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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 11 novembre 1997 - Vol. 35 N° 131

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Affaires du jour

Alors, nous allons entreprendre nos travaux aux affaires du jour, et j'inviterais M. le leader du gouvernement à appeler la matière à l'ordre du jour.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. D'abord, je vais appeler l'article 28.


Projet de loi n° 146


Présentation, adoption du principe et adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 28 du feuilleton, M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce, au nom du vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances, propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi n° 146, Loi n° 5 sur les crédits 1997-1998, qu'elle en adopte le principe et qu'elle adopte le projet de loi proprement dit.


Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Le projet de loi n° 146, Loi n° 5 sur les crédits 1997-1998, est donc adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je vais vous demander quelques instants, si vous me le permettez, puisque l'article que je vais appeler, le ministre responsable de ce projet est sur le point d'arriver. Alors, est-ce que vous me permettez de suspendre quelques instants, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, dans les circonstances, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 10 h 4)

(Reprise à 10 h 6)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! Alors, nous allons poursuivre nos travaux, et j'inviterais M. le leader adjoint du gouvernement à nous indiquer la matière au menu.

M. Brassard: Oui, M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 4.


Projet de loi n° 159


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 4, M. le ministre des Transports propose l'adoption du principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. J'inviterais M. le ministre des Transports à prendre la parole. M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président, merci. Alors, M. le Président, j'ai le plaisir de soumettre à cette Assemblée le projet de loi n° 159 modifiant la Loi sur le ministère des Transports et créant le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Le ministère des Transports possède 1 445 véhicules légers, 822 camions lourds et quelque 2 000 autres équipements. Le ministère possède également 54 ateliers mécaniques et 60 sites d'approvisionnement en carburant, répartis sur l'ensemble du territoire québécois et assurant le bon fonctionnement des équipements. C'est sans aucun doute le plus important parc de véhicules du gouvernement. Comme vous le savez, ces équipements servent particulièrement à l'entretien des routes et des ponts, au déneigement des routes, à la pose de signalisation, d'éclairage, au marquage des routes, à la surveillance des travaux, etc. Aussi, pour le ministère des Transports, il s'avère particulièrement important d'avoir des équipements disponibles en bon état lors des opérations d'entretien hivernal et aussi lors de situations d'urgence. Ce parc représente 40 % du parc gouvernemental, et les coûts inhérents à l'acquisition et au fonctionnement sont de l'ordre de 50 000 000 $.

Il faut constater, M. le Président, que 50 % de ce parc a dépassé sa vie économique utile et qu'il en coûterait 71 000 000 $ pour remplacer ces équipements désuets. Or, le budget de capitalisation pour la présente année financière, 1997-1998, du ministère des Transports est de l'ordre de 5 500 000 $. Alors, faute de budget de capitalisation, nous sommes contraints de faire réparer des équipements désuets et de recourir de plus en plus à la location, ce qui s'avère à longue échéance beaucoup plus coûteux, vous en conviendrez, que l'acquisition. L'an dernier, la facture d'entretien et de réparation s'est élevée à 22 000 000 $ pour une flotte d'équipements dont la valeur résiduelle est estimée à un peu plus de 30 000 000 $, 22 000 000 $ de réparation et d'entretien pour une valeur du parc d'équipements d'un peu plus de 30 000 000 $.

Devant ce constat, le ministère des Transports décidait l'an dernier, en juillet 1996, de mettre en place une unité autonome de services visant l'intégration de tous les processus requis pour la gestion performante de son parc d'équipements, et ce, afin d'en améliorer la productivité et de rationaliser des dépenses qui sont liées à cette activité. Cette unité autonome de services – vous savez qu'il y en a quand même plusieurs maintenant qui ont été créées au sein de l'appareil gouvernemental – qu'on appelle le Centre de gestion des équipements roulants, a été reconnu officiellement par le Conseil du trésor en mai dernier, en mai 1997. Et évidemment, ce centre ne gère pas seulement le parc de véhicules mais aussi les 54 ateliers mécaniques et les 280 personnes qui constituent les effectifs de ces ateliers.

Je vous rappelle, M. le Président, que les unités autonomes de services représentent une nouvelle philosophie de gestion axée sur l'atteinte de résultats et l'amélioration de la productivité. Les unités autonomes de services sont imputables devant l'Assemblée nationale. À cet effet, le Centre de gestion des équipements roulants devra rendre des comptes à la commission parlementaire de l'administration publique sur la réalisation de son plan d'action et sur ses performances financières. Donc, il ne s'agit pas de sociétés d'État qui sont créées par une loi, ces unités autonomes de services sont créées par décision du Conseil du trésor et continuent de constituer au sein d'un ministère des unités.

Afin d'optimiser les ressources, le Centre de gestion des équipements roulants applique un concept de gestion intégrée des équipements, concept qui est utilisé par plusieurs entreprises performantes qui ont des parcs de véhicules imposants. Pensons à Bell Canada, au CN, Vidéotron, Hydro-Québec. Au Nouveau-Brunswick, le ministère des Transports du Nouveau-Brunswick fonctionne de cette façon-là, applique ce concept également de gestion intégrée des équipements, et aussi le gouvernement fédéral américain.

(10 h 10)

Le ministère des Transports estime que la création du Centre de gestion des équipements roulants peut entraîner à moyen terme une économie annuelle de l'ordre de 20 % de l'ensemble des coûts inhérents à la gestion de l'équipement roulant, ce qui veut dire un montant de l'ordre de 10 000 000 $, puisque, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, l'ensemble des dépenses se situe à 50 000 000 $.

Alors, déjà, la mise en place du Centre de gestion nous permet de rationaliser dans ce secteur d'activité les dépenses relatives à l'administration et à l'encadrement de 70 %, le rendant comparable au secteur privé gérant un parc d'équipements d'envergure.

Vous rappelez aussi, M. le Président, que le Centre de gestion des équipements roulants a pour objectif d'accroître la productivité, de réduire les coûts administratifs, de fournir des services de location d'équipement à des prix compétitifs à ceux du marché tout en assurant l'autofinancement de ses activités. Or, nous avons constaté que les environnements législatif, réglementaire et administratif limitent, entravent la capacité d'innovation du Centre de gestion des équipements roulants et diminuent considérablement ses possibilités d'optimiser ses ressources.

Le problème se situe au plan des pratiques comptables gouvernementales qui ne sont pas adaptées à la réalité du Centre de gestion des équipements roulants, d'un centre de gestion qui a à gérer un imposant parc de véhicules. Selon les conventions comptables du fonds consolidé du revenu, le coût d'acquisition des équipements est inscrit en totalité à la dépense même si le bien acquis procure des avantages futurs. Il faut payer comptant les équipements faisant partie du parc de véhicules.

Ce cadre budgétaire et comptable fait en sorte que le ministère des Transports conserve les véhicules au-delà de leur vie économique parce qu'il n'y a pas suffisamment de ressources pour acquérir le nombre de véhicules requis. Le résultat, c'est qu'il doit conserver des véhicules au-delà de leur vie économique utile, ce qui forcément a des effets d'accroissement sur les coûts d'entretien, de réparation et de location, comme je le signalais tout à l'heure. C'était de l'ordre de 22 000 000 $ l'an dernier. Je le répète, c'est beaucoup d'argent pour entretenir un parc de véhicules dont une bonne partie est devenue, on peut dire, obsolète, complètement désuète et devrait être remplacée.

Un autre problème qui découle des pratiques actuelles est que le gestionnaire d'équipement a peu d'intérêt, ou pas du tout d'intérêt, à vendre le véhicule au moment où sa valeur de revente est optimale parce qu'il ne peut pas bénéficier des montants de la revente. L'intérêt n'existe pas. Or, récupérer le produit de la vente d'un véhicule au moment où il atteint une vie économique optimale est essentiel à une gestion cohérente des cycles de vie d'un véhicule. Dans la situation actuelle – je vais vous donner un exemple – c'est comme si vous vendiez votre voiture, M. le Président, au moment où vous en obtenez le meilleur prix de revente, mais que vous ne pouviez encaisser ce montant. C'est ce qui se passe présentement.

Par ailleurs, si nous voulons tirer le maximum des ressources gouvernementales et favoriser l'autofinancement du Centre de gestion des équipements roulants, nous devons lui donner les moyens d'offrir ces services de gestion intégrée à d'autres ministères et organismes publics. Plusieurs se sont en effet montrés intéressés à bénéficier de ce mode de gestion, et je vous rappelle que les dépenses de gestion d'équipements du gouvernement, à l'exclusion du ministère des Transports, sont de 40 000 000 $. Alors, 50 000 000 $ pour le ministère des Transports et 40 000 000 $ pour les autres ministères, ce qui fait un total de 90 000 000 $ de dépenses pour gérer les équipements de l'appareil gouvernemental, du gouvernement. Il y a d'autres ministères, évidemment, qui ont des parcs de véhicules moins importants que celui du ministère des Transports, mais quand même pas négligeables. Je pense, entre autres, au ministère de l'Environnement et de la Faune, au ministère des Ressources naturelles également. Il y a plusieurs ministères qui ont des parcs de véhicules qui sont assez importants.

Cependant, les procédés administratifs actuels obligent le ministère des Transports à assumer, à même ses budgets, le coût des services qu'il rend pour ensuite l'imputer aux ministères et organismes bénéficiaires. Alors, dans le cas du Centre de gestion des équipements roulants, cela veut dire acheter des pièces d'équipements et des services externes à un gros volume pour lequel on ne possède pas une marge budgétaire suffisante. En plus, les mécanismes comptables et techniques permettant de facturer les clients sont lourds et inapplicables dans le cas des services offerts par le Centre de gestion des équipements roulants.

Alors, vous voyez, en gros, si on résume, les méthodes comptables qui s'appliquent au sein des ministères ne sont vraiment pas du tout appropriées pour un Centre de gestion des équipements roulants qui veut à la fois gérer un parc de véhicules important et également aussi offrir ses services à d'autres ministères, puisque, par le biais des 54 ateliers de mécanique répartis à travers le territoire – les 280 personnes qui y travaillent sont, pour un bon nombre, des mécaniciens d'expérience – c'est évident qu'on peut offrir à d'autres ministères ces services-là tout en respectant les règles du marché.

Alors, la solution que nous proposons pour résoudre ces différents problèmes, différents obstacles à une meilleure gestion du parc de véhicules et des équipements, la solution que nous proposons, c'est la création d'un fonds spécial, le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Il sera affecté au financement des investissements et des dépenses de gestion des équipements roulants du ministère des Transports et des ministères et organismes qui voudront transiger avec le Centre de gestion des équipements roulants. Le fonds permettra d'amortir les investissements, de récupérer le produit de disposition des équipements au moment de la revente et de facturer les services rendus aux ministères et organismes publics.

Or, M. le Président, le fonds dont il est question aujourd'hui s'avère un instrument indispensable au fonctionnement du Centre de gestion des équipements roulants. Ce fonds permettra notamment d'amortir les investissements relatifs aux équipements sur leur durée de vie économique, ce qui se traduira par un rajeunissement significatif de l'ensemble des équipements et qui aura pour conséquences, on s'en doute bien, de réduire les coûts de réparation et d'améliorer aussi la fiabilité de ces équipements. Tout ça découle évidemment de la mise en place du fonds, et on estime que les dépenses qui sont liées au fonctionnement et à la réparation des véhicules diminueront d'ici trois ans de 3 000 000 $, soit 1 000 000 $ par année.

(10 h 20)

De plus, la création du Fonds de gestion de l'équipement roulant permettra de récupérer les montants de vente des véhicules désuets ou excédentaires. Compte tenu que le Centre de gestion verra à disposer des équipements au moment le plus opportun, c'est-à-dire quand ils bénéficient de la meilleure valeur de revente et avant qu'ils n'engendrent des coûts d'entretien et de réparation excessifs, les montants de vente augmenteront donc de façon significative. Alors, le centre, au fond, il va pouvoir fonctionner comme on le fait, nous, avec notre véhicule automobile. Ces montants de disposition seront affectés au financement de nouveaux équipements. À titre d'exemple, on estime actuellement que, si le ministère disposait de tous ces équipements qui ont dépassé leur vie utile, le revenu de disposition se chiffrerait à environ 3 500 000 $, alors que, dans une gestion intégrée, la vente de ces équipements au moment opportun devrait rapporter 15 000 000 $. Un bon écart, une bonne différence.

La possibilité de facturation des services rendus et l'encaissement des revenus à l'intérieur de ce fonds spécial contribuera, d'une part, à l'autofinancement du fonds et, d'autre part, à la rationalisation des besoins du ministère des Transports par la mise en place d'une facturation réelle. Ainsi, la mise en place de ce fonds spécial augmentera les échanges de services entre ministères et organismes publics et contribuera aux objectifs d'optimisation des ressources gouvernementales. Je rappelle aux membres de l'Assemblée nationale que ce projet de loi s'inscrit parfaitement bien dans la démarche d'assainissement des finances publiques poursuivie par le gouvernement du Québec.

Qu'en est-il finalement des aspects financiers du projet de loi que je dépose aujourd'hui? Les sommes versées au Fonds de gestion de l'équipement roulant proviendront de la vente des véhicules et des équipements désuets ou en surplus, excédentaires. Le fonds sera aussi alimenté par la facturation des services. En contrepartie, toutes les dépenses nécessaires à la réalisation des activités du Centre de gestion seront imputées au Fonds de gestion de l'équipement roulant. Les surplus accumulés par le fonds seront versés au fonds consolidé du revenu aux dates et dans la mesure que déterminera le gouvernement. C'est une disposition qu'on retrouve dans tous les projets de loi qui créent des fonds spécifiques.

Le ministère des Transports demeurera évidemment un client important du Centre de gestion des équipements roulants. Alors, afin de payer au fonds les services reçus, il est évidemment primordial que le ministère conserve les crédits budgétaires affectés à la gestion des équipements et des ateliers mécaniques, et de la rémunération aussi des effectifs. C'est évident qu'il ne faudra pas que ce soit retranché du budget du ministère, parce que ces ressources-là vont être versées au Centre de gestion pour services rendus, en quelque sorte. On va louer les équipements au fonds et on va aussi évidemment verser les ressources requises pour gérer les ateliers et rémunérer les employés.

Quant aux économies budgétaires découlant des gains d'efficacité et de productivité et de la rationalisation de la demande, elles seront affectées de façon prioritaire au rajeunissement des équipements et à la diminution du coût de location. Nous prévoyons que durant la prochaine année budgétaire, celle de 1998-1999, les investissements en équipements roulants du fonds s'élèveront à 11 500 000 $. C'est le résultat d'une entente, c'est réglé entre le ministère des Finances et le Conseil du trésor. Donc, il y aura des investissements en équipements pour 11 500 000 $ en 1998-1999. Évidemment, ça veut dire que c'est deux fois plus que, dans les budgets de capitalisation du ministère des Transports, on prévoyait pour ce genre de dépenses. C'est 5 500 000 $ pour acheter des équipements qui étaient prévus au budget du ministère; là, par le biais du fonds, on pourra en acheter deux fois plus: 11 500 000 $.

Pour les années subséquentes, à partir de 1999, le niveau d'investissement sera déterminé en collaboration avec le ministère des Finances et le Secrétariat du Conseil du trésor, de sorte que l'objectif d'un rajeunissement graduel des équipements soit respecté.

Les équipements roulants déjà acquis par le ministère des Transports seront transférés au Centre de gestion, selon des modalités comptables à être déterminées. Le Centre de gestion deviendra propriétaire des équipements, des véhicules qu'il acquerra à même le fonds spécial. Alors, il va sans dire, M. le Président, que ce fonds spécial produira annuellement des états financiers vérifiés et publiés aux comptes publics, rendant ainsi la gestion du fonds des plus transparentes.

Alors voilà, M. le Président, l'essentiel du projet de loi n° 159 qui prévoit, comme on vient de le mentionner, la création d'un fonds spécial relevant du ministre des Transports et affecté au financement des investissements et des dépenses de gestion des équipements roulants, ce qui va, de façon certaine, améliorer nettement le fonctionnement de l'unité autonome de service qui, elle, est déjà en opération, déjà opérationnelle depuis le printemps dernier. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Transports. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Pontiac. M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Si on regarde le projet de loi n° 159 et qu'on lit les notes explicatives, ce n'est pas étonnant que le discours du ministre ait été très, très court. Ça dit: «Ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement. Il détermine les sommes qui constituent ce fonds et il en établit les règles de fonctionnement.»

M. le Président, c'est le deuxième projet de loi que le ministre des Transports nous présente pour un fonds spécial. Il ne faut pas se leurrer, M. le Président, c'est La fin justifie les moyens . Ce gouvernement s'est donné un objectif très louable, le déficit zéro. Mais selon les règles du jeu qui ont toujours été là, si on veut faire des comparaisons, M. le Président, c'est que, comme toute famille qui a des problèmes de sous, acheter à crédit, ce n'est certainement pas recommandable; certainement pas recommandable parce qu'on fait juste pousser dans le futur les paiements de ces sommes-là dont on va profiter aujourd'hui.

On ne questionne pas, M. le Président: Est-ce que de mieux gérer l'équipement est quelque chose d'essentiel et de très bon? Oui, on est tous d'accord pour améliorer. Et le ministre lui-même le disait, qu'ils ont créé une unité d'administration de services. Ils ont créé ça. Ça existe déjà. Pourquoi avoir un fonds si on a déjà mis en place les structures, les modalités pour atteindre cet objectif? Parce que, M. le Président, on lisait, il n'y a pas tellement longtemps, dans Le Soleil du 25 du troisième mois de 1996: «Des services mécaniques coûteux». Ça coûtait 88 $ l'heure pour réparer son parc de 8 700 véhicules. C'est certain que, lorsqu'on voit des coûts de cette envergure-là, il faut faire quelque chose au point de vue de l'administration. Qu'on ait procédé à faire ces choses-là, totalement d'accord. Mais, comme je le disais tantôt, c'est le deuxième fonds spécial que le ministre des Transports nous apporte. C'est petit, 12 000 000 $, comparé au Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier. On parle de 500 000 000 $ par année, 500 000 000 $ qui ne sont pas comptabilisés dans l'année comme c'était dans le passé. On va les payer sur cinq, sept, 15 ans, dépendant du genre de travaux.

M. le Président, c'est cacher la réalité. C'est cacher la réalité des choses. Les citoyens ne le savent pas que ce que nous ne payons pas cette année, nous devrons le payer l'an prochain, ou l'année après, ou sur 15 ans. Est-ce que nos finances vont être meilleures à ce moment-là? Est-ce qu'elles vont l'être, meilleures? Est-ce qu'on va avoir créé l'impression aux citoyens du Québec que nous avons atteint le déficit zéro lorsqu'on a pelleté dans le futur des dépenses que, normalement, on payait dans la même année? 500 000 000 $, un demi-milliard, c'est beaucoup dans un an, puis ça, là, c'est seulement les deux fonds qui touchent le ministère des Transports directement.

Mais le fonds de ceux qui ont prix leur retraite, des milliards qu'on va être obligé de payer encore. À quel moment est-ce que le gouvernement a réellement contrôle de ça? Est-ce qu'ils savent où ils s'en vont? Je peux vous dire, M. le Président, que, dans le cas de la création du fonds pour le réseau routier, le ministre ne le savait pas, ni le gouvernement ni le ministre des Finances, parce qu'on a présenté, au moment du budget de l'année 1996-1997, un fonds qui devait être de l'ordre de 360 000 000 $. Ça, c'était au mois de mai 1996. Savez-vous qu'on a appris que, au mois de février 1997, on a décidé – à ce moment-là, il manquait 75 000 000 $; ce n'est pas grand chose, 75 000 000 $! – on a décidé d'ajouter, en février 1997, cette année, 75 000 000 $ pour atteindre 435 000 000 $?

(10 h 30)

M. le Président, qu'on paie des dépenses capitales pour des routes, des structures, peut-être que c'est des choses qui seraient acceptables en autant qu'on ne cache pas la vérité des dépenses. Mais, lorsqu'on est rendu pour payer les salaires... Dans le cas du fonds routier, c'est 1 700 employés, M. le Président. On paie leurs salaires sur des sommes d'argent qu'on emprunte pour cinq, sept, 15 ans. Je n'en connais pas, d'entreprises, qui opèrent de cette façon-là. C'est: l'épicerie, le jour à jour, payer ça sur cinq à 15 ans. M. le Président, c'est de tenter... c'est: la fin justifie les moyens. On a décidé que c'était le déficit zéro pour l'an 2000, et tous les moyens sont justes, tous les moyens sont acceptables. Mais il y a une chose, M. le Président, la population n'est pas dupe, la population le réalise. Elle réalise que c'est seulement de la poudre aux yeux, c'est seulement de la poudre aux yeux que ce gouvernement est en train de créer, M. le Président.

M. le Président, nous sommes aujourd'hui devant cette Assemblée pour débattre du principe du projet de loi n° 159. Il me semble, moi, que la première question qu'on doit se poser quand un tel projet est déposé est: Une loi est-elle justifiée pour atteindre l'objectif visé? M. le Président, vous savez, le passé est toujours garant de l'avenir. On s'aperçoit que tous les fonds qui ont été créés à date ont comme objectif premier de cacher, de réellement cacher et de donner l'impression à la population que nous sommes en train d'atteindre le déficit zéro.

M. le Président, lorsqu'on voit les sommes qu'on devra payer dans l'avenir, c'est un peu de dire: On va se rendre à l'an 2000 en voulant faire accroire à la population que nous avons atteint l'objectif 2000 et aussi le grand projet de la séparation, puis, une fois que ce sera accompli – je doute que ça arrivera – on dira: Bien, voici les conséquences, c'est les conséquences, vous devez payer maintenant, vous devez payer pour le geste que vous avez posé. M. le Président, il me semble que la population devrait être mise au courant de toutes les conséquences des gestes qui sont posés et les atteintes du déficit zéro.

Dans tout ça, M. le Président, le ministre nous fait valoir que la création de ce fonds améliorera la gestion du parc de matériel roulant du ministère des Transports. M. le Président, j'espère que le ministre n'a pas besoin d'améliorer la performance de son ministère. Non, M. le Président, il n'a pas besoin de légiférer pour atteindre cet objectif, car il a les outils nécessaires pour ce faire. D'ailleurs, et je le mentionnais tantôt, si je ne m'abuse, le centre de gestion de l'équipement roulant est déjà en fonction en vertu d'une décision du Conseil du trésor datant de mai 1997.

Non, M. le Président, et je me répète encore, la véritable raison d'être de ce projet de loi est de nature financière, et il vise trois objectifs très précis. Un, la récupération des sommes résultant des ventes de véhicules désuets. En effet, les sommes recueillies par ces ventes sont versées au ministre des Finances et n'ont aucune incidence sur le budget du ministère. C'est dans la main droite ou la main gauche? Je pense que le ministère des Finances et le ministère des Transports, c'est le même gouvernement, c'est les mêmes citoyens qui paient. Alors, qu'ils paient à un ministère ou à un autre ministère, il n'y a aucune différence. Et, si c'est tellement important d'avoir cet équipement-là en bonne condition, bien, c'est une décision du gouvernement de dire: Pour exécuter notre mandat, pour bien faire les choses, on doit avoir de l'équipement et mieux gérer l'équipement. Donc, M. le Président, pourquoi ce fonds?

On dit que le résultat de cet état de fait est que les véhicules sont gardés plus longtemps que leur vie utile et que, à terme, ils sont cannibalisés, c'est-à-dire que l'on prélève les pièces pour la réparation d'autres véhicules. M. le Président, je suis persuadé qu'il n'est nullement nécessaire de légiférer pour que le ministère des Transports et le ministère des Finances puissent s'entendre afin que la récupération de ces sommes se fasse de façon harmonieuse. Cette situation est carrément absurde. Si j'ai bien compris le mémoire remis au Conseil des ministres, le ministre des Finances empêche le ministère des Transports de bien gérer ses équipements roulants, et c'est une des raisons pourquoi il faut légiférer. Pas très fort.

Le but encore, M. le Président, la seule chose qui est plus importante que tout ça, c'est l'atteinte du déficit zéro. Donc, tous les montants qu'on peut enlever, qui donnent l'impression qu'on a atteint le déficit zéro mais qu'on pellette dans l'avenir, ça donne l'impression qu'on gère bien. Et on n'a qu'à entendre les discours du premier ministre pour démontrer que la chose la plus importante – qu'il croit – pour convaincre les Québécois de voter pour la séparation, c'est qu'ils démontrent qu'ils sont de bons gestionnaires. Mon oeil, M. le Président! Ce n'est pas en pelletant dans l'avenir qu'on va réussir à réellement baisser le fardeau, le taux de taxation des citoyens du Québec. Ce n'est pas de cette façon-là. On va tenter de les endormir, de les faire rêver. Il y a des choses, il faut que ça soit dit. Il faut dire les choses telles qu'elles sont.

(10 h 40)

La deuxième raison d'être de ce projet de loi est pour permettre au ministère des Transports de facturer les autres ministères pour des travaux d'entretien sur leurs véhicules. Est-ce qu'il faut légiférer pour faire ça? Est-ce qu'on ne pourrait pas, M. le Président, trouver une façon de dire: Regardez, les travaux sont exécutés par le ministère des Transports pour un autre ministère. Pourquoi ne pas laisser facturer pour payer les employés, les pièces, toutes ces choses-là, le loyer? Pourquoi pas, M. le Président? Pourquoi il faut légiférer? Ah! c'est une bonne excuse pour se créer un autre fonds, un autre fonds qui va faire paraître que le gouvernement baisse le déficit, en pelletant des dépenses dans l'avenir. M. le Président, c'est ça, la nouvelle façon de gouverner? Faire accroire aux gens, les faire rêver comme, eux, ils rêvent?

Le ministre nous indiquait que le ministère des Transports possède la plus importante flotte de véhicules du gouvernement et peut compter sur un réseau de 54 ateliers mécaniques disséminés sur le territoire. Ces ateliers seraient sous-utilisés. Donc, on suggère de proposer ces services aux autres ministères moyennant rémunération. Personnellement, M. le Président, j'ai une grande inquiétude par rapport à ce concept. A-t-on bien analysé les conséquences de ce geste sur les économies des régions? Pourtant, on dit qu'on se préoccupe des régions. Est-ce que c'est de cette façon-là que le gouvernement va commencer à faire de la compétition aux ateliers, aux vendeurs d'essence en région? «C'est-u» ça, M. le Président, qui est le but du gouvernement? Pourquoi? Pour se créer un autre fonds qui va leur permettre...

Puis le ministre le disait: Cette année, on va être capable de dépenser 12 500 000 $. Dans le budget, on avait seulement 5 500 000 $. Donc, on vient de se permettre de dépenser et ça ne paraîtra pas, là. Ça ne sera pas dans les dépenses. On va payer 1 200 000 $ l'an prochain, 1999-2000. Puis, en plus, M. le Président, qu'est-ce qui arrive, c'est la première année. Si on a déjà prévu 5 500 000 $ plus 12 000 000 $, là c'est 18 000 000 $ qui viennent tout de suite de partir, l'an prochain, dans les dépenses. C'est arrivé la première année du fonds routier, M. le Président. On avait prévu 385 000 000 $. En réalité, il y a eu un 246 000 000 $ qui apparaissait dans les crédits mais qui a été mis dans le fonds, et, à ce moment-là, tout de suite, c'est 250 000 000 $ de moins de dépenses qui apparaissent pour cette année-là.

Donc, M. le Président, la seule raison, c'est encore de vouloir donner l'impression que, oui, le déficit descend. Mais on est en train d'augmenter la dette énormément. Est-ce que ceci est dans le meilleur intérêt de la population, de leur faire accroire qu'on est en train de faire comme le gouvernement canadien et les autres gouvernements des provinces, atteindre le déficit zéro pour être capable de se donner plus de marge de manoeuvre? Parce qu'on est en train de pousser ça dans l'avenir.

M. le Président, je disais ma préoccupation pour les régions. Si les autres ministères décidaient de faire faire l'entretien et les réparations de leurs véhicules par le ministère des Transports en plus d'acheter leur essence aux ateliers du ministère, l'impact sur les détaillants en essence et les ateliers mécaniques de ces régions serait important. Mais la question fondamentale est: Le ministère des Transports s'imposera-t-il dans ce marché de manière déloyale, ne fonctionnant pas selon les mêmes principes de rentabilité et de performance? Le ministère des Transports chargera-t-il les coûts réels de ces travaux? Ou, pour être compétitif, diminuera-t-il ses prix en dessous de son prix coûtant réel? On sait comment il y a de problèmes, dans les régions, pour créer des emplois. Présentement, en autant que les prix sont raisonnables et que la qualité du travail est bonne, M. le Président, ce sont aujourd'hui les entreprises privées en région qui font ça. Si on va leur enlever cette possibilité, de quelle façon est-ce qu'on va compenser pour la perte de ces revenus et de ces emplois?

M. le Président, ce gouvernement fait de grands discours en développement régional, mais il montre son vrai visage lorsqu'il propose des mesures renforçant le rôle d'un gouvernement central fort et omnipuissant. Il faut y penser, M. le Président, lorsqu'on parle de 14 000 000 de litres d'essence, et ça, ça n'inclut peut-être même pas les autres ministères. Le danger, c'est que tous les ministères... on commence à faire les travaux nous-mêmes. Et on a vécu l'expérience. On voyait que déjà, si on ne guettait pas, ça coûtait 88 piastres de l'heure. Est-ce que réellement on sert bien notre population – non – en lui faisant accroire que ça va être moins cher, qu'on va atteindre le déficit zéro, que tout va être meilleur dans le meilleur des mondes?

Oui, M. le Président, je vois que l'ancien ministre du Revenu fait signe de la tête. Oui. Puis je pense que c'est lui qui a sorti le thème En dessous de la table . Mais c'est ça, là, on est en train de faire accroire aux gens... C'est en dessous de la table, ces montants-là. On les cache en dessous de la table. On ne le fait pas au grand... C'est pas mal comme thème, M. le député, c'est pas mal. C'est exactement, vous mettez en pratique ce que vous demandez aux gens de ne pas faire. Vous faites le contraire, vous le faites.

Oui, M. le Président, oui. Mais, M. le Président, il m'a fait signe, donc j'ai... Et il me fait penser que ça ne se fait pas en dessous de la table. Ça ne se fait pas. On tente de le faire, mais les gens commencent à se réveiller: ces fonds spéciaux là, c'est de faire en dessous de la table ce qu'on ne veut pas faire au grand jour. On ne veut pas démontrer aux gens qu'en réalité on est en train de pelleter dans l'avenir puis donner l'impression qu'on va atteindre le déficit zéro.

M. le Président, la troisième et peut-être la plus fondamentale est: «La constitution de ce fonds permettra d'acheter des véhicules et d'amortir cet achat sur plusieurs années.» A priori, cette nouvelle méthode comptable peut apparaître correcte à sa face même. Mais là où, personnellement, j'ai des problèmes, c'est que cela constitue un artifice comptable qui fait croire aux électeurs qu'il peut réduire le déficit sans trop couper et sans trop augmenter les taxes.

(10 h 50)

M. le Président, ça n'a plus de bon sens. Depuis quelque temps, on assiste à une multiplication des fonds, autant décriée par le Vérificateur que par les observateurs. Bien sûr, je me réjouis que le ministère des Transports puisse renouveler sa flotte de véhicules. Je dois dire que je comprends le ministre. J'ai déjà occupé cette fonction, et chaque année mes services me démontraient l'urgence de faire quelque chose pour renouveler la flotte. Mais la réponse du Conseil du trésor et du ministère des Finances était toujours la même: Non! Ou plutôt: Autofinancez. Le choix était alors simple: on diminuait notre intervention sur le réseau ou on demandait au personnel d'entretien des véhicules de faire un effort additionnel, d'en faire plus avec moins.

Et, certainement, M. le Président, ça créait un incitatif de vouloir améliorer. Tout le monde, on ne peut pas nier le fait que, lorsque tout est facile, ce n'est pas nécessairement à ce moment-là que les gens font la meilleure gestion, la gestion la plus serrée et la plus saine possible. Le paradoxe, M. le Président, est qu'il n'y a plus d'argent mais que soudain, par une nouvelle méthode comptable, on a maintenant les moyens. Voyons donc, M. le Président, on n'a pas plus d'argent! Regardons les coupures dans l'éducation, dans la santé. Si on avait plus d'argent puis qu'on nous disait: Bien, regardez, c'est une bonne chose, on paiera ça dans l'avenir... Pourquoi faire souffrir notre population? Pourquoi? Mais, lorsque vient l'achat d'équipements...

Mais ce n'est pas réellement ça, M. le Président, c'est encore de la poudre aux yeux. Le but, c'est de cacher des dépenses qui se font dans l'année pour donner l'impression que le déficit est zéro, pour les pelleter dans les années à venir. On devra les payer, il n'y a pas de miracle. Vous le savez vous-même, M. le Président, si vous empruntez de l'argent sur une période d'années, vous devez remettre le capital plus les intérêts. Plus les intérêts. Et, si c'était la meilleure façon au monde de le faire, tout le monde ferait ça. Pourquoi, pendant des années, ce gouvernement, le gouvernement du Québec a toujours voulu payer comptant, M. le Président, payer comptant ses dépenses? Mais le pire, c'est que ces fonds-là permettent de financer à long terme le salaire des employés. Il me semble, M. le Président, que ça devient difficile d'accepter ce genre de façon de faire les choses.

M. le Président, il y a deux ans, le ministre des Transports nous avouait que le ministère n'avait plus les moyens d'effectuer l'entretien du réseau routier. Et voilà que, aujourd'hui, grâce à des artifices comptables que sont le Fonds d'amélioration et de conservation du réseau routier et le Fonds de gestion des équipements roulants, soudainement le ministère peut se permettre d'accroître ses investissements sans que cela n'affecte le déficit. Je le disais tantôt, M. le Président, c'est 500 000 000 $, M. le Président, 500 000 000 $ presque chaque année qu'on dépense dans le réseau routier.

M. le Président, j'avais posé la question au ministre. Je lui ai demandé: Au moment où vous avez décidé de créer ce fonds, avez-vous fait une étude de coûts-bénéfices? Parce que, s'il y a un ministère du gouvernement du Québec qui, avant de procéder à faire des travaux, fait des études de coûts-bénéfices... Malheureusement, le ministre n'a pas pu me répondre. Parce que, si on pouvait démontrer à la population que de construire des routes aujourd'hui et de payer pour dans cinq à 15 ans, on va en bénéficier, je pense qu'il n'y aurait aucun problème, mais ce n'est pas le cas, M. le Président. Ce n'est pas le cas. Et le pire, c'est qu'on inclut dans ça le salaire.

M. le Président, le ministre des Finances répondait à une question de mon collègue de Laporte disant: Bien, tu sais, une compagnie qui fait poser un toit, elle compte le salaire des employés qui font la réparation du toit. Mon oeil, M. le Président! Comment est-ce qu'une compagnie d'assurances qui loge dans une bâtisse, qui fait changer le toit... Peut-être que l'entreprise va payer pour le toit sur cinq ans, mais je suis convaincu que l'entrepreneur qui, lui, construit et fait les travaux du toit, il ne paie pas ses employés de cette façon-là. Il ne paie pas ses employés de cette façon-là, l'entrepreneur. Il doit payer ses employés tous... S'il fait ça, il ne sera pas là longtemps. Ce n'est pas comme un gouvernement qui peut soit pelleter dans le futur, pelleter aux municipalités, pelleter aux régies de la santé régionales, pelleter aux commissions scolaires. L'entreprise privée ne paie pas les salaires en empruntant pour cinq à 15 ans.

Mais le pire, c'est que les employés du ministère des Transports, ces gens-là travaillent déjà à la préparation de ces travaux-là. Ils travaillent à la préparation, ils ne font pas l'exécution. L'entrepreneur qui va exécuter, lui, on va le payer comptant. Mais c'est nos employés à nous qui aident à faire la préparation. Puis qu'est-ce qui arrive des projets? Puis le ministre le sait. Combien est-ce qu'il y en a de projets pour lesquels on fait les travaux mais qu'on n'exécute pas? Donc, on va payer à crédit des employés pour des travaux qui ne se feront pas, peut-être dans la période sur laquelle c'est amorti. Bonne façon de gérer, ça, M. le Président. Oui, c'est réellement une bonne, bonne façon de gérer.

M. le Président, c'est une supercherie que nous dénoncerons avec la plus grande énergie. Bien évidemment, nous souscrivons de tout coeur à l'objectif du déficit zéro et nous sommes d'accord avec un accroissement des investissements, mais nous nous élevons contre les méthodes. Ce gouvernement ne peut s'en tirer en nous faisant croire ces balivernes. Tout se paie, et cette méthode comptable est conforme en tous points avec l'idéologie péquiste. Ils tentent de nous faire croire qu'il n'y aura aucun coût de rattaché à l'indépendance. Bien, voyons donc! Voyons donc! C'est totalement irresponsable – M. le Président, les gens de l'autre côté auront la chance de répondre sur ce projet de loi – c'est un autre pelletage sur les générations futures. Ce gouvernement manque de transparence. Les dettes encourues doivent apparaître aux comptes publics et refléter la situation financière réelle du gouvernement, et ce n'est pas le cas.

(11 heures)

J'en ai donné des exemples et je suis convaincu qu'il y aura d'autres de mes collègues qui vont vous en donner des exemples. On assiste à une multiplication de ces fonds pour construire des routes, acheter des véhicules, des ordinateurs et, comme je le disais, également pour camoufler les salaires de milliers de fonctionnaires qui disparaissent des livres, car ils sont employés par cesdits fonds. Les comptes de dépenses de ces fonctionnaires, leurs frais de déplacement, les loyers, le mobilier, jusqu'aux crayons, tout ça disparaît des livres du gouvernement. Ça s'en va dans le fonds. Nouvelle façon de gouverner, M. le Président. Et tout ceci a été fait, et personne... Du moins, si on a fait des études qui nous démontrent que, oui, on va tous en bénéficier, qu'on les donne, qu'on nous fasse la preuve, M. le Président. On a eu l'occasion et on va certainement avoir l'occasion en commission parlementaire de discuter article par article. Je ne sais pas si, dans le cas de ce fonds-ci, on va être capable de nous donner des faits concrets, pas utiliser Bell Canada, puis Gaz Métropolitain, puis ces choses-là comme exemples, le gouvernement fédéral des États-Unis.

Ça, M. le Président, c'est quoi ici, c'est quoi, l'avantage de procéder de cette façon-là? Et est-ce qu'on ne doit pas vivre selon nos moyens? Et, si on est pour dépenser des sous qu'on devrait payer dans l'avenir, est-ce qu'on ne devrait pas être clair et transparent sur ça, dire aux gens c'est quoi, les conséquences? On est tous d'accord qu'il faut que nos routes soient en bonne condition, c'est bon, parce que j'ai toujours dit que c'est un placement. Mais quelque chose qui va nous mettre dans une pire situation ou dans une situation équivalente à celle dont on veut se sortir dans l'avenir, ce n'est certainement pas la chose qu'on veut, ce n'est certainement pas le discours qu'on entend de l'autre côté.

On fait miroiter qu'après l'an 2000 on ne devrait plus en avoir, des problèmes. Mon oeil! Qu'on fasse le total de toutes ces sommes-là, on va s'apercevoir qu'on est en train de pelleter dans le futur des sommes d'argent qu'on devrait payer maintenant. Si on ne les paie pas maintenant, les comptabiliser et démontrer qu'en réalité c'est seulement de la fumée que de dire qu'on est en train de baisser le déficit. Je dois admettre que cela est astucieux, mais nous savons tous, en cette Assemblée, qu'un jour ou l'autre nous devrons payer la facture, et, plus grave encore, ce seront nos enfants et nos petits-enfants qui feront les frais de ces aventures comptables.

M. le Président, notre ministre des Finances se promène partout en utilisant sa baguette magique, et pouf! un autre fonds. Est-ce l'imagination du pouvoir ou plutôt le pouvoir de l'imagination? La pensée magique n'a aucune place dans la conduite des opérations gouvernementales. Soyons sérieux. Je vois déjà le ministre des Finances dans la prochaine campagne électorale se péter les bretelles et affirmer qu'il est en bonne voie d'éliminer le déficit et qu'un Québec souverain partira sur la bonne voie. Qu'on nous la donne, la preuve. Il ne faudrait pas applaudir trop vite. Les gens qui veulent applaudir, ne vous excitez pas, ce matin. Si vous n'avez pas les chiffres, n'applaudissez pas trop vite, parce qu'on va s'assurer que la population va être mise au courant des façons dont vous procédez.

Oui, M. le Président, oui, ces gens-là, la seule chose qu'ils peuvent nous dire: Ah! Le plus gros déficit, vous l'avez fait. Je leur suggérerais de lire Claude Picher – tu sais, la feuille de route de nos ministres des Finances – et il dit: «Au Québec, c'est Jacques Parizeau qui détient le record du déficit le plus grave.» En 1980, 4,8 % du PIB. 4,8 %, M. le Président, 1,4 % de plus que ces gens-là qui accusent mon collègue de Laporte. 1,4 %, en 1980, 1,4 %. Aïe! N'oubliez pas de le dire, ça aussi. La vérité, elle a sa place. On ne vous entend jamais parler de ça. C'est comme ça qu'on peut se péter les bretelles.

M. le Président, on devrait faire les choses un peu avec beaucoup de sérieux. Examinons d'un peu plus près ses prétentions. Le président du Conseil du trésor déposait une demande de crédits additionnels devant l'Assemblée nationale. Dans ces crédits, on y lisait que la réduction des dépenses gouvernementales était de 0,6 % par rapport au dernier exercice financier. Malgré des coupures massives en santé, en éducation, malgré le transfert de portions importantes d'opérations gouvernementales, celui-ci n'a même pas réussi à restreindre son niveau de dépenses de 1 %. Il n'y a vraiment pas de quoi se péter les bretelles. M. le Président, ce n'est pas moi qui les ai déposés, c'est le président du Conseil du trésor.

On vient d'apprendre, en plus, qu'il y a 35 000 employés de l'État qui vont bénéficier d'une mise à la retraite anticipée. C'est énorme, même colossal, mais, à en croire le gouvernement, il n'y aura aucune conséquence pour le gouvernement, il en résultera des économies faramineuses pour celui-ci. Eh bien, pour moi, combien d'autres citoyens, j'en suis convaincu, et contribuables sont inquiets de cet état de fait? Je peux et nous pouvons accepter qu'à long terme on puisse bénéficier de certaines économies, mais je suis très méfiant face à un gouvernement qui a tendance à ne donner des faits qu'une facette, cachant celles moins agréables.

C'est ça, M. le Président, qu'il faut être, il faut être transparent, il faut donner l'heure juste aux citoyens. Si on juge que, comme gouvernement... Il faut avoir le courage politique de dire: On juge à propos que ça, c'est nécessaire, et on doit dépenser ça cette année – bien qu'on le fasse, M. le Président, et qu'on le justifie aux gens – on a dépensé plus que prévu parce que nous avons jugé que c'était important de le faire. Pas le cacher dans les années à venir. Faites donc selon les conventions comptables qu'on a toujours utilisées ici, au Québec.

Pourquoi, tout d'un coup, si la fin justifie les moyens , donner l'impression que réellement on est en train d'atteindre le déficit zéro quand on est en train de pelleter dans l'avenir, de pelleter... C'est les jeunes, les enfants et les petits enfants, les générations à venir qui devront payer cette note. On sait déjà que cette génération qui va venir, certainement, avec la mondialisation des marchés, avec toutes ces choses-là, aura suffisamment de défis, d'énormes défis. Si déjà on les endette encore pire, ce n'est certainement pas leur donner de chance, c'est certainement avoir une vision à court terme.

(11 h 10)

Oui, M. le Président, ce projet de loi, bien inoffensif en soi, confirme insidieusement cette nouvelle tendance vers laquelle s'est engagé ce gouvernement cachottier. Quatre petits articles qui vont permettre au gouvernement d'acheter ses camions, automobiles et autres véhicules sans qu'il ait à débourser un sou dans l'exercice courant. M. le Président, la question fondamentale reste la suivante, et c'est celle-là qui est importante: Paiera-t-on plus à cause de ce stratagème? La question est simple, mais la réponse est plus complexe. Non, M. le Président, le prix revient, à toutes fins pratiques, à la même chose pour une automobile ou un camion. Tout ce qu'on aura réussi à faire, c'est de remettre le paiement de ces véhicules dans l'avenir, de passer la note aux générations futures pour se donner bon visage, bonne face aujourd'hui, pour montrer qu'on est des bons administrateurs, qu'on peut atteindre le déficit zéro.

Mais là, une autre cible. Il y avait les municipalités, les commissions scolaires, les régies de la santé. Maintenant, c'est la génération future, c'est elle qui va payer. Pourtant, ce n'était pas ça, M. le Président. On disait qu'il fallait que tout le monde mette l'épaule à la roue pour s'assurer que les générations futures ne seront pas plus endettées et vont être capables d'avoir une qualité de vie semblable à la nôtre. C'est ça, la nouvelle façon de gouverner, en mettant tout le monde coupable, en faisant payer tout le monde. Il y en a qui ne savent même pas, M. le Président, ne savent même pas la note qu'ils devront payer dans l'avenir.

M. le Président, il y a une autre chose aussi. La discipline à laquelle chacun des ministères s'était astreint depuis quelques années s'effritera immanquablement. Par l'entremise de fonds, on vient à être capable de répondre, de dire aux gens: Regardez, ce n'est plus nécessaire de faire des efforts. L'incitatif de vouloir faire plus avec moins, de gérer mieux, ça va partir, ça. Comment peut-on demander aux gens de s'astreindre à faire des choses lorsqu'on trouve des moyens pour dépenser des sous quand, malheureusement, on n'a pas les moyens?

Avant, M. le Président, quand les réponses du Conseil du trésor ou des Finances arrivaient, qu'il fallait autofinancer ses investissements, chacun des ministères redoublait d'imagination pour effectuer ses investissements à même les budgets alloués en début d'année. Maintenant, si la demande se maintient, chacun des ministères se verra attribuer un fonds spécial dans lequel il mettra chacune de ses dépenses en capital. Mais il est bien évident que les biens achetés grâce à ces fonds devront se payer. Il n'y en a pas, de miracle. Il n'y en a pas, à moins que le vendeur décide de nous le donner, de nous donner le produit qu'on a acheté. Sans ça, M. le Président, on doit tous payer ce qu'on achète.

M. le Président, c'est un peu ça, le drame. C'est bien beau, tous ces nouveaux investissements dans le domaine routier, par exemple, mais, d'ici quelques années, les amortissements et le service de remboursement de la dette nous rattraperont et on atteindra le niveau de dépenses des années antérieures et on ne pourra plus investir. On ne le pourra plus. Et c'est dans ce domaine-là que, dans les moments difficiles comme nous vivons, ces questions pouvaient donc attirer notre quote-part des investissements au Québec pour augmenter la colonne des revenus. C'est ça qui manque, et certainement pas ce gouvernement qui crée une situation, M. le Président, pour faciliter ses investissements. C'est ça, le drame caché.

Disons, par exemple, une route, payée 200 000 $ cette année, ne coûte rien, selon les nouvelles conventions comptables. Par contre, l'an prochain, si elle est amortie sur 10 ans, on paiera 20 000 $ plus l'intérêt sur le 200 000 $ initial. L'année subséquente également. Si le niveau d'investissement se maintient, nous serons étouffés d'ici cinq à 10 ans. On prévoit, dans le domaine du réseau routier, et fort probablement avec raison, que c'est encore plus que 500 000 000 $ l'an prochain et l'année après.

Donc, M. le Président, on voit qu'au lieu de réduire ça va continuer et qu'on fait juste continuer d'augmenter et augmenter les paiements qu'on devra faire tantôt. Je l'ai dit et je le répète, si on ne payait que les travaux routiers, cela pourrait se justifier, mais nous devrons également comprendre dans ces coûts le salaire d'un nombre important de fonctionnaires ainsi que les frais connexes. Imaginez que l'on amortisse le salaire des fonctionnaires sur 10 ans, cela dépasse l'imagination. Poussée à l'absurde, cette méthode nous permettra de réduire rapidement notre déficit simplement parce que la dépense n'est pas inscrite aux livres ni l'emprunt que cet achat nécessite. C'est une façon de cacher la réalité des choses.

Qu'on soit donc transparent. Qu'on dise donc que la raison principale de ces fonds-là, c'est que ça n'apparaît pas dans les livres et que la fin justifie les moyens. On veut atteindre à tout prix le déficit zéro. M. le Président, nous sommes d'accord, mais il semble qu'il faut le faire de façon ouverte, transparente, et ne pas donner l'impression qu'on l'atteint en poussant dans l'avenir les dépenses que nous faisons aujourd'hui. Si on ne payait que les travaux routiers, cela pourrait se justifier, mais nous devrons également comprendre, dans ces coûts, le salaire d'un nombre important de fonctionnaires ainsi que les frais connexes.

M. le Président, c'est carrément un autre pelletage par en avant, et cette détérioration accrue de nos finances publiques rattrapera les contribuables, mais trop tard. Il faut mettre fin à cet abus des méthodes comptables et donner un compte rendu exact de la situation financière du gouvernement. Il me semble que c'est élémentaire que les gens qui devront payer la note soient mis au courant de toutes les méthodes, quelles sont les conséquences des gestes qu'on pose aujourd'hui, et à ce moment-là, si – le monde, en connaissance de cause – on peut démontrer en réalité que, oui, on va atteindre l'objectif du déficit zéro, on pourra après ça avoir une meilleure économie pour qu'on puisse investir et créer une activité économique. M. le Président, tout le monde est d'accord avec ça.

Présentement, la situation économique du Canada est propice à la croissance. Profitons-en pour donner un coup dans nos dépenses publiques et les assainir afin que nous puissions affronter un cycle descendant avec une certaine sérénité. Sinon, M. le Président, nous nous retrouverons dans une situation périlleuse face à nos créanciers. Je pense qu'il faut que tout se fasse au-dessus de la table.

(11 h 20)

La taille de l'État doit diminuer, chacun doit faire des efforts additionnels. Mais, pour reprendre la maîtrise de nos finances publiques, nous devons agir autant sur la colonne des dépenses que sur la colonne des revenus. On doit en finir avec les coupures sauvages dans le domaine de la santé. Parce que, si on a de l'argent, puis qu'on a trouvé une façon de trouver des sous, puis que ça n'affectera en rien notre déficit puis notre dette, si on a trouvé cette solution magique, pourquoi ne pas avoir un peu plus de compassion pour les gens qui sont malades, dans ce domaine-là de la santé et aussi dans le domaine de l'éducation? S'il y a une chose qui est importante, c'est de préparer nos jeunes aux défis qu'ils auront dans l'avenir, avec la mondialisation des marchés. Est-ce que ça, M. le Président, ce n'est pas une chose importante, bien plus importante que de faire accroire aux gens qu'on est en train d'atteindre le déficit zéro en empruntant puis en pelletant ça dans le futur? Si on a trouvé la solution, on a gagné le gros lot, pourquoi ne pas l'utiliser dans des domaines aussi sensibles que la santé et aussi importants que l'éducation?

M. le Président, je disais que la situation économique du Canada est propice. Au Québec, on possède des ressources presque illimitées, une main-d'oeuvre hautement qualifiée. Les investisseurs recherchent un tel environnement, mais ils recherchent également la stabilité politique qui leur permettra de planifier à long terme un investissement. Car on ne doit pas se leurrer, ces investisseurs comparent avec les marchés concurrents et, bien assurément, le critère de stabilité politique demeure important et les rend d'une prudence extrême.

Mais revenons au projet de loi n° 159. À priori, ce projet de loi est à l'image du menu législatif de cette session, maigre et sans conséquence. En effet, le gouvernement, conformément au mot d'ordre du premier ministre et à la lumière des résultats des dernières élections partielles, a compris que la population en avait assez de ses improvisations et de ses incohérences, assez des coupures sauvages dans les domaines de la santé, de l'éducation et des services sociaux. D'ailleurs, le message fut on ne peut plus clair de la part du premier ministre: Faites-vous oublier. M. le Président, c'est la raison pour laquelle la réforme de l'aide sociale fut reportée. Quels autres projets de loi ont été retardés? Quelles surprises nous réserve le gouvernement?

M. le Président, un projet de loi de quatre articles peut paraître anodin, mais il peut produire des effets assez dévastateurs, en particulier au niveau régional. Par exemple, on apprenait que le ministère des Transports envisageait d'offrir ses services aux autres ministères afin de mieux rentabiliser ses ateliers de réparation. Ça, M. le Président, est-ce que c'est dans l'intérêt supérieur de nos régions? Est-ce que ça va créer des emplois, ou est-ce que ça va créer des mises à pied? Et c'est ça, la question qu'il faut se poser. Oui, M. le Président.

En terminant – vu que vous me faites signe qu'il ne me reste qu'une seule minute – la création d'un fonds est seulement pour permettre à ce gouvernement que la fin justifie les moyens, une façon de cacher sa mauvaise administration financière, donner l'impression qu'on va atteindre le déficit zéro en pelletant dans l'avenir, à nos jeunes enfants, une dette dont ils n'ont pas besoin.

Donc, en terminant, M. le Président, je vous remercie pour votre attention et vous pouvez être assuré que nous ne sommes pas d'accord avec la création de ce fonds.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Alors, y a-t-il d'autres intervenants? M. le député de Papineau, je vous cède la parole.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. En passant, j'aimerais féliciter mon collègue de Pontiac, avec toute son expérience d'ancien ministre des Transports ou de la Voirie, d'expliquer carrément le but de cette loi. Et je pense que, moi aussi, dans mon rôle de député de notre belle région de l'Outaouais, on doit insister carrément et expliquer aux gens qui nous écoutent ce matin la raison principale du projet de loi n° 159 qui modifie la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement. Il détermine les sommes qui constituent ce fonds et en établit les règles de fonctionnement.

Les informations complémentaires que nous avons, M. le Président, pour nous aider à faire comprendre un peu le projet de loi. La gestion du parc d'équipement roulant du ministère, 1 445 véhicules légers, 822 camions lourds et 2 133 autres équipements, est répartie dans plus de 60 unités administratives. Il résulterait probablement d'importantes économies si on intégrait l'administration de cette fonction. Le ministère des Transports du Québec possède déjà 40 % de la flotte gouvernementale et détient une expertise reconnue dans l'entretien et la réparation des véhicules. De plus, faute d'investissements au fil des ans, le parc est particulièrement âgé et l'entretien et les réparations coûtent de plus en plus cher par rapport à la valeur des véhicules. La création du fonds permettrait l'amortissement des immobilisations, la récupération des ventes d'équipements désuets et la facturation entre ministères.

Le financement de ce fonds se fera par le versement d'avances de fonds de financement au FGER, qui est le Fonds de gestion de l'équipement roulant, et les dépenses de capitalisation s'élèveraient à 12 500 000 $ pour 1998-1999, mais seulement l'amortissement et le remboursement de la dette seront inscrits aux comptes, soit 1 200 000 $. Encore une manière de cacher le déficit, M. le Président. Deux cent quatre-vingts... – qui est équivalant à temps complet – seront vraisemblablement affectés au fonds, et les budgets de gestion de 63 000 000 $ sont maintenus.

Le questionnement de nous, dans l'opposition, M. le Président. Ce mode de gestion s'apparente à celui du Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier. Devant l'impossibilité de financer les dépenses de capitalisation nécessaires à l'accomplissement de son mandat en raison du contexte budgétaire, le gouvernement modifie ses conventions comptables et effectue des dépenses qui n'apparaissent pas immédiatement aux comptes publics et, par conséquent, n'accroissent pas le déficit. On le cache. Cette méthode s'avère extrêmement dangereuse car elle reporte à plus tard des dépenses effectuées aujourd'hui et, à moyen terme, coûtera cher aux contribuables tout en camouflant ces dépenses. Cela s'inscrit dans une démarche par laquelle le gouvernement parviendra à éliminer son déficit grâce à la créativité de ses comptables en transférant, entre autres, 280... au fonds.

(11 h 30)

M. le Président, depuis un certain temps, il semble que la politique du gouvernement du Parti québécois consiste à créer de nouveaux fonds spéciaux afin de lui permettre de reporter sur plusieurs années à venir certaines dépenses qui seraient, autrement dit, autrement comptabilisées dans les états financiers actuels du gouvernement.

On peut citer, M. le Président, à titre d'exemple, le fonds spécial de conservation et d'amélioration des réseaux routiers, mis en oeuvre par un décret n° 247-97 en date du 26 février 1997, le Fonds de gestion des départs assistés, le Fonds d'assistance financière pour les régions sinistrées, le Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail, le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome, le Fonds des pensions alimentaires, le Fonds des services de police et le tout dernier-né, le Fonds de gestion de l'équipement routier.

Il est évident, M. le Président, que l'un des buts recherchés par le gouvernement vise à faciliter l'atteinte éventuelle de l'équilibre budgétaire du gouvernement: déficit zéro. Tout le monde est d'accord avec ça, tout le monde est d'accord avec ça. Même, il y avait une résolution acceptée à l'unanimité ici, à l'Assemblée nationale. De la manière dont on fait ça, c'est qu'on veut soulager le budget du gouvernement des dépenses qui normalement auraient dû être effectuées dans l'année courante pour les reporter sur les années à venir. Ce faisant, on ne coupe pas vraiment dans les dépenses, on les inscrit ailleurs, soit dans les fonds spéciaux.

Un autre exemple, c'est que, dans l'action du gouvernement actuel pour atteindre le déficit zéro, l'effort est fait complètement ailleurs qu'à l'Assemblée nationale. Je vais vous expliquer pourquoi je dis ça. Le premier exemple, c'est la facture qu'on a pelletée ou transférée avec nombre discussions avec l'UMQ qui a accepté un montant de transfert de 375 000 000 $, 374 000 000 $. Le seul effort que le gouvernement actuel a fait, c'est 0,06 % de son budget de 40 000 000 000 $.

Les municipalités, elles, ont 375 000 000 $ qui ont été transférés globalement sur le dos des payeurs de taxes. C'est un effort énorme qu'on a demandé aux municipalités. 250 000 000 $ aussi aux commissions scolaires. Pas dans le budget, là. Les déficits accumulés, M. le Président, c'est l'administration de notre gouvernement actuel: 250 000 000 $, les universités au Québec; 50 000 000 $ à nos cégeps. Sans parler aussi des déficits accumulés de tous nos hôpitaux dans la province de Québec et les coupures drastiques dans tous les services côté éducation, côté santé et côté aussi des plus démunis du Québec. Il ne faut pas mentionner aussi un autre coût bientôt, le 1er janvier 1998: la TVQ qui va augmenter de 1 %, et, si je ne me trompe pas, si ma mémoire est fidèle, des revenus de 650 000 000 $ pour le gouvernement. Toutes ces actions-là sont toutes refilées complètement aux payeurs de taxes. Au complet.

Les seuls qui ont fait, je dois le dire, un effort, c'est les gens qui siègent ici, à l'Assemblée nationale, qui ont eu une coupure de 6 % sur leur salaire. Au début, M. le Président – vous serez d'accord avec moi – c'était supposé être les docteurs, les juges, tout le monde était pour aider au déficit. Très louable. Nous devions faire notre part. Finalement, c'est seulement les députés de cette Assemblée qui ont eu une coupure de 6 %. Tout partout ailleurs, c'est dans leur masse salariale totale, les juges, les docteurs, qu'ils ont réussi carrément à pouvoir aider le gouvernement à baisser son déficit.

Les fonds spéciaux, c'est un peu la même chose. On a voulu encore une fois cacher, complètement cacher... Et ce qui me surprend, c'est qu'on n'entend pas l'autre côté vraiment dire qu'ils ne sont pas d'accord avec la manière dont ça a été fait. Personne. C'est muet complètement. On a même envoyé une commande, si vous voulez, demandé aux députés dans chacune des régions d'aller vendre aux municipalités que la baisse des transferts qui a été faite aux municipalités à 375 000 000 $, les municipalités avaient assez de surplus qu'on pouvait payer sans augmenter les taxes. Ce n'est pas ça qui se passe.

Je me rappelle avoir vu aux nouvelles le député de Rouyn-Noranda, je crois, M. Pelletier...

Une voix: D'Abitibi-Est.

M. MacMillan: D'Abitibi-Est, merci. On lui a complètement répondu, les maires de sa région, que... Les taxes n'étaient pas pour augmenter parce qu'il y avait des surplus dans chacune de ses municipalités. On lui a répondu que ce n'était pas vrai, M. le Président. Alors, on a refilé totalement le déficit sur le dos des payeurs de taxes sans faire aucune action ici même, à l'Assemblée nationale, si vous voulez, par le Conseil des ministres et les députés qui sont assis ici. Et je me répète. Sur le dos des municipalités, les déficits accumulés dans les hôpitaux, les déficits accumulés dans les commissions scolaires, les déficits accumulés dans les cégeps et les universités du Québec, M. le Président. Et je ne pense pas que c'est vraiment de la planification comme dans un budget.

Et on l'a mentionné tantôt, on se fait crier que le plus gros déficit de 6 000 000 000 $, c'est le Parti libéral, en 1994. J'espère que vous allez tous acheter le livre de M. le député d'Iberville qui mentionne... Ce matin, il y avait un article dans Le Soleil , qui dit que, tout bonnement, quand le Parti québécois a pris le pouvoir, après trois ou quatre semaines on a découvert 600 000 000 $ de plus de déficit, mais avant que M. Campeau aurait dit qu'il paraissait que tout allait bien. C'est écrit. Ce n'est pas moi qui invente ça, c'est le député d'Iberville, ministre du temps, le ministre du référendum, qui, en passant, a dépensé 150 000 000 $ et plus pour se faire dire par les Québécois qu'on n'en voulait pas, de référendum, puis qu'on n'en veut pas, de la séparation.

Et, encore une fois, on le voit, la bonne foi du ministre des Transports, qui a la commande de son collègue du Lac-Saint-Jean, le premier ministre du Québec... On va refiler encore une fois des dépenses, on va cacher ça, on va financer ça sur cinq ans, sur 10 ans. Si M. le ministre des Transports me disait ce matin: On va tout prendre ça, cet argent-là, dans le fonds puis on va mettre ça sur l'autoroute 50 dans l'Outaouais, je dirais: «Fine», on va être capable de faire au moins un bout de chemin. Mais ce n'est pas son intention. Ce n'est pas l'intention de prendre ce fonds-là pour améliorer nos routes. Ce n'est pas l'intention de prendre ce fonds-là pour même changer l'équipement.

Comme je viens de le mentionner – il n'écoutait pas, mais je vais me répéter – si le ministre des Transports me disait ce matin que tous ces argents-là feront partie de la nouvelle entente fédérale-provinciale pour construire l'autoroute 50, je m'en irais chez nous tout de suite, immédiatement, puis je ne critiquerais pas du tout. Mais ce n'est pas le cas, ce n'est pas ça qui se passe. On veut encore cacher, camoufler des dépenses carrément pour amener au déficit zéro.

Et vous savez pourquoi on veut amener ça au déficit zéro? C'est parce qu'on a hâte d'aller en élection. Si vous avez lu, ce matin ou samedi, l'éditorial de Michel David du Soleil : Surveillez-vous, les pas bons s'en viennent , c'est ça qu'était l'article, l'éditorial, le billet ou le commentaire de M. David. Et c'est vrai. Surveillez-vous, on s'en vient! Vous l'avez vu dans les partielles, les gens vous ont envoyé un message, ils n'acceptent pas la manière dont vous refilez – vous coupez dans toutes les dépenses de la santé, de l'éducation – ça carrément sur le dos des contribuables. Puis on le sait, oui, c'est eux qui paient les taxes. C'est eux, mais c'est la manière dont on le fait. On le fait drastiquement, on coupe dans la santé. Encore ce matin dans les journaux, on a des listes d'attente, M. le Président, qui s'accumulent de jour en jour. Il n'y a aucun service.

Je connais un ami personnel qui est venu ici, à Québec, à l'hôpital Laval, qui a passé... Et je ne veux pas dramatiser le débat sur le déficit, mais, lui, il venait d'apprendre qu'il avait de un à trois mois à vivre avec un cancer et il a passé deux jours dans les corridors. Alors, on fait ça sur le dos de tout le monde.

(11 h 40)

Le gouvernement pense que les gens, eux, sont d'accord avec ça. On l'a vu avec nos partielles, trois partielles. Mon collègue de Pontiac l'a mentionné tantôt, M. le Président, trois partielles sur quatre. Il y en avait trois qui étaient déjà du Parti libéral, mais c'étaient trois comtés qui avaient gagné seulement un par 200, un par 500 et un par 900 et un qu'on a été défait, Duplessis, qui avait gagné, notre ancien collègue M. Perron... qui, au lieu de gagner par 5 000, a gagné seulement par 1 500.

Alors, le message est là. Il est clair. On veut que le gouvernement... Oui, au déficit zéro, M. le Président. Tout le monde est d'accord avec ça. Tout le monde est d'accord que le déficit zéro, on veut avoir ça, mais c'est la manière qu'on fait le déficit zéro. Là, on arrive ce matin avec un Fonds spécial de gestion de l'équipement routier. On a un exemple ici, dans le journal – sans enlever la capacité ou le bon vouloir des gens qui travaillent dans les services du ministère du Transport – où on veut couper les coûts. Il y a eu une étude qui a été faite en 1995 – un article, je n'ai pas la date, au mois de mars 1996 – que ça coûte 88 $ de l'heure pour réparer le parc, les 8 700 véhicules, au ministère du Transport.

Et il y a un monsieur ici, à Québec, je vais mentionner son nom, un garagiste de Sainte-Foy, M. Métivier, qui offrait, il n'avait pas eu d'appel d'offres, mais, quand même, il offrait, lui, de faire ce travail pour 40 $ de l'heure. Le privé, ça. Et on parle de richesse. On parle de création d'emplois et on a un monsieur ici qui, au lieu de dépenser 88 $ – c'est le coût au ministère des Transports – le privé, lui, pourrait faire toutes ces réparations-là pour 40 $, M. le Président. Et on me dit aussi, j'ai entendu mon collègue de Pontiac tantôt parler de la gazoline, que le gouvernement maintenant, au lieu d'aller au privé, va aller en soumission ou va se procurer, je pense, sa gazoline qui coûte supposément 0,06 $ de moins cher, à cause sûrement de la taxe.

Mais dans nos régions – comme le mentionnait le porte-parole de l'opposition aux transports – si les gens du ministère des Transports décident de ne pas prendre la gazoline ou de ne pas aller au privé pour la réparation, il va y avoir un effet aussi, sûrement. Et ma peur de l'avenir de... toutes nos activités, au ministère des Transports, dans chacune de nos régions, c'est très important. Un exemple, Papineauville, qui a une vingtaine d'employés qui travaillent là, M. le Président. Si on décide de tout centraliser ça à Hull ou à Gatineau, alors ces 20 personnes qui demeurent dans... ou qui travaillent là, ça a un impact financier qu'on ne peut pas laisser de côté.

Alors, c'est pour ça que tantôt j'ai voulu vraiment appuyer mon collègue de Pontiac et vraiment signaler aux gens la manière dont on décide, si vous voulez, de baisser le déficit sur le dos des contribuables par les municipalités, par moins de services en santé dans toutes nos régions du Québec, moins de services aussi dans l'éducation, dans les cégeps, et camoufler tous ces déficits-là par les universités, par les hôpitaux. Je pense que c'est notre devoir, l'opposition, de le répéter et de dire aux gens: Surveillez-vous; on veut vraiment camoufler, camoufler et cacher le vrai déficit de la province de Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Papineau. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Est-ce qu'on peut avoir un cinq minutes, à midi, pour finir mon temps? Parce qu'effectivement il est 11 h 45, et nous avons un droit de parole de 20 minutes. Je voudrais savoir: Est-ce qu'on peut avoir le consentement ou est-ce que...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ça m'aurait pris un consentement, mais on peut l'avoir plus tard, espérons. Alors, nous allons débuter. Puis, vous-même, vous pourrez voir, à ce moment-là, si vous décidez d'arrêter ou de continuer. Alors, on verra tantôt. Je verrai quand l'heure sera arrivée. Alors, M. le député, je vous cède la parole.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai voulu certainement faire une intervention sur le projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. J'ai lu ça avec intérêt parce que, de ce côté, nous avons vu beaucoup de fonds spéciaux, des fonds qui vont supposément faire la gestion de beaucoup de choses.

J'ai écouté le député de Papineau quand il a fait sa première intervention et je suis presque certain que le ministre est maintenant plus convaincu que ce n'est pas un bon projet de loi, que ce n'est pas une bonne façon de procéder. J'espère qu'il a vraiment pris note de ce que le député de Papineau a dit, parce que je suis convaincu qu'effectivement nous n'avons pas besoin de ce projet de loi n° 159 tel que proposé. Nous avons besoin, certainement, de faire des changements dans le ministère des Transports, mais nous n'avons pas besoin de ce type de législation.

Effectivement, le ministère des Transports a une flotte impressionnante, la plus large de tous les ministères. Mais est-ce que nous avons besoin de créer un autre fonds spécial? Pour faire quoi? Pour faire des sous-contrats avec les autres ministères? Vous pouvez faire ça vous-même, M. le ministre, assez facilement. Nous n'avons pas besoin de quelque chose d'aussi lourd qu'un autre fonds, parce qu'il y a une stratégie en arrière de cet autre exemple de créer un nouveau fonds de notre gouvernement, une stratégie de cacher le déficit, une stratégie de fraude intellectuelle, une stratégie de cacher les vrais chiffres devant la population. C'est un autre exemple du double langage de ce gouvernement.

Nous avons vu les fonds après les fonds, les fonds spéciaux après les fonds spéciaux: le Fonds de gestion des départs assistés, le Fonds d'assistance financière pour les régions sinistrées, le Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail, le Fonds d'aide à l'action communautaire autonome, le Fonds des pensions alimentaires, le Fonds des services de police et aussi, comme nous sommes en train de discuter aujourd'hui, le Fonds de gestion de l'équipement roulant. Ce n'est pas ça, la vraie lutte contre le déficit; c'est une stratégie de cacher les choses.

Vous savez, M. le Président, que le budget 1996-1997 était de 40 864 000 000 $; cette année, c'est 40 276 000 000 $. Ils ont coupé dans la santé, ils ont coupé aveuglément dans la santé et l'éducation, mais, dans les autres ministères, est-ce qu'ils ont coupé? Non. Est-ce qu'il est en train de vraiment garder le contrôle sur nos finances publiques? Non, M. le Président, il est en train de mettre ça de côté, de trouver une autre place pour cacher de l'argent, de faire ça d'une façon où il peut dire qu'il a suivi sa démarche pour arriver à un déficit zéro. Mais ce n'est pas un déficit zéro; c'est un déficit caché. C'est caché, il existe.

De plus en plus, les médias parlent de ça. On peut voir: La dette du gouvernement du Québec est beaucoup plus élevée qu'il n'y paraît . On parle, M. le Président, dans le journal Les Affaires , des dettes dans nos commissions scolaires, on parle des dettes dans les cégeps, dans les universités, dans les établissements de santé, dans les municipalités, dans les autres organismes communautaires. De plus en plus, le monde voit qu'il est en train de juste transférer le fardeau fiscal à nos contribuables. C'est amputer l'avenir, hypothéquer l'avenir de nos jeunes et de toute la société québécoise. C'est un autre exemple d'une bombe à retardement que le gouvernement québécois est en train de placer. Il veut «extender», prolonger la façon dont il paie les dettes.

M. le Président, je n'accepte pas ça. Ce n'est pas une bonne façon de gérer, et nous allons montrer à la population québécoise qu'il doit arrêter de faire des fonds spéciaux. Il n'a pas, dans ce cas, besoin d'un fonds spécial. Même, M. le Président, au ministère du Revenu, vous savez qu'il est en train d'engager les 1 000 percepteurs, il est en train de dépenser des millions de dollars pour les ordinateurs, même là il est en train de cacher les dépenses. Ils ont emprunté pour payer les ordinateurs et aussi les fonctionnaires. M. le Président, peut-être que le gouvernement n'est pas au courant de ça, mais, vous savez, quand vous empruntez de l'argent, un jour, vous avez besoin de payer, avec intérêts aussi. Avec ça, M. le Président, c'est clair et net que le gouvernement n'est pas en train de régler les finances publiques; il est en train de cacher de l'argent et des dettes.

(11 h 50)

Le député de Papineau a parlé d'une chose assez importante aussi, c'est de responsabiliser notre fonction publique, de demander à nos hautes instances du gouvernement, ceux et celles qui mènent nos ministères d'une façon administrative, de trouver des solutions créatives de faire... Nous avons souvent parlé ici, dans cette Chambre, M. le Président, de faire plus avec moins. Maintenant, cet autre geste de la tendance de ce gouvernement de cacher les vraies dettes va faire exactement le contraire, M. le Président. Il est en train de dire que vous pouvez mettre les dépenses dans un fonds que vous pouvez payer pendant les prochains cinq, sept, 10, 15 ans. Vous n'avez pas besoin de vraiment vous serrer la ceinture maintenant, vous pouvez reporter ça à plus tard. Mais, M. le Président, on fait ça dans l'équipement routier, on fait ça dans le réseau de la santé et des services sociaux, on demande qu'ils fassent ça dans l'éducation aussi – je peux continuer, comme je l'ai déjà mentionné – qui va payer pour ça? Vous savez, ça va être les contribuables québécois. Toujours avec un intérêt élevé. Il est en train d'hypothéquer leur avenir.

M. le Président, j'ai vu dans les articles du projet de loi n° 159 qu'il veut facturer les autres ministères. Mais est-ce que vous avez besoin d'une loi pour faire ça? Est-ce que vous pouvez faire ça administrativement? Est-ce que vous pouvez entrer dans les ententes avec les autres ministères? Il me semble que vous pouvez faire ça. On demande pourquoi le gouvernement veut faire ça. Il me semble que c'est assez clair. Et vous pouvez voir que dans chaque ministère, il y a une tendance, il y a une stratégie: ils vont prendre une partie de leurs dépenses, ils vont mettre ça dans un fonds spécial. Ils peuvent, sur papier – sur papier – sauver tout de suite, je pense, si ma mémoire est bonne, 18 000 000 $, tout de suite. Mais ce n'est pas sauvé, là. On doit payer actuellement, avec les intérêts et les fonds... Avec les intérêts pendant des années et des années, nous allons payer beaucoup plus.

Avec ça, M. le Président, c'est une stratégie qui, il me semble, est loin d'être claire. Moi, je n'entre pas avec les mots non parlementaires, mais c'est loin d'être la vérité. C'est très loin de la vérité. Pour moi, nous avons vu une stratégie qui, de plus en plus, n'est pas acceptable par la population québécoise.

Mr. Speaker... J'ai juste entendu les commentaires. Maintenant, nous avons clarifié les choses. Merci.

Mr. Speaker, I'm very concerned about projet de loi n° 159. This is a government that is not cutting in the right places. Already, I've emphasized that last year's budget was $40 864 000 000; this year's budget was $40 276 000 000. They have cut in areas of education and health, but they haven't cut in other Government departments. What they are doing, what this Government is doing... And it is a strategy that you see on a regular basis: you see that this Government is taking public funds and moving them into special funds outside the normal accountability structures of the Government. This way they are hoping to trick, to fool the population of Québec. The Quebeckers won't buy that. They will not accept that this Government is not addressing the financial questions in an appropriate way.

You see today that the Canadian Government is dealing with the deficit in a realistic fashion, we're talking about surplusses. But what does the Québec Government do? It forces the ministries to create special funds. It forces other institutions to mortgage their future. They're doing that in hospitals, they're doing that in education. And today, when we've normally paid out of the operating accounts of the budget for the highway equipment, they are creating a special fund. Today, they are going to try to move it out, mortgage the payments over five, seven, 10, 15 years. They're going to create a fund in which they can make it look on the books that they're saving money, but in fact it's going to increase the cost. It's going to increase the debt. Because I don't know if this Government understands – maybe they should visit one of their local banks or caisse pops – that, if you borrow money, you're going to have to pay for it.

So, eventually, it is going to be very clear that this is really a time bomb that the Government is doing. It's another trick that this Government is trying to create in front of the population of Québec. They're saying: No, we've saved money, because on the books, look, we don't have this expense, we have $1 200 000 instead of $12 000 000. They're going to try to convince people that they're in fact saving money, but what they've done is mortgage our future, mortgage our future in a completely unacceptable way.

You notice, Mr. Speaker, that this is a shell game of the Government that is basically trying to move money around to make it look like they're saving money, and you see that whether it's in the various funds created in the battle against poverty, whether it's in various community development funds, whether it's on alimony payments, whether it's on police services. More and more, what they're doing is try to take those funds out of the funds that are counted under the public debt and hide them, hide them in a way that frankly I think in Commerce 101 or Public Accounting 101 or basic prerequisites of studying for a university degree in public accounting people will see right through this strategy. If they think that they're going to impress investors in Québec that this Government is actually controlling the public finances in a real and legitimate way through this kind of strategy, I think they have much to learn.

Our highways desperately need, and the equipment that runs those highways desperately needs upkeep. We need to stop putting all the money towards separation. We have to invest, yes, we have to invest in our ministries, in our equipment. This is not the way to do it in a realistic way. What we have to do is ask our ministries to take the proper control, to take the proper advice that we are giving them to, in fact, show in an honest, realistic manner what funds we have available and what funds we don't have available and what deficit we have. Because other than that, this whole battle about deficit zero is a fraud, is an intellectual fraud, unacceptable, completely intellectually dishonest, and that we have to challenge, and that is what we have to do in Bill 159.

There are all kinds of other issues that the Deputy of Papineau talked about. He talked in terms of creating a false competition in the regions with – Pontiac, I'm sorry – the Deputy of Pontiac and the Deputy of Papineau... in terms of creating a false competition. When we are going to be funding out that kind of work, are you going to be, in fact, closing down a number of other businesses locally? Is this an example of running an economy for the regions? Is this an example of, in fact, job creation for the regions when, in fact, they may, through their interventions, Mr. Speaker, close down many different groups?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, M. le député de Nelligan, étant donné l'heure présentement, je dois avoir le consentement pour poursuivre, sinon je devrai suspendre.

Des voix: On va suspendre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vais suspendre? Oui. Donc, nous allons suspendre jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons aborder immédiatement les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article b, M. le Président.


Projet de loi n° 168

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances présente le projet de loi n° 168, Loi modifiant la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec. M. le vice-premier ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi sur la Caisse de dépôt et placement du Québec afin de supprimer les restrictions qui limitent son pouvoir d'acquisition en actions ordinaires et en unités de fonds indexés et ses pouvoirs d'investissement en immeubles et en hypothèques et de permettre le dépassement, dans certains cas, de la limite en actions ordinaires ou autres titres qu'elle peut détenir dans une même personne morale.

Ce projet vise également à permettre la création de filiales pour l'exercice de nouvelles activités reliées à l'immobilier, à la gestion de fonds, à l'offre et à la fourniture de services relatifs aux activités de placement et pour la réalisation d'investissements dans certaines personnes morales ou entités.

Ce projet vise, de plus, à permettre à deux administrateurs de la Caisse d'être résidents de l'extérieur du Québec. Enfin, ce projet contient diverses dispositions visant à faciliter la gestion par la Caisse de ses investissements.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: L'article a, M. le Président.


Projet de loi n° 166

Le Président: À l'article a du feuilleton, Mme la ministre de l'Éducation et de la Famille présente le projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Ce projet de loi accorde au gouvernement le pouvoir d'instituer, sur la recommandation du ministre de l'Éducation, après consultation du Conseil supérieur de l'éducation, des collèges régionaux d'enseignement général et professionnel formés d'un ou de plusieurs collèges constituants. Le collège régional aura pour mission d'organiser l'enseignement dispensé par ces collèges constituants, tandis que ceux-ci seront chargés de mettre en oeuvre les programmes d'études collégiales que le collège régional leur aura confiés.

Ce projet de loi prévoit par ailleurs que le droit à la gratuité scolaire ne s'appliquera dorénavant qu'aux programmes conduisant au Diplôme d'études collégiales. Les collèges pourront ainsi exiger des droits de scolarité pour les programmes conduisant à une Attestation d'études collégiales.

Enfin, le projet de loi prévoit des modifications à plusieurs dispositions afin de faciliter la gestion d'un collège et l'administration générale de la loi, notamment en conférant au gouvernement certains pouvoirs à l'égard des lettres patentes constitutives des collèges.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que le leader du gouvernement pourrait informer cette Chambre si le gouvernement a l'intention de procéder à des consultations au cours de l'étude de ce projet de loi?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il y a eu beaucoup de consultations sur l'avant-projet. Dans ce contexte-là, je ne pense pas qu'à ce moment-ci on fasse quoi que ce soit qui ait pour but de donner d'autres auditions.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une précision, M. le Président. Est-ce qu'on doit comprendre de la réponse du leader qu'il n'y aura pas de consultations?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, après consultation avec la ministre, on peut envisager la possibilité d'auditions particulières, possiblement, mais pour le moment on va examiner davantage; je donnerai une réponse plus complète au leader de l'opposition.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre de l'Éducation.


Rapports annuels de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie, de l'École polytechnique, de l'École des hautes études commerciales, de l'École nationale d'administration publique, de l'École de technologie supérieure, de l'institut Armand-Frappier, de l'Institut national de la recherche scientifique et de Télé-université

Mme Marois: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer les rapports annuels 1996-1997 suivants: l'Institut de tourisme et d'hôtellerie du Québec; l'École polytechnique, en trois volumes; l'École des hautes études commerciales, en trois volumes; l'École nationale d'administration publique, en trois volumes; l'École de technologie supérieure, en trois volumes; l'institut Armand-Frappier, en trois volumes; l'Institut national de la recherche scientifique, en trois volumes; et enfin la Télé-université, aussi en trois volumes. Ce qui explique l'importance et le volume de la chose.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre délégué à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel de la Société Innovatech du sud du Québec

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Société Innovatech du sud du Québec.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Le Président: Très bien, ce document est déposé. J'ai reçu, de mon côté, dans les délais prescrits, préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Conformément à l'article 97.1 du règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.

Au dépôt de rapports de commissions, il n'y en a pas aujourd'hui.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Merci. M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition jugée non conforme.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. M. le député.


Reformuler l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique

M. Gauvin: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 290 pétitionnaires du comté de Montmagny-L'Islet.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Parce que l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique confirme l'abandon des responsabilités de l'État en éducation;

«Parce qu'en permettant la prolifération d'écoles sélectives il compromet la fréquentation par tous les jeunes de l'école de village ou de quartier;

«Parce qu'il favorise la privatisation et la sous-traitance des services éducatifs, provoquant ainsi des pertes d'emplois particulièrement chez le personnel professionnel et de soutien;

«Parce qu'il attaque l'autonomie professionnelle du personnel et les conventions collectives;

«Parce qu'il permet de déroger au programme d'études national, menaçant ainsi la formation équivalente de tous les jeunes;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à la ministre de l'Éducation de mettre de côté ce mauvais brouillon et de reprendre l'exercice de réforme de la Loi sur l'instruction publique avec l'objectif de la modifier partout où elle fait obstacle à l'égalité des chances ainsi qu'à l'école commune laïque et gratuite.»

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dion: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour présenter une motion non conforme.

Le Président: Pétition non conforme. Il y a consentement?

M. Dion: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition signée par 596 pétitionnaires, enseignants et enseignantes du Syndicat de l'enseignement Richelieu-Yamaska.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Parce que l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique confirme l'abandon des responsabilités de l'État en éducation;

«Parce qu'en permettant la prolifération d'écoles sélectives il compromet la fréquentation par tous les jeunes de l'école de village et de quartier;

«Parce qu'il favorise la privatisation et la sous-traitance des services éducatifs, provoquant ainsi des pertes d'emplois particulièrement chez le personnel professionnel et de soutien;

«Parce qu'il attaque l'autonomie professionnelle du personnel et des conventions collectives;

«Parce qu'il permet de déroger au programme d'études national, menaçant ainsi la formation équivalente de tous les jeunes;

«Nous demandons à la ministre de l'Éducation de mettre de côté ce projet de loi et de reprendre l'exercice de réforme de la Loi sur l'instruction publique avec l'objectif de la modifier partout où elle fait obstacle à l'égalité des chances ainsi qu'à l'école commune laïque et gratuite.»

(14 h 10)

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est également déposée. M. le député d'Abitibi-Est.

M. Pelletier: M. le Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour déposer un extrait de pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Très bien. M. le député.


S'assurer que la réforme du régime d'aide sociale respecte les valeurs démocratiques

M. Pelletier: M. le Président, je dépose donc l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 418 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la région de l'Abitibi-Témiscamingue.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«[...] Considérant que le gouvernement a augmenté la coupure pour refus ou abandon d'emploi ou refus de se conformer aux directives de l'agent;

«Considérant que le gouvernement a comptabilisé la totalité des avoirs liquides lors de l'entrée à l'aide sociale [...];

«Considérant que le gouvernement a retiré le crédit d'impôt foncier et qu'il a imposé les prestations d'aide sociale;

«Considérant que le gouvernement a retiré le barème de non-disponibilité aux mères ayant un enfant de cinq ans;

«L'intervention réclamée se résume ainsi [...]:

«Que toute personne ait droit de participer à la société de façon pleine et entière [...];

«Que l'État soit responsable d'assurer une réelle distribution de la richesse [...];

«Que le régime d'aide sociale puisse reposer sur des valeurs démocratiques [...];

«Que le régime d'aide sociale puisse être démocratisé en reconnaissant l'expertise des personnes elles-mêmes [...].»

Je certifie, M. le Président, que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Malavoy: M. le Président, moi aussi, je sollicite le consentement de la Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Alors, il y a consentement, Mme la députée.

Mme Malavoy: Je vous remercie. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 4 622 pétitionnaires, citoyennes et citoyens de l'Estrie.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le gouvernement a aboli le barème de disponibilité de même que le barème de participation;

«Considérant que le gouvernement a augmenté la coupure pour refus ou abandon d'emploi ou refus de se conformer aux directives de l'agent;

«Considérant que le gouvernement a comptabilisé la totalité des avoirs liquides lors de l'entrée à l'aide sociale;

«Considérant que le gouvernement a coupé les soins dentaires et optométriques et instauré l'assurance-médicaments;

«Considérant que le gouvernement a retiré le crédit d'impôt foncier et qu'il a imposé les prestations d'aide sociale;

«Considérant que le gouvernement a retiré le barème de non-disponibilité aux mères ayant un enfant de cinq ans;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Que toute personne ait droit à un revenu décent qui permet de vivre dans la dignité;

«Que toute personne ait droit de participer à la société de façon pleine et entière, que ce soit par l'emploi ou autrement;

«Que l'État soit responsable d'assurer une réelle distribution de la richesse et une véritable création d'emplois de qualité;

«Que le régime d'aide sociale puisse reposer sur des valeurs démocratiques et, dans cette perspective, il doit notamment favoriser l'autonomie des personnes et combattre toute forme de discrimination;

«Qu'il ne doit y avoir aucune obligation de participer à des mesures d'insertion afin de toucher des prestations d'aide sociale;

«Que le régime d'aide sociale puisse être démocratisé en reconnaissant l'expertise des personnes elles-mêmes en mettant en place des mécanismes de recours à tous les niveaux.»

Et je certifie que cette extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, puisqu'il n'y a pas aujourd'hui d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons immédiatement aborder la...

M. Ouimet: ...


Demande de directive

Le Président: C'est une question de directive, à ce moment-ci...

M. Ouimet: ...

Le Président: ...sur les pétitions? Alors, allez-y, M. le député.


Procédure de dépôt de pétition

M. Ouimet: M. le Président, des parents d'une commission scolaire du territoire du Nouveau-Québec m'ont demandé de déposer en leur nom une pétition. Il s'agit de plus de 600 parents. C'est une pétition non conforme qui a été remise au député d'Ungava le 22 mars 1997 et qu'il n'a pas encore déposée en cette Chambre. Alors, les parents me demandent de la déposer.

Le Président: Alors, à ce moment-ci, est-ce qu'il y a... Est-ce qu'il y a consentement pour le dépôt à ce moment-ci de cette pétition? M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, une question de directive a été posée. J'attends la réponse.

Le Président: Écoutez. La présidence ne peut pas empêcher les pétitions d'être déposées. Il y a une procédure et, quand cette procédure n'est pas suivie, il doit y avoir consentement de l'Assemblée.

M. Jolivet: Non. Ma question n'est pas là, M. le Président. Il y a une directive qui a été demandée. C'est de même que j'ai compris sa question. Il a dit: Question de directive. Il vous a posé une question, et j'attends la réponse. Vous me dites que vous n'en donnerez pas. C'est ce que je comprends?

Le Président: Non. Ce que j'indique, c'est qu'on me demande si cette pétition peut être déposée, puisque finalement un autre député n'aurait pas... Je n'ai pas à présumer et à ce moment-ci je peux aussi interpréter cette demande comme une demande de consentement pour dépôt de... S'il n'y a pas consentement, je vais vérifier quelle procédure on pourrait utiliser pour déposer cette pétition. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Strictement, M. le Président, si on se comprend bien, si, du côté du gouvernement, il y a consentement à ce moment-ci, on pourrait déposer la pétition comme telle. S'il y avait un refus – non explicable – de donner le consentement, à ce moment-là, vous devriez répondre à la question de directive: Comment faire pour déposer la pétition d'un groupe de citoyens quand le député du comté ne veut pas le faire pour ses citoyens?

Des voix: C'est ça.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il y a eu une façon détournée d'un député de l'opposition en vous demandant une directive et de faire en sorte, malheureusement, de passer outre à notre règlement. Vous avez une question de directive. Il n'y a rien qui aujourd'hui, à ce moment-ci, nous indique que le député ne fera pas son devoir s'il a à le faire et, dans ce contexte-là, M. le Président, vous avez une directive à donner. Donnez-nous-la, on agira en conséquence, mais je vous demanderais de bien regarder cette question de directive avant d'y répondre.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, en tenant en considération, M. le Président, que le député d'Ungava a la pétition depuis le 22 mars – ce n'est pas de se décider aujourd'hui ou demain, ça – ça justifie la question. C'est les parents qui veulent que ce soit déposé. On a donné notre consentement à quatre ou cinq pétitions, nous autres, non conformes, aujourd'hui. Si vous aviez la gentilhommerie de nous donner la réciproque sur une pétition, ce serait apprécié.

Le Président: À ce moment-ci, j'ai indiqué que, puisqu'il n'y avait pas consentement, de toute façon, j'allais prendre la question en délibéré, voir quelle directive je donnerais. Il faudra aussi que je vérifie dans quelle mesure, à ce moment-ci, le député de Marquette a à sa disposition la pétition, parce qu'il ne peut pas y avoir deux pétitions. Alors, il faudrait savoir qui a la pétition et, à ce moment-là, qu'est-ce que les pétitionnaires ont demandé. M. le chef de l'opposition.

M. Paradis: Simplement une question de précision dans le but de votre délibéré, s'il y a toujours entêtement à ne pas donner de consentement. Le député vous a indiqué que, lui, il avait la copie de la pétition comme telle. L'original, c'est le député d'Ungava qui, depuis le 22 mars, le contemple, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, on vient de mettre... De la part du leader de l'opposition, s'il y a entêtement en nous regardant, je dois vous dire, M. le Président, que la question qui a été posée par le député de Marquette était claire. C'est une question de directive. J'aimerais la connaître, moi aussi, parce que vous savez qu'en vertu du règlement des ministres n'ont pas à déposer de pétitions. On peut demander à d'autres personnes de le faire en notre nom, au nom de nos citoyens. Mais, dans ce contexte-là, j'aimerais entendre complètement votre décision, et on avisera en conséquence à ce moment-là.

(14 h 20)

Le Président: Bien, à ce moment-ci, je crois avoir indiqué clairement que je vais étudier cette question, compte tenu des circonstances que je viens d'indiquer.


Questions et réponses orales

Nous allons passer à la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui. Alors, en question principale, M. le député de Laporte.


Ampleur du déficit à l'arrivée au pouvoir du gouvernement

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Au cours des derniers mois, des dernières années, même, les membres du gouvernement, le premier ministre, le ministre des Finances et les députés ministériels n'ont cessé de proclamer ad nauseam que le dernier gouvernement libéral leur a laissé un irresponsable déficit de 6 000 000 000 $, disent-ils. Mais, M. le Président... Très bien, on prend note de vos applaudissements.

Or, M. le Président, cette affirmation-là est assez étonnante, parce qu'on parle d'un excédent de 1 400 000 000 $ de déficit par rapport aux prévisions. Or, le ministre des Finances de l'époque avait déclaré, et mon collègue le leader de l'opposition l'a rappelé la semaine dernière, qu'à son arrivée au pouvoir le député de Crémazie, ministre des Finances, avait dit qu'il n'avait pas eu de mauvaises surprises dans les finances du gouvernement après son arrivée. Il avait dit que les finances n'étaient pas en trop mauvais état et qu'il n'avait trouvé aucun squelette. C'est assez étonnant, M. le Président, une telle déclaration quand on voit ce que disent les membres du gouvernement.

Or, subséquemment, en décembre de la même année, le gouvernement publiait un document dans lequel il certifiait encore que les finances publiques étaient en parfait état, selon les prévisions à leur arrivée au pouvoir.

Or, aujourd'hui, M. le Président, un fait nouveau est survenu. Un député de cette Chambre, le député d'Iberville, qui était ministre dans le gouvernement du Parti québécois, donc assis à la table du Conseil des ministres, a publié un livre extrêmement intéressant, je dois le dire, dans lequel il déclare, à la page 124, et je cite, M. le Président: «À cet égard, il faut aussi souligner le comportement du gouvernement lors de son arrivée au pouvoir et à l'occasion du budget préréférendaire. En l'espace d'au plus deux semaines – dit-il – les estimés initiaux du déficit laissé par les libéraux, présentés au Conseil des ministres, ont grimpé de quelque chose comme 600 000 000 $ sans que la moindre information ne soit fournie pour expliquer cet écart.»

M. le Président, si on avait besoin d'une preuve pour affirmer ce que nous avons toujours dit, nous avons maintenant une preuve d'un témoin oculaire, quelqu'un qui était assis à la table des ministres – et auditif aussi – qui a entendu et vu ce qui s'est passé.

Ma question au ministre des Finances est bien simple, M. le Président: Le ministre des Finances ne se rend-il pas compte qu'avec le témoignage du député d'Iberville l'arnaque est démasquée et que dorénavant...

Le Président: M. le député de Laporte, je vous inviterais à faire attention au vocabulaire, je pense qu'on se comprend tous, à l'égard d'un certain nombre de termes qui sont très clairs dans leur signification. M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, je prends note de vos observations. Alors, ma question, je la reprends, au ministre des Finances: Est-ce qu'il se rend compte qu'avec l'aveu que vient de faire le député d'Iberville la manoeuvre ou l'astuce – pour ne pas employer d'autres mots – du Parti québécois est démasquée et que, dorénavant, les Québécois parleront du monstrueux déficit de 5 800 000 000 $ fabriqué par le gouvernement du Parti québécois ainsi que de sa fraude préréférendaire?

Le Président: M. le vice-premier ministre, ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): D'abord, M. le Président, j'apprécie le fait que le député de Laporte, en élevant le député d'Iberville au rang d'auteur crédible, approuve en même temps toutes les études Le Hir. J'apprécie aussi...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): J'apprécie également le fait – on l'a vu par sa question – que, s'il peut tourmenter la pensée d'un auteur, il peut tourmenter la pensée d'un autre, et c'est celle du député de Crémazie. En son absence la semaine dernière, une même tentative fut faite avec une fameuse phrase du député de Crémazie, que l'on tronque pour essayer de camoufler sa honte de mauvais gestionnaire. Voici ce qu'a dit le député de Crémazie, je le cite, dans La Presse , le jeudi 29 septembre: «Ce que j'ai vu, c'est acceptable, mais je n'ai pas fini l'analyse, a insisté M. Campeau.» Et, nous, on l'a finie, l'analyse...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Alors, le député de Crémazie, par la suite, il a fini son analyse, et on se souvient des horreurs qu'il a découvertes, en particulier des pertes camouflées en n'inscrivant aucune provision pour créances douteuses durant tout le dernier mandat, dont un seul exemple, à la SDI, démontre qu'il y a eu pour 464 000 000 $ de pertes qui n'ont jamais été comptabilisées aux dépenses. Alors, non seulement le député de Crémazie a fini son analyse, il l'a expliquée. Le Québec entier, y compris le Vérificateur général par les états qu'il signe, sait que vous nous avez laissé un déficit record inacceptable contre lequel nous nous battons avec un certain succès depuis ce temps-là.

Le Président: M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, si, en septembre 1994, l'analyse n'était pas terminée, le ministre des Finances reconnaîtra-t-il qu'en décembre 1994, trois mois plus tard, l'analyse était terminée? Et le ministre des Finances sait-il qu'à ce moment-là, en décembre 1994, le gouvernement du Parti québécois a publié un document – que j'ai devant moi, que j'exhibe ici – dans lequel le gouvernement a confirmé qu'au bout de six mois de l'administration libérale, à la fin de l'administration libérale, au départ des libéraux, le déficit de l'année en question était en réduction de 10 % par rapport à l'année précédente, alors que les prévisions étaient de 9,4 % de réduction?

Donc, à ce moment-là, au départ des libéraux, le budget était parfaitement respecté, et c'est dans le deuxième semestre de cette année-là que la situation s'est détériorée et que le Parti québécois, avec son astuce, a créé la fraude préréférendaire dont je parlais tantôt.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): D'abord, ça faisait cinq ans de suite, M. le Président, que nos amis d'en face, quand ils étaient ici, avaient perdu toute crédibilité. Ça faisait cinq ans de suite qu'ils se trompaient dans leur déficit par des marges qui dépassaient beaucoup les 8 % ou 10 %.

Deuxièmement, ce dont nous nous sommes rendus compte grâce à la perspicacité du député de Crémazie, c'est que toute espèce de déclaration qui avait été faite par le précédent gouvernement concernant les compressions du déficit étaient demeurées, comme la plupart de leurs actes de gestion, purement verbales et aucune mesure de compression réelle des dépenses n'avait été faite. Alors, les comptables du gouvernement et le Vérificateur général ont constaté ce qu'il en était, et le déficit qu'ils nous ont laissé, c'est celui-là, puis ils vont vivre avec encore pendant longtemps.

Le Président: M. le député.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances réalise qu'en fait, en prenant la déclaration du député de Crémazie, de septembre 1994, à l'effet que les finances étaient en bon état, en prenant le document de décembre 1994, trois mois plus tard, qui confirme qu'à la fin du règne libéral le déficit observé était parfaitement conforme aux prévisions et, finalement, l'aveu du député d'Iberville dans son livre, témoin oculaire et auditif de ce qui se passait au Conseil des ministres, quand on regarde l'ensemble de ces éléments-là, tout cela forme une preuve accablante de la supercherie préréférendaire du Parti québécois?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Encore une fois, la phrase du député de Crémazie est parfaitement claire: «Je n'ai pas fini l'analyse.» Et c'est quand on a fini l'analyse et qu'on a vu que vous aviez fait des prévisions qui, comme les cinq années précédentes, n'étaient basées sur aucune donnée factuelle et n'avaient aucun réalisme, que la vérité a éclaté au grand jour. Et vous vous débattez désespérément depuis ce temps-là pour essayer de faire oublier ces jours sombres de votre administration et les sept avertissements que vous aviez eus par les décotes des agences de crédit qui vous avaient bien dominés et qui ne nous ont pas fait ça à nous parce que nous avons géré convenablement les finances. Ça vous fait envie, ça vous fait honte puis on va vous le rappeler régulièrement.

(14 h 30)

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Situation financière à l'arrivée au pouvoir du gouvernement

M. Johnson: Oui. M. le Président, l'indignation feinte du ministre des Finances, ça ne trompe personne, là. La réalité, comme vient de le démontrer mon collègue, c'est que, d'une part, le ministre des Finances de l'époque avait, en ouvrant les livres, constaté qu'il n'y avait pas de mauvaises surprises, de squelettes, on peut appeler ça comme on veut.

Le ministre des Finances vient nous dire: Oui, oui, mais il n'avait pas fini de regarder tout ça. Une fois que ç'a été fini de regarder... parce qu'en décembre, là, on parle de 80 jours plus tard, on ne parle pas de huit jours ou huit heures plus tard. Donc, 80 jours plus tard ou à peu près, on publie, au gouvernement, l'état des finances publiques avec ce qu'on sait au mois de décembre, pas ce qu'on sait le 29 septembre, avec ce qu'on sait au mois de décembre à l'égard de la situation financière le 30 septembre. Et tout ça va dans le même sens, là. Le déficit était sur les bons rails, il était exactement tel que budgété et même un petit peu mieux, un peu d'avance sur les revenus autonomes, si on s'en souvient, au 30 septembre, et en avance sur le déficit comme tel.

Troisième élément qu'on voit aujourd'hui. Il y a un membre du Conseil des ministres qui nous dit: À l'époque – il n'en revenait pas à l'évidence, là – on ne nous expliquait même pas comment ça se fait que ça gonflait de centaines de millions, ça, en deux semaines, les chiffres à l'égard desquels le ministre des Finances ne semblait pas trouver de surprises puis de squelettes. C'est ça, la réalité, c'est ça, les trois faits qui convergent.

Moi, ce que je veux demander, M. le Président, à un membre du Conseil des ministres qui est ministre de la Santé, c'est: Est-ce qu'il était, lui, autour de la table à ce moment-là? Est-ce qu'il se souvient...

Une voix: ...

M. Johnson: Ah! il n'était pas là. Est-ce qu'il se souvient, oui ou non, que son collègue des Finances de l'époque, député de Crémazie, et le premier ministre d'alors probablement et les autres qui prétendent savoir compter ou qui contribuent à l'établissement de la politique budgétaire du Québec, est-ce qu'il se souvient, lui, le ministre de la Santé, qu'on lui présentait une situation qui se détériorait à vue d'oeil pour des raisons purement politiques et qu'en conséquence aujourd'hui il est pris avec des compressions, avec des décisions qui en font l'exécuteur de basses oeuvres du ministre des Finances de l'époque, du premier ministre de l'époque et qu'il s'est surtout attaché à soigner l'option référendaire plutôt qu'à soigner les patients au Québec?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je ne sais pas si le chef de l'opposition, bien que ça soit son droit le plus strict, a bien fait d'attirer l'éclairage sur lui dans ce débat, car il me force à remonter à certains textes de M. Alain Dubuc du 26 juin 1993, qui dit – et ça va faire plaisir au député de Laporte soit dit en passant: «S'il y a quelqu'un dans le gouvernement Bourassa qui est responsable du gâchis financier qui inquiète à juste titre les agences de crédit, ce n'est pas le ministre des Finances mais bien le président du Conseil du trésor, Daniel Johnson.» Voilà les vraies responsabilités établies.

Quant au député de Laporte, qui s'est peut-être consolé brièvement par ma citation, je vais lui en ressortir une autre. Lui, il disait que – et ça a beaucoup ému les marchés financiers – un déficit de 5 000 000 000 $ était tolérable. Il était déjà résigné de son propre aveu à 5 000 000 000 $. Et, en se résignant à 5 000 000 000 $, il s'est rendu à 5 700 000 000 $ en dépassant des sommets intolérables.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, alors que la manoeuvre de diversion du ministre des Finances ne trompe personne, parce que, alors qu'il cite ça, il publie sur la scène internationale des profils financiers du Québec où il affirme que depuis 1992 – pas depuis 1995 – les dépenses de programmes sont parfaitement contrôlées au Québec et qu'on est même en deçà des prévisions de dépenses... C'est ça qui est publié...

Des voix: Bravo!

M. Johnson: ...profil financier du Québec. Compte tenu de la manoeuvre de diversion du ministre des Finances qui ne trompe personne, est-ce que le ministre de la Santé pourrait nous dire une chose simple – ce n'est pas une question d'opinion: Est-ce qu'il se souvient, oui ou non, d'avoir été autour de la table du Conseil des ministres lorsqu'on les alimentait, lui-même et ses collègues, de toutes sortes littéralement de fadaises et de sornettes financières qui venaient du ministre des Finances afin de préparer le budget préréférendaire et référendaire? Est-ce qu'il s'est aperçu à ce moment-là si, oui ou non, on était en train de lui demander éventuellement de se faire l'exécuteur des basses oeuvres de Jacques Parizeau afin de soigner l'option plutôt que de soigner les malades au Québec? C'est ça qu'il est en train de faire.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: C'est drôle, je me rappelle très bien, M. le Président, des discussions qu'on pouvait avoir au gouvernement à l'époque. C'était de constater qu'en ce qui était le secteur de ma responsabilité, la santé et les services sociaux, on avait à chaque jour, de façon de plus en plus claire, la preuve et la démonstration que le Québec avait accumulé un retard sans précédent par rapport à tous les autres pays et aux autres provinces canadiennes pour entreprendre une réorganisation de ses services de santé – alors que tous les pays du monde les questionnaient depuis cinq ou six ans, nous, on ne bougeait pas – et que l'état des finances publiques, tel qu'il apparaissait à ce moment-là, nous mettait dans une situation qui rendrait la tâche terriblement difficile.

C'est ce qui nous a préparé à traverser deux années très, très dures, dont on s'est sorti dans un temps record, je pense. On a maintenant un réseau qui commence à respirer et à revoir l'avenir avec confiance. Ça, c'était très clair et la situation d'aujourd'hui est encore plus claire. Mais on regarde vers l'avenir, maintenant, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le ministre de la Santé se souvient, à l'époque, qu'on lui ait constamment montré un soufflement du déficit de centaines et de centaines de millions, comme vient d'en témoigner un de ses collègues de l'époque? Est-ce que, oui ou non, il se souvient que le ministre des Finances apportait de l'eau au moulin préréférendaire? Est-ce que, oui ou non, il ne s'est pas aperçu, à ce moment-là, que ce que ça signifiait pour lui, c'est qu'à l'heure où l'on se parle il est en charge d'assurer avec une tronçonneuse qu'on est en train de négliger le système de santé, négliger les patients, tout ça pour soigner l'option à l'époque, qui est l'option référendaire?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, le chef de l'opposition a l'air tellement préoccupé puis obnubilé par un passé qu'il essaie de faire oublier qu'il n'est pas capable de voir la situation où on est rendu. On était...

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Ce qu'on a vu à l'époque et les deux années qu'on a traversées, et toutes les confirmations qu'on a eues dans tout le réseau, c'était qu'on était dans une situation très difficile sur le plan de l'organisation des services de la santé, avec un retard énorme. On était dans une situation où non seulement on avait à faire face à ce qui nous avait été laissé comme héritage, mais on avait le gouvernement de la même couleur qu'on retrouvait à Ottawa qui nous a imposé des coupures énormes, qui a réglé son déficit sur notre compte. Et on a dû traverser une période qui a été réellement un enfer pour les gens du réseau, imposé par l'incurie de ceux qui nous ont précédés.

Mais là on en est sorti. C'est ça qui est l'avenir. Alors, le passé, moi, il ne m'obnubile pas. C'est l'avenir qui m'intéresse. Que ceux qui ont à se faire pardonner trouvent le moyen de le faire, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: En principale, M. le député de Pontiac.


Création du Fonds de gestion de l'équipement roulant

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Nous procédions ce matin au débat visant à l'adoption du principe du projet de loi n° 159, création d'un autre fonds, et on apprenait que le ministère des Transports allait procéder à des dépenses de 11 000 000 $ sur son parc d'équipement roulant, ce qui doublera les dépenses prévues aux crédits votés le printemps passé. Pourtant, grâce à la création d'un nouveau fonds, les dépenses aux livres indiqueront zéro pour l'année en cours.

Ma question, M. le Président, au ministre des Transports: Alors, M. le ministre – ma question est très simple – par quelle sorte de tour de magie peut-il doubler ses dépenses en inscrivant moins dans ses livres?

Le Président: M. le ministre des Transports.

(14 h 40)

M. Brassard: M. le Président, ce matin nous avons amorcé le débat sur le principe du projet de loi n° 159 qui prévoit justement la création d'un fonds de gestion de l'équipement roulant du ministère des Transports. Je suppose que le député de Pontiac a été inattentif lorsque j'ai prononcé mon allocution. Je vais brièvement lui rappeler ceci.

Il y a, je dirais, des centaines de milliers de Québécois qui, lorsqu'ils décident de s'acheter une voiture, une auto, étalent dans le temps le paiement ou le remboursement du prix de cet achat parce que c'est un bien durable, qui dure pendant plusieurs années, qui est utilisé pendant plusieurs années.

Alors, l'idée du fonds qu'on va créer par une loi, c'est précisément de faire en sorte qu'en ce qui concerne le parc de véhicules du ministère des Transports on puisse en amortir le coût et faire en sorte qu'on renouvelle cette flotte de véhicules, qu'on puisse la renouveler et, en même temps, l'amortir. Ça m'apparaît être, sur le plan comptable et financier, une méthode tout à fait acceptable que des milliers de Québécois et d'entreprises utilisent de façon régulière. Toutes les entreprises qui ont des parcs de véhicules, c'est ça qu'elles font. Alors, le gouvernement a décidé, pour ce qui est de son principal parc de véhicules, celui du ministère des Transports, de procéder aussi de cette façon.

Le Président: M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: M. le Président, le ministre n'a certainement pas répondu à la question. Toutefois, si je le comprends bien, après tout ce mot de passe-passe, un peu le discours de ce matin, est-ce que le ministre...

Le Président: En complémentaire, M. le député.

M. Middlemiss: Oui. M. le Président, si je comprends bien le ministre, il fera payer le prix de ses cachettes...

M. le Président, est-ce que le ministre fera payer le prix de ses cachettes en ajoutant de l'intérêt au coût des équipements que nous payions comptant sous notre régime?

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: Oui. M. le Président, peut-être que vous le payiez comptant, mais avec un déficit de près de 6 000 000 000 $. Ce n'est pas évident que c'était payé comptant.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Vous avez complété?

M. Brassard: C'est le ministre des Transports qui payait peut-être comptant, mais c'est le ministre des Finances qui empruntait. Ça se retrouvait dans le déficit de 6 000 000 000 $. Donc...

Deuxièmement, M. le Président, je voudrais référer à la thèse que les députés de l'opposition ont commencé à propager ce matin, puis ils vont se relayer, je ne sais pas, pendant un certain nombre de jours pour la propager, cette thèse-là, à l'effet que la création de ce fonds constitue une cachette ou une opération de camouflage. Alors, M. le Président, les opérations de ce fonds seront déposées à l'Assemblée nationale, examinées à la commission parlementaire de l'administration financière. Je ne vois pas où est la cachette, où est le camouflage. Tout va être rendu public et tout va se faire dans la plus totale transparence.

Le Président: En complémentaire.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, au ministre des Transports: Est-ce que le ministre des Transports considère normal et acceptable de financer sur cinq ans le salaire de centaines de fonctionnaires qui oeuvrent au ministère des Transports, qui vont oeuvrer dans ce fonds de gestion du parc automobile du gouvernement? Est-ce que c'est normal de financer sur cinq ans, comme une télévision en couleurs, le salaire de gens qui sont payés toutes les semaines, toutes les deux semaines et dont le salaire est payé maintenant mais financé sur cinq ans? Est-ce que c'est normal?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, là, probablement que c'est une autre principale parce qu'on change de fonds. Là, on change de fonds. Ce n'est plus le fonds pour gérer l'équipement, là, c'est le fonds pour l'amélioration du réseau routier. Alors, je ne sais pas. Vous considérez ça comme une principale? Parce que ce n'est nettement pas une additionnelle. Ceci étant dit, pour ce qui est du fonds concernant les travaux routiers, une partie...

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: Pour ce qui est du fonds concernant la restauration et l'amélioration du réseau routier, les dépenses d'investissement sont affectées au fonds et seront financées par voie d'emprunts. Ça comprend aussi ce qu'on appelle les dépenses connexes dans tout projet routier, c'est-à-dire les travaux visant à concevoir les plans et devis, les dépenses d'expropriation. C'est ce qu'on appelle les frais connexes. Ça fait partie du projet routier, donc il est normal que ça soit également financé de la même façon que pour les travaux proprement dits. Et puis il y a une partie des effectifs du ministère des Transports dont le travail est directement relié aux investissements routiers. Et ça aussi, il a été décidé – puis je trouve ça tout à fait normal – que ce soit également assumé par le fonds.

Le Président: En complémentaire.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Transports pourrait se détromper là et réaliser qu'on parle bien de ce Fonds de gestion de l'équipement routier? Sur ce fonds, dans le mémoire qu'il a déposé au Conseil des ministres, il affirme qu'il y a des centaines de fonctionnaires qui vont être payés par le fonds et dont le salaire étant payé maintenant, à chaque mois va être financé sur cinq ans. Est-ce que le ministre des Transports est au courant de ça?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: M. le Président, je comprends pourquoi il a fait un déficit de cette ampleur-là, parce qu'il confond bien des choses. Dans le fonds qui sera créé par la loi qui est à l'étude actuellement à l'Assemblée nationale, ce qui va être assumé par ce fonds, c'est uniquement les coûts d'acquisition des véhicules. La rémunération des effectifs, des employés qui se retrouvent dans les ateliers mécaniques, ça, c'est via l'unité autonome de services. Le ministre des Finances confond le fonds de gestion des équipements avec l'unité autonome de services; l'ancien ministre qui ne le redeviendra plus, je l'espère.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre des Transports s'aperçoit que faire un déficit, c'est acheter maintenant, payer plus tard; puis créer des fonds tout partout, c'est acheter maintenant, payer plus tard? Puis acheter maintenant, payer plus tard deux fois, ça se ressemble, et ce qu'il est en train de faire, c'est de continuer à endetter le Québec différemment.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Brassard: Non, M. le Président. Il y a des dépenses gouvernementales qui constituent des investissements et qui peuvent parfaitement et normalement être financées par voie d'emprunts. C'est le cas d'une école, c'est le cas d'un hôpital, c'est le cas d'un pont aussi qui dure 50 et 100 ans. C'est tout à fait normal et légitime, sur le plan comptable comme sur le plan financier, de pouvoir financer par voie d'emprunts de telles infrastructures.

Le Président: En complémentaire? Dernière complémentaire, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, est-ce que le ministre des Finances peut confirmer... des Transports, plutôt, M. le Président, je ne veux pas lui donner une promotion. Est-ce que le ministre des Transports peut confirmer que, dans le Fonds de gestion de l'équipement roulant dont on parle il n'y a aucun salaire qui va être financé sur cinq ans?

Des voix: Oups!

(14 h 50)

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: Dans l'allocution puis le discours que j'ai prononcé ce matin, j'ai clairement indiqué que ce qui serait financé par le Fonds de gestion de l'équipement roulant, c'est l'achat des véhicules dont a besoin le ministère des Transports, soit des camions, soit des équipements de toutes natures. C'est l'achat qui va être financé par le fonds.

Le Président: En principale, M. le député d'Iberville.


Problème de la pauvreté à Clarenceville

M. Le Hir: M. le Président, la Société Radio-Canada diffusait, vendredi dernier, un reportage décrivant la pauvreté endémique qui sévit à Clarenceville, dans le comté d'Iberville que j'ai l'honneur de représenter dans cette Chambre. Deux familles sur trois y vivent de l'assurance-chômage ou de l'aide sociale. En mission commerciale en Chine, le premier ministre s'émerveille quotidiennement de la vigueur du développement économique qu'il y constate. Cela n'a pas toujours été le cas. Tous les Québécois de mon âge se souviendront sûrement du temps où L'Oeuvre de la Sainte-Enfance leur offrait d'acheter un petit Chinois pour 0,25 $. Au rythme où vont les choses, les Chinois pourront nous acheter et nous revendre à crédit bientôt.

Ma question au vice-premier ministre est la suivante: Quand le gouvernement du Québec entend-il organiser une mission économique au Québec pour donner aux Québécois une chance au moins égale que celle qu'il est prêt à offrir aux Chinois?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Je ne sais pas si, M. le Président, le député d'Iberville cherchait à insulter la Chine, le Québec ou Clarenceville, mais je pense qu'en gros il a réussi à insulter les trois. Commençons par Clarenceville. Oui, ça peut être l'objet d'une intéressante monographie. Qu'on se penche sur le cas particulier de Clarenceville, je pense qu'il n'y aurait rien de déplacé à ça, s'il y a un problème de pauvreté spéciale là. Mais comparer le Québec qui est la quinzième puissance économique du monde avec un revenu de 20 000 $ par année par tête à la grande République populaire de Chine en émergence qui n'a pas un revenu de 500 $ par tête, ça prend du culot pour faire ça dans cette Chambre.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Comptabilisation de la mise en commun de services municipaux dans les dépenses compressibles des municipalités

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Le 9 octobre dernier, alors que le premier ministre et ses négociateurs confirmaient au monde municipal le pelletage de centaines de millions de dollars de factures dans leur cour, la présidente de l'UMRCQ, Mme Jacinthe Simard, sensibilisait le premier ministre à la situation suivante.

Plusieurs municipalités gèrent pour leur voisine la mise en commun de certains services municipaux, et on retrouve, comme vous le savez, M. le Président, dans les budgets de ces municipalités-là les dépenses inhérentes à ces ententes. C'est le cas notamment de Baie-Saint-Paul, du village de Saint-Sauveur-des-Monts, Boischatel, Parisville et quelques autres. Le premier ministre avait donné, et je le cite, «l'assurance qu'il verrait ça avec le ministre des Affaires municipales», fin de la citation. Les factures ont été acheminées la semaine dernière. Constat: Le gouvernement a délibérément choisi d'ignorer cette réalité.

Ma question au ministre des Affaires municipales: Est-ce qu'il pourrait, s'il vous plaît, faire exception à la règle et respecter une fois pour toutes les promesses du premier ministre et corriger les iniquités dont sont victimes plusieurs municipalités du Québec?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Alors, M. le Président, l'entente qui a été signée avec l'UMQ prévoit que nous allons calculer la contribution des municipalités à une hauteur de 5,78 % sur les budgets, moins les services de dettes des municipalités, et que l'ensemble des budgets des municipalités allaient être pris en compte. C'est-à-dire, que l'on fasse des achats d'une autre municipalité ou que l'on fasse des achats chez n'importe quel fournisseur de biens et de services, cela constitue le budget de la municipalité. Ce n'est pas parce qu'on a acheté une voiture chez un concessionnaire et qu'on a payé notre TVQ et notre TPS qu'on est exempté de la contribution de 5,78 %.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: Je ne comprends pas pourquoi on applaudit de l'autre bord, M. le Président.

Est-ce que le ministre des Affaires municipales pourrait... Le ministre pourrait-il nous dire si, oui ou non, il va régler cette inéquité qu'on retrouve dans plusieurs villes du Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, lorsqu'on prend les dépenses d'une municipalité, on prend l'ensemble des dépenses, des achats de biens et services et les salaires qui sont payés pour fournir les services à la population et, pour les fins de calcul de financement des activités locales, nous allons soustraire le service de la dette. Que ce soit bien compris.

Il peut arriver, oui, évidemment, qu'une ville achète des services d'une autre municipalité. Bien évidemment, le total de la dépense est escompté et comptabilisé dans cette municipalité et, donc, fait partie du budget. Il est évident aussi que la municipalité qui, elle, donne le service, vend ce service, a un revenu équivalent. Ça signifie donc que la dépense ou le revenu, à titre d'achat ou de vente de biens et services, est comptabilisé dans les deux budgets. À cet égard-là, ça fait donc partie des dépenses qui peuvent être compressibles dans une municipalité. Il nous apparaît normal que nous puissions comptabiliser, donc, dans le calcul l'ensemble des dépenses qui sont compressibles dans la municipalité.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le ministre des Affaires municipales réalise que sa négligence, son inaction et son incompréhension totale dans ce dossier vont avoir comme conséquence d'augmenter inutilement la facture des citoyens du village de Saint-Sauveur-des-Monts de 32 000 $, on parle de 25 000 $ à Baie-Saint-Paul et à Boischatel, et de 4 000 $ à Parisville? Réalise-t-il qu'il y a une différence entre gérer l'entente, recevoir les argents pour – excusez l'expression – les «dispatcher» ailleurs? Il y a une grande différence entre ça et les municipalités qui paient la contribution à la municipalité qui la gère.

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: Est-ce que la députée de Jean-Talon est en train de nous dire que, quand la ville de Sillery achète de l'eau de la ville de Québec et qu'elle la vend avec profits à l'Université Laval, on ne devrait pas compter cette dépense dans le budget de Sillery? Voyons donc! C'est une transaction financière qui fait partie soit des revenus, d'un côté, soit des dépenses, de l'autre, et ça fait partie des budgets de la municipalité. C'est la comptabilité municipale 001.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: Le ministre des Affaires municipales pourrait-il retourner sur les bancs d'école, apprendre comment ça fonctionne et réaliser qu'il n'y a pas une municipalité qui a le droit de faire de profits dans les ententes de services avec les autres municipalités?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, on peut certainement retourner dans l'histoire et aller examiner les livres de la ville de Sillery, et examiner le coût du prix de vente de l'eau à l'Université Laval par rapport à l'achat qui a été fait à la ville de Québec. On se rendra compte que cette municipalité, oui, effectuait une transaction en achetant des services et des biens d'une municipalité pour les revendre à un consommateur. Ça faisait partie de ses dépenses, tout comme ça faisait partie d'un revenu pour la ville de Québec. Et ça appartient au domaine des dépenses compressibles. C'est élémentaire en termes de calcul.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, question de directive. Comment peut-on demander au ministre de retirer ce qu'il vient de dire et dénoncer les menteries qu'on a entendues ici aujourd'hui?

(15 heures)

Le Président: Vous savez bien, Mme la députée de Jean-Talon, puisque vous avez maintenant suffisamment d'expérience, que vous ne pouvez pas, même sous le prétexte d'une directive à la présidence, faire ce que vous n'avez pas l'autorisation de faire, c'est-à-dire utiliser des propos qui ne sont pas parlementaires, d'une part. D'autre part, la façon de questionner ou d'exprimer une insatisfaction à l'égard d'une réponse ou d'une question, je pense que tout le monde sait comment on peut faire. Et ce n'est pas, encore une fois, à la présidence à trancher pour savoir dans quelle mesure une réponse est satisfaisante ou pas satisfaisante. Il y a des réactions que vous pouvez donner, des questions additionnelles que vous pouvez donner, et le jugement de la population qui nous écoute.

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: ...compte tenu de ce que la députée a dit, même en forme de directive, est-ce que vous lui demandez de retirer ce qu'elle a dit? Je pense que c'est important, parce qu'elle a employé des mots qui sont antiparlementaires.

Le Président: Compte tenu du contexte de l'échange, M. le leader du gouvernement, j'ai indiqué à Mme la députée de Jean-Talon que je n'acceptais pas ses propos. Pour le moment, je crois que c'est suffisant. M. le député des Îles-de-la-Madeleine, en principale?

M. Farrah: En additionnelle, M. le Président.

Le Président: En complémentaire.

M. Farrah: Oui. Comment le ministre des Affaires municipales explique-t-il que la municipalité de Cap-aux-Meules, aux Îles-de-la-Madeleine, s'est vu imposer une taxe de plus de 7 000 $ parce qu'elle a agi comme intermédiaire entre le ministère des Transports et la Corporation de transport adapté des Îles afin de lui faire parvenir l'aide annuelle statuaire de 122 000 $, à savoir, M. le Président, que c'est une entente comptable? La municipalité reçoit 122 000 $ une journée; la même journée, elle fait un chèque de 122 000 $ à la Corporation de transport adapté. Et là il faut qu'elle donne 5,78 % du 122 000 $, alors que l'organisme qui contrôle le transport adapté, la municipalité n'a aucun contrôle dessus. Elle est autonome et elle agit en pleine autonomie. Alors, comment expliquer cela, M. le ministre?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, j'ai été sensibilisé à la question de cette transaction par la municipalité de Cap-aux-Meules. J'ai déjà indiqué ici que nous étions capables de prendre en considération certains cas vraiment particuliers. Ce qu'il s'agit de voir: Est-ce que les biens et services qui sont achetés par la municipalité font effectivement partie de son budget de dépenses? Et, par ailleurs, est-ce que le budget de la municipalité qui reçoit le service, lorsqu'il s'agit de transaction entre deux municipalités, inclut bien la dépense ou le revenu que nous avons à calculer? Dans ce cas-là, nous pouvons examiner le cas particulier de Cap-aux-Meules.

Le Président: Mme la députée de La Pinière, en principale.


Disponibilité de volumes d'histoire dans des écoles de Montréal

Mme Houda-Pepin: M. le Président, le 16 octobre dernier, des jeunes de la rive sud de Montréal sont revenus à la maison avec une lettre de la direction de leur école qui se lit comme suit: «Il existe dans la région de Montréal une école secondaire en milieu défavorisé qui a grand besoin de votre aide. À cette école, les élèves de deuxième secondaire n'ont que très peu de volumes d'histoire à leur disposition, environ un pour deux élèves. Le volume qu'ils utilisent est celui que nous avions l'année passée. Nous vous remercions à l'avance de votre don. Il sera très apprécié.»

M. le Président, comment la ministre de l'Éducation explique-t-elle que des écoles de Montréal soient si dépourvues qu'elles ne puissent offrir à leurs élèves, sur une base individuelle, des livres d'histoire, et ce, à un moment où tout le monde s'entend pour dire que l'enseignement de l'histoire est déficient au Québec?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. D'abord, comme question de fait, j'ai demandé à mon ministère de s'enquérir auprès de chaque commission scolaire de l'état actuel des volumes disponibles dans toutes les écoles du Québec, parce que je crois qu'effectivement il est absolument essentiel que les étudiants et les étudiantes aient accès à des volumes en nombre suffisant.

Est-ce que c'est un pour tous les élèves dans toutes les matières? Pas nécessairement, sans doute, mais, dans les matières essentielles, cela va de soi, M. le Président. Alors, j'ai demandé, donc, qu'on fasse le point, qu'on identifie exactement là où ce ne serait pas le cas pour voir avec les commissions scolaires comment elles pourraient s'assurer que les élèves aient accès à des volumes de qualité.

Maintenant, quand la députée dit: Nous avons le volume de l'an dernier en histoire, il me semble que, en histoire, qu'on ait le volume de l'an dernier, ça ne doit pas nécessairement causer des troubles énormes, là – on se comprend? – d'apprentissage. Le volume est peut-être un petit peu détérioré, cela peut se passer, mais l'histoire, évidemment, rappelant les faits du passé, que ce soit celui de l'an dernier ou celui de cette année, ça doit demeurer un volume de qualité en termes scientifiques, étant entendu que, contrairement à ce que l'on croit et à ce qui est dit, les programmes ne se sont pas modifiés en profondeur depuis le début des années quatre-vingt, à l'exception d'une révision des programmes de français et de certains programmes de mathématiques. C'est d'ailleurs l'opération dans laquelle nous nous engageons, et là d'une façon systématique, M. le Président.

Le Président: La période des questions et des réponses orales, pour aujourd'hui, est terminée.


Motions sans préavis

Nous allons aborder l'étape des motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Souligner le jour du Souvenir

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je solliciterais le consentement de l'Assemblée nationale afin de débattre de la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne, en cette journée du 11 novembre, le jour du Souvenir, la mémoire de ceux et celles qui ont perdu la vie au cours des deux grandes guerres et des conflits qui ont suivi.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre? Il y a consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Entente un, un, M. le Président.

Le Président: Alors, une intervention de chaque côté. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le Président, c'est un grand honneur pour moi, au nom de tous mes collègues, de présenter et de prendre parole à l'occasion de cette motion. C'est un honneur particulier pour moi-même. En septembre 1939, quelques semaines après la déclaration de la guerre, un jeune homme de 18 ans, alors étudiant à l'école secondaire, se portait volontaire avec les Forces aériennes royales du Canada. Il a été à ce moment refusé; c'était trop tôt dans le processus.

In 1941, that same young man, then 20 years old, tried again and was at that occasion accepted into the RCAF. In 1943, he, along with 15 000 other young men, crossed the Atlantic Ocean on the Queen Elizabeth, arrived in England and spent little over two years in the 408th squadron of the Royal Canadian Air Force Bomber Command. Ce jeune homme, M. le Président, est mon père, et je suis très reconnaissant qu'il ait pu se joindre à nous aujourd'hui dans les tribunes.

Des voix: Bravo!

M. Copeman: Mr. Speaker, my father was not a war hero in the traditional sense of the word, but like the hundreds of thousands of Canadians and tens and thousands of Quebeckers who volunteered to serve their country, he is a hero nonetheless.

Plus d'un million et demi de Canadiens, incluant au-delà de 200 000 Québécois, ont servi dans les Forces aériennes, navales et terrestres de la Première et de la Deuxième Guerre mondiale et du conflit de Corée. De ce nombre, plus de 110 000 ont sacrifié leur vie à la défense de leur pays.

In the First War, Mr. Speaker, one only has to think of the Canadian Expeditionary Force of 620 000 men and the terrible casualties that they endured: over 10 % of the fighting force, at battles such as Ypres, Passendale and, perhaps best known, at Vimy Ridge. Pendant la Deuxième Guerre mondiale, plus d'un million d'hommes et de femmes, dont 175 000 Québécois, ont servi dans le combat contre le fascisme. Et, là encore, on pense à de grandes batailles où les Forces canadiennes étaient engagées, comme Dieppe, Normandie, Monte Cassino, la bataille de l'Atlantique et la bataille aérienne de la Grande-Bretagne. Ces hommes et femmes ont servi pour défendre leur pays et le droit de vivre dans un monde sans oppression.

(15 h 10)

Mr. Speaker, we of subsequent generations owe them more than many of us realize, because of things we now take for granted.

Ça serait peut-être approprié, M. le Président, de conclure par une portion du poème écrit par l'Anglais Laurence Binyon, qui fut même, après la Première Guerre mondiale, nommé chevalier de la Légion d'honneur par le gouvernement français. Ce poème a été écrit en 1914, quelques semaines après le commencement de la guerre, et il est récité lors des cérémonies du Souvenir à travers le pays.

Mr. Speaker, it might be appropriate to conclude with the words of the English poet Laurence Binyon, written in the opening weeks of that terrible war in 1914, now recited at Rememberance Day ceremonies across this great land:

«Ils ne vieilliront pas comme nous qui leur avons survécu. Ils ne connaîtront jamais l'outrage ni le poids des années. Quand viendra l'heure du crépuscule et celle de l'aurore, nous nous souviendrons d'eux.

«They shall not grow old as we that are left grow old. Age shall not weary them nor the years con them. At the going down of the sun and in the morning, we will remember them.» Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député de Taschereau, maintenant.


M. André Gaulin

M. Gaulin: M. le Président, nous rappelons aujourd'hui le jour où se termina la Première Guerre dite mondiale, à Rothondes, petite commune de France, le 11 novembre 1918. Ce jour dit du Souvenir nous rappelle aussi que, contre toute attente des femmes et des hommes de bonne volonté, un deuxième conflit planétaire fit violence à notre Terre et à ses vivants pendant six années de ferraille et de bataille.

De ces guerres absurdes ressort le triste bilan de près de 45 000 000 de victimes, des civils, et, pour le Québec et le Canada, de 95 000 militaires. «Est-ce ainsi que les hommes vivent?», demande un des témoins de cette époque, le poète Louis Aragon. Ce citoyen et écrivain évoquait d'ailleurs, dans L'affiche rouge, si bellement sonorisé par Léo Ferré, tous ces hommes dans la fleur de leur jeunesse à qui fut ravie la vie sur les champs d'honneur qui furent pour eux les champs d'horreur:

«Adieu la peine et le plaisir, adieu les roses,

«adieu la vie, adieu la lumière et le vent;

«marie-toi, sois heureuse et pense à moi souvent,

«toi qui vas demeurer dans la beauté des choses.»

M. le Président, je vous le demande, pourquoi y a-t-il toujours des guerres, de celles du Péloponnèse à celles qui ont tristement marqué le progrès technique et scientifique de ce XXe siècle qui vit apparaître l'arme nucléaire et raya de la carte Hiroshima mon amour et Nagasaki. Tous les imaginaires sociaux se sont nourris de la douleur, de l'angoisse, des drames humains engendrés par ces guerres, parce que, comme l'a chanté Charles Aznavour avec sa voix du frisson de vivre: «Toutes les fleurs sont mortes aux fusils de nos pères.» Nous en avons gardé le coquelicot, fleur d'espérance.

Je termine, M. le Président, en rappelant à notre mémoire ceux qui sont tombés dans la grande tuerie de ce siècle, en particulier à partir de cette Assemblée nationale, ceux qui sont morts, du moins le voulions-nous ainsi, pour la liberté et une paix qui dure. C'est pourquoi nous devons plus que jamais nous convaincre que la paix durable, tout comme le développement durable, ne peut être que le fruit d'une véritable démocratie, d'une grande concertation et d'une vigilance de tous les instants. Aux hommes d'ici tombés pour nous et par nous, pour un amour de la France à libérer que partage l'Azarius Lacasse de Bonheur d'occasion et le Napoléon Plouffe de Roger Lemelin, nous pourrions redire un bref extrait de cette remarquable suite fraternelle de Jacques Brault, un long poème lyrique adressé à son frère Gilles mort en Sicile:

«Je me souviens de toi, Gilles, mon frère oublié dans la terre de Sicile, je me souviens d'un matin d'été à Montréal, je suivais ton cercueil vide. J'avais 10 ans. Je ne savais pas encore. Maintenant, je sais que tu es mort avec une petite bête froide dans la gorge, avec une sale peur aux tripes. J'entends toujours tes 20 ans qui plient dans les herbes crissantes de juillet. Je crois, Gilles, je crois que tu vas renaître. Tu es mes camarades aux poings durs, à la paume douce. Tu es notre secrète naissance au bonheur de nous-mêmes.»

M. le Président, que celles et ceux qui survivent aux hommes et aux femmes fauchés par les guerres de ce siècle se souviennent aujourd'hui.


Mise aux voix

Le Président: Alors, il m'apparaît évident que la motion du député de Notre-Dame-de-Grâce est adoptée à l'unanimité.

Alors, est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je pense qu'il est de tradition, sauf erreur, que nous observions une minute de silence à l'honneur de ceux et celles qui sont décédés au champ de bataille.

Le Président: Je ne le sais pas, parce que je pense que ça faisait déjà quelques années, malheureusement, que ce jour du Souvenir n'était plus rappelé à l'Assemblée nationale. Je pense que c'est une bonne chose que ça le soit cette année, et j'espère que ça le sera dans les années à venir. Alors, effectivement, je crois qu'on pourrait se lever pour observer un moment de silence.

(15 h 16 – 15 h 17)

Très bien. Si vous voulez vous rasseoir.

Alors, toujours à l'étape des motion sans préavis, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Je voudrais solliciter le consentement de l'Assemblée pour déposer la motion suivante:

«Que, conformément à l'article 178 du règlement de l'Assemblée nationale, une commission parlementaire spéciale soit constituée afin de donner suite au rapport final du Protecteur du citoyen sur les circonstances entourant le refus du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de délivrer un permis d'exploitation d'une usine de transformation de produits marins.»

Le Président: M. le leader du gouvernement, est-ce qu'il y a consentement?

M. Jolivet: M. le Président, je comprends très bien la demande du député quant à la commission parlementaire étudiant le rapport du Protecteur, mais, sachant que le contenu du rapport est sub judice, je me refuse à ce moment-ci d'en faire quelque étude que ce soit tant qu'on n'aura pas reçu quelque décision des tribunaux.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Sauf erreur, M. le Président, le leader du gouvernement invoque les dispositions de l'article 35, paragraphe 3°, de notre règlement. Je pense que vous avez déjà rendu des décisions concernant l'application de cet article: «Le député qui a la parole ne peut parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit.»

Je pense qu'il y a possibilité, dans les circonstances, de donner suite à la motion tout en appliquant très rigoureusement, au cours de la commission, les dispositions de l'article 35.3°, sinon le Parlement serait à jamais bâillonné sur ce sujet.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup, sur la question de règlement.

M. Dumont: En effet, M. le Président, le Protecteur du citoyen a produit un rapport sur le sujet. Le rapport du Protecteur du citoyen, à ma connaissance, n'a pas été, lui, porté devant les tribunaux. S'il y a des aspects du rapport qui sont sub judice, ça sera, à ce moment-là, aux membres de la commission et au président de la commission à être prudents dans l'exécution du mandat dont il est question dans la motion. Mais le rapport du Protecteur du citoyen, à ma connaissance, lui, n'est pas porté devant les tribunaux. Ce rapport-là est à être débattu par les parlementaires, si tant est que les parlementaires prennent au sérieux des actes aussi répréhensibles que ceux que décrit le Protecteur du citoyen, qui ont été commis par le gouvernement.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

(15 h 20)

M. Jolivet: M. le Président, en aucune façon je ne veux bâillonner qui que ce soit. Tout le monde connaît ma grande ouverture d'esprit. Dans ce contexte-là, M. le Président, je ne donnerai à personne la capacité, qui pourrait être malheureuse à un certain moment donné, de passer outre à ce qui est sub judice. Dans ce contexte-là, je serais prêt à regarder l'ensemble de ce dossier, si jamais il est nécessaire de le faire, lorsque les jugements seront rendus, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, il semble y avoir différentes interprétations des possibilités qui s'ouvrent à l'Assemblée nationale du Québec et, comme vous êtes l'arbitre des différentes interprétations, M. le Président, est-ce que vous auriez l'obligeance de rendre une décision à l'effet s'il nous est interdit, ici, à l'Assemblée nationale, conformément aux propos du leader du gouvernement, de traiter de ce rapport du Protecteur du citoyen ou si ça nous est permis, dans le cadre et le respect de l'article 35.3?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, non, il n'en est pas question, puis j'essayais d'expliquer pourquoi.

Le Président: Alors, je suis convaincu que, de part et d'autre, vous savez très bien qu'à ce moment-ci la présidence n'a qu'à demander s'il y a consentement ou pas et constater s'il y a consentement ou pas. Quant aux raisons, elles peuvent être valables ou pas. À ce moment-ci, je n'ai pas à les apprécier.

Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Sinon, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. À ce moment-ci, je cède la parole au leader du gouvernement.

M. Jolivet: Merci, M. le Président. J'avise donc cette Assemblée que la commission de la culture poursuivra les consultations particulières sur le rapport du comité sur le développement d'une très grande bibliothèque intitulé Une grande bibliothèque pour le Québec aujourd'hui, de 15 h 30 à 17 heures, ainsi que demain, le mardi 12 novembre 1997, de 9 heures à midi, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 158, Loi abrogeant certaines lois permettant la constitution de personnes morales en matière agricole et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira en séance de travail aujourd'hui, le mardi 11 novembre 1997, après la période des affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de formuler les conclusions et recommandations de la commission comme suite de l'audition des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira demain, le mercredi 12 novembre, de 9 heures à midi, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est d'entendre le secrétaire du Conseil du trésor et le président du Comité des responsables concernant la fonction de vérification interne au gouvernement du Québec, conformément, toujours, à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Avis de sanction

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vous avise, en ce qui me concerne, qu'il y aura sanction de plusieurs projets de loi au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur, aujourd'hui, à 16 heures.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Et je vous informe que demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion de M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale déplore l'absence de politique du gouvernement du Parti québécois visant à éliminer l'exclusion et à diminuer le fossé économique et social qui se creuse entre les jeunes et les autres générations.»


Affaires du jour

Alors, nous allons passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Pour permettre aux gens de se préparer, j'ai entendu dire qu'il y aurait deux débats de fin de séance et que vous les annonciez à ce moment-ci.

Le Président: Je n'ai pas eu d'avis, M. le leader du gouvernement, à ce moment-ci.

M. Jolivet: O.K. Alors, nous sommes aux affaires...

Le Président: Du jour.

M. Jolivet: ...du jour. L'article 4, M. le Président.


Projet de loi n° 159


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Président: Alors, l'Assemblée, à ce moment-ci, va reprendre le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

À ce moment-ci, qui est le prochain intervenant? M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams (suite)

M. Williams: Oui. Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais terminer mon intervention que j'ai commencée avant la période des questions sur le projet de loi n° 159. Le projet n° 159, comme je l'ai mentionné, M. le Président – et j'essaie de comprendre le ministre quand il essaie de répondre pendant la période des questions, mais je pense qu'il est peut-être en train d'ajuster sa position – effectivement, c'est assez clair. Comme le titre le dit, c'est la création d'un autre fonds qui va essayer de cacher le déficit.

Le ministre a répondu au député de Papineau qu'il n'y a pas de personnel dans ça, pas de ressources humaines. Mais c'est clair, dans l'article 2 du projet de loi, on parle du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de l'équipement roulant. Gestion, ça veut dire ressources humaines, c'est les fonctionnaires.

Avec ça, M. le Président, c'est clair et net que nous sommes en train d'hypothéquer notre futur. Nous sommes en train d'emprunter, comme nous en avons déjà discuté ici, en Chambre. On veut dépenser de l'argent maintenant et payer plus tard. C'est clairement une façon, comme ils ont fait dans plusieurs autres fonds, de cacher le déficit – j'ai déjà mentionné lors des premières 15 minutes une longue liste de fonds spéciaux qui sont créés – de prendre les dépenses dans la colonne vérifiée, dans les grandes dépenses gouvernementales, ce qui est plus ou moins 40 000 000 000 $, mettre ça à côté, d'essayer de cacher ces fonds. C'est assez clair, là, qu'il est en train de cacher. C'est une fraude intellectuelle que nous sommes en train de faire, et je pense qu'on doit avec toute notre rigueur dénoncer cette façon de travailler.

Nous avons vu ça dans le secteur de la santé, le secteur de l'éducation et plusieurs autres. Maintenant, on voit ça dans le transport. Il veut payer pour les fonctionnaires, pour la gestion de la flotte roulante, pour la gestion; il veut payer ça maintenant, il veut dépenser ça maintenant mais payer ça plus tard. Est-ce qu'il veut payer pour les salaires qu'il paie chaque semaine, est-ce qu'il veut payer pour ça dans cinq ans, sept ans, 10 ans, 15 ans? On ne sait pas, mais on doit questionner ce que le gouvernement est en train de faire dans cette question, M. le Président.

C'est un autre exemple du double langage de ce gouvernement. Il suppose une chose, la grande lutte pour le déficit zéro, mais là il ne fait pas vraiment le travail comme les autres provinces et le gouvernement fédéral le font pour la lutte contre le déficit, pour baisser le déficit à zéro. Il est en train de juste ajuster, mettre ça dans une autre place, cacher ça. Mais, M. et Mme Tout-le-Monde comprennent mieux que ça, ils voient que c'est vraiment juste un autre fonds, qu'ils vont continuer de dépenser de l'argent.

Juste les chiffres que j'ai mentionnés, M. le Président, c'est assez clair. L'année passée, le budget, c'était 40 864 000 000 $; dans le budget proposé cette année, c'est 40 276 000 000 $. Où est-ce qu'ils ont coupé? Oui, effectivement, dans la santé et l'éducation, mais est-ce qu'ils ont coupé dans les autres secteurs? Non. Ils ont créé les fonds spéciaux. Ils ont mis les dépenses ailleurs. Ils sont en train, comme j'ai dit – j'ai besoin de répéter assez souvent pour peut-être convaincre le ministre, cette fois-là – d'essayer de cacher les dépenses.

Et notre fonction publique est prête à accepter le défi. De plus en plus, nous avons demandé de faire plus avec moins. Mais maintenant le gouvernement est en train de faire: C'est pas grave, ça; cache ça. On a essayé de faire un réaménagement à l'échelle du Titanic. Il est en train de juste bouger ça. Est-ce que ça va être le ministre des Transports qui paie ou est-ce que ca va être caché ailleurs? Il a décidé d'essayer de cacher ça ailleurs. M. le Président, ce n'est pas une bonne façon de responsabiliser notre secteur. Et est-ce que ça va nous aider? Non, parce que nous avons vu pendant trois ans une négligence incroyable dans ce secteur; ils n'ont pas dépensé pour le soutien ni pour l'amélioration de nos routes.

(15 h 30)

Arrivé maintenant au but, à la fin de ce gouvernement – on voit de plus en plus les sondages qui augmentent, que les Québécois ne veulent rien savoir de ce gouvernement – il arrive avec une autre petite astuce d'essayer de changer, essayer de dire qu'il fait quelque chose. Il dit qu'il veut souscontracter avec les autres ministères. On n'a pas besoin de loi pour faire ça. S'il veut faire ça, il peut le faire, M. le Président. Je me demande pourquoi on arrive avec un projet de loi n° 159, comme ça. C'est clair et net: Il veut créer un autre fonds, il veut cacher les dépenses gouvernementales, il veut, à sa façon, essayer de passer une autre astuce devant la population québécoise. Mais on sait, c'est une bombe à retardement. Là, peut-être que le gouvernement a oublié le vrai financement, mais, une fois que vous avez emprunté de l'argent, si vous avez emprunté de l'argent dans une banque, vous pouvez essayer de prolonger les paiements, mais vous allez payer l'intérêt, et vous allez payer beaucoup plus cher. Et, à la fin de l'année, vous aurez besoin de payer. Je sais que ce gouvernement essaie de juste passer ça dans le futur.

On essaie aujourd'hui, M. le Président, de dire au gouvernement que ce n'est pas une bonne façon de gérer nos affaires. Ce n'est pas une bonne façon. On doit arrêter de créer des fonds spéciaux. On doit prendre vraiment la responsabilité de gérer les finances publiques d'une façon beaucoup plus responsable. Et de juste créer une autre place, de mettre les dépenses ailleurs, de cacher ça, je pense que la population va dire: Non, ce n'est pas une façon de gérer nos finances publiques.

M. le Président, je demande tout de suite au ministre des Transports de refaire son travail. S'il veut vraiment aider notre équipement roulant, s'il veut vraiment améliorer ça, mettre de l'argent, avoir le courage de dire: Oui, c'est une priorité de ce gouvernement... Arrêtez de jouer avec un «shell game», de juste dépenser de l'argent à une place ou une autre. Je pense que les Québécois et les Québécoises méritent beaucoup mieux que ça. On ne veut pas avoir cette fraude fiscale, cette fraude intellectuelle. On veut avoir un gouvernement qui est transparent, honnête et qui respecte ses engagements. On ne veut pas avoir un autre exemple du double langage de ce gouvernement Bouchard. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir à ce moment-ci sur le projet de loi n° 159. J'écoutais mon collègue expliquer la façon dont il fallait lire, voir, comprendre l'initiative du gouvernement à l'égard de ce projet de loi. Il n'est peut-être pas inutile, d'entrée de jeu, de juste mettre la table avec quelques données qui vont nous permettre de comprendre pourquoi le projet de loi n° 159 existe et pourquoi nous devons en débattre aujourd'hui.

Mon collègue en a parlé un petit peu tantôt, lorsqu'on regarde les chiffres, lorsqu'on compare les années et lorsqu'on entend toujours qu'il doit y avoir des efforts de coupures – et des coupures, il y en a, oui, dans le secteur de la santé à une hauteur de 4 %, dans le secteur de l'éducation à une hauteur de 6 % – le problème, ce que les Québécois ne savent pas – et la lumière doit être faite là-dessus – c'est qu'en même temps qu'il y a des coupures au ministère de l'Éducation et au ministère de la Santé il y a des augmentations à certains ministères. Lesquels? Au ministère des Finances, au ministère du Revenu, au Conseil du trésor et au bureau du premier ministre, et là c'est 90 % de hausse. C'est ce qui nous amène à un effort gouvernemental de 0,6 %. Comme cet effort de 0,6 % ne peut en aucun cas amener un zéro, il doit y avoir une autre manoeuvre pour essayer de mettre un zéro sur la table. C'est ce que vient faire le projet de loi n° 159.

Je suis heureux d'intervenir en après-midi, tout de suite après la période de questions, alors que le ministre des Transports a été d'une limpidité, me semble-t-il, exemplaire dans ce cas-là – bien que je ne pense pas que c'était intentionné – lorsqu'il a dit: Le but de l'affaire, c'est de faire un fonds pour emprunter et que ça ne paraisse pas dans le fonds général. C'est tout ça, la différence entre avant le projet de loi et après le projet de loi. Ce n'est pas que l'emprunt ne sera pas fait, ce n'est pas qu'il n'y aura pas un déficit, c'est que ça ne paraîtra pas dans le fonds général. Lorsqu'on est en face d'un projet de loi qui vise la création d'un fonds, il faut se demander pourquoi on veut créer un fonds, le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

M. le Président, juste pour regarder un peu l'effet de ce fonds-là dans les postes budgétaires du ministère des Transports, aux crédits de l'année passée il y avait un poste budgétaire pour l'équipement roulant: 5 000 000 $. Ça, c'est dans le projet de loi actuel, la situation avant le projet de loi. Avec le projet de loi, qu'est-ce qu'on va retrouver? On va retrouver, au lieu d'une dépense de 5 000 000 $ – et là on est toujours supposément dans des coupures... À la Santé et à l'Éducation, ça, on le sait, que ça coupe, puis en masse à part de ça, mais, dans le domaine du transport, de l'équipement, 5 000 000 $, là on va aller à 11 000 000 $. Est-ce que ça va paraître dans les chiffres du gouvernement, dans le fonds général? Non, non. De 5 000 000 $ on va en dépenser 11 000 000 $, mais on va mettre ça dans un fonds spécial et on va mettre un zéro.

Ce qu'on est en train de faire en créant une multitude de fonds, c'est d'enlever les aspects passifs du fonds général, on garde les éléments d'actifs et on arrive avec un beau zéro. Tout ce qui était en surplus de passifs, on les met, on les éclate dans un nombre incroyable de fonds. Je vous en fais une liste rapide, M. le Président: le fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier, c'en est un; le Fonds de gestion des départs assistés, c'en est un autre; le Fonds d'assistance financière pour les régions sinistrées; le Fonds de lutte contre la pauvreté; le Fonds d'aide à l'action communautaire; le Fonds des pensions alimentaires; le Fonds des services de police; et là on a ce nouveau Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Qu'est-ce que ces fonds, M. le Président? Ces fonds, ce n'est rien d'autre, lorsqu'on les regarde comme il faut, que de démontrer que le ministre des Finances a tort lorsqu'il nous dit que zéro égale zéro. Dans ce cas-ci, avec le gouvernement du Parti québécois, avec ses subtilités et ses astuces, zéro n'égale pas zéro. Zéro au fonds général signifie des déficits dans un nombre incalculable de fonds qu'on va avoir créés pour aller cacher des déficits, aller cacher des passifs qui auraient empêché d'atteindre un zéro. Il n'y a pas de courage là-dedans.

J'entends souvent des ministres du côté du parti ministériel qui disent: On est courageux. Courageux dans quoi? Courageux dans la cachette, M. le Président? Courageux dans l'éclatement d'un nombre incroyable de fonds pour dire aux Québécois: Notre fonds général est à zéro. Ah! mais les autres fonds? Ah bien! ça, les autres fonds, comprenez-moi bien, c'est normal qu'on emprunte pour ça. La question, c'est: Si c'est normal que vous empruntiez, M. le Président, comme le ministre des Transports l'a dit aujourd'hui, pourquoi on ne le dit pas aux Québécois? Pourquoi on le cache? Moi, je n'ai pas de problème si le ministre des Transports veut emprunter, qu'il le dise. Qu'il le dise, que ce soit transparent. On ne peut pas faire accroire aux Québécois qu'on va atteindre un zéro quand on ne l'atteint pas, quand on le cache.

Je vous ai parlé d'un nombre assez effarant d'autres fonds, M. le Président. Il n'y a pas juste les fonds qui se multiplient et qui permettent de cacher les passifs pour essayer de faire apparaître par magie un zéro au fonds général, il y a pire que ça. Ça, le pire, c'est les effets des coupures, coupures de la santé, coupures de l'éducation. Parce que c'est toujours ça qu'il faut regarder. Il y a des coupures à la mauvaise place. Quand on coupe à l'éducation et à la santé et qu'on augmente 90 % des crédits au bureau du premier ministre, au ministère des Finances, au Revenu et au Conseil du trésor, M. le Président, il y a quelqu'un quelque part qui ne sait pas ce qu'il fait ou, s'il le sait, il le fait dans le dos des Québécois.

Pendant qu'on coupe à l'éducation et à la santé, qu'est-ce qui se passe, M. le Président? Comment ça se reflète? Le gouvernement dit: Écoutez, j'ai baissé mes passifs, j'ai moins de déficit parce que j'ai coupé à la santé et à l'éducation. On voit l'effet que ça fait lorsqu'on visite les hôpitaux, lorsqu'on visite les institutions qui offrent des services qu'on espérerait les meilleurs pour nos concitoyens.

La semaine passée, M. le Président, je suis allé à l'UQTR, à Trois-Rivières, rencontrer le recteur. Je lui demandais comment ça se passait. Le Parti libéral du Québec, on se promène un peu partout, on essaie de voir comment les gens réagissent, notamment dans les domaines de la santé et de l'éducation, parce qu'on considère que c'est fondamental. Je rencontre le recteur de l'UQTR. Alors, il y a des coupures. J'ai dit: Comment ça se ressent, ces coupures-là? Alors, évidemment, il y a un gros impact sur l'avenir, sur les jeunes qui vont s'en venir tantôt nous remplacer, sur la relève, sur la recherche, la recherche qui est souvent porteuse de création d'emplois. Vous voyez, on affecte demain en coupant aujourd'hui.

Mais qu'est-ce qui se passe dans les livres des institutions comme l'UQTR? Bien, on cache le déficit là aussi, M. le Président. Non seulement on éclate le déficit dans un nombre incalculable de fonds gouvernementaux, mais on dit aux institutions: Faites des déficits. Empruntez. Remplacez nos emprunts pour qu'on puisse essayer de montrer un zéro aux Québécois. Mais, dans le bulletin du gouvernement du Parti québécois, c'est là qu'il va être, le zéro. On ne le cherchera pas ailleurs, c'est dans leur bulletin.

(15 h 40)

À l'UQTR, en mars 1996, il y avait un surplus de 2 000 000 $. Alors, là, ils avaient fini de référender. Nous autres, on pensait qu'ils auraient pu gouverner, mais finalement référender, ce n'était pas si pire parce qu'ils nous épargnaient pendant ce temps-là. Là, ils sont arrivés. Toujours en augmentant de 90 % des postes comme le bureau du premier ministre et le ministère des Finances, on coupe dans la santé, dans l'éducation. À l'UQTR, un surplus de 2 000 000 $ s'est transformé en deux ans, M. le Président, en un déficit de 5 000 000 $. Il y a 7 000 000 $ qui étaient dans le déficit du gouvernement du Parti québécois qu'on a pris et qu'on a mis dans le déficit de l'UQTR.

Je vous donne un exemple, M. le Président. C'est un exemple parmi tant d'autres, et, en faisant le tour de tout le Québec, de toutes les institutions, on va se rendre compte que c'est un mirage, que c'est une opération de camouflage, cette opération soi-disant d'assainissement des finances publiques. Ce n'est pas l'assainissement des finances publiques; c'est le camouflage des finances publiques, c'est un écran de fumée sur un gouvernement qui n'a jamais eu comme préoccupation le progrès économique du Québec, la création d'emplois au Québec.

Le ministre des Finances, qui s'occupe d'économie depuis trois ans maintenant, n'a jamais déposé ici, en cette Chambre, l'ombre du début d'une réflexion d'une politique qui amènerait au dépassement du Québec, à la création d'emplois, la création de la richesse. On a inventé, avec ce gouvernement, M. le Président, la redistribution de la richesse, richesse créée par de la taxe. On a inventé de la taxe sur la pauvreté pour essayer de redistribuer de la richesse. Ce n'est pas par la taxe. Là-dessus, le ministre des Finances avait raison, la taxe tue l'emploi. Mais pourquoi tant de taxes, dirions-nous, M. le Président? Pourquoi avoir tant haussé les taxes? Pourquoi ne pas avoir fait une politique, ne serait-ce qu'une esquisse, ne serait-ce que le début d'une réflexion qui amènerait les Québécois à se dire: Ce gouvernement-là, il veut créer de la richesse et on pourra la redistribuer? Et pas du tout. Ce n'est pas ça qui s'est passé, M. le Président.

Alors, vous nous demandez aujourd'hui, le gouvernement nous invite à débattre de son projet de loi. Il nous invite parce qu'il souhaiterait qu'on l'appuie. M. le Président, si j'avais à appuyer le gouvernement sur ce projet de loi, je me ferais complice de sa tentative de camoufler aux Québécois les finances publiques, le véritable état des finances publiques. M. le Président, jamais, jamais je ne me joindrai à ce gouvernement pour ériger en principe absolu le fait qu'il est mieux que les Québécois ne sachent pas. C'est ça qui les motive.

On a le député d'Iberville, M. le Président, qui nous fait la démonstration dans un livre de ce qui se passait au Conseil des ministres et qui n'a jamais été dit. La cachette, l'omission, ne pas dire ce qui se passe, c'est la ligne de conduite, c'est maintenant la ligne de parti du Parti québécois, M. le Président. Cacher, refuser de dire, essayer d'amener les gens à croire la façade en se disant: Si on réussit à bien jouer nos cartes, à bien jouer nos réseaux de marketing et de communication, on va les avoir.

M. le Président, j'entends ces gens parler de démocratie, ils n'en croient pas un mot. Vous allez les entendre encore, au cours des prochains jours, des prochaines semaines, des prochains mois, déchirer leur chemise au nom des Québécois, de la démocratie. Quand vous regardez les pièces législatives qu'ils nous apportent, c'est le contraire qu'ils nous proposent. Ils nous proposent, ils nous demandent de s'associer à eux pour ne pas dire aux Québécois ce qu'il y a de plus fondamental lorsqu'on administre des fonds publics: quel est l'état de ces fonds publics, un domaine comme bien d'autres où ce gouvernement a choisi de ne rien dire aux Québécois.

Le député d'Iberville a fait un livre où il nous dit qu'en l'espace d'une séance du Conseil des ministres on a inventé 600 000 000 $ de déficit de plus par un tour de passe-passe, un tour de passe-passe comme le projet de loi n° 159 nous demande de faire. Et on nous demande d'être complices de ces actions-là? Jamais, M. le Président! Du camouflage, des cachettes, il y en a tout le temps, ce gouvernement-là nous en fait constamment.

Je vais vous rappeler le plan O. Je ne sais pas si vous vous souvenez de ce que c'est, le plan O. Le plan O, c'est la machination du gouvernement du Parti québécois pour, en prévision d'un référendum positif qui serait dommageable pour l'économie du Québec, prendre 20 000 000 000 $ de nos économies dans nos fonds de retraite – 20 000 000 000 $ de l'argent des Québécois et des Québécoises, ce n'est pas de la petite bière, là – et mettre ça dans un fonds perdu, en espérant que le yoyo remonte avant qu'on ait tout perdu. Bien, quand est-ce, M. le Président, que ça a été dit aux Québécois, ça, avant le référendum? Jamais. C'est arrivé après, la vérité est venue après. Le député d'Iberville vient de sortir un livre qui, me semble-t-il, doit nous ramener tous, ici, à être toujours très attentifs à ce que le gouvernement nous propose, à toujours avoir à l'oeil et à l'attention qu'il peut se cacher des intentions.

Le ministre des Transports nous a dit tantôt: Je crée un fonds, ça ne change pas ce que vous faisiez avant, on va emprunter pour l'avenir. Mais, quand tu grattes un peu... Il disait ça, tantôt, à la période des questions. Quand tu grattes un peu, mais pourquoi un projet de loi, d'abord? Si c'est pour emprunter, là, c'est quoi, la différence? Bien, il dit: C'est parce que – mais il ne le dit pas, il faut qu'on fouille un peu, il faut qu'on gratte – comme on va avoir un fonds spécial, ça, ça va être dans une petite annexe, dans un petit volume qui ne viendra pas en même temps qu'on va faire notre fonds général, puis on va dire qu'on est arrivé à zéro. Le ministre des Transports est devant vous, là, puis il vous dit: Ça va nous permettre de dire aux Québécois: J'ai trouvé un zéro quelque part.

Mais, M. le Président, l'ensemble des parlementaires, ici, qui avons comme fonction de surveiller l'Exécutif, on ne doit pas laisser passer ces tours de passe-passe. Et j'espère qu'au caucus du Parti québécois il y a du monde qui va frotter les oreilles de l'Exécutif puis qui va lui dire: Je pense qu'on est démasqué, je pense qu'ils ont compris les petits tours de passe-passe qu'on faisait. C'est à croire que Jean-François Lisée commence à avoir moins de subtilité, M. le Président. On voit le jeu qui se cache derrière ces manoeuvres.

Il n'y a rien dans le projet de loi, il n'y a rien d'autre que de retirer des montants de dépenses du gouvernement de manière à ce que les revenus puissent, à un moment donné, être suffisants avec certaines dépenses. Parce que c'est toujours ce que les gens nous demandent: Puis, vous autres, qu'est-ce que vous feriez? De ce côté-ci, M. le Président, d'abord, on a assez de respect pour la notion de démocratie que la première chose qu'on pense, qui nous anime comme députés en cette Chambre, c'est qu'on doit bien aux Québécois la vérité. Et la vérité, c'est la transparence et c'est de savoir c'est quoi, l'état des finances publiques. Ça, c'est de ce côté-ci, c'est comme ça qu'on voit les choses.

Puis, deuxièmement, on pense, nous, qu'il est possible de l'atteindre, le déficit zéro. De l'autre côté, ils disent: On va l'atteindre, mais ils ne le croient pas parce qu'ils ne prennent pas les moyens pour l'atteindre. Quand on y croit, on met en place un programme, on met en place des outils, on met des objectifs, une planification, un programme. Dans ce cas-ci, oui, on a coupé. On a coupé à l'éducation, à la santé, deux secteurs névralgiques pour les Québécois, et on a augmenté de 90 % les crédits du bureau du premier ministre, du ministre des Finances, du Conseil du trésor, du ministre du Revenu.

(15 h 50)

Mais, M. le Président, ce n'est pas ça, des moyens, une planification pour arriver au zéro. Nous, M. le Président, de ce côté-ci, on pense qu'assainir les finances publiques ça veut dire mettre en place les moyens, regarder la colonne des revenus, avoir des incitatifs à la création d'emplois. Atteindre le déficit zéro, ça veut dire arriver à un vrai zéro. Les députés du parti ministériel, de l'Exécutif, et les autres, ils n'atteindront pas le déficit zéro parce qu'ils ne le visent pas. Ils en parlent, mais, comme toute l'action ou l'inaction que nous lègue ce gouvernement, ils ne font qu'en parler, M. le Président. Parce que dans les faits le déficit zéro, ils n'y croient pas, ne prennent pas les mesures pour y arriver. Et le zéro qu'ils vont nous montrer, c'est un zéro de conduite parce qu'ils auront caché aux Québécois, dans une multitude de fonds, les déficits qu'ils ne veulent pas montrer, qui sont leur honte. Ils vont les cacher dans des déficits d'institutions, cégeps, universités, régies régionales de la santé, les hôpitaux. C'est là qu'ils sont, les déficits de ce gouvernement.

À nous, on demande d'être complice de ces cachettes, de ces manipulations, de ce faux zéro. La réponse est non. Nous sommes convaincus qu'un véritable déficit zéro est atteignable mais dans le respect de la vérité, dans le respect des Québécois et en ayant à coeur le progrès et le développement du Québec et non de toujours chaque jour essayer de nous ramener la grande noirceur. Ils sont en train d'y arriver, mais nous allons mettre un éclairage là-dessus, M. le Président, le plus rapidement possible. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Châteauguay. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Abitibi-Ouest. M. le député.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui. Merci, M. le Président. Devant autant de discours axés sur le passé et toutes sortes de données complètement fausses, erronées qui relèvent davantage de l'idéologie politique que du principe du projet de loi, je voulais au moins prendre cinq minutes de mon 20 minutes sur le projet de loi. Mais, de toute évidence, les amis d'en face n'ont aucunement l'intention de dire quoi que ce soit sur le projet de loi. Ils aiment mieux continuer un certain nombre d'énormités qui les ont caractérisés pendant neuf ans, puis, moi, je les ai toutes vécues les unes après les autres. Ça fait qu'on va s'en parler. C'est de ça qu'ils veulent qu'on discute? On va s'en parler, bien calmement, très froidement.

Mais je voudrais quand même prendre, je l'ai dit tantôt, cinq minutes sur le projet de loi. Les gens qui nous écoutent, ils ne doivent pas le savoir après avoir entendu les quatre, cinq répondeurs automatiques qui ont une commande de dire la même chose. Et ce n'est pas nouveau, je veux dire, ils ont une commande très automatique: Il faut que vous disiez la même chose: Nous, on est contre les fonds dédiés, on ne sait pas pourquoi, ça n'a pas d'importance, mais il faut parler contre, et, comme on n'a rien à dire là-dessus, on va dire ce que j'ai entendu depuis le matin sur ce projet de loi là.

Mais ce qu'on a à étudier, M. le Président, très clairement, c'est le projet de loi n° 159. Et, pour des gens qui parlent de cachette, de vouloir camoufler, de vouloir tromper, de vouloir jouer en dessous de la table, il me semble que c'est assez clair, ils ont les mêmes documents que j'ai, ils ont également copie du mémoire qui a été transmis au Conseil des ministres. La preuve: ils l'ont cité à la période de questions. Et d'une façon on ne peut plus claire, je «pourrais-tu» rappeler juste quelques phrases du projet de loi.

La problématique, c'est ceci. Selon les conventions comptables généralement observées du fonds consolidé du revenu, le coût de l'acquisition d'un équipement doit être inscrit en totalité à la dépense même si le bien acquis procure des avantages pour des années futures. Oui, je connais ça, j'ai quelques notions en comptabilité. C'est une école de pensée qui dit que c'est une façon de comptabiliser les sommes. Les pratiques comptables gouvernementales ne sont pas adaptées à la réalité de la flotte de véhicules des Transports, parce que, si c'était vrai, ils n'auraient qu'à regarder – mais ça ne les intéresse pas – dans le mémoire le même tableau que j'ai. Et qu'est-ce qu'on dit? On dit: La durée moyenne de vie optimale de la flotte automobile, c'est de cinq ans. C'est ce qu'on dit. Là, je ne veux pas jouer au technicien. Il y en a sûrement qui connaissent ça mieux que moi, y compris chez les «fins, fins» l'autre bord.

Alors, je prends pour acquis que cette évaluation-là est logique. Et là je regarde, je dis: Est-ce que c'est ça que nous faisons? La réponse, c'est non, M. le Président. Ce n'est pas ce qu'on fait. Il doit y avoir une raison pourquoi on ne fait pas ça depuis des années. Et là je regarde. Le gros de la flotte de véhicules automobiles du ministère des Transports a ce qu'on appelle une vie qui a dépassé la vie moyenne optimale qui est de cinq ans parce que c'est six ans et plus pour à peu près 800 véhicules sur l'ensemble de la flotte – et ça ne donne pas grand-chose de reciter ces chiffres-là parce qu'ils ne veulent pas parler du projet de loi – c'est à peu près au total, là, 5 000 si on additionne l'ensemble de la flotte de véhicules; ça inclut les véhicules légers, les camions lourds et les 2 133 autres équipements. Et 2 000 plus 1 500, ça fait à peu près 4 000 plus 800, mettons qu'on arrondit, ça fait 1 000, ça fait 5 000.

On s'«accorde-tu», là? Là, c'est écrit – ils ont le même papier que moi – on dit: Les pratiques comptables d'aujourd'hui ne permettent pas de rentabiliser au maximum tout ce qu'on appelle communément... Et ça, ça fait partie de la gestion. Je me rappelle d'avoir appris ça dans mes cours d'administration. Une saine gestion des équipements implique la maîtrise de l'ensemble du cycle de vie des équipements. Et l'ensemble du cycle de vie des équipements, ça, c'est l'acquisition, c'est l'utilisation et la disposition qu'on appelle communément, dans le jargon comptable, l'aliénation.

Il ne faut pas parler de même avec les gens d'en face, ils ne connaissent pas ces termes-là. Ils nous l'ont prouvé pendant neuf ans. Ils ne connaissent rien en comptabilité et c'est ces – je suis obligé de le dire comme je le pense – espèces de sépulcres blanchis, qui pendant des années ont fait accroire que, eux autres, ils connaissaient ça, la gestion des finances publiques, qui nous ont laissé un merdier, un bourbier. On l'a vu. On l'a vu à la période de questions. C'est tellement un bourbier sans précédent que je le sais qu'ils vont continuer sous cet angle-là à faire accroire que tout le monde de l'externe qui a confirmé la hauteur du déficit alentour de 5 700 000 000 $, non, ce n'était pas ça.

Puis je vais y revenir, moi, sur la révélation de M. notre ami le député d'Iberville. J'y étais, au Conseil des ministres, moi. J'y étais, puis ça ne me gênera pas de parler exactement de ce qu'il a soulevé. Ça ne me gênera pas. Mais vous allez voir les différences. Puis, moi, je suis toujours dans la même formation politique, en passant. Je n'ai pas été exclu. J'en fais partie, j'en suis fier. Est-ce qu'il y a des choses difficiles à faire? La réponse, c'est oui. Est-ce que ça me plaît tous les jours? La réponse, c'est non. Mais globalement je sais que c'est un passage obligé compte tenu de l'héritage sans précédent, éhonté dont on a hérité.

Mon cinq minutes achève sur le projet de loi? C'est pour ça qu'ils veulent parler. Je fais juste vous dire: Pour des gens qui veulent cacher quelque chose, ils l'ont, d'abord, la mémoire. Y «a-tu» de quoi de plus public que ce que nous faisons présentement et ce que nous allons faire? On va faire ça un bout de temps parce que tous les répondeurs vont s'aligner puis vont marmonner le même discours. Ils vont répéter la même sornette, les mêmes énormités, puis ils ont commencé à la période de questions.

Alors, c'est évident. Pour des gens qui cachent quelque chose, on va en parler pendant deux jours. Ça fait partie d'un mémoire ministériel, ça fait partie d'un projet de loi. Puis, dans le projet de loi, pour ceux qui savent lire, il y avait un document d'accompagnement. Il y avait un discours du ministre, et tout est dit. Tout est dit très clair. Or, le budget de capitalisation pour la présente année financière sera de tant. Faute de budget de capitalisation, nous sommes contraints de faire telle affaire, telle affaire. Et, en faisant telle chose, telle chose, on ne rencontre plus les objectifs de renouveler la flotte. Ça, il me semble que ce n'est pas difficile à comprendre. Il n'y a rien de caché là-dedans.

Pourquoi qu'on n'est pas capable de faire ça? C'est parce que les principes comptables auxquels on est assujetti dans le fonds consolidé, ça ne nous permet pas – et je pense que ça résume tout le projet de loi – d'avoir la maîtrise de l'ensemble du cycle de vie des équipements qui s'appelle l'acquisition, l'utilisation et l'aliénation. La récupération des montants de la vente des véhicules au moment où ils ont atteint leur vie économique optimale – écoutez les mots, mais ça, ça ne les intéresse pas eux autres, les répondeurs – est essentielle à une gestion cohérente des cycles de vie de véhicules. Je répète: Est essentielle, essentielle à une gestion cohérente des cycles de vie de véhicules.

Alors, moi, écoutez, M. le Président, très simplement, je ne peux pas accepter ce que j'ai entendu: Artifice, en dessous de la table, on aurait de quoi à cacher, ça correspondrait à l'idéologie péquiste, alors qu'on est en train de faire le ménage des finances publiques. C'est dur, c'est connu. Tout le monde nous blâme d'aller trop vite. On a fait un sommet socioéconomique au vu et au su de tout le monde pour dire: Bien, voici les objectifs.

J'entendais le député de Châteauguay tantôt. Ça n'a pas de bon sens. Je veux bien qu'il aime ça faire des phrases, mais il disait: Le déficit, nous autres, on ne croit pas à ça, puis on ne l'atteindra pas parce qu'on ne prend pas les moyens; puis, nous, on veut en parler, mais on ne prend aucun moyen pour l'atteindre. Ça ne coûterait pas cher de monter à la bibliothèque – je ne sais pas s'il sait où elle est, mais ça ne coûterait pas cher d'aller voir à la bibliothèque; il a le droit, lui aussi, il a accès à ça comme député, malheureusement, parce que, un, il ne s'en sert pas – s'il allait voir ce qui se passe là.

Moi, ça fait bientôt 21 ans que je suis dans cette Assemblée et j'aurai vu deux fois, à date, dans ma vie un gouvernement qui, lors du dépôt du livre des crédits, a réalisé les objectifs financiers qu'il s'était fixés. Ça, ce n'est pas du placotage. Ça, ce n'est pas un discours. Et ce n'est pas pour rien que c'est si dur. Je le sais, que c'est difficile, ce que nous faisons. Je le sais, qu'il y a des coupures dans la santé et dans l'éducation. Puis il y a des contributions qu'on demande à toutes sortes de citoyens parfois, puis des organismes d'autres fois. Et j'y reviendrai, sur l'effort qu'on demande aux municipalités, entre autres.

(16 heures)

Mais là je ne veux pas me perdre, je veux juste traiter là-dessus: Est-ce qu'on a pris les moyens de viser et d'atteindre nos objectifs? Moi, quand j'ai entendu ici, dans cette Chambre, un des anciens ministres des Finances, il avait dit: On vise à atteindre l'objectif de 3,8, au niveau du déficit. On lit le livre des crédits, on a atteint 3,8. Je l'ai entendu dire, l'année qui a suivi: On va viser 3,2. Pour la première fois, je répète – ça faisait la deuxième, par exemple, dans ma vie parlementaire – je pouvais aller voir le livre des crédits et observer que, pour la seconde fois, on avait atteint la cible fixée, 3,2.

Et là on a dit qu'on allait atteindre la cible de 2,2, qui serait la troisième année en 21 ans qu'un gouvernement réalise ses objectifs budgétaires, et je suis confiant de l'atteindre. Pas parce que j'en parle, parce que, quand on réussit pendant deux années à faire la preuve, qu'on a pris les moyens et qu'on a fait les efforts budgétaires requis pour arriver à l'objectif fixé, et qu'on l'a fait deux fois en deux ans, pourquoi on ne le referait pas la troisième année, puisque c'est la même équipe, c'est le même consensus?

Il n'y a personne qui nous dit: Lâchez l'objectif de l'atteinte du déficit zéro. Il y a du monde qui nous dit: Y «aurait-u» moyen d'étirer l'élastique? Il y a du monde qui nous demande: Y «a-tu» moyen que ça soit moins dur? Il y a des affaires qui restent toujours difficiles, et ça ne peut pas en être autrement quand il s'agit de passage obligé. Ça, je le sais que c'est difficile, parce que ça nous fait prendre les bouchées doubles et triples. Est-ce que, cette année, la hauteur de la marche au niveau des compressions est forte? Vous le savez bien que la réponse, c'est oui. La preuve, c'est qu'il y a quelques mois on a été obligé de réajuster dans le domaine de la santé et des services sociaux parce que nous croyions, avec raison, je pense, que l'effort était trop grand. L'effort était tellement grand qu'on a, ce que j'appelle, diminué la demande de compressions parce qu'il y avait danger. Il y avait danger réel de faire tellement mal au système qu'on a été obligé d'apporter des corrections.

Alors, moi, quand le député de Châteauguay nous marmonne la même phrase parce qu'on n'a pas eu l'amabilité de lui faire faire un discours, qu'il est obligé d'en faire un et qu'il n'a rien à dire, il a répété ça à peu près pendant 10 minutes: Nous, là, on n'a aucun respect pour la démocratie. Ça fait brillant, dans une Chambre, de dire ça! Pensez-vous qu'il ne faut pas être effronté! S'il y a un parti qui est cité partout à travers le monde comme ayant un très grand respect, compte tenu des origines du Parti québécois, compte tenu de ce que le fondateur a mis sur la table... On a une série de lois, c'est cité partout dans le monde... on envoie même un Directeur général des élections qui se promène partout dans le monde, suite à une loi que, nous, on a adoptée pour se donner en exemple de régime démocratique, et ça a l'outrecuidance et l'imbécillité de venir nous dire: Nous autres, la démocratie, on s'en fout.

Ça vous donne un exemple jusqu'à quel point on peut aller quand on n'a rien à dire sur le principe d'un projet de loi. Alors, comme ils n'ont rien à dire là-dessus, bien, on va parler de ce qu'ils veulent qu'on parle. Ils sont revenus encore à la période des questions: Non, notre déficit, ce n'est pas nous autres. La preuve, il y a un député qui a aujourd'hui un livre à vendre et il a décidé de dire des choses.

Bien, au même moment où effectivement, en 1994, on a pris le pouvoir, j'étais ministre des Ressources naturelles. Je participais à toutes les séances du Conseil des ministres, et je ne suis pas reconnu pour quelqu'un qui dit autre chose que les faits. Je suis bien plus connu comme quelqu'un qui donne l'heure juste que faire du placotage. Que s'est-il passé quand on avait des rapports constants sur l'évolution des finances publiques? Il s'est passé tout simplement ceci, M. le Président. Dans les cinq, six dernières années, comme on avait un gouvernement qui ne voulait pas réduire le rythme de croissance des dépenses publiques et qu'il ne voulait pas exiger les efforts qui auraient été requis d'être faits, ces chers amis avaient développé cette très bonne pratique de ce qu'on appelle la notion des crédits périmés. Exemple, on donne à mon ministère des Ressources naturelles 430 000 000 $, dans le Livre des crédits , mais, en septembre, compte tenu qu'on se rend compte qu'on ne réalisera pas les objectifs...

Et ça, de toute façon, j'espère qu'il n'y a personne qui doute de ça, parce que ce n'est même pas moi qui dis ça. Ce n'est pas moi qui dis ça, qu'ils n'ont jamais atteint l'objectif fixé. Il y a toujours un bout! On va y revenir un petit bout pour le député de Laporte. En 1991-1992, leur prévision, c'est 3,4. Qu'est-ce qu'ils font? 4,2. En 1992-1993, leur prévision, c'est 3,7. Qu'est-ce qu'ils font? 4,9, 4 900 000 000 $! En 1993-1994, leur prévision, c'est 4,1. Qu'est-ce qu'ils font? 4,9, encore une fois. En 1994-1995, leur prévision c'est 4,4. Qu'est-ce qu'ils font? Le déficit record, 5,7.

Ça va faire pour les mensonges, M. le Président! Ça fait, sur quatre ans, un écart moyen constant – et je sais ce que c'est, un écart moyen constant, moi, dans mes notions de comptabilité et de finance – ça fait 1 000 000 000 $ d'écart constant. C'est évident qu'avec des prévisions comme ça on avait une situation qui n'avait pas de sens. Alors, je reviens à ce qui se passait au Conseil des ministres. Très simple. On a regardé la demande qu'ils avaient faite à chacun des ministères pour livrer ce qu'on appelle les compressions budgétaires qu'il fallait avoir dans le budget en crédits périmés. Et les gens savent ce que c'est que périmer des crédits. Je répète, ça veut dire – prenons un exemple simple – je te donne 1 000 $. Rendu à peu près au milieu de l'année, je te dis: Je ne peux pas te laisser le 1 000 $ que je t'avais donné dans le livre des crédits parce que ça ne balancera pas. Peux-tu m'en remettre 200 $, peux-tu me remettre 200 $ du 1 000 $ que je t'ai passé lors du dépôt des crédits, le 1er avril de chaque année? Ce n'est pas compliqué à comprendre, là. Ça s'appelait la fameuse notion des crédits périmés.

Mais, si on demande ça au ministère des Ressources naturelles, à titre d'exemple, ça suppose que je suis capable de voir, au Conseil des ministres – parce que c'est l'endroit pour apprécier ces choses – quels sont les moyens concrets que le ministère des Ressources naturelles a pris pour livrer les 200 $ de crédits que je lui ai demandé de périmer. Puis, quand on a regardé ça au Conseil des ministres – puis, je m'en rappelle, les séances étaient assez longues – on a pris pas mal de temps pour regarder ça, mais on n'a pas trouvé grand-chose. Donc, en termes clairs, quand on s'est mis à fouiller puis à fouiller puis à fouiller, c'est évident que ça n'aurait pas balancé à la fin de l'année. Et, oui, il a fallu relever la hauteur du déficit anticipé, uniquement pour des raisons honnêtes, en ne constatant pas que les moyens avaient été pris pour s'assurer que, jusqu'à la fin de l'année, il avait la capacité comme structure d'État de rendre possible le montant prévu ou escompté. C'est ça qui est arrivé, très concrètement. Puis, moi, je peux le dire haut et fort. Il me semble que, ça, c'est beaucoup plus l'explication que ce que j'ai vu dans son livre pour essayer d'en faciliter la vente ou je ne sais trop quoi. Ça, c'est les faits, là, c'est ça qui s'est passé.

Et aujourd'hui ces gens-là ont un projet de loi à étudier puis tout leur discours porte sur: Nous, on n'atteindra pas l'objectif du déficit zéro, on en aurait trop à cacher, on voudrait tricher avec la démocratie, on voudrait jouer en dessous de la table. Alors que s'il y a un gouvernement qui a été transparent, très clair puis qui se fait mal... Il n'y a pas de cachette, on n'est pas fou, là, on le sait qu'on se fait mal comme gouvernement quand on a à traverser un passage si difficile mais qu'on a la conviction qu'on n'a pas les moyens de tromper comme ils l'ont fait pendant neuf ans, d'errer, de se tromper, avec les conséquences que ça avait sur les marchés financiers. Ces huit ou neuf décotes qu'ils ont eues pendant leur régime, on les a eues par la tête, M. le Président, les huit ou neuf décotes. Ces beaux parleurs, quand ils nous disent qu'une décote ça coûte cher puis qu'on n'a pas les moyens de l'assumer, ils nous en ont passé huit ou neuf dans le toupet, huit ou neuf décotes où, à chaque fois, c'est les Québécois qui à même leurs impôts étaient obligés d'assumer leurs erreurs de calcul, leur manque de courage de dire: C'est assez.

De toute façon, au même moment où eux vivaient presque dans l'allégresse, l'ensemble des autres provinces de ce beau Canada – qui n'est pas le mien, mais on est quand même actuellement, malheureusement, dans ce régime-là – qu'est-ce qu'elles faisaient, les autres provinces? Elles faisaient le ménage des finances publiques. Ralph Klein, quand, il y a à peu près six mois, lui, il a réuni tous les gens que, nous, on a réunis il y a un an pour faire un sommet pour dire: On est en difficulté, alors lui, au lieu de réunir ce monde-là pour dire: On est en difficulté, il a dit: J'ai 2 000 000 000 $ à redistribuer, comment on fait la redistribution? Mais, pour être capable d'envisager de faire une redistribution et éventuellement replacer plus d'équité en éducation, en santé ou ailleurs, il faut non pas des déficits à la hauteur qu'ils nous l'ont laissé, non pas des coûts, M. le Président, par année, de financement de la dette alentour de 6 000 000 000 $, 6 000 000 000 $ par année à la rivière, au fleuve, dans la Petit-Saguenay ou ailleurs. On n'a pas les moyens.

Et là ces gens-là essaient de nous faire accroire qu'on aurait des choses à cacher, qu'on ne serait pas en mesure, dans ce projet de loi là, de dire très clairement... Et je lis encore les notes explicatives – ils ne les ont pas lues, ils ne savent pas lire, pour la plupart, puis ils ne veulent pas l'apprendre, c'est ça qui est le plus grave: «Ce projet de loi prévoit l'institution du Fonds de gestion de l'équipement roulant affecté au financement des activités reliées à la gestion de cet équipement.» Parce que, depuis plusieurs années, on n'est pas capable de faire ce que nous savons que nous devons faire. «Quand est-ce qu'on pellete», comme c'est une expression consacrée de l'autre bord? On pellete en avant quand on ne fait pas ce qu'on sait que l'on doit faire aujourd'hui.

(16 h 10)

Ce qu'on doit faire aujourd'hui, c'est s'assurer que la flotte, l'équipement automobile et l'ensemble de l'équipement des Transports soient modernisés, remplacés. Et on le sait, avec les difficultés budgétaires, qu'on ne peut pas le faire. Et est-ce qu'il y a moyen de le faire au vu et au su de tout le monde par le biais d'un fonds spécialisé où les sommes ne serviront qu'à ça? Ça a l'air que oui, puisque c'est ça qui est déposé. Et ce n'est pas pour le cacher. La même commission parlementaire qui voudra regarder ça, analyser ça, est-ce qu'elle en aura la possibilité? Bien oui! La commission parlementaire, les mêmes instruments dont le Parlement dispose pour s'assurer qu'il n'y aura pas de fligne-flagne – c'est en français, ça – qu'il n'y aura pas de folies là-dedans et qu'on est certain que les sommes servent pour les fins pour lesquelles on constitue le fonds.

Moi, pour un, ça m'intéresse d'être vigilant, parce que je ne suis pas le gars qui veut les multiplier. On ne peut pas faire un fonds à chaque fois qu'on a un problème financier. On ne peut pas faire un fonds spécial à chaque fois qu'on a un problème financier, ce n'est pas vrai. Alors, ça, je suis sensible à ça, mais je n'accepterai pas qu'on se fasse dire toutes sortes de folies sous prétexte qu'on veut créer un fonds pour arriver à l'objectif qui est nôtre. Je donne juste peut-être une phrase ou deux. J'entendais le député de Papineau sur ce supposé pelletage aux municipalités. Je voudrais juste dire encore une fois que, pour ce qui est des municipalités, d'abord, on a été capables – avec beaucoup de difficultés, je le reconnais – d'arriver à une entente avec l'Union des municipalités du Québec qui nous a dit: On n'aime pas ça, il n'y a pas de cachette, mais l'effort de 350 000 000 $ que vous nous imposez, on va être obligés de passer à travers.

Et je voudrais juste rappeler au député de Papineau et à d'autres collègues que Claude Picher – je n'aime pas toujours la manière dont il écrit, mais, règle générale, lui, quand il écrit, au moins c'est étoffé, ce n'est pas du placotage comme j'en ai entendu de l'autre bord – il donnait juste un exemple. Dans le monde municipal, est-ce qu'il a été prouvé noir sur blanc qu'il y avait un écart salarial en faveur du monde municipal et qu'il y avait lieu d'exiger de ce monde-là un effort pour réduire ce que j'appelle la disproportion dans les emplois comparables? La réponse, c'est oui. C'est prouvé, et tous ces chiffres-là, on en dispose, on les connaît. Donc, on dit correctement au monde municipal: Vous allez faire votre effort comme les autres. Ce n'est pas parce que j'aime ça. J'aurais aimé mieux passer autrement, mais on ne peut pas faire autrement.

Et je termine, M. le Président, en disant: Le projet de loi qui est ici sur la table, au contraire, ce n'est pas pour cacher quelque chose, c'est, pour une fois, également être capables de poser un geste dont nous reconnaissons qu'il doit être posé, c'est-à-dire le remplacement d'une flotte qui est désuète. Plus on retarde, plus on pécherait envers les contribuables qui devront l'assumer dans quelques années à un coût plus élevé, et ça, ça serait tricher avec les faits, ça, ça serait aller à l'encontre des intérêts des contribuables.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Abitibi-Ouest.


Avis touchant les travaux des commissions

Avant de céder la parole à M. le député de Laporte, je désire vous faire part d'une correction à apporter aux travaux de la séance de la commission de l'administration publique prévue pour demain matin. La correction est la suivante. L'objet de cette séance est d'entendre le comité des responsables de la vérification interne, le groupe des responsables de l'évaluation de programmes ainsi que le Contrôleur des finances concernant la fonction de vérification interne au gouvernement du Québec, conformément à la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics. Le secrétaire du Conseil du trésor sera donc entendu lors de la séance du 19 novembre et non demain, tel qu'annoncé précédemment – c'est là qu'est la correction – afin de réagir aux représentations faites par les organismes mentionnés ci-haut.

Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laporte. M. le député.


Reprise du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 159


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous sommes donc en train d'étudier ce projet de loi que nous présente le ministre des Transports, qui vise essentiellement à créer un fonds, un fonds pour gérer le matériel roulant du ministère des Transports. En gros, M. le Président, on comprendra que ce que ça veut dire, c'est que le gouvernement, qui jusqu'à maintenant payait comptant l'achat de ses véhicules, de ses camions, de ses automobiles, à même son budget de l'année courante, dorénavant va emprunter, va financer ou, comme on dit chez nous, va mettre sur la finance ces équipements-là, ces camions-là, ces véhicules-là et reporter sur cinq ans, les cinq prochaines années, le paiement de ses coûts de financement.

Bien sûr, on comprend que ce que ça fait dans l'immédiat, c'est que le gouvernement peut se doter tout de suite d'une flotte d'automobiles, de camions qui ne lui coûtent rien dans le budget de l'année courante, avant les élections, mais on paiera pour ça dans les années plus tard. Alors, ça veut dire: on achète maintenant, on en profite et, quand la prochaine élection sera terminée, après l'élection, là on commencera à payer, de façon que ça ne fasse pas trop mal aux Québécois avant l'élection.

M. le Président, ce fonds-là qu'on nous présente, c'en est un parmi d'autres. Le gouvernement a commencé depuis un certain temps à multiplier ces fonds-là. On en a parlé; je voudrais simplement faire un petit rappel. Le gouvernement, par exemple, jusqu'à maintenant, sous l'administration précédente, payait comptant les travaux sur le réseau routier. Quand on construisait une route, quand on réparait une route, quand on faisait de la pose d'asphalte, tout ça, tous ces travaux-là, quand on faisait de la réfection des structures, des ponts, des chaussées, tout ça était payé comptant, sous l'administration libérale, dans l'année. Terminé. Il n'y avait pas de dette. Il n'y avait pas de dette, M. le Président, affectée à ces travaux-là.

Ce que le Parti québécois fait, c'est qu'il dit: Je vais faire les mêmes travaux, peut-être même plus, mais je ne paierai pas tout de suite; je vais financer ça sur cinq ans, sur 10 ans, même sur 15 ans. Autrement dit, on met sur la finance. Comme on dit chez nous, on met sur la finance, comme quand on achète une télévision en couleurs qu'on finance sur trois ans ou qu'on achète un complet qu'on finance sur deux ans, ou des choses comme ça. On finance sur cinq ans, sur 10 ans des achats, des travaux qui auparavant, sous l'administration libérale, étaient payés comptant.

Alors, M. le Président, c'est deux façons de procéder. C'est sûr, le gouvernement du Parti québécois nous dit: Nous, là, on veut avoir un déficit zéro. Bon, parfait, M. le Président. Je peux dire tout de suite, comme je l'ai dit à de nombreuses reprises, que, nous, du Parti libéral, on est d'accord avec le déficit zéro, avec l'atteinte d'un équilibre budgétaire. D'ailleurs, ceux qui ont proposé le premier plan de réduction du déficit à zéro, c'est nous. M. le Président, le premier plan qui a été déposé, c'est en 1994. Lors du budget, le dernier budget libéral, alors que le premier ministre était le député de Vaudreuil, nous avons déposé un plan de réduction du déficit à zéro.

Nous avons proposé aussi aux électeurs de passer une loi pour obliger le gouvernement à avoir un déficit zéro. C'était dans le programme politique. Et, après les élections, quand c'est le Parti québécois qui a été élu, nous avons appuyé la loi sur le déficit zéro, M. le Président. Nous l'avons appuyée et nous avons appuyé le gouvernement aussi dans son plan de réduire le déficit à zéro. D'ailleurs, le gouvernement suit religieusement le plan que nous avions déposé. Et je ne cesse pas, M. le Président, de lui dire que je suis d'accord avec l'objectif du gouvernement de suivre notre plan.

Le problème, M. le Président, c'est que le gouvernement, pour arriver au déficit zéro, s'y prend d'une façon qui n'est pas la nôtre. Nous, on ne procéderait pas comme ça, et c'est là qu'on diverge totalement d'opinions avec le gouvernement.

Je voudrais faire un peu d'histoire. M. le Président, quand le Parti québécois dit que les libéraux n'ont jamais, dans le passé, géré très bien les finances publiques, je rappellerais simplement, pour ceux qui ont la mémoire un peu plus longue, que, quand M. Bourassa a pris le pouvoir, en 1985, le déficit laissé par Jacques Parizeau et les péquistes était énorme. C'était plus élevé que maintenant, en comparaison que quand les péquistes sont arrivés au pouvoir, en 1994. Quand on compare les deux, c'était beaucoup plus important en 1985, quand nous sommes arrivés, que quand le Parti québécois est arrivé.

Or, M. Bourassa a commencé, en 1986, 1987, 1988, à réduire le déficit à chaque année, pas en coupant sauvagement à la tronçonneuse dans les services les plus essentiels, comme on le fait maintenant, mais en réduisant les dépenses d'une façon correcte, ordonnée, sévère, oui, mais humaine, et on est arrivé, comme ça, en 1989, avec un déficit qui était rendu à 1 600 000 000 $. On était rendu à une année près du déficit zéro. Une autre année, M. le Président, et ça y était.

Le problème, c'est que, en 1990, tout le monde s'en souvient, il y a eu une récession majeure au Québec, une récession majeure, des pertes d'emplois comme on n'en a jamais vues en Amérique, et non seulement en Amérique, mais en Occident, et le gouvernement ne pouvait pas à ce moment-là, M. le Président, continuer à la tronçonneuse, comme maintenant, alors que les gens perdaient leur emploi par centaines de milliers. Alors, forcément, le déficit, à cause du fait qu'il y avait beaucoup de pertes d'emplois, donc les revenus du gouvernement ont chuté. Plutôt que de crucifier les Québécois avec des taxes nouvelles, comme fait le Parti québécois présentement, pour tenter d'aller chercher un équilibre budgétaire, le gouvernement, M. le Président, a eu pitié, d'une certaine façon, des électeurs et des payeurs de taxes et a laissé augmenter un peu le déficit.

(16 h 20)

Je dois dire ceci. Dans l'augmentation du déficit sous les libéraux, à la fin, ce n'étaient pas les dépenses qui n'étaient pas contrôlées, c'étaient des erreurs d'estimation des revenus. Quand on parle des dépenses, M. le Président, il faut le dire parce que celui qui était en charge des dépenses au gouvernement dans le temps de M. Bourassa, c'était le chef de l'opposition actuel, le député de Vaudreuil. Et les documents du gouvernement actuel – ça, c'est un document qui est de mai 1997; le ministre des Finances se promène à travers le monde actuellement avec ce document-là, Profil financier du Québec . Bien, ça dit que, sous l'administration des finances par le député de Vaudreuil, chef de l'opposition actuel, chef du Parti libéral, à chaque année, les dépenses étaient respectées. Jamais, en 1992, 1993, 1994, jamais le Québec n'a excédé ses dépenses. Donc, s'il y a eu des déficits, ce n'était pas à cause du fait qu'on ne contrôlait pas nos dépenses, M. le Président.

Ce qui est arrivé, c'est qu'il y a eu des excédents, il y a eu des manques de revenus pour le gouvernement, et les gens qui étaient en charge de ça, le ministre des Finances de l'époque, Gérard D. Levesque, et même le premier ministre Bourassa, ne sont plus ici pour se défendre, M. le Président. On peut bien dire ce qu'on veut contre la gestion des finances publiques par le premier ministre Bourassa ou son ministre des Finances, ces gens-là, s'ils étaient ici aujourd'hui, sauraient donner les explications. Mais, en ce qui concerne les dépenses, M. le Président, on peut les donner parce que celui qui était en charge des dépenses, il est ici, et les documents du gouvernement indiquent qu'il a parfaitement exécuté son travail.

Il arrive donc, M. le Président, que, lors de l'arrivée au pouvoir du Parti québécois, nous venions de déposer un budget réduisant les dépenses de 500 000 000 $. Là, avec un plan de réduction du déficit à zéro, on a vu ce que le Parti québécois a fait, M. le Président. Pour pouvoir se ménager une année référendaire à l'eau de rose, pour pouvoir, lors de l'année référendaire, faire des cadeaux aux fonctionnaires, entre autres, le gouvernement a tripoté littéralement le budget, le dernier budget libéral. On l'a vu aujourd'hui par l'aveu du député d'Iberville qui était ministre dans le gouvernement, qui était assis à la table des ministres, et qui nous a dit, dans un livre publié aujourd'hui, qu'en l'espace de deux semaines le déficit a augmenté de 600 000 000 $, le déficit laissé par les libéraux. Alors qu'ils nous avaient dit, M. le Président, que le déficit était parfaitement sous contrôle à leur arrivée, ils l'ont dit en septembre 1994, ils l'ont répété en décembre 1994, tout à coup, en l'espace de deux semaines, on a inventé littéralement 600 000 000 $ de nouvelles dépenses ou de déficit, et là a commencé à se faire le petit jeu de cache-cache, le petit jeu de tripotage de chiffres où on a littéralement, M. le Président, remis dans l'année des libéraux, noirci l'année des libéraux avec des jeux comptables, des pirouettes comptables de façon à se ménager dans l'année 1995, l'année suivante, une année référendaire à l'eau de rose. Et ça, c'est dit en toutes lettres dans le livre du député d'Iberville qui était ministre dans le gouvernement du Parti québécois. Ça, c'est une accusation très forte. C'est un aveu de la part de quelqu'un qui était là, qui était assis à la table du Conseil des ministres et qui a tout vu ça, et qui aujourd'hui, M. le Président, en toute conscience, vient le dire et l'écrire, à part ça.

Le déficit de 5 700 000 000 $ dont on parle, c'est l'affreux déficit qu'a concocté, qu'a fabriqué le Parti québécois. Et le Parti québécois va, à la face de la postérité, M. le Président, payer le prix de ce déficit-là et surtout de la manoeuvre qu'ils ont faite de tenter de nous l'imposer à nous, alors qu'ils ont été au pouvoir la plus grande partie de cette année-là. Ils ont été au pouvoir plus longtemps que nous et ils ont certifié qu'à notre départ les chiffres étaient parfaits. Et tout ça, M. le Président, ça s'est concocté dans la deuxième partie de l'année alors qu'ils étaient au pouvoir. Et je pense, M. le Président, que ceux qui vont prendre le temps de lire le livre du député d'Iberville et de regarder les chiffres vont en être parfaitement convaincus.

M. le Président, on en arrive donc maintenant aux démarches que fait le gouvernement pour tenter de faire croire aux Québécois qu'on s'en va vers le déficit zéro et que c'est un vrai déficit zéro. Pour ce qui est de s'en aller vers un vrai déficit, M. le Président, je pense que le Parti québécois va continuer, année après année, à prétendre que le déficit s'en va vers zéro, et je suis parfaitement content. Si jamais le Parti québécois y arrive, je serai très content et je vais continuer à les inciter à le faire, M. le Président. Le problème, c'est qu'il va falloir que ce soit un vrai déficit zéro, que la comptabilité du gouvernement... qu'il y ait une seule comptabilité du gouvernement. Qu'on n'ait pas deux sets de livres, comme on dit: une comptabilité officielle puis une deuxième à côté. Et c'est ça que fait le gouvernement présentement. Tranquillement, on réduit le déficit, on réduit le déficit, M. le Président, mais, pendant qu'on fait ça, ici, dans la page centrale, dans un autre livre, dans d'autres livres où on tient d'autres comptabilités, on fait des dépenses, on emprunte, et ces emprunts-là ne sont pas reflétés dans la comptabilité du gouvernement.

Je vais vous donner un exemple, M. le Président, pour qu'on puisse mieux comprendre. Supposons qu'on prend le cas d'un travailleur qui gagne 30 000 $ par année et qui a des dépenses. Alors, disons qu'il gagne 30 000 $ par année. C'est un travailleur qui gagne, disons, un bon salaire, puis, après impôt, il reste 30 000 $ par année. Alors, il paie ses dépenses, son automobile, il paie son hypothèque, il paie ses dépenses pour sa maison, pour nourrir ses enfants, pour les vêtir, enfin toutes les dépenses, et à la fin de l'année il regarde son budget puis il dit: J'ai 30 000 $ de revenu net, 30 000 $ de dépenses, donc j'ai un budget équilibré. Je n'ai pas de déficit. Donc je suis à zéro. Ça, c'est là où on veut en venir.

Mais, si le même individu ouvre un autre compte de banque dans une autre succursale ou une caisse populaire plutôt qu'une banque, et là il dit: Je veux emprunter 10 000 $ parce qu'il y a d'autres dépenses que je veux faire, je veux faire un voyage en Europe avec ma femme, je veux acheter une deuxième automobile, je veux me louer un chalet à la campagne, mais, ça, mon budget ne me permet pas de le faire parce que je dépense le 30 000 $ que j'ai à dépenser, donc, à côté, il va faire un emprunt ailleurs, et là, plutôt que de payer ces dépenses-là comptant, il les finance sur trois ou cinq ans. En réalité, on peut dire que cette personne-là est en déficit parce qu'elle vient d'emprunter 10 000 $, elle a fait des dépenses pour 10 000 $ dans l'année. On devrait donc dire que ses dépenses de l'année ne sont pas de 30 000 $, mais de 40 000 $. Donc, il a fait un déficit de 10 000 $ dans l'année. Mais ce n'est pas ça qu'il fait. En allant emprunter à côté, il fait croire à sa femme puis à ses enfants que tout est parfait. C'est l'équilibre budgétaire. On vit selon nos moyens, dit-il.

Bien, c'est ça que le Parti québécois fait présentement. Il prétend qu'on va vivre selon nos moyens dans deux ans, que les revenus du gouvernement vont aller équilibrer ses dépenses, qu'on n'aura plus de déficit, mais, à côté, le gouvernement fait toutes sortes d'emprunts pour payer des choses qu'on payait comptant avant. La construction du réseau routier, l'entretien du réseau routier, il y en a pour 500 000 000 $, 600 000 000 $ par année. Ce n'est pas rien. Deuxièmement, l'achat des automobiles, l'achat des camions.

Prenons le départ des fonctionnaires, M. le Président. On a obtenu le départ de dizaines de milliers de fonctionnaires. Une grosse économie pour le gouvernement. Imaginez-vous les salaires de tous ces gens-là qui étaient payés, avant ça, à toutes les deux semaines, et maintenant ils sont disparus. Donc, le gouvernement économise des centaines et des centaines de millions de dollars avec le départ des fonctionnaires. Mais, par contre, pour les faire partir, ça a coûté cher. Ça a coûté exactement, à peu près, 3 000 000 000 $, une somme d'argent qu'on a dû payer pour acheter, si vous voulez, le départ des fonctionnaires. Il a fallu leur donner des bonus, il a fallu leur donner des primes de séparation. Il y en a pour 3 000 000 000 $.

Bon. On serait porté à dire: Si le gouvernement économise, disons, 1 000 000 000 $ par année de salaires, il va prendre son 1 000 000 000 $ puis, au bout de trois ans, il va avoir remboursé le 3 000 000 000 $ que ça a coûté pour les faire partir. Ce n'est pas ça que fait le gouvernement, pas du tout, mais pas du tout. Qu'est-ce que le gouvernement fait? Il empoche le 1 000 000 000 $ de réduction de salaires puis il finance sur 16 ans, il emprunte dans un fonds à côté sur 16 ans le remboursement du 3 000 000 000 $. Donc, dans les livres officiels du gouvernement, on encaisse les revenus, les salaires qu'on ne paie plus, puis la dépense, le 3 000 000 000 $, dans un fonds à côté qui ne fait pas partie de la comptabilité du gouvernement. On emprunte 3 000 000 000 $ et, pendant 16 ans, on va payer pour ça. C'est donc dire, M. le Président, que le Parti québécois, ça va faire longtemps qu'il aura quitté le pouvoir, ça va faire 15 ans qu'il aura quitté le pouvoir quand on aura fini de payer pour le départ de ces fonctionnaires-là.

Une autre pirouette comptable, autrement dit, pour éviter de faire refléter la vraie comptabilité du gouvernement, un tripotage de budget de sorte qu'on a réellement deux sortes de comptabilité: la comptabilité officielle où on s'achemine, semble-t-il, vers un déficit zéro et une comptabilité parallèle, secrète, cachée où on accumule des dettes, et des dettes, et des dettes, et on finance ça sur une période de trois ans, cinq ans, 10 ans, ça dépend des dépenses.

(16 h 30)

M. le Président, évidemment, à ce rythme-là, on va peut-être pouvoir un jour prétendre qu'on a atteint le déficit zéro, mais là il va falloir faire en sorte de regarder dans les fonds à côté. Le Vérificateur général, dans son rapport, en a parlé. Il a dit: Écoutez, c'est quoi que le gouvernement est en train de faire? Il est en train de comptabiliser ailleurs des dépenses qui auraient dû être comptabilisées dans la comptabilité générale du gouvernement. Et le Vérificateur général dit: Si le gouvernement continue comme ça, il faudrait qu'il consolide tous ces livres-là. Autrement dit, prendre tous les fonds, toutes les comptabilités parallèles, mettre ça ensemble et dire c'est quoi, le portrait. Est-ce que vraiment on a un déficit zéro? Ça, ce serait honnête, ce serait transparent, et là on saurait exactement si, oui ou non, on a un vrai déficit zéro.

M. le Président, toutes les provinces canadiennes font ça présentement, toutes sans exception, consolider leur comptabilité. Le gouvernement fédéral fait ça aussi, on met une seule comptabilité. Quand c'est terminé, tous les autres Canadiens, sauf les Québécois, savent que la comptabilité est unifiée et qu'on a un portrait réel. Pas au Québec, M. le Président. Le gouvernement refuse de consolider ses états financiers. Donc, M. le Président, c'est une astuce, un deuxième compte de banque, un deuxième set de livres, comme on dit, où on inscrit ailleurs les dépenses qui, normalement, devraient être inscrites au fonds général du gouvernement.

M. le Président, comment nous, les libéraux, si on était là, on ferait pour changer ça? Bien, c'est simple, M. le Président, notre plan, il était très simple. Si on était là, nous, on continuerait la recherche du déficit zéro et on y arriverait, mais on ne serait pas obligés, comme le Parti québécois, de couper dans les dépenses à la tronçonneuse, dans la santé. Dans les municipalités, M. le Président, j'entendais le député, tantôt, qui nous disait que les fonctionnaires sont trop payés, les fonctionnaires municipaux. C'est peut-être vrai dans les grosses municipalités, je n'en disconviens pas, mais, dans les petites municipalités, promenez-vous à travers le Québec, demandez dans les petites municipalités où il y a 1 000 personnes, moins de 1 000 ou 2 000 personnes, les fonctionnaires, ils ne sont pas trop payés, ils sont parfois sous-payés, et ils font tout.

Alors, ce n'est pas exact de dire, comme le dit le gouvernement, que les fonctionnaires dans les petites municipalités sont trop payés. Ce n'est pas vrai. Là, on va les faire payer sur la même échelle que tout le monde. Alors, à Montréal, où, semble-t-il, les salaires excèdent la norme provinciale, eux, ils vont leur faire payer 5,8 %, mais, dans les petites villes du Québec, ils vont aussi payer 5,8 %. Ce n'est pas vrai que, dans ces petites villes là, ces gens-là sont trop payés par rapport à la moyenne provinciale.

Alors, nous, M. le Président, la première chose que l'on ferait si on était là, on enlèverait l'obstacle qui présentement nuit à la création d'emplois: la menace d'un autre référendum. Si, demain matin, on avisait les investisseurs qu'il n'y aura plus de référendum au Québec, qu'il n'y aura plus de menace de séparation, je peux vous dire tout de suite que la croissance économique augmenterait réellement rapidement. Les emplois augmenteraient comme en 1994, la dernière année du Parti libéral, quand le député de Vaudreuil était premier ministre: 78 000 nouveaux emplois, 3,4 % de croissance économique réelle, la meilleure année de la décennie, parce qu'il n'y avait pas de menace, à ce moment-là, de référendum. Depuis qu'on nous menace d'un référendum, M. le Président, la croissance économique stagne, les investissements stagnent et les emplois, évidemment, stagnent aussi, tout stagne. Le gouvernement n'a pas le choix, s'il veut atteindre le déficit zéro, que de taxer et de surtaxer les Québécois, puisque ses revenus n'augmentent pas, étant donné que les emplois n'augmentent pas autant qu'ils devraient.

M. le Président, c'est ça, le plan du Parti libéral pour remettre le Québec sur la voie de la prospérité. Aucun référendum sous une administration libérale. On n'aurait que ça, M. le Président, comme programme politique, ce serait assez pour créer assez d'emplois pour remettre les Québécois au travail.

M. le Président, je conclus en disant qu'avant aujourd'hui le gouvernement payait comptant ses dépenses; dorénavant, le gouvernement a mis les Québécois sur la finance. En mettant les Québécois sur la finance, M. le Président, on n'a fait que reporter à plus tard les dépenses et le déficit que le gouvernement prétend atteindre, zéro, mais qu'il n'atteindra pas réellement parce qu'il aura fait des déficits ailleurs, dans d'autres fonds. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laporte. Avant de poursuivre ce débat, j'ai quelques annonces à vous faire. Il y aura, ce soir, deux débats de fin de séance: l'un entre le député de Laporte et le ministre des Finances concernant les méthodes comptables douteuses comptabilisées par le ministre des Finances en période préréférendaire, et le deuxième entre Mme la députée de Jean-Talon et le ministre des Affaires municipales au sujet de la facture gouvernementale envoyée aux municipalités, qui ne tient pas compte des ententes intermunicipales pour celles qui les gèrent. Alors, on aura ça à 18 heures.

Je suis prêt maintenant à céder la parole au prochain intervenant, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir sur ce projet de loi. C'est ma première intervention, en tant que député, contre un projet de loi, mais force est de constater que je doute que ce soit la dernière, surtout avec les intentions que semble avoir le gouvernement actuel en ce qui a trait à la lutte au déficit.

M. le Président, il y a une chose qui m'a frappé depuis mon entrée en Chambre, c'est la fameuse cassette du déficit laissé par le gouvernement libéral de 5 700 000 000 $. J'ai même entendu cet après-midi, pendant la période de questions, le ministre dire que tout le monde s'entend là-dessus pour dire que, à la fin de l'année, c'était le pire déficit que le Québec ait connu. Mais tout le monde s'entend aussi pour dire que, à la fin du mandat des libéraux, en septembre 1994, les objectifs budgétaires étaient respectés, que la lutte au déficit était non seulement respectée, mais que ça allait encore mieux que prévu. Pourquoi, M. le Président? Parce que la seule et unique priorité, ce qui alimentait tous les débats, ce qui faisait la force du gouvernement libéral à l'époque, c'est qu'on avait une obsession, l'obsession de la création d'emplois.

D'ailleurs, il y a plusieurs chiffres là-dessus, M. le Président, dont, entre autres, dans Le Devoir , où on disait que finalement, sur une base de 12 mois, la meilleure performance qui ait été faite, ça équivaudrait à 30 400 nouveaux emplois, en 1996, de la part du gouvernement péquiste, soit moins que la moitié des 76 000 emplois créés en 1994, la meilleure année de la décennie. C'est pour ça que la lutte au déficit allait bien et que les objectifs étaient respectés.

Vous savez, M. le Président, il y a plusieurs raisons pour lesquelles on est contre ce projet de loi. La première, moi, qui me frappe, c'est que c'est un exemple parfait de ce qu'on veut faire pour réussir à cacher le déficit. Il y a plusieurs autres exemples de fonds qui ont été créés dernièrement. On peut parler du fonds spécial de conservation et d'amélioration du réseau routier mis en oeuvre en février 1997. On peut parler du Fonds de gestion des départs assistés, du Fonds d'assistance financière pour les régions sinistrées, du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail, du Fonds d'aide à l'action communautaire autonome, du Fonds des pensions alimentaires, du Fonds des services de police, puis là on a le Fonds de gestion de l'équipement routier.

M. le Président, ce qu'il y a de merveilleux avec ces fonds-là, c'est que c'est une belle façon d'avouer, pour le gouvernement du Parti québécois, l'échec à la lutte au déficit et l'échec à l'atteinte du déficit zéro. Pourquoi? Parce qu'on s'est dit: Étant donné qu'on n'est pas capable de l'atteindre, étant donné qu'on n'est pas capable de lutter pour assainir les finances publiques, on va cacher les argents, on va cacher les dettes un peu partout; comme ça on va donner l'impression et l'illusion aux gens que ça va bien, que ça marche bien au Québec et qu'on s'occupe de nos affaires.

L'obsession du déficit zéro, M. le Président, finalement, c'est beaucoup plus une obsession de cacher le déficit, de le camoufler, de le mettre dans des tiroirs, où personne – même, je serais heureux d'entendre le député de Montmorency là-dessus qui en a déjà parlé à plusieurs reprises – n'est d'accord avec cette façon de gérer. Et le Québec est l'une des seules provinces au Canada qui ne présente pas d'états financiers consolidés. Les autres provinces le font. Le Canada le fait. Nous, on ne le fait pas. Pourquoi? Parce que c'est une belle façon de démontrer que l'on cache le déficit. On peut se comparer, mais aussi on peut regarder ce qui s'est dit ici là-dessus, le rapport du Vérificateur général, le dernier rapport, qui disait: «Depuis plusieurs années, on assiste à la prolifération de fonds spéciaux dont les données financières sont soustraites aux états financiers actuels du fonds consolidé du revenu et du Fonds des services de santé. La publication d'états financiers consolidés permettrait d'éliminer cet effet.»

(16 h 40)

Donc, ce n'est pas seulement les libéraux qui le disent, là; il y en a d'autres qui le disent aussi. Là-dedans, on donne un exemple: «Institués en 1996, le Fonds de conservation et d'amélioration du réseau routier, le Fonds de gestion des départs assistés et divers fonds relatifs aux technologies de l'information sont des exemples concrets du problème qui se pose. Ces fonds permettent, en substance, de reporter sur plusieurs années certaines dépenses qui seraient autrement comptabilisées dans les états financiers actuels du gouvernement. Or, les règles comptables que le gouvernement s'est données lui interdisent notamment d'inscrire cet amortissement ou par tranches des dépenses de nature capitale qu'il devrait porter à ses livres dans l'année qu'il acquiert ses biens.»

C'est bien simple, M. le Président, ce n'est pas une pratique reconnue à nulle part, mais on le fait. On le fait parce que, je l'ai dit, on ne veut pas s'attaquer au déficit. Pour donner le plus bel exemple de ça, on parle beaucoup, du côté du gouvernement, qu'on réduit les dépenses, qu'on s'attaque aux dépenses de l'État, qu'on réduit les salaires et qu'on fait des efforts là-dedans. Mais, si on regarde le dernier budget, si on regarde les dépenses gouvernementales de 1995 par rapport à 1996, on se rend compte qu'ils ont coupé seulement 260 000 000 $ dans les dépenses par rapport à l'année d'avant. Donc, on n'a pas coupé puis on cache des dépenses en même temps. Ça a un effet merveilleux, ça a l'effet de donner l'impression à la population qu'on s'occupe du problème. Mais c'est absolument faux. Ça démontre un manque de volonté politique, et, surtout, on avoue l'incapacité du gouvernement actuel à jouer sur l'autre colonne, c'est-à-dire la colonne des revenus.

C'est simple, on ne crée pas de richesse au Québec présentement. Depuis trois ans, on ne crée pas de richesse. On ne s'attaque pas de façon sérieuse à la création d'emplois, à la relance économique. Il n'y en a pas, de politique de relance économique, M. le Président. C'est simple, il n'y en a pas. Il n'y a pas d'actions concertées, il n'y a pas d'actions réfléchies de la part de ce gouvernement-là qui peuvent mettre les Québécois en confiance et leur faire constater que, oui, le gouvernement travaille pour créer des emplois. Il n'y en a pas. Ce qu'on fait, c'est à la pièce. On improvise et on ne sait pas trop où on s'en va.

Le Sommet socioéconomique de l'an dernier, on se souvient tous des engagements qui visaient à réduire la réglementation. Bien, moi, je vous dirais que ce qu'on a vu et ce que j'ai pu constater dans les derniers mois, c'est plutôt, au contraire, une augmentation de la réglementation des entreprises. Et, si je prends l'exemple de mon comté, dans le comté de Kamouraska-Témiscouata on est à côté du Nouveau-Brunswick, c'est certain qu'on vit la problématique de la lutte que fait Frank McKenna pour attirer des entreprises du Témiscouata chez lui.

Il y a deux éléments là-dedans, M. le Président. Le premier élément, c'est sûr que c'est l'incertitude politique, c'est certain. Mais ça, on va en reparler, tout le monde en est conscient, tout le monde est d'accord là-dessus. Mais il y a un deuxième élément, en plus de ça, M. le Président, c'est que les gens qui veulent garder des entreprises dans le Témiscouata, le constat qu'ils font et ce qu'ils nous disent, ce qu'ils disent à leur député, ce qu'ils disent aux intervenants, c'est: On aimerait bien ça lutter contre Frank McKenna. On a une population qui est aussi compétente, aussi bien formée, mais on n'a pas les outils pour agir rapidement quand il y a un projet qui sort, quand il y a des entreprises qui sont sur le point d'être créées. On n'est pas capable de rivaliser parce que, c'est bien simple, on ne s'occupe pas des entreprises au niveau du gouvernement, ça ne les intéresse pas. Ils ont l'impression qu'au Québec c'est les entreprises qui doivent travailler pour le gouvernement, alors qu'au Nouveau-Brunswick c'est plutôt l'inverse, c'est le gouvernement qui travaille pour les entreprises.

Ça serait peut-être le temps, M. le Président, qu'au sein du gouvernement du Québec on prenne conscience de ça, qu'il faut travailler pour les entreprises. Ce sont elles qui sont les créateurs d'emplois et ce sont elles qui permettent de créer la richesse nécessaire pour faire une vraie lutte au déficit et ne pas être obligé de le cacher comme on le fait actuellement par la mise en place d'un autre fonds.

Malgré le fait qu'on peut dire que l'économie du Québec reprend un peu du poil de la bête, il ne faut pas oublier une chose. On est quand même les derniers, et il n'y a rien à être fier là-dedans. C'est inquiétant, M. le Président, parce que, partout en Amérique du Nord, partout au Canada, il y a une croissance économique, il y a une reprise économique solide, sauf au Québec. Qu'est-ce qu'on va faire, M. le Président, le jour où cette reprise économique là va arrêter aux États-Unis, va arrêter au Canada, le jour où on va retomber dans un cycle de crise économique? Qu'est-ce qu'on va faire? On n'a pas pris le taureau par les cornes au bon moment. Pourquoi? Parce qu'on était arrêté à travailler à une autre cause qui était la cause du Parti québécois, la cause du référendum, et, encore une fois, on laissait l'économie de côté, ce n'était pas la priorité.

Aussi, étant donné qu'on n'est pas capable de créer de richesse, on crée des fonds et on pellette, on envoie des factures. On en a parlé, il va y avoir un débat de fin de séance là-dessus, le fameux pelletage aux municipalités de 375 000 000 $, M. le Président, il y a des effets à ça. Tantôt, on parlait de la masse salariale dans les grandes municipalités. Moi, chez nous, il y a 38 municipalités. Et, des 38 municipalités, il y en a environ quatre ou cinq grosses, les autres, c'est des petites municipalités. C'est des petites municipalités où il est impossible de récupérer quoi que ce soit sur la masse salariale. Il n'y en a pas, de marge de manoeuvre. Le seul moyen qu'elles ont, ces petites municipalités là, c'est d'augmenter carrément les taxes de leurs concitoyens, des contribuables. Qu'est-ce que ça a pour effet, ça, M. le Président, quand on augmente les taxes? Ça réduit l'activité économique dans le village, dans la paroisse, dans la région, et ça fait en sorte qu'il y a moins de gens qui dépensent. Donc, encore une fois, on diminue les incitatifs à la création d'emplois.

Mais il y a un autre effet aussi, c'est que, étant donné qu'on est obligé d'envoyer plus d'argent au gouvernement, étant donné qu'on est obligé d'absorber ce pelletage-là, on coupe dans des services qui, dans des communautés comme dans mon comté, sont essentiels, c'est-à-dire les corporations de développement économique. Quand une petite municipalité est obligée de couper son commissaire industriel, quand elle est obligée de couper l'aide ou sa participation à la corporation de développement économique régionale, bien, c'est toute la région qui en souffre, M. le Président. Et ça occasionne encore des pertes d'emplois, ça occasionne des diminutions d'opportunités d'affaires et ça fait en sorte que l'économie roule moins bien et qu'on ne joue pas sur la colonne des revenus. Il faut, je crois, que ces gens-là se rendent compte qu'il y a une autre façon d'atteindre le déficit zéro, c'est de jouer sur les revenus.

Pour revenir au projet de loi n° 159, il y a une chose là-dedans qui, comme dans les autres fonds, est assez inacceptable, c'est qu'on transfère – le coût, dans ce cas-là, de la gestion de l'équipement roulant – ça aux générations futures. Et ça, je pense qu'on endette directement les jeunes pour de nombreuses années encore. Encore une fois, on veut donner l'impression qu'on s'attaque au problème, mais ce qu'on fait, c'est qu'on le transfère à d'autres, on le transfère à d'autres qui vont devoir l'assumer pendant encore 15 ans. Ça va faire longtemps que l'auto va être finie puis va être au rancart, M. le Président, dans 15 ans, mais il y encore des jeunes, il y a encore des gens qui vont payer pour ça. C'est inacceptable, M. le Président.

Et on fait en sorte d'augmenter encore et de creuser l'écart entre les générations, de creuser ce fossé-là. Il y a un article qui est paru aujourd'hui, M. le Président, puis on va en parler sûrement dans les prochains jours aussi. L'écart entre les générations, entre les opportunités qu'ont eues les générations qui nous ont précédés, nous, les jeunes, et ce qu'on vit actuellement, bien, cet écart-là avec des fonds comme ça, avec des projets de loi comme ça, il ne fait que s'agrandir encore. C'est encore des diminutions d'opportunités pour les jeunes, et on augmente le fardeau fiscal qu'on leur transfère.

Et ça, M. le Président, je suis tombé sur quelque chose qui m'a fait sourire quand j'ai vu ce projet de loi là. Je suis tombé sur une citation de l'ancien chef du Parti québécois et ancien premier ministre du Québec, M. Parizeau, M. Parizeau qui avait dit à un moment donné: Il faut cesser d'emprunter pour payer l'épicerie. Il disait ça, c'est absolument compréhensible. Sa vision d'atteinte de l'objectif du déficit zéro, c'était de dire: On va arrêter d'emprunter pour payer l'épicerie. Mais là, avec ce gouvernement-là, M. le Président, depuis 1996, on se rend compte que non seulement on continue d'emprunter pour l'épicerie, mais là on est en train d'emprunter pour payer l'auto, on est en train d'emprunter pour faire en sorte que les fonctionnaires prennent leur retraite, on emprunte pour tout, et on ne fait qu'augmenter et qu'accentuer les jeunes qui vont devoir absorber tout ça au cours des prochaines années.

(16 h 50)

Cet après-midi, M. le Président, le ministre des Transports disait que ça se faisait avant. C'est quoi, la différence entre payer l'auto cette année et la mettre dans les chiffres et emprunter sur le budget global pour le faire, et créer un fonds et emprunter de la même façon? La différence est bien simple, c'est que, au moins, quand c'était inscrit dans les livres, les gens étaient conscients, ils voyaient parfaitement la réalité. C'est un processus qui était complètement transparent. Et ça, on peut le dire, là, qu'il y a même des députés qui ont déjà quitté le Parti québécois pour ça, pour ce manque de transparence là qui n'est, encore une fois, qu'augmenté avec ce projet de loi là. Et on n'a pas de dette tout de suite, M. le Président. On n'a pas de dette, c'est ça que je viens d'entendre. On n'a pas de dette tout de suite, on répartit cette dette-là sur 15 ans. Au lieu de la payer tout de suite, pendant 15 ans il y a des jeunes comme moi qui vont payer pour ça, qui vont continuer de payer parce qu'on a mis du fard sur les livres. On a caché ça. On ne l'a pas sorti. On a caché ça.

Mais je vais vous dire une chose, M. le Président, quand on rencontre des gens dans la rue, les Québécois, ils le voient, le jeu. Puis laissez-moi vous dire que c'est pour ça qu'on remplit notre rôle d'opposition puis qu'on est sur le terrain, pour le dire aux Québécois. Plus on leur en parle, plus ils se rendent compte à quel point ils sont en train de se faire avoir par ce gouvernement-là qui cache le déficit au lieu de vraiment s'y attaquer.

Tantôt, je parlais qu'on empruntait pour payer des autos, mais ce n'est pas tout. On parle même d'emprunter pour payer des fonctionnaires et de mettre ça dans le fonds, d'emprunter puis de mettre ça dans un fonds pour 15 ans pour camoufler ça. C'est rendu qu'on camoufle les salaires des fonctionnaires. Ça atteint des niveaux, c'est certain que je n'ai pas l'expérience de la majorité de mes collègues, mais des niveaux que, moi, je n'avais jamais vus. Il y a des gens qui ont vu ça mais qui n'ont jamais vu que ça prenait autant d'ampleur et que c'était rendu une pratique courante. Il n'y a même plus personne qui est surpris au gouvernement, M. le Président, d'entendre ça, la création d'un fonds. Puis je suis sûr qu'il n'y a personne qui s'oppose à ça, parce que c'est rendu la pratique courante. On va le payer sur 15 ans. Achetons tout de suite, payons plus tard. C'est ça, la devise de ce gouvernement-là, M. le Président.

En plus, avec ce projet de loi là, on laisse entendre qu'on pourrait concentrer les services de l'ensemble de la flotte gouvernementale dans des endroits bien précis. Ça, je vais vous dire une chose, M. le Président, dans des régions où il y a plusieurs petits garages, où le gouvernement est quand même présent, c'est un plus pour ces gens-là de pouvoir travailler pour le gouvernement. De pouvoir avoir ces petits contrats là de temps en temps, ça aide à arrondir les fins de mois. Mais là ce qu'on vient de dire, on vient de nationaliser la réparation des autos et de la flotte gouvernementale. Ça, M. le Président, c'est un retour aux années soixante. On nationalise la réparation de la flotte gouvernementale. Ça, ça a des beaux impacts en région. Ça, ça aide beaucoup au développement régional.

Ce qui est particulier, c'est que c'est certain que ça va avoir un impact. C'est certain qu'il va se perdre des emplois encore. Puis là on va se demander: Bien, aie, comment ça que la création d'emplois ne va pas mieux que ça au Québec? Comment ça que ça ne marche pas mieux que ça? On dirait que toutes les actions que pose ce gouvernement-là, c'est pour nuire au développement économique du Québec. C'est ça, jour après jour. Au lieu de dire: On s'attaque au déficit puis on relance l'économie au Québec, on semble dire: On cache le déficit puis on nuit à la relance économique. M. le Président, c'est inadmissible. Et je vais vous dire une chose, quand on regarde les sondages, bien c'est un peu ça qui se reflète dans les sondages aussi. Les gens s'en rendent compte. Les gens ont le goût d'avoir des élus, des représentants qui travaillent pour eux, qui vont défendre leurs idées, qui défendent leurs positions et qui travaillent dans le meilleur intérêt de la population du Québec.

M. le Président, j'ai dit pendant ma campagne électorale que, à toutes les fois qu'un projet de loi viendrait attaquer les gens de mon comté, je le dénoncerais. Je pense que, malgré le fait qu'on ait un menu législatif qui est quand même mince, je vais avoir l'occasion de me lever souvent au cours de cette session-ci, notamment sur des projets de loi comme ça, M. le Président, qui sont dangereux pour le développement régional, comme je l'ai démontré, qui sont dangereux pour l'avenir des jeunes, pour l'avenir des générations qui poussent au Québec, qui sont dangereux pour les méthodes et les conventions comptables, notre façon de lire et de comprendre les finances publiques du Québec, qui sont dangereux pour l'attitude et la façon que doit avoir le gouvernement de gérer les fonds publics québécois. C'est notre argent, mais c'est aussi celui de tous les Québécois qui est géré de cette façon-là. C'est inadmissible, c'est inacceptable et c'est surtout dangereux pour la population québécoise.

En conclusion, je dirais que, quand on a vu ce projet de loi là arriver, quand j'en ai pris connaissance, je me suis tout de suite posé la question, on s'est tout de suite dit: Voici un autre bel exemple de la grande opération camouflage. Je vais vous dire une chose, M. le Président, plus ça va, plus les gens se rendent compte que la seule et unique préoccupation du gouvernement actuel, c'est de cacher le déficit, c'est de nuire au développement économique et de faire avancer la seule cause qui les intéresse, c'est-à-dire la cause de la souveraineté puis de la séparation du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.

M. Benoit: Oui, M. le Président, puis-je vous demander de prendre le quorum avant que je commence?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vais vérifier avant; s'il vous plaît, je vérifie le quorum. Oui, nous avons 14, 15 et le quorum est de 13.

Alors, M. le député d'Orford. Oui, maintenant. Ah! vous voulez intervenir, excusez-moi. Ça va, excusez, M. le député d'Orford, très bien. Il était debout, je croyais qu'il voulait intervenir sur une question de règlement, alors je voulais vérifier le quorum à ce moment-là, puis c'est pour ça. Monsieur s'était levé debout, je croyais qu'il voulait intervenir sur autre chose. C'est pour ça, j'ai voulu vérifier le quorum avant de revenir.

Alors, je vous cède la parole, M. le député de Marguerite-D'Youville.


M. François Beaulne

M. Beaulne: Merci, M. le Président. Je me sens obligé d'intervenir à cette étape de la discussion, M. le Président, suite en particulier aux commentaires et aux interventions qui ont été faits à la fois à la période des questions par le député de Laporte ainsi que par son intervention de tout à l'heure. Il me semble qu'il est difficilement explicable, cet acharnement qu'ont nos collègues de l'opposition contre un projet de loi somme toute assez bénin et assez technique qu'est le projet de loi n° 159 instituant le Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Je m'explique mal l'acharnement de nos collègues de l'opposition. C'est peut-être du fait que nous sommes en bonne voie d'atteindre la cible budgétaire que nous nous sommes fixée pour cette année ainsi que les cibles budgétaires que nous nous sommes fixées jusqu'à l'an 2000, c'est-à-dire l'atteinte du déficit zéro, et que par conséquent, se voyant pris de vitesse et surtout constatant que le gouvernement du Parti québécois dans son mandat aura atteint les objectifs d'assainissement des finances publiques qu'il s'est fixés, ils se sentent obligés de camoufler notre réussite et de lancer la population du Québec dans une espèce de labyrinthe où les résultats de l'assainissement des finances publiques seront méconnaissables par le public.

J'avance cette interprétation parce qu'à partir de mon expérience personnelle de banquier je ne comprends pas pourquoi on s'objecte à la création d'un fonds de gestion de l'équipement roulant. D'abord, il m'a toujours semblé que la création de fonds spéciaux – et d'ailleurs ça a été manifesté à plusieurs reprises par des intervenants socioéconomiques divers – à mon avis, a toujours été une sorte de garantie que les fonds qui sont destinés à des programmes ou à des projets particuliers seraient effectivement dirigés vers ces programmes et ces projets particuliers, ce qui est l'objectif, entre autres, de la création de ce Fonds de gestion de l'équipement roulant.

Je m'explique mal dans ce contexte comment nos collègues peuvent s'objecter à ce que ce Fonds de gestion de l'équipement roulant, qui répond à un besoin de notre système de transport, soit mis sur pied. Personnellement, et je suis sûr que c'est un réflexe qui est partagé par plusieurs de mes collègues, qu'ils soient de l'opposition ou qu'ils soient du côté ministériel, mieux vaut avoir des sommes spécifiquement allouées dans des fonds spéciaux plutôt que d'avoir des sommes qui sont un peu partout éparpillées dans ce qu'on appelle les fonds consolidés. On a souvent vécu des expériences où les sommes qui étaient supposément attribuées à des projets spécifiques, entre autres l'entretien routier, étaient canalisées vers d'autres objectifs. Moi, il me semble que la création de ce Fonds de gestion de l'équipement roulant, d'ailleurs comme la création d'autres fonds spécifiques, est une garantie que les fonds vont être utilisés à bon escient.

(17 heures)

J'aimerais également rappeler que la pratique de constituer ces fonds est tout à fait compatible avec ce qui se fait dans le milieu financier, pratique qu'on exige à la fois des gouvernements emprunteurs et des corporations qui empruntent des fonds pour des projets de développement. La plupart des contrats de prêts qui sont consentis aux gouvernements ou à leurs agences ainsi que les contrats de prêts qui sont consentis aux corporations comportent bien souvent la création de fonds d'amortissement, de ce qu'on appelle en anglais des «sinking funds», c'est-à-dire qu'on oblige en quelque sorte les emprunteurs à mettre de côté des sommes d'argent spécifiques pour amortir sur une période de temps le coût du projet. Je vous rappellerai également que ces fonds qui sont constitués ne comportent pas seulement quelques éléments du projet, mais comportent à la fois le matériel impliqué et les services offerts, de même que les coûts des salaires. C'est donc dire que le Fonds de gestion de l'équipement roulant que nous propose le ministre des Transports répond, à mon avis, aux normes et aux pratiques du milieu financier et est tout à fait compatible avec ce qui se fait normalement. Et même, j'ajouterais que c'est une prudence qui fait en sorte que le ministère des Transports disposera des fonds nécessaires pour atteindre les objectifs qu'il s'est fixés, plutôt que d'avoir à recourir à toutes sortes de démarches et à toutes sortes de demandes au Conseil du trésor qui, d'année en année, demeurent fort aléatoires.

J'ajouterai, pour répondre à l'intervention de notre collègue de Kamouraska–Témiscouata, que je ne vois aucunement ici un risque de dérapage intergénérationnel. Bien au contraire, il me semble que tout financement de projet qui s'échelonne sur une période de temps, qu'elle soit de cinq ans, de 10 ans, de 15 ans ou de 20 ans, va profiter autant à ceux qui au moment présent en font les bénéfices qu'à ceux qui à l'avenir pourront en bénéficier. Alors, je ne vois absolument rien qui va à l'encontre de l'équité intergénérationnelle, de financer sur une période de temps des projets, du matériel ou des investissements qui vont bénéficier à des générations, qui peuvent s'échelonner sur une période de longévité que préconisent les différents projets de loi qui créent des fonds spécifiques, des fonds dédiés, comme on les appelle.

Alors, M. le Président, je ne veux pas intervenir plus longuement. Il me semblait néanmoins important à cette étape-ci, par rapport à tout ce qui se dit sur la création de ce fonds, d'apporter quand même certaines précisions et de remettre un peu les pendules à l'heure en ce qui concerne les objectifs de la création de ce Fonds de gestion de l'équipement roulant, de même que sa compatibilité avec les pratiques financières communes et courantes. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marguerite-D'Youville. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Oui. Merci, M. le Président. J'aimerais intervenir, comme, je pense, la très grande partie des membres de l'opposition, sur le projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. C'est important, l'équipement roulant, au ministère des Transports. On y dénombre, à titre d'information, plus de 1 445 véhicules légers, 822 camions lourds, 2 133 autres équipements, dans environ 60 unités administratives un peu partout à la grandeur du territoire. On s'aperçoit que notre parc roulant, au Québec, est très vieillissant. Il faut voir ici les petites colonnes, là. On s'aperçoit que, sur les chiffres que je viens de donner, plus de 769 véhicules ont plus de six ans. Donc, c'est un parc immobilier vieillissant, et je comprends que la province est après réaliser qu'ils devront investir dans le parc immobilier. Ils sont après essayer de chercher une autre astuce, M. le Président, une autre astuce. Je vais y revenir dans quelques minutes.

Pour les gens qui nous écoutent ici ce soir, vous vous dites: Pourquoi l'opposition est-elle soudainement montée aux barricades avec un projet de loi n° 159? Il y a à peu près une page dans cette histoire-là, pleine de numéros; c'est à ne rien comprendre pour le commun des mortels. Pourquoi Robert Benoit, le député d'Orford, a décidé de parler sur ce projet de loi? Pourquoi, après ça, un autre député? Puis, avant ça, il y en a eu, le tout dernier qui vient d'être élu. Pourquoi des gens d'expérience, en grande partie venant du monde des affaires, ont décidé de se prononcer sur ce projet de loi là? Pourquoi?

Bien, la raison est bien simple, c'est qu'on a trois rôles comme législateurs, comme députés. D'abord, de représenter les gens de nos circonscriptions, ce que nous faisons, je pense, avec beaucoup, beaucoup de travail, beaucoup d'heures et beaucoup d'efforts. La deuxième fonction d'un bon député, c'est celle de légiférer, de s'assurer qu'un projet de loi on le regarde, on le fait regarder par des gens compétents aussi et on demande à nos recherchistes d'étudier ce qui se passe ailleurs. Et, finalement, un bon député, son job ici, à Québec, est aussi de gérer les deniers publics ou, devrais-je dire, d'aider le ministre des Finances à gérer les deniers publics.

Donc, ce soir, je pense que mes trois rôles vont être en même temps. Je vais représenter ce que les gens du comté d'Orford pensent. Je vais aider un législateur de l'autre côté à améliorer son projet de loi et, bien sûr, avec l'expérience que j'ai eue dans le monde des affaires pendant 23 ans, je vais essayer de lui expliquer un peu comment gérer des deniers publics. Alors que ce gouvernement péquiste, de l'autre bord, alors que ce gouvernement péquiste se tape la gueule à la grandeur du Québec avec des guichets uniques...

Oui, M. le Président. Il faut écouter le député de Joliette, il faut écouter la députée de Hochelaga-Maisonneuve nous dire comment les guichets uniques, c'est la solution à tous les maux au Québec. Et donnez-moi un seul discours... Même quand il est en Chine, il en parle, notre distingué député de Joliette; même en Chine, il parle de ses guichets uniques. La députée de Hochelaga-Maisonneuve se fait représenter par la députée de Sherbrooke, qui était honorablement dans mon comté il y a quelques jours, qui nous a parlé de ces guichets uniques, de l'importance de ces guichets uniques, comment il faut regrouper les choses pour bien les comprendre, comment on va mieux les gérer si elles sont intégrées.

J'en suis. J'ai été le premier défenseur, comme adjoint parlementaire au ministre de l'Industrie et du Commerce, à dire qu'il fallait regarder les guichets uniques, que c'était une solution. Ils n'ont rien inventé! Nous avions parlé de ça bien avant eux. Mais où le discours semble bifurquer: Comment se fait-il que le guichet unique, c'est bon pour les services aux gens mais que ce n'est pas bon pour les dettes du Québec? Et c'est là que le mot «astuce»... Vous savez, quand M. Parizeau nous disait: Si on peut juste les faire entrer dans la chaudière un peu, les homards, on va fermer la chaudière puis ils vont être pris dedans. C'est ça, l'astuce. Nous, les pauvres homards, sommes-nous après nous patenter une autre astuce? Et la réponse à ça: Je pense que oui.

Et c'est Harry Truman qui disait, alors qu'il était président américain: C'est toujours la même pièce de théâtre, mais il n'y a que les acteurs qui changent. Mais la farce cette fois-ci, c'est que non seulement c'est la même pièce de théâtre, mais ce sont aussi les mêmes acteurs, parce que ceux qui nous proposent ça étaient là entre 1976 et 1985. Qui a mis des déficits dans tous les hôpitaux du Québec entre 1976 et 1985? Qui a permis que les hôpitaux du Québec s'endettent, si ce n'est que c'est ce gouvernement péquiste qui a voulu cacher les déficits entre 1976 et 1985? Qui a permis aux universités d'avoir des déficits? N'est-ce pas ce gouvernement péquiste, entre 1976 et 1985, qui a permis aux universités de s'endetter? N'est-ce pas aussi ce gouvernement, en voulant cacher constamment le déficit, qui a permis à des musées de le faire, qui a permis à plein d'institutions qui, finalement, relèvent de l'État de mettre des déficits qui n'étaient pas consolidés dans les états financiers du Québec? Bien, non seulement c'est la même pièce de théâtre qu'on a connue avant 1985, ce sont aussi les mêmes acteurs et ce sont les mêmes effets négatifs des déficits non consolidés... dont nous ne savons trop où nous sommes rendus.

(17 h 10)

Et ça a eu pour effet, quand on regarde ça en rétrospective, de débalancer la fiscalité entre le Québec et l'Ontario. Tellement que quand Robert Bourassa, notre très bon premier ministre libéral, arrivera au pouvoir en 1985, ça lui prendra des années à ramener l'équilibre entre la fiscalité des citoyens entre le Québec et l'Ontario. Demandez-vous pas pourquoi, sous le règne péquiste, entre 1976 et 1985, plus de 400 000 citoyens du Québec, souvent les gens riches, souvent les gens instruits, quitteront le Québec, 400 000, M. le Président, parce qu'à force de cacher des déficits, à force de penser qu'il y a quelque chose qui ne marche pas, qu'il y a une autre astuce là-dedans, les gens quittaient le Québec. Et c'est encore le cas en ce moment. En ce moment, l'effet net migratoire entre le Québec et les autres provinces est toujours à l'avantage des autres provinces. Nous perdons des citoyens, au niveau migratoire, avec les autres provinces.

Vous savez, ils s'amusent à toutes les périodes de questions. Ils ont une petite cassette qu'ils ont embobinée pour tout le monde. Ils nous reviennent, ils commencent tous leurs réponses avec ça: Les plus forts déficits ont été sous Robert Bourassa. Mais ce n'est pas vrai, M. le Président. Ce n'est pas parce qu'on dit une fausseté 100 fois qu'elle devient vérité. Le plus haut déficit dans l'histoire du Québec... Parce qu'un déficit ça se compare au PIB. C'est comme une action sur la Bourse. Une action vaut 100 $, l'autre en vaut 5 $. Celle de 100 $ n'est possiblement pas meilleure que celle de 5 $. On les compare quand on prend les prix versus le bénéfice. Là, on divise les deux ensemble et on arrive à ce qu'on appelle un «price earning ratio». Là on est capable de dire qui a le plus haut déficit, quelle est l'action la plus élevée à la Bourse.

Ici, c'est la même chose. Un déficit, ça se compare à un PIB, M. le Président. Tous les universitaires, incluant notre bon ministre des Finances, vont vous dire que le plus haut déficit dans l'histoire du Québec, en pourcentage du PIB – c'est la seule façon qu'on peut comparer des déficits – c'est celui qui a été fait sous le règne de M. Parizeau. Même M. Parizeau va être d'accord avec ça, M. le Président. Arrêtez de nous raboter qu'on a fait les plus importants déficits. Dans la vraie vie, ce n'est pas vrai. Les plus importants déficits, que ça ait été nous ou eux, M. le Président, on doit le reprocher. Les gouvernements doivent, comme les municipalités, opérer sans déficit. De ce côté-ci de la Chambre, nous le reconnaissons, nous l'avons toujours reconnu. D'autre part, il y a des périodes économiquement plus difficile, dont celle que le Parti libéral a connue entre 1991 et 1995, et, à ces époques-là, l'importance d'un gouvernement d'aider à l'économie, M. le Président.

Comment allez-vous... J'écoutais avec grande attention le député de Marguerite-D'Youville, c'est un ancien banquier. Mais la question que je lui pose, à ce bon député de Marguerite-D'Youville... Je comprends qu'ils lui dont dit: Écoute, va réciter ta cassette en bas. C'est correct, ça, il n'y a pas de problème avec ça. Mais, lui, quand il était banquier, un de ses clients serait arrivé avec un autre petit fonds à côté, une autre petite filiale à côté et une autre société à côté, comment aurait-il pu, comme banquier, comparer les états financiers, année après année, si ce n'est pas consolidé? Si ce n'est pas consolidé, il aurait dit: Écoute donc, mon cher client, va donc faire tes devoirs. Essaie donc de me mettre ça sur une seule feuille: tes déficits d'un bord, tes actifs sur l'autre, tes opérations sur la troisième. Essaie donc de me comparer ça année après année pour que ça se tienne, cette affaire-là. Je suis sûr que, comme banquier, le bon député de Marguerite-D'Youville, il n'aurait pas dit: Crée donc de petits fonds à gauche et à droite pour essayer de mélanger les dirigeants de la banque, en haut. Je suis convaincu de ça, M. le Président.

Vous savez, c'est euphorique, cette histoire de petits fonds là. Un bon jour, on a eu une distinguée dame, au Québec, qui s'est appelée Mme Lapointe, qui s'est levée en pleine campagne électorale, «from nowhere», comme il disent en anglais, et elle a dit: On va prendre un bout des profits des casinos et on va donner ça aux bonnes oeuvres du Québec, comme si elle venait d'inventer que la terre était ronde. Tout le monde a applaudi devant ça, sauf moi, je pense, M. le Président, et notre gang, parce qu'on s'est dit: Que tu prennes les profits des casinos, et que tu les envoies dans un fonds consolidé, et que tu dises au ministre de la Santé, et que tu dises au ministre des Affaires sociales, et que tu dises au ministre des Finances, vous les distribuerez à partir des priorités sur lesquelles vous vous êtes fait élire, j'en suis, M. le Président, parce que ces profits-là du casino, ils ne disparaissaient pas non plus, ils revenaient dans le compte de banque de la province, ce qu'on appelle le fonds consolidé. Ah non! Mme Lapointe avait décidé, elle, qu'on aurait un petit compte, un petit sac en quelque part, un petit bas de laine, et ça, on donnerait ça aux bonnes oeuvres. On ne sait pas trop qui est-ce qui contrôle ça, on ne sait pas trop comment on répondrait de ça en commission parlementaire, on ne sait pas trop qui est le boss de ça, mais ce n'est pas grave, Mme Lapointe avait eu une bien bonne idée.

Ça, on est après en créer un peu partout, de ces fonds-là. Où est-ce qu'on va arrêter ça, M. le Président? On se lève un matin et on crée un autre fonds. Ça ne se tient pas debout. Ça ne se tient pas debout. Je comprends qu'on est une société distincte, au Québec, mais comment ça se fait que les autres provinces ne font pas ça, que le Canada ne fait pas ça? Je les ai tous écoutés. Il n'y en a pas un qui m'a dit que ça se faisait dans les autres provinces. Il n'y en a pas un qui m'a dit que ça se faisait au Canada. Je comprends qu'on est différent, mais, je ne sais pas, moi, au niveau des chiffres, j'ai l'impression qu'on est pas si différent que ça.

Le mot «consolidé», pour les gens qui nous écoutent, les gens qui n'ont peut-être pas toutes les notions de comptabilité, le mot «consolidé», ça dit ce que ça veut dire, c'est-à-dire qu'on prend tous les avoirs d'un individu et on dit: Si on additionne sa maison, si on additionne sa voiture et on additionne, je ne sais pas, moi, le petit terrain qu'il y a en arrière, bien, il a consolidé ses actifs. Puis, de l'autre côté, on a pris ses dettes, l'hypothèque, la dette sur la voiture et un petit emprunt qu'il avait fait à quelqu'un d'autre, on les a additionnées et, l'un soustrait à l'autre, on arrive avec un actif consolidé, c'est-à-dire qu'on sait exactement ce que le bonhomme ou la madame vaut. Mais, quand on se met à multiplier ça un peu partout, bien là on ne sait plus trop. On ne sait plus trop, et c'est ça que la province est après essayer de nous faire.

Vous savez, M. le Président, les gens qui nous écoutent, qui viennent d'arriver du travail, moi, je les invite à acheter le livre du député d'Iberville. Contrairement à ce que le ministre des Finances nous a dit cet après-midi à la période des questions, moi, je m'en suis servi, des études Le Hir. Je m'en suis servi énormément, des études Le Hir, parce qu'il y en a qui démontraient, il y en a un bon nombre qui démontraient que ça n'avait pas d'allure de se séparer du Canada, M. le Président, dont celle sur le textile, dans mon comté où j'ai tout près de 3 000 personnes qui travaillent dans le textile.

Alors, ce qu'il nous dit, le bon député d'Iberville, c'est: Attention, ce gouvernement-là, quand je siégeais au Conseil des ministres, ils ont essayé, dans le pétage de broue référendaire, oui, M. le Président, dans le pétage de broue référendaire, ils ont essayé de cacher des affaires. Ils ont essayé de dire que les libéraux avant... Même, malheureusement, il y a un autre ministre des Finances juste avant qui avait dit que ce n'était pas si tant pire, ces états financiers là, et là, soudainement, oups! il y a eu 600 000 000 $ qui est arrivé de quelque part. Ça, c'est le député d'Iberville qui nous dit ça, qui siégeait au Conseil des ministres. Lui, il a eu le courage de le mettre par écrit, M. le Président. Il siège comme indépendant. Ça lui a valu son siège, lui, ce n'est pas grave. C'est un gars qui se tient debout, il a dit la vérité. Moi, je le félicite, et les gens qui nous écoutent ici ce soir se questionnent.

D'ailleurs, je ne sais trop quel député tantôt disait: Ah, ils ne connaissent rien, les libéraux. Attention! C'est un terrain dangereux quand on se met à comparer la compétence des gens. Moi, ce que je peux dire, c'est que, dans ce cabinet-là, M. le Président, il y avait trois hommes d'affaires et une femme d'affaires, dans tout le Conseil des ministres: il y avait le député Paillé – on peut le nommer par son nom maintenant – ils l'ont tassé; il y avait le député d'Iberville, ils l'ont tassé; il y avait le député de Crémazie, président de la Caisse de dépôt, ils l'ont tassé; et il y avait la députée de Rosemont, ils ne l'ont pas tassée, elle a eu une démotion, elle gère les entrées d'argent du ministère du Revenu.

Alors, M. le Président, il n'y a plus personne au Conseil des ministres qui vient du monde des affaires, pas un. Du bien bon monde; ça vient des CLSC, ça vient du monde de la santé. Pas de problème avec ça, tout du bon monde. Mais du vrai monde qui vient du milieu des affaires, qui a eu de la misère à faire le «payroll» le vendredi, qui a eu de la misère à payer l'hypothèque sur la maison, qui a eu de la misère à payer l'emprunt sur le camion, il n'y en a plus un au Conseil des ministres, plus un, M. le Président. Du monde qui vient de la fonction publique, ça, on en a pas mal dans ce gouvernement-là. Et, quand on veut comparer les compétences, je ne l'aurais pas fait. Il y a quelqu'un d'autre qui a ouvert ça tantôt. Je voulais juste leur dire: Compétence pour compétence, en affaires, M. le Président, on peut faire tout un débat là-dessus.

Vous savez, c'est ce gouvernement qui nous dit: Ne payez pas les gens sous la table. Ils ont raison de dire ça. Ils ont raison de dire aux gens: Attention, ne favorisez pas le noir, il y en a trop dans notre société. Mais ces mêmes gens dans la publicité avec des grandes tables et les enfants assis en dessous de la table, est-ce qu'ils n'ont pas raison de nous dire ça? Oui. Mais est-ce que, eux, M. le Président, ne sont pas après mettre sous la table ce déficit? Est-ce qu'ils ne sont pas après le cacher? Est-ce qu'ils ne sont pas après faire une autre astuce, M. le Président, avec le projet de loi n° 159? Donc, bien évidemment, vous avez compris que je voterai contre quand nous arriverons aux différents moments de voter contre ce projet de loi là.

(17 h 20)

Donc, ce que je dis, les méthodes sont extrêmement discutables. Je ne dis pas qu'elles sont malhonnêtes, je dis qu'elles sont extrêmement discutables, ces méthodes-là, M. le Président. Ça ressemble un peu à Dominique Michel, qui nous a dit pendant des années: Voyagez maintenant, prenez votre brosse à dents, vous paierez plus tard, M. le Président. Bien, je pense que le député de Rivière-du-Loup, aujourd'hui, c'est un peu ce qu'il a dit dans sa question à la période des questions: On est après nous faire voyager maintenant et à payer un peu plus tard. Et ça, nous, de notre côté de la Chambre, on pense que ce grand mythe que ce gouvernement est après essayer de créer, celui du déficit zéro, ce sera encore une fois un grand mythe. On est après multiplier les déficits dans les hôpitaux. On est après multiplier les déficits dans les universités. Je vois la bonne députée de Sherbrooke qui est ici, qui s'est prise aux cheveux avec le recteur il y a quelques jours, qui a dit que ce n'était pas grave, les déficits dans les universités, puis allons donc de l'avant comme ça, puis c'est parce qu'on n'avait pas le tour de gérer ça, les universités. M. le Président, on est après générer des déficits partout où on peut dans cet État-là, partout où on peut, parce qu'on ne les consolide pas. Et là je ne vous parlerai pas du Musée des beaux-arts de Montréal, je ne vous parlerai pas de toutes sortes d'autres organismes financés par la province dont les déficits n'apparaissent pas dans les états financiers.

On est allé jusqu'à créer un fonds spécial – et ça, c'est incroyable... Je ne pensais pas qu'on pouvait faire ça, M. le Président. Je ne pensais pas qu'on pouvait faire ça. Ta femme part, il y a un divorce dans la maison. Tu crées un fonds spécial à côté parce que ta femme te quitte. C'est ça que l'État a fait, M. le Président. Quand ils ont laissé partir les fonctionnaires, ils ont décidé de créer un fonds spécial à côté parce qu'il y en a qui s'en allaient. Bien, voyons donc! Les gens qui nous écoutent ce soir, demandez-leur donc s'ils ont un de leurs chums, quand son épouse a quitté ou quand lui a quitté la maison, qui a créé un fonds spécial à côté parce qu'il partait. Ça ne se tient pas debout, M. le Président.

On crée des fonds spéciaux partout. On en a créé un avec le casino. On est après en créer un avec les voitures, les bazous du Québec. On est après en créer un sur l'asphalte. Même le personnel qui peinture les bazous, M. le Président, on va le payer sur cinq ans, avec ce projet de loi là. Où est-ce qu'on arrête cette euphorie? Ça ne se tient pas debout. Mais je n'ai pas de surprise, parce qu'un social- démocrate dans l'âme, un vrai social-démocrate, un vrai de vrai, un Bob Rae de ce monde, ça, c'est un gars qui, quand il se lève le matin puis qu'il y a un problème dans la société, il dit: O.K., là il y a un problème, qu'est-ce que je vais faire? Puis là la solution, ça arrive d'en haut, on dirait, là on dit: On va créer une autre patente. Alors, là, quand ce n'est pas une société, quand ce n'est pas une régie, c'est un fonds spécial. Les patentes spéciales au Québec, M. le Président, c'est supposé régler les problèmes, alors que, moi, je vous dirai que, si on les mettait sous la lumière, ces problèmes-là, si on les étudiait, si on les regardait sérieusement, on s'apercevrait qu'il n'y en a pas, de solutions, en créant des patentes comme celles-là.

Je finirai en vous disant – et ça, j'insiste – vous savez, alors qu'on est en Chine en ce moment et qu'en Chine on va privatiser 378 000 entreprises – pays communiste au monde – 378 000 entreprises seront privatisées dans les prochaines années, eh bien, au Québec, à ce moment-là, au même moment au Québec, le ministère des Transports – écoutez bien ce que je vais vous dire, M. le Président – va se mettre à vendre de l'essence. Oui, M. le Président! Alors, les gens qui nous écoutent ce soir dans leur garage, qui vendent de l'essence puis de l'huile, attention! Si vous avez des clients autres que ceux du ministère des Transports, en Gaspésie, à Austin, dans l'Abitibi, dans l'Outaouais, n'importe où, là, si vous vendiez du gaz, par exemple, au petit camion du musée ou si vous vendiez du gaz, je ne le sais pas, à quelque organisme gouvernemental, maintenant, ces gens-là iront acheter leur gaz au ministère. Là, on est 30 ans en arrière, on est rendu en 1960, quand on étatisait les affaires. Là on est rendu que la Chine est après les privatiser puis, nous autres, on est après les étatiser, M. le Président. Alors, on aura l'occasion de reparler de ce projet de loi à différentes occasions dans les prochaines semaines, et je reviendrai. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Bellechasse. M. le député.


M. Claude Lachance

M. Lachance: Merci, M. le Président. D'abord, je voudrais vous dire que je n'ai pas l'intention de rivaliser, au niveau des décibels, avec celui qui me précède, M. le député d'Orford. Ce n'est pas mon genre et je ne pense pas que c'est la meilleure façon d'étayer les positions que nous défendons.

Après avoir parlé de toutes sortes de choses, celui qui m'a précédé n'a peut-être pas parlé suffisamment du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant. M. le Président – et ça, c'est un témoignage que j'ai eu à quelques reprises de la part des gens qui travaillent au ministère des Transports chez nous, dans Bellechasse – c'est un secret de polichinelle de constater que le matériel, que les équipements, que les camions sont dans un état tel qu'ils ont besoin d'être remplacés à cause de leur vétusté. Alors, c'est une des raisons importantes pour lesquelles ce projet de loi est devant nous pour étude présentement.

Il y a, au ministère des Transports présentement, on parle de quelque chose comme 1 400 véhicules légers, 800 camions lourds et plus de 2 000 autres équipements de toutes sortes, ce qui représente 40 % du parc de véhicules du gouvernement du Québec. Ces équipements, dans beaucoup de cas, sont particulièrement âgés, et il n'y a personne parmi nous qui accepterait, par exemple, de payer plus cher de réparations sur une période de trois ou quatre ans que ce que ça coûte en réalité pour acheter un véhicule neuf.

À titre d'exemple, en 1996-1997, l'an dernier, le ministère a dû défrayer 22 000 000 $ en entretien et en réparations pour ces équipements, alors que la valeur résiduelle de ces équipements était estimée à quelque chose comme 30 000 000 $. C'est donc une situation qui ne pouvait pas durer, et je pense qu'on devait trouver une façon imaginative de régler le problème et d'améliorer ce parc le plus rapidement possible.

Tantôt, j'entendais le député d'Orford se questionner tout haut pour savoir si ce qu'on faisait était quelque chose d'original ou quelque chose qui existait ailleurs. J'ai des petites nouvelles pour lui. À titre comparatif, il existe au moins dans deux provinces canadiennes, soit le Manitoba et le Nouveau-Brunswick, ainsi que chez nos voisins du Sud, au gouvernement fédéral américain, des agences qui ont pour mandat la gestion du parc automobile. Alors donc, si c'est bon pour le géant américain, pourquoi ça ne serait pas bon au Québec?

Il y a également, dans le secteur privé, M. le Président, plusieurs entreprises bien cotées en bourse, qui sont reconnues pour être rentables, comme Bell Canada, BC Tel, Vidéotron et plusieurs autres entreprises dans le secteur privé, qui ont aussi des unités d'affaires qui sont tout à fait distinctes pour la gestion de leur parc de véhicules. Alors, ça me semble des exemples intéressants à suivre afin d'en arriver à atteindre les objectifs qu'on s'est fixés.

M. le Président, je reviens à certains propos qui ont été évoqués tout à l'heure par des porte-parole de l'opposition, qui cherchent à discréditer la mise sur pied de ces fonds en parlant de camouflage, de secret, de cachette. Évidemment, c'est de la foutaise. Comment voulez-vous qu'on parle de cachette lorsque des milliers, des dizaines de milliers de nos concitoyens et concitoyennes suivent nos débats ici par le biais de la télévision, par le biais également du Journal des débats ou encore par Internet. Également, il y aura, pour ce fonds comme pour d'autres fonds, un rapport annuel qui sera déposé à l'Assemblée nationale et étudié en commission parlementaire et soumis à l'examen des parlementaires au vu et au su de toute la population du Québec. Alors, comment parler de cachette ou de camouflage lorsqu'on a des exemples comme ceux-là de transparence, de limpidité?

M. le Président, j'aimerais revenir à certains propos qui ont été soulevés tout à l'heure par nos amis d'en face, comme on les appelle, et qui tentent désespérément d'attaquer la crédibilité du gouvernement dans les efforts qu'il déploie pour assainir les finances publiques, en nous disant que, bon, ce n'est pas un déficit zéro réel que nous aurons, mais que c'est caché avec toutes sortes de moyens, entre autres avec des fonds dédiés. Je vais vous citer deux exemples que le gouvernement précédent, pendant son mandat de neuf ans, faut-il le rappeler, a utilisés – et puis, c'est drôle, ils ne nous en parlent pas aujourd'hui – pour essayer d'atténuer l'impact budgétaire.

Je pense que l'opposition officielle est bien mal placée pour porter des accusations, parce qu'un des premiers gestes que le gouvernement Bourassa avait posé en 1986, le gouvernement libéral, ça avait été d'apporter des modifications à la pratique comptable du gouvernement afin d'inscrire la totalité des profits d'Hydro-Québec dans ses revenus. Ça n'existait pas, ça, avant 1986. Donc, par une écriture comptable bien simple, le déficit a été réduit de plusieurs centaines de millions de dollars.

(17 h 30)

Deuxième exemple, dont vous vous souvenez, M. le Président – et ça, ça s'est passé au dernier mandat du gouvernement précédent – de 1989 à 1994, nos amis libéraux ne se sont pas gênés pour siphonner 2 000 000 000 $ dans la caisse de la Société de l'assurance automobile du Québec. Alors, ça prend un certain culot pour venir nous reprocher aujourd'hui la façon dont nous voulons nous y prendre pour atteindre le déficit zéro. Ils disent qu'ils ont eu l'idée bien avant nous. Le député de Laporte, l'ancien ministre des Finances, nous dit que c'est lui qui a eu l'idée. C'est curieux d'avoir eu l'idée comme ça au bout de neuf ans d'administration! Il aurait peut-être pu y penser avant puis passer aux actes puis le réaliser!

D'ailleurs, si je me permets un retour vers le passé – «back to the future» – on pourrait ressortir des coupures de presse de l'époque du ministre des Finances, qui était pendant quelques mois le député de Laporte. Le Devoir du 4 mars 1994 titrait: Québec vire de bord: la reprise avant le déficit. L'objectif du déficit zéro est relégué aux oubliettes. Ça, c'était dans Le Devoir . Dans Le Soleil de la même journée, le 4 mars 1994, on titre, et je cite: Le ministre Bourbeau juge tolérables les 4 700 000 000 $ actuels. Le déficit restera au même niveau. Même chose dans La Presse du 9 mars 1994: Le déficit du Québec redevient inacceptable . Parce que, là, il a bien vu qu'il y avait une réaction de la part de la population. On n'était pas très loin de la campagne électorale. La Presse du 13 avril 1994 cite: Québec décale sa guerre au déficit. Le ministre des Finances se limiterait à le maintenir au-dessous de 5 000 000 000 $. Vous avez vu le résultat; finalement, on s'est retrouvé avec un déficit de 5 700 000 000 $.

M. le Président, je voudrais rappeler à nos amis d'en face également, que, lorsqu'ils ont pris le pouvoir en 1985-1986, le 31 mars 1986, la dette totale du Québec était de 31 600 000 000 $. Lorsqu'ils l'ont quitté, neuf ans plus tard, où en était-on? 74 400 000 000 $. Alors, pourquoi aujourd'hui on est obligé de faire du ménage dans nos finances publiques? Je pense que c'est évident qu'on ne pouvait pas continuer sur cette erre d'aller. Il fallait prendre nos responsabilités, et c'est ce que nous faisons présentement même si ça nous cause des problèmes importants, même si nous aimerions laisser de côté ce calice douloureux.

On a des intérêts à payer à cause de cette dette immense, gigantesque, qui tournent autour de 6 000 000 000 $ par année. C'est à peu près l'équivalent de ce que nous rapporte la TVQ, la taxe de vente du Québec. Alors, on ne pouvait pas continuer comme ça. On ne pouvait pas non plus continuer à avoir le risque suspendu au-dessus de nos têtes d'une nouvelle décote après les nombreuses décotes que le Québec a connues à l'époque du gouvernement libéral.

M. le Président, j'entendais également le député qui m'a précédé parler de certains propos cités dans un volume du député d'Iberville. Je trouve ça très incohérent. Pourquoi incohérent? Parce que nos amis d'en face, je les ai vus pendant des jours, pendant des semaines tirer à boulets rouges – et le terme n'est pas trop fort – sur le ministre qui était à l'époque le député d'Iberville, notre collègue M. Le Hir. Alors, ça a été un acharnement sur lui, un acharnement continuel. On mettait en doute sa crédibilité. Et là, voilà qu'aujourd'hui on le cite en exemple pour appuyer ses thèses. Quel revirement de situation! Celui qui n'était pas crédible il y a quelques mois est devenu tout à coup, comme ça, aujourd'hui... Pour appuyer une thèse que les libéraux peuvent avoir, on le cite, on le prend à témoin comme étant quelqu'un qui sait de quoi il parle.

Alors, M. le Président, en terminant, je crois que ce qui fait mal à nos amis d'en face, c'est que l'actuel gouvernement est en train de faire quelque chose, faire du ménage, là où eux n'ont pas eu le courage de travailler pendant les neuf ans qu'ils ont été au pouvoir. Et le déficit zéro, la population en est, je pense, bien consciente, il sera atteint tel que prévu au tournant de l'an 2000. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Bellechasse. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Toujours dans le cadre de la loi n° 159, loi qui vient créer à nouveau un fonds pour administrer les services du gouvernement du Québec. Je pense que c'est ça le débat que l'opposition fait aujourd'hui. C'est de faire ressortir auprès de la population québécoise que le gouvernement cache certaines dépenses. Tantôt, le député du côté ministériel disait: Je comprends mal les députés de l'opposition de constamment nous accuser de cacher des choses.

Bien, oui, M. le Président, c'est ça. L'effort que nous devons faire, c'est de rappeler à la population, à toutes les fois qu'un projet de loi comme celui-là sera présenté, que l'objectif déficit zéro du premier ministre du Québec, du ministre des Finances et du gouvernement actuel, finalement, est un objectif où tu as un résultat caché, dans le sens qu'ils transfèrent des dépenses aux autres, ils transfèrent la facture aux autres pour arriver à atteindre leur objectif.

Le projet de loi n° 159, comme le mentionnait mon collègue il y a quelques minutes, le député d'Orford, c'est un projet de loi de quelques articles, de quatre articles, M. le Président, mais qui a toute son importance quand on le définit et qu'on le décrit, un projet de loi qui a pour effet justement de créer un fonds pour acheter, acquérir de l'équipement pour le ministère des Transports. Et, j'y reviendrai tantôt, M. le ministre a donné des explications, à la présentation de son projet de loi, qu'il a presque reniées à la période de questions cet après-midi. Je reprendrai sa présentation et la population sera en mesure d'en juger.

Pour revenir à tous ces fonds, et celui-là plus spécifiquement, tantôt, le député de Bellechasse mentionnait: Bien, il faut bien faire quelque chose. Il faut acheter de l'équipement, l'équipement est désuet. Ça se comprend, ça fait trois ans qu'ils n'ont pas investi dans l'équipement et qu'ils ont assumé ou assuré une maintenance déficiente au niveau de l'équipement. On parle surtout du ministère des Transports, mais il y a d'autres services gouvernementaux aussi qui font face à la même situation, des équipements, en années, qui sont passés dû et qui n'ont pas eu l'entretien souhaité faute de budget au niveau de tous ces ministères.

Mais ce dont on doit s'inquiéter aussi, c'est que le gouvernement actuel, dans sa façon de se préparer à faire la démonstration en l'an 2000, ou à l'occasion du prochain référendum, ou à l'occasion d'une prochaine élection qui est probablement pour l'an prochain, c'est de démontrer: Nous avons travaillé à assainir les finances publiques et, vous voyez, nous avons réduit l'objectif de x. Et c'est ce qui va arriver, et on a aujourd'hui le projet de loi n° 159, on en aura probablement d'autres dans quelques mois, d'ici un an, des projets de loi qui créent des fonds pour prendre en charge les dépenses de l'État pour assumer certains services aux citoyens du Québec. Donc, ce sera une gestion avec une série de petites caisses qui seront difficiles à contrôler, difficiles à suivre, c'est-à-dire que ce sera difficile de compréhension pour la population de tout suivre ça. Tel fonds gère tel service, tel fonds gère telle pièce d'équipement.

On en a des exemples. Les transferts de dépenses au niveau des municipalités, par exemple. Ce n'est pas nécessairement un fonds, mais on pourrait presque l'appeler, le 500 000 000 $, un fonds de secours pour le gouvernement du Québec, d'une part. Les institutions de santé, on leur permet d'emprunter pour apporter des améliorations au niveau des infrastructures, d'emprunter pour supporter les départs des travailleurs et des travailleuses dans le domaine de la santé. Et ça, ça vaut, M. le Président, pour l'éducation. Et là, avec le projet de loi n° 159, on parle du transport. On a eu les retraites. Le gouvernement du Québec se retire dans certains programmes de support à l'agriculture, ce qui aura un impact dans chacune de nos régions dans les prochains mois, dans les années à venir. Un manque de support à l'agriculture, pour certaines régions, pourrait devenir catastrophique au niveau de certaines productions. Donc, vous voyez le gouvernement qui se retire, et il y en a beaucoup d'autres qu'on pourrait mentionner.

(17 h 40)

Donc, comme je le mentionnais, le gouvernement du Québec se prépare à gérer avec des petites caisses pour arriver à faire la démonstration qu'il a coupé dans ses dépenses et que, finalement, il atteint un équilibre budgétaire. M. le Président, ça va avoir un impact économique dans chacune de nos régions. Mon collègue du côté de l'opposition, le député d'Orford, l'a mentionné tantôt, et le député de Kamouraska-Témiscouata la même chose, avec ce fonds, et c'est les propres paroles du ministre quand il a fait cette présentation aujourd'hui, vous allez avoir un fonds de gestion de l'équipement du gouvernement du Québec, et il propose que le ministère des Transports ou, du moins, ce fonds fasse la gestion de tous les équipements pour tous les services et les autres ministères du gouvernement du Québec, et l'entretien aussi.

Vous vous rappelez, M. le Président, parce que vous étiez probablement en Chambre ce matin et vous étiez aussi là lors de la période des questions, quand le ministre des Transports nous présentait son projet de loi, il nous disait: Un fonds pour acquérir de l'équipement et l'entretien de ces équipements et la gestion des équipements. Ça, ça en couvre assez grand. Donc, il y a lieu de s'inquiéter. Il y a lieu de s'inquiéter, à savoir que ce fonds-là va financer l'acquisition d'équipements, va gérer l'entretien de ces équipements et va aussi assumer la gestion de ces équipements. À la période des questions, cet après-midi, M. le Président, le ministre a répondu à des questions: Le fonds va servir uniquement à l'acquisition d'équipements. Et ça, c'est un peu en contradiction avec la présentation qu'il avait faite de ce projet de loi, d'une part. Mais, ça, on y reviendra, parce que le projet de loi va être débattu en commission parlementaire, et plusieurs d'entre nous seront là pour questionner, pour se rassurer sur les intentions du gouvernement avec ce fonds-là de plusieurs millions de dollars.

Donc, je mentionnais tantôt, M. le Président, que ça va certainement avoir un impact économique parce que le comité de gestion de ce fonds-là va acquérir de l'équipement au nom de tous les services gouvernementaux en région. Autrefois, si vous étiez dans la région de Rivière-du-Loup, dans la région de Montmagny-L'Islet, si vous étiez dans l'Outaouais, certains ministères faisaient appel à des garages pour l'achat d'équipements. Donc, ils allaient en soumissions publiques et des garages de nos propres régions pouvaient soumissionner selon leur capacité pour des pièces d'équipement qu'ils étaient en mesure de fournir à certains ministères. L'entretien de ces véhicules-là se faisait en région, avec appels d'offres ou, je pense, propositions au niveau de certains garagistes. L'achat d'essence se faisait un peu partout dans nos services, dans nos stations publiques, et ça animait, ça générait une certaine activité économique pour chacune des régions. Le ministre nous dit: Avec ce fonds-là, il y aura aussi le mandat d'offrir des services de vente d'essence pour tous les services gouvernementaux. Donc, on vient dire que, dans les régions comme celles que j'ai mentionnées tantôt, celle que je représente et beaucoup d'autres régions au Québec, dans le futur, ce sera un service gouvernemental, du gouvernement du Québec, le Fonds de gestion, qui va s'assurer de l'achat d'équipements, de l'entretien et de l'essence, comme je le mentionnais.

M. le Président, il y a lieu de s'inquiéter. Et ce n'était pas suffisant, la déclaration du ministre, cet après-midi, de nous dire: Ce sera uniquement pour l'achat d'équipements. C'est là que je veux, en fait, demander à la population et dire à la population: Nous avons avantage à surveiller le gouvernement dans son plan d'action pour gérer à gauche et à droite des fonds pour arriver à nous faire la démonstration du déficit zéro dans quelques mois. Et c'est qu'on dit que ce sera un déficit caché, dans de telles situations.

M. le Président, il est anormal qu'un gouvernement nous dise: Nous voulons gérer comme l'entreprise privée. Ça se fait partout au niveau de l'entreprise privée, oui. Mais, si nous avons avantage à donner des services via l'entreprise privée, bien, qu'on privatise certains services du gouvernement du Québec, s'ils sont en mesure de faire la démonstration qu'il y aurait des économies, que la population n'en serait que mieux servie et que les services nous seraient donnés de façon à assurer un service plus constant à la population.

Mais là n'est pas la question pour le moment. Je pense que là où il y a des services offerts par le ministère des Transports, par exemple, là où ils se sont réservés justement l'entretien des routes l'hiver, ils se sont gardé les autoroutes, les travailleurs du ministère des Transports donnent un très bon service; on en a la preuve dans les grands axes routiers à l'occasion des tempêtes hivernales que nous avons. On l'a mentionné tantôt, l'équipement est probablement usagé, date de plusieurs années, est désuet, mais ce n'est pas une raison pour créer des fonds comme celui-là pour acquérir de l'équipement. On pourrait facilement le faire par des investissements de la part du ministère des Transports. Vous allez me dire: Nous n'avons pas les finances pour investir les montants nécessaires, soit des 10 000 000 $, 12 000 000 $, 15 000 000 $ pour rajeunir tout cet équipement-là. Oui, mais on devrait le dire à la population: Nous créons un fonds, et il sera comptabilisé dans nos rapports annuels; il ne sera pas caché, il ne sera pas financé sur cinq, huit ou 10 ans.

Donc, nous avons avantage, nous avons raison, les députés de l'opposition, d'être très vigilants, et nous allons continuer de l'être parce que nous savons très bien que, d'ici à la prochaine élection et d'ici au prochain référendum, le gouvernement, par toutes les astuces imaginables dont il a fait la démonstration dans les derniers mois, saura créer des fonds comme celui-là, donner ou demander carrément à des conseils d'administration, comme au niveau des établissements de la santé et des établissements d'éducation, d'emprunter sur des moyens termes ou du long terme pour ne pas avoir à supporter des investissements à ce niveau-là, au niveau des infrastructures. Nous aurons avantage à être très vigilants et à démontrer et à demander à la population de suivre de près les gestes du gouvernement, elle aussi, pour mieux comprendre où il s'en va et où il veut nous amener. Donc, c'était la démonstration que je voulais faire aujourd'hui, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. On est en face d'un projet qui est issu du ministre des Transports mais qui, dans la pratique, n'est pas un projet de loi du ministre des Transports. C'est un projet de loi du ministre des Finances qui, dans l'ensemble des passe-passe qu'on est en train de découvrir et qui doivent mener à ce qu'on est en train de voir, comme un déficit zéro, de plus en plus sur papier, qui sont ces opérations, ces déplacements d'argent ou ces déplacements de déficits... qu'ils veulent amener à pouvoir dire à la population: On est arrivé à un déficit zéro, alors que, dans la pratique, il est loin d'être évident qu'on aura véritablement contré le phénomène de l'endettement que tant de nos citoyens ont déploré et pour lequel ils s'inquiètent.

J'ai été surpris, d'ailleurs, à la période de questions un peu plus tôt, de la candeur avec laquelle le ministre des Transports lui-même disait à ses collègues de l'opposition officielle, à ses collègues du Parti libéral, il leur disait: Vous avez fait la même chose, vous endettiez le Québec. Il disait: Créer un fonds, ce n'est pas pire qu'endetter le Québec, ce n'est pas pire qu'emprunter. Il avait entièrement raison. Il était en train de dire: Nous, ce qu'on est en train de faire comme gestion, bien, on reprend certains des principes que vous nous avez légués, l'opposition officielle, en endettant le Québec, mais, nous autres, on va endetter le Québec d'une façon un peu mieux tournée.

Je l'ai dit tout à l'heure à la période des questions, je pense que c'est important de le répéter en des termes simples, en des termes que nos concitoyens peuvent comprendre, le déficit gouvernemental, quand un gouvernement arrive à la fin de l'année, pour ses achats et pour ses dépenses, il a manqué d'argent et il fait un déficit, ça s'appelle: Achetez maintenant et payez plus tard. Quand le gouvernement crée un fonds, comme c'est le cas présentement, et qu'il dit: On va acheter telle série d'équipements ou on va construire des routes, dans le cas qui nous occupe, on va acheter des véhicules, on va les payer plus tard, bien, c'est: Achetez maintenant et payez plus tard. C'est le même principe.

Le ministre faisait le parallèle, il disait: Dans nos vies privées, il y a un certain nombre de choses, les voitures, l'hypothèque sur une maison, un certain nombre de paiements qu'on étale sur plusieurs années. Bien oui, mais c'est de l'endettement. Quand on a un prêt auto, quand on s'achète une auto et qu'on contracte auprès d'une institution financière un prêt, on s'endette. Le gouvernement actuel est en train de nous dire: Nous, on veut arriver à un déficit zéro, arrêter l'endettement. Là on dit: On va faire un immense prêt auto pour toute la flotte de véhicules du Québec, mais ça ne sera pas de l'endettement, c'est un fonds, c'est de l'amortissement. Ce n'est pas du déficit ou de l'endettement qu'on camoufle là-dedans, c'est autre chose.

(17 h 50)

Comme le citoyen qui contracterait auprès d'une institution financière, il sort de sa banque, il vient de contracter un prêt auto, mais il sort de là en disant: Je ne suis pas plus endetté que quand je suis entré. Je sors de la banque, j'ai un prêt pour ma voiture, mais je n'en sors pas plus endetté que quand je suis entré. Bien non! C'est de se boucher les yeux, M. le Président, c'est de refuser de voir la réalité. D'autant plus que dans le cas d'un prêt auto, pour le contracter sur cinq ans, il ne faut pas être député, il faut être un petit utilisateur de véhicule, quelqu'un qui ne fait pas trop de kilométrage dans une année. Parce que je peux vous dire, moi, comme député de Rivière-du-Loup, avec le travail que je fais, au bout de cinq ans, ma voiture, ça fait longtemps que j'ai repassé, j'ai changé deux fois toutes les pièces d'un pare-chocs à l'autre. Je pense que les véhicules du gouvernement, qui sont pour la plupart sur la route à longueur d'année, qui servent à des gens qui travaillent sur le terrain, qui utilisent leurs véhicules à longueur d'année, ce n'est pas tous les véhicules du gouvernement, sur une période de cinq ans, pour lesquels ça va représenter un amortissement réel.

Donc, je le dis comme je le pense, quand on prend un achat de l'année en cours, quand on prend des achats – il faut voir l'historique financier du Québec – qui ont toujours, au Québec, été payés à même le budget, des immobilisations qui ont toujours été financées à même le budget de l'année en cours et qu'on commence à les étaler, c'est une forme d'endettement. Soyons réalistes, il y en a d'autres qui l'ont dit avant moi, une dette, c'est une dette, M. le Président. Il va falloir que le gouvernement soit capable de faire face à cette situation-là d'une façon responsable.

Parce que j'avais compris... Quand le premier ministre et quand d'autres ministres nous ont fait des discours sur leur conversion à l'élimination du déficit, moi, j'étais très heureux de ça. Moi, je suis un de ceux qui étaient inquiets de l'endettement perpétuel des gouvernements. Je suis l'un de ceux qui sont préoccupés par l'évolution de la situation des finances publiques. Quand le gouvernement nous a dit: On va arrêter d'accumuler des dettes, on va arrêter d'étaler nos factures d'épicerie sur une plus longue période, j'étais heureux d'entendre ça. Là, je suis en train de me poser des questions, parce qu'on se demande: Est-ce que vraiment l'objectif, c'est d'arrêter d'accumuler des dettes, ou l'objectif, c'est d'être capable d'arriver à une espèce de bilan électoral où, à la prochaine élection, on va pouvoir dire qu'on a atteint un déficit zéro, mais qu'en pratique, dans la vraie vie, il y a des fonds où il y a plein d'endettement de caché?

Il y a des régies de la santé qui ont leurs propres dettes accumulées, et il y a des établissements de la santé qui ont leurs dettes, et il y a des institutions d'enseignement qui ont leurs dettes. Est-ce qu'on n'est pas en train de dire: On a un gouvernement du Québec qui est arrivé au déficit zéro, qui a éliminé son déficit, mais on a, par ailleurs, un peu partout, éparpillés dans toutes sortes d'institutions, dans toutes sortes de fonds, toute une série de petits déficits ou de petites dettes qui, mis ensemble, nous ramènent à une situation qui ressemble drôlement à ce qu'on a vécu jusqu'à aujourd'hui, c'est-à-dire un gouvernement qui ne paie pas ses dépenses, un gouvernement qui, année après année, ne rencontre pas ses paiements et pellette sur les générations futures ses paiements?

Parce que le but évident du gouvernement, maintes fois répété, d'arrêter «d'enquérir» des dettes, c'est de dire: On ne veut pas que ce soient les générations futures, on ne veut pas que les gens dans le futur paient pour des services qu'ils n'auront pas utilisés. Or, toutes ces mesures-là, ces créations de fonds, toutes les actions ou les subterfuges du gouvernement pour refiler des déficits et des dettes à gauche et à droite, ça a le même effet. Ça fait payer plus tard. Ça fait payer sur des générations futures. Ça pellette par en avant des dépenses qui, dans la pratique, sont des dépenses qui sont encourues aujourd'hui.

Ça va aussi à l'encontre d'une recommandation maintes fois exprimée par le Vérificateur général du Québec. J'ai toujours eu confiance dans les recommandations du Vérificateur général dans une période de gestion des finances publiques difficile, dans une période où on est obligés de faire des choix extrêmement douloureux sur le plan de nos finances. La première étape, c'est d'écouter le Vérificateur pour voir: Est-ce qu'au moins l'argent qu'on a est bien utilisé? Est-ce qu'il n'y a pas de trou dans le sac ou dans le panier qui fait que le panier coule puis qu'il y a de l'argent qui se perd? Et le Vérificateur a fait beaucoup de recommandations sur la mesure des résultats des actions gouvernementales.

Le Vérificateur a fait énormément de recommandations, entre autres, sur le portrait qu'on doit avoir de la réalité des finances publiques. Il a toujours dit: Pour avoir un bon portrait de la réalité des finances publiques, il faudrait avoir autant que possible une dette globale, une dette cumulée dans le budget.

Alors, j'ai bien hâte de voir comment on va faire, à l'intérieur des prochains budgets ou à l'intérieur des prochains portraits financiers du Québec, pour comptabiliser toutes les dettes qui vont être accumulées. Parce que, dans la pratique, quand le Fonds de gestion de l'équipement roulant, ou quand une régie de la santé, ou quand n'importe quel organisme qui relève du gouvernement accumule des dettes, renvoie des paiements dans le futur, c'est nous autres, c'est les payeurs de taxes du Québec qui en sommes responsables, il ne faut pas se faire d'illusions. Que ce soit le gouvernement du Québec qui arrive à la fin de l'année puis qui dit: J'ai 3 000 000 000 $ de déficit, c'est nous autres, comme contribuables, comme payeurs de taxes, qui avons à payer pour ça. Mais, si ce n'est pas le gouvernement du Québec lui-même qui, dans ses livres, arrive avec un déficit mais que, par contre, c'est la régie de la santé de la Gaspésie qui arrive avec un déficit puis qu'à l'autre bout il y a un Fonds de gestion de l'équipement roulant qui, lui, a reporté des paiements sur le futur, bien, tout ça, de façon accumulée, c'est de l'endettement dont les payeurs de taxes du Québec sont responsables, pour lequel on va devoir payer un jour.

Ce n'est pas parce que ça porte un autre nom que le déficit gouvernemental qu'on n'aura pas un jour, comme contribuables du Québec, à payer pour ça. Il faut se le tenir pour dit. C'est pour ça que je dis que le Vérificateur général a toujours dit: Il faut avoir un bon portrait de la réalité financière du Québec. Le meilleur portrait qu'on puisse avoir, bien, c'est quand toutes les formes d'endettement sont mises ensemble. Puis là, j'ai l'impression qu'on va dans le sens inverse des recommandations du Vérificateur général, d'où mon inquiétude, avec le projet de loi n° 159, c'est-à-dire qu'on se retrouve dans une réalité où on s'éloigne des préoccupations du Vérificateur général, qu'on éparpille les formes d'endettement. Je ne sais pas jusqu'où ça va aller, cette tendance-là, mais le gouvernement semble véritablement avoir l'intention d'aller de plus en plus loin dans l'éparpillement des formes d'endettement.

Ça doit nous amener, M. le Président, d'ailleurs à faire une espèce de bilan de la réelle lutte au déficit du gouvernement. Je regarde la dernière année, le gouvernement se pète les bretelles sur sa gestion du déficit, de son élimination du déficit. Mais, pour avoir un vrai portrait de la réduction des dépenses, donc de l'amélioration de la gestion de l'État, il faudrait enlever d'abord tous les fonds, tous les déficits qui sont créés un peu partout dans les régies de la santé puis dans les établissements puis tout ce qui arrive. Ça, il faudrait enlever ça, parce que ça, ce n'est pas un gouvernement qui réellement réduit ses dépenses, c'est un gouvernement qui répartit ses formes d'endettement ailleurs. Il faudrait enlever les augmentations de taxes, 1 % de la TVQ au 1er janvier qui s'en vient, transfert aux municipalités. Ça, ce n'est pas un gouvernement qui réduit ses dépenses. Augmenter les taxes, c'est une façon facile d'arriver. Quand tu n'as pas été capable de t'attaquer à tes dépenses, tu viens fermer le budget par des augmentations de taxes. La baisse des taux d'intérêt qui a donné au gouvernement actuel une sérieuse augmentation de marge de manoeuvre dans sa lutte au déficit.

Tout ça pour dire, M. le Président, que j'ai l'impression que, du côté de la réduction de dépenses, de la réduction de la taille de l'État... Il y a un groupe de députés, avec le député de Fabre en tête, qui a tenté de faire des balbutiements d'efforts pour réduire le nombre d'organismes. Finalement, on a fait semblant de donner une suite puis, en pratique, là, il n'y a pas un employé de moins puis il y a quelques structures de moins parce qu'on fait des fusions, mais on a gardé tout ce qu'il y avait, on a gardé tout le monde, on a mis juste un chapeau. Mais on n'a pas réduit la taille de l'État comme ça aurait pu être fait. Alors, tout ça pour dire que la réduction des dépenses réelle n'est pas faite, très peu, puis là on est en train d'éparpiller l'endettement par plusieurs mesures dont la création de fonds comme vient le faire le projet de loi dont on discute. Et c'est pour cette raison-là, M. le Président, que je peux très difficilement joindre ma voix au principe du projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Nous allons procéder maintenant au débat de fin de séance, tel que prévu, entre le député de Laporte et le ministre des Finances au sujet des méthodes comptables douteuses comptabilisées par le ministre des Finances en période préréférendaire. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Laporte pour cinq minutes. Après, il y aura M. le ministre pour un cinq minutes et la réplique de deux minutes.

M. Gobé: Moi, j'ai une question, question de directive.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Avant de donner la parole, M. le député de LaFontaine, question de renseignement?

(18 heures)

M. Gobé: Une question de directive, M. le Président, de renseignement. Je comprends bien qu'on poursuivra le débat sur le projet de loi n° 159 demain?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Enfin, personnellement, je ne sais pas si c'est demain. Ce sera le leader qui l'appellera.

M. Jolivet: M. le Président, en temps et lieu.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, une prochaine séance.

M. Gobé: D'accord, merci.


Débats de fin de séance


Ampleur du déficit à l'arrivée au pouvoir du gouvernement

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Laporte, je vous cède la parole pour cinq minutes.


M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Oui, M. le Président. Vous savez que le député d'Iberville, qui était ministre dans le gouvernement du Parti québécois, a publié cette semaine un livre, un livre que je montre ici et qui s'intitule Solution unique pour une société plus qu'unique .

Or, dans ce livre-là du député d'Iberville, qui était un ministre péquiste, comme je le disais, dans le gouvernement du Parti québécois, le député d'Iberville rappelle ce qui s'est passé en 1994-1995, quand le gouvernement du temps a déposé son budget au printemps 1995. Alors, d'une part, il dit: «Il faut souligner le comportement du gouvernement lors de son arrivée au pouvoir et à l'occasion du budget préréférendaire. En l'espace de deux semaines – dit le député d'Iberville – les estimés initiaux du déficit laissé par les libéraux présentés au Conseil des ministres ont grimpé de quelque chose comme 600 000 000 $ sans que la moindre information ne soit fournie pour expliquer l'écart.»

Un peu plus loin, le député d'Iberville dit ceci: «Quelques mois plus tard, lors du dépôt du budget – il s'agissait du budget 1995 – on apprend que les prévisions de recettes sont basées sur des projections de croissance économique dont l'optimisme exagéré crève les yeux – dit-il. Dans les deux cas, la marge de manoeuvre financière du gouvernement s'en trouvait sensiblement accrue, ce qui constituait un avantage stratégique important en période préréférendaire.»

Il disait un peu plus loin: «Ce ne serait pas si grave si l'on n'avait pas su que cela aurait nécessairement pour effet de forcer le gouvernement à des compressions draconiennes par la suite au détriment, bien sûr, du niveau des services à la population, mais aussi du niveau d'activité économique du Québec dans les années à venir.» Et de conclure le député d'Iberville, M. le Président, cette phrase très lourde de sens: «Était-il légitime pour le gouvernement de subordonner l'intérêt collectif à la poursuite d'un objectif politique dont il ne savait même pas encore s'il correspondait à la volonté de la majorité?»

En gros, M. le Président, ce que le député d'Iberville raconte, lui qui était ministre dans le gouvernement du Parti québécois, c'est que le gouvernement du Parti québécois a volontairement et sciemment traficoté les chiffres pour noircir la dernière année de l'administration libérale, a envoyé le maximum de dépenses dans cette année-là pour se créer, si vous voulez, une marge de manoeuvre artificielle aux dépens de l'ancien gouvernement libéral, une marge de manoeuvre artificielle. Avec ça, M. le Président, on a été capable, en période préréférendaire – juste avant le référendum – de faire des cadeaux aux fonctionnaires, de réduire le déficit de l'année courante en disant: Voyez-vous, nous, on est des bons gestionnaires, on est capables de tout faire ça avant le référendum. Or, la réalité, M. le Président, c'est que les chiffres, et là on a la preuve, étaient traficotés. Ce n'était pas un budget réaliste, c'était un budget qui leurrait les Québécois.

Ce qui est grave dans tout ça, M. le Président, c'est qu'on est devant une stratégie tout à fait réfléchie d'un gouvernement supposément responsable mais qui ne l'était pas du tout et qui tentait de faire croire aux Québécois, en période préréférendaire, qu'il avait les moyens de faire des cadeaux à tout le monde, qu'il avait les moyens d'annoncer une réduction du déficit sans, en aucune façon, comprimer les dépenses, avant le référendum, pour nous montrer une situation rose, le plus rose possible, et, M. le Président, sachant très bien qu'une fois le référendum terminé, une fois cette année-là qu'on avait empruntée aux libéraux, si vous voulez, cette marge de manoeuvre qu'on avait volée aux libéraux, d'une certaine façon, on ne l'aurait plus par la suite et qu'on serait obligé par la suite de couper dans les dépenses d'une façon incroyable, dans la santé et dans les autres dépenses.

M. le Président, c'est pour ça que, depuis ce temps-là, le gouvernement essaie maintenant de cacher ses déficits ailleurs, de les cacher dans la santé, dans les hôpitaux, de les cacher dans les municipalités, de les cacher dans les fonds. Mais la réalité, c'est que ce gouvernement-là a été terriblement irresponsable envers les Québécois en leur racontant des histoires avant le référendum, en traficotant le budget, en jouant, M. le Président, dans les chiffres, et c'est ce que dit le député d'Iberville, ministre dans le gouvernement péquiste. Et ce gouvernement irresponsable, c'est celui qui gouverne encore le Québec, M. le Président, et qui veut nous amener encore vers un autre référendum, avec les conséquences qu'on sait que ça peut avoir. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Laporte. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre des Finances. M. le ministre.


M. Bernard Landry

M. Landry (Verchères): M. le Président, on vient de voir le député de Laporte faire des efforts pathétiques, et je pense que, si j'étais dans sa condition, j'essaierais de les faire pour effacer un passé qui déshonore sa formation politique. Ils ont géré le Québec, au cours du dernier mandat où ils étaient au pouvoir, avec une négligence incroyable, et c'est dur à porter, ça. Ils voient bien aujourd'hui qu'on est obligé de faire des efforts, qu'on est obligé de comprimer les dépenses. Ils essaient, par exemple, de persécuter le ministre de la Santé qui a été obligé de remettre de l'ordre dans leur gâchis, tout en sachant intérieurement qu'ils sont les premiers responsables de tout cela.

Ils n'ont tellement plus de crédibilité qu'ils se servent d'un petit livre publié par le député d'Iberville qui s'appelle – on l'appelle le député d'Iberville quand... – Richard Le Hir, alors qu'ils ont passé deux ans à le démolir dans sa crédibilité. À chaque fois qu'il publiait la moindre ligne, ils montaient aux barricades pour anéantir le moindre de ses dires. Là, il a écrit une page qui pourrait peut-être leur servir de planche de salut – ce qui n'est pas le cas, on le verra bien – et ils s'en servent comme d'un oriflamme.

Ils n'ont aucune crédibilité, d'abord parce que, 58, ils se sont trompés dans leurs prévisions budgétaires, et pas dans des petites proportions. 58, ils ont annoncé que le déficit serait de tant, et il a été de tant plus et plus, plus, plus. Les marges d'erreur – quand j'étais prof à l'UQAM, je mettais des «E» pour échec devant des choses semblables: 61 %, 20 %, 30 %, 18 %, 29 % la dernière année. Le député de Laporte avait annoncé, comme ministre des Finances, un déficit de 4 400 000 000 $. Il galopait joyeusement jusqu'à 6 100 000 000 $, et les efforts du député de Crémazie, le ministre des Finances de l'époque, l'ont ramené à 5 700 000 000 $.

Il a parlé d'un 600 000 000 $, le député d'Iberville. Je vais lui en parler, de son 600 000 000 $, je sais où il est. Ce 600 000 000 $ que nous avons découvert, et que nous avons découvert rapidement, c'est des prévisions de revenus qui avaient été inscrites par le député de Laporte sur la base de pures hypothèses, sans que le moindre geste ne soit posé pour les réaliser. Alors, 126 000 000 $ d'accroissement des revenus, pas un geste pour collecter – le Vérificateur général leur a dit tellement souvent qu'ils laissaient l'argent sur la table – 74 000 000 $ pour implanter des loteries vidéo – ils ne l'ont jamais fait, c'est nous qui l'avons fait – 166 000 000 $ pour privatiser des sociétés d'État qu'ils n'ont pas privatisées et qui n'étaient même pas en voie de réalisation; et 288 000 000 $ à l'égard du programme de stabilisation des revenus des provinces, montant que le gouvernement fédéral a finalement refusé de verser.

Il est là, le fameux 600 000 000 $. L'actuel député d'Iberville a simplement confirmé ce qu'on a toujours dit et ce que le député de Crémazie avait dit. Il a examiné les dépenses, il a examiné les revenus puis il s'est rendu compte de la catastrophe, qui en était une véritable. Nous n'avons pas gonflé le gâchis libéral; nous l'avons constaté et nous avons constaté qu'il était plus élevé que ce que nous avions d'abord anticipé. Et je vais citer, à l'appui de mon terme «gâchis», qui est un terme faible dans les circonstances, parce que 6 000 000 000 $, là... Gâchis, ça, c'est pratiquement quand un enfant gaspille le dessin qu'il est en train de faire en renversant le pot de peinture. Mais, là, ce n'est pas de ça qu'il s'agit, c'est 6 000 000 000 $, et je vais citer quelqu'un qui connaît ces choses, qui est économiste de formation, qui s'appelle Alain Dubuc, puis ça va faire un peu plaisir au député de Laporte, d'ailleurs, parce que ça le met un peu hors du coup, en tout cas pour l'essentiel de la période.

Alain Dubuc a écrit, le 26 juin 1993: «S'il y a quelqu'un dans le gouvernement Bourassa qui est responsable du gâchis financier qui inquiète à juste titre les agences de crédit, ce n'est pas le ministre des Finances mais bien le président du Conseil du trésor, Daniel Johnson», qui est devenu ensuite premier ministre. Le député de Laporte est devenu ministre des Finances. J'imagine que la contagion a pu être l'excuse du député de Laporte. En fin de compte, je ne sais pas si c'est lui qui sera accablé par l'histoire ou pas lui seulement, parce que c'est cinq années de catastrophe, et, lui, il a été là quelques mois, peut-être près d'un an.

Tout ça pour vous dire qu'on peut avoir une certaine compassion pour l'opposition. Ce n'est pas facile d'être dans l'opposition et ce n'est pas facile de critiquer le gouvernement. Mais, quand on s'est mis dans une situation impossible comme nos prédécesseurs l'ont fait, ça doit devenir un exercice d'une mortification totale, en être rendu à s'accrocher à des bouées aussi peu flottantes et flottables que les écrits du député d'Iberville. Ça confirme ce qu'on a toujours dit depuis qu'on a repris les rênes du pouvoir. Ils nous ont laissé une situation désespérée et le Parti libéral va en porter le poids pour très longtemps, malgré les valeureux efforts du député de Laporte pour s'en sortir.

(18 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre des Finances. Je vais laisser maintenant les deux dernières minutes à M. le député de Laporte pour sa réplique.


M. André Bourbeau (réplique)

M. Bourbeau: M. le Président, on peut revenir sur le passé. Ce que le ministre des Finances oublie de dire, c'est que nous avons vécu, en 1990, 1991 et 1992, la pire récession depuis la crise de 1929 et que, nous, nous avons refusé, lors de cette récession-là, d'agir comme vous le faites présentement. Mais, vous, vous n'êtes pas en récession, vous êtes en croissance économique et vous créez une récession parce que vous coupez tellement que vous créez une récession. Nous, on a subi la récession et on a eu pitié des Québécois, on ne les a pas égorgés comme vous le faites.

Deuxièmement, le chef de l'opposition, lorsqu'il était responsable des dépenses, a toujours respecté ses budgets de dépenses, et le ministre des Finances lui-même se promène à travers le monde avec un document disant que le député de Vaudreuil a toujours respecté ses dépenses lorsqu'il était président du Conseil du trésor. Donc, là-dessus, le chef du Parti libéral est totalement à exclure de ces attaques-là. Sa gestion a été impeccable.

Tantôt, le ministre a essayé d'expliquer le 600 000 000 $. Il faut dire une chose. C'est vrai qu'on avait prévu des privatisations, nous. Vous avez stoppé les privatisations en arrivant au pouvoir. Ne venez pas vous plaindre qu'il n'y a pas eu de revenus, vous avez stoppé les privatisations. Vous avez retardé l'implantation des loteries vidéo. Nous, on était en train de les implanter. Vous l'avez retardée pendant huit mois pour qu'il n'entre pas d'argent pendant l'année où on était là. Vous avez posé des gestes comme ça continuellement qui ont fait en sorte qu'effectivement vous avez empêché que les revenus augmentent. Subséquemment, vous avez tripoté aussi dans les transferts – on en reparlera – de façon à faire en sorte que l'année des libéraux soit noircie et vous vous êtes créé une espèce de marge de manoeuvre artificielle à même l'année précédente. Et ça, c'est clair, le député d'Iberville qui était ministre est témoin de ça, il l'a dit, M. le Président. Et je pense que, de plus en plus, les gens vont se rendre compte que ce gouvernement-là est un gouvernement irresponsable qui n'hésite pas à tripoter les chiffres pour aider à sa propre cause, son option indépendantiste, aux dépens de l'intérêt des Québécois. M. le Président, les Québécois se sont fait tricher et s'en souviendront.


Comptabilisation de la mise en commun de services municipaux dans les dépenses compressibles des municipalités

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin au premier débat. Nous allons aborder le deuxième débat. Mme la députée de Jean-Talon va interroger à nouveau M. le ministre des Affaires municipales au sujet de la facture gouvernementale envoyée aux municipalités qui ne tient pas compte des ententes intermunicipales pour celles qui les gèrent. Alors, Mme la députée de Jean-Talon, pour un cinq minutes.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. M. le Président, j'aimerais inviter le ministre des Affaires municipales à suivre un cours d'introduction à la gestion municipale, et je pense que ça presse. Quand on est titulaire d'un poste comme celui-là, je pense qu'il faut connaître les plus élémentaires rudiments de la gestion municipale.

J'ai questionné, cet après-midi, le ministre sur une problématique qui est réelle et que vivent plusieurs municipalités au Québec. Je me sens dans l'obligation, M. le Président, de lui rappeler cette situation-là. Il y a plusieurs municipalités qui gèrent des ententes de services, qui les gèrent pour et au nom de certaines villes voisines. Ce sont des ententes de mise en commun. Je pense que le ministre doit savoir ce que veut dire «mise en commun de services». Il se fait le grand promoteur de mises en commun, puis on a eu aujourd'hui la preuve qu'il ne comprenait pas du tout ce que signifiait la mise en commun des services.

Les municipalités qui gèrent ces ententes-là se retrouvent à la fois gestionnaires de l'entente et partenaires également de cette entente-là. Je m'explique. Vous avez une municipalité, n'importe laquelle au Québec, qui décide de dispenser, à la demande de ses collègues, des villes voisines, des municipalités voisines, que ce soit le 911, que ce soient des services de sécurité publique, ça peut être la mise en commun d'un service de paie, tous les exemples peuvent être bons. Ces municipalités qui dispensent le service ont dans leur budget d'opération – et j'espère que ça va être clair – le montant total de la dépense, donc du budget d'opération. Jusqu'ici, ça va bien.

Les municipalités qui décident de signer ces ententes de services là l'ont fait parce qu'elles étaient convaincues qu'il y avait une économie d'échelle, mais elles n'ont jamais au grand jamais pensé qu'en signant ces ententes elles recevraient un jour une facture par la tête les enjoignant – et le mot est très faible – les obligeant à payer 5,8 % ou 5,7 % de leur budget compressible, en excluant le service de dette, donc en payant 5,8 % du budget compressible, cette facture-là au gouvernement.

Or, il s'avère, M. le Président, que des municipalités... Et je vous cite à titre d'exemple le village de Saint-Sauveur-des-Monts, qui gère six ententes de services pour des municipalités voisines et avec des municipalités voisines. Le maire du village de Saint-Sauveur-des-Monts a écrit au ministre des Affaires municipales au mois d'août le sensibilisant déjà à cette problématique-là et lui disant qu'il y avait une inéquité et que c'était totalement inacceptable qu'on lui demande de payer un pourcentage de l'ensemble de ces factures-là, puisque la municipalité recevait à la fois, et c'est sûr, les quotes-parts des municipalités qui sont parties prenantes de l'entente, mais que la municipalité avait dû faire aussi des dépenses pour se permettre de dispenser le service.

Alors, j'ai questionné le ministre là-dessus aujourd'hui, et le ministre m'a servi sa cassette d'achat de biens et de services puis que c'était ni plus ni moins comme un «in and out». Bien, ce n'est pas comme ça que ça marche dans les municipalités, M. le Président. Je pense qu'il est important, au-delà des attaques personnelles en cette Chambre, je pense qu'il est très important que le ministre relise sa correspondance, réponde à ces maires qui lui demandent de régler cette inéquité. Le premier ministre avait compris, semble-t-il, cette problématique, puisque au mois d'octobre, début octobre, il avait donné l'engagement qu'il en parlerait au ministre des Affaires municipales et que ça se réglerait. Il faut croire qu'il va falloir attendre le retour du premier ministre de son voyage en Chine pour qu'il puisse régler cette question, de la même façon qu'il a fallu que le premier ministre gère le gâchis du ministre des Affaires municipales au moment de son voyage en France.

M. le Président, je demande au ministre des Affaires municipales de regarder cette réalité-là. Elle est existante, elle est présente, elle est là. Il y a des municipalités qui vont devoir payer beaucoup plus cher. Déjà, 1 $ de pelletage, c'est trop, mais quand on demande au village de Saint-Sauveur-des-Monts de payer 32 000 $ de plus parce qu'il gère une entente au nom des autres municipalités, c'est inacceptable. Même chose pour Boischatel, même chose pour Parisville, même chose pour Baie-Saint-Paul. J'ai pris ces quatre exemples-là; il y en a d'autres.

Et ce que je trouve le plus déplorable, M. le Président, c'est que... Est-ce que vous me faites signe que c'est terminé?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, il vous reste 10 secondes. Vous aurez une réplique.

Mme Delisle: Excusez-moi! Ce que je trouve le plus déplorable – c'est parce que je... 10, pardonnez-moi – M. le Président, c'est qu'on n'encourage pas, avec des décisions comme celle-là, les mises en commun; au contraire, on va les décourager. Alors, je demanderais au ministre des Affaires municipales de revoir sa décision, d'admettre qu'il s'est trompé puis de refaire ses devoirs, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Je vais céder la parole au ministre des Affaires municipales pour une intervention de cinq minutes. M. le ministre.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Merci, M. le Président. Huit ans au conseil municipal d'une municipalité, c'est la pratique de ce que ça signifie, gérer les taxes et des revenus des citoyens et des citoyennes et c'est ce que le ministre des Affaires municipales a fait dans la belle municipalité de Saint-Guillaume-de-Granada, qui avait des ententes avec la ville de Rouyn-Noranda.

M. le Président, c'est assez simple comme question. Il s'agit d'avoir un sens élémentaire de la conception de l'administration publique pour comprendre la clause 1.6 de l'entente qui a été signée avec l'UMQ, qui représente 70 % de la population du Québec avec 30 % des municipalités, pour comprendre comment est fixée la contribution au fonds spécial de financement des activités locales. La députée de Jean-Talon, là, qui a déjà occupé des responsabilités au plan municipal, est capable de comprendre cela aisément. Ce n'est pas très compliqué comme démonstration, M. le Président, puis il ne faut pas tenter d'embrouiller le débat en compliquant avec une question technique la situation qui est extrêmement simple.

(18 h 20)

M. le Président, les municipalités seront appelées à contribuer pour 5,78 % de leur budget de dépenses de l'année 1997. Ce n'est pas très, très compliqué comme démonstration. N'importe qui qui nous écoute peut comprendre cela. Quand on achète un service de quiconque, que ce soit de la municipalité voisine, ou que ce soit d'un entrepreneur privé, ou que ce soient des dépenses salariales, c'est toujours une dépense. Donc, le calcul de 5,78 %, pour la municipalité, se fait toujours sur son budget de dépenses.

Dans la première catégorie, il y a donc des municipalités qui achètent des services. Il peut arriver quelquefois que les municipalités achètent ces services d'une autre municipalité. La municipalité qui vend, elle, le service, elle engage des dépenses. Ce n'est pas par miracle, ce n'est pas la génération spontanée qui produit ce service. La municipalité engage dans son budget des dépenses pour produire ce service qu'elle vend par ailleurs légalement, en vertu de la Loi sur les cités et villes, à une autre municipalité. On ne s'occupe pas, M. le Président, de la question des revenus; on s'occupe de la question des dépenses. La municipalité a un budget de dépenses à chaque année, et c'est le budget de dépenses de l'année 1997 qui compte. On ne regarde pas là où est acheté le bien, là où on se procure le service, on regarde quelle dépense engage la municipalité pour se procurer ou vendre un service.

Dans le cas de Sillery, par exemple... Je le sais que c'est un cas qui chatouille la députée de Jean-Talon parce que c'est un cas réel d'application de ce que ça signifie. La municipalité de Sillery, municipalité bien administrée en vertu de la Loi des cités et villes, par exemple, achète de l'eau de la ville de Québec suivant un tarif approuvé par la Commission municipale du Québec, à 0,154 $ du mètre cube.

M. le Président, la municipalité de Sillery, ce même cube d'eau, elle le vend, elle le tarifie pour ses citoyens très exactement à 0,37 $ du mètre cube, parce que la municipalité, en toute légalité, justifie son excédent de vente, si vous voulez, du produit parce que l'excédent des dépenses est attribué aux biens, aux services, aux activités, pourvu que l'excédent s'explique par des motifs de saine administration. Très exactement.

Alors, M. le Président, quand la députée de Jean-Talon disait, cet après-midi, des mots qui sont inacceptables au plan parlementaire, elle ne reflétait pas la réalité, par exemple, de la municipalité de Sillery, qui fait bien son travail d'administration publique des fonds publics. Elle achète un mètre cube d'eau à 0,154 $ du mètre cube à la ville de Québec et elle le procure, elle le dispense à ses consommateurs, en particulier un de ses gros consommateurs, l'Université Laval, selon les informations qui nous sont données, à 0,37 $ du mètre cube. Et c'est tout à fait justifié, M. le Président, en saine administration publique.

Conclusion, M. le Président: Il faut que la députée apprenne ce que signifie une dépense, un déboursé dans une municipalité. Et la contribution au fonds de financement des activités locales, ce sera calculé toujours sur les dépenses des municipalités pour rendre des services aux citoyens ou encore vendre des services à d'autres municipalités parce qu'il y a un bénéfice pour ces citoyens de le réaliser ainsi. Voilà l'explication très simple, M. le Président, de comment le calcul doit se faire. Ce n'est pas compliqué, c'est élémentaire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le ministre des Affaires municipales. Je vais laisser la parole à Mme la députée de Jean-Talon pour sa réplique de deux minutes.


Mme Margaret F. Delisle (réplique)

Mme Delisle: M. le Président, pour ce qui est du cas de Sillery, le maire de Sillery, M. Shoiry, saura bien reprendre le ministre dans les erreurs qu'il vient encore de prononcer. C'est absolument inimaginable qu'il taxe la ville de recevoir l'eau, d'acheter l'eau à 0,154 $ du mètre cube et de la revendre aux citoyens à 0,30 $. Est-ce que le ministre des Affaires municipales ne réalise pas qu'il y a de l'entretien du réseau, qu'il y a des équipements dont il faut s'occuper? Alors, écoutez, il nous a parlé de huit ans au conseil municipal. Je serais gênée, si j'étais lui, de me promener et de raconter au monde que j'ai siégé pendant huit ans dans un conseil municipal.

Le ministre, ce qu'il ne comprend pas, c'est que, oui, c'est sur les dépenses qu'on va le chercher, mais on taxe deux fois les dépenses. C'est ça, le problème que le ministre n'a pas compris. Est-ce qu'il ne pourrait pas, en toute humilité, regarder le dossier? Ce n'est quand même pas tous des imbéciles, les maires! Vous avez passé votre temps, M. le Président, pas vous, mais le premier ministre et le ministre des Affaires municipales, à dire ici, tout le printemps dernier, que les élus municipaux ne savaient pas gérer, qu'il y avait de la marge de manoeuvre et qu'il y avait de la place. Est-ce qu'on ne pourrait pas, s'il vous plaît, s'asseoir et regarder avec les élus municipaux la problématique?

C'est clair et net que le ministre n'a strictement rien compris. Les municipalités qui gèrent les ententes vont être obligées de payer deux fois. Ça s'appelle de la double taxation et ça s'appelle de l'inéquité. Je ne peux pas concevoir qu'il n'y ait personne au ministère qui puisse asseoir le ministre sur une chaise pour lui expliquer les faits de la vie. C'est comme ça que ça marche.

Bon. Alors, M. le Président, je pense que non seulement les municipalités mériteraient que le ministre refasse son exercice, mais il devrait prendre connaissance, je l'invite... D'ailleurs, M. le Président, je vais déposer la lettre; probablement qu'il a tellement de courrier qu'il n'a pas pu la lire. Le maire Filion, village Saint-Sauveur-des-Monts, trois pages pour lui expliquer ce qu'il en est. Alors, qu'il prenne connaissance de ça. Qu'il ne vienne pas me dire que je ne sais pas de quoi je parle; au contraire, dans ce cas-ci, je sais très bien de quoi je parle: il va taxer deux fois les municipalités qui sont concernées dans ce dossier-là. Est-ce que je peux déposer la lettre?


Document déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, la lettre peut être déposée, très bien. La lettre est déposée. Ça va. Alors, je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Ceci met fin au débat. Nous allons ajourner nos travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 27)