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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 11 juin 1997 - Vol. 35 N° 115

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Président: À l'ordre, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous abordons les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi, non plus.


Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration.


Avis de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse sur les dispositions du projet de loi n° 109 relatives à l'élection des commissaires d'une commission scolaire anglophone

M. Boisclair: Oui. M. le Président, je dépose l'avis de la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse concernant le projet de loi n° 109 relatif à l'élection des commissaires d'une commission scolaire anglophone.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le vice-premier ministre et ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.


Rapport annuel de la Société générale de financement du Québec

M. Landry (Verchères): J'ai l'honneur de déposer, M. le Président, le rapport annuel 1996 de la Société générale de financement du Québec.

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Rapport annuel de la Société de développement de la Baie James

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996 de la Société de développement de la Baie James.

Le Président: Alors, ce document est déposé, comme les deux autres précédemment, bien sûr. Mme la ministre de la Culture et des Communications. Alors, ce sera peut-être pour demain. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel du Centre de recherche industrielle du Québec

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 du Centre de recherche industrielle du Québec.

Le Président: Alors, ce document est également déposé. Mme la ministre déléguée aux Mines, aux Terres et aux Forêts.


Rapport annuel de la Société québécoise d'exploration minière

Mme Carrier-Perreault: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Société québécoise d'exploration minière.

Le Président: Ce document est déposé.

Au dépôt de rapports de commissions, M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député...

Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Rapport annuel de la Régie du cinéma

Mme Beaudoin: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1996-1997 de la Régie du cinéma.

Le Président: Très bien. Est-ce qu'il y a d'autres dépôts de rapports?


Dépôt de rapports de commissions

Alors, dépôt de rapports de commissions, maintenant. M. le président de la commission des transports et de l'environnement et député de Bellechasse.


Étude détaillée du projet de loi n° 148

M. Lachance: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir de déposer le rapport de la commission des transports et de l'environnement qui a siégé le 10 juin 1997 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 148, Loi modifiant la Loi sur l'Agence métropolitaine de transport. La commission a adopté le projet de loi avec des amendements.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Berthier.

M. Baril (Berthier): Je demande le consentement de cette Chambre pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. M. le député de Berthier.


Implanter une usine de fabrication d'éthanol dans Lanaudière et

adopter

une politique fiscale pour ce faire

M. Baril (Berthier): Je dépose l'extrait d'une pétition de 25 000 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Berthier et de la région de Lanaudière.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que nous appuyons les intervenants de la région de Lanaudière dans leurs efforts pour implanter une usine de fabrication d'éthanol dans Lanaudière;

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons au gouvernement d'adopter une politique fiscale accordant un abattement de la taxe d'accise sur la portion éthanol contenue dans l'essence et de recommander très fortement au promoteur du projet de construire son usine dans la région de Lanaudière.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Saguenay? Alors, M. le député de Jacques-Cartier. Il n'y a pas de... Bon. Très bien.

Il n'y a pas d'interventions aujourd'hui portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise cependant qu'après la période de questions et de réponses orales... Donc, après la période de questions et de réponses orales M. le ministre de la Santé et des Services sociaux répondra à une question posée le 10 juin dernier par M. le député de Brome-Missisquoi concernant les patients en attente de chirurgie cardiaque à l'hôpital Le Gardeur de Repentigny.

Je vous avise également qu'après cette période de questions et de réponses sera tenu le vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture et des Communications proposant que le projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma et modifiant d'autres dispositions législatives, soit adopté.


Questions et réponses orales

Alors, ça nous amène immédiatement à la période de questions et de réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


Situation économique de Montréal

M. Johnson: Dans son discours inaugural, au mois de mars l'an dernier, le premier ministre nous a dit – je lui rafraîchis la mémoire – qu'on ne pouvait pas envisager... il n'y a pas de relance de l'économie québécoise sans relance de la métropole québécoise. Il faisait écho, par là, à ce qu'il avait dit lors de son assermentation, deux mois plus tôt, en janvier, et le discours était toujours cohérent, toujours le même. Le premier ministre prétendait avoir par la désignation d'un ministre, avec toute la structure et les coûts que ça représente, pour à peu près 8 000 000 $, commencé à régler le problème de la métropole. Après avoir consacré plus de 2 000 000 $ à la mise sur pied d'une autre structure, celle du Conseil de développement, on se ramasse avec une dizaine de millions consacrés essentiellement à des structures entre les mains d'un ministre, le ministre responsable de la Métropole, qui avoue assez candidement que ça va être son successeur qui va prendre les décisions qui vont peut-être faire une différence à Montréal. On voit que le ministre n'est pas tellement, je dirais, fier de ce qu'il a fait jusqu'à aujourd'hui à tout le moins ou, certainement, n'est pas tellement confiant qu'il va pouvoir réaliser quelque chose pour la métropole.

La réalité, comme disent les Américains, «a reality check», lorsqu'on compare le discours du premier ministre, son langage, avec la réalité et les faits, c'est que Montréal est la 24e ville sur 24 métropoles en Amérique du Nord au point de vue du taux de chômage, au point de vue du rythme de création d'emplois, que la moitié ou à peu près de la population bénéficie d'une façon ou d'une autre d'une prestation sociale et que le salaire réel des Montréalais continue à descendre. Mais il faut quand même que le gouvernement commence à s'en mêler. C'est ça que les Québécois et les Montréalais attendent, même si, à l'occasion du Sommet... Et ça, je veux le souligner, il y a eu le chantier de Montréal qu'on a confié à M. Bérard, de la Banque Nationale, qui a abattu un travail colossal. Il est plus que temps... C'est ça, ma question au premier ministre: N'est-il pas plus que temps que lui-même s'implique, qu'il s'en fasse une préoccupation d'un chantier montréalais, lui, au lieu de déléguer ça à d'autres, qu'il donne suite aux suggestions qui lui sont faites soit par le chantier de Montréal, soit par les intervenants des chambres de commerce, soit par tous ceux qui disent: Veuillez concentrer votre attention, M. le premier ministre, sur la création d'emplois à Montréal, sur notre métropole, sur ce que le premier ministre appelle lui-même le poumon économique du Québec? À quand ce rattrapage du premier ministre qui, lui aussi, se comporte comme une queue de classe, compte tenu de tous les autres qui veulent s'occuper de Montréal?

(10 h 10)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition invite le gouvernement à la cohérence. Cohérents, nous l'avons été; nous le sommes. Nous savons très bien que l'économie de Montréal est un pilier essentiel de l'économie du Québec. Nous avons fait des efforts considérables, depuis deux ans, par rapport à Montréal, notamment par la création d'un ministère de la Métropole, notamment par un mode d'intervention qui crée une synergie dans la métropole, notamment par un sommet économique. Et les travaux extrêmement fructueux, dont le chef de l'opposition vient de faire l'éloge, les résultats commencent à paraître, M. le Président. Le bilan de santé de l'économie de Montréal, publié dans La Presse le 21 mai dernier, montre que tous les indicateurs économiques principaux sont en progrès: chômage en baisse, construction en hausse, mises en chantier en hausse, marché immobilier en hausse, ventes des grands magasins en hausse, taux d'occupation des hôtels en hausse, taux d'occupation des espaces à bureau en hausse, trafic du port en hausse, trafic des aéroports en hausse, M. le Président. Donc, voici un gouvernement cohérent, et je suis très fier de comparer notre performance par rapport à celle du chef de l'opposition à l'époque où, pendant six ans, de 1989 à 1995, il a présidé le Comité ministériel permanent sur le développement du Grand Montréal alors qu'on a enregistré une perte de 92 000 emplois en six ans, sous son règne. Nous, depuis deux ans, on a fait un gain de 14 000 emplois à Montréal, et, si on considère la grande région métropolitaine, de 58 000 emplois depuis septembre 1994.

Et, parlant de cohérence, M. le Président, je pense à la triste performance du chef de l'opposition hier à Toronto qui, pour faire plaisir au Canada anglais, a porté le dernier coup à la notion et au concept de société distincte pour le Québec. Et, s'il y avait quelqu'un de fier hier au Canada anglais, c'était sûrement Preston Manning, parce que non seulement, maintenant, le concept ne veut plus rien dire, mais le chef de l'opposition l'a supprimé du vocabulaire.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Le premier ministre continue, M. le Président, à s'enflammer en faveur de la société distincte, lui qui a voté contre, qui a tout fait pour être contre. Double langage. Hypocrite! Hypocrite!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition, je pense que vous conviendrez qu'il n'est pas acceptable de laisser entendre que la langage du premier ministre est hypocrite et encore moins de faire en sorte qu'on puisse penser que lui-même l'est. Alors, je vous invite à retirer ces propos.

M. Paradis: Même si c'est vrai, il faut que tu les retires.

M. Johnson: M. le Président, je réitère, comme je l'ai toujours fait sans aucune intervention ni du leader, ni de vous, ni de qui que ce soit, que le premier ministre pratique un double langage, un langage hypocrite.

Le Président: M. le chef de l'opposition, je vous ai demandé de retirer vos propos, c'est-à-dire de faire en sorte que ce qualificatif soit retiré.

M. Johnson: Je me rends à votre décision, M. le Président.

Le Président: Merci.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre pourrait s'enflammer en faveur des gens qui s'appauvrissent à Montréal? Est-ce que le premier ministre pourrait s'enflammer et s'enthousiasmer un petit peu pour des politiques de création d'emplois, alors que l'évolution des investissements à Montréal, selon son propre bureau de la Statistique du Québec, est à la baisse, alors que l'emploi chez les jeunes est à la baisse? Alors qu'on veut se préoccuper de l'avenir, les indicateurs pour les jeunes, pour l'investissement, pour l'emploi sont à la baisse, de toute façon, dans la métropole du Québec comme partout au Québec, et ce, en raison de l'immobilisme, au point de vue économique, du gouvernement et de son manque d'intérêt pour les jeunes qui, eux, veulent des emplois. Ils ne veulent pas des discours.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, les chiffres que je viens de mentionner, ce n'est pas nous qui les avons inventés, ils sont tirés d'une analyse globale qui a été faite par les analystes financiers de La Presse et qui montre qu'à tous les plans les aiguilles pour la santé économique de Montréal sont maintenant à la hausse, autrement dit, que nous commençons à redémarrer l'économie de Montréal grâce aux efforts du gouvernement et à la concertation avec les milieux d'affaires, les milieux syndicaux et tout le monde à Montréal. Au fond, M. le Président, ce que fait le chef de l'opposition ce matin, c'est une tentative de diversion pour faire oublier les propos saugrenus qu'il a tenus hier à Toronto. C'est gênant, M. le Président, quand on est Québécois, de lire les journaux le lendemain d'une visite du chef de l'opposition à Toronto. Et le geste le plus à-plat-ventriste qu'il a posé hier, ça a été de lancer un concours pathétique au Canada anglais pour savoir comment le Canada anglais accepterait de nous désigner, nous, les Québécois. Alors, j'ai une suggestion pour lui, M. le Président. Le Québec, c'est le Québec d'un peuple, c'est le Québec d'une nation, c'est le peuple et la nation du Québec. Voilà la vraie désignation!

Le Président: Je vous indique tout de suite que je ne tolérerai pas le genre de comportement qui est en train de se développer ce matin. Et je vous dis tout de suite que j'ai l'intention de désigner les députés qui, d'arrière-ban, interpellent les uns et les autres avec des qualificatifs qui sont inacceptables dans cette Assemblée. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, comme manoeuvre de diversion, il ne se fait pas mieux. Est-ce que le premier ministre ne pourrait pas décider de s'enflammer et de faire applaudir les suiveux de son côté parce qu'il y a plus d'emplois pour les jeunes, parce qu'il y a plus d'investissements au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, s'il y en a un qui sait qu'ils ne sont pas suiveux, c'est moi.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît!

M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte que, lorsqu'on parle du chômage et du sous-investissement dans la métropole, les Québécois ne veulent pas entendre encore parler le premier ministre de constitution, puis du Bloc québécois, puis de toutes les patentes de son programme? C'est ça qui nuit à l'économie du Québec, vous le savez bien. Est-ce que le premier ministre ne pourrait pas se rendre compte que l'économie de Montréal est aussi déprimée que le ministre responsable de Montréal et que c'est ça qu'il faut régler?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

(10 h 20)

M. Landry (Verchères): M. le Président, dans son préambule, le chef de l'opposition a dit – et nous avons tous bien entendu – que Montréal arrivait au 25e rang sur 25 villes nord-américaines pour le taux de chômage. Il y a une petite chose qu'il n'a pas dite, c'est que Toronto est au 24e. On dirait que le chef de l'opposition vient de découvrir que le chômage est deux fois plus élevé au Canada qu'aux États-Unis. Il n'aura pas le prix Nobel de l'économie avec ça...

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Et j'ajouterais d'ailleurs ce que tous les économistes sérieux savent, que, si le taux de chômage est deux fois plus élevé au Canada qu'aux États-Unis d'Amérique, c'est à cause d'une politique absurde et perverse que Robert Bourassa dénonçait lui-même quand la Banque du Canada appliquait des remèdes totalement erronés à la conjoncture québécoise et ontarienne.

Mais, au-delà de ça, M. le Président, les chiffres que je viens de donner, et qui sont connus du monde entier, sont à la page 1 de l'étude de l'économie de Montréal, à laquelle le chef de l'opposition se réfère. S'il s'était rendu à la page 5, il aurait lu ceci: «Le manufacturier bourdonne de projets. Stimulée par la croissance des exportations, l'industrie manufacturière prévoit accroître ses immobilisations de 20 % en 1996. Les fabricants d'avions, de produits pharmaceutiques et de matériel de télécommunication augmentent tous leurs immobilisations de plus de 40 %.»

Le pessimisme contenu dans la question du chef de l'opposition officielle n'est que projection de l'inaction dont il fut le chef pendant des années.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Après avoir entendu le prix Nobel de la suffisance...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ...est-ce que le premier ministre ne convient pas que, sur les 24 ou 25 métropoles d'Amérique, alors que toutes celles qui sont devant Montréal ont un taux de chômage inférieur à 9 %, y compris Toronto, Montréal est au-dessus de 11 %, se tient à 11 % et 12 %, que c'est à Montréal que les jeunes souffrent le plus, que c'est à Montréal, selon le propre ministère du vice-premier ministre, le Bureau de la statistique du Québec, que les investissements vont être à la baisse? C'est ce qui est prévu malgré tous les discours et tous les gargarismes triomphalistes du vice-premier ministre et du premier ministre.

Est-ce qu'ils ne se rendent pas compte qu'ils sont encore en train de vouloir créer des mots puis des discours et du double langage au lieu de s'occuper des vrais problèmes et de regarder pourquoi les investissements chutent à Montréal, si ce n'est pas à cause de leurs politiques, ou de leur immobilisme, ou de leur obsession constitutionnelle et séparatiste?

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Le chef de l'opposition s'entête à serrer les dents sur un mauvais morceau. Pourquoi essayer de faire passer Montréal pour la 25e sur 25 quand on compare, dans 23 cas, les villes d'un autre pays beaucoup plus prospère et qui a un taux de chômage, je le réitère, la moitié du nôtre? Est-ce que c'est pour aider Montréal, à la face du monde ou à la face de quiconque, que vous insistez lourdement sur le fait qu'elle est au 25e rang, alors que la ville la plus prospère au Canada, Toronto, est au 24e rang?

Je pense qu'on peut décoder la véritable estime que vous portez à l'économie du Québec quand vous faites des comparaisons de cet ordre. Et ces chiffres ne sont pas encore au taux record que vous aviez atteint sous votre mandat. Concentrez-vous donc sur le fait que nous avons eu, l'an dernier, des investissements étrangers records, essentiellement dans la ville de Montréal. Concentrez-vous donc sur le fait que le Québec est devenu la sixième puissance aérospatiale du monde, dépassé uniquement par les cinq plus... Le Québec à lui seul, M. le Président.

C'est des choses sur lesquelles vous... Grâce à qui? a-t-il dit. Grâce aux Québécois et aux Québécoises et à leur fantastique habileté et à l'habileté de la main-d'oeuvre montréalaise. Le chef de l'opposition devrait plutôt encourager ces hommes et ces femmes qui travaillent dans l'industrie de l'aéronautique plutôt que d'essayer de le déprimer par ses comparaisons boiteuses.

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en principale?

Mme Frulla: Non. En complémentaire, M. le Président.

Le Président: En complémentaire.

Mme Frulla: Est-ce que le premier ministre, qui disait, lors de son assermentation, qu'il dotait la métropole d'un poids politique à sa mesure, admet aujourd'hui que son poids est un petit peu léger et que celui-ci, à part s'être entouré de 110 fonctionnaires, ministères et commissions confondus, pour un coût d'opération de 10 500 000 $, n'a fait à peu près rien? Et, encore une fois, M. le Président, est-ce que le premier ministre peut demander à son ministre de la Métropole à quand le plan de relance qu'il a promis pour le printemps et qui, jusqu'à maintenant, n'a jamais été déposé, et on l'envoie pour l'automne? À quand le pacte fiscal pour Montréal?

Je rappelle aussi au ministre des Finances, M. le Président, que Montréal reste quand même la capitale de la pauvreté du Canada. Ça fait que, à part prendre du Prozac, tout le monde, là, on ne peut pas dire que ça va bien à Montréal.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: C'est M. Parizeau, paraît-il, qui disait que les statistiques sont aux économistes ce que les lampadaires sont aux ivrognes, plus...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ménard: Alors, il terminait donc en disant qu'elles sont plus utiles pour s'appuyer que pour éclairer, parce que des statistiques, on peut s'en envoyer par le tête continuellement. Nous en avons plusieurs, et essentielles, qui démontrent le progrès. D'autres peuvent en montrer, très partielles, qui démontreraient un recul. Moi aussi, depuis que j'ai commencé à patauger dans ce milieu avec lequel j'étais moins familier, j'ai voulu plus d'éclairage que d'appui et j'ai voulu regarder ce qui était essentiel. C'est l'évolution mensuelle de l'emploi depuis longtemps, et je m'aperçois, avec ce qu'on m'a préparé comme courbe avec ces statistiques, qu'il y a toujours des variantes, de sorte qu'il y a toujours quelqu'un qui peut y trouver...

(10 h 30)

Depuis 1989, on pourrait remarquer que l'emploi est descendu à un niveau très bas pendant que le gouvernement antérieur était au pouvoir. Depuis que nous avons pris le pouvoir, l'emploi a remonté et, depuis les derniers mois, il remonte de façon remarquable et il est quand même à un sommet qu'il n'a jamais atteint à Montréal depuis 1989. Je crois que la méthode que j'ai utilisée ailleurs et que je cherche à utiliser à Montréal, qui est de mobiliser toutes les énergies disponibles, au-delà des convictions politiques, à long terme, travaillant parfois avec le gouvernement fédéral, reconnaissant à l'opposition ce qu'elle avait bien créé, comme Innovatech du Grand Montréal, lui reconnaissant le crédit, reconnaissant aux maires ce qu'ils peuvent faire, aux entrepreneurs de Montréal, je crois que c'est la bonne méthode et je crois que, si, depuis plus de six mois, l'emploi est en progression à Montréal, c'est parce que le milieu des affaires, qui ne nous est pas particulièrement favorable habituellement, n'est-ce pas, y a mis du sien. Et je voudrais que les élus locaux fassent de même, et c'est pourquoi je pense que l'on peut mener plusieurs chantiers de front à Montréal. C'est pourquoi je rejette les suggestions qui m'ont été faites par l'opposition hier, à la période de questions, d'entreprendre un chantier uniquement après qu'un autre est terminé. En continuant à agir de concert, en regardant nos forces au moins autant que nos faiblesses, je pense qu'il y a de l'espoir et que la dernière évolution de l'économie montre que nous sommes sur la bonne route, et, prochainement, vous verrez les annonces que l'on peut faire après 18 mois d'efforts. Merci.

Le Président: Mme la députée de Jean-Talon, en principale.


Réduction de la masse salariale dans les municipalités

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Depuis hier, on assiste au même scénario que celui qui a conduit à la loi n° 104, Loi spéciale sur la diminution des coûts de la main-d'oeuvre dans le secteur public. On sème la confusion, on divise. Encore une fois, on assiste au double langage du gouvernement péquiste. Loi spéciale? Oui, non, peut-être.

Une voix: Ça dépend à qui on parle.

Mme Delisle: On sait maintenant que la date butoir du 1er septembre peut être déplacée: mi-septembre, mi-octobre, mi-novembre. Pourtant, le premier ministre, le 22 mars dernier, alors qu'il commentait l'entrée en vigueur de la loi spéciale n° 104, indiquait: «Plus jamais. Ce genre d'exercice est malsain pour les relations de travail.» Et il ajoutait, et je le cite: «La situation actuelle est très dangereuse. Il est tout à fait inacceptable que les salariés finissent par ne plus avoir confiance en leur convention collective, n'accordent plus de crédibilité au processus de négociation. C'est très malsain.» Fin de la citation.

Hier, M. le Président, vous vous rappellerez, le premier ministre nous a dit: «Ne vous énervez pas.»

Question au premier ministre: Puisque, le 22 mars dernier, le premier ministre qualifiait cette façon de faire de malsaine et de dangereuse pour les relations de travail, peut-il reconnaître et admettre aujourd'hui que c'est exactement ce qu'il est en train de faire dans le domaine des relations de travail dans le secteur municipal?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous avons eu hier une rencontre extrêmement positive avec les représentants du monde municipal. Il y avait plusieurs ministres du gouvernement qui m'accompagnaient de même que le ministre des Affaires municipales et tous les représentants des corps municipaux organisés étaient présents. Nous avons eu une discussion qui a duré près de deux heures. Nous avons échangé très franchement sur ces réalités que nous vivons tous ensemble et nous aurons cet après-midi une autre rencontre, cette fois-ci avec les représentants des salariés syndiqués. Nous menons, au fond, une opération de franchise, d'ouverture et d'équité, et le gouvernement mise essentiellement sur la capacité qu'ont les parties, les vis-à-vis en question, d'échanger sur les réalités qui leur sont communes d'intégrer dans le contexte québécois les solidarités qui sont nécessaires et les efforts de rationalisation que tout le monde attend du monde municipal.

M. le Président, je crois que nous sommes sur la bonne route. Ce n'est pas facile. Il n'y a personne qui prétend que c'est facile. Ça serait plus facile un peu si on avait l'appui de l'opposition, bien sûr, pour mener une opération de solidarité québécoise. J'ai cru comprendre que l'opposition est contre un effort d'équité dans le monde municipal.

Il faut quand même voir les choses comme elles le sont. Voici une société qui, dans son gouvernement, dans ses ministères, dans son personnel syndiqué, chez les médecins, chez les juges, chez les cadres, chez les députés, a fait en sorte qu'il y ait un effort collectif. Chacun a fait sa part.

Est-ce qu'on veut dire qu'on devrait faire des compressions additionnelles du côté de la santé? Est-ce que c'est ce que l'opposition veut? Non, M. le Président, ça n'arrivera pas. Nous allons demander... et j'ai cru comprendre qu'il y a un sincère désir d'accepter la réalité de notre société dans le monde municipal, hier, et nous allons continuer aujourd'hui avec le monde syndical. Ce n'est pas facile, ce n'est pas un exercice d'agrément que nous conduisons, mais nous le faisons en assumant nos responsabilités, contrairement aux gens d'en face qui nous ont mis dans le trou quand ils ont eu le pouvoir.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, le premier ministre pourrait-il reconnaître que c'est de la manière de faire qu'il est question ici? Et pourrait-il nous expliquer, encore une fois, la cohérence entre les propos tenus le 22 mars dernier, «plus jamais», et ceux tenus hier, lorsqu'il a laissé entendre qu'il y aurait peut-être une loi spéciale, qu'il n'y en aurait peut-être pas, de loi spéciale? Pourrait-il aussi reconnaître, pour ce qui est de la cohérence, lorsqu'il a répondu au chef de l'opposition, tout à l'heure, en début de la période des questions: «Cohérents, nous le sommes et nous l'avons toujours été»... Où est la cohérence, M. le Président, dans la façon d'agir du premier ministre, actuellement, alors qu'il regrettait presque sa façon d'agir, le 22 mars dernier?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, comme je suis un optimiste, j'ai cru déceler des éléments positifs dans la question de la députée.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: Oui, parce que, si on fait l'exégèse, elle a dit qu'elle s'oppose surtout à la manière de faire. Donc, je comprends qu'elle appuie la démarche gouvernementale, qu'elle souhaite donc qu'il y ait un effort de 500 000 000 $ d'équité de fait dans le monde municipal, et je l'en remercie, M. le Président.

Quant à la manière de faire, M. le Président, bien sûr, comme on le dit souvent, tout se situe dans la manière. Il n'y a pas de manière facile pour le faire. Nous ne pensons pas détenir la vérité absolue. Si l'opposition a des suggestions à nous faire sur une façon de le faire plus facilement, M. le Président, d'aller provoquer cet effort d'équité, cet effort de contribution à l'équité, au Québec, nous sommes tout à fait disposés. Mais notre manière à nous, M. le Président, c'est la négociation. Si elle en a une meilleure, qu'elle nous le dise.

Le Président: M. le député des Île-de-la-Madeleine.


Modification du règlement concernant la coloration de la margarine

M. Farrah: Oui. Merci, M. le Président. À plusieurs reprises, l'opposition officielle a tenté de réveiller ce gouvernement de son somnambulisme et de son immobilisme, M. le Président, et de son incapacité à l'égard de la défense des intérêts des producteurs de lait du Québec, aux prises avec un gouvernement plus préoccupé par son option que par la compréhension des grands enjeux québécois et canadiens en matière d'agriculture. On se souviendra, M. le Président, que, le 23 mai dernier, la Fédération des producteurs de lait du Québec et l'Union des producteurs agricoles, lors de rencontres au sommet, présentaient au premier ministre une option juridique étoffée de spécialistes des ententes sur le commerce intérieur et extérieur. Ce gouvernement, M. le Président, fait fausse route dans l'interprétation des ententes négociées sur le commerce intérieur au Canada au chapitre de la coloration de la margarine. Ce gouvernement a négligé de plaider et de défendre les intérêts des producteurs de lait du Québec au sein de la fédération canadienne, conformément et dans le cadre de cette entente sur le commerce intérieur.

M. le Président, est-ce que le premier ministre, qui confond le sens des mots «harmoniser» et «abroger», peut nous dire, aujourd'hui, s'il a enfin obtenu l'opinion juridique qu'il a demandée à une firme privée pour l'aider à comprendre le français, peut-être, M. le Président, et si l'actualisation des études d'impact est terminée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, vous souffrirez que je rappelle la genèse du problème que nous affrontons maintenant. Ce sont les libéraux, les gens d'en face, qui ont signé cet accord par lequel certains prétendent que nous sommes menottés et d'après lequel certains prétendent que nous avons l'obligation, maintenant, d'abroger, puisqu'on n'harmonise jamais de façon contraire à celle que de supprimer des barrières, et que le mot «abrogation», d'ailleurs, se retrouve dans des textes qui entourent la question.

Ceci étant dit, M. le Président, le problème a été créé par eux. Nous sommes au gouvernement, puis les gens s'attendent à ce que l'on règle les problèmes que les libéraux ont créés. Donc, nous sommes en train de travailler sur la question. J'ai dit que nous avions demandé une étude juridique de la part d'un cabinet externe; cette étude est en voie d'élaboration. On me dit que nous l'aurons incessamment. Donc, nous saurons bientôt si nous pourrons trouver une issue à ce mur de béton que le gouvernement libéral a tissé autour du Québec.

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, comment le premier ministre peut-il justifier le fait qu'ils sont devant un mur? Est-ce qu'il peut nous confirmer, M. le Président, que, lors des rencontres fédérales-provinciales des ministres de l'Agriculture depuis deux ans et demi, ils ont mis à l'ordre du jour ce sujet, M. le Président, pour défendre les producteurs laitiers du Québec? Prouvez-nous que vous l'avez mis à l'ordre du jour, au niveau des conférences fédérales-provinciales, pour défendre les producteurs laitiers du Québec, M. le Président.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

(10 h 40)

M. Julien: M. le Président, j'aimerais rappeler à cette Chambre que, lorsque le gouvernement du temps a signé cet accord, il y avait eu des discussions à l'intérieur du comité réunissant les différents ministres de l'Agriculture du Canada. Il en manquait un, celui du Québec. Il n'était pas là, lui. C'est là que ça s'est décidé, puis le gars qui représentait le Québec n'était pas là. Puis là on vient me demander: L'avez-vous mis là? Il n'est pas à l'ordre du jour. On va avoir nos discussions encore, on va parler de l'accord global au mois de juillet. Il n'est pas là. C'est tout.

Le Président: M. le ministre.

M. Julien: Ça les fatigue bien quand on leur rappelle que, quand c'était le temps de prendre des décisions, ils n'étaient pas là. Ils n'étaient jamais là. Vous n'étiez pas là. Vous n'avez jamais été là. En plus de ne pas avoir été là, vous essayez de semer encore la confusion chez les producteurs. Vous nuisez à l'agriculture par ce genre de débat là. On a pris l'engagement, quand on les a rencontrés, d'actualiser les études économiques, de finir la consultation et l'avis qu'on va recevoir, et ça, cet engagement-là, on va le respecter, comme on a respecté l'engagement sur la loi n° 23 que vous n'avez pas réussi à faire.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Farrah: M. le Président, le premier ministre est sûrement conscient que c'est le ministre qui nuit à l'agriculture, ce n'est pas les...

Le Président: En question complémentaire, M. le député.

M. Farrah: Le ministre est-il conscient, M. le Président, qu'il vient d'admettre qu'il n'a aucunement agi dans le dossier et que ce gouvernement n'a aucunement agi dans le dossier depuis deux ans et demi parce que, là, il va le mettre à l'ordre du jour de la rencontre de juillet 1997, et ça fait deux ans et demi qu'ils sont au pouvoir? Il vient de confirmer l'immobilisme et le somnambulisme du gouvernement à l'égard de ce dossier, ce qui va à l'encontre des producteurs laitiers du Québec.

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: M. le Président...

Le Président: Mme la députée de... M. le ministre.

M. Julien: Merci, M. le Président. Il doit venter fort aux Îles parce que ça fait plusieurs fois qu'on explique ça à mon critique, et il n'a encore rien compris. Remarquez qu'il n'est pas fait pour comprendre non plus. Il y a une date à laquelle ils ont à signer, le premier septembre. Ce qu'on fait actuellement, c'est de chercher tous les moyens pour voir comment on va faire en sorte de régler ce dossier-là à notre avantage. C'est l'engagement qu'on a pris et c'est ce qu'on va tenir. Point.

Le Président: M. le député de l'Acadie... M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre ne rend pas compte que ce que son ministre de l'Agriculture vient de nous dire, c'est que, depuis octobre 1994, en aucun moment – il y a peut-être eu 12 ou 13 réunions de ministres de l'Agriculture au Canada – en aucun temps, ça n'a été inscrit à l'ordre du jour, que, d'aucune façon, ça n'a été discuté, et que, là, ça va être discuté à peu près à quelques semaines d'une échéance que le premier ministre prétend être inéluctable? Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il y a eu zéro mention du dossier des producteurs laitiers québécois à l'échelle canadienne par son ministre de l'Agriculture et que le premier ministre, lui non plus, n'en a aucunement parlé à aucun des premiers ministres qu'il a rencontrés, notamment au premier ministre de l'Ontario?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il va y avoir une conférence des ministres de l'Agriculture en juillet prochain. Je peux vous dire une chose: notre ministre va être présent, alors que, en juillet 1994, alors que se discutait cette question fondamentale, alors que les décisions finales se prenaient, il y avait une chaise vide à cette Conférence, c'était celle du ministre libéral du Québec. Quand on m'a informé de toutes ces choses-là, je me suis dis: Bon, bien, voici un ministre qui a signé un accord qu'il n'avait pas négocié, c'est assez grave, mais je voudrais voir quand même si le premier ministre du temps l'a signé lui aussi. J'ai été voir, M. le Président, puis la signature de l'actuel chef de l'opposition apparaît sur ce traité qui, maintenant, nous nuit, au Québec, et qui force le gouvernement, maintenant, à entreprendre un combat extrêmement difficile. Nous serons présents en juillet, M. le Président, nous allons défendre l'agriculture du Québec, contrairement à ce qu'a fait ce gouvernement qui nous a précédés.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Pendant que le premier ministre a les yeux rigoureusement fixés sur le rétroviseur, est-ce qu'il ne peut pas nous dire si, depuis les 11 dernières réunions de ministres de l'Agriculture canadiens, dont son ministre de l'Agriculture devait s'occuper, au cours desquelles il a eu une douzaine d'occasions de parler de ça... Est-ce qu'il ne se rend pas compte que les 12 dernières où, lui, il était au gouvernement, où le PQ était au pouvoir, ça n'a jamais été discuté? Deuxièmement, il n'a pas répondu à ma question: Est-ce que lui-même en a parlé au moins une fois aux premiers ministres qu'il rencontre, notamment au premier ministre de l'Ontario?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement, quand il a pris connaissance du traité, a demandé des opinions. Le gouvernement, enfin les gens qui étaient chargés du dossier de façon plus immédiate ont demandé des opinions à ceux qui s'y entendent, des experts connus, au gouvernement comme à l'externe, notamment dans le cas d'un professeur universitaire, s'ils pouvaient croire leurs yeux: est-ce que vraiment, ça, ça voulait dire ce que ça voulait dire quand on le lisait? Est-ce qu'il y avait des possibilités d'avoir une conception différente du sens des textes? Et là il y a eu une opération, qui a été longue, de consulter les gens, de vérifier le sens des textes.

C'est depuis quelques mois que nous savons maintenant que toutes les études qui ont été demandées jusqu'à maintenant, sauf celle qui est en cours, concluent au caractère obligatoire en matière d'abrogation du règlement de la margarine, qui interdit de colorer la margarine. Et, ensuite, nous avons entrepris une démarche, nous avons parlé avec l'UPA et nous sommes en situation un peu de crise par rapport à ce document qui a été signé.

Enfin, M. le Président, ce n'est pas rien. Quand un gouvernement élu, légitime se présente à des conférences avec ses collègues des autres provinces et signe un traité qu'on a mis des années à négocier, ce n'est pas rien quand on est pris avec ça. C'est ce qui nous arrive maintenant.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Ayant compris de la réponse du premier ministre que lui non plus n'a jamais parlé à ses homologues provinciaux de ce dossier-là, notamment au premier ministre de l'Ontario, est-ce que le premier ministre peut, par ailleurs, pour l'avenir, s'engager à déposer ici, en cette Chambre, le résultat des études d'impact qui ont été commandées de même que les avis juridiques que lui-même a commandés, avant la fin de la session?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, ce sont les intérêts supérieurs du Québec qui détermineront la décision de savoir si les documents seront déposés ou pas. On ne va tout de même pas aider les adversaires du Québec quand ils vont se ranger du côté de l'ancien gouvernement pour signer l'accord qui a été signé. Donc, ce qui arrivera des documents puis des études juridiques, on connaît la tradition, il y a une longue tradition qui a toujours été respectée, que, dans l'intérêt du public, les opinions légales ne sont pas publiées. Si nous pensons que l'intérêt le requiert, M. le Président, par souci de transparence, nous le ferons.

Mais, je voudrais quand même – je me pose une question – savoir si j'aurais une réponse. Depuis le début que je me demande si le chef de l'opposition est content d'avoir signé ce traité qui nous met dans le trou, M. le Président. Est-ce qu'il est content de ça? Est-ce qu'il est fier de ça ou s'il n'est pas en train simplement de transférer sa culpabilité dans des questions agressives à la Chambre?

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Ce que je peux dire au premier ministre qui me pose une question, c'est que, moi, je ne suis pas fier que, lui, il n'en ait jamais parlé puis que le ministre de l'Agriculture n'en ait jamais parlé depuis trois ans. Ça, je ne suis pas fier de ça.

(10 h 50)

Le Président: M. le député de l'Acadie, en principale.


Prime de départ accordée à M. Pierre Baillargeon, ex-secrétaire du conseil d'administration d'Hydro-Québec

M. Bordeleau: Oui, merci, M. le Président. Il y a trois semaines, le ministre des Relations internationales nous confirmait que M. Pierre Baillargeon, ex-secrétaire corporatif à Hydro-Québec, avait reçu, en novembre dernier une prime de séparation de 208 000 $, soit l'équivalent d'un an et demi de salaire, et se retrouvait sur la liste de paie du ministère des Relations internationales depuis le 28 avril dernier, après y être retourné suite à son congé sans traitement. Le ministre déclarait alors que tout était réglé, suite à une lettre adressée le 25 avril à M. Baillargeon. Et le ministre citait alors l'extrait suivant, je cite: «Je comprends que, pour éviter la double rémunération à même les fonds publics, vous avez pris les dispositions auprès des représentants d'Hydro-Québec afin de retourner une partie de l'indemnité que vous avez reçue d'un montant équivalent au salaire que vous toucherez jusqu'au 1er juin 1998.»

Le premier ministre peut-il nous confirmer, tel que le ministre des Relations internationales l'affirmait le 21 mai dernier, que M. Baillargeon a bel et bien déjà remis une partie de cette prime de séparation de 208 000 $? Quel est le montant exact de cette remise et quand celle-ci a-t-elle été précisément effectuée?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai entendu comme tout le monde la décision ministérielle à l'effet de faire en sorte qu'il n'y ait aucune espèce de double rémunération dans cette affaire et que, s'il y a eu des indemnités supérieures au salaire qui était dû, elles devraient être remises au gouvernement. La décision ministérielle a été prise, elle a été communiquée, à ce que j'ai compris, à l'intéressé. Maintenant, est-ce que tout cela a été exécuté? Je prends avis de la question et nous ferons rapport dès que nous pourrons retourner au dossier pour savoir si les instructions formelles et décision ministérielle ont été remplies.

Le Président: Mme la députée de La Pinière, en principale, rapidement.


Réception officielle pour souligner la fête nationale du Québec au cours d'une mission du ministre des Relations internationales à Milan

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Après avoir présidé au démantèlement de la représentation du Québec à Rome et à Milan en mars 1996, supposément pour des raisons de restrictions budgétaires, le ministre des Relations internationales vient de se payer cette semaine un voyage en Italie pour rouvrir un nouveau bureau à Milan. On apprend en même temps qu'au cours de sa mission en Italie le ministre offrira le 12 juin, c'est-à-dire demain, une réception officielle pour souligner la fête nationale du Québec.

M. le Président, au premier ministre: Depuis quand célèbre-t-on la fête de la Saint-Jean le 12 juin? Et est-ce que le ministre des Relations internationales, qui affectionne particulièrement les cocktails et les tapis rouges, ne profite pas de cette occasion comme prétexte pour se payer la traite lors de son séjour à Milan, alors que le ministre de la Santé s'avoue incapable de trouver les fonds nécessaires pour la chirurgie cardiaque?

Le Président: Mme la députée... M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, s'il vous plaît. M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, le gouvernement n'est pas là pour dire à l'opposition comment gérer ses questions, mais je ne peux pas m'empêcher de trouver d'une inélégance suprême le genre d'attaque qu'on vient d'entendre contre le ministre qui est absent parce qu'il fait son devoir d'État de ministre des Relations internationales du Québec. Je pense que l'opposition qualifie elle-même la vue qu'elle a du rayonnement international du Québec, surtout avec les expressions méprisantes qu'on a entendues – «se payer la traite» – alors que notre collègue fait son devoir et fait rayonner le Québec à l'étranger. Fermer des délégations? Alors, monsieur...

Le Président: M. le vice-premier ministre, en conclusion, s'il vous plaît.

M. Landry (Verchères): Il y a plusieurs façons de qualifier la cacophonie qui m'empêche de répondre. Une des hypothèses, c'est probablement que plusieurs éléments de l'opposition sont gênés de la bourde que vient de commettre notre collègue.

Par ailleurs, je réitère que...

Le Président: Est-ce que je pourrais vous indiquer qu'à chaque fois que ce genre de comportement se déroule à l'Assemblée nationale le cabinet de la présidence de l'Assemblée nationale est inondé de téléphones de citoyens qui trouvent inacceptable ce genre de comportement? M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): M. le Président, je conclus ma réponse en disant que, contrairement à ce que la députée a laissé entendre, le réseau diplomatique et commercial du Québec ne s'est pas restreint. Avec moins d'argent, à cause des conditions budgétaires difficiles, nous sommes, au moment où je parle, représenté dans beaucoup plus de villes qu'avant. Et, dans ces villes, ce n'est pas l'unicité du Québec que l'on va fêter le jour de la fête nationale, c'est la fête nationale d'un peuple et d'une nation.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions et des réponses orales.


Réponses différées


Patients en attente de chirurgie cardiaque à l'hôpital Le Gardeur de Repentigny

Comme je vous l'indiquais précédemment, il y a d'abord une réponse différée et, par la suite, il y aura un vote qui a été reporté. Pour le moment, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux va répondre à une question posée le 10 juin dernier par M. le député de Brome-Missisquoi concernant les patients en attente de chirurgie cardiaque à l'hôpital Le Gardeur de Repentigny. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, hier, le leader de l'opposition laissait entendre, dans une question, que des patients de l'hôpital Le Gardeur seraient dans une attente très longue, et qui pourrait être nocive à leur santé, pour recevoir une chirurgie cardiaque.

Nous avons tout de suite vérifié, comme je l'ai dit hier, M. le Président, et je peux donner ce matin l'information suivante à la Chambre et à la population. D'abord, le délai d'attente habituel à l'hôpital Le Gardeur pour des patients qui doivent subir une chirurgie cardiaque après qu'ils ont eu une coronographie – c'est l'examen sur la base duquel se fait la décision de l'indication ou pas d'une chirurgie cardiaque – l'attente habituelle à cet hôpital est de sept à 10 jours pour tous les patients qui sont hospitalisés, s'il y a le moindrement une intervention qui doit être faite rapidement.

À ce jour, en plus des patients pour lesquels une intervention doit être faite rapidement, comme ce que j'ai décrit, il y a cinq patients qui sont en attente d'une admission de Le Gardeur et qui seront admis à l'Hôtel-Dieu de Montréal. Un de ces patients a eu son admission hier ou aujourd'hui, qu'on m'a confirmé; deux autres ont leur admission prévue pour leur chirurgie à l'Hôtel-Dieu de Montréal, au pavillon de l'Hôtel-Dieu du CHUM de Montréal, jeudi, demain; et les deux autres patients seront admis, au plus tard, au début de la semaine prochaine. Ça, c'est l'information qui nous est donnée par l'hôpital Le Gardeur et qui nous est confirmée par les autorités du CHUM, plus particulièrement au pavillon de l'Hôtel-Dieu.

Le troisième élément était un patient particulier, un M. Morin, qui a été nommé par le leader de l'opposition, qui aurait eu deux infarctus. On a eu toute une description qui laissait vraiment croire que ce monsieur avait été mal suivi. Les faits sont les suivants, M. le Président. M. Morin a eu un premier infarctus le 23 avril et, sur la base de son examen, la décision a été prise qu'il devait avoir un traitement médical. Il est traité médicalement à la suite de son infarctus, il n'était pas question d'intervention chirurgicale à ce moment-là.

(11 heures)

Pendant que le patient était sous traitement médical, tel que décidé par les médecins, il y a eu une récidive d'infarctus, le 16 mai. Le patient a été réadmis à l'hôpital pour vérifier l'efficacité et le suivi du traitement et, à ce moment-là, on a procédé à une coronarographie – qui est l'examen qu'on fait quand on pense qu'il pourrait y avoir indication à intervention chirurgicale – qui a été faite le 21 mai. L'admission à l'Hôtel-Dieu de Montréal pour la chirurgie de ce patient – qui est maintenant traité et stabilisé – est prévue pour le 12 juin. C'est donc dans un délai, pour des gens qui sont dans un état stable, de trois semaines que le patient aura été opéré – c'est demain – depuis le temps de sa coronarographie à la suite de laquelle on a décidé de l'admission. Alors, après vérification de tous les faits, je pense que je suis content de confirmer à la population que, contrairement à ce qu'on a laissé entendre hier, l'hôpital Le Gardeur fait un excellent travail, traite très bien ses patients et que tous les patients qui sont en attente sont traités dans des délais tout à fait normaux compte tenu de leur état de santé.

Je continuerai, M. le Président, en resoulignant comment c'est un peu odieux, ce genre de comportement auquel on assiste depuis quelques jours où on a des informations tout à fait incomplètes, déformées, qui sont une désinformation systématique et d'une démagogie inqualifiable, M. le Président, et qui, en plus, est terriblement méprisante pour le monde dans le réseau de la santé et des services sociaux où, dans des conditions difficiles sur le plan financier, les gestionnaires, les professionnels, les employés réussissent toujours à donner des soins excellents et à répondre aux besoins de la population. Je veux rassurer la population: ils ont pour les servir, au-dessus de 200 000 personnes qui travaillent et qui, comme le ministre et le gouvernement, ont à coeur leur santé, et tout va continuer à être fait pour bien les servir. J'espère qu'on en arrivera à une fin de justifier cette espèce de démagogie qui projette une inquiétude complètement injustifiée par rapport à la réalité du réseau de la santé et des services sociaux, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre veut dire que l'ensemble des intervenants du secteur de la santé, les médecins, les infirmières, les techniciens et les techniciennes qui interviennent au nom de leurs patients, les comités des malades, les conjoints qui interviennent, les journalistes qui rapportent les faits dans des journaux ou comme on l'a vu hier soir sont tous des démagogues? Les députés péquistes qui sont intervenus à l'Assemblée nationale pour sauver la vie de concitoyens de leur comté et d'autres régions du Québec sont des démagogues, aux yeux du ministre de la Santé?

Quant aux faits qu'il a rapportés, M. le Président, il a confirmé exactement le nombre de patients qu'on avait mentionné. Dans le cas du patient qui a été identifié, son épouse a appelé, hier soir, pour confirmer que, suite à la question qui avait été posée à l'Assemblée nationale, le bureau du ministre était intervenu. M. le ministre, c'est un geste humain, je vous remercie.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: L'intervention du bureau du ministre n'a pas été pour changer quoi que ce soit aux décisions. Ce que je vous ai dit ce matin, c'étaient des décisions... Il faut quand même respecter ceux qui...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Le bureau du ministre a simplement été aux informations auprès des médecins, des cliniciens, des gestionnaires qui nous ont dit ce qu'ils auraient dit au chef de l'opposition s'il avait fait son devoir puis qu'il avait vérifié l'information, ce qui aurait évité... Ce n'est pas tout le monde qui est pris dans ce jeu-là qui sont des démagogues, comme il veut le suggérer, M. le Président. Eux, ils sont les victimes manipulées par cette démagogie à laquelle on assiste depuis un bout de temps, M. le Président.

Des voix: Bravo!


Votes reportés

Le Président: Alors, il y a maintenant un vote reporté. Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture et des Communications... M. le député de Saint-Laurent, s'il vous plaît!


Adoption du projet de loi n° 64

Alors, nous allons procéder au vote reporté sur la motion de Mme la ministre de la Culture et des Communications proposant que le projet de loi n° 64, Loi modifiant la Loi sur le statut professionnel et les conditions d'engagement des artistes de la scène, du disque et du cinéma et modifiant d'autres dispositions législatives, soit adopté.

Je demanderais que, pendant le vote, il y ait le silence pour permettre aux officiers de la table de pouvoir se concentrer.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), Mme Charest (Rimouski), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

Y a-t-il des abstentions?

(11 h 10)

La Secrétaire adjointe: M. MacMillan (Papineau).

Le Président: Très bien.

Le Secrétaire: Pour:106

Contre:0

Abstentions:1

Le Président: Alors, la motion est, en conséquence, adoptée ainsi que le projet de loi n° 64.


Motions sans préavis

Motions sans préavis. M. le député de Rivière-du-Loup.


Souligner le 300e anniversaire de fondation de Trois-Pistoles

M. Dumont: M. le Président, je voudrais solliciter le consentement de la Chambre pour déposer la motion sans préavis suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le 300e anniversaire de fondation de Trois-Pistoles en invitant toute la population du Québec à se joindre aux Pistolois et Pistoloises lors des nombreuses festivités qui vont marquer l'événement.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, même si la motion est déjà adoptée d'une certaine façon, je pense qu'il y a des interventions. M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Alors, c'est avec énormément de fierté que je prends la parole aujourd'hui pour souligner les 300 ans de détermination, de fierté et de travail qui ont bâti Trois-Pistoles, en fait, pour souligner les 300 ans d'histoire de Trois-Pistoles, une histoire passionnante. Déjà, au XVIe siècle, les bateaux du Pays basque venaient chasser la baleine au large de Trois-Pistoles. Une fois la baleine capturée, les Basques la tirent vers l'île qui porte maintenant leur nom, l'île aux Basques, en face de Trois-Pistoles. Ils ont aussi laissé leur nom à la MRC dont Trois-Pistoles est aujourd'hui le chef-lieu, la MRC des Basques.

Concédée à Charles Denys de Vitré le 6 janvier 1687, Trois-Pistoles deviendra, neuf ans après, fief et seigneurie de Jean Riou. Fait inusité dans les annales québécoises, elle restera entre les mains de la même famille Riou jusqu'à l'abolition du régime seigneurial en 1854. Établi à l'île d'Orléans depuis quelque 20 ans, Jean Riou arrive à Trois-Pistoles dès le printemps 1697 avec Catherine Leblond et leurs trois fils, Nicolas, Vincent et Pierre. Il s'acquitte alors de sa tâche de défricher les terres, de les habiter et d'établir des pêches. Ses fils et leurs descendants poursuivront son oeuvre de pionnier, étendant leur domaine en 1712 et 1751 jusqu'à la seigneurie du Bic.

Dans son aveu et dénombrement du 17 février 1723, Nicolas Riou dresse l'inventaire du premier hameau pistolois situé à proximité du quai actuel: une maison de 42 pi de long, une grange de 38 pi de long, une chapelle de colombage de 30 pi de long, un moulin à eau à faire farine et 25 arpents de terre labourable. En 1790, Trois-Pistoles compte 196 habitants. En 1801, on construit la deuxième chapelle. En 1810, on ouvre le deuxième rang ouest, puis le deuxième rang est. En 1827, l'année de l'élection canonique de Trois-Pistoles, on ouvre le troisième rang à la colonisation et Trois-Pistoles compte alors plus de 1 600 habitants.

Dans le siècle qui suit, Trois-Pistoles continue à se développer, basée sur l'industrie, l'agriculture et de plus en plus sur une activité culturelle florissante. Aujourd'hui, Trois-Pistoles, connue par notre population pour L'Héritage et pour Bouscotte , est une magnifique ville de quelque 4 000 habitants avec une vocation axée sur le développement récréotouristique et culturel, dont les attraits naturels et le paysage architectural font l'envie de plusieurs.

Pour ceux qu'elle accueillera à l'occasion des fêtes du 300e, Trois-Pistoles foisonne d'activités. En plus des activités permanentes, comme la Maison du notaire, le Parc de l'aventure basque en Amérique, Le Jardin des légendes, les excursions à l'île aux Basques ou aux baleines, le Caveau-théâtre et l'Univers de Victor-Lévy Beaulieu, cette année donnera lieu à la tenue d'une multitude d'activités spéciales organisées par un comité des fêtes exceptionnel, dont nous avons salué des représentants dans nos tribunes, représentants qui se joignent à moi aujourd'hui pour souhaiter d'avance la plus cordiale bienvenue à tous ceux et celles qui se joindront aux Pistolois et Pistoloises pour fêter ces 300 riches années d'histoire. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Montmagny-L'Islet.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Je veux joindre ma voix à tous les membres de l'Assemblée nationale, au nom du groupe des députés de l'opposition, pour rappeler le 300e anniversaire de Trois-Pistoles et souhaiter à ses représentants, qui sont ici dans les galeries, la bienvenue à l'Assemblée nationale, d'une part.

M. le Président, 300 ans d'histoire pour Trois-Pistoles, petite ville, pourrais-je dire municipalité, qui joue un rôle très important dans le secteur du Bas-Saint-Laurent, comme plusieurs de nos municipalités qui ont su développer la Côte-Sud et le Bas-Saint-Laurent, il y a quelques centaines d'années. Je pense que nos citoyens et citoyennes, nos ancêtres... Dans le cas de Trois-Pistoles, c'était la famille Riou, comme le député de Rivière-du-Loup vient de nous le rappeler, qui est à l'honneur aujourd'hui en la personne aussi de sa présidente, Mme Carmen Rioux, qui préside ce comité. Donc, on se doit de la féliciter, au nom de sa population, des fêtes, de reprendre l'histoire de Trois-Pistoles, l'histoire de l'ancêtre Riou, d'une part.

Trois-Pistoles a été, pour cette région du Bas-Saint-Laurent, je pense, un centre, une municipalité-centre, comme on pourrait l'appeler, qui a su se développer avec l'agriculture, la forêt et la navigation, comme plusieurs des municipalités, comme je le mentionnais, qui ont joué un rôle très important pour le développement plus éloigné du Saint-Laurent. Je pense que les gens, à partir d'une municipalité comme Trois-Pistoles, nos ancêtres et ceux qui ont développé le Québec et le Bas-Saint-Laurent, comme la région que je représente, la Côte-Sud, d'abord, se sont installés à Trois-Pistoles et, ensuite, ont développé les municipalités un peu plus éloignées vers le sud.

Donc, on doit louer, encore une fois, ceux et celles qui ont mis du temps, plusieurs mois de préparation. On sait que ça prend, pour préparer des fêtes comme celles-là, des recherches. Les citoyens ont mis beaucoup de temps pour préparer cette fête en l'honneur de ceux et celles qui ont développé cette ville et cette municipalité du Bas-Saint-Laurent, comme je le mentionnais.

J'invite la population québécoise, à l'occasion de leurs déplacements, à l'occasion de leurs vacances estivales, à arrêter dans cette municipalité qui est tout à fait agréable et accueillante. Je l'ai fait l'an passé. Je l'ai fait il y a déjà plusieurs années aussi, à l'occasion. Avant d'arriver à Trois-Pistoles, vous avez en évidence l'église de Trois-Pistoles qui, si je me rappelle, a, on pourrait dire, trois clochers ou trois tourelles. C'est un édifice qui est particulier. Donc, on sait déjà, quand on voit ces trois tourelles, qu'on arrive à Trois-Pistoles. Donc, encore une fois, j'invite les Québécois et les Québécoises, dans leurs déplacements, à arrêter saluer les gens de Trois-Pistoles à l'occasion du 300e anniversaire. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Maintenant, M. le député de Matane et ministre du Travail.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: Alors, M. le Président, Trois-Pistoles, pour nous, les Rioux, c'est la maison mère, parce que c'est notre père à tous, Jean Riou, qui a fondé la région, qui est venu s'y installer, qui a développé une seigneurie. On peut dire que ce sont là des entrepreneurs tenaces qui ont eu un entêtement assez exceptionnel pour développer non seulement la région de Trois-Pistoles, mais aussi s'étendre à l'île d'Orléans et, ensuite, aller fonder une multitude de villages dans la région et dans la péninsule gaspésienne.

(11 h 20)

Je voudrais dire à Anita Rioux et je voudrais aussi signaler à Gaston Rioux que tous nos voeux de succès les accompagnent. Et je voudrais saluer mon collègue ici, que je vois là-haut, M. Rioux, qui a travaillé très fort à l'établissement de ce joyau dans les Basques qu'est ce centre international maintenant. Je terminerai en soulignant ceci, parce que le premier ministre le dit dans son petit mot qu'il adresse aux Pistolois et aux Pistoloises: Vous avez eu une fierté remarquable, vous avez eu un courage extraordinaire, vous avez développé un coin de pays magnifique. Moi, ce que je vous dis: Si on se fie à la lignée des Rioux, qui est tenace et durable, on en a encore pour longtemps à faire du développement. Bravo, bonne chance, félicitations!


Mise aux voix

Le Président: Alors, comme c'était évident dès le départ, la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 144, Loi sur les prestations familiales, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 145, Loi sur le ministère de la Famille et de l'Enfance et modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance, aujourd'hui, de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 65, Loi instituant au Code de procédure civile la médiation préalable en matière familiale et modifiant d'autres dispositions de ce code, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May;

Que la commission des transports et de l'environnement procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 143, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des finances publiques poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic, aujourd'hui, de 16 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'aménagement du territoire poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 63, Loi sur les sociétés d'économie mixte dans le secteur municipal, aujourd'hui, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'économie et du travail se réunira en séance de travail aujourd'hui, le mercredi 11 juin, de 13 heures à 15 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est d'examiner le rapport préliminaire de la commission concernant le mandat de surveillance d'Hydro-Québec.

Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira en séance de travail demain, le jeudi 12 juin, de 9 h 30 à 10 heures, à la salle RC.171 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de discuter d'un projet de cueillette de livres pour le Centre Jacques-Couture de Madagascar.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, ça va?

M. Bélanger: Je voudrais peut-être aviser les membres de cette Assemblée qu'il est de mon intention d'ajourner les travaux de l'Assemblée à 18 heures, ce soir. Conséquemment, quatre commissions siégeront.


Affaires du jour

Le Président: Ça va? Nous en arrivons maintenant aux affaires du jour.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 7 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 142


Adoption du principe

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 237 du règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe du projet de loi? Il y a consentement. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, la présentation de cet amendement sera un peu une occasion de rappeler ce qu'est le régime d'assurance-médicaments et dans quel contexte il évolue. On se rappelle que, le 1er janvier dernier, l'Assemblée nationale a adopté une loi qui créait un nouveau régime qui vise à donner à l'ensemble de la population un accès à un prix raisonnable et sur une base d'équité aux médicaments et à une liste de médicaments qui permet de répondre à tous les problèmes de santé qui peuvent requérir ce type de technologie dans l'ensemble du traitement qui est prescrit à une personne.

Notre régime a un caractère très particulier: c'est un partenariat entre le secteur public et le secteur privé. On se rappellera qu'il y avait déjà, au Québec, à peu près 4 000 000 ou 4 500 000 Québécois et Québécoises qui avaient déjà une forme variable de couverture d'assurance pour leurs médicaments dans le cadre de régimes, de contrats d'assurance collective ou dans des régimes d'avantages sociaux négociés entre les syndicats et les employeurs avec des assureurs qui fournissent ce type de police d'assurance. Il y avait les personnes âgées de 65 ans et plus et les personnes prestataires de la sécurité du revenu, qui représentent à peu près 1 500 000 personnes, qui étaient déjà couvertes par le Régime d'assurance-maladie du Québec pour leurs médicaments, mais il y avait 1 400 000 personnes au Québec qui n'avaient aucune couverture d'aucune nature. Le nouveau régime donc est venu couvrir l'ensemble de la population, en échange d'une contribution.

C'est un régime général, soit assuré par le privé et le public, mais qui a des caractéristiques de base qu'on retrouve dans les deux voies de notre régime, privé ou public, à savoir qu'il s'agit d'une assurance qui offre une même liste de médicaments, comme je le disais, qui est complète pour l'ensemble des problèmes de santé de la population. C'est un régime qui prévoit que toutes les personnes sont couvertes, toute la famille, y compris les enfants, et, dans le régime public, les enfants sont couverts sans aucuns frais. Et c'est un régime qui veut répartir, pour l'ensemble, les coûts du médicament, pour le régime public, selon les revenus des gens.

Alors, on est sorti d'une distinction de classes de personnes dans la population, personnes âgées ou prestataires de la sécurité du revenu ou autres, pour rendre le médicament accessible, donner l'assurance grâce à une prime qui sera graduée selon le revenu. Il y a des personnes qui ne paieront aucune prime, d'autres paieront une prime de 40 $ selon leurs revenus et progressivement jusqu'à un maximum de 175 $. Et, au moment de l'achat de médicaments, avec cette assurance, il y a une première portion que les gens devront payer complètement et c'est une portion qui varie de 25 $ par trois mois jusqu'à un montant qui est à peu près de 112 $ par bloc de trois mois, avec, au-delà d'un montant de base, une demande de 25 % du coût du médicament jusqu'à un plafond maximal de 200 $ pour les personnes qui ont des revenus les plus bas et de 750 $ pour le plafond le plus élevé, toujours compte tenu des revenus des différents groupes de la population, M. le Président.

Il faut se rappeler que, quand on a lancé ce programme, on avait prévu qu'il y aurait une période d'ajustement et qu'on se donnerait quelques mois pour bien s'assurer que tous les aspects du programme pourraient être rodés, et c'est ce qui a pu être fait rapidement au cours des premiers mois. On se rappellera que, dès le début du programme, on a soulevé un certain nombre de difficultés qui tenaient, par exemple, aux employés de la fonction publique fédérale qui résident au Québec. L'employeur fédéral a été le seul qui n'a pas trouvé le moyen d'ajuster son régime à celui du Québec; tous les autres employeurs l'ont fait, y compris des filiales de compagnies internationales. Mais, malgré ça, on a finalement convenu d'une entente administrative avec l'employeur fédéral et la compagnie d'assurances qui assure ces employés, la compagnie Sun Life, pour couvrir maintenant ces gens-là de la même façon, avec le même plafond que l'ensemble des citoyens du Québec, de sorte qu'on a enlevé une inéquité qui risquait de s'installer, M. le Président.

(11 h 30)

Dès le début de l'application de ce programme, il est apparu qu'il y avait un groupe de personnes, qui sont des gens à faibles revenus, qui souffrent d'un problème psychiatrique sévère et qui, pour différentes raisons, éprouvaient une difficulté à ajuster dans leur budget, à libérer de leur budget les sommes nécessaires. Comme ces gens-là, en général, consomment des médicaments qui représentent une facture assez élevée, alors, même si le plafond maximal pour ces gens-là était de 50 $ par trois mois, si la première prescription à la pharmacie demandait de se rendre jusqu'au plafond, 50 $, c'était beaucoup à payer et, dès le début du programme, en janvier, on a fait un ajustement pour rendre sur une base mensuelle le plafond que les gens devraient rencontrer, de sorte que, dès ce moment-là, ça ne pouvait jamais leur coûter plus cher que 16 $ par mois, et ça a permis à ces gens-là d'avoir accès aux médicaments.

On se rappellera que dans les premiers jours – et les médias avaient fait évidemment toute une couverture de l'incident – il y avait eu des petites difficultés avec le système informatique, qui est un système, en passant, qui est un des plus performants pour ce genre de programme, qui a été installé par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, en collaboration avec ses partenaires, dans un temps vraiment record de six mois, alors qu'on me disait que, normalement, il faut presque prévoir une année pour installer ce genre de programme. Alors, la mise en place, en dedans de quelques jours, a été complètement rodée et on a maintenant un système qui en quatre mois – pour la période des quatre premiers mois depuis le 1er janvier – a permis de traiter plus de 18 000 000 d'ordonnances, et chaque traitement, chaque transaction entre un pharmacien et la Régie de l'assurance-maladie du Québec se fait dans moins de sept secondes. Alors, c'est vraiment un système performant qui a été adapté tout de suite.

D'ailleurs, je profite de l'occasion pour souligner que la Régie de l'assurance-maladie du Québec vient de se voir attribuer un prix d'excellence pour la réalisation de ce système interactif pour permettre la gestion, les prix Octas qui sont donnés pour l'innovation technologique. Alors, je pense que ça a été un grand succès qu'on a pu apprécier lors de la mise en oeuvre du programme et, maintenant, qui est reconnu dans l'ensemble du Québec et même dans l'ensemble du Canada.

Je n'entrerai pas dans les détails mais il y a eu un certain nombre d'autres petits ajustements qui ont dû être faits, M. le Président. Rapidement, dans les mois qui ont suivi le début de la mise en place de ce régime, à peu près toutes les situations ont pu se corriger ou sont en voie de l'être grâce à une collaboration, je dois le souligner, de tous les assureurs privés et une excellente collaboration aussi des employeurs et des syndicats, et surtout grâce à une collaboration remarquable de la part des pharmaciens qui ont vraiment montré qu'ils étaient, à part tout à fait entière, des professionnels de la santé et qu'ils faisaient partie de l'équipe de première ligne avec les médecins, les infirmières, le personnel des CLSC et qu'ils étaient capables de rendre service à la population et d'adapter un système général aux besoins de leurs clients et aux situations particulières de différentes personnes.

Après avoir fait le tour de tout ça, de tous ces problèmes-là, il nous est resté un groupe de personnes et on tenait vraiment à voir comment, avec le deuxième cycle de trois mois qui commençait au 1er avril... voir quelles étaient les personnes, s'il y en avait, pour lesquelles les solutions apportées n'étaient pas satisfaisantes. Et, effectivement, on a pu confirmer que, parmi les personnes les plus vulnérables de notre société, les plus démunies, il n'y avait pas surtout une difficulté, compte tenu de la prestation de sécurité sociale qui est donnée aux gens, d'assumer une contribution minime pour le coût du médicament, mais que ces gens-là éprouvaient la même difficulté de disponibilité que ceux qui pouvaient avoir une prescription assez coûteuse, le même genre de difficulté qui s'est confirmée et qui avait été celle des personnes à faibles revenus et souffrant de maladie psychiatrique pour lesquelles on avait, dès le début du programme, mensualisé la gestion de la franchise, de la coassurance et du plafond.

Alors, après avoir examiné avec ma collègue la ministre de la Sécurité du revenu les différentes façons d'assouplir et d'adapter le régime pour ces personnes, après avoir vu ce qui était possible par les mécanismes de la sécurité du revenu et des mécanismes qui relèveraient plus du régime d'assurance-maladie du Québec, nous avons conclu qu'il était préférable de généraliser cette mensualisation et de le faire à ce moment-là pour être sûrs d'être équitables envers tous, pour l'ensemble, pas seulement pour les gens qui avaient été cernés comme ayant vraiment une difficulté de disponibilité, mais afin de prévenir que d'autres personnes ne soient dans cette situation-là. On a décidé de généraliser – et c'est ce qu'on propose – l'application d'un plafond mensuel pour l'ensemble des 3 000 000 de personnes qui sont couvertes par la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Alors, ça veut dire que, selon leurs revenus, les gens n'auront pas à payer plus que 16 $ par mois pour leurs médicaments, ou 41 $, ou au maximum 62 $ par mois pour leurs médicaments, compte tenu des revenus des gens, et ça, ça s'adresse bien sûr aux prestataires de la sécurité du revenu, mais aussi à tous les nouveaux assurés dont on sait maintenant que ce sont des gens, de façon générale, qui ont des revenus très bas, un peu supérieurs à ceux d'un prestataire de la sécurité du revenu, mais quand même des petits salaires, puisque presque 1 000 000 sur le 1 400 000 de ces personnes n'auront pas à payer de prime. Alors, ça dit beaucoup quel groupe peut bénéficier maintenant de ce programme d'assurance. Eux aussi, en toute équité, auront le même traitement et, bien sûr, l'ensemble des personnes âgées qui sont couvertes par le régime d'assurance-médicaments. Alors, il sera possible, M. le Président, de voir à ce que cette nouvelle façon de gérer le système puisse s'appliquer dès le 1er juillet prochain si, évidemment, l'Assemblée nationale vote cette loi. Il s'agit, en fait, de changer un mot dans un article de la loi pour référer à un plafond mensuel plutôt qu'à un plafond trimestriel.

Maintenant, c'est peut-être bon de prendre quelques minutes pour se rappeler dans quel contexte évolue ce régime d'assurance-médicaments. Ce n'est pas simplement un régime de paiement de factures, c'est vraiment un régime qui permet à l'État d'assumer une part importante, à peu près les deux tiers, au moins, du coût du médicament, qui permet de partager le reste des coûts du médicament, encore une fois, sur une base d'équité selon les revenus des gens, mais c'est un système qui est entouré de quatre ou cinq mécanismes importants pour en assurer une bonne gestion, une gestion efficace, et aussi assurer une utilisation adéquate, appropriée du médicament.

Rappelons que la loi que l'Assemblée nationale avait approuvée intégrait une structure qui existait déjà depuis, je pense, 25 ans au Québec, qui est le Comité consultatif de pharmacologie, qui est un groupe d'experts en pharmacologie qui avise le ministre pour la constitution de la liste des médicaments qui sont couverts par le régime d'assurance, s'assure d'une bonne évaluation de la valeur thérapeutique des médicaments et aussi s'assure que le prix des médicaments est un prix juste, raisonnable et équitable. Autrement dit, comme le régime est payé en bonne partie soit par une contribution directe ou soit par les taxes des contribuables québécois, on veut s'assurer que les gens en ont pour leur argent, qu'ils ont un médicament d'excellente qualité et que, parmi tout ce qui est disponible sur le marché, on peut offrir des médicaments qui sont à un bon rapport de prix-qualité, si vous voulez.

Ce Comité, donc, a déjà fait la preuve de la valeur de son travail au cours des 25 dernières années. Il est maintenant intégré au régime d'assurance-médicaments. On a maintenant pu adapter un système où la liste de médicaments est révisée deux fois par année. On prévoit pouvoir même la réviser trois fois par année, de sorte qu'on puisse être constamment à jour pour l'ajout ou les modifications de médicaments et assurer aux Québécois et aux Québécoises que cette liste est une liste qui leur donne ce qui, en temps réel, est le meilleur éventail de médicaments dont ils peuvent avoir besoin.

Il y a un autre élément, un autre mécanisme qui a été créé par la loi à l'exemple de ce qui existait déjà pour les médicaments consommés dans les établissements, pour les personnes, par exemple, qui étaient hospitalisées et qui consommaient des médicaments. On avait fait l'expérience de comités de revue de l'utilisation du médicament pour s'assurer que, non seulement sur une base individuelle mais sur une base de profils de groupe et d'évolution dans le temps de l'utilisation du médicament, on puisse donner aux professionnels, aux médecins qui prescrivent les médicaments, aux pharmaciens qui complètent, remplissent la prescription et assurent au patient le médicament qui correspond à la prescription médicale, alors, pour donner à ces gens-là une information qui leur permette d'ajuster leur pratique à ce qui est un meilleur usage possible du médicament.

(11 h 40)

On avait développé tout un mécanisme, toute une méthodologie pour réviser l'utilisation du médicament. On s'est aperçu que c'était très efficace, parce que ça permettait de diminuer l'utilisation de médicaments qui étaient moins utiles et par contre d'avoir une utilisation des médicaments qui correspondent le plus à l'état d'un patient. Alors, ce type de mécanisme est maintenant généralisé. Il s'agit d'une entente qui est établie entre le Collège des médecins, l'Ordre des pharmaciens et la Régie de l'assurance-maladie du Québec pour que constamment on apprenne, avec l'utilisation de notre système, à mieux utiliser le médicament, encore une fois, et qu'on donne aux professionnels une information très à jour pour qu'ils puissent apprendre de l'expérience qu'on acquiert en gérant notre système.

En plus de ces deux mécanismes qui existaient déjà et qu'on a intégrés, on a convenu, lors de l'étude et de la discussion de la loi, de rajouter un autre mécanisme qui est un groupe de concertation. Alors, on réalisait bien, pendant les travaux de la commission qui a entendu tous les groupes qui sont venus présenter leurs commentaires et leurs recommandations, que les personnes au-delà des experts en pharmacologie, au-delà des experts pharmaciens et médecins, qui eux analysent la révision de l'utilisation des médicaments, que les cliniciens eux-mêmes, ceux qui prescrivent le médicament, les pharmaciens qui remplissent les prescriptions, les infirmières qui voient aussi à s'assurer de l'utilisation correcte des médicaments par les patients et que les consommateurs en général souhaitaient avoir leur mot à dire dans la gestion de ce système-là.

Mais devant la difficulté, si vous voulez, de confondre des missions très techniques, soit du Conseil consultatif de pharmacologie ou du Comité de revue de l'utilisation des médicaments, on a décidé de mettre sur pied un groupe qu'on a appelé un groupe de concertation, qui sera formé de professionnels cliniciens, auxquels je fais référence, et d'utilisateurs, en nombre égal, et qui auront comme mandat, eux, de donner des avis au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le fonctionnement de l'ensemble du régime, sur les conditions d'accessibilité, sur ce qui, au-delà des aspects très techniques, peut conditionner une bonne utilisation du médicament, sur l'information qui est nécessaire à donner aux usagers du médicament et sur tous les moyens qui peuvent être utilisés dans les cabinets de médecins, dans les CLSC, dans les établissements pour assurer qu'on intègre bien l'ensemble des services pharmaceutiques, y compris le médicament, dans le système des soins de santé. C'est un groupe aussi qui devra avoir un oeil sur l'évolution du système et sur le contrôle des coûts d'un tel système en regard de l'ensemble des médicaments qu'on assure à la population.

Alors, ce groupe sera annoncé dans les prochains jours. Il nous reste à compléter les contacts avec les personnes qui ont été choisies, après consultation dans différents milieux, et sûrement qu'avant la fin de cette session je serai en mesure, M. le Président, de publier le mandat, que je viens de résumer, de ce groupe, sa composition et qu'ils pourront se mettre au travail tout de suite.

Vous voyez l'importance de ce groupe à deux égards. D'abord, comme notre loi contient un article qui nous dit que dans trois ans, après l'application du régime – trois ans après le 1er janvier 1997 – il y aura un rapport de fait en commission parlementaire – une révision de cette loi et du fonctionnement du régime en commission parlementaire – de façon à ce qu'on s'assure que toutes les améliorations qui pourraient y être apportées au niveau de la loi même, que tout changement qui devrait être fait au régime ou toute bonification qui pourrait être faite au régime qui n'auraient pas pu être faits en cours de route jusque là pourront être faits. Alors, ce groupe de concertation – les représentants professionnels qui utilisent le médicament et les consommateurs de médicaments, des patients – sera en position de travailler dans cette optique et de donner des avis au ministre pour qu'on puisse vraiment être prêts, et que ça ne soit pas une évaluation faite à la dernière minute, dans trois ans, mais que ça soit une évaluation qui aura été préparée et pour laquelle on aura vraiment toute l'information pertinente et de l'information qui aura été validée au besoin. Ce groupe-là, pour faire ce travail et pour permette qu'on complète notre système, va permettre au ministre – et j'espère qu'on pourra le faire avant la fin de cette année, à l'automne – de pouvoir publier une politique du médicament au Québec. On n'a jamais eu vraiment une approche qui assure un contrôle et une gestion globale du médicament et un lien bien équilibré avec l'ensemble du fonctionnement du système de santé et de services sociaux.

On a commencé à préparer et à développer une politique du médicament qui permettra de s'assurer que les mécanismes d'accessibilité sont efficaces, qui nous permettra de voir, sur la base de ce qu'on apprend de l'utilisation du médicament par les autres mécanismes auxquels j'ai fait référence, qu'est-ce que ça suggère comme bonification du système, qui nous permettra d'avoir, dans la politique du médicament, vraiment une bonne stratégie et un financement adéquat, de l'information constante et régulière à la population et aussi, bien sûr, aux professionnels qui interviennent et qui utilisent le médicament dans le traitement qu'ils proposent aux patients. Et, finalement, cette politique du médicament nous permettra de bien développer aussi les mécanismes de contrôle de la gestion du système et du contrôle des coûts du système. Et ça, ça voudra dire qu'il faudra greffer, dans les travaux du ministère, des capacités de recherche évaluative sur l'efficacité des médicaments, sur les coûts et sur le rapport de qualité–prix pour les médicaments.

Cette politique va donc être élaborée en concertation avec le groupe de concertation, elle permettra une consultation de tous ceux qui nous permettront de la bonifier, et j'ai comme objectif qu'avant la fin de la première année du régime on soit en mesure d'avoir un système complet, qui nous assure une liste adéquate bien évaluée, qui nous assure qu'on contrôle l'utilisation et qu'on la rend la plus adéquate possible, qu'on a des mécanismes de contrôle des coûts et que l'ensemble du système est géré avec des avis qui sont donnés par un comité de concertation. Et, à cela, on a rajouté, pour la prochaine année et demie, une autre opération plus ponctuelle sur laquelle aussi je donnerai de l'information plus complète au cours des prochains jours, qui est un groupe d'experts, de chercheurs qui ont répondu à un appel d'offres qu'on a fait récemment et qui commencent à travailler ce mois-ci ou le mois prochain pour pouvoir suivre de façon beaucoup plus microscopique, si vous voulez, beaucoup plus sur le terrain, la façon dont évolue notre programme, spécialement en regard des personnes qui sont à plus faibles revenus et des personnes âgées qui, parmi ceux de notre société, ont le plus besoin d'utiliser des médicaments, de sorte qu'on puisse s'assurer, au-delà d'une utilisation adéquate, au-delà d'un bon contrôle des coûts, que les effets de l'utilisation du médicament, qui est permise par notre régime, sont des effets voulus et bénéfiques et qu'on puisse aller chercher de façon beaucoup plus pointue, par une recherche évaluative sur le terrain, une évaluation des résultats, en termes de santé pour les personnes, qui sont obtenus grâce à notre programme d'assurance-médicaments.

Alors, je pense qu'avec l'ensemble de ces mesures, avec l'ajustement additionnel que nous y apportons aujourd'hui, on a vraiment l'assurance, là aussi, d'avoir un système qu'on peut dire, sans chauvinisme, M. le Président, un des mieux équilibrés, des plus complets, je pense, de ce qu'on peut retrouver au Canada, d'avoir une façon de l'administrer et de le gérer qui va nous permettre d'apprendre constamment et d'améliorer, comme on l'a fait au cours des derniers mois, ce système. Un système encore une fois qui est établi, en plus d'avoir montré qu'il est très adaptable, qu'il peut être adaptable rapidement et de façon souple et flexible, qui est un système qui a corrigé une situation d'iniquité dans notre société. Je sais bien que des gens qui, avant, ne payaient rien pour leurs médicaments et à qui on demande une contribution maintenant ont trouvé ça peut-être difficile au début. Plus j'entends de commentaires, plus je pense que les gens ont compris que la contribution qu'on leur demande permet à leur voisin qui, souvent, est une personne de 63 ans, qui n'avait aucune couverture et qui payait tous ses médicaments, même si ça pouvait coûter quelques milliers de dollars par année, alors que la personne qui avait 65 ans, elle, ne payait rien pour son médicament ou à peu près rien... Ça a corrigé l'iniquité entre des gens, 1 400 000 personnes, qui sont les nouveaux bénéficiaires de ce programme, qui n'avaient aucune couverture, qui pouvaient vraiment être mis en péril.

(11 h 50)

On avait beaucoup d'exemples de gens qui ont dû quitter un emploi parce qu'elles n'étaient pas capables de faire face au coût des médicaments pour, comme on dit, se laisser glisser et demander la protection de la sécurité du revenu, parce que, étant prestataire de la sécurité du revenu, là, les médicaments étaient gratuits. Alors, c'était vraiment le jour et la nuit de différence entre des gens qui ne pouvaient avoir que 1 000 $ ou 2 000 $ de différence de revenus par année. Même si on n'a pas encore là un système que je qualifierais de parfait, on a un système qui est beaucoup plus équitable et qui couvre toute la population du Québec.

Les prochaines étapes, j'espère qu'on pourra les faire dans les meilleurs délais, M. le Président. On a un système qui a montré qu'il peut se bonifier. Et, à mesure qu'on aura plus d'argent qu'on peut injecter dans notre système de santé, dans la mesure, par exemple, où une promesse électorale faite par le Parti libéral, qui est maintenant le gouvernement à Ottawa, à l'effet de penser à un régime d'assurance-médicaments, si le gouvernement fédéral voulait vraiment aller dans ce sens-là... Nous, on a déjà notre régime qui ne demande qu'à être bonifié à mesure qu'on pourra y investir plus. Alors, on n'aura pas besoin d'attendre qu'on développe un système pancanadien avec des normes dites nationales, qui pourrait être un système lourd et complexe dans l'ensemble du Canada. Nous, on a maintenant un système. On a démontré son efficacité, on a démontré qu'on pouvait l'améliorer constamment. Alors, dès qu'Ottawa nous remettra notre part qui nous revient de ce qui serait un programme d'assurance-médicaments, très rapidement, on pourra compléter notre programme et le rendre encore plus généreux, si vous voulez, pour l'ensemble des citoyens.

Alors, j'ai confiance, M. le Président, que cette modification qu'on propose est d'ailleurs, aussi, en plus de la conclusion des analyses plus techniques qu'on a faites, une réponse qui va exactement dans le sens de ce que graduellement tous les groupes nous ont demandé, y compris l'opposition qui s'est faite le porte-parole de différents groupes de personnes qui avaient une difficulté pour s'assurer de la disponibilité du médicament. Et même si, pendant ce temps-là, on s'assurait, avec les pharmaciens travaillant avec la Régie, avec les CLSC, que les gens n'étaient pas privés de leurs médicaments, on a pu reconnaître que la suggestion qui a été faite venait valider, était confirmée aussi par les études techniques et qu'avec une mensualisation – c'est le changement qu'on fait – du plafond, selon leurs revenus les gens auront à débourser au maximum 62 $ ou 41 $ ou que 16 $ par mois pour avoir accès à tous les médicaments dont ils ont besoin. M. le Président, je souhaite que, dans les prochaines heures et les prochains jours, on puisse en arriver à adopter cette loi qui va être, je pense, une très bonne nouvelle pour l'ensemble de la population du Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais céder la parole à M. le leader de l'opposition. M. le leader.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Merci, M. le Président. Le ministre avait raison de le souligner, il ne s'agit pas d'un projet de loi qui est extrêmement compliqué ou complexe, il ne comprend que deux articles, un qui modifie la loi et l'autre qui prévoit l'entrée en vigueur de la loi pour le 1er juillet 1997. Les notes explicatives sont relativement limpides. Ce projet de loi modifie le régime général d'assurance-médicaments afin de prévoir, à l'égard des personnes dont la Régie de l'assurance-maladie du Québec assume la couverture, que les franchises et la contribution maximale exigible de ces personnes seront désormais réparties sur une base mensuelle plutôt que trimestrielle.

Il avait donc raison, M. le Président, d'insister que nous devons retourner en arrière et s'interroger sur la nature même du projet d'assurance-médicaments. Le ministre avait également raison de souligner que c'est à la suggestion de l'opposition. Le 23 avril 1996, vous vous en souviendrez, M. le Président, c'est le député de Viau qui s'est levé en cette Chambre et qui a demandé qu'une telle modification soit apportée. Mais, ça ne change en rien, M. le Président – et j'espère que les députés de l'autre côté qui font encore du bureau de comté pourront en témoigner – à ce que constitue l'assurance-médicaments au Québec, particulièrement pour les personnes âgées et pour les personnes les plus démunies. Ça ne change en rien à l'approche du ministre de la Santé quant à la façon d'opprimer le système de santé au Québec.

M. le Président, tout le monde en convient, cette année, le gouvernement du Québec diminue ses dépenses de 0,6 %. Le ministre de la Santé, lui, est fier de dire qu'il a fait cinq fois plus en santé, dans les coupures, que tous les autres ministères ou la moyenne des autres ministères du gouvernement. Il est fier de ça, comme ministre de la Santé, de s'attaquer de cette façon-là au système de santé. Il est aussi fier, M. le Président, d'aller fouiller dans la poche des plus démunis. Il a tenté de le cacher le plus longtemps possible. Vous vous en souviendrez, de ses discours, au début: il ne s'agissait pas d'une taxe; il ne s'agissait pas de renflouer les coffres du gouvernement à partir de la poche de ceux et de celles qui sont des personnes âgées ou qui sont des bénéficiaires de l'aide sociale. Il nous a prêché ça pendant je ne sais pas combien de temps.

Mais finalement, et vous auriez dû être là, M. le Président – je sais que vous étiez à vaquer à d'autres occupations – en commission parlementaire, le 24 avril 1997, quand le président de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, M. André Dicaire, a finalement craché le morceau, le ministre était furieux. On lui a posé une simple question. On lui a demandé: Combien ça coûte de plus aux 880 000 personnes âgées du Québec, ce régime d'assurance-médicaments? Les gens de 65 ans et plus, combien que ça leur coûte de plus? Je vais citer le chiffre, ce n'est pas le mien, M. le Président, il provient de la bouche du président de la Régie de l'assurance-maladie: 253 000 000 $, sur une base annuelle, de plus.

On voit, là, tout le brouhaha que cause la demande de compressions budgétaires, au niveau des municipalités, de 500 000 000 $. Là, on a attaqué les personnes âgées pour 253 000 000 $, puis il n'y a personne de l'autre côté qui s'est levé pour tenter d'expliquer au ministre que, parmi les personnes âgées, il y en a beaucoup, c'est la grande majorité, qui vivent sous le seuil de la pauvreté. Pas un seul député péquiste. Au contraire, ils ont tous et toutes voté et applaudi cette nouvelle taxe de 253 000 000 $ sur les personnes âgées, M. le Président.

Pendant qu'il était à la table à témoigner, parce qu'on n'obtenait pas ces réponses-là du ministre, on a également demandé au président de la Régie de l'assurance-maladie combien on allait puiser dans la poche des plus démunis de la société au Québec, les quelque 800 000 personnes qui vivent des prestations de l'aide sociale. Et on sait comment c'est calculé, là. On calcule le minimum requis pour se loger, pour se nourrir puis pour s'habiller. On n'avait pas calculé, dans leur barème, une nouvelle taxe de 37 000 000 $. De l'autre côté, pas un seul député péquiste s'est levé pour dire: Ça n'a pas de bon sens d'aller chercher, dans la poche des gens qui n'en ont pas, 37 000 000 $. Ils ont même tous voté en faveur du projet de loi présenté par le ministre.

Ça, ça veut dire, grosso modo, M. le Président, 300 000 000 $ de nouvelles taxes sur le dos des plus démunis au Québec. On verra tantôt, M. le Président, comment ça a été interprété par les divers observateurs et quelles sont les conséquences aujourd'hui, chez ces gens-là qui sont les plus démunis, de cette nouvelle taxe du gouvernement du Québec: 253 000 000 $ pour les 880 000 personnes âgées, 37 000 000 $ pour les 800 000 bénéficiaires de l'aide sociale. Est-ce qu'il s'agit de quelque chose qui est bon pour la santé des Québécois ou bon pour la santé de ceux qui aiment ça, taxer?

M. le Président, Jean-Jacques Samson, après en avoir pris connaissance – c'est un éditorialiste bien connu au journal Le Soleil – ne nous parlait pas d'un remède pour les gens qui ont besoin de remède, il nous parlait d'un remède pour les finances publiques: «Encore une fois, le ministre de la Santé s'est comporté comme un ministre du Revenu. Il s'est fait l'exécuteur des basses oeuvres du ministre des Finances sans plaider pour les gens qui comptaient sur lui pour plaider.» Ces gens-là s'attendaient à avoir un ministre de la Santé qui soit assez informé des besoins des personnes âgées. D'ailleurs, ils les a traitées de riches, les personnes âgées. Que les riches paient! Pour lui, les personnes âgées, ce sont des gens riches. Que les riches paient! On va fouiller dans la poche des 800 000 assistés sociaux. M. le Président, que le ministre de la Santé ait abandonné ces clientèles qui sont les plus vulnérables en dit long sur la compréhension qu'il a du rôle d'un ministre de la Santé qui est responsable de la santé de tous les Québécois et de toutes les Québécoises.

Le Soleil n'était pas isolé dans ses critiques de la taxe sur les médicaments qu'a annoncée le ministre de la Santé. Le journal La Presse titrait Projet Rochon – projet ministre de la Santé – des iniquités subsistent : «Le ministre de la Santé n'a pas répondu aux craintes réelles d'une explosion des coûts du régime à moyen terme.»

(12 heures)

Agnès Gruda, dans La Presse , parlant du ministre de la Santé, «le maître des illusions». Ce n'est pas un démagogique député de l'opposition qui vous parle, c'est une éditorialiste réputée du journal La Presse qui traite le ministre de la Santé de «maître des illusions». Je cite brièvement, M. le Président, je sais que vous vous intéressez à ce sujet: «Le gouvernement courait deux lièvres à la fois: d'une part, il voulait s'assurer que tous les Québécois bénéficient d'un accès égal aux médicaments et, de l'autre, il voulait alléger sa facture. Là où ce deuxième objectif l'a emporté sur le premier, on a eu de mauvaises surprises. Et là où ce deuxième objectif l'a emporté sur le premier, c'est quand ça s'est attaqué aux 880 000 personnes âgées et aux 800 000 bénéficiaires de l'aide sociale en tentant d'aller sournoisement puiser dans leurs poches quelque 300 000 000 $.»

M. le Président, Le Soleil , La Presse , The Gazette ... The Gazette titrait, M. le Président, en éditorial: Drug plan: just another tax . Que ça soit en français ou en anglais, M. le ministre, votre projet a été bien compris par l'ensemble des observateurs. Il ne s'agissait pas d'instaurer un régime d'assurance-médicaments. Il s'agissait d'aller chercher 300 000 000 $ de taxe additionnelle chez les personnes âgées et chez les prestataires de l'aide sociale.

Après Le Soleil , après La Presse , ou en même temps, après ou en même temps que The Gazette , M. le Président, le journal Le Devoir , sous la plume du doyen des éditorialistes: Pilule encore indigeste . On parlait de ce dont vient de se vanter le ministre de la Santé: «Le projet de loi n° 33 reste une taxe déguisée en mesure sociale.» Et, de l'autre côté, M. le Président, on a applaudi à cette nouvelle taxe de 300 000 000 $ pour les personnes de 65 ans et plus et pour les personnes qui sont les plus démunies de la société, les prestataires de la sécurité du revenu.

Michel David, dans Le Soleil , lui, a titré, à un moment donné, en parlant de l'ensemble de la législation: L'enfirouâpeur , M. le Président. Je sais que c'est un article que vous avez lu très attentivement et dont vous vous souvenez sans doute de la conclusion. Je ne vous demanderai pas à ce moment-ci de la réciter, je vais strictement vous en lire un bref extrait: «Une taxe est une taxe, comme un chat est un chat. De toute façon, les personnes âgées et les assistés sociaux vont payer.»

M. le Président, cette taxe s'inscrit dans un contexte qui est particulièrement difficile. Le Québec traverse, à cause de l'instabilité politique nourrie par ce gouvernement, une période extrêmement difficile sur le plan économique. Depuis l'assermentation de l'actuel premier ministre, qui a succédé à Jacques Parizeau il y a un peu plus d'un an, il y a seulement 3 % des emplois créés au Canada qui l'ont été au Québec. On a 25 % ou on compte 25 % de la population du Canada et, depuis que l'actuel premier ministre a été assermenté, on n'a eu ou on n'a reçu que 3 % des emplois qui ont été créés dans le pays. Il y a quelque chose qui ne va pas.

Mais, si on est bon dernier en ce qu'il est convenu d'appeler la création d'emplois, on est bon premier en ce qu'il est convenu d'appeler la pauvreté. Le rapport du Conseil national du bien-être social, le dernier déposé: «Québec a le taux de pauvreté le plus élevé au pays.» Est-ce que le ministre de la Santé a pris connaissance de ce rapport? Est-ce que, dans l'élaboration de sa taxe médicaments, il a fait des efforts pour exclure du paiement ceux et celles qui n'ont pas les moyens de payer? Les personnes âgées, les deux tiers sous le seuil de la pauvreté, qui doivent choisir entre se nourrir ou s'acheter des médicaments, les personnes prestataires de l'aide sociale qui doivent effectuer le même choix, est-ce que le ministre de la Santé s'est fait le porte-parole ou le porte-voix de ces gens?

Est-ce que les députés ministériels qui ont applaudi cette taxe de 300 000 000 $, M. le Président, se sont fait les porte-voix de ceux et celles qui ont ces choix difficiles à faire aujourd'hui à cause de cette nouvelle taxe ou si, comme leur ministre ou à l'image du ministre, ils ne se sont pas tout simplement contentés d'applaudir 253 000 000 $ de taxe additionnelle pour les personnes âgées et 37 000 000 $ de taxe additionnelle pour les quelque 800 000 prestataires de l'aide sociale?

M. le Président, le ministre, quand il nous présente ce projet de loi, est-ce qu'il a considéré en même temps les adoucissements qui sont nécessaires? Parce que ça fait mal à ces gens-là; ça fait mal aux personnes âgées, ça fait mal aux prestataires de l'aide sociale. Là, moi, je vois le ministre qui va dire: C'est encore le député qui exagère. M. le Président, c'est le titre d'un éditorial dans le journal Le Devoir sous la plume de Jean-Robert Sansfaçon: Ça fait mal . «Le malheur avec le gouvernement du Québec, c'est qu'entre deux budgets bien des surprises nous attendent et risquent de coûter cher. L'addition des compressions à l'aide sociale devient intolérable. C'est plutôt l'addition de toutes ces compressions et son effet désastreux sur la vie quotidienne des familles bien réelles, en chair et en os et en misère, qui devient totalement intolérable.»

Est-ce que le ministre de la Santé a fait des représentations auprès du Conseil des ministres pour épargner les personnes âgées, pour épargner les prestataires de l'aide sociale? Est-ce que les députés péquistes de l'autre côté se sont faits les porte-voix des gens qui sont les plus démunis dans la société ou s'ils se sont faits les porte-voix du ministre des Finances et de son adjoint le ministre de la Santé qui avaient comme mission d'aller chercher 253 000 000 $ dans la poche des personnes de 65 ans et plus et qui avaient pour mission d'aller chercher 37 000 000 $ dans la poche des assistés sociaux?

M. le Président, les gens demandent une révision du régime, oui, pour étaler sur 12 mois mais également pour faire en sorte que ceux et celles qui n'ont pas les moyens ne soient pas les premiers taxés. Comment peut-on se prétendre social-démocrate au Québec aujourd'hui et accepter, proposer, voter une taxe de 253 000 000 $ qu'on applique aux personnes de 65 ans et plus quand on sait que la vaste majorité vivent sous le seuil de la pauvreté? Comment peut-on se prétendre, de l'autre côté, social-démocrate quand on vote une taxe de 37 000 000 $ qu'on va chercher chez les gens à qui on a sévèrement compté: En avaient-ils assez pour avoir une chemise sur le dos, un modeste panier d'épicerie puis un toit sur la tête? On a voté ça, puis on a applaudi ça de l'autre côté. Puis le ministre, lui, au lieu de jouer son rôle de défenseur de ces gens auprès du Conseil des ministres, s'est fait plutôt l'allié du ministre des Finances qui n'avait qu'un seul objectif: aller encore fouiller dans la poche des contribuables.

Est-ce qu'il y a de l'espoir, M. le Président? Moi, j'aimerais le croire, mais je suis obligé de me référer à un autre engagement formel du ministre de la Santé, qui, encore une fois, n'a pas été suivi, qui ne profite pas de l'occasion qui lui est présentée cette fois-ci pour inclure dans son projet de loi les modalités nécessaires pour épargner les plus pauvres et les plus démunis.

Le 9 avril dernier, M. le Président, et vous vous en souviendrez, c'est un article de La Presse canadienne , un journaliste chevronné également, Pierre April, écrivait: Assurance-médicaments: Rochon promet de venir au secours des pauvres . Est-ce que la taxe est diminuée ou est-ce que le projet de loi ne fait en sorte que, au lieu de payer aux trois mois, on paie une fois par mois mais c'est le même montant de taxe? Est-ce que c'est ça que le ministre nous annonce aujourd'hui? Est-ce que c'est ça vraiment, venir en aide de façon concrète et de façon réelle aux plus démunis et aux personnes qui en ont besoin?

M. le Président, je ne sais pas si c'est par coïncidence, par accident ou des fois la divine providence qui tente à la dernière minute d'infléchir un ministre puis une formation politique qui oublient leur rôle de défenseurs des plus démunis, hier, à l'Assemblée nationale, j'ai eu le privilège de déposer une pétition de quelque 7 000 personnes, qui se lisait comme suit... Et ça, c'était hier, et on discute de ce projet de loi aujourd'hui. Moi, je ne sais pas si le ministre a pris la peine de prendre connaissance de la pétition. Je ne sais pas si le ministre s'est intéressé aux personnes qui l'ont signée. À voir le projet de loi non amendé, à moins qu'on nous réserve des surprises, il nous apparaît clair que le ministre a tout simplement tourné la tête; il ne veut pas voir cette misère. Tout va bien dans son système de santé, il n'y a pas de pauvreté au Québec. Le ministre se porte garant de tout.

(12 h 10)

La pétition, M. le Président, vous vous en souviendrez, se lisait comme suit: «Considérant que les politiques actuelles concernant le coût des médicaments pour ces catégories de personne nous apparaissent irresponsables, inhumaines et financièrement contre-productives...», M. le Président, irresponsables, inhumaines et, qui plus est, financièrement contre-productives, et on va voir, tantôt, pourquoi. Ça va coûter plus cher que ce qu'il tente de récupérer dans la poche des plus démunis. Parce que, quand on s'attaque aux plus démunis, parfois, on crée des coûts sociaux et économiques plus importants que l'argent qu'on tente de siphonner dans leurs poches.

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale, d'intervenir en faveur du rétablissement du plan précédent d'assurance-médicaments, avec des frais de 2 $ par prescription – maximum de 100 $ annuellement...» De l'autre côté de la Chambre, avant de vous lever sur ce projet de loi, je vous invite, M. le Président, et je les invite par votre entremise, à retourner lire les discours qui ont été prononcés en cette Chambre par des ténors péquistes, au moment où le 2 $ a été imposé. Je vous demande de relire attentivement ce que vous avez dit, à ce moment-là. Et, aujourd'hui, les plus démunis nous demandent de revenir à ce 2 $. Et, vous, à l'époque, quand vous étiez dans l'opposition, vous trouviez ça inhumain, irresponsable et contre-productif, et vous avez applaudi à 300 000 000 $ de nouvelle taxe pour les personnes âgées et pour les bénéficiaires de l'aide sociale.

«Pour les personnes âgées et les médicaments gratuits pour les personnes souffrant de maladies mentales sur l'aide sociale.» On reparlera tantôt de ces gens-là, M. le Président. Et la pétition a été déposée. Le dépôt de la pétition était coordonné avec une conférence de presse tenue par les médecins. Des docteurs! Pas des docteurs en titre, ministériels, mais des vrais docteurs, des docteurs qui, dans les cliniques, soignent les gens quotidiennement et qui ont fait circuler cette pétition parce qu'ils ont été témoins. Ils ont été témoins d'événements qui étaient humainement insupportables, M. le Président. C'est les vrais docteurs, pas les docteurs ministres, là. Les docteurs qui ont à travailler dans des cliniques, dans des coins les plus défavorisés de la province de Québec, eux, ils ont encore en mémoire le serment qu'ils ont prêté, parce que ce serment-là leur est rappelé quotidiennement par les gens qui les visitent. Il y en a d'autres qui oublient facilement ce serment-là qu'ils ont prêté lorsqu'ils sont devenus médecins.

Information de base sur le régime d'assurance-médicaments , M. le Président, je suis prêt à croire que le ministre en a pris connaissance, de ce document-là, mais juste au cas où – parce qu'on sait comment il est occupé – on va en faire une lecture ensemble. Puis, s'il n'en avait pas pris connaissance avant, c'est encore le temps d'apporter des modifications à son projet de loi pour tenir compte de la volonté exprimée par des patients puis des vrais docteurs qui se sont donné la peine d'alerter les députés de l'Assemblée nationale de quelque formation politique que ce soit à des drames qui sont vécus et à des problèmes réels qui sont causés par la taxe sur les médicaments, M. le Président.

«Le 1er août 1996, le gouvernement du Québec mettait fin à un programme de gratuité – 1er août 1996, vous allez vous en souvenir, là – des médicaments qui aidait 1 600 000 de personnes âgées et bénéficiaires de l'aide sociale. Le gouvernement du premier ministre Bouchard votait la loi n° 36 à 5 heures a.m., le 19 juin 1996.» En pleine nuit, alors que tout le monde dormait au Québec, 5 heures du matin – sauf quelques travailleurs de nuit puis des gens dans les hôpitaux, qui n'ont pas le temps de regarder – on votait cette loi-là. Quand on veut aller fouiller dans la poche des plus démunis, M. le Président, je conviens avec le ministre que 5 heures du matin, c'est une heure où ça peut passer plus inaperçu qu'en plein milieu de la journée.

«Les objectifs de la loi n° 33 étaient de réduire les coûts du plan d'assurance-médicaments en vigueur, estimés l'an passé à 800 000 000 $, et d'inclure dans le nouveau régime les Québécois non assurés. Cependant, ce plan a eu pour conséquence de mettre fin à la gratuité des médicaments pour 1 600 000 personnes âgées et bénéficiaires de l'aide sociale. Jusqu'à l'an passé, les Québécois âgés de 65 ans et plus payaient 2 $ par prescription, jusqu'à la limite de 100 $ par année.» Maintenant, ils paient bien davantage, grâce à la taxe qu'ils ont votée, de l'autre côté de la Chambre, à 5 heures du matin, l'an passé.

«Les personnes âgées recevant une pension gouvernementale de base de 10 449 $ doivent débourser jusqu'à 200 $ par année.» Imaginez-vous, une personne âgée à 10 000 $ par année, une taxe additionnelle de 200 $ par année, et vous êtes fiers d'avoir voté une telle taxe, de l'autre côté.

«Si le revenu se situe entre 10 000 $ et 16 000 $, le coût grimpe jusqu'à la limite de 675 $ par année.» Je ne sais pas s'il y en a qui comprennent, M. le Président – je sais que, vous, vous le comprenez – de l'autre côté, ce que ça veut dire, pour une personne qui gagne entre 10 000 $ et 16 000 $ par année, une taxe additionnelle de 675 $ par année. Ça, c'est pour les personnes âgées et les bénéficiaires de l'aide sociale.

«Si le revenu dépasse 16 000 $, le coût peut atteindre 925 $. Le calcul est basé sur la formule d'une franchise à laquelle s'ajoute 25 % du coût du médicament jusqu'à un maximum qui dépend du revenu de la personne. Depuis que le nouveau régime est appliqué, plusieurs études confirment ce que d'autres recherches ont déjà mis en évidence. L'augmentation du coût des médicaments s'accompagne d'une réduction de l'usage des médicaments par certains groupes, en particulier les personnes âgées, les patients psychiatriques et les démunis.» Vous avez vu là où il y a diminution, M. le Président? Les personnes âgées, les personnes qui ont des troubles psychiatriques et les plus démunis de la société. C'est ces gens-là qu'on a frappés.

Un rapport publié dans la Gazette du 9 décembre 1996 rapportait que, chez 110 personnes ayant fait l'objet d'un sondage, une sur trois arrêtait de prendre sa médication, 33 % des personnes dans ces groupes-là ont arrêté de prendre leur médication – et ils le doivent au ministre de la Santé – 40 % avaient des difficultés à payer leur loyer et à faire leur marché – 40 %, M. le Président – et une sur 10 était hospitalisée – pas une sur 100 000, une sur 10 était hospitalisée – parce qu'elle avait cessé de prendre ses médicaments ou qu'elle ne les prenait pas comme prescrits. Belle économie, quand on sait que le coût de l'hospitalisation est d'un minimum de 500 $ par jour! Une sur 10 parmi les plus démunies a été hospitalisée parce que les gens, de l'autre côté, se sont attaqués aux plus pauvres et aux plus démunis.

La Presse rapportait, le 22 mai 1997, que 800 plaintes avaient été signalées au Protecteur du citoyen. On sait que ce n'est pas tout le monde qui se plaint au Protecteur du citoyen. Quand on a 800 plaintes au Protecteur du citoyen, on sait que c'est la tête de l'iceberg, on sait combien il y en a en dessous qui se plaignent. Le Protecteur du citoyen a dénoncé le plan actuel. M. Guy MacDonald décrivait la situation présente comme un état de crise. Mais on se ferme les yeux de l'autre côté. On ne veut pas voir la misère humaine qu'on a créée.

Jeunesse au soleil, Sun Youth, une organisation très crédible qui s'occupe des plus pauvres et des plus démunis – parce que le gouvernement le fait de moins en moins, quand il ne s'y attaque pas carrément – rapportait pour sa part un sondage où, parmi 150 personnes, 47 % avaient dû réduire leur médication. Ça, c'est proche de une sur deux chez les plus démunis. J'ai de la difficulté à comprendre que le ministre ne profite pas du projet de loi pour corriger ça et que, de l'autre côté, on est fiers de ces statistiques. 67 % avaient dû réduire leur consommation d'aliments.

M. le Président, les vrais docteurs, pas ceux qui ont des titres de ministre, mais ceux qui s'occupent des patients, vous diront que, quand vous ne vous nourrissez pas comme il faut, vous portez atteinte à votre santé. 67 % avaient dû réduire leur consommation d'aliments. 40 % avaient dû cesser les médicaments complètement. Beau résultat! Aujourd'hui, on est à l'Assemblée nationale et on se vante d'être allé chercher 300 000 000 $ chez les personnes âgées et chez les plus démunis. 34 % déclaraient avoir été hospitalisés parce qu'ils ne pouvaient pas acheter leurs médicaments. 34 % hospitalisés, à quel coût? Lorsqu'on parle de mesures contre-productives sur le plan social et sur le plan économique...

(12 h 20)

Une étude publiée dans le New England Journal of Medicine , le 8 septembre 1994, s'est penchée sur une période de temps pendant laquelle l'État du New Hampshire a tenté de limiter les dépenses de médicaments et, par voie législative, imposa une limite de trois médicaments au maximum en 1981. Un plafond de trois médicaments fut également imposé pour les psychotropes. On a alors assisté à une diminution soudaine de l'utilisation des médicaments psychiatriques et à une augmentation simultanée des visites aux centres de santé communautaire et un accroissement important de l'utilisation des services d'urgence et d'hospitalisation partielle.

Est-ce que le ministre avait pris connaissance, avant d'imposer cette taxe de 300 000 000 $ aux personnes âgées et aux bénéficiaires de l'aide sociale, de cette étude? Est-ce que les députés ministériels, qui ont applaudi, à 5 heures du matin, en pleine noirceur, cette nouvelle taxe chez les plus démunis, avaient pris connaissance de cette étude?

L'augmentation estimée des coûts de services de santé mentale dépassait de 17 fois les épargnes sur les coûts des médicaments; 17 fois plus cher que ça a coûté que ce que ça a rapporté. Est-ce que vous êtes encore fiers d'avoir voté, à 5 heures du matin, une taxe de 300 000 000 $? Ces chiffres n'incluent pas les coûts afférents, comme les dépenses administratives, les médicaments distribués dans les centres de santé mentale, les coûts pour le système de justice, les coûts familiaux et les autres coûts intangibles comme la souffrance et les suicides. Est-ce que vous aviez pris connaissance de cette expérience et de cette étude, qui a été publiée, avant d'applaudir et de voter, dans la nuit, à 5 heures du matin, une taxe de 300 000 000 $ pour les personnes âgées et pour les plus démunis de la société?

Il est important de noter que, 11 mois après la contestation par les services d'aide légale du New Hampshire, l'État est revenu à la modalité de paiement de 1 $ par prescription. L'utilisation de médicaments et de services de santé mentale revinrent, par la suite, à leur niveau de base précédent. Comment corriger la situation? Revenir à un système qui fonctionnait et qui avait fait ses preuves quant aux personnes qui sont les plus démunies.

Un autre article... Mais là, si vous n'aviez pas lu le premier, peut-être que vous aviez pris connaissance – M. le Président, vous, je n'en doute pas, vous l'aviez fait, mais les autres membres de l'Assemblée – au moins du deuxième article. Un autre article publié dans le New England Journal of Medicine , le 10 octobre 1991, évalua la période pendant laquelle le New Hampshire a tenté de réduire les coûts des médicaments et imposa un maximum de trois médicaments en 1981. Ils notèrent une diminution de 35 % dans l'utilisation des médicaments essentiels chez la personne âgée – pas les médicaments non essentiels, diminution de 35 % des médicaments essentiels chez les personnes âgées – causée par une taxe du type de celle que vous avez votée, de l'autre côté, en pleine nuit, à 5 heures du matin, pour fouiller dans les poches des personnes âgées et des plus démunis.

On assista également à un accroissement de deux fois du taux d'admission dans les centres d'accueil. Doubler les admissions, ça ne coûte pas cher! Des économies de bouts de chandelles, des taxes chez les gens qui n'ont pas les moyens. L'étude conclut que limiter un remboursement pour les médicaments essentiels pousse les patients vulnérables, à faibles revenus, vers un risque accru d'institutionnalisation dans les résidences pour personnes âgées et augmente les coûts de la santé. Bilan net: on a fait mal aux pauvres puis ça coûte plus cher aux contribuables. Puis, quand on est péquiste, M. le Président, à 5 heures du matin, on applaudit des mesures comme celle-là.

Une étude menée à – j'imagine que, s'ils n'avaient pas pris connaissance des deux premières, ils ont peut-être pris connaissance de la troisième étude – l'Université de Caroline du Sud, en 1977, a montré une réduction de l'utilisation des médicaments importants, comme ceux pour le coeur et pour les troubles psychiatriques, au moment de l'introduction d'une participation de 50 % du patient dans le paiement des médicaments. Aucune réduction ne fut observée dans la consommation d'analgésiques et de sédatifs.

La conclusion était que, lorsque le patient doit prendre des décisions sur le choix des médicaments qu'il peut se payer, il va choisir ceux qui soulagent la douleur mais pas les médicaments d'importance pour sa santé. On condamne les gens pauvres, les personnes âgées à masquer le mal par voie de médication plutôt qu'à guérir le mal par voie de médication. Ceci provoquerait une détérioration de l'état de santé de la population, une augmentation de la consommation des services médicaux, comme celui de l'hôpital, et une augmentation du nombre de décès. Ça coûte plus cher puis il y a plus de monde qui meurt. On est content, de l'autre côté, et on continue d'applaudir le ministre de la Santé.

Une étude conduite par Linge, en 1987 – si vous n'aviez pas pris connaissance des autres, au moins celle-là – a montré qu'il n'y avait pas de différence significative en coût total d'une population de patients âgés en Pennsylvanie, où il n'y avait pas de programme-médicaments, et au New Jersey, où il y avait un programme d'assurance-médicaments. Ce fait s'expliquerait par la réduction des soins de santé mentale hospitalière dans le groupe où le programme d'accès aux médicaments était gratuit.

La coalition des médecins pour la justice sociale a posté 15 000 pétitions à 7 500 médecins de famille à travers le Québec. Cette pétition propose que le gouvernement revienne au plan précédent d'assurance-médicaments pour les personnes âgées et les malades psychiatriques. M. le Président, est-ce qu'on peut aujourd'hui prendre connaissance de cette pétition, des documents qui l'accompagnaient et avoir un peu de compassion pour les gens qui n'ont pas les moyens de payer une taxe de 300 000 000 $? Ce sont les personnes de 65 ans et plus que nous représentons à l'Assemblée nationale, pour la plupart, et les bénéficiaires de l'aide sociale, M. le Président, qui n'ont vraiment pas ces besoins.

Pour ceux et celles qui n'auraient pas pris connaissance des études ou de la pétition, au moins, M. le Président – et je sais que vous l'avez fait – lire les journaux le matin. Ce n'est pas tellement compliqué là, quand on est député de lire les journaux le matin pour tenter de se faire une tête, là, plutôt que de voter automatiquement comme le ministre ou comme le ministre des Finances, M. le Président.

Ce matin, Le Soleil : Des médecins dénoncent l'assurance-médicaments . Moi, là, je viens d'entendre le docteur ministre de la Santé dire que c'était bon. Puis ce matin, en lisant les journaux, les vrais docteurs, ceux et celles qui soignent les patients puis qui se rappellent de leur serment lorsqu'ils ont atteint cette profession, disent: On dénonce l'assurance-médicaments puis on dénonce des cas où c'est invivable pour les citoyens et les citoyennes.

En anglais, M. le Président, la même chose, ce matin. En français comme en anglais. Vous avez beau changer de langue, la misère est là quand même. «Drug plan is hurting those who need it the most, says a doctors' coalition.» Ça fait mal à ceux qui en ont le plus besoin. Ici, on légifère et on oublie d'apporter le remède que ça prendrait, le remède législatif pour ces gens. On préfère continuer, de l'autre côté, à appliquer, M. le Président, le remède qui fait du bien au ministre de la Santé et au ministre des Finances: fouiller dans la poche des plus démunis, fouiller dans la poche des personnes âgées au Québec.

M. le Président, on l'a vu, le ministre de la Santé se fait une gloire d'avoir coupé cinq fois plus dans le ministère de la Santé que l'ensemble des autres ministères du gouvernement. Maintenant, il va se faire une gloire d'être allé chercher chez les plus démunis la taxe la plus pernicieuse et de l'avoir fait à 5 heures du matin. Puis aujourd'hui il dit: Vous devriez me remercier, parce que, là, cette taxe-là, au lieu de la payer quatre fois par année, vous allez me la payer 12 fois par année, mais ça va être la même.

M. le Président, moi, j'aurais compris du ministre qu'il profite de l'occasion pour prendre connaissance de ces études, pour prendre connaissance de ces pétitions puis dire: Oui, on va étaler les paiements pour tout le monde, mais on va avoir des mesures particulières et spéciales pour les personnes âgées qui n'en ont pas les moyens, là. On le sait, notre système a des lacunes graves et importantes puis on va les corriger.

On va croire, si on est député de l'autre côté ou de ce côté-ci, les vrais docteurs, ceux qui travaillent dans les cliniques puis qui reçoivent les patients, plutôt que le docteur ministre de la Santé. Il me semble que le test de crédibilité n'est pas tellement difficile pour un député qui s'intéresse à sa population et qui veut représenter correctement ses personnes âgées puis ses plus démunis. Puis on va profiter du projet de loi pour dire à notre docteur ministre: Vu qu'on croit les vrais docteurs qui pratiquent, à ce moment-là, bien, on va apporter des correctifs.

Puis, nous, de ce côté-ci, M. le Président, on offre notre collaboration pour que Pierre Bourgault... On ne dira quand même pas, là, que c'est un chroniqueur libéral; c'est un chroniqueur qui est au Journal de Montréal . On connaît ses...

Une voix: ...

(12 h 30)

M. Paradis: Est-ce que c'est l'horloge qui grince, M. le Président? On connaît son sens de l'analyse. M. Bourgault, au mois de décembre dernier, disait de ce gouvernement – puis le plan de régime de la Santé en faisait partie – en parlant du premier ministre: «La fonction semble le dépasser, et il dirige ce qui semble devoir être un des pires gouvernements des 40 dernières années...» Ce n'est pas un démagogue libéral qui vous dit ça, là, c'est Pierre Bourgault, qui écrit régulièrement dans Le Journal de Montréal . «En effet, si le premier ministre sait où il va, il est bien le seul à le savoir. D'autre part, la manière qu'il a de gouverner est proprement suicidaire et pour lui et pour la cause de la souveraineté. Il tire tous azimuts sur tout ce qui bouge, il se fait des ennemis de plus en plus tous les jours et chaque mouvement qu'il fait sent l'improvisation à plein nez. À supposer qu'il sache où il va, il est à peu près certain qu'il ne s'y rendra jamais tant il a l'art de se mettre à dos à peu près tout le monde. En effet, tout se déroule comme si le premier ministre se disait, en se levant le matin: Il me semble qu'on a oublié de frapper sur quelqu'un hier, alors on va s'en occuper aujourd'hui.» Et c'est ce que fait la taxe-médicaments de l'adjoint du ministre des Finances, le docteur ministre de la Santé.

«C'est pourquoi tout le monde est en beau maudit dans tous les dossiers. Un jour, ce sont les municipalités régionales de comté qui écopent, le lendemain, ce sont les étudiants, puis ce sont les agriculteurs, puis les assistés sociaux, puis les personnes âgées, puis les transporteurs scolaires, puis les commissions scolaires. On frappe partout, en environnement, en santé, dans la fonction publique, dans les affaires juridiques. On frappe d'abord les grands groupes pour ensuite s'en prendre à leurs composantes plus petites. On a l'impression que nous sommes en bas, en train de subir des bombardements à répétition.»

Et pour qualifier la façon d'agir, parce qu'il avait été témoin aussi que la loi sur l'assurance ou la taxe-médicaments avait été passée à 5 heures du matin: «Arrogance», «improvisation», «cachotterie», «cavalier», «sournois». M. le Président, ça décrit très, très bien ce que le ministre a proposé à la population.

Maintenant, est-ce qu'on peut, une fois qu'ensemble on a pris connaissance des études, qu'on a pris connaissance des retombées négatives sur le terrain, qu'on a également possiblement à coeur la défense de nos personnes âgées et de nos plus démunis, dire au ministre: Bah! vous voulez qu'on paie votre taxe 12 fois plutôt que quatre fois? Ça répartit les paiements. Hydro-Québec fait ça. Mais ça ne change pas le paiement puis ça ne changera pas la misère.

C'est dans le journal The Gazette qu'une personne qui intervient auprès des gens pauvres s'exprimait comme suit, et je cite en anglais, M. le Président: «"For some people, it will help, but others, it won't", said Yolande Vallières, from Québec city Maison Revivre shelter. "They still have to pay $16.67. When you don't have it, you don't have it. I took people one by one. I sat down and did their budget with them; it is impossible, they cannot do it" – c'est impossible pour les plus démunis, ils ne peuvent pas. For Boisvert, the amendments won't change anything whether we have to pay $50 every three months or $20 each month, starve the first month or starve a little less over three months; there is not much difference".»

M. le Président, ça, c'est quelqu'un qui s'occupe, à Québec, ici même, des plus démunis, à la maison Revivre. Est-ce qu'on peut profiter de l'ouverture qui est faite? Nous, de notre côté, on a accepté que le projet de loi soit discuté même si ça ne faisait pas sept jours; on va accepter d'en discuter en commission parlementaire. Mais est-ce qu'on peut, de l'autre côté, tenter d'infléchir le ministre – parce que, nous, on a tenté et on n'a pas été capables – et lui dire de profiter de l'occasion – puis on pourrait tous s'entendre d'ici la fin de la session – pour ajouter des dispositions pour faire en sorte que les plus démunis soient épargnés, qu'on efface... On efface puis on recommence. On efface la misère qu'on a créée depuis le vote à 5 heures du matin. On efface...

Une voix: ...

M. Paradis: M. le Président, est-ce que c'est encore... M. le Président, est-ce qu'on peut recommencer puis dire: On a commis des erreurs, puis l'objectif n'est pas financier, l'objectif, comme l'a dit le ministre, c'était d'assurer ceux qui ne l'étaient pas avant? Bon, d'accord. Mais est-ce qu'à ce moment-là on va le faire sur le dos des plus démunis en les privant de ce qu'il y a de plus nécessaire? Est-ce qu'on va accepter que ces gens-là reviennent en centre hospitalier puis que ça nous coûte plus cher comme société? Ou est-ce qu'on va s'entêter à dire qu'on a raison, que tous ceux et celles qui critiquent, que les pauvres, c'est parce qu'ils ne savent pas gérer leur budget – je ne sais pas lequel, de l'autre côté, a dit ça – que c'est parce que les médecins qui travaillent dans ces places-là ne sont pas des vrais docteurs, le vrai docteur, c'est le ministre de la Santé, lui, il ne voit pas de patients, ceux qui voient des vrais patients, ce n'est pas des vrais docteurs, que les journalistes font du jaunisme?

Est-ce qu'on va continuer ensemble dans cette façon de faire ou si on ne profitera pas d'une fin de session puis d'un projet de loi qui requiert des consentements à toutes les étapes pour, ensemble, oui, constater que les personnes qui n'étaient pas assurées et qui sont assurées, ça, c'est quelque chose de bien, mais que la personne sur l'aide sociale, elle n'a pas les moyens, puis que la majorité des personnes âgées n'a pas les moyens, puis qu'on revienne en arrière, puis qu'on tente de garder ce qu'il y a de bon puis d'épurer ce qu'il y a de mauvais?

Pour faire ça, M. le Président, il faut s'élever au-dessus de la partisanerie politique. Et j'en fais appel à vous, M. le Président, et aux membres de l'autre côté de la Chambre pour que ce débat répare les drames humains qui ont été causés par quelque chose qui a été inspiré strictement par une mesure fiscale et qui mérite davantage, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le leader de l'opposition. Alors, pas d'autres interventions? Je m'en vais maintenant... Alors, vous n'avez qu'à vous lever, madame, et puis on va vous céder la parole avec plaisir. Mme la députée de Sainte-Marie–Sainte-Anne.

Mme Loiselle: Saint-Henri–Sainte-Anne.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Saint-Henri– Sainte-Anne, excusez.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: C'est ça. Merci, M. le Président. Vous comprendrez que je tenais mordicus à intervenir sur le projet de loi n° 142, projet de loi, M. le Président, qui donne l'impression à la population que le ministre de la Santé vient d'alléger, vient d'adoucir les effets pervers qu'a créés, finalement, l'implantation, l'instauration du régime de l'assurance-médicaments du ministre de la Santé.

Il faut bien se comprendre, il n'en est rien, M. le Président! Avec le projet de loi n° 142, le ministre ne fait finalement, si je peux m'exprimer ainsi, qu'étirer la douleur, qu'étaler sa taxe-médicaments sur une base mensuelle au lieu d'une base trimestrielle. Mais, étant donné, M. le Président, que le projet de loi n° 142 n'inclut, ne comprend aucune diminution de la contribution financière, que les personnes les plus démunies, que les personnes retraitées, âgées, à faibles revenus doivent contribuer à son régime, étant donné qu'il n'y a aucune diminution de cette contribution qu'ils doivent faire, alors ça ne change rien dans le quotidien, même sur une base mensuelle, pour ces personnes-là, parce que le montant qu'ils doivent débourser reste le même. Alors, on ne fait finalement qu'étaler la pauvreté, mais sur une base dite maintenant mensuelle.

M. le Président, quand on parle aux gens, quand on va dans nos comtés, quand on rencontre les gens, les organismes, on se rend compte qu'il y a de plus en plus de Québécois et de Québécoises qui se sentent trompés, qui sentent qu'ils ont été trahis et, je dirais même, voire manipulés au cours des dernières années soit par les députés du Parti québécois, soit par le programme du Parti québécois, soit par les beaux discours, les belles promesses, le beau programme du Parti québécois. M. le Président, nous, on est habitués, ici, à l'Assemblée nationale, depuis deux ans et demi, à ces belles paroles, aux beaux discours mielleux et à ces belles promesses. Là, maintenant, c'est une évidence, dans chaque dossier, on peut constater que le discours ne va aucunement avec les gestes qui sont posés par ce gouvernement.

J'aimerais attirer votre attention, M. le Président, quand je vous parlais des belles paroles et des beaux discours de ce gouvernement, spécifiquement, particulièrement pour les plus démunis en matière de santé, en matière de l'assurance-médicaments. Je vous ramène au programme avec lequel les candidats et les députés élus ministériels dans cette Chambre se sont promenés durant la campagne électorale de 1994, le programme du Parti québécois dans lequel, M. le Président, il est écrit noir sur blanc, au niveau des engagements pris par ce gouvernement pour la santé...

On peut y lire, M. le Président, dans le programme du Parti québécois: «Pour le Parti québécois, l'avenir de notre santé collective ne peut être marqué de listes d'attente – c'est ce qu'on vit actuellement, M. le Président, ça a doublé, même triplé – de ticket modérateur – on parlait ici, dans le programme, M. le Président, du 2 $ que les personnes âgées devaient payer par ordonnance pour obtenir leurs médicaments, il va sans dire, avant l'arrivée de ce gouvernement péquiste – de désassurance – je vous rappelle, M. le Président, que ce même gouvernement, une fois arrivé au pouvoir, a désassuré les soins dentaires et les soins optométriques pour les personnes les plus démunies de notre société, les prestataires de l'aide sociale, et ça continue dans le programme du Parti québécois – de coupures de services et d'abandon des plus vulnérables.»

(12 h 40)

Alors, ce qui suit le petit préambule, c'est la promesse, l'engagement: «Pour le gouvernement du Parti québécois, il importe – M. le Président, là, j'attire votre attention – de réaffirmer les principes fondamentaux de notre système. Ce système doit être universel, accessible – ce qu'il n'est plus, M. le Président, pour les personnes démunies qui doivent faire des choix entre prendre leurs médicaments ou se nourrir convenablement – et son financement doit être public. Le recours au ticket modérateur – toujours dans le programme du Parti québécois, dans son engagement – véritable taxe sur la maladie et la détresse, doit être rejeté – programme du Parti québécois – doit être rejeté», M. le Président.

Et on en remettait durant la campagne électorale. Je vous rappelle, M. le Président, qu'il y avait l'équipe qu'on appelait, durant la campagne électorale, le caucus de la santé. Ça, ce sont les candidats du Parti québécois qui se promenaient au Québec et allaient donner les engagements au niveau de la santé pour leur parti. Le premier engagement du caucus de la santé du PQ, ça s'est fait dans mon comté. Il y avait, à l'époque, le candidat, maintenant député élu de Bourget; il y avait le candidat Rémy Trudel, qui est maintenant ministre des Affaires municipales; il y avait la candidate défaite Diane Lavallée; et le ministre délégué au Revenu, M. Bertrand.

Alors, ces gens-là, quand ils sont venus nous parler de leur engagement sur la santé, nous ont dit, M. le Président, et je rappelle les paroles du ministre des Affaires municipales actuel durant la campagne électorale, qui a bien dit: «Ce régime – en parlant de ce qu'on nous proposait, aux Québécois, durant la campagne – permettra alors au gouvernement péquiste de faire disparaître le ticket modérateur imposé par les libéraux aux personnes âgées du Québec.» M. le Président, j'admets que le candidat à l'époque et maintenant député et ministre des Affaires municipales, quand il a dit que le gouvernement péquiste allait faire disparaître le ticket modérateur de 2 $ pour les personnes âgées, j'admets qu'il n'a pas menti. Parce que c'est vrai, le gouvernement péquiste a fait disparaître le ticket modérateur de 2 $ que les personnes âgées devaient payer pour se procurer leurs médicaments. Il l'a fait disparaître pour faire apparaître la taxe-médicaments, la taxe-médicaments qui fait qu'aujourd'hui il y a des milliers de personnes qui ne peuvent se procurer leurs médicaments parce qu'elles ont une contribution financière beaucoup trop lourde qu'elles ne peuvent pas absorber, parce qu'elles n'ont pas l'argent dans leurs poches pour payer cette contribution.

Je vous donne l'exemple, M. le Président, de la différence entre ce qui se vivait à l'époque, avant l'élection du Parti québécois au pouvoir, et ce que doit vivre un couple âgé. Un couple âgé avec des revenus à peine supérieurs au revenu... supplément du revenu garanti, ce qui veut dire un couple âgé dont on peut dire qu'ils vivent sur la ligne de la pauvreté sinon sous le seuil de la pauvreté. Avec ce qu'on nous propose... avant, je vous le rappelle, 2 $ par personne par ordonnance, avec un maximum de contribution de 100 $; maintenant, avec la taxe-médicaments, pour ce couple âgé, M. le Président, on doit payer dorénavant... chacune des personnes dans le couple doit payer la prime annuelle. On n'en parle pas beaucoup depuis quelque temps, de la prime annuelle. Mais, ça, c'est un montant de 175 $ que chaque personne dans le couple âgé doit payer. À ça s'ajoute, M. le Président, si ces deux personnes-là sont malades et doivent consommer des médicaments... alors, pour ce couple âgé, contribution maximale, incluant la franchise et la coassurance, de 750 $ chacun. Alors, si on additionne le tout, avec la taxe-médicaments du gouvernement péquiste, ce couple âgé qui vit durement, qui essaie finalement de boucler les fins de mois avec ses faibles revenus, doit débourser un montant de 1 850 $ pour pouvoir – pour ces deux personnes âgées – se procurer leurs médicaments.

M. le Président, je suis obligée de vous rappeler, comme l'a fait mon confrère le député de Brome-Missisquoi et porte-parole en santé, vous rappeler, à l'époque, la consternation des députés péquistes de l'opposition quand l'ex-ministre de la Santé, notre collègue Marc-Yvan Côté, avait déposé son projet de loi pour instaurer le 2 $ par ordonnance pour les médicaments pour les personnes âgées.

On sait maintenant que ces déclarations-là, on doit le dire, étaient finalement une désolation mal exprimée, une consternation, on le sait aujourd'hui avec les résultats de ce que fait ce gouvernement péquiste, qui était trompeuse, qui était fausse et qui était pipée. Alors, je vous rappelle...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe du gouvernement, sur une question de règlement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne vient de contrevenir au règlement 35.6°: «Imputer des motifs indignes» aux députés, hein, des motifs. Elle a parlé de tromperie et de faussetés. Alors, M. le Président, j'aimerais qu'elle respecte le règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, Mme la députée, vous comprenez le sens de l'intervention. Alors, il faudrait que j'aille réentendre. Je n'ai pas suivi le détail, si elle parlait de tromperies, et tout, ou si c'est pour prêter de mauvaises intentions. Alors, je pense que ce n'est pas... telle n'est pas son intention. Il ne faut pas que je lui prête de mauvaises intentions non plus. Ce n'était certainement pas l'intention de Mme la députée. Alors, je lui demanderais qu'elle confirme mon interprétation.

Mme Loiselle: M. le Président, en lisant quelques paragraphes des discours qui ont été prononcés par les députés péquistes à l'époque, les gens pourront juger d'eux-mêmes de ce que je voulais avancer tantôt. Alors, je reviens au député, son comté m'échappe, le député Trudel, peut-être que vous pouvez m'aider...

Une voix: Rouyn-Noranda.

Mme Loiselle: ...Rouyn-Noranda, qui, à l'époque, dans l'opposition officielle, était le porte-parole en santé. Lors du dépôt du projet de loi pour instaurer le 2 $ pour les personnes âgées, le député nous disait: «M. le Président, le discours honteux du ministre de la Santé et des Services sociaux ne passera pas comme une lettre à la poste. Nous allons – les députés péquistes de l'époque – au cours des prochaines heures faire la démonstration qu'il s'agit d'un mauvais choix, qu'il s'agit essentiellement d'une mesure de désolidarisation sociale. C'est une attaque quasi inqualifiable, inacceptable à une des caractéristiques les plus fondamentales de notre société québécoise.» Et le député péquiste continuait: «Il s'agit aujourd'hui pour le gouvernement de faire tomber la première pierre de l'édifice de la solidarité sociale que nous avons bâti au Québec en matière de santé et de services sociaux.» Toujours pour le 2 $, le député péquiste en remettait: «M. le Président, on ne sera pas complices de cette entreprise de destruction, destruction des fondements de notre régime de santé et des services sociaux. C'est qu'on vient d'aller chercher des nouvelles formes de tarification.» Ça, M. le Président, c'était le député de Rouyn-Noranda.

Le député de Joliette, au moment où il était dans l'opposition officielle, et encore pour le 2 $ pour les personnes âgées, lui, il nous rappelait la grande générosité du rapport Rochon. Il nous disait donc que c'était une fierté, la commission Rochon, vous vous rappelleriez, quand on l'a mise sur pied, en 1985, il disait bien qu'il ne fallait pas toucher aux grands acquis du système – ça, pour nos auditeurs, la commission Rochon, c'est la même personne que le ministre de la Santé actuel – et qu'il ne fallait pas remettre en cause l'universalité et la gratuité. Alors, ce qu'on peut dire, M. le Président, avec son régime d'assurance-médicaments, c'est que le même rapport Rochon, le même ministre de la Santé, avec sa taxe-médicaments, vient de renier sa signature qu'il avait apposée sur son rapport de la commission Rochon.

M. le Président, toujours dans cette grande consternation, cette grande désolation quand on a, nous, instauré le 2 $ pour les personnes âgées, le premier ministre actuel, qui était alors à Ottawa, M. Lucien Bouchard, lui, il a fait toute une crise. Et M. Bouchard dénonce Marc-Yvan Côté, «un idéologue de droite». Le premier ministre du Québec actuel du Québec disait, pour le 2 $ pour les personnes âgées: Pas question de toucher aux programmes sociaux, a averti Lucien Bouchard, s'en prenant très durement aux idéologues de droite, parmi lesquels il classe Marc-Yvan Côté. Il a lancé un vibrant appel à la solidarité de tous en faveur des plus démunis. C'est toujours M. Bouchard, premier ministre actuel, qui disait, à l'époque, pour les 2 $ pour les personnes âgées...

Mme Caron: Question de règlement.

Mme Loiselle: M. le Président...

Mme Caron: M. le Président, on peut laisser passer une fois, deux fois, trois fois, mais...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: ...contrevient au règlement, qu'elle ne peut, même en citant un article, désigner un membre de notre Assemblée autrement que par son titre.

(12 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, actuellement, il est premier ministre. Vous devez référer au monsieur en question par son titre. Très bien. Mme la députée.

Mme Loiselle: Alors, le premier ministre actuel, on le connaît bien, c'est un grand acteur quand il parle de solidarité et de compassion. Il disait donc dans cette allocution: «Il y a de l'argent à aller chercher dans les dépenses excessives, là où ce sera faire preuve de justice sociale, de bon sens et de bonne gestion.» C'est toujours le premier ministre actuel qui parle. «On ne touchera pas aux programmes sociaux. Il faudrait tous se lier...» Écoutez celle-là, M. le Président: «Il faudrait tous se lier par un pacte de civilisation, un pacte d'humanisme, un pacte de compassion sociale, un pacte de justice distributive et ne pas toucher aux plus démunis.» Ça, c'est les paroles qui sortaient de la bouche du premier ministre actuel au sujet du 2 $ pour les personnes âgées. Quand aujourd'hui cette même personne appuie son ministre de la Santé et dit qu'il est le plus grand ministre de la Santé au Québec, cette même personne fait payer à un couple âgé qui vit sous le seuil de la pauvreté 1 850 $ par année – si ces gens-là sont malades – pour obtenir ses médicaments.

Et le premier ministre du Québec en remettait. Il disait qu'il dénonçait les idéologues de droite qui proposent d'instituer un ticket modérateur ou de désassurer certains services sociaux. Il a même ajouté, le premier ministre du Québec: «Marc-Yvan Côté, c'est le genre de politicien qui a comme première réaction de frapper les plus démunis quand il y a un problème. Ce n'est pas comme ça qu'on va réussir à se construire une société.» M. le Président, quand je vous dis et que je vous répète, depuis deux ans et demi, que ce gouvernement, par le biais spécialement, particulièrement des ministres et de son premier ministre, a de beaux discours, qu'il a de belles paroles, qu'il sait parler avec compassion et solidarité dans les mots, le geste, il est brutal, le geste, il est froid, et le geste, il est obsédé par les colonnes comptables de ce gouvernement.

M. le Président, depuis son arrivée au pouvoir, le gouvernement péquiste a deux cibles privilégiées: les assistés sociaux, les plus démunis de notre société, et les personnes âgées. Je vous le rappelle, M. le Président, je sais que vous le savez, mais pour certains des députés qui ne sont pas au courant, actuellement au Québec, il y a une personne âgée sur trois qui vit sous le seuil de la pauvreté. En sachant cela, qu'a fait ce gouvernement depuis qu'il est au pouvoir, et en ayant en main l'avis du Conseil des aînés qui a été déposé en mai 1997?

Conseil des aînés, Avis sur les orientations d'une politique de vieillissement . On dit clairement que, «même si les situations d'indigence ont diminué grâce aux mesures visant à leur assurer un minimum de revenus et améliorer leurs revenus de retraite, il n'en demeure pas moins qu'avec les jeunes les aînés au Québec représentent le groupe le plus pauvre de la population. Cette pauvreté, on la retrouve principalement chez les aînés vivant seuls. En effet, non seulement composent-ils la moitié de la population des aînés au Québec, mais plus d'un aîné seul sur deux vit sous le seuil de la pauvreté au Québec». Le gouvernement est au courant de ça. Mais le gouvernement, il s'en fiche, il met en place sa taxe-médicaments qui cible plus particulièrement les retraités démunis à faibles revenus.

Mais, pour en remettre, le gouvernement a aussi, dans une autre direction, appauvri les personnes âgées du Québec. Rappelez-vous, M. le Président, que ce gouvernement péquiste a aboli le crédit d'impôt pour personne vivant seule, qui cible particulièrement les personnes âgées. Ce gouvernement a récupéré les crédits d'impôt en raison de l'âge et pour revenus de retraite, qui ciblent particulièrement les personnes âgées. Ce gouvernement a augmenté les frais d'hébergement dans les centres d'accueil de 10 %. Il y a des personnes âgées qui se sont retrouvées avec une augmentation de près de 100 $ par mois pour vivre dans des centres d'accueil. Et, pour finir tout ça, pour la cerise sur le sundae, comme on dit, le gouvernement est allé chercher, avec sa taxe-médicaments, 253 000 000 $ dans les poches des personnes âgées au Québec.

Et on pourra, une autre journée, parler de l'allocation-logement unifiée qui nous a été annoncée dans le budget du ministre des Finances. On a sorti trompettes et clairons pour nous annoncer l'allocation unifiée pour le logement. Ce qu'on a oublié de nous dire, M. le Président, c'est qu'avec cette allocation-logement unifiée il y 6 500 ménages âgés au Québec qui actuellement reçoivent Logirente, et avec cette allocation, ces 6 500 ménages âgés vont perdre complètement, complètement l'aide qu'ils reçoivent actuellement avec Logirente. Et ce qu'on oublie de nous dire aussi, pour l'allocation-logement unifiée, c'est qu'on baisse le taux d'allocation, ce qui veut dire qu'en baissant le taux la plupart des personnes âgées actuellement vont voir une perte de revenus pour se loger au Québec.

Alors, M. le Président, depuis le début, au moment où le ministre – une minute? – de la Santé a parlé de mettre en place son régime d'assurance-médicaments, de la façon que c'était fait, tout le monde a compris que c'était une commande budgétaire. C'était tellement mal fait, c'était tellement bâclé et précipité que même le Protecteur du citoyen, tout de suite, a dit: Les médicaments, l'assurance-médicaments, les défavorisés assumeront le gros des économies. Si on se fie aux prévisions du gouvernement, ça va se faire sur le dos des gens pauvres et malades, et il faut que cela soit dit.

M. le Président, il n'est pas normal qu'on soit obligé de mettre en place des fonds d'aide, comme le groupe Jeunesse au soleil qui est obligé d'aller chercher de l'argent dans des fondations privées, chez des entreprises privées, pour que les personnes âgées puissent se procurer leurs médicaments. Il n'est pas normal non plus que les pharmaciens, en bloc, sortent et disent: Les pharmaciens voient de nombreux malades qui rognent leurs médicaments. La majorité des pharmaciens affirment que, depuis le 1er août 1996, de nombreux cas de personnes qui renonçaient à prendre leurs médicaments ou ne respectaient pas leur posologie ont été signalés au Québec, contredisant ainsi les propos du ministre Rochon. Les pharmaciens voient se confirmer leurs craintes. Ils signalent de nombreux cas de patients qui, faute d'argent, cessent de prendre leurs médicaments.

Il est malheureux que mon temps soit écoulé, M. le Président, parce que j'avais d'autres interventions à vous faire afin de sensibiliser, si c'est possible un jour de sensibiliser ce ministre-là, mais pour le sensibiliser afin de bonifier le projet de loi n° 142, afin que finalement... Eh que ça parle, les députés péquistes, tout d'un coup, M. le Président! Ils devraient se promener dans leur comté et voir ce qui se passe sur le terrain.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous inviterais à laisser le président intervenir quand les temps sont terminés. J'applique le règlement équitablement pour chacune des personnes et je vous inviterais, s'il vous plaît, à respecter le président quand il aura à décider de la fin de l'intervention. Y a-t-il d'autres interventions? Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, pour une intervention. Il vous reste deux minutes.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Je peux aussi bien commencer, M. le Président, et reprendre, si les leaders le veulent, ou on peut ajourner tout de suite. Mais, si la leader adjointe du gouvernement insiste pour qu'on poursuive, je vais commencer avec mes deux minutes puis... Très bien.

M. le Président, le projet de loi n° 142 qui est devant cette Chambre, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, vient essentiellement tenter de créer... de résoudre, je devrais dire, une situation perverse dans l'application d'un programme que, nous, de ce côté de la table, on a appelé la loi sur l'impôt-médicaments. M. le Président, les effets pervers ont été largement décrits, mais, en ma qualité de porte-parole de l'opposition officielle en matière de la sécurité du revenu, je crois qu'il est pertinent, pour le bénéfice des députés ministériels et des gens qui nous écoutent, de refaire un peu le bilan du programme d'impôt-médicaments, en particulier sur la clientèle des récipiendaires de l'aide sociale.

M. le Président, nous savons fort bien – et, hier, la députée de Rimouski me l'a confirmé en commission parlementaire – que les familles et les personnes à l'aide sociale sont parmi les plus pauvres des plus pauvres au Québec. La députée de Rimouski m'a dit hier: Oui, c'est une évidence. Alors, je dois comprendre, M. le Président, qu'on va reprendre cette évidence à 15 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, étant donné l'heure, je dois vous interrompre, et nous reprendrons plus tard. Je vais suspendre les travaux jusqu'à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 h 9)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Nous poursuivons notre débat. À l'article 7 de votre feuilleton, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives. Lors de la suspension du débat de ce matin, le député de Notre-Dame-de-Grâce avait la parole et avait utilisé deux minutes de son temps qui est de 20 minutes. Alors, M. le député.

(15 h 10)

M. Copeman: Merci, M. le Président. Avant la suspension à 13 heures, je disais que je suis assez confiant d'être capable d'affirmer en cette Chambre que les bénéficiaires d'aide sociale sont parmi les plus pauvres des plus pauvres au Québec. Et même, comme je l'ai indiqué hier, les députés ministériels me donnaient raison en disant que c'était de toute évidence que les bénéficiaires d'aide sociale sont parmi les plus pauvres au Québec. Il s'agit évidemment, M. le Président, de tout près de 450 000 adultes qui sont bénéficiaires d'aide sociale, chiffre qui n'a pas beaucoup changé depuis un an. C'est beaucoup de monde. Il y a également à peu près 250 000 enfants qui vivent de l'aide sociale.

M. le Président, je voudrais prendre une bonne partie, la majeure partie de mon intervention sur les impacts de la Loi sur l'assurance-médicaments, ce qu'on appelle, nous, la loi, le régime d'impôt-médicaments, sur la clientèle de la sécurité du revenu, en vous rappelant quelle a été la situation antérieure. La situation antérieure était que les assistés sociaux, les personnes assistées sociales recevaient gratuitement leurs médicaments. Il n'y avait aucun coût à défrayer pour l'obtention de leurs médicaments.

Lors de la présentation du régime d'assurance-médicaments, il y avait eu un rapport technique, le comité Castonguay avait suggéré certaines pistes de solution aux problématiques de la consommation des médicaments. Il est vrai, M. le Président, que et le comité Castonguay et le comité Bouchard-Fortin sur la réforme de l'aide sociale ont suggéré que même les personnes assistées sociales devraient faire une contribution pour le prix de leurs médicaments. Essentiellement, l'analyse était qu'il faut mettre tout le monde à contribution dans la société, pour des raisons d'équité et pour tenter également de faire un désincitatif à la consommation peut-être non justifiée des médicaments. Mais, et c'est très important de le souligner, le rapport Bouchard-Fortin, en recommandant effectivement que les personnes assistées sociales devraient faire une contribution pour leurs médicaments, a recommandé que les barèmes d'aide sociale soient augmentés en conséquence, et c'est ça, le point très important. Je l'ai déjà entendu, le ministre de la Santé, dans le passé, nous dire que, oui, même Bouchard et Fortin sont d'accord que les personnes assistées sociales paient une contribution pour leurs médicaments.

Ce que le ministre de la Santé oublie de dire très fréquemment, pour être juste, pour donner toute la vérité, c'est que Bouchard et Fortin ont suggéré, ont recommandé une hausse dans les barèmes pour compenser une perte de revenus disponibles des personnes assistées sociales. M. le Président, même selon le ministère de la Sécurité du revenu, les barèmes, présentement, d'aide sociale ne couvrent pas les besoins essentiels d'un individu ou d'une famille. Alors, même le ministère de la Sécurité du revenu reconnaît que les barèmes actuels d'aide sociale ne couvrent pas les besoins essentiels d'un individu ou d'une famille. Tenter de vivre sur 490 $ par mois serait, pour bien du monde parmi nous, impossible, et c'est ça, le barème d'un adulte seul non participant sur l'aide sociale, 490 $ par mois.

Quand on commence à calculer toutes les compressions qui ont été faites dans le passé sur les barèmes d'aide sociale, on peut vite constater que les bénéficiaires d'aide sociale ont moins de revenus disponibles aujourd'hui qu'ils en avaient il y a deux ans. Alors, comment est-ce que ce gouvernement a réagi? Les ténors du gouvernement acceptent que les personnes assistées sociales soient parmi les plus pauvres au Québec. Quel est l'impact du régime d'assurance-médicaments sur ces personnes très pauvres? Quelle est la réponse du gouvernement à cet égard? C'est de les appauvrir davantage, M. le Président. J'ai vu récemment un macaron distribué par Michel Chartrand qui prend le logo du Parti québécois et qui indique en-dessous du logo: L'autre façon d'appauvrir . Michel Chartrand, M. le Président, ce n'est pas le plus grand supporter du Parti libéral du Québec qui existe. Alors, quand, lui, il diffuse un macaron qui fait un jeu de mots sur le slogan du Parti québécois pendant l'élection, L'autre façon de gouverner , et diffuse un macaron avec le logo du Parti québécois qui dit L'autre façon d'appauvrir , il a, selon nous, entièrement raison.

Alors, comment est-ce que le régime d'assurance-médicaments, ou impôt-médicaments, traite les bénéficiaires d'aide sociale? Ça les appauvrit davantage en leur imposant une franchise et une coassurance jusqu'à un maximum de 200 $ par année sur leurs médicaments. Je vous rappelle, M. le Président, la situation antérieure où les personnes assistées sociales n'avaient pas l'obligation de payer pour leurs médicaments. Alors, c'est 200 $ par année – pour les personnes assistées sociales qui utilisent les médicaments – supplémentaires, à partir du 1er août, à l'année passée.

M. le Président, sur le plan macro de la lutte au déficit, cela signifie que l'État ramasse, selon les chiffres du ministre de la Santé, 37 600 000 $ sur le dos des personnes assistées sociales malades qui ont besoin de médicaments. 37 600 000 $ par année! C'est ça que ça rapporte, cette taxe-médicaments imposée par bâillon par ce présent gouvernement.

M. le Président, mon collègue le député de Brome-Missisquoi et leader de l'opposition et ma collègue la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne ont longuement fait état des situations perverses qui existent avec l'impôt-médicaments, et ça vaut la peine que je les résume brièvement.

«Un impact imprévu – c'est Le Soleil – les factures de médicaments se retrouvent dans les organismes de dépannage ou dans les CLSC. Les CLSC sont débordés par les demandes d'aide de la part des personnes qui n'ont pas les moyens de payer leur participation à l'assurance-médicaments. Dans Limoilou, l'ACEF de Québec, CLSC Basse-Ville–Limoilou, Mme Christine Berryman avoue que la situation fut dramatique en janvier et qu'elle risque de l'être à nouveau en avril.» Ce n'est pas les mots du député de Brome-Missisquoi ni les miens, M. le Président, c'est une travailleuse au CLSC Basse-Ville–Limoilou: «La situation fut dramatique.» Je suis convaincu que ça préoccupe le député de Limoilou. Convaincu!

«À Montréal – M. le Président, dans le même article – Sun Youth, Jeunesse au soleil a mis sur pied une ligne-médicaments et traite plus de 400 cas par mois», des personnes qui ne peuvent pas acheter leurs médicaments, qui ne peuvent pas payer. Mme Yolande Vallières, de la maison Revivre, je la cite, M. le Président, ça vaut la peine: «Moi, je ne peux pas le prouver, mais nous avons eu un cas où nous sommes convaincus que, si la personne est décédée, c'est parce que ce monsieur-là ne prenait pas ses médicaments faute d'argent.» Ça, c'est une situation dramatique, M. le Président. C'est ça qui existe présentement dans le régime d'impôt-médicaments.

(15 h 20)

Il y a un autre effet pervers: les pharmaciens qui font du crédit pour que les personnes assistées sociales puissent acheter leurs médicaments. Il y a des citations de plusieurs pharmaciens de la région de Québec: «"C'est une catastrophe, fustige Jean Martel, rue Saint-Vallier ouest. Les personnes se privent de biens essentiels."» C'est également dans Le Soleil , M. le Président. Les pharmaciens qui sont en train de donner du crédit à des personnes assistées sociales pour qu'elles puissent acheter leurs médicaments, ça n'a pas de bon sens dans le Québec de 1997, M. le Président.

And finally, Mr. Speaker, today's Gazette , where there's a report on the drug plan, The drug plan is hurting those who need it most , says the Coalition of doctors for social justice, who presented a petition via the MNA for Brome-Missisquoi in this very House, Mr. Speaker. And a quote from a man by the name of Roger Boisvert, a welfare recipient and psychiatric patient who managed to avoid any major psychiatric crisis; as long as he took his medication, he stayed out of hospital. But when the elements of Québec's new drug insurance plan went into effect last August 1st for senior citizens and welfare recipients, Boisvert found himself with a choice, and I quote Mr. Boisvert, Mr. Speaker: «Since my income is very low, I had to choose whether to eat or take my medication. The only way I could manage was when I had money for my prescription... I paid for it and took my medication, or I didn't take them at all and I put my money elsewhere.»

This gentleman, Mr. Speaker, is highlighting the terrible choice that is facing what we consider to be literally tens of thousands of Quebeckers, a choice between eating and taking medication. Mr. Speaker, it is absolutely unacceptable, in the Québec of 1997, that a government should impose such a terrible choice on those people in need of social assistance. It's inhuman and indecent, Mr. Speaker.

Quelle est la réponse du ministre de la Santé? La réponse, c'est le projet de loi n° 142. Est-ce qu'on baisse les contributions demandées? Est-ce qu'on admet, quelque part dans le projet de loi, que 200 $ par année pour les personnes assistées sociales est trop élevé? Non. Est-ce qu'on admet finalement que ce n'est pas un problème de budgétisation, comme le ministre a prétendu ici, en cette Chambre? Non. Ce qu'on fait, c'est qu'on prend la contribution trimestrielle et on l'étale sur 12 mois. Au lieu de payer 50 $ par trimestre, le maximum, M. le Président, une personne assistée sociale va maintenant payer 16,74 $, si mes calculs sont exacts.

Est-ce que c'est ça, une réponse, une vraie réponse raisonnable, responsable au programme qui existe? Moi, je crois que non, M. le Président. Et il y a d'autres intervenants qui disent essentiellement que l'étalement ne règle rien. Selon la même coalition de médecins et autres, la Coalition des médecins pour la justice sociale, on indique: «Tous étaient d'avis que l'étalement mensuel annoncé par le ministre Rochon – pardon, le ministre de la Santé – ne règle pas le problème de fond.» Une citation: «"J'ai fait le budget de dizaines et de dizaines de personnes et, que ce soit 16,67 $ par mois ou 50 $ par trois mois, les gens n'arrivent pas davantage. L'aide sociale a tellement été coupée ces dernières années", dit Mme Vallières.»

M. le Président, la réponse de ce gouvernement est nettement insuffisante. Tout ce que ça fait, c'est que ça étale le malheur, ça étale la douleur, ça étale l'injustice qui vise les personnes assistées sociales. Au lieu d'être injuste une fois par trois mois, le gouvernement veut être injuste à tous les mois. C'est ça, la réponse du gouvernement. Il est risible et honteux. Il vaut mieux vraiment accepter le noeud du problème, reconnaître que les maximums établis dans la loi sont trop élevés pour les personnes assistées sociales, qu'elles ne peuvent pas payer les médicaments. Que ce soit un maximum établi à chaque mois ou un maximum établi aux trois mois, ça ne change rien, à la fin de l'année, elles vont payer le même montant. C'est là le défaut et l'injustice du projet de loi n° 142, et on va continuer à le décrier sur toutes les tribunes qui nous sont disponibles, à toutes les instances, avec des groupes de citoyens qui continuent à mettre de la pression pour tenter de convaincre le gouvernement de changer d'idée et d'arrêter cette injustice flagrante. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous tous tenons à féliciter le député de Notre-Dame-de-Grâce et son fidèle supporter, le député de Verdun. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 8 de notre feuilleton et je vais demander le consentement pour déroger à l'article 237 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, madame. Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 237 de notre règlement prévoyant un délai d'une semaine entre la présentation et l'adoption du principe d'un projet de loi?

Une voix: Il y a consentement.


Projet de loi n° 149


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Il y a consentement. Alors, l'article 8 de notre feuilleton. Mme la ministre de la Sécurité du revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 149? Alors, Mme la ministre de la Sécurité du revenu.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, je vous remercie, M. le Président. C'est avec fierté que j'ouvre ce débat à l'Assemblée nationale sur le projet de loi n° 149, projet de loi qui porte réforme au Régime des rentes du Québec. J'aimerais, par un bref rappel, simplement vous commenter les diverses positions publiques, dans les médias notamment, qui ont suivi le dépôt du projet de loi n° 149. Si vous me permettez quelques minutes, je vais retrouver le document.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons suspendre quelques instants pour permettre à Mme la ministre de...

(Suspension de la séance à 15 h 29)

(Reprise à 15 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, mesdames et messieurs les députés, veuillez vous asseoir. Alors, nous reprenons le débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives. Alors, Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, je vous remercie, M. le Président, je m'excuse de ce contretemps. Effectivement, cet après-midi nous aurons à examiner à la fois le projet de loi n° 149, immédiatement, et, par la suite, le projet de loi n° 150. Donc, je vous disais, M. le Président, que c'est avec fierté que je soumets au débat de deuxième lecture à cette Assemblée le projet de loi n° 149 qui modifie la Loi sur le régime de rentes du Québec. M. le Président, c'est, je pense, un concert bien accueilli qui nous aura permis de comprendre que ce projet de loi répond aux attentes de la population.

Je veux citer simplement quelques grands titres dans les médias. Par exemple, aujourd'hui, dans Le Journal de Montréal , on retrouvait, sous la signature de Jean-Philippe Décarie, un article qui s'intitulait Une réforme attendue et qui rappelait qu'à la Régie des rentes une hausse vitale allait, donc, se produire. Et je cite le bas de vignette qui était le suivant: «Il fallait réagir et vite. Ce qu'a fait Louise Harel, la ministre responsable de la Régie, en haussant de 6 % à 9,9 % la cotisation des contribuables et des entreprises d'ici à six ans.» En fait, c'était Le Journal de Montréal d'aujourd'hui.

Bien, mon Dieu, on retrouvait, dans Le Soleil d'aujourd'hui aussi, d'hier plutôt, le 11 juin, un peu l'équivalent, M. le Président. Sous la plume, cette fois, de Louis Tanguay, Le Soleil publiait un article intitulé Le prix de l'équité . Ça se retrouvait dans la chronique sur les finances personnelles et familiales et cet article disait ceci: «Les générations qui suivent ont elles aussi droit à un minimum de revenu assuré. Dans ce sens, la réforme annoncée la semaine dernière par la ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Mme Louise Harel, a l'avantage de rassurer ceux qui pouvaient craindre de cotiser au régime sans être sûrs de retirer des prestations dans 40 ou 50 ans.» Alors, on voit aussi que le projet de loi a été bien accueilli.

Ce fut le cas, M. le Président, dès son dépôt, jeudi dernier, puisque le lendemain Le Devoir déjà titrait, et je cite – sous la plume de Mario Cloutier, du bureau du Devoir ici même, à Québec: L'urgente réforme du Régime de rentes du Québec est maintenant lancée . «La ministre responsable du dossier a décidé de hausser rapidement le taux de cotisation pour regarnir la caisse du Régime de rentes du Québec.» Alors, Le Devoir , Le Soleil , Le Journal de Montréal ; il en a été ainsi également, M. le Président, je pense, dans l'ensemble de l'accueil qui a été fait jusqu'à maintenant au projet de loi n° 149.

Et peut-être un dernier article, puisqu'il s'agit de l'éditorialiste du Devoir , connu pour son expertise en matière de régime de retraite, M. Jean-Robert Sansfaçon, et qui, le 6 juin, publiait un article dans la chronique Perspective qui s'intitulait La consolidation du RRQ et qui simplement mettait en exergue ceci: «Québec a retenu des mesures assez simples qui protègent le régime dans sa facture actuelle.»

Alors, c'est donc dire que, presque unanimement, cette législation qui a été déposée jeudi dernier a été bien accueillie. Sans doute, aussi, était-elle attendue depuis très longtemps. Je voudrais vous rappeler, M. le Président, que ce n'est pas d'hier qu'il y avait un sentiment d'inquiétude, qui d'ailleurs progressait et s'amplifiait au fil des années, de voir que rien n'était fait à la veille, tout prochainement, dans 10, 15 ans – c'est comme demain, ça, évidemment – de l'arrivée massive à l'âge de la retraite de la génération des baby-booms au Québec.

Donc, je vous rappelle que ma collègue l'actuelle ministre de l'Éducation et responsable des politiques familiales, au moment où elle assumait la responsabilité que j'ai maintenant, il y a 12 ans de ça, avait publié, en 1985, un document qui s'intitulait Agir maintenant pour demain . Ça, «agir maintenant», c'était en 1985, puis «pour demain», c'était dans les années qui ont passé depuis. Et ça portait justement sur une politique québécoise de sécurité de revenu à la retraite. Le document était d'ailleurs signé par M. Chevrette et Mme Marois à titre de ministre de la Santé de l'époque et de ministre de la Sécurité du revenu.

Je dois vous dire, M. le Président, que, quand nous sommes revenus au gouvernement, pendant les neuf années qui avaient précédé, dans ce dossier strictement rien n'avait été fait. On a retrouvé le dossier exactement... En fait, à peu de choses près, sauf l'indice du coût de la vie au 1er janvier de chaque année, c'était comme une sorte de statu quo, finalement, statu quo dans le sens où c'était le même indice qui était utilisé, celui-là qui nous conduisait tout droit au précipice. Alors, ça avait été comme ça pendant neuf ans.

Ce n'est pas faute que des ministres du gouvernement libéral qui m'ont précédée aient essayé de corriger la situation. J'ai en main un mémoire qui fut déposé, d'ailleurs, au Conseil des ministres et qui portait comme objet le titre suivant: Financement à long terme du Régime de rentes du Québec , mémoire au Conseil des ministres déposé par ma prédécesseure, la ministre de la Sécurité du revenu, Mme Trépanier, le 31 janvier 1994. Et j'y reviendrai parce que je crois, M. le Président, que l'opposition peut nous faire grief de ne pas avoir repris certaines dispositions, mais il vaut mieux, je pense, en avoir mis la majorité de côté, notamment celle qui portait l'âge de la retraite de 65 ans à 67 ans dans quatre ans exactement, dans quatre ou cinq ans.

Donc, on a retrouvé la situation, en fait, aggravée, puisque, à partir de 1992, la caisse de la Régie des rentes était en état de choc, puisqu'il y avait décaissement, n'est-ce pas. Décaissement, c'est-à-dire que les cotisations étaient moins élevées que les prestations qu'il fallait payer. Et ça, ça a débuté à partir de 1992. Ce fut le cas en 1993, ce fut le cas en 1994. Et là vous comprenez que le projet de loi qui est devant nous a justement comme objectif de cesser la saignée, n'est-ce pas, de ce qui fut mis de côté à la Régie des rentes du Québec et, au contraire, de commencer à engranger des cotisations pour une époque qui s'en vient.

Vous savez, ce n'est pas loin ça, là, que la génération des 50 ans en ait 60. Et on sait que dorénavant les gens prennent leur retraite autour de 60 ans. Ça a été un renversement de tendance d'ailleurs complet, hein? Vous savez qu'en l'espace de moins de 15 ans le deux tiers des personnes qui prenaient leur retraite à 65 ans, c'est devenu deux tiers qui la prennent à 60 ans. Dans une société, des phénomènes comme ceux-là... On en a connu, quand même, des bouleversements.

Quand on pense que, au Québec, il y a 30 ans, au moment où la Régie des rentes a été créée – il y a exactement 31 ans, puisqu'elle le fut en 1966 – les actuaires – j'allais dire «de l'époque» mais qui sont encore actuaires maintenant, parce que je me rappelle que l'actuaire principal était M. Castonguay, n'est-ce pas, Claude de son prénom – prévoyaient qu'il y aurait, 30 ans plus tard, donc en 1996, l'an dernier, une population qui atteindrait 14 000 000, au Québec, avec un niveau de fécondité qui nous amenerait à peu près à 234 000 naissances par année. Alors, avez-vous idée de comment il leur fut impossible de prévoir tous les bouleversements démographiques liés notamment au taux de fécondité, à la baisse des naissances? Et, en 1966, leurs prévisions, c'étaient des prévisions sur une population qui allait atteindre 14 000 000, avec des naissances qui allaient être quasi trois fois plus que celles que l'on constate maintenant.

C'est donc dire que ces changements ont été extrêmement importants. J'y reviendrai. Mais c'est déterminant, parce que, en 1966, au moment de la création de la caisse et du Régime de rentes du Québec, il y avait huit travailleurs pour un retraité; 30 ans plus tard, il avait cinq travailleurs pour un retraité. Ça, c'était l'an passé, hein, 30 ans plus tard. Et, dans 30 ans, on dit qu'il y aura deux travailleurs pour un retraité. Alors, vous comprenez, M. le Président, qu'il faut être prévoyant, il faut être extrêmement prévoyant.

(15 h 40)

Moi, je me réjouis, vraiment je me réjouis que l'ensemble de la société québécoise l'ait compris. Et ça, quand je dis «l'ensemble de la société québécoise», ça comprend aussi les patrons et les syndicats. C'est quand même assez exceptionnel qu'on n'ait pas entendu de levée de boucliers, par exemple de la part des entreprises ou du milieu patronal, devant cette hausse de cotisations que le projet de loi n° 149 a annoncée la semaine dernière. C'est parce qu'ils ont compris que, si on ne mettait pas de côté, si on n'épargnait pas, si on n'était pas prévoyant maintenant, imaginez quel fardeau on allait laisser sur les épaules de nos enfants et de nos petits-enfants. Non seulement le fardeau pour nous-mêmes, mais, en plus de ça, on allait les hypothéquer dans leur capacité d'économiser eux-mêmes pour finalement prendre charge de leur propre retraite.

Alors, voyez, M. le Président, je pense que l'année qui s'est écoulée depuis que j'ai déposé le livre vert, l'an dernier, intitulé Pour vous et vos enfants: garantir l'avenir du Régime de rentes du Québec , eh bien, cette année-là a été fructueuse. D'abord, des consultations publiques sur cette proposition contenue dans le livre vert. Ces consultations publiques ont eu lieu auprès d'une quarantaine d'organismes l'automne dernier.

Et des négociations avec le gouvernement fédéral également se sont déroulées sur les perspectives de réforme du régime public de rentes du Québec et du Régime de pensions du Canada. On sait que, depuis 30 ans, sans qu'il y ait équivalence, il y a harmonisation, notamment au niveau des taux de cotisation, compte tenu de la mobilité de la main-d'oeuvre. Et je rappelle que la mobilité de la main-d'oeuvre, c'est aussi un objectif du gouvernement québécois, qui a signé en juillet 1995 une entente dans le cadre des négociations sur la liberté de commerce et qui est proactif dans cette entente en faveur de la mobilité de la main-d'oeuvre.

Alors, la réforme permettra à la génération actuelle de travailleurs et de travailleuses qui cotisent – en fait, c'est une génération dont nous faisons partie, n'est-ce pas – d'assurer aux jeunes générations qu'elles pourront bénéficier de tous les avantages d'un régime public de retraite.

Alors, le moment est venu, à cette étape de l'adoption du principe du projet de loi, de rappeler les objectifs que le gouvernement s'était fixés dans cette réforme du Régime de rentes. Premièrement, assurer l'équité entre les générations de cotisants en établissant rapidement un taux de cotisation constant à très long terme. On pense, M. le Président, qu'il y a une pérennité dans le régime, avec ce qu'on propose, pour au moins 50 ans. Puisqu'on va être capable de relever le niveau de réserve, qui était à peu près à deux fois et demie, à cinq fois et demie, le temps de passer, si vous voulez, le gonflement dans les courbes de la génération du baby-boom, et on pourra ensuite revenir à une réserve autour de quatre fois. Comme deuxième objectif, garantir autant aux personnes âgées qu'aux générations futures les bénéfices hors de tout doute de leur rente de retraite.

Ces objectifs ont rallié la grande majorité des groupes et des personnes qui se sont prononcés lors de la consultation publique. La plupart se sont dit d'accord avec les mesures proposées dans le livre vert, et plusieurs en ont suggéré d'autres. Mais la majorité avait une préoccupation en tête: assurer à très long terme la confiance dans le Régime de rentes tout en évitant de reporter le fardeau du coût de la retraite sur les jeunes générations, celles de maintenant comme celles qui nous suivent.

Après avoir soupesé les avantages et les inconvénients de chacune des mesures proposées, je vous présente aujourd'hui celles qui ont été retenues. D'abord, l'accélération du rythme d'augmentation du taux de cotisation. C'est là la principale mesure qui nous permettra d'atteindre nos objectifs rapidement. Puisque nous avons la responsabilité d'établir une plus grande équité entre les générations dans le financement du régime, nous l'avons dit au moment du livre vert, si rien n'était fait, le taux de cotisation, qui est de 6 % en 1997 grâce à l'annonce que le ministre des Finances a faite l'automne dernier, atteindrait 13 % en l'an 2023. Les actuaires et les rapports actuariels sont clairs, si le rythme d'augmentation des cotisations avait été le même qu'au fil des dernières années, en fait, c'est la génération qui nous suit qui aurait eu à payer 13 % de taux de cotisation en n'étant même plus capable d'obtenir l'équivalent en bénéfices et en avantages.

Alors, ça aurait été inéquitable pour les jeunes générations, qui auraient assumé un coût beaucoup plus élevé que leurs parents. Parce que, nous, finalement, c'est 5,6 % l'an passé, ça a été 4 % pendant les années quatre-vingt, et finalement pour des rentes comparables, parce que les prestations équivalent environ à 10 %. Ça signifie donc que, pendant des années, on a pu payer 4 %, 4,5 %, 5 %, et là on est rendu à 6 % de cotisation pour des prestations qui vont chercher autour de 10 %, n'est-ce pas. Alors, il y avait danger que les générations qui nous suivent aient à payer plus pour avoir moins.

Alors, il existait une solution depuis longtemps: augmenter le taux de cotisation plus rapidement que prévu pendant que la génération du baby-boom est encore sur le marché du travail, et ce taux pouvant être stabilisé à un niveau beaucoup plus bas que si nous limitions nos augmentations de façon lente et graduelle, telles qu'elles avaient été faites jusqu'à maintenant. Le fait d'accélérer durant six ans – parce que c'est durant les six prochaines années que l'accélération va avoir lieu – eh bien, cette accélération va être telle, M. le Président, qu'elle va avoir un effet vraiment important, sérieux sur la baisse du taux de cotisation qui, sinon, aurait été laissé à la responsabilité de la génération qui nous suit.

Alors, nous proposons donc de plafonner le taux de cotisation payé à parts égales, employeur et travailleur, et déductible d'impôt, ne l'oublions pas, nous proposons de le plafonner à 9,9 %, et ça, d'ici six ans, et ce sera plafonné comme ça jusqu'à la moitié du XXIe siècle. Nous pensons que jusqu'à la moitié du XXIe siècle, compte tenu des réserves et compte tenu des prévisions de vieillissement, eh bien, avec une accélération du taux et d'autres mesures sur lesquelles je reviendrai, il va être possible d'avoir un taux stable et constant.

Alors, pour y parvenir, évidemment, les augmentations sont de 0,4 %. Donc, on va passer de 6 % cette année à 6,4 % l'an prochain, ensuite à 7 % en 1999, à 7,8 % en l'an 2000, à 8,6 % en l'an 2001 et puis autour de 9,9 % en l'an 2002. Et ce sera 0,5 % en l'an 2003, année où le plafond sera atteint. Alors donc, je répète les augmentations: 0,4 %, 0,6 %, 0,8 % en l'an 2000, 2001 et 2002, et puis 0,5 % en l'an 2003.

Ça fait étrange, M. le Président, de parler de l'an 2000. C'est comme si c'était très loin. Et, en fait, l'an 2000, c'est comme demain, quand on pense que notre élection a eu lieu en 1994, il y a déjà trois ans, et que l'an 2000 est dans trois ans également. On voit combien rapidement ces trois dernières années se sont passées de ce côté-ci, en tout cas, de l'Assemblée. Je ne sais pas si ce fut le même sentiment d'années vite écoulées de l'autre côté.

Alors, je souligne que le calendrier d'augmentation, ce calendrier est le même que celui proposé pour le Régime de pensions du Canada, donc même calendrier d'augmentation des taux de cotisation. L'équivalence entre les deux régimes est donc préservée et la compétitivité des entreprises québécoises maintenue à égalité avec les entreprises canadiennes.

(15 h 50)

À ce sujet-là, d'ailleurs, M. le Président, j'aimerais citer des études, des évaluations, qui ont été réalisées notamment par le ministère des Finances du Canada et ici, au Québec, par l'économiste universitaire Pierre Lefebvre, sur l'augmentation rapide du taux de cotisation. Alors, dans les deux cas, à la fois, donc, M. Lefebvre, qui est d'ailleurs venu en commission parlementaire présenter un mémoire qui portait sur cette question, et à la fois les évaluations du ministère des Finances du Canada indiquent des impacts négatifs mineurs sur le produit intérieur brut, sur l'emploi et l'inflation, d'autant que c'est perçu comme une épargne en vue de prestations de retraite garanties.

Ça devrait permettre aux entreprises, en fait, de faire en sorte que les augmentations de salaire soient finalement moins élevées que ce qu'elles auraient pu être, étant donné que l'entreprise peut faire valoir que les augmentations de cotisations sont de l'épargne différée. Et effectivement c'est... C'est-à-dire, c'est de la rémunération différée. On met de côté une rémunération actuelle pour pouvoir en profiter plus tard. Alors donc, le fait d'annoncer ces augmentations six ans à l'avance a comme avantage appréciable pour les entreprises mais aussi les travailleurs qu'ils sauront exactement les taux de cotisation à long terme.

Je regardais, M. le Président, dans les autres pays industrialisés avec lesquels on a à se comparer, les taux de cotisation qui sont payés, si vous voulez. Pensez aux États-Unis, vous savez que ça atteint 12 %. Pensez aux pays de l'OCDE. Les pays de l'OCDE sont infiniment plus élevés. Ça varie entre 18 % et 20 %, ça monte jusqu'à 30 %, les taux de cotisation versés pour les bénéfices de retraite, de décès et d'invalidité. Alors, on comprend que, même dans six ans, à 9,9 %, on se situe en deçà de ce que les entreprises dans les autres pays industrialisés ont présentement à verser.

Il faut aussi rappeler que cette progression plus rapide du taux de cotisation aura pour effet d'accumuler une réserve qui produira des revenus de placements et permettra d'atteindre un taux de cotisation constant. Pensez, par exemple, que, avec les cotisations versées et les revenus de placements, en l'espace d'environ huit ans, on va passer de 5 000 000 000 $ cette année... Ce sera, je pense, autour de 5 000 000 000 $ de revenus de cotisations et de revenus de placements, alors que, d'ici huit ans, on pourra compter sur environ 10 000 000 000 $ de cotisations et de revenus de placements. Alors, la Caisse de dépôt et placement, qui gère notre patrimoine de retraite public, pourra donc mettre dans l'économie de marché quelque chose qui en huit ans sera très considérable.

C'est vrai que c'est un effort qu'on doit faire comme société durant les six prochaines années, mais je rappelle qu'on doit s'en réjouir aussi. C'est un effort que consent pas nécessairement de gaieté de coeur, mais que consent finalement un peu tout le monde dans la société en sachant très bien que c'est un parcours obligé.

Et puis en même temps cet effort-là va avoir un effet quasi bénéfique, puisque cette épargne va mettre en circulation, en faveur de l'économie de marché des entreprises, en l'espace de huit ans, presque 5 000 000 000 $ de plus chaque année. Alors donc, M. le Président, la réserve, qui représente actuellement la valeur d'environ deux fois les sorties de fonds annuelles du régime, atteindra jusqu'à cinq fois et demie, comme je le mentionnais tantôt, d'ici l'an 2020, ce qui permettra de maintenir le taux de cotisation à 9,9 % sur une très longue période. Nous pourrons alors faire face à l'arrivée massive des baby-boomers à la retraite, qui est prévue entre l'an 2005 et 2015. Puis le niveau de la réserve redescendra graduellement pour atteindre autour de cinq fois la sortie de fonds annuelle du régime et s'y maintiendra par la suite.

Comme vous le savez, M. le Président, d'autres mesures ont également été appliquées pour parvenir à faire plafonner le taux de cotisation à un niveau de 9,9 %. Ces autres mesures sont les suivantes, la première étant le gel de l'exemption générale. Cette exemption est actuellement égale à 10 % du maximum des gains admissibles, soit 3 500 $ en 1997. On cotise sur le revenu compris entre 3 500 $ et le maximum qui est de 35 800 $. On cotise sur un plafond de 35 800 $ et un plancher de 3 500 $. Cette situation présente l'inconvénient d'exclure du Régime de rentes 450 000 travailleurs et travailleuses qui ont des gains de travail inférieurs à 3 500 $.

D'autre part, les travailleurs et travailleuses qui gagnent le maximum de gains admissibles, soit 35 800 $, voient leur rente future calculée sur un montant de 35 800 $, alors que dans le fond ils ne cotisent que sur 32 300 $. Alors, nous tous, dans cette Assemblée, qui avons des revenus supérieurs à 35 800 $, nous nous trouvons dans le fond à accumuler des gains, un droit de retraite sur 35 800 $, alors que nous ne payons des cotisations que sur 32 300 $. C'est donc relativement inéquitable, n'est-ce pas?

Alors, comme la maximum des gains admissibles est ajusté chaque année en fonction de l'augmentation générale des salaires, l'exemption générale suit la même courbe à la hausse. Donc, chaque année l'indice des prix à la consommation détermine la hausse du plafond puis la hausse du plancher. À partir de 1998, l'exemption, donc le plancher de 3 500 $, sera maintenu à son montant actuel. Ce gel aura pour effet de réduire progressivement l'exemption en termes réels qui ne représentera plus, par exemple, que 5 % du maximum des gains admissibles vers l'an 2015 et encore moins par la suite. Grâce à cette mesure, un plus grand nombre de travailleurs et de travailleuses à faibles revenus...

Je vous disais tantôt qu'il y a 450 000 travailleurs et travailleuses qui ont gagné moins que l'exemption fixée, l'exemption générale, le plancher de 3 400 $, l'an dernier. Alors, grâce à cette mesure, un plus grand nombre de ces 450 000 travailleurs et travailleuses à faibles revenus seront couverts par le Régime de rentes du Québec. Ils paieront des cotisations et pourront bénéficier des prestations du régime tout en bénéficiant d'une disposition qui est extrêmement équitable dans un régime public, qui est celle de la soustraction de 15 % des gains les plus faibles. Au moment de prendre la retraite, dans le calcul global, il y a la soustraction de 15 % des gains faibles, M. le Président, et ça, ça permet de ne pas diminuer ses bénéfices de retraite pour les années qui auraient été travaillées en ayant un salaire faible. Donc, en pouvant bénéficier de cette soustraction de 15 % des gains faibles, ils pourront bénéficier des prestations du régime. Le gouvernement du Québec reconnaît ainsi que nous devons assurer une protection minimale aux travailleurs et travailleuses par le régime public d'épargne-retraite.

Pour l'ensemble des cotisants, les gains sur lesquels ils cotisent se rapprocheront progressivement des gains donnant droit à une rente. En fait, ce que ça signifie en termes pratico-pratiques, c'est qu'il va arriver un moment donné où sur le plafond de 35 800 $ de prestations à venir nous paierons des cotisations de 35 800 $, sans exemption. Mais ça va se faire graduellement.

Nous n'avons pas introduit la proposition de réduction proportionnelle qui, elle, était prévue dans le mémoire de ma prédécesseure la ministre libérale, en 1994, parce que cette réduction proportionnelle à ce moment-ci aurait appesanti de beaucoup le fardeau des cotisants. Et je pense que c'est une mesure, dans six ans, après cette hausse rapide, que nous pourrons envisager si tant est qu'elle se révélât nécessaire.

(16 heures)

D'autre part, l'autre mesure envisagée pour être en mesure de garantir un taux de cotisation à 9,9 %, c'est la modification de la rente d'invalidité du bénéficiaire qui a atteint 65 ans. Alors, le Régime de rentes prévoit qu'une rente d'invalidité est remplacée par une rente de retraite lorsque le ou la bénéficiaire atteint 65 ans, qui est l'âge de la retraite normal en vertu du régime. Actuellement, ce ou cette bénéficiaire a droit à une pleine rente de retraite, alors que celle-ci est calculée en tenant compte de l'ajustement des gains du cotisant invalide selon l'évolution générale des salaires entre la date du début de l'invalidité et le moment où il atteint 65 ans.

Dorénavant, la rente de retraite avec ajustement actuariel remplacera la pleine rente. Cet ajustement sera le même que celui qui est appliqué aux bénéficiaires de la rente de retraite à 60 ans, soit une réduction de 0,5 % – un demi de 1 %, en fait – pour chaque mois compris entre 60 et 65 ans pour lequel une rente d'invalidité est versée. Alors, cette mesure mettra les bénéficiaires d'une rente d'invalidité qui atteignent 65 ans dans la même situation que s'ils avaient reçu une rente de retraite anticipée à 60 ans. Le traitement permettra, en fait, à deux types de bénéficiaires, ceux d'une rente de retraite anticipée et ceux d'une rente d'invalidité, d'avoir un traitement finalement équivalent.

La quatrième mesure est l'établissement d'une prestation uniforme de décès. La prestation de décès est actuellement égale au moindre des montants suivants: soit six fois le montant de la rente de retraite du cotisant ou 10 % du maximum des gains admissibles pour l'année au cours de laquelle le cotisant est décédé. En termes pratiques, ça signifie qu'en 1997 la prestation de décès maximale était de 3 580 $. Mais, en réalité, la moyenne versée est beaucoup plus faible. La moyenne des prestations de décès est autour de 2 400 $. À compter de l'an prochain, la prestation de décès deviendra uniforme; elle sera de 2 500 $, un montant non indexé.

Nous avons choisi cette voie plutôt que celle du gouvernement fédéral qui propose de fixer la prestation de décès à six fois la rente de retraite à laquelle le cotisant avait droit, mais avec un maximum de 2 500 $. Donc, avec le Régime de pensions du Canada, le maximum est à 2 500 $, comme au Québec, mais, au Québec, ce sont tous les cotisants, quels que soient les montants qu'ils ont versés et quels que soient les salaires... Ça ne sera pas en fonction du salaire, mais ce sera une prestation uniforme de décès. Nous préférons, M. le Président, choisir cette façon de faire, nous la trouvons en fait beaucoup plus équitable pour les travailleurs et travailleuses à faibles revenus.

La cinquième mesure est le versement de cotisations par le retraité qui travaille. Le Régime de rentes prévoit que les personnes qui souhaitent recevoir une rente de retraite... Je vous indiquais tantôt que la rente de retraite anticipée, c'est-à-dire entre 60 et 65 ans, est vraiment beaucoup utilisée. Alors, actuellement, le régime est ainsi fait que les personnes qui reçoivent une rente de retraite anticipée doivent avoir cessé de travailler au moment de leur demande. Mais certaines de ces personnes, pour des raisons qui sont les leurs, recommencent ensuite à travailler; ça ne leur est pas interdit, c'est un régime d'assurance, alors elles peuvent obtenir cette rente de toute façon, qu'elles ont payée, n'est-ce pas, et elles peuvent l'obtenir à partir de 60 ans. Et un certain nombre d'entre elles recommencent ensuite à travailler. Selon les dispositions actuelles de la loi, elles sont alors exemptées de cotiser au régime.

Par ailleurs, les personnes âgées de plus de 65 ans ne sont pas tenues d'avoir cessé de travailler pour demander leur rente de retraite. Elles peuvent donc cumuler revenus d'emploi et rente de retraite sans avoir à cotiser au régime. Les employeurs dont la cotisation cesse alors également sont tentés d'inciter leurs employés de 65 ans ou plus à demander de recevoir leur rente de retraite tout en continuant de travailler, puisqu'ils n'ont plus à verser la part de l'employeur au Régime de rentes.

Dorénavant, les bénéficiaires d'une rente de retraite qui travaillent devront cotiser au Régime de rentes comme tous les autres travailleurs et travailleuses. En contrepartie, la rente de retraite de ces bénéficiaires sera revalorisée en fonction des nouvelles cotisations versées, dans la mesure où ils ne touchent pas déjà la rente maximale. En fait, dans la pratique, M. le Président, on se rend compte que c'est, aux deux tiers, des femmes qui continuent de travailler après l'âge de 60 ans, et encore plus après l'âge de 65 ans, parce que, pour plusieurs d'entre elles, les années de leurs maternités les ont écartées du marché du travail et elles se trouvent à ne pas avoir accumulé une épargne-retraite qui leur permet d'avoir des revenus satisfaisants.

Alors, par l'introduction de cette disposition, elles pourront en même temps avoir, après 65 ans, leur rente, mais continuer de cotiser en travaillant, de manière à la revaloriser pour atteindre la rente maximale. Je comprends que ceux et celles des bénéficiaires qui ont déjà atteint la rente maximale auront aussi à continuer à cotiser, mais ça m'apparaît là une question d'équité envers, aussi, M. le Président, les jeunes travailleurs et travailleuses. Il serait assez anormal que, dans le calcul des coûts, les employeurs se voient avantagés à maintenir ou à embaucher des personnes retraitées du fait qu'ils n'auront pas à verser des charges sociales, dont une cotisation qui, dans six ans, va quand même atteindre 9,9 %, payée pour moitié employeur et employé. On voit que c'est autour de 5 %. Alors, je pense que ça met tous les travailleurs et travailleuses, quel que soit leur âge, sur un pied d'égalité.

Alors, c'est une mesure qui sera appliquée à partir du 1er janvier 1998. J'ajoute et je précise que c'est une mesure qui va s'appliquer aux nouveaux bénéficiaires de rente de retraite. Les retraités actuels ne seront pas, finalement, concernés par cette mesure, mais ce sont les nouveaux bénéficiaires de la rente de retraite. Donc, on n'applique pas cette règle du jeu en changeant la partie de ceux qui ont déjà été bénéficiaires et qui sont sur le marché du travail, mais ça s'appliquera pour les nouveaux retraités, les nouveaux bénéficiaires de rente de retraite.

La septième et dernière mesure n'a pas d'incidence directe sur le taux de cotisation, mais elle m'apparaît extrêmement importante, et je tenais beaucoup à la souligner, c'est celle de l'évaluation périodique du Régime de rentes. Jusqu'ici, l'analyse actuarielle du Régime de rentes se faisait tous les cinq ans. Comme nous atteindrons rapidement un taux de cotisation que nous voulons maintenir sur une très longue période, il devient encore plus nécessaire de revoir fréquemment la situation financière du régime afin de ne pas répéter les erreurs passées et de s'assurer que les gouvernements qui nous suivront continueront d'être aussi prudents que nous tentons de l'être maintenant, M. le Président.

Alors, nous garantissons d'ajuster, au besoin, le Régime de rentes à l'évolution démographique, économique et sociale par des analyses actuarielles qui seront faites dorénavant à tous les trois ans. De plus – et ça constitue un précédent – nous procéderons à une consultation publique au plus tard à tous les six ans afin que la population puisse se prononcer sur les modifications éventuelles à apporter au régime. Vous voyez, ici, s'il y avait eu cette disposition obligeant une consultation publique à tous les six ans, on n'en serait pas arrivé, là, à la situation que nous connaissons maintenant. C'est là une reddition de comptes qui va garantir la transparence du régime public de retraite.

M. le Président, il faut que les jeunes aient confiance que les cotisations qu'ils paient comme travailleurs maintenant ou qu'ils paieront dans quelques années, que ces cotisations-là, ils vont pouvoir en bénéficier. Alors, ça va leur permettre, aux cotisants et aux bénéficiaires retraités aussi, de suivre l'évolution du régime. Le gouvernement pourra ainsi intervenir dès qu'un redressement semblera nécessaire et éviter que les problèmes s'amplifient, comme on l'a vécu au cours des 15 dernières années. Cette surveillance continue sera de nature à consolider définitivement la confiance en l'avenir du régime public de retraite. Alors, les mesures que je viens de vous décrire visent toutes à atteindre des objectifs de pérennité et d'équité du régime. Elles entreront en vigueur à partir du 1er janvier 1998.

D'autres modifications sont également proposées. Ces modifications visent à moderniser la Loi sur le régime de rentes du Québec. Je ne donnerai que deux exemples. D'abord, nous proposons d'accorder le droit à une rétroactivité pouvant aller jusqu'à cinq années pour la rente de retraite versée après 65 ans. Jusqu'à maintenant, la rente de retraite n'était versée que le mois suivant la demande pour les cotisants âgés de moins de 70 ans. Les cotisants âgés de 70 ans ou plus pouvaient, quant à eux, bénéficier d'une rétroactivité maximale de 12 mois.

(16 h 10)

Le fait d'allouer une rétroactivité de cinq ans profitera à tous ces travailleurs et travailleuses qui, parfois par ignorance... Ça peut vous sembler surprenant, mais, M. le Président, vous seriez surpris de voir des cas assez pathétiques de travailleurs et de travailleuses qui ignoraient, finalement, avoir droit à une rente de retraite et qui, s'en rendant compte – compte tenu du dispositif dans nos lois – ne pouvaient pas en bénéficier si tant est qu'ils avaient moins de 70 ans, sauf rétroactivement pour le mois précédant leur demande. Alors, dorénavant, la rétroactivité pourra aller jusqu'à cinq ans. Nous estimons qu'une telle mesure touchera 3 400 nouveaux bénéficiaires dès la première année d'application. On va vraiment pouvoir régler pour 3 400 bénéficiaires qui étaient dans cette situation.

Je suis heureuse de proposer également la prolongation du délai d'annulation d'une rente de retraite pour le bénéficiaire qui présente une demande de rente d'invalidité. Beaucoup de collègues des deux côtés de cette Chambre m'ont parlé de ces situations, aussi, pathétiques de personnes qui, demandant une rente d'invalidité après les délais prescrits, se la voyaient refuser. Alors, le délai passera de six à 18 mois. Donc, de six mois à un an et demi, à la condition qu'il soit prouvé que l'invalidité a débuté dans les six mois suivant le versement de la rente de retraite. Cette mesure viendra répondre aux attentes de plusieurs requérants de la rente d'invalidité qui reçoivent une rente de retraite mais qui jugent avoir mal évalué leur état ou avoir manqué d'information lorsqu'ils ont fait leur demande de rente d'invalidité.

Il est essentiel de souligner, M. le Président, que toutes ces mesures seront appliquées tout en conservant les quatre principaux acquis du Régime de rentes, comme nous l'avions promis lorsque j'ai rendu public le livre vert sur la réforme, le printemps passé. Ces acquis sont les suivants. Taux de remplacement du revenu à la retraite de 25 %. Donc, la retraite publique, c'est 25 % du taux de remplacement de revenu à la retraite. C'est évident que vaut mieux épargner aussi à côté, mais ce 25 %, il était quasi menacé, dans un document de consultation du Régime de pensions du Canada qui prévoyait le diminuer. L'âge de la retraite à 65 ans, l'indexation complète des prestations. Je vous rappelle qu'il était question, l'an dernier, dans ce document fédéral, d'une désindexation partielle des prestations des retraités actuels. Et puis, finalement, le retranchement des années de gains faibles ou nuls. J'ai parlé tantôt du 15 %. C'est le retranchement des années de gains faibles ou nuls dans le calcul global au moment de la prise de la retraite. Alors, nous aurons l'occasion de revenir sur l'ensemble des modifications proposées au Régime de rentes du Québec.

Je souhaite, M. le Président, avoir la collaboration de l'opposition pour mener à bien ce projet de loi. Jusqu'à maintenant, l'opposition, tant en commission parlementaire qu'au moment des travaux que nous avons menés jusqu'à maintenant, a porté vraiment un jugement responsable sur l'ensemble du dossier. J'espère que ça va continuer. J'insiste toutefois sur le fait que ce qu'il faut retenir avant tout, c'est qu'après toutes ces années d'incertitude la confiance dans le Régime de rentes du Québec sera désormais assurée. Nous pourrons dorénavant dire très haut et très fort que nous avons pris les moyens qu'il fallait pour garantir le versement des prestations pour les décennies à venir. Même les plus jeunes seront assurés de pouvoir bénéficier de la rente de retraite à laquelle ils auront droit lorsque le temps sera venu.

Et ce qui est tout aussi important, c'est qu'ils n'auront pas à payer des taux de cotisation disproportionnés, puisque la réforme atteint son but de ne pas reporter le coût des retraites actuelles sur les générations futures. Les objectifs que nous nous étions fixés, M. le Président, seront atteints avec l'adoption du projet de loi n° 149, et je crois que nous pouvons en être fiers. Je vous en remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de la Sécurité du revenu. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 149? Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 24 de notre feuilleton.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, Mme la ministre.

Mme Harel: Oui, certainement, nous allons prendre en considération l'article 24 du feuilleton. Très bien.


Projet de loi n° 150


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements transmis

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 24 de votre feuilleton, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 150, Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et instituant la Commission des partenaires du marché du travail, ainsi que les amendements transmis en vertu de l'article 252 de notre règlement par Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité, ainsi que l'amendement de Mme la députée de Saint-François. Ces amendements sont déclarés recevables. Y a-t-il des interventions sur ce rapport ainsi que sur les amendements déposés?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui. J'ai déclaré les amendements recevables. Votre amendement est recevable ainsi que les amendements qui ont été déposés par Mme la ministre de l'Emploi et de la Solidarité. Alors, à ce stade-ci, y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission ainsi que sur les amendements déposés? Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, les amendements que j'ai déposés l'ont été à la suite de l'audition du Comité de formation de l'industrie de la construction. Ces amendements permettront à l'industrie de la construction, qui bénéficie, dans le cadre des lois qui relèvent de mon collègue le ministre du Travail, d'un régime légal distinct en matière de relations de travail, en matière de formation professionnelle et qui bénéficie aussi d'un régime légal distinct à l'égard du prélèvement de la dépense de 1 % à laquelle sont assujetties l'ensemble des entreprises québécoises dans le cadre de la loi générale sur la formation et le développement de la main-d'oeuvre... Alors donc, régime légal distinct.

Par ailleurs, M. le Président, je comprends que l'ensemble de l'industrie de la construction, autant les employeurs que les travailleurs, se retrouvent déjà membres au sein d'un comité de formation professionnelle dans l'industrie de la construction, communément appelé, je pense, le CFPIC. Alors, ce comité, donc, est venu en commission parlementaire faire valoir le point de vue de l'industrie de la construction.

Cependant, je pense, M. le Président, que, autant il est nécessaire d'adopter les amendements présentés par le gouvernement, autant il serait mal venu de recevoir l'amendement qui a été déposé par l'opposition officielle, d'une part, parce que je ne pense pas que cet amendement déposé par l'opposition, contrairement à celui du gouvernement, donnerait, non pas un statut spécial, un statut particulier, mais un statut exorbitant à une industrie par rapport à toutes les autres.

M. le Président, il faut reconnaître la spécificité de l'industrie de la construction; c'est ce que les amendements du gouvernement font. La spécificité de l'industrie de la construction pourra être reconnue dans le cadre de l'implantation d'un comité sectoriel relevant d'Emploi-Québec, lequel comité sectoriel reprendra la composition du CFPIC. Autant il est nécessaire de reconnaître la spécificité de l'industrie de la construction, autant il est nécessaire de reconnaître la spécificité de l'industrie de l'aéronautique, de la pétrochimie, des pâtes et papiers, du tourisme, de l'agriculture.

(16 h 20)

Au moment où nous nous parlons, il y a 26 comités sectoriels qui ont été implantés dans le cadre du développement et de la formation de la main-d'oeuvre et qui sont à élaborer des plans d'action identifiant les besoins de la main-d'oeuvre dans l'industrie et les besoins en main-d'oeuvre. Ces 26 comités sectoriels sont aussi à élaborer des plans d'action en matière de formation professionnelle, de concert, d'ailleurs, avec le ministère de l'Éducation, suite à l'entente que j'ai signée au mois d'août passé avec ma collègue la ministre de l'Éducation. Dans le cadre de ce plan d'action en formation professionnelle, ces comités sectoriels sont à préparer des outils à mettre à la disposition des apprentis et des compagnons dans le cadre du nouveau régime d'apprentissage adopté par la loi n° 102 que nous avons déjà mise en vigueur, M. le Président.

Alors, je comprends que ces comités sectoriels, dont, d'ailleurs, l'existence légale s'est trouvée pour la première fois confirmée législativement par l'adoption de la loi n° 102 ici même, dans cette Assemblée, la semaine dernière, ces comités sectoriels ont un rôle prépondérant, déterminant, extrêmement important. J'ai l'occasion de le dire et j'en profite ici: c'est un des beaux héritages que nous aura laissé le ministre libéral de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie, M. Gérald Tremblay, c'est un des beaux héritages, les grappes industrielles.

Et, en même temps, M. le Président, que le gouvernement fait sienne cette orientation en faveur des comités sectoriels, non seulement fait sienne, mais la fait reconnaître par l'Assemblée nationale, par le Parlement, dans le cadre d'une loi adoptée la semaine dernière, autant, M. le Président, il faut faire attention pour qu'on ne donne pas à une industrie par rapport à toutes les autres, qu'on ne lui donne pas vraiment un statut exorbitant.

Malheureusement, c'est ce qui m'apparaît être le cas avec l'amendement présenté par l'opposition officielle. Je ne pense pas que cet amendement témoigne d'une volonté unanime des membres patronaux et syndicaux de l'industrie de la construction. Moi, à ma connaissance, c'est un amendement qui, de bonne foi, a été soumis par un des membres du CFPIC, soit la CSD-Construction. Alors, je reconnais légitime leur représentation, M. le Président, mais, en même temps, vous conviendrez que, s'il fallait reconnaître le CFPIC, Comité sur la formation professionnelle dans l'industrie de la construction, au même titre que l'ensemble des partenaires du marché du travail qui sont supposés représenter l'ensemble de tout le marché du travail, bien, il y aurait là un débalancement. Alors, je comprends qu'il y aurait là des conséquences majeures.

C'est évident que je vais vous demander de mettre aux voix ces propositions d'amendement et que nous allons voter contre la proposition déposée par l'opposition. Je vous rappelle, c'est une proposition qui aurait pour effet de placer le Comité sur la formation professionnelle dans l'industrie de la construction sur le même pied que la Commission des partenaires. Alors, la Commission des partenaires est constituée de partenaires syndicaux et patronaux qui parlent au nom d'une représentativité générale, M. le Président. Pensez, par exemple, qu'au CFPIC il y a des patrons et des syndicats qui eux-mêmes sont membres de toutes les centrales syndicales et de toutes les associations patronales déjà représentées à la Commission des partenaires. Ça pourrait être aussi inéquitable aux yeux des comités sectoriels, qui ont un mandat comparable, mais dans d'autres secteurs, comme l'aéronautique, la pétrochimie, le tourisme. Il y en a 26 autres, secteurs.

Il ne s'agit pas de refuser de reconnaître un statut particulier à la construction. Je vous rappelle que l'encadrement légal est déjà reconnu dans la Loi sur les relations du travail, la formation professionnelle et la gestion de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, et, déjà à l'article 18.2, on y précise le rôle que le CFPIC a à jouer, qui est celui de donner des avis à la Commission de la construction. Alors, l'article 3, que l'opposition officielle voudrait voir amendé, précise que les stratégies et objectifs sont définis en collaboration avec la Commission des partenaires du marché du travail, qui représente l'ensemble du marché du travail, et, sauf pour les règles d'utilisation du fonds de formation administré par la Commission de la construction du Québec, pour lesquelles il est décisionnel, le CFPIC exerce un rôle consultatif, alors que la Commission des partenaires instituée par le projet de loi n° 150 va avoir un rôle qui est celui de définir, en collaboration avec le ministre, notamment les stratégies et les plans d'action annuels. Alors, il faut être cohérent, M. le Président. Le mandat de la Commission des partenaires est extrêmement important, et il nous semble qu'à ce stade-ci ce serait dangereusement improvisé que de satisfaire l'opposition en donnant suite à la proposition d'amendement.

Cependant, M. le Président, je dois dire que j'ai apprécié le travail qui s'est fait en commission parlementaire à l'occasion de l'étude article par article du projet de loi n° 150. Ça nous a permis, je pense, de bien clarifier les objectifs de la réorganisation des services publics. Notamment, M. le Président, ça nous aura permis – dans un tableau qui a été distribué en commission parlementaire et qui, par la suite, je pense, a été distribué à l'ensemble de tous les parlementaires – de bien saisir à quel point le projet de loi n° 150, qui crée le ministère de l'Emploi et de la Solidarité, intègre les trois réseaux, met fin à l'éparpillement des services, décloisonne les clientèles, simplifie les 110 mesures et programmes en cinq axes d'intervention, à quel point ce projet de loi en est un de simplification des structures.

Contrairement à tous les discours qui se sont répétés du côté de l'opposition durant les derniers jours, M. le Président, c'est à une simplification des structures à laquelle on assiste avec l'adoption du projet de loi n° 150. Et je crois que la démonstration en commission parlementaire en a été évidente, M. le Président, et j'en ai comme témoin évidemment le tableau qu'il me fera plaisir de déposer pour que l'ensemble des membres de cette Assemblée nationale puissent constater combien nous allons mettre fin à un obstacle important dans la lutte au chômage au Québec, obstacle qui est celui de l'éparpillement, du cloisonnement et qui est finalement celui de la prolifération de ce que j'ai appelé, moi, au fil des années, l'industrie du chômage plutôt que des mesures actives d'emploi.

Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, je souhaite l'adoption de cette prise en considération du rapport en troisième lecture, et nous entendons évidemment voter contre l'amendement proposé par l'opposition officielle, Mme la députée de Saint-François. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, je suis heureuse d'intervenir à nouveau sur le projet de loi n° 150, qui est la Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et instituant la Commission des partenaires du marché du travail.

On se souviendra que ce projet de loi, M. le Président, a pour but, bien sûr, de décloisonner les clientèles ou encore les services en matière de main-d'oeuvre et de formation professionnelle. Cependant, ce projet de loi, aussi, crée certaines structures, comme le mentionnait la ministre, c'est-à-dire que ce soit au niveau du ministère, que ce soit au niveau régional ou au niveau local.

(16 h 30)

Et quoi qu'en dise la ministre, nous avons passé, bien sûr, quelques heures en commission parlementaire, j'ai offert ma collaboration et je pense qu'on a été en mesure de mieux comprendre certains facteurs ou certaines portions du projet de loi, mais je dois vous dire que c'était assez bloqué au début. Disons qu'on a réussi à éclaircir davantage avec les informations qu'on a obtenues au cours de la commission parlementaire, mais je dois bien avouer qu'il y a encore certains bouts ou certains secteurs, des structures, entre autres, qui ne sont pas tout à fait éclaircis, dans le sens qu'il y a encore une certaine brume, là, qui existe. Je ne peux pas dire que c'est tout à fait à la satisfaction de l'opposition.

Cependant, M. le Président, je pense qu'on a réussi à comprendre, au niveau du ministère, ce que la ministre avait l'intention de faire en créant, entre autres, Emploi-Québec, qui est un organisme, une unité, je devrais dire, autonome d'administration qui aura pour objectif de gérer l'entente qui sera signée entre la ministre et la Commission des partenaires du marché du travail. Alors, je pense que, dans ce sens-là, il est important d'avoir un organisme, d'avoir des personnes qui seront imputables, compte tenu du fait qu'on décentralisera maintenant davantage des budgets que des programmes et, bien sûr, qu'on doit s'assurer de la bonne gestion de ces fonds publics.

Malgré, M. le Président, comme je le mentionnais, les explications, je n'ai pas encore tout à fait saisi l'image du casse-tête des structures et je ne suis pas nécessairement d'accord avec toutes les structures, parce que, même si, au départ, on en réduit beaucoup, de structures, je n'ai pas encore compris la vision du gouvernement. Actuellement, le gouvernement fait un exercice à peu près à tous les niveaux, bouscule beaucoup de personnes, que ce soit au niveau régional ou... bouscule beaucoup d'organismes.

Je pense, par exemple, à tout ce qui se fait au niveau de la santé, actuellement. On peut appeler ça un grand dérangement plutôt qu'un grand changement, dans le sens que, bon, tout le monde est touché, mais on ne sait pas trop où on s'en va. Je pense, la même chose au niveau de l'éducation. Au moment où on est en consultation, où la ministre doit prendre des décisions quant aux cartes des territoires des commissions scolaires, on a énormément de représentations dans nos comtés et on est très inquiets de ces cartes. On ne sait pas trop exactement si elles seront basées ou si elles seront faites en fonction des MRC. On n'a pas, du gouvernement, encore cette précision.

La même chose au niveau municipal. Il avait été question, un certain temps, qu'il pourrait y avoir une réduction des MRC. Il semblerait que le tout serait retardé. Cependant, il pourrait y avoir, bien sûr, fusion des municipalités. Donc, il y a aussi tous ces chantiers mis en place dans le but d'essayer de trouver des moyens de ne pas faire payer par la population le 500 000 000 $ que le gouvernement pelletera dans la cour des municipalités à compter du 1er janvier 1998 prochain.

Mais il y a aussi toute la question de la politique du développement régional. Je dois vous dire, M. le Président, que, samedi dernier, j'ai assisté justement à une séance d'information dans ma région, une séance qui était donnée par le député de Johnson et secrétaire de la région au niveau du gouvernement, et je dois vous dire que j'avais un oeil attentif et puis que je regardais les gens réagir. Je dois vous dire que les questions n'ont pas, non plus... Il n'y a pas eu énormément de questions ou préoccupations. J'avais comme l'impression que les gens qui étaient dans la salle, ceux et celles qui connaissaient ou qui travaillaient déjà dans des organismes, pouvaient comprendre, pouvaient se retrouver assez facilement, mais, par contre, tous les représentants des conseils municipaux, les maires, les conseillers municipaux qui étaient là écoutaient, mais j'avais comme l'impression qu'ils étaient un petit peu assommés. Ils ne savaient pas trop qui allait faire quoi, comment ces organismes, aussi, ou ces structures vont s'harmoniser avec celles déjà existantes.

On parlait d'un budget de fonctionnement assez considérable, au niveau des régions, pour le fonctionnement des structures existantes, des organismes, que ce soient, par exemple, les corporations de développement économique, ou les conseils de l'environnement, ou quoi que ce soit, mais on avait l'impression, finalement, que ce n'était pas tous les gens qui étaient dans la salle, là, qui comprenaient bien qui allait remplacer qui et ce qu'on allait faire. Parce qu'on disait: Écoutez, il n'en tient qu'à vous. Vous devez vous prendre en main. Ce sont les régions, ce sont les municipalités ou les représentants des municipalités... Vous devrez vous prendre en main. Sauf que, bien sûr, M. le Président, on nage un petit peu, là, j'ai comme l'impression, dans l'improvisation, puisque tout n'est pas mis en place.

Par contre, c'est un peu la même chose quand on disait à la ministre, en commission parlementaire, que nous n'avions pas tous les morceaux du casse-tête dans le projet de loi de la ministre, le projet de loi n° 150, je le disais tout à l'heure, qu'on parle premièrement de la création du nouveau ministère de l'Emploi et de la Solidarité, de cette unité autonome Emploi-Québec, mais aussi de la Commission des partenaires du marché du travail, qui sont en majorité actuellement, du conseil d'administration de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui sera démantelée suite à l'adoption de ce projet de loi. Mais il y a aussi des structures au niveau régional. Je pense, par exemple, à Emploi-Québec régional, bien sûr, qui est une structure administrative du ministère, mais aussi aux comités régionaux des partenaires et, au niveau local, aux centres locaux d'emploi et aux centres locaux de développement, les CLD et les CLE.

Alors, dans ce projet de loi n° 150, on ne retrouve pas les CLE et les CLD, c'est-à-dire les centres locaux d'emploi et les centres locaux de développement. On les retrouve dans ce document de la politique de soutien au développement local et régional du ministre responsable du Développement régional, mais qui fait actuellement l'objet de discussions dans toutes les régions du Québec, donc qui n'est pas adopté.

Il n'y a pas de projet de loi qui a été déposé pour créer ces structures. Alors, vous comprenez, M. le Président, que c'est la raison pour laquelle on y va un peu rapidement, étant donné que ces structures-là n'ont pas encore fait l'objet de toutes les discussions. Et, cependant, le projet de loi de la ministre est aussi basé sur ces structures qui seront créées plus tard.

Donc, c'est pour ça que nous vous disions que nous n'avons pas tous les morceaux du casse-tête pour être en mesure d'évaluer dans une juste mesure toutes les structures. Chose certaine, bien sûr qu'on diminue de beaucoup les structures, mais est-ce que... Je suis toujours sous l'impression qu'on a quand même un palier, qu'on a certains paliers en trop. Bien sûr, c'est à l'usage qu'on va pouvoir le vérifier. Nous ne sommes pas en mesure de vérifier toutes ces structures actuellement, pour les raisons que je vous ai mentionnées.

M. le Président, nous avons eu l'occasion aussi, au cours de cette commission parlementaire, d'entendre certains représentants. La ministre a accepté, sans trop de préavis, à la suggestion de l'opposition, de convoquer certains partenaires. Donc, des membres de l'exécutif de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, qui seront des représentants de la Commission des partenaires du marché du travail, sont venus nous dire qu'ils étaient d'accord avec le projet de loi. Ils sont en accord avec le projet de loi parce qu'ils sont peut-être plus en mesure de voir, après de longues discussions avec les régionaux, comment ça peut s'harmoniser et s'imbriquer, ces structures, une dans l'autre. Mais cependant ils sont d'accord avec le projet de loi parce qu'ils ont obtenu ce qu'ils désiraient, entre autres.

Ils voulaient avoir un pouvoir de décision, ils voulaient que leur pouvoir soit décisionnel. Cependant, au questionnement des représentants de l'exécutif de la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre, nous avons appris que ce pouvoir décisionnel n'est pas un véritable pouvoir comme tel, mais est un pouvoir décisionnel de recommandation, ce qui est très différent, finalement, de ce que, nous, nous avions compris que les intervenants souhaitaient obtenir, c'est-à-dire un véritable pouvoir décisionnel. Ils fondent beaucoup d'espoir dans les structures. Donc, bien sûr, je le mentionnais, qu'ils semblent comprendre le fonctionnement, alors que, nous, on continue encore à se questionner sur certaines structures. Et, comme je le mentionnais, M. le Président, c'est seul l'usage qui nous dira qui avait raison.

Nous avons aussi rencontré les représentants de la construction, suite à une demande de l'Association des constructeurs du Québec, qui se sentaient un peu mis à l'écart au niveau de toute cette démarche et de l'importance pour les représentants de la construction d'être partie prenante aux décisions et aussi au plan de développement, étant donné qu'ils ont leur propre plan de formation professionnelle. Alors, ils nous avaient demandé de pouvoir les entendre, ce qui a été accepté par la ministre. Nous les avons entendus. Ils ont fait certaines recommandations, d'où l'amendement de la ministre à l'article 4 concernant les comités sectoriels.

(16 h 40)

Alors, je dois vous dire, M. le Président, que je suis d'accord avec l'amendement qui a été proposé par la ministre. L'opposition avait proposé un amendement à l'article 3, à la demande, justement, des représentants de la construction. Cependant, cet après-midi, juste avant d'entrer en cette Assemblée, j'ai reçu une autre recommandation, probablement qui a été acheminée aussi à la ministre, de la Commission de la construction du Québec qui faisait une autre suggestion, qui souhaitait, par exemple, qu'on ajoute à l'article 17, après le 6°, le texte suivant que je vais vous lire, c'est-à-dire «examine, s'il y a lieu, et approuve le plan d'action annuel en matière de développement de la main-d'oeuvre qui lui est soumis par le Comité sur la formation professionnelle dans l'industrie de la construction».

Alors, étant donné cette demande qui nous est parvenue de la Commission de la construction cet après-midi, juste avant que j'entre en Chambre, je consens à retirer l'amendement que l'opposition avait soumis à l'article 3. Je n'ai pas l'intention qu'on le discute. Je consens à ce qu'on retire cet amendement qui avait été soumis par l'opposition. Cependant, compte tenu du fait qu'à ce moment-ci l'opposition ne peut pas présenter d'autre amendement, alors je souligne à la ministre cet amendement qui est demandé par la Commission de la construction du Québec. C'est elle seule maintenant qui a la possibilité de l'accepter ou de le refuser. Je lui soumets quand même cette demande de la part de la Commission de la construction du Québec. Je comprends que, avec les comités sectoriels, la ministre donne quand même une voix au secteur de la construction, mais j'ai compris également qu'il souhaiterait encore avoir plus de sécurité à ce niveau.

M. le Président, actuellement, bien sûr, comme je le mentionnais, toutes ces structures devront être intégrées, devront s'harmoniser. Il y a un travail colossal qui devra se faire au niveau des régions pour mettre en place non seulement la politique du développement régional, mais également la politique de l'emploi et de la main-d'oeuvre. On sait que la ministre a beaucoup de chats à fouetter en même temps, puisqu'elle doit négocier les modalités de l'entente sur la main-d'oeuvre qui a été signée avec le gouvernement fédéral puisque cette entente entrera en vigueur le 1er janvier prochain.

Elle doit aussi travailler sur ce projet de loi, mais aussi elle va devoir mettre en vigueur toutes ces structures. Il y a aussi le démantèlement de la Société québécoise de la main-d'oeuvre. Alors, c'est beaucoup de travail à faire en peu de temps. Aussi, elle devra attendre, d'autre part, pour les centres locaux d'emploi et les centres locaux de développement, que son collègue dépose une politique finale et aussi un projet de loi pour créer l'ensemble de ces structures.

Je dois vous dire, M. le Président, qu'au niveau des régions déjà on se questionne beaucoup. Je vous faisais part que samedi dernier il n'y avait pas nécessairement beaucoup de réactions parce qu'on semble être un peu enterré, actuellement. On semble se demander: Mais qu'est-ce qui va arriver? Où on va aller? Parce qu'il ne faut pas oublier que, depuis trois ans, on ne parle que de structures. On n'a pas encore entendu parler de véritable politique du marché de l'emploi ou de la main-d'oeuvre, mais c'est davantage de structures à peu près à tous les niveaux.

Depuis près de trois ans, on a fait des tournées régionales, que ce soit en vue du référendum... On a fait le référendum, on a fait aussi des sommets. Là, maintenant, on consulte sur la politique du développement régional, on consulte sur les municipalités, on consulte au niveau des commissions scolaires. Alors, vous comprendrez que les régionaux actuellement en ont plein les bras. Alors donc, ils devront travailler au plan local, ils devront travailler sur les plans qu'on appelle «les plans locaux», c'est-à-dire que chaque MRC devra préparer son plan.

Au même moment cependant, j'ai compris que les CRD aussi actuellement retravaillent sur leur planification stratégique, devront élaborer une nouvelle planification stratégique en vue de leur plan triennal, puisque le plan prend fin prochainement. Alors donc, encore là, chaque MRC devra faire son plan local, lequel plan devra être endossé par les partenaires régionaux, et ces partenaires régionaux transmettront ce plan à la Commission des partenaires, qui a signé avec la ministre, comme je le mentionnais, une entente de gestion ou qui signera une entente de gestion avec Emploi-Québec.

Donc, ce plan, M. le Président, devra subir le jugement du local, devra subir également le jugement des partenaires régionaux et le jugement, bien sûr, du national. J'ai comme l'impression qu'il y a beaucoup de papiers qu'on retrouvera en circulation d'un palier à l'autre.

Il y a énormément de questions qu'on doit se poser aussi. Je pense que ce qui est important, à ce niveau-ci, au niveau de ce projet de loi, c'est toujours le client, même au niveau non seulement de ce projet de loi ou de toutes ces démarches entreprises par le gouvernement et qui bousculent, qui bousculent beaucoup, qui chambardent non seulement des structures, mais aussi le milieu, parce que, vous savez, au niveau de ces structures, on requiert toujours les services à peu près des mêmes personnes aux niveaux local et régional.

On exige aussi des représentants, bien sûr, du milieu patronal. On sait que le milieu patronal, généralement, se prête à cet exercice, mais il ne faut pas le multiplier. Là, actuellement, on retrouve le milieu patronal au niveau des CRD, on va le retrouver au niveau des partenaires régionaux, alors, à un moment donné, c'est qu'on les sollicite tellement qu'ils décident tout simplement de travailler dans leur propre entreprise afin de mieux réussir et d'exporter leur marché plutôt que de travailler sur des structures à l'intérieur de structures, où souvent ils sont des figurants plutôt que de véritables partenaires.

Alors donc, M. le Président, je pense que c'est important de se poser des questions quant au citoyen. Est-ce que le citoyen ou la citoyenne, avec ce projet de loi, sera mieux servi, sera servi plus rapidement, plus efficacement? Je pense qu'on est en mesure de se poser ces questions. Est-ce que ce projet de loi permettra de l'aider davantage? Est-ce que ce brassage de structures va créer des emplois? Est-ce que celui ou celle qui cherche du travail, qui a besoin de renforcer son employabilité ou encore d'améliorer ses compétences, sera mieux servi et rassuré par le brassage de structures qui s'annonce dans les prochains jours, je devrais dire dans les prochaines semaines, dans les prochains mois, dans les prochaines années? Comment se feront tous ces arrimages d'une structure à l'autre, d'un palier à l'autre, d'une région à l'autre?

M. le Président, je souhaite bonne chance au gouvernement. Pour moi, c'est encore en bonne partie un véritable casse-tête, et nous n'avons pas, comme je le mentionnais, tous les morceaux de ce casse-tête. Je pense que, au-delà de toutes les structures, il est urgent que la qualité des services réponde adéquatement à un marché du travail qui évolue à une vitesse jamais égalée dans l'histoire contemporaine. Il est aussi urgent de remettre le Québec sur l'autoroute de la croissance économique afin que la qualité de vie de tous les Québécois s'en trouve améliorée. C'est pourquoi nous devons examiner avec beaucoup d'attention la proposition du gouvernement.

Comme je le mentionnais en commission parlementaire à la ministre: Comment voulez-vous que l'opposition vote pour quelque chose que nous avons de la difficulté à saisir ou encore quelque chose dont on ignore toute la portée? Parce que je répète que, dans le projet de loi de la ministre, il y a certaines créations de structures, mais, encore là, les centres locaux d'emploi... pardon, les centres locaux de développement et les centres locaux d'emploi – bien oui, c'est ça, à un moment donné, vous savez, on se perd avec le nom de toutes ces structures – seront créés à partir d'un autre document, du document du ministre responsable du développement économique.

Alors donc, il est difficile pour nous d'en saisir toute la portée. C'est quelque chose qui reste encore un peu nébuleux, puisqu'il nous manque des morceaux du casse-tête, et c'est pourquoi à ce moment-ci j'ai beaucoup d'hésitation à voter pour le projet, non pas que... Il y a une bonne proportion du projet de loi avec laquelle nous sommes en accord. Je pense qu'on est en accord avec tout le décloisonnement des services, des clientèles, de l'imputabilité, le fait de décentraliser par budget et non par programme, nous sommes d'accord avec ça, mais il y a encore certaines parties du projet de loi avec lesquelles nous ne sommes pas nécessairement en accord.

M. le Président, je souhaite aussi que la ministre prenne en considération la demande qui a été faite par la Commission de la construction du Québec. Comme je vous l'ai dit, quant à moi, je suis prête à retirer l'amendement qui a été proposé par l'opposition. Je vous remercie.

(16 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, je voudrais intervenir sur ce projet de loi n° 150 créant le ministère de l'Emploi et de la Solidarité. J'ai eu l'occasion, à l'adoption du principe, de venir devant vous pour exprimer mes commentaires mais également mes réserves face à ce projet de loi. Et, après l'étude du projet de loi en commission et sa prise en considération aujourd'hui, je voudrais réitérer devant cette Assemblée et à la ministre les réserves que j'avais exprimées, ainsi que ma collègue la députée de Saint-François et porte-parole en matière d'économie, par rapport à ce projet de loi.

Je crois que les opinions et les remarques qui ont été exprimées par l'opposition officielle visaient à démontrer tout l'intérêt que nous portons à l'emploi et aussi à la solidarité. Mais, face à ce projet de loi, le projet de loi n° 150, force est de constater que la montagne a accouché d'une souris, c'est le cas de le dire.

Aussi notre rôle comme députés, c'est également d'être à l'écoute des citoyens, d'être à l'écoute des décideurs. Et, comme ce projet de loi qui nous est proposé a un impact majeur, aux plans local et régional, je me suis appliquée à vérifier auprès des décideurs montérégiens, avec lesquels je travaille sur une base régulière sur le développement régional et le développement local, ce qu'ils pensaient de ce projet de loi.

Certes, par certains aspects le projet de loi peut présenter un certain intérêt. Par exemple, le fait que l'on regroupe à l'intérieur d'un même projet des structures déjà existantes, par souci d'éviter les dédoublements entre autres, le fait que le ministère de l'Emploi et de la Solidarité puisse regrouper le réseau des centres Travail-Québec, le réseau du Développement des ressources humaines Canada et la Société québécoise de développement de la main-d'oeuvre; au total, on parle de 287 points de services et structures.

J'ai eu l'occasion de vérifier l'intérêt des représentants du milieu local par rapport à ce regroupement et force est de constater que l'accueil est relativement satisfaisant. Mais, sur le reste et essentiellement sur toutes les autres structures – et la ministre tantôt faisait référence à un tableau qu'elle aurait diffusé en commission parlementaire – qui nous sont proposées, il y a lieu de questionner la pertinence ainsi que le bien-fondé de ces structures.

Alors, on sait très bien, M. le Président, que ce ministère-là, de l'Emploi et de la Solidarité, ne vient pas tout seul. Il ne vient pas tout seul, d'abord, parce qu'il y a une Commission des partenaires du marché du travail qui, elle, en principe, est chargée de l'application de la loi qui oblige les entreprises à investir au moins 1 % de leur masse salariale dans la formation. Elle a également entre autres mandats de déterminer les critères de répartition des ressources sur leur territoire. Mais son pouvoir, on le sait, demeure très limité.

Il y a également Emploi-Québec, une sorte d'unité autonome qui, elle, va se charger de la mise en oeuvre des mesures et programmes de la main-d'oeuvre et de l'emploi, et cette unité autonome de gestion va également se charger des ententes de la ministre avec les partenaires du marché du travail.

Alors, on serait tenté, dans un premier temps, de croire qu'il y a lieu ici de structures décentralisées, mais il n'en est rien parce qu'il y a un enchevêtrement de structures aux plans local et régional. Parce que ce projet de loi n'arrive pas tout seul. Au même moment et peut-être quelques semaines avant que la ministre ne dépose son projet de loi devant cette Assemblée, le ministre du Développement régional, lui, a rendu public son livre blanc sur le développement local et régional, lequel document est actuellement en consultation. Et, pas plus tard, je crois, qu'aujourd'hui, le représentant de l'aile parlementaire péquiste est en Montérégie en consultation sur ce document.

J'ai eu également des réactions là-dessus. Et qu'est-ce que les gens aux niveaux local et régional nous disent? Ils nous répondent qu'ils sont inondés de structures, qu'ils sont inondés de contradictions, aussi, de ce gouvernement, où les mêmes ministères, où les mêmes ministres n'arrivent pas à se parler pour coordonner leurs propres actions, et en même temps on demande aux milieux local et régional de s'approprier toutes ces structures qui sont en quelque sorte, parfois, dédoublées.

Alors, si je regarde par exemple le livre blanc du ministre du Développement régional, on nous propose quatre structures. Déjà là, il y a quatre structures. Il y a les centres locaux de développement, les CLD. Ces CLD seraient soutenus par le gouvernement mais gérés par le milieu. Alors, qu'est-ce que cela signifie? Parce qu'ultimement les citoyens se posent toujours des questions. Qu'est-ce que cela veut dire qu'ils seront soutenus par le gouvernement mais gérés par le milieu?

Alors, on apprend que les CLD doivent être financés par les municipalités. D'ailleurs, le projet de loi n° 137, dans son article 10, oblige les MRC à contribuer financièrement aux CLD. Les MRC vont établir un règlement pour déterminer la contribution des municipalités. Si toutefois la MRC ne le fait pas, c'est le gouvernement qui le fera. Alors, quand des choses comme ça arrivent dans le paysage et dans le milieu local et régional, cela crée des inquiétudes.

Deuxièmement, qu'est-ce qu'on a comme structure qui est proposée par ce gouvernement parallèlement au projet de loi n° 150 que la ministre nous propose? Évidemment, les centres régionaux de développement, les CRD. Je siège au CRD de la Montérégie, M. le Président. Je sais comment se fait la concertation régionale. On n'a pas besoin de superposer d'autres structures par rapport à ça pour travailler plus efficacement.

Troisième structure qui nous est proposée par le ministre du Développement des régions, la Conférence administrative régionale, la CAR, qui, elle, va établir au plan politique la mise en oeuvre de la table régionale des députés, ce qui est aussi une autre structure, M. le Président. Alors, on n'en finit plus d'envoyer dans le paysage structure par-dessus structure, ce qui est non seulement un manque de vision, mais c'est une confusion. Cela crée une confusion dans les esprits.

J'ai pu me rendre compte de cette réalité et à quel point les gens étaient confus par rapport à toutes ces structures qui leur sont garrochées – puis le terme n'est pas exagéré – lorsque, devant des décideurs, on leur a exposé ce que c'était, le guichet unique, ce que c'était, le CLD, ce que c'était, les CLE. Et les gens se posaient des questions, après la session d'information, pour savoir à quel dieu se fier, parce que c'est tellement de structures que les gens se demandent: Est-ce qu'on va avoir assez de monde pour pouvoir les libérer pour siéger sur toutes ces structures? Qui va les faire fonctionner? Et avec quel argent?

Ce qui est déplorable dans ce projet de loi, M. le Président, c'est qu'il y a une absence totale d'une véritable stratégie de l'emploi, ce dont, nous autres, on se préoccupe. Et je crois que le Parti québécois aussi devrait se préoccuper d'une véritable stratégie d'emploi. Le gouvernement a manqué une opportunité, à l'intérieur de ce projet de loi, de nous proposer quelque chose de concret qui va rallier non seulement l'opposition officielle, mais l'ensemble des Québécois.

C'est pourquoi, M. le Président, je joins ma voix à celle de notre collègue la porte-parole de l'opposition officielle en matière d'emploi pour dire à la ministre qu'il y a encore des devoirs à accomplir par rapport à ce projet de loi et exprimer les réserves non seulement de l'opposition, mais aussi témoigner et refléter les réserves qui sont exprimées par le milieu, dans la région de la Montérégie en particulier. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Mme la ministre, vous disposez d'un temps de parole de cinq minutes. Je vous cède la parole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, ce sera nécessairement bref. D'abord, j'aimerais déposer le tableau concernant la simplification des structures entre le développement local et régional et le nouveau ministère de l'Emploi et de la Solidarité. Je pense que le livre blanc de mon collègue le ministre responsable du Développement régional, au chapitre 3, va donner réponse à toutes les questions que Mme la députée de La Pinière a posées, en termes d'arrimage entre la politique active du marché du travail et la politique de développement local et régional.

Comme on le sait, la politique active du marché du travail sera une politique gouvernementale, mais avec une commission des partenaires qui aura un rôle prépondérant à jouer, alors que la politique de développement local et régional est laissée à l'initiative, n'est-ce pas, des forces vives des milieux locaux et régionaux. Alors, j'aimerais déposer ce tableau, qui va certainement satisfaire les attentes exprimées par Mme la députée de La Pinière.


Document déposé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le tableau est déposé.

(17 heures)

Mme Harel: M. le Président, je regrette de n'avoir pas pu suivre aussi attentivement que je l'aurais souhaité – je m'en excuse également – parce que je tenais à vérifier si nous avions reçu cette proposition d'amendement de la Commission de formation professionnelle de l'industrie de la construction. À 15 heures cet après-midi, je n'avais rien reçu, ayant fait la vérification avant de venir ici pour nos travaux. Et je viens à l'instant même de tenter de vérifier si nous l'avions reçue, et on me disait que non.

Alors, écoutez, M. le Président, je comprends que ce serait vraiment trop improvisé, à ce stade-ci de nos travaux, que de procéder à l'examen de projet d'amendement qui ne m'aurait pas encore été transmis. Alors, ce que je vous propose, c'est de procéder, donc, à l'adoption du rapport de la commission parlementaire et des amendements qui jusqu'à maintenant ont été déposés.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre. Il n'y a plus d'autres interventions.


Mise aux voix des amendements de la ministre

Alors, les amendements proposés par Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous passons maintenant au rapport tel qu'amendé. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 150, Loi sur le ministère de l'Emploi et de la Solidarité et instituant la Commission des partenaires du marché du travail, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Je vous demande de prendre en considération l'article 7 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 142


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 7, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux propose l'adoption du principe du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

Est-ce que nous avons déjà débuté ce projet de loi? Oui. Alors, je suis prêt à entendre le prochain intervenant. M. le député de Nelligan, je vous cède la parole.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je vois déjà le niveau d'intérêt, de l'autre côté de la Chambre, sur ce sujet. J'espère qu'ils vont aussi prendre la parole et dire ce qu'ils pensent du projet de loi n° 142. M. le Président, s'il vous plaît.

Il me semble, M. le Président, que la loi n° 142, ce n'est pas un pas tellement positif pour les citoyens québécois. Le projet de loi n° 142, la Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, ça a l'air sérieux, ça a l'air important. Effectivement, on touche un sujet assez important.

Mais, M. le Président, voulez-vous voir ce projet de loi? C'est comme ça, là, 49 mots. Quarante-neuf mots, je pense que c'est une bonne démonstration du niveau d'importance que ce gouvernement accorde à la santé et au bien-être des contribuables, des Québécois et Québécoises, et particulièrement à nos aînés: 49 mots. Il y a eu cinq mois avec ce système de taxe sur les médicaments, cinq mois, c'est plus ou moins 10 mots par mois. Est-ce que le ministre a vraiment tenu compte de ce que les citoyens ont dit? Je pense que non. Seulement 49 mots pour un projet de loi aussi important qui change le régime d'assurance-médicaments d'une façon incroyable, qui taxe les contribuables, les citoyens à un niveau de plus ou moins 300 000 000 $ de plus.

Avec ça, M. le Président, ce n'est pas nécessairement un grand atout aujourd'hui de voir que le ministre veut procéder avec le projet de loi n° 142 qui, comme je l'ai mentionné, comprend 49 mots. Le Protecteur du citoyen a dit qu'il a déjà reçu 800 ou peut-être maintenant presque 1 000 plaintes. Le programme a commencé le 1er janvier, M. le Président, cette année, et ils ont déjà reçu presque 1 000 plaintes. C'est plus ou moins 20 mots par plainte. Est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux, le technocrate, prend les demandes des contribuables et des citoyens d'une façon sérieuse? J'ai de forts doutes, M. le Président. Le projet de loi n° 142 change les règles de paiement. Avant ça, c'était chaque trois mois. Maintenant – et je vais expliquer ça un peu plus tard – il dit qu'on peut payer chaque mois. Merci beaucoup, M. le Président, mais ça ne change rien. Je sais que c'est une petite nuance, et les contribuables, les Québécois et Québécoises ont demandé beaucoup plus que ça.

Avec ça, c'est un réaménagement des chaises sur le Titanic. C'est un système qui ne marche pas, et maintenant le ministre arrive avec ses petits changements et il essaie de convaincre les citoyens québécois que c'est quelque chose d'utile. Peut-être que ce petit geste, c'est un petit, petit pas pour quelques personnes, mais tout le monde a demandé beaucoup plus que ça. Et ça vient du même gouvernement qui est carrément contre le programme que nous avions quand nous étions au pouvoir. Nous avions dit que nous allions avoir un programme pour les Québécois et Québécoises, mais ça allait coûter 2 $ par médicament, 2 $ par prescription, avec un maximum de 100 $. Mais maintenant, ces mêmes citoyens doivent payer beaucoup plus que le 100 $; ils doivent payer leur franchise, ils doivent payer le copaiement, ils doivent payer le 25 %, et ça peut continuer jusqu'à 1 000 $, s'il y a un couple.

Les contribuables et les citoyens ont téléphoné à mon bureau, ils sont venus me visiter et ils sont entrés, je pense, à chaque bureau de comté, ils ont dit que ça leur fait mal. On a eu des personnes qui sont entrées et qui ont dit: J'ai besoin de choisir entre manger et prendre mes médicaments. Je pense que vous avez tous reçu des demandes comme ça. Mais maintenant, le ministre donne le choix de ne pas bien manger chaque trois mois, mais maintenant, vous allez avoir cette possibilité de ne pas bien manger chaque mois! Ça ne change rien, ça ne change absolument rien quant aux montants que le contribuable doit payer.

Laissez-moi juste expliquer, M. le Président. For example, the maximum combined premium and deductible payment for a welfare recipient receiving the maximum guaranteed income supplement would be $16.67 a month instead of $50 for three months; $16.67 times three comes to $50. What do you change? For seniors receiving a partial income supplement, it will be $41.67 a month instead of $125 quarterly. You make the calculation: it's the same thing. And for seniors who aren't getting an income supplement, it will be $62.50 a month instead of quarterly limits of $187.50. You do the calculations, it is no game whatsoever.

M. le Président, les Québécois, et particulièrement les aînés, ont tous dit que c'était trop demander, de payer des montants aussi élevés que ça. Laissez-moi juste expliquer ce que le fameux projet de loi n° 142 dit. Selon le projet de loi annoncé hier, le retraité ayant le droit au maximum de supplément du revenu aurait, lui aussi, une franchise de 16,67 $ par mois à payer, tandis qu'elle serait de 41,67 $ par mois pour les retraités qui n'ont pas droit à la totalité du supplément. L'ensemble des autres assurés paieraient une franchise mensuelle de 62,50 $ au lieu du paiement trimestriel de 187 $. Avec ça, avec ces modifications, à compter de juillet, un assisté social qui doit acheter 60 $ de médicaments paierait 16,67 $. Auparavant, il aurait payé 33,75 $, soit la franchise trimestrielle de 25 $. Mais, s'il y a une personne qui a besoin de beaucoup de médicaments, ça ne change presque rien pour elle.

(17 h 10)

Nous avons voulu avoir plus de changements, plus d'ouverture d'esprit, parce que la population québécoise dit que c'est un mauvais système. Ce n'est pas un système universel de médicaments, c'est un système de taxe-médicaments. C'est clair, le ministre a dit ça pendant les crédits, il est en train de fouiller dans les poches québécoises, particulièrement celles des personnes âgées, 253 000 000, $ et pour les assistés sociaux, 37 000 000 $, un total de 290 000 000 $ que le gouvernement est en train d'aller chercher chez les plus démunis de notre société. Je trouve, M. le Président, que c'est complètement inacceptable.

Le programme de taxation des médicaments, la taxe-médicaments, est un ajout sur la vague et l'avalanche de taxes que les contribuables ont reçues, particulièrement nos aînés. Ils ont reçu une augmentation des frais d'hébergement, ils ont reçu les autres augmentations de taxes, particulièrement lors du pelletage, maintenant, de ce gouvernement qui envoie toutes les responsabilités et les taxes au niveau municipal. Les personnes âgées, nos aînés, souvent, leur maison peut avoir une évaluation assez élevée, mais leurs revenus, ne sont pas nécessairement aussi élevés que ça. Mais, à cause de tout ce changement de fardeau fiscal, c'est eux qui vont payer très cher pour cette nouvelle taxe-médicaments.

Avec ça, ce n'est pas surprenant que nous ayons vu que les médecins ne sont pas impressionnés. Ce n'est pas surprenant que les docteurs, les médecins sortent contre les annonces. Des médecins dénoncent l'assurance-médicaments. Ce n'est pas le Parti libéral du Québec, c'est les médecins. Est-ce qu'ils se sont trompés? Non, c'est eux autres qui vivent l'expérience quotidienne devant la population. Et moi-même, dans mon bureau de comté, j'ai eu la visite de personnes qui ont des problèmes graves à cause de cette situation.

Nous avons eu, juste avant-hier, un dépôt de pétition, 7 000 personnes qui ont signé une pétition contre ce projet de loi. M. le Président, dans mon comté, nous avons eu une pétition organisée par un groupe d'aînés, le Conseil des aînés. Et je voudrais les féliciter de leur travail et de leur engagement pour essayer de protéger ces contribuables et ces citoyens. Ils ont ramassé plus de 1 000 signatures, 1 108 pétitionnaires du comté de Nelligan. C'est M. George Cross qui a organisé ça. Et j'ai eu le plaisir, l'honneur de déposer cette pétition le 15 mai 1997. Mais le ministre n'a pas écouté. Jour après jour, les citoyens ont signé des pétitions pour convaincre le ministre. Ça n'a pas de bon sens d'arriver avec ces petits changements comme ça!

Qu'est-ce que le ministre fait? Il n'écoute pas, il ne répond pas à leurs besoins. Il arrive avec un projet de loi qui dit: Bon, je vais changer les paiements, maintenant, vous avez l'obligation de faire ça chaque trois mois, maintenant, vous avez un plafond à chaque mois. Ça ne donne pas grand-chose, quand vous êtes en train d'être taxé indirectement pour un autre 1 000 $, particulièrement quand vous êtes malade.

Avec ça, M. le Président, j'espère que le ministre va avoir le courage de ne pas pousser ce projet de loi trop vite, peut-être de prendre un après-midi ou une journée pour écouter les plus grands interlocuteurs dans ce réseau. Nous avons eu les groupes, 7 000 personnes qui ont signé une pétition. Nous avons eu les médecins qui ont signé les annonces contre ce projet de loi, trouvez-en quelques-uns, demandez à quelques-uns de venir nous voir ici, à l'Assemblée nationale, et d'expliquer ce qui se passe dans ce programme. Est-ce que le ministre est en train de dire, avec son projet de loi n° 142, que le seul et unique problème dans son réseau de taxation-médicaments est la différence entre trois mois et un mois de paiement? Non, M. le Président. J'espère qu'il a au moins compris le message plus que ça.

Je pense, M. le Président, que – c'est essentiel maintenant – après cinq mois de ce désastre, cette mauvaise façon de gérer nos programmes de médicaments, nous avons besoin d'avoir une commission parlementaire sur ça. Comme vice-président de la commission des affaires sociales, j'ai demandé d'avoir une commission parlementaire sur les médicaments. J'espère que, demain, pendant notre séance de travail, nous allons avoir une bonne chance de nous assurer que les deux côtés adoptent cette recommandation.

Mais il y a aussi le projet de loi n° 142 devant nous. Je pense que c'est un niveau d'urgence. On doit en convoquer quelques-unes... nous n'avons pas besoin de prendre toutes les journées qui restent avant la fin de la session. On peut, je pense, avoir un consensus sur quel groupe on peut demander, les grands interlocuteurs, ceux et celles qui représentent les malades, ceux et celles qui représentent les interlocuteurs professionnels sur cette question, on peut faire un bon échange pour mieux comprendre les problèmes de cette régie des médicaments.

M. le Président, je sais que le ministre de la Santé et des Services sociaux pense plus comme un adjoint parlementaire du ministre des Finances. Je sais qu'il est sous la tutelle du ministre des Finances. Je sais que la commande vient de la plus haute instance de ce gouvernement qui dit: Cherche tous les sous sur le dos de la population québécoise, nonobstant l'impact, cherche les sous chez les plus vulnérables, cherche à essayer de trouver une façon de récupérer le plus grand niveau d'argent possible, nonobstant l'impact sur la santé physique ou la santé fiscale de la population. Et, malgré tous les beaux discours pendant la dernière campagne électorale, où ils disaient: Ah! Nous n'allons jamais faire quelque chose comme ça. Nous allons abolir le fameux 2 $. Oui, effectivement, ils ont aboli le fameux 2 $, mais ils ont augmenté ça à un maximum de 100 $, et maintenant, c'est augmenté jusqu'à 750 $, M. le Président. Ce n'est pas une façon de gouverner.

Je comprends, il y a une stratégie de ce gouvernement qui met la qualité des soins, la qualité de notre système de santé en deuxième importance de la question fiscale. Ce n'est pas surprenant que le ministre dise: L'attente d'une chirurgie contribue à assainir les finances publiques. Ils utilisent les médicaments, ils utilisent les listes d'attente, ils utilisent la santé des Québécois et Québécoises pour sauver de l'argent. C'est inacceptable, M. le Président.

Mr. Speaker, I was very disappointed when I saw Bill 142. Bill 142 that has the explanatory notes as long as the actual project: 49 words. It doesn't respond to the interest of Quebeckers. It clearly shows that the Minister hasn't been paying any attention. Senior citizens are saying that they are choosing between eating and taking their medication. Senior citizens are saying: We have been taxed up to here. This Government has a literal attack on the senior citizens, whether it's through taxation, directly or indirectly. Mr. Speaker, it is clear that this doesn't respond in large measure to the concerns of the citizens of Québec. I would suggest that the Minister convene in the briefest delay a special commission before we finalize the adoption of this «projet de loi» so that we can hear from them.

Parce que peut-être que le ministre n'est pas au courant de tous les autres problèmes. Moi, j'ai parlé avec quelques entreprises, des PME, qui ont une police d'assurance qui n'inclut pas les médicaments. Mais, à cause de l'obligation de ce fameux programme de taxe-médicaments, ils n'ont pas le droit d'avoir une police juste sur la vie et les choses qui touchent le caractère des soins, si ça n'inclut pas les médicaments. Avec ça, M. le Président – peut-être que le ministre n'est pas au courant de ça – mais plusieurs PME ont lâché leur programme parce qu'ils n'ont pas eu les moyens de payer les sommes dues. Qui est sorti gagnant? Personne. C'est particulièrement vrai pour les PME avec un âge moyen plus élevé que la moyenne, c'est les boîtes de professionnels, etc., et peut-être qu'il n'est pas au courant de ça. Si on peut profiter de la présence de tous les députés ici avant le passage de ce projet de loi, on peut ajouter plusieurs articles à ce projet de loi n° 142 pour continuer de bonifier le programme de médicaments, que malheureusement presque tous les Québécois appellent une taxe-médicaments.

(17 h 20)

M. le Président, j'espère que le ministre va nous écouter cette fois. C'est un programme qui ne marche pas de la façon que les Québécois veulent. C'est une augmentation de taxes qui est assez difficile pour nos aînés; un de nos aînés sur trois vit dans des situations tellement difficiles. Ce gouvernement a appauvri nos aînés. On doit maintenant arrêter ces démarches, on doit s'assurer que nous ayons un programme beaucoup plus juste et équitable.

Nous avons appris aujourd'hui, M. le Président, que, malgré les annonces à l'effet que les CLSC sont la porte d'entrée du système de santé et des services sociaux – c'est ça qu'il dit: Les CLSC sont la porte d'entrée dans le système de santé et des services sociaux – c'est ici, à l'Assemblée nationale, qu'est la porte d'entrée. On doit arriver avec nos cas de comté, on doit questionner le ministre avant qu'il bouge, sur des questions comme ça. Avec ça, M. le Président, c'est malheureux qu'effectivement on ne sache pas, cas par cas, comment on peut régler un problème aussi grave que ça. On doit recommencer à la base.

C'est déjà cinq mois d'un très mauvais projet. Quelle réponse avons-nous eue du ministre? Un projet de 50 mots. Il me semble qu'il peut faire mieux que ces 10 mots par mois. Avec ça, M. le Président, je voudrais qu'il nous écoute. Comme les médecins le disent, c'est un «window dressing», c'est un réaménagement des chaises sur le Titanic. On doit s'assurer que les contribuables et les citoyens québécois soient mieux traités que ça.

M. le Président, j'espère que le ministre va avoir le courage – et j'ai entendu peut-être un appui, de l'autre côté de la Chambre, à mes remarques – d'arrêter le programme. Donnons-nous le temps ensemble de bonifier ça. Invitons les groupes le plus tôt possible et, ensemble, on peut trouver les moyens d'assurer aux Québécois et aux Québécoises les moyens d'avoir accès aux meilleurs médicaments possible, mais pas au prix que le ministre a établi, et on peut établir un système qui soit un vrai système d'accessibilité pour les médicaments et qui ne soit pas vraiment un système pour encore fouiller dans les poches des Québécois. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Il n'y a plus d'autres intervenants? Je m'en vais céder la parole maintenant à M. le ministre pour son droit de réplique. M. le ministre.


M. Jean Rochon (réplique)

M. Rochon: Merci, M. le Président. Je serai bref, mais je pense qu'il est important, en terminant ce débat, de souligner un certain nombre de points.

Dans toutes les interventions qu'on a entendues de la part des membres de l'opposition, il y a eu encore toute la rafale de critiques sur la politique budgétaire du gouvernement, interprétant que le ministre de la Santé agit plus comme un agent du Trésor que comme un ministre de la Santé. Je voudrais bien rappeler aux gens que ce n'est pas ça du tout, la situation. On est dans une situation d'un gouvernement qui assume ses responsabilités, qui veut assainir les finances publiques, et d'un ministre de la Santé qui, avec l'ensemble du réseau de la santé et des services sociaux, travaillent très fort et, grâce à ce réseau et aux travailleurs qui y sont, réussissent, malgré le contexte budgétaire difficile, à maintenir notre système, à en améliorer des bonnes parties et à le transformer pour en faire vraiment le système performant dont on aura besoin en l'an 2000.

Si on compare ça à ce qui se passait avant, il avait déjà commencé à y avoir des diminutions de crédits sous l'ancien gouvernement, dans le système de santé et des services sociaux, mais c'était fait sans un changement important dans notre système. Les crédits diminuaient, il y avait des compressions importantes qui étaient déjà ressenties, il ne faut pas oublier ça, et, malgré ça, on continuait à s'endetter en augmentant les déficits à chaque année. Là, on a une situation où le déficit est après disparaître. Notre système se transforme et s'améliore, tout en reconnaissant que c'est une situation qui n'est pas toujours facile à vivre, parce qu'un changement de système aussi rapide, vu qu'on a commencé un peu en retard, ne se fait pas de façon tout à fait neutre, mais on commence à voir sérieusement de la lumière au bout du tunnel.

En ce qui regarde plus spécialement le programme d'assurance-maladie et l'amendement qui est proposé aujourd'hui, on nous dit que la situation qui existait avant était bien meilleure et qu'on devrait revenir à cette situation. Il y a deux choses que je voudrais rappeler à ce sujet-là, juste pour qu'on voie les choses dans leur perspective, M. le Président. Les difficultés de financer totalement sur les fonds publics le médicament existaient avant le changement de gouvernement. On se rappellera que le gouvernement précédent, tout ce qu'il avait trouvé comme solution, ça avait été de suspendre ce qu'on appelle la circulaire malades sur pied, c'est-à-dire cette circulaire administrative qui définissait les conditions dans lesquelles le gouvernement payait pour les médicaments des personnes qui souffrent de maladies chroniques qui demandent des médicaments souvent coûteux, soit pour un cancer, pour une fibrose kystique, pour le sida. Alors, la façon qu'avait trouvée le gouvernement précédent de régler le problème, ce n'était pas de demander une contribution en assurant le médicament à tout le monde, c'était d'annuler, de suspendre cette circulaire et de dire aux gens qui doivent prendre des médicaments coûteux pour une maladie chronique, donc à long terme: À l'avenir, débrouillez-vous, on ne paie plus vos médicaments. On avait trouvé une autre solution, qui était le 2 $, et on a dit: Il faudrait ramener le 2 $.

Alors, pour répondre à ça, je vais simplement prendre le même type de référence qu'utilisent les membres de l'opposition pour faire ces discussions-là, c'est-à-dire ce qu'on voit dans les journaux. Et là, ce n'est pas dans n'importe quel journal, ce n'est pas n'importe quel journaliste, c'est Le Devoir , Michel Venne, qui connaît très bien ce programme, qui a suivi toute la discussion sur l'assurance-médicaments, qui est intervenu à différents moments de façon critique, très correctement; donc, ce n'est pas quelqu'un de complaisant. Mais là, ce qu'il nous dit, c'est que, devant la suggestion qui est faite de revenir au 2 $ comme une autre solution, on titre son article dans la page éditoriale du Devoir de ce matin: Contre un retour au «p'tit deux» , le petit 2 $. Et ce qu'il dit plus spécialement, M. Venne, c'est que cette proposition «de revenir au régime du "p'tit deux" est irrecevable. Ce régime a fait la preuve de son inefficacité. La tarification n'avait eu aucune influence sur la consommation de médicaments. Ce mécanisme était en outre inéquitable, puisqu'il était appliqué sans égard à la capacité de payer.» Un banquier ou un assisté social qui avait passé le cap de 65 ans, donne-t-il comme exemple, payait de toute façon le 2 $.

Par rapport au régime actuel, ce qu'il en dit, c'est que «malgré ses imperfections», c'est un régime qui est encore à bonifier, on l'a dit, c'est un régime qui «est basé sur le niveau de revenus des gens, jusqu'à un plafond annuel». C'est un régime, donc, qui «est, en soi, plus équitable», dit-il. Sans compter que, note-t-il, plus de 1 000 000 de personnes – on sait que c'est 1 400 000 personnes – qui n'étaient pas assurées du tout désormais vont l'être. Il ajoute que c'est un régime, en plus, qui «responsabilise les gens», parce que la baisse de consommation des médicaments, dit-il, n'est pas mauvaise en soi.

Et on sait que ce n'est pas neutre, l'utilisation du médicament. On sait, par des études qui ont été faites, que les gens qui prennent régulièrement plusieurs médicaments, 20 % de ces gens-là se retrouvent dans une urgence dans l'espace d'une année pour un problème causé par le médicament ou pour une consommation inadéquate du médicament et que, parmi ces gens-là, il y en a un autre 20 % – de ceux qui vont à l'urgence – qui doivent être hospitalisés tellement leur situation est grave à cause d'une mauvaise utilisation du médicament. Donc, une diminution bien encadrée, comme je le démontrais dans la présentation du projet de loi, est une bonne chose.

Finalement, il dit très bien qu'avec les ajustements qui ont été faits périodiquement au programme on a montré que c'était un régime qui était adaptable. Donc, conclut-il, on a là vraiment, avec la mensualisation, un mécanisme d'évaluation. Tout ce qu'il nous reste à faire, dit-il, pour améliorer encore plus, c'est d'avoir un mécanisme d'évaluation impartial du régime.

Or, j'ai pu annoncer ce matin qu'il est prévu dans la loi, et nous en donnerons les détails dans les prochains jours, qu'effectivement on aura un groupe de concertation qui va aviser le ministère, le ministre sur le développement de la politique du médicament et qu'on a en plus une étude, au cours des 18 prochains mois, qui va être faite par des universitaires pour aller évaluer justement, de façon très, très sur le terrain, surtout auprès des personnes âgées ou des prestataires de la sécurité du revenu, quel est l'effet du médicament sur eux.

(17 h 30)

Alors, je termine, M. le Président, en rappelant que les témoignages qu'on entend de gens qui ont vu ce programme-là de façon critique nous confirment que c'est un pas dans la bonne direction. Je répète qu'on pourra toujours bonifier encore ce programme, surtout si le fédéral réalise enfin qu'il doit nous donner plus d'argent qui nous revient. Avec ça, on pourra encore faire un grand pas en avant dès qu'on aura cet argent-là. On n'aura pas besoin d'attendre un grand programme fédéral pour faire ça. Et là, enfin, avec cette modification, je pense qu'on donne aux Québécois et aux Québécoises un régime qui est vraiment un partage équitable selon les moyens de chacun et une accessibilité aux médicaments selon nos besoins. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé. Comme vous avez utilisé votre droit de réplique, le principe du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): En conséquence, je suspends donc les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

(Suspension de la séance à 17 h 31)

(Reprise à 17 h 34)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes maintenant réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

Nous allons entreprendre nos travaux tout d'abord par les remarques préliminaires. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Remarques préliminaires


M. Jean Rochon

M. Rochon: Alors, mes remarques vont être très, très courtes, M. le Président. Je pense qu'on vient de terminer le débat sur l'adoption du principe de ce projet de loi. Il y a, en fait, une modification qui est toute simple, qui est toute courte. Il s'agit d'un article – et je le lis – qui dit que la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives est modifiée par le remplacement du mot «trimestre» par le mot «mois» partout où il se trouve dans les articles 26, 28, 30, 32 et 33.

Alors, comme on l'a très bien expliqué, le régime reste essentiellement ce qu'il est dans tous ses paramètres, dans tout son fonctionnement, avec tous les mécanismes au niveau de la confection de la liste, du contrôle de l'utilisation des médicaments, du développement d'une politique du médicament, d'un comité qui va aviser le ministre sur les médicaments. Tout reste, y compris la philosophie de ce système, si vous voulez. Mais, pour répondre à la difficulté de disponibilité de fonds, pour les gens qui pouvaient avoir une première facture au début d'un trimestre qui était un peu élevée – jusqu'à 50 $ – on ramène le plafond sur une base mensuelle plutôt que trimestrielle, ce qui veut dire qu'avec ce changement-là, pour toutes les personnes au Québec, le plus que ça pourra coûter pour leurs médicaments par mois, c'est une soixantaine de dollars, pour des gens qui ont le plafond maximal de 750 $ par année, ou une quarantaine de dollars, 41 $, pour les personnes âgées qui ont le supplément partiel du revenu garanti. Et, pour des gens qui sont les plus vulnérables, les moins bien nantis, qui ont des plus bas revenus dans notre société, eh bien, ce plafond annuel, qui est à 200 $, voudra dire que le médicament ne pourra pas coûter plus que 16,60 $ par mois, peu importe le coût de la prescription.

Alors, je pense que c'est un changement, j'espère, qu'on peut faire rapidement, et on aura, en plus de tous les ajustements qu'on a pu faire pour rendre le système très bien stabilisé maintenant, bonifié déjà le système moins de six mois après son existence. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le leader de l'opposition et critique officiel en matière de santé, vos remarques préliminaires.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je dois déplorer à ce moment-ci que les députés qui ont parlé au moment de l'adoption du principe du projet de loi n'aient pas reçu de la part du ministre une oreille attentive. Que les députés n'aient pas reçu une oreille attentive, ça peut se comprendre, mais que les gens qui sont intervenus depuis le lancement de ce programme de taxe-médicaments n'aient pas reçu d'oreille attentive de la part du ministre, c'est ce qui nous perturbe davantage.

M. le Président, nous avons insisté auprès de la députation ministérielle et du ministre pour que les personnes âgées du Québec, dont la grande majorité vit sous le seuil de la pauvreté, ne se voient pas imposer de façon continue – et c'est cette décision-là que maintient le ministre et que maintiennent les députés ministériels – une taxe de 253 000 000 $ sur un plan annuel. On a plaidé pour que les gens qui sont sur l'assistance sociale et qui, elles aussi, ces personnes-là, se doivent de choisir entre prendre des médicaments ou se nourrir ne se voient pas imposer une taxe additionnelle de 37 000 000 $, M. le Président.

On a demandé et invité le ministre à profiter de l'occasion, au lieu de simplement étaler les paiements... Parce que, là, le projet de loi, tout ce qu'il vise à faire, M. le Président, c'est qu'avant ça on payait le ministre, si on était une personne âgée ou un assisté social ou un bénéficiaire du régime – c'est un grand mot, «bénéficiaire»! – quatre fois par année; là, on va le payer 12 fois par année. Au lieu de se rappeler de lui quatre fois par année, on va souvenir de lui 12 fois par année, M. le Président. Les paiements vont être moindres à chaque fois qu'on va les faire, mais, au total, ça ne change rien.

La taxe qui a été votée en pleine nuit, à 5 heures du matin, par le ministre et des députés ministériels, sur les pauvres et les plus démunis de la société, une taxe de 300 000 000 $, va continuer à être une taxe de 300 000 000 $ sur les pauvres et les plus démunis. Moi, j'ai été désolé de constater que les ministériels ne sont pas plus réveillés à 5 heures du matin qu'à 17 heures. La dernière fois que le projet de loi avait été voté, c'était à 5 heures du matin. Là, on allait fouiller dans la poche des gens. Cette fois-ci, on leur dit: On vous prend le même montant, mais, au lieu de nous payer quatre fois, vous allez nous payer 12 fois.

(17 h 40)

M. le Président, il y a quelque chose, là, qui ne réussit pas à pénétrer l'esprit ou la volonté politique de ce gouvernement-là de se porter à la défense des gens qui n'ont pas les moyens de payer, comme tel. Vous le savez, M. le Président, comment les municipalités font une guerre pour le 500 000 000 $ que le gouvernement veut aller chercher. Le ministre, lui, il va chercher 300 000 000 $, puis les députés péquistes applaudissent. Moi, je les ai tous vus tantôt, là, applaudir le ministre, le féliciter d'aller chercher dans la poche des personnes âgées de 65 ans et plus, dont la majorité vivent sous le seuil de la pauvreté, 253 000 000 $. Je n'en revenais pas, M. le Président! À 5 heures du matin l'année passée, je me suis dis, c'est passé inaperçu, mais, à 17 heures, là, je pense que c'est de la récidive.

Même chose en ce qui concerne les assistés sociaux, M. le Président. Ces gens-là n'ont pas les moyens. Si on ne veut pas écouter l'opposition, est-ce qu'on pourrait au moins – puis c'est peut-être une question que j'adresse au ministre de la Santé – entendre certains bénéficiaires et leurs médecins? Pas les docteurs ministres, là, mais les docteurs qui pratiquent, les médecins qui pratiquent dans les milieux les plus défavorisés, ceux qui pratiquent vraiment la médecine, là, puis qui ont lancé une pétition qui a été déposée à l'Assemblée nationale du Québec. Est-ce qu'on pourrait faire l'effort, là, de profiter de l'ouverture de la loi, pas pour étaler les paiements – qui demeurent les mêmes – mais pour faire en sorte qu'on corrige les injustices? Puis pas strictement, M. le Président, pour des fins sociales, mais pour des fins économiques également.

J'ai attiré l'attention aujourd'hui du ministre – j'espère – et des députés ministériels sur des études publiées à travers le monde, où on a vécu l'expérience que de taxer les médicaments des plus riches, ça finit par coûter plus cher. Puis ça ne finit pas loin par coûter plus cher. Quand la personne ne prend pas ses médicaments, elle doit être hospitalisée, M. le Président. Et, quand on hospitalise quelqu'un, c'est 500 $ par jour. Est-ce que ça ne vaut pas la peine pour le ministre de s'arrêter quelques secondes puis de réfléchir, puis de réfléchir aux statistiques qui nous parviennent de sondages effectués par des organismes qui s'occupent des plus démunis dans la société?

À titre d'exemple, M. le Président, l'organisme Jeunesse au soleil a fait effectuer un sondage auprès de 150 personnes qui sont une clientèle de Jeunesse au soleil, donc des personnes démunies, par définition. Parmi ces personnes-là, 47 % avaient dû réduire leur médication. Parmi ces personnes-là, 67 % avaient dû réduire leur consommation d'aliments – les gens avaient à choisir entre s'alimenter ou prendre des médicaments. 40 % avaient dû cesser les médicaments. Est-ce qu'on peut demander au ministre, bien sincèrement, combien a coûté l'hospitalisation de ces gens-là? Est-ce que ça a coûté plus cher que la taxe sur les pauvres que le ministre a imposée? Puis, si c'est le cas, comme toutes les études le démontrent, pourquoi le ministre, au lieu de s'entêter puis dire: J'ai raison puis il n'y a pas de problème, puis le seul problème, c'est qu'ils vont me payer 12 fois plutôt que me payer quatre fois, le même montant, ne prend pas conscience de ces véritables problèmes là qui sont vécus et qui occasionnent des coûts supérieurs puis ne profite pas de l'ouverture – on est en fin de session, tous les consentements sont possibles – pour corriger une erreur majeure de son programme d'assurance-médicaments?

Le fait que les gens qui n'étaient pas assurés soient assurés, je pense que c'est un pas dans la bonne direction, M. le Président. Tout le monde souhaitait que les gens qui ne l'étaient pas le soient. Mais personne n'a souhaité que le régime soit financé par les plus démunis. Personne n'a souhaité que le gouvernement impose une taxe de 300 000 000 $ aux personnes de 65 ans et plus et aux bénéficiaires de l'aide sociale. Personne n'a voulu que ces gens-là, lorsqu'ils cessent leur médication ou qu'ils choisissent entre s'alimenter ou se médicamenter, M. le Président, retournent à l'hôpital puis occasionnent des coûts à la société qui défont finalement toutes les économies que le ministre a voulu faire ou annulent toutes les taxes qu'il a voulu collecter dans les poches de ces gens-là.

Est-ce que c'est trop demander à ce moment-ci au ministre de la Santé de prendre connaissance de la pétition qui a été déposée hier à l'Assemblée nationale, qui a été signée à l'initiative de vrais docteurs, de médecins qui soignent le monde dans leur quotidien, et qui a été signée par des personnes qui sont soit des bénéficiaires, soit des proches parents ou des amis, ou des groupes communautaires, de ces bénéficiaires-là et de profiter de cette occasion-ci, M. le Président, pour que le projet de loi qu'on aura adopté, ça ne soit pas un seul article pour étaler les paiements?

Ça m'a l'air du style de projet de loi «Household Finance». Tu es mal pris, tu es en faillite, tu n'arrives plus à joindre... on va consolider tes dettes. Est-ce que le ministre peut comprendre que, pour les assistés sociaux, ce n'est pas, comme quelqu'un l'a déjà mentionné de l'autre côté de la Chambre, une incapacité ou un manque d'intelligence d'équilibrer le budget? Quand tu n'en a pas, de budget, tu n'as pas de capacité de l'équilibrer.

Est-ce que le ministre peut prendre connaissance du témoignage qui a paru ce matin d'une maison qui vient au secours des femmes, à Québec, qui était publié dans The Gazette et où la personne responsable a dit: Moi, je me suis assis avec ces gens-là puis j'ai tenté de faire leur budget pour tenir compte de la taxe-médicaments du ministre, puis ça n'additionne pas, ça n'arrive pas?

Est-ce que le ministre peut faire cet effort-là ou s'il va se péter les bretelles en disant: Bon, bien, là, maintenant, ce n'est plus 50 $ qu'ils auront à me payer, ces gens-là, à tous les trois mois, ça va être 16 $ à tous les mois, puis penser qu'il devient ainsi un héros national puis qu'il a corrigé les lacunes d'un système qui va fouiller dans la poche des gens les plus démunis et les plus pauvres, des gens qui n'ont pas de ressources à fournir à la société? Si le ministre est prêt au moins, s'il ne nous croit pas, à entendre ces gens-là, à entendre de vrais médecins en commission parlementaire, qui ont une vraie pratique médicale, à entendre de vrais patients qui ont eu à faire ces choix-là et possiblement à entendre également quelqu'un d'un groupe social, soit de l'organisation Jeunesse au soleil ou des maisons d'hébergement à Québec, ou il choisira – moi, je n'ai pas, là-dessus, de doctrine – ils ont tous le même message: c'est que, dans la réalité, en dehors de la pensée technocratique, de la pensée magique technocratique, ça ne fonctionne pas pour les gens qui n'ont pas d'argent... Si le ministre est prêt à faire ça, M. le Président, nous, nous sommes prêts à tous les consentements et à toutes les ouvertures.

Si le ministre veut s'entêter à penser que son plan technocratique est bon, que, parce qu'il a corrigé de payer quatre fois par année par 12 fois par année, il vient d'atteindre ce qu'on appelle «l'équilibre de son système» puis qu'il n'y a plus de problème, j'espère qu'il va y avoir, comme dans d'autres dossiers, des députés de l'autre côté qui, au lieu de se faire le porte-parole du ministre envers les plus démunis, vont se lever et se faire le porte-parole des plus démunis contre le ministre.

M. le Président, on est dans une situation où on ne peut pas s'objecter à étaler les paiements, bien que ça ne change pas le montant, mais on peut s'objecter au fondement même d'un régime qui taxe pour 253 000 000 $ sur une base annuelle, pour le moment, parce qu'on sait comment ça part, ces régimes-là, mais on ne sait jamais comment ça arrête. Les personnes de 65 ans et plus que vous avez dans votre comté, puis vous le savez, contrairement à ce que le ministre a dit, ces gens-là, ce n'est pas tous des gens riches. La majorité, ce sont des gens pauvres.

Comment on peut aller chercher 37 000 000 $ chez les bénéficiaires de l'aide sociale? Les personnes âgées, là, elles sont 880 000 à peu près à se faire taper sur la tête par le ministre. Les bénéficiaires de l'aide sociale, ils sont plus de 800 000. Ça, c'est plus de 12 % de la population du Québec, M. le Président. Comment on peut penser aller chercher 37 000 000 $ chez des gens quand on sait comment sont construits les barèmes d'aide sociale? Les technocrates aux ministères de l'Emploi et de la Sécurité du revenu bâtissent le barème de l'aide sociale en disant: Comment on peut habiller une personne pendant une année pour que ça coûte le moins cher possible? Comment on peut lui acheter un tee-shirt puis une paire de jeans? C'est ça que ça veut dire, le barème de l'aide sociale. Comment on peut lui bâtir un panier d'épicerie – puis on ne va pas, là, dans les viandes, on va dans le macaroni puis dans les céréales – pour que ça ne coûte pas trop cher? Puis comment on peut lui trouver un toit pour lui mettre sur la tête, à cette personne-là, sans que ça coûte cher? Puis, une fois qu'on a fait ça ensemble puis qu'on a mis ça ensemble, c'est ça, le chèque de l'aide sociale. Puis le ministre, lui, sans parler à sa collègue responsable de la Sécurité du revenu, met un impôt, une taxe, à ces gens-là, de 37 000 000 $ puis il dit: Payez-moi, maintenant.

M. le Président, est-ce qu'on peut, comme parlementaires, se mettre cinq minutes dans les chaussures ou dans la situation de ces gens-là puis dire comment on réagirait à une taxe de 37 000 000 $, quand nos sous sont comptés pour se vêtir, pour se nourrir puis pour se loger? Comment une personne qui a travaillé toute sa vie – là, je parle des personnes âgées – à bâtir le Québec, à bâtir une société dont nous sommes fiers, mais qui, parce qu'il n'y avait pas de Régime de rentes à l'époque et qu'il n'y avait pas de fonds de pension et ces choses-là, se ramassent aujourd'hui avec un revenu de 10 000 $ ou 11 000 $ sur une base annuelle – et ça, c'est la majorité des personnes âgées – comment on peut oser penser prélever une taxe, M. le Président, de 253 000 000 $ chez ces personnes-là?

(17 h 50)

Le ministre pense, lui, que c'est un remède pour la population. Les éditorialistes pensent plutôt, M. le Président, et je vous l'exhibe, que c'est un remède pour le trésor public. Ils pensent qu'ils n'ont pas affaire à un ministre de la Santé mais qu'ils ont affaire à un ministre des Finances, ou à un président du Conseil du trésor, ou à un adjoint du ministre des Finances, mais à quelqu'un qui n'a pas plaidé leur cause au sein du Conseil des ministres comme tel. Et ça, ces gens-là, ils se sentent abandonnés puis ils se sentent trahis, et ils n'ont plus les moyens aujourd'hui de payer.

Et ce que ça va occasionner, M. le Président? Le ministre pense qu'il fait ça pour équilibrer les finances publiques. Est-ce qu'il peut nous dire combien ça a coûté à date, cette taxe-là, quand les personnes ont arrêté de prendre leurs médicaments? Quand ces personnes-là ont dû être hospitalisées? Quand ces personnes-là se sont retrouvées dans des situations insoutenables pour leur milieu? Comment ça a coûté aux groupes communautaires pour les maintenir? M. le Président, aucun chiffre, aucune donnée, parce que, dans la tête du ministre et des ministériels, il n'y en a pas, de problème. Quand il n'y a pas de problème, on ne cherche pas de solution, M. le Président. Mais est-ce qu'on pourrait demander au ministre d'en chercher, des solutions?

Comment le ministre peut se présenter devant l'Assemblée nationale en nous disant honnêtement et franchement: Moi, je suis le meilleur ministre de la Santé que le Québec ait jamais porté. La preuve, M. le Président, c'est que j'ai accepté, comme ministre de la Santé, des coupures cinq fois plus importantes dans le ministère de la Santé cette année que de l'ensemble des autres ministères du gouvernement; la moyenne, 0,6 % pour l'ensemble des ministères du gouvernement, 3,2 % pour le ministère de la Santé. Ça, c'est son premier championnat. Aujourd'hui, il se présente devant nous et dit: Je suis le ministre qui va rapporter le plus en taxes et en impôts et je vais aller chercher ça dans la poche des plus démunis. Comment il peut se présenter en défenseur de la santé des Québécoises et Québécois devant l'Assemblée nationale en disant: J'ai pris cinq fois plus de coupures et, d'un autre côté, je suis le ministre, mais...

Le ministre du Revenu est gêné. Le ministre du Revenu est gêné. Il voit le ministre de la Santé. Lui, il n'oserait probablement pas faire ça, aller fouiller dans les poches des assistés sociaux pour 37 000 000 $. Il ne ferait probablement pas ça, aller fouiller dans les poches des personnes âgées de 65 ans et plus, qui vivent majoritairement sous le seuil de la pauvreté, pour un montant de 257 000 000 $ sur une base annuelle. Je pense que ça le gênerait de faire ça, M. le Président. Et lui, le ministre de la Santé, il fait pire que le ministre du Revenu. Je ne sais pas s'il a des aspirations à être muté là et si le ministre du Revenu a des aspirations à être muté à la Santé. Moi, je ne connais pas leurs plans de carrière comme tels ni le plan du premier ministre. Mais ça n'a pas de bon sens, M. le Président, pour les gens qui vivent cette situation-là. Est-ce qu'on peut à ce moment-ci au moins, si vous ne nous croyez pas, accepter d'entendre les vrais docteurs? Pas les docteurs ministres, les docteurs qui soignent le monde et qui ont fait en sorte qu'une pétition soit déposée à l'Assemblée nationale, qui vous implorent de ne pas continuer dans cette voie-là, qui vous implorent de profiter de l'occasion de cette législation pour apporter des correctifs qui sont – je pense que le meilleur mot, là – équilibrés et humains.

Si on prenait le temps, M. le Président – et c'est l'invitation que je lance au ministre – d'entendre ces gens-là, il pourrait les contre-interroger. Il pourrait leur dire que lui, le docteur ministre, il connaît mieux ça que les docteurs qui soignent le monde; il pourrait leur dire que les statistiques de l'organisation Jeunesse au soleil ne sont pas bonnes, qu'il y en a eu... Mais est-ce qu'on peut se permettre de manquer ou de rater cette occasion-là en fin de session, M. le Président? Est-ce qu'on peut se permettre d'attendre trois ans, comme l'a dit le ministre, avant de faire un bilan? Parce que la personne qui est pauvre et qui a arrêté sa médication, elle n'est pas financée sur trois ans, elle; à chaque mois, elle a le strict minimum pour se loger, pour se nourrir, pour se vêtir et elle n'a pas 300 000 000 $ à donner au ministre de la Santé pour ses fins de taxation, comme tel, M. le Président.

Moi, si le ministre nous dit... Même si les règles ne le permettent pas habituellement à ce moment-ci, M. le Président, il y aurait consentement pour que le ministre nous dise à ce moment-ci: Je suis prêt à entendre ces gens-là. On va l'accommoder sur les heures – nous, ça ne nous dérange pas: 24 heures par jour, sept jours par semaine – on va entendre ces gens-là, et, lorsqu'on aura entendu ces gens-là, moi, je suis persuadé que le projet de loi, il ne contiendra pas qu'un seul article; ça ne sera pas un projet de loi pour étaler les paiements sans baisser les paiements, mais ça va devenir un projet de loi qui va tenir compte de la réalité de vie quotidienne des personnes âgées au Québec et des personnes qui vivent de la sécurité du revenu. C'est 880 000 personnes âgées, c'est plus de 800 000 personnes qui vivent de la sécurité du revenu; c'est plus de 12 % de la population du Québec. Peut-être que ça devrait inciter le ministre à prendre un moment de réflexion. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition et critique officiel en matière de santé. À ce stade-ci, les remarques préliminaires étant complétées, est-ce qu'il y a des motions préliminaires?

M. Paradis: Il y a consentement. Maintenant, est-ce que le ministre donne son acquiescement?

Le Président (M. Pinard): Est-ce que, M. le ministre, vous acquiescez à la demande de...

M. Rochon: Est-ce que je peux avoir le droit de parole, M. le Président?

M. Paradis: Si vous acquiescez, oui, mais, si vous n'acquiescez pas, non.

M. Rochon: Acquiescer...

Le Président (M. Pinard): Si vous acquiescez de...

M. Rochon: Non, non, non.

Le Président (M. Pinard): Donc...

M. Paradis: Dois-je comprendre que le ministre n'acquiesce pas?

Le Président (M. Pinard): Le ministre n'acquiesce pas.

M. Rochon: Le ministre n'acquiesce pas à ce genre de suggestion là. Surtout pas.

Le Président (M. Pinard): O.K. Est-ce qu'il y a des motions préliminaires? Non.


Étude détaillée

Donc, nous commençons l'étude détaillée du projet de loi, qui contient deux articles, le projet de loi n° 142, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives. Le Parlement du Québec décrète ce qui suit:

1. La Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives (1996, chapitre 32) est modifiée par le remplacement du mot «trimestre» par le mot «mois», partout où il se trouve dans les articles 26, 28, 30, 32 et 33.

Y a-t-il des interventions sur l'article 1 du projet de loi? M. le ministre, vous avez des interventions?

M. Rochon: Je serais prêt à l'adopter, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Très bien. M. le critique officiel.

M. Rochon: ...par exemple, le droit de répliquer à l'intervention qu'on pourra faire.

M. Paradis: Ce n'est pas de même que ça fonctionne. Vous avez une intervention ou pas.

Le Président (M. Pinard): Alors...

M. Paradis: Oui, M. le Président, simplement une question.

Le Président (M. Pinard): Oui, M. le député.

M. Paradis: Vu qu'il s'agit d'un projet de loi qui modifie cinq articles, comme tel, en remplaçant les mêmes mots, simplement s'assurer que les objectifs visés par le ministère – et les objectifs, ce n'est pas compliqué, c'est de prendre les paiements qui sont quatre fois par année et les mettre 12 fois par année – que tout est couvert sur le plan technique. Moi, c'est la seule garantie dont j'ai besoin à ce moment-ci, que les vérifications ont été faites au niveau du ministère et que les buts visés par la loi vont être réellement atteints par le libellé de cet article.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je peux donner toute l'assurance à ce sujet. Le projet a été vérifié autant par le ministère que la Régie de l'assurance-maladie du Québec, et cet article-là qui modifie un mot dans cinq autres articles permet de rencontrer les buts qui sont visés, qui sont de ramener sur une base mensuelle le plafond pour les paiements, la contribution des personnes pour l'achat de leurs médicaments. C'est absolument vérifié de partout, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. C'est un projet de loi d'un article, mais j'ai déjà envoyé à la commission des affaires sociales une demande pour demander à l'exécutif d'étudier ce programme de médicaments. Si, aujourd'hui, nous avons juste un article, je trouve ça malheureux, mais il me semble qu'il y a beaucoup d'autres sujets dont on peut discuter. Mais, sans nécessairement retarder le travail aujourd'hui, est-ce que le ministre s'engage à s'assurer qu'on peut mettre en vigueur ce mandat d'initiative peut-être à partir des premiers six mois du programme? On peut faire une évaluation ensemble, à la commission des affaires sociales dans le mois de septembre ou dans les plus brefs délais.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je devrais rappeler que le projet de loi contient déjà un article qui prévoit qu'après un cycle de trois ans le projet revient en commission parlementaire pour évaluation et du fonctionnement du régime et de la loi.

Quant à un mandat de la commission des affaires sociales de discuter quoi que ce soit au sujet de ce régime ou du projet de loi, je ne pense pas que c'est moi qui ai les pouvoirs ou l'autorité de décider de quoi que ce soit au sujet d'un mandat d'initiative que veut se donner une commission, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Brome-Missisquoi, ou de Nelligan.

M. Paradis: Oui. Je comprends, M. le Président, pour faire suite à la demande du député de Nelligan, de la réponse du ministre que lui n'a pas d'objection et qu'au contraire il serait favorable, si la commission souhaite aller dans ce sens-là. C'est important de savoir, sur le plan de l'exécutif, là... On est juste le législatif.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Je pense qu'une demande comme ça... Encore une fois, je ne pense pas que, moi, dans mes fonctions de ministre, j'aie quoi que ce soit à dire sur ce genre de décision là. On a toujours été très ouverts et très transparents. S'il y avait quoi que ce soit qui était utile à discuter en un temps utile dans la vie du programme... Parce que, pour discuter de différents aspects d'un régime comme celui-là, il faut quand même qu'il ait fonctionné assez longtemps pour qu'on ait de l'information, autrement on peut discuter de nos impressions et ça ne va pas faire avancer tellement les choses.

(18 heures)

On sait que le Comité de revue de l'utilisation des médicaments s'est mis en place et va permettre de mieux connaître comment évolue l'utilisation des médicaments. On a dit qu'on a une recherche qui a été lancée, qui commence dans les prochaines semaines et qui va se dérouler sur une année et demie, pour bien voir sur le terrain comment les gens, surtout les plus vulnérables, ceux qui ont les plus petits revenus... pour voir auprès de ces gens-là quel est l'impact du programme, quel est leur changement d'habitudes dans la consommation du médicament, pour s'assurer que le changement d'habitudes de consommation de médicaments est bénéfique pour eux et non pas nocif. Et on sait qu'en plus, finalement, le groupe de concertation qui va aviser le ministre dans le développement et dans l'application d'une politique du médicament pour l'ensemble, lui aussi, va être annoncé dans les prochains jours.

Alors, je pense que, pour être utile, il faudrait convenir d'un moment où on a de l'information réelle, concrète sur le fonctionnement du programme. Si, en tout temps d'ici trois ans, on a de l'information qui permet d'avoir une bonne discussion et qui pourrait permettre de bonifier, même encore en cours de route, d'ici trois ans, le régime d'assurance-médicaments, nous, on sera toujours ouverts à ça. Mais je pense que ça serait important qu'on fasse une discussion comme ça en temps utile avec vraiment de l'information additionnelle sur l'application du régime et non pas de refaire une discussion qui serait de reprendre tous les débats qu'on a faits au moment de l'application de la loi.

Maintenant, quel serait ce temps? À quel moment ce temps serait opportun et qu'on aurait vraiment de l'information pour pouvoir avoir une bonne discussion, intelligente? Ça, je ne peux pas le dire tout de suite, là. On verra quand ça se présente et quand c'est utile de le faire. Mais, en principe, je serai toujours ouvert à une analyse très transparente de ce qu'on fait là, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, très brièvement, M. le Président. Mon intervention, ce n'est pas d'empêcher l'utilisation de l'article qui dit qu'effectivement dans trois ans nous allons faire une évaluation, mais c'est difficile pour ceux et celles qui sont frappés par cette taxe-médicaments d'attendre trois mois. Il y a eu déjà plus de 800 plaintes au Protecteur du citoyen. Il y a des cas précis. Ce n'est pas juste le ouï-dire, ce sont des cas précis où particulièrement les aînés disent: J'ai besoin de choisir entre manger et prendre mes médicaments. Maintenant, vous donnez une chance de choisir entre manger et le médicament 12 fois par année, et avant c'était juste quatre fois par année.

Avec ça, il me semble que... C'est déjà six mois, ou presque six mois, et dans quelques autres cas, c'est beaucoup plus lent que ça, M. le Président. J'ai voulu juste avoir, dans cet esprit de collaboration que l'on voit ici, dans cette Chambre, un signal du ministre qu'effectivement on peut faire une courte évaluation. Il peut recommander à ses membres, qui sont les membres de la commission des affaires sociales, et dire: Sans mettre en doute les autres systèmes d'évaluation, la commission des affaires sociales, qui est mandatée par cette Assemblée dans le cas de la réforme parlementaire pour étudier ces choses-là...

Le ministre peut prendre une petite évaluation, prendre peut-être un jour ensemble avec le Protecteur du citoyen, qui a reçu plus de 800 plaintes, quelques interlocuteurs professionnels comme les médecins et quelques groupes de personnes directement touchées, et on peut avoir une espèce d'évaluation. Ça ne met pas en doute toutes les autres démarches que vous êtes en train de faire.

J'ai voulu aujourd'hui, en esprit de collaboration, en esprit d'assurer que nous avons un bon système de santé, avoir un signal du ministre s'il va encourager les membres de son parti qui sont les membres de la commission des affaires sociales à supporter la demande de faire ce mandat d'initiative dans les plus brefs délais.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, le régime a tout près de six mois d'existence. L'application du régime a été suivie de très près et on a pu faire peut-être une bonne demi-douzaine d'ajustements au régime. Celui qui est apporté par le projet de loi qui est proposé aujourd'hui nous vient à la suite d'une évaluation du fonctionnement du régime, où on a eu justement des commentaires. Parce qu'on va vraiment dans le sens des suggestions qui nous ont été faites, M. le Président, par des vrais docteurs, par des vraies infirmières, par des vrais pharmaciens et par des vrais travailleurs sociaux. Ceux qui travaillent avec les gens qui avaient des difficultés de disponibilité d'argent, tout le monde nous a suggéré que c'était ça qu'il fallait faire. Donc, on a eu, là, ce genre d'évaluation pour les premiers six mois. C'est même une suggestion qui était faite par tout le monde, au point que l'opposition l'a prise à son compte, elle aussi. Alors, je pense que c'est assez complet.

Alors, si on veut être sérieux et dans un esprit de collaboration, je pense que, là, on est rendu à refaire des ajustements, à les compléter après un premier six mois, je pense qu'il faudrait quasiment donner une autre année de fonctionnement à ce régime-là. On arriverait à mi-cours, à mi-chemin entre le trois ans pour la réévaluation complète, et là on aura le temps d'avoir d'autres informations de comment, avec les changements puis les ajustements qui ont été faits, le régime fonctionne. Est-ce que c'est vraiment mieux? Est-ce qu'il y a d'autre chose qui est arrivé comme problème? Mais le faire dans un délai plus court, on pourra toujours en discuter, là, puis la commission des affaires sociales décidera, M. le Président, mais mon sentiment, pour vous le dire franchement, comme je le vois actuellement, c'est que le faire avant un an, vu qu'on en fait une, évaluation, puis qu'on fait des changements, là, je ne pense pas qu'on aurait rien de plus, comme connaissance et comme information, qui nous permettrait vraiment d'utiliser le temps de la commission correctement.

Maintenant, si, dans l'intervalle, il arrive d'autres changements possibles à faire, si le fédéral remplit ses promesses et nous donne l'argent qu'il nous doit pour qu'on puisse encore bonifier le programme parce qu'on aura plus d'argent pour le faire, ah bien, là on aurait une excellente occasion, oui, de revenir devant la commission des affaires sociales et de voir comment on pourrait encore bonifier plus ce programme-là, si on a l'argent qui nous est dû qui nous revenait plus vite qu'on pouvait l'espérer. Alors, dans une de ces deux situations-là, ça m'apparaît une suggestion très bonne qui est faite et, moi, je vais sûrement donner toute ma collaboration, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Est-ce qu'on doit comprendre de la réponse du ministre, là, qu'il dit qu'il n'est pas question, pour les personnes âgées de 65 ans et plus et les bénéficiaires de l'aide sociale, là, qui vivent des situations inacceptables suite à l'imposition de cette taxe-médicaments, qu'il y ait des modifications quant au taux de paiement, au taux de taxe au cours de la prochaine année? Est-ce que c'est ça qu'on doit comprendre de la réponse du ministre?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Bon. Je voudrais rappeler, là, quand on fait cette suggestion-là, qu'il faut juger ce qui est apporté comme programme par rapport à ce qu'était la situation antérieure et par rapport aux options alternatives possibles. La situation antérieure était une situation où il n'était plus possible de continuer à financer le médicament sans demander une contribution plus grande aux gens. À tel point, M. le Président, qu'il faut se rappeler que le gouvernement qui nous a précédé, en 1993, a eu la même difficulté, est arrivé devant le même problème. Ils ont fait quoi comme solution? Ils ont mis le 2 $. Le 2 $, si je me réfère à des éditorialistes reconnus qui connaissent bien ce régime-là, qui l'ont regardé de façon critique pendant toute ces discussions, ils nous le disent carrément, eux aussi, revenir au «p'tit deux», c'est une proposition qui est irrecevable, dit M. Venne dans Le Devoir de ce matin. C'est un régime qui fait preuve de son inefficacité puis c'est un régime qui, à part ça, était inéquitable parce qu'il n'était pas en référence avec la capacité des gens de payer.

Quelle était l'autre solution qui avait été trouvée par le gouvernement précédent, si on veut vraiment comparer jusqu'à quel point on améliore la situation? C'était de trouver l'argent tout simplement en abolissant les paiements à tous les malades qui ont des maladies chroniques pour lesquelles ils ont des médicaments très coûteux. C'était bien pire que de demander une contribution à tout le monde selon ses revenus, ce qu'on fait actuellement. C'est dire: Tous ceux qui ont un cancer, qui ont de la fibrose kystique, qui ont le sida, à l'avenir, débrouillez-vous avec vos médicaments. Ça coûte 10 000 $, 15 000 $, 20 000 $ par année, c'est votre problème. Nous, on n'est pas capables de payer. C'est ça, le genre de solution que le gouvernement avait trouvée.

Alors là, je pense que, oui, on a la meilleure solution qu'on peut appliquer avec les moyens qu'on a, parce qu'on a un système qui couvre maintenant tout le monde, 1 400 000 personnes qui n'avaient aucune couverture; 300 000 enfants, là-dedans, qui vont avoir une couverture complète sans aucuns frais. De ce 1 400 000 personnes, c'est tellement des gens à petits revenus qui n'avaient aucune couverture avant puis dont les solutions qu'on avait apportées avant n'amélioraient pas le sort, il y a un 1 000 000, sur ces 1 400 000 personnes-là, qui ne paieront même pas de prime tellement c'est des gens qui ont un petit revenu. C'est des gens, ça, avant, qui finissaient par perdre leur travail, par perdre leur emploi parce qu'ils n'étaient pas capables de payer le médicament, dans beaucoup de cas, et qui devenaient des prestataires de la sécurité du revenu.

Alors, moi, je dois dire à la population que, quand on pourra bonifier le système comme on le fait déjà, puis le bonifier encore plus, on va le faire avec le plus grand plaisir, c'est ce qu'on souhaite, mais qu'actuellement avec les moyens qu'on a – et si on se compare à d'autres provinces canadiennes, c'est dans le même sens que ces gens-là ont évolué – on se donne un système qui est très équitable, qui couvre tout le monde, qui donne les mêmes médicaments à tous les gens, et on demande, par contre, une contribution selon la capacité des gens de faire cette contribution. Et, pour le bonifier, il faut qu'on ait plus de ressources à mettre dans le système de santé, donc il faut qu'on soit sortis de notre déficit, il faut qu'on puisse réinvestir dans le système de santé, si ça va mieux dans les prochaines années, à moins, encore une fois, que le fédéral réalise les promesses faites en campagne électorale et qu'il arrête de nous couper les transferts qui sont dus, qu'on nous redonne un peu plus d'argent.

Mais c'est ça qui est l'affaire, pour le bonifier plus, il faut plus de ressources. Ou bien Ottawa arrête de nous en enlever puis nous donne ce qui nous est dû, ou bien on sort de notre situation des finances publiques, on est plus riches, on augmente nos fonds et, à ce moment-là, on va le rebonifier. Oui, on va le rebonifier, et dans les meilleurs délais, dès qu'on en aura les meilleurs moyens, M. le Président.

(18 h 10)

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre.

M. Paradis: M. le Président, je ne veux pas entreprendre un débat avec le ministre, mais, pas des docteurs ministres mais des vrais docteurs ont fait circuler une pétition – les docteurs qui soignent du monde à tous les jours dans les cliniques – qui a été déposée à l'Assemblée nationale hier. Puis le système du 2 $ que le ministre décrie, ce qu'ils souhaitent, puis je vais vous en faire lecture, c'est: «Nous, soussignés – les vrais docteurs puis les vrais patients – demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir en faveur du rétablissement du plan précédent d'assurance-médicaments, avec des frais de 2 $ par prescription – maximum de 100 $ annuellement – pour les personnes âgées et les médicaments gratuits pour les personnes souffrant de maladie mentale sur l'aide sociale.» Je pense que c'est assez clair. Ça, c'est les vrais docteurs. Pas les docteurs ministres, ceux qui ont des vrais patients dans leur bureau puis qui tentent de les soigner.

Quand le ministre tente de se débarrasser de ses responsabilités puis de dire: C'est la faute du fédéral... Quand ce n'est pas la faute des médecins, c'est la faute des infirmières, c'est la faute des techniciens, c'est la faute des journalistes, c'est les démagogues députés de l'opposition, ça devient la faute du gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral a offert, en début de campagne électorale, un transfert de 185 000 000 $. Moi, j'ai attendu les réactions du ministre de la Santé. Aucune réaction du ministre de la Santé, parce que, lui, il n'en a pas besoin, d'argent: Ça va bien, il n'y a pas de problème en santé. Mais j'ai entendu des réactions du ministre des Affaires municipales qui a dit: Ça va nous faire du bien, ce 185 000 000 $ là. On va prendre ça dans la santé et mettre ça aux affaires municipales. À peu près tous les autres collègues se sont dit: Nous autres, on a besoin d'argent dans nos ministères pour nous aider à régler des problèmes. Le ministre de la Santé a été le dernier membre du gouvernement péquiste à parler de ce 185 000 000 $ là promis par le gouvernement fédéral.

M. le Président, moi, j'ai un petit peu compris, parce que, quand un ministre dit: Il n'y a pas de problème, donc je n'ai pas besoin de chercher des solutions, puis, si je ne cherche pas de solutions, ça ne coûte rien puis tout le monde est heureux dans la province... Ce n'est pas le cas, M. le ministre. Est-ce que vous pouvez avoir une sensibilité au moins envers les personnes qui n'ont pas les moyens, qui sont les plus démunies, qui sont les 800 000 et quelques bénéficiaires de l'aide sociale? Le Québec est la capitale de la pauvreté au Canada à cause de votre option constitutionnelle, à cause de votre façon de gérer. Le Québec, depuis que l'actuel premier ministre a été assermenté, n'a créé que 3 % des emplois créés au Canada.

Quand il ne se crée pas de richesse, il n'y a pas d'argent, puis quand vous avez un ministre de la Santé qui se vante d'être le ministre qui fait faire les plus grandes économies au gouvernement, cinq fois plus que l'ensemble des autres ministères, quand vous avez un ministre de la Santé qui se vante de taxer plus que le ministre du Revenu les plus démunis de la société, comment voulez-vous que les gens qui sont les plus démunis puissent s'en sortir, dans un tel système, avec un tel discours d'un tel ministre qui n'a pas vu de patients je ne sais pas depuis combien d'années?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: Il a l'avantage, comparativement à d'autres, d'en avoir déjà vu, par exemple, des patients. M. le Président, les recommandations, la pétition qui peut être déposée, je respecte l'opinion des vrais docteurs qui peuvent la déposer, comme dit le chef de l'opposition, mais il y a aussi des vrais docteurs – d'autres, ce n'est pas une majorité de médecins qui font cette suggestion-là – il y a beaucoup de vrais docteurs, de vraies infirmières, de vrais pharmaciens et de vrais travailleurs sociaux qui, dans les six derniers mois, ont été sur le terrain pour aider les gens qui avaient des difficultés avec le plafond trimestriel, et c'est la suggestion que tout ce monde-là nous a faite, M. le Président, de ce qui était la première, immédiate amélioration à faire à ce régime.

Comme ministre de la Santé, je l'ai dit et je le redis, je rêve du jour, et je pense, j'espère qu'il sera très prochain, où on pourra encore mettre plus d'argent dans notre système de santé, aller au-delà de ce qu'on fait là. D'autant plus qu'on aura un système qui a été transformé, qui va être beaucoup plus performant, avec l'argent qu'on va mettre dedans, on va produire encore plus que le système qu'on avait avant de faire cette transformation-là.

Et, bien sûr, l'argent qui nous a été promis, quand on va l'avoir, on va l'utiliser. Maintenant, c'est important de voir que, quand M. Martin a déposé son budget, il n'y avait rien qui était redonné aux provinces. Quelques mois après, en campagne électorale, tout d'un coup, on n'a pas dit qu'on ne donne rien, on dit qu'on en enlèverait moins qu'on avait dit qu'on en enlèverait, qu'au lieu de baisser le plancher des transferts jusqu'à 11 000 000 000 $ on arrêterait à 12 500 000 000 $. Mais on va faire ça quand? Sur cinq ans. On va nous enlever 1 500 000 000 $ de moins graduellement sur une période de cinq ans. Et ça va commencer quand, le 185 000 000 $? L'an prochain. Cette année, on n'a rien.

Alors, un, ils ne nous donnent rien. Ils vont en enlever moins, puis ils vont commencer à en enlever moins sur le 1 500 000 000 $, juste 185 000 000 $ l'an prochain. Alors, j'attends ça et, quand effectivement ça arrivera, s'ils peuvent être un peu plus généreux, comprendre qu'ils devraient accélérer leurs retours, et si l'autre promesse électorale, d'intervenir pour contribuer à l'assurance-médicaments, que le fédéral nous donne l'argent qui nous revient et qu'on peut améliorer notre système, ça va être fait. On a montré qu'on avait un système très adaptable, qu'on pouvait ajuster dès qu'on va avoir les moyens, et je vais tout faire pour qu'on les ait le plus vite possible, M. le Président. On va faire des changements pour améliorer le système.

Maintenant, présentement, avec les moyens qu'on a, sur la base de toutes les consultations et les suggestions qui nous ont été faites, on apporte des améliorations au système qui vont le rendre encore plus équitable et qui vont permettre à tous les Québécois, toutes les Québécoises, en retour d'une contribution qui est ajustée à leurs revenus, M. le Président, d'avoir un accès à l'ensemble des médicaments qui sont nécessaires pour leur état de santé. Alors, je dois dire que, avec ce qu'on a comme moyens, c'est le mieux qu'on peut faire et qu'on est en position, quand effectivement on aura plus d'argent – et j'espère que ça va venir très rapidement – pour faire ce changement-là.

Je voudrais redire, encore une fois, pour revenir contre cette déclaration que répète constamment comme une cassette le leader de l'opposition, d'abord, qu'il me fait dire des choses que je n'ai jamais dites. Moi, j'ai toujours dit, et je le crois, que ce n'est pas la faute des gens dans le système de santé, des travailleurs qui sont là. C'est grâce à eux et grâce à leur intervention qu'on s'en tire. Celui qui ne tient pas compte de leur travail, qui ne comprend pas le mérite qu'ils ont, ce n'est pas moi, c'est le chef de l'opposition, parce que lui continue à faire des critiques injustifiées. Il continue à faire des généralisations qui ne tiennent pas sur la réalité, et en faisant ça, c'est vraiment une marque de mépris des gens qui font fonctionner ce système-là. Et c'est ça qui est vraiment de renvoyer un signe négatif aux gens.

Moi, je sais ce qu'ils font. Je les rencontre régulièrement et je leur rends un grand hommage; et quand on dit que le système de santé a contribué cinq fois plus que tous les autres secteurs, ce n'est strictement pas vrai, M. le Président.

Le président du Conseil du trésor, il y a quelques semaines, a expliqué ça en Chambre, à la période de questions, au chef de l'opposition. Je pense qu'il n'est pas capable de comprendre l'explication, parce qu'elle était très claire et elle venait du président du Conseil du trésor.

Dans les faits, si on regarde le budget de cette année du secteur de la santé et des services sociaux, par rapport à l'an passé, on nous demande et on réalise une compression de 5,7 %. Tous les autres secteurs – tous les autres secteurs – quand on regarde le livre du budget, font une contribution de 7,4 %. Il n'y a que la Sécurité du revenu à qui on demande une contribution qui est moins grande qu'à la Santé. Tous les autres secteurs font plus que la Santé. Donc, le gouvernement a reconnu qu'il fallait protéger ce système-là et que, malgré l'effort qu'on doit faire, nous aussi, quand même, comme on est le tiers des dépenses du Québec, on en demande moins à ce secteur-là cette année. C'est ça qu'est la réalité. C'est ça qui sont les vraies choses, et je peux assurer la population que le rôle du ministre de la Santé, c'est, comme membre d'un gouvernement, de s'assurer que les objectifs budgétaires du gouvernement soient réalisés, mais pas aux dépens du système de la santé, pas aux dépens de ce qu'on s'est donné de très cher et qu'on va continuer à défendre et même réussir à améliorer en cours de route, M. le Président. Voilà la réalité.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, le problème est plus profond que je croyais. Le ministre de la Santé refuse de regarder les chiffres publiés par son propre ministre des Finances. L'ensemble du gouvernement du Québec, cette année, les ministères, réduisent leurs dépenses de 0,6 %.

Le ministre de la Santé, lui, s'est fait rouler par le président du Conseil du trésor puis le ministre des Finances; lui, c'est de 3,2 %. Il faut compter les crédits supplémentaires. Vous avez été un petit peu possédé par des politiciens plus brillants que vous, aux Finances puis au Trésor. 0,6 %, ça, c'est les coupures de l'ensemble du gouvernement du Québec. L'an passé, le gouvernement du Québec a dépensé 40 500 000 000 $. Cette année, le gouvernement du Québec dépense 40 250 000 000 $; 250 000 000 $ de différence sur 40 000 000 000 $, M. le Président, tout le monde peut comprendre que c'est 0,6 %. Le ministre de la Santé, lui, a accepté des compressions budgétaires cinq fois supérieures à la moyenne de l'ensemble des ministères du gouvernement.

S'il allait voir son ami le président du Conseil du trésor, il se ferait expliquer qu'au niveau des organismes centraux du Conseil du trésor il y a eu une augmentation de budget de 67,9 %. Lui, le président du Conseil du trésor, il connaît ça, les chiffres. Il a floué le ministre de la Santé, consciemment ou inconsciemment, pour s'enrichir. S'il va voir son collègue le ministre du Revenu, lui, il a eu une augmentation de budget. Il a engagé 3 000 nouveaux fonctionnaires: 24 %. S'il va voir son collègue le ministre des Transports: une augmentation de budget de 8 %.

Lui, il s'est fait posséder, M. le Président; consciemment ou inconsciemment, ça, ce n'est pas important. L'important, c'est le résultat. Diminution des dépenses de l'ensemble du gouvernement de 0,6 %; diminution des dépenses au ministère de la Santé: 3,2 %. C'est cinq fois plus que l'ensemble des ministères du gouvernement. Et le ministre de la Santé ne peut pas avouer sur la place publique qu'il s'est fait flouer, mais ça fait partie des documents officiels et du Conseil du trésor et du ministère des Finances.

Maintenant, M. le Président, au lieu de lancer la balle à Ottawa, est-ce qu'il peut regarder ce que les autres provinces font? Mike Harris, qu'on dit un politicien de droite – c'est les péquistes qui disent ça: Jamais on ne sera un gouvernement comme Mike Harris puis Ralph Klein – Mike Harris, en Ontario cette année, dans son budget, a dit: Fini les coupures dans le domaine de la santé. Ralph Klein, en Alberta, M. le Président, a dit: Non seulement c'est fini, les coupures, je réinjecte de l'argent frais et nouveau dans le domaine de la santé.

(18 h 20)

Si le ministre, au lieu de s'entêter à penser qu'il a gagné sa guerre budgétaire contre le ministre des Finances puis le président du Conseil du trésor, avait l'humilité d'avouer qu'il s'est fait flouer, mais que la «game» n'est pas finie, s'il retournait au Conseil du trésor demander des crédits additionnels pour régler ses problèmes en termes d'assurance-médicaments, on pourrait épargner les gens qui sont sur la sécurité du revenu, environ 800 000 personnes, puis on pourrait épargner des prestataires, les personnes âgées de 65 ans et plus, puis on pourrait même épargner de l'argent. Parce que ces gens-là, quand ils coupent leur médication ou qu'ils choisissent entre les médicaments puis la nourriture, à ce moment-là, ils reviennent dans notre système hospitalier à 500 $ par jour. Et là, le ministre de la Santé, qui n'a pas su calculer avec le ministre des Finances puis avec le président du Conseil du trésor, ne sait pas calculer combien ça lui coûte à l'interne, à son ministère, puis on est pris dans ce cercle vicieux là.

Est-ce que le docteur pourrait prendre des cours d'économie du ministre des Finances puis du président du Conseil du trésor et en venir à la conclusion que, maintenant qu'il s'est fait avoir, ce n'est pas fini? Il peut changer de côté puis, au lieu de se faire l'avocat ou le défenseur du ministre des Finances puis du président du Conseil du trésor, se faire le défenseur des gens qui en ont le plus besoin dans la société, qui ne sont pas capables de payer, pour les personnes âgées, 253 000 000 $ de taxe-médicaments, pour les bénéficiaires de l'aide sociale, 37 000 000 $ de taxe-médicaments. Est-ce que ça serait possible pour le ministre de la Santé de dire qu'il n'en a pas suffisamment, d'arrêter de mettre le blâme sur Ottawa, de regarder ce que Ralph Klein a fait en Alberta, de regarder ce que Mike Harris a fait en Ontario et peut-être d'arrêter ça, au Québec? C'est ce que les gens lui demandent.

Est-ce qu'il va faire la sourde oreille aux médecins? Est-ce qu'il va faire la sourde oreille aux infirmiers et aux infirmières, aux techniciens, aux administrateurs du réseau puis au Comité des malades? Est-ce qu'il va arrêter de dire que tout ce monde-là se trompe, que tout ce monde-là est dans l'erreur et qu'il est le seul possesseur de la vérité?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je pense que le président du Conseil du trésor avait très bien expliqué que, avec le genre de comparaisons et de chiffres que nous lance le critique de l'opposition officielle... Il mélange des chiffres de crédits, des chiffres de budget avec des chiffres de dépenses, il prend ce qui fait son affaire dans la colonne puis dans le tableau qui lui conviennent puis il sort des choses qui ne tiennent pas debout. Avec ce genre de démagogie là, oui, je vais faire plus confiance à l'équipe gouvernementale et au président du Conseil du trésor pas mal plus que je vais faire confiance à des gens qui nous font une démagogie pareille pour savoir qui a floué qui.

La réalité dans les budgets, c'est que le secteur de la santé est un secteur qui a été placé en priorité, qui a été protégé et dont, comparativement aux autres secteurs, la contribution n'a pas été du tout paramétrique. D'ailleurs, les gens avaient craint que, si on avait eu une contribution paramétrique dans le 3 000 000 000 $ d'efforts budgétaires qu'a faits le gouvernement, comme le secteur de la santé y est pour à peu près le tiers des dépenses de programmes du gouvernement, ce soit presque 1 000 000 000 $ qu'il aurait eu à prendre comme compressions. Ce n'est pas 1 000 000 000 $ qu'il a à prendre comme compressions; dans le secteur de la santé, au global, c'est 760 000 000 $, et pour le réseau de la santé, M. le Président, c'est de l'ordre de 579 000 000 $ et c'est étalé sur une gestion de deux ans, avec un financement pour protéger le système. C'est ça, la réalité.

Là, je fais le tour de toutes les régions, et avec chacune des régions on s'assure que l'étalement et des départs des effectifs dans le réseau et du financement permet au réseau de continuer à fonctionner, d'assurer que les services vont être donnés en continuité et qu'on absorbe une part qui est moins grande que les autres programmes et qu'on l'absorbe au rythme où le système peut le prendre, M. le Président. Ça, c'est la réalité.

Maintenant, quand on parle du risque pour les patients de se retrouver à l'hôpital, dans les derniers mois, il n'y a personne qui a manqué de médicaments. Les gens sur le terrain se sont assurés que chaque individu qui avait une difficulté, on l'aidait et on trouvait un moyen spécifique. Ce qui nous a amenés à régler graduellement tous les problèmes, à trouver différents types de solution plus celle qu'on propose aujourd'hui.

Ce régime-là – et on le sait pour d'autres endroits qui ont développé des régimes du genre – permet rapidement d'améliorer l'utilisation du médicament pour qu'elle soit plus adéquate et d'éviter – là où on a des chiffres sûrs, par exemple par des études qui ont été faites au Canada et États-Unis – qu'il y ait des gens qui ne consomment pas adéquatement le médicament, surtout des gens qui consomment plusieurs médicaments. On sait, par des études qui ont été faites, qu'il y a 20 % de ces gens-là, dans l'espace d'une année, qui vont devoir se présenter à l'urgence de l'hôpital parce qu'ils ont un problème qui se présente à cause d'une mauvaise utilisation de leurs médicaments. Et, de ceux qui se présentent à l'urgence, il y en a un autre 20 % qui ont une situation assez grave qu'on doit les hospitaliser. La Colombie-Britannique a fait une étude et ils ont même trouvé que, parmi les gens qui ont dû être hospitalisés pour une mauvaise utilisation du médicament, il y en a même qui étaient assez malades pour en décéder. Ça, c'est une chose qui va être corrigée et améliorée par le régime, et ça, c'est une donnée qui est très dure.

Finalement, on peut bien dire puis nous reprocher, au gouvernement, de ne pas être capable de faire ce que l'Ontario et l'Alberta font, c'est-à-dire qu'ils réinvestissent dans leur système de santé, mais c'est ce qu'on va faire l'année prochaine ou dans les prochaines années. C'est ce qu'on va faire quand on va être rendu comme eux, au même rythme. Parce qu'eux ont commencé et ont fait avant nous l'assainissement de leurs finances publiques. Et, si ça avait été fait en même temps que les autres provinces, c'est l'opposition d'aujourd'hui, qui était alors au gouvernement, qui aurait fait son boulot dans le temps au lieu de continuer à nous endetter puis à nous laisser une commande énorme à remplir pour assainir les dépenses publiques; déjà, l'opposition, qui était le gouvernement à l'époque, aurait fait ce que l'Alberta et l'Ontario ont fait, de sorte qu'on serait aujourd'hui en position de faire plus dans le domaine de la santé. C'est ce qu'on va pouvoir faire rapidement dans les prochaines années dès qu'on aura rejoint ce que les autres provinces ont fait, elles aussi, avant nous, M. le Président.

Alors, je pense que c'est là la réalité. Mais là, M. le Président, je ferai remarquer qu'on en est rendu à refaire le débat sur les crédits, à rediscuter de l'ensemble du budget dans le secteur de la santé, alors que ce comité plénier a un mandat qui est très précis, qui est très simple, qui est d'étudier, et j'espère pouvoir adopter, comme on en avait convenu, un petit changement au régime d'assurance-médicaments qui va l'améliorer pour tous les citoyens du Québec. On a juste à faire un effort de bonne collaboration et de compréhension, comme dit le leader de l'opposition, de sensibilité pour la situation des Québécois et des Québécoises, et je pense qu'on pourrait et on devrait conclure assez rapidement qu'en faisant ce changement-là on apporte une amélioration tout de suite aux gens et on se met en position d'en apporter d'autres à mesure qu'on va avoir les moyens. Et j'espère que le bon sens va triompher, que la collaboration que nous avait promise l'opposition va se concrétiser et qu'on va pouvoir conclure ce débat, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, dans cet esprit de collaboration et de façon à ce que le ministre ne prenne pas les chiffres de l'opposition, je vais le référer aux chiffres de sa formation politique et du gouvernement du Québec, aux chiffres du président du Conseil du trésor déposés à l'Assemblée nationale et sur lesquels il a voté. J'imagine que, lorsqu'il les a votés, il les a compris, au moins qu'il les a lus, s'il ne les a pas compris. À la page 46 du message du président du Conseil du trésor, dans les crédits qui ont été déposés, la mission Santé et services sociaux: Réseau, Régie de l'assurance-maladie et Autres programmes: coupure de 3,3 %. Lorsque les crédits ont été déposés, le gouvernement coupait l'ensemble de ses dépenses, suivant le président du Conseil du trésor, de 2,1 %. Donc, il était déjà, dans ses coupures, en haut de la moyenne des autres ministères.

Parce qu'il y a des ministères qui ont eu des grosses augmentations. Je l'ai mentionné tantôt, le président du Conseil du trésor, lui, s'est octroyé 67,9 % d'augmentation – il était bien placé pour le faire; le ministre de la Santé ne l'a pas vu faire – le ministre du Revenu, 24,2 %, le ministre des Transports, 8,8 %, etc. Ce qui fait, M. le Président, que l'ensemble du gouvernement, au moment du dépôt de ce cahier-là par le président du Conseil du trésor, avait coupé de 2,1 %, et le ministre de la Santé, lui, de 3,2 %.

Mais là où le ministre de la Santé s'est fait avoir encore un petit peu plus, c'est que, trois semaines après, celui qui est encore plus vite que le président du Conseil du trésor, qu'on appelle le ministre des Finances, a déposé des crédits supplémentaires. Il en a déposé pour 195 000 000 $. Le ministre de la Santé, lui, il vient de nous dire que c'est 30 % et plus, le budget de la Santé. Est-ce qu'il a eu 30 % et plus des crédits supplémentaires? Il ne peut pas les avoir eus, il ne les a pas demandés, M. le Président, il a oublié de les demander. Mais lui, le ministre des Finances, il s'est augmenté, sur ce 195 000 000 $ là, de 127 000 000 $. Vous savez combien il a laissé à notre pauvre ministre de la Santé qui avait oublié de le demander? Il a laissé 15 425 000 $.

(18 h 30)

Quand on regarde le tableau consolidé, pas les chiffres de l'opposition, le tableau consolidé du ministre des Finances, on regarde l'ensemble des dépenses pour 1996-1997 du gouvernement du Québec: 40 522 000 000 $. On regarde les prévisions des dépenses, y inclus les crédits supplémentaires, parce que, ça aussi, ça compte: 40 275 600 000 $. Le calcul du ministre des Finances sur les compressions budgétaires totales pour le gouvernement du Québec cette année: 0,6 %. Le ministre de la Santé, lui, avec son modeste 15 000 000 $, il est tombé de 3,3 % à 3,2 %. Donc, au total, suivant les livres publiés sur lesquels il a voté, en plus de ça – le pire, c'est qu'il a voté pour ces livres-là – il a accepté des coupures cinq fois supérieures aux compressions de l'ensemble du gouvernement du Québec.

Son problème aujourd'hui, c'est qu'il ne veut pas l'admettre parce que, s'il fallait qu'il admette ça, les gens auraient compris qu'il ne s'est pas défendu à la table du Conseil des ministres, qu'il n'a pas demandé d'argent. Moi, je pense que c'est vrai qu'il n'en a pas demandé parce que, quand j'écoute ses réponses, les médecins ont tort, les infirmiers et infirmières ont tort, les techniciens ont tort, les administrateurs ont tort, les journalistes ont tort, les députés de l'opposition sont des démagogues. Donc, il n'y a pas de problème, on ne cherche pas d'argent, on ne cherche pas de solution, M. le Président, et c'est ça, le problème du ministre de la Santé et des Services sociaux au Québec.

Et là, quand on nous amène un projet de loi et qu'il nous dit: Ça va régler les problèmes, ça ne règle pas les problèmes, M. le Président. C'est ce qu'on lui dit. Quand est-ce qu'il va poser un geste pour les plus démunis? Quand est-ce qu'il va poser un geste pour les personnes de 65 ans et plus à qui il a imposé une taxe de 253 000 000 $ sur une base annuelle, en nous disant qu'il s'agissait toutes de personnes riches et fortunées, alors que, vous le savez, M. le Président, dans votre comté comme dans mon comté, comme dans les autres comtés des autres députés, ce sont des gens qui vivent au seuil de la pauvreté? Comment on a osé aller chercher 37 000 000 $ chez les gens qui sont des assistés sociaux, qui ont à peine de quoi se nourrir, se vêtir, s'abriter, M. le Président?

Tant que le ministre de la Santé n'acceptera pas les chiffres du ministre des Finances, tant que le ministre de la Santé n'acceptera pas les chiffres du président du Conseil du trésor, tant que le ministre de la Santé n'acceptera pas, M. le Président, de faire face à la réalité qu'il manque, comme les médecins lui ont dit à l'émission Le Point hier, de ressources... Les vrais docteurs qui traitent des vrais patients ont dit au ministre: Docteur, ça nous prend des ressources additionnelles pour traiter les gens. Aujourd'hui, des vrais docteurs qui traitent des gens pauvres dans les quartiers les plus pauvres au Québec nous disent: Il faut retourner au système où les gens ne payaient pas plus de 2 $, maximum 100 $ par année, et gratuit pour les gens qui ont des problèmes psychiatriques et qui sont sur l'aide sociale.

Le ministre fait la sourde oreille. Il dit: Au lieu de me payer quatre fois par année, vous allez me payer 12 fois par année et dites-moi merci, M. le Président. Est-ce que le ministre peut relire son livre des crédits, peut relire le message du président du Conseil du trésor, réviser son vote? S'il s'est fait avoir sur ces chiffres-là, qu'il retire son vote et qu'il dise: Je me suis trompé, je me suis fait avoir. Le ministre des Finances s'est payé 127 000 000 $, le président du Conseil du trésor, lui, s'est augmenté de 67 % puis, moi, je n'aurais pas dû accepter ça. Là, on va le comprendre.

Mais, tant qu'il ne fera pas amende honorable, tant, M. le Président, qu'il ne répondra pas aux besoins des plus démunis et des gens qui les soignent, nous allons continuer de le talonner et de l'inviter à les entendre. Là, il nous dit: Je ne veux pas les entendre avant trois ans. Ça va bien, ça, M. le Président. Dans trois ans, il va être où, lui? La personne qui a à s'acheter des médicaments et à choisir entre sa nourriture et les médicaments, elle n'a pas trois ans à attendre, elle; c'est à chaque mois qu'elle doit faire face à ses obligations. Le ministre, lui, il dit: Dans trois ans, peut-être que je vais regarder ça. S'il y a des correctifs, je vais mettre un comité par-dessus un conseil et, dans cinq ans, on changera peut-être la législation.

Nous sommes présentement en modification de législation. Au lieu d'étaler les paiements strictement, qu'est-ce qu'attend le ministre pour répondre aux cris d'alarme? Nous autres, on est, tout simplement, de ce côté-ci, l'opposition, M. le Président, porte-parole des médecins, porte-parole des gens qui en ont besoin pour tenter de faire entendre raison au ministre. La dernière fois, il a passé son projet de loi à 5 heures du matin. Il devait commencer à comprendre qu'il y avait de quoi qui n'avait pas de bon sens. Là, il est 18 h 30. Est-ce qu'il va comprendre mieux, à 18 h 30, qu'il comprenait à 5 heures du matin?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, oui, on a besoin de plus de ressources, oui, on peut utiliser plus de ressources dans le domaine de la santé. On n'en a pas plus que ça aujourd'hui à utiliser, M. le Président. Pourquoi? Je vais le redire sans entrer dans tout le détail du débat: Parce qu'on est endetté. On est endetté comme ce n'est pas possible. On est la province la plus endettée au Canada. Chacun des citoyens porte une dette de 10 400 $, alors que l'autre province qui a la dette la plus haute, c'est l'Ontario qui a une dette per capita d'à peu près 8 000 $. C'est ce qu'on porte comme dette.

Alors, on manque de ressources, c'est sûr. Il nous en faut plus, mais il va falloir se sortir du pétrin où ils nous ont mis: 1 000 000 000 $ de déficit de plus que le déficit prévu, pendant 10 ans des budgets déficitaires. Défoncer, en termes de déficit, de 1 000 000 000 $ par année, ça nous a mis dans la dèche. Alors, c'est sûr qu'on manque de ressources, M. le Président, je n'ai jamais dit le contraire, mais, par contre, je pense qu'avec l'effort qu'on fait là on va s'en sortir puis on va en avoir plus, de ressources.

Pour montrer le genre de manipulation qu'on fait avec les chiffres pour essayer de faire une démonstration que le gouvernement ne fait pas ce qu'il faut dans le domaine de la santé... Moi, je ne suis pas un expert dans le domaine. On ne devait pas discuter de ça aujourd'hui; je n'ai pas les livres et les références. Ce n'est pas de ça qu'on devait discuter aujourd'hui. Mais ce que je comprends, quand on regarde ce qui a été donné de plus au Trésor par rapport à la Santé, c'est que le Trésor prend à son compte, entre autres, le service de la dette, de cette dette énorme qu'ils nous ont laissée, qu'il doit payer, puis ça apparaît dans ses livres puis il va assumer ça. Alors, c'est bien clair qu'à un moment donné ça fait apparaître quelque chose à une place, comme si on en donnait plus au Trésor.

Le Trésor, il ne dépense pas de programmes, lui, il n'a pas de dépenses de programmes. Les programmes, c'est dans les secteurs sectoriels et, le Trésor, l'argent qu'il a, ce qu'il va gérer, entre autres, c'est le service de la dette, la dette qu'ils nous ont laissée, qu'on est obligés d'assumer, et ça fait augmenter les fonds du Trésor. Mais c'est ce genre de choses là, de manipulation, de déformation de l'information qui est une démagogie indescriptible, M. le Président.

Autre chose. On parle du budget supplémentaire, que le budget supplémentaire avait été prévu et fait pour mettre en oeuvre des mesures de création d'emplois au Québec. Alors, c'est allé dans des secteurs de création d'emplois. Aussi, dans la Santé, M. le Président, on a dit 15 000 000 $. Il y a plus que ça. En plus de ce 15 000 000 $ là, il y a eu 80 000 000 $ dans le domaine de la santé pour tout le secteur de l'économie sociale qui va créer des emplois et qui vient, dans le domaine de la santé, faire assumer les services domestiques par des entreprises d'économie sociale. Ça vient donc rajouter au budget de la Santé et des Services sociaux de l'argent qu'on a déjà pour aider des groupes communautaires et pour faire donner des services aux gens par les CLSC qui le font en substitution souvent parce que les groupes communautaires ne sont pas assez bien soutenus pour donner des services à domicile.

C'est 80 000 000 $ de plus sur les crédits additionnels qui viennent à la Santé, en plus du 15 000 000 $ auquel on a fait référence, qui visent justement les groupes communautaires, les services à domicile pour les personnes âgées, pour les personnes les plus démunies, pour les personnes handicapées. C'est ça qui a été fait, là. Alors, il y a une grande majorité de réallocations qu'on efface complètement quand on fait ce genre de comparaisons là, et on veut faire croire à la population que le gouvernement ne fait pas l'effort qu'il faut à la Santé, ce qui est complètement faux. La répartition de l'effort, elle est moins forte en santé que dans les autres secteurs. C'est une priorité.

On n'a pas encore assez de ressources en santé; là-dessus, on est d'accord puis on travaille très fort pour pouvoir en réinvestir plus. Mais il faut reconnaître que, si on n'en a pas plus que ça présentement, c'est parce qu'on nous a laissé un héritage dont il faut se débarrasser. Et ça, c'est beau, aujourd'hui, d'un gouvernement qui n'a jamais assumé ses responsabilités, qui n'a pas fait ce que le gouvernement de Mike Harris a fait, qui n'a pas fait ce que le gouvernement de Klein, en Alberta, a fait et qui vient maintenant, aujourd'hui, reprocher au gouvernement actuel la situation qu'il a créée.

Alors, je pense, M. le Président, que c'est vraiment un peu sans bon sens. On est rendus à refaire la discussion des crédits avec des chiffres partiels lancés ici et là, alors que les documents qu'on a et ce qu'on a à discuter aujourd'hui, c'est quelque chose de tout à fait différent. Mais ça fait partie de la stratégie de l'opposition. Dites n'importe quoi, répétez-le, répétez-le, et, à force de répéter tout ça ou n'importe quoi, il en restera probablement quelque chose. C'est de la désinformation, c'est de la démagogie, et je pense que, dans une vraie démocratie, ça peut peut-être compter des points à court terme, mais la population est plus sage que ça et va comprendre tout ce qu'il y a de démagogique – et il y a des mots parlementaires qu'on ne peut pas utiliser – mais qui ne correspond pas du tout à la réalité dans ce qui nous est dit, M. le Président.

(18 h 40)

Encore une fois, je pense que ce qu'on fait aujourd'hui, c'est, tout simplement... Et je fais encore appel à la collaboration, au bon sens de l'opposition – qu'ils ont quelque part dans le fond d'eux-mêmes, j'en suis sûr; si on va assez loin, on va le trouver – pour qu'on puisse apporter cette amélioration à un régime qui est un régime équitable, les médicaments, qui est un service de santé essentiel à l'ensemble des citoyens du Québec, et qu'on va le donner de façon encore beaucoup plus souple, beaucoup plus accessible, M. le Président. C'est tout ce qu'il y a à faire aujourd'hui, et le type de débats sur les crédits, on les a faits et on les refera avec toute l'information en main.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, je vous rappelle qu'à ce stade-ci nous avons déjà utilisé au-delà de 40 minutes. Le temps de parole était de 20 minutes pour chacun des intervenants. Alors, nous avons 44 minutes au moment où on se parle. Donc, est-ce que l'article 1 est adopté?

Des voix: Adopté sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division? Alors, nous allons passer maintenant... Y a-t-il des interventions sur l'article 2 du projet de loi qui stipule que «la présente loi entre en vigueur le 1er juillet 1997»? M. le ministre, est-ce que vous avez des remarques ou quelque chose sur l'article 2?

M. Rochon: Je voudrais juste mentionner que c'est heureux qu'on ait un système qui est assez flexible et qui peut rapidement s'ajuster, parce que, si on vote cette loi à cette session-ci, quelques jours après la modification sera déjà en application, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le critique officiel de l'opposition sur l'article 2.

M. Paradis: Oui, simplement, M. le Président, dans un esprit de collaboration, pour revenir sur certaines hérésies que des gens qui connaissent ça puis qui nous écoutent ne me permettraient pas de laisser passer, lorsqu'on parle du déficit record du Québec, je référerais le ministre de la Santé à un excellent article de Claude Picher, qui écrit dans le journal La Presse et qu'on peut apercevoir à tous les matins à l'émission de TVA , qui compare tous les déficits de l'histoire du Québec et qui donne le championnat à Jacques Parizeau et à son gouvernement, en l'année 1982-1983. Il compare la dette relativement au produit intérieur brut. Il fait l'analyse de tous les budgets.

Et, au lieu d'essayer de blâmer les gouvernements libéraux qui ont précédé – je ne sais pas où il était en 1982-1983, le ministre – s'il avait lu cet article de journal là, il se serait rendu compte que c'est le PQ qui a le championnat de tous les temps des déficits du gouvernement du Québec. D'ailleurs, je pense que c'était de commune renommée. M. Parizeau se faisait appeler le père de la dette du Québec. En ce qui concerne... Oui?

Le Président (M. Pinard): Excusez, M. le leader de l'opposition.

Mme Caron: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, compte tenu que nous nous rendons compte, M. le Président, qu'il n'y a pas de possibilité de respecter l'adoption de ce projet de loi, tel qu'il en avait été convenu, et que le temps est dépassé...

Une voix: M. le Président, M. le Président, M. le Président...

Mme Caron: ...alors, M. le Président, je...

Le Président (M. Pinard): Point de règlement?

Une voix: Question de règlement.

Le Président (M. Pinard): Question de règlement.

Mme Caron: ...vous demande, M. le Président...

Une voix: M. le Président, question de règlement.

Mme Caron: ...d'ajourner le débat.

Le Président (M. Pinard): Je vais entendre ce qu'il dit, puis je vais vous revenir.

Mme Caron: Je vous demande, M. le Président, d'ajourner le débat.

Le Président (M. Pinard): Excusez, Mme la leader...

M. Paradis: C'est immédiatement après le fait.

Le Président (M. Pinard): Excusez, Mme la leader adjointe du gouvernement. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Il n'a jamais été convenu quoi que ce soit quant à ce projet de loi avec la partie ministérielle.

Mme Caron: Alors, M. le Président, nous saurons...

Le Président (M. Pinard): Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.


Motion d'ajournement du débat

Mme Caron: Nous saurons, bien sûr, quoi faire les prochaines fois où on nous donnera des informations sur les projets de loi, M. le Président. Alors, compte tenu qu'effectivement le ministre a pris des engagements, compte tenu de ce qu'on nous avait dit qu'on devait faire et que l'adoption devait se faire, M. le Président, avant la fin de la séance, donc je vous demande d'ajourner le débat.

Le Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Il est 18 h 45. Nous serions disponibles pour poursuivre l'étude détaillée de ce projet de loi en commission plénière à compter de 20 heures. À ma connaissance, il n'y a pas d'autres projets, là, qui... Peut-être que le ministre a des engagements. Peut-être à 21 heures, 22 heures? Nous, on est disponibles.

M. Rochon: M. le Président, si je peux parler là-dessus, là, je pense qu'on tombe dans le loufoque, là, dans le loufoque. Ce qui reste à approuver, à discuter puis à décider, c'est un article de loi qui dit: «La présente loi entre en vigueur le 1er juillet 1997.» Je ne vois pas ce qu'il y a encore à débattre là-dessus puis je ne vois pas qu'est-ce qu'on a à refaire un débat sur l'avenir du Québec...

Le Président (M. Pinard): Excusez...

M. Rochon: ...et à se reréunir ce soir, à 20 heures, pour réentendre tout ce...

Le Président (M. Pinard): M. le ministre. M. le ministre et M. le leader de l'opposition, je tiens à vous rappeler, à tous, que, conformément à nos règles, le temps de parole alloué par article est de 20 minutes à l'auteur et de 20 minutes au niveau de la critique. Donc, à ce stade-ci, si vous êtes en mesure...

Mme Caron: M. le Président, j'ai fait une motion d'ajournement...

Le Président (M. Pinard): Vous avez le droit d'ajourner le...

Mme Caron: ...du débat et...

Une voix: La motion est débattable.

Mme Caron: ...le gouvernement décidera le moment où il rappellera le débat, M. le Président.

Une voix: M. le Président, la motion est débattable.

Le Président (M. Pinard): Alors, effectivement, en vertu de notre règlement, la motion est débattable.

(Suspension de la séance à 18 h 45)

(Reprise à 18 h 47)

Le Président (M. Pinard): Nous reprenons le débat. Nous sommes en commission et, à ce stade-ci, je demande à la leader adjointe du gouvernement de bien vouloir retirer sa motion.


Motion de retrait de la motion d'ajournement du débat

Mme Caron: Oui, M. le Président. Compte tenu qu'on espère pouvoir terminer ce projet de loi dans les quelques minutes qui suivent, je retirerais ma motion d'ajournement.


Étude détaillée (suite)

Le Président (M. Pinard): Je vous remercie beaucoup. Nous avions cédé le droit de parole au député de Brome-Missisquoi, leader de l'opposition et critique officiel en matière de santé et de services sociaux. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Permettez-moi de vous remercier, M. le Président, pour vos talents de médiateur que vous savez toujours sagement mettre à la disposition de tous les parlementaires. Ça vous honore dans votre fonction.

Ceci étant dit, M. le Président, nous en étions au déficit record du Québec en 1982-1983, selon l'analyste financier Claude Picher qui avait analysé tous les budgets des gouvernements du Québec. Tout le monde s'entend pour dire que c'est cette année-là qui a été la pire et que M. Parizeau était connu comme le père du déficit du Québec contemporain. Et, à ce moment-là, tenter, de la part du ministre, de placer le blâme sur les libéraux, alors que l'administration péquiste détient tous les records, ça dénote une méconnaissance, comme telle, du fonctionnement des finances publiques.

Mais il y a encore pire, M. le Président, et les gens ne m'auraient pas permis de le passer sous silence, les gens qui connaissent ça et qui nous observent. Le ministre de la Santé – et ce n'est pas surprenant que, sur le plan des budgets du ministère de la Santé, il se soit fait posséder, qu'il ait accepté cinq fois plus de compressions que l'ensemble du gouvernement – vient de nous dire, tantôt, M. le Président, et je le cite pratiquement au texte, que, si le Conseil du trésor a obtenu une augmentation de près de 68 %, c'est parce que c'est le Conseil du trésor qui assume le service de la dette.

M. le Président, je vous jure que j'en ai entendu des vertes et des pas mûres en cette Chambre sur le plan de l'administration publique et des finances publiques. Je pense que tout le monde sait que c'est le ministre des Finances qui assume le service de la dette. D'ailleurs, l'augmentation, cette année, compte tenu des taux d'intérêt qui n'étaient pas généralement à la hausse... Et le ministre, s'il avait un budget à administrer comme les personnes âgées ou les assistés sociaux, saurait c'est quoi, les taux d'intérêt; ils n'ont pratiquement pas bougé au cours de la dernière année, tant et si bien que le ministre des Finances lui-même nous dit que le service de la dette, qui était, l'an passé, de 5 844 000 000 $, va passer à 5 902 000 000 $, une différence de 68 000 000 $. Donc, l'explication qu'il a donnée pour l'augmentation des crédits du président du Conseil du trésor ne tient pas.

Il faudrait, au lieu de faire une guerre de chiffres, que le ministre prenne le dernier document du ministère des Finances, qu'il se rende compte que l'ensemble du gouvernement a coupé de 0,6 % puis que, lui, il a subi des coupures, il a accepté ou demandé des coupures de 3,2 %, soit cinq fois plus. Et, lorsqu'il aurait réalisé cette chose, il se serait rendu compte que la Santé, ce n'est pas un ministère égal parmi les autres, que le ministère de la Santé, pour le gouvernement d'en face, c'est une priorité, mais une priorité de coupures et de taxation et que le ministre, lui, il est content que ça soit comme ça.

(18 h 50)

Et c'est ça que les gens les plus démunis ne peuvent accepter: les 880 000 personnes qui sont âgées de 65 ans et plus et qui viennent de se faire imposer une taxe de 253 000 000 $ sur une base annuelle et les plus de 800 000 personnes qui vivent sous le seuil de la pauvreté, sur la sécurité du revenu, qui ont à peine de quoi se vêtir, se nourrir et se loger qui se font imposer une taxe de 37 000 000 $. Et, je le répète, M. le Président, je ne comprends pas pourquoi le ministre, au lieu de faire des guéguerres de chiffres puis de dire que c'est la faute des autres puis que le président du Conseil du trésor assume la dette, puis de mélanger tout le monde, n'écoute pas les médecins, les vrais médecins qui représentent ces gens-là, n'écoute pas les personnes défavorisées et ne leur vient pas en aide.

Qu'il profite de l'ouverture, de la compréhension et de l'esprit de collaboration qui nous animent en cette Assemblée nationale pour faire en sorte que ces gens-là bénéficient du projet de loi non pas seulement pour voir étaler leurs paiements, leurs taxes sur 12 mois au lieu de faire quatre versements, mais également qu'on tienne compte des difficultés réelles dans lesquelles ils se trouvent. C'est l'appel qu'on lance, M. le ministre, bien sincèrement et bien humainement. Si vous répondez positivement, le débat va se finir rapidement.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Brome-Missisquoi. M. le ministre, est-ce que vous voulez utiliser votre temps de parole sur l'article 2?

M. Rochon: Je vais juste redire une chose pour garder le contrepoids, par honnêteté pour les gens qui nous écoutent, qui nous regardent. Les guéguerres de chiffres, ce n'est pas nous qui les faisons; on essaie de replacer les chiffres à mesure. Quand on parle des finances publiques et du trésor public et qu'on joue sur les mots après ça pour essayer de redéfaire les explications que j'ai données... Et, là-dessus, on doit reconnaître qu'on a une opposition qui a un talent inégalable pour jouer dans la désinformation et la démagogie. Ils vont continuer à le faire, c'est ce qu'ils font le mieux présentement.

Moi, tout ce que je demande aux Québécois et Québécoises, c'est de comprendre qu'on veut améliorer un système, un régime d'assurance-médicaments qui assure une accessibilité aux médicaments à tout le monde en retour d'une contribution qui est ajustée aux revenus des gens. Il couvre à peu près le tiers du coût de l'ensemble du régime et la Régie de l'assurance-maladie du Québec assume plus des deux tiers du coût. C'est un système qu'on pourra bonifier, on l'a déjà bonifié dans les six premiers mois de son existence et on va pouvoir le bonifier encore à mesure qu'on aura plus d'argent et de ressources à y investir.

Et des gens qui viennent nous faire la leçon et nous reprocher de ne pas faire mieux n'avaient pas trouvé mieux, eux, que de faire une coupure totale aux médicaments pour tous les gens qui souffrent de maladies chroniques, qui souffrent de cancer, qui souffrent du sida, qui souffrent de la fibrose kystique. On a suspendu la seule petite directive qui permettait de les aider. On a décidé qu'on réglerait le problème financier en les coupant et on a foutu ce monde-là sur le carreau, M. le Président. Et là, aujourd'hui, on vient nous reprocher de ne pas faire encore mieux, alors qu'en plus de ça, sans améliorer le système de santé à l'époque, ils nous ont laissés avec une dette qu'on est obligés d'absorber.

Alors, je pense que la population va être capable de faire du sens là-dedans. Moi, je fais bien confiance au bon sens de l'ensemble de la population, à sa capacité de comprendre au-delà de l'écran de fumée et de démagogie qu'on nous fait pour voir que, là, on a quelque chose qui aide le monde, qui aide tout le monde sur une base équitable, encore une fois, comparativement aux mesures qu'on appliquait avant, qui étaient de choisir des groupes de citoyens parmi ceux qui souffrent le plus de maladies qu'on sait incurables et qui ont besoin de médicaments et de leur avoir, tout simplement, enlevé leurs médicaments pour balancer des finances, mais les balancer tout en faisant quand même un déficit, en plus. Ça n'équilibrait même pas le budget, ce qu'ils décidaient de faire là.

Alors, M. le Président, quand on aura comparé ça, je pense qu'on verra que ce qui est sain, vraiment sain et démocratique, c'est qu'on termine, j'espère, dans les meilleurs délais ce débat qui a dérapé complètement, où on ne sait plus trop de quoi on parle, je pense, pour revenir à l'essentiel qui est devant nous et faire quelque chose d'utile pour les Québécois et les Québécoises, et le faire vite au cours des prochains jours, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Les gens qui m'écoutent, et particulièrement la famille de M. Robert Bourassa, ne me permettraient pas de ne pas dénoncer les propos que vient de tenir le ministre de la Santé, M. le Président. J'ai siégé neuf ans et demi au Conseil des ministres avec M. Robert Bourassa et, à chaque fois qu'il fallait faire les budgets du gouvernement du Québec, à chaque année, le système de la santé se voyait automatiquement indexé au coût de l'inflation plus un facteur de vieillissement. Même chose sous Thérèse Lavoie-Roux comme ministre de la Santé; même chose sous Marc-Yvan Côté, ministre de la Santé. Ces gens-là ne se sont jamais fait posséder comme le ministre de la Santé s'est fait posséder cette année. À chaque année, M. Bourassa insistait pour que la santé constitue une priorité. Il faisait la même chose dans le domaine de l'éducation et de la formation des jeunes et il faisait la même chose dans le domaine de la sécurité publique. Ces gens-là qu'on a en face de nous, M. le Président, ont d'autres priorités. Combien de structures ont-ils créées depuis qu'ils sont au gouvernement, des structures qui ne rendent aucun service à la population et pour lesquels le ministre de la Santé a voté?

M. le Président, quand on parle de désinformation, on ne peut pas passer sous silence la contribution de Robert Bourassa dans le domaine de la santé. Je ne sais pas s'il avait une prémonition de ce qui lui arriverait dans ses derniers jours, mais il a toujours agi en fonction du budget de la province de Québec comme un bon père de famille: la santé, l'éducation, la formation de nos jeunes et la sécurité publique pour la population. Et je ne pouvais pas clore ce débat en laissant le ministre de la Santé laisser planer un doute sur l'attachement, le dévouement et la conscience qu'ont eus M. Robert Bourassa envers la santé de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, et les ministres qui l'ont servi, Thérèse Lavoie-Roux, Marc-Yvan Côté et Lucienne Robillard. Merci.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Brome-Missisquoi. Alors, à ce stade-ci, est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Sur division?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé. Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants.

M. Paradis: M. le Président, avant la suspension des travaux, compte tenu que le ministre a un agenda qui est serré et qu'on peut économiser du temps, est-ce qu'on pourrait s'entendre immédiatement pour procéder à l'adoption du projet de loi? De cette façon, sur le plan législatif, tout serait terminé, sauf la sanction du lieutenant-gouverneur.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il y a consentement de part et d'autre, on va faire les écritures. Le rapport également, M. le leader de l'opposition?

M. Paradis: Oui, le rapport également.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Le rapport de la commission plénière ainsi que l'adoption du projet de loi, adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Alors, ceci met fin à nos travaux et nous ajournons à jeudi, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 58)


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