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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 13 novembre 1997 - Vol. 35 N° 133

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Table des matières

Affaires du jour

Présence de la consule générale du Costa Rica à Montréal, Mme Carmen Patricia Gudiño-Fernandez, et de parlementaires de la République du Costa Rica

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures trois minutes)

Le Président: Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour

Pour cette séance de la matinée, nous allons aller aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 8 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 164


Adoption du principe

Le Président: Alors, à l'article 8, Mme la ministre déléguée au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 164, Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Je suis prêt à reconnaître le premier intervenant. Mme la ministre déléguée au Revenu.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, ce matin, je soumets à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 164, qui est intitulé: Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Ce projet de loi n° 164 vise principalement à solutionner certains problèmes qui ont été soulevés par le Protecteur du citoyen dans son rapport qui portait sur l'application de cette loi.

Ce projet de loi fait suite aussi à des recommandations qui ont été émises par un comité de suivi de la loi que nous avions mis en place, à l'époque de l'adoption de cette loi, à la suite de la décision de Mme Jeanne Blackburn, qui était marraine de cette loi et qui était ministre responsable de la Condition féminine et à qui je veux rendre hommage aujourd'hui pour avoir défendu ce projet que notre gouvernement juge essentiel aux enfants du Québec.

Le mandat du comité de suivi, qui est un comité de travail, en fait, comporte deux volets: un volet d'évaluation de notre régime de perception automatique des pensions alimentaires et un autre volet qui consiste à suggérer certains ajustements pour l'améliorer continuellement, sorte de processus d'amélioration continue, toujours avec le même objectif, de réduire la pauvreté des familles qui dépendent de ces pensions alimentaires. Et vous allez pouvoir constater par ce projet de loi, M. le Président, que nous avons été à l'écoute des intervenants.

La Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires est l'une des mesures dont notre gouvernement est probablement le plus fier, M. le Président. Elle a comme objet principal, comme objectif, en fait, d'assurer aux enfants que le parent non gardien honore ses responsabilités vis-à-vis d'eux. Elle constitue le premier pas que notre gouvernement a fait dans la lutte à la pauvreté des femmes et des enfants, tout particulièrement en favorisant la permanence, la stabilité et la régularité des paiements des pensions alimentaires. Le projet de loi que je présente aujourd'hui à l'Assemblée ne modifie en rien les objectifs et la protection que nous nous étions fixés. Il n'introduit que des ajustements pour une meilleure protection de nos enfants et des familles qui dépendent des pensions alimentaires.

Dans un premier temps, une nouvelle disposition proposée dans ce projet de loi permettra au tribunal d'autoriser le paiement de la pension par le débiteur alimentaire directement à son créancier, celui qui reçoit la pension, dans l'attente de la prise en charge du dossier par le ministre du Revenu, et ce, conformément à la loi.

Dans un deuxième temps, il prévoit une diminution de la sûreté qui doit être fournie par un débiteur alimentaire quand les parties choisissent conjointement, et surtout de façon éclairée et libre, de ne pas recourir au régime de perception automatique des pensions alimentaires par l'État. Cette sûreté devra alors prévoir le paiement de la pension pendant un mois au lieu de trois mois, tel que c'est prévu actuellement à la loi. Et, en plus, il prolonge à 30 jours le délai à l'intérieur duquel le débiteur alimentaire doit fournir cette sûreté au ministre.

À l'égard de la première mesure, celle qui permettra au tribunal d'autoriser un paiement de pension alimentaire entre deux parents dans l'attente de la prise en charge du dossier par le ministre du Revenu, il faut voir que la législation actuelle ne permet pas à un débiteur alimentaire de verser la pension directement à son créancier et ne permet pas au juge de prévoir dans son ordonnance que le débiteur puisse payer sa pension directement au créancier avant que le ministère du Revenu en débute le traitement.

Or, à l'expérience et selon les recommandations du Protecteur du citoyen, et à la suite de l'analyse de notre comité de suivi, notre groupe de travail sur ce projet de loi pour en améliorer continuellement la qualité, il appert que dans plusieurs dossiers le débiteur alimentaire serait disposé à payer directement les versements de la pension à son créancier en attendant que le ministère, en particulier, du Revenu prenne en charge ce dossier, mais il appert aussi qu'il hésite à le faire parce qu'il agirait à ce moment-là en contravention de la loi. En effet, jusqu'à ce que l'avis de retenue ou l'ordre de paiement, c'est-à-dire le mode de perception qui a été établi par le ministère, soit effectif, la loi oblige le débiteur à verser le montant de la pension au ministre ou au ministère, de manière plus concrète.

M. le Président, il existera toujours un délai entre le prononcé d'un jugement et, bien sûr, la prise en charge du dossier par le ministère du Revenu. De fait, on estime que le délai minimum sera autour de 30 jours. Par conséquent, la mesure que nous proposons par ce projet de loi n° 164 vient combler un besoin et vient surtout répondre à une demande de la part des hommes et des femmes qui sont assujettis à l'application de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires.

(10 h 10)

Par ailleurs, il est important de souligner que la permission que nous donnons de faire cette entente prendra fin lorsque la pension sera perçue selon l'un des deux modes de paiement qui sont effectivement prévus à la loi, ou au plus tard, donc au maximum, quatre mois après le prononcé du jugement. Ce délai sera suffisamment long, de l'avis du groupe de travail et du Protecteur du citoyen et enfin de ceux qui ont travaillé pour l'amélioration de ce projet de loi, pour que toutes les modalités soient satisfaites et que le ministère du Revenu puisse verser la pension conformément à la loi. Néanmoins, je tiens à souligner et à rappeler à l'attention de cette Assemblée que le délai visé pour la prise en charge d'un dossier est d'environ 30 jours de la date du jugement.

L'autre mesure que ce projet de loi introduit vise à donner suite aux commentaires encore spécifiques du Protecteur du citoyen. Celui-ci soulignait que le nouveau régime vise aussi le respect de l'autonomie des parties en autorisant que la loi ne soit pas applicable à leur égard, mais sous certaines conditions. Même si la loi prévoit que les parties peuvent se soustraire à son application, donc éviter l'intervention du ministère du Revenu, cette soustraction à la loi est quand même assujettie à certaines conditions. L'une de ces conditions est celle de verser une sûreté qui sera suffisante pour garantir le paiement de la pension pendant trois mois, et ce, en un seul versement qui doit être fait dans les 10 jours du prononcé du jugement.

Or, comme nous l'a bien indiqué le Protecteur du citoyen, comme l'a validée le comité de suivi, cette condition reste souvent extrêmement difficile, voire impossible à réaliser pour les débiteurs à faibles revenus. J'ajouterais même que, pour la plupart des débiteurs, il est très difficile à la fois de payer une pension alimentaire lors d'une séparation ou d'un divorce et d'avoir sous la main une somme ou une garantie représentant trois mois de cette pension alimentaire et de la verser dans le délai prescrit par la loi. On propose donc que ce dépôt, cette sûreté qu'il faut faire, à fournir, garantisse plutôt le paiement de la pension pendant un mois. Donc, on réduit l'envergure du montant de trois mois à un mois et on prolonge le délai qui était de 10 jours pour constituer la sûreté à un mois.

Je tiens à souligner que cette modification a reçu l'aval des associations qui représentent à la fois les créanciers et les débiteurs alimentaires. Elle a reçu l'aval du Protecteur du citoyen, du Barreau du Québec ainsi que d'autres ministères et organismes gouvernementaux qui sont impliqués dans le développement social au Québec. J'invite donc les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 164 parce qu'il y va de l'intérêt des enfants et des parents qui dépendent de la pension alimentaire pour vivre. Merci, M. le Président.

Le Président: Je reconnais maintenant Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Mardi dernier, la ministre déléguée au Revenu déposait en cette Chambre le projet de loi n° 164, Loi qui modifie la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Avant d'aborder plus spécifiquement le projet de loi n° 164, j'aimerais, M. le Président, si vous me le permettez, revenir sur les objectifs visés par l'adoption de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires que l'Assemblée nationale a d'ailleurs adoptée à l'unanimité le 11 mai 1995.

Comme on le sait, la pauvreté chez les enfants engendre la marginalisation, le décrochage scolaire, la délinquance, la détresse psychologique. Donc, la problématique du non-paiement des pensions alimentaires a des conséquences très graves pour les femmes et les enfants qui vivent la rupture. Toutefois, je trouve important de rappeler aux membres de cette Assemblée qu'il y a au Québec 45 % de bons payeurs versus 55 % de mauvais payeurs au niveau du versement de la pension alimentaire. L'adoption d'une loi facilitant le paiement des pensions alimentaires était donc sans conteste un pas dans la lutte contre la pauvreté qui sévit durement chez les familles monoparentales, et l'opposition officielle partageait les objectifs visés par la loi 60, à savoir: favoriser la stabilité et la régularité du paiement des pensions alimentaires; réduire les délais et augmenter le taux de perception des pensions alimentaires; implanter des mécanismes permettant aux enfants et aux parents d'obtenir les pensions alimentaires auxquelles ils ont droit; et, finalement, responsabiliser les parents et les conjoints face à leur obligation alimentaire.

D'ailleurs, M. le Président, il est important de mentionner que la majorité des groupes qui ont été entendus en commission parlementaire à l'époque accueillaient favorablement les objectifs visés par la loi. On ne peut que constater aujourd'hui que, malheureusement, les objectifs n'ont pas été atteints et que, dans plusieurs cas, la situation s'est détériorée. Les femmes et les enfants ont dû subir des délais indus. Les femmes qui, normalement, n'avaient aucune difficulté à percevoir leur pension alimentaire ne la recevaient plus. La difficulté pour la créancière d'obtenir des renseignements sur le cheminement de son dossier a été accentuée.

Malheureusement, M. le Président, ce que nous avions prévu est arrivé, soit un embourbement tel que les femmes et les enfants en paient le prix aujourd'hui. Nous demeurons toujours convaincus que, si la ministre veut vraiment assurer la stabilité et la régularité dans le paiement des pensions alimentaires, si elle veut vraiment augmenter le taux de perception, si elle veut vraiment lutter contre l'appauvrissement des familles monoparentales, elle devrait tout simplement exempter les bons payeurs de l'application de la loi. Ceci lui permettrait de concentrer tous ses efforts, toutes ses énergies à combattre les mauvais payeurs.

De plus, M. le Président, j'aimerais rappeler les inquiétudes et les recommandations qui avaient été soumises par certains groupes, notamment le Protecteur du citoyen et le Conseil du statut de la femme, quant à l'importance que le gouvernement devrait spécifiquement accorder à l'implantation de ce nouveau système de perception automatique des pensions alimentaires. À cet égard, permettez-moi de citer les allégations du Protecteur du citoyen à ce sujet. Le Protecteur du citoyen disait: «La mise en oeuvre de ce nouveau programme gouvernemental nécessitera aussi une planification serrée et intelligente. Celle-ci devra associer les clientèles dans l'élaboration des outils d'information et des formulaires. La formation du personnel est aussi essentielle. En somme, il faut s'assurer que tous les processus soient fonctionnels avant l'entrée en vigueur de la loi.»

De plus, M. le Président, le Protecteur du citoyen faisait également une mise en garde sérieuse au gouvernement. Il disait: «Une telle opération doit être planifiée minutieusement, comme je le rappelais d'ailleurs dans mon dernier rapport annuel. En effet, une planification déficiente entraîne souvent des ratés qui compromettent l'exercice des droits. Trop souvent, une loi qui remédie à des carences ou à des délais indus génère ses propres carences et délais parce que les besoins, les outils et les processus nécessaires à son implantation sont mal évalués. Or, ajoutait le Protecteur du citoyen, l'enjeu d'une réforme qui favorise le paiement des pensions alimentaires est trop important pour que l'on se permette des erreurs.»

M. le Président, d'autre part, le Conseil du statut de la femme soutenait et disait: «Même si une réforme de la perception des pensions alimentaires ne pourra à elle seule régler le problème de pauvreté des femmes, elle aura une influence certaine sur les conditions de vie de plusieurs femmes et enfants. Le Conseil espère également que le gouvernement se donnera les moyens nécessaires pour assurer un fonctionnement efficace du régime.»

Eh bien, le gouvernement a fait tout à fait le contraire. Il a précipité l'entrée en vigueur du nouveau régime. Je l'ai vivement dénoncé à l'époque et je le dénonce encore aujourd'hui, puisque nous pouvons constater les dégâts qui ont résulté de cette décision. Et j'aimerais, M. le Président, vous rappeler les faits.

Cinq mois suivant l'adoption de la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, le gouvernement rejette du revers de la main la stratégie qui avait été planifiée pour assurer le succès de l'implantation de ce nouveau régime. Et, pour des raisons qu'on peut qualifier de purement partisanes, le gouvernement annonça, en pleine campagne référendaire, que la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires serait devancée et qu'elle entrerait en vigueur le 1er décembre 1995, soit six mois plus tôt que prévu initialement.

(10 h 20)

M. le Président, en précipitant l'entrée en vigueur du nouveau régime de perception des pensions alimentaires, le gouvernement a créé un fouillis administratif qui, depuis deux ans, pénalise les femmes et les enfants. D'ailleurs, quelques mois seulement après cette entrée en vigueur précipitée, de nombreuses plaintes ont été acheminées, tant de la part des créanciers que des débiteurs alimentaires, au Protecteur du citoyen, et ce dernier a pu constater que la majorité de ces plaintes étaient fondées.

M. le Président, comment ce gouvernement a-t-il pu être aussi irresponsable en précipitant l'entrée en vigueur de ce nouveau régime, tout en sachant pertinemment que le système informatique n'était pas prêt, que les nouveaux agents de recouvrement n'avaient pas reçu la formation adéquate? On peut conclure aujourd'hui, M. le Président, que le processus d'implantation du nouveau régime facilitant le paiement des pensions alimentaires a été un échec total.

D'ailleurs, M. le Président, permettez-moi de vous soumettre les commentaires que l'on pouvait retrouver dans les journaux en 1996. On pouvait lire dans les médias, M. le Président: «Une balloune politique dont les femmes font les frais.» «Les pensions alimentaires, c'est la pagaille.» «Versement des pensions alimentaires, des ratés dans la perception automatique. Les chèques prennent des semaines à se rendre.»

De plus, M. le Président, on pouvait lire dans le quotidien Le Soleil du 18 mai 1996: «La machine infernale de la perception automatique des pensions alimentaires fait des siennes. Pas moins de 2 000 révisions d'ordonnances de divorce ont été transférées par erreur du ministère de la Justice à celui du Revenu avec, pour résultat – et c'est important que vous le sachiez, M. le Président – que des femmes attendent parfois des semaines des chèques de pension que leur ex-époux, généralement des bons payeurs, auraient pu tout simplement leur donner en main propre.»

On pouvait lire également, M. le Président, au mois de novembre 1996: «Les pensions alimentaires plus difficiles à toucher.» Et on pouvait même lire, M. le Président: «C'est le bordel, lançaient plusieurs avocats spécialistes en droit familial, quand on leur demande de dresser le bilan de la première année d'application de la Loi sur le paiement des pensions alimentaires qui est entrée en vigueur le 1er décembre 1995.» Dans ce même article, une agente d'information du ministère du Revenu stipulait, et je cite: «Nous disposons d'un nouveau système informatique depuis la mi-octobre 1996. Nous nous attendons à ce que cela accélère le processus puisque, avant cette installation, il fallait procéder à la main.» On comprend pourquoi, M. le Président, l'implantation du nouveau régime de pensions alimentaires a été un échec quand on constate que le système informatique a été prêt seulement 11 mois après l'entrée en vigueur du nouveau régime. D'ailleurs, le bilan déposé par la ministre en juin dernier vient confirmer ce qu'on pouvait lire dans les journaux.

En effet, M. le Président, si je prends le tableau du traitement des dossiers des pensions alimentaires, on s'aperçoit qu'en décembre 1996, soit un an après l'implantation, sur les 39 222 dossiers, 12 441 dossiers n'étaient pas encore assignés à un agent de recouvrement contre 26 781 dossiers qui l'étaient. Vous conviendrez avec moi que c'est un bien triste bilan, pour ne pas dire un échec si on se met à la place des femmes et des enfants qui sont en attente de recevoir leur pension alimentaire. Un an et demi plus tard, soit en juillet 1997, le bilan reste encore inacceptable. On peut constater que 7 403 dossiers étaient toujours en attente d'être assignés à un agent de recouvrement.

De plus, M. le Président, la ministre déléguée au Revenu rappelait, dans un communiqué émis le 4 novembre dernier, que le nombre de dossiers de pension alimentaire non assignés à un agent continuait de diminuer. Au 31 octobre 1997, 2 943 dossiers étaient toujours en attente d'assignation.

M. le Président, malgré la constatation d'une baisse par rapport à décembre 1996, il n'en reste pas moins qu'il y a près de 3 000 familles monoparentales aujourd'hui dont le dossier est toujours en attente d'assignation, donc en attente de versement de leur pension alimentaire. De plus, il serait intéressant de savoir, sur les 58 695 dossiers qui ont été assignés, combien sont toujours en traitement et combien donnent droit au versement de la pension alimentaire. Mais, malheureusement l'opposition n'a pas les résultats de ces chiffres en main.

En passant, je profite de l'occasion aujourd'hui pour reconnaître le travail immense que les fonctionnaires du ministère du Revenu ont dû accomplir pour désembourber le système du nouveau régime de perception des pensions alimentaires. Il faut souligner que leur travail aurait été beaucoup plus facile et plus efficace si le gouvernement n'avait pas précipité l'implantation de ce nouveau système.

M. le Président, le 4 novembre dernier, la ministre déléguée au Revenu déposait à l'Assemblée nationale le projet de loi n° 164, Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Les modifications législatives contenues dans ce projet de loi visent à assouplir la loi et, il faut le dire, ce n'est pas trop tôt. Par contre, je me demande si les modifications législatives proposées par la ministre déléguée au Revenu viendront vraiment régler les problèmes que l'on connaît; ou bien essaie-t-elle tout simplement de guérir un bras cassé en appliquant un diachylon? Ces modifications, M. le Président, permettront-elles vraiment d'assurer aux femmes et aux enfants le versement des sommes auxquelles ils ont droit?

Les articles 1 et 4 du projet de loi visent donc à assouplir les conditions qui permettent aux parties de se soustraire de l'application de la loi afin d'éviter l'intervention du ministère du Revenu pour le versement de la pension alimentaire. Dorénavant, le montant de la sûreté exigé du débiteur pour bénéficier de l'exemption de la loi ne sera plus équivalent à trois mois de pension alimentaire, mais sera équivalent à un mois seulement. M. le Président, l'article 4 vient, lui, allonger le délai concernant le dépôt de la sûreté. Le débiteur alimentaire aura donc, suite à l'adoption de ce projet de loi, 30 jours à partir du prononcé du jugement au lieu de 10 pour déposer le montant de la sûreté au ministère du Revenu. Comme nous l'avons mentionné lors de l'étude de la loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, et comme le mentionnait le Protecteur du citoyen dans son rapport du mois d'août dernier, le dépôt d'une sûreté équivalent à trois mois de pension alimentaire, dont le versement est exigible dans les 10 jours à partir du prononcé du jugement, est une condition souvent impossible à rencontrer pour le débiteur à faibles et à moyens revenus. Ces modifications permettront sûrement aux bons payeurs qui veulent être exemptés de l'application de loi de verser directement la pension alimentaire à la créancière plutôt qu'au ministère du Revenu, et ce, afin d'éviter des délais indus. Il est à prévoir que ces modifications permettront également de désengorger le système.

L'article 2 du projet de loi n° 164, lui, vise à suspendre pour un temps limité l'obligation pour le débiteur de verser directement la pension alimentaire au ministre du Revenu. Il faut se rappeler, M. le Président, que la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires empêche le débiteur alimentaire de verser directement à son créancier le montant de la pension alimentaire. Si je me fie au rapport du Protecteur du citoyen, l'article 2 vient tout simplement légaliser une procédure, une pratique que le ministère du Revenu a mise en oeuvre depuis le mois de mai pour pallier aux difficultés en permettant temporairement aux parties qui y consentent le paiement de la pension alimentaire directement au créancier sans que le ministère intervienne.

Cette modification législative permettra donc aux familles monoparentales qui sont présentement privées de leur pension alimentaire, non pas parce que le débiteur est fautif mais parce que le système est engorgé au ministère du Revenu, de recevoir directement du débiteur leur pension alimentaire. Cette modification législative m'apparaît une nécessité, dans les circonstances, quand on sait que les délais pour le versement de la pension alimentaire varient entre quatre et six mois. Je rappelle, M. le Président, que ce délai est intolérable et même inacceptable.

(10 h 30)

Toutefois, il est important de savoir que cette suspension de prise en charge par le ministre ne pourra excéder quatre mois à partir du prononcé du jugement. Ce délai de quatre mois suscite beaucoup de questionnement. Pourquoi la ministre impose-t-elle une échéance et un délai de quatre mois? Comment se fera la transition entre le quatrième et le cinquième mois, c'est-à-dire entre le moment où c'est le débiteur qui est responsable du versement de la pension et le moment où c'est le ministère du Revenu qui en devient responsable? La ministre peut-elle nous garantir qu'à la fin du délai de quatre mois la prise en charge du dossier par son ministère ne viendra pas causer un nouveau délai additionnel dans le versement de la pension alimentaire? En voulant assouplir la loi, la ministre ne vient-elle pas de créer un irritant supplémentaire en introduisant un tel délai? J'aurai l'occasion, M. le Président, lors de l'étude article par article en commission parlementaire, d'échanger avec la ministre à cet effet.

De plus, on retrouve différents points fort importants dans le rapport déposé par le Protecteur du citoyen au mois d'août dernier. Je pense notamment au manque de flexibilité dans la retenue sur le salaire. On sait que le Code de procédure civile prévoit que le ministère peut saisir jusqu'à 50 % du salaire brut d'un débiteur. Les faits, la réalité révèlent que certains débiteurs, après saisie de leur salaire, ne disposent que d'un montant inférieur au barème de l'aide sociale pour vivre ou pour faire vivre leur nouvelle famille. Certains débiteurs soutiennent qu'ils envisagent même de laisser leur emploi pour s'inscrire à la sécurité du revenu. Si tel est le cas, la ministre déléguée au Revenu admettra volontiers que ce genre de situation n'aidera certainement pas à régler la pauvreté que vivent les femmes et les enfants.

De plus, M. le Président, le Protecteur du citoyen soulève les difficultés que vivent les personnes qui ont une ordonnance de la Cour du Québec, division de la chambre de la jeunesse, leur ordonnant un changement de garde pour la protection de leur enfant. Dans ces cas précis, comme le ministère du Revenu se réfère uniquement au jugement de la Cour supérieure, il ne tient pas compte de cette ordonnance et il comptabilise le non-paiement de la pension alimentaire du débiteur à titre d'arrérages. La seule solution qui s'offre au débiteur qui vient d'avoir la garde complète de ses enfants est de s'adresser à nouveau à la Cour supérieure pour faire annuler les arrérages et la pension alimentaire courante. N'y aurait-il pas matière à trouver des solutions pour alléger le processus quand il y a une ordonnance de la Cour du Québec, notamment au niveau de la chambre de la jeunesse, ordonnance précisant un changement de garde d'enfants pour la protection de ces enfants? La ministre devra se pencher sur cette question, sur cette problématique, le plus tôt possible.

Également, M. le Président, avant de terminer, je vous rappelle que les familles les plus pauvres parmi les familles pauvres au Québec, ce sont les familles monoparentales. 50 % d'entre elles se retrouvent à l'aide sociale et voient toujours leurs pensions alimentaires déduites dollar pour dollar de leurs prestations d'aide sociale, et le retard du dépôt de la loi sur la réforme de l'aide sociale ne fait que les maintenir dans une pauvreté extrême. Comme je l'ai mentionné au tout début de mon discours, le taux très élevé de pauvreté chez les femmes et les enfants, soit les familles monoparentales, me préoccupe au plus haut point, et je suis très sensible à la situation difficile que vivent ces gens, surtout dans les cas de rupture. À cet égard, toute modification législative pouvant aider à lutter contre la pauvreté des femmes et des enfants ne peut que recevoir notre collaboration. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Mme la ministre déléguée au Revenu.


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais remercier la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne pour son offre de collaboration pour continuer à améliorer cette loi et pour travailler avec acharnement avec nous pour réduire la pauvreté des enfants et des familles. Elle a bien reconnu la nécessité de cette loi et elle a reconnu aussi l'impact qu'elle avait eu par rapport à la situation réelle, où plus de la moitié des mariages se soldent en divorces et où plus de la moitié des parents qui sont responsables de payer les pensions n'assument pas leurs responsabilités. Et je pense que, plus on va travailler ensemble dans cette Chambre, plus on va réussir à réduire la pauvreté des enfants et, généralement, des femmes, il faut le dire, qui en assument la charge. 55 % de mauvais payeurs, c'est extrêmement inquiétant dans une société. Et – je cite la députée de Saint-Henri– Sainte-Anne – notre loi a été un pas vers la lutte contre la pauvreté, et je veux remercier tous ceux qui ont travaillé, des deux côtés de la Chambre, à la réussite de cette loi.

Les objectifs de la loi n'ont pas changé. Ce que nous avons voulu faire par ce projet de loi, c'est d'en améliorer encore la portée, d'en améliorer encore l'aspect pratique et d'assurer une plus grande stabilité et une plus grande régularité des paiements.

J'aimerais peut-être préciser quelques commentaires quant aux recommandations du Protecteur du citoyen. Le Protecteur du citoyen avait fait des recommandations de deux natures. Certaines d'entre elles nécessitent des modifications administratives auxquelles on travaille, et j'apprécie les commentaires élogieux qu'a eus la députée par rapport aux fonctionnaires du ministère du Revenu qui travaillent sur ce dossier-là de manière rigoureuse et responsable.

Et l'autre partie des recommandations du Protecteur du citoyen requérait des changements législatifs. Et, à cet égard, le ministère et le comité de suivi ont convenu de donner suite aux recommandations de nature administrative, d'abord en réduisant le délai de traitement des dossiers à 30 jours. On a aussi mis en place un nouveau système téléphonique. On a préparé des directives sur la divulgation des renseignements aux parties, au tier, ainsi que l'établissement d'une politique un peu plus souple dans la détermination du montant des arrérages, dont la députée a parlé, qui devraient être ajoutés à l'avis de retenue. Donc, on a vraiment essayé de tenir compte de la situation financière du débiteur.

Par ailleurs, des cinq recommandations qui pouvaient engendrer des modifications à la loi, il y en a deux que je présente ce matin. En outre, il y a une recommandation qui est toujours à l'étude au ministère de la Justice et à laquelle nous participons activement. Il y en a une autre qui a été réglée par l'entrée en vigueur du projet de loi qui établissait la médiation préalable en matière familiale. Finalement, la troisième recommandation, qu'on n'a pas pu retenir, elle est bloquée par un conflit de juridiction entre la Cour du Québec et la Cour supérieure. Ce n'est pas la première fois que ça arrive.

Quant à la situation au niveau du paiement et de la stabilité financière, le fait d'avoir devancé la mise en application du projet de loi pour les nouvelles ordonnances, pas pour tout, nous a permis, M. le Président, de retourner, avant la mise en vigueur complète de la loi, 6 500 000 $ aux femmes et aux enfants qui en attendaient le paiement. Alors, ça, ça nous a permis de répondre à la demande des nouvelles ordonnances. Bien sûr, il y avait un arrérage, un retard accumulé au niveau du ministère de la Justice, parce qu'on l'a dit, la moitié ou presque, d'après le ministère de la Justice, des payeurs, ils n'étaient pas de très bons payeurs, soit pas réguliers, soit pas responsables, soit perdus dans la nature.

Alors, ce que nous avons fait, c'est justement d'aider la responsabilité et la stabilité financières de ces nouvelles ordonnances. Et je pense que, contrairement à ce qu'a dit la députée de Sainte-Anne, notre nouveau régime est un succès total. Mais ce sur quoi on travaille, c'est l'amélioration. Et je pense que c'est là-dessus qu'il faut travailler ensemble pour qu'on puisse encore améliorer les revenus et la stabilité du revenu des femmes. Je tiens ici à remercier tous ces députés qui ont travaillé à définir ce projet de loi, tous ces fonctionnaires qui ont travaillé à leur administration, parce que je pense que l'administration publique a fait un pas remarquable.

Je voudrais compléter quelques données que la députée a mentionnées parce que je pense que c'est important et que ça va l'intéresser. Au niveau des dossiers qui sont actuellement actifs en traitement, au 31 octobre, il y en avait 46 666. Il y avait aussi 12 029 dossiers fermés et seulement 2 943 dossiers actifs au prétraitement, une baisse de 60 % par rapport au mois de juillet dernier. C'est toute une performance, ça! Ça fait un total de 61 638 dossiers. Je crois que ça témoigne de l'efficacité des systèmes, oui, de la formation complète des gens du ministère du Revenu.

(10 h 40)

Si on regarde ce que ça représente en volume d'argent que les enfants ont reçu par le biais de leurs parents, on parle de 105 400 000 $ au 31 octobre qui ont été versés aux créancières et aux créanciers alimentaires. 105 000 000 $, c'est beaucoup d'argent et ça nous permet de réduire d'autant la pauvreté.

En conclusion, je dirais que, si on veut réduire la pauvreté des enfants et des parents qui en assument l'éducation à la maison, il faut qu'on augmente le revenu des parents. Pour augmenter le revenu des parents, il faut augmenter l'activité économique. Les bonnes nouvelles de ce mois-ci, c'est qu'effectivement au Québec on est sur une reprise, même le taux de chômage a baissé.

Il faut augmenter aussi la solidarité sociale dans notre société, et ça se fait en parallèle avec une plus grande responsabilité fiscale qui rejoint essentiellement ce que j'ai déposé hier au niveau du projet de loi qui vise à donner suite au budget de notre gouvernement. Et j'espère qu'on va compter sur l'appui de l'opposition, et entre autres de la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, pour assurer que les nouvelles mesures du budget au 1er janvier prochain, qui vont réduire l'impôt sur le revenu des particuliers de 850 000 000 $, réduire de 15 % l'impôt des ménages qui gagnent moins de 50 000 $, réduire de 3 % l'impôt des ménages qui gagnent plus de 50 000 $, éliminer totalement l'impôt pour 200 000 contribuables à faibles revenus, améliorer l'aide en faveur des travailleurs à faibles revenus, simplifier les formules pour qu'on puisse avoir une plus grande responsabilité fiscale... J'espère qu'on va compter sur l'appui de la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Et je terminerais, M. le Président. J'écoutais les chiffres de la députée tout à l'heure. Je constate que la spécialité de l'opposition, c'est de regarder en arrière puis de fixer les bilans d'il y a trois mois. La différence entre notre gouvernement et celui qui était dirigé par l'opposition avant qu'on arrive, c'est que, nous, on se projette dans l'avenir. Et c'est ça, la différence entre un gouvernement du passé puis un gouvernement de l'avenir.


Mise aux voix

Le Président: Vous en recommandez donc l'adoption. Alors, est-ce que cette motion est adoptée? Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: Oui, M. le Président. C'est une motion d'avenir, il va de soi. Je fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée également? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je souhaiterais que vous appeliez – pas appeler, pardon, c'est un anglicisme, on me l'a fait remarqué – que vous preniez en considération l'article 9 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 165


Adoption du principe

Le Président: Alors, à l'article 9, Mme la ministre déléguée au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 165, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec. Mme la ministre déléguée au Revenu.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, je soumets maintenant à cette Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 165 qui est intitulé Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec.

Ce projet de loi, un peu technique, j'en conviens – mais, au ministère du Revenu, on en a souvent, des projets de loi techniques – propose d'introduire diverses modifications qui visent principalement à corriger des situations problématiques qui ont été relevées dans le cadre de l'application des lois que j'ai mentionnées au début. L'adoption de ces modifications est nécessaire pour que nous puissions assurer l'application concertée, équitable et efficace de l'ensemble des lois qui relèvent du ministre du Revenu.

Parmi les mesures qui sont contenues dans ce projet de loi n° 165, permettez-moi, M. le Président, d'insister un petit peu plus sur certaines d'entre elles. La première mesure, c'est le délai de cotisation. Le ministre du Revenu est actuellement limité par un délai lorsqu'il cotise à nouveau une personne à la suite de la découverte de revenus supplémentaires, par exemple. Selon la législation actuelle, ce délai est de trois ans depuis qu'un premier avis de cotisation a été établi.

Il existe certaines situations, par contre, dans lesquelles le ministère du Revenu se retrouve dans l'impossibilité d'établir une cotisation à l'égard d'une personne à l'intérieur de ce délai, et ça, pour toutes sortes de raisons.

La première des situations que vise à corriger ce projet de loi, c'est celle d'une personne qui n'a pas produit une déclaration de revenus dans le but spécifique d'éluder l'impôt sur les revenus qu'elle n'a pas déclarés. Actuellement, si le ministère du Revenu a établi une cotisation estimative à l'égard d'une personne parce que celle-ci n'a jamais produit de déclaration de revenus – et ça arrive, malheureusement – nous sommes dans l'impossibilité d'établir une nouvelle cotisation au-delà d'un délai de trois ans suivant ce premier avis de cotisation estimative.

La modification que nous proposons fait en sorte que le ministère du Revenu pourra désormais émettre une nouvelle cotisation tant et aussi longtemps qu'un contribuable n'aura pas produit sa déclaration. Lorsqu'il l'aura produite, le ministère pourra alors le cotiser, à l'instar de tout autre contribuable – donc comme tout le monde – qui, lui, a de fait produit une déclaration sans que le ministère ne l'y ait forcé par une cotisation estimative au début – parce qu'on ne le savait pas – et ce, dans un délai de trois ans depuis la date de sa déclaration ou indéfiniment s'il a fait une fausse déclaration. On le sait, si on fait une fausse déclaration, on peut nous cotiser n'importe quand. Cette modification que nous proposons, elle vise également à uniformiser ce délai à ceux qui sont prévus dans d'autres lois fiscales qui tiennent compte du moment où la déclaration est produite pour établir le délai de cotisation.

L'autre situation qui concerne les délais de cotisation touche en particulier les corporations. Actuellement, le ministère du Revenu, dans une démarche de vérification concertée avec le gouvernement fédéral, peut émettre des avis de cotisation à la suite de l'obtention de certains renseignements de la part de Revenu Canada. Or, à cause des délais de cotisation dans la loi actuelle, le ministère du Revenu n'a pas toujours la possibilité d'apporter les corrections correspondantes dans ses avis de cotisation.

Il faut savoir que les vérifications à l'égard des corporations peuvent être très complexes, on le sait, et peuvent nécessiter des représentations sur une période assez longue, ce qui fait en sorte que nous ne pouvons plus agir en raison de l'expiration des délais qui sont prévus aux lois actuelles. Ces délais-là sont trop courts et ils ne correspondent plus à la réalité.

En conséquence, M. le Président, la modification proposée prévoit un délai de cotisation additionnel d'un an à partir de la date de l'avis de cotisation émis par le gouvernement fédéral. Cette modification reflète ce qui se passe en Ontario, en Alberta. Donc, on devrait se sentir rassuré, de l'autre côté de la Chambre. Cette mesure vise aussi à réduire les dédoublements au niveau des vérifications et à donner plein effet à l'entente d'échange de renseignements qui existe entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral.

Le deuxième volet de ce projet de loi, c'est l'assouplissement aux délais d'opposition. Je suis certaine que l'opposition sera tout ouïe sur cette recommandation. Actuellement – je rappelle un peu les faits – une personne qui n'a pas contesté son avis de cotisation dans le délai prévu par la loi peut demander une prorogation de ce délai lorsqu'elle démontre qu'elle a été empêchée d'agir à l'intérieur de ce délai. Toutefois, elle ne peut faire une telle demande qu'à la condition qu'il ne se soit pas écoulé plus d'un an depuis la date de l'avis de cotisation. Donc, je le répète, une personne peut faire une telle demande seulement s'il ne s'est pas écoulé plus d'un an depuis la date de son avis de cotisation.

Le projet de loi que nous vous soumettons ce matin vise à allonger ce délai, qui est actuellement un délai maximum, en faisant courir ce délai non pas à compter de la date de la cotisation, mais à compter de la date où le délai pour s'opposer a expiré. Ce délai plus long est un réel avantage pour les contribuables. Cette modification constitue une harmonisation au délai d'opposition prévu dans la législation fédérale et elle se justifie par le fait que le Québec administre la taxe sur les produits et services.

(10 h 50)

Ce projet de loi permet également un assouplissement à l'égard des circonstances dans lesquelles une personne peut obtenir une prorogation de son délai d'opposition.

Actuellement, une personne peut demander à son représentant, si elle ne veut pas le faire elle-même, de contester son avis de cotisation, et le défaut du représentant de le faire dans le délai prévu à la loi n'est pas de nature à permettre une prorogation du délai. La modification qu'on propose vise donc à permettre une prorogation du délai d'opposition dans ces circonstances. Ainsi, un contribuable ne sera plus pénalisé en raison d'une erreur de son représentant. Je vois le député de Nelligan qui hoche la tête et je pense qu'il sera favorable à cette modification également.

L'autre élément que ce projet de loi vise à améliorer, c'est la communication de renseignements fiscaux à des fins de lutte contre les produits de la criminalité, et ça, j'espère qu'on aura l'appui de l'opposition là-dessus; en fait, je n'en doute même pas une seconde. Ces dernières années, M. le Président, les corps policiers ont entrepris diverses actions pour mieux combattre le fléau relié aux personnes qui tirent profit d'activités criminelles. Bien que plusieurs de ces actions aient donné des résultats extrêmement intéressants, il y a encore fort à faire à l'encontre des personnes qui retirent d'énormes bénéfices de la commission d'infractions criminelles.

À cet égard, le gouvernement doit faire en sorte que les corps policiers puissent disposer d'outils efficaces dans la lutte contre ceux qui jouissent des produits de la criminalité. Dans cette optique, les membres de cette Assemblée, je pense, seront heureux d'apprendre que le projet de loi n° 165 renferme une mesure particulière qui vise à permettre aux membres de la Sûreté du Québec ainsi qu'aux membres d'un corps de police municipale de bénéficier, dans certains cas, d'un droit d'accès aux renseignements et aux documents que le ministère du Revenu a obtenus dans l'application de nos lois fiscales. D'ailleurs, un tel droit d'accès à des documents fiscaux existe déjà dans la législation fédérale. Ce droit d'accès ne pourra toutefois s'exercer que si certaines conditions sont rencontrées. En effet, M. le Président, pour s'en prévaloir, les policiers devront, au préalable, obtenir l'autorisation d'un juge de la Cour du Québec. Une telle autorisation ne sera accordée que si le juge est convaincu qu'il est dans l'intérêt public de permettre l'accès aux renseignements et aux documents demandés.

De plus, il importe d'ajouter que la communication de ces renseignements et de documents détenus par le ministère du Revenu ne pourra être permise que dans le cadre d'enquêtes policières reliées à la lutte contre les produits de la criminalité. Enfin, les renseignements et les documents obtenus par les policiers ne pourront être communiqués qu'aux seules fins de l'enquête policière ayant justifié leur transmission.

J'invite donc, M. le Président, les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 165 qui modifie la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci, M. le Président. Oui, j'ai écouté avec intérêt l'intervention de la ministre déléguée au Revenu sur la loi n° 165, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu, la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires et la Loi sur le régime de rentes du Québec.

La ministre a essayé d'expliquer le grand contenu de ce projet de loi. Souvent, M. le Président, j'ai mentionné que nos lois fiscales sont presque impossibles à comprendre, avec des textes tellement juridiques, spécifiques, que, si vous ne suivez pas les lois comme fiscalistes ou comme avocats ou avocates, ça va être assez difficile de comprendre. C'est pourquoi, M. le Président, les débats ici, en Chambre, entre les politiciens, les élus, sont assez utiles pour expliquer ce que ça veut dire, la loi. Je ne cite pas quelques exemples pour faire mon point, je pense que la ministre déléguée du Revenu va être d'accord avec moi, c'est difficile de comprendre. Ce n'est pas une plainte contre nos avocats qui l'ont écrite, c'est une loi complexe, mais on veut s'assurer que la population comprend ce que le gouvernement veut faire et ce que l'opposition veut dire.

Mais, avant de commencer mes commentaires sur ce projet de loi, M. le Président, je suis un peu étonné de ce que j'ai appris ce matin par la ministre déléguée au Revenu qui, il me semble, deux fois dans son discours... Et vous pouvez sortir les galées. Elle est en train, je pense, de recommander que le Québec fasse exactement la même chose qu'Ottawa et les autres provinces canadiennes. Et là c'est toute une annonce. Je ne sais pas si elle est en train de faire une déclaration ministérielle, ici, s'ils ont eu un Conseil des ministres et qu'ils ont dit: Effectivement, les autres provinces ont raison. Elle a cité l'Alberta et l'Ontario. Ça marche bien en Alberta et en Ontario, c'est ça qu'elle a dit. Intéressant, M. le Président, parce que l'Alberta et l'Ontario utilisent le système du ministère du Revenu canadien, fédéral.

Ici, au Québec, c'est nous autres qui avons décidé: Non, on veut faire ça avec notre propre système. Avec ça, M. le Président, je trouve ça intéressant. Et peut-être qu'au retour du premier ministre la semaine prochaine il va y avoir une bonne discussion au Conseil des ministres, parce que la ministre déléguée a effectivement, je pense, entre les lignes, annoncé qu'elle veut fermer le ministère du Revenu du Québec, et ils sont prêts à utiliser la même stratégie que l'Ontario, que l'Alberta, qu'Ottawa.

Avec ça, je tiens compte des remarques de la ministre déléguée. Et peut-être que, pendant la commission parlementaire, on peut discuter de ses recommandations de fermer le ministère du Revenu du Québec. Je ne sais pas si les 8 000 personnes qui travaillent au ministère vont être à 100 % d'accord avec ce geste. Mais peut-être que les contribuables du Québec vont trouver ça intéressant, parce que nous avons vu, particulièrement pendant les quelques derniers mois, une stratégie agressive, presque une stratégie de harcèlement de nos contribuables. Avec ça, peut-être qu'il est maintenant temps de vraiment discuter de cette question.

En tout cas, j'offre mes services à la ministre déléguée pour faire ce débat: Est-ce que ça va être bon de réfléchir sur une autre façon de collecter les taxes? Il me semble que peut-être plus tard elle voudra aller un peu plus loin. Quand elle dit qu'on veut faire la même chose que l'Alberta, l'Ontario et Ottawa, qu'est-ce que ça veut dire? En tout cas, nous allons, je pense, avoir une chance un peu plus tard, M. le Président, de discuter de cette question. Mais, comme j'ai mentionné, je trouve ça un peu intéressant, un peu surprenant que peut-être elle ait déjà convaincu le Conseil des ministres que ça va être une façon de sauver de l'argent aux Québécois en ayant juste un ministère du Revenu. Je trouve ça intéressant qu'elle veuille utiliser le modèle de l'Ontario au Québec et dise que c'est Ottawa qui peut faire les choses comme ça. Mais, en tout cas, chaque jour, on a des surprises, et c'était la surprise aujourd'hui.

Le projet de loi n° 165, M. le Président, c'est une petite loi en comparaison de la brique qui a été déposée hier, le 161, avec 500 pages, 756 articles qui touchent 26 lois québécoises. Mais, quand même, malgré que ce soit juste 12 articles, c'est une loi assez importante. Et l'opposition va avoir beaucoup de questions et beaucoup de craintes. Nonobstant la façon dont la ministre déléguée essaie de nous convaincre que tout est beau, tout est correct et tout est formidable, moi, j'ai de la misère à y croire, au moment où on parle. Et je vais donner une chance, dans la prochaine étape, à la ministre déléguée d'expliquer ça.

Mais, encore une fois, on arrive: le fisc a besoin de plus de pouvoirs, de plus de temps parce qu'il ne peut pas faire son job. Déjà, vous savez, M. le Président – fort probablement, dans votre bureau de comté, vous avez reçu des plaintes sur ça – que le fisc, le ministère du Revenu utilise le droit de rétroactivité d'une façon aberrante, d'une façon abusive. Il arrive à la porte d'un contribuable, il frappe à la porte et dit: Nous avons légalement le droit de vous taxer rétroactivement sur trois ans. Il ne dit pas ça comme ça, là. Il dit: La loi permet de faire les cotisations trois ans passés parce que, il dit, le ministre du Revenu ne peut pas faire toutes les études de chaque déclaration d'impôts chaque année.

(11 heures)

En principe, je comprends pourquoi ils ont eu ce pouvoir, mais c'est la façon dont ils utilisent ce pouvoir; je trouve que c'est abusif. Parce que, M. le Président, j'ai déjà demandé, il y a des mois, des mois passés, en commission parlementaire, d'avoir le pourcentage, combien de cas, chaque année, sont étudiés par le fisc, quel pourcentage la première année, la deuxième année et la troisième année. J'ai demandé l'information, je n'ai pas reçu ça. C'était avant vous, Mme la ministre déléguée, mais je le demande encore. Peut-être que, cette fois-là, je vais avoir une réponse. Quel pourcentage de nos cas est actuellement retardé jusqu'à trois ans? Il me semble que ça commence à être de plus en plus le comportement de ce gouvernement de retarder les choses, d'arriver à la toute dernière minute, d'utiliser le pouvoir de rétroactivité, plus l'intérêt, plus la pénalité. Voilà, ils ont tout un système de taxation, soit payer les taxes en retard avec l'intérêt, la pénalité.

Je trouve que c'est intéressant, le vice-premier ministre lui-même utilise ce système. Les taxes municipales, il dit: Bah! je n'ai pas besoin de payer tout de suite, je vais payer l'intérêt et la pénalité. Il trouve que c'est logique. Une fois, peut-être que je vais avoir une chance, M. le Président, de lui demander si c'est sa recommandation à tous les contribuables québécois de ne pas payer leurs taxes, d'attendre d'avoir un avis de cotisation, de payer l'intérêt et la pénalité. Je trouve ça assez bizarre comme stratégie fiscale.

Mais le premier point, le point le plus important, la ministre a commencé avec. Elle a dit que le fisc, le pauvre fisc, le ministère du Revenu, avec plus de 8 000 fonctionnaires, le fisc qui a engagé 1 000 percepteurs juste l'année passée, le fisc qui a juste acheté 1 000 ordinateurs... Chaque personne qui travaille au ministère, M. le Président, presque chaque personne a un ordinateur portatif pour s'assurer qu'il peut fouiller dans les poches des Québécois. Avec ça, il arrive que trois ans sont passés. On veut avoir notre petite astuce: Non, ce n'est pas trois ans depuis la déclaration, ça va être trois ans après la première cotisation. Moi, je voudrais savoir où est le problème, pourquoi le fisc, avec toutes ces personnes, n'a pas fait son travail. La réponse, ce n'est pas de changer la loi, de prolonger le temps, mais ça va être de dire: Non, nous avons besoin de mieux faire notre travail.

Avec ça, M. le Président, effectivement, je vais avoir beaucoup de questions parce que, étape par étape, chaque loi qui arrive de ce gouvernement donne plus de pouvoirs, pas aux contribuables, elle donne plus de pouvoirs au fisc de ramasser de l'argent, d'avoir toute la flexibilité. Il peut être juge, jury et policier en même temps.

M. le Président, avant qu'on puisse adopter ces changements fiscaux, on doit s'assurer que le ministère du Revenu a fait toutes les choses possibles sans changer la loi, a respecté la loi qui existe maintenant. Au moment où on parle – j'attends d'avoir un débat avec la ministre, mais, au moins, on parle – je ne suis pas convaincu qu'il y ait besoin d'une autre extension. Il y a déjà trois ans. Comme j'ai dit hier, c'est des questions de pouvoir. Faites votre job. Ce n'est pas ma faute si le gouvernement dépense plus d'énergie sur l'obsession de la séparation que pour gérer ses affaires. Ce n'est pas notre faute. Il me semble que nous avons besoin d'avoir un gouvernement qui réponde à des besoins, et je pense qu'il y a des députés qui sont d'accord avec moi, là. Nous avons besoin d'avoir un gouvernement qui réponde aux besoins quotidiens de la population québécoise.

Avec ça, peut-être que la ministre va arriver avec quelques exemples qui, sans avoir ces changements, vont perdre quelque chose. Je suis prêt à écouter ça. Mais j'ai déjà eu ce problème, pas avec cette ministre déléguée, avec l'ancien ministre, parce qu'il y a vraiment la chaise musicale, là, entre les ministres délégués, «junior ministers, as we say in English». À la toute dernière minute, en décembre, j'ai eu une petite visite de l'ancien ministre délégué qui a dit: J'ai besoin d'avoir ce petit changement à la toute dernière minute. Le «trois ans» ne marche pas pour nous. Parce que, si on ne fait pas un changement de trois ans sur les mauvaises créances, nous allons potentiellement, au moins aux livres, perdre 300 000 000 $. La première visite sur ça, c'était plus ou moins, si ma mémoire est bonne, le 10 décembre l'année passée. Tout en urgence et, avec ça, nous étions bâillonnés, comme d'habitude, et ils ont passé ce projet de loi.

Mais, au moins, c'est un peu mieux que d'habitude, ça a été déposé la semaine passée. Avec ça, M. le Président, il me semble que nous allons avoir le temps de discuter de ce projet de loi ou cette partie du projet de loi. Et, en toute transparence, est-ce que le trois ans est assez pour le fisc? Est-ce que, avec les 8 000 fonctionnaires, avec tous les percepteurs qu'ils ont engagés, avec tout son pouvoir accru par la loi n° 32, de couplage d'informations, d'échanges de toute information sur la vie privée des Québécois, est-ce qu'il peut faire son travail dans les trois ans? Sinon, est-ce qu'il y a d'autres façons de faire, à part encore une fois donner plus de temps au fisc?

Deuxième point, M. le Président, sur la question des photocopies de l'information, le projet de loi n° 165 donne la possibilité d'avoir quelqu'un qui soit désigné par le ministère ou le ministre afin de faire les photocopies. Sur le plan technique, administrativement, peut-être que ça peut être intéressant pour ceux et celles qui font l'analyse des dossiers; peut-être. Mais, sur la question de la confidentialité de l'information, sur la question de la vie privée, sur la question du secret fiscal... Parce que je ne suis pas convaincu. Nous avons eu le débat ici, dans cette Chambre, que toute l'information est bel et bien protégée. Nous avons, le printemps passé, parlé d'un marché noir de l'information qui vient du ministère du Revenu. Avec ça, M. le Président, d'un côté, je comprends qu'on veuille avoir plus de flexibilité, aider nos percepteurs à faire les études, mais, pour les contribuables, on pense que notre rôle ici, ce n'est pas juste de donner plus de pouvoir aux fonctionnaires, je pense qu'on doit donner les outils au gouvernement pour faire son travail, aucun doute, mais on doit faire ça d'une bonne façon, pour protéger les contribuables. M. le Président, je vais avoir des questions sur ça aussi.

Et j'ai entendu encore, M. le Président, la stratégie de ce gouvernement, qu'il doit tout faire pour la lutte contre la criminalité. Pour les choses criminelles, comme la ministre le sait, je suis prêt certainement à travailler avec elle et son équipe pour assurer que le gouvernement ait les outils nécessaires et appropriés pour faire son travail contre la criminalité, il n'y a aucun doute. Mais je m'excuse, M. le Président, j'ai besoin vraiment de poser des questions quand on dit qu'on peut donner, qu'on peut faire la communication des renseignements fiscaux aux policiers. Moi, je vais avoir beaucoup de questions: Quel type d'informations? Comment ça va être protégé? Dans quel cas? Une fois que nous aurons établi la loi, une fois que nous aurons donné ce pouvoir, est-ce que ça va être porte ouverte, qu'en tout temps on pourra avoir cet échange d'informations?

On doit être prudent, M. le Président, et c'est une balance assez difficile à atteindre. Selon moi, ce gouvernement exagère tout le temps. On doit s'assurer que les personnes innocentes, que les contribuables honnêtes, ce qu'est la grande, grande majorité des contribuables québécois, ne soient pas négativement affectés par cet article de loi. Je n'accepte pas, quand le gouvernement fait cette annonce qu'on doit faire la bataille contre la criminalité, qu'on doit faire la bataille contre le marché noir, et qu'avec ça on donne tout le pouvoir au ministre du Revenu. Je n'accepte pas ça. J'accepte que nous allions ensemble faire la lutte contre la criminalité, comptez sur nous, aucun doute. Sur le vrai marché noir, pas sur le marché noir inventé par le gouvernement même, nous allons certainement travailler avec eux. Mais, sur le marché noir inventé par le gouvernement par le changement à mi-chemin des règles, non, je ne tombe pas dans le piège de ce gouvernement.

(11 h 10)

Et c'est ça que j'ai entendu aujourd'hui: On doit donner ce pouvoir. Mais, si on doit le donner, et je suis ouvert à discuter de ça avec la ministre; si, pendant la discussion, elle dit: Effectivement, la police a besoin de ça, je n'en suis pas convaincu ce matin, mais, si pendant le débat elle dit que, oui, nous avons besoin de ça, je voudrais avoir les documents déposés par la police sur cette question. Mais, si on donne ce pouvoir, je voudrais vraiment encadrer ça, limiter ce pouvoir, m'assurer que nous n'avons pas un autre abus. Nous en avons vu pas mal, pendant les derniers trois ans, des abus de pouvoir du ministère du Revenu.

M. le Président, le troisième point. Nous avons vu hier que certaines parties de ce projet de loi changent la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires. Encore une fois, ce gouvernement fait ça trop souvent, un échange de renseignements d'identification, le numéro d'assurance sociale. Vous savez, je ne commence pas ça aujourd'hui parce que nous sommes sur le projet de loi n° 165, mais vous vous souvenez, je pense, du projet de loi n° 32 qui est un... Je vois qu'il y a quelques députés qui trouvent le débat sur le projet de loi n° 32 assez intéressant. Peut-être que plus tard ils pourront faire une intervention sur ça s'ils le veulent. Le projet de loi n° 32, juste pour rappeler les faits, c'est le pouvoir de coupler les dossiers, la fusion de tous les dossiers, l'échange d'informations, etc., pour s'opposer encore à la lutte contre le marché noir. Quand ils ont passé le projet de loi n° 32, c'était la quatorzième fois qu'ils abrogeaient la loi sur l'accès à l'information. C'est grave, ça. Là, je pense que les contribuables honnêtes ont le droit à leur intimité. C'est pourquoi je vais demander pendant le débat pourquoi nous avons besoin de cette information.

Je crois que la ministre et le ministère ont déjà tous les pouvoirs nécessaires. Je ne veux pas qu'elle se lève et dise: On veut aider le système sur les pensions alimentaires. Nous aussi, nous avons fait des recommandations. Pourquoi a-t-elle mis tous les bons payeurs dans le même système, ce qui n'était pas nécessaire? Nous avons offert nos services pour améliorer ce projet de loi. Effectivement, de ce côté de la Chambre, le Parti libéral du Québec a toujours protégé la vie privée des contribuables québécois. M. le Président, nous allons questionner cet article.

Il y a un autre petit article, et je trouve ça intéressant que la ministre n'ait pas parlé de ça, l'article 10 du projet de loi. Il faut que je le lise pour le mettre en contexte. «Toutefois, aucune imposition ne peut être faite par le ministre à l'égard d'un employeur plus de quatre ans après la date à laquelle le montant devait être remis, à moins que l'employeur n'ait fourni aucune déclaration, n'ait fait une fausse déclaration ou commis quelque fraude en fournissant les renseignements requis ou qu'une renonciation n'ait été transmise au ministre au moyen du formulaire prescrit.»

Entre toutes les lignes, ici, M. le Président, si j'ai bien compris la loi, si je travaille dans une petite compagnie, et nous avons eu un certain arrangement, que mon salaire était payé, mais la compagnie, l'employeur n'a pas fourni le formulaire prescrit, peut-être que j'ai travaillé en 1985 pour cet employeur, j'ai été payé, j'ai pensé que tout était bien correct, mais l'employeur n'a fourni aucune déclaration. Ce n'est pas ma faute, c'est celle de l'employeur. Si j'ai bien compris cet article – et, si je n'ai pas bien compris, je serai très heureux – mais si j'ai bien compris, cet article donne le pouvoir au ministère du Revenu de retourner dans le passé, pas de trois ans, pas de quatre ans, pas de cinq ans, mais illimité, pour vérifier ces affaires-là. Je pense qu'on doit certainement questionner cet article et s'assurer que ça n'ait pas un impact aussi négatif que je l'ai pensé.

M. le Président, je pensais qu'avec mes commentaires pendant le premier débat sur ce projet de loi la ministre aurait déposé un avis qu'elle a reçu du Barreau du Québec, un avis qu'elle a reçu de la Commission d'accès à l'information, parce qu'on parle d'échange d'informations. Je sais que ça ne prend pas un amendement cette fois-là à la loi sur l'accès à l'information, mais il me semble qu'ici, avant qu'on puisse passer un projet de loi aussi important que ça, on doive faire cette vérification.

Sur le prolongement des droits d'appel pour les contribuables, il me semble qu'il y a quelque chose d'intéressant, et nous allons certainement continuer nos discussions sur ça. Mais, M. le Président, mes commentaires sont basés sur ma connaissance du projet de loi depuis le dépôt, la semaine passée, et aussi sur les interventions de la ministre déléguée aujourd'hui. Je garde une réserve, une fois que j'aurai moi-même une chance de savoir ce que la Commission d'accès à l'information pense à ce sujet et aussi le Barreau. Avec ça, je garde du temps pendant la prochaine étape pour faire d'autres commentaires.

Mr. Speaker, some brief comments about Bill 165 that was tabled by the Minister for Revenue today, an Act to amend the Taxation Act, the Act respecting the ministère du Revenu, the Act to facilitate the payment of support and the Act respecting the Québec Pension Plan. Brief comments and summary. I'm worried that this is another bill that gives increased powers to the Minister of Revenue. The Minister basically was saying that she needed more time, that there are certain cases that people just are not filing in time. I understand that's a concern. We have to work towards that, but they have the power already, three years, to go after those taxes, and I would suggest to the Minister, instead of coming with a simple answer of just giving more power to the Ministry, that she in fact get her Ministry back on track in doing its work.

Your recall, Mr. Speaker, that the Vérificateur général said that the average time of analysis for each tax dossier was 12 minutes. So I would suggest, with all due respect, that maybe the Minister, instead of asking for more time, could go back and have them do their work properly. I want to highlight that, this problem about these delays, because it seems illogical. If you say, well, look, we need more time to do the analysis, we need the right to go back taxing, it's understandable in certain cases, but when it becomes the norm – and I've seen this – that more and more the effort isn't done within the first two years to actually respond to proper delays, what happens is it indirectly penalizes the taxpayer, because you may not file a tax form, which isn't right, but we should be working in a collaborative model, a voluntary model to make sure that's happening or you might have been inadvertently improperly filed. It could be a mistake of «bonne foi», good intentions. But this part of the article, I believe, gives extra power that isn't needed to the Ministry.

I also highlight very quickly some questions about giving the power to make photocopies of dossiers, the power to exchange informations with the police on criminal activities. Again, they seem to, particularly the first part, facilitate the administration and not necessarily completely protect the taxpayer. I've questions on that. Maybe in some of the areas, in term of criminal cases, we're going to need a certain amount of flexibility, but we may have to make sure that is properly framed and limited.

I'm very concerned also, Mr. Speaker, about again... Let me just read article 9: «The Minister shall transmit to the Régie des rentes du Québec the social insurance numbers of former spouses that are necessary for the partition of the unadjusted pensionable earnings provided for in section 102.1 of the Act respecting the Québec Pension Plan (chapter R-9).»

(11 h 20)

Again, Mr. Speaker, this is an exchange of potentially sensitive informations. I'm worried about it not unto itself, but because of the communicative effect of all the other changes of informations. So, I think we have to really debate this and make sure that we have a clear understanding of how far it goes. I will ask the Minister to table any correspondence that she's had between the Commission d'accès à l'information and herself on this matter. If she hasn't asked for it up to now, I would strongly recommend that maybe before noon hour she send a note to the Commission d'accès à l'information to get their comments. That would make us feel better. It would, I think, allow us... I don't think it is a debate whether we feel good or not, but it would help us to debate of what's at stake here. And I'd appreciate if that gets done.

And the final point is – I've understood the end of the bill – in terms of that could be inadvertent. And at this point, I'll just say «inadvertent» mistake, in which, with a prolonging of a certain amount of time because an employer has not filed forms, it seems – if I understood it correctly – that it gives almost unlimited time delays to the Minister of Revenue to go back on certain employees if their employer has not filed. It seems to me, if the intent is to make sure the employer files, we should be working on that, and we should not inadvertently penalize the employee.

M. le Président, voilà quelques commentaires que j'ai mentionnés. J'ai commencé avec mon étonnement que la ministre soit indirectement en train de recommander qu'on fasse tout comme Ottawa, tout comme l'Ontario et tout comme l'Alberta. Peut-être que, pendant sa réplique, elle pourra expliquer pourquoi elle a décidé que la piste que le Québec a choisie pendant des années, ce n'est pas assez bon pour elle.

Il me semble, M. le Président, que ce projet de loi n'est pas nécessairement gros, mais qu'il y a les concepts qui sont assez fondamentaux, puis qu'on doit faire un bon débat, un débat en détail bientôt. J'espère, maintenant que c'est déposé, un premier débat. S'il y a des groupes qui veulent quelques commentaires sur ça, sur l'échange d'informations ou sur le pouvoir accru qu'on peut trouver au ministère du Revenu, nous allons être ouverts pour écouter ces groupes. Je pense juste en nommer quelques-uns: l'association des planificateurs fiscaux, souvent, fait des interventions; le Protecteur du citoyen; la Commission d'accès à l'information, que j'ai déjà mentionnée; ou quelques groupes qui représentent les personnes touchées par les pensions alimentaires.

Je n'adresse pas une demande formelle pour avoir les audiences au moment où on parle mais, dans un esprit de collaboration, M. le Président, j'espère que la ministre va être ouverte, parce que, si après le premier niveau, un premier débat sur ce projet de loi, nous avons quelques groupes qui veulent passer leurs commentaires sur ce projet de loi, nous allons être assez souples pour entendre ces groupes. Parce que nous sommes en train de changer, petit à petit, la façon dont le ministère du Revenu travaille. Peut-être que, dans quelques cas, l'opposition officielle va être d'accord avec ça. Peut-être que, dans quelques autres, nous allons avoir certains désaccords. Selon notre compréhension, nous ne sommes certainement pas d'accord avec quelques parties de ce projet de loi.

So, in conclusion, Mr. Speaker, if groups are interested in presenting any comments about this, I hope the Minister will be open, because I'm profoundly concerned that again, in the latter part of a session, we have to debate fiscal law. It seems to me fiscal law since it is such a complicated law. But really we should have had this law in September. We certainly should have had Bill 161 earlier. It's not the type of law that fits well into debate at the end of a session as we approach Christmas. That being said, the official opposition will certainly offer a service to improve this law, to make it stronger, to take out some of the serious mistakes that we have found in this law, and we hope that during the parliamentary commission that, I understand, will start next week, on this law, the Minister will be open to our suggestions of how to improve this so that individual taxpayers are not adversely affected by this, individual taxpayers who, as the majority of taxpayers, are honest, who do not need any more interference by this government. When we have problem areas, we want to make sure that we pass the laws that respond to the problem areas, and not, in a complete across-the-board manner, and inadvertently, negatively affect Québec taxpayers.

M. le Président, merci beaucoup. Je présume qu'il y aura plusieurs autres intervenants du coté ministériel sur ce projet de loi, parce que les lois fiscales sont tellement importantes. Je vais certainement écouter ceux et celles qui veulent discuter. Et, comme j'ai mentionné, l'opposition officielle va offrir ses services à la ministre déléguée pour améliorer ce projet de loi parce que nous avons trouvé des grandes lacunes dans le projet de loi n° 165. Merci beaucoup.

Le Président: Merci, M. le député de Nelligan. Mme la ministre déléguée au Revenu.


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Alors, je vois que le jeune député de Nelligan n'a pas le même respect des fonctionnaires du ministère du Revenu que sa collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne. Il n'est pas très gentil pour les fonctionnaires du ministère du Revenu.

Je sais, et je suis d'accord avec lui, que les lois fiscales sont difficiles à comprendre. Elles ne sont pas toutes très simples. Ce n'est pas facile, et c'est pour ça que notre gouvernement essaie d'en changer quelques-unes pour le mieux. Parce que, même s'il y a 94 % des contribuables qui autodéclarent leurs revenus, je pense qu'on doit viser 100 %, puis on doit continuer à améliorer nos façons de faire.

Quant à l'harmonisation de nos lois avec celles de nos partenaires commerciaux en territoire canadien, je trouve la remarque du député assez intéressante, parce que ce n'est pas parce qu'il y a un État, une juridiction qui fait des choses mieux que nous qu'on ne doit pas s'en inspirer. Alors, dans certains cas, qu'on harmonise un certain nombre de choses avec des États qui font des choses bien, moi, je trouve que c'est très positif. Il y a quand même, il ne faut pas l'oublier, un objectif d'améliorer l'efficacité et l'équité dans notre régime fiscal et dans notre activité de perception des impôts.

C'est intéressant, d'ailleurs, parce que, si... La question que le député m'a posée quant à pourquoi on harmonisait, j'aimerais peut-être rappeler quelques données économiques au député de Nelligan. La production intérieure brute du Québec, c'est 180 000 000 000 $, et la contribution à cette production intérieure brute qui nous vient de nos ventes hors Québec, c'est 54 %, plus de la moitié. Dans ce 54 %, il y a deux chiffres: il y a 35 % qui sont les revenus de nos ventes à l'international et puis il y a 19 % qui sont les revenus de nos ventes à nos partenaires canadiens. Donc, quand on veut améliorer l'application de nos lois fiscales et alléger la perception fiscale ou la façon de percevoir, on doit s'inspirer de ce qui se fait de mieux auprès de nos partenaires.

Une des inquiétudes du député, c'est qu'on fasse disparaître un ministère du Revenu. Je le rassure tout de suite. On est d'accord avec lui pour faire disparaître un ministère du Revenu, et j'en ai même discuté longuement hier avec mon homologue fédéral qui était à Québec, mais je pense que le Québec peut très bien assumer, comme il l'a fait dans le passé, la responsabilité du ministère du Revenu pour toute l'activité de perception des Québécois.

Et je vais faire un petit cours d'histoire ici. Si on remonte à 1867 – puisque je sais que l'opposition aime bien le passé – le Québec, à cette époque-là, n'avait pas de dette puis il avait un système assez structuré où il n'y avait aucune «distraction» par un gouvernement fédéral. Ce n'est qu'au début du XXe siècle qu'on a commencé à dire: Bien, il y a l'effort de guerre, puis il faudrait que les Québécois contribuent. Alors, on a commencé par dire oui. Puis, après ça, ils ont doublé tout le système. Pendant tout ce temps-là, nous autres, les contribuables québécois, on paie deux fois. On paie deux fois.

Alors, comme j'ai offert à mon homologue hier, je fais la même offre, je suis disposée à assumer la seule responsabilité de collecte des revenus au Québec et à transférer, le cas échéant, l'argent que nous voudrions transférer au fédéral. On le fait déjà pour la TPS, M. le Président, je ne vois pas pourquoi on ne le ferait pas pour le reste.

(11 h 30)

Alors, pour terminer sur ce projet de loi, je suis très contente de l'offre de collaboration que le jeune député de Nelligan nous a faite tout à l'heure en disant: On veut travailler en commission parlementaire pour améliorer nos lois, les rendre plus faciles. Et je vais recevoir de manière très constructive les propositions qu'il saura nous faire. Et c'est avec plaisir que je travaillerai avec lui pour améliorer l'expression et éventuellement l'application de nos lois fiscales, dans le respect de l'équité et de la responsabilité fiscale. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, Mme la ministre. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Question de règlement. Est-ce que je peux demander, par l'article 213, une question à la ministre déléguée au Revenu?

Le Président: Est-ce que Mme la ministre déléguée au Revenu accepte de répondre à la question qui serait posée? Je comprends qu'il n'y a pas de consentement pour que cette question soit posée.

Mme Dionne-Marsolais: ...


Mise aux voix

Le Président: Alors, je remercie également la ministre de signaler aux membres de l'Assemblée que les députés dans la quarantaine sont jeunes. Ceci étant dit, est-ce que la motion de Mme la ministre déléguée au Revenu est adoptée?

M. Williams: Sur division.

Le Président: Sur division. Très bien. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: M. le Président, puisqu'il faut mettre un frein à ce bain de jouvence, je vais faire motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, avant de vous demander de prendre en considération un autre article de notre feuilleton, je vous demanderais une brève suspension de nos travaux, de façon à permettre aux intervenants prévus pour ce projet de loi d'être présents.

Le Président: Alors, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, je voudrais juste savoir: Est-ce qu'on peut continuer notre travail? Quel article ou quel projet de loi nous allons étudier maintenant, monsieur?

Le Président: M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Alors, je vous aurais demandé, M. le Président, l'article 4, donc, qui est le projet de loi n° 159.

Le Président: Alors, si je comprends bien, M. le leader adjoint du gouvernement, vous souhaitez une suspension de quelques instants pour permettre aux intervenants qui auraient à parler sur la Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant de pouvoir prendre place et préparer leurs interventions. Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 33)

(Reprise à 11 h 43)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons reprendre la séance. Alors, veuillez prendre place, vous asseoir. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, tel que je vous l'ai indiqué avant cette courte suspension, je vous demanderais de prendre en considération l'article 4 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 159


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Président: À l'article 4, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 12 novembre sur l'adoption du principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. À ce moment-ci, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. Mme la députée de Mégantic-Compton.


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: C'est un peu spécial, M. le Président, de se faire applaudir par les ministériels.

Des voix: Ha, ha, ha!

Mme Bélanger: Je l'apprécie. Peut-être qu'à la fin du discours ils vont apprécier moins. Alors, M. le Président, nous sommes à discuter du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement. Il détermine les sommes qui constituent ce fonds et il en établit les règles de fonctionnement.

Ce projet de loi, M. le Président, pour le profane, semble très anodin, puisqu'il ne contient que quatre articles, mais il faudrait nous permettre de comprendre pourquoi le projet de loi n° 159 existe et pourquoi nous devons en débattre aujourd'hui. Pour commencer, il faudrait expliquer que la seule obsession du gouvernement du Parti québécois est de faire croire à la population que la bonne gestion de ce gouvernement a atteint le déficit zéro à la fin de son mandat. C'est un objectif que le Parti libéral avait aussi et c'est d'ailleurs le Parti libéral qui a obligé le gouvernement à adopter la loi «déficit zéro».

M. le Président, depuis 14 ans que je suis députée, je n'ai jamais pensé que pour atteindre le déficit zéro il fallait acheter aujourd'hui et payer plus tard. C'est ce que le gouvernement fait en créant des fonds, c'est-à-dire des emprunts affectés au financement des activités reliées à la gestion de l'équipement roulant. D'ailleurs, ce matin, Michel David, du Soleil , m'a donné de bons arguments. Il dit, dans son article: «C'est un peu louche, cette soudaine prolifération de fonds spéciaux qui permettent au gouvernement de reporter sur plusieurs années des dépenses qui devraient normalement être comptabilisées maintenant: Fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier, Fonds des services de police, Fonds de gestion de l'équipement routier.»

«Tout le monde, dit-il, reconnaît que certaines immobilisations doivent être amorties sur une longue période, mais le gouvernement prend d'inquiétantes libertés avec le dictionnaire quand il inclut dans la rubrique "investissements" des dépenses aussi courantes que le pavage des routes, y compris les salaires des fonctionnaires du ministère des Transports. Il s'agit – parce qu'on sait que, nous, on nous accuse d'avoir fait un déficit hors normes – dit-il, surtout de savoir si on est en train de dégonfler le déficit de façon tout aussi artificielle.»

Alors, M. le Président, pour en revenir à mon allocution, on sait que le ministère des Transports possède 1 445 véhicules légers, 822 camions lourds et 2 133 autres équipements. Ces équipements sont gérés de façon décentralisée et répartis dans plus de 60 unités administratives. La valeur de remplacement de ces équipements est estimée à 71 000 000 $. Dans les années passées, l'achat de ces équipements était comptabilisé dans le budget de l'année courante, ce qui veut dire que, lorsque le ministère remplaçait ces équipements, ils étaient payés comptant.

L'obsession de ce gouvernement est d'arriver au déficit zéro, oui. Mais comment peut-on y arriver? Il faut y arriver par toutes sortes d'astuces, comme c'est l'habitude de ce gouvernement depuis qu'il est au pouvoir. On crée des fonds, c'est-à-dire on emprunte et on paie plus tard. On ne comptabilise pas les dépenses dans l'année courante et on arrivera, lors de la lecture du budget, avec un déficit moindre, puisqu'on achètera l'épicerie aujourd'hui et on prendra cinq, 10, 15 ans pour amortir la facture.

M. le Président, la véritable raison d'être de ce projet de loi est de nature financière. Il vise trois objectifs précis. Premièrement, la récupération des sommes résultant de la vente des véhicules désuets. En effet, les sommes recueillies par cette vente seront versées au ministère des Finances et n'auront aucune incidence sur le budget du ministère des Transports.

La deuxième raison d'être de ce projet de loi est de permettre au ministre des Transports de facturer les autres ministères pour des travaux d'entretien de leurs véhicules. Et ça, ça aura une grande incidence sur le développement de nos régions. Est-ce qu'il faut légiférer pour ça? Je crois que c'est plutôt une bonne excuse, un autre fonds. Un autre fonds qui va faire croire que le gouvernement baisse le déficit en pelletant ses dépenses courantes dans l'avenir. Est-ce que c'est ça, la nouvelle façon de gouverner?

La troisième raison d'être de ce projet de loi, et peut-être la plus fondamentale, est que la constitution de ce fonds permettra d'acheter des véhicules et, comme je l'ai dit antérieurement, d'amortir cet achat sur plusieurs années. Cette méthode comptable est un artifice ou une astuce qui fait croire aux citoyens et citoyennes que le gouvernement a réduit le déficit sans trop couper et sans trop augmenter les taxes. Ce qui est encore faux, puisque c'est de la poudre aux yeux, car ce gouvernement pellette son déficit dans les municipalités, pellette son déficit dans les commissions scolaires, dans les régies régionales, permet aux institutions de santé d'emprunter pour rencontrer leurs dépenses courantes.

M. le Président, nous, du Parti libéral, souscrivons de tout coeur à l'objectif zéro, mais nous nous élevons contre les méthodes de ce gouvernement qui nous fait croire à une baisse artificielle du déficit zéro. Comme le dit très bien Michel David dans son article, «il s'agit surtout de savoir si on n'est pas en train de dégonfler le déficit de façon tout aussi artificielle».

(11 h 50)

M. le Président, quel est l'avantage de procéder par la création de fonds pour acheter l'épicerie aujourd'hui et atténuer le coût de cette épicerie sur cinq, 10 ou 15 ans? Si on fait le total de toutes ces sommes créées par des fonds, on va s'apercevoir qu'on est en train de pelleter dans l'avenir des sommes d'argent qu'on devrait payer maintenant. Et, si on les étale sur plusieurs années, il faudrait être assez transparent pour ne pas faire croire qu'on est en train de baisser le déficit. C'est très astucieux, M. le Président, mais nous ne sommes pas dupes et nous savons très bien que, tôt ou tard, nous devrons payer la facture. Et ce qui est plus grave encore, ce seront nos enfants et nos petits-enfants qui feront les frais de ces aventures comptables.

Oui, M. le Président, ce projet de loi bien inoffensif en soi confirme astucieusement cette nouvelle tendance vers laquelle s'est engagé ce gouvernement, quatre petits articles qui vont permettre au gouvernement d'acheter ses camions, ses automobiles et autres véhicules sans qu'il ait à débourser un sou dans l'exercice courant. M. le Président, qu'on soit donc transparent, qu'on dise donc que la raison principale de ces fonds, c'est que ça n'apparaît pas dans les livres et que la fin justifie les moyens. On veut atteindre à tout prix le déficit zéro. Nous ne sommes pas contre ce principe, mais il semble qu'il faut le faire d'une façon transparente et ne pas donner l'impression qu'on l'atteint en puisant dans l'avenir les dépenses que nous faisons aujourd'hui.

Enfin, M. le Président, ce projet de loi est à l'image du menu législatif de cette session. Un projet de loi de quatre articles peut paraître anodin, mais, comme je le disais au début de mon intervention, il peut être aussi dévastateur, en particulier au niveau régional. Pourquoi? Parce que le ministère des Transports envisageait d'offrir ses services aux autres ministères pour mieux rentabiliser ses ateliers de réparation. Est-ce que cette pratique va dans l'intérêt de nos régions? Est-ce que ça va créer des emplois ou est-ce que ça va occasionner des mises à pied? C'est là la question.

M. le Président, je conclus en disant qu'avant aujourd'hui le gouvernement payait comptant ses dépenses et que dorénavant le gouvernement mettra les Québécois sur la finance. En mettant les Québécois sur la finance, on ne fait que reporter à plus tard les dépenses et le déficit zéro que prétend atteindre le gouvernement, un déficit qui ne s'atteindra pas. S'il s'atteint, il sera très artificiel. Alors, c'est pourquoi l'opposition est contre ces fonds créés qui leurrent la population. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, Mme la députée de Mégantic-Compton. Est-ce qu'il y a une autre intervention à ce moment-ci? M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, compte tenu de l'heure, je vous demanderais qu'on suspende nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

Le Président: Très bien. Alors, les travaux de l'Assemblée nationale sont suspendus jusqu'à 14 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 11 h 55)

(Reprise à 14 h 3)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Présence de la consule générale du Costa Rica à Montréal, Mme Carmen Patricia Gudiño-Fernandez, et de parlementaires de la République du Costa Rica

Pour débuter la séance cet après-midi, j'ai le plaisir de souligner la présence dans les tribunes de parlementaires de la République du Costa Rica, d'abord M. Francisco A. Pacheco, M. José Antonio Lobo, M. Bernardo Benavides et M. Luis G. Villanueva. Ces députés sont accompagnés par la consule générale du Costa Rica à Montréal, Mme Carmen Patricia Gudiño-Fernandez.


Affaires courantes


Décision du président sur une demande de directive du ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration portant sur la divulgation de renseignements nominatifs à l'Assemblée

Alors, nous allons débuter les affaires courantes. Dès ce moment-ci, je vais rendre la directive qui m'a été demandée le jeudi 6 octobre dernier par le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration. La question qui a été soulevée alors est celle de savoir si l'un des privilèges parlementaires individuels, en l'occurrence le privilège parlementaire de la liberté de parole, permet à un député, lors d'une intervention à l'Assemblée, de divulguer des renseignements personnels nominatifs, et ce, quelle que soit la forme que prend cette divulgation: discours, citation d'un document, dépôt d'un document ou exhibition d'un document.

La présidence ne se prononcera pas précisément sur les faits qui sont à l'origine de cette demande de directive mais plutôt sur les importants principes de droit parlementaire qui la sous-tendent ainsi que sur le comportement que les députés devraient idéalement adopter en cette matière. Afin de bien comprendre toute l'étendue du problème, il importe dans un premier temps de tracer les contours du privilège parlementaire de la liberté de parole.

Il ne faut pas voir dans les privilèges parlementaires une série illimitée d'avantages accordés ou réservés aux députés. En fait, les privilèges parlementaires sont limités à ce qui est nécessaire pour qu'une assemblée législative puisse exercer son rôle en toute indépendance. Ils servent principalement à prémunir les assemblées de toute entrave extérieure afin que les élus puissent exercer sans aucune contrainte le mandat qui leur a été confié par la population. Quel que soit le système politique qui la sous-tend, toute assemblée législative élue démocratiquement jouit de droits ou de privilèges essentiels à l'exercice de ses fonctions.

Le privilège de la liberté de parole, privilège revendiqué par les députés dès le début du parlementarisme, est à la fois le plus incontesté et le plus fondamental des droits des députés tant dans l'enceinte de l'Assemblée qu'en commission parlementaire.

Permettez-moi de vous citer ici un passage de l'arrêt Club de la Garnison de Québec contre Lavergne, rendu en 1917, dans lequel la Cour du banc de la Reine décrit bien le fondement du privilège de la liberté de parole, et je cite: «Un membre du Parlement ne doit être en aucune manière gêné ou entravé dans son droit de parler ouvertement et librement sur toute question qui peut être discutée au Parlement. Aucune crainte ou appréhension ne doit restreindre ce privilège.»

Les privilèges nécessaires à l'exercice des fonctions parlementaires des membres de l'Assemblée nationale du Québec et de toutes les assemblées législatives du Canada, dont le privilège de la liberté de parole, font partie intégrante de la Constitution. En 1993, la Cour suprême du Canada a même décidé que la Charte canadienne des droits et libertés ne peut prévaloir sur les privilèges parlementaires, puisqu'il s'agit de deux normes constitutionnelles de même valeur. Dès lors, si la Charte canadienne des droits et libertés qui, rappelons-le, fait partie de la Constitution ne peut avoir préséance sur les privilèges parlementaires, il est difficile d'imaginer qu'une loi adoptée par le Parlement du Québec, qui n'est pas une norme supralégislative, puisse prévaloir sur un privilège parlementaire, celui de la liberté de parole, en l'occurrence.

En plus d'être consacré par la Constitution, le privilège de la liberté de parole a été codifié à l'article 44 de la Loi sur l'Assemblée nationale qui édicte qu'«un député ne peut être poursuivi, arrêté ni emprisonné en raison de paroles prononcées, d'un document déposé ou d'un acte parlementaire accompli par lui dans l'exercice de ses fonctions à l'Assemblée, à une commission ou à une sous-commission».

À la lecture de cet article, on peut constater que le privilège couvre non seulement les paroles prononcées par un député à l'Assemblée, mais également tout autre acte accompli dans l'exercice de ses fonctions parlementaires, y compris le dépôt de documents.

Bien qu'il soit important, le privilège dont il est question comporte des limites. Tout d'abord, il s'applique seulement dans l'exercice des fonctions parlementaires des députés, soit dans le cadre des délibérations de l'Assemblée et des commissions. De plus, ce privilège est limité par les règles du débat parlementaire qui ont été adoptées par les députés de l'Assemblée eux-mêmes. À titre d'exemple, un député doit se conformer à l'article 35 du règlement de l'Assemblée qui traite des propos non parlementaires et des paroles interdites, sous peine d'être rappelé à l'ordre par le président. Enfin, un député ne pourrait pas invoquer son immunité parlementaire pour se soustraire au pouvoir disciplinaire de l'Assemblée.

(14 h 10)

Dans le cas précis qui a été soulevé, la question est de savoir s'il existe une restriction particulière à l'exercice des privilèges parlementaires en rapport avec le fait de prononcer des paroles, de déposer un document ou de poser un acte qui irait à l'encontre du droit à la vie privée de citoyens et de la protection des renseignements personnels, garantis par des lois votées par l'Assemblée nationale.

Le droit au respect de la vie privée est un droit fondamental, surtout à une époque où l'information voyage rapidement et devient de plus en plus facilement accessible, transformant notre société en une société d'information. En plus d'être reconnu expressément par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, le droit au respect de la vie privée est consacré, sous différentes formes, dans plusieurs lois québécoises. Aussi important soit-il, cependant, le droit au respect de la vie privée doit, sur le plan juridique, coexister avec d'autres principes fondamentaux qui régissent le fonctionnement d'un État démocratique. Parmi ceux-ci, il y a les privilèges parlementaires, en l'occurrence le privilège de la liberté de parole, dont jouissent l'Assemblée nationale et ses membres. Comme je l'ai démontré précédemment, le privilège de la liberté de parole est un droit constitutionnel qui, dans le cadre des délibérations de l'Assemblée et de ses commissions, a une portée presque absolue, sous réserve des règles de procédure que l'Assemblée s'est elle-même imposées.

Le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration avait raison lorsque, jeudi dernier, il mentionnait que la Loi sur l'Assemblée nationale et le règlement ne renferment aucune disposition qui traite directement du respect de la vie privée et de la protection des renseignements personnels. Ce droit est certes protégé par la Charte des droits et libertés de la personne et par différentes autres lois, mais, comme je viens de le mentionner précédemment, ces lois ne peuvent, sur le plan juridique, avoir préséance sur le privilège constitutionnel de la liberté de parole des parlementaires.

Faute de règles de procédure parlementaire portant expressément sur le respect de la vie privée, on peut à juste titre se demander si le président devrait prendre l'initiative de jouer un rôle en cette matière. En d'autres mots, le président devrait-il empêcher toute intervention, tout dépôt ou tout autre acte qui contreviendrait au respect du droit à la vie privée? Même si, j'en suis sûr, certains le jugeraient souhaitable, force est de constater que le président n'est pas habilité à exercer un tel rôle. De fait, il est reconnu que le président d'une assemblée législative ne peut interpréter la loi, à l'exception des dispositions législatives qui concernent la procédure parlementaire. Ainsi donc, le président de l'Assemblée nationale ne peut, à titre d'exemple, décider si le dépôt d'un document à l'Assemblée se fait en contravention de la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels.

Il ressort donc de ce qui précède que le privilège de la liberté de parole a une portée très large et protège un député de toute entrave en ce qui a trait aux paroles prononcées, au dépôt de documents ou à tout autre acte accompli par lui dans l'exercice de ses fonctions parlementaires. Il ressort également que ce privilège, vu son statut constitutionnel, a préséance, en droit strict, sur toute loi, y compris la Charte des droits et libertés de la personne du Québec et la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Il appert aussi que le président n'est pas généralement habilité à interpréter les lois.

Cela étant, même si, sur le plan juridique, les députés jouissent d'une immunité considérable dans l'exercice de leurs fonctions parlementaires, ils devraient toujours avoir à l'esprit les principes démocratiques fondamentaux qui gouvernent le fonctionnement de notre société. J'exprime donc formellement le souhait que tout député, lorsqu'il prononce une parole, dépose un document ou accomplit un acte dans le cadre des délibérations parlementaires, se soucie des droits fondamentaux de tous les citoyens et de toutes les citoyennes du Québec. Le président a des pouvoirs juridiques limités en cette matière. C'est pourquoi il fait appel à la collaboration de l'ensemble des députés afin que la façon d'exprimer les points de vue à l'Assemblée soit empreinte d'une éthique élevée.

M. Boisclair: M. le Président.

Le Président: M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.

M. Boisclair: Oui. M. le Président, je vous remercie d'avoir répondu aux interrogations que je soulevais. Nous allons tous convenir ici, dans cette Assemblée, que le droit à la vie privée est un droit qui est fondamental. À ce moment-ci, est-ce qu'il ne serait peut-être pas pertinent de vous demander, de solliciter aussi l'appui des groupes parlementaires pour que la commission de l'Assemblée nationale puisse voir de quelle façon nous pouvons pousser une réflexion? Nous avons, par exemple, des règles dans cette Assemblée, pour le dépôt de pétitions, qui sont assez contraignantes, n'a-t-on vu ces dernières semaines à l'Assemblée nationale. Peut-être pourrions-nous continuer une réflexion sur cette question. Je le demande au nom de notre formation.

Le Président: Écoutez, la commission de l'Assemblée nationale peut se saisir de cette question, tout comme actuellement les leaders et la présidence sont à travailler sur les éléments de réforme parlementaire auxquels cette question-là pourrait s'ajouter. Alors, je pense qu'à ce moment-ci je prends bonne note de vos demandes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Tout en sollicitant votre attention et celle de mes collègues, je vous demande dès l'abord d'appeler l'article a.


Projet de loi n° 169

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances présente le projet de loi n° 169, Loi modifiant la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, ce projet de loi vise à faciliter l'implantation d'un numéro unique d'entreprise au Québec. À cette fin, il permet à l'Inspecteur général des institutions financières d'immatriculer, en plus des personnes morales, les personnes physiques, les sociétés et les groupements.

Il permet également à l'Inspecteur général de conclure des ententes avec des ministères ou organismes du gouvernement pour leur déléguer, aux conditions et selon les limites prévues dans l'entente, le pouvoir d'immatriculer une personne physique, une société, un groupement ou une personne morale. Il habilite, par ailleurs, tout ministère ou organisme du gouvernement à conclure une telle entente.

Enfin, ce projet de loi retire des dispositions de la loi, celles relatives aux pouvoirs du greffier de la Cour supérieure en matière d'immatriculation.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, l'article c.


Projet de loi n° 167

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances présente le projet de loi n° 167, Loi modifiant la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): Ce projet de loi, M. le Président, vise à élargir les objets et les pouvoirs d'une caisse, d'une fédération ou d'une confédération, notamment pour permettre à une caisse et à une fédération de fournir de nouveaux services et des produits financiers.

Il prévoit qu'une confédération aura pour objet, entre autres, de favoriser la réalisation des objets des caisses, de promouvoir leur développement et d'offrir des services de soutien aux fédérations et aux personnes morales de leur groupe. Une caisse, une fédération et une confédération pourront exercer, en outre des activités expressément autorisées par la loi, toute autre activité qui se rapporte à la réalisation de leurs objets, sauf si le gouvernement leur en interdit l'exercice.

Ce projet de loi prévoit également qu'une caisse et une fédération pourront, de façon accessoire à leurs activités principales, offrir des services à des personnes qui ne sont pas des membres. De plus, une confédération pourra, de façon accessoire à ses activités principales, offrir à toute personne les services qu'elle utilise ou rend aux caisses, fédérations ou autres personnes morales de son groupe.

Par ailleurs, ce projet de loi modifie les dispositions relatives à la capitalisation des caisses afin notamment de permettre à une fédération et à une confédération d'établir des normes concernant la suffisance et la composition du capital de base. Il modifie également les dispositions relatives aux titres de capitalisation afin de faciliter leur émission.

De plus, ce projet de loi introduit des dispositions visant à renforcer les pouvoirs de supervision et d'intervention de l'Inspecteur général ainsi que les exigences de divulgation des intérêts des dirigeants et des situations de conflit d'intérêts. Il prévoit aussi des dispositions visant à assouplir les règles d'affectation des trop-perçus. Enfin, ce projet de loi contient des dispositions de nature transitoire et de concordance.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article d.


Projet de loi n° 180

Le Président: À l'article d du feuilleton, Mme la ministre de l'Éducation présente le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives. Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Ce projet de loi propose une restructuration des pouvoirs, responsabilités et rapports entre les établissements d'enseignement, la commission scolaire, le ministre de l'Éducation et le gouvernement.

C'est ainsi que le projet accorde à chaque établissement d'enseignement des fonctions et pouvoirs actuellement dévolus à la commission scolaire, que ce soit en matière de services éducatifs, de services extrascolaires ou de gestion des ressources humaines, matérielles et financières. Ces fonctions et pouvoirs seront exercés par un conseil d'établissement qui, dans le cas de l'école, viendra remplacer le conseil d'orientation et le comité d'école.

(14 h 20)

Par ailleurs, le projet institue un nouveau type d'établissement d'enseignement, à savoir le centre de formation professionnelle. Celui-ci sera chargé d'assurer la formation professionnelle, tant auprès des jeunes que des adultes, dans le cadre d'un nouveau régime pédagogique particulier. En concordance avec ces changements, le projet modifie les fonctions et pouvoirs du directeur d'un établissement d'enseignement, de la commission scolaire, du ministre et du gouvernement ainsi que du comité de parents de la commission scolaire. Dans le cas de ce dernier, il est prévu qu'il sera désormais formé de parents provenant des conseils d'établissement des écoles et d'un parent provenant du comité consultatif des services aux élèves handicapés et aux élèves en difficulté d'adaptation ou d'apprentissage.

En outre, le projet transfère au ministre de l'Éducation certains pouvoirs et certaines fonctions en matière de transport des élèves. Le projet prévoit aussi l'institution d'une Commission des programmes d'études, d'un Comité d'évaluation des ressources didactiques, d'un Comité d'agrément des programmes de formation à l'enseignement et d'un Comité d'orientation de la formation du personnel enseignant chargés de conseiller le ministre sur les matières relevant de leur compétence.

Le projet apporte également des modifications en matière de perception des taxes scolaires. Enfin, le projet contient des modifications de concordance et prévoit des dispositions transitoires et finales.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

M. Ouimet: M. le Président.

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La ministre de l'Éducation a-t-elle l'intention de tenir des consultations particulières, compte tenu qu'il y a des changements importants par rapport à l'avant-projet de loi, surtout le recul considérable pour les parents?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, après vérification avec la ministre, oui, nous avons l'intention de regarder avec les gens de l'opposition la possibilité d'avoir des auditions particulières.


Mise aux voix

Le Président: Alors, l'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie du projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article e, M. le Président.


Projet de loi n° 171

Le Président: À l'article e du feuilleton, M. le ministre responsable du Développement des régions présente le projet de loi n° 171, Loi sur le ministère des Régions. M. le ministre responsable du Développement des régions.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, ce projet de loi prévoit la création du ministère des Régions dirigé par un ministre désigné sous le titre de ministre des Régions. Il détermine les domaines d'action du ministre ainsi que ses principaux pouvoirs et fonctions en matière de développement local et régional.

Ce projet permet de reconnaître des centres locaux de développement et des conseils régionaux de développement. Il précise qu'un centre local de développement a notamment pour mandat d'élaborer un plan d'action local et une stratégie en matière de développement de l'entrepreneuriat, y compris celui de l'économie sociale. Il prévoit, par ailleurs, qu'un conseil régional de développement a principalement pour mandat de favoriser la concertation entre les partenaires régionaux et établit à cette fin un plan stratégique régional.

Ce projet a en outre pour objet d'instituer le fonds de développement régional affecté au financement des mesures prévues dans le cadre d'ententes et de toute autre activité exercée par les conseils régionaux de développement. Enfin, ce projet de loi contient des dispositions relatives à l'organisation du ministère des Régions ainsi que des dispositions transitoires et de concordance. Ce projet de loi amende une dizaine d'autres lois existantes.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le député de Richmond.

M. Vallières: Oui, M. le Président. Compte tenu de la création de cette nouvelle structure et de l'impact possible sur les contribuables québécois, est-ce que le ministre a l'intention de tenir des consultations générales ou encore particulières sur ledit projet de loi?

M. Chevrette: M. le Président, nous avons consulté quasi ad nauseam sur le sujet, mais, si jamais des consultations particulières étaient requises, ça me fera plaisir d'en discuter avec le député, d'autant plus que je crois qu'on passe du discours au geste.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Oui.

Le Président: Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Article f, M. le Président.


Projet de loi n° 154

Le Président: À l'article f du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet de loi n° 154, Loi modifiant la Loi sur la protection de la santé publique. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Alors, M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la protection de la santé publique afin de prévoir l'obligation d'être titulaire d'un permis pour exploiter un centre de conservation de gamètes ou d'embryons et afin de permettre à d'autres institutions d'enseignement que les seules universités de se voir offrir des cadavres non réclamés.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: L'article g, M. le Président.


Projet de loi n° 176

Le Président: À l'article g du feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux présente le projet de loi n° 176, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur le ministère de la Santé et des Services sociaux afin que le ministre puisse, par entente, déléguer à un organisme l'exercice de fonctions qui lui sont attribuées par cette loi ou par une autre loi dont il est chargé de l'application.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin de permettre à la Régie d'exercer toute fonction qui lui est déléguée aux termes d'une entente conclue avec un ministre.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte de se saisir de ce projet de loi? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. L'article h, M. le Président.


Projet de loi n° 178

Le Président: À l'article h du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor présente le projet de loi n° 178, Loi sur l'abolition de certains organismes. M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'abroger les dispositions législatives instituant ou permettant d'instituer certains organismes. Ces dispositions se rapportent à l'Office des autoroutes du Québec, au Comité d'études musicales, au Comité d'études dramatiques, au Bureau d'examinateurs des mesureurs de bois, au Bureau des examinateurs en tuyauterie, au Bureau des examinateurs électriciens, à la Régie des télécommunications, à la Société de la Maison des sciences et des techniques, à la Société québécoise des transports et à toute personne morale dont elle contrôle le capital-actions, et au Conseil de la recherche et du développement en transport.

Enfin, ce projet de loi contient des modifications de concordance et des dispositions transitoires.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. L'article b.


Projet de loi n° 175

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi n° 175, Loi modifiant de nouveau diverses dispositions législatives concernant le domaine municipal. M. le ministre des Affaires municipales.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, ce projet de loi modifie diverses lois municipales. En matière d'aménagement et d'urbanisme, d'abord, il met en place un système de révision quinquennale des plans et des règlements d'urbanisme municipaux, laquelle est soumise à une procédure allégée en ce qui concerne la consultation des personnes habiles à voter.

Le projet de loi donne également aux municipalités régionales de comté et aux municipalités locales le pouvoir d'adopter des dispositions réglementaires touchant la plantation et l'abattage d'arbres en forêt privée et précise qu'une municipalité régionale de comté doit en tout temps examiner si un règlement de zonage est conforme aux orientations gouvernementales concernant la protection des activités agricoles en zone agricole. Finalement, il élargit les règles actuelles concernant les informations devant être fournies lorsqu'un permis de construction est demandé.

Par ailleurs, le projet de loi change les règles encadrant le processus décisionnel au sein du conseil de la municipalité régionale de comté et celles relatives au droit de retrait d'une municipalité à l'égard d'une compétence exercée par la municipalité régionale de comté.

Le projet de loi prévoit aussi de nouvelles règles de dissolution des sociétés de développement commercial et une composition différente de leurs conseils d'administration.

D'autre part, le projet de loi impose au trésorier d'une municipalité l'obligation d'émettre un certificat de disponibilité de crédit lors de l'engagement d'un employé par un fonctionnaire autorisé. Il oblige par ailleurs le maire à faire état, chaque année, de tous les contrats de plus de 1 000 $ conclus par la municipalité.

En ce qui a trait aux pouvoirs des municipalités, le projet de loi apporte des modifications précisant leur pouvoir de construire des conduites privées d'eau et d'égout et leur permettant de conclure des ententes pour établir des bibliothèques avec les commissions scolaires ou les établissements d'enseignement et de créer des réserves financières à des fins spécifiques. Il a également pour effet de leur accorder certains pouvoirs quant à la gestion des terres du domaine public. Il accorde en outre le pouvoir à un comité exécutif créé par une loi particulière et ayant le pouvoir d'autoriser une dépense de permettre à un fonctionnaire de l'effectuer et de passer un contrat en conséquence. Finalement, le projet de loi modifie la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités de façon à permettre aux municipalités de faire l'essai de nouveaux mécanismes de votation lors d'élections partielles ou de scrutins référendaires.

Le projet de loi prévoit, d'autre part, la possibilité pour les régies intermunicipales de conclure certains types d'ententes intermunicipales. Il donne de plus à la Communauté urbaine de Québec des pouvoirs déjà dévolus aux municipalités relativement à la cession de certains biens et au mode de fonctionnement de son fonds de roulement.

Les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik se voient de leur côté soumis aux mêmes règles que l'ensemble des municipalités du Québec relativement à l'aliénation des biens meubles et immeubles, à l'adjudication des contrats municipaux et aux poursuites pénales pouvant être intentées en cas d'infraction à la loi, à un règlement ou à une ordonnance. Le projet de loi accorde également aux villages nordiques les mêmes pouvoirs que ceux des municipalités en matière de location de biens.

(14 h 30)

Par ailleurs, le projet de loi apporte plusieurs ajustements à des dispositions existantes. Il allonge notamment le délai accordé au greffier d'une municipalité régie par la Loi sur les cités et villes pour publier un avis de vente d'un immeuble par défaut de paiement de taxes et élargit la possibilité de publication des appels d'offres relatifs aux contrats de construction, d'approvisionnement et de services de plus de 100 000 $. Le projet de loi précise également les règles permettant à une personne d'être exemptée d'une taxe spéciale ou d'une compensation imposée pour le remboursement d'un emprunt en effectuant un seul versement.

En matière de fiscalité municipale, le projet de loi élargit l'exonération applicable aux fiducies quant aux droits de mutations immobilières, établit clairement le caractère public de la matrice graphique, change la règle établissant au nom de qui sont inscrites au rôle d'évaluation les roulottes appartenant à un autre propriétaire que celui du terrain sur lequel elles se trouvent et précise la possibilité de payer par chèque ou autre effet négociable le tarif applicable lors du dépôt d'une demande de révision en matière d'évaluation foncière.

Par ailleurs, et ça arrive à la fin, M. le Président, le projet de loi apporte des précisions à certaines règles relatives à la constitution, à l'annexion ou au regroupement de municipalités. Il modifie également la Loi sur le traitement des élus municipaux de façon à éliminer, à partir de 1998, toute possibilité d'indexation automatique de la rémunération des élus pour permettre le remboursement de certaines dépenses assumées par ceux-ci dans le cadre de leurs fonctions. La Loi sur la Société d'habitation du Québec est d'autre part modifiée afin de permettre la fusion d'offices municipaux d'habitation.

Finalement, en plus d'apporter quelques modifications de concordance de façon à assurer une cohérence avec d'autres dispositions existantes, le projet de loi prévoit la désynchronisation des rôles d'évaluation et de la valeur locative des municipalités dont le territoire est compris dans celui de la municipalité régionale de comté de Nicolet-Yamaska, valide, par ailleurs, à certaines conditions, les programmes de revitalisation des vieux quartiers complémentaires au Programme de la Société d'habitation du Québec et contient une disposition aux fins de la fixation ou du réajustement par la Régie du logement des loyers exigibles pour la location des logements situés dans le Village olympique, M. le Président.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, au leader du gouvernement. Je ne sais pas si tout le monde a bien écouté attentivement le ministre des Affaires municipales, il est question de bois, de forêts, de matrices, de taxes, d'évaluation, d'agriculture, etc., dans ce projet de loi là. Par respect pour les privilèges des parlementaires qui représentent des élus municipaux et des citoyens qui vivent dans des municipalités – à moins que les députés péquistes me disent qu'ils ont tous compris – est-ce qu'il ne s'agit pas d'un projet de loi omnibus qu'on se doit d'éviter de présenter à l'Assemblée nationale, à moins d'être très mélangé comme le ministre des Affaires municipales l'est?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je sais très bien que la députée responsable de la critique du ministre des Affaires municipales saura très bien faire valoir les points de vue que le leader de l'opposition fait valoir à ce moment-ci. Il y a une chose qui est certaine, c'est que nous avons un projet de loi devant nous, et la question qui est posée, c'est: Sommes-nous d'accord pour son dépôt?

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Mme Delisle: M. le Président. Est-ce que ce serait possible de savoir de la part du gouvernement s'il y aura des consultations générales ou particulières dans le cas de ce projet de loi là étant donné la multiplicité des sujets?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Avec l'ouverte d'esprit du ministre des Affaires municipales, il y aura des auditions particulières après entente avec l'opposition.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle

M. Paradis: Est-ce qu'on doit comprendre de la réponse du leader du gouvernement que ces audiences particulières porteront sur tous et chacun des sujets évoqués par le ministre des Affaires municipales dans son bill omnibus?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, les audiences porteront sur l'ensemble du projet de loi, et c'est à l'opposition de faire valoir quels sont les groupes qu'elle veut entendre. À ce moment-là, nous aurons une entente intervenue entre la porte-parole de l'opposition et le ministre des Affaires municipales, qu'il me fera plaisir d'entériner ici avec le leader de l'opposition.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, je veux qu'on se comprenne clairement, là. Moi, je cherche encore et je ne sais pas si quelqu'un l'a trouvé, l'ensemble du projet de loi. Il y a des éléments qui touchent de la taxation, d'autres éléments qui touchent du zonage, d'autres éléments...


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que, à ce moment-ci, l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Vote par appel nominal, M. le Président.

Le Président: Alors, qu'on appelle les députés. Alors, nous allons débuter le vote, et j'apprécierais que tout le monde procède au vote en silence, ce qui va permettre à l'officier de la table de pouvoir se concentrer pour faire l'appel nominal.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Rochon (Charlesbourg), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Désilets (Maskinongé), M. Brien (Rousseau), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Duguay (Duplessis).

M. Filion (Montmorency).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:60

Contre:33

Abstentions:0

Le Président: Alors, l'Assemblée est donc saisie du projet de loi n° 175. M. le leader du gouvernement.

(14 h 40)

M. Jolivet: L'article i.


Projet de loi n° 177

Le Président: À l'article i du feuilleton, M. le ministre de la Sécurité publique présente le projet de loi n° 177, Loi modifiant la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la recherche des causes et des circonstances des décès afin de permettre au juge en chef de la Cour du Québec de désigner un juge de cette Cour pour faire l'enquête et produire le rapport que prévoient les articles 14 et 15 de cette loi.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article j.


Projet de loi n° 172

Le Président: À l'article j du feuilleton, M. le ministre du Travail présente le projet de loi n° 172, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les normes du travail. M. le ministre du Travail.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur les normes du travail afin d'interdire, à l'égard des salariés âgés de moins de 15 ans, tout travail entre 23 heures et 6 heures, sauf dans le cas de la livraison de journaux ou dans tout autre cas déterminé par le gouvernement. Il oblige, en outre, un employeur à aménager les heures de travail d'un tel salarié de façon à ce qu'il puisse être à la résidence familiale entre 23 heures et 6 heures, sauf exceptions déterminées par le gouvernement.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit la gratuité de la chambre et de la pension à l'égard d'un ou d'une domestique qui loge ou prend ses repas à la résidence de son employeur.

Enfin, le projet retranche de la Loi sur les normes du travail les dispositions relatives à la publication des projets de loi, de règlement et des règlements de façon à rendre applicables celles de la Loi sur les règlements du Québec.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Sur un projet de loi public, au nom d'un député, l'article k, M. le Président.


Projet de loi n° 197

Le Président: À l'article k du feuilleton, M. le leader du gouvernement, au nom de Mme la députée de Prévost, présente le projet de loi n° 197, Loi sur l'Agence de développement du Centre de villégiature de Mont-Tremblant. M. le leader du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Ce projet de loi institue l'Agence de développement du centre de villégiature de Mont-Tremblant. Les affaires de l'Agence seront administrées par un conseil d'administration composé de cinq membres, dont deux nommés par la municipalité de Mont-Tremblant, deux nommés par Station Mont-Tremblant, société en commandite, et un nommé conjointement par la municipalité et la société.

Ce projet de loi prévoit que l'Agence a pour objet de réaliser et de financer la construction d'infrastructures municipales et qu'à cette fin elle peut notamment contracter avec toute personne pour la réalisation de ses objets, acquérir des biens meubles et immeubles pour la réalisation de ses objets, aliéner un bien meuble ou immeuble, à titre gratuit, en faveur de la municipalité de Mont-Tremblant et solliciter et recevoir des dons, legs, subventions ou autres contributions.

Enfin, le projet de loi prévoit que l'Agence peut emprunter des sommes pour financer la réalisation de travaux d'infrastructures municipales.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Projet d'intérêt privé, M. le Président. L'article l.


Projet de loi n° 256

Le Président: Alors, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 256, Loi concernant la Ville de Blainville. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Mme la députée de Blainville présente le projet de loi d'intérêt privé n° 256, Loi concernant la Ville de Blainville. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Oui.

Le Président: M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article m.


Projet de loi n° 260

Le Président: À l'article m, j'ai également reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 260, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

M. le député de Saint-Jean présente le projet de loi d'intérêt privé n° 260, Loi concernant la Ville d'Otterburn Park. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Et je fais motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Alors, la motion est adoptée? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article n.


Projet de loi n° 262

Le Président: Concernant l'article n du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 262, Loi concernant la Ville de Montréal-Est. Le directeur de la législation a constaté, dans ce cas-ci aussi, que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

Mme la députée de Pointe-aux-Trembles présente le projet de loi d'intérêt privé n° 262, Loi concernant la Ville de Montréal-Est. L'assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est adoptée. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article o, M. le Président.


Projet de loi n° 264

Le Président: Alors, concernant l'article o du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 264, Loi concernant la Municipalité de Saint-Lin. Le directeur de la législation a constaté, là aussi, que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.


Mise aux voix

M. le député de Rousseau présente le projet de loi d'intérêt privé n° 264, Loi concernant la Municipalité de Saint-Lin. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire et pour que le ministre des Affaires municipales en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Article p, M. le Président.


Projet de loi n° 259

Le Président: Alors, à l'article p du feuilleton, j'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 259, Loi concernant la Fondation du Centre hospitalier de l'Université de Montréal. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose le rapport.


Mise aux voix

M. le député de Westmount–Saint-Louis présente le projet de loi d'intérêt privé n° 259, Loi concernant la Fondation du Centre hospitalier de l'Université de Montréal. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Boulerice: Je fais motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques et pour que le ministre d'État de l'Économie et des Finances en soit membre.


Mise aux voix

Le Président: Cette motion est adoptée? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit et rapport annuel de l'Inspecteur général des institutions financières

M. Landry (Verchères): J'ai l'honneur de déposer, M. le Président, le rapport sur la mise en oeuvre de la Loi sur les caisses d'épargne et de crédit, novembre 1997, et le rapport annuel 1996-1997 de l'Inspecteur général des institutions financières.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Rapport annuel de la Société des établissements de plein air du Québec

M. Chevrette: Je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Société des établissements de plein air.

Le Président: Alors, ce document est déposé également. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


Rapport annuel du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement

M. Bégin: J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 du Bureau d'audiences publiques sur l'environnement.

Le Président: Très bien.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.


Décision du président sur une demande de directive du député de Marquette portant sur la procédure de dépôt de pétition

Au dépôt de pétitions. Avant de procéder au dépôt proprement dit, je vais, à ce moment-ci, rendre la directive qui m'a été demandée mardi le 11 novembre dernier par le député de Marquette.

La question posée se résume ainsi: Un député peut-il, à la demande de citoyens, déposer une pétition en lieu et place d'un autre député alors que l'original de cette pétition se trouverait toujours entre les mains de ce dernier?

Comme l'indique Beauchesne dans son traité de jurisprudence parlementaire, le droit de présenter une pétition au Parlement en vue du redressement d'un grief est un principe constitutionnel fondamental appliqué sans interruption depuis 1867. Il s'agit d'ailleurs d'un droit garanti par l'article 21 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec qui y stipule que toute personne a le droit d'adresser des pétitions à l'Assemblée nationale pour le redressement de griefs.

Toutefois, la transmission d'une pétition doit se faire conformément à la procédure établie par l'Assemblée nationale, procédure que l'on retrouve aux articles 62 à 65 de notre règlement. L'article 62 prescrit notamment que: «Toute personne ou association de personnes peut, par l'intermédiaire d'un député, adresser une pétition à l'Assemblée dans le but d'obtenir le redressement d'une situation qu'elle considère injuste. Le député qui la transmet doit l'avoir remise au Bureau du secrétaire général au moins une heure avant la période des affaires courantes.»

Je voudrais insister particulièrement sur ce dernier point. En effet, le député qui transmet une pétition à l'Assemblée doit d'abord l'avoir remise au Bureau du secrétaire général. Dans le cas qui est à l'origine de la demande de directive, aucune pétition qui pourrait s'apparenter à celle à laquelle le député de Marquette fait référence n'a été reçue au Bureau du secrétaire général.

En conséquence, il s'agit d'une affaire qui n'est pas encore du ressort de l'Assemblée. À ce stade-ci, elle concerne, d'une part, le député à qui une pétition aurait été confiée et qui, de ce fait, en serait responsable, notamment à l'égard des pétitionnaires; d'autre part, elle concerne les instigateurs de la pétition, à qui il appartient de veiller au suivi de la demande de transmission de celle-ci à l'Assemblée par le député de leur choix.

Par ailleurs, il va de soi qu'un député qui serait en possession d'une photocopie d'une pétition dont l'original serait entre les mains d'un de ses collègues ne peut en faire le dépôt. À cet égard, je vous réfère à l'article 63 du règlement, qui précise que la pétition doit être un original, ainsi qu'à une décision du 11 avril 1984, qui rappelle l'interdiction de déposer une photocopie d'une pétition.

M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Oui, sur votre décision, M. le Président. Bien sûr, je n'ai pas l'original; le député d'Ungava a l'original de la pétition. Je serais prêt à proposer au député d'Ungava de la déposer mardi. À défaut, je déposerai une demande formelle auprès de votre Bureau pour pouvoir déposer l'extrait de la pétition.

(14 h 50)

Le Président: Soyons clairs. Soyons très clairs. Ce que je viens de dire, c'est que le député, en présumant que les faits sont exacts... Je ne veux pas faire la discussion sur le fond, mais, d'une façon générale, une pétition, il y a un original, et l'original a été confié par des citoyens qui ont signé cette pétition à un député de leur choix. C'est à ce député et aux citoyens qui sont concernés de régler éventuellement leur problème. Si jamais les citoyens, pour une raison ou pour une autre, n'étaient pas satisfaits de la façon dont les choses étaient faites, à ce moment-là il va falloir qu'ils signent une nouvelle pétition parce que, qu'est-ce que vous voulez, la pétition, l'original, ils l'ont remise... À moins qu'ils ne récupèrent l'original. À ce moment-là, l'original qui sera récupéré pourra être confié à un autre député, et ce dernier pourrait à ce moment-là déposer l'extrait de la pétition, puisque l'original aurait été remis au Bureau du secrétaire général.

Je pense qu'il faut que ce soit clair. La décision à laquelle je faisais référence dans ma directive, c'est qu'on ne peut pas déposer une photocopie et un extrait. C'est l'original qui doit être déposé à l'Assemblée nationale. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Est-ce qu'on doit comprendre de votre décision, M. le Président, que la population qui souhaite s'adresser à l'Assemblée nationale et qui a remis sa pétition, ses demandes, à un député qui refuse de faire le dépôt à l'Assemblée nationale comme tel n'a d'autre choix que de tenter de récupérer cette pétition-là que le député ne veut pas rendre publique ou de recommencer à signer tous les noms un peu partout pour que ce soit déposé à l'Assemblée nationale? Est-ce que c'est ça qu'on doit comprendre de votre décision, M. le Président?

Le Président: Oui, M. le député, parce que, dans les circonstances, compte tenu de la façon dont nos règles sont formulées pour un dépôt de pétition à l'Assemblée... Et, vous savez, ce matin on a eu une réunion justement, les deux leaders et moi, sur un certain nombre de questions dont, éventuellement, la réforme de cette étape des dépôts de pétitions, puisque, pour le moment, on constate, tout le monde, qu'on a plus de pétitions non conformes que de pétitions conformes qui sont déposées à l'Assemblée. Mais, pour le moment, tant que les règles n'auront pas été changées, c'est exact, c'est ce genre de procédure qu'il faudra suivre. Et, à ce moment-ci, ce qu'on peut dire, c'est que c'est au citoyen concerné à voir avec le député avec lequel il a traité à régler la question.

M. Fournier: M. le Président, question de directive. Une explication sur la décision. À partir du moment où le règlement est notre loi, c'est quand même cette Assemblée qui en est maître. Nous devons en débattre, en discuter, adopter des modifications. Autrement dit, c'est cette Assemblée qui est souveraine. Il devrait donc être possible, j'imagine, selon votre décision, que nous puissions demander un consentement de manière à ce que, dans ce cas-là, pour essayer de solutionner l'imbroglio, un consentement puisse être demandé et que, s'il est accordé, ça nous permette de déposer une copie de la pétition.

Est-ce que je dois comprendre que votre décision ne nous empêche pas, n'empêche aucun des députés pour lesquels il y a des citoyens qui viennent les voir et qui disent: Écoutez, là, pour régler mon problème avec un autre député, peux-tu faire quelque chose? que nous puissions nous lever à l'Assemblée et demander un consentement de manière à ce que nous puissions répondre aux souhaits des concitoyens? Après tout, si on est payés pour être ici, c'est pour répondre à leurs souhaits.

Le Président: Sur la question de règlement soulevée, M. le leader du gouvernement?

M. Jolivet: Non, mais, un peu à travers tout ça, M. le Président, il y a une chose qui est claire, et j'ai bien compris. Le citoyen a le droit, en vertu de la Charte, de déposer une pétition. Le député en aucune façon n'est obligé de le faire, peu importent les décisions qui ont été rendues jusqu'à maintenant, et même les ministres – la coutume veut que ce soit de cette façon-là que ça se passe – demandent à une autre personne de le faire en leur nom. Ça a toujours été, d'année en année, la coutume, qu'on ait été de ce bord-ci ou de l'autre côté de la Chambre quand ça s'est produit.

Dans ce contexte-là, M. le Président, vous avez rendu une décision, on va vivre avec pour le moment, jusqu'à ce qu'on ait la chance de pouvoir échanger au niveau de la façon dont les pétitions devraient être présentées.

Le Président: Écoutez, ce que je dois dire, c'est que l'intervention du député de Châteauguay est exacte, c'est-à-dire que, au-delà de ce que je viens de dire, il peut y avoir demande de consentement – c'est possible – unanime, et, si l'Assemblée unanimement décide de permettre un geste, une dérogation au règlement qu'elle a elle-même édicté, alors à ce moment-là il n'y a pas de problème. On se comprend?

M. Jolivet: O.K. M. le Président, vous donnez la réponse tout de suite, il n'a pas besoin de poser la question. Tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas eu la discussion entre les deux leaders et vous, il n'est pas question de donner quelque consentement que ce soit.

Le Président: Oui, bien, là, il n'y en a pas qui ont été demandés pour le moment.


Dépôt de pétitions

Alors, la directive ayant été rendue, maintenant nous en arrivons au dépôt de pétitions comme tel. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Au nom de plus de 600 pétitionnaires du comté d'Ungava, je sollicite le consentement de la partie gouvernementale pour déposer une pétition.

Des voix: Non.

Le Président: Il n'y a pas consentement, M. le député de Marquette. Alors, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Léger: Je sollicite le consentement de l'Assemblée pour déposer une pétition non conforme, s'il vous plaît.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Paradis: Nous allons consentir, M. le Président. De ce côté-ci, nous sommes d'accord à ce que la population puisse s'exprimer.

Le Président: Vous pouvez y aller, Mme la députée.


Reformuler l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique

Mme Léger: Je dépose l'extrait d'une pétition par 576 pétitionnaires, membres du Syndicat des enseignants et enseignantes de Le Royer.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Parce que l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique confirme l'abandon des responsabilités de l'État en éducation;

«Parce qu'en permettant la prolifération d'écoles sélectives il compromet la fréquentation par tous les jeunes de l'école du village ou de quartier;

«Parce qu'il favorise la privatisation et la sous-traitance des services éducatifs, provoquant ainsi des pertes d'emplois particulièrement chez le personnel professionnel et de soutien;

«Parce qu'il attaque l'autonomie professionnelle du personnel et les conventions collectives;

«Parce qu'il permet de déroger au programme d'études national, menaçant ainsi la formation équivalente de tous les jeunes;

«Nous demandons à la ministre de l'Éducation de mettre de côté ce mauvais brouillon et de reprendre l'exercice de réforme de la Loi sur l'instruction publique avec l'objectif de la modifier partout où elle fait obstacle à l'égalité des chances ainsi qu'à l'école commune laïque et gratuite.»

Le Président: Puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de... Une autre pétition. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Je sollicite le consentement pour déposer une pétition au nom de 212 pétitionnaires du comté de Marquette.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement?

M. Jolivet: M. le Président, ça me fait grandement plaisir de lui donner le consentement.

M. Ouimet: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 212 pétitionnaires, enseignantes et enseignants du beau comté de Marquette.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Parce que l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique confirme l'abandon des responsabilités de l'État en éducation;

«Parce qu'en permettant la prolifération d'écoles sélectives il compromet la fréquentation par tous les jeunes de l'école de village ou de quartier;

«Parce qu'il favorise la privatisation et la sous-traitance des services éducatifs, provoquant ainsi des pertes d'emplois particulièrement chez le personnel professionnel et de soutien;

«Parce qu'il attaque l'autonomie professionnelle du personnel et les conventions collectives;

«Parce qu'il permet de déroger au programme d'études national, menaçant ainsi la formation équivalente de tous les jeunes;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à la ministre de l'Éducation de mettre de côté ce mauvais brouillon et de reprendre l'exercice de réforme de la Loi sur l'instruction publique avec l'objectif de la modifier partout où elle fait obstacle à l'égalité des chances ainsi qu'à l'école commune laïque et gratuite.»

Je certifie que cet extrait de pétition est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Dépôt d'une pétition conforme, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: La pétition, en présumant qu'elle est conforme, est-ce qu'elle a été remise au secrétaire général, puisque je n'ai pas d'indication que ça a été fait?

M. Paquin: Oui. Elle a été remise et on m'a retourné la feuille.

Le Président: Ce serait plus simple pour le président et le député de Saint-Jean pour se comprendre, si on nous laissait... M. le député de Saint-Jean.

M. Paquin: Elle a été déposée et elle est conforme, M. le Président. Alors, je ne sais pas pourquoi vous ne l'avez pas dans votre liste.

Le Président: Écoutez, avec le consentement, on va y aller, là, mais on m'indique, au niveau de la table, que je n'avais pas d'indication que cette pétition a été déposée. Mais, sur consentement, on peut... Alors, il y a consentement.

M. Paquin: Je la déposerai à une autre occasion, si vous le désirez, M. le Président.

(15 heures)

Le Président: Non, il y a consentement.


S'assurer que la réforme du régime d'aide sociale respecte les valeurs démocratiques

M. Paquin: Maintenant? Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale de façon conforme par 243 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Saint-Jean.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement a aboli le barème de disponibilité de même que le barème de participation;

«Considérant que le gouvernement a augmenté la coupure pour refus ou abandon d'emploi ou refus de se conformer aux directives de l'agent;

«Considérant que le gouvernement a comptabilisé la totalité des avoirs liquides lors de l'entrée à l'aide sociale;

«Considérant que le gouvernement a coupé les soins dentaires et optométriques et instauré l'assurance-médicaments;

«Considérant que le gouvernement a retiré le crédit d'impôt foncier et qu'il a imposé des prestations d'aide sociale;

«Considérant que le gouvernement a retiré le barème de non-disponibilité aux mères ayant un enfant de cinq ans;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Que toute personne ait droit à un revenu décent qui permet de vivre dans la dignité;

«Que toute personne ait droit de participer à la société de façon pleine et entière, que ce soit par l'emploi ou autrement;

«Que l'État soit responsable d'assurer une réelle distribution de la richesse et une véritable création d'emplois de qualité;

«Que le régime d'aide sociale puisse reposer sur des valeurs démocratiques et, dans cette perspective, il doit notamment favoriser l'autonomie des personnes et combattre toute forme de discrimination;

«Qu'il ne doit y avoir aucune obligation de participer à des mesures d'insertion afin de toucher des prestations d'aide sociale (workfare);

«Que le régime d'aide sociale puisse être démocratisé en reconnaissant l'expertise des personnes elles-mêmes en mettant en place des mécanismes de recours à tous les niveaux.»

Je certifie que l'extrait de cette pétition est conforme à l'original.

Le Président: L'extrait ayant été lu, M. le député de Saint-Jean, je vous prierais de faire le nécessaire avec le Secrétariat de l'Assemblée pour que la pétition soit remise, parce que, d'après les informations qui viennent de m'être communiquées, on n'a pas l'original. Donc, la pétition, elle n'est pas en notre...


Questions et réponses orales

Alors, nous allons passer à la période des questions et des réponses orales. M. le leader de l'opposition officielle, en principale.


Engorgement des urgences dans la région de Montréal

M. Paradis: Oui, M. le Président. Mercredi, le 5 novembre dernier, sous le titre Les urgences débordent encore , les médias nous apprenaient que six des neuf salles d'urgence, soit les deux tiers, des hôpitaux montréalais débordaient. Trois cent soixante-quatre patients étaient alités sur des civières dans les corridors de ces urgences. Le même jour, ici même à l'Assemblée nationale, le ministre de la Santé affirmait, et je le cite au texte: «Ce n'est pas à toutes les semaines, heureusement, ce n'est pas tous les jours que les urgences sont engorgées.»

M. le Président, le lendemain, les médias nous apprenaient que les mêmes salles d'urgence à Montréal étaient encore engorgées. Aujourd'hui, sous le titre – une semaine après – C'est toujours l'enfer aux urgences , nous apprenions que la situation s'est encore malheureusement détériorée. Ce n'est plus six des neuf hôpitaux dont les salles d'urgence sont débordées, c'est maintenant sept des neuf hôpitaux. Ce ne sont plus 364 patients qui sont alités sur des civières dans les corridors des salles d'urgence, ce sont 377.

Est-ce que le ministre maintient toujours sa déclaration de mercredi dernier à l'effet que ce n'est pas à toutes les semaines que les urgences sont débordées?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, comme j'ai aussi dit dans cette enceinte et ailleurs dans des discussions au sujet des salles d'urgence, c'est une situation, principalement à Montréal présentement, pour quatre ou cinq hôpitaux, qui demeure difficile et qui a un certain caractère chronique, depuis très longtemps, de difficultés puis qui périodiquement amène un engorgement dans des salles d'urgence. Il faut bien comprendre aussi que, quand il y a un engorgement dans une salle d'urgence, ça peut prendre quelques jours avant de revenir à une situation souhaitée et tout à fait normale.

Maintenant, le contexte de ce qui se passe présentement à Montréal, il faut bien le voir dans son ensemble, parce que la situation des urgences, au Québec comme à Montréal, n'est pas une situation qui va en s'aggravant mais qui va en s'améliorant.

Des voix: ...

M. Rochon: Absolument! Et, à ce titre, je voudrais rappeler, pour bien montrer qu'il ne s'agit pas là d'une spéculation de l'esprit, que depuis... Si on regarde ce qui se passait entre 1990 et aujourd'hui, pour avoir une période de temps, c'est à peu près 10 fois moins de personnes à chaque mois qui doivent attendre plus que 48 heures sur une civière dans une salle d'urgence.

On se rappelle que 48 heures, c'est l'indice qui est utilisé, l'indicateur pour suivre le fonctionnement des salles d'urgence. C'est donc une amélioration par un facteur de 10, si on compare chaque mois de l'année par rapport au total des personnes qui doivent attendre. Ça, c'est depuis 1990. Si on regarde plus particulièrement les deux, trois dernières années, alors on avait en moyenne 10 % des gens qui venaient aux salles d'urgence qui devaient attendre à chaque jour, à chaque semaine ou à chaque mois, et ça, c'est passé à peu près à 3 %. Il y a donc une évolution généralement vers une amélioration.

Mais il reste effectivement, à Montréal, dans cinq grands hôpitaux, une situation où, à différents moments, ça se réengorge et sur laquelle, comme je l'ai dit, il y a un travail très, très, très assidu impliquant les établissements, la régie régionale et le ministère, avec des experts cliniques qui travaillent avec chacun de ces établissements-là pour qu'on puisse en arriver à régler cette situation-là, comme ça a été le cas dans beaucoup d'autres hôpitaux du Québec qui posaient problème auparavant, à régler cette situation-là de façon beaucoup plus définitive.

M. Paradis: En principale, M. le Président.

Le Président: Principale, M. le député de Brome-Missisquoi.


Situation dans les urgences de la région de Montréal

M. Paradis: Oui, M. le Président. Comment le ministre de la Santé peut-il parler d'amélioration quand, cette semaine par rapport à la semaine passée, c'est une salle d'urgence de plus qui déborde à Montréal – ce n'est plus six sur neuf, c'est sept sur neuf – quand il y a encore plus de patients d'alités – ce n'est plus 364, c'est 377? Comment peut-il parler d'amélioration quand les médias titrent: Un patient passe 99 heures aux urgences de Maisonneuve-Rosemont ?

Vous me permettrez une brève citation de l'article: «99 heures, c'est le temps qu'un patient aphasique de 81 ans, cloué sur une civière, a passé aux urgences de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont. Entré en ambulance à 21 heures jeudi dernier, ce n'est qu'en fin de soirée lundi, plus de quatre jours plus tard, qu'il a finalement obtenu une chambre. La journée du samedi et le dimanche, le patient les a passées dans le bruit, en face de la porte par où arrivent les ambulanciers, un endroit éclairé la nuit comme le jour. Ne pouvant parler et n'ayant pas de sonnette pour attirer l'attention du personnel, il a fait ses besoins sous lui. À une autre occasion, alors qu'il éprouvait le besoin d'aller à la selle, on l'a installé sur une chaise d'aisance au beau milieu du corridor, avec d'autres patients, dans une absence totale d'intimité.» Ça, c'était en fin de semaine dernière.

Au même moment, est-ce que le ministre de la Santé a pris connaissance de la déclaration du ministre des Finances qui déclarait samedi dernier: La situation dans les urgences est acceptable? Est-ce qu'aujourd'hui en cette Chambre le ministre de la Santé va continuer de se comporter comme l'exécuteur des basses oeuvres du ministre des Finances, continuer à prendre sa défense ou s'il va se lever et enfin prendre la défense des malades au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Premièrement, M. le Président, cette phrase du leader me prend tout à fait par surprise. Elle est totalement contraire à ma pensée. Je sais que la gestion d'un système de santé moderne est difficile. Je me rappelle qu'on parlait, quand il était au pouvoir, de médecine de guerre. Je crois que ce sujet est trop sérieux pour laisser passer n'importe quoi. Il n'y a personne au Québec, à commencer par le ministre de la Santé, qui va dire que la situation dans les urgences est acceptable. Dès qu'il y a deux personnes qui souffrent d'un manque de ressources, c'est déjà trop.

Cependant, qu'on regarde la situation occidentale. On se concentre sur le Québec puis sur le ministre de la Santé qui, est largement héritier, d'ailleurs, des négligences antérieures. Vous en avez eu, un ministre de la Santé, vous, qui a essayé de régler le problème, puis il n'a pas pu le faire parce que votre gouvernement l'a empêché de le faire. Il ne l'a pas soutenu. Alors, elle n'était pas acceptable dans votre temps, la situation, elle ne l'est pas encore aujourd'hui. Ce qui est inacceptable, c'est qu'avec un sujet aussi sérieux on se laisse aller à une démagogie aussi constante et aussi harassante.

Tout le monde sait que la population vieillit, tout le monde sait que ça pose des contraintes énormes sur tous les systèmes de santé avancés. Notre système de santé est un système de santé avancé et, heureusement, on a un ministre qui fait tout pour lui faire donner le maximum de son rendement.

M. Paradis: Principale, M. le Président.

(15 h 10)

Le Président: En principale, M. le député de Brome-Missisquoi.


Crédits alloués au secteur de la santé

M. Paradis: Oui. Le ministre des Finances et le ministre de la Santé, après avoir blâmé l'opposition, après avoir blâmé les malades, blâment maintenant les journalistes. Je lui exhibe encore une fois une citation du journal La Tribune de samedi dernier. On me dit que c'est un titre? Vous voulez un extrait de l'article? Le journaliste Michel Morin: «Le ministre des Finances et vice-premier ministre du Québec estime néanmoins que la situation dans les urgences est acceptable.» Ça, c'est le journaliste qui l'a signé.

Maintenant, M. le Président, si le ministre des Finances est sérieux ou si le ministre de la Santé est sérieux quand ils disent que la situation est inacceptable, comme les médecins, comme les infirmières, comme l'opposition officielle, comme les gens qui en ont besoin, s'ils estiment que cette situation est inacceptable, qu'est-ce qu'ils attendent pour débloquer des fonds et pour ouvrir des lits dans les hôpitaux de façon à ce que ces situations ne se reproduisent pas jour après jour, semaine après semaine au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Bon. Je pense que j'ai été clair, M. le Président. Personne ne me fera dire que je pense, comme le ministre de la Santé et comme mes collègues ici, que la moindre attente dans les urgences est acceptable, premièrement. Deuxièmement, débloquer des fonds, oui, malgré l'héritage catastrophique que vous nous avez laissé, malgré les coupures à hauteur de 2 000 000 000 $ par année du gouvernement fédéral, avec un cumulatif de 15 000 000 000 $. Il faut s'en rappeler. Oui, nous avons débloqué des fonds et nous avons donné au ministre de la Santé au moins 100 000 000 $ de plus.

Mais, au lieu, si vous voulez vraiment vous acquitter de votre rôle d'opposition officielle et rendre service à la population, et je vous supplie, à la limite, de le faire, est-ce que vous ne pourriez pas dénoncer l'indécence du gouvernement du Canada et en particulier de mon collègue le ministre des Finances qui, après vous avoir coupé, nous avoir coupé des sommes monstrueuses, établit une fondation pour l'innovation médicale en essayant de forcer nos hôpitaux à dépenser pour rencontrer l'argent qu'il y met? Et, si on ne le fait pas, le Québec va perdre de l'argent. C'est une des manoeuvres les plus odieuses de l'histoire du fédéralisme contemporain.

Le Président: En terminant, M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Oui.

Le Président: M. le député de Papineau, s'il vous plaît. M. le député de Papineau, s'il vous plaît. M. le ministre.

M. Landry (Verchères): En terminant, M. le Président, je supplie encore une fois nos amis d'en face. S'ils veulent défendre les malades, qu'ils dénoncent donc le régime malade dont ils sont les idolâtres perpétuels.

Le Président: En complémentaire, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre des Finances a déjà pris connaissance de l'article d'Alain Dubuc qui, lui, dit que c'est le gouvernement Bouchard qui a choisi de cibler la santé dans ses coupures et que c'est son choix personnel? Qu'est-ce qu'il attend pour faire comme Mike Harris en Ontario ou Ralph Klein en Alberta et cesser les coupures dans la santé et réinjecter de l'argent? Eux aussi, ils vivent dans le même régime fédéral.

Le Président: M. le ministre.

M. Landry (Verchères): Premièrement, est-ce que le leader de l'opposition officielle a déjà entendu parler du programme Transfert social canadien? Est-ce qu'il s'est rendu compte que les coupures du ministre des Finances fédéral ont été ciblées particulièrement sur la santé et répercutées directement sur nos comptes d'exploitation?

Deuxièmement, mentionner Ralph Klein, dont vous auriez dû suivre l'exemple il y a 10 ans, est une indécence en soi. Ralph Klein était à déficit zéro alors que votre ministre des Finances du temps disait que 5 000 000 000 $ pour le Québec, c'était acceptable.

Ultimement, parler de Mike Harris, juste accessoirement, mais d'une façon très grave, c'est une insulte grossière aux francophones de l'Ontario dont il a fermé le dernier hôpital.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, on ne mentionnera pas combien le ministre de la Santé en a fermé, lui, au Québec. Est-ce que le ministre de la Santé peut au moins prendre en considération les chiffres de son propre gouvernement, le chiffre du ministère des Affaires intergouvernementales canadiennes qui stipule que le Québec dépense per capita 1 200 $, un petit peu plus que 1 200 $, que Mike Harris dépense, pour ses citoyens de l'Ontario, 1 500 $ per capita, que Ralph Klein, en Alberta, dépense 1 600 $ per capita? Est-ce qu'il peut mettre les priorités aux bonnes places plutôt que de les mettre aux mauvaises places et nous imprimer des cartes comme il l'a fait toute la journée hier?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, comme toujours, on dit des choses en partie, à peu près. Ce que le député de Brome-Missisquoi ne dit pas, c'est que ce différentiel dans le per capita pour la santé entre le Québec et les provinces qu'il a citées existe depuis des dizaines d'années. On a toujours eu à peu près ce différentiel, toujours. Alors, il n'y a rien de nouveau là-dedans et il y a d'autres facteurs qui expliquent ça.

Si on s'offusque tant de l'autre côté de la Chambre aujourd'hui, alors qu'il y a une situation qui graduellement s'améliore malgré la situation impossible dans laquelle ils nous ont laissés, pourquoi, M. le Président, sous leur règne, à chaque année, c'était 10 % des gens qui attendaient 48 heures? C'est à partir de 1995 qu'on a commencé à baisser à... on s'est rendu à 5 %, et là on est rendu à 3 %. À chaque année, ils le maintenaient et ça ne s'améliorait pas. C'était le temps de s'en offusquer à ce moment-là. C'était le temps de faire quelque chose à ce moment-là, M. le Président.

Là, la situation a commencé à changer. Il faut faire attention aux cas particuliers. Il arrive des cas malheureux et, sur le nombre de situations qui se présentent dans le système de la santé et des services sociaux, il va de temps en temps arriver des situations qu'on regrette et qu'on veut prévenir de plus en plus.

Le député – je vais terminer là-dessus, M. le Président – avait dramatisé une situation dans le Saguenay–Lac-Saint-Jean, au complexe de Sagami, parce qu'il y a eu une situation difficile qui s'est présentée. Il a, encore là, généralisé à partir d'échantillon de un. Bien, hier, dans Le Réveil de Chicoutimi, il y un porte-parole de l'hôpital qui disait très clairement qu'il n'y a pas de problème de débordement à l'urgence là-bas, qu'ils peuvent affirmer que, toutes consultations confondues, la moyenne d'attente ne dépasse pas deux heures, M. le Président, et que les plaintes sont très rares. Le personnel est compétent et travaille très dur pour maintenir cette situation.

Alors, il faut faire attention...

Le Président: M. le ministre. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, qui dois-je croire? Le ministre de la Santé qui me dit qu'il n'y a pas de problème à l'hôpital de Chicoutimi ou le Dr Rénald Dutil qui lance un cri d'alarme au ministre de la Santé et qui dit, dans le journal de ce matin: À Chicoutimi, plusieurs heures de garde ne peuvent être couvertes à l'urgence?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: De toute façon, M. le Président... Non, non. La déclaration du Dr Dutil fait référence à la situation particulière présentement, qui est en voie de règlement, qui est celle qui a créé des difficultés aux centres universitaires des sciences de la santé, plus spécialement à Sherbrooke où il y a une situation spéciale pour les médecins urgentologues. Ça, c'est ça.

Mais là, c'est d'hier qu'on a ça et c'est quelqu'un qui parle au nom de l'hôpital, de l'hôpital, sur place, et qui assume des responsabilités. Il doit savoir de quoi il parle, M. le Président. Alors, je pense que ce qu'il faut retenir de ce qui se passe, malgré que l'opposition va essayer de sortir les choses de leur contexte, oublie, encore une fois, que pendant des années ils n'ont rien fait pour la situation, c'est qu'elle s'est améliorée par un facteur de 10 % à 3 % de gens en attente, et qu'on continue. D'ici à la fin du mois, on aura un plan précis pour chacun des hôpitaux; les gens y travaillent. Alors, je demanderais qu'on respecte juste un peu les travailleurs, les professionnels, les gestionnaires sur le terrain qui s'acharnent à régler cette situation-là. On vient juste de sortir d'une situation financière impossible qui nous a coupé les marges de manoeuvre des prochaines années.

Alors, quand on a créé une situation comme ça, on ne vient pas tout d'un coup s'offusquer. Et, dans d'autres temps, dans une autre époque où les règles parlementaires étaient absentes ou différentes, je pense qu'on a déjà appelé ça des comportements de sépulcres blanchis, ce genre d'attitude là.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup. Est-ce qu'il y a des complémentaires qui... M. le député d'Ungava.

M. Létourneau: En principale.

(15 h 20)

Le Président: En principale. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.


Exécution des sentences prononcées par les tribunaux

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Ma question va s'adresser au ministre de la Sécurité publique et toucher ce qu'on doit appeler le dossier noir du laisser-aller dans les centres de détention.

Après les agents des services correctionnels qui ont sonné des alarmes, après les directeurs de prison qui ont sonné des alarmes, après le Vérificateur général qui a dressé un portrait très précis du laisser-aller dans le système correctionnel québécois, c'est aujourd'hui trois juges de la Cour d'appel qui, devant l'ampleur d'une situation, nous disent: «Ça deviendra peut-être un aveuglement volontaire ou de l'hypocrisie que de prononcer des peines sans tenir compte des conditions de leur mise en oeuvre, alors que l'on saura pertinemment que leur exécution dépendra de décisions discrétionnaires de l'administration correctionnelle prises pour des motifs qui n'auront rien à voir avec la dangerosité réelle d'un détenu.» Ils disent aussi: «La Cour d'appel estime que la libération prématurée du détenu peut être qualifiée d'encouragement à la récidive.» Et c'est des juges qui parlent, M. le Président.

Alors, ma question au ministre de la Sécurité publique est fort simple: Est-ce que, ce matin, il a ajouté ces juges-là à la liste de tous ceux qui se trompent – parce qu'il semble que tous ceux qui posent le même constat se trompent – ou est-ce qu'il va enfin faire l'aveu que son gouvernement n'a jamais fait, que leur laisser-aller dans le système correctionnel coûte cher?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'ai pris connaissance du jugement de la Cour d'appel et je suis en mesure de dire aussi aujourd'hui que notre gouvernement fait une gestion des sentences au Québec selon le respect de la loi et en toute responsabilité.

J'aimerais reprendre un extrait, justement, du jugement de la Cour d'appel. Dans ce jugement, on dit: «Si ce système est en voie de se généraliser – écrit le juge Lebel au nom de ses deux collègues – il peut remettre en cause des principes fondamentaux.» Donc, «si ce système est en voie de se généraliser». Il faut comprendre que, sur l'ensemble des personnes qui sont remises en absence temporaire, uniquement 5 % le sont pour des causes de surpopulation, donc 5 % sur 100 %. Alors, ce n'est pas généralisé, ce n'est pas une pratique généralisée.

Hier, M. le Président, j'ai admis qu'il y a un problème de surpopulation, oui, dans nos centres de détention, un problème qui est connu depuis 1989 au moins. Mais ce n'est pas un problème qui se règle d'un trait de plume. En 1992, les libéraux ont présenté le projet de loi 147 qui faisait en sorte que maintenant ça ne prenait plus un tiers mais un sixième de la sentence pour pouvoir faire en sorte qu'on avait le droit à une absence temporaire. On pensait ainsi régler le problème d'absences temporaires. On ne l'a pas réglé. Il n'y a pas de façon vraiment simple de régler.

Cependant, M. le Président, les directives sont claires. Si la personne représente un danger pour la population, selon des grilles d'évaluation serrée... J'ai demandé à mon ministère de resserrer ces grilles, de refaire une évaluation de ces grilles pour éviter justement que des gens qui représentent un danger puissent être remis en libération pour absence temporaire. Mais ce que ça prend, c'est une réforme en profondeur. Je me suis attaqué, comme ministre de la Sécurité publique, à ce problème et je devrais très bientôt présenter à l'Assemblée nationale un projet de loi pour proposer des solutions concrètes.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre, qui a reconnu hier la surpopulation, reconnaît aussi que les déclarations de ces prédécesseurs étaient loin de la vérité quand ils disaient que les gens libérés illégalement étaient des cas mineurs, des cas d'infraction, par exemple, au Code de la sécurité routière et qu'en réalité on vient de voir en deux jours deux cas de gens qui ont commis des actes avec violence, des gens dont la dangerosité, pour reprendre le terme des juges, pour le public était réelle et qu'en libérant des gens comme ça avant même qu'ils aient purgé un sixième de leur sentence, c'est un manquement total à la capacité, à leur rôle d'assurer la sécurité du public québécois?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, j'aimerais tout simplement donner quelques statistiques au député de Rivière-du-Loup. Dans une année, c'est environ 66 000 personnes qui passent à travers nos centres de détention; 66 000. Il faut comprendre que 90 % des gens sentencés le sont pour des sentences de six mois et moins; 47 %, 30 jours et moins. Donc, il y a un roulement, oui, un fort roulement. Mais il faut aussi comprendre – et ça, je crois que c'est là un des éléments de la solution – que 47 % des gens sentencés et qui sont de la compétence, de la juridiction du Québec le sont pour des infractions reliées à la sécurité routière, 47 %. Je crois qu'on doit éviter que notre système d'incarcération, notre système de détention serve de moyen pour échapper de payer des amendes. Et on constate qu'on a un problème à ce niveau-là.

Comment se fait-il que, alors que le taux de criminalité, au Québec, baisse depuis cinq ans, que le nombre de comparutions, au Québec, baisse depuis cinq ans, on a de plus en plus de gens dans nos centres de détention? C'est ça vraiment, je crois, les questions fondamentales qu'on doit se poser. Oui, M. le Président, il peut arriver qu'il y ait des cas qui passent à travers les mailles de notre système, et chaque cas est un cas de trop que je n'accepterai pas comme ministre de la Sécurité publique. Mais il n'y a pas de solution simple. Nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour faire en sorte que ce genre de situation ne se reproduise pas.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: Oui. Comment le ministre de la Sécurité publique peut concilier ses déclarations à l'effet qu'à l'intérieur des prisons on garde des gens pour des cas aussi mineurs qu'il décrit, d'infraction au Code de la sécurité routière, pendant qu'en même temps on dit qu'on manque de places au point que quelqu'un condamné à 23 mois pour voies de fait fait, dans la pratique, sept jours? Comment il peut concilier des déclarations comme celles-là? Est-ce qu'il ne pense pas qu'à la place de faire de telles déclarations il devrait donner un suivi sérieux au Vérificateur général et à ses recommandations sur la gestion de son système?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, ce que j'ai dit, c'est que 47 % des gens sentencés qui étaient sous notre responsabilité l'étaient relativement à des infractions au Code de la route. Le Vérificateur général, dans son rapport, a quant à lui dit que, quant au nombre de places occupées effectivement par ces gens dans nos centres de détention, c'était entre 5 % et 10 %, selon les chiffres mêmes du Vérificateur général. C'est ça, la vraie problématique. Donc, il faut regarder les solutions permanentes. Il n'y a pas de solutions faciles. Les libéraux les ont essayées, puis ça n'a pas marché. Alors, à ce moment-là, regardons les solutions permanentes et responsables qui vont régler d'une façon permanente le problème que nous connaissons.

Le Président: Une dernière complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup. Après ça, je vais...

M. Dumont: Oui, dernière complémentaire. Comment la population peut avoir confiance dans le système correctionnel alors que maintenant les directeurs de prison, les juges, le Vérificateur général eux-mêmes le disent: Le système, hors de confiance? Et comment il peut nous convaincre qu'ils vont reprendre confiance et qu'il va régler les problèmes alors que, depuis que le PQ est élu au pouvoir, il a empiré le problème en fermant des prisons plutôt que de l'améliorer?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, c'est vraiment une vision simpliste de penser que les fermetures que nous avons effectuées sont la cause du problème. Les fermetures que nous avons effectuées, ça représente environ 75 places sur 3 500 places dans l'ensemble de notre système de détention. Donc, c'est simpliste de dire que le problème que nous vivons présentement, c'est à cause de ça. Ce que nous avons fait, c'est que nous avons fermé de petits établissements qui coûtent excessivement cher à opérer et que nous avons à ce moment-là réalloué les ressources dans d'autres centres de détention. C'est ça que nous avons fait.

Le ministère de la Sécurité publique, c'est évident, avait une demande du Conseil du trésor relativement à une réduction de son budget. Je sais que c'est un vocabulaire abstrait pour les libéraux quand on parle de réduction de dépenses, mais cependant...

Le Président: En conclusion, M. le ministre, s'il vous plaît. M. le ministre, en conclusion.

M. Bélanger: Oui. Donc, M. le Président, je crois que nous avons fait une gestion responsable au niveau de nos centres de détention. C'est 75 places seulement. Je sais que le député de Rivière-du-Loup protège toujours et aurait voulu qu'on ne ferme pas le centre de détention de Rivière-du-Loup, mais c'était un des centres qui coûtaient le plus cher quotidiennement à opérer par détenu, malheureusement.

M. Lefebvre: M. le Président, en principale.

Le Président: M. le député de Frontenac.


Surpopulation dans les centres de détention

M. Lefebvre: M. le Président, on ferme des hôpitaux puis on ferme des prisons. Les mêmes causes produisent les mêmes effets: on se retrouve avec des victimes et en matière de santé puis en matière carcérale. Hier, j'ai relevé le cas d'un individu en liberté illégale qui se retrouve accusé, six jours après sa libération – peut-être même moins que six jours – d'avoir violé et sodomisé une femme de 57 ans. La Cour d'appel rend public aujourd'hui un autre cas aussi révoltant, récidive d'un conjoint à l'égard de sa compagne, violence conjugale, agression sur sa conjointe alors que lui aussi aurait dû être en prison. Les juges de la Cour d'appel envoient un message au ministre puis à son gouvernement que les sentences doivent être purgées, que les libérations prématurées encouragent la récidive, que la surpopulation carcérale ne justifie pas des libérations avant terme.

Est-ce que le ministre réalise que, si les juges de la Cour d'appel – je suis dans ma question, M. le Président – font de tels commentaires, dénoncent le système carcéral, c'est que la situation est devenue dramatique, que, lui, là, il doit arrêter de flâser? Qu'il prenne des décisions, qu'il crée des places en détention, qu'il arrête de protéger les criminels puis s'occupe des victimes.

Des voix: C'est ça! Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

(15 h 30)

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je suis désolé que le député de Frontenac se soit fait voler sa question par le député de Rivière-du-Loup, mais c'est la même réponse que j'ai donnée au député de Rivière-du-Loup, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que je peux dire au ministre qu'effectivement j'avais l'intention...

Le Président: Attention. Je voudrais rappeler à tous les membres de l'Assemblée, et en particulier à ceux qui adressent des questions, qu'une question complémentaire qui commence par «est-ce que» et qui se poursuit par une expression d'opinion n'est pas nécessairement une question complémentaire. «Est-ce que je peux...» Alors, je pense que je voudrais qu'il y ait une question complémentaire dans les règles, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Est-ce que le ministre réalise que le député de Rivière-du-Loup, tout comme mes collègues et moi-même, on s'intéresse aux cas de violence par des criminels en liberté, contrairement à tous les autres députés péquistes qui trouvent ça drôle? Et est-ce que le ministre réalise que la réponse qu'il a donnée à mon collègue de Rivière-du-Loup, comme celle qu'il m'a donnée à moi, était tout aussi insignifiante, première réponse, que la deuxième, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, le député de Frontenac nous a habitués, en cette Chambre, à un meilleur contrôle de ses émotions. Je suis un peu déçu aujourd'hui de constater ça. Maintenant, je crois que j'ai répondu d'une façon claire au député de Rivière-du-Loup. Quand il y a des cas dramatiques qui nous sont proposés, moi, comme ministre de la Sécurité publique, je ne peux pas rester indifférent à ça, et je ne prends pas ça à la légère.

Cependant, ce que je dis, c'est que, quand on doit apporter des solutions, regardons que ce ne soit pas uniquement du tape-à-l'oeil, comme les libéraux ont essayé de faire uniquement artificiellement en essayant de construire de nouveaux centres de détention, qui n'ont rien réglé, il faut l'admettre. De bonne foi peut-être, les libéraux ont construit de nouveaux centres de détention en pensant régler le problème, mais ils n'ont rien réglé. Ils n'ont qu'aggravé le problème du déficit. C'est ça, la réalité.

Alors, M. le Président, c'est pour ça que j'ai demandé qu'on révise les grilles et les caractères qui vont servir à l'évaluation des gens qui sont remis en absence temporaire, parce que nous avons, dans nos centres de détention, la capacité et les places nécessaires pour que les gens qui représentent un danger pour la société soient gardés dans nos centres de détention, conformément à la loi. Nous avons cette capacité et nous devons nous assurer que la loi est respectée, que toutes les mesures sont prises, et je le ferai et je le fais comme ministre de la Sécurité publique.

Le Président: En complémentaire, M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que la réponse du ministre finalement se limite à dire qu'il va continuer à faire du placotage, qu'il n'y aura pas de gestes concrets, pas de nouvelles places de créées en détention puis qu'on pourra continuer à libérer des criminels dangereux pour des raisons humanitaires sous prétexte qu'ils sont deux par cellule? C'est ça qui va continuer à se passer? C'est ça, la réponse du ministre? Pas de nouvelles places, pas de réajustement au système carcéral, puis ça va continuer à fonctionner comme ça fonctionne depuis trois ans.

Le Président: M. le ministre.

M. Bélanger: M. le Président, j'espère qu'on n'est pas en train de nous reprocher de faire du dédoublement de cellules, puisque c'est le plan Elkas qui, le premier, a proposé officiellement de dédoubler des cellules, le ministre libéral de la Sécurité publique. Alors, qu'on ne vienne pas nous reprocher maintenant qu'on a procédé à des dédoublements de cellules.

J'ai admis hier, franchement: Oui, on a un problème de surpopulation dans nos centres de détention, et ça a été admis par mon prédécesseur. Cependant, ce problème ne fait pas en sorte que des gens dangereux sont remis en liberté, ça ne devrait pas justifier ça. Ça ne devrait pas justifier ça. Alors, c'est pour ça que j'ai pris les mesures nécessaires et je devrais, grâce au concours du ministre de la Justice qui m'a offert sa collaboration, du ministre des Transports aussi, déposer un projet de loi très bientôt qui devrait à ce moment-là désengorger nos centres de détention de gens qui se servent de nos centres de détention pour éviter de payer des amendes. Comme société, on ne peut pas se permettre ça, et je crois que c'est la réflexion qu'on se devait de faire comme société, comme gouvernement et procéder à l'action. Et c'est ce que je ferai, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Le ministre se rend-il compte que, depuis deux jours, dans cette Assemblée, tout ce qu'il fait finalement, c'est de défendre le système, les agresseurs, les détenus, mais qu'il oublie complètement les victimes. Les victimes, ce sont des femmes particulièrement, des femmes qui se font violenter, agresser et souvent battre. Le ministre tantôt disait qu'il y a des cas qui passent entre les mailles du système...

Le Président: En terminant, Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Est-ce que le ministre réalise, M. le Président, que les cas qui passent dans les mailles du système, comme lui-même le disait tantôt, les victimes, ce sont des femmes particulièrement, des femmes qui se font violer, agresser et battre?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, le fait que ce soit des femmes ou des hommes, quant à moi, ça m'importe peu. L'important, c'est que ce sont des individus qui sont traumatisés, qui ont des préjudices physiques ou émotionnels relativement à ces choses-là. Je trouve ça sérieux, M. le Président. Je pense qu'il aurait été irresponsable de ma part de nier le problème. Je l'ai admis, le problème. Mais ce que j'ai aussi admis, c'est que je vais prendre les mesures nécessaires pour que justement les gens qui n'ont pas affaire dans nos centres de détention ne soient pas dans nos centres de détention, pour qu'à ce moment-là nos centres de détention puissent répondre, d'une façon encore plus adéquate, à leurs responsabilités. Et c'est ce que je vais faire, M. le Président. Le problème de surpopulation, je le répète, la députée siégeait au moment où ce problème avait été constaté par les libéraux, au moment où M. Ryan, le ministre libéral, le reconnaissait qu'il y avait un problème. Alors, qu'a-t-elle fait, elle, M. le Président?

Le Président: M. le député d'Ungava, en principale.


Retombées économiques de la mission commerciale en Chine

M. Létourneau: M. le Président, pour parler d'économie, comme vous le savez, la Mission Québec en Chine s'est terminée hier. Est-ce que le ministre d'État des Ressources naturelles, dont nous saluons le retour, qui accompagnait le premier ministre à cette occasion, peut faire part aux membres de cette Chambre des retombées économiques concrètes de cette mission pour le Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, maintenant que le ministre des Richesses naturelles est de retour parmi nous, je voudrais bien lui faire savoir, par votre intermédiaire, que, pendant qu'il était absent à faire cette extraordinaire travail en Chine, il n'y a eu aucune question de l'opposition, ce qui est la preuve que cette mission est un succès éclatant. Et, comme je le ferai pour le premier ministre quand il sera revenu, je le félicite déjà de son formidable travail en République populaire de Chine.

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles, avec un peu moins de temps qu'il vous en aurait...

M. Chevrette: Oui, M. le Président, mais je suppose qu'on me fournira, par une additionnelle, l'occasion de renseigner cette Chambre. Je voudrais vous dire que c'est la première fois que je suis introduit de façon aussi délicate. Je remercie le vice-premier ministre.

Je voudrais vous dire que, moi, je voudrais rendre hommage à tous les Québécois et les Québécoises chefs d'entreprise qui nous ont accompagnés, qui ont effectué plus de 1 400 contacts avec l'industrie chinoise et qui ont conclu des ententes ou des contrats pour plus de 1 190 000 000 $, avec des retombées directes de 425 000 000 $ pour le Québec. M. le Président, je voudrais vous dire aussi qu'au-delà de 520 emplois seront créés directement au Québec. Et, si le tout se réalise avec une excellente performance comme ça semble se produire présentement... Oui, si vous aviez été plus souvent en Chine et un peu partout à travers le monde, on aurait été sur la mappe sur le plan économique beaucoup plus qu'on l'est présentement. On a le courage politique d'organiser ces tournées, ces missions économiques...

Le Président: M. le député de Papineau. En terminant, M. le ministre.

(15 h 40)

M. Chevrette: Oui, M. le Président, en terminant, et j'aurai l'occasion d'y revenir, l'opposition, tout ce qu'elle a trouvé à dire durant cette mission en Chine, c'est d'essayer de féliciter l'ambassade canadienne.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Au ministre d'État des Ressources naturelles, qui sait fort bien qu'il n'y a pas de développement social si ce n'est pas précédé par un développement économique: Est-ce qu'il pourrait rassurer cette Chambre, et notamment la députée de La Pinière, que Mission Québec, contrairement à Team Canada, va s'assurer d'un suivi?

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, oui, le premier ministre a annoncé la création d'un comité ministériel qui sera présidé par le ministre d'État de l'Économie et des Finances et, également, par le ministre des Relations internationales et verra à exiger, à tous les trois mois, d'avoir un rapport. De plus, on a décidé sur place d'augmenter notre représentation en Chine et de faire en sorte que le suivi de chacun des dossiers soit assuré par des présences sur le territoire chinois, dans les provinces les plus importantes comme Pékin, Shanghai.

Je suis convaincu... Et je demanderais à tous les membres de cette Chambre, d'ailleurs, de respecter ces Québécois, ces entrepreneurs québécois qui ont décidé eux-mêmes de former une association spontanée pour aider le suivi ministériel gouvernemental. C'est du jamais vu, un geste de solidarité. Et, si cette Chambre, de temps à autre, suivait ce modèle qui nous est donné par des individus qui se connaissaient à peine et qui, pourtant, certains, sont gênés d'entendre les propos, certains sont gênés d'entendre les propos de nos amis d'en face sur la valeur de ces missions.

Le Président: En principale, M. le député de Marquette.


Manque de manuels scolaires dans les écoles

M. Ouimet: M. le Président, le gouvernement devrait peut-être envisager une mission dans les écoles, dans les salles d'urgence et dans les prisons aussi.

Avant-hier, la ministre de l'Éducation affirmait en Chambre qu'il n'est pas nécessaire que tous les élèves aient leur propre manuel scolaire pour toutes les matières. Le manuel scolaire est pourtant l'outil fondamental dont les élèves ont besoin pour réussir leur cours. Pourtant, des reportages récents de l'émission Le Point ont fait état des ravages causés par les coupures brutales du gouvernement du Parti québécois. Actuellement, plusieurs écoles n'ont plus les moyens d'acheter les livres, et ce, même dans les matières essentielles.

Question à la ministre de l'Éducation: Si, pour la ministre de l'Éducation, il n'est pas essentiel, il n'est pas nécessaire que chaque élève ait son propre manuel dans chaque matière, quel est son seuil de tolérance? Est-ce que c'est deux élèves par manuel? Trois élèves par manuel? Quatre élèves par manuel? C'est quoi, son seuil de tolérance.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: M. le Président, comme le député de Marquette se référait à l'émission du Point qui a présenté certaines situations particulières, il se souviendra sûrement qu'un des intervenants a mentionné que cela fait au moins une dizaine d'années que la situation est telle dans les écoles. Il aurait pu d'ailleurs rappeler qu'il y a quelques années de cela, en 1991, en 1993, en 1994, le président de la CECM, député de Marquette, avait dans ses coffres des surplus accumulés de 28 000 000 $, 33 000 000 $, 21 000 000 $ et n'achetait pas de manuels scolaires...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, maintenant, M. le Président, je réfère le député de Marquette à la réponse que je donnais effectivement à sa collègue de La Pinière cette semaine. D'abord, je suis en train de faire faire un état de situation pour l'ensemble des écoles du Québec, de telle sorte que nous connaissions exactement ce dont il est question. Parce que certains reportages, tout en ayant une grande qualité, peuvent aller chercher des situations qui ne traduisent pas nécessairement ce qui représente l'ensemble de la réalité québécoise. Donc, nous faisons actuellement le point sur cette question.

Et je répète aussi au député que, dans les budgets que nous transférons aux commissions scolaires, il y a une portion qui prévoit chaque année de l'achat ou du renouvellement de matériel scolaire, de livres, de documents, de dictionnaires, etc. C'est évident, M. le Président, que l'idéal et ce qui serait souhaitable, c'est que chaque élève ait un manuel pour chaque matière, mais cela va de soi que, pour les matières essentielles, il faut que tous les élèves aient accès à un manuel, puissent l'utiliser, puissent l'apporter chez eux, puissent s'en servir pour leur apprentissage, M. le Président.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: La ministre sait-elle que la situation est grave dans les écoles, que les commissions scolaires dépensent la totalité des fonds qui sont versés par le ministère de l'Éducation et que ces fonds ne sont pas suffisants parce qu'elle les coupe, elle, la ministre de l'Éducation, depuis les trois dernières années et que la Loi sur l'instruction publique et le régime pédagogique exigent que chaque élève ait son propre manuel? C'est tolérance zéro, au Québec. Pas la réponse qu'elle a donnée mardi dernier.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Alors, M. le Président, nous avons demandé, oui, au milieu scolaire, comme à la santé, comme dans l'ensemble des services gouvernementaux, un effort de rationalisation. Généralement, je peux vous dire que, dans le cas de l'éducation, les commissions scolaires ont d'abord rationalisé du côté administratif. J'en ai eu pour preuve, d'ailleurs, des échanges très longs et très complets avec le même député de Marquette en commission parlementaire sur le fait, par exemple, qu'on a réduit le personnel administratif, mais que, par ailleurs, on a conservé dans un grand nombre de commissions scolaires le personnel professionnel qui est en soutien aux élèves. Je ne dis pas au député de Marquette que j'accepte cette situation-là, je dis: Je veux en connaître l'ampleur, M. le Président, et j'aiderai et je verrai à soutenir les commissions scolaires de telle sorte qu'elles puissent assumer complètement et entièrement leurs responsabilités.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui.

Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.


Motions sans préavis

Ce qui nous amène immédiatement aux motions sans préavis. M. le député de Saint-Jean.


Demander au gouvernement fédéral de régler rapidement le dossier du fonds de pension des employés retraités de la Singer

M. Paquin: M. le Président, afin de soutenir les retraités de l'ex-usine Singer de Saint-Jean-sur-Richelieu dans le cadre de leur cause auprès du gouvernement fédéral, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec demande instamment au gouvernement fédéral de régler rapidement, pour des raisons humanitaires, le dossier du fonds de pension des employés retraités de la Singer, compte tenu que l'âge moyen des personnes concernées est de 82 ans, et qu'elle en appelle à la compassion du ministre canadien des Ressources humaines.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, strictement pour attirer l'attention de la Chambre sur le fait que cette semaine le député de Rivière-du-Loup a déposé une motion en cette Chambre et que le leader du gouvernement avait invoqué futilement, à mon avis, les dispositions du règlement qui traitent des causes qui sont pendantes devant les tribunaux. Au libellé même de la motion présentée par le député de Saint-Jean, il y a dans cette affaire des causes qui sont devant les tribunaux.

Tout comme cette semaine, M. le Président, il faut être prudent dans ces choses-là, mais il ne faut pas bâillonner les parlementaires qui tentent de s'exprimer sans porter préjudice à ces causes qui sont devant les tribunaux, de s'exprimer en faveur de leurs concitoyens qui vivent des situations humanitaires qui sont inacceptables. Simplement pour attirer l'attention du leader du gouvernement, lorsque ça se reproduira, on aimerait la même ouverture d'esprit en faveur des citoyens.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je m'attendais à cette demande, mais je dois faire une grande distinction avec la décision que nous avons prise cette semaine de refuser une telle motion au moment où on discutait de la mise en place d'une commission parlementaire qui aurait pour effet d'aller discuter, avec les dangers que ça comportait, une décision qui a été rendue et qui est encore actuellement sub judice.

(15 h 50)

À ce moment-ci, la demande qui est faite est faite au gouvernement fédéral, ne comporte aucune discussion quant au contenu du sujet qui est devant les tribunaux, mais demande au gouvernement fédéral de porter une action au moment où il pourrait décider, à ce moment-ci, de laisser tomber sa demande devant les tribunaux. Et c'est l'appel que l'Assemblée nationale fera au gouvernement fédéral. Donc, c'est vraiment différent de la position que nous avons tenue cette semaine.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement? Alors, il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix: Sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Sans débat. Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de la culture poursuivra les consultations particulières sur le rapport du Comité sur le développement d'une très grande bibliothèque intitulé Une grande bibliothèque pour le Québec aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des finances publiques procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 164, Loi modifiant la Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires, le mardi 18 novembre 1997, de 9 heures à 11 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Président: Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, le jeudi 13 novembre, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de l'Environnement et de la Faune pour les mois de janvier 1996 à mars 1997.

Aux avis touchant les travaux des commissions. En ce qui me concerne, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira, le mardi 18 novembre prochain, de 9 heures à midi, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère des Relations avec les citoyens pour les mois de janvier 1995 à mars 1997. C'est un autre avis.

Je vous rappelle que l'interpellation de demain, vendredi le 14 novembre 1997, portera sur le sujet suivant: La situation de l'aide financière aux étudiants au Québec. M. le député de Verdun s'adressera alors à Mme la ministre de l'Éducation.

Je vous avise de plus que l'interpellation prévue pour le vendredi 21 novembre 1997 portera sur le sujet suivant: La réforme électorale au Québec. M. le député de Rivière-du-Loup s'adressera alors à M. le ministre responsable de la Réforme électorale et parlementaire.


Affaires du jour

Alors, nous allons aborder maintenant les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui. M. le Président, nous allons aborder l'article 6 pour une adoption du principe.

Le Président: L'article 4 ou 6?

M. Jolivet: L'article 6.


Projet de loi n° 162


Adoption du principe

Le Président: Alors, à l'article 6, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor propose l'adoption de principe du projet de loi n° 162, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite. M. le président du Conseil du trésor.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, j'ai le plaisir de présenter le projet de loi n° 162, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite. Ce projet de loi apporte des modifications à la loi sur les conditions de travail des membres de l'Assemblée nationale, à la Loi sur le régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, à la Loi sur le régime de retraite des élus municipaux et à la Loi sur le régime de retraite des maires et conseillers des municipalités. Ce projet de loi apporte également des modifications à la Loi sur le régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, qu'on appelle le RREGOP, et à la Loi sur le régime de retraite de certains enseignants.

Ce projet de loi fait suite à l'adoption, le printemps dernier, de la loi n° 104 sur la diminution des coûts de la main-d'oeuvre dans le secteur public et de la loi n° 123 modifiant diverses dispositions des régimes de retraite du secteur public. Ces deux lois découlaient des ententes intervenues entre le gouvernement, les syndicats du secteur public et les associations de cadres sur la mise en place de programmes de départs volontaires.

Rappelons qu'au cours des derniers mois le gouvernement, en collaboration avec les organisations syndicales et les associations d'employés, a veillé au bon déroulement de cette opération qui a permis à 34 997 personnes, au 10 novembre 1997, dont 2 133 personnes de niveau non syndicable, de présenter une demande de retraite. Ces demandes se répartissent de la façon suivante: fonction publique, 3 965; éducation, 13 243; santé, 17 789.

Je tiens à rappeler de nouveau la contribution remarquable des employés de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, la CARRA – dont j'ai visité récemment les nouveaux bureaux – à l'atteinte des objectifs du Programme de départs volontaires. Lors de cette visite, j'ai pu constaté l'ampleur et la complexité du travail accompli par tous les employés de cet organisme et en particulier à l'occasion de ce programme. Je les en remercie.

Le nombre des départs témoigne éloquemment du succès exceptionnel de ce programme, grâce auquel le gouvernement a réduit de manière substantielle ses coûts de main-d'oeuvre tout en permettant à 35 000 personnes de prendre une retraite méritée à des conditions très avantageuses, ainsi qu'à des milliers de jeunes Québécois motivés et compétents d'obtenir un emploi dans le secteur public. Même si un tel bouleversement implique de nombreux ajustements à l'organisation du travail, je suis convaincu que l'apport de tous ces jeunes à l'évolution des services publics sera marquant et profitera à l'ensemble des citoyens du Québec.

J'aborderai maintenant, M. le Président, les trois principaux types de changements proposés par le projet de loi n° 162. Premièrement, ce projet de loi vise à modifier diverses lois en matière de retraite afin d'appliquer certaines règles fiscales qui prévoient qu'un participant doit cesser d'être visé par son régime de retraite au plus tard le 30 décembre de l'année au cours de laquelle il atteint l'âge de 69 ans au lieu de la limite actuelle de 71 ans. Cette modification découle du discours sur le budget du printemps 1996 du gouvernement fédéral qui l'avait alors annoncée. Je vous rappelle que les principaux régimes qui s'appliquent aux employés des secteurs public et parapublic, soit le RREGOP, le RRE, le RRF et le RRCE, ont déjà fait l'objet d'une telle modification le printemps dernier. Le projet de loi n° 162 vise donc à rendre conformes aux règles fiscales fédérales les régimes suivants: le Régime de retraite des agents de la paix en services correctionnels, le Régime de retraite des employés municipaux, le Régime de retraite des maires et des conseillers des municipalités et le Régime de retraite des membres de l'Assemblée nationale.

Deuxièmement, ce projet de loi prévoit la participation au RREGOP de certains employés du gouvernement fédéral intégrés dans une fonction au gouvernement du Québec. Au printemps dernier, le gouvernement du Québec convenait avec le gouvernement du Canada de la prise en charge, par le Québec, de la gestion des mesures actives d'emploi visant les personnes bénéficiaires de l'assurance-emploi. Une entente de principe est donc intervenue à cet effet le 21 avril 1997. Cette entente a été suivie d'une entente de mise en oeuvre qui doit permettre le transfert de certains employés fédéraux au ministère de l'Emploi et de la Solidarité. L'entente de mise en oeuvre prévoit le transfert des employés le 1er avril 1998, de même que l'assujettissement de ces employés au RREGOP dès leur transfert.

Troisièmement, le présent projet de loi vise à apporter certains ajustements aux mesures temporaires de retraite déjà prévues dans les lois sur le RREGOP et le RRCE. Ces ajustements découlent, pour la majorité, des recommandations du comité de suivi. Je vous rappelle que la constitution de ce comité conjoint gouvernement-syndicats était prévue par l'entente sur le Programme de départs volontaires afin d'assurer une application efficace des dispositions du programme. Ces ajustements concernent notamment l'admissibilité au programme, les retours au travail exceptionnels et le taux d'intérêt applicable aux demandes de rachat effectuées dans le cadre du programme par les employés de niveau non syndicable. Ainsi, le projet de loi n° 162 confirme que toute personne qui occupe une fonction dans un établissement d'enseignement visé à l'annexe I du RRE et qui devient admissible à une pension en juillet et en août 1997 en raison de son âge est réputée avoir atteint cet âge le 1er juillet 1997 aux fins de l'application des mesures temporaires.

(16 heures)

Pour ce qui est des retours au travail exceptionnels, je tiens à souligner que cette problématique constitue, pour le gouvernement et les organisations syndicales, une préoccupation majeure dont nous entendons bien contrôler l'évolution. L'engagement de ne pas occuper un emploi auprès d'un employeur du secteur public pour une durée minimale de deux ans, pris par les employés lors de la signature de leur entente de départ, doit être respecté. À ce sujet, j'ai écrit récemment aux membres du Conseil des ministres pour les inviter à prendre toutes les mesures nécessaires au respect de cet engagement, même lorsque les services d'une personne sont requis par le biais d'une corporation ou sur la base d'un contrat de services individuel.

De plus, les parties ont convenu d'émettre un communiqué expliquant clairement aux employeurs du secteur public l'engagement pris par les personnes qui ont bénéficié des dispositions du Programme de départs volontaires de ne pas revenir occuper un emploi dans le secteur public au cours des deux années suivant la date effective de leur retraite. Afin d'aider les employeurs du secteur public à mieux gérer l'application de cette mesure au moment de l'embauche d'une personne, la CARRA pourra les informer si la personne qu'ils souhaitent embaucher a bénéficié ou non des avantages du Programme de départs volontaires. Cette information sera transmise par la CARRA à l'employeur seulement dans le cas où la personne concernée aura autorisé la divulgation de ce renseignement.

Le projet de loi n° 162 prévoit que seuls les cas de retour au travail que le comité de suivi aura jugé nécessaires en raison de circonstances exceptionnelles relatives à l'organisation du travail et au service à la clientèle seront permis. Les personnes effectuant un tel retour ne participeront pas à un régime de retraite durant la période de retour au travail et, comme le prévoit l'article 108 de la Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic adoptée le 18 juin dernier, pour les situations de retour au travail avant le 1er septembre 1997, les dispositions actuelles sur le retour au travail seront aussi suspendues.

Enfin, M. le Président, deux dispositions du projet de loi visent spécifiquement les employés de niveau non syndicable. La première précise que les dispositions usuelles de retour au travail ne s'appliquent pas aux cadres qui ont bénéficié du Programme de départs volontaires et qui effectuent un retour au travail avant le 1er décembre 1997. Les mêmes règles s'appliquent aux syndiqués et au personnel de niveau non syndicable.

La deuxième mesure précise que le taux d'intérêt applicable à l'égard d'une demande de rachat faite par un employé de niveau non syndicable dans les délais prescrits par le Programme de départs volontaires est fixé à 8,60 % pour la période débutant le 1er août 1997. Il s'agit d'uniformiser le traitement des dossiers en utilisant le même taux que celui dont ont bénéficié les employés syndiqués pour des rachats similaires.

Ce sont là, M. le Président, les principales dispositions contenues au projet de loi n° 162 modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite. Je demande donc aux membres de notre Assemblée d'en adopter le principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le président du Conseil du trésor et ministre responsable de l'administration publique. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Le président du Conseil du trésor a bien présenté que le projet de loi n° 162 touche des dispositions d'harmonisation avec les lois fiscales en ramenant l'âge de 71 ans à 69 ans, et il n'est aucunement de l'intention de l'opposition de faire aucun blocage sur cette question.

Il y a cependant dans le projet de loi deux points qui sont recommandés par le comité de suivi, c'est-à-dire les questions qui touchent une extension de deux mois, si j'ai bien compris l'article 35, qui font en sorte que les personnes qui ont pris leur retraite en juillet et en août sont réputées avoir pris leur retraite au 1er juillet pour pouvoir quand même bénéficier du programme. Autrement dit, on extensionne de mois en mois, si je comprends bien.

Pourquoi pas jusqu'en septembre? Pourquoi pas jusqu'en novembre? Ou est-ce qu'on fera un autre projet de loi? Il y aura peut-être des explications qu'on devra avoir au moment où on fera l'étude article par article. Pourquoi deux mois et pas trois ou quatre? Parce que je connais des gens qui auraient été heureux de pouvoir bénéficier du programme mais qui malheureusement sont nés, par exemple, le 1er novembre 1947 et qui ne peuvent pas en avoir bénéficié, dudit programme. Donc, c'est une question qu'on aura à examiner lorsqu'on fera l'étude article par article de l'article 33 qui, on peut le remarquer, est un article assez considérable, et les articles suivants.

En ce qui touche le traitement des personnes qui retournent sur le marché du travail, c'est compréhensible qu'il faille avoir une certaine souplesse. Dans des cas de personnes très spécialisées qui avaient pris leur retraite et qui doivent pouvoir, dans une période de transition, retourner à l'emploi du gouvernement, quelles sont exactement les modalités qui seront appliquées par les articles 34, 35 et 36? Il y aura lieu, et c'est le rôle, M. le Président, lorsqu'on étudie les projets de loi article par article, de fouiller ces questions.

Je ne pourrai pas m'empêcher, puisque le président du Conseil du trésor a été plus général dans ses introductions lorsqu'il a parlé du Programme de départs volontaires, moi aussi, de parler du Programme de départs volontaires, M. le Président. Et je voudrais en parler et vous rappeler que le programme de mise à la retraite volontaire était prévu pour 15 000 personnes. C'étaient 15 000 personnes qu'on finançait en partie par un 800 000 000 $ qui venait du budget de l'État et un 800 000 000 $ qui venait de ce qu'on prétendait être les surplus accumulés à l'intérieur du RREGOP. Nous avons eu déjà l'occasion d'échanger sur cette question-là; nous aurons probablement encore l'occasion d'échanger sur ce point de vue là.

Mais ce n'est plus 15 000 personnes que nous avons maintenant à un coût de 800 000 000 $, M. le Président, on est rendu à 34 000 personnes. On peut bien se targuer d'avoir atteint à ce moment-là un grand succès, mais 34 000 personnes, si 15 000 personnes coûtaient 800 000 000 $ dans le surplus des caisses de retraite et 800 000 000 $ de la part du gouvernement, combien coûtent 34 000 personnes? Alors, c'est assez facile de remarquer qu'avec une simple règle de trois, puisque 800 000 000 $, ça fait 1 600 000 000 $, ça veut dire qu'il y aura 1 600 000 000 $ de plus à financer, à l'heure actuelle, dans les départs en retraite. Ce qui fait que l'ensemble du projet va avoir coûté au gouvernement 1 600 000 000 $ plus 800 000 000 $, c'est-à-dire 2 400 000 000 $ à peu près. Vous comprenez la somme importante dont on parle.

Alors, ce gouvernement, au lieu, comme le recommande actuellement l'Ordre des comptables, dont est membre le président du Conseil du trésor, d'inscrire réellement aux états financiers du gouvernement une dépense au moment où elle est faite, ce gouvernement a institué un fonds et amortit le 2 400 000 000 $, ou du moins la somme que ça leur coûtera, sur une période de, je crois, 16 ou 18 ans, c'est-à-dire sur une période infinie. Alors, si vous remarquez, M. le Président, ce qui se passe, c'est que le coût, à l'heure actuelle, est réellement porté et dépensé cette année. Les bénéfices – parce qu'il y a évidemment un certain bénéfice qu'il va y avoir parce qu'on aura moins de salaires à payer; j'imagine que les 34 000 personnes ne seront pas toutes remplacées – que ce gouvernement va faire avec le Programme des départs volontaires vont être comptabilisés cette année dans les états financiers, mais le coût, par le simple jeu des fonds qui amortissent sur une période de 16 ans, va être réparti sur 16 ans, c'est-à-dire qu'on ne verra aux états financiers de cette année qu'un seizième du coût et la totalité des bénéfices des départs en retraite. Voici ce que nous, de ce côté-ci, nous dénonçons fortement de l'utilisation et des modifications ou l'adaptation des pratiques comptables à des objectifs purement politiques.

Le Vérificateur général d'un côté, l'Ordre des comptables de l'autre côté, en troisième lieu le Contrôleur des finances du gouvernement qui dit: Je suis obligé de suivre les directives comptables que me donne mon gouvernement, mais je reconnais que ça ne correspond pas aux directives comptables généralement acceptées dans le secteur public. Mais c'est ce que je suis parce qu'on me dit de le faire de cette manière-là.

(16 h 10)

Alors, vous comprenez bien, M. le Président – je sais que vous connaissez facilement les questions des chiffres – la situation dans laquelle on est. On a un coût du système qu'on peut... Et, bien sûr, je l'ai fait purement par règle de trois. Si ça coûtait 1 600 000 000 $ pour 15 000 personnes, pour 34 000 personnes, je fais une simple règle de trois. J'imagine que le ministre pourra donner à cette Chambre, lorsqu'on aura des débats sur les états financiers, le coût réel du programme. Sauf que, avec les techniques comptables qu'ils utilisent actuellement, on ne se retrouve qu'à comptabiliser un seizième ou un dix-huitième du coût réel du programme. Alors, ça, je ne pouvais pas, puisqu'on m'a ouvert la porte actuellement sur le Programme de départs volontaires, ne pas aborder de plain-pied cette question, cette manière qu'a encore ce gouvernement de jouer avec les pratiques comptables pour essayer d'en arriver plus facilement au fameux déficit zéro.

Au lieu d'arriver au déficit zéro comme nous avions voulu le faire, M. le Président, lorsqu'on était d'accord sur la loi sur le déficit zéro, c'est-à-dire atteignons le déficit zéro sans modifier les pratiques comptables... Actuellement, on modifie les pratiques comptables sur des questions qui restent, disons, pour le moins questionnables – je vais faire attention aux mots que j'utilise – quant à la manière dont on comptabilise cette dépense dans les états financiers du gouvernement. Et on va bien évidemment beaucoup plus facilement voir apparaître dans la dette non pas 1 700 000 000 $ de plus, mais un dix-huitième ou un seizième de ce montant-là. Alors, ça, c'est évident que, vous comprenez facilement comme vous arrivez plus facilement au déficit zéro à ce moment-là, vous allez comptabiliser, au niveau du coût que vous allez avoir, seulement un seizième du coût du Programme de départs volontaires, par contre, vous allez pouvoir en tirer pleinement, dans les états financiers du gouvernement, le fait que le nombre de personnes que vous n'aurez pas remplacées, c'est-à-dire le nombre de salaires que vous n'aurez plus à payer et, excusez-moi le terme... une diminution de dépenses, ou donc, en termes d'états financiers, un revenu que vous comptez tout de suite... Ça, nous ne pouvons pas, en aucune manière, de ce côté-ci de la Chambre, l'accepter.

Alors, je me devais, M. le Président, de faire cette remarque-ci, et soyez sûr que ce débat sur la manière de comptabiliser le coût des départs volontaires dans les états financiers du gouvernement, nous le reprendrons à bien d'autres égards dans d'autres arènes et, soyez sûr, on ne lâchera pas sur ces questions-là.

Ceci étant dit, le projet de loi n° 162 touche des aménagements sur les fonds de pension qui sont purement de concordance, et je crois que, en deuxième lecture, sous réserve de l'étude article par article dans la portée véritable des articles 33, 34, 35, 36 et 37 qui portent, à ce moment-là, sur les nouvelles mesures transitoires recommandées par le comité du suivi de l'entente, nous allons voter en faveur du projet de loi n° 162. Mais je me devais, M. le Président, de bien rappeler ici à cette Chambre que le Programme de départs volontaires, sur la manière dont ils avaient utilisé les surplus actuariels du RREGOP, était quelque chose sur lequel nous n'étions pas d'accord, premièrement. Et, deuxièmement, nous sommes encore beaucoup moins d'accord sur la manière dont est comptabilisé actuellement le coût des départs volontaires. Nous aurons l'occasion d'échanger plus longtemps sur cette question. Alors, le projet de loi n° 162, nous allons voter en faveur.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais céder la parole à M. le ministre pour son droit de réplique. M. le ministre.


M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: Oui. Merci, M. le Président. Je vais remercier l'opposition de voter en faveur du projet de loi. Je pense que cela veut dire que l'opposition en reconnaît les mérites, premièrement. Je pense qu'il s'agit d'un projet de loi très correct qui donne suite à des ententes qui sont intervenues à quelques reprises, notamment au mois de décembre dernier, au mois de mars, d'autres avec les associations de cadres, notamment au cours du mois de juin.

Alors, M. le Président, j'ai bien pris note de la remarque. Mais remarquez qu'il y est allé sur le bout des pieds, sur la comptabilisation du coût du Programme de départs volontaires. J'aurai l'occasion de lui fournir une réponse en long et en large sur cette question et je lui dirai tout simplement que cela est conforme aux règles, à l'heure actuelle, d'amortissement du coût de ces départs, qui ont été utilisées à de multiples occasions, y compris par son parti lorsqu'il était au gouvernement.

Alors, nous y viendrons. Cela n'est pas du tout camouflé, en aucune façon. Cela apparaîtra très ouvertement aux états financiers du gouvernement, comme au résultat des opérations courantes du gouvernement. Il n'y a aucune cachette là-dedans et cela est fait en toute transparence. Nous y viendrons peut-être bien en étude article par article déjà. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre. Le principe du projet de loi n° 162, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.


Renvoi à la commission des finances publiques

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Appelez l'article 4 pour l'adoption du principe d'un projet de loi qui fait l'objet d'une bonne discussion.


Projet de loi n° 159


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 4, l'Assemblée reprend le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Alors, Mme la députée de Mégantic-Compton avait terminé son intervention lors de la dernière séance et M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques avait demandé l'ajournement du débat. Je suis prêt à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de l'Acadie, je vous cède la parole.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, M. le Président. Alors, si j'interviens aujourd'hui dans le cadre du projet de loi n° 159, c'est essentiellement parce que le projet de loi n° 159 revêt un aspect très important au niveau du fonctionnement du gouvernement actuel concernant certaines pratiques comptables qui sont tout à fait discutables.

Tout d'abord, M. le Président, pour situer un peu les personnes, mentionnons que le projet de loi n° 159 en soi est un petit projet de loi, quelques articles à peine, quatre articles. Et on nous dit que ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement. Il détermine les sommes qui constituent ce fonds et en établit les règles de fonctionnement.

On voit, M. le Président, à la lecture de la description du projet de loi, que ça peut paraître relativement anodin, mais il en est tout autrement. C'est la raison pour laquelle je pense que c'est important pour les députés de l'opposition de participer au débat sur l'adoption du principe de ce projet de loi.

Essentiellement, pour bien comprendre ce qui se passe, il faut situer le projet de loi n° 159 dans un contexte beaucoup plus large. Et vous me permettrez, M. le Président, de l'aborder à deux niveaux. D'abord, au niveau du contexte des finances publiques, relativement à l'objectif que le gouvernement a d'atteindre le déficit zéro d'ici à l'an 1999. Aussi, dans ce débat-là, il y a eu souvent référence à la performance du gouvernement libéral concernant le déficit. On a mis sur le dos du gouvernement libéral un déficit tout à fait démesuré par rapport à la réalité, et je voudrais expliquer un peu qu'est-ce qui s'est passé à ce niveau-là parce que ça va permettre de comprendre où on s'en va avec un projet de loi comme le projet de loi n° 159.

(16 h 20)

Essentiellement, le gouvernement du Parti québécois a blâmé le Parti libéral d'avoir fait un déficit qu'on a mentionné comme le plus haut déficit, pour 1994-1995, un déficit de 5 700 000 000 $. Depuis quelques jours, on rappelle au gouvernement que le gouvernement, au fond, a manipulé passablement les données pour en arriver à accuser le gouvernement libéral de cette réalité du déficit de 5 700 000 000 $. Je vais revenir sur certaines déclarations pour démontrer que c'était complètement faux, que le gouvernement libéral n'est pas responsable du déficit de l'année 1994-1995, qui s'est soldée effectivement par un montant très élevé, mais essentiellement dû à des manipulations du gouvernement du Parti québécois.

Le ministre des Finances de l'époque, M. Campeau, député de Crémazie, affirmait, au moment où il est arrivé aux Finances, que «les finances publiques ne sont pas en trop mauvais état». Ça, c'était en septembre 1994. On dit, dans un article, que «le grand argentier péquiste n'a pas trouvé de squelettes dans les placards du ministère». Alors, voilà, M. le Président, au moment où le gouvernement arrive au pouvoir, le ministre des Finances lui-même dit qu'il trouve les finances publiques dans un état relativement bon.

On a également à regarder la synthèse des opérations financières du mois de juin. Au mois de juin 1994, au moment où le Parti libéral était au pouvoir, on regarde la synthèse des opérations financières et on s'aperçoit que le déficit budgété pour l'année 1994-1995 est de 4 400 000 000 $. Les prévisions, qui sont révisées après le premier trimestre de l'année, on prévoit toujours un déficit de 4 400 000 000 $. Ça, ça a été un document qui a été préparé par le gouvernement du Parti libéral. À ce moment-là, les objectifs de déficit qui était prévu, de l'ordre de 4 400 000 000 $, étaient respectés et il n'y avait aucune révision qui était prévue à ce niveau-là.

On arrive à la synthèse des opérations financières du deuxième trimestre, c'est-à-dire les opérations financières se terminant en septembre 1994, publiées en décembre 1994 par le gouvernement du Parti québécois, c'est-à-dire trois mois après l'arrivée au pouvoir du gouvernement, trois mois après que le ministre des Finances eut dit que les finances du Québec ont été trouvées dans un bon état. Ce qu'on remarque à ce niveau-là, M. le Président, le discours du budget, un déficit anticipé de 4 400 000 000 $. Mais ce qu'on trouve, par hasard tout simplement! entre le dernier rapport et le rapport produit par le gouvernement du Parti québécois, c'est que le déficit anticipé est maintenant passé à 5 700 000 000 $.

Alors, le gouvernement du Parti québécois anticipe un déficit de l'ordre de 5 700 000 000 $, alors qu'à ce moment-là, à la fin du deuxième trimestre, les objectifs de compression des dépenses publiques par le gouvernement libéral avaient atteint l'objectif et étaient même supérieurs à l'objectif. On était en deça de l'objectif de près de 10 %, c'est-à-dire que les dépenses publiques avaient été diminuées de 10 % par rapport à ce qui était anticipé à ce moment, c'est-à-dire au deuxième trimestre. La seule différence qu'il y a entre les deux, M. le Président, c'est le déficit, maintenant, qui est anticipé de 5 700 000 000 $. Et ça, ça a été écrit dans un document venant du ministre des Finances du gouvernement du Parti québécois.

Alors, qu'est-ce qui s'est passé essentiellement, M. le Président, pour qu'on voie un déficit, comme ça, augmenter de façon très importante? Eh bien, je pense qu'on a une partie de la réponse de tout ça qui nous est venue essentiellement dans le livre qu'a publié un collègue de l'Assemblée nationale, le député d'Iberville, il y a quelques jours, où il mentionne, dans son livre, en parlant du budget préréférendaire, il dit: «En l'espace d'au plus deux semaines les estimés initiaux du déficit laissé par les libéraux présentés au Conseil des ministres ont grimpé de quelque chose comme 600 000 000 $ sans que la moindre information ne soit fournie pour expliquer cet écart.» Il était au Conseil des ministres, M. le Président, assis à la table du Conseil des ministres. Il a vu des manipulations de chiffres comme ça passer, et il n'y a jamais eu d'explications...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je crois que le député a utilisé un mot qui n'est pas permis par notre règlement. Il a parlé de «manipulations». Je vous demanderais de lui demander de retirer ces mots.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, effectivement, le sens ou le contexte sur les mots «manipulations des chiffres» n'est pas acceptable parce que ça laisse entendre des manoeuvres frauduleuses ou, enfin, sous la table, alors qu'on ne peut pas employer telles expressions. Je vous demanderais, s'il vous plaît, de retirer cette parole.

M. Bordeleau: M. le Président, dans ce cas-là, je vais utiliser un autre terme, je vais parler de l'«arrangement des chiffres». On a joué avec les chiffres. On les a arrangés pour que ça convienne. Et ça, c'est confirmé par le député d'Iberville qui nous dit, et je répète: «Les estimés initiaux du déficit laissé par les libéraux présentés au Conseil des ministres ont grimpé de quelque chose comme 600 000 000 $ sans que la moindre information ne soit fournie pour expliquer cet écart.»

Essentiellement, M. le Président, je pense que le député a aussi un élément de réponse intéressant, parce qu'il poursuit, à la page 125 de son livre, en se questionnant: «Est-il légitime pour le gouvernement de subordonner l'intérêt collectif à la poursuite d'un objectif politique dont il ne savait même pas encore s'il correspondait à la volonté de la majorité?»

Le gouvernement a soufflé les chiffres et s'est donné une marge de manoeuvre à la veille du référendum; on a vu de façon très concrète ce que ça a produit par la suite. I l faut se rappeler que le gouvernement du Parti libéral avait voté la loi 102 qui impliquait un gel des salaires dans la fonction publique. Il y avait même eu une diminution de 1 % à ce moment-là aussi. Le gouvernement du Parti québécois, dans ce contexte-là, où on se donne une marge de manoeuvre assez large, a annulé la loi 102 et a donné une augmentation aux fonctionnaires, la diminution qui avait été prévue a été strictement annulée, et on a fait un cadeau aux fonctionnaires, à la veille du référendum, d'environ 800 000 000 $.

Alors, ça, M. le Président, ça se traduit dans les prévisions de déficit que le gouvernement du Parti québécois a arrangées pour se donner la meilleure figure possible aux yeux de la population et se donner une marge de manoeuvre pour faire des cadeaux à la veille du référendum. Et c'est confirmé par le député d'Iberville qui se demande: Est-ce que c'était «légitime pour le gouvernement de subordonner l'intérêt collectif à la poursuite d'un objectif politique dont il ne savait même pas encore s'il correspondait à la volonté de la majorité»? Et la volonté de la majorité, M. le Président, s'est exprimée au référendum; ça a été non à la séparation. Mais, dans ce contexte-là, le gouvernement du Parti québécois a fait un cadeau de 800 000 000 $ tout simplement pour essayer d'avoir le plus grand appui possible de la population. Alors, c'est ce qui s'est passé.

Ce matin même, dans un article publié dans Le Soleil , par M. Michel David, qui est une personne, un observateur très régulier de la scène politique depuis de nombreuses années, il mentionnait dans son article: «Mais il reste qu'à l'approche du référendum le PQ n'avait aucun intérêt à mettre le gouvernement au régime pour atteindre l'objectif fixé par le budget Bourbeau, bien au contraire.» Voilà, M. le Président, ce qui s'est passé.

Alors, ce gouvernement-là, comme on le voit très bien ici, a parlé d'un déficit qu'il met sur le dos constamment du Parti libéral, alors que c'est lui qui a arrangé les chiffres pour que ça lui convienne et pour se donner une marge de manoeuvre à la veille du référendum. Et ça, c'est la population du Québec qui a payé pour cette augmentation-là du déficit, qui était une augmentation du déficit strictement pour des fins politiques, à l'égard de son option de la séparation du Québec. Alors, quand on regarde de quelle façon le gouvernement du Parti québécois a agi à ce moment-là, il ne faut pas se surprendre de ce qui se produit présentement avec le projet de loi n° 159. Essentiellement, si on a été capable d'arranger les chiffres de cette façon-là, comme je l'ai démontré, on est aussi capable d'arranger les pratiques comptables pour que ce soit à l'avantage du gouvernement.

Qu'est-ce qui se passe maintenant? Il se passe que le gouvernement du Parti québécois prétend qu'il va atteindre un objectif de déficit zéro en l'an 1999. Alors, là-dessus, sur l'atteinte d'un objectif zéro au niveau du déficit, personne n'est contre ça; nous-mêmes, on l'avait dans notre programme électoral au moment de la dernière élection. Excepté que ce qui se produit en réalité, c'est qu'ils manipulent encore une fois, ils font une grosse opération de camouflage, une opération, encore là, de double langage; ça, c'est caractéristique du gouvernement du Parti québécois: incohérence, double langage. On dit: On va atteindre l'objectif zéro, on vous demande des sacrifices, on demande à toute la population de se serrer la ceinture. On voit les effets que ça a dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'éducation, au niveau municipal.

(16 h 30)

On demande à tout le monde de faire d'énormes sacrifices pour atteindre l'objectif zéro, ce à quoi la population, disons, s'est pliée de plus ou moins bonne grâce. Mais là, ce dont on s'aperçoit, c'est qu'ils ne l'atteindront pas, l'objectif zéro. Oui, ils vont avoir l'objectif zéro dans les livres, mais ce qu'ils font actuellement, c'est qu'ils créent toute une série de fonds spéciaux et, au lieu d'assumer dans le budget, dans les états financiers consolidés, l'ensemble des dépenses du gouvernement et l'ensemble des revenus du gouvernement de façon à ce qu'on puisse voir concrètement où on s'en va, on met dans les états consolidés tous les revenus que le gouvernement reçoit, une partie des dépenses; une autre partie des dépenses, on les met dans des fonds spéciaux qui ne sont pas visibles dans les états financiers consolidés du Québec. Dans ces fonds spéciaux, évidemment, là on s'organise, au lieu de payer des dettes immédiatement, comme on le faisait quand on était là, on s'organise pour échelonner ça sur cinq ans, 10 ans, 15 ans. Essentiellement, c'est ça qui est le jeu. On dépense de la même façon, mais on met les dettes dans le compte à côté, et puis là on va présenter des états où on va arriver à zéro. Mais il faudra que la population – et la population n'est pas dupe – regarde concrètement et s'aperçoive que les dettes ont été tout simplement transférées dans le livre comptable à côté, le petit livre. Ça, on aura à le payer demain, et c'est la génération future qui aura à assumer ces dettes-là pour des années à venir.

Essentiellement, M. le Président, on voit que le gouvernement continue avec des astuces à faire miroiter aux yeux de la population le déficit zéro, alors qu'il n'améliore à peu près en rien la situation financière. On a eu le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier, un fonds qui a été créé par le ministre des Transports. Qu'est-ce que ça veut dire, concrètement, ce fonds-là? Ça veut dire que l'investissement total, en 1996-1997, était de 360 000 000 $, dont à peine une quarantaine de millions vont être réellement imputés aux dépenses de l'année 1996-1997. En 1997-1998, le montant des dépenses va être porté à 515 000 000 $, et on prévoit pour l'année suivante 574 000 000 $. On impute seulement, dans l'année financière en cours, une petite partie de ça. Donc, la dette, là, elle est reportée. On a fait du pelletage par en avant. On a reporté la dette à plus tard.

On emprunte des centaines de millions puis on n'inscrit pas ces emprunts-là, ces dettes-là aux états financiers du gouvernement. Et, durant ce temps-là, M. le Président, on augmente les frais d'immatriculation en faisant croire à la population qu'en augmentant les frais d'immatriculation ça va nous permettre d'entretenir les routes, ça va nous permettre d'équilibrer nos budgets, d'arriver à payer les dépenses complètement. Les gens paient les frais d'immatriculation, des augmentations. Et ce n'est pas vrai qu'ils ont payé à ce moment-là les frais. Les frais sont empruntés, ils sont dans un compte que les gens auront à payer plus tard.

Nous, quand on était au pouvoir, ces dépenses-là, on les payait à chaque année, puis ça rentrait dans les états financiers de la province. Là, on nous présente le projet de loi n° 159, et, dans le projet de loi n° 159, ce qu'on va faire, c'est qu'on va payer sur cinq ans l'achat d'équipement roulant. Alors, l'équipement roulant, ce n'est quand même pas minime, M. le Président. On fait référence ici à 1 445 véhicules légers, à 822 camions lourds, à 2 133 autres types d'équipement. Alors, c'est des sommes énormes. On prévoit dépenser, par exemple, en 1998-1999, à peu près 12 500 000 $ et on va amortir ça sur cinq ans. C'est donc dire que, dans l'année fiscale, on va mettre un cinquième de ça comme dépense. La balance, c'est des dettes qu'on a reportées à plus tard, que les autres auront à payer, les autres étant l'ensemble des concitoyens du Québec et nos enfants éventuellement.

Je dis «nos enfants» parce que je fais référence ici au Fonds de gestion des départs assistés. M. le Président, les retraites qui viennent d'être prises pour diminuer la masse salariale du gouvernement, savez-vous que c'est un engagement de 3 000 000 000 $ réparti sur les 16 prochaines années qu'on va devoir payer? Et ça, ça ne paraîtra pas, à part le un seizième de ça, dans l'état financier des années. On pourrait poursuivre comme ça.

Je veux juste vous rappeler également que, dans le domaine de la santé actuellement, avec les coupures qu'on fait, le gouvernement autorise les hôpitaux à emprunter pour venir à bout d'arriver. Et, à ce moment-là, au lieu de penser qu'on coupe dans les dépenses tout simplement, on pousse les institutions, parce qu'elles ne sont pas capables d'arriver, à emprunter. Actuellement, on est à près de 600 000 000 $ d'emprunts que les hôpitaux ne pourront jamais payer, c'est bien évident, et il va arriver ce qui est arrivé quand le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir en 1985. Durant les années où le Parti québécois était au pouvoir, les hôpitaux s'étaient endettés pour 285 000 000 $, et qu'est-ce qui est arrivé? Le gouvernement du Parti libéral a dit: Bon, écoutez, on va prendre la facture, on va la payer – puis on l'a payée dans les états financiers – puis, à l'avenir, vous devez vous autofinancer, arriver à un équilibre financier.

Je me souviens, parce que j'étais membre du conseil d'administration d'un hôpital à ce moment-là, qu'il fallait équilibrer les budgets. Là, avec l'attitude du gouvernement, le gouvernement coupe dans les argents qui vont aux hôpitaux et les hôpitaux sont pris à la gorge, n'ont plus le choix. On leur dit: Bien, dans ce cas-là, empruntez, et on est rendu à 600 000 000 $ d'emprunts. Puis ce n'est pas les hôpitaux qui vont le payer demain, ils en seront incapables. Donc, ça veut dire que c'est le gouvernement éventuellement qui va récupérer ça et qui va le faire payer à la population.

Donc, quand on prétend qu'on fait un équilibre financier, je pense qu'il ne faut pas que la population soit dupe de ça et se laisse leurrer. Comme on a été capable de manipuler, je m'excuse, M. le Président, de camoufler et puis de jouer avec les chiffres pour faire paraître le gouvernement du Parti libéral avec un déficit de 5 700 000 000 $, bien on est capable ici de camoufler le déficit zéro, mais tout simplement. On va arriver sur le papier, oui, avec un déficit zéro, mais il va y avoir un paquet de dettes à côté.

Puis il faut être quand même assez spécial. Hier, je regardais le vice-premier ministre qui se pétait les bretelles avec le Fonds de lutte contre la pauvreté. M. le Président, est-ce qu'il faut réaliser que ce gouvernement-là a coupé dans l'aide sociale, augmente la TVQ de 1 % en janvier 1998? Ça va affecter toutes les familles à revenus modestes. On coupe dans l'aide sociale, on augmente les taxes, on accroît la pauvreté essentiellement, et on s'en va à un sommet, on demande à un sommet de créer un fonds de solidarité et on demande aux intervenants – pas le gouvernement, les intervenants – de participer à ça, de mettre de l'argent là-dedans. On fait payer par les intervenants les coupures que le gouvernement a faites tout simplement en créant une plus grande pauvreté au Québec dans les familles à revenus modestes.

On fait la même chose avec le projet de loi n° 173, qui est la Loi instituant le fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale. Qu'est-ce qu'on fait, M. le Président? Le gouvernement a coupé essentiellement 375 000 000 $ de financement aux municipalités. Il dit aux municipalités: Ce 375 000 000 $ là, vous allez le mettre dans un fonds. C'est vous autres. Vous allez le prendre dans votre poche, le mettre dans un fonds. Et puis qu'est-ce qui se produit? Bien, les municipalités, essentiellement, sont obligées de couper dans leurs services d'une façon énorme, de couper dans les salaires, et, même là, les salaires n'arrivent pas au niveau de coupures que le gouvernement leur demande. À ce moment-là, les municipalités, pour un bon nombre, vont être obligées d'augmenter les taxes. Alors, on essaie de récupérer d'un bord, on pousse le panier dans la cour du voisin, puis on dit: Organise-toi avec ça. Le voisin, lui, les municipalités vont être obligées d'augmenter les taxes. Et c'est tous les contribuables du Québec qui vont devoir payer.

M. le Président, je ne fais pas de la fabulation, là. On l'a vu dans le milieu scolaire. Quand la ministre de l'Éducation a coupé les transferts aux commissions scolaires au cours des dernières années, qu'est-ce qui s'est produit à Montréal, au Conseil scolaire de l'île de Montréal? Qu'est-ce qui s'est produit? Première année, la taxe scolaire à Montréal a augmenté de 17 %; la deuxième année, augmentation de 23 %; la troisième année, augmentation de 45 %. Depuis que ce gouvernement-là est en place, la taxe scolaire a doublé à Montréal.

Et on vient nous dire qu'on équilibre, qu'on compresse les dépenses et qu'on arrive à équilibrer les revenus et les dépenses. Ce n'est pas vrai, M. le Président, et ce ne sera pas vrai, même quand le ministre des Finances va montrer des états consolidés avec un déficit zéro. Parce qu'il faudra qu'à ce moment-là il nous mette aussi sur la table toutes les dettes qui ont été créées à gauche puis à droite dans des fonds spéciaux, tous les transferts qui ont été faits sur le dos des citoyens du Québec au niveau des commissions scolaires et au niveau des municipalités qui vont être payés en plus par les concitoyens du Québec et non pas... Ce que les citoyens du Québec vont avoir à payer, ça ne vient pas remplacer des diminutions qui seraient faites ailleurs, ça vient tout simplement s'ajouter à ce que le citoyen paie déjà. Puis ce qu'il paie déjà, on le voit, c'est des augmentations. On l'a vu avec l'assurance-médicaments, on l'a vu avec les taxes scolaires.

M. le Président, je termine là-dessus, vous me faites signe que mon temps est terminé. Je pense que la population doit être très au courant de ça et doit surveiller le gouvernement parce que ce gouvernement-là est en train de camoufler, comme il le fait depuis le début, avec un double langage, de l'incohérence et du camouflage, les déficits qu'ils sont en train d'accumuler et qui sont loin de s'éliminer.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. J'aimerais, étant donné que je vais faire une intervention assez substantielle, s'il est possible, avoir le plus de députés possible ici, dans cette Chambre. Voulez-vous vérifier le quorum, M. le Président?

(16 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, rapidement. Nous sommes en défaut par quelques-uns. Alors, je vais donner quelques secondes pour rétablir la situation, sinon on devra sonner les cloches.

Alors, nous pouvons poursuivre nos travaux. M. le député de Viger, je vous cède la parole.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. On a devant nous le projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Dans les notes explicatives, on lit: «Ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement. Il détermine les sommes qui constituent ce fonds et il en établit les règles de fonctionnement.»

M. le Président, il faut à ce moment-ci parler un peu de toutes sortes de fonds qu'est en train de faire ce gouvernement-là. Depuis un certain temps, il semble que la politique du gouvernement du Parti québécois consiste à créer des fonds spéciaux afin de lui permettre de reporter sur plusieurs années à venir certaines dépenses qui seraient autrement comptabilisées dans les états financiers actuels du gouvernement. C'est une habitude qu'on est en train d'avoir depuis quelques années, depuis quelques mois plus particulièrement, où ce gouvernement-là, avec l'objectif du déficit zéro en l'année 1999-2000, essaie de camoufler, véritablement de camoufler ce déficit zéro parce qu'il sait très bien qu'il ne pourra pas y arriver, avec tout ce qu'il est en train de faire, en ne coupant pas plus dans les dépenses du gouvernement.

M. le Président, j'aimerais vous faire, tantôt, une énumération de tous ces fonds spéciaux que le gouvernement est en train de faire pour berner la population. Parce que ce n'est pas un déficit zéro qu'on aura en l'an 1999-2000, mais c'est plutôt un déficit qui va être caché par toutes sortes de fonds. Et pas seulement dans toutes sortes de fonds, mais des déficits que seront obligées d'avoir d'autres entités québécoises comme les municipalités, comme les hôpitaux, comme les universités et autres, M. le Président. Il y a eu à date – et je vais vous en faire une énumération assez substantielle – des fonds spéciaux qui ont été constitués par ce gouvernement. À titre d'exemple, le Fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier, mis en oeuvre par le décret 247-97 en date du 26 février 1997, le Fonds de gestion des départs assistés, le Fonds des services de police et, le tout dernier, celui dont on parle actuellement, M. le Président, le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Il est évident, comme je le disais tout à l'heure, que l'un des buts recherchés par le gouvernement vise à faciliter l'atteinte éventuelle de l'équilibre budgétaire, le déficit zéro, en soulageant le budget du gouvernement de dépenses, qui normalement auraient dû être effectuées dans l'année courante, pour les reporter sur les années à venir. C'est ça qu'il est en train de faire, M. le Président. Ce faisant, on ne coupe pas vraiment dans les dépenses, on les inscrit ailleurs, soit dans les fonds spéciaux. La seule façon de pouvoir faire des comparaisons valables d'une année à l'autre serait de consolider toutes les opérations du gouvernement, de telle façon que les états financiers reflètent la situation réelle, M. le Président. On doit noter que le Québec est la seule province canadienne à ne pas présenter des états financiers consolidés, puisque toutes les autres provinces ainsi que le gouvernement du Canada le font.

Comme je le disais tout à l'heure, il y a le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier. Les textes des budgets des années 1996-1997 et 1997-1998 réfèrent continuellement au coût des investissements sur le réseau routier et aux frais d'administration qu'on a donc capitalisés et amortis sur une période d'années à compter du 1er avril 1996.

Le mot «investissement» est employé dans un sens très large, puisqu'il comprend la conservation des chaussées, la conservation des structures, l'amélioration du réseau et le développement du réseau. La période d'amortissement varie selon le genre d'intervention, passant de cinq années d'amortissement pour la conservation des chaussées à 10 années pour l'amélioration du réseau et à 15 années pour la conservation des structures et le développement du réseau.

Pour l'année 1996-1997, on doit souligner que 85 % des kilomètres portaient sur la conservation des chaussées, alors que seulement 15 % portaient sur l'amélioration du réseau. Comment peut-on mettre des montants énormes d'argent sur un nombre d'années x quand ces améliorations, on les fait dans cette année-ci?

La façon de faire du gouvernement actuel est très claire. Il veut reporter des montants énormes, des millions et des millions, des milliards, je dirais, sur les générations futures. L'objectif d'un gouvernement est celui de ne pas reporter ces sommes énormes sur les épaules des jeunes qui vont nous remplacer tantôt. Ces jeunes-là, ils doivent avoir l'image d'un gouvernement qui vraiment fait son devoir, un gouvernement qui prend en considération, justement, la possibilité que ces jeunes puissent arriver sur le marché du travail et n'aient pas à combler ou à payer pour les fautes qui ont été commises par des gouvernements précédents.

M. le Président, comme je disais tout à l'heure, l'investissement total pour l'année 1996-1997 était de 360 000 000 $, dont à peine une quarantaine de millions fut réellement imputée au budget de dépenses de l'année 1996-1997. Pour l'année 1997-1998, le montant des dépenses fut porté à 515 000 000 $, et on prévoit 574 000 000 $ pour l'année prochaine. Quant à l'économie, entre guillemets, celle de 1996-1997 diminue à chaque année, passant de 246 000 000 $ à 180 000 000 $ l'année prochaine, à 127 000 000 $ l'année suivante, et à 77 000 000 $ pour l'année budgétaire 1999-2000.

(16 h 50)

Sur le Fonds de gestion des départs assistés, voilà une façon de faire vraiment épouvantable de ce gouvernement. Dans le Fonds de gestion des départs assistés, par ces mesures que le gouvernement a prises, le gouvernement a reporté sur une période maximum de 16 années des dépenses totalisant près de 3 200 000 000 $, effectuées pour faciliter le départ de nombreux fonctionnaires. On se rappellera que, cette année, le gouvernement s'était donné comme objectif 15 000 départs dans la fonction publique, ce qui aurait coûté 800 000 000 $ aux syndicats, aux employés, dans le fonds de retraite des employés, et 800 000 000 $ que ça aurait dû coûter au gouvernement. Mais, étant donné qu'il y a eu au-delà de 32 000 départs, le gouvernement est obligé de combler cette différence, et cette différence est de 3 000 000 000 $.

Qu'est-ce qu'il fait, le gouvernement? Il prend 205 000 000 $ par année pendant 16 ans pour payer ce montant qu'il serait obligé de mettre actuellement à l'intérieur de son budget, M. le Président. Parce qu'il ne faut pas oublier que le gouvernement, il va faire des économies cette année. Combien il va faire d'économie? On va le savoir tout à l'heure, combien d'économie. Mais il va seulement rembourser 200 000 000 $ par année. Même s'il fait une économie de 600 000 000 $, 700 000 000 $, il va en rembourser seulement 200 000 000 $. L'autre 400 000 000 $ ou 500 000 000 $, il va le mettre toujours sur le dos de la génération future. M. le Président, c'est complètement épouvantable, cette façon de faire.

Le gouvernement, dans ce Fonds des départs assistés, récupère les salaires de tous les fonctionnaires qui quittent, ce qui constitue pour lui une réduction substantielle de ses dépenses salariales. Quant aux coûts des avantages accordés pour obtenir ces départs, le gouvernement n'en paie qu'un seizième par année, puisqu'ils sont amortis sur une période de 16 ans. C'est ça que je disais, M. le Président, c'est 200 000 000 $ par année au lieu de prendre la totalité de tout ça. Les coûts de ce programme se répartissent comme suit: la première vague totalisait 180 000 000 $, donc 170 000 000 $, en 1996-1997, et 10 000 000 $, en 1997-1998. Cette somme sera amortie, celle-ci, pour quatre ans, M. le Président, pour quatre années encore.

L'autre fonds, comme je disais, le Fonds de gestion de l'équipement routier. Il est à noter que, jusqu'à maintenant, le gouvernement paie toujours comptant l'achat de l'équipement routier: automobiles, camions et autres. À partir de maintenant, il semble que ces dépenses seront capitalisées et amorties sur une période de cinq ans, ce qui réduira d'autant la dépense gouvernementale pour l'année d'achat de ces véhicules.

M. le Président, qu'est-ce qu'on dit dans ça? C'est que le gouvernement, avant, il achetait un véhicule, il achetait un camion, il achetait un autre véhicule routier, puis il les payait au moment de l'achat. À partir d'aujourd'hui, à partir de cette année, avec ce gouvernement du Parti québécois, on ne fait plus ça. On achète une automobile, puis on la finance sur cinq ans. Ça veut dire qu'au lieu de la payer tout de suite on va la payer pendant cinq années, avec tous les coûts d'intérêts qu'il faut additionner à ça.

C'est complètement épouvantable. Est-ce que c'est ça, la saine gestion? Est-ce que c'est ça, la façon dont on veut protéger notre jeunesse, dont on veut laisser un capital à notre jeunesse? En faisant comme ça, on hypothèque encore plus nos jeunes et, demain, cette jeunesse-là, c'est elle qui devra payer, M. le Président. Est-ce que c'est de la responsabilité? Moi, je dirais plutôt que c'est de l'irresponsabilité, M. le Président.

Et c'est tellement vrai aussi, cette question du déficit zéro, que c'est quasiment du camouflage. On lisait aujourd'hui, dans Le Soleil de Québec, sous la plume de Michel David... Il disait quoi? À un certain moment, dans son article, il disait: «Quand on reconstitue le fil des événements, ce qui s'est passé à l'automne...» On parle du déficit, M. le Président, on se rappellera que, nous, on disait qu'il y avait un déficit de 4 400 000 000 $, puis, tout d'un coup, il est arrivé que ce déficit-là, ce n'était plus 4 400 000 000 $, mais c'était 5 700 000 000 $; 1 300 000 000 $ de plus.

Qu'est-ce qu'il dit, M. Michel David, dans ça? Et je le cite: «Quand on reconstitue le fil des événements, ce qui s'est passé à l'automne 1994 est en effet troublant. Le ministre des Finances, Jean Campeau, a sans doute fait preuve d'une grande naïveté, le 28 septembre, quand il a déclaré n'avoir eu aucune mauvaise surprise en ouvrant les livres, mais son expertise technique lui permettait certainement de se faire une idée exacte de la situation.

«Bizarrement – c'est toujours Michel David qui parle – il était absent lors de la conférence de presse que le premier ministre Parizeau avait donnée, le 2 novembre, pour annoncer que le déficit pour l'année 1994-1995 ne serait pas de 4 400 000 000 $, comme le prévoyait le budget d'André Bourbeau, mais plutôt de 5 000 000 000 $.» Il y avait déjà une augmentation de 600 000 000 $, M. le Président.

Et Michel David dit encore: «Soupçonnant une entourloupette – c'est Michel David qui dit ça – je me souviens avoir vérifié auprès du chef de cabinet de M. Parizeau si le chiffre était bien définitif.» Et la réponse a été: «Il m'avait assuré que oui.» Les chiffres étaient définitifs.

«Or, le 8 décembre, M. Campeau réapparaissait pour dire que ce serait finalement 5 700 000 000 $. N'eut été de ses efforts, le déficit aurait même atteint 6 100 000 000 $, ajoutait-il.

«Pour appuyer ses dires, il avait rendu public un document intitulé Une autre façon de gérer s'impose , qui prétendait démontrer "l'excès d'optimisme" de l'ancien gouvernement.

«On trouvait cependant en annexe du même document la synthèse des opérations financières au 30 septembre 1994. Elle indiquait que deux semaines après le départ des libéraux, les prévisions du budget Bourbeau tenaient toujours.»

Il continue encore un petit peu loin, toujours M. David: «Le débat sur le déficit a cependant pris une tournure inusitée depuis quelque temps. Il ne s'agit plus seulement de savoir s'il a été gonflé artificiellement, mais surtout si on n'est pas en train de le dégonfler de façon tout aussi artificielle.

«C'est un peu louche, cette soudaine prolifération de fonds spéciaux qui permettent au gouvernement de reporter sur plusieurs années des dépenses qui devraient normalement être comptabilisées maintenant – et lui, il fait l'énumération: Fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier, Fonds des services de police, Fonds de gestion de l'équipement routier, etc.

«Tout le monde reconnaît que certaines immobilisations doivent être amorties sur une longue période, mais le gouvernement prend d'inquiétantes libertés avec le dictionnaire quand il inclut dans la rubrique "investissements" des dépenses aussi courantes que le pavage des routes, y compris les salaires des fonctionnaires du ministère des Transports.» Fin de la citation de Michel David, dans Le Soleil d'aujourd'hui.

Il faut comprendre, comme je le disais tout à l'heure, que ce gouvernement est en train... C'est ça qui est troublant encore plus. Et il y a le ministre de la Santé qui est ici. C'est troublant que ce gouvernement-là du Parti québécois ait réussi à trouver de l'argent pour mettre dans des fonds spéciaux, mais il n'y a pas d'argent pour les malades. Les malades, ils ne se font pas soigner actuellement. On a vu encore aujourd'hui, dans les journaux d'aujourd'hui, qu'il y a sept hôpitaux sur neuf à Montréal où les urgences sont débordées. C'est incroyable. Ces malades qui vivent des moments pénibles, qui sont en train de vivre des moments dramatiques, difficiles, dans des corridors, parce qu'il y a un manque de ressources, parce qu'il y a un manque de lits. Mais ce gouvernement trouve les moyens, il trouve l'argent pour le mettre dans des fonds spéciaux. C'est ça qui est inquiétant. C'est les priorités de ce gouvernement.

Est-ce que c'est uniquement pour atteindre son déficit zéro et faire la prochaine campagne électorale sur le déficit zéro? Il faut se poser la question. Mais les gens, la population du Québec n'est pas dupe. Elle va très bien comprendre que le déficit zéro, il ne sera jamais atteint avec la comptabilité normale que le gouvernement devrait faire, et que des gens malades subissent les conséquences justement de l'incurie de ce gouvernement et des priorités qui ont été mises de l'avant par ce gouvernement. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui. Merci, M. le Président. Alors, comme...

M. Gautrin: M. le Président, est-ce qu'il y a le quorum?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je crois que, même à l'oeil, nous avons amplement quorum, oui.

Une voix: Est-ce qu'il y a une commission qui siège?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Enfin, il y a au moins une commission, sinon plus qu'une. Il y a deux commissions.

(17 heures)

Alors, nous avions quorum. J'inviterais Mme la députée à prendre la parole.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Alors, tout comme mes collègues, j'ai l'intention d'intervenir sur le projet de loi n° 159 qui concerne la création d'un fonds de gestion de l'équipement roulant pour le ministère des Transports. Pourquoi ce projet de loi? On se souviendra qu'en mai 1997 le gouvernement a créé un centre de gestion de l'équipement roulant pour gérer le parc de véhicules appartenant au gouvernement, entre autres au ministère des Transports. Ce centre comprendra, bien sûr, la gestion de 54 ateliers mécaniques et de 280 personnes, fonctionnaires qui y travaillent.

On nous dit que ce n'est pas une société d'État. Effectivement, ce n'est pas une société d'État, c'est un centre qui doit rendre des comptes à la commission parlementaire de l'administration publique sur sa performance et sur ses réalisations, sur son plan d'action. C'est une nouvelle structure dont on a un peu de la difficulté à reconnaître les objectifs, sinon que ces objectifs semblent être davantage budgétaires, dans le sens que je pense que, quand on est à la charge d'un ministère, qu'on s'occupe déjà de la flotte automobile et qu'on s'occupe déjà de l'entretien, et ainsi de suite, que ce soit fait par le ministère ou que ce soit fait par une unité administrative qui est connexe, ça ne change pas grand-chose. Je dois avouer cependant que, peut-être au niveau de l'unité, ça peut permettre des obligations de résultat. Peut-être que ça pourrait aider ou rationaliser, entre autres, et aussi inciter les autres ministères à faire affaire avec le ministère des Transports pour l'achat des véhicules ou encore l'entretien.

C'est un objectif qui semble louable à sa face même si c'est dans le but, bien sûr, de faire des économies. Par contre, là où je m'inquiète un peu, cependant... Parce que, avec le projet de loi qui a été déposé, le projet de loi n° 159, c'est à ce moment-là que surviennent peut-être les questionnements sur le fonds que l'on veut créer, parce que aussi, lorsqu'on lit le discours qu'a fait le ministre lors du dépôt du projet de loi, on se rend compte que ça peut aller plus loin. On ne connaît pas tout à fait encore les intentions, mais ça peut aller beaucoup plus loin, parce que ce que j'ai cru comprendre, c'est qu'on profiterait de ce centre pour aussi obliger les autres ministères à faire affaire avec le ministère des Transports, avec ce centre d'unité.

Mais, aussi, ça irait beaucoup plus loin que ça. Ce serait au niveau de l'entretien de tous les véhicules ou encore de l'équipement gouvernemental qui serait, bien sûr, à ce moment-là réparé par les équipes du ministère des Transports. Je ne doute pas de leur compétence. Je pense à tous les mécaniciens, ou quoi que ce soit. Mais cependant, ce qui m'inquiète davantage, c'est que j'ai cru déceler que ça pourrait s'appliquer aux autres ministères. Et on sait très bien que, quant aux autres ministères, par exemple, au niveau des régions, concernant cet équipement ou ces véhicules, l'entretien est donné à contrat à des garagistes ou encore à des commerçants, et là, à ce moment-là, peut-être que ça aurait pour but d'enlever du travail ou d'enlever cet entretien au niveau des régions, au niveau des concessionnaires, au niveau des garagistes qui font cet entretien.

La même chose, par exemple, au niveau de l'essence. Je ne suis pas certaine, mais on semblait dire que, même en région, le ministère des Transports pourrait donner l'essence à l'ensemble de tous les véhicules, pour les autres ministères concernés, ou encore pour l'entretien de l'équipement. Là encore, je me pose de sérieuses questions. Je me dis: Écoutez, en région, on a besoin aussi de faire vivre nos garagistes, nos marchands, nos commerçants, et c'est aussi important d'avoir cette concurrence saine. Donc, si tel était le cas, bien sûr qu'on serait tout à fait en désaccord avec cette possibilité d'enlever à nos garagistes la possibilité de vendre l'essence ou encore de faire la réparation.

Mais ce n'est pas tellement à ce niveau-là, M. le Président, que je voudrais intervenir mais davantage sur l'objectif qui est visé par le projet de loi n° 159, c'est-à-dire d'instituer un fonds de gestion de l'équipement roulant. Là je me dis: Bon, qu'on crée une unité, c'est une chose; qu'on crée un fonds... Pourquoi on crée un fonds, puisque déjà, au ministère, on pourrait très bien acheter des véhicules, les échanger, en autant qu'on a le budget pour le faire? Je comprends qu'on s'inquiète peut-être que, s'il y a vente des véhicules, ça doit retourner au fonds consolidé, mais, d'un autre côté, ça ne devrait pas nous inquiéter si on a le budget nécessaire pour le faire.

Donc, il faut, je pense, se questionner davantage sur ce qui sous-tend la création de ce fonds. Si ce n'était que ce fonds, M. le Président, peut-être qu'on aurait laissé passer, mais là ce sont des fonds un après l'autre qu'on nous annonce. Même le ministre des Affaires municipales, hier, nous annonçait la création d'un autre fonds. Et là on a commencé à se poser des questions: Pourquoi le gouvernement tend-il à créer autant de fonds, c'est quoi l'objectif et qu'est-ce qu'on essaie de camoufler, finalement?

Parce que, vous savez, on se pose toujours des questions; on ne peut pas nécessairement faire confiance à ce gouvernement et on est tout légitimé de poser des questions. Et là on s'est arrêté puis on s'est dit: Bon, si on fait l'évaluation ou le nombre de fonds spéciaux qui ont été créés, qu'est-ce qui arrive avec ces fonds? On se rend compte que l'objectif qu'on vise, c'est bien sûr d'aider à la diminution du déficit, mais c'est-à-dire pas le déficit réel, mais le déficit zéro que veut atteindre le gouvernement par tous les moyens possibles.

Alors donc, la création de ces fonds spéciaux, c'est un moyen pour arriver au déficit zéro, dans le sens qu'il est facile de dire: On crée un fonds spécial, on investit des sommes. Par contre, ces sommes-là, par la suite, elles sont redistribuées, mais il faut les financer à long terme. Ça veut dire que tout gouvernement qui arrivera par la suite devra rembourser pour ces fonds qui ont été créés, pour les sommes qui ont été dépensées, mais en même temps c'est que ça ne comprend pas uniquement de l'immobilisation, ça comprend d'autres frais que de l'immobilisation. Si c'était seulement de l'immobilisation, c'est-à-dire l'achat de véhicules, comme, par exemple, on achète un édifice gouvernemental, à ce moment-là on pourrait dire: C'est normal que l'on puisse financer sur cinq, 10, 15, 20 ans, comme on va financer, par exemple, une maison, un édifice à appartements.

Mais là ce n'est pas le cas. C'est qu'on est en train de financer même les salaires des fonctionnaires. Le ministre a essayé de se faire rassurant lorsqu'on lui a posé une question, avant-hier, sur la possibilité d'inscrire les salaires dans ce fonds spécial, et le ministre nous a répondu que c'était uniquement l'achat de véhicules et d'équipements qui sera financé par le nouveau Fonds de gestion de l'équipement roulant que veut créer le ministère des Transports.

Cependant, hier, lorsqu'on a requestionné à nouveau le ministre, il était beaucoup moins convaincant, puisque là il commençait à parler de: Oui, ça pouvait comprendre des salaires. D'ailleurs, le ministre des Finances aussi l'a très bien indiqué, que ça comprenait des salaires. Alors donc, ce qui veut dire qu'on finance à long terme les salaires des gens qui travailleront à l'entretien de l'équipement des véhicules appartenant au gouvernement.

Alors, c'est la raison pour laquelle, M. le Président, l'opposition s'est donné le mot pour qu'on intervienne sur ce projet de loi pour, comment pourrais-je dire, arrêter ou stopper cette hémorragie de fonds spéciaux qui ont pour objectif de camoufler tout à fait le déficit, c'est-à-dire le diminuer beaucoup plus rapidement, alors qu'on reporte à plus tard et qu'il n'apparaît plus dans les livres. Même le Vérificateur général en a fait mention, de cette comptabilité qui est un système de comptabilité parallèle, puisqu'on aura des dettes dans des fonds spéciaux, qui n'apparaissent pas dans le budget du gouvernement mais qu'on devra payer plus tard.

(17 h 10)

Alors, M. le Président, je pense que c'est la raison pour laquelle on intervient, parce que, comme je le mentionnais, ce n'est pas le premier fonds, pensons entre autres au Fonds de gestion des départs assistés. C'est un fonds quand même qui est assez considérable. On se souviendra pourquoi on a payé des départs assistés. Je me souviens, lors de la dernière campagne électorale, le Parti québécois s'était engagé à scraper la loi 102. Pour le bénéfice des gens qui nous écoutent, la loi 102 que le gouvernement libéral de l'époque avait adoptée, c'était dans le but de geler les salaires des fonctionnaires. Alors donc, on s'était engagé à scraper cette loi, à tout simplement l'annuler une fois qu'on serait au pouvoir, c'est ce qui a été fait. Et non seulement on l'a scrapée, mais, la veille du référendum, on se souviendra qu'on a aussi accordé des augmentations de salaire aux fonctionnaires.

Alors donc, on est obligé par la suite, compte tenu des gestes qu'on avait posés antérieurement, d'accorder des primes de départ. Alors, on a créé, encore une fois, un fonds, le Fonds de gestion des départs assistés – quand même, c'est des dépenses qui totalisent 3 000 000 000 $ – pour faciliter le départ de nombreux fonctionnaires, et qui seront financés sur une période de 16 ans. Mais, en plus de ça, si encore, M. le Président, ces départs avaient été planifiés, avaient été faits en toute connaissance de cause, mais non, ils ont été faits en toute improvisation.

Et là je voudrais parler, entre autres, au niveau de la santé. C'est incroyable, M. le Président, ce qu'on vit actuellement au niveau des départs, que ce soit au niveau des infirmières, entre autres, des gens dont on aurait eu besoin. Il aurait absolument fallu qu'ils demeurent, qu'ils puissent conserver leur poste, mais, comme on n'a pas accordé aux institutions locales la gestion des départs, le gouvernement a voulu conserver la main haute sur ces départs en offrant non pas aux secteurs d'activité qui étaient les moins en demande ou dont on avait moins besoin, on a permis à tous ceux et celles qui voulaient obtenir leur prime de départ de quitter, sans aucune planification, sans permettre aux régions de planifier ces départs, avec l'expérience qui est arrivée, que vous avez, par exemple, des infirmières très qualifiées qui ont quitté – parce que, aussi, naturellement, elles en avaient vraiment marre de ce qui se passait à l'intérieur de nos hôpitaux – qui aujourd'hui doivent être réembauchées pour pouvoir donner la formation aux infirmières qui prennent la relève. Alors, on a vu quantité de départs comme ça, non planifiés, parce que, comme je le mentionnais, on n'a pas cédé aux milieux la possibilité, c'est-à-dire le pouvoir de gérer les départs, mais qu'on l'a fait tous azimuts, avec les conséquences que l'on connaît aujourd'hui.

La même chose, entre autres, avec les médecins. Souvenons-nous des nombreux départs de médecins, c'est près de 300 000 $ qu'on a donnés à chacun des médecins – bien, peut-être pas tout à fait 300 000 $, mais jusqu'à 300 000 $ – pour qu'ils puissent se retirer. Mais, encore là, ça ne signifie pas nécessairement que c'est dans des secteurs d'activité, par exemple, qu'on aurait souhaités. Il y a des pénuries d'anesthésistes, entre autres, des pénuries dans certains secteurs de la médecine. Malgré tout, ces personnes ont quitté et aujourd'hui on se retrouve avec un manque.

On se retrouve aussi avec des urgentologues qui en ont par-dessus la tête de devoir pratiquer comme ils le font, dans des salles d'urgence qui débordent et qui n'ont pas nécessairement le personnel qualifié, souvent, pour les accompagner, puisque le personnel qui était là en place a quitté. Et on n'a pas pris le temps, bien sûr, de les former. Mais, M. le Président – ça, on pourra y revenir – c'est sûr que la question des urgentologues, le ministre a dit qu'il avait une proposition. On espère bien qu'il pourra aller chercher, au niveau du Conseil du trésor et du ministère des Finances, le 10 000 000 $ que ça prendrait pour régler la situation, afin que les urgentologues puissent être payés décemment pour pouvoir poursuivre leur pratique à l'intérieur des salles d'urgence, faute de quoi les salles d'urgence actuellement se vident et ce sont encore les patients qui doivent souffrir pour les gestes qu'a posés le gouvernement.

Alors, M. le Président, je reviens à ce fonds de gestion, c'en était un, mais il y en a bien d'autres fonds qui ont été créés par le gouvernement, toujours dans le but de camoufler, c'est-à-dire de faire en sorte que le déficit baisse beaucoup plus rapidement. Vous savez, M. le Président, il y a deux façons de diminuer un déficit. Premièrement, c'est qu'il y a une façon de diminuer ses dépenses. Mais, quand on regarde les dépenses gouvernementales actuellement, on ne peut pas se rendre compte qu'il y a eu une grande diminution des dépenses. C'est à peu près 0,6 % qui ont été coupés au cours de la dernière année. C'est très peu par rapport à ce qu'on aurait pu faire. Surtout qu'on l'a fait, par contre, dans des secteurs qui étaient les plus importants, la santé et l'éducation, entre autres, et puis pour les plus démunis.

Puis l'autre façon, c'est de créer la richesse. L'autre façon, c'est de créer la richesse, c'est-à-dire que c'est de créer de l'emploi et puis c'est de s'assurer, bien sûr, que la consommation aussi est à la hausse. Et, au niveau de l'emploi, bien, ce n'est pas nécessairement un succès, M. le Président. Quand on regarde, par exemple, depuis l'arrivée du premier ministre au pouvoir, c'est à peu près, voyez-vous, 6 % seulement des emplois au Canada que le Québec a réussi à créer, malgré qu'on représente 25 % de la population canadienne. Alors, c'est très peu. De janvier 1996, entre autres, à octobre 1997, c'est 25 000 emplois, par rapport à 183 000 en Ontario. Alors donc, on a de la difficulté à créer la richesse. Et, quand on ne peut pas créer la richesse, il faut couper davantage.

Mais il y a aussi une autre façon de réduire le déficit. Quand on ne peut pas jouer sur les dépenses et qu'on est incapable d'aller chercher des revenus, il y a une autre façon, c'est de créer des fonds spéciaux. Alors, c'est de créer des fonds spéciaux pour que les dépenses semblent ou demeurent stables ou semblent être gelées parce qu'on transfère dans un fonds spécial des sommes qui autrement apparaissent dans le budget, comme, par exemple, ce fonds spécial, ici, qui normalement devrait apparaître dans les dépenses du ministère des Transports. Alors, on transfère tout, l'achat, l'entretien des véhicules automobiles, dans un fonds spécial qu'on finance à long terme, donc qui n'apparaît plus dans les dépenses gouvernementales comme telles. Par contre, ce fonds spécial, ça a une influence sur les revenus, et finalement c'est qu'on réduit le déficit beaucoup plus rapidement et qu'on fait croire à la population qu'on va atteindre le déficit zéro, mais, par contre, en le camouflant dans des fonds spéciaux, et c'est là que le bât blesse.

Pour revenir à la question du déficit, M. le Président, on a quand même passablement de questions qui ont été posées au gouvernement récemment parce qu'on se rend bien compte qu'il y a – comment pourrais-je dire, donc – cette comptabilité, comme on l'appelait, parallèle qui s'en vient de plus en plus. Vous savez, à chaque fois que l'opposition pose des questions au ministre des Finances ou au gouvernement sur le déficit ou encore sur un point de vue économique, on nous reproche toujours que c'est de la faute de l'opposition à l'époque. Je dois vous dire que les plus gros déficits ont été faits lorsque l'ancien premier ministre, Jacques Parizeau, était au pouvoir, entre 1977 et 1985. C'est là qu'on aura connu les plus gros déficits.

Et, en plus de ça, je dois vous dire que, actuellement, quand on voit comment le gouvernement s'y est pris pour grossir le déficit au moment où on a quitté comme gouvernement... Le Parti libéral a quitté le gouvernement pour faire partie de l'opposition. On sait comment ce déficit a été grossi. C'est facile pour un gouvernement de reporter plein de dépenses, par exemple, de figurer dans la colonne des dépenses, de mettre des dépenses qui n'ont pas été faites ou de ne pas gérer les dépenses avant l'année financière, puis c'est facile aussi de reporter sur l'autre année. Alors, c'est exactement... Mes collègues en ont fait mention cette semaine, avec, entre autres, un article qui a été écrit dans le livre de l'ancien député d'Iberville. On a vu comment le gouvernement s'y prenait.

(17 h 20)

Alors, M. le Président, on ne peut pas être pour la création de fonds spéciaux qui ont pour objet de camoufler le déficit du gouvernement dans le but, bien sûr, d'en arriver au déficit zéro. On dit: Si on veut arriver au déficit zéro, créons la richesse, et soyons transparents, et disons à la population exactement les gestes qu'on a l'intention de poser.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Le prochain intervenant sera le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Pour le bénéfice de mes amis ministériels, je vais expliquer une fois de plus pourquoi l'utilisation des fonds spéciaux et des fonds dédiés est quelque chose qui est profondément malsain. Je suis totalement cohérent. Il n'y a pas eu un projet de loi qui a proposé un fonds dédié ou un fonds spécial sans que je ne me lève pour dire: C'est quelque chose qui est malsain en soi, que ça soit les premiers fonds qu'on a eus, sur l'industrie des courses de chevaux, jusqu'à ce qu'on trouve aujourd'hui, les fonds spéciaux pour le ministère du Transport et l'équipement roulant.

M. le Président, vous comprenez bien qu'il est important de réduire actuellement le déficit d'opération. Pour réduire ce déficit d'opération, il ne faut pas le faire par des pratiques comptables douteuses mais bien en ayant des états financiers clairs et compréhensibles. Alors, il existe au Canada des conventions qui sont des conventions comptables unanimement reconnues qui sont mises de l'avant par l'Institut canadien des comptables agréés. Et, pour l'Institut canadien des comptables agréés, il est important que les dépenses soient comptabilisées au moment où elles sont faites.

M. le Président, parce que je vois l'intérêt que vous portez à la question, je vais me permettre de vous lire quelques remarques des recommandations de l'Institut canadien des comptables agréés. D'abord, on va définir ce qu'est le mot «dépenses», ensuite on va voir comment on doit les comptabiliser. Je n'ai aucun doute de la bonne foi des ministériels qui, lorsqu'ils auront compris à quel point on s'en va dans une situation non claire avec les fonds spéciaux, reviendront sur leur position, particulièrement la députée de Marie-Victorin, sur cette question. Les dépenses sont le coût des biens et services acquis au cours de l'exercice, qu'ils aient ou non été payés ou facturés, et comprennent les paiements de transfert dus qui n'appellent aucune contrepartie directe.

Alors, ça, ça fait la recommandation qui avait été faite par l'Institut canadien des comptables agréés en 1996: On doit rendre compte des dépenses dans l'exercice au cours duquel les biens et services sont acquis et les dettes contractées ou au cours duquel les paiements de transfert deviennent dus. Je répète: On doit rendre compte des dépenses dans l'exercice au cours duquel les biens et services sont acquis.

Alors, M. le Président, la création d'un fonds, des fonds... Aujourd'hui, on a le Fonds de gestion du matériel roulant. Dans l'intervention précédente que j'ai faite sur le projet de loi n° 162, on a vu apparaître le Fonds pour la gestion des départs assistés. Ces fonds ont essentiellement pour objet de répartir sur une longue période de temps le coût des dépenses qui sont faites pour l'acquisition d'un bien ou d'un service. Dans le cas présent, c'est la réfection des routes, dans le cas des fonds de départs assistés, il s'agit d'un service pour augmenter ou améliorer les fonds de pension.

M. le Président, il faut bien comprendre ici qu'on ne peut pas collectivement – et c'est une décision collective – changer et modifier les conventions comptables pour en arriver plus rapidement à un déficit, et soi-disant au déficit zéro. Ça ne peut pas se faire et ce n'est pas dans l'intérêt de personne à l'heure actuelle de changer ces conventions comptables. Il est beaucoup plus sain de dire: On a quand même réussi à réduire considérablement le déficit de fonctionnement en maintenant les mêmes conventions comptables, que de dire: On a atteint un déficit soi-disant nul, mais on l'a obtenu parce qu'on a changé en cours de route les pratiques comptables. Et c'est ce qu'on est en train de faire avec des fonds.

Jusqu'à maintenant, on comptabilisait non pas dans un fonds spécial, mais dans les dépenses générales de l'État les investissements routiers. À partir de maintenant, on va les comptabiliser à partir d'un fonds qui va être un fonds spécial, qui aura sa comptabilité à part, qui aura, bien sûr, au départ, une énorme dette, mais dont on n'inscrira aux livres, petit à petit, qu'une fraction, année après année, de cette dette. Et vous comprenez que vous changez considérablement les conventions comptables.

Comprendre où on en est en termes de déficit, être en mesure réellement de mesurer l'effort qui est fait, ce doit être fait de bonne foi et non pas en changeant la manière de comptabiliser. Je ne nie pas qu'il y a un effort important qui est fait par ce gouvernement pour réduire son déficit. Je ne comprends pas pourquoi, pour essayer de présenter encore mieux ce qu'il fait, il est besoin de changer les conventions comptables et il est besoin de créer des fonds spéciaux pour abrier un certain nombre de dépenses qui n'apparaîtront aux états financiers qu'amorties sur une longue période de temps.

Dans l'intervention que j'ai faite sur le projet de loi n° 162, qui touchait le Fonds de gestion des départs assistés, on était dans des dépenses beaucoup plus importantes que celles qui touchent actuellement le Fonds de gestion de l'équipement roulant. On se trouvait à ce moment-là dans... Parce que, comme l'a rappelé le président du Conseil du trésor, les départs volontaires ont dépassé de loin ce qui a été prévu. Il a fallu financer les améliorations aux plans de retraite qui étaient à l'intérieur du RREGOP, du RRE et du RRF. C'est un coût de l'ordre de 2 700 000 000 $ à 3 000 000 000 $.

Normalement, cette dépense aurait dû apparaître aux états financiers dans l'année où elle a été faite, et actuellement, parce qu'on crée à ce moment-là un fonds spécial, un fonds de départs assistés, seulement un dix-huitième de ces dépenses-là apparaîtront aux états financiers, alors que, dans les états financiers, les bénéfices inhérents aux départs ou au fait qu'on paiera moins de salaires aux gens qui ne sont plus des fonctionnaires vont apparaître.

(17 h 30)

Je plaide, M. le Président, aujourd'hui et j'en appelle aux ministériels pour la réalité des chiffres. Ne cachons pas ce qui se fait. L'effort qui est fait pour réduire le déficit est un effort que tous, collectivement, on fait. N'essayons pas de le présenter ou de présenter que c'est mieux ou que c'est moins lourd que ce qui est fait. Ça n'a absolument aucun sens, en termes de gestion de la comptabilité publique, de procéder de cette façon. Parce que ce que vous faites, M. le Président, et vous allez comprendre implicitement, vous cachez une partie de la dette, que vous ne présentez pas, parce qu'elle devient une dette non présente dans les états financiers.

Alors, M. le Président, c'est clair, je pourrais vous lire, si vous voulez, l'ensemble des recommandations sur la manière de présenter les dépenses, mais il est important de rendre compte des dépenses brutes pour montrer l'ampleur globale des acquisitions des biens et services et des injections de fonds dans l'économie. Cette information est nécessaire pour faciliter la compréhension et l'évaluation de l'incidence financière des dépenses du gouvernement, pour permettre un meilleur contrôle par le législateur.

Comprenez bien, M. le Président, que, si on ne donne pas une information comptable exacte ou si on change les conventions comptables, si en particulier, même, on change – parce que c'est ce qu'on est en train de faire – les périodes d'amortissement des fonds suivant les fonds avec lesquels on est en train de fonctionner, dans cette manière de comptabiliser à peu près tout, on est à peu près, à moins de suivre les choses de très près, incapable de comprendre.

On fait la même chose – je vais parler pour la députée de Marie-Victorin – dans le cas, à l'heure actuelle, du Régime de rentes du Québec. Les modifications qui sont proposées au Régime de rentes du Québec le sont sur la base des chiffres de 1994 et non pas sur la base des chiffres qui devrait être celle de 1997 ou 1998, et ça, parce que ça permet d'avoir des ajustements qui sont plus faibles que ce qu'on aurait besoin de faire.

M. le Président, l'effort collectif qui est fait pour assainir les finances publiques doit être mesuré avec des conventions comptables non modifiées, avec des conventions comptables acceptées de tous. La création des fonds spéciaux, c'est une manière de retirer du fonds consolidé du gouvernement et des états financiers du gouvernement une partie des dépenses du gouvernement qui, à ce moment-là, est amortie différemment des autres dépenses gouvernementales. Comprenez ça. Vous voyez à quel point, à ce moment-là, en changeant, en modifiant, en créant ces fonds spéciaux... Et ce n'est pas le premier qu'on a créé. On va créer probablement le fonds sur les départs volontaires, soyez sûr que je vais être le premier à me battre sur ces questions-là, sur ce genre de chose là.

Il n'y a pas eu un fonds, M. le Président, sur lequel je n'ai pas essayé de parler contre ou de m'opposer, quel qu'il soit, même les plus petits, comme le fonds sur – je me rappelle celui sur l'industrie hippique – la soutenance de l'industrie des courses. Parce que, en soi, vous comprenez que, dès que vous soustrayez à la comptabilité publique une partie de l'activité de l'État, dès que vous soustrayez soit une partie des dépenses, soit, ce qui est encore plus pernicieux, des fonds dédiés, lorsque vous dites qu'une partie des revenus de l'État ne sera pas comptabilisée dans l'ensemble du fonds consolidé mais va être consolidée dans un fonds spécial, vous êtes en train de présenter des états financiers qui ne correspondent pas à la réalité des chiffres.

Nous allons voter contre le projet de loi n° 159 non pas parce qu'on est opposés à la réfection des routes – mon Dieu, c'est bien sûr que n'importe qui qui se promène doit savoir qu'il est important de faire la réfection des routes! – parce que la manière de comptabiliser aux états financiers du gouvernement les dépenses inhérentes à cette réfection est en train de fausser complètement les équilibres financiers, parce qu'on les impute à un fonds spécial, parce qu'on amortit sur une longue période de temps cette dépense, comme on l'a fait sur le fonds des départs assistés, comme on l'a fait dans un certain nombre d'autres fonds, parce qu'aller de cette manière-là ne donne pas une vision aux parlementaires, une vision réelle de la situation financière de l'État, parce que cette manière de gérer fausse en quelque sorte la perception ou le contrôle que les parlementaires peuvent avoir sur les dépenses de l'État.

Vous comprenez sans difficulté, M. le Président, que, si vous avez mis une partie de la dette dans des fonds, si vous prenez une partie de la dette publique, que vous l'envoyez dans d'autres secteurs, vous faussez en quelque sorte l'analyse qu'on peut faire de la situation financière. Vous savez que, depuis longtemps, on a demandé et on demande, ou un certain nombre de parlementaires autour de cette Chambre – d'ailleurs, qu'ils soient ministériels ou de l'opposition – demandent qu'on en arrive aussi à des états financiers consolidés. Nous sommes une des rares provinces au Canada qui ne présente pas ses états financiers comme étant des états financiers consolidés, c'est-à-dire qu'on n'inclut pas dans nos états financiers une partie des dépenses qui sont transférées au secteur parapublic ou péripublic, ce qui donne aux personnes qui doivent regarder ou lire la situation financière du gouvernement, notre situation collective – parce que c'est une situation qui nous touche tous – une mauvaise perception de la situation où nous sommes.

Alors, M. le Président, on ne peut pas aujourd'hui accepter de créer, d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. On ne peut pas fonctionner de cette manière-là, pas plus que l'on ne peut fonctionner en ayant un fonds pour les départs volontaires. Il faut, comme le recommande l'Institut canadien des comptables agréés, pour qu'on ait une vision correcte des déficits et des revenus, comptabiliser les dépenses dans l'année, dans l'exercice financier où elles sont faites. On ne peut pas faire de la cavalcade comptable, financière pour être en mesure d'abrier ou de cacher le déficit. C'est malsain sur le plan comptable, c'est malsain sur le plan de la gestion, c'est malsain pour l'ensemble de nos concitoyens. Et chaque fois qu'on ira, actuellement, en voulant cacher des dépenses de l'État dans différents fonds et les amortir sur une longue période, je me lèverai pour parler contre. Merci, M. le Président.

(17 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, c'est à mon tour. Je fais suite évidemment à une série de collègues qui se sont vus dans l'obligation de dénoncer et d'essayer, de tenter de ramener à la raison le gouvernement qui crée, cette année, par le projet de loi n° 159... Et je vous rappelle que c'est la Loi qui modifie la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Donc, le gouvernement crée un autre fonds de gestion – ça semble être la nouvelle marque de commerce de ce gouvernement – pour tenter de cacher le déficit.

M. le Président, je suis contente de l'occasion qui m'est offerte, j'ai une vingtaine de minutes pour vous exposer, tenter de convaincre les membres du gouvernement et les députés du côté ministériel qu'on ne peut plus continuer de gérer de cette façon-là. On se rappellera que le Vérificateur général, dans son rapport à l'Assemblée nationale pour l'année 1996-1997 – donc, ce n'est pas un rapport de l'opposition ni du Parti libéral du Québec, c'est bien celui du Vérificateur général – dans son chapitre 2 qui traite des Comptes publics, élément de reddition de comptes du gouvernement – et c'est une étude qui est conduite auprès du ministère des Finances – nous souligne que «l'information financière fournie par le gouvernement doit être fiable, pertinente et complète. Elle doit respecter certaines normes pour être comparable avec celle des autres gouvernements et assurer la transparence des opérations effectuées». Je cite toujours: «Le Vérificateur général s'appuie sur les recommandations du Conseil sur la comptabilité et la vérification dans le secteur public de l'Institut canadien des comptables agréés lorsqu'il propose le mode de présentation de l'information financière du gouvernement. Nous constatons – dit le Vérificateur général – que le gouvernement n'applique pas intégralement ces recommandations. Sa reddition de comptes est donc insatisfaisante.»

Pourquoi je vous souligne les propos du Vérificateur général? C'est simple, c'est que les citoyens qui cherchent à comprendre comment fonctionnent les différents ministères et comment le gouvernement gère les finances publiques devraient s'attendre à avoir, évidemment, une comptabilité qui soit claire, transparente et qui détienne des informations qui sont justes et pertinentes.

On dit plus loin que les états financiers publiés par le gouvernement ne sont pas des états financiers consolidés. On sait qu'on est la seule province au Canada, que le gouvernement du Québec est le seul gouvernement au Canada à ne pas présenter des états financiers consolidés. Alors, «les états financiers publiés [...] par le gouvernement ne sont pas des états financiers consolidés[...] puisqu'ils n'incluent pas l'ensemble de ses activités et de ses ressources. Ils portent sur les activités du fonds consolidé du revenu et du Fonds des services de santé. Ils ne comprennent donc pas les données financières de plusieurs entités et fonds.

«Compte tenu de l'ampleur des sommes en cause – ce n'est pas en 1990, ça, là, ni en 1992, ni en 1993, on parle de 1996-1997 – les parlementaires et les autres utilisateurs des états financiers du gouvernement sont privés d'une information adéquate et globale quant à une partie importante des activités financières dont le gouvernement est responsable». Bien, moi, M. le Président, quand je lis ça, ça me fait peur. Quand je lis ça, je comprends qu'on manque de transparence et j'essaie par la suite d'aller voir pourquoi le gouvernement, par la création de ce nouveau fonds qui s'ajoute à une quinzaine de fonds depuis un an ou deux, a choisi cette façon de faire plutôt que de faire en sorte que l'on puisse retrouver dans l'ensemble du fonds de la province toutes les données pour qu'on puisse faire toutes les comparaisons des mêmes choses, des mêmes éléments avec les gouvernements des autres provinces.

Bien, la raison est bien simple: on a décidé – et le Parti libéral du Québec, dans l'opposition, était d'accord avec ça, qu'il fallait mettre un frein et cesser de dépenser sans compter et qu'il fallait atteindre le déficit zéro en quatre ans. Ça s'est fait ici, en cette Chambre, et j'aimerais vous rappeler, M. le Président, que ça s'est fait aussi parce qu'on l'a demandé. On avait, nous, dans notre programme électoral, l'atteinte du déficit zéro en cinq ans, pas deux ans après avoir fait un référendum puis pas après avoir passé une année à tenter d'acheter tout le monde, on l'aurait fait au moment où on aurait repris le pouvoir. Le sort en a décidé autrement, et les citoyens en ont décidé autrement. On était d'accord avec l'atteinte de l'objectif zéro, mais pas n'importe comment, pas en tentant de camoufler le déficit à toutes sortes de places, pas en tentant de faire croire aux citoyens que, dans quatre ans, donc dans deux ans parce que c'est déjà commencé, on aurait sur papier un beau déficit zéro.

Le premier ministre, député de Jonquière, les ministres et les députés vont pouvoir se promener, c'est vrai, en disant: On a atteint le déficit zéro. Mais notre devoir à nous, c'est de dénoncer ce qui se passe, de dire aux citoyens puis aux citoyennes du Québec: Vous vous faites leurrer parce que le déficit zéro, il sera sur papier, mais allez voir après où vous allez le retrouver, le déficit zéro. Vous allez le trouver partout. Vous allez le trouver justement dans la prolifération de fonds, ces fameux fonds que le gouvernement a décidé d'instituer pour tenter de sortir, évidemment, de ses livres comptables cette portion de dépenses... en fait qu'il faut faire, c'est certain. Qu'on parle ici de l'entretien du réseau routier ou qu'on parle de l'équipement roulant, c'est clair que le gouvernement a la responsabilité d'entretenir son réseau, d'entretenir son équipement.

Mais pourquoi le gouvernement a-t-il choisi, dans le cas qui nous concerne, de créer ce fonds pour l'équipement roulant? Pourquoi le gouvernement a-t-il choisi de nous faire payer sur cinq ans de l'équipement qu'on a toujours acheté comptant? J'avais l'occasion, M. le Président, hier soir de parler avec un ex-député de cette Chambre, M. Alcide Courcy, avec qui on discutait de pratiques parlementaires. Évidemment, M. Courcy a été longtemps député en cette Chambre et il nous rappelait à juste titre que l'équipement, dans son temps, l'équipement, dans notre temps, il s'achetait comptant.

On nous dit, le ministre des Transports nous sert depuis quelques jours la salade suivante: Mais oui, mais l'entreprise privée le fait, pourquoi, nous, on ne peut pas le faire? Bien, l'entreprise privée ne gère pas de la même façon que nous, premièrement; deuxièmement, elle prend des risques; troisièmement, le gouvernement ne paie pas de taxe, alors que l'entreprise privée le fait. Et il faut peut-être se rappeler que l'entreprise privée a aussi un amortissement fiscal sur ses immobilisations, ce qui n'est pas tout à fait le cas avec le gouvernement.

Mais ce qui est pernicieux dans cette décision de créer ces fonds, et plus spécifiquement celui-ci, c'est qu'on a instauré une pratique, au gouvernement du Québec, qui est de changer les méthodes comptables. Et on les a changées pourquoi? Je vais vous le dire, moi. On les a changées pour l'option. On ne les a pas changées puis on n'a pas créé de nouveaux fonds spéciaux parce que c'était la façon et la méthode la plus dynamique et innovatrice et créatrice de gérer les fonds publics. Non, M. le Président. On a créé les fonds spéciaux, c'est la façon qu'on a trouvée, au gouvernement du Québec, de créer des fonds spéciaux, pour tenter de leurrer la population et lui faire croire que, oui, on s'en va vers un déficit zéro. Mais allez donc voir ce qui se passe dans les hôpitaux, allons donc voir ce qui se passe dans les commissions scolaires, allons donc voir la façon dont le gouvernement a décidé de régler ses problèmes de finances publiques sur le dos des autres, allez donc demander aux maires dans les municipalités s'ils sont bien contents de recevoir la facture qu'ils ont reçue.

Quand les députés du côté ministériel se promènent dans les comtés... J'arrive de Gaspésie. J'ai passé trois jours en Gaspésie. J'ai rencontré les maires et les mairesses du comté de Gaspé et du comté de Bonaventure. Je les ai tous rencontrés, à peu d'exceptions près. Ils ne sont pas très heureux ni heureuses de la facture. Mais on a des députés qui se promènent puis qui disent: Ils sont capables de faire ça. Vous êtes capables de recevoir la facture, pas de problème. Nous autres, il faut qu'on règle notre déficit, là, puis il faut qu'on règle notre problème de finances publiques, mais on va le régler sur votre dos.

Alors, comment le gouvernement réussira à arriver, sur papier, à son déficit zéro? C'est en tentant de faire croire aux citoyens qui paient des impôts pour des services que, oui, il fallait faire un effort, que, oui, on leur demande de faire des efforts, que le gouvernement a fait lui-même ses propres efforts – puis je vais vous en parler dans quelques secondes, de cet effort-là – et que, par contre, il ne faut pas qu'il s'en fasse, ce pauvre citoyen, parce qu'il va avoir une augmentation de taxes. Si ce n'est pas une augmentation de taxes, ça va être une baisse de services, mais, de toute façon, il va payer à quelque part.

(17 h 50)

Puis parlons-en donc, de la réduction des dépenses du gouvernement pour arriver à ce déficit zéro. Le gouvernement du Québec n'a réduit ses propres dépenses que de 0,6 %, je parle ici des dépenses des ministères. Si les gens ne nous croient pas ou si les députés croient que c'est exagéré comme affirmation, je les ramène au cahier des crédits du printemps dernier, au mois de mai 1996, lorsque le président du Conseil du trésor a déposé le cahier des crédits supplémentaires. On a retrouvé, à la dernière ligne, que les dépenses du gouvernement n'avaient été réduites que de 0,6 %. Et on demande à tout le monde de se serrer la ceinture, on demande aux maires dans les municipalités de réduire leurs dépenses de presque 6 %. Est-ce qu'il y a une équité là-dedans? Non.

M. le Président, de parler de fonds spéciaux, de parler de manque de transparence, je sais que ça ne fait pas l'affaire du gouvernement de nous entendre dire ça, puis ça ne fait certainement pas leur affaire d'entendre questionner par quelqu'un d'autre que le Parti libéral du Québec cette prolifération de fonds spéciaux. Et j'aimerais ici vous ramener à Michel David, qui n'est certainement pas un membre du Parti libéral du Québec, à M. David qui commence à trouver «un peu louche – et je vous le cite – cette soudaine prolifération de fonds spéciaux qui permettent au gouvernement de reporter sur plusieurs années des dépenses qui devraient normalement être comptabilisées maintenant: Fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier, Fonds des services de police, Fonds de gestion de l'équipement routier», et j'en passe. Je le cite toujours: «Tout le monde reconnaît que certaines immobilisations doivent être amorties sur une longue période, mais le gouvernement prend d'inquiétantes libertés avec le dictionnaire quand il inclut dans la rubrique "investissements" des dépenses aussi courantes que le pavage des routes, y compris les salaires des fonctionnaires du ministère des Transports.» Mon collègue, le député de Laporte, le chef de l'opposition, le porte-parole en matière de transports, mon collègue de Pontiac, et combien d'autres ont questionné cette semaine le ministre sur le bien-fondé de ce fonds spécial.

Le gouvernement a tenté de nous leurrer, a tenté de nous faire croire que c'était une pratique comptable parfaitement conforme, parfaitement correcte, puisque dans l'entreprise privée, je l'ai mentionné tantôt, ça se faisait. Mais ce n'est pas comme ça que ça marche au gouvernement. Ça n'a jamais ou rarement fonctionné comme ça. Et tout à coup, depuis deux ans, prolifération de fonds spéciaux. L'atteinte du déficit zéro, cet objectif auquel tout le monde aspire, c'est certain, bien, je pense qu'on n'a pas tous les mêmes raisons pour atteindre cet objectif zéro. Lorsqu'on a donné notre accord, on l'a donné parce qu'on y croyait profondément, parce que, pour nous, atteindre l'objectif déficit zéro signifie qu'on met la table et qu'on peut créer de la richesse, donc créer de l'emploi.

Ça signifie créer un climat où les gens vont pouvoir reprendre espoir pendant qu'on cherche à atteindre ce déficit zéro là. Pour le gouvernement du Québec, un seul objectif, il est clair: l'option, pour que le gouvernement du Parti québécois puisse arriver en 1999 et dire: Regardez, mes bons citoyens, vous allez pouvoir voter à nouveau pour nous, on a atteint le déficit zéro. La grande cachette, la grande surprise, ça va être, la cachette, là où le gouvernement a caché ses dépenses, là où les gens ne peuvent pas voir où sont cachées les dépenses du gouvernement. Et ça, c'est inacceptable.

On ne peut pas continuer, comme citoyens, à laisser ce gouvernement-là nous leurrer, leurrer les citoyens en leur faisant miroiter, et je dis bien «miroiter», qu'on va atteindre l'objectif zéro, qu'il n'y aura pas eu de conséquences et qu'il n'y aura pas de dépenses cachées ailleurs.

On sait que les commissions scolaires empruntent, maintenant. On sait que le gouvernement a donné l'autorisation aux hôpitaux d'emprunter. Pouvez-vous m'expliquer, M. le Président, comment on va payer cette dette-là? Des dépenses qui étaient normalement absorbées par le gouvernement le sont maintenant par des entités paragouvernementales, et ces dépenses-là, ces gens-là sont obligés de s'endetter pour pouvoir les défrayer. Qui va payer pour ces dépenses-là? Qui va payer pour cette dette-là? Il n'existe pas une autre province de Québec avec d'autres contribuables qui vont être capables de payer. C'est vous et moi, mesdames et messieurs, chers citoyens qui nous écoutez, qui allons avoir à payer pour ce manque de transparence, cette façon de faire du gouvernement du Québec qui fait en sorte qu'on crée de nouveaux fonds et qui fait en sorte, je le répète, de cacher le déficit.

C'est pour cette raison-là, M. le Président, que le Parti libéral ne peut pas être complice de telles pratiques comptables. C'est pour ça que je tiens aujourd'hui, comme l'ont fait mes collègues, à démasquer cette astuce, à démasquer cette manoeuvre qui va faire en sorte que les Québécois se retrouveront peut-être avec un déficit zéro sur papier, mais ils auront une méchante surprise lorsque le gouvernement du Parti québécois se retrouvera de ce côté-ci de la Chambre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Je croyais que vous vouliez prendre la parole, M. le whip de l'opposition.

M. Farrah: C'est à mon tour d'intervenir?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Si vous voulez débuter, il nous reste deux minutes.

M. Farrah: Bien, on peut attendre à mardi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Écoutez, étant donné l'heure, nous allons ajourner à mardi prochain, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 58)