt et proche, quels que soient les Cassandre et ceux qui veulent nous menacer avec des arguments matérialistes nous empêchant d'accomplir ce que Robert Bourassa appelait «notre destin» et que nous allons chercher, n'en déplaise à l'opposition officielle, en toute liberté et en toute dignité, sur le plan de l'économie et des finances comme sur le plan de la culture et sur les divers plans de notre vie collective.

Des voix: Bravo!

(Applaudissements)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le vice-premier ministre. Cette réplique de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances met fin au débat sur le discours sur le budget.

Conformément à l'article 277 de notre règlement, l'Assemblée doit maintenant se prononcer sur les motions de censure qui ont été présentées à l'occasion du débat sur le discours sur le budget et sur la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant à l'Assemblée d'approuver la politique budgétaire du gouvernement.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous demanderais, M. le secrétaire, de bien vouloir appeler les députés.

(16 h 36 – 16 h 45)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Mise aux voix des motions de censure

Nous allons d'abord mettre aux voix, dans l'ordre de leur présentation, les motions de censure présentées dans le cadre du débat sur le discours sur le budget. Premièrement, la motion de censure présentée par M. le député de Laporte, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement péquiste pour son budget 1998-1999 qui ne contient aucune mesure qui puisse améliorer les services de santé et d'éducation, qui ne comporte aucune perspective réelle d'amélioration de l'emploi, notamment pour les jeunes, et qui ne s'attaque pas à l'appauvrissement des Québécois.»

Que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères)...

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a des abstentions? M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions: 0

(16 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion du député de Laporte est donc rejetée.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Rivière-du-Loup, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour ses orientations économiques interventionnistes et son refus de s'attaquer au principal frein à la croissance économique que représente le fardeau fiscal imposé aux contribuables québécois.»

Que les députés en faveur de cette motion... M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Est-ce que je peux demander le même vote?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le député de Rivière-du-Loup demande le vote nominal.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veulent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Dumont (Rivière-du-Loup).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount– Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Verdun, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour son manque de transparence quant à l'effet des changements de la réforme de la comptabilité gouvernementale sur les équilibres financiers.»

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Je vais demander: Le même vote?

Une voix: Oui.

M. Jolivet: O.K.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Donc, la motion du député de Verdun est rejetée.

Quatrièmement, je vais maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Kamouraska-Témiscouata, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement péquiste pour son budget 1998-1999 qui ne contient aucune mesure sérieuse pour contrer l'appauvrissement de nos régions, de la population et plus particulièrement des jeunes et qui balaie dans la cour des générations futures une augmentation de la dette québécoise de plus de 16 %.»

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, le même vote?

Une voix: Oui.

Des voix: Même vote.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion du député de Kamouraska-Témiscouata est donc rejetée.

Nous poursuivons. Nous allons maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour l'absence de mesures, dans son budget 1998-1999, pouvant améliorer les conditions de vie des personnes les plus démunies de notre société.»

M. le leader.

M. Jolivet: Même vote, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion est donc rejetée.

Nous allons maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par le chef de l'opposition officielle et député de Vaudreuil, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour son absence de vision et de moyens en matière de santé, d'éducation, d'économie et d'emploi et quant à l'avenir des jeunes, qui constituent les véritables priorités de la société québécoise.»

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Même vote, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): La motion du chef de l'opposition officielle est donc rejetée.

Nous poursuivons. Je mets maintenant...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je disais donc que je mets maintenant aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Westmount–Saint-Louis, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour avoir "omis" d'inclure, dans son budget 1998-1999, des mesures spécifiques à la création d'emplois au Québec répondant aux véritables besoins des jeunes tout en ayant réduit les dépenses en éducation et en formation professionnelle.»

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Même vote, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

Une voix: Pas d'objection.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion de censure du député de Westmount–Saint-Louis est donc rejetée.

Nous allons maintenant mettre aux voix la motion de censure présentée par M. le député de Nelligan, qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement péquiste qui ne cesse de harceler les contribuables à faibles revenus, notamment les travailleuses et travailleurs à pourboire.»

M. le leader du gouvernement?

M. Jolivet: Même vote.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition? M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:33

Contre:61

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion du député de Nelligan est donc rejetée.


Mise aux voix de la motion du ministre des Finances

Je mets maintenant aux voix la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement.

Alors, M. le leader de l'opposition?

(17 heures)

M. Paradis: Oui. Vote inversé, M. le Président. Vote inversé.

M. Jolivet: M. le Président, nous allons le voter.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, vote nominal.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères)...

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: ...M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Duguay (Duplessis), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général?

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:33

Abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, la motion du vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances est donc adoptée.

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, nous allons permettre aux députés qui sont en commission d'y retourner. Quant à l'Assemblée, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à demain, mercredi 22 avril, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, les travaux de l'Assemblée sont donc ajournés à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 4)


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