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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 5 décembre 1997 - Vol. 35 N° 144

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Table des matières

Présence du ministre des Relations extérieures de la Principauté d'Andorre, M. Albert Pintat Santolària

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Présence du ministre des Relations extérieures de la Principauté d'Andorre, M. Albert Pintat Santolària

Pour débuter la séance, j'ai le grand plaisir de souligner la présence dans les tribunes du ministre des Relations extérieures de la Principauté d'Andorre, Son Excellence M. Albert Pintat Santolària.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article a.


Projet de loi n° 184

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le leader du gouvernement, au nom de M. le ministre de la Justice, présente le projet de loi n° 184, Loi concernant la rémunération des juges. M. le leader du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur les tribunaux judiciaires et la Loi sur les cours municipales afin d'établir un processus obligatoire préalable à la fixation de la rémunération des juges de la Cour du Québec et des cours municipales.

À cette fin, il crée un comité qui aura notamment pour fonctions d'évaluer, à tous les trois ans, si le traitement, le régime de retraite et les autres avantages sociaux de ces juges sont adéquats.

Le comité sera formé de quatre membres nommés par le gouvernement suivant la procédure que le projet de loi énonce. Il formulera ses recommandations au gouvernement, après avoir reçu les observations de la magistrature, du gouvernement et des autorités municipales concernées.

Le projet de loi prévoit également que les recommandations du comité seront déposées devant l'Assemblée nationale. Celle-ci pourra, par une résolution motivée, approuver, modifier ou rejeter le rapport du comité, et le gouvernement devra mettre en oeuvre cette résolution. À défaut par l'Assemblée nationale d'adopter la résolution dans le délai prévu par le projet de loi, le gouvernement devra mettre en oeuvre les recommandations du comité de la rémunération. Le projet de loi précise enfin les règles financières applicables au comité.

Les lois modifiées par ce projet: Loi sur les cours municipales, Loi sur les tribunaux judiciaires.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Au dépôt de rapports de commissions, Mme la présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Mégantic-Compton. Je crois que nous allons...

Des voix: ...

Le Président: M. le député.

M. Bissonnet: Avez-vous la copie du rapport? Quand vous l'aurez, M. le Président, je suis prêt.

Le Président: Alors, on reprendra ça un peu plus tard.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise cependant qu'après la période des questions et des réponses orales seront tenus les votes reportés sur deux motions: la première, la motion sans préavis présentée par M. le député de Kamouraska-Témiscouata et la motion de M. le ministre des Finances proposant que le principe du projet de loi n° 168, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, soit maintenant adopté.

Alors, nous en arrivons immédiatement à la période des questions et des réponses orales.


Dépôt de rapports de commissions

Mais auparavant je crois que nous allons permettre à Mme la députée de Mégantic-Compton de présenter le rapport de sa commission. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, en soulignant qu'elle célèbre aujourd'hui son quatorzième anniversaire comme députée de Mégantic-Compton, sans interruption de mandat.

Des voix: Bravo!

Mme Bélanger: Je remercie tout le monde, évidemment. Alors, je serai encore là à la prochaine élection.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Ça, c'est la bonne nouvelle.

Des voix: Bravo!


Consultations particulières sur les projets de loi nos 175 et 173

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé le 2 décembre 1997 afin de procéder à des consultations particulières sur le projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouvelles diverses... de nouveau diverses dispositions législatives – c'est émouvant un peu – concernant le domaine municipal, ainsi que sur le projet de loi n° 173, Loi instituant le fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale.

Le Président: Votre document est déposé, Mme la députée de Mégantic-Compton.


Questions et réponses orales

Nous abordons maintenant la période de questions et de réponses orales. M. le député de Chomedey, en principale.


Enquête de la Commission d'accès à l'information concernant la communication de renseignements personnels au cabinet du premier ministre

M. Mulcair: Merci, M. le Président. M. le Président, dans l'affaire du coulage de renseignements confidentiels, on se souvient que Mme Malo, la sous-ministre du Revenu, a d'abord dit qu'il n'y avait pas eu d'infraction. Avant-hier, le procureur de la Commission d'accès a dit: Il y a eu violation, c'est clair. Hier, le premier ministre a clôturé la période de questions en disant qu'il n'y avait rien de criminel là-dedans.

M. le Président, c'est le premier ministre lui-même qui a, dans un premier temps, nommé la Commission d'accès à l'information pour l'enquêter, ce qui est, de l'avis des experts, déjà une ingérence illégale de l'exécutif dans le judiciaire. Maintenant, on se rappelle qu'à plusieurs reprises le premier ministre a affirmé que, lui, il n'y était pour rien dans le coulage. Citons-le, par exemple, le 25 novembre où il a dit: «Alors, ce que je réitère, M. le Président, c'est qu'à mon cabinet ni moi ni personne n'avons – "ni moi", c'est clair – demandé des informations fiscales du ministère du Revenu.»

Est-ce que le premier ministre est capable de comprendre que sa démarche n'est pas croyable dans une société démocratique comme la nôtre? M. le Président, l'enquêté nomme son enquêteur et télégraphie les résultats de l'enquête. La Commission comme telle n'a pas encore siégé, mais il est en train de dire que le rapport doit dire au moins deux choses: premièrement, que, lui, il n'y est pour rien et, deuxièmement, qu'il n'y a rien de criminel là-dedans. Est-ce que le premier ministre est capable de comprendre qu'il n'y a surtout rien de crédible là-dedans?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, oui, juste pour les besoins de la cause et pour éviter quoi que ce soit. Une enquête est en cours actuellement et, en vertu de l'article – c'est juste une mise en garde, ne vous inquiétez pas – 35.3°, M. le Président, j'aimerais simplement, pour les besoins de la cause, rappeler que «le député qui a la parole ne peut parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit». C'est simplement une mise en garde, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, sur cette question, M. le Président, il s'agit exactement de la mise en garde que vous aviez vous-même faite à partir du trône présidentiel. À ce moment-ci, tout ce que le leader du gouvernement tente de faire, c'est de retarder la période de questions et de camoufler l'affaire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, d'abord, le leader de l'opposition me prête des intentions. Mon but est de simplement m'assurer qu'il n'y ait, devant une enquête, possibilité de faire dérailler quoi que soit, et, en conséquence, je voulais simplement vous demander de faire cette mise en garde.

Le Président: Alors, je crois que le rappel est fait. M. le premier ministre.

(10 h 10)

M. Bouchard: M. le Président, la Commission d'accès à l'information a été invitée à faire une enquête sur les allégations du Journal de Montréal . Elle est en train de procéder à cette enquête. Hier, on m'a interrogé pour me demander des commentaires sur des propos tenus par le procureur de la Commission. J'ai dit que je m'abstiendrais de tenir des propos, de faire des commentaires ou des évaluations du travail de la Commission, ou des propos qui seraient tenus par ses membres, compte tenu de la nécessité de maintenir des garanties d'indépendance, et d'objectivité, et de sérénité dans la conduite de l'enquête qui est en cours.

Je crois qu'il faut s'en tenir à cela, M. le Président. L'enquête est en cours. Les témoins seront entendus. Les rapports seront rendus publics. On dit même qu'il y aura des audiences publiques. Quand on aura les résultats de l'enquête, on pourra statuer sur l'affaire.

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: M. le Président, comment ça se fait qu'hier le premier ministre s'est permis de dire qu'il n'y avait rien de criminel là-dedans et qu'aujourd'hui il trouve une autre cachette, il se réfugie derrière la règle de sub judice pour ne pas répondre? Est-ce qu'il n'est pas capable de comprendre que toute la population voit leur jeu? Qu'ils sont en train de se cacher? Que c'est du camouflage et qu'ils perpétuent le «cover-up»?

Le Président: M. le député de Chomedey, c'est la troisième fois en quelques jours que j'indique que le terme «cover-up» dans le contexte actuel n'est pas admissible. Et ce n'est pas parce que, à chaque fois, vous le retirez qu'il devient plus admissible la fois suivante. À ce moment-ci, j'indique que mon intention c'est qu'à la prochaine occasion que ça se produit, vous le savez très bien, je vais passer la parole à un autre député. M. le premier ministre.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, il y a suffisamment là... le leader du gouvernement qui tente de faire de l'obstruction, le premier ministre qui refuse de répondre, sans que la présidence dise à l'opposition qui va poser les questions.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, il n'est certainement pas dans l'intention de la présidence d'indiquer à l'opposition qui posera les questions, d'orienter votre stratégie, d'indiquer le nombre de questions qui doivent être posées. Cependant, la présidence a la responsabilité de faire appliquer le règlement, et, après plusieurs mises en garde, je crois qu'il y a des choses qui doivent être comprises également. Et je vous rappellerais que, dans d'autres Parlements de type britannique, comme à Ottawa par exemple, ce type d'utilisation que la présidence peut faire de donner la parole à un autre député quand le règlement n'est pas respecté, ça se fait régulièrement.

M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, loin de moi de faire de l'obstruction, comme le leader de l'opposition l'indique, mais il me semble que l'article 42 – et tout le monde le connaît, du moins devrait le connaître – c'est évident que c'est dans une même séance. Mais le problème qui existe à ce moment-ci, c'est que le député, sachant que vous ne permettez pas ce mot, l'utilise quand même, et, en conséquence, le gros bons sens de tout le monde le comprend très bien, c'est qu'il met à ce moment-là votre décision... de sorte que, finalement, il ne se soumet pas à votre décision.

Alors, M. le Président, je pense que votre décision, quant à moi, est tout à fait correcte. Le gros bon sens nous indique que, quand un mot n'est pas parlementaire, ce n'est pas parce qu'on l'utilise quatre ou cinq fois dans quatre ou cinq journées différentes qu'il le devient.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Le leader du gouvernement a cité le bon article, il s'agit de l'article 42 de notre règlement. Vous avez le devoir de l'appliquer, et il est complété par vos obligations qui sont prévues au huitième alinéa de l'article 2. Et, si vous l'appliquez, il n'y aura pas de problème de ce côté-ci, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je réitère une évidence, il y a une enquête en cours, une enquête impartiale, une enquête qui est menée par une commission qui a été créée par l'Assemblée nationale, qui agit à l'intérieur des pouvoirs extrêmement considérables qui lui ont été confiés, elle a assigné des témoins, il y aura des audiences publiques, le rapport sera rendu public. Je crois qu'il faut respecter le processus maintenant.

Le Président: M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Est-ce que le premier ministre peut comprendre qu'on vit dans une démocratie, qu'il ne s'agit plus du droit divin des rois, que personne, même un premier ministre désigné, n'est au-dessus de la loi et qu'il doit répondre devant le Parlement du Québec? On n'est pas au caucus du Bloc, ici, il doit répondre, M. le Président, et cesser de se réfugier...

Le Président: Vous êtes en principale ou en complémentaire, M. le député de Chomedey, là.

M. Mulcair: Je terminerai ma question additionnelle, M. le Président.

Le Président: Très bien.

M. Mulcair: Pourquoi le premier ministre refuse toujours de répondre, ici, en Chambre, devant le Parlement du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai répondu à toutes les questions. L'affaire est maintenant devant la commission d'enquête, qui va faire rapport après avoir entendu les témoins. On ne sortira pas de là. Il y a un processus légal qui est maintenant entamé, la Commission ayant accepté de se saisir de l'enquête. Elle la conduit de façon rigoureuse et objective. Elle va rendre compte en public. Et nous devons faire en sorte qu'elle puisse le faire correctement.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Marge de manoeuvre de la Commission d'accès à l'information dans la tenue de l'enquête sur les renseignements personnels

M. Lefebvre: M. le Président, dans cette affaire, la règle du sub judice existe, mais elle existe depuis le début. M. le Président, le 25 novembre, le premier ministre a adressé une lettre à M. Comeau pour que la Commission d'accès à l'information enquête. Le premier ministre a commis de l'ingérence non seulement par écrit, mais également par des propos qu'il a tenus, depuis cette date du 25 novembre, ici, en cette Chambre. Et je veux lui rappeler ce qu'il disait le 25 novembre. Il disait ceci. Il commentait sa propre lettre en disant qu'il demandait à la commission d'enquête de vérifier et «de faire la lumière sur les allégations relatives aux appels téléphoniques». De quel droit le premier ministre peut-il demander à la commission d'enquête sur quoi enquêter? Les appels téléphoniques.

Bien plus, M. le Président, le premier ministre a même commenté la version du principal témoin, Charles Chevrette, en disant ceci: «Moi, je n'ai pas discuté avec M. Chevrette, c'est sa version, qui est la suivante. On verra qu'elle corrobore partiellement celle du rapport d'enquête.» De quel droit le premier ministre pouvait-il se permettre de dire ceci?

Et bien plus, M. le Président, et c'est là la faute, l'ingérence la plus importante, il a qualifié le témoin principal, Charles Chevrette, en disant ceci – ça, c'est peut-être vrai, M. le Président, mais c'est à la commission d'enquête à décider: «Ça, c'est un homme honnête qui parle, c'est Charles Chevrette, un honnête homme.»

M. le Président, est-ce que le premier ministre réalise que non seulement il a télégraphié ce qu'il veut lire dans le rapport, mais qu'il a pris les moyens pour y arriver? Et sa conduite, depuis le début, ses commentaires constituent de l'ingérence absolument grossière qui a miné toute la crédibilité du processus à la Commission d'accès à l'information.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on assiste depuis quelques jours à des attaques en règle de la part de l'opposition contre des personnes. Je crois qu'il faut respecter l'honnêteté des gens qui évoluent dans notre société. Et, quand il y a un processus d'enquête, ce n'est pas le temps de les salir, c'est le temps de laisser le processus d'enquête écouter ces témoins-là, évaluer les faits qui seront rapportés et faire rapport. Pourquoi ne pas respecter la Commission, M. le Président? Pourquoi ne pas respecter le processus d'enquête? C'est un processus d'enquête irréprochable, rigoureux, le plus rigoureux qu'on puisse imaginer dans le cadre des lois existantes, et je soumets que l'opposition, si elle veut être démocrate, devrait respecter les processus qui font la vérité.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, comment le premier ministre peut-il demander aux parlementaires de cette Chambre de respecter le processus démocratique, et on est d'accord, alors que lui qui devrait être le premier à donner l'exemple, et par écrit et verbalement, par des commentaires répétés, fait exactement le contraire de ce qu'il devrait faire et de ce qu'il demande aux autres de faire?

Comment le premier ministre peut-il penser que la population va le croire et va avoir confiance aux résultats à venir, au rapport à venir de cette Commission d'accès à l'information?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Je me demande pourquoi l'opposition met tant d'acharnement à essayer de jeter des ombres sur la rigueur et la valeur de l'enquête qui est en cours. Cette Commission a été formée par une loi qui a été adoptée par l'Assemblée nationale. Elle est investie de pouvoirs très considérables. Ce que je dis, c'est que nous devrions nous abstenir de commenter ce qui se passe, des déclarations qui sont faites, entre autres, par le procureur de la Commission, c'est là-dessus qu'on m'interrogeait hier, et que nous devrions continuer, durant les journées qui viennent, de laisser la Commission procéder à son enquête. C'est tout ce que je dis, M. le Président. C'est un devoir fondamental que nous avons, c'est le droit minimum que la Commission peut revendiquer.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Chomedey.

(10 h 20)

M. Mulcair: En principale, M. le Président.

Le Président: En principale.


Tenue de l'enquête sur les renseignements personnels par la Commission d'accès à l'information sur recommandation du premier ministre

M. Mulcair: Comment est-ce que le premier ministre peut oser prétendre que la Commission d'accès à l'information est en train d'agir en vertu de son mandat qui lui est donné au terme de la loi, alors qu'ici, en Chambre, le 25 novembre et à plusieurs reprises depuis, par écrit et dans ses déclarations, il a dit la même chose, que c'est lui, le premier ministre du Québec, qui a ordonné l'enquête? Je vais le citer au texte pour qu'il n'y ait pas de malentendu, M. le Président.

C'est le premier ministre qui parle: «Alors, j'ai décidé – pas Mme Malo, pas la Sûreté du Québec, pas la ministre déléguée au Revenu, pas l'opposition, lui, le premier ministre – ce matin de confier un mandat particulier à la Commission d'accès à l'information, un mandat d'enquête sur cette question pour qu'elle puisse nous dire ce qu'il en est.» Et il continue, il dit: «Alors, moi, je veux savoir et j'ai demandé à la Commission d'accès à l'information de conduire cette enquête.»

Est-ce que le premier ministre, qui s'est vanté de ses lumières d'avocat la semaine dernière, se souvient que, lorsqu'il y a une ingérence de l'exécutif dans le judiciaire, il y a faute? C'est ce que les experts disent, c'est ce que l'opposition dit, et la seule manière d'y remédier, c'est de ramener toute cette affaire devant ce Parlement pour que toute la lumière puisse être faite là-dessus, si on n'a rien à cacher.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la lettre qui a été expédiée au président de la Commission d'accès à l'information, elle dit qu'on invite... J'invite la Commission. La Commission était libre d'accepter ou de refuser. Et, dans une lettre du 25 novembre, le président répond: La Commission d'accès à l'information a décidé d'instituer une enquête. C'est la décision de la Commission à la suite de la réception d'une invitation.

M. le Président, quand le député de Chomedey nous invite à soumettre cette affaire à l'instance dont il parle, je dois lui dire honnêtement que j'ai plus confiance dans la rigueur et la sérénité des commissaires de la Commission qu'en lui-même.

Des voix: Bravo!

M. Mulcair: En principale.

Le Président: En principale, M. le député de Chomedey.


Non-ingérence du pouvoir exécutif dans le processus d'enquête des organismes de surveillance publics

M. Mulcair: Je veux me permettre de citer un grand premier ministre, un grand parlementaire, pour le premier ministre désigné, Jean Lesage, qui a dit en cette Chambre en 1966: «Je n'ai pas d'ordre à donner à quelque régie ou commission que ce soit. Elles doivent agir en vertu de la loi. C'est elles qui décident si elles font ou non enquête.»

Comment ça se fait que ce gouvernement, qui encore hier osait nous citer René Lévesque – «être informé, c'est être libre» – ne cesse de se comporter comme Duplessis plutôt que comme René Lévesque? C'est ça qu'ils font.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, ce que disait M. Jean Lesage est parfaitement correct à l'état de ses obligations et à l'état du droit, c'est toujours la même situation qui prévaut, et c'est pour cela que nous avons utilisé le terme «invité la Commission à tenir une enquête». J'ai invité la Commission, elle était libre de la tenir ou de ne pas la tenir, et la Commission a décidé d'instituer l'enquête. Qu'on s'en tienne aux faits et aux formulations qui ont été utilisées pour respecter, en effet, le genre de rapports qui existent entre l'exécutif et les commissions.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, en principale.


Modification des articles 45 et 46 du Code du travail

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Le gouvernement nous a habitués sur plusieurs thèmes à des doubles discours, mais un de ceux qui sont en train de devenir les champions des doubles discours, c'est le ministre du Travail, particulièrement dans le dossier de l'article 45 du Code du travail. Quand le gouvernement parle avec les élus municipaux, on laisse entrevoir qu'on pourrait assouplir le Code du travail pour leur permettre de gérer plus facilement. Par contre, hier, quand on était en présence de gens du monde des syndicats: Revendications des syndicats au sujet du Code du travail, Rioux ouvre une porte, laissant entendre que, là, on pourrait resserrer l'article 45 du Code du travail.

Avec l'article 45, le Québec est le seul gouvernement en Amérique du Nord à avoir des contraintes aussi sévères à la sous-traitance. C'est un handicap concurrentiel, c'est un boulet aux chevilles des municipalités qui veulent offrir des services aux meilleurs coûts à leur population.

Dans la dernière session parlementaire, le ministre du Travail, avec son humour habituel, nous avait dit qu'il avait manqué de temps. La session parlementaire était trop chargée, il avait manqué de temps pour inclure cet élément-là. Dans la présente session, on peut se demander: Est-ce qu'il a encore, malheureusement – il me semble que le menu n'est pas si chargé que ça – manqué de temps? Alors, la question au ministre du Travail est bien simple: Est-ce qu'il a l'intention d'agir ou non pour moderniser l'article 45 du Code du travail? Puis, s'il pouvait parler à tout le monde en même temps, dans quel sens il agirait?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, je suis content, au fond, de la question du député de Rivière-du-Loup, elle me permet de préciser un certain nombre de choses. En ce qui a trait aux articles 45 et 46 du Code du travail, si on écoute le député de Rivière-du-Loup, c'est comme si on s'était traîné les pieds. Ce n'est pas vrai. On a institué un comité d'experts qui a fait une réflexion sur l'article 45, c'est le rapport Mireault qu'on a entre les mains. Le rapport Mireault a été déposé, et on a découvert en cours de route qu'il y avait une autre catégorie de travailleurs qui avait été oubliée dans le décor, c'est les travailleurs forestiers. On a demandé à M. Mireault de poursuivre sa réflexion.

Ce que j'ai dit hier au sujet du Code du travail, pour répondre plus précisément au député de Rivière-du-Loup, c'est: Une réforme en profondeur. Et c'était ça, la demande qui m'était acheminée hier, lors du colloque sur les relations de travail, par le patronat et les syndicats. J'ai dit: Une réforme à la pièce n'est peut-être pas indiquée dans les circonstances. Ce qu'on essaie de faire, c'est de regarder l'ensemble de l'économie du Code. Et aussi, ce que j'ai demandé aux partenaires syndicaux et patronaux: On va agir quand on va sentir qu'il se dégage un consensus entre vous autres dans cette matière. On ne touche pas au Code du travail aussi facilement que voudrait le faire le député de Rivière-du-Loup, M. le Président. C'est un Code du travail qui est important, c'est une législation qui est fondamentale, et on ne joue pas là-dedans à l'aveuglette.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce que le ministre du Travail, qui dit ne pas s'être traîné les pieds, peut rappeler à cette Chambre le moment, le mois auquel le rapport Mireault a été déposé? Parce que c'est une chose de dire qu'il a créé un comité, mais est-ce qu'il peut nous rappeler à quel moment le rapport a été déposé pour qu'on mesure combien de temps il a eu pour agir depuis ce temps-là? Puis est-ce qu'on doit comprendre de sa réponse que, si on a besoin d'un consensus entre patrons et syndicats pour agir, il vient de nous dire qu'il n'agira pas d'ici l'élection puis que ce qu'il lui manque, c'est du leadership dans ce dossier-là?

Le Président: Merci, M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, le député de Rivière-du-Loup semble oublier une chose, il y a une culture au Québec qui fait qu'on travaille en partenariat, et, en matière de relations de travail, tous les ministres du Travail qui se sont succédé au Québec ont toujours travaillé avec les partenaires syndicaux et patronaux. C'est normal qu'il en soit ainsi, ce sont nos partenaires, et on travaille avec eux. Et, quand il s'agit de poser des gestes importants comme amender le Code du travail, revoir son économie générale, c'est normal qu'on les consulte et c'est normal qu'on essaie d'avoir des consensus entre nous.

Je voudrais dire aussi au député de Rivière-du-Loup, qui est intéressé aux relations de travail, que ça n'a jamais aussi bien marché au Québec en matière de relations de travail. Écoutez bien ça, M. le Président, ça va peut-être aider le député de Rivière-du-Loup dans ses réflexions: Le CPQ, hier, observait que 1997, c'était la meilleure année que nous avions connue depuis des lunes au Québec: 88 arrêts de travail et 19 000 travailleurs. Du jamais vu. Le député de Rivière-du-Loup s'excite; moi, je pense qu'il ne fait pas la même lecture de la réalité que moi.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce que, devant l'incapacité du ministre à nous dire s'il va, oui ou non, faire quelque chose, le premier ministre, qui est le grand patron du Conseil des ministres, peut nous dire... Suite au Sommet, où il avait annoncé des déréglementations, il avait laissé entendre qu'il y aurait des assouplissements à ce niveau-là, est-ce qu'il peut nous dire au moins quel mandat il a donné à son ministre du Travail? De resserrer l'article 45? D'assouplir l'article 45? Ou de gagner du temps puis de donner un show pour passer l'élection?

Le Président: M. le premier ministre.

(10 h 30)

M. Bouchard: M. le Président, l'article 45, c'est une clef de voûte du Code du travail. Nous savons que ce Code du travail, bien qu'il requière des modernisations – et tout le monde le reconnaît, qu'il faudra le réexaminer de façon générale – a produit des résultats très heureux, et notamment au point de vue de la paix industrielle. Je pense qu'il faut confirmer ce que le ministre vient de dire, nous avons une remarquable paix industrielle. Je pense qu'il faut confirmer ce que le ministre vient de dire. Nous avons une remarquable paix industrielle et en même temps une remontée de l'emploi extrêmement intéressante. Les chiffres du chômage de ce matin montrent que le chômage, qui était de 11,3 %, est maintenant à 11 % au Québec, après les résultats de ce matin, que nous avons créé depuis le sommet économique, un an, 82 500 emplois nouveaux, que présentement, au Québec, Desjardins confirme que, et je cite: «L'économie du Québec a rebondi avec vigueur en 1997 et s'apprête à connaître en 1998 une deuxième bonne année de suite, une performance qu'on n'avait pas vue depuis 10 ans.»

Je rappelle donc que le gouvernement, grâce justement à un cadre du travail qui est correct mais qui requiert des modifications, va faire attention avant d'y aller à coups de hache là-dedans. Il faut que ça se fasse correctement. Je rappelle qu'au point de vue économique nous avons atteint le plus haut niveau jamais prévu dans le domaine des exportations internationales, dans le domaine des investissements privés, dans le domaine de ce qui est livré par les manufactures, que les mises en chantier ont monté de 18 %, les ventes au détail de 9 %, que le PIB réel augmente de 2,8 % cette année et que nous avons maintenant, cette année, 18 000 emplois de créés, nouveaux, de plus que prévu au budget. Donc, nous avons un encadrement qui est correct, nous avons des mesures macroéconomiques qui permettent la création d'emplois. L'économie du Québec est en train de remonter. Ce n'est pas le temps de tomber à coups de hache là-dedans pour tout changer du jour au lendemain sans être prudents.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Est-ce que le premier ministre peut nous dire, ou le ministre du Travail, en français, pour les élus municipaux, pour les gens des carrefours jeunesse-emploi, pour tous ceux qui sont victimes de l'article 45 du Code du travail, que ce qu'ils viennent de dire, ça veut dire qu'ils ne feront rien? Je veux juste avoir une réponse précise, claire, là-dessus.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il y a des gens qui ont des recettes assez primaires pour apporter des solutions aux problèmes que nous avons. C'est vrai que nous avons des problèmes, c'est vrai qu'il faut assouplir, modifier, réajuster en fonction des concepts et des impératifs nouveaux des mécanismes qu'on s'est donnés. Mais les solutions à l'emporte-pièce comme de supprimer 45, comme de supprimer la formule Rand, comme le voudrait le Parti libéral, ça, ça n'a pas de bon sens. Il faut y aller avec plus de doigté et de respect pour le consensus que ça.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Saint-François, en complémentaire.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, si ça va si bien au Québec, le premier ministre peut-il nous dire pourquoi il s'est créé le mois dernier, en novembre, 13 000 emplois en Ontario, alors qu'il s'en est créé 200 au Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Le mois dernier, c'est l'Ontario qui en a perdu.

M. Landry (Verchères): Bien, c'est ça. Tous les économistes savent qu'après une forte création d'emplois, pendant trois ou quatre, cinq mois, il y a un tassement. Alors, on a eu 5 000, 9 000, c'est normal, et le mois passé en Ontario, c'était l'inverse. Alors, chacun son tour. Je sais que dans votre système c'est toujours le tour de l'Ontario, mais dans notre système à nous on va faire venir celui du Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Projet de loi concernant le budget de la ville de Montréal

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Là, c'est le tour de la métropole. On entame cet après-midi l'étape de l'adoption de principe du projet de loi n° 183 qui permet à la ville de Montréal de déposer pour la première fois de l'histoire du Québec un budget déficitaire pour l'année 1998.

Comme le ministre des Affaires municipales lie intimement la Communauté urbaine de Montréal à cette comptabilité du troisième type, c'est-à-dire qu'il demande à la Communauté urbaine de réduire la quote-part de Montréal, de 30 000 000 $, par une contribution de la réduction de 6 % des coûts de sa main-d'oeuvre et ceux de la STCUM, est-ce que le ministre des Affaires municipales alors entend donner suite à la résolution que je vais déposer, qu'il a reçue cette semaine du comité exécutif de la CUM qui lui demande de l'inclure dans le projet de loi n° 183 de façon à lui permettre d'anticiper la récupération de ses coûts de main-d'oeuvre et lui donner aussi les mesures législatives nécessaires pour récupérer le 6 %?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, nous avons donc indiqué par le dépôt du projet de loi n° 183 que la ville de Montréal pouvait indiquer dans la préparation de son budget une somme de 125 000 000 $ et prendre tous les moyens nécessaires pour en arriver en cours d'année à ce qu'une modification des revenus et des dépenses permette de récupérer de façon structurelle, de façon permanente ce montant, pour en arriver à un résultat équilibré.

Par ailleurs, on nous a annoncé, au cours des dernières heures, que la Communauté urbaine de Montréal avait réussi à présenter, au niveau du comité exécutif, un projet de budget équilibré au niveau des revenus et des dépenses. Par ailleurs, en sus de ce budget équilibré, la Communauté urbaine de Montréal devra réaliser exactement les mêmes gestes que nous demandons à toutes les autres municipalités du Québec, c'est-à-dire procéder à un effort de réduction de la masse salariale de 6 %, qui équivaut à une somme de 55 000 000 $, et, dans ce sens-là, suivre la résolution adoptée par le comité exécutif de la Communauté urbaine de Montréal, que le 55 000 000 $ soit retourné en diminution des quote-parts qu'offrent des municipalités vers la Communauté urbaine de Montréal. Donc, l'information, c'est que la Communauté urbaine a présenté un projet de budget qui sera adopté le 10 décembre prochain et qui sera équilibré, et on devra réaliser des efforts comme partout ailleurs au Québec.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Je demande, M. le Président, la permission de déposer l'extrait du procès-verbal d'une séance du comité exécutif, le 3 décembre 1997.


Document déposé

Le Président: Il y a consentement, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci. Je reviens justement à ce projet de résolution. Est-ce que, oui ou non, le ministre entend amender le projet de loi qu'on va étudier cet après-midi, le projet de loi n° 183, afin de respecter la résolution du comité exécutif, cette résolution-ci de la Communauté urbaine de Montréal, étant donné, évidemment, que les pirouettes comptables du ministre font en sorte que la Communauté urbaine va avoir un manque à gagner de 30 000 000 $, qu'elle ne sait pas exactement comment aller le récupérer, que la STCUM, qui a fini de négocier, est réticente à donner justement et à redemander à ses employés une diminution de 6 % parce qu'elle ne veut pas hausser les tarifs des Montréalais, les tarifs du transport en commun? Est-ce que, oui ou non, le ministre va décider d'amender le projet de loi pour respecter ce projet de résolution du comité exécutif de la Communauté urbaine de Montréal déposé le 3 décembre 1997? Oui ou non?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, ce que nous avons donc indiqué, c'est que la situation de la ville de Montréal était une situation vraiment particulière et que nous avions décidé de supporter cette situation et de travailler en collaboration pour en arriver à des redressements structurels de façon à ce que les corrections soient permanentes. Du côté de la Communauté urbaine de Montréal et des membres de la Communauté urbaine, chacun doit prendre ses responsabilités. C'est assez clair, nous avons conclu une entente avec les municipalités, qui indique une récupération de 5,77 % des budgets municipaux compressibles et, par ailleurs, des efforts à réaliser au niveau de la récupération des masses salariales. Dans ce sens-là, non, le gouvernement n'a pas l'intention d'inclure cet amendement à son projet de loi dont nous allons discuter à compter de cet après-midi ici, à l'Assemblée nationale.

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Étiquetage erroné entraînant une surfacturation dans la vente au détail

M. Chagnon: M. le Président, le premier ministre vient de nous dire que les ventes au détail, au Québec, ont augmenté de 9 %, cette année. Sait-il qu'une enquête menée dans cinq chaînes de magasins, de grands magasins de la région métropolitaine, a démontré un taux moyen d'erreurs de 14 %? Ce taux s'élève à 26,7 % dans trois magasins La Baie. Sait-il qu'on a retrouvé des taux d'erreurs de 17,3 % dans le cas des magasins Canadian Tire et Zellers? Sait-il que les consommateurs ont perdu 350 000 000 $ à cause de ces erreurs l'an dernier? 350 000 000 $!

Qu'entend faire le premier ministre, M. le Président, pour protéger les millions de consommateurs québécois, trois semaines avant Noël?

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, c'est une question qui me concerne à plus d'un titre, entre autres à titre de responsable de l'Office de la protection du consommateur. C'est une question qui concerne le Québec et qui nous intéresse au point que nous en avons discuté avec nos partenaires des autres provinces pour faire en sorte que des commerces qui ont des sièges sociaux à l'extérieur du Québec puissent se soumettre à des mêmes réglementations. Ces discussions se font, à l'heure actuelle, dans le cadre de l'entente sur le commerce intérieur. Nous avons soulevé ces questions à deux reprises.

(10 h 40)

Et je tiens, à ce moment-ci, à rappeler quelles sont les dispositions de l'actuelle loi de l'Office de la protection du consommateur, qui nous indique, pour éviter ce genre de situation... Parce que la meilleure règle pour éviter que ces choses se produisent, c'est de faire en sorte que les gens soient informés. Et, pour que les gens soient informés, il faut faire en sorte de faire respecter les dispositions de la loi de l'Office de la protection du consommateur qui nous indiquent qu'un commerçant doit indiquer clairement et lisiblement sur chaque bien offert et en vente dans son établissement ou, dans le cas d'un bien emballé, sur son emballage le prix de vente de ce bien.

Ce qui arrive à l'heure actuelle et pourquoi il y a des erreurs, c'est que l'étiquetage unitaire des prix ne se fait pas toujours, et, lorsque le consommateur se présente à la caisse, il ne peut pas parfois lui-même, à moins d'une erreur grossière – cette dame qui a payé une laitue 8,95 $ – confirmer la différence de prix entre ce qui est annoncé et ce qu'il paie à la caisse. Donc, l'Office de protection du consommateur agit, veille à faire respecter la loi, et je pense que c'est l'assurance que nous pouvons donner à la population. C'est plus de 25 ans d'expertise à l'Office de la protection du consommateur, et on peut en être fier, M. le Président.

Le Président: M. le député de D'Arcy-McGee, en principale?

M. Bergman: En principale.

Le Président: En principale.


Mesures pour protéger les consommateurs contre un étiquetage erroné

M. Bergman: M. le Président, en tenant compte des chiffres mentionnés par mon collègue le député de Westmount–Saint-Louis, est-ce que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration et responsable de l'Office de la protection du consommateur, qui a accepté des coupures massives résultant en des réductions importantes du nombre d'enquêteurs, peut nous expliquer pourquoi, alors que son gouvernement est au courant de ces faits depuis l'été dernier, il n'a rien fait et qu'aujourd'hui, le 5 décembre, 20 jours avant Noël, les Québécois paient pour sa négligence?

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: M. le Président, le député est bien mal placé pour nous dire qu'on n'a rien fait. Option Consommateurs, qui a réalisé l'étude, est financé par le gouvernement du Québec, et, à cet égard, cette étude a été faite en partie grâce à la collaboration et à l'appui du gouvernement du Québec. Donc, qu'on ne vienne pas me dire qu'on ne fait rien.

Encore une fois, faut-il rappeler qu'à ces problèmes compliqués il n'y a pas de solutions simples? Ce qu'il nous faut répéter, des deux côtés de la Chambre, c'est que, pour éviter ce genre de situations, il nous faut d'abord et avant tout miser sur l'éducation des gens et, deuxièmement, sur la qualité de l'information. Si on veut que les marchés fonctionnent bien, il faut que les gens soient bien informés, il faut qu'ils soient capables eux-mêmes de vérifier par rapport à l'étiquetage unitaire et ce qui est à la caisse s'il y a différence. Ma responsabilité, c'est d'abord de faire appliquer la loi de l'Office, parce que le député, comme moi, conviendra que les dispositions législatives sont correctes.

Le Président: M. le député.

M. Bergman: M. le Président, qu'est-ce que le ministre va faire aujourd'hui pour régler ce problème, 20 jours avant Noël?

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: M. le Président, j'ai rencontré à quelques reprises les représentants, entre autres, de l'Association des détaillants alimentaires et des représentants de ces grandes chaînes pour faire en sorte de les sensibiliser à ces réalités. Si on s'aperçoit que ce genre d'erreurs persiste... Parce que c'est la deuxième étude qui nous est présentée. Celle-ci est de beaucoup plus catastrophique que la première qui nous avait été présentée. Si les choses persistent, nous allons peut-être forcer des gens à mettre sur pied des programmes de remboursement et faire en sorte que les gens, s'il y a erreur, donnent le produit, et peut-être même imposer une pénalité qui serait supérieure à la différence entre le prix payé et le prix marqué au moment de l'achat. C'est ce genre de discussions que nous devons avoir, entre autres, avec les commerçants. Mais, avant d'utiliser l'outil législatif, je mise d'abord et avant tout sur la bonne foi des partenaires et sur la bonne collaboration que nous avons à ce jour.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, en complémentaire.

M. Chagnon: M. le Président, le ministre dit: S'il y a erreur. Nous savons qu'il y a erreur. Qu'a fait le premier ministre si depuis six mois son gouvernement sait qu'il y a erreur et que les consommateurs se font rouler pour 175 000 000 $ depuis six mois? Qu'a fait le premier ministre sur cette question? Qu'a fait son gouvernement?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: D'abord, mes collègues auront tous remarqué que ceux qui ont pris six mois, ce sont les gens de l'opposition, qui pour la première fois nous posent cette question...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Boisclair: Et je serais même tenté d'ajouter, M. le Président, que, dans mon cas, s'il fallait que j'attende les questions de l'opposition pour faire des choses, je ne serais pas très occupé, par les temps qui courent.

Des voix: Ha, ha, ha!

Des voix: ...

Le Président: Alors, est-ce qu'on pourrait aller rapidement au fond des choses? Ça va éviter...

M. Boisclair: M. le Président, d'abord, je veux bien expliquer au député de Westmount–Saint-Louis que cette question est sur la table de longue date et que nous en discutons régulièrement avec les représentants des associations de défense de consommateurs, que nous en avons discuté avec les représentants, entre autres, de l'ADA, de l'Association des détaillants alimentaires, et que, d'abord et avant tout, la clé, c'est l'éducation, c'est l'information.

Vous qui nous demandez de déréglementer, avant d'utiliser l'outil législatif et de modifier la réglementation, misons d'abord et avant tout sur la collaboration que nous avons avec les associations de consommateurs et aussi avec les commerçants. Et est-ce que je peux rappeler que cette étude a été rendue possible en partie grâce à l'appui du gouvernement du Québec? C'est un outil qui, d'abord, va informer les gens. Et je pense que, depuis que cette étude a été publiée, les gens feront davantage attention. Et c'est un plus pour la défense des consommateurs.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: Est-ce que le premier ministre peut s'assurer que son ministre soit plus occupé en faisant en sorte que les consommateurs ne se fassent plus rouler pour 350 000 000 $ en essayant de nous faire accroire que, un, c'est légal, et, deux, que les consommateurs devraient être mieux informés? Qu'a-t-il fait, ce ministre, pour mieux informer les consommateurs d'une chose qu'il connaissait depuis six mois?

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: D'abord, il faut rappeler que cette pratique est illégale. Et je cite l'article...

Des voix: ...

M. Boisclair: Voyons donc!

Le Président: M. le ministre.

M. Boisclair: Écoutez, on va s'entendre, ce n'est pourtant pas très compliqué. La loi de l'Office de la protection du consommateur... Et je cite l'article 224: «Aucun commerçant, manufacturier, ou publicitaire ne peut [...] exiger pour un bien ou un service un prix supérieur à celui qui est annoncé.»

Ce qui est en cause, ici, c'est le marquage des prix. Comment le consommateur qui va à la caisse peut se rappeler du prix annoncé lorsqu'il le prend sur les tablettes, au moment où il se retrouve à la caisse? La seule façon dont il peut faire ça et vérifier ce qui apparaît sur la caisse électronique, c'est en s'assurant que les biens soient marqués de façon unitaire, avec l'affichage unitaire des prix sur chaque produit.

La difficulté, c'est que les commerçants, à l'heure actuelle, au lieu de mettre le prix sur chacun des biens, le mettent sur la tablette. Et, lorsque le consommateur arrive à la caisse, il ne peut pas vérifier ce qui est annoncé et ce qu'il paie dans les faits. La façon d'agir de façon correcte, c'est d'exiger l'étiquetage unitaire des prix. C'est de cette façon que les consommateurs pourront comparer le prix annoncé et le prix qu'ils paient à la caisse.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis.

M. Chagnon: M. le Président, si le ministre sait depuis six mois que c'est illégal, combien de poursuites a-t-il prises? Combien le ministre des Finances a-t-il reçu en taxes supplémentaires pour rien?

Des voix: C'est ça! Bravo!

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je sais que le mot «hypocrisie» n'est pas parlementaire, mais, en entendant les rumeurs venant d'en face, je n'ai pas pu m'empêcher de penser de façon obsessionnelle aux 500 000 000 $ par année qu'ils ont laissé traîner sur les tables des restaurants par leur négligence, leur incapacité à procéder...

Le Président: M. le député de Frontenac, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Ils ont privé, par leur manque de courage politique – parce que c'est dur de s'attaquer à la question des pourboires, tout le monde le sait – des dizaines de milliers d'employés à pourboire de protections sociales élémentaires, assurance-emploi...

(10 h 50)

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, si le ministre des Finances a une déclaration ministérielle à faire, il existe au règlement des prévisions à cette fin. Maintenant, nous sommes à la période de questions, il y a une question qui a été posée quant à la protection des consommateurs, et il ne s'adresse absolument pas à la question posée, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Landry (Verchères): Le leader vient de prouver quel est le sens moral et éthique de la formation politique qui est en face de nous. Comme si c'était respecter le consommateur que les pourboires que les consommateurs donnent servent à la fraude plutôt qu'aux finances publiques.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que vous considérez que l'utilisation du mot «fraude», parce que c'est le ministre des Finances qui l'utilise, est permise en cette Chambre?

Le Président: Je pense, M. le leader de l'opposition officielle, que le qualificatif que le ministre a utilisé ne s'adressait pas du tout aux membres de l'Assemblée nationale, mais à ceux qui, finalement... Un instant!

M. le député d'Argenteuil, je connais bien le sens du mot «fraude» et je sais aussi qu'il ne s'agit pas d'utiliser un mot pour qu'il devienne antiparlementaire. Alors, à ce moment-ci, je considère que le ministre des Finances n'a prononcé aucun propos qui pourrait être qualifié d'antiparlementaire.


Votes reportés

La période de questions et de réponses orales est terminée, mais nous avons, Mmes, MM. les députés, deux votes reportés.


Motion proposant de demander au gouvernement fédéral de ne pas abandonner le projet de Gazoduc Trans Québec et Maritimes inc.

Alors, nous allons d'abord procéder au vote sur la motion sans préavis présentée par M. le député de Kamouraska-Témiscouata et qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement fédéral et à l'Office national de l'énergie de ne prendre aucune décision irréversible qui pourrait mettre en péril le projet de Gazoduc Trans Maritimes sans, au préalable, avoir analysé, étudié et comparé les retombées économiques, sociales et environnementales qui peuvent en découler pour le plus grand avantage du Québec et de l'Est du Canada.»

Alors, que les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Brouillet (Chauveau), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Brien (Rousseau), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Duguay (Duplessis).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Est-ce qu'il y a des députés contre cette motion? Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:100

Contre:0

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de M. le député de Kamouraska-Témiscouata est adoptée.


Adoption du principe du projet de loi n° 168

Je mets maintenant aux voix la motion de M. le ministre des Finances proposant que le principe du projet de loi n° 168, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, soit maintenant adopté.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

(11 heures)

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Brien (Rousseau), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Duguay (Duplessis).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:38

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion de M. le ministre des Finances est adoptée, donc le principe du projet de loi n° 168 est adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Motions sans préavis

Alors, nous en arrivons à l'étape des motions sans préavis. Je vais céder la parole à Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et ministre responsable de la Condition féminine.


Souligner la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique

Mme Harel: Alors, M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la journée du 6 décembre commémorant les événements de l'École polytechnique et condamne toute violence faite aux femmes.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader.

M. Jolivet: Un intervenant de chaque côté.

Le Président: Une intervention de chaque côté? Alors, si je comprends bien, Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, demain, le 6 décembre, sera le huitième anniversaire de la tragédie survenue à l'École polytechnique de Montréal en 1989. Les Québécoises et les Québécois se souviennent de ces tristes événements, alors que 14 étudiantes étaient victimes d'une violence délibérément dirigée contre elles parce qu'elles étaient des femmes.

À titre de ministre responsable de la Condition féminine, je crois que nous devons nous souvenir du 6 décembre pour changer les choses. Et cette motion nous donne l'occasion, chaque année, d'un temps d'arrêt et de réflexion face à la violence faite aux femmes. Qu'il s'agisse de violence conjugale, d'agression à caractère sexuel, de harcèlement ou de discrimination, ces violences découlent de la domination historiquement exercée par les hommes sur les femmes.

En décembre 1995, il y a deux ans maintenant, le gouvernement du Québec adoptait une politique d'intervention en matière de violence conjugale intitulée Prévenir, dépister, contrer la violence conjugale . Cette politique est le fruit d'une très vaste concertation de tous les milieux concernés, y compris du milieu des organismes communautaires autonomes. Au gouvernement, huit ministères et organismes prennent une part active à la mise en oeuvre de cette politique d'intervention. Le ministère de la Santé et des Services sociaux, celui de la Sécurité publique, les ministères de la Justice, de l'Éducation, de la Famille et de l'Enfance, le Secrétariat à la condition féminine et aussi, parce que cette politique met l'accent sur la nécessité d'adapter les interventions à la diversité culturelle québécoise, le ministère des Relations avec les citoyens et le Secrétariat aux affaires autochtones.

La très grande majorité des engagements contenus dans cette politique ont à ce jour été réalisés ou sont en voie de l'être. Mais ce qu'affirme fondamentalement la politique en matière de violence conjugale, son esprit, sa philosophie, c'est que la lutte contre la violence conjugale doit, pour être efficace, faire l'objet d'une mobilisation générale de l'ensemble de la société. Non seulement les gouvernements, mais les individus eux-mêmes, les organisations, les intervenants de tous les secteurs concernés, les entreprises privées doivent aussi mettre l'épaule à la roue et prendre part à cette mobilisation plus générale contre la violence faite aux femmes.

Je tiens à réaffirmer la détermination du gouvernement à poursuivre non seulement les efforts entrepris pour endiguer la violence faite aux femmes, mais également à lancer sous peu dans les médias une très vaste campagne de sensibilisation et de prévention, qui sera faite en collaboration avec des partenariats privés et qui, durant les trois prochaines années, dans la population en général, mais en ciblant en particulier les adolescents de 13 et 14 ans, favorisera chez ceux-ci l'adoption de valeurs et de comportements prônant le rejet de rapports inégalitaires et de domination.

La violence, faut-il le rappeler, entre les hommes et les femmes naît de rapports inégalitaires et de rapports de domination. Alors, des orientations gouvernementales très claires portant sur les agressions sexuelles sont aussi en cours d'élaboration, et le gouvernement a réitéré ses engagements en matière de lutte contre la violence faite aux femmes dans le programme d'action 1997-2000 pour toutes les Québécoises. Nous entendons continuer à agir comme catalyseurs des forces en présence. Nous entendons cependant mobiliser les forces en présence dans notre société pour donner une impulsion et créer les conditions nécessaires au changement des mentalités. C'est donc en partenariat avec l'ensemble des intervenants qu'il nous sera possible de faire que les choses changent. Merci.

Le Président: M. le député de Laporte.

M. Laporte: D'Outremont, M. le Président, d'Outremont. C'est avec une vive et profonde émotion... M. le Président...

Le Président: Un jour peut-être, mais, en attendant, M. le député d'Outremont.


M. Pierre-Étienne Laporte

M. Laporte: Merci, M. le Président. C'est avec une vive et profonde émotion que je prends la parole aujourd'hui pour rappeler la terrible tragédie qui a eu lieu il y a huit ans à l'École polytechnique de Montréal, tragédie dans laquelle des jeunes filles ont perdu la vie de façon violente, jeunes femmes dont l'avenir était prometteur et sans limites. Je tenais à intervenir sur cette motion, car la violence faite aux femmes est un sujet qui me touche personnellement. Je suis moi-même père de deux filles qui sont des jeunes femmes de l'âge de celles qui ont été sauvagement tuées à Polytechnique, et mon souhait le plus cher est qu'elles puissent vivre dans une société où elles se sentiront en sécurité, une société où la violence faite aux femmes n'est pas tolérée, une société où des événements comme celui qui est arrivé à Polytechnique il y a huit ans ne se reproduiront plus jamais.

Au cours des années, de nombreuses actions gouvernementales ont été prises. Je pense notamment au ministère de la Santé et des Services sociaux, au ministère de la Justice, au ministère de la Sécurité du Revenu qui ont tous mis en place des politiques afin d'aider à contrer cette violence que subissent plusieurs catégories de femmes de notre société.

Au cours des ans, des centres d'aide ont vu le jour: des centres d'aide aux victimes d'actes criminels et d'aide aux victimes de violence conjugale; des centres d'hébergement pour femmes victimes de violence conjugale ou encore pour venir en aide aux femmes en difficulté; des centres ou des services téléphoniques d'urgence qui sont accessibles 24 heures par jour, sept jours par semaine, pour répondre aux besoins de ces femmes violentées.

(11 h 10)

Cependant, M. le Président, ce qui me trouble profondément, c'est de constater que, malgré tous les efforts que notre société a faits pour venir en aide à ces femmes, les statistiques nous prouvent hors de tout doute que la violence persiste toujours. En réalité, rien n'indique que ce type de violence soit en décroissance. Les données statistiques les plus récentes publiées par le gouvernement du Canada révèlent qu'une femme sur quatre âgée de 18 ans et plus a déjà été victime de violence criminalisable de la part de son mari ou de son conjoint de fait. La moitié des Canadiennes et 46 % des Québécoises ont été victimes d'au moins un acte de violence depuis l'âge de 16 ans. Un sixième des agressions faites aux femmes ont eu lieu dans la rue. Une femme sur quatre subira une agression sexuelle à un moment donné ou à un autre de sa vie. Pour la moitié d'entre elles, cette agression aura lieu avant l'âge de 17 ans.

Nous sommes donc, M. le Président, en présence d'un état d'insécurité réel et grave, état d'insécurité qui est d'ailleurs étroitement relié au niveau de revenus des catégories de femmes dont on parlait plus tôt. Et j'insiste là-dessus, pour le mentionner, je pense que cet état d'insécurité est non seulement stable, mais on n'observe pas non plus qu'il soit en état de régression compte tenu du fait qu'on sait que, dans la plupart des sociétés occidentales actuellement, les écarts de revenus sont en croissance plutôt que d'être en diminution.

Les conséquences de ces actes inadmissibles chez les victimes sont nombreuses. Colère, peur, perte d'estime de soi, honte, culpabilité et problèmes de relation avec les hommes ne sont qu'une partie des séquelles laissées chez les femmes victimes de violence. Les femmes agressées sexuellement sont huit fois plus susceptibles de faire des tentatives de suicide et cinq fois plus susceptibles de subir une dépression nerveuse.

La violence menace l'enfant qui en est la victime ou le témoin. Au plus jeune, elle lègue un sentiment d'insécurité, de culpabilité et une perte d'estime de soi. Souvent, l'adaptation sociale et scolaire se fera difficilement. Chez les adolescentes, la détresse peut se traduire par des fugues, tentatives de suicide ou abus de drogue et d'alcool. Adultes, les filles ayant été témoin de violence conjugale deviennent plus souvent elles-mêmes victimes de violence conjugale. Les garçons témoins ne deviennent pas nécessairement des agresseurs, mais ces expériences les ont mis en contact avec des modèles de soumission féminine et de recours à la violence.

Je le répète, M. le Président, la violence faite aux femmes n'est ni un phénomène nouveau, ni un phénomène marginal, ni un phénomène en régression. Elle peut toucher indifféremment toutes les femmes. Il est nécessaire que l'on dénonce haut et fort la violence conjugale, les agressions sexuelles et toutes autres sortes de violence dont peuvent être affectées les femmes de notre société. La violence sous toutes ses formes entraîne des conséquences néfastes sur l'intégrité physique et psychologique de ces femmes, puisque ces actes de violence ne meurtrissent pas seulement le corps par les coups et les blessures, mais aussi l'esprit par l'avilissement, la destruction de l'identité et la dévalorisation personnelle et l'humiliation.

M. le Président, j'encourage de tout mon coeur les femmes à lutter afin qu'elles puissent prendre leur place, puissent étudier dans une discipline qui leur plaît et obtenir un emploi qui les sortira de la pauvreté et qui leur donnera l'occasion de s'épanouir pleinement; à lutter également afin de provoquer des changements d'attitude et de comportement qui permettront à nos enfants de se développer et d'évoluer dans une société qui respecte l'intégrité de tous et de toutes. Je les appuie et je les encourage, et je sais que mes collègues aussi partageront cette position.

L'élimination de la violence faite aux femmes est un enjeu déterminant au regard duquel le gouvernement doit assurer son leadership et maintenir le cap dans ses décisions et ses actions visant à promouvoir la non-violence. Pour aborder efficacement le problème de la violence faite aux femmes, il ne suffit pas seulement de modifier notre façon d'agir, il faut surtout changer notre façon de penser. Il est nécessaire que tous les efforts soient mis en oeuvre pour enrayer ce fléau social et que le gouvernement québécois continue à prendre toutes les actions nécessaires pour l'éliminer. Tous et chacun devront s'impliquer afin d'enrayer le phénomène de la violence faite aux femmes et ainsi leur garantir le bien-être et la protection auxquels elles ont droit.

Enfin, M. le Président, j'aimerais transmettre au nom de tous mes collègues de l'Assemblée nationale toute la compassion et reconnaître publiquement le courage dont font preuve jour après jour depuis huit ans les parents des 14 jeunes filles massacrées à la Polytechnique. On se rappellera, M. le Président, ce que Hemingway disait du courage. Hemingway disait que le courage, c'était agir avec grâce dans l'épreuve. Sa façon en anglais de le dire était peut-être un peu difficile à traduire. Hemingway disait que le courage, c'est «grace under pressure». Quel témoignage de courage nous ont offert ces parents, M. le Président, combien nous les admirons et avec quelle sympathie nous nous associons au prolongement de leur deuil! Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, à l'évidence, la motion de Mme la ministre est adoptée. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Vote par appel nominal, sur cette motion, M. le Président.


Vote reporté

M. Jolivet: M. le Président, nous allons le remettre, en vertu de l'article 223, à mardi.

Le Président: Alors, le vote sera reporté, tel que prévu par nos règlements. Une autre motion sans préavis, M. le leader du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Jolivet: M. le Président, je voudrais, à ce moment-ci, solliciter les membres de l'Assemblée pour faire une motion de commission qui actuellement reçoit des invités. C'est la seule motion que je ferai à ce moment-ci.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Très bien. M. le leader.

M. Jolivet: Que la commission de l'éducation poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 13 heures, et de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Alors, ça va?

Une voix: Oui.


Motions sans préavis (suite)

Le Président: Très bien. Alors, maintenant, je veux reconnaître M. le ministre des Relations internationales.


Demander au gouvernement canadien de reconnaître les dispositions de l'Entente France-Québec en matière d'entraide judiciaire

M. Simard: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec demande au gouvernement canadien de respecter la compétence de l'Assemblée nationale du Québec en matière de droit civil et, en conséquence, lui demande d'indiquer à la France qu'en matière d'entraide judiciaire civile et commerciale ce sont les dispositions de l'Entente France-Québec qui s'appliqueront au Québec afin que les Québécoises et les Québécois bénéficient des nombreux avantages qui y sont prévus.»

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Jolivet: M. le Président, nous nous sommes entendus, deux de chaque côté.

Le Président: Alors, ça va? Deux de chaque côté? Très bien. M. le ministre des Relations internationales.


M. Sylvain Simard

M. Simard: Merci, M. le Président. Le Québec et la France ont développé des relations harmonieuses depuis plus de 30 ans. Une coopération bénéfique s'est faite, tant en matière culturelle, économique que sociale, par la conclusion d'un grand nombre d'ententes. Aujourd'hui, le gouvernement fédéral semble avoir décidé de mettre un terme à cette coopération en s'opposant à la conclusion d'une entente en matière d'entraide judiciaire. Le gouvernement fédéral, qui avait déjà tendance à nier la réalité québécoise, semble maintenant vouloir nier son histoire, particulièrement en ce qui concerne les relations entre la France et le Québec.

Dans le projet d'entente, la France et le Québec se sont entendus sur des mesures très avantageuses pour les justiciables du Québec. Ce que contient cette entente dépasse le contenu de la Convention Canada-France, auquel le gouvernement fédéral voudrait nous limiter, au détriment des Québécoises et des Québécois visés. L'Entente comporte en effet des mesures visant à favoriser l'accès à la justice, comme l'aide juridique et les commissions rogatoires, sujets qui ne se retrouvent pas dans la Convention.

M. le Président, l'entente négociée avec la France s'inscrit dans la continuité d'autres ententes, telles celle qui existe en matière de sécurité sociale et particulièrement celle qui a été signée par M. Robert Bourassa en matière de fiscalité, en 1987. Le modèle utilisé de même que le vocabulaire sont conformes à ces deux exemples, qui n'avaient pas soulevé d'objections de la part des autorités fédérales.

Le gouvernement fédéral semble vouloir appliquer maintenant son plan B dans les relations internationales, alors qu'il devrait plutôt collaborer à ce que la France et le Québec continuent à développer leur étroite coopération pour le plus grand bénéfice des Québécoises et des Québécois. Or, en exigeant une parfaite harmonisation sur la rétroactivité et les délais de prescription, le gouvernement fédéral demande au Québec d'introduire dans une loi des dispositions qui dérogeraient à son droit civil, en fonction d'engagements qu'il a pris à la place du Québec.

(11 h 20)

Une telle opération serait la négation de la souveraineté de l'Assemblée nationale sur le droit civil. En d'autres termes, le Québec n'adoptera pas de loi dérogeant à son droit civil pour se conformer à des engagements moins favorables pris par le Canada et n'a pas l'intention de réduire la portée ou le champ de l'Entente France-Québec qui, en plus d'être plus avantageuse pour les Québécoises et les Québécois, satisfait aussi les attentes de la partie française.

Voici pourquoi, M. le Président, en terminant, nous déposons aujourd'hui une motion par laquelle l'Assemblée nationale réaffirme sa compétence en matière de droit civil et demande au gouvernement fédéral d'indiquer à la France que ce sont les dispositions prévues à l'Entente France-Québec qui s'appliqueront au Québec pour le bénéfice de sa population et de la population québécoise. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre des Relations internationales. Mme la députée de La Pinière.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, à chaque fois que les intérêts du Québec étaient en jeu, le Parti libéral du Québec, tant au pouvoir que dans l'opposition, les a toujours défendus. Autant dire que le Parti libéral du Québec a, depuis des générations, accompagné les Québécois dans leur volonté d'affirmer leur identité propre et leur appartenance au Québec et au Canada.

Au chapitre des compétences propres au gouvernement du Québec, le Parti libéral du Québec s'est toujours fait un devoir de les défendre et de les promouvoir dans le respect des juridictions respectives du fédéral et des autres provinces.

Au plan international, c'est le gouvernement du Parti libéral du Québec qui a mis le Québec sur la carte du monde et qui a doté le Québec d'un réseau de délégations et de bureaux commerciaux à l'étranger avant que le gouvernement du Parti québécois, dirigé par l'actuel premier ministre, préside à son saccage. Il lui a fallu une visite en Chine pour se rendre compte de l'ampleur de ses dégâts, assez pour décréter unilatéralement, dans la hâte et l'improvisation, qu'il va déléguer des fonctionnaires québécois à l'ambassade du Canada à Pékin. Il faut le faire.

C'est ce même premier ministre, alors ambassadeur du Canada à Paris, qui s'est attiré, en 1987, les foudres de Jacques Parizeau qui l'a accusé de massacrer le Québec en France. Et que disait Jacques Parizeau dans une entrevue à L'actualité de décembre 1987? Il disait ceci de l'actuel premier ministre, et je le cite au texte: «C'est curieux que ces gens – en parlant implicitement de l'actuel premier ministre – se soient tournés vers le fédéral. Ça ne me choque pas outre mesure, car il faut bien gagner sa vie, n'est-ce pas? Par exemple, je vous avouerai qu'il y a des choses que je ne comprends pas dans la façon dont les réalignements se sont faits dans la bagarre perpétuelle entre la délégation du Québec et l'ambassade du Canada à Paris. Au fond – disait M. Parizeau – la délégation est en train de couler, de se faire massacrer avec l'aide active d'anciens du Parti québécois et des gens qui en ont été proches. Ici, on ne parle pas de jobs alimentaires, on ne parle pas de gens qui ont un problème d'emploi. Comment pensez-vous que ceux qui ont milité bénévolement durant des années pour la cause prennent cela?»

Cette attaque virulente a tellement piqué l'ancien ambassadeur du Canada à Paris et actuel premier ministre du Québec qu'il a senti l'obligation de répliquer, dans La Presse du 26 novembre 1987, par un article intitulé Le massacre du Québec à Paris . Et je cite au texte l'actuel premier ministre: «Je prends connaissance du texte d'une entrevue publiée par le magazine L'actualité dans son numéro de décembre. M. Jacques Parizeau y tient, au sujet de l'ambassade du Canada à Paris, des propos pour le moins surprenants. Pour lui, l'ambassade, «avec l'aide active d'anciens du PQ» au nombre de 30 ou 40, semble-t-il, serait en train de «massacrer la Délégation du Québec à Paris». Suivent des commentaires moins que flatteurs sur ceux qui ont changé de camp. Comme il se trouve que je dirige cette ambassade et que je suis, moi aussi, un ancien du PQ, on comprendra que je me sente expressément visé.» C'était le premier ministre du Québec en 1987. Alors, pour la défense des intérêts du Québec par ce gouvernement, on repassera.

Pour ce qui est de respecter la compétence de l'Assemblée nationale du Québec en matière de droit civil, il va sans dire que l'opposition officielle a toujours été pour. Comment peut-il en être autrement quand c'est le Parti libéral du Québec lui-même qui a mis au monde le concept du prolongement international des compétences internes du Québec? C'est la théorie de Paul Gérin-Lajoie, un ancien ministre libéral, mise en pratique par tous les gouvernements libéraux qui se sont succédé depuis.

Pour ce qui est du projet de l'Entente Québec-France relative à l'entraide judiciaire en matière civile et commerciale, l'opposition officielle en appelle aux deux niveaux de gouvernement, fédéral et provincial, pour en arriver à une entente et finaliser sa signature, il va sans dire, dans le cadre de la Convention relative à la reconnaissance et à l'exécution des décisions judiciaires en matière civile et commerciale, ainsi qu'à l'entraide judiciaire en matière des pensions alimentaires signée entre le Canada et la France le 10 juin 1996.

Or, M. le Président, pour que l'Entente Québec-France soit valide aux yeux du droit international et pour qu'elle bénéficie réellement aux Québécoises et aux Québécois, il est impératif qu'elle soit ratifiée par Ottawa. Le ministre des Relations internationales accuse dans ses propos le gouvernement fédéral d'empêcher la signature de cette entente. Or, il n'en est rien. De bonne foi, dès que le ministre des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada a été informé par la France, d'ailleurs, de l'existence de ce projet d'entente, un haut fonctionnaire fédéral a invité les représentants du gouvernement du Québec à une rencontre pour clarifier et aplanir les termes de l'entente, car il ne suffit pas de signer une entente entre la France et le Québec, il faut qu'elle soit valide aux yeux du droit international et applicable en France.

Alors, ce que le ministre des Relations internationales ne dit pas, c'est qu'en 1977 le gouvernement du Québec, sous un gouvernement du Parti québécois, avait conclu une entente avec la France sur l'entraide judiciaire. Cette entente n'a pas force de loi en France précisément pour la raison qu'elle n'a pas été conclue sous le couvert d'une convention entre le Canada et la France. Ça, M. le Président, c'est ce que le ministre a oublié volontairement de dire à cette Assemblée.

Alors, c'est pour éviter un tel revers au Québec que le ministre Lloyd Axworthy a clairement indiqué dans son communiqué du 22 octobre 1997, et je le cite: «Nous souhaitons vivement aider le gouvernement du Québec à conclure une entente valide avec la France. Il est dans l'intérêt des Québécois que les consultations entre le gouvernement fédéral et le gouvernement du Québec reprennent rapidement afin de résoudre les problèmes qui se posent encore sur la substance.»

Dans une lettre du 23 octobre dernier que le ministre des Affaires internationales a adressée au ministre des Relations internationales, le ministre Lloyd Axworthy a exprimé le souhait d'en arriver à une entente dans les plus brefs délais.

(11 h 30)

M. le Président, le ministre des Relations internationales accuse aujourd'hui Ottawa d'exprimer des réserves sur les termes de l'Entente Québec-France, et c'est ce même ministre qui a manqué à ses devoirs lorsque le gouvernement fédéral a invité les provinces à une consultation préparatoire à la Convention Canada-France en matières civiles, commerciales et en matière de pensions alimentaires, qui a d'ailleurs été signée en 1996, et que ce gouvernement refuse de reconnaître et refuse d'y inscrire d'ailleurs le projet de l'entente qui fait litige actuellement. M. le Président, l'opposition officielle souhaite que l'entente Québec-France soit signée de façon à bénéficier aux Québécoises et aux Québécois.

Ce gouvernement est en train de masquer son incompétence en provoquant des chicanes fédérales-provinciales et en faisant feu de tout bois pour antagoniser les relations avec notre partenaire principal, pour des gens qui parlent de partenariat, et ce, dans le seul but de faire croire aux Québécois et aux Québécoises que le fédéralisme ne fonctionne pas à l'avantage du Québec. M. le Président, j'invite le ministre des Relations internationales à mettre ses énergies dans la coopération avec le gouvernement fédéral pour défendre les intérêts des Québécois au lieu de déployer toute sa charge contre Ottawa pour des raisons purement idéologiques.

Pour ce qui est, M. le Président, et je terminerai là-dessus, de la perception des pensions alimentaires, il est utile de rappeler que ce gouvernement a, dans la fièvre de la campagne référendaire, précipité l'entrée en vigueur du nouveau régime de perception automatique des pensions alimentaires, ce qui a eu pour effet de provoquer un retard considérable dans le traitement des dossiers et priver ainsi des milliers de femmes et d'enfants de revenus pour assurer leur subsistance. Quand on connaît le niveau de pauvreté dans lequel sont rendues à vivre les familles monoparentales, on peut questionner sérieusement la crédibilité de ce gouvernement à prétendre défendre véritablement les intérêts des citoyens.

M. le Président, on est également en droit de s'interroger sur les véritables motivations de ce gouvernement qui sacrifie les intérêts des femmes et des enfants pour défendre sa seule et unique obsession, la séparation du Québec. M. le Président, quand il est question de défendre les intérêts du Québec et des Québécois, le Parti libéral du Québec a toujours répondu «présent» et continuera à le faire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de La Pinière.

Avant de vous céder la parole, M. le leader du gouvernement, je voudrais, pour le bénéfice des collègues de cette Assemblée, vous mentionner que, lorsqu'il y a une motion sans préavis, le temps de parole est de 60 minutes à l'auteur et, au représentant de l'opposition, de 60 minutes, et tous les autres intervenants ont un temps de parole de 20 minutes, et ainsi qu'un droit de réplique de 20 minutes. Alors, ça, c'est sur chaque motion sans préavis.

Maintenant, comme il y avait entente entre les deux partis pour établir qu'il y avait un représentant de chaque côté, ceci met fin à la motion sans préavis.

Une voix: L'entente, c'est deux.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Deux de chaque côté?

Une voix: Deux de chaque côté.

M. Jolivet: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. M. le leader.

M. Jolivet: Oui, juste une chose, je comprends que vous donnez ce que le règlement prévoit, cependant il y a la tradition, et c'est dans ce sens-là, il y avait deux personnes de chaque côté. Mais je comprends que vous avez fait une mise au point qui est en vertu du règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Effectivement, M. le leader, parce que souvent on me questionne, à savoir: Comment se fait-il que, d'un côté de la Chambre, on parle pendant un temps relativement court et, de l'autre côté, le temps de parole est un petit peu plus long? Alors, comme je viens de le mentionner, le temps de parole est de 60 minutes à l'auteur, de 60 minutes au niveau de l'opposition, et également tous les autres intervenants qui peuvent parler sur une motion sans préavis ont un temps de parole de 20 minutes. Également, le règlement stipule que la réplique est de 20 minutes. Alors, comme nous avons eu deux intervenants sur cette motion et que vous avez convenu de part et d'autre qu'il y en avait deux de chaque côté, je serais prêt maintenant à reconnaître M. le leader adjoint du gouvernement et ministre des Transports et délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, je viens d'entendre de la part de la députée de La Pinière un bel exemple de ce qu'est l'attitude du Parti libéral du Québec en matière de défense des compétences du Québec. C'est un discours à deux volets: Oui, le Parti libéral du Québec entend défendre les compétences exclusives du Québec. Et puis le deuxième volet: Cependant, il est clair que c'est le fédéral qui a raison et qu'on se met aux ordres du fédéral. Elle fait appel à la coopération du gouvernement du Québec avec le gouvernement fédéral. Dans son esprit, dans l'esprit du Parti libéral du Québec, la coopération, ça veut dire inféodation, ça veut dire assujettissement, ça veut dire subordination du Québec à l'égard du fédéral. C'est ça que ça signifie.

Alors, M. le Président, oui, le Québec a négocié avec la France un texte d'entraide judiciaire en matières civiles et commerciales. Il s'agit là d'un domaine essentiellement de sa compétence, puisqu'il concerne son droit civil et plus particulièrement son Code civil. Or, il semble que le gouvernement fédéral, toujours dans le cadre de son plan B... Parce que c'est de ça qu'il s'agit, d'une offensive tous azimuts, y compris sur la scène internationale, de la part du fédéral pour faire reculer le Québec. Donc, le gouvernement fédéral considère maintenant qu'il est plus à même que l'Assemblée nationale du Québec de déterminer ce qui convient à la société québécoise et qu'il peut en conséquence s'engager à la place du Québec avec un autre partenaire.

Faut se rappeler que le droit civil est une des caractéristiques fondamentales de la société québécoise, auxquelles certaines personnes, je vous le rappelle, M. le Président, particulièrement tout récemment, se font une joie de référer pour identifier le caractère unique du Québec. Mais là, vraiment, avec l'attitude du gouvernement fédéral qui, lui, a donné son adhésion à la déclaration de Calgary, on a vraiment la preuve – en faudrait-il davantage? – que le concept de caractère unique est un concept d'une insignifiance absolue, une coquille vide, un hochet symbolique sans aucune portée. Bel exemple! Belle preuve! Le gouvernement fédéral, en voulant imposer au Québec le contenu de sa convention qu'il a signée avec la France, et ce, par le biais d'une exigence d'harmonisation des textes – beau prétexte, prétexte d'harmoniser les textes – il fait en sorte ainsi de priver les justiciables québécois d'avantages que le gouvernement du Québec, seul responsable en la matière, a négociés pour eux avec un partenaire étranger.

Le gouvernement fédéral, dans ce dossier, insinue que le gouvernement du Québec a voulu prétendre à la souveraineté sur la scène internationale en concluant cette entente. Je lui rappellerais à ce sujet... Et je voudrais citer mon collègue dans une lettre qu'il adressait à M. Axworthy. Je le cite: «Quand un gouvernement responsable des législations visées par des conventions internationales déclare s'engager, avec un partenaire, à les respecter, il ne prétend pas à la souveraineté mais assume simplement ses responsabilités.» Fin de la citation. En outre, lui-même, en voulant imposer au Québec les engagements qu'il a pris avec la France dans ce domaine, démontre une prétention de compétence qu'il n'a pas.

Il est évident que nous assistons ici à une opération qui, dans le cadre du plan B, vise essentiellement à nier sur tous les plans la compétence du gouvernement du Québec. On faisait allusion tout à l'heure à ce qu'on appelle, depuis les années soixante, «la doctrine Gérin-Lajoie». Eh bien, je vous dirai, M. le Président, que, selon la déclaration de Calgary, qui est le programme constitutionnel pour la prochaine élection du Parti libéral – il a demandé aux neuf provinces du Canada anglais de lui rédiger son programme constitutionnel – dans son programme constitutionnel, qu'on appelle «la déclaration de Calgary», la protection du caractère unique ne peut se faire qu'au sein du Canada. Cela signifie ultimement que le Québec ne pourrait protéger ce caractère unique à l'étranger par l'intermédiaire de son réseau de délégations, par la signature d'ententes bilatérales ou multilatérales de coopération avec d'autres États dans les secteurs relevant de ses compétences. Cela va tout à fait à l'encontre de ce qu'on appelle «la doctrine Gérin-Lajoie», c'est-à-dire de la volonté manifestée par le gouvernement du Québec depuis 40 ans et plus, volonté manifestée par les gouvernements québécois successifs de prolonger les compétences internes du Québec, exclusives en plus, sur la scène internationale.

(11 h 40)

Ce qu'implique la déclaration de Calgary, c'est le retour à la bienveillante tutelle fédérale des interventions du Québec à l'étranger. C'est ce qu'on constate en ce qui concerne cette entente portant sur le droit civil.

Alors, le gouvernement fédéral aurait plutôt intérêt à se préoccuper du bien-être des Québécoises et des Québécois en cessant de faire de l'obstruction mesquine afin que l'entente entre en vigueur le plus rapidement possible. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes. Nous allons maintenant céder la parole au leader adjoint de l'opposition ainsi qu'au critique officiel en matière de relations intergouvernementales. Alors, M. le député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. À chaque fois que j'ai l'occasion de prendre la parole après le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes du Québec, ou que je l'écoute, je me rappelle et je revois toujours le style. Enfin, ce n'est jamais une surprise de l'entendre inventer nos positions, réécrire nos discours et puis s'amuser à essayer de les descendre. Il invente, il nous met des mots dans la bouche.

Et, s'il était assez aimable pour écouter ce que l'on dit et lire nos documents, M. le Président, il verrait que dans notre proposition d'affaires canadiennes c'est beaucoup plus large. Il y a cette amélioration du Canada pour l'ensemble des Québécois et des Canadiens et cette affirmation des Québécois dans la réconciliation, pas dans la confrontation. Alors, ce serait plaisant à un moment donné qu'on ait un débat qui se soulève un petit peu au-delà de la partisanerie lorsqu'on parle des compétences du Québec, lorsqu'on parle de l'avenir de nos institutions, de l'avenir de notre société. J'aimerais qu'on se lève un petit peu au-dessus, et je vais, moi, si vous me permettez, essayer de procéder à une lecture objective de la situation.

D'abord, il ne faudrait peut-être pas s'étonner – là je vais me permettre une petite pointe partisane et je vais ensuite faire mon objectivité, mais je pense que c'est important de le préciser, M. le Président, pour que les gens voient. D'abord, poser la question. Hier, on avait une déclaration ministérielle qui refaisait dans la confrontation intergouvernementale, et aujourd'hui dans les discours – pas dans la motion, dans les discours – tout ce qu'on entend, c'est de la confrontation.

Alors, je dis: Voici une petite pointe partisane; c'est ma lecture. Peut-être que de l'autre côté on va dire: Ce n'est pas le cas. Moi, c'est la lecture que j'ai faite; j'ai entendu, et les gens ont suivi les débats, et je suis persuadé que les Québécois vont se faire une idée de ce qui a été tenu comme propos. Moi, je n'y ai senti aucune tentative d'entente et d'amélioration; je n'ai entendu que de la confrontation. Peut-être qu'on entendra plus tard un désir nouveau, au Parti québécois, de faire de la coopération, mais malheureusement les discours ne traitaient pas de ces sujets.

Revenons à la situation, regardons ce qui est devant nous. Nous sommes en face – dans un pays fédéral comme le nôtre, parce que nous avons choisi, comme Québécois, de rester Canadiens et d'améliorer le Canada, d'améliorer ce régime fédéral – d'un système, donc, avec des compétences partagées. Et, si les compétences sont partagées, soit il faut les protéger, les promouvoir – nous en sommes, depuis toujours d'ailleurs – mais il faut aussi concevoir qu'il y a des interrelations entre les juridictions. Et la question est la suivante: Comment gérer ces interrelations?

Je donne des exemples bien simples pour qu'on comprenne. Et je suis sûr que les deux côtés, ça, on va accepter ça, on s'élève au-dessus de la partisanerie. Personne ne peut douter du fait, et surtout pas le premier ministre actuel du Québec, que le gouvernement fédéral ait compétence en matières étrangères. Je m'explique. Sûrement pas le premier ministre actuel du Québec, qui était ambassadeur du Canada, qui a reçu un chèque de paie du gouvernement fédéral en vertu de cette compétence. Donc, je suis persuadé d'une chose – toujours au-delà de la partisanerie – on va se comprendre: il y a une compétence à Ottawa en matière d'affaires extérieures.

Ceci étant, nous avons aussi, au Québec, nos compétences. Et il est important, M. le Président, que nous puissions les affirmer, les faire respecter, que nous puissions les utiliser pour faire profiter les Québécois – les Québécoises notamment, parce qu'il y est, entre autres, question de pensions alimentaires, qui sont, on le sait, souvent le plus grand nombre de créancières... Il est important qu'on puisse les mettre à profit pour les Québécois. Pas les utiliser pour la cause de la séparation, les utiliser pour que dans le concret il y ait des bénéfices pour les citoyens. C'est ça qui est l'idée. On est donc en face de deux compétences qui doivent vivre ensemble; non pas se confronter pour s'annuler, mais vivre ensemble. Donc, ça va appeler de la coopération.

J'ai noté hier – et je le disais – dans le discours du ministre des affaires canadiennes du Québec que, dans sa déclaration ministérielle sur les relations intergouvernementales, il n'y avait aucune stratégie de relations intergouvernementales, aucune stratégie d'alliances à tisser, aucune direction sur les bénéfices pour qu'on puisse faire profiter les Québécois de ces compétences qui doivent vivre ensemble. Il n'y avait que de la confrontation. Dans ce cas-ci, il faut gérer les interrelations entre les deux compétences au bénéfice des Québécois. Certains pourraient dire – et je m'éloigne un petit peu du propos pour faire cette précision – qu'avant même de parler de prolongation externe de nos compétences il serait utile que le gouvernement actuel s'occupe de nos compétences à l'interne, parce que, comme l'a noté la députée de La Pinière, dans le domaine des perceptions alimentaires au Québec, c'est un fiasco total. Je peux comprendre que le gouvernement essaie toujours de faire diversion, mais, si on veut parler de ces sujets-là et de la prolongation externe, n'oublions pas que ce gouvernement a du travail à faire à l'interne et qu'il serait plus que temps qu'il s'y applique pour le bénéfice réel des Québécois et des Québécoises.

Dans la suite d'hier, M. le Président, je serais tenté de demander combien de fois le ministre des Relations internationales a rencontré, discuté avec son homologue, combien de fois il l'a fait de visu. Les rencontres qu'il a eues avant Paris, combien de fois? Combien de fois le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes du Québec a discuté de ce dossier? On sait qu'il y avait des rencontres, notamment sur les commissions scolaires linguistiques. Combien de fois ils ont traité de ce dossier et dans quel esprit ils l'ont fait? Voilà des questions qu'il faut se poser parce que c'est cette démonstration de travail dans le sens des intérêts du Québec qui est en jeu.

À mon avis, M. le Président, lorsqu'on regarde la suite des événements, la seule chose, la seule stratégie, la seule démarche qu'a adoptée ce gouvernement du Parti québécois n'a été que de transposer en France la cause du Parti québécois. Pour les Québécois qui nous écoutent, comment comprendre qu'un gouvernement qui aurait vraiment à coeur les intérêts des Québécois, et qui sait qu'il est dans un régime fédéral, et qui sait qu'il y a des interrelations entre la compétence fédérale, dans le domaine international, et celle du Québec dans ses compétences, notamment, ici, le droit civil... Comment expliquer que le gouvernement canadien n'ait jamais été avisé de la démarche du gouvernement du Québec? Comment expliquer qu'il n'y ait pas eu de discussions antérieures? Comment expliquer que ce soit la France qui ait avisé du problème? C'est, à mon avis, parce que ce gouvernement ne tente toujours que de créer des conflits, d'inventer une théorie du complot.

Ça m'amène à l'autre aspect, notamment celui du ministre des affaires canadiennes qui a évoqué deux ou trois fois que c'était là un des éléments du plan B. Bon, ce cher plan B dont on entend souvent parler. La vérité, M. le Président: Est-ce qu'il y a un complot? La question qu'il faut se poser, si on s'élève au-dessus de la partisanerie, c'est: Est-ce qu'il y a vraiment un complot à l'égard du droit civil? Est-ce que le gouvernement fédéral est en train de porter atteinte à notre compétence en matière civile? Je voudrais quand même vous citer un passage de ce que fait ou de ce que dit le gouvernement fédéral actuellement à l'égard du droit civil.

(11 h 50)

Je vous cite un discours tenu par le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, d'Ottawa, en novembre dernier. Et il disait ceci, pour voir s'il y a vraiment un complot: «Le bilinguisme permet au Canada d'être à la fois membre de la francophonie et du Commonwealth.» Comme Québécois, je peux vous dire que nous en sommes très heureux. Et il continue: «Les origines culturelles variées de la population canadienne nous donnent également de nombreux points d'ancrage dans le monde. Notre ouverture sur le Pacifique et l'Atlantique favorise nos échanges culturels et commerciaux.» Ça, ça a des retombées pour le vrai monde, M. le Président.

Dans la même veine: «Notre bijuridisme représente une fenêtre sur le monde, et le gouvernement du Canada veut travailler activement à la promotion de cette caractéristique fondamentale de la société québécoise qui rejaillit sur l'ensemble du Canada.» Il poursuit: «Le ministère de la Justice a tout d'abord adopté, en juin 1995 – et je parle du ministère de la Justice à Ottawa – une politique sur le bijuridisme législatif qui traduit sa volonté de rendre les lois plus claires et d'une interprétation plus accessible pour tous les Canadiens. Le ministre de la Justice s'est engagé, à cette occasion, à rédiger chacune des deux versions de tout projet de loi ou de règlement touchant au droit privé, en tenant compte également de la terminologie des concepts, des notions et des institutions propres aux deux régimes de droit privé canadien.»

S'il y a complot, M. le Président, il est du côté du gouvernement du Parti québécois qui dénature sans cesse la réalité, la vérité, sans cesse. Il nous invente des propos. Il voudrait rédiger nos discours et il dénature le positionnement qui existe à Ottawa. Il n'y a pas de complot. Qu'il y ait une incompréhension, qu'il y ait des explications à donner, cela ne doit pas entraîner l'acceptation, l'utilisation d'une stratégie de confrontation. La vérité, c'est que l'Assemblée nationale, les institutions québécoises doivent continuer de s'affirmer, de rayonner. Nous croyons que le Québec n'est pas en quête de libération nationale, comme voudrait le laisser entendre le Parti québécois. Les Québécois sont en quête d'affirmation, de rayonnement, d'expression de leur société mais pas d'une libération. Et il est normal que dans ce souhait, dans cette volonté d'expression et de rayonnement de notre société et de notre identité, nous ayons à défendre à tout instant nos compétences, et nous y sommes.

Cependant, cette défense ne doit pas pénaliser les Québécois et les Québécoises, ne doit pas faire reculer les Québécois et les Québécoises, et c'est ce qui est déplorable dans l'attitude de ce gouvernement qui utilise tous les stratagèmes possibles pour faire croire à des complots qui n'existent pas, et ne doit pas diviser les Québécois du reste du Canada pour nous faire perdre tous les avantages qui en découlent.

Conclusion: le Québec a droit au prolongement externe de nos compétences, et notamment en droit civil. Et il est utile de rappeler que Terre-Neuve, je l'ai dit hier, a adopté en premier cette résolution qui n'est qu'une étape mais qui a comme direction de reconnaître le caractère unique du Québec, et notamment son droit civil. Alors, il est important de le rappeler ici. Les Québécois ont droit à ce prolongement externe de nos compétences. Les Québécois ont droit aussi d'avoir un gouvernement qui travaille dans le sens de leurs intérêts réels par l'approche constructive, plutôt que de pénaliser les Québécois et de soumettre constamment les intérêts des Québécois au bénéfice de la cause de la séparation.

M. le Président, sur une motion comme celle qui nous est présentée aujourd'hui, nous voulons dire: Nous allons toujours avoir en tête, dans le positionnement que nous prenons, l'intérêt concret, réel, pratique des citoyens que nous représentons, avant tout dogme et toute théorie. Si nous supportons et nous défendons le prolongement externe de nos compétences, c'est parce que voilà un moyen de servir l'intérêt de nos citoyens en vertu des particularités qui sont propres à la société québécoise. Mais nous savons aussi que, ayant toujours à coeur l'intérêt réel, pratique des Québécois et des Québécoises, nous devons éviter de saborder le partenariat qui existe déjà, qui fonctionne déjà, qui permet déjà aux Québécois et aux Québécoises de tirer des bénéfices économiques et sociaux.

Il faut éviter toute stratégie qui saborderait les avantages que nous avons et plutôt avoir toujours en tête, en ayant un regard le plus objectif possible, de se dire: Voilà un système que nous avons, un partenariat que nous avons, sachons y voir les avantages qui servent nos concitoyens que nous représentons, sachons aussi y déceler, toujours avec vigilance, les problèmes, les choses à améliorer et travaillons concrètement à convaincre, travaillons concrètement à avancer les arguments qui vont faire en sorte que nos partenaires vont, avec nous, tirer profit d'un Canada amélioré, avec l'enrichissement de l'identité québécoise bien affirmée, et qui va nous permettre à nous, Québécois, de tirer le maximum des avantages que peut nous donner une approche constructive, une approche décidée, résolue, qui protège et défend ce que nous avons mais qui cherche sans cesse à améliorer la qualité de vie de nos concitoyens. Voilà, M. le Président, le sens de notre intervention.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay.


Mise aux voix

Le débat étant terminé, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.


Avis touchant les travaux des commissions

M. Jolivet: Oui, aux avis touchant les commissions, M. le Président. Je reprends donc les avis que j'avais commencés tout à l'heure et j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes atteintes de maladie mentale et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 17 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'éducation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'aménagement du territoire procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 173, Loi instituant le fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, le lundi 8 décembre 1997, de 10 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Finalement, que la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, le lundi 8 décembre 1997, de 10 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement. Je comprends que vous aviez déjà signalé des consultations particulières. Merci.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

À la rubrique des renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

M. Copeman: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le Président, après les événements de la semaine passée, où le président du Parti québécois, premier ministre du Québec, a laissé entendre à son Congrès national qu'il y aura un dépôt, avant les Fêtes, d'un projet de loi sur la réforme de l'aide sociale, et que, dans le feuilleton d'aujourd'hui, on ne voit aucun préavis... M. le Président, vous connaissez aussi bien que moi toutes les étapes que ce projet de loi, il va falloir qu'il franchisse avant les Fêtes. Je pourrais peut-être demander au leader du gouvernement quand est-ce que le premier ministre va tenir sa parole et respecter le dépôt du projet de loi sur la réforme de l'aide sociale, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Le député est impatient, M. le Président. Il verra en temps et lieu que le premier ministre déposera, par l'intermédiaire de la ministre responsable, ce qu'il faut au moment opportun.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

(12 heures)

M. Paradis: Oui, strictement, le premier ministre a pris un engagement très ferme devant les membres de son Conseil. À ce moment-là, quand on parle de moment opportun, est-ce que le leader du gouvernement est en train de nous dire qu'il répète l'engagement du premier ministre, que ça va être fait à temps durant cette session pour que ça soit adopté à cette session? S'il s'agit de bonification pour les bénéficiaires de l'aide sociale, on peut l'assurer de la collaboration de l'opposition officielle. Est-ce que, lorsqu'il dit «moment opportun», il répète l'engagement que ça va être fait avant les Fêtes et, s'il s'agit d'un projet qui est favorable aux bénéficiaires de l'aide sociale, qu'il pourrait être adopté avant les Fêtes pour que les plus démunis de la société puissent passer Noël et le début de l'année avec le même esprit qui nous animera tous à ce moment-là?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, ce que je répète... Je prends acte de la coopération que me donne le leader de l'opposition, et, lorsque viendra le temps de ce dépôt, nous verrons si, lui aussi, il tiendra parole.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors... Oui, M. le leader de l'opposition, une dernière intervention.

M. Paradis: M. le Président, il n'est pas question qu'on ne tienne pas parole de ce côté-ci. Maintenant, on bénéficie de la présence de Mme la ministre qui est la marraine dudit projet de loi. Peut-être que le leader pourrait consulter ou la ministre nous répondre directement en cette Chambre: Quand ledit projet de loi va-t-il être déposé? Ou, au moins, qu'on nous indique: Est-ce que le projet de loi a reçu l'aval du Conseil des ministres ou est-ce qu'on néglige ceux qui sont les plus démunis de notre société, du côté gouvernemental?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, le leader de l'opposition a beaucoup de moyens de faire valoir ses points de vue, je le conçois très bien. Tout sera fait selon les règles, et, s'il faut le consentement de l'opposition, je verrai à ce qu'il soit fait en ce sens si une adoption doit être faite avant les Fêtes. Et, dans ce contexte-là, je verrai si le leader de l'opposition qui nous dit, s'il y a des bonifications dans un tel projet de loi qui sera déposé en temps et lieu, qu'il nous donne son aval à ce moment-ci pour l'adoption, peu importe le fait qu'il ait été déposé après le 13 novembre dernier... Je prends donc acte de son bon vouloir, et on verra lorsqu'il sera déposé.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce qu'on doit comprendre, M. le Président, de la réponse que le leader du gouvernement vient de nous donner qu'il réitère en cette Chambre l'engagement pris par le premier ministre à l'occasion du Conseil national du Parti québécois la fin de semaine dernière que le projet de loi va effectivement être déposé, qu'on aura le temps suffisant d'en discuter correctement pour l'adopter s'il est favorable aux bénéficiaires de la sécurité du revenu?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, tout ce que je dis à ce moment-ci... Le député est un peu impatient, il pourra poser toutes ces questions-là mardi prochain au premier ministre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ceci met fin... Toujours dans la même rubrique, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Tout comme vous, j'ai aperçu Mme la ministre responsable des bénéficiaires de la sécurité du revenu qui voulait donner un complément de réponse, et il y a consentement à ce moment-ci pour qu'elle puisse le faire.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, en vertu du règlement, c'est le leader qui répond aux questions. S'il a besoin de l'appui de la ministre, il le fait, et, dans ce contexte-ci, la ministre s'apprêtait à aller un petit peu plus vite que l'annonce qu'on devra faire, puisqu'elle doit parler maintenant, et nous sommes rendus à cette étape-là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, si vous le permettez, M. le leader du gouvernement...

M. Jolivet: C'est ça, mais je voulais quand même le dire, M. le Président, pourquoi. Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Je comprends, maintenant, que la rubrique est complétée. Vous avez autre chose, M. le leader de l'opposition?

M. Paradis: Oui.

M. Jolivet: M. le Président, vous ne m'avez pas laissé finir.

Le Vice-Président (M. Pinard): Allez.

M. Jolivet: O.K. Ça va peut-être lui permettre d'avoir sa réponse. La ministre s'apprêtait à passer à l'étape suivante sur le projet de loi du Régime de rentes, et c'est dans ce sens-là que la réponse qui a été donnée est actuellement donnée.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce que je dois comprendre, M. le Président, que, à ce moment-ci, le leader du gouvernement invoque le règlement et qu'il refuse le consentement que l'opposition lui offre de donner à ce moment-ci l'opportunité à Mme la ministre responsable des prestataires de la sécurité du revenu de donner une réponse beaucoup plus éclairante que les absences de réponse qu'on a obtenues du leader du gouvernement?

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, toutes mes informations sont correctes, et, à ce moment-ci, nous devrons passer à l'étape suivante.


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, merci. Nous avons maintenant complété les affaires courantes et nous allons procéder immédiatement avec les affaires du jour. Alors, aux affaires du jour, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 25 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 149


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements de la ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 25 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par Mme la ministre de la Sécurité du revenu. Ces amendements sont déclarés recevables. Y a-t-il des interventions sur le projet de loi n° 149? Alors, Mme la ministre de la Sécurité du revenu.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Ce sera une brève intervention, puisque nous n'en sommes qu'à l'étape de la prise en considération du rapport et que nous aurons donc l'occasion, en troisième lecture, de compléter l'ensemble de la présentation du projet de loi n° 149 avant qu'il ne soit soumis, donc, à une adoption finale à l'Assemblée nationale.

Alors, peut-être deux mots pour d'abord vous signaler qu'avec le consentement de l'opposition nous introduisons des amendements, à ce stade-ci, sur la notion de conjoint de fait, de manière à permettre un partage de la rente de retraite s'il y a consentement mutuel entre conjoints de fait. Peut-être préciser qu'il s'agit d'une disposition qui se retrouvait déjà dans le Régime de pensions du Canada ainsi que dans les régimes complémentaires de retraite et qu'il a fallu un examen plus minutieux qui nous aura conduits à une décision finale au Conseil des ministres cette semaine.

Alors, je profite de l'occasion pour vous signaler que les modifications qui sont introduites à l'occasion de la prise en considération du rapport accordent aux conjoints de fait les droits qui sont reconnus aux conjoints mariés en ce qui concerne le partage des gains et en ce qui concerne le partage de la rente de retraite.

Alors, le partage des gains consiste à répartir en parts égales entre les deux ex-conjoints – il faut que ce soit un consentement mutuel, dans ce cas-là, mais il peut se produire aussi qu'il y a, et on le voit de plus en plus souvent d'ailleurs, des séparations qui se font sous le signe de l'entente – la somme des gains admissibles qu'ils ont accumulés dans le Régime de rentes pendant leur période de vie commune.

Le partage de la rente de retraite consiste à répartir entre les conjoints qui continuent de cohabiter – aussi, ce qui peut être possible à partir de 60 ans – la rente de chacun en tenant compte de la durée de leur vie commune. Actuellement, le partage des gains inscrits en vertu de la Loi sur le régime des rentes n'est possible qu'entre deux conjoints dont le mariage a été dissous par divorce ou déclaré nul, ou encore ce partage est possible entre deux conjoints mariés et séparés de corps, sauf si ceux-ci renoncent au partage.

Quant au partage de la rente de retraite du Régime de rentes du Québec, depuis le 1er janvier 1994, il est possible de faire le partage de la rente de retraite à partir de l'âge de 60 ans, mais uniquement entre conjoints mariés et non judiciairement séparés de corps. Alors, depuis l'entrée en vigueur de la Loi sur le régime de rentes du Québec, depuis 1966, il y a 31 ans, les conjoints de fait ont droit à la rente de conjoint survivant, mais encore faut-il qu'il y ait eu, si vous voulez, décès. Aucun autre droit n'est conféré aux conjoints de fait ni en cas de rupture de l'union de fait ni non plus pendant la vie commune, alors ni au moment de la rupture comme un partage des gains ni au moment de la vie commune comme un partage de la rente.

Le gouvernement profite donc de cette réforme pour adapter les dispositions du Régime de rentes du Québec à la réalité sociale que représente le nombre croissant de couples qui choisissent l'union de fait plutôt que le mariage et pour établir une certaine équivalence entre les droits consentis aux conjoints mariés et aux conjoints de fait. Il faut noter que ces nouvelles mesures ont une incidence bénéfique sur le revenu des femmes, qui est encore souvent inférieur à celui des hommes, puisque que ce soit, suite à une rupture, le partage des gains, ou le partage de la rente pendant la vie commune, ce partage, en fait, est généralement à leur avantage.

(12 h 10)

Les modifications permettent aussi une plus grande concordance des dispositions du Régime de rentes du Québec, comme je l'ai mentionné, avec celles du Régime de pensions du Canada. Déjà, depuis 10 ans, le Régime de pensions du Canada confère aux conjoints de fait le droit au partage des gains et au partage de la rente de retraite. Les modalités générales suivantes s'appliqueront au partage des gains et au partage de la rente entre conjoints de fait.

Donc, le droit au partage est accordé aux conjoints de fait qui ne sont pas mariés à une autre personne, de façon à ne pas déroger aux règles du Code civil relatives au patrimoine familial, et, d'autre part, la durée minimum de vie maritale pour reconnaître les conjoints de fait est la même que celle prévue pour le droit à la rente de conjoint survivant, à savoir trois ans ou un an si un enfant est né de cette union. Alors, voilà, M. le Président, les dispositions introduites dans le cadre de cette prise en considération, les dispositions introduites à l'égard des conjoints de fait.

Je voudrais peut-être dire un mot – j'aurai l'occasion d'y revenir la semaine prochaine – sur un débat, là, qui a eu lieu durant nos travaux en commission parlementaire et qui portait sur le rapport actuariel. Je suis convaincue que l'opposition, en l'occurrence le porte-parole de l'opposition, le député de Verdun, en traitera soit aujourd'hui ou soit lors de la prise en considération en troisième lecture. Simplement, M. le Président, qu'il me soit permis de dire ici que les projections de la Régie des rentes s'étendent sur une cinquantaine d'années, de sorte que les résultats qui peuvent apparaître moins favorables pour certaines variables sont compensés par des résultats plus favorables pour d'autres.

Je rappelle, par exemple, que les taux de rendement de la Caisse de dépôt et de placement des dernières années ont permis à la réserve du Régime de rentes d'atteindre 15 600 000 000 $, comparativement aux 14 000 000 000 $ que projetait l'analyse actuarielle de 1994. Ces hypothèses – l'analyse actuarielle de 1994 – tenaient compte des grandes tendances démographiques, notamment le taux de fécondité, le sol migratoire, l'espérance de vie. Ces tendances sont sujettes à modification bien évidemment, mais à ce moment-ci rien ne nous indique qu'elles auraient substantiellement changé.

Ceci dit, je vais simplement vous signaler, M. le Président, que j'ai retenu, au nom du gouvernement, un certain nombre d'amendements que l'opposition nous a présentés, notamment celui de retarder l'application de la mesure prévoyant l'ajustement de la rente de retraite du bénéficiaire invalide prévue au 1er janvier 1998. Suite à un amendement de l'opposition, ce report prendra effet le 1er janvier 1999. D'autre part, le gouvernement, aussi, va déclencher le début de l'analyse actuarielle. Nous l'avions prévu au 31 décembre 1998, alors que la prochaine analyse actuarielle sera basée sur l'état du régime au 31 décembre 1997. Je comprends que c'est, je crois, satisfaisant d'une certaine façon pour la commission de penser que nos travaux ont été vraiment faits sous le signe, là, de la rigueur et du sérieux, et nous avons donc tenu compte des représentations qui ont été faites par l'opposition à ce sujet.

D'autre part, je veux remercier très sincèrement les membres d'abord de la commission des affaires sociales qui, l'automne dernier, avaient reçu plus d'une quarantaine d'organismes qui sont venus présenter un mémoire lors de la consultation sur le livre vert, livre vert qui portait sur la réforme du Régime de rentes. Je veux aussi remercier les membres de la commission de l'économie et du travail qui ont poursuivi l'examen du projet de loi n° 149. Je crois que ça a été un travail qui a été très satisfaisant.

Ils avaient d'ailleurs commencé, avec l'accord des membres de la commission – je crois que c'est un précédent, c'est inusité – mais ces travaux en commission ont commencé par une présentation audio-visuelle par l'actuaire en chef de la Régie des rentes qui visait à expliquer les objectifs de la réforme du Régime des rentes et les principales propositions de modifications contenues dans le projet de loi n° 149. En fait, c'est là une présentation qui mériterait d'ailleurs d'être offerte aux membres de cette Assemblée nationale dans le cadre des différents caucus. Et j'ai bien l'intention de l'offrir autant au caucus de l'opposition qu'au caucus ministériel dès l'adoption du projet de loi. Je vous remercie M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Sécurité du revenu. Nous cédons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition et député du comté de Verdun. Alors, M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, d'abord nous sommes saisis ici d'un certain nombre d'amendements qui sont présentés par la ministre au document que nous avons adopté en commission, amendements qui sont assez substantiels et qui viennent réintroduire dans le Régime de rentes la possibilité pour les conjoints de fait de pouvoir partager, mais partager sur une base volontaire, les contributions qu'ils avaient faites au Régime de rentes ou éventuellement partager les gains admissibles ou la pension, le cas échéant, en cas de bris du lien entre les deux conjoints.

C'est un pas en avant que nous voulons saluer. Ça clarifie un certain nombre de problèmes pour des gens qui, de bonne foi, ont vécu pendant assez longtemps en situation d'union de fait et qui, au moment du bris de cette union qui pouvait se faire dans l'harmonie, auraient voulu quand même respecter les droits de chacun et ne pouvaient pas le faire parce que la Régie des rentes ne le leur permettait pas. M. le Président, nous allons donc voter en faveur des amendements qui sont présentés aujourd'hui par la ministre.

Deuxième élément. Il est bon de rappeler quel a été le comportement de l'opposition dans l'étude article par article du projet de loi n° 149. Nous aurons l'occasion, en troisième lecture, d'insister sur cela. Nous avons fait toute cette réforme de la Régie des rentes, basée sur une étude actuarielle qui datait de 1994. Nous avons essayé de faire valoir que toutes les modifications qui ont été apportées, en termes numériques, c'est-à-dire en termes de chiffres, pouvaient être soumises à variations lorsqu'on aurait en main la prochaine étude actuarielle.

Vous savez parfaitement, M. le Président, que ces trois dernières années la démographie n'a pas suivi ce qui était prévu, le comportement économique n'a pas suivi ce qui était prévu, et les rendements de la Caisse n'ont pas suivi non plus ce qui était prévu. Bien sûr, on peut avoir des effets qui se compensent dans l'un, dans un cas et dans l'autre, mais c'est un peu une espèce de... Oui, ça peut se compenser, mais on ne sait pas exactement combien compense l'un par rapport à l'autre.

Et on a été amené à prendre des décisions sur les taux de cotisation. Si vous regardez le rapport, l'opposition s'est abstenue sur les taux de cotisation. Non pas qu'elle pouvait se prononcer contre les taux de cotisation qui étaient présentés, mais s'abstenait, pour ce que j'entends des taux de cotisation à long terme – pas à court terme, bien sûr – en disant: Nous ne pouvons pas nous prononcer sur les taux de cotisation à long terme tant qu'on n'a pas en mains les chiffres et la situation réelle du régime en 1997.

Je suis heureux de savoir qu'une étude va être débutée dès fin 1997, que probablement on aura des chiffres vers le milieu 1998. Mais il aurait été nettement préférable, pour connaître les effets du projet de loi, de pouvoir travailler avec les chiffres en main tels que dorénavant ils seront. Parce qu'il faut bien que vous compreniez, M. le Président, que ce qui est un peu risible à l'intérieur de tout cela, c'est qu'on dit: Dans le futur, on va s'organiser pour faire une évaluation actuarielle tous les trois ans et là on se réunira tous les trois ans pour se poser des questions sur comment les choses se passent. Ce qui est excellent, mais on aurait pu au moins le faire pour le point de départ. On aurait pu dire: On commence tout de suite par voir les modifications.

(12 h 20)

Implicitement, la ministre – je dois quand même me permettre de la corriger – elle dit: Oui, vous savez, des variations actuarielles, c'est projeté sur une très longue période. C'est bien sûr. Mais je me permettrais de rappeler au gouvernement que l'année dernière, s'il était en mesure de mettre sur pied le Programme de départs volontaires, et les 800 000 000 $ qu'il a pu trouver dans le Programme de départs volontaires – je comprends qu'on ne parle pas actuellement du Régime de rentes du Québec mais du RREGOP, du RRE et du RRF – c'est parce que l'évolution des paramètres – et dans ce cas-là c'étaient les paramètres de rémunération – a permis de générer un supplément d'actifs de 800 000 000 $ entre deux analyses actuarielles.

C'est ça qui a permis au gouvernement – vous me permettrez le débat qu'on a eu l'année dernière sur la loi n° 104 – de pouvoir utiliser cet excédent d'actifs qui était généré entre deux évaluations actuarielles et qui, dans ce cas-là, était basé sur le fait que les salaires dans la fonction publique avaient crû beaucoup moins que ce qui était prévu dans l'analyse actuarielle de 1992. Donc, ce que je tiens à lui rappeler, c'est que, bien sûr, une analyse actuarielle projette sur longtemps, mais, entre deux périodes de trois ans, vous pouvez avoir des variations. Et, comme on parle de beaucoup d'argent, à ce moment-là ça peut avoir des effets significatifs.

Alors, M. le Président, je vais réserver probablement tous mes commentaires... Dernier point. Il reste que nous sommes, nous, de l'opposition, toujours très préoccupés – et je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce va insister là-dessus – par le fait qu'on a été obligés, parce qu'on n'avait pas les vrais chiffres... Il faut bien le rappeler, si on avait eu les vrais chiffres, peut-être qu'on n'aurait pas été obligés de le faire. On a été obligés, et nous avons voté contre... Mais le projet de loi a été obligé de pénaliser les personnes handicapées de manière à avoir un taux de cotisation d'équilibre, en 2003, qui soit inférieur au 10 %. Je pense qu'on aurait pu le faire autrement. Il y aurait eu d'autres techniques pour le faire. On aurait pu éviter de toucher les personnes qui recevaient la rente d'invalidité et qu'on va considérer, à partir de 60 ans, comme étant des gens qui ont choisi de prendre une retraite anticipée. C'est un élément que je trouve assez pénible à l'intérieur du projet de loi.

Le député de Notre-Dame-de-Grâce est intervenu fortement et a pu repousser cette mesure jusqu'au début 1999 de manière que l'on ait en main – et c'est toujours la base... Là on aura en main la nouvelle évaluation actuarielle. Et soyez sûr que, si les chiffres de la nouvelle évaluation actuarielle permettent de faire en sorte que cette mesure ne s'applique pas à ces populations très défavorisées tout en atteignant le principe d'un taux de cotisation d'équilibre en dessous du 10 %, nous allons être les premiers à faire en sorte d'avoir un geste d'équité envers eux.

M. le Président, je terminerai ici mes remarques. Vous comprenez bien que je pourrais parler beaucoup plus longtemps sur ce projet de loi. Nous allons le faire en troisième lecture, nous aurons la chance à ce moment-là de reprendre toutes les mesures qui sont relativement techniques lorsqu'on parle du gel de l'exemption annuelle de base, bon, de la mesure de la croissance du maximum de gains admissibles. On va pouvoir vous expliquer tout ce qui est à l'intérieur du projet de loi. C'est simple à comprendre quand on l'explique lentement et calmement, mais c'est un peu technique. Je voudrais simplement, donc, terminer ici en rappelant notre adhésion aux amendements qui sont déposés en ce qui touche le partage des gains admissibles pour les conjoints de fait, en rappelant encore une dernière fois qu'on aurait vraiment souhaité pouvoir travailler sur une évaluation actuarielle à date et non pas celle de 1994 et qu'on déplore le fait qu'on s'en prenne ici en partie aux personnes invalides pour atteindre un taux de cotisation d'équilibre en dessous de 10 %. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. Nous cédons maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je serai bref. Petite mise en situation en ce qui concerne l'article 41 du projet de loi, qui touche les rentes d'invalidité et leur impact sur la rente de retraite. Lors de la consultation qu'a faite la commission des affaires sociales sur le livre vert, il y avait une série de propositions qui touchaient toute la question de l'invalidité. Plusieurs mesures ont fait l'objet de cette consultation, et il y avait une mesure qui était évoquée, dans le temps, qui était d'assimiler la rente d'invalidité avec la rente par anticipation, ce qui ferait en sorte que, si jamais, entre 60 et 65 ans, quelqu'un devenait invalide et prenait sa rente d'invalidité, il y aurait une pénalité actuarielle de 0,5 % par mois qui s'appliquerait à la rente de retraite.

Cette proposition n'a pas été bien reçue, évidemment, M. le Président, par de nombreux groupes qui représentent le milieu associatif des personnes handicapées, incluant évidemment l'Office des personnes handicapées du Québec. Elle n'a été, non plus, absolument pas bien reçue de notre part, l'opposition, ici, à l'Assemblée nationale.

Nous avons commencé le débat sur le projet de loi n° 149. Plusieurs membres de la commission ont fait des interventions lors des remarques préliminaires pour tenter de convaincre la ministre de procéder autrement, M. le Président. Nous étions essentiellement à la recherche de 0,2 % de cotisation, dans le taux de cotisation. C'est ce que représentent, semble-t-il, les propositions dans le projet de loi pour appliquer cette pénalité actuarielle à l'âge de 65 ans à des gens qui prennent leur rente d'invalidité entre l'âge de 60 et 65 ans. Et nous avons soutenu tout le long de la commission notre souhait que le gouvernement, la ministre, la Régie des rentes tentent de procéder autrement pour ne pas imposer ce fardeau fiscal à des personnes qui sont dans le besoin.

Nous avons, je dois dire, M. le Président, rencontré ce que j'appellerais un demi-succès. Un demi-succès est toujours mieux qu'un échec, et nous sommes conscients qu'on arrive, avec l'appui de la ministre et de ses collègues, à un demi-succès qui est de reporter l'entrée en vigueur de la mesure au 1er janvier 1999. Ça veut dire que, au lieu que... toute personne qui faisait une demande de rente d'invalidité entre l'âge de 60 et 65 ans après le 1er janvier 1998, tel qu'il était prévu dans la loi, c'est maintenant reporté au 1er janvier 1999. C'est une bonne chose, M. le Président.

Ce n'est pas ce qu'on aurait souhaité au complet, nous. On aurait souhaité, comme beaucoup d'autres groupes, voir le retrait de l'article 41. Mais ça donne un an pour analyser un peu plus loin l'impact de cette mesure, pour prendre en considération la nouvelle étude actuarielle qui va être faite, devancée par la Régie des rentes, et ça donne un an aussi, M. le Président – et je le dis très aimablement à la ministre – à d'autres groupes pour renchérir sur la question et peut-être tenter de voir si on ne peut pas faire autre chose que d'appliquer cette mesure. Et je suis très content que la ministre ait accepté cet amendement que j'ai proposé, tout en vous signalant, M. le Président, qu'en proposant l'amendement ça ne veut pas dire qu'on est d'accord sur le principe de l'article 41. Mais on rencontre un demi-succès. Je pense que c'est une bonne chose pour tous ceux qui seront mis dans la situation de prendre leur retraite, leur rente d'invalidité dans l'année qui s'en vient.

Alors, M. le Président, c'est ça, la situation. Nous allons poursuivre les étapes nécessaires et nous allons continuer notre vigilance à l'égard des mesures qui s'appliquent aux personnes handicapées ici, au Québec. Merci, M. le Président.


Mise aux voix des amendements et du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Ceci met fin au débat. Le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je vous demanderais de considérer l'article 7 du feuilleton.


Projet de loi n° 179


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 7 de notre feuilleton, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose l'adoption du principe du projet de loi n° 179, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 179? M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, actuellement, au Québec, il existe trois sortes ou trois catégories de zecs ou de zones d'exploitation contrôlée, soit celle qui concerne la faune, celle qui concerne le saumon et une qui concerne la sauvagine.

(12 h 30)

Le projet de loi vise à permettre au ministre de l'Environnement et de la Faune de reconnaître une personne morale pour agir comme représentant de l'ensemble de ces zecs ou encore une catégorie ou un mixte de catégories dont je viens de parler. Cette personne morale, donc, agirait au nom de l'ensemble ou de différentes parties.

Le projet de loi aussi prévoit que tout organisme gestionnaire d'une zec devrait verser à cette personne morale qui serait reconnue par le ministre une partie des droits qui lui sont dévolus en vertu des fonctions qu'elle exerce. Cette obligation existerait pour une période de trois ans, et le gouvernement pourrait la prolonger plus tard.

Cette personne morale aurait pour fonctions, d'une part, de consulter les organismes qui sont parties à un protocole d'entente pour lequel elle agit à titre de représentante, deuxièmement, de favoriser la concertation entre les organismes et, finalement, d'exercer toute autre fonction que le ministre pourrait lui assigner.

La condition de reconnaissance de cette personne morale par le ministre est qu'elle doit être composée d'un nombre de membres atteignant au moins 50 % plus un de l'ensemble des organismes gestionnaires de toutes les zones d'exploitation contrôlée, en l'occurrence celles de chasse et de pêche, de pêche au saumon et de chasse à la sauvagine ou de l'ensemble de deux gérant une catégorie de zone d'exploitation contrôlée.

Par ailleurs, au cours des dernières années, le programme de reconnaissance et de financement des organismes de la faune a été progressivement abandonné. Au surplus, des normes de différents programmes de soutien financier destinés au domaine de la conservation et de la mise en valeur de la faune ont été resserrées, de sorte que la Fédération québécoise des gestionnaires de zec, la FQGZ, a vu ses sources de revenus disparaître. Pour éviter que la FQGZ ne cesse ses activités au cours des prochains mois, elle sollicite une reconnaissance formelle et une source de financement alternative.

La FQGZ est une corporation sans but lucratif qui a pour but d'assurer la représentation sur une base nationale des organismes membres, de promouvoir la prise en charge de l'aménagement, de la mise en valeur et de la conservation de la faune par les utilisateurs de la faune eux-mêmes. Les membres de cette Fédération sont les organismes gestionnaires de zecs qui ont acquitté leur cotisation annuelle.

On compte actuellement 62 zecs de chasse et de pêche, qui couvrent un territoire de 48 000 km². Les zecs sont les territoires dont la fréquentation est la plus élevée au kilomètre carré, soit 26 jours, comparativement à 16 jours par kilomètre carré pour la pourvoirie et à 13 jours par kilomètre carré pour la réserve faunique. La conservation et l'accessibilité à la ressource faunique, la participation des usagers à sa gestion et à l'autofinancement des opérations sont les éléments caractéristiques de ce réseau.

On estime à 125 000 personnes, sur une base annuelle, le nombre des usagers de 18 ans et plus qui fréquentent les zecs chaque année. Les revenus autonomes de l'ensemble des organismes gestionnaires sont de l'ordre de 8 700 000 $ annuellement. Ils proviennent essentiellement de la vente des cartes de membre, des droits d'accès associés à la pratique des activités de chasse et de pêche et aussi des droits de circulation.

L'obligation dont on parle pour les organismes gestionnaires de zones d'exploitation contrôlée de contribuer au financement de cette personne morale en lui versant une partie des droits de circulation et de pratique d'activités dans les zones d'exploitation contrôlée s'appliquera, comme je l'ai mentionné tantôt, pour une période initiale de trois ans.

Par contre, on doit prévoir, M. le Président, que, certaines circonstances se présentant, on doive poser certains gestes. Ainsi, on pourra prévoir l'annulation de la reconnaissance de la personne morale dont je viens de parler dans l'un ou l'autre des cas suivants: d'une part, lorsqu'elle n'est plus composée du nombre de membres requis pour sa reconnaissance et, d'autre part, lorsqu'elle ne respecte pas les conditions qui ont été prescrites à l'origine de sa reconnaissance.

Sur un autre plan, actuellement, le gouvernement peut, par règlement, à l'égard des zones d'exploitation contrôlée, déterminer les conditions auxquelles les activités de chasse, de pêche et de piégeage sont permises et les droits maximums exigibles pour la pratique de ces activités. Le montant des droits exigibles qui peut être déterminé peut varier selon les catégories de personnes, selon l'âge des personnes, selon l'activité pratiquée, selon l'espèce faunique recherchée, selon la durée de séjour ou selon le secteur ou la date où l'activité de chasse, de pêche ou de piégeage est pratiquée. Cette modification permettra au gouvernement de faire aussi varier les montants des droits exigibles selon la catégorie de permis ou selon la période où l'activité est pratiquée. Donc, dorénavant, ce sera possible de faire payer des droits selon les catégories dont je viens de parler. Cette marge de manoeuvre s'appliquera également pour les réserves fauniques et les refuges fauniques, M. le Président.

Encore une fois, sur un autre plan, le projet de loi prévoit que le gouvernement peut autoriser le sous-ministre de l'Environnement et de la Faune ou un fonctionnaire à exercer un pouvoir qui est dévolu au ministre en vertu de la présente loi. Dans le cadre de la nouvelle politique gouvernementale en matière de déréglementation, il m'apparaît souhaitable d'accélérer et d'alléger le processus décisionnel en matière de gestion de la faune et de son habitat en permettant au ministre lui-même, par opposition au gouvernement, de déléguer ses pouvoirs au sous-ministre ou à un fonctionnaire. Enfin, le ministre pourra, pour des fins scientifiques, éducatives ou de gestion de la faune, délivrer un permis autorisant une personne à passer outre à certaines dispositions de la loi. Le titulaire de ce permis doit et devra se conformer aux conditions déterminées par le ministre sur le permis.

Il m'apparaît souhaitable, M. le Président, que le ministre de l'Environnement et de la Faune puisse autoriser des activités de recherche, d'éducation ou de gestion en matière d'aquaculture en accordant à cette fin un permis spécial permettant de déroger aux normes réglementaires sur des sujets, telles que celles relatives à l'exploitation des temps de pêche et des temps d'élevage et celles relatives au zonage piscicole. Voilà, M. le Président, un survol rapide de l'ensemble des dispositions de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, avant de vous présenter la motion qui va suivre, j'aimerais vous souligner que M. le ministre de l'Environnement nous quittera dans quelques heures pour cette importante conférence internationale de Kyoto sur les effets de serre. Nous lui souhaitons bonne mission et nous sommes assurés qu'il parlera d'une voix forte.

M. le Président, conformément à l'article 100, je fais motion pour ajourner le débat, pour réserver l'intervention du porte-parole de l'opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Pinard): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous demanderais de suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous suspendons donc les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 38)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! Nous allons poursuivre nos travaux aux affaires du jour. Et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer la matière à l'ordre du jour.

M. Jolivet: J'ai un petit problème, M. le Président. Je croyais que le ministre était arrivé. Je vais vous demander un petit moment de suspension le temps qu'il arrive, puisque j'appelle son projet de loi. C'est une prise en considération de l'adoption de principe de l'article 10. Alors, donnez-moi un petit moment pour aller chercher le ministre, là.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, très bien. Je l'ai vu, il n'y a pas longtemps, il ne doit pas être très loin. Alors, nous allons suspendre quelques minutes en attendant l'arrivée du ministre pour la présentation de son projet de loi.

(Suspension de la séance à 15 h 5)

(Reprise à 15 h 9)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Tous les principaux acteurs sont présents maintenant. Nous sommes prêts à débuter, et j'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'ordre du jour.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Voilà, nous pouvons poursuivre nos travaux en prenant en considération l'article 10 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 183


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 10, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal. Alors, M. le ministre, je vais vous céder la parole pour votre intervention.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Alors, tel que vous l'a indiqué notre leader, donc, et suite à vos indications, nous allons débuter l'étude du projet de loi n° 183 qui est un projet de loi concernant le budget de la ville de Montréal, qui est un projet de loi qui est bien simple en termes de présentation, puisqu'il a des objectifs assez simples.

(15 h 10)

Ce projet de loi, il concerne donc le budget de la ville de Montréal. C'est un budget de quatre articles seulement, mais qui est fort important dans la conjoncture financière de la ville de Montréal et de ce que nous aurons à réaliser au cours des prochains jours et des prochaines semaines à l'égard de Montréal, à l'égard aussi – on le verra dans la présentation – des budgets des 28 autres municipalités membres de la Communauté urbaine de Montréal et également des articles qui nous indiquent les gestes qu'il y aura à poser pour atteindre l'équilibre financier à la ville de Montréal au cours des prochains jours, au cours des prochains mois et pour le budget de l'année 1998. Le projet de loi vise à autoriser, donc, la ville de Montréal à adopter, pour l'exercice financier 1998, un budget dans lequel l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables tient compte d'une augmentation anticipée des revenus ou d'une diminution anticipée des dépenses jusqu'à concurrence d'une somme globale de 125 000 000 $. Si, au cours de l'exercice financier, l'équilibre ne se réalise pas de la manière prévue au budget ainsi adopté, la ville le modifie afin que cet équilibre soit atteint.

Alors, M. le Président, essayons de retracer, d'abord, les fondements de la présentation de ce projet de loi ici, à l'Assemblée nationale, aujourd'hui, pour permettre à la ville de Montréal, d'abord, d'adopter un budget équilibré dans les dates qui lui sont imparties par les dispositions de sa Charte. C'est au 15 décembre que le conseil municipal de la ville de Montréal doit adopter son budget, et tout cela était précédé d'une présentation et d'une adoption par le comité exécutif de la ville de Montréal de ce même budget pour qu'il entre en vigueur le 1er janvier 1998.

M. le Président, elle a été exposée au cours des derniers mois assez largement, mais c'est une occasion ici assez claire qui nous est donnée d'exposer à nouveau la situation dans laquelle se retrouve la ville de Montréal et surtout les correctifs, les redressements structurels qui doivent être mis en marche, adoptés, mis en vigueur pendant l'année 1998 pour en arriver à ce qu'il n'y ait – et c'est très clair au niveau des objectifs – pas d'augmentation de taxes pour les citoyens de la ville de Montréal; que, par ailleurs, on soit amené à ce résultat par un certain nombre de gestes qui vont nous amener à des redressements qui soient permanents; et qu'on n'ait pas, à chaque année, comme nous l'avons fait depuis trois ans, à négocier des mesures financières pour faire en sorte que la fiscalité de Montréal ne soit pas affectée de façon sensible, pour que les citoyens vivant dans la ville ne soient eux-mêmes affectés au niveau des dépenses de taxation, soit au niveau du secteur résidentiel ou du secteur non résidentiel; et qu'on puisse se retrouver, bien sûr, dans une situation d'équilibre; mais qu'on ne se retrouve plus, année après année, dans cette situation délicate de prévoir des ententes avec la ville de Montréal de façon bien spécifique pour équilibrer les finances du budget de l'année à venir.

Le projet de loi vise donc essentiellement à permettre à la ville de Montréal d'escompter dans son budget présenté au conseil municipal pour son éventuelle adoption une somme globale de 125 000 000 $. M. le Président, la situation de la ville de Montréal est telle que nous devions poser ce geste. Il est très clair, compte tenu des éléments que je vais évoquer, que la seule position dans laquelle se serait retrouvée la ville de Montréal, la seule situation qui pouvait être évoquée, à défaut d'intervention du gouvernement du Québec, c'était celle d'augmenter de façon substantielle les taxes pour les citoyens, les contribuables des secteurs résidentiels ou non résidentiels de la ville de Montréal.

Effectivement, M. le Président, s'il faut reconnaître qu'il s'est posé à la ville de Montréal un grand nombre de gestes administratifs au cours des dernières années pour en arriver à réduire la masse budgétaire de cette ville et conserver l'équilibre, il se présente, au moment où on se parle, en début décembre, très nettement une impasse budgétaire d'une hauteur de 125 000 000 $. Essentiellement, donc, ce solde d'impasse qui s'est constitué, qui existe à la ville de Montréal pour l'année 1998, il est relié à des situations qui peuvent être identifiées et pour lesquelles il faut chercher et surtout mettre en place des redressements structurels, des corrections permanentes pour en arriver à un résultat équilibré.

Le premier élément de cette situation, c'est que, évidemment, la ville de Montréal, malgré le fait qu'elle soit actuellement reconnue ville-centre, c'est-à-dire ayant des responsabilités qui vont au-delà des services offerts aux citoyens de la ville de Montréal, eh bien, la ville de Montréal, comme toutes les autres villes et municipalités du Québec, a à contribuer à ce fonds spécial de financement des activités locales suite à l'entente du 23 octobre avec l'Union des municipalités du Québec.

Nous avons fait en sorte que la contribution de la ville de Montréal soit maintenue à un niveau qui tienne compte de cette situation de ville-centre, c'est-à-dire des dépenses qui lui sont nécessaires pour répondre à des besoins qui ne sont pas strictement reliés uniquement à sa population, mais la contribution de la ville de Montréal a été maintenue à un niveau de 46 000 000 $. Si nous avions poursuivi dans la direction d'une contribution uniforme à la réduction des dépenses ou à la contribution à ce fonds de financement des activités locales, M. le Président, nous aurions demandé plutôt quelque chose comme 90 000 000 $ à la ville de Montréal, compte tenu de son budget qui totalise 1 858 000 000 $.

Pendant tout l'été et pendant cette longue période où nous avons poursuivi des négociations avec les municipalités au Québec sur un pacte municipal, sur une entente à intervenir, nous avons toujours maintenu une position, à l'égard de la ville de Montréal, qui a été une position qui n'a pas changé et qui n'a pas bougé parce que nous étions extrêmement conscients de la situation délicate des finances de la ville de Montréal à titre de ville-centre. C'était le cas également pour cinq autres municipalités au Québec: Trois-Rivières, Sherbrooke, Chicoutimi, Hull, qui s'ajoutent à Montréal et, bien sûr, à la capitale, à la ville de Québec, et qui ont des responsabilités de ville-centre. Nous avons maintenu la contribution autour de 46 000 000 $. Ce faisant, M. le Président, il est évident, comme pour toutes les autres municipalités au Québec, que nous avons créé une pression sur les dépenses de la ville de Montréal, dépenses qui se retrouvaient, en termes de budget, dans une situation déjà fort délicate.

(15 h 20)

Par ailleurs, pour la plus grande municipalité du Québec, la demande que nous avons faite à l'ensemble des travailleurs et travailleuses du secteur municipal de contribuer à même les masses salariales, et non pas les salaires – c'est toujours la même approche, M. le Président, de contribuer jusqu'à une hauteur de 6 % des masses salariales dans la réduction des dépenses des municipalités parce que nous avons nous-mêmes, comme gouvernement, réduit nos propres dépenses de 6 % – eh bien, cela impose un fardeau, en quelque sorte, où les gestes supplémentaires signifient une somme de 41 000 000 $ pour la ville de Montréal. 6 % des coûts de main-d'oeuvre à la ville de Montréal, en termes de réduction de l'ensemble de la rémunération reliée aux différents personnels qu'il y a à la municipalité, à la ville de Montréal, c'est 41 000 000 $.

Il faut aussi comprendre, M. le Président, que, pour la ville de Montréal, les services de police sont assumés par l'organisme de mise en commun qui s'appelle la Communauté urbaine de Montréal, et il en est de même également pour les services de transport en commun, qui sont assurés par une société reliée à la Communauté urbaine de Montréal, la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal. L'ensemble des employés de ces deux corps spécialisés, le Service de police de la Communauté urbaine et la Société de transport de la Communauté urbaine, l'ensemble de ces travailleurs, de cette force de travail, lorsqu'on demande un effort similaire à la fonction publique et parapublique... M. le Président, ce que nous demandons, c'est un effort supplémentaire, c'est-à-dire de 55 000 000 $. Et comme ces masses salariales sont pourvues à même des contributions des 29 municipalités membres de la Communauté urbaine de Montréal, il est évident que les économies de 6 % sur les masses salariales à réaliser avec ces groupes de travailleurs vont amener des retombées de 30 000 000 $ sur la ville de Montréal.

À la Communauté urbaine de Montréal, pour les deux groupes d'employés que je viens de citer, le total représente donc une somme de 55 000 000 $, c'est-à-dire 6 % des masses salariales de l'ensemble de la rémunération. Parce que, M. le Président, il faut le répéter souvent, il faut être très clair: dans le secteur municipal comme dans tous les autres secteurs au Québec, il ne s'agit jamais d'autoriser des diminutions de salaires directes des employés qui travaillent dans les municipalités, dans les MRC, dans les communautés urbaines, mais plutôt d'atteindre l'objectif avec des mesures qui peuvent se réaliser et qui font en sorte que l'on ne diminue pas les salaires mais qu'on réussit à atteindre ces objectifs par différents programmes de gestion de la main-d'oeuvre, de gestion des avantages qui sont conférés au personnel qui constitue cette main-d'oeuvre, et réaliser ainsi 6 % d'économies sur la masse salariale. On a vu que c'était possible dans les secteurs public et parapublic.

Il n'y a pas deux situations qui se ressemblent et qui sont identiques, mais l'approche est la même. C'est la même approche qui doit être utilisée. Alors, M. le Président, une contribution de 46 000 000 $ au Fonds spécial de financement des activités locales, une contribution en quelque sorte pour la réduction des masses salariales, qui nous amène à 71 000 000 $, c'est-à-dire 41 000 000 $ pour les travailleurs et travailleuses directement à la ville de Montréal et pour ceux qui oeuvrent à la Société de transport ou dans le service policier à la Communauté urbaine de Montréal.

Et, M. le Président, lorsqu'on regarde le budget qui a été déposé pour étude au comité exécutif de la ville de Montréal, il y a ce que nous pourrions appeler un solde d'impasse de 53 000 000 $. Il faut donc que des mesures soient prises en cours d'année et rapidement, pour qu'elles puissent produire des résultats afin d'en arriver, à la fin de l'année 1998, à un budget équilibré et que nous soyons aussi placés dans la situation où, pour 1999, nous n'aurons pas à nous poser la question avec la même acuité, avec les mêmes dimensions. Il faut que ce soient des corrections de nature structurelle, des redressements permanents. Et nous nous sommes engagés, avec la ville de Montréal, à réaliser un tel processus pour en arriver à de tels règlements.

Pour ce faire, M. le Président, il faut que la ville de Montréal soit autorisée donc à escompter soit cette diminution de dépenses de ses coûts de main-d'oeuvre soit une réduction suite à des mises en commun, à des réorganisations au plan structurel, de façon à ce que nous puissions adopter, à la ville de Montréal, un budget équilibré et, d'autre part, que nous puissions mettre en route immédiatement un certain nombre de démarches, un certain nombre de processus pour corriger des situations qui, pour les Montréalais et les Montréalaises, ne les conduisent pas dans la direction de davantage d'assainissements ou d'un assouplissement du fardeau fiscal, mais plutôt dans la direction contraire.

M. le président, au cours des trois dernières années, donc, nous avons à chaque année convenu avec la ville de Montréal de lui verser un certain nombre de millions soit à titre de compensation spécifique dans des revenus de taxes des réseaux de télécommunications, de gaz et d'électricité ou encore, bien sûr, le retour maintenant à 100 % pour la ville de Montréal des taxes qui étaient perçues – parce qu'il n'y en a plus maintenant – sur les activités: la taxe d'amusement sur les activités récréatives, culturelles et sportives.

Dans la ville de Montréal, la taxe d'amusement ayant été abolie, nous avons recréé le montant que la ville de Montréal aurait retiré si cette taxe avait été maintenue. Puisqu'elle a à maintenir des activités et des dépenses pour la tenue de ces activités, nous allons lui retourner maintenant, de façon permanente, ces revenus, ou des «en lieu» de taxes, pour les événements reliés aux activités sportives, culturelles dans la ville de Montréal, ce qui procure à la ville de Montréal, compte tenu de ses responsabilités, des revenus permanents, mais ils ne sont pas suffisants pour combler la différence.

Alors, M. le Président, il s'agit donc dans un premier temps, et c'est ce que le projet de loi édicte, d'escompter une somme de 125 000 000 $ et de mettre en route un certain nombre de gestes essentiels pour retrouver l'équilibre et un équilibre permanent au niveau des finances de Montréal. On se souviendra, par exemple, que la situation s'est présentée avec à peu près, je dirais, le même degré de précarité en 1997, compte tenu d'un certain nombre d'événements qui se sont produits sur le territoire de la ville de Montréal. Avec le conseil municipal, le comité exécutif de la ville de Montréal et le maire de la ville de Montréal, nous avons convenu qu'il fallait poser un certain nombre de gestes. Ces gestes ont été posés si bien que les indications que nous avons à ce jour, c'est que l'année 1997 se terminera, pour Montréal, dans un état d'équilibre, le moins que l'on puisse dire, avec un très, très léger surplus, selon les dernières indications que nous avons obtenues de la ville de Montréal.

Pour entreprendre cette année 1998, pour lui permettre d'adopter le budget, M. le Président, nous devons amender les dispositions qui gouvernent la ville de Montréal dans sa charte. C'est ce que prévoit le projet de loi n° 183, avec des éléments de correction à introduire. Parce qu'il n'y a pas seulement les éléments conjoncturels qui se sont présentés à la ville de Montréal et qui nous amènent à cette conclusion d'une difficulté, d'une situation unique, difficile pour la ville de Montréal, il y a d'autres éléments également. Nous devons en parler ici pour indiquer à l'opposition, pour indiquer la l'Assemblée nationale, pour indiquer à la population les redressements nécessaires qui peuvent apparaître au cours des prochains jours, des prochaines semaines et des prochains mois pour régler la situation d'une façon beaucoup plus permanente.

(15 h 30)

M. le Président, il y a un élément, dans le budget de la ville de Montréal, qui cause une pression énorme au plan des dépenses, c'est toute la question des régimes de retraite. Je ne voudrais pas entrer dans le détail de ce que cela signifie pour la ville de Montréal en termes de transactions, mais quand même donner un ordre de grandeur – le phénomène en soi doit être décrit – et les correctifs qui peuvent y être apportés.

M. le Président, on peut affirmer, donc, qu'avant 1983 des engagements avaient été pris par la ville de Montréal à l'égard de ses travailleurs et de ses travailleuses pour les fonds de retraite de ces personnes, et nous n'étions pas en présence d'un régime qui avait amassé de l'argent, qui avait capitalisé de façon suffisante pour en arriver à pouvoir répondre aux besoins des personnes qui allaient prendre leur retraite au fur et à mesure de leur mise à la retraite à la ville de Montréal, si bien qu'il a été convenu, à l'égard des régimes de retraite, de changer la nature des contributions pour capitaliser ce régime après 1983 et de faire en sorte que les dépenses reliées aux régimes de retraite avant l'année 1983 soient assumées à même les dépenses annuelles des budgets présentés par la ville de Montréal, ce qui, compte tenu des bénéfices de ce régime, amène à une contribution énorme pour la ville de Montréal.

Pour vous donner une indication, M. le Président, disons que les engagements pris par la ville de Montréal pour les années précédant l'année 1983 sont énormes, et que la ville de Montréal, à titre d'employeur, contribue annuellement au régime de retraite de ses employés pour une somme moyenne variant entre 60 000 000 $ et 65 000 000 $, au chapitre de sa contribution courante, pour ce qu'elle doit faire à l'intérieur des régimes actuels. Au 31 décembre 1996, le déficit actuariel du régime de retraite des employés s'élevait, pour les années... On parle des déficits actuariels pour les régimes de retraite avant l'année 1983, pour lesquels il faut débourser déjà des argents. Eh bien, le déficit est assez énorme. C'est un déficit de 1 900 000 000 $ pour les régimes de retraite qui sont pour les employés avant l'année 1983.

La ville, à cet égard, s'est engagée, à travers des actes légaux, ce qu'on appelle «les actes notariés», à effectuer des versements spéciaux dont la date d'échéance – essayons d'imaginer cela – a été fixée au 31 décembre de l'an 2045. Il y aura longtemps que l'équilibre sera revenu, je l'espère, à la ville de Montréal, à ce moment-là. Mais, imaginez, nous nous retrouvons dans une situation aujourd'hui où la ville de Montréal doit contribuer à des fonds de retraite pour respecter ses engagements, et il est évident que tous ses engagements devront être respectés. Eh bien, d'ici la fin de cette période, pour payer les bénéfices aux régimes tel que nous nous y sommes engagés, il y a un déficit actuariel de 1 900 000 000 $.

La ville consacre annuellement 9,3 %, tout près de 10 % de son budget, aux coûts reliés à l'ensemble de ces régimes de retraite, et, si les modalités actuelles demeurent inchangées, la projection du coût annuel des régimes de retraite fera porter cette charge à 310 000 000 $ annuellement en l'an 2015, ce qui représenterait alors 17 % de son budget.

M. le Président, c'est la partie difficile en ce qui concerne les régimes de retraite. Il y a heureusement une partie à l'égard des régimes de retraite de la ville de Montréal qui est beaucoup plus reluisante, qui est beaucoup plus satisfaisante au premier regard, et, constatant cette situation, j'ai demandé au Conseil des ministres l'autorisation d'enclencher les travaux pour examiner les facettes des régimes de retraite à la ville de Montréal. Ce comité, présidé par le sous-ministre Georges Felli, est à terminer les dernières recommandations qu'il doit nous formuler et formuler aux impliqués, c'est-à-dire les travailleurs et la ville de Montréal, au cours des prochaines heures.

Il s'avère, selon les premières indications qui nous ont été données et qui restent à être confirmées par le rapport du groupe Felli, que nous avons créé, que, pour les régimes de retraite après l'année 1983 et les modalités qui sont incluses en termes de contributions pour payer les bénéfices du régime, eh bien, cette partie des régimes de retraite à la ville de Montréal présente des surplus actuariels extrêmement importants – extrêmement importants – qui pourraient nous amener sur des voies de solution qui, bien sûr, vont demander de la collaboration des parties concernées, puisque ce sont des régimes à frais partagés, évidemment, en termes de contributions avec les associations de travailleurs et la ville elle-même, mais il y a là un potentiel de solution extrêmement important quand nous sommes toujours dans l'optique de solutionner l'impasse de 125 000 000 $. Quand on pense aux coûts actuels que je viens de mentionner à l'égard des régimes de retraite avant l'année 1983 ou après l'année 1983, il y a là un potentiel de solution – et des solutions permanentes – important qu'il faudra non plus examiner, parce que l'examen se termine dans les heures qui vont suivre. Il faudra des correctifs qu'il faudra mettre en oeuvre pour en arriver à obtenir des corrections permanentes.

Une autre situation, M. le Président, qui se présente à la ville de Montréal et qui est un autre morceau d'héritage, si vous voulez, de différentes actions qui ont été réalisées au cours des 10, 15 dernières années, c'est toute la situation des sociétés paramunicipales. Au cours des années, il s'est constitué à Montréal principalement trois sociétés paramunicipales en matière de développement domiciliaire, en matière de développement industriel et en matière de mise en valeur du patrimoine. Or, ces trois sociétés paramunicipales, donc indépendantes de la ville de Montréal, mais constituant en quelque sorte des sociétés subsidiaires de la ville de Montréal, ont engendré des coûts qui présentent des résultats substantiels en termes de financement. Pour vous donner une indication, en ce qui a trait à ces sociétés paramunicipales, entre 1989 et 1996, la ville a accordé à ces organismes un soutien financier de quelque 394 000 000 $. Pour lui permettre d'atteindre ses objectifs, le gouvernement va là aussi accompagner, travailler et intervenir avec la ville de Montréal pour mettre en place des mesures visant à raffermir les contrôles de la ville sur les opérations de ses sociétés et en particulier nous allons réduire le maximum de capitalisation et le maximum d'actifs que pourront détenir ces sociétés à une somme de 325 000 000 $.

M. le Président, au seul chapitre du budget 1998, la ville de Montréal, aux fins de maintenir les actifs de ses sociétés paramunicipales, d'assurer leur fonctionnement et également d'assumer les déficits, s'il en était, de ses sociétés paramunicipales, pourrait être amenée à débourser jusqu'à 31 000 000 $. On conviendra que c'est une pression énorme sur ce budget, le budget de la ville de Montréal, compte tenu de la situation actuelle.

Alors, M. le Président, là aussi, il y a des interventions à réaliser pour redresser la situation à l'égard des sociétés paramunicipales. Déjà, la ville de Montréal a indiqué formellement qu'elle entendait fondre en une seule société l'administration, la direction et la gestion de ses trois sociétés. Également, la ville de Montréal a demandé et prendra les dispositions pour assurer un contrôle beaucoup plus rigide de la part du comité exécutif sur ses sociétés paramunicipales et, d'autre part, pour limiter le plafond de capitalisation qui sera permis dans ses sociétés, au cours des prochaines années, à un maximum de 325 000 000 $ et non pas 500 000 000 $ comme c'est le cas actuellement, compte tenu de ce que cela signifie.

(15 h 40)

Nous devrons aussi prendre probablement d'autres mesures. Là encore, des examens de la situation sont à se réaliser actuellement, et, si nous avions à adopter d'autres moyens, la ville de Montréal pourra être assurée de la collaboration du gouvernement du Québec pour faire en sorte que nous puissions redresser cette situation à l'égard des sociétés paramunicipales pour que cela ne constitue pas un fardeau financier mais plutôt un mécanisme d'aide pour l'évolution et le développement de la ville de Montréal.

M. le Président, à un autre chapitre nous pensons également qu'il faudrait entreprendre un certain nombre de démarches et réaliser un certain nombre d'actions dans le sens de la mise en commun d'un certain nombre de ressources pour en arriver à diminuer les coûts de production de certains services à la ville de Montréal et dans la région de Montréal. C'est pourquoi le gouvernement a confié un mandat au ministre d'État à la Métropole pour non pas examiner, mais préparer un plan de fusion et d'intégration des trois sociétés de transport de la région métropolitaine de Montréal, des principaux pôles urbains de la région de Montréal. On le sait tous, en termes de transport en commun, il y a principalement trois sociétés de transport: la Société de transport de la ville de Laval, la Société de transport de la Rive-Sud de Montréal et la Société de transport de la Rive-Sud de Montréal et la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal. Nous pensons qu'il y a lieu maintenant de poser des gestes en vue de l'intégration de ces trois sociétés et surtout des économies que pourrait générer l'intégration de ces trois sociétés au plan administratif en vue de maintenir et de développer toujours les services de transport en commun dans la région de Montréal, mais aussi d'examiner les différents modes de financement de ces sociétés de transport, qui, actuellement, à ce seul chapitre, pour la ville de Montréal, signifient, en termes de participation au déficit de la STCUM, de la Société de transport de la Communauté urbaine de Montréal, des engagements avoisinant les 170 000 000 $. Alors, M. le Président, il s'agit là d'un poste budgétaire extrêmement important, qui est majeur dans le budget de la ville de Montréal.

Le ministre d'État de la Métropole, avec, bien sûr, les organismes concernés, les sociétés concernées, sera appelé à présenter, à discuter et également à enclencher les mécanismes nécessaires pour l'intégration de ces trois sociétés de transport et également les mesures afférentes, en termes de financement du transport en commun, de façon à en arriver à un résultat qui diminue la pression sur les citoyens et les citoyennes de la ville de Montréal en particulier, ce qui serait vrai, bien sûr, aussi pour les citoyens et les citoyennes de la région de Laval et de la rive sud de Montréal, pour en arriver toujours, comme objectif, à avoir un budget équilibré, mais aussi et surtout en arriver à des mesures récurrentes pour l'équilibre des finances du budget de la ville de Montréal.

M. le Président, il reste évidemment toute une série de mesures à être adoptées, qui sont particulièrement considérables, en termes de mesures pour la ville de Montréal; c'est à l'égard des coûts de main-d'oeuvre. J'ai déjà eu l'occasion, donc, de vous indiquer au départ ce que ça signifiait pour la ville de Montréal, ces coûts de main-d'oeuvre. 6 % des masses salariales, à la ville de Montréal, c'est un total de 41 000 000 $. Mais, quand on additionne à ce 41 000 000 $ les 6 % de la masse salariale pour les services policiers et le service de transport, évidemment, c'est un autre 30 000 000 $. Donc, pour en arriver à équilibrer revenus et dépenses, à la ville de Montréal, un autre élément extrêmement important, c'est la diminution des masses salariales.

M. le Président, à cet égard, la situation à Montréal n'est pas différente, en quelque sorte, de la situation dans les autres municipalités et dans les autres grandes villes du Québec, puisque nous avons tous convenu qu'il fallait arriver à des solutions négociées pour en arriver à diminuer de 6 % les coûts de main-d'oeuvre ou la rémunération globale dans les municipalités. On ne parle pas, encore une fois, et il ne faut surtout pas parler de coupures de salaires parce qu'il y a d'autres moyens pour y arriver. La situation de la ville de Montréal présente une certaine acuité, puisque la masse salariale est énorme, compte tenu du budget de cette municipalité de 1 858 000 000 $ et de ce que ça implique, en termes de coûts de main-d'oeuvre.

Il faut savoir, par exemple, M. le Président, que près de 75 % des dépenses considérées comme compressibles à la ville de Montréal sont reliées à la rémunération, c'est-à-dire une somme de 618 000 000 $.

M. le Président, à cet égard, je suis à peu près assuré que l'opposition et un certain nombre de personnes qui ne sont pas tout à fait d'accord avec le fait que nous ayons choisi d'aider Montréal, comme nous avons choisi d'aider les municipalités au Québec, vont dire: Est-ce que ces mesures peuvent être réalisées non seulement pour 1998, mais de façon permanente pour en arriver à des corrections permanentes? Cet après-midi, j'ai annoncé, avec le premier ministre, les mesures que nous entendions prendre comme gouvernement pour fournir aux municipalités et aux associations de travailleurs les outils à leur disposition pour réaliser l'objectif d'une réduction des masses salariales, une réduction nécessaire des masses salariales dans les municipalités au Québec pour en arriver à présenter des budgets équilibrés en termes de revenus et de dépenses. La position du gouvernement, très clairement exprimée cet après-midi, d'abord aux Unions municipales, aux regroupements de travailleurs et de travailleuses et aux concernés, est une démarche qui mise toujours sur la négociation, mais qui prévoit aussi une obligation de résultat dans le temps pour en arriver à ce que les municipalités puissent présenter des budgets équilibrés. Pour la ville de Montréal, c'est extrêmement important, puisque cela va nous assurer pour presque au-delà de 70 % le règlement de la situation déficitaire de la ville de Montréal, pour une somme de 71 000 000 $ sur 125 000 000 $ en termes d'impasse. Donc, le geste est extrêmement important.

Il est aussi un geste qui va nous permettre d'affirmer, à la fin du processus, que chacun aura fait sa part, que chacun aura fait sa juste part dans les secteurs public et parapublic au Québec et dans le secteur municipal, tout comme on l'a fait dans tous les autres secteurs, et nous aurons tous ensemble la capacité et la possibilité de dire que nous avons tous fait notre effort. Eh bien, M. le Président, les constats auxquels nous en sommes arrivés depuis le 25 novembre, la date finale, la date butoir que nous avions fixée dans l'entente avec l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, nous ont amenés à dresser les éléments de constat suivants: actuellement, dans les municipalités, on peut constater jusqu'à 25 % des conventions qui sont réglées et qui ont un impact sur la préparation des budgets et sur la masse salariale de ces municipalités pour 1998. Nous avons été aussi à même de constater un travail extrêmement important, positif de la part des grandes centrales syndicales, des dirigeants de l'UMQ et d'un grand nombre de syndicats et de municipalités, c'est-à-dire que le travail intensif qui se déroule depuis le 23 octobre en particulier mérite que nous soulignions dans le diagnostic cet aspect.

(15 h 50)

Dans un très grand nombre de cas, dans la grande majorité des cas, eh bien, tout le monde s'est mis au travail dans un esprit positif au niveau des centrales syndicales et au niveau des dirigeants de l'Union des municipalités du Québec, qui ont constamment échangé avec le gouvernement et les parties contractantes pour faire en sorte qu'on se dirige vers un règlement, et également, et cela va de soi, un grand nombre de syndicats de municipalité, on a tous été à même ici à chaque jour de constater des ententes qui ont été convenues dans plusieurs municipalités. Mais, à ce jour, quelque 25 % des conventions ont permis des règlements qui... donc, permettent des économies ou des réductions, des modifications au niveau de la masse salariale de 6 %. Et compte tenu de la date qui est impartie aux municipalités, 15 décembre pour la ville de Montréal, 31 décembre pour les autres municipalités, le gouvernement a été aussi amené à constater, par contre, plusieurs blocages importants dans les syndicats locaux et aussi chez certaines municipalités, parce que c'est rare, M. le Président, que les impasses se dessinent à un seul partenaire. Elles se dessinent à deux partenaires, parce qu'il y a deux parties à la négociation.

On a aussi constaté chez certaines municipalités qu'elles n'ont pas déposé de proposition ni même convoqué la partie syndicale. Alors, M. le Président, il faut bien constater qu'il y a cet aspect qui s'est présenté en termes de diagnostic. Et, depuis le 25 novembre, depuis la fin de la date butoir, nous avons pu constater un certain enlisement, quoique des discussions intensives et fructueuses se déroulent actuellement dans plusieurs dossiers et nous laissent espérer des règlements concrets qui vont permettre aux municipalités de présenter leur budget dans les dates imparties, avec un équilibre au niveau des revenus et des dépenses en pouvant escompter sur ces économies de masse salariale, en particulier avec les autres modifications, les autres économies qui ont pu être réalisées, pour présenter leur budget de 1998.

Il a été important également et il est important de rappeler les objectifs qui nous ont amenés à demander cette contribution et à faire en sorte que le processus donne ses fruits. M. le Président, il faut rappeler que tout cela est dans le cadre d'un rétablissement de l'équilibre de nos finances publiques, que nous devons également nous assurer qu'il y a une équité entre les syndiqués du secteur public et les syndiqués du secteur municipal. Tous ont accepté de contribuer dans le secteur public. Dans le secteur municipal, nous pensons qu'il doit y avoir également un effort similaire.

Il faut aussi prendre en note l'équité interne qui doit exister d'une ville à l'autre, d'une municipalité à une autre. Puisque des gens ont jusqu'à maintenant convenu de faire et de réaliser leur contribution, il nous semble qu'il serait injuste de passer droit et de laisser d'autres impliqués dans la situation faire en sorte qu'ils n'aient pas à contribuer à cet immense effort collectif difficile qui demande de l'énergie, qui demande de la volonté, qui demande une détermination sans pareil. M. le Président, il serait injuste, en termes d'équité, de ne pas demander le même effort à tout le monde, et l'équité aussi entre les contribuables municipaux. Parce que , à cet égard-là, donc, si les gestes n'étaient pas réalisés en termes d'entente et de réduction, certains pourraient subir des hausses de taxes, d'autres non, parce que, dans certaines municipalités, on aurait négocié et réussi, et, dans certaines autres municipalités, on n'aurait pas négocié et ne serait pas arrivé à des règlements, et c'est les citoyens qui écoperaient. Il nous semble qu'en termes d'équité, il faut poser les gestes pour avoir comme résultat cette équité également pour les contribuables.

Il faut rappeler aussi qu'on a signé une entente, M. le Président, comme gouvernement, le 23 octobre dernier. L'engagement était à l'effet de prendre acte des résultats des négociations en date du 25 novembre et d'aviser des mesures à adopter à la lumière des résultats obtenus en regard des objectifs poursuivis, c'est-à-dire une contribution jusqu'à un maximum, jusqu'à une concurrence de 6 % à même les masses salariales des municipalités pour réaliser l'effort de l'équilibre des finances publiques au niveau local tout comme au niveau national.

Et bien, M. le Président, après avoir évidemment procédé à un certain nombre de consultations et d'échanges avec l'ensemble de sa députation, de ses représentants, le gouvernement a donc annoncé aujourd'hui, début décembre, qu'il allait donner suite à son engagement et assumer les responsabilités qui lui incombe comme gouvernement pour atteindre les objectifs que je viens d'énumérer compte tenu des constats que nous avons pu réaliser. Nous avons donc décidé de procéder par voie législative dans les cas où il le faudra pour atteindre les résultats escomptés. Ce que ça signifie – et c'est particulièrement indiqué à l'égard du projet de loi que nous allons étudier aujourd'hui, le projet de loi n° 183 pour la ville de Montréal – c'est que les gestes qui vont être posés sont les suivants. Le gouvernement fixe un délai de rigueur à la négociation. Celle-ci se terminera le 30 janvier 1998. M. le Président, les parties ont jusqu'au 30 janvier pour convenir d'ententes qui vont permettre la récupération nécessaire jusqu'à un maximum de 6 % des masses salariales, de l'ensemble de la rémunération, pour en arriver à ce que les municipalités puissent non seulement escompter ces montants en termes de diminution de leurs dépenses pour le budget 1998, mais également convenir d'ententes qui vont concrétiser, matérialiser cette possibilité, et ces indications qui seront contenues aux budgets des municipalités.

Au 30 janvier, M. le Président, l'Assemblée nationale du Québec sera convoquée, si nécessaire, pour adopter une loi qui mettra en place un mécanisme de règlement. Ce mécanisme de règlement qui sera mis en marche par l'adoption d'une loi ne s'appliquera toutefois qu'à la demande de l'une ou l'autre des parties dans chaque municipalité. Il se présente au Québec une diversité de situations et une diversité au niveau des municipalités elles-mêmes. Un nombre plus restreint, cela va de soi, de municipalités, quelque chose comme 250, eh bien, représentent ou incluent des populations assez volumineuses. Ce sont des municipalités de grande taille. Au-delà de 153 ont 10 000 habitants et plus en termes d'agglomération. Mais, au Québec, un très grand nombre de municipalités de petite taille, aux alentours de 1 200 municipalités, sont présentes sur l'ensemble du territoire québécois et quelques 200 autres sont également présentes mais regroupent une population bien supérieure. En fait, si on prend un autre pôle de référence pour le définir, les 270 municipalités qui sont représentées par l'Union des municipalités du Québec représentent 70 % de la population du Québec. C'est donc dire qu'il y a une diversité au niveau de la taille et de ce que cela représente en termes de municipalités au Québec, et le gouvernement indique donc aujourd'hui que, dans toute intervention, si nécessaire, au plan législatif qu'il entend prendre après la date de rigueur du 30 janvier 1998, le mécanisme de règlement ne s'appliquera toutefois qu'à la demande de l'une ou l'autre des parties dans chaque municipalité.

En clair, M. le Président, ce serait un instrument, un outil habilitant qui permettrait à la municipalité, donc, de prendre une résolution pour indiquer qu'elle va utiliser le mécanisme pour régler la situation, pour obtenir un règlement. Suivant la situation dans laquelle elle se retrouve, c'est elle qui va décider ou encore, à la demande de l'autre partie, on va décider de faire appel à ce mécanisme qui serait mis en place à ce moment. Dans le cas où on aura exercé le droit d'utiliser le mécanisme prévu à la loi, l'une ou l'autre des parties pourra donc, je le répète, faire appel à ce mécanisme-là.

(16 heures)

Chacune des parties dans chaque municipalité devra déposer, dans un très court laps de temps, une proposition finale quant à l'organisation du travail, la révision des clauses de convention actuellement entre les parties et également les mécanismes pour atteindre l'objectif de récupération dans les coûts de main-d'oeuvre allant jusqu'à un maximum de 6 %. La loi prévoira, par ailleurs, qu'un arbitre choisira celle des deux propositions qui entrera en vigueur pour l'année 1998. La proposition qui sera retenue par l'arbitre sera la proposition la plus raisonnable, respectant notamment les critères généraux suivants, mais qui pourront être précisés et davantage élaborés au cours des prochains jours.

D'abord, un premier critère, bien sûr, impératif, la récupération dans les coûts de main-d'oeuvre allant jusqu'à un maximum de 6 %. Parce qu'il pourrait très bien être démontré et il devra être démontré qu'on a la nécessité d'obtenir un gain, au niveau de la réduction des coûts de main-d'oeuvre jusqu'à 6 %, parce qu'il peut se présenter, compte tenu du travail réalisé par les conseillers municipaux, que cet effort ne puisse être que de 5 % ou de 5,5 %, suivant la situation de la municipalité.

Donc, la proposition qui serait retenue, c'est celle qui va respecter notamment les critères d'un maximum de 6 % de récupération, qu'il n'y ait pas de baisse de salaires et également un critère qui prévoira que la récupération visera toutes les catégories de personnes rémunérées dans la municipalité. Il serait injuste qu'une proposition concernant un groupe de travailleurs ne prévoie pas l'équité avec les autres travailleurs de la municipalité. Alors donc, la dernière offre faite par la partie syndicale ou la dernière offre faite par la partie patronale, la municipalité, respectant les critères d'un maximum de 6 %, pas de baisse de salaires et une récupération visant toutes les catégories de personnes rémunérées par la municipalité, y compris les élus municipaux, puisqu'il y a rémunération aussi à ce niveau. Avec cette décision du gouvernement, et compte tenu du cadre législatif dans lequel évoluent l'ensemble des municipalités au Québec, les municipalités pourront dès ce jour escompter, dans la préparation de leur budget pour l'année 1998, une diminution de leurs coûts de main-d'oeuvre jusqu'à un maximum de 6 %.

La députée de Marguerite-Bourgeoys comprendra facilement maintenant – et on ne peut lui en faire grief, quand même – que, suite à sa question de ce matin quant à la position à adopter pour la Communauté urbaine de Montréal et l'ensemble des 28 autres municipalités qui, en soi, ne disposent pas d'instruments législatifs comme le projet de loi n° 183, nous pensons que, compte tenu de notre corpus législatif, il est maintenant très clair que chacune des municipalités et les personnels professionnels qui ont à préparer ces budgets pourront, compte tenu des avis juridiques que nous avons obtenus et compte tenu de la situation, escompter dans leur budget jusqu'à un maximum de 6 % dans la réalisation de leurs prévisions budgétaires.

Il est entendu, M. le Président, que tout cela, en termes de baisse de dépenses escomptées, est basé sur le fait d'une capacité raisonnable de réaliser ces baisses de dépenses. Avec les annonces que nous avons faites aujourd'hui, avec le travail qui se réalise dans de très nombreuses tables d'échange et le travail qui se réalisera au cours des prochains jours et des prochaines semaines et des efforts qui sont mis de part et d'autre dans ces tables de travail, eh bien, M. le Président, on peut indiquer donc qu'il y aura réalisation de ces coûts escomptés par les municipalités de façon à ce que les municipalités du Québec, dans la préparation de leur budget et dans le processus d'adoption de leur budget, puissent en arriver à présenter des budgets équilibrés qui vont pouvoir escompter jusqu'à 6 % de leurs coûts de main-d'oeuvre dans la perspective de la concrétisation, de la matérialisation et de la réalisation de cet engagement au cours des mois à venir avec les indications que je viens de donner ici.

M. le Président, c'est assez simple. Nous croyons que la meilleure façon de régler une situation, peu importe laquelle, quand les deux parties concernées sont des éléments de la solution, sont parties à la solution, eh bien, nous pensons que nous devons indiquer à chacune des parties que nous devons poursuivre intensément la recherche d'un règlement négocié d'ici le 30 janvier prochain. Nous sommes persuadés que chacune des parties voudra faire en sorte que la façon dont elle entrevoit la réalisation de la diminution des coûts serait tellement souhaitable qu'il faut être à la table des négociations. Et on l'a tellement été au cours des derniers jours, des dernières semaines qu'il est éminemment permis d'être raisonnablement optimistes sur le règlement d'un grand nombre de situations qui vont nous amener à des résultats qui vont pouvoir être matérialisés pour les municipalités du Québec.

M. le Président, la négociation a donné d'excellents résultats dans un grande nombre de cas jusqu'à maintenant. L'intensification du processus et la volonté gouvernementale d'y arriver nous indiquent tous que nous devons continuer à déployer une somme d'efforts considérables pour y arriver.

Je conclurai en disant: Avec le projet de loi n° 183, nous allons permettre à la ville de Montréal de déposer et d'adopter son budget. Mais au même moment il faut nous engager, et nous nous engageons comme gouvernement du Québec, à accompagner la ville de Montréal pour que nous puissions comme résultats obtenir des redressements de nature structurelle qui vont nous conduire à des solutions permanentes qui vont faire en sorte que le redressement de la situation, le développement de la ville de Montréal – si important non seulement pour la ville de Montréal, mais pour les Montréalais et les Montréalaises et l'ensemble du Québec – eh bien, nous allons atteindre ces objectifs, parce qu'il nous faudra prendre des moyens pour y arriver avec les parties concernées, avec toute la volonté et la détermination nécessaires.

Lorsque tout cela sera, dans quelques mois, nous l'espérons fermement, avec ce que nous présentons derrière nous, nous pourrons dire: Chacun a fait sa part, chacun a fait sa juste part, mais chacun a participé à ce redressement pour l'ensemble des finances publiques du Québec. Nous serons fiers d'avoir tous ensemble participé à cette opération qui a été et qui demeure difficile, mais qui est un geste nécessaire si nous voulons franchir le cap du prochain millénaire avec une situation équilibrée et davantage de possibilités pour le développement d'une ville comme Montréal, pour les villes du Québec et pour le Québec lui-même, M. le Président.

(16 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Suite à l'explication du ministre, je vais joindre ma voix pour vous expliquer aussi comment notre formation voit ce projet de loi n° 183. Je vais essayer aussi, à ma façon, là, de faire comprendre pourquoi effectivement il est nécessaire et impératif d'aider notre métropole, c'est-à-dire la ville de Montréal, on s'entend, et revenir un peu à la case départ, c'est-à-dire à partir de l'annonce du ministre du 4 novembre 1997.

On se rappelle, M. le Président, que, le 4 novembre 1997, le ministre annonçait dans un communiqué de presse, mais en outre faisait une annonce publique, en disant qu'il permettait à la ville de Montréal de déposer son budget avec un manque à gagner de 125 000 000 $. Maintenant, il disait aussi que la ville devait déposer ce budget avec le même manque à gagner de 125 000 000 $, mais s'assurer que les Montréalais n'avaient pas de hausse de taxes.

C'est sûr, M. le Président, qu'il serait absolument impensable que les Montréalais aient et se voient affublés d'une hausse de taxes parce qu'on se rappelle qu'à Montréal la taxation ou la fiscalité est déjà inéquitable par rapport, ne serait-ce, qu'à ce que j'appelle «ses villes soeurs», c'est-à-dire les villes qui l'entourent, que ce soit, par exemple, ville Mont-Royal, que ce soit Westmount, que ce soit Outremont, où, partout ailleurs sur le territoire ou presque, elles ont ou les résidents de ces villes ont une taxation qui est inférieure à Montréal, spécialement dans le non-résidentiel. Ce que ça veut dire, c'est que la ville, de plus en plus, devient non compétitive par rapport aux villes qui cohabitent l'île, ce qui rend la situation, au niveau du développement économique par exemple, de plus en plus difficile pour Montréal. Donc, on approuvait un manque à gagner de 125 000 000 $, et Québec appuyait la ville dans le fait qu'elle déposait, et encore aujourd'hui, là, de façon tout à fait illégale, un budget qui comportait ce manque à gagner.

Maintenant, parallèlement à ça, on disait que le gouvernement escomptait que la ville aille chercher ce manque à gagner par des économies au chapitre de la main-d'oeuvre et aussi au niveau de certaines compressions budgétaires. De la main-d'oeuvre, on dit: La ville va aller chercher, durant l'année en cours, des économies de 72 000 000 $ qui sont divisées comme suit, c'est-à-dire 42 000 000 $ pour Montréal chez sa main-d'oeuvre propre, 30 000 000 $ pour la CUM qui correspond à la quote-part que Montréal donne à la CUM pour ces mêmes fonctions. Donc, à ce 72 000 000 $ – ça, c'était une partie du 125 000 000 $ – on ajoute un autre 53 000 000 $ d'économies en efforts évidemment de compressions budgétaires de nature d'abord structurelles, c'est-à-dire en répondant à certains problèmes structurels de la ville et aussi en exploitant davantage la piste de la mise en commun de services.

Alors, si on regarde, M. le Président, à vue d'oeil l'examen détaillé de ces solutions, d'abord au niveau de la mise en commun de services, on a fait appel à la mise en commun des sociétés de transport, par exemple, où le ministre de la Métropole – qui est particulièrement, je dirais, absent dans ce débat-ci, je vous le ferais remarquer – a annoncé, lui, la mise en commun finalement des sociétés de transport, autant celle de Laval que celle de la Rive-Sud et que celle de Montréal. À ceci, le ministre de la Métropole a dit: Qu'à cela ne tienne. Au mois d'avril ou à peu près, il parlait d'économies allant jusqu'à 100 000 000 $, 100 000 000 $ d'économies provenant de cette mise en commun de transports.

Cela dit, M. le Président, 100 000 000 $, on ne sait pas tout à fait où il l'a pris. À preuve, il y avait un comité, parce que c'est la mode, de ce temps-là, les comités. Alors, il y a un comité qui doit se pencher sur l'étude de la mise en commun de ces sociétés de transport. Ce comité-là ne s'est pas encore réuni, d'après le président de la STCUM. Encore faut-il qu'il se réunisse, étudie la situation pour en arriver à dire s'il va y avoir justement des économies au niveau de cette mise en commun des trois sociétés de transport.

Encore une fois, est-ce que c'est si évident que ça, M. le Président? Analysons. La STCUM a un budget d'environ 800 000 000 $ et correspond à peu près à 7 000 employés. Si on ajoute à ça celle de Laval et celle de la Rive-Sud, on se retrouve et on se retrouvera avec une énorme société de transport. Est-ce que le fait de mettre en commun et de se retrouver avec un grand ensemble va faire en sorte que, au niveau administratif, on va sauver des coûts? Reste à prouver.

Ce qu'il faudrait faire par contre, c'est de s'assurer que certains services fournis à ces sociétés de transport soient mis en commun, soit, par exemple, la réparation d'autobus ou la réparation des infrastructures au niveau du transport, ça, c'est une bonne idée; que l'on mette en commun aussi toute la perception pour avoir un taux uniforme sur la grande région de Montréal; la perception des billets, ça aussi, c'est une bonne idée. Mais de dire qu'on va se retrouver avec une énorme société de transport englobant l'ensemble de la région, est-ce que c'est sûr qu'on va avoir des économies d'échelle? Encore faut-il que le comité se penche et nous le prouve. Jusqu'à maintenant il ne l'a pas fait, et jusqu'à maintenant on parle quand même d'économies de 100 000 000 $ encore une fois, ce qui est à vérifier.

Autre chose aussi, M. le Président, c'est qu'on a parlé d'une mise en commun de certains services spécialisés, spécifiquement chez les pompiers. On s'est aperçu que ça a créé une réaction extrêmement virulente au niveau des maires de banlieue, où l'on dit que les maires de banlieue, là-dessus, déterrent la hache de guerre: Pas question de fusion des services contre les incendies. Pourquoi? C'est bien simple. Quand il y a eu la fusion du service de police, par exemple, sur l'île de Montréal, ce que ça a fait – d'ailleurs, on se rappelle, cette fusion-là a été causée à cause de la grève des policiers – c'est que ça a augmenté le coût du service de police sur l'île de Montréal. Pourquoi? Parce que les conventions collectives de Montréal s'appliquent maintenant sur l'ensemble de l'île.

Même chose, si on en vient à une fusion au niveau des pompiers, ce seront les conventions collectives de Montréal chez les pompiers qui s'appliqueront à la grandeur du territoire. Donc, dans certaines villes où le coût de service des incendies est beaucoup moins cher que dans la ville de Montréal, c'est sûr que les maires de banlieue se disent: Il n'y a pas d'économies là; au contraire, il va y avoir une augmentation des coûts. Alors, c'est pour ça que les maires de banlieue, par exemple, se sont soulevés quand on a mentionné le fait qu'on parlait d'une mise en commun des services contre les incendies.

Donc, M. le Président, au niveau de la mise en commun de services, en soi, ce n'est pas une mauvaise idée, au contraire. Même nous, dans notre programme à nous, notre formation, nous disons qu'il faut absolument regarder cette mise en commun de services pour s'assurer que les citoyens puissent bénéficier d'un très bon service et à meilleur coût. Je pense que même les maires... Il n'y a personne qui est contre ça. Encore faut-il des analyses qui sont extrêmement sérieuses avant de faire des annonces – comme Perrette et le pot de lait – de coûts à récupérer quand on n'en est même pas sûr.

Autre chose aussi, M. le Président, au niveau de la mise en commun des services de transport, on se souvient aussi que le ministre de la Métropole parle éventuellement d'une récupération des coûts de fonctionnement, mais celui-ci, à toutes les questions qui lui ont été posées, que ce soit par nous, que ce soit par les journalistes, que ce soit par les maires, que ce soit par l'ensemble des sociétés de transport, il a été plutôt évasif sur ce qu'il voulait dire par «aller récupérer des coûts pour payer le fonctionnement». En clair et en général, ça, ça veut dire une taxe; ça, ça veut dire charger les utilisateurs, donc taxer en sus les utilisateurs pour payer le coût de fonctionnement. Alors, encore une fois on est un peu dans le vague et dans la brume quand à savoir comment vont se faire ces économies en fusionnant les compagnies de transport.

(16 h 20)

Donc, M. le Président, quelqu'un qui fait un budget sérieusement ne peut pas escompter dans son budget des chiffres qui ne sont pas réels. C'est impossible, il n'y a aucune méthode comptable qui accepte, que ce soit au niveau du privé ou du public, que quelqu'un ou qu'un organisme ou... De toute façon, le gouvernement n'accepte pas ça de ses organismes à lui, qu'un organisme décide de faire son budget à partir de chiffres fictifs ou d'économies escomptées peut-être. Alors, c'est ce qu'on fait en disant: Il va y avoir des économies éventuelles l'année prochaine sur la mise en commun, entre autres, de certains services, dont la mise en commun des sociétés de transport.

Deuxièmement, M. le Président, quand on parle de la réduction des coûts, le gouvernement a accédé aussi à la demande de la ville de Montréal de réduire de 1,5 % à 1 % la réserve pour imprévus. Ce n'est pas la première fois que la ville de Montréal réduit son pourcentage du budget qui était réservé, si vous voulez, pour certains imprévus, et Dieu sait si, à Montréal, des imprévus, il y en a. Si on a un hiver trop rigoureux, par exemple, sachant le coût que ça peut engendrer, tout le déblaiement de la neige sur le territoire de l'île de Montréal, ne serait-ce que ça, un peu trop de neige, forcément on dépasse le budget et de façon très, très rapide. Ensuite, vous savez qu'une tempête de neige, à Montréal, quand on a fini tout le déblaiement, peut coûter jusqu'à 2 000 000 $ le déblaiement, ce qui fait que, quand il y a un peu trop de neige, si on avait une tempête comme ils ont eue à Québec l'année dernière – ça peut arriver – tout de suite la ville se retrouve en déficit quant à ce service qui est un service essentiel pour la population de Montréal.

Donc, déjà la ville, il y a quelques années, a réduit de 2 % à 1,5 % sa réserve. Là, aujourd'hui, la ville demande, pour arriver à payer ce 125 000 000 $, de réduire de 1,5 % – ce qui veut dire une réduction de 10 000 000 $ sur son budget – à 1 %, à égalité avec celui de la CUM. La ville n'a pas le choix, M. le Président, elle ne fait pas ça de gaieté de coeur, elle le fait tout simplement parce qu'elle doit aller chercher dans tous, tous les tiroirs le petit peu d'argent qu'il lui reste pour en arriver justement à venir appuyer, si on veut, cette réduction virtuelle du 125 000 000 $. Donc, réduction escomptée au niveau de la mise en commun des sociétés, ce qui n'est pas évident, on vient de le prouver. Deuxièmement, réduction au niveau de sa réserve pour imprévus – ça, c'est 10 000 000 $ – et là croisons-nous les doigts et espérons qu'il n'arrive rien.

Au niveau des paramunicipales, M. le Président, il en a été question – le ministre justement en a parlé tantôt – on attend à cet égard des propositions de modifications législatives qui visent à réduire le volume financier autorisé pour les sociétés. La ville de Montréal a dans son budget un tableau qui est assez significatif à ce niveau-là, au niveau des dépenses de la ville attribuables aux trois sociétés paramunicipales de 1986 à 2015. Évidemment, à partir de 1986, comme c'était le boom de l'immobilier, certaines paramunicipales se sont prises pour la Caisse de dépôt et ont acheté des terrains, ont acheté certains édifices aussi, là, terrains, édifices, etc., pour faire du développement, au point où il y a certains terrains qui se sont vendus jusqu'à 100 $ le pied carré et qui aujourd'hui en valent 10 $. Alors, ce qui fait que les paramunicipales se retrouvent avec un service de dette qu'elles doivent payer et qui correspond à un déficit énorme par rapport à ce qu'elles ont payé initialement – par rapport au coût, là – et à ce qu'elles ont acheté. Donc, on parle de 40 000 000 $ cette année au niveau du budget de fonctionnement des paramunicipales.

Si on ajoute un service de dette de 503 000 000 $, hein, encore une fois de 1986 à 2015, ensuite une affectation au PTI de 34 000 000 $, ça, ça veut dire, M. le Président, que les dépenses imputées aux exercices de 1986 à 2015 se chiffrent à 578 000 000 $. Alors, c'est évident qu'il faut absolument agir au niveau des paramunicipales pour aider la ville à soulager, si on veut, ce déficit, ou enfin une partie, qui est proprement dit structurel. Chose certaine, c'est que les ministres Perreault et Trudel considèrent urgent de mettre en place des mesures qui visent à raffermir les contrôles de la ville sur les opérations de ces sociétés et à réduire à 325 000 000 $ le maximum d'actif qu'elles peuvent posséder.

C'est ce qui a été dit, M. le Président, dans le communiqué de presse que le ministre a distribué le 4 novembre dernier. Moi, je veux bien, mais j'aimerais savoir où, quand, comment on va faire ça. Parce qu'encore une fois on se base sur des hypothèses. Et ce qu'on trouve inacceptable, au niveau du projet de loi n° 183, c'est que tout le projet de loi est fondé sur des hypothèses. Mais ce projet de loi permet à la ville quand même de déposer un budget déficitaire de 125 000 000 $. Mais c'est parce qu'il n'y rien de sûr dans ce que l'on propose, ce n'est encore une fois que des hypothèses.

Une autre hypothèse – évidemment que c'est nécessaire – c'est toute la problématique du déficit actuariel des caisses de retraite de la ville de Montréal. C'est un problème majeur. Le gouvernement du Parti québécois, en 1983, a obligé les municipalités à capitaliser les fonds de retraite. Ils ont traité les municipalités comme si c'étaient des sociétés privées et ils ont demandé aux municipalités de faire ce que le gouvernement ne fait pas. C'est-à-dire que, ici, au niveau du Québec, c'est du «pay as you go». C'est ce que faisaient la plupart des municipalités d'ailleurs, et, en 1983, on a dit: Vous allez capitaliser les fonds de retraite. On a dit aussi: On donne 15 ans pour l'ensemble des villes, mais 62 ans pour la ville de Montréal afin d'amortir le déficit.

Soixante-deux ans, M. le Président, où, là, on a vu le taux d'endettement augmenter, augmenter, et ce, de façon exponentielle. À preuve, ce petit tableau qui s'inscrit dans la présentation du budget de la ville de Montréal où on voit clairement le déficit exponentiel de ces caisses de retraite qui, en 1984, correspondait à 16 300 000 $, donc 1,3 % du budget, hein, pour augmenter à 2,5 % du budget en 1991, à 37 400 000 $. Ça, ce n'est que pour payer le déficit, là. À partir de 1983, les villes ont investi ou enfin ont gardé les sommes nécessaires pour payer les fonds de retraite. Ça, ce n'était que pour payer la dette d'avant 1983.

Alors, en 1981, je disais, c'est 2,5 % du budget, 37 400 000 $. En 1996, ça correspond à 3,1 % du budget, 57 900 000 $, M. le Président. Ça, ça veut dire, là, que la ville dépose ou enfin escompte 57,9 % dans son budget. Ça, c'est avant de commencer. Ajoutons le déficit, comme je le disais tantôt, des paramunicipales, qui est autour d'à peu près 32 000 000 $, puis la ville paie à peu près, je dirais en gros là, 90 000 000 $. Elle n'a pas bougé, encore là; elle n'a pas déneigé, elle n'a pas donné de services aux citoyens. Ça, ce n'est que pour payer les dettes qui ont été contractées avant le budget actuel.

En 2001, M. le Président, on va parler de 5 % du budget, on est rendu à 89 900 000 $, et comme ça de façon exponentielle pour que, en 2016, si on ne fait rien, la ville va payer 203 000 000 $ pour tout simplement payer enfin pour affronter, si on veut, les problèmes structurels dus à ces fonds de retraite. Autrement dit, ce qu'on a fait en 1983, c'est qu'on a hypothéqué trois générations. Juste ça. Alors, c'est un peu normal, je pense, que le gouvernement du Parti québécois, qui a institué ça en 1983, hein, décide de le réparer en 1997. C'est un peu normal, surtout que la ville de plus en plus met ça en évidence.

(16 h 30)

Je dois vous dire, M. le Président, que, quand le déficit actuariel était de 16 300 000 $, dans un budget global d'à peu près un milliard et quelques, c'est 1 %, ça paraissait moins, on en entendait moins parler. Mais là c'est devenu tellement crucial que je dois dire que la ville là-dessus fait ses devoirs, c'est-à-dire que, depuis deux ans, elle sensibilise le gouvernement, les membres de l'Assemblée nationale par rapport à ce problème structurel qui est capital à régler.

Le seul problème, c'est qu'on a formé un groupe de travail, et on attendait des conclusions de ce groupe-là piloté par le sous-ministre des Affaires municipales, et ces conclusions-là devaient être déposées le 1er décembre au ministre des Affaires municipales et au ministre de la Métropole de telle sorte que le gouvernement puisse agir rapidement. Là, on apprend aujourd'hui... C'était une de mes questions d'ailleurs, M. le Président. Je voulais poser cette question-là en Chambre, aujourd'hui. Je me disais: Ou est-ce qu'il est, le rapport? Est-ce qu'il a été déposé? Est-ce que vous en avez pris conscience? Est-ce qu'il va être rendu public? Où est-ce que vous en êtes? Et là je viens d'apprendre que le rapport n'est pas encore déposé. On y met la touche finale.

M. le Président, il y a quelque chose qui m'achale dans tout le processus, c'est que les dates butoirs, là, il me semble que ça ne compte pas. Pour les négociations, par exemple, on est rendu à la troisième date butoir, avec ce qui a été annoncé aujourd'hui, et ça, je vais y revenir tantôt, à l'annonce d'aujourd'hui, et je suis certaine que ma collègue va y revenir encore mieux que moi. Mais, cela dit, là on avait une date butoir, pour le comité de travail, qui était le 1er décembre, mais là la date butoir, ça ne compte pas. Il n'est pas prêt. Ah! ça va peut-être être prêt la semaine prochaine, excepté que, moi, je demande au gouvernement: Pourquoi c'est faire que vous mettez une date puis que vous ne la respectez pas?

Moi, je me souviens, quand j'étais ministre, que je mettais une date et je que les ai toutes respectées. Toutes respectées, sauf une. Quand le nouveau président du Conseil des arts devait être nommé pour une certaine date et que le président qui avait été pressenti, qui avait accepté, finalement, 24 heures avant, pour toutes sortes de raisons personnelles qu'il faut respecter, a été obligé de décliner, là j'ai été obligée – force majeure parce que je n'avais plus de président – de reporter de deux mois. Excepté que les dates, quand on met des dates, habituellement, on les respecte parce que ce que ça fait, M. le Président, c'est que les intervenants concernés se fient là-dessus, hein, pour, dans ce cas-ci, administrer et fonctionner.

Alors, M. le Président, je reviens au Groupe de travail sur les déficits actuariels et je dis qu'encore une fois c'est capital qu'on règle ce problème. D'abord, c'est capital pourquoi? Parce que la ville, sur le 125 000 000 $ de déficit de son budget, ça fait partie du 53 000 000 $ qu'elle doit régler. C'est une partie intégrante du chiffre qu'elle doit aller récupérer pour déposer un budget non déficitaire, sinon, si elle ne veut absolument pas déposer un budget déficitaire et qu'on ne l'aide pas, bien, elle va être obligée d'augmenter les taxes, et c'est absolument impensable, on l'a dit tantôt, pour les Montréalais, qui paient déjà trop. Donc, je pense que ce qui est important, c'est que ce problème soit, oui, réglé.

Il y a une autre chose, par exemple, qui est un petit peu achalante, c'est que les syndicats ne font pas partie du comité. Il y a un comité qui est là, qui est mis sur pied, comme je disais tantôt, qui devait donner son rapport le 1er décembre, mais les syndicats qui vont être les premiers concernés, là – parce que c'est quand même leur argent, c'est quand même leurs fonds de retraite – eux ne sont pas impliqués. Des rumeurs veulent qu'il y ait certaines de ces sommes, de ces fonds de retraite, qui soient récupérées pour payer justement ce déficit. Bon, c'est correct en soi si les syndicats, qui sont les principaux partenaires, en arrivent à travailler avec le gouvernement à une solution qui est équilibrée, d'abord, et, deuxièmement, une solution aussi qui respecte les deux parties. Je sais qu'il y a un malaise présentement au niveau des syndicats, malaise qui a été d'ailleurs exprimé par Gilles Charland, le président des 60 000, 66 000 syndiqués municipaux, qui dit : Bien, nous, on l'a étudié, le problème, et ç'aurait été de nous montrer un peu de respect que de nous inclure dans ce comité-là. Alors, je passe le message au gouvernement parce que, évidemment quand les gens sont partie prenante et qu'ils sentent qu'on les considère et qu'on les respecte, c'est sûr que c'est plus facile de régler après.

M. le Président, voilà en gros ce que le projet de loi, projet de loi de trois articles, demande ou enfin permet à la ville, c'est de déposer un budget déficitaire de 125 000 000 $ où l'on récupère 72 000 000 $ à partir du 6 % des négociations avec les syndicats. Ajoutez à ça, M. le Président, 53 000 000 $ qu'on dit à la ville d'aller chercher au niveau de ses économies globales, dont la fusion de services, comme je le disais tantôt, dont les problèmes structurels au niveau des paramunicipales, et, encore une fois, au niveau du déficit... enfin, l'élimination des déficits actuariels dus aux caisses de retraite.

M. le Président, on a beaucoup parlé de la mise en tutelle de la ville et aujourd'hui je veux expliquer pourquoi on a, je pense, le sentiment justifié que la ville est en tutelle. D'abord, M. le Président, on sait très bien que le 4 novembre dernier, quand l'annonce a été faite, et on sait très bien que, la semaine dernière, lorsque la ville a déposé son budget, tout était fait dans un contexte d'illégalité. Pourquoi illégalité? Parce que, oui, il y a un projet de loi, il n'est pas encore adopté, d'une part. Il est rétroactif, ce qui prouve que c'est illégal, parce que rétroactif à la date même de l'annonce, et on permet tout de même à la ville de déposer un budget avec un montant qui n'est pas, jusqu'à date, récupéré. Espérons que c'est récupérable, espérons-le pour les Montréalais. Mais, jusqu'à l'instant, ce n'est pas récupéré. Deuxièmement, quand on parle de la mise en tutelle de la ville, c'est que Québec dicte à Montréal où couper et où compresser. Et, M. le Président, il y a un certain malaise par rapport à ça, et je veux m'exprimer un peu sur le malaise qu'on a senti non seulement par rapport à la ville de Montréal, mais par rapport à l'ensemble du traitement que l'on fait aux municipalités.

Cette semaine, nous étions en commission parlementaire, M. le Président, entre autres sur les projets de loi nos 175 et 173. Et je dois vous dire, M. le Président, que, par exemple, les représentants de la Conférence des maires de banlieue sont venus s'exprimer sur le projet de loi n° 173 et dénoncer l'iniquité de ce projet de loi là – c'est le projet de loi du pelletage de 350 000 000 $ – par rapport à, je dirais, la dynamique au niveau de la ville de Montréal. Et le ministre s'est retourné à un moment donné vers les maires et il leur a fait, honnêtement, d'un ton extrêmement paternaliste, la morale; il leur a fait la morale par rapport au déficit zéro, par rapport à ce grand objectif sur lequel tout le monde s'était accordé au Sommet économique, par rapport à leur contribution à ce grand objectif approuvé par l'ensemble des Québécois. Et je dois vous dire, M. le Président, que j'ai trouvé les maires... Je les ai félicités d'ailleurs pour leur patience et leur retenue. Parce que, honnêtement, avec mon sang italien, si j'avais été eux, probablement que j'aurais été debout sur la table ou, enfin, debout sur la table du ministre en train de l'égorger. Pourquoi, M. le Président? Parce que les maires, avec cette retenue, lui ont répondu de vertement mais calmement, je dois vous dire, en lui disant qu'ils n'avaient pas de leçon à recevoir de personne, spécialement d'un gouvernement qui coupe ses dépenses de 0,6 %, qui pellete son déficit dans la cour des autres, des municipalités, des institutions, des fonds spéciaux, et qui, lui, a les moyens pour le faire, alors il s'en sert allègrement, qui refait l'ensemble des méthodes comptables, qui innove au niveau des méthodes comptables, comme le Vérificateur général l'a dit, en pelletant ou en camouflant 1 700 000 000 $ de déficit pour montrer évidemment une réduction de déficit, réduction qui, elle aussi, est virtuelle.

Ce qui veut dire, M. le Président, que les municipalités qui ont bien géré depuis des années, qui ne veulent pas augmenter les taxes pour leurs citoyens – pourquoi? parce qu'elles réalisent que les citoyens sont amplement taxés – qui se font pelleter aussi, j'étais pour dire de leurs responsabilités, mais ce n'est pas vrai, qui se font pelleter de l'argent au niveau du gouvernement et qui, en plus de ça, s'en viennent ici et se font faire la morale... je trouve ça un peu exagéré.

(16 h 40)

Alors, ce qui me ramène à la ville de Montréal. Ça, c'est l'attitude globale au niveau des maires: On va vous dire quoi faire. On va dire quoi faire à des gens et, bien souvent, à certains maires qui ont beaucoup plus d'expérience que ceux qui leur disent: On va vous dire quoi faire. Sur l'île de Montréal, incluant Laval, ce sont des gens qui ont énormément d'expérience, et certains d'entre eux sont maires depuis plusieurs termes. Et comme ils sont le premier palier, le palier le plus proche de leurs citoyens, il me semble que eux savent, en premier lieu, ce que les citoyens... la capacité de payer de leurs citoyens.

Alors, j'en viens à la ville de Montréal où on agit exactement de la même façon. On se souvient de l'année passée où le gouvernement a dit à la ville, suite à certaines remarques du vérificateur de la ville: Je vais envoyer certains de mes émissaires et on va vérifier vos finances, on va travailler avec vous au niveau de vos finances. Et là on s'aperçoit, M. le Président, que c'est le gouvernement du Québec qui a fait le budget, parce que, pour que la ville puisse déposer un budget tel, avec l'aval du gouvernement, c'est sûr que ça ne peut pas être autre chose que le gouvernement qui dicte où compresser dans les dépenses, de réduire la masse salariale de 6 %, d'impliquer aussi la Communauté urbaine, de débalancer l'équilibre, parce que, ce faisant, au niveau du budget de la Communauté urbaine... de lui permettre de baisser sa réserve pour faire face à des imprévus. Donc, c'est vraiment le gouvernement qui a la mainmise, entre autres sur la ville de Montréal. Pourquoi? Parce que c'est la ville au Québec, d'abord, qui a le plus haut budget – c'est sûr, c'est la métropole – qui représente 800 000 personnes, et c'est la ville au Québec qui, à cause de son volume et à cause de sa grosseur, est la plus mal en point.

Alors, M. le Président, encore une fois, la façon de faire, si on veut, du ministre a été évidemment reçue de façon, je dirais, un peu amère de la part de l'ensemble des intervenants montréalais, et spécifiquement de la part des médias où Agnès Gruda, par exemple, de La Presse , qualifiait la loi d'«une mauvaise blague du ministre Trudel». Et elle appelle, elle aussi, l'action du ministre «cette discrète tutelle budgétaire», hein: «Cette discrète tutelle budgétaire – qu'elle dit – serait un moindre mal si ses prévisions s'appuyaient sur quelque chose de solide, mais cela se tient uniquement sur du papier.» Alors, c'est ça, M. le Président. Ça, ça en est une.

À un moment donné, on parle de «gel de taxes conditionnel, conditionnel en 1998». «Bourque comble virtuellement le manque à gagner de 125 000 000 $.» «Québec légalise le budget mais ne s'engage pas à effacer ou à éponger un déficit.» Ça, c'est Le Devoir . On parle de «Montréal présumée solvable». Et c'était partout. «Québec impose son aide à Montréal. Plutôt que le pacte fiscal promis, le gouvernement indique au maire comment combler son manque à gagner de 125 000 000 $.»

C'est ça, M. le Président, une tutelle. C'est ça, c'est ce que ça veut dire. Une tutelle, ce que ça veut dire, c'est qu'il y a un autre intervenant qui décide à la place de l'intervenant concerné. C'est ça, la tutelle, M. le Président, et c'est exactement ça qui se passe à Montréal. Encore faut-il, M. le Président, que la tutelle... La tutelle pourrait avoir du sens, d'abord si elle était officialisée, et, deuxièmement, elle pourrait avoir du sens si elle faisait du sens. Mais, comme on parle toujours de chiffres qui n'existent pas et de chiffres fictifs, on se demande si celui qui impose sa tutelle est plus intelligent que celui qui est en tutelle. C'est ça, la grande question que l'on se pose à Montréal.

M. le Président, il y a autre chose aussi. C'est que Québec, dans cette loi-là, et c'est ce qui va nous faire voter contre le projet de loi, je vais vous dire pourquoi, c'est parce que Québec n'endosse pas Montréal. M. le Président, je l'ai dit en conférence de presse, si Québec endossait le 125 000 000 $, si Québec disait à Montréal: Vous ne déposez pas un budget déficitaire, parce que j'endosse le 125 000 000 $... On va aller le chercher, parce que Québec n'a pas l'intention, lui, d'être déficitaire de 125 000 000 $. Ça, ça se comprend. On va aller le chercher. Mais, en attendant, je l'endosse, de telle sorte que, s'il y a un manque à manque à gagner, je vais compenser.

C'était dit d'ailleurs, M. le Président. Le ministre s'était aventuré. À un moment donné dans son communiqué de presse, le ministre disait clairement à quelque part: «La ville de Montréal peut compter sur le support du gouvernement pour lui permettre d'atteindre les objectifs visés. À cet égard, je ferai rapport périodiquement au Conseil des ministres...» Non ce n'est pas là. À un moment donné, le ministre avait dit aussi que, s'il manquait de l'argent, le gouvernement s'engageait à combler la différence. Ça, ça a été dit dans le communiqué de presse du 4 novembre, mais on n'en a plus jamais réentendu parler. Alors, probablement que le ministre, au Conseil des ministres, s'est fait dire qu'il s'était un peu trop avancé.

Alors ce qui fait, M. le Président, que le 125 000 000 $, il est vraiment basé sur des chiffres hypothétiques. C'est ça que ça veut dire, parce que Québec n'endosse pas ce 125 000 000 $. Avec une promesse d'aller le chercher, mais il ne l'endosse pas. À preuve, dans le projet de loi, M. le Président, l'article 2 du projet de loi dit ceci: «Si au cours de l'exercice financier 1998, l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables ne se réalise pas de la manière prévue au budget adopté, en tenant compte de l'article 1 – qui prévoyait là que la ville pouvait soumettre un budget déficitaire – la ville modifie le budget afin que cet équilibre soit réalisé.» Maintenant, cet article-là figure partout dans la charte des villes, excepté que, dans le cas qui nous affère, le cas présent, il a une signification qui a une portée qui est très différente. Pourquoi? Parce qu'il est clairement dit que, si la ville ne réalise pas de la manière prévue le budget adopté, elle devra changer ses chiffres. Bon.

Alors, si la ville ne trouve pas le 125 000 000 $ ou arrive avec un déficit de 30 000 000 $ ou 40 000 000 $, qu'est-ce qui va arriver? C'est que la ville devra, parce qu'elle n'a pas le droit de faire un déficit, remodifier ses chiffres, présenter un budget moins la somme qu'il lui reste à trouver et augmenter les taxes. La seule façon qu'une ville puisse arriver, c'est d'augmenter son foncier, alors d'augmenter les taxes. C'est ça que ça veut dire et c'est pour ça que nous sommes contre le projet de loi, parce que Québec n'endosse pas. Québec ne se met pas la pression nécessaire pour la réalisation de cet objectif commun, c'est-à-dire que la ville de Montréal, notre métropole, se sorte du trou. C'est exactement ça, la raison, M. le Président, pourquoi ce projet de loi là on est si contre. Parce qu'il n'y a aucun «commitment» du gouvernement.

On entend les mots «nous allons cheminer avec vous», «nous allons vous accompagner dans vos négociations», «nous allons être près de vous pour que vous réalisiez vos objectifs», mais quand est-ce que Québec a dit: Écoutez bien, nous autres, on va se commettre avec vous et on va le réaliser cet objectif-là? Jamais, M. le Président. À preuve, pendant huit fois depuis 1994, on a promis un pacte fiscal pour la ville de Montréal. On se souvient, lors de la campagne électorale de 1994, il y a quatre ministres, maintenant ministres, à l'époque, ils n'étaient pas ministres, ils étaient candidats – Mme la ministre du Revenu, le ministre du Travail, le premier ministre d'alors, celui qui était responsable aussi du développement de Montréal avant qu'on ait un ministère de la Métropole au coût de 12 000 000 $ qui n'a pas réalisé grand chose, en tout cas, jusqu'à maintenant – chacun a promis... Il y en a même qui sont allés jusqu'à dire 100 000 000 $ pour Montréal. 100 000 000 $ pour Montréal. On avait même dit: Montréal recevra ce pacte fiscal de 100 000 000 $, et il y aurait même une baisse de taxes. On avait annoncé ça. Regardez dans vos coupures de presse au niveau de 1994, et je dirais juste après avoir gagné l'élection, un mois et demi après, où on parlait de 100 000 000 $ pour Montréal.

(16 h 50)

Ce qui arrive, M. le Président, c'est que, depuis, Montréal a vu – enfin, parce que les ministres se sont succédés, autant le ministre de la Métropole que le ministre des Affaires municipales – ou a reçu de l'aide ponctuelle, mais pas pour rien, M. le Président – on s'entend là, hein – soit à cause de vente d'actifs à rabais. En effet, le gouvernement a acheté, par exemple, le terrain du casino, à rabais, en demandant à la ville de payer pour le pont, le pont reliant la ville au casino, donc payer pour certaines infrastructures. Québec a acheté aussi ce qu'on appelle...

Une voix: L'hippodrome.

Mme Frulla: Non... Oui, l'hippodrome. Bien, on ne parlera pas de l'hippodrome, on va se le garder pour la fin. Il a acheté, pas le Centre des congrès, mais le centre d'affaires, face à La Presse , encore une fois à rabais. Parce que je vous disais, M. le Président, qu'il y a certains terrains, qui ont été vendus pour 100 000 000 $, qui se vendent maintenant pour 10 000 000 $. Alors, c'était une bonne affaire pour Québec. Et la ville, mal prise, devait vendre ses actifs, ne serait-ce que pour boucler son budget. À l'époque, on disait que c'était un raid épouvantable, un vol pour la ville. Pourquoi? Parce qu'elle se débarrassait, forcément pour boucler son budget, d'actifs à bon marché, alors que peut-être dans 10 ans, dans 15 ans, la valeur de ses actifs aurait augmenté.

L'hippodrome, c'est la même affaire. L'hippodrome, c'est la même chose, c'est-à-dire que, là, c'est une société privée qui décide d'acheter les terrains de l'hippodrome, des terrains qui sont dans un lieu extrêmement convoité à Montréal, entre l'aéroport de Montréal et le boulevard Décarie, en ce sens où ça pourrait être un terrain de développement industriel extraordinaire ou même de développement pour la haute technologie. Les terrains ne sont même pas contaminés ou presque. Alors, ce qui fait qu'encore une fois cette société privée, par le biais de Québec, fait une très bonne affaire aux dépens de la ville qui, elle, n'a pas le choix et vend ses terrains. Pourquoi? Pour arriver. Alors, la ville se débarrasse de ses actifs à un prix où on ne vend pas. Nous autres, à Montréal, M. le Président, et je dirais même partout au Québec, on ne les vend pas, nos maisons, si on n'est pas obligés. Pourquoi? Parce qu'on les a payées trop cher, ça fait qu'on ne s'organisera pas pour les vendre aujourd'hui. On va peut-être attendre dans une couple d'années pour rentrer dans notre argent ou peut-être faire un petit profit – il n'y a pas de mal à ça. Excepté que là la ville est obligée de vendre ses terrains qu'elle a payés à fort prix parce qu'elle n'arrive plus. Donc, elle fait une vente de feu. C'était ça, M. le Président, le pacte fiscal de 1994, 1995, 1996.

Oui, il y a une aide. Il y a une aide au niveau de la taxe sur le gaz et l'électricité, le retour sur la taxe, la TGE. Ça, il y a une aide qui a été récurrente non seulement pour Montréal mais pour l'ensemble des villes-centres. Mais, cela dit, par rapport à l'aide, il y a eu du pelletage. Il y a eu du pelletage qui correspond à 80 500 000 $ pour le budget 1998, de pelletage dû à Québec. D'abord, la facture due à la loi n° 173 – on va voter contre, mais qui va probablement passer, on est minoritaires malheureusement – la facture qui correspond à 46 800 000 $ pour la ville de Montréal; ensuite, la réduction de l'aide financière qui correspond à 24 000 000 $ pour Montréal – ça, c'est tout simplement la non-récurrence des aides ponctuelles antérieures – la TVQ, la hausse et l'abolition de ristournes pour 8 000 000 $; la contribution à l'Institut de police de Nicolet, 1 400 000 $, M. le Président – on n'a pas besoin de l'Institut de police de Nicolet, on n'en a pas besoin, on forme nos propres policiers à Montréal, on n'a pas le choix, donc on paie deux fois, nous autres, pour le service spécialisé de police: une fois avec nos taxes, l'ensemble des taxes, comme l'ensemble des Québécois, pour la Sûreté du Québec, puis on paie une autre fois pour notre propre police, puisqu'on est une ville de 800 000 et puis qu'en quelque part on est obligés d'assurer tous les services, ça fait qu'on participe à Carcajou, on participe à tous les services hautement spécialisés de police – et la diminution des subventions pour l'inspection des aliments et l'assainissement de l'air, 300 000 $. Ce qui fait que le pelletage, cette année, c'est 80 500 000 $. Ça, si on n'avait pas ça sur un budget de 125 000 000 $, ça aiderait pas mal. Ça aiderait pas mal. Donc, sur le 125 000 000 $ de déficit de la ville de Montréal, il y a 80 500 000 $ qui est dû à Québec.

Alors, ça aurait été normal, M. le Président, que Québec dise: Le 125 000 000 $, je vais vous l'endosser; je vais vous l'endosser puis, ensemble, on va aller le récupérer; je vais vous l'endosser. Alors, ce n'est pas un cadeau que Québec nous fait, aux Montréalais, au contraire. Je dirais, moi, que c'est plus un remords de conscience. Parce que 80 500 000 $, M. le Président, c'est la faute de Québec. C'est clair, c'est la faute de Québec. Et, M. le Président, en quelque part, ce n'est pas parce que les solutions ne sont pas là. Tout le monde le dit, la solution passe d'abord et avant tout par l'équilibre au niveau de la fiscalité municipale.

Maintenant, on dit: Il va y avoir... Il y a un comité, en effet. Tu sais, il y a une différence de culture, hein, entre un gouvernement du Parti québécois et un gouvernement du Parti libéral outre l'option, là. Ça, c'est une chose qui est fondamentale puis c'est une chose que l'on défend chacun de notre côté. Puis c'est correct aussi, ça fait partie de la démocratie, puis c'est sain, puis c'est bon, excepté qu'il y a une différence de culture, c'est-à-dire que, nous autres, quand il y a des problèmes, on se dit: C'est quoi, les solutions? Bien, on va les trouver le plus rapidement possible. Eux autres, quand ils ont un problème, ils disent: On va faire un comité puis on va attendre le rapport du comité, puis on va analyser le rapport du comité, puis, si l'analyse du rapport du comité n'est pas tout à fait concluante, nous aurons un autre comité pour se pencher sur la solution du comité précédent.

Alors, c'est ce qu'on fait au niveau de la fiscalité municipale. Il y a ce qu'on appelle le rapport D'Amours – on se rappelle de ça – qui est arrivé avec des solutions concluantes au niveau de la fiscalité municipale. Est-ce que c'est tout applicable? Peut-être que oui, peut-être que non, mais il y avait de très bonnes idées là-dedans. Entre autres, on demandait au gouvernement d'agir en citoyen responsable, c'est-à-dire de payer ses «en lieu» de taxes puis d'arrêter de contester dans les municipalités aussi l'évaluation. Parce que c'est ce qu'il fait, le gouvernement, il conteste l'évaluation municipale. «C'est-u» beau, ça? Il agit comme une entreprise privée. Le gouvernement agit comme une entreprise privée au niveau des municipalités, municipalités qui sont ses créatures. Il faut le faire!

Deuxièmement, il y avait le comité aussi, à Montréal, dirigé par Serge Saucier, qui élaborait aussi des pistes de solution. On se rappelle, au Sommet économique, à la question de Gilles Vaillancourt, maire de Laval... On se rappelle, il avait posé une question en disant: Le problème, dans la grande région de Montréal, c'est la disparité au niveau de la fiscalité, le déséquilibre au niveau des municipalités. Et, je me souviens très bien, j'étais assise en arrière de lui, et le ministre des Finances a répondu: Nous allons faire un comité et, dans un an, nous allons avoir la réponse. Bien, un an plus tard, on annonce, dans la loi n° 173, un comité. Un comité qui va se pencher sur l'ensemble de la fiscalité municipale pour 1999. On a eu des propositions aussi de dire: On «peut-u» mettre une date butoir même si vous autres, une date butoir, tu sais, ça ne vous fait pas grand-chose? Mais on «peut-u» en mettre une, ne serait-ce que pour nous autres? Bien, là, quatre dates butoirs plus tard, ça ne vous fait pas grand-chose.

Alors, là, on va s'en mettre une date butoir. Et est-ce qu'on peut dire le 31 mars 1999? Là, j'ai bien hâte de voir, moi, M. le Président, si on va accéder à cette demande-là, hein? J'ai bien hâte de voir. Cela dit, printemps 1999, moi, ça ne me fait rien, mais on risque d'être en élection. Ça fait que la fiscalité municipale, là, on va passer probablement une couple d'élections là-dessus parce que ce n'est pas évident non plus, de fois en fois, d'échéance en échéance, de date butoir en date butoir, qu'on va la régler demain matin, excepté que c'est ça, la clé. C'est ça, la clé, parce le jour où, entre autres, sur l'île de Montréal... Je ne peux pas dire, au niveau de l'ensemble des municipalités du Québec, si la problématique doit être semblable, surtout dans la région de Québec, ma collègue le sait plus que moi, mais je sais que, sur l'île de Montréal et par rapport à la grande région de Montréal, s'il y avait un équilibre fiscal de Montréal par rapport à l'ensemble des îles, je vous le dis, 90 % du problème est réglé. Je vous le dis, M. le Président.

D'ailleurs, la Commission de développement de la métropole devait se pencher là-dessus, excepté que la Commission de développement de la métropole, elle ne s'est pas réunie. C'était bien important d'avoir une Commission de développement de la métropole en juin passé. Moi, j'avais dit même au ministre de la Métropole d'alors: Pourquoi ne pas attendre? Parce qu'il me semble que le projet de loi n° 173, ou enfin la réforme, ce qu'on appelle maintenant la réforme du ministre des Affaires municipales, qui n'est pas une réforme maintenant, qui est juste une facture, mais, à l'époque, qui était une réforme... Ça serait bon, finalement, d'implanter la réforme et de passer une Commission de développement de la métropole parce qu'il me semble que les municipalités concernées seraient plus entichées, si on veut, de participer à cette commission de développement comparativement à maintenant où tout le monde est là sur ses gardes et a peur. Ah non, c'était pressant, il fallait passer ça tout de suite, même que je vous dirais qu'on a passé certains articles, article par article, et ce n'était pas le ministre qui répondait. Lui, il savait qu'il s'en allait, c'était vraiment son sous-ministre, puis on sentait une espèce de je-m'en-foutisme, ce qui fait qu'ils ont voté pour, on a voté contre, et la Commission de développement de la métropole ne siège pas encore. Nous sommes rendus en décembre, et c'était supposé être très urgent.

Alors, voilà, M. le Président. Donc, on revient à la fiscalité, fiscalité qui se doit d'être réglée. Tout est là, on a plein de solutions, excepté, qu'on arrête de se pencher dessus, là, puis qu'on commence à les mettre en application, et je vous dirais que 90 % du problème est réglé.

(17 heures)

Deuxièmement, M. le Président, la réforme. Parce qu'on devait avoir une réforme. Il y avait la colonne de gauche et il y avait la colonne de droite. Ce qu'on fait maintenant, rendu au mois de décembre, évidemment, l'autre date butoir, on a appliqué la colonne de droite, les factures, mais on n'a plus jamais vu la couleur de la colonne de... c'est-à-dire, on a appliqué la colonne de gauche, mais on n'a jamais vu la couleur de la colonne de droite. Et, de l'avis de l'ensemble des municipalités, dont la ville de Montréal, si on avait appliqué la colonne de droite, c'est-à-dire donner aux villes certaines responsabilités, si le gouvernement, en plus, avait pris les siennes, c'est-à-dire partager, si on veut, la facture pour les équipements suprarégionaux, par exemple, et d'autres solutions et pistes de solutions qui étaient dans la colonne de droite, la ville de Montréal n'aurait pas besoin, probablement, d'une loi n° 183, entre autres.

Et je parle pour l'ensemble des villes. J'imagine que certaines villes aussi, ça aurait réglé une partie de leurs problèmes. Mais ça, on n'a plus vu ça, là. Là, on fait appel... C'est-à-dire que ce qu'on sait présentement, c'est qu'on discute d'une facture. On ne discute pas d'une réforme, on discute d'une facture, et cette facture-là a engendré pour la ville de Montréal des coûts de 80 500 000 $, entre autres, mais surtout un 47 000 000 $ directement proportionnel à cette facture-là, M. le Président. Alors, voilà un peu l'ensemble du portrait.

Et ce qui fait que, M. le Président, en plus de demander à la ville de Montréal, par cette loi n° 183, de déposer un budget qui est déficitaire de 125 000 000 $, en plus de ne pas endosser, de ne pas prendre ses responsabilités – c'est ça là, c'est de ça dont on parle – en plus de ne pas endosser le 125 000 000 $, de ne pas se commettre, en plus de ça, ce que l'on fait, c'est qu'on met aussi en péril les budgets de la Communauté urbaine de Montréal. Deux mots là-dessus.

La Communauté urbaine de Montréal, vous savez, c'est la mise en commun de certains services sur l'île de Montréal, et ce partage-là est à peu près unique, parce qu'elle va encore plus loin que la Communauté urbaine de Québec. Évidemment, ce sont des vases communicants. Quand on joue dans le budget de la ville de Montréal, forcément on joue dans le budget de la CUM. Et c'est pour ça ma question aujourd'hui, où le conseil d'administration de la CUM voulait être inclus dans le projet de loi n° 183, parce qu'ils disent: Vous ne pouvez pas toucher à un sans toucher à l'autre.

On a vu cet après-midi le premier ministre faire une annonce et dire que, si les négociations collectives n'aboutissaient pas le 30 janvier prochain, on était pour être appelés en Chambre pour voter une loi spéciale. Bon. M. le Président, c'est parce que, à Montréal, ça ne négocie pas, là. On va voter supposément une loi spéciale, mais c'est tellement large! C'est tellement large! C'est sur la meilleure solution, ça n'excède pas 6 %, puis il faut que ça soit un des deux partis qui demande. Alors, moi, je peux vous dire tout de suite: Voici la situation à Montréal au niveau des négociations, ça ne négocie pas. Ce n'est pas compliqué, là. La ville de Montréal dit que ça ne négocie pas, le syndicat de Montréal dit que ça ne négocie pas. Les pompiers sont dans une impasse. La CUM dit que ça ne négocie pas. Et la STCUM qui, elle, doit supposément fournir 6 000 000 $ pour aider à fermer le budget de la CUM, elle ne négocie plus. Ils ont fait leur effort, ils l'ont fait. La STCUM a coupé 350 employés et a fourni 9 000 000 $. Le président de la STCUM ne veut pas augmenter les tarifs. Pourquoi? Parce qu'ils sont déjà assez élevés puis on veut inciter les gens à prendre le transport en commun, pour tous les avantages qu'on peut y voir.

Alors, là, M. le Président, il n'y a personne à Montréal qui négocie. Personne! Ce qui fait que, malgré toutes les dates butoirs passées, malgré l'autre date butoir du 30 janvier, ça ne négocie pas à Montréal. Alors, espérons, évidemment, que ça va accélérer les choses. Mais il faut dire que les travailleurs disent qu'en 1994 ils ont signé une convention collective – les médiateurs étaient Jean-Roch Boivin, entre autres – et que eux ont fait leur effort et qu'en quelque part ils veulent être partie prenante de ces négociations-là. Et vous savez qu'à Montréal il y a une tradition, peu enviable, je l'avoue, de négociations qui s'étirent, qui prennent un temps fou et qui, en quelque part, finissent toujours par une espèce de bras de fer, si on veut, entre la ville et ses travailleurs. M. le Président, espérons que ça va se régler en deux mois, mais permettez-moi, par tradition, d'en douter. Alors, c'est sûr qu'on va revenir ici à un moment donné, peut-être, et ce n'est pas souhaitable – je dis bien: Ce n'est pas souhaitable – mais je pense bien que la ville de Montréal risque de venir et de demander de l'aide. À moins, M. le Président, qu'on n'accélère les négociations par un moyen quelconque. Mais, au moment où on se parle, il n'y a aucune négociation qui se fait sur l'île de Montréal.

Alors, M. le Président, en terminant, on est contre le projet de loi pour une raison: parce que Montréal, la métropole, a vraiment et véritablement besoin d'aide. La métropole n'a pas besoin de maquillage – ça fait assez longtemps qu'on le dit. La métropole, M. le Président, qui représente 800 000 habitants et qui représente presque un seizième de la population du Québec, et qui, avec l'ensemble des autres villes de l'île, représente 25 % du Québec, qui contribue amplement au développement économique du Québec, la ville de Montréal a besoin d'aide. C'est un cri d'alarme à l'ensemble du Québec et à l'ensemble des municipalités aussi du Québec pour qu'on se solidarise pour Montréal. Mais se solidariser ne veut pas dire, M. le Président, de permettre... pas de permettre, je m'excuse là, d'obliger la ville de Montréal à déposer un budget avec un manque à gagner de 125 000 000 $. Ça ne veut pas dire non plus, M. le Président, que le gouvernement doit se soustraire de ses obligations, c'est-à-dire d'endosser le 125 000 000 $.

Ce que l'on aurait aimé à Montréal, ce que l'ensemble des Montréalais auraient aimé, ce sont des gestes proactifs du gouvernement, que celui-ci remplisse tout simplement ses promesses: c'est-à-dire qu'il livre des solutions durables, dont un pacte fiscal à partir de 1994; évidemment, qu'il donne les outils nécessaires à la ville pour négocier de façon saine avec ses employés, M. le Président, et, en dernier lieu, pour pas que trois ans plus tard on se retrouve avec une ville qui est en pire état qu'elle ne l'était quand le gouvernement est arrivé au pouvoir. Merci, M. le Président, j'ai terminé.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Nous cédons maintenant la parole à la critique officielle de l'opposition en matière municipale et députée de Jean-Talon. Alors, Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Je vous remercie, M. le Président. Si on est ici aujourd'hui pour discuter du projet de loi n° 183, projet de loi concernant le budget de la ville de Montréal, c'est qu'on est obligé de constater que le gouvernement est responsable de la situation qui prévaut actuellement dans l'ensemble des municipalités du Québec et plus particulièrement dans la ville de Montréal. C'est une situation que le gouvernement a lui-même créée et c'est une situation que le gouvernement a lui-même laissé pourrir.

Vous me permettrez, M. le Président, de faire un bref retour en arrière et de vous rappeler qu'à partir du mois de mars dernier, donc il y a huit mois, le ministre des Finances a indiqué dans son budget qu'il demanderait aux municipalités un effort de 500 000 000 $, contribution, disait-il, à l'assainissement des finances publiques, alors qu'il s'était engagé six mois auparavant, lors d'un consensus qui avait été établi par les Unions municipales, les intervenants sociopolitiques et économiques, que, oui, on acquiesçait à la réduction du déficit zéro avant l'an 2000, mais que ça devra se faire sans hausse de taxes pour les contribuables... Le ministre des Finances, dans le budget du mois de mars dernier, en annonçant le transfert de 500 000 000 $, disait ceci: «Nous entendons procéder à un réaménagement de la fiscalité locale et confier aux instances locales des responsabilités accrues.» M. le Président, j'invite le ministre des Affaires municipales, le premier ministre et tous les collègues à relire la page 38 du budget qui a été déposé en mars dernier.

(17 h 10)

On se rappellera toutes les péripéties, le cafouillage, l'improvisation de ce gouvernement pour tenter de faire croire qu'il y aurait un pacte fiscal, un pacte municipal, la réforme du ministre des Affaires municipales, le transfert d'une facture concernant le transport scolaire, peut-être la gestion à partir du 1er juillet 1998, pour se ramasser, le 23 octobre dernier, avec une facture, M. le Président, de l'ordre de 375 000 000 $. Et j'aurai l'occasion avec mes collègues, en commission parlementaire, de faire valoir tous les arguments sur ce dossier-là à partir de lundi prochain. Donc, je résume très succinctement cette partie du dossier.

À la mi-novembre, le gouvernement du Québec, pour respecter – et «respecter», je me sens obligée de dire ce mot-là ici, M. le Président, parce que j'aurais le goût d'en dire un autre – une entente avec l'Union des municipalités du Québec, a déposé le projet de loi n° 173 qui crée un fonds spécial pour le financement des activités locales; c'est la contribution, dit le gouvernement, à l'assainissement des finances publiques. Pour arriver à payer la facture gouvernementale, les municipalités doivent réduire de 6 % leur masse salariale et doivent aussi, avec la facture... Je reprends. La facture comprend 5,8 %, des dépenses compressibles, et le gouvernement a fortement suggéré aux municipalités de réduire leur masse salariale de 6 % par souci d'équité avec les employés de la fonction publique et d'autres employés.

Tout ça pour vous dire, M. le Président, que la ville de Montréal a reçu une facture qui est très élevée. Elle est peut-être un peu moins élevée par rapport à ce que, toutes proportions gardées, auraient reçu l'ensemble des municipalités du Québec, parce que le gouvernement a choisi... Et même si je ne suis pas d'accord avec le pelletage de 375 000 000 $, je suis quand même d'accord qu'on reconnaisse nos villes-centres comme étant des villes qui ont à assumer des dépenses qui, normalement, ne devraient pas l'être par l'ensemble de leurs citoyens. Mais on revient à la facture de Montréal. Montréal doit payer 47 000 000 $ comme participation à l'assainissement des finances publiques, mais, là aussi, elle doit aussi contribuer, par le biais de sa quote-part à la Communauté urbaine, à la réduction de la masse salariale, et c'est un autre 30 000 000 $. Ça fait donc 75 000 000 $ et le manque à gagner pour réduire ses dépenses est de l'ordre de 53 000 000 $, ce qui fait un total de 125 000 000 $.

Ce n'est pas parce que la ville de Montréal a mal géré. Ce n'est pas parce que la ville de Montréal n'a pas fait les efforts pour réduire les effectifs et rationaliser les dépenses. Ce n'est pas ça. C'est qu'on nous dit... J'ai eu le plaisir de rencontrer les gens de Montréal, hier, qui m'ont expliqué – d'ailleurs, ma collègue en a fait la démonstration tout à l'heure – qui nous ont expliqué les problèmes structurels à Montréal, et il faut trouver des moyens pour les régler. Mais le moyen que le gouvernement a trouvé pour les régler, c'est de déposer un projet de loi dans lequel la ville de Montréal va pouvoir adopter – d'abord déposer, mais ensuite adopter – un budget dans lequel le 125 000 000 $ de manque à gagner a disparu; il n'est pas là.

Ça m'amène à vous dire, M. le Président, qu'on s'est objectés à cette façon de faire – on s'y objecte toujours – parce que les municipalités, en réalité, ne sont pas supposées faire de déficit. Ça, c'est dans la loi depuis assez longtemps. Et j'aimerais, pour éclairer nos collègues et vous-même, dont je sais que vous avez déjà porté ce chapeau-là, je sais que vous avez mis tous les efforts qu'il fallait lorsque vous prépariez vos budgets, vous savez très bien ce que c'est... Mais est-ce que vous savez, M. le Président, que j'ai fait une recherche? J'ai tenté de savoir depuis combien d'années les municipalités ne faisaient pas de déficit, les municipalités au Québec, et je suis remontée jusqu'à 1916. En 1916, on retrouve dans un document qui s'appelait la Vérification des comptes de la corporation municipale , à l'article 645, et je le cite: «Si le rapport du vérificateur établit qu'il y a un déficit dans ses comptes, le secrétaire-trésorier doit acquitter dans les 15 jours qui suivent la signification de la copie de la résolution mentionnée le montant dont il a été trouvé reliquataire.»

On avance dans le temps, pour arriver en 1968, dans la Loi sur les cités et villes. On retrouve l'article 474 qui dit: «Le conseil doit, durant la période allant du 15 novembre au 31 décembre, préparer et adopter un budget de la municipalité pour le prochain exercice financier et y prévoir des revenus au moins égaux aux dépenses qui y figurent. Il faudra attendre à 1977 pour qu'on retrouve dans le Code municipal la même disposition. Et c'est intéressant, M. le Président, quand on lit les débats de l'Assemblée nationale du 20 octobre 1977, de retrouver ce que j'y ai trouvé. Je lis: «Nous croyons que le temps est mûr pour l'incorporation au Code municipal d'un article analogue à l'article 474 de la loi des cités et villes. Cet article oblige le conseil à préparer et adopter son budget entre le 15 novembre et le 30 décembre pour l'exercice financier qui suit, l'oblige à prévoir des revenus au moins égaux aux dépenses et de transmettre une copie de ce budget au ministre des Affaires municipales.»

M. Gautrin: J'ai une question de règlement, M. le Président.

Mme Delisle: Bien, voyons...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le député de Verdun.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que les commissions ne siègent plus et que nous n'avons plus quorum.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vous demanderais de vérifier si, effectivement, des commissions ont cessé. Vous avez vérifié?

Appelez les députés, s'il vous plaît. Je pense que les commissions ont toutes cessé leur travail. Merci beaucoup. Merci d'être parmi nous. Alors, je vous demanderais, Mme la députée de Jean-Talon, de bien vouloir poursuivre tout en s'assurant, bien entendu, que le quorum est de 21. Mme la députée, s'il vous plaît.

Mme Delisle: M. le Président, ce que je souhaitais faire, avant notre interruption, c'était de vous démontrer que ça fait plus de 80 ans que, au Québec, les conseils municipaux, les maires, les trésoriers, les secrétaires-trésoriers préparent les budgets en fonction de critères et d'encadrements qui sont très stricts. Même si, en 1916, ce n'était pas une disposition identique à celle qu'on retrouve aujourd'hui dans le Code municipal ou dans la Loi sur les cités et villes, il n'en demeure pas moins que les municipalités étaient astreintes, par le biais de leurs conseils municipaux, à équilibrer leur budget. On ne retrouve pas de précédent où les municipalités, à moins de faire un déficit... Mais les municipalités sont habituées, lorsqu'elles préparent leur budget, à y inclure les données réelles. Pas des données virtuelles, des données réelles. C'est donc ancré dans nos coutumes, et je ne pense pas que les citoyens et les citoyennes du Québec s'attendent à ce que leurs élus n'inscrivent pas ces données réelles dans leur budget. Les élus s'attendent, lorsque le maire dépose et adopte son budget, lorsque le conseil municipal l'adopte, à y retrouver des chiffres qui sont exacts. Ça ne veut pas dire qu'il n'y aura pas, en cours de route, certaines fluctuations ou certains changements dans le budget, c'est possible qu'il y en ait en cours d'année, mais il faut essayer de prévoir le plus près possible les dépenses et les revenus.

M. le Président, je vous annonce que le gouvernement vient de changer les règles du jeu par ce projet de loi là, par le projet de loi n° 173, mais aussi par l'annonce qu'ont faite aujourd'hui le premier ministre et le ministre des Affaires municipales. Ils l'ont fait, comme je l'ai dit, au moment de la présentation du projet de loi n° 183 en autorisant Montréal à déposer et à adopter un budget dont les données ne sont pas les bonnes données et ils l'ont fait en acceptant de déposer le projet de loi n° 173 qui, lui, donne l'autorisation – croit-il, le ministre – de pouvoir taxer indirectement les citoyens. Mais ce qui s'est passé aujourd'hui est totalement inacceptable. On a assisté aujourd'hui à un premier ministre et un ministre des Affaires municipales qui bafouent les règles, qui bafouent les lois. Et je m'explique.

Une voix: C'est grave.

(17 h 20)

Mme Delisle: Oui, c'est grave, mais ça n'a pas l'air de déranger grand monde de l'autre côté. Ça, c'est clair et net.

Des voix: ...

Mme Delisle: M. le Président, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la députée de Jean-Talon, je vous rappelle le règlement n° 35, imputer des motifs...

Mme Delisle: M. le Président, je comprends vos commentaires.

En annonçant aujourd'hui aux citoyens du Québec que leurs élus pourraient inscrire à leur budget des données qui ne sont pas des données réelles, et qu'elles pourraient le faire, ces municipalités-là, en attendant une loi spéciale, c'est totalement inacceptable. C'est totalement inacceptable, et je ne comprends pas pourquoi tous les députés sont complices d'une telle façon de faire, pourquoi on est...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, ça va faire, là. Nous traiter de complices de quelque chose, il y a quelque chose qui ne va pas, M. le Président. En vertu du règlement, elle n'a pas le droit de m'imputer quelque motif que ce soit, ni m'insulter.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader du gouvernement... M. le député de Westmount– Saint-Louis, sur le point de règlement.

M. Chagnon: Oui, M. le Président, il n'y a rien d'antiparlementaire dans les propos de ma collègue de Jean-Talon. Le terme «complice» peut fort bien être cité à l'Assemblée nationale, il ne s'applique pas individuellement au député de Laviolette. Il s'applique généralement dans une situation qui est bien décrite par la députée de Jean-Talon.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, le député n'écoutait vraiment pas. Elle a dit: «Tous les députés de l'autre côté sont complices de», et ça, c'est une accusation qui n'a pas droit en cette Chambre et c'est antiparlementaire, M. le Président. J'aimerais qu'elle parle comme du monde.

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous le permettez... Madame.

Mme Frulla: ...encore une fois, de collégialité, de collègue, de complicité, je pense qu'il n'y a rien de mal à ça, et je vous demanderais, M. le Président, de permettre à ma collègue de continuer son intéressant exposé. Si ça fait mal, c'est autre chose.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, s'il vous plaît! Mme la députée de Jean-Talon, je vous rappelle qu'il vous reste actuellement cinq minutes à votre exposé et je vous prierais de bien continuer, comme vous le faites habituellement, tout en respectant notre règlement.

Mme Delisle: M. le Président, je vais vous illustrer par deux exemples ce que je tenais à expliquer tout à l'heure. Lorsque les municipalités déposent leur budget et l'adoptent, il y a un trésorier qui, lui, doit signer un certificat comme quoi les données qui sont indiquées dans le budget sont réelles. Ça, ça vaut pour toutes les municipalités au Québec, que ce soit Montréal, que ce soient toutes les autres municipalités au Québec. Aujourd'hui, devant nous, on a un projet de loi qui autorise le trésorier de la ville de Montréal, et je vais vous lire l'article 1, troisième alinéa: «Les règlements et résolutions nécessaires à l'imposition des taxes, à la fixation des tarifs et à la perception des revenus ainsi que les certificats que le directeur des finances de la ville de Montréal délivre relativement à ce budget en tenant compte du présent article sont valablement adoptés et délivrés.» Ça, en bon français, ça veut dire que le trésorier ou le directeur des finances doit apposer sa signature sur un document qui dit que les chiffres qui sont là-dedans sont bons. Aujourd'hui, le premier ministre, accompagné de son ministre des Affaires municipales, du revers de la main a annoncé à tous les élus municipaux qu'ils pouvaient faire la même chose, qu'ils pouvaient inscrire dans leur budget la réduction de la masse salariale de 6 % alors qu'elle n'est pas là. Je vous concède qu'il y a des municipalités qui ont réglé, mais l'ensemble des municipalités ne l'a pas fait. Or, quand je parle de bafouer les règles, de bafouer les lois, de bafouer le système, je pense que, quand je parle d'être complices de ça... Vous allez voter pour cet article-là; ça, ça s'appelle la complicité. Et aujourd'hui...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, sur un point de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez demandé à la députée de s'en tenir à la formule habituelle qu'elle a d'utiliser des mots et de ne pas nous accuser de quoi que ce soit et elle vient de refaire à même son discours la même réprimande, et je crois, M. le Président, que c'est contraire à notre règlement. J'aimerais que vous lui disiez tout doucement qu'elle peut continuer son discours. mais qu'elle évite de faire les choses qu'elle fait à ce moment-ci

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis

M. Chagnon: M. le Président, la complicité encore une fois dont parle la députée de Jean-Talon devrait permettre au député de Laviolette... S'il le faut, on lui redonnera un autre dictionnaire encore pour qu'il puisse comprendre que cela ne fait pas partie des règles et des mots qui sont, dans le sens employé par la députée de Jean-Talon, antiparlementaires.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: La suffisance du député de Westmount–Saint-Louis est pour moi... comme on dit toujours, ça dépasse...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader. M. le leader, je pense que... M. le leader, s'il vous plaît. M. le leader, s'il vous plaît. Alors, je comprends que nous sommes en train... M. le leader. M. le leader. M. le leader, s'il vous plaît.

Je comprends que nous sommes un vendredi, que nous avons passé une semaine lourde, fatigante. Si on calcule la somme de travail que, tous et chacun, vous mettez à servir vos commettants et commettantes, alors c'est tout à fait normal que les esprits s'échauffent et qu'on en vienne à exprimer des propos qui nous font mal mais que nous allons regretter éventuellement.

Alors, Mme la députée de Jean-Talon, puisqu'il vous reste environ une minute, une minute et demie, je vous inviterais à conclure, s'il vous plaît.

Mme Delisle: M. le Président, ce que le gouvernement fait aujourd'hui, il a créé un dangereux précédent. Il incite les élus municipaux à ne pas respecter la stricte ligne de conduite qu'on connaît depuis 80 ans. Il invite les élus municipaux à faire ce que le gouvernement a choisi de faire, par le biais d'une législation, à inscrire dans leurs budgets des chiffres qui n'existent pas. C'est totalement inacceptable et je ne comprends pas, je le répète, pourquoi les députés du côté ministériel ne comprennent pas qu'on est en train d'ouvrir une porte, de créer un précédent dans les municipalités. On est en train de donner le message suivant: Vous pouvez inscrire ce que vous voulez, il n'y a pas de problème, nous vous avons donné l'autorisation aujourd'hui de le faire. C'est ça qui arrive ici aujourd'hui, M. le Président.

Je sais que mon temps est terminé. Je veux juste vous dire, M. le Président... Je demanderais au ministre des Affaires municipales pourquoi ce projet de loi là tient toujours, s'il vient de donner aujourd'hui l'autorisation à l'ensemble des municipalités du Québec de faire exactement ce qu'on retrouve dans ce projet de loi là alors que ces municipalités n'ont pas de projet de loi pour faire la même chose?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Jean-Talon. Nous cédons maintenant la parole... M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: M. le Président, je ne suis pas le spécialiste de la procédure parlementaire, mais, puisque la députée pose une question, je devrais avoir l'occasion de lui répondre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous pouvez vous prévaloir de l'article 213.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Non, non. Non, non, pas sur l'adoption d'un principe. Si vous permettez, M. le député de Westmount–Saint-Louis, j'ai tout simplement une question à poser au ministre des Affaires municipales: Est-ce que vous voulez vous prévaloir de l'article 213 auprès de la...

M. Chagnon: Mais, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis, si vous permettez, M. le ministre des Affaires municipales se lève debout, et actuellement je ne lui concède pas la réplique. Il aura la réplique lorsque tous les députés... Par contre, n'importe qui en cette enceinte peut se lever debout et vouloir poser une question à celle ou à celui qui vient de terminer son allocution. Est-ce cela que vous désirez, M. le ministre?

M. Trudel: M. le Président, j'en connais quand même un bout de la procédure. Alors, en vertu de l'article 213, est-ce que je peux poser une question à la députée de Jean-Talon?

(17 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la députée de Jean-Talon, est-ce que vous désirez répondre à une question du ministre? Non. Alors, comme la députée de Jean-Talon... Bon. La soirée va être longue.

Alors, à ce stade-ci, est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur l'adoption du principe? Alors, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Vous avez un temps de parole de 20 minutes.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Je remarque le silence de nos collègues du gouvernement, à part le ministre des Affaires municipales qui, lui, voudrait poser des questions. Je ne vois pas pourquoi il voudrait poser des questions à ce temps-ci de nos travaux parlementaires, M. le Président. Pendant la période des questions, quand on lui pose des questions, il ne trouve pas les réponses. Alors, il n'y a pas de raison de vouloir commencer à poser des questions et de faire fonctionner le monde à l'envers. Faire fonctionner le monde à l'envers, M. le Président, ce n'est pas la moindre des choses, ce n'est pas la chose qui peut faire en sorte de faire cesser ce gouvernement, parce qu'il fonctionne à l'envers dans ce dossier-là comme dans le reste. M. le Président, il fonctionne à l'envers, parce que, en principe, on a un projet de loi qui cherche à modifier le budget de la ville de Montréal... Quand on a un ministère de la Métropole, il n'y a personne qui a pensé que ce devrait être le ministère de la Métropole qui présente le projet de loi. Bien non. Le Québec investit, nous investissons, comme contribuables, 12 000 000 $ dans un budget de la métropole, pas assez fins pour faire un projet de loi qui viendrait affecter, évidemment, qui vient toucher le budget de la ville de Montréal. C'est assez étonnant que ce ne soit pas le ministère de la Métropole qui vienne toucher à cet objet, puisque le ministère de la Métropole a été créé pour aider la métropole, semble-t-il. Or, c'est tout le monde qui fait la sauce, sauf le ministre de la Métropole, semble-t-il.

M. le Président, le ministre des Affaires municipales présente un projet de loi venant modifier le budget de la ville de Montréal. C'est assez étonnant que le ministre de la Métropole cherche à modifier le budget de la ville de Montréal de la façon dont il nous le présente. Depuis trois ans et demi, l'équipe d'en face qui s'appelait à l'époque... qui nous parlait de l'autre façon de gouverner, disait, en 1994: Nous allons présenter un pacte fiscal à Montréal. Eh bien, de ces pactes fiscaux, Montréal n'en a jamais rien vu, n'a jamais vu l'ombre de la queue du quart de la moitié d'un pacte fiscal. On a passé des ministres des Affaires municipales les uns après les autres, on a passé deux premiers ministres les uns après les autres, ils ont tous promis à Montréal un pacte fiscal. À tous les trois mois, on sort le pacte fiscal, puis, à tous les trois mois, le maire de Montréal puis les conseillers de Montréal attendent le pacte fiscal. À tous les trois mois, on se fait dire: Ça s'en vient, attendez encore un peu. Soyez patients, le pacte fiscal s'en vient. Nenni, il n'y en a jamais eu, de pacte fiscal.

Puis l'aide à Montréal, c'est pour quand? Toujours bien pas par le projet de loi n° 183 qui vient faire en sorte de permettre à la ville de Montréal de se créer un budget virtuel. Un budget virtuel qui était... D'abord, vous le savez, M. le Président, vous êtes député de Saint-Maurice, à Shawinigan, toutes les autres villes de votre comté, elles n'ont pas le droit de faire un déficit. Vous savez ça. Elles n'ont pas le droit, nos lois empêchent les villes de faire un déficit.

Le projet de loi que le ministre des Affaires municipales nous dépose vient dire ceci, vient permettre à la ville de Montréal de pouvoir faire un déficit de 125 000 000 $. Et il lui dit: Tu vas avoir le droit de faire un déficit de 125 000 000 $, mais tu vas aller te reprendre, tu vas aller te récupérer dans ton année financière tant du côté de tes masses salariales de tes employés qu'à gauche et à droite, tu iras te rechercher ton 125 000 000 $ pendant l'année. Ce n'est pas une façon de budgéter, ça, M. le Président. Ça n'a aucun sens. Et le projet de loi, comme tel, nous fait fonctionner dans la budgétisation virtuelle. C'est de la comptabilité créative, M. le Président. Mais on ne peut pas laisser planer le doute non seulement chez les contribuables individuels ou commerciaux de Montréal... C'est un doute majeur qui plane sur eux avec ce projet de loi parce qu'ils ne savent pas si, au mois de janvier, février, mars ou éventuellement dans notre prochaine session, une autre législation pourrait faire en sorte de venir corriger celle-là.

Pas plus tard qu'aujourd'hui le premier ministre et le ministre des Affaires municipales se targuaient, amenaient une autre échéance au dossier des négociations avec les cols bleus puis les cols blancs des villes et les cadres des villes. Une autre échéance. Ils ont dit: Bon, bien, s'ils ne se sont pas entendus le 30 janvier, on va déposer une loi spéciale, on va convoquer le Parlement pour une loi spéciale. Mais, si ce monde-là était sérieux pour cinq cennes, il déposerait tout de suite son projet de loi. Les autorités municipales non seulement de Montréal, mais d'à travers tout le Québec sauraient à quoi s'attendre, elles sauraient à quoi s'attendre avec un projet de loi qui viendrait spécifiquement dire: Si le 30 janvier, les négociations entre les villes et leurs syndicats ne sont pas rendues à tel niveau ou à tel point, ou ne sont pas complétées, le gouvernement entend décréter ce qui suit.

Si le ministère des Affaires municipales et le bureau du premier ministre étaient un tant soit peu sérieux, ils auraient déposé leur projet de loi, on saurait de quoi on parle plutôt que de faire des espèces de menaces, sortir l'épouvantail encore une fois, comme on a promis autant de fois le pacte fiscal pour Montréal puis qu'il n'est jamais arrivé. On ressort l'épouvantail en disant: Bien, si vous ne vous entendez pas le 30 janvier, on va reconvoquer la Chambre puis on fera une loi spéciale. Il n'y a pas beaucoup de monde qui va prendre ni le premier ministre ni le gouvernement au sérieux dans ce dossier-là.

Après avoir, dans le dossier des négociations avec les secteurs public et parapublic, changé à peu près 14 fois de date butoir, la repoussant éternellement, c'est la même chose dans ce dossier-là, M. le Président. Dans le dossier des négociations avec le secteur des municipalités, le premier ministre avait dit: Date butoir, le 25 novembre; si l'UMQ et les membres de l'Union des municipalités du Québec et les membres de l'Union des municipalités régionales de comté ne se sont pas entendus avec leurs employés, nous aurons une loi. Le 25 novembre est passé depuis une semaine et demie, M. le Président, puis il n'y a pas eu une remarque, pas une déclaration de la part ni du ministre des Affaires municipales ni du premier ministre à l'effet qu'il y aurait quelque chose d'autre qui s'en venait, que le gouvernement était sérieux quand il avait émis sa date butoir du 25 novembre.

On se retrouve aujourd'hui, 5 décembre, pas plus avancés, Gros-Jean comme devant, en train d'étudier un projet de loi qui va venir modifier le budget que la ville de Montréal pourrait adopter, lui permettant d'avoir un déficit de 125 000 000 $. Sous prétexte que, éventuellement, si les négociations avec les cols bleus puis avec les cols blancs de la ville de Montréal, si les négociations avec les chauffeurs d'autobus de la STCUM ou encore avec les policiers de la SPCUM ne fonctionnaient pas, on reviendrait ici, pour Montréal ou pour n'importe où ailleurs au Québec, on reviendrait ici, en session spéciale, le 30 janvier, pour étudier un projet de loi spécial. Ça n'a pas de sens, M. le Président.

Si ce gouvernement-là, encore une fois, était le moindrement sérieux, il le déposerait, son projet de loi en matière de relations de travail. Qu'il le mette sur la table, que les autorités municipales de Montréal, que les autorités municipales de l'île de Montréal, que les autorités municipales de toutes les autres municipalités en dehors de l'île de Montréal sachent à quoi s'attendre. Non pas de vagues promesses. Des promesses, ils en ont eu depuis trois ans et demi par le gouvernement, et on les attend encore. Comme les Montréalais attendent un pacte fiscal. Les Montréalais attendent un pacte fiscal depuis trois ans et demi. Assez patients, merci.

On leur promet quoi? On leur promet: Ah bien! comme disait le ministre des Affaires municipales, le Québec ne commencera pas à participer financièrement pour aider la ville de Montréal. Ce n'est pas assez important, ça, la ville de Montréal. Un sixième de la population du Québec, ce n'est pas assez important. Mais une chose est certaine, puis le gouvernement du Québec va permettre à la ville de Montréal de s'inventer un budget repoussant à l'avenir, repoussant dans le temps son niveau de déficit qu'il aurait si on ne lui permettait pas de faire un déficit.

En fait, M. le Président, le budget que fera la ville de Montréal, c'est un budget dans lequel on devrait retrouver des soi-disant, selon le gouvernement, économies de 53 000 000 $ sur les masses salariales. Mais les premiers qui ont forcé le gouvernement de la ville de Montréal ou les autorités de la ville de Montréal à avoir un règlement avec les cols bleus, ça a été ce gouvernement-là. Ils ont forcé un règlement entre les autorités municipales de Montréal puis les cols bleus. Ils l'ont forcé, le règlement. Ils ont même payé pour, ils ont même donné 5 000 000 $ à la ville de Montréal. J'avais posé une question là-dessus en Chambre, à la période de questions, puis le premier ministre avait été bien obligé de dire: Bien oui, c'est vrai, on a fait ça.

Donner 5 000 000 $ de plus à la ville de Montréal une fois pour permettre des transferts, des départs assistés chez les cols bleus de façon à ne pas changer le plancher d'emploi dans le dossier des cols bleus de Montréal. Mais c'est assez curieux de voir le même gouvernement se relever debout quelques mois plus tard puis dire: Bien, vous savez, là, vous avez négocié avec vos cols bleus et avec vos cols blancs, il faudrait que vous retourniez négocier des contrats qui viennent juste d'être signés, l'encre n'est pas sèche, puis demandez-leur de diminuer de 6 % leur niveau de masse salariale, et à vos cols bleus, et à vos cols blancs, puis à vos cadres. Ça ne fait pas sérieux, sérieux. Ça ne fait pas sérieux, M. le Président. On est obligé de dire que ça ne fait pas sérieux.

Non seulement le projet de loi vient modifier ou vient permettre à la ville de Montréal de se faire un budget... La députée de Marguerite-Bourgeoys appelait ça un budget du troisième type, à la période de questions, ce midi. C'est tout à fait juste. Un budget carrément virtuel. Non seulement il lui permet de se faire un budget virtuel, comme on pourrait faire des bulles puis faire des budgets, un pro forma sur n'importe quoi, mais, en plus de ça, le projet de loi ne tient pas compte d'autres réalités montréalaises comme le financement de la CUM. Les quote-parts de chacune des parties à la CUM, qui va les fournir? Qui va les payer? Qui a prévu dans ce projet de loi le financement de la CUM? Il va manquer combien? 30 000 000 $? 30 000 000 $, le financement de la CUM. Un détail! Le ministre des Affaires municipales l'avait oublié, semble-t-il. Un détail, 30 000 000 $ au financement de la CUM!

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Westmount–Saint-Louis, vous savez très bien que, puis j'en ai parlé tout à l'heure, 35 s'applique dans nos débats.

M. Chagnon: Oui. C'est quoi, le problème? Expliquez-moi ça.

Le Vice-Président (M. Pinard): Ça va être très facile de vous l'expliquer. Vous venez de laisser entendre que le ministre avait oublié des choses. Vous lancez ça, alors vous créez un problème à l'intérieur de cette enceinte. Respectez 35 et continuez votre allocution. Ça va très bien pour l'instant.

M. Chagnon: M. le Président, je répète que le ministre avait oublié le financement de la CUM. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est l'exécutif de la Communauté urbaine de Montréal qui a envoyé un télégramme, qui a envoyé une résolution en lui disant: Le ministre, tu nous a oubliés dans ton organisation. Quand même il dirait: Non, je ne les ai pas oubliés! Moi, je veux bien que le ministre prétende qu'il ne les a pas oubliés, mais Mme Danyluk, les membres de l'exécutif de la CUM, qui sont aussi des maires des autres municipalités de Montréal, prétendent, eux, qu'ils ont été oubliés par le ministre des Affaires municipales dans le financement de la CUM. Un gros oubli, 30 000 000 $.

Tout ça pour nous amener, M. le Président, à regarder encore une fois cette loi modifiant le budget de la ville de Montréal. Mais qui est responsable de cette confusion? Qui est responsable de ce problème dans lequel le gouvernement cherche à repousser vers l'avant la solution? Eh bien, enfin, le ministre des Affaires municipales vient de le reconnaître, c'est le gouvernement. Je suis content de l'entendre. Je suis heureux, c'est la première fois que je l'entends le signaler. Puis, venant de la bouche du ministre, ça prend autant de crédibilité puis ça prend un courage pour l'admettre. Si le ministère des Affaires municipales puis si le gouvernement avaient effectivement réglé le problème... Si le gouvernement avait réglé le problème de sa promesse électorale, s'il avait été responsable et s'il avait réglé avec Montréal ce pacte fiscal qu'il avait promis en 1994, effectivement le problème ne se poserait pas. Alors, le ministre des Affaires municipales a raison de dire que la faute de cette désorganisation est causée par le gouvernement.

M. le Président, ces initiatives budgétaires qui sont prises après que légalement la ville est obligée de transmettre son budget et de faire son budget ne correspondent pas à des opérations qui sont bien, bien courantes dans notre système. Je préfère d'un grand bout les villes qui ont dit: Nous avons un code, le code des cités et villes, qui nous amène des obligations, non seulement des obligations, mais nous amène, entre autres, parmi nos obligations, l'obligation de faire un budget, de le déposer et de le faire adopter avant la fin novembre. Les villes qui ont répondu à ces obligations-là méritent nos salutations, puis nos encouragements, puis nos chaleureuses félicitations. M. le Président, les villes qui ne l'ont pas fait devraient mériter de la part du ministre des Affaires municipales d'être sanctionnées.

Mais là on a un système à deux vitesses. On a le système où, si tu te mets dans l'illégalité, bien, si tu es gros, on va finir par te reconnaître puis on va finir par changer la loi pour te permettre de redevenir dans la légalité; si tu es pour faire un déficit puis que t'as pas le droit d'en faire un, on va changer la loi pour te permettre d'en faire un. Finalement, nos institutions puis notre code des cités et villes servent à quoi, si ce n'est que de se laisser enfreindre, pour ne pas dire autre chose, et éventuellement se faire corriger par des lois dites à caractère spécial. Le législateur n'a pas beaucoup intérêt à fonctionner comme ça parce qu'il envoie un message, d'abord au monde municipal, que d'être placé en dehors de la zone du droit, en dehors de la zone légale n'a pas beaucoup d'effet et n'a pas beaucoup d'importance parce que, si tu te places en dehors du monde légal, en dehors de ton cadre légal, il n'y aura pas de sanction, on va changer la loi pour te permettre de continuer à fonctionner. Et ça, M. le Président, c'est un très mauvais signal à envoyer aux institutions qui relèvent du gouvernement, de ce gouvernement-ci, du gouvernement du Québec.

Et c'est des solutions, M. le Président, qui sont à courte vue puis à court terme, et je m'en voudrais de ne pas avoir parlé sur un projet de loi qui risque d'avoir des incidences financières extrêmement importantes pour les Montréalaises et les Montréalais, à qui on avait promis d'aider à diminuer le niveau de taxation, à qui on avait promis d'aider au financement de certains des centres dits régionaux de services qu'on retrouve à Montréal. Le gouvernement du Québec ne l'a pas fait, le gouvernement du Québec n'a pas, par exemple, amélioré ses «en lieu» de taxes, a même fait le contraire, a diminué ses «en lieu» de taxes, a diminué le financement. Puis aujourd'hui qu'est-ce que Montréal peut attendre et s'attendre de recevoir de Québec, sinon un projet de loi qui va lui permettre de se faire un budget virtuel, peu crédible, que les gens n'accepteront pas, mais qui risque à moyen terme de faire en sorte d'augmenter le niveau de taxation dans une ville qui est déjà lourdement taxée, l'une des plus lourdement taxées en Amérique du Nord? M. le Président, c'est ce qui fait que nous allons nous opposer avec véhémence à ce projet de loi. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Nous allons maintenant céder la parole au député de Roberval. M. le député.


M. Benoît Laprise

M. Laprise: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que je vais prendre seulement quelques minutes avant le souper. Ça va permettre de dégager un peu l'atmosphère et, d'abord, de dire à tous nos collègues que je pense que l'ensemble du Québec aime Montréal. Ça, soyez assurés de ça, je tiens à vous le dire personnellement: Tout le monde aime Montréal.

Et, comme le ministre des Affaires municipales a fait un brillant exposé, a expliqué, je pense, dans son ensemble, la dimension et l'importance que prend le dossier de Montréal actuellement, je crois que, si, avec 125 000 000 $, on avait été capable de régler le problème de Montréal, il aurait été facile de faire des consensus possibles pour aider vraiment directement Montréal. Mais on sait très bien que, dans le contexte actuel, avec le portrait que nous avons de l'économie de Montréal, de l'administration de Montréal, que verser un montant de 125 000 000 $ à l'administration de Montréal n'aurait pas réglé vraiment les problèmes qui sont au coeur de la ville de Montréal, au coeur de son administration publique depuis déjà un certain nombre d'années.

Parce que, si vous avez assisté à la commission parlementaire l'année dernière ou il y a quelques mois, du moins, à laquelle j'assistais personnellement, où on rencontrait à ce moment-là la ville de Montréal et le syndicat des cols bleus de Montréal, on constatait jusqu'à quel point les exigences des employés de Montréal étaient fortes pour l'administration municipale, à un point tel que le président du syndicat, M. Jean Lapierre, à ce moment-là, demandait aux élus de Montréal, en face de nous autres, devant la commission parlementaire, d'être payés 40 heures et d'en travailler 35. Ça représentait un montant de 20 000 000 $ pour...

Alors, je reposais la question moi-même au président du syndicat, je lui disais: Comment pouvez-vous penser que des élus au coeur de Montréal puissent vendre à leurs concitoyens de leur charger 20 000 000 $ de taxes pour payer du temps pas fait, alors qu'on sait très bien que la journée d'un employé des cols bleus de la ville de Montréal peut représenter à peu près 30 heures de travail productif, déjà? 30 heures de travail productif, alors qu'on demandait d'en être payés 40 pour figurer 35! Alors, imaginez le contexte économique que ça peut représenter pour une administration municipale.

La convention des cols bleus, c'est ça. C'est la difficulté qu'on rencontre, et on sait très bien que la syndicalisation des employés de Montréal – d'ailleurs, vous l'avez vu par les enquêtes l'année passée – est un secteur témoin comme quoi il y a vraiment des problèmes là, au coeur de cette administration-là, au coeur du travail de ces employés-là qui ont, d'après moi, une convention chromée au possible, mur à mur et qui permet peut-être d'avoir un déséquilibre économique sur le plan de l'administration municipale. Puis je ne me gêne pas pour le dire à part de ça, même si on me met des restrictions parfois, parce que, pour avoir vécu certaines conventions collectives, certaines négociations collectives, je ne m'empêcherai pas de dire ces choses-là telles que je les pense, telles que je les vois également. C'est clair.

(17 h 50)

Des voix: Bravo!

M. Laprise: La convention des cols blancs, on avait annoncé dernièrement un 10 % d'augmentation. On nous a dit par après que ce n'était pas vrai, j'en suis fort aise. La convention des policiers, ça, je vous dirais franchement... Si je disais tout ce que je pense, ce serait grave.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Laprise: Mais je peux vous dire qu'il y a quelque chose à aller chercher là, et c'est ça que le gouvernement se doit de faire, de permettre à cette ville-là de prendre en main vraiment son administration municipale, ses décisions importantes à prendre face à son personnel et de vraiment redonner une nouvelle image du personnel de la ville de Montréal, une certaine fierté à travailler pour la ville de Montréal. Et c'est ça qu'il faut redonner. En même temps qu'on va peut-être rationaliser sur le plan économique l'ensemble des conventions de Montréal, il faut redonner aux travailleurs de Montréal cette fierté qu'ils devraient avoir de travailler pour leur ville, parce qu'on a une belle ville. Montréal, sur le plan culturel, sur le plan commercial, sur le plan international, c'est notre vitrine internationale, on doit en être fiers.

Vous avez la convention des pompiers également, qui n'est pas rassurante trop, trop de ce temps-là. Mais, à un moment donné, il va falloir que quelqu'un mette ses culottes avec des bretelles et qu'il dise: À partir de maintenant, c'est ça qui va se passer. Mais c'est les administrateurs de Montréal qui doivent le faire, et le gouvernement doit supporter, je pense, cette administration-là en fonction de ça.

Je n'irai pas tellement plus loin, mais, considérant la demande que la députée de Marguerite-Bourgeoys nous a faite d'appuyer la démarche de Montréal, de demander aux villes, même, du Québec d'appuyer la démarche de Montréal pour raffermir, redonner cette confiance, redonner cette popularité à la métropole sur le plan international et même sur le plan du Québec... C'est une force, au Québec, la ville de Montréal. Il faut la considérer comme telle, il faut en être fier. Mais ce qui me déçoit le plus là-dedans, c'est de ne pas voir les gens de Montréal se lever debout, sortir de leur salon moelleux. Les hommes d'affaires de Montréal, les professionnels de Montréal, il y en a. Puis arrêtons de se dire: On y va ou bien on n'y va pas, puis allons-y. À l'administration publique de Montréal, prenons les affaires de Montréal en main et, avec le Québec, on va faire de Montréal la plus grande métropole au Canada puis au monde. Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le député de Roberval. Un ex-maire, vos paroles traitent de la chose municipale avec un doigté et une connaissance... Alors, merci de vos propos, et je cède la parole au député... Oui, M. le député de Westmount– Saint-Louis.

M. Chagnon: J'ai apprécié les propos du député de Roberval. C'est pour ça que nous aimerions entendre plus souvent les propos des députés ministériels.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, je comprends, mais, écoutez, avant de décider s'il peut parler ou pas, il faut que j'entende son propos, et son propos était à l'effet de souligner le bien-fondé... Et il était enchanté des propos du député ministériel. Alors, à ce stade-ci...

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: ...il avait déjà parlé, donc il ne pouvait pas reparler une deuxième fois. Deuxièmement, ce n'est pas parce que vous étiez maire que vous avez le droit de lui permettre ça.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous savez, c'est une grande famille que la mairie au Québec. Nous sommes maintenant à 17 h 55. Est-ce que, M. le député de Verdun, vous désirez débuter votre allocution?

M. Gautrin: Si vous me permettez, on pourrait peut-être commencer à huit heures, si vous voulez, si ça peut...

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Verdun, je vous cède la parole.

M. Gautrin: Il me reste combien de temps, M. le Président, avant l'ajournement?

Le Vice-Président (M. Pinard): Cinq minutes.

M. Gautrin: Cinq minutes. Merci, M. le Président.

Une voix: Ah non!


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Pardon? Merci, le député de Maskinongé.

M. le Président, j'ai apprécié le soutien du député de Roberval à la cause montréalaise. C'était rafraîchissant d'entendre un député d'une région soutenir Montréal. Mais la conclusion, après son intervention vigoureuse, aurait été qu'il devrait voter contre le projet de loi n° 183. Sa conclusion logique devrait l'amener à voter contre le projet de loi n° 183 qui amène la ville de Montréal dans une espèce de situation – et je vais vous la décrire dans les 20 minutes qui me sont imparties, M. le Président – financière absolument bizarroïde, et on va le détailler tout à l'heure, et qui, de surcroît, ne règle en aucune manière le problème ou un des problèmes majeurs que vous trouvez dans les budgets de la ville de Montréal, qui est le fait que son fonds de pension n'est pas capitalisé et que, en plus, la dette actuarielle est projetée sur 62 ans, ce que vous ne faites nulle part, parce que, même pour le déficit du RREGOP, si vous me permettez, enfin la manière dont vous l'avez amorti, vous l'avez quand même amorti, c'est-à-dire sur 16 ans... On n'est pas d'accord avec ça mais au moins vous l'avez limité sur 16 ans; là, c'est sur 62 ans.

Donc, M. le Président, si vous me permettez, dans les propos que je vais tenir avec vous, je vais, d'une part, vous expliquer pourquoi toute personne qui veut soutenir Montréal doit dire: Ce projet de loi ne règle absolument rien. Deuxièmement, j'essaierai de vous expliquer après quels sont les problèmes qu'a Montréal.

Le projet de loi actuellement dit à Montréal: Vous n'avez pas le droit de faire de déficit, mais vous allez pouvoir, dans votre budget, inscrire des revenus virtuels, c'est-à-dire des revenus qui ne sont pas là, mais qui ne sont même pas escomptables, mais que vous allez pouvoir inclure dans vos revenus, premièrement, et, deuxièmement, il y a des dépenses que vous devez faire, mais vous allez faire comme si vous n'aviez pas à les faire; et là, bien sûr, vous arriverez à un budget équilibré de 125 000 000 $. Comprenez-moi bien. C'est ça qu'on dit à l'article 1. Pour 125 000 000 $, vous allez avoir pour 72 000 000 $ de dépenses que vous devez faire, mais on va faire comme si vous ne les faisiez pas...

Une voix: Une comptabilité créative.

M. Gautrin: C'est assez génial. Je voyais tout à l'heure le ministre de l'Environnement, qui est un spécialiste de droit municipal, j'aurais au moins voulu l'entendre parler sur cette nouvelle voie pour comptabiliser les choses. Prenez, vous avez votre budget municipal, mais, là-dedans, vous allez dire: Il y a des revenus que je sais que je n'aurai pas, mais je vais faire comme si j'allais les avoir; il y a des dépenses que je sais que je vais devoir faire, mais je vais faire comme si je n'avais pas à devoir les faire. Ça, c'est l'article 1, M. le Président.

Exemple: il est clair que la ville de Montréal doit payer une contribution à la Communauté urbaine de Montréal. On lui dit: Il y aura 30 000 000 $ que tu vas faire comme si tu n'avais pas à les verser. C'est à peu près la situation. Évidemment, les 30 000 000 $ il va falloir les trouver quelque part, qu'on le veuille ou non.

Il y avait un 53 000 000 $ sur un effort de compressions additionnelles. On ne sait pas où elle va les trouver, mais on va dire: Bien, tu fais comme si tu les avais. Alors, vous ne savez pas où trouver ces fonds-là et ces budgets-là et vous allez budgéter comme si vous étiez en mesure de les avoir trouvés quelque part. C'est tellement facile.

Écoutez, avant d'être maire, M. le Président, vous êtes aussi notaire. Je me mets sérieusement dans ce que vous avez à gérer ou à regarder une comptabilité d'un de vos clients, quelqu'un qui viendrait vous dire: Voici, j'ai des dépenses, mais je vais faire comme si mes dépenses n'existaient pas; j'ai des revenus que je ne pense pas avoir, mais je vais faire comme si j'avais des revenus. Et là je vous présente à ce moment-là un budget équilibré au point de vue de mon budget personnel.

Sérieusement, vous, comme notaire et comme administrateur, vous auriez dit à la personne: C'est légèrement imaginatif, c'est créatif, si vous me permettez, mais ça ne correspond pas à la manière de comptabiliser réellement les entrées de fonds et les sorties de fonds.

(18 heures)

Si le ministre avait été sérieux, il aurait eu plusieurs choix. Il aurait pu dire à la ville: Vous n'arrivez pas, en date du 25 novembre, à avoir un budget équilibré, peut-être qu'on peut retarder l'échéance et vous laisser un peu plus de temps pour trouver un budget équilibré, ou il aurait... J'ai terminé mon temps, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): Malheureusement.

M. Gautrin: Ce qui me forcera à revenir, dans ces conditions-là, à 20 heures. J'espère que la commission comprendra que la Chambre me donne l'ordre d'être présent ici à 20 heures. Je serai présent pour terminer mon allocution, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons nos travaux jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, je vous rappelle que, lorsque nous avons suspendu les travaux de l'Assemblée nationale à 18 heures, le député de Verdun avait débuté son allocution. M. le député, vous avez bénéficié d'un temps de cinq minutes. Alors, il reste donc 15 minutes à votre allocution. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Si, en cinq minutes, j'avais réussi, peut-être, à convaincre nos collègues de ne pas voter pour le projet de loi, peut-être que je pourrais abréger mon intervention, mais je n'en suis pas sûr. Alors, pour ces raisons, je vais continuer mon intervention.

M. le Président, ce que je tenais réellement à vous dire dans l'intervention que j'avais commencée tout à l'heure, c'est que ce projet de loi qui a deux articles – deux articles essentiellement – permet à la ville de Montréal d'établir ce qu'on appellerait des budgets qui n'existent pas, des budgets virtuels – c'est ce que la députée de Marguerite-Bourgeoys a qualifié – c'est-à-dire des budgets dans lesquels on va dire: Vous devez dépenser tel et tel montant, mais faites comme si vous n'avez pas à les dépenser, et il y a des revenus que vous savez que vous n'aurez pas, mais faites comme si vous allez avoir ces revenus. Puis, avec ça, vous avez un budget qui balance dans ce sens-là. M. le Président, c'est ça que vous avez au premier article.

Au premier article, on vous dit: Il y a 125 000 000 $. Vous ne savez pas où ils sont, on ne sait pas comment les trouver, on ne sait pas comment les financer, mais ça, ce n'est pas grave. Vous allez faire un budget pro forma, un pseudobudget, et, là-dessus, vous allez essayer d'escompter ces 125 000 000 $. Et, M. le Président, on vous donne quand même des espèces de guide, on vous dit: Faites comme si vous n'avez pas à payer les 30 000 000 $ que vous devez payer à la CUM. Faites comme si vous étiez capables de couper 53 000 000 $ dans vos frais de fonctionnement à la ville de Montréal. Vous ne pouvez pas le faire avec les conventions collectives, mais faites comme si vous pouviez le faire. Et puis faites comme s'il y avait 42 000 000 $ à Montréal que vous pouviez être en mesure d'économiser. C'est absolument ridicule.

Je m'excuse, M. le Président, c'est absolument ridicule. Au lieu de fonctionner comme on aurait pu fonctionner, parce que les problèmes de la ville de Montréal sont réels, au lieu de fonctionner comme on aurait dû fonctionner, c'est-à-dire que, bon, la date butoir de la fin novembre est trop tôt, les négociations ne sont pas assez avancées, le pacte fiscal que ce gouvernement avait promis à Montréal n'a pas encore réussi à atterrir, bon, alors, là, on aurait pu dire: Nous retardons la date à laquelle Montréal doit présenter son budget, mais ce n'est pas ça qu'on dit.

On leur dit: Faites un budget virtuel – c'est le mot qu'a utilisé la députée de Marguerite-Bourgeoys. Faites un budget comme si c'était un budget qui était vrai. On sait tous qu'il est faux, mais, nous, on va fermer les yeux, parce qu'on sait qu'il est faux et on ferme les yeux en sachant que c'est un faux budget, mais on fait comme si c'était un vrai budget. C'est ridicule, M. le Président. Franchement, c'est ridicule. Et je ne m'attendais pas à une mesure comme ça de la part d'un homme comme le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, qui est un homme qui, d'habitude, nous a habitués à beaucoup plus de rigueur dans sa pensée que cette espèce de pseudobudget qu'il nous présente. Il y a une limite.

Et vous aviez des solutions devant vous, vous auriez pu retarder la date. Vous auriez pu dire: Montréal, exceptionnellement, a jusqu'au 1er janvier ou au 1er février pour présenter un budget équilibré, et, pendant ce temps-là, nous allons négocier avec Montréal. Ou bien vous auriez pu dire: Dès maintenant, il y a telle et telle contribution que nous, du gouvernement, nous allons assumer. C'est encore une possibilité que vous auriez pu faire à Montréal.

Ce n'est pas ça. On leur convient de faire un pseudobudget, mais le pire, c'est l'article 2. Là, je parlais de l'article 1; l'article 2, c'est encore mieux. Non, mais c'est vrai. L'article 2, c'est absolument suave. L'article 2 vous dit: Voici, vous allez faire un faux budget, mais, si ça s'adonne que, le faux budget, ça ne marche pas – ce que tout le monde sait au départ – ça va fonctionner comme si c'était un vrai budget. Je vous le lis. Vous êtes en train de le lire, M. le Président? Lisez-le avec moi.

«2. Si, au cours de l'exercice financier de 1998, l'équilibre entre les revenus et les dépenses...» Et on sait que ce n'est pas possible, on a convenu que c'était un budget virtuel, un budget dans lequel ce n'est pas les vrais revenus qui rentrent puis ce n'est pas les vrais... Alors, vous lisez avec moi, vous qui avez été maire, vous lisez.

(20 h 10)

«2. Si, au cours de l'exercice financier de 1998, l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables ne se réalise pas – on sait déjà qu'il ne se réalisera pas, c'est évident, au départ ils ont dit que ça ne se réaliserait pas – de la manière prévue – c'est ridicule – au budget adopté en tenant compte de l'article 1, la ville modifie le budget afin que cet équilibre soit réalisé.»

Le gouvernement ne s'implique pas. Est-ce que vous comprenez ce que dit l'article 2? Il dit: Voici, on vous suggère, on vous soumet, on dit: Faites donc une espèce de budget qui n'existe pas avec des revenus qui n'existent pas, avec des dépenses que vous allez considérer que vous n'avez pas à faire. Mais, au lieu de dire: Nous, le gouvernement du Québec, on va être derrière vous pour combler le déficit, on dit: Non, ah! une fois que vous l'aurez déposé, vous allez faire comme si c'était un vrai budget.

Sérieusement, et avec tout le respect que j'ai pour le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue – et il sait à quel point je le respecte, c'est un homme qui a fait sa marque dans beaucoup de domaines avant de rentrer à l'Assemblée nationale – moi, je m'excuse, je serais gêné si j'étais obligé, par mes fonctionnaires, de présenter une espèce d'affaire comme ça, et je ne comprends pas comment – non, mais sérieusement – sans difficulté, il a la prétention de nous dire, sans avoir l'air ridicule: Voici, article 1, faites un faux budget; article 2, votre faux budget, il va compter comme un vrai budget. Je m'excuse, moi, j'ai été habitué à des débats avec beaucoup plus de rigueur de la part du député de Rouyn-Noranda– Témiscamingue. Je me rappelle des débats lorsqu'on a mis sur pied la loi 120, je me rappelle – il était dans l'opposition à l'époque – de la rigueur avec laquelle il avait débattu article par article. Bon Dieu! Je comprends à quel point il doit être gêné. Il doit être terriblement gêné de présenter à l'Assemblée cette espèce de projet de loi ridicule. Un homme de sa trempe et de ce qu'on connaît chez lui, d'être en mesure, M. le Président, de présenter une affaire aussi ridicule, ce n'est même pas sérieux.

Alors, vous voulez que, nous, de notre côté, M. le Président, on accepte de jouer à cette mascarade, à cette espèce de situation dans laquelle on va dire: Oui, faites comme si c'était un vrai budget, mais on vous dira que ce n'est pas un vrai budget. S'il vous plaît!

Les vrais problèmes de la ville de Montréal, je vais vous dire où ils sont. Le vrai problème de la ville de Montréal, il se trouve au niveau du fonds de pension. Le fonds de pension des fonctionnaires de la ville de Montréal n'avait pas été capitalisé. Il l'a été à partir de 1983. C'était une décision de votre gouvernement, enfin du gouvernement de M. Lévesque à l'époque, qui a dit à la ville de Montréal: Vous devez capitaliser le fonds de pension. Et l'énorme dette actuarielle envers le fonds de pension des fonctionnaires de la ville de Montréal – parce qu'elle croît constamment, comme vous le comprenez, parce qu'elle s'ajoute avec le phénomène des intérêts, etc. – elle pèse de plus en plus lourd sur les épaules d'un budget municipal à Montréal.

Alors, c'est un phénomène qui se passe sur le long terme. À l'époque, en 1983, ils avaient dit, ce qui était complètement ridicule: Voici, vous allez pouvoir capitaliser sur 62 ans. Alors, évidemment, sur 62 ans, vous voyez, 62 ans, la manière dont on va en porter le poids, de la non-capitalisation du régime de rentes des fonctionnaires municipaux. Alors, c'est là qu'est le vrai problème.

De surcroît – et là je tiens réellement à prévenir ce gouvernement, là il va nous avoir en face de lui – la capitalisation qui s'est faite à partir de 1983 dans le fonds de pension des fonctionnaires municipaux a créé des surplus actuariels. Alors, il faut bien que vous compreniez la situation: le fonds de pension, parce qu'il n'a pas eu les versements, a un déficit actuariel, mais la partie qui a déjà été capitalisée depuis 1983 – donc, on est en 1997 maintenant – a créé une certaine forme de surplus actuariel qui appartient... Bon Dieu, s'il y a quelque chose qui appartient aux employés et aux employés syndiqués actuellement de la ville de Montréal, c'est bien ça! Ils sont prêts à faire un effort. Mais ils nous verront en travers, du moins, moi, ils me verront en travers de leur chemin le jour où on dira: Pour satisfaire ou pour faire en sorte qu'on ne va pas permettre... ou pour régler les problèmes financiers de la ville de Montréal, que vous avez créés artificiellement, vous allez commencer à aller puiser dans le fonds de pension des fonctionnaires de la ville de Montréal, qui a été accumulé par un travail constant des fonctionnaires, soit les pompiers, les policiers ou les employés municipaux. Ça, je vous le dis, M. le Président, si c'est négocié, je dirai: Correct, il n'y a aucun problème; mais, si ce n'est pas négocié, si c'est imposé...

Parce qu'il y a une tendance, vous savez ce qu'on dit là, ce qui circule, parce qu'on a aussi des oreilles, on n'est pas complètement imbécile dans notre situation, on sait à l'heure actuelle que cette espèce de petit magot qui a été constitué, qu'on appelle les surplus actuariels du fonds de pension... Alors, vous comprenez bien, il faut bien comprendre que, parce qu'on n'a pas capitalisé depuis très longtemps, il y a une dette à payer au fonds de pension des employés, mais que ce qu'on a capitalisé après 1983 a créé un surplus. Et ça, il y a une espèce de gens qui sont en train de vouloir regarder avec des yeux très envieux comment on va pouvoir prendre dans le surplus de la caisse de retraite des fonctionnaires municipaux de Montréal.

Et, moi, je dis, je suis de ceux qui croient que les caisses de retraite, d'abord et avant tout, appartiennent aux salariés, à ceux qui ont travaillé. C'est pour eux. Alors, si ça s'adonne que la situation économique a été particulièrement bonne, s'il y a un surplus actuariel dans une caisse de retraite, cela doit revenir d'abord et avant tout à bénéficier les pensions ou la situation de ceux qui ont été les cotisants au régime de retraite. Alors, je mets en garde aujourd'hui les gens du gouvernement, tous autant que vous êtes ici, vous disant: Si vous voulez commencer à vouloir puiser dans ce surplus sans l'avoir négocié, par une loi spéciale, vous allez nous avoir en face de vous, parce que nous croyons, nous, qu'un surplus de caisse de retraite, ça appartient d'abord et avant tout aux travailleurs qui ont été en mesure de créer et d'amasser ce surplus actuariel.

M. le Président, ce n'est pas avec des pseudoprojets de loi qui présentent un pseudobudget qu'on croira comme un vrai budget qu'on règle le problème de Montréal. Mais je dis aussi au ministre, parce que ce n'est pas dans son projet de loi, que, si jamais il a l'intention d'aller foutre la main dans le surplus actuariel des caisses de retraite des pompiers, des policiers et des fonctionnaires de la ville de Montréal sans que ça ait été négocié, ça, je vous dis, là, attention, il y a une limite. Il y a une limite, et ça, la limite, vous la dépasseriez si vous faisiez ça.

Qu'il y ait une négociation comme ça s'est fait... On n'était pas d'accord quand vous l'avez faite, la négociation, avec une espèce de couperet sur la gorge, comme vous l'avez fait avec vos fonctionnaires de la fonction publique dans le cas du RREGOP et de la loi n° 104 où vous avez dit: Vous avez le choix de vous couper 6 % ou bien vous acceptez ce qu'on vous propose. Le cadre de la négociation n'était pas très correct, mais, au minimum, ça a été négocié, M. le Président. Le jour ou si vous nous prévenez aujourd'hui que, demain ou après-demain, il y aura une loi spéciale qui permettra au gouvernement d'aller puiser dans les surplus actuariels de la caisse de retraite des fonctionnaires municipaux de la ville de Montréal, ou dans la caisse de retraite des pompiers de la ville de Montréal, ou dans la caisse de retraite des policiers de la ville de Montréal, soyez sûr que vous ne passerez pas ce projet de loi facilement ici, en Chambre. Nous serons absolument à nous battre pied à pied contre vous, sur un geste qui serait profondément inique.

Alors, M. le Président, vous comprenez, les problèmes de la ville de Montréal existent. Cette affaire-là n'est aucunement une solution. C'est une affaire absolument ridicule. Je conçois avec vous que le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue est un peu gêné de présenter ce projet de loi, je comprends. La solidarité ministérielle, je sais ce que sait. Il faut être en mesure de présenter des choses, des fois, qu'on nous oblige à faire. C'est difficile pour lui. C'est pénible pour lui, je le comprends. Mais faites attention! Si ce que vous avez derrière la tête, qui n'est pas dans le projet de loi, arrive sur le plancher de la Chambre, là, la bataille va être dure, soyez conscient de ça, parce que, moi, je ne tolérerai pas actuellement qu'on aille puiser dans les surplus actuariels d'une caisse de retraite qui appartient d'abord et avant tout aux pompiers, aux policiers, aux employés municipaux de la ville de Montréal, aux pensionnés de la ville de Montréal, en disant: On va aller poigner là-dedans, parce que, comme ça, ça nous permettra après d'équilibrer les choses. Si vous arrivez avec un règlement négocié, on se pliera. Mais, si jamais vous voulez aller là-dedans, soyez sûr que vous aurez devant vous la totalité des parlementaires de l'opposition officielle aujourd'hui. Soyez sûr, M. le Président, que nous ne tolérerons pas ici qu'on aille puiser dans les surplus actuariels de la caisse de retraite des fonds de pension des employés municipaux de Montréal, des pompiers de Montréal et des policiers de Montréal. Ça, c'est quelque chose sur lequel nous allons être totalement en opposition.

(20 h 20)

Nous savons qu'il y a certainement un problème, parce que la caisse de retraite n'a pas été capitalisée comme elle aurait dû l'être. On comprend le problème, on est tout à fait d'accord avec ça. Mais vous n'allez pas prendre sur le dos des travailleurs, qui ont été d'honnêtes citoyens, qui ont travaillé pour atteindre et constituer ce fonds de pension, pour régler les problèmes budgétaires de la ville de Montréal. Pour moi, jamais! Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député Verdun. Nous cédons maintenant la parole au député de Saint-Laurent. Alors M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai suivi avec beaucoup d'intérêt, depuis cet après-midi, le début, et les propos qu'a tenus ma collègue de Marguerite-Bourgeoys, celle de Jean-Talon. J'ai écouté le ministre, j'ai écouté mon collègue de Roberval et, bien sûr, j'ai entendu les commentaires que vient de faire mon collègue le député de Verdun.

M. le Président, dans les 20 minutes qui me sont allouées, vous me permettrez d'abord de rappeler, et ça me semble important, que les gens de Montréal ont été amenés à croire, durant la campagne électorale de 1994... On se souviendra de la belle cérémonie, de l'accolade fraternelle qu'avaient MM. Doré et Parizeau – on peut le nommer, maintenant, il n'est plus premier ministre – belle cérémonie sur les galeries: «Un pacte fiscal, depuis tellement longtemps attendu à Montréal, sera consacré par l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement du Parti québécois.»

Ha! Je veux dire, ça fait plaisir à entendre. Tu dis: Enfin, s'ils pouvaient mettre les gestes avec le discours, pour une fois, on aurait là, au moins, un commencement de solution au problème. Alors, comme ils ont trouvé que la phrase était bien accueillie, depuis le moment où ils l'ont promis et à venir jusqu'à maintenant, à neuf reprises ils ont répété la même phrase: La solution pour Montréal, c'est un pacte fiscal. C'est la même chose que la première fois, que la deuxième, que la troisième.

Mais il n'y a pas plus de pacte fiscal, après neuf fois! Arrêtez d'en parler et faites quelque chose! Autrement, vous vous couvrez d'un ridicule. Mais, si ce n'était que pour rejaillir de la façon dont je viens de le décrire sur vous autres, je m'en réjouirais. Je dirais: Si le Parti québécois est assez naïf pour penser que les gens vont croire qu'ils peuvent répéter neuf fois la même chose sans jamais la faire, puis que les gens vont les applaudir, je pourrais m'en réjouir.

Mais, M. le Président, j'ai des citoyens de Montréal, des connaissances, je représente une partie des gens de mon comté qui sont dans le quartier Cartierville qui me disent qu'ils ont le sentiment d'avoir été trompés – leur mot, c'est «trahis» – ils ont le sentiment qu'on se moque d'eux, qu'on profite de leur situation de faiblesse pour, fois après fois, leur imposer des cataplasmes, des solutions qui sont temporaires.

À chaque année, là, depuis quelques années, on trouvait la solution miracle. On disait: Pour cette année, on va vous acheter le casino en échange de quoi on va vous donner 50 000 000 $. L'année d'après, là, c'était rendu les terrains de l'hippodrome, on va vous échanger ça. Il n'y a pas personne qui a pensé d'acheter, année par année, un étage de l'hôtel de ville de Montréal? On aurait au moins trouvé une solution pour trois, quatre ans. Ça n'a pas plus de bon sens là, mais au moins ça leur éviterait de revenir, année après année, avec le ridicule qui les couvre de la façon qu'ils font ça, M. le Président.

Alors, mon collègue a traité tantôt, et je vais y revenir, de l'utilisation des surplus de caisse de retraite. Alors, il y a des gens qui pensent que ce gouvernement-là se moque de la population, l'a fait en période électorale et, depuis ce temps-là, prend un malin plaisir à humilier et à les utiliser à des fins bassement électoralistes plutôt que de véritablement s'adresser au problème de Montréal.

J'ai entendu un collègue qui, avant la période d'ajournement de 18 heures, a dit: On aime Montréal. Je pense que c'est vous qui étiez là, qui présidiez. On aime Montréal. Et là toute l'équipe Duracell s'est mise à applaudir. Ils ne parlent pas mais ils applaudissent. Un petit coup de Duracell qui a duré 30 secondes. On aime Montréal. Bravo! On aime Montréal. Mais, quand on dit qu'on aime Montréal, la meilleure façon de le prouver, c'est d'y aller avec des gestes concrets, de les aider. Pas seulement applaudir celui qui dit qu'il les aime, puis on va vous repromettre une dixième fois une solution comme celle-là. Bah! Ça n'a pas de bons sens.

Alors, les gens de Montréal ont de plus en plus la conviction que ce gouvernement-là se moque d'eux. Certains disent que c'est une attitude méprisante. Et on n'a qu'à regarder, M. le Président, ce qui s'est écrit dans les journaux. On dit – et c'est tellement bon, là: Québec impose son aide à Montréal. Tu sais là, il est tellement convaincu que la solution, c'est eux autres qui l'ont. On dit: On impose la solution à Montréal. Et là je suis obligé de vous le montrer parce que je n'ai pas le droit de dire le nom de famille de celui qui a la responsabilité. On dit, bon, au maire Bourque: Aide-toi puis le Québec t'aidera. Les gens ont dit, si c'est vrai qu'ils vont nous aider, ils vont faire ça comment, nous aider. Parce que c'est bien beau que le ministre dise: Aide-toi puis on va t'aider. On dit: Comment est-ce qu'ils vont m'aider?

Là, ils nous arrivent avec le projet de loi qu'il y a devant nous autres aujourd'hui, là. Mes collègues ont commenté, je pense, de façon on ne peut plus adéquate de quoi il en retourne vraiment. M. le Président, c'est tellement une solution qui n'a pas de bon sens! Le ministre, dans son exposé... Puis mon collègue député de Roberval disait avant le souper: Le ministre l'a décrit de tellement brillante façon! Aïe! il faut être vraiment capable, il faut que ça scintille dans le temps des fêtes pour décrire une présentation comme celle-là de brillante. C'est un projet de loi de trois articles. Il nous explique qu'il aime tellement Montréal... Il dit: Voici la solution! Mais le même ministre aujourd'hui, en conférence de presse avec son premier ministre, il dit: On l'a, la solution. Si, au 30 janvier, vous n'avez pas réglé le problème, on va revenir en Chambre avec une loi spéciale. Donc, il sait que son cataplasme sur une jambe de bois, qui fait qu'on est ici vendredi soir puis que vous êtes obligés d'écouter ça, M. le Président, ça n'a pas de bon sens.

Aussi récemment que la semaine dernière, le premier ministre, le même qui était en conférence avec Trudel, là... Je m'excuse, je m'excuse! Je n'ai pas le droit. Non, non, vous avez raison. Je n'ai pas le droit de le mentionner par son nom. Le ministre des Affaires municipales en compagnie du premier ministre. C'est bien?

Des voix: ...

M. Cherry: Bon! L'équipe Duracell à l'oeuvre! Une petite claque, vous pouvez repartir. O.K.? Bon!

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: Ce midi, M. le Président, le ministre des Affaires municipales, en compagnie du premier ministre, est allé dire: Si vous ne réglez pas l'affaire d'ici au 30 janvier, on va revenir en cette Chambre puis on va vous régler le problème. Ah bon, bien coudon! Si c'est la solution que le ministre a – et il prétend que maintenant ça fonctionne – pourquoi il ne le dit pas maintenant?

Pourquoi? Il le sait bien. Écoutez, la semaine dernière, le même premier ministre – on l'a tous entendu, c'était dans les médias – disait: Non, je n'ai pas l'intention d'intervenir. La semaine passée qu'il a dit ça, là. Je ne fouille pas vos mémoires trop, trop lointaines. La semaine dernière, le premier ministre a dit: Non, ça règle tellement bien avec les municipalités, il y a, au moment où on se parle, un taux de règlement à 30 %, donc ça va bien. Puis il dit: Et ça tombe par grappes. C'est le premier ministre qui dit ça.

Dans les heures qui ont suivi, le président de l'Union des municipalités, il a dit: Si c'est des grappes, c'est des grappes de raisins secs. Ce n'est pas 30 %, c'est 14 %. Alors, tu sais! Je comprends qu'ils ont une méthode un peu particulière pour calculer, là, mais il me semble que, sur le nombre de villes qui ont réglées puis sur le nombre de villes qu'il reste à régler, ça ne prend pas un cours classique pour être capable de faire le décompte entre 14 % et 30 %. M. le Président, vous m'indiquez que ça aide. J'aimerais que ça paraisse que ça aide, M. le Président.

(20 h 30)

M. le Président, donc, le premier ministre est conscient que ça ne règle pas avec les municipalités. Alors là, ce qu'il fait, c'est qu'aujourd'hui il a décidé encore une fois de dire: Un autre délai. Le 30, on va revenir en Chambre puis là, si vous ne réglez pas, il y a des arbitres qui vont être nommés puis qui vont trancher. Ça, c'est la solution Ponce Pilate. J'ai créé un problème, je ne suis pas capable de le régler parce que, la façon de le régler, ça aurait été d'accompagner par des mesures législatives la sorte d'appui dont ont besoin les villes pour être capables d'atteindre le pelletage que le gouvernement leur a donné. Mais ça, faire ça, ça serait de prendre de front les centrales syndicales. Alors, il ne fait pas ça, il dit: On va mettre ça dans les mains des arbitres, puis on va trouver une belle façon à la Ponce Pilate, puis tout ça, ça va se régler. C'est une formule qui commence à être usée, là. Ça a poigné, un certain temps, mais, tu sais, là, ce n'est pas vrai que les dés vont sortir sept à chaque fois.

Mon collègue, M. le Président, celui qui m'a précédé, a fait un peu l'historique, et je pense que c'est important parce que ça me semble une des façons que le gouvernement veut utiliser dans le cas particulier de la ville de Montréal. Il a l'intention de regarder dans les surplus de caisses de retraite. En 1983, le gouvernement de l'époque a décidé que, parce qu'il n'y avait pas eu suffisamment de capitalisation pour rencontrer les obligations de la caisse de retraite en face des fonctionnaires municipaux, la ville de Montréal devrait, à compter de 1983, et a étalé sur une période de 62 ans... Il faut absolument qu'ils rencontrent les engagements pour la solvabilité de ce que devra verser le fonds de caisse de retraite.

Règle générale, M. le Président, quand il y a des surplus dans la caisse de retraite, il y a deux choses qu'on peut faire avec, deux choses: Ou on améliore les bénéfices, parce qu'il y a des surplus, ou on diminue les contributions. Ça, c'est la façon dont ça doit normalement se faire quand il y a des surplus de caisse de retraite. J'en ai négocié pendant de nombreuses années, et c'est ça qu'on fait avec, on s'occupe des gens qui sont déjà retraités, qui sont partis depuis fort longtemps, dont la pension ne rencontre plus ce dont ils ont besoin pour vivre. On fait des ajustements pour ceux qui sont partis ou on diminue les contributions. C'est comme ça que ça se fait.

Dans ce cas-ci, il y aurait une troisième solution, M. le Président, parce que, depuis 1983, depuis la capitalisation, depuis la bonne gestion, il y a des surplus. Une des façons responsables, ça serait de diminuer le nombre d'années plutôt que de dire: À l'époque, on avait fait des prévisions que ça prendrait 62 ans avant que la capitalisation soit atteinte. Bien, s'il y a des surplus, on pourrait les appliquer et en diminuer le nombre d'années plutôt que de maintenir ça et dire: Voilà là un réservoir dans lequel on peut aller mettre la main. Non, non, non, il y a des surplus parce qu'ils ont une capitalisation sur la durée que je viens de vous citer. Alors, ça, ça me semble une avenue, que les gens qui ont permis que ces accumulations-là existent puissent avoir le loisir de décider, parce que ce sont les payeurs de taxes de Montréal. Quand la ville fait son budget, elle est obligée de tenir compte de la capitalisation qu'elle doit faire année après année. Donc, si les surplus pouvaient être appliqués à la durée, les citoyens de Montréal pourraient avoir moins d'années à être obligés de faire ça.

Mais ce n'est pas ça, là. Le gouvernement indique que, lui, il pense qu'une façon de solutionner le problème temporaire, parce que c'est une solution temporaire, ça, là... Une fois que tu as utilisé le surplus, il n'en existe plus, et les gens qui, de bonne foi, étaient convaincus que ça leur appartenait grâce à leurs contributions, grâce à leur saine gestion... Parce que ce sont, bien souvent, des comités où les deux parties sont représentées. L'employeur et l'employé confient des mandats de gestion à des compagnies, exigent des rapports périodiquement, et, finalement, on réussit... Bien souvent, là, on scinde ces montants-là en divers groupes, on les met en compétition les uns avec les autres pour les stimuler et pour qu'il y ait un meilleur rendement, et ça, souvent, ça crée des surplus.

Mais, quand on fait ça, bien, là, on doit les appliquer à ceux qui ont permis que cet argent-là soit investi et, avec les fruits de ça, qu'on puisse l'appliquer soit, comme je le disais, pour des améliorations pour les retraités déjà passés, ou pour des bénéfices futurs à ceux qui accéderont à la retraite, ou bien donc en diminuer les contributions. Mais pas pour éponger un déficit.

Et dans la solution... Je ne suis même pas certain que c'est un bon mot, là. C'est quasiment faire insulte à l'intelligence des gens qui nous écoutent que de penser que ce projet de loi là est une solution. C'est un cataplasme temporaire. C'est quelque chose qui ne marchera pas, on le sait. Et le ministre le sait très bien. Il a eu beau, avec le premier ministre, fixer la date au 30 janvier 1998, s'il croit qu'il va bousculer le syndicat des cols bleus de la ville de Montréal, s'il croit qu'il va bousculer le syndicat des cols blancs de la ville de Montréal, s'il croit qu'il va réussir à extorquer les surplus de caisses de retraite aux policiers de la ville de Montréal ou aux pompiers de la ville de Montréal, c'est parce qu'il croit encore au Père Noël à son âge. Et je ne peux pas croire que ça, ça constitue une solution. Ça ne peut pas, M. le Président. Ça ne tient pas compte de la réalité. On connaît tous la difficulté traditionnelle des relations de travail entre la ville de Montréal et ses associations syndicales.

Cette année, on va les convoquer en commission parlementaire pour qu'ils viennent nous expliquer comment ça se fait que c'était difficile, puis des planchers d'emploi... Tu sais, ces gens-là, ce n'est pas arrivé. Le résultat de la négociation de cette année est le fruit, le cumul d'une série de négociations, mandat après mandat, qui ont fait que les gens qui étaient en place ont accédé à ça, ou des sentences arbitrales ont permis que. Alors, ces gens-là disent: C'est à nous, on l'a mérité, on l'a gagné, ça nous appartient. Et là, tout d'un coup, arriverait quelqu'un qui dit: Non, non, non, ce n'est pas comme ça que ça marche? Non. Moi, M. le Président, je vous avoue honnêtement que ces gens-là ont le droit de se sentir bousculés.

Pourquoi le 30 janvier, M. le Président? Pourquoi la ville de Montréal a une espèce de faux budget, qu'il faut, par une législation, temporairement, lui permettre de passer les Fêtes puis qu'on va revenir ensemble au mois de janvier pour être capables de trouver la phase II ou le plan B? Tiens! vous aimez ça, des plans B? Le plan B, ça, c'est le 30 janvier. On va revenir ici, encore, pour tenter de solutionner – «tenter», je dis bien – ce qui est la situation de la ville de Montréal et de nombreuses municipalités.

Dans le cas de la ville de Montréal comme ailleurs, M. le Président, vous savez très bien que les relations entre les villes et les syndicats ont fait que, dans de nombreux endroits, des sacrifices ont déjà été acceptés de part et d'autre, des conventions collectives suite à ces sacrifices ont été signées, mais que, après que le gouvernement du Québec envoie une facture additionnelle aux municipalités, on leur demande de rouvrir les conventions qu'elles viennent à peine de signer, dans certains cas, pour leur demander des contributions additionnelles en plus de celles qu'elles viennent de faire présentement, qu'on va aller fouiller dans les surplus de caisses de retraite. C'est de rêver en couleur. C'est vraiment... C'est de la poésie que de penser que, en décembre 1997 et entre maintenant et le 30 de janvier, la solution va être trouvée dans la situation de Montréal qui fait l'objet du projet de loi qui est devant nous présentement, M. le Président.

Ce n'est pas vrai, tout le monde sait ça. Vous m'indiquez qu'il me reste deux minutes, M. le Président? Alors, vous me permettrez de conclure en disant que je trouve extrêmement regrettable que le gouvernement nous oblige à cette parodie de la démocratie en faisant semblant que le projet de loi qui est devant nous, ce soir, est la réponse à la situation de Montréal, quand nous savons tous que, au tout début de 1998, si le premier ministre a dit vrai, que nous serons ici le 30 de janvier, donc nous serons ici encore une fois parce que, encore une fois, M. le Président, les solutions temporaires du maquillage et de la manipulation de la vérité nous auront obligés à revenir plutôt que de prendre des situations et des solutions courageuses. Merci, M. le Président.

(20 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Saint-Laurent. Nous allons maintenant céder la parole au député de D'Arcy-McGee.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Ce n'est pas pour exprimer ma joie que je m'adresse à vous ce soir dans cette digne Assemblée nationale, M. le Président, sur le projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal. Fondamentalement, la raison d'être de ce projet de loi est d'autoriser la ville de Montréal à adopter pour son année financière 1998 un budget illégal en vertu des lois actuelles de la province de Québec. En fait, ce projet de loi dit à la ville de Montréal qu'elle peut créer un budget fictif où l'équilibre est atteint entre les revenus et les dépenses estimés pour l'année 1998 parce qu'il est établi en fonction d'une augmentation anticipée des revenus et d'une réduction anticipée des dépenses pour un montant – tenez-vous bien – de 125 000 000 $.

The bill says that the city of Montréal can create a fiction in its budget for 1998 whereby the balance between probable revenue and probable expenditure is contingent upon an anticipated increase in revenue and an anticipated decrease in expenditure amounting to not less than the total sum of $125 000 000. Mr. Speaker, in effect, the Minister of Municipal Affairs is following the tone set by the Minister of Finance in presenting to the population misleading, erroneous and doubtful accounting and fiscal practices. This bill allows in effect the city to present to the population a budget which, on the surface, might seem to be balanced because the Minister is permitting the city to cook the figures, that is to say to insert figures based on their own fiction.

Mr. Speaker, check the explanatory notes of the bill. The Minister instructs the city to use figures based on anticipated revenue and anticipated expenses and talks about probable revenue and probable expenses, figures which are basically a fiction. The city's budget, therefore, will be a pure fiction. The city's budget will have very little chance to survive the hard realities. Let this PQ Government be honest. Let them admit that they're allowing the city of Montréal to present a deficitary budget of $125 000 000.

M. le Président, nous sommes confrontés à un budget qui ne vise qu'à cacher les problèmes sous le tapis jusqu'à ce que l'on trouve une solution qui viendra peut-être demain, peut-être l'année prochaine. Mr. Speaker, we are faced with a budget which is only sweeping the problems under the carpet for a solution tomorrow. When tomorrow we come to the day of judgment, and when the MNA from Jonquière runs out of fictions, only two solutions will be possible: the population of the city of Montréal will witness an amended budget in mid-year authorizing the city of Montréal to increase its taxes, or the PQ Government will pay the bill itself after it has exhausted all other scenarios.

In effect, by this bill, the Québec Government is guaranteeing the obligations of the city of Montréal, a sort of bank guarantee, a sort of tutorship of the city of Montréal. Mr. Speaker, $80 000 000 worth of the $125 000 000 problem that the city of Montréal has has been caused by the PQ Government. I remind you that five decisions of the PQ Government cost the city of Montréal $80 000 000: firstly, the city of Montréal's share of the «nouveau pacte fiscal» is $46 800 000; secondly, the actual reduction in fiscal assistance is $24 000 000; thirdly, the abolition of the TVQ rebate costs the city of Montréal $8 000 000; and fourthly, the city of Montréal's contribution to the Police Institute of Nicolet is $1 400 000. All totalling $80 000 000, Mr. Speaker.

M. le Président, le gouvernement du Parti québécois ne respecte pas ses promesses envers la ville de Montréal. Il avait promis de préparer et présenter à la ville un nouveau pacte fiscal pour alléger les problèmes de la ville de Montréal. Ce sont seulement des mots, des mots et encore des mots. C'est tout ce que la ville a reçu à ce jour du premier ministre désigné de cette province. Mais seulement les mots, ce n'est pas suffisant. Ce dont la ville de Montréal a besoin, c'est d'une vision pour son avenir, d'une structure fiscale qui va lui permettre de jouer le rôle important qu'elle doit jouer et qu'elle doit remplir pour ses citoyens et pour la population entière du Québec.

Montréal est le moteur économique du Québec et requiert toute notre attention. Montréal et les diverses régions du Québec doivent s'entraider et se respecter. Le succès de l'une n'est pas incompatible avec le succès de l'autre, mais plutôt complémentaire. Le plus tôt que, nous, comme société, comprendrons cela et le mettrons en pratique, le plus tôt nous serons à même d'en retirer des bénéfices.

Montréal and the various regions of Québec must complement and help each other. The success of one is not incompatible with the success of the other, but is rather compatible. The sooner that we, as a society, are able to put this into practice, the sooner we will be able to reap the benefits. Mr. Speaker, the PQ Government has ignored the very serious problems being faced by Montréal, and instead of finding solutions, it has imposed additional taxes on an overburdened taxed city.

Mr. Speaker, we would be remiss in this debate we are having in the National Assembly of Québec on this day with respect to the city of Montréal and the fact that it cannot balance its budget for 1998 without dubious accounting methods if we didn't discuss the penalty being suffered by the city of Montréal and, consequently, also the Province of Québec as a result of the political uncertainty plaguing our great city of Montréal and hanging over it like a dark cloud.

On ne peut dissocier l'incertitude politique vécue au Québec du fait que la ville de Montréal ne peut pas équilibrer son budget. Montréal est la seule métropole en Amérique du Nord qui souffre de cette incertitude qui obscurcit son avenir et l'empêche de trouver des solutions pour stimuler son économie. Un entrepreneur qui investit est conscient qu'il y a certains risques à courir qui sont normaux. Un entrepreneur qui investit à Montréal doit en plus encourir le risque causé par notre climat politique incertain. Ce risque additionnel les fait reculer, empêchant ainsi Montréal de bénéficier de la venue d'investisseurs qu'en temps normal Montréal peut s'attendre à recevoir et, en conséquence, des revenus additionnels que cela pourrait générer et dont nous avons besoin. L'incertitude politique affecte un grand nombre de décisions que les entreprises doivent prendre chaque jour et les prive des nombreux bénéfices qu'ils pourraient retirer, les empêchant trop souvent de penser à des projets d'expansion, mais les entraînant plutôt à des réductions d'effectifs et, malheureusement, trop souvent, les forçant à la faillite et à la fermeture.

(20 h 50)

Mr. Speaker, individual Montrealers are also changing many of their spending decisions in a negative manner based upon the political uncertainty, thus hindering no more spending and consumption, which in turn as a downward spiral on the economy of the city again hindering a sense of normalcy and causing the severe budgetary problems that we are faced with, and that is the reason why we are here tonight. Finally, the political uncertainty is depriving the city of Montréal of some of its best brains which have gone to live elsewhere in the world. This brain drain not being limited to any particular group of people, thus again the tax base of the city of Montréal has been negatively affected.

Dans le rapport intitulé Montréal, métropole nord-américaine , les dirigeants d'entreprises s'expriment. Le rapport du comité responsable d'une étude auprès de 36 dirigeants d'entreprises en date d'octobre 1996 et accepté par tous présents au Sommet socioéconomique mentionne, et je cite: «Mais nos entrevues ont établi clairement de façon globale que l'économie de Montréal est pénalisée par l'impact de ce risque sur l'ensemble des décisions des entreprises et des individus. En somme, l'incertitude politique constitue pour Montréal un désavantage structurel pour attirer des activités créatrices d'emplois face à ses concurrentes nord-américaines.» Fin de la citation.

M. le Président, ce projet de loi, ce gouvernement du Parti québécois ne donne aucune chance à la ville de Montréal de réussir mais la plonge, au contraire, dans un endettement sévère. Je me joins à mes collègues de l'opposition officielle pour voter contre ce projet de loi qui est totalement inacceptable et reflète de nouveau l'incapacité du gouvernement du Parti québécois d'administrer cette province. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous allons maintenant céder la parole au député de Jeanne-Mance. M. le député.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: Merci, M. le Président. Nous sommes à l'adoption du principe du projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal. Il s'agit d'un projet de loi de quatre articles qui autorise la ville, pour la première fois dans l'existence d'une municipalité au Québec, à adopter un budget non équilibré. Les citoyens de l'île de Montréal, de la ville de Montréal et les 27 municipalités ont été frappés en plein front, au mois de juillet.

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Bissonnet: Vous trouvez ça drôle, M. le député de Fabre. Vous trouvez ça bien drôle, là, vous. Mais je tiens à vous dire que, dimanche, dans votre comté, il y aura une convention et que vous allez avoir une opposante qui va vous talonner pas mal. Vous trouvez ça drôle que les citoyens de Montréal aient été augmentés de 45 % de taxes scolaires le 28 juin dernier? Vous allez trouver ça drôle que des citoyens locataires... Je m'adresse toujours à M. le Président, vous le savez très bien, M. le député de Gouin. Article 32, peut-être que le député pourrait s'asseoir à sa place, M. le Président.

M. le Président, je déteste me faire déranger quand je m'adresse aux électeurs de l'île de Montréal. Et de dire au député de Fabre qui trouvait ça drôle que la population, les propriétaires, petits propriétaires, aient été touchés de 45 % et de 30 %, l'année dernière... Et les locataires, dans leur renouvellement de bail le 1er juillet, vont avoir les premières conséquences de cette augmentation. Si on se réfère à la dernière campagne électorale... J'ai un article avec moi du 18 août 1994, Parizeau promet un nouveau pacte fiscal à Doré . Intéressant! Ça fait trois ans et demi, depuis cette promesse de l'ex-premier ministre, et ça fait huit ou neuf fois qu'on parle de pacte fiscal dont l'objectif est d'aider la ville de Montréal. Ça fait neuf fois qu'on en parle, et ce projet de pacte fiscal n'est pas encore réglé, M. le Président.

Je voudrais vous citer quelques passages d'un article de La Presse du 18 août: «...et M. Parizeau à l'époque a déclaré qu'il allait trouver les moyens de dégager Montréal du carcan dans lequel elle est placée, avant la tenue du référendum, en raison de ce qu'il a appelé l'urgence de la situation. Tant M. Parizeau que M. Doré ont brossé un bien triste portrait de Montréal, dont le nombre de pertes d'emplois d'année en année s'aggrave de telle sorte qu'il est devenu inutile, dans un tel contexte, d'envisager l'avenir avec optimisme. Parmi les mesures urgentes, M. Parizeau songe à une ouverture du partage de la taxe de vente.»

M. le Président, quand la ville de Montréal avait un partage de la taxe de vente, quand la ville de Montréal avait les revenus de la taxe d'amusement, la ville de Montréal, à ce moment-là, avait des revenus beaucoup plus élevés qu'elle n'en a présentement. Elle a été pénalisée, à cette époque-là, M. le Président.

Ce n'est pas la première fois qu'un gouvernement veut aider Montréal. Ça a été fait dans les années 1967-1968, lorsqu'on a créé la Communauté urbaine de Montréal, qui a apporté une nouvelle structure, M. le Président, à tous les citoyens de l'île de Montréal. On a, à ce moment-là, fusionné les services de police pour faire un Service de police de la Communauté urbaine, on a fusionné les services d'évaluation et on a fusionné les services de l'assainissement de l'eau et de l'air. Il y a 10 ans, M. le Président, la Communauté urbaine de Montréal et la ville de Montréal, au niveau de l'assainissement de l'eau et de l'air, étaient un exemple qu'on pouvait citer à travers le Canada.

Et qu'est-ce qu'on retrouve dans ce budget, M. le Président? Parce que, vous savez, on a dit... Le premier ministre actuel, à son discours inaugural et avant son discours de Laval, a dit: Nous ne toucherons pas aux consommateurs québécois, nous n'augmenterons pas la taxe de vente. Qu'est-ce qui arrive? Le 1er janvier, augmentation de 1 % de la taxe de vente à tous les Québécois. On touche qui? On «touche-tu» les consommateurs? Oui, M. le Président. Et le premier ministre s'était engagé à ne pas toucher aux consommateurs. C'est le même payeur de taxes, M. le Président.

Donc, 350 000 000 $ aux municipalités. Et voici ce que M. Parizeau disait, dans son article, en 1994 – je l'ai souligné, M. le Président, parce que je trouve ça bien intéressant: «Pour l'avenir plus lointain, le chef péquiste a indiqué que, dans la mesure où la réponse au référendum serait oui, il faudra entreprendre une grande décentralisation des pouvoirs et des ressources fiscales vers les municipalités.» M. le Président, «une grande décentralisation des pouvoirs et des ressources fiscales vers les municipalités». Avez-vous vu les pouvoirs des services fiscaux...

M. le Président, pouvez-vous demander au député de Dubuc d'aller s'asseoir? Je sais qu'il est dans la baie, mais là il s'en vient bien près de moi. J'aime mieux l'avoir loin de moi, M. le Président, et vous me comprenez, j'en suis certain. C'est gentil.

(21 heures)

Alors, vous comprenez, M. le Président, on veut décentraliser puis donner plus de pouvoirs aux municipalités. Et qu'est-ce qu'on fait avec le projet de loi? On pellette 350 000 000 $ de taxes aux municipalités, alors que M. Parizeau, que vous respectez tous, avait promis, lors de la proposition d'un pacte fiscal pour Montréal au maire Jean Doré, à l'époque, une décentralisation de pouvoirs fiscaux vers la ville. Et ce qu'on leur retourne, c'est 350 000 000 $. Ce qui touche Montréal, c'est 72 000 000 $. S'il y a une coupure de 6 % dans l'ordre des salaires, il reste un résidu de 52 000 000 $.

Là, aujourd'hui, ce matin, ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys posait une question au ministre des Affaires municipales, parce que la Communauté urbaine de Montréal, il faut bien se comprendre, il y a la ville de Montréal puis il y a la Conférence des maires de la banlieue... Il faut bien comprendre que la Conférence des maires de la banlieue n'est plus dans l'union municipale, l'UMCQ. Elle n'est plus là-dedans. Donc, on est, nous autres, là, avec 28 maires, le maire d'une grande ville... Et puis là la communauté urbaine a décidé de demander au ministre d'inclure la communauté urbaine dans le projet de loi en ce qui a trait à la récupération de 6 % des coûts de la main-d'oeuvre. Là, ce dont on m'a informé, c'est que le ministre des Affaires municipales, aujourd'hui, et le premier ministre ont fait une conférence de presse pour dire que, le 30 janvier, s'il n'y pas des ententes, il y aura une loi spéciale. Ça «couvre-tu» la ville de Montréal? Ça «couvre-tu» la ville de Trois-Rivières, la ville de Chicoutimi? Est-ce que c'est une majorité de villes ou une minorité de villes? Je me suis informé: Est-ce que vous avez des documents? Avez-vous des pièces que... Avant de faire mon discours ce soir, devant vous, M. le Président, j'ai dit: Je vais m'informer. Ah, il a dit: Il n'y a pas de documents, c'est juste une conférence de presse.

Alors, là, on a toutes les villes au Québec qui font des budgets. Elles font toutes des budgets. Elles doivent les adopter avant le 31 décembre. Et là je me demande où on s'en va. On s'en «va-tu» vers l'Épiphanie pour passer avant l'Immaculée Conception? Je ne sais pas. Là, les villes qui font un budget, bien, on peut peut-être couper 6 %, peut-être 5 %, peut-être 4 %. Mais, s'il y a quelques villes, plusieurs villes qui ne s'entendent pas, qui n'ont pas négocié une nouvelle convention collective avec leurs syndiqués, car on sait bien que, dans la majorité des grandes villes et des moyennes villes au Québec, il y a des unités syndicales qui représentent les employés... Mais on ne sait pas. Dans la conférence de presse... Est-ce qu'il y a 20 villes qui n'ont pas eu d'entente, 25 villes? On ne le sait pas, M. le Président.

Donc, pour la première fois dans l'existence du Québec, M. le Président, cette année, on a un projet de loi qui couvre la ville de Montréal, qui lui dit: Vous pouvez faire un budget, vous pouvez arriver 125 000 000 $ dans le trou. Nous autres, le gouvernement du Québec, on ne va pas s'engager à ce que, ce montant-là, si vous ne le trouvez pas, on va le rendre par une subvention. Il n'y a aucun engagement formel. Et là aujourd'hui on dit: Là, si vous négociez avec vos syndicats... Mais ils n'ont pas négocié à la ville de Montréal, là, il faut qu'ils négocient avec les pompiers, les policiers. Puis à ce que je sache, les policiers à la Sûreté du Québec, ils n'ont pas eu 6 % de coupures, M. le Président.

Une voix: Oui, oui.

M. Bissonnet: Non, non, non. Ils n'ont pas eu 6 % de coupures. Vous avez dit: Ils ont fait un petit effort. Ils n'ont pas eu 6 % de coupures. Les seuls qui ont eu 6 % de coupures, ce sont les députés de l'Assemblée nationale, à ce que je sache. Les juges n'en ont pas eu, puis les pharmaciens, puis les médecins non plus.

Une voix: Bravo!

M. Bissonnet: Non, non, écoutez, il faut mettre les choses telles qu'elles sont. Alors, là, à Montréal, ils ont six gros syndicats, des syndicats solides. Il faut qu'ils négocient. Ils n'ont pas grand temps pour négocier, M. le Président. Ils n'ont pas grand temps. Alors, toutes les villes aujourd'hui peuvent faire un budget puis elles se doivent qu'il soit équilibré. Mais, avec la conférence de presse, M. le ministre, elles n'ont aucune garantie. On fera probablement, si toutes les villes n'ont pas négocié une coupure... On ne baissera pas les salaires, mais on va les couper de 6 %. Alors, si vous voulez passer une loi de 6 %, passez-là. Mais là vous êtes dans l'expectative. Alors, les villes vont se rencontrer avec leur gérant de la ville: Bien, on ne sait pas ce qu'ils vont faire à Québec, mais il est fort possible que, si on ne s'entend pas avec nos syndicats, ils vont être coupés de 6 %.

Une voix: Pas sûr.

M. Bissonnet: On n'est pas sûr, mais les villes n'ont jamais présenté de budget non équilibré. C'est la première fois que cet événement arrive avec ce projet de loi pour la ville de Montréal. Alors, moi, M. le Président, je suis... Parce que j'ai été maire d'une ville, à Saint-Léonard, et puis, nous autres, c'était un budget équilibré. Puis je me rappelle très bien, en 1977, M. le Président, à la ville de Saint-Léonard, il y avait 80 000 de population. Il y avait six conseillers. Il y en avait six. Le gouvernement du Parti québécois trouvait que ce n'était pas assez. Ils en ont mis 12. Savez-vous comment ça a coûté, ça, M. le Président, depuis 1978, de passer de six à 12 conseillers? On parle d'à peu près 150 000 $ par année, et ça fait, depuis ça, 20 ans. On parle de près de 3 000 000 $ que les citoyens de Saint-Léonard ont dû payer en salaires à des élus. Et je vous le dis, M. le Président, à six conseillers dans cette ville, c'était assez.

Et, en plus de ça, à cette époque-là, M. le Président, on a amené la formule du colistier. On a voulu, alors que l'élu municipal, c'est l'élu qui est le plus proche de la population, on a voulu dans les villes de plus de 20 000, avec ces mesures législatives, proliférer la naissance de partis politiques dans les villes. Regardez aujourd'hui dans les villes où il y a des partis politiques, et regardez dans les villes où il n'y a pas de partis politiques et vous allez voir que les chicanes municipales au conseil sont bien moindres, sont plus petites. Et il y a un consensus qui se fait entre les élus de ces municipalités pour travailler véritablement dans l'intérêt de chacun des concitoyens.

M. le Président, j'ai écouté avec attention ma collègue la députée de Marguerite-Bourgeoys, j'ai écouté avec attention mon collègue le député de Verdun et j'ai écouté aussi le député de Saint-Laurent, qui sont tous des députés qui sont dans la ville de Montréal, sur l'île de Montréal, et j'ai bien apprécié ce qu'ils ont dit, ces députés-là, sur les fonds de pension, la caisse de retraite des employés de la ville de Montréal. Il y a beaucoup d'employés, M. le Président, qui sont retraités de la ville de Montréal, mais les employés qui ont les moins bonnes pensions, qui ont fini avant l'année 1974, M. le Président, eux n'ont pas l'indexation, et ceux qui le sont depuis 1974 ont bénéficié de l'indexation. Parce que, dans un syndicat, c'est toujours les membres du syndicat, qui sont des travailleurs à l'emploi d'une municipalité, qui votent. Mais ceux qui ont pris leur retraite n'ont pas les moyens d'informer les autres membres et, à ce moment-là, c'est la classe qui est la plus défavorisée qui n'a jamais eu d'indexation. Et ces gens-là revendiquent cette indexation-là depuis plus de 15 ans, M. le Président. Et, à ce jour, ils n'ont pas eu raison, il n'ont pas eu gain de cause. Alors, avant d'aller regarder les fonds de pension, de retraite, posons-nous la question. Ça appartient à tous ces syndiqués.

M. le Président, moi, en tout cas, je ne sais pas ce qui va se passer, mais si je fais une conclusion avec la conférence de presse du premier ministre qui a dit, à Laval: Moi, je ne touche pas à la taxe de vente; 1 %, non, je ne touche pas à ça; les consommateurs, on n'y touchera pas, on va faire tout notre possible pour qu'on n'y touche pas... Moi, dans ma région, les citoyens ont eu des augmentations de taxes scolaires de plus de 75 % en deux ans. Alors, je trouve qu'il y a des limites. Et avec la conférence de presse qu'on a faite aujourd'hui, je ne sais pas ce que les villes, les maires de villes, les directeurs généraux et les directeurs du personnel vont comprendre là-dessus. Qu'est-ce qui va se passer? On négocie. À la ville de Saint-Léonard, où je suis député, M. le Président, ça a tout été fait. Les conventions collectives ont été rouvertes, puis il y a un budget qui s'en vient. Ils travaillent fort. Puis là vous allez passer une loi au mois de janvier, alors que ces employés-là, avec la municipalité, ont fait leur effort. Puis là, parce qu'il y aurait 50 villes ou 857 villes qui ne se sont pas entendues, vous allez couper de 6 % tous ces employés-là, qui ont déjà fait leur part? M. le Président, il y a quelque chose à s'inquiéter. Et je vous remercie de votre attention. Bonsoir.

(21 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jeanne-Mance. Nous allons maintenant céder la parole au député de Vachon. Alors, M. le député.


M. David Payne

M. Payne: Merci, M. le Président. Je pense qu'on ne devrait pas laisser passer facilement les propos de mon collègue de D'Arcy-McGee qui, tout à l'heure, dans un exposé en anglais, plus tôt, a sorti des chiffres qui ne correspondent pas à la vérité à mon avis. Je voudrais, par exemple, regarder la question des investissements. Ce n'est pas directement concernant le projet de loi tel quel, mais, comme il faisait l'essentiel de son discours à ce sujet-là, je pense que ça mérite un détour. Il parlait de fuites du capital de Montréal et des cadres supérieurs, et je voudrais lui poser la question: Qu'est-ce qu'il pense d'une étude qui a été faite tout dernièrement par la Royal Bank of Canada, la Banque Royale du Canada, qui a dit, et je le cite, que Montréal avait un développement économique, une performance sur le développement économique parmi les meilleures au Canada et que Québec ranks... Je vais le lire en anglais pour nos collègues anglophones. Elle a dit: «Québec ranks first with the Atlantic region for economic stability.» Je continue: «The steadiness of its economic growth and the diversity of its exports, to indicators used by the Royal Bank, have shown the most stability among the Canadian provinces.» Montréal a montré la plus grande stabilité, et le Québec en particulier, parmi toutes les provinces canadiennes dernièrement.

S'il ne croit pas la Banque Royale, peut-être qu'il aimerait regarder une autre entreprise multinationale de respectabilité incontestable, il s'agit de Price Waterhouse. Là, Price Waterhouse, dans une autre analyse complètement différente, a parlé du rang de Montréal parmi 25 villes à travers l'Amérique du Nord et il a regardé différentes entreprises. Regardez ce qu'ils ont trouvé et gardez à l'esprit ce que le député de D'Arcy-McGee vient de nous dire. Price Waterhouse nous informe que Montréal est le numéro un en rang dans toutes les 25 villes analysées en Amérique du Nord dans l'aérospatiale, le nombre de jobs créés et maintenus. On parle de haute technologie ici. Price Waterhouse parlait également de biopharmaceutique. Pour le nombre de jobs, où est-ce qu'on se situe dans toutes ces villes-là, les 25 à travers l'Amérique du Nord? Cinquième. En passant, ce n'étaient pas des petites villes, chacune des villes avait une conglomération de plus de 2 000 000. Des villes comme Philadelphie, comme Chicago, comme Boston, San Francisco, donc la grande ligue. On arrivait cinquième en biopharmaceutique. Dans les technologies de l'information, Montréal est arrivée septième. Dans le total du nombre de jobs créés et existant actuellement dans la haute technologie, on est arrivé septième sur 25. Dans le nombre d'entreprises, dans son ensemble, de haute technologie, on est arrivé neuvième. Bien malgré tout cela, l'agglomération, le total de la population à Montréal, on n'était que quinzième, donc pénalisé à cause de la taille. N'empêche qu'on est arrivé premier, cinquième, sixième, septième, septième et neuvième dans le rang en Amérique du Nord. Quelque chose d'assez exceptionnel.

Il a parlé aussi de taxes, le député de D'Arcy-McGee. Je voudrais sortir quelque chose qui concerne les incitations fiscales en ce qui concerne la recherche et développement à Montréal. À travers le Québec d'ailleurs, mais on parle de Montréal, par exemple, il ne faut pas oublier que l'investissement en capital est déductible d'impôt. C'est important, lorsqu'on arrive à intéresser quelqu'un à venir à Montréal, tout est déductible, tandis qu'aux États-Unis il devrait savoir que ce n'est pas déductible immédiatement. On est obligé, normalement, d'attendre cinq ans. Lorsqu'il parle des cadres supérieurs, est-ce qu'il sait que nos chercheurs, ici, sont attirés par le fait qu'ils ne paient pas de taxes? Ils ont un congé de taxes pendant deux ans de temps, jusqu'à 24 mois. Mais, s'il n'aime pas la théorie, il devrait regarder quelques faits, et je voudrais citer quelques exemples.

Si ça va si mal au Québec au moment où on se parle, comment se fait-il que Magnola ait investi 700 000 000 $ dernièrement, une entreprise d'origine japonaise? Aussi CP Forest, 460 000 000 $, une entreprise du Canada qui a choisi le Québec pour investir? Ou peut-être la modernisation de Pratt & Withney, qui auraient pu déménager une bonne partie de leurs opérations aux États-Unis, ce qu'ils n'ont pas fait. Ils ont investi 300 000 000 $, une entreprise US. On pourrait regarder Domtar avec son 48 000 000 $, Rolls-Royce, une entreprise d'Angleterre, dans la machinerie, 140 000 000 $. Je les ai rencontrés, d'ailleurs. Ils étaient fort intéressés à avoir les résultats de Montréal, les performances économiques de Québec et les incitations fiscales pour venir ici, au Québec. J'ai rencontré à Londres, dernièrement, M. Dowty – je dois avoir les chiffres pour M. Dowty quelque part... Oui, c'est ça. Pour leur implantation – vous devriez les connaître, c'est tout près de Mirabel – 110 000 000 $, une entreprise du Royaume-Uni. Sportec, même chose, acquisition de plastique, 75 000 000 $, une entreprise US. Bell Helicopter – ce ne sont pas des petites entreprises – Textron, United States, l'aérospatiale, 40 000 000 $, Bridgestone, Firestone, 40 000 000 $. Les pièces d'automobile Waterville TG, 23 000 000 $, une entreprise du Japon. Actuellement, il y a l'entreprise Mercedes qui cherche un endroit quelque part en Amérique du Nord, qui sont intéressés à Montréal. Pourquoi? Parce que nous avons l'essentiel pour créer les emplois. Nous avons une structure de taxation parmi les plus compétitives en Amérique du Nord. Nous avons une façon de les attirer, de les amener ici, à Montréal. J'en sais quelque chose. Mon frère qui est anglophone avait des offres souvent, pour aller au Texas, au États-Unis, avec un salaire alléchant. C'est formidable. Il a refusé parce qu'il trouve ça ici, la qualité de vie est ici, il y a des incitatifs pour rester ici, à Montréal.

Mais, moi, je vis une bonne partie de ma vie dans la langue anglaise et j'écoute régulièrement évidemment les médias anglophones. Et j'écoute, bien sûr, mes collègues, de D'Arcy-McGee parmi d'autres anglophones, avec le message dévastateur qu'ils racontent, le naufrage de Montréal. C'est ça, le message qu'ils envoient constamment. Mais c'est un discours pourri parce que les chiffres ne correspondent pas à ce qu'ils racontent comme ragots. Et c'est ça, le problème que nous avons actuellement au Québec. Et ce n'est pas déconnecté à la question nationale, c'est la même histoire que ça va mal à Montréal. C'est nos députés en face qui racontent cette histoire. Et, parmi les plus coupables, c'est mes collègues, malheureusement, les collègues anglophones. Ils disent dans leur langue ce qu'ils n'osent pas dire dans la langue française, ici, dans cette Chambre, parce qu'il y en a des gens ici, parmi mes collègues, qui prendraient plaisir à contredire ce qu'ils disent. Mais c'est ça, les deux cultures à Montréal. Les vrais séparatistes, les vrais partitionnistes, souvent ce sont les anglophones et les députés d'en face. Oui, franchement, M. le député. Je vais vous donner d'autres exemples.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: M. le Président, suite à l'intervention du député de Vachon, il nous prête une intention qui est d'être des partitionnistes. Je pense que ceux qui ont à coeur d'aller rencontrer les partitionnistes...

Le Vice-Président (M. Pinard): Avant de vous entendre sur la question de règlement, je tiens à mentionner, à ce stade-ci, qu'effectivement il y a eu des propos qui ont été tenus par le député de Vachon, prêter des intentions concernant, notamment, la partition. Et, de votre côté, vous conviendrez également, M. le député de Robert-Baldwin, que vous avez retourné d'une façon non équivoque la balle.

Alors, à ce stade-ci, je vous demanderais de continuer à travailler dans le calme qui nous est coutumier depuis 20 heures. M. le député de Vachon, je vous inviterais à poursuivre tout en maintenant votre allocution dans les règles qui nous régissent. M. le député.

(21 h 20)

M. Payne: Oui, M. le Président. J'ai une certaine difficulté à comprendre pourquoi on ne peut pas imputer des motivations aux partitionnistes. Il y a une phrase en anglais qui dit que ceux qui veulent porter l'habit, ce sont ceux qui sont effectivement touchés par les propos. Effectivement, je suis convaincu, M. le Président, que les partitionnistes travaillent contre les intérêts des Montréalais. D'accord? Il n'y a strictement rien d'antiparlementaire dans ce que je dis. Vous êtes d'accord avec moi?

Le Vice-Président (M. Pinard): Jusque-là, ça va.

M. Payne: D'accord. Et, souvent, j'ai la même impression en ce qui concerne nos députés d'en face, sans vouloir les nommer, que souvent ils embarquent dans le même genre de discours que les partitionnistes. Peut-être que c'est mon imagination. Je ne voudrais pas imputer des motivations ou des motifs aux députés de l'opposition, mais je pense que, plus profondément, c'est mes chiffres qui font mal aux députés de l'opposition. Alors, je vais continuer.

Bell-Northern Research, comment se fait-il qu'ils ont investi 350 000 000 $? Le député de D'Arcy-McGee, qui n'est pas à sa place actuellement, a essayé de me décourager. Je voudrais bien que vous puissiez arrêter.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Vachon, vous allez convenir que, si les députés sont en arrière du trône, ils ne sont pas en cette Assemblée. Alors, comme il est en arrière du trône...

Une voix: Il peut faire n'importe quoi?

Le Vice-Président (M. Pinard): Il peut faire n'importe quoi parce qu'il est hors de l'Assemblée. Alors, s'il vous dérange, à ce moment-là je vais demander au sergent d'armes de voir à ce que le député quitte l'enceinte. Mais, moi, je ne peux pas le voir s'il est en arrière du trône. Alors, allons-y.

M. Payne: O.K. Alors, Bombardier, 275 000 000 $, M. le député de D'Arcy-McGee; Ericsson Communications, 270 000 000 $, de la Suède; Merck-Frosst, 250 000 000 $. Tout cela, ça représente des investissements purs et directs à l'intérieur, ici au Québec, à Montréal. Petresa Chemicals, 160 000 000 $, une entreprise de l'Espagne. Voilà pour les investissements.

Oublions la théorie, regardons les faits. Et, lorsqu'on voit les faits, peut-être que les membres de l'opposition, ça leur fait mal, mais Montréal, ça ne va pas mal, lorsqu'on voit la transformation extraordinaire qu'on a vue depuis les derniers 15 ans. On était une ville manufacturière basée souvent sur le textile; on est maintenant les plus forts en Amérique du Nord dans les cinq domaines que je viens de mentionner. Pour moi, ça, ça représente, ça constitue une fierté, une fierté qui n'est pas toujours partagée, j'ai l'impression, par mes collègues d'en face. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Vachon. Nous allons maintenant céder la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Vous avez compris que j'ai été un peu surpris tantôt lorsque le député de Vachon accusait certains des députés libéraux d'être des partitionnistes, alors que ce sont ces mêmes députés qui ne se gênent pas pour aller sur toutes les tribunes pour défendre l'intégrité du territoire du Québec à l'intérieur du Canada, et que les plus grands partitionnistes, je pense, ce sont les députés d'en face, M. le Président.

Des voix: ...

M. Marsan: M. le Président, nous sommes ici ce soir...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Robert-Baldwin, je vais vous demander de retirer vos paroles.

Une voix: Lesquelles?

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'effet que les députés d'en face sont des partitionnistes.

M. Marsan: M. le Président, je veux m'exécuter. Les députés d'en face sont des séparatistes. «C'est-u» correct?

Le Vice-Président (M. Pinard): Ça va.

M. Marsan: Merci. J'aimerais, M. le Président, revenir au projet de loi du ministre des Affaires municipales. J'ai senti que le ministre des Affaires municipales est un petit peu gêné de présenter un projet de loi, lui qui, dans certains débats depuis plusieurs années, avait... On pouvait être d'accord ou pas d'accord avec le ministre des Affaires municipales, mais il avait toujours eu un minimum, en tout cas, je pense, de rigueur, particulièrement au niveau de la comptabilité dans son ensemble. Je ne sais pas, le pouvoir, ce que ça peut faire, M. le Président, mais on s'aperçoit qu'il y a une difficulté, et il nous présente un beau projet de loi de deux articles qui autorise la ville de Montréal à adopter, pour l'exercice financier 1998, un budget dans lequel l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables tient compte d'une augmentation anticipée des revenus et d'une diminution anticipés des dépenses jusqu'à concurrence d'une somme de 125 000 000 $.

M. le Président, est-ce que vous aimeriez ça, vous, et moi, et tous les Québécois, si on avait à la fin de l'année un déficit, on avait plus de dépenses que de revenus, et que, par un coup de baguette magique, un projet de loi de deux articles, on serait exemptés de payer une somme qui est due? Ça, c'est l'article 1. Et l'article 2 dit: Si vous n'êtes pas capables de le payer, bien, vous allez être obligés de le payer l'autre année subséquente.

Alors, on s'aperçoit qu'on a un projet de loi qui, de toute évidence, essaie de nous montrer qu'on va régler un problème cette année, mais on oublie complètement de parler de ce qui va arriver l'an prochain. Là aussi, M. le Président, on va être en sérieuse difficulté l'an prochain.

Alors, l'article 1, on indique 125 000 000 $ comme comptes à recevoir. La ville de Montréal devrait recevoir 125 000 000 $. Même si vous ne le recevez pas, M. le Président, on autorise, le gouvernement du Québec autorise la ville de Montréal à recevoir 125 000 000 $, même si on sait qu'elle ne le recevra pas.

Article 2: Si vous le recevez, au cas où il pourrait y avoir certaines autres modifications, par exemple une augmentation de taxes, eh bien, on va modifier le budget afin que cet équilibre se réalise. Donc, il pourrait y avoir pour les Montréalais cette mauvaise surprise, cette augmentation de taxes, M. le Président.

M. le Président, j'aimerais rappeler, comme mon collègue de Jeanne-Mance tantôt l'a si bien fait, cette belle promesse du Parti québécois, le 18 août 1994, en pleine campagne électorale. M. Parizeau promet un nouveau pacte fiscal à Jean Doré, à l'époque où M. Doré était le maire de la ville de Montréal. Alors, le chef du Parti québécois, M. Parizeau, a fait grand plaisir au maire Jean Doré, permettant de conclure un nouveau pacte fiscal qui reconnaît les caractéristiques de la métropole. Et on continue: «Je suis heureux de cette grande sensibilité et des engagements qui sont pris et je m'en réjouis au nom des Montréalais parce qu'ils servent leur intérêt», a souligné M. Doré. Le pacte fiscal, M. le Président, on l'a aujourd'hui. Et ce n'est pas un pacte fiscal, c'est une écriture comptable. On permet, le gouvernement du Québec, par une législation, se sert d'une astuce comptable pour permettre à la ville d'inscrire un compte à recevoir que, fort probablement, elle ne le recevra pas. Donc, obligation pour les Montréalais d'augmenter le fardeau de taxes.

M. le Président, j'aimerais revenir sur cette façon de faire la comptabilité. Je me suis permis de regarder encore une fois le livre du Vérificateur général et, au mois de juin dernier, il présentait son rapport pour l'année 1996-1997. Il nous indique: «Les états financiers publiés actuellement par le gouvernement ne sont pas des états financiers consolidés – ça, c'est l'ensemble des états financiers du gouvernement du Québec – parce que, selon l'Institut des comptables, ils n'incluent pas l'ensemble des activités et des ressources; ils portent sur les activités du fonds consolidé du revenu et du Fonds des services de santé. Ils ne comprennent donc pas les données financières de plusieurs entités, de plusieurs fonds. Compte tenu de l'ampleur des sommes en cause, les parlementaires – ça, c'est le Vérificateur qui parle, M. le Président – et les autres utilisateurs des états financiers du gouvernement sont privés d'une information adéquate et globale quant à une partie importante des activités financières dont le gouvernement est responsable.» Les parlementaires, la population, selon le Vérificateur, on est privés d'une information qui nous permet de voir vraiment les résultats financiers de ce gouvernement.

(21 h 30)

Et, toujours en juin 1997, on indique: «Le gouvernement du Québec est le seul gouvernement du Canada à ne pas présenter d'états financiers consolidés.» Ça, c'était il y a six mois, M. le Président. Dernièrement, la semaine dernière, le Vérificateur a présenté son rapport de demi-année, après six mois de la nouvelle année, et on indique de nouveau sur sa déclaration: «Comptes publics, éléments de reddition de comptes du gouvernement comportaient des commentaires quant au périmètre comptable du gouvernement. Je critiquais – c'est le Vérificateur qui parle – particulièrement la constitution des fonds spéciaux qui permet d'étaler sur plusieurs années certaines dépenses qui, autrement, seraient comptabilisées au fur et à mesure dans les états financiers du gouvernement. À l'aide de ces fonds, le gouvernement peut en effet contourner les règles comptables qu'il s'est données en inscrivant par amortissement ou par tranche des dépenses qu'il devait porter à ses livres dans l'année où il acquiert des biens ou effectue des déboursements, comme dans le Fonds de conservation et d'amélioration routier.

«Présentement – c'est le Vérificateur qui parle – les états financiers du gouvernement n'incluent pas toutes ces activités et ressources selon le périmètre comptable recommandé par le Conseil sur la comptabilité et la vérification dans le secteur public de l'Institut canadien des comptables agréés. Je déplore le fait que la publication d'états financiers consolidés se fasse toujours attendre et que les fonds spéciaux continuent de se multiplier.»

M. le Président, ce soir, nous avons une nouvelle astuce. Après avoir eu les commentaires du Vérificateur sur les états financiers qui ne sont pas consolidés, et on sait depuis que le gouvernement du Parti québécois a généré des déficits dans tous les réseaux, que ce soit la santé, l'éducation, les universités, les cégeps, les municipalités... eh bien, comme deuxième étape, le Vérificateur disait: Comme astuce, ils ont créé des fonds ou des entités, nous en avons plusieurs depuis l'arrivée de ce gouvernement: le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier; le Fonds de gestion des départs assistés; le fonds relatif aux technologies de l'information; le Fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale. Ça, c'était la deuxième tranche.

Aujourd'hui, c'est la troisième, M. le Président, et j'ai hâte de lire le rapport du Vérificateur, le prochain rapport qu'il nous donnera au mois de juin sur cette astuce comptable qui permet d'inscrire un compte à recevoir à une ville alors qu'on ne sait même pas si on va le recevoir dans l'année, et on sait que les villes sont liées par l'obligation d'atteindre leurs objectifs d'équilibre financier. M. le Président, je pense que ces faits-là, un après l'autre, sont de plus en plus troublants et j'ai bien hâte de lire les éditoriaux qui vont suivre la publication de ce projet de loi.

M. le Président, je me suis permis de consulter quand même certains éditorialistes pour voir un peu comment les gens réfléchissent sur l'approche du ministre des Affaires municipales envers les municipalités. J'ai bien lu Mme Agnès Gruda, qui parle de la mauvaise blague du ministre, elle le nomme, et on sait que c'est le ministre des Affaires municipales: «Les mesures annoncées hier par le ministre Rémy Trudel – Oh! excusez, M. le Président, par le ministre des Affaires municipales – permettront à Montréal de présenter un budget équilibré avant la fin du mois, mais ce budget sera une fiction qui a peu de chances de survivre à la dure réalité des choses.» Ça, ce n'est pas le Parti libéral qui dit ça, M. le Président. «Ceux qui croyaient encore à la possibilité d'un pacte fiscal – je le rappelle, Montréal, jeudi 18 août 1994, en pleine campagne électorale – entre Québec et sa métropole n'ont qu'à s'en prendre à leur propre naïveté. Non seulement le ministre des Affaires municipales n'a-t-il annoncé aucun mécanisme récurrent permettant de soulager la ville, mais, en plus, il n'avait aucune aide ponctuelle à offrir à Montréal pour traverser la crise.» La seule aide qu'il nous offre dans un projet de loi de deux articles, c'est d'inscrire un compte à recevoir. Puis le deuxième article: Bien, si vous ne le recevez pas, augmentez vos taxes. M. le Président, promesse du Parti québécois en pleine campagne électorale. Félicitations du maire de Montréal à l'époque!

À toutes fins pratiques, ce que Mme Gruda nous dit, c'est que la ville est en tutelle et que c'est une tutelle qui peut être plus ou moins discrète. «Cette tutelle serait un moindre mal si ses prévisions s'appuyaient sur quelque chose de solide, mais cela ne tient uniquement que sur du papier. Les compressions de la masse salariale, encore faut-il les négocier.» Puis ce qui est beau dans le projet qu'on présente aujourd'hui, on apprend, en même temps que le projet est discuté en cette Chambre, que le ministre et le premier ministre, qui annonce en grande pompe qu'il va donner, jusqu'au 31 janvier, à chacune des municipalités le choix de s'entendre avec leur syndicat pour réduire de 6 % les masses salariales. Et de nouveau, M. le Président, avec la façon dont on était habitués d'avoir des dates butoirs avec le premier ministre négociant, eh bien, on peut s'attendre, là encore, à voir plusieurs délais. Ce dossier dure et perdure. Ça fait quand même depuis le budget où certaines coupures ont été annoncées, particulièrement celles dans le domaine municipal. Eh bien, on ne vient que de nous identifier encore une fois une date butoir.

M. le Président, j'aimerais également souligner un autre article, Mme Katia Gagnon et Gilles Gauthier, dans La Presse du 5 novembre dernier, toujours intitulé par le nom du ministre des Affaires municipales, au maire Bourque: Aide-toi et Québec t'aidera . Le 18 août 1994, c'était Parizeau promet un nouveau pacte à Doré . Aujourd'hui, c'est Aide-toi et Québec t'aidera . Je pense que le message est clair, c'est un engagement du Parti québécois qui n'a pas été tenu, un autre de ses nombreux engagements qui n'ont pas été tenus, M. le Président.

Si on poursuit la recherche que j'ai pu faire avec certains de nos collègues, eh bien, dans le journal Le Devoir , cette fois: «Plutôt que le pacte fiscal promis, le gouvernement indique au maire comment combler son manque à gagner de 125 000 000 $.» Belle indication, M. le Président: inscrivez un compte à recevoir, 125 000 000 $, puis tout va être réglé. «Un gros bout de pensée magique», selon le RCM.

M. le Président, je pense que, lorsqu'on lit les nombreux commentaires qui ont été faits sur cette réforme du ministre de la Santé, particulièrement sur cette surprise, un projet de loi de deux articles qui, à toutes fins pratiques, n'est qu'une astuce comptable, eh bien, on peut s'apercevoir qu'il y a vraiment des difficultés majeures dans ce gouvernement.

D'autres articles: Pluie de critiques sur le budget , Un budget illégal , et je pense que ça a été longuement documenté par l'opposition libérale et aussi les membres du conseil municipal, M. le conseiller indépendant Sammy Forcillo, qui n'a pas hésité à qualifier la ville de Montréal de succursale du gouvernement du Québec. Lorsque l'on permet à une municipalité de faire des déficits, il y a un problème. Je pense que, là aussi, c'est toute l'interprétation qu'on peut faire à ce projet de loi qui va permettre à une municipalité d'inscrire des comptes à recevoir alors que ces comptes ne seront pas reçus.

M. le Président, je pourrais continuer. Il y a plein de ces articles qui ont, au fil des jours, démontré que ce gouvernement est en train de descendre dans les plus bas fonds des principes de la comptabilité et de nous obliger à constater, comme opposition officielle, que ce sont des astuces comptables, maintenant, qui mènent le gouvernement.

Je voudrais rappeler ce que le député de Laporte disait sur les nombreux fonds qui ont été créés, les nombreux déficits des différents réseaux. Eh bien, après avoir écouté l'exposé du député en cette Chambre, le Vérificateur général a même confirmé ce que le député de Laporte avait affirmé. Je pense, M. le Président, que nous assistons à des difficultés de plus en plus sérieuses par rapport à ce gouvernement.

(21 h 40)

Mr. Speaker, on behalf of many of my constituents, I'd like to recall that information, on Thursday August 18th, 1994 – at the time, it was electoral time – Mr. Parizeau pledge... «Mayor Jean Doré came as close as he could to endorsing Parti québécois leader, Jacques Parizeau, yesterday, without actually saying the words». And today, Mr. Speaker, what we have, we have a new bill with two articles authorizing the receivable account, which, in accounting, is a really bad way to give the proper statement to anyone.

M. le Président, vous me faites signe que le temps s'achève, eh bien, j'aimerais, à titre de conclusion, rappeler comme mes collègues, le député de Verdun, le député de Jeanne-Mance, la mise en garde qui a été faite au gouvernement d'être très prudent, surtout s'il a l'intention de toucher au fonds de pension des pompiers, des policiers pour régler son problème, surtout si ces façons d'agir ne sont pas faites avec l'acquiescement des syndicats et de leurs représentants.

Je rappelle également les différentes astuces. On a parlé des réseaux qui sont en déficit très, très élevé, des états financiers qui ne sont plus consolidés, qui ne sont pas consolidés. Déficit dans le domaine des hôpitaux à des niveaux record, déficit au niveau des cégeps, des universités. Les nombreux fonds qui sont créés, eh bien, on essaie de payer l'épicerie, les dépenses courantes à partir des fonds, donc on diminue la dépense, on la reporte sur plusieurs années, et, là encore, M. le Président, c'est pour cacher la situation, c'est pour démontrer, du côté du gouvernement, qu'on veut atteindre l'équilibre ou le déficit zéro, alors que, dans les faits, il faudra payer sur plusieurs années. Simplement l'exemple des départs assistés, qui vont coûter près de 3 000 000 000 $ à l'État, eh bien, ils vont être amortis ou échelonnés sur 16 ans. Alors, imaginez ceux qui auront à payer, dans 16 ans, les décisions que ce gouvernement-là prend aujourd'hui!

M. le Président, je pense que la plus belle farce dans ce dossier, c'est vraiment la promesse du Parti québécois avec son chef, à l'époque, qui promettait contre vents et marées qu'il allait donner à Montréal le souffle de vie, le pacte fiscal. Eh bien, c'est vraiment très pauvre. Je pense qu'il n'y a plus de pacte fiscal. De nouveau, c'est encore une fois une promesse du gouvernement péquiste qui n'est pas réalisée. Un espoir, M. le Président? Oui. Un espoir, eh bien, c'est que ce gouvernement sera sûrement remplacé bientôt par un autre gouvernement, celui de notre formation...

Une voix: Bravo!

M. Marsan: ...qui va créer de l'emploi, qui va créer de la richesse, qui va respecter ses partenaires. En terminant, encore une fois, c'est la vérité, M. le Président, à la face de cette Assemblée, la promesse du Parti québécois, en 1994, d'avoir un pacte fiscal pour Montréal, vous ne l'avez pas réalisée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant céder la parole au député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Merci beaucoup. Ça me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 183 concernant le budget de la ville de Montréal, budget qui s'inscrit dans la foulée de factures du gouvernement du Québec qui sont pelletées à Montréal à la hauteur de 80 000 000 $. C'est l'impact sur 1998 de l'action gouvernementale du Parti québécois.

Bon, évidemment, on pourrait passer rapidement. Lorsqu'on regarde article par article, ce n'est pas le projet de loi le plus long, il tient en une page, ni plus ni moins, trois articles. Avant d'aborder le contenu, permettez-moi quand même de mettre une mise en contexte. Lorsqu'on a à considérer le budget de la ville de Montréal, il faut aussi se demander dans quel contexte Québec intervient, dans quel contexte Québec, sous la gouverne du Parti québécois, a décidé d'entreprendre une opération, une mégaopération de pelletage de factures. On sait, je viens de le dire pour Montréal, un impact, pour 1998, de 80 000 000 $. On sait que, pour le monde municipal, c'est à la hauteur de 375 000 000 $. Ce qu'il est important de se demander pour l'ensemble des Québécois – parce qu'on parle de Montréal, là, mais on parle d'une opération qui se fait à la grandeur du Québec, qui a des impacts sur tous les Québécois et les Québécoises – ce qu'il faut se demander, c'est: Est-ce que ça vaut la peine? Le contexte, c'est ça. À quoi ça sert de faire ce pelletage de factures? Les gens qui sont chez eux peuvent se demander: Bien, si Québec n'a plus à faire ces paiements et que c'est le monde municipal qui va les faire demain, donc Québec fait une économie, donc il va y avoir moins de dépenses, à Québec.

Ce sont les mêmes gens, nos concitoyens, les gens qu'on représente, qui savent très bien, dans le domaine de la santé, qu'il y a eu des coupures. On les voit; les impacts sont là, quotidiens. Pour ceux qui visitent les hôpitaux, malheureusement pour eux, ils les vivent. Pour les autres, les plus chanceux, qui n'ont pas à se rendre à l'urgence ou dans les hôpitaux, ils le voient dans les premières pages des journaux. Ils constatent l'effet dramatique des coupures du gouvernement du Parti québécois, notamment de celui qui est premier ministre actuellement.

Ils les voient aussi, lorsqu'ils ont des enfants, dans le domaine de l'éducation. Ils voient l'ensemble des services qui existaient avant qui ne sont plus disponibles maintenant. Ils voient leurs enfants parfois ne pas avoir de manuel scolaire, alors que la loi prévoit que chaque enfant doit avoir un manuel scolaire, alors que le gros bon sens, M. le Président, devrait commander à un gouvernement le moindrement connecté sur sa mission principale d'offrir ce soutien pour préparer l'avenir. Après tout, à quoi ça sert un gouvernement, M. le Président, si ce n'est pas à faire progresser, à préparer l'avenir? C'est à ça qu'on s'attend d'un gouvernement.

Donc, mettons ce projet de loi dans son contexte. Les gens se disent, doivent se dire: Mais, avec toutes ces coupures du gouvernement du Québec, tout ce pelletage, il doit y avoir tout un ménage qui se fait à Québec. Justement, M. le Président, c'est le grand malheur de l'activité gouvernementale du Parti québécois.

Lorsqu'on regarde le livre des crédits 1997-1998, volume 1, Crédits supplémentaires 1 , lorsqu'on regarde le budget de dépenses – on parle des dépenses qui sont coupées à la santé, à l'éducation, on parle des dépenses que normalement Québec ne ferait plus parce que pelletées dans la cour des municipalités – on s'aperçoit de quoi, M. le Président? On s'aperçoit qu'en 1996-1997 – pas dans l'année dans laquelle nous sommes présentement, l'année passée – les dépenses totales du gouvernement, 40 522 000 000 $. Avec toutes les coupures qu'on a connues, les gens à la maison doivent se dire: Mon Dieu! ça doit être descendu à 30 000 000 000 $, cette affaire-là; on a tellement coupé. Bien, le 40 522 000 000 $, à la fin de cette année, avec toutes les coupures escomptées, les dépenses seront de 40 275 000 000 $. Autrement dit, 246 000 000 $ de moins seront dépensés par Québec. En même temps qu'on coupe les dépenses dans l'éducation de 553 000 000 $, 5,8 % de coupures à l'éducation, en même temps qu'on coupe la santé de 411 000 000 $, 3,2 % qui sont coupés là, lorsqu'on regarde le budget total de l'État, et je fais fi du 375 000 000 $ dans le monde municipal, 80 000 000 $ à Montréal, oui, toutes ces coupures, le résultat net de cette autoflagellation, M. le Président, 246 000 000 $ de moins, seulement 246 000 000 $ de moins, 0,6 %. Pas 6 %!

Le gouvernement du Québec prétend faire des coupures de 6 % dans les masses salariales alors que son propre budget de dépenses ne sera coupé que de hauteur de 0,6 %. Si le monde municipal doit maintenant assumer des factures de Québec, comment ça se fait que Québec n'a pas moins de factures à payer? Pourquoi on fait cette opération? Si c'était pour faire le ménage dans les finances publiques, on pourrait toujours dire: Bon, peut-être que les moyens ne sont pas les meilleurs, peut-être que les priorités ne sont pas aux bonnes places; c'est évident que ce n'est pas dans l'éducation et dans la santé qu'on doit le faire. Mais, pire que ça, M. le Président, non seulement ce n'est pas dans les bons endroits qu'on coupe, mais on coupe pour rien, il n'y a pas de ménage de fait dans les finances publiques. Et vous me demandez de venir plaider, de venir parler sur un projet de loi n° 183 qui propose – et j'y reviendrai tantôt – ni plus ni moins que de triturer les budgets pour faire semblant, comme tout le discours du gouvernement du Parti québécois tient lieu d'apparence, faire semblant qu'on fait le ménage. C'est une honte, M. le Président! C'est une honte! Et les Québécois doivent savoir ce qu'il y a dans les budgets du gouvernement du Québec. On coupe de 5,8 % dans la santé. Ce n'est pas la meilleure place pour couper. Dans l'éducation, 5,8 %... 3,2 % dans la santé, mais, au ministère du Revenu – un ministère qui fait parler de lui pas mal ces temps-ci, on en convient – 24 % d'augmentation. Le saviez-vous? Il y a des ministères qui ont des augmentations. Là, je ne parle pas des coupures de 6 %, je parle d'augmentation, 24 % d'augmentation au ministère du Revenu. Il n'y a personne de l'autre côté qui en a parlé. C'est dommage qu'on ait de la misère, du côté du Parti québécois, à dire la vérité, à dire les choses telles qu'elles sont.

(21 h 50)

Le ministère du Revenu, 24 % de hausse. Le ministère du Conseil du trésor, une hausse de 61 % – hausse – dans les dépenses, de 61 %. Le ministère des Finances, M. le Président, on ne peut pas dire que c'est le ministère qui rend le plus grand nombre de services aux Québécois, là, ça, hein? On est loin des salles d'urgence, on est loin des salles de classes. M. le Président, la palme revient à celui qui était, croyait-on encore, le numéro deux, maintenant relégué au niveau du numéro trois du Parti québécois, le ministère des Finances: 135,7 % d'augmentation dans le budget. Alors, là, les gens arrivent puis ils nous disent: Oui, mais toutes ces affaires-là, les factures, les coupures, c'est parce qu'on va préparer l'avenir. Avec ça, on va avoir fait le ménage. Bien, M. le Président, on n'a rien nettoyé pantoute. La poussière, elle est sous le tapis. Le tapis, c'est le discours du gouvernement du Parti québécois qui dit: Nous approchons d'un zéro quelconque. Nous coupons dans les dépenses. Bien, voyons donc! C'est marqué ici, dans les documents du Parti québécois: 135 % d'augmentation aux Finances, 61 % d'augmentation au Trésor, 24 % d'augmentation au Revenu. Pendant ce temps-là, dans la santé puis dans l'éducation, on coupe. Au net-net, 0,6 % de coupures, 200 000 000 $ de coupures, quand il y en a pour 375 000 000 $ qui est transféré aux municipalités, pendant qu'il y en a pour 500 000 000 $ dans l'éducation, 411 000 000 $ dans la santé, on s'est autoflagellé pour rien. Ça n'a rien donné.

On est là aujourd'hui et on vient nous présenter un projet de loi supposément dans cette grande manoeuvre de ménage. Mais la poussière est partout, puis le ménage, il va falloir qu'il y ait un gouvernement qui suit qui aura le courage de le faire, pas l'apparence de courage, pas le discours de courage, le courage de le faire.

Je vois le ministre des Affaires municipales qui ne le sait même pas, M. le Président. Il n'est même pas au courant qu'ils ont 0,6 % de coupures. C'est ça qu'ils ont fait. C'est une vraie honte, M. le Président, de faire mal aux Québécois comme ils font mal aux Québécois, aux jeunes dans les salles de classes, à ceux qui sont au cégep, à l'université. L'avenir du Québec qui est pénalisé, et pourquoi? Pour un résultat de coupures de 246 000 000 $. Le ministre des Affaires municipales est aussi bien de retourner dans ses documents plutôt que de réagir.

Alors, je reviens à son projet de loi, M. le Président. Agnès Gruda... Ce n'est pas moi qui vais le commenter, son projet de loi, référer à des gens de Montréal, qui suivent la réalité de Montréal et qui ont dit ceci à propos du budget, le projet de loi sur le budget de Montréal: «Ce budget sera une fiction qui a peu de chance de survivre à la dure réalité des choses. Ceux qui croyaient encore à la possibilité d'un pacte fiscal entre Québec et sa métropole...»

Mon collègue en parlait tantôt, le pacte fiscal. Je me souviens encore, M. le Président, vous voyez cette scène, 1994, c'est l'été, la terrasse de l'hôtel de ville à Montréal, M. Parizeau et M. Doré réunis ensemble, promesse, la main sur le coeur, d'un pacte fiscal. La farce! La farce a trop duré, M. le Président. Pacte fiscal dans la première année, mais, dans la deuxième année, dans la troisième année, on l'attend encore, le pacte, il ne viendra jamais. Il ne viendra jamais. Ce qui vient, c'est des factures, pour rien. Je le répète: Des factures pour rien, parce qu'il n'y a rien de changé dans le budget des dépenses du gouvernement du Québec. Et je ne vous parle pas de la colonne des revenus, M. le Président. Tout le monde sait, au Québec, qu'on ne peut pas s'attendre d'un gouvernement du Parti québécois à un développement économique qui va nous amener des revenus. On peut s'attendre à des hausses de taxes.

Il y a un autre projet de loi qui est ici, en Chambre, 161, hausse de TVQ, 1 %, 600 000 000 $. Il y en a, des hausses comme ça dans plein de secteurs: l'immatriculation, le gaz. Il y en a pour 1 000 000 000 $. Alors, pour les taxes, ça va, la colonne des revenus, on augmente les taxes. On surcharge les Québécois, enlève la compétitivité au Québec, pénalise l'avenir. Ça, c'est une logique qu'on dirait au Parti québécois. Des beaux discours, ils font des beaux discours, par exemple. Mais, lorsqu'on regarde la réalité des faits, c'est tragique. Agnès Gruda, donc, nous parle du pacte fiscal, elle dit: «Ceux qui croyaient encore à la possibilité d'un pacte fiscal entre Québec et ses métropoles n'ont qu'à s'en prendre à leur propre naïveté ou d'avoir écouté les discours du gouvernement du Parti québécois, discours qui les ont amenés à croire des choses qui ne se réaliseront jamais. Non seulement le ministre n'a-t-il annoncé aucun mécanisme récurrent permettant de soulager la ville, mais, en plus, il n'avait aucune aide ponctuelle à offrir pour aider Montréal à traverser la crise. Le robinet de la subvention de novembre que l'on faisait couler depuis trois ans est fermé, fini, ne veut plus.»

Évidemment, ça, le robinet, c'est celui qui est d'acheter à rabais des actifs que les Montréalais possédaient. Ils ont fait le choix de faire ça, je ne pense pas que c'était le meilleur choix. Peut-être que c'était un peu imposé par Québec, toujours un gouvernement qui a le consensus dans le discours, mais la tutelle dans l'action. Agnès Gruda dit ceci: «Pour aider Montréal à boucler son budget, le gouvernement l'autorise...» Écoutez, ça, c'est une phrase magnifique, formidable. Imaginez-vous que vous êtes un homme d'affaires, une femme d'affaires, et vous voyez que les gouvernements, eux, ont le droit de faire ça, ces choses-là. Allez voir votre banquier avec une stratégie comme celle-là, vous n'irez pas loin. «Pour aider Montréal à boucler son budget, le gouvernement l'autorise à inscrire 71 000 000 $ dans la colonne des économies salariales – Ha! faites semblant que c'est déjà arrivé; la magie continue, le magicien est au pouvoir – et 53 000 000 $ dans celle des compressions des services.» Autrement dit, fermez-vous les yeux, mettez des lunettes roses et imaginez que vous avez été capables de faire des compressions de 53 000 000 $ puis qu'il y a, en plus, un 71 000 000 $ d'économies salariales. Imaginez-vous qu'il y a 125 000 000 $ qui apparaissent comme par enchantement dans votre budget. C'est ça que je vous offre, la magie. Imaginez! Mais, dans les faits, ça n'arrive pas. Ce n'est pas parce qu'on fait un projet de loi... Malgré tout le respect que j'ai pour cette institution, M. le Président, et pour la capacité que nous avons d'agir, nous n'avons pas encore, en cette Assemblée nationale, la capacité de faire apparaître dans le concret ce que le gouvernement voudrait qu'on imagine. Ça n'arrive pas comme ça. Il faut vivre dans le réel.

Évidemment, la même approche a été utilisée par ce même gouvernement avec son faux zéro, vous savez, ces écritures comptables qui ne collent pas à la réalité, l'ensemble des fonds. Mon collègue de Chomedey me rappelle cette expression de plus en plus à la mode qui s'appelle «zapper». On zappe les postes de télévision, c'est le sens qu'on lui connaissait avant. Mais, maintenant, on zappe des dépenses. Mais elles existent, elles continuent d'exister. C'est juste qu'elles n'apparaissent pas au bilan final. Quand le gouvernement du Parti québécois ferme sa caisse, il veut nous faire croire qu'il est arrivé à un résultat. Mais, quand on fouille dans les tiroirs, en dessous de la table, on s'aperçoit quoi, M. le Président? On s'aperçoit qu'ils ont créé une tonne de fonds: le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier, une belle place pour mettre des dépenses qui n'apparaîtront pas dans le relevé final à la fin de la journée; le Fonds de gestion des départs assistés; le fonds de gestion de l'équipement routier. Des fonds comme ça, M. le Président, il y en a des tonnes, des tonnes. Alors, évidemment, on essaie d'utiliser la même technique pour Montréal.

Agnès Gruda dit ceci: «Cette discrète tutelle budgétaire serait un moindre mal si ces prévisions s'appuyaient sur quelque chose de solide, mais cela se tient uniquement sur papier. Les compressions de la masse salariale, encore faut-il les négocier. Les réductions de services, il faut les mettre en pratique. Quant aux 10 000 000 $ que l'on prévoit épargner en dégonflant le coussin des imprévus, il suffirait d'une grosse tempête de neige pour les réduire à néant.» Le coussin des imprévus!

(22 heures)

Dans un budget, une autorité responsable prévoit une portion pour les imprévus. Le gouvernement veut couper cette portion et nous faire croire que maintenant il n'y a plus d'imprévus. Mais, dans tout budget, ils sont là, il faut les garder, et on va donc reporter le problème à plus tard.

Je reviens sur cette notion du gouvernement du Parti québécois qui essaie de nous faire croire qu'ils sont courageux, qu'ils font le ménage. Il n'y en a pas, de ménage, M. le Président. Agnès Gruda nous le dit: Une tempête de neige et ça vole en éclats. C'est comme cette notion de surplus, M. le Président, cette notion d'utilisation des surplus actuariels. Je dois avouer – je ne sais pas si je suis le seul en cette Chambre – que j'ai toujours... Et ce n'est pas le premier cas avec Montréal. Ça a été fait aussi avec les fonctionnaires, on est allé chercher des surplus. D'abord, les surplus, à qui appartiennent-ils, premièrement? Notamment à des retraités à qui on n'a jamais demandé leur avis, on est allé piger dans la cagnotte. Les surplus, ça alimente un fonds qui paie des pensions à ces gens-là. Il y a des mots pour ça. D'ailleurs, ils sont inscrits au Code criminel, ces mots-là; je ne les utiliserai pas, parce qu'on n'a pas le droit de les utiliser ici. Mais vraiment, c'est ce qui s'est passé: on est allé chercher de l'argent à quelqu'un sans lui demander son avis. Bon, c'est une chose.

Mais là où j'ai un gros, gros problème, c'est: S'il y a des surplus, pourquoi y a-t-il des surplus? Pourquoi est-ce que ça se trouve là, les surplus? Vous savez pourquoi, M. le Président. Ces surplus-là, ils existent parce qu'on a planifié des cotisations en fonction d'un certain taux de rendement. Or, nous sommes à une période où nous avons traversé une période de marché haussier, et donc, les rendements sont supérieurs; donc, des surplus. Est-ce que vous pensez que les marchés haussiers, ça dure l'éternité, à l'infini? La vérité, malheureusement, M. le Président, c'est qu'il y a des fois aussi des mouvements dans l'autre sens, et c'est pour ça que les surplus sont utiles: c'est que, lorsque le marché baissier arrive, il est là pour équilibrer les fonds de pension.

Le gouvernement du Parti québécois vient chercher ces surplus pour donner l'apparence d'un ménage qui n'est vraiment pas fait, parce que les coupures n'ont toujours pas été réalisées dans le concret, parce qu'on en a donné au ministre des Finances pour 135 %, on en a donné au Conseil du trésor pour 61 %, au Revenu, pour 24 %. Le ménage n'est pas fait, l'autoflagellation ne sert à rien dans la santé et dans l'éducation, mais on va chercher en plus des surplus pour se payer ces dépenses-là et, demain, ces caisses seront à sec, seront déficitaires parce qu'on est allé puiser des surplus qui ont été gagnés grâce à un marché haussier, et, quand le marché, quand le cycle – tout est cyclique – va se retourner, nous allons être dans un problème incommensurable, d'une dimension tragique.

Encore une fois – et je termine, M. le Président, vous m'indiquez que je dois terminer – comme dans l'éducation, où c'est l'avenir du Québec qu'on pénalise, ce que l'on fait à l'égard des surplus, ce que l'on fait à l'égard de l'ensemble des coupures, pour un résultat nul, un résultat de 0,6 %, c'est l'avenir du Québec qu'on pénalise. Et je condamne, M. le Président, l'action de ce gouvernement, qui parle mais qui fait dommage au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Y a-t-il d'autres intervenants? Alors, M. le député de Chomedey, je vous cède la parole.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. À mon tour, il me fait plaisir de prendre la parole au nom de notre formation politique concernant le projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal, Bill 183, An Act respecting the budget of Ville de Montréal.

Mr. Speaker, as you know, under section 133 of the Constitution Act, 1867, as interpreted by the Supreme Court, notably in the Blaikie case, which is a decision rendered on December 13th, 1979, it's incumbent upon the provinces, including Québec, to provide...

M. Fournier: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Châteauguay, oui. C'est sur une question de règlement?

M. Fournier: Oui, si vous me permettez. Pour permettre à cette Chambre d'être éclairée par les propos de mon collègue de Chomedey, peut-être, si on pouvait vérifier le quorum?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous n'avons pas quorum actuellement. Je vais donner quelques secondes pour régler la situation.

Alors, M. le député de Chomedey, si vous voulez poursuivre.

M. Mulcair: Ah oui! Le ministre responsable des Relations avec les citoyens est arrivé avec ses cartes de jeu en main, nous expliquant qu'il était en train de jouer aux cartes. Ce n'est pas très digne pour notre Parlement, M. le Président, mais s'il trouve que c'est important!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon, très bien, ça va. Alors, je vous inviterais à ne pas passer de remarques de part et d'autre pour ne pas susciter des remarques. Puis, effectivement, on ne doit pas souligner...

Alors, je reprends. Je vous inviterais à vous asseoir, s'il vous plaît, ceux qui circulent. M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, on disait que le projet de loi n° 183, dans son titre de la version anglaise, «An act respecting the budget of Ville de Montréal», one needn't be a member in good standing of the Québec Order of Translators and Interpreters to understand that whatever else that is, that's not an English language title. Even if the people across from us are not very fond of the fact, under section 133 of the Constitution Act 1867, as interpreted and applied by the courts, most notably in the Blaikie case, and, of course, thereafter in such cases as the Manitoba reference, statutes in Québec as in Manitoba, as now constitutionally in New Brunswick, and by convention and legislation in Ontario, statutes in Québec must be bilingual. And if you look at the version that we have before us here, you see obviously that the English version is not that. It contains many words that are not in the English language, and it's regrettable that this Government can't see it frankly within itself of course to obey the dictates of the Supreme Court of Canada, as said out under section 133 of the Constitution Act 1867.

Be that as it may, Mr. Speaker, one of the most surprising aspects of this Bill, of course, is the fact that it reflects the tendency of this Government to constantly pretend that things can happen just because they say they shall.

M. le Président, ça vaut la peine de lire les notes explicatives du projet de loi n° 183: «Ce projet vise à autoriser la ville de Montréal à adopter, pour l'exercice financier de 1998, un budget dans lequel l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables tient compte d'une augmentation anticipée des revenus et d'une diminution anticipée des dépenses, jusqu'à concurrence d'une somme globale de 125 000 000 $.

«Si, au cours de cet exercice financier, l'équilibre ne se réalise pas de la manière prévue au budget ainsi adopté, la ville le modifie afin que cet équilibre soit réalisé.»

(22 h 10)

Pour bien comprendre ce que ça, ça veut dire en clair, ça veut dire que le Parti québécois est en train de nous sortir la même baguette magique qu'ils ont sortie pendant le référendum. Ils sont en train de dire qu'ils vont faire apparaître dans les livres 125 000 000 $ qui n'y sont pas. Ils sont en train de dire que, par un coup de passe-passe, ils vont faire en sorte que le budget de la ville de Montréal soit équilibré sur papier, même s'il manque 125 000 000 $. C'est exactement l'exercice auquel ils sont en train de se livrer. Et c'est incroyable de voir comment ce gouvernement peut par la suite prétendre qu'avec des mesures comme ça ils sont en train – et ils le disent souvent – d'assainir les finances publiques, comme si les dépenses réelles en matière municipale peuvent par enchantement disparaître parce qu'on adopte une loi disant que c'est 125 000 000 $ de moins. Même si c'est ça, c'est effectivement tout comme les fonds que le ministre des Finances crée à tout bout de champ.

Vous l'avez vu comme nous, M. le Président, le ministre des Finances dit que, quand on met une couche d'usure sur une route, les salaires des fonctionnaires au ministère des Transports peuvent être échelonnés dans le temps, comme s'il s'agissait d'un édifice qu'on était en train d'amortir sur les livres comptables. Ils font des fonds spéciaux pour divertir, de la même manière que certains restaurants; dernièrement, on a démontré qu'ils étaient en train de divertir les choses vers une sorte de néant informatique. C'est la même chose ici. On appuie sur un bouton et, tout d'un coup, il y a 125 000 000 $ qui apparaissent. Où sont les 125 000 000 $, M. le Président? Bien, ici, sur le bout de papier qu'on a devant nous. Mais c'est complètement faux. Il n'en est rien. Il n'y a personne qui est dupe. Mais pour sauver, pour des raisons que seuls eux connaissent, le maire de Montréal, ils ont inventé le projet de loi n° 183.

Afin d'essayer de comprendre les mystères de tout ce qui sort du ministère des Affaires municipales, c'est toujours bon de lire leurs communiqués de presse, comme le communiqué de presse qu'on a lu chez eux dernièrement, qui annonçait, sur en-tête du ministère des Affaires municipales, que le ministre des Affaires municipales envoyait une mise en demeure à une madame, une septuagénaire, dans son comté, une militante de notre parti politique, la présidente de notre association, parce qu'elle avait eu la témérité de dire qu'une promesse qui avait été faite n'avait pas encore été réalisée, qu'un bout de route qui devait être fait n'avait pas encore été fait puis que ce n'était pas garanti que ça se ferait. Dans les 10 jours, sans doute à cause de ça puis d'autres pressions, le ministre a enfin eu l'autorisation du Conseil des ministres pour faire ce bout de route là. Mais je n'en revenais pas de voir, sur une en-tête du ministère, un communiqué de presse – c'est de l'argent du public, ça, après tout – pour redorer un peu l'image, faire un peu de pression politique, faire de la politique partisane, finalement, par voie de communiqué de presse sur en-tête du ministère.

Je me suis rendu à Rouyn-Noranda, M. le Président – coin absolument merveilleux, superbe, très, très belle ville, Rouyn-Noranda – pour rencontrer nos militants, les gens sur place et essayer de comprendre comment ça se faisait qu'on était rendu là avec un ministre qui utilise son en-tête de lettres de ministère pour faire des menaces à des gens. Vous savez ce que j'ai vu, la première chose, M. le Président, en arrivant à l'aéroport? J'ai vu la photo du député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue sur une grosse pancarte à l'aéroport. Je n'avais jamais vu ça. Mais il dit que les autres de son côté le font. Mais je n'ai jamais vu ça, puis personne d'autre de l'autre côté n'était en mesure de nous dire qu'il y avait des gens qui avaient déjà fait ça.

Toujours est-il, M. le Président, que, lorsqu'on regarde les communiqués de presse du ministère des Affaires municipales, comme leur communiqué de presse sur le projet de loi qui est devant nous, il faut toujours le mesurer à l'ombre de ce qu'on a déjà vu sortir de ce ministère-là. Dans le journal La Frontière , qui est un excellent journal régional justement dans ce coin-là, l'édition du 2 décembre, on entend qu'il n'y a pas eu de suite de donnée à ça, que le ministre est trop occupé avec des affaires d'État. Je n'y peux rien, mais, tout à l'heure, en entrant dans la Chambre pour prendre ma place, j'ai constaté qu'il faisait ses cartes de Noël. Alors, ça, c'est les affaires d'État, qu'il explique aux gens dans son coin, qui le préoccupent tellement.

Mais pour revenir au communiqué de presse du ministère daté du 4 novembre où le ministre des Affaires municipales tente d'expliquer au monde comment il va régler les problèmes budgétaires de la ville de Montréal, il y a non seulement la baguette magique, mais une sorte de cassette qui vient avec, une sorte de jeu animé, M. le Président. Vous avez la baguette magique, vous avez le projet de loi avec les 125 000 000 $, puis là vous avez une explication de leur conte de fée. Alors, je vous le lis: «À la suite de nombreux échanges et rencontres qu'il a eus au cours des derniers mois avec le maire de Montréal, M. Pierre Bourque, le ministre des Affaires municipales – M. le ministre – a présenté au Conseil des ministres la semaine dernière un diagnostic détaillé – il fait de la pratique illégale de la médecine en plus de la pratique illégale de la comptabilité – de la situation financière de la ville de Montréal, de ses sociétés paramunicipales et des divers régimes de retraite de ses employés. Il a rendu public aujourd'hui les décisions adoptées par le Conseil des ministres pour soutenir la ville dans ses efforts pour atteindre ses objectifs financiers en 1998 et ainsi éviter d'alourdir le poids des taxes à Montréal.» Là, on cite théoriquement le ministre, on sait que c'est quelqu'un qui a écrit ça. «La ville de Montréal est dans une situation financière difficile, a expliqué M. le ministre, et, pour l'année 1998, la ville prévoit un manque à gagner de 125 000 000 $.» M. le Président, première phrase de citation – et je dois dire que le ministre est en train de dire la vérité – là, cette phrase-là, c'est vrai: «La ville de Montréal est dans une situation financière difficile et, pour l'année 1998, la ville prévoit un manque à gagner – "manque à gagner", des mots "fancy" pour dire "déficit" – de 125 000 000 $.»

Mais, comme, en vertu de nos lois au Québec, il est interdit à une municipalité d'encourir un déficit, il faut trouver une manière de se sortir de cette impasse. Alors, on explique que, dans ce contexte, il faut immédiatement examiner nombre d'avenues de solutions afin d'éviter un accroissement du fardeau fiscal des contribuables montréalais. Ils doivent 125 000 000 $, ils ne les ont pas, il faut qu'ils les empruntent, et on veut faire un bout de papier qui dit quoi? On continue.

«La première recommandation du ministre des Affaires municipales, qui a été adoptée par le gouvernement, permettra à la ville de Montréal de déposer un budget équilibré, puisqu'il l'autorise à escompter des économies au chapitre de la main-d'oeuvre correspondant à l'effort qui a été consenti par les employés du secteur public, soit l'équivalent d'une contribution de 6 % des coûts de main-d'oeuvre. Montréal pourra ainsi récupérer 71 000 000 $, soit 41 000 000 $ pour ses propres coûts de main-d'oeuvre et 30 000 000 $ représentant sa quote-part à la Communauté urbaine de Montréal.»

Ça veut dire quoi, ça, dans des mots que les gens peuvent comprendre? Ça veut dire que, parce que le gouvernement du Parti québécois, depuis maintenant un an, dit qu'il va couper les gens de 6 % – et, à ce que je sache, après avoir menacé à peu près tout le monde de les couper, à peu près les seuls qui ont été coupés ont été les députés – là, ils sont en train de dire que, effectivement, ils vont aller chercher 6 % en coûts de la main-d'oeuvre à la ville de Montréal. Mais ce n'est pas fait, ça, encore, M. le Président. Le débat de ce soir tombe à un moment intéressant, parce que, aujourd'hui même, le premier ministre était en train de faire des déclarations publiques à l'effet qu'il fallait attendre au mois de janvier pour voir si, effectivement, ils pouvaient réaliser cette coupure de 6 % dans les coûts de la main-d'oeuvre. Donc, il n'y a rien de tout ça qui est fait. Mais c'est en anticipant le fait qu'éventuellement le 6 % pourrait être économisé sur le dos des travailleurs au niveau municipal qu'on est en train de prétendre que Montréal n'aurait pas le déficit de 125 000 000 $. C'est vraiment de l'imaginaire transposé en termes de chiffres et sur un bout de papier. Mais il n'y a pas une cenne de plus qui est rentrée dans les coffres de la ville de Montréal pour autant, M. le Président.

«Cette réduction des coûts de main-d'oeuvre s'aligne sur la récente entente signée par le gouvernement du Québec.» Phrase creuse, si jamais il y en a eu une. «Cette entente stipule que la voie à privilégier est celle de la négociation avec les employés, et le gouvernement s'est engagé à accorder aux municipalités son soutien dans cette démarche afin de s'assurer que l'effort exigé de tous les groupes de la société soit équitable.» Et là vient une citation qui contient une de leurs phrases clés, un de leurs mots préférés de ce temps-ci: «Compte tenu du sens des responsabilités de tous les partenaires face aux défis auxquels nous sommes confrontés, je suis convaincu que les résultats recherchés seront atteints à cet égard.»

M. le Président, le mot magique là-dedans, cette fois-ci, c'est les «partenaires». Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de prendre les nouvelles aujourd'hui, M. le Président, mais les partenaires ne sont pas de bonne humeur. Ils menacent même de faire un front commun de tous les employés municipaux de la province. C'est difficile de ne pas les comprendre. Ils ont des conventions collectives dûment signées, dûment négociées qui doivent être en vigueur, et là, tout d'un coup, on est en train de leur apprendre que, sous la menace d'une loi spéciale qui devrait venir à la troisième semaine du mois de janvier, tout ça, ça risque de sauter.

Mais ils sont des partenaires quand même. Parce que c'est de ça qu'il s'agit toujours pour ce gouvernement-là. Ils essaient de faire passer n'importe quoi avec leurs mots magiques, un peu de baume sur ce qu'ils sont en train de faire. Lorsqu'ils nous parlent, justement, de séparation, maintenant ils parlent d'un nouveau partenariat. C'est comme ça qu'ils décrivent la séparation du Québec d'avec le reste du Canada, c'est un partenariat, ça. Ça rappelle justement les mots utilisés dans le célèbre roman d'Orwell, 1984 , où il y avait un ministère de la vérité dont la tâche principale consistait à donner un nouveau sens aux mots. Alors, on a des gens qui menacent de faire une grève, front commun, grève illimitée. Il va y avoir toutes sortes de difficultés. Ils vont faire une loi spéciale. Ça, c'est leurs partenaires. C'est comme ça qu'ils voient les choses.

(22 h 20)

On l'a vu cet après-midi aussi avec le ministre responsable de l'Office de la protection du consommateur. Nos collègues ont essayé de savoir comment ça se faisait que, depuis sept mois, il n'avait rien fait pour avertir les consommateurs que les machines, qui étaient censées être en train de lire les prix, faisaient des erreurs qui coûtaient des centaines de millions de dollars aux consommateurs. La réponse, c'est: On privilégie la voie de la collaboration avec nos partenaires. Il y a un Office de la protection du consommateur qui est censé appliquer une loi mais, vu que ça a été vidé de son contenu, maintenant on fait des phrases creuses sur nos partenaire. Et c'est la même chose ici: «Compte tenu du sens des responsabilités de tous les partenaires face aux défis auxquels nous sommes confrontés, je suis convaincu que les résultats recherchés seront atteints à cet égard.»

M. le Président, mon collègue le député de Châteauguay, tantôt, a parlé du fait que ce gouvernement fait semblant d'être courageux en matière de dépenses publiques. Il fait semblant, parce que ce n'est pas vrai qu'on s'en va vers le déficit zéro. C'est juste qu'on a trouvé de nouvelles astuces, de nouvelles manières de le masquer.

Ici, ce soir, avec le projet de loi n° 183, on a un autre excellent exemple. Sur papier, on vient de dire que, même s'il manque 125 000 000 $ pour la ville de Montréal, on va faire semblant que ce n'est pas vrai. Et ça vaut la peine de lire, M. le Président, les termes exacts de la loi. C'est une loi très courte. Premier article: «Malgré toute disposition législative inconciliable, la ville de Montréal peut, pour l'exercice financier de 1998, dresser et adopter un budget dans lequel l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables tient compte d'une augmentation anticipée des revenus et d'une diminution anticipée des dépenses, jusqu'à concurrence d'une somme globale de 125 000 000 $.»

«Malgré toute disposition législative inconciliable», en clair, ça veut dire quoi? Ça veut dire: Peu importent les vraies règles qui existent. Mais ça se dit bien, hein? Ça coule comme de source de la bouche d'un avocat, «malgré toute disposition législative inconciliable». Ce qu'on est en train d'avouer avec ça, M. le Président, c'est que tout le reste, on n'est pas dans le domaine du réel. On est en train de dire: Faisons semblant que ça rencontre les règles qui existent, parce que ce n'est pas le cas.

Il continue: «De plus, pour le même exercice [...] le montant qui doit être prévu au budget comme crédit pour dépenses contingentes et voté conformément au deuxième alinéa [...] de la Charte de la Ville [...] est égal à 1 % des revenus probables.»

Il continue disant ceci: «Les règlements et résolutions nécessaires à l'imposition des taxes, à la fixation des tarifs et à la perception des revenus ainsi que les certificats que le directeur des finances de la ville de Montréal délivre relativement à ce budget en tenant compte du présent article sont valablement adoptés et délivrés.»

In the English version, Mr. Speaker, it is provided that «the by-laws and resolutions necessary to levy taxes, fix rates and collect revenue and the certificates issued by the director of finance of ville de Montréal in relation to the budget provided for in this section shall be validly adopted and issued».

One of the saving graces of this particular legislation is that there is a glaring difference between the English and the French versions. The French version is clearly a deeming provision, where they are saying, irrespective of anything else, this is deemed to be validly adopted. Here, in the English version, they say – it's directive, it's imperative – «it shall be validly adopted», meaning it has to be validly adopted. Perhaps that is one of the things that is going to save the tax payers in the City of Montréal, or anybody else is going to decide to contest this bill whenever the fairy tale ends and they realize that the $ 125 000 000 is not there. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Chomedey. Je vais maintenant céder la parole au prochain intervenant, le député de Laurier-Dorion. M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Je vois tous ces députés ministériels qui, devant ce projet de loi qui donne quand même une exception historique quant à la situation budgétaire de l'île de Montréal, de la ville de Montréal, sont restés assis. J'aurais cru que quelqu'un se lèverait pour vanter les mérites de ce projet de loi, mais personne ne s'est levé de l'autre côté. Alors, permettez-moi donc de vous expliquer brièvement comment on perçoit ce projet de loi. Il y a deux mots qui se ressemblent, mais qui sont très loin l'un de l'autre au niveau du sens qu'on a. Il y a ce qu'on peut appeler «vertueux» puis il y a «virtuel». Ce que nous avons ici n'est pas très vertueux, mais c'est très virtuel.

C'est virtuel, M. le Président, parce qu'il s'agit d'un projet de loi qui va permettre à la ville de Montréal d'adopter un budget fictif pour combler un trou de 125 000 000 $. Quand on sait que la loi actuelle ne permet pas aux villes de faire des déficits, nous avons une situation, de jamais vu dans l'histoire du Québec, et sûrement de la ville de Montréal, où une ville va être autorisée à présenter un budget en disant: Même si cela ne concorde pas, tel que la loi me permet de le faire, je le fais, parce que j'anticipe un certain ajustement ultérieurement, soit en baissant mes dépenses ou en augmentant mes revenus, et j'y arriverai. Et, depuis le retour du premier ministre, de sa visite en France, on a ajouté un nouveau mot au vocabulaire québécois, puis c'est le mot «accompagner». Et on apprend que le gouvernement du Québec va accompagner la ville de Montréal dans cet effort. Je ne sais pas si le Québec va devancer la ville de Montréal, mais il va l'accompagner, semble-t-il, dans cet effort de rendre ce budget virtuel un peu plus réel.

Mais, M. le Président, il s'agit d'une situation qu'on peut qualifier d'un peu loufoque, une situation qui ressemble beaucoup à de la fumée avec des miroirs, tel que ce qui caractérise le gouvernement dans une série d'autres dossiers. De la fumée et des miroirs parce qu'on fait croire au monde que tout est réglé, que tout est correct, même quand on sait que, fondamentalement, rien n'est attaché. D'autant plus qu'on dit à la ville de Montréal: Vous allez prétendre que vous avez un équilibre budgétaire, on va venir par après vous trouver ou vous aider à trouver des façons de combler ce déficit budgétaire que vous affichez, même si on a contribué, au départ, on a contribué, nous du Québec, du gouvernement du Québec, à ce déficit. Parce qu'une grosse partie, une grande partie de ce 125 000 000 $ qu'il manque à Montréal est due au fait, au moins pour 80 000 000 $, que le gouvernement du Québec a pelleté ou créé des situations qui font en sorte que la ville de Montréal, dans ce cas-ci, a un manque à gagner pour au moins 80 000 000 $ de ces 125 000 000 $, et le gouvernement vient dire par la suite qu'il permet à la ville de Montréal de prétendre qu'elle a... Si c'est un peu confus, M. le Président, c'est parce que la situation dans laquelle nous nageons, elle est confuse.

Examinons d'abord de quoi il s'agit quand on parle de ce 125 000 000 $. Il s'agit, pour 46 800 000 $, de... si on était cyniques, on dirait d'un nouveau pacte fiscal que le gouvernement du Québec a convenu avec la ville de Montréal, un pacte fiscal, M. le Président, qui n'est pas le pacte fiscal qui avait été promis lors de la campagne électorale, avec tambour et trompette, par l'ancien premier ministre Parizeau quand il rencontrait le maire Doré de l'époque pour lui dire: Paroles solennelles du gouvernement du Parti québécois éventuel, nouveau pacte fiscal pour Montréal. On va vous assurer que vous aurez la capacité de faire face à la situation budgétaire, parce qu'on va reconnaître le rôle de métropole de Montréal. Ça a été transformé, avec les années, en un pacte fiscal qui est de dire à Montréal: On vous refile 46 800 000 $ d'obligations que vous avez envers le gouvernement du Québec. Donc, on prend 46 800 000 $ de l'argent de la ville de Montréal plutôt que de trouver un pacte fiscal qui, réellement, aurait aidé la ville de Montréal. Alors, le voilà pour le 46 000 000 $, M. le Président. Au lieu de donner, on prend, pour revenir, après, dire qu'on va accompagner dans une démarche pour trouver... Après ça, on réduit tout simplement l'aide financière qu'on donnait à Montréal de 24 000 000 $, on réduit d'un autre 24 000 000 $. On est rendu, déjà, à 70 000 000 $, M. le Président.

(22 h 30)

Là on va augmenter la TVQ, le 1er janvier, de 1 %. Mais la ville, elle achète des choses, puis ça va coûter plus cher. Puis, avant, on retournait... il y avait une ristourne. Là, elle sera abolie. On ajoute un autre 8 000 000 $ au poids, à la dette, à l'incapacité d'équilibrer le budget à Montréal. On contribuait pour 1 400 000 $ à l'Institut de police de Nicolet, on le coupe, puis on diminue aussi certaines subventions pour un autre 300 000 $, pour un grand total d'à peu près 80 500 000 $ que le gouvernement lui-même a enlevés à Montréal. Alors, le pacte fiscal qui avait été promis en 1994 est transformé en coupures fiscales, M. le Président.

Est-ce qu'on est en droit de parler de double langage? Je penserais que oui parce que, quand on promet de donner puis qu'on enlève, bien, si ce n'est pas ça, le double langage, c'est quoi, M. le Président? Mais c'est un peu la marque de commerce qui tranquillement s'installe chez ce gouvernement: dire une chose, faire son contraire; clignoter à gauche, tourner à droite; prétendre que nous faisons des choses.

C'est la même situation en ce qui concerne toute la question de réduction du déficit, M. le Président. On nous chante l'histoire que le déficit sera zéro, le déficit sera zéro, le déficit sera zéro, pendant qu'en même temps on est en train de créer des fonds spéciaux qui transforment ce déficit dans les livres comptables du gouvernement en déficit dans un autre «set» de livres, au point où même le Vérificateur général a été obligé de signaler le fait que ce jeu de cache-cache, bien, c'est quelque chose qui sert momentanément au niveau du discours politique. Je pense que c'était Abraham Lincoln qui disait, M. le Président, et il le disait en anglais, vous allez me permettre de le citer en anglais: «You can fool some of the people some of the time but you can't fool all the people all the time.» Et c'est à peu près ce qui est en train d'arriver. On peut tromper, et vous allez me dire que ce n'est pas parlementaire, mais on peut induire la population en erreur certaines fois, mais on ne peut pas induire la population en erreur tout le temps.

Une voix: Harry Truman.

M. Sirros: Pardon?

Une voix: Harry Truman.

M. Sirros: Harry Truman a dit ça? Moi, j'ai toujours pensé que c'était Abraham Lincoln. Alors, je remercie le député qui prend la parole sans l'avoir pour me ramener à cette correction, M. le Président. C'est quand même aussi vrai, si c'était Abraham Lincoln qui le disait ou Harry Truman, que «you can fool some of the people some of the time but you can't fool all the people all of the time».

Et, effectivement, M. le Président, le ministre des Affaires municipales ainsi que ses collègues du gouvernement vont se rendre compte que, plus le temps passe, plus les gens se réveillent, plus les gens commencent à réaliser que, bien, les gestes et les paroles ne concordent pas, parce que, quand on avait parlé d'un pacte fiscal, tout le monde avait compris que c'était un pacte pour aider, puis là on s'est rendu compte que le pacte fiscal est rendu à enlever de l'argent, à Montréal dans ce cas-ci, sans parler des autres municipalités.

Donc, la situation amène une situation un peu particulière où le gouvernement et le maire de la ville de Montréal ont dû se parler à un moment donné, puis le maire aurait dû dire, j'imagine: Écoutez, là, avec ce que vous faites, je ne suis pas capable, c'est impossible de boucler mon budget, puis le ministre qui lui dit: Ne fais rien, fais comme si c'était possible, fais comme si tu étais capable et fais comme si c'était un jeu vidéo, où c'est un monde virtuel. Même si ce n'est pas très vertueux, soyons virtuels. Et le maire a dû dire, j'imagine: Bien, tiens, c'est intéressant, je vais prétendre que je peux, je vais présenter un budget fictif, illégal jusqu'à un moment donné et, bien, ça va me permettre de dire que je vais pouvoir boucler mon budget en étant équilibré le jour où j'aurai pu trouver soit la réduction des dépenses, soit l'augmentation des revenus durant l'année durant laquelle le budget aura effet.

Et là nous apprenons également une autre astuce, jeu ou manoeuvre du gouvernement qui, jusqu'à tout récemment, disait à ses partenaires que sont les syndicats: Ne vous inquiétez pas, ne vous inquiétez pas, vous allez négocier, on est certains que vous pouvez trouver des choses, entendez-vous, en oubliant qu'il y avait bon nombre de municipalités et syndicats des travailleurs municipaux qui avaient conclu des ententes de bonne foi ou qui sont encore régis par des ententes qui sont en vigueur. Et on leur disait, bon, le premier ministre, solennellement, j'imagine, je l'ai vu, je l'ai entendu, il était très solennel comme il a l'habitude de l'être, M. le Président: Non, non, on n'envisage pas de loi spéciale. Bien, tiens, aujourd'hui, le chat est sorti du sac! Et là le ministre nous a dit que... Le premier ministre, je l'ai vu moi-même, aux nouvelles, il a pris la peine de descendre en bas, à la conférence de presse, mettre le ministre des Affaires municipales à son côté, prendre la parole et dire encore une fois solennellement: On va régler ça. Si, d'ici au 30 janvier, vous ne vous êtes pas entendus, ça va être une loi spéciale. On va vous couper de 6 %.

Évidemment, ils connaissent ça, ils l'ont déjà pratiqué en 1982, pour 20 %. En tout cas, c'est une formule qu'ils ont trouvée. Mais, encore une fois, «you can fool some of the people some of the time, but you can't fool all the people all the time.» Et même les syndiqués, M. le Président, commencent à se rendre compte que, oups! «négociation», c'est un bien beau mot, mais, quand quelqu'un te met un «gun» sur la tempe, pour parler ainsi, ta marge de manoeuvre de négociation n'est pas très grande. Si on te dit: Tu règles ou je tire, il me semble que, à un moment donné, tu cherches à trouver une façon pour que l'autre ne tire pas. Et l'autre qui tenait le pistolet, il se tourne de bord puis il dit: Vous voyez, j'ai arrangé les choses pour que les gens règlent.

Bien, j'imagine que c'est une façon de faire, M. le Président. Je ne crois pas que ce soit une façon de faire qui amène des relations sociales très harmonieuses. Je ne crois pas que ce soit une façon de faire qui est très vertueuse. Je ne crois pas que ce soit une façon de faire qui va faire en sorte que les gens vont respecter plus les politiciens, puis les députés, puis les ministres, puis le gouvernement. J'ai l'impression que ça conduit plutôt à plus de nos concitoyens qui déduisent que, peu importe ce que les gens qui sont élus à l'Assemblée nationale disent, ils font à leur guise, ils disent une chose puis ils font le contraire quand ça fait leur affaire. Puis là tu as les gens, comme le ministre des Affaires municipales, le premier ministre et d'autres, qui se lèvent, qui font des discours, M. le Président, pour convaincre le monde, ou pour tenter de convaincre le monde que c'est la meilleure chose pour eux, que c'est ce que ça prenait, que c'est quand même courageux d'agir ainsi, parce que c'est pour le plus grand bien de la société.

Non, M. le Président, ce n'est pas pour le plus grand bien de la société, c'est pour le plus grand bien, à court terme, du Parti québécois. Le problème, c'est que ces choses nous rattrapent tous à un moment donné. Et, si on continue dans cette voie-là, on va commencer à voir effectivement des réactions de plus en plus dures, comme on a vu, ici, des gens qui viennent au parlement manifester, les gens qui font le Parlement de la rue, M. le Président, ceux qui ont cru que, quand on parlait de réforme de l'aide sociale, c'était parce que véritablement on avait les intérêts des plus démunis de la société à coeur, qu'on n'était pas juste en train de leur chanter une chanson et de leur conter une histoire pour se faire élire.

Parce que, de l'autre côté, le Parti québécois, qui s'est toujours présenté comme le parti qui avait à coeur les plus pauvres, les plus démunis, le parti social-démocrate, qui tiennent même des colloques sur la social-démocratie, je n'en revenais plus de voir ça, M. le Président – M. le ministre, s'il vous plaît.

(22 h 40)

Plus on voyait ces choses-là, M. le Président, plus on devenait incrédules. Parce que, quand on raconte des histoires aux gens qui croient en nous puis qu'on les laisse tomber comme ce gouvernement a fait avec, dans ce cas dont je vous parle, les plus démunis, les gens qui dépendent un peu des transferts de l'État non pas parce qu'ils veulent, mais parce qu'ils ont de la difficulté à s'installer sur le marché du travail parce que le marché du travail stagne, bien, quand on les laisse tomber, le choc est grand et la réaction est grande aussi, et ça va aller en grandissant.

Nous, de notre côté, on n'a jamais, dans ce cas-ci, prétendu être un parti d'idéologie, mais on a toujours dit qu'on était un parti et qu'on est un parti, M. le Président, qui a à coeur le meilleur intérêt des Québécois, des citoyens. Et, quand il s'agit des plus démunis, y inclus les citoyens des différentes villes, les engagements qu'on prenait puis qu'on prend, on les respecte. Ce n'est peut-être pas tout ce que les gens voudraient avoir, en ce qui concerne les groupes dont je parle, mais, au moins, ils peuvent savoir que ce qui est dit sera fait parce que ce qui a été dit a été fait, M. le Président.

Dans le cas, par exemple, des assistés sociaux, le parti qui a aboli la discrimination basée sur l'âge, ce n'était pas le Parti québécois, qui se disait un parti social-démocrate. Parce que je me rappelle qu'on leur avait donné cette occasion-là quand ils étaient encore au pouvoir, entre 1981 et 1985, puis ils ont refusé de le faire. On l'a fait quand on est arrivé au pouvoir. Ici, M. le Président, nous avons la situation où les municipalités, Montréal dans ce cas-ci en particulier, on avait fait chanter des chansons, conter des histoires sur le pacte fiscal, pour aboutir avec la permission de déposer un budget virtuel. C'est là qu'on est rendu.

Il s'agit, M. le Président, d'une honte pour la ville de Montréal, quelque chose qui équivaut à un genre de mise en tutelle de la ville de Montréal, où le ministre des Affaires municipales siffle à l'oreille du maire comment faire pour présenter son budget qu'il est incapable de présenter à cause de toutes les coupures, de tous les services qui ont été enlevés, ou les montants qui ont été imposés sur la ville de Montréal par ce même gouvernement qui se tourne en genre de sauveur en disant: Moi, je te permets maintenant de prétendre que tout va bien. Parce que de la prétention, ce gouvernement en a. Ils sont capables de prétendre que le déficit va atteindre zéro. Ils sont capables de prétendre que la ville de Montréal a un budget réel. Ils sont capables de prétendre qu'ils ont un partenariat avec les syndiqués, quand, en fin de compte, ils leur mettent le couteau dans le dos. Parce que c'est ce qu'ils font.

Ils leur disent: Même si vous avez signé des conventions, même si on vous a dit qu'on était des partenaires, même si on vous a fait travailler durant nos campagnes électorales, même si on vous a fait croire qu'avec nous ça va aller mieux pour vous, on va vous utiliser pour atteindre nos propres fins. C'est à peu près ce que la parole de ce gouvernement vaut. Clignotez à gauche, tournez à droite. Prétendre qu'on atteint le déficit zéro, créer des fonds spéciaux. Prétendre qu'on a un budget réel pour la ville de Montréal puis créer un budget virtuel, M. le Président.

Vous me dites que mon temps est terminé, mais j'aurais pu continuer encore longtemps en parlant comme je l'ai fait tantôt sur les assistés sociaux, en parlant sur toutes sortes d'autres secteurs où on dit une chose, l'inclusion de tous les Québécois, quand, au contraire, on divise les Québécois, de l'autre côté, quand on refuse de condamner des paroles qui sont très condamnables, et on en sait tous, M. le Président. Mais, que voulez-vous, pour l'instant, ils sont là. You can fool some of the people some of the time, mais pas tout le monde tout le temps. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je pense qu'on ne peut pas rester muets devant ce projet de loi qui est devant nous ce soir, le projet de loi n° 183. Avant d'en arriver, je pense, à parler de cette pièce législative comme telle, je pense qu'il faut retracer un petit peu, comme l'ont fait certains de mes collègues, l'historique qui nous amène là aujourd'hui.

Tous se souviennent des engagements électoraux de ce parti-là en 1994. On était supposé remettre Montréal sur la carte. C'était épouvantable, Montréal, c'était l'apocalypse, on était à la veille de fermer les ponts puis dire à tout le monde qu'il n'y avait plus rien à faire là. Pourtant, M. le Président, force est d'admettre que, trois ans plus tard, après deux premiers ministres et nombre et nombre d'engagements solennels, main sur le coeur et autres larmes et cris, on n'est pas plus avancé. On n'est pas plus avancé parce qu'il semble que, pour ces gens-là, Montréal, ce n'est pas important, ce n'est pas une priorité. Les gens vont dire: Oui, mais, M. le député, vous êtes représentant de Kamouraska-Témiscouata, pourquoi vous parlez sur le projet de loi de Montréal? Parce que même dans nos régions – et l'intervention du député de Roberval, cet après-midi, l'a prouvé clairement – le fait d'avoir une métropole forte, une métropole vivante, une métropole qui se développe, c'est un de nos principaux pôles économiques, c'est un de nos principaux pôles culturels, c'est un de nos principaux pôles sociaux, je pense que c'est important pour tous les Québécois et toutes les Québécoises.

Je pense que ce qui se passe avec ce projet de loi, M. le Président, ça démontre clairement l'incompétence de ce gouvernement-là en matière de fiscalité municipale. J'ai eu la chance de travailler dans ces dossiers-là depuis plusieurs années, les affaires municipales, et je vous dirais que, dans les trois premières années du gouvernement péquiste, on a assisté à des pseudoréformes de la fiscalité municipale, d'une part, et, d'autre part, à des pseudoarrangements avec Montréal. Je pense que, si on fait un bilan clair de tout ça, ce ne fut que péripéties et péripéties, rapiéçage et posage de plasteurs qui n'ont rien donné, clairement.

Je me posais la question, quand j'ai vu ce projet de loi là apparaître, je me disais: Étant donné que le ministre va permettre à Montréal de faire un déficit cette année, est-ce qu'il va permettre la même chose aux autres municipalités? C'est un peu ce que je me disais. Parce que, suite à son transfert direct de factures de 375 000 000 $, on se dit: Bon, bien, c'est sûr que Montréal est la métropole, mais qu'est-ce qui va arriver avec les autres municipalités, qui n'ont pas plus de marge de manoeuvre, ne serait-ce qu'elles en ont encore moins que Montréal peut en avoir? Bien, il l'a fait cet après-midi et, cette fois-là, ce n'est pas par un projet de loi, c'est par un simple engagement de dire: Bon, les municipalités, là, on s'installe tous, on met tous nos lunettes virtuelles puis on embarque tous dans la virtualité totale et complète au niveau budgétaire. C'est le nouveau pacte fiscal et la nouvelle façon; la nouvelle fiscalité municipale au Québec, c'est la fiscalité virtuelle!

Quand on regarde la situation de Montréal de façon plus précise et pourquoi nous en sommes là, on peut regarder un peu les décisions du gouvernement du Québec qui ont affecté le budget 1998 de la ville de Montréal. D'abord, le nouveau pacte municipal, entre guillemets, qui s'est traduit par une facture de 46 800 000 $, fait en sorte que Montréal se retrouve avec un manque à gagner. Certains disent que les relations sont très bonnes entre le ministre des Affaires municipales et le maire de Montréal, mais force est d'admettre qu'avec des amis comme ça on n'a pas besoin d'ennemis, M. le Président! Si on regarde, deuxièmement, la réduction de l'aide financière, un autre 24 000 000 $; la hausse de la TVQ – le gouvernement qui la met dans ses poches puis la prend à Montréal – 8 000 000 $ encore; contribution à l'Institut de police de Nicolet, 1 400 000 $, etc.

Je me souviens, quand j'étais jeune, un des premiers discours politiques que j'ai entendus, c'était, je crois, un député créditiste qui avait dit à un moment donné: Nous sommes au bord du précipice, faisons un pas en avant. Bien, avec ce qui s'est fait là aujourd'hui, M. le Président, je pense que la situation de Montréal, tout le monde vient d'admettre qu'on est au bord du précipice. Bien, aujourd'hui, le ministre vient de leur dire: Bien, faisons un pas en avant, ça va bien, puis ne vous inquiétez pas, en descendant, on va vous envoyer une corde. La corde, là, il manque des grands bouts, parce que personne n'est capable de la rattraper. Si Montréal en est là aujourd'hui, on n'a pas besoin de parler pendant des heures là-dessus pour trouver les vrais coupables, ils sont de l'autre côté, M. le Président, il sont directement en face de nous.

(22 h 50)

Vous savez, dans toute cette saga – on peut la qualifier ainsi – depuis le mois de mars 1997, lors du dépôt du budget, toute la saga municipale, on a eu des déchirements de chemises, des annonces à la dernière minute, juste avant les vacances d'été, improvisées, personne n'était trop au courant. À un moment donné, pouf! on trouve 419 000 000 $ sur le transport scolaire, on dit que c'est de ça qu'on a besoin, on le met dans le communiqué de presse, on n'informe personne. Woups! à un moment donné, on se rend compte que ça ne peut pas marcher comme ça. Bien, on revire de bord, on retourne en arrière encore, vire à gauche, vire à droite, d'un côté puis de l'autre. Peu importe le programme, peu importent les engagements, il faut trouver de l'argent. Donc, encore une fois, comme au niveau de la santé, je pense que le vrai ministre des Affaires municipales, c'est plutôt celui qui tient les cordons de la bourse puis les cordons du budget du gouvernement du Québec plutôt que celui qu'on connaît actuellement.

Mais on revient encore cet automne. Une autre saga de négociations, on continue encore, on s'assoit à table, des scénarios, des coulages, puis bang! on a une proposition. On la met dans les médias, ça ne marche pas. Congrès de l'UMRCQ. Après ça, on recommence encore avec l'UMQ, dans le dos de l'UMRCQ, avec les commissions scolaires. C'est épouvantable, tout ce qu'on a pu diviser, M. le Président, au niveau des municipalités, au niveau des organisations municipales, pour réussir à en arriver là où on est. Mais ce n'était pas fini, parce que cette entente-là, malgré tout, on revient encore avec d'autres éléments sur Montréal puis on revient encore avec d'autres éléments sur les municipalités au complet qui viennent encore une fois faire gaspiller temps, énergie et argent à tout le monde. Il faut se demander, s'il n'y avait pas eu cette saga de transfert de 500 000 000 $ improvisée à la dernière minute, où il faut trouver un chiffre, on le trouve sans trop se poser de questions, toute l'énergie que ces gens-là auraient pu mettre à améliorer la qualité de vie de leurs concitoyens et concitoyennes. C'est ça, la vraie question qu'il faut se poser. C'est bien beau, négocier puis dire qu'il y a des gens qui sont payés pour ça, mais ces gens-là sont aussi payés pour autre chose, améliorer les services qui sont offerts à la population, et, pendant qu'ils négocient, pendant qu'on s'obstine, pendant qu'on coule des scénarios, ce n'est pas ça qu'on fait.

L'autre élément qui est drôle là-dedans, M. le Président – qui est drôle ici mais qui n'est absolument pas drôle, qui est même dramatique – c'est que, au cours des dernières semaines, je pense que, s'il y a une chose qui a été ressortie de façon très claire par l'opposition, c'est les fonds cachés et le camouflage du déficit, et je crois que ce projet de loi qu'on a devant nous ce soir concernant Montréal se situe exactement dans cette ligne de pensée et dans cette nouvelle méthode de comptabilité que semble avoir instaurée le gouvernement du Québec. Ils ont tellement aimé ça, créer des fonds, M. le Président – ça a marché, ils ont réussi à cacher 1 500 000 000 $ cette année, comme a dit le Vérificateur général, c'est bon, ça a marché – qu'ils se sont dit: On va donner la chance aux autres de faire exactement pareil. On a créé des fonds, on a dissimulé 1 500 000 000 $, comme le disait le Vérificateur général, et, de l'autre côté, on se dit: Bien, coudon, on pourrait peut-être faire la même chose avec Montréal, puis, cet après-midi, avec toutes les municipalités au complet, on va leur faire adopter des budgets avec des trous, on va faire croire à tout le monde que ça marche, puis, coudon, bien, advienne que pourra. Si ça ne marche pas, ça ne marchera pas. On recommencera l'année prochaine, ça fait un an que ça dure.

Mais, M. le Président, ce n'est pas une façon de traiter ses partenaires, ce n'est pas une façon de traiter des collègues, des élus au niveau local, des élus au niveau municipal. Le gouvernement du Québec a instauré un système de comptabilité que le Vérificateur général a dénoncé, a dit que ce n'était pas la bonne façon de faire, ce n'était pas transparent, et non seulement ils ne se contentent pas de ça, ils essaient de l'implanter dans les municipalités. C'est assez grave. Quand on parle d'un nouveau pacte fiscal, si c'est ça, le nouveau pacte fiscal, bien, je comprends pourquoi on parle jusqu'à cette heure-là sur ce projet de loi et qu'on s'y oppose, parce que c'est un précédent, ça ne s'est jamais vu, et, si c'est ça, la nouvelle vision de ce gouvernement-là au niveau de la fiscalité municipale, c'est très inquiétant pour les Québécois et les Québécoises qui nous écoutent ce soir et c'est très inquiétant pour les Québécois et les Québécoises qui seront à nos places demain et dans des années, M. le Président, parce que c'est eux autres qui, en bout de ligne, de toute façon, vont payer la facture.

Tout ça fait en sorte que, depuis trois ans, mais notamment depuis deux ans, on est vraiment en train de mettre en place une économie virtuelle, une économie dont personne ne peut vraiment voir les tenants et les aboutissants. On a des chiffres, des indicateurs économiques qui nous démontrent que le Québec est au-delà de la moyenne canadienne seulement dans trois indicateurs sur 27, puis on essaie de faire croire à tout le monde que ça va bien. Aïe! on a trois indicateurs positifs sur 27, on est reparti, ça va bien! Mais, mon Dieu, M. le Président, on ne s'inquiète pas des 24 autres, ça n'inquiète pas personne. On a eu, depuis trois semaines, toutes sortes de choses qui ont pété à gauche et à droite, concernant les renseignements, puis ça n'inquiète pas personne.

C'est la même chose au niveau des Affaires municipales. On crée de nouveaux régimes, puis on s'en va avec ça, puis on se dit: Bof! On va implanter ça sans trop inquiéter le monde, sans trop dire quoi que ce soit de précis là-dessus. M. le Président, moi, il y a quelque chose, cet après-midi, qui m'a frappé. Je me suis dit: Si jamais, avec la nouvelle fiscalité, avec le nouveau système d'administration qu'a mis en place le gouvernement actuel, si jamais une entreprise, ou un jeune qui se part en entreprise, ou quelqu'un qui se part en quelque domaine que ce soit présentait un plan d'affaires avec des trous aussi importants que ceux que nous propose le gouvernement actuel en ce qui a trait à la fiscalité municipale, est-ce qu'il pourrait avoir le moindre petit emprunt qui lui serait consenti dans une banque? Force est d'admettre que la réponse est assez évidente, merci, c'est assez clair, je pense que c'est non.

Je ne pense pas, M. le Président, qu'une entreprise ou qu'un entrepreneur sérieux qui arriverait à la banque avec un plan d'affaires aussi plein de trous que le budget actuel du gouvernement du Québec et qu'il le propose, en plus, pour les municipalités aurait droit à la moindre petite aide financière. Je suis certain, M. le Président, que même les programmes gouvernementaux, qui sont plus larges et plus accessibles souvent que ce qui est offert par les banques, ça ne cadrerait même pas là-dedans, ils ne rempliraient même pas les critères. Le plan qui nous est proposé au niveau du projet de loi n° 183 et ce qui a été annoncé cet après-midi, M. le Président, je dirais que c'est honteux, parce que même des gens, les analystes du gouvernement du Québec qui regarderaient ça n'accorderaient même pas la moindre petite marge de crédit à une entreprise qui baserait son système d'administration là-dessus.

M. le Président, je suis quand même très content d'intervenir là-dessus ce soir parce que, à plusieurs niveaux, ça nous permet de faire le lien avec l'ensemble de ce qui a été fait par ce gouvernement-là dans différents domaines. On a mis en place un ministère de la Métropole, c'était normalement supposé sauver Montréal. Je ne sais pas où se situe le ministère en ce qui a trait à ces données-là, mais je ne peux pas croire que quelqu'un qui veut défendre les intérêts de Montréal, quelqu'un qui a à coeur la métropole du Québec soit d'accord avec ce qui est proposé aujourd'hui. Ça me surprendrait énormément que des gens appuient ça, que des gens sérieux, que des gens qui ont à coeur le développement de Montréal appuient ça.

On crée un nouveau système, puis tout le monde semble d'accord avec ça, puis, encore une fois, la même vieille phrase de ce gouvernement-là depuis des mois, malgré tout ce qui peut arriver au niveau des allocations familiales, au niveau de l'économie, au niveau de l'emploi, au niveau de la santé, au niveau de l'éducation, cette bonne vieille phrase: Ça va bien. C'est assez inquiétant quand on voit tous ces indicateurs-là un peu partout puis qu'on a comme ligne, qu'on a comme conclusion: Ça va bien. On peut bien avoir aussi peu d'intervenants du côté gouvernemental qui sont intervenus là-dessus.

Quand on parle de coupures comme ça et des mesures qui ont été imposées à Montréal, je pense que, au-delà des chiffres, il y a déjà, selon moi, quelques années que ce gouvernement-là ne prend pas au sérieux l'administration et l'avenir de la métropole. Je pense que plusieurs des cadeaux qui ont été faits à Montréal au cours des dernières années – on peut penser à l'hippodrome, on peut penser à divers autres cadeaux qui ont été faits – c'est plutôt des surprises et des cadeaux empoisonnés. Ça n'a pas eu pour effet vraiment d'améliorer la situation des Montréalais et des Montréalaises.

(23 heures)

On vient dire, M. le Président, qu'on fait cet exercice-là pour éviter des augmentations de taxes, pour éviter de faire en sorte que les citoyens et les citoyennes de Montréal paient plus de taxes. Mais, M. le Président, vous savez comme moi, j'en suis certain, j'en suis même convaincu, et comme la plupart des députés du côté ministériel, que, même s'il n'y a pas d'augmentation de taxes, à partir du moment où il y a une réduction des services, à partir du moment où il y a des choses qui étaient offertes et qui ne le sont plus, le citoyen en a moins pour son argent et ça revient exactement au même que d'avoir une augmentation de taxes, M. le Président. Ça revient exactement au même. On dirait qu'il y a seulement ces gens-là, dans leur lunette virtuelle, leur économie virtuelle, leur administration virtuelle, qui ne voient pas ça sous cet angle-là. C'est quand même très inquiétant pour l'avenir.

On vient dire aux gens de Montréal: On base, entre autres, votre budget sur la contribution de 6 % des coûts de main-d'oeuvre, qui donnerait 71 000 000 $, en plus de la quote-part de la CUM, toutes des choses comme ça. Mais c'est des choses qui ne sont pas réglées. Ce n'est pas des choses dont concrètement, aujourd'hui, on peut dire que c'est réglé, dont on peut dire que c'est là. C'est comme si on disait dans nos budgets: Moi, je prévois gagner le double de l'argent l'an prochain, mais je vais tout de suite hypothéquer tout ce que j'ai, je vais tout de suite dépenser le plus possible. Puis, l'an prochain, si je n'ai pas l'augmentation de salaire, si je ne double pas mon salaire, je vais avoir l'air fin. C'est sûr que, pour cette année, ça te fait un beau budget, tu vas passer une vraie belle année, mais, l'année prochaine, qu'est-ce qui va arriver? Dans deux ans, qu'est-ce qui va arriver? Vient un moment donné où il faut payer pour ça. M. le Président, je ne pense pas que ce soit ce soir que ces gens-là vont nous dire de façon sérieuse et crédible quel est leur plan pour relancer la métropole.

Il y a un élément que je trouve très triste dans ce projet de loi et dans tout le débat qui a suivi. C'est qu'il y a peu de députés ministériels de la grande région de Montréal qui sont intervenus là-dessus. Moi, je me pose la question, M. le Président: Comment ces gens-là vont faire en fin de semaine ou peut-être seulement pendant les vacances de Noël... si je prends l'exemple, je ne sais pas, du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, pour se promener dans son comté et dire qu'il a appuyé ce projet de loi là? Il a appuyé ce projet de loi là qui vient hypothéquer l'avenir de Montréal, qui vient faire reculer Montréal. Comme je l'ai dit tantôt, Montréal est au bord du précipice, on lui fait faire un pas en avant. Et dire à ses gens qu'il était d'accord avec ça? Comment il va faire, M. le Président? Quel genre de temps des Fêtes ce député-là va passer? À moins qu'il ne les passe pas au Québec, mais ca me surprendrait, connaissant... Normalement, il devrait aimer sa ville, puis, s'il aimait sa ville, il interviendrait contre ce projet de loi là. Mais, à ce moment-là, il pourrait se promener avec fierté dans son comté et dire: Oui, j'ai défendu les Montréalais et les Montréalaises au détriment du gouvernement du Québec, parce que, comme je l'ai dit... J'entends dire: Pas de taxes, pas de taxes. Oui, pas de taxes, M. le Président. Mais, quand on n'a plus de services, même si on ne paie plus de taxes, ça va mal un peu dans la vie. À un moment donné, il faut s'ouvrir les yeux et voir les choses comme elles sont. Ce n'est pas tout, un compte de taxes. Quand on a moins de services...

Je pense qu'une des solutions qu'a envie de proposer le gouvernement du Québec avec ça, c'est un peu comme s'il disait aux Montréalais: Regardez, O.K., vous n'aurez pas d'augmentation de taxes, mais achetez-vous tous une pelle parce qu'on ne déblaiera plus les trottoirs. Bien oui, on n'augmente pas les taxes, mais on va tous s'acheter des pelles puis, en plus, on va déblayer les trottoirs. Puis on va se promener dans le temps des Fêtes, à Montréal, et les députés de Montréal vont tous être fiers de ça. M. le Président, si une chose comme ça se produisait pour les municipalités de mon comté, je serais contre, et c'est pour ça que je suis contre. Il y a d'autres projets de loi qui sont proposés, d'autres alternatives qui ont été proposées cet après-midi, mais, moi, au moins, je vais avoir la fierté de me promener dans mon comté et de dire aux gens: J'ai travaillé pour vous défendre, j'ai travaillé pour vous autres et je ne me suis pas fait complice d'un gouvernement qui veut appauvrir le Québec, qui veut appauvrir les Québécois et les Québécoises et qui met en place un système de taxation, un pacte municipal virtuel basé sur des trous, basé sur rien, sur des hypothèses et qui fait en sorte que l'on hypothèque l'avenir des Québécois et des Québécoises et l'avenir des jeunes et des générations futures. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. S'il n'y a plus d'autres intervenants, je vais céder la parole à M. le ministre pour sa réplique. M. le ministre.


M. Rémy Trudel (réplique)

M. Trudel: M. le Président, quelques mots de réplique, puisque j'ai patiemment écouté les députés de l'opposition répéter à une quinzaine de reprises la même argumentation. Alors, ce n'est pas parce qu'on répand 15 fois la même chose que ça devient une vérité, et ils ne m'ont pas convaincu, M. le Président.

À ce moment-là, pas besoin de faire de longs débats, simplement quelques remarques de conclusion pour indiquer que ces gens-là n'ont montré aucune sensibilité à la ville de Montréal, ils n'ont montré aucune compassion et surtout aucune compréhension de la situation. Pour eux, qu'il se soit passé des problèmes dans les régimes de retraite, que les sociétés paramunicipales aient fait en sorte que Montréal se retrouve dans une situation financière vraiment difficile, que les efforts qui sont demandés à Montréal, comme à l'ensemble des autres municipalités, causent des problèmes aux Montréalais et aux Montréalaises, ça, c'est le cadet de leurs soucis, M. le Président. Ça, ça ne les intéresse pas, les problèmes de Montréal; on avait vu ça à l'époque où ils étaient au pouvoir. Et même quand on est de Kamouraska-Témiscouata, on vient de comprendre tout ce qui se passe à Montréal. Et l'expression qui s'est le mieux employée pour ces personnes, c'est: Laissez-les couler dans le fleuve Saint-Laurent, c'est encore la meilleure situation!

M. le Président, c'est non! Nous avons choisi d'aider Montréal, nous avons choisi – comme la députée de Prévost, qui est de cette région-là – de prendre parti pour Montréal, nous avons choisi aussi de prendre la voie des redressements qui vont devenir permanents avec l'administration en place.

M. le Président, il fallait poser ce geste de dire à la ville de Montréal: D'abord, vous pouvez préparer votre budget, et nous allons travailler sur les pistes suivantes avec vous. Et nous allons vous accompagner tout au long de ce travail pour en arriver à ce que les éléments du programme à réaliser se matérialisent et qu'on termine l'année 1998 avec un budget équilibré, et qu'on prépare l'année 1999 avec des mesures, avec une situation et des redressements qui permettent de retrouver une situation plus naturelle, plus normale, pour en arriver à ce que les Montréalais continuent – pas retrouvent, mais continuent – d'avoir la fierté de leur ville. Comme le disait le député de Roberval: Qu'on soit aussi fiers, partout à travers le Québec, de notre métropole et que, quand on a des difficultés, eh bien, on puisse compter sur Montréal au niveau du développement... mais Montréal peut compter sur le Québec.

M. le Président, là on peut consulter, on peut tergiverser, on peut placoter, mais, un bon matin, il faut prendre parti. La loi n° 183, elle prend parti pour la ville de Montréal, elle prend parti pour les Montréalais et les Montréalaises, elle prend parti pour ceux et celles qui, au 1er janvier 1998, pourront dire: Il n'y aura pas d'alourdissement du fardeau de taxes parce qu'il y a quelqu'un à l'Assemblée nationale, dans la majorité gouvernementale, qui a pris parti pour nous, qui s'est mis à travailler avec nous, et c'est ensemble que nous allons réussir.

Quant aux sornettes que vous pouvez entendre sur le restant du débat, M. le Président, il faut toujours bien causer à l'Assemblée nationale pour occuper les gens le vendredi soir. Nous, on va agir, on va agir dans l'intérêt des Montréalais et des Montréalaises, et c'est comme ça que nous allons réussir, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Affaires municipales. M. le député de Kamouraska-Témiscouata, vous voulez intervenir sur une question de règlement?

M. Béchard: Oui, en vertu de l'article 213, est-ce que le ministre accepterait de répondre à une petite question?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre? Alors, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, vous pouvez poser votre question.

M. Béchard: Oui, M. le Président, j'écoutais la réplique du ministre puis je me demandais: Comment le ministre peut-il dire que la situation de Montréal le préoccupe, alors qu'il a observé, sans se tenir debout, un transfert de plus de 80 500 000 $ découlant directement des décisions de son gouvernement au cours de la dernière année? Comment peut-il prétendre ça?

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre.

(23 h 10)

M. Trudel: M. le Président, le peuple les a chassés du pouvoir parce qu'ils ne savaient pas calculer, et ils ont bien eu raison. Pendant tout l'été, nous avons protégé la partie à débourser de la ville de Montréal à l'intérieur du pacte que nous avions à passer avec les municipalités. Nous avons maintenu cette contribution à 2,5 % du budget, M. le Président, et non pas 5,7 %, parce que nous avions conscience de la situation et qu'il fallait réparer le 1 000 000 000 $ d'erreurs par année de nos amis d'en face au cours des sept dernières années. Alors, M. le Président, voilà pourquoi nous avons agi pour Montréal. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le principe du projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, compte tenu que nos collègues ont bien travaillé cette semaine et que, par contre, les commissions continuent à siéger, je fais motion que nous ajournions nos travaux au mardi 9 décembre 1997, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous ajournons nos travaux à mardi prochain, 10 heures.

(Fin de la séance à 23 h 11)