L'utilisation du calendrier requiert que Javascript soit activé dans votre navigateur.
Pour plus de renseignements

Accueil > Travaux parlementaires > Travaux de l'Assemblée > Journal des débats de l'Assemblée nationale

Recherche avancée dans la section Travaux parlementaires

La date de début doit précéder la date de fin.

Liens Ignorer la navigationJournal des débats de l'Assemblée nationale

Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 21 mai 1997 - Vol. 35 N° 104

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures une minute)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour


Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Alors, nous débutons les affaires du jour à la rubrique Affaires inscrites par les députés de l'opposition.


Motion proposant que l'Assemblée exige du premier ministre qu'il reconnaisse la volonté démocratique des Québécois exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995

À l'article 72 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 de notre règlement, M. le député de Châteauguay présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du premier ministre qu'il reconnaisse la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois qui s'est exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995.»

Avant le début de la séance, nous avons tenu une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat. Le partage du temps a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées à chacun des députés indépendants; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants pourra être redistribué entre les groupes parlementaires. Je spécifie également que les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant. Alors, M. le député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. La motion qui est devant nous aujourd'hui et qui sera finalement débattue après qu'on eut tenté à plus de 20 reprises de la présenter pour qu'elle soit débattue, ce qui a toujours été refusé par le gouvernement du Parti québécois, cette motion a trait au droit des Québécois à l'autodétermination. Cette motion a trait à l'exercice du droit à l'autodétermination par les Québécois, et, si beaucoup de personnes parlent de ce droit, il faut préciser ce que signifie ce droit, parce qu'il semble qu'il y ait, tout au moins dans cette Chambre, chez les gens d'en face, une incompréhension de ce que signifie le droit à l'autodétermination. Ça signifie pour les Québécois, je vous le soumets, M. le Président, le droit de décider de leur avenir. Ce n'est pas de décider de voter oui à l'indépendance qui est le droit à l'autodétermination, c'est de décider de leur avenir lorsque les Québécois doivent exprimer leur volonté à l'occasion d'un référendum.

Or, le 30 octobre 1995, les Québécois ont exercé leur droit à l'autodétermination et ils ont décidé de poursuivre l'expérience canadienne en insistant pour une transformation du contrat canadien, et ça, de choisir l'avenir de cette façon-là, c'est aussi exercer son droit à l'autodétermination. Je le disais, à plus de 20 occasions, nous avons, de ce côté-ci, présenté une motion demandant au gouvernement de reconnaître l'exercice du droit à l'autodétermination, de reconnaître le résultat, de reconnaître que les Québécois avaient choisi de poursuivre l'expérience canadienne, de moderniser le Canada. C'est ça qui s'est passé le 30 octobre. À plus de 20 reprises, le gouvernement du Parti québécois a refusé de reconnaître et de respecter la volonté des Québécois, ce qui m'a fait bien rire lorsque j'ai entendu, pas plus tard qu'hier, le premier ministre du Parti québécois nous parler du devoir démocratique. Lui, il appelle ça son «devoir démocratique» d'aller sur les planches du Bloc québécois, mais, quand on est sur le plancher de l'Assemblée nationale, le devoir démocratique du premier ministre du Parti québécois, ça a été, à plus de 20 occasions, de sortir lorsqu'on présentait une motion, de partir à rire et de refuser d'en débattre. Une motion qui visait à faire reconnaître le résultat, parce que les Québécois, et nous en sommes, sont craintifs face à ce gouvernement – surtout ceux d'entre nous qui avons lu ce bouquin, M. le Président, et je vais en parler – et il était important de faire reconnaître par le gouvernement ce résultat. À plus de 20 occasions, ils l'ont refusé.

Ce matin, avant de vous présenter ce que je pense qu'un gouvernement qui respecte les Québécois devrait faire suite au référendum, je vais essayer de me poser la question et de trouver une réponse avec vous, M. le Président, et avec tous les autres. Pourquoi le gouvernement du Parti québécois a refusé systématiquement une chose aussi simple que de reconnaître le résultat d'un exercice démocratique, l'exercice le plus fondamental qu'ont fait les Québécois: décider de leur avenir? Comment un gouvernement qui plaide le devoir démocratique peut-il refuser de reconnaître le vote des Québécois et des Québécoises?

Je vais tenter, M. le Président, d'identifier les raisons. La première hypothèse que je vous soumets, c'est peut-être de voir que, pour le Parti québécois, pour le gouvernement du Parti québécois, ils ne font pas le même constat du résultat, peut-être. Peut-être est-ce là une des raisons pour lesquelles ils ne veulent pas reconnaître le résultat. Je vous dis ça parce qu'on a beaucoup de signaux qui nous amènent à penser que le Parti québécois, pour eux, tous les résidents du Québec ne sont pas des Québécois. Il y aurait, pour eux, deux catégories de Québécois, et c'est peut-être pour ça qu'ils refusent de reconnaître le résultat, parce qu'ils ne s'entendent peut-être pas sur le résultat.

Souvenez-vous, M. le Président, du «nous» – ouvrez les guillemets, «nous» – de Parizeau, au soir du référendum. Le même Parizeau que louange le premier ministre du Parti québécois et qui fait campagne pour le Bloc. Souvenons-nous de son «nous», le soir du référendum. Le «nous» de l'exclusion, qui exclut les anglophones, les allophones, ceux-là mêmes qui, de plus en plus, et tout le monde le reconnaît, convergent vers la langue française.

Ce qui est intéressant à propos de ce «nous», de Parizeau, ce «nous» d'exclusion, c'est de comparer ce qui s'est passé dans son petit stratagème. Avant le 30 octobre, le soir du «nous, les...», il était allé parler à la communauté arménienne. C'était une semaine avant le vote, c'était le 23 octobre. Là, il était en train de faire toujours les faux-semblants et le grand jeu pour arracher des votes.

(10 h 10)

Il disait: «Au lendemain d'un oui, nous devrons procéder à un grand rassemblement. Ceux qui auront voté non sont aussi québécois que les autres. Que l'on soit d'origine récente ou lointaine, le Québec qui commence le 31 octobre sera un Québec rassembleur et tolérant.» Ça, c'était le 23 octobre.

M. Blais: Qu'est-ce qu'il a contre ça?

M. Fournier: On me demande, M. le Président, ce que j'ai contre ça: le manque de cohérence, le fait que c'était pour arracher des votes, parce qu'une semaine après, le «nous» de Parizeau, qui vous hante encore, est venu défaire ça. C'est ce que j'ai contre ça.

À l'honorable député qui me demande ce que j'ai contre ça: l'indignation la plus profonde de voir qu'on nous parle d'un projet de société et tout ce qu'on fait, c'est un gâchis, d'exclure des gens de notre société en disant... Parce que c'est à ça que m'invite le collègue de Masson. Qu'est-ce que j'ai contre ça? J'ai contre ça les propos du 30 octobre. Parizeau qui dit: Si vous voulez, on va cesser de parler des francophones, on va parler de nous, on a voté oui à 60 %. Depuis ce temps-là, le gouvernement du Parti québécois nous envoie le signal qu'il n'a pas vu le résultat. C'est peut-être pour ça qu'il ne veut pas accepter notre motion, parce qu'il ne reconnaît pas le résultat, parce qu'il ne reconnaît pas tous les Québécois. Il ne reconnaît Québécois que ceux qui ont dit oui à l'indépendance; les autres, ça traîne dans le paysage, c'est dans les jambes. Et ça parle d'un devoir démocratique, M. le Président.

Ces gens-là, c'est peut-être pour ça – c'est la première hypothèse – qu'ils ont refusé de débattre de la motion. Ils ont décidé d'avoir maintenant comme ligne de conduite le «nous» de l'exclusion. Et ça ne s'est pas terminé le 30 octobre. Celui qui est redevenu... en l'espace d'un moment il a été renié, mais depuis il est redevenu le maître à penser. Parizeau disait il y a une semaine, le 14 mai de cette année 1997, il était à la radio, CBV Bonjour : Est-ce qu'il est absolument nécessaire de s'engager à maintenir une sorte d'égalité des postes de radio, du nombre de postes de radio en français et en anglais dans la région de Montréal? Ça, là, c'est le maître à penser, le guide spirituel du gouvernement du Parti québécois aujourd'hui, celui avec qui on va monter sur les planches du Bloc québécois. Ça, c'est le projet de société du Parti québécois. Un gâchis, M. le Président. D'essayer de dire avant le vote: On va être après un oui une société tolérante et ouverte. Et quand on s'aperçoit que l'exercice démocratique s'est tenu et que le gouvernement s'est fait dire non, c'est fini. La tolérance et l'ouverture, c'était juste du blabla, de belles promesses.

Ça, c'est la première hypothèse. La première hypothèse à l'effet que, pour eux, pour le Parti québécois, les signaux sont là, même s'ils vont nous faire de beaux discours pour dire avec la main sur le coeur combien c'est important d'avoir une société où tout le monde se rassemble. Notez bien le mot «solidarité» – il va revenir énormément souvent – «équité», «justice», «solidarité». Pourtant, c'est un parti d'exclusion. C'est un parti du «nous», avec un gouvernement du «nous» qui oublie tous les autres, avec un premier ministre du Parti québécois qui, aujourd'hui encore, va passer sa journée à planifier ce qu'il pourrait faire pour faire élire le Bloc québécois, alors qu'il y a au sein de cette société qui s'appelle le Québec une divergence d'opinions et qu'il faudrait respecter cette divergence – c'est ça, la démocratie – et il faudrait travailler pour tous les Québécois.

La deuxième hypothèse, M. le Président, peut-être que de l'autre côté on a refusé d'en débattre parce qu'on ne voulait pas reconnaître le résultat référendaire. Et, pour ne pas le reconnaître, c'était aussi éviter de reconnaître les résultats gonflés obtenus à coups de propagande, mais, encore pire, de faux-semblants, et je m'explique – M. le Président, vous pourrez prendre les écouteurs s'ils n'entendent pas les propos.

M. le Président, lorsque nous étions en campagne référendaire, nous disions: Il y aura des coûts économiques à l'indépendance. Et, du côté du Parti québécois, on nous disait: Il n'y aura pas de problème; avec l'indépendance, avec la souveraineté, on va être une souveraineté beaucoup plus riche. Ça, c'était le discours durant la campagne. Alors, on a appris que, durant la même période où ils nous faisaient ces beaux discours comme quoi on serait plus riche, eux-mêmes, le gouvernement du Parti québécois, étaient à préparer une ponction de 20 000 000 000 $ – ça s'appelle le plan O. Ce n'est pas 2 000 000 $. Ce n'est pas 200 000 000 $. Ce n'est même pas 2 000 000 000 $. C'est 20 000 000 000 $. C'est l'argent des fonds de retraite des Québécois, des Québécoises, Hydro-Québec, ministère des Finances, parce qu'ils avaient prévu qu'il y aurait des coûts économiques, mais ils le niaient avec la campagne. Nous disions durant cette campagne, avant le vote: Le partenariat, c'est un leurre. Le camp du Oui nous assurait de la conclusion de ce partenariat, M. le Président. Le premier ministre du Parti québécois, vous vous en souviendrez, simulait à tous les soirs l'appel téléphonique de Chrétien à Parizeau, de Parizeau à Chrétien. On négociait en deux jours un partenariat. À tous les soirs, le premier ministre du Parti québécois simulait ce partenariat. Pendant ce temps-là, qu'est-ce qui se passait? Jacques Parizeau envoyait Jacques-Yvan Morin à Paris, M. le Président. Pendant qu'on entendait ces simulations téléphoniques, Jacques-Yvan Morin se retrouvait à Paris. Et voici ce qu'en dit Jacques Parizeau: «Le jeu de bascule a commencé en 1989. Il s'est poursuivi jusqu'au jour du référendum, le 30 octobre 1995. Au cours des jours qui l'ont précédé, j'ai envoyé à Paris un ancien vice-premier ministre de René Lévesque, M. Jacques-Yvan Morin, afin qu'il prépare avec nos amis français le scénario des jours qui suivraient un référendum gagné.» Notez bien: non pas des années, non pas des mois, mais le scénario des jours qui suivraient un référendum gagné. Quel était ce scénario, M. le Président, qui était planifié? Eh bien, on le retrouve un peu plus loin dans le bouquin de Jacques Parizeau, ce scénario qui était planifié en même temps que le premier ministre du Parti québécois simulait sa conversation téléphonique, laissant croire à l'ensemble des Québécois que ça prendrait une semaine ou deux et puis que le Canada serait bien forcé d'accepter ce partenariat où nous serions à égalité. C'est ce qu'on laissait croire.

On envoie Jacques-Yvan Morin préparer le scénario des jours qui suivent le référendum. Et je vais vous lire un passage de ce scénario des jours qui suivaient le référendum, et c'est Jacques Parizeau, le guide spirituel, redevenu guide spirituel du Parti québécois, qui le dit et il parle de son voyage: «C'est au cours de ce voyage que Valéry Giscard d'Estaing a soulevé une question dont je n'avais jusque-là compris la portée. Il faut, dit-il en substance, dès la victoire du Oui au référendum, dans les heures ou les jours qui suivent, qu'un geste solennel soit accompli par le Québec pour proclamer sa souveraineté, c'est-à-dire dans la semaine ou les 10 jours suivants. Que l'on suspende pendant, disons, six mois ou un an l'application de la proclamation d'indépendance pour donner le temps à des négociations avec le Canada d'aboutir ou pour rédiger conjointement avec le Canada un traité de partenariat, fort bien. Seulement, la France, comme les autres pays du monde, du reste, ne peut reconnaître qu'un pays. Elle ne reconnaît pas une intention.» Et il ajoute: «On constatera que mes discours en ce qui touche les négociations avec le Canada sont rédigés de façon à permettre...» Notez la subtilité...

Une voix: L'astuce.

M. Fournier: L'astuce. Ah! le collègue de Masson a bien noté l'astuce. Devoir démocratique. Une astuce comme celle-là, M. le Président, c'est la poubelle. C'est la poubelle. Il n'y a rien de plus laid. Ça ne prépare qu'un gâchis, des astuces comme celle-là.

«Les négociations avec le Canada sont rédigées, disait-il, de façon à permettre – notez la subtilité – une telle déclaration de souveraineté et je ne me suis jamais engagé en public ou en privé à ne pas faire de déclaration unilatérale de souveraineté.» Et il ajoute: «Ceux qui parlent ne savent pas et ceux qui savent ne parlent pas.»

(10 h 20)

Deux choses: Quand on a comme ligne de conduite que ceux qui savent ne parlent pas, en démocratie, lorsqu'on demande au peuple d'exercer sa volonté, c'est une honte d'avoir ça comme ligne de conduite. Et je suis étonné que les gens qui ont dénoncé Jacques Parizeau lorsqu'ils ont lu ce texte-là qui était dans les journaux – et c'est ce texte-là qui a fait lever tout le monde pour dire: C'est épouvantable – je ne comprends pas qu'ils aient changé leur capot de bord et qu'aujourd'hui ce soit devenu la meilleure idée qu'ait jamais eue Jacques Parizeau d'accompagner la simulation téléphonique que le premier ministre du Parti québécois tenait durant la campagne référendaire... En même temps qu'il faisait croire aux Québécois qu'il allait y avoir un partenariat, lui, il envoie Jacques-Yvan Morin à Paris pour que, dans les jours qui suivent, il puisse faire sa déclaration unilatérale d'indépendance.

M. le Président, pendant que le négociateur en chef nous jouait de sa baguette magique, Jacques Parizeau préparait la grande passe: la rupture de l'union économique canadienne. Et le premier impact est déjà connu: 20 000 000 000 $ d'argent des Québécois et des Québécoises, ceux pour qui on les entend se lever et se dire qu'ils sont à leur défense. Quelle sorte de défense quand on joue avec la démocratie, avec les Québécois comme ça, M. le Président? Je vous le demande.

Pendant que le premier ministre du Parti québécois rêvait à voix haute et faisait entendre son chant des sirènes d'un partenariat illusoire, Parizeau, lui, ne s'engageait subtilement qu'à faire une offre. Et, sitôt cette offre faite, il pouvait se retourner et dire: Voyez, je ne me suis jamais engagé à ne faire autre chose qu'une offre. Elle est faite. Maintenant, je peux et je dois, avec la France, déclarer unilatéralement l'indépendance du Québec. C'était ça, le scénario. C'était ça, le chant des sirènes du premier ministre du Parti québécois qui continue. Parce qu'il continue à nous dire qu'il va nous le donner, le partenariat.

Bien, il va monter sur les tribunes. Il va monter sur les tribunes avec Jacques Parizeau bientôt. Et, quand il va monter, je voudrais qu'il puisse se souvenir de ce que dit Jacques Parizeau du partenariat. Il dit ceci: «Je me suis toujours personnellement opposé à l'idée qu'un Québec souverain recrée une instance parlementaire commune avec son voisin canadien. Où serait l'avantage? Le Canada anglophone gagnerait tous les débats à trois contre un, nous retournerions à la case impasse.»

C'est une farce, le partenariat, M. le Président. C'est un leurre. C'est un attrape-Québécois. C'est un gros sapin qu'on essaie de passer. Dans le fond, tout ce qui reste, c'est l'indépendance pure et dure. Et ils vont nous faire encore, M. le Président, des beaux discours, des gros discours.

Il y a le ministre des Relations internationales – je vous en cite juste un bout, M. le Président – qui a le culot, aujourd'hui, de faire des discours sur le partenariat, après ce que je vous ai lu de Jacques Parizeau, après ce qu'on sait de sa grande passe. Il était à l'Université Laval, le 1er novembre 1996, et il disait ceci – il est ministre du gouvernement du Parti québécois, le ministre dont je vous parle: «Les modalités de prise de décision – il parle du partenariat, le rêve continue, on engraisse l'illusion – devraient être inédites, également. Peut-on envisager, par exemple, de tenir compte des performances économiques des États dans la pondération des voix plutôt que d'asseoir uniquement ces modalités sur le poids démographique ou le principe de la parité?» On fait du blabla, mais, pire encore, on est en train de dire qu'on va faire reculer le Québec par rapport à ce que nous avons comme poids, aujourd'hui, dans le partenariat d'aujourd'hui. On voudrait nous faire perdre des votes en nous ramenant simplement au poids économique.

On ne s'aperçoit pas, de l'autre bord, des folies qu'on dit. Mais ce n'est que des illusions, ce n'est que pour faire rêver. C'est un peu comme lorsque le ministre des Finances, vice-premier ministre, nous dit, et encore récemment: «Si on avait voté oui, on serait tellement riches qu'on n'aurait pas, nous, Québécois, assez d'imagination pour inventer tous les programmes qui nous permettraient de dépenser tout l'argent qu'on aurait.» Ça, c'est le même ministre des Finances à qui j'ai demandé ici, en cette Chambre, M. le Président: «Pouvez-vous nous déposer le plan O où vous concoctiez de prendre 20 000 000 000 $ de l'argent des Québécois, en cachette, pour ne pas dire qu'il y avait des coûts économiques, même si vous le saviez?» Il m'a dit, savez-vous quoi? «On n'a pas de plan O, ça n'existe pas.» Alors, il a fallu que j'écrive, en vertu de la loi d'accès à l'information, pour me faire dire par un fonctionnaire: Bien oui, ça existe. Là, je suis en bataille, M. le Président. Je suis en lutte à la Commission d'accès pour faire réviser la décision pour pouvoir mettre la main là-dessus. Le document existe, le plan qui cherchait à aller prendre 20 000 000 000 $ existe, sauf que ceux qui ont le devoir démocratique sur les planches du Bloc québécois, pas sur le plancher de l'Assemblée nationale, eux, ils nous refusent l'information. C'est ça qui se passe, M. le Président.

Moi, je vous dis ceci, et je termine là-dessus: Assez, c'est assez. Le Parti québécois a déshonoré le sens démocratique des Québécois en cachant la vérité. Ce n'est pas de la simple propagande, M. le Président, c'est cacher la vérité. Le gouvernement du Parti québécois persiste dans ses cachettes. Le Parti québécois a déshonoré le droit des Québécois à décider librement de leur avenir. Ce que je dis, et tout le monde va en convenir: Avec des gestes comme ceux-là, le Parti québécois s'est déshonoré. Ce qui serait honorable, M. le Président, ce serait d'appuyer cette motion. Ce qui serait honorable, ce serait d'accepter la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois de moderniser le pacte canadien, d'assurer au Québec une plus grande marge d'autonomie en acceptant le virage de l'interdépendance, non pas en se cantonnant dans l'isolement et le refus.

Ce qui serait honorable, M. le Président, ce serait de respecter la volonté qu'ont les Québécois de se faire reconnaître. Il y a le député de Groulx qui, semble-t-il, est en voie de partager avec beaucoup de Québécois ce souhait de reconnaissance, de reconnaître la société d'accueil québécoise à majorité francophone comme société distincte.

Et je termine en vous disant, M. le Président, de vous souvenir, lorsque de l'autre côté ils vont se lever pour vous dire que la société distincte, c'est démodé, c'est dépassé, c'est fini, de leur rappeler que dans un sondage CROP pour Radio-Canada, il y a un an, après le référendum, on demandait aux Québécois si le Québec devrait être reconnu en tant que société distincte dans la constitution du Canada, bien, il y en avait 80 %, de Québécois, qui disaient oui.

Si le gouvernement avait le devoir démocratique à la bonne place; si le gouvernement du Parti québécois voulait un jour commencer à reconnaître qu'un gouvernement ce n'est pas juste un gouvernement d'un parti politique, arrêter de confondre parti et patrie; s'ils pouvaient comprendre qu'ils sont là pour défendre tous les Québécois et comprendre – et c'est le but de cette motion – que lorsqu'on demande aux Québécois leur avis, dans un référendum, dans une opération qui a pris un an, qui a coûté des tas de millions, le moins qu'on puisse faire d'honorable, c'est d'écouter la voix des Québécois, c'est de dire: Je vais mettre mes énergies là-dedans. Ce n'est pas de dire: Ah! On va en faire un autre, celui-là ce n'était pas bon, on recommence. On brasse les cartes puis on recommence. Mais non! On ne joue pas comme ça avec la démocratie.

Ce qu'on fait d'honorable, M. le Président, c'est qu'on dit aux Québécois: Vous avez choisi; ce n'était pas notre projet, on vous l'a soumis et vous avez choisi de rester dans le Canada. On a compris que vous vouliez qu'il soit modifié, qu'il y ait des changements. Nous allons nous mettre à la tâche; nous allons travailler dans ce sens; nous allons, pour l'avenir, tout le temps, toujours dénoncer, jour après jour, la grande passe à Parizeau, dénoncer ce qu'il a fait aux Québécois, le gâchis qu'il fait à cette société en créant deux catégories de Québécois; nous allons cesser d'avoir Jacques Parizeau comme guide spirituel et nous allons commencer à faire confiance aux Québécois. C'est ce que je demande à ce gouvernement. Merci, M. le Président.

(10 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay. Nous allons maintenant céder la parole au député de Joliette, ministre d'État des Ressources naturelles et ministre responsable du Développement des régions. Alors, M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. M. le Président, assez, c'est assez! C'est tout à fait vrai. Je pense que ça fait 50 fois, dans cette Chambre, qu'on nous demande de reconnaître les résultats du référendum. Assez, c'est assez! Si on ne l'avait pas reconnu, est-ce qu'on serait un pays souverain? Pensez-y donc 30 secondes. Si on s'est fait battre à 50 % et des poussières, si on ne l'avait pas reconnu, ça voudrait dire qu'on se comporterait comme un pays indépendant, souverain. Ce serait beau de les voir. Cinquante fois, ceux qui ont gagné le référendum ont essayé de dire: Oui, mais comment ça se fait que vous ne dites pas que vous l'avez perdu? On le sait qu'on l'a perdu, le référendum. On le sait tous, si bien qu'on s'est rallié à cela. Je ne comprends pas, absolument, l'acharnement, l'entêtement du Parti libéral à vouloir dire: Vous avez perdu le référendum. Reconnaissez-vous qu'on a perdu? Oui, on l'a perdu. On va s'en parler, M. le Président, parce que la motion qui est sur la table ce matin comme débat aurait pu être présentée le premier mercredi qui a suivi les résultats du référendum pour qu'on en discute comme on va le faire ce matin. Mais ça a laissé couler de l'eau sous le pont, et c'était excellent que ce soit quelques mois, pour ne pas dire quelques années plus tard, parce qu'on va voir la transparence, on va voir ce que les sépulcres blanchis ont fait depuis ce temps, et vous verrez de quel bord la transparence existe.

Le respect de la décision du 30 octobre 1995, oui, il est en cause dans la motion de ce matin, et dans la campagne électorale actuelle encore plus. Si les libéraux ont déposé cette motion, c'est pour essayer de faire marquer des points à leurs petits confrères fédéralistes durant la campagne électorale – on va parler d'eux également ce matin – parce que cette motion met en cause, précisément à cause de la campagne en cours, cinq aspects très spécifiques: d'abord, le respect de la décision du 30 octobre 1995, oui; le respect du droit des Québécois à disposer d'eux-mêmes, parce qu'on en parle constamment durant cette campagne électorale; le respect de la loi québécoise sur les consultations populaires, je vais vous en parler; le droit de l'Assemblée nationale à décider de la question référendaire, c'est en cause durant la présente élection; je vais également parler d'intégrité du territoire et je vais les prendre un par un, dans l'ordre, les éléments qui sont en cause par la motion et par la présente élection.

D'abord, parlons du respect de la décision d'octobre 1995. Bien, de toute évidence, l'Assemblée nationale, le gouvernement respecte intégralement la décision du 30 octobre. Il y a seulement les libéraux qui ne se sont pas rendu compte qu'on respectait la décision du 30 octobre. Et la marge était si étroite – 50 % plus un, finalement – pour nous, démocrates, ça a suffi. On les respecte. Le Québec est une province du Canada, on le sait. On n'aime pas ça le dire, nous, parce qu'on a une option beaucoup plus valorisante: on veut être un pays normal pour un peuple normal. Mais on paie nos impôts au Canada, on discute avec le gouvernement fédéral, on mène de nombreux combats au sein du système fédéral actuel et, parfois, surtout quand il y a des rumeurs d'élections, on signe des ententes administratives. La question qui se pose aujourd'hui, c'est de savoir si les leaders du Non, eux, auraient respecté le verdict référendaire si le 50 % et plus avait penché en faveur du Oui. C'est ça, la question qu'on doit se poser aujourd'hui.

Une voix: Bravo!

M. Chevrette: Et, à ce sujet, M. le Président, le chef fédéral du Non, Jean Chrétien, a dit aux Québécois, rappelez-vous, cinq jours avant le vote référendaire, dans son discours télévisé, les trémolos dans la voix, que «l'enjeu du référendum – et je le cite – c'est une décision sérieuse et irréversible de demeurer Canadiens ou de ne plus l'être, de rester ou de partir. Cette décision est entre les mains des citoyens québécois», disait-il. Jean Chrétien reconnaissait la question. Il la reconnaissait, cette question. Il avait participé à la campagne. Il disait que la décision était entre les mains des citoyens du Québec.

Aurait-il tenu parole, lui, oui ou non? Ou était-ce un mensonge? Je me souviens que, au lendemain du référendum, en réponse à une question que lui posait M. Bouchard, M. Chrétien avait déclaré que, en cas de victoire du Oui, loin de tenir parole et de respecter la décision, il avait l'intention de se servir de tous les pouvoirs, disait-il, afin de protéger la Constitution canadienne, donc l'unité nationale; détail, bien sûr, qu'il avait omis de mentionner dans son adresse télévisée aux Québécois. Qui est transparent? Cinq jours avant: Je respecterai le Québec. Cinq jours après: J'aurais pris tous les moyens pour ne pas respecter le verdict populaire, alors que nous, depuis 15 mois et plus, on respecte le verdict populaire. Mais on a l'intention, bien sûr, de défendre notre option. Et, parlant de respect des divergences, M. le député de Châteauguay, quand un peuple est à 50-50, il y a une moitié qui doit respecter l'autre aussi. Et, ça, vous ne semblez pas le reconnaître.

Des voix: Bravo!

M. Chevrette: M. le Président, ça m'amène à parler du droit du peuple québécois à disposer de lui-même. Aujourd'hui, dans cette campagne électorale, ce droit des Québécois est mis en cause par les deux grands partis fédéraux. Par Jean Chrétien et ses candidats libéraux, d'abord, qui veulent que ce soit la Cour suprême qui décide pour les Québécois. Il veut que ce soit la tour de Pise – la Cour suprême – qui décide à la place des Québécois. Ils veulent même choisir à notre place, imaginez-vous, un avocat qui parlerait en notre nom, parce qu'on ne veut pas en envoyer. Il a dit: On va leur choisir un avocat pour parler en leur nom. Imaginez-vous! Imaginez-vous, ça fait sérieux! Ils veulent organiser à toutes fins pratiques une imposture. C'est ça qu'ils veulent. Ils ont peur de la démocratie québécoise; ils veulent la nier puis ils veulent l'étouffer.

Jean Charest, de son côté, lui, refuse de reconnaître le droit des Québécois. Lorsqu'on lui parle de ça, ah, il répond en termes astronomiques. Il y a des grands trous noirs. Il parle de trous noirs. On va l'appeler M. Trou-Noir, parce qu'il ne voit rien, il ne conçoit pas qu'un peuple puisse vouloir s'autodéterminer.

Plusieurs membres de l'opposition dans cette Assemblée, M. le Président, font également campagne pour des candidats fédéralistes. La députée de Saint-François fait campagne avec M. Trou-Noir dans Sherbrooke. Le député de LaFontaine, lui, il est très actif dans les circonscriptions de Montréal pour les candidats de Jean Chrétien. Et, deux anciens membres, Yvon Charbonneau, France Dionne, deux députés de cette Assemblée, sont rendus dans les rangs fédéralistes dans la présente campagne. L'opposition est donc directement interpellée, M. le Président. Je voudrais savoir si elle entend être complice des candidats qui veulent étouffer le droit du Québec à disposer de lui-même. A-t-elle des trous de mémoire, cette opposition? Nous allons voir. Allons voir ensemble, M. le Président.

Alors qu'il était premier ministre, il y a deux ans, le chef de l'opposition actuel avait affirmé, et je le cite au texte: «Il m'apparaît extrêmement clair qu'au Québec, du point de vue politique, du point de vue de la société québécoise, de l'ensemble de la population, nous avons déjà exercé, en 1980, le droit à l'autodétermination.» Puis il ajoutait sur un ton plutôt péremptoire, qui sied à ce genre de choses, d'ailleurs: «Je ne vois pas pourquoi, tout d'un coup, ce serait disparu.» Il parlait bien. M. Johnson disait ça, l'actuel chef de l'opposition, M. le Président.

En novembre 1994, il est encore plus clair. Il dit: «Nous sommes maîtres chez nous – il avait emprunté ça à Jean Lesage, bien sûr – de décider de notre avenir. C'est un droit fondamental que je défendrai ici et partout, en toute circonstance.» Oh, quel sursaut! Quel élan d'énergie, d'un coup sec! Il doit s'être fait traiter de capricieux par un fédéraliste cette journée-là pour avoir déclaré, avec autant de fermeté, son désir d'être maître chez eux. Je dirais que, ceci, c'est une longue tradition au Québec, la défense des intérêts du Québec.

Jean Lesage disait, lui: «Maîtres chez nous». Daniel Johnson – non pas le fils, le père – parlait «d'égalité ou d'indépendance». Il a défendu ce droit inaliénable et, quand un premier ministre se lève puis qu'il le répète, il est dans la lignée de la défense des intérêts du Québec, comme ça a toujours été.

D'autres leaders libéraux ont défendu ce principe aussi. Moi, je me souviens, ici, à l'Assemblée nationale – il y a beaucoup de gens d'en face qui ont applaudi, d'ailleurs, cet homme – de Robert Bourassa. Et je m'en rappelle comme si c'était hier. C'était peut-être la première fois pour moi, mais maudit que j'étais fier de lui quand il avait dit ceci: «Quoi qu'on dise et quoi qu'on fasse, le Québec est aujourd'hui et pour toujours une société distincte, libre et capable d'assumer son destin et son développement.» C'était Robert Bourassa. En 1992, il déclarait également dans cette Chambre: «Ce serait totalement inacceptable qu'on empêche le Québec de décider de son avenir.»

(10 h 40)

Puis vient le rapport de la commission Bélanger-Campeau, dont tout le monde se rappelle, qui porte notamment les signatures de l'ancien premier ministre du Québec, de l'actuel député de Viger, de l'actuel député de Nelligan, et qui indique que les membres de commission ont, et je cite, «la conviction profonde que l'expression claire de la volonté du peuple québécois est le fondement du processus politique pouvant conduire à la souveraineté». C'était écrit textuellement, ça, dans le rapport de la commission Bélanger-Campeau. Et, dans son propre addendum, rappelez-vous, celui qui ne se trompait que rarement, disait-il, l'ancien chef libéral Claude Ryan écrit ce qui suit dans l'addendum au rapport de la commission Bélanger-Campeau: «Je souscris entièrement à l'orientation voulant qu'en dernier ressort le peuple québécois soit appelé à décider souverainement de son avenir collectif.»

Les députés libéraux, M. le Président, doivent se demander aujourd'hui s'ils doivent renier tous ces engagements en apportant leur aide à Jean Chrétien ou à Jean Charest. Ils veulent tout simplement renier ainsi les principes que le Parti libéral du Québec a défendus jusqu'à maintenant et renier les droits des Québécois.

Et, au-delà des droits des Québécois, il y a également le respect de notre loi référendaire. Depuis 1977, nous avons ici une Loi sur la consultation populaire qui a fait ses preuves. Le Parti libéral l'a utilisée, même, en 1992 et notre parti l'a proposée et utilisée deux fois. Elle fait l'envie de bien des pays à travers le monde, cette loi. Le gouvernement français s'en est même servi pour réformer sa propre loi. Et le Directeur général des élections enseigne le fonctionnement à bien des pays à travers le monde. Il y un endroit où on veut fouler aux pieds la loi québécoise, puis c'est au Canada et par les partis fédéraux.

On sait que Marcel Massé, par exemple, un des ténors libéraux, a affirmé ouvertement, en 1995, que son gouvernement allait ignorer les limites des dépenses prévues à notre loi et allait faire toute la publicité subliminale fédérale que les millions de dollars de nos taxes et impôts allaient lui permettre. Rappelez-vous ça. Il se foutait éperdument de notre loi. On sait également que les membres du caucus fédéral ne se sont pas gênés pour organiser une manifestation monstre en défonçant les limites permises. D'ailleurs, ils ont promis qu'ils recommenceraient si ça se faisait. Un irrespect total de nos lois.

On sait également aujourd'hui que le ministre Stéphane Dion – vous savez, le suave Stéphane Dion – pense que la règle universelle de 50 % plus un devrait être abolie dans un seul endroit au monde: au Québec. C'est à peu près ça que pense Stéphane Dion. Il y a eu un moment où le fédéral avait pensé faire fi de la loi québécoise des consultations populaires. C'était en 1992, au moment du référendum de Charlottetown. L'ancien chef du Parti libéral, Robert Bourassa, à ce moment-là s'était battu pour défendre la loi québécoise. Et de son siège, il y a cinq ans ce mois-ci, même, il s'était adressé à la présidence et avait dit, M. le Président: «Je suis responsable de la législation et l'Assemblée nationale est responsable de la législation québécoise. Nous allons suivre la situation de très près, de manière à ce que les droits des Québécois soient respectés.» M. Bourassa allait imposer au gouvernement d'Ottawa que le référendum de 1992 soit réalisé au Québec dans le respect des lois québécoises des consultations populaires contre la tentation fédérale de faire selon la loi fédérale.

Et vous vous rappellerez c'est grâce à qui si le Québec a été remboursé pour ce référendum national. C'est grâce au Bloc québécois à Ottawa et c'est grâce à l'opposition, qui était le Parti québécois à l'époque. On est allé chercher notre 30 000 000 $ dès notre arrivée au pouvoir alors que les libéraux, pendant trois, quatre ans, ont tergiversé, n'ont pas eu la force politique d'aller chercher cet argent qui nous était dû.

M. Bourassa ajoutait, au nom de son parti et de son gouvernement, également: «Nous avons fermement l'intention de protéger les décisions de l'Assemblée nationale et surtout la décision du Québec de décider de son avenir.» M. le Président, moi, je dis: On n'en attend pas moins du successeur de M. Bourassa. On n'en attend pas moins du parti de M. Bourassa. On n'en attend pas moins des libéraux actuellement en caucus de défendre les intérêts du Québec, de défendre le droit du Québec à son autodétermination, de défendre les lois de la consultation populaire.

Et ça nous amène à la question référendaire. Pendant cette campagne, le suave député libéral fédéral Stéphane Dion puis les membres du «Reform Party» également et Jean Charest ont tous mis en cause le droit de l'Assemblée nationale de décider de la question référendaire. Et ça, je n'ai jamais entendu un libéral se lever contre ça, aucun, M. le Président. Il y a un «preacher», à RDI, il y a 15 jours, qui était comparé à Pierre Lacroix, qui s'est fait dire qu'il devait aller vers ça, mais on ne l'a pas entendu ce matin se lever puis dire qu'il était contre. Les propos de...

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez, M. le ministre, question de règlement.

M. Fournier: Question de règlement simplement pour préciser les faits. Si le ministre avait lu le journal ce matin, il saurait que le député a pris position...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le ministre, si vous voulez poursuivre.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Il y en a qui se sentent visés sans qu'on les nomme. C'est bon. C'est bon signe.

Le chef de l'opposition et ses collègues ont été très muets à cet égard. Pas un ne s'est élevé contre Dion; pas un ne s'est élevé contre Charest; pas un ne s'est élevé contre Chrétien qui ne se gêne pas, durant la présente campagne électorale, pour dire que le Québec n'a pas le droit de rédiger sa question, que 50 % plus un... Pas un de leur côté. De l'à-plat-ventrisme. C'est ça, l'attitude du Parti libéral. Puis on veut jouer par une motion en Chambre pour essayer d'aider ces fédérastes qui veulent absolument écraser ceux qui veulent véritablement se bâtir un pays normal pour un peuple normal.

L'actuel critique libéral en matière constitutionnelle – là, je vais le citer, je vais le nommer, il va comprendre encore plus que tantôt – le député de Châteauguay, celui de qui j'ai essayé de parler sans le nommer préalablement, affirmait en décembre 1995: Le droit à l'autodétermination du Québec existe. Le gouvernement élu propose le quand et le comment. C'est exactement ce qu'on fait. On est élu, on rédige la question, on fixe le moment puis on dit comment ça va se faire. Et ils nous reprochent de ne pas être transparents. «Faut-u» être... quelque chose que je n'ai pas le droit de dire en vertu de nos règlements.

Le chef de l'opposition, lui, était encore plus clair, le 26 septembre dernier. Ce n'est pas trop loin, ça, même s'ils ont la mémoire courte. Rendu en septembre, j'espère que, de septembre à mai, il va y avoir un petit peu de réminiscence. Ce qu'il disait, le 26 septembre dernier, lorsqu'il disait ce qui suit aux politiciens fédéraux en mal d'écriture sur la question, et je le cite: «Si des membres du gouvernement fédéral veulent dicter la question aux Québécois, c'est très facile, ce qu'ils ont à faire, bien, qu'ils démissionnent de leur siège à la Chambre des communes» – qu'ils fassent comme Charbonneau, ici, pour s'en aller là-bas – qu'ils cherchent un parti qui va les accueillir au Québec – une belle façon de leur dire qu'il ne les accueillerait pas trop dans le PLQ en passant – qu'ils se présentent à une convention, qu'ils essaient de se faire élire aux élections et, s'ils ont une majorité, ils peuvent peut-être le faire, parce que c'est comme ça que ça va se faire.» Voyez-vous, le chef de l'opposition, quand il n'est pas pris dans un carcan où il doit aider les fédéraux, il a des petits relents de son père probablement, ou de Jean Lesage, ou de M. Bourassa, ou de M. Ryan. Quand arrive le temps où il pourrait se tenir debout, démontrer sa volonté de défendre le Québec, pas un mot, le mutisme complet.

Il disait ceci: La question est posée par le gouvernement, adoptée par l'Assemblée nationale. C'est comme ça que ca marche, qu'est-ce qu'il veut de plus? La question est préparée par le gouvernement et a été votée par l'Assemblée nationale. C'est le peuple, à une date précise, qui se prononce. Qu'est-ce qu'ils peuvent bien avoir de ça? Et le peuple s'est prononcé et on respecte ce verdict. Qu'est-ce qu'ils veulent? Pourquoi le chef de l'opposition a-t-il peur maintenant, aujourd'hui, durant la campagne fédérale qui remet en cause tous ces principes-là? Pourquoi a-t-il peur, de son siège, de se lever puis de dénoncer ou, au moins, de répéter exclusivement ce qu'il disait au mois de septembre, ça ne serait déjà pas mal?

Non, non, soumis, à plat ventre, en dessous du tapis de porte, aplati au bout. Non, c'est dangereux de se tenir debout puis de leur dire: La question relève de l'Assemblée nationale du Québec. C'est dangereux de dire: C'est le gouvernement qui fixe la date. C'est dangereux de dire: On a une loi qui est supérieure à toutes les lois qui existent sur le continent nord-américain en termes de démocratie. «C'est-u» dangereux de dire ça puis de dire que ça ne vous regarde pas, le type de question qu'on va poser, c'est au Québec qu'on va s'autodéterminer?

M. le Président, de quoi ont-ils peur, ces gens-là? De quoi? «Y est-y» d'accord, le chef de l'opposition? Je vais lui en poser des questions, moi, peut-être qu'il répondra dans cinq mois. «Y a-tu» peur de dire à Jean Chrétien que ça n'a pas d'allure ce qu'il dit? «Y a-tu» peur de dire à Stéphane Dion que 50 %, c'est la démocratie? La preuve, c'est qu'ils ont gagné leur non avec 50,6 %. «Y ont-u» peur de dire à Massé qu'il doit respecter les lois sur le financement des partis politiques? Avez-vous peur de ça? M. Bourassa avait louangé, lui, le financement et la loi du Québec. Les députés, Yvon Charbonneau puis France Dionne, sont-ils d'accord avec la députée Sheila Finestone qui dit ceci...

(10 h 50)

Une voix: Finestone.

M. Chevrette: C'est «Feenstone»? En tout cas, Feen ou Finestone, faites vos jeux, c'est Brigestone, Firestone! M. le Président, qu'est-ce qu'elle dit, cette madame?

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît!

M. Chevrette: Qu'est-ce qu'elle dit, cette Mme Finestone? Elle dit: «J'appuie le mouvement partitionniste. J'appuie le mouvement partitionniste, c'est très important. Je les félicite. Le premier ministre Chrétien et le ministre Dion ont été tous les deux très clairs et je l'ai dit moi-même, dit-elle, si le Canada est divisible, le Québec l'est aussi.» Puis la candidate libérale ajoute: «Je reconnais le droit et j'applaudis les efforts des groupes pro-unité qui ont amené cette idée à l'intention de tous les Québécois, l'idée de la partition.»

Est-ce que Yvon Charbonneau est d'accord avec ça? Est-ce que France Dionne est d'accord avec ça? Est-ce que le «preacher» de Châteauguay est d'accord avec ça, prêcher la partition? Qu'il se lève et qu'il le dise, parce que c'est ça qu'on encourage durant la présente campagne électorale. J'ai hâte de les entendre dire s'ils sont d'accord ou pas avec la partition, M. le Président.

Je sais que le député de Laurier est pour ça à mort, lui, mais, il y en a d'autres dans cette formation politique qui seraient mal à l'aise de se prononcer pour la partition du territoire québécois. On va en parler, M. le Président. Le chef de l'opposition déclarait en novembre 1994, dans cette Chambre, une phrase qui était belle et forte, et je vais la lui emprunter pour la circonstance: «Pour le PLQ, les Québécois conservent en tout temps le droit et le pouvoir de déterminer démocratiquement le statut politique qui leur convient à l'intérieur des frontières actuelles du Québec.» C'est le chef de l'opposition actuel qui disait ça. J'aimerais ça entendre le député de Laurier dire qu'il est d'accord avec son chef contre la partition. J'espère qu'il en aura le courage. Il ne le fera pas, parce que, en sourdine, il y en a un bon nombre de l'autre côté, un bon nombre qui encouragent la partition du territoire alors que leur propre chef, en novembre 1994, déclarait ce que je viens de dire.

Le député de Mont-Royal puis le député de Châteauguay, l'an dernier, avaient montré une certaine forme de courage en allant affronter les partitionnistes sur leur propre terrain. Pourquoi le chef de l'opposition n'a-t-il pas le courage aujourd'hui de dénoncer les partitionnistes qui sont au pouvoir à Ottawa et les partitionnistes du Parti conservateur qui voudraient arriver au pouvoir, eux autres, et peut-être certains membres de sa propre formation politique? Leurrons-nous pas, ils n'auront pas le courage de répondre à cette question-là. Ils n'auront pas le courage, M. le Président. On préfère faire peur. Le Bonhomme Sept Heures, le fantôme.

Pourquoi ont-ils honte de répéter à Jean Chrétien et à Stéphane Dion, puis à Preston Manning, puis à Jean Charette ou Jean-qui-a-des-trous-noirs-Charest qui va défendre qui? Pourquoi ont-ils peur de dire qu'ils défendent l'intégrité territoriale québécoise? Pourquoi? Vous n'en avez pas entendu un de l'autre côté dire ça. Est-ce que l'union sacrée des fédéralistes au Québec va maintenant jusqu'à renier les droits du Québec, M. le Président? Est-ce que le programme du PLQ, les principes de tous les premiers ministres du Québec depuis des décennies sont niés par ces gens-là? C'est un mutisme complet face aux attaques les plus basses qu'il ne peut pas arriver durant cette campagne électorale là.

Aujourd'hui, leur silence, ce n'est pas une option. Quand les droits du Québec à l'Assemblée nationale, les droits du peuple québécois sont attaqués dans une campagne électorale, le silence n'est pas une option honorable. Je demande donc au chef de l'opposition et à son critique en matière constitutionnelle de sortir de leur silence puis de défendre les intérêts supérieurs du Québec. Et, M. le Président, pour que cette motion reflète véritablement ce que l'Assemblée nationale du Québec doit rechercher, on va donner la chance aux libéraux de s'exprimer. Je demanderai, par exemple, avant de la déposer, à toutes les Québécoises et à tous les Québécois d'en faire autant le 2 juin, d'exprimer hautement et fièrement leur choix face au droit du Québec de faire respecter ses lois; le choix face au droit du Québec de rédiger la question par son Assemblée nationale. C'est tout ça qui est mis en cause, et je suis sûr que le 2 juin prochain les gens vont massivement aller l'exprimer en faveur du Bloc québécois.


Motion d'amendement

M. le Président, je voudrais amender cette motion pour permettre à certains libéraux ou bien de s'absenter de la Chambre pour ne pas voter, parce que ça va être un petit peu compromettant, ou bien pour d'autres d'affirmer au moins une certaine fierté. Et on pourra dire que l'Assemblée nationale s'est véritablement exprimée sur ses droits fondamentaux. Je propose donc en amendement que la motion en discussion soit amendée:

1° par le remplacement, dans la première ligne, des mots «du premier ministre qu'il reconnaisse» par les mots «de l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec qu'ils reconnaissent»;

2° par l'ajout, à la fin, des mots suivants: «tenu en vertu de la loi sur les consultations populaires, reconnaissant ainsi le droit fondamental des Québécoises et des Québécois de décider de leur avenir en vertu de cette loi».

Et la motion amendée se lirait donc comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige de l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec qu'ils reconnaissent la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois qui s'est exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995 tenu en vertu de la loi sur les consultations populaires, reconnaissant ainsi le droit fondamental des Québécoises et des Québécois de décider de leur avenir en vertu de cette loi.» Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre. Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: Oui, M. le Président, juste sur la recevabilité de la motion d'amendement, sans interrompre le débat, je vais me permettre de vous demander de pouvoir réserver les commentaires et remarques sur la recevabilité de cette motion et vous revenir avec des arguments, s'il y a lieu de soulever des arguments quant à la recevabilité.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Alors, je vais accepter votre proposition. Nous allons poursuivre pour l'instant les débats, et je vais vous concéder un cinq minutes pour examiner. Immédiatement après la fin de l'allocution du député de Rivière-du-Loup, à ce moment-là, je prendrai en délibération. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup, je vous cède maintenant la parole. Vous avez un droit de parole de cinq minutes.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Cette motion-là, M. le Président, ne nous en dit pas long. Ce qui est inclus là-dedans, la reconnaissance des résultats référendaires, dès que le résultat a été un peu clair, j'ai été le premier à le faire d'une façon résolue en donnant un sens évidemment à ça, en disant: Il faut ramener, après un débat déchirant de quelques semaines, le plus rapidement possible le Québec sur le terrain de la réconciliation et surtout réunir le plus rapidement possible les énergies du Québec à la bonne place, ramener les priorités de notre gouvernement entre autres sur le problème du chômage, l'amélioration des conditions qui permettent aux entreprises, aux PME du Québec de créer davantage d'emplois, sur l'amélioration du climat d'investissement – climat d'investissement qui a été affecté par toutes sortes de décisions du gouvernement et pour lequel il aurait été important de se concentrer à le raffermir, l'améliorer – mettre nos énergies sur des efforts pour contrer l'appauvrissement des ménages qui est en continuelle détérioration.

(11 heures)

Et ma crainte, dès le soir du 30 octobre, dès le soir du référendum, c'était que de part et d'autre, dès le lendemain matin, dès le mardi matin, on retombe dans l'obsession constitutionnelle. C'est-à-dire que ma crainte, c'était que des partis dont la joute essentielle depuis tant d'années n'a été que la Constitution soient incapables de mettre de côté, de refermer la porte sur ce vote que la population avait fait et dire: On va passer à autre chose; on va unir les forces du Québec sur d'autres questions. Et ma crainte était fondée, M. le Président, parce que l'obsession nous est revenue. L'obsession nous est tellement revenue qu'aujourd'hui on nous présente, si mes calculs sont bons, 19 mois après la fin de la campagne référendaire, une motion pour reconnaître à nouveau le résultat du référendum qu'il m'apparaissait que tout le monde avait reconnu. Alors, quand on lit la motion, donc, ça nous indique deux choses sur les auteurs de la motion: d'abord, l'obsession constitutionnelle, parce que c'est absolument extraordinaire d'entendre un parti qui accuse l'autre, qui accuse le gouvernement d'être obsédé par une option, mais qui, dans l'ensemble de ses interventions, est aussi obsédé de constitution que les autres, mais avec une position inverse; la deuxième chose que ça nous indique, c'est qu'il n'y a rien dans la motion qui reconnaisse les résultats – tout le monde les a reconnus – pas d'idée, pas de contenu, pas de suggestion de ce qu'on devrait faire d'autre. C'est une chose de dire que ce que les autres veulent faire, ce n'est pas bon, mais on ne nous dit pas ce qu'on va faire. Ça nous indique donc une deuxième chose, c'est le vide de la pensée politique de ceux qui occupent présentement les banquettes de l'opposition officielle: pas de programme, pas d'idée, pas de suggestion. On s'obsède de constitution, mais, même sur ce qui est leur obsession, la constitution, pas de proposition de réforme constitutionnelle. Ils font un congrès, ils oublient d'en parler, manque de temps, supposément. Donc, sur ce qui est le seule obsession, même pas rien à dire. Alors, imaginez, sur le reste, sur l'économie, sur tout ce qui ne les intéresse pas, comment ils n'ont rien à dire, comment ils n'ont rien à nous proposer.

Ce dont le Québec a besoin, M. le Président, c'est d'un climat favorable au développement économique. C'est de moins de taxes, c'est de moins de réglementation, c'est d'une situation où les gens qui veulent créer des emplois, de la grande entreprise jusqu'à la PME, jusqu'à la PPE, jusqu'aux gens qui veulent créer leur propre emploi, comme certains l'ont fait avec des garderies et se font taper sur les doigts aujourd'hui par le même gouvernement qui leur a permis de partir il n'y a pas si longtemps, que, de façon générale, ceux qui veulent créer des emplois ou créer leur emploi vivent dans des conditions qui facilitent ça. C'est pour que le gouvernement concentre les énergies du Québec sur ça que l'Action démocratique du Québec a amené l'idée d'un moratoire, de mettre de côté ces questions-là pour le restant du mandat et le mandat suivant, évidemment dans le respect de la volonté populaire exprimée au référendum. D'ailleurs, quand des sondages ont été faits sur cette question-là, il était très clair que, même parmi les gens qui ont voté oui, il y en avait une majorité qui pensait qu'il fallait prendre une pause sur ces questions-là. C'est en ce sens-là, M. le Président, que je propose aussi un amendement qui va devenir, si je comprends, un sous-amendement à l'amendement du député de Joliette.


Motion de sous-amendement

Donc, que l'on ajoute, après les mots de l'amendement «en vertu de cette loi», «et qu'afin d'unir l'ensemble des forces vives du Québec autour des objectifs communs de relance économique et de création d'un climat favorable à l'emploi et à l'investissement, on respecte un moratoire sur les chicanes linguistique et constitutionnelle jusqu'à la fin de ce mandat ainsi que pour la totalité du prochain».

Alors, c'est le sous-amendement que je veux déposer, en invitant, évidemment, d'abord l'opposition officielle, s'ils veulent être cohérents avec leur motion et s'ils veulent au moins amener une idée, amener quelque chose dans le débat autre que du vide, autre que de l'air, à appuyer cette motion-là. Mais j'invite aussi tous les parlementaires à se rallier autour d'une motion qui respecte véritablement la volonté populaire de concentrer nos énergies sur l'amélioration des conditions économiques au Québec. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Votre sous-amendement est déposé. O.K.? Il est actuellement à la photocopie. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Nous allons évidemment vous demander un cinq minutes pour pouvoir prendre connaissance du sous-amendement qui a été déposé par le député de Rivière-du-Loup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: On pourrait faire probablement ce qu'on a fait tantôt, c'est-à-dire qu'il y ait un cinq minutes de réflexion sur le sous-amendement, si je comprends bien, tout en continuant les débats, ce qui fait qu'à ce moment-là on serait à l'étape où vous recevez mes commentaires sur l'amendement du ministre, M. le Président, comme vous me l'avez suggéré tantôt.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord.

Mme Caron: C'est exactement ce que j'ai fait, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Bon. Alors, dans les circonstances, vous allez accepter toutefois que, à ce stade-ci, comme vous n'avez pas pris connaissance, actuellement, du sous-amendement déposé par le député de Rivière-du-Loup, nous allons continuer nos débats, mais en ne discutant que sur la motion principale et non, actuellement, sur l'amendement ni sur le sous-amendement, et ce, pour les cinq prochaines minutes, le temps que les partis de l'opposition et le gouvernement prennent connaissance du sous-amendement du député de Rivière-du-Loup. Ça vous convient?

Mme Caron: Question de directive, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui.

Mme Caron: Puisque vous aviez convenu que, sur l'amendement lui-même, on ne prenait qu'un cinq minutes, c'est-à-dire le temps du discours du député de Rivière-du-Loup, à ce moment-ci, je m'attends à ce que le leader adjoint de l'opposition puisse immédiatement nous dire s'il a des remarques à faire sur la recevabilité de l'amendement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Écoutez, je crois qu'à ce stade-ci on se doit d'analyser la situation globalement. Alors, dans les circonstances...

M. Fournier: M. le Président, est-ce que je peux vous aider? Donnez-moi 30 secondes, je vais vous aider.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: Simplement pour vous dire que, sur l'amendement déposé, ça nous fait plaisir de concourir avec la motion qui est écrite, en espérant évidemment que le gouvernement vote pour et qu'ensuite il applique sa politique en fonction de cette motion une fois pour toutes. Mais, sur l'amendement, il n'y a pas de problème, ce qui nous permettrait de passer au député de Laurier-Dorion.

Le Vice-Président (M. Pinard): D'accord. Alors, ça vous convient, Mme la leader adjointe du gouvernement? Donc, puisqu'il y a consentement, à ce stade-ci, on va continuer nos débats sur la motion principale ainsi que sur l'amendement qui est déposé par le gouvernement, accepté par l'opposition. Toutefois, je vais vous demander de ne traiter que de la motion principale et de l'amendement et non pas de traiter actuellement du sous-amendement qui est déposé par notre député de Rivière-du-Loup, puisque celui-ci n'a pas encore été examiné par le gouvernement et l'opposition officielle. Alors, M. le député de Laurier-Dorion.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Il me fera plaisir de suivre votre consigne et de parler de la motion comme telle, surtout après les interventions du ministre des Ressources naturelles et du chef de l'Action démocratique, parce que, de part et d'autre, je pense qu'on a entendu là des remarques qui méritent un certain nombre de répliques.

M. le Président, je n'en reviens pas d'entendre les ténors du Parti québécois s'ériger en grands défenseurs de la démocratie en affirmant que, évidemment, on respecte – pas respecte – on reconnaît le résultat du référendum, et poursuivre par la suite avec toutes ces grandes démonstrations théâtrales qui, à la Place des Arts ou au Grand Théâtre de Québec, mériteraient des cris de bravissimo pour le spectacle qui nous est donné, un spectacle de victimes enragées par rapport à ce qui se passe sur une autre scène politique, spectacle par rapport aux grands défenseurs de la démocratie, mais sans jamais, une fois, expliquer c'est quoi, respecter la démocratie, non pas juste reconnaître le résultat du référendum, mais respecter la volonté populaire. Parce que, si la démocratie a un certain sens, elle doit être plus que la stricte interprétation mécanique des règles qui régissent nos institutions, elle doit se fonder sur le respect de la volonté populaire, et le respect de la volonté populaire, ça entraîne des gestes concrets de ceux qui gouvernent.

Le ministre qui a parlé tantôt a dit que, quand un peuple est divisé à 50-50, il faut que le 50 % respecte l'autre 50 %. Moi, je dirais, M. le Président: Quand un peuple est divisé, le devoir fondamental de ceux qui gouvernent est de procéder à des gestes qui prônent la réconciliation et non pas d'insister, d'insister et d'insister davantage pour expliquer au peuple comment le peuple s'est trompé en exerçant son droit à l'autodétermination. Ce qui est en cause ici, ce n'est pas simplement de dire: Bien, oui, on l'a reconnu, on n'a pas déclaré, en dépit de la volonté populaire, l'indépendance. C'est ce qu'il nous a dit. Il nous a dit: On a respecté le choix démocratique des Québécois parce qu'on n'a pas procédé à une déclaration d'indépendance après un vote du Non. Ça aurait été le comble, M. le Président. Mais reconnaître la volonté populaire, ça veut dire respecter la volonté populaire.

(11 h 10)

Et, moi, j'aimerais vous ramener à un autre personnage politique. Le ministre a abondamment cité tous les chefs du Parti libéral du Québec, M. le Président. Moi, j'aimerais ça vous ramener à un grand démocrate reconnu par tous ici, je pense, comme grand démocrate, René Lévesque, qui a vécu une situation similaire. Il a tenu un référendum en 1980, il a perdu et il a bien dit: À la prochaine, M. le Président. Et la prochaine, c'était 15 ans plus tard. Mais ce n'est pas juste le temps qui compte. Dans ces 15 ans, il y a eu des événements qui sont survenus, il y a eu le rapatriement de la Constitution, il y a eu les tentatives échouées de Meech et de Charlottetown de répondre à cette question qui était en plan sur la scène politique québécoise. Ce n'est qu'après des événements concrets, réels que, de par leur force, la légitimité d'un deuxième référendum est arrivée. Personne de ce côté-ci n'a remis en cause la légitimité de tenir un autre référendum en 1995.

Nous, on trouvait que c'était une perte de temps, que ça nous déviait des vrais enjeux de la société. C'est ce qu'on a dit en campagne électorale en 1994. Nous avons perdu de justesse, mais nous avons perdu. Nous avons respecté le fait que, légitimement, c'était correct de proposer un autre référendum. Et il a eu lieu, ce référendum, le 30 octobre, M. le Président, et le peuple a parlé. Quand le peuple parle, normalement, les élus du peuple écoutent et ils agissent en conséquence, comme René Lévesque l'avait fait. Il avait bien dit: À la prochaine. Mais il a agi en proposant, après le rapatriement même de la Constitution, le beau risque. Il a dit: J'ai compris ce que les Québécois ont voulu, ils veulent qu'on reste à l'intérieur de la fédération et qu'on essaie de la faire marcher mieux.

Et, le 30 octobre, c'est à peu près la même chose qui est arrivée: le peuple a parlé, et une grande majorité du «nous» de Jacques Parizeau – parce que c'est la barre qui est souvent retenue, 60 % de francophones – la grande majorité de ceux qui ont voté non et de ceux qui ont voté oui également, l'ont fait en exprimant une volonté de changement à l'intérieur du pays canadien, en voulant voir des mesures mises de l'avant pour que ça marche. Au lieu de respecter, non pas juste de reconnaître du bout des lèvres, mais de respecter cette volonté populaire et d'agir en conséquence en révisant leur programme, en prenant acte de la volonté populaire, en disant clairement aux Québécois: Nous avons compris, le Parti québécois aurait dû, M. le Président, reformuler son programme politique en tenant compte de la volonté populaire. C'est ça qui aurait été le vrai respect de la démocratie. C'est ça qui aurait prêté une certaine crédibilité aux gorges chaudes qui sont faites ces jours-ci par le premier ministre, le ministre des Ressources naturelles et tous les autres ténors du Parti québécois sur la démocratie, parce que ce à quoi nous assistons actuellement, c'est à une perversion de la démocratie qui est mise de l'avant par ce parti. Une perversion de la démocratie qui fait en sorte que les gens nous disent: Bien, on a perdu, on le reconnaît, mais on ne va pas le respecter parce qu'on n'avait pas déclaré tout de suite l'indépendance et, aussitôt qu'on a une autre occasion, on va refaire la même chose. On va expliquer au peuple comment le peuple s'est trompé sans qu'il n'y ait quoi que ce soit d'autre qui soit arrivé depuis le 30 octobre et ces déclarations que le fait qu'il y a eu un résultat serré. On dirait que c'est le résultat serré qui justifie dans la tête des membres du Parti québécois la mise de l'avant d'un autre référendum, sans plus. On a perdu de justesse, on va se reprendre. Bien, c'est une perversion de la démocratie, parce que ça va permettre à d'autres, y inclus des partitionnistes et tous ceux qui prônent le genre de chaos social qui pourrait être entraîné par ce genre de proposition, de vous servir exactement la même médecine. Ils vont dire: On n'accepte pas le résultat parce que ça aurait été la troisième fois.

Bon Dieu, quelqu'un qui aurait vu deux fois l'option prônée par le gouvernement défaite, pourquoi la troisième fois va-t-il l'accepter? Il y en a qui vont dire toutes sortes de choses. Ils vont dire: Bien, c'est juste un sur trois. Ça ne compte pas. C'est une perversion de la démocratie que vous êtes en train de pratiquer, et ça, c'est dangereux, parce qu'on ne peut pas se permettre, dans une société comme la nôtre, de vivre le genre de situation divisive que nous avons connue deux fois en 15 ans. Combien de fois est-ce qu'une société ou un peuple peut se permettre ça, de se diviser comme ça et de se déchirer comme ça sans, en même temps, déchirer le tissu social qui tient ensemble, dans l'harmonie et dans le respect de la démocratie, tout le peuple? Combien de fois est-ce qu'on peut subir le genre de discours du premier ministre antérieur du Parti québécois qui faisait une nette distinction entre les bons puis les pas bons, les «nous» puis les autres? Combien de fois est-ce qu'on peut subir ça? Combien de fois est-ce qu'on peut vivre la situation où vous nous dites finalement: Bien, on a perdu, mais de justesse; sans que quoi que ce soit d'autre arrive on va tenir un autre référendum? Le respect de la démocratie exige que vous écoutiez. René Lévesque, prenez son exemple. Prenez son exemple: À la prochaine. Si jamais il y a une autre prochaine, il faut que ça arrive quand, légitimement, il y a des choses qui surviennent.

Actuellement, le seul parti à l'Assemblée nationale qui a pris acte de la volonté populaire, c'est le Parti libéral du Québec qui a effectivement refait son programme, qui a effectivement mis de l'avant des propositions concrètes pour tenir compte de la volonté populaire exprimée le 30 octobre, un programme fondé sur la reconnaissance de l'identité du Québec comme société distincte, comme composante unique à l'intérieur du Canada, avec la nécessité de reconnaître le droit de veto également pour ce qui est des changements futurs constitutionnels par rapport à cette identité québécoise et les autres éléments. Ça a été mis de l'avant en même temps qu'on met de l'avant la notion de l'«interdépendance», la notion que nous devons prendre acte du fait que nous vivons à l'aube du XXIe siècle et non pas dans le XIXe, comme vous le proposez avec une autre proposition d'un État-nation, que nous sommes effectivement interdépendants et que ça serait le temps que tous, au Canada, on comprenne que, si nous mettons nos énergies à travailler ensemble dans le même sens, nous avons effectivement une base sur laquelle nous pouvons bâtir des choses qui vont permettre aux Québécois et à d'autres Canadiens – mais aux Québécois; comme nous sommes ici, à l'Assemblée nationale, parlons de ça – de s'épanouir en français, avec l'identité culturelle et francophone sécure à l'intérieur d'un pays qui est sur l'avant-scène mondiale, M. le Président, un avenir qui s'ouvre devant le XXIe siècle, non pas de proposer le genre de rupture qui, effectivement, nous amènerait à des trous noirs, parce qu'on l'a vu dans ce qui avait été proposé et mis de l'avant plutôt par l'ancien premier ministre, M. Parizeau, le chaos qui peut venir après un genre de déclaration unilatérale d'indépendance, surtout après le mépris, le mépris du peuple qui est manifesté par le refus du Parti québécois de prendre véritablement et honnêtement acte de la volonté populaire, de comprendre que reconnaître le résultat du bout des lèvres n'est pas la même chose que respecter la volonté populaire, M. le Président. Ce n'est pas la même chose, et, si, sans qu'il n'y ait quoi que ce soit d'autre qui arrive entre le référendum tenu le 30 octobre, où le peuple effectivement s'est exprimé, il n'y a personne qui va pouvoir vous suivre si jamais une autre fois arrive et que le résultat est aussi serré dans l'autre sens, parce que vous ne démontrez pas de respect pour le résultat serré que nous avons connu.

(11 h 20)

M. le Président, s'il est vrai que nous travaillons ici, à l'Assemblée nationale, pour améliorer les conditions de vie de nos concitoyens, le chef de l'Action démocratique disait que, pour lui, un moratoire serait de mise. Il va à mi-chemin. Ce n'est pas juste le temps qui doit déterminer la voie que nous devons suivre, c'est aussi la lecture des événements politiques. Comme, après le premier référendum, il y a eu des événements politiques qui ont légitimé aux yeux de tout le monde la tenue d'un deuxième référendum, à moins qu'il n'y ait d'autres événements, il n'y a aucune raison légitime – non pas légale, parce que la technicalité, c'est autre chose, mais la légitimité, M. le Président, ça compte dans la démocratie – il n'y a aucune raison qui amènerait à avoir une légitime proposition d'un autre référendum, parce que ça revient à dire que c'est parce que le résultat a été serré que vous persistez à dire: Une autre fois, un autre référendum, dès la possibilité d'une reprise – loin de nous cette idée – du pouvoir du Parti québécois. Sur le plan de l'éthique démocratique, je dois vous inviter à refaire votre programme sur le strict droit, M. le Président, du point de vue partisan. Moi, je souhaite que vous persistiez à voir que les gens d'en face continuent à prêcher le mépris du peuple québécois, parce que c'est ce qu'ils font, et, quand le peuple est méprisé, M. le Président...

Mme Caron: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, je pense que, lorsqu'on accuse une formation politique de mépriser la population, c'est vraiment imputer des motifs indignes à l'ensemble du gouvernement de ce côté-ci et que c'est tout à fait inacceptable.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Fournier: M. le Président, le collègue de Laurier-Dorion tente tout simplement d'expliquer une démarche qui est la démarche du gouvernement depuis un an, depuis ce...

Mme Caron: Question de règlement...

M. Sirros: Quand ça fait mal, ça fait mal.

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît, le débat est un débat très émotif ce matin, il va merveilleusement bien, alors je vous prierais de bien vouloir poursuivre, M. le député, tout en ayant toujours à l'esprit l'application de notre règlement qui nous gère tous et chacun. M. le député.

M. Sirros: C'est ce que je faisais, M. le Président, mais on ne m'empêchera quand même pas d'interpréter les gestes d'un gouvernement. Je n'attribue des motifs à personne, à moins qu'on ne soit rendu à dire que l'État, c'est nous, à moins qu'on ne soit rendu à s'assimiler totalement. On le fait souvent, là, on se drape dans le drapeau québécois, mais, chaque fois qu'on dit qu'on n'est pas d'accord avec la démarche du parti ministériel, si les gens d'en face se lèvent pour s'indigner en disant qu'on leur impute des motifs... On est rendu là. Je n'ai nommé personne. Alors, je pense dans mes droits, comme parlementaire, d'interpréter ce que je considère être un mépris du peuple par les gestes posés ou plutôt par les gestes qui n'ont pas été posés par ce gouvernement, parce que ne pas mépriser aurait voulu dire une refonte de leur programme.

Je disais que le chef de l'Action démocratique, lui, allait à mi-chemin, qu'il essayait, comme d'habitude, de se tailler une place entre les deux partis et qu'il est assis sur la clôture. Il a dit: Bien, pour au moins une dizaine d'années, laissez-nous tranquilles avec cette option-là. Moi, je lui suggère, M. le Président – je ne sais pas s'il était ici tantôt – que ça aurait été plus correct de proposer, comme le père fondateur du Parti québécois l'avait fait, une reformulation de leur option pour tenir compte de la volonté populaire exprimée. Et là on aurait été en mesure de me dire que je n'ai pas le droit de parler du mépris du peuple, mais ça n'a pas été le choix de ce gouvernement. Le lendemain, presque, des résultats, l'actuel premier ministre – ou peut-être une couple de mois plus tard, quand il était clair qu'il deviendrait premier ministre du Québec – disait péremptoirement que jamais, plus rien, aucune option, aucune offre, aucun changement constitutionnel ne pourrait l'amener à renier l'option de la souveraineté, qu'il allait persister à proposer un autre référendum. Moi, je souhaite qu'il tienne parole à la prochaine campagne référendaire. Si vous avez le courage de vos convictions, de vos propos, tenez parole, dites aux Québécois que ce que vous allez proposer, c'est un autre référendum sur la sécession du Québec, avec toutes les conséquences que ça entraîne au niveau de la déchirure sociale, de l'instabilité politique, des conséquences inconnues. C'est dangereux ce que vous faites, parce que vous êtes en train justement de jouer, M. le Président – pas vous directement, mais le parti ministériel, par votre entremise, à qui je m'adresse – avec le tissu social de notre démocratie, et, si vous persistez à le faire, vous allez ouvrir la porte à tous ceux qui ne cherchent qu'une excuse pour saisir la première opportunité que le parti ministériel pourrait leur donner de créer le genre de problème qu'on n'a jamais connu ici. Et ça peut aller effectivement très loin quand on joue avec le fondement même de la démocratie. Et, si, pour le parti ministériel, c'est un jeu de dire: Nous reconnaissons le résultat parce que nous n'avons pas déclaré l'indépendance, bien, on comprend combien ils sont loin d'une véritable compréhension du sens de la démocratie. C'est pour ça que, quand j'entends le premier ministre dire des choses qui font de lui supposément le grand défenseur de la démocratie, c'est un sentiment de révolte qui surgit en moi, parce que c'est tellement faux, c'est tellement à côté de la réalité et à côté de la vérité, parce que ce qui est en train de se faire, c'est surtout la perversion de la démocratie.

Ce n'est pas un jeu où on dit: Tu sais, on en a perdu deux, on va en faire un troisième, puis un quatrième, puis un cinquième. Gilles Duceppe, lui, est rendu à nous dire: Bien, de toute façon, ce n'est pas grave parce que d'autres pourraient proposer qu'on revienne au Canada, comme si c'était une balle de ping-pong qu'on pouvait traîner entre nous pendant des générations et des générations. Le peuple a parlé le 30 octobre. Vous vous acharnez – ceux du gouvernement – à nous dire combien c'est important de respecter la démocratie, que 50 % plus un, c'est la barre pour la rupture du pays. Mais 50 % plus un, c'est aussi la barre pour l'acceptation du pays, c'est aussi la barre pour la refonte du pays, c'est aussi la barre pour les propositions, comme celles que nous avons faites pour remodeler la fédération, pour que ça marche.

Et, au lieu d'aller vous promener sur les tribunes de la campagne fédérale, revenez donc à l'Assemblée nationale pour vous occuper des vrais problèmes des gens. Revenez donc ici pour nous parler du chômage, pour nous parler des investissements. Et osez répéter, les ténors farfelus, que l'instabilité politique n'a aucune conséquence sur l'emploi, sur la cohésion sociale. On le voit tous les jours. On dit ici: Partition, partition! Mais d'où surgissent ces tensions sociales? Ça surgit du fait que le parti ministériel persiste à ne pas respecter la volonté populaire qui a été exprimée et à ignorer ainsi le fondement même de la démocratie. C'est pour ça, M. le Président, que, avant de conclure, je tiens à apporter un sous-amendement, afin qu'on puisse véritablement s'assurer que le premier ministre du Québec comprend le sens de la motion qui est non pas seulement de reconnaître du bout des lèvres, mais de respecter la volonté populaire.


Motion de sous-amendement

Et c'est pour ça que j'ai proposé qu'on ajoute dans la deuxième ligne, après le mot «Québec» de l'amendement, les mots «et plus particulièrement du premier ministre du Québec». Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laurier-Dorion...

M. Lachance: En vertu de l'article 213, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de l'article 213? Nous vous écoutons, M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: Est-ce que le député me permettrait une question?

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que vous accepteriez de recevoir une question du député de Bellechasse en vertu de l'article 213? M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: M. le député de Laurier-Dorion ne nous a pas parlé de son opinion sur les projets de partition de certains individus. J'aimerais ça l'entendre là-dessus, M. le Président.

M. Sirros: M. le Président, le député avait les oreilles bouchées quand j'ai dit que, quant à nous, nous travaillons pour éviter tout ce qui est chaos social et que l'option qui est proposée, c'est son option qui nous amène au trou noir, effectivement, où rien n'est garanti par la suite. Ceux qui sont dans le reste du Canada, ils sont libres, eux aussi, de proposer et de faire des choses. J'ai bien entendu M. Manning dire, au débat en langue française, même s'il s'est exprimé en anglais, que, quant à lui, oui, il reconnaîtrait un résultat même si c'était serré, en autant que la question serait claire, mais que, par la suite, la seule chose qui serait sur la table, ça serait – il le disait dans ces mots, je pense: «The terms of negotiations of secession, including the boundaries of an eventual Québec.»

(11 h 30)

Moi, je suis à l'Assemblée nationale et j'ai choisi d'oeuvrer ici en fonction des meilleurs intérêts du Québec, et c'est ce que je vais continuer de faire tant et aussi longtemps que je serai ici. Mais votre option amène le Québec tout entier à une situation qui le met devant, effectivement, un trou noir, et c'est ça qui est irresponsable.


Débat sur la recevabilité du sous-amendement du député de Rivière-du-Loup

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup. À ce stade-ci, nous devons maintenant vider la question du sous-amendement qui nous a été déposé par le député de Rivière-du-Loup. Est-ce qu'il y a des interventions sur le sous-amendement? Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, tout en précisant que, concernant le deuxième sous-amendement qui a été apporté par la formation du parti d'en face, nous allons nous garder évidemment le même temps pour l'examiner.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi. Oui. Là, on va procéder... Je voudrais qu'on vide la question du sous-amendement...

Mme Caron: Je tiens à préciser qu'on maintient notre cinq minutes.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...et après, nous allons travailler sur le sous-amendement qui vient d'être déposé par le député de Laurier-Dorion.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Alors, concernant le sous-amendement du député de Rivière-du-Loup, nous considérons que cet amendement est irrecevable. Dans Beauchesne, c'est effectivement très clair: Un sous-amendement se doit de modifier un amendement; il ne doit pas élargir la portée de l'amendement.

Donc, je vais vous référer à deux jurisprudences, la première, celle du 14 novembre 1979, au moment où M. Vaillancourt rendait une décision sur un sous-amendement: «La motion de sous-amendement est irrecevable puisqu'elle n'a pas pour objet de modifier la motion d'amendement – et c'est le cas du sous-amendement qui a été déposé par le député de Rivière-du-Loup. De plus, pour être recevable, la motion de sous-amendement doit remplir les conditions prévues par l'article 70 du règlement. En plus de se rapporter directement au sujet de la motion d'amendement, la motion de sous-amendement ne peut que retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres, et son effet ne peut être d'écarter la motion d'amendement.»

Il est bien clair que, dans le sous-amendement, on se retrouve avec l'ajout d'un nouveau principe, puisqu'on nous parle, dans la motion de sous-amendement du député de Rivière-du-Loup, d'un débat, d'un nouveau débat, d'unir les forces vives du Québec. On parle de la relance économique. Donc, c'est un nouveau principe qui est ajouté, et il ne se rapporte absolument pas à l'amendement que nous avions déposé.

Je vous rappellerai aussi une autre jurisprudence, que vous connaissez sûrement mieux, puisque c'est celle que vous aviez exercée vous-même, celle du 6 novembre 1996, au moment où vous conveniez, et à juste titre, M. le Président, qu'il était important, selon la doctrine de Beauchesne, qu'on ne doive pas contrevenir au principe de la motion principale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. M. le leader adjoint de l'opposition, de brèves remarques?


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Oui, M. le Président, très rapidement, simplement pour mentionner, d'une part, que, s'il faut comprendre des propos de la leader adjointe qu'il y avait des éléments de forme qui ne faisaient pas son affaire, vous avez, en vertu de 193, la possibilité d'en corriger la forme.

Deuxièmement, pour ce qui est de la question du sous-amendement par rapport à l'amendement, je voudrais vous rappeler la décision répertoriée 200/3 du 19 décembre 1973, où on disait ceci: «Le président doit décider de la recevabilité des sous-amendements avec latitude. Puisque ce sous-amendement couvre un aspect nouveau de l'amendement, il doit être jugé recevable.»

Par ailleurs, j'ajoute que le sous-amendement présenté par le député de Rivière-du-Loup vient préciser la notion même qui est au coeur du débat de ce matin. Je ne veux pas faire un débat là-dessus; juste sur la recevabilité, pour expliquer ce que je dis. Lorsque, dans ce sous-amendement, il fait référence à un moratoire sur les chicanes linguistiques et constitutionnelles dès aujourd'hui, dans ce mandat et dans le prochain, il fait donc référence à un souhait qui a été formulé le 30 octobre dernier de dire: Voilà, nous voulons rester dans le Canada, nous voulons en finir des chicanes et des divisions et nous voulons avoir une prospérité et un avenir meilleur tous ensemble. C'est le but qui est souhaité par la motion. Et, moi, je dis que ce sous-amendement s'inscrit très bien avec l'amendement et avec la motion principale, puisqu'elle nous appelle à nous réunir dans un but commun que tous les Québécois devraient avoir, un avenir où nous avons tous une place au sein de cette société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint. M. le député de Rivière-du-Loup, quelques remarques?


M. Mario Dumont

M. Dumont: Brièvement, M. le Président, je pense que le sous-amendement que j'ai déposé touche tout à fait le propos de la résolution comme de l'amendement. Au niveau de la forme, le règlement vous permet de modifier la forme. Peut-être que le terme «sous-amendement», c'est un autre amendement qui est devenu un sous-amendement dans la mesure où il se raccrochait à l'amendement, mais qui ne modifie pas que l'amendement, en effet, qui modifie et qui vient préciser la proposition elle-même. Alors, si, au niveau de la forme, il fallait l'appeler un autre amendement plutôt qu'un sous-amendement, je n'ai pas de problème avec ça.


Décision du président sur la recevabilité du sous-amendement

du député de Rivière-du-Loup

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci de vos remarques. À ce stade-ci, je suis déjà prêt à rendre ma décision. Vous parliez tout à l'heure de sous-amendement qui pourrait être un amendement. Alors, que ce soit un amendement ou un sous-amendement, dans les circonstances, c'est irrecevable pour le motif suivant: c'est que ça introduit un principe tout à fait nouveau qui est étranger à la motion d'amendement et également à la motion principale. Donc, je n'accepte point votre amendement ou, si vous préférez, votre sous-amendement.


Reprise du débat sur la motion principale et l'amendement

Alors, nous allons poursuivre maintenant les travaux sur la motion principale et sur l'amendement qui a été déposé par... Oui, c'est ça. C'est que nous poursuivons nos travaux sur l'amendement déposé par le député de Joliette, qui a été recevable, ainsi que sur la motion principale. Et, pendant ce temps, nous allons... Est-ce que vous êtes en possession actuellement du sous-amendement qui a été déposé par le député de Laurier-Dorion, Mme la leader adjointe? Est-ce que vous êtes en sa possession? Vous l'acceptez comme recevable? Irrecevable? Bon, alors, moi, ce que je voudrais, parce qu'il faut que je l'étudie également... Je vais vous demander de débuter votre intervention et je vous reviens dans cinq minutes sur ce sous-amendement. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, sur le fond de la motion que nous étudions aujourd'hui, l'amendement que nous avons apporté, il est justement pour faire reconnaître à l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois. Oui, nous avons un sens démocratique beaucoup plus grand parce que nous ne souhaitons pas limiter cette reconnaissance simplement au premier ministre mais bien à l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec. Et pourquoi, M. le Président? Nous allons voir pourquoi.

Le véritable enjeu que nous avons devant nous, c'est effectivement que, jusqu'à maintenant, à chacun des référendums que nous avons tenus, la formation politique que je représente a respecté l'engagement du peuple québécois. Mais il n'en a pas été de même de l'autre côté, et je vais vous le prouver.

En 1980, suite au référendum, vous vous souviendrez très bien que, sur toutes les tribunes, le camp fédéraliste, au cours du référendum de 1980, a constamment dit et répété que, si les Québécois et les Québécoises votaient non au projet de souveraineté-association, il faisait une promesse solennelle – ils avaient même leur tête sur le billot: ils étaient pour changer et améliorer les rapports entre le Québec et le Canada. Qu'est-ce qu'ils ont fait suite au référendum? Est-ce qu'ils ont respecté ce vote démocratique des Québécois et des Québécoises qui avaient voté non et qui, donc, s'attendaient, selon les ténors fédéralistes, à une modification, à des changements à la Constitution? Qu'est-ce qu'ils ont fait? Unilatéralement, contre la volonté de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, contre la volonté des formations politiques qui siégeaient ici, à l'Assemblée nationale, donc contre la volonté aussi du Parti libéral de l'époque, ils ont rapatrié la Constitution contre le Québec, contre la volonté des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, 1995, nouveau référendum. Référendum où nous nous retrouvons avec un résultat de 50,6 %. Nous l'avons respecté. Nous l'avons reconnu. On n'a pas besoin de l'écrire. La plus belle preuve: Qu'est-ce que nous avons fait? Nous avons continué à participer au système fédéral. Nous avons continué à négocier des ententes, à signer ces ententes. Et il faut dire que c'est le rôle du Bloc québécois à Ottawa qui a permis la signature de ces ententes-là, parce qu'ils ont été vigilants. C'est ça qui est arrivé. Et pourquoi ils les ont signées? Parce qu'ils avaient peur de se retrouver en élection avec tous les députés, les candidats du Bloc québécois qui leur auraient rappelé qu'ils n'auraient pas signé ces ententes-là. C'est la seule raison. Donc, nous avons respecté cet engagement.

(11 h 40)

Mais, M. le Président, qu'est-ce qu'on a fait, de l'autre côté, pour respecter la décision du peuple québécois à 50,6 %? On a commencé à parler de partition. Est-ce que c'était respecter la volonté démocratique des Québécois et des Québécoises? De notre côté, si nous ne l'avions pas respectée, nous aurions pu parler de partition pour les territoires souverainistes. Dans ma région, M. le Président, c'est une région souverainiste, on n'a jamais parlé de ça. Toute la région est souverainiste au complet. Le Saguenay–Lac-Saint-Jean aussi. Est-ce qu'on a parlé de partition? Non, parce que nous avons toujours reconnu que le territoire québécois, les limites du territoire québécois devaient être respectées. Le chef de l'opposition l'a admis, on l'a cité tantôt, il devrait le répéter maintenant à ses compères du côté fédéraliste.

Qu'est-ce qu'ils ont fait aussi depuis le vote du référendum, M. le Président? Le député de Laurier nous disait: Il faut qu'il y ait des événements nouveaux, il faut qu'il y ait des faits nouveaux; il n'y a pas eu de faits nouveaux. Il y en a eu, des faits nouveaux. Cette fois-ci, on ne peut pas rapatrier la Constitution, elle est déjà rapatriée. Alors, qu'est-ce que le gouvernement de M. Jean Chrétien a fait et ses alliés fédéralistes, M. Jean Charest aussi, qu'est-ce qu'ils nous font, cette fois-ci, M. le Président? Non seulement ils ne respectent pas leurs promesses de changement, de reconnaissance constitutionnelle de la société distincte, mais ce dont nous parle M. Charest, c'est d'une reconnaissance de société distincte mais sans aucun pouvoir, sans aucune reconnaissance. Une coquille vide, c'est ça qu'on nous propose. Un veto donné à toutes les régions. On continue les ingérences dans les champs qui appartiennent aux compétences du Québec et des autres provinces. C'est ça qu'on fait présentement, au niveau fédéral.

Et on nous a sorti le plan B, M. le Président. Oui, c'est ça qu'on a fait. Est-ce que c'est respecter le vote démocratique des Québécois et des Québécoises – alors que M. Chrétien disait qu'il était pour respecter ce choix des Québécois et des Québécoises – de tout de suite se retourner vers la Cour suprême, de nommer neuf juges qui vont décider de la légalité de la démarche des Québécoises et des Québécois? Au référendum de 1980 et au référendum de 1995, on reconnaissait que la démarche était légitime. Là, parce qu'on sent que le pourcentage est rendu tout près pour changer de l'autre côté, eh bien, on décide d'en référer à la Cour suprême. Oui, ça, c'est un fait nouveau, M. le Président, et ça justifie le droit de revenir, et rapidement, au niveau d'une demande du Québec.

Ensuite, contre la volonté du Québec, M. le Président, la Cour suprême veut maintenant désigner d'office un avocat pour nous représenter, alors que nous avons toujours dit et maintenu... Et nous aimerions entendre les députés du Parti libéral, de ce côté-là, réitérer le droit du peuple québécois à son autodétermination, réitérer que ce n'est pas la Cour suprême et le gouvernement fédéral qui vont décider du droit du peuple québécois.

Autre point, M. le Président. Qu'est-ce qu'il y a de changé? La question a toujours été écrite par le gouvernement du Québec. Maintenant, du côté fédéral, du côté de M. Jean Chrétien, on nous dit qu'il doit, lui, écrire la question. C'est lui qui veut la dicter. Et, du côté de Jean Charest, bien ça dépend de l'heure du jour, là, mais il veut à tout le moins l'approuver, à tout le moins la corriger, comme si les Québécois avaient à demander aux autres de venir écrire leur propre question. Ça aussi, c'est un élément qui est changé, M. le Président. Est-ce que c'est respecter la démocratie, de décider que maintenant le peuple québécois ne peut même plus écrire sa question?

Autre point, M. le Président. Jusqu'à maintenant – référendum de 1980, référendum de 1995 – on a toujours dit qu'il fallait 50 % plus un. Qu'est-ce qu'on fait, maintenant? Non, ce n'est plus ça. On remet en question le 50 %. Ça aussi, c'est un changement. Est-ce que c'est respecter la démocratie? Partout dans le monde, la démocratie, c'est 50 % plus un. C'est la règle du 50 % qui s'applique. Maintenant, ce n'est plus suffisant. Qui ne respecte pas la démocratie? Et on entend M. Dion sur toutes les tribunes nous dire que là on pourrait commencer à regarder ce que ça pourrait être. D'ailleurs, M. Charest, lui, on ne l'a pas entendu là-dessus. Il ne s'est pas encore prononcé là-dessus. Et on vient nous donner des leçons de démocratie à nous? Qui ne respecte pas la démocratie en voulant choisir la question, en voulant modifier le pourcentage normal d'une démocratie, en voulant faire intervenir la Cour suprême plutôt que la décision du peuple québécois? Qui remet en cause la démocratie? Et, de l'autre côté, on ne les entend pas s'élever contre ça.

Oui, il y a un enjeu, il y a un enjeu réel, et, moi aussi, tout comme mon collègue de Joliette, j'en appelle aux Québécoises et aux Québécois. Présentement, la démocratie du peuple québécois est en cause. Elle est effectivement en danger. Le camp fédéraliste a démontré qu'il n'entendait pas respecter la démocratie du peuple québécois de différentes façons. Je vous les ai toutes énumérées, M. le Président. Donc, j'en appelle aux Québécois et aux Québécoises. Si nous voulons conserver notre droit démocratique, le droit du peuple québécois à décider de lui-même, nous devons, lors de la prochaine élection fédérale, voter pour le seul parti qui respecte ce droit démocratique et qui a confirmé et réaffirmé que c'était le peuple qui déciderait: le Bloc québécois. Merci.


Débat sur la recevabilité du sous-amendement du député de Laurier-Dorion

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Concernant le sous-amendement qui nous a été déposé par le député de Laurier-Dorion, d'ajouter, après «des hommes et des femmes politiques du Québec», «et plus particulièrement du premier ministre du Québec», ce sous-amendement, il n'a absolument aucune contradiction avec l'amendement qui a été déposé par le député de Joliette. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. Je vous ai bien mentionné tantôt, M. le Président, que je le jugeais irrecevable. Nous n'avons pas plaidé.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement, je vais vous permettre très brièvement parce que, à 11 h 50 précises, je donne le droit de réplique, comme c'est prévu dans notre règlement, au député de Châteauguay. Alors, très, très brièvement.

Mme Caron: Très, très brièvement, on ne peut... M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député...

Mme Caron: Vous m'avez donné la parole, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le président a le droit de recevoir certaines remarques des deux leaders et, par la suite, de rendre sa décision. Comme je l'ai mentionné, je vais respecter en tous points votre droit de parole, M. le député de Châteauguay, et, à 11 h 50, vous aurez votre droit de réplique de 10 minutes. Alors, je vous entends.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Oui, M. le Président, très rapidement. Le sous-amendement est irrecevable parce qu'on ne peut réintroduire un élément qu'on a déjà enlevé dans l'amendement. Nous avions déjà, par notre amendement, enlevé le terme «premier ministre», et le sous-amendement vient le réintroduire. Je vous réfère, dans la jurisprudence, au 4 avril 1990, Lawrence Cannon, où on explique très clairement, à partir de Beauchesne, que «l'effet d'un sous-amendement ne doit pas tendre à revenir vers la motion de fond». Donc, notre amendement l'avait retiré. Donc, on ne peut le réintroduire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: M. le Président, je vous ai déjà cité la jurisprudence sur le fait que, les motions de sous-amendement, le président doit exercer une certaine latitude à cet égard. Et je dois rappeler aussi, M. le Président, et je pense que c'est le point important, que vous avez à exercer une latitude à l'égard des sous-amendements. Le point le plus important à retenir, c'est de se souvenir que nous sommes dans un débat, lequel débat visait, au début, dans sa motion, dans son principe de base, principe qui n'a pas pu être altéré par d'autres amendements parce que les amendements ne peuvent pas altérer des principes... Alors, le principe de base sur lequel on parle, c'est de lier le premier ministre, le gouvernement.

Ce qui s'est passé, c'est qu'il y a un amendement qui a été déposé par la partie ministérielle pour mettre tous les hommes et les femmes politiques du Québec pour accompagner le premier ministre dans la motion. Ce qui est visé par le sous-amendement, c'est de préciser que, s'il faut viser tout le monde, hommes et femmes politiques, il faut particulièrement viser celui qui était atteint par le principe, le premier ministre. Et, dans ce sens-là, M. le Président, votre latitude devrait s'appliquer en respectant les principes de la motion principale, qui ne doit pas être affectée, et les amendements et sous-amendements doivent aller d'une façon cohérente dans ce sens-là. Alors, je pense que la décision que vous aviez prise, que vous alliez annoncer me semblait conforme au règlement.

(11 h 50)

Mme Caron: M. le Président. Oui, très brièvement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Le leader adjoint de l'opposition a reconnu notre amendement comme recevable; il n'a pas plaidé son irrecevabilité. Donc, il a accepté de changer «premier ministre» par «l'ensemble des hommes et des femmes politiques». Ce n'est pas nous qui l'avons obligé à accepter cet amendement-là, il l'a accepté. Il est très clair qu'un sous-amendement ne peut revenir vers la motion de fond. C'est très clair, M. le Président.


Décision du président sur la recevabilité du sous-amendement

du député de Laurier-Dorion

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, avant de vous céder votre droit de réplique, M. le député de Châteauguay, je vais rendre ma décision concernant le sous-amendement. Je considère, à ce stade-ci, qu'il n'y a point de contradiction entre le sous-amendement qui a été déposé par le député de Laurier-Dorion et l'amendement qui a été déposé par le député de Joliette. Le sous-amendement ne vient que préciser. Et le premier ministre du Québec fait bel et bien partie des hommes et des femmes politiques. Alors, à ce stade-ci, je retiens le sous-amendement qui a été déposé par le député de Laurier-Dorion.


Reprise du débat sur la motion principale, l'amendement et le sous-amendement du député de Laurier-Dorion

Alors, votre droit de réplique, M. le député de Châteauguay.


M. Jean-Marc Fournier (réplique)

M. Fournier: M. le Président, 21 mai, 11 h 50, je pense qu'on vient de vivre un moment important. Si je comprends bien – parce que ça peut changer, le vote n'est pas encore tenu – les signaux qu'on a de la partie ministérielle, c'est que le premier ministre du Québec, ses collègues du Conseil des ministres, les membres du Parti québécois siégeant dans cette Chambre viennent de décréter, à partir du 21 mai 1997, la fin de la campagne référendaire sur laquelle nous avions voté le 30 octobre 1995. Pour une fois, après un an et demi, ils acceptent la fin de la campagne. Il était temps, M. le Président! Il était temps!

À partir d'aujourd'hui, le gouvernement du Québec, par son vote sur cette motion, va mettre un point final à la division des Québécois entre eux. Et je comprends, M. le Président, qu'avec un vote sur cette motion qui reconnaît le résultat, la volonté démocratique des Québécois qui s'est exprimée... Ils dit ceci: Non à l'indépendance; non à la séparation; non à la sécession; non à la souveraineté. Ils ont dit: Nous voulons poursuivre l'expérience canadienne; nous voulons des aménagements; nous voulons des changements; nous voulons un gouvernement qui va nous respecter. À compter du 21 mai 1997, lorsque nous voterons sur cette motion, le gouvernement du Parti québécois va enfin donner le signal qu'il respecte la volonté des Québécois, enfin, et je comprends que le premier ministre du Parti québécois ne sera plus revu sur les planches du Bloc québécois parce que, lorsqu'il y est...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: ...parce que lorsque... et, M. le Président...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: M. le Président, regardez les éclats de rires. Regardez. J'ai presque le goût de leur montrer le livre du mentor, le mentor. J'ai dit: Le mentor, hein? Le guide spirituel qui joue dans les subtilités des mots mais qui passe toujours à côté, M. le Président, pour jouer avec les Québécois, leur tendre des pièges. C'est ça qu'il fait. Qu'est-ce que font les élèves du maître? Ils sont en train de nous dire qu'ils sont pour respecter la volonté, mais, dans le fond, juste ici, juste à l'Assemblée. Ils vont voter pour ça – parce que ça paraît mal, ce n'est pas «politically correct» de ne pas respecter la volonté – dans les paroles, dans les propos, mais, lorsqu'on les défie de mettre l'action en ligne avec les propos, ah bien, là, M. le Président, on rit, on trouve ça drôle. On ne comprend pas que c'est normal d'agir dans le sens de ses propos.

Des voix: Bien, oui.

M. Fournier: Ça, c'est le gouvernement de ceux qui ont comme ligne de conduite: ceux qui parlent ne savent pas et ceux qui savent ne parlent...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Fournier: M. le Président, une ligne de conduite comme celle-là est une ligne de conduite antidémocratique. Lorsqu'on dit, M. le Président, lorsque le grand chef spirituel des indépendantistes nous dit que, lui, il a un grand jeu, une grande passe pour les Québécois, il joue de subtilités dans les mots pour se garder des portes ouvertes, pour être capable de la faire, l'indépendance, de façon unilatérale: Je vais faire une offre. Je vais l'envoyer par fax à Ottawa. Deux jours après, je me retourne: Je m'étais engagé à faire une offre; elle est faite. Maintenant, partons avec la France, soyons heureux. Imaginez quel beau gâchis c'était de voir ce premier ministre de l'époque aller dire aux Québécois qu'il y en avait je ne sais plus combien de pourcent qui n'étaient pas des vrais Québécois; ils n'étaient pas dans le «nous», M. le Président.

Nous avons eu des amendements, des sous-amendements qui ont été déposés, et je suis étonné que le sous-amendement du député de Rivière-du-Loup n'ait pas été accepté par la partie ministérielle. Parce que ce qu'il disait, le sous-amendement du député de Rivière-du-Loup, l'associé d'hier du Parti québécois, il disait: Non seulement dans le prochain mandat, dans le mandat actuel, les chicanes linguistiques et constitutionnelles, la police de la langue, les divisions, la présence du premier ministre du Parti québécois sur les tribunes pour exciter la foule, pour leur dire combien nous sommes humiliés, quel danger nous courons... Mais le danger, M. le Président, il est en face de nous. Le danger, il est là, tous les jours, un danger qui vient nous dire dans son discours d'aujourd'hui: Ah! nous reconnaissons la volonté démocratique des Québécois quand ils votent oui, ceux qui votent oui; les autres, bien ça ne compte pas.

À compter d'aujourd'hui, M. le Président, par leur vote, ils vont affirmer que la campagne est terminée, ils vont reconnaître que les Québécois ont fait un choix. C'est ça qui est la motion. On ne commencera pas à faire dire aux mots d'autres choses que ce qu'ils veulent dire, hein! On va commencer, une fois pour toutes, du côté ministériel, à respecter les Québécois. On va respecter le français pour commencer, on va respecter ce que ça veut dire, les mots. Et ce que ça veut dire, c'est que les Québécois ont voté. On ne parle pas du prochain – bien, du prochain – des multiples autres référendums que vous voulez tenir, on parle de celui que vous avez tenu, celui dans lequel on a dit: Ça va entraîner des coûts économiques. Vous avez dit: Il n'y en aura pas, de coûts économiques. Puis on découvre après que vous saviez qu'il y en avait au moins pour 20 000 000 000 $. Vous le cachiez. M. le Président, ils le cachaient. Il y en avait pour 20 000 000 000 $. L'ancien ministre des Finances trouve ça drôle; moi, je trouve ça épouvantable. J'ai honte, les Québécois ont honte de voir qu'ils ont été manipulés par un ministre des Finances qui avait prévu, en cachette, un fonds de 20 000 000 000 $ de coûts économiques qu'il comprenait qui s'en venaient et il n'a jamais rien dit.

Certains, de l'autre côté, trouvent ça drôle ou s'étonnent qu'on s'indigne de la chose, mais, quand on parle de l'argent des Québécois, M. le Président, c'est les gens qu'on représente. On fait quoi ici, nous autres, si on ne représente pas le monde, si on n'est pas là pour prendre leur défense? On fait quoi si on cautionne ce que ce gouvernement fait? Quand on pense que c'est l'épargne des Québécois... L'argent à la Caisse de dépôt, c'est notre bas de laine. C'est du monde dans mon comté qui se demande ça va être quoi, leur avenir. Puis, quand il y a des gens d'en face qui trouvent ça épouvantable ou qui s'étonnent qu'on s'indigne de leur conduite, j'aime autant leur dire: Moi, je pense que je fais mon mandat. Je ne suis pas sûr pour eux autres qu'ils représentent bien le peuple. Ils ont beau se draper dans le drapeau, ils devraient le dérouler de temps en temps pour s'apercevoir qu'il y a du monde autour.

M. le Président, je termine là-dessus. Le 24 septembre 1994, le premier ministre actuel disait ceci: Les Québécois veulent que le gouvernement péquiste donne priorité à l'économie plutôt qu'au débat référendaire. La campagne étant terminée à partir d'aujourd'hui, j'espère qu'il va se souvenir de ses propos. Et il disait ceci, en 1994: Mais, si la défaite du Oui devait survenir, M. Bouchard croit toujours que le Bloc devrait se dissoudre.

À partir d'aujourd'hui, à partir de son vote, à partir de cet après-midi, lorsqu'il va se lever et qu'il va dire: Oui, j'accepte enfin la volonté démocratique des Québécois, on ne le verra plus sur les tribunes du Bloc ou ailleurs en train de diviser les Québécois entre eux, de diviser le Canada, d'amener une rupture économique, d'amener une rupture de nos valeurs communes, de défaire un avenir si prometteur pour nous. Et il va, au contraire, s'inspirer de ce que nous avons mis sur pied, s'inspirer de notre programme, s'assurer qu'il y aura reconnaissance, qu'il y aura pleine autonomie dans la gestion de l'interdépendance et que, de cette façon, nos enfants auront un avenir bien meilleur que celui que M. Parizeau préparait et que ce gouvernement a l'air de vouloir encore suivre. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay. Ceci met fin à notre débat de ce matin, et nous allons maintenant procéder à la mise aux voix sur la motion principale déposée par le député de Châteauguay.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal? Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demande de reporter le vote à cet après-midi, à la période des affaires courantes.


Votes reportés

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le vote est reporté à cet après-midi, aux affaires courantes. Nous allons donc suspendre maintenant nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 2)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Très bien. Veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons débuter par les affaires courantes.

Déclarations ministérielles. Il n'y en a pas.

Présentation de projets de loi, non plus.

Dépôt de documents.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions aujourd'hui.


Dépôt de pétitions

Alors, nous arrivons immédiatement au dépôt de pétitions. Mme la députée de Jean-Talon... mais elle n'est pas ici à ce moment. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, je voudrais saluer les gens des tribunes qui représentent les écoles privées du Québec et je sollicite le consentement pour déposer une pétition jugée non conforme.

Une voix: Consentement.

M. Ouimet: Alors, consentement.

Une voix: Consentement.


Aider au financement de l'école privée et de services de résidence-pensionnat

M. Ouimet: Donc, M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 151 874 pétitionnaires et appuyée par des organismes représentant 108 019 personnes, pour un total de 259 893 personnes.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que les enjeux et les valeurs en cause dans le processus éducatif marquent trop profondément la vie d'un peuple pour que l'État puisse s'en attribuer le monopole;

«Attendu que l'État doit promouvoir l'ensemble du système scolaire et que les établissements privés ne relèvent pas de la permission ou de la tolérance de l'État mais de la liberté d'enseignement fondée elle-même sur le droit des parents;

«Attendu que la priorité ne doit pas être accordée au secteur public ni au secteur privé mais à l'éducation et à la qualité de l'enseignement;

«Attendu que l'État n'a pas le droit d'empêcher des citoyens d'exercer leur liberté de fonder des écoles et de les administrer, pour autant qu'elles répondent à certains critères d'excellence quant à la qualité des services et la compétence des professeurs;

«Attendu que l'État doit être respectueux du droit inaliénable qu'ont les parents de privilégier certaines options fondamentales dans l'éducation de leurs enfants et de bénéficier d'une tradition éducative de qualité. Ce droit ne peut être exercé sans les subventions de l'État;

«Attendu que l'école privée est de moins en moins accessible à cause des frais de scolarité de plus en plus élevés et de la discrimination qui existe dans le transport scolaire;

«Attendu que la loi qui régit l'enseignement privé ne permet pas un financement suffisant;

«Attendu que le service de résidence-pensionnat est en péril et que déjà plusieurs résidences-pensionnats ont dû fermer leurs portes;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Que l'évaluation des écoles privées soit faite en raison de la qualité des services, du personnel et du projet éducatif et non en raison de la seule complémentarité au secteur public;

«Que l'ouverture de nouvelles écoles privées ne soit pas l'objet d'un moratoire qui irait à l'encontre de la liberté d'enseignement et du droit fondamental des parents;

«Que les subventions à l'école privée comprennent une valeur locative et 80 % du coût moyen de l'année en cours, par élève du secteur public;

«Que le transport scolaire soit accessible à tout jeune du Québec, selon les mêmes paramètres, indistinctement du réseau scolaire fréquenté;

«Que le service de résidence-pensionnat reçoive une aide substantielle de l'État, même principe que les garderies, afin de répondre aux besoins de la société actuelle.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, je voudrais rappeler à nos invités, nos visiteurs, que seuls les députés ont le droit de manifester dans l'enceinte de l'Assemblée nationale. Et je sais que parfois leur enthousiasme et leur bruit camouflent celui des visiteurs, mais ça ne donne pas l'autorisation pour autant. Alors, Mme la députée de Deux-Montagnes. La pétition, par ailleurs, est déposée.

Mme Robert: Oui, M. le Président. Je demanderais le consentement pour déposer cette pétition parce qu'elle est non conforme. Elle l'est en partie.

Le Président: Alors, il y a consentement, Mme la députée.


Maintenir la maternelle mi-temps et octroyer les budgets nécessaires pour ce faire

Mme Robert: Merci. Je dépose l'extrait d'une pétition par 468 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Deux-Montagnes.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que le Québec est une société démocratique;

«Considérant que les parents sont les premiers responsables de l'éducation de leurs enfants;

«Considérant que le projet de maternelle temps plein cinq ans ne convient pas à tous les enfants, mais répond aux demandes de 50 % des parents du Québec;

«Considérant que la maternelle mi-temps existante répond aux attentes de 50 % des parents du Québec;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale: de maintenir telle qu'elle existe présentement la maternelle mi-temps, tout en offrant la maternelle temps plein à la demande des parents; de confier aux commissions scolaires et aux milieux-écoles le pouvoir et les budgets nécessaires pour répondre adéquatement à cette requête.»

Je certifie que cet extrait est conforme à une partie de l'original de la pétition.

Le Président: Alors, cette pétition est également déposée. Mme la députée de Jean-Talon, maintenant.

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Je demande le consentement pour déposer une pétition non conforme.

Des voix: Ça va.

Mme Delisle: Ça va?

Le Président: Ah! vous avez le consentement.


Faire partie de la nouvelle commission scolaire regroupant Beauport, Charlesbourg, Des Îlets et Chutes-Montmorency

Mme Delisle: Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à la ministre de l'Éducation par 11 717 pétitionnaires représentant les populations de Stoneham, Tewkesbury, Lac-Delage, Charlesbourg, Lac-Beauport et Notre-Dame-des-Laurentides.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérations et éventuels impacts sur les élèves de notre territoire:

«Déracinement du milieu et non-respect des alliances naturelles entre les municipalités;

«L'école secondaire la plus proche étant à Loretteville – l'école Roger-Comtois – le coût du transport scolaire sera plus élevé, le temps passé par les élèves dans les autobus augmentera passablement, la majorité des élèves seront obligés de dîner à l'extérieur de la maison;

«Les axes routiers et les services communautaires – CLSC – sont développés dans le sens nord-sud et non dans le sens est-ouest;

«Il n'y a pas ou peu de transport interurbain sur le territoire;

«Les élèves consomment des services, de la culture, des loisirs et des sports davantage dans le sud – Charlesbourg;

«Perdre la priorité d'accès au programme d'éducation internationale;

«Près de 1 100 élèves seront transférés de Charlesbourg vers Loretteville;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons à la ministre de l'Éducation, Mme Pauline Marois, de faire partie de la nouvelle commission scolaire regroupant Beauport, Charlesbourg, Des Îlets et Chutes-Montmorency.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est aussi déposée.

Il n'y a pas aujourd'hui d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège. Je vous avise...

(14 h 10)

M. Paradis: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Sans en faire une question de droit ou de privilège, en vertu de l'article 2.8° du règlement, vous avez des responsabilités qui vous incombent. Les faits sont les suivants. Ce matin, le cabinet du vice-premier ministre émettait, en avant-midi, un Telbec invitant les journalistes à une conférence de presse qui se tiendrait ici, au parlement, avec un membre du Bloc québécois.

On comprend que le premier ministre se voue corps et âme à la défense du Bloc québécois, on comprend que le gouvernement, également, se voue corps et âme à promouvoir le Bloc québécois. Maintenant, que l'Assemblée nationale soit utilisée par le gouvernement pour des fins partisanes au niveau d'une campagne électorale fédérale pour supporter le Bloc québécois, M. le Président, je pense qu'il vous appartient de mettre un frein à une telle initiative.

Le Président: M. le vice-premier ministre.

M. Landry (Verchères): Il est vrai, M. le Président, que j'ai des informations à communiquer à la population, qui concernent l'ensemble du Québec – c'est sur le Tokamak de Varennes – et les deux députés de Verchères, c'est entendu. Et ce qu'a dit le leader de l'opposition est véridique. Ça fait très longtemps que je siège en cette Chambre, quand même, avec quelques absences. Je connais le règlement, mais cette particularité qui ne rend pas possible de faire une conférence de presse avec quelqu'un qui n'est pas membre de cette Assemblée dans les locaux de l'Assemblée m'était inconnue. Mais, grâce à la vigilance des services du président, à qui rien n'échappe, la chose me fut communiquée et j'ai évidemment renoncé à ce projet spécifique, mais non pas à celui d'informer la population sur l'autre injustice que commet le gouvernement du Canada envers le Québec en ruinant une installation scientifique pour laquelle il s'était engagé à collaborer pendant 15 ans.

Le Président: Alors, je comprends que, d'un côté et de l'autre, on s'est éloigné un peu de la question de règlement pour en ajouter. Mais, puisque chaque côté a eu l'occasion d'ajouter un peu, on peut considérer que c'est match nul, et on va passer maintenant aux avis.

Je vous avise qu'après la période des questions et des réponses orales seront tenus les votes reportés suivants: sur la motion, d'abord, de M. le député de Châteauguay présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition; sur la motion d'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles et député de Joliette; et sur la motion de sous-amendement proposée par M. le député de Laurier-Dorion sur la motion précédente, c'est-à-dire la motion d'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Questions et réponses orales

Alors, ça nous amène, à ce moment-ci, à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Rencontre souhaitée par des investisseurs allemands avec le premier ministre

M. Johnson: J'ai quelques tableaux ici qui démontrent, depuis trois ans, par opposition aux années précédentes, la croissance moyenne de l'emploi au Québec comparée à celle de nos voisins de l'Ontario, où malheureusement le Québec est en retard considérable: une croissance de l'emploi de 2 % depuis trois ans en Ontario et de 0,5 % ici, au Québec. La même chose est vraie de la moyenne des croissances économiques, des différents indicateurs. Encore une fois, on voit le retard qu'accuse le Québec par rapport à l'Ontario depuis novembre 1994: 2,8 % de croissance en Ontario, 1,5 % au Québec. C'est du simple au double, extrêmement inquiétant pour l'emploi. Ça a des répercussions, évidemment, sur la capacité des familles de se donner une certaine qualité de vie, dans la mesure où la rémunération hebdomadaire moyenne des familles québécoises, notamment depuis 18 mois, a connu la plus faible croissance au Canada, mis à part Terre-Neuve. On voit encore que nous sommes en retard.

Et, évidemment, ça, ça se traduit... Si on cherche une mesure qui vient ramasser tout ça, il est évident que la croissance des investissements est la meilleure mesure de la capacité de l'économie québécoise à soutenir l'emploi. Et c'est là qu'on voit – ça aussi, là, on ne peut pas... ça vient du budget du vice-premier ministre et des différents bureaux statistiques – la croissance des investissements de 1994 à 1997: en Ontario, 11,5 % de croissance, et moins 2,4 % au Québec.

Compte tenu de l'importance qu'il y a d'aller susciter de l'investissement afin de régler le problème de l'emploi, est-ce que le premier ministre pourrait nous expliquer pourquoi, le 1er et le 2 mai derniers, il avait le temps d'aller plaider pour l'indépendance sur les tribunes bloquistes, notamment dans Laurier–Sainte-Marie le 1er mai, et, pendant ce temps, Mike Harris, lui, rencontrait des investisseurs allemands? Et, dans les heures qui ont suivi, malgré la demande de ces investisseurs et visiteurs qui représentent littéralement des centaines de milliers d'emplois, des dizaines de milliards de dollars de chiffre d'affaires, d'investissements, comment se fait-il que le premier ministre n'a pas trouvé du temps à son agenda pour s'occuper d'attirer des investissements au Québec, alors qu'il trouve du temps dans son calendrier et son agenda pour faire des discours pour le Bloc québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je rencontre à une grande fréquence un nombre innombrable, je dirais, extrêmement considérable de gens d'affaires, d'investisseurs. Je ne rate pas une occasion d'exposer les atouts que le Québec peut présenter en matière d'accueil et d'investissements. Et je n'ai pas peur de comparer mon dossier, à ce point de vue, avec celui de n'importe quel premier ministre.

Il se trouve que, dans ses parages du 1er mai – je n'ai pas la date précise – on m'a mis au courant qu'il y avait un groupe de gens d'affaires très importants, en effet, originaires de l'Allemagne, qui étaient au Canada, qui avaient un rendez-vous, je ne sais pas avec qui – peut-être M. Chrétien, je ne voudrais pas l'affirmer – mais la campagne électorale, je pense, avait un peu fait déranger les agendas et ils étaient, contrairement à ce qu'on pensait... ils se sont trouvés disponibles pour une rencontre à Québec avec moi, mais à un moment où j'étais déjà pris. On a fait l'impossible pour trouver un trou dans mon agenda, et ça a été impossible parce qu'on l'a su une journée ou deux, enfin, je ne pourrais pas dire au juste, mais très très près des événements, puisque eux avaient libéré un trou dans leur propre agenda, contrairement à ce qui avait été prévu autrefois. Voilà.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment le premier ministre trouve-t-il un bloc de temps, un bloc québécois de temps dans son calendrier, son agenda, pour faire des discours avec Gilles Duceppe, avec Yves Duhaime et avec tous les autres, et bientôt avec Jacques Parizeau, si on a bien compris? Ça, j'ai hâte de voir ça, comme tout le monde, là!

Comment le premier ministre trouve-t-il, les 1er et le 2 mai derniers, le temps de faire des points de presse sur la campagne fédérale, le temps de faire des discours sur la campagne fédérale avec le Bloc québécois? Comment trouve-t-il le temps de décevoir des investisseurs qui s'attendaient à le voir le 2 mai, littéralement – à moins que, le connaissant, ils ne soient pas déçus de ne pas le voir... Mais, moi, j'ai compris que c'est son rôle et que les investisseurs ont intérêt, quel que soit le gouvernement en place... Quel que soit le gouvernement en place, les investisseurs cherchent à voir le premier ministre du Québec s'ils le peuvent, surtout s'ils représentent des dizaines de milliers d'entreprises, des associations professionnelles, que ce soit comme les Japonais, le Keidanren, ou d'autres entreprises, le Conseil du patronat français. Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte qu'il a favorisé, les 1er et 2 mai derniers, son implication dans la campagne fédérale avec le Bloc québécois au lieu de s'occuper de l'emploi pour les Québécois?

Le Président: M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): Ce rapport que fait le chef de l'opposition entre les investissements étrangers et l'agenda du premier ministre est étrange et périlleux, et je vais expliquer pourquoi. L'an passé, nous avons eu le record des investissements étrangers dans l'économie du Québec, 2 500 000 000 $. C'est trois fois plus, plus que trois fois plus qu'à l'époque où le chef de l'opposition était premier ministre. Alors, je conclus de sa logique qu'il n'avait pas le temps de les rencontrer parce qu'il était trop occupé, ou il les rencontrait puis, après ça, ils décidaient de ne pas investir!

(14 h 20)

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Oui. Évidemment, le député de Joliette la trouve bonne. Je ne suis pas sûr... Oui, oui. On comprend que c'est en plein son style. Le vice-premier ministre est en plein dans le style du député de Joliette, alors ce n'est pas étonnant que le député de Joliette trouve ça drôle.

La question que j'ai posée au premier ministre, c'est: Comment peut-il prétendre d'abord qu'il apprend à la dernière minute que la plus grosse et la plus importante délégation d'investisseurs allemands se pointe ici – c'est à Montréal, en l'occurrence – et souhaite le rencontrer, que des indications préliminaires sont qu'effectivement ils pourraient le rencontrer, que ça n'a pas dérangé d'aucune façon le premier ministre de l'Ontario de rencontrer ces gens longuement, que ça n'a pas dérangé le ministre de l'Industrie et du Commerce du Canada, en pleine campagne électorale, de rencontrer ces gens-là également longuement parce que c'est important pour les travailleurs et pour l'ensemble de l'économie canadienne, et que le premier ministre du Québec, lui, n'a pas le temps, dans son calendrier, de rencontrer des gens, alors qu'il est plus intéressé, à l'évidence, à combler le retard dans les sondages du Bloc québécois qu'à combler le retard économique de l'emploi au Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, voici de la démagogie dans sa plus basse expression. Ce chef de l'opposition a été pendant quelques mois premier ministre. Il sait qu'un des problèmes que nous avons dans ces fonctions, c'est de gérer l'agenda, qu'on fait les agendas plusieurs semaines à l'avance et qu'il est très, très difficile même de remplir les agendas déjà existants. Je ne me souviens pas des dates, j'ai oublié les raisons pour lesquelles j'étais pris, mais je me souviens qu'on a essayé à la dernière minute de faire des déplacements dans l'agenda. On n'a pas été capables parce qu'on a été avertis trop tard. Ces hommes d'affaires allemands, ces gens d'affaires allemands n'avaient pas de rendez-vous avec moi quand ils sont venus au pays, ils avaient prévu rencontrer d'autres personnes et il s'est trouvé que... On m'a informé, je crois, qu'il y avait un trou qui s'était créé à la dernière minute à leur agenda et qu'ils auraient été disponibles pour me rencontrer. J'ai tout fait pour le faire, je n'ai pas été capable de trouver des moments qui coïncidaient avec les leurs. Voilà la vérité, M. le Président.

Ceci étant dit, je n'ai pas à m'excuser de participer à une campagne électorale à Ottawa quand on sait de quoi il est question maintenant. J'ai parlé hier du droit fondamental du Québec, du peuple du Québec, de l'Assemblée nationale de déterminer l'avenir politique du Québec. J'ai dit et je rappelle que tout ça est en cause dans la campagne actuelle. Il y a deux anciens députés de la formation de l'opposition officielle qui sont maintenant candidats au sein d'une formation fédérale qui veut restreindre le droit du Québec à décider de lui-même. Je crois, M. le Président, que c'est un devoir que j'ai. J'estime que c'est mon devoir. Je le fais avec enthousiasme, je le fais avec détermination. Il faut qu'une voix se fasse entendre au Québec contre les menées antidémocratiques du gouvernement fédéral.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Pendant que le premier ministre retrouve le ton théâtral dont pouvait témoigner le ministre des Ressources naturelles dans un ouvrage sur le premier ministre, dont il disait: Qu'il peut donc être théâtral, ce Lucien, il se convainc lui-même! – et je cite le député de Joliette – comment le premier ministre peut-il trouver plus important de s'impliquer dans la campagne électorale, de ne pas accepter des invitations qui lui sont faites pour parler de l'économie du Québec et qu'il trouve le temps de s'inviter, contre Gilles Duceppe, dans le comté de Laurier–Sainte-Marie?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on me donne un aide-mémoire sur les choses qui se sont passées à l'occasion de la visite des investisseurs ou des gens d'affaires allemands. La seule plage qui était possible pour eux, qui m'était offerte à la dernière minute, c'était un vendredi, et il se trouvait que c'était à peu près la seule journée où je me trouvais dans mon comté, depuis très longtemps. Et le chef de l'opposition sait combien il est difficile pour un premier ministre de s'occuper de son comté dans ses fonctions. J'y vais beaucoup trop rarement. On avait réussi à isoler un moment où j'avais des annonces à faire, des gens à rencontrer. C'était ce vendredi, et je ne l'ai pas annulé, pour des raisons démocrates, pour des raisons de respect des responsabilités du député.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, personne n'en veut au premier ministre d'aller dans son comté. Ce n'est pas ça qui est la question. La question est de savoir: Dans une journée complète, avec les facilités qui sont à la disposition du premier ministre de se déplacer littéralement selon ses besoins – parce qu'il faut jongler avec beaucoup de choses, y compris le comté – est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'il n'a même pas trouvé le moment de composer avec un agenda, oui, chargé? J'espère qu'il ne se plaint pas, c'est ça, un agenda de premier ministre! J'espère qu'il ne découvre pas ça non plus, c'est ça, un agenda de premier ministre. C'est de s'occuper non seulement de son comté, mais de l'ensemble des Québécois. Et, dans son comté, s'il a le taux de chômage des jeunes le plus élevé au Canada, est-ce que ça n'aurait pas été une bonne idée de regarder et de rencontrer les investisseurs afin d'attirer ici de l'investissement et de l'emploi qui bénéficieraient à tous les Québécois, y compris dans son comté?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Là, je constate que, dans l'esprit du chef de l'opposition, ce n'est plus le Bloc qui est fautif, c'est les gens de mon comté. Je vais respecter les responsabilités que j'ai envers mon comté et je rappelle, M. le Président, que la seule plage qui m'a été offerte par les gens d'affaires, c'était ce vendredi où j'étais dans mon comté. Il n'y a pas eu moyen de faire autrement.

Deuxièmement, dans cette campagne, il y a des choses fondamentales aussi. On voit actuellement que le chef du Parti conservateur est en train de vouloir envahir la juridiction fondamentale du Québec dans le domaine de l'éducation. Je n'ai pas entendu une seule voix du Parti libéral du Québec, je n'ai pas entendu une seule voix pour s'élever contre cette invasion, cet empiétement inacceptable, si jamais il était élu pour le faire, M. le Président. Quand on pense qu'il y a parmi eux des gens qui ont déjà été ministre de l'Éducation, quand on pense qu'ils savent ce que c'est que le respect des compétences du Québec dans l'éducation, ils ne disent pas un mot devant la tentative avouée d'un chef de parti fédéral d'imposer des examens fédéraux à des élèves de troisième, huitième et secondaire V. Ça, c'est scandaleux, M. le Président!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.


Compressions budgétaires dans le réseau de l'enseignement privé

M. Ouimet: Principale, M. le Président. Les états généraux de l'éducation, dont les commissaires ont été nommés par le gouvernement d'en face, recommandaient de réduire à zéro le financement des écoles privées mais recommandaient de le faire de façon progressive. Suite au dépôt de ce rapport, le premier ministre du Québec prenait l'engagement quasi solennel de ne pas suivre cette recommandation mais plutôt de demander au réseau privé un effort comparable à celui exigé du réseau public.

Cependant, et contrairement à l'engagement du premier ministre, le réseau privé a subi une coupure beaucoup plus importante que le réseau public, ce qui fait dire ce matin au représentant des écoles privées, et je le cite: «C'est peut-être la raison pour laquelle le premier ministre refuse de nous voir, puisqu'il se rappelle les engagements pris par son gouvernement et qu'il constate aujourd'hui que ceux-ci n'ont pas été respectés.»

Question au premier ministre: Le premier ministre peut-il admettre que son gouvernement a un préjugé défavorable à l'endroit des écoles privées, que son gouvernement souhaite la diminution et la disparition du réseau privé, et c'est ce qui explique que 30 écoles privées fermeront leurs portes d'ici les deux prochaines années, que les inscriptions diminuent et que les frais augmenteront, dans certains cas, d'environ 300 $ par élève? Si c'est ça, la véritable volonté du gouvernement, pourquoi ne pas le dire de façon honnête aux parents des écoles privées?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en effet, lorsque le rapport des états généraux sur l'éducation a été rendu public, il y avait des recommandations qui concernaient l'école privée qui n'étaient pas en accord avec la politique gouvernementale non plus qu'avec l'opinion que je me fais de la place d'un réseau privé dans l'éducation au Québec.

J'ai immédiatement – la journée même, je crois – rectifié les choses en disant que jamais nous n'allions mettre en oeuvre une pareille recommandation. Et j'affirme encore aujourd'hui, je suis très heureux de le réitérer, à quel point mon gouvernement et moi-même croyons que le réseau privé au Québec dans l'éducation est très important, qu'il a sa place légitime, qu'il doit être traité et considéré comme tel par l'État québécois.

Deuxièmement, concernant les financements, je pense qu'on a beaucoup exagéré tout à l'heure dans ce qu'on a affirmé, parce qu'il est vrai que cette année la compression du côté du réseau privé est plus forte que du côté du réseau public, mais, l'année dernière, c'était le contraire. Alors, il y a eu un effort de compensation sur deux années, qui n'est pas complété; je laisserai la ministre de l'Éducation en parler. Mais nous sommes tout à fait cohérents avec nous-mêmes et nous réitérons que les deux réseaux doivent être traités équitablement par rapport au financement qui vient de l'État.

En troisième lieu, je ne sais pas ce qui a été répondu en mon nom à une demande d'entrevue, mais, en ce qui me concerne, je serai très heureux de rencontrer les représentants de l'école privée.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: M. le Président, comment les parents des écoles privées peuvent-ils croire le premier ministre, alors qu'ils l'accusent aujourd'hui et l'accusaient la semaine passée de ne pas avoir tenu ses engagements, de ne pas avoir respecté sa parole et que, de façon cumulative, sur une période de deux ans, les compressions budgétaires ont été plus importantes au niveau du réseau des écoles privées que du réseau des écoles publiques? Comment les parents du Québec peuvent-ils faire confiance au premier ministre, alors que les gestes posés par son gouvernement vont à l'encontre des paroles qu'il donne?

(14 h 30)

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est sûr que, si ces personnes écoutent le député de Marquette, elles ne vont pas nous faire confiance, mais, si elles m'écoutent, elles vont me faire confiance.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Bouchard: Je donne la parole à la ministre de l'Éducation.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai beaucoup de difficultés à accepter les propos du député de Marquette parce que, dans les faits, j'ai eu l'occasion de rencontrer la Fédération des écoles privées à plus de deux reprises, en fait, à trois reprises exactement. Je suis même allée à leur rencontre annuelle il y a à peine quelques semaines pour expliquer les choix du gouvernement.

Dans les faits, et le premier ministre l'a rappelé, dès la sortie des orientations de la Commission des états généraux, nous avons clarifié la situation en ce qui a trait aux écoles privées. Nous avons cependant dit très clairement aussi, et aux écoles et aux parents, qu'un effort allait leur être demandé et qu'il serait équivalent. L'année dernière, l'effort a été beaucoup en deçà de ce qui avait été demandé au secteur public. On s'en souviendra d'ailleurs, ça avait valu un certain nombre de critiques de la part des milieux du secteur public. Et, cette année, il y a une forme de rattrapage qui est faite avec un léger décalage sur deux ans.

Donc, en ce sens, M. le Président... Si, d'ailleurs, on traitait, je vous dirais, les écoles privées comme on le fait ailleurs au Canada, il n'y aurait aucune subvention qui leur serait versée. Ce n'est pas le choix que nous avons fait ici, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Si la ministre de l'Éducation prétend que son gouvernement ne suivra pas la recommandation des états généraux sur l'éducation, comment se fait-il qu'il va y avoir près de 30 écoles qui fermeront leurs portes au cours des deux prochaines années, que les inscriptions diminuent, que les frais de scolarité continuent d'augmenter et que, dans deux ans, dans trois ans, dans quatre ans, si la tendance se maintient, ça sera la disparition du réseau des écoles privées au Québec?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Ce n'est pas ce que nous souhaitons, M. le Président, et les gestes que nous posons ne visent pas ce que prétend que nous visons le député de Marquette, puisque, dans les faits, les crédits qui leur sont versés, qui sont versés aux écoles privées au Québec, permettent effectivement que ce réseau reste en santé. Il peut y avoir cependant certaines circonstances, parce que le bassin de clientèle diminue, parce qu'il y a une situation économique particulièrement difficile dans certains cas, parce qu'on peut avoir pris aussi certains risques en implantant des écoles privées alors qu'on n'était pas certain du bassin de clientèle, qui font que cela donne la situation que décrit le député de Marquette, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre a compris, comme tout le monde, le choix de mots de la ministre, encore une fois, comme dans les garderies, comme dans la prématernelle: Les choix du gouvernement, dit-elle, ne visent pas à mettre au mal, je dirais, les écoles privées? Est-ce que le premier ministre se rend compte que les choix qui ont été faits, si ce n'est pas ça que ça vise comme objectif, c'est le résultat des gestes du gouvernement qui viennent contredire le discours du premier ministre? Et est-ce qu'on n'est pas encore une fois devant un exemple de double langage et de manque de transparence et de franchise quand les gestes ne correspondent pas aux engagements puis aux paroles du premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que l'opposition n'a pas écouté les réponses de la ministre de l'Éducation. Nous réitérons que nous estimons nécessaire, même, qu'il y ait au Québec, en parallèle au secteur public, un secteur privé de l'éducation. C'est une chose qui est saine en soi. Nous avons fait des choix politiques importants, au Québec. Nous sommes les seuls à financer, l'État du Québec est le seul au Canada à financer...

Une voix: ...

M. Bouchard: Oui, nous sommes les seuls à les financer au niveau où nous les finançons, M. le Président. C'est ce que j'allais dire avant qu'on nous interrompe. Et on ne demande pas merci à personne, c'est une responsabilité collective et je pense que c'est très bon pour l'éducation. En même temps, il y a des choix personnels là-dedans, qui s'exercent par des parents, que nous respectons. Et il n'y a rien qui empêche que, même si on est en politique, on est des parents, nous autres aussi, puis on fait des choix, nous aussi.

Et, M. le Président, nous allons nous assurer que ces choix restent possibles, restent libres, restent efficaces, et faire en sorte qu'il y ait au Québec un réseau d'éducation privée qui soit vivant, qui soit compétent et qui apporte une grande contribution à la valeur de l'éducation au Québec. Les financements suivront de façon comparable.

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Malgré les propos du premier ministre, le premier ministre se rend-il compte qu'on juge un arbre à ses fruits? On juge un gouvernement aux gestes qu'il pose et non pas aux paroles qu'il donne? Et peut-il prendre l'engagement, compte tenu que les parents des écoles privées sont dans les tribunes aujourd'hui même, ils se sont déplacés à Québec... Peut-il les rencontrer aujourd'hui même pour discuter de la question du financement du réseau des écoles privées?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Alors, M. le Président, je ne pense pas qu'on va écrire nos agendas ici, ensemble, cet après-midi. Bon. Alors, je répète...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je disais donc aux membres de cette Assemblée que je ne crois pas qu'il soit pertinent que nous écrivions ensemble ni l'agenda du premier ministre ni l'agenda de qui que ce soit cet après-midi. Cependant, j'ai bien compris que le premier ministre était prêt à recevoir les représentants des parents, et il en va de même de mon côté. Vous savez, et je le répète, M. le Président, que j'ai déjà rencontré à trois reprises la Fédération des écoles privées; d'ailleurs, ce qui est plus que la Fédération des commissions scolaires au plan officiel et formel, M. le Président. J'imagine que le député de Marquette devrait me féliciter et me remercier de cette attitude.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Compte tenu de la présence à Québec des gens à ce moment-ci, est-ce que le premier ministre ne pourrait pas faire juste un petit trou dans son agenda pour rencontrer les représentants des parents d'enfants qui sont dans les écoles privées? Je ne peux pas croire. Je ne lui demande pas de rencontrer des investisseurs allemands, là, je lui demande juste de rencontrer des parents québécois. Est-ce que le premier ministre pourrait avoir quelques minutes aujourd'hui pour faire ça?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Ça vole très, très bas, M. le Président. Je voudrais uniquement dire que je n'ai pas besoin du chef de l'opposition pour rencontrer des gens de l'école privée, pour leur parler, pour m'entendre avec eux. J'entretiens les meilleurs rapports avec eux. J'aurai plaisir à communiquer directement avec eux pour que nous puissions ensemble conjointement fixer une date qui nous convienne.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Comment le premier ministre a-t-il trouvé rapidement le temps de rencontrer les cadres du gouvernement parce qu'on lui a demandé de le faire puis qu'il n'a pas le temps de rencontrer les parents québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je suis bien convaincu que les représentants des parents, qui sont en haut, ne sont pas dupes de ces petits procédés mesquins.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Mais en attendant, ils sont venus ici pour rien puis ils ne verront pas le premier ministre.

Le Président: Mme la députée de Saint-Henri–Sainte-Anne, en principale.


Demande d'aide financière du centre pour conjoints violents Après-coup

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. On se rappelle tous et toutes de la tragédie qui a eu lieu à Baie-Comeau en septembre dernier, qui a coûté la vie à toute une famille: la mère, le fils et le conjoint violent qui était en situation de crise. Suite à ce drame, le coroner Jacques Bérubé a déposé il y a quelques jours son rapport, dont les principales recommandations visent l'implantation partout au Québec, dans toutes les régions du Québec, de centres de prévention d'aide pour les conjoints violents qui sont en état de crise.

(14 h 40)

M. le Président, il y a un seul centre de crise pour hommes violents au Québec qui rencontre exactement toutes les recommandations du coroner Bérubé, c'est le centre Après-coup. Après-coup est le seul au Québec qui place, qui héberge des conjoints violents en situation de crise, et son programme de thérapie intensive est menacé de fermeture suite aux refus répétés du ministre de la Santé et des Services sociaux de leur venir en aide de façon financière.

Alors, une question au ministre de la Santé: Est-ce que le ministre a l'intention de venir en aide, oui ou non, aux dirigeants du centre Après-coup?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, il faudrait d'abord rappeler que, dans le dossier de la violence et, singulièrement, des difficultés reliées à la violence conjugale, le gouvernement a établi une politique il y a plus d'un an, politique interministérielle qui implique, en plus de la Santé et des Services sociaux, le Secrétariat à la condition féminine, le ministère de la Sécurité du revenu, le ministère de la Justice, le ministère de la Sécurité publique. Tous ceux qui peuvent faire quelque chose pour améliorer la situation sont impliqués entre les ministères et aussi sur le terrain.

On a eu l'occasion de faire un bilan, il y a quelques semaines, de l'application de cette politique. Sur 57 mesures qui étaient prévues, plus de 32 étaient réalisées et 19 autres étaient en voie de réalisation. Alors, je pense que, globalement, il y a une action importante qui se fait centralement et sur le terrain surtout.

Maintenant, je dois vous dire que, pour le centre Après-coup, je vais prendre des informations plus précises. Je ne saurais pas vous répondre présentement sur ce qu'il en est exactement de ce centre d'aide. Mais je vais prendre des informations sur la situation, les demandes qu'ils ont faites et ce qu'on leur a répondu et j'informerai la Chambre dans les meilleurs délais, M. le Président.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi, leader de l'opposition officielle.


Diminution de 3,2 % des dépenses gouvernementales dans le domaine de la santé cette année

M. Paradis: Oui, M. le Président. Hier, à l'Assemblée nationale, la majorité péquiste a voté des dépenses additionnelles pour le gouvernement de l'ordre de quelque 195 000 000 $, livre des crédits, crédits additionnels. Avec le budget, ces dépenses additionnelles nous permettent de dégager maintenant un portrait clair des priorités ou de l'absence de priorités du gouvernement péquiste.

Dans ce document, sur lequel les députés péquistes ont voté hier, à la page 4 – document du ministre des Finances – on nous apprend que les dépenses gouvernementales pour cette année n'ont pas diminué de 20 %, n'ont pas diminué de 10 %, n'ont pas diminué de 6 %; les dépenses gouvernementales, comparées aux dépenses de l'année passée, ont diminué de 0,6 %.

Au même moment, alors que le système de santé craque de partout, que les listes d'attente s'allongent, que les corridors sont bondés dans les urgences, que les pharmaciens menacent de se désengager du système de taxe-médicaments, que l'on ferme la pouponnière à l'hôpital Sainte-Justine, le président du Conseil du trésor, lui, dans un autre document déposé à l'Assemblée nationale, nous annonce que les dépenses dans la santé vont diminuer non pas de 0,6 %, comme l'ensemble des dépenses gouvernementales, mais plutôt de 3,2 %, cinq fois plus que l'ensemble des autres ministères du gouvernement du Québec.

Dans un tel contexte, comment le ministre de la Santé explique-t-il qu'il n'a pas su défendre le système de santé des Québécois et des Québécoises et a-t-il accepté dans son ministère des coupures cinq fois supérieures aux coupures imposées à l'ensemble des autres ministères québécois?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je vois que le leader de l'opposition essaie de manipuler des chiffres ou, en tout cas, d'en tirer des conclusions qui ne correspondent pas du tout à la réalité. Les chiffres de la page 4 des crédits supplémentaires indiquent qu'il y a une diminution des dépenses de 2,3 %.

Par ailleurs, lors du discours du budget, le ministre des Finances a annoncé des investissements additionnels qui impliquent une augmentation du plafond de dépenses ou des dépenses de 195 000 000 $. Et ce qu'il inclut pour arriver à faire la comparaison qu'il fait, c'est tout le réajustement que nous avons introduit dans les états financiers du gouvernement, dans le budget et dans les crédits en ce qui concerne la politique familiale, 314 000 000 $.

Alors, si l'on met les choses sur une base comparable, nous avons réduit les dépenses de 2,3 %. C'est là-dessus qu'il doit baser ses constatations par rapport à la santé. Et, sur ce plan-là, lorsqu'il prend aussi les chiffres qu'il mentionne, il traite de l'effort budgétaire plutôt que de traiter de la réduction des dépenses.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, toujours en référant le premier ministre à la page 4 des états financiers déposés par le ministre des Finances, qui indique: avant les crédits additionnels, 2,3 %; après les crédits additionnels, 1,8 %; total, diminution de 0,6 %, M. le Président...

Le Président: Je voudrais simplement vous rappeler, M. le député de Brome-Missisquoi, que vous êtes en complémentaire et que vous n'avez pas les privilèges du chef de l'opposition.

Des voix: Ah! Ah!

M. Paradis: Oui. M. le Président, en prenant connaissance de ces chiffres, comment le premier ministre accepte-t-il que le budget de la santé soit diminué, lui, de 3,2 %, alors que le budget de la santé animale qu'a défendu – puis ce n'est pas un poids lourd au cabinet – le ministre de l'Agriculture n'est absolument pas coupé? Quelles sont les véritables priorités de son gouvernement en matière de santé, la santé des humains ou la santé animale?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, sur une période de temps, on verra toute l'équité qu'il y a dans les crédits du gouvernement, sur une période de trois ou quatre ans, d'ailleurs. Mais je voudrais ramener le député à plus de réalisme là-dessus, parce que, en ce qui concerne l'agriculture, il y a eu des réductions de budget considérables l'an dernier, l'année d'avant et cette année encore. Et puis, lorsqu'il fait sa comparaison avec la santé, le ministère de la Santé de mon collègue, il prend une année très précise, sur un point très précis. Alors, M. le Président, qu'il relise ses livres.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Comment le ministre de la Santé, qui accepte un tel état de fait, peut-il accepter de maintenir ouvert, dans sa circonscription électorale, le zoo de Charlesbourg, qui avait été vendu par le précédent gouvernement, et que, à ce moment-là, il accepte des fermetures de pouponnières dans des hôpitaux?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: D'abord, pour la question du Jardin zoologique du Québec, parce que c'est le nom du parc en question, celui qui pose la question présentement, dans sa vie antérieure, alors qu'il était ministre de l'Environnement, il ne l'a pas vendu, il l'a bazardé. Il l'a bazardé pour à peu près rien. Un contrat mal fait qui n'était même pas sur le plan légal et qu'on a été obligé de récupérer au lendemain de l'élection. Et là ça fait trois ans qu'on essaie de défaire ce qu'ils ont fait. Pour d'autres équipements, on n'est pas arrivé assez vite pour intervenir en temps utile, mais celui-là, on pense être capable, encore, de sauver la situation, M. le Président.

On a discuté pendant toute une interpellation, vendredi passé, de ces questions de budget. Le député de Brome-Missisquoi a joué régulièrement entre des dépenses probables, des crédits, des éléments de budget, en mêlant les tableaux et les chiffres pour, à un moment donné, faire ressortir que la santé assumait à peu près 90 % des compressions du gouvernement. Sur la même base de comparaison, le ministère de l'Éducation en assumait pour à peu près 125 % à 130 %, ce qui faisait qu'il était après nous calculer une affaire, M. le Président, où, à force de faire des compressions, on finissait par faire des profits, ce qui démontrait très bien comment ils ont réussi à nous mettre dans la dèche où ils nous ont mis pendant...

Des voix: Bravo!

(14 h 50)

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Impossibilité pour le gouvernement de procéder au congédiement du coroner Bouliane sur la base du rapport Gobeil

M. Lefebvre: M. le Président, depuis février 1995, le coroner Bouliane est suspendu, mais il continue à recevoir son plein salaire. Depuis février 1995, M. le Président, on a payé au coroner Bouliane près de 200 000 $, soit 85 000 $ par année, à ne rien faire, absolument rien faire. En janvier 1997, le ministre de la Sécurité publique refusait encore à ce moment-là de congédier le coroner Bouliane. Il disait ceci: Le rapport du juge Gobeil devrait normalement constituer la matière à partir de laquelle le Conseil des ministres devrait prendre des décisions.

M. le Président, l'enquête est terminée. Le juge Gobeil a déposé son rapport le 15 avril. Ce rapport a été rendu public le 15 avril dernier. Il est accablant, le rapport du juge Gobeil. Le coroner Bouliane, la preuve est faite, a vendu des autobus à Cuba. Il était l'âme dirigeante de la compagnie. Il était carrément en infraction avec la Loi sur les coroners sur au moins deux articles très précis de la loi.

M. le Président, ma question au ministre de la Sécurité publique est très simple: Qu'est-ce qu'il attend pour agir, ce qu'il aurait dû faire depuis un bon bout de temps, faire son devoir prévu à l'article 15 de la Loi sur les coroners, demander au Conseil des ministres, y compris au premier ministre, de congédier le coroner Bouliane, qui n'a plus de coroner que le titre puis le salaire, rien d'autre?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Oui. M. le Président, les avis que j'ai sont à l'effet que seul le Conseil des ministres peut congédier le coroner sur la base du rapport d'un juge. Or, nous avons le rapport du juge Gobeil. Il y a un jugement qui maintenant l'a rendu public, mais ce rapport du juge Gobeil est contesté dans ses fondements devant la Cour supérieure par Me Bouliane. Il nous est donc, à ce moment-ci, tant que cette question ne sera pas tranchée par les tribunaux, impossible de prendre nos décisions sur la base d'un rapport qui fait l'objet d'une contestation devant les tribunaux.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: Est-ce que le ministre de la Sécurité publique, s'il fait un calcul rapide, réalise que le coroner Bouliane reçoit présentement 300 $ par jour à ne rien faire, alors que le Bureau des coroners a vu ses budgets diminuer, lors du dernier budget, de 900 000 $? Le Bureau des coroners est surchargé, on manque d'effectif, et entre-temps le ministre de la Sécurité publique refuse de faire son travail. Il nous dit – c'est ça, sa réponse – qu'on va attendre peut-être jusqu'à la Cour suprême, trois, quatre ans. Ça veut dire plus ou moins un autre 300 000 $ payé au coroner Bouliane, qui est en infraction, la preuve est faite. Qu'est-ce qu'il attend pour prendre ses responsabilités, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Perreault: M. le Président, je suis un peu surpris qu'un ancien ministre de la Justice nous demande d'agir sur la base d'un rapport qui est actuellement devant les tribunaux quant à ses fondements mêmes, ce sur quoi nous devrions nous baser. Et, puisqu'on nous demande ce que nous faisons, pour l'instant nous respectons les tribunaux. Mais j'aurais le goût de poser la question suivante à l'opposition: Qu'est-ce qu'elle faisait, elle, pendant que Me Bouliane posait les gestes que le rapport souligne?

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que je peux avoir l'assurance du premier ministre qu'au prochain Conseil des ministres, mercredi prochain – ça aurait dû être fait ce matin – le premier ministre va prendre cinq minutes, là, pour disposer du cas de Bouliane plutôt que de prendre des heures pour essayer de dépanner Gilles Duceppe? Est-ce que le premier ministre va prendre cinq minutes la semaine prochaine pour regarder le dossier Bouliane, s'assurer que les prescriptions de la Loi sur les coroners sont respectées, et, entre autres, l'article 15, demander à son ministre pourquoi son ministre refuse de recommander au Conseil des ministres et au premier ministre le congédiement du coroner Bouliane? C'est devenu un scandale. Je demande au premier ministre de vérifier ça la semaine prochaine.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous venons d'entendre des précisions très claires de la part du ministre de la Sécurité publique. Nous sommes dans une société de droit. Le gouvernement peut poser des gestes lorsque la loi l'y habilite. Il se trouve, tel qu'il découle des propos du ministre, que le gouvernement ne peut procéder au congédiement d'un coroner que sur la base d'un jugement qui a été rendu à l'encontre d'un coroner et que ce jugement, pour le moment, n'est pas définitif, puisqu'il fait l'objet d'une contestation judiciaire.

En conséquence, les choses étant ce qu'elles sont, le gouvernement ne peut pas se fonder sur la base qui serait requise, c'est-à-dire un jugement qui n'est pas contesté. Tant que le jugement ne fera pas l'objet d'un jugement final lui-même au terme de la contestation engagée, tout indique que nous ne pourrons procéder. De toute façon, nous allons suivre le dossier de très près. Il est certain que c'est le genre de situation qui est extrêmement ennuyeuse pour les citoyens, pour les contribuables et pour tous les gouvernements, mais nous devons suivre la loi, nous devons poursuivre les processus qui ont été engagés par rapport à ces choses.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre, qui est juriste, pourrait, dans le cinq minutes qu'il va s'octroyer, regarder de plus près la possibilité pour le gouvernement, sur la foi du rapport d'enquête... C'est ça qui est l'élément qui déclenche la légitimité de la décision du Conseil des ministres; ce n'est pas ce que M. Bouliane peut vouloir faire en Cour supérieure à l'égard du rapport d'enquête. Est-ce que, sur la foi de l'existence même du rapport d'enquête, il n'y a pas justement le fondement pour le Conseil des ministres de procéder au congédiement? Si Me Bouliane n'est pas content, il attaquera la décision du gouvernement, il se fera restaurer dans ses fonctions, il poursuivra en dommages, avec les chances que ça peut représenter de succès de son côté, on le sait. Est-ce que le premier ministre ne peut pas envisager de commencer tout de suite à économiser 300 $ par jour au lieu d'attendre peut-être qu'un jour on s'aperçoive qu'on aurait dû faire ça aujourd'hui?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, juriste ou pas, nous savons tous qu'il est beaucoup plus économique de respecter la loi que de ne pas la respecter. Et prendre une décision qui ne serait pas conforme à la loi, ça exposerait, si les tribunaux devaient statuer dans ce sens, le gouvernement à payer plus cher, en termes de dommages et de pénalités. Donc, nous allons nous assurer que la loi soit suivie. Nous allons demander un rapport plus précis sur la situation juridique de ce dossier et nous agirons en fonction de ce que la loi nous permet de faire.

Le Président: M. le député de l'Acadie, en principale.


Prime de départ accordée à M. Pierre Baillargeon, ex-secrétaire du conseil d'administration d'Hydro-Québec

M. Bordeleau: Oui, merci, M. le Président. Le gouvernement actuel exige depuis plusieurs mois de tous les citoyens des sacrifices énormes dans l'assainissement des finances publiques. Malgré qu'il constate actuellement que les Québécois sont à bout de souffle, il n'en continue pas moins de couper, de taxer et de tarifer tout ce qui bouge. Le premier ministre actuel, qui se fait l'ardent défenseur des sacrifices pour tous, semble être moins préoccupé par ce qui se passe dans son entourage et chez les hauts fonctionnaires et hauts dirigeants.

Rappelons seulement qu'au mois de février dernier le premier ministre trouvait tout à fait normal que ses proches collaborateurs quittent Ottawa pour se retrouver immédiatement dans son cabinet à Québec et empochent des primes de séparation de plusieurs milliers de dollars. Or, nous apprenions il y a quelques semaines que M. Pierre Baillargeon, après avoir été engagé par l'ex-président d'Hydro-Québec, M. Yvon Martineau, quitte la fonction de secrétaire après seulement 18 mois et passe à la caisse pour ramasser une prime de 208 000 $ équivalant à un an et demi de salaire. Il est important de souligner que M. Baillargeon, haut fonctionnaire au ministère des Affaires internationales, était en congé sans solde, donc conservait sa sécurité d'emploi, et est maintenant de retour sur la liste de paie du gouvernement depuis le 28 avril dernier.

Est-ce que, le premier ministre, étant donné qu'il a trouvé normales les primes accordées à ses proches collaborateurs, on doit présumer qu'il est également d'accord avec cette prime de 208 000 $ accordée à M. Baillargeon, alors que ce dernier est présentement employé et rémunéré par le gouvernement?

Le Président: M. le ministre des Relations internationales.

M. Simard: M. le Président, en effet, M. Pierre Baillargeon a réintégré le ministère des Relations internationales le 28 avril dernier et, depuis, pour faire suite d'ailleurs à des engagements précis lors de la création de la Société Montréal internationale, est prêté à SMI pour exercer des fonctions. Antérieurement, un congé sans traitement avait été accordé à M. Baillargeon par notre ministère pour lui permettre d'exercer des fonctions de secrétaire général auprès du conseil d'administration d'Hydro-Québec. Hydro-Québec a mis fin, le 18 novembre 1996, au contrat avec M. Baillargeon et lui a versé, à l'époque, des indemnités.

(15 heures)

Nous avons accepté que M. Baillargeon revienne au ministère des Relations internationales, donc qu'il soit prêté à la Société Montréal internationale, mais, évidemment, nous nous sommes assurés d'abord qu'il n'y ait pas de double rémunération. Je vous cite la lettre envoyée par le directeur des ressources humaines de notre ministère le 25 avril, un passage: «À cette fin, je comprends que, pour éviter la double rémunération à même les fonds publics, vous avez pris les dispositions auprès des représentants d'Hydro-Québec afin de retourner une partie de l'indemnité que vous avez reçue d'un montant équivalant au salaire que vous toucherez au ministère jusqu'au 1er juin 1998.»

Actuellement, M. le Président, nous sommes à vérifier la façon dont ce retour sera fait au gouvernement et à Hydro-Québec. L'hypothèse qui est retenue est que, pendant les 80 prochaines semaines, M. Baillargeon ne reçoive aucun salaire du ministère des Relations internationales.

Donc, depuis le 25 avril dernier, 15 jours avant que le député de l'Acadie ne s'excite le poil des moustaches, c'était une question réglée.

Une voix: Bravo!

Le Président: Alors, je regrette, M. le député de l'Acadie, mais à ce moment-ci la période des questions et des réponses orales est terminée.

Il n'y a pas de réponses différées.

Mais j'inviterais tout le monde à la collaboration – parce que nous avons des votes reportés – afin que les choses soient claires et qu'il n'y ait pas d'ambiguïté.


Votes reportés

Alors, tel qu'annoncé précédemment, nous allons procéder aux votes reportés suivants. Je vais donner la lecture, d'abord, de la motion de M. le député de Châteauguay présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, puis de la motion d'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles et député de Joliette, et finalement de la motion de sous-amendement de M. le député de Laurier-Dorion. D'abord, la motion de M. le député de Châteauguay se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du premier ministre qu'il reconnaisse la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois qui s'est exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995.»

La motion d'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles et député de Joliette se lit, quant à elle, comme suit:

Que la motion en discussion soit amendée:

1° par le remplacement, dans la première ligne, des mots «du premier ministre qu'il reconnaisse» par les mots «de l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec qu'ils reconnaissent»;

2° par l'ajout, à la fin, des mots suivants: «tenu en vertu de la loi sur les consultations populaires, reconnaissant ainsi le droit fondamental des Québécoises et des Québécois de décider de leur avenir en vertu de cette loi».


Motion de sous-amendement à l'amendement à la motion de l'opposition proposant que l'Assemblée exige du premier ministre qu'il reconnaisse la volonté démocratique des Québécois exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995

Alors, la motion de sous-amendement de M. le député de Laurier-Dorion se lit comme suit:

Que l'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles et député de Joliette soit sous-amendé par l'ajout, après les mots «hommes et femmes politiques du Québec», des mots «et plus particulièrement du premier ministre du Québec».

Alors, conformément à l'article 201, je mets d'abord aux voix la motion de sous-amendement de M. le député de Laurier-Dorion, que je viens juste de lire.

Que les députés en faveur de cette motion de sous-amendement veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve)...

Des voix: ...

Le Président: Je vous rappelle que nous sommes dans un vote. C'est un moment solennel, et je vous demanderais l'indulgence pour l'officier de la table qui doit faire l'appel nominal.

La Secrétaire adjointe: ...M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:35

Contre:56

Abstentions:0


Motion d'amendement à la motion de l'opposition proposant que l'Assemblée exige du premier ministre qu'il reconnaisse la volonté démocratique des Québécois exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995

Le Président: Alors, la motion de sous-amendement de M. le député de Laurier-Dorion est rejetée. Je mets maintenant aux voix la motion d'amendement de M. le ministre d'État des Ressources naturelles et député de Joliette. Cette motion, je le rappelle, se lit comme suit:

Que la motion en discussion soit amendée:

1° par le remplacement, dans la première ligne, des mots «du premier ministre qu'il reconnaisse» par les mots «de l'ensemble des hommes et des femmes politiques du Québec qu'ils reconnaissent»;

2° par l'ajout, à la fin, des mots suivants: «tenu en vertu de la loi sur les consultations populaires, reconnaissant ainsi le droit fondamental des Québécoises et des Québécois de décider de leur avenir en vertu de cette loi».

La motion telle qu'amendée se lirait comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige de l'ensemble des hommes et femmes politiques du Québec qu'ils reconnaissent la volonté démocratique des Québécoises et des Québécois qui s'est exprimée lors du référendum du 30 octobre 1995, tenu en vertu de la loi sur les consultations populaires, reconnaissant ainsi le droit fondamental des Québécoises et des Québécois de décider de leur avenir en vertu de cette loi.»

Alors, que les députés en faveur de la motion d'amendement veuillent bien se lever.

(15 h 10)

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), Mme Simard (La Prairie), M. Laurin (Bourget), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Fournier (Châteauguay), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Président: Est-ce que les députés contre cette motion veulent bien se lever? Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:91

Contre:0

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion d'amendement de M. le député de Joliette est adoptée.


Motion amendée

Peut-on considérer que la motion amendée du député de Châteauguay est donc adoptée? Alors, elle est adoptée.


Motions sans préavis

Nous passons maintenant à l'étape des motions sans préavis. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


Souligner la Journée du drapeau du Québec

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que les membres de l'Assemblée nationale soulignent la Journée du drapeau du Québec qui a lieu le 24 mai et qui nous fournit l'occasion d'exprimer notre fierté d'être Québécois et Québécoises.»

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Président: Alors, cette motion est adoptée, sans débat, me dit-on? Très bien. M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Oui, je demanderais le consentement de l'Assemblée pour débattre et adopter la motion sans préavis suivante:

«Que les membres de l'Assemblée nationale, afin de donner suite à la motion adoptée à l'unanimité cet après-midi, s'unissent à l'ensemble des forces vives du Québec autour des objectifs communs de relance économique et de création d'un climat favorable à l'emploi et à l'investissement en mettant fin aux chicanes linguistiques et constitutionnelles.»

Des voix: Bravo!

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Des voix: ...

Le Président: Il n'y a pas consentement. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans prévis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 79...

Le Président: M. le leader du gouvernement, je m'excuse. Que les députés qui doivent quitter la salle des délibérations le fassent maintenant et rapidement. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je disais donc que j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 79, Loi instituant la Commission des lésions professionnelles et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le jeudi 22 mai, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 125, Loi modifiant diverses lois dans le but de prévenir la criminalité et d'assurer la sécurité publique, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 89, Loi sur l'application de la Loi sur la justice administrative, demain, le jeudi 22 mai, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'éducation poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 109, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique, la Loi sur les élections scolaires et d'autres dispositions législatives, demain, le jeudi 22 mai, de 9 heures à midi, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Alors, pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est d'entendre le secrétaire du Conseil du trésor concernant la gestion administrative de l'assurance-traitement, en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en arrivons maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, concernant le projet de loi n° 109 qui fait l'objet d'étude devant la commission parlementaire, il y a eu plusieurs désistements, des désistements, entre autres, de la part des directeurs d'école. Certains groupes, maintenant, demandent d'être entendus, et le gouvernement a évoqué auprès de ces groupes-là une entente entre l'opposition et le gouvernement pour respecter les groupes qui ont été identifiés. Nous voudrions, de ce côté-ci, indiquer notre consentement pour faire en sorte que les groupes qui demandent d'être entendus puissent être entendus. Notamment, il y a un groupe présidé par Mme Judy Fay, qui représente les commissions scolaires protestantes de la région de Québec et de la région de Chicoutimi. Alors, de notre côté, nous consentons à ce que ce groupe-là soit entendu. Ça n'aurait aucun impact au niveau de l'horaire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, on verra en commission. Je pense que, normalement, ce genre de chose là, ça se parle entre les cabinets des leaders. Je prends note du consentement du député de Marquette. Je prends note aussi que son leader a entendu le consentement qu'il a donné. Alors, on va s'en reparler, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. M. le Président, le consentement vaut pour notre formation politique. Il s'agit simplement de remplacer des groupes qui ont annulé par des groupes qui souhaitent être entendus, sans déranger le calendrier normalement prévu.

Maintenant, M. le Président, la semaine dernière, à l'occasion de la période de questions de jeudi, le député de Notre-Dame-de-Grâce adressait à Mme la ministre de l'Éducation une question concernant l'École orale de Montréal pour les sourds inc., Montréal Oral School for the Deaf Inc. La question a été prise en avis par Mme la ministre. Il y a également de la correspondance qui a été échangée entre le groupe et la ministre depuis le mois de décembre l'an passé. La ministre est au courant du problème, elle a pris avis il y a une semaine à l'Assemblée nationale du Québec. Quand peut-on souhaiter obtenir une réponse de la part de la ministre? Il s'agit d'enfants qui sont défavorisés, d'une institution qui mérite une réponse à la question qui a été posée.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, si on regarde notre bilan quant aux réponses données aux questions posées par l'opposition, je crois que c'est un bilan qui est tout à fait honorable. Nous avons toujours fait diligence pour répondre aux questions qui nous sont posées. Alors, la ministre de l'Éducation a pris avis de la question, M. le Président, elle va répondre dans les meilleurs délais. Donc, dans les meilleurs délais, l'opposition aura sa réponse, et pas juste l'opposition, mais surtout les parents de l'école et les gens qui travaillent pour ces institutions.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. M. le Président, moi, là, je suis habitué maintenant à la rengaine du leader du gouvernement, comme tel. Il y a un peu plus d'un mois, j'ai adressé personnellement au ministre de la Santé et au ministre du Travail une question concernant les certificats de conformité aux normes de sécurité du Code du bâtiment pour les centres hospitaliers, les centres hospitaliers de longue durée où des personnes âgées sont hébergées, et les centres psychiatriques.

On m'a répondu, à ce moment-là, le ministre de la Santé: On va vérifier. Le ministre du Travail: Ça me fera plaisir de déposer un rapport de la Régie du bâtiment. À deux reprises, je suis intervenu auprès du leader du gouvernement; à deux reprises, j'ai entendu parler de son bilan, de son record; à deux reprises, on m'a répondu: Dans les meilleurs délais. Ça fait plus d'un mois. Il s'agit d'un problème de sécurité publique comme tel. On a des engagements ministériels, on a des engagements du leader du gouvernement. M. le Président, de quelle façon, vous, pouvez-vous intervenir pour qu'on ait finalement une réponse?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. À chaque fois que le leader de l'opposition... Moi aussi, je suis un peu habitué à ses rengaines, M. le Président. Alors, on commence à s'habituer mutuellement à notre discours et à notre langage. Alors, je peux lui donner la même réponse. À chaque fois qu'il fait une demande, je fais la même demande, à ce moment-là, au ministre du Travail. Le ministre du Travail me dit que, dans les meilleurs délais ça sera fait. Alors, moi, je transmets, à ce moment-là, la demande qui m'est faite par le leader de l'opposition, et les documents devraient être déposés sous peu, dans les meilleurs délais.

(15 h 20)

Le Président: Quant à la façon pour le président d'intervenir en votre faveur, je pense qu'il n'y en a aucune, sauf de vous donner le droit de parole à ce moment-ci pour pouvoir poser des questions au gouvernement. Alors, comme vous venez d'avoir votre réponse, M. le...

M. Paradis: M. le Président, sous réserve, un de vos prédécesseurs a déjà décidé, de la chaise présidentielle, d'exiger du gouvernement qu'il agisse promptement, de façon que le règlement de l'Assemblée nationale ait un sens non seulement dans son écriture comme telle, mais dans son application. Et, en vertu des pouvoirs qui vous sont conférés par l'article 2 du règlement comme tel, lorsque vous jugez que ça a dépassé les bornes, que ça a dépassé ce qui est acceptable, votre responsabilité vous autorise à rappeler le gouvernement à l'ordre.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'aimerais peut-être avoir la jurisprudence du leader de l'opposition, parce que le député de Joliette me dit que, lui, quand il avait posé des questions au feuilleton, dans le temps qu'il était leader du gouvernement, le député de Brome-Missisquoi, toutes ses questions étaient mortes au feuilleton. Alors, à ce moment-là, je ne sais pas, ça devait être un autre président, pas le président qui était là quand on était dans l'opposition, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, la décision présidentielle à laquelle je me référais, je vais vous l'acheminer, je vais également en acheminer une copie au nouveau leader du gouvernement. On ne parlait pas, à ce moment-là, dans cette décision-là, des questions qui étaient écrites au feuilleton, bien que ce soit applicable; on parlait des questions qui étaient posées à la période des questions orales de chaque semaine. Et les deux questions que j'ai posées, autant pour l'institution qui s'appelle le Montréal Oral School for the Deaf, autant que pour la sécurité dans les édifices publics, ont été des questions qui ont été posées à la période des questions. Et, si on veut que la période des questions signifie quelque chose, quand un ministre prend un engagement, il doit le respecter. Si le leader n'a pas l'autorité nécessaire auprès de ses collègues pour faire respecter leurs engagements, le président doit l'aider.

Le Président: Alors, écoutez, la présidence sera heureuse de prendre connaissance de la jurisprudence, d'une part. D'autre part, je comprends que, en fait, cet échange pourrait peut-être faire avancer nos travaux sur la réforme parlementaire, puisque, dans les documents que je vous ai remis récemment, on parle du problème de la période des questions et des réponses.


Avis de sanction

Alors, de mon côté, je vous avise, à cette étape-ci, qu'il y aura sanction de projets de loi au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur demain matin, le jeudi 22 mai, à 11 heures.


Affaires du jour

Ça nous amène maintenant aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 13 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 119


Adoption du principe

Le Président: À l'article 13, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 119, Loi modifiant la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers et d'autres dispositions législatives. M. le ministre d'État des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Tout d'abord, il y a deux semaines, je déposais un projet de loi ayant pour but de modifier la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers. Ce projet de loi propose une refonte en profondeur du cadre juridique entourant la qualité des produits pétroliers et des équipements de stockage. Nous voulons faire en sorte que ce cadre juridique soit mieux adapté aux conditions actuelles et à l'atteinte des objectifs que nous visons. Il s'agit de mieux assurer la sécurité des utilisateurs, d'améliorer la protection de l'environnement et de responsabiliser davantage les propriétaires d'équipements pétroliers.

Pour y arriver, nous introduisons une hiérarchie de risques rattachés aux divers produits et équipements pétroliers. Cela nous amène à proposer une meilleure réglementation des équipements et cela nous amène donc aussi à faire en sorte qu'en présentant ces équipements ils doivent présenter un très haut niveau de risque, tout en introduisant, à l'opposé, un allégement des mesures applicables aux équipements à plus faible risque.

Pourquoi ces changements, M. le Président? À l'origine, c'est à la demande de l'industrie pétrolière que le gouvernement est intervenu dans le secteur des produits pétroliers. Les représentants de l'industrie pétrolière nous pressaient de réglementer la distribution des produits. Ils souhaitaient que nous adoptions les normes d'installation prévalant dans les marchés nord-américains. C'est dans cette foulée que fut adoptée en 1971 la première Loi sur le commerce des produits pétroliers.

Au milieu des années quatre-vingt, le Québec s'est vu confronté, comme c'était le cas en Amérique ou en Europe, à de graves problèmes de fuite de produits dans l'ensemble du parc d'équipements pétroliers. Le gouvernement du Québec décida alors de réviser la portée de la loi pour étendre son application à l'ensemble des utilisateurs d'équipements pour viser notamment les entreprises de transport, les institutions publiques de même que les agriculteurs, compte tenu du caractère souvent vétuste des équipements de ces derniers.

C'est ainsi que fut sanctionnée en décembre 1987 la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers. Depuis cette date, l'enregistrement des équipements pétroliers utilisés à des fins autres que le commerce des produits pétroliers est aussi obligatoire. La mesure réglementaire prévoit de plus un programme de remplacement des équipements souterrains en acier non protégés contre la corrosion, programme qui se poursuivra jusqu'en 2001 et qui impliquera des immobilisations de la part des propriétaires d'équipements de l'ordre de 500 000 000 $. Ce programme est en voie d'être largement complété.

Quant à la problématique actuelle, avec les années, on constate que la loi actuelle ne favorise pas pleinement la responsabilisation des utilisateurs d'équipements pétroliers. Sous le régime actuel, toute modification sur un équipement pétrolier en usage au Québec doit être autorisée. Il est opportun, je crois, de revoir ce suivi, car les utilisateurs détiennent l'expertise et sont en mesure d'assumer des responsabilités en matière de vérification et de sécurité des équipements.

Par ailleurs, la loi actuelle n'a pas encore permis d'endiguer complètement le problème des fuites des produits pétroliers. Tout en reconnaissant que des progrès sensibles ont été accomplis dans ce domaine, le ministère des Ressources naturelles estime qu'une portion encore importante du parc d'équipements pétroliers québécois n'est toujours pas étanche. On évalue à plusieurs millions de dollars les déboursés occasionnés par les bris d'équipements prématurés, les pertes de produits, les coûts de décontamination, les blessures corporelles et les évacuations de populations survenant lors de fuites importantes. Seulement sur le territoire de la ville de Montréal, une trentaine d'évacuations surviennent chaque année en raison de déversements ou de fuites de produits pétroliers. Une étude menée par le ministère a permis de constater que même les nouveaux équipements sont susceptibles de fuir, dans les premières années, en raison d'une mauvaise installation. La malfaçon et le non-respect des normes d'utilisation auraient pour conséquence de réduire de façon très sensible l'espérance de vie des nouveaux équipements pétroliers de remplacement. Or, ces produits constituent un danger potentiel pour la population et une menace pour l'environnement en raison des risques d'incendie liés à leur inflammabilité et des impacts environnementaux causés par les fuites.

Parce qu'ils les côtoient presque quotidiennement, les gens finissent par oublier que ces produits sont dangereux et qu'ils peuvent présenter des risques pour la santé et l'environnement. À titre d'exemple, un seul litre d'essence suffit pour contaminer et rendre impropre à la consommation humaine 1 000 000 de litres d'eau. Il n'est donc pas étonnant de constater que les hydrocarbures soient à l'origine d'une grande quantité des cas de contamination portés à l'attention du gouvernement du Québec. Les risques associés aux équipements pétroliers entraînent de plus en plus de difficultés pour les utilisateurs qui souhaitent obtenir le financement nécessaire pour leurs projets de développement.

Les objectifs de la loi. Eh bien, les modifications que nous demandons visent d'abord à mieux cibler les activités et les équipements, qui doivent être réglementés pour assurer la sécurité des personnes et la protection de l'environnement. Deuxièmement, l'objectif est d'introduire de nouvelles approches mettant l'accent sur l'initiative privée. Le projet de loi vise à améliorer l'étanchéité des nouveaux équipements pétroliers au Québec et à réduire les fuites dans l'ensemble du parc d'équipements. Un nouveau régime de contrôle des produits et équipements forestiers, donc, sera implanté.

Le projet de loi introduit un nouveau régime de contrôle des produits et des équipements pétroliers. Contrairement à la loi actuelle, le projet de loi est axé sur la gestion des produits et équipements pétroliers présentant un certain niveau de risque plutôt que sur le contrôle d'activités de commerce liées aux produits pétroliers eux-mêmes. Les moyens de contrôle et les normes réglementaires seront modulés selon le niveau de risque lié au type et à l'usage de l'équipement.

Le projet de loi introduit une déréglementation des équipements à faible risque en abolissant toutes les obligations réglementaires qui étaient liées à l'enregistrement de ces équipements ou à la délivrance des permis. Il s'agit d'une déréglementation majeure. Les modifications proposées réduiront de façon substantielle les sites soumis à un contrôle régulatoire sous forme de permis ou de certificat. C'est dire qu'une large proportion de la clientèle actuelle ne serait plus soumise à des contrôles administratifs de l'État. Je crois que c'est tout près de 70 %. On pourra le voir plus en détail en commission parlementaire, les types de clients.

(15 h 30)

Comme c'est le cas dans presque toutes les juridictions canadiennes ou américaines, la réglementation québécoise relative aux produits pétroliers a traditionnellement été articulée autour d'un vaste système de contrôle et de surveillance assumé par l'État. Toutefois, les objectifs de sécurité et de protection de l'environnement sous-jacents à cette volonté gouvernementale ne doivent pas être confondus avec les moyens de contrôle mis en place. Une réglementation intelligente et qui n'impose pas de fardeau institutionnel aux citoyens est celle qui favorise la mise en place de moyens plus souples et moins coûteux de réaliser les mêmes objectifs. C'est dans cette voie que s'est engagée la réflexion qui a mené aux modifications présentées aujourd'hui.

Le projet de loi vise en outre à reconnaître un régime de vérification des équipements à haut niveau de risque par des intervenants du privé. Plusieurs de ces intervenants sont en mesure d'évaluer et d'attester de la qualité des installations. Le régime de vérification ne peut que bonifier les décisions de délivrer ou non les permis d'utilisation des équipements pétroliers.

En marge de ce régime de vérification, le projet de loi reconnaît aussi la valeur des vérifications que pourront effectuer eux-mêmes les titulaires de permis. Ce n'est pas nouveau comme mesure. Je référerais mes collègues de l'Assemblée nationale à l'accréditation de certains techniciens dans des garages qui comportent de nombreuses flottes soit de camions, d'autobus, etc.

Afin de donner plus de souplesse et de s'adapter plus rapidement au développement technologique, le projet de loi permet les méthodes de conception et l'utilisation de matériaux ou d'équipements différents de ce qui est prévu au règlement en autant que la sécurité du public soit adéquatement assurée.

Par ailleurs, le projet de loi permettra également d'approuver des programmes privés de vérification, reconnaissant ainsi l'expertise que possèdent certaines entreprises pour gérer adéquatement leurs équipements pétroliers.

Le projet de loi nous permet aussi d'éliminer un certain nombre de dédoublements ou de chevauchements avec d'autres organismes gouvernementaux. Le projet de loi, enfin, bonifie également le régime des sanctions pénales et administratives. Et présentement, le MRN régit, croyez-le ou non, 112 000 réservoirs sur plus de 57 000 sites.

Avec les modifications proposées dans le projet de loi, environ 40 000 de ces sites ne seront plus soumis à des contrôles administratifs directs de l'État tout en étant cependant soumis aux dispositions générales de la loi.

Les provinces ou les États avoisinant le Québec possèdent un encadrement juridique à l'égard des produits et des équipements pétroliers. Ils sont également aux prises avec la problématique des fuites. Le projet de modification de la loi s'inscrit donc dans les grandes tendances observées dans les autres régimes.

En conclusion, M. le Président – je sais que c'est un projet de loi technique, bien sûr – nous croyons que les intervenants du secteur privé doivent se voir accorder une plus grande latitude à l'égard des matières pour lesquelles ils ont développé une expertise et pour lesquelles l'État n'a plus à intervenir directement.

De plus, la protection de l'environnement et la sécurité publique, au coeur de nos préoccupations, seront assurées par les normes environnementales existantes et dans le cadre de ce nouveau régime. C'est pourquoi j'invite tous les membres de cette Chambre, bien sûr, à adopter le principe de ce projet de loi qui, je le répète, comporte énormément de technicalités, mais qui garde toujours l'objectif sur la sécurité des gens. Et c'est une volonté, je crois, quand on regarde ce qui s'est passé au Sommet économique, de déréglementation tout en responsabilisant les gens. Donc, je suis convaincu que les gens de cette Chambre, tous les parlementaires, adopteront à l'unanimité le principe de ce projet de loi, et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État aux Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Laurent. M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Dans ma responsabilité de porte-parole de l'opposition officielle en matière d'énergie, je prends la parole dans le cadre de ce débat, et ce, bien sûr au nom de ma formation politique.

Le projet de loi qui a été déposé, le 8 mai dernier, par le ministre d'État aux Ressources naturelles, c'est un projet de loi qui vise à remplacer les chapitres I, II et III de la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers. On se rappellera également qu'à la fin de 1996, dans le cadre de l'adoption de la Régie de l'énergie, cette même loi avait été modifiée afin de mieux contrer ce qu'on appelait à l'époque la «guerre de l'essence». Bien sûr, quand on aura l'occasion, en commission parlementaire, on pourra échanger plus longuement sur le sujet, également sur d'autres questions qu'on posera au ministre lorsque nous discuterons de ce projet de loi article par article.

Au cours des derniers jours, M. le Président, j'ai mené mes propres consultations auprès des principaux groupes concernés. Certains d'entre eux ont d'ailleurs manifesté le désir de se faire entendre en commission parlementaire. Dans un premier temps, les groupes consultés m'ont indiqué que cette pièce législative avait l'avantage de moderniser la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers. Tel que l'indiquait le ministre, c'est une loi qui est en vigueur depuis de nombreuses années, donc il est normal qu'occasionnellement nous la révisions. Et, dans un souci de déréglementation, cette loi-là s'appliquait dans les objectifs que nous poursuivons.

D'autre part, ils sont d'avis que les modifications proposées dans le projet de loi sont d'ordre général, mais que les véritables changements se retrouvent dans la réglementation à venir. Alors, M. le Président, en conséquence, je crois que l'étude du projet de loi n° 119 serait grandement facilitée si tous les parlementaires membres de cette commission avaient entre les mains ce projet de règlement. Je pense que ça faciliterait le travail que nous avons à faire.

Parmi les irritants qui ont été soulevés durant ma consultation, M. le Président – il faut ici préciser que les groupes sont actuellement affairés à produire une étude en profondeur du projet de loi du ministre – figurent, bien sûr, l'augmentation des amendes de même que la manière d'établir une infraction.

Je termine tout simplement ici mes remarques en rappelant au ministre d'État des Ressources naturelles la nécessité d'entendre, comme ils le demandent d'ailleurs, les principaux intervenants concernés. Après la tenue de cet exercice, l'opposition officielle procédera à l'étude détaillée en offrant toute sa collaboration et en tentant de bonifier cette pièce législative, si cela est nécessaire, à la lumière des échanges lors d'une consultation sur invitation. Ceci termine mes remarques, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie beaucoup, M. le député de Saint-Laurent. M. le ministre d'État des Ressources naturelles, je vous cède la parole.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Oui, en guise de réplique, je voudrais tout simplement offrir, comme à l'habitude, à mon collègue, tous nos spécialistes, tous nos juristes et qu'il ait toute l'information, parce que je pense que, dans ce genre de loi là, on a avantage, de part et d'autre, pour commencer l'étude article par article, à avoir toutes les informations, ce qui facilite bien souvent l'étude article par article parce qu'on a reçu les informations techniques. À sa convenance, dès qu'il le pourra... Il me fera plaisir même de l'offrir aux membres de la commission, des deux côtés de la Chambre, pour que les parlementaires...

Parce que c'est un projet de loi qui est assez volumineux en soi, qui déréglemente, qui innove, qui donne des responsabilités nouvelles. Et je suis passablement d'accord avec le député de Saint-Laurent, qu'on doit se préparer adéquatement. On pourra échanger sur les dates possibles de disponibilité, comme je l'ai dit. Au besoin, on verra, suite à cet échange-là, s'il devient nécessaire – je ne rejette même pas cela – qu'il y ait des consultations particulières; on s'entendra. Je pense qu'on a développé une manière de travailler, de part et d'autre, le député de Saint-Laurent et moi-même, où il y a beaucoup de transparence, beaucoup d'ouverture, et c'est dans ce sens-là que je veux continuer, dans notre secteur, en tout cas, à faire de cette façon.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Alors, ceci met fin au débat sur l'adoption du principe. Le principe du projet de loi n° 119, Loi modifiant la Loi sur l'utilisation des produits pétroliers et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 23, M. le Président.


Projet de loi n° 141


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 23, M. le ministre d'État des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi n° 141, Loi sur l'Agence de l'efficacité énergétique. M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Les choses évoluent très vite dans le secteur énergétique nord-américain. Dans ce contexte très exigeant, le gouvernement a pris les initiatives qui s'imposaient pour défendre et promouvoir les intérêts du Québec. L'une d'entre elles touchait le secteur de l'efficacité énergétique, qui a fait l'objet, comme vous le savez, de l'un des volets fondamentaux de notre politique énergétique, déposée en cette Chambre le 26 novembre dernier.

(15 h 40)

En plus de proposer la création d'une régie de l'énergie, la politique énergétique proposait la mise sur pied d'un organisme exclusivement consacré à la promotion de l'efficacité énergétique.

Je suis heureux de présenter aux membres de cette Chambre les principaux éléments du projet de loi que j'ai déposé à cet effet la semaine dernière. La promotion de l'efficacité énergétique, je tiens à le rappeler, a fait l'objet d'un consensus lors du débat public sur l'énergie. Au fil de ses 200 recommandations, la Table de consultation proposait une approche équilibrée nous permettant de relever les défis de la déréglementation et de la mondialisation des marchés, tout en tenant compte des impacts environnementaux et sociaux des questions énergétiques. La Table recommandait de fonder la politique énergétique sur la satisfaction des besoins dans une perspective de développement durable, ce concept devant englober les préoccupations économiques, sociales, environnementales ainsi que la notion d'équité.

Incidemment, permettez-moi de vous souligner que la Régie de l'énergie sera opérationnelle sous peu. Nous en avons nommé les régisseurs la semaine dernière. La mise sur pied d'un organisme consacré maintenant exclusivement à la promotion de l'efficacité énergétique donne suite à la création de la Régie et s'appuie sur les recommandations consensuelles de la Table de consultation qui a présidé au débat public sur l'énergie.

En novembre dernier, vous vous en souviendrez, j'ai rendu publique une politique ayant pour but de mettre l'énergie au service de l'ensemble des Québécois et des Québécoises, une politique élaborée dans une perspective de développement durable, une politique élaborée en vue de préparer l'avenir. Cette politique a pour objectif, premièrement, d'assurer aux citoyens et aux citoyennes du Québec les services énergétiques requis au meilleur coût possible, de renforcer et de multiplier les moyens de développement économique, de respecter les équilibres environnementaux existants et de rétablir ce qui serait déficient, de garantir également l'équité et la transparence.

Pour atteindre ces objectifs, différents moyens sont privilégiés dans la création d'une régie de l'énergie et d'une agence de l'efficacité énergétique. Comme je vous le mentionnais, la loi sur la Régie a déjà été sanctionnée en décembre dernier, et aujourd'hui nous allons de l'avant avec la création de l'Agence. M. le Président, vous comprendrez un peu ma fierté.

Avec l'Agence de l'efficacité énergétique, le Québec sera enfin véritablement outillé pour développer ses ressources énergétiques dans une perspective de développement durable. L'Agence de l'efficacité énergétique aura une double mission: assumer la promotion de l'efficacité énergétique pour toutes les formes d'énergie et dans tous les secteurs d'activité, et cela, au bénéfice de toutes les régions du Québec; mettre en oeuvre également, toujours dans une perspective de développement durable, des engagements gouvernementaux en matière d'économie d'énergie.

L'Agence se verra confier des mandats dans les cinq secteurs suivants: information et sensibilisation; identification des mesures législatives et réglementaires édictées par le gouvernement; appui à la Régie de l'énergie en matière d'efficacité énergétique; conception, administration et financement de programmes spécifiques en efficacité énergétique; et enfin, cinquièmement, soutien à la recherche et au développement en matière d'efficacité énergétique. Par ailleurs, elle agira comme guichet unique en matière d'efficacité énergétique auprès de l'administration gouvernementale.

L'Agence sera dotée d'un conseil d'administration formé de sept à 10 membres représentant les parties intéressées par la question de l'efficacité énergétique, qu'il s'agisse de fournisseurs ou de consommateurs d'énergie ou encore de gens actifs en recherche et développement.

Comme organisme public, eh bien, l'Agence de l'efficacité énergétique sera financée par des crédits gouvernementaux. Toutefois, il est possible que nous percevions une contribution spéciale auprès des distributeurs d'énergie dans le cadre d'un programme spécial d'efficacité énergétique. Il reviendrait alors au gouvernement de fixer par règlement une telle contribution.

Le dossier de l'efficacité énergétique comporte des dimensions institutionnelles importantes, et il est essentiel que ces dimensions soient prises en compte par un organisme gouvernemental habilité à prendre position au nom de toutes les composantes de la société. Et je voudrais m'expliquer là-dessus. Au cours des derniers mois, j'ai eu l'occasion de présider à quelques reprises des missions commerciales afin d'appuyer les efforts faits par l'industrie énergétique québécoise pour percer un certain nombre de marchés étrangers. C'est ainsi que je suis allé au Mexique, au Costa Rica, en Turquie et en Chine. J'ai alors pu constater, M. le Président, à quel point il était important de se situer au-dessus des intérêts particuliers de telle ou telle entreprise pour promouvoir les intérêts de toute l'industrie et, par extension, ceux de l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

L'Agence gouvernementale de l'efficacité énergétique peut être perçue comme un arbitre ou un animateur neutre capable de considérer et de promouvoir les intérêts supérieurs de la collectivité.

L'Agence devra agir en partenariat avec les individus mais aussi avec les organismes qui se sont engagés activement dans le secteur de l'efficacité énergétique. Le projet de loi contient des dispositions spécifiques en ce sens. Si je me rappelle bien, c'est l'article 17. Il est essentiel qu'il y ait concertation, engagement réciproque à faire avancer les choses. Il faut que tous tirent dans le même sens. C'est seulement à cette condition que nous pourrons obtenir des résultats à la hauteur de nos espérances. Je profite d'ailleurs de cette tribune pour inviter les principaux intervenants de même que tous les membres de cette Assemblée à collaborer très activement à la mise sur pied et au travail de l'Agence.

Par les temps qui courent, on entend souvent parler de partenariat, et ce n'est pas sans raison. Cette approche est de plus en plus intégrée dans nos pratiques parce que c'est la seule qui soit réellement prometteuse pour ce qui est de l'amélioration de l'efficacité énergétique, certes, mais aussi en matière de développement économique régional.

Le programme PRIME et les projets que nous avons amorcés dans le secteur du transport lourd sont de bons exemples. Ce sont aussi de bons modèles de contribution à la stimulation de l'industrie de l'efficacité énergétique québécoise. Le programme PRIME, ou Programme résidentiel d'intervention et d'investissement en matière énergétique, a été lancé à l'occasion du Sommet sur l'économie et l'emploi. C'est un programme qui vise à stimuler les investissements des propriétaires occupants du secteur résidentiel dans les produits et services qui favorisent une diminution de leur facture énergétique. PRIME touche l'ensemble des composantes de la consommation énergétique résidentielle, soit l'enveloppe thermique, les systèmes de climatisation, de ventilation, de chauffage, les appareils électroménagers, etc. Même les comportements énergétiques des occupants d'une maison ne sont pas laissés de côté. L'automne prochain, le programme sera lancé sur une base expérimentale dans trois régions du Québec: le centre de la Mauricie, le Saguenay–Lac-Saint-Jean et Kamouraska-L'Islet.

Avant de terminer, je voudrais faire référence à l'étude sur l'industrie de l'efficacité énergique, réalisée il y a deux ans, à notre demande, par l'AQME, l'Association québécoise de la maîtrise des énergies. Je voudrais attirer votre attention sur deux faits que cette étude a fait ressortir. Tout d'abord, la consommation annuelle d'énergie se chiffre, au Québec, à 17 000 000 000 $, et il serait possible de réduire cette facture de 2 500 000 000 $ sur une base récurrente. Ce potentiel d'efficacité énergétique représente des milliards d'investissement. L'efficacité énergétique est un secteur qui génère des emplois. On a parfois tendance à l'oublier parce qu'il se présente sous la forme d'une foule de petits projets, qu'il fait appel aussi à une grande variété de produits ou de services. Mais, quand on les additionne tous, force nous est de reconnaître que l'efficacité énergétique contribue de façon significative aux économies régionales et que cela est susceptible de s'accroître.

D'ailleurs, seulement dans la construction – je sais que le député de Saint-Laurent s'y connaît autant que moi – on dit maintenant que la rénovation est de beaucoup supérieure à la construction en matière de création d'emplois, et ça, c'est un fait. En se basant sur des méthodes nouvelles d'efficacité énergétique avec des programmes d'efficacité énergétique, on aide la rénovation de l'enveloppe thermique, on aide donc la construction, on aide donc à créer de l'emploi. De fait, le domaine de l'efficacité énergétique est un secteur d'activité où beaucoup de choses sont encore possibles. Nous pouvons développer dans ce domaine une expertise aussi enviable que celle dont nous disposons en matière de production d'électricité, de transport et de distribution de l'électricité; il suffit que nous osions investir ce champ de manière encore plus résolue qu'auparavant. Je suis confiant que, tous ensemble, nous saurons le reconnaître en votant pour l'adoption du principe de cette loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre d'État des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Saint-Laurent. M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci beaucoup, M. le Président. Le projet de loi qui est devant nous, qui fait l'objet de principe, son objectif, c'est d'instituer l'Agence d'efficacité énergétique dont les affaires seront, bien sûr, administrées par un conseil d'administration d'au moins sept personnes et d'au plus 10 qui seront nommées par le gouvernement et sous la responsabilité d'un directeur général.

(15 h 50)

Définir la mission de l'Agence. C'est d'abord, il faut se rappeler, d'informer et de sensibiliser les consommateurs, de fournir un soutien technique à la recherche et au développement, de concevoir, d'administrer des programmes et de donner des avis en matière d'efficacité énergétique. La loi prévoit également, M. le Président, que l'Agence pourra s'associer à un partenaire qui oeuvre dans le domaine, permettra également à l'Agence de consentir un prêt ou même de donner une subvention dans le cadre d'un programme ou de fournir un soutien financier à la recherche et au développement, que le gouvernement peut imposer une contribution aux distributeurs d'énergie dans le cadre d'un programme spécial d'efficacité énergétique. La création de l'Agence énergétique, c'est l'une des recommandations du rapport de la Table de consultation du débat public sur l'énergie et qui a été inscrite dans la nouvelle politique énergétique qui a été déposée à la fin de 1996.

Il est important, M. le Président, de se rappeler que l'ensemble des experts s'étaient alors entendus sur le fait que le développement durable, qui est au coeur de la nouvelle politique, passe par l'efficacité énergétique. Il faut toutefois bien comprendre que cette Agence se substituera à l'actuelle Direction de l'efficacité énergétique du ministère des Ressources naturelles. De plus, les mandats qui lui seront confiés ne seront que complémentaires aux responsabilités d'Hydro-Québec en cette matière.

Son financement, nommément, M. le Président, sera assuré par une redevance supplémentaire sur les ventes d'énergie perçues par la Régie qui a été créée il y a quelques mois et qui entrera en fonction tout prochainement. Certains estiment, M. le Président, que les sommes récoltées pourraient s'élever entre 20 000 000 $ et 30 000 000 $. Tel que le ministre l'a souligné, il est important de rappeler que l'Agence aura la responsabilité du programme PRIME.

Les organismes environnementaux sont également, M. le Président, d'accord avec la mise en place de cette Agence. L'Association québécoise pour la maîtrise de l'énergie estime également que c'est une bonne chose, dans la mesure où cela va développer et soutenir l'intérêt des gestionnaires étatiques et privés à l'efficacité énergétique.

Je profite de l'occasion, M. le Président, pour rappeler que, dans les trois jours que nous avons eus en commission parlementaire, les gens d'Hydro-Québec, à des questions que nous leur avons posées – parce qu'un des sujets à l'ordre du jour était justement la recherche et le développement fait par Hydro-Québec – le président, M. Caillé, a reconnu d'emblée que les efforts de recherche et de développement dans l'efficacité énergétique n'étaient pas à la mesure des espoirs et des attentes que nous avons puis des besoins de la collectivité. Il a reconnu qu'il y avait de l'ordre à mettre là-dedans et, dans certains cas, à prioriser certaines recherches. Alors, dans ce sens-là, vous comprendrez, M. le Président, que nous sommes anxieux de voir ces paroles transformées en actions et en gestes concrets.

Alors, M. le Président, rapidement, d'abord ça va se substituer à l'actuelle Direction de l'efficacité énergétique. Comme elle bénéficiera d'un budget qui est plus élevé – le budget à l'heure actuelle est 2 100 000 $ et son budget prévu est de 3 500 000 $ – il peut y avoir lieu de penser qu'il y aura du personnel supplémentaire d'embauché. Par ailleurs, la mise de l'avant de nouveaux programmes d'efficacité énergétique peut contribuer à la création de nouveaux emplois. Et ça aussi, c'est important.

Le ministre soulignait tantôt l'aspect de la rénovation. M. le Président, non seulement en isolant mieux les maisons, mais avec les fenêtres thermiques, les matériaux de construction, aujourd'hui on peut capter l'énergie solaire. Il y a un tas d'aspects, M. le Président, qui seraient extrêmement bénéfiques pour l'ensemble de la collectivité québécoise et il nous tarde de voir des travaux effectués dans ce sens-là.

Cette Agence, je l'ai dit, sera financée par une redevance supplémentaire perçue par la nouvelle Régie qui a été créée. On peut penser que cette nouvelle taxe indirecte sera assumée en tout ou en partie par les contribuables québécois. Nous aurons l'occasion d'en échanger en commission. De plus, on n'écarte pas la possibilité de demander une contribution spéciale aux distributeurs d'énergie pour financer des programmes spécifiques d'économie d'énergie.

Alors, vous comprendrez, M. le Président, que, devant un projet comme celui-là, c'est avec empressement que nous contribuerons aux travaux article par article pour, s'il y a lieu, bonifier ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Laurent. Y a-t-il d'autres interventions sur ce projet de loi? Il n'y a plus d'autres interventions, alors...

M. Chevrette: Droit de réplique d'une minute.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...je vais céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles pour son droit de réplique.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais faire la même offre que j'ai faite pour l'autre loi. Si jamais l'opposition était intéressée à avoir ce qu'on appelle un «briefing» sur la loi, techniquement, à n'importe quel temps, nous serons disponibles. On légifère dans le sens des consensus, les deux lois dont nous venons de discuter. Il est rare, peut-être, de voir des députés des deux côtés de la Chambre... mais effectivement on sait très bien que c'est les industries ou bien que c'est les groupes qui sont désireux d'avoir des outils de développement. Donc, je fais la même offre et j'espère qu'on pourra adopter ce projet de loi le plus rapidement possible.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le ministre des Ressources naturelles. Le principe du projet de loi n° 141, Loi sur l'Agence de l'efficacité énergétique, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 11, M. le Président.


Projet de loi n° 111


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 11, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 13 mai dernier sur l'adoption du principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur les forêts. Le dernier intervenant était M. le député de Joliette. Alors, je vais céder la parole maintenant à M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Dans le cadre du projet de loi n° 111, la loi qui modifie la Loi sur les forêts, qui a été présenté par le député de Joliette, ministre responsable de l'énergie et des ressources, la semaine dernière, comme vous l'avez mentionné...

C'est un projet de loi que l'industrie, le ministre et les différents intervenants au niveau de la ressource forestière, je ne vous dirai pas souhaitaient, mais qui probablement était devenu nécessaire pour plusieurs raisons, dont une, le projet de loi pourra permettre au ministre d'intervenir dans une situation qui perdure, soit les surplus de copeaux, qui est une situation au Québec qu'on a vécue dans les dernières années à des périodes différentes, des surplus de copeaux exagérés, ce qui est considéré comme inacceptable d'abord pour l'industrie, parce que ça crée des problèmes à certaines petites scieries, l'accumulation de ces surplus de copeaux, pour la simple raison que ça les prive d'apports financiers importants considérés pour la rentabilité de chacune de ces entreprises.

Qu'on débatte de ce projet de loi à nouveau cette semaine dans le cadre de la Semaine de l'arbre et de la forêt, je trouve ça intéressant, d'une part. D'autre part, comme je le mentionnais à l'occasion de la motion qui a été présentée hier dans cette Assemblée dans le cadre, à nouveau, de la Semaine de l'arbre et de la forêt, la forêt, au Québec, a permis aux Québécois et aux Québécoises depuis des dizaines et des dizaines d'années de se développer, et surtout dans les régions au Québec. Dans la province de Québec, je pense que l'industrie forestière est très développée, florissante dans la plupart de nos régions, et c'est un apport économique pour l'emploi, surtout au niveau des petites localités, et c'est l'histoire du Québec qui le démontre.

(16 heures)

Ce projet de loi, on pourrait le classer en cinq parties, M. le Président. Projet de loi qui donne des pouvoirs au ministre, il faut le reconnaître, qui donne certains pouvoirs au ministre, mais nous allons admettre que c'est des pouvoirs devenus nécessaires, toujours en considérant que le ministre va les utiliser pour régulariser certaines situations. On ne connaît pas les règlements qui vont guider le ministre encore, mais j'ose croire qu'en commission parlementaire, à l'étude article par article du projet de loi, le ministre aura la chance justement de préciser; s'il connaît déjà la réglementation, de nous en informer ou de préciser les orientations qu'il voudrait donner au contenu de la réglementation.

Comme je le mentionnais après avoir pris connaissance de ce projet de loi, nous constatons que les mesures proposées sont intéressantes si elles sont appliquées de façon rigoureuse, pour mieux comprendre le projet de loi. Et je remercie ici le ministre de nous avoir permis, avec des gens de son cabinet et de son ministère, de faire une première analyse du projet de loi pour mieux le comprendre, ce qui nous permet aujourd'hui de dire que, oui, nous allons collaborer pour permettre au ministre de l'Énergie et des Ressources du Québec d'avoir ce pouvoir, d'abord, un, comme je le mentionnais, de mieux contrôler les volumes de coupe d'une région à une autre et d'un industriel à l'autre et, d'autre part, de corriger certaines lacunes sur le plan administratif des montants payés par l'industrie en guise de compensation de droits de coupe.

Donc, M. le Président, l'article 8 introduit les articles 73.3.1 et 73.3.3 qui spécifient les modalités suivant lesquelles le ministre procède à l'ajustement des montants payés par les bénéficiaires en fonction des droits payables par ces derniers et prévoit des dispositions relatives au paiement des intérêts sur des soldes impayés et sur des montants encaissés en trop. Donc, ça vient régulariser ou corriger une lacune sur le plan administratif, et probablement toute l'industrie ne s'en trouvera que mieux servie.

Il y a aussi d'autres passages de ce projet de loi. Donc, le Fonds forestier, je pense que c'est une correction... Le Fonds forestier a été institué l'an passé à peu près à la même date, au moment où on mettait en place un projet de loi qui permettait au ministère de créer les agences de développement de forêts privées et instituait le Fonds forestier. Donc, à ce moment-là, c'est une partie importante. Je pense que c'est l'article 15 qui permet au gouvernement d'autoriser le versement au Fonds d'une partie des redevances perçues des bénéficiaires de CAAF après le 31 mars 1997 – donc, c'est d'actualité, ça corrige une situation qui est très d'actualité – afin que ces sommes puissent être affectées au financement d'activités d'aménagement forestier. Notons que l'article 16 permet au ministre responsable des Forêts d'emprunter auprès de son collègue des Finances, à même le fonds de financement, des sommes pour la gestion du Fonds forestier. Ce pouvoir n'est pas extraordinaire puisqu'on le retrouve dans d'autres projets de loi.

Donc, je pense, M. le Président, sans élaborer davantage sur le contenu du projet de loi, que l'opposition officielle aura la chance en commission parlementaire – suite à l'information que nous avons déjà reçue de certains officiers du ministère, d'une part, l'analyse que nous avons faite du projet de loi – d'échanger avec certains industriels concernés de la région du Québec et surtout ceux qui vivent une problématique au niveau des surplus de copeaux, comme je le mentionnais, d'une part, et de la gestion des redevances des droits de coupe, d'autre part.

Un nouvel élément qui a été introduit dans le projet de loi, où on va devoir questionner davantage le ministre, et ça ne touche que certaines parties du Québec, soit la vente de bois sur pied, ce qu'on appelle la vente aux enchères d'une certaine partie de l'exploitation, en fait, des ressources de certaines régions du Québec, d'une part.

D'autre part, je pense qu'il y a une autre partie du projet de loi qui vient régulariser une situation qui permet aux entreprises de verser aux agences régionales – comme je le mentionnais tantôt – de mise en valeur des forêts privées une certaine somme de tous les volumes de bois coupés au Fonds forestier. Ça vient régulariser une situation qui était souhaitée depuis le Sommet sur la forêt privée, c'est des suites données au Sommet sur la forêt privée.

Donc, c'est un peu ce que touche le projet de loi n° 111, M. le Président. Nous sommes en accord avec le principe du projet de loi que nous aurons la chance de débattre en commission parlementaire dans les prochains jours. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Montmagny-L'Islet. M. le député de Pontiac veut prendre la parole. Je vous cède la parole, M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Merci, M. le Président. Comme vous le savez, M. le Président, le comté de Pontiac est un comté qui est riche en ressources forestières. C'est probablement le Pontiac et le Témiscamingue qui sont les seules régions au Québec où il reste aujourd'hui le pin blanc et le pin rouge. En plus, on est choyés, dans la région du Pontiac, dans l'Outaouais, d'avoir aussi des forêts feuillues, des forêts mixtes. Donc, ce n'est pas étonnant qu'aujourd'hui je profite de l'occasion pour intervenir sur le projet de loi n° 111.

Comme l'indiquait tantôt mon collègue le député de Montmagny-L'Islet, c'est tout à fait approprié que nous soyons aujourd'hui en train de discuter un projet de loi modifiant la Loi sur les forêts durant la Semaine de l'arbre et des forêts. M. le Président, le ministre indiquait, dans son intervention de la semaine dernière, que le projet de loi lui-même, c'est des modifications relatives aux modalités de paiement des redevances forestières au Fonds forestier, à la mesure de réduction des volumes de bois, à la vente de bois dans les réserves forestières et à la contribution des titulaires d'un permis de transformation du bois aux agences de mise en valeur des forêts privées.

Si je comprends bien, M. le Président, on veut certainement moderniser les redevances qui sont dues par les exploiteurs de la forêt vis-à-vis du ministère des Ressources naturelles et aussi optimiser l'utilisation du bois. Il semble qu'il y a des endroits, il y a des industries de sciage qui, elles, produisent énormément de copeaux, d'autres sont préoccupées de s'assurer qu'il y ait un minimum de copeaux de disponibles. Donc, à ce moment-là, le ministre veut se réserver ce privilège peut-être de favoriser, et avec raison, la performance des gens.

J'aimerais soulever peut-être un problème qui est tout à fait particulier chez nous. À vouloir contrôler la coupe pour utiliser les copeaux ou bien réduire la coupe sur la forêt publique pour donner plus de chance à la forêt privée, je pense que c'est quelque chose de louable. Mais le fait qu'on a dans notre région, et je l'ai soulevé au ministre... C'est qu'on a une usine de pâtes et papiers qui s'approvisionne à partir de la forêt publique, s'approvisionne aussi à partir de la forêt privée au Québec. Mais le fait que nous sommes le long de la frontière, elle s'approvisionne aussi dans la forêt privée en Ontario, et ça devient un problème de prix. Je pense que c'est une saine compétition, une affaire de prix.

Le problème que j'avais soulevé au ministre, c'est que, en même temps qu'il y avait une réduction des commandes de la part de l'usine, on a augmenté sur la forêt publique les approvisionnements. Donc, c'est certain que ça n'a pas pris grand temps que les producteurs forestiers de la forêt privée chez nous m'ont sensibilisé, donc j'ai sensibilisé le ministre. Donc, ça aussi, je pense que, même si ça ne fait pas partie intégrante du projet de loi, c'est quelque chose dont on voudrait s'assurer, et surtout de regarder le problème particulier. Est-ce qu'on ne crée pas une situation plus difficile pour la forêt privée québécoise si, par hasard, il y a un marché de disponible en Ontario à moindre prix? Donc, je pense que, ça, M. le Président, il faudrait y voir.

L'autre chose aussi, c'est qu'on veut tenter d'améliorer la performance, d'utiliser au maximum possible la matière première. Je veux soulever un autre problème qui est survenu chez nous. C'est dans une usine de sciage de cèdre. Il y en a très peu, d'usines de cette nature, M. le Président. Mais le problème, c'est que je pense qu'on devrait aussi, au niveau du ministère, avant d'émettre un permis à une usine... Parce que, pour le permis, tout de suite, hein, on va voir le Développement régional, on va voir les gens locaux, ils investissent des sous, même un montant assez significatif de 200 000 $ du contrat de relance de la MRC Pontiac, et on s'aperçoit aujourd'hui malheureusement qu'on a construit l'édifice, qu'on n'a pas installé l'équipement de sciage, et, à ce moment-là, il me semble que le ministère aurait certainement de s'assurer avec d'autres... Dans le cas du ministre en question, il porte deux chapeaux. Il est aussi le ministre responsable du Développement régional.

(16 h 10)

Il me semble qu'on devrait s'assurer, parce que souvent on parle d'Excelfort, à Fort-Coulonge, que c'est sur la foi d'avoir un CAAF, sur la foi d'avoir un permis de construire une usine que les gens locaux ont mis des sous. La caisse populaire s'est embarquée et la MRC, et il me semble que là aussi il faudrait tenter de prévenir qu'il y ait des situations comme on a là. C'est que, dans le moment, on cherche de toutes façons d'être capable de faire opérer l'usine qui n'a pas opéré après que tous les sous ont été donnés; et on s'attendait de créer 70 emplois! Les gens aujourd'hui le cherchent. Donc, je crois que ça fait tout partie, ça, de la Loi sur les forêts, et qu'on devrait s'assurer qu'en rendant ça plus moderne sur les redevances, en s'assurant... de donner une poignée... Parce qu'on se sert souvent du fait qu'on a un permis d'usine de sciage, du fait qu'on a un CAAF, et à ce moment-là les gens disent: Aïe! C'est quelque chose de bien. On se sert de ça pour inciter les gens à embarquer.

Donc, M. le Président, sur ça, je vais... Comme le disait mon collègue, je pense que, chez nous, la forêt, c'est quelque chose d'extrêmement important et je pense qu'on cherche tous les moyens possibles... Et j'en ai déjà parlé au ministre, qu'une chose qu'on devrait faire... C'est qu'on parle toujours de deux régions, au Québec, et un des problèmes, c'est qu'il va falloir trouver une façon pour qu'on puisse faire la transformation, la deuxième et la troisième, en région, parce que souvent, pour des raisons quelconques, des municipalités sont mieux organisées, ont plus de sous à offrir à des entreprises pour aller s'établir là. Mais on va chercher la matière première en région et on va la transformer dans d'autres régions, et malheureusement les gens dans les régions commencent de plus en plus à vouloir dire au gouvernement: Regardez! Ça nous appartient. On vient chercher ça chez nous, mais on crée des emplois à d'autres endroits.

Donc, j'espère que c'est juste un début de modification de la Loi sur les forêts qui pourrait nous amener à s'assurer que toutes les régions, et surtout les régions du Québec où la matière première est située, puissent bénéficier au maximum de la transformation de cette matière première. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Pontiac. Pour terminer, je vais céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles pour sa réplique. M. le ministre.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier les membres de l'opposition également pour l'appui au projet de loi, et je pense bien qu'on se donne, en tout cas, des outils additionnels. Je pense qu'on franchit un pas, effectivement, et c'est discuté avec les entreprises, avec l'industrie en général. Mais je me montre même ouvert à ce que le député de Pontiac a dit, parce qu'on est souvent victimes précisément, et je suis d'accord avec lui, et il sait très bien que je suis franc, direct. Quand on se fait avoir de bonne foi pour aider une région, on n'est pas content. Ça, c'est clair. Et je suis ouvert à des discussions en commission parlementaire pour se donner les moyens, précisément. Quand on permet à du monde d'investir dans un milieu, on n'abuse pas de la bonne foi des gens. Moi, je suis entièrement d'accord avec vous.

Vous trouvez donc un allié face à vous en ma personne, responsable des Ressources naturelles, et je vais tout faire, à part ça, pour que ce projet voie le jour – parce que c'est 70 emplois chez vous – et soyez assuré que vous avez un collaborateur dans ce dossier. J'ai fait des mains et des pieds. On ne réussit pas toujours. Puis il y a des gens qu'il va falloir qu'ils comprennent qu'on n'abuse pas nécessairement de la confiance des gens. Ça me fatigue, moi, ça, et un chat échaudé craint l'eau froide. Ce n'est pas parce qu'on ne voulait pas. L'objectif fondamental, c'était d'aider la région. Il n'y a aucune mauvaise foi dans ça. Il n'y a personne de notre côté puis ni de votre côté, je suis convaincu, des gens du milieu. Il y a quelqu'un qui va devoir s'expliquer à un moment donné, parce que ce n'est pas vrai qu'on va laisser tomber un projet qui pouvait être rentable, qui pouvait être viable, puis qui est parti pourtant avec des coûts modestes pour grimper peut-être trop rapidement aussi. On sait ce que représente, et le député de Pontiac le sait, la valeur d'un CAAF. Ce n'est pas de monter un projet pour venir chercher un CAAF et pour vendre le CAAF. La ressource, c'est pour créer de l'emploi dans le milieu. Je partage à 150 % ce qu'il a dit et je me montrerai ouvert en temps et lieu pour trouver les solutions. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Le principe du projet de loi n° 111, Loi modifiant la Loi sur les forêts, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 6, M. le Président.


Projet de loi n° 105


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 6, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 1er mai 1997 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement.

Le dernier intervenant a été M. le député de Vimont. Alors, je serais prêt à reconnaître un prochain intervenant, et c'est M. le député de Laurier-Dorion.

M. Sirros: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est bien ça. Alors, je vous cède la parole, M. le député.


M. Christos Sirros

M. Sirros: Merci, M. le Président. Ça serait ce qu'on pourrait qualifier d'une intervention éclair, étant donné que le projet de loi comporte deux articles, un projet de loi qui nous trouve d'accord avec le principe. Alors, on se lève pour dire: Effectivement, nous sommes d'accord avec le principe.

C'est un projet de loi qui introduit la notion d'une obligation pour les industries et les municipalités également qui n'ont pas soumis de plan d'assainissement dans un cadre précis, qui, jusqu'à maintenant, n'avaient pas à verser des frais annuels, à devoir le faire, parce que, jusque-là, c'étaient les entreprises qui avaient effectivement agi en bons citoyens corporatifs qui versaient des frais une fois qu'une attestation de leur programme d'assainissement avait été reconnue par le ministère de l'Environnement, et ils payaient des frais annuels pour cette attestation, tandis que ceux qui n'avaient pas encore soumis un plan d'assainissement pouvaient s'en remettre au fait qu'il n'y avait rien de prévu dans la loi pour renforcer le principe du pollueur-payeur, M. le Président.

Alors, ce projet de loi nous trouve d'accord. Je dois pourtant soulever le contexte dans lequel ce nouveau règlement qui serait adopté par le ministère de l'Environnement pour prévoir les différentes catégories de sources de pollution, de territoires sur lesquels on va agir, etc., ça va être effectivement un règlement de plus, M. le Président. Étant donné que nous sommes dans le domaine de la protection de l'environnement, nous estimons que c'est quelque chose d'acceptable, mais il faut quand même le situer dans le contexte où le ministère de l'Environnement, qui adopte des règlements en plus, donc doit veiller à leur mise en application pour que ce soit efficace, se trouve à être tellement réduit dans ses dépenses, dans ses fonds de fonctionnement, M. le Président, qu'on peut se poser la question quant à l'efficacité et la possibilité d'être efficace qu'aura le ministère de l'Environnement quant à l'application de ce nouveau règlement qu'on adopte.

D'ailleurs, le dernier point de mon intervention, ce serait de dire que nous ne pourrons pas vraiment juger la portée qu'aura ce projet de loi, dont le principe nous trouve d'accord, jusqu'à ce qu'on puisse voir le règlement qui va l'accompagner. C'est effectivement le règlement qui va nous indiquer les différentes catégories de sources de contamination qui seront ciblées, qui va nous indiquer les différents barèmes qui seront applicables à ceux qui, jusqu'à maintenant, ne payaient pas. Donc, il faut voir, par le dépôt du règlement, quelles seront les priorités retenues, parce que, effectivement, il va falloir retenir des priorités, étant donné le contexte de ressources limitées dans lequel le ministère de l'Environnement se trouve, des ressources dramatiquement limitées, ce qui a même forcé le ministre de l'Environnement à faire un peu de patinage artistique en parlant de la créativité nécessaire pour que ces coupures soient vues comme des coupures salutaires, M. le Président, dans son ministère.

Ça étant dit, le principe nous trouve d'accord. Ça vient renforcer, comme je disais, le principe qu'on avait adopté il y a déjà plusieurs années, quand on était au pouvoir, de pollueur-payeur. Ça vient couvrir un trou, en quelque sorte, qui était là sur l'aspect de l'équité par rapport à ceux qui agissaient en bons citoyens corporatifs et ceux qui faisaient fi de leur obligation de dépolluer, et c'était effectivement, comme le ministre l'a dit, un principe qui était devenu dépollueur-payeur, tandis que ceux qui polluaient ne payaient pas.

(16 h 20)

Alors, ça étant dit, M. le Président, cette intervention se voulait tout simplement pour marquer le point que nous sommes d'accord avec le principe, que nous espérons voir le règlement qui, si je comprends bien, sera déposé en commission parlementaire pour qu'on puisse l'examiner avec le projet de loi article par article. Ce serait effectivement même intéressant de l'avoir un peu plus tôt, si possible, pour que les entreprises puis les personnes concernées par l'étendue ou la portée du règlement puissent en être saisies, puissent faire leurs représentations pour qu'on puisse ensemble juger de la portée réelle qu'aura ce principe que nous adoptons ici aujourd'hui, M. le Président. Merci.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Laurier-Dorion. Il n'y a plus d'autres intervenants? Alors, je vais mettre aux voix le principe. Le principe du projet de loi n° 105, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des transports et de l'environnement

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des transports et de l'environnement pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants avant de procéder et, à ce moment-là, je vous appellerai l'article 9.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien. Alors, nous allons suspendre quelques instants avant d'entreprendre l'étude de l'article 9.

(Suspension de la séance à 16 h 22)

(Reprise à 16 h 23)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. L'Assemblée reprend ses travaux. J'inviterais M. le leader du gouvernement à nous indiquer l'affaire à l'ordre du jour.

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. L'article 9, M. le Président.


Projet de loi n° 108


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 9, M. le ministre délégué au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le ministre.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Il me fait plaisir effectivement de soumettre à l'Assemblée pour qu'elle en adopte le principe le projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Il s'agit d'une autre de ces pièces législatives dont l'objectif est justement de donner suite à un certain nombre de décisions antérieures contenues, par exemple, à des discours du budget ou à des déclarations ministérielles. Donc, l'effet d'un tel projet de loi est de donner, d'une certaine façon, la sanction légale aux décisions antérieurement prises.

Ce projet de loi, donc, a pour objet plus spécifique d'harmoniser la législation fiscale du Québec avec celle du fédéral. Comme vous le savez, les deux autorités fiscales essaient de faire en sorte que, le plus possible, l'encadrement législatif, en ce qui regarde les législations, soit le plus harmonisé possible de façon à faciliter le travail de tout le monde. À cet effet, le projet de loi donne donc suite aux mesures d'harmonisation prévues dans le Discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1995. D'une manière accessoire, il donne également suite à certaines mesures d'harmonisation prévues dans différents bulletins d'information émis par le ministère des Finances respectivement le 8 septembre 1995, le 26 janvier 1996 et le 24 avril de la même année.

Le projet de loi contient plusieurs mesures à caractère plus technique et modifie sept lois fiscales. Tout d'abord, le projet modifie la Loi sur la fiscalité municipale afin d'y apporter une modification de concordance découlant de changements apportés dans la Loi sur les impôts à l'égard de la notion d'exercice financier. Il modifie également la Loi sur les impôts principalement afin d'y apporter des modifications semblables à celles qui ont été apportées à la loi fédérale de l'impôt sur le revenu par divers projets de loi.

J'aborderai donc, M. le Président, à compter de maintenant, par sujets quelques-unes des règles modifiées ou introduites concernant la Loi sur les impôts. Le premier sujet traite de l'élimination de la possibilité accordée aux particuliers et à certaines entités qui exploitent une entreprise de différer l'imposition du revenu provenant de cette entreprise en choisissant un exercice financier qui ne correspond pas à l'année civile. Ce changement aura pour effet d'exiger que ces particuliers et ces entités déclarent leur revenu d'entreprise dans l'année au cours de laquelle il aura été gagné.

Un autre sujet concerne les règles applicables aux fiducies. Le projet de loi propose de modifier la Loi sur les impôts afin d'empêcher que l'utilisation de fiducies familiales ne confère des avantages fiscaux indus. Pour y arriver, la première modification proposée concerne l'élimination, à compter du 1er janvier 1999, du mécanisme permettant à une fiducie familiale de différer l'application de la règle concernant l'aliénation réputée de ses biens à tous les 21 ans. Ainsi, la Loi sur les impôts prévoit, de façon générale, que l'actif d'une fiducie est réputé faire l'objet d'une aliénation à tous les 21 ans. Cette mesure a été introduite dans la loi lors de la mise en place du régime d'imposition des gains en capital, en 1972. Alors, cette mesure vise donc à empêcher qu'une fiducie soit utilisée par des particuliers pour reporter indéfiniment l'imposition des gains en capital courus sur leurs biens.

L'application de cette règle peut néanmoins être retardée si la fiducie se prévaut du choix prévu à cet effet dans la législation jusqu'à son année d'imposition, qui commence après le jour où elle ne comptera plus aucun bénéficiaire exempté, soit généralement un proche qui n'est pas séparé de l'auteur de la fiducie par plus d'une génération. Ainsi, la possibilité de proroger par choix spécial la date d'aliénation réputée des biens d'une fiducie est donc supprimée, dans le cadre de ce projet de loi, à compter du 1er janvier 1999. Les fiducies qui, avant cette date, auront fait le choix prévu pour reporter l'imposition des gains en capital seront réputées avoir aliéné les biens de la fiducie à leur juste valeur marchande à cette date. Une autre modification proposée à l'égard des fiducies concerne l'élimination des règles portant sur l'attribution du revenu d'une fiducie à un bénéficiaire privilégié, sauf dans les cas où un tel bénéficiaire est atteint d'une déficience mentale ou physique grave et prolongée.

(16 h 30)

Le troisième sujet vise l'obligation faite à une société exonérée d'impôts constituée exclusivement pour la réalisation de recherche scientifique et de développement expérimental de produire un formulaire dans lequel elle doit notamment faire état de ses travaux et de ses dépenses de recherche et de développement. Un autre sujet dont je désire vous faire part a trait aux règles applicables à l'égard de la production de la déclaration fiscale d'un particulier en affaires au cours d'une année, et de son conjoint, afin de prolonger le délai de production du 30 avril de l'année suivante au 15 juin de cette année suivante. En raison de cette prolongation, une nouvelle définition est introduite dans la Loi sur les impôts, dont le but est de simplifier, dans diverses dispositions de la Loi, la manière d'effectuer le renvoi à la date d'échéance de production de la déclaration fiscale de tout contribuable.

De plus, le projet de loi modifie la Loi sur le ministère du Revenu, d'une part, pour tenir compte de l'abrogation de la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux et, d'autre part, afin d'étendre les règles relatives à la responsabilité solidaire en matière de retenues à la source à quiconque a le pouvoir d'autoriser pour une personne le paiement d'un montant assujetti à une retenue à la source ou de faire en sorte qu'un tel paiement soit effectué par cette personne ou pour son compte.

En terminant, la Loi sur les impôts et d'autres lois fiscales sont également modifiées afin d'y apporter diverses modifications, y compris des modifications de concordance et de terminologie. En conclusion, je vous ferai grâce de l'énumération des autres sujets abordés par le projet de loi n° 108, puisque les notes explicatives du projet de loi en font état et que nous aurons l'occasion certainement de l'examiner plus en détail à l'occasion de la prochaine commission parlementaire. Alors, j'invite donc les membres de l'Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 108. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais ajouter quelques commentaires sur le débat de principe du projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal, the Bill 108, An Act to amend the Taxation Act and other legislative provisions of a fiscal nature.

Comme le ministre l'a déjà expliqué, effectivement, quand on voit la première note explicative, il parle de l'harmonisation avec les lois fiscales, la législation fiscale d'Ottawa. Moi, j'ai hâte d'avoir le temps, quand le ministre proposera les mesures qui effectivement feront l'harmonisation avec Ottawa... Mais c'est Ottawa qui s'harmonise avec nous. Parce que souvent je vois, particulièrement depuis les derniers 12 mois, qu'on arrive avec des projets qui suivent l'initiative du fédéral, qui n'est pas nécessairement bonne ou mauvaise, mais je pense que le Québec doit prendre le leadership dans ces affaires-là. Mais, comme j'ai dit souvent au ministre délégué au Revenu, je suis encouragé avec le nombre de projets de loi qui arrivent ici, à cette Assemblée, qui à un titre... c'est de l'harmonisation avec le fédéral. Avec ça, je le félicite et je vois de plus en plus les députés qui étaient plus séparatistes avant qui commencent à être de plus en plus fédéralistes avec ces perspectives.

Mais l'autre commentaire que j'ai besoin de mentionner, M. le Président, c'est que c'est un projet de loi qui met en vigueur plusieurs choses qui viennent du discours du budget. Mais ça ne vient pas du discours du budget de cette année, que nous avons tous étudié ici, ça ne vient pas du discours du budget de l'année passée; ça vient du discours du budget de 1995, deux budgets passés. Avec ça, je réitère mes commentaires que j'ai déjà mentionnés au ministre délégué, que c'est difficile de continuer à étudier les projets de loi qui suivent un budget, mais suivent un budget déjà changé, et déjà changé deux fois à cause que c'est deux budgets passés. Mais, en tout cas, nous allons faire notre possible pendant l'étude détaillée de ce projet de loi.

Je peux dire aussi déjà, parce que je sais que le ministre délégué essaie de dire qu'effectivement le projet de loi va mettre en vigueur les choses législativement, que, dans plusieurs cas, elles sont déjà en vigueur. Je ne veux pas répéter tous mes discours que j'ai déjà passés ici, mais ça ne m'empêche pas, malgré que plusieurs mesures soient en vigueur, de questionner ces mesures, d'être contre plusieurs de ces mesures, de questionner comment ça marche. J'ai le droit. Si c'est un projet de loi déposé à l'Assemblée nationale, j'ai le droit de questionner, j'ai le droit d'assurer que la population comprend ce qui se passe, malgré que j'accepte, malgré le fait que, dans plusieurs articles de la loi ou presque la totalité, c'est déjà en vigueur. Mais je pense que ça va être irresponsable et je pense que toute la Chambre, ici, va être d'accord avec moi que ça va être irresponsable si on ne questionne pas, si on ne clarifie pas, si on n'essaie pas d'améliorer ce projet de loi.

M. le Président, j'ai eu la chance, comme porte-parole de l'opposition en matière de revenu, de parler avec beaucoup de fiscalistes, parce que souvent, là, on doit aller chercher leurs conseils, leur avis sur les projets de loi parce qu'ils sont complexes, ils sont lourds. Mais aussi plusieurs des fiscalistes que j'ai contactés disent que ces projets de loi sont lourds, sont compliqués. À Ottawa, les lois fiscales sont beaucoup plus simples. Ici, à Québec, elles sont lourdes, elles sont complexes.

Je ne cite pas les 153 articles de ce projet de loi; je voudrais juste citer le premier article de cette loi pour montrer l'exemple, expliquer l'exemple de cette complexité. L'article 1 de ce projet de loi n° 108 dit que l'article 220.3 de la Loi sur la fiscalité municipale (L.R.Q., chapitre F-2.1), remplacé par l'article 1 du chapitre 36 des lois de 1995 et modifié par l'article 27 du chapitre 14 des lois de 1996 et par l'article 7 du chapitre 3 des lois de 1997, est de nouveau modifié par le remplacement, dans le deuxième alinéa, d'«exercice financier, au sens de l'article 1» par «exercice financier, au sens que lui donne la partie I». Voilà un exemple d'un article assez compliqué. Vous avez besoin de sortir au moins quatre projets de loi pour savoir exactement ce que ça veut dire. Je voudrais encore une fois encourager le ministre à prendre l'initiative, que nous avons discutée aux commissions la semaine passée, de faire une réforme complète de nos lois fiscales, d'assurer que la population comprend ce que nous sommes en train de passer.

L'autre commentaire, je voudrais juste mentionner que, comme porte-parole de l'opposition, et peut-être que ce n'est pas la tradition dans les autres ministères, mais j'ai toujours demandé d'avoir les documents utilisés par le ministère avant qu'on commence l'étude de ce projet de loi. J'ai juste reçu une note qu'effectivement je vais avoir ça aujourd'hui, mais, au moment où on parle, je n'ai pas reçu ça encore. Moi, comme le ministre prend ses responsabilités d'une façon sérieuse, je prends, comme porte-parole de l'opposition, l'avenir très au sérieux et je voudrais prendre le temps d'assurer qu'on comprend tous les articles du projet de loi. J'ai besoin juste de mentionner encore une fois que, malgré les bonnes intentions du ministre délégué sur ça, je n'ai pas reçu la documentation telle que promise.

Il y a quelques remarques que je voudrais juste mentionner sur le principe, parce que je vais avoir plusieurs questions, une fois qu'on commencera l'étude article par article. Un, je ne suis pas contre l'idée que le gouvernement doit avoir les outils pour faire son travail. Je comprends pourquoi. Il me semble que c'est logique de changer le calendrier, d'assurer que c'est plus logique pour les raisons d'impôts. Mais je voudrais assurer qu'il n'y a pas un impact financier énorme, particulièrement sur les travailleurs autonomes. Je voudrais assurer que nous ne sommes pas en train d'augmenter les difficultés, la paperasse pour les travailleurs autonomes. Je vais certainement questionner le ministre pour savoir, si c'est une mesure déjà en vigueur, c'était quoi, les mesures de transition, ce qu'il a fait pour aider les travailleurs et travailleuses, et, si ce n'est pas déjà en vigueur, ce qu'il va faire pour ça.

(16 h 40)

Le ministre a parlé de la question de l'obligation de faire une société exonérée d'impôts, constituée exclusivement pour la réalisation de recherches scientifiques et de développement expérimental – recherche et développement – de produire un formulaire dans lequel elle doit notamment faire l'état de ses travaux et de ses dépenses de recherche et développement.

Nous sommes dans une période de discours de déréglementation, mais, moi, je vois potentiellement un problème là. Je voudrais demander au ministre délégué: Est-ce que c'est encore plus de réglementation? Est-ce que ça augmente la paperasse? Est-ce que ça cause des problèmes? Ou comment ce système va marcher? Peut-être que c'est en réponse aux problèmes que nous avons eus avec les projets de recherche et de développement et les contribuables touchés par cette question. Avec ça, si c'est une réponse à cet effet et que ça peut améliorer et corriger les choses pour le futur, c'est quelque chose de pas mal intéressant. Mais je voudrais assurer que dans ce geste nous ne sommes pas en mesure de créer plus de problèmes pour nos travailleurs et travailleuses.

M. le Président, c'est le type de questions que je vais demander pendant la prochaine étape de ce projet de loi. Je comprends que le ministère du Revenu veut sceller tous les trous, il veut fermer tous les trous, il veut assurer qu'il peut continuer de taxer tout ce qui bouge. Je sais que c'est ça, le grand mandat du ministère du Revenu. Et on peut faire une longue discussion sur ça parce que de plus en plus nous avons vu, par ce gouvernement, une vague de nouvelles taxes et d'augmentations des tarifs et copaiements, etc. Je comprends ça, mais je ne suis pas convaincu que nous sommes en train de faire toutes les bonnes choses, particulièrement, si j'ai bien compris tous les articles de loi, pour les travailleurs autonomes.

Quelques remarques avant de terminer, M. le Président. Je comprends le dernier lieu, le troisième lieu, quand on parle d'étendre les règles relatives à la responsabilité solidaire en matière de retenues à la source à toute personne qui a une influence sur les biens ou les affaires d'une autre personne et qui consent ou fait en sorte que le paiement d'un montant sujet aux retenues à la source soit affecté par cette autre personne ou pour son compte. Peut-être que c'est une chose dans la bonne direction, mais je voudrais savoir jusqu'à quel point le ministre va aller dans ses démarches, parce qu'on voit souvent que... Et, particulièrement la dernière fois, nous y étions ensemble, M. le Président. Le ministre a dit que là il veut avoir juste un certain montant de pouvoirs, mais il a besoin légalement de tout le pouvoir nécessaire. Là, je voudrais assurer que nous ne sommes pas en train de créer un problème quand nous sommes en train d'essayer d'avoir une solution. Avec ça, ce n'est pas nécessairement le fait que ça va être encadré, mais je vais demander jusqu'à quel point le ministre va aller dans ces directions-là.

Voilà quelques commentaires, M. le Président. Nous allons avoir beaucoup de chances, j'espère, dans les plus brefs délais, commencer notre étude détaillée de ce projet de loi, parce que, un autre commentaire – et je m'excuse d'être un peu répétitif aujourd'hui, mais je pense que peut-être la répétition aide la pédagogie – j'ai toujours recommandé de ne pas passer les lois fiscales pendant la session intensive. Et c'est ça, on commence maintenant, et ça donne une chance de prendre le temps nécessaire, qui n'est pas nécessairement un temps exagéré, d'assurer que la population comprend toutes les mesures qu'on trouve dans ce projet de loi, malgré le fait que ça vient d'un budget de deux ans passés dans plusieurs cas.

Avec ça, M. le Président, merci pour cette opportunité de faire quelques commentaires sur les grandes lignes de ce projet de loi, et, comme je l'ai déjà mentionné, j'espère que bientôt nous allons avoir une refonte complète de nos lois fiscales. J'espère que nous allons arrêter d'arriver avec des projets de loi qui viennent d'un budget de deux ans passés. J'espère qu'on peut commencer ici à passer des lois qui sont effectivement utiles pour l'État mais aussi compréhensibles et assez simples pour que la population comprenne mieux et, dernièrement, que nous ne sommes pas en train de créer plus de paperasse et de règlements pour les travailleurs et travailleuses autonomes. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Il n'y a pas d'autres interventions? Je vais céder la parole pour le droit de réplique à M. le ministre délégué au Revenu. M. le ministre.


M. Roger Bertrand (réplique)

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Alors, je remercie le député de Nelligan, porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, pour ses suggestions, ses commentaires relativement à cette étape-ci de l'adoption du projet de loi. On en est au principe, donc.

Je puis le rassurer. Effectivement, je vais prendre toutes les mesures pour que la documentation qu'on est habitué de transmettre à l'opposition officielle de même qu'aux membres de la commission parlementaire leur soit transmise dans les plus brefs délais. Et, de même, s'il était possible, même, de tenir une session de travail préalable, on le ferait; ça dépendra, à ce moment-là, du rythme des travaux de la commission parlementaire.

J'aimerais commenter la question de l'angle avec lequel cette Assemblée de même que la commission parlementaire compétente travaillent sur de tels projets de loi. Je rappelle que ces projets de loi n'introduisent rien de nouveau, que souvent les discussions quant au fond des mesures ont été faites au moment soit des déclarations ministérielles ou au moment des discours des budgets et qu'il convient peut-être davantage, à ce moment-ci, de s'assurer que le projet de loi rend bien les intentions déclarées à l'occasion du discours du budget ou de déclarations ministérielles, peu importe. Mais est-ce qu'on rend bien, effectivement, l'économie d'ensemble de la mesure qui était proposée à ce moment-là? Ce qui n'empêche aucunement, bien sûr, qu'on puisse échanger sur le fond de la question. J'attire l'attention du député de Nelligan là-dessus. Il est tout autant important de s'assurer que les textes de loi rendent bien l'idée de base du ministre ou des ministres des Finances concernés.

En ce qui regarde la présentation d'une telle pièce à ce moment-ci, c'est-à-dire un an, des fois, deux ans après un discours du budget, M. le Président, il n'y a rien de nouveau dans cette procédure. Ça fonctionne de même depuis des années et des années, même avant le présent gouvernement. Mais je puis assurer qu'on fait tout ce qui est en notre pouvoir pour accélérer les choses le plus possible de façon à ce que nos textes de loi soient les plus à jour possible.

Et, en ce qui regarde la refonte des lois fiscales, j'ai déjà indiqué au député de Nelligan avoir échangé sur cette priorité-là avec mon collègue le ministre de la Justice. Nous sommes sur la même longueur d'onde là-dessus. Et, dès que les moyens physiques et financiers le permettront, nous procéderons certainement sans délai.

En ce qui regarde l'impact financier pour les travailleurs autonomes auquel faisait référence le député de Nelligan, c'est une question qui m'apparaît être fort importante, effectivement. Elle doit être aussi appréciée en relation avec les critères d'équité que nous devons appliquer à l'égard d'autres travailleurs qui, eux ou elles, étant salariés, doivent effectivement rendre compte de leur rémunération et donc payer leurs impôts dans l'année où ils ont été gagnés. Donc, bien sûr qu'on peut s'intéresser à l'impact financier pour les travailleurs autonomes de ce qui est proposé dans le projet de loi, mais on doit le faire, cet examen-là, avec en tête cette perspective d'équité par rapport à l'ensemble des travailleurs et des travailleuses. Quant aux mesures de transition, il me fera plaisir, effectivement, d'expliquer aux membres de la commission et au député de Nelligan quelles sont à cet égard les mesures qui sont prévues.

Je rappelle, M. le Président, qu'il ne s'agit pas pour le ministère du Revenu de décider d'imposer des taxes additionnelles. Il s'agit simplement pour le ministère et le ministre que je suis de s'assurer que les dispositions fiscales sont conformément appliquées telles qu'elles sont prévues aux différentes pièces fiscales, qu'elles soient législatives ou réglementaires ou qu'elles procèdent d'un discours du budget, alors qu'elles n'ont peut-être pas encore été sanctionnées au niveau d'une loi; mais elles s'appliquent quand même, comme on le sait. Alors, le mandat du ministère du Revenu, c'est de collecter toutes les taxes et tous les impôts qui sont dus, compte tenu, je dirais, du régime fiscal tel qu'il existe. Et c'est dans cette perspective-là que nous continuerons à travailler.

Ceci étant dit, M. le Président, j'assure le député de Nelligan et les membres de la commission que je suis à leur entière disposition une fois que le présent projet de loi aura été adopté au niveau du principe. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: En vertu de l'article 213, est-ce que je peux demander une question au ministre? M. le Président, peut-être que j'ai...

M. Bertrand (Portneuf): L'article 212, oui, mais pas 213.

(16 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, si M. le ministre accepte que vous lui posiez une question au titre de l'article 212, ça va.

M. Williams: Oui, merci pour votre ancienne expérience comme président, M. le ministre délégué au Revenu. Compte tenu de la présence du ministre de la Justice en Chambre, je voudrais savoir exactement quelles démarches vous avez prises pour assurer que nous soyons en train, j'espère, de faire une réforme complète de nos lois fiscales. J'ai voulu profiter de la présence de vous deux en Chambre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, les mesures que j'ai prises ou les actions sont toutes simples et toutes efficaces. J'ai d'abord effectivement rencontré mon collègue et l'ai sensibilisé à l'importance, justement, de procéder plus tôt que tard à une telle refonte. Depuis lors, nos fonctionnaires sont en contact pour la suite des choses, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. S'il n'y a pas d'autres intervenants, je vais mettre au vote le principe du projet de loi n° 108, Loi modifiant la Loi sur les impôts et d'autres dispositions législatives d'ordre fiscal. Ce principe est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Bélanger: Oui. M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je vous demanderais de prendre en considération l'article 7 de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 106


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 7, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du principe du projet de loi n° 106, Loi modifiant la Loi sur la presse. M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Alors, le projet de loi modifiant la Loi sur la presse qui est actuellement devant cette Assemblée poursuit l'objectif suivant: il propose de rendre applicable à des journaux distribués gratuitement, notamment les divers hebdomadaires régionaux ou locaux, le processus de rétractation prévu à la Loi sur la presse. Ce processus est actuellement réservé aux seuls journaux publiés à des fins de vente.

La Loi sur la presse a été sanctionnée le 4 avril 1929 et, pour l'essentiel, elle n'a jamais été modifiée. Elle ne s'applique qu'aux journaux ou périodiques dont la publication à des fins de vente et de distribution a lieu plus d'une fois par mois et dont l'objet est de donner des nouvelles, des opinions, des commentaires ou des annonces. Pour se prévaloir des dispositions de la Loi sur la presse, le propriétaire et l'imprimeur ou encore l'éditeur du journal doivent avoir enregistré une déclaration devant le greffier de la Cour du Québec pour le district judiciaire où est imprimé ou publié ce journal. Cette déclaration, faite en vertu de la Loi sur les journaux et autres publications, énonce les noms et domiciles de l'imprimeur ou de l'éditeur ainsi que des propriétaires et l'adresse du journal.

Actuellement, la Loi sur la presse donne aux journaux publiés à des fins de vente et plus d'une fois par mois les moyens de contrer les recours en responsabilité civile fondés sur une atteinte à la réputation dont ils pourraient faire l'objet de la part d'une personne qui s'estimerait lésée par le contenu d'un article publié dans le journal. En effet, la loi oblige la personne qui veut poursuivre à donner un préavis d'action au journal – il s'agit d'un avis préalable de trois jours ouvrables – de manière à permettre au journal de publier gratuitement et de bonne foi une rectification ou encore une rétractation. Il faut noter que, si le journal n'est pas un quotidien, la rectification doit aussi être publiée aux frais du journal dans un autre journal du district judiciaire ou d'un district judiciaire voisin. Le choix de ce journal revient à la personne qui s'estime lésée.

L'effet pratique de cette loi est de permettre aux journaux d'atténuer la responsabilité civile par une rétractation ou une rectification immédiate, c'est-à-dire le jour même ou le lendemain de la réception d'un préavis d'action. Dans le cas où le journal publie ou fait publier la rectification ou la rétractation conformément à la loi, la personne qui s'estime lésée par le contenu d'un article ne pourra alors réclamer du journal que ses dommages actuels et réels seulement.

Il faut aussi souligner, M. le Président, qu'en vertu de cette même loi la personne qui s'estime lésée a également un droit de réponse. Si cette réponse n'est pas démesurément longue et si elle est rédigée dans des termes convenables, le journal doit la publier à ses frais et sans autre commentaire. Il importe de vous souligner que cette double publication, c'est-à-dire la rétractation et la réponse, a pour effet d'interdire toute poursuite en diffamation.

Je trouve ici utile de vous informer, M. le Président, que la Loi sur la presse déroge au délai de prescription d'un an prévu à l'article 29.29 du Code civil du Québec en matière d'action fondée sur une atteinte à la réputation. La loi prévoit expressément que l'action doit être intentée dans les trois mois de la publication de l'article concerné ou dans les trois mois où la personne en a pris connaissance, à la condition toutefois qu'il ne se soit pas écoulé plus d'un an depuis sa publication.

Le projet de loi que je vous présente répond à une demande formulée par l'Association des hebdos du Québec à la suite d'une action intentée contre un de ses membres. Cette Association regroupe les éditeurs de 131 journaux. Cette demande est également appuyée par la Québec Community Newspapers Association.

Cette modification législative permettra donc de régler une situation particulière en donnant à des journaux distribués gratuitement, tels les hebdomadaires régionaux ou locaux, les moyens de se prévaloir des dispositions de la Loi sur la presse lorsqu'ils feront face à une action fondée sur la diffamation. Comme pour les journaux publiés à des fins de vente, les journaux distribués gratuitement pourront se protéger contre ce type de poursuite en bénéficiant de la possibilité de rétractation préalable.

Certes, l'objet de ce projet est limité. Il vise un problème spécifique et ne prétend pas actualiser la loi pour tenir compte de toutes les formes de publications et de tous les médias, non plus qu'il ne prétend répondre à toutes les interrogations sur la liberté de presse. C'est un autre chantier, M. le Président. Toutefois, les ministères de la Culture et des Communications, de la Sécurité publique et de la Justice entendent mettre sur pied un comité de travail regroupant des représentants de ces trois ministères. Ce comité aura notamment pour mandat de réviser et d'actualiser la loi afin de l'adapter aux réalités des médias électroniques, incluant les nouvelles technologies, et de revoir toute la portée de la protection actuellement accordée par la loi en matière de diffamation.

Voilà, M. le Président, le contenu du projet de loi n° 106. Je le soumets donc à cette Assemblée pour l'adoption du principe et je vous remercie de l'attention que vous lui avez accordée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Il n'y a pas d'autres intervenants? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je vous demanderais de prendre en considération l'article 17 de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 123


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'article 17, vous avez bien dit? Bon. À l'article 17, le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor propose l'adoption du principe du projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic. M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique, je vous cède la parole.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: Alors, merci, M. le Président. J'ai le plaisir de présenter le projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic.

Ce projet de loi s'inscrit dans la démarche du gouvernement du Québec visant à restaurer sa santé financière et à se redonner la marge de manoeuvre budgétaire qui lui fait défaut en ce moment. Cette démarche ne pouvait être menée à bien sans que les coûts de main-d'oeuvre, qui constituent 56 % de nos dépenses de programmes, ne soient réévalués. Cette démarche a aussi conduit l'Assemblée nationale à adopter la Loi sur la diminution des coûts de la main-d'oeuvre dans le secteur public et donnant suite aux ententes intervenues à cette fin.

Le gouvernement et les syndicats concernés ont ensuite poursuivi leurs discussions afin d'harmoniser l'application des mesures temporaires de retraite anticipée convenues le 22 mars 1977. Depuis le dépôt à l'Assemblée nationale, le 8 mai 1997, du projet de loi n° 123, une entente est intervenue entre le gouvernement et les syndicats concernés, lesquels sont la CSN, la CEQ, la FTQ, la Fédération des infirmières et infirmiers du Québec, le Syndicat de la fonction publique du Québec et le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec, le 12 mai dernier. M. le Président, je reviendrai plus tard sur ce point après avoir donné les précisions sur le projet de loi n° 123.

(17 heures)

Premièrement, le projet de loi n° 123 vise à corriger une situation particulièrement pénalisante pour certaines personnes à la retraite depuis déjà plusieurs années. Lors de l'introduction de diverses mesures facilitant la prise d'une retraite anticipée, en 1983 et 1987 notamment, dans les secteurs public et parapublic, le gouvernement et les syndicats se sont entendus à l'effet qu'une personne ayant bénéficié de ces mesures et revenant au travail dans le secteur public perdait définitivement les avantages additionnels octroyés lors de son départ. Il appert qu'une centaine de ces personnes ont effectué un retour au travail pour des périodes très courtes, allant même jusqu'à une seule journée, sans être informées sur les conséquences de leur retour au travail. Le gouvernement et les syndicats concernés ont donc convenu d'éliminer complètement cette pénalité pour toute période de retour au travail antérieure au 1er janvier 1998.

D'autre part, à ce sujet, une campagne d'information personnalisée sera effectuée au cours de l'année, en collaboration avec les syndicats de la CARRA, la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, afin d'informer ces personnes que, dans le cas d'un retour au travail à compter du 1er janvier 1998, elles devront renoncer aux bénéfices reçus lors de leur départ pour le reste de leur retraite ou rembourser le traitement reçu durant cette période. Cette personne aura donc un choix à faire lors d'un retour au travail en fonction de la valeur de ses bénéfices et du traitement qu'elle recevra durant cette période. Je suis persuadé que ces dispositions seront suffisamment dissuasives pour éviter que ces personnes ne reviennent au travail dans le secteur public.

Deuxièmement, certaines dispositions des régimes de retraite applicables aux employés du secteur public prévoient que le coût des bénéfices est à la charge du gouvernement, sauf s'il en convient autrement par décret. Il en est ainsi pour le congé sabbatique à traitement différé, qui permet à un employé de réduire son salaire durant quelques mois ou années et de prendre un congé pendant lequel il continue de recevoir son salaire réduit. Durant cette période, l'employé cotise sur son salaire réduit et le gouvernement paie la cotisation de l'employé sur la différence entre le salaire réduit et le plein salaire. Ainsi, l'employé se voit reconnaître une pleine année de service, et le même principe s'applique lorsque l'employé est mis en disponibilité et qu'il ne reçoit, aux fins de sa retraite, qu'une partie de son salaire.

Les dispositions des régimes de retraite ne sont pas précises quant à savoir si le gouvernement doit payer la part de l'employeur durant un congé sabbatique à traitement différé, dans le cas des organismes qui doivent assumer la contribution de l'employeur au régime de retraite. Pour la plupart, ces employeurs dits autonomes sont des organismes extrabudgétaires, tels que la RRQ, la Régie des rentes du Québec, la CSST ou la Société de l'assurance automobile du Québec, ou des sociétés d'État telles la Caisse de dépôt et placement du Québec ou Loto-Québec. Le projet de loi n° 123 vient donc préciser que les employeurs qui assument déjà la part de l'employeur au régime de retraite devront aussi payer la part de l'employé.

Troisièmement, le projet de loi n° 123 vient préciser l'assujettissement au régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le RREGOP, des employés concernés.

Quatrièmement, le projet de loi n° 123 vise à apporter diverses modifications découlant de la réforme fiscale concernant l'épargne-retraite. Ces modifications sont rendues nécessaires afin que les régimes de retraite applicables aux employés des secteurs public et parapublic soient reconnus aux fins des déductions fiscales afférentes à la participation à un tel régime.

Le projet de loi propose également diverses autres mesures, lesquelles ont pour but de simplifier l'administration des régimes de retraite pour la CARRA en permettant notamment d'uniformiser le traitement des demandes.

Enfin, comme je le mentionnais au début, le projet de loi n° 123 vise à apporter des modifications de concordance afin de permettre l'application de l'entente intervenue le 22 mars 1997 entre le gouvernement et les syndicats.

De plus, j'annonce que je proposerai des modifications additionnelles, en commission parlementaire, qui donneront suite à l'entente intervenue entre le gouvernement et les syndicats le 12 mai dernier. L'entente du 12 mai 1997 vient compléter les discussions entourant la mise en place d'un vaste programme de départs volontaires dans le secteur public, alors que l'entente du 22 mars 1997 visait les trois principaux régimes de retraite applicables aux employés des secteurs public et parapublic, soit le RREGOP, le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, le Régime de retraite des enseignants, le RRE, et le Régime de retraite des fonctionnaires, le RRF. L'entente du 12 mai dernier vise trois autres régimes, soit le Régime de retraite de certains enseignants, le RRCE, le régime de retraite des employés fédéraux intégrés au Québec et le régime de retraite du centre hospitalier Côte-des-Neiges.

Les discussions entre les parties ont permis d'en arriver à une entente à l'effet d'introduire dans ces régimes des mesures temporaires de retraite anticipée similaires à celles du RREGOP, du RRE ou du RRF, soit: premièrement, le projet de loi introduit au RRCE un critère de retraite âge plus années de service équivalant à 80, avec un minimum de 55 ans d'âge; aussi, la réduction actuarielle passe de 6 % à 3 %, et ces mesures sont identiques à celles introduites au RRE. Deuxièmement, le projet de loi introduit aux deux autres régimes, le RREFQ, qui est le régime de retraite des employés fédéraux intégrés au Québec, et le régime de retraite du centre hospitalier Côte-des-Neiges, un critère de retraite âge plus années de service équivalant à 80, avec un minimum de 50 ans d'âge. La réduction actuarielle passe, elle, de 6 % ou 5 %, selon le cas, à 3 %. Ces mesures sont identiques à celles qui ont été introduites au RREGOP. Ces mesures permettent ainsi aux employés couverts par ces régimes d'avoir accès à des bénéfices similaires à ceux de leurs collègues.

Comme vous le savez, le gouvernement du Québec a compté sur la mise en place d'un vaste programme de retraite anticipée pour atteindre facilement – ou plus facilement, je devrais dire – ses objectifs budgétaires, soit l'équilibre des finances publiques en l'an 2000. Tous les efforts ont été déployés de la part du gouvernement et des syndicats, de même qu'à la CARRA, afin de permettre à tous les employés auxquels s'adressent ces mesures d'obtenir les informations nécessaires à une prise de décision éclairée.

Il me fait donc plaisir, M. le Président, d'annoncer à cette Chambre qu'à ce jour plus de 9 600 personnes, soit au 21 mai 1997, ont déjà complété une demande de rente de retraite et que quelques milliers d'autres poursuivent leur réflexion à l'heure actuelle. Éventuellement, le projet de loi n° 123 permettra à d'autres employés des secteurs public et parapublic de prendre une retraite anticipée et de concourir ainsi à l'atteinte des objectifs budgétaires du gouvernement. C'est pourquoi je recommande l'adoption du principe de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. On ne peut pas discuter du projet de loi n° 123 qui est devant nous sans avoir en arrière-plan le projet de loi n° 104 qui, rappelons-nous, avait été adopté par cette Chambre suite à une suspension des règles qui n'avait pas permis aux parlementaires de faire l'étude article par article de ces modifications importantes que l'on avait apportées aux régimes de pension, soit le RREGOP, le Régime de retraite des employés du gouvernement et des organismes publics, soit le RRE, soit le RRF. L'opposition avait voté contre le projet de loi n° 104 et, en toute logique, nous allons voter contre, aussi, le projet de loi n° 123. Puisque nous étions contre le projet de loi n° 104, nous serons donc aussi contre le projet de loi n° 123, en rappelant, à ce moment-là, où on en est dans la logique.

(17 h 10)

Le ministre se rappelle certainement que tous les éléments, les articles du projet de loi n° 104 n'avaient pas pu être étudiés ici au moment où on avait fait l'étude article par article, d'ailleurs en session plénière de cette Chambre, que je crois que vous présidiez à l'époque, M. le Président, et nous avions eu deux heures pour débattre de choses éminemment techniques qui touchent les régimes de pension. Si nous avions eu, à l'époque, la chance de pouvoir faire notre travail de parlementaires comme nous devons le faire normalement, si, à l'époque, on ne nous avait pas imposé un bâillon, si, à l'époque, on avait pu réellement faire l'étude article par article de la loi n° 104, peut-être que le gouvernement ne serait pas obligé aujourd'hui, deux mois après avoir adopté la loi n° 104, de revenir devant la Chambre pour présenter la loi n° 123.

Je ne disconviens pas qu'à l'intérieur de la loi n° 123 il y a un certain nombre de mesures purement techniques, M. le Président. Harmonisation avec les nouvelles règles fiscales. C'est sûr qu'il y a à l'heure actuelle une nécessité d'harmoniser certains bénéfices des régimes de retraite avec les changements qu'on a connus à l'intérieur des lois fiscales. Ça veut donc dire qu'on ne sera pas contre tous les articles, lorsqu'on arrivera à l'étude article par article, M. le Président.

Mais ce projet de loi n° 123 étant tellement lié, en soi, à cette espèce de stratégie, cette massue, cet écrasement qui a donné lieu à la loi n° 104 que nous allons, par stricte logique et continuité, voter contre le principe de la loi n° 123, parce que nous étions contre la loi n° 104. Rappelons-nous, la loi n° 104, ç'a été cette espèce de menace qui a été mise sur la tête de l'ensemble des employés de l'État, des secteurs public et parapublic, pour les amener, sous la menace, à devoir signer avec le gouvernement. Bien sûr, ils ont signé, je le reconnais, mais ils ont signé avec cette espèce de menace législative sur la tête. Parce que nous étions contre la loi n° 104, cette loi qu'on a considérée comme une loi inique, nous allons être contre cette loi n° 123 qui n'est quasiment qu'une amélioration, un prolongement, une correction de ce qu'on aurait pu faire aussi à l'intérieur de la loi n° 104.

M. le Président, il y avait des oublis dans la loi n° 123. Le ministre, dans son intervention, va dire qu'il va y toucher, parce que, de fait, c'est vrai, il y a eu des petits groupes de travailleurs qui n'étaient pas inclus. Je m'attendais à ce qu'on fasse une nouvelle législation pour eux, à savoir ce qu'on appelle le régime de rentes de certains enseignants, c'est-à-dire les ex-religieux qui, normalement, suite à l'entente qui avait été passée au moment où ils avaient réintégré le système, devaient avoir les mêmes bénéfices que le RREGOP.

Donc, on aura l'occasion, puisque, là, on pourra, j'espère, faire l'étude à tête reposée, de redébattre de tout ce qui avait été proposé à l'intérieur de la loi n° 104 qui, rappelons-nous, M. le Président, n'a pas pu être étudiée article par article par cette Chambre, on nous l'a quasiment passée, écrasée sur le corps. On a été quasiment totalement obligé de voter une trentaine d'articles qui changeaient en profondeur les régimes de pension de nombreux travailleurs du secteur public et du secteur parapublic sans que les parlementaires aient pu faire l'étude article par article.

Je remarque aussi qu'on aura la même chance de pouvoir débattre ici de deux petits syndicats: le centre hospitalier Côte-des-Neiges, il s'agit de l'ancien Hôpital des vétérans, qui avait une accréditation syndicale à part, qui n'est pas actuellement dans le projet de loi déposé, mais je comprends qu'il va y avoir aussi des modifications qui vont être apportées, de même que pour le régime de retraite des fonctionnaires fédéraux qui, suite à l'entente sur la main-d'oeuvre, vont être intégrés.

M. le Président, il faut bien comprendre la position de l'opposition. Comme nous étions opposés à la loi n° 104, nous allons être opposés à la loi n° 123 et nous allons faire tout le travail, dans le projet de loi n° 123, que nous n'avons pas pu faire dans le cadre de la loi n° 104, ce qui ne veut pas dire que nous allons faire un blocage sur des choses qui sont purement de l'harmonisation. Mais, sur le principe comme tel, on ne peut pas être d'accord sur le projet de loi n° 123, à partir du moment où nous étions contre la loi matraque, la loi qui était la loi n° 104.

Cette loi n° 123 touche un certain nombre... À part cette harmonisation, ce qui aurait dû être déjà dans la loi n° 104 et parce qu'on l'a faite en toute vapeur, hors de tous les principes démocratiques, on rajoute des petits aménagements qui peut-être peuvent être considérés comme acceptables.

Il est sûr qu'il y avait un élément un peu inique pour la centaine de personnes qui, ayant bénéficié d'une retraite anticipée, revenaient travailler quelques jours pour le gouvernement, perdaient, à ce moment-là, les avantages qu'elles avaient. Il faudra regarder quel genre de pénalité elles avaient eue à l'époque et voir que ces personnes qui prendront dorénavant leur retraite soient clairement averties des risques qu'elles courent. De la même manière, sur tout ce qui touche un point de détail sur les employés du gouvernement ou des secteurs public et parapublic qui bénéficient d'un congé sabbatique, il y a des technicalités sur la manière dont leurs cotisations au fonds de pension doivent se faire.

Mais, M. le Président, sur la contestation, le point sur lequel je voudrais réellement faire comprendre à la Chambre la position des parlementaires de l'opposition ici, c'est que nous n'avons pas, au moment de l'adoption de la loi matraque, la loi n° 104, fait un travail sérieux de parlementaires. Parce que nous n'avons pas fait notre travail sérieusement et, je le rappelle, parfaitement... Et le président du Conseil du trésor se rappellera certainement qu'on a très sérieusement eu deux heures pour simplement débattre de 13 articles. Et, ensuite, au moment de l'adoption de la loi n° 104, le leader du gouvernement nous a imposé littéralement, lorsque nous débattions de la loi ici, en commission plénière, l'adoption du reste des articles, ce qui fait que, normalement, parce que les parlementaires n'ont pas fait ce qui est une des fonctions les plus principales du parlementaire lorsqu'il fait de la législation, à savoir analyser la portée de chacun des articles que l'on vote, parce que le gouvernement a voulu procéder avec célérité, parce que le gouvernement avait besoin d'une massue pour pouvoir amener l'ensemble des travailleurs syndiqués à se plier à ses diktats, nous n'avons pas pu, dans le cadre des régimes d'assurance, faire le travail sérieux et serein que nous aurions dû faire à l'époque.

Si nous l'avions fait, M. le Président, peut-être n'aurions-nous point eu besoin aujourd'hui de devoir débattre une grande partie de ce qui est couvert par la loi n° 123, et on aurait simplement une petite loi d'harmonisation qui arrive lorsqu'on change des mesures fiscales et où, à chaque année, on doit harmoniser le régime de retraite avec certaines modifications fiscales. Mais on a fait pire. On n'a pas travaillé correctement, comme parlementaires, lorsque nous avons dû adopter la loi n° 104. Parce que nous n'avons pas adopté la loi n° 104 avec sérieux, nous sommes obligés, M. le Président, aujourd'hui de débattre de la loi n° 123.

J'aurai l'occasion de pouvoir débattre article par article et, je le comprends maintenant, de ce que nous n'avions point pu faire lorsque nous voulions débattre des articles qui touchaient le RREGOP, le RRE et le RRF. Évidemment, ce sera, pour rester dans l'ordre, M. le Président, dans le cadre du RRCE. Mais, comme les bénéfices du RRCE sont analogues à ceux du RREGOP, du RRE et du RRF, et je comprends que le projet de loi actuellement ici veut harmoniser les deux régimes, nous aurons l'occasion, M. le Président, à ce moment-là de pouvoir réellement débattre de ce qui était toute la portée, que nous n'avons pas pu... les articles sur lesquels nous n'avons point pu échanger lorsque nous avons adopté la loi n° 104.

(17 h 20)

Alors, soyez assuré, M. le Président, que, même si ce projet de loi est un projet de loi très technique, nous allons nous acharner à le comprendre, premièrement, ce qui n'est pas nécessairement facile. Il y a 99 articles, je pourrais vous en lire un certain nombre et vous verriez à quel point ils sont écrits dans un langage limpide et clair, si vous voulez. Vous êtes philosophe, mais, vous verrez, le langage législatif à cet effet-là est loin d'être limpide à première vue. Et, deuxièmement, je crois qu'il y a des éléments beaucoup plus de fond qui ont été abordés par la loi n° 104, particulièrement dans ce que je j'appellerai les équilibres intergénérationnels et sur lesquels nous allons pouvoir revenir dans le cadre strictement du RRCE, qui donne les mêmes avantages qui ont été donnés à l'intérieur du RREGOP.

Pour résumer brièvement, pour faciliter les retraites anticipées – et je comprends que le gouvernement avait l'objectif de faciliter les retraites anticipées – on a donné à une partie des cotisants – c'est assez technique – ceux qui avaient plus que 50 ans d'âge, qui avaient accumulé 10 ans d'expérience, des bénéfices importants – et je comprends qu'il y ait 9 000 personnes qui tendent à s'en prévaloir – sur l'ensemble de l'avoir qui avait été obtenu à l'intérieur du RREGOP. C'est-à-dire qu'une petite partie des personnes qui ont contribué au RREGOP vont pouvoir avoir droit à ce qui a été accumulé par l'ensemble des cotisants.

Et là il y a un principe d'équité auquel nous nous étions opposés au moment où nous avons débattu de la loi n° 104, sur lequel... Nous allons nous opposer sur le principe mais non pas sur le principe de l'harmonisation. C'est-à-dire, vous comprenez bien, M. le Président, que, sur le principe qu'on harmonise le RRCE avec le RRE, nous allons être d'accord avec l'harmonisation, mais nous serons opposés à ce sur quoi nous harmonisons. C'est-à-dire, le RRE et le RREGOP ayant fait une mauvaise décision, nous étions contre cette décision que nous trouvions inique. Donc, nous allons pouvoir en débattre à sa valeur propre, ce que nous n'avons pas pu faire au moment de l'adoption de la loi n° 104. C'était un geste qui était inique, c'est-à-dire qu'il favorisait une minorité de personnes qui avaient contribué au RREGOP à même les contributions de l'ensemble des participants aux régimes de retraite. Mais le principe qu'à un moment ou un autre il faut que tous les régimes de l'État soient harmonisés, l'opposition ne peut pas être contre ce principe-là. Il faut, bien sûr, qu'en toute justice tous les régimes de retraite soient harmonisés. Mais on ne peut pas être d'accord pour qu'on s'harmonise avec quelque chose qui au départ était mauvais.

Alors, je ne sais pas si vous comprenez, M. le Président. Je vais résumer. Nous ne sommes pas d'accord avec les modifications qui avaient été apportées aux régimes de retraite par la loi n° 104, mais nous ne sommes pas contre le fait que ce qui avait été le brouillon laissé de côté soit nettoyé maintenant, aujourd'hui, pour toute justice envers les différents employés de l'État.

Alors, ça va être le genre d'échange, M. le Président, que nous allons avoir en commission parlementaire, où nous allons pouvoir, par le biais de la loi n° 123, refaire une partie des débats que nous n'avons pas pu faire ici, au Parlement, sur la loi n° 104 parce que nous avons été virtuellement écrasés par la suspension des règles imposée par le gouvernement. Et vous vous en rappelez parfaitement, M. le Président, nous n'avons eu que deux heures pour étudier ici, en commission plénière, les différents articles de la loi n° 104.

Alors, c'est assez simple, ici. Par principe, parce que la loi n° 123 n'est qu'une continuité de la loi n° 104, nous allons voter contre la loi n° 123, tout en réitérant que, sur les mesures techniques comprises à l'intérieur de la loi n° 123, nous n'avons pas, bien sûr, d'objections, et tout en réitérant que l'harmonisation horizontale n'est pas quelque chose auquel nous nous objectons. Mais nous nous objectons à ce qui était à la base, derrière la racine même du projet de loi, c'est-à-dire la loi inique, la loi matraque, la loi n° 104, M. le Président. Alors, c'est pour cette raison-là que l'opposition va voter contre la loi n° 123, tout en comprenant qu'il y a quelques aménagements techniques avec lesquels nous pouvons concourir sans difficulté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole, s'il n'y a pas d'autres intervenants, à M. le ministre délégué à l'Administration et à la Fonction publique et président du Conseil du trésor pour son droit de réplique.


M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: Merci, M. le Président. Je veux simplement me lever pour prendre acte des propos du député de Verdun, qui a dit qu'il serait contre. Alors, il portera la responsabilité de son vote. Et puis il a dit aussi qu'il referait le débat sur la loi n° 104, après 123. Je veux simplement dire que la loi n° 104 a été déposée après une entente avec les trois grandes centrales syndicales plus trois autres syndicats fort importants: la Fédération des infirmières et infirmiers, le Syndicat de la fonction publique et le Syndicat des professionnels du gouvernement du Québec. Alors, il y avait quand même des ententes importantes.

La loi n° 123, maintenant, donne suite aux ententes qui sont convenues avec les syndicats, le 12 mai, dans la foulée de la loi n° 104. Et on adopte ces projets de loi presque à chaque session – une avant Noël, une avant juin – pour donner suite à toutes sortes de négociations qui ont eu cours durant la session ou le semestre et qui doivent être entérinées dans les lois.

Alors, je veux simplement dire qu'il ne faudrait pas, quand même, que le député de Verdun salive trop avant tout cela. Mais, ceci étant dit, je le connais bien et, en commission parlementaire, je sais que nous ferons du travail très sérieux. Mais je voudrais quand même qu'on fasse le débat de 123 et non pas celui de 104, parce que c'est de cela qu'il s'agit.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre. Alors, le principe du projet de loi n° 123, Loi modifiant diverses dispositions législatives des régimes de retraite des secteurs public et parapublic, est-il adopté?

M. Gautrin: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des finances publiques

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des finances publiques pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Alors, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux au jeudi 22 mai 1997, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est adoptée? Alors, nos travaux sont ajournés à demain, jeudi, 10 heures.

(Fin de la séance à 17 h 28)


Document(s) associé(s) à la séance