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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 18 mars 1997 - Vol. 35 N° 78

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Annexe
Membres de l'Assemblée nationale du Québec

Journal des débats


(Dix heures neuf minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour

Alors, nous débutons nos travaux ce matin par les affaires du jour. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui. M. le Président, l'article 24 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 42


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 24 de notre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 6 décembre 1996 sur l'adoption du projet de loi n° 42, Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement avait demandé l'ajournement du débat à la fin de l'intervention du député de Portneuf et ministre du Revenu. Alors, M. le ministre délégué au Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, comme vous le savez, le projet de loi n° 42, intitulé Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal, apporte un très grand nombre de modifications terminologiques à diverses lois fiscales. En effet, environ 2 000 dispositions sont affectées par ce projet de loi.

(10 h 10)

Lors de la tenue de la commission permanente du budget et de l'administration qui en a fait l'étude détaillée en date du 7 novembre 1996, quelques amendements ont été apportés afin de corriger certaines erreurs techniques ayant été décelées à ce moment. Depuis cette date, quelques autres correctifs seraient requis dont certains ont notamment pour objet de tenir compte de l'antériorité de la sanction de projets de loi – il s'agit des projets de loi nos 34 et 91 – par rapport au projet de loi n° 42, les autres étant de nature technique. Il serait donc approprié d'apporter ces correctifs avant que le projet ne soit adopté par la présente Assemblée. En conséquence, M. le Président, je demande que le projet de loi n° 42 soit envoyé en commission plénière pour l'étude des amendements que je dépose.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Williams: Oui.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. En conséquence, l'Assemblée se constitue maintenant en commission plénière pour l'étude des amendements indiqués par M. le ministre. Nous allons suspendre nos travaux quelques instants pour permettre de nous constituer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 10 h 11)

(Reprise à 10 h 19)


Commission plénière


Étude des amendements proposés par le ministre

M. Pinard (président de la commission plénière): Alors, conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier les amendements proposés par M. le ministre du Revenu au projet de loi n° 42, Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal. M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Donc, pour la présentation de ces motions d'amendements au cours de la présente plénière, je suis accompagné, en plus, bien sûr, de nos collègues, de Mme Josée Morin, qui est chef du Service de la rédaction des lois au ministère du Revenu du Québec, de même que de M. Alain Lavigne, chef de cabinet également au ministère du Revenu.

Alors, M. le Président, je ne sais pas de quelle façon vous souhaitez que nous procédions. Je pourrais simplement présenter chacun des amendements et en expliquer le motif.

Le Président (M. Pinard): Exact, et nous allons l'adopter amendement par amendement.

(10 h 20)

M. Bertrand (Portneuf): O.K.

Le Président (M. Pinard): Ça vous convient?

M. Bertrand (Portneuf): Très bien.

M. Williams: Oui, effectivement. Aussi, je pense que ça va être la façon la plus facile, un amendement à la fois.

M. Bertrand (Portneuf): Excellent. Alors, M. le Président, le premier amendement est le suivant: L'article 27 du projet de loi n° 42, intitulé Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal, est modifié, dans le texte anglais, par le remplacement des mots «bodies of the Crown» par les mots «Crown corporations», dans le paragraphe n de l'article 570 de la Loi sur les impôts que le paragraphe troisième édicte. Alors, l'amendement proposé, M. le Président, au texte anglais, à l'article 27 du projet de loi n° 42 est d'ordre technique et vise à y corriger une erreur de traduction.

Le Président (M. Pinard): M. le critique officiel.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Juste comme remarques préliminaires, je trouve intéressant que nous soyons ici aujourd'hui avec le nouvel horaire de l'Assemblée, juste après la fête de saint Patrick, en train d'étudier un projet de loi que nous avons commencé à la dernière session. Aussi, le ministre délégué a eu la chance de faire ses remarques finales sur ce projet de loi et on arrive avec les amendements en troisième lecture. Ce n'est pas la première fois que nous avons les amendements à la toute dernière minute avec ces projets de loi qui touchent les lois fiscales, et je suis heureux que nous ayons le temps effectivement, M. le Président, d'étudier les amendements et de nous assurer qu'effectivement ça corrige toutes les erreurs et les contradictions et les omissions de ce projet de loi n° 42.

Je trouve, avec tout le respect que... Je présume que le ministre délégué a pensé que le projet de loi était vraiment bel et bien fini. Le ministère arrive à la toute dernière minute ou je ne sais pas quand – ça va être une de mes premières questions que je vais demander: Quand est-ce que le ministre délégué a reçu les amendements? Ils sont tous arrivés tous, il y a une minute, et, woops, nous les avons. Malgré que effectivement ce projet de loi soit en train de mettre beaucoup de choses en vigueur dans le Code civil et d'autres projets de loi, ils ont eu plusieurs mois pour étudier ça et il y a des erreurs. Je ne les blâme pas pour ça, nous sommes tous humains. Peut-être que les erreurs, comme le dit le ministre, sont assez techniques.

Je voudrais savoir quand ils ont reçu les amendements, parce que je trouve ça curieux que nous n'ayons pas adopté ce projet de loi avant Noël. Nous avons commencé ça, si ma mémoire est bonne, le 17 octobre, de bonne heure, M. le Président. Nous avons travaillé avec un grand esprit de collaboration avec le ministre délégué et tout l'entourage. Nous avons fait les amendements ensemble, et je pense qu'ils ont un esprit d'harmonisation, si je peux utiliser ce mot. Mais on arrive avec des amendements. Ma première question: Quand avez-vous reçu les amendements proposés?

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. J'aimerais, tout d'abord, effectivement confirmer que les remarques finales du ministre ont été faites sur le projet de loi. Et c'est la raison pour laquelle en aucun cas il ne serait question de proposer ici un amendement qui toucherait la substance même du projet de loi, un principe même du projet de loi. Ce dont il est question ici, c'est d'un certain nombre de modifications, dont certaines sont d'ordre légistique, c'est-à-dire qu'entre le moment où on a déposé le projet de loi et le moment où on va l'adopter de façon finale, on a adopté par ailleurs d'autres projets de loi qui nous incitent maintenant à faire des ajustements de concordance et qui ne touchent pas, encore une fois, le fond des questions qui sont abordées dans le projet de loi. Donc, c'est la raison pour laquelle il nous apparaît non seulement approprié, mais également dans la tradition et la façon de faire habituelle d'apporter ces modifications-là.

Certaines modifications, il est vrai, viennent corriger quelques erreurs que nous avons pu identifier depuis, mon Dieu, décembre dernier. Elles ont été portées à ma connaissance au cours des dernières semaines et des derniers jours dans leur libellé final. Alors, il nous apparaît, à ce moment-ci, utile et nécessaire d'apporter ces amendements-là de façon à avoir, je dirais, la version la plus finale, la plus complète, la plus exacte possible de ce projet de loi.

Je rappelle, M. le Président, que les projets de loi du ministère du Revenu sont, par la force des choses, des projets de loi assez techniques et qui touchent souvent beaucoup d'autres lois. On faisait le dénombrement des articles auxquels touche finalement le présent projet de loi; il y a entre 1 500 et 2 000 articles qui sont touchés. Alors, on comprend que, dans un exercice aussi complexe que celui-là, qui est une première, à ma connaissance, puisqu'il s'agit d'harmoniser les lois fiscales au nouveau Code civil, il puisse y avoir, je veux dire, peut-être nécessité d'apporter quelques amendements encore pour corriger un A par un B ou une expression par une autre, ce qu'on aurait peut-être omis de faire en cours de route. Cela m'apparaît tout à fait normal. Nous préférons, quant à nous, faire le travail le plus parfait possible plutôt que de présenter à l'Assemblée ou de recommander l'adoption finale d'un projet alors qu'on saurait qu'il y a peut-être encore deux ou trois petites modifications d'ordre technique à être apportées. Ça m'apparaît, tout simplement, comme on dit, l'économie et le bon sens.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Juste pour bien comprendre la réponse du ministre délégué, j'ai juste compris que, lui, il a retardé l'adoption finale de ce projet de loi à cause des corrections qu'il veut. Ce n'est pas ça?

M. Bertrand (Portneuf): Non, non, non. Nous étions prêts à adopter le projet de loi avant décembre si le calendrier l'avait permis, si le temps l'avait permis. Ça n'a pas pu être fait. Nous avions convenu, je pense, à ce moment-là, de nous revoir lors de la reprise du printemps pour l'adoption finale du projet de loi. Entre-temps, il est arrivé que nous ayons identifié d'autres possibilités d'amendements d'ordre tout à fait technique. C'est ce qui s'est passé dans la réalité.

M. Williams: Bon, juste un dernier point sur ça. Non, je ne me souviens pas de la discussion avec moi pour retarder l'adoption de ce projet de loi. J'étais prêt avant Noël à l'adopter selon notre étude. Je voudrais mieux comprendre pourquoi le gouvernement, votre gouvernement, n'a pas donné assez de priorité à ce projet de loi pour s'assurer que ce soit adopté avant Noël. Parce que, vous savez, la dernière journée juste avant Noël, nous avons passé pas mal de lois. Nous avons aussi eu plusieurs bâillons sur plusieurs autres projets de loi – ce que je ne recommande pas d'utiliser, M. le ministre délégué, certainement – mais, après ça, nous avons eu plusieurs lois qui ont été ratifiées juste avant Noël. Je voudrais juste comprendre et aussi que la population québécoise comprenne pourquoi le gouvernement a décidé que ce n'était pas aussi important que ça d'approuver ça avant Noël?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, M. le député de Nelligan, mon collègue, sait très bien que les fins de session connaissent inévitablement, quelles que soient les années, les sessions et les Législatures, des encombrements qui sont tout à fait normaux et naturels. Alors, il s'est passé, dans le cas de décembre, le même phénomène qui se passe à toutes les fins de session finalement ou parties de session. Et je puis l'assurer que, si nous avions eu une meilleure collaboration de la part de l'opposition officielle, le projet de loi n° 42 aurait été passé sans problème.

M. Williams: Moi, je voudrais juste assurer que, vous savez, nous avons donné toute la collaboration pour le projet de loi n° 42 pour nous assurer que nous avons modifié et amélioré ce projet de loi. Et, je le répète en ondes, j'étais prêt à faire toutes les étapes jusqu'à l'étape finale avant Noël. Malheureusement, le gouvernement a décidé de ne pas avancer ce dossier.

Voilà pour quelques remarques préliminaires. Peut-être qu'on peut continuer. Si le ministre veut faire une réplique à ça, il aura toujours le temps de le faire.

Le Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, concernant l'amendement à l'article 27 du projet de loi n° 42, est-ce que cet amendement est adopté?

M. Williams: Maintenant, j'ai une question sur ça.

Le Président (M. Pinard): Oui, d'accord, allons-y.

M. Williams: Merci. C'était, en guise de quelques remarques préliminaires, afin de juste placer le débat où nous sommes maintenant rendus avec ce projet de loi n° 42. Parce que je suis d'accord avec le ministre délégué, c'est des lois techniques, complexes qui touchent – je n'ai pas compté tous les articles – plus ou moins 2 000... Ça touche pas mal de projets de loi. Souvent, nous avons adopté les articles du projet de loi après une bonne discussion, après les excellentes réponses des représentants du ministère pour nous assurer qu'on comprenne les articles de la loi et aussi, en conséquence, que la population québécoise comprenne la loi. C'est pourquoi je voulais juste m'assurer que la population comprenne ce qui se passe.

(10 h 30)

Mais, sur l'article 27 du projet de loi n° 42 qui change «bodies of the Crown» to «Crown corporations» dans le texte anglais, je voudrais savoir: Est-ce que, selon vous, M. le ministre délégué, c'est la seule place où nous avons trouvé ce problème? Et est-ce que, dans tous les textes où on trouve les mots «bodies of the Crown», maintenant ils sont déjà remplacés par les mots «Crown corporations» dans le texte anglais? Est-ce qu'il peut nous donner la garantie aujourd'hui que c'est la dernière correction de ce problème?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, M. le député de Nelligan se souviendra certainement qu'effectivement, en commission parlementaire du budget et de l'administration, lorsque le projet de loi a été étudié article par article, effectivement on avait procédé à un certain nombre de corrections de la sorte: remplacer «bodies of the Crown» par «Crown corporations». Or, il est arrivé effectivement que nous ayons identifié un autre article où l'expression aurait dû être changée sans qu'elle l'ait été au niveau des travaux de la commission. Alors, nous en proposons donc, par voie de conséquence, la modification. Est-ce qu'il y en a d'autres? Je ne le croirais pas. Sous réserve qu'éventuellement on en découvre, actuellement on pense qu'il n'y a pas d'autres articles dont il serait nécessaire de modifier le libellé de la même façon.

M. Williams: Merci pour ça. Et juste une clarification de la façon dont on travaille sur les traductions de nos projets de loi, parce que, selon moi, souvent la préparation des projets de loi, c'est assez complexe aussi, il y a plusieurs étapes. Et, dans les projets de loi fiscaux, c'est pas mal complexe, comme nous l'avons discuté. Je voudrais savoir, et c'est vraiment pour mieux comprendre comment ça marche: Qui fait la traduction et qui fait la vérification de la traduction? Je sais que le texte est préparé en français, et le texte prioritaire, c'est le texte français. Mais je voudrais savoir la façon dont on fait la traduction de nos lois. Souvent, nous avons eu les débats en français, l'interprétation des lois, avec ça la traduction, ça va être assez difficile. Ma question n'est pas de critiquer la traduction, mais je voudrais savoir comment nous avons traduit et comment votre ministère traduit les projets de loi.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, ces traductions sont faites par les services habituels de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Pinard): À ce stade-ci, je pourrais peut-être répondre que la traduction est assurée par le service de la législation de l'Assemblée nationale. Alors, nous avons des traducteurs professionnels qui voient à traduire les projets de loi en langue anglaise.

M. Williams: Parce que je trouve qu'ils font un travail monumental. Ma question est juste de savoir comment ça marche. Je voudrais juste m'assurer, si nous avons encore d'autres corrections à faire, où je peux questionner. C'est ici, à l'Assemblée?

Le Président (M. Pinard): Par le Service de la traduction.

M. Williams: Merci beaucoup. Avec la réponse que le ministre nous a donnée, qu'il ne croit pas qu'il y ait d'autres corrections du même ordre, je peux dire que je suis prêt à adopter l'amendement 1.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, si jamais le député de Nelligan trouvait un autre endroit où on devrait le corriger, je souhaiterais qu'il le dise.

M. Williams: Je suis prêt à m'asseoir avec vous, M. le ministre délégué. Sortez toutes les lois, si vous voulez, on peut faire toute une lecture et, ensemble, nous allons finir 100 % bilingues, vous et moi.

Le Président (M. Pinard): Si vous le permettez, j'aimerais vous préciser que le service de législation, à notre département de traduction, nous avons actuellement environ sept ou huit personnes qui travaillent journalièrement à la traduction de nos lois.

M. Williams: Sept personnes?

Le Président (M. Pinard): Sept ou huit personnes actuellement.

M. Williams: Qui font français-anglais?

Le Président (M. Pinard): Oui.

M. Williams: Ou anglais-français? J'espère qu'ils ne sont pas coupés avec tous les...

Le Président (M. Pinard): Qui font la traduction des projets de loi pour vous assurer de les avoir en langue anglaise.

M. Williams: M. le Président, est-ce que vous pouvez donner une garantie que nous allons garder ce service de haute qualité pour assurer que nos lois sont bel et bien traduites?

Le Président (M. Pinard): Bien, je pense que vous pourriez en faire mention lors des réunions du Bureau de l'Assemblée nationale, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, concernant l'amendement à l'article 27 du projet de loi n° 42, est-ce que cet amendement est adopté?

M. Williams: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, nous allons procéder maintenant à l'amendement de M. le ministre délégué au Revenu à l'article 62, qui se lit comme suit, si vous permettez: L'article 62 de ce projet de loi est modifié, dans le paragraphe 2°, par l'insertion, après «–le sous-paragraphe 2° du sous-paragraphe iii du paragraphe c de la définition de l'expression "contrat de consultation externe" prévue au premier alinéa;», de «–la définition de l'expression "paiement contractuel"» prévue au premier alinéa;». Alors, M. le ministre du Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Alors, il s'agit d'un amendement qui vise à corriger une omission survenue lors de la rédaction de ces articles. Le mot «société» devait également être remplacé par les mots «société de personnes» dans la définition de l'expression «paiement contractuel» prévue au premier alinéa de l'article 1029.8.36.4 de la Loi sur les impôts. Il s'agit donc, encore là, d'une modification d'ordre technique.

Le Président (M. Pinard): Merci. M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. C'est de la concordance avec les autres. Selon les notes que j'ai reçues, en effet, le mot «société» devait également être remplacé par les mots «société de personnes» dans la définition de l'expression «paiement contractuel». Est-ce que c'est une omission qui est juste pour cet article de loi ou est-ce que c'est comme plus ou moins le premier amendement, que vous êtes en train de corriger un article qui a été oublié ou omis dans les autres changements? Je voudrais saisir exactement.

M. Bertrand (Portneuf): C'est une correction qui aurait dû être faite en même temps que les autres, si vous voulez, au moment où on travaillait en commission parlementaire, et qui a été omise effectivement, et on apporte la correction maintenant par cet amendement.

Le Président (M. Pinard): Harmoniser avec le Code civil.

M. Bertrand (Portneuf): Oui.

M. Williams: Merci.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Williams: Adopté.

Le Président (M. Pinard): L'amendement de M. le ministre: L'article 71 de ce projet de loi est modifié:

1° dans le paragraphe 2°, par l'insertion, après «–l'article 87.2;», de «–l'article 90;» et, après «–le sous-paragraphe ii du paragraphe a de l'article 485.24;», de «–le sous-paragraphe iii du paragraphe c du deuxième alinéa de l'article 485.27;»;

2° par le remplacement, dans le paragraphe 2°, de «–les paragraphes c et e de l'article 965.9.7;» par «–les paragraphes c à e de l'article 965.9.7;»;

3° par la suppression, dans le paragraphe 5°, de «–l'article 485.10;»;

4° par le remplacement, dans le paragraphe 13°, de «–les paragraphes b, c et g de l'article 261.7;» par «–les paragraphes b et c de l'article 261.7;»;

5° dans le paragraphe 13°, par l'insertion, après «–les paragraphes b, c et g de l'article 261.7;», de «–la partie de l'article 261.7 qui suit le sous-paragraphe iv du paragraphe f;»;

6° par la suppression, dans le paragraphe 16°, de «–le paragraphe b de l'article 485.11;».

M. le ministre du Revenu.

(10 h 40)

M. Bertrand (Portneuf): Oui. Alors, M. le Président, il s'agit d'un amendement qui vise à supprimer des corrections qui n'avaient pas à être faites dans les articles, donc, 485.10 et 485.11 de la Loi sur les impôts et qui, d'autre part, font en sorte que le remplacement de l'expression «société» par «société de personnes» ou «corporation» par «société» se fera également dans diverses autres dispositions de cette loi.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui, M. le Président, merci. Je voudrais demander au ministre délégué... Parce que nous avons eu un débat sur ça, un débat amical, mais certainement un débat, sur l'importance de ce changement dans la loi. Ils ont eu des opinions différentes. Effectivement, le Barreau a soumis un avis assez clair contre cette proposition, mais, après mes discussions, le ministre délégué au Revenu a dit qu'il avait consulté le ministre de la Justice et qu'il avait une autre opinion. Coïncidentalement ou parallèlement, nous avons eu les autres commissions parlementaires, et M. Landry, le ministre des Finances – je m'excuse, M. le Président – a présenté les autres projets de loi. Selon mon interprétation des discussions, il a recommandé plus ou moins exactement le contraire de ce que nous sommes en train de faire dans le projet de loi n° 42. Je pense que c'était le projet de loi n° 60, pendant la même période que nous avons étudié ce projet.

Sans refaire le débat complètement, je voudrais commencer ma question: Est-ce que le ministre délégué au Revenu a cherché l'avis du Barreau sur les amendements tels qu'il est en train de proposer dans l'article 71?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, je considère à ce moment-ci, M. le Président, que le Barreau, effectivement, a produit son avis, puisqu'il s'agit finalement, dans le cas qui nous occupe, de la même matière et que par ailleurs les avocats fiscalistes, qui sont également membres du Barreau, étaient d'opinion que la modification qui a été proposée et qui a été adoptée doit être faite aussi. Alors, bon, avis pour avis, à un moment donné ça prend quelqu'un pour trancher, et votre humble serviteur a donc donné écho aux représentations des avocats fiscalistes finalement, que je considère là-dedans parler d'autorité pour procéder de la façon qu'on procède, c'est-à-dire par la substitution en question.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Williams: Si ma mémoire est bonne, vous avez dit que l'avis du Barreau n'était pas pertinent. Je pense que c'étaient les mots que vous avez utilisés. On peut vérifier ça aux galées, mais j'ai une bonne mémoire pour les affaires comme ça, M. le ministre délégué.

Je voudrais savoir c'est quoi, l'impact des six amendements tels que vous les avez proposés. Si on n'accepte pas ces amendements, dans la vraie vie, qu'est-ce que ça va changer?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Par exemple, je vous donnerai simplement l'exemple du deuxième alinéa, où on remplace l'expression «–les paragraphes c et e de l'article...» bon, untel, par «–les paragraphes c à e...» Alors, je pense que la portée de l'article est fort différente si on dit «paragraphes c et e» par rapport à «paragraphes c à e». Il y a au moins une couple de paragraphes qui sont oubliés dans le premier libellé.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Williams: Oui. Je voudrais juste comprendre la situation où se trouve les parlementaires aujourd'hui. De bonne foi, là, vous, moi et les autres représentants de la commission du budget et de l'administration, nous avons essayé de comprendre les articles déposés dans le projet de loi n° 42. Nous avons questionné, l'opposition officielle, vous et les représentants du ministère, et, finalement, nous avons eu la réponse que, dans cet article, c'était nécessaire de passer tel qu'écrit et pas tel que vous voulez amender aujourd'hui.

Mais je voudrais savoir: si l'amendement 2, votre exemple, n'est pas accepté légalement, est-ce que ça cause une situation difficile ou pas vivable ou est-ce que ça va être juste un article plein de contradictions?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Bon. Je demanderais, si vous me permettez M. le Président, à Mme Morin de bien vouloir expliquer la portée justement. C'est que, dans le deuxième paragraphe, on vise à faire en sorte que les substitutions de «corporation» et «société» se fassent partout où elles doivent se faire et pas plus.

Le Président (M. Pinard): Alors, madame, si vous voulez bien vous identifier pour les fins de l'enregistrement et nous donner votre titre également.

Mme Morin (Josée): Oui. Josée Morin, chef du Service de la rédaction des lois, à Revenu Québec. Bon, voici. Alors, il faut comprendre que les instructions qui sont données dans le projet de loi n° 42 sont assez particulières. Il s'agit d'instructions spécifiques où on énumère chacune des dispositions où on doit procéder à des remplacements de termes. Alors, essentiellement, tout le projet de loi n° 42 est un projet à caractère terminologique où on remplace un terme par un autre et plus particulièrement les occurrences – enfin celles qui reviennent le plus souvent... où on remplace le mot «corporation» par le mot «société» et aussi où on remplace les mots «société» par «société de personnes». Alors, ça, ce sont les occurrences qu'on rencontre le plus souvent dans ce projet-là. Ce qui est arrivé...

M. Williams: Les changement ont été obligés à cause du Code civil?

Mme Morin (Josée): Oui, absolument. Bien, en fait, tous les amendements qui sont, dans le projet, à caractère terminologique découlent de la nouvelle terminologie utilisée dans le Code civil. Et, comme il a été mentionné plus tôt, on a modifié dans ce projet-là environ 2 000 articles, enfin tout près de 2 000 articles, de sorte que, pour faire le repérage des dispositions où il fallait apporter des modifications terminologiques, on procède de différentes façons lorsqu'on travaille et, entre autres, on se sert des repérages informatiques.

Alors, il peut arriver évidemment, avec le nombre, qu'il y ait des dispositions qui nous aient échappé à ce moment-là, et ce sont les corrections qu'on apporte, de sorte que les corrections, qu'on retrouve à l'article 71, sont de deux ordres. En fait, on procède à des corrections pour supprimer des instructions qui étaient là et où on n'avait pas à apporter de correction. Alors, c'est le cas notamment du paragraphe 3°, où on supprime, dans une instruction, une référence à un article, et, lorsqu'on lit cet article-là dans la loi, l'instruction nous dit qu'on doit remplacer le mot «société» par «société de personnes», mais, quand on y arrive, on ne trouve pas ces mots-là dans l'article. Alors, c'est simplement une anomalie technique. On n'aurait pas dû trouver cette instruction-là. Elle s'y trouvait par erreur, tout simplement.

Et, si on prend le cas du paragraphe 1°, c'est une instruction qui n'y figurait pas. Alors, quand on lit l'article, on devait faire un remplacement de mots et on ne trouve pas ces mots-là dans le libellé du texte. Alors, l'instruction nous dit bien de remplacer les mots «corporation» par les mots «société», mais on lit l'article et on ne trouve pas le mot «corporation». Alors, l'instruction est erronée tout simplement. Donc, l'objet de la modification vise à faire en sorte que les instructions soient précises et justes dans tous les cas.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Juste en terminant là-dessus, il faut comprendre que, bien sûr, ce n'est pas la fin du monde si, à un endroit donné, on oublie de changer «société» par «corporation» ou... Sauf que l'objet du projet de loi, c'est justement de s'ajuster au libellé ou à la terminologie qu'on retrouve dans le Code civil. Alors, si on ne le fait pas, on ne sera pas ajusté. Ça n'empêchera pas le monde de vivre, mais l'objet même principal du projet de loi, qui est au fond une harmonisation, ne sera pas rencontré totalement, parfaitement.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Williams: Pour ma compréhension, je voudrais vous demander: Est-ce que vous croyez que les mots «personne morale» incluent le concept de société et société de personnes? Parce qu'il me semble que... Je ne mets pas le but en doute, mais, avec le but supposé de simplifier, est-ce que nous ne sommes pas en train de faire exactement le contraire, de compliquer ça? Selon vous, est-ce que vous pensez que le concept de personne morale inclut tous ces concepts dont on discute?

Le Président (M. Pinard): Madame.

Mme Morin (Josée): Oui. Bien, nous avons introduit dans le projet de loi n° 42, à l'article 14, une clause de nature interprétative qui, je pense, règle la question de façon très claire. Alors, si on lit cette clause-là qui se retrouve à l'article 1.7 de la loi de l'impôt sur le revenu – je peux en faire la lecture: «Dans la présente loi et dans les règlements, une personne morale, qu'elle soit ou non à but lucratif, est désignée par le mot "société" étant entendu que ce mot ne désigne pas une personne morale lorsqu'il est employé dans l'expression "société de personnes".»

Alors, ainsi, par cette clause interprétative, il devient très clair que, partout finalement où on utilise le mot «société», il est entendu qu'on réfère au concept de personne morale que l'on retrouve au Code civil. Et d'ailleurs, si on s'en réfère au Code civil, l'expression «société» aussi se retrouve au Code civil, alors je pense que l'harmonisation est fort bien rendue par l'utilisation du mot «société».

(10 h 50)

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Je m'excuse de redemander la question ou de juste reformuler la question: Est-ce que, selon votre réponse, avec l'article 14, nous sommes en train de préciser la différence entre «société» et «personne morale» et «société de personnes»? Il y a une différence entre «société» et «société de personnes» que l'on ne retrouve pas dans le concept de «personne morale», il y a une distinction entre les deux.

Le Président (M. Pinard): Madame.

Mme Morin (Josée): Oui, alors, voici, c'est peut-être plus facile de référer au concept en langue anglaise, vous le savez. Alors, en anglais, ce qui était autrefois «corporation» en français, et qui est resté «corporation» en anglais, est maintenant désigné par «société», alors que «société de personnes» traduit ce qu'on retrouve en anglais sous le vocable «partnership». Alors, la société de personnes n'a pas la personnalité morale, n'est pas une personne morale. Quand on trouve l'expression «société de personnes», on ne réfère pas à une personne morale – et d'ailleurs c'est ce que dit la clause interprétative – alors que, lorsque l'on parle d'une société, il s'agit nécessairement d'une personne morale.

Le Président (M. Pinard): M. le député, ça vous convient?

M. Williams: Merci. Le ministre délégué a dit que nous sommes en train d'ajuster nos lois à cause du Code civil. J'ai demandé si tous ces changements venaient du nouveau vocabulaire du Code civil, et vous avez dit oui. Avec ça, il me semble que les mots que nous sommes en train d'explorer aujourd'hui, les changements de vocabulaire sont, en principe, déjà en vigueur dans les lois québécoises à cause du Code civil. Et, selon le ministre lui-même, il dit que c'est juste des changements techniques. Pendant la commission parlementaire sur ce projet de loi, j'ai demandé: Est-ce qu'il y a une meilleure façon de procéder? Selon mon interprétation, qui n'est pas une interprétation légaliste, c'est l'interprétation d'un élu, j'ai appris que le Code civil était déjà changé, et c'est pourquoi on doit changer ces mots dans la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et les autres choses comme ça. J'accepte ça, mais est-ce que vous avez eu la chance, M. le ministre délégué, de réfléchir un peu plus sur: Est-ce qu'il y a une autre façon de procéder? Parce que, si vraiment un projet de loi comme 42 est purement technique, qu'il est non arrêtable à cause du Code civil – parce que le Code civil est déjà ratifié – est-ce que vous avez eu une chance de réfléchir à une autre façon de procéder avec des changements, qui sont, selon vous, purement techniques?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, sous réserve d'une opinion – normalement, je pense qu'en Chambre je n'ai pas à donner d'opinion – qui est celle d'un profane, je pense que c'est faciliter la vie à tout le monde que de s'assurer que, dans les différentes lois, on ait les terminologies les plus harmonisées possible plutôt que de laisser cet exercice-là à chaque citoyen qui voudrait éventuellement référer à la Loi sur le ministère du Revenu, à la Loi sur les impôts sans que les ajustements terminologiques aient été faits. Ce serait faire porter sur le dos de chaque citoyen, évidemment, le fardeau de ce que nous devons faire pour faciliter finalement la vie du monde. Ce qu'on fait dans le moment, on le fait au nom de l'ensemble des Québécois et des Québécoises et de ceux qui ont à référer à la Loi sur les impôts, à la Loi sur le ministère du Revenu, aux différentes lois à portée fiscale, en relation éventuellement avec les dispositions du Code civil. Moi, je vous parle en profane, mais avec le gros bon sens.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Williams: Ce n'est pas ça que je mets en doute. Si j'ai bien compris, on doit faire ces changements. Ce n'est pas un débat politique, à ce moment-là; le débat politique s'est passé pendant le débat sur le Code civil. J'accepte ça, je trouve ça... J'ai hâte à la journée où on pourra avoir plus une discussion sur le fond que sur les technicalités, mais je pense que ça s'en vient bientôt avec les choses, cet après-midi, les crédits, et le budget qui s'en vient. Ma question... ou ma suggestion – parce que je ne veux pas chercher une opinion que le ministre n'est pas, pour le moment, à l'aise de dire: Je recommande avec toute sincérité que peut-être on peut faire une séance de travail et faire un peu de réflexion sur comment on peut améliorer la façon de faire la concordance qui a été causée par le Code civil dans nos lois des impôts. Je trouve ça un peu curieux que nous ayons eu un Code civil ratifié il y a plusieurs années passées et que maintenant on arrive avec les changements de concordance que vous avez dit qu'on doit faire. J'accepte ça à cause du Code civil, pas une autre loi. Il me semble qu'avec toute la réforme parlementaire que nous sommes en train de – j'espère – commencer, peut-être que nous allons trouver une autre façon de procéder. J'ai fait cette remarque pendant la commission parlementaire et je refais ça aujourd'hui. Et, dans le temps, quand tout le monde sera disponible, j'offre mes services pour m'asseoir et travailler avec le ministre délégué pour peut-être trouver une façon plus efficace pour faire ces types de projets de loi qui sont purement de concordance.

M. Bertrand (Portneuf): Brièvement, M. le Président, on se rappellera que c'est le premier projet de loi – c'est vraiment une initiative un peu remarquable, dans ce sens-là – qui s'ajuste effectivement à la terminologie du nouveau Code civil. On peut certainement en tirer des enseignements pour la suite des choses, c'est-à-dire pour d'autres lois éventuellement qui devraient être modifiées logiquement au cours des prochains mois, des prochaines années.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Je voudrais juste savoir aussi... Vous avez parlé, M. le ministre, qu'on essaie de rendre ça plus accessible à la population québécoise, et je suis complètement d'accord avec ça. Est-ce que nous allons avoir une loi des impôts publiée en 1997, telle qu'amendée? Parce que, quand je fais des recherches pour vos projets de loi, comme ça, on commence à chercher les lois et souvent c'est difficile parce que c'est amendé, c'est amendé, c'est amendé. Est-ce qu'après que cette loi 42 sera adoptée Les Publications du Québec ou vous-même allez publier la loi de l'impôt telle qu'amendée, au moins jusqu'à maintenant?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

(Consultation)

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, il y aura effectivement des versions papier et des versions informatique de la nouvelle loi, avec les modifications, les amendements. Pour le reste, aller plus loin que ça, on parle de refonte, et c'est des exercices beaucoup plus vastes et fondamentaux, à ce moment-là, je veux dire, en termes de quantité de travail. Je ne sais pas, au niveau de la refonte, quand le ministère de la Justice procédera éventuellement là-dedans. Je ne peux pas vous dire.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: La réponse est non?

M. Bertrand (Portneuf): Bien la réponse, c'est: On va rendre les renseignements sous la forme habituelle après l'adoption d'un projet de loi. Mais, de façon à permettre éventuellement d'avoir des libellés tenant compte de toutes les modifications dans différentes lois, je pense qu'on doit référer, à ce moment-là, à la refonte des lois, et ce n'est pas une question qui relève de ma compétence.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Au fond, on peut continuer ça un peu plus tard. Mais il me semble que nous avons passé plusieurs heures ensemble à améliorer nos lois québécoises, et je pense que vous avez eu le besoin d'admettre, M. le ministre délégué, que l'opposition officielle a travaillé avec pleine coopération. Je partage le point de vue qu'on doive s'assurer que nous avons ajusté nos lois fiscales et nos lois sur les impôts selon le Code civil, malgré que je puisse avoir des différences d'opinion sur quelques articles de la loi.

(11 heures)

Mais, le principe, je n'ai pas de problème avec. Sauf que, si le but est de s'assurer que nos lois sont actuellement en concordance avec les autres projets de loi, qui – j'espère que c'est l'autre raison – sont plus simples à comprendre, particulièrement la Loi sur les impôts, il me semble qu'avec une réforme aussi substantielle – je ne demande pas chaque projet de loi, mais vous-même dites que c'est un changement de 2 000 articles plus les autres que nous avons passés pendant les mois – que peut-être c'est le moment opportun de publier une Loi sur les impôts tel qu'amendée. Parce que je ne sais pas si...

Vous avez toutes les ressources en arrière de vous pour chercher quel article est amendé par quel, amendé quand, et c'est tout un exercice. Je ne sais pas, M. le Président, je pense que vous êtes d'accord, et je ne blâme personne, ce n'est pas une critique – au moins pour le moment – de vous ou du ministère, mais il me semble que, pour le simple citoyen qui veut comprendre cette loi, nous avons une certaine responsabilité de nous assurer que nos projets de loi sont «up to date», sont mis au point. S'il y a une façon de faire ça électroniquement, je voudrais le savoir, et c'est une façon. Mais je ne veux pas... Je cherche un projet de loi sur les impôts où ça ne prend pas nécessairement cinq projets de loi pour trouver l'article maintenant, et c'est ça que nous avons maintenant.

Ma question était assez simple: Si vous n'avez pas eu l'idée de faire ça jusqu'à maintenant, je recommande qu'avec ces changements assez substantiels... Je sais que le Conseil du trésor, peut-être, avec toutes les coupures qui s'en viennent, ne veut pas dépenser d'argent, mais il me semble qu'une loi aussi importante pour la population québécoise, particulièrement maintenant où de plus en plus on commence à questionner tout le système – tout le monde sait qu'ils sont taxés jusqu'ici, plusieurs personnes pensent qu'elles sont taxées plus haut que ça – il me semble qu'on doit au moins donner à la population québécoise la loi mise au point avec les derniers amendements. C'est ça que je demande. Et je voudrais mieux comprendre pourquoi nous n'allons pas faire ça. Et qu'est-ce qui empêche de faire un dernier changement, par exemple à la Loi sur les impôts, publier ça daté du 18 mars 1997: Voilà la Loi sur les impôts telle qu'amendée par tous les autres projets de loi?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Bien, en tout cas, M. le Président, ce que réclame éventuellement le député de Nelligan, ça existe. Nous allons produire une nouvelle version de la Loi sur les impôts par exemple, mais ce n'est pas cette version-là qui tient lieu de version officielle. Ce qui tient lieu de version officielle, c'est la dernière Loi sur les impôts telle qu'elle apparaît à la refonte de 1994 et, par la suite, tous les amendements, depuis 1994, consécutifs aux différents projets de loi adoptés.

Alors, c'est bien sûr que nous publions une version, par exemple, de la Loi sur les impôts, mais ce n'est pas la version refondue, ce n'est pas la version officielle. C'est ce que donnent les textes suite aux différents projets de loi qui ont été adoptés. Mais, pour pouvoir compléter l'exercice de façon complète, il faut parler, à ce moment-là, en termes de refonte de lois, dont l'initiative relève de mon collègue de la Justice.

M. Williams: Ah, peut-être...

M. Bertrand (Portneuf): ...de la suggestion. Je la prends pour une suggestion à ce moment-ci et j'en prends bonne note.

M. Williams: Merci d'en prendre bonne note, mais j'en demande un peu plus. Est-ce que vous êtes prêt à recommander au ministre de la Justice de faire ça? Parce que, selon votre réponse – et je sais qu'il y a une équipe tellement compétente au niveau légal au ministère – vous avez chaque article de la Loi sur les impôts, tels qu'amendés, a, b, c, d, xième fois. Vous avez ça, vous avez dit que vous avez ça. Il me semble que ça va être, je ne veux pas exagérer la simplicité de ça, mais il me semble que l'information est là et, pour le simple citoyen, je ne comprends pas pourquoi cette année, je ne demande pas chaque année, je ne demande pas si tu arrives avec un projet de loi comme vous êtes arrivés à la toute dernière minute, juste avant Noël, de faire tout un nouveau projet de loi... Mais il me semble que ça va être le temps de peut-être faire ça. Si vous dites que ce n'est pas votre responsabilité, mais que vous êtes prêt à le recommander au ministre de la Justice, j'accepte ça, et nous allons faire le suivi ensemble. Mais il me semble qu'ici, à l'Assemblée nationale, on essaie d'assurer que nos lois soient accessibles à la population, et je le répète parce que ce n'est pas juste... Je ne cherche pas juste à créer le travail pour rien. Moi, je sais que nous avons besoin d'utiliser nos fonctionnaires de la façon la plus efficace, mais, avec ça, ce n'est pas juste des petits changements, quelques changements. Il y a les livres des amendements, et je voudrais juste simplifier la compréhension de ce projet de loi.

Avec ça, j'espère que le ministre délégué peut, avec moi, faire les recommandations pour cette situation au ministre de la Justice, et on peut avoir un large consensus parce que, quand la population me demande d'avoir une copie de la Loi sur les impôts, je ne peux pas la donner. Je ne peux pas la donner.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre, en terminant.

M. Bertrand (Portneuf): Alors, M. le Président, oui, je prends en très bonne considération les suggestions et les propos du député de Nelligan, et on verra pour la suite des choses.

M. Williams: Prendre note maintenant, en très bonne considération, pour le moment, j'accepte ça. C'est mon intention de faire un suivi au ministre de la Justice. J'espère que je peux compter sur votre appui.

M. Bertrand (Portneuf): Je suis tout heureux de compter sur l'appui aussi du député de Nelligan dans ce sens-là. Voilà.

Le Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, est-ce que l'amendement à l'article 71 est adopté?

M. Williams: Adopté.

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, l'amendement de M. le ministre délégué au Revenu à l'article 75 se lit comme suit: L'article 75 de ce projet de loi est modifié par le remplacement, dans le paragraphe 2°, de «–la partie de l'article 45 qui suit le paragraphe b du premier alinéa;» par «–la partie de l'article 45 qui suit le paragraphe a du premier alinéa;». M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Alors, il s'agit encore là d'une modification d'ordre technique qui vise à corriger une erreur de transcription survenue lors de la rédaction de cet article.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je suis prêt à accepter cet amendement qui corrige une erreur de transcription.

Le Président (M. Pinard): D'accord. Alors, l'amendement proposé à l'article 75 est-il adopté?

M. Williams: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. L'amendement de M. le ministre délégué au Revenu à l'article 78 du projet de loi n° 42 se lit comme suit: L'amendement proposé à l'article 78 du projet de loi n° 42 est d'ordre technique. Excusez-moi. Oui, d'accord. Alors, l'article 78 de ce projet de loi est remplacé par le suivant: 78. L'article 5 de cette loi, modifié par l'article 19 du chapitre 35 des lois de 1996, est de nouveau modifié par le remplacement, dans le texte français du quatrième alinéa, du mot «juridiction» par le mot «compétence». M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, juste pour mentionner en passant qu'on réfère ici à l'article 78, mais il s'agit de la nouvelle numérotation suite à la disparition de l'article 76. Le projet de loi avait donc été numéroté par voie de conséquence. Alors, c'est la raison pour laquelle on réfère ici à l'article 78. Donc, il s'agit de tenir compte de l'antériorité par rapport au projet de loi n° 42 du projet de loi n° 34 devenu le chapitre 35 des lois de 1996. Cet amendement ne modifie d'aucune façon la substance du projet de loi. Il n'a pour objectif que celui de respecter une règle en matière de rédaction législative.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

(11 h 10)

M. Williams: Oui, merci beaucoup. Sans répéter ce que j'ai juste dit sur l'autre amendement... Merci pour cette clarification parce que, quand j'ai lu l'article 78, j'ai dit: Ce n'est pas du tout 78, c'est 79. Mais, sans répéter tout, je souligne mon point encore. C'est difficile même avec le projet, et nous n'avons pas adopté... L'article 79, ce n'est pas maintenant 79, c'est 78. Je pense que vous et moi devons certainement faire une visite au ministre de la Justice dans les plus brefs délais, M. le ministre délégué. Mais, maintenant que je comprends qu'effectivement on ne parle pas de 79 tel que c'est proposé, on parle de 78 tel que ça va être adopté, toujours avec les amendements qui sont en train d'amender la Loi sur les impôts, je suis prêt à accepter l'amendement.

Le Président (M. Pinard): On remarque qu'il y a une constance chez vous, M. le député.

M. Williams: Oui, oui, certainement. Et je pense qu'avec votre appui peut-être que vous pouvez accompagner le ministre délégué et moi auprès du ministre de la Justice pour...

Le Président (M. Pinard): Auprès du ministre de la Justice pour une réforme complète de la Loi sur les impôts.

M. Williams: Oui.

Le Président (M. Pinard): Nous allons y réfléchir.

M. Williams: Merci beaucoup.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'amendement proposé à l'article 78 est adopté?

M. Williams: Adopté.

Le Président (M. Pinard): L'amendement de M. le ministre délégué au Revenu à l'article 104 se lit comme suit: L'article 104 de ce projet de loi est modifié par le remplacement de ce qui précède le paragraphe 1° par ce qui suit:

104. Cette loi, modifiée par le chapitre 46 des lois de 1994, par les chapitres 1, 18, 36, 43, 49, 63 et 69 des lois de 1995 et par les chapitres 12, 31, 33, 35 et 81 des lois de 1996, est de nouveau modifiée. M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui. Alors, M. le Président, vous comprendrez qu'il s'agit de l'ancien article 105, et ce qu'on fait essentiellement, c'est tenir compte de l'antériorité par rapport au projet de loi n° 42 des projets de loi nos 34 et 91 devenus respectivement les chapitres 35 et 81 des lois de 1996. Il s'agit encore d'un amendement qui ne modifie d'aucune façon la substance du projet de loi.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Est-ce que le ministre délégué, juste pour l'enregistrement, peut expliquer brièvement les projets de loi nos 34 et 91?

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président.

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Ha, ha, ha! Je ne suis pas sûr qu'on ne soit pas un peu au-delà du temps, normalement, qu'on devrait consentir à un tel amendement. Enfin...

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Williams: Bon, certainement, mais, nommément, 91, c'était un projet de loi qui était arrivé à la toute dernière minute ici. Il me semble que j'ai voulu juste rappeler... Je voudrais assurer que nous allons donner tout le temps nécessaire d'assurer que les législateurs et aussi la population comprennent nos projets de loi. C'est pourquoi j'ai demandé avec toute politesse, pas avec un long préambule mais une brève question, d'expliquer un peu les buts des deux projets de loi. Mais, si le ministre ne veut pas répondre, je suis prêt pour le vote.

Le Président (M. Pinard): Alors, est-ce que l'amendement est adopté?

M. Williams: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. L'amendement de M. le ministre délégué au Revenu à l'article 107 se lit comme suit: L'article 107 de ce projet de loi est remplacé par le suivant:

107. L'article 81 de cette loi, modifié par l'article 23 du chapitre 23 des lois de 1994 et par l'article 858 du chapitre 2 des lois de 1996, est de nouveau modifié par le remplacement, dans le texte français du paragraphe h, du mot «constitution» par les mots «constitution en personne morale».

M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): Oui. Alors, M. le Président, il s'agit donc encore une fois de l'ancien article 108, qui est devenu l'article 107 suite à la renumérotation, et ce qu'on vise à faire, c'est compléter l'historique de cet article modificatif par l'ajout d'une référence à l'article 23 du chapitre 23 des lois de 1994, lequel article modifie également l'article 81 de la Loi sur le régime de rentes du Québec depuis la dernière refonte des lois du Québec. Alors, il s'agit d'un amendement qui ne modifie d'aucune façon la substance du projet de loi et dont l'objectif est de respecter une règle en matière de rédaction législative.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan.

M. Williams: Oui. Merci. Une dernière question sur ça: Selon vous, M. le ministre délégué, tous les articles ne changent d'aucune façon la substance du projet de loi tel que nous l'avons étudié en commission parlementaire, en commission du budget et de l'administration; c'est juste des corrections, des changements de concordance et il n'y a aucun changement de substance pour cet article et tous les autres articles?

M. Bertrand (Portneuf): C'est le cas, M. le Président. C'est bien le cas.

M. Williams: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Est-ce que l'amendement est adopté?

M. Williams: Adopté.

M. Bertrand (Portneuf): Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, la commission plénière ayant complété son mandat, je mets fin à ses travaux.

Je tiens à remercier celles et ceux qui y ont participé et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement. Merci. Nous suspendons pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 16)

(Reprise à 11 h 22)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, M. le Président.

M. Côté (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié les amendements proposés au projet de loi n° 42, Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal, et qu'elle les a adoptés.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous allons donc poursuivre le débat sur l'adoption du projet de loi n° 42. M. le député de Nelligan.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Juste brièvement quelques commentaires sur le projet de loi n° 42 que nous avons terminé en plénière avec encore des amendements.

Effectivement, juste pour situer la population, le projet de loi n° 42, c'est la Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal, in English, Bill 42 is An Act to harmonize certain legislative provisions of a fiscal nature with the Civil Code of Québec.

M. le Président, comme le ministre délégué l'a dit au début, mais aussi dans sa dernière intervention avant Noël, c'est une loi qui effectivement est en train de mettre la concordance avec le Code civil. Nous avons changé plusieurs articles de loi, ce qui touche plus ou moins 2 000 changements.

On espère qu'on est en train d'assurer que notre loi des impôts et les autres lois fiscales sont plus compréhensibles et que la population peut mieux comprendre ces lois, parce que, comme je l'ai mentionné plusieurs fois, à plusieurs niveaux de ce projet de loi, la loi des impôts et les autres lois d'ordre fiscal sont tellement complexes, mais je suis heureux, jusqu'à un certain point, que nous soyons en train de corriger le manque de concordance. Sauf que j'ai aussi mentionné qu'effectivement la population québécoise cherche une réforme fiscale, elle cherche que ce gouvernement ne fasse pas juste des projets de loi de concordance qui changent les mots, qui rendent ça concordant avec le Code civil. Elle veut avoir une vraie réforme qui mette notre système de taxation plus juste et plus humain.

Nous avons étudié ce projet de loi avant Noël. L'opposition officielle était prête à ratifier ce projet de loi avant Noël, mais, dans le blitz des bâillons que nous avons vu avant Noël, un projet de loi après l'autre, je ne sais pas, je ne blâme pas le ministre délégué sur ça, mais le gouvernement à peut-être juste oublier son projet de loi.

Finalement, on arrive aujourd'hui, une journée après la St. Patrick's, avec ce projet de loi, encore une fois, M. le Président, avec des amendements qui corrigent la loi d'impôt mais qui corrigent le projet de loi n° 42 tel quel. Si c'était un projet de loi qui était vraiment juste d'harmonisation, de concordance... J'ai voulu avoir un projet bel et bien fini. Ce n'est pas nécessairement comme le ministre a dit, ce n'est pas une loi de fond, de débat politique, c'est une loi technique. Mais, je présume, avec des lois techniques, on peut arriver avec un document final. Nous avons le droit toujours d'améliorer. Mais je trouve ça – j'ai utilisé le mot «curieux» – un peu inquiétant – je ne veux pas exagérer aujourd'hui – qu'on arrive encore avec des changements d'ordre technique qui ne changent, selon le ministre délégué, d'aucune façon la substance de ce projet de loi. C'est pourquoi j'ai utilisé la plénière pour assurer que la population québécoise comprenne le projet de loi n° 42 tel qu'amendé à la commission et aussi tel qu'amendé en commission parlementaire.

J'ai recommandé deux façons de faire que je voudrais juste répéter pour m'assurer que le ministre tienne compte ou prenne note avec énergie, prenne ça en considération – et j'espère qu'il fera un bon suivi... Un, il me semble qu'on doit trouver une meilleure façon de changer nos lois qui sont simplement en concordance avec le Code civil. Il me semble que peut-être, nous, on peut, avec la créativité des deux côtés de la Chambre, trouver un système qui est plus efficace, plus vite et plus souple que celui que nous venons juste de finaliser.

Deuxième commentaire, M. le Président. Avec les changements substantiels que nous avons vus dans plusieurs lois, mais particulièrement dans la Loi sur les impôts, j'ai recommandé, avec votre appui aussi, M. le Président, qu'on puisse aller ensemble au ministre de la Justice, qu'on puisse lui demander une refonte de ce projet de loi. Je ne veux pas minimiser l'importance de ça. Parce que je ne sais pas, M. le Président – ou les téléspectateurs qui écoutent ce débat – s'ils ont essayé d'avoir la loi des impôts tel qu'elle existe maintenant ou s'ils veulent savoir c'est quoi exactement, x article ou un autre article: c'est tellement compliqué parce que souvent on trouve des amendements, et les amendements ne sont pas les articles tels qu'amendés, c'est des amendements des amendements des amendements des amendements. Et souvent, M. le Président, c'est assez compliqué de comprendre tous les articles de loi.

Avec ça, ma suggestion, M. le Président, est un peu dans le même esprit que j'ai travaillé ce projet de loi n° 42 et aussi dans le même esprit que le projet de loi n° 42 a été présenté: on essaie de bonifier, on essaie de rendre ça plus compréhensible et que la population puisse mieux comprendre nos projets de loi. Si c'était le but de 42, ma recommandation, M. le Président, c'est un suivi, c'est une extension de ce but. Effectivement, je pense qu'avec un changement de 2 000 articles de la Loi sur les impôts, malgré les coûts de ça, parce que je sais que nous sommes assez sensibles aux coûts... Mais, avec la réforme parlementaire que nous sommes en train de commencer, il me semble que, M. le Président, avec les changements, on doit trouver la façon d'assurer que le citoyen puisse avoir facilement, d'une façon accessible, les articles complets tels qu'amendés pour mieux comprendre notre projet de loi.

Je n'insiste pas plus longtemps sur ça, mais je voudrais certainement continuer après l'adoption de ce projet de loi, M. le Président, à vraiment insister pour que le ministre de la Justice fasse un suivi de cette recommandation.

(11 h 30)

En terminant, M. le Président, je trouve que l'opposition officielle a démontré un grand esprit de collaboration. J'étais déçu que le ministre délégué n'ait pas utilisé l'avis du Barreau du Québec. Il me semble que le Barreau du Québec joue un rôle tellement important dans notre législature. Je sais qu'on peut avoir des différences d'opinion, mais je me souviens que nous avons eu deux commissions en même temps et que, dans les deux commissions, nous avons eu une différence d'opinion sur les mots «corporation» et «société». C'est le grand continu de ce projet de loi.

S'il y a, dans nos propres commissions, ici, une contradiction; s'il y a un avis négatif du Barreau, il me semble qu'on doit tenir compte de cet avis-là. Mais, finalement, le ministre a décidé. Et j'ai eu une chance de lui demander pourquoi il n'avait pas accepté l'avis du Barreau. Il a dit que c'est parce qu'il avait reçu un avis du ministre de la Justice qui est le contraire de ça. Il a dit – mon intention, dans mes commentaires, ce n'est pas de commencer un débat – qu'il avait décidé de prendre l'avis du ministre de la Justice plutôt que l'avis du Barreau, selon la réponse dont je me souviens, et finalement il n'a pas accepté l'avis du Barreau. Il me semble, quand une instance aussi importante que le Barreau arrive avec un avis, qu'on doit tenir compte de ça.

M. le Président, je pense que l'opposition a essayé d'améliorer le projet de loi avec ses questions et plus particulièrement les réponses des représentants du ministère du Revenu. Nous avons, j'espère, aidé la population du Québec à mieux comprendre ce projet de loi, parce que, selon moi, M. le ministre, après trois lectures de ce projet de loi, quand je lis des articles du projet de loi, souvent c'est difficile de comprendre ce que ça veut dire, en français et en anglais. Mais, quand je sors des galées les réponses des représentants du ministère du Revenu, quand ils parlent en français – de temps en temps, en anglais – je pense qu'avec une explication moins légale on peut comprendre exactement le sens de ce projet de loi.

Avec ça, M. le Président, je termine mes commentaires sur le projet de loi n° 42. Merci beaucoup pour cette opportunité.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres interventions concernant l'adoption du projet de loi n° 42?


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 42, Loi concernant l'harmonisation au Code civil du Québec de certaines dispositions législatives d'ordre fiscal, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je vous demande de prendre en considération l'article 4 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 81


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à l'article 4 du feuilleton, M. le ministre délégué au Revenu propose l'adoption du principe du projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions? Alors, M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Merci, M. le Président. Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur a pris connaissance de ce projet de loi et il en recommande l'étude à l'Assemblée. Conséquemment, je soumets donc à la présente Assemblée, pour qu'elle en adopte le principe, le projet de loi n° 81, loi intitulée Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives.

Il s'agit d'un projet de loi qui, à l'instar de la plupart des projets de loi à caractère fiscal qui ont été présentés devant cette Assemblée au cours des dernières années, contient un grand nombre de mesures à caractère aussi technique. Il abroge deux lois et il en modifie plusieurs autres, dont la Loi sur les impôts, la Loi sur le ministère du Revenu et la Loi sur la taxe de vente du Québec, et ceci, afin de donner suite principalement aux divers discours sur le budget du ministre des Finances du Québec.

Tout d'abord, M. le Président, tel que mentionné précédemment, le projet de loi abroge la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux et la Loi sur les stimulants fiscaux au développement industriel en raison de leur désuétude. Il modifie par ailleurs plusieurs lois. Ainsi, ce projet de loi modifie notamment la Loi concernant les droits sur les transferts de terrains, qui assujettit au paiement de droits les transferts de terrains situés au Québec faits au profit d'acquéreurs qui ne résident pas au Canada. Au cours des dernières années, son champ d'application est devenu très limité en raison d'assouplissements qui y ont été apportés. Toutefois, les coûts d'observation liés à son application sont devenus relativement importants. Alors, par conséquent, la modification apportée à la loi met fin à ce régime en soustrayant de son application tout transfert fait après le dernier discours sur le budget relatif à un terrain situé au Québec.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la fiscalité municipale afin de préciser l'assujettissement, à la taxe payable à titre de taxe foncière municipale, d'une personne qui produit de l'énergie électrique au Québec lorsque cette énergie est fournie à une personne qui exploite un réseau de production, de transmission ou de distribution de ce type d'énergie.

Il modifie en outre la Loi constituant le Fonds de solidarité des travailleurs du Québec et la loi constituant Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi, principalement pour abaisser de 60 à 55 ans l'âge à compter duquel un particulier qui se prévaut d'un droit à la retraite ou à la préretraite peut obtenir le rachat d'une partie ou de la totalité de ses actions du FSTQ ou de Fondaction, selon le cas.

Le projet de loi n° 81 modifie par ailleurs la Loi sur les impôts principalement afin d'y modifier ou d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec.

J'aborderai maintenant, M. le Président, quelques-unes des règles modifiées ou introduites par le projet de loi n° 81 et qui concernent la Loi sur les impôts. Premièrement, la réduction progressive de certains crédits d'impôt non remboursables. Actuellement, la législation fiscale accorde des crédits d'impôt non remboursables aux personnes vivant seules, à celles de 65 ans ou plus et à celles bénéficiant de certains revenus de retraite. Ces trois crédits d'impôt sont accordés intégralement sans égard au niveau de revenus des particuliers concernés. Dans l'état actuel des finances publiques et dans une optique de meilleure équité, il n'apparaît pas approprié de continuer à accorder ces crédits d'impôt sans tenir compte du niveau de revenus de ces particuliers. Par conséquent, il est proposé qu'à compter de l'année 1996 les montants servant de base au calcul de ces trois crédits d'impôt soient dorénavant réduits progressivement en fonction du revenu net du particulier concerné.

Le second sujet, parallèlement à l'abaissement de l'âge à compter duquel un actionnaire peut demander le rachat de ses actions émises par le FSTQ et par Fondaction en cas de retraite ou de préretraite, traite du crédit d'impôt non remboursable relatif à l'acquisition de ses actions, qui passe de 20 % à 15 %, et du plafond annuel de telles actions, qui est fixé à 3 500 $.

Le troisième sujet est relatif aux règles concernant les régimes enregistrés d'épargne-logement de manière à permettre le retrait sans imposition des fonds accumulés dans de tels régimes et utilisés pour la réalisation de travaux de rénovation admissibles à l'égard du logement qui est habité par le bénéficiaire de ces régimes à titre de propriétaire occupant. De plus, il est prévu que ces régimes non encore liquidés au 31 décembre 1999 soient révoqués à cette date.

Un autre sujet concerne la mise en place, dans le cadre de ce projet de loi, d'une mesure relative à la culture et aux communications, soit l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable pour la production de titres multimédias. En outre, le traitement fiscal avantageux est accordé à l'égard des titres disponibles en français et destinés au marché de la consommation.

Il me fait plaisir de souligner également, par le biais d'un autre sujet, l'effort du gouvernement pour venir en aide à l'industrie navale au Québec, d'une part par l'introduction d'un nouveau crédit d'impôt remboursable pour la construction navale et, d'autre part, par la réduction de la taxe sur le capital pour l'acquisition d'un navire.

Par ailleurs, un autre sujet touche l'assujettissement des caisses d'épargne et de crédit, de Fondaction, le Fonds de développement de la Confédération des syndicats nationaux pour la coopération et l'emploi, et du Fonds de solidarité des travailleurs du Québec au paiement de la taxe sur le capital.

M. le Président, un autre sujet concerne les sociétés d'assurance. Actuellement, la législation fiscale, à l'instar de celle d'autres provinces, assujettit les sociétés d'assurance au paiement de la taxe sur le capital calculé en fonction des primes payables en considération d'un contrat d'assurance. Toutefois, depuis plus de 15 ans, le taux de cette taxe est demeuré inchangé, contrairement au taux applicable pour la plupart des autres sociétés. Alors, afin d'obtenir un effort comparable des sociétés d'assurance, il est proposé d'instaurer dans la législation fiscale québécoise une taxe additionnelle sur le capital des sociétés d'assurance sur la vie.

(11 h 40)

Enfin, M. le Président, ce projet de loi donne suite à la déclaration ministérielle du vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances du 26 novembre 1996 concernant la constitution du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail. Cette mesure, qui a reçu l'aval des participants au Sommet sur l'économie et l'emploi tenu l'automne dernier, permettra au gouvernement d'accentuer le retour à l'emploi des personnes les plus démunies de notre société. Ainsi, en facilitant l'accès à l'emploi, ce fonds permettra de combattre la pauvreté en favorisant la réinsertion au travail de ces personnes.

Par ailleurs, vous vous souviendrez certainement que le dernier discours du budget instaurait des mesures visant à assouplir la réglementation afférente aux producteurs de boissons alcooliques, particulièrement en rapport avec la production artisanale. À cet égard, les mesures annoncées visaient à élargir en faveur des producteurs artisanaux le droit de vente directe au consommateur sur les lieux de production. Par conséquent, des modifications sont apportées également à la Loi sur les licences, en concordance avec ces nouvelles règles.

Ce projet de loi modifie de plus certaines mesures d'ordre administratif contenues dans la Loi sur le ministère du Revenu, de manière, d'une part, à faciliter la perception des créances fiscales et à faire respecter diverses obligations fiscales touchant particulièrement les mandataires du ministère du Revenu dans leur rôle de percepteurs des taxes et autres droits prévus par une loi fiscale et, d'autre part, à étendre certains pouvoirs du ministre du Revenu, notamment en matière de compensation de production de documents, de cotisations des administrateurs d'une personne morale et de certificats d'inscription.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec afin d'y introduire, pour certaines sociétés qui ne sont pas entièrement exemptées d'impôts, par ailleurs, un allégement relativement à la cotisation qu'elles doivent verser en tant qu'employeur au Fonds des services de santé.

Le projet de loi modifie également la Loi sur la taxe de vente du Québec. Ce projet de loi, donc, tient notamment compte de la transformation en crédit d'impôt des déductions pour cotisation syndicale, cotisation professionnelle et cotisation à une association artistique reconnue, afin de maintenir le remboursement antérieur prévu à cet égard. Quoiqu'il ne s'agisse plus d'une déduction aux fins de l'impôt sur le revenu, les modifications apportées assurent le maintien du remboursement de la TVQ payée à l'égard d'une telle cotisation.

Le régime de la TVQ prévoit une règle de fourniture à soi-même selon laquelle le constructeur d'un immeuble d'habitation qui commence à en effectuer la location à des fins résidentielles est réputé s'être fourni l'immeuble par vente et doit conséquemment payer la TVQ calculée sur la juste valeur marchande de l'immeuble à ce moment. Alors, ce projet de loi assouplit l'application de cette règle de fourniture à soi-même à l'égard d'une entreprise qui construit un immeuble d'habitation à logement unique ou un logement en copropriété dans le but de le vendre, mais qui en effectue la location temporaire à des fins résidentielles en attendant de le vendre. Ainsi, une telle entreprise pourra désormais reporter jusqu'à 12 mois le paiement du montant de la TVQ qu'elle doit acquitter en raison de l'application de la règle de fourniture à soi-même en effectuant un choix à cet effet avant la fin du mois suivant celui où cette règle s'est appliquée.

Enfin, M. le Président, au titre de la taxe sur les boissons alcooliques, ce projet de loi apporte des modifications similaires à celles discutées plus tôt relativement à la Loi sur les licences. Ainsi, il modifie cette loi pour tenir compte des mesures visant à élargir en faveur des producteurs artisanaux le droit de vente directe au consommateur sur les lieux de production.

Je vous fais grâce, M. le Président, de l'énumération des autres sujets abordés par le projet de loi n° 81, puisque les notes explicatives de ce projet de loi en font état et que nous aurons l'occasion de les examiner plus en détail à l'occasion de la commission parlementaire. J'invite donc les membres de cette Assemblée à adopter le principe du projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf. Alors, nous cédons maintenant la parole au député de Nelligan et critique officiel de l'opposition. Alors, M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Merci pour cette chance de faire quelques commentaires en introduction du projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives; Bill 81, An Act to amend the Taxation Act, the Act respecting the Québec sales tax and other legislative provisions.

M. le Président effectivement, c'est un projet de loi omnibus. Ça touche plusieurs lois, selon mon information. Nous sommes en train d'amender 18 lois québécoises et nous sommes en train d'abroger deux projets de loi québécois. Il me semble qu'effectivement ça mérite une étude assez profonde, M. le Président, parce que, quand j'ai relu le budget de l'année passée, il me semble que peut-être le ministre délégué au Revenu n'a pas nécessairement compris ou le gouvernement n'a pas compris quand le ministre des Finances a dit trop d'impôt tue l'impôt. Et la population québécoise a demandé d'avoir moins d'impôts, moins de taxes et moins de règlements.

Mais vous trouvez dans ce projet de loi, dans mon opinion, aucun vrai changement de règlement, de déréglementation, et aussi il y a certainement plusieurs mesures d'augmentation de taxes. On peut juste en nommer quelques-unes, et, comme j'ai mentionné, M. le Président, il y a tout un lexique ici, à l'Assemblée nationale, des mots qui ne disent pas le mot «taxe», mais qui sont des synonymes pour «taxe». C'est une autre façon de fouiller dans les poches des Québécois. On peut juste citer les notes explicatives, n° 6, page 3: «la réduction progressive des montants servant de base au calcul des crédits d'impôt non remboursables accordés aux personnes vivant seules, à celles qui ont atteint l'âge de 65 ans et à celles qui ont certains revenus de retraite»; en 11°, «la limitation du crédit d'impôt pour pertes aux seules sociétés qui peuvent pleinement bénéficier du taux préférentiel d'imposition de 5,75 %» – c'est une limitation de crédit d'impôt; l'autre, c'est une réduction progressive, en 12°, «l'abolition, pour les grandes sociétés, de la limite au remboursement de certains crédits d'impôts» – une abolition; «l'instauration d'une taxe additionnelle sur le capital applicable aux sociétés d'assurance sur la vie», au n° 19.

Le ministre a parlé lui-même de la contribution au Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail, mais effectivement, M. le Président, c'est une autre taxe. Et aussi j'ai vu à la page 5 des notes explicatives, M. le Président, que, encore une fois, c'est des mesures coercitives. On cherche, en 8°, 9° et 10°, un pouvoir de pénalité à l'égard d'une personne, pouvoir de pénalité et aussi un pouvoir d'une amende. Avec ça, encore une fois, M. le Président, le fisc, le ministère du Revenu est en train de créer ou de demander plus de pouvoirs pour, dans mon opinion, dans plusieurs cas, harceler plusieurs contribuables. Mais je vais donner une chance au ministre d'expliquer pendant la deuxième lecture de ce projet de loi ce que ça veut dire exactement, ce pouvoir d'amende et ce pouvoir de pénalité.

Je trouve ça assez intéressant qu'il y ait deux tendances, dans ce projet de loi, M. le Président. Il y en a une qui m'a frappé au début, à la première lecture de ce projet de loi, le deuxième article de ce projet de loi, qui est le seul qui parle d'un certain discours du budget. Mais j'ai trouvé ça un peu surprenant de voir cette note explicative, et je voudrais juste la citer: «Il donne aussi suite d'une manière accessoire à certaines mesures prévues dans le discours du budget du ministre des Finances du 20 mai 1993.» Le 20 mai 1993, c'est presque quatre ans passés. Il me semble qu'en ce temps-là c'était un autre gouvernement et il me semble que le ministre du Revenu – je sais que le député de Portneuf n'a pas toujours été le ministre délégué au Revenu – il me semble que le gouvernement arrive un peu tard avec cette affaire. Et je voudrais certainement lui demander encore une fois, comme j'ai fait dans le projet de loi n° 42, pourquoi ça arrive aussi tard, comme ça, les changements.

Mais je vois une autre tendance qui est assez claire aussi dans ce projet de loi, parce que les premiers articles parlent de mettre en vigueur les autres discours du budget, incluant le discours du budget 1996. Et vous voyez ça sur le terrain, M. le Président, que le gouvernement est en train d'essayer de collecter ou d'essayer d'avoir tout le pouvoir de ramasser le plus grand nombre de taxes, de taxes cachées, de taxes déguisées possible.

Pendant la commission parlementaire sur la loi 198, j'ai questionné le sous-ministre sur, selon mon opinion, l'appétit insatiable d'avoir l'information de la population québécoise, mais aussi souvent une approche insensible de la réalité des contribuables québécois.

Je voudrais, pendant l'étude article par article de ce projet de loi, questionner le ministre. Parce qu'il me semble ce n'est pas le temps d'avoir une réponse: C'est vraiment juste technique. Je suis juste le messager. Je suis en train de juste mettre en vigueur ce qu'un autre ministre a déjà dit. Je suis juste en train de mettre en place un discours du budget ou aussi un avis ou un bulletin d'information du ministre des Finances.

J'espère que, pendant l'étude article par article de ce projet de loi, on pourra avoir un débat de fond qui pourra donner une chance à la population québécoise de savoir ce qui se passe, de savoir pourquoi le gouvernement a recommandé ces mesures et aussi de savoir: Est-ce qu'elles sont efficaces et est-ce qu'il a le temps de changer quelques-unes des choses déjà annoncées dans les budgets du passé?

(11 h 50)

M. le Président, vous savez que la population québécoise veut avoir un gouvernement qui contrôle les dépenses publiques, veut avoir un gouvernement qui respecte sa signature, veut avoir un gouvernement qui est compétent et capable de gérer. Et, selon mon opinion, ce projet de loi n° 81, c'est un autre exemple du manque de vision de ce gouvernement, qui n'arrive pas avec des nouvelles façons de faire pour respecter la volonté de la population québécoise.

M. le Président, une autre chose que j'ai demandée, et je voudrais répéter ça en ondes, c'est que peut-être que ça a été juste un oubli du ministre délégué, mais souvent, avec les projets de loi, nous avons recommandé la meilleure façon d'étudier des projets de loi. Comme vous le savez, ce matin nous avons, des deux côtés, parlé de la complexité de ces projets de loi. J'ai demandé au ministre délégué au Revenu de s'assurer à l'avance, et pas juste la soirée avant, d'avoir la documentation, les documents pertinents, les notes explicatives de tous les articles de loi; ça me donnerait la chance, avec nos ressources, d'étudier ça. Le ministre a accepté de faire ça. J'ai apprécié ça beaucoup parce que je pense que ça peut faciliter la discussion. J'attends ça dans les plus brefs délais. Je sais que ce n'est pas nécessairement aujourd'hui que nous allons continuer la prochaine étape, mais je voudrais avoir la chance de vraiment étudier ce projet de loi. Parce que souvent un petit article de loi, comme je voudrais en mentionner un, l'introduction d'une déduction pour les employés qui cotisent à une convention de retraite, c'est juste quelques mots, mais ça peut avoir un impact majeur sur la population québécoise, et je voudrais avoir vraiment toute l'information possible avant qu'on puisse approuver ces articles de loi.

Il y a aussi plusieurs articles de la loi qui disent qu'on doit étendre la responsabilité des administrateurs d'une société. Je voudrais savoir pourquoi et comment nous sommes en train d'étendre les responsabilités des administrateurs.

Mais, effectivement, dans chaque article de la loi, il y a des questions de fond. J'espère que la commission du budget et de l'administration, qui va étudier ça bientôt, va avoir la chance de discuter le fond de ces articles, pas juste les technicalités de ces articles, mais d'avoir vraiment une chance, enregistrée en commission, d'assurer que la population, un, est au courant de ce que le gouvernement est en train de faire et, deux, d'avoir une chance de faire des commentaires. J'espère que ceux et celles qui sont touchés par ce projet de loi ont été consultés.

Une des questions que je vais demander au ministre délégué au Revenu, c'est: C'était quoi, le niveau de consultation qu'il a fait en préparation de ce projet de loi? Parce qu'il me semble qu'on doit, particulièrement avec l'expérience que nous avons juste eue avec le projet de loi n° 42 – s'assurer que... Est-ce que le projet de loi n° 81 tel qu'écrit – pas tel qu'amendé, mais tel qu'écrit – va répondre vraiment aux intérêts de la population québécoise? Et aussi est-ce que ça va répondre à l'objectif, tel qu'expliqué par les législateurs?

Finalement, M. le Président, je voudrais juste dire que, comme pour tous les autres projets de loi d'ordre fiscal, l'opposition officielle va travailler avec bonne foi et en collaboration. Notre but est d'assurer que nous ayons une loi qui protège les intérêts de la population québécoise, qui soit bien écrite et qui réponde à toutes nos questions. J'espère que nous allons avoir la chance d'expliquer comment ce projet de loi n° 81 met en vigueur l'esprit et le discours du budget 1996-1997 et, s'il y a des contradictions, j'espère qu'un représentant du côté ministériel va avoir le courage de dire: Effectivement, ce n'est pas ça qu'on veut faire, et qu'il va avoir le courage de changer ça et d'améliorer ce projet de loi. J'offre ma collaboration et j'espère que nous allons procéder à l'étude article par article de ce projet de loi. Et je voudrais juste dire en terminant, M. le Président, que j'espère que le projet de loi n° 81 ne va pas être oublié cette session comme le projet de loi n° 42 a été oublié à la dernière session. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Y a-t-il d'autres interventions sur l'adoption du principe du projet de loi n° 81?


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 81, Loi modifiant la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.


Renvoi à la commission du budget et de l'administration

Mme Caron: Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission du budget et de l'administration pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, considérant l'heure, nous allons maintenant suspendre les activités à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 58)

(Reprise à 14 h 5)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.


Affaires courantes

Très bien. Si vous voulez vous asseoir. Alors, nous débutons immédiatement la période des affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article a de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 100

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire présente le projet de loi n° 100, Loi modifiant la Loi électorale et d'autres dispositions législatives concernant la liste électorale permanente. M. le ministre délégué à la Réforme électorale et parlementaire.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, ce projet de loi modifie la Loi électorale pour compléter et préciser les dispositions relatives à la liste électorale permanente. Il reconnaît le droit de tout électeur d'être inscrit sur la liste électorale permanente et permet à l'électeur de choisir d'y être inscrit pour les seules fins d'un scrutin provincial, municipal ou scolaire. De plus, le projet prévoit qu'un électeur peut s'inscrire à la liste devant servir à un scrutin sans être inscrit à la liste électorale permanente.

En matière de mise à jour de la liste électorale permanente, le projet de loi précise que la Régie de l'assurance-maladie du Québec transmet au Directeur général des élections les informations relatives à une personne qui atteindra l'âge de 18 ans et autorise le Curateur public à informer le Directeur général des élections de l'ouverture d'un régime de curatelle en faveur d'une personne majeure.

En matière de transmission de la liste électorale, le projet de loi prévoit que dès la prise du décret le Directeur général des élections transmet au directeur du scrutin et aux partis politiques la liste devant servir à une élection et que cette liste comprend les électeurs dont les demandes de changement à la liste électorale permanente ont été reçues avant la prise du décret.

De plus, le projet de loi prévoit qu'au cours d'une période électorale un avis doit être expédié à chaque adresse indiquant les électeurs qui y sont inscrits ou mentionnant, le cas échéant, qu'aucun électeur n'y est inscrit. Le projet de loi confie aux commissions de révision la responsabilité de vérifier les renseignements relatifs aux électeurs pour lesquels le Directeur général des élections n'est pas en mesure d'assurer la mise à jour de leur inscription sur la liste électorale permanente.

Enfin, le projet de loi apporte des modifications de concordance à la Loi sur l'Assemblée nationale, à la Loi sur la consultation populaire et à la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités.


Mise aux voix

Le Président: Bien. L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article b de notre feuilleton, M. le Président.


Projet de loi n° 97

Le Président: À l'article b du feuilleton, Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce présente le projet de loi n° 97, Loi sur le Centre de recherche industrielle du Québec. Mme la ministre déléguée.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Ce projet de loi a pour objet de permettre au Centre de recherche industrielle du Québec de continuer son existence comme personne morale de droit public dotée d'un fonds social.

Le Centre aura principalement pour mission de concevoir, développer, mettre à l'essai des équipements, produits et procédés et d'exploiter, seul ou avec des partenaires, les équipements, produits et procédés qu'il a développés ou dont il détient les droits.

Ce projet de loi modifie la composition du conseil d'administration du Centre, qui sera désormais formé de neuf membres nommés par le gouvernement, dont un président-directeur général. Il contient des règles relatives aux conflits d'intérêts et à la protection des administrateurs en cas de poursuite.

Ce projet de loi contient, de plus, des dispositions financières précisant notamment le fonds social autorisé du Centre ainsi que les modalités d'exercice des engagements financiers qu'il est autorisé à prendre. Il comporte enfin des dispositions de nature transitoire.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.


Message du lieutenant-gouverneur

M. Landry (Verchères): M. le Président, un message de Son Honneur Mme le lieutenant-gouverneur du Québec signé de sa main.


Crédits pour l'année financière 1997-1998

Le Président: Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet à l'Assemblée nationale les crédits pour l'année financière se terminant le 31 mars 1998 conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867 et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée. L'honorable Lise Thibault.

Alors, je dépose ce document. Veuillez vous asseoir. M. le vice-premier ministre et ministre d'État de l'Économie et des Finances.

M. Landry (Verchères): M. le Président, pour donner suite au message de Son Honneur Mme le lieutenant-gouverneur, qu'il me soit permis de déposer les crédits pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1998 ainsi que les renseignements supplémentaires.

Le Président: Alors, ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission plénière

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour déférer les crédits budgétaires 1997-1998 en commission plénière afin que l'Assemblée étudie et adopte, conformément à l'article 280 du règlement, le quart de ces crédits.

Le Président: Alors, cette motion est-elle adoptée?

M. Paradis: Adopté.


Prévisions budgétaires de l'Assemblée nationale pour l'année financière 1997-1998

Le Président: Adopté. Je dépose, de mon côté, les prévisions budgétaires de l'Assemblée nationale pour l'année financière 1997-1998.

(14 h 10)


Copie du jugement de la Cour d'appel dans la cause Robert Thérien contre Marcelle Pellerin et autres et lettre du DGE au président

Le 4 mars dernier, le Directeur général des élections me transmettait, conformément aux exigences de l'article 477 de la Loi électorale, une copie certifiée conforme du jugement de la Cour d'appel, rendu le 3 mars dernier, dans l'affaire Robert Thérien contre Marcelle Pellerin et Pierre-F. Côté, et autres.

Dans sa lettre de transmission, le Directeur général des élections m'informe que, et je cite, «la Cour d'appel annule l'élection tenue dans la circonscription électorale de Bertrand le 12 septembre 1994 et par laquelle M. Robert Thérien a été proclamé élu.

«En conséquence, le siège du député de la circonscription électorale de Bertrand est vacant en date du 3 mars 1997 et les dispositions de l'article 130 de la Loi électorale trouvent leur application.» Alors, je dépose ces deux documents.


Copie du jugement de la Cour d'appel concernant une requête pour l'émission d'une ordonnance de sursis présentée par M. Robert Thérien

Je dépose également copie du jugement de la Cour d'appel rendu le 7 mars 1997 qui rejette une requête pour l'émission d'une ordonnance de sursis présentée par M. Robert Thérien en vertu de l'article 522.1 du Code de procédure civile.


Copie de l'ordonnance de la Cour suprême du Canada dans la cause Robert Thérien contre Marcelle Pellerin et autres et lettre du DGE au président

Finalement, le Directeur général des élections m'a transmis aujourd'hui une copie certifiée conforme de l'ordonnance de l'honorable juge Cory de la Cour suprême du Canada rendue le 14 mars 1997. Dans sa lettre de transmission, le Directeur général des élections mentionne, et je cite: «Par cette ordonnance, l'honorable juge Cory refuse le sursis d'exécution demandé par M. Thérien du jugement final de la Cour d'appel annulant l'élection tenue dans la circonscription électorale de Bertrand, le 12 septembre 1994.» Je dépose également ces deux documents.

Au dépôt de rapports de pétitions, il n'y a pas de dépôt aujourd'hui. Est-ce qu'il y a dépôt de rapports de... Oui? Je m'excuse, j'aurais dû dire «dépôt de rapports de commissions».


Dépôt de pétitions

On est rendu maintenant au dépôt de rapports de pétitions. Mme la députée de Rimouski.

Mme Charest: M. le Président, je demande de pouvoir présenter la pétition, même si elle n'est pas conforme. C'est en lien avec les agressions sexuelles chez les enfants.

Le Président: Consentement pour un dépôt de pétition non conforme au règlement? Alors, il y a consentement, vous pouvez y aller, Mme la députée.


Rendre les sentences accordées aux agresseurs sexuels conformes aux peines prévues au Code criminel canadien

Mme Charest: Je dépose l'extrait d'une pétition par 11 938 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que la moitié de la population féminine du Québec vit une agression à caractère sexuel avant l'âge de 16 ans;

«Considérant que les agressions sexuelles sont les crimes les moins dénoncés;

«Considérant que 66 % des actes de violence pouvant faire l'objet d'une poursuite au criminel sont de nature sexuelle;

«Considérant les effets dévastateurs qu'engendrent les agressions sexuelles chez les femmes et les enfants qui en sont victimes ainsi que leurs proches;

«Considérant que le contexte de la déjudiciarisation et la diminution des places en détention peuvent avoir un impact sur les sentences rendues en matière d'agression sexuelle.

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous, soussignés, demandons que les mesures nécessaires soient prises afin que les sentences accordées aux agresseurs sexuels soient conformes aux peines prévues au Code criminel canadien, puisque la légèreté des sentences rendues par les juges de la Cour du Québec, notamment, banalise les conséquences de ces crimes chez les victimes et décourage ces dernières à porter plainte.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition, M. le Président. Merci.

Le Président: Merci, Mme la députée. Alors, cette pétition est déposée.

Il n'y a pas aujourd'hui d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Questions et réponses orales

Nous en arrivons donc immédiatement à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Effets des compressions budgétaires sur le financement et le maintien des services publics

M. Johnson: Oui, M. le Président. Aujourd'hui, le ministre des Finances a déposé le budget de dépenses préparé par son collègue du Conseil du trésor, et je suis frappé, un peu comme tout le monde, de voir qu'encore une fois il y a des fictions qui semblent avoir la vie dure.

Dans les présentations qui ont été faites, dans les interventions qu'on peut soupçonner déjà des ministres du côté gouvernemental, on entendra que, comme disait le premier ministre, il n'y a pas d'augmentation de taxes, le contribuable n'est pas touché, les citoyens ne sont pas touchés, les élèves ne sont pas touchés, les malades ne sont pas touchés, c'est l'administration, c'est la machine, ce sont les services de structure, c'est la structure, alors que, à l'évidence, dans les livres des crédits, ce qu'on constate, c'est qu'il y a au moins, du côté du scolaire, une centaine de millions qui devra être récupérée dans l'assiette fiscale foncière scolaire, qu'il y aura une centaine de millions au niveau municipal à l'égard du financement des services de la Sûreté du Québec, une centaine de millions qui va frapper les universités, probablement en sous-financement, mettant en péril la qualité de l'enseignement postsecondaire au Québec, et qu'à tout le moins on n'entend, du côté du gouvernement, pas du tout se formaliser de laisser porter à environ 250 000 000 $ – ce sont les estimés qui circulent – l'endettement de nos hôpitaux, qui étaient autrefois en équilibre financier, en raison du sous-financement.

Est-ce que le premier ministre maintient sa fiction qu'il a répétée à de nombreuses reprises que, selon lui, tous ces gestes font en sorte que les citoyens ne soient pas touchés, les élèves ne soient pas touchés, les malades ne soient pas touchés et les contribuables ne soient pas touchés et que ce soient la machine, l'administration et la structure qui soient touchées par des gestes qui, dans le fond, touchent tous les Québécois dans leurs poches ou dans les services publics?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le chef de l'opposition aime parler de fiction; nous, nous disons que nous sommes en face de la réalité, une réalité qui est celle d'une situation financière que nous devons redresser. Nous sommes en train d'y arriver, nous sommes en train d'emprunter l'autre versant de la réussite. Nous avons un dernier budget – et j'inclus les crédits dans cela – qui reste difficile, mais c'est le dernier exercice difficile que nous nous imposons. En réalité, nous n'avons jamais caché à personne que nous avons cet effort à faire et que, cette année, il faudrait que l'équité s'inscrive au coeur des critères de répartition de l'effort.

Et on aura noté en particulier qu'au titre des dépenses de main-d'oeuvre nous avons prévu, par rapport au personnel syndiqué, 800 000 000 $ sur une base annuelle récurrente. C'est dire, donc, que nos personnels syndiqués sont mis à contribution. Il y a également, bien sûr, ces personnels que constituent les juges, les cadres, les médecins et autres, les élus y compris, qui seront mis à contribution. En réalité, M. le Président, il s'agit de crédits qui sont bien sûr rigoureux, mais qui sont équitables.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le premier ministre peut nous expliquer comment, dans les gestes que je viens d'isoler, dans ce qu'on retrouve dans le livre des crédits: augmentation des taxes scolaires de 100 000 000 $, augmentation des taxes municipales de 100 000 000 $, sous-financement des universités d'une centaine de millions – ça va avoir ses effets quelque part, là – et une augmentation des déficits accumulés des hôpitaux à 250 000 000 $, un quart de milliard de dollars, comment ce qu'il appelle sa réalité, c'est conforme aux fictions qu'il entretient, que seules la machine, l'administration et les structures sont touchées et non pas les services aux citoyens? Est-ce qu'il ne se rend pas compte qu'il laisse se détériorer les services publics, incapable qu'il est de financer quoi que ce soit autrement que par des coupures et non pas par du développement économique?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: En aucune façon. La qualité des services publics sera maintenue. Il est évident cependant que...

Des voix: ...

M. Bouchard: Certainement, M. le Président, c'est un objectif que nous poursuivons.

Des voix: ...

Le Président: M. le premier ministre.

(14 h 20)

M. Bouchard: M. le Président, je crois qu'il faut quand même noter ce qu'on dit. La question était: Est-ce qu'on ne va pas affecter les services? J'ai dit: En aucune façon, parce que la qualité des services publics va être maintenue. C'est un engagement du gouvernement, et nous allons le respecter.

M. le Président, si on regarde l'ensemble des crédits, ils sont conformes à tous les engagements que le gouvernement avait contractés. Ils respectent de toutes les façons les cibles que nous devons nous assigner, qui ont été fixées par des consensus deux fois réitérés par des sommets économiques où tous les décideurs du Québec étaient convoqués. Et on verra que, oui, c'est vrai que, par exemple, dans les commissions scolaires, certaines pourraient être obligées de demander une contribution à leurs concitoyens. Ça ne va pas excéder les plafonds qui sont déjà fixés, ça n'affecte pas les plafonds. Ce sera partiel. C'est certaines d'entre elles qui seront astreintes à le faire, à un montant qui ne dépassera pas 100 000 000 $, d'après nos estimations.

Nous pensons, M. le Président, que ces crédits sont parfaitement réalisables, qu'il n'y a de surprise pour personne, que nous avons annoncé tout cela et que nous pourrons maintenir la qualité des services tout en redressant le Québec et en relançant l'emploi.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Sur le fait que les services sont maintenus, est-ce qu'on peut inviter le premier ministre à parcourir certains des hôpitaux de la région de Québec, de Montréal, de la Mauricie, des Bois-Francs, de l'Estrie ou quoi que ce soit? Est-ce que le premier ministre est au courant de la détérioration réelle des services?

Mais, pour revenir au point principal, est-ce que le premier ministre, au lieu de nous dire qu'il respecte l'atteinte de ces objectifs, pourrait nous indiquer comment il respecte sa parole, ce qui est probablement beaucoup plus important, en assurant les Québécois qu'il y a de l'espoir en termes d'emplois pour financer les services publics, qu'il y a de l'espoir de relancer l'économie pour avoir des revenus pour financer les services publics, et que ce qui est au coeur des actions du gouvernement, c'est de couper, de couper et de couper parce qu'il est incapable de créer des revenus qui peuvent payer pour les services publics?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Les crédits ne sont pas un exercice qui définit les politiques fiscales et économiques du gouvernement. Les crédits, ça définit les dépenses que nous allons faire et, en l'occurrence, des dépenses qui vont être diminuées, dans un effort global, de 6,4 % par rapport à l'an passé, 2 300 000 000 $, légèrement supérieur, à peu près équivalent à l'an dernier en termes de diminution de dépenses. Quant aux politiques de résurgence de l'emploi, aux politiques d'investissement, aux politiques fiscales, aux politiques de revenus, il faudra voir le budget qui viendra.

Le Président: En principale, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Négociations dans le secteur public

M. Chagnon: Oui, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer si les négociations sont terminées dans les secteurs public et parapublic?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, au cours des récentes journées et des récentes heures, je dirais presque jour et nuit, les gens ont travaillé activement aux tables de négociation. Je crois même que tous les syndicats se sont présentés à la table, maintenant, y compris la FAS et la CEQ, même du côté des enseignants et des enseignantes, et que beaucoup d'idées ont été brassées. Des mesures imaginatives et nouvelles ont été proposées de part et d'autre et examinées, et ce matin, à 8 heures, le gouvernement a conclu l'exercice en déposant de façon ultime la totalité des propositions et des idées nouvelles qui ont été brassées en fin de semaine afin que les centrales et les syndicats puissent retourner voir leurs instances et décider comment ils vont réagir à cette proposition qui reflète, en très grande partie, des propositions qui ont émané des deux côtés.

Nous avons dit, ce matin, lorsque cette offre a été déposée, cette proposition globale et ultime a été déposée, que la réponse devait venir au plus tard demain soir.

Le Président: En principale, à nouveau, M. le député de Westmount–Saint-Louis.


Contribution des employés du secteur public au redressement des finances publiques

M. Chagnon: Oui, M. le Président. Le premier ministre a souvent fait état, comme il l'a fait aussi il y a quelques minutes, de la façon dont l'ensemble des employés du gouvernement devra participer au redressement du budget du gouvernement.

Or, dans le budget de dépenses qui nous a été déposé, on remarque que la différence entre les dépenses probables de cette année et les crédits que nous aurons à voter pour l'année qui vient représente une diminution des dépenses du gouvernement de 814 000 000 $. On s'aperçoit que l'effort budgétaire demandé aux syndiqués, en représentant les coûts de main-d'oeuvre, est de 831 000 000 $.

Est-ce que le premier ministre peut nous indiquer quand il a dit aux employés syndiqués ou non syndiqués des secteurs public et parapublic qu'ils auraient à défrayer 100 % du coût de diminution des dépenses du gouvernement?

Des voix: Oh! Oh!

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, vous aurez vu que nous avons déposé aujourd'hui des crédits qui sont la troisième année d'un plan qui donne des résultats et au terme de laquelle nous aurons les trois quarts du chemin de parcouru vers l'équilibre des finances publiques.

M. le Président, quand le député pose sa question, il fait des calculs, mais des calculs tronqués. L'effort budgétaire que nous demandons présentement, cette année, est de 2 328 000 $ et, sur les coûts de main-d'oeuvre, ils sont à la hauteur de 831 000 000 $. C'est cela, c'est 36 % sur ces coûts de main-d'oeuvre là, 36 %. Si l'on comprend toutes autres mesures qui peuvent avoir une incidence, c'est moins de 50 %, mais c'est le chiffre qu'il faut comparer.

Le député compare simplement des dépenses probables avec des crédits que nous avons cette année et en termes de diminution de dépenses, mais il oublie le 195 000 000 $ non récurrent. Quoi qu'il en soit, il ne s'agit que de la réduction des dépenses et non de l'effort total. Le rapport qu'il faut faire, c'est à l'effort total.

Le Président: M. le député.

M. Chagnon: M. le Président, est-ce que le ministre ne convient pas que son cours d'économie de l'école d'économie de Belgrade est un peu différent de ce qu'on retrouve dans son budget de dépenses? Son budget de dépenses prévoit 33 864 000 000 $ de crédits à être votés et on prévoit que, l'an dernier ou cette année, on aura dépensé 34 000 000 000 $. Il y a eu 114 000 000 $ de différence, pas 2 300 000 000 $. Il y a eu 114 000 000 $ de différence et nous avons à récupérer, le gouvernement cherche à récupérer 830 000 000 $ dans le salaire de ses employés. Donc, c'est les employés qui vont tout payer.

Des voix: C'est ça.

Le Président: M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, nous avons toujours affirmé que l'effort budgétaire que nous avions à faire comprenait la résorption de facteurs de croissance, les augmentations de salaires, entre autres, les augmentations de clientèles, lesquelles représentent des coûts de 1 300 000 000 $, plus 1 319 000 000 $, plus 1 009 000 000 $ qui sont des réductions de budgets, des réductions de dépenses, et c'est cela qu'il faut mettre en rapport avec la réduction ou l'effort sur les coûts de main-d'oeuvre.

Le Président: En principale, M. le député de Frontenac.


Budget de l'opération Carcajou pour 1996-1997 et 1997-1998 à Montréal et à Québec

M. Lefebvre: M. le Président, le 25 janvier 1996, le directeur de la Sûreté du Québec, M. Serge Barbeau, disait, en commission parlementaire, que Carcajou avait besoin d'un budget de 6 000 000 $.

Ma question au ministre de la Sécurité publique: Peut-il nous dire combien d'argent a été dépensé pour Carcajou, Montréal et Québec, pour l'année qui se termine dans quelques jours et quel est le budget Carcajou prévu et pour Montréal et pour Québec pour l'année 1997-1998?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Oui. M. le Président. Je ne voudrais pas induire la Chambre en erreur sur des chiffres précis. Je sais qu'effectivement c'est de l'ordre de plusieurs millions, pour ce qui est de l'année qui vient de se terminer. Je sais également que les efforts pour l'année en cours sont importants. Il faut comprendre cependant ceci. Il y a une opération, dans le cas de la lutte au crime organisé, qui a été distinguée en deux opérations, cette année. La lutte aux motards criminalisés continue sous le nom de Carcajou, tant à Montréal qu'à Québec. Nous avons d'ailleurs rajouté tout récemment un autre 500 000 $. Ce matin, avec les maires, on est rendu à plus de 1 000 000 $ pour les six premiers mois, juste dans la région de Québec, dans le cas de GRICO. Mais, également, la lutte contre le crime organisé a été divisée sous le nom d'une autre opération. Il y a donc des postes distincts. Mais je pourrai obtenir le chiffre précis pour l'année qui vient, pour le prochain exercice, dans le cas de Carcajou, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que je dois comprendre du ministre de la Sécurité publique – je pense que je n'ai pas le choix, là – que, lui qui ne savait pas, la semaine dernière, combien il y avait de policiers dans Carcajou Québec, il est en train de me dire cet après-midi qu'il ne sait pas combien d'argent on a dépensé sur l'année qui se termine dans quelques jours? C'est ça, sa réponse, M. le Président?

Des voix: Oui. Ha, ha, ha!

Le Président: M. le ministre.

M. Perreault: M. le Président, j'ai indiqué tout simplement ceci. Dans le cas de Carcajou, l'année dernière, je pense que ce gouvernement a fait la démonstration de sa volonté d'agir. Il l'a fait à travers Carcajou, dans le cas des motards criminalisés; il y a consacré plusieurs millions. Il l'a fait dans le cas de la lutte à la contrebande. Nous le faisons actuellement dans la région de Québec. Nous le faisons, tant pour GRICO que pour Carcajou. Tout ça représente plusieurs millions de dollars, M. le Président, sans parler des ressources mises par les forces policières de la Communauté urbaine de Montréal et de la région de Québec. Pour ce qui est des chiffres très précis, je les donnerai au député dès demain.

Le Président: M. le député.

(14 h 30)

M. Lefebvre: M. le Président, pourquoi le ministre de la Sécurité publique, qui refuse à toutes fins pratiques d'améliorer les effectifs de Carcajou autant à Montréal qu'à Québec, refuse-t-il l'opinion d'un expert en cette matière, M. Pierre Sangollo, un expert en matière de lutte au crime organisé qui disait, le 13 mars dernier, et je le cite: «Le seul moyen de ramener la paix à Québec est d'augmenter le nombre d'enquêteurs de Carcajou tout en leur donnant les outils dont ils ont besoin.»? Pourquoi refuse-t-il l'opinion d'un expert comme M. Sangollo, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Perreault: M. le Président, j'ai beaucoup de respect, effectivement, pour l'expérience et l'expertise de M. Sangollo. Je pense qu'en ces matières on doit cependant agir – comment dire? – avec à la fois sérénité et détermination. Je veux dire ceci: Je veux également me fier à ce que j'ai entendu ce matin dans le cas de la région de Québec. J'ai rencontré ce matin l'ensemble des maires de la région de Québec et j'ai entendu les commentaires. Ils en ont même fait publiquement, le maire de Québec, le maire de Saint-Nicolas et d'autres maires qui reconnaissaient la qualité de la démarche que nous sommes à faire ensemble actuellement au niveau de l'organisation des forces policières de la région de Québec, des choses qui, malheureusement, avaient pris du retard.

Nous sommes à faire cette démarche. Ce matin, nous avons convenu de rajouter des sommes. La semaine dernière, le directeur général adjoint de la Sûreté mentionnait que des ressources humaines supplémentaires étaient là pour Carcajou, et je veux dire une chose qui va être très claire: Il n'y a aucune ressource – en termes humains ou financiers – qui m'a été demandée, par les forces policières, et à laquelle je n'ai pas acquiescé, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Rivière-du-Loup.


Compressions budgétaires au ministère de la Santé et des Services sociaux

M. Dumont: Merci, M. le Président. Dans les crédits aujourd'hui, on apprend qu'environ – pour faire un chiffre rond – un tiers des coupures totales qui vont être faites vont être faites directement, dans le domaine de la santé, dans des services à la population qui ont déjà été durement touchés. Pendant ce temps-là, on s'étonne tous de voir que le nombre de fonctionnaires au ministère de la Santé va demeurer stable, et ça, malgré la création, dans les dernières années, de régies de la santé pour supposément gérer la santé en région, que le budget de ces régies pour administrer la santé en région, lui, contrairement aux services qui diminuent, augmente d'environ 12 %.

Ma question au ministre de la Santé est tout à fait simple: Comment expliquer qu'on a besoin de plus en plus de mettre de l'argent dans l'administration pour gérer moins de services?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, je ne sais pas où le député prend son information, mais, en lisant les crédits correctement et la réalité, moi, je peux vous dire que ce qui se passe, c'est la situation suivante. Dans les régies régionales – je l'ai déjà rappelé il y a quelques jours, à la période de questions – malgré l'augmentation de travail et la décentralisation, le nombre du personnel est resté stable. Dans l'ensemble des régies régionales, on trouve au total à peu près 1 200 employés, pour les 16 régions, qui sont répartis, et, si on exclut les quatre plus grandes régions qui ont des masses plus importantes, en moyenne on retrouve à peu près une cinquantaine de personnes dans une régie régionale en dehors des quatre régions les plus populeuses.

Au ministère, au cours des trois à quatre dernières années, le personnel a diminué d'à peu près 250 personnes. On est rendu à à peu près 750 présentement. Ça a été un personnel qui est monté jusqu'à 1 000. Là, je vous parle de la réalité aujourd'hui. Alors, il n'y a pas eu... Et, l'année passée, au niveau du ministère, sur tout l'aspect de l'administration du ministère, la compression a été de l'ordre de 15 % comme objectif, et on a réalisé un peu plus que 18 %. Alors, la réalité, là, c'est que toute la partie qui n'est pas directement reliée aux services – la partie administrative, le personnel qui travaille au niveau du ministère – a été diminuée au cours des dernières années, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Dumont: M. le Président, est-ce que le ministre, en demandant où je prends mes chiffres, nie que le budget qui s'appelle «Fonctionnement des régies régionales» passe, dans les crédits d'aujourd'hui, de 65 000 000 $ à 73 000 000 $? Puis est-ce que lui, qui appelle ça des services aux citoyens, a entendu parler de listes d'attente dans les régies plutôt que de listes dans les établissements?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Elle est drôle. M. le Président, l'augmentation de budget qui apparaît dans les crédits – et le député a assez d'expérience en Chambre pour savoir que les crédits, c'est une photo des dépenses à un moment donné – ce n'est pas le budget des établissements. L'augmentation d'à peu près 8 000 000 $ qui est là est le reflet de programmes qui ont été transférés sur le plan budgétaire aux régies régionales. Le plus important de ceux-là, de l'ordre de 5 500 000 $, c'est un programme qu'on appelle de fonds affectés et qui était dans différents établissements et qui sert à payer des dépenses qui sont non prévues au début de l'année. Par exemple, un exemple typique, c'est des clientèles particulières dont des familles d'accueil doivent s'occuper et qui peuvent avoir des besoins plus grands qui sont difficiles à prévoir au cours de l'année. Alors, c'est de la réaffectation, pour une meilleure rationalisation au niveau de chacune des régions, qui a été faite aux régions. Globalement, c'est une diminution de plus de 3 000 000 $, même, que ce réaménagement des crédits décèle, une diminution de plus de 3 000 000 $ dans les crédits réels de nos régies, M. le Président, si on ne calcule pas des budgets ailleurs dans la région qui leur ont simplement été transférés sur le plan administratif.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Est-ce que le ministre peut nous dire, en additionnant les effectifs qu'il nous disait qu'il était en train de réduire, mais qui sont toujours, d'après ce que je peux voir, de 874 l'année passée à 874 cette année, ce qui fait une réduction de zéro selon mes calculs, si, au total des régies et du ministère de la Santé, cette année, 1997-1998, il va y avoir plus ou moins de monde affecté à l'administration de la santé qu'il y en avait avant la création des régies régionales de la santé? Et, s'il y en a plus – ce qui est mon avis – il va falloir qu'on nous dise: Est-ce qu'on met du sérum sur les bureaux, est-ce qu'on met des plasteurs sur les formulaires ou est-ce qu'on veut offrir des services à la population ou dans la santé?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Oui. La formule est facile puis ne correspond absolument pas à la réalité. Je l'ai déjà dit, je le répète: le personnel qui n'est pas affecté directement aux services a déjà diminué. Si on prend au niveau du ministère, sur trois ans, c'est un peu plus que 25 %, la compression administrative qui a été faite. C'est ça, la réalité. Et, en cours d'année, il y aura encore, avec les programmes qui sont prévus, des diminutions d'effectifs qui sont affectés directement de l'administration. C'est vrai aussi au niveau des établissements, où ça a déjà commencé. Avec le résultat des nombreuses fusions qui ont été faites à travers tout le territoire du Québec, on a diminué le nombre d'établissements d'à peu près 170. Alors, c'est ça, la réalité. Et, si on réussit à rencontrer les objectifs budgétaires qui sont ceux que commande la situation économique du Québec présentement, aujourd'hui, en maintenant le niveau de services et en développant même des nouveaux services au niveau du maintien à domicile, au niveau d'Info Santé, au niveau des CLSC, c'est parce qu'il y a eu de ce genre de transferts là. Alors, il faut vraiment regarder les vraies choses au bon moment puis à la bonne place, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.


Action policière dans le règlement des conflits entre groupes de motards criminalisés à Montréal

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Vendredi dernier, dans le comté de Marquette, nous avons frôlé la catastrophe.

Des voix: Oh!

M. Ouimet: Dans la...

Le Président: M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, dans la guerre opposant les bandes de motards, une bombe a explosé sur la rue Notre-Dame, juste en face d'une garderie qui devait accueillir des bébés et des enfants quelques heures à peine après l'explosion. Les citoyens ont peur, il y a plus d'une vingtaine de commerces qui ont été gravement endommagés. Les policiers responsables de l'enquête disent qu'ils n'ont pas assez d'effectifs et ils demandent au gouvernement du Québec ce qu'il entend faire pour enrayer la guerre des motards. Les citoyens ont peur.

Qu'entend faire le ministre de la Sécurité publique?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Bien, M. le Président, je pense que les citoyens en ont assez, avec raison. Dans une société démocratique comme la nôtre, il y a des choses qui ne sont pas tolérables. Je dois dire que, en ce qui concerne l'action policière à Montréal, je pense que les policiers de Montréal peuvent, bien sûr, aborder ces questions avec les autorités politiques de Montréal. Nous travaillons toutefois en collaboration dans le cadre de l'opération Carcajou.

Je veux ajouter que ce matin, avec les maires de la région de Québec, nous avons communiqué avec M. Rock, le ministre fédéral de la Justice, pour dire qu'il était tout à fait prématuré d'écarter à ce moment-ci tout recours à des mesures spéciales, tout recours à des modifications du Code criminel canadien dans la lutte aux motards criminalisés, et je pense que nous devons nous asseoir ensemble, regarder la situation. Il faut qu'on trouve des solutions, et je pense qu'on est capables d'en trouver, pour peu qu'il y ait une volonté de collaboration de tous les pouvoirs civils impliqués, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Le ministre entend-il renforcer les effectifs Carcajou à Montréal?

Le Président: M. le ministre.

(14 h 40)

M. Perreault: M. le Président, j'aurai l'occasion de revoir les forces policières de Montréal. Si elles le souhaitent, si elles ont besoin de ressources supplémentaires, nous n'hésiterons pas à en ajouter. Chaque fois que la Sûreté du Québec en a demandé, de notre côté, nous l'avons fait; chaque fois qu'on nous a demandé de rajouter des sommes, nous l'avons fait. Nous aidons financièrement la Communauté urbaine de Montréal comme celle de Québec, au niveau de l'intervention des forces policières, elles y mettent également leurs ressources, la GRC est également présente. Et, encore une fois, je le répète, M. le Président, je pense que c'est non seulement une question de volume de forces policières, mais c'est également une question, je pense, de législation, et il faut qu'on s'assoie avec le fédéral et qu'on regarde les dispositions qui nous permettront d'avancer là-dedans, M. le Président.

Le Président: M. le député de Verdun, en principale.


Effets des compressions budgétaires sur les finances des universités

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je viens de traverser le livre des crédits et ça me fait penser... Merci. J'ai l'impression...

Le Président: M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Merci, M. le Président et je suggère à mes collègues de le faire. La technique que je remarque à l'intérieur de ce livre des crédits me semble être une certaine forme de mascarade. C'est-à-dire que, pour arriver à réduire votre déficit, vous transférez au réseau de l'éducation et au réseau de la santé des compressions qui vont les amener, eux, à devoir faire des déficits.

À titre d'exemple, M. le Président – et je vais poser la question, par exemple, au premier ministre: Sait-il que la semaine dernière l'ensemble des universités, en commission parlementaire, sont venues dire qu'elles ne pourraient pas supporter des compressions de l'ordre de 100 000 000 $ sans devoir faire des déficits de fonctionnement? Et là, vous leur demandez des compressions de l'ordre de 184 000 000 $. Ce qui veut dire, de fait... Est-ce que vous comprenez ce que ça veut dire? Ça veut dire que le dépôt des crédits actuellement va peut-être permettre au gouvernement de diminuer ses dépenses, mais va forcer à augmenter, dans les hôpitaux, dans les universités, dans le réseau de l'éducation, les déficits dans ce niveau-là.

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Merci, M. le Président. D'abord, je pense qu'il faut faire une correction quant aux efforts demandés aux universités, parce qu'à cause des années budgétaires et des années scolaires évidemment le versement des subventions doit être rebalancé, ce qui fait que l'effort réel, réel, demandé aux universités sera plutôt de l'ordre de 98 000 000 $. Ce qui n'est pas rien, j'en conviens, M. le Président. Cependant, cet effort se répartirait de la façon suivante – et je viendrai plus spécifiquement à la question du député – soit 48 000 000 $ reliés au coût de main-d'oeuvre, qui correspond à l'effort qui sera demandé à l'ensemble des autres réseaux, soit à l'éducation, soit à la santé et services sociaux ou dans les ministères; un 17 000 000 $ qui sont des revenus sur lesquels les universités pourront compter – ce sont, entre autres, les frais qui sont chargés aux étudiants étrangers, aux canadiens qui choisissent de venir étudier dans nos universités – ce qui demande donc un effort portant sur des mesures diverses de l'ordre de 33 000 000 $, M. le Président. Moi, je pense que notre objectif n'est pas d'abord de transférer à nos partenaires, aux gens du réseau scolaire ou aux universités le déficit que nous voulons éliminer. On ne demandera pas aux autres indirectement ce qu'on ne veut pas faire directement, voyons donc! On serait complètement incohérent, M. le Président.

Alors, ce que l'on se propose de faire, et en ce sens-là, les universités ont déjà commencé, M. le Président, en se dotant d'abord d'une commission leur permettant de regarder comment elles pouvaient devenir plus efficaces en «réseautant» leurs programmes, en utilisant les nouvelles technologies de l'information pour faire en sorte que des profs puissent être des sommités en leur matière, mais enseigner aussi bien de Rimouski, de Montréal que de Rouyn-Noranda, M. le Président.

Alors, c'est évident que, j'allais dire, une nécessité fait loi. Cela obligera les universités, bien sûr, à rationaliser leurs approches, à revoir certains de leurs programmes, mais je ne crois pas cependant que cela les accule à rehausser de façon importante leur niveau de déficit, M. le Président.

Le Président: M. le député.

(14 h 50)

M. Gautrin: La ministre devrait, et je lui suggère... La ministre peut-elle lire les galées de la commission de l'éducation, où clairement il a été établi qu'on ne pourra pas supporter le niveau de compression d'une centaine de millions de dollars sans augmenter, dans chacun des établissements, les déficits accumulés? Donc, ce que vous faites, de fait, c'est transférer...

Le Président: ...complémentaire, vous n'avez pas droit à un préambule à la fin pas plus qu'au début.

Mme Marois: Non seulement, M. le Président, je lis les galées de la commission auxquelles fait référence le député de Verdun, mais j'ai aussi des gens du ministère qui, d'une façon systématique, suivent les débats qui ont cours, me font des notes, et donc je suis parfaitement au courant de ce qui se passe à la commission. Il me semble, d'ailleurs, que c'est mon devoir que de l'être, comme ministre de l'Éducation.

J'aimerais ajouter une autre information, que le député connaît déjà, mais qu'il n'est peut-être pas mauvais qu'on se rappelle ici, tous ensemble. J'ai mis sur pied en novembre dernier un groupe de travail concernant le financement des universités. Ce groupe de travail doit d'ailleurs me remettre son rapport d'ici la fin du mois ou au début du mois prochain. Quel était l'objectif justement de revoir les modalités de financement, les modalités de transferts aux universités? Il y a des problèmes qui ont été soulevés, entre autres par le président de l'Université du Québec, sur la question des petites unités, des constituantes en région, qui risquent d'être affectées plus que d'autres, à cause de leur base. Ce sont des questions que j'ai soulevées auprès de ce groupe de travail à qui j'ai confié un mandat, qui devrait me faire des recommandations, de telle sorte qu'on puisse réajuster s'il y a lieu et corriger le tir en ce qui a trait à l'aide et aux transferts aux universités, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Marquette.


Compressions budgétaires dans le réseau de l'éducation

M. Ouimet: Le premier ministre disait tantôt qu'il n'avait jamais caché à quiconque qu'il y avait des efforts budgétaires à être faits en éducation. Pourtant, dans son discours d'assermentation, il déclarait, et je le cite: «La qualité de la vie québécoise des prochaines années dépend entièrement des choix que nous ferons en éducation. Il faut décider maintenant, disait-il, si nous voulons former des générations de décrocheurs.» Ce choix, il est fait aujourd'hui: il coupe plus de 700 000 000 $ dans le budget de l'éducation. Les élèves, les enseignants et, oui, encore les contribuables, feront les frais de ces coupures sauvages.

Le premier ministre peut-il admettre qu'en transférant la facture de taxes scolaires de plus de 100 000 000 $ dans la cour des commissions scolaires il est tout simplement en train de pelleter son déficit dans la cour des contribuables?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Oui, M. le Président. Je réitère totalement la citation que vient de faire le député quant à l'importance que nous prêtons tous, au Québec, et ce gouvernement en particulier, au rôle de l'éducation dans notre société. Par ailleurs, je dois corriger les chiffres, enfin préciser les chiffres que vient de mentionner le député. Il a parlé d'une diminution de l'ordre de 700 000 000 $; elle est, en fait, plutôt de 683 000 000 $. Mais il faut bien noter qu'il y a au-dessus de 300 000 000 $ de cette diminution qui seront pris à même les diminutions des coûts de main-d'oeuvre, ce qui laisse entre 300 000 000 $ et 400 000 000 $ de réduction réelle. Et c'est vrai qu'il y aura une contribution qui sera demandée aux commissions scolaires, de l'ordre de 100 000 000 $, mais c'est une contribution que nous avons tous à faire, au Québec, et c'est la part des commissions scolaires dans l'effort collectif que nous faisons.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Le premier ministre ne trouve-t-il pas indécent de dire dans le même discours que, pour lui, l'éducation, c'est une priorité et, par la suite, de la couper de près de 700 000 000 $? Ne trouve-t-il pas ça indécent, quelque part?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: D'abord, je renvoie le député aux corrections que j'ai faites à ses affirmations exagérées, en disant que l'effort dans l'éducation se situe plus, en termes de contenu, entre 300 000 000 $ à 400 000 000 $, qu'il y a 100 000 000 $ qui va être demandé en contribution aux commissions scolaires. J'ajouterai que, dans le cas de l'éducation, ce que nous dépensons par rapport au PIB est encore supérieur à ce que les pays comparables dépensent, et donc on n'est pas en train de saborder le régime de l'éducation. Et en plus je rappellerai que nous avons une réforme de l'éducation qui est très importante, qui va renouveler et «réjuvéner» notre régime d'éducation, que nous avons, en plus, une politique de la petite enfance qui va faire en sorte que nous combattons dès maintenant, que nous posons dès maintenant les jalons d'un combat très efficace contre le décrochage.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Est-ce que le premier ministre, qui vient de répéter mot à mot un argument que j'ai entendu dans la bouche du président du Conseil du trésor à l'effet que notre portion du produit intérieur brut qu'on consacre à l'éducation est plus élevée qu'ailleurs... Est-ce que ça ne tient pas nécessairement au fait qu'on paie trop nos professeurs, qu'on paie trop les enseignants et les enseignantes, qu'on donne trop de services dans nos écoles, mais qu'en réalité ce qui manque, c'est du développement économique et une hausse du PIB? C'est ça qui permet de réduire la portion qu'on consacre à l'éducation. C'est comme ça qu'on s'assure que les générations futures ont ce qu'il faut.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, la référence qui est faite est une norme internationale, une norme reconnue, le PIB moyen des pays de l'OCDE, auquel il faut bien se comparer, puisque nous vivons dans le monde de la réalité. Et, quand nous nous comparons aux normes internationales qui ont cours, on arrive à des données comme celles auxquelles on vient de référer.

Bien sûr, il faut créer de l'emploi, bien sûr, il faut travailler au renouvellement de l'économie du Québec, et je demande au chef de l'opposition de réprimer son indignation jusqu'à ce qu'il puisse la transformer en admiration en voyant le budget.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Au ministre de la Métropole, M. le Président: À quoi ça sert de faire des commissions parlementaires, d'écouter les intervenants qui viennent nous dire tous, un après l'autre, que c'est l'inéquité fiscale sur l'île de Montréal qui fait en sorte qu'on ne puisse développer une...

Le Président: Je m'excuse, Mme la députée, mais je pense que la question qui avait été posée par le député de Marquette était une question sur l'éducation. Le chef de l'opposition a renchéri. Je pense que vous devriez poser une question principale.


Augmentation des taxes scolaires à Montréal

Mme Frulla: En principale, je reviens: À quoi ça sert de faire des commissions parlementaires, d'écouter des intervenants qui nous disent chacun, un après l'autre, que cette inéquité-là est un frein majeur au développement d'une vision métropolitaine, quand on vient d'apprendre aujourd'hui, à cette heure, que l'île de Montréal va faire les frais de la moitié de l'augmentation de 100 000 000 $ de la taxe scolaire, et ce, en plus du 36 000 000 $ dont on a fait les frais l'an passé? Alors, à quoi ça sert? Et est-ce que le ministre de la Métropole, dans son cheminement, peut me dire si lui est d'accord avec ça?

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole.

M. Ménard: Si l'augmentation de la taxe scolaire est en proportion plus grande sur l'île de Montréal qu'ailleurs, c'est parce que, sur l'île de Montréal, on n'avait pas atteint comme ailleurs le maximum qui était permis par la loi. Et, pour régler les problèmes, c'est sûr...

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: Il est certain qu'il faudra régler cet ensemble par le pacte fiscal que nous allons offrir à Montréal et pour lequel nous avons quand même, bon an, mal an, trouvé 50 000 000 $ d'argent nouveau par rapport à l'état lamentable dans lequel vous l'aviez laissé par les politiques Ryan, à l'époque.

Maintenant, à quoi ça sert? Ça sert justement à chercher à simplifier les structures si abondantes que vous aviez laissées sur la région métropolitaine et qui empêchaient son développement.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la députée.

Mme Frulla: Est-ce que le ministre réalise, dans un simple exercice de calcul, que le 5 000 000 $ de pacte fiscal supposément que vous avez donné à Montréal au mois de novembre a été effacé à partir d'aujourd'hui avec le 10 000 000 $ du rabattement de la TVQ, d'une part, et avec à peu près une quarantaine de millions qui vient de nous tomber dessus aujourd'hui même? Ça, ça fait 50 000 000 $. Il n'y en a pas, de pacte fiscal. Et, à Montréal, le résultat, là, c'est ceci: zéro.

Une voix: Pas de bon sens.

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: Je crois que la députée de Marguerite-Bourgeoys a tendance à exagérer et aussi a tendance à diminuer beaucoup. Ce n'est pas 5 000 000 $, c'est 50 000 000 $. Bon, c'est 10 fois plus que ce que vous disiez qui est le montant que nous avons donné au régime du pacte fiscal depuis deux ans et c'est ce sur quoi on doit s'engager. Vous avez dit «5 000 000 $» au début; c'est pour ça que je vous corrige. Ça ne va pas dans la tendance habituelle d'exagérer. Mais c'est certain que nous devons trouver des solutions à long terme pour Montréal, et c'est ce que nous cherchons actuellement. C'est pour ça que l'on tient une commission parlementaire et c'est pour ça aussi, puisque l'île de Montréal se vide aux dépens de certaines banlieues, que nous cherchons, alors que nous nous constituons en un ensemble cohérent qui devrait travailler ensemble, la collaboration de tous les acteurs métropolitains.

Le Président: En principale, M. le député de Robert-Baldwin.


Compressions budgétaires dans le réseau hospitalier

M. Marsan: Oui, M. le Président. Le ministre de la Santé s'est effondré pour une troisième année consécutive devant son collègue du Trésor: nous constatons que le ministre coupe 493 000 000 $ dans les établissements de santé.

J'aimerais vous faire remarquer, M. le Président, que le ministre a manoeuvré pour qu'il nous soit difficile de savoir les coupures qu'il a l'intention de faire dans les hôpitaux. Ils les a toutes regroupées dans les établissements de santé.

Ma question, M. le Président...

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, votre question.

M. Marsan: Ma question, M. le Président: Le ministre peut-il nous dire combien il coupera cette année dans le budget des hôpitaux?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, les compressions de crédits qui doivent être réalisées dans le domaine de la santé, on le sait, sont au total de l'ordre de 760 000 000 $. Il y en a près de 400 000 000 $ qui seront faites au titre du coût de la main-d'oeuvre, et la façon dont ça pourra se concrétiser va dépendre du résultat des négociations qui arrivent à terme présentement. Il reste donc à peu près 360 000 000 $ qui, pour l'ensemble du reste du secteur de la santé, seront les compressions à intégrer.

Ça se répartit en trois gros blocs. Il y en a un de l'ordre de 160 000 000 $ à peu près qui est déjà prévu dans les plans de transformation des régies, qui a été fait sur une période de trois ans; la troisième année de la période prévoyait déjà 160 000 000 $ de compressions pour les objectifs qui avaient déjà été établis. Il y a un autre montant de l'ordre d'à peu près 130 000 000 $ qui va être fait par un ensemble de mesures de modernisation du système qu'on est maintenant en mesure de faire après avoir fait des intégrations, des fusions au niveau de l'administration, au niveau de la gestion des services de soutien, de l'organisation du travail différente; au total, dans l'ensemble des régions, on prévoit qu'à peu près 130 000 000 $ pourraient être comprimés à ce titre-là. Et il y a un autre 65 000 000 $ à peu près pour différents programmes, à peu près la moitié au titre du médicament, dans les programmes surtout de médicaments, pour la RAMQ et pour le reste du système.

On ne peut pas, à ce moment-ci, on a établi les crédits, aller chercher dans des classes d'établissements, parce qu'on y va plutôt par type de services qui sont rendus aux gens. Maintenant, dans les prochaines semaines, les régions vont recevoir leur enveloppe budgétaire comme prévu et, à partir de chacune des régies régionales, les établissements vont avoir leur budget, et ces informations-là vont devenir disponibles au cours des prochaines semaines. Mais, sur un niveau de planification, les jeux sont très clairs maintenant, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Marsan: M. le Président, si je comprends bien, le ministre de la Santé n'est pas capable de nous dire combien il va couper...

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, je pense que maintenant vous avez assez d'expérience... Vous êtes en complémentaire: posez votre question directement.

M. Marsan: Alors, dois-je comprendre que le ministre ne sait pas combien il va couper dans ses hôpitaux? Et j'aimerais demander au ministre s'il sait qu'aujourd'hui, en date d'aujourd'hui, les hôpitaux ont accumulé un déficit de près de 180 000 000 $ et que cela... Et c'est ma question: Est-ce que ça s'ajoute aux 493 000 000 $ de coupures dans les établissements de santé? Est-ce que vous êtes capable de répondre à ça?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je suis content que cette question soit soulevée parce que ça fait écho à des commentaires faits par le chef de l'opposition au début de cette période de questions.

D'abord, je pense bien que le député de Robert-Baldwin doit se rappeler qu'il y a une différence entre les budgets de fonctionnement puis les budgets d'immobilisation. Il ne faudrait pas mêler les cartes à ce point-là.

(15 heures)

En ce qui regarde les emprunts que les hôpitaux ont faits, au total, c'est effectivement de l'ordre de 344 000 000 $. Mais, là-dessus, il y a une partie qui est faite pour le fonctionnement, comme le réseau a toujours fait, des emprunts qui sont faits pour le fonctionnement des différents programmes qui sont autofinancés par le réseau, mais il y a une partie qui est pour gérer la transition. Et on nous a souvent dit, on nous a reproché, sans regarder ce qui se passait, qu'on n'investissait pas pour développer des services pour faire suivre la transformation. Au contraire. Et, sur le 344 000 000 $, il y en a 154 000 000 $ qui sont des emprunts spécifiques pour capitaliser des développements qui sont faits au titre de la transformation du réseau. L'endettement pour le fonctionnement est de l'ordre d'à peu près 190 0000 $. Et, si on compare ces chiffres-là d'aujourd'hui à ce qui se faisait avant, en mars 1994, par exemple, avant le changement de gouvernement, c'était de l'ordre de 193 000 000 $, qui était l'endettement du réseau; on est à 190 000 000 $ aujourd'hui, ça se maintient, en dollars constants. Et ce qui est l'«empruntement» supplémentaire, c'est pour la transformation du réseau, ce n'est pas de l'endettement de fonctionnement, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, ceci met fin à la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui.

Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en arrivons à l'étape des motions sans préavis. M. le chef de l'opposition officielle.


Offrir les meilleurs voeux de l'Assemblée à la communauté irlandaise à l'occasion de la fête de la Saint-Patrick

M. Johnson: Oui, M. le Président. Je demande le consentement de cette Chambre afin que nous débattions et adoptions, le cas échéant, la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale offre ses meilleurs voeux à toute la communauté irlandaise du Québec à l'occasion de la fête de la Saint-Patrick.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, il y aurait consentement. Juste pour rappeler l'entente, il y aurait donc deux intervenants du côté de l'opposition et un intervenant de notre côté, M. le Président.

Le Président: Alors, sur cette entente, M. le chef de l'opposition, je vous cède la parole.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président. Comme on a l'occasion de le dire, comme à peu près les deux tiers des Québécois francophones se disent Irlandais du côté de leur père ou de leur mère, on se sent, dans la semaine de la Saint-Patrick, quelle que soit la portion biologique de sang irlandais qu'on peut avoir, à 100 % Irlandais.

Il y a toujours des occasions nouvelles à chaque année, je trouve, d'évoquer le souvenir des Irlandais qui se sont joints à nous, ici, en terre d'Amérique, depuis environ deux siècles. Cette année, bien évidemment, on sait que c'est le 150e anniversaire de la grande famine de 1847, en Irlande, qui a fait en sorte que des 100 000, ou à peu près, Européens qui sont venus ici, au Canada, qui ont traversé l'Atlantique en 1847, 90 000 étaient des Irlandais. Et je reviendrai un peu plus tard sur le sort qui les attendait et surtout la contribution qu'ils ont faite au développement du Québec.

Mais les Irlandais, bien avant 1847, ont également contribué à la vie parlementaire du Québec. C'est Robert Lester, qui était né à Galway, qui a été un des premiers députés nés en Irlande qui a su représenter ses concitoyens à l'Assemblée du Bas-Canada. En 1892, Robert Lester était député de la basse-ville de Québec... – 1792, oui, merci, M. le député – de 1792 à 1796 et de 1800 à 1804. Il était, par là, le premier d'une très longue tradition d'hommes et de femmes politiques qui, avec leurs origines irlandaises, ont apporté ici, dans la Législature et partout dans tous les forums où il se discute de politique au Québec, leur contribution insigne.

Ça s'explique en partie par les affinités assez remarquables que les Irlandais ont développées avec ceux qu'on a appelés les Canadiens, les Canadiens français, les Québécois d'expression française, notamment en raison de la religion. Il est évident que ces affinités se sont traduites, dans le domaine politique, par la création de duos assez célèbres, comme celui de Daniel Tracey et de Duvernay, qui avaient ensemble plaidé dans le Irish Vindicator , dans les années trente, l'abolition du Conseil législatif, qui ont été jetés en prison pendant un mois pour avoir osé demander une chose pareille et qui, lorsqu'ils sont sortis de prison, ont été portés en triomphe. On a même, à l'époque, frappé une médaille en leur honneur. C'est pour dire, M. le Président, ce que l'enthousiasme irlandais pouvait amener au débat public d'alors.

La même chose est vraie du duo La Fontaine-Baldwin. Baldwin était un avocat de Toronto d'origine irlandaise qui se battait, lui aussi, pour la reconnaissance du gouvernement responsable, dans les années quarante, 1840. Il avait été défait à deux reprises dans la circonstance électorale de la ville de Toronto, et on lui a ouvert un siège à Rimouski. Il y a un journal quotidien, un journal à tout le moins anglophone de l'époque qui a souligné que «Baldwin had been "Rimouskified"»...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ...ce qui est assez intéressant. Aujourd'hui, on dit qu'on est parachuté...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Johnson: ...dans un comté. À l'époque, on avait dit de Baldwin qu'il avait été «rimouskifié». Ça a été le premier, là aussi, d'une longue série, je dirais, de Canadiens d'origine irlandaise qui se sont associés à des élus francophones du Québec dans les grands combats politiques. Il y a eu d'autres et très nombreux politiciens d'origine irlandaise ici même, à l'Assemblée nationale. Énumérer les noms de famille, ça aurait l'air, d'abord, de la généalogie de l'Irlande comme telle et, d'autre part, par la variété des noms de famille, ça pourrait être très, très long.

Évidemment, dans la mesure où, moi aussi, je me réclame de mon sang irlandais, je fais juste remarquer que je suis le troisième Irlandais de ma famille qui occupe ce siège ou l'autre en face, incidemment, que ça vient de mon arrière-arrière-arrière-grand-père Johnson, qui est arrivé ici dans les années 1820 – alors bien avant 1847 – et que, je dirais, la francisation des Johnson s'est opérée lorsque mon grand-père, Frank Johnson, de la région de Danville et Richmond, a épousé Marie Daniel. Alors, on vient de comprendre évidemment d'où je tiens mon prénom, et mon père, le sien avant moi, bien évidemment, de même que la façon dont les Johnson se sont francisés, à tout le moins dans le cas de notre famille.

Ça, c'est une chose que de rappeler les différentes anecdotes, là, qui retracent le chemin des Irlandais au Québec et leur contribution. Évidemment, ici, on parle surtout de politique, mais on connaît la contribution, évidemment, littéraire que les Irlandais ont faite à l'intérieur même du Québec et on connaît également leur présence dans le monde de l'enseignement, que ce soit à McGill, à Concordia ou ailleurs, en français comme en anglais. Les Irlandais d'origine, ceux qui se réclament d'origine irlandaise et qui ont conservé leur patronyme sont également très présents dans d'autres domaines que la politique, au Québec.

Mais, comme je le disais tout à l'heure, ce qui est important cette année, c'est de souligner le 150e anniversaire de la grande famine d'Irlande qui a amené ici des dizaines de milliers des ancêtres de ceux qui sont aujourd'hui nos compatriotes. Ça a été une tragédie sans nom parce qu'elle frappait des milliers de familles. Ça a été également une occasion, en 1847 et dans les années suivantes, pour les Québécois – et je dis «les Québécois», notamment de la région de la capitale comme telle – d'accueillir en leur sein à la demande, très souvent, des curés et vicaires qui se précipitaient à Grosse Île, qui était l'île de la quarantaine, pour veiller auprès des malades par centaines – que dis-je, par milliers – qui, en cette année 1847, ont marqué, je dirais, par ce drame le fléau que la maladie avait apporté.

Aujourd'hui, à Grosse-Île, il y a plus de 5 000 Irlandais de cette époque-là qui sont enterrés. C'est un immense mémorial, évidemment, à leur mémoire, à une tragédie, je le répète, qui a permis aux Québécois d'ouvrir leurs bras et leurs coeurs, leurs maisons, leurs familles à des orphelins irlandais dont on sait de façon très, très pertinente et très précise que ces familles d'accueil qui ont adopté ces enfants se sont toujours efforcées de leur rappeler leurs origines, leurs caractéristiques culturelles, leurs origines irlandaises, le fait qu'ils parlaient anglais ou que leurs parents parlaient anglais et même Irish, qui est cette forme de langue celtique, je crois, qui tient en son coeur même, comme le disait Mary Robinson, la présidente d'Irlande, il y a trois ans, toute l'histoire de l'Europe.

Et je terminerais ces quelques mots, M. le Président, en citant justement Mme Robinson qui, il y a à peine deux ans devant son Assemblée, prononçait un discours sur la diaspora des Irlandais, tout ce qu'on doit éprouver de l'Irlande pour tous ses fils et ses filles qui se retrouvent aujourd'hui de par le monde et notamment, évidemment, en Amérique du Nord. Évoquant la tragique histoire, la traversée, la maladie et le fléau de 1847, Mary Robinson disait devant ses collègues élus, à Dublin: «Even across time and distance, tragedy must be seen as human and not historic, and that to think of it in national terms alone can obscure that fact.».

Il faut se souvenir à juste titre, je dirais, non pas d'une tragédie en termes historiques ou d'y voir là une manifestation, un cataclysme passager, impersonnel, mais se replonger dans ce que ça pouvait signifier à l'époque pour ces milliers de familles d'être, d'une part, séparées, d'être frappées par la maladie, trop souvent par la mort, et de voir des enfants par milliers privés de leurs parents et être adoptés, accueillis bien généreusement et avec courage et un don de soi remarquable par les familles québécoises, de voir que, derrière ça, il y a des milliers de tragédies humaines.

Et, de la même façon, lorsque Mme Robinson, qui a visité Grosse Île, dont l'histoire et la commémoration sont extrêmement bien documentées – je me permets de le recommander – par une Québécoise, Mme Marianna O'Gallagher, dont le père avait érigé la croix celtique qu'on retrouve à Grosse Île pour commémorer justement les événements de 1847... Mme Robinson disait: The Irish who died at Grosse Île were men and women with plans and dreams of future achievements. It takes from the humanity and individuality to consider them merely as victims.

Je pense que nous devrions, en tout état de cause, chaque fois que des fléaux frappent l'une ou l'autre des parties de la terre, nous souvenir que ce ne sont pas là simplement des fléaux désordonnés, de grands événements tectoniques, si on veut, des mouvements de population, mais que ce sont à l'intérieur des familles, des hommes, des femmes et des enfants qui sont touchés par ces tragédies. Ça nous aide, je pense, à mettre en perspective tous les efforts que nous devons continuer à faire pour éviter sous toutes ses formes que les familles, où qu'elles soient de par le monde, soient ainsi touchées par des drames comme ceux qu'ont vécus certains de nos ancêtres irlandais.

(15 h 10)

Le Président: Je reconnais maintenant M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, je voudrais, comme le chef de l'opposition, souligner l'importance de la contribution des Québécoises et Québécois d'origine irlandaise à la construction du Québec. Je voudrais en particulier profiter de l'occasion qui m'est donnée pour féliciter le Dr Michael Connely, qui a reçu hier le titre d'Irlandais de l'année. Le Dr Connely a développé un programme spécial d'études à Concordia qui a mis l'accent sur l'apport culturel des Irlandais au Canada.

Les Irlandais au Québec et au Canada, c'est très important. Au Québec, au XIXe siècle, c'était la moitié des immigrants qui arrivaient ici. Déjà, en 1700, on comptait une centaine de familles irlandaises établies au Québec, et nous savons que c'est au XIXe siècle, à la suite de la grande famine qu'a évoquée le chef de l'opposition, que nous avons eu surtout l'apport irlandais. Grosse Île est le symbole de cette immigration. J'ai eu l'occasion, M. le Président, il y a quelques années, de visiter Grosse Île, et j'incite tous nos concitoyens à faire ce pèlerinage qui est extrêmement émouvant, qui symbolise de façon parfaitement concrète et saisissante le sort de ces milliers de personnes qui sont parties dans des conditions de fortune, qui sont arrivées, la plupart du temps, extrêmement malades, parfois déjà mortes, qui ont été inhumées là-bas, à Grosse Île, et les autres demeurant très souvent en quarantaine pendant de très longs moments dans des sanatoriums et dans des hôpitaux là-bas avant de pouvoir intégrer le continent.

Les Irlandais, ce sont des gens qui sont très souvent extrêmement sympathiques, qui sont tous passionnés et travailleurs, qui ont oeuvré dans tous les milieux et qui n'ont pas échappé non plus à une activité intense au sein de la politique. Nous comptons ici, au Québec, trois premiers ministres récents qui sont d'origine irlandaise. Nous savons que beaucoup de Québécois de nom francophone, de noms divers ont du sang irlandais. C'est une communauté extrêmement vivante et qui a inspiré une bonne partie de la culture québécoise telle que nous la connaissons. Je voudrais, M. le Président, dire qu'il y a des Irlandais dans toutes les familles. Il y a même des Johnson dans toutes les familles, y compris les familles politiques. Je voudrais dire à quel point nous sommes tous conscients de la grande contribution que les Irlandais et Irlandaises ont apportée à ce Québec moderne que nous composons.

Je voudrais dire que j'ai été tout à fait heureux ce matin, au nom du gouvernement, d'annoncer à M. Ray McBayne, qui organise cette journée des Irlandais pour célébrer l'arrivée des Irlandais, le 150e anniversaire, à Grosse Île, qu'il y aurait une subvention du gouvernement pour l'aider à défrayer cette manifestation et de joindre ma voix à tous ceux qui vont souligner la célébration de cette grande fête de la Saint-Patrick.

Une voix: Bravo!

Le Président: Merci, M. le premier ministre. Mme la députée de Jean-Talon.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Étant de descendance irlandaise moi-même, du côté maternel – ma mère est une Martin – j'ai eu l'occasion hier, M. le Président, de célébrer la fête de St. Pat's avec la communauté irlandaise. Je ne reprendrai pas tout l'historique, qui a été expliqué par le chef de l'opposition, mais je pense que c'est important de se rappeler l'horrible sort qui a été réservé aux Irlandais lorsqu'ils ont dû quitter l'Irlande, en 1847. On pourrait peut-être se rappeler qu'à l'époque le tiers des Irlandais est resté là, le tiers des Irlandais est décédé et l'autre tiers a émigré ici, en Amérique du Nord, et a fait un arrêt à Grosse Île. Et hier a été l'occasion, entre autres, de fêter la St. Pat's, mais aussi de lancer les fêtes commémoratives du 150e anniversaire de l'arrivée des Irlandais à Grosse Île.

Je pense que la reconnaissance de ces fêtes, en fait l'organisation de ces fêtes, va nous permettre, M. le Président, de reconnaître l'admirable travail du clergé, à l'époque, qu'il ait été anglophone ou francophone, des communautés amérindiennes, qui ont contribué aussi en dons d'argent et même en dons personnels pour tenter d'alléger le sort de ces gens-là – qu'on pense au personnel infirmier – et toutes ces personnes l'ont fait au prix, souvent, de leur propre vie. On a parlé de la contribution, hier, entre autres, du cardinal Taschereau, de l'archevêque anglican, à l'époque, et c'est toute une partie d'histoire qu'on connaît moins et qu'on aura l'occasion cet été, à l'occasion des Fêtes du 150e qui vont se dérouler, pour la plupart, à Grosse Île... Je vous invite tous et toutes à y participer. On a même obtenu la contribution très tangible non seulement du gouvernement canadien, mais aussi de la corporation touristique Chaudière-Appalaches, que je salue aujourd'hui et qui était présente lors du dévoilement d'une plaque, hier, à la mairie de la ville de Québec.

Mr. Speaker, 1997 not only commemorates the 150th anniversary of the massive arrival of the Irish in North America, but represents a privileged moment to honor the Irish nation and its descendance who, throughout their history and their culture and their heritage, very widely contributed to the development of Québec society and the Francophone community as we know it today.

Et j'aimerais aussi féliciter Marianna O'Gallagher, qui a contribué de façon très particulière à l'organisation de ces fêtes. Elle est une auteure connue de la région de Québec, et à l'extérieur de Québec également, et fait maintenant partie des 100 Irlandais les plus connus. Elle a reçu cet insigne honneur à New York, la fin de semaine dernière, en présence du sénateur Kennedy et d'autres Irlandais bien connus en Amérique du Nord. Donc, happy St. Patrick's week.

Le Président: M. le député de Lévis.


M. Jean Garon

M. Garon: Alors, M. le Président, il me fait plaisir de prendre la parole à l'occasion de la fête des Irlandais. Si j'avais parlé le premier, peut-être que les gens auraient eu moins de compliments, parce que je suis à moitié Irlandais moi-même, mais je vais vous dire plus que ça. J'ai eu l'occasion, avec des membres du Parti libéral, d'aller en Irlande en 1986, et j'avais passé pour un gars de l'Irlande, dans un pub, et on m'a demandé si je venais de tel village ou de la ville de Cork, et j'étais un peu surpris parce que mes ancêtres venaient de Cork. J'ai dit à la demoiselle: Pourquoi? Elle a dit: Vous ressemblez aux gens de là. Alors, la génétique, je ne sais pas si elle est aussi forte que celui qui a trouvé le crâne de son ancêtre, et 9 000 ans plus tard, à un kilomètre de l'endroit où il demeurait, mais la génétique est beaucoup plus forte qu'on pense. Et c'est pour ça que, quand je regarde l'histoire de l'Irlande, bien, pour moi, c'est un modèle. Quand je regarde, par exemple, les batailles qu'ont faites les Irlandais pour acquérir leur indépendance, je pense que c'est un modèle, tu sais, de batailles vigoureuses pour être libres. Parce que la liberté, moi, je pense que c'est une qualité irlandaise, et...

Une voix: ...

(15 h 20)

M. Garon: Non, je ne le dis pas de façon partisane; je le dis de façon réaliste, parce que ce qui caractérise les Irlandais, au fond, c'est d'être un peu des gens qui ne se soumettent pas facilement. Et on voit ce qu'ils ont fait en Amérique du Nord, au fond, comme les souches importantes de familles irlandaises que l'on trouve en Amérique du Nord.

Moi, j'ai été étonné, en 1986, quand j'avais fait, à l'invitation du président de l'Assemblée nationale d'Irlande, le voyage avec des gens de l'Assemblée nationale. Ce qui m'avait frappé, c'est à quel point je remarquais que la musique irlandaise avait influencé le Québec. Il y a des gens, des fois, qui pensent que tel rigodon vient de la Beauce; je vais vous dire une chose, c'est qu'ils n'ont pas creusé longtemps, ils se seraient aperçus que ce rigodon venait d'Irlande. Et, si les gens regardent un peu notre alimentation, à quel point l'alimentation québécoise est influencée par l'alimentation irlandaise, ils seraient surpris. Les comportements des gens, aussi. J'ai toujours dit: Il y a deux types de Québécois, il y a des Québécois qui sont d'esprit libre... Ça, je pense que ce sont nos racines irlandaises. Notre aspect de soumission vient d'ailleurs.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Mais je ne dirai pas d'où. J'ai une idée, mais je ne dirai pas d'où.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Mais, simplement, M. le Président, j'aimerais vous dire que, pour un, j'aimerais beaucoup qu'on renoue. Les Irlandais étaient venus ici avant 1985 – je ne me rappelle pas en quelle année exactement – parce qu'ils étaient intéressés à voir de quelle façon on fonctionnait. Ils avaient invité une délégation, en 1986, dont j'avais fait partie. J'étais le seul du Parti québécois. Il y avait quatre ou cinq députés du gouvernement, à ce moment-là, qui sont dans l'opposition maintenant. Et ce qui m'avait frappé...

On avait eu une invitation aux frais des Irlandais. On avait visité une partie de l'Irlande. On avait eu l'occasion de rencontrer tout le Conseil des ministres, à raison de deux, trois ou quatre ministres par soir. Et, à la fin, j'avais demandé à des gens: Ça fait une semaine qu'on est ici, je suis estomaqué à quel point vous êtes chaleureux à notre endroit, j'aimerais savoir pourquoi autant de chaleur. Parce que c'était incroyable, les efforts qu'ils avaient faits pour nous faire visiter et connaître l'Irlande. Ils ont dit: Il y a une chose qu'on voudrait savoir, qu'on essaie de savoir de vous, c'est que vous vivez en Amérique du Nord entourés, comme francophones, de 250 000 000 de parlant anglais, de personnes qui sont de langue anglaise, et vous avez réussi à maintenir votre langue, ce qu'on trouve extraordinaire, alors que, nous, en Irlande, sur une île, protégés d'une certaine façon, alors qu'en Europe il y a plusieurs langues – puisqu'il n'y a aucun peuple de plus de 80 000 000, puisque les plus nombreux sont les Allemands, 60 000 000 d'Italiens, 57 000 000, je pense, de Français, à peu près le même nombre d'Anglais, etc. – on a seulement entre 15 % et 20 % des Irlandais qui parlent encore le gaélique – qu'ils nous disaient, en 1986 – on aimerait savoir votre recette.

J'ai regretté, moi, que cette conversation ait eu lieu le dernier soir de notre visite; j'aurais aimé ça que ça aurait été le premier soir de notre visite, parce que les Irlandais sentaient, au fond, que leur combat, c'était un peu le nôtre. Sur le plan culturel, leur combat, au fond, c'est leur langue, en tout cas pour ceux qui y croient. Comme au Québec, pour ceux qui y croient – parce que ce n'est pas tout le monde qui y croit – c'est un peu notre combat, sur le plan culturel. Et je pense qu'on devrait renouer les relations avec l'Irlande, qui ont été un peu abandonnées depuis 1986, parce que la branche irlandaise du Québec est une des branches les plus importantes. La France, c'est important, mais je dirais que peut-être la branche italienne et la branche irlandaise sont les deux autres branches les plus importantes. Et on devrait renouer, parce que les relations culturelles, dans le monde, ce sont les relations les plus importantes. Et je suis persuadé... D'autant plus que je suis à même de le dire, ma femme est aussi en partie irlandaise; ça ne paraît pas quand le nom du père n'est pas irlandais. Et je pense que le meilleur côté des Québécois, c'est leur côté irlandais. Je suis persuadé que... Parfois, quand je regarde le chef de l'opposition, je me dis: À un moment donné, un jour – qui n'est pas venu – son côté irlandais prendra le dessus et il aura le goût de se battre pour la souveraineté, lui aussi. Je vous remercie.

Des voix: Ha, ha, ha!


Mise aux voix

Le Président: Alors, je dois comprendre que la motion est adoptée. Une autre motion? Alors, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour que nous discutions et, le cas échéant, adoptions la motion suivante:

«Que les membres de cette Assemblée blâment sévèrement les responsables et artisans de l'émission Un jour à la fois , diffusée au réseau TVA le 17 mars 1997, en raison du thème et des propos visant à discréditer l'ensemble des candidats et élus de tous les niveaux de gouvernement: scolaire, municipal, provincial et fédéral, et plus spécialement le premier ministre du Québec, le ministre de la Santé, le chef de l'opposition, le premier ministre et le vice-premier ministre du Canada.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, on ne m'a pas transmis auparavant une copie de la motion. On aurait pu, à ce moment-là, la regarder. On ne l'a pas vue encore, mais est-ce que je peux suggérer qu'on la reporte à demain, et à ce moment-là on pourra donner notre consentement?

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, sans que ça constitue un précédent, là, nous sommes à l'étape des motions non annoncées. Il ne faudrait pas, à moins de l'inclure dans la réforme parlementaire, que les motions non annoncées deviennent des motions annoncées, mais, pour le cas qui nous occupe, il y aurait consentement.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, le leader de l'opposition sait très bien que, quand je fais ces interventions-là, ce n'est pas en vertu de notre règlement, parce que, évidemment, c'est des motions sans préavis. Cependant, afin de donner notre consentement, il est de tradition, quand c'est possible, de se transmettre une copie de la motion que nous allons présenter. Alors, si je peux voir la copie de la motion, demain nous pourrons, à ce moment-là, regarder si nous pouvons donner notre consentement, M. le Président.

Le Président: Très bien. Alors, nous sommes toujours aux motions sans préavis. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Souligner la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle

M. Copeman: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle, se tenant du 16 au 22 mars, et remercie tous les organismes, entreprises et individus oeuvrant pour l'intégration des personnes vivant avec une déficience intellectuelle.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président, il y a consentement pour un intervenant de part et d'autre.

Le Président: Alors, sur cette entente, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Cette semaine marque l'organisation de la Semaine québécoise de la déficience intellectuelle. C'est un événement qui date de plusieurs années au Québec dans sa forme actuelle, une semaine organisée en grande partie par l'Association du Québec pour l'intégration sociale, une association qui oeuvre dans la société québécoise depuis un peu plus de 40 ans.

M. le Président, le travail de cette organisation et le but de cette semaine visent essentiellement à promouvoir l'intégration des 200 000 Québécois et Québécoises qui présentent une déficience intellectuelle, au Québec, tout près de 3 % de la population. Une déficience intellectuelle n'est pas, évidemment, à confondre avec une maladie mentale. Il s'agit de deux catégories aux différences très marquées. Les maladies mentales sont des maladies traitables, pour lesquelles il y a normalement un traitement curatif, tandis que la déficience intellectuelle, on la reconnaît comme une situation stable auprès d'une personne, qui n'est pas du tout reliée à sa santé mentale, mais qui, pour une raison ou une autre, empêche d'une certaine façon le développement et l'exercice quotidien des fonctions normales.

(15 h 30)

M. le Président, l'intégration, c'est le mot clé: l'intégration sociale, l'intégration en milieu éducatif et l'intégration en milieu d'emploi pour les tout près de 200 000 Québécois et Québécoises qui présentent une déficience intellectuelle. Si ces personnes-là éprouvent des difficultés dans notre société, c'est largement dû aux préjugés qu'on a comme Québécois et Québécoises qui ne présentent pas de déficience intellectuelle. S'il y a des barrières érigées dans notre société à leur pleine participation à part entière dans la société québécoise, c'est largement dû aux préjugés des personnes qui ne présentent pas de déficience intellectuelle. Alors, c'est essentiellement une semaine de sensibilisation. Il y a des initiatives locales, il y a des conférences, des cafés-rencontres, et le tout se terminera avec le gala Défi de ce vendredi.

Alors, M. le Président, je voulais simplement remercier les organismes qui oeuvrent dans le domaine pour l'organisation de cette Semaine pour nous sensibiliser, comme Québécois et Québécoises, au potentiel de chacun parmi nous, peu importent nos capacités, peu importent nos limitations fonctionnelles, de contribuer à l'essor de la société québécoise comme membres à part entière. Merci.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, je suis très heureux de pouvoir, au nom du gouvernement, m'associer à cette motion qui est présentée par le porte-parole de l'opposition. Une déficience intellectuelle, nécessairement, dépendant de son degré, de sa sévérité, ça entraîne un certain degré d'incapacité. Maintenant, cette incapacité-là ne doit pas être synonyme d'un handicap, et je pense que, comme l'a souligné le député de Notre-Dame-de-Grâce, il est important qu'une société qui veut être humaine aménage des mécanismes d'intégration, des voies d'intégration sociale à tous ses citoyens, y compris ceux qui ont certaines difficultés.

Il y a 25 ou 30 ans, je me rappelle, M. le Président, je pense qu'on n'avait à peu près aucune idée de combien de personnes dans notre société pouvaient vivre avec un problème de déficience mentale. À l'époque, les familles, par ignorance très souvent, parfois ne reconnaissaient pas un léger degré de déficience intellectuelle qui créait des difficultés à un membre de la famille. Quand la déficience intellectuelle était un peu plus importante, on avait parfois honte et on cachait les gens, de sorte qu'on avait vraiment une société qui, sans être méchante, ne donnait vraiment pas une chance d'épanouissement à ces citoyens. Beaucoup de choses se sont passées depuis ce temps-là. Je pense que la société québécoise, à l'instar de beaucoup de sociétés dans le monde, a évolué beaucoup. On connaît mieux aussi les situations de déficience intellectuelle, c'est moins mystérieux et le degré de tolérance s'est beaucoup amélioré, quoiqu'il y ait encore beaucoup de chemin à faire.

Le gouvernement, par différentes actions, différents ministères – singulièrement, bien sûr, le ministère de la Santé et des Services sociaux – est très actif dans ce domaine-là, et nous allons continuer à développer toutes les activités possibles. Au cours des prochaines années, à mesure qu'on sera sorti de la situation financière dans laquelle on est, il y a des marges de manoeuvre qui vont se dégager, et ça fait partie des priorités que l'on a de s'assurer que, sur le plan social, au niveau des communautés, on ait plus de services de disponibles et que les familles aient plus de soutien pour que, dépendant encore là des besoins des membres des familles qui ont un problème de déficience intellectuelle, les familles soient soutenues, soient capables de les aider à s'intégrer dans la société. L'école est très importante pour donner une chance à ces gens-là de développer au maximum les capacités qu'ils ont, et c'est ça, la vraie définition de la santé. C'est d'être capable de développer de façon maximale le potentiel que l'on a, et ça, ça ne doit être limité pour personne.

Finalement, pour tous ceux qui peuvent le faire, il est important que l'intégration sociale se fasse aussi par le travail. À ce titre, lors du dernier sommet socioéconomique, il faut se rappeler que tout le volet de l'économie sociale qui a été ouvert et développé prévoit, entre autres, un projet qui est le développement de centres de travail adaptés pour des personnes qui souffrent de différents types de déficiences ou d'incapacités, mais aussi pour les gens qui ont un problème de déficience intellectuelle. Je pense qu'on sera en mesure, au cours des prochaines années – tous les efforts vont être consentis à cet effet-là – de donner à ces citoyens-là toute la place à laquelle ils ont droit et de permettre aux communautés de profiter aussi de la contribution parfois très surprenante que ces citoyens et ces citoyennes peuvent apporter à leur communauté.

M. le Président, je veux aussi, en terminant, souligner cette Semaine et remercier toutes les organisations, tous les individus dans notre société qui font un effort, qui sont sensibilisés, qui en aident d'autres à se sensibiliser et qui nous aident à améliorer le sort de ces concitoyens. Merci.


Mise aux voix

Le Président: Alors, encore une fois, je crois qu'on peut considérer cette motion adoptée.

Des voix: Adopté.

Le Président: Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

Une voix: Non.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Alors, nous en arrivons maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales poursuivra des consultations particulières sur le livre vert intitulé «La réforme de la sécurité du revenu: un parcours vers l'insertion, la formation et l'emploi», aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi n° 92, Loi sur la Commission de développement de la métropole, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, et demain, le mercredi 19 mars 1997, de 9 heures à 11 heures, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de la culture se réunira aujourd'hui, mardi le 18 mars, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, et demain, mercredi 19 mars, de 9 heures à midi, à la salle Louis-Joseph-Papineau de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de procéder à une consultation générale portant sur les cartes d'identité et la protection de la vie privée.

Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira demain, mercredi 19 mars, de 9 heures à 11 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est d'entendre les dirigeants des établissements d'enseignement de niveau supérieur quant au rapport annuel déposé à l'Assemblée nationale en application de la Loi sur les établissements d'enseignement de niveau universitaire.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, maintenant. M. le leader du gouvernement. Non?

Alors, en ce qui me concerne, je vous informe que, demain, lors des affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Richmond. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale déplore l'inaction du gouvernement péquiste à l'endroit des régions, et ce, malgré les engagements pris par le premier ministre, notamment dans son discours d'assermentation du 29 janvier 1996 et réitérés dans son discours inaugural du 25 mars 1996.»


Affaires du jour

À ce moment-ci, nous allons passer aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 22 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 131


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Président: À l'article 22, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 131, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie. Est-ce qu'il y a des interventions? Il n'y a pas d'interventions.


Mise aux voix du rapport

Est-ce que le rapport de la commission des institutions portant sur le projet de loi n° 131, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je rappellerais l'article 22 de notre feuilleton.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Je demanderais le consentement de la Chambre pour que nous puissions procéder à la deuxième étape, c'est-à-dire à l'adoption, en même temps, de ce même projet de loi.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Ce serait un consentement pour procéder à la troisième étape, M. le Président, et c'est accordé.


Adoption

Le Président: Alors, le consentement est accordé. Est-ce que le projet de loi n° 131, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie, est adopté?

Une voix: ...procède aux échanges.

Le Président: Aux échanges. Alors, on en arrive à l'intervention du ministre proposeur du projet de loi, M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Nous sommes aujourd'hui conviés à franchir une nouvelle étape en ce qui concerne l'éthique et la déontologie dans l'administration publique, celle de l'adoption du projet de loi n° 131 intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie.

Ce projet de loi, rappelons-le, vise à la fois des personnes et des organismes. Il veut d'abord s'assurer que les personnes agissant comme administrateurs ou membres d'organismes ou encore d'entreprises publiques soient soumises à des règles qui donnent à l'État et au public des assurances de probité. Selon la position qu'elles occuperont, ces personnes seront soumises à des normes édictées par le gouvernement et par l'organisme ou l'entreprise où elles sont nommées, ou bien à des règles établies par les organismes et entreprises où elles occuperont leurs fonctions.

Les organismes et entreprises du secteur public auront la responsabilité d'élaborer un code d'éthique et de déontologie destiné à leurs administrateurs ainsi qu'aux personnes qu'ils auront à désigner dans d'autres organismes et entreprises. Nous avons opté pour cette approche décentralisée en ayant confiance que le travail de réflexion fait à la base par les principaux intéressés eux-mêmes aurait un effet mobilisateur et intégrateur dans la recherche constante du bien public.

(15 h 40)

La démarche qui nous conduit où nous sommes aujourd'hui débutait en janvier 1995, lorsque je constituais, on s'en souvient, un groupe de travail qui avait pour mission de me formuler des recommandations relativement à l'éthique et à la déontologie dans les secteurs de la vie publique qui n'étaient pas soumis aux règles d'éthique de la fonction publique.

Le groupe de travail, présidé par M. André C. Côté, doyen de la faculté de droit de l'Université Laval, a particulièrement ciblé les sociétés d'État et leurs filiales. Il est apparu au groupe que la nature des activités de ces institutions ainsi que le processus de nomination et de rémunération de leurs administrateurs en faisaient des points de mire pour l'opinion publique. L'étude du rapport du groupe de travail a cependant convaincu le gouvernement de soumettre aux nouvelles règles toutes les personnes relevant de son pouvoir de nomination et qui n'étaient pas soumises à des règles élaborées d'éthique et de déontologie.

De plus, afin de s'assurer que les secteurs qui bénéficient d'importants paiements de transfert de l'État aient aussi des normes d'éthique et de déontologie, il a été décidé d'obliger les diverses institutions et établissements de l'éducation, de la santé et des services sociaux à se doter aussi de règles applicables à leurs administrateurs. C'est avec ces préoccupations que le gouvernement a saisi l'Assemblée nationale du projet de loi n° 131 et de l'avant-projet de règlement concernant l'éthique et la déontologie.

En raison du caractère particulier de cette nouvelle source de préoccupations, il fut décidé de soumettre ce projet de loi à une consultation publique. Les séances de consultation ont confirmé notre perception initiale. En effet, la totalité des intervenants, des associations, des groupes ou des citoyens souhaitaient qu'il y ait des règles qui régissent l'éthique des administrateurs publics. Plusieurs intervenants, tout en étant d'accord avec l'objet du projet, nous ont fait part de préoccupations qui les touchaient plus particulièrement et ont fait des recommandations afin d'améliorer les textes.

Les amendements apportés au projet de loi en commission parlementaire ont tenu compte de la majorité des commentaires formulés lors de la consultation. De plus, la collaboration exemplaire de l'opposition nous a permis d'améliorer la qualité de ce projet de loi. D'autres préoccupations exprimées lors des consultations ont été de plus incluses dans l'avant-projet de règlement du gouvernement.

La démarche que l'Assemblée nationale propose donc aux divers agents et organismes visés par le projet de loi s'appuie sur leur sens des responsabilités. En effet, pour la grande majorité des cas, les conseils d'administration des organismes et entreprises du gouvernement auront à effectuer une réflexion sur l'éthique et la déontologie qui devront être appliquées à leurs membres. Cette démarche constitue une condition essentielle et un préalable pour l'établissement d'un code destiné à leurs dirigeants ainsi qu'aux personnes que tous ces organismes auront à désigner dans des postes d'administration de leurs filiales ou autrement.

Le rapport du groupe de travail Côté constatait qu'il y a un pluralisme éthique dans notre société et que ce pluralisme se manifestait aussi par sphère d'activité. En ce qui concerne l'administration publique, je crois opportun de mettre en lumière les quatre éléments relevés par le groupe de travail, et je cite:

«Notre réflexion prend appui sur le postulat que l'administration publique n'est pas une administration comme les autres.

«Le contrat social impose un lien de confiance particulier entre l'État et les citoyens.» Troisièmement: «L'administration publique est au surplus assujettie à des impératifs de justice et d'efficacité.» Quatrièmement: «L'administrateur public, qui contribue à leur réalisation, possède objectivement un intérêt personnel qui motive son action. Ces quatre éléments sont nécessairement en tension. La recherche d'un point d'équilibre entre ces quatre éléments sous-tend toute la problématique spécifique de l'éthique et de la déontologie dans l'administration publique, problématique spécifique dont nous sommes saisis ici.»

À mes yeux, M. le Président, ce qui est dit de l'administration publique est également vrai pour tous ces organismes, établissements, collèges, universités, hôpitaux qui reçoivent un financement direct ou des aides considérables de l'État. Les fonds publics qui leur sont versés le sont parce que l'État considère qu'ils participent au bien commun. En retour, l'État et la population dans son ensemble s'attendent à ce que leur action et leur comportement soient guidés par le bien commun. Chez certains, la démarche est déjà réalisée, sinon sérieusement avancée. Des entreprises nous ont déjà communiqué leur code de déontologie. À ceux-là, leur démarche sera de vérifier si leur code est conforme à la loi et à son esprit. Chez les autres, il faudra d'abord faire la réflexion, puis établir un code d'éthique.

Par ailleurs, M. le Président, je me suis engagé, lors de l'étude détaillée du projet de loi, à ce que le projet de règlement fasse l'objet d'un échange en commission parlementaire. C'est ce que nous ferons bientôt devant la commission parlementaire.

Cette visibilité que notre institution nous permet aura son pendant chez tous ceux qui sont visés par le projet de loi. La nouvelle loi imposera à tous les organismes et établissements de publier leur code d'éthique dans leur rapport annuel. Ceci répondra à une autre préoccupation éthique que nous avons: la transparence de l'administration publique.

Ces nouvelles dispositions législatives indiqueront à la population, bien sûr, mais aussi aux nombreux organismes et entreprises de l'État ainsi qu'à toute l'administration publique que la qualité d'une administration résidera toujours d'abord et avant tout dans la qualité et la motivation des personnes qui consacrent leur talent et leurs énergies à la réalisation de la mission. J'ai confiance que ces nouvelles mesures feront qu'il n'y aura plus de doute sur la probité des administrations publiques et de leurs dirigeants. M. le Président, je suis particulièrement fier de déposer un premier projet de loi sur l'éthique et la déontologie devant cette Chambre. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Nous arrivons aujourd'hui, à l'issue d'un long cheminement, à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission qui a fait l'étude détaillée du projet de loi n° 131, loi visant à renforcer l'éthique et la déontologie des administrateurs publics.

Je rappellerai brièvement les étapes qui ont précédé les travaux de cette Chambre. Le 13 janvier 1995, le ministre de la Justice confiait à un groupe de travail le mandat d'identifier les fondements et les composantes de la dimension éthique dans la gestion des biens publics et de cerner les aspects qui ont une importance primordiale pour le maintien du lien de confiance entre les citoyens et les administrateurs publics. Le mandat du groupe de travail incluait aussi l'identification et la proposition de baliser des normes de comportement en vue de favoriser l'intégrité et la probité des administrateurs et des gestionnaires publics tout en prévoyant des mécanismes de prévention et de sanction de comportements dérogatoires.

Le groupe de travail, composé de 11 personnes, présidé par André C. Côté, doyen de la faculté de droit de l'Université Laval, s'est réuni à sept reprises, pour remettre son rapport le 26 avril 1995. Il s'agit d'un rapport de plus de 175 pages qui couvre un vaste domaine, partant de la sélection, de la nomination, de la rémunération, des indemnités et des avantages des gestionnaires de l'État dans un contexte où l'éthique, la probité et la déontologie professionnelles sont au centre des préoccupations.

De ce rapport, M. le Président, est né le projet de loi n° 131. Ce projet de loi a fait l'objet d'une première consultation où plusieurs groupes sont venus nous dire comment ils voyaient l'éthique et la déontologie et comment ils interpréteraient le contenu du projet de loi du ministre de la Justice. En décembre dernier, à la reprise de l'étude détaillée de ce projet de loi, le ministre de la Justice proposait une série d'amendements à cette pièce législative. L'ampleur de ces amendements méritait que les parlementaires consultent à nouveau les principaux intervenants, ce que nous avons fait de ce côté-ci, M. le Président. Cette deuxième consultation, plus informelle, portant des amendements que le ministre proposait en décembre dernier, a permis à plusieurs groupes de s'exprimer. Ainsi, nous savons que le projet de loi du ministre de la Justice, avec les amendements qu'il a déposés, répondait en tout ou en partie à plusieurs arguments soulevés par les groupes que nous avons entendus en commission parlementaire.

Le 20 février dernier, nous sommes revenus en commission parlementaire, et le ministre nous a proposé d'autres amendements en plus de ceux qu'il avait déposés en décembre. C'est donc dire que l'éthique et la déontologie sont une chose beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît à première vue, surtout lorsqu'il s'agit d'exporter par loi des règles d'éthique et de déontologie gouvernementales à des entreprises dans lesquelles le gouvernement n'a qu'une participation minoritaire; je pense, entre autres, à certaines filiales d'Hydro-Québec, M. le Président.

(15 h 50)

Plusieurs voyaient difficilement la cohabitation de gestionnaires ou d'administrateurs provenant du privé avec des administrateurs nommés par le gouvernement au sein du même conseil d'administration, avec l'application de règles d'éthique différentes selon l'appartenance au secteur privé ou au secteur public. Nous avons eu quelques difficultés à bien comprendre, en commission parlementaire, la portée des amendements proposés par le ministre et du même coup la portée du projet de loi n° 131. Malgré ces difficultés, nous avons fait un travail constructif, en commission parlementaire. Et je tiens à rappeler ici l'engagement pris par le ministre de la Justice envers l'opposition, de regarder, en commission parlementaire, le projet de règlement modifié qui accompagne ce projet de loi, et le ministre nous a promis que cette commission parlementaire aura lieu dans le mois de mars.

Voilà, M. le Président, l'essentiel de mes remarques, à ce stade-ci. Et je termine en disant que l'opposition est toujours disponible pour examiner ce projet de règlement que nous attendons avec beaucoup d'empressement, parce que c'est le projet de règlement qui est la pièce maîtresse de ce projet de loi n° 131. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Viger. Il n'y a pas d'autres interventions sur le projet de loi?


Mise aux voix

Alors, le projet de loi n° 131, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Conseil exécutif et d'autres dispositions législatives concernant l'éthique et la déontologie, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, article 25 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 47


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 25, M. le ministre de la Justice propose l'adoption du projet de loi n° 47, Loi modifiant la Loi sur le paiement de certaines amendes. M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. L'étude du projet de loi n° 47, qui modifie la Loi sur le paiement de certaines amendes, a été complétée par les membres de la commission des institutions le 26 novembre 1996. Ce projet de loi, soumis en vue de son adoption, a principalement pour objet de permettre le recouvrement des amendes et confiscations attribuées au Québec en vertu du Code criminel ou encore d'une autre loi fédérale en ayant recours à la procédure d'exécution des jugements prévue au chapitre XIII du Code de procédure pénale du Québec.

Ce recours à la procédure d'exécution pénale est autorisée par le Code criminel. Il repose sur un souci de cohérence en permettant d'appliquer aux amendes et confiscations imposées en vertu des lois fédérales les mêmes mécanismes de recouvrement que ceux qui sont applicables aux amendes et aux confiscations imposées en vertu des lois du Québec. La mesure permettra d'éviter la mise sur pied d'un système administratif parallèle à celui déjà existant et d'écarter ainsi des coûts additionnels tant au ministère de la Justice qu'aux municipalités.

Les percepteurs des amendes pourront donc pratiquer des saisies mobilières ou immobilières lorsque ce sera nécessaire ou encore offrir aux débiteurs de payer des sommes dues au moyen de travaux compensatoires. Si ces moyens ont échoué, le percepteur pourra demander à un juge de délivrer un mandat d'incarcération contre les défendeurs.

Par ailleurs, le projet de loi n° 47 apporte à la Loi sur le paiement de certaines amendes diverses modifications pour supprimer des dispositions qui font double emploi avec des règles déjà contenues dans la Loi sur les tribunaux judiciaires. C'est le cas, entre autres, des dispositions qui prévoient l'examen et l'inspection des registres des tribunaux et certains pouvoirs réglementaires.

Enfin, M. le Président, le projet de loi modifie la formulation quelque peu vétuste de certaines dispositions de cette loi afin de l'actualiser. Juste pour vous rappeler, elle date exactement de l'année 1900.

En terminant, je signale qu'aucun amendement n'a été apporté au projet de loi. Et je voudrais souligner l'entière collaboration dont l'opposition a fait preuve lors de l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, comme le ministre de la Justice vient si justement de l'indiquer et comme à chaque fois lorsqu'il y va de l'intérêt du public dans le domaine de la justice, l'opposition officielle a collaboré entièrement à l'adoption du projet de loi n° 47, Loi modifiant la Loi sur le paiement de certaines amendes, Bill 47, An Act to amend the Act respecting the payment of certain fines.

Maintenant, M. le Président, toute loi s'adopte dans un contexte. Et je profite de cette occasion pour rappeler à mon collègue le ministre de la Justice que, tout en apportant notre collaboration et notre aide lors de l'adoption du projet de loi n° 47, on demeure néanmoins très préoccupés, du côté de l'opposition, des effectifs et des fonds qui sont affectés à l'application de nos lois. Je ne suis pas en train nécessairement de parler des grands dossiers comme les bandes de motards criminalisés dont on a parlé beaucoup ces derniers jours, mais je parle sur un plan beaucoup plus simple.

Si on regarde le bon travail qui a été fait par une équipe de journalistes de l'émission News Watch , à Montréal cette semaine, on est à même de constater que très souvent, lorsqu'on attribue même des amendes lourdes à des gens, par exemple en cas de conduite avec facultés affaiblies, les gens reprennent leur voiture, ils se font réarrêter et ils se font réimposer des amendes ou même une période obligatoire de 14 jours de prison qu'ils ne purgeront jamais. On a trouvé des cas de personnes accusées et condamnées à répétition – trois, quatre, cinq fois – pour conduite avec facultés affaiblies, et il n'y a rien à faire pour les empêcher, parce que, du côté du gouvernement, on a tendance à mettre ça dans le panier... Du moins, du côté du ministre de la Sécurité publique, on dit: Oh, c'est des infractions au Code de la route, c'est des problèmes de circulation. Mais, lorsqu'on parle de conduite avec facultés affaiblies, on diffère d'opinions d'avec le gouvernement. Pour nous, ça y va d'une question importante de protection du public, et, nous, on est en train de dire au ministre de la Justice qu'on espère que lui et son gouvernement vont consacrer les fonds nécessaires à l'application des lois et veiller à ce que les dispositifs nécessaires pour réprimer l'inconduite soient là pour que tout le monde soit protégé.

Parce que c'est une chose de dire qu'on va adopter une nouvelle loi sur la perception des amendes et qu'on va envoyer des mandats d'incarcération, mais, si on envoie un mandat d'incarcération et qu'il n'y a pas de place dans les prisons parce qu'on ne met pas assez d'argent et qu'après on se tourne de bord et on dit: Bien, après tout, c'est juste des infractions au Code de la route ou des problèmes de circulation, bien, on n'est pas bien, bien avancé, M. le Président.

Alors, tout en apportant sa collaboration pour l'adoption du projet de loi n° 47, l'opposition officielle exprime vivement le souhait que le gouvernement comprenne que la protection du public dans le domaine de la justice et dans le domaine de la sécurité publique a sa place et son importance dans notre société et que c'est à lui, comme formation qui est là pour gouverner, de s'assurer que les sommes nécessaires sont consacrées à cette fin. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Il n'y a plus d'autres interventions?


Mise aux voix

Le projet de loi n° 47, Loi modifiant la Loi sur le paiement de certaines amendes, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 20 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 31


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 20, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'économie et du travail sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail. M. le ministre du Travail, je vous cède la parole.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: Merci. M. le Président, le projet de loi n° 31 constitue, à n'en point douter, une adaptation majeure des dernières années, une adaptation majeure qu'on a pu apporter à la Loi sur les normes du travail. Ce projet de loi que nous nous apprêtons à adopter a été modifié substantiellement au cours de la dernière session, c'est-à-dire que le gouvernement puis le ministre se sont mis à l'écoute de l'opposition et de tous les groupes qui ont voulu se présenter en commission parlementaire pour nous faire valoir leur point de vue. Être à l'écoute, ça veut dire se rendre aussi aux arguments et aux critiques qui ont été formulés devant nous. C'est normal, une commission parlementaire, c'est fait pour ça.

Bien que louables et fondés en théorie, certains aspects du projet de loi posaient des problèmes, il a été critiqué, et nous avons compris le message. Ils ont disparu du projet de loi, et ce qui reste devant nous, c'est l'essentiel. Le but visé, l'objectif premier, au fond, du projet, c'est de permettre aux salariés d'obtenir les services de procureurs compétents et spécialisés de la Commission des normes pour les défendre lorsqu'ils sont congédiés sans juste cause et suffisante.

(16 heures)

Il s'agit, M. le Président, et je le notais plus tôt, d'une modification majeure à la Loi sur les normes du travail. Les derniers amendements qui ont été apportés à cette loi-là, c'est en 1991 par les libéraux, lorsqu'ils étaient au pouvoir, une modification importante qui avait été apportée par l'ancien gouvernement; et l'adoption du projet de loi qui est devant nous permet, dans une certaine mesure, de boucler la boucle, de réaliser ce que l'ancien gouvernement avait formulé en 1991, c'est-à-dire de donner aux mesures qui avaient été votées à cette époque-là toute leur force et toute leur portée. Comme le disait si bien le député de LaFontaine, il ne suffit pas de conférer des droits aux citoyens, il faut leur donner aussi les moyens de les exercer. Devant des paroles aussi lucides, vous comprendrez bien que, de mon côté, j'ai été facilement porté à comprendre le genre de cette intervention. Et c'est exactement ce que le gouvernement veut achever par le projet de loi qui est devant nous.

En 1991, le gouvernement d'alors renforce la norme interdisant les congédiements sans cause juste et suffisante. Mais il y avait un problème. Et c'est ça qu'on veut corriger. Il y avait un problème, c'est qu'on ne donnait pas au travailleur les moyens de l'exercer. Alors, ce que nous a permis la discussion en commission parlementaire de ce projet de loi, c'est de prendre fait et cause en faveur des salariés congédiés. C'est ça, le sens de notre engagement comme gouvernement, et je pense que l'opposition avait les mêmes objectifs que nous: Prendre fait et cause pour les travailleurs. Et c'était ça, le fondement de toute la démarche, et ce, contrairement à toutes les autres normes du travail. Parce que n'oubliez pas, M. le Président, que la Commission des normes pouvait défendre, avec ses procureurs, tous les congédiements, les pratiques interdites, les pratiques déloyales des employeurs, mais lorsqu'arrivait le moment fatal du congédiement on était sans moyen pour agir.

Pourtant, s'il est un moment dans la vie d'un salarié où on a besoin d'appui et de support, c'est bien lorsqu'on se fait congédier ou qu'on met fin à notre prestation d'emploi. Et, pour ces raisons valables et pour des motifs que je trouve hautement valables, le gouvernement du Québec se devait de donner évidemment force par une disposition législative à cette orientation qu'avait pris le gouvernement d'alors. Nous croyons, de ce côté-ci, que l'amendement proposé apporte cet appui aux travailleurs en leur donnant un recours véritable et non pas un recours illusoire.

Certains groupes opposés au projet de loi, particulièrement au pouvoir de représentation des procureurs de la Commission des normes, ont dit que le maintien du statu quo constituait une option viable et que d'autres moyens s'offraient au gouvernement pour atteindre nos objectifs d'accessibilité à la justice. À ces arguments, nous avons répondu que l'expérience récente dans les recours à l'encontre de congédiement démontre clairement que, faute de moyens financiers, des salariés ont abandonné leurs recours et n'ont pu faire exécuter le jugement qui leur était favorable. Il était donc, M. le Président, temps d'agir. De plus, des délais indus d'audition sont le lot de plusieurs centaines de salariés devant se défendre seuls devant un commissaire du travail. C'était devenu intenable pour des salariés ordinaires et ça représentait des coûts absolument faramineux, hors de portée.

À ceux qui critiquent le processus de médiation de la CNT mené dans le cas de congédiements sans cause juste et suffisante, je voudrais les rassurer. Je voudrais leur dire aussi qu'avec le projet de loi une nouvelle dynamique de ce processus de médiation sera intégrée à nos méthodes de travail. Je prends l'engagement, d'ailleurs... Parce que plusieurs ont porté à mon attention que des travailleurs avaient été un peu découragés de la façon de travailler de certains procureurs ou fonctionnaires de la Commission des normes, tant et si bien que ça a eu des effets assez répréhensibles, je dirais, pour la suite des choses dans le règlement de leur dossier. Je prends acte de ça parce que le processus de médiation que nous avons à la Commission est très important dans la solution des dossiers.

Nous établissons un meilleur équilibre, en votant cette loi aujourd'hui, entre les moyens de l'employeur et ceux du salarié en donnant à ce dernier l'assurance qu'il sera appuyé sans frais devant le Commissaire général du travail et d'autres instances, si nécessaire. Donc, nul n'est besoin pour les salariés d'accepter, impuissants, une entente qui ne les satisfait pas parce qu'ils n'ont tout simplement pas les moyens d'exercer pleinement leurs recours jusqu'au bout. Je pense que le temps était venu de régler cette question. Tout considéré, M. le Président, notre gouvernement a décidé, à l'instar de la Commission des normes du travail, de prendre fait et cause pour les travailleurs en leur donnant des moyens comparables à ceux dont peuvent disposer les employeurs. C'est ça qu'on appelle l'équité. C'est ça, la justice sociale élémentaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre du Travail. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. C'est, aujourd'hui, pour les travailleurs, certainement une bonne journée, un bon jour, parce que le projet de loi n° 31 qui va être adopté en cette Chambre va certainement les combler ou du moins remplir un certain nombre de lacunes ou de problèmes auxquels ils faisaient face dans le cas de congédiements pour cause non justifiée ou injuste, ou pratique interdite.

M. le Président, c'est un projet de loi qui a cheminé longtemps, c'est un projet de loi qui date du mois de mai dernier. Alors, ce n'est pas un projet de loi qui a été adopté à toute vitesse, qui a été adopté sans réflexion, sans précaution par les parlementaires. C'est un projet de loi qui est à l'honneur des députés du Parlement, de quelque bord qu'ils soient, car, en effet, le projet de loi tel que présenté faisait problème. On sait que bien souvent les projets de loi qui sont rédigés par nos savants juristes de la haute fonction publique, nos savants législateurs, peuvent être en décalage avec les réalités vécues par les citoyens ordinaires, et particulièrement par les travailleurs. Ces projets de loi peuvent à l'occasion passer à côté de la volonté même du législateur, du ministre. Et il appartient aux députés, dans les commissions parlementaires et en cette Chambre, de faire un travail qui est de rencontrer les citoyens, de rencontrer les groupes qui auront à voir ou à vivre avec les projets de loi, d'écouter ce qu'ils ont à nous dire et d'essayer d'apporter des changements, des bonifications à tout projet de loi, quel qu'il soit. Et ce fut fait dans celui-là, M. le Président.

C'est vrai qu'au début ce fut un peu laborieux; peut-être parce que, vous savez, c'était au mois de mai et beaucoup de projets de loi pouvaient être sur la table, et le ministre avait certainement hâte d'en faire adopter. Et c'est là tout à fait normal, un ministre veut toujours adopter les projets de loi assez rapidement. Donc, au départ, ce n'était pas évident que nous pourrions prendre vraiment tout le temps qui était nécessaire. Mais, très rapidement, M. le ministre du Travail s'est rendu compte qu'il était dans l'intérêt collectif et général de prendre un peu de recul.

Alors, il est venu voir l'opposition et il nous a suggéré de lui soumettre une liste de noms que nous pourrions entendre, d'organismes ou de groupes représentatifs, ce que nous avons fait. Alors, bien sûr, nous avons soumis des noms de groupes comme Au Bas de l'échelle, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, la FTQ, la Confédération des syndicats nationaux, CSN, la Centrale de l'enseignement du Québec, la Centrale des syndicats démocratiques, le Conseil du patronat du Québec, l'Association des manufacturiers du Québec, le Protecteur du citoyen, le Barreau du Québec, la Fédération des femmes du Québec et les comités d'action des non-organisés.

Et là, M. le Président, on touche un point particulier à ce projet de loi là, les non-organisés. De plus en plus, notre société se retrouve avec des travailleurs qui ne sont plus dans les cadres traditionnels de représentation, les syndicats, les associations professionnelles. Les gens ont du travail précaire, temporaire, les gens sont des fois ballottés d'un emploi à l'autre, de six mois en six mois, d'un an en un an et ils n'ont plus les mêmes protections qu'auparavant. Alors, il fallait donc que ces gens-là puissent se faire entendre. Et je déplore que trop souvent, pour nous, en cette Chambre – et ça inclut, je pense, tout le monde – le premier réflexe est d'entendre les groupes organisés – alors, les grands syndicats, les représentants patronaux – alors qu'on oublie trop facilement que la majorité des travailleurs au Québec ne sont pas représentés, ne sont pas membres de ces organisations syndicales. Et on oublie trop facilement aussi que la très grande majorité des entrepreneurs, des commerçants, des chefs de petites entreprises, eux aussi ne sont pas membres des organismes patronaux officiels.

(16 h 10)

On a tendance, donc, lorsque nous faisons ces consultations, à cibler un peu trop ces groupes organisés et on n'écoute pas ce que les autres ont à nous dire. Et je trouve que, dans ce projet de loi là, ça a été quelque chose de très positif, parce qu'on va devoir de plus en plus – c'est près de 60 % de tous les gens qui sont non représentés dans les grandes associations patronales ou syndicales – faire face à ce phénomène dans les prochaines années. On voit ce qui se passe en Europe: du travail précaire, des gens temporaires, intérimaires, contrats à durée indéterminée. Il va donc falloir que nous mettions en place des mécanismes dans notre société pour encadrer le travail de ces gens-là, pas l'encadrer d'une manière dirigiste comme ça se faisait dans les années cinquante dans certains pays de l'Est. M. le Président, il va falloir le faire d'une manière souple, d'une manière large pour que ça ne soit pas quelque chose qui va venir brimer toute l'énergie et tout le potentiel qu'un travailleur indépendant, par exemple, peut avoir, mais il va falloir que ça soit là quand même pour éviter que ces gens-là se retrouvent avec des droits différents et un traitement différent dans leur travail de ceux qui sont dans d'autres sortes de travail ou qui sont représentés par des syndicats, à titre d'exemple, mais aussi que les entreprises, bien sûr, qui, elles, sont plus petites ne se retrouvent pas dans une situation qui ne collerait pas à la réalité parce que représentées par des organismes qui représentent peut-être des plus grandes entreprises.

Alors, ça, c'est des choses fondamentales, je pense, dans les prochaines années et je souhaiterais que le ministre, s'inspirant de ce qui s'est passé à cette commission, puisse ouvrir une réflexion là-dessus, sur les protections et sur les changements à apporter en matière de travail, de protection sociale pour les travailleurs, ces nouveaux travailleurs, de cette nouvelle économie qui se développe et qui est beaucoup plus difficile et laborieuse pour les travailleurs que celle que nous avons connue depuis 20, 25 ans, ici, et qui s'apparente, à certains endroits, à certains moments, à celle que nous connaissions il y a 40, 50 ou 60 ans, pour ces mêmes travailleurs.

Alors, je profite de ça pour l'inviter. Et, moi, je l'assure, bien sûr, de notre côté, ici, de notre collaboration. Nous avons déjà commencé un peu une réflexion là-dessus de notre côté et je souhaiterais qu'à un moment donné, peut-être au niveau d'une commission parlementaire, un groupe de travail, nous puissions nous pencher là-dessus et faire en sorte de continuer à faire avancer les lois du travail et de les adapter au contexte actuel, et particulièrement en ce qui concerne la protection des travailleurs.

Il y avait dans le projet de loi un côté qui était moins consensuel pour nous, M. le Président. C'est la ponction qui est faite dans la caisse de la Commission des normes pour financer le bureau du Commissaire général du travail. Nous avons de la difficulté avec cela; nous considérons que ce n'est pas à cette caisse-là de financer les recours, de financer cette action, là, qui peut être entreprise, parce que nous disons que le payeur, celui qui est poursuivi ne devrait pas être celui qui va payer le juge ou le commissaire. En termes d'impartialité et de justice, il y a déjà eu des précédents et il y a eu dernièrement quelques débats qui ont été faits, en particulier sur le projet de loi n° 79, à la CSST, où le Barreau nous a fait valoir ces choses-là. Il y a d'autres projets de loi où notre collègue le député de Chomedey et porte-parole du ministère de la Justice pour l'opposition, bien sûr, nous a sensibilisés.

Alors, M. le Président, là-dessus, nous ne pouvons pas être d'accord et nous émettons toujours les mêmes réserves. Nous déplorons que le gouvernement aille ponctionner une partie des sommes de la caisse des Normes pour financer les gens qui auront à rendre justice sur les causes qui seront apportées par les citoyens. Bon, est-ce que nous devions, pour cette raison-là, nous opposer au projet de loi, contrairement, complètement? Nous avons réfléchi, nous étions en commission parlementaire, nous avions un groupe de travail avec des députés qui étaient très, très intéressés à ça: le député de Bourassa, notre collègue Yvon Charbonneau, le député d'Argenteuil, qui était présent avec nous, la députée de Saint-François ainsi que le député de Shefford. Et nous avons convenu à ce moment-là, le soir de la commission parlementaire, la dernière séance, que nous ne serions pas en accord avec cette partie-là mais que nous serions en accord avec le projet de loi pour la bonne partie qui est dedans, celle des travailleurs. Alors, ça ne veut pas dire que nous souscrivons à l'ensemble. Il sera mis en application. La partie avec laquelle nous ne sommes pas d'accord sera mise, malgré tout, en application. Le gouvernement en est conscient. Je pense qu'il aurait pu faire deux projets. Le gouvernement pouvait dire: En ce qui concerne la ponction dans la caisse des Normes, on la met à part puis on fait un projet de loi juste pour élargir l'accès des travailleurs à leur défense, à leur représentation gratuite devant la Commission des normes.

On rappellera que c'est grâce à l'opposition – le ministre l'a mentionné – qu'il n'y a aucuns frais qui vont être chargés lorsque les gens vont aller devant la Commission des normes, alors qu'avant il avait été amené dans le projet de loi un montant pouvant varier, je pense, de 80 $ à 250 $ par personne. Le ministre disait à juste titre: C'est un moment très difficile, pour un travailleur, de se retrouver congédié. Prenons le cas d'une mère de famille monoparentale qui est congédiée et qui gagne 300 $ ou 250 $ par semaine et qui doit aller déposer 90 $ ou 80 $ tout de suite, là, pour aller se faire défendre parce qu'elle n'est pas d'accord avec les causes de son congédiement. Nous trouvions cela injuste, et la même chose pour un montant plus élevé où ça serait 250 $, et nous avons donc fortement insisté, nous faisant là l'écho du groupe et de travailleurs, et le ministre a accédé à notre demande et il a compris lui aussi que c'était certainement des choses que la société ne pouvait pas imposer à ces travailleurs-là.

On parle des plus démunis, là. On ne parle pas des gens qui gagnent 40 000 $ ou 50 000 $ par année. Ceux-là sont capables, généralement – généralement, sauf exception – de prendre un avocat. Ce sont des gens plus lettrés ou plus articulés. Ils sont capables d'aller, peut-être, se défendre plus facilement, alors que, lorsqu'on parle de bas, bas salariés, bien, ce sont des gens qui, lorsqu'ils perdent leur emploi, se trouvent dans une situation de détresse, et ça, nous ne pouvions souscrire à ça. Et c'est ces raisons-là qui font que, même si dans le projet de loi il y a une partie qui ne nous plaît pas, une partie avec laquelle nous ne sommes pas d'accord, à laquelle nous sommes opposés, malgré cela, nous allons donner notre consentement pour le projet de loi.

M. le Président, en terminant, je tiendrais à remercier un de mes collègues, le député que j'ai nommé précédemment, le député de Bourassa, la députée de Saint-François, le député de Shefford et le député d'Argenteuil ainsi que les quelques autres qui sont venus pour nous aider à cette commission parlementaire. Je tiens aussi à remercier les députés du gouvernement, qui ont aussi, à l'occasion, fait valoir des points dans cette commission qui étaient proches ou semblables à ceux de l'opposition, en particulier le député de La Peltrie, qu'il me fait toujours plaisir de voir dans notre commission car il sait faire avancer d'une manière positive les dossiers qui touchent les travailleurs et ses concitoyens, ainsi que les autres députés. Je ne voudrais pas tous les nommer. Je tenais à le mentionner et je dirais en terminant que cette décision du ministre de finir par écouter les gens, de prendre note de ce qu'ils disaient, d'amender le projet de loi en conséquence est certainement un des beaux jours et un des beaux côtés du parlementarisme au Québec. Merci, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Il n'y a pas d'autres intervenants. Alors, le rapport de la commission de l'économie et du travail portant sur le projet de loi n° 31, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je demanderais le consentement pour que nous puissions procéder à l'étape suivante, soit l'adoption finale de ce projet de loi, et, en conséquence, je vous demanderais de prendre en considération l'article 20 de notre feuilleton.


Adoption


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour que nous dérogions de l'article 230? Il y a consentement. Alors, à l'article 20, nous sommes maintenant à l'adoption du projet de loi. Le projet de loi n° 31, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 5 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 88


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 5, M. le ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de congé annuel et de congé parental. M. le ministre du Travail, je vous cède la parole.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, au sommet économique de Montréal, en octobre dernier, vous vous souviendrez que le gouvernement du Québec, avec ses principaux partenaires économiques, a pris un certain nombre de décisions, et évidemment ça avait des répercussions sur la législation du côté social. Alors, le projet de loi qui est devant vous s'avise évidemment d'éviter ou d'enlever certains irritants qui vont permettre plus facilement la création d'emplois et le développement économique et social du Québec.

(16 h 20)

Pour le gouvernement, il était et demeure absolument prioritaire d'éliminer tous les frais à la création d'emplois, d'essayer de faire en sorte que les législations, les règlements soient plus simples et, quand c'est possible, d'essayer de simplifier toutes les procédures quand ce n'est pas nécessaire, de ne pas en mettre. Et, quand c'est des problèmes trop graves, si on peut les enlever, on les enlève.

Déjà, des mesures importantes ont été prises pour procéder à la déréglementation de certains secteurs d'activité. À ce titre, le ministère du Travail... Et je publiais, la semaine dernière, les avis annonçant l'abolition de certains comités paritaires. Ce sont des gestes concrets qui font partie de la stratégie globale qui ressort du Sommet et qui obligent à toutes fins utiles le gouvernement et le législateur à donner suite à ses engagements, à respecter ses engagements. Quand on annonce que des décrets vont être abolis, abrogés, ça représente d'excellentes nouvelles pour les entrepreneurs du Québec, notamment dans le secteur manufacturier, où le verre plat et le bois ouvré occupent une importance très grande.

Cette stratégie globale du gouvernement, ça comporte également des engagements pour que tous y participent. Il ne faut pas que certains salariés ou certains groupes de travailleurs ou de travailleuses soient sacrifiés ou soient laissés-pour-compte dans la suite des objectifs de création d'emplois et de développement économique. Il faut quand même être prudent. Je pense qu'il y a une sagesse qui doit guider le législateur et je pense qu'on se doit d'en être conscient, tout le monde. Le gouvernement du Québec ne pourrait cautionner la poursuite d'une orientation, si importante soit-elle, si elle se faisait au détriment des parties, si minime soit-elle, et des fragments importants de la classe ouvrière ou des employeurs du Québec.

Je parlais plus tôt d'une stratégie globale, M. le Président. Bien, le projet de loi n° 88, comme d'autres projets à venir qui seront déposés devant cette Assemblée, il fait justement partie des moyens qu'on veut mettre de l'avant, comme gouvernement, pour réduire avant tout tous les effets néfastes et tout ce qui peut être fait pour la libéralisation du marché du travail. Le projet de loi n° 88 amende la Loi sur les normes du travail pour accorder à toute une catégorie de travailleurs et de travailleuses le droit à une troisième semaine de vacances, si elles n'ont pas accumulé cinq ans de service continu ou d'ancienneté. C'est important, M. le Président. Il y a 15 jours, il y a deux semaines d'accordées, et les gens qui vont vouloir se prévaloir d'une troisième semaine pourront le faire. Nous croyons que cette mesure pourra créer des centaines d'emplois, surtout pour les jeunes qui seront appelés à faire du remplacement durant la saison d'été, notamment.

Le projet de loi prévoit aussi – et ça, ce n'est pas négligeable – que le congé parental dont peut bénéficier chacun des parents à la suite d'une maternité ou de l'adoption d'un enfant passe de 34 à 52 semaines. Cette mesure, en plus de favoriser le partage du travail, permettra aux parents de pouvoir mieux assumer leurs responsabilités de parents, et en plus ce congé n'est pas rémunéré. D'ailleurs, il ne l'est nulle part en Amérique du Nord.

Cependant, le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre sera bientôt saisi d'une proposition de règlement qui aurait pour effet de maintenir, pour tous les parents qui exercent leur droit au congé parental, certains avantages ou bénéfices. Ainsi, le service continu ou l'ancienneté serait maintenu durant le congé, ce qui aurait pour effet de permettre à ces parents de continuer d'accumuler leurs vacances comme s'ils étaient véritablement au travail. De plus, le règlement prévoirait que les parents qui le veulent et acceptent de défrayer leur part pourraient maintenir les bénéfices consentis par l'employeur durant le congé parental. Dès que le Conseil consultatif se sera prononcé, je serai heureux, M. le Président, de proposer l'adoption de ce règlement qui, de fait, accorde aux parents qui prennent un congé parental les mêmes droits qu'à tous ceux et celles qui veulent se prévaloir d'un congé de maternité.

Ces deux mesures, ajoutées déjà à celles annoncées lors du Sommet et à d'autres qui se sont concrétisées ou en voie de l'être, sont des clés pour la relance de l'emploi et l'adaptation de nos règlements aux nouvelles réalités du marché du travail, qui doivent être souples pour qu'on cesse d'affecter les employeurs dans leur volonté de faire du développement et de créer des emplois. Moi, je pense que le Québec fait un virage vers la modernité. Je pense que nous devons ajuster nos lois et nos règlements pour que, justement, on ne décourage personne qui veut investir au Québec et qui veut développer son entreprise. Ce qui importe maintenant, ce n'est pas de jeter tout par-dessus bord, loin de là. C'est de faire en sorte de ne pas décourager les employeurs, de ne pas non plus aller à l'encontre des intérêts des travailleurs, mais bien de se mettre dans la tête qu'au Québec présentement il y a une urgence: c'est celle de la création d'emplois. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre du Travail. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Ce projet de loi n° 88 est certainement parmi ces projets de loi qui ont deux connotations. Le ministre nous mentionnait que ce projet de loi était pour créer des emplois. Oui, certes, et c'est bien et c'est tant mieux s'il le réalise. Ce n'est pas prouvé dans le cas des semaines de vacances, de la troisième semaine de vacances, parce que ce n'est pas évident que les travailleurs les prendront et que les entreprises permettront de les prendre les trois en même temps, car, en effet, je voyais dans un journal, un quotidien de la région des Cantons de l'Est, je pense, dans le comté de Brome-Missisquoi, une entreprise qui était en train de régler ses conventions collectives, tout allait bien, sauf que la compagnie américaine a dit: Écoutez, on a un problème. Les gens prennent leurs deux semaines de vacances en même temps, à peu près à la même période. Nous, on ne peut pas se permettre ça. On a des cadences de production à respecter, et il faut donc que vous compreniez qu'on ne peut pas aménager le travail de cette façon-là. Et les travailleurs ont décidé d'eux-mêmes, en effet, de morceler leur temps de vacances autant qu'il se pouvait pour accommoder la cadence de production.

Ce que ça veut dire, M. le Président, c'est qu'encore là on peut donner un droit à des gens, encore faut-il qu'ils puissent l'exercer. Alors, pour l'exercer, ça prend deux conditions, d'après moi. La première condition, c'est que l'entreprise puisse ne pas s'en trouver affectée, ne pas faire en sorte de faire baisser la production. On sait qu'il y a des travailleurs qui sont des travailleurs spécialisés qu'on ne pourra pas, comme ça, remplacer juste pour une semaine. Ça, là, il ne faut quand même pas... Personne, je pense, ici va comprendre ça, va être d'accord avec cet argument qui dit que, vu que les gens prennent une semaine de vacances de plus, on va engager du monde. Sur ce point de vue là, je n'en suis pas, d'autant plus que c'est des travailleurs, bien souvent, spécialisés. À moins de faire affaire avec des travailleurs intérimaires qu'on engagerait pour une semaine seulement ou deux semaines, là, je pense que l'argument est un peu gros, lorsque M. le ministre nous mentionne que c'est un projet de loi qui va créer des emplois. Cette partie-là, en tout cas, certainement pas.

Par contre, certains pays en Europe ont des législations qui amènent déjà quatre ou cinq semaines de vacances, et il est logique et il est légitime pour des travailleurs, des travailleuses qui, après une année complète de travail, des fois difficile, stressante, dans les grandes villes ou en dehors, dans des industries lourdes, bruyantes, polluantes à l'occasion, que ces travailleurs qui bien souvent ont des enfants qu'ils ne voient pas toujours comme ils le voudraient, avec lesquels ils n'ont pas de longues périodes d'interactivité... Eh bien, ces pays occidentaux ont trouvé qu'il était intéressant et important que, donc, les travailleurs puissent avoir un certain nombre de semaines de vacances important. Et moi, personnellement, j'en suis et je crois que c'est là certainement un des côtés importants de l'organisation du travail, car, en effet, un travailleur ou une travailleuse qui est en bonne santé physique, mentale, psychique et en bonne harmonie familiale avec son mari, ses enfants, et cela grâce à des périodes de vacances et à des conditions de travail intéressantes, bien, ce travailleur ou cette travailleuse est certainement beaucoup plus productif ou productive dans son entreprise, dans son commerce, dans son bureau pour faire son activité que si c'est le contraire.

(16 h 30)

Je crois, là, M. le Président, que les vacances, ce n'est pas un luxe. Les vacances, c'est une nécessité sociale, sanitaire et économique. Alors, je ne peux pas être contre ça. Mais que M. le ministre ne vienne pas nous dire qu'on va gagner des emplois avec ça. Là, je pense que la barre est haute à sauter un petit peu.

L'autre côté du projet de loi m'intéresse beaucoup, puis je pense qu'il intéresse au moins deux personnes en cette Chambre. Je vois le leader du gouvernement qui est en face de moi, il est à peu près dans la même situation que moi: nous sommes tous les deux pères de jeunes enfants et nous savons très bien, pour avoir des jeunes enfants – je pense qu'il a un enfant d'un an et demi et, moi, de deux ans – que ça prend beaucoup de temps et que, lorsque l'enfant est né, c'est difficile, c'est déchirant d'être obligé d'emmener l'enfant dans une pouponnière ou dans une crèche ou dans une garderie à huit, sept, cinq, six mois. C'est quelque chose qui nous prend à l'intérieur, et c'est normal. Il vient de naître, il est fragile, il est petit, on a le goût de s'en occuper, on a le goût que la mère puisse... Et c'est généralement la mère. Ça peut être le père, je ne veux pas qu'on me taxe d'être dirigiste en vertu de l'un ou de l'autre, mais généralement c'est comme ça et c'est très bien. Moi, je le vois comme ça; d'autres peuvent le voir autrement. Moi, je pense que la mère a certainement un rôle très, très important. C'est le plus beau rôle de la mère que d'élever son enfant.

Bien, je pense que, étant donné que de plus en plus les mères, les femmes sont au travail pour des raisons économiques ou alors parce qu'elles sont monoparentales, eh bien, on doit favoriser, au moins la première année, faire en sorte que, la première année, elle puisse s'en occuper. Et je trouve ça paradoxal, à l'occasion. C'est qu'on dit à la mère: Tu vas pouvoir prendre ton congé sans solde. C'est beau, le principe est beau, alors que, si elle ne prend pas de congé sans solde – elle n'est pas obligée – elle va avoir des subventions pour emmener son enfant à la garderie ou à la pouponnière. Il y a là quelque chose qui dépasse l'entendement puis le bon sens. On est prêt à donner à cette personne de l'argent du gouvernement pour l'aider après quatre, cinq mois à retourner au travail pour payer sa garderie et sa pouponnière, et en même temps on n'est pas prêt à lui dire: Si, toi, tu restes à la maison, on va te donner le même montant pour compenser la perte économique. Je pense qu'il y a là certainement place à de l'amélioration.

Si le ministre et le gouvernement sont prêts à nous dire qu'il faut favoriser le congé parental, pas seulement pour créer de l'emploi... Le ministre a dit: Ça va créer de l'emploi. Mais, moi, je ne veux pas créer de l'emploi avec le congé maternel des mères, le congé parental, je veux que les mères puissent s'occuper de leurs enfants – c'est ça que je veux – ou les pères, s'ils le désirent. Je ne veux pas créer de l'emploi. Si ça crée de l'emploi, bien, tant mieux, ça viendra après, mais ça ne doit pas être le principal argument.

Moi, je suis toujours déçu de voir que, dans le début des projets de loi, le ministre amène des arguments semblables à ceux-là. Je suis certain, quand on aura fini la commission parlementaire, qu'il va avoir changé, puis qu'il va avoir adopté son discours puis qu'il va retrouver le côté social qu'il avait quand il était plus jeune puis le côté plus humain. Parce que, avant tout, cette loi-là devrait être une loi humaine, une loi sociale. On veut créer de l'emploi en envoyant les mères en congé parental. C'en est triste, M. le Président. J'espère que ce n'est pas juste ça.

Ce qu'il faut faire, c'est être cohérent avec notre discours. Est-ce que, oui ou non, en cette Chambre, le gouvernement et l'opposition, nous pensons qu'une mère de famille a le droit d'élever son enfant à la maison, chez elle, la première année? Première question. Deuxième question: Est-ce que nous pensons que la société doit faire quelque chose pour aider les jeunes mères, les jeunes familles à élever leurs enfants? C'est oui, parce qu'on leur donne des aides et des subventions pour faire garder leurs enfants lorsqu'elles retournent travailler.

Alors, si c'est oui aux deux, pourquoi pas faire juste un avec, si les mères le désirent? Est-ce qu'on ne pourrait pas, je le disais précédemment, trouver une solution qui fera en sorte que les mères restent à la maison et reçoivent le montant ou une partie du montant que nous sommes prêts, comme société, à leur accorder sous forme de déduction d'impôt, ou de mariée, ou de je ne sais pas trop quelle affaire, ou à elles-mêmes, si elles envoient leurs enfants à la garderie? Il y aurait là certainement quelque chose, un aménagement qui ne coûterait pas plus cher à l'État, parce qu'on le donne de toute façon, mais qui, au point de vue social, ah! ah! aurait un effet tellement important, tellement bénéfique, premièrement, parce que la qualité de vie de l'enfant, la qualité de vie de la mère, de la famille, l'équilibre psychique, psychologique...

Pensez-y un peu. Quand une mère se fait réveiller la nuit par le bébé, on se lève. Ça m'arrive encore, moi, à deux ans, avec mon petit garçon. Elle se lève, le fait manger aux quatre, cinq, six heures, change les couches. Le matin, elle se relève encore, rebiberon, prépare le sac, prépare le truc. Hop! dans la voiture, à la garderie. Elle est fatiguée, elle est... Au bout de quelque temps de ce régime-là, lorsqu'elle rentre chez elle, les conflits vont éclater. La fatigue, la tension dans le couple vont générer une situation difficile. C'est donc là un côté très important, M. le Président.

L'autre côté, bien, c'est le côté natalité. Comme société, nous nous plaignons constamment que nous n'avons pas d'enfants. On lit dans des rapports que nous avons 0,9 % ou 0,8 % enfant par citoyen, c'est-à-dire que nous ne nous renouvelons pas. On ne se renouvelle pas. Pourquoi on ne se renouvelle pas? Bien, certains vont amener des arguments à l'effet que les femmes vont sur le marché du travail. C'est sûr, on n'a pas le choix. Au niveau économique, le seul moyen d'avoir une vie à peu près décente maintenant, en tenant compte des critères de notre société, c'est d'avoir deux salaires. Bon, un jeune mari va gagner une trentaine de milliers de dollars, puis la femme, à peu près une vingtaine de milliers. C'est à peu près ça, là, le chose, dépendant du métier ou de la profession qu'elles font. Des fois, ça peut être équivalent. Il n'en reste pas moins que les deux vont sur le marché du travail. Alors, ayant eu le premier enfant, bien souvent, se rendant compte de la difficulté d'élever un enfant, surtout la première année, avec la compatibilité du travail, bien, des fois, ça repousse avant d'en faire un deuxième, puis on n'est moins intéressé. Il y a d'autres problèmes, d'autres choses qui se posent. Alors, au Québec, au lieu de légiférer à la pièce avec un projet qui modifie les lois sur les normes du travail, est-ce qu'on ne devrait pas arriver avec un projet de société global pour les familles?

On voit qu'il y a la ministre de l'Éducation qui parle des garderies à plein temps, de l'école pour les enfants, de la maternelle. Enfin, elle parle même de congé parental à un moment donné, elle aussi, là. Ce n'est pas arrimé avec ça. On légifère encore dans un même domaine, qui est celui de la famille, de différentes manières, chaque ministère avec ses fonctionnaires dans un coin, puis l'autre dans l'autre, puis dans l'autre, puis dans l'autre. M. le Président, on n'avance pas de la bonne façon. Il faudrait qu'il y ait une réflexion globale sur la famille, sur la natalité, et, si nous ne le faisons pas, bien, on va continuer comme ça: de moins en moins d'enfants, la société québécoise va continuer de vieillir, et nous allons avoir un problème à un moment donné.

Or, certains, ça va les faire sourire parce que, rendu à cinquante et quelques années, on s'en fout, on est un peu égoïste dans nos affaires et on trouve ça bizarre d'entendre des députés qui parlent de famille et de natalité. Mais c'est l'avenir de notre société qui est là, M. le Président. C'est la base même. À quoi servirait-il d'avoir fait évoluer le Québec – et j'entends souvent des députés dire: On a évolué beaucoup, on est parti de loin, on est rendu une société très développée, très culturelle, économique, sociale, la langue française, la culture québécoise – si, en fin de parcours, nous ne faisons plus d'enfants ou peu d'enfants, à un point tel que notre société, par elle-même, bien, elle va s'atrophier et elle va tranquillement se minoriser encore plus?

Alors, on a là des occasions en or. Juste sur ce projet de loi qui a quatre, cinq articles, eh bien, il y a là déjà place à une large réflexion. M. le Président, vous comprendrez que ce principe-là, on ne peut pas être contre. Mais nous nous questionnons beaucoup. Pourquoi on va amener 34 à 52 semaines de congé parental gratuit sans donner aux gens les moyens de vivre pendant ce temps-là? Que va-t-il arriver à la mère de famille dont le mari a un petit salaire? Il gagne une trentaine de milliers de dollars. Qu'est-ce qu'il va arriver si elle prend ce congé-là pendant un an? Pas d'argent, pas de salaire. Le ministre nous dit qu'il va réglementer et faire en sorte que, s'ils paient de leurs poches, ils vont avoir les mêmes bénéfices qui sont consentis par l'employeur pendant leur congé. Mais est-ce qu'il comprend, le ministre, qu'ils n'auront pas d'argent pendant ce temps-là, les gens, et que, là, ils vont devoir payer en plus pour garder des bénéfices? Il me semble que ça devrait être implicite que, si l'on donne le droit aux gens de prendre un congé parental, on va au moins comme société assurer la garde de leurs bénéfices sans être obligé de les faire payer.

Alors, on dirait que la société tire tout de son bord et essaie de se donner une bonne image. C'est un peu ça, le projet de loi. C'est comme ça que je le vois. Mais ce n'est pas comme ça qu'on bâtit une société. Je le déplore. C'est encore quelque chose qui sort du Sommet. Le Sommet, c'était un sommet économique. Ce n'était pas un sommet sur la famille, ce n'était pas un sommet sur les gens, sur le vécu des travailleurs, sur les pères de famille, les mères de famille. Ce n'était pas sur ça, le Sommet. On a parlé de business et de création d'emplois. Et ce projet de loi là, c'est un projet de création d'emplois, le ministre nous l'a dit. Bien, moi, je n'en suis pas, pour un projet de création d'emplois, j'en suis pour un projet social, un projet de société.

(16 h 40)

Des milliers d'emplois, a-t-il dit. Il me semble que, si, en plus, un certain nombre de citoyens et de citoyennes restaient chez eux et que ça permettait à d'autres de travailler, eh bien, le bénéfice que la société va en retirer devrait au moins servir à compenser le bénéfice ou les avantages que ces gens-là ne retireront pas.

Un enfant au monde, ça coûte plus cher, c'est plus de travail, c'est plus de stress. Vous laissez votre emploi, et là on vous dit: Maintenant, bien, vous n'êtes pas payé. D'ailleurs, c'est tellement vrai que les employés gouvernementaux, les gens qui travaillent dans la fonction publique, ont des congés parentaux, de maternité, les femmes, plus longs que dans le secteur privé. Et là je parle, moi, dans mon discours, beaucoup, dans mon intervention, pour les travailleurs non organisés, les petits travailleurs du bas de l'échelle, les travailleuses en particulier.

M. le Président, quelqu'un qui travaille dans la fonction publique du Québec a le droit d'avoir six mois de congé de maternité. C'est beau, ça. C'est déjà payé à un certain montant. Lorsque ce congé est terminé, cette personne peut s'inscrire au congé de maternité qui est disponible pour tout le monde sur l'assurance-chômage. C'est un autre sept ou huit semaines, si mes chiffres sont exacts, ce qui nous amène à huit mois, presque. Alors, pourquoi est-ce que la société consent à des travailleurs – et légitimement, moi, j'en suis, là, j'en suis – à des travailleuses des avantages de huit mois de congé de maternité payé avec les impôts et les taxes des citoyens et, d'un autre côté, on va dire à des travailleuses non syndiquées, non dans le système gouvernemental: Vous avez droit au congé normal de trois mois ou quatre mois, mais après ça vous retournerez travailler, puis on n'est pas prêt à vous aider si vous restez, parce qu'on vote une loi qui vous permettrait de rester l'année au complet, mais on n'est pas prêt à vous indemniser ou à vous aider? Je n'aime pas le mot «indemniser». Ce n'est pas une indemnisation, le congé de maternité.

Alors, moi, je dis que M. le ministre peut-être devrait revoir ce projet de loi là. Il devrait revoir s'il ne peut pas l'accompagner de mesures financières pour inciter les gens, inciter les mères de famille à en profiter. Si vraiment il veut qu'elles restent à la maison, si vraiment c'est un projet social, bien, il doit être accompagné de mesures concrètes, financières pour que les gens puissent l'utiliser. Il l'a dit lui-même, tout à l'heure. Dans son discours précédent, il disait: Le député de LaFontaine disait, à juste titre: On peut donner des droits aux gens, mais encore faut-il leur donner les moyens de les exercer. Bien, moi, je dis: Donnons aux mères du Québec, aux mères de famille le moyen d'exercer le droit qu'on leur donne, le droit de rester à la maison et d'élever leur enfant pour la première année.

Alors, M. le Président, sur le principe du projet de loi, nous ne pouvons pas être contre. C'est sur ce qui l'accompagne que nous avons peut-être des réserves, et peut-être que nous ne serons pas d'accord, en bout de ligne. Nous ne le savons pas. Nous verrons en cours de commission parlementaire les changements, les bonifications qui peuvent être faits dans la ligne que je décrirai. Je ne sais pas quelle est la marge de manoeuvre de M. le ministre. Je souhaite et je répète que, si vraiment son but, son voeu, le voeu de ce gouvernement est de faire un projet de loi pour aider les mères de famille à élever leurs enfants à la maison pendant un an la première année, bien, il faut leur donner les moyens de le faire. Et, là-dessus, je pense que l'ensemble des députés en cette Chambre doivent être d'accord, quand même nous ne serions pas du même bord, avec ce principe, sinon à quoi sert-il?

Je le disais, une mère de famille... Prenons une mère de famille monoparentale. Comment elle s'embarque là-dedans, là? Une mère de famille monoparentale, disons, qui est le seul revenu à la maison, elle a le droit de prendre son 52 semaines, elle aussi. Elle va vivre comment, la partie, les semaines où elle n'a plus le droit à son allocation de maternité? Comment elle va faire? Donnez-moi la réponse. Y a-t-il quelque chose dans la loi qui prévoit ça? Je n'en ai pas l'impression. On ne l'a pas vu. Il y a quatre ou cinq articles, puis je n'ai pas vu ça. Alors, il faut l'accompagner. On donne un droit théorique. Mme Unetelle, vous attendez un bébé, vous accouchez, vous travaillez, votre mari ou votre conjoint ou le père de l'enfant n'est plus là, il est parti, vous voulez prendre votre congé de maternité et retourner travailler après. Comment vous allez vivre quand le congé sera terminé? Là, on se retrouve... C'est une situation qui n'est probablement pas prévue; il va falloir en discuter en commission parlementaire.

Alors, je répète, M. le Président, que, pour nous, avant de donner un droit aux citoyens, si vraiment c'est un droit, et lorsqu'on vote une loi pour dire que le congé parental passe de 34 à 52 semaines, on leur donne un droit, encore faut-il leur donner les moyens de l'exercer. Et je suis certain que le ministre pense comme moi là-dessus.

Alors, je l'invite à regarder des mesures d'accompagnement. Il n'y a pas de raison que, si la femme envoie son enfant en pouponnière, ou en crèche, ou en garderie – appelons ça comme on voudra – elle reçoive une certaine indemnité pour pouvoir le faire, alors que, si elle reste chez elle pour s'en occuper la première année, elle n'en aura pas. Il y a peut-être là lieu de faire des transferts, des aménagements, des accommodements. Je ne le sais pas. Peut-être qu'il va falloir parler avec sa collègue qui s'occupe des garderies, avec sa collègue au niveau social. Je ne sais pas comment le ministre va faire. Mais je pense qu'en voulant parler de relations de travail, il a embarqué dans le social, dans le familial, et c'est tant mieux.

C'est tant mieux, quand on sait que M. le ministre a déjà été un des chantres du social, du syndicalisme. On sait qu'il a déjà, sur des tribunes télévisées, défendu les citoyens et les citoyennes. Il a changé depuis qu'il est ici. C'est vrai. On oublie, des fois. On oublie puis on ne se rappelle plus, des fois, d'où on vient. Peut-être que ça lui est revenu déjà dans quelques projets de loi. Peut-être que, dans celui-là aussi, il va se rendre compte que son projet de loi, tel qu'il est proposé là, c'est un bon principe, mais qui n'a pas de bon sens pour être appliqué parce qu'il va se faire appliquer sur le dos des travailleuses ou des travailleurs; sinon ils ne l'appliquerons pas. Puis, s'ils ne l'appliquent pas, ça ne sert à rien, c'est un projet de loi pour rien, c'est juste du blabla. Si c'est pour juste créer des emplois et que ça ne marche pas, il ne créera pas d'emplois non plus, parce que, les gens, ils ne le prendront pas.

Ça fait que, M. le Président, pour toutes ces raisons-là, nous émettons un certain nombre de réserves sur le projet de loi. Nous allons être d'accord sur le principe. Nous réservons notre position pour les étapes subséquentes qui vont venir. Et, dès maintenant, j'indique au ministre que, pour aller plus loin avec notre collaboration, nous devrons aller certainement dans une partie des idées ou des voies que j'ai essayé de tracer dans mon intervention, et que, si c'est le cas, c'est avec un grand plaisir et avec notre collaboration que nous verrons à faire progresser ce projet. Sinon nous continuerons à insister pour que ce droit qu'on veut donner aux femmes, aux mères de famille, aux pères de famille aussi, ils aient les moyens de l'utiliser, les moyens de le prendre. Sinon le projet de loi sera un projet de loi inutile, un projet de loi de propagande, de galerie, qui servirait juste à démontrer qu'on fait des choses ou qu'on veut faire des choses, mais qu'on sait très bien que les gens ne le feront pas ou le feront tellement peu que ça ne vaut même pas la peine, à ce moment-là, de leur faire miroiter que c'est un avantage social pour eux autres.

Alors, voilà notre position, M. le Président. Et nous sommes, à ce stade-ci, pour le principe du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Avant d'aller plus loin, j'aimerais vous annoncer, chers collègues, que nous aurons trois débats de fin de séance: le premier, entre le député de Robert-Baldwin et le ministre de la Santé et des Services sociaux, au sujet des crédits affectés à la santé; le deuxième, entre le député de Verdun et la ministre de l'Éducation, au sujet des crédits affectés aux universités; et le troisième, entre le député de Marquette et la ministre de l'Éducation, concernant les crédits affectés à l'éducation.

Alors, nous sommes donc prêts à reprendre le débat sur l'adoption du principe. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Il n'y a pas d'autres intervenants.


Mise aux voix

Alors, le principe du projet de loi n° 88, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail en matière de congé annuel et de congé parental, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, nous allons suspendre nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 16 h 50)

(Reprise à 16 h 55)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons reprendre nos travaux. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vous demanderais de prendre en considération l'article 11 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 96


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 11, M. le ministre du Travail propose l'adoption du principe du projet de loi n° 96, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail concernant la durée de la semaine normale de travail. M. le ministre du Travail, je vous cède la parole.


M. Matthias Rioux

M. Rioux: M. le Président, il s'agit encore une fois d'un projet de loi important qui vise à réduire progressivement la durée de la semaine normale de travail de 44 à 40 heures. Ça donne suite aussi à des consensus, lors du sommet de Montréal, le sommet d'octobre sur l'économie et l'emploi, de l'automne dernier. Selon nos estimations – on a fait des vérifications au ministère du Travail et on s'est harmonisé également avec le ministère de l'Économie – on pense à la création d'un potentiel de 15 000 emplois, si cette législation passait. Il s'inscrit dans la foulée de deux autres consensus pris à l'occasion de cet événement, qui requièrent des modifications à la Loi sur les normes du travail et pour lesquels j'ai déjà déposé le projet de loi n° 88 il y a quelques instants.

On se rappelle, M. le Président, que ce premier projet de loi propose deux choses. Premièrement, il augmente la durée du congé parental de 34 à 52 semaines; deuxièmement, il donne le droit à un congé annuel supplémentaire, sans salaire, d'une durée égale au nombre de jours requis pour porter le congé annuel du salarié à trois semaines. Avec les 5 000 emplois générés par ces deux mesures puis les 20 000 emplois dont je viens de parler, c'est quand même extrêmement important de se dire, entre nous, que, bien sûr, ces mesures, ce n'est pas la fin du monde, mais lorsqu'on réussit à harmoniser, à arrimer nos législations et que ça a des effets directs sur la création d'emplois, pourquoi s'en priver?

Revenons maintenant au projet de loi lui-même. M. le Président, la notion de la durée de la semaine normale de travail n'est pas toujours très bien comprise et, à tout le moins, est sujette à certaines confusions. Il faut comprendre que la durée de la semaine normale de travail actuellement prescrite par la Loi sur les normes du travail entraîne une majoration de 50 % du salaire brut habituel que touche normalement un salarié pour toutes les heures effectuées en sus de ce nombre.

L'article 52 de la loi n'a pas pour but d'établir une durée maximale de travail, mais plutôt une durée normale ainsi que le mode de calcul de la rémunération payable au-delà des heures normales travaillées. Cette disposition crée donc l'obligation, pour les employeurs, de rémunérer un salarié à un taux majoré à compter de la quarante-cinquième heure de travail par semaine. Vous comprenez toute la dynamique, quarante-cinq et quarante-quatre, il y a, là, à mon avis, une marge avec laquelle il faut bien apprécier les choses et faire en sorte que, si les employeurs y voient leur avantage, il faut que le salarié voit le sien aussi. Dès lors, la semaine normale de travail peut varier d'une entreprise à l'autre, mais elle est condition toutefois que le minimum prescrit par la loi soit respecté. Compte tenu que plusieurs employeurs accordent déjà des conditions de travail plus avantageuses, il y a parfois méprise entre la règle juridique et les conditions de travail qui prévalent dans les entreprises.

Cela étant dit, les membres de cette Assemblée qui sont familiers avec le domaine des relations de travail auront déjà saisi la portée du projet de loi. Essentiellement, ceux et celles qui travaillent plus de 40 heures par semaine auront désormais le droit d'être rémunérés une fois et demie leur traitement habituel dès la 41e heure de travail. La mesure vise donc à inciter les entreprises dont la durée de travail est supérieure à 40 heures à se conformer à la nouvelle norme sous peine d'alourdir leurs coûts de production. Mais surtout on incite les employeurs à embaucher du nouveau personnel au-delà de 40 heures.

Puisque le principal objectif de la mesure est de créer des emplois et non d'augmenter les coûts de main-d'oeuvre, il est proposé d'étaler la réduction de la semaine normale de travail sur une période de quatre ans en raison d'une heure par année. On s'est posé beaucoup de questions là-dessus. On se demandait: Est-ce qu'on va passer la semaine de 44 à 40 heures d'un seul coup? Est-ce qu'on va le faire en deux occasions? On s'est dit: Allons-y donc de façon graduelle, de façon raisonnable, pour n'assommer personne et faire en sorte que les gens embarquent dans ce nouvel engrenage de façon plus harmonieuse.

(17 heures)

Dès qu'il est question de création d'emplois, certains auraient sans doute préféré que la mesure produise ses effets dans un plus bref délai. Avec le taux de chômage que nous connaissons, M. le Président, je comprends cette impatience, mais il faut prendre garde de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain. Il faut être prudent là-dedans comme dans bien d'autres choses. D'une part, l'approche proposée permet aux employeurs de se préparer graduellement à l'application de la nouvelle norme, et ils seront alors en mesure d'anticiper et de mettre en place les modifications requises à une organisation du travail plus performante pour améliorer leur compétitivité. En outre, cette période d'ajustement leur permet de former leur personnel à cette nouvelle réalité. D'autre part, il ne faut pas oublier qu'une réduction des heures de travail peut aussi occasionner une perte de revenus. Les personnes qui travaillent 44 heures par semaine, mais qui ne gagnent que le salaire minimum ou un peu plus ne sont pas nécessairement toutes disposées à avoir immédiatement plus de temps libre, si, en conséquence, elles subissent une baisse proportionnelle de leur salaire. Ça se comprend.

La date du 1er octobre n'est pas étrangère à cette préoccupation. En effet, puisque l'augmentation du taux du salaire minimum s'effectue toujours à compter du 1er octobre – une loi que je gère – l'application du dispositif à cette date permettrait de compenser au moins en partie les salariés rémunérés à ce taux dans l'éventualité où les employeurs réduiraient la semaine habituelle de travail à la norme publique en vigueur. Nous avons donc tenu compte des intérêts légitimes exprimés par les membres du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, Conseil au sein duquel siègent les représentants patronaux et syndicaux. L'important, M. le Président, c'est de tracer la voie à un meilleur partage de l'emploi, et tant mieux si nous pouvons compter sur l'engagement des employeurs et des syndicats pour atteindre notre objectif.

Par ailleurs, il y a une autre dimension très importante dont il faut tenir compte dans ce projet de loi. Il faut prendre acte que les membres du comité consultatif du travail et de la main-d'oeuvre souhaitent le respect des conventions collectives en vigueur. Je les comprends. Dans un premier temps, entre le caractère d'ordre public de la loi et le respect des conventions collectives, tant les représentants des employeurs que des salariés souhaitent d'abord le maintien des pratiques de rémunération en vigueur qui ont été librement convenues entre les parties et pour une période sur laquelle elles se sont également entendues et engagées, à part ça.

Alors, je pense qu'il faut tenir compte normalement de ces choses; ce sont là des réalités qui m'apparaissent incontournables. Le maintien des conditions de travail pour une période jugée raisonnable est une pratique courante lors de l'introduction de nouvelles normes ou d'une modification à une norme existante, particulièrement lorsqu'elles ont des incidences sur la rémunération des travailleurs syndiqués. Cette solution avait d'ailleurs prévalu lors de l'entrée en vigueur de la Loi sur les normes du travail, en 1980, et de la révision dont elle a fait l'objet en 1990.

J'y mets cependant une réserve, M. le Président. Auparavant, le Code du travail fixait à trois ans la durée maximale d'une convention collective. Mais il faut dire, depuis les contrats sociaux, depuis les conventions collectives de longue durée... Et celui qui a été un précurseur là-dedans, c'est l'ancien député d'Outremont, également qui a été ministre de l'Industrie et du Commerce, qui nous avait habitués à ces contrats sociaux qui faisaient en sorte que les travailleurs et les employeurs pouvaient signer des conventions collectives de longue durée afin d'assurer une stabilité de l'emploi et aussi une progression plus normale de la rémunération et aussi, j'ajouterai, pour assurer la pérennité de certaines entreprises.

Il faut maintenant tenir compte que le Code ne fixe plus de plafond à la durée des conventions collectives; c'est important, ça. C'est donc dire qu'il pourrait s'écouler plusieurs années avant qu'une convention collective prévoyant une durée de la semaine normale de travail supérieure à 40 heures ne vienne à échéance. En plus de ce délai, il faut aussi considérer que l'article 59 du Code prévoit le maintien des conditions de travail à compter de l'expiration de la convention collective et tant que le droit au lock-out ou à la grève n'a pas été exercé ou qu'une sentence arbitrale n'est pas intervenue. Au bout du compte, on pourrait se retrouver en l'an 2005 ou même plus tard avant que toutes les conventions collectives soient conformes à la durée de la semaine de travail de 40 heures.

Il fallait donc essayer d'éviter des écueils, et c'est ce que nous prévoyons. En conséquence, le respect des conventions collectives ne doit cependant pas avoir pour effet de nier le caractère universel de la Loi sur les normes du travail, une loi d'ordre public, une loi fondamentale au Québec. Il est important de ne pas introduire une concurrence déloyale au profit des entreprises ayant conclu des contrats de longue durée, au détriment des entreprises non syndiquées et de celles ayant conclu des contrats de trois ans ou moins. Il en va ainsi de l'équité entre les travailleurs du Québec, entre les travailleurs syndiqués et les travailleurs non syndiqués, dont parle souvent le député de LaFontaine.

C'est vrai que les travailleurs non syndiqués ont le droit d'être défendus, et la Loi sur le normes du travail est là pour ça. À cet égard, la solution préconisée se veut un compromis entre le respect intégral du processus de la négociation collective et le caractère universel de la Loi sur les normes, dont on ne saurait indûment retarder l'application.

Voilà, M. le Président, les principaux éléments de ce projet de loi que je trouve très important pour les travailleurs et les travailleuses. Les modifications proposées permettront de créer des milliers d'emplois et sans doute encore davantage si tous les partenaires du marché du travail mettent l'épaule à la roue et font preuve d'un peu d'imagination, mais aussi de bonne volonté pour faciliter l'accès à l'emploi du plus grand nombre possible de Québécois et de Québécoises. C'est pourquoi je demande aux membres de cette Assemblée d'adopter le principe de ce projet de loi n° 96, projet de loi qui modifie la Loi sur les normes du travail concernant la durée de la semaine normale de travail. Et je fais appel à l'opposition officielle pour nous faire valoir son point de vue là-dessus, parce que je sais que le député de LaFontaine est très sensible à ce genre de préoccupation sociale que peuvent avoir les législateurs québécois. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre du Travail. Y a-t-il d'autres interventions sur ce projet de loi? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Article 21 de notre feuilleton, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 21, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements sur le projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables. Je vais céder la parole à M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. M. le ministre.

Excusez, M. le ministre. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Avant de commencer l'intervention du ministre, M. le Président, je vous demanderais, afin de vérifier quelque chose, que nous puissions suspendre quelques instants seulement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, très bien. Alors, à la demande du leader du gouvernement, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 9)

(Reprise à 17 h 11)


Projet de loi n° 56


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Brouillet): Nous allons poursuivre nos travaux. Je vais céder la parole à M. le ministre de l'Environnement et de la Faune qui va nous parler sur la prise en considération du rapport de la commission de l'aménagement et des équipements au sujet du projet de loi n° 58, Loi modifiant la Loi sur les espaces menacés ou vulnérables.

Une voix: N° 56.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Projet de loi n° 56, excusez, oui. Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.

M. Cliche: Oui, M. le Président. Le projet de loi, c'est sur les espèces menacées et non pas les espaces menacés. Je m'excuse.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ha, ha, ha!

M. Bélanger: Le Parti libéral, par exemple. Le Parti libéral: les espèces menacées!

Des voix: Ha, ha, ha!


M. David Cliche

M. Cliche: Merci, M. le Président. Alors, effectivement, la commission de l'aménagement et des équipements a siégé la semaine dernière, et nous avons adopté les articles de ce projet de loi sans aucune modification. J'aimerais prendre ces quelques minutes pour résumer l'essentiel de cette loi.

Essentiellement, cette loi découle de recommandations qui ont été faites par les inspecteurs de la flore que sont les agents de conservation de la faune et qui, dans l'exercice de leurs fonctions concernant la loi sur la protection des espèces menacées, ont remarqué certaines carences au niveau des pouvoirs qui étaient les leurs, et c'est dans la perspective de pouvoir améliorer l'application de cette loi et surtout de faciliter le travail des agents de conservation de la faune que nous avons présenté ce projet de loi et que nous avons discuté effectivement en commission parlementaire ce projet de loi.

Il y a trois éléments que je juge essentiels dans ce projet de loi qui n'est pas très volumineux. Ce n'est pas le projet de loi le plus important que j'ai eu le plaisir d'acheminer et de faire adopter par cette Chambre, cette Assemblée, mais c'est quand même un projet de loi important qui va permettre aux agents de conservation de la faune, qui sont aussi des inspecteurs de la flore, de mieux effectuer leur travail de protection des espèces floristiques qui sont en ce moment inscrites sur la liste des espèces menacées. L'espèce la plus connue et la plus célèbre, naturellement, est l'ail des bois, qui jusqu'à tout récemment faisait l'objet d'un commerce qui prenait de l'ampleur et qui mettait même en péril la pérennité de ce bulbe de nos forêts feuillues qui est délicieux mais qui ne peut subir le commerce parce que la reproduction de ce bulbe est très longue et que les habitats sont quand même assez restreints. Donc, le projet de loi vise essentiellement à faire en sorte qu'un inspecteur de la flore puisse disposer d'une espèce vulnérable qu'il aurait en sa possession et qui pourrait être susceptible de se déprécier rapidement.

En ce moment, l'inspecteur de la flore n'a pas les pouvoirs de se départir, de détruire ou d'autrement disposer des bulbes d'ail des bois qu'il aurait saisis, de sorte qu'il y a ici une correspondance ou une similarité avec la Loi sur la conservation de la faune, où un agent de conservation de la faune, également inspecteur de la flore, peut disposer d'une espèce vulnérable – dans ce cas-ci, une espèce florale ou floristique – soit à des fins de transplantation, parce qu'une espèce ou un bulbe d'ail des bois qui est saisi, si, à l'intérieur de quelques jours, il peut être replanté, ça peut également être détruit, ça peut également servir à des fins de recherche et ça peut également servir... C'est de moins en moins le cas parce qu'il y a de moins en moins de pensionnats, mais il est également dans la pratique, dans les us et coutumes de donner ces espèces végétales ou animales saisies à des congrégations.

Une autre disposition que nous avons discutée en commission parlementaire et qui a été adoptée, c'est de faire en sorte que la durée de 90 jours qui est permise à un inspecteur de la flore pour préparer sa preuve passe à 120 jours. Pour ceci, il y a essentiellement deux raisons. D'abord, le délai de 120 jours donnera 30 jours de plus à ces inspecteurs, qui sont déjà passablement chargés de travail, pour préparer une preuve, donc une meilleure preuve, et, deuxièmement, le nombre de 120 jours apparaît important aux inspecteurs de la flore, parce qu'il y a eu des cas où ils ont saisi des contrevenants, ils ont arrêté des contrevenants à la loi des espèces menacées et ces contrevenants transportaient des graines. Or, la période de temps nécessaire pour faire germer les graines et ainsi faire la preuve que les graines que ces contrevenants transportaient correspondent véritablement aux espèces vulnérables, la période de 120 jours est plus susceptible d'aider les inspecteurs de la flore dans leur travail.

Quelques dispositions, également une autre disposition qui va permettre au gouvernement d'adopter un règlement qui va, lui, prescrire la façon dont les inspecteurs de la flore pourront disposer des espèces saisies chez les contrevenants, et également une disposition de concordance à l'effet qu'une déclaration de culpabilité à la cour opère la confiscation du spécimen. C'est-à-dire que l'agent, l'inspecteur en flore n'a pas à revenir en cour pour amener la cour à déclarer que le bien est saisi. C'est-à-dire que la déclaration de culpabilité opère automatiquement la confiscation. C'est essentiellement le sens de ce projet de loi qui vise à faciliter le travail des inspecteurs de la flore dans l'exercice de leurs fonctions pour la protection des espèces florales.

Mais j'aimerais également indiquer à cette Chambre que j'ai maintenant enclenché les procédures, au niveau de mon contentieux, pour acheminer au Conseil des ministres, à mes collègues du Conseil des ministres qui accepteront, sans doute dans l'enthousiasme général, d'inscrire à la liste des espèces menacées des espèces animales qui sont effectivement, selon les grands experts scientifiques que nous avons consultés, le comité scientifique, les espèces animales qui sont présentement menacées de survie, notamment le caribou du sud du Saint-Laurent, qui vit dans le parc de la Gaspésie. Mais je peux également parler du suceur cuivré, du couguar de l'est, du fameux carcajou, du légendaire carcajou qui est en danger. Ce n'est pas le carcajou de mon collègue de la Sécurité publique, c'est plutôt le carcajou qui rôde dans les forêts, qui est la hantise des chasseurs, des trappeurs et des gens qui ont des camps de villégiature, parce qu'il a la mauvaise habitude d'ouvrir les sacs de farine et d'uriner sur la nourriture pour marquer sa présence. Il est néanmoins en danger. Et c'est notre responsabilité de dignes responsables de la biodiversité et de la protection des espèces vulnérables au Québec de faire en sorte que non seulement les espèces végétales, mais également les espèces animales qui sont menacées puissent faire l'objet d'une protection législative adoptée devant cette Assemblée. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. Je ne serai pas beaucoup plus long que le ministre. Nous en sommes à la troisième étape de ce projet de loi, la prise en considération. Oui, nous avons travaillé en commission la semaine dernière dans un climat de bien vouloir faire avancer la faune et l'environnement au Québec, une collaboration, je pense, heureuse, quand on parle de projets de loi comme ceux-là.

J'ai dit avant aujourd'hui et je le redis aujourd'hui, j'ai souvent l'impression, à la quantité de petits projets de loi d'un article, de trois articles, de six articles, depuis deux ans et demi, beaucoup de documents, beaucoup de conférences de presse, certaines, même, à l'Université de Montréal, beaucoup de grands sparages, de conférences de toutes sortes, mais, quand on arrive à passer à la législation, c'est une autre histoire. J'ai l'impression d'être un peu comme le réparateur de laveuse Maytag. Je ne suis pas souvent appelé à faire des projets de loi et, quand on m'appelle, c'est vraiment juste pour changer un fusible dans la boîte, en bas.

Un projet de loi de six articles. Vous qui avez une longue expérience, M. le Président, vous savez que, dans un projet de loi, six articles, si on enlève le premier, où on donne les références, le dernier, où on parle du titre, finalement, il y a à peu près un article, là-dedans, où il y a de la substance. Je trouve le ministre, d'ailleurs, très bon de nous parler 10, 12 minutes sur un seul article, comme ça. C'est un peu de valeur, d'un côté, d'utiliser si peu un si bon ministre de l'Environnement. Et, d'un autre côté, je pense qu'il devrait se battre un peu plus fort au Conseil des ministres pour qu'on passe des vraies législations, comme mes confrères, qui ne sont pas des réparateurs de Maytag, qui ont des projets de loi importants et qui font avancer leurs projets, qui font avancer leurs sujets.

(17 h 20)

Alors, j'ai l'impression, ici, M. le Président, qu'il y a des problèmes sur tous les fronts. Il y a des problèmes, bien sûr – et je vois le très distingué député qui est assis devant moi – la production porcine, particulièrement dans sa région. Ça lui fait plaisir quand je lui en reparle. Alors, il y a un problème incroyable là-dessus. Ça traîne, ça perdure. Tout le monde se chicane là-dessus, hein? Tout le monde: les gens de l'Acadie, les gens du Saguenay. J'étais dans la Beauce tantôt. J'arrive de la Beauce à l'instant même. Savez-vous de quoi les gens m'ont parlé, en faisant du porte-à-porte dans la Beauce? Il y a une partielle là-bas. Les gens m'ont parlé de production porcine. Les agriculteurs veulent nous rencontrer, les environnementalistes veulent nous rencontrer, les gens veulent arriver à des compromis, à des solutions. Mais non, on laisse le monde se chicaner. On laisse le monde se chicaner, M. le Président.

Or, j'aimerais ça si le ministre nous arrivait avec des projets de loi importants. Avant que vous me rappeliez à l'ordre, je veux rappeler au ministre que, quand nous parlons des espèces menacées au Québec, ce n'est pas tout aussi vrai et aussi beau que le ministre veut bien nous le dire, et c'est notre job, nous, à l'opposition, de dire les choses comme elles sont ou de la façon dont nous, on les voit. Alors, le grand organisme au Canada – pour ne pas dire au monde – qui supervise ce que font les gouvernements en matière de protection des espèces menacées, ça s'appelle le Fonds mondial pour la nature du Canada. C'est un très grand organisme, de grande réputation. Personne ne questionne, je pense, la qualité des gens qui sont là, la pertinence des études qu'ils font et des conclusions auxquelles ils arrivent, et à tous les ans, M. le Président, pour votre information, ils font des notes nationales, des notes globales pour les années.

Alors, en 1995-1996, les années où le gouvernement péquiste était en place, il est un peu désespérant de voir qu'on aura -C pour les espèces menacées au Québec. Alors, quand je regarde d'autres provinces qui auront des A, la Colombie-Britannique, l'Alberta, qui aura un B, d'autres provinces qui auront finalement beaucoup mieux que nous, des provinces moins grandes, à l'occasion, qui ont fait un effort certain, nous, avec -C, on n'a pas encore à se gargariser. Je dois avouer qu'il y a une amélioration. Je pense qu'on est dans la bonne direction, mais, cette année en tout cas, ce n'est même pas une note de passage. Comme diraient certains, c'est moins pire que le -E qu'a eu le ministre dans son bulletin à la fin de l'année par les groupes d'environnement. Ça, ce n'était pas jojo. Je vais vous le dire franchement, -E, pour un ministre de l'Environnement au Québec, ce n'est pas... E, vous savez tous ce que ça veut dire? Ça veut dire échec. -E, c'est échec, là. Alors, les groupes d'environnement avaient donné le bulletin au ministre. Au -E ils donnent -C. Ils laissent de l'espoir qu'il y a quelque chose qui s'améliore là-dedans.

Maintenant, le ministre nous dit que c'est un beau projet de loi, que ça va améliorer les espèces menacées. Oui, il y a quelque chose là-dedans, il a raison. Il y a des gens qui disent, d'autre part, que c'est très humble devant les problèmes auxquels on a à faire face, M. le Président. Aujourd'hui, il y a eu le dépôt des crédits, et on étudiera ça un peu plus en profondeur, mais ce qu'on croit comprendre, c'est qu'il y a des coupures importantes au ministère de l'Environnement. Et je vous rappellerai que des agents de la faune... Ça, c'est les gens qui s'assurent que les lois sont appliquées sur le terrain, parce que nous, ici, à Québec, on peut passer toutes les lois, tous les règlements qu'on veut bien, ça n'en fait pas pour autant quelque chose d'efficace. Il faut qu'il y ait des gens, soit des policiers, soit des agents de la faune, soit toutes sortes de gens sur le terrain, qui fassent appliquer ces lois-là. Alors, les gens qui faisaient appliquer ces lois-là, en 1990, ils étaient 600 au Québec. Ce qu'on appelle finalement les gardes-chasses, les agents de la faune. Il y en a maintenant 357 au moment où on se parle, et là, avec les coupures qu'on apprend dans les crédits, il y aura 11 bureaux de la faune qui fermeront dans les deux prochaines années. Alors, les espèces menacées, je pense qu'elles sont plus menacées ce soir – puis je ne veux pas faire de jeu de mots, je suis tout à fait sérieux – qu'elles l'étaient quand on s'est levé ce matin, avec les coupures qui continuent.

Et les gens du ministère de la Faune le disent franchement: On n'appellera pas ça le MEF bien, bien longtemps. Le F va tomber si ça continue à la cadence à laquelle on est après couper dans le ministère de la Faune. Et 11 bureaux, c'est énormément. Cinquante vont prendre leur retraite. Alors, des 357 agents dont je vous parle, il y en aurait une cinquantaine, là, qu'on va laisser aller pour toutes sortes de bonnes raisons valables. Alors, on va tomber à 307 agents d'ici la fin de l'année sur un territoire qui est, quoi, sept fois grand comme la France.

On nous contait que, si vous êtes en Abitibi et qu'on porte une plainte auprès de vous, dans un vieux camion de 300 000 km, vous devrez faire sur des chemins de terre entre 1 500 à 2 000 km pour aller faire le constat du problème parce qu'il n'y a personne d'autre. Alors, c'est un peu dément, ce qui se passe. Ces gens-là sont complètement démotivés. Le ministre lui-même disait qu'il a eu l'occasion de faire un tour dans un de ces bazous qui appartiennent au ministère et qu'il était complètement découragé. Il dit que ça n'avait pas d'allure. Alors, je l'encourage. Moi, je l'aide, le ministre, à aller au ministère puis à faire valoir ces points de vue là. S'il le veut, je vais y aller avec lui au bureau de M. Bouchard puis je vais l'aider un peu à faire avancer ses dossiers, M. le Président. Il y a un problème là. Ça n'a pas l'air que ça avance au ministère. Ça n'a pas l'air que ça avance au bureau du premier ministre, tellement que le F est après tomber. Les agents sont après tomber sur l'autre bord. Les camions sont rendus à 300 000 kilomètres, et puis, on a un C, un C dans les espèces menacées, puis le ministre, lui, par les groupes de l'environnement, il a un moins un.

Alors, il y a un problème. Il y a un problème sérieux, et je ne suis pas sûr que les espèces menacées sont en meilleure situation ce soir qu'elles ne l'étaient ce matin, quand on s'est levés.

Ceci dit, on pense que, sur le fond, le Parti libéral pense que, sur le fond, le projet de loi est valable. On va voter pour le projet de loi et on invite le ministre, là, avec la consultation sur les déchets qu'il vient de faire à la grandeur du Québec... Mme Journault, qui a été la présidente des audiences, le nouveau président du BAPE, les deux s'entendent dans le rapport à dire: Il faut bouger vite, il faut réglementer. Puis ils disent au ministre, là: Envoyez-vous pas tout croche avec des politiques, des grands papiers où on va dire qu'on va maintenant avoir une politique sur ci et une politique sur ça. Ce qu'ils lui disent dans la première page du rapport, c'est que ce n'est pas ça que ça prend. Ça va être une loi et des règlements.

Alors, ce qu'on entend, c'est que le ministère veut déréglementer – il y a 40 règlements qui traînent sur les tablettes – qu'il parle d'enlever ça de sur les tablettes un peu partout, laisser l'industrie régler ses problèmes, s'autogérer – c'est des beaux grands mots, en environnement, c'est très préoccupant quand on nous dit ça. Et je dis au ministre que ce que ces gens-là qui ont fait le tour du Québec, ce que ces gens-là ont entendu à la grandeur du Québec – et il sait la confiance que j'ai dans cette présidente qui a mené cette étude sur le BAPE, et des commissaires, je pense qu'ils ont fait un ouvrage tout à fait extraordinaire... Ce qu'ils ont dit au ministre, c'est: Allez-y avec une loi, allez-y avec des règlements, rapidement.

Pour terminer, M. le Président, parce qu'on parle un petit peu de matières résiduelles, je rappelle au ministre – et ça, c'est dramatique, quand on lit ce rapport de 500 pages – il y avait deux grands engagements que le PQ a pris lors de la dernière élection, quand on parle d'environnement. Il y avait deux très grands engagements. Le premier, c'était que 70 % des déchets du Québec vont dans une dizaine de sites privés. Vous avez entendu le nom Saint-Nicéphore, vous avez entendu Laidlaw. Ça, ce sont des sites privés. Or, le PQ avait dit partout, sur toutes les tribunes, le ministre en tête: Nous, quand on prendra le pouvoir, les sites privés deviendront propriété publique et gérés par le public. C'était ça, l'engagement du PQ. Alors là, on s'aperçoit, M. le Président, que ce grand engagement, dans le rapport du BAPE, qu'il n'en est pas question. Il n'en est pas question.

Deuxième grand engagement du PQ: les incinérateurs. Or, dans le programme, c'était clair, une ligne: On va arrêter les incinérateurs, etc. Là, on apprend même, à l'heure actuelle, qu'il y a de nos incinérateurs qui ne sont vraiment pas... On nous parle de celui de Lévis, dans ce rapport-là, que j'ai découvert, qu'il était probablement le plus polluant quasiment sur le continent. Alors là, le ministre danse sur place et là il ne sait plus trop quoi faire, puis il laisse l'impression que, oui, peut-être qu'on va y aller avec un incinérateur. Mais là, dans le rapport, il n'y a rien là-dessus. Finalement, on dit: Si vous voulez en bâtir, des incinérateurs, vous pouvez peut-être en bâtir. Ils nous mettent quelques conditions, mais finalement l'engagement, lui aussi vient d'être «flushé».

Les deux grands engagements du ministre, ou de ce gouvernement qui est en place, en environnement, dans ce rapport du BAPE, ne sont pas retenus, et ça, c'est très préoccupant, M. le Président, quand on parle de morale politique. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Orford. Y a-t-il d'autres interventions? M. le ministre, vous pouvez intervenir pour cinq minutes.


M. David Cliche

M. Cliche: Cinq minutes. Merci, M. le Président. J'aimerais apporter quelques compléments d'information à mon collègue de l'Assemblée nationale et critique officiel en ce qui concerne le rapport qui a été rendu public vendredi dernier, le rapport sur la gestion des matières résiduelles. Je sais, M. le Président, que ce n'est pas directement relié aux espèces menacées, mais je pense qu'il a abordé cette question et il a droit à quelques compléments d'information.

D'abord, j'ai lu effectivement les 457 pages du rapport complet de la gestion des matières résiduelles, d'un couvert à l'autre, M. le Président. Je vous note que c'est 25 heures de lecture attentive que j'ai moi-même investies dans la lecture de ce rapport pour vraiment y comprendre tout l'essentiel. Le rapport est excellent. Mes commentaires, ce matin, à la presse, qu'on lira demain certainement dans les journaux, sont à l'effet que, sur le fond, ce rapport est bon. J'y souscris dans les grandes lignes. Il a cependant des faiblesses, et je veux en faire part au critique officiel de l'opposition pour qu'il sache également la suite des événements.

(17 h 30)

Il est néanmoins relativement faible sur les analyses économiques eu égard à l'application des principes. Et, lorsque j'ai eu le plaisir de rencontrer non seulement la présidente de cette commission, mais les cinq commissaires, je leur ai demandé – parce que j'avais pris connaissance du rapport de la première page à la dernière – quel est le plan de mise en oeuvre que vous me suggérez? Quelle serait, à l'échelle d'une région, la mise en oeuvre des principes que vous prônez? Naturellement, les 3RV, la fin de l'enfouissement du putrescible, etc., et là-dessus le rapport est muet. Le rapport est muet à la fois sur l'analyse économique et surtout sur la mise en oeuvre, comment nous allons mettre en oeuvre ce rapport.

C'est pourquoi j'ai annoncé ce matin – et je tiens à le faire dans cette Chambre, dans cette Assemblée – que je tiendrai moi-même et je présiderai moi-même, en début avril, trois forums avec les principaux intervenants à la gestion des matières résiduelles. Si le critique officiel de l'opposition veut se joindre à cet exercice, j'en serai ravi. Mais j'ai l'intention de tenir trois forums. Je n'ai pas l'intention d'exagérer dans la consultation, mais je pense qu'il est essentiel de s'asseoir avec les intervenants, les principaux partenaires dans la gestion des matières résiduelles, et je parle, bien sûr, des municipalités et des municipalités régionales de comté, qui sont interpellées dans ce rapport de la première page à la dernière. Ce serait le premier forum. Le deuxième, naturellement, ce sont les intervenants privés et les intervenants publics au niveau de l'enfouissement et au niveau de la gestion des matières résiduelles. Que ce soit au niveau du tri, que ce soit au niveau du recyclage, que ce soit au niveau de la réutilisation, ces gens-là seront conviés à un forum. Et finalement et non le moindre forum, avec les citoyens que le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement recommande de regrouper dans des comités régionaux de vigilance ou de suivi de la gestion des matières résiduelles, mais également les groupes environnementaux qui ont été, au fil des ans, au coeur de cette réflexion sur la gestion des matières résiduelles.

Donc, j'ai l'intention d'aller de l'avant le plus rapidement possible qu'il est permis de le faire, compte tenu de l'importance des recommandations. Et je rappelle à la mémoire du critique officiel de l'opposition cette dernière phrase de la conclusion de ce rapport de 450 pages qui recommande au ministre de l'Environnement et au gouvernement d'aller rapidement, de mettre en oeuvre cette politique, ce que j'ai l'intention de faire. Et je le convie à participer à ces réflexions.

Je vais terminer en disant que le Bureau d'audiences publiques, essentiellement, en ce qui concerne l'incinération, a conclu que, dans l'état actuel des techniques et l'avancement rapide des techniques d'incinération et de contrôle des émissions atmosphériques – et là je cite de mémoire le rapport du BAPE – eu égard aux techniques connues d'enfouissement dans les lieux d'enfouissement, la technique d'incinération comporte moins de risques environnementaux et moins de risques au niveau de la santé publique que les lieux d'enfouissement sanitaire relativement aux techniques qui sont actuellement connues et disponibles sur le marché.

En ce qui concerne la propriété des lieux d'enfouissement sanitaires, encore là le rapport du BAPE, que, je pense, nous devons écouter dans sa grande sagesse, dit que ce n'est pas tellement la propriété du site qui est à la base d'un respect de l'environnement, c'est plutôt l'encadrement et la réglementation applicables à la fois aux propriétaires publics et aux propriétaires privés. Et là-dessus je veux rassurer le critique officiel de l'opposition que notre projet de règlement d'assurer l'étéchan... l'étéchan... l'étéchanté... l'été...

Des voix: Étanchéité.

M. Cliche: ...l'étanchéité des sites – ha, ha, ha! – le captage des lixiviats et le captage des biogaz ira de l'avant pour assurer la population que ces sites sont respectueux de l'environnement.

Je tiens à souligner, en terminant, qu'une des principales recommandations, c'est la fin de l'enfouissement des putrescibles en l'an 2003, ce qui ferait en sorte que nous n'aurions plus à vivre les problèmes de lixiviats et les problèmes de biogaz, de CH4, qui sont dommageables pour l'environnement et la santé humaine. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune. Il n'y a pas d'autres intervenants?


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements portant sur le projet de loi n° 56, Loi modifiant la Loi sur les espèces menacées ou vulnérables, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de suspendre quelques instants.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons suspendre nos travaux, peut-être jusqu'aux débats de fin de séance, nous verrons. Si nous pouvons avoir les acteurs le plus rapidement possible, nous pourrons procéder aux débats de fin de séance. Alors, nous allons suspendre quelques minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 35)

(Reprise à 17 h 58)


Débats de fin de séance

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Nous allons entreprendre nos débats de fin de séance. Le premier débat, M. le député de Robert-Baldwin va interroger M. le ministre de la Santé et des Services sociaux concernant les crédits affectés à la santé. Les règles du jeu, vous les connaissez: cinq minutes au député, cinq minutes au ministre, une réplique de deux minutes au député. Alors, M. le député, je vous cède la parole.


Compressions budgétaires dans le réseau hospitalier


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. Je voudrais souligner que c'est toujours un peu décevant d'être obligé de faire un débat de fin de séance. Pourquoi on fait un débat de fin de séance comme ça? C'est parce qu'au moment de la période des questions, lors d'une interrogation, le ministre n'a pas donné toute l'information, n'a pas été en mesure de répondre de la bonne façon aux questions que nous lui avons adressées. M. le Président, c'est avec beaucoup de surprise, et même une surprise désagréable, que nous avons constaté que le ministre de la Santé ne pouvait pas nous dire quelle était l'ampleur des coupures dans les hôpitaux, au moment de la période des questions, cet après-midi. C'est surprenant qu'un ministre ne sache pas encore, au moment où on doit déposer les crédits, qu'il ne soit pas en mesure de nous dire le montant exact qu'il a l'intention de retrancher.

De plus, le ministre a voulu faire des comparaisons avec les années antérieures. Cependant, en écoutant les nouvelles tantôt, je pense que les gens qui sont en mesure d'évaluer ce qui se passe dans le réseau de la santé... Je pense particulièrement aux représentants de l'Association des hôpitaux, l'association des établissements de santé, qui disaient que les déficits accumulés dans les hôpitaux ont atteint un seuil critique, c'est du jamais vu depuis sept ou huit ans. Et ça, c'est en contradiction flagrante avec ce que le ministre de la Santé nous disait. Ça serait important, au moment où on veut étudier les crédits, de savoir ce qui est investi dans les hôpitaux, dans les CLSC, dans les centres de soins de longue durée.

(18 heures)

C'est la première année. On a regroupé tous les établissements de santé et on a fait un beau paquet pour nous empêcher de voir exactement comment ça fonctionne. Alors, j'espère que le ministre va nous donner d'abord la ventilation des montants alloués dans chacun des secteurs, mais aussi des coupures et des contraintes pour une troisième année consécutive, avec, comme toile de fond, l'impact des coupures du ministre de la Santé, l'impact sur les patients, l'impact sur les familles, l'impact sur les employés.

Au même moment – toujours en écoutant les nouvelles tantôt – on nous apprenait qu'il y avait beaucoup d'urgences, dans la région de Québec particulièrement, qui étaient engorgées: résultat de la réforme du ministre de la Santé. Si on continue de faire des coupures comme on fait dans le milieu de la santé, c'est encore des lits, dans les hôpitaux, qu'on va fermer. Si on ferme plus de lits dans les hôpitaux, ce sont les salles d'urgence qui vont continuer d'être engorgées, qui vont continuer d'avoir beaucoup trop de patients.

Cette semaine, dans la région de Montréal, c'était l'urgence de l'hôpital Louis-H. LaFontaine. Et le représentant du syndicat, pas n'importe qui, le représentant du syndicat CSN-FAS – on sait les négociations qui existent actuellement avec le ministre – il déclarait, et je cite: «C'est le bordel. Quand j'y suis allé, a-t-il résumé, les lits sont à la queue leu leu dans les corridors, si proches, dans certains cas, que les pieds d'un patient touchent la tête du suivant, littéralement. D'autres patients sont contraints de dormir dans des fauteuils inclinables.» J'ai déjà fait état de ces situations-là au ministre, avec le résultat: Non, ce n'est pas vrai, ça n'existe pas, ça va bien dans le réseau, tout est beau, tout est rose. M. le Président, j'invite le ministre a écouter les nouvelles, ce soir, dans la région de Québec particulièrement. Les débordements des salles d'urgence à l'hôpital Laval, c'était vraiment indicatif des problèmes qu'a apportés la réforme de la santé.

Autre point extrêmement décourageant dans l'établissement des crédits: au moment où on va couper des centaines de millions dans les hôpitaux, le ministre nous annonce qu'il va augmenter de 10 000 000 $ ses régies régionales, vous savez, ce monument à la gloire du ministre, ses hauts-parleurs. Eh bien, lorsqu'on va avoir dépensé 75 000 000 $ dans les régies régionales, on n'aura pas encore soigné un patient, M. le Président. Vous me faites signe qu'il ne reste pas beaucoup de temps.

Pensons aussi au personnel dans les différents établissements de santé, les infirmières, qui sont extrêmement démotivées, qui manquent de ressources, qui n'ont pas le nombre de personnels nécessaire sur les unités de soins. Pensons aussi aux médecins, qui ne peuvent pas opérer leurs patients. Pourquoi? Parce que les salles d'opération ne sont pas satisfaisantes, parce qu'ils n'ont pas de lits pour hospitaliser les patients.

En terminant, M. le Président, pensons aussi aux listes d'attente et aux nombreux patients qui sont sur des listes d'attente. Eh bien, on constate, dans tous les secteurs où c'est de la chirurgie lourde, neurochirurgie, chirurgie cardiaque, orthopédie, là encore, on atteint des records. Alors, M. le Président, j'espère que le ministre va être capable de répondre à ma question: Combien va-t-il couper dans les hôpitaux, dans les centres d'accueil, dans les centres de soins de longue durée? Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Le député de Robert-Baldwin montre, par sa question, qu'il n'a pas suivi ou qu'il n'a pas compris certains éléments essentiels de la réorganisation du service de santé et des services sociaux. Il est resté à l'âge de pierre.

Tout le monde nous disait, dans ce réseau, depuis deux ans: Ce qu'il nous faut, c'est une complémentarité de ressources et une continuité de services, un réseau de services plutôt qu'un réseau d'établissements. Et, pendant les deux dernières années, à chacun des dépôts et des études de crédits, j'ai annoncé qu'avec la réorganisation il faudrait s'habituer à voir le réseau et les crédits structurés comme fonctionne le réseau, c'est-à-dire selon ses régions, selon ses territoires et selon les services et non pas selon des classes d'établissements. Parce que les classes d'établissements ont changé elles-mêmes; il y a eu beaucoup de fusions, il y a eu beaucoup d'intégrations, et dans tout le réseau. Si le député de Robert-Baldwin se promenait un peu puis qu'il parlait vraiment au monde, il s'apercevrait que ce n'est plus les établissements qui inquiètent vraiment les gens.

Alors, c'est entendu qu'au moment du dépôt des crédits on ne dépose pas en disant combien il y a de plus ou de moins dans les hôpitaux ou dans les CLSC ou dans les centres de longue durée; on monte le réseau selon ses services et selon ses régions. Et ce qui se fait et ce qui a été discuté avec l'ensemble des régions, au cours des prochains jours, des prochaines semaines, chacune des régions va avoir la confirmation finale – les grandes lignes sont déjà données – de l'enveloppe de la région. Les régions sont déjà préparées pour voir comment, au niveau des territoires dans les régions, les enveloppes seront réparties en fonction de la population et en tenant compte des besoins de la population et des spécificités, des particularités des populations différentes, selon les régions et les territoires à l'intérieur des régions. Et, au bout de ce processus, dans les prochaines semaines, chacun des établissements va voir la consolidation de son budget en fonction des services qu'il est appelé à donner et des collaborations qu'il est appelé à développer avec les autres établissements.

Alors, ce n'est plus – ce qui est significatif – de regarder le budget à partir de l'angle des établissements, mais bien à partir des régions, des populations et des services qui sont donnés. Alors, c'est pour ça que ce n'est pas possible et ce n'est pas une information pertinente à ce stade-ci, au niveau de l'ensemble des crédits et de la présentation des crédits, de donner cette information-là. Il fallait choisir les régions ou les établissements, puis d'annoncer pendant deux ans. C'est fait maintenant.

Maintenant, la situation est difficile quand on fait une réorganisation de système. C'est la troisième année de la transformation du système et c'est la deuxième année parmi les deux plus difficiles – celle qu'on termine et l'an prochain – et c'est la dernière année vraiment très difficile. Parce qu'après ça on n'aura plus de diminution de crédits réelle; on aura à absorber les coûts de système, les augmentations annuelles, mais les crédits vont demeurer constants. Alors, c'est au moins ça qui est la bonne nouvelle. C'est le dernier effort à faire, et on a un réseau qui est prêt à le faire parce qu'il y a des plans – c'est prévu – qui ont prévu cette troisième année, qui ont même commencé dans beaucoup de régions à dégager l'horizon vers l'an 2000. Alors, on sait où agir, on sait où peuvent se faire des compressions, on sait où peuvent se moderniser des services et s'améliorer le fonctionnement administratif et technique du réseau. Ces choses-là sont prêtes, et c'est ce qui va permettre au réseau, avec de grands efforts... Il va falloir une grande performance. Il faut améliorer encore beaucoup nos systèmes, mais les gens sont préparés et seront capables de relever le défi. Après ça, on sera sortis de la période vraiment difficile, on se sera donné un système performant, un système moderne qui va être capable éventuellement, même, de reprendre des investissements et de redéployer encore plus de nouveaux services.

Il ne faut pas s'inquiéter avec le niveau d'endettement des hôpitaux. C'est une autre sornette qu'on veut brandir, mais qui est tout à fait normale. Je l'ai dit cet après-midi et je le répète, l'endettement des hôpitaux, à la fin de janvier 1997, était de 189 000 000 $. Ça, ça correspond à un endettement des hôpitaux, des établissements en général, pour leur fonctionnement, qui correspondait... Si on prend 1993, il était à 228 000 000 $ à ce moment-là, c'est abaissé à 193 000 000 $ en 1994, et c'est encore à 189 000 000 $, ce qui est tout à fait normal parce qu'on finance un certain nombre de projets pour lesquels ont peut capitaliser la dépense sur quelques années sur les immeubles et les biens immobiliers du réseau.

Le montant qui a été ajouté, 150 000 000 $, pour faire un total de 344 000 000 $, c'est un plan de financement particulier pour gérer la transition, et tout système, toute entreprise qui s'est réorganisée a eu un budget spécial sur un certain nombre d'années qui a été vraiment financé comme tel, ça aussi, sur les biens immeubles pour permettre vraiment de développer des services à mesure qu'on transforme le système, ce qui était des mesures tout à fait normales de financement d'un système dynamique qui bouge. Comme on s'est habitué, dans l'opposition, et qu'on aurait pensé voir un système statique qui diminue simplement et qui se ratatine à cause du contexte budgétaire, on ne peut pas s'imaginer ce que c'est.

Alors, M. le Président, je conclus en voulant redire à la population que, malgré l'année encore très difficile qu'on aura à passer, on a un réseau qui est prêt à y faire face et on a un réseau qui va sortir de là plus fort qu'il est rentré dans cette transformation.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais donner la parole, pour deux minutes de réplique, à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan (réplique)

M. Marsan: M. le Président, j'entendais encore le ministre réagir en disant que c'est normal, mais, tantôt, là, vraiment, un interlocuteur extrêmement objectif, le président de l'Association des hôpitaux, disait que tous les déficits accumulés ont atteint un seuil critique, que la situation est grave. Le ministre veut nier la réalité.

(18 h 10)

M. le Président, le ministre dit que tout est beau, avec ses lunettes roses. Ça va bien. Je l'invite à aller voir dans les urgences qui entourent le parlement, ici – la situation est débordée – à tout simplement se rendre à l'hôpital Laval pour savoir ce qui se passe dans le réseau, ce qui se passe avec les décisions qu'il a prises pendant la réforme.

M. le Président, comment peut-on faire confiance à un ministre qui a promis devant les caméras, à l'émission Mongrain, que c'était fini, les coupures, qu'il n'y en aurait pas d'autres et qui, aujourd'hui, en dépose pour plus de 760 000 000 $? Comment peut-on faire confiance à un ministre qui ne connaît même pas les coupures dans son réseau hospitalier? Il n'est même pas capable de nous dire de combien il va couper les hôpitaux. Il envoie ça, il balaie ça aux régions maintenant. Comment peut-on faire confiance à un ministre qui dit que tout va bien quand les urgences débordent, quand les listes d'attente ont atteint des sommets inégalés, que tout est rose? Demandez aux gens qui vont dans les bureaux de comté. Demandez aux gens qui sont dans les hôpitaux ce qu'ils pensent vraiment de la réforme du ministre. Ils vont vous le dire que ça ne va pas bien. Ils vont aussi vous dire possiblement ce qu'ils pensent du ministre.

Comment peut-on faire confiance à un ministre qui donne, en pleine campagne référendaire, 915 000 000 $ sur une période de trois ans aux employés de l'État et qui, tout de suite après, essaie de les leur reprendre? C'est ça, le ministre de la Santé. Et, en terminant, comment peut-on faire confiance à un ministre qui augmente la bureaucratie, qui augmente son monument à lui, ses régies régionales et qui, de l'autre côté, diminue les services aux patients? C'est ça, le ministère de la Santé sous un gouvernement du Parti québécois, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Nous allons maintenant entreprendre le deuxième débat. M. le député de Marquette.


Compressions budgétaires dans le réseau de l'éducation

Alors, si vous n'avez pas d'objections, on peut commencer par le débat sur l'éducation. M. le député de Marquette interrogera Mme la ministre de l'Éducation au sujet des crédits affectés à l'éducation. Alors, M. le député, je vous cède la parole pour une intervention de cinq minutes.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Le premier ministre – et j'aurais aimé le voir en cette Chambre pour répondre à mes questions – disait...

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Voudriez-vous rappeler au député de Marquette qu'on ne peut souligner l'absence ou la présence de députés en cette Chambre, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. Alors, c'est très bien. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, le premier ministre affirmait en cette Chambre cet après-midi qu'on n'allait pas affecter les services aux élèves. Il répondait: En aucune façon. Parce que la qualité des services publics va être maintenue. Pourtant, les enseignants, les dirigeants de commissions scolaires et d'autres intervenants ont réagi rapidement cet après-midi à l'annonce de compressions de plus de 700 000 000 $ dans le monde de l'éducation pour dire: Les services aux élèves vont être directement affectés par les compressions budgétaires. On parle de l'achat de volumes scolaires, M. le Président, qui ne pourra pas se faire, de l'achat de matériel didactique, de l'achat d'ordinateurs, de postes de bibliothécaires qui seront coupés, de conseillers en orientation qui seront coupés.

Au niveau des services par rapport à des élèves qui ont des difficultés d'adaptation et d'apprentissage, eh bien, on va réduire le nombre d'intervenants auprès de ces élèves qui ont des besoins, notamment les psychologues, les orthopédagogues et les aides pédagogiques individuels. Au niveau des enseignants, maintenant, on va augmenter le nombre d'élèves par classe et on va réduire de 10 % les postes d'encadrement; tout ça, des compressions de 210 000 000 $ au niveau des postes d'enseignants et des postes d'encadrement, 135 000 000 $ au niveau des services directs aux élèves, ce qui représente... L'année passée, c'était 3 %; cette année, c'est 10 % de cette enveloppe-là.

On va assister à une détérioration des bâtiments scolaires. J'invite la ministre de l'Éducation à accepter l'offre des responsables de l'école montréalaise, qui lui demandent de prendre l'autobus scolaire avec elle jeudi pour aller constater l'état des écoles et l'état des services publics en éducation, la détérioration suite à la venue au pouvoir du gouvernement du Parti québécois. La sécurité des élèves est compromise. C'est la Fédération des commissions scolaires qui le disait aujourd'hui, M. le Président. Le gouvernement remet sérieusement en question la sécurité des enfants en imposant une compression budgétaire de 50 000 000 $ dans le seul poste du transport scolaire.

Les contribuables, encore cette année, ne seront pas épargnés. L'année passée, c'était 77 000 000 $; cette année, c'est plus de 100 000 000 $. On va refiler le déficit gouvernemental à un autre palier et on va inviter 37 commissions scolaires à augmenter les taxes de plus de 100 000 000 $. Que dire des frais supplémentaires qui seront chargés aux parents cette fois-ci ou des frais qui seront chargés aux élèves par le biais des parents? On n'a qu'à penser au transport scolaire le midi et à la surveillance des élèves. Et la ministre se rappelle fort bien du cas d'une commission scolaire qui poursuit des parents pour des comptes en souffrance.

Manifestement, la ministre de l'Éducation n'a pas réussi à sauver les services aux élèves. Elle est en train, depuis deux ans, d'hypothéquer l'avenir de nos enfants dans nos écoles au Québec tout en se promenant dans le réseau et en disant qu'elle est en train d'effectuer une réforme en éducation. Comment pouvons-nous effectuer une réforme en éducation lorsqu'on baisse les budgets de façon si importante, avec des coupes qui n'ont aucune vision, des coupes paramétriques? Et la ministre le sait. Au mois de juin dernier, le premier ministre l'avait invitée, cette ministre de l'Éducation, à éviter des coupures paramétriques.

Or, on constate aujourd'hui: services aux élèves directement touchés, plus de 10 %; les contribuables devront financer, se verront refiler une partie importante de la facture de la taxe scolaire. Les parents seront mis à contribution; les élèves qui ont des difficultés d'adaptation et d'apprentissage seront durement frappés. Les enseignants également seront mis à contribution, parce que les élèves seront plus nombreux dans une salle de classe. La ministre peut-elle m'indiquer comment est-ce qu'on peut réussir à réduire le décrochage scolaire lorsqu'on augmente le nombre d'élèves dans une salle de classe? Elle devrait lire les avis du Conseil supérieur de l'éducation.

Alors, M. le Président, c'est d'un constat d'échec qu'on doit se rendre compte. La ministre a complètement capitulé devant le président du Conseil du trésor et devant le premier ministre.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Et, en réponse, je dirais, au tir tous azimuts du député de Marquette, on va essayer de remettre nos pendules à l'heure de telle sorte qu'on sache exactement de ce dont il s'agit, particulièrement pour le réseau du primaire, secondaire, et les catastrophes qu'il nous annonce ne devraient pas se produire, M. le Président.

Cependant, j'aimerais, d'entrée de jeu, rappeler que si nous en sommes aujourd'hui à devoir demander cet effort considérable – et je n'en disconviens pas, M. le Président – au réseau de l'éducation, au réseau de la santé et des services sociaux, à l'ensemble des services gouvernementaux, qui sont d'ailleurs davantage mis à contribution en termes de pourcentage et d'efforts qui leur est demandé que ce qui est demandé à l'éducation ou à la santé et aux services sociaux, M. le Président, c'est parce qu'un gouvernement qui nous a précédés n'a pas assumé ses responsabilités et n'a pas procédé aux choix nécessaires, utiles auxquels il aurait dû procéder, alors il nous a laissé un déficit sur les bras à une hauteur de près de 6 000 000 000 $, un déficit annuel à une hauteur de près de 6 000 000 000 $, alors que dans tous les autres États autour de nous on avait commencé à corriger le tir sur la question des déficits. C'est avec cette réalité-là qu'on se retrouve. Alors, recevoir aujourd'hui des leçons du député de Marquette, qui, en plus, dit à peu près tout et n'importe quoi, merci, M. le Président!

(18 h 20)

Alors, remettons maintenant nos pendules à l'heure. D'abord, effectivement, je vais traiter ça d'une façon particulière: deux questions. La question d'un effort budgétaire qui va être demandé du côté du transport scolaire. C'est vrai que mon collègue le ministre des Transports a demandé que l'on revoie cette enveloppe à hauteur de 50 000 000 $, sachant cependant que l'enveloppe n'avait pas été touchée pendant les dernières années, alors que partout ailleurs il y a eu des efforts de faits, soit sur des mesures administratives ou sous toute autre forme, si on veut, d'efforts à consentir qui ont été demandés aux commissions scolaires et aux institutions. Cependant, comme on sait que les contrats viennent à échéance avec les transporteurs scolaires, comme on sait aussi que, dans certaines commissions scolaires, ils ont réussi, en négociant serré, à assumer des coûts qui étaient en deçà de ce qui était versé par l'allocation au transport scolaire, nous pensons qu'il y a là matière à resserrement et, donc, qu'effectivement on pourrait arriver à réduire de l'ordre de 50 000 000 $ les coûts reliés au transport scolaire.

Deuxième élément, quant à la détérioration des bâtisses sur l'île de Montréal ou ailleurs. Le député sait très bien que, bon an mal an, nous avons un budget relié d'abord à la préservation des actifs et ensuite au développement de nouveaux actifs et que généralement ces décisions se prennent un peu plus tard, après des discussions qui ont cours et qui ont lieu avec les commissions scolaires, ce qui me permettra éventuellement, donc, de pouvoir parler de cette question autant pour Montréal que pour l'ensemble du Québec.

Alors, maintenant qu'on a mis ça de côté, revenons à ce qui sera demandé très concrètement au réseau du primaire-secondaire. Alors, je vais reprendre les chiffres de l'effort budgétaire. Je sais que c'est très bref, le temps qui nous est imparti; j'aimerais que vous me préveniez, d'ailleurs, du temps qu'il me reste. Alors, rapidement, l'effort qui sera demandé au primaire-secondaire est à hauteur de 473 000 000 $. Cependant, de cela, il faut défalquer, c'est-à-dire qu'il faut enlever effectivement ce que l'on demande au niveau de la contribution des citoyens et des citoyennes, à hauteur de 102 000 000 $, qui est une taxation. Donc, on réduit le montant à 371 000 000 $, comme effort budgétaire, autant l'effet des coûts de système que l'effet de réduction réel. Ajoutons à cela un troisième élément. Dans les coûts de main-d'oeuvre, sur lesquels nous avons des discussions actuellement avec nos partenaires syndicaux, pour lesquels nous avons fait un dernier dépôt ce matin, nous croyons pouvoir retenir, liée à ces coûts de main-d'oeuvre, une somme à hauteur de 211 000 000 $.

Et là le député prend pour acquis que cela pourrait signifier des hausses d'élèves dans les classes ou toute autre mesure reliée, par exemple, à la tâche, alors que nous avons proposé d'autres avenues – il me donne l'occasion d'en parler – qui pourraient concerner des aspects périphériques du revenu, par exemple la question des assurances, la question de certains congés monnayables, et qui nous permettraient sans doute d'arriver à une entente qui conviendrait autant aux enseignants qu'au gouvernement, puisque nous atteindrions la cible sans pour autant toucher à certains aspects auxquels ne veulent pas toucher, sans doute à raison dans certains cas, les enseignantes et les enseignants.

Donc, l'effort réel demandé aux commissions scolaires publiques serait de l'ordre de 128 000 000 $, si on exclut la question du secteur privé. On le sait, je le répète, ce que j'ai dit au député, qu'il y a actuellement des surplus dans les commissions scolaires. Est-ce que ce n'est pas le moment qu'on puisse les utiliser et évidemment envisager toute espèce d'avenue qui va permettre d'atteindre cet objectif, M. le Président?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, Mme la ministre. Je vais céder la parole à M. le député de Marquette pour sa réplique de deux minutes. M. le député.


M. François Ouimet (réplique)

M. Ouimet: M. le Président, la ministre dit dans sa réplique que, si on en est rendu là aujourd'hui, à demander des efforts dans le monde de l'éducation, c'est à cause du gouvernement précédent. J'aimerais rappeler à la ministre de l'Éducation qu'elle était présidente du Conseil du trésor lorsqu'elle a fait des cadeaux préréférendaires de presque 1 000 000 000 $ aux employés de la fonction publique. Se souvient-elle de la signature qu'elle a apposée au bas des conventions collectives, respectant un certain nombre de choses, et qu'aujourd'hui son gouvernement lui demande de renier? Ça, c'était la responsabilité de la députée de Taillon.

Par ailleurs, M. le Président, si on en est rendu là, c'est à cause de l'incapacité du gouvernement d'augmenter ses revenus en créant des emplois et donc en faisant en sorte que plus de contribuables puissent payer des taxes. C'est ça qui est la véritable réponse. Quand elle dit: On va demander aux commissions scolaires de négocier un petit peu plus serré avec le transporteur scolaire, la ministre pense-t-elle que les transporteurs scolaires sont en affaires pour ne pas faire des profits? La réponse des transporteurs scolaires, c'est que, au lieu de garder un autobus de cinq ans ou de six ans, ils vont le garder pour une période de temps de neuf ans ou de 10 ans. Au lieu de faire les inspections qu'ils devraient faire normalement, ils ne les feront pas, pour pouvoir réaliser leurs profits. Alors, c'est faux, ce que dit la ministre de l'Éducation, et vous aurez remarqué comme moi, M. le Président, que la ministre n'a pas répondu aux questions des services directs aux élèves qui seront touchés par les compressions. Elle est en train de compromettre l'avenir de nos enfants, et ça, la société va le payer extrêmement cher plus tard, M. le Président. Merci.


Effets des compressions budgétaires sur les finances des universités

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Marquette. Ceci met fin au deuxième débat. Nous allons entreprendre le troisième débat. M. le député de Verdun interrogera Mme la ministre de l'Éducation au sujet des crédits affectés aux universités. M. le député de Verdun, je vous cède la parole pour cinq minutes.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Dans la période de questions, j'avais comme point central de dire que les crédits, à l'heure actuelle, vont avoir pour effet de transférer aux réseaux, aux universités, aux hôpitaux et aux commissions scolaires, l'économie du déficit, c'est-à-dire qu'on va les compresser dans le budget de telle manière qu'ils vont être obligés, eux, de faire un déficit. Donc, on aura eu une approche tout à fait factice. Alors, je vais essayer de vous expliquer, M. le Président. C'est assez difficile de comprendre sur les chiffres, mais vous allez me suivre, et je suis sûr que la ministre va me suivre.

On va rentrer sur les livres des crédits de 1994-1995, de 1995-1996, de 1996-1997 et de 1997-1998. Pourquoi revenir si loin? Pour pouvoir tenir compte réellement de l'effet de bascule. Qu'est-ce que ça veut dire, l'effet de bascule, d'abord, M. le Président? Dans le langage, ça veut dire quoi? Ça veut dire que l'année budgétaire d'un gouvernement va de la fin mars jusqu'à des fins mars. Les années académiques, ça va du début juin jusqu'à début juin. Ça veut dire que, dans les crédits que nous votons aujourd'hui, il y en a deux douzièmes qui sont attribués pour la fin de l'année académiques 1996-1997 et qu'il y a en a dix douzièmes qui sont pour 1997-1998. On se comprend, sur l'effet de bascule? C'est clair? Alors, pour bien comprendre ce qui est donné par année académique, il faut prendre deux douzièmes de ce qui est donné, par exemple, en 1994-1995, plus dix douzièmes de 1995-1996, et on aura ce qui est donné en année académique pour 1995-1996. Et, ensuite, on peut regarder les différences. Est-ce que vous comprenez ça sans difficulté, M. le Président?

Alors, si on suit ce raisonnement-là, au livre des crédits, pour le monde universitaire, vous avez: 1994-1995, 1 578 374 000 $; 1995-1996, 1 513 829 000 $; 1996-1997, 1 419 633 000 $; et 1997-1998, 1 235 480 000 $. Je sais qu'on pourrait faire croire qu'il y a une compression de 184 000 000 $ dans le budget. Ce n'est pas tout à fait ça, par l'effet de bascule. Je comprends ça, mais, néanmoins, c'est beaucoup plus important que ce que nous a dit la ministre. Je vous explique pourquoi.

Si je recalcule maintenant en fonction d'années académiques, je trouve, pour l'année 1994-1995, ce qui a été transféré, 1 560 949 $; 1995-1996, 1 498 129 $; 1996-1997, 1 388 940 $, c'est-à-dire qu'il va y avoir une compression, déjà, de 109 000 000 $ dans l'année scolaire qui finit. Et, pour l'année qui vient après, en supposant que l'an prochain il n'y aura pas de compression – faisons cette hypothèse-là, qu'il n'y aura pas de compression, ce qui n'est pas évident non plus, mais supposons qu'il n'y ait pas de compression – on arrivera, l'an prochain, à avoir une compression, entre ce qui va être donné pour l'année académique 1997-1998 et l'année académique 1996-1997, de 153 460 000 $. 153 460 000 $, c'est une compression de 11 %, à l'heure actuelle, dans le budget des universités.

Moi, je pensais... Ce qui circulait, c'était quand même qu'il y aurait une compression de l'ordre de 6 % qui était annoncée. La compression réelle est une compression de 11 %. Et la commission de l'éducation, la semaine dernière, a entendu l'ensemble des recteurs des universités, que ce soit Michel Gervais, que ce soit René Simard, que ce soit Pierre Reid, que ce soit Paule Leduc. À chaque fois, chacun d'entre eux a dit: Nous ne pouvons pas supporter de telles compressions, nous allons être obligés d'augmenter le déficit. Et, si vous voulez avoir la référence, je vais vous la donner strictement. Paule Leduc, qui synthétise, après, c'est dans les galées – alors, je n'ai pas classé mes papiers – c'est à la page 970313, la réponse de Mme Leduc disant: Oui, je ne peux pas étaler un taux de compression – elle semblait, elle, déjà savoir que le taux de compression était à 11 %; moi, je pensais qu'il était à 8 % – de 11 %, je vais être obligée d'augmenter mon déficit.

Alors, tout l'argument actuellement de l'opposition, c'est de dire: Ces crédits qui prétendent réduire actuellement le déficit sont purement factices. De fait, à l'heure actuelle, vous êtes en train de transférer aux réseaux, que ce soit le réseau des universités, le réseau des cégeps, le réseau des écoles, le réseau des hôpitaux, le déficit que vous économisez.

(18 h 30)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Évidemment, je prendrai la peine quand même, à la relecture des propos de mon collègue, de revérifier pour les années précédentes, parce que je n'avais pas avec moi les documents. Mais généralement le député de Verdun fait bien ses devoirs et ses leçons.

Cela étant, je vais reprendre quand même la démonstration que j'ai faite cet après-midi, parce que justement ce dont il vient de parler, soit l'effet de bascule, qu'est-ce que c'est? Il le disait, c'est essentiellement le fait que nos années budgétaires, qui se terminent à la fin mars au gouvernement, ne correspondent pas aux années scolaires, et même entre les différents réseaux. L'université a une année scolaire qui s'étend sur une certaine période, les cégeps en ont une autre et les commissions scolaires en ont une autre, donc il y a différents taux de transfert qui peuvent s'appliquer.

Alors, devant l'effort, qui semblait effectivement assez considérable, demandé à l'enseignement supérieur, d'ailleurs autant aux universités qu'aux cégeps, puisque nous considérons que les cégeps... Et j'imagine que l'opposition, qui s'est maintenant ralliée au fait qu'on devait conserver les cégeps, considère aussi que c'est de l'enseignement supérieur qui s'y fait. Donc, devant l'effort assez considérable qui était demandé, devant ce phénomène aussi que nous constatons, où nous devons bien nous rendre à l'évidence que les universités ont fait un certain nombre d'efforts – on leur en demande d'autres qui sont assez élevés – nous avons envisagé la possibilité de revoir le taux de cette fameuse bascule de telle sorte que nous puissions demander un effort qui soit moins considérable cette année aux universités et aux cégeps, ce qui fait que l'effort réel, hein, l'effort budgétaire, le net, quand on tient compte des coûts de système et de la réduction des crédits, on parle plutôt, pour l'ensemble supérieur, d'un taux de l'ordre de 5,7 %, ce qui est quand même relativement raisonnable.

C'est bien sûr que ça veut dire qu'on l'étale, à ce moment-là, cet effort sur une autre année. Mais, cela étant, dans une perspective où, l'autre année, on prévoit davantage un gel qu'une réduction même de crédits, bon, on se donne une certaine marge de manoeuvre. Et ajoutez à cela que j'ai demandé deux choses que je répète: d'abord, un groupe de travail se penche actuellement sur le financement des universités et, d'autre part, la CREPUQ a mis elle-même en place une commission qui va revoir les fonctions des différentes universités, les programmes, dans le respect évidemment de l'autonomie des unes et des autres, mais dans le sens d'une meilleure efficacité et d'une plus grande efficience.

Alors, dans les faits – je reprends les chiffres très rapidement – l'effort demandé à l'enseignement supérieur sera plutôt près du 173 000 000 $ que du 285 000 000 $. Les cégeps y compteront pour 74 000 000 $ et les universités – ce que je donnais comme réponse au député cet après-midi au moment de la période de questions – pour 98 000 000 $. Et là il y a dans ça aussi des revenus.

On a essayé d'être le plus équitable possible, de répartir les efforts, oui, du côté des dépenses, bien sûr, que l'on réduit, mais aussi d'une certaine contribution qui est demandée. Je pense, au niveau des universités, à cette contribution qui sera demandée aux étudiants étrangers, je pense à cette contribution qui sera demandée aux étudiants venant de l'extérieur du Québec, mais qui sont des étudiants canadiens, qui paient des frais incommensurablement plus élevés dans leur État respectif que ce qu'ils paient au Québec. Alors, on va leur demander de payer la moyenne canadienne, ce qui a un peu de sens quand même, très honnêtement, M. le Président. Parce que les étudiants québécois, eux, ils doivent bien payer ce montant lorsqu'ils vont à Toronto, lorsqu'ils vont à Vancouver ou ailleurs au Canada, ils paient le montant qui est là. Puis le régime de prêts et bourses est mis à contribution pour les aider et, en plus, notre régime de prêts et bourses est meilleur et beaucoup plus généreux que celui auquel ont accès les Canadiens dans leur ensemble. Bon.

Alors, donc, effectivement, là, si on reventile le tout, toutes proportions gardées compte tenu de ce qu'on demande du côté des coûts de main-d'oeuvre, on parle d'un 48 000 000 $ qui serait lié aux coûts de main-d'oeuvre, d'un 33 000 000 $ là relié à un effort réel des universités et un 17 000 000 $ qui serait des sommes supplémentaires provenant de revenus.

Donc, on pense que c'est raisonnable, M. le Président. Ce n'est pas l'idéal; ah, ça, je n'en disconviens pas. Est-ce que c'est ce que j'aurais préféré? Non. Mais je vis avec un héritage; on essaie de le gérer correctement en préservant la suite des choses, M. le Président. Et le fait que nous accordions priorité, oui, à l'éducation, à la préservation de nos services essentiels à cet égard, oui à une réforme qui sera une réforme qui va porter sur la qualité, M. le Président, et que nous pourrons faire malgré et tenant compte des efforts budgétaires qui vont être demandés... D'ailleurs, dans ce sens-là, la rationalisation dans nos universités, à laquelle vont procéder nos universités, s'inscrit parfaitement dans cet effort aussi qui est demandé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la ministre de l'Éducation. Je vais céder la parole, pour les deux dernières minutes, à M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin (réplique)

M. Gautrin: M. le Président, écoutez, là, moi, je veux bien qu'on étale, etc., mais c'est ce qui est écrit, là. C'est écrit, là. Vous l'avez déposé. Si vous aviez voulu l'étaler, vous auriez déposé autre chose, Bon Dieu! Alors, peut-être qu'au moment du dépôt du budget vous allez peut-être faire autre chose; vous nous l'annoncez aujourd'hui. Je veux bien, mais ce qui est écrit ici, c'est que j'ai 1 235 480 000 $, ce qui correspond – je comprends les effets de bascule et je comprends tout ça, là – à une compression de 153 460 000 $. C'est facile à calculer. Si maintenant on me dit qu'il y a d'autres choses, que peut-être on va étaler sur deux ans, sur trois ans la compression, bravo! Bravo! Mais, Bon Dieu, écrivez-le dans le livre des crédits! Ça veut dire que c'est le tiers de la compression que vous auriez dû mettre. Donc, on n'aurait pas dû avoir 1 275 000 000 $ dans ce livre-là, on aurait dû avoir à peu près 1 315 000 000 $.

Écoutez, c'est... Moi, je ne comprends plus rien. Ou bien ce livre de crédits, ça veut dire quelque chose ou ça ne veut rien dire. Si ça ne veut rien dire, je ne vois pas de quoi on parle ici. Si ça veut dire quelque chose, à ce moment-là c'est ce qui est écrit que je crois. Je veux bien croire tout à fait ce que dit la ministre à l'heure actuelle, mais, moi, je lis aussi le livre des crédits. Or, ça ne correspond pas, ça n'arrive pas à balancer. Mais non. Ce que vous me dites que vous comprenez, que ça ne balance pas, puis que ça fait un effort trop fort, puis qu'il va falloir l'étaler sur deux ans ou trois ans, je suis bien d'accord avec vous, c'est un effort trop fort, c'est un effort qu'il faut étaler sur deux ou trois ans, je comprends tout ça, moi aussi, mais je vous dis: À l'heure actuelle, ce n'est pas ce que vous avez écrit dans le livre des crédits, puis vous avez été présidente du Conseil du trésor.

Alors, si le budget... Parce que je sais tout ça, qu'on peut, dans le discours du budget, changer ce qui est dans le livre des crédits, que le discours du budget va être bientôt et que, si le livre du budget corrige, bravo, mais aujourd'hui, quand je lis le livre des crédits, je ne peux pas m'empêcher de lire qu'il y a une compression de 153 000 000 $ que l'on juge tous les deux inacceptable et impossible dans le réseau des universités. Maintenant, le budget, on verra ce que ça donnera.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Alors, ceci met fin aux débats de fin de séance, et nous allons ajourner nos travaux à demain, mercredi, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 38)