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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 3 décembre 1996 - Vol. 35 N° 61

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Table des matières

Présence de l'ambassadeur de la république du Pérou, M. Hernan Couturier Mariategui

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures six minutes)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Présence de l'ambassadeur de la république du Pérou, M. Hernan Couturier Mariategui

Au départ, j'ai le grand plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, de l'ambassadeur de la république du Pérou, Son Excellence M. Hernan Couturier Mariategui.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

Dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions. Mme la présidente de la commission de l'éducation et députée de Chicoutimi. Alors, on y reviendra peut-être.


Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de Bourassa.


Maintenir les loyers dans les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires, augmenter leur nombre et assurer la protection des HLM

M. Charbonneau (Bourassa): M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 3 095 pétitionnaires, locataires de HLM des secteurs nord, centre et ouest de Montréal.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Étant donné que le gouvernement du Québec s'apprête à réviser ses programmes en habitation et que certaines des mesures envisagées menacent directement plus de 800 000 ménages à faibles revenus déjà très affectés par d'autres compressions budgétaires:

«Augmentation importante des loyers dans les HLM, les coopératives et les autres logements sans but lucratif, afin de puiser 50 000 000 $ dans les poches de 85 000 locataires;

«Retrait graduel du financement de nouveaux logements sociaux;

«Abolition du remboursement d'impôts fonciers, afin de récupérer 133 000 000 $ auprès de 724 000 ménages;

«Transfert de la propriété des HLM aux municipalités sans aucune mesure garantissant qu'ils ne pourront être privatisés et que les droits des locataires seront protégés;

«L'intervention réclamée se résume comme suit:

«Nous, soussignés, demandons à l'Assemblée nationale d'intervenir afin de: maintenir les loyers dans les logements sociaux à 25 % des revenus des locataires; maintenir et augmenter le nombre de logements sociaux réalisés chaque année; sauvegarder le remboursement d'impôts fonciers et assurer la protection intégrale des HLM et le traitement équitable des locataires de ces logements où qu'ils demeurent au Québec par le maintien de normes nationales strictes.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, cette pétition est déposée. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Je demande le consentement de la Chambre pour le dépôt d'une pétition non conforme de la Société canadienne de la sclérose en plaques, signée par 26 792 signataires dont on peut saluer les représentants ici, demandant que le Betaseron soit inscrit sur la liste des médicaments en janvier 1997.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour permettre le dépôt de cette pétition?

(10 h 10)

Des voix: Oui, oui.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, la pratique veut normalement que le leader de l'opposition me présente la pétition pour que je puisse la regarder avant qu'elle soit présentée, mais je vais donner le consentement, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, compte tenu de la planification des travaux parlementaires par le leader du gouvernement, je me dois de m'excuser. Ça n'a pu être fait ce matin. Les travaux se sont poursuivis jusqu'à 2 h 30. Peut-être qu'avec une meilleure planification on pourra remédier à ces choses-là, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je constate qu'il ne s'est pas encore remis du fait qu'ils étaient uniquement six pour voter hier, à 2 h 30.

Le Président: Bon. M. le député de Robert-Baldwin.


Inscrire le Betaseron sur la liste des médicaments assurés

M. Marsan: Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 19 553 pétitionnaires, membres de la Société canadienne de la sclérose en plaques, division du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Le Betaseron s'avère le seul médicament sur le marché à pouvoir réduire le nombre et la gravité des poussées chez les personnes atteintes d'une forme cyclique de sclérose en plaques. Il a d'ailleurs fait l'objet d'études cliniques poussées dans plusieurs pays du monde.

«Malgré cela, en décembre 1995 et en juillet 1996, le Conseil consultatif de pharmacologie du Québec a refusé de recommander l'inscription du Betaseron sur la liste de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Par conséquent, ce médicament n'est toujours pas accessible financièrement à toutes les personnes qu'il pourrait soulager, car son coût s'élève à 18 000 $ par année.

«En dépit de nombreuses démarches auprès du ministre Jean Rochon afin qu'il recommande l'inscription du médicament Betaseron sur la liste de médicaments, la Société canadienne de la sclérose en plaques, division du Québec, n'a pas jusqu'à maintenant obtenu gain de cause.

«Le Betaseron revêt une importance capitale pour toutes les personnes qu'il peut soulager. C'est pourquoi, nous demandons instamment à l'Assemblée nationale de faire inscrire le médicament Betaseron sur la liste de la Régie de l'assurance-maladie du Québec.»

Il y a également une autre pétition, M. le Président. Cette fois, elle s'adresse au ministre Rochon plutôt qu'à l'Assemblée nationale, mais elle reprend dans les même mots, et elle est signée par 7 239 pétitionnaires, ce qui totalise 26 792 signataires.

Le Président: Alors, ces deux pétitions sont déposées.

Il n'y a pas, aujourd'hui, d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.


Décision du président sur une demande de directive du député de Rivière-du-Loup concernant la fréquence des questions principales attribuées aux députés indépendants

Avant de procéder à la période des questions et des réponses orales, je vais rendre la décision portant sur la demande de directive qui a été présentée, la semaine dernière, par le député de Rivière-du-Loup relativement à la fréquence des questions principales attribuées aux députés indépendants lors de la période des questions et des réponses orales.

Alors, le jeudi 28 novembre dernier, lors de la période des questions, le député de Rivière-du-Loup s'est levé pour poser une question principale. Je n'ai alors pas pu accéder à sa demande, ayant déjà, à la séance précédente, accordé une question principale à un autre député indépendant, en l'occurrence le député de Montmorency.

En effet, au début de la présente Législature, la présidence a établi que le nombre de questions principales attribuées aux députés indépendants serait limité à une question par trois jours. Cette pratique a été suivie et appliquée avec rigueur tant par mon prédécesseur que par moi-même. Le député de Rivière-du-Loup a fait valoir que cette répartition des questions principales a été décidée à un moment où l'Assemblée ne comptait qu'un seul député indépendant et que, depuis, la composition de l'Assemblée a été modifiée de sorte qu'il siège présentement trois députés indépendants. Aussi, selon le député de Rivière-du-Loup, la présidence devrait-elle désormais s'inspirer de la décision rendue le 12 décembre 1989 par le président Jean-Pierre Saintonge.

À cette occasion, le président Saintonge, après avoir énoncé les principes de base de la répartition des questions orales, ajoutait, et je cite: «Ces principes sont complétés par des facteurs laissés à l'appréciation du président, comme le rôle de premier plan reconnu à l'opposition officielle lors des contrôles parlementaires, la composition de l'Assemblée, l'importance, l'actualité, l'urgence des questions principales, de même que le nombre de questions complémentaires rattachées à chacune des questions principales.» Fin de la citation.

Plus particulièrement, le député de Rivière-du-Loup prétend qu'en cette matière des traitements différents doivent être accordés aux députés indépendants selon qu'ils ont été élus sous la bannière d'un parti politique ne formant pas un groupe parlementaire ou qu'ils ont quitté un groupe parlementaire sans adhérer à un autre groupe parlementaire.

L'occasion m'est donc fournie de rappeler ici que les articles 13 à 15 du règlement de l'Assemblée nationale ne donnent ouverture à aucune différence de traitement entre les députés indépendants, quelle que soit l'origine de leur statut d'indépendant. En conséquence, rien n'autorise la présidence à prendre l'initiative d'introduire, dans la pratique de l'Assemblée, des distinctions fondées sur la façon dont chacun des députés indépendants a acquis ce statut. Pour parvenir à un tel résultat, il faudrait modifier le règlement, ce qui relève de l'autorité de l'ensemble de l'Assemblée et non pas de la présidence uniquement.

Il est vrai, par ailleurs, que, lors de la précédente Législature, le président Saintonge a, à certaines reprises, accordé aux députés indépendants plus d'une question par trois séances, mais il importe de rappeler qu'au cours de la Trente-quatrième Législature l'Assemblée a compté jusqu'à six députés indépendants.

Dans le contexte de la présente Législature, qui a vu passer de un à trois le nombre de députés indépendants, il ne paraît pas approprié, pour l'instant, de modifier les règles d'attribution des questions principales édictées par mon prédécesseur et observées depuis lors. En effet, s'il importe de continuer à raffiner les critères d'attribution des questions principales, il importe également d'agir sans précipitation avec le souci de ne pas créer de regrettables précédents.

C'est dans cet esprit que le 14 juin dernier, alors que l'Assemblée comptait déjà trois députés indépendants, j'ai confirmé que les députés indépendants ont droit à une question toutes les trois séances et donc occasionnellement à deux questions par semaine en période de session intensive, comme nous le sommes maintenant.

Aussi, jusqu'à plus ample réflexion, dans le cadre, notamment, de la réforme parlementaire, ou à moins de changements significatifs dans la composition de l'Assemblée, je maintiens ma décision du 14 juin dernier et en conséquence la pratique actuelle.

Alors, nous en arrivons maintenant à la... M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Tout en nous conformant à votre décision que vous venez de rendre et qui est conforme au libellé même du règlement, étant donné que les députés indépendants sont considérés comme égaux, pourquoi un jouit-il d'un budget de recherche différent de tous les autres membres de l'Assemblée nationale, six fois plus élevé que les deux autres députés indépendants?

Une voix: Parce qu'il a signé le 12 juin, voyons donc.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: M. le Président, deux...

Le Président: En tout cas, en ce qui concerne la question qui a été posée par le leader de l'opposition officielle au président, je voudrais rappeler que, d'abord, quand le président est arrivé en fonction le 12 mars, la question était déjà réglée par un bureau de l'Assemblée, et jusqu'à maintenant le Bureau de l'Assemblée nationale n'a pas cru bon de revenir sur cette décision...

Une voix: Sur division.

Le Président: Bien sûr sur division, mais néanmoins la décision avait été prise en majorité selon les règles du Bureau, donc du conseil d'administration de l'Assemblée. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Sur votre décision, M. le Président, je dois comprendre que le nombre des questions principales allouées au cours d'une séance, au cours des séances n'aura pas non plus d'influence sur leur distribution. En d'autres termes, qu'il y ait dans les séances six, neuf ou 12 questions principales ne change pas la quantité qui pourra être répartie aux députés qui ne sont pas membres de groupes parlementaires. C'est une question de directive que je vous formule.

Pour ce qui est de l'intervention du leader de l'opposition, M. le Président, je pense qu'il faudrait lui rappeler que le projet de loi 37, qui a été présenté par M. Pierre Paradis, leader du gouvernement, le leader de l'opposition officielle, le 17 juin 1994, a introduit une disposition qui modifiait l'article 108 de la Loi sur l'Assemblée nationale pour que le Bureau puisse donner à des partis représentés à l'Assemblée, à la suite des dernières élections générales, des budgets de recherche spécifiques, et je remercie le leader de l'opposition officielle pour son sens de la démocratie d'avoir introduit cette disposition-là, M. le Président.

Le Président: Vous avez raison, M. le député de Rivière-du-Loup, d'indiquer que la règle que je viens de rappeler n'est pas en relation avec le nombre de questions principales qui peuvent être posées dans une séance, mais, dans les faits, la pratique veut, et c'est ce que j'essaie de suivre le plus fidèlement possible, quand un député indépendant est présent à l'Assemblée et quand il a droit à une question cette journée-là, à ce moment-là, à partir de la quatrième question principale, je reconnais généralement un député indépendant.

Donc, c'est très rare que, lors d'une question principale, lors d'une séance particulière et d'une période de questions et de réponses orales, il n'y ait pas au moins quatre ou cinq questions principales. Bien sûr, l'actualité et l'intensité des débats, et également les stratégies politiques des groupes parlementaires, je n'en suis pas le maître, mais, au-delà de ça, je pense que ça protège relativement bien les députés indépendants.

(10 h 20)

Il restera toujours un problème pour la présidence, puisque vous êtes trois députés indépendants. Il s'agira pour moi de faire en sorte que le principe de l'alternance et de l'équité puisse prévaloir à ce moment-là pour qu'il n'y ait pas de traitement inéquitable entre les trois députés indépendants.


Questions et réponses orales

À ce moment-ci, s'il n'y a pas d'autres précisions sur cette décision, nous allons passer immédiatement à la période de questions et de réponses orales, et la parole est au chef de l'opposition officielle.


Fardeau fiscal des contribuables

M. Johnson: Le premier ministre nous dit, depuis maintenant presque un an, qu'il n'a jamais voulu toucher aux citoyens, que les gestes de recherche de l'équilibre budgétaire feraient en sorte que ce seraient les machines, les appareils, les administrations qui seraient touchés, que, évidemment, par ailleurs, on est déjà trop taxés au Québec, donc qu'il ne fallait pas augmenter les impôts ni, d'ailleurs, j'en profite pour le dire, augmenter quand même les budgets de recherche du député de Rivière-du-Loup qui se prend pour un parti, comme il l'a lui-même indiqué.

Le premier ministre a donc poursuivi, avec l'équipe ministérielle, dans le sens, d'abord, de maîtriser les dépenses publiques, ce qui d'ailleurs, comme l'écrit lui-même le ministre des Finances, est une marque de commerce de l'administration gouvernementale au Québec depuis 1992. C'est ce que le ministre des Finances véhicule sur la place internationale, que, depuis 1992, il y a un contrôle des dépenses publiques au Québec. Il est évident cependant que l'autre colonne – il n'y a pas juste les dépenses, il y a les revenus aussi – doit faire l'objet de l'attention du gouvernement.

Et les revenus, on devrait le souligner au premier ministre qui ne veut pas taxer les Québécois, consistent à augmenter la richesse. Les revenus qui peuvent augmenter viennent du fait de la création d'emplois. Créer des emplois, c'est créer des revenus pour le gouvernement afin de financer les services publics. On ne peut pas dire qu'il y a eu beaucoup de succès de ce côté-là depuis un an. Depuis l'assermentation du premier ministre, on a perdu, au Québec, plus de 50 000 emplois. Il y a moins, évidemment, de Québécois qui sont en emploi qu'en janvier dernier. Le premier ministre et ses collègues ont par ailleurs augmenté les dépenses, je dirais pelletées sur le dos des municipalités. La liste de ce matin fait état de 250 000 000 $ qui sont maintenant payés par le contribuable municipal. À quoi s'ajoutent l'assurance-médicaments pour 200 000 000 $; l'immatriculation et les permis de conduire, 18 000 000 $; 25 000 000 $ ou 30 000 000 $ du côté du tourisme pour les nuitées, la taxation des forfaits touristiques; 85 000 000 $ pour la taxe sur la solidarité. On parle donc de 600 000 000 $ d'augmentation de taxes, soit chez le contribuable municipal ou chez les contribuables du Québec, depuis un an.

Est-ce que le premier ministre se rend compte que ce n'est pas une stratégie pour monter les revenus, ça, que d'augmenter les impôts, parce que, dans le fond, carrément, au lieu de créer de l'emploi, créer des taxes, ça tue l'emploi, et c'est ça qu'il est en train de faire?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, tout le monde s'accorde pour dire que le grand problème qui pèse sur l'État du Québec, sur notre société, c'est le fait que nous avons trop dépensé par rapport aux revenus que nous avions, par rapport à nos capacités d'emprunt, par rapport à un certain sens de la rigueur qui a été perdu collectivement en cours de route. Puis il n'y a personne à blâmer en particulier, sauf que, collectivement, nous avons adopté une attitude qui a fait en sorte qu'on a dépensé plus que nous avons créé de richesse et que nous avons emprunté plus que ne pouvait le supporter le crédit financier du Québec.

Nous sommes arrivés maintenant au terme d'une génération de comportements de cette façon. Il est impératif, de l'accord de tous au Québec – nous avons un consensus extrêmement large, qui est appuyé, d'ailleurs, par tout ce que les analystes financiers nous disent, toute la perception générale du monde international – que le Québec à son tour, après que toutes les provinces du Canada l'aient fait, sauf l'Ontario qui est en train de le faire aussi, remette de l'ordre dans ses finances publiques. De sorte que, quand le chef de l'opposition fait remonter, par une citation, à 1992 l'effort de compression de dépenses du gouvernement du Québec, il oublie manifestement cette fameuse année 1994 où manifestement il n'a rien contrôlé du tout en termes de dépenses, puisque le déficit a été historique, de l'ordre de 5 700 000 000 $. Tout ça s'ajoutait sur la pile des dettes. Tout ça fait en sorte que, maintenant, nous sommes en bout de course et qu'il faut qu'il y ait un sursaut de responsabilités, et de rigueur, et de solidarité au Québec, et qu'on partage l'effort, tout le monde.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se souvient que le député de Crémazie, qui était ministre des Finances en octobre 1994, en arrivant au ministère des Finances, a dit que tout était beau et que c'est son prédécesseur, Jacques Parizeau, qui a annoncé tout d'un coup, trois semaines après, un beau vendredi, tout seul devant la Tribune de la presse que, dans le fond, c'était épouvantable?

Est-ce que le premier ministre se souvient également que la façon de régler le problème budgétaire consiste non seulement et exclusivement à travailler du côté des dépenses, mais également du côté des revenus, des revenus, et que la solution réside non pas à augmenter les impôts, et les taxes, et les tarifs, et les dépenses fiscales des Québécois, mais à faire en sorte qu'on augmente le nombre de Québécois qui paient des impôts, et qu'il faut une stratégie, et des décisions, et de l'action de création d'emplois plutôt que de création d'impôts comme vous le faites?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, de façon assez générale, je concours au jugement général, au jugement que vient de porter le chef de l'opposition sur la façon de remédier à la situation. C'est surtout du côté des dépenses qu'il faut redresser les finances publiques, c'est-à-dire en diminuant et contrôlant davantage nos dépenses. Il faut penser que, du côté des taxes nouvelles, il n'y a pas beaucoup de solutions, quoiqu'il soit impératif qu'il y ait un partage de l'effort collectif de ce côté-là aussi, mais ce n'est pas là essentiellement qu'on va trouver la solution.

Comme nous l'a dit la Commission sur la fiscalité qu'a présidée M. D'Amours, il faut en effet faire en sorte que les rentrées fiscales s'améliorent par une création d'emplois, mais l'économie actuelle, M. le Président, n'est pas la plus vivante qu'on puisse espérer, et nous savons tous très bien que, pour relancer l'économie, il faut agir sur les grands principes macroéconomiques. Il faut faire en sorte que la dette et le déficit soient contrôlés. C'est ça, le boulet qui empêche la création d'emplois, et il faut passer par là, M. le Président, tout le monde le reconnaît, et je pense que le chef de l'opposition devrait lui-même le reconnaître.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre ne se rend pas compte que la vitalité de l'économie à la grandeur du Canada est presque enviable dans le monde occidental et que la seule région, l'endroit qui se distingue au Canada, c'est le Québec par ses pertes d'emplois, que tous les chiffres depuis presque un an vont tous dans le même sens, que la fragilité de l'économie québécoise et le peu de création d'emplois, je dirais les pertes d'emplois qu'il y a eu depuis que le premier ministre est en poste nous distinguent du reste du Canada, y compris de provinces aussi petites, et aussi fragiles, et aussi peu équipées que le Nouveau-Brunswick? Et, dans le fond, est-ce que le premier ministre ne rejoint pas les raisons, je dirais l'opinion de beaucoup d'analystes qui indiquent que ce sont les gestes de son gouvernement qui font en sorte qu'on devrait probablement lui décerner le titre de l'homme de l'année de l'économie du Nouveau-Brunswick, lui, le premier ministre du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, de se référer à l'ensemble canadien comme à une sorte de paradis où on connaît le succès et au Québec l'insuccès, c'est complètement faux, complètement faux, M. le Président, puisque, en termes d'investissements, c'est au Québec qu'on a le plus haut taux de progression en investissements privés actuellement et que nous nous sommes fait dire par le gouverneur de la Banque du Canada, qui parlait à Washington à des investisseurs, que c'est grâce aux efforts en particulier faits au Québec pour contrôler le déficit et la dette qu'on a pu baisser le taux d'intérêt et créer ainsi des conditions pour la relance de l'emploi.

Je pense que le chef de l'opposition devrait se rappeler aussi qu'entre les États-Unis et le Canada il y a un écart du taux de chômage de l'ordre de 5 %, 6 %, que ce n'est pas vrai, donc, que le Canada réussit mieux que, entre autres, nos voisins américains, qu'on a un effort collectif à faire tout le monde, et je ne pense pas que c'est en dénigrant le Québec vis-à-vis du Canada qu'on va réussir à redresser la situation.

Une voix: Bravo!

Le Président: En principale, Mme la députée de Jean-Talon.


Abolition du remboursement partiel de la TVQ aux municipalités

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Hier, le ministre des Affaires municipales, en réponse à ma question, nous a affirmé qu'il n'y avait pas de problème. La coupure de 76 000 000 $ ne représente qu'une petite goutte d'eau dans les budgets municipaux. Ce matin, les maires de Hull et de Laval réclament de toute urgence une mobilisation du monde municipal et la convocation d'une table spéciale de la Table Québec-municipalités. Le maire de Québec devra hausser ses taxes de 1 %, afin de combler un manque à gagner de 2 000 000 $; le maire de Lévis devra hausser ses taxes de 55 $ du compte moyen, afin de combler un manque à gagner de 700 000 $; le maire de Saint-Romuald, quant à lui, devra trouver 100 000 $ de plus, et ce ne sont là que quelques exemples, M. le Président, des hausses de taxes qui sont prévues.

(10 h 30)

Hier, le ministre nous expliquait que les municipalités n'avaient strictement rien compris et que l'opposition n'avait rien compris. Ma question, M. le Président: Si la décision du ministre des Affaires municipales n'a aucune conséquence sur les budgets municipaux, comment le ministre explique-t-il que, ce matin, les maires sont encore en furie?

Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.

M. Trudel: Alors, M. le Président, il faut d'abord relever une fausseté dans la première affirmation de la députée de Jean-Talon, puisque la ville de Québec a gelé son niveau de taxes pour l'année 1997. C'est suffisamment gros en première page du Soleil pour reconnaître ce qu'est la vérité. Alors, les taxes seront gelées à la ville de Québec pour l'année 1997.

Deuxièmement, M. le Président, c'est vrai que nous avons demandé un effort aux municipalités: à chaque tranche de 9 000 $ des budgets municipaux, nous allons leur demander de travailler au niveau de leurs dépenses pour une somme de 76 $. Oui, c'est un effort que nous demandons aux municipalités pour nous aider, pour travailler à atteindre l'équilibre des finances publiques pour l'ensemble de la société québécoise.

Et nous devons aussi, M. le Président, puisqu'on y faisait allusion, travailler avec le passé également. Quand on dit 250 000 000 $ de davantage de factures aux municipalités, il faut donc rappeler qu'il y en a 22 000 000 $ qui sont dus à la réforme Ryan. C'est indiqué encore ce matin. Alors, ces nouveaux transferts ne sont quand même pas dus à l'ancien gouvernement... Lorsqu'on dit qu'on a réduit également de 50 000 000 $ l'aide aux services de transport en commun dans les grandes municipalités, tous ces gestes sont dus au gouvernement précédent.

M. le Président, ce que nous avons indiqué très clairement, c'est que nous demandons un effort aux municipalités, nous demandons un effort aux municipalités. Et, oui, les municipalités devront travailler pour en arriver à obtenir le même résultat que l'an passé, c'est-à-dire qu'on a demandé un effort de 47 000 000 $, mais on a réussi, dans les municipalités de 5 000 habitants et plus, à baisser les taxes de 0,5 % parce qu'on a bien travaillé au niveau des élus municipaux, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, est-ce que le ministre sera plus sensible à la situation budgétaire des villes de son comté, et plus particulièrement celle de Rouyn-Noranda, qui, à elle seule, devra trouver 500 000 $ suite à sa décision irréfléchie?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: Alors, M. le Président, ce sera d'autant plus facile pour la ville de Rouyn-Noranda que nous leur avons offert 750 000 $ d'argent supplémentaire pour contribuer à la rénovation des vieux quartiers. Tout comme ce sera possible pour la ville de Montréal, puisque du côté de l'opposition on ne regarde que les efforts demandés au niveau des dépenses mais pas les efforts qui ont été faits de façon spécifique pour aider les municipalités. Par exemple, à Montréal, nous avons injecté 19 000 000 $ pour aider à la rénovation des vieux quartiers; à Québec, c'est 5 500 000 $ que nous avons investis. Est-ce qu'on a calculé également que le ministre de la Sécurité publique autorisera dorénavant les municipalités à récupérer les amendes dues à la réforme de la carte policière? Voilà de nouveaux revenus pour les municipalités. Des efforts, oui, on leur demande de gérer adéquatement la situation, et on est capable, en toute compétence, de relever ce défi au Québec, M. le Président.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: Si j'ai bien compris, M. le Président, les maires n'ont encore rien compris.

Le premier ministre, M. le Président, peut-il s'engager en cette Chambre à retirer cette mesure qui est discriminatoire à l'égard des municipalités, puisque le remboursement partiel de la TVQ continue de s'appliquer dans le réseau scolaire et dans le réseau hospitalier?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, nous connaissons les gestionnaires municipaux, nous connaissons les maires, ce sont des gens qui sont très, très près des problèmes des citoyens et des citoyennes, qui connaissent très bien les problèmes de la gestion publique, qui savent que le gouvernement du Québec est aux prises avec des problèmes budgétaires encore plus importants que ceux qu'ils ont à gérer, et je suis convaincu qu'ils reconnaissent fondamentalement l'équité de cette mesure qui les assimile, en fait, aux consommateurs québécois de même qu'aux petites entreprises, aux grandes entreprises.

Le Président: Mme la députée.

Mme Delisle: M. le Président, comment le premier ministre peut-il parler d'équité ici, alors que le réseau scolaire, le réseau municipal et le réseau hospitalier se voyaient rembourser 43 % de la TVQ et qu'aujourd'hui seulement les municipalités se voient abolir ce remboursement, que le réseau scolaire et le réseau hospitalier – c'est ça, ma question – ne subissent pas cette abolition-là?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, deux considérations. D'abord, le réseau de la santé et le réseau scolaire, les deux sont financés à une très large hauteur, à une très grande hauteur par le gouvernement du Québec. Donc, cela équivaudrait pratiquement à nous taxer nous-mêmes. C'est ce que cela voudrait dire.

Deuxièmement, deuxième considération, la taxe de vente du Québec, plus elle est portée largement, plus son taux risque de demeurer le même, de se stabiliser. Les municipalités, je pense, sont appelées à faire l'effort que toute autre organisation que le gouvernement est appelée à faire en payant sa taxe sur les achats qu'elle fait.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: En entendant le ministre des Affaires municipales énumérer les largesses de Père Noël qu'il a distribuées un peu partout alors qu'on parle de réduire les dépenses, est-ce que le premier ministre ne trouve pas que, dans ce dossier-là, où le ministre des Affaires municipales indique les centaines de milliers, pour ne pas dire les dizaines de millions de dollars qu'il a distribués, qu'on a annulés par l'imposition, jeudi dernier, dans le fond, d'une taxe de 76 000 000 $ sur les contribuables municipaux... Est-ce que ce n'est pas exactement le même comportement qu'avec les employés du secteur public auxquels on a donné 1 000 000 000 $ pour ensuite tenter de leur reprendre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je pense que le ministre des Affaires municipales a donné une réponse extrêmement sensée. En fait, le chef de l'opposition devrait choisir: dans une question, il nous reproche de trop comprimer les dépenses; dans l'autre, il nous reproche de trop dépenser. La réalité, c'est que nous gérons avec rigueur et modération, de façon sélective pour que ce soient la qualité et le rendement des dépenses qui soient le critère. Nous faisons le choix de la qualité et du rendement des dépenses, et il est entendu que le gouvernement du Québec continue de dépenser, c'est évident, puisque nous continuons d'assumer des missions essentielles. Le but principal d'ailleurs de l'effort que nous déployons, c'est de restaurer une marge de manoeuvre de l'État pour qu'il puisse continuer de s'occuper de ce qui est essentiel au Québec.

Le Président: En additionnelle ou en principale?

M. Johnson: Oui, la dernière complémentaire. Alors que le premier ministre, à l'évidence, n'a pas compris qu'il ne s'agit pas d'augmenter les impôts exclusivement ni de diminuer les dépenses exclusivement mais également de créer de la richesse – non pas d'augmenter les impôts, mais d'augmenter le nombre de personnes qui paient des impôts – est-ce que le premier ministre entend, dans un geste d'ouverture, dans un geste de collaboration et de compréhension du problème dans lequel maintenant les contribuables municipaux vont se retrouver, s'engager immédiatement à remettre en cause, à reporter cette décision d'augmenter le fardeau fiscal des contribuables municipaux de 75 000 000 $, à procéder à des discussions avec la Table Québec-municipalités, à regarder de façon globale comment, s'il insiste pour que les contribuables municipaux fassent un effort eux aussi, ça pourrait être fait de la façon la plus efficace, la plus transparente, surtout, et la moins cavalière et improvisée? Et est-ce que le premier ministre ne pourrait pas nous dire ce matin qu'il envisage de reconsidérer cette décision de jeudi dernier, sujet à des discussions avec les autorités municipales, et donc qu'il retire cette mesure, quitte à en discuter et voir comment il pourrait la remplacer?

Une voix: C'est ça.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, cette mesure d'équité a été annoncée et, bien sûr, sera respectée. Elle sera suivie d'une démarche de consultation sur le financement des services municipaux. Je voudrais dire qu'à écouter le chef de l'opposition, j'ai comme l'impression qu'il se comporte comme quelqu'un qui est assis sur une solution miracle qu'il avait et qu'il n'a pas utilisée lui-même pour créer de la richesse quand il était premier ministre et qu'il faisait un déficit de 5 600 000 000 $.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: En l'absence du ministre des Finances et de l'Économie, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il se souvient qu'en 1994 il s'est créé 77 000 emplois au Québec pendant que depuis qu'il est là il s'en est perdu 54 000?

Des voix: Oui! Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je demanderais au chef de l'opposition s'il se souvient que cette année on a cinq fois plus d'investissements étrangers que durant 1994, alors qu'il était premier ministre?

Des voix: Ah!

Une voix: La guerre des chiffres.

(10 h 40)

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, en principale.


Climat de travail au ministère de la Santé et des Services sociaux

M. Marsan: Oui, M. le Président. Dans les services de santé et les services sociaux, jour après jour, nous constatons l'anxiété et l'inquiétude grandissante des patients et de leur famille. Nous constatons également la démobilisation du personnel du réseau: infirmières, employés généraux, médecins, professionnels. Comme si ce n'était pas suffisant, un compte rendu d'une consultation ministérielle, en date du 29 octobre dernier, nous dévoile maintenant la démobilisation profonde des fonctionnaires du ministère de la Santé. M. le Président, je cite un court extrait de ce rapport:

«Le climat de travail – ça, c'est au ministère de la Santé – est qualifié unanimement de démobilisateur déshumanisé. Il y a beaucoup d'insécurité, de méfiance, de frustration, d'incertitude. Il y a un manque de communication, d'information et, pire encore, un manque de transparence.» On ajoute également: «Le ministre et son cabinet gèrent seuls la transformation du réseau.»

M. le Président, ma question au premier ministre: Qu'attend le premier ministre pour intervenir auprès du ministre de la Santé devant un rapport aussi accablant, démontrant l'incapacité du ministre à gérer son propre ministère?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'aurais souhaité, comme bien du monde, je pense, que la question soit adressée directement au ministre de la Santé au moment où il serait parmi nous. C'est un ministre qui est à peu près toujours présent en période des questions et qui se trouve aujourd'hui en tournée régionale. Mais je dois dire une chose, par exemple – il répondra à la question quand il sera là – je dois dire que tout le monde est d'accord pour dire que c'est un des meilleurs ministres de la Santé que le Québec a jamais eu.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui. M. le Président, pour l'information du premier ministre, j'aimerais avoir le consentement pour déposer...

Le Président: M. le député.

M. Marsan: Alors, M. le Président, est-ce que le premier ministre a pris connaissance de ce rapport accablant? Et est-ce que je pourrais avoir le consentement pour le déposer, pour que, s'il n'en a pas pris connaissance, il puisse en prendre connaissance?

Une voix: Bravo!


Document déposé

Le Président: Alors, il y a consentement pour dépôt. Et, comme la question a été posée, M. le premier ministre.

M. Bouchard: Alors, M. le Président, je comprends que, lorsqu'on est dans l'opposition puis qu'on est en politique active, on est parfois obligé de prendre des positions en lesquelles on ne croit pas. Mais prenons le cas et le jugement de M. Marc-Yvan Côté, qui, lui, a quitté la politique active, qui, lui, a été ministre des Affaires sociales et de la Santé, et qui, donc, d'une façon très objective, a reconnu, il n'y a pas tellement longtemps, les grandes qualités et a chanté les louanges du ministre actuel de la Santé.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. Depuis le temps qu'il suit, quand même, la politique au Québec, est-ce que le premier ministre se rend compte que ce rapport de consultation ministérielle, ce qu'il contient comme blâme à l'endroit du ministre, à l'endroit de la façon dont le cabinet du ministre est impliqué, à l'endroit des relations entre le ministre ou son cabinet, d'une part, et le réseau de la santé, d'autre part, est un blâme accablant sur le ministre et sur l'équipe ministérielle, et que c'est sans précédent, ça? Je fais appel à la mémoire du premier ministre. Est-ce que ce n'est pas sans précédent de voir une telle consultation, faite pour un ministre, qui conclut littéralement à la faiblesse du leadership dans le ministère, à la façon dont c'est organisé et à la façon dont on doit, surtout, corriger, ce qui est extrêmement important, la mission de la santé à l'intérieur du gouvernement, et que c'est sans précédent, ça, un rapport qui qualifie le ministre et son ministère de telle façon?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, ce qui est sans précédent depuis très longtemps au Québec et au gouvernement, c'est un ministre de cette qualité, qui a accepté de relever les défis des grandes réformes qu'il fallait faire, alors que d'autres avant lui le savaient et n'ont pas osé le faire, qui dirige son ministère de façon remarquable, de façon ouverte, qui entretient une communication parfaite avec la population. Et je pense que, si on doit chercher dans le passé pour pouvoir le comparer à quelqu'un qui était également aussi éminent, c'est M. Castonguay, à l'époque.

Le Président: En complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Compte tenu des deux dernières réponses du premier ministre, est-ce que je peux constater, comme tout le monde, que, d'abord, il a invoqué l'appui de Marc-Yvan Côté et que, là, il vient de le planter?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, c'est qu'il y a eu une longue suite...

Le Président: Je...

M. Bouchard: Pardon?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le Québec a eu la chance de pouvoir compter sur une longue suite de grands ministres des Affaires sociales et de la Santé. Il y en a quelques-uns. Quand on veut les illustrer en dehors de la politique, pour ne pas faire de politique partisane, on parle de M. Castonguay. M. Castonguay est un libéral, donc j'ai pensé que ça pouvait être un jugement plus objectif, puis c'est quelqu'un qui n'était pas... Mais je pourrais très bien parler de Pierre Marc Johnson, de Guy Chevrette et de très grands ministres des Affaires sociales.

Le Président: M. le député d'Iberville, en principale.


Résultat des enquêtes relativement à la procédure d'attribution des contrats du Secrétariat à la restructuration

M. Le Hir: M. le Président, il y aura un an après-demain, le prédécesseur actuel du premier ministre, en réponse à une question de l'opposition, évoquait l'hypothèse d'un vaste complot dont l'État québécois aurait été la victime, relativement à l'attribution prétendument frauduleuse de contrats par le Secrétariat à la restructuration. Dans les jours qui suivaient, au mépris des précédents de l'histoire parlementaire, le prédécesseur du premier ministre actuel et chef du parti qu'il se trouve maintenant à diriger exigeait que je quitte son caucus et intervenait auprès de l'Exécutif de son parti, dans le comté que je représente, pour que celui-ci demande ma démission comme député, en violation des règles les plus élémentaires de la justice naturelle selon laquelle tout individu, membre d'un groupe jouissant d'une reconnaissance officielle, a le droit de connaître la nature des griefs que les membres de cette association ont à son endroit avant qu'ils demandent son exclusion, qu'il a le droit d'être entendu et qu'on doit lui donner l'occasion de se défendre, à moins que l'association en question ne veuille l'en priver parce qu'elle a quelque chose à cacher.

Ces événements devaient déclencher une tempête médiatique d'une rare intensité, qui ne devait se calmer qu'avec la diffusion du deuxième rapport de l'enquête du Vérificateur général, dans lequel il ne retenait aucun motif de blâme à mon endroit.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Le Hir: Ma question s'en vient, M. le Président.

Le Président: Elle doit arriver, là.

M. Le Hir: Sur le complot, plus rien. Depuis lors, tous les Québécois ont pu voir le parti ministériel défendre le comportement d'un membre de sa députation, accusé de manoeuvres électorales frauduleuses, et voir le premier ministre et plusieurs de ses ministres défendre les droits et justifier la nomination à de hautes fonctions publiques d'ex-membres du FLQ qui, même s'ils sont réhabilités et ont obtenu un pardon, n'en ont pas moins été accusés et trouvés coupables de meurtre et de complicité d'enlèvement.

Je demanderais donc au premier ministre s'il est nécessaire, au Québec, d'avoir été accusé et trouvé coupable d'avoir violé les lois civiles et criminelles pour avoir droit à la protection et à la mansuétude de son parti et de son gouvernement, et selon quelle échelle.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le député fait référence à une affaire à laquelle je n'ai pas été mêlé, mais... Je n'ai pas participé aux débats en cette Chambre non plus qui étaient relatifs à cette affaire. Je comprends que ça a été très pénible pour lui, très difficile pour tout le monde, mais je crois que, maintenant que les enquêtes qui ont eu lieu jusqu'à maintenant l'ont totalement innocenté, que tout le monde l'a reconnu, il devrait accepter le verdict de la vérité et s'en satisfaire pour le moment. Je ne vois pas ce que je peux faire de plus, M. le Président.

Le Président: En complémentaire? M. le député de Frontenac, en complémentaire.

M. Lefebvre: M. le Président, la Sûreté du Québec fait enquête, depuis plus ou moins 11 mois, dans l'affaire du député d'Iberville, l'affaire Le Hir. Alors, je voudrais savoir du ministre de la Sécurité publique...

Le Président: Je pense... On se comprend. Alors, je pense que, la semaine dernière, le député de Chomedey a accepté de formuler sa question différemment.

M. Lefebvre: Dans l'affaire du député d'Iberville, M. le Président, la Sûreté du Québec fait enquête depuis 11 mois.

Je voudrais savoir du ministre de la Sécurité publique: Quand le rapport de la Sûreté du Québec va-t-il tomber? Quand les conclusions, suite à toute cette enquête, seront-elles connues?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Oui, M. le Président, on doit dire d'abord que la Sûreté du Québec ne fait pas enquête dans l'affaire du député d'Iberville mais bien suite à un certain nombre de demandes du Vérificateur général du Québec. Donc, la Sûreté du Québec fait enquête là-dessus. La Sûreté du Québec remettra son rapport soit à un procureur de la couronne, s'il y a lieu, soit au Vérificateur général.

Le Président: En principale?

M. Bordeleau: En additionnelle.

Le Président: En complémentaire, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. Tenant compte de l'intervention que vient de faire le député d'Iberville, est-ce que le premier ministre ne reconnaît pas tout le caractère nébuleux de l'intervention politique dans le dossier qu'on a appelé «l'affaire Le Hir»? Et continue-t-il à vouloir cacher la vérité?

(10 h 50)

Le Président: M. le député de l'Acadie, à deux reprises depuis quelques jours, y compris il y a quelques minutes, avec votre collègue le député de Frontenac, je demande à ce que les membres de l'Assemblée ne parlent pas de cette affaire en désignant le député d'Iberville par son nom, d'abord. Alors, je vous demanderais de formuler votre question de telle sorte qu'on respecte les droits et privilèges du député d'Iberville.

M. Bordeleau: M. le Président...

Le Président: Je viens d'entendre un propos qui, à mon... C'est le genre de propos qui, finalement, crée une atmosphère et un climat qui est à la fois désagréable pour les membres de l'Assemblée, mais complètement inacceptable pour nos concitoyens et concitoyennes. Alors, M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. M. le Président, tenant compte de l'intervention que vient de faire le député d'Iberville, est-ce que le premier ministre ne reconnaît pas le caractère nébuleux de l'implication politique des gens qui se trouvaient autour du premier ministre de l'époque et continue-t-il à vouloir cacher la vérité par rapport à tout ce qui a touché les affaires du Secrétariat à la restructuration?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, il est reconnu en cette Chambre qu'on ne peut utiliser l'expression «cacher la vérité», que c'est donner une intention, à ce moment-là, contraire à nos règlements. Alors, je vous demanderais, à ce moment-là, de peut-être demander au député de l'Acadie de reformuler sa question, M. le Président, encore une fois.

Le Président: M. le député de l'Acadie, quand on utilise l'expression «cacher la vérité», il faut faire attention. Dans la mesure où on peut laisser croire ou laisser entendre, parce que tout est une question d'appréciation au moment où les propos sont prononcés, dans le contexte où on peut laisser croire qu'on prétend que nos vis-à-vis ou notre vis-à-vis induit la Chambre volontairement en erreur, à ce moment-là c'est complètement inacceptable.

Alors, je vous demande, encore une fois, de vous conformer à l'esprit du règlement et à la lettre du règlement qui fait en sorte que les questions doivent être posées sans aussi soulever de débat.

M. Bordeleau: Pourquoi M. le premier ministre refuse-t-il de prendre les mesures nécessaires pour mettre en lumière les implications politiques des affaires, des contrats donnés au niveau du Secrétariat à la restructuration concernant l'implication des gens qui étaient dans l'entourage du premier ministre de l'époque?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le dernier rapport que nous avons eu en main, qui d'ailleurs demandait un complément d'enquête sur certains aspects administratifs, ne met aucunement en cause les interventions politiques de qui que ce soit. C'est un aspect administratif qui a fait l'objet de remarques et de conclusions et qui a déterminé l'idée et la nécessité, à tout le moins l'opportunité de demander des compléments d'enquête de la Sûreté du Québec sur certains de ces aspects administratifs concernant les gens qui ont bénéficié de contrats, de commandites, et ainsi de suite.

Donc, en ce qui concerne ce dossier, je pense que le député d'Iberville doit se rendre compte maintenant qu'il a provoqué un autre accès d'acharnement thérapeutique chez le député de l'Acadie.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Oui. En invoquant que les rapports, notamment le rapport du Vérificateur, ne touchent en rien les aspects politiques, comme il vient de le dire, est-ce que le premier ministre se souvient au moins que le mandat du Vérificateur excluait justement les aspects politiques et que c'est la dernière chose que le premier ministre peut invoquer au soutien de ses prétentions?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: M. le Président, je dois corriger le chef de l'opposition. Justement, le rapport du Vérificateur a conclu qu'il n'y avait pas d'intervention politique, très positivement. Qu'il le lise avant de poser des questions.

Le Président: En complémentaire, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que le président du Conseil du trésor ou le premier ministre nie en cette Chambre que le Vérificateur général lui-même a dit publiquement que son mandat n'incluait aucune vérification sur le plan politique et qu'il s'en était tenu au mandat restrictif que le gouvernement de l'époque lui avait donné?

Le Président: M. le président du Conseil du trésor.

M. Léonard: Il y a eu deux enquêtes du Vérificateur général. À la première, il a répondu effectivement ce que vous dites, mais pas à la deuxième qui a porté sur des aspects beaucoup plus larges. Et, à ce moment, lors du deuxième rapport, il a conclu qu'il n'y avait pas eu d'intervention politique.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Dans les circonstances, M. le Président, est-ce que le premier ministre, compte tenu des propos du député d'Iberville, compte tenu de ses propres propos en cette Chambre, qui, ce matin, passent l'éponge sur l'implication du député d'Iberville dans cette affaire, compte tenu du fait que le Vérificateur général a affirmé qu'il n'avait jamais eu de mandat sur le plan politique comme tel, compte tenu qu'il n'y a pas de coupable identifié de toute cette affaire où des millions ont été investis, d'argent des contribuables, gaspillés à la veille du référendum, est-ce que le premier ministre peut prendre l'engagement de faire preuve de transparence et de déclencher une commission parlementaire pour faire la lumière sur cette affaire de façon à ce que les véritables coupables soient identifiés?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Premièrement, M. le Président, il y a une autre séquelle dont la suite est attendue: il y a une enquête qui est en cours à la Sûreté du Québec en réponse au complément qui a été requis. Et, deuxièmement, M. le Président, après tout ce qui s'est passé en cette Chambre – je n'étais pas ici, je l'ai vu dans les journaux – après toutes les heures et les heures de discussions, d'enquêtes, de questions et de réponses, je ne veux pas me prêter, je ne prêterai pas l'Assemblée nationale à une autre chasse aux sorcières.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, en principale.


Adaptation du programme d'assurance-médicaments aux besoins des personnes atteintes du sida ou de sclérose en plaques

M. Marsan: M. le Président, le ministre de la Santé déclarait, quant à son régime d'assurance-médicaments, que «ceux pour qui ça peut poser un problème, encore une fois, on s'en occupe sur une base individuelle et personnelle». Ce matin, le Dr Réjean Thomas, président de la clinique L'Actuel, rappelait cette affirmation au ministre de la Santé et l'invitait à trouver une solution pour les personnes atteintes du VIH.

Est-ce que le premier ministre, dont le leader parlementaire refusait hier la motion de l'opposition demandant une modification au programme d'assurance-médicaments pour les personnes atteintes du sida, entend revoir sa position et adapter son programme d'assurance-médicaments aux véritables besoins des patients atteints du virus du sida, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, encore une fois, le ministre de la Santé n'est pas ici, mais je me souviens qu'hier, en réponse à une question qui traitait de cette affaire qu'il prend très au sérieux, et nous tous au gouvernement, il a dit qu'il examinerait les accommodements qu'il peut apporter à la situation actuelle, et j'endosse totalement cette intention du gouvernement.

Le Président: En complémentaire, M. le député.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Est-ce que le premier ministre peut profiter du fait que les représentants de la Société canadienne de la sclérose en plaques soient dans les tribunes aujourd'hui pour permettre à ces patients de se procurer le médicament Betaseron que refuse son ministre de la Santé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'éprouve la plus grande sympathie, et tout le monde en cette Chambre, pour les patients et les malades que représentent les personnes qui sont dans cette galerie. Maintenant, il s'agit d'un médicament particulier, que je ne connais pas; je suis convaincu qu'entrant dans cette technique je serais maladroit de m'engager dans des réponses précises. Je vais donc me concerter avec le ministre de la Santé pour en discuter.

Le Président: Mme la députée de Blainville, en principale.


Perception automatique des pensions alimentaires

Mme Signori: Merci, M. le Président. Certains articles de journaux de la fin de semaine dernière font état des difficultés rencontrées par le service de perception automatique des pensions alimentaires. On y mentionne notamment, M. le Président, des lenteurs dans le règlement de certains dossiers et le défaut de certains débiteurs d'honorer leurs engagements malgré l'intervention du ministère du Revenu.

Je demande au ministre délégué au Revenu: Qu'en est-il exactement de la situation et, le cas échéant, quelles mesures sont envisagées ou déjà initiées pour remédier à cette situation?

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, nous sommes effectivement à compléter l'implantation de ce régime de perception des pensions alimentaires suite à l'adoption d'un projet de loi en mai dernier, suite à l'initiative du gouvernement. Les choses vont bon train et, grosso modo, selon ce qui avait été prévu à l'échéancier.

(11 heures)

Premièrement, bien sûr, en ce qui concerne les nouvelles ordonnances, nous avons débuté en décembre dernier; la deuxième phase du plan a été actualisée en mai dernier avec la deuxième partie de la loi que nous avons activée en ce qui regarde les anciennes ordonnances, et, depuis lors, tout va selon notre prévision, notamment en ce qui regarde l'informatisation qui est maintenant complétée dans le traitement des dossiers.

M. le Président, on peut déjà constater un certain nombre d'avantages significatifs de ce nouveau régime par rapport à l'ancien, et je citerais en exemple uniquement, à ce moment-ci, le fait que, dans les nouvelles ordonnances, moins de 10 % des dossiers doivent faire l'objet de mesures de perception, en lieu et place de l'ancien régime où on avait des problèmes de défaut de paiement dans à peu près 50 % à 55 % des cas. On voit donc que les dispositions de la loi, lorsqu'elles sont appliquées effectivement, produisent beaucoup des résultats escomptés.

Je ne prétends pas pour autant, M. le Président, que tout va, je veux dire, à la perfection. Nous avons effectivement des problèmes relativement aux débiteurs qui ont le statut de travailleur autonome et dont certains font défaut de produire les renseignements qui sont exigés pour nous permettre, au ministère du Revenu, de faire notre travail. À cet égard, le projet de loi n° 65 de mon collègue de la Justice prévoit effectivement une disposition et des pénalités pour ceux et celles qui feraient défaut de produire ces renseignements-là, et, sitôt que la loi sera adoptée, j'espère, avec la collaboration de l'opposition officielle, nous serons d'autant mieux équipés pour fonctionner avec célérité. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, Mme la députée de Blainville.

Mme Signori: En complémentaire, M. le Président. Le ministre a-t-il l'intention de travailler au maintien de l'obligation de la perception automatique pour tous les débiteurs et non seulement pour ceux qui font défaut d'assumer leurs responsabilités?

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, je crois comprendre qu'il s'agit d'une disposition de la loi qui a été adoptée qui a fait également l'objet de beaucoup de débats, également d'une grande unanimité. Et, à ce moment-ci, je ne vois pas pour quelle raison nous devrions revenir là-dessus.

Le Président: M. le chef de l'opposition, en complémentaire?

M. Johnson: Oui, au premier ministre.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: En complémentaire, est-ce que le premier ministre pourrait nous expliquer pourquoi son ministre vient de nous dire, en réponse à la députée, que les choses vont bon train, alors que les témoignages sont à l'effet que les pensions sont plus difficiles à toucher pour les femmes et qu'elles sont, comme en veut un témoignage ici, une balloune politique dont les femmes font les frais? Comment est-ce que ça va bon train quand c'est une balloune politique pour laquelle les femmes sont en train de payer?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: Je pense que le chef de l'opposition devrait reconnaître que c'est une mesure progressive, qui améliore les choses et qui, pour une partie, a besoin d'un rodage additionnel, notamment, et c'est ce que le ministre du Revenu vient de déclarer, concernant les travailleurs autonomes, où la situation est plus difficile, puisque ceux qui ne produisent pas les renseignements qui sont requis se trouvent à échapper au nouveau mode de perception. Donc, le gouvernement est en train de resserrer l'application des mesures requises pour faire en sorte que les renseignements soient disponibles et que nous puissions appliquer dans ce secteur-là avec efficacité le nouveau mode de perception.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Oui, déjà notre collègue de Saint-Henri–Sainte-Anne s'est fait répondre presque mot à mot la même chose. Ce que j'ai demandé au premier ministre et ce que je souligne ici, c'est: Quand dira-t-il à son ministre du Revenu de se grouiller pour que ça marche, cette affaire-là?

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, j'ai demandé effectivement qu'on trace un bilan complet de l'application du régime en date du 1er décembre 1996, et il sera rendu disponible dès le mois de janvier. Un comité de suivi formé de représentants des différents milieux impliqués de même que de ministères québécois prendra en compte ce bilan et nous fera les recommandations appropriées.

Je dois vous dire simplement, M. le Président, qu'il peut arriver effectivement, dans certains cas, qu'un débiteur va prendre tous les moyens à sa disposition, des moyens légaux et d'autres, pour, justement, se défiler de ses responsabilités. Le ministère du Revenu, à ce moment-là, prend tous les moyens à sa disposition pour, justement, faire en sorte que la personne rencontre ses obligations, et nous réussissons, parfois après plusieurs semaines.

J'ai un cas récent justement qui a été réglé à la satisfaction, je pense, de tout le monde. Oui, oui, justement...

Des voix: ...

Le Président: M. le ministre délégué au Revenu.

M. Bertrand (Portneuf): ...où on a dû, dans le respect des lois, des dispositions des différentes lois, y aller d'un certain nombre de mesures très sévères qui ne seraient aucunement à la portée d'un citoyen comme vous et moi, par exemple, qui se retrouverait dans une même situation. Alors, le ministère du Revenu a ces moyens-là. Il les applique, et avec succès, même si, dans certains cas, ça peut peut-être prendre un peu plus de temps. Mais il faut comprendre que, dans de tels cas, M. le Président, jamais la personne n'aurait pu toucher son dû.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Chomedey.

M. Mulcair: Oui. Merci, M. le Président. Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi il n'écoute pas, maintenant qu'il voit que c'est engorgé, la suggestion de l'opposition d'exclure les bons payeurs? Parce que c'est là une des raisons majeures pour lesquelles le système ne fonctionne pas, parce que, comme d'habitude, son gouvernement a visé trop large et a tenté et voulu réglementer même ce qui marchait bien.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Juste, M. le Président, peut-être un petit rappel au règlement. Il ne suffit pas de mettre «est-ce que» et à ce moment-là de mettre un préambule dans la question. Je pense qu'à plusieurs reprises aujourd'hui, dans les questions, M. le Président, on met les mots «est-ce que» et après ça on met des préambules aux questions. Je pense qu'à ce moment-là on contrevient à l'esprit et à la lettre de notre règlement, M. le Président...

Le Président: Alors, ce rappel au règlement ayant été fait à ce moment-ci, je pense que je vais demander au ministre de répondre à la question.

M. Bertrand (Portneuf): Pour une raison très simple, M. le Président: il s'agit d'une disposition qui, à l'époque, dans la sérénité des débats dans lesquels nous étions, a été appuyée de façon unanime par les deux côtés de la Chambre. Alors, je suggérerais à ce moment-là...

Le Président: Alors, en conclusion, M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Donc, à l'unanimité, M. le Président, et dont l'objectif était...

Le Président: À ce moment-ci, il n'y a qu'un député qui a la parole, et c'est le ministre délégué au Revenu. M. le député, le gouvernement et le ministre – et je pense que notre règlement est clair – a non seulement la responsabilité de ses réponses, mais les règles sont claires: si un député n'est pas satisfait d'une réponse, il y a des processus qui sont inscrits dans le règlement et on n'a qu'à se prévaloir des mécanismes qui sont prévus au règlement pour éventuellement aller plus loin dans un débat ou dans une discussion avec un membre du gouvernement. Mais, à ce moment-ci, c'est le ministre délégué au Revenu qui a la parole, et je crois qu'on devrait, il reste à peine quelques instants à la période des questions et des réponses, lui donner la responsabilité et le droit de répondre correctement à la question qui a été posée par le député de Chomedey.

M. Bertrand (Portneuf): M. le Président, donc, une disposition dont l'objectif était d'assurer le respect des ordonnances alimentaires, étant donné la pression souvent utilisée auprès des créancières, qui sont en majorité des femmes monoparentales, d'ailleurs, M. le Président... Donc, il n'est certainement pas mon intention de proposer une modification de cette approche, qui avait été d'ailleurs un projet de loi voté à l'unanimité dans cette Chambre.

Le Président: Alors, cette réponse met fin à la période des questions et des réponses orales pour aujourd'hui.

Il n'y a pas de réponses différées.

Il n'y a pas non plus de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en arrivons aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.


Ajouter trois groupes aux consultations particulières sur le projet de loi n° 50

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

Que, dans le cadre des consultations particulières sur le projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie, que la commission de l'économie et du travail entende également: le Syndicat canadien de la fonction publique à Hydro-Québec, le jeudi 5 décembre 1996, de 17 heures à 17 h 45; le Groupe de recherche appliquée en macro-écologie, le mardi 3 décembre 1996, de 23 heures à 23 h 45; M. Alban D'Amours, le mercredi 4 décembre 1996, de 23 heures à 23 h 30;

«Que les modalités des consultations soient identiques à la motion principale adoptée par cette Assemblée le mercredi 27 novembre 1996.»


Mise aux voix

Le Président: Alors, cette motion est-elle adoptée?

M. Bélanger: Adopté.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. M. le Président, strictement, quant à cette motion du leader du gouvernement...

Le Président: Je demanderais aux collègues qui ont à aller travailler à l'extérieur de l'enceinte de l'Assemblée de le faire rapidement et en silence, pour permettre la poursuite de nos travaux, ici, à l'Assemblée.

Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

(11 h 10)

M. Paradis: Oui, strictement, M. le Président, une question d'information. Comme il s'agit d'ajouts à une liste qui avait déjà été présentée aux membres de l'Assemblée nationale et compte tenu que nous sommes, là, à la fin des travaux, en session intensive, est-ce que le leader du gouvernement nous indique qu'il s'agit maintenant, avec ces ajouts, d'une liste qui est définitive et complète?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, il n'y a jamais une liste qui est définitive, dans le sens que, après consultation entre le porte-parole de l'opposition et le ministre, on a décidé de rajouter ces trois noms-là. Alors, je suis certain que, si on voulait en rajouter d'autres, à ce moment-là il pourrait y en avoir d'autres qui soient rajoutés.

Mais, relativement à cette motion, cette motion, elle est telle qu'elle est. Je ne l'amenderai pas à ce moment-ci. Mais j'invite le leader de l'opposition peut-être à demander au porte-parole de l'opposition dans le dossier d'en parler au ministre. À ce moment-là, le consentement pourrait toujours, le cas échéant... de rajouter des membres à cette...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, là, c'est une question bien simple: Est-ce qu'au moment où le leader du gouvernement propose à cette Assemblée les ajouts qui sont contenus dans sa motion d'aujourd'hui le gouvernement a l'intention de convoquer ou d'inviter d'autres personnes? Ou est-ce que, du côté gouvernemental, il s'agit de la position gouvernementale et que, quant au gouvernement, cette liste-là est complète et définitive?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'aimerais faire remarquer au leader de l'opposition que ça va être une trentaine de groupes qui vont être entendus sur ce projet de loi, une trentaine de groupes sur un projet de loi alors que nous sommes en session intensive. Alors, je crois que c'est déjà quelque chose d'assez considérable comme effort pour entendre et écouter la population. Au moment où nous nous parlons, au moment où je viens de déposer cette motion, oui, la liste est fermée. Mais, comme je l'ai dit au leader de l'opposition, si jamais il voulait en rajouter, il y a toujours la possibilité, à ce moment-là, entre le porte-parole et le ministre, de se parler. Mais je ne peux présumer, à ce moment-là, si nous en rajouterons ou pas.

Le Président: Ça va? Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, M. le Président. Je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale demande au ministre de la Santé et des Services sociaux qu'il modifie le régime d'assurance-médicaments afin de répondre au besoin pressant des personnes atteintes de sclérose en plaques.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Comme il a été mentionné hier déjà, M. le Président, la loi, telle qu'elle a été faite, le régime d'assurance-médicaments permet déjà des accommodements pour pouvoir faire en sorte qu'on modifie la liste des médicaments. Comme je l'ai mentionné, à ce moment-là il n'est pas nécessaire de modifier le régime d'assurance-médicaments, mais plutôt de regarder la possibilité de rajouter d'autres médicaments. Donc, c'est pour ça que je ne peux pas donner le consentement pour débattre de cette motion.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. En soulignant et pour tenter d'accommoder les gens qui sont aux prises avec cette maladie et également d'accommoder, sur le plan parlementaire, le leader du gouvernement, nous ne serions aucunement fermés à quelque amendement que ce soit à cette motion qui est présentée par le député de Robert-Baldwin. Le but est de s'assurer que ces gens-là puissent obtenir le médicament dont ils ont besoin dans le cadre du régime d'assurance-médicaments.

Je tiens compte des propos énoncés par le leader du gouvernement. Ici, là, une modification, un amendement à proposer, en autant que le but recherché, M. le Président, soit atteint, nous pourrions l'adopter. Je propose même, de façon à ne pas retarder nos travaux en session intensive – bien que le problème soit important et que nos travaux mériteraient parfois d'être retardés par des problèmes aussi importants – que cette motion soit adoptée sans débat, unanimement par l'Assemblée nationale, pour que les parlementaires indiquent au ministre de la Santé et des Services sociaux quelle est l'intention de l'Assemblée nationale quant à ces gens qui sont victimes d'une telle maladie.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, comme le ministre de la Santé et des Services sociaux l'a dit à plusieurs reprises, il est très sensible à la situation que vivent les patients, que vivent les gens atteints de cette maladie. Cependant, comme il l'a mentionné, il n'est pas nécessaire de modifier comme tel le régime d'assurance-médicaments pour chercher des solutions pour les gens atteints de cette maladie. Donc, c'est pour ça que nous ne voulons pas faire de débat qui viserait la motion telle que présentée par le député de Robert-Baldwin. Et, non, je ne donne pas de consentement, M. le Président.

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?

M. Marsan: M. le Président, afin de satisfaire le leader du gouvernement, je voudrais déposer cette motion:

«Que l'Assemblée nationale demande au ministre de la Santé et des Services sociaux qu'il modifie le régime d'assurance-médicaments afin d'inscrire dans la liste des médicaments assurés le Betaseron pour répondre au besoin pressant des personnes atteintes de sclérose en plaques.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour cette autre motion, M. le leader du gouvernement?

M. Bélanger: Pour les mêmes motifs que j'ai énoncés tout à l'heure, M. le Président, je ne peux pas donner mon consentement.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, moi, là, j'aimerais bien comprendre. Le leader du gouvernement nous indique que le régime d'assurance n'a pas besoin d'être modifié pour que le médicament devienne assuré comme tel. Le député tente de l'accommoder, modifie le libellé et demande cette fois-ci simplement d'ajouter à la liste le médicament comme tel, et il subit un autre refus, M. le Président. Je ne veux pas prêter d'intention au leader du gouvernement dans un dossier qui touche autant d'humains de façon aussi profonde au Québec.

Maintenant, est-ce qu'on peut quand même accepter de l'adopter unanimement de façon à ce que le voeu de l'Assemblée nationale rejoigne le ministre de la Santé et des Services sociaux, sans débat?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, à partir du moment où ici, du côté de cette Chambre, nous disons qu'il n'y a pas de consentement, il ne devrait pas même y avoir de débat comme il se fait présentement. J'ai expliqué les motifs, parce que vous avez permis à ce moment-là au leader de l'opposition de s'expliquer, de donner une argumentation relativement à la demande qui a été faite. Mais, normalement, il ne devrait même pas y avoir de débat, M. le Président. À partir du moment où on dit qu'il n'y a pas de consentement, il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Président: C'est-à-dire qu'effectivement, si j'interprétais ça d'une façon stricte, il pourrait effectivement ne pas y avoir de débat. Dans la mesure où de gré à gré on peut vouloir s'expliquer un peu, je laisse l'échange se faire. Mais, à ce moment-ci, comme il n'y a pas consentement, la motion ne peut pas être débattue.

Je demanderais par ailleurs au député de Robert-Baldwin, pour les écritures, de faire en sorte que les deux textes qu'il a présentés soient disponibles pour les officiers de la table.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous en arrivons maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission de l'économie et du travail poursuivra et terminera les consultations particulières sur le projet de loi n° 76, Loi instituant le Fonds de partenariat touristique, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 130, Loi sur la justice administrative, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 12, Loi modifiant le Code de la sécurité routière et d'autres dispositions législatives, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission du budget et de l'administration poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 73, Loi concernant la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances et modifiant diverses dispositions législatives en matière de retraite, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail procédera aux consultations particulières sur le projet de loi n° 50, Loi sur la Régie de l'énergie, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif.


Affaires du jour

Le Président: Très bien. Alors, maintenant pour les renseignements sur les travaux de l'Assemblée, puisqu'il n'y a pas de questions ou d'interventions à cette étape-ci, nous en arrivons maintenant à l'étape des affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais de prendre en considération l'article 13 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 77


Adoption du principe

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du principe du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Je suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Merci, M. le Président. Alors, l'article, M. le Président, s'appelle l'article 13; le projet de loi, n° 77. J'espère que c'est plutôt les numéros du projet de loi qui porteront chance à ce projet de loi.

M. le Président, c'est avec beaucoup de plaisir et de fierté que je présente aujourd'hui ce projet de loi. Il s'agit d'une réforme importante de l'organisation policière au Québec, d'une réforme nécessaire, d'une réforme qui a malheureusement trop tardé.

M. le Président, ce projet de loi constitue l'aboutissement d'une longue période de réflexion, également d'une importante consultation qui s'est déroulée tout au cours de l'été dernier et où j'ai pu rencontrer, sur l'ensemble du territoire du Québec, près de 600 maires des municipalités; l'essentiel, sinon l'ensemble des préfets; la grande majorité, sinon la totalité des directeurs des services policiers, tant ceux des services policiers municipaux que ceux également de la Sûreté du Québec.

Ce projet de loi permettra d'améliorer l'équité fiscale entre les contribuables, de favoriser une plus grande efficacité d'ensemble du système policier au Québec et de rapprocher les services policiers de la communauté.

Les nouvelles règles du jeu qu'il établit mettront également fin à ce qu'il faut bien reconnaître comme étant un développement qui, au cours des dernières années, s'est fait sans plan d'ensemble de l'organisation policière, particulièrement depuis l'intervention du gouvernement précédent, en 1992, intervention qui à toutes fins pratiques avait établi au sein des corps policiers, de l'organisation policière, beaucoup de confusion.

(11 h 20)

Le projet de loi se divise en deux grandes parties. L'essentiel du projet de loi porte sur la réforme de la carte policière, mais également, à travers cet exercice, le projet de loi vient apporter certains correctifs soit à l'organisation et au financement de l'Institut de police du Québec ou encore, par exemple, au droit démocratique des policiers de se présenter à des élections et à un certain nombre d'autres aspects particuliers sur lesquels je reviendrai.

Peut-être avant d'entrer dans le coeur du sujet, M. le Président, faire un certain rappel historique, un certain nombre de faits. Le 20 juin 1991, le gouvernement du Québec adoptait la Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les finances municipales. Cette législation est entrée en vigueur le 1er janvier 1992 et elle modifiait plusieurs articles de la Loi de police, et, parmi les modifications principales qui étaient apportées, notamment à l'article 6.1, l'une de ces modifications permettait l'introduction d'une tarification pour les services de la Sûreté du Québec, calculée à partir de deux critères, soit la richesse foncière uniformisée et également un facteur variable selon la population de la municipalité.

Une autre disposition qui avait également été adoptée stipulait que le gouvernement pouvait définir par voie réglementaire les services de base qu'une municipalité locale doit dispenser sur son territoire en matière de services policiers, en fonction bien sûr des diverses catégories de municipalités. Il importe aussi de rappeler que la Loi de police actuellement en vigueur prévoit que les municipalités locales doivent assujettir leur territoire à la compétence d'un corps de police. Ce n'est donc pas une chose nouvelle, c'est inscrit dans nos règles du jeu depuis longtemps: la responsabilité d'assurer des services policiers partout sur le territoire est une responsabilité municipale.

Maintenant, les municipalités, celles d'entre elles qui ont une population égale ou supérieure à 5 000 habitants doivent actuellement obligatoirement assujettir leur territoire à un corps de police municipal à moins d'avoir une dispense du gouvernement, tandis que les autres municipalités locales, celles de moins de 5 000 habitants, peuvent s'en remettre aux dispositions législatives qui prévoient que la Sûreté du Québec peut agir sur leur territoire dans la mesure où tel est le voeu de ces municipalités.

Au plan de l'organisation policière, les modifications qui ont été apportées en 1991 et, par la suite, en 1992 avaient pour objectif d'établir un partage de responsabilités entre les municipalités et le gouvernement du Québec de même que de rétablir un début d'équité fiscale entre les municipalités, puisque, on le sait, par le passé, ces municipalités n'assumaient aucun coût pour les services policiers de base, donc n'assumaient aucun coût lorsque la Sûreté du Québec remplissait pour ces municipalités les obligations qui étaient les leurs. En même temps, on sait que d'autres municipalités au Québec assumaient l'entièreté de leurs coûts de police. Alors, l'application de l'ensemble des modifications qui ont été mises en vigueur par ce qu'on a appelé la «loi 145» n'a pas été sans entraîner diverses répercussions tant sur l'organisation policière que dans le monde municipal, de même bien sûr que sur les revenus gouvernementaux.

Tout d'abord, il faut se rappeler que les municipalités qui ont été desservies par la Sûreté du Québec se sont vu remettre une facture, mais simplement une facture, M. le Président, sans pouvoir d'aucune façon exercer un contrôle direct sur les services reçus ni sur les orientations et les priorités des services fournis par la Sûreté du Québec lorsque c'était le cas. Ces municipalités se voyaient donc confinées à un rôle de simples perceptrices de fonds au nom du gouvernement du Québec.

Deuxièmement, les ententes intermunicipales ou les créations de corps de police municipaux ont forcé la Sûreté du Québec à revoir continuellement la répartition de son effectif, ce qui s'avère, il faut bien le reconnaître, un exercice difficile, puisque chaque fois la relocalisation d'effectif, la relocalisation de postes de la Sûreté sont en cause, ce qui rend donc extrêmement difficile la planification à moyen terme de l'offre des services policiers.

On sait bien qu'il est difficile d'organiser des services policiers en fonction des règles du jeu de l'offre et de la demande. Des services policiers, ça ne s'organise nulle part dans le monde selon les principes de l'entreprise privée. L'efficience policière, la qualité de son organisation dépendent, bien sûr, d'une définition claire du territoire à desservir, dépendent de règles du jeu claires si on veut planifier avec efficacité et au meilleur coût l'offre des services policiers partout au Québec.

On se rappellera également – toujours dans ce rappel, un petit peu, de l'histoire de l'organisation policière au Québec – que le gouvernement, dans le livre des crédits 1996-1997 du printemps dernier, annonçait la mise en place d'un mode de financement mixte pour les services de base de la Sûreté du Québec et un rehaussement des sommes payables pour les services de la Sûreté du Québec par les municipalités qui utilisent ces services, rehaussement jusqu'à environ 50 % des coûts assumés par la Sûreté du Québec en matière de services de gendarmerie partout sur le territoire. Puis, en même temps, le ministre des Affaires municipales, mon collègue, annonçait une politique en matière de consolidation des communautés locales, politique qui a amené les conseils municipaux à questionner, bien sûr, leur mode d'organisation policière. Alors, c'est l'ensemble de ces éléments qui a conduit à revoir l'approche gouvernementale initiale en matière d'organisation policière pour l'ajuster au contexte actuel.

Alors donc, depuis quelques années déjà, des réflexions ont cours sur la nécessité d'apporter divers changements à l'organisation policière du Québec en vue de mieux répondre à l'évolution sociale et d'adapter davantage les moyens consentis aux besoins de protection de chaque milieu. Tantôt les demandes sont venues des milieux municipaux, tantôt elles sont venues des milieux policiers, tantôt encore le gouvernement a formulé des propositions.

Il faut savoir que la Sûreté du Québec, avec un peu plus de 4 000 policiers, assure présentement la protection du territoire dans plus de 1 165 municipalités dont plus de 1 000 ont une population inférieure ou égale à 3 000 habitants. Elle dessert ainsi, au plan des services de base, environ 1 500 000 habitants. Elle offre aussi une multitude de services spécialisés et prête assistance fréquemment aux corps de police municipaux. Le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, pour sa part, compte environ également 4 000 effectifs, dessert bien sûr les 29 municipalités de la Communauté urbaine de Montréal. Et enfin environ 150 corps de police municipaux constitués d'un peu plus de 4 700 policiers ont, quant à eux, juridiction sur le territoire de tout près de 196 municipalités qui regroupent 3 500 000 habitants. Donc, les effectifs policiers se divisent à peu près au tiers, au tiers, au tiers entre, d'une part, la Communauté urbaine, les corps policiers municipaux et la Sûreté du Québec.

Il faut également savoir que plusieurs municipalités qui maintiennent actuellement un corps de police doté d'un faible effectif policier bénéficient quand même des services supplétifs de la Sûreté du Québec, et ce, sans aucune facturation, alors qu'à l'opposé des municipalités de 5 000 habitants et plus profitent encore aujourd'hui des services de la Sûreté du Québec. Même si la loi leur fait l'obligation d'être desservies par un corps de police municipal, elles en profitent. Dans certains cas, certaines municipalités sont ce qu'on appelle en défaut. Alors, d'un côté comme de l'autre, il y avait nécessité de corriger, d'apporter des correctifs à la situation si l'on veut avoir en ces matières une approche qui soit équitable pour l'ensemble des contribuables du Québec.

Également, il faut bien comprendre que, si les municipalités de plus de 5 000 habitants ont généralement les ressources nécessaires pour offrir ce qu'on pourrait appeler les services policiers de base aux citoyens, rares sont ces municipalités, sauf les très grosses, qui disposent des moyens suffisants pour faire face à des besoins plus spécialisés, notamment les enquêtes sur les crimes graves en réseaux, la recherche en forêt, l'encadrement de manifestations, par exemple, à risque, les sinistres majeurs, etc. Or, on le sait, ce genre d'événement peut se produire n'importe où au Québec, à n'importe quel moment. Il est donc nécessaire – et là-dessus la position du gouvernement est claire – dans toute approche d'une réforme de la carte policière et de l'organisation policière de maintenir dans toutes les régions du Québec un effectif policier de la Sûreté suffisant pour pouvoir agir rapidement, efficacement afin d'assurer la sécurité des citoyens et l'ordre public partout sur le territoire.

(11 h 30)

Là-dessus, M. le Président, mon choix est clair, le choix du gouvernement est clair: toute réforme de la carte policière doit passer par le maintien et la consolidation des activités de la Sûreté du Québec sur le territoire, ce qui n'empêche pas l'adaptation de la carte policière aux besoins locaux, ce qui également ne remet pas en cause les acquis en matière d'organisation policière au Québec pour les municipalités de plus de 5 000 habitants.

J'ai indiqué que, suite aux réformes ou, enfin, au transfert fiscal fait par le gouvernement précédent en 1992, la situation actuelle de concurrence au sein de l'organisation policière crée une forme d'instabilité, engendre entre les corps policiers souvent des débats stériles quant à la desserte des territoires. Et parmi notamment les répercussions qui ont été engendrées par l'introduction d'une tarification obligatoire des services de base de la Sûreté, en 1992, la plus marquante de ces répercussions, c'est sans aucun doute une forme de morcellement de l'organisation policière, morcellement qui est dû en bonne partie à l'absence d'un plan d'ensemble, d'une vision de ce que devrait être l'organisation policière.

Alors, si aucune mesure n'était prise, il y a tout lieu de croire que les dispositions légales actuellement en vigueur accélèreraient le morcellement de l'organisation policière au Québec tout en favorisant globalement une augmentation substantielle des coûts de police. Nous consacrons tous ensemble, que nous soyons des contribuables municipaux ou provinciaux – c'est les mêmes contribuables, M. le Président – plus de 1 300 000 000 $ à notre sécurité publique à travers le financement des coûts des corps de police. Il est évident que toute réforme de la carte policière ne doit pas entraîner une augmentation de ces coûts et doit donc s'axer sur les réalités avec lesquelles nous devons composer.

Autrement dit, si on n'apportait pas des modifications législatives au projet de loi n° 77, on laisserait, on permettrait, on donnerait l'opportunité aux municipalités de moins de 5 000 habitants, à celles les plus riches d'entre elles, de se doter directement ou par ententes intermunicipales de services de police autonomes, laissant par le fait même aux autres contribuables, au gouvernement du Québec la responsabilité de desservir les autres, c'est-à-dire celles dont la richesse foncière, dont la population est moins importante, qui sont souvent situées aux confins des municipalités régionales de comté. On se retrouverait, à la fin de ce processus, avec une augmentation des coûts de desserte, avec une mauvaise organisation de la sécurité publique, ce qui serait au désavantage de tous les contribuables du Québec.

Quatre grands principes sont à la base de la démarche qui est la mienne. D'abord, bien sûr, faire une réforme de la carte policière qui s'inscrit dans le sens des responsabilités reconnues aux municipalités quant à l'organisation des services de base. Cette responsabilité doit être pondérée, cependant, puisque, compte tenu de l'organisation municipale au Québec – et tout le monde est d'accord avec ça – du grand nombre de petites municipalités de moins de 5 000 et même de 3 000 habitants, ce principe de responsabilité et d'autonomie municipale ne peut vraiment avoir son véritable sens que dans la mesure où il s'exerce, dans la plupart des cas, dans le contexte de regroupements significatifs et, à notre avis, à travers une structure de regroupement qui a fait ses preuves et dans laquelle se retrouvent l'ensemble de ces municipalités. Et cette structure de regroupement, c'est la municipalité régionale de comté.

Deuxième principe, c'est bien sûr la recherche d'une plus grande équité – on n'y arrive jamais parfaitement, mais c'est la responsabilité du gouvernement de le faire – entre les municipalités et les contribuables, notamment dans la distribution de l'effort que chacun doit consentir en matière de sécurité publique. Ça aussi, c'est un principe fondamental qui doit présider à la formulation de nos décisions.

Troisième principe, c'est que toute stabilisation, réorganisation de la carte policière doit bien sûr être analysée, jugée à l'aune de l'efficacité dans le déploiement des ressources policières, de façon à ce que l'organisation de la carte nous permette de répondre aux besoins, d'établir le niveau de service, mais, encore une fois, le niveau de service adapté aux circonstances, mais, encore une fois, au meilleur coût possible. Puis, enfin, cet équilibre qui est recherché, M. le Président, qui est déjà présent entre les trois grands groupes policiers au Québec, bien, je pense qu'il faut faire en sorte de le maintenir de telle sorte qu'il y ait là-dedans, à notre avis, un gage de stabilité et d'harmonie qui doit constituer une ligne de conduite à privilégier dans la réflexion sur l'organisation policière. Il y a donc, en conséquence, à mieux départager, clarifier les rôles respectifs, d'une part, de la Sûreté du Québec, d'autre part, des divers corps de police municipaux et, encore une fois, en distinguant parmi ces corps de police ceux qui se retrouvent dans les grandes, très grandes agglomérations urbaines et les autres.

Alors donc, en conséquence, l'intervention, M. le Président, dans le cadre du projet de loi n° 77, vise les éléments suivants: d'abord, conforter l'organisation actuelle, l'histoire de l'organisation actuelle de la police au Québec; confirmer l'obligation, la responsabilité des municipalités de plus de 5 000 habitants de disposer de leur propre corps policier, d'assumer ainsi leurs responsabilités ou de le faire via des ententes avec d'autres municipalités. Deuxièmement, pour les municipalités de 5 000 habitants et moins qui sont non organisées, organiser ces municipalités en les regroupant au sein de la MRC – elles y sont déjà d'ailleurs – créer au sein de chacune de ces MRC un comité de sécurité publique formé d'élus, de même que des représentants des services policiers régionaux. Réaliser, signer, confirmer entre ces municipalités membres de la MRC et la Sûreté du Québec une entente de services, laquelle entente de services établira enfin les règles du jeu dans chacune des MRC du Québec.

Cette proposition s'accompagne également de la mise en vigueur du règlement sur les services policiers de base – règlement qui a fait l'objet d'une consultation, qui a été modifié pour tenir compte des commentaires – qui définit le minimum de services auxquels tous nos concitoyens, partout sur le territoire du Québec, sont en droit de s'attendre en matière de services policiers. Le projet implique également, bien sûr, un rééquilibrage de la facturation, du fardeau fiscal entre les divers contribuables des municipalités du Québec, ce qui se traduira par un rehaussement de la tarification pour les services policiers de base fournis par la Sûreté du Québec. Rehaussement, M. le Président, cependant, qui se limitera, globalement, à 50 % de la facture des services policiers au Québec. Puis, également, la création d'un fonds spécial pour y comptabiliser les coûts de même que les revenus des services policiers en matière de gendarmerie sur le territoire du Québec.

M. le Président, on le sait, plusieurs des municipalités qui sont actuellement desservies par la Sûreté du Québec – et elles sont nombreuses, elles sont plus de 1 000, tout près de 1 200 – auraient pu s'organiser autrement dans le passé, la loi le leur permettait, la loi le leur permet encore; ces municipalités ont choisi de travailler avec la Sûreté du Québec. Plusieurs de ces municipalités considéraient et critiquaient la situation, puisqu'elles se voyaient, en quelque sorte, transférer une facture sans jamais pouvoir exercer quelque contrôle que ce soit, ni sur les services reçus, ni sur les coûts, sinon que très indirectement par l'entremise des premiers comités consultatifs. Elles avaient donc, avec raison, l'impression qu'elles étaient laissées pour compte, que les élus locaux n'avaient rien à dire dans l'organisation des services policiers sinon qu'à payer.

Alors, c'est évident que cette situation devait être corrigée, mais c'est évident également, je l'ai dit tantôt, que l'existence d'un très grand nombre de petites municipalités pose un problème majeur lorsqu'on veut corriger ce genre de situations. Et c'est pourquoi nous avons choisi la voie du regroupement, la voie qui va dans le sens des efforts de mon collègue aux Affaires municipales, la voie qui va dans le sens de toute l'organisation municipale au Québec pour permettre à ces municipalités d'exercer leurs responsabilités en matière d'offre de services policiers à leurs contribuables et de le faire, donc, de façon beaucoup plus réaliste et fonctionnelle que ce qui était la réalité telle qu'elle se vivait jusqu'à maintenant.

(11 h 40)

Or, il fallait donc apporter des corrections à la loi, puisque la situation actuelle ne permet pas à un regroupement de municipalités ou à une municipalité de négocier avec la Sûreté du Québec ce genre de contrat de services où les parties peuvent s'entendre sur un quantum de services, sur les coûts, sur les modalités de gestion. Cette formule existe ailleurs, on ne l'a pas complètement inventée; on ne peut pas s'en donner tout le mérite, elle existe ailleurs, elle existe en Ontario où la police provinciale, par exemple, de l'Ontario, qui est l'équivalent de notre Sûreté du Québec, dessert, sur une base contractuelle, un certain nombre de municipalités.

Alors, j'estime donc, M. le Président, qu'il est nécessaire que les municipalités de moins de 5 000 habitants qui sont actuellement desservies par la Sûreté du Québec viennent à conclure des ententes avec la Sûreté sur la base de ces municipalités. Toute municipalité locale de 5 000 habitants et plus continuera, bien sûr, donc, d'avoir l'obligation d'être assujettie à un corps de police municipal, à moins d'une autorisation exceptionnelle du ministre. Il peut arriver quelques cas d'exception. On ne peut pas faire un projet de loi qui couvre de façon uniforme tout le Québec. Ce qu'on présente aujourd'hui, c'est la vision de l'organisation, les grandes lignes; il peut y avoir quelques exceptions.

De même qu'il pourra y avoir aussi, pour les municipalités de moins de 5 000 habitants, un certain nombre d'exceptions; notamment, celles qui ont déjà un corps de police, qui souhaiteront le conserver, qui souhaiteront le faire cependant en respectant le Règlement sur les services policiers de base et non pas comme une échappatoire au paiement de leur juste part, de leur quote-part des coûts de police, mais celles qui voudront effectivement conserver leur corps de police, s'organiser pour le faire en respectant les services de base. M. le Président, j'ai clairement fait savoir que le projet de loi prévoit des dispositions pour tenir compte de cette volonté locale.

Donc, ce qu'on met de l'avant, c'est un projet de loi qui, à mon avis, j'en suis convaincu, s'appuie sur l'histoire et la réalité actuelle de l'organisation policière au Québec, mais, en même temps, il fixe des balises claires pour l'avenir, il donne un sens au développement futur, puis il va permettre aux divers responsables, aux municipalités, à la Sûreté du Québec, un déploiement efficace de leurs forces sur le territoire, mais en connaissant pour l'avenir, pour les prochaines années, le cadre dans lequel ils vont devoir le faire, plutôt que de devoir à chaque année se poser la question de savoir à quoi ressemblera la carte policière l'année suivante.

Alors, encore une fois, M. le Président, quand on parle d'un budget de 1 300 000 000 $, quand on parle d'effectifs de près de 13 000 personnes au total, je pense que c'est de notre responsabilité de pouvoir établir certaines de ces règles du jeu.

J'ai dit donc qu'on tiendra compte toutefois dans cette orientation, dans cette démarche, de certaines particularités géographiques d'une région. On tiendra compte également parfois de certaines caractéristiques de l'organisation policière déjà en place, également des changements qui pourront intervenir dans les structures municipales. J'ai déjà dit, d'ailleurs, avec mon collègue des Affaires municipales, qu'on s'assurera que la démarche qu'il poursuit actuellement, de regroupement des municipalités, ne soit pas entravée d'aucune manière par certaines des dispositions de notre projet de loi, mais qu'au contraire on garantira aux municipalités une forme de neutralité fiscale pour éviter que la démarche d'organisation policière ne vienne contrecarrer les projets de fusion des municipalités.

En ce qui concerne maintenant les services de base, j'ai toujours dit que parallèlement au projet de loi qui est présenté devant nous, il y a également un projet de règlement qui a fait l'objet de consultations, qui tient compte, je pense, des commentaires qu'on a entendus, qui fait l'objet, je pense, d'un assez large consensus, et ce projet de règlement va entrer en vigueur, à toutes fins pratiques, en même temps que la loi.

Ce projet de règlement établit, bien sûr, les règles minimums à partir desquelles l'offre des services policiers doit être garantie partout sur le territoire. Ce projet de règlement est important, et il faut pouvoir lire la loi un petit peu en parallèle à ce projet de règlement, puisque l'un et l'autre se complètent. Mais, enfin, l'ensemble de nos contribuables pourront compter sur le fait que, 24 heures par jour, dans toutes les zones urbanisées du Québec, je dirais presque sur tout le territoire... Mais on comprendra bien sûr que, lorsqu'on est dans des régions très éloignées, très peu peuplées, l'offre de service n'est pas tout à fait la même. On ne peut pas, en Ungava, sur la Côte-Nord, dans des régions très éloignées, avoir exactement la même offre de service. Mais, partout sur le territoire du Québec, l'objectif de ce règlement sur les services de base, c'est de garantir à nos concitoyens que 24 heures par jour, sept jours par semaine, il y a des services policiers de disponibles ou, dans d'autres cas, dépendamment de la population locale, une patrouille 24 heures par jour, dépendamment des cas.

M. le Président, lorsque j'ai fait ma tournée, ce dont je me suis rendu compte, dans bien des cas, c'est que j'ai reçu un certain nombre de demandes. Une des demandes très importantes qui m'a été faite par l'ensemble des élus, c'est: est-ce qu'on peut, si... Je pense que tout le monde se rendait compte que, dans le contexte des finances publiques au Québec, dans le contexte où près de 5 000 000 de nos concitoyens paient déjà 100 % de leur facture de police, le congé que plusieurs contribuables avaient reçu dans les petites municipalités en matière de coûts de police tirait à sa fin. Mais, en même temps, tout le monde se rendait bien compte, donc, que l'effort qui était demandé, à 50 % des coûts, était un effort exigeant, puisque jusqu'à maintenant ces municipalités payaient environ 35 % des coûts de police, et on m'a demandé si le gouvernement ne pouvait pas retourner le produit des amendes perçues par la Sûreté du Québec lorsqu'elle fournit les services policiers. Lorsqu'elle perçoit des amendes dans une municipalité, de retourner le produit de ces amendes aux municipalités concernées, donc les amendes afférentes aux infractions constatées sur leur territoire. Et, M. le Président, le gouvernement a accepté cette requête des municipalités. Je tiens à le préciser, parce qu'on donne toutes sortes de chiffres par les temps qui courent concernant le coût de la démarche gouvernementale. On sait que les municipalités paient actuellement, globalement, au Québec, pour l'utilisation des services de la Sûreté du Québec, environ 66 000 000 $. Le gouvernement a annoncé qu'il porterait ce coût, cette facture à environ 100 000 000 $, ce qui est la moitié de la facture. Le gouvernement va continuer à payer 50 % de la facture, mais on passe de 66 000 000 $ à 100 000 000 $, mais, en même temps, on retourne aux municipalités, M. le Président, le produit des amendes. Pour la première année, c'est des sommes qui ressemblent à tout près de 2 000 000 $, mais de l'avis même de la présidente de l'UMRCQ, M. le Président, ces sommes pouvaient aller à plusieurs dizaines de millions. Quant à nous, de façon plus réaliste, plus modeste, on prévoit que ces sommes, ces retours d'amendes dépasseront les 10 000 000 $.

Donc, si on fait le compte comme il faut, M. le Président, 66 000 000 $ à 100 000 000 $, il y a environ 34 000 000 $. Si on soustrait de ça quand même une dizaine ou une douzaine de millions qui vont retourner aux municipalités, au plan des amendes, on se rend compte que, au total, ce que le gouvernement transfère, bien sûr, est important, mais qu'on est loin de certains chiffres qui sont présentés.

Il est vrai toutefois – puis je pense qu'on doit le dire, qu'on doit reconnaître ça à la vérité – que cet exercice, il est réel au plan macroéconomique; il est réel sur l'ensemble du territoire du Québec. Il ne nous est pas possible de faire cette démarche municipalité par municipalité. Donc, certaines municipalités auront donc des augmentations moindres, d'autres seront plus grandes. Mais, encore une fois, dans chaque cas, il s'agit pour les contribuables d'une augmentation mais d'une augmentation que le gouvernement a voulu rendre plus raisonnable, M. le Président.

Et je rappelle que, si rien n'avait été indexé depuis quelques années, le projet qui est sur la table, quant à lui, contrairement à ce qui avait été fait précédemment par l'ancien gouvernement, c'est un projet de loi qui procède d'une vision de l'organisation policière, c'est un projet de loi qui donne aux élus des responsabilités précises, ce que ne faisait pas l'ancien projet de loi.

Certains diront: Oui, mais c'est peut-être encore trop. Je voudrais juste rappeler que l'expérience ailleurs au Canada, lorsque la Gendarmerie royale du Canada... ou encore lorsqu'en Ontario la Police provinciale de l'Ontario remplit ce type d'obligation pour les municipalités, les tarifs chargés à ces municipalités varient souvent entre 70 % et même 90 % des coûts réels. Alors, on en est très loin, M. le Président, puisque, au total, la facture sera d'à peine 50 % des coûts réels. Et si on déduit de cette facture les revenus qui seront transférés aux municipalités pour les produits d'amendes, on est encore en dessous de ces 50 %, M. le Président.

(11 h 50)

On a regardé également les modes de partage de ces coûts entre les municipalités. On a regardé diverses possibilités concernant les formules de partage de ces coûts et, après une longue réflexion, nous en sommes arrivés à la conclusion qu'il valait mieux maintenir les règles du jeu actuelles, règles du jeu actuelles qui sont fondées à la fois sur la richesse foncière des municipalités, donc sur la capacité collective qu'ont les contribuables d'une municipalité de payer, de se donner certains services, de même que sur le volume de la population, donc sur les besoins en matière de services policiers. Mais nous avons évidemment, bien sûr, modifié les quotas, M. le Président. La formule qui était avant ça de 0,10 $ à 0,35 $ du 100 $ d'évaluation, nous l'avons portée à 0,18 $, mais nous avons maintenu à 0,35 $ le plafond parce que, encore une fois, il nous semble que cela correspond à la réalité et à la capacité qu'ont les municipalités de faire face à leurs responsabilités. Également, toujours dans ce souci de tenter de rétablir le plus possible un certain équilibre entre les contribuables, cela nous semblait aller dans cet esprit.

M. le Président, il faut aussi rappeler que, à toutes fins pratiques, toutes les municipalités du Québec, sauf peut-être les très grandes, puis même les très grandes, toutes les municipalités du Québec vont continuer de recevoir les services spécialisés de la Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec va continuer à fournir gratuitement l'ensemble des services qu'elle fournit actuellement en matière soit d'enquête, soit d'intervention d'urgence, soit d'escouade spécialisée, et ce, M. le Président, partout sur le territoire. Cette orientation est maintenue.

J'ai indiqué que, dans le livre des crédits 1996-1997, pour réaliser au plan administratif, financier l'ensemble de cette réforme, le gouvernement a annoncé la mise en place d'un mode de financement mixte pour les services de base de la Sûreté du Québec. Ce mode de financement, donc, comprend à la fois des crédits et comprend, d'autre part, dorénavant des revenus en provenance d'un fonds spécial, fonds dédié où seront versées les contributions des municipalités. Elles sont identifiées à la hauteur de 25 000 000 $ pour l'exercice actuel dans les crédits. Alors, on verra un petit peu comment tout ça se passe.

M. le Président, je vois le temps qui passe. Je souhaite terminer avant la clôture, l'ajournement. Alors, permettez-moi d'aborder certains autres aspects du projet de loi, de les évoquer rapidement. Le projet de loi n° 77, on le sait, au-delà de toute cette question de la réforme de l'organisation de la carte policière, de la stabilisation de la carte policière, vise aussi à répondre et à corriger un certain nombre d'autres aspects de la vie policière au Québec, à répondre à certaines demandes qui nous ont été formulées soit par des municipalités, soit par les associations de policiers au Québec.

Or, parmi ces questions, il y a d'abord un certain nombre de questions reliées notamment à la juridiction des corps policiers sur les autoroutes. Rien n'est prévu actuellement dans la loi, M. le Président, et, à l'évidence, on assiste actuellement à certains chevauchements, à certaines discussions à la fois inutiles, coûteuses entre les divers corps de police. Les modifications qui ont été proposées au Code de la sécurité routière, tout en reconnaissant, là, l'exclusivité bien réelle, non contestée vont demeurer assez souples pour permettre qu'il y ait des assistances éventuelles entre corps de police ou encore parfois même certaines exceptions. Alors donc, le projet de loi prévoit, au niveau des modifications qui seront apportées au Code de la sécurité routière, confier à la Sûreté du Québec, en principe, la juridiction sur l'ensemble des autoroutes du Québec. Il y a un certain nombre de bonnes raisons à cela. Mais, lorsque les circonstances paraîtront évidentes, elles permettront au ministre d'accepter certaines exceptions.

En second lieu, M. le Président, il y a une demande depuis plusieurs années de plusieurs groupes de policiers, notamment de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal, plusieurs revendications quant au caractère un peu désuet, à leur avis, de l'article 6 de la Loi de police qui, selon eux, constitue une restriction déraisonnable à la liberté des policiers de participer au processus politique et démocratique.

La loi actuelle interdit en effet, sous peine de destitution – donc, c'est une peine grave – aux membres de la Sûreté du Québec de se porter candidats à une élection fédérale, provinciale, municipale ou scolaire ou de se livrer à quelque activité partisane en faveur d'un candidat ou d'un parti politique. Et cette disposition s'applique également à tout policier municipal qui, toutefois, peut se porter candidat ou se livrer à certaines activités partisanes lors d'une élection municipale ou scolaire, mais à la condition que ça se passe hors des limites de tout district judiciaire dont fait partie la municipalité qui l'emploie.

Or, on le sait, nos sociétés évoluent, nos droits évoluent et, dans une société qui garantit et qui cherche et qui veut garantir l'exercice des droits démocratiques de tous les citoyens sans exception, il y a lieu, à notre avis, de modifier la loi et de permettre aux policiers, comme ça se passe ailleurs dans d'autres provinces canadiennes, comme ça se passe dans bien d'autres pays, donc de permettre aux policiers qui le désirent de se livrer à des activités politiques, de briguer des charges électives, tout en encadrant toutefois, M. le Président, l'exercice de ce droit afin d'éviter toute possibilité de conflit d'intérêts, afin de garantir la transparence de l'exercice des activités de police au Québec.

Alors, c'est ainsi que, sauf pour certains officiers de la Sûreté du Québec, sauf également pour les directeurs des corps de police, un policier pourra, par exemple, être candidat à une élection fédérale ou provinciale mais à condition d'être en congé sans solde, de telle sorte qu'il n'y ait pas de concurrence d'activités entre ses activités de policier et ses activités électorales. Il pourra également se présenter, M. le Président, à une élection municipale ou scolaire mais, encore une fois, à la condition que ce soit à l'extérieur du territoire où il exerce ses fonctions, de telle sorte qu'il ne se retrouve pas en situation où il interpelle des concitoyens alors qu'il est en même temps dans un processus électoral.

M. le Président, encore une fois, je tiens à le dire pour ceux et celles qui trouveraient cette ouverture à l'exercice des droits démocratiques un peu inattendue, que cela se réalise actuellement un peu partout au Canada, que cela se réalise également ailleurs, aux États-Unis, cela se réalise en France, cela se réalise dans la plupart... dans beaucoup de pays, peut-être pas dans tous les pays mais dans beaucoup de pays dont l'organisation sociale nous ressemble, M. le Président.

En troisième lieu, M. le Président, l'article 2.1 de la Loi de police qui est actuellement en vigueur prévoit que le ministre de la Sécurité publique est, lorsqu'il s'agit de déterminer la responsabilité civile à l'égard d'un tiers, donc réputé être l'employeur d'un policier municipal lorsque celui-ci agit à titre d'agent de la paix dans un territoire qui n'est pas soumis à la juridiction du corps de police de la municipalité qui l'emploie. On comprend que l'article vise à protéger les tiers de gestes fautifs qui pourraient être posés par des policiers. Il y a eu un peu de jurisprudence dans certaines causes récemment, et cette jurisprudence, toutefois, confirme que la municipalité, dans son rôle d'employeur, demeure responsable de son policier, qu'il soit sur son territoire ou non. Il nous a semblé, par conséquent, qu'il y aurait lieu de modifier l'article pour que la responsabilité du ministère et du ministre soit reconnue dans les seuls cas où un policier municipal agit à la demande expresse du ministre, M. le Président. On sait que des corps policiers des municipalités peuvent se prêter assistance. On sait qu'un policier, parfois, peut intervenir, sa fonction d'agent de la paix le suit en quelque sorte partout avec lui et il doit intervenir, mais, à ce moment-là, il le fait comme policier, et son employeur, c'est la municipalité qui est celle où il pratique ses activités.

(12 heures)

Il y a également d'autres modifications qui sont apparues utiles, nécessaires, qui n'ont pas toutes la même portée mais qui, quand même, bonifient l'exercice des activités policières. Par exemple, M. le Président, actuellement, l'article 374 de la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik prévoit que les policiers du corps policier régional de Kativik doivent prêter leur serment d'allégeance et de discrétion devant le président de l'Administration régionale Kativik. Alors, pour qui connaît un peu l'immensité du territoire, tout de suite on se rend compte que cette disposition soulève quelques difficultés pratiques de réalisation, qu'elle oblige des déplacements extrêmement coûteux.

Donc, on propose une modification pour que les policiers de ce corps policier du Grand Nord du Québec prêtent leur serment devant le directeur de police, comme c'est le cas ailleurs, d'ailleurs, pour les autres policiers municipaux. Et je pense qu'il s'agit d'une amélioration de la situation et qui vise à rendre partout sur le territoire du Québec des pratiques similaires, lorsque c'est possible.

Dernier point, M. le Président, qui est abordé dans ce projet de loi, qui est une dimension importante de ce projet de loi, et ça concerne le financement actuel de l'Institut de police du Québec, donc le financement de la formation de base des policiers. Alors, on le sait, la première partie du projet de loi, tout en stabilisant la carte policière au Québec, vise à rétablir un meilleur partage des responsabilités financières entre l'État et les collectivités locales concernant la desserte policière au Québec. À notre avis, ce principe peut et doit également s'appliquer dans le cas de la formation de base des policiers.

Or, jusqu'à maintenant, les coûts de cette formation ont été assumés à toutes fins pratiques entièrement par le gouvernement du Québec. Mais, en 1990, le gouvernement précédent a conféré à l'Institut de police du Québec le statut d'une corporation autonome, et le gouvernement avait signifié clairement son intention à l'effet que le financement des activités de l'Institut soit assumé de plus en plus par les utilisateurs. Or, ces utilisateurs sont de deux ordres: ce sont, bien sûr, les aspirants policiers, mais ce sont aussi, bien sûr, les corps policiers, les administrations qui puisent dans le bassin des personnes formées à l'Institut pour engager les futurs policiers.

Or, on sait qu'avec l'augmentation des coûts de scolarité... On sait que les étudiants défraient actuellement... On sait que la presque totalité des coûts d'hébergement, des frais connexes... et que ces coûts-là représentent à peu près 30 % des dépenses de l'Institut. Mais on sait également que la scolarité est à toutes fins pratiques dispensée gratuitement. Or, il y a eu quand même des changements au Québec en matière de formation policière. Le ministère de l'Éducation a apporté des modifications à son programme au niveau des cégeps, le programme de technique policière qui est dispensé. Alors, actuellement le programme à l'Institut de police n'est plus dans ce qu'on appelle le cursus du D.E.C. comme tel, mais il vit davantage comme une formation additionnelle, en quelque sorte, comme une formation qui est quelque part entre un stage et la formation de base.

Alors, M. le Président, puisque les frais qui sont déjà chargés – les frais d'hébergement – aux aspirants policiers sont de 2 882 $, qu'il y aura également, donc, des frais de 1 000 $ supplémentaires qui seront chargés à compter de janvier, ce qui fait quand même 3 800 $, le gouvernement a pensé que l'ensemble de ces frais correspondaient pour l'essentiel à un niveau de contribution, par exemple, qui est demandé aux étudiants universitaires, et il nous a semblé impossible d'aller au-delà à ce moment-ci. Or, pour autant, les coûts de formation à l'Institut de police dépassent largement tout ça. Ce sont des sommes beaucoup plus importantes. Alors, on parle même de tout proche de 13 500 $ pour un stage de 13 semaines.

Alors donc, on pense que dans le contexte actuel il faut aussi que les parties patronales – toutes les parties patronales – assument leur part du financement de l'Institut. Et cette part a été fixée dans le projet de loi à un maximum de 1 % de la masse salariale du personnel policier de chacune des grandes organisations, ce qui me permet de dire tout de suite que conséquemment le gouvernement ne se retirera pas du financement de l'Institut de police. Le gouvernement, comme partie patronale, comme bailleur de fonds de la Sûreté du Québec, va continuer d'assumer à toutes fins pratiques, puisque c'est à peu près la proportion de policiers membres de la Sûreté sur l'ensemble des policiers du Québec, le tiers des coûts de l'Institut de police. Mais effectivement le gouvernement considère que les deux autres tiers doivent être partagés entre les autres employeurs, les employeurs municipaux, qui bénéficient, dans l'embauche des policiers, de la formation que ceux-ci reçoivent à l'Institut de police du Québec.

En même temps, puis je tiens à le dire parce qu'il y a des débats là-dessus, le gouvernement est convaincu que la création de l'Institut de police du Québec, l'obligation faite à tout aspirant policier d'avoir une formation de base uniforme peu importe où on a l'intention de travailler sur le territoire du Québec a constitué historiquement un acquis sur lequel le gouvernement n'a pas l'intention de revenir en arrière. Ça ne veut pas dire que certaines modifications ne sont pas possibles, que certaines transformations, dans cette formation, ne sont pas possibles. Je pense qu'il y a de la place pour de l'amélioration.

Et, justement en ramenant l'essentiel des coûts comme étant la première responsabilité des divers employeurs, des coûts de formation de base, en modifiant le conseil d'administration de l'Institut de police de telle sorte que ces employeurs vont se retrouver autour de la table pour décider des orientations, je pense que toutes les représentations qui peuvent être faites, notamment par le service de police de la Communauté urbaine de Montréal – représentations qui parfois peuvent être en bonne partie fondées, je le reconnais – pourront pleinement s'exercer au sein du conseil d'administration de l'Institut. Les gens seront justement autour de la table, pourront en quelque sorte décider des orientations, puisqu'ils en seront également, pour une part, les bailleurs de fonds. Et, ce faisant, je crois qu'on allie à la fois la préservation des acquis... et en même temps on donne aux partenaires un plus grand contrôle sur un outil avec lequel ils ont à composer.

Alors, je conclurais en disant ceci. Le projet de loi n° 77 n'épuise pas, loin de là, tout ce qu'il faut faire en matière de réorganisation policière au Québec, mais il permet de faire ce qui aurait dû être fait, à mon avis, depuis longtemps. Il permet de stabiliser la carte de l'organisation policière au Québec; c'est extrêmement important. Il confirme les responsabilités des élus locaux en matière de services policiers. Il tient compte de nos réalités historiques, de ce qu'a été et de ce qu'est l'organisation policière au Québec. Il redonne aux élus locaux une prise sur les services qui sont rendus par la Sûreté du Québec et il garantit effectivement, et c'est également l'intention du gouvernement, le maintien sur l'ensemble du territoire des activités de la Sûreté et donc des services spécialisés que la Sûreté du Québec doit rendre à l'ensemble des municipalités.

Il rétablit entre les divers contribuables plus d'équilibre dans les coûts qu'ils doivent assumer en matière de services policiers. Parce que, si certains trouvent aujourd'hui qu'il y a une hausse significative de leur compte de taxes, il faut rappeler, si on veut être correct et juste, que le congé de contribution qu'ils ont eu dans le passé, c'est parce que d'autres ont payé à leur place. Et, là-dessus, les chiffres sont clairs, sont éloquents. Une municipalité qui, en vertu de la loi, est tenue d'avoir un corps policier, ça coûte à peu près 125 $ per capita pour les contribuables du Québec. Près de 5 000 000 des contribuables du Québec sont dans cette situation. Une municipalité actuellement desservie par la Sûreté du Québec, ça coûte à peu près – un petit peu moins – autour de 40 $ par contribuable. Avec la proposition, ça va ne coûter encore que 50 % des coûts, autour de 65 $, 70 $ par contribuable. Évidemment, ce n'est pas une situation uniforme partout, dépendamment de la population et de l'assiette foncière, mais on est encore loin du coût assumé par l'ensemble des contribuables en matière de services policiers.

(12 h 10)

Donc et surtout, puis je terminerais là-dessus, une réorganisation de la carte policière qui, je le pense, je le souhaite, va aller dans l'esprit de ce qui se fait ailleurs, d'une police plus communautaire, plus près des vrais besoins parce que plus en connexion avec les élus locaux à travers les comités de sécurité publique, donc moins centralisée, comme l'ont été jusqu'à maintenant les services offerts par la Sûreté du Québec au niveau de la gendarmerie, nettement proche des besoins des citoyens, donc une meilleure police, M. le Président, mais tout ça sans globalement, au Québec, augmenter les coûts de nos services policiers.

C'est une réforme, M. le Président, qui aurait dû être faite il y a déjà plusieurs années. Et, si le gouvernement d'avant avait eu le courage de ne pas juste envoyer la facture mais d'avoir un peu de vision, de voir un peu venir les choses, il aurait fait plus que de transférer une facture, il aurait proposé un modèle d'organisation pour la police au Québec, et c'est ce que le projet de loi fait.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Je cède maintenant la parole au député de Frontenac et leader adjoint de l'opposition. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, nous abordons, ce matin – et la première intervention est terminée, c'est celle du ministre – l'étude du principe du projet de loi n° 77, un projet de loi d'une extrême importance, on le sait, on a vu les réactions au niveau de tous les groupes qui sont interpellés par ce projet de loi. Et je dirais à toutes fins pratiques que, partout au Québec, qu'on soit dans des régions urbaines, qu'on soit dans des régions rurales, petites municipalités comme moyennes municipalités comme grosses municipalités, tous les Québécois et les Québécoises sont ou seront touchés par l'intention du gouvernement manifestée par son projet de loi n° 77, projet de loi qui a été déposé à la toute dernière minute.

Et, moi, je me méfie, je me suis toujours méfié... Puis on en parlait hier avec le projet de loi n° 79 du ministre du Travail, je faisais ces commentaires-là à 2 h 15, ce matin – parce que, contrairement à ce qu'on nous avait dit, on continue à siéger la nuit, avec le gouvernement de M. le député de Jonquière – alors je me méfie d'un projet de loi déposé à la toute dernière minute. C'est le cas du projet de loi n° 77, qui a été déposé la dernière journée, c'est-à-dire le 14 novembre.

Essentiellement, M. le Président, c'est un projet de loi où le ministre de la Sécurité publique n'est que le faire-valoir. Il est, lui, le prolongement du ministre des Finances. Je vais essayer, très rapidement, de résumer ce qu'il y a dans le projet de loi et, après ça, bien, je tenterai de le démontrer puis d'en faire la preuve, avec ma propre analyse et surtout le témoignage de plein de gens qui se sont prononcés, à date, sur l'intention du ministre de la Sécurité publique, l'intention avouée mais surtout ce qui est caché dans le projet de loi n° 77, et aussi évidemment en citant des experts qui ont analysé, à date, le cheminement du gouvernement dans ce projet de loi là.

M. le Président, le ministre, je l'entendais, sauf erreur, dimanche, à une émission de télévision qui s'appelle Point de presse . Il a fait à deux ou trois reprises un lapsus qui est extrêmement révélateur: il a parlé non pas de la réorganisation policière, mais de la réorganisation de la Sûreté du Québec. Voyez-vous? Alors, c'est son subconscient qui s'adressait à ceux et celles qui l'écoutaient, parce que, effectivement... Et tout de suite je veux que ce soit très clair. Les propos que j'ai l'intention de tenir en regard de ce qu'on veut faire avec la Sûreté du Québec ne doivent d'aucune façon être interprétés comme remettant en question les compétences à la Sûreté du Québec. Sauf que je voudrais que le ministre soit plus limpide et plus clair. Alors, lorsqu'il a dit: Ce projet de loi n° 77, essentiellement, c'est la réorganisation de la Sûreté du Québec, il avait raison, parce que c'est ça, le projet de loi, essentiellement.

Ce que le ministre veut faire avec, évidemment, la complicité du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor et du premier ministre, c'est d'imposer, autant que possible, autant que faire se peut, la Sûreté du Québec partout au Québec. C'est ça qu'il y a là-dedans, M. le Président. La démarche du gouvernement, c'est de donner du territoire additionnel à la Sûreté du Québec.

Et là où le ministre fait fausse route, dans un premier temps... Lorsqu'il impose la Sûreté du Québec à des municipalités qui aimeraient mieux fonctionner avec leur propre corps de police, il fait deux erreurs. Dans un premier temps – j'en parlerai tout à l'heure plus longuement, lorsque j'analyserai les témoignages que nous avons eus des dirigeants actuels et passés de la Sûreté du Québec, la Fédération des policiers de la Sûreté du Québec – je veux tout de suite indiquer que le ministre veut imposer sa Sûreté du Québec et en même temps mettre en tutelle la gestion de l'organisation policière à l'intérieur des petites municipalités de zéro à 5 000 habitants. C'est ça que le ministre fait.

D'ailleurs, les notes explicatives de son projet de loi sont très explicites dans ce sens-là: les municipalités pourront faire plein de choses, sauf qu'elles devront se faire autoriser par le ministre. L'autorisation du ministre, c'est le pouvoir arbitraire du ministre. Alors, c'est la Sûreté du Québec à moins que, moi, comme ministre de la Sécurité publique, je sois d'avis contraire. Alors, lorsqu'on lit bien ce que veulent dire les mots, ça sera la Sûreté du Québec.

Ce que je reproche à ce projet de loi et au ministre, c'est de ne pas le dire, de ne pas le dire. Et il y a eu une réaction extrêmement vive à cause des faux-fuyants du ministre, des demi-vérités, et ça s'est dit en commission parlementaire jeudi passé. Puis le ministre, M. le Président, au cours de la tournée dont il a parlé tout à l'heure, s'est fait apostropher pas à peu près. Pourquoi? Parce qu'il ne dit pas la vérité, ou des demi-vérités ou des demi-faussetés. Puis ça, les élus municipaux ne le prennent pas puis avec raison. Avec raison, M. le Président.

Donc, imposer la Sûreté du Québec, pourquoi? Pour que les citoyens du Québec, à l'intérieur des petites municipalités, financent la Sûreté du Québec pour un montant additionnel de 40 000 000 $, contrairement à ce que disait le ministre. Dans le cahier des crédits, au mois de mai dernier, on parlait de 25 000 000 $, après ça 30 000 000 $. Maintenant, c'est 40 000 000 $. C'est ça que le ministre se fait dire partout aussitôt qu'il met le nez à l'extérieur puis qu'il se retrouve en territoire occupé par des élus de petites municipalités. On lui dit: M. le ministre, vous nous trompez. Volontairement ou pas, on verra; ça, c'est une autre histoire. Vous nous trompez.

Qu'est-ce qu'il y a d'autre dans le projet de loi? Le financement de l'Institut de police pour un montant de 8 000 000 $ et – le ministre en a parlé tout à l'heure – la possibilité de permettre à des policiers d'occuper des postes d'élus. Mais, en même temps, M. le Président, on ne permet pas à ces mêmes élus, sauf s'ils sont en congé sans solde, de faire de l'activité politique. Ces mesures ont été qualifiées d'extrêmement timides, de confuses également, et le Directeur général des élections ne nous a pas du tout éclairés, quant à moi. Et j'ai eu l'occasion – le ministre s'en souviendra – de tout de suite identifier un problème majeur quant à moi, c'est la déontologie policière. On ne peut pas faire l'un sans modifier l'autre, et il m'apparaît que c'est impossible. Maintenant, on verra en commission parlementaire, parce que j'imagine qu'on ne réussira pas à faire fléchir le gouvernement au niveau du principe. On devrait se rendre en commission parlementaire au niveau, M. le Président, de la suggestion de permettre à des policiers d'occuper des postes d'élus. L'opposition n'indique pas être en désaccord avec cette intention-là, mais il m'apparaît techniquement que ça peut causer problème.

Mes remarques préliminaires sur le projet de loi, sur le principe, M. le Président – parce qu'on peut faire une espèce de tour d'horizon rapide – se terminent en disant: Au-delà de ce qu'il y a dans le projet de loi, l'attitude du gouvernement, l'attitude du ministre, elle est extrêmement reprochable. Pas de consultations, sinon une journée de consultations qu'on a tenue jeudi dernier.

Et je comprends pourquoi le ministre les refusait, ces consultations-là. Il s'est fait sonner les cloches pas à peu près en commission parlementaire, en présence de ses collègues le député de Fabre, le député de Gaspé, la députée de Deux-Montagnes, le député de Drummond, le député de Nicolet, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, le député de Bonaventure qui présidait la commission. Alors, ce sont des députés, parce qu'ils ont assisté à ces commissions-là, quant à moi mieux informés que leurs collègues ministériels. Et je suis convaincu que les députés dont je viens de parler sont, parce que plus informés, probablement pas mal plus en désaccord avec l'intention du gouvernement. Mais la solidarité va les obliger à suivre, quant à moi, un peu bêtement le gouvernement, avec la responsabilité de répondre en temps et lieu à leurs concitoyens et à leurs concitoyennes, dans leurs comtés respectifs.

(12 h 20)

M. le Président, l'organisation policière sur le territoire du Québec, le ministre en a parlé très rapidement, puis ça, je pense qu'on s'entend là-dessus. Il y a 150 corps de police municipaux au Québec, à un ou deux près. À la Communauté urbaine de Montréal, c'est 150 corps de police municipaux avec 4 700 et quelques policiers. La police de la Communauté urbaine de Montréal, c'est énorme: 4 100 et quelques policiers.

La Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec, puis ça, je ne comprends pas que le ministre, encore ce matin, parce qu'il sait qu'il y a un problème au niveau des effectifs à la Sûreté du Québec... Il sait qu'il y a une contradiction entre sa volonté exprimée dans son projet de loi n° 77 et la capacité de la Sûreté du Québec de remplir cette mission additionnelle qu'il veut lui donner, en ce qu'il veut lui confier du territoire additionnel. Le ministre sait très bien que, dans l'état actuel des effectifs disponibles à la Sûreté du Québec, c'est une impossibilité, sinon au risque de protéger de façon inadéquate les Québécois qui présentement sont protégés par la Sûreté du Québec et la clientèle à venir.

Quand le ministre dit qu'il y a 4 000 policiers à la Sûreté du Québec, c'est faux, M. le Président. C'est faux, et il le sait. Puis ça, je ne comprends pas qu'il lance ce chiffre-là au vu et au su de tout le monde, sachant que c'est faux. Parce qu'il a été, il le sait, contredit jeudi dernier par les représentants de la fédération des policiers provinciaux du Québec. Il y a, au moment où on se parle, 3 750 policiers à la Sûreté du Québec, pas 4 000. Pourquoi parler de 4 000 alors que c'est 3 750 tout juste? Je ne comprends pas. Il y a donc plus ou moins 13 000 policiers au Québec: les verts, la Sûreté du Québec; les policiers bleus, la sûreté municipale.

La protection policière coûte environ, non compris la GRC, 1 200 000 000 $, plus ou moins. C'est beaucoup d'argent. On s'entend là-dessus, il faut que les Québécois et les Québécoises qui paient pour cette protection policière, peu importe de quelle façon, reçoivent la protection maximale. Et, lorsqu'on aborde une question aussi fondamentale que la sécurité publique, que la protection des citoyens et des citoyennes, on ne peut pas jouer sur les mots, faire croire aux gens des choses qui ne se produiront pas, interpréter les faits. Je trouve ça dangereux puis irresponsable jusqu'à un certain point.

La police au Québec, pour les municipalités où on retrouve 5 000 habitants et plus, bien, c'est son corps de police. C'est encore ça aujourd'hui. Le projet de loi n° 77 ne change pas cet état de fait. De zéro à 5 000, ça sera la Sûreté du Québec, sauf – parce que je ne crois pas que ce soit modifié, hein... Il y a 35 municipalités à peu près au Québec aujourd'hui qui ont des corps de police alors qu'on se retrouve dans des territoires où il y a moins de 5 000 habitants.

On sait que cette protection policière de la Sûreté du Québec dans les petites agglomérations coûte 0,10 $ à chaque citoyen du Québec. Pour bien saisir la conséquence du projet de loi n° 77, il faut partir de la situation actuelle. Ça coûte combien à un contribuable, à un citoyen dans une petite municipalité? Il y en a 1 200 – 1 100, 1 200 – à peu près au Québec. Ça coûte combien à un citoyen, la protection de la Sûreté du Québec, au moment où on se parle? Ça coûte 0,10 $ du 100 $. Ça veut dire quoi, 0,10 $ du 100 $? Ça veut dire que, pour un propriétaire foncier, un propriétaire d'une résidence évaluée à 100 000 $, on le sait, ça coûte 100 $; hein, 0,10 $ du 100 $: 100 $.

Quelle est la conséquence de la proposition du gouvernement? À quelles questions les députés ministériels seront-ils confrontés lorsqu'on adoptera, si c'est le cas, le projet de loi n° 77? Le député de Drummond va se faire demander: Ça veut dire, quoi, ça, M. le député de Drummond, 0,18 $ du 100 $ au lieu de 0,10 $ du 100 $? Si je calcule bien, M. le député de Drummond – c'est bien le cas, j'ai une propriété de 100 000 $ – ça me coûtait 100 $; ça va me coûter 180 $? Le député de Drummond va dire oui. Il va être obligé de dire oui. Et là il va être obligé d'expliquer en plus qu'il doit, ce citoyen de son comté, supporter 1 % de la masse salariale du corps de police municipal pour l'Institut de police de Nicolet. Alors, si le corps de police de Drummondville coûte 1 000 000 $ d'opération, ça coûtera 10 000 $: 1 %, 10 000 $. Ce 10 000 $ là, c'est évidemment les citoyens de cette même municipalité qui vont l'absorber. Bon.

Essentiellement, la conséquence pour le citoyen, 0,10 $ à 0,18 $ du 100 $... Le ministre, on s'entend là-dessus, il parle d'un plafond de 0,35 $ du 100 $. Ça, c'est un plafond. Ce n'est pas de ça qu'il faut parler. C'est du 0,18 $ du 100 $ qu'il faut parler. C'est ça que ça coûtera dans les faits, là, dans la vraie vie. C'est presque du simple au double. C'est ça que ça va coûter, la facture additionnelle de 40 000 000 $ répartie sur l'ensemble du territoire du Québec pour les municipalités qui ont la protection de la Sûreté du Québec.

Il y a aussi, M. le Président, en plus de la Sûreté du Québec, des corps de police municipaux. Il y a des regroupements de corps de police municipaux. Ici, dans la région, on peut donner comme exemples les municipalités de Saint-Émile, de Loretteville, de Lac-Etchemin puis de Lac-Beauport qui se sont regroupées. Il y a d'ailleurs pas mal de projets de regroupement de polices municipales qui sont, au moment où on se parle, en marche. Il y en a un petit peu partout. Il y en a dans la région de l'Estrie, il y en a dans le Bas-Saint-Laurent, il y en a dans mon propre comté. Le ministre s'est donné le pouvoir... Parce qu'il y a une date butoir qui est le 31 décembre. Il faudra avoir soumis au ministre avant le 31 décembre ces regroupements. Mais le ministre se donne le droit de refuser ou d'accepter. C'est ça, la mise en tutelle de l'organisation policière.

Si, par hypothèse, une petite municipalité de mon comté veut se regrouper avec le corps de police de Thetford Mines et de Black Lake, il faudra que le ministre donne son accord. C'est ça, la mise en tutelle. Alors, il va être pris dans la situation de conflit d'intérêts suivante. Lui, il est le ministre qui paie la Sûreté du Québec. S'il refuse à la petite municipalité de se regrouper... Prenons la municipalité de Robertsonville dans mon comté. Le ministre va être placé devant la situation suivante: Si je dis oui à Robertsonville de se regrouper avec le corps de police Thetford–Black Lake, je perds, moi, le 0,18 $ du 100 $ pour ma Sûreté du Québec. Alors, il va être placé dans la situation de conflit d'intérêts. S'il dit non, c'est la Sûreté du Québec, et, pour lui, bien, c'est un gain net.

C'est ça, la situation qui est dénoncée, M. le Président, par l'ensemble des élus municipaux. Et, que le ministre le veuille ou pas, c'est dans cette situation-là qu'il sera placé compte tenu du pouvoir qu'il se donne, lequel est assez explicite. Ça paraît dans ses notes explicatives: Sauf si le ministre de la Sécurité publique l'autorise, on ne pourra recourir à un autre corps de police. L'autorisation du ministre, c'est le pouvoir arbitraire. Il va vous répondre ou il va me répondre, en commission parlementaire: J'aurai à décider si on respecte les services de base, dont on ne connaît ni les tenants ni les aboutissants, parce que c'est prévu dans nos règlements. C'est, à date, extrêmement confus et c'est la marge de manoeuvre que veut se garder le ministre. La confusion va lui permettre d'exercer son pouvoir de refuser les regroupements sans qu'on puisse le contester. C'est strictement, à toutes fins pratiques, un pouvoir politique que le ministre va exercer.

(12 h 30)

M. le Président, la loi actuelle, la situation actuelle a au moins le mérite de respecter l'autonomie des municipalités. Puis c'est ça qui est reproché par les élus municipaux au ministre de la Sécurité publique dans sa démarche inscrite dans le projet de loi n° 77: on veut donner l'illusion aux élus municipaux responsables des petites municipalités, par le projet de loi n° 77, qu'ils auront le pouvoir d'organiser leur propre police, ou encore on veut leur donner ou leur faire croire qu'ils pourront requérir les services de la police d'une petite municipalité voisine, ou on veut leur faire croire qu'ils pourront se regrouper. C'est ce que dit le ministre dans son projet de loi n° 77. Pourquoi je parle d'illusion? Pourquoi je dis qu'on tente de faire croire? C'est parce qu'ultimement le ministre se garde le droit, sans devoir référer à quelque autre arbitre que lui-même, de dire oui ou de dire non, parce que le ministre est placé, je l'ai dit tout à l'heure – c'est important que ça soit bien saisi, ça – dans une situation de conflit d'intérêts. Puis si, demain matin, un autre de ses collègues – ou de notre côté – se retrouvait dans sa situation, ça serait exactement le même problème. Il est placé dans la situation conflictuelle suivante: s'il refuse, c'est payant pour lui, c'est de l'argent pour sa Sûreté du Québec. Encore une fois, ça ne remet pas en question la compétence de la Sûreté du Québec. Les commentaires que je fais n'ont rien à voir avec la compétence de la Sûreté du Québec.

Il y a tout un débat à faire sur la qualité de protection dans les petites municipalités, isolées ou regroupées. La qualité de protection est-elle meilleure si elle vient d'un policier de la Sûreté du Québec ou d'un policier municipal? Il y a tout un débat à faire là-dessus, M. le Président, tout un débat, et le débat n'est pas fait. Moi, j'ai à évaluer, à dénoncer les volets cachés du projet de loi n° 77 et à bien identifier la volonté du gouvernement. Quant au reste, le débat, on le fera peut-être, si le ministre consent, lorsqu'on sera en commission parlementaire à recevoir des groupes.

Et là on lui a – l'opposition – arraché une consultation de sept, huit groupes, jeudi dernier. Je comprends que le ministre ait refusé, il savait ce qu'on allait lui dire. Et, du côté de l'opposition, on ne s'était pas trompé, il fallait la faire, cette consultation-là; elle a été extrêmement utile. J'en parlerai tout à l'heure, M. le Président. Ce qu'on a entendu en commission jeudi dernier, ça n'a fait que confirmer ce qu'on craignait, ce qu'on avait lu dans les médias, ce qu'on avait entendu dans les médias électroniques, ce qu'on avait lu dans des journaux, et régionaux et nationaux, que le projet de loi n° 77 faisait consensus, à savoir que tous les groupes interpellés sont contre, d'une façon ou de l'autre, pour une raison ou pour une autre.

M. le Président, l'impact économique du projet de loi n° 77, j'en ai parlé tout à l'heure avec un exemple très concret: 40 000 000 $ d'augmentation pour payer la Sûreté du Québec, c'est 80 % de hausse. Ce n'est pas ce que le ministre avait dit en tournée, et il se l'est fait reprocher très sévèrement par Mme Simard de l'UMRCQ. Essentiellement, ce que Mme Simard lui dit: Vous ne nous avez pas dit la vérité. C'est ça qu'elle lui reproche, M. le Président, essentiellement. On donnera plus de détails tout à l'heure. L'Institut de police, 8 000 000 $.

Pourquoi on est contre, M. le Président? À cause de tout ce que je viens de dire, mais aussi à cause de ce que ceux et celles qui sont directement concernés sont venus nous dire en commission parlementaire – dont j'ai parlé tout à l'heure – et aussi ce qu'ils ont dit au cours des derniers mois, depuis plus ou moins le mois d'août 1996. La meilleure preuve, moi, c'est le témoin. Lorsqu'on a à faire un débat ici, à l'Assemblée nationale, puis on peut appuyer nos dires par des témoins crédibles, ça constitue, quant à moi, la meilleure preuve.

M. le Président, tous ceux et celles qui ont été entendus à la commission de consultation publique – je me répète – arrachée de force au gouvernement, consultation qui s'est tenue jeudi... Arrachée de force, oui, parce que, au moment où le ministre a déposé son projet de loi, le 14 novembre, je lui avais posé la question: Est-ce qu'il y aura des consultations? «Je vais réfléchir.» Ça, «je vais réfléchir», ça veut dire «je ne veux pas». Lorsque, plus ou moins une semaine plus tard, j'ai directement posé, à la période de questions, au ministre la question suivante: Compte tenu de l'importance du projet de loi, est-ce qu'on aura des consultations publiques?, ça a été: Non. Sauf erreur, c'est le leader qui avait répondu à sa place: On va y penser. Deux, trois jours plus tard, en catastrophe – c'est ce qui a été reproché au ministre, en catastrophe... Alors là c'est quelqu'un qui est intervenu, ce n'est pas le ministre qui a décidé. Quand ça chauffe un peu, quand c'est compliqué, quand on n'est pas certain, ce n'est pas le ministre de la Sécurité publique qui décide. On l'a vu, on pourrait donner un nombre considérable d'exemples. On sent – sinon, c'est carrément ouvert et public – que c'est quelqu'un d'autre qui intervient, qui dit au ministre de la Sécurité publique: M. le ministre, ou Robert, tu vas faire ci puis tu vas faire ça. C'est ce qui s'est passé dans ce dossier-là. Un petit peu comme l'enquête à la Sûreté du Québec qui a été décrétée en catastrophe par le ministre suite à une intervention fort probable de ceux et celles qui entourent le premier ministre, parce que le ministre avait perdu la maîtrise de son dossier. Ça a été exactement la même chose en regard de la demande de consultation publique. On lui a dit: M. le ministre, écoutez, entre deux maux, il faut choisir le moindre. Vous allez y goûter, soyez assuré que ça ne sera pas drôle, cette journée de consultation, mais on va la faire puis on va tenter de s'en tirer du mieux possible. Alors, effectivement, le ministre, M. le Président, il s'est fait dire ses quatre vérités. La Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal est venue nous dire, jeudi dernier, qu'elle veut un sommet sur la sécurité publique. J'ai lu ce matin que le ministre, encore une fois, dans une espèce de volte-face qui lui ressemble, essaie de rassurer la Fraternité des policiers de la CUM en disant: Oui, ça ne serait peut-être pas une mauvaise idée. Il pense qu'il va calmer les appréhensions de la Communauté urbaine de Montréal en disant: On pourrait éventuellement... Bien oui, mais, si on veut un sommet de la sécurité publique au printemps, bien, qu'on retarde le projet de loi n° 77. Si on veut être conséquent, si on veut être franc, M. le Président, compte tenu de l'importance du dossier dont on parle, puis qu'on est vraiment sincère, bien, qu'on retarde le projet de loi n° 77 puis allons-y sur un sommet de la sécurité. Mais, là encore, c'est la chèvre et le chou.

Évidemment, la Communauté urbaine de Montréal, la Fraternité des policiers, pas la CUM, demande le retrait de la contribution du 1 % et qualifie de mesure extrêmement timide l'intention du gouvernement de permettre aux policiers de faire de l'activité politique. Essentiellement, la Fraternité des policiers de la CUM demande un moratoire. Lorsqu'on demande un sommet de la sécurité publique au printemps, ça veut dire: Votre projet de loi n° 77, il est inapproprié aujourd'hui, retardez-le. C'est ça qu'on demande au ministre, M. le Président. C'est ce qu'on a entendu jeudi dernier. La Fédération des policiers du Québec, essentiellement, c'est à peu près le même message que celui que nous a servi la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal. On voudrait que les municipalités... Cependant, la Fédération des policiers du Québec a été pas mal plus sévère – les policiers municipaux, ça, là – ils veulent que les municipalités aient le choix, un choix réel, pas du bluff, pas créer l'illusion ou l'impression de, puis se garder le pouvoir de dire non de façon arbitraire sans qu'il y ait appel de la décision du ministre. Ils ont compris ça. La Fédération des policiers du Québec l'a compris. Que les municipalités aient vraiment le choix de donner à leurs citoyens la protection par les policiers municipaux ou la Sûreté du Québec, c'est ce qu'ils demandent au ministre. Ils ont compris et ils l'ont dit au ministre: Le projet de loi n° 77 ne crée que de l'illusion. Ils ne croient pas le ministre, ils ne sont pas d'accord avec l'intention du gouvernement exprimée par le projet de loi n° 77 quant au choix des municipalités de décider si ça sera des policiers municipaux ou la Sûreté du Québec. La Fédération des policiers du Québec craint le maraudage.

Quand je disais, M. le Président – puis, je l'ai dit à plusieurs reprises – que le projet de loi n° 77 va créer une confrontation, avec toutes les conséquences que ça comprend, entre les policiers de la Sûreté du Québec et les policiers municipaux, c'est ce qu'est venu dire M. Martin au nom de la Fédération des policiers du Québec, en parlant de maraudage. Il veut des états généraux sur la police et, évidemment, il est également contre le 1 % sur la masse salariale des corps de police municipaux pour Nicolet.

(12 h 40)

Alors, essentiellement, la Fédération des policiers du Québec est contre le projet de loi n° 77. Dit de façon polie, évidemment. Évidemment, ils parlent à leur patron. Vous savez, la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal, dont j'ai parlé tout à l'heure, la Fédération des policiers du Québec, lorsqu'ils s'adressent au ministre de la Sécurité publique, c'est au patron qu'ils parlent. Mais, malgré ça, il faut louer, il faut reconnaître la lucidité des représentants des fédérations et le courage qu'ils ont eu de dire au ministre: Vous faites fausse route. On vous suggère d'attendre, d'y aller, un, sommet de la sécurité au printemps. Et la Fédération des policiers du Québec, un moratoire, à toutes fins pratiques, ça veut dire la même chose, M. le Président.

L'Association des policiers provinciaux du Québec, qu'est-ce qu'on est venu nous dire? M. Cannavino, nouveau président de la Fédération, était accompagné de M. Jocelyn Turcotte. Essentiellement, ce que j'ai fait avec M. Cannavino et M. Turcotte, avec également des questions du ministre et d'autres membres de la commission, on a fait le portrait de ce qu'était la Sûreté du Québec aujourd'hui. Pourquoi? Pour être capables de démontrer – et ça, c'est l'opinion de l'opposition – que la Sûreté du Québec, dans l'état actuel de ses effectifs, de ses budgets, ne peut pas prendre la charge additionnelle que veulent lui donner le ministre et le gouvernement pour des fins strictement financières et de piastres, ne peut pas prendre la charge additionnelle que provoquerait l'adoption du projet de loi n° 77 et tout ce qui s'en suivra, à savoir le refus systématique du ministre à tout projet qui lui sera soumis maintenant jusqu'au 31 décembre pour imposer la Sûreté du Québec.

La démonstration qu'on a faite... Et ça, c'est M. Cannavino qui me le dit en commission parlementaire devant le ministre. C'est pour ça que je ne comprends pas le ministre qui revient tout à l'heure avec le chiffre de 4 000 effectifs. Ce n'est pas vrai. Il y a 3 750 policiers à la Sûreté du Québec au moment où on se parle. Il y en avait, en 1994, 4 400. Dernière année du gouvernement libéral: 4 400 policiers. La Sûreté du Québec a perdu plus ou moins, en trois ans, 700 policiers. Et j'ai posé la question – et le ministre s'en souvient – à M. Cannavino: Si le projet de loi n° 77 était adopté tel qu'écrit et que vous aviez à occuper tous les territoires que souhaite vous voir occuper le ministre, c'est combien de policiers de plus? Le ministre s'en souvient, il parlait de 900 policiers de plus. La Sûreté du Québec est déjà, au moment où on se parle, en sous-effectif.

M. le Président, le message que j'envoie au gouvernement: Vous ne pouvez pas imposer à la Sûreté du Québec une tâche additionnelle énorme, alors qu'elle suffit à peine. Puis ça n'a rien à voir avec la bonne foi des policiers, bien au contraire, ni non plus de la direction de la Sûreté du Québec. C'est le pouvoir politique qui est blâmable. C'est le ministre de la Sécurité publique qui ose rappeler à ses collègues et à ceux et celles qui vous écoutent que le gouvernement précédent a déstabilisé la Sûreté du Québec. Y «a-tu» un gouvernement au cours des 25 dernières années qui a plus déstabilisé la Sûreté du Québec que ce gouvernement du premier ministre actuel et du premier ministre précédent, de ce ministre actuel et du ministre qui l'a précédé? La Sûreté du Québec vit une crise de leadership politique. C'est ça, le problème à la Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec a fait face à toutes sortes de crises provoquées par une faiblesse de gestion politique, et le ministre ose dire qu'on a, nous, les libéraux, déstabilisé la Sûreté du Québec. C'est faire insulte à l'intelligence de tous ceux et celles qui l'écoutent puis qui l'ont regardé aller depuis sept, huit mois.

Déstabiliser la Sûreté du Québec, c'est imposer à la Sûreté du Québec une charge qu'elle ne peut pas prendre à moins qu'on n'augmente les effectifs, à moins qu'on n'augmente les budgets, et ça, le ministre le sait. Et la mise en garde que je lui fais, c'est: Attention, dans l'état actuel des choses, si vous ne modifiez pas le cap, vous risquez de mettre en péril, dans certains cas, la sécurité des citoyens. Puis c'est ça, la responsabilité de l'opposition, puis je le fais en partant de témoignages précis et aussi et surtout en partant de chiffres précis.

L'Association des directeurs de police et de pompiers du Québec favorise le regroupement de petits corps de police, puis elle a des réserves très sérieuses sur les activités politiques. On s'interroge sur l'intention du gouvernement quant au financement de l'Institut de police. Alors, M. le Président, le monde de la police sans exception est contre le projet de loi, avec, dans certains cas, des prises de position plus serrées, plus vigoureuses, plus agressives. Personne du monde de la police n'est venu dire au ministre: Le projet de loi n° 77, c'est bon.

M. le Président, en commission parlementaire, on a eu droit aussi aux témoignages des élus municipaux, et là je peux vous dire que le ministre y a goûté, puis le gouvernement. Je veux juste vous rappeler qu'à une question... Parce que c'est important de retourner dans le temps pour bien comprendre: le monde qui sépare le gouvernement dans ce dossier-là et sa vision bonbon rose, et les élus municipaux qui, eux, vont avoir à vivre avec la décision du ministre de la Sécurité publique si elle n'est pas modifiée. À une question que je posais au ministre le 21 novembre – c'est tout récent, j'en parlais tout à l'heure: Est-ce qu'on pourrait avoir des consultations?, le ministre m'a répondu: Bien, j'ai fait une tournée au Québec, j'ai rencontré 700 maires, des préfets, j'ai rencontré tout le monde, tous ceux et celles concernés par la réorganisation policière. Et la réponse suave, naïve, parce que je ne peux pas dire autre chose... Le ministre, de deux choses l'une: il ne comprend pas, il ne saisit pas, il ne fait qu'écouter, ou encore, puis ça, ce serait pire, il nous compte des histoires, il nous compte des blagues, il nous ment en pleine face puis il pense qu'on ne réussira pas à le démasquer. Ça, c'est enfantin.

M. Bélanger: M. le Président.

Une voix: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, là, je pense...

M. Lefebvre: Non.

M. Bélanger: ...que le député de Frontenac est en train de s'écouter puis peut-être de s'emballer lui-même dans son inflation verbale.

M. Lefebvre: Alors, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Frontenac...

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Oui. J'ai dit: De deux choses l'une... Le leader, encore une fois, il commence sa journée sur le mauvais pied...

M. Bélanger: Bien oui, mais, «ment en pleine face», là...

M. Lefebvre: Hein?

M. Bélanger: «Ment en pleine face»...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement, M. le leader adjoint de l'opposition, vous savez que le mot «mentir» est un propos antiparlementaire. Alors, j'apprécierais que vous démontriez un petit peu plus de prudence dans vos propos. M. le leader, si vous voulez bien continuer.

M. Lefebvre: M. le Président, de deux choses l'une: ou le ministre ne comprend pas ce qu'on lui dit parce qu'il n'écoute pas – il ne veut pas écouter. Ça, ça s'appelle de la mauvaise foi, hein, ça, ce n'est pas mentir.

M. Bélanger: M. le Président.

M. Lefebvre: Non.

M. Bélanger: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: ...encore une fois, le député de Frontenac s'emporte, M. le Président. Il sait très bien qu'on ne peut pas accuser un parlementaire d'être de mauvaise foi. Alors, je pense qu'il était bien parti, là, il avait déjà fait une bonne partie de son intervention. Qu'il continue donc dans sa lancée initiale.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader adjoint de l'opposition...

M. Lefebvre: M. le Président, que le leader continue donc à...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...j'apprécierais beaucoup...

M. Lefebvre: ...placoter avec ses voisins, qu'il ne me dérange pas, là. C'est ce qu'il a fait...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition, s'il vous plaît. Alors, vous avez le privilège d'avoir à la présidence une oreille plus qu'attentive. Alors, si vous voulez bien continuer.

M. Lefebvre: M. le Président, le ministre a dit plein de choses en Chambre. Moi, je ne le crois pas. C'est correct, ça? Bon. Quand le ministre dit: l'Association des directeurs de police et pompiers du Québec est favorable au projet de loi, le syndicat des policiers de la Sûreté du Québec est favorable au projet de loi... J'ai rencontré les représentants des syndicats des policiers municipaux qui sont favorables, je viens de démontrer que c'est carrément le contraire. Ceux et celles qui écoutent tireront la conclusion.

(12 h 50)

L'Union des municipalités du Québec, qui représente plus de 5 000 000 de contribuables, est favorable au projet de loi. Voici ce que ces gens-là ont dit. L'UMRCQ, par sa présidente, a dit en commission parlementaire ou en commission de consultation jeudi dernier: «Si le ministre, M. le Président, a tant à coeur le citoyen, il va laisser, je pense, aux élus municipaux le choix de pouvoir déterminer quel est le meilleur service pour leurs citoyens, et, surtout, s'il est sûr que le service de la Sûreté du Québec est à moindre coût, je me demande pourquoi il a besoin de mettre une date butoir et d'exiger qu'on se dépêche.» M. le Président, ça, est-ce que c'est quelqu'un qui est d'accord avec l'intention du gouvernement, comme a dit le ministre? La présidente, Mme Simard, continue en disant: «On ne croyait jamais qu'au moment où M. Parizeau avait pris l'engagement que, lorsque le gouvernement serait sous la gouverne de son parti, il retirerait la loi 145...» Ce qu'elle dit, Mme Simard, c'est ce qu'on nous avait dit. Eh bien, au lieu de la retirer, à l'heure actuelle, le gouvernement, qui est sous le Parti québécois, en rajoute. C'est ça, avoir été compris? C'est ça, des élus municipaux qui sont d'accord? Mme Simard: «Ce que l'on veut, M. le Président, c'est d'avoir la liberté de choix», la liberté de choix dont j'ai parlé tout à l'heure. «Et, également, lorsque le ministre a circulé, il avait annoncé une hausse de 40 %. Pour nous, c'est inacceptable. Et, chez les élus municipaux, à l'heure actuelle la grogne monte.» C'est ça, des élus municipaux qui sont d'accord avec le ministre? Mme Jacinthe Simard, elle est la présidente de l'UMRCQ. Elle avait, c'est important de le rappeler au préalable, dans une lettre du 21 novembre, dit au ministre, qui a l'audace de dire à ceux et celles qui nous écoutent, à ses députés, que les élus municipaux sont d'accord avec sa proposition... L'UMRCQ, ce n'est pas rien, ça, là, c'est 1 100 municipalités au Québec, c'est la population la plus touchée par la proposition du gouvernement. Je crois personnellement que vous avez entendu ce que vous voulez bien entendre des élus municipaux lors de votre tournée. Vous dites: 1 100 municipalités verront leur taux de facturation haussé de 80 %. Vous parliez de porter de 70 000 000 $ à 100 000 000 $ la facture globale. Nous savons maintenant que l'augmentation réelle n'est pas de cet ordre. Qu'est-ce qu'elle dit, de façon très polie, M. le Président? «Vous nous avez dit en tournée que vous feriez une chose, vous faites le contraire.» Il y a un mot pour qualifier cette attitude-là; je n'ai pas le droit de le dire, M. le Président, je n'ai pas le droit de le dire. C'est ça que l'UMRCQ est venue dire au ministre. La CUM demande de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 77.

Ça coûtera 2 200 000 $ à la CUM pour le financement de l'Institut, le 1 % dont on parle. Aucune consultation sur le financement de l'Institut de Nicolet. C'est ça, l'autre façon de gouverner? C'est ça, le partenariat avec les élus municipaux? On parle de partenariat avec le reste du Canada alors qu'on n'est même pas capable, M. le Président, de faire le minimum au niveau de la relation gouvernement et élus municipaux. Ce n'est pas moi qui le dis. Aucune consultation sur le financement de l'Institut de Nicolet, voeu des états généraux: la CUM. «Sans aucune forme d'avertissement», c'est Mme Danyluk... Est-ce que les députés du Parti québécois savent ce qu'elle a dit, Mme Danyluk, que le député de Gouin connaît très bien, lui, un député de l'île de Montréal, M. le Président? «Sans aucune forme d'avertissement – c'est madame qui parle – le gouvernement impose aux contribuables de la CUM – les contribuables – une facture de 2 200 000 $. On vient d'apprendre cet après-midi...», etc. Elle parle de la TVQ, M. le Président. «Ce soir, je me demande plutôt si on veut vraiment nous entendre.» C'était ça, le message, M. le Président. Mme Daniluk continue en disant... Je m'excuse, M. Duchesneau, qui l'accompagnait, qui est le directeur général de la police de la Communauté urbaine de Montréal: «Je trouve un peu saugrenu que le Solliciteur général au Canada nous demande de nous prononcer sur des réformes policières au Canada, que des pays, le Burkina-Faso, le Brésil, le FBI nous a demandé de donner des conférences à tous les chefs de police des autres pays du bloc de l'Est, tout récemment, à Budapest, et que, dans notre province – ça, c'est M. Duchesneau; on sait c'est qui, M. Duchesneau, c'est une compétence en organisation policière, M. le Président, c'est une compétence au niveau de l'expertise policière – on ne nous consulte pas du tout sur la réorganisation policière, je trouve ça très peu poli, saugrenu.»

Est-ce que les députés qui vont voter, probablement, avec le ministre sur ce projet de loi savent ce que pense M. Duchesneau de l'attitude de ce gouvernement-là? C'est lui qui le dit, M. le Président: «Nous réprouvons donc la méthode de consultation du ministre, qui ébauche, pour le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, un avenir pour le moins douteux et précaire. Vers quel destin nous entraînez-vous de manière si effrénée?» Je le sais, moi, puis il le sait, lui aussi. C'est une question d'argent, M. le Président. C'est 50 000 000 $ qu'on veut aller chercher. Les conséquences, ça n'a aucune espèce d'importance. C'est un ministre faire-valoir du ministre des Finances puis du président du Conseil du trésor, point à la ligne.

M. le Président, vous m'indiquez qu'il me reste trois minutes, mais je pense que le leader va me donner un accord répété, parce que, en privé, tout à l'heure, il m'a indiqué que, si j'avais besoin d'une dizaine de minutes, je l'aurais pour terminer mon intervention. Il me reste combien de temps, en passant?

Le Vice-Président (M. Pinard): Il vous reste exactement 15 minutes.

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. Duchesneau continue son témoignage de jeudi dernier: «Nous ne sommes pas de cet avis. Il n'y a pas eu de consultation.» Écoutez, là. Ça, c'est très grave. Quand j'entends quelque chose, moi, d'aussi sévère à l'encontre du ministre et de son gouvernement par M. Duchesneau, là, directeur général de la police de la Communauté urbaine de Montréal... «De toute évidence, le ministre ne veut pas de débat de fond sur la réorganisation policière du Québec. Il souhaite s'en tirer avec quelques pirouettes et une réformette à la sauvette.» Ce n'est pas n'importe qui qui dit ça. Il dit ça au ministre; il dit ça à son patron. Duchesneau relève du ministre de la Sécurité publique ultimement. «Il souhaite s'en tirer avec quelques pirouettes et une réformette à la sauvette.» Témoin, témoin, M. le Président, qui a une expertise considérable, plus que n'importe qui en cette Chambre, plus que le ministre. Dans un premier temps, ce qu'il dit: J'ai été consulté par plein de pays à la grandeur du monde, par le FBI; vous ne me consultez pas.

Malheureusement, M. le Président, «je ne peux en dire autant du modèle de réorganisation policière». Écoutez bien, là. J'espère que les députés péquistes, qui sont ici pour apprendre des choses et du ministre et de l'opposition... Voici ce que dit M. Duchesneau de la réforme du ministre de la Sécurité publique, projet de loi n° 77: «Je ne peux en dire autant du modèle de réorganisation policière que le ministre de la Sécurité publique – est-ce que le ministre écoute, M. le Président? – tente de nous enfoncer dans la gorge.»

Je n'ai jamais, jamais, en 11 ans, entendu des témoignages aussi sévères à l'encontre d'un projet de loi gouvernemental. Je n'ai jamais entendu, M. le Président, de façon unanime... Tous ceux qui ont paradé en commission parlementaire ont planté le ministre. Il n'a pas réagi et il ne réagit pas. Pourquoi? Parce que ce n'est pas lui qui décide, c'est le Trésor, c'est les Finances. On a besoin d'argent. Il arrivera ce qui arrivera, peu importe l'opinion des experts, entre autres de M. Duchesneau.

Ce n'est pas fini, M. le Président. Le monde municipal, l'UMQ: «Le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'iniquité fiscale. On veut l'autonomie municipale pour le choix des services policiers.» J'en ai abondamment parlé tout à l'heure. M. Brisebois de l'UMQ: «On prend très durement cette ingérence qui n'avait été annoncée d'aucune façon à aucune des instances.» On dit au ministre: Vous nous avez dit une chose et vous avez fait le contraire. C'est ça qu'on dit au ministre. Qu'a dit M. Vaillancourt, maire de Laval, président de l'UMQ? M. le Président, je pose une question de M. Vaillancourt. «Bien, j'ai dit que le ministre – ça, c'est lorsqu'il évalue la démarche du gouvernement qui tente de faire croire aux élus municipaux qu'ils vont pouvoir s'organiser avec leur propre liste – avait fait le devis, qu'il avait demandé la soumission, reçu une soumission unique. Sa propre soumission s'est déclarée conforme et il va se donner le contrat, ça, c'est clair.»

(13 heures)

M. le Président, de la part de quelqu'un qui a une renommée au niveau de tout le Québec, le maire de Laval, le président de l'UMQ, une façon extrêmement subtile et polie de ridiculiser le ministre. C'est ça qu'il a fait, et le ministre n'a pas sourcillé. Moi, j'étais mal à l'aise. Je vais vous avouer franchement, M. le Président, j'étais mal à l'aise de voir un de mes collègues se faire traiter comme ça. À partir de, sauf erreur, 10 heures le matin jusqu'à 22 heures, ça a été un après l'autre, modéré jusqu'à un certain point par les fédérations de policiers, je le comprends, sauf M. Duchesneau, et...

Une voix: Ah!

M. Lefebvre: ...M. Duchesneau... Bien oui. Le député de Laviolette arrive, là. M. Duchesneau a été catastrophique dans son analyse du projet de loi n° 77. Le député de Laviolette, il n'y a rien qui le dérange, lui. Il est whip, il est heureux. Le projet de loi n° 77? Il arrivera ce qu'il arrivera. Pas de conséquences.

M. le Président, ça continue, les témoignages. Ça sera la guerre, dit Mme Jacinthe Simard. Mme Simard... M. le ministre disait, tout à l'heure: J'ai rencontré les élus municipaux, ils sont d'accord. Mme la présidente de l'UMRCQ: Ça sera la guerre. Jean-Jacques Samson – parce qu'il y a des élus qui parlent, mais il y a des journalistes: Encore du tordage de bras. Le projet de loi n° 77, du tordage de bras. L'UMRCQ s'en va-t-en guerre. Ça, c'est le 5 septembre 1996.

Est-ce que les députés du Parti québécois le savent, que l'UMRCQ est en guerre contre le gouvernement dans cette intention d'imposer la Sûreté du Québec, de mettre en tutelle les municipalités dans la réorganisation de la police? Je ne crois pas. Pas sûr, hein?

En période de questions, j'ai rappelé au ministre que Mme la présidente de l'UMRCQ avait dit, pas du ministre – je ne le rappellerais pas, ce n'est pas correct, ce n'est pas chrétien, ce n'est pas catholique, je ne le dirais pas, ça: Pas intelligent – la réforme – pas intelligent. Les chefs de police grincent des dents. L'UMRCQ – parce qu'on pourrait penser que ça va se calmer – au mois d'août: La guerre contre le gouvernement. Le 22 novembre, la semaine dernière: L'UMRCQ menace de déverser des ordures devant le parlement. M. le Président, ce sont les partenaires du gouvernement qui disent quelque chose d'aussi énorme! On menace le ministre et son gouvernement de venir déverser sur la colline parlementaire des ordures pour essayer de faire réfléchir ce gouvernement. Je ne sais pas si on va y arriver.

Ingérence gouvernementale inacceptable. Ça continue: Décembre sera chaud, promet l'UMRCQ. Le 28 novembre: Les villes en guerre contre Québec. Ça, c'est lundi de cette semaine. Puis le ministre ose dire qu'il a été compris. Le ministre dit qu'il a été compris, puis il répète ça encore ce matin, M. le Président.

Il y a quelque chose qui ne va pas. Il y a quelque chose qui ne va pas avec le ministre. Ou tout va pour lui, puis ça, c'est dangereux. Ça, c'est dangereux. Il ne réalise pas ce qui se passe. Il se fait attaquer de tous bords, tous côtés, puis prouvées, là, pas des attaques gratuites, prouvées. On lui dit: M. le ministre, telle chose, telle chose, telle chose. Il encaisse tout ça, il ne dit pas un mot. Ça va.

Pourquoi? Il aime ça, être ministre. Il veut rester ministre. Puis on lui a dit: M. le ministre, vous, là, la ligne, c'est boum! Posez-vous pas de questions. Puis, si jamais vous ne vous comprenez plus, on va vous tenir par la main puis on va vous aider. On l'a fait avec l'enquête publique sur la Sûreté du Québec. On l'a fait dans les «combats extrêmes». À chaque fois que le ministre est coincé, on le prend par la main, puis là on le guide jusqu'au prochain obstacle. C'est ça qu'on lui dit.

Parce qu'il est inquiet, lui. Ce n'est pas un mauvais bonhomme, le ministre. Il a un minimum, je pense, de jugement. Il ne peut pas ne pas être inquiet, M. le Président, face à une telle avalanche de critiques extrêmement sévères des partenaires: un, des élus municipaux, puis des partenaires au niveau des directeurs de corps de police d'un peu partout au Québec, les bleus, les verts. Il ne peut pas ne pas comprendre que ça n'a pas de bon sens, ce qu'il est en train de faire, sauf qu'il est, puis je termine là-dessus, parce que je pense que mon temps est épuisé, M. le Président... Il reste cinq minutes.

Alors, M. le Président, le ministre est l'exécuteur des basses oeuvres du ministre des Finances, du président du Conseil du trésor. Parce que le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor cherchent désespérément, on le voit dans toutes sortes de gestes posés au cours des dernières semaines et des derniers mois, à boucler le budget avec le déficit dont on a parlé dans le budget du mois de mai, déficit de 3 200 000 000 $.

Alors, qu'est-ce qu'on fait? On coupe les municipalités d'une façon absolument sauvage, inacceptable, de 76 000 000 $ sur la TVQ. On refile des factures comme celle dont on parle dans le projet de loi n° 77, de 50 000 000 $, plus ou moins, M. le Président. Les conséquences...

Moi, là, je vais vous dire une chose. La TVQ, c'est très grave, c'est très, très grave quant à la relation entre le gouvernement puis ses partenaires, les élus municipaux, les municipalités. Et ils réagissent pas à peu près. Mais, lorsqu'on parle – je l'ai dit tout à l'heure – de protection policière, là, il n'y a pas que le gouvernement et les élus municipaux qui sont en cause, il y a le citoyen. Le citoyen, c'est lui qui est au coeur du débat lorsqu'on parle de la protection policière. Le ministre de la Sécurité publique, les corps de police – qu'ils soient de la Sûreté du Québec ou des sûretés municipales – n'existent qu'en fonction du mandat et de la responsabilité qu'ils ont de protéger les citoyens.

Alors, le ministre de la Sécurité publique n'a pas de courage. Il devrait résister à la commande qu'on lui passe au nom de la grande mission dont il a la responsabilité, protéger les citoyens. Ce n'est pas ça qu'il fait. Bêtement, il reçoit la commande puis il l'exécute, puis je pense que ce qui le protège en un sens, c'est qu'il ne comprend pas tout ce qui se passe. Ça le protège. Une espèce de naïveté qui le protège, mais il y a plein de gens inquiets qui lui envoient des cris d'alarme, dont l'opposition. Nous autres – je vais conclure là-dessus – de notre côté... Moi, je ne veux pas jouer avec ça, la sécurité publique ni non plus avec la justice. Si on veut faire de la petite politique, bien, on en fera dans d'autres dossiers dont la conséquence est moins immédiate, dangereuse, pour le citoyen.

M. le Président, l'opposition... Et le ministre a eu un avant-goût, le leader du gouvernement a eu un avant-goût de ce qu'on peut faire cette nuit, là. Ça, c'est un projet de loi qui a été amené à la sauvette. Le ministre était mêlé, le leader du gouvernement était tout mêlé, hier, dans sa démarche des travaux parlementaires. Il ne savait pas que l'article 236 existait. Alors, là, il faudrait qu'il se prépare. Ce n'est pas des menaces. Le projet de loi n° 77 n'a pas de bon sens, il est contesté par tous ceux et celles qui sont interpellés, et l'opposition va jouer son rôle parce qu'on parle au nom de tous les Québécois, y compris ceux qui ont appuyé ce gouvernement-là le 12 septembre 1994.

Tous les moyens mis à la disposition de l'opposition pour bloquer le projet de loi, on va les utiliser de façon bien correcte, démocratiquement, et j'espère qu'on ne nous fera pas les reproches que M. le député de Laviolette nous a faits cette nuit, à 2 h 15, de dire qu'on utilisait des motions de report que lui n'avait pas comprises parce qu'il n'était pas là. Puis je ne lui en fais pas le reproche. Il vaquait à ses occupations, il était dans le parlement, probablement à son bureau, puis il travaillait sur la discipline de ses députés. C'est ça, un whip. Bon. Mais il est arrivé ici à 2 h 15 en disant: C'est épouvantable, l'opposition, une motion de report... Une espèce de vieux discours usé à la corde. Il n'aurait pas été capable de reprendre trois lignes de ce qui avait été dit et par son ministre, M. le député de Matane, ni non plus par les députés de l'opposition.

Alors, message que j'envoie au gouvernement: Avant qu'il ne soit trop tard, pourquoi le ministre n'aurait-il pas un sursaut de lucidité puis de courage, puis cet après-midi, aller s'asseoir avec le ministre des Finances et le président du Conseil du trésor, peut-être le premier ministre, et dire: Ça n'a pas de bon sens, moi, je suis mal à l'aise, je suis gêné de devoir bêtement fouiller dans les poches des citoyens pour 50 000 000 $, plus ou moins, puis en plus mettre en péril, à cause de tout ce que ça va provoquer de confrontation – je pense que le ministre ne mesure pas ça – peut-être, éventuellement, la sécurité des citoyens et, moi, comme ministre de la Sécurité publique, je n'ai pas le droit de me prêter à de telles manoeuvres? Moi, j'applaudirais si le ministre faisait ça, M. le Président, puis il gagnerait un peu d'estime. J'ai du respect pour lui, mais il ne m'a pas convaincu, à date, dans aucun dossier, qu'il gère bien la sécurité publique au Québec. Un bon ministre de la Sécurité publique, ça prend du courage, puis il faut être capable de faire face à son propre gouvernement, pas être bêtement, M. le Président, au service du Trésor et des Finances.

(13 h 10)

M. le Président, ce n'est que le début de la discussion, ça va durer une bonne partie, plus que la journée, rien que sur le principe, parce qu'on a plein de députés de notre côté qui veulent parler. Moi, j'ai essayé de résumer quelle serait l'argumentation de l'opposition.

Je vois réagir le ministre, continuer à sourire, il a eu des claques sur le nez pas à peu près, jeudi passé, de tous bords, de tous côtés, il a souri du début à la fin, puis il sourit encore.

Alors, je vais le laisser là-dessus, M. le Président, qu'il sourie, qu'il sourie, mais il y en a un sacré paquet qui sont inquiets. M. le Président, je vous remercie de m'avoir écouté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Frontenac. Et nous suspendons nos travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 11)

(Reprise à 15 h 5)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir.

Nous allons poursuivre aux affaires du jour. Nous étions à débattre sur l'adoption du principe du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des intervenants? Alors, je crois que c'est le leader adjoint qui a terminé son intervention. Je céderai la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je suis heureux d'intervenir sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Mes premiers commentaires seront sur la facture elle-même du projet de loi, qui nous complique un peu la vie en ce qu'il touche deux sujets qui, à mon avis, sont tellement différents, pas du tout reliés, qu'on peut très bien être pour un et contre l'autre. Et c'est mon cas. Parce qu'on inclut dans le même projet de loi une réorganisation policière au niveau territorial qu'on veut imposer au niveau des municipalités du Québec, une façon de refiler une facture au niveau des municipalités, et, dans le même projet de loi, on introduit une disposition concernant un principe démocratique qui est de donner un droit démocratique de se porter candidat, de se présenter, d'offrir ses services à la population, dans le cadre des élections fédérales ou provinciales, à des policiers, à des constables.

Je commence tout de suite en précisant que mon opposition au projet de loi n° 77 dans sa forme actuelle, projet de loi qu'on a devant nous, n'empêche pas que je suis tout à fait d'accord, et j'ai eu l'occasion de l'exprimer dans le passé, avec cet élément fondamental de démocratie, ce droit fondamental, à mon avis, de constables, de policiers d'exercer un certain nombre d'activités politiques allant jusqu'à se porter candidats, c'est-à-dire d'aller jusqu'à offrir leurs services à leurs concitoyens.

La réforme de l'organisation policière, M. le Président, doit faire partie, je présume, de cette espèce de politique du gouvernement actuel qui devait, on se souvient, dans le cadre de la campagne électorale, dans les mois qui l'ont suivie, être une décentralisation qui devait se faire dans la coopération avec le monde municipal, un vaste exercice de concertation qui devait avoir lieu pour que les services soient gérés plus proche des citoyens, mais qui se transforme au fil des mois, au fil des années, beaucoup plus en un exercice de transfert de factures vers les municipalités – et ça a l'air de rempirer, si on en juge par l'annonce de jeudi passé du ministre des Finances qui envoie carrément une facture de 76 000 000 $ sur une base annuelle aux municipalités, alors que certaines municipalités avaient terminé le travail de préparation de leur budget – qui devient de plus en plus, donc, un exercice unilatéral de la part du gouvernement, où il y a de moins en moins de consultation avec le monde municipal.

M. le Président, au moment où on étudie un projet de loi comme celui-ci, quand on regarde le bilan du gouvernement au niveau de ses relations avec le monde municipal, on en est à se demander si, du côté du gouvernement, on voit le rôle d'élu municipal, la fonction de maire comme étant une simple fonction, un rôle de fonctionnaire finalement, un rôle de fonctionnaire qui serait un exécutant du gouvernement, à qui on donne un certain nombre de directives, à qui on donne un certain nombre de contraintes budgétaires en cours de route puis en cours d'année, puis qui doit se débrouiller avec ça.

(15 h 10)

Alors, pour moi, dans ma conception des choses, bien que, du point de vue légal, les municipalités soient des créations du gouvernement du Québec, une fois que cette création-là est faite, le maire, l'élu est désigné par sa population et choisi par sa population pour administrer sa municipalité. Il a à répondre de ses actions devant ses concitoyens. Il a à faire des planifications budgétaires. Il a à faire des choix difficiles, et Dieu sait qu'il y en a eu dans les dernières années! Et là il fait face, au-dessus de lui, à un gouvernement qui le traite, lui, comme maire, comme élu d'une population dans une municipalité, il a affaire à un gouvernement qui semble le traiter, le considérer comme un exécutant, comme un fonctionnaire. Et ça, je m'inscris complètement en faux par rapport à cette philosophie cavalière dont de plus en plus de gens dans le monde municipal commencent à se plaindre.

Dans le projet de loi n° 77, on parle d'une trentaine de millions. Les interprétations varient, on parle d'une trentaine de millions, une facture qui va être renvoyée dans la cour des municipalités avec bien peu de garanties quant aux services qui vont en découler directement. On sait combien il existe de problèmes à l'heure actuelle. Il y a même des MRC complètes, qui, à certaines heures de la nuit, n'ont pas de service de police, qui voient leur facture augmenter, qui ont vu leur facture augmenter déjà, qui voient le ministre leur en refiler, qui n'ont pas réellement de pouvoir direct là-dessus, qui n'ont pas de pouvoir direct sur l'organisation des services policiers, qui sont obligées de répondre à leurs concitoyens: Écoutez, on vous fait payer plus parce que, nous autres, on nous charge plus, mais qui ne peuvent pas répondre à leurs citoyens: On va vous offrir un meilleur service, parce qu'elles n'ont pas le contrôle sur le service en question.

Le ministre a fait une première tournée. Par la suite, les gens du monde municipal qui ont voulu avoir des rencontres supplémentaires avec le ministre, aller plus loin pour fouiller des choses, pour explorer des possibilités, se sont frappés à un mur parce qu'ils ont bien senti que le but réel du gouvernement, c'était de passer une facture aux municipalités; pas d'opérer une véritable décentralisation, pas d'améliorer les services, pas d'améliorer la sécurité du public. Ça, on ne s'en surprend pas. Quand on regarde la feuille de route du ministre de la Sécurité publique en matière d'incarcération, en matière de respect des sentences qui sont données, il ne faut pas se surprendre que la sécurité du public ne soit pas sa priorité numéro un. Je pense que tout le monde s'en est un peu aperçu.

Mais, dans ce cas-ci, on va chercher de plus en plus des argents de différentes façons par une facture qu'on refile unilatéralement aux municipalités. Malgré des blâmes du monde municipal, l'administration du gouvernement actuel... Malgré des invitations à discuter, des invitations au dialogue, le gouvernement semble avoir fermé la porte. Ces transferts-là successifs doivent nous amener, évidemment, en tant que représentants de la population à l'Assemblée nationale, à nous poser la question suivante: Chaque fois qu'on pellete plus de factures dans la cour des municipalités, on ne fait pas de nouveaux partages, on remet toujours à l'année prochaine le nouveau partage de l'assiette fiscale. La véritable réforme de la fiscalité, la véritable entente avec les municipalités est toujours pour l'année d'après. Pendant ce temps-là, on force les municipalités à augmenter un peu les taxes foncières, à aller compléter les trous que le gouvernement du Québec crée dans leur budget en augmentant leur taux de taxation.

On entend parler du fait qu'au niveau des commissions scolaires, les taxes scolaires, il va y avoir une autre augmentation dans les prochains mois. Quand on regarde la croissance, l'augmentation absolument phénoménale des taxes foncières qui en a découlé depuis quelques années, puis là on pourrait additionner à ça le désengagement du gouvernement du Québec par rapport au transport dans différents domaines, on peut se demander, M. le Président, dans cinq ans, dans 10 ans, qui au Québec va avoir les moyens d'avoir une maison.

Est-ce que la famille de la classe moyenne qui, il y a 10 ans, 15 ans, avait dans ses rêves, dans ses projets et aussi dans sa capacité de payer le fait d'avoir une maison, est-ce que cette famille-là, avec le genre d'augmentation... Parce que là on augmente les taxes au niveau municipal, on transfère des factures au niveau des municipalités, mais le gouvernement du Québec lui-même, pendant ce temps-là, ne baisse pas ses taxes pour permettre aux gens de payer; il les augmente, il en invente des nouvelles et leur donne toutes sortes de noms, l'assurance-médicaments...

Écoutez, la quantité d'argent que le gouvernement du Québec est venu chercher dans les poches des contribuables entre 1986 et 1996 est passée de 19 000 000 000 $ à 31 000 000 000 $. Là, on vient, depuis quelques semaines... Depuis le Sommet, où on nous a dit qu'il ne fallait plus augmenter les taxes et les impôts, je pense qu'à toutes les semaines on a annoncé de nouvelles augmentations. M. le Président, avec ces augmentations-là de leurs taxes, de leurs impôts, tous les noms qu'on peut donner à ces augmentations-là de la part du gouvernement, plus les transferts qu'on envoie aux municipalités, qui les forcent dans bien des cas, puis on en voit des exemples, ces jours-ci, qui commencent à sortir au grand jour, surtout quand ce n'est pas planifié dans leur budget, à augmenter, donc, le fardeau fiscal au niveau de l'impôt foncier, on peut se demander qui, quelle classe de la population, d'ici quelques années, va avoir les moyens d'acquérir, d'avoir accès à l'acquisition d'une propriété, d'une simple petite maison.

C'est pour ces raisons-là qu'il est extrêmement difficile pour moi de souscrire à cette approche du gouvernement, comme, je pense, les intervenants du monde municipal, l'UMRCQ qui représente des petites municipalités partout à travers le Québec. Leur opposition à ça, ce n'est pas une opposition de principe, ce n'est pas un dogmatisme. On connaît les élus municipaux: dans toutes les régions du Québec, c'est des gens de gros bon sens, c'est des gens qui administrent leur municipalité. Il y en a probablement de tous les partis politiques, qui votent pour tous les partis, puis il y en a probablement des meilleurs que d'autres, mais, à travers tout ça, ces gens-là, quand ils se réunissent puis qu'ils regardent l'action du gouvernement actuel, ils ne comprennent pas. Ils ne savent plus ce qu'on attend d'eux. Ils ne comprennent pas comment le gouvernement du Québec peut toujours leur transférer des factures, les traiter comme des simples exécutants.

Et je vais vous dire que, dans bien des cas, quand il s'agit de petites municipalités, des municipalités de 1 000, 1 500 habitants, ils en sont rendus à se poser la question, à se demander si le gouvernement a vraiment une idée de comment, dans quelques années, ces gens-là vont être capables d'assurer la survie de leur municipalité, d'assurer des niveaux de taxes que les gens, avec la situation économique, avec la situation de l'emploi, sont capables de payer, d'offrir un minimum de services.

Alors, moi, je l'entends. Je l'entends dans mon coin, je l'entends quand je me promène à travers le Québec, le questionnement des élus municipaux des petites municipalités. Puis, quand je dis «petites», je ne parle pas de 200, 300, je parle de jusqu'à 1 000, 1 500. C'est beaucoup de municipalités, ça, au Québec qui représentent des communautés où les gens font leur affaire, où les gens ont leurs services, puis ils s'organisent ensemble, puis ils essaient de créer des emplois, puis ils essaient de développer un peu de richesse dans leur coin de pays. Mais ils se demandent comment ils vont pouvoir passer à travers, dans la mesure où leur voix n'est pas entendue au gouvernement du Québec, dans la mesure où on leur refile des factures pour lesquelles on ne leur donne pas de pouvoirs réels sur l'amélioration des services, dans la mesure où, quand ils essaient d'exprimer un point de vue, qu'ils se réunissent, qu'ils se concertent au niveau de la MRC, on n'a pas le temps d'écouter leur point de vue, le ministre n'a plus le temps de rencontrer le préfet.

C'est l'effet bulldozer, M. le Président, qui passe sur des gens qui sont eux-mêmes – je le rappelle encore parce que je pense que c'est fondamental dans le débat – des élus, des gens choisis par la population pour administrer leur municipalité, pour faire une planification financière, pour la respecter, pour offrir les meilleurs services possible à leurs concitoyens et à leurs concitoyennes.

Évidemment, je pourrais parler longuement de l'organisation policière, du progrès énorme que le gouvernement a à faire en matière d'organisation du travail dans ce domaine-là pour que l'organisation du travail soit faite, soit préparée en fonction de la réalité du terrain, de ce dont on a vraiment besoin pour offrir des services. Moi, j'ai beaucoup de difficultés quand on me dit qu'on ne peut pas offrir des services 24 heures sur des territoires de MRC à cause de conventions collectives ou à cause de toutes sortes de normes. J'ai l'impression que c'est le peuple qui doit se mettre à genoux au service des normes plutôt que les normes qui devraient être ajustées au service du peuple. Mais ça, c'est comme la queue qui branle le chien, c'est contraire à la logique. Et il me paraît que, s'il y a, en matière de réorganisation policière, un coup de barre sérieux qui aurait dû être donné, c'est d'abord et avant tout à ce niveau-là et pas seulement une question de transférer une facture en peu de temps.

(15 h 20)

Il y a toutes sortes d'autres problèmes, M. le Président, qui apparaissent au grand jour, à gauche et à droite, avec ce projet de loi. Les MRC qui ont des territoires non organisés dans certains cas se voient refiler des factures extrêmement salées, des factures de plusieurs milliers de dollars pour couvrir un nombre restreint, on pourrait dire, une poignée de résidences, un nombre de résidences qui pourraient se compter sur les doigts de la main, mais qui, dans le cadre du projet de loi actuel, sont des problèmes, des factures plus grosses qui vont être refilées à des MRC qui sont pénalisées par des situations comme celle-là. Et, évidemment, faute de prendre peut-être le temps nécessaire pour écouter les gens du monde municipal, le ministre n'a pas eu le temps d'introduire, à l'intérieur de sa loi, dans les délais appropriés, toutes les dispositions pour que son projet de loi colle véritablement à la réalité.

Or, je passe évidemment sous silence toute la question des discussions sur les coûts, où il est loin d'y avoir entente, encore là, où il est loin d'y avoir unanimité entre les différents intervenants. La seule chose sur laquelle tout le monde est d'accord, c'est que, de transfert en transfert – ça a été commencé sous l'ancienne administration, avec la réforme Ryan – on a l'impression que ceux qui s'étaient scandalisés à l'époque de la réforme Ryan, que ceux qui avaient fait des protestations, qui étaient dans l'opposition à l'époque et qui sont rendus au gouvernement aujourd'hui, ne semblent plus très scandalisés de l'approche qui avait été utilisée à l'époque, ils semblent plutôt s'en inspirer. Ils semblent plutôt chercher dans la réforme Ryan une source d'inspiration pour, à leur tour, transférer des factures au monde municipal, passer sur le dos des élus municipaux comme s'ils étaient de simples exécutants, de simples fonctionnaires à la remorque et au service du gouvernement du Québec.

Or, c'était mon point de vue, M. le Président. Je tenais à le faire valoir parce que je pense que c'est de plus en plus un questionnement qui va émerger dans notre population, l'accès de citoyens qu'on appelle de la classe moyenne, l'accès de gens qui sont des gens ordinaires mais qui gagnent honnêtement leur vie, qui veulent élever une famille puis qui veulent pour ça avoir accès non pas à des propriétés luxueuses – ceux qui ont les moyens d'avoir des propriétés de grand luxe vont être capables probablement de payer, de continuer à payer leurs taxes puis de faire face aux augmentations... mais l'accès des familles ordinaires, qui veulent tout simplement avoir accès à une petite propriété, dans bien des cas qui sont des jeunes familles qui veulent avoir accès à une première propriété, leur capacité de le faire, au fur et à mesure qu'on augmente, qu'on augmente, qu'on augmente le fardeau fiscal au niveau des taxes foncières ou qu'on force les municipalités, d'une certaine façon, à l'augmenter en leur refilant des factures de dernière minute, en même temps que le gouvernement du Québec lui-même vient les étrangler avec toutes sortes de taxes de son côté...

Donc, les gens sont absolument étranglés de partout par les augmentations de taxes par un gouvernement – et je complète avec ça – qui pourtant, à plus d'une occasion... Le premier ministre, avant même de se porter candidat à la chefferie de son parti, l'avait dit: Il faut arrêter de taxer, d'augmenter le fardeau fiscal des contribuables. Je me souviens des discours du ministre de l'Économie et des Finances au Sommet, qui disait: Si on augmente encore le fardeau fiscal des contribuables, on va les étouffer, on va nuire à l'économie, et qui, pourtant, ne rate, depuis quelque temps, jamais une occasion. Dans certains cas, même, il semble que c'est populaire, son propre caucus applaudit à des augmentations de taxes. Alors, il semble que, du côté du gouvernement, on a fait ce choix, par une panoplie de moyens, d'aller chercher de plus en plus d'argent dans la poche des contribuables.

Dans le cas des affaires qui concernent directement le monde municipal, bien, ces factures-là sont refilées sous forme de taxes foncières puis dans quelque temps ça risque d'être des taxes scolaires qui touchent le même champ, qui est le champ foncier, et qui, à mon avis, restreignent dangereusement l'accès du monde ordinaire à la propriété, ce qui était, je pensais, dans notre société, M. le Président, un objectif qu'au contraire on souhaitait élargir. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Richmond. M. le député.


M. Yvon Vallières

M. Vallières: Alors, je veux vous remercier, M. le Président. J'ai la nette impression que beaucoup de gens de ce côté-ci de la Chambre, soit de l'opposition officielle, vont rapidement se mettre d'accord pour combattre le projet de loi qui a été déposé par le ministre en cette Chambre.

M. le Président, nous avons devant nous un projet de loi qui permet au gouvernement de réduire son propre déficit sur le dos des municipalités, et par ricochet sur le dos des contribuables. Le député de Frontenac l'indiquait ce matin, le député de Rivière-du-Loup vient de l'indiquer et d'autres après moi vont l'indiquer également, vont en faire la démonstration.

Malgré ce que nous disait avec vigueur le premier ministre le 28 mars dernier, déclaration solennelle: «Les citoyens ne sont pas touchés, M. le Président, c'est les machines, l'administration, les appareils, c'est sûr, mais les citoyens ne sont pas touchés.» La belle affaire, M. le Président! Des paroles vides de sens de la bouche du premier ministre quand on constate toutes les mesures qui sont mises de l'avant par son gouvernement.

Par qui ce gouvernement croit-il que la facture de 50 000 000 $ qu'il s'apprête à refiler aux municipalités par ce projet de loi sera-t-elle payée, sinon par les pauvres contribuables dans chacun de nos comtés respectifs? Faut-il vivre à ce point enfermé dans une bulle pour ignorer que le citoyen dont parle avec des trémolos dans la voix le premier ministre est le même citoyen qui, lorsque sa municipalité l'exigera, va mettre la main dans sa poche pour payer cette facture de 50 000 000 $, en plus d'avoir à payer 250 000 000 $ pour favoriser le retour des assistés sociaux sur le marché du travail, en plus d'avoir à payer plus cher pour son permis de conduire, plus cher pour son immatriculation, payer également pour le régime d'assurance-médicaments mis en place. Enfin, j'arrêterai ici l'énumération, ça me prendrait l'après-midi à le faire.

M. le Président, je vais prendre beaucoup de temps, enfin dans la vingtaine de minutes qui m'est accordée, pour énumérer ces nouvelles façons de voir du gouvernement depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement du Parti québécois.

Le Parti libéral a réussi, quant à lui, grâce à la vigilance du député de Frontenac, à arracher à la toute dernière minute une consultation de certains organismes en commission parlementaire, qui ont eu peu de temps pour se préparer pour donner leur point de vue sur ce projet de loi. Encore une fois, manque de considération, manque de respect pour les élus municipaux. Même le Directeur général des élections, pourtant bien outillé, est venu nous rencontrer avec des notes qu'il n'a pu distribuer aux membres de la commission. Il a d'ailleurs, bien malgré lui, pris avis d'une question que je lui posais sur une disposition particulière du projet de loi n° 77 portant sur le droit de se présenter aux élections municipales pour les policiers. Je voulais connaître la tendance, enfin le portrait, en Amérique du Nord, sur cette question, l'évolution au cours des dernières années.

Cela confirme, M. le Président, que le ministre, dès le départ, ne voulait pas de consultation. Son lit est déjà fait, il va bulldozer son projet de loi. Ce projet de loi n° 77, les municipalités n'en veulent pas. Elles l'ont fait clairement savoir au ministre de la Sécurité publique. Elles veulent conserver le choix de leur police, et on peut les comprendre.

Je pense ici à une petite ville de mon comté, la ville de Richmond, qui est située à quelques pas des frontières du comté de Johnson, bien connu du député de Johnson en cette enceinte également. Cette municipalité vient de demander au ministre de la Sécurité publique un statut d'exception pour maintenir son propre corps de police. La population se dit entièrement satisfaite des services offerts par le corps de police de Richmond. La municipalité peut planifier en toute connaissance de cause son budget, car c'est elle qui administre son corps de police et détermine les conditions de travail de ses policiers. Bref, voilà un bel exemple de gestion municipale adaptée aux besoins réels de cette petite municipalité de mon comté. Par sa demande, cette municipalité fait savoir au ministre qu'elle n'en veut pas, de son projet de loi qui fait obstacle à une administration efficace et éclairée des deniers de ses contribuables.

(15 h 30)

D'ailleurs, plusieurs municipalités régionales de comté ont également signifié leur intention d'entreprendre une étude pour se doter de leur propre corps de police: la MRC de Drummond, la MRC d'Arthabaska, la MRC d'Asbestos. J'y vois, encore là, M. le Président, un refus très clair de la législation que le ministre tente d'imposer aux municipalités. Plusieurs municipalités régionales de comté ont signifié leur intérêt à former leur propre corps de police. L'UMRCQ a demandé un délai, soit le 31 mars 1997, par rapport au 31 décembre 1996, tel que précisé présentement, pour que les MRC puissent déposer leurs études; cette démarche a été qualifiée d'irréaliste par le gouvernement.

Dans le projet de loi n° 77, d'ailleurs, le ministre se conserve le pouvoir discrétionnaire. Il préfère que les municipalités régionales de comté n'aient pas le temps de s'organiser. Ce qu'il cherche dans son projet de loi, ce n'est rien d'autre que le financement de la Sûreté du Québec. C'est la raison pour laquelle le ministre se garde cette discrétion d'accorder lui-même les permis de police régionale.

Cette loi fait également la démonstration hors de tout doute de l'incapacité de ce gouvernement à communiquer avec les élus municipaux. Il préfère plutôt imposer son point de vue sans dialogue constructif et sans se soucier aucunement des principales préoccupations exprimées par les élus municipaux. C'est probablement ce qu'on appelle l'«autre façon de gouverner»: Tu fais ce que je te dis et tu te tais, sinon je vais te punir. Comme pour les fusions municipales, c'est: Marche avec nous autres, ou on va te couper les vivres; on va te punir.

Permettez-moi, M. le Président, de ramener ce projet de loi dans une perspective régionale. Le projet de loi n° 77 oblige donc une municipalité de 5 000 habitants et moins à conclure une entente avec la Sûreté du Québec pour ses services de police. Où retrouve-t-on ces municipalités de 5 000 habitants et moins sinon dans les régions du Québec? Le Québec de demain, c'est le Québec des régions, a dit le ministre d'État au Développement régional. Ça, c'est le discours. La réalité est toutefois bien différente. À quoi donc ressemblera le Québec de demain si ce gouvernement continue d'abuser de la sorte des municipalités, de transgresser sans aucune pudeur ni aucune retenue les règles du jeu pourtant clairement établies?

Jeudi dernier, le ministre des Finances, dans une déclaration solennelle à l'Assemblée nationale, abolissait, comme ça, tout d'un coup, le remboursement partiel de la TVQ sur les biens et les services achetés par les municipalités. Et voilà, d'un simple claquement de doigt, 76 000 000 $ venaient d'être subtilisés des poches des contribuables via les goussets des municipalités. Et pourtant, les municipalités étaient bien loin d'imaginer un tel scénario d'horreur, elles qui venaient de compléter ou étaient sur le point de terminer l'exercice budgétaire de la prochaine année financière.

Le gouvernement libéral l'a fait dans le passé, nous diront les gens d'en face. Oui, mais de façon différente, et combien différente: par exemple, le transfert d'une partie du réseau routier local, et c'est une décision qui est maintenant appréciée par les municipalités. Mais il y avait en contrepartie un programme d'aide, qui accompagnait notre politique, de 50 000 000 $ par année. D'ailleurs, le gouvernement péquiste se refuse de le maintenir.

M. le Président, on emploie souvent cette expression en région: Quand le vase est plein, il faut savoir s'arrêter. Et là le gouvernement ajoute ce qu'il faut pour que la coupe déborde. Trop, c'est trop, assez, c'est assez, vous disent les élus municipaux. Ainsi, pour donner l'illusion aux contribuables qu'il gère efficacement son propre budget, qu'il respecte son engagement de réduire à zéro son déficit annuel d'ici l'an 2000, ce gouvernement déverse une bonne partie de ses responsabilités sur le dos des municipalités, les forçant même à s'endetter et à taxer pour faire face à ce pelletage excessif. Quand on sait que de plus en plus les municipalités doivent se substituer au gouvernement pour assurer des services autrefois dispensés par ce dernier – qu'on pense à l'entretien des routes, au financement du transport en commun et bientôt aux services de police – on peut facilement imaginer qui aura à payer la note en bout de piste: les payeurs de taxes dans les différentes municipalités du Québec. On a vu dernièrement que même les régies régionales de la santé, pour exécuter la commande du ministre de la Santé, devront, elles aussi, recourir encore plus aux emprunts.

Un éditorialiste de La Tribune de Sherbrooke a d'ailleurs bien saisi le drame qui se pointe à l'horizon pour les régions. Il dit, et je le cite: «Mais le danger réel est de créer la pauvreté des collectivités et la pauvreté des moyens, désagréger le tissu social et détruire des institutions bâties de longue date.» Fin de la citation.

Comment ce gouvernement peut-il nier cette évidence et rester sourd aux récriminations des régions qui, lentement mais sûrement, se vident de leur substance? Le projet de loi n° 77, loi qui modifie la Loi de police, n'est rien d'autre que la propre incurie du gouvernement dans sa recherche de solutions pour atteindre son objectif de déficit zéro. Mais voilà, il privilégie les solutions faciles, celles qui ne nécessitent aucun effort, pour pouvoir oser prétendre qu'il a fait le ménage dans ses finances publiques, pendant que les municipalités, elles, sont en train de s'asphyxier sous le poids de nouvelles responsabilités, sans avertissement et sans transfert de ressources financières.

Et, tantôt, le gouvernement va demander aux mêmes municipalités d'ouvrir leur bourse pour faire du développement régional. Mais le gouvernement l'aura vidé avant et, encore une fois, il y aura augmentation des taxes municipales, cette fois, pour favoriser le développement local et régional.

Nous avons à maintes reprises, comme opposition officielle, dénoncé le double langage de ce gouvernement. Je dois reconnaître que ce projet de loi nous donne encore raison. Le gouvernement s'est prononcé à plusieurs reprises en faveur de l'autonomie municipale et contre l'imposition de solutions mur à mur. L'autonomie municipale, dans ce projet de loi, en prend pour son rhume. En effet, on ne laisse guère le choix aux municipalités en les obligeant à conclure une entente avec la Sûreté du Québec pour ses services de police, et il en sera de même pour toutes les municipalités, indépendamment de leur expérience ou de leur situation particulière.

M. le Président, qu'en pensent les municipalités du comté de Richmond? Si j'avais à vous livrer tout ce qu'on m'a dit, tout ce qu'on m'a écrit là-dessus, j'aurais besoin de tout l'après-midi, au nom de municipalités, de municipalités régionales qui m'ont écrit pour s'objecter à ce projet de loi du ministre, à cette intention du gouvernement. Qu'il me suffise de mentionner les municipalités suivantes: Shipton, Saint-Lucien, Garthby, Saint-Rémi, Tingwick, Warwick canton, Wotton, Kingsey Falls, Saint-Marthyrs-canadiens, Saint-Samuel de Horton, Kingsey canton, Saint-Joseph-de-Ham-Sud, Notre-Dame-du-Bon-Conseil village, Saint-Claude, Saint-Fortunat, Saint-Camille, Notre-Dame-du-Bon-Conseil paroisse, Sainte-Clothilde paroisse. Je pourrais continuer, M. le Président, mais il me semble que ça devrait être suffisamment clair pour que les gens d'en face s'arrêtent à cette levée de boucliers exceptionnelle, unanime dans nos milieux contre l'adoption de ce projet de loi.

Et j'ai pris le temps de vérifier quelque peu l'impact. Je comprends mieux maintenant pourquoi ces gens s'y objectent. Je prends par exemple la municipalité de Saint-Cyrille, une municipalité de 3 888 de population. Actuellement, elle paie, pour la police, 147 000 $; avec le projet de loi du ministre, ça va passer à 260 000 $. Une municipalité comme Ham-Nord, de 1 039 de population, qui paie 24 000 $, va passer à 44 000 $. Une municipalité comme Saint-Fortunat, de 270 habitants, va passer de 9 000 $ à 17 000 $. Une municipalité comme Warwick canton, de 1 994 habitants, passe de 73 000 $ à 135 000 $ de taxation. Une municipalité comme Cleveland, de 1 659 de population, ça va devoir lui coûter quelque chose comme 82 000 $, alors que ça lui en coûte actuellement 46 000 $. Et on pourrait continuer. Dans Kingsey canton, le même phénomène. Dans Shipton, 3 000 de population, 74 000 $ de taxes actuellement, ça va devenir 135 000 $. Tingwick, même chose, 43 000 $ devient 92 500 $.

Donc, M. le Président, c'est bien clair que les élus municipaux sont conscients que le gouvernement est en train de refiler la note à leurs contribuables, à leurs payeurs de taxes. Alors, pourquoi ces gens-là accepteraient sans maugréer les intentions gouvernementales de pelleter chez eux son incapacité à régler véritablement ses problèmes budgétaires?

Je pourrais vous citer, si le temps me le permettait, quelques autres journalistes qui ont pris position dans ce dossier, mais, M. le Président, je devrai conclure. Pour imposer sa police aux municipalités, le ministre nous dit que les services vont être meilleurs. Ça aussi, je veux vous indiquer que l'immense majorité des municipalités avec lesquelles je me suis entretenu ne croient pas le ministre, parce qu'elles savent qu'il a réduit les effectifs de la Sûreté du Québec, et elles savent très bien que le service de police ne sera pas meilleur parce qu'il y a eu dépôt du projet de loi du ministre en cette Chambre et que l'intention réelle du ministre, c'est de financer les services de la Sûreté du Québec, point à la ligne.

(15 h 40)

Mais, M. le Président, ce pelletage est la conséquence directe d'un phénomène qui est grave, très grave, encore plus grave que le projet de loi qu'on a devant nous, qui est celui de l'incapacité de ce gouvernement de créer les emplois nécessaires à l'augmentation des revenus du gouvernement. Alors, qu'est-ce que le gouvernement a décidé de faire comme suite à son incapacité? Il a décidé de culpabiliser les autres. Alors, coupables, les commissions scolaires, coupables, les municipalités, coupables, les entreprises, coupables, les employés du secteur public, coupables, les contribuables dans les différentes municipalités. Alors, tout le monde doit payer pour l'incapacité de ce gouvernement, et au premier rang, les municipalités. Et ça nous apparaît, M. le Président, de ce côté-ci de la Chambre et de celui qui vous parle, tout à fait inacceptable. Et je pense qu'il est de mon devoir de représentant du comté de Richmond à l'Assemblée nationale de faire tout ce qui est en mon pouvoir pour convaincre le gouvernement de modifier très largement ou encore de retirer ce projet de loi qui est devant nous.

Le gouvernement se prépare, M. le Président, d'autres problèmes en traitant aussi cavalièrement le monde municipal. Il subira les lourdes conséquences au plan politique mais aussi sur le plan du bon fonctionnement du gouvernement dans son ensemble. Et, M. le Président, je connais suffisamment la députation en cette Chambre pour vous dire que, des deux côtés de la Chambre, je pense que la députation, les députés respectent les élus municipaux. Eh bien, M. le Président, j'espère que, de l'autre côté de la Chambre, on va prendre conscience que globalement, quand on voit par ailleurs le gouvernement intervenir avec un projet de loi comme celui qu'il nous présente, il fait la démonstration nette et précise qu'il ne respecte pas les élus municipaux. Et ça, M. le Président, c'est grave, dans l'histoire d'un gouvernement, de traiter de pareille façon un autre niveau de gouvernement.

Alors, j'espère que les collègues, qui, probablement comme nous en cette Chambre, même s'ils sont de l'autre côté de la Chambre, souhaitent que les élus municipaux soient traités de façon convenable par le gouvernement, auront l'occasion... S'ils ne le font pas en cette Chambre, M. le Président, ils le feront à l'intérieur de leur caucus, ils expliqueront jusqu'à quel point il est important d'établir un dialogue sérieux, un dialogue crédible avec cet autre niveau de gouvernement, des élus de la population également, que sont les conseils municipaux à la grandeur du territoire québécois.

Il y va, à mon avis, M. le Président, de la crédibilité et de la qualité des relations du gouvernement avec ses partenaires du monde municipal. Et dire qu'on nous parle, M. le Président, dans un pareil contexte, de régionalisation. Bien, moi, je vous dis que ça augure mal, M. le Président, nous parler de régionalisation, de vouloir confier de nouvelles responsabilités aux municipalités au même moment où on leur fait un pareil affront avec une loi qui, sans aucune consultation, sans aucun avertissement, vient donner une pareille gifle au monde municipal. Or, M. le Président, il est encore temps pour ce gouvernement de refaire ses devoirs, et je souhaite que les interventions à répétition de ce côté-ci de la Chambre pourront l'en convaincre. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Richmond. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Mme la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, M. le Président, je tiens, à mon tour, à intervenir sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. D'entrée de jeu, M. le Président, je vous mentionnerais que lorsque mon collègue, le député de Frontenac et porte-parole en matière de sécurité publique, a questionné le ministre, il y a de cela quelques semaines, sur sa réforme de la police, le ministre s'est levé en cette Chambre et a dit à tout le monde présent – tout le monde ici présent, puisque la plupart des députés étaient en cette Chambre – qu'il n'avait aucun problème avec ce projet de loi là, et qu'il avait parcouru toute la province depuis l'été dernier et que tout le monde était d'accord avec son projet de loi et les amendements qu'il apporterait à la Loi de police, et qu'il ne comprenait pas pourquoi, de ce côté-ci, on avait des objections.

M. le Président, j'ai commencé, comme porte-parole de l'opposition en affaires municipales, à recevoir des résolutions de conseils municipaux dès la fin de l'été sur ce projet de loi là. J'en ai reçu des centaines. Mon collègue de Frontenac, qui est le porte-parole, en a reçu des centaines, et nous étions en copie conforme aux lettres qu'a reçues le ministre responsable de la police. Donc, déjà les conseils municipaux avaient un problème majeur avec ce projet de loi là. Lorsqu'on lit les journaux et lorsqu'on retourne dans le temps – pas il y a trois ans, quand on retourne dans le temps, il y a quelques semaines – l'UMRCQ, par la voie de sa présidente, a dénoncé vertement ce projet de loi, l'a dénoncé certainement pas parce que c'était un bon projet de loi, l'a dénoncé parce qu'on faisait encore une fois une brèche dans l'autonomie des municipalités et qu'on faisait encore une fois – et j'en ferai la démonstration dans quelques minutes – une brèche dans le choix que les municipalités peuvent faire du type de service qu'elles veulent donner à leurs contribuables. Quand la municipalité donne un service à ses contribuables ou lorsqu'une MRC ou une communauté urbaine donne des services, on se donne collectivement des services. On ne décide pas un bon jour d'en donner ou de ne pas en donner. C'est parce que la population souhaite avoir ce type de service là.

À la demande de mon collègue de Frontenac, le ministre a organisé en catastrophe une consultation sur son projet de réforme policière, et nous avons entendu, la semaine dernière, plusieurs groupes. Oh, surprise! Contrairement à ce que le ministre avait annoncé ici, en cette Chambre, il n'y a personne qui est venu féliciter le ministre pour sa réforme policière, il n'y a personne qui est venu féliciter le ministre pour son projet de loi et, au contraire, tout le monde – l'UMRCQ, l'UMQ, la Fraternité des policiers de la CUM, à Montréal, l'Association des directeurs de police du Québec – est venu, et je peux vous en nommer d'autres, M. le Président. On n'a qu'à relire les procès-verbaux de ces consultations publiques pour s'apercevoir que le projet de réforme du ministre de la Sécurité publique non seulement ne fait pas l'unanimité, mais il n'y a personne qui en veut, pour toutes sortes de raisons. Je m'attarderai plus particulièrement sur trois éléments du projet de loi et j'aimerais soulever ici qu'à l'égard de ces trois projets de loi là on bafoue l'équité, on bafoue le choix et on bafoue l'autonomie des municipalités.

Plusieurs de nos collègues d'en face nous diront qu'en 1990-1991, avec la réforme Ryan, il y avait eu transfert de responsabilités, que ça avait été épouvantable. On n'arrête pas d'en entendre parler. Je peux vous le dire – parce que, vous le savez, je portais un autre chapeau à l'époque – moi aussi, j'avais trouvé que le transfert, surtout au niveau du transport en commun, avait été un peu difficile à digérer au moment où ça a été annoncé. Mais mon collègue l'a bien dit tout à l'heure, que le transfert s'était fait avec aussi des programmes de réajustement. S'il y a un élément que j'avais trouvé équitable dans la réforme présentée en 1990, c'était bien celui où on obligeait toutes les municipalités de 5 000 habitants et plus à se doter d'un corps de police. Il était absolument inéquitable à l'époque que les municipalités de 10 000 – parce qu'il y en avait au Québec – de 15 000, de 7 000 profitent des services gratuits de la SQ alors que d'autres de 5 000, de 10 000 et de 15 000 s'étaient constitué un corps de police et que les contribuables se payaient ce type de service. Alors, quant à moi, cet élément-là de la réforme a été très bénéfique et il a été très équitable.

(15 h 50)

Le gouvernement actuel, par le biais de ce projet de loi, maintient, en fait, la politique pour ce qui a trait aux 5 000 et plus et dit aux municipalités: Si vous êtes une population de 5 000 et plus ou si vous faites un regroupement et que ça comporte une population de 5 000 et plus, vous allez pouvoir vous doter d'un corps de police ou vous aurez le choix: Vous pourrez vous prévaloir des services de la Sûreté, évidemment en tenant compte que vous allez devoir payer pour ces services-là. Là où j'ai un problème et où mes collègues ont un problème, que le monde municipal a un problème, c'est l'article de loi qui dit que, si vous regroupez une population de 5 000 et moins ou si vous avez une municipalité de 5 000 et moins, vous allez devoir en tout temps, sauf exception, discrétion du ministre – ça, on a pris l'habitude avec ce gouvernement-là, discrétion du ministre, décret gouvernemental – utiliser les services de la Sûreté du Québec. M. le Président, c'est totalement inacceptable de ne pas laisser le choix aux municipalités du Québec ou aux MRC qui souhaiteraient se doter d'un corps de police régional de ne pas avoir le choix de le faire. C'est une entrave à l'autonomie, c'est une entrave au choix que les municipalités peuvent et doivent faire. Si on est tous d'accord qu'il doit y avoir des services de base au niveau de la sécurité publique, on devrait tous être d'accord que les municipalités sont suffisamment autonomes. Les lois sont là pour le démontrer. Ce sont des lois provinciales, mais elles sont là pour le démontrer. Les municipalités devraient aussi avoir le choix du type de corps de police.

Le ministre, M. le Président, nous dit que, de toute façon, ce sera le service à la carte et que la Sûreté du Québec pourra offrir tous les services dont la municipalité ou dont la MRC aura besoin. Il faut se questionner sur cette obligation que le ministre fait aux municipalités du Québec, les 5 000 et moins, d'utiliser les services de la Sûreté du Québec. Et loin de moi l'idée ici de dire que les agents de la Sûreté ne sont pas qualifiés et ne sont pas compétents. Je n'ai jamais pensé ça puis je ne viendrai pas le dire ici.

Mais, moi, j'aimerais, comme contribuable, avoir le choix. Et, M. le Président, vous savez comme moi qu'une des raisons qui motive le ministre, ce qui guide le ministre dans cette réforme, c'est évidemment les coûts excessifs de la Sûreté du Québec, coûts excessifs qui découlent évidemment des conventions collectives qui sont très généreuses, et elles sont encore très généreuses. Il en coûterait beaucoup moins cher pour le même type de services – c'est facile à démontrer – si une MRC avait le choix de constituer son propre corps de police.

Donc, en ce qui regarde le choix, l'article qui oblige les municipalités de 5 000 et moins, ou la MRC, à faire appel aux services de la Sûreté du Québec plutôt que d'aller en appel de propositions ou de se constituer un propre corps régional démontre clairement dans notre esprit qu'on n'a aucun respect ici, que ce gouvernement-là n'a aucun respect pour les municipalités, aucun respect pour l'autonomie de gestion. On a une multitude d'exemples. Je pourrais vous ouvrir une parenthèse qui, moi aussi, durerait jusqu'à cette nuit. Je ne veux pas le faire parce que j'ai d'autres collègues qui ont bien hâte d'intervenir sur ce projet de loi là, et je sais que mes collègues ministériels ont bien hâte de nous entendre aussi sur ce sujet. Mais c'est un mépris, quant à moi, à l'égard des élus municipaux et de leur capacité de prendre elles-mêmes et eux-mêmes les décisions qui concernent leurs contribuables.

Le premier ministre a dit en cette Chambre en mars dernier que les machines et les structures seraient affectées par les décisions du gouvernement, mais jamais les citoyens ni les contribuables. Quand on attaque ou qu'on touche une structure; quand on coupe 50 000 000 $ dans la TGE, la taxe sur les télécommunications, gaz, électricité; quand on annonce de façon unilatérale que les 76 000 000 $ qui revenaient aux municipalités par le biais du remboursement partiel de la taxe de vente, on coupait ça à partir de minuit jeudi soir dernier; quand on impose 40 000 000 $ de plus pour les coûts de la Sûreté du Québec aux petites municipalités; quand on impose 1 % de plus sur la masse salariale des corps policiers pour financer l'Institut de police du Québec, M. le Président, c'est un mépris total à l'égard des élus du Québec et c'est un mépris à l'égard des contribuables qui, eux, ne sont pas des structures; ce sont des citoyens, des payeurs de taxes. Et ces gens-là, s'il y a des structures qui s'appellent des municipalités, des corporations municipales, des organismes municipaux, c'est parce qu'il y a des services qui sont dispensés aux citoyens.

Je vous avoue bien franchement, là, que je suis bien contente de ne pas être du côté du gouvernement, M. le Président, parce que je ne sais pas comment j'expliquerais ça dans mon comté et dans les comtés voisins, ces nouvelles mesures qui viennent encore une fois, sous le couvert de l'assainissement des finances publiques... C'est trop facile actuellement de dire: On coupe ci, on coupe ça, on ajoute ci, on ajoute ça, sans vraiment démontrer l'exercice sérieux qui a été fait à la base de ces décisions. Donc, en ce qui regarde la constitution du corps de police, on ne peut pas être d'accord avec une proposition comme celle qui se retrouve dans le projet de loi n° 77.

Le deuxième élément où j'aimerais démontrer que le sens d'équité, le choix et l'autonomie font carrément défaut dans ce projet de loi là, c'est quant à la possibilité pour les officiers de la Sûreté, les directeurs de tout autre corps de police, de pouvoir se présenter comme candidats. On pourrait longtemps ainsi discourir sur la pertinence ou pas qu'un policier, quel que soit son grade, se présente à tout poste, que ce soit au niveau municipal, provincial ou fédéral. Le gouvernement a décidé que tous ceux qui n'étaient pas hauts gradés pouvaient le faire. On a exclu les directeurs et les officiers de la Sûreté, ainsi que les directeurs généraux des corps de police.

Lorsqu'on a interrogé le Directeur général des élections sur ce sujet, on lui a demandé s'il y avait, quant à lui, un problème quant à la distinction qu'on faisait: Est-ce qu'un policier n'était pas de toute façon un policier, qu'il soit à la direction de son organisation ou qu'il soit à la base de son organisation? Pourquoi le constable pourrait se présenter et que le directeur ne pourrait pas le faire? Il n'y avait pas de raison qui justifiait ça si ce n'est que le gouvernement avait été effectivement un petit peu timide dans sa législation et qu'il comprenait finalement qu'on souhaitait voir comment ça irait avec les constables et les agents et que, par la suite, on verrait s'il y avait lieu d'accorder ce privilège de se présenter à un poste élu aux directeurs et aux officiers de la Sûreté et aux directeurs de tout autre corps de police.

Je trouve ça un peu étrange, M. le Président. D'un côté, on dit: Vous pouvez le faire; de l'autre côté, on dit: Bien, toi, tu ne pourras pas y aller, t'as plus d'expérience, tu connais mieux ça ou... Alors, toi, on ne bénéficiera pas de ton expertise, on va attendre, on va voir si tu vas pouvoir y aller. On ne peut pas accepter ça. De la timidité. Évidemment, je reconnais que c'est la réponse de M. Côté, mais le ministre semblait embarquer dans ces explications, et je pense que c'est inacceptable.

Si on le permet à la base, de se présenter, qu'on le permette à tout le monde pour que tous les gens du Québec puissent bénéficier de l'expertise de ceux qui ont gravi les échelons. On a questionné, évidemment, d'autres intervenants sur ce sujet, puis ils trouvaient un peu cavalière cette distinction que fait le gouvernement, que fait le ministre à ce sujet-là. On a donc fait fi de l'équité en ce qui regarde cet article-là, on a fait fi également du choix. Un policier haut gradé qui aurait souhaité servir sa communauté ou servir sa province ou son pays ne peut pas le faire, et on lui enlève évidemment son autonomie de décision.

(16 heures)

Un autre élément dans le projet de loi concerne l'Institut de police et son financement. Ça, c'est à peu près la meilleure que je n'ai pas vue. On va charger aux corps de police, par le biais de leur masse salariale, 1 % qui va être affecté à l'Institut de police du Québec. Bien, si vous aviez été présent, M. le Président, lors des consultations publiques sur ce sujet, vous auriez vu le ridicule de cette histoire, et j'aimerais, encore là, vous faire une certaine démonstration en vous citant un passage du mémoire qui a été présenté par la Communauté urbaine de Montréal. Son directeur général, M. Jacques Duchesneau, c'est-à-dire pas le directeur général mais le directeur du service de police de la Communauté urbaine de Montréal, était totalement frustré, d'abord, d'avoir été averti à la dernière minute. On a dû faire notre propre mea culpa, puisque c'est nous, ici, qui avons exigé des consultations publiques quelques jours avant que le ministre décide d'aller de l'avant avec son projet de loi. Le directeur, donc, M. Duchesneau, nous a fait une démonstration hors de tout doute que ça coûterait moins cher de former les recrues, comme ils le font déjà à la Communauté urbaine de Montréal. Ils n'ont pas besoin de les envoyer coucher en résidence, là, ça coûte une fortune, aller à l'Institut de police du Québec. Si le gouvernement ne veut pas garder son institut de police, ou n'a plus les moyens de le garder, les policiers, la Fraternité, la police de la Communauté urbaine de Montréal sont venus nous dire: On est capables de le faire pour moins cher. Et la démonstration, je vous la lis: Actuellement, ça va coûter, par le biais de cette proposition de 1 %, à la Communauté urbaine de Montréal 2 193 000 $; je vous rappelle que c'est 1 % sur la masse salariale de 1997. La démonstration qu'en a fait M. Duchesneau, c'est qu'il en coûterait 364 000 $ pour former ces mêmes personnes à la Communauté urbaine de Montréal. Vous ne viendrez pas me dire, collègues du côté ministériel, qu'il n'y a pas une économie à faire là! Pour quelle raison demande-t-on aux municipalités du Québec, par le biais de leur corps policier, de contribuer 1 % de la masse salariale à l'Institut de police du Québec sans qu'on ait même fait l'exercice de se demander: Est-ce qu'on en a encore besoin, puis est-ce que cette formation-là ne peut pas être faite autrement, et ailleurs, et de façon moins coûteuse?

L'exemple que je veux prouver par ça, c'est que je veux démontrer qu'on décide qu'on a besoin de 1 000 000 000 $, on a besoin de millions, à gauche et à droite, et tout ce qu'on fait, on se dit, un bon matin: Qu'est-ce que je pourrais bien faire pour aller chercher 76 000 000 $, qu'est-ce que je pourrais bien faire pour aller chercher 40 000 000 $, qu'est-ce que je pourrais bien faire pour aller chercher 50 000 000 $, qu'est-ce que je pourrais bien faire pour aller chercher 8 000 000 $ pour financer l'Institut de police du Québec? Moi, je vous dis, M. le Président: C'est assez, les municipalités en ont un ras-le-bol collectif. Vous n'avez qu'à lire toutes les résolutions qui ont été envoyées au ministre – je peux vous en déposer ici des centaines – vous pourrez lire les articles de journaux. Et quand le ministre des Affaires municipales se lève puis qu'il nous dit en cette Chambre: Il n'y a pas de problème, c'est juste 1 % des budgets. Ça paraît qu'il n'en a jamais fait, des budgets, lui. M. le ministre de la Sécurité publique: Il n'y a pas de problème, tout le monde est d'accord avec ça. Bien, il n'y a personne qui est d'accord avec ça.

Les gens sont d'accord avec le fait qu'on doive couper, les gens sont d'accord avec le fait qu'on doive rationaliser, mais les gens ne sont pas d'accord avec la façon dont ça se fait. C'est un mépris incroyable à l'égard des élus municipaux. Et je serais gênée, je l'ai dit tout à l'heure, de me promener dans vos comtés puis d'aller expliquer comment on en est venu aujourd'hui à 200 000 000 $, sans aucune consultation avec le monde municipal, sans jamais s'être assis avec eux pour leur dire: Écoutez, il faudrait qu'on coupe 200 000 000 $, on «peut-u» s'asseoir, on «peut-u» essayer de trouver un moyen, puis c'est ça qu'on va faire pour le couper. Quand on a des partenaires qu'on respecte, c'est comme ça qu'on agit. Et, pour toutes ces raisons, je voterai contre le projet de loi n° 77.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nicolet-Yamaska.


M. Michel Morin

M. Morin (Nicolet-Yamaska): Merci, M. le Président. Il m'est très agréable aujourd'hui d'intervenir en cette Chambre sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Vous me permettrez d'intervenir plus particulièrement sur un des aspects du projet de loi, soit le financement de l'Institut de police du Québec, situé à Nicolet, soit dans le beau comté de Nicolet-Yamaska. Donc, je m'attarderai surtout à l'article 17.1 de la loi n° 77, soit le financement de l'Institut de police du Québec à Nicolet. Permettez-moi quelques réflexions concernant le maintien de l'Institut de police du Québec à Nicolet comme institution privilégiée de formation policière. La création de l'Institut de police du Québec s'est réalisée dans la poursuite d'objectifs précis et elle repose sur des caractéristiques diversifiées que j'aimerais faire connaître à cette Assemblée.

Premièrement, lors de sa création, en 1969, les organisations policières du Québec vivaient de nombreuses disparités concernant le choix de leurs interventions. On assistait, à l'époque, à des comportements différents selon les services de police, d'où le bienfait de la création de l'IPQ, qui donne depuis plus de 25 ans, à Nicolet, une excellente formation et surtout une formation uniforme à travers tout le Québec. Bref, l'IPQ a été créé afin d'unifier les interventions policières québécoises, et cela a eu pour effet de contrer les conséquences du non-consensus entre les organisations policières.

M. le Président, il est essentiel ici de bien définir la formation policière au Québec. D'abord, ce sont les cégeps – environ une dizaine à travers le Québec – qui donnent le cours de techniques policières. Mais l'étape majeure de leur formation se donne à Nicolet, à l'Institut, où les aspirants et aspirantes policières effectuent de nombreuses interventions policières et sont supervisés par une équipe d'instructeurs compétents et reconnus.

M. le Président, cette formation spécialisée se donne dans une des plus belles petites villes du Québec, soit à Nicolet. D'ailleurs, la ville de Nicolet a fait ses preuves depuis très longtemps dans le domaine de l'éducation et dans le domaine de la formation. Qu'il suffise de nommer ici le séminaire de Nicolet, fondé en 1803, où loge actuellement l'IPQ, le collège Notre-Dame-de-l'Assomption, l'école secondaire Jean-Nicolet, l'école d'agriculture. M. le Président, nous avons, à Nicolet, une tradition dans le domaine de l'éducation, et celle-ci fait l'envie de tous les Québécois et de toutes les Québécoises, et cela, dans un milieu favorable à l'apprentissage. Voilà autant de raisons qui militent en faveur de la formation policière dans ce milieu empreint de tolérance et de compréhension des apprentissages.

M. le Président, c'est un secret de Polichinelle que les grands centres urbains, dont Montréal entre autres, cherchent à récupérer l'Institut de police. D'ailleurs, la semaine dernière, le chat est sorti du sac lors des consultations. Il est essentiel et impératif que cette formation spécialisée se fasse dans un seul endroit afin d'éviter les différences dans cette formation spécialisée et aussi afin d'éviter que certaines techniques ne soient pas répandues sur tout le territoire québécois. C'est également pour cette raison, c'est-à-dire à un seul endroit, qu'il est plus facile à l'Institut de police du Québec de réagir rapidement s'il y a des modifications dans le curriculum, dans la formation et dans les structures. De cette façon, les policiers sont toujours formés de façon contemporaine, et les contenus sont actualisés et sont conformes à la réalité de l'intervention policière actuelle.

Un des grands objectifs qu'atteint l'Institut de Nicolet est l'uniformisation des techniques policières entre les divers services policiers québécois, ce qui permet à l'Institut d'être un chef de file dans l'évolution de la formation policière. À titre d'exemple, l'IPQ a développé un standard unique, un regroupement des diverses philosophies pertinentes. Exemple, dans le domaine du tir, nous avons, à Nicolet, une salle de tir sophistiquée qui a été aménagée à des coûts élevés afin que toutes les organisations policières aient la même formation.

(16 h 10)

M. le Président, ces différents apprentissages sont toujours soutenus par des professionnels de la pédagogie, des professionnels de la psychologie, des sciences de l'éducation physique, des ressources en audiovisuel et informationnelles. Il est également important de souligner que l'Institut de police du Québec s'est donné une mission importante dans le domaine de la recherche et du développement. Qu'il suffise ici de mentionner l'expertise qu'elle a su développer dans des domaines de cheminement académiques et comportementaux.

M. le Président, nous sommes conscients que ces changements dans la loi font des remous dans le monde municipal, mais celles-ci, les municipalités, doivent également réaliser que les services policiers de base constituent également une responsabilité municipale et qu'il est équitable qu'elles en assument d'ailleurs une partie des coûts. N'oublions pas que le gouvernement du Québec continue à assumer le tiers de la facture du financement de l'Institut de police du Québec.

Notre gouvernement est également conscient qu'il faudra peut-être entrevoir certaines adaptations vis-à-vis de l'IPQ. Nous ne sommes pas fermés aux suggestions en commission parlementaire. Mais il est essentiel, je dis bien, il est essentiel que l'Institut de police du Québec garde ses acquis et que ses acquis demeurent à Nicolet, puisque l'Institut y a fait, depuis 26 ans, réellement ses preuves à travers le Québec, le Canada et dans de nombreux pays qui y ont envoyé leurs policiers pour parfaire leur formation. M. le Président, cette décision du ministre de la Sécurité publique s'intègre très bien dans notre politique de décentralisation. Le Québec, c'est aussi le Québec des régions et des petites villes comme celle de Nicolet, où l'IPQ y a un apport économique majeur.

M. le Président, Nicolet connaît actuellement une période d'adaptation nécessaire mais douloureuse. Les transformations dans le domaine de la santé nous ont ébranlés sérieusement, le désengagement de l'État-providence nous a fait mal, puisque nous possédons, à Nicolet, des infrastructures énormes pour une population d'environ 8 000 habitants. Des édifices comme celui du parlement ici, nous en avons sept à Nicolet. Nicolet, c'est une ville épiscopale, c'est une ville de clochers grâce aux nombreuses communautés religieuses qui sont venues s'y établir il y a plus de 100 ans. Nicolet, c'est aussi une ville de culture, c'est une ville d'éducation également et c'est une ville aussi de formation policière où l'on y pratique un modèle unique au monde qui permet à nos policiers et policières du Québec d'y acquérir une formation de très grande qualité dans un climat de quiétude, de tolérance qu'est celui de la ville de Nicolet. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nicolet-Yamaska. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Westmount– Saint-Louis. M. le député.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, je suis heureux de prendre la parole sur le projet de loi n° 77 à ce moment-ci de nos débats, après le député de Nicolet qui nous a parlé évidemment du collège de Nicolet, de l'école de police de Nicolet, une école qui est reconnue depuis plusieurs années, comme il l'a indiqué, une école qui s'est installée dans des locaux historiques à Nicolet. Mais le député aurait pu nous mentionner aussi comment les maires de son comté ont reçu le projet de loi n° 77, il aurait pu nous dire comment ils étaient heureux éventuellement de voir leur facture grimper. Mais je peux citer le député et je peux annoncer au député qu'à Montréal et dans le restant de la province on est pas mal moins heureux du résultat réel du projet de loi n° 77.

À Montréal, 3 200 000 $ seront puisés à même l'enveloppe de la CUM pour financer l'école de police. Le ministre semble vouloir rapetisser les chiffres, mais les évaluations sont faites par la CUM. Et il a connu les gens de la CUM, le ministre, il a lui-même siégé à la CUM. Et, s'il ne prend pas au sérieux les évaluations de la CUM, le ministre prend peut-être au sérieux celles de l'Union des municipalités régionales de comté, qui publiait dans le volume 8, numéro 4, de son bulletin de liaison, décembre 1996... Ce qu'il y a de malheureux dans ce bulletin, dans ce volume 8, numéro 4, du bulletin de liaison, c'est que l'UMRCQ va être obligée de publier un autre bulletin de liaison pour décembre parce qu'ils sont déjà en retard. On disait ici: «Réforme policière. L'UMRCQ blâme l'administration Bouchard.» Une des raisons majeures pour lesquelles on blâme l'administration Bouchard, c'est d'avoir pelleté près de 50 000 000 $ dans les enveloppes des municipalités en les forçant à recourir à la Sûreté du Québec, pour la majorité d'entre elles qui ont moins de 5 000 habitants, et effectivement à payer beaucoup plus cher que les services qu'ils s'offrent actuellement.

Dans la conclusion de ce bulletin de liaison, l'Union des municipalités régionales de comté disait: «En conclusion, l'UMRCQ rappelle au gouvernement Bouchard qu'il a pelleté des factures pour un montant de 158 000 000 $ dans les municipalités en 1996.» Or, c'était avant l'annonce de jeudi passé où on rajoutait un autre 76 000 000 $ par des modifications sur le remboursement de la taxe de vente du Québec à l'ensemble des municipalités du Québec qui vont coûter 10 000 000 $ à Montréal, 2 000 000 $ à Longueuil, 2 000 000 $ à Québec et plusieurs centaines de milliers de dollars dans chacune des municipalités du Québec. Alors, il faudra que l'UMRCQ rajoute un autre feuillet à son bulletin de liaison. Il y aura au moins deux, trois éditions en décembre juste pour ajuster le nombre d'augmentations de pelletage de dépenses et de coûts qui seront faites dans la cour des municipalités.

Mais, si on revient au projet de loi n° 77, le ministre de la Sécurité publique se fait dire allégrement que la facture de 40 000 000 $ n'est pas suffisante. On demande en plus une nouvelle ponction de 6 000 000 $ pour l'Institut de Nicolet, dont a parlé le député. Ça, le ministre prétend toujours que les chiffres sont trop élevés, mais c'est l'évaluation des gens qui vont les payer. Or, l'évaluation des gens qui vont les payer... En principe, ils sont assez grands pour savoir ce qu'ils vont payer, même si le ministre ne semble pas le croire.

Qui dit que le ministre de la Sécurité publique a finalement déposé son projet de loi sur la réforme des services policiers sans consulter personne? Est-ce que le ministre est d'accord avec ça? A-t-il consulté tout le monde? A-t-il consulté tout le monde? La présidente de l'Union des municipalités régionales de comté prétend que le ministre n'a consulté personne. Moi, je sais que j'ai entendu le ministre dire qu'il avait fait une grande tournée du Québec. Mais, pour moi, il a fait une tournée dans une caravane loin de tout le monde. Il n'a pas parlé à personne. La présidente de l'Union des municipalités prétend n'avoir jamais été consultée et que le monde municipal n'a jamais été consulté. «Sans consulter personne, dit l'Union des municipalités, il a ajouté aux dispositions déjà connues qu'il forcerait dorénavant chaque direction de police à faire une contribution d'environ 1 % sur sa masse salariale. Cet argent, 6 000 000 $ provenant des municipalités et 2 000 000 $ de la Sûreté du Québec, devrait servir à assurer la survie à long terme de l'Institut de police du Québec à Nicolet.» Mais ça, c'est une ponction de 1 % sur la masse salariale qui sera faite tant à la Sûreté du Québec que dans les municipalités. Et ça, le ministre aura beau prétendre qu'il a consulté, mais, encore une fois, l'Union des municipalités prétend le contraire.

(16 h 20)

L'Union des municipalités, l'Union des municipalités régionales de comté, tous s'entendent pour dire que le projet de loi est un déplacement d'argent qui va finalement obliger des augmentations de taxes municipales, particulièrement dans les petites municipalités à travers le Québec. On parle d'une augmentation qui va passer de l'équivalent de ce que ça coûtait actuellement pour le financement des polices locales, soit 0,10 $ le 100 $ d'évaluation à 0,18 $, presque le double. Est-ce que le ministre a consulté avant de transformer son modèle policier québécois et de l'imposer à l'ensemble du Québec? Le ministre pourra toujours prétendre que oui, M. le Président, mais la population, les gens de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec prétendent que non. Mais tout le monde ne peut pas avoir raison. Et tous ceux qui actuellement se plaignent ne peuvent pas tous avoir tort, même si le ministre prétend, lui, avoir raison.

Une chose est certaine, M. le Président, c'est qu'il y a 48 000 000 $ qui seront pris dans la poche des contribuables du Québec, par le biais des municipalités, pour financer des modifications à la Loi de police du Québec. En deux mots, le ministre, ce qu'il cherche à faire, dans le fond, c'est de faire financer une partie de la Sûreté du Québec par les municipalités régionales, et particulièrement les petites municipalités. Les petites municipalités, d'ailleurs – et elles s'en plaignent amèrement – n'auront plus le droit d'avoir ou d'instituer leur propre corps de police dans leur MRC. Dans la municipalité régionale de comté, on aurait pu installer un système de police, bâtir un corps de police. Maintenant, le ministre de la Sécurité publique le défend et oblige, à moins que lui-même soit d'accord, les municipalités locales à faire financer par leurs contribuables les augmentations pour le financement de la police, une police sur laquelle ils n'auront jamais aucun contrôle. Est-ce que le maire d'une des municipalités du comté de Nicolet, du comté de Drummond, du comté de Vaudreuil a un mot à dire sur les conditions de travail des policiers de la Sûreté du Québec, a un mot à dire sur l'organisation de la Sûreté du Québec? Jamais. Ce n'est pas dans le rôle des organisations municipales d'administrer la Sûreté du Québec. Par contre, on va leur demander de payer plus cher pour un service qui ne sera pas différent de celui qu'ils ont depuis déjà plusieurs années.

Le ministre prétend qu'on ne peut autoriser un corps de police à moins qu'il y ait 1 à 1,25 policier par 1 000 habitants. Il est assez particulier de constater, M. le Président, qu'au moment où on se parle il y a au Québec en plusieurs municipalités une protection, une assurance policière, pour les citoyennes et les citoyens, qui est basée sur juste la moitié du critère du nombre de policiers fixé par le ministre. Par exemple, 0,63 à 0,89 policier semble être une norme que l'on retrouve dans plusieurs municipalités locales, plusieurs petites municipalités. Toutefois, pourquoi aujourd'hui, par le biais du projet de loi n° 77, viendrions-nous obliger les municipalités à voir à augmenter le paiement d'un ratio de policiers qui ne les desservira pas davantage que ce qu'ils connaissent actuellement? Il n'y aura pas plus d'accidents dans la municipalité dans l'avenir qu'il y en avait il y a six mois, un an ou deux ans parce qu'on va les faire payer davantage pour leurs services de police. Il n'y aura pas plus de demandes ou d'infractions criminelles à Saint-Liboire ou à Saint-Dominique, dans le comté de Saint-Hyacinthe, qu'il y en avait l'an dernier, ou il y a deux ans, ou il y a trois ans. Il n'y aura pas plus de criminalité à Saint-Simon ou à Sainte-Madeleine qu'il y en avait les autres années passées. Par contre, les municipalités seront obligées dorénavant de payer pas mal plus cher pour un service qu'elles n'utiliseront pas plus et elles n'auront aucun mot à dire quant à l'avenir, à l'organisation, à la réforme, à la gestion de ce service: la Sûreté du Québec.

On peut comprendre aisément le problème qui se pose par ce pelletage sans avoir convoqué la Table Québec-municipalités ou sans avoir convoqué les gens de l'UMRCQ pour négocier le rôle d'un corps de police local à travers le Québec, le négocier et même s'être fait une tête comme gouvernement sur l'organisation de la police, mais en permettant aux gens locaux, aux élus locaux, de prendre leurs responsabilités sur un sujet aussi capital que la sécurité publique, M. le Président. La sécurité publique, ce n'est pas un problème, un dossier qui existe rien que pour Montréal. C'est un problème qu'on retrouve partout à la grandeur du Québec. Partout, des citoyennes et des citoyens ont besoin d'un corps de police efficace. Mais il n'est pas permis, il est exclu, dans la façon dont le ministre a conçu son projet de loi, que l'on puisse desservir des municipalités locales autrement que par le biais de la Sûreté du Québec. Et c'est évidemment de quoi se plaint grandement l'Union des municipalités régionales de comté.

M. le Président, quand on ajoute les 48 000 000 $ de pelletage plus les 110 000 000 $ précédents, qu'on est rendu à 160 000 000 $, et qu'on ajoute les 76 000 000 $ par le ministre des Finances jeudi passé, on est rendu à une facture d'au-delà de 225 000 000 $ à 240 000 000 $, uniquement payable par les contribuables municipaux à partir de l'an prochain et même, dans le cas du non-remboursement de la taxe de vente du Québec, à partir de jeudi soir, minuit.

M. le Président, c'est là une façon fort cavalière de faire affaire avec ses partenaires, les gens qui étaient invités il n'y a pas trois semaines, il y a un mois, à un sommet, le sommet de l'emploi, le Sommet sur l'économie et l'emploi. Ce Sommet est un véritable désastre, M. le Président. Depuis qu'il est terminé, ce Sommet-là, à peu près tous les soi-disant partenaires du gouvernement s'en sont dissociés. Que ce soit dans le domaine des relations de travail ou les différents syndicats, ils ont décidé et ont annoncé que le consensus était brisé. Autant, dans le domaine du monde municipal, l'Union des municipalités régionales de comté blâme l'administration Bouchard, autant l'Union des municipalités du Québec fait de même.

L'Union des municipalités régionales, pour la citer, M. le Président, dit qu'elle en a gros sur le coeur devant l'attitude du gouvernement Bouchard à se servir sans vergogne dans les budgets municipaux, et incidemment dans la poche des contribuables, pour atteindre son objectif de déficit zéro d'ici l'an 2000. «Faudra-t-il que l'on dise à M. Bouchard – dit l'Union des municipalités régionales de comté – que l'on se dissocie du consensus du Sommet pour l'emploi pour qu'il daigne écouter les 8 000 élus municipaux du Québec, des régions?» Huit mille personnes! Huit mille personnes qui sont élues dans des comtés qui sont représentés par des membres de l'Assemblée; 8 000 personnes qui sont bafouées; 8 000 personnes qui sont ridiculisées par le gouvernement, de la façon dont il s'y prend pour leur passer une partie de sa taxation, M. le Président. «Alors, daignera-t-il écouter les 8 000 élus municipaux du Québec et des régions ou faudra-t-il, comme les étudiants et l'Union des producteurs agricoles, menacer d'une manifestation devant le parlement du Québec pour qu'il soit sensible à nos arguments?» s'interroge la présidente de l'UMRCQ.

Je sais que le député de Charlevoix est un grand ami de la présidente de l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Elle est maire d'une municipalité de son comté. Je suis certain qu'il saura la convaincre, peut-être, d'atténuer ses propos dans l'avenir, mais il n'en demeure pas moins que celle-ci se trouve évidemment bafouée par la partie post-Sommet. Les consensus ne résistent plus à ce Sommet qui fut éphémère et qui, de toute façon, fut fort artificiel. Les consensus ne résistent plus, parce qu'ils ont été atteints, ni plus ni moins, par une espèce de magie d'un moment qui n'a pas pu résister à la réalité du temps qui passe.

(16 h 30)

M. le Président, les citoyens contribuables qui vont devoir débourser les 225 000 000 $ à 240 000 000 $ supplémentaires que leur transfère le gouvernement du Québec actuellement sont aussi ceux-là mêmes qui sont inquiets, au moment où on se parle, quelques semaines avant Noël, de savoir s'ils auront encore un emploi, quand ils en ont un, de savoir s'ils seront capables de payer leurs comptes courants, de payer leurs taxes municipales, de payer leurs taxes scolaires. Ils sont ceux qui sont en proie à une anxiété qui se retrouve et qui ne s'est jamais retrouvée au Québec, M. le Président. Pourtant, malgré tout, au-delà du blâme généralisé qu'on pourrait faire au gouvernement en ce qui a trait à sa façon de procéder avec le monde municipal en ce qui concerne le pelletage de factures, le pelletage de taxes aux contribuables, ce monde, la population du Québec, qui est en état d'anxiété, je le disais, est elle-même en proie à des problèmes économiques qu'on a peu ou jamais vus ici au Québec. Malheureusement, le Québec est devenu la terre contreproductive à l'égard de l'emploi. Le Québec est devenu, depuis six mois, un secteur, une province en arrière du Nouveau-Brunswick en ce qui concerne la création d'emplois. Depuis au-delà de six mois, le Québec a un taux de chômage qui est supérieur à celui du Nouveau-Brunswick. On n'a jamais vu ça dans notre histoire.

M. le Président, nous vivons des heures tristes et des heures critiques. Et, en même temps, on force le contribuable à essayer de dépenser plus d'argent pour garder sa maison. Combien de maisons retrouverons-nous, dans les semaines puis les mois à venir, chez Desjardins ou chez les autres banques, où, le prêt hypothécaire n'étant pas rencontré, les taxes n'étant pas rencontrées, on va tout simplement porter ses clés chez son banquier, chez son gérant de caisse populaire? Combien de ces cas-là? On va en avoir encore au Québec pour les six prochains mois, l'année qui vient, encore. Chaque cas est non seulement malheureux, chaque cas est un drame individuel, est un drame social.

Quand quelqu'un de ce gouvernement-là comprendra-t-il les réalités économiques de base? Quand quelqu'un de ce gouvernement-là comprendra-t-il que la véritable orientation que ce gouvernement doit prendre aujourd'hui, c'est de mettre tous ses oeufs, toutes ses opportunités dans la création d'emplois? La stabilité de l'emploi, c'est la mère de toutes les nécessités actuellement au Québec, c'est la mère de tous les voeux au Québec. Qu'on cesse ces transferts unilatéraux de taxation par le biais des municipalités aux contribuables. Qu'on fasse en sorte de cultiver cette obsession de l'emploi. Mais non, ce gouvernement, M. le Président...

M. le Président, dans les études économiques du Mouvement Desjardins, en perspective , la dernière parution du troisième trimestre – la dernière parution, on l'a eue aujourd'hui – l'étude économique concernant les perspectives économiques du point de vue des économistes du Mouvement Desjardins, l'indice d'emploi Desjardins: «Québec, la faible création d'emplois inquiète et inquiète encore. Depuis cinq mois, les revers subis en matière de création d'emplois inquiètent. Après la forte chute de l'emploi en juin et en juillet, on s'attendait à de meilleurs résultats. Le mois d'août devait nous apporter un fort rebondissement, mais l'emploi a de nouveau reculé en septembre.» On dit ici que la création d'emplois au Québec tranche totalement avec celle de l'Ontario et des provinces de l'Ouest. Par exemple, d'octobre 1995 à octobre 1996, il s'est créé 104 000 emplois en Ontario, alors que le Québec en a perdu 33 000. M. le Président, le véritable drame, au Québec, c'est celui de la création d'emplois. Et ça devrait être l'obsession de ce gouvernement, plutôt que le pelletage à répétition des taxes et des factures du gouvernement du Québec dans le secteur du monde municipal. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Westmount–Saint-Louis. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de joindre mes collègues et de prendre la parole à l'occasion du débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives.

M. le Président, ce projet de loi a été déposé en cette Chambre le 14 novembre dernier par le ministre de la Sécurité publique. Même si le nombre d'articles qu'il renferme, soit 26, n'en fait pas un projet de loi volumineux, nous savons maintenant, en raison du travail du porte-parole de l'opposition officielle, le député de Frontenac, et aussi de nombreuses interventions de mes collègues libéraux, que les conséquences du projet de loi, tel qu'il est rédigé, sont extrêmement graves à plusieurs égards. En effet, c'est toute l'organisation des services de police au Québec qui est touchée.

Présentement, la Sûreté du Québec dessert 1 248 municipalités, ce qui représente 24 % de la population. Elle compte entre 3 800 à 4 000 policiers syndiqués, dont 1 900 sont patrouilleurs. Une municipalité de moins de 5 000 habitants peut avoir son propre corps de police ou passer une entente avec une autre municipalité pour avoir des services de police. Elle peut aussi s'en remettre à la Sûreté du Québec ou à un autre corps de police municipal qui agit sur son territoire.

Ce projet de loi, M. le Président, obligera une municipalité de moins de 5 000 habitants à conclure une entente avec la SQ pour ses services de police, sauf si le ministre l'autorise à utiliser les services d'un autre corps de police. Elle n'aura donc pas le choix. Pour les municipalités de plus de 5 000 habitants, la situation reste la même: soit avoir son propre corps de police ou conclure une entente avec une autre municipalité ou avec la SQ. Si une municipalité ne se conforme pas aux dispositions de cette loi, la Sûreté du Québec la desservira. Pour mettre en place ces nouvelles dispositions, des pouvoirs réglementaires sont prévus au projet de loi. Des ententes entre la SQ et les municipalités y sont décrites et un comité de sécurité publique sera formé pour en faire le suivi.

Aussi, un fonds de service de police sera mis en place pour le financement des biens et services fournis par la SQ aux municipalités. À noter, M. le Président, que les surplus de ce fonds seront versés au fonds consolidé, tel que le déterminera le gouvernement. Et c'est un suivi, monsieur, la même chose au tourisme avec la détaxation. Au-dessus de 10 000 000 $, à cause de la détaxation, seront remis au fonds consolidé. Alors, c'est une autre taxe déguisée.

Qu'il s'agisse des municipalités de moins de 5 000 habitants, des municipalités de plus de 5 000 habitants, qu'il s'agisse des unions municipales, de l'UMRCQ et de l'UMQ, des administrations municipales et même de la Communauté urbaine de Montréal, tous les milieux qui sont préoccupés par la protection de la population québécoise qui est touchée sont contre le projet de loi n° 77.

Évidemment, en prenant la parole aujourd'hui, je pense encore à cette déclaration du premier ministre le 28 mars dernier, dans cette Assemblée, qui répondait aux attaques du chef de l'opposition officielle quant aux conséquences des coupures dans les crédits budgétaires du gouvernement, c'est-à-dire ses prévisions des dépenses pour l'année 1996-1997. Donc, ici même, notre bon premier ministre, malgré les coupures dans la création d'emplois, dans l'éducation et l'aide aux familles, répondait avec un ton dont lui seul a le secret: «Les citoyens ne seront pas touchés» dans le Journal des débats du 28 mars, à la page 139.

Ce rappel est extrêmement important quand on sait que par le projet de loi n° 77 ça représente une facture additionnelle de nouvelles taxes de 40 000 000 $ aux petites municipalités qui seront obligées de signer des ententes de services avec la Sûreté du Québec pour une durée de cinq ans. Le projet de loi n° 77 refile une autre facture de 8 000 000 $ aux municipalités qui ont un corps municipal, que le gouvernement oblige à financer l'Institut de police du Québec.

M. le Président, avec une telle facture le ministre de la Sécurité publique a dû, pour calmer la mauvaise humeur, accepter d'entendre plusieurs groupes à la demande de l'opposition officielle. Aussi, jeudi dernier, le ministre, pour qui tout semblait bien aller, s'est fait fortement dénoncer et critiquer par les groupes qui sont venus témoigner devant la commission des institutions. Pensons à l'UMRCQ et à sa présidente, Mme Simard. Pensons à l'UMQ et à la Communauté urbaine de Montréal également. Mais le ministre doit aussi réfléchir et comprendre que, derrière les témoignages entendus en commission parlementaire, ce sont toutes les municipalités du Québec.

(16 h 40)

Et j'aimerais, en passant, vous lire, de mon comté, l'opinion de plusieurs municipalités comme Thurso, comme Papineauville, comme Saint-André-Avellin village, comme Namur, Montebello Fassett, Duhamel, Chénéville, Vinoy, Ripon, Montpellier et beaucoup d'autres, qui ont envoyé dans mon bureau et aussi, j'espère, au ministre de la Sécurité publique l'opposition au projet d'organisation policière annoncé par le ministre de la Sécurité publique. Et, je vous la lis, M. le Président:

«Considérant que le ministre de la Sécurité publique, M. Robert Perreault, a annoncé une augmentation de coûts de 30 000 000 $ par année pour les municipalités utilisant les services de la Sûreté du Québec;

«Considérant que cette augmentation des coûts est de l'ordre d'environ 40 %;

«Considérant que le ministre de la Sécurité publique a également déclaré que la révision de l'organisation policière au Québec devra garantir l'équilibre actuellement observé entre la Sûreté du Québec, le service de police de la Communauté urbaine de Montréal et l'ensemble des corps de police municipaux;

«Considérant l'objectif du ministre de la Sécurité publique de consolider la Sûreté du Québec comme corps de police national et assurer sa capacité d'intervention sur tout le territoire du Québec;

«Considérant l'intention avouée du ministre de la Sécurité publique d'obliger les municipalités de moins de 5 000 habitants desservies par la Sûreté du Québec de ne recourir qu'aux seuls services de la Sûreté du Québec à l'avenir;

«Considérant qu'il serait impossible, selon le projet d'organisation policière du ministère de la Sécurité publique, pour les municipalités de moins de 5 000 habitants desservies par la Sûreté du Québec, de se placer sous la juridiction d'un corps de police municipal;

«Considérant qu'il est dans l'intérêt du monde municipal et des contribuables du Québec de laisser aux municipalités la possibilité d'être desservies par le corps de police de leur choix, compte tenu de la qualité et des coûts du service de police;

«Considérant que l'obligation qu'auraient les municipalités de moins de 5 000 habitants d'être desservies par la Sûreté du Québec aurait pour effet de les condamner à payer une facture sans qu'elles aient aucune autre alternative;

«Considérant que l'évaluation des coûts de service que donne la Sûreté du Québec, soit 200 000 000 $, est illusoire et exagérée;

«Considérant que le projet d'organisation policière du ministère de la Sécurité publique n'a pour but que de satisfaire les revendications des syndicats de policiers;

«Considérant que le gouvernement s'est plusieurs fois prononcé en faveur de l'autonomie municipale et contre l'imposition de solutions mur à mur;

«Il est proposé par le conseiller et appuyé [...] – et c'est tous les conseillers dans le comté de Papineau, M. le Président, et les maires aussi – résolu que le conseil des municipalités du comté de Papineau s'oppose à ce projet d'organisation policière annoncé par le ministère de la Sécurité publique et qu'il fasse connaître au ministre son opposition à ce projet;

«Qu'en matière d'organisation policière, il est essentiel de laisser la plus grande autonomie possible aux instances municipales;

«Que les municipalités locales doivent avoir le choix entre se regrouper au sein d'un corps de police régional, créer leur propre corps de police ou être desservies par la Sûreté du Québec, avec ou sans entente;

«Que le monde municipal rejette l'évaluation de 200 000 000 $ que le gouvernement du Québec a estimée pour les services de la Sûreté du Québec et que cette copie soit envoyée au ministre de la Sécurité publique.»

Alors, c'est toutes les municipalités du Québec et les municipalités de ma circonscription, tous les payeurs de taxes qui exigent que le gouvernement arrête sa folie de taxes, oui, M. le Président, sa folie de taxes: assurance-médicaments, 196 000 000 $; tarifs d'Hydro-Québec, hausse de 2,5 %; et les coupures en éducation avec les hausses de taxes imposées en conséquence par les commissions scolaires; et les coupures additionnelles et futures dans la santé.

En fin de semaine, M. le Président, un commettant m'a dit ironiquement: Si un seul Québécois n'a pas été taxé, c'est que Bernard Landry ignore son nom. Évidemment, il y aura de nombreuses remarques à ajouter...

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, selon l'article 35.1°, le député de Papineau sait très bien qu'il ne peut pas désigner un député par son nom.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Papineau, je vous prierais de bien vouloir continuer votre allocution tout en respectant en tout point notre règlement.

M. MacMillan: Je m'excuse, M. le Président, c'est un lapsus. Je voudrais vous rementionner ce que le commettant a dit dans mon comté: Si un seul Québécois n'a pas été taxé, c'est que le ministre des Finances ignore son nom. Je m'excuse, M. le Président.

Évidemment, il y aura de nombreuses remarques à ajouter. J'espère seulement que les députés qui forment le parti ministériel ont commencé à y réfléchir, car eux, comme nous, de l'opposition, auront à dénoncer ce geste. Mais, pire pour eux, ils devront répondre à leurs militants – que je respecte – et dire comment leur chef, le premier ministre, les respecte quand le projet de loi n° 77 constitue une nouvelle pièce à conviction dans le lourd dossier de ce gouvernement qui ne peut plus cacher son arrogance et son obsession pour l'indépendance, que la plus haute montagne de taxes ne peut plus faire mentir. Vous aurez compris, M. le Président, que je voterai contre l'adoption du principe du projet de loi n° 77. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Papineau. Je cède maintenant la parole à la députée de Marguerite-Bourgeoys.


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. C'est dans l'intérêt d'ailleurs des citoyens et des citoyennes de la municipalité de la Communauté urbaine de Montréal que je vais intervenir au moment de l'adoption du principe du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Avant de discuter de ce projet de loi, j'aimerais, pour le bénéfice de mes collègues, et plus particulièrement... rappeler au ministre de la Sécurité publique la situation du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal dans l'espace québécois.

Le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal offre des services policiers de base et, aussi, des services spécialisés à près de 1 800 000 résidents, soit le quart de la population du Québec, et protège aussi les quelque 375 000 personnes qui transitent quotidiennement sur le territoire de la CUM. Plus de 4 100 policiers travaillent au Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, ce qui en fait le service de police municipal le plus important au Québec et le deuxième en importance au Canada. Les policiers du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal comptent pour 30 % de l'ensemble des policiers qui oeuvrent au Québec. Il faut savoir aussi, M. le Président, qu'en 1994 les services policiers ont coûté plus de 1 300 000 000 $ aux citoyens du Québec et que le budget du Service de police de la Communauté urbaine de Montréal représente 30 % de ces dépenses.

Quant aux citoyens de la Communauté urbaine de Montréal, leur contribution, en 1994, représentait 37,4 % du total des budgets alloués à la police au Québec, soit 393 000 000 $ pour le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal et, aussi, 95 000 000 $ pour la Sûreté du Québec. Il faut aussi mentionner que, tel le grand centre urbain, la CUM doit faire face à une criminalité importante et aussi très particulière. M. le Président, en 1995, le tiers de tous les crimes rapportés au Québec et 43 % de tous les crimes de violence ont eu lieu sur le territoire de la Communauté urbaine de Montréal. Ce territoire est aussi un endroit privilégié pour les activités criminelles de crimes organisés, les activités criminelles de gangs de rues, et c'est sûr qu'une police de la Communauté urbaine de Montréal a su développer évidemment, avec le temps, une expertise remarquable en matière de lutte de ces formes de criminalité.

C'est forte de cette représentativité et des problèmes afférents que la Communauté urbaine de Montréal est indignée de l'attitude du ministre et s'explique mal, aussi, les orientations du projet de loi n° 77, d'autant plus que le ministre connaît aussi beaucoup la dynamique de la CUM.

J'aimerais rappeler au ministre de la Sécurité publique que le 16 avril dernier, la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Mme Vera Danyluk, lui écrivait ainsi qu'à son collègue le ministre des Affaires municipales, à la suite d'un communiqué de presse émis par le gouvernement annonçant la mise sur pied de ce comité interministériel chargé de consulter les partenaires municipaux et policiers au sujet de l'organisation policière. Elle avait alors réitéré l'importance de ce dossier pour la Communauté urbaine de Montréal et demandé spécifiquement qu'aucune décision ne soit arrêtée tant que des discussions approfondies n'aient eu lieu avec le ministère de la Sécurité publique sur la question des services de base et sur celle du coût des services spécialisés que le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal doit supporter à cause du rôle métropolitain de l'île de Montréal.

(16 h 50)

Je fais un aparté, M. le Président, pour souligner que le partage des coûts en matière de police mérite en effet une attention particulière, compte tenu du déséquilibre et, aussi, de l'inéquité qui prévalent à cet égard. Dans cette perspective, il apparaît équitable que la Communauté urbaine de Montréal soit compensée pour les coûts des services spécialisés qui sont assumés par son service de police et non la Sûreté du Québec. Ce n'est pas le sujet d'ailleurs aujourd'hui, et j'aurai aussi l'occasion d'en parler.

Mais, revenant à la lettre de Mme Danyluk, le ministre des Affaires municipales lui répondit le 22 mai dernier en l'assurant que le comité interministériel accorderait une attention toute particulière aux préoccupations de la Communauté urbaine de Montréal.

D'autre part, dans un document rendu public en mai 1996, intitulé «Révision de l'organisation policière au Québec: perspectives», le ministre de la Sécurité publique invitait les élus municipaux et les milieux policiers à revoir les priorités et à mieux répartir et utiliser les forces policières. Sans rappeler l'ensemble des enjeux cités par le ministre, je me permettrai d'en mentionner trois qui concernaient directement la Communauté urbaine de Montréal: le partage des coûts de la Sûreté du Québec, les services policiers de base et les services spécialisés, les problématiques propres aux grandes agglomérations urbaines de Montréal et Québec. Par ailleurs, il ne faudrait pas oublier que cette démarche devait également s'inspirer de quatre grands principes: l'autonomie municipale, l'équité entre les municipalités et les contribuables, l'efficience dans le déploiement des ressources policières et l'équilibre et la stabilité des grands ensembles policiers québécois.

Dans un autre document faisant suite à l'annonce du 1er mai, on précisait que la révision de l'organisation policière était rendue nécessaire pour une plus grande efficacité et une meilleure équité. Ça signifiait entre autres l'élimination de certains dédoublements ou chevauchements, l'amélioration de l'équité fiscale entre toutes les municipalités, qu'elles soient desservies ou non par la Sûreté du Québec, et la stabilisation des coûts des services policiers du Québec.

Or, tous croyaient que les balises étaient mises et que le ministre de la Sécurité publique se lançait dans une grande consultation transparente, ouverte qui tiendrait compte de l'opinion de tous, et plus particulièrement de ceux qui avaient déjà fait part de leur grand intérêt pour cette révision de l'organisation policière. Voilà que le 18 octobre dernier, à la Table Québec-municipalités, le ministre de la Sécurité publique expliquait qu'il avait terminé sa tournée de consultations et qu'il pouvait désormais définir sa nouvelle carte policière. Cependant, le ministre confirmait qu'il n'avait pas rencontré les représentants municipaux des trois communautés urbaines, que c'était voulu ainsi et que, concernant la métropole plus spécifiquement, il désirait poursuivre encore quelque temps sa réflexion avant de proposer un canevas de travail, ce qui est tout à fait normal. Eh bien, le «c'était voulu ainsi» sous-entendait certainement l'attitude actuelle du gouvernement et cachait fort probablement un souhait d'exclure du tableau les communautés urbaines, sinon on aimerait entendre le ministre ensuite là-dessus.

D'autre part, le projet de loi nous démontre que le ministre se préparait aussi à refiler une nouvelle facture aux municipalités. En effet, il y a à peine 10 jours, nous apprenions que le projet de loi serait adopté avant la présente session, et évidemment il faut s'imaginer la surprise de la Communauté urbaine de Montréal qui se voyait confrontée à un projet de loi sur lequel, contre toute attente, elle n'avait pas été consultée. Ils ont été entendus à la hâte, jeudi dernier, mais au dire même de Mme Danyluk, la présidente de la CUM, et je cite: «Nous nous demandions si nous serions entendus ce soir. Je me demande plutôt si l'on veut vraiment nous entendre.»

De même, sans aucune forme d'avertissement, le gouvernement décide d'imposer et d'insérer discrètement à l'intérieur du projet de loi une taxe supplémentaire en demandant qu'un montant équivalent à 1 % de la masse salariale de chaque corps policier serve à financer l'Institut de police de Nicolet. Pour les citoyennes et citoyens de la Communauté urbaine, il s'agit d'une facture de 2 200 000 $ pour soutenir ce financement. Le problème aussi, c'est que, quand la Communauté urbaine a reçu le téléphone – c'était vendredi, il y a à peu près deux semaines, si ma mémoire est bonne; j'ai rencontré Mme Danyluk le lundi sur un autre sujet – ils étaient complètement découragés parce que le budget était fermé. Alors, c'est un peu comme le budget de la ville de Montréal qui a été annoncé et présenté le mardi, et le ministre des Finances – j'y reviendrai tantôt, évidemment – leur imposait une taxe supplémentaire compte tenu de l'annulation de l'abattement de la TVQ. J'y reviens.

À ce sujet, l'intention du ministre de la Sécurité publique de détourner 1 % de la masse salariale des policiers municipaux pour financer l'Institut de police constitue aussi, en plus du coût, un exemple d'ingérence gouvernementale dans les affaires municipales. Ça aussi, le ministre devra y répondre parce que c'est ce qu'on nous dit à la CUM, d'autant plus que cette nouvelle taxe – car il faut l'appeler ainsi – apparaît, comme je le disais tantôt, après l'adoption du budget de la Communauté urbaine.

Vous savez, M. le Président, je parlais tantôt aussi de la surprise que la Communauté urbaine, la ville de Montréal et l'ensemble des villes ont reçue jeudi dernier sur l'abolition du remboursement partiel de la TVQ, qui va coûter aussi plusieurs millions de dollars aux contribuables montréalais.

Donc, M. le Président, ça n'a l'air de rien, mais, en trois semaines, les intervenants de la CUM – je parle pour eux parce que je suis critique en matière de la Métropole, mais ça s'applique aussi dans l'ensemble du Québec – reçoivent une facture non attendue, autant au niveau de la Sécurité publique que du ministre des Finances, alors que le budget était fermé ou en voie d'être fermé.

À cet égard et avec un exemple similaire, il faut, M. le Président, citer Agnès Gruda, dans La Presse de ce matin, qui commentait aussi ces nouvelles factures envoyées à la fin de l'exercice financier pour les villes, et elle disait: «À Montréal, on frise l'absurde – en parlant du pelletage de Québec. Québec vient de consentir un soi-disant pacte fiscal de 33 000 000 $ – moins que ce qu'on attendait, je dois avouer – et la nouvelle décision pourrait priver la ville de plus de la moitié de cette somme.» Donc, M. le Président, Mme Gruda dit ce que tous les intervenants de la CUM disent, et aussi à Montréal forcément, c'est: «On donne d'une main et on enlève de l'autre deux jours plus tard: c'est une triste blague.» Je ferme la citation.

Je rappellerai aussi au ministre de la Sécurité publique que le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal fait déjà sa large part en ce qui a trait à la formation. Il y a investi cette année près de 6 000 000 $, soit 2 % de son budget. De plus, avec l'instauration de la police de quartier, il y ajoutera un montant de 4 000 000 $ en formation. C'est dire que l'imposition de 1 % pour l'Institut de police aurait mérité certaines consultations, plus spécifiquement avec le principal intéressé, c'est-à-dire le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal.

M. le Président, les élus de la Communauté urbaine et les dirigeants de son service de police sont choqués et ne comprennent pas non plus comment le gouvernement peut procéder de cette façon, après toutes les représentations qui ont été faites au cours des dernières années concernant les nombreuses difficultés éprouvées à ce sujet par la Communauté urbaine. À cet égard, j'entends encore le directeur de police, M. Duchesneau, dire au ministre de la Sécurité publique la semaine dernière que, partout dans le monde, jusqu'au Burkina-Faso, on consulte le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal pour son expertise et que son propre gouvernement ne daigne pas le faire avant de déposer un projet de loi qui le concerne directement. C'est peut-être amusant, M. le Président, mais c'est surtout désolant.

M. le Président, il est dommage que le ministre nous présente un projet de loi, je dirais – et je répète aussi ce que l'on dit dans le milieu – incomplet. Pourquoi ne pas avoir amorcé des discussions sérieuses sur les inéquités, entre autres sur celles qui touchent les contribuables montréalais? À titre d'exemple, les citoyens et citoyennes de l'île de Montréal contribuent par leurs impôts pour 23 % du budget d'opération de la Sûreté du Québec alors qu'elle est très peu présente sur son territoire. Le principe de l'utilisateur-payeur ne semble pas être valable pour la Communauté urbaine de Montréal.

M. le Président, bien que le ministre ne semble pas d'accord, il doit, en toute intégrité, donner suite à la demande de la présidente de la Communauté urbaine de Montréal qui réclame des états généraux sur la police du Québec afin, comme elle le dit si bien, d'examiner la question dans une perspective globale plutôt que d'un point de vue restreint. L'idée d'un sommet est louable, c'est louable, mais insuffisante à notre point de vue.

Par ailleurs, j'invite le ministre à encourager la proposition du directeur de police, M. Duchesneau, à rapatrier de Nicolet à Montréal la formation de ses recrues. Il s'agit d'une idée qui est intéressante, qui mérite d'être mûrie, M. le Président, et, même si elle n'est pas tout à fait prête, il y a quand même un embryon d'idée qui pourrait aider aussi le ministre non seulement à avoir une police plus performante, mais aussi à sauver des sous alors qu'on en cherche partout, et ce, dans tous les secteurs.

(17 heures)

Donc, les questions qu'on doit se poser et auxquelles on aimerait que le ministre réponde dans sa réponse, c'est: Pourquoi le ministre de la Sécurité publique n'a-t-il pas tenu compte de cette réalité avant de déposer le projet de loi? Pourquoi avoir imposé une facture de 2 200 000 $ pour financer l'Institut de police sans explorer d'autres méthodes tenant compte de l'équité régionale? Pourquoi la CUM ne serait-elle pas compensée pour les coûts des services spécialisés qui sont assumés par son service de police et non par la Sûreté du Québec? Pourquoi, M. le Président?

Notre interprétation est celle-ci: c'est parce que le gouvernement continue d'ignorer les besoins fondamentaux de sa métropole, qui a besoin d'aide et non de factures supplémentaires. Et ça m'étonne d'un ministre qui, ayant oeuvré longtemps au sein de l'appareil municipal montréalais, devrait connaître ses difficultés et favoriser son épanouissement, ce qui me fait dire, connaissant le ministre comme je le connais, que sa façon de faire au niveau de l'application de la facture ne vient peut-être pas de lui mais beaucoup plus du président du Conseil du trésor, qui applique des pressions supplémentaires partout et dans tous les ministères pour que ceux-ci envoient des factures supplémentaires aux contribuables non seulement montréalais, mais aussi québécois. À répondre. Mais, malheureusement, M. le Président, je me vois dans l'obligation aussi de dire aux élus de la CUM, parce qu'on ne les a pas, les réponses: Je suis navrée, mais encore une fois vous devez passer votre tour.

Bien plus que de voter contre l'adoption du principe du projet de loi n° 77, je me fais le porte-parole des élus de la Communauté urbaine de Montréal. Pourquoi? Parce que mon ministre de la Métropole, encore une fois, on ne l'a pas entendu sur ce sujet. Encore une fois, il a été muet, encore une fois il va nous dire qu'il a été convaincu par l'ensemble des collègues et encore une fois, lui qui connaît très bien le dossier, il n'a pas participé dans le débat public et n'a pas participé dans la dynamique qui fait en sorte que la Communauté urbaine de Montréal ainsi que les intervenants montréalais se posent de graves questions auxquelles lui devrait répondre parce qu'il est là pour ça – il est là pour ça – auxquelles lui devrait répondre, et, s'il représente sa clientèle auprès du gouvernement, que lui devrait transmettre au ministre de la Sécurité publique et au ministre des Affaires municipales pour que ceux-là puissent être encore... enfin, pour qu'ils aient ce questionnement dans la tête avant de déposer un projet de loi qui est contesté, et qui est peut-être nécessaire, mais qui est contesté.

M. le Président, comme je me fais le défenseur des intervenants de la métropole, puisque le ministre n'est pas là, n'est tout simplement pas là, alors je demande au ministre de la Sécurité publique de surseoir à l'adoption de ce projet de loi qui aura des répercussions importantes sur la population de l'île de Montréal et de convoquer des états généraux tout simplement comme l'ont demandé plusieurs intervenants, dont Mme Danyluk, présidente de la Communauté urbaine. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Je cède maintenant la parole au député de Drummond. M. le député.


M. Normand Jutras

M. Jutras: Je vous remercie, M. le Président. Alors, j'interviens aujourd'hui relativement au projet de loi n° 77, qui est le projet de loi qui veut modifier la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Vous savez, il s'agit d'un projet de loi important, parce que le budget de tout ce qu'on appelle la police au Québec, ça s'élève à 1 300 000 000 $, et là je fais référence aux chiffres de 1995. On se rappellera qu'on a au Québec trois corps de police regroupés de trois façons, c'est-à-dire la Sûreté du Québec, le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal et 153 corps de police municipaux, ce qui représente plus ou moins, au total, quelque chose comme 12 000 à 15 000 policiers au Québec.

Il y a plusieurs facettes dans ce projet de loi là: il y a la facette qui concerne la réorganisation de la desserte policière au Québec, il y a une facette qui concerne aussi l'Institut de police du Québec et un autre chapitre qui concerne l'éligibilité qui sera donnée aux policiers pour accéder à certaines fonctions électives. Je traiterai deux points: d'abord, ce qu'il en est des activités politiques des policiers et, par la suite, de la réorganisation des services de police au Québec.

Vous savez, M. le Président, tel que la Loi de police était faite au Québec, nos policiers, qu'ils soient municipaux, ou de la Sûreté du Québec, ou de la Communauté urbaine de Montréal, ne pouvaient pas être candidats à une élection fédérale, ni à une élection provinciale, ni municipale, ni scolaire. On se rappellera que, ces dernières années, il y avait des dispositions semblables concernant d'autres personnes dans notre société. Et, à travers les années, il y a des améliorations qui ont été apportées: nous avons donné le droit de vote à certaines personnes, je pense aux juges, entre autres, aux procureurs de la couronne, et certaines personnes aussi qui ne pouvaient pas être candidates ont pu l'être.

Cette fois-ci, nous apportons une amélioration pour les policiers. C'est demandé depuis nombre d'années par les policiers au Québec. Je me rappelle, entre autres, d'un rapport de la Commission de police, en 1988, qui faisait des demandes en ce sens-là. À maintes reprises, les policiers, sur les tribunes publiques, réclamaient ce droit-là. De sorte que, d'une interdiction totale qui leur était faite, et je le disais, sur le plan municipal, scolaire, fédéral et provincial, il y a des modifications qui sont apportées dans la loi, et dorénavant les policiers, sauf les cadres, pourront être candidats à certains postes. Entre autres, M. le Président, ils pourront être candidats soit à une élection municipale soit à une élection scolaire, en autant que ce soit en dehors des limites du territoire où ils exercent leurs fonctions. Ça, c'est ce qui en est pour les élections à un conseil municipal, maire ou conseiller municipal, ou comme commissaire. Par ailleurs, M. le Président, avec le nouveau projet de loi, ils pourront aussi être candidats à une élection fédérale ou à une élection provinciale. Cependant, à une condition: si un policier se porte candidat, il devra à ce moment-là être en congé total et sans traitement. Il en va de même s'il se livre à une activité politique de nature partisane.

Alors, je pense, M. le Président, tenant compte de la Charte des droits et libertés de la personne, tenant compte de l'évolution des lois au cours des dernières années qui ont permis à certaines personnes qui auparavant ne pouvaient pas être candidates, je pense qu'un ajustement à ce chapitre s'imposait à l'égard des policiers.

J'entendais des critiques de l'opposition qui disaient que notre projet de loi est trop timide. À cela je répondrai deux choses. La semaine dernière, en commission parlementaire, nous avons entendu le Directeur général des élections, Pierre-F. Côté, et M. Côté disait que, finalement, le projet de loi était prudent, mais qu'il y avait lieu d'être prudent en ce domaine. On sait que les policiers sont des auxiliaires de la justice, ils sont chargés de faire respecter la loi, ils sont chargés du respect de l'ordre, au même titre, M. le Président, que l'on retrouve encore certaines réserves dans la loi à l'endroit des procureurs de la couronne et à l'endroit des juges. Je pense que les policiers, vu les fonctions assez particulières qu'ils doivent appliquer, c'est pour ça, je pense, qu'il y a lieu d'y aller avec prudence.

Alors, c'étaient les commentaires que nous faisait le Directeur général des élections la semaine dernière. Il nous disait qu'il approuvait le projet de loi tel qu'on le présentait, quitte éventuellement à voir s'il y a lieu d'améliorer ça. Mais je pense que, pour le moment, c'est un pas en avant qui devrait satisfaire les policiers. C'est le premier sujet dont je voulais parler par rapport à ce projet de loi. Ça m'apparaît être une heureuse amélioration qui répond certainement à ce que les policiers ont demandé depuis tant et tant d'années.

(17 h 10)

Par ailleurs, aussi, ce qui est bien important, M. le Président, c'est qu'on réorganise la desserte policière au Québec. On sait qu'on a déjà plusieurs lois qui ont été amendées en ce sens-là, et, cette fois-ci, on veut consolider, somme toute, l'organisation policière à travers tout le Québec. Alors, il y a déjà une distinction qui était faite dans la loi, que l'on reprend mais avec plus de fermeté, à savoir les municipalités de 5 000 âmes et plus et les municipalités de moins de 5 000 âmes. Alors, pour ce qui est des municipalités de 5 000 âmes et plus, M. le Président, vous savez que ces municipalités, pour la plupart – et là je parle de municipalités d'une certaine envergure, des villes comme Drummondville, Saint-Hyacinthe, Victoriaville – ont déjà leur corps de police. Alors, ce que la loi prévoit, donc, c'est que ces municipalités-là devront établir leur propre corps de police, si ce n'est déjà fait. Ou encore, elles pourront aussi faire une entente avec une autre ville.

Et, encore là, M. le Président, je donne un exemple de mon comté, dans Drummond. Présentement, la municipalité de Saint-Nicéphore, qui est une municipalité qui compte environ 9 000 âmes, vient de faire une entente avec la ville de Drummondville pour être desservie par le corps de police de Drummondville. Alors, c'est l'autre possibilité, soit avoir son propre corps de police, soit faire une entente avec une autre ville. Ou encore, le choix qu'elles auront, même, c'est d'être desservies par la Sûreté du Québec. C'est dans le cas des municipalités de 5 000 âmes et plus.

Dans le cas des municipalités de moins de 5 000 âmes, elles devront être desservies par la Sûreté du Québec, quoique, encore là, et je fais référence à l'article 6 du projet de loi, on dit qu'«une municipalité de moins de 5 000 habitants est desservie par la Sûreté conformément à une entente conclue en vertu de l'article 73.1» de ce projet de loi. Cependant, dans le cas des municipalités de moins de 5 000 âmes, on prévoit aussi une autre opportunité, on dit: Une municipalité locale de moins de 5 000 habitants pourra établir son propre corps de police avec entente avec le ministre de la Sécurité publique.

Alors, ce sont les principes qui sont posés par ce projet de loi là. Ce qui est surtout intéressant, M. le Président, et ça répond à une critique qui était faite souventefois antérieurement, c'est qu'on sait que, depuis la réforme Ryan, depuis 1992, les petites municipalités de moins de 5 000 âmes devaient payer pour les services de la Sûreté du Québec. Mais ce que les gens de ces municipalités-là disaient: On paie, mais on n'a aucun contrôle là-dessus, on ne peut rien dire, ce n'est pas nous qui disons ce que nous voulons, nous ne pouvons pas nous plaindre de quoi que ce soit, nous n'avons aucun contrôle.

Ce qui est intéressant dans le nouveau projet de loi, c'est qu'on remédie à cette situation-là. Et, dans le cas des petites municipalités qui sont desservies par la Sûreté du Québec, il y aura une entente qui devra intervenir entre la MRC dont fait partie la municipalité concernée et le ministre de la Sécurité publique concernant les services de police. Et là je réfère à l'article 73.2 de ce projet de loi qui dit que l'entente, entre autres à laquelle va participer la MRC... Et puis, il faut dire aussi que ce sera chapeauté par un comité de sécurité publique. Alors donc, la MRC, dans cette entente-là, pourra dire son mot quant à la nature et l'étendue des services de police fournis, le nombre de policiers affectés à ces services, les échanges d'informations entre la Sûreté et la municipalité signataire, le contrôle de l'application de l'entente, l'emplacement du poste de police, les rôles et les responsabilités de la Sûreté et de la municipalité signataire, le mécanisme de règlement des différends portant sur l'interprétation ou l'application de l'entente et la durée de l'entente.

Alors, Votre Seigneurie... Je m'excuse, je retourne à mon ancien métier. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Jutras: M. le Président, c'est une initiative qui m'apparaît tout à fait intéressante et qui répond exactement aux critiques que maintes fois les maires faisaient, disant: On paie, puis c'est normal quand on paie qu'on puisse dire quelque chose, et on ne peut rien dire. Alors, on répond donc à cette demande.

Une autre critique, M. le Président, qui est faite par rapport à ce projet de loi là et par rapport à l'organisation policière, c'est qu'on nous dit qu'on fait du pelletage dans la cour des municipalités. Sauf que nos amis d'en face semblent avoir oublié l'important pelletage que la réforme Ryan avait fait il y a quelques années. Mais, cependant, je pense que, dans le cas présent, c'est une question d'équité.

En fait, qu'est-ce qu'on fait? Présentement, les municipalités qui sont desservies par la Sûreté du Québec, depuis la réforme Ryan, paient de 0,10 $ à 0,35 $ par 100 $ de richesse foncière. On augmente cette quote-part-là de 0,18 $ à 0,35 $, là, par 100 $ de richesse foncière. C'est vrai que c'est une augmentation, M. le Président, mais la raison pour laquelle je dis que c'est une question d'équité... Premièrement, les municipalités ont un service; donc, elles vont payer pour ce service-là, de la Sûreté du Québec. Mais, aussi, ce qu'il ne faut pas oublier, c'est que, dans les villes où il y a des corps de police constitués, les citoyens qui sont là paient la facture totale de leurs services de police. Je prends, chez moi, à Drummondville, les contribuables paient la facture totale de leurs services de police.

Alors, on voit que, dans le cas présent, dans les municipalités de moins de 5 000 âmes qui seront desservies par la Sûreté du Québec, oui, elles vont subir une augmentation, ces municipalités-là, mais, encore là, M. le Président, elles ne paieront pas la totalité, le 100 % de ce que ça représente comme services. On peut dire qu'elles vont payer entre 40 % et 60 % de ce que ça représente. Alors, c'est pour ça que je dis que c'est une question d'équité, puis, même encore là, on ne se rapproche pas de la situation qui prévaut dans les villes où il y a des corps de police constitués. Je regarde, présentement, dans les municipalités de moins de 5 000 âmes, on se trouve à payer l'équivalent d'un coût, là, per capita, de 42 $. Avec l'augmentation, ça va représenter 70 $. Cependant, dans les municipalités où il y a des corps de police constitués, c'est 126 $ que ça représente per capita. Alors, c'est vrai que c'est une augmentation, mais à cela je réponds qu'il y a des services qui sont donnés en contrepartie. Deuxièmement, dorénavant les gens de ces municipalités-là vont avoir leur mot à dire, vont signer une entente, ils vont pouvoir imposer certaines exigences. Et, troisièmement, comme je le mentionnais, par rapport aux villes plus importantes, ces gens-là paient encore moins pour les services de police que les gens des municipalités plus importantes.

Alors, c'est pourquoi, M. le Président, je soumets que c'est un projet de loi qui est intéressant, qui vient répondre à plusieurs demandes. Le ministre de la Sécurité publique a fait une tournée tout au cours de l'été, c'est un projet de loi qui vient répondre à des besoins, à un laisser-aller qui a duré trop d'années, et c'est pourquoi j'appuierai ce projet de loi et je voterai en faveur de ce projet de loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Drummond. Je cède maintenant la parole au député de Viger. M. le député.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. C'est avec, je dirais, plaisir, mais dans le sens contraire du mot, que je prends la parole sur le projet de loi n° 77, parce qu'on ne peut jamais avoir du plaisir quand un gouvernement taxe encore plus les citoyens du Québec. Ce gouvernement-là, du Parti québécois, il est là depuis deux ans. On se rappellera, on pourrait dire, même aujourd'hui que ce gouvernement est le champion à taxer depuis qu'il est arrivé au pouvoir. M. le Président, 50 000 000 $, le projet de loi n° 77, qui s'ajoutent aux 200 000 000 $ de l'assurance-médicaments, aux 30 000 000 $ d'Hydro-Québec, aux 20 000 000 $ du permis de conduire, aux 115 000 000 $ déjà refilés à des municipalités du Québec, aux 77 000 000 $ des commissions scolaires.

J'écoutais le député de Drummond qui disait qu'il y avait pas mal de monde qui était d'accord avec ce projet de loi et que, probablement même, il était arrivé trop tard, M. le Président. Il faut se rappeler que, selon la Loi de police qui existait avant, une municipalité de moins de 5 000 habitants pouvait avoir son propre corps de police ou passer une entente avec une autre municipalité pour avoir des services de police. Elle pouvait aussi s'en remettre à la SQ ou à un autre corps de police municipal qui agit sur son territoire. C'était ça, la Loi de police, M. le Président.

(17 h 20)

Avec le projet de loi qui est devant nous, la loi obligera les municipalités de moins de 5 000 habitants à conclure une entente avec la SQ pour ses services de police, sauf si le ministre l'autorise à utiliser les services d'un autre corps de police. Donc, elle n'a plus le choix. Elle pouvait choisir avant, elle n'a plus ce choix-là. Et on se rappellera... Et c'est la raison pour laquelle il y a tellement d'opposition au projet de loi n° 77.

On parlait tout à l'heure que, en commission parlementaire, il y a eu le Directeur général des élections qui disait qu'il était un peu timide, le projet de loi, mais qu'il fallait être un peu timide. Probablement que le député de Drummond a oublié qu'en commission parlementaire, le 28 novembre dernier, il y a eu l'Union des municipalités régionales de comté qui s'est prononcée contre le projet de loi. Elle disait quoi, cette union? Elle disait que le projet de loi n° 77 est inacceptable; elle veut le respect de l'autonomie municipale, elle veut un délai pour le regroupement municipal, elle veut un processus de réouverture des ententes. Encore, l'Union municipale s'oppose au financement de l'Institut de police de Nicolet. Elle disait: Le projet de loi n° 77 ne reflète pas les préoccupations exprimées lors de la tournée du ministre. Le projet de loi n° 77 ne règle pas le problème numéro un de l'organisation policière, soit le contrôle des coûts.

M. le Président, à part l'Union des municipalités régionales de comté, il y a eu aussi l'Union des municipalités du Québec. Elle aussi s'est prononcée contre ce projet de loi. Pourquoi, M. le Président? Elle dit: Le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'iniquité fiscale quant au financement des coûts de la police. Le financement de l'Institut de Nicolet n'a jamais été discuté. Encore, l'Union des municipalités du Québec veut le retrait temporaire du 1 % pour le financement de Nicolet jusqu'au 31 mars 1997, veut encore l'autonomie municipale pour le choix des services policiers, donc avoir son propre corps de police, faire une entente intermunicipale pour les services de la SQ.

M. le Président, la CUM, la Communauté urbaine de Montréal, aussi s'est prononcée contre le projet de loi. Elle demande quoi? Elle demande de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 77. Elle dit: Ce projet de loi s'assure de 2 200 000 $ pour le financement de l'Institut de Nicolet, et Montréal va payer 53 % de ce montant, soit 1 166 000 $. Seulement Montréal, elle va payer 53 % pour le financement de l'Institut de Nicolet. Ils disent encore, la CUM: Aucune consultation sur le financement de l'Institut de Nicolet, le ministre n'a fait aucune consultation pour financer l'Institut de Nicolet. Elle est contre le changement de la représentation au conseil d'administration de l'Institut de Nicolet, veut des états généraux afin de revoir la structure complète des services policiers au Québec et une réflexion de fond sur la formation policière. Elle veut aussi patrouiller les autoroutes de la CUM.

La Fraternité des policiers de la CUM, pour répondre au député de Drummond, elle aussi est contre. La Fraternité des policiers de la CUM, elle est contre. Pourquoi? Elle veut un sommet sur la sécurité publique, demande le retrait de la contribution de 1 % pour le financement de l'Institut de Nicolet, demande d'extirper du projet de loi les éléments qui touchent l'organisation policière. Elle dit aussi: Mesure timide quant aux activités politiques concédées aux policiers. M. le Président, l'Association des policiers provinciaux du Québec, elle aussi s'est prononcée contre le projet de loi n° 77. Eux autres, ils se questionnent sur l'augmentation des tarifs et les effectifs adéquats. Ils veulent avoir des effectifs adéquats.

La Fédération des policiers du Québec aussi. Cette fédération s'est prononcée contre le projet de loi, veut laisser le choix aux municipalités. La Fédération, elle dit: Laissons le choix aux municipalités du Québec. Elle veut un moratoire d'un an pour le regroupement des municipalités. Elle craint le maraudage. Elle veut des états généraux sur la police. L'Association des directeurs de police et de pompiers du Québec, eux aussi se sont prononcés contre. Ils disent quoi? Ils favorisent le regroupement des petits corps de police... contre les activités politiques. M. le Président, je vous dispense de tous les autres qui se sont prononcés contre ce projet de loi. Ce que je ne peux pas comprendre, c'est qu'il y a une très, très, très grande majorité des gens qui sont contre ce projet de loi là, et le ministre de la Sécurité publique, il continue encore à aller de l'avant. En dépit de n'importe quoi, je peux dire, il ne prend même pas en considération les conséquences de ce projet de loi qui ont été mises de l'avant par beaucoup de groupes qui se sont présentés en commission parlementaire, et le ministre, il n'a jamais fait de consultation sur ce projet de loi n° 77.

On se rappellera aussi que, seulement pour la ville de Montréal, ce projet de loi, ça représente au-delà de 3 000 000 $. La ville de Montréal a déjà terminé son budget pour l'année 1997, puis là elle se voit refiler encore une facture de 3 000 000 $.

M. le Président, l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, un communiqué qu'elle a émis le 28 novembre 1996. Ils disent quoi? «Le ministre de la Sécurité publique – eux autres, ils disent «le ministre Perreault», mais, moi, je dis le ministre de la Sécurité publique – accusé de gonfler les coûts de la SQ et de prendre les citoyens en otage.» La Loi de police ne doit pas devenir la loi de la police. Et, dans ce communiqué, on dit: «En commission parlementaire sur le projet de loi n° 77 visant la réorganisation policière au Québec, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec a livré une véritable charge contre le ministre de la Sécurité publique en démontrant que son évaluation des coûts de 200 000 000 $ par année pour les services de la SQ aux municipalités qui n'ont pas de corps de police est gonflée, trafiquée et arbitraire...» C'est l'Union des municipalités régionales de comté du Québec qui dit ça. Et ils continuent: «...la preuve que votre 200 000 000 $ ne résiste pas à l'analyse et ne tient pas compte des revenus d'amendes de plus de 60 000 000 $ récoltés par la Sûreté du Québec dans les municipalités desservies.»

M. le Président, ça continue: «Vous n'avez pas non plus exclu de votre facture vos coûts pour les effectifs qui ne desservent même plus les municipalités qui se sont déjà dotées d'un corps de police...» Ça veut dire qu'on va faire payer deux fois. Il y a des municipalités qui paient déjà pour un corps de police, mais le ministre, il dit: Mais ça coûte quand même 200 000 000 $ pour la SQ. Puis ils continuent: «...tout comme vous n'avez pas retiré les dépenses destinées à la patrouille des autoroutes, que les municipalités ne devraient pas payer [...]. De plus, les coûts reliés à la structure même de la SQ ne devraient pas nous être refilés», faisant référence au personnel de gestion des postes de la Sûreté, qui représente un vrai gaspillage d'encadrement. Et le communiqué continue encore: «Comment, dans le contexte économique actuel, pouvez-vous justifier que des municipalités de petite taille, de moins de 3 000 habitants, peu populeuses et financièrement moins bien nanties, où le taux de criminalité est bas, reçoivent une augmentation de facture de 80 %?» Le gouvernement actuel, le ministre de la Sécurité publique, il veut refiler aux municipalités de moins de 3 000 habitants une augmentation de 80 %. Imaginez-vous dans quelle situation ils vont se retrouver, ces élus municipaux et ces habitants de ces municipalités-là!

(17 h 30)

Et le communiqué continue encore en disant: «Le projet de loi n° 77, une arnaque pour prendre en otage les citoyens des municipalités les moins bien nanties.» Et ils disent: «Ce projet de loi constitue une véritable arnaque, a déclaré la présidente de l'Union des municipalités régionales de comté, Mme Jacinthe Simard. Au moment où le ministre nous refile une augmentation de 80 % des coûts de la Sûreté du Québec, 40 000 000 $, il veut nous interdire, avec son projet de loi, de créer nos propres corps de police et prive ainsi les citoyens de moyens pour réduire les coûts des services publics.»

M. le Président, ces élus des petites municipalités, ils demandent au gouvernement de surseoir parce que ça va coûter très cher, et, par conséquent, si ça coûte très cher, c'est toujours le même contribuable qui va payer. Mais le gouvernement, je ne peux pas comprendre. On va essayer, on va essayer toute la soirée de faire comprendre au gouvernement de surseoir et d'attendre, de faire des vraies consultations, parce que ce gouvernement, ils ne les a pas faites. Il ne les a pas faites, les consultations qu'il faut faire dans une situation comme celle-là. C'est quand même près de 50 000 000 $ qui seront refilés aux municipalités du Québec. Et à quelles municipalités? La très grande majorité, c'est des municipalités en bas de 5 000 habitants et, encore pire, en bas de 3 000 habitants.

Il y avait aussi l'Union des municipalités du Québec, l'autre Union, qui disait, à un certain moment: «Financement de l'Institut de police de Nicolet». Elle disait quoi, l'Union des municipalités du Québec? Elle disait: «Une ingérence gouvernementale inacceptable». M. le Président, ils disaient: «L'intention du ministre de la Sécurité publique, dévoilée jeudi dernier, de détourner l'équivalent de 1 % de la masse salariale des policiers municipaux pour financer l'Institut de police de Nicolet constitue un exemple d'ingérence gouvernementale inacceptable. D'abord, l'Union des municipalités du Québec n'a jamais été informée ni consultée quant à cette disposition introduite en cachette par le ministre de la Sécurité publique dans son projet de loi n° 77 modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives.» M. le Président, ils disent sans ombrage, ils disent très clairement qu'ils n'ont jamais été informés. L'Union des municipalités du Québec, elle n'a jamais été informée ni consultée quant à la disposition de payer 1 % pour l'Institut de Nicolet. Ils disent qu'on a fait introduire cette disposition en cachette par le ministre de la Sécurité publique.

Et ce ne sont pas seulement ces organismes-là qui se sont prononcés contre ce projet de loi. Il y a tellement d'articles de journaux, de journalistes qui se sont prononcés sur ce projet de loi. Et j'en ai un devant moi. C'est le journaliste Jean Vigneault, du journal Le Courrier , qui dit: «C'est rare qu'un ministre fait l'unanimité auprès des maires de plusieurs MRC. Le ministre de la Sécurité publique a réussi ce tour de force à Saint-Hyacinthe: il a dressé tous les maires contre lui et sa police régionale.» Et il continue, toujours, Jean Vigneault: «Dans la MRC des Maskoutains comme dans celle de Brome-Missisquoi, les maires ont dénoncé vigoureusement la tourné du ministre.» Enfin: «Le ministre n'est pas venu consulter, il est venu enfoncer sa réforme et sa police régionale assurée par la SQ dans la gorge des maires et finalement dans celle des contribuables.» Il continue encore: «Le ministre de la Sécurité publique se comporte comme dans le bon vieux temps de Duplessis.» Ça, c'est M. Jean Vigneault, dans le journal Le Courrier .

M. le Président, il y a d'autres articles: «Mme Danyluk réclame des états généraux sur la police». Il y a encore Mme Simard, la présidente de l'Union municipale régionale de comté, qui dit: «Décembre sera chaud». Elle dit: «Mme Jacinthe Simard verrait bien une armada de camions à ordures défiler devant le parlement en signe de protestation.» Et ça continue encore: «L'UMRCQ part en croisade contre le ministre de la Sécurité publique». M. le Président: «L'UMRCQ menace de déverser des ordures devant le parlement.» C'est tous des journalistes, ça, M. le Président.

Puis dans La Presse du 16 novembre: «Les chefs de police grincent des dents». M. le Président, il dit quoi, Jean-Paul Charbonneau dans La Presse du 16 novembre? Il dit: «Jeudi soir, quelques membres du conseil d'administration de l'Association des directeurs de police et pompiers du Québec ont apostrophé le ministre de la Sécurité publique à la suite de son allocution. Le ton de la discussion a parfois monté de plusieurs crans.» Et encore, dans le Journal de Québec , on dit: «Perreault – c'est le ministre de la Sécurité publique – vertement critiqué».

M. le Président, l'UMRCQ part en guerre. Le ministre réussit vraiment à faire l'unanimité contre son projet de loi. Moi, j'espère ardemment, M. le Président, que le ministre va écouter tous ceux qui sont intervenus sur ce projet de loi. Et particulièrement nous, de l'opposition officielle, on va essayer de le convaincre de surseoir à l'adoption du projet de loi parce que c'est dans l'intérêt de la population du Québec. Les gens, ils veulent être consultés. Les organisations, elles veulent être consultées. Les élus municipaux, ils veulent être consultés parce que c'est eux qui doivent, après, refiler la facture aux contribuables. Parce que le gouvernement du Québec, il s'en fiche. Il dit aux municipalités, aux élus municipaux: Voilà la facture, allez les chercher dans les poches des contribuables. M. le Président, ce n'est pas la façon de faire.

Et j'espère ardemment que le ministre de la Sécurité publique va prendre en considération ces aspects avant que le projet de loi n° 77 soit adopté. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Viger. Je céderai maintenant la parole au député de Pontiac. M. le député.


M. Robert Middlemiss

M. Middlemiss: Oui, merci, M. le Président. Pour moi aussi, c'est un plaisir de prendre la parole sur le projet de loi n° 77, au stade du principe. M. le Président, je pense qu'il faut démontrer un peu que quelqu'un qui prend le temps de lire les notes explicatives ne peut pas réellement s'imaginer c'est quoi, les conséquences de ce projet de loi. Je vais lire ça, mais ensuite on fera une rétrospective pour voir que, lorsqu'on change de côté de l'Assemblée nationale, on semble changer aussi d'attitude. Et le passé est souvent, presque tout le temps assez garant de l'avenir.

Donc, les notes explicatives, M. le Président, ça dit: «Ce projet de loi modifie les dispositions de la Loi de police régissant l'organisation des services de police sur le territoire du Québec. C'est ainsi qu'il prévoit notamment qu'une municipalité locale de moins de 5 000 habitants doit conclure une entente par l'intermédiaire de sa municipalité régionale de comté pour obtenir les services de la Sûreté du Québec, sauf si le ministre de la Sécurité publique l'autorise à recourir à un autre corps de police. Quant aux municipalités de 5 000 habitants et plus, elles seront desservies soit par leur propre corps de police, soit par un autre corps de police conformément à une entente conclue avec une autre municipalité, soit, sur autorisation du ministre, par la Sûreté conformément à une entente. Enfin, pour ce qui est des municipalités qui ne se conformeront pas à ces dispositions, elles seront desservies par la Sûreté conformément aux dispositions prévues par la Loi de police.

«Le projet de loi précise le contenu minimal d'une entente portant sur les services de police fournis par la Sûreté du Québec à une municipalité. Il prévoit aussi la création d'un comité de sécurité publique chargé du suivi de cette entente. Il propose également, dans la Loi sur le ministère de la Sécurité publique, l'institution du Fonds des services de police affecté au financement du coût des biens et services fournis par la Sûreté aux municipalités.»

(17 h 40)

«Le projet de loi modifie également la Loi de police afin de permettre aux policiers et aux constables spéciaux d'exercer certaines activités politiques. C'est ainsi que, sauf pour certains officiers de la Sûreté du Québec et les directeurs des autres corps de police, un policier pourra notamment être candidat à une élection fédérale ou provinciale, mais à condition d'être alors en congé sans solde, et qu'il pourra également se présenter à une élection municipale ou scolaire, mais à condition que ce soit en dehors du territoire où il exerce ses fonctions.

«Par ailleurs, le projet de loi modifie la Loi sur l'organisation policière relativement au financement de l'Institut de la police et à la composition de son conseil d'administration.

«Enfin, le projet de loi contient d'autres modifications d'ordre plus technique et de concordance ainsi que des dispositions transitoires.»

À lire ça, M. le Président, quelqu'un qui m'écoute aujourd'hui va dire: Bien certainement! C'est un projet de loi pour la police, puis ça a été fait par le ministre de la Sécurité publique. Mais, si on regarde le fond, c'est une commande du président du Conseil du trésor. Tu sais, il a fait des commandes partout. Le seul but de tout ça, c'est encore d'aller taxer le citoyen, parce que, en bout de piste, que ce soit le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial, le gouvernement municipal, des commissions scolaires, la personne qui paie, c'est le citoyen. Et le citoyen l'a dit il y a longtemps, qu'il en avait assez, de taxes. Mais le gouvernement, ce gouvernement a fait miroiter qu'il n'y aura pas d'augmentation de taxes et que le citoyen ne paiera pas, que ça va être de l'administration.

M. le Président, la seule chose qu'ils ont faite, que le gouvernement a faite, c'est de pelleter dans la cour soit des commissions scolaires soit des municipalités, et c'est encore le citoyen qui est pris. Et l'ironie de tout ça, c'est surtout lorsqu'on va parler de la police. Tantôt, le député de Drummond parlait de la réforme Ryan, comment c'était épouvantable, et, j'en suis convaincu, je n'ai pas eu malheureusement le privilège d'entendre le ministre, il a dû, lui aussi, dire que ce que ce gouvernement faisait était certainement équitable. Mais, M. le Président, et ça, je vais vous l'expliquer, l'équité, c'est venu avec la réforme Ryan et ça a touché trois volets. Un, le volet de la police, dont nous parlons encore aujourd'hui, parce que là c'est une extension. Ce qu'ils font aujourd'hui, c'est une extension. Pourtant, lorsque ces gens étaient de ce côté-ci de l'Assemblée nationale, elle était épouvantable, la réforme Ryan. Mais la réforme Ryan, c'était l'équité.

Je ne sais pas, dans votre cas, M. le Président, si, où vous demeurez, dans la ville, vous avez votre propre corps de police. Si c'est le cas, et c'est le cas de pas mal de citoyens à travers le Québec, à ce moment-là les citoyens, dans leurs taxes foncières, payaient pour le service de police. En plus, dans leurs impôts personnels, ils payaient pour la Sûreté du Québec. Donc, on a dit: Regardez, là, il semble que les gens qui demeurent en ville et qui ont leur propre corps de police paient plus que le citoyen qui demeure dans une municipalité où il n'y en a pas. Donc, on va établir qu'un certain montant des coûts de la Sûreté du Québec va être chargé aux municipalités qui n'ont pas de corps de police. Je pense qu'en soi c'est l'équité. À ce moment-là, on a dit: Voici, vous assumez vos responsabilités. Et c'était 0,10 $, hein, ça commençait à 0,10 $ le 100 $. Et là on a augmenté ça à 0,18 $. Mais on va donner quoi de plus?

Je me souviens de ces gens-là, comment ils étaient offensés. C'était épouvantable. Ils ont déchiré leur chemise. Au moins, à ce moment-là, les gens, les maires, tout le monde s'est plaint. Ils n'ont pas aimé ça. D'accord. Mais ils ont dit: Maintenant, là, il nous semble que, pour être plus équitable, on devrait peut-être avoir des cours municipales, qu'on puisse avoir le produit des amendes, ces choses-là. Ce n'est pas fait. Je ne le vois pas, là.

J'ai entendu le ministre des Affaires municipales dire ça aujourd'hui. Mais qu'est-ce qu'il dit? De beaux discours. Mais c'est quoi, la réalité? La preuve, c'est: Comment ça se fait que ce n'est pas dans ce projet de loi là? Si c'est le cas, pourquoi on n'a pas indiqué que dorénavant les polices, les amendes vont être... Parce que, premièrement, ça prend toute une structure. Il va falloir que les municipalités qui n'ont pas de cour municipale... Il va falloir changer la loi aussi pour que les polices puissent appliquer dans ces municipalités, parce que c'était un des problèmes.

Donc, M. le Président, où est-ce que c'est, ça, là? Je vois le ministre, je l'ai vu, je pense que c'était dimanche, il était à RDI. Il semblait avoir convaincu tout le monde. Il ne m'a pas convaincu, moi, M. le Président, et encore bien moins depuis que j'ai lu les journaux, depuis que j'ai parlé avec les maires de mon comté, que j'ai regardé les résultats de la consultation au mois de novembre. J'ai l'impression que le ministre a discuté en vase clos. Il s'est promené et, pour moi, il a dû discuter en voyageant; pour moi, il n'a pas arrêté tellement longtemps pour parler aux gens. Ou bien qu'est-ce qu'il leur a dit? Est-ce qu'il leur a dit qu'il y aurait un coût attaché à tout ça? Ou est-ce qu'on leur a indiqué... Qu'est-ce qu'on aurait pu leur indiquer? Il a dit: Regardez, on va faire des changements, police de base... Les gens sont toujours ouverts.

J'ai eu, moi, l'occasion et le privilège de faire la tournée du Québec, aux Transports, au moment du transfert du réseau routier aux municipalités. Eh oui! J'ai rencontré les gens. Il y avait beaucoup d'objections au tout début, mais, lorsqu'on prenait la peine de leur expliquer, après ça, discuter et négocier... C'était un des volets. Je vous disais tantôt qu'il y avait trois volets à la réforme Ryan, un des volets, c'était le transfert du réseau routier. Et, après la tournée, M. le Président, on a formé un comité, les Affaires municipales, le ministère des Transports et les deux Unions, un comité technique. C'est de cette façon-là, après avoir discuté avec les élus, qu'on a formé un comité. Et ça a pris un an à négocier, à discuter, pour un projet que... Au tout début, on parlait d'un transfert de 115 000 000 $ aux municipalités pour prendre en charge le réseau routier, qui s'est terminé avec 151 000 000 $, M. le Président.

Donc, c'est pour vous montrer que, lorsqu'on échange, qu'on explique aux gens, qu'on s'assoit avec eux et qu'on leur dit: Voici ce que ça veut dire... Je suis convaincu que, si le ministre... Je n'ai aucun doute que le ministre a fait le tour du Québec, mais je n'ai pas l'impression que les maires, les élus, ont compris ce qu'il a dit. Je suis certain que je ne suis pas le seul. Je suis convaincu que beaucoup de mes collègues de l'autre côté, M. le Président, eux aussi reçoivent des appels de leurs élus municipaux qui disent: Qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce qui se passe dans l'affaire de la police? Surtout lorsqu'on dit: Maintenant, les municipalités de moins de 5 000 de population, vous êtes obligées à la SQ. C'est pourquoi, ça, là? Pourquoi on oblige? Pourquoi ne pas leur laisser le choix? On les oblige à aller à la Sûreté du Québec. J'aimerais bien savoir pourquoi on a décidé de procéder de cette façon-là.

Puis il n'est pas le seul, le ministre de la Sécurité publique, tous les ministres – j'écoutais ça à la période des questions – il semble qu'il n'y a rien là, bon, il n'y a rien là du tout. Tout le monde est heureux, tout le monde est d'accord avec tous ces changements-là. Pourtant, ce n'est pas ça qu'on entend. Il me semble que, lorsqu'on forme le gouvernement, le but de ça, c'est de tenter d'améliorer le sort de la population, d'améliorer la qualité de la vie. Mais c'est tout à fait le contraire qui se produit.

On y a ajouté un autre élément, M. le Président. Ah oui! Puis, le troisième élément de la réforme Ryan, c'est encore une autre affaire d'équité. C'était que le gouvernement ne paierait plus le déficit d'opération du transport en commun, puis ce qui est tout à fait normal, tu sais. C'est qu'il faut responsabiliser les sociétés de transport en commun. Et, sachant fort bien que c'est le gouvernement, avec les sous de tout le monde, qui va compenser pour le déficit, peut-être qu'il y a un manque de responsabilisation et un manque de gérance qui permettent peut-être de ne pas donner le meilleur transport pour les coûts impliqués. Et c'est encore le citoyen qui finit par payer.

(17 h 50)

Mais on ajoute un autre élément, M. le Président – je suis certain que le ministre n'a pas pu en parler du tout aux élus municipaux qu'il a rencontrés – c'est la quote-part qu'on demande aux municipalités pour l'école de police à Nicolet. Ça, tout le monde, les Unions, tout le monde dit: Regarde, ça n'a pas de bon... C'est arrivé d'où, ça, là? Pourquoi vous nous demandez de faire ça? Donc, ça ne se peut pas qu'il ait discuté de ça avec les gens. Ça ne se peut pas du tout, parce qu'on lui aurait dit, à ce moment-là, on lui a dit, au mois de novembre – les consultations, tu sais – que ça n'a pas de sens. Il y en a même qui ont demandé d'avoir un moratoire sur cette partie-là, parce qu'on va aller chercher 1 000 000 $ et quelque chose sur un budget de l'ordre de 7 000 000 $. Donc, les municipalités disent: Aie! Ça ne marche pas.

Donc, comment le ministre... Je l'ai vu à la télévision puis il semblait que ce qui s'en venait, c'était réellement voulu. Pourtant, M. le Président, le 28 novembre, l'UMRCQ a dit: On est contre. Ils sont venus le dire qu'ils étaient contre. Ils disaient: Le projet de loi n° 77, il est inacceptable. Comment ces gens-là pourraient dire ça si le ministre leur avait donné tout le portrait? Une des deux choses, tu sais, ils se sont mal compris, parce qu'ils disent, tu sais... Et l'autre chose qu'il leur dit: Regardez, là, les municipalités de 5 000 âmes et moins, maintenant vous les forcez, là. Mais qu'est-ce qui arrive à l'autonomie municipale? Vous les forcez à prendre la SQ comme police. Où est cette autonomie qu'on a toujours respectée?

Et, comme je disais tantôt, M. le Président, ils s'opposent au financement de l'Institut de Nicolet. Et, regardez, ils l'ont même indiqué que le projet de loi n° 77 ne reflète pas les préoccupations exprimées lors de la tournée du ministre. Donc, j'avais raison, M. le Président, ils l'ont dit. Ils l'ont dit en commission parlementaire.

Pourtant, le ministre continue à dire que, oui, tu sais, on avait eu quasiment un consensus unanime. Loin de ça. Et, regardez, je ne pense pas que c'est ce projet de loi là qui va régler le problème numéro un qui est l'organisation policière... soit le contrôle des coûts. Ce n'est certainement pas ça. Tout ce qu'on fait, c'est qu'on transfère les coûts, là. On dit: Au lieu, nous autres, d'avoir l'odieux d'augmenter des taxes pour payer ça, on dit aux municipalités: Vous allez payer pour pas plus de services qu'avant, mais avec une obligation pour les municipalités de 5 000 âmes et moins d'avoir la Sûreté du Québec.

Et ça, l'UMQ aussi est contre parce que le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'inéquité fiscale quant au financement des coûts de la police. L'inéquité, ça ne la règle pas. Et l'UMQ disait que le financement de l'Institut de Nicolet n'a jamais été discuté. Jamais, M. le Président. De quoi on a parlé? On a dû parler de la température. Il semblerait que la température durant l'été, ça n'a certainement pas été favorable. Ce n'était même pas bon pour l'économie. Et c'est eux qui demandaient le retrait du 1 % pour le financement de Nicolet. On leur a dit: Attendez donc au moins de mars 1997. Attendez au 31 mars pour cette partie-là. Et eux aussi, et c'est tout à fait normal que, comme l'UMRCQ, ils aient dit: Regarde...

Ils veulent l'autonomie municipale pour le choix des services policiers, donc avoir leur propre corps de police, faire une entente intermunicipale ou les services de la SQ. Donnons-leur le choix. Mais non, on l'impose. Donc, ces gens-là, l'UMRCQ, l'UMQ, ça, c'est formé des élus. Est-ce que vous avez déjà été, vous, M. le Président, un élu municipal? Donc, vous avez été, vous aussi, un membre soit de l'UMQ soit de l'UMRCQ, et vous savez que ça vous représente. Donc, si ces gens-là sont venus en commission parlementaire exprimer ce point de vue là, ils ont dû être représentatifs des élus.

M. le Président, je vais juste énumérer. La CUM, la Communauté urbaine de Montréal, est certainement contre le projet de loi. La Fraternité des policiers... En parlant, je pense, peut-être, la seule chose... Les policiers sont peut-être heureux, mais peut-être pas les policiers de la CUM, parce que j'avais eu l'occasion de parler à ces gens-là. Ils voulaient avoir un droit de vote – j'ai déjà parlé à ces gens-là – et ils l'ont, mais il me semble qu'ils ne sont pas tellement heureux. Ils ont dit: C'est un petit peu...

Une voix: ...les libéraux.

M. Middlemiss: Non, non. Pas ça. En d'autres mots, ils disaient... Certainement, M. le Président, que ça a été assez mollo, le droit de vote qu'on leur a donné. Donc, tu sais, même les policiers ne sont pas heureux, les élus ne sont pas heureux, et, comme je disais tantôt, peut-être que, si ça avait été un projet de loi que le ministre lui-même, tu sais, avec les policiers, avec les élus, avait rédigé puis s'il avait dit: Regarde, c'est absolument nécessaire, si ça avait été un projet de loi, je suis convaincu qu'on n'aurait pas de... hein, il n'y aurait personne qui serait contre. Mais, comme je l'ai dit tantôt, le ministre a eu sa commande du président du Conseil du trésor, qui a dit: Va chercher des sous, on en a besoin.

Et pourtant qu'est-ce que je trouve, l'ironie de tout ça? La première fois où on a cherché l'équité, l'équité pour les gens qui avaient un service de police et qui payaient, des gens en ville qui avaient leur propre corps de police et qui payaient deux fois, pour ces gens-là, bien, l'équité a été faite. À ce moment-là, on a dit: Voici, on l'a fait de cette façon-là. Mais il était censé y avoir des améliorations. Alors, le droit de percevoir les amendes, ainsi de suite. Mais je ne le vois pas, ça. Il me semble que, avant de commencer à leur dire, aux municipalités: Ça va vous coûter encore un autre 25 000 000 $, 30 000 000 $, on devrait leur dire: Regardez, maintenant on va trouver les moyens pour vous assurer que les amendes sur votre territoire, vous puissiez les avoir. Il me semble que c'est tout à fait normal. Avant, elles ne recevaient pas les amendes, mais elles ne payaient pas du tout, comme municipalités, pour la Sûreté du Québec.

Donc, c'est malheureux que le ministre ait pris tout ce temps-là pour faire une tournée du Québec et arriver avec un projet de loi que malheureusement personne ne veut avoir. Donc, M. le Président, vous pouvez être assuré que je ne suis certainement pas pour le principe de ce projet de loi là. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Pontiac. Comme il ne reste qu'une minute avant que je suspende les travaux, si vous êtes d'accord de part et d'autre, nous pourrions immédiatement suspendre nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir, et, à moment-là, le député de D'Arcy-McGee pourrait débuter en début de séance. Ça vous convient? Alors, je suspends jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir. Nous allons reprendre aux affaires du jour. Avions-nous terminé l'étude du principe du projet de loi n° 77? Je ne crois pas. Nous sommes encore à cette étape-là. Alors, je serais prêt à reconnaître un intervenant.

Mme Caron: Nous en étions au député de D'Arcy-McGee, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de D'Arcy-McGee, je vous cède la parole.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Il est de mon devoir aujourd'hui de prendre la parole contre l'adoption du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, Bill 77, An Act to amend the Police Act and other legislative provisions.

M. le Président, présentement, la Sûreté du Québec dessert 1 248 municipalités, ce qui représente 24 % de la population de la province de Québec. Selon la Loi de police, les municipalités dont la population est égale ou supérieure à 5 000 habitants doivent avoir leur propre corps de police ou conclure une entente avec une autre municipalité pour obtenir les services de police. Quant à une municipalité de moins de 5 000 habitants, elle peut avoir son propre corps de police ou passer une entente avec une autre municipalité pour avoir des services de police. Elle peut aussi s'en remettre à la Sûreté du Québec ou à un autre corps de police municipal qui agit sur son territoire.

Ce projet de loi que nous avons devant nous modifie les dispositions de la Loi de police régissant l'organisation des services de police sur le territoire du Québec. Il prévoit qu'une municipalité de moins de 5 000 habitants doit conclure une entente par l'intermédiaire de sa municipalité régionale de comté pour obtenir les services de la Sûreté du Québec, sauf si le ministre de la Sécurité publique l'autorise à recourir à un autre corps de police. Quant aux municipalités de 5 000 habitants et plus, elles sont desservies soit par leur propre corps de police soit par un autre corps de police, conformément à une entente conclue avec une autre municipalité, ou, avec l'autorisation du ministre, par la Sûreté du Québec, conformément à une entente. Les municipalités qui ne se conformeront pas à ces dispositions seront desservies par la Sûreté du Québec, conformément aux dispositions prévues par la Loi de police. Pour mettre en place ces nouvelles dispositions, des pouvoirs réglementaires sont prévus au projet de loi.

M. le Président, nous le savons maintenant, le gouvernement péquiste adopte toujours une attitude inacceptable envers les individus ou les organismes les plus faibles et les plus démunis de notre société. Ce même gouvernement du PQ est celui qui a sérieusement endommagé et continue de ralentir l'économie de la province de Québec par son option séparatiste. Ce gouvernement du PQ, il est responsable aussi de l'augmentation du chômage qui frappe les Québécoises et les Québécois. Ce gouvernement péquiste est celui aussi dont l'option séparatiste a causé une baisse dramatique des investissements privés et étrangers, ce même gouvernement dont les décisions provoquent un exode de la province de Québec des citoyens de toute origine provenant de toutes les régions du Québec.

(20 h 10)

Il faut savoir aussi que les programmes et les politiques du gouvernement du Parti québécois ont considérablement limité les revenus qui, autrement, auraient été accessibles à la population du Québec. Ce gouvernement péquiste cause une diminution sévère des revenus taxables, réduisant ainsi les taxes que le gouvernement peut recevoir. Et alors, pour payer leurs dépenses, nous sommes aux prises avec un gouvernement qui surtaxe la population du Québec par une multitude de taxes indirectes et cachées, comme toutes ces taxes additionnelles qui viennent de tomber sur les Québécoises et Québécois. Pensons seulement à l'arrivée de l'assurance-médicaments, la supertaxe déguisée. Pensons aux nouvelles coupures de 76 000 000 $ imposées par les péquistes aux municipalités, lesquels montants seront refilés d'une manière ou d'une autre à la population du Québec. On a encore là une autre supertaxe déguisée. Et que dire de la déclaration ministérielle de la semaine dernière imposant une nouvelle taxe sur la vente des cigarettes? Et je pourrais continuer ainsi longtemps.

M. le Président, le projet de loi n° 77 nous donne une fois de plus la preuve que le gouvernement du Parti québécois trouve plus facile d'imposer sa volonté à ceux qui ont le moins les moyens de s'opposer aux politiques gouvernementales, soit, dans le cas qui est devant nous, les petites municipalités de moins de 5 000 habitants. Ces municipalités de 5 000 habitants ne veulent pas être obligées d'utiliser les services de la Sûreté du Québec, elles veulent leur propre autonomie, le libre choix de leur force de police qui appliquera la loi dans leurs municipalités et donnera la sécurité à leurs citoyens.

Mr. Speaker, the bill before us, once again, is evidence that the PQ Government finds it easy to impose its will upon those with less means of opposing PQ Government policy, in this case the smaller municipalities with less than 5 000 citizens. These municipalities with less than 5 000 citizens do not want to be obliged to use the services of the Sûreté du Québec, they want to choose the police force which will apply the law within their own municipality.

M. le Président, des organismes majeurs et prestigieux de la province de Québec sont contre le projet de loi n° 77 et ont clairement et publiquement manifesté leur désaccord. Mais, malgré cette opposition du public, le gouvernement du Parti québécois, qui vit hors de la réalité et commence à perdre contact avec les Québécoises et Québécois, insiste pour passer ce projet de loi. L'Union des municipalités régionales de comté du Québec, l'Union des municipalités du Québec, la Communauté urbaine de Montréal, la Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal sont contre ce projet de loi.

La question de l'économie municipale est fondamentale et ne doit pas être remise en question. De plus, et on revient ici encore avec la notion des taxes cachées qui sont imposées aux Québécoises et Québécois, parce que c'est de cela qu'il s'agit, ce projet de loi déposé devant nous est une nouvelle façon de forcer les petites municipalités à payer une portion des coûts engendrés par la Sûreté du Québec.

L'Union des municipalités régionales de comté du Québec, qui a dénoncé ce projet de loi, a déclaré que les petites municipalités seront forcées de donner un chèque de 40 000 000 $ à la Sûreté du Québec. Le 0,10 $ de chaque 100 $ d'évaluation qui représente actuellement le coût des services de police des municipalités devra être augmenté à 0,18 $ par 100 $ d'évaluation. Et qui, d'après vous, M. le Président, devra payer ces taxes? Personne d'autre que les résidents de ces petites municipalités affectées par ce projet de loi que nous sommes en train d'étudier aujourd'hui. Je trouve que c'est inéquitable, injuste et que ça représente une intrusion dans le financement des petites municipalités.

The UMRCQ, which has denounced this bill, has stated that the small municipalities will be forced to pay a 40 000 000 $ bill to the Sûreté du Québec. The present 0,10 $ of every 100 $ of evaluation for the cost of police services of municipalities will have to be increased to 0,18 $ for police services. And who, I ask you, Mr. Speaker, will pay this tax? None other than the persons residing in the small municipalities affected by this bill we are now studying. This is inequitable, unjust, an intrusion in the finances of the smaller municipalities.

M. le Président, c'est un principe de droit et d'équité que de dire que celui qui paie doit avoir le contrôle des dépenses qui occasionnent ce paiement. Dans le cas qui nous occupe, les municipalités concernées n'auront aucun contrôle sur le coût d'opération de la Sûreté du Québec. On nous dit que ceci n'est pas juste. Dites-moi alors pourquoi on demande à ces municipalités de financer la Sûreté du Québec. Et que dire des salaires payés à la Sûreté du Québec qui devront maintenant être assumés en partie par les municipalités? Est-ce que les municipalités auront le droit de négocier ces salaires? Voyons donc! Ce projet de loi est encore une fois la démonstration que le gouvernement péquiste ne traite pas tous les citoyens du Québec de la même façon. Nous commençons à être habitués à leur façon de faire, mais nous ne l'accepterons jamais.

Mr. Speaker, let us ask some basic questions of the bill before us, namely Bill 77. Mr. Speaker, please feel free to answer these questions yourself and then to judge the quality of the bill being presented in the National Assembly.

M. le Président, posons quelques questions de base sur le projet de loi n° 77. Je vous invite à y répondre vous-même, et alors vous pourrez juger de la qualité du projet de loi qui est déposé devant cette Assemblée nationale.

Mr. Speaker, will Bill 77 resolve in job creation or job loss for the people of Québec? The answer is that there's neither job creation nor job loss. Why are we not spending more time in this National Assembly examining bills presented to us by the PQ Government which would create jobs? The answer, Mr. Speaker, is that this Government, the PQ Government is void of creative ideas, void of legislation which should put Quebeckers back to work. The PQ has an obligation to the people of Québec which it is not fulfilling.

M. le Président, est-ce que ce projet de loi va créer des emplois ou, au contraire, causer des pertes d'emplois pour les Québécoises et les Québécois? La réponse est: Ni l'un ni l'autre. Pourquoi ne travaillons-nous pas ici, dans cette Assemblée nationale, à examiner des projets de loi du gouvernement du Parti québécois qui seraient créateurs d'emplois? La réponse est très simple: Le gouvernement du PQ est incapable de nous présenter des idées novatrices ou une législation qui aiderait les Québécoises et les Québécois à reprendre leur place sur le marché du travail. Le gouvernement a une obligation envers les Québécoises et les Québécois, mais, depuis son entrée au pouvoir, il semble l'avoir oubliée.

M. le Président, continuons. Est-ce que le projet de loi n° 77 aura un impact sur les finances publiques en matière de revenus et taxes? La réponse est oui. Mais je suis très désolé de dire que ceci aura un effet très négatif, parce que le ministre impose un fardeau additionnel de 40 000 000 $ sur les municipalités de moins de 5 000 habitants pour aider à assumer le budget de la Sûreté du Québec.

M. le Président, encore une fois, je vous le demande, qui aurait à payer cette facture? Eh bien, ce seraient les citoyens des municipalités de moins de 5 000 habitants en payant un surplus de 0,08 $ par chaque 100 $ d'évaluation. Je demande aux citoyens de ces municipalités de dénoncer haut et fort l'incompétence du gouvernement devant nous, le gouvernement péquiste.

(20 h 20)

Mr. Speaker, let us continue. Will Bill 77 help us to improve public services? The answer is a resounding no. On the contrary, this bill before us will probably reduce police services to Quebeckers, because the Sûreté du Québec will have to do more with less resources. Again, Quebeckers, as a result of the incompetence of the PQ Government, will see the quality of their services diminished. I call upon the people of Québec to express themselves one and all in a loud and clear voice against this Government which is evidencing and causing a deterioration in the quality of life of all Quebeckers. We must rid ourselves of this Government once and for all.

M. le Président, je suis certain qu'à l'heure actuelle vous conviendrez avec moi que la population du Québec souffre du climat d'incertitude politique, économique et sociale créé par le gouvernement du Parti québécois, ce gouvernement qui est ici devant nous et qui se promène à travers le monde en véhiculant cette incertitude effrayante aux investisseurs potentiels.

Est-ce que ce projet de loi cherche à diminuer la réglementation, tel que le gouvernement péquiste l'avait promis? Vous noterez que le gouvernement du Parti québécois n'a pas souvent tenu les promesses qu'il a faites jusqu'à ce jour aux Québécoises et Québécois, et j'ai tendance à croire que ce projet de loi, qui devrait réduire la réglementation, ne sera en fait qu'une autre de ses promesses jetées à la poubelle. En fait, c'est tout le contraire qui va se produire: le projet de loi va augmenter et compliquer de nombreux règlements auxquels devront se conformer les citoyens.

En conclusion, je joins ma voix à celle de mes collègues pour m'opposer à ce projet de loi n° 77 qui est injuste, inopportun et mal rédigé. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de...

M. Bergman: D'Arcy-McGee.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...D'Arcy-McGee. Excusez. C'est bien ça. D'Arcy-McGee. Alors, je pourrais céder la parole à un prochain intervenant. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. À mon tour, je voudrais ajouter quelques commentaires aux collègues qui m'ont précédé concernant le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives.

It's my turn, Mr. Speaker, to add a few comments to those of the colleagues that preceded me on the subject of Bill 77, an Act to amend the Police Act and other legislative provisions.

M. le Président, on trouve, comme vous le savez fort bien, à l'intérieur de chaque projet de loi ce qu'on appelle des notes explicatives. Ces notes-là tentent de façon précise de, si je peux dire, vulgariser, expliquer les objectifs d'un projet de loi. Elles sont très sommaires, elles le font de façon très sommaire et je dirais même très discrète, parce que les notes explicatives de ce projet de loi indiquent: «C'est ainsi qu'il prévoit notamment qu'une municipalité locale de moins de 5 000 habitants doit conclure une entente par l'intermédiaire de sa municipalité régionale de comté pour obtenir les services de la Sûreté du Québec, sauf si le ministre de la Sécurité publique l'autorise à recourir à un autre corps de police.» Une phrase assez anodine, M. le Président, qui est incluse parmi les notes explicatives, mais une phrase qui a toute une portée financière pour les municipalités de moins de 5 000 personnes au Québec. Et je reviendrai là-dessus.

La Sûreté du Québec, aujourd'hui, compte un peu plus de 4 000...

Une voix: 3 700.

M. Copeman: ...on me dit 3 700 membres et dessert 1 248 municipalités. Et, comme je l'ai indiqué, comme l'indiquent les notes explicatives, un des buts recherchés par ce projet de loi, c'est d'étendre le territoire desservi par la Sûreté du Québec.

On demande une chose assez difficile, quant à moi. On demande essentiellement à la Sûreté du Québec de faire plus avec moins. On demande à la Sûreté de fournir des services à des municipalités pour lesquelles elle n'est pas responsable au moment où on se parle, mais sans qu'on ajoute des agents de police. On lui demande de faire plus avec moins, une façon de le dire, mais avec le même niveau d'effectifs, ce qui, à mon sens, est déjà un défi de taille pour la Sûreté du Québec.

Dans la population en général, vous avez entendu, M. le Président... Le ministre, s'il avait été ici, serait d'accord avec moi pour dire qu'il a entendu lui aussi des commentaires comme quoi, dans les diverses régions du Québec, la présence policière n'est pas tout à fait à la hauteur que la population estime nécessaire pour la protection de leurs biens et de leur vie. Alors, on demande essentiellement, plus, on exige que les 3 700 agents de la Sûreté du Québec acceptent d'autres responsabilités qu'ils ont au moment où on se parle, sans augmenter les effectifs ou les ressources nécessaires auprès de la Sûreté du Québec pour le faire. Déjà un point avec lequel nous sommes en désaccord, déjà une faille importante dans le projet de loi.

Mais plus pernicieux que ça, M. le Président, est l'effet fiscal de ce projet de loi, parce que cette petite phrase anodine par laquelle on oblige les petites municipalités à faire des ententes avec la Sûreté du Québec... Évidemment, non seulement on les oblige à le faire, mais, pratique courante de ce gouvernement, on leur impose la facture – une facture additionnelle pour les contribuables québécois et québécoises – qui, selon nos estimations, peut s'élever à environ 40 000 000 $. Où est-ce que les municipalités vont trouver ces sommes-là pour payer pour ces ententes avec la Sûreté du Québec? Bien, comme bien d'autres municipalités, comme bien d'autres paliers de gouvernement et d'instances ici, au Québec, nous sommes convaincus que ces municipalités-là seront, dans une large mesure, obligées d'augmenter les taxes pour être capables d'assumer les frais de ces services. C'est très clair, M. le Président.

(20 h 30)

M. le Président, il est, à mon esprit, évident que ce projet de loi ne représente qu'un simple pelletage de taxes du gouvernement du Québec à des petites municipalités. Les gens d'en face, qui ont dans le passé décrié, déchiré leur chemise au sujet du pelletage des responsabilités vers les municipalités sans les ressources nécessaires, se trouvent à être dans la situation où ils font exactement la même chose. Il y a des mots qu'on peut utiliser pour ce genre de geste là, mais, malheureusement, ces mots sont antiparlementaires. Alors, je ne peux pas les utiliser. Le mot qui me vient à l'esprit: hypocrisie. Je ne peux pas l'utiliser! Mais quand on a dit une chose dans le passé, puis quand on arrive au pouvoir puis qu'on fait exactement le contraire, il n'y a, quant à moi, qu'une conclusion à en tirer. Facile pour eux autres, dans le temps, le parti ministériel, de décrier du pelletage. Ils faisaient tout un chiard. Je n'étais pas ici, en cette Chambre, mais je suivais les débats. Ils déchiraient leur chemise! Ce n'est pas beau à voir, à part ça, vraiment pas beau à voir, parce qu'on pelletait des responsabilités vers les municipalités sans les ressources nécessaires, puis ils font exactement la même chose en 1996.

M. Lefebvre: Pire!

M. Copeman: Et le député de Frontenac me corrige: ils ne font pas exactement la même chose, ils font des choses pires. Et il a raison.

M. le Président, on transfère un fardeau fiscal vers des municipalités. On va être obligé d'augmenter les taxes, j'en suis convaincu. On ne respecte pas le choix des municipalités, parce qu'on dit dans la loi que ces petites municipalités doivent conclure des ententes, sauf à l'exception, approuvée par le ministre de la Sécurité publique. Encore une fois, une autre tendance de ce gouvernement en face de nous, c'est d'enfreindre la liberté des choix des citoyens québécois dans beaucoup de domaines. Que ce soit dans le domaine des gardes de l'enfance, que ce soit dans d'autres domaines, ce gouvernement a une tendance de dirigisme jusqu'au plus haut point. Il enlève le choix des municipalités de soit maintenir leur propre corps policier ou – si elles veulent, oui – d'accepter la protection de la Sûreté du Québec. Mais, pour ce gouvernement, il n'y a pas de choix. Pourquoi il n'y a pas de choix, M. le Président? Parce que le projet de loi n° 77 est une mesure fiscale. Il aurait dû être présenté par le ministre des Finances. Il aurait dû être présenté par le ministre des Finances en guise d'augmentation de taxes, c'est très clair.

Un autre exemple de ça: le financement de l'Institut de police à Nicolet. Là, encore une fois, tout d'un coup, le gouvernement décide que les corps de police vont être responsables, jusqu'à concurrence de 1 % de leur masse salariale, du financement de la formation donnée par l'Institut de police. Tout d'un coup, M. le Président, juste comme ça! On se réveille un jour, les municipalités sont responsables de cette facture. Encore une fois, pelletage des responsabilités vers les municipalités sans financement adéquat, sans compensation de quelque nature.

La facture de l'Institut de police à Nicolet représente une facture globale de 2 200 000 $ par année, à peu près, qui va être refilée vers les corps policiers. Pour la ville de Montréal, le comté de Notre-Dame-de-Grâce, comme vous le savez très bien, M. le Président, est situé, aux quatre cinquièmes de son territoire, dans la ville de Montréal; l'autre cinquième, c'est la ville de Montréal-Ouest, petite municipalité de 4 000 âmes. La ville de Montréal, elle va être responsable pour 1 100 000 $ par année pour la facture de Nicolet, 1 100 000 $. Sans avis, la ville de Montréal se retrouve avec une facture à payer: 1 100 000 $ de plus.

La semaine passée, le ministre des Finances s'est levé en cette Chambre, a fait une déclaration ministérielle comme quoi, quelque, quoi, six heures plus tard ou huit heures plus tard, le rabais qui était accordé aux municipalités à travers le Québec sur une partie de la taxe de vente de Québec était annulé. Tout d'un coup, le ministre des Finances se lève en cette Chambre avec une déclaration ministérielle et refile une facture aux municipalités de 76 000 000 $ pour l'année prochaine, sans consultation, sans la moindre indication qu'il ferait ça. L'effet de cette mesure, la semaine passée, du ministre des Finances est de refiler une facture de 10 000 000 $ à la ville de Montréal pour l'année prochaine, 10 000 000 $!

Je sais, c'est beaucoup de chiffres, M. le Président, mais vous allez comprendre pourquoi j'ai exposé ces chiffres. Le pacte fiscal que le ministre responsable de la Métropole a annoncé en grande pompe, pacte fiscal, l'année prochaine, de 33 000 000 $ pour aider Montréal à sortir du marasme économique causé par les gens d'en face. Le ministre responsable de Montréal est obligé de trouver 33 000 000 $ pour tenter de pallier ça. Alors, déjà une incohérence complète, M. le Président. Ils causent le marasme puis ils sont obligés de pallier avec 33 000 000 $. Mais là ce n'est pas 33 000 000 $, cette aide pour la ville de Montréal, parce que même pas une semaine plus tard, ce que le gouvernement a donné – 33 000 000 $ – avec la main droite, il enlève 10 000 000 $ avec la main gauche, ce qui représente l'équivalent de rabais de la TVQ. Il enlève 10 000 000 $ et il enlève 1 100 000 $ pour Nicolet. Ça veut dire qu'il enlève 11 000 000 $. Le ministre responsable de Montréal ne peut plus parler d'un pacte fiscal de 33 000 000 $ qu'il a annoncé la semaine passée, parce qu'il vient d'enlever 11 000 000 $ la semaine passée et cette semaine. Ça veut dire que c'est un pacte fiscal que de 22 000 000 $.

Moi, je lance le défi au ministre responsable de la Métropole d'être capable de trouver ces autres 11 000 000 $ de plus pour pallier aux gestes de son propre gouvernement qui fait descendre un financement de 33 000 000 $ pour la ville de Montréal tout d'un coup, même pas une semaine plus tard, à 22 000 000 $. Ça, c'est très créatif comme approche, M. le Président. C'est très péquiste, ça, comme approche. Il donne 33 000 000 $ la semaine passée et il enlève 11 000 000 $ la même semaine ou la semaine d'après. En anglais, M. le Président, on appelle ça «robbing Peter to pay Paul».

That's what this Government has a tendency to do. But frankly, Mr. Speaker, it's worse than robbing Peter to pay Paul because – the member from Marquette has it exactly – it's robbing Peter and Paul to pay Bernard. That's what it is, Mr. Speaker. It's robbing Peter and robbing Paul to pay Bernard. That's very clear. And, of course, the Bernard to which I refer is no other than the Minister of Finance.

This Government insists, Mr. Speaker, on taxing Quebeckers at every turn in the legislative calendar and at every turn in the fiscal year by every means possible. This Government which said once upon a time that Quebeckers were already taxed to the limit, that taxation, according to the very words of the Minister of Finance, kills job creation. So what does this Government do? Impose more taxes. And they wonder why Québec, under the tutelage of the current Premier, has lost 54 000 jobs.

Mr. Speaker, I have to admit I am not an expert in economics. I don't have the background that the Minister of Finance has. In his typically condescending manner, he tends to stand up in the House and denigrate anyone who isn't a professor or an academic, like yourself, Mr. Speaker, or many of us who have not had the occasion to become academics over a lifetime. But despite the fact I am not an expert, I can see clearly and I can see that when the Minister of Finance says that increase taxation kills employment. But when that same Minister does nothing but increase taxes, the result is obvious even to a layman such as myself, Mr. Speaker. Even someone who is not initiated in the world of high finance, as myself, can understand that if you accept that high taxation kills job creation and you go around imposing taxes left, right and center, it's going to have an impact on jobs. And lo and behold, Mr. Speaker, what kind of an impact do we have? A job loss of 54 000 here, in the Province of Québec.

Par contre, même si je ne suis pas expert dans les finances – le député de Duplessis prétend que c'est clair que je ne suis pas un expert – ce n'est pas moi qui ai dit que la perte d'emplois au Québec pendant l'été a été due au mauvais temps. Le ministre des Finances, avec toute son expérience, toute sa formation, quant à lui, quand il pleut, on perd des emplois. C'est ça qu'il a dit. L'extension logique de ça: quand il fait beau, on devrait créer des emplois. Bien, je n'ai pas fait un relevé exhaustif de nos journées de pluie et de nos journées de beau temps, mais je peux vous assurer d'une chose, M. le Président: je pense qu'on a eu assez de beau temps pour ne pas perdre 54 000 emplois depuis l'arrivée du député de Jonquière à la tête de ce gouvernement. Je peux l'appeler «le député de Jonquière» aussi, M. le député de Taschereau, si ça ne vous dérange pas?

(20 h 40)

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Écoutez, le député de Notre-Dame-de-Grâce sait très bien qu'il ne peut s'adresser directement à un député, et il l'a fait à deux reprises, M. le Président.

M. Copeman: Je m'en excuse, M. le Président. C'est ça qui arrive quand les commentaires sont filés juste pour l'oreille de ceux qui parlent: on a une tendance à répliquer en enfreignant, je l'avoue, nos règlements.

M. le Président, pluie de taxes, pelletage de responsabilités vers des municipalités, sans compensation, sans ressources additionnelles; des groupes dans le Québec qui sont contre, un consensus. Cette nuit, on a parlé du consensus du ministre du Travail sur le projet de loi n° 99. Là, il y a tout un autre consensus du ministre de la Sécurité publique sur le projet de loi n° 77. Consensus? L'Union des municipalités régionales de comté du Québec, contre: inacceptable; l'Union des municipalités du Québec, contre: inacceptable; Communauté urbaine de Montréal, contre; Fraternité des policiers de la CUM, contre. C'est un beau consensus, ça! Un autre consensus dans le style du premier ministre; tout le monde est contre.

M. le Président, pour toutes ces raisons, il m'apparaît très clair que la seule chose que cette Chambre peut faire, c'est de rejeter le projet de loi n° 77 et dire avec toute notre vigueur à quel point la réforme du ministre de la Sécurité publique est ratée et qu'il devrait recommencer ses travaux comme il faut pour présenter un meilleur projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le prochain intervenant sera le député de Marquette. Je vous cède la parole, M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. J'ai l'impression d'assister à du déjà-vu dans plusieurs secteurs. En 1995, on s'en rappelle, le gouvernement avait accordé des augmentations de plus de 1 000 000 000 $ aux employés de la fonction publique afin d'aller acheter leur Oui pour le référendum qui s'en venait sur l'indépendance ou la séparation du Québec.

Que s'est-il passé? Et pourtant, en 1994-1995, on connaissait fort bien la situation financière du Québec; elle n'a à peu près pas changé. On le savait fort bien, et pourtant on promettait 1 000 000 000 $. Aujourd'hui, on se retrouve...

Mme Caron: Question de règlement. Il s'est trompé de projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, pourriez-vous rappeler au député de Marquette l'article 211 sur la pertinence, s'il vous plaît? Nous sommes sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Voilà.

M. Maciocia: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Viger, vous voulez intervenir sur une question de règlement?

M. Maciocia: Oui, sur la question de règlement. Je pense que la leader adjointe du gouvernement, elle devrait attendre quand même que le député de Marquette puisse terminer ses phrases pour arriver, justement, sur le projet de loi n° 77. Je crois qu'elle commence à être un peu trop... disons à s'élever un peu trop. Probablement qu'elle veut se montrer à la télévision, je ne sais pas trop, mais il ne faudrait pas le faire.

Mme Caron: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, rapidement, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Bien oui, M. le Président, évidemment, le député de Viger sait très bien qu'il ne peut pas me prêter des motifs. Alors, je ne vois vraiment pas pourquoi il a fait cette intervention-là. Puis peut-être rappeler que c'est le député de Marquette qui intervenait et que, depuis le début de son intervention, il n'a absolument pas parlé encore du projet de loi n° 77. Il était vraiment sur un autre projet.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Alors, s'il vous plaît, je pense que, sur ce point-là, nous allons très, très rapidement, pour ne pas relancer un débat sur cette question-là...

M. Maciocia: Très bref, M. le Président. Comme je disais, le député de Marquette, il commençait son intervention. Il s'en venait justement sur le projet de loi n° 77 pour dire que le gouvernement, il est en train de faire du pelletage des impôts et des taxes aux citoyens du Québec, et c'est ça que le député de Marquette s'en venait pour dire.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, très bien. Vous savez que, sur la question de la pertinence, il faut se donner un petit peu de temps pour voir s'il y a une exagération, là, parce qu'il y a toujours possibilité de ramener, enfin, quelques points qu'on soulève au projet de loi. Alors, je vous inviterais, si vous voulez, à poursuivre et à voir à ramener quand même les choses en fonction du projet de loi que nous avons sur la table.

M. Ouimet: M. le Président, si la députée de Terrebonne me laissait aller quelque peu, elle verrait tout à fait la pertinence de mes propos, parce que je m'apprêtais à citer un éditorial de Jean-Jacques Samson, du mois de septembre 1996, où il disait comment les MRC s'étaient fait berner, tout comme les employés de la fonction publique, par le discours gouvernemental préréférendaire, mais que maintenant la réalité frappe: «La réalité a frappé et continue de frapper les employés de la fonction publique. Le gouvernement, de la main gauche, a accordé 1 000 000 000 $; le gouvernement, de la main droite, est en train maintenant de récupérer le même 1 000 000 000 $.»

La même chose au niveau des municipalités régionales de comté. Voici ce que disait M. Jean-Jacques Samson dans son éditorial du Soleil du 5 septembre 1996. Il disait ceci: «La lune de miel est terminée. Le Parti québécois avait séduit les membres de l'Union des municipalités régionales de comté par son discours sur la décentralisation.»

Avant le référendum, M. le Président, on se rappellera, le ministre des Affaires municipales et même le premier ministre promettaient mer et monde aux MRC. Et M. Samson continue. Il disait: «Ce nouveau partage des pouvoirs était intimement lié, dans le programme péquiste, à une victoire du Oui au référendum qui entraînerait un rapatriement au Québec de toutes les responsabilités», etc. C'est tout à fait pertinent, ce que dit M. Jean-Jacques Samson, et c'est tout à fait pertinent, ce que je dis, parce que M. Samson parlait de la colère justifiée des maires des petites municipalités du Québec, voyant comment le gouvernement est en train d'arnaquer les MRC.

C'est exactement ce qui se passe actuellement. Le discours sur la décentralisation, c'est terminé. On est en train de vouloir récupérer 48 000 000 $ sur le dos des contribuables en leur demandant de financer les coûts de la Sûreté du Québec. Or, c'est le même coût qu'en 1980-1981. On se rappellera qu'à la veille du référendum, dans les années quatre-vingt, on avait promis mer et monde aux gens de la fonction publique, pour, par la suite, leur imposer des compressions de 20 % au niveau de leur salaire. J'ai déjà eu l'occasion de dire en cette Chambre qu'en 1980 on s'était attaqué aux enseignants; en 1996, on s'attaque maintenant aux contribuables, et on s'attaque aux contribuables de façon directe dans le projet de loi n° 77.

C'est le même stratagème dans d'autres projets de loi. On n'a qu'à penser au virage ambulatoire du ministre de la Santé qui disait qu'on allait fermer des hôpitaux pour donner plus de services de santé à la population. Dans le fond, ce qu'ils visent, c'est tout simplement de taxer davantage les contribuables et de réaliser des économies sur le dos des contribuables.

(20 h 50)

La même chose au niveau de l'assurance-médicaments. On indiquait, lorsque le ministre de la Santé a présenté son projet de loi, qu'il voulait assurer des citoyens qui, disait-il, n'étaient pas assurés. Et son projet de loi était présenté comme un projet de loi qui était très bien, qui était équitable et qui était même souhaitable. Sauf que nous avons commencé à questionner sur le projet de loi et nous avons questionné aussi le ministre des Finances et nous nous sommes rapidement rendu compte que c'était un stratagème pour aller chercher plus de 200 000 000 $ dans la poche des contribuables québécois.

La même chose au niveau du monde municipal. On se rappelle du 158 000 000 $ de taxes additionnelles qui s'est abattu sur le monde municipal. Et là, M. le Président, avec le projet de loi n° 77, on tente de faire la même chose avec les petites municipalités.

Le ministre de la Sécurité publique prétend que, lui, il veut procéder à une réforme des services policiers au Québec, mais, au contraire, et tout le monde a vu le stratagème, c'est uniquement une mesure pour aller récupérer 50 000 000 $ sur le dos des contribuables.

Je me permettrai de citer un communiqué de la part de la présidente de l'UMRCQ, daté du 28 novembre 1996, qui disait ceci: «Comment, dans le contexte économique actuel, pouvez-vous justifier que des municipalités de petite taille, de moins de 5 000 habitants, peu populeuses et financièrement moins bien nanties, où le taux de criminalité est bas, reçoivent une augmentation de facture de 80 %?» Parce que c'est ça, le fond du projet de loi. C'est ça, l'objectif du ministre de la Sécurité publique. Il a reçu une commande de la part du président du Conseil du trésor, qui, lui, a reçu une commande de la part du ministre des Finances, qui, lui, a reçu une commande de la part du premier ministre du Québec. Tous les projets de loi qui sont présentés à l'Assemblée nationale n'ont qu'un seul objectif, c'est d'aller récupérer des sommes d'argent dans la poche des contribuables. Tout le monde y passe, tout le monde y goûte. Et ça, ce sont les propos mêmes du premier ministre: Tout le monde va devoir y passer. Ce soir, le projet de loi n° 77, eh bien, ce sont les municipalités régionales de comté qui y passent.

Je vois le député de Lotbinière, et, lui, il sait que le monde scolaire va y passer bientôt à deux égards: au niveau de la taxe scolaire, un autre 100 000 000 $ qui sera pelleté dans la cour des commissions scolaires et puis, par la suite, on va présenter une réforme au niveau des services à la petite enfance. Que vise-t-on avec cette réforme-là? On vise, semble-t-il, des beaux principes. On semble se coller sur un consensus qui existe dans le monde de l'éducation. Mais, cependant, on va profiter de l'occasion pour financer beaucoup moins les services à la famille. Des 2 100 000 000 $ qui sont injectés actuellement par le gouvernement, je vous parie n'importe quoi que le gouvernement va saisir l'occasion pour réduire le financement qu'il accorde actuellement aux mères de famille, aux pères de famille et aux enfants. C'est de ça dont il s'agit, et personne n'est dupe. Les éditorialistes l'ont vu, le monde municipal l'a vu. Tout le monde est contre le projet de loi n° 77, parce qu'on prétend vouloir faire une réforme alors que, véritablement, ce que l'on vise et le mandat du ministre de la Sécurité publique, c'est de taxer davantage les citoyens et de faire passer ça sur le dos d'autres personnes, en l'occurrence, ici, les MRC.

Une augmentation de facture de plus de 80 %. Le coût va passer de 0,10 $ du 100 $ d'évaluation actuellement à plus de 0,18 $ du 100 $ d'évaluation. C'est de ça dont il s'agit. Et, par la suite, on va faire financer également par ce même monde municipal des maisons d'enseignement comme l'Institut de police de Nicolet, qui coûte entre 6 000 000 $ et 8 000 000 $. Nouveau stratagème trouvé par le ministre de la Sécurité publique: le ministre de la Sécurité publique a décidé de se prévaloir de la nouvelle taxe sur la masse salariale, le 1 %, pour pouvoir financer l'Institut de police à Nicolet. Donc, 40 000 000 $ d'une part, 8 000 000 $ d'autre part, on va aller chercher 48 000 000 $ de cette façon-là. Comment est-ce qu'on va abrier ça? Comment est-ce qu'on va tenter de camoufler ça? On va dire qu'on veut faire une réforme des services de police. Tout le monde a vu clair, et il a été dit, au sujet du ministre de la Sécurité publique, qu'il a réussi à faire l'unanimité: l'unanimité contre lui et contre son projet de loi.

M. le Président, les MRC demandent quelque chose qui m'apparaît rempli de bon sens. Elles demandent de pouvoir avoir le choix, de pouvoir exercer un certain choix. Elles ont demandé au ministre de la Sécurité publique, parce qu'elles ont été prises de court... Elles ont été informées de la mesure du ministre et du coût que ça représentait. Vers le mois d'octobre, elles ont dit au ministre: Nous sommes en mesure de nous revirer de bord assez rapidement puis nous allons trouver des façons d'arriver avec des ententes avec d'autres corps policiers. Le ministre refuse. Pourquoi le ministre refuse-t-il de leur accorder un délai additionnel pour possiblement venir bonifier le projet de loi? C'est parce que, lui, il a une commande financière: il doit aller chercher 48 000 000 $, point à la ligne, et il doit livrer la commande avant le 31 décembre de cette année, parce que, l'année prochaine, on sait que le processus budgétaire, le processus des crédits est déjà engagé, est déjà amorcé. Alors, c'est strictement ça. Pourtant, les municipalités sont de bons gestionnaires et ont fait la preuve combien de fois par le passé qu'elles étaient en mesure de bien gérer les domaines qu'on leur confiait.

J'aimerais citer un exemple, dans le comté de Marquette. Voici deux administrations responsables. On apprenait aujourd'hui que la ville de Saint-Pierre et la ville de LaSalle partageront leurs services d'incendie afin de réaliser des économies pour les contribuables de ville Saint-Pierre et pour les contribuables de ville LaSalle. Voilà une preuve éloquente de la capacité du monde municipal, lorsqu'il a la pleine gestion des choses qui lui sont confiées, de réaliser des économies. Elles ont bien compris, et ici je me permettrai de citer l'article paru dans La Presse ce matin: «Les services de protection contre les incendies de Saint-Pierre et de LaSalle relèveront dès janvier 1997 – et, en pratique, dès demain – d'une seule et unique direction. Il y aura une économie évidente pour les deux municipalités.»

M. le Président, j'adresse ce soir mes plus sincères félicitations aux deux administrations municipales de mon comté qui réalisent des économies. Pourtant, lorsqu'on regarde le projet de loi du ministre de la Sécurité publique, il ne semble pas vouloir reconnaître la capacité de gestion des élus municipaux. Parce que les élus municipaux lui demandent de pouvoir faire des ententes avec d'autres corps policiers. Ils ne veulent pas se limiter à la SQ, surtout que, à la SQ, semble-t-il que le taux d'encadrement est beaucoup plus élevé. C'est un corps policier qui serait plus coûteux, qui a certains domaines d'expertise dont possiblement les petites MRC n'ont pas besoin. Mais le ministre de la Sécurité publique veut les obliger à transiger avec la SQ pour assurer la sécurité sur leur territoire.

(21 heures)

Alors, comment comprendre cet entêtement du ministre de la Sécurité publique qui, contre l'avis de tout le monde... Et je n'ai jamais vu des propos aussi sévères que les propos tenus par Mme Jacinthe Simard, présidente de l'UMRCQ, qui disait ceci dans son communiqué du 28 novembre dernier. Elle disait: «Ce projet de loi constitue une véritable arnaque – a déclaré la présidente de l'UMRCQ, Mme Jacinthe Simard – au moment où le ministre nous refile une augmentation de 80 % des coûts de la Sûreté du Québec, pour 40 000 000 $, il veut nous interdire avec son projet de loi de créer nos propres corps de police et prive ainsi les citoyens de moyens pour réduire les coûts des services publics.» Des propos extrêmement sévères, M. le Président, et il y en a beaucoup d'autres dans l'ensemble de la correspondance que j'ai lue. Par exemple, une lettre, toujours du même organisme, un peu plus récente, le 21 novembre 1996. Mme Jacinthe Simard écrivait toujours au ministre de la Sécurité publique pour lui dire ceci, et je cite: «Sachez, M. le ministre, que le document qui nous a été remis nous a plus que jamais convaincus que votre chiffre est gonflé, trafiqué et arbitraire.» Ce n'est pas la première fois que les alliés du gouvernement indiquent au gouvernement qu'il manipule les chiffres pour ses propres fins. On se rappellera d'une lettre de la CEQ que j'avais moi-même déposée ici, lors de la période de questions, dans laquelle les membres de la CEQ s'interrogeaient sérieusement sur la transparence du gouvernement et comment il manipulait littéralement les chiffres à l'intérieur du ministère de l'Éducation, pour tenter d'arriver à ses fins et pour tenter de présenter une situation qui, lorsqu'on effectue des vérifications, ne se confirme pas.

Alors, des propos extrêmement sévères de la part de l'UMRCQ dans un autre bulletin, un bulletin de liaison qui a été adressé aux membres de l'UMRCQ. La présidente disait ceci: «Quand les citoyens sauront qu'ils sont pris en otages pour maintenir les effectifs de la SQ et qu'ils doivent payer le gros prix, ils feront leur bilan comptable et politique de l'administration Bouchard, de l'administration du premier ministre» indiquait Mme Simard. On serait peut-être porté à penser que Mme Simard est quelqu'un d'allégeance libérale. Je tiens à vous informer et je tiens à informer les gens qui nous écoutent ce soir que c'est une ancienne candidate du Parti québécois défaite dans une investiture. Ça va bien. Des gens qui sont des alliés du gouvernement actuel, du Parti québécois, qui sortent sur la place publique pour dénoncer vigoureusement les attaques du gouvernement, les attaques du ministre de la Sécurité publique sur des contribuables qui sont ni plus ni moins sans défense, parce qu'on sait que le gouvernement va se servir de sa majorité pour opprimer l'opposition puis, par la suite, pour ajouter un fardeau additionnel de 50 000 000 $ sur le dos des contribuables. C'est la raison pour laquelle nous serons contre ce projet de loi. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Sauvé. M. le député.


M. Marcel Parent

M. Parent: Merci, M. le Président. Aujourd'hui, 3 décembre 1996, deux ans après le 12 septembre 1994 au moment où les Québécoises et les Québécois élisaient le Parti québécois comme nouveau gouvernement du Québec. Les Québécoises et les Québécois, à ce moment-là, ont cru ce gouvernement, ont cru le programme électoral, ont cru les ténors de ce parti qui s'engageait à administrer le Québec d'une façon normale, d'une façon saine, d'une façon à améliorer le sort de la vie des Québécoises et des Québécois. Et, depuis deux ans, M. le Président, tout ce que ce gouvernement a fait ne ressemble aucunement à ses engagements électoraux. Ce gouvernement s'est donné des mandats pour lesquels il n'était pas mandaté, et on en a la preuve aujourd'hui avec le projet de loi n° 77.

C'est malheureux, M. le Président, que les membres de l'opposition en cette Chambre se voient obligés de se lever continuellement pour rappeler à ce gouvernement qu'il a des obligations de bonne gestion, pour rappeler à ce gouvernement qu'il n'a pas le droit de tout chambarder s'il n'a pas reçu un mandat. Et c'est comme ça depuis deux ans, et, lorsqu'on considère que ce gouvernement a été élu avec à peine un différentiel de 15 000 votes à l'étendue de la province, on se demande... Il a peut-être le droit politique de faire ce qu'il fait, mais souvent on peut mettre en doute le droit moral des initiatives qu'il prend face aux Québécoises et aux Québécois.

Le projet de loi, en fin de compte, M. le Président, c'est un projet de loi qui modifie les dispositions de la Loi de police régissant l'organisation des services de police sur le territoire du Québec. Ainsi, il prévoit notamment qu'une municipalité locale de moins de 5 000 habitants doit absolument conclure une entente par l'intermédiaire de sa municipalité régionale de comté pour obtenir les services de la Sûreté du Québec, sauf – c'est ça qui est important – si le ministre de la Sécurité publique l'autorise à recourir à un autre corps de police. Ce gouvernement ne reconnaît même pas la légitimité des élus dans les municipalités de moins de 5 000 de population. Quant aux municipalités de 5 000 habitants et plus, bien, ça, ce n'est pas trop compliqué, elles seront desservies soit par leur propre corps de police – ce qui arrive plus souvent qu'autrement – soit par un autre corps de police conformément à une entente conclue avec une autre municipalité, soit, sur autorisation – encore une fois – du ministère, par la Sûreté conformément à une entente. Encore une fois, le ministre ne fait pas confiance aux élus municipaux. Le ministre ne fait pas confiance aux maires des municipalités même si ce sont des municipalités de plus de 5 000 habitants. Enfin, pour ce qui est des municipalités qui ne se conforment pas à ces dispositions, elles seront desservies, qu'elles le veuillent ou non, par la Sûreté du Québec conformément aux dispositions de la Loi de police. Au moins, il aurait pu toucher à ça, mais il n'y a pas touché.

Ce projet de loi précise aussi, M. le Président, le contenu minimal d'une entente portant sur les services de police fournis par la Sûreté du Québec à une municipalité. Il prévoit la création d'un comité de sécurité publique chargé du suivi de l'entente. Il propose également, dans la Loi sur le ministère de la Sécurité publique, l'institution du Fonds des services de police affecté au financement du coût des biens et des services fournis par la Sûreté du Québec aux municipalités.

Il fait d'autres choses, ce projet de loi là aussi. Le projet de loi modifie également la Loi de police afin de permettre aux policiers et aux constables spéciaux – écoutez bien ça, là – d'exercer certaines activités politiques. C'est ainsi qu'il nous dit que, normalement, pour certains officiers de la Sûreté du Québec et pour des directeurs d'autres corps policiers, ils pourront notamment être candidats à une élection fédérale ou provinciale mais à une condition: à la condition, alors, d'être en congé sans solde, et qu'ils pourront également, ces candidats, se présenter à une élection municipale ou scolaire, mais à condition que ce soit en dehors du territoire où ils exercent leurs fonctions. Je ne comprends pas, M. le Président. Un policier de la Sûreté du Québec qui demeure à Mascouche – petite municipalité pas très loin de Montréal – est affecté à Saint-Jérôme ou à Sainte-Agathe et il se présente comme conseiller municipal à Mascouche puis, parce que c'est un libéral, il est élu, hein? Et là son patron le prend de Sainte-Agathe et le transfère à Mascouche. Il est dans son territoire; il est un élu municipal. Qu'est-ce qu'il fait? Il démissionne? Alors, ce projet de loi là, en ce qui regarde l'éligibilité des policiers à briguer des charges policières puis des charges publiques, doit être revu de fond en comble.

Par ailleurs, ce projet de loi là modifie aussi la Loi sur l'organisation policière relativement au financement de l'Institut de police et à la composition de son conseil d'administration.

Enfin, le projet de loi modifie par contre d'autres lois existantes comme le Code de la sécurité routière, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la Loi sur l'organisation policière, la Loi de police, même la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik.

(21 h 10)

Essentiellement, c'est un projet de loi où le ministre de la Sécurité publique n'est que le messager. Il est en fin de compte le prolongement du ministre des Finances. Puis je vais essayer très rapidement de résumer ce qu'il y a dans ce projet de loi puis après ça, bien, je tenterai de démontrer et puis d'en faire la preuve avec ma propre analyse et surtout pourquoi ce projet de loi là n'a pas sa raison d'être, M. le Président, avec le témoignage de plein de gens qui se sont prononcés sur l'intention du ministre de la Sécurité publique, intention avouée, mais surtout ce qui est caché derrière la loi n° 77 et aussi évidemment en citant des experts qui ont analysé, à date, le cheminement du gouvernement dans ce projet de loi.

M. le Président, ce que le ministre veut faire, avec évidemment la complicité du ministre des Finances, la complicité du président du Conseil du trésor et, ipso facto, la bénédiction du premier ministre, ce n'est pas mêlant, c'est d'imposer autant que possible et autant que faire se peut la Sûreté du Québec partout au Québec. C'est ça qu'il y a dans ce projet de loi. La démarche du gouvernement, c'est de donner du territoire additionnel à la Sûreté du Québec. Et là, M. le Président, le ministre fait fausse route. Il y a actuellement, au Québec, environ 13 000 policiers, si on compte les 3 700 policiers de la Sûreté du Québec, plus les policiers des différents corps policiers municipaux et environ 4 000 policiers à la Communauté urbaine de Montréal. Cet ensemble de policiers qui a la responsabilité de la sécurité publique, savez-vous comment ça coûte, M. le Président? 1 200 000 000 $. Ils servent l'ensemble des services de police au Québec, et c'est ça qu'on est en train de chambarder, sans étude, sans planification et sans consultation. Bien, lorsqu'on paie ce prix-là pour sa propre protection, on est en droit d'être consulté et de savoir où s'en va le gouvernement.

M. le Président, le ministre veut imposer sa Sûreté du Québec et, en même temps, mettre en tutelle la gestion de l'organisation policière à l'intérieur des petites municipalités entre zéro de population et 5 000 habitants. C'est ça que le ministre fait. Et d'ailleurs les notes explicatives de son projet de loi – on en a parlé tout à l'heure – sont plus explicites en ce sens-là. Les municipalités pourront faire plein de choses, sauf qu'elles devront se faire autoriser par le ministre. Le ministre met les municipalités en tutelle en ce qui regarde leur liberté de se donner des corps de police, de se donner un système de protection qu'elles sont obligées de donner à leurs citoyens. C'est la responsabilité des municipalités de voir à la sécurité des citoyens. Mais non, le ministre leur nie ce droit-là et le ministre les met en tutelle. Le ministre les oblige à prendre les services de la Sûreté du Québec quand ils n'en ont pas les moyens. Et, on le sait, les petites villes de 5 000 habitants et moins n'ont pas les moyens de payer les tarifs exigés par la Sûreté du Québec pour leur donner les services. D'ailleurs, M. le Président, les notes explicatives du projet de loi sont explicites, je les ai mentionnées tout à l'heure, ça prend absolument l'autorisation du ministre. Le ministre se donne des pouvoirs qui ne lui appartiennent pas.

Au cours de la tournée dont le ministre a parlé ce matin – ce n'est pas moi qui le dis – il s'est fait apostropher, il s'est fait ramasser par à peu près tout le monde et chaque fois qu'il mettait le nez dehors. Pourquoi? Parce qu'on lui a reproché – je fais bien attention à mes mots, M. le Président, la députée de Terrebonne me regarde – de ne pas dire toujours la vérité, on lui a reproché de dire des demi-vérités, peut-être des demi-faussetés, si ça choque moins les oreilles des gens de l'autre côté. M. le Président, ça, les élus municipaux ne le prennent pas, ne l'ont pas pris et ils nous en parlent encore, et avec raison.

Imposer la Sûreté du Québec, pourquoi? Pour que les citoyens du Québec, pauvres payeurs de taxes, à l'intérieur des petites municipalités, financent la Sûreté du Québec pour un montant additionnel de 40 000 000 $, contrairement à ce que disait le ministre dans le cahier des crédits du mois de mai dernier. Il parlait de 25 000 000 $. Il a parlé de 30 000 000 $. Aujourd'hui, c'est 40 000 000 $. Aujourd'hui, le 3 décembre, à l'étude du principe du projet de loi n° 77, on est rendu à 40 000 000 $, quand on est parti, voilà trois mois, à 25 000 000 $. Où ça va arrêter, M. le Président? Je souhaite aux Québécoises et aux Québécois que ça n'aille pas plus fort que 40 000 000 $ parce que, sans ça, ils vont faire sauter la banque. C'est ça que le ministre s'est fait dire partout: Vous ne dites pas toujours la même chose, vous changez de version. Ce n'est pas mentir, ce n'est pas aller contre la vérité, c'est changer sa version. Et c'est ça. On ne lui a jamais, jamais pardonné ça. Mme Simard, de l'Union des municipalités du Québec, lui a dit: M. le ministre, vous ne dites pas toujours la même chose. M. le ministre, je voudrais vous dire – je ne le dirai pas – ça ne ressemble pas à ce que vous nous avez déjà dit. Et ce ministre-là continue, continue à lancer dans le public, comme ça, des chiffres, là, sans savoir ce que ça donne.

Dans ce projet de loi, qu'est-ce qu'il y a aussi? Il y a le financement de l'Institut de police de Nicolet pour un montant de 8 000 000 $. Et le ministre en a parlé, ce matin, de la possibilité de permettre – qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, M. le Président – 8 000 000 $ supplémentaires pris sur une base de 1 % de la masse salariale des corps de police, 40 000 000 $ d'augmentation, pour payer la Sûreté du Québec; c'est 80 % de la hausse. Ce n'est pas ce que le ministre avait dit en tournée. Ce que je vous disais, ce que Mme Simard lui a dit, essentiellement: «Vous ne nous avez pas dit la vérité.» Je ne voulais pas le dire tout à l'heure, mais je le revois encore dans mon texte ici, et c'est ce qu'elle reproche, M. le Président, au ministre.

Pourquoi on est contre? Bien, on est contre à cause de tout ce que je viens de dire, M. le Président, mais aussi à cause de ceux et celles qui sont directement concernés et qui sont venus nous le dire en commission parlementaire, à cause de ce qu'ils nous ont dit aussi au cours des derniers mois. Les maires des municipalités n'en voulaient pas de ce projet de loi; l'UMRCQ n'en voulait pas de ce projet de loi là; la Communauté urbaine de Montréal n'en voulait pas de ce projet de loi là; les associations de chefs de police n'en voulaient pas; l'association de policiers n'en voulait pas de ce projet-là. Le maire de Montréal n'en voulait pas de ce projet-là; il ne voyait pas pourquoi il aurait à payer pour l'école des policiers de Nicolet. Mais non, le ministre nous a dit, ici, en Chambre: Tout le monde est d'accord. Bien, je réalise aujourd'hui qu'il y avait rien que lui qui était d'accord. S'il se prend pour le monde, c'est inquiétant. Il n'y a personne qui est d'accord avec ça.

M. Cannavino et M. Turcotte, vous savez qui sont ces deux personnes? M. Cannavino est le nouveau président de l'Association des policiers provinciaux, et M. Turcotte est l'ancien président, le président sortant. Ils sont venus nous rencontrer en commission parlementaire et, en répondant aux questions soulevées par le ministre et par d'autres membres de la commission, ils ont fait le portrait de ce qu'est la Sûreté du Québec aujourd'hui. Et ces gens-là qui vivent dans le milieu, qui vivent le problème policier, la situation policière continuellement nous ont démontré clairement que la Sûreté du Québec, dans l'état actuel de ses effectifs, de ses budgets, ne peut pas prendre de charge additionnelle, charge que veulent lui donner le ministre et le gouvernement, et ça, pour des fins strictement financières, pas pour des fins d'organisation, pas pour des fins de meilleure gestion, pas pour des fins de meilleurs services, pour sauver, pour aller récupérer de l'argent pour remettre au ministre des Finances qui, lui, a un objectif à rencontrer puis qu'il n'est pas capable de rencontrer.

La Sûreté du Québec, M. le Président, ne peut prendre de charge additionnelle, une charge additionnelle provoquée par l'adoption du projet de loi n° 77 et tout ce qui s'ensuivra. Écoutez, soyons sérieux, il y a 3 750 policiers actuellement à la Sûreté du Québec, au moment où on se parle. En 1994, il y en avait 4 400, dernière année du gouvernement libéral. La Sûreté du Québec a perdu, depuis l'arrivée de ce gouvernement, 700 policiers, et on veut, actuellement, à part de ça, lui donner la charge de tous les autres corps policiers de la province. Mais il faut se poser des questions sur le sérieux d'un projet de loi comme ça.

(21 h 20)

M. le Président, le message que j'envoie au gouvernement, écoutez-le bien, vous le direz, les députés, au ministre. Il y en a un ministre avec nous, là. Ça me fait plaisir, M. le ministre, de vous voir ici, le ministre responsable du Grand Montréal, puis j'espère que vous allez parler sur ça au nom de la Communauté urbaine, au nom du Grand Montréal. Je vous le passe le message, M. le ministre, vous le direz à vos collègues au Conseil des ministres. Vous ne pouvez pas imposer à la Sûreté du Québec une tâche additionnelle, alors qu'elle suffit à peine à remplir son mandat. Puis ça, ça n'a rien à voir avec la qualité puis la bonne foi des policiers, c'est la réalité. Et, si quelqu'un le sait, c'est le ministre délégué responsable du Grand Montréal, qui a occupé le poste avec brio, je dois le dire – et je le lui ai déjà dit – de ministre de la Sécurité publique. Alors, faites-vous le porte-parole des citoyennes et des citoyens du Québec, M. le ministre. Vous direz à votre successeur, celui qui essaie de vous succéder honorablement, c'est quoi, les inquiétudes de la population du Québec.

La Communauté urbaine de Montréal, pour les gens qui ne vivent pas dans la région de Montréal – il y en a peut-être qui ne la connaissent pas – c'est la ville de Montréal, avec près de 1 000 000 de population, et tout un chapelet de municipalités sur l'île qu'on appelle la Communauté urbaine de Montréal. C'est pratiquement le quart de la population du Québec qui vit dans ce milieu-là, si on s'étend aussi avec Terrebonne. Mais, si on regarde surtout sur l'île de Montréal, le projet de loi n° 77, savez-vous comment ça va coûter aux payeurs de taxes de la Communauté urbaine de Montréal? Les gens de Montréal qui ne regardez pas les nouvelles, mais qui regardez peut-être ce qui se passe à l'Assemblée nationale, ça va vous coûter 2 200 000 $ de plus qu'ils vont prendre dans vos poches pour financer ce projet de loi là.

Huit millions pour le financement de l'école de police de Nicolet, sans aucune consultation et sans aucun renseignement, sans aucune information préalable concernant les coûts d'opération de l'Institut. Si c'est ça, l'autre façon de gouverner, je m'inquiète. Si c'est ça, la façon d'oser, bien, je peux dire qu'on ose fort, M. le Président, sans s'occuper des répercussions. Si c'est ça, le partenariat avec les élus municipaux, je ne suis pas trop, trop en sécurité quand on parle de partenariat avec le reste du Canada, alors qu'on n'est même pas capable de faire l'unité, de parler, de se concerter avec les élus municipaux.

Ce n'est pas moi qui vous le dis, M. le Président, c'est Mme Danyluk, la présidente de la Communauté urbaine, lorsqu'elle dit: Le gouvernement impose aux contribuables de la Communauté urbaine de Montréal une facture de 2 200 000 $. Et, quand on vient d'apprendre, il y a quelques jours, que, sans avis préalable, le ministre des Finances décide de leur couper ce privilège qu'ils avaient de la TVQ, hein, et que ça leur donne encore une surcharge de 400 000 000 $...

M. le Président, la taxe de 1 % sur les salaires, 2 500 000 $ de la Communauté urbaine pour l'Institut de Nicolet... La Communauté urbaine de Montréal est équipée pour former ses policiers, elle a de l'expertise. Deux des anciens directeurs de la police de Montréal, M. Vignola et M. Gilbert, ont été les directeurs de l'école de la police de Montréal avant l'avènement de la Communauté urbaine, deux sommités dans le monde... Ils en ont partout à Montréal, des gars comme ça capables de faire la job, capables de former leurs policiers. Savez-vous ce que ça coûte, ça? Ça coûte 40 000 $ à la ville de Montréal-Nord, ville que je représente, plus 400 000 $ à la ville de Montréal-Nord avec le retrait du remboursement de la TVQ. 400 000 $ plus 40 000 $, ça fait 440 000 $ pour une municipalité de 85 000 habitants. Bien, ça, c'est fort, M. le Président.

Une voix: Écoeurant.

M. Parent: Ce n'est pas écoeurant, mais – mais – ça frise l'indécence. Alors, contrairement aux affirmations du ministre, contrairement à ce qu'on a entendu partout, il n'y a personne qui est en faveur de ce projet de loi, et nous voterons contre le projet de loi.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Sauvé. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jeanne-Mance. M. le député.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: Merci, M. le Président. Je voudrais féliciter le député de Sauvé de son intervention. Je voudrais également remercier le député de Frontenac, qui est le porte-parole de l'opposition officielle dans ce dossier et qui, après plusieurs interventions, a réussi à obtenir du gouvernement une commission parlementaire afin que des audiences publiques aient lieu sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Mon intervention se fera en grande partie sur les commentaires qui ont été apportés à cette commission par les responsables des organismes qui se sont fait entendre à la toute dernière minute.

Si c'était une mauvaise nouvelle, M. le député de Sauvé, pour la ville de Montréal-Nord, c'était une mauvaise nouvelle pour la ville de Saint-Léonard. Le conseil de ville est actuellement après étudier son budget pour l'année prochaine, et la semaine dernière ils avaient une nouvelle qu'ils n'avaient pas prévu dans la confection de leur budget sur le retrait de la taxe de vente, et ça leur coûte 567 000 $, un demi-million. Avec ce projet de loi n° 77, ça leur coûte un montant de 76 000 $, trois cinquièmes de 1 000 000 $. En avez-vous d'autres projets de loi comme ça d'ici la fin de la session? En avez-vous d'autres? Le 28 mars, le premier ministre nous disait – je me rappelle de la date, M. le Président, parce que c'est ma fête, le 28 mars, comprenez-vous...

Une voix: Bravo!

M. Bissonnet: Il nous disait tout simplement que les citoyens ne seraient pas touchés. Depuis ce temps-là: 200 000 000 $, l'assurance-médicaments; 30 000 000 $, Hydro-Québec; 20 000 000 $, les permis de conduire; 77 000 000 $ aux commissions scolaires; 115 000 000 $ aux municipalités. Hydro-Québec, 2,5 % d'augmentation, plus la TVQ puis la TPS. Et là, aujourd'hui, nous avons un 50 000 000 $: 40 000 000 $ pour la Sûreté du Québec puis 8 200 000 $, près de 10 000 000 $ pour l'Institut de police.

Une voix: Rien de trop beau.

M. Bissonnet: Alors, ce projet de loi, M. le Président... Ce qui existe actuellement selon la Loi de police, c'est que les municipalités dont la population est égale ou supérieure à 5 000 habitants doivent avoir leur propre corps de police ou conclure une entente avec une autre municipalité pour obtenir les services de police. Une municipalité de moins de 5 000 habitants peut avoir son propre corps de police ou passer une entente avec une autre municipalité pour avoir des services de police. Elle peut aussi s'en remettre à la Sûreté du Québec ou à un autre corps de police municipal qui agit sur son territoire. Alors, ce projet de loi n° 77 obligera une municipalité de moins de 5 000 habitants à conclure une entente avec la SQ pour ses services de police, sauf si le ministre l'autorise à utiliser les services d'un autre corps de police. Elle n'aura donc plus le choix. Pour les municipalités de plus de 5 000 habitants, la situation reste la même, soit avoir son propre corps de police ou conclure une entente avec une autre municipalité ou avec la SQ.

Alors, ici, évidemment les municipalités qui ont moins de 5 000 de population sont représentées par l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Alors, ils se sont présentés à la commission parlementaire jeudi dernier et eux sont contre ce projet de loi pour les motifs suivants: ils veulent le respect de l'autonomie municipale; ils veulent un délai pour le regroupement municipal des services de police; ils veulent aussi un processus de réouverture des ententes; ils s'opposent au financement de l'Institut de police; et, selon eux, le projet de loi n° 77 ne reflète pas les préoccupations exprimées lors de la tournée du ministre. Parce que le ministre a fait une tournée, puis il y a un article dans Le Courrier le 27 août: «Un ministre trop pressé». Il ne faut pas oublier que ce ministre-là, moi, je l'ai connu, il était conseiller municipal à Montréal. Il voulait être président du comité exécutif, puis il espérait même se présenter au municipal avec quelqu'un que vous connaissez bien, puis il ne s'est pas présenté.

Madame, vous me regardez. C'est parce que j'aime ça vous regarder. M. le Président, je m'excuse de ne pas vous regarder et de regarder Mme la députée de Terrebonne. Elle va se lever pour une question de règlement. Alors, je voudrais éviter ça pour ne pas perdre du temps.

(21 h 30)

Alors, ce ministre, dis-je, il était à la Commission de transports comme conseiller municipal, et je vois le ministre qui représente la métropole et j'espère, lui qui connaît le dossier, ancien Solliciteur général, qu'on va avoir le privilège et l'opportunité de l'entendre sur ce projet de loi. Je ne sais pas si c'est trop lui demander, mais je pense que nous sommes en droit d'avoir son exposé et son point de vue sur cette controverse qui existe dans ce projet de loi.

Donc, à la commission des institutions, le directeur général de l'UMRCQ disait ceci, et je le cite textuellement: «Actuellement, la Loi de police laisse aux municipalités de moins de 5 000 habitants le choix entre la Sûreté du Québec ou encore la police municipale. C'est ce choix que vient d'abolir le projet de loi n° 77. À l'avenir, une municipalité de moins de 5 000 habitants se devra d'obtenir non pas l'approbation mais l'autorisation du ministre pour se donner un corps de police municipal. Le ministre se réserve donc le pouvoir discrétionnaire, discriminatoire de disposer des décisions prises par les seules municipalités de moins de 5 000 habitants en matière de services policiers.

«Paradoxalement, le projet de loi n° 77 vient donc geler la situation incohérente qui est apparue au cours de la dernière année. Les municipalités de 5 000 habitants et plus se donneront un corps de police, et la carte policière québécoise continuera à ressembler à un gruyère. La seule différence, c'est que les trous seront de plus en plus nombreux.» Ça, c'est M. le directeur général de l'UMRCQ, M. Michel Fernet. «En fait, la solution retenue par le projet de loi n° 77 vise essentiellement à assurer à la province une source stable de revenus et accrue de revenus également.

«Parallèlement à l'obligation faite aux petites municipalités dans la loi, le projet de loi n° 77 modifie également à la hausse le taux multiplicateur de la richesse foncière uniformisée applicable à ces municipalités. Les articles 6 et 7 du projet de loi sont donc inacceptables pour nous, l'UMRCQ. Il perpétue le seuil arbitraire et injustifié du 5 000 habitants dans le seul but d'assurer une source de financement dédiée à la Sûreté du Québec sans permettre une gestion efficace et efficiente des services de police au Québec.

«Nous demandons donc que toutes les municipalités aient la possibilité d'être desservies par un corps de police municipal, peu importe sa taille. Il s'agit de respecter le principe de l'autonomie municipale ainsi que celui de la responsabilisation des collectivités locales. À tout le moins, le délai devrait être accordé aux municipalités de moins de 5 000 habitants par le projet de loi n° 77 afin de leur permettre de se doter d'un corps de police municipal. Il est possible d'éviter un plus grand morcellement de la carte policière au Québec en permettant à ces municipalités de se regrouper au sein de leur MRC pour se donner un corps de police régional, comme le ministre l'a d'ailleurs admis lors de la dernière réunion de la Table Québec-municipalités à laquelle il a assisté.» Ça ne fait pas longtemps, ça, M. le Président.

«Les modifications prévues au projet de loi n° 77 seraient moins lourdes de conséquences pour les municipalités si le ministre avait manifesté son intention d'utiliser les nouveaux pouvoirs d'autorisation que lui donnera la loi avec ouverture et équité. Au contraire, le ministre a clairement indiqué qu'il n'autoriserait plus de nouveaux corps de police à partir du 1er janvier 1997, plaçant les municipalités de moins de 5 000 habitants dans un état de captivité.

«Dorénavant, c'est le ministre de la Sécurité publique qui décidera à son gré de l'organisation des services de police et des coûts obligatoires à être assumés par les municipalités. Le gouvernement doit le réaliser avant qu'il ne soit trop tard. Il nous mène directement à l'affrontement. C'est la négation du partenariat au profit d'un paternalisme dépassé.» C'est la position de l'UMRCQ dans ce dossier.

Quant à l'UMQ, elle est contre également et pour les motifs principaux suivants: le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'inéquité fiscale quant au financement des coûts de police; le financement de l'Institut de Nicolet de 8 200 000 $ n'a jamais été discuté; il veut le retrait temporaire du 1 % pour le financement de Nicolet jusqu'au 31 mars 1997; et l'autonomie municipale pour le choix des services policiers, donc avoir son propre corps de police, faire une entente intermunicipale, ou les services de la SQ...

Quant à la communauté urbaine, je voudrais vous citer, M. le Président, ce que le chef de police, M. Jacques Duchesneau, disait à la commission des institutions, et je le cite – et M. le ministre de la Métropole doit prendre bonne note de ce que le chef Duchesneau nous dit parce que je pense que ça va l'intéresser très fortement – il dit ceci: «La réorganisation policière que propose le ministre de la Sécurité publique touche directement le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, même si on ne veut pas l'admettre. Nous réprouvons donc la méthode de consultation du ministre qui ébauche, pour le Service de police de la Communauté urbaine de Montréal, un avenir pour le moins douteux et précaire. Vers quel destin nous entraînez-vous de manière si effrénée? Telle est la question.

«Nous l'avons dit dans le passé, le SPCUM pourrait offrir ses services spécialisés sur une base régionale et éliminer ainsi les dédoublements en la matière, des économies importantes en résulteraient, tout comme nous pourrions envisager d'élargir le champ d'action du SPCUM pour ce qui touche les services policiers de base et ainsi en réduire les chevauchements dans la grande région de Montréal. Encore mieux, nous pourrions revoir la structure complète des services policiers au Québec au lieu de la revoir à la pièce comme nous le faisons, et ça, pour des économies, à notre avis, de plus de 200 000 000 $ pour le Québec. Encore faudra-t-il avoir quelqu'un à qui le dire.

«Donc, dans un autre ordre d'idées, le SPCUM pourrait très bien s'occuper de la formation de ses propres policiers. Nous avons investi plus de 10 700 000 $ en 1996 dans la formation de nos policiers, soit près de 5 % de la masse salariale. Dans ce cas-ci, c'est plutôt le ministre qui nous dit de lui verser 1 % de notre masse salariale, ou 2 200 000 $, pour financer l'Institut de police du Québec. Si le SPCUM prenait en charge la formation de ses recrues, cela coûterait 364 000 $ au lieu de 2 200 000 $, une économie de près de 1 800 000 $. N'est-il pas grand temps de revoir nos façons de faire en matière de formation, et est-ce qu'une réingénierie...

«Le ministre de la Sécurité publique sait fort bien que le projet de loi n° 77 inclut des obligations majeures pour le Service de police de la Communauté urbaine en matière de financement de l'IPQ et que ces obligations ont des répercussions sur les coûts d'exploitation du Service de police. Le ministre de la Sécurité publique ne devrait pas oublier – c'est M. Duchesneau qui parle – qu'il est originaire de Montréal et qu'il a déjà fait partie de l'administration municipale de la ville de Montréal. Il est donc à tout le moins sensibilisé, informé, sinon personnellement interpellé par la situation économique et budgétaire de la Communauté urbaine de Montréal. C'est pourquoi nous demandons au ministre de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 77 afin que nous puissions être entendus.

«Nous demandons aussi d'amorcer le dialogue constructif qu'il prévoyait au début du processus de réorganisation, de procéder aussi à une révision en profondeur de l'organisation policière au Québec. C'est pourquoi, enfin, nous demandons la tenue d'états généraux sur la police.»

«M. le Président, M. le ministre de la Sécurité publique déclarait il y a quelques mois que le modèle de police de quartier préconisé par le SPCUM est un modèle à imiter puisqu'il est bien aligné sur la réalité, à un tel point que la Sûreté du Québec et autres corps de police municipaux pourraient s'en inspirer pour contrer la violence chez les jeunes et les phénomènes des gangs de rue. Malheureusement, M. le Président, je ne peux en dire autant du modèle de réorganisation policière que le ministre de la Sécurité publique tente de nous enfoncer dans la gorge.» C'est ce que M. Duchesneau disait à la commission des institutions et je pense, M. le Président, que le ministre responsable de la Métropole, suite aux déclarations du chef de police de la CUM et des dires de la présidente de la CUM, devrait donner son point de vue sur ces commentaires aux membres de cette Assemblée. Je pense que ça serait intéressant de connaître son point de vue.

(21 h 40)

En ce qui a trait à la Fraternité des policiers de la CUM, elle est contre également. Eux autres, ils veulent un sommet sur la sécurité publique, ils demandent le retrait de la contribution du 1 % et ils demandent d'extirper du projet de loi les éléments qui touchent l'organisation policière. La Fédération des policiers du Québec veut laisser le libre choix aux municipalités, veut un moratoire de un an pour le regroupement des municipalités, craint le maraudage, veut des états généraux sur la police.

Il en reste, M. le Président, que tout le monde est contre ce projet de loi, sauf les gens du gouvernement. Et je vous rappelle que lundi prochain il y a une élection partielle dans le comté de Pointe-aux-Trembles, je vous rappelle ça, et je pense que la population du comté de Pointe-aux-Trembles, après toutes ces taxes qui sont versées aux citoyens – et on ne devait taxer personne – a une occasion en or de dire à ce gouvernement: Assez, c'est assez! Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jeanne-Mance. Je vais maintenant céder la parole à monsieur... Excusez. M. le député de Marquette?

M. Ouimet: M. le Président, je pense reconnaître que le ministre délégué à la Métropole souhaite intervenir sur le projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, je me dois de céder la parole à celui qui se lève le premier et, en l'occurrence, c'est M. le député d'Orford. Alors, je dois lui céder la parole. M. le député.


M. Robert Benoit

M. Benoit: M. le Président, comme l'ont fait les gens du Parti libéral, de l'opposition, je veux joindre ma voix au projet de loi n° 77. Bien sûr, vous avez compris que j'irai contre la Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives.

Pourquoi, M. le Président – je viens de réveiller peut-être quelqu'un de l'autre bord – je tiens à intervenir sur ce projet de loi d'une façon particulière? C'est que, dans le comté d'Orford, c'est un comté où on n'a que des petites municipalités. On en a trois qui ont des corps de police à elles et les autres municipalités, sur un total d'une vingtaine, sont des petites municipalités qui sont directement touchées par ce projet de loi là.

Mais, avant d'aller plus loin, il faut remettre les faits dans leur juste perspective. Je n'ai jamais vu un gouvernement se faire élire avec un programme aussi épais, aussi de phrasage, aussi de solutions à tout, aussi de poésie. C'était extraordinaire quand on lisait ça. On se disait: Ces gens-là, ils ont probablement trouvé la solution, la solution à tous les maux de la société. Je vous avouerai que je me faisais un vilain plaisir de lire ça, soir après soir, après mon porte-à-porte, votre programme puis le nôtre, puis je me disais: S'ils font tout ça... Tout à coup je ne suis pas dans le bon parti politique?

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Benoit: C'était extraordinaire, ce programme que vous proposiez, un programme de la gauche où on proposait d'abord aux étudiants tout ce qu'ils voulaient. À la fonction publique, il n'y en avait pas de problème. Aux environnementalistes, M. le Président – je ne veux pas prendre tout mon discours pour vous parler de ça – il n'y a rien qu'on ne leur a pas promis; il faut voir ce qui se passe sur le terrain en ce moment. Aux agriculteurs, le magnifique droit de produire, M. le Président – je vais y revenir – ils sont réunis, ce soir, dans un édifice à côté d'ici; il n'y a rien qu'on n'a pas promis aux agriculteurs. Aux syndicats de la construction, M. le Président, il n'y a rien qu'on ne leur a pas promis; on est après, maintenant, défaire ça. Aux municipalités, ah! bien, là, le député de Joliette, dans son enthousiasme, avec sa chemise à velcro, il en a déchiré un bon paquet de chemises en nous disant que ça n'avait pas d'allure ce qu'on était après faire; et comment il leur en a promis aux municipalités! Aux gens plus démunis de la société aussi; je me souviens de discours absolument extraordinaires.

Alors, tout ça, on a retrouvé ça dans le programme du parti, du PQ: 225 pages, M. le Président. C'était un petit bijou. Tu t'imagines qu'avec un programme comme ça tu n'auras pas besoin de partir le lendemain parce que ce que tu as décidé... Je veux dire, regardez ce que Mike Harris est après faire en Ontario. Je veux dire, il a réfléchi, il a été élu puis il passe à l'action.

Là, ici, c'est exactement le contraire. Tu écris un gros programme, tu promets à peu près n'importe quoi à n'importe qui, puis, le lendemain de l'élection, tu dis: Tout à coup, tout à coup qu'on en a trop mis; comment on va en enlever un peu, là? Une des façons, ce serait peut-être de faire des consultations. Alors, là, tu pars en consultation sur le terrain. Nommez-moi un groupe, depuis deux ans, qui n'a pas été consulté. Un groupe! Les avocats ont été consultés, les gens du loisir, les constitutionnalistes, les fiscalistes, les gens d'affaires: il n'y a pas un groupe au Québec qui n'a pas été consulté depuis deux ans. Là, tu dis: Ils ont fait un gros programme, ils n'ont pas écouté. Là, ils ont comme un petit remords, ils vont aller en consultation en éducation, en n'importe quoi. Là, ils vont écouter le monde pour de vrai. Ils ne les ont pas écoutés dans le programme; c'étaient des pelleteux de nuages qui ont écrit ça, c'est bien évident. On s'aperçoit... en tout cas, dans le programme de l'environnement, c'est bien évident que c'étaient des pelleteux de nuages. Aujourd'hui, on s'aperçoit qu'il n'y a rien de ça qu'ils sont capables de faire.

Là, ils ont consulté le monde. Tu te dis: Bien, ils ont un petit remords de conscience et ils vont aller sur le terrain puis ils vont écouter. Ils vont écouter! Mais là, quand tu lis Le Courrier de Saint-Hyacinthe, Jean Vigneault, qu'est-ce qu'il dit? Il dit: Le ministre, il est arrivé à Saint-Hyacinthe, pas pour nous écouter, hein, il était en consultation, mais il était ici pour nous parler. M. le Président, c'est ça, la nouvelle façon de gouverner. Alors, là, on a un beau programme, des grandes consultations. Puis là on se dit: Ils savent où ils s'en vont, ma grande foi divine! Pantoute, M. le Président.

Il y a tellement de monde qui manifeste à Québec ces temps-ci. Ce soir, il y a deux manifestations, pour les gens qui nous écoutent. Il y a d'abord la fonction publique qui est après voter de l'autre bord de la rue, dans le Centre des congrès, puis, à côté, au Hilton, l'UPA, eux vont tout briser parce que, franchement, on leur a promis des choses puis on n'est pas après les livrer. C'est devenu une industrie, à Québec, les manifestations. Quand ce n'est pas la fonction publique, c'est les avocats puis, quand ce n'est pas les avocats, c'est les démunis puis, quand ce n'est pas les démunis, c'est la santé. Puis là on s'en va comme ça.

Des gens qui étaient supposés avoir écouté lors d'un programme électoral, qui étaient ensuite allés sur le terrain écouter: ou bien leur appareil auditif ne fonctionne pas très bien puis ils n'entendent pas ce que le monde dit, ou bien ils parlent trop. Mais il y en a quelque part qui n'ont pas compris ce que le monde leur a dit. Le monde est après se demander, quand le ministre leur disait: On veut votre bien, si, finalement il n'a pas oublié de dire: On veut votre bien puis on va l'avoir. C'est à peu près ça qui est après se passer, M. le Président.

Mon confrère tantôt énumérait la liste des nouvelles taxes au Québec qu'on est après faire pleuvoir sur des citoyens raisonnables, des citoyens qui, en ce moment, au Québec, jusqu'au 21 juin – et vous m'écoutez bien, jusqu'au 21 juin, M. le Président – les citoyens du Québec moyen, tout ce qu'ils ont gagné, donc, jusqu'au 21 juin, tout ce qu'ils ont gagné, c'est de l'argent pour payer des taxes et des impôts. À partir du 21 juin, là tu commences à travailler pour toi, puis tes cadeaux de Noël, puis ton épouse, puis tes enfants. Ça n'a pas d'allure, M. le Président! Il y a des pays socialistes qui ont moins taxé les gens qu'on l'a fait.

Et puis, à la façon du PQ, bien sûr: quand tu as un problème, tu crées une structure. Et ça, les structures, ça règle tous les problèmes. D'ailleurs, dans le programme électoral, c'est à peu près le seul engagement que vous avez pris que vous avez tenu. Il y en avait quelque chose comme une couple de centaines, de structures, que vous proposiez, à l'époque, dans le programme électoral. Et au sommet socioéconomique à Montréal, il y en a eu une autre couple de dizaines de structures que vous proposiez, dont un certain nombre pour la région de Montréal, comme si créer des structures à Montréal, ajouter des fonctionnaires par-dessus des fonctionnaires, des étages de fonctionnaires... Si ça, ça va créer des jobs, bien, je souhaite à notre ministre délégué à Montréal de créer des jobs en ajoutant des fonctionnaires.

M. le Président, je veux revenir à l'essence même du projet de loi n° 77: les municipalités avec 5 000 citoyens. Je vais vous conter une belle petite histoire, M. le Président, vous allez trouver ça extraordinaire. Il y a six municipalités dans le comté d'Orford, et non les moindres. Alors, elles sont allées voir le ministre – qui m'écoute avec grand intérêt – au printemps dernier puis elles ont dit: Écoutez, M. le ministre, nous, on va être avant-gardistes sur votre projet de loi, on va se créer une régie intermunicipale. On est six municipalités – je vais vous les énumérer tantôt – on a déjà un bon poste de police à Magog, un super chef de police. Il n'y a jamais eu de problème d'éthique là, ça fonctionne bien, les coûts sont bien contrôlés, nos policiers sont formés à Nicolet. Il y a des gens de plus d'expérience, il y a des enquêteurs, les citoyens sont très heureux.

(21 h 50)

Et puis là on a cinq municipalités alentour. Je vous les nomme, M. le Président. Alors, la première, c'est le canton de Magog, dont le maire est l'ancien député Jean-Guy St-Roch, de Drummondville, qui est maintenant un citoyen là-bas, qui est un très bon maire. C'était un industriel à l'époque. Alors, lui, il s'est joint à la régie et on a créé la régie avec le canton et la ville.

Alors là ils sont allés voir le ministre puis ils ont dit: Écoutez, on en a deux, on voudrait monter à six et on voudrait ajouter à ça. Alors, le ministre a dit: Allez de l'avant, pas de problème. Allez de l'avant, achetez les vêtements, bien sûr, les voitures, engagez du personnel, pas de problème. Ils ont négocié, tout ce beau monde là ensemble. Ce n'est pas évident, six municipalités.

Là-dedans, il y a le canton d'Orford, où le maire est un architecte, M. Jacques Delorme, un gars de grande réputation, un gars qui a à grand coeur les intérêts de ses citoyens.

Il y a une plus petite ville, un peu moins riche, la ville d'Omerville, qui a une autoroute qui passe chez elle, un maire du nom de M. Roy, un technicien; c'est un nouveau maire. M. Roy a eu des problèmes. Quand il est arrivé, sa municipalité était un petit peu en difficulté. Il a pris le contrôle de ça avec un conseil municipal et puis ils ont pris leurs responsabilités puis ils ont dit: Oui, ça a de l'allure, la régie intermunicipale, on devrait regarder ça de très près.

Ensuite, non la moindre, la municipalité d'Austin, M. le Président, où là on a Roger Nicolet qui est le maire. M. Nicolet, ça a été un candidat pour le PQ dans Shefford, ça a été ce monsieur que vous venez de nommer au Lac-Saint-Jean pour l'enquête, c'est l'ancien président de l'UMRCQ. C'est un gars qui doit connaître ça un petit peu. Alors, M. Nicolet s'est joint à cette régie intermunicipale.

Et puis, finalement, la sixième municipalité, petite municipalité au bout du Petit-Lac-Magog, extraordinairement belle, Sainte-Catherine – les gens l'appellent, chez nous, «Kateville» – avec Pierre Beaupré, qui est un dirigeant de Bell Canada et maintenant un nouveau maire depuis la dernière élection.

Alors, ces six municipalités-là se sont entendues pour mettre en place une régie intermunicipale, prendre les équipements en place, acheter quelques structures de voitures, de vêtements, et tout le monde se réjouissait. L'expérience de cette structure avait déjà fonctionné très bien avec le canton de Magog. Alors, les citoyens étaient heureux; les coûts étaient contrôlés. C'est des gens qui connaissent le milieu, hein, M. le Président; c'est des gens qui savent où sont les petits chemins de terre, où se cachent les... En période de chasse, c'est un problème épouvantable dans notre coin, là, la périurbanité. Alors, ces gens-là connaissent les gens; ils savent où les choses se passent; ils connaissent les voisins. Alors, c'était une structure idéale pour notre coin: pas trop dispendieuse, de qualité et qui répond aux élus, finalement, à tous les quatre ans.

Alors, ça, ça s'est passé au printemps 1996. Ça ne fait pas bien, bien longtemps, M. le Président. Là, une fois que tout ce beau monde là s'est entendu, ils sont allés voir le ministre, ils ont dit: M. le ministre, on avait eu votre bénédiction – le chef de police, M. le maire Lacasse, de Magog – nous, on est prêts à procéder. On va repayer ce que ça coûte et puis on vous assure de la qualité, avec les gens que je viens de vous énumérer: l'ex-président de l'UMRCQ, un ancien député, un dirigeant de Bell Canada, un architecte, Denis Lacasse, un pédagogue. Alors, avec des gens de cette qualité-là, soyez assurés que notre corps de police va être un corps près des gens, bien géré, à des coûts tout à fait raisonnables. Les employés étaient de qualité; il n'y en avait pas de problème. Ils avaient même laissé démissionner un policier de Québec, de la ville de Québec ou une des villes en périphérie de Québec, pour venir aider au poste de police de Magog. Alors, le gars avait démissionné; il avait eu un nouvel habit à Magog. Et là notre bon ministre est arrivé puis a dit: Non, arrêtez tout ça, on n'autorise pas ça, cette affaire-là.

Alors, là, il y a eu une multitude de rencontres avec le député puis le ministre, ici même, dans cette Chambre, entre les maires et le ministre, et il y a eu une multitude d'appels. Et, en date de ce soir, M. le Président, cette régie n'a toujours pas la permission d'aller de l'avant. Le ministre nous a dit dans cette Chambre, quand je l'ai interpellé: Bien, écoutez, je m'en vais en consultation – c'est la mode, les consultations, il s'en va en consultation – je vais vous donner une réponse à la fin de l'été, au milieu de l'été.

Alors, le milieu de l'été a passé, début de l'automne. On est maintenant à toutes fins pratiques au début de l'hiver, on n'a toujours pas de réponse, M. le Président. Et là, ces municipalités-là, elles veulent procéder; elles veulent procéder dans l'esprit de la loi, mais on ne leur donne pas le O.K.

Et j'interpelle ici le ministre ce soir au nom de ces maires, au nom de ces citoyens de la Régie intermunicipale de police du Lac-Memphrémagog, au nom de la MRC – parce que tout ça a eu la bénédiction de la MRC de Memphrémagog – j'interpelle le ministre et je lui dis: M. le ministre, montrez donc votre bonne volonté, montrez donc que ce que vous nous proposez, ça peut fonctionner. Nous, chez nous, on l'a fait. On l'a fait dans cette bonne volonté, on l'a fait avec la collaboration de tout le monde. Il n'y en a pas, d'opposition, à ce projet-là. Nommez-moi un projet dans la société où il n'y a pas d'opposition. Et là on a un beau cas. Et le ministre refuse de donner son approbation, M. le Président, et on ne peut pas savoir trop, trop pourquoi. Moi, je suis convaincu que le personnel est d'une très grande qualité, il est formé. Ils connaissent le territoire. Les élus ont été démocratiquement élus.

M. Bordeleau: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, excusez-moi. M. le député de l'Acadie.

M. Bordeleau: Oui. Mon collègue d'Orford a des propos qui sont très intéressants, et je regrette qu'il y ait un nombre suffisant de membres absents de la Chambre, de sorte que je pense qu'on n'a pas le quorum présentement. Je vous demanderais de vérifier.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, on n'a pas quorum. Il manque quelques députés. Alors, si ça ne se corrige pas immédiatement... Alors, nous avons quorum présentement. M. le député d'Orford, je vous cède la parole.

M. Benoit: D'ailleurs, le député de l'Acadie, qui est présent avec nous, M. le Président, est à même d'approuver ce que je dis, lui-même étant très au fait de la situation dans cette région-là, étant souvent présent dans la région; il a de la famille dans ce coin-là, et je le vois souvent dans notre coin. Et il me disait justement, le député de l'Acadie, comment les gens de chez nous, comment les gens de sa famille, de ces cantons, veulent avoir cette police régionale, comment elle colle à la réalité, comment elle ne coûte pas cher, comment elle serait efficace. Mais ce n'est pas ça qu'on nous propose, M. le Président, c'est une autre patente.

Les gens chez nous, ils l'ont trouvée. Le ministre avait tellement trouvé que c'était bon qu'il avait donné sa bénédiction. On avait tellement trouvé que ça allait bien qu'on avait engagé du personnel. On avait tellement bien engagé du personnel qu'on avait acheté des voitures. Et puis là, M. le Président, on est devant le vide total. Le vide total, M. le Président.

Or, permettez-moi de vous demander, M. le Président... J'aimerais que les députés qui nous écoutent ce soir ici fassent l'essai ou que les citoyens qui nous écoutent ce soir fassent l'essai – je l'ai fait, moi, M. le Président: Prenez une police municipale dans ces petites municipalités là et dites-leur d'aller dans tel rang, dites-leur qu'il y a une urgence. Ils connaissent les échevins, ils connaissent le maire, les choses vont aller vite.

À un moment donné, M. le Président, quand je suis arrivé comme député, il y a eu une situation d'urgence. J'ai appelé la police provinciale, je leur ai suggéré finalement qu'ils parlent rapidement au maire de cette municipalité-là, qu'on prenne en contrôle la situation. Finalement, on avait besoin d'embarcations sur un lac, il y avait un noyé, etc., la noirceur arrivait. Et la police provinciale m'a dit: On ne connaît pas le maire, on ne connaît pas son numéro de téléphone. J'étais d'ailleurs intervenu à l'époque auprès du ministre en lui disant: Comment se fait-il que notre police provinciale ne soit pas plus près des gens que ça? Comment se fait-il que notre police provinciale ne connaisse pas le nom de tous les maires dans les municipalités?

Et là c'est ce qu'on nous offre, de travailler avec les municipalités. Mais, M. le Président, ça fait longtemps qu'on aurait dû le faire. Ça fait longtemps qu'on aurait dû le faire, et c'est pour ça qu'il y a de la résistance sur le terrain, parce que nos corps de police, tels qu'on est après les structurer chez nous, ce sont des gens près de leur population.

(22 heures)

Enfin, vous savez, il n'y a pas juste les maires dont je viens de vous énumérer la liste qui vous demandent, d'une part, de leur donner la permission, et, d'autre part, de ne pas procéder avec le projet de loi n° 77. La présidente, Mme Simard, de l'UMRCQ, ce n'est pas n'importe qui. Mme Simard, elle a été candidate pour le PQ dans une convention. Donc, elle doit bien vous connaître, les membres du PQ, elle doit bien vous apprécier, elle doit bien vous respecter: elle a été candidate à la dernière élection pour vous, messieurs dames du PQ.

Eh bien, j'aimerais vous dire ce qu'elle disait récemment, ce qu'elle disait en plus, bien sûr, de la Fédération des policiers du Québec, du président de la CUM. Et je finirai, M. le Président, sur cette phrase de cette candidate du PQ, qui est maintenant la présidente de l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Elle dit: «Ce projet de loi, c'est une arnaque pour prendre en otage les citoyens des municipalités les moins riches.» Les six municipalités dont je vous parle, ce sont de petites municipalités pas très riches, et on est après les prendre en otage. C'est ça que la candidate du PQ défaite, Mme Simard, présidente de l'UMRCQ, dit.

Alors, M. le Président, moi, je ne comprends pas que ce gouvernement, ces députés ne s'opposent pas à ce projet de loi là. Comment se fait-il? Ils sont là comme des statues de Pâques, de l'île de Pâques. Ils sont là; ils ne disent pas un mot. Comment se fait-il, M. le Président? Nous, les gens nous appellent. En fin de semaine, j'ai fait plein d'activités dans le comté d'Orford. Les gens nous disent: Arrêtez ça, ça n'a pas d'allure. Comment se fait-il que les députés du gouvernement sont après laisser leur ministre aller de l'avant, alors qu'ils sont interpellés? J'en suis convaincu, j'en suis convaincu. Je les rencontre, moi, les gens. Je suis allé dans Jonquière il y a deux semaines; j'étais à Grand-Mère il y a quelques jours; je serai à Saint-Jean dimanche de cette semaine; j'étais à Valcourt dimanche dernier. Les gens nous en parlent de ça. Les comtés que je viens de vous nommer, c'est tous des comtés du PQ. Les gens nous disent: Le projet de loi n° 77, ça n'a pas d'allure, arrêtez ça.

Pourquoi les députés de l'autre bord, M. le Président, du gouvernement ne se lèvent-ils pas et ne disent pas au ministre: Aïe! On va regarder ça de nouveau, cette affaire-là, ça ne tient pas debout; c'est une nouvelle taxe; les citoyens du Québec, des taxes, ils n'en veulent plus, ils ne sont plus capables? Alors, on va voter contre le projet de loi n° 77 parce que, particulièrement dans le comté d'Orford, il ne répond pas du tout mais du tout aux aspirations des maires et des citoyens du comté d'Orford. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député d'Orford. Je cède maintenant la parole au député de l'Acadie. M. le député.


M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Oui. Merci, M. le Président. Alors, je trouvais important d'intervenir dans le cadre du débat sur le projet de loi n° 77 parce qu'il s'agit là d'une loi très importante qui va avoir un impact sur l'ensemble de la province, dans tous les coins de la province, dans les grandes municipalités comme dans les petites municipalités. Et, quand on regarde l'objectif comme tel de ce projet de loi, il y a peut-être trois éléments particuliers sur lesquels j'aimerais intervenir. Il y a plusieurs points à l'intérieur du projet de loi, mais il y en a trois en particulier sur lesquels je vais centrer mon intervention.

Un premier objectif, c'est qu'on nous dit qu'une municipalité locale de moins de 5 000 habitants doit conclure une entente par l'intermédiaire de sa municipalité régionale de comté pour obtenir les services de la Sûreté du Québec, sauf si le ministre de la Sécurité publique l'autorise à recourir à un autre corps de police. Alors, la règle, c'est, pour les petites municipalités de 5 000 habitants et moins, la Sûreté du Québec obligatoirement, à moins que, de façon subjective, de façon arbitraire, le ministre autorise autre chose.

Le deuxième point concerne les municipalités de 5 000 habitants et plus, où on dit que les municipalités vont devoir se doter de leur propre corps de police, soit d'un autre corps de police conformément à une entente ou, à la limite, sur autorisation du ministre par la Sûreté du Québec conformément à une entente.

Le troisième élément du projet de loi concerne le fait que le projet de loi modifie la Loi sur l'organisation policière relativement au financement de l'Institut de police et à la composition de son conseil d'administration.

Alors, M. le Président, il s'agit là de l'essentiel du projet de loi qui, depuis son dépôt, fait parler grandement à travers la province. Et on a pu remarquer des réactions très négatives assez généralisées et on a pu en prendre conscience la semaine dernière, au moment où la commission des institutions a tenu des auditions publiques et où on a rencontré des intervenants qui étaient particulièrement impliqués ou touchés, concernés par le projet de loi n° 77. Il s'agit d'une question importante qui touche à un problème dont on a parlé depuis de nombreuses années, soit la réforme de la carte policière. Et, ici, M. le Président, les gens ont l'impression qu'il ne s'agit pas essentiellement de la réforme à laquelle on s'attendait. Essentiellement, ce à quoi on a droit, c'est une opération comptable, c'est une commande, c'est l'exécution d'une commande du ministre des Finances et le ministre de la Sécurité publique, actuellement, se comporte essentiellement comme un ministre délégué au ministre des Finances qui remplit les commandes qui lui sont tracées.

Et, d'ailleurs, c'est malheureusement assez généralisé au sein du cabinet du gouvernement actuel, ce genre d'attitude au niveau des différents ministres sectoriels. On le voit dans tous les secteurs, le ministre des Finances place ses commandes et les autres exécutent. Et les commandes sont des commandes strictement d'économies budgétaires sans aucune perspective plus large, sans aucune priorité, et on voit les dégâts qui ont été causés au niveau de la Santé, de l'Éducation, de la Sécurité du revenu. Et là on en est au niveau de la carte policière.

On a affaire à un gouvernement qui, depuis son accession au pouvoir, tient un double langage. Et ça, on l'a dit à plusieurs reprises, et malheureusement je pense qu'on devra continuer à le dire: c'est un gouvernement qui a fait miroiter des illusions, qui a créé des rêves, qui a créé des attentes un peu partout, notamment dans le milieu municipal, et on s'aperçoit après coup que les paroles ne correspondent pas du tout aux gestes. Les paroles étaient belles, les paroles étaient mielleuses, mais les gestes sont le contraire de ce qui était annoncé.

Et j'en veux pour référence un article de M. Jean-Jacques Samson, qui a paru au mois de septembre 1996, où il nous disait: «Le Parti québécois avait séduit les membres de l'Union des municipalités régionales de comté par son discours sur la décentralisation et toute la liste des pouvoirs que le gouvernement de Jacques Parizeau promettait en 1995 de déléguer aux élus locaux.» Un peu plus loin: «La décentralisation est sortie du discours type du premier ministre et Québec n'a même pas donné suite au projet-pilote de décentralisation qu'il avait proposé aux municipalités intéressées.»

Alors, voilà, M. le Président, qu'est-ce qui crée actuellement une réaction aussi négative dans le milieu, c'est ce genre d'attentes qu'on a créées, d'illusions qu'on a fait miroiter et la déception de la réalité avec laquelle les gens doivent vivre.

Je vais prendre, M. le Président, un premier élément qui concerne les municipalités de 5 000 habitants et plus, et plus particulièrement la situation de la Communauté urbaine de Montréal. Alors, la Communauté urbaine de Montréal, par ce projet de loi, sera touchée dans le sens où elle aura à financer directement l'Institut de police de Nicolet. Et le gouvernement impose une facture aux contribuables de la Communauté urbaine de Montréal que ces gens-là devront défrayer un jour ou l'autre, d'une façon ou de l'autre. C'est évident que, quand on renvoie ça au niveau de la Communauté urbaine de Montréal, éventuellement ce sera les contribuables et toujours les mêmes contribuables qui paieront les frais de la facture. À la Communauté urbaine de Montréal, M. le Président, ça coûtera 2 200 000 $ pour la contribution ou le financement de l'Institut de police de Nicolet. Et, dans les autres municipalités, on devra accorder 1 % de la masse salariale, encore là, au financement de l'Institut. Les contribuables de la Communauté urbaine de Montréal sont déjà actuellement très touchés par les coûts qu'ils doivent assumer concernant le maintien des forces policières. Actuellement, les gens de la CUM paient 23 % des frais d'exploitation de la Sûreté du Québec, soit environ 95 000 000 $, et reçoivent à peu près pas de services de la Sûreté du Québec. Et ils contribuent à un niveau de 95 000 000 $ annuellement sans qu'ils n'utilisent les services de ce corps policier puisque la Communauté urbaine de Montréal a son propre corps policier. Alors, déjà, il y a une très grande contribution qui est faite par la population de la Communauté urbaine de Montréal et on devra ajouter maintenant 2 200 000 $ qui seront obligatoirement versés par la Communauté urbaine de Montréal pour le financement de l'Institut de police de Nicolet.

Au moment des rencontres, la semaine dernière, des auditions publiques, on a eu l'occasion de rencontrer Mme Vera Danyluk, la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, qui était accompagnée de M. Jacques Duchesneau, le directeur du corps policier de la Communauté urbaine de Montréal, et on a fait clairement valoir, à ce moment-là, une fin de non-recevoir à l'égard de ce transfert au niveau de la responsabilité financière de la formation donnée à Nicolet. Et on ne permet pas, au fond, actuellement, en faisant transférer cette obligation aux municipalités, de porter un jugement critique qui pourrait permettre certaines modifications, possiblement à l'Institut de police, ou possiblement, à la limite, une autre forme de service qui pourrait être mise en place, soit localement, soit régionalement, qui permettrait d'assurer la formation des policiers.

(22 h 10)

Alors, en obligeant les gens à financer cette institution-là, on ne permet pas aux autres d'évaluer des alternatives qui pourraient être moins coûteuses puis peut-être plus efficaces. Et, dans ce sens-là, M. Duchesneau nous faisait valoir que, si le SPCUM prenait en charge la formation de ses recrues, cela coûterait 364 000 $ au lieu de 2 200 000 $, soit une économie de 1 800 000 $ pour la Communauté urbaine de Montréal. Alors, ça, ça serait un jugement logique, ça serait une position qui tiendrait compte des intérêts réels des contribuables de la région de Montréal, de dire: Bon, on est capable de former nos recrues avec une dépense de 364 000 $, alors que l'obligation que fait le ministre dans le projet de loi n° 77, c'est de payer 2 200 000 $ qui seront payés en bout de ligne par les contribuables de la Communauté urbaine de Montréal. Alors, voilà, M. le Président, certaines remarques qui nous ont été faites par les gens de la Communauté urbaine de Montréal.

Pour ce qui est de l'Union des municipalités du Québec, on a eu comme porte-parole le président, M. Gilles Vaillancourt, maire de Laval, qui est venu, lui aussi, manifester sa déception et son grand désarroi vis-à-vis l'ingérence gouvernementale qu'il juge inacceptable. L'UMQ n'a jamais été informée ni consultée – et je répète, n'a jamais été informée ni consultée – avant l'annonce qui a été faite au moment du dépôt du projet de loi, où on a obligé les municipalités à défrayer 7 000 000 $ pour assumer la formation donnée à l'Institut de police de Nicolet, alors que ces municipalités défraient ou consacrent actuellement de 2,5 % à 3 % de leur budget de sécurité publique à la formation de leurs policiers. Alors, M. le Président, on voit, là encore, une autre conséquence négative qui nous permet de penser que le seul objectif de toute cette opération-là, c'est de faire payer les dépenses de l'Institut de police de Nicolet aux municipalités, indépendamment des besoins que ces municipalités-là peuvent avoir ou ne pas avoir.

Les directeurs de police sont venus également, et les membres qui étaient là, on mentionne dans l'article ou on fait référence à leurs représentations qui ont apostrophé le ministre de la Sécurité publique à la suite de son allocution: «Le ton de la discussion a parfois monté de plusieurs crans. Ils ne digèrent pas le transfert de responsabilités annoncé par le ministre, relativement à une participation de 1 % environ de la masse salariale de chaque corps de police au financement de l'Institut de police.»

Alors, M. le Président, du côté des municipalités de 5 000 habitants et plus, du côté d'un grand centre comme la Communauté urbaine de Montréal, c'est clair que le ministre a fait l'unanimité contre son projet de loi, surtout à partir du problème du financement de l'Institut de police de Nicolet, qui ne correspond pas à des besoins véritables de ces centres-là et qui, même, oblige les municipalités à défrayer des coûts qui ne sont en rien comparables ou qui sont très négativement comparables à des alternatives que ces organismes municipaux auraient pu évaluer en parallèle pour prendre la meilleure décision dans les meilleurs intérêts des citoyens.

Au niveau de l'UMRCQ, on a fait référence, à plusieurs reprises déjà, que la réaction a été excessivement négative. On a vu les sorties de Mme Jacinthe Simard, qui est la présidente de l'UMRCQ. Et le premier point que les gens n'ont pas digéré, c'est la question d'enlever essentiellement le libre choix aux municipalités de créer leur propre corps de police ou de créer, en conjonction ou en concertation avec d'autres petites municipalités, un corps de police régional en impliquant également les MRC. Le ministre de la Sécurité publique, avec son projet de loi, élimine cette possibilité-là et force, oblige les petites municipalités à faire affaire avec la Sûreté du Québec, essentiellement. Il y a bien, dans le projet de loi auquel j'ai fait référence tout à l'heure, une clause où on dit que, sur autorisation du ministre, il pourra autoriser autre chose pour les petites municipalités. Mais on sait très bien que son opération, c'est une opération qui vise à faire payer les frais de la Sûreté du Québec par les municipalités et à se décharger des coûts qui sont actuellement absorbés par le gouvernement. Donc, c'est à peu près peu probable que le ministre accordera cette possibilité-là, et à toutes fins pratiques c'est ce que les élus municipaux ont compris. C'est une opération où on va leur demander de faire affaire avec la Sûreté du Québec, point final. Alors, il y avait eu des expériences intéressantes qui étaient en marche au niveau de la MRC des Collines-de-l'Outaouais, où on était en train de développer un modèle de corps de police régional qui répondait bien aux besoins des citoyens, aux particularités du milieu. Mais, après avoir tant parlé, M. le Président, contre le gouvernement précédent en parlant du mur-à-mur, bien, on a un gouvernement actuellement qui en fait, du mur-à-mur, au niveau des corps de police en obligeant l'ensemble des petites municipalités du Québec à travailler avec la Sûreté du Québec, qui a un modèle uniforme sur l'ensemble du territoire.

On a également, dans le même ordre d'idées, dans l'article de M. Jean-Jacques Samson un extrait qui reflète bien ce que j'ai mentionné, c'est-à-dire la volonté du ministre de faire payer pour la Sûreté du Québec par l'ensemble des municipalités. M. Samson, sous le titre «Du tordage de bras», mentionnait: «Pendant ce temps, son collègue Robert Perreault, de la Sécurité publique, soucieux de garder à la Sûreté du Québec un statut de police nationale mais n'ayant plus les moyens de payer les képis des agents, interdit aux municipalités de se regrouper pour créer des corps policiers régionaux et donne lui aussi jusqu'en janvier 1997 aux maires pour conclure des ententes de services avec la Sûreté du Québec. Encore du tordage de bras...»

M. le Président, quelles seront essentiellement les conséquences que ça va avoir, cette opération de tordage de bras, pour les contribuables, pour la personne, en bout de ligne? Parce que c'est elles. Nous, on est ici, à Québec, on discourt sur des projets de loi, on met en place des structures. Mais l'objectif ultime, c'est de servir efficacement, au moindre coût possible, avec la meilleure qualité possible les concitoyens qu'on représente ici. Alors, l'effet que ça aura, selon... La présidente de l'Union des municipalités régionales de comté nous dit que cette réforme va provoquer des hausses de 0,08 $ du 100 $ d'évaluation pour les 1 066 municipalités qui payaient déjà 0,10 $ les 100 $ d'évaluation pour les services de la SQ. «Faire des élus municipaux des percepteurs de taxes, nier le principe de la libre concurrence en nous imposant la SQ, ce n'est pas très intelligent», dit Mme Simard.

Alors, on refile essentiellement une facture de 40 000 000 $ au niveau des petites municipalités pour défrayer les coûts de la Sûreté du Québec. Alors, c'est ça, M. le Président, les conséquences que ça va avoir, ce projet-là n° 77, sur les contribuables. Et encore, ça fait partie du palmarès des taxes déguisées, des manoeuvres où on essaie de camoufler le plus possible certaines taxes, certains impôts, certaines tarifications et qu'on transfert toujours le fardeau de toutes ces mesures-là sur le contribuable en bout de ligne, alors que le premier ministre, à de multiples reprises, a toujours mentionné que ce n'était pas les contribuables qui seraient touchés. M. le Président, quand je vous parlais tout à l'heure d'un gouvernement à double langage, c'est exactement ce qu'on voit depuis plusieurs mois. Et ça, la population, actuellement, le constate et est en mesure d'apprécier la justesse des mots que je viens de tenir.

Il y a eu un communiqué qui a été émis également par l'Union des municipalités, où on mentionne que les coûts évalués par le ministre de la Sécurité publique, des coûts de 200 000 000 $ par année pour les services de la SQ aux municipalités qui n'ont pas de corps de police, sont une évaluation gonflée, trafiquée et arbitraire. M. le Président, je n'utilise pas des mots antiparlementaires. J'utilise exactement les mots qu'on trouve dans le communiqué de presse de l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec, qui parle d'une évaluation de coûts gonflée, trafiquée et arbitraire.

Un peu plus loin, M. le Président, Mme Simard nous dit: «Ce projet de loi constitue une véritable arnaque. On veut nous interdire la possibilité de créer nos propres corps de police et on prive ainsi les citoyens de possibilités ou de moyens de réduire les coûts des services publics. Les municipalités demandent la possibilité de créer leurs corps de police municipaux sur la base des MRC.» Elle nous dit spécifiquement, et je cite: «Je dirais que, sur le plan du principe, le refus du ministre est l'aspect le plus inacceptable de ce projet de loi.»

(22 h 20)

M. le Président, on entendait aujourd'hui le premier ministre qui vantait les mérites, la compétence des élus municipaux, la représentativité, le dévouement de ces gens qui représentent des citoyens à la base, dans chacun des milieux à travers la province, et le premier ministre vantait ces gens-là, vantait leur compétence. Et ce qu'on fait, en même temps qu'on fait ça, on leur enlève la liberté de choisir. On les oblige à adopter le modèle pensé par le ministre de la Sécurité publique et le premier ministre, puisque M. le ministre de la Sécurité publique disait qu'il avait validé cette option d'étendre la Sûreté du Québec sur l'ensemble du territoire avec le premier ministre et que le premier ministre était d'accord. Alors, c'était réglé. Ça s'appliquait pour tout le monde. C'est ça, le genre de consultation, de concertation, de partenariat que ce gouvernement nous dit vouloir développer avec les élus municipaux.

Les élus municipaux, M. le Président, trouvent l'attitude du gouvernement absolument méprisante. Et on ajoute l'insulte à l'injure quand on envoie un message et qu'on fait concrètement exactement le contraire. Vous savez, c'est le gouvernement qui est le champion des sommets. Et un journaliste parlait des sommets-spectacles. Alors, on fait des grands spectacles, on fait des grands sommets, on développe des consensus, et le premier ministre se réfère aux consensus mais, quand ces consensus-là ont été développés sur des objectifs louables, on ne parlait jamais des moyens et, depuis à peine deux mois, on s'aperçoit, surtout après le dernier sommet qui a eu lieu, que les moyens n'ont jamais été discutés comme ça a été le cas du transfert, qui a été fait la semaine dernière, de 76 000 000 $ au niveau de l'exonération ou du non-retour de la TVQ aux municipalités. On pellette dans le champ municipal des responsabilités, comme celle de la TVQ qu'on ne remet pas, des montants d'argent très importants au niveau de la Sûreté du Québec, et on renvoie ça là-bas. Et on nous dit en même temps que ce sont des gens qui ont toutes les compétences, qui prennent à intérêt les intérêts des citoyens, et, en même temps qu'on dit ça, on leur nie leur capacité d'agir dans les meilleurs intérêts des citoyens et on refuse de leur donner l'autonomie que leur ont donnée ou que leur ont confiée les citoyens qui les ont élus.

Alors, M. le Président, c'est la raison pour laquelle on observe depuis quelque temps des réactions très négatives dans le milieu. Je suis assuré que, si le gouvernement ne change pas d'attitude et ne retire pas ce projet de loi n° 77 pour débattre de toute la question de la police dans un sommet plus large qui aborderait tous les aspects, c'est malheureusement, je pense, une crise sociale qui va se poursuivre et qui ne sera pas dans l'intérêt du climat nécessaire au Québec, climat de stabilité et de sécurité. On mine, ou on canalise des énergies à mauvais escient. Je termine sur ça, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de l'Acadie. Je cède maintenant la parole à la députée de Kamouraska-Témiscouata. Mme la députée.


Mme France Dionne

Mme Dionne: Merci, M. le Président. Je prends la parole ici ce soir sur ce projet de loi n° 77, ce projet de loi malheureux déposé par le gouvernement, c'est la loi qui modifie la Loi de police et d'autres dispositions législatives.

Pour avoir entendu, et vous avez écouté avec beaucoup d'attention mes collègues parler sur ce projet de loi, vous voyez, M. le Président, qu'il y a des gros problèmes et que le gouvernement, là encore, oublie complètement les citoyens dans sa façon de gouverner. Quand on revient au fameux slogan, il n'y a même pas deux ans, «L'autre façon de gouverner» – je dis deux ans, on revient à septembre 1994 – on s'aperçoit que cette autre façon de gouverner a déçu et déçoit encore de plus en plus de citoyens au Québec.

M. le Président, ce projet de loi n° 77, qui est allé en commission parlementaire pour entendre les différentes parties impliquées, a déçu bien des gens parce qu'on parle d'une facture supplémentaire qui est imposée aux municipalités, donc aux citoyens payeurs, mais aussi on vient toucher à des principes fort importants au niveau des municipalités du Québec.

Quand on regarde ce projet de loi, M. le Président – et je vais résumer rapidement au bénéfice des gens, de façon particulière, de mon comté – c'est qu'on vient dire, par ce projet de loi, qu'une municipalité de 5 000 habitants et moins, qui avait le droit d'avoir son propre corps de police ou de passer une entente avec d'autres municipalités pour les services de police, ne peut plus travailler comme elle veut le faire, ne peut plus être autonome parce que le gouvernement, et de façon particulière le ministre de la Sécurité publique, a décidé que ces municipalités devaient uniquement passer par la Sûreté du Québec pour avoir des services de police.

Alors, qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président, pour les citoyens de Kamouraska-Témiscouata en particulier, dans un comté où on retrouve 37 municipalités de moins de 5 000 habitants? Ça veut dire beaucoup d'argent, beaucoup d'argent qu'on vient chercher dans les poches des contribuables des citoyens de petites municipalités. Et, dans ce sens-là, ça fait mal. Quand on regarde Kamouraska-Témiscouata, il y a seulement une municipalité qui a un corps de police, la ville de La Pocatière. Toutes les autres municipalités du comté se servent de la Sûreté du Québec comme service de police.

Alors, dans ce sens-là, à tout le moins, on se serait attendu que le gouvernement... Parce qu'on parle d'une autre façon de gouverner, donc différente de ce qui se passait avant. Ça devrait être ça, M. le Président, sauf qu'on s'attendrait à ce que le gouvernement, avec son autre façon de gouverner, vienne voir une nouvelle façon d'offrir les services de police, une façon peut-être, à la limite, moins coûteuse mais plus efficace. Alors, ce serait répondre aux attentes des citoyens du Québec qui ont élu ce gouvernement, en septembre 1994, avec l'autre façon de gouverner. On devait s'attendre à ça.

Alors, de ce côté-ci de la Chambre, M. le Président, on s'est dit: Bien, écoutez, s'ils sont rendus au pouvoir, ça veut dire qu'ils ont probablement des projets novateurs, des projets différents. Mais non. Au lieu d'essayer de régler les problèmes gouvernementaux, d'essayer de régler les problèmes de services aux citoyens, qu'est-ce qu'on fait? On dit aux municipalités du Québec, qui sont des partenaires: Écoutez, la facture va être de tant maintenant. Elle était de tant; elle va grimper de tant, sauf que, si vous pensez que vous avez le choix, bien ce n'est pas vrai, vous n'avez pas le choix. Vous devez prendre la Sûreté du Québec telle qu'elle est, comme elle est, sans changement au niveau des services, sans amélioration, et ça va vous coûter plus cher. C'est comme ça que ça fonctionne maintenant.

Ils nous ont dit, de l'autre côté: Écoutez, M. Ryan est passé, l'ancien ministre des Affaires municipales, il a commencé à charger les municipalités pour les services de police; nous, on ne fait que continuer. Mais, moi, je me souviens des déclarations du député de Jonquière. Il y a peut-être des gens de l'autre côté qui ne se souviennent plus du député de Jonquière, mais il a fait des grands discours. Et, quand ceux qui étaient là, dans l'opposition, à l'époque, parlaient, ils ont fait des grands discours pour décrier la situation, décrier la façon de travailler, et ils disaient qu'effectivement M. Ryan venait faire des choses tout à fait incroyables, impossibles. Et c'était comme ça qu'on entendait, qu'on a entendu bien des discours de l'opposition de l'époque, du Parti québécois, et, de toute façon, de façon particulière, sur la façon dont M. Ryan, le ministre des Affaires municipales de l'époque, parlait. Et le député de Jonquière, écoutez, était le premier, il a dit: Jamais nous ne ferons ça, M. le Président, jamais on ne va faire comme eux autres; écoutez, jamais on ne fera ça, c'est tout à fait impossible, aberrant. Alors, aujourd'hui, on se retrouve avec l'autre façon de gouverner qui devait changer les choses et qui est en train de détériorer une situation qui n'était pas nécessairement facile pour les municipalités, et ça, on se l'était dit entre nous, c'était quand même difficile à accepter d'avoir une partie de la facture imposée aux municipalités.

Alors là, on vient l'augmenter. Il n'y a pas d'inflation beaucoup, M. le Président. La facture, écoutez, même le coût total de la Sûreté du Québec, d'après ce que dit la présidente de l'UMRCQ, a passé de 135 000 000 $ en 1991... il est maintenant à 200 000 000 $ même si la Sûreté du Québec donne le service dans moins de municipalités. Alors, on doit se poser des questions, M. le Président. Pas d'inflation, presque pas d'augmentation de salaires, et ce qui veut dire en tant que tel que les municipalités vont avoir une charge supplémentaire, un 0,08 $ de plus du 100 $ d'évaluation municipale, mais pas d'amélioration de service, pas plus qu'avant, seulement une facture d'un peu plus et moins d'autonomie, M. le Président.

Alors, quand on regarde ça, on peut bien se questionner sur les réalités d'aujourd'hui et l'autre façon de gouverner de ce gouvernement du Parti québécois qui promettait mer et monde et qui change d'avis à tout moment. Avant sommet, après sommet, ce n'est pas la même chose, M. le Président, que ce soient les déclarations du premier ministre ou celles de chacun des ministres de ce gouvernement.

(22 h 30)

Alors, M. le Président, quand on regarde ça, on se dit: Ce projet de loi n° 77, il est choquant pour les municipalités, il est choquant parce que, de plus en plus, les municipalités ont rationalisé. Et, d'ailleurs, je reviens au discours du premier ministre quand il nous a dit: Vous nous avez laissé un déficit de 5 700 000 000 $.

M. le Président, quand on regarde ça, on sait fort bien que le déficit de l'année 1994-1995, il a été six mois dans le temps d'un gouvernement du Parti libéral et les six derniers mois dans le temps d'un gouvernement du Parti québécois. Et on sait fort bien comment on a voulu démontrer à la population que le déficit était élevé en fin d'année, dans des décisions des derniers six mois, pour montrer une facture plus grande de 5 700 000 000 $ pour, après ça, avoir l'air plus fin après en coupant les déficits.

Alors, vous savez, M. le Président, quand on regarde ça, on sait fort bien que cette facture-là de 5 700 000 000 $, elle a été gonflée les derniers six mois, à l'arrivée du Parti québécois. Et d'ailleurs, de l'autre côté, ils le savent fort bien. Ils devraient l'avouer tout candidement, honnêtement: c'est comme ça que ça s'est passé. Et on préparait le référendum en plus, alors il y avait une marge de manoeuvre qui était nécessaire pour effectivement aider la cause.

Alors, M. le Président, quand on regarde ça, on se dit une chose: on nous reproche, quand on était au pouvoir, quand le ministre des Affaires municipales, M. Ryan, était là, de ne pas avoir fait certaines coupures qui devaient être faites. Alors, dans le dossier de la Sûreté du Québec, effectivement il y avait un montant d'argent qui avait été, suite à des négociations qui ont duré six mois, je me souviens, suite à une tournée où les chiffres ont été déposés aux municipalités – parce que le ministre lui-même s'est déplacé – il y avait effectivement une facture qui avait été déposée aux municipalités, dis-je bien, et à ce moment-là les municipalités savaient à quoi s'attendre d'avance, M. le Président, et pas après, comme c'est le cas dans le moment avec la TVQ et la fameuse facture, là, pour combler le déficit des derniers mois.

Alors, M. le Président, quand on regarde la façon de faire de ce gouvernement du Parti québécois et quand on est citoyen d'une municipalité de mon comté, on peut être de plus en plus déçu de la façon dont on travaille les choses. On veut aller chercher des argents additionnels, on veut brimer l'autonomie des municipalités, ça, je le dis et je le répète parce que c'est l'UMRCQ et l'UMQ qui l'ont bien dit: ils représentent effectivement les municipalités du Québec.

Alors, M. le Président, quand on va un petit peu plus loin dans le projet de loi, on se dit: Qu'est-ce qui va arriver dans notre municipalité? Moi, je prends les 37 municipalités de mon comté. Il y a des municipalités qui ne sont pas de même importance, la population peut passer entre 200 et 5 000. Il est bien certain qu'il y a des municipalités qui payent plus que d'autres la facture pour les services de police.

Mais il y a aussi un autre élément qu'on n'a pas vu et qui est quand même difficile à accepter, qui avait été soulevé à l'époque par les municipalités de mon comté – dans les documents que j'ai vus jusqu'à maintenant, on ne semble pas non plus trouver la solution – c'est qu'on retrouve des municipalités de même importance, M. le Président. Par exemple, une municipalité qui peut avoir 1 500 de population peut avoir une évaluation municipale qui peut être plus grande qu'une autre de même importance, ce qui veut dire que la facture imposée, compte tenu du 0,08 $ du 100 $ d'évaluation municipale, peut représenter une facture différente dans une municipalité plutôt que dans une autre. Et ce qui est le plus aberrant, M. le Président, c'est que les municipalités où la facture des fois est plus élevée sont peut-être les municipalités qui ne retrouvent pas nécessairement ou n'ont pas nécessairement besoin des services policiers de la même façon. Le taux de criminalité est plus bas dans bien des cas ou est différent du nôtre, et la facture, quand même, est plus élevée.

Alors, quand on regarde ça, on se dit: Il y a un problème au niveau de la facture du 100 $ d'évaluation municipale parce qu'on touche des municipalités de même importance. On les touche de façons différentes, et ce n'est pas tout à fait équitable entre cesdites municipalités. Et c'est sûr que, dans ce sens-là, les municipalités vont sûrement relever le problème d'équité qu'on y retrouve.

M. le Président, quand on regarde les commentaires qui sont faits par l'Union des municipalités régionales de comté – je vais prendre celle-là comme exemple, puisque ça touche la plupart des municipalités de mon comté, puisque, comme je vous disais, la seule municipalité qui a son corps de police dans le moment, c'est la ville de La Pocatière et elle fait partie de l'UMQ – si on prend le cas des autres municipalités et qu'on regarde les commentaires de l'UMRCQ, je pense que Mme Simard, elle est sévère, et avec raison, M. le Président, avec raison parce qu'on parle effectivement d'un projet de loi qui est antidémocratique, qui ne donne pas de marge de manoeuvre aux municipalités de regarder ça. On ne trouve pas de façon novatrice de donner les services.

Quand on parle aussi des particularités régionales, alors là on a un règlement sur les services de base qui est carrément le même partout à travers le Québec, M. le Président. Et, quand on écoute les grands débats que font, entre autres, le ministre responsable des affaires régionales et tous les députés des régions, où on parle de décentralisation, de particularités régionales et de politique de développement régional, on s'aperçoit, M. le Président, que ce ne sont que de beaux discours, carrément de beaux discours. On n'y croit pas. On y croit juste quand on s'en va en région et que, là, on veut expliquer ce qui va peut-être s'en venir et qu'on prend même le temps, comme c'est arrivé à Saint-Germain-de-Kamouraska lors d'un colloque sur le développement local, de dire que tout ce qui a été fait avant, ce n'était pas bon, ça ne valait rien. On recommence à zéro avec une nouvelle politique de développement régional, et le ministre responsable des Ressources naturelles, qui est responsable de ce dossier, arrive en disant que l'avenir des régions passe par de nouvelles structures. J'ai toujours pensé, M. le Président, que l'avenir des régions passait par des emplois, mais le ministre responsable du Développement des régions ne parle que de structures.

Alors, peut-être que, pour ce gouvernement, les structures, c'est la réponse à tout, sauf que les citoyens du Québec en tant que tels, les citoyens des régions, ils ont besoin d'emplois. Ils ont besoin d'emplois et ils n'ont pas nécessairement besoin de structures. Il y en a déjà beaucoup, alors d'en faire d'autres et de passer une année, deux années à débattre de nouvelles structures, M. le Président, ça ne règle pas les problèmes d'emplois, ça ne donne pas d'emplois aux gens.

Le projet de loi qui est devant nous, le projet de loi n° 77, au lieu justement de faciliter les services de police en région, de prendre le temps de regarder ces services-là... Non, on ne fait pas ça. On envoie une facture aux municipalités disant: Ces services seront conservés tels qu'ils sont. On ne change pas, on ne fait pas preuve d'imagination, on n'offre même pas la possibilité à la Sûreté du Québec de regarder des façons novatrices de travailler en collaboration avec les corps de police municipaux existants. Non, pas du tout, c'est: la facture, vous prenez ça, vous avalez ça et c'est comme ça que ça fonctionne.

Alors, M. le Président, quand Mme Simard, la présidente de l'UMRCQ, dit qu'on ne tient pas compte des particularités régionales, c'est bien vrai. Alors, on fait un mur-à-mur coûteux et inutile en matière de sécurité publique, contrairement à la tendance actuelle en Amérique du Nord. Alors, c'est quand même incroyable. Ce qui veut dire que... Bon. Il y a d'autres corps policiers, il y a d'autres gouvernements, il y a d'autres municipalités qui regardent les tendances, qui essaient d'innover pour contrer le crime au Québec, pour protéger les citoyens, mais ça, au Québec, non. Ça, on ne peut pas faire ça au Québec, il faut commencer par facturer et, ensuite, bon, bien là, là, on va voir. Alors, dans ce sens-là, Mme Simard, je pense que, comme présidente d'une union de municipalités qui se doit d'avoir une vision d'avenir, elle regarde ce qui se passe ailleurs qu'au Québec.

Comme ce gouvernement du Parti québécois pense qu'il est seul au monde, et tout seul, et que les murs autour, c'est ce qu'il y a de plus important, et «travaillons tout seuls comme des petits», alors, c'est comme ça que ça arrive. Alors, on oublie les tendances, on oublie puis, à un certain moment donné, on va être obligé de faire du rattrapage incroyable pour être à la hauteur de ce qui se fait un peu partout. Et il va falloir que le gouvernement du Parti québécois s'en aille pour ça. Il n'y a pas d'autre solution. Parce que ce gouvernement ne regarde que lui-même, par lui-même, pour lui-même. Il oublie les citoyens carrément. Il oublie que les citoyens peuvent faire preuve d'imagination.

Prenons les corps de police, M. le Président... Prenons la région du Bas-Saint-Laurent. On a un corps de police à Rivière-du-Loup, on en a un à Rimouski. Est-ce que ça ne veut pas dire que la ville de Rivière-du-Loup, en collaboration avec les municipalités qui entourent la ville de Rivière-du-Loup dans la même MRC, n'aurait pas pu à tout le moins avoir la chance de regarder une façon différente de donner le service peut-être d'une façon moins coûteuse? Mais pas du tout! Pas du tout, M. le Président. Non. S'il vous plaît! Le ministre a fait sa tournée au mois de septembre, a écouté les gens, a laissé certaines ouvertures, mais, deux mois plus tard, il a fermé les portes complètement. Il a dit: Vous allez passer par ce créneau-là, dans ma façon de travailler, dans ma façon de voir les choses, parce que, nous, on veut avoir de l'argent et on veut que vous passiez par la Sûreté du Québec uniquement.

Prenons Rimouski, par exemple, M. le Président. C'est la même chose pour la ville de Rimouski. Qui nous dit que la ville de Rimouski, avec les municipalités environnantes, peut-être Rimouski-Est et les autres municipalités qui l'entourent, n'aurait pas eu avantage à regarder à tout le moins – à regarder, M. le Président – une façon de faire, de donner des services de police peut-être aussi efficaces mais moins coûteux, ou peut-être plus efficace? Non, M. le Président. Ça, on n'a pas le droit de le faire. Parce que, quand on est en région, on parle de décentralisation. Mais, quand vient le temps de donner les outils aux gens, de les laisser s'exprimer sur des sujets fondamentaux: Non, c'est vraiment la centralisation pure et simple; on veut votre argent et on va l'avoir.

(22 h 40)

M. le Président, moi, je vais terminer en parlant du fameux sommet qui a été demandé par les gens qui sont passés en commission parlementaire. Et, là-dessus, je veux juste vous citer la déclaration du ministre, parce qu'il n'a pas parlé en commission parlementaire, il n'a pas réagi là-dessus, il était très hésitant et, encore là, il a... Mais, quand il est venu pour parler à la presse, il a dit, bon: «Sur ces questions-là – et je le cite, là – je serais – "je serais" – peut-être intéressé effectivement à envisager quelque chose qui pourrait peut-être se passer quelque part à la fin du printemps ou au début de l'été.» Fin de la citation.

Quand on regarde une déclaration comme celle-là, M. le Président, on s'aperçoit de deux choses. Premièrement, le ministre, il ne sait pas trop où il s'en va. Il faudrait qu'il le sache quand même avant de parler à la presse. Ça ne fait pas tellement sérieux, hein? Et, ensuite, est-ce qu'il a un respect pour les gens qui sont venus et qui sont, je pense, des partenaires dans le développement, et de plus en plus dans le développement tant économique que des services offerts à la population?

M. le Président, les services offerts à la population, ils se doivent d'être de plus en plus efficaces. On a des outils qu'on n'avait pas dans le passé: pourquoi ne pas donner la possibilité de regarder ça? Alors, là le ministre est très vague, très vague là-dessus quand il devrait, oui, dire: Oui, je vous prends au mot; on va s'asseoir ensemble puis on va travailler de façon positive pour les citoyens du Québec. Non, ce n'est pas le cas. Alors, vous voyez, M. le Président, la marge de manoeuvre des gens, des citoyens et des partenaires de ce gouvernement, elle est seulement là en paroles, mais, dans les actes, c'est la centralisation pure: On veut votre argent puis on va l'avoir.

Alors, le projet de loi n° 77, nous, on est contre, de ce côté-ci de la Chambre, et je pense qu'on a de bonnes raisons de l'être, parce que les citoyens du Québec en ont de plus en plus ras le bol – c'est le mot – de la façon dont ils sont traités, du respect que ce gouvernement leur donne. Parce que, si c'est comme ça que ça fonctionne, ils sont de plus en plus moroses, ils ont moins le goût d'investir, ils ont moins le goût de s'impliquer dans des choses. Et la cause la plus fondamentale, c'est ce gouvernement qui est là présentement. Alors, moi, je vais voter contre le projet de loi n° 77.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata. Je cède maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: Merci, M. le Président. Qui aurait cru, qui aurait dit, en 1991, 1992, 1993, qu'aujourd'hui un projet de loi comme celui présenté, le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives... Et je reprends ce que je mentionnais: Qui aurait cru ça, qu'un gouvernement du Parti québécois, qui représente donc... On retrouve une majorité de députés qui étaient à l'Assemblée nationale en 1990, 1991, 1992, 1993, qui criaient, prenaient la parole, ici, dans cette Chambre, pour défendre, d'abord, la loi 145 et d'autres dispositions – et ma collègue y a fait allusion tantôt – présentée par M. Ryan, ministre des Affaires municipales, présentée tout près de deux ans avant l'application de cette loi, d'abord présentée par le ministre des Affaires municipales, M. Picotte, qui a précédé M. Ryan, et ensuite défendue par M. Ryan. Les gens de l'opposition criaient au scandale, d'abord, et ils étaient à la défense des municipalités, disaient-ils. Un projet de loi qui avait été préparé, défendu, présenté en région avait permis aux représentants des deux unions des municipalités d'exprimer leur désaccord, d'échanger sur tous les points.

Et je reviens justement sur le 0,10 $, l'imposition d'évaluation de transfert aux municipalités. Évidemment, c'était la première fois, c'était un début. Comme quelqu'un de l'autre côté disait récemment, ces jours-ci: C'était un début qui avait été préparé par M. Ryan, mais ces gens-là nous disaient: C'est inacceptable, c'est inacceptable de transférer une facture pour des services de police dont les citoyens de certaines municipalités ne profitent qu'à l'occasion, des services qui ne sont pas sollicités par les petites municipalités. Et aujourd'hui la plupart des membres qui forment le gouvernement actuel, c'est-à-dire les députés élus sous la bannière du Parti québécois, semblent trouver tout à fait raisonnable que ce projet de loi, d'abord, qui vient réglementer à nouveau l'imposition de la Sûreté du Québec aux municipalités, d'une part – et déjà, depuis plusieurs mois, leur avoir transféré une facture de l'ordre qu'on mentionnait...

M. le Président, qui aurait cru que les députés, qui, à ce moment-là, avaient supporté les élus municipaux pour venir ici à l'Assemblée nationale, allaient dans des régions un peu partout revendiquer le retrait de cet article... de ce projet de loi d'abord, la loi 145, et de la partie qui touchait le transfert d'une partie de la facture aux municipalités...

M. le Président, aujourd'hui on reconnaît et on croit comprendre, et de mes collègues y ont fait allusion, que le ministre de la Sécurité publique a un mandat du gouvernement – et c'était inclus dans le discours du budget de mai passé, et je pense que le premier ministre l'a confirmé lui-même publiquement, en réponse à des questions ici, que c'était un mandat du gouvernement, que c'était un besoin du gouvernement d'aller répartir, c'est-à-dire de demander aux municipalités de faire un effort pour supporter le gouvernement dans la rationalisation de ses dépenses et de se partager la facture... Donc, c'est les propres paroles du premier ministre. Donc, on comprend aujourd'hui que le ministre de la Sécurité publique a un mandat, soit celui d'imposer aux municipalités... Il ne peut pas échanger avec elles, à part que d'être réceptif et de leur dire qu'il est peut-être souhaitable qu'on puisse se parler un peu plus tard, comme ma collègue le mentionnait. Mais aujourd'hui les municipalités sont déjà face à une facture qui a presque doublé dans les corps... les services de police.

Il y a des articles qui sont très dérangeants, puis je pense que les municipalités ont raison de se questionner. Au-delà de 1 000 municipalités, pour ne pas dire tout près de 1 200 municipalités sont aux prises avec cette situation: elles n'ont plus le choix, elles doivent, elles auront l'obligation de travailler avec les services de la Sûreté du Québec, de payer leur facture; elles n'ont pas le choix de pouvoir organiser dans des secteurs donnés leur propre corps de police, ce qui serait très légitime et ce qui serait dans certaines situations la meilleure solution, avec une facture en moins.

Et on a tous, chacun... Et je vois des députés de l'autre côté qui représentent des régions où il y a une concentration de population qui s'y prêterait, de mettre en place un service de police regroupé pour un certain nombre de municipalités, une régie – ça peut être sous forme de régie, comme on vu dans les dernières années, un regroupement de municipalités qui gèrent un service de police en commun... La démonstration a été faite, on en a des exemples, soit dans la MRC des Chutes-de-la-Chaudière, ici dans la région, dans la banlieue de Québec, d'une part.

(22 h 50)

Je pourrais citer dans ma région un exemple où ça pourrait facilement s'appliquer. À la ville de Montmagny, vous avez un corps de police très bien structuré, et la population en général, qui a à côtoyer, ou qui a à visiter, ou à venir chercher des services à la ville de Montmagny, a la chance de se rendre compte de quelle façon la sécurité publique est assurée à Montmagny. Et vous avez des événements d'importance où la sécurité publique a eu la chance de le démontrer. Vous avez le Festival de l'oie blanche, qui attire des milliers de personnes pendant près de 15 jours, 12 ou 13 jours. Ils ont été cités en exemple de la collaboration du corps de police de Montmagny. Pourquoi ce corps de police là ne pourrait pas, si c'était la volonté de plusieurs municipalités environnantes – parce que vous avez une concentration de 15 000 à 18 000 de population autour de la ville de Montmagny, les municipalités environnantes... Pourquoi ces municipalités-là ne pourraient-elles pas négocier ou conclure une entente avec la ville de Montmagny pour solliciter des services? On va me dire: C'est peut-être possible si le ministre donne son appui, son approbation. Mais ce qui se dessine aujourd'hui, M. le Président – et je sais très bien que vous allez être sensible à ce que je vais vous expliquer – et ce qui déçoit les municipalités, c'est que le ministre va se sentir obligé de dire non à toutes les nouvelles initiatives de la sorte qui pourraient aller solliciter les services d'un corps de police dans une périphérie raisonnable autour d'une petite ville, pour la simple raison qu'il a besoin des revenus qui sont déjà identifiés dans le cadre du projet de loi, soit entre 1 000 et 1 200 municipalités, il a besoin de ces revenus-là déjà identifiés pour supporter les frais de la Sûreté du Québec.

Quand je vous dis que le ministre a un mandat du gouvernement d'aller chercher cette facture-là et d'expliquer à la plupart des municipalités que, non, le gouvernement a décidé que la Sûreté du Québec serait le corps de police qui desservirait l'ensemble de ces municipalités-là déjà identifiées, c'est ça, la crainte que vivent les municipalités. Comme plusieurs l'ont mentionné, ils avaient déjà commencé à se regrouper, à échanger et à tenter de mettre en place un corps de police, faire des estimés, sonder auprès de la population, vérifier auprès de la population si c'était sa volonté.

Donc, M. le Président, je pense que c'est très décevant pour les municipalités, la façon dont le gouvernement actuel se comporte envers les municipalités, quand on sait que... Et je sais très bien que les collègues de l'autre côté, comme ceux ici de l'opposition, ont la chance, à toutes les semaines, d'échanger avec des municipalités de leur comté: c'est la déception; on pourrait même ajouter que c'est la déprime au sein des administrateurs municipaux, la façon dont le gouvernement les traite.

On en est rendu à au-delà de 200 000 000 $, dans les derniers mois, de transferts aux municipalités. Donc, ce qu'on croit comprendre, c'est que les municipalités servent de percepteurs de taxes. Le ministre de la Sécurité publique, dans le cadre du dossier des services de police, sert aussi de percepteur de taxes pour le gouvernement du Québec, et c'est ça que les municipalités ressentent. Le premier ministre va pouvoir se permettre de déclarer – et ils le font depuis plusieurs mois, plusieurs de ses ministres et les députés de la formation ministérielle: Il n'y aura pas et il n'y a pas eu d'augmentation de taxes; on va chercher de la tarification, on demande à nos partenaires de faire leur part. Je pense qu'ils disent – et je reprends les paroles du premier ministre: «C'est un dossier de société.»

Mais est-ce que les municipalités du Québec ont été préparées? Est-ce que les municipalités, il y a un an, avant le premier mandat... Le député de Joliette, qui était ministre des Affaires municipales, s'est promené, à juste titre. Il était le nouveau ministre d'un nouveau gouvernement, et nous l'avons tous entendu présenter aux municipalités régionales, ou aux municipalités locales, ou aux petites villes: Il n'y aura pas de transfert aux municipalités – on ne fera pas comme le précédent gouvernement – de responsabilités sans support financier. On ne sollicitera pas de nouvelles participation financière ou de nouvelle implication financière de la part des élus, et des municipalités, et des payeurs de taxes des petites municipalités. C'étaient à peu près les mots employés et c'était sur un ton très rassurant, M. le Président. Donc, aujourd'hui ce n'est pas ce qu'on vit, ce n'est pas ce que les municipalités vivent.

Toujours pour revenir à la frustration que vivent les municipalités, je pense que le projet de loi n° 77 sur la modification de la Loi de police en est un bel exemple. Un bel exemple parce que, carrément, on a dit: On n'a pas eu le temps de vous consulter, d'avoir votre opinion, ou de vous présenter, ou de vérifier avec vous autres de quelle façon ça pourrait être fait pour que ce soit acceptable et facilement adoptable pour chacune des régions du Québec. Ceux qui ont déjà l'intention de former un corps de police ou ceux dont la concentration de population pourrait s'y prêter... Mais non, dans le budget, on l'indiquait déjà, il y a eu des déclarations ministérielles à l'effet que, oui, il y aura un transfert de facture de tout près de 40 000 000 $ aux municipalités dans le cadre du corps de police, en fait de la facture sur la Sûreté du Québec, d'une part. Le premier ministre est allé à l'UMRCQ, à l'ouverture du congrès, et il leur a carrément dit: Ce qui est dans le budget va rester, on ne peut rien changer, même si ça semble vraiment être très dérangeant pour les élus municipaux.

M. le Président, je représente une région, comme je vous le mentionnais, qui n'a qu'un corps de police organisé, soit la ville de Montmagny, mais il y a de mes collègues qui ont aussi fait allusion au fait de l'inquiétude que pouvaient avoir les grands centres urbains, les grands centres urbains, comme Montréal, Québec et d'autres grandes villes qui feront les frais de la facture de la formation policière, soit l'Institut de police.

Bien, les municipalités, ces petites villes concernées, sont en train de faire la démonstration que, si la loi le leur permettait et si elles avaient la chance de donner elles-mêmes leur formation ou de partir – je ne dis pas dans chacune des villes, mais de se regrouper – et de mettre en place une structure pour donner la formation à leurs corps de police, ça pourrait coûter la moitié moins que l'Institut de police. Mais elles n'auront pas la chance de pouvoir l'expérimenter parce qu'on leur dit: Vous allez avoir à payer une participation financière pour supporter l'Institut de police. Et c'est une autre démonstration comme quoi le ministre de la Sécurité publique est un percepteur de taxes au nom du gouvernement pour aller supporter des infrastructures de services existantes qui sont aujourd'hui payées entièrement par le gouvernement.

Donc, c'est une série de mesures qui fait en sorte que c'est les municipalités qui ont et qui auront à expliquer à leur population pourquoi le compte de taxes de monsieur, madame ou du couple aura une augmentation de 70 $, 80 $, 150 $, 200 $ sur le compte de taxes à venir. Et ça, si vous pensez, M. le Président, que ça sécurise les résidents propriétaires des municipalités dans l'ensemble des milieux du Québec, des petites municipalités comme des centres urbains, eh bien, non. Il s'agit de regarder aller le gouvernement depuis quelques mois, plus précisément depuis un an et demi surtout. Vous avez eu des mesures. Vous avez eu le ministre de la Santé qui a été intraitable dans la réorganisation des services de santé au Québec. Personne ne pouvait, en fait, ne serait-ce que les régies de la santé dans certaines occasions, même tenter de négocier avec le ministre de la Santé: imaginez la population ou les petits groupes organisés.

On en a une belle démonstration ces jours-ci. Il y a des groupes organisés pour la défense de certaines personnes qui sollicitent justement d'être acceptées ou d'être inscrites au niveau de certains médicaments – et je n'ai pas à tous les nommer, je pense à des groupes très sympathiques – mais le ministre fait la sourde oreille et n'a absolument pas l'intention de modifier quoi que ce soit bien que l'ensemble de la population semble très favorable à des ouvertures comme celles-là.

M. le Président, je pense que, quand vous vivez dans un milieu comme le mien et un milieu comme le vôtre et de plusieurs de nos collègues qui sont ici présents, c'est décevant de voir que des structures comme nos municipalités, nos MRC, les commissions scolaires, et je pourrais nommer d'autres groupes – je pense qu'au niveau de la santé, c'est une structure qui est légèrement différente – elles en sont rendues qu'elles s'attendent à n'importe quoi, jour après jour, de ce qui peut venir du gouvernement. Elles ne peuvent même plus prévoir.

Hier soir, la plupart de nos municipalités, et aujourd'hui encore – je pense que c'est des débats d'actualité dans chacune de nos municipalités – hier soir parce que c'était le premier lundi du mois, où la plupart des municipalités avaient leur assemblée régulière, je dois vous dire que ce qui se disait – on m'en a informé aujourd'hui – ce qui se discutait dans l'ensemble des municipalités, c'est: Qu'est-ce qui va nous arriver la semaine prochaine? Même si on fait notre budget aujourd'hui, qu'est-ce qui va nous arriver comme déclaration ministérielle, comme celle qu'on a vue la semaine dernière, je pense mercredi ou jeudi passé, où on leur annonçait: À partir de minuit ce soir 76 000 000 $ seront dorénavant à vos frais, seront votre facture. Qu'est-ce qu'on aura en janvier, février ou mars, dépendamment des négociations avec la fonction publique?

(23 heures)

Si ça réussit, comme le prévoient le premier ministre et l'ensemble des ministres du gouvernement... si ça ne réussit pas comme prévu, il y aura probablement un manque à gagner. Est-ce que c'est, à nouveau, les municipalités qui feront les frais de la facture?

Donc, M. le Président, je trouve ça très déplorable, parce qu'on crée un climat de méfiance au sein des municipalités, on crée un climat où les gens, les administrateurs publics, municipaux sont très déçus du rôle qu'ils jouent, au nom de leur population, d'une part. Plusieurs d'entre eux se disent: Si on a à administrer dorénavant des services publics, dans chacune des municipalités, avec des augmentations de la sorte tous les ans, du moins ce qu'ils viennent de vivre dans les deux dernières années, ça devient invivable, il n'y a plus d'intérêt pour nous. Et ils sont à se demander: Est-ce que ce n'est pas une stratégie pour amener à faire vivre un certain écoeurement aux élus municipaux, pour faciliter la fusion de certaines municipalités?

Aujourd'hui, ce qu'on entend dans nos municipalités, ça va jusque-là, même. Est-ce que ce n'est pas une stratégie, qu'on pourrait dire? Dans certains cas, on pourrait dire subtile, mais elle n'est absolument pas subtile. Évidemment, elle est très irrespectueuse envers les élus municipaux, et je souhaite que non. Si jamais c'était le cas, M. le Président, on aurait tous à en souffrir, parce que vous auriez un désintéressement, et déjà ça se fait sentir, pour les citoyens et les citoyennes de chacune de nos régions d'occuper des postes d'administrateurs publics au sein de nos municipalités.

Donc, comme l'ensemble de mes collègues ici de l'opposition, on se devra, M. le Président, de voter contre ce projet de loi pour démontrer à notre population qu'au moins nous comprenons que, dans l'espace de quelques mois, on en demande trop à nos municipalités, à nos citoyens payeurs de taxes. Et on aura à voter non sur le projet de loi n° 77. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Je cède maintenant la parole au député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Je vous remercie, M. le Président. Si ce soir nous sommes en train de discuter du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, c'est parce que l'opposition trouve que cette pièce de législation, qui est très importante pour l'ensemble de nos municipalités, ne correspond pas à la réalité, ne correspond pas à ce à quoi nous nous serions attendus.

En effet, M. le Président, je ferai rapidement un rappel pour les membres de cette Assemblée qui ne le sauraient pas, ou nos téléspectateurs, les citoyens et citoyennes du Québec qui nous écoutent, et des fois nous ne savons pas combien ils peuvent être nombreux à nous écouter.

M. le Président, cette loi va changer la loi actuelle. Actuellement, la Sûreté du Québec dessert environ 1 248 municipalités au Québec, ce qui représente à peu près 24 % de la population, et la Sûreté compte 4 100, 4 200 policiers, actuellement, qui sont... bien sûr, appartiennent au syndicat l'Association des policiers provinciaux du Québec, mais aussi il y a 1 963 patrouilleurs. Ça, c'est pour faire un peu le tableau de la Sûreté du Québec. On sait que la présente Sûreté du Québec est un corps de police de haute qualité. Certains détracteurs pourront, à l'occasion, essayer de le dénigrer, mais nous savons que, dans cette matière qui est de maintenir la sécurité publique, maintenir la probité, faire en sorte de réprimer trafics, vols, violence, crimes, M. le Président, il ne peut avoir, même si c'est toujours une recherche de la part des intervenants des corps policiers, toujours 100 % de réussite, mais on doit y tenir pareil. Il n'en reste pas moins que la Sûreté du Québec – et je vais le dire, moi, parce que, ayant voyagé beaucoup, ayant vécu dans d'autres pays, j'ai vu d'autres corps policiers, d'autres organisations – il faut dire que la Sûreté du Québec nous fait généralement honneur, à nous les Québécois, et rend les services pour lesquels elle est payée, et mérite la confiance, en général, des Québécois et des Québécoises.

M. le Président, ceci étant dit, il n'en reste pas moins que le gouvernement, lorsqu'il décide certaines modifications, doit tenir compte des réalités. En effet, actuellement, selon la loi, M. le Président, les municipalités qui ont une population égale ou supérieure à 5 000 habitants doivent maintenir leur propre corps de police ou alors conclure une entente avec les autres municipalités avoisinantes. En d'autres termes, une petite municipalité qui aurait 4 000 ou 3 000 habitants, voisine d'une municipalité qui en aurait 6 000, 7 000, 8 000 ou plus que ça, peut s'associer avec et créer un corps de police qui couvrira l'ensemble des deux municipalités ou donner un contrat de services au corps de police de la municipalité voisine. Et, pour celle qui a moins de 5 000 habitants, actuellement elle peut avoir son corps de police, elle aussi, ou alors passer une entente avec un autre corps de police, ou s'en remettre aux services de la Sûreté du Québec et ainsi assurer la sécurité de ses concitoyens.

Le projet de loi, lui, qui est déposé devant nous, le projet de loi n° 77, M. le Président, actuellement il obligera les municipalités de moins de 5 000 habitants à conclure une entente avec la Sûreté du Québec pour assurer la sécurité sur leur territoire. En faisant cela, il enlève la possibilité, il enlève le libre choix de s'entendre avec un corps de police municipal voisin, à moins – est-il écrit dans le projet de loi – que le ministre l'autorise. Et là on voit l'ingérence que le ministre veut avoir dans la gestion des municipalités du Québec. Pourquoi le ministre devrait-il être la partie qui va trancher, dire oui ou non dans la décision d'une municipalité dûment élue au suffrage universel, avec ses conseillers municipaux, avec ses maires élus par la base, par la population? Pourquoi est-ce que c'est le ministre qui devrait décider? Je pense, M. le Président, que déjà là, au départ, nous avons une disposition dans cette loi qui ne correspond pas à la réalité des petites municipalités du Québec, soit celle de leur libre décision de s'autogérer elles-mêmes.

M. le Président, pour les autres municipalités, bon, ça reste la même chose, et il n'y a pas là matière à discuter. Alors, nous passerons rapidement là-dessus. Et, si une municipalité refuse de se conformer à cette loi, eh bien, la Sûreté du Québec sera automatiquement responsable. Et, bien sûr, il y aura une facture, car ne pensons pas que ses tarifs seront gratuits. Alors, là, on voit encore que, bien sûr, ce n'est pas pour faire en sorte de respecter le libre arbitre, la libre autonomie des municipalités au Québec. Bon.

Il y a quelque chose aussi dans le projet de loi qui me frappe et qui m'a impressionné, parce que, M. le Président, on dit qu'un fonds des services de police sera mis...

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Vous avez sûrement compris que je requiers le quorum. On est à peine six, dont deux libéraux.

Le Vice-Président (M. Pinard): Si vous me permettez, on n'a pas tout à fait le même cours de base en mathématiques parce que, moi, j'en compte neuf. Mais vous avez parfaitement raison, par contre. Veuillez appeler les députés.

(23 h 8 – 23 h 11)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, puisque nous avons retrouvé notre quorum, M. le député de LaFontaine, si vous voulez bien poursuivre. Vous avez six minutes d'écoulées à votre temps d'intervention qui est d'un maximum de 20 minutes, donc il vous reste 14 minutes. M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, une particularité de ce projet de loi, c'est qu'on y retrouve la création d'un fonds des services de police qui sera mis en place pour le financement des biens et services fournis par la SQ aux municipalités, et, M. le Président, bien sûr, il est mentionné que les surplus de ce fonds seront versés au fonds consolidé de la province, c'est-à-dire dans le fonds du Conseil du trésor, tel que le déterminera le gouvernement. Et là, M. le Président, nous retrouvons encore une fois, dans ce projet de loi là, un fonds dédié. On le retrouve dans plusieurs projets de loi de ce gouvernement, c'est-à-dire que de plus en plus, pour financer les activités de différents secteurs de notre société, on lève des taxes, des tarifs... ou des tarifs, M. le Président, indépendamment des impôts que les Québécois et les Québécoises paient.

On l'a vu dans le projet de loi sur les normes du travail, M. le Président, où la cotisation qui est payée par les employeurs pour administrer la Loi sur les normes du travail, cette cotisation servira maintenant à financer une partie importante du Bureau du Commissaire général du travail alors qu'elle n'était pas créée pour cela. Antérieurement, le Bureau du Commissaire général du travail, lui, était financé par les crédits du ministère, donc par les taxes et les impôts. Mais, vu qu'on a coupé dans ce ministère-là, on va chercher maintenant l'argent dans un autre secteur pour lequel il n'était pas fait.

On voit à peu près la même chose, M. le Président. Lorsque je vois qu'un fonds des services de police sera mis en place pour le financement des biens et services fournis par la SQ aux municipalités et qu'en plus il est précisé que les surplus de ce fonds seront versés au fonds consolidé de la province, c'est la même chose, M. le Président, c'est le même principe. Ce gouvernement est en train de tarifer, c'est-à-dire de faire payer par les utilisateurs les services qui, avant, étaient payés par leurs impôts. Car, en effet, les services de la Sûreté du Québec étaient antérieurement payés par les impôts des Québécois, comme le service des normes du travail et du Bureau du Commissaire général du travail. Et là on va mettre, encore une fois, un nouveau système de financement.

On nous dira que, non, aujourd'hui, ce n'est pas grand-chose, peut-être quelques transferts ou quelques augmentations de taxes quelque part, mais on sait que lorsqu'un gouvernement introduit de nouveaux systèmes de taxation et de financement, immanquablement, quel que soit le gouvernement, gouvernement après gouvernement, les taxes ne font qu'augmenter et c'est le citoyen qui paie. Alors, on devrait s'attendre, M. le Président, si on est pour faire payer les fonds de fonctionnement des services de police pour les municipalités qui auront affaire avec la SQ, eh bien, il me semble qu'on devrait à ce moment-là avoir des conséquences au niveau des impôts ou des sommes qui sont versées à la SQ, ce qui ne sera pas le cas.

M. le Président, un certain nombre de groupes, d'organismes très importants dans ce milieu s'opposent à ce projet de loi là ou posent de sérieuses questions, demandent à être entendus, demandent à ce que l'on revoie cette loi de la police, car, en effet, les municipalités de moins de 5 000 habitants ne veulent pas être obligées d'utiliser les services de la Sûreté du Québec. On ne peut pas les blâmer. Certaines d'entre elles veulent faire affaire avec d'autres corps policiers. Certaines d'entre elles veulent avoir leur propre système de police.

Actuellement, je pense que la Sûreté du Québec, dans les 1 438 municipalités dans lesquelles elle fait affaire, fait un excellent travail. On se demande si le gouvernement ne cherche pas, par cette loi, à aller chercher une partie de la facture qui actuellement est payée par les taxes et les impôts des Québécois dans les municipalités, faisant payer doublement, c'est-à-dire augmenter vos taxes pour payer la Sûreté, qui est déjà payée par vos impôts, taxes de vente et taxes provinciales. Voilà, M. le Président, ce à quoi on assiste.

On parle d'une facture de 40 000 000 $. C'est ça la vraie raison. La loi sur la police, ce n'est pas une loi pour restructurer, pour refaire, pour réorganiser le système de sécurité et de prévention au Québec, c'est une loi pour aller chercher de l'argent, pour faire financer. Ce gouvernement ne pense qu'à couper, à chercher des taxes nouvelles et à financer. Il ne pense pas à redéployer, à recréer, à faire évoluer les systèmes en tenant compte de l'évolution de notre société.

On sait, M. le Président, que des gens, des organismes très importants s'y opposent. L'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, elle est contre. Ça représente les petites municipalités rurales en particulier. Que disent-elles? «Le projet de loi n° 77 est inacceptable. Nous voulons le respect de l'autonomie municipale. Nous voulons un délai pour nous permettre de nous regrouper entre petites municipalités pour ne pas être obligées de subir cette loi-là.»

M. le Président, il y a aussi dans ce projet de loi l'obligation pour les municipalités, jusqu'à concurrence de 20 % au niveau de la formation, de financer l'Institut de police de Nicolet. Les municipalités s'y opposent, bien sûr, et on ne peut les en blâmer, car elles font chez elles beaucoup de formation. Les corps de police, M. le Président, que ce soit Montréal ou d'autres, assurent la formation continuelle de leur propre corps policier. Est-ce qu'on fait payer par les entreprises les cégeps et les universités de Montréal ou de la province? Non. Alors, pourquoi aller faire payer par les municipalités l'école qui va former des policiers? Lorsqu'un jeune étudiant fait une technique policière au cégep de Rosemont ou au cégep de Saint-Laurent, est-ce qu'on oblige les municipalités à donner 1 % pour payer le cégep? Non. Alors, pourquoi les obliger à payer l'Institut de police? C'est un peu paradoxal, parce que c'est à peu près les mêmes cours qui se donnent d'un bord ou de l'autre. L'UMRCQ pense que ce projet de loi ne règle absolument rien en ce qui concerne les coûts et l'organisation policière.

L'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, les plus grosses villes, elles disent: «Le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'inéquité fiscale quant au financement des coûts de la police.» Il faut les croire, M. le Président, ce ne sont pas les seuls qui le disent. Et que disent-elles? «Le financement de l'Institut de police de Nicolet n'a jamais été discuté.» On ne les a même pas consultées. On a décidé que ça serait comme ça. Aucune consultation.

Et que veulent-elles? Elles veulent avoir l'autonomie municipale. Les municipalités veulent être capables de s'organiser elles-mêmes quant à leur propre police. Et c'est tout à fait raisonnable. C'est tout à fait logique, M. le Président. Elles veulent être capables de s'entendre, de décider elles-mêmes si elles veulent ou non faire affaire avec un autre corps de police ou avec la Sûreté du Québec. Et qui pourrait les en blâmer? Parce que ce sont elles qui vont devoir défrayer les coûts, qui vont devoir supporter la qualité ou la non-qualité des services de police.

Je rappellerai que les municipalités sont gérées par des gens qui sont élus au suffrage universel, par la base de la société. Il y a des maires, des conseillers municipaux. Je pense qu'on doit reconnaître que ces gens-là généralement administrent raisonnablement et d'une façon très sérieuse leur municipalité.

(23 h 20)

La Communauté urbaine de Montréal, M. le Président, elle est contre, elle aussi. Alors, elle demande de ne pas adopter ce projet de loi, de le retarder, de ne pas accepter ça. Ça va lui coûter une facture de 2 200 000 $ pour le financement de l'Institut de Nicolet. Montréal va payer à peu près 53 % des coûts de cette facture de Nicolet. Il n'y a eu aucune consultation, là encore, avec la Communauté urbaine de Montréal. Est-ce normal? Pourtant, le ministre, qui a été lui-même conseiller municipal de Montréal, qui a été élu au nom de la démocratie à Montréal, de la consultation, qui a siégé comme un des membres de la Communauté urbaine de Montréal, il n'a pas pris la peine de les consulter. Trouvez-vous ça normal, vous? Double langage, qu'on tenait à Montréal puis qu'on tient ici, à Québec.

M. le Président, la Communauté urbaine de Montréal, ils veulent des états généraux afin de revoir la structure complète des services policiers au Québec et puis de faire une réflexion sur la formation policière. C'est là, je pense, la demande fondamentale. Il est temps, au Québec, qu'on fasse des états généraux ou qu'on fasse une vaste consultation, une vaste discussion, un forum sur l'organisation policière. M. le Président, si nous ne le faisons pas, nous aurons certainement à porter pour l'avenir les problèmes qui vont être générés par ces changements à la pièce, changements cosmétiques qui sont faits seulement en fonction de sauver de l'argent ou de commandes du Conseil du trésor. C'est là le problème. C'est la Communauté urbaine de Montréal qui le demande, à peu près 3 000 000 d'habitants, 2 000 000 et quelques 100 000 habitants, M. le Président.

Un autre joueur important dans la sécurité publique au Québec: la Fraternité des policiers de la CUM. Elle est contre, M. le Président, elle aussi. Elle veut un sommet sur la sécurité publique au Québec et l'organisation policière, et on les comprend, parce qu'ils gèrent une grande partie des problèmes de sécurité dans la province. Criminalité, trafic de drogue, violence conjugale, fraude fiscale, fraude commerciale et tout ce qui touche, M. le Président, la délinquance est en grande partie concentré dans cette grande ville, cette grande métropole qu'est Montréal, qu'est la Communauté urbaine de Montréal.

M. le Président, une autre: l'Association des policiers provinciaux du Québec. Ils se questionnent, ils se demandent combien ça va coûter, tout ça. Est-ce qu'ils auront les effectifs pour assumer la mission qu'on veut leur donner? Autre question, M. le Président. La Fédération des policiers du Québec, ils veulent laisser le choix aux municipalités, ils veulent des états généraux sur la police. J'ai rencontré, la semaine dernière, M. le Président, des chefs de police, et je dois dire que c'est ce qu'ils me disaient aussi. L'Association des directeurs de police et pompiers du Québec, ce qu'ils veulent, ce qu'ils disaient: Nous voulons des regroupements des petits corps de police. C'est ça que nous voulons, c'est ça que nous demandons.

Alors, M. le Président, je crois que l'ensemble des intervenants qui sont confrontés à cette loi, qui vont devoir vivre avec, qui vont devoir gérer les situations qui vont être créées par cette loi, l'ensemble des intervenants émettent des réserves sérieuses quant à la pertinence du projet de loi et quant à ses buts avoués. Et que demandent-ils? M. le Président, ils demandent soit des consultations, soit des états généraux, soit une vaste réflexion sur les services de police au Québec dans son ensemble, ou soit un forum, ou autre exercice, ou mécanisme de consultation ou de discussion.

Alors, que nous reste-t-il à faire, M. le Président, ici, dans cette Chambre? Ou adopter ce projet qui n'est pas un projet de loi qui vise à favoriser, ou à remoderniser, ou à refaire en sorte que nos services policiers soient plus adéquats et collant mieux à la réalité de l'an 2 000 et des prochaines années... Ce qu'ils veulent, M. le Président, c'est un projet de loi fiscal.

Aussi, étant donné que l'ensemble des corps policiers de la Communauté urbaine de Montréal, de l'UMRCQ, de l'UMQ sont opposés à ça et demandent plus de temps pour la réflexion, je ferai en sorte, M. le Président, de vous demander, en vertu de l'article 100 de notre règlement, de suspendre notre débat, de reporter notre débat, afin de donner au ministre le temps d'aller rencontrer ces gens-là, d'aller parler avec eux et d'aller écouter ce qu'ils ont à lui dire, parce qu'ils ont certainement des choses à lui dire, et qu'il revienne en Chambre, bien sûr, avec des changements, ou des idées nouvelles, ou un consensus avec l'ensemble de ces intervenants.


Motion d'ajournement du débat

Alors, voilà, M. le Président, je fais donc motion, en vertu de l'article 100, que nous mettions fin à cette séance, pour permettre au ministre, bien sûr, de retourner rencontrer les gens, et que nous reprenions plus tard, à une date qui vous conviendra, ou qui conviendra au gouvernement, pour reprendre ce débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Alors, en vertu de notre règlement: «L'ajournement du débat peut être proposé à tout moment de la séance. Il ne peut l'être qu'une seule fois, sauf par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement. Une telle motion ne requiert pas de préavis et ne peut être amendée.»

L'article 101, Temps de parole: «L'auteur de la motion et un représentant de chaque groupe parlementaire ont chacun un temps de parole de 10 minutes. L'auteur de la motion a un droit de réplique de cinq minutes.»

Et l'article 102, Reprise du débat: «Si la motion est adoptée, son auteur est entendu le premier à la reprise du débat. Il peut choisir de reporter son intervention si elle n'était pas commencée au moment de l'ajournement. Dans le cas contraire, il doit la poursuivre dès la reprise, sinon elle est considérée comme terminée.»

Alors, M. le député de LaFontaine, vous avez un temps de parole de 10 minutes. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. En effet, si j'ai invoqué l'article 100 de notre règlement, c'est, comme je le disais en l'invoquant quelques minutes précédant cette reprise des travaux, qu'il semble, à la lecture des réactions de l'ensemble des intervenants policiers au Québec, soit la Fraternité des policiers de Montréal, de la Communauté urbaine de Montréal, grand corps de police réputé quasiment à travers le monde, dans la francophonie en particulier, car vous savez que ce sont des gens qui connaissent ce dont ils parlent... Nous avons des policiers de la Fraternité des policiers de Montréal, actuellement, qui sont en Haïti, qui sont en Bosnie, qui sont au Rwanda, à différents endroits à travers le monde. Nous avons de nos policiers qui collaborent, à travers l'ensemble des grands corps policiers internationaux, dans la lutte contre le grand banditisme, dans la lutte contre la répression des stupéfiants; une fraternité qui comprend des gens, des policiers dévoués et sérieux, au service de leurs concitoyens. Et que disent-ils, ces gens-là? On ne nous a pas écoutés. Le ministre qui, lui-même, est issu de la Communauté urbaine de Montréal, ancien conseiller municipal de Montréal, ne nous écoute pas. Il se fout de nous autres. Alors, M. le Président, nous demandons à ce qu'il nous entende, nous demandons un sommet, nous voulons être partie prenante de cette réorganisation, si tant soit-il qu'il y en a une au Québec au niveau des services de police, nous voulons être partie prenante ou être des acteurs impliqués là-dedans. Le ministre ne les écoute pas.

L'Association des policiers provinciaux du Québec s'interroge fortement. La Fédération des policiers du Québec, l'ensemble des corps policiers du Québec, l'ensemble, représenté par M. Martin, président de la Fédération des policiers du Québec, un homme éminemment connu au Québec, un homme sérieux, qui a à coeur le maintien d'une qualité importante de services policiers au Québec, il veut des états généraux sur la police. En clair, ce qu'il dit: Faites-nous participer, nous aussi, à cette refonte de la Loi de police, de l'organisation policière. Malheureusement, force est de constater que le ministre fait la sourde oreille. Puis, qu'est-ce que ça va amener, s'il fait la sourde oreille, M. le Président? Ça va amener qu'il va obliger les gens à vivre avec une loi qui ne fera pas leur affaire, les obliger à payer des coûts pour financer les services publics que son gouvernement veut couper, en disant qu'il n'augmentera pas les impôts, mais il va chercher par en arrière les taxations, les tarifications. Ces gens-là vont être obligés d'appliquer ou de vivre dans un système dans lequel ils ne sont pas partie prenante. Et tout le monde sait ici... Il s'agit de voir en cette Chambre. Nous, on fait une réforme parlementaire, une réforme des horaires de l'Assemblée nationale. Nous sommes consultés, on nous demande notre opinion, on discute, le président soumet une proposition, les leaders, les whips en parlent, ça discute. On va finir, un jour, par avoir une réforme qui va faire consensus de l'ensemble des députés, des anciens comme des nouveaux, de ceux qui travaillent fort comme de ceux qui pensent que leur travail est à l'extérieur, un peu plus au niveau du terrain que de la Chambre, mais qui fera consensus. Et ça permettra, M. le Président, de le vivre. Ça vous permettra, à vous comme président, de l'appliquer, avec la collaboration de chacun pour une meilleure efficacité.

(23 h 30)

Bien, c'est ça qu'ils demandent, les corps de police. Ils disent: Avant de toucher à ça, voulez-vous donc nous consulter? C'est nous autres qui allons devoir vivre avec ça. C'est nous autres qui allons devoir l'appliquer. On ne les écoute pas, on fait la sourde oreille; ils ne sont pas crédibles, ces gens-là. Lorsqu'on a parlé du projet de loi n° 27, dont j'étais responsable comme porte-parole de l'opposition, en ce qui concerne l'arbitrage obligatoire et la médiation pour les corps policiers et pompiers du Québec, même chose, ils avaient demandé à être entendus. Ils ont dit: Nous voulons aller en commission parlementaire pour faire valoir au ministre des points et des dimensions qu'il n'a peut-être pas saisis dans le projet de loi, que les technocrates qui l'ont écrit n'ont pas saisis ou n'ont pas voulu voir et que le ministre ne comprend pas.

Non, on leur a refusé, comme si nos policiers, nos pompiers étaient des citoyens de second ordre au Québec. Bien, je dis non, M. le Président. Ce sont des citoyens de premier ordre. Ce sont des citoyens qui ont le respect de leurs concitoyens puis qui assurent notre sécurité et qui assurent la quiétude puis la paix dans notre société. On se doit au moins ça, de les rencontrer et de les écouter, si on veut avoir leur collaboration. Ce n'est pas ce que le gouvernement fait actuellement. On les néglige, M. le Président, on les méprise dans leurs demandes.

M. le Président, l'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, la Communauté urbaine de Montréal, ce n'est pas des joueurs mineurs sur le terrain municipal; ça représente l'ensemble des 1 500 ou 1 600 municipalités qu'on a au Québec. Ils demandent aussi des états généraux, des consultations ou des forums avant d'adopter cette Loi de police n° 77. Ils le demandent. Non seulement il y a ceux qui vont l'appliquer qui le demandent, mais il y a ceux qui vont l'administrer, la gérer, soit les élus municipaux, ou les administrations municipales, ou les regroupements de municipalités.

Bien non. Le ministre, M. le Président, semble passer par-dessus ça, flotter dans une espèce d'indifférence qui révolte une partie de ces gens-là qui nous le font savoir. Manque de sensibilité envers cette obligation que nous avons, nous, les élus, de consulter, d'écouter, de parler avec les gens que nous administrons, avec les gens à qui nous allons demander de poser, pour leurs concitoyens, des gestes, des actes dans leurs activités professionnelles. Ce qui est bon pour nous, à l'Assemblée, pour réformer notre code parlementaire ou réformer de simples heures de siège, ici, et d'audiences, n'est pas bon pour des policiers, des corps de police, n'est pas bon pour des municipalités et leurs dirigeants? Deux poids, deux mesures!

À ce titre-là, M. le Président, vous pourriez vous lever en cette Chambre et décréter unilatéralement les nouveaux horaires auxquels nous allons siéger, en disant: Moi, je pense que c'est bon pour vous, donc ce sera bon pour vous, ça va sauver tant d'argent, et puis allons-y. Bien, c'est le même principe dans ce projet de loi là. Je pense qu'on passe à côté, on passe à côté. Autant il est important, pour une réforme parlementaire où on parle de démocratie, que les députés puissent se prononcer et intervenir quant à leur exercice dans cette Chambre de la démocratie et des règles qui doivent la régir, autant la même chose, M. le Président...

Et je vois le ministre qui parle avec un député; je pense qu'il serait intéressant qu'il écoute ce que j'ai à dire, ce que les députés ont à dire. M. le Président, je m'excuse, mais le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques fait du chahut, et j'aimerais que vous le rappeliez à l'ordre.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de LaFontaine, vous me permettrez de vous mentionner que vous avez passablement tiré la ligne, puis le saumon a sauté. Alors, je vous prierais de bien vouloir continuer.

M. Lefebvre: M. le Président, le député de...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition, je tiens à vous mentionner qu'hier nous avons eu sensiblement les mêmes interventions du député de LaFontaine. Or, M. le député de LaFontaine, je vous prierais de vouloir demeurer à votre allocution. Et, quant à la discipline à l'intérieur de cette enceinte, si vous le permettez, je vais essayer de la maintenir et je vais essayer de faire le mieux possible afin que nos débats demeurent dans un contexte tout à fait agréable à la fois pour ceux qui ont à les faire, à la fois pour ceux qui ont à les écouter également et pour nos téléspectateurs, même si actuellement nous sommes quand même rendus à une heure passablement tardive. Alors, M. le député de LaFontaine, si vous le permettez...

M. Lefebvre: M. le Président, si vous permettez...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...nous allons vous écouter sur votre motion d'ajournement.

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: ...ou de directive. M. le Président, est-ce qu'on s'entend pour convenir que l'article 32, qui parle du décorum et, entre autres, de l'ambiance à l'intérieur de l'Assemblée, surtout pour ceux et celles qui s'adressent à vous, peut être soulevé par n'importe quel député? Et c'est exactement ce que le député de LaFontaine a fait à l'égard du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Ceci étant dit, vous avez, vous, par la suite à décider s'il avait raison ou pas de le faire. Je ne pense pas qu'on puisse cependant lui reprocher de l'avoir soulevé, M. le Président. S'il s'est trompé, vous lui dites, puis ça s'arrête là.

Le Vice-Président (M. Pinard): Parfait. Alors, j'apprécie actuellement la façon dont les députés se comportent en cette enceinte. C'est agréable de travailler dans un climat semblable et c'est agréable également de vous écouter, M. le député de LaFontaine. C'est ce que je fais d'une façon assidue et j'apprécierais maintenant que vous complétiez. Il vous reste deux minutes, c'est-à-dire 1 min 52 s sur votre motion d'ajournement. Alors, M. le député de LaFontaine, s'il vous plaît!

M. Gobé: M. le Président, je comprends très bien votre souci du décorum et du respect des députés en cette Chambre. Il me semble que, si les députés ont des choses à dire, il est possible pour chacun d'entre nous de se lever, de prendre le micro et de déclarer ce qu'on a à dire sur un projet de loi, sur le fond ou sur la forme d'un projet de loi. Et je pense que, lorsque des bruits, ou des gestes, ou des ricanements sont proférés en cette Chambre, ils peuvent à l'occasion envoyer des messages au député qui parle qui sont non conformes à l'esprit de ce que vous avez expliqué, il y a quelques minutes, d'un bon déroulement des débats de cette Assemblée.

Et moi, personnellement, M. le Président, en 11 ans de siège en cette Assemblée, j'ai toujours respecté les députés qui parlaient puis qui avaient des choses à dire, et particulièrement lorsque les gens d'en face étaient en opposition, n'en déplaise aux gens qui sont assis, des fois, à être obligés d'écouter parce qu'ils sont d'un gouvernement qui oblige à passer des projets de loi qui ne font pas toujours l'affaire de tout le monde. C'est notre privilège, M. le Président, comme députés.

M. le Président, pourquoi je demande un ajournement des débats? C'est justement pour ces raisons-là. Lorsque certaines personnes ne sont plus capables de comprendre qu'il y a des arguments qui plaident pour qu'un projet de loi ne soit pas adopté ou que le ministre retourne faire des consultations, qu'il écoute les groupes populaires, qu'il écoute les gens qui sont concernés directement, soit les corps de police, les représentations des municipalités, il est normal à ce moment-là que nous disions: Bien, écoutez, peut-être que le débat devrait maintenant s'arrêter pour donner au ministre la chance d'aller reconsidérer sa décision, d'aller rencontrer les gens, faire en sorte d'établir une paix sociale, un consensus avec les gens, car une loi comme celle-là, adoptée sans consensus, elle ne pourra pas fonctionner, elle ne marchera pas. Alors, en conséquence, M. le Président, je réitère, bien sûr, ma demande d'ajournement des débats de cette séance.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Je cède maintenant la parole au député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Vous avez un temps de parole de 10 minutes, M. le député.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Depuis les débuts de la session intensive, depuis hier, c'est le député de LaFontaine qui conduit le choeur des vierges. Nous l'avons entendu, hier soir, dans sa défense pathétique des droits. On se serait attendu, à un certain moment, à ce qu'il oublie son passé, comme il le fait, et qu'il se lève de son banc et se mette à entonner L'Internationale socialiste. On aurait cru entendre un brave camarade de la CGT, ou de Force ouvrière, ou de je ne sais quel autre groupement d'inspiration léniniste-trotskiste.

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, on est à débattre d'une motion prévue à l'article 100, à savoir: Est-ce qu'il y aurait lieu d'ajourner le débat sur le projet de loi n° 77? Je comprends que c'est le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui a été désigné pour répondre à nos arguments. Maintenant, à date, tout ce qu'il a fait, c'est des cabrioles, là. Est-ce qu'il pourrait arriver à la pertinence de la question et répondre au député de LaFontaine sur le fond de la question? On demande l'ajournement du débat.

(23 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Frontenac, je tiens à vous mentionner que le temps de parole du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques est de 10 minutes et qu'actuellement, à mon chronomètre, j'ai 45 secondes d'utilisées. Alors, d'après moi, il peut au moins bénéficier d'un préambule correspondant à environ 20 % de son temps alloué avant d'arriver à la pertinence. Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: M. le Président, je vous remercie de me rétablir dans mes droits. Je comprends la consternation qui vous animait lorsque vous avez entendu l'intervention du leader adjoint de l'opposition officielle. M. le Président, il n'est pas question d'interrompre ce débat et cette loi doit être votée. Je vais donner les raisons pour lesquelles cela doit se faire et j'ose espérer que le leader adjoint de l'opposition officielle les écoutera pour son bénéfice.

M. le Président, les municipalités sont en train, d'une part, de confectionner leur budget. Donc, je pense qu'il faut que la loi soit votée de façon à ce qu'elles puissent en tenir compte dans la préparation du budget qu'elles sont en train de faire. Et vous devez comprendre que, dans une municipalité, ce n'est pas une petite caisse que l'on gère, mais ce sont des montants qui peuvent aller même à plusieurs millions de dollars. Donc, je pense que c'est un minimum de respect, d'une part.

Deuxièmement, M. le Président, vous savez comme moi qu'il existe des municipalités où il y a des corps de police qui n'ont aucun policier. Alors, vous allez admettre avec moi que la sécurité du public est en danger, qu'elle est menacée et qu'une situation comme celle-ci ne peut perdurer; d'où, M. le Président, l'urgence d'agir. C'était la volonté ferme du ministre de la Sécurité publique, mon collègue et voisin de Mercier, d'agir. Il l'a fait, M. le Président. Il a consulté, quoi qu'en disent les députés de l'opposition et notamment celui qui conduisait ce choeur dont je parlais tantôt, le député de LaFontaine.

M. le Président, il nous faut également agir puisqu'il y a pagaille, et pagaille instaurée par ces gens d'en face, ces gens d'en face qui n'ont pas encore compris les vertus salvatrices et rédemptrices de l'opposition. Ils n'ont pas encore compris les vertus de l'opposition. Ils n'ont pas encore eu l'occasion de réfléchir sur les torts et les dommages qu'ils avaient causés au Québec durant les neuf ans où ils ont été au gouvernement. Ces torts, ils sont de tout ordre: ils sont politiques, ils sont moraux, ils sont financiers et ils sont également dans le sens policier. Il faut mettre fin à cette pagaille qui existe, M. le Président. Il faut, je le répète, que les municipalités sachent à quoi s'en tenir. Il faut qu'il y ait des corps policiers qui soient structurés comme des corps policiers.

Je suis persuadé, M. le Président, que vous doutez de ma parole quand je vous dis qu'il y a des corps policiers où il n'y a pas de policiers. Le ministre de la Sécurité publique, de son siège, peut vous en donner la preuve formelle. La première fois qu'il m'en a parlé, je vous avoue que j'ai cru que c'était une blague, un humour quelconque, un trait d'esprit. Non, c'est sérieux. Et la population est en droit, chaque soir, nonobstant les cris du député de LaFontaine, d'être capable de s'endormir rassurée, sachant qu'il y a une force de sécurité publique qui veille à son bien-être.

Et voilà un autre endroit, M. le Président, où c'est malheureux que la télévision des débats n'entre pas dans tous les foyers montréalais. Ce député, qui est un député de l'île de Montréal, actuellement ne travaille pas pour sa population. Et sa collègue la députée de Sillery ne travaillait pas, quand elle est intervenue, pour la population de la capitale nationale, pour la population de Québec.

Parce qu'il y a, M. le Président – et vous le savez autant que moi, mais eux ne le savent pas; donc, à travers vous, je le leur apprends – une grave inéquité dans le paiement des services policiers au Québec. Nous, dans la région métropolitaine, assumons des corps policiers et assumons également la sûreté nationale, c'est-à-dire la Sûreté du Québec. Durant ce temps-là, dans les paroisses, dans les villages, eh bien, on n'a rien ou on a la Sûreté du Québec. Ça coûte aux alentours – que le ministre me corrige pour les chiffres – en moyenne 46 $, quelque chose comme cela, alors que nous, sur l'île de Montréal...

Et allez le dire aux contribuables, allez le dire aux contribuables. D'ailleurs, nous allons le dire aux contribuables de Pointe-aux-Trembles que vous ne souhaitez pas alléger leur fardeau fiscal et que vous êtes en faveur de l'inéquité à leur endroit, parce que, nous, ça nous coûte en moyenne quelque chose comme 130 $, si ce n'est pas 140 $. Alors, vous allez comprendre avec moi, M. le Président, que c'est un traitement inéquitable. Le terme le dit bien. Donc, il faut le corriger; sinon, où est cette justice? Elle n'est pas là.

Et puis, M. le Président, ils ont fait des gorges chaudes là-dessus. Nous, un parti soucieux des droits, et notamment votre humble serviteur, eh bien, nous avons compris que, nonobstant les logorrhées qui proviennent de Frontenac, il est normal, il est justifié que, dans ce pays comme dans les autres, un policier puisse s'engager, puisse travailler à la chose publique, s'occuper de la cité, comme disait Platon qui n'est sans doute pas l'auteur préféré des gens d'en face. On vous apprendra qui il était tantôt. Vous allez voir, c'est un auteur contemporain très populaire.

M. le Président, il y a un rapport de la Commission de police, en 1988, qui le demandait. Il y a eu un mémoire de la Fraternité des policiers et policières de la Communauté urbaine de Montréal en 1993, et ils l'ont répété de nouveau. J'entendais le député de Sauvé, tantôt, qui disait: Ils nous ont dit en commission... «Nous», il parlait des membres qui étaient présents à cette commission, parce que, malheureusement, il avait d'autres obligations, il ne pouvait pas y assister. Mais ils étaient très contents de voir que ce gouvernement, ici, voulait respecter leurs droits et leur permettre de participer à la chose publique. Que ce soit au niveau scolaire, que ce soit au niveau municipal, que ce soit au niveau national, ici, au Québec ou encore pour un certain temps au niveau fédéral canadien – ça sera une passade dans leur cas, mais peu importe – c'est un droit fondamental. Et ça, eux le savent. La demande est là depuis fort longtemps, et jamais ils n'y ont répondu.

Ce qui fait, M. le Président, que cette loi, elle est essentielle à trois points de vue. Je les répète en terminant. Actuellement, le régime est inéquitable, notamment pour ceux de la grande région métropolitaine et ceux de la région de Québec. Deuxièmement, il y a des droits qui ne sont pas respectés comme tels, qui sont des droits légitimes de la part des policiers et des policières. Troisièmement, il y a une pagaille telle qu'il nous faut agir au nom de la sécurité publique pour l'ensemble des citoyens et des citoyennes du Québec. Donc, il n'est pas question de reporter quoi que ce soit. Cette loi sera votée. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je cède maintenant la parole au leader adjoint de l'opposition et député de Frontenac. M. le leader adjoint.

Des voix: Bravo!


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, on dit que la définition de la culture, c'est ce qui reste après avoir tout oublié. On réalise, à écouter le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qu'il a perdu la mémoire tout jeune. Égal à lui-même, M. le Président...

(23 h 50)

M. Boulerice: Je n'ai pas perdu la mémoire; je ne suis jamais devenu libéral.

M. Lefebvre: ...il ne manque jamais, dans toutes ses interventions, d'avoir le ton méprisant et hautain pour ceux et celles à qui il s'adresse, que ce soit ici ou en commission parlementaire. Ça dénote également le vide total de son message. Il n'a pas dit un mot de la motion qui est en discussion; il a plutôt, parce que, là, il était coincé, M. le Président... J'aurais aimé – puis ça faisait partie d'ailleurs du propos que je voulais tenir – entendre le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, comme d'autres de ses collègues qui sont membres de la commission des institutions, nous dire ce qu'il pense du projet de loi n° 77. Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, ce n'est pas ce qu'il a fait. Il a à peine effleuré le sujet à l'intérieur d'un petit débat de 10 minutes.

M. le Président, la motion du député de LaFontaine vise essentiellement justement à permettre aux collègues d'en face de s'exprimer. Lorsque le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques disait qu'on ne s'est pas, de notre côté, habitués à l'opposition, je vous dirai que, de leur côté, M. le Président, ils ont compris ce qu'était le gouvernement. Être au gouvernement, pour eux, c'est être condamnés au silence, c'est ne pas avoir le droit d'intervenir, c'est vivre avec la honte de l'incapacité de défendre leur propre gouvernement, c'est se cacher dans le mutisme le plus total.

Il y a eu à date 18 interventions du côté des députés libéraux; du côté des ministériels, on a eu droit évidemment à l'intervention du ministre, parce que, lui, il n'a pas le choix et, s'il avait pu la faire faire par un autre que lui, entre autres un de ses conseillers au «bunker», c'est quelqu'un à côté du premier ministre qui serait venu parler à sa place, comme ça se fait à peu près dans tous ses dossiers. Mais, n'ayant pas le choix, il a livré son intervention ce matin, écrite par un autre. On a eu droit à l'intervention du député de Drummond et du député de Nicolet-Yamaska. Ça s'est arrêté là.

On foule aux pieds la règle fondamentale de l'alternance dans un Parlement. C'est pour ça, M. le Président, que le député de LaFontaine suggère d'ajourner le débat. Pas de reporter l'étude du projet de loi n° 77 à trois mois ou à six mois, ça viendra peut-être plus tard au cours de la présente séance ou demain. L'ajournement du débat, M. le Président, l'objectif de l'opposition, c'est de permettre aux ministériels de prendre quelques jours, d'ici la fin de la session, pour lire le projet de loi. Je suis convaincu qu'il n'y a pas la moitié des ministériels, il n'y a pas quatre députés ministériels qui ont lu le projet de loi, M. le Président. Et, si je demandais au député de Laviolette, le whip en chef du gouvernement: Il y a combien d'articles dans le projet de loi, d'un coup sec... Voyez-vous? Il ne le sait pas. Il ne le sait pas, M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lefebvre: Alors, ce qu'on veut, avec l'ajournement du débat, c'est permettre aux députés ministériels de prendre connaissance du projet de loi, de lire la condamnation extrêmement sévère et unanime de tous ceux et celles qui ont comparu devant la commission des institutions jeudi dernier, M. le Président, permettre à ces députés écrasés devant leur ministre de lire ce que ceux et celles qui sont agressés par leur projet de loi pensent du gouvernement. C'est ça l'objectif et rien que ça. Mais c'est tout ça et c'est beaucoup: permettre aux ministériels de se retrousser un peu, de récupérer un peu d'énergie et de fierté, de défendre leur projet de loi, de se préparer à bien comprendre, à bien réaliser ce qui les attend dans leur comté respectif au cours des prochains jours et des prochaines semaines lorsqu'ils auront à faire face à leurs élus municipaux, lorsqu'ils auront à faire face a leurs voisins et à leurs voisines qui verront leurs taxes foncières grimper de presque le double.

Le ministre trouve ça drôle, M. le Président. Le ministre trouve ça drôle. On lui a expliqué ce matin, il trouvait ça drôle. Il se l'est fait expliquer jeudi dernier par l'UMQ, l'UMRCQ, la fédération des policiers provinciaux, la fédération des policiers municipaux, et il trouvait ça drôle, M. le Président. Il trouve tout drôle. Savez-vous pourquoi? Il ne comprend pas. Il ne comprend pas la portée du projet de loi n° 77 et la conséquence des dispositions contenues dans le projet de loi n° 77.

Le ministre ne comprend pas parce qu'il ne veut pas comprendre, M. le Président. Je n'ai jamais prétendu qu'il ne le pourrait pas s'il faisait abstraction de la commande que le Trésor lui a passée d'aller chercher 48 000 000 $. Peu importe ce qu'on dira, peu importe ce qu'on pensera, M. le Président, le ministre ne réalise pas qu'il est en train de mettre en confrontation la Sûreté du Québec avec les policiers municipaux du Québec, les policiers municipaux partout au Québec, M. le Président. Le ministre ne réalise pas, avec ses collègues, que le monde municipal est en ébullition face à ce projet de loi extrêmement dangereux, M. le Président.

Alors, l'objectif de la motion du député de LaFontaine d'ajourner le débat, c'est de permettre aux ministériels de voir clair, d'évaluer les conséquences du projet de loi n° 77, de bien le lire, de se réunir avec des conseillers du ministre qui vont leur expliquer ce qu'il y a de bon. Il y en a peut-être quelques éléments qui nous ont échappé, M. le Président. Et, vous savez, ce n'est pas facile pour l'opposition de modifier son évaluation du projet de loi parce que le point de vue des ministériels, on ne le connaît pas. Les députés qui voteront, M. le Président, à la première occasion, là, peu importe la question qu'on posera, ce sera oui. À tout ce qui touchera le projet de loi n° 77, M. le Président, ce sera oui, même si on n'a pas compris.

Pourquoi on ne l'a pas compris? Parce qu'on ne l'a pas étudié, M. le Président. On ne se l'est pas fait expliquer. On s'est fait dire: Suivez-nous, suivez-nous, M. le Président, dans la noirceur la plus totale, faites-nous confiance. C'est ça que le ministre leur a dit, parce que quelqu'un d'autre a dit ça au ministre: Faites-nous confiance. Alors, M. le Président, je demande aux ministériels de se ressaisir.

J'aimerais entendre le ministre de la Métropole. Le ministre de la Métropole, M. le Président, je ne sais pas s'il a réalisé que le financement de l'Institut de police, ça coûtera à la ville de Montréal 2 200 000 $. On ne sait pas s'il est d'accord. On ne sait pas ce qu'il pense d'une telle agression de son ministre de la Sécurité publique.

J'aimerais savoir, M. le Président, que pense le ministre des Affaires municipales dont la clientèle... Sa responsabilité, au ministre des Affaires municipales, c'est de défendre les municipalités au Québec. Son collègue, de qui il est complice, va verser sur le dos des municipalités 40 000 000 $. Le ministre des Affaires municipales n'a rien à dire.

Le ministre du Développement des régions, M. le Président: 1 100 municipalités sont attaquées par le projet de loi n° 77, 48 000 000 $ de nouvelles taxes. Le ministre du Développement des régions, qui intervenait lorsqu'il était du côté de l'opposition, le député de Joliette, un bon député. Il a des idées, le député de Joliette. J'aimerais les connaître. Peut-être n'a-t-il pas encore pris connaissance du projet de loi n° 77, M. le Président.

Les secrétaires régionaux, ces espèces de personnages qui existent encore, semble-t-il, qui sont payés... Je ne le sais pas, ils ont une prime additionnelle pour faire quoi? J'en ai un, moi, c'est le député de Lotbinière. C'est un bon garçon. C'est un bon garçon. Je ne sais pas ce qu'il fait, je ne sais pas ce qu'il pense. Il est secrétaire régional. C'est quoi, ça, M. le Président? Il est député, puis, en plus, il est secrétaire régional. Il n'a pas lu le projet de loi n° 77, j'en suis convaincu. Il y a 45 municipalités dans le comté de Lotbinière. Quand elles vont lui tomber sur la canisse, M. le Président...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lefebvre: ...là, il va comprendre ce qu'il y a dans le projet de loi.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lefebvre: Moi, là, mon secrétaire régional, M. le Président, le député de Lotbinière, je trouve que c'est un bon garçon puis je veux le protéger. Avant qu'il s'en retourne dans son comté en fin de semaine, je veux lui donner la chance de comprendre ce qu'il y a dans le projet de loi n° 77.

La seule façon, c'est de dire oui à l'ajournement du débat, prendre quelques jours, réfléchir de leur côté, se réunir, jaser, écouter le ministre et les conseillers du ministre surtout, surtout, puis, après ça, M. le Président, ils vont retrouver un petit peu de courage, là, ils vont s'en venir ici, à l'Assemblée nationale, puis ils vont respecter la règle de l'alternance, M. le Président.

(minuit)

C'est ça, la motion du député de LaFontaine. Je suis convaincu, M. le Président, qu'avec la réplique du député de LaFontaine qui va suivre la mienne, là, ils vont dire: Ça a du bon sens, on va ajourner le débat, puis on va faire autre chose, ou on va aller se coucher. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Alors, vous avez un droit de réplique de cinq minutes, M. le député de LaFontaine.


M. Jean-Claude Gobé (réplique)

M. Gobé: Merci, M. le Président. M. le Président, après avoir entendu les arguments tant du député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, et particulièrement les siens... force est de constater que... Bien sûr, M. le Président, j'espère que l'Assemblée va plutôt comprendre les miens. En effet, M. le Président, vous comprendrez que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, qui était là pour plaider la position opposée à celle de l'opposition, n'a pas su nous convaincre du bien-fondé de continuer à travailler plus tard ce soir sur ce projet de loi là. En effet, M. le Président, il n'a pas su nous démontrer qu'il était nécessaire de continuer à étudier ce projet de loi là sans écouter l'UMRCQ, qui demande des états généraux sur l'organisation de la police au Québec. Il n'a pas su nous expliquer ou nous convaincre qu'il était temps de continuer, de siéger cette nuit, après minuit, à parler de ce projet de loi, alors que la Fraternité des policiers de la CUM – il a parlé de Montréal mais la Fraternité des policiers de la CUM, Communauté urbaine de Montréal, demande des débats et un sommet sur la sécurité publique. M. le Président, la CUM, Communauté urbaine de Montréal, qui va avoir une facture de 1 166 000 $ supplémentaires avec ce projet de loi là, demande de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 77 et veut des états généraux afin de revoir la structure complète des services policiers au Québec et une réflexion de fond sur la formation policière. Il n'a pas su nous convaincre que, vu qu'on ne les a pas entendus, nous devions continuer à étudier ce projet de loi là maintenant, à cette heure-ci.

M. le Président, il n'a pas su me convaincre – non plus, j'espère, les membres de cette Assemblée – que l'Association des directeurs de police et pompiers du Québec, qui s'interrogent grandement sur ce projet de loi là, veulent qu'on continue à en discuter maintenant avant de les rencontrer et de les consulter.

M. le Président, il n'a pas su nous convaincre, non plus – et je n'ai pas entendu parler d'ailleurs de ce volet-là; et là c'est pour nos collègues des régions, des députés en face, là, qui sont majoritairement représentants des régions... L'UMRCQ est contre: Le projet de loi n° 77 est inacceptable et ne règle pas le problème de l'organisation policière et, entre autres, du contrôle des coûts pour les régions et les petites municipalités... s'oppose au financement de l'Institut de police de Nicolet, veut un délai pour le regroupement municipal. Donc, M. le Président, ils demandent d'être entendus, ils demandent des délais.

Le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, malheureusement, n'a pas été capable de nous convaincre de continuer, de l'urgence d'avoir à débattre de ce projet de loi maintenant. Au contraire, M. le Président, je pense que ses arguments nous incitent à comprendre qu'il est temps, peut-être, de surseoir pour quelques heures, quelques jours peut-être, jusqu'à demain ou après-demain, pour permettre au ministre de rencontrer tout ce monde-là. L'UMQ, l'Union des municipalités du Québec, M. le Président, importante plus grosse organisation représentant les municipalités au Québec, s'inquiète: Le financement de l'Institut de Nicolet n'a jamais été discuté, le projet de loi n° 77 ne corrige pas l'inéquité fiscale... au financement des coûts de police... demande un débat sur l'organisation policière au Québec.

M. le Président, ces arguments des corps constitués du Québec qui représentent vraiment le Québec au niveau de l'administration publique municipale, au niveau de l'organisation policière, qu'elle soit de corps de police ou de représentation syndicale ou de travailleurs dans la police, M. le Président... ils demandent qu'on les consulte, qu'on fasse un débat, qu'on fasse un forum, donc qu'on prenne le temps, pas qu'on adopte le projet de loi à minuit cinq, M. le Président.

En terminant, je citerai le député de Nicolet... le député de Laviolette, pardon, qui, hier, à titre de whip, nous a fait un discours à deux heures et quart du matin pour nous dire que le député de LaFontaine, sur le projet de loi n° 79, n'aurait pas dû le discuter après minuit. Bien, soit, M. le Président; si c'était bon hier soir, c'est encore aussi bon et peut-être mieux ce soir parce qu'on touche la sécurité publique des Québécois et des Québécoises puis on touche les coûts municipaux au Québec.

M. le Président, pour toutes ces raisons-là, je fais appel humblement à mes collègues de l'autre côté de la Chambre, ça les concerne, c'est des petites municipalités, c'est des régions, c'est la grande région de Montréal. S'il vous plaît, le projet de loi n'est pas prêt, les gens ne sont pas prêts à discuter, ils demandent du temps. Bien, accédons donc à leur demande, suspendons nos travaux et faisons en sorte de donner au ministre le temps d'aller les rencontrer, de les consulter et d'établir les consensus pour bonifier ce projet de loi là et le rendre plus applicable et plus efficace au Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Le débat sur la motion d'ajournement étant terminé, nous allons mettre la motion du député de LaFontaine aux voix. Quels sont ceux...

Une voix: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal. Alors, que l'on appelle les députés.

(0 h 5 – 0 h 12)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Je demanderais au ministre des Affaires municipales de bien vouloir s'asseoir également, ainsi que le député d'Abitibi-Est. Merci.


Mise aux voix

Alors, nous allons mettre maintenant aux voix la motion d'ajournement qui a été présentée par le député de LaFontaine.

Que ceux qui sont en faveur de la motion d'ajournement veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Johnson (Vaudreuil), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Fournier (Châteauguay), M. Cherry (Saint-Laurent), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre la motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Garon (Lévis), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Aucune. Alors, M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:26

Contre:47

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! Si vous le permettez, je déclare donc la motion du député de LaFontaine rejetée. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Avant que nous continuions nos travaux, s'il y a lieu, j'aimerais savoir de Mme la leader adjointe du gouvernement si elle prend à la lettre le message de son whip, qui disait hier, à peu près à la même heure, que l'opposition, en faisant une motion de report, retardait les travaux de l'Assemblée, plaçait les parlementaires dans l'obligation de siéger en pleine nuit. M. le Président, je veux savoir de la leader, Mme la leader adjointe...

Le Vice-Président (M. Pinard): La question...

M. Lefebvre: On a fait une motion d'ajournement d'une demi-heure seulement, on est arrivés au même résultat, il est minuit et quart. Est-ce que le gouvernement a l'intention de nous faire siéger encore jusqu'à 4 heures cette nuit, M. le Président, alors qu'on est en pleine réforme parlementaire?

Le Vice-Président (M. Pinard): Parfait. Alors, Mme la leader adjointe du gouvernement, est-ce que vous...

Mme Caron: M. le Président, premièrement, ce n'est pas une question de règlement, ce n'est pas une question de directive, et nous ne sommes pas, à cette heure-ci, à la période des renseignements sur les travaux. Donc, nous poursuivons le débat.


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, tout à l'heure, avant le dépôt de la motion d'ajournement par le député de LaFontaine, ce dernier avait terminé son intervention. Alors, y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi n° 77?

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je cède la parole...

Une voix: Debout, Cherry!

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, messieurs! S'il vous plaît, messieurs! Alors, ceux qui doivent quitter cette enceinte, je vous prierais de le faire le plus rapidement possible et dans l'ordre, s'il vous plaît. Alors, quant aux autres, nous allons avoir le privilège d'entendre le député de Saint-Laurent. M. le député.


M. Normand Cherry

M. Cherry: Merci, M. le Président. Pour celui qui, hors micro, a fait la remarque: «Debout, Cherry!», je rappellerai que celui qui m'a initié en politique, qui était un homme de petite stature, disait qu'un homme, ça se mesure des épaules en montant. Mais, bien sûr, pour pouvoir avoir cette mesure, il faut d'abord en avoir une, et je comprends que le député de Lotbinière ne peut pas se servir de ça.

Des voix: Bravo!

Une voix: C'est la première fois qu'on l'entend parler dans les six derniers mois.

M. Cherry: Oui. M. le Président, je suis convaincu que les citoyens du comté de Lotbinière qui écoutent nos débats, ce soir, auraient souhaité beaucoup mieux entendre véritablement, au micro, en caméra, leur député se lever et les représenter. Les gens de Lotbinière ont fait confiance à ce député et étaient convaincus que chacune...

Une voix: Bravo!

M. Cherry: Ah oui, ah oui, ah oui! Je vois le député de Crémazie, de sa façon intelligente habituelle, applaudir. C'est probablement son court séjour au cabinet qui fait qu'il occupe les banquettes à cette heure, M. le Président. Pardon? Ah tiens! Voilà, voilà le ministre de Sainte-Marie–Saint-Jacques. C'est ça, voilà, on les reconnaît.

M. le Président, la réforme policière. Je réfère à un document qui devrait intéresser nos collègues, c'est émis par l'Union des municipalités régionales de comté du Québec. Donc, comme un très grand nombre d'entre vous venez des régions, vous avez, chacun de vous, dans vos comtés respectifs, de nombreuses municipalités qui souhaiteraient que leur député se soit levé en cette Chambre pour les représenter. On m'indique que, dans le comté de Lotbinière entre autres, il y aurait 45 municipalités.

Une voix: Quarante-trois.

(0 h 20)

M. Cherry: Quarante-trois. Ah! Quarante-trois avec un représentant muet. Ce n'est pas l'engagement qu'il a pris auprès de ces gens-là lorsqu'il a sollicité leur appui. Il les a assurés qu'il les représenterait très bien à l'Assemblée nationale. La façon qu'il choisit, sur un projet de loi qui affecte les 43 municipalités de sa circonscription, c'est de rester muet, M. le Président.

Que dit l'Union des municipalités régionales de comté, de sa circonscription comme de nombreuses autres? Elle blâme l'administration Bouchard. «Le gouvernement Bouchard garantit un plancher d'emploi et une hausse de salaire aux employés.»

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le député de Saint-Laurent, on a pris une décision, il y a quelques jours, de ne pas accepter qu'on désigne un membre par son nom, ne serait-ce que dans un texte que vous lisez. Vous l'aviez en main avant de le lire, alors faites les corrections à mesure que ça se présente. M. le premier ministre, il faut prononcer...

M. Cherry: Donc, je dois référer au député de Jonquière ou au...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Premier ministre.

M. Cherry: ...premier ministre. C'est ça?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien. S'il vous plaît.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Alors, O.K. Bon, s'il ne faut pas dire Bouchard, on ne le dira pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Alors, l'Union des municipalités régionales de comté en a gros sur le coeur devant l'attitude du gouvernement – le mot qu'il ne faut pas que je dise, là – à se...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: ...servir sans vergogne dans les budgets municipaux et, incidemment, dans les poches des contribuables. Le député de Lotbinière, ici, 43 municipalités souhaiteraient qu'il parle en leur nom. C'est pour ça qu'ils l'ont élu, mais apparemment il a compris que ça, ça veut dire que, quand tu parles, tu es taxé. C'est une des rares choses auxquelles le ministre des Finances n'a pas pensé encore. Alors, il s'est dit: Je ne parlerai pas. À moins qu'il craigne, lui comme d'autres... On se souvient, lors de l'élection partielle dans Jonquière, quand le premier ministre s'était retourné puis avait dit: «C'est qui, ce gars-là?» Vous souvenez-vous de ça, M. le Président? Probablement qu'il a peur que, s'il entendait sa voix, le premier ministre dirait: C'est qui, ça, ce gars-là? Alors, pour éviter de se faire reconnaître, il a choisi de faire partie de la chorale silencieuse des gens qui ont choisi de représenter leurs électeurs, leurs municipalités en demeurant confortablement et béatement assis.

Et je continue, M. le Président. L'article dit: Faudrait-il que l'on dise à – le nom qu'il ne faut pas que je mentionne – que l'on se dissocie du consensus du sommet pour l'emploi pour qu'il daigne écouter les 8 000 élus municipaux du Québec, des régions? Ils sont 8 000 qui, eux, ont pris la responsabilité au niveau local de représenter leurs électeurs et leurs électrices. Eux deviennent des courroies de transmission, des relais à leur élu provincial, à la personne en qui la majorité des gens dans leur comté ont fait confiance. Et quand ils ont un problème, ils espèrent, ils souhaitent... Ils croyaient. On est obligé d'en parler au passé: Ils croyaient que leurs élus des régions auraient un minimum de sens des responsabilités jumelé avec un minimum de courage pour les représenter et dire à leur gouvernement: Non, pas de cette façon-là.

Mais, M. le Président, comme moi vous êtes témoin uniquement parfois de certaines remarques ou sarcasmes hors micro, mais aucun ne décide de se lever et de jouer le rôle pour lequel chacun de nous a sollicité un mandat auprès de ses électeurs.

Bien sûr, M. le Président, vous comprendrez bien que, quand je parle au nom de ces municipalités, des gens pourraient dire: Qu'est-ce que le député de Saint-Laurent peut bien vouloir de parler de ça? Mais c'est justement, je me sens interpellé à cause du silence de mes collègues. Parce que quand j'y vais, en région, faire des activités, rencontrer des électeurs et électrices, je peux leur dire que, moi, député de Saint-Laurent, une des municipalités probablement les moins affectées par ça, suis obligé, à près de minuit trente, de me lever et de faire valoir leurs droits, leurs revendications, parce que la chorale de ceux qui sont affectés, les muets assis de l'autre côté...

M. Lefebvre: Question de règlement. Voilà, j'allais rappeler au député de Lotbinière: il serait mieux assis à sa banquette plutôt que de parler avec Mme la ministre. Il a des chances de comprendre s'il écoute.

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît. J'inviterais, s'il vous plaît, à la demande du leader, tout le monde à prendre son siège.

M. le député de Saint-Laurent.

M. Cherry: Merci, M. le Président. Pour garantir les emplois, on me dit – je réfère toujours au texte M. le Président – que la SQ est imposée aux municipalités. Et, toujours à partir du même document, c'est carrément inacceptable que le ministre – ça doit être un autre nom qu'on ne peut pas nommer – nous empêche de créer nos propres corps de police sur la base des MRC, alors qu'avec ces derniers les citoyens pourraient économiser un peu plus de 1 000 000 $ par année. En plus de ne pas parler, il les empêche d'économiser, il leur transfère sa facture et tout ce que ce monde-là attend, c'est l'ajournement, pour s'en aller en party de Noël, pour faire accroire à son monde combien ils les ont bien défendus. Bien, M. le Président, je me sens obligé de me lever pour que les gens qui nous écoutent et ceux qui vont retransmettre ces informations-là puissent identifier, par leur silence, les gens qu'ils avaient choisis pour les représenter, M. le Président.

Concernant ce que le ministre rappelle dans sa lettre: une perspective de complémentarité de besoins et de moyens entre les municipalités et le gouvernement... C'est le ministre qui appelle ça... Si vous ne savez pas quoi dire, lisez ce qu'il dit. Vous pourriez au moins vous lever puis avoir l'air de savoir dire quelque chose. Sachez que les municipalités ne partagent pas du tout toute votre compréhension. Il me semble que...

Une voix: C'est clair.

M. Cherry: ...c'est l'Union des municipalités régionales de comté... Quand votre ministre propose des choses qui n'ont pas de bon sens, les gens qui vous ont fait confiance s'attendent à ce que vous allez dire ces choses-là. Non, un minimum de... Je ne sais pas. On ne peut pas appeler ça «courage», là, je présume, tu sais. Je comprends qu'ils vont proposer de nous baisser de 5 %, mais il en reste encore un peu. Il me semble que, pour l'argent qu'on est payé, tu peux te lever puis dire quelque chose.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Cherry: Non? Alors...

Une voix: C'est dur à prendre sur l'autre bord.

M. Cherry: ...avec information récente d'une hausse de 80 % pour les coûts de la Sûreté du Québec, une vingtaine de MRC, M. le Président, nous ont signifié qu'elles étaient intéressées à entreprendre une étude pour se doter de leur propre corps de police.

C'est un gouvernement qui a parlé de décentralisation, de confier des responsabilités. Ces gens-là veulent croire ce que vous leur avez dit...

Une voix: Avant le référendum.

M. Cherry: ...se prennent en main, proposent une solution qui va être aussi efficace, à moindres coûts, à moindres coûts. Et le ministre dit non. Non. Non seulement on va vous transférer des responsabilités, mais, en plus de ça, on va vous empêcher de prendre des mesures qui vous donneraient le même service à des coûts moindres.

Je ne sais pas si c'est ça que vous appelez «l'autre façon de gouverner», mais il me semble que ce n'est pas à ça que les citoyens et citoyennes du Québec s'attendent de leurs élus.

(0 h 30)

Alors, on dit que l'Union des municipalités régionales de comté incite ses membres à poursuivre leurs analyses malgré les propos du ministre dans le projet de loi de – un autre nom que je ne peux pas nommer – ...vient de déposer à l'Assemblée nationale... et il conserve toujours son pouvoir discrétionnaire pour autoriser la formation de corps de police dans les municipalités de 5 000 habitants ou moins, sur une base de MRC.

Et voici ce que dit l'Union – vous pourriez au moins dire ça. Ce que nous souhaitons – ils ne poussent pas trop fort – ce qu'ils souhaitent, les gens qui vous ont élus... Eux autres, ils écrivent: Ce que nous souhaitons, c'est qu'il use de sa discrétion comme de son bon jugement – il ne faut pas en demander trop, par exemple, là – que nous attendons de notre ministre de la Sécurité publique. Quand les citoyens sauront qu'ils sont pris en otage pour maintenir les effectifs de la SQ et qu'ils doivent payer le gros prix, ils feront leur bilan comptable et politique de l'administration – que je ne peux pas nommer – aux arguments du ministre de la Sécurité publique, à l'effet qu'il ne peut autoriser de corps de police qui compte moins de 1 à 1,25 policier par tranche de 1 000 habitants, Mme Simard rétorque que de nombreux corps de police ont été avalisés par ses prédécesseurs avec des ratios de 0,63 à 0,89. Donc, quand il y a volonté, quand les gens veulent se prendre en main, quand les gens reconnaissent qu'ils doivent se doter de services et qu'ils décident de le faire à moindres coûts, dans le respect du mandat que leur confient leurs électeurs, ce gouvernement-là ne leur permet même pas de le faire, pour une seule et unique raison, pour assurer que les coûts de la Sûreté du Québec vont être payés par les citoyens, même si ça coûte plus cher qu'une police dont ils pourraient se doter dans leur MRC. C'est probablement, M. le Président, du jamais vu. C'est probablement du jamais vu. C'est peut-être ça, l'autre façon de gouverner. Il dit: Faites-nous confiance, on va s'arranger pour que ça vous coûte plus cher. N'oubliez pas de mettre ça dans vos bilans quand vous retournerez dans le temps des fêtes.

Et je continue toujours: «Et qu'on n'invoque pas que les services de base ne sont pas respectés, ce serait faux. Ils savent quelle sorte de protection leurs citoyens veulent et quelle sorte de protection ils veulent leur offrir. De plus, il est évident que, dans des communautés de moins de 5 000 habitants, le taux de criminalité est moins élevé, donc nous n'avons pas besoin d'effectifs lourds», indique la présidente de l'Union. Donc, ils sont conscients que leurs citoyens ont besoin de services, ont besoin de protection. Ils sont conscients. Ils sont également conscients des limites des capacités de payer de leurs citoyens. Alors, ils sont prêts à se conformer à des directives du gouvernement de protéger leurs citoyens, tout en leur faisant réaliser des économies. Mais le gouvernement refuse, et c'est le même gouvernement qui a parlé du partage, de la décentralisation des pouvoirs, tous des mots dont il se gargarisait durant la campagne référendaire, mais qui là, vraiment, mais vraiment, n'ont aucun sens.

On se doit, en cette Chambre, de prendre la parole d'un député. Mais je ne sais pas comment on peut, de façon sérieuse, prendre la parole des gens d'en face quand ils nous disent qu'ils croient à la décentralisation, qu'ils croient à la responsabilité, à la prise en charge des régions – quand elles souhaitent le faire dans des dossiers comme celui-là – et que c'est le gouvernement, à partir de décisions d'ici, qui impose – qui impose – à l'ensemble de ces régions-là. Et, M. le Président, comme, moi, je suis convaincu que vous constatez le triste spectacle des gens qui ont la responsabilité, qui se défilent de leur responsabilité et qui préfèrent avaliser une politique inacceptable pour l'ensemble de leurs citoyens au nom d'une sorte de minimum de solidarité politique, qui, en 1996, dans les années difficiles qu'on passe... Les citoyens ne se reconnaissent pas quand leur député reste bien assis plutôt que de se tenir debout et de faire valoir les intérêts des gens... à qui ils ont fait confiance. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Laurent. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Laviolette et whip en chef du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Il ne s'agit pas, M. le Président, de faire le pitre ici, en cette Chambre, pour être sérieux. Le député qui vient de parler devant moi, il avait l'occasion, lorsqu'il était à la FTQ, de faire le pitre, mais ici, à l'Assemblée nationale, M. le Président, il faut être clair, il faut voir les choses telles qu'elles sont. Le député a formulé toutes sortes d'accusations, M. le Président, et, moi, je trouve ça un peu aberrant. D'autant plus que, venant, lui, d'une grande ville, il a oublié d'aller voir ce qui se passe dans les régions. Et je suis un régionaliste, je suis une personne qui vient des régions et je sais ce qui se passe avec ce projet de loi là. Je vais essayer d'être sérieux, M. le Président, de ne pas lire un communiqué de presse pour être capable de parler pendant 10, 15 minutes. Je vais le dire tel qu'on le vit chez nous, dans la grande région de la Mauricie.

Nous avons, à partir du projet de loi, mon collègue le député de Saint-Maurice et moi-même, appuyé des démarches qui ont été entreprises par la MRC du Centre-de-la-Mauricie, surtout davantage poussées par la ville de Shawinigan, en regard même de certaines discussions qu'on avait avec deux grosses villes à côté, soit la ville de Shawinigan-Sud et la ville de Grand-Mère, en considérant tout le secteur rural, en sachant très bien que la politique, telle que présentée par le ministre dans le projet de loi, offre des options qui permettent aux municipalités de se regrouper sous une formule régionale. Mais la ville de Shawinigan a pris sur elle de faire les négociations, elle est allée voir les villes environnantes. Shawinigan-Sud n'a pas embarqué, ni la ville de Grand-Mère. Et je suis pourtant le député du comté de Laviolette, de la ville de Grand-Mère. Pourtant, la ville de Saint-Georges, qui est de l'autre côté de Grand-Mère, se retrouve à être dans l'ensemble des gens qui ont décidé de former une police régionale.

Mais cette police régionale, M. le Président, les gens, le conseil, ont dit: Allez voir votre conseil. Alors, je l'ai vu, mon conseil. Le conseil de ville de Grand-Mère était un peu surpris de voir que, moi, Jean-Pierre Jolivet, leur député, j'avais signé une lettre appuyant la démarche de la MRC du Centre-de-la-Mauricie, par la ville de Shawinigan, de se donner un corps de police pour une région. Ils m'ont demandé, en me convoquant, parce qu'on a différents... à un moment donné on se rencontre, pour me dire: Pourquoi tu as signé ça? Bien, je l'ai signé pour la raison suivante, M. le Président, je vous l'indique tel que je leur ai dit, tel que je l'ai dit d'ailleurs lors d'une activité qu'on avait – on l'appelle le Festival du panache – à Saint-Georges de Champlain, où le maire de Grand-Mère, Gérald Bastarache, était là, et le maire de Saint-Georges de Champlain, M. Périgny, y était.

J'ai dit quoi? J'ai dit: Pourquoi, vous, la ville de Grand-Mère, vous n'avez pas signé le document, puis vous me dites, à moi, que je n'aurais pas dû le signer? Bien, je vais vous le dire, pourquoi. C'est que la ville de Saint-Georges était prête à faire des ententes avec la ville de Grand-Mère, mais Grand-Mère a décidé, à un moment donné, de dire: Écoutez, à Saint-Georges, voilà la police que je vous offre et voilà le coût. La ville de Saint-Georges a dit: Ce n'est pas ça que je veux. Je ne veux pas tout le système d'enquête, je veux un système de surveillance, comme la Sûreté du Québec me le donnait avant. Si on est capable de s'entendre, il n'y a pas de problème.

Donc, la ville de Grand-Mère offrait un système qui coûtait trop cher à Saint-Georges et qu'elle ne voulait pas avoir et, en contrepartie, ce qu'elle demandait, la ville de Grand-Mère le lui refusait. Qu'est-ce qu'elle a fait? Shawinigan est allée lui offrir le service qu'elle voulait. Et j'ai dit à la ville de Grand-Mère: Si vous aviez fait comme Shawinigan, peut-être qu'aujourd'hui Grand-Mère et Saint-Georges de Champlain auraient un corps de police dans le même genre, sauf que ce n'est pas ce que vous avez décidé. Moi, j'ai compris que, comme régionaliste – et on avait vérifié auprès du ministre, le député de Saint-Maurice et moi-même – il était possible de le faire à la condition qu'elle présente, selon des délais, les effectifs qu'elle voulait regrouper. Et là ça a des effets, cette chose-là, sur la Sûreté du Québec de ma région, dont le poste central est à Shawinigan.

Ça veut dire que le ministre, lui, prend des décisions, il y a des dates limites qu'il faut mettre un jour quand on veut se décider à quelque chose. Mais ce qui est arrivé, c'est que le ministre nous a dit oui, mais à la condition que je puisse savoir maintenant, moi, ce que je vais faire avec ma police de Shawinigan qu'on va devoir répartir ailleurs. Et ça, dans ce contexte-là, M. le Président, on a agi, le député de Saint-Maurice et moi-même, les gens de notre région, de façon tout à fait normale pour discuter d'un problème qui surgissait depuis nombre d'années. On disait aux municipalités: On va faire tel geste, puis on n'y arrivait pas. M. Ryan a essayé, à sa façon, avec les difficultés qu'il a rencontrées, de la façon dont il l'a fait, et ce n'est pas celle que nous avons choisie.

(0 h 40)

Deux exemples que je peux vous donner, M. le Président. Les neiges usées, qu'est-ce qui est arrivé? En bien des circonstances, les municipalités, d'année en année, demandaient de reculer les échéances, mais elles n'arrivent jamais à une solution. Puis, encore dernièrement – je vous donne un exemple – la ville de Grand-Mère a demandé, parce qu'ils ont de la difficulté à trouver un terrain qui soit le moins dispendieux possible... Mais tout le monde sait que les neiges usées, on devra un jour trouver une solution. Bien, on recule, on recule, on recule jusqu'à un moment donné où le ministre dit: Voilà la date limite à laquelle on devrait arriver. Et là, après ça, là, on a fini de reculer, les études sont pas mal faites, les argents qu'on a eu à dépenser pour le faire sont dépensés, il va falloir qu'on prenne une décision.

L'autre exemple que je veux donner, M. le Président, je l'ai vécu dans le temps où j'étais au pouvoir dans le premier mandat de M. Lévesque, c'est toute la question du zonage agricole. Saint-Barnabé, Saint-Boniface, dans mon coin, dans le comté de Saint-Maurice, c'étaient deux municipalités modèles quant au zonage agricole, mais vous aviez d'autres municipalités où ce n'était pas ça. Il a fallu qu'un jour l'État se décide à dire aux municipalités: D'année en année, on vous a demandé de prendre vos responsabilités, vous ne les avez pas prises, nous allons décider. Et on l'a fait. Donc, nous sommes dans un contexte où les argents disponibles pour donner des services à une population sont moindres que ce qu'on avait avant. Il faut donc rationaliser nos services, donner le meilleur service possible avec les argents disponibles, et, dans ce sens-là, la proposition qui est faite par le ministre vient nous donner ces possibilités-là.

Qu'est-ce que l'on fait de l'autre côté? On peut bien prendre des municipalités qui sont contre, on peut bien prendre l'article de Mme Simard qu'elle a écrit à l'époque dans le contexte où elle faisait des pressions, ce qui est tout à fait normal, je ne lui en veux pas. Je lui dis: Elle fait son travail puis son boulot, puis tant mieux. La seule chose, c'est que, vis-à-vis de tout ça, nous avons été capables de présenter un projet de loi qui permet des choses sensées, correctes, permettant aux gens de pouvoir faire les choses qui sont plausibles et qui permettent à une population de dépenser le moins d'argent possible pour donner le meilleur service possible, M. le Président.

Qu'est-ce que l'on a contre ça? Bien, on a un «filibuster» encore une fois ce soir. Ils ont le droit. Je ne peux pas les empêcher de le faire. Ils vont reprendre ce que j'ai dit hier à deux heures et quart du matin, comme j'ai essayé de nous convaincre qu'à un moment donné ça n'a plus de bon sens. Puis je regarde le député de l'autre côté qui le vit comme moi. Je sais que des gens de l'autre côté le vivent comme moi. Mais on est obligés d'agir aujourd'hui selon ce que le règlement de l'Assemblée nationale nous donne. Je ne peux pas agir autrement et, donc, ils ont le droit d'utiliser ces formules.

Je l'expliquais hier dans un texte qui provenait du journal du 125e de la Tribune de la presse. On l'a expliqué. Un monsieur a parlé à monsieur qui a été... de 11 heures le soir à 10 h 20 le lendemain matin. Il l'a fait parce que c'était possible dans le temps. On a changé nos règles en 1976 quand on est arrivés au pouvoir. On veut les changer à nouveau. Tant mieux! Bravo! Mais, entre-temps, je vis avec le fait que l'opposition a le droit de s'opposer. Elle a le droit d'utiliser tout ce que le règlement lui donne le droit de faire, mais elle doit le faire de façon logique, pour des raisons correctes.

Et c'est dans ce sens-là, M. le Président, que je dis, quand le député qui m'a précédé, qui vient d'une grande ville, nous parle d'un document dont je suis sûr qu'il ne connaît pas l'application dans chacune de nos régions: Bien, il parle dans le vide. Puis il peut bien faire le pitre ici, à l'Assemblée, c'est son droit, mais ce n'est pas de même qu'on va faire avancer ce que l'on doit faire, comme député, comme travail. Ce n'est pas en insultant les gens en disant qu'ils ne vont pas voir le monde, qu'ils ne font rien de bon, alors qu'on sait très bien ce qu'on a fait, nous, ce qu'on est capables de faire, dans quelle limite on doit travailler avec nos conseillers municipaux et nos maires de chacune de nos municipalités, puis arriver à des solutions concrètes, plausibles, exemplaires.

M. le Président, si on faisait nos débats d'ici la fin, qu'on prenne tout le temps voulu pour le faire, ça me ferait grandement plaisir. Qu'on le fasse de la façon dont on l'a fait tout à l'heure, ça me «débine» un peu, en bon Québécois. Je trouve ça un peu nous abaisser, comme membres de l'Assemblée nationale, que de le faire de cette façon-là. Mais, si on veut faire des vrais débats puis indiquer les problèmes qui nous confrontent, je l'accepterais facilement. Mais le faire comme on l'a fait tout à l'heure, M. le Président, je pense que c'est un peu dépasser les bornes.

Alors, en espérant que le débat que nous allons faire ce soir, qui va se perdurer... Il y a certainement, à un moment donné, une autre motion qui va nous arriver. On va devoir voter. J'ai averti les membres de notre formation d'être présents, d'être disponibles pour le vote, puis ça va arriver. Puis, à un moment donné, on va voter le projet de loi, comme on l'a fait hier. Ça pourra arriver dans 15 minutes qu'on vote le projet de loi puis qu'on aille se coucher, mais ça se peut que l'opposition dise: On va les traîner encore, puis ça peut aller jusqu'à 4 heures ce matin. Ce n'est pas grave, on est là pour ça. Notre travail, on va le faire le mieux possible. Mais le projet de loi, il nous le faut parce qu'il faut faire les changements qui s'imposent.

D'autant plus que, dans le contexte de ce que le ministre a mis comme limite – étant une limite raisonnable, les municipalités peuvent s'organiser – le ministre acceptera les propositions si elles sont convenables, acceptables. Et là, à ce moment-là, on pourra faire un travail constructif, permettre à ce moment-là, en commission parlementaire, de faire les amendements qui s'imposeront, si l'opposition le désire, et de faire vraiment le travail là où il doit être fait, étude article par article du projet de loi en commission parlementaire, M. le Président. En espérant, donc, que les débats se situeront – et je sais que le député qui va me suivre, c'est une personne capable de faire ses débats à cette hauteur – se fassent de façon correcte et non pas de la façon dont le pitre de tout à l'heure l'a fait. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Laviolette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il fut un temps où nos amis qui sont maintenant au gouvernement étaient dans l'opposition. Il fut un temps où la leader adjointe, la députée de Terrebonne, était dans l'opposition. Peut-être qu'elle y retournera. Et, à cette époque-là, M. le Président, le discours qu'ils tenaient, c'était: Ça n'a pas de sens de faire de la législation après minuit. Et je partageais ce point de vue là, comme ministériel. Entre vous et moi, ce n'est pas à 0 h 45 que les gens ont l'esprit le plus clair, le plus rapide, pour être en mesure de juger un projet de loi qu'on a devant nous. Malgré cela, les ministériels ont voté contre la motion d'ajournement que le député de LaFontaine a proposée.

Malgré cela, notre amie la députée de Terrebonne nous maintient encore actuellement en Chambre pour débattre de ce projet de loi, alors que nous pourrions très facilement le débattre demain. Nous sommes au début de la session intensive, nous avons amplement de temps devant nous. Le menu législatif est particulièrement maigre, M. le Président, et nous aurions pu et nous pourrions parfaitement en débattre plus facilement. Non. C'est une espèce de vice que les leaders attrapent. Lorsqu'un député devient leader, il a comme un plaisir sadique à vouloir faire siéger ses collègues la nuit. Et ça existe chez tous les leaders que j'ai vus, il y a une espèce de plaisir à nous obliger à débattre de nuit.

Alors, M. le Président, puisque nous devons débattre de nuit, je vais débattre de nuit de ce projet de loi. Mais j'aurais souhaité que, dans sa sagesse bien connue, la députée de Terrebonne nous évite ce débat de nuit. M. le Président, je vais donc revenir sur le projet de loi n° 77 et je vais me contenter d'aborder deux points à l'intérieur du projet de loi n° 77.

Premièrement, le projet de loi n° 77 augmente les taxes que doivent payer les concitoyens. Actuellement, pour les services de la Sûreté du Québec, les municipalités régionales, les municipalités de régions, paient 0,10 $ du 100 $ d'évaluation. L'adoption du projet de loi n° 77 va faire que ces mêmes résidents de ces municipalités vont devoir payer 0,18 $ du 100 $ d'évaluation. On passe donc de 0,10 $ du 100 $ d'évaluation à 0,18 $. Pour une maison de 100 000 $, ça veut dire que l'augmentation pour les frais de police va passer de 100 $ à 180 $. C'est une forme de taxe et c'est une taxe déguisée. Alors, bien sûr, ce gouvernement va pouvoir dire: Je n'augmente pas les impôts, mais je transfère aux municipalités – c'est-à-dire la taxation foncière – une partie de mes responsabilités.

Alors, le ministre des Finances, lorsqu'il fera son discours, pourra dire: Je n'ai pas augmenté les impôts. La réalité de la vraie vie, c'est qu'aujourd'hui, lorsqu'on passe la loi n° 77, on augmente de fait la part pour les services de police, dans les petites municipalités, de plus de 80 %. C'est ça, la réalité: une augmentation de 80 %, M. le Président, de la part que nos concitoyens dans les petites municipalités, ceux qui utilisent les services de la Sûreté du Québec, vont devoir payer pour les services de police. Et vous comprenez bien que l'opposition ne peut pas partager ce point de vue là. On ne peut pas partager le fait de déguiser des augmentations d'impôts, de les transférer aux municipalités.

(0 h 50)

Nos collègues d'en face devraient se rappeler les discours qu'ils ont faits lorsque le député d'Argenteuil – il n'est plus en cette Chambre, je pense que je peux le nommer par son nom – M. Ryan avait aussi transféré aux municipalités des responsabilités. J'aurais pu lire ici, ce soir, les discours qu'à l'époque la députée de Terrebonne, par exemple, avait faits sur ce projet de loi et voir à quel point elle s'était opposée avec véhémence sur le transfert de responsabilités aux municipalités, avec beaucoup d'éloquence, d'ailleurs, à l'époque. J'aurais pu relire exactement le même discours parce qu'on fait la même chose aujourd'hui: on transfère des responsabilités aux municipalités; on les oblige à utiliser les services de police de la SQ et à payer ça à même l'assiette fiscale de l'impôt foncier.

Alors, ça, c'était un premier point sur lequel nous nous opposons, mais ce n'est pas le plus grave, pas le plus grave dans le projet de loi. Ce qui est vraiment très grave, c'est le financement de l'Institut de police. Alors, je sais que l'Institut de police ne relève pas de la ministre de l'Éducation, malheureusement, parce que je suis sûr, la connaissant, qu'elle n'aurait jamais accepté une chose comme ça. Parce que, si c'est ça, je vois un énorme danger à l'intérieur du financement de nos institutions d'enseignement postsecondaire. C'est la première fois, M. le Président, qu'on va transférer des responsabilités d'éducation, c'est-à-dire le financement de l'Institut de police, de ce qui est la tâche normale... c'est-à-dire du budget de l'État, des impôts que, vous et moi, nous payons, que nous allons les transférer aux municipalités.

Je ne suis pas de ceux qui partagent le point de vue que les responsabilités et le financement de l'enseignement postsecondaire devraient relever des municipalités. Je pense qu'il y a une responsabilité à cet effet-là du gouvernement provincial, c'est même la responsabilité première du gouvernement provincial. Je suis sûr que, sur ce point-là, la ministre de l'Éducation partage mon point de vue. Et c'est parce que, pour une raison historique, l'Institut de police n'a pas été rattaché comme il aurait dû l'être au ministère de l'Éducation qu'aujourd'hui le ministre de la Sécurité publique peut changer le mode de financement de l'Institut de police. Mais, de tradition et de tout temps, au Québec, le financement de l'enseignement postsecondaire a toujours été basé et financé principalement par le gouvernement du Québec. Quand je dis principalement, c'est parce que je... dans ma tête, la restriction mentale quant aux frais de scolarité que les étudiants peuvent payer au niveau universitaire.

Le bris que nous faisons ici en passant la loi n° 77 sur le financement de l'Institut de police me semble extrêmement dangereux, parce que c'est une pente. On fait un premier pas dans une mauvaise direction, puis, après, on est tenté d'en faire un deuxième, puis un troisième. Alors, j'espère ne pas avoir un jour à débattre une loi qui serait présentée par la ministre de l'Éducation qui transférerait aussi aux municipalités une partie du financement des cégeps.

Parce que c'est le premier pas qu'on a ici, M. le Président. J'espère que la ministre de l'Éducation ne va pas nous présenter ça bientôt, que ce n'est pas un projet dans ses cartons, de manière à être la même logique où on prendrait l'Institut de police, qui serait financé par les municipalités, puis on étendrait ça à l'ensemble de notre réseau postsecondaire. Ce serait extrêmement dangereux. Et soyez sûrs que la bataille que nous ferions de ce côté-ci de la Chambre, s'il y avait une volonté du gouvernement d'aller dans cette direction-là, serait farouche. Mais, déjà, ce premier pas est dangereux parce qu'il va dans la mauvaise direction. J'aurais bien vu le ministre transférer la gestion de l'Institut de police au ministère de l'Éducation, ça aurait été naturel, et le ministère de l'Éducation l'aurait absorbée tout à fait naturellement. Là, commencer à le conserver et le financer sur l'impôt foncier, il y a là une brèche dans un principe fondamental, que nous ne pouvons pas accepter.

Mais, de surcroît... Et je n'ai pas vu actuellement la ministre de la Sécurité du revenu et de la Solidarité se lever. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve avait, à l'époque, et très brillamment, défendu l'importance de la formation continue, défendu l'importance que tous les employeurs fassent de la formation continue et contribuent 1 % de leur masse salariale à la formation continue. C'était, dans le discours du gouvernement, une position qui était une position de principe pour améliorer et permettre aux différents travailleurs de se ressourcer, et nous avons voté ici cette loi.

Le financement de l'Institut de police va demander 1 % de la masse salariale des policiers; déjà une brèche fondamentale dans le principe du financement des institutions d'enseignement postsecondaire. Mais, de plus, ce 1 %, qui contribuait donc pour le financement de l'Institut de police, pourra être comptabilisé dans les responsabilités qu'ont les municipalités de consacrer 1 % de leur masse salariale à la formation continue, à l'amélioration de la formation de leurs policiers.

Donc, ce qu'on fait actuellement, en votant ce projet de loi, c'est qu'on dit aux différents corps de police, qui maintenant sont soumis à cette loi-là – la loi du 1 %, une loi que nous avions passée des deux côtés de la Chambre, où, je me rappelle, le député d'Outremont, à l'époque, le député de Bourassa et moi-même avions collaboré pleinement avec la députée de Hochelaga-Maisonneuve pour arriver à une loi compréhensible qui touchait tous les aspects de la formation continue et permanente en entreprise – on va dire à nos policiers: La responsabilité que la municipalité avait de contribuer 1 % de la masse salariale pour votre formation continue, elle l'aura déjà assumée par le 1 % qu'elle va donner pour le financement de l'Institut de police.

Ça veut dire que l'on dit à nos concitoyens qui travaillent dans nos différents corps policiers et particulièrement à ceux qui travaillent à la STCUM: Vous n'avez pas besoin, vous n'aurez pas le droit, vous ne pourrez pas, comme les autres travailleurs et employés des différentes entreprises ou les différents organismes gouvernementaux, vous, vous n'aurez pas le droit à la formation continue, vous n'aurez pas le droit de pouvoir vous ressourcer, vous n'aurez pas le droit de pouvoir avoir accès à des nouveaux programmes, avoir accès à des compléments de formation, parce que la part que votre municipalité devait consacrer à cette formation continue est déjà utilisée pour le financement de l'Institut de police.

(1 heure)

Et ça, M. le Président, s'il n'y avait que cela dans la loi, c'est déjà un principe que je trouve totalement, totalement inacceptable. Je m'étonne que la députée de Hochelaga-Maisonneuve, pour qui j'ai énormément de respect, ne se lève pas ici pour, au moins, faire retirer ce petit bout à l'intérieur de son projet de loi. Parce que, là encore, c'est une brèche sur un principe sur lequel nous avions fait consensus, sur un principe autour duquel nous avions fait consensus, à savoir qu'il était important, dans notre société, de pouvoir assurer à chacun des travailleurs, quelles que soient les entreprises, que ce soit les entreprises gouvernementales ou les entreprises privées ayant un certain nombre d'employés, une formation continue.

Alors, on fait une première brèche à l'intérieur de cela; on dit: La responsabilité que les municipalités ont envers leur corps de police pour assurer à leurs policiers une formation continue, ça sera considéré comme le paiement que vous faites à l'Institut de police. Ça veut dire, à l'heure actuelle, M. le Président, que les policiers n'auront pas le droit à cette formation continue, ça veut dire que les policiers ne pourront pas avoir les cours de ressourcement, ça veut dire que les policiers n'auront pas droit, comme les autres travailleurs, à cette formation.

Alors, M. le Président, il y a bien d'autres points qui sont à critiquer à l'intérieur du projet de loi n° 77; mes collègues les ont fait valoir. Mais, moi, je m'arrête ici à deux grands principes qui sont mis en brèche par le projet de loi n° 77 et sur lesquels je me dois de m'opposer le plus vigoureusement possible, tout en partageant, bien sûr, les oppositions de mes collègues. Ces deux principes, je vous le répète et je demande actuellement au gouvernement d'être en mesure de revenir, au moins sur ces questions-là, sur sa décision.

Premier principe qui est battu en brèche aujourd'hui par le projet de loi n° 77, c'est: le financement de l'enseignement postsecondaire, cégep et université, des institutions de ce niveau-là, est fait à même le fonds consolidé, est fait à même les impôts des Québécois et des Québécoises, et non pas par les municipalités et la taxation foncière. Ouvrir une brèche dans ce principe fondamental, c'est ouvrir des brèches sur tous les problèmes du financement des collèges et des universités.

Deuxième principe qui aujourd'hui est battu par le projet de loi n° 77, c'est celui qui avait été mis de l'avant par la députée de Hochelaga-Maisonneuve, à savoir que toute entreprise avait la responsabilité d'assumer une formation continue à ses employés et que l'ensemble du Québec profiterait de cette augmentation de formation continue. Ce principe est battu en brèche ici parce que l'on dit: Le 1 % que les municipalités contribueront au financement de l'Institut de police pourra compter pour le 1 % qu'elles doivent consacrer pour leurs policiers à la formation continue.

Deux principes qui, à mon sens, sont fondamentaux dans la tradition et l'histoire du Québec, deux principes que le projet de loi n° 77 vient remettre en cause et, s'il n'y en avait d'autres raisons, et elles sont multiples, deux raisons pour lesquelles nous devons nous opposer très fortement au projet de loi n° 77. Et c'est pour cette raison, M. le Président, que nous allons continuer, comme opposition, à faire valoir toutes les raisons pourquoi on ne peut pas voter pour ce projet de loi.

Je suis sûr, en terminant, que, si nos collègues d'en face n'étaient pas tenus par la solidarité ministérielle, la députée de Taillon, la ministre de l'Éducation, partagerait mon point de vue et elle ne risquerait pas de mettre en brèche le principe que l'éducation postsecondaire ne doit pas être financée par les municipalités. Je suis sûr que la députée de Hochelaga-Maisonneuve partagerait aussi mon point de vue, à savoir que le principe du 1 % ne peut pas être remis en question. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de La Pinière. Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives, à cette étape de l'adoption du principe. Ce projet de loi a été introduit à la hâte par le ministre de la Sécurité publique le 14 novembre dernier. Cette hâte n'a, malheureusement, pas été motivée par l'intérêt public, mais uniquement par les impératifs budgétaires qui poussent ce gouvernement à fouiller dans les poches des contribuables.

Ce projet de loi a des incidences considérables sur les citoyens de quelque 1 250 municipalités de 5 000 habitants et moins. En effet, il s'agit d'un projet de loi qui affecte l'une de nos principales institutions, la Sûreté du Québec, qui compte pas moins de 4 182 policiers syndiqués, dont 1 963 patrouilleurs. Il faut se rappeler que la Loi de police, que le gouvernement vient modifier avec le projet de loi n° 77, permettait aux municipalités de 5 000 habitants et plus soit de se doter de leur propre corps de police, soit de signer des ententes avec les municipalités avoisinantes pour partager les coûts d'un service de police commun. La même disposition s'appliquait selon la Loi de police aux municipalités de 5 000 habitants et moins avec ceci de particulier: c'est que ces dernières pouvaient recourir soit aux services de la Sûreté du Québec, soit aux services d'un corps de police municipal qui agit sur leur territoire.

La Sûreté du Québec dessert actuellement 24 % de la population répartie dans 1 248 municipalités et dispose d'un budget de fonctionnement de près de 394 000 000 $ pour l'année 1996-1997. Le projet de loi n° 77 vient donc confirmer l'annonce faite par le ministre de la Sécurité publique, lors de l'étude des crédits de 1996-1997, à l'effet que les municipalités qui reçoivent les services de la Sûreté du Québec se verraient désormais dans l'obligation de payer la facture à même les revenus générés par la tarification. Les municipalités de 5 000 habitants et moins n'auraient donc d'autre choix que celui de conclure une entente avec la Sûreté du Québec, ce qui revient, dans les faits, à une mise en tutelle des petites municipalités face à leur propre organisation policière. D'ailleurs, si une municipalité ne se conforme pas aux dispositions de cette loi, la Sûreté du Québec la desservira quand même. C'est là ma première réserve.

Voilà un gouvernement qui a, tout au long de l'année référendaire, chanté aux élus municipaux les vertus de la décentralisation du processus de décision et des budgets s'y rattachant, et, à la première occasion qui se présente, il n'hésite pas à imposer de façon unilatérale son autre façon de gouverner et son cortège de taxes, de coupures et de transferts de déficit vers les municipalités, et, dans le cas qui nous concerne aujourd'hui, vers les petites municipalités. Concrètement, le projet de loi n° 77 vient chercher près de 50 000 000 $ dans les poches des contribuables québécois: 8 000 000 $ pour le financement de l'Institut de police et 40 000 000 $ pour la Sûreté du Québec. Il s'agit donc d'un projet qui répond essentiellement à des impératifs budgétaires et ne tient pas compte réellement des besoins des citoyens.

(1 h 10)

Ce projet de loi n° 77 obligera par ailleurs les municipalités à financer en partie l'Institut de police alors que, depuis 1990, les revenus de l'Institut provenaient essentiellement du gouvernement, des frais d'hébergement et d'inscription. Désormais, si ce projet de loi entre en vigueur, c'est une autre taxe déguisée qui s'abat sur les contribuables québécois, car, ultimement, c'est à raison de 1 % de la masse salariale des corps de police municipaux que cet Institut sera financé. On comprendra donc les inquiétudes exprimées tant par les municipalités que par l'Association des directeurs de police et pompiers du Québec. Cette dernière se demande si les municipalités ne seraient pas tentées de couper dans leur masse salariale, considérant que leur contribution annuelle à l'Institut de police est calculée précisément sur la base du pourcentage de la masse salariale du personnel policier.

On le voit, M. le Président, les municipalités de 5 000 habitants et moins ont raison de dénoncer l'attitude du gouvernement à leur endroit, attitude qui les force à utiliser les services de la Sûreté du Québec alors qu'elles souhaitent conserver le droit de choisir leur propre service de police. Pas étonnant alors que l'Union des municipalités régionales de comté du Québec, l'UMRCQ, soit sortie pour exprimer son opposition à ce projet de loi, car non seulement les municipalités de 5 000 habitants et moins se voient imposer une décision unilatérale, mais, comme ce ne sont pas elles qui négocient les salaires des agents de la Sûreté du Québec, elles se retrouvent dans une situation où elles perdent le contrôle sur les coûts de ce service, ce qui constitue une ingérence directe du gouvernement dans le processus décisionnel des élus municipaux.

C'est ce qui fait dire à Mme Simard, présidente de l'UMRCQ, dans l'édition de décembre 1996 du bulletin L'Union , et je cite: «C'est carrément inacceptable que le ministre de la Sécurité publique nous empêche de créer nos propres corps de police sur la base des MRC, alors qu'avec ces derniers les citoyens pourraient économiser un peu plus de 1 000 000 $ par année. Au moment où le gouvernement parle de rationalisation des dépenses, il opte pour la formule la plus dispendieuse pour les contribuables afin de préserver les emplois de la Sûreté du Québec. Nous ne voyons pas d'autre objectif pour justifier la réforme du ministre de la Sécurité publique.» C'était la déclaration de Mme Simard, présidente de l'UMRCQ.

Cette opposition au projet de loi n° 77 ne vient pas que des unions municipales. Aux plans local et régional, plusieurs voix se sont fait entendre, notamment celle de la Montérégie où les élus locaux ont vertement critiqué le ministre de la Sécurité publique sur ce projet de loi. Je me permets de citer, à cet effet, un article paru dans Le Courrier du Sud du 8 septembre 1996, sous le titre: «Les préfets de la Montérégie dénoncent le ministre de la Sécurité publique», dans lequel on peut lire, et je cite, M. le Président: «La table de concertation des préfets de la Montérégie, regroupant les préfets de 15 MRC, s'est réunie, le 23 août 1996, à Sorel. On y a discuté du projet de réorganisation des services policiers mis de l'avant par le ministre de la Sécurité publique du Québec [...]. La Table des préfets de la Montérégie dénonce vigoureusement le projet de réorganisation du ministre de la Sécurité publique. En effet, alors que les coûts seront majorés de près de 50 %, le service de base prévu demeurera le même que celui annuellement dispensé par la Sûreté du Québec. Il s'agit donc d'une augmentation nette sans bénéfices supplémentaires. Qui plus est les municipalités seront forcées de conclure une entente avec la Sûreté du Québec. Pourtant, dans un contexte de restrictions budgétaires, les municipalités doivent avoir le loisir de choisir le meilleur service au meilleur coût.

«À cet effet, les préfets soutiennent que le ministre doit permettre aux municipalités, pour assurer la sécurité publique sur leur territoire, la réalisation d'ententes intermunicipales ou la création d'un corps de police régional. Somme toute, les préfets de la Montérégie demandent au ministre de la Sécurité publique d'axer sa réorganisation de la sécurité publique sur l'allégement des contrôles et des normes afin de laisser aux élus municipaux l'initiative de choisir le type de corps policier qui convient le mieux à leurs besoins.»

Alors, comme on peut le constater, M. le Président, contrairement à ce que dit le ministre, les régions et les municipalités s'opposent à ce projet de loi n° 77, et je suis étonnée de voir que la ministre de l'Éducation, qui est également ministre responsable de la Montérégie, n'ait pas relevé cette opposition dans la région où elle est responsable et n'en ait pas fait état à l'Assemblée nationale. En tout cas, je ne l'ai pas entendue à ce jour.

On le voit, M. le Président, les préfets de la Montérégie et les élus municipaux, qui sont le plus près des citoyens et qui sont à même de définir leurs besoins, dénoncent ce projet de loi n° 77 et réclament du ministre de la Sécurité publique d'abandonner son projet de loi dans l'intérêt des contribuables québécois. M. le Président, plusieurs municipalités de 5 000 habitants et moins ont envoyé au premier ministre, au ministre de la Sécurité publique et au ministre des Affaires municipales des lettres de protestation et des extraits de résolutions adoptées par leurs conseils municipaux respectifs.

Je citerai à ce titre l'extrait du procès-verbal de la municipalité de Saint-Mathias-sur-Richelieu, adopté lors de la session ordinaire de son conseil municipal du 9 septembre 1996, et on constatera, à la lecture de cette résolution, que le monde municipal s'est mobilisé et s'est exprimé contre ce projet de loi, contrairement à ce que prétendent le ministre et certains de ses collègues, en tout cas les quelques-uns qui ont pris la parole sur ce projet de loi dans cette Chambre.

Donc, que dit la résolution de la municipalité de Saint-Mathias-sur-Richelieu? Je me permets, M. le Président, de la citer textuellement:

«Considérant que le ministre de la Sécurité publique a annoncé une augmentation des coûts de 30 000 000 $ par année pour les municipalités utilisant les services de la Sûreté du Québec;

«Considérant que cette augmentation des coûts est de l'ordre d'environ 40 %;

(1 h 20)

«Considérant que le ministre de la Sécurité publique a également déclaré que la révision de l'organisation policière au Québec devra garantir l'équilibre actuellement observé entre la Sûreté du Québec, le service de police de la Communauté urbaine de Montréal et l'ensemble des corps de police municipaux;

«Considérant l'objectif du ministre de la Sécurité publique de consolider la Sûreté du Québec comme corps de police national et d'assurer sa capacité d'intervention sur tout le territoire du Québec;

«Considérant l'intention avouée du ministre de la Sécurité publique d'obliger les municipalités de moins de 5 000 habitants desservies par la Sûreté du Québec de ne recourir qu'aux seuls services de la Sûreté du Québec à l'avenir;

«Considérant l'intention du ministre de la Sécurité publique d'obliger les municipalités de 5 000 habitants et plus d'être desservies par un corps de police municipal afin de maintenir l'équilibre entre les corps policiers du Québec;

«Considérant qu'il serait impossible, selon le projet d'organisation policière du ministre de la Sécurité publique, pour les municipalités de moins de 5 000 habitants desservies par la Sûreté du Québec, de se placer sous la juridiction d'un corps de police municipal;

«Considérant qu'il est dans l'intérêt du monde municipal et des contribuables du Québec de laisser aux municipalités les possibilités d'être desservies par le corps de police de leur choix, compte tenu de la qualité et des coûts des services de police;

«Considérant que l'obligation qu'auraient les municipalités de moins de 5 000 habitants d'être desservies par la Sûreté du Québec aurait pour effet de les condamner à payer une facture sans qu'elles n'aient aucune autre alternative;

«Considérant que l'évaluation des coûts des services que donne la Sûreté du Québec, soit 200 000 000 $, est illusoire et exagérée;

«Considérant que le projet d'organisation policière du ministre de la Sécurité publique n'a pour but que de satisfaire les revendications des syndicats de policiers;

«Considérant que le gouvernement s'est plusieurs fois prononcé en faveur de l'autonomie municipale et contre l'imposition des solutions mur à mur;

«En conséquence, sur proposition de M. Jean Daneau, appuyée par M. Bernard Isabey, il est résolu:

«1° Que le conseil de la municipalité de Saint-Mathias-sur-Richelieu s'oppose au projet d'organisation policière annoncé par le ministre de la Sécurité publique et qu'il fasse connaître au ministre son opposition à ce projet;

«2° Qu'en matière d'organisation policière il est essentiel de laisser la plus grande autonomie possible aux instances municipales;

«3° Que les municipalités locales doivent avoir le choix entre se regrouper au sein d'un corps de police régional, créer leur propre corps de police ou être desservies par la Sûreté du Québec, avec ou sans entente;

«4° Que le monde municipal rejette l'évaluation de 200 000 000 $ que le gouvernement du Québec a estimée pour les services de la Sûreté du Québec;

«5° Que copie de la présente résolution soit envoyée au ministre de la Sécurité publique, au ministre des Affaires municipales, au premier ministre, aux députés de l'opposition ainsi qu'à l'UMRCQ.

«Adopté à l'unanimité. Extrait certifié conforme, Saint-Mathias-sur-Richelieu, ce 20e jour de septembre 1996.»

Voilà, M. le Président, une preuve éclatante de l'opposition du milieu municipal, du milieu local, qui réclame du ministre qu'il revienne sur son projet de loi n° 77 qui n'est pas dans l'intérêt des citoyens, qui n'est pas dans l'intérêt des contribuables québécois. Et, contrairement à ce qui a été affirmé en cette Chambre, le ministre a déjà reçu des résolutions et des lettres s'opposant à son projet de loi, demandant au ministre de le retirer.

Et, pour faire écho à ce que la Montérégie a dit par la voix de ses préfets, je ne peux, M. le Président, et pour toutes les raisons qui ont été exprimées ici par mes collègues, notamment par le critique en matière de sécurité publique, le député de Frontenac, que m'opposer à ce projet de loi, à cette étape de l'adoption du principe. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de La Pinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. J'aimerais vous dire que ça me fait plaisir de prendre la parole cette nuit sur le projet de loi n° 77, sauf qu'en réalité, non, ce serait mentir. J'aurais aimé pouvoir parler en plein jour. Et d'ailleurs j'aurais aimé aussi entendre les députés ministériels parler en plein jour; on ne les entend ni le jour ni la nuit...

M. Jolivet: Wo, wo!

M. Brodeur: ...sauf un. Je dois souligner le courage du député de Laviolette, qui au moins, même si je ne partage pas son opinion, a su se lever ici, en cette Chambre, et en donner une. Les autres, on s'imagine qu'ils n'en ont pas ou qu'on leur donnerait instruction de ne pas les exprimer.

M. le Président, je veux m'exprimer ce soir sur le projet de loi n° 77, un projet de loi qui a pour but strictement d'aller chercher 40 000 000 $ dans la poche des Québécois et des Québécoises. Ce projet de loi a pour but de faire une ponction dans la poche des Québécois, mais aussi d'imposer en quelque sorte la Sûreté du Québec partout au Québec. C'est un genre de tutelle, comme le disait le député de Frontenac ce matin, de la gestion policière des petites municipalités.

D'ailleurs, plusieurs collègues ont cité des articles de journaux. J'en ai un autre entre les mains, ici, où on dit carrément qu'à l'avenir la gestion policière sera carrément entre les mains de l'arbitraire du ministre. Et j'ai ici l'extrait d'un journal d'ailleurs que le ministre lit sûrement tous les jours, un journal très urbain, La Terre de chez nous , et le titre, c'est «Revendications de l'UMRCQ: choisir sa police.» Donc, à la face même de l'article, on voit que les dirigeants de l'UMRCQ se sentent brimés dans leur choix.

Et, pour illustrer les dires de l'UMRCQ, je vais vous citer une partie d'un paragraphe qui est titré «Pour l'autonomie municipale». «L'UMRCQ revendique le droit des municipalités de créer leur propre corps de police, seules ou avec d'autres, de conclure des ententes intermunicipales ou de céder leurs compétences à la MRC ou, enfin, de s'en remettre à la Sûreté du Québec. Dans la revue Quorum de novembre, la présidente, Jacinthe Simard, déplore que le ministre fasse fi des 700 résolutions d'opposition à sa réforme adoptées par les municipalités.» Donc, M. le Président, lorsqu'on lit attentivement la loi, on voit que le ministre se réserve un pouvoir très discrétionnaire d'accepter ou pas qu'une municipalité forme avec d'autres ou s'incorpore à d'autres corps de police. Donc, on peut imposer, en fin de compte, la Sûreté du Québec à toutes les petites municipalités.

M. le Président, ce que je déplore beaucoup dans ce projet de loi aussi, c'est qu'on s'attaque aux municipalités les plus faibles. On a 1 200 petites municipalités au Québec. Moi, dans mon comté, j'en ai plusieurs. J'en ai plusieurs, des municipalités qui ont beaucoup de kilométrage de routes, qui ont peu – comment dire – de propriétés imposables où on peut aller chercher des taxes. Donc, chaque augmentation est d'autant plus importante pour ces petites municipalités là. On va faire porter cette augmentation de coût, qui est souvent du double pour ces petites municipalités là, sur les contribuables.

Ces petites municipalités là, aujourd'hui, probablement... Je sais que, dans mon comté, ils n'ont pas le câble, loin en campagne comme ça; donc, ils ne peuvent pas nous écouter. On en profite pour leur en passer des petites vites une fois de temps en temps, comme ça. Les grosses municipalités, naturellement, sont plus équipées pour se défendre, en fin de compte.

M. le Président, l'UMRCQ était même réduite à menacer le ministre de déverser des ordures devant le parlement. Le même article le mentionne, et je veux vous en citer un petit passage ici: «L'UMRCQ menace de déverser des ordures devant l'Assemblée nationale si le ministre de la Sécurité publique, M. Robert Perreault, continue d'ignorer l'opposition de ses membres à la réforme policière qu'il veut faire adopter d'ici la fin de décembre.

(1 h 30)

«La présidente, Mme Jacinthe Simard, ne cache pas qu'un tel moyen de pression est relié au succès récemment remporté par l'Union des producteurs agricoles, qui menaçait d'envahir la colline parlementaire avec des épandeurs à fumier. Son analyse la porte à croire que le gouvernement – du premier ministre actuel, pour ne pas prendre le nom d'un député en place ici – ne semble malheureusement sensible qu'à de telles manifestations.»

Donc, M. le Président, il y a de quoi s'inquiéter. Il y a de quoi s'inquiéter puisque, malgré l'opposition, je dirais, de la très grande majorité des intervenants, le ministre n'a pas su écouter et, en fin de compte, va nous passer cette loi-là probablement une nuit quelconque de cette semaine, pour aller en commission parlementaire et sûrement revenir ici dans les mêmes circonstances.

Et puis j'espère qu'il y a quelques personnes qui nous écoutent encore cette nuit. J'aimerais imager les conséquences pour les municipalités. Je vais prendre l'exemple d'une petite municipalité de mon comté, qui s'appelle Saint-Joachim-de-Shefford. Saint-Joachim-de-Shefford, c'est une municipalité où il y a 1 172 personnes qui y résident, environ 300 unités résidentielles imposables. Juste cette année, ces petites municipalités là ont dû subir des coupures. Vous savez que chaque député en zone rurale a un budget d'amélioration du réseau routier. Donc, on sait, M. le Président – puis je crois que, dans votre comté, vous avez un réseau routier assez important aussi – qu'on a dû subir des coupures qui ont influencé directement le budget de ces municipalités-là.

Donc, Saint-Joachim-de-Shefford, pour prendre cet exemple-là, a reçu une coupure, cette année, de 52 500 $, strictement sur le plan de l'amélioration du réseau routier. Ils ont appris aussi de la part du vice-premier ministre et ministre des Finances qu'ils allaient recevoir 10 000 $ de moins en TVQ. Et, dans le projet de loi qui nous occupe, on apprend aujourd'hui – on apprend... on a appris il y a quelques semaines – que la municipalité devra payer 40 000 $ de plus. Saint-Joachim-de-Shefford, ça a 75 km de route, ça a 1 200 habitants, plus ou moins, et puis ça a 300 unités imposables. Donc, c'est une augmentation qui est très importante. Présentement, le rôle d'évaluation: on doit payer 0,6395 $ du 100 $ d'évaluation. Je parlais ce matin avec le secrétaire-trésorier de la municipalité, qui dit qu'il devra imposer, que la municipalité devra imposer à ses concitoyens une augmentation entre 0,15 $ et 0,25 $ du 100 $ d'évaluation; c'est excessivement important. Ça veut dire que dans cette petite municipalité là, dans cette petite ville là, qui est environ à 10 km de Granby, les gens vont payer plus cher de taxe que dans la grande ville, sans avoir, en fin de compte, les mêmes services. On peut se poser des questions sur les qualités régionalistes de ce gouvernement-là, lorsqu'on voit qu'on envoie ces taxes-là à ces municipalités-là qui sont loin des grands centres puis qui cherchent à se développer.

M. le Président, là-dessus, je parlais à la même municipalité. Et, par hasard, justement, ce matin, ils ont reçu une lettre du ministre des Affaires municipales les avertissant déjà qu'ils allaient passer, en fin de compte, à la médecine du gouvernement actuel. Je veux vous en citer quelques passages. Lorsqu'on sait ce qui attend les municipalités au cours des prochains mois et de la prochaine année, on peut lire de quelle façon le gouvernement traite ces gens-là. On commence... c'est-à-dire, il y a trois pages, puis on parle d'autres choses la plupart du temps. La lettre est adressée au maire: «La création d'emplois et l'assainissement des finances publiques sont au centre des préoccupations du gouvernement.» Ça fait qu'on se demande, en commençant, où on s'en va avec ça. Ça doit être très bien, pour le reste. Ce dont on s'aperçoit, si on prend l'essentiel de chaque paragraphe, et je vous en cite quelques-uns: «Tout en conservant le plafond actuel de 0,35 $ du 100 $ d'évaluation, le tarif minimum des services de base de la Sûreté du Québec passe de 0,10 $ à 0,18 $ du 100 $ d'évaluation. Vous trouverez en annexe le calcul effectué par le ministère des Affaires municipales du montant estimatif de la somme payable par votre municipalité pour ces services pour l'exercice 1997.» Parce que, en annexe, on a la facture. Paragraphe suivant.

«Le ministre d'État de l'Économie et des Finances – je ne le nommerai pas, il paraît qu'on ne peut pas citer le nom d'un député ici même s'il fait partie intégrante de la lettre – a annoncé, le 28 novembre, l'abolition des remboursements de la TVQ sur les achats de biens et services effectués par les municipalités et leurs organismes. Cette mesure est apparue la plus adéquate dans les circonstances à titre de contribution des municipalités à l'assainissement des finances publiques.»

En fin de compte, M. le Président, vous savez bien que cette facture-là est renvoyée à nos concitoyens, puis c'est des taxes directes qui seront prises dans leurs poches. Et on termine, et c'est presque de la tragicomédie, M. le Président, mes concitoyens l'ont pris, en fin de compte, presque comme un affront: «Je vous convie donc à relever ce défi et je puis vous assurer de toute ma collaboration ainsi que celle du gouvernement pour réussir cette opération.»

Donc, M. le Président, avec des amis comme ça, on n'a pas besoin d'ennemis. Pour imager un peu le calcul, les conséquences de cette loi-là sur chacune des municipalités, j'ai justement la facture qui est envoyée ici à la municipalité de Saint-Joachim-de-Shefford où le coût de la Sûreté du Québec sera dorénavant de 82 481 $ alors qu'il était de 43 000 $ cette année. Et ça, ce n'est pas seulement pour cette municipalité-là. J'ai des municipalités, M. le Président, qui doivent ressembler énormément aux municipalités de votre comté.

J'en ai une ici, paroisse de Roxton Pond, une petite municipalité de 2 000 habitants qui payaient 106 000 $ pour leur police, en paieront dorénavant 201 000 $. Le petit village de Roxton passe de 25 000 $ à 46 000 $. Sainte-Cécile-de-Milton, une autre municipalité qui a seulement 2 000 habitants et 60 km de routes à entretenir, passe de 106 000 $ à 195 000 $. Et le canton de Shefford qui passe de 256 000 $ à 426 000 $.

Donc, M. le Président, pour des petites municipalités, ce sont des proportions d'augmentation excessivement importantes, d'autant plus que la qualité du service n'a pas été augmentée. Et le ministre se souviendra, il n'y a pas si longtemps, de la fermeture de certains pénitenciers. Et cette région-là était affectée probablement plus que certaines autres. Il y a le pénitencier de Waterloo qui a été fermé, le pénitencier de Cowansville aussi. Le pénitencier de Cowansville servait, par exemple, à garder des détenus ou des prévenus qu'on avait ramassés durant la nuit dans tous ces petits villages. Maintenant, il faut aller les porter à Sherbrooke. Pendant ce temps-là, les municipalités n'ont pas le service auquel elles devraient s'attendre; puis, en plus, elles vont payer deux fois le prix l'année prochaine qu'elles payaient cette année avec deux fois moins de service.

Donc, M. le Président, je citais la lettre du ministre des Affaires municipales tantôt qui disait: «Je vous convie donc à relever ce défi et je peux vous assurer de toute ma collaboration – je me demande laquelle collaboration – ainsi que celle du gouvernement pour réussir cette opération.» Il faut se demander de quel genre d'opération il s'agit. Quant à moi, ce n'est pas une opération qu'on peut qualifier de catholique. On sait, puis je le répète encore, puis le ministre l'a sûrement entendu quelques fois aujourd'hui, que l'ordre vient tout simplement... Ce n'est sûrement pas une idée qui surgit de son ministère, mais plutôt du ministère des Finances afin de faire tout simplement une ponction dans les poches des citoyens.

Parce qu'il faut savoir, M. le Président... J'ai parlé aujourd'hui avec quelques élus de ma région. Ils sont très inquiets, surtout insultés, parce que, en définitive, ils devront augmenter leurs taxes municipales, en fin de compte refiler cette facture-là à leurs concitoyens, et ce sont ces gens-là qui vont porter l'odieux de cette augmentation de taxes. Donc, ils devront expliquer à chacun de nos concitoyens que ce ne sont pas eux mais bien le gouvernement actuel. À la prochaine élection, probablement que mon adversaire, qui sera un adversaire péquiste, dira: C'est probablement la faute de l'administration municipale si vous avez augmenté vos taxes; probablement que le maire doit être libéral, il a mal administré. En fin de compte, on fait porter l'odieux sur les administrations municipales.

(1 h 40)

Donc, M. le Président, lorsqu'on ne dit mot, lorsqu'on ne se défend pas de ces choses-là... On dit: Qui ne dit mot consent. C'est, de toute évidence, qu'on rejette l'odieux à tous ces gens-là, à toutes ces bonnes gens qui font partie de nos conseils municipaux de ces petites municipalités là.

M. le Président, je voudrais aussi élaborer sur le développement régional. Il n'y a pas si longtemps, il y a à peine deux ans, on entendait le député de Joliette nous dire qu'ils allaient s'attaquer au développement régional. On entendait aussi le premier ministre, il n'y a pas si longtemps, au mois de mars, nous dire que le travail n'avait pas été fait pour développer nos régions. M. le Président, ce millier de municipalités là, pour la plupart, font partie intégrante des régions du Québec. Et ce n'est pas en surtaxant, en décourageant ces citoyens-là à s'implanter dans ces régions souvent éloignées là, ce n'est pas non plus en taxant les enfants de ces citoyens-là – souvent des agriculteurs ou des personnes qui veulent s'établir au village, plus près des parents – ce n'est pas en les taxant de cette façon-là – en fin de compte, ils seront plus taxés que les grandes municipalités, en toutes proportions, avec moins de services – qu'on va peupler nos régions au Québec. Donc, on ne peut penser que par ce pelletage dans les cours des municipalités, comprenant la taxe du ministre, comprenant les décisions de la TVQ, comprenant les coupures aussi dans l'amélioration du réseau routier, le développement des régions va s'en trouver amélioré.

On ne s'est pas seulement attaqués à ça. Donc, on peut estimer la somme à environ 40 000 000 $ de coupures qui sont refilées à ces petites municipalités là. On s'est aussi dit: Comment aller chercher quelques dollars de plus? On a pensé aller chercher 8 000 000 $ de plus. Puis là il fallait se trouver un prétexte – parce que maintenant tout est prétexte à être taxé – donc, on s'est dit: On a passé une loi sur 1 % sur la taxe sur la masse salariale, on va aller chercher 8 000 000 $, l'Institut de police, c'est de la formation, on va passer ça de cette façon-là. Donc, tout est prétexte à taxation, tout est prétexte à aller chercher des taxes pour toutes sortes de choses. Peu importe la raison, on va en trouver une qui se tient debout pour justifier notre augmentation. Donc, on a une augmentation de taxe qui est passée aux municipalités de 8 000 000 $ pour les municipalités de 5 000 habitants et plus.

M. le Président, probablement que c'est un avant-goût de ce qui va se produire en 1997. On a entendu parler d'augmentation, de coupures additionnelles dans la santé, tout près de 1 000 000 000 $. Je vois la ministre de l'Éducation qui est là, qui va s'apprêter, j'imagine, dans les prochains mois, à nous dévoiler une opération de coupures elle aussi. Et là on a trouvé des trucs, et le ministre de la Sécurité publique nous dévoile un des premiers trucs: on taxe pour l'Institut de police. Probablement qu'on pourrait faire la même chose, j'imagine, pour l'Institut d'hôtellerie. Pourquoi ne pas taxer les restaurateurs? On peut dire aussi qu'on pourrait taxer les agriculteurs pour financer l'ITA à Saint-Hyacinthe. On peut y aller, on peut en imaginer des taxes. Probablement qu'ils en ont peut-être dans ce genre-là dans leur carton. On pourrait même, par exemple, taxer les camionneurs pour réparer des routes. C'est tout bien, bien noble ces taxes-là. Sauf que c'est des taxes, M. le Président. On peut aller en chercher de toutes les façons possibles et imaginables. Donc, ce sont des prétextes. On s'invente des prétextes. On va en trouver plusieurs l'an prochain, en 1997, des prétextes, j'imagine, pour nous donner des taxes supplémentaires.

Vous me dites qu'il me reste une ou deux minutes. Une minute. Donc, M. le Président, je voudrais profiter de la dernière minute qu'il me reste pour déposer une motion pour que le gouvernement puisse réfléchir et voir peut-être à ce que le projet de loi n° 77 soit bonifié. Et pour cette raison, M. le Président, je dépose cette motion de report.


Motion de report

Je fais donc motion pour que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots «soit maintenant adopté» par les mots «soit adopté dans six mois». Donc, M. le Président, je pense que ça donnerait le temps, premièrement, à chacune des municipalités concernées peut-être de se revirer de bord, d'expliquer à leurs concitoyens que possiblement le gouvernement va les taxer et que cette taxe-là ne vient non pas d'eux, mais c'est une façon autre qu'ils ont trouvée de taxer et de pelleter des déficits dans les cours des municipalités.

Donc, M. le Président, je désire déposer cette motion. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a une motion de report. Si les deux partis sont d'accord, nous allons adopter la même distribution du temps, parce que vous savez que ça ouvre à un débat restreint de deux heures. Si vous êtes d'accord, nous allons partager le même... M. le leader.

M. Lefebvre: Après une réunion des leaders... Mme la députée de Terrebonne n'était pas en fonction hier soir et ça ne serait pas bête qu'on répète devant elle les règles qui nous régissent lorsqu'on a à discuter de cette importante motion qui vient d'être déposée par le député de Shefford, motion de report, M. le Président. Alors, je suggère une réunion des leaders.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons faire une réunion des leaders pour s'entendre sur le partage du temps. Alors, nous suspendons quelques minutes.

(Suspension de la séance à 1 h 46)

(Reprise à 1 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À la suite de la réunion avec les leaders, voici la répartition du temps, des deux heures de débat restreint. Il y aura 10 minutes de réservées pour les députés indépendants et le reste du temps sera réparti à 50 % pour chacun des groupes parlementaires. Le temps non utilisé par un groupe sera transféré à l'autre groupe ou aux autres groupes – c'est le cas des indépendants – et puis il n'y a pas de limite dans les interventions.

Alors, nous sommes prêts à céder la parole au premier intervenant dans ce débat de deux heures.

M. Lefebvre: M. le Président, je voudrais rappeler à Mme la députée de Terrebonne, leader adjointe du gouvernement, qu'il y a une décision qui a été rendue par Mme Louise Bégin, à l'époque vice-présidente de l'Assemblée, établissant le principe voulant que le premier intervenant sur une motion de report soit à l'opposé de celui qui a proposé la motion, à savoir, dans le présent débat et dans le présent cas, un intervenant qui vient des ministériels. Alors, j'écoute, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je crois que la question de l'alternance est quand même laissée à celui qui refuse d'utiliser son droit d'alternance; on ne peut pas l'obliger à le faire. S'il le veut, on doit le lui céder, mais, en l'occurrence, je ne peux pas... Alors, je suis obligé de reconnaître le premier qui se lève. Et, si personne ne se lève, je mets la motion aux voix.

Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Vous avez très bien compris que, de ce côté-ci, M. le Président, on a des choses à dire, on n'a rien à prouver, sauf qu'il faut évidemment soutenir les motions que l'on propose. Du côté des ministériels, peu importe ce qu'on propose à l'attention des députés de l'Assemblée, c'est, sauf de très, très rares exceptions, le silence total, c'est le mutisme le plus complet. Tout ce qu'on souhaite, M. le Président, c'est que l'horloge tourne, qu'on fasse le temps qu'il faut puis qu'on sorte de l'Assemblée nationale avec le principe du projet de loi. On est prêt, pour ce faire, à endurer à peu près toutes les agressions de l'opposition en silence, un peu comme des martyrs écrasés devant le temps.

Moi, je trouve ça pitoyable, M. le Président. Puis un Parlement, ce n'est pas ça. Un Parlement, c'est le forum par excellence où on peut et on doit s'exprimer. Je trouve ça désolant de voir des parlementaires qui sont payés pour ça, ils sont payés pour s'exprimer, M. le Président, ils sont payés pour donner leur point de vue. Qu'ils soient ministres, qu'ils soient leader du gouvernement, leaders adjoints ou simples députés, ils ont la responsabilité de soutenir leur point de vue, ils ont la responsabilité de soutenir par la parole les projets de loi qu'ils défendront par un vote qu'ils donneront sur le principe, probablement, M. le Président, demain à quelque part, là, sur la fin de l'après-midi ou en soirée. Mais de se soumettre à un exercice aussi dévalorisant pour le parlementarisme, moi, je trouve ça humiliant. Et, de notre côté, M. le Président, on essaie de rééquilibrer le débat. Alors, on parle plus qu'on devrait peut-être, pour combler l'absence d'idées, M. le Président, de l'autre côté, pour combler l'absence de courage. Et, en plus, j'ai l'impression qu'on combine, du côté des ministériels, deux choses: le silence, le mutisme et la nuit. À 1 h 55, c'est moins gênant. On prend pour acquis qu'il y a moins de gens qui nous regardent. C'est moins humiliant parce que ça se fait à l'extérieur du parlement, lumières closes.

Je vois Mme la ministre de l'Éducation, M. le Président, qui, plutôt que d'être ici, à 1 h 55, à lire sa correspondance, à écrire à ses commettants... Parce qu'en plus d'être ministre elle est députée. Elle est d'abord et avant tout députée; elle est députée de Taillon. Ses concitoyens et concitoyennes, ses électeurs et ses électrices sont affectés par le projet de loi n° 77. Est-ce que la ministre de l'Éducation, qui bouge, qui grouille d'envie de parler mais qui n'ose pas le faire parce que ça irait à l'encontre de la stratégie passive du gouvernement, est-ce que la députée de Taillon, quoique très occupée, j'en conviens, a quand même pris une demi-heure, une heure pour bien comprendre la portée du projet de loi n° 77, M. le Président?

Mme Caron: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...M. le leader adjoint de l'opposition. Mme la leader adjointe du gouvernement, c'est une question de règlement?

Mme Caron: Oui, M. le Président. Le leader adjoint de l'opposition sait très bien qu'il ne peut pas s'adresser directement à un député et ne peut même pas souligner la présence ou l'absence d'un député en cette Chambre. Alors, je pense qu'on n'aurait même pas à lui rappeler ce règlement; il est supposé le connaître.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader, vous savez que vous devez vous adresser à la présidence, et tout. Alors je vous inviterais, s'il vous plaît...

M. Lefebvre: Est-ce que Mme la députée de Taillon... Je ne m'adresse pas à la députée de Taillon, là; je parle d'elle. C'est complètement différent. Je n'ai pas dit: Vous, Mme la députée de Taillon, est-ce que vous m'écoutez? Ce n'est pas ça que j'ai dit. Nuance! Est-ce que, M. le Président, la députée de Taillon ou est-ce que M. le député de Lévis a pris connaissance du projet de loi n° 77? Je suis parfaitement dans la règle quand je m'exprime comme ça.

Alors, voici que le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques, égal à lui-même, fait son entrée – ça lui ressemble – fait des clowneries, des pitreries et des insignifiances, M. le Président, et rien d'autre.

Mme Caron: Question de règlement.

M. Lefebvre: Vous voyez, M. le Président. Vous voyez, là!

Mme Caron: Question de règlement!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. S'il vous plaît! S'il vous plaît! Ça va, là. Ça va. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à vous asseoir. Je vous inviterais, s'il vous plaît, à respecter le droit de parole pour ne pas susciter, par des interventions, toutes sortes de réactions. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, vous faites quoi avec le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques? Vous avez vu. Vous avez vu et vous avez entendu.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui. J'ai entendu, oui. Mais j'ai entendu aussi la façon dont vous l'avez qualifié, et il y a eu la réaction de part et d'autre. C'est pour ça que j'ai dit qu'il fallait éviter, si vous voulez, par des attitudes de provocation, de susciter... Non. S'il vous plaît. M. le leader adjoint...

M. Lefebvre: M. le Président, vous avez voulu me rappeler que toute vérité n'est pas bonne à dire; j'en conviens, j'étais... Il est 2 heures du matin, c'est déjà assez difficile de vivre... Il y a trois ou quatre insignifiants puis bouffons, à ma gauche, là...

Mme Caron: M. le Président! M. le Président!

Le Vice-Président (M. Brouillet): J'ai tout compris. S'il vous plaît! J'ai tout compris. Bon.

S'il vous plaît. Si vous voulez prendre vos places. M. le député. M. le député! J'inviterais, s'il vous plaît...

Alors, je vous demanderais de respecter le droit de parole, et vous aurez tout le loisir d'intervenir, si vous le désirez, à votre tour. Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je trouve ça désolant de devoir faire les commentaires que j'ai faits, ce n'est pas dans mes habitudes.

Une voix: Ha, ha, ha!

(2 heures)

M. Lefebvre: Si, comme je disais à plus ou moins 2 h 30 hier soir, ou cette nuit, il y en a qui ne sont pas en état d'être à l'Assemblée nationale parce qu'ils ne sont pas capables de supporter la fatigue, vous devriez les inviter à quitter l'Assemblée nationale, à nous laisser travailler, à nous laisser nous exprimer, à nous laisser, du côté de l'opposition... Et vous savez que la présidence a la responsabilité, puis c'est consacré depuis des millénaires – figure de style – que la présidence a la responsabilité de protéger les droits de la minorité. Vous le faites et vous le faites très bien, M. le Président, et, si vous avez l'occasion, en caucus, de l'expliquer à vos collègues, ce serait peut-être apprécié, du côté de l'opposition.

Depuis que le Parlement du Québec existe, depuis plus ou moins 200 ans, c'est une règle qui a toujours été respectée, et j'en connais, du côté des ministériels, qui, lorsqu'ils ont l'occasion de le faire, nous servent cette leçon-là. Alors, j'ai des choses à dire, il y a d'autres collègues qui ont des choses à dire. Si on est en désaccord, parfait. C'est ça, un Parlement. Qu'on se lève, qu'on le dise dans des propos corrects, puis on va l'accepter, de notre côté, puis peut-être qu'on pourra nous faire changer d'idée, peut-être qu'on réussira à nous expliquer que le projet de loi n° 77 n'est pas ce qu'on y a vu, une agression contre à peu près tous les groupes dont on parle dans ce projet de loi là.

Évidemment, M. le Président, lorsqu'on s'écrase comme on le fait du côté de nos amis d'en face, entendre les commentaires qui ont été faits par la vingtaine de députés libéraux avec des argumentations très serrées, des interventions très bien préparées sur la base essentiellement de témoins qui sont venus jeudi dernier expliquer au ministre de la Sécurité publique pour quelles raisons ils étaient en désaccord avec le projet de loi n° 77, évidemment que ça fait mal. Ça fait mal surtout pour des députés de régions, des députés qui représentent des circonscriptions rurales, parce qu'ils devront rendre compte de leur inaction. Ils devront rendre compte à leurs commettants, à leurs électeurs, à leurs élus municipaux de la passivité qu'ils ont manifestée tout le long du débat du projet de loi n° 77. Ça, ça fait mal. C'est dur à vivre, ça, M. le Président, c'est dur à vivre, se faire dire en plein parlement, en pleine lumière – ici, c'est éclairé, à l'extérieur on est dans la pénombre parce qu'il est 2 h 5 du matin – qu'on n'a rien à dire, qu'on ne défend pas nos électeurs, nos électrices, ce pourquoi on a été élus le 12 septembre 1994.

Un député, M. le Président, c'est d'abord et avant tout quelqu'un qui représente les intérêts de sa population, de sa circonscription au Parlement, et non pas l'inverse. C'est surtout, d'abord et avant tout, un défenseur de sa population et non pas le défenseur du gouvernement.

M. le Président, le député de Sainte-Marie– Saint-Jacques continue à faire des insignifiances, des singeries. Il a un papier là, puis il fait des grimaces. Je l'ai vu...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il se fait tard, hein. Écoutez, je n'ai pas vu – j'étais à vous écouter – ce qui s'est passé. Alors, que chacun prenne ses responsabilités et tienne compte du contexte un peu difficile, à cette heure-ci. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Heureusement, M. le Président, que, du côté des amis d'en face, sauf de très rares exceptions, ce sont des députés, hommes ou femmes, avec qui on a beaucoup de plaisir à travailler, qui respectent les règles de l'échange. Il y a des exceptions. Sainte-Marie–Saint-Jacques, c'en est une, exception, et il rend mal à l'aise ses propres collègues.

M. le Président, il y en a un autre là que je vois accoté sur la colonne...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Allez, monsieur, un peu plus vite, vous faites perdre le temps aux autres, là. Allez vous asseoir.

M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Merci, M. le Président, et je sympathise beaucoup avec vous, M. le Président. Le rôle le plus ingrat, dans des situations comme celles qu'on vit présentement, c'est vous qui l'avez, M. le Président, de devoir ramener à l'ordre des députés qui, pour certains, sont au travail depuis huit, neuf heures, là, ce matin, et la fatigue aidant, on fait des insignifiances, des bouffonneries. Ce n'est pas nécessairement volontaire. Pour certains, M. le Président, c'est le système nerveux là qui est en train de craquer, puis c'est vous qui devez supporter ça, M. le Président, c'est vous qui devez maintenir l'ordre. Savez-vous pourquoi? Parce qu'on siège, contrairement à ce qu'on nous avait dit, M. le Président, à des heures où on devrait être chez nous, à récupérer, à dormir, pour reprendre ce matin, à dix heures, à une heure normale. C'est ce qu'on nous avait dit qu'on ferait. M. le Président, vous le savez, vous êtes associé avec M. le Président de l'Assemblée nationale à une démarche qui vise à modifier nos règles, les règles de nos débats parlementaires.

Et la façon, M. le Président, qu'on vous supporte du côté du gouvernement, c'est que deux nuits de suite – hier matin, 2 h 45, il est 2 h 10, M. le Président, on est sur un débat qui va prendre un minimum de deux heures, on ne laissera pas l'Assemblée nationale avant quatre heures du matin – le gouvernement, M. le Président, hypocrite, ce n'est pas ça qu'on nous avait dit, M. le Président, ce n'est pas ça qu'on nous avait dit... qu'on allait siéger à des heures normales...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition, je crois que vous avez employé un mot, ici, qui provoque des réactions, là. Vous savez que ce n'est pas parlementaire d'employer cette expression-là, «hypocrite». Je vous demanderais de la retirer, s'il vous plaît, pour poursuivre après.

M. Lefebvre: Le gouvernement, M. le Président, qui ne respecte pas sa parole, qui ne fait pas ce qu'on avait dit, à l'époque, en campagne électorale et après. Je me souviens du gouvernement dirigé par M. Parizeau, de septembre 1994 jusqu'à janvier dernier, avec comme leader M. le député de Joliette, qui avait pris des engagements fermes en campagne électorale: jamais plus on allait siéger dépassé minuit, M. le Président. C'est systématique, pire que tout ce qu'on a connu sous le gouvernement libéral.

Ça, s'il n'y avait que ça, s'il n'y avait que ça, M. le Président. Si ce n'était que cette seule promesse qu'on avait trahie, on pourrait s'en accommoder parce que, vous savez, essentiellement, ça n'affecte, à première vue, que les parlementaires. Mais, lorsqu'on réalise ce que le gouvernement fait dans un projet de loi comme le projet de loi n° 77, là c'est vraiment, M. le Président, la trahison d'engagements pris en campagne électorale et dans les mois qui ont suivi, et également M. le Président, trahison répétée lors de l'arrivée du nouveau premier ministre, député de Jonquière.

La motion de report, essentiellement, M. le Président, est basée, je l'ai dit tout à l'heure, sur les témoignages entendus en commission parlementaire jeudi dernier. Tous les groupes, tous les groupes, sauf exception – le Directeur général des élections, évidemment, n'a pas donné d'opinion sur l'opportunité de reporter le projet de loi – tous les autres groupes, et chez certains de façon très, très claire, très, très insistante, M. le Président, on demande au gouvernement du Québec et à son ministre de la Sécurité publique de reporter à plus tard l'intention du gouvernement inscrite dans le projet de loi n° 77 et, dans certains cas, d'abandonner, purement et simplement, M. le Président, la décision du gouvernement de, si on veut résumer le projet de loi n° 77, imposer 40 000 000 $ de nouvelles taxes aux citoyens et citoyennes du Québec pour le financement de la Sûreté du Québec, d'imposer aux citoyens et citoyennes du Québec, M. le Président, un autre montant de 8 000 000 $ pour le financement de l'Institut de police de Nicolet.

(2 h 10)

M. le Président, on est inquiet, puis ça a été très clairement indiqué par certains intervenants lors de la commission parlementaire de jeudi dernier. On est inquiet également sur les modifications qu'on veut apporter à la direction de l'Institut de police, M. le Président, entre autres au conseil d'administration, M. le Président.

On a également exprimé au ministre et aux membres de la commission des institutions des réserves sur le processus que va enclencher le ministre visant à permettre à des policiers d'occuper des postes d'élus, peu importe à quel niveau. Alors, sur l'essentiel, parce que c'est ce que je viens de résumer, il y a désaccord à peu près total et unanime.

C'est ce qui amène une mise au point très, très, très, très, M. le Président, agressive de l'UMRCQ, exprimée par sa présidente, Mme Jacinthe Simard. C'est peut-être l'attaque la plus virulente à laquelle le ministre a eu droit dans tout ce qui a été dit, dans tout ce qui a été écrit, l'attaque de l'UMRCQ. On accuse le gouvernement, M. le Président, dans un premier temps sur la démarche du gouvernement, d'avoir manqué à sa parole. On accuse le gouvernement carrément d'avoir dit, quelque part en juin, juillet, août dernier, une chose et de faire le contraire dans le projet de loi.

Ça, M. le Président, c'est... Manquer à sa parole puis mentir, c'est pareil. C'est pareil, M. le Président, il n'y a pas de différence. Ici, on ne peut pas dire qu'un parlementaire ou qu'un ministre ment, on peut dire qu'il a manqué à sa parole. Mais, si, M. le Président, on prend la définition, dans le dictionnaire «Larousse» ou dans «Le Petit Robert», manquer à sa parole et mentir, ça veut dire la même chose. Alors, moi, je ne dis pas que le ministre a menti, je dis qu'il a manqué à sa parole. Voyez-vous? Puis je suis correct. Et je le dis parce que je le lis dans le projet de loi n° 77, mais surtout, M. le Président, parce que je suis appuyé, avec mes collègues, par Mme Jacinthe Simard, qui n'a aucun intérêt personnel, aucun intérêt personnel.

Moi, je pourrais, à la rigueur, me faire accuser, M. le Président, d'avoir un intérêt personnel en tentant de faire croire aux Québécois puis aux Québécoises, à ma population, que le gouvernement n'est pas correct. Ça pourrait me permettre éventuellement d'être réélu. Ce n'est pas le cas de Mme la présidente de l'UMRCQ: elle n'a pas d'intérêt personnel, ni non plus les élus municipaux qui ont la responsabilité de gérer 1 100 municipalités au Québec. Leur seul objectif, c'est de bien représenter les intérêts de leurs concitoyens et concitoyennes.

Lorsque ces gens-là dénoncent avec autant de vigueur – je pense qu'on peut s'entendre là-dessus... les ministériels, depuis le temps qu'on en parle, depuis le temps qu'ils lisent dans les journaux, qu'ils écoutent et à la radio et qu'ils voient à la télévision, M. le Président, les attaques sans précédent des groupes concernés par le projet de loi n° 77, je ne peux pas imaginer que ça n'a pas inspiré un peu de réflexion. Je suis convaincu que les députés ministériels, particulièrement ceux qui sont membres de la commission des institutions, M. le Président, qu'ils sont arrivés à la conclusion que ça ne peut pas être autre chose. Je suis convaincu qu'ils sont arrivés à la conclusion que le gouvernement dont ils sont membres trahit les engagements qu'il a pris.

Comment vont-ils gérer cette situation-là? Je ne sais pas, M. le Président, c'est leur problème. La responsabilité qu'on a, nous, c'est de l'expliquer d'une façon correcte et objective à la population du Québec, puis c'est ce qu'on fait. Et je mets le ministre au défi, moi, de contredire, M. le Président, sur l'essentiel, tout ce qui a été dit aujourd'hui par mes collègues et moi-même; je suis convaincu que tout ce qu'on a dit est vrai et qu'il ne peut pas, M. le Président, prouver le contraire parce que c'est appuyé, encore une fois, par des intervenants comme Mme Simard, qui dit au ministre: «Nous avons deux revendications importantes à faire à ce moment-ci, c'est de laisser la liberté de choix.»

Le ministre s'est fait dire ça, M. le Président, par à peu près tous ceux et celles avec qui il a discuté de son projet de loi: la liberté de choix. L'autonomie des municipalités de pouvoir décider de quelle façon on protégera nos populations, par la Sûreté du Québec ou par des policiers municipaux, c'est ça, la liberté de choix. C'est ce que Mme Simard a demandé au ministre et également de ne pas indiquer de date butoir pour les élus municipaux, date butoir du 31 décembre. Mme Simard, pour et au nom de 5 000 000 de citoyens répartis sur et à l'intérieur d'environ 1 100 municipalités, demande au ministre de reporter à plus tard, j'allais dire l'adoption du projet de loi, ce n'est pas ça, là, de reporter à plus tard, d'annuler l'intention du gouvernement. Mme Simard demande au gouvernement, purement et simplement, M. le Président, d'abandonner le projet de loi.

Alors, nous, parce que, ça, on y renonce, on sait qu'on n'y arrivera pas, alors on y va avec ce qu'il nous reste: la motion de report, M. le Président. Six mois. Donnez-vous... M. le Président, que le ministre et son équipe, que ses conseillers qui l'entourent, ses députés qui auront eu le temps de réfléchir, de se faire vraiment bien expliquer par leurs concitoyens et concitoyennes qu'ils ne font pas leur devoir, qu'ils n'ont pas compris la portée du projet de loi n° 77, M. le Président... Six mois, c'est court; ce n'est pas beaucoup, M. le Président.

La Fédération des policiers municipaux du Québec, M. Michel Martin, témoignage extrêmement sévère sur l'ensemble du projet de loi. Mais, puisque, sur une motion de report, j'ai à démontrer si c'est justifié du côté de l'opposition, à 2 h 20 du matin, M. le Président, de demander le report du projet de loi, je veux être très pertinent, l'article 211, je me limiterai, dans ma démonstration, à rappeler au ministre ce que les intervenants ont dit en regard d'un report, d'un moratoire.

M. le Président, tous sans exception, un deuxième, M. Michel Martin, président de la Fédération des policiers municipaux du Québec: «À cet égard, nous croyons qu'il y aurait lieu de décréter un moratoire d'au moins un an.» On demande six mois, nous. Un an, M. le Président.

Le député de Masson, qui est un député très proche de sa population, bon député, M. le Président, respectueux des usages des parlementaires des deux côtés de la Chambre, je suis convaincu que ça l'agace, le projet de loi n° 77, M. le Président. Lui, il parle à son monde. Il va les voir en fin de semaine. Il les a vus en fin de semaine dernière. Il a probablement, comme il l'a fait depuis une quinzaine d'années, parlé avec des gens de son comté, des élus municipaux, la population de son comté. Je suis convaincu que le député de Masson est mal à l'aise, parce que – je le connais depuis 11 ans, je suis ici depuis 11 ans – c'est un des parlementaires les plus, M. le Président, exigeants quant au respect des engagements et de la parole donnée. Il est mal à l'aise avec ça, j'en suis certain, M. le Président, et j'ai hâte de le voir voter sur le principe.

M. le Président, j'aimerais cependant l'entendre intervenir, peut-être que, d'ici une demi-heure ou deux, il s'exprimera sur la motion de report, M. le Président. Hé! ça peut arriver que je me trompe. Je me serai peut-être trompé. Peut-être que le député de Masson, le député de Lotbinière, M. le ministre du Revenu, ils sont peut-être d'accord avec le projet de loi n° 77. Autrement dit, ils ne sont peut-être pas rien coincés pour voter pour, ils sont peut-être d'accord. Ça, ça serait dramatique. Ça voudrait dire que ces députés-là, M. le Président, sont complètement déconnectés de la réalité des choses, qu'ils ont été attrapés par le pouvoir, puis qu'ils pensent que le pouvoir, c'est éternel. Attention! C'est éphémère, le pouvoir. Éphémère, M. le Président. Et, on le sait, un gouvernement, ça se bat lui-même bien plus que c'est remplacé par l'opposition. Vous êtes, M. le Président, à l'intérieur d'une équipe qui s'en va exactement vers cette issue: un gouvernement qui se bat lui-même.

(2 h 20)

M. le Président, vous le savez, le gouvernement qui est en face de nous est en très bonne marche vers ce destin: un gouvernement qui se bat lui-même. Puis, ça va arriver pas mal plus vite que plein de gens pensaient, M. le Président, y compris les ministériels. Ils jasent, ils jasent entre eux. On les entend. Pas de confidence. Pas de confidence. Les états d'âme, les états d'âme, M. le Président. Ils savent ce qui se passe. Ils savent ce qui les attend. Ils savent ce qui s'en vient puis ils savent que la population du Québec, en 1996, moins que jamais va accepter que des politiciens, des politiciennes, qu'un gouvernement manque à sa parole. Et c'est ce qu'on est en train de faire dans ce projet de loi, projet de loi n° 77.

Puis ça les inquiète, ceux et celles surtout qui ont de l'expérience. Pour les nouveaux députés un petit peu encore naïfs, naïfs, ils rentrent au Parlement, ça les excite encore après deux ans, M. le Président: Je suis un élu. Hé! madame ou monsieur le député. Je fais partie des 125 privilégiés de cette belle province qu'est le Québec. Je suis un élu, donc j'ai le monopole de la vérité et ma population va comprendre parce que c'est moi qui leur dit. Attention! Ça tourne vite, ça! Avec des projets de loi comme celui-là, M. le Président, ça tourne très vite.

C'est pour ça, moi, que je dis au ministre de la Sécurité publique, pour qui j'ai beaucoup de sympathie, beaucoup de sympathie, M. le Président, parce qu'il a une tâche lourde pas à peu près, lui, hein... Ce n'est pas drôle d'être obligé d'exécuter les commandes du Trésor. Le ministre – comme mon ami, M. le député Copeman, me le glisse à l'oreille, le député de Notre-Dame-de-Grâce – délégué aux Finances. Il n'y en a pas de ministre délégué aux Finances, je crois, hein?

Une voix: Oui, oui, il y en a un.

M. Lefebvre: Il y a le ministre de la Sécurité publique... Le ministre délégué aux Finances. Mission: 40 000 000 $. Ah! Pas assez? Non, non, non! Le ministre des Finances l'a rappelé, il a dit: 40 000 000 $, ce n'est pas assez. On a trouvé autre chose: l'Institut de police. Ce n'est pas le ministre de la Sécurité publique, M. le Président, qui a pensé à ça. Ça ne se peut pas. Il ne peut pas, à titre de ministre de la Sécurité publique, être assez naïf pour agresser lui-même sa propre clientèle. Bien voyons donc! C'est le ministre des Finances ou un adjoint du ministre des Finances qui a appelé le ministre de la Sécurité publique puis il lui a dit ceci: M. le ministre de la Sécurité publique, la Sûreté du Québec, vous allez augmenter ça, 0,10 $ du 100 $ ce n'est pas assez, à 0,18 $ du 100 $. Oui, mais, écoutez, ce n'est pas ça que j'ai dit aux élus dans ma tournée de juillet, août. Pas d'importance! Pas d'importance! Vous avez manqué à votre parole? C'est pas un problème, on s'occupe de ça. Ce n'est pas la première fois qu'on le fait depuis qu'on est là, septembre 1994: le ministre de la Santé l'a fait, le ministre des Transports l'a fait, la ministre de l'Éducation, elle l'a fait – puis elle le fait encore. Alors... Le ministre de la Justice, le ministre de la Justice, M. le Président, on ne penserait jamais que ce politicien-là était assermenté. Ça n'a pas de bon sens! La Justice, la Sécurité publique, la Santé et l'Éducation sont à peu près les secteurs d'activité les plus importants au Québec et c'est ceux qui sont les plus agressés quotidiennement par ce gouvernement.

Puis, on se demande, après avoir fait un tel constat, pour quelle raison la population ne fait plus confiance aux politiciens et aux politiciennes. Je comprends! Puis heureusement qu'ils ne savent pas tout. Heureusement que les Québécois puis les Québécoises, M. le Président, ne savent pas tout ce qui se passe. M. le Président, si les Québécois... Puis c'est pour ça qu'on siège à 2 h 30 du matin sur des projets aussi infâmes. On fait ça, M. le Président, portes closes, hein? Personne ne sait ce qui se passe.

Il y a à peu près 125 personnes qui nous écoutent à la télévision maximum, maximum, M. le Président, dont certaines conjointes ou conjoints des députés d'en face, parce qu'ils espèrent toujours, ces conjoints et ces conjointes, après deux ans, de les voir à la télévision, M. le Président. Moi, je connais... J'en suis convaincu, M. le Président, il y a des conjoints, conjointes de députés ministériels qui n'ont pas encore vu leur député parler à la télévision. Et ils se disent: Il va se dégêner, peut-être à 2 h 30, le 3 décembre. Mais ça ne sera pas encore cette nuit. Ça ne sera pas encore cette nuit, M. le Président. Il y a 125 personnes à peu près qui nous écoutent.

Mme Barbeau: 124.

M. Lefebvre: Mme la députée de Vanier me dit 124.

Une voix: Elle est célibataire, c'est pour ça.

M. Lefebvre: Célibataire, bon.

Une voix: Son mari ne l'écoute pas.

M. Lefebvre: M. le Président, c'est cocasse. C'est drôle et triste en même temps. Je me souviens, en décembre 1995, de la Loi sur les médicaments – il me semble que c'est en décembre ou juin 1995: ce qu'il y a à peu près de plus écoeurant pour nos aînés. On a voté ça, on a travaillé ça et on a discuté ça encore une fois à 4 heures, 5 heures le matin. Les aînés, M. le Président. Vous remarquerez qu'à chaque fois que ce gouvernement soumet à l'attention des parlementaires une loi vicieuse, tordue, qui est à peu près ce qu'il y a de pire quant au manquement à la parole donnée, on fait ça de nuit. Ça se comprend, ça se comprend, M. le Président. Le manque de courage, ça ne se fait pas au grand soleil, ça. On fait ça en cachette et on espère que les journalistes ne le publiciseront pas trop. On espère que l'opposition va laisser tomber. Mais on va frapper un sacré noeud avec l'opposition qui est en face de vous autres, M. le Président.

Le projet de loi n° 77, le gouvernement va nous l'arracher par la force du nombre. Pas par l'intelligence, M. le Président, pas par le courage, par la force du nombre, exprimée quelque part au cours des prochaines heures par 75 députés qui vont faire ce que François Gendron, député d'Abitibi-Ouest disait souvent: «Rubber stamp». C'est comme ça que le député d'Abitibi-Ouest qualifiait la majorité, du temps où lui était dans l'opposition. Des vulgaires voteurs, sans savoir... C'est ça que votre collègue nous disait. Moi, je n'ai jamais été capable de prendre sur moi une telle qualification d'un collègue à l'Assemblée nationale. Je ne fais que répéter ce qu'un député de la formation d'en face, qui est encore là, qui est président du caucus, disait des députés ministériels libéraux qui ne parlaient pas, qui ne s'exprimaient pas à cause du système, M. le Président, qui devait être changé par ces amis d'en face, par ce nouveau gouvernement. Alors, c'est ce que disait le député d'Abitibi-Ouest: la majorité écrasée, la majorité silencieuse, et plus. Et plus, M. le Président. Et je réalise que c'est pire que tout ce que j'ai pu voir, moi, en onze ans.

M. le Président, on a combien d'heures de faites sur le projet de loi n° 77? Une douzaine d'heures. J'ai entendu deux députés péquistes s'exprimer sur quelque chose d'aussi important que le projet de loi n° 77. Le député de Bonaventure est président d'une commission. Il a des choses à dire, lui. La belle, la très belle région qu'il représente, une des plus belles régions du Québec, M. le Président, avec la région que, moi, je représente, la région de l'Amiante, le député de Frontenac. Le député de Bonaventure n'a rien à dire là-dessus? Quand il va s'en retourner chez lui, vendredi, cinq heures d'automobile, il va se dire: Lefebvre de Frontenac m'a dit, à 2 h 30 du matin, que je n'ai rien à dire. Et il avait raison, je n'ai rien à dire. Il n'a rien qu'à se lever.

Le député d'Ungava, ce n'est pas un mauvais député, ça. Bon joueur de hockey, bon patineur, M. le Président.

Une voix: Il patine bien.

(2 h 30)

M. Lefebvre: C'est un monsieur, c'est un gentleman. Il ne parle pas. Pourquoi? Pourquoi? Pas parce qu'il n'a pas de choses à dire. De deux choses l'une: il est d'accord avec le projet de loi n° 77 ou il n'a pas le droit de parler. Dans un cas comme dans l'autre, c'est condamnable. Comment, M. le Président, ces députés qui sont vos collègues vont-ils expliquer à leurs populations respectives qui vont leur poser des questions comme: Je «peux-tu» voir ton intervention sur le projet de loi n° 77? Tabarnouche, je «peux-tu» savoir ce que tu as dit...

Le député de Lotbinière, il s'est fait ramasser tout à l'heure pas à peu près par mon collègue le député de Saint-Laurent. Il y a goûté, puis je pense qu'il a sa leçon pour longtemps. M. le Président, 43 municipalités dans Lotbinière, 43 municipalités. Un beau comté rural, 100 %. S'il y a une région type au Québec agressée par 77, c'est le comté de Lotbinière. Ils passent tous au cash sans exception. Puis, moi, j'y vais, dans Lotbinière. Il vient dans mon comté, et, moi, je vais dans son comté. Quand on va me demander: M. Lefebvre, le député de Lotbinière a dit quoi sur 77? Bien, je n'étais pas là, je ne peux pas dire ça... Je vais être là du début à la fin puis, moi, je ne peux pas mentir. Je ne mens pas en Chambre, je ne mens pas dans Frontenac, je n'irai pas mentir dans Lotbinière. Je vais dire: Il n'a rien dit. «C'est-u» vrai? Ah non! Il n'a rien dit.

Les élus municipaux vont me dire: M. Lefebvre, comment vous expliquez ça, vous? On a élu un député pour nous représenter. Il y a 43 municipalités, on l'a rencontré souvent, puis il nous a dit: Moi, je vais vous défendre mieux que Lewis Camden. Aïe! Lewis Camden, bon député qui intervenait, qui s'est déjà poigné face à face avec son propre gouvernement pour défendre ses électeurs, M. le Président. J'ai vu Lewis Camden faire des interventions à l'encontre de politiques de notre gouvernement puis modifier le cours des choses, modifier le cap dans certains projets de loi, soit au caucus ou ailleurs, projets de loi qui touchaient l'agriculture, M. le Président, projets de loi qui touchaient la voirie rurale. Il défendait bien ses concitoyens et concitoyennes. Le député de Lotbinière, bon bonhomme, gentil, mais il n'a rien à dire sur quelque chose d'aussi important.

M. le Président, je m'arrête là-dessus. J'ai d'autres collègues qui veulent parler. Parce que je prends pour acquis que, l'autre bord, on a beau sonner les cloches, on a beau les supplier de parler... M. le Président, je veux savoir ce que Mme la députée de Deux-Montagnes... Youhou! Voyez-vous, M. le Président? Ceci étant dit, on va passer à autre chose et à quelqu'un d'autre. Là, moi, j'ai frappé le vide. Il n'y a plus personne de ce côté-là qui veut s'exprimer sur la motion de report.

On suggère – et je m'arrête là-dessus – au gouvernement, au ministre de la Sécurité publique d'écouter, sinon l'opposition, les conseils qui lui sont donnés par ceux qui travaillent sous sa responsabilité. Le ministre de la Sécurité publique, il est le patron de tous les policiers du Québec. On lui dit: M. le ministre, vous allez trop vite, vous faites fausse route. Également, les partenaires du gouvernement que sont les municipalités et les élus municipaux, ils disent clairement au gouvernement que ça n'a pas de bon sens, six mois pour protéger ultimement la population du Québec. Et le dernier argument, je l'ai dit au ministre en commission parlementaire, en commission de consultation: la Sûreté du Québec, pour qui j'ai le plus grand respect, M. le Président, un bon corps de police, des policiers responsables, une direction respectable, très respectable, j'ai l'impression, je pense que la Sûreté du Québec, en toute objectivité, n'a pas, au moment où on se parle, les effectifs pour répondre à la demande additionnelle qu'on lui imposera avec les dispositions du projet de loi n° 77.

Le moratoire, justement, devrait permettre au ministre, au cours des six prochains mois, de rééquilibrer la Sûreté du Québec et au niveau des effectifs et au niveau des budgets. Ne serait-ce que pour ça, ce petit bout-là, j'aimerais que le ministre, M. le Président... sinon lui, qu'il me réponde par quelqu'un d'autre: Est-ce que la Sûreté du Québec ne devrait pas profiter d'un six mois pour se réorganiser, pour prendre les moyens qu'il faut pour répondre à la charge additionnelle que voudra lui imposer ou que veut lui imposer le ministre par le projet de loi n° 77? Plein d'arguments qui militent en faveur d'un vote, du côté des ministériels, d'un vote d'appui à la motion de M. le député de Shefford.

J'espère, M. le Président, que, d'ici à ce que le débat soit terminé, on prendra cinq minutes de réflexion. Le député de Masson, cinq minutes, il en a en masse, lui, pour voir clair, comprendre. Il a écouté toute la journée, hein! Il est intéressé. Je le connais, moi. Ça l'intéresse, le débat. Savez-vous pourquoi, M. le Président? Parce qu'il est en train de comprendre, avec tout ce qu'on dit, qu'il s'est fait avoir par son ministre, alors il écoute. Il écoute. Est-ce qu'il aura le courage de se rendre jusqu'au bout? C'est ce que nous verrons, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Frontenac. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: M. le Président, quelques mots. J'avoue n'avoir ni la pratique ni l'éloquence du député de Frontenac, surtout à cette heure-là. Et je suis certain que, si on se rendait à la proposition de l'opposition, finalement il serait bien déçu, M. le Président, parce que, visiblement, il est dans son élément à 2 h 35 du matin. Il est dans toute sa splendeur.

M. le Président, non, on ne reportera pas le projet de loi. On ne reportera pas le projet de loi. Je vais indiquer rapidement peut-être un peu pourquoi. Souvent les gens du parti d'en face qui ont été à l'administration, notamment, de la sécurité publique – pas le député de Frontenac, d'autres – ont passé des années à reporter des décisions qui s'imposaient et nous ont laissés dans la situation où on se retrouve, la situation qui nous oblige à agir, M. le Président, et à agir dès maintenant.

Il y a bien des raisons pour lesquelles on ne peut pas reporter. Il y en a une évidente, c'est l'obligation qu'ont les municipalités de faire leur budget. Elles sont à le faire présentement. C'était tout à fait responsable, correct, franc, de leur donner l'heure juste. C'est ce qu'on a fait, M. le Président. Et, là-dessus, j'en profite juste pour dire quelque chose, parce qu'on dit un peu toutes sortes de choses depuis quelque temps. Il a été très clair dès le début – et tous les documents publiés par le gouvernement sont très clairs – que nous proposions de porter à 100 000 000 $ la contribution des municipalités, qui était à 66 000 000 $. Et nous avons, en réponse aux demandes des municipalités, accepté de leur transférer les revenus provenant notamment des amendes perçues. Alors, si on fait le calcul, M. le Président, on est très loin des chiffres qui sont avancés. Et, en même temps, M. le Président, je pense qu'il est tout à fait incorrect, inexact de dire que nous avons soutenu quelque autre chiffre tout au cours de la tournée qu'on a faite.

M. le Président, une des raisons pour lesquelles d'ailleurs le report de ce projet de loi serait à mon avis inutile, c'est qu'il a donné lieu à une importante consultation – là aussi on dit un peu n'importe quoi en face – probablement la plus importante qui ne s'est jamais faite dans le secteur de la sécurité publique. Bien sûr, tout le monde n'est pas d'accord sur tous les aspects du projet de loi, mais le projet de loi rencontre dans bien des dimensions des appuis. Les circonstances font que parfois un groupe appuie une partie du projet, appuie moins une autre partie; un autre groupe appuie l'autre partie. Mais ça, M. le Président, ça fait partie de la vie, ça fait partie de la situation, puis je pense qu'il faut vivre avec. Alors donc, les municipalités doivent faire leur budget, et, parce qu'elles doivent faire leur budget, le gouvernement doit leur donner l'heure juste. C'est ce que nous faisons, M. le Président.

(2 h 40)

Deuxièmement, M. le Président, l'administration précédente avait laissé la situation se détériorer, au point où, au Québec, on a, dans certaines régions, des corps policiers dûment constitués avec zéro policier. Puis ça n'arrive pas juste à un endroit, ça arrive à plusieurs endroits au Québec. À d'autres endroits, on a un policier. Et les gens avaient laissé perdurer une situation comme celle-là, dans le fond, à l'encontre de la réforme que M. Ryan avait lui-même mise en oeuvre pour des raisons que je n'ose pas évoquer et qui étaient carrément une façon, en quelque sorte, de permettre à certaines municipalités, certains contribuables de se défiler devant leurs obligations. C'était à toutes fins pratiques un déni des obligations municipales en matière de responsabilité publique. Et je pense que, pour n'importe quel citoyen, ce n'est pas nécessaire d'avoir une grande formation en ce qui concerne la sécurité publique pour se rendre compte qu'un corps policier avec zéro policier, bien, il y a quelque chose à faire puis que c'est une situation qui ne peut pas perdurer, puis c'est une situation qui devait être corrigée. Et c'est ce que nous faisons, M. le Président.

On a souvent parlé des chicanes entre la Sûreté du Québec et les policiers municipaux, des chicanes de juridiction. Le projet de loi, il vient mettre fin à ça. Et, contrairement à ce qui se dit, encore une fois, en face, contrairement à une certaine perception, il n'y aura pas plus de champ d'action pour la Sûreté du Québec. À toutes fins pratiques, c'est la réalité présente, ce sont les mêmes municipalités à desservir, et il n'y a rien qui ressemble aux visions un petit peu apocalyptiques qu'on veut développer en avant. J'entendais, des fois, le député de Frontenac parlant avec le président de l'Association des policiers, lors de la commission parlementaire, pour dire: C'est bien épouvantable, on va vous enlever des responsabilités qui étaient les vôtres, la Sûreté va prendre votre place. M. le Président, il n'y a rien de tel dans le projet de loi. Ou encore, on disait: La Sûreté va avoir de nouvelles obligations, elle n'a pas les ressources pour y faire face. Il n'y a rien de tel dans le projet de loi. Alors, encore une fois, je pense qu'on évoque des épouvantails qui ne sont pas là.

Le projet de loi, il est bien simple, M. le Président, il est très simple. Ce qu'il fait, c'est qu'il rétablit un peu plus d'équité entre les contribuables du Québec. C'est bien évident que certains contribuables seront appelés à payer davantage qu'ils ne paient maintenant, une part plus équitable de leurs responsabilités en matière d'offre des services de la Sécurité publique. Et, pour l'essentiel, ce que le projet de loi fait, c'est qu'il assure que dorénavant les élus locaux puissent avoir un droit de regard sur l'organisation des services policiers sur leur territoire. Ce qu'ils n'avaient pas dans le cadre de la réforme Ryan, et, pour autant, ils avaient reçu la facture et ils devaient payer. Alors, M. le Président, conséquemment, on évoque bien des épouvantails mais, à mon avis, qui ont très peu à voir avec le projet de loi qui est devant nous.

On a souvent évoqué la présidente de l'UMRCQ, Mme Simard. Puis il y a une chose qui mérite d'être dite, qui est cocasse, qui est même amusante, d'une certaine façon. M. le Président, la présidente de l'UMRCQ, qui est mairesse de Baie-Saint-Paul, avait toute la latitude, la liberté de choisir le type d'organisation de services policiers qu'elle souhaitait pour sa municipalité, et elle a décidé, en toute liberté, d'utiliser les services de la Sûreté du Québec pour fournir à ses concitoyens les services policiers.

Il me semble que ça nous amène un petit peu à réfléchir. Si la proposition qui est sur la table était à ce point aberrante, comment expliquer que la mairesse de Baie-Saint-Paul choisit les services de la Sûreté du Québec pendant que la présidente de l'UMRCQ, elle, fait campagne pour que les autres municipalités membres de l'UMRCQ utilisent d'autres services que ceux de la Sûreté du Québec? Il me semble que ça devrait un petit peu nous amener à réfléchir par rapport à tout ce qui se passe présentement et à se rendre compte finalement que, derrière tout ça, on provoque une espèce de débat, comme s'il y avait dans le projet de loi un bouleversement radical de certaines situations alors qu'essentiellement ce qu'on fait, c'est qu'on propose aux 1 000 municipalités du Québec de moins de 5 000 habitants, qui sont inorganisées, un modèle d'organisation qui continue le travail qu'elles faisaient avec la Sûreté du Québec.

Alors, M. le Président, je ne vois pas pourquoi on retarderait un projet de loi, on reporterait l'adoption d'un projet de loi qui vise, encore une fois, à plus d'équité entre les contribuables, qui vise à responsabiliser les élus locaux, qui vise à leur donner un contrôle qu'ils n'ont pas présentement sur l'organisation des services policiers de base, qui permet de cesser certaines chicanes entre corps policiers, qui permet également d'assurer à tous les contribuables du Québec, où qu'ils soient sur le territoire, un service en matière de sécurité publique, ce qu'ils n'ont pas présentement dans tous les cas, donc un projet de loi qui propose un modèle, une vision de l'organisation policière au Québec. Puis je pense que la grande différence entre ce projet de loi puis ce qui a été fait avant, c'est que M. Ryan, à l'époque où il a fait son projet, s'est contenté d'envoyer une facture aux municipalités sans leur donner aucune responsabilité, aucune prise dans la décision.

Le gouvernement actuel n'est pas en train non plus d'augmenter indirectement le fardeau fiscal global des Québécois. Le gouvernement actuel, on le sait, globalement est en train de diminuer le fardeau fiscal des Québécois, alors que, lorsque le gouvernement précédent avait agi dans ce secteur-là, ce qu'il faisait, dans le fond, c'est qu'il demandait aux municipalités de taxer à sa place, puisqu'il augmentait au total le fardeau des contribuables québécois. Ce qui n'est pas le cas du gouvernement, puisqu'il diminue globalement le fardeau fiscal des Québécois.

M. le Président, pour toutes ces raisons, on ne doit pas reporter l'adoption de ce projet de loi. C'est un bon projet de loi, c'est un projet de loi également qui vient corriger certaines autres lacunes, répondre à certaines attentes, notamment, des policiers en matière d'exercice de leur droit démocratique. Le projet de loi va mettre le Québec un peu à l'heure du reste de l'Amérique du Nord, à l'heure de la plupart des pays occidentaux.

Le projet de loi va donner aux policiers ce qu'ils demandent depuis longtemps: la possibilité d'avoir accès à des fonctions électives. Évidemment, ce sera balisé. Il y a certaines contraintes qui seront mises à l'exercice de ce droit, mais c'est une demande qu'ils ont faite depuis très longtemps, et je serais très étonné... Si les policiers entendaient actuellement l'opposition demander que ce droit qu'ils réclament soit encore une fois reporté, je suis convaincu qu'ils seraient en total désaccord avec ce qu'ils entendent présentement.

Le projet de loi vient également, je pense, rappeler à l'ensemble des élus, qu'ils soient municipaux ou provinciaux, l'importance de l'Institut de police du Québec, l'importance d'accorder en priorité les ressources publiques, qui sont rares, à la formation de base des policiers. Il vient également, en révisant les règles du jeu du conseil d'administration de l'Institut de police, s'assurer que l'avenir de l'Institut de police, l'avenir de la formation des policiers, bien, ça puisse être discuté à la fois par l'ensemble des représentants des parties patronales et des représentants syndicaux, ce qui nous semble tout à fait normal. Alors, non, on ne s'engagera pas dans un report de ce projet de loi là.

Je pense que nous avons tenu compte d'une bonne partie des représentations. Je pense que nous pourrons tenir compte d'autres représentations qui ont été faites lors de la commission parlementaire. Et, pour toutes ces raisons, je pense que nous devrions cesser un petit peu ce qui ressemble de plus en plus à de l'obstruction, à mon avis, mal fondée et que nous devrions avancer dans l'étude de ce projet de loi là. Je crois que c'est dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt des contribuables, puis c'est également dans l'intérêt de l'organisation des services policiers au Québec et de la sécurité publique.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Nous allons céder maintenant la parole au député de LaFontaine. M. le député.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Tout d'abord, j'aimerais rappeler au ministre que nous ne faisons pas d'obstruction, et le plus bel exemple, M. le ministre, pardon, M. le Président – on doit s'adresser à vous – c'est qu'à 23 h 55 j'ai présenté en cette Chambre une motion pour ajourner les travaux. J'arguais, pour présenter cette motion, que le débat avait assez duré, que le ministre, devant les objections qui étaient présentées devant lui et en cette Chambre, devant les députés, aurait intérêt à surseoir aux discussions que nous faisons, vu l'heure tardive qu'il était, et d'aller jusqu'à demain ou après-demain regarder dans son projet de loi pour essayer de contacter peut-être les gens, les groupes, les organisations qui nous ont fait des remarques ou des recommandations s'opposant à certaines dispositions de son projet de loi, pour essayer de l'améliorer et de trouver des solutions à cette impasse qui semble se dessiner entre, d'un côté, certains intervenants, ou la majorité des intervenants concernés par le projet de loi, et les services du ministre, son cabinet ou ses fonctionnaires ou lui-même.

(2 h 50)

Et là, M. le Président, après avoir plaidé une dizaine de minutes, j'ai entendu le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui nous a fait un discours, lui aussi, qui n'a pas convaincu grand monde, je le pense, en cette Chambre, et le vote a été pris par la suite. Et le vote a fait que le gouvernement, les députés gouvernementaux ont voté majoritairement, 47 à 23 ou 24, le rejet de la motion d'ajournement. Bon. On nous reproche maintenant de siéger à 2 h 50 et de faire de l'obstruction. Bien là, quand même, il faut regarder les choses sérieusement. C'est le gouvernement qui a décidé qu'il ne voulait pas suspendre les travaux, qu'il voulait continuer à en discuter. C'est le ministre lui-même. C'est le leader adjoint du gouvernement. C'est ses collègues. Certes, c'est leur droit. Mais qu'on ne reproche pas à l'opposition à ce moment-là de faire son travail.

Moi, j'aurais préféré parler sur ce projet de loi demain, dans l'après-midi, au su et au vu de tout le monde, après que le ministre eut pu arriver et dire: J'ai profité de la nuit et de la matinée pour parler avec les gens de l'UMRCQ, qui est contre le projet de loi. Le ministre nous parle de sa grande consultation. M. le Président, lorsqu'on consulte et qu'on fait une grande consultation et qu'on arrive avec un projet de loi... Moi, je vais vous dire qu'après 11 ans de vie politique en cette Chambre je n'ai jamais vu un ministre qui m'a dit, ou une ministre, parce qu'il y en a eu des deux côtés: J'ai consulté, nous avons consulté tout le monde, voilà le projet de loi, puis que, lorsqu'on arrive en commission parlementaire, à peu près tout le monde est contre le projet de loi.

On n'a pas consulté. On est allé voir les gens, on leur a expliqué peut-être notre idée à ce moment-là, on leur a dit ce qu'on voulait faire. Mais consulter, ce n'est pas à sens unique, c'est un peu interactif. On donne des choses, on dit des choses, on évoque des idées, des possibilités, des probabilités, des projets, et de l'autre côté les gens nous répondent. Il ne faut pas avoir les oreilles bouchées, il faut écouter ce qu'ils disent, il faut en prendre note, il faut établir des consensus.

M. le Président, un projet de loi qui touche la police... Et je pense que tout le monde dans cette Chambre et au Québec est conscient que, s'il y a une institution qui doit fonctionner d'une manière consensuelle, d'une manière qui fait l'unanimité de l'ensemble des intervenants au Québec, que ce soit municipal, que ce soient les corps de police, les chefs de police, les organisations syndicales et même les citoyens, parce qu'on oublie les citoyens aussi dans ce projet de loi, on n'en parle pas des citoyens... M. le Président, s'il y a une organisation qui doit fonctionner en tenant compte de tous ces gens-là, c'est bien l'administration de la police.

Or, M. le Président, le ministre dit: Moi, je ne bougerai pas, je reste comme ça, je reste inflexible. On a vu ça. On a vu ça à d'autres paliers de gouvernement, où des administrations... Prenons Montréal il y a quelques années, où l'ensemble des taxes de Montréal, en dedans de sept ans, ont augmenté de 87 %. Une administration qui ne comprenait pas que c'était le temps de prendre le virage qu'il fallait prendre pour mieux administrer la ville, qui a créé des paramunicipales qui se sont endettées, qui ont acheté des buildings qui ont été revendus à perte. Voilà, M. le Président. Et le ministre était membre de cette administration municipale. L'entêtement! L'entêtement, c'est le public qui le paie, c'est les citoyens qui le paient. À un point tel que son administration a été battue aux élections suivantes, largement battue. Parce que, le peuple, à la fin, il juge, M. le Président.

M. le Président, lorsque je parle de cette situation, c'est parce que les gens ne changent pas. L'entêtement à un niveau ou à un palier de gouvernement ou d'administration se retrouve bien souvent à un autre. La consultation, M. le Président...

M. Maciocia: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Oui, M. le Président. Pourriez-vous vérifier s'il y a quorum ici, à l'Assemblée nationale?

Le Vice-Président (M. Pinard): ...16, 17, 18, 19, 20, 21. Alors, nous avons quorum. M. le député de LaFontaine, si vous voulez continuer, s'il vous plaît.

M. Gobé: M. le Président, pourquoi nous demandons au ministre de reporter... d'abord de suspendre, d'ajourner les travaux – ça a été refusé – nous demandons de reporter le projet de loi? Je le dis, je le répète, maintenant que tous les collègues sont ici non pas pour faire obstruction, parce que je ne pense pas qu'en cette Chambre, à cette heure-ci, il y ait grand intérêt à débattre d'un dossier aussi important, mais simplement parce que le ministre veut s'entêter, comme il s'entête avec les citoyens, comme il s'entête avec les corps policiers, comme il s'entête avec les maires, avec les représentants des MRC, avec les représentants de la CUM, Communauté urbaine de Montréal.

Le ministre, M. le Président, ne veut pas comprendre ce que l'ensemble des observateurs lui disent, et je vais faire quelques citations. Un journaliste, éditorialiste dans un journal qui s'appelle Le Courrier , dit: «Un ministre trop pressé». Je vais faire la lecture; peut-être que ça va intéresser quelques collègues qui n'ont pas cette revue de presse: «C'est rare qu'un ministre fait l'unanimité auprès des maires de plusieurs MRC. Le ministre de la Sécurité publique – je vais dire son nom, mais, M. le Président, vous me pardonnerez – M. Robert Perreault – j'ai dit pardon, alors je m'excuse – a réussi ce tour de force à Saint-Hyacinthe. Il a dressé tous les maires contre lui. Dans la MRC des Maskoutains comme dans celle de Brome-Missisquoi, les maires ont dénoncé vivement la tournée du ministre. En fait, le ministre n'est pas venu consulter, il est venu enfoncer sa réforme et sa police régionale dans la gorge des maires et, finalement, dans celle des contribuables.» Ce n'est pas moi qui dis ça. Ce n'est pas le député de LaFontaine qui a inventé ça.

Alors, M. le Président, à la lecture de cet éditorial sur lequel on pourrait disserter longtemps, deux choses ressortent. Tout d'abord, que le ministre ne consulte pas, qu'il informe. Est-ce que, au Québec, on a cette tradition d'informer et non de consulter? Ou alors qu'on le dise, qu'on dise: Messieurs, je ne viens pas vous consulter, je viens vous dire que c'est ça qui va se faire. Est-ce que c'est comme ça que vous avez promis, lorsque vous vous êtes présentés aux élections, que vous alliez gouverner? C'était la nouvelle façon de gouverner? C'était consulter, s'asseoir avec les maires, avec les municipalités. C'était régionaliser. C'était discuter. C'étaient des forums. C'étaient des chantiers. C'était ça qu'on avait promis aux gens. Ce n'est pas ça qui se tient.

M. le Président, voilà un exemple frappant de la manière dont ce projet de loi est amené et voilà certainement une des raisons pour lesquelles les gens ne sont pas d'accord avec le projet de loi. Quoi qu'en dise le ministre, les gens disent: On n'accepte pas. On ne veut pas. Parce que, si les gens acceptaient, si les corps policiers étaient d'accord, si tous les intervenants étaient d'accord, pensez-vous que les députés de l'opposition seraient légitimés de discuter ce soir sur le projet de loi? Je ne le crois point, M. le Président, car nous serions seuls. Nous serions bien seuls. Et quelle autorité morale pourrions-nous invoquer... ou nous référer pour demander au ministre d'aller rencontrer les gens si les gens étaient d'accord?

Alors, M. le Président, c'est une des raisons majeures pour lesquelles nous avons essayé, au cours de la soirée, de faire comprendre au ministre, tout d'abord en demandant, à 23 h 45, 23 h 50, d'arrêter les travaux, d'arrêter pour cette nuit, d'arrêter ces discussions, de permettre un temps de repos et de réflexion qui aurait été certainement salutaire, certes... Il ne l'a point voulu.

M. le Président, on retrouve dans ce projet de loi là, et parmi les récriminations des gens, le fait que c'est un projet de loi qui n'est pas un projet de modernisation, de restructuration ou de redéploiement de la force policière au Québec, ni de réorganisation. C'est un projet de loi à saveur fiscale qui va permettre au gouvernement, qui devrait faire des coupures dans ses services de police, d'aller collecter une facture dans les municipalités, 40 000 000 $. Le ministre nous disait: Nous sommes un gouvernement qui, nous autres, abaissons le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises.

(3 heures)

Bien, M. le Président, on va regarder ça ensemble. Depuis qu'ils sont arrivés, depuis que le gouvernement est arrivé, le fardeau fiscal des Québécois, d'abord, il n'a pas baissé. Deuxièmement, on a taxé, on a tarifé. Qu'est-ce qu'on a tarifé? Les services de santé, les services judiciaires, la Commission des normes du travail elle-même va être tarifiée. Une femme enceinte, congédiée illégalement par son employeur, maintenant – pas maintenant parce que l'opposition s'oppose au projet de loi et qu'il n'a pas encore été voté – si on ne s'y était pas opposés depuis le mois de mai, paierait entre 150 $ et 250 $ pour se faire représenter par la Commission des normes, alors qu'actuellement c'est gratuit.

M. le Président, on tarifie aussi les médicaments. Les médicaments, qui étaient gratuits pour les personnes âgées et un certain nombre d'autres personnes, ces personnes-là vont devoir maintenant les payer. Pas d'augmentation du fardeau fiscal, M. le ministre? On a augmenté Hydro-Québec au-delà de l'inflation normalement consentie. On vient, encore dernièrement, de pelleter dans la cour des municipalités le remboursement de la TVQ, encore 60 et quelques millions de dollars. Et il a le culot de nous dire en cette Chambre qu'on n'a pas augmenté le fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises. On a coupé la prestation de logement des personnes âgées, le remboursement, et quoi encore, M. le Président? Nous pourrions en parler pendant presque toute la soirée de toutes ces taxations, cette tarification cachée. Qu'on ait au moins le courage de dire les choses comme elles sont. Oui, nous allons défendre l'opinion des gens qui ne peuvent se faire entendre par le ministre.

Un autre exemple: comme montréalais – le ministre était montréalais dans le temps – il veut que le gouvernement fasse en sorte que l'Institut de police, maintenant, soit financé par 1 % de la masse salariale. M. le Président, la Communauté urbaine de Montréal demande, elle, à former ses propres policiers. La facture qui va lui être chargée suite à loi du ministre va être de 2 200 000 $ approximativement. Eh bien, M. Duchesneau, le directeur de la police de la Communauté urbaine de Montréal, nous assure qu'il peut former les policiers de Montréal pour 360 000 $, ce qui veut dire qu'on va charger en gros 1 900 000 $ pour financer l'Institut de police du Québec, alors que Montréal n'en retirera pas de profit. Est-ce que c'est nécessaire de faire ça? Est-ce que ce n'est pas, encore là, une ponction fiscale sur Montréal pour l'envoyer ailleurs, alors que le gouvernement coupe dans ses services de formation de policiers dans d'autres régions? C'est ça, M. le Président.

Puis le ministre nous dit: On n'augmente pas le fardeau fiscal. Bien, les Montréalais, ils vont devoir le payer; ça va être dans le budget de Montréal. Le ministre nous dit: Il faut que je passe le projet de loi; ça va être dans le budget des municipalités. Après ça, il dit: Non, non, c'est pour améliorer le système. Ça n'améliore pas le système; c'est pour faire votre budget, à vous. Vous allez faire une ponction fiscale. C'est juste ça, le projet de loi. C'est pour ça que les gens ne sont pas d'accord; c'est pour ça que les gens s'opposent.

Ce que les gens demandent, M. le ministre, c'est un sommet sur la police. Et le ministre dit, dans une autre déclaration: Je suis inflexible sur ma réforme. Mais il dit: Je tiendrai peut-être, au printemps, un sommet. M. le Président, on passe la loi puis on fait un sommet après. Soyons donc sérieux! Commençons donc les choses par le bon bout: commençons par faire le sommet, puis la réforme après. Il semble que ça sera bien plus logique puis bien plus intéressant pour tout le monde. C'est quoi, cette histoire-là? Ou, alors, il y a une raison, c'est parce qu'on veut aller chercher de l'argent dans la poche du monde pour faire des coupures puis boucler le budget de la province de Québec. C'est ça qu'on veut faire, pour se désengager ailleurs. Mais ce n'est pas vrai qu'un ministre va déclarer publiquement, alors que les gens demandent un sommet, qu'il va passer la loi avant, puis qu'il fera le sommet après. Je n'ai jamais vu ça.

Bien voilà, M. le Président, une des raisons pourquoi nous demandons un report de ce projet de loi là, pour qu'il ait le temps de le faire, son sommet, qu'il ait le temps de les consulter, les gens, de les rencontrer et puis de sortir des solutions et des consensus. Puis, sans consensus, ce ne sera pas un bon projet de loi. Il ne sera pas applicable, comme bien d'autres projets de loi. Il faudra revenir dessus à un moment donné, puis on n'aura pas rendu service à la société ni à nos concitoyens. C'est ça qu'on se prépare à faire et c'est pour ça qu'à cette heure-ci on ne lâche pas puis on continue, M. le ministre, à essayer de vous faire comprendre de prendre votre temps, d'écouter le monde qui vous le dit, de chercher des consensus puis de chercher à faire un projet de loi qui corresponde à l'ensemble des voeux de la majorité puis au bon sens de l'administration policière au Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de LaFontaine. Je cède maintenant la parole au député de Masson. Alors, M. le député.


M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président; je vous offre mes remerciements. De me faire attaquer de façon aussi directe, croyant ainsi me fermer le bec, c'est mal me connaître. Je n'ai pas les idées à sec, surtout quand il faut défendre un projet de loi du gouvernement du Québec. Le député de Frontenac sur moi a tiré ses canons, comme représentant du comté de Masson. Je voudrais qu'il sache, même en regardant l'heure, que, pour lui et pour son plus grand malheur, je suis encore de taille pour lui livrer bataille, même si dans des heures aussi indues il n'est pas excessivement facile d'avoir le verbe aussi agile. Mais je m'en voudrais, et ça ne vous surprendrait guère que je refuse de lui livrer la guerre. Il est souvent intolérable, M. le Président, que, dans cette Chambre, passer pour des misérables. Et le député de Frontenac m'a servi un remontant, un stimulant, un cognac. Je crois, M. le Président, que, même si ses paroles n'étaient pas tellement gratinées, je suis assez généreux pour l'excuser. Parce qu'à cette heure sur un fil il déambule, comme nous, dans des discours de noctambules.

Je ne voudrais pas, M. le Président, et ceci serait de la frime, faire tout mon exposé en rimes. Mais, si des vers se mettent dans ces rimes, je voudrais que personne ne me tienne comme un type qui pose un crime. Je vais laisser, M. le Président, ces assonances et ces sornettes parce qu'il est très tard et mon exposé, de cette façon, serait peut-être mal interprété, même si beaucoup de monde nous regarde et que je pourrais par plusieurs être félicité.

M. le Président, à cette heure, plutôt que discuter d'un projet comme celui-là, si l'opposition avait suivi la tradition britannique, eh bien, il y a longtemps que ce projet serait voté. Je ne comprends pas de quelle façon ils ont interprété leur rôle de nous tenir aussi longtemps cette nuit; ça ne donne absolument rien et ils le savent. Ils nous disent que, de ce côté-ci – ils en ont même nommé – nous étions inaptes à comprendre ce qu'ils nous disaient. Il y en a 20 à 22 qui ont parlé. Il est possible que nous soyons inaptes à comprendre, mais ils semblaient peut-être ineptes à nous apprendre. J'ai l'impression qu'après avoir expliqué au gouvernement, pendant 22 fois 20 minutes, un projet de loi, c'est nous prêter pas beaucoup de compréhension que de croire que nous soyons encore aux abois. Je pense que nous avons compris. Et nous avons compris qu'ils veulent tout simplement perdre du temps et mettre dans l'embarras le gouvernement. C'est simple, M. le Président.

Vous avez remarqué, comme moi, qu'à mesure où les heures s'égrènent, nous avons toujours, dans des circonstances comme ça, des horloges humaines et, à toutes les cinq minutes, il y en a un qui arrive et sur la petite aiguille se rebute. C'est comme ça, le système britannique; il ne faut pas, dans ce cas-ci, que nous prenions panique.

(3 h 10)

Mais je ne peux pas comprendre comment ça se fait que, vers 23 h 50, on demande l'ajournement, disant qu'on ne veut pas parler de nuit, et qu'ensuite on demande une motion de report pour être certain d'être encore deux heures en Chambre pour débattre de la motion. C'est assez difficile à comprendre, la logique, c'est très difficile, à moins que ce soit pour s'amuser, pour lancer des bulles dans l'air et s'amuser à les crever. À cette heure-ci, personne ne nous regarde, les bulles de savon peuvent se promener, il n'y a pas de problème.

Mais c'est plus sérieux que ça, M. le Président. Il y a, au Canada tout entier, dans le service policier, une inéquité qui n'est pas acceptable par un gouvernement, inacceptable par un gouvernement. Il y a deux provinces où les citoyens et les citoyennes paient leur police: l'Ontario et le Québec. Moi, je défends le Québec. Ici, au Québec – c'est une inéquité, ça, au Canada – nous payons nos polices provinciales, nos polices municipales à 100 %. Dans huit provinces, c'est le gouvernement fédéral qui paie les polices. Nous payons donc 25 % du système policier de huit provinces, tout en payant 100 % de nos propres polices. Ça, c'est une inéquité.

En 1972, une personne que vous connaissez très bien, qui s'appelle Jérôme Choquette, était ministre de la Justice et il avait, quoique fédéraliste, de ses réclamations fait la liste, et, comme parfois, pour les libéraux, ça va, envoyé ce compte au Parlement d'Ottawa. Et il avait envoyé un compte de 755 000 $ pour l'année 1972. Je ne sais pas si vous regardez, depuis ce temps-là, ça fait une quarantaine d'années, quand même. Non, 1972... Vous savez, il est tard, j'ai peut-être de la facilité à parler, mais un peu de difficulté à soustraire. Ça fait une trentaine d'années, disons 34 ans et cinq mois, trois jours et 13 minutes.

Une voix: Vingt-quatre ans.

M. Blais: Vingt-quatre? Bon. Alors, 24 ans. Pensez, aujourd'hui, si on regarde cette somme-là puis toutes les sommes qui s'y additionnent et si on les indexe, il y a un gros montant. Mais, de l'autre côté, j'en vois qui restent pantois. Ils ne savent pas ça. Ils défendent le fédéralisme puis ils ne savent pas pourquoi. Ils ne savent pas pourquoi, mais ils le défendent quand même, ça fait bien dans la conversation. Dans le West Island, ça fait bien, ça se dit bien: Moi, je défends le fédéralisme. Ça se dit bien.

Il y a huit provinces qui sont dans le même cas, M. le Président. Mais, sur notre propre territoire, il faut que quelqu'un se lève, et c'est le gouvernement actuel, le ministre actuel qui, après 15, 20 ans de tergiversations, vient dire: Il faut une équité sur le territoire. Ce n'est pas normal qu'une grosse partie de la population profite des services de police et que les villes plus nombreuses, comme Montréal, Québec, etc., se paient leur propre police en plus. Le gouvernement du Québec, on vient tomber dans la même injustice qu'on peut reprocher à Ottawa, parce que, les grandes villes se payant leur police, les petites villes ne s'en payant pas, profitant de la police provinciale, elles ne paient qu'une fois. Alors, c'est cette équité-là qu'on se doit d'avoir.

Je regarde de l'autre côté: il y en a qui semblent sortir des nues. Mais commençons par corriger et arrêtons de faire objection à ceux qui veulent mettre de l'équité. On comprend qu'ils ne veulent pas qu'on en mette. En en mettant, de l'équité, sur notre territoire, ils s'autoaccusent de ne pas vouloir qu'on en fasse avec Ottawa. Il y a une certaine constance dans leur résonance.

Je pense, M. le Président, que cette motion de report... Et je suis heureux de défendre le projet du ministre. C'est un excellent ministre, il nous a renseignés sur son projet de loi; il ne l'a pas fait en catimini dans son bureau. Non, il nous a informés sur l'ensemble de son projet de loi, sur la justesse de ce projet de loi, sur l'équité que ça amène. Et tout le monde ici, ce n'est pas parce qu'on est des gens qui se lèvent et qui votent un par un. Non, pas ce projet de loi là. En tout cas, ça peut arriver, mais pas celui-là. Nous sommes tous conscients que nous nous devons de l'appuyer.

Mais il y en a pour qui c'est juste pour perdre du temps qu'ils font ça, M. le Président, pour embêter de plus en plus le gouvernement, puis ils veulent absolument que nous arrivassions près de Noël et que nous mettassions une motion de clôture ou de bâillon pour nous accuser, après, d'avoir fait comme eux. C'est peut-être un tic de l'opposition, mais ce n'est certainement pas du tact. C'est pour ça que, dans leurs tactiques, toute la nuit, ils ont l'air de tic-tac.

M. le Président, cette motion de report aurait dû être irrecevable, mais, dans le système britannique avec toutes ses largesses, je comprends que vous l'ayez acceptée. Mais il ne faut pas pour autant qu'on nous empêche de battre cette motion et qu'enfin une loi qui respecte l'équité sur le territoire, du côté policier, soit par notre...

M. Maciocia: Question de règlement, M. le Président. Question de règlement.

M. Blais: ... – j'ai fini – gouvernement votée. Je vous remercie.

M. Maciocia: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Viger. Question de règlement, M. le député?

M. Maciocia: Oui. Pourriez-vous vérifier le quorum, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous avons actuellement notre quorum, et je tiens à remercier le député de Masson pour ses propos. Alors, il reste combien de temps? Trente-cinq minutes? Alors, il reste 35 minutes au parti ministériel. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants du côté ministériel?

Une voix: Non.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'opposition, vous avez le droit de récupérer 35 minutes. M. le député de Marquette.

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le whip en chef du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Compte tenu des argumentations apportées par le député de LaFontaine, est-ce que le député de Marquette peut m'indiquer pourquoi il utilise le 35 minutes? Parce qu'il avait l'intention de terminer voilà longtemps déjà.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, vous utilisez l'article 213? Est-ce que vous désirez répondre à cette question, M. le député de Marquette?

M. Maciocia: Sur la question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Viau... Viger.

M. Maciocia: Viger. Oui, M. le Président. Vous avez bien dit, tout à l'heure, qu'il restait 35 minutes du côté ministériel.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui.

M. Maciocia: Le côté ministériel, il ne prend pas le 35 minutes, puis automatiquement c'est nous, de l'opposition, qui allons le prendre.

Le Vice-Président (M. Pinard): C'est pour ça que je cédais la parole au député de Marquette, M. le député de Viger. Excusez-moi, M. le député de Laviolette, question de règlement?

M. Jolivet: Non, M. le Président, je vais prendre du temps.

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K. Alors, je vous cède la parole, M. le député de Laviolette.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Merci, M. le Président. Je suis un peu abasourdi par le fait qu'il reste 35 minutes. Nous pourrions utiliser ce 35 minutes pour voter, j'imagine, la motion de report. On pourrait le prendre dès immédiatement. Le député de Marquette s'est levé, en contradiction avec tout ce qui a été dit depuis le début soit par le leader adjoint de l'opposition, soit par le député de LaFontaine, à l'effet qu'ils avaient l'intention de fermer boutique par une motion d'ajournement à 23 h 55 hier soir. Et là il s'en vient justement en voulant utiliser le temps que nous serions prêts à laisser tomber, en contradiction flagrante avec tous les beaux discours qu'ils ont faits depuis maintenant trois à quatre heures.

(3 h 20)

Il faut être logique avec ce qu'on fait. J'ai dit hier des choses, je les répète. On aura beau les utiliser, mais vous voyez – puis là j'en fais mention à tous ceux qui nous écoutent – qu'une réforme parlementaire, ça se fait lorsque les deux partis de l'Assemblée nationale, en demande par le président, acceptent de régler les choses de façon convenable. Ou bien nous sommes sérieux quand nous parlons de ces changements ou bien nous faisons du théâtre. J'ai souvent l'occasion de dire à mes collègues et à d'autres que, moi, ici à l'Assemblée nationale, quand on dit que je joue un rôle, je dis toujours: Je ne joue pas de rôle; je fais mon travail de parlementaire, me permettant comme parlementaire de regarder les projets de loi convenablement.

Qu'est-ce que l'on fait à ce moment-ci, là? On fait justement, de la part de l'opposition, du double langage par l'utilisation du 35 minutes, alors que nous serions prêts à arrêter ici, à ce moment-ci, à passer au vote et à revenir sur le sujet qui est en discussion, sur le débat normal, qui est le projet de loi du ministre. Nous pourrions, j'en suis assuré, M. le Président, terminer immédiatement.

L'opposition nous a dit de façon très sérieuse par le député de LaFontaine, que je crois, qu'elle voulait, à 23 h 55 passées, par la motion d'ajournement, arrêter le débat en disant: Allons nous coucher, allons nous reposer, prenons le moyen d'être plus en forme ce matin à 10 heures quand débutera la période de questions, les affaires du jour. À ce moment-là, j'aurais compris que le député de Marquette ne se serait pas levé, que le député de Viger ne se serait pas levé, puis qu'ils auraient dit: Maintenant, nous demandons le vote.

S'ils font l'inverse, c'est qu'ils démontrent leur mauvaise foi, M. le Président. En veulent-ils une vraie réforme? Je ne pense pas. Veulent-ils embêter le gouvernement? Je le pense. Jusqu'à maintenant, ils ont bien réussi. Je ne vois pas pourquoi ils continueraient s'ils sont sérieux, s'ils sont vraiment des personnes qui pensent ce qu'elles disent et qui disent ce qu'elles pensent. Malheureusement, je ne sens pas ça.

Est-ce que ça vaut la peine, de ma part, de continuer maintenant, M. le Président? Je pourrais arrêter maintenant. Je pourrais dire à mes collègues: On ne prend pas le temps qui reste. Laissons voir de la part de l'opposition s'ils sont vraiment sérieux. S'ils ne sont pas sérieux, ça sera à la population de les juger. Quant à nous, nous croyons, même s'ils ne sont pas cinq, que nous pourrions leur donner le droit de poser la question puis de demander le vote immédiatement. Mais je crois que, dans les minutes qui viennent, nous verrons le vrai visage de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Laviolette et whip en chef du gouvernement. Avant de vous céder la parole, M. le député de Viger, je vais m'enquérir auprès de nos...

M. Maciocia: C'est une question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui. Je voulais m'enquérir, auprès de la table, du temps. Donc, il nous reste 30 minutes. O.K. Alors, une question de règlement, M. le député de Viger.

M. Maciocia: M. le Président, j'entendais le whip en chef du gouvernement, tout à l'heure, dire: C'est la faute de l'opposition si on siège à 3 h 25 du matin. M. le Président, c'est le gouvernement qui a la clé...

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur une question de règlement, je vous ai écouté et je crois...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je vous ai entendu... S'il vous plaît! Alors, à ce stade-ci, il y a une motion qui a été déposée, il y a un temps de parole qui a été octroyé et il reste un temps de 30 minutes non utilisé par le côté ministériel et qui est dévolu d'office à l'opposition officielle. Alors, s'il y a un intervenant qui se lève du côté ministériel, je vais le reconnaître; s'il n'y en a pas et qu'il y a un intervenant qui se lève du côté de l'opposition officielle, je vais céder le droit de parole à cet intervenant, et vous avez droit à 30 minutes. Alors, M. le député de Viger. Excusez-moi, M. le député de Viger. Alors, M. le whip en chef du gouvernement.

M. Jolivet: Une question de directive, M. le Président. Jusqu'à maintenant, nous avons le droit de l'utiliser quand on veut, si je comprends bien ce que vous avez déterminé, qu'il y avait une enveloppe de deux heures, avec 10 minutes pour les gens qui sont les membres indépendants, le reste étant divisé équitablement. La question que vous posez, c'est que vous dites: Est-ce qu'il y a quelqu'un du côté ministériel qui voudrait l'utiliser? Il se pourrait qu'on ne fasse pas l'alternance, qu'on ne l'utilise pas à ce moment-ci, mais que, à un moment donné, on veuille l'utiliser. À ce moment-là, de quelle façon – et c'est ça, la question – je pourrais...

Le Vice-Président (M. Pinard): O.K.

M. Jolivet: Parce que vous dites: Il est automatiquement dévolu, à ce que j'ai compris, d'office aux membres de l'opposition. Alors, si vous dites qu'il est dévolu automatiquement, ça veut dire que le 30 minutes, il pourrait tout le prendre et, moi, je n'aurais pas l'occasion de revenir en réplique. Parce que je peux dire qu'à ce moment-ci je ne veux pas l'utiliser, mais, si, dépendant des argumentations qu'ils appellent, je le voulais, de quelle façon devrais-je le faire?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à ce stade-ci, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est que, s'il n'y a pas d'intervenant du côté ministériel qui se lève, il reste un temps de parole de 30 minutes et, à ce moment-là, ce 30 minutes, pour l'instant, est dévolu à l'opposition. Supposons, comme exemple, que le député de Viger prendrait une allocution de 15 minutes et qu'il s'assoit. Je reconnais, à ce moment-là, quelqu'un du côté ministériel qui se lève. Alors, le parti ministériel pourrait bénéficier du résidu de l'enveloppe. D'accord?

Alors, ce n'est pas parce que, à ce moment-ci, il n'y a aucun intervenant du côté ministériel qui demande d'utiliser le temps de parole que je n'ai pas le droit de céder le temps de parole de l'autre côté, mais, comme je le mentionne bien – et j'espère que vous me suivez bien, là; j'ai peut-être de la difficulté à m'exprimer à ce stade-ci, à 3 h 30 du matin – si le député de Viger prenait cinq minutes – alors, on me dit qu'il restait 30 minutes, c'est bien ça? 32 minutes – il resterait 27 minutes. Alors, automatiquement, je regarde du côté ministériel pour m'assurer qu'il n'y a aucun intervenant qui veut prendre le droit de parole et, s'il n'y en a pas, je regarde du côté de l'opposition. S'il y a quelqu'un qui se lève, je lui cède la parole; sinon, je mets la motion au vote.

M. Jolivet: M. le Président, simplement pour clarifier.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le whip.

M. Jolivet: Je le comprenais très bien comme ça, M. le Président; vous l'avez très bien expliqué. Ma question, ce n'était pas celle-là. S'il reste 32 minutes, puis qu'il décide de prendre le 32 minutes qui reste, de quelle façon je peux intervenir? Si je veux avoir un droit, puisque j'ai encore le droit, de quelle façon dois-je intervenir?

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, à partir de ce moment-là, il n'y a aucune restriction quant à la durée du droit de parole d'un parlementaire dans la convention qui a été établie entre les deux leaders. Donc, si le député de Viger – prenons le même exemple – au lieu de prendre un droit de parole de 20 minutes, prenait un droit de parole de 35 minutes ou de 32 minutes, à ce moment-là, le temps dévolu serait expiré et on passerait au vote. Alors, ça vous convient au niveau des directives?

M. Jolivet: Ça va très bien.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, M. le député de Viger.


M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je ne peux pas laisser passer les affirmations que vient de faire le whip en chef du gouvernement quand il affirme en Chambre que c'est à cause de l'opposition qu'on siège à 3 h 30 du matin. Justement, le député de LaFontaine avait fait une motion d'ajournement à 23 h 55 parce que l'opposition prétendait qu'après minuit les gens devraient plutôt aller se coucher. Même les citoyens du Québec, les gens, la population du Québec, ils ne voudraient pas que les députés siègent après minuit, M. le Président, et même avant. Et c'était la raison de l'argumentation du député de LaFontaine d'ajourner les travaux à 23 h 55.

Mais qui a les commandes à l'intérieur du salon bleu, M. le Président? C'est le gouvernement. Si le député de Laviolette avait le courage de se lever de son siège et de dire: On ajourne à demain matin, l'opposition va ajourner, M. le Président. Ce n'est pas nous qui pouvons décider; c'est le gouvernement qui nous oblige à être ici, et c'est la raison pour laquelle on est ici, M. le Président, parce que nous ne voulons pas, absolument pas, qu'ils nous passent sur le corps et qu'il passe 40 000 000 $ dans la gorge des contribuables du Québec. Parce que le projet de loi n° 77, il coupe 40 000 000 $. C'est tous les gens qui s'y sont opposés. À partir de tous les organismes, la CUM, les deux unions des municipalités, les policiers, tout le monde s'objecte à ce projet de loi, parce que ça coûte de l'argent. C'est encore le contribuable du Québec qui paie. Puis le whip en chef du gouvernement, il a le courage, pour ne pas dire autre chose, de dire: C'est l'opposition qui nous oblige à siéger à cette heure-ci. Ce n'est pas nous qui commandons ici, c'est les autres. Qu'il ait le courage de le faire puis on va continuer demain matin, à l'heure où les gens peuvent vraiment écouter les arguments de l'opposition pour faire valoir les raisons pour lesquelles ce projet de loi ne devrait pas être adopté. C'est pour ça qu'on est ici. Et ils ne passeront pas sur nous. Jusqu'à quand on va être ici? Et le gouvernement, il n'ajournera pas les travaux. On va continuer à se battre parce que c'est dans l'intérêt de la population et c'est dans l'intérêt du citoyen du Québec, M. le Président. Et on va le faire, on a le courage. On l'a déjà fait puis on va continuer à le faire si le gouvernement, il n'a pas le courage puis il n'a pas la responsabilité d'ajourner les travaux. Parce que c'est eux autres mêmes qui disaient: Quand nous, on va être au pouvoir, on ne siégera plus après minuit. C'est ça qu'on a dit. Ça a été ça qui a été dit jusqu'à la dernière minute, M. le Président, puis là ça fait deux jours qu'on siège en fin de session, lundi et mardi... hier lundi, puis aujourd'hui mardi, les deux premières journées de fin de session... on a siégé jusqu'à 2 h 45 hier puis, à 3 h 30, on est encore ici, à l'Assemblée nationale. Ça, c'est le double langage de ce gouvernement, un gouvernement qui est capable seulement de taxer les Québécois et les Québécoises. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Viger. Alors, je cède maintenant la parole au député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Quel culot, quelle audace, quel toupet de la part du whip en chef du gouvernement de dire: On va voir le vrai visage de l'opposition, alors que nous avons vu le vrai visage du gouvernement. À 11 h 50, le député de LaFontaine a présenté une motion pour ajourner les débats. Qu'ont-ils fait? Ils ont voté contre, M. le Président.

Quand je pense au député de Masson, qui s'est levé, qui a fait un discours, des jeux de mots, des belles rimes, hein! Il a même trouvé la façon de parler de souveraineté et de séparation dans un tel projet de loi, alors que les contribuables sont frappés de plein fouet par ce gouvernement qui va aller piger 48 000 000 $ dans les poches des contribuables. Il n'a rien trouvé d'autre que d'amuser ses collègues, d'en réveiller quelques-uns. Parce que le vrai visage du gouvernement, j'aurais bien souhaité, M. le Président, que la caméra soit sur le whip en chef du gouvernement alors que celui-là était écrasé dans son siège, les yeux fermés, la bouche ouverte, qu'il dormait alors qu'on parle de ce projet de loi.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de... S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Vous connaissez très bien le règlement, M. le député de Marquette. Vous êtes entré en fonction en même temps que moi, je crois, alors on a eu tous deux l'occasion de cheminer ensemble, de prendre conscience et connaissance de notre règlement. Alors, je vous demanderais, s'il vous plaît, de bien vouloir le respecter et de faire en sorte que le débat se continue dans la sérénité. Vous avez un travail à faire, vous l'exécutez bien, alors je vous invite à poursuivre votre allocution.

M. le leader de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, un peu une question de directive. Est-ce que vous reprochez à mon collègue – vous le faites d'une façon bien correcte, vous êtes l'autorité ici – de décrire l'atmosphère, l'allure qu'a l'Assemblée nationale à 3 h 35 le matin? Et c'est important que les Québécois et les Québécoises sachent qu'à 3 h 35 le matin ce n'est pas comme 3 h 35 l'après-midi. On voit donc des choses que l'on ne voit pas en temps normal, M. le Président, à savoir des députés qui somnolent. Et peut-on leur faire reproche lorsque le gouvernement nous oblige à siéger à 3 h 35 le matin? Alors, je considère que les propos de mon collège sont parfaitement corrects. Il ne fait que décrire une situation qui est vraie, et c'est la faute du gouvernement, et de son whip, et de son leader.

(3 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci pour vos propos, M. le député de Frontenac. Moi, je me considère chanceux et choyé ce soir de présider des débats dans un salon quand même bien garni, au-delà du quorum requis en vertu de notre règlement. Je trouve que les propos des parlementaires sont tout à fait conformes. Le débat se tient bien et je vous invite à poursuivre dans l'harmonie. Et, de ce fait, je pense que le député de Marquette est prêt à continuer. Alors, M. le député, je vous invite.

M. Ouimet: Il y a certaines vérités, M. le Président, qu'on doit dire ici, en cette Chambre, surtout lorsqu'on pense à Rimouski où, le 25 août dernier, dans le Progrès-Écho de dimanche, le titre était: «Les maires attendent le ministre de pied ferme». Et on sait à quel point ce projet de loi n'est pas accepté dans la ville de Rimouski. Et j'aurais bien souhaité également que la caméra se place directement sur la députée de Rimouski, qui a quitté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le whip du gouvernement, question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, nous avons permis que le temps qui est dévolu à la partie ministérielle soit pris par les gens de l'opposition, jusqu'à maintenant. Je pense qu'on se doit ici, en cette Chambre, M. le Président, un décorum. Le député n'a pas le droit de pointer qui que ce soit, ici, en cette Chambre. Qu'il se limite donc, s'il vous plaît, à parler pourquoi on doit reporter l'étude de ce projet de loi là sans s'en prendre à des personnes. Je pense que le député doit savoir que des gens comprennent qu'il y a, à ce moment-ci, des décisions qui doivent être prises. Nous avions proposé à l'opposition de voter immédiatement, ce qu'elle a refusé, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition, question de règlement? Question de directive?

M. Lefebvre: M. le Président, vous avez entendu, vous avez très bien entendu mon collègue de Marquette, qui a tout simplement décrit, encore une fois, la situation dont le gouvernement, son leader, son whip sont responsables. Il est 3 h 37, M. le Président, puis il y a des députés qui ne sont plus en état, entre guillemets, de supporter de façon adéquate et correcte les travaux de l'Assemblée parce qu'ils sont épuisés, épuisés, M. le Président. C'est ça que mon collègue dit. Il n'y a rien d'irrégulier là-dedans. C'est la faute...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint de l'opposition, je pense qu'à ce stade-ci il faut cesser de mettre la responsabilité de part et d'autre. Nous vivons dans un système parlementaire qui nous permet de travailler jusqu'à 3 h 40; au moment où l'on se parle, il est 3 h 40. C'est notre système parlementaire actuel qui permet qu'on travaille à cette heure-là. Et les gens qui nous écoutent, je les avise que les députés qui sont ici présents devront obligatoirement être présents à 10 heures ce matin, lors de l'ouverture de l'Assemblée. Ce sont les affaires courantes qui débutent à 10 heures ce matin. Et, si des députés terminent à 8 heures ou à 9 heures, ils devront être à 10 heures à l'ouverture des affaires courantes.

Donc, entre-temps, notre système parlementaire n'est pas modifié. Nous espérons, nous de la présidence, qu'effectivement les travaux nous permettront de faire en sorte que la session d'hiver, on puisse la travailler avec un autre horaire un petit peu plus humain – je dirais ça: «un peu plus humain» – qui nous permettrait d'être peut-être beaucoup plus efficaces. Parce que c'est anormal qu'un homme ou une femme commence à faire du bureau le matin à 8 heures et qu'à 3 h 40, dans la nuit, cette personne-là soit encore sur l'ouvrage. Mais, dans notre système actuel, c'est permis, c'est permissible et, à partir de ce moment-là, nous allons continuer à travailler dans ce sens-là.

Alors, si M. le député de Marquette est prêt à continuer son allocution, nous allons l'écouter d'une façon assidue.

(3 h 40)

M. Ouimet: M. le Président, je tiens à rappeler également, suite à vos propos, que c'est le leader du gouvernement qui détermine le calendrier de nos travaux et qui détermine les heures auxquelles nous siégons, et le whip en a une responsabilité parce qu'il travaille directement avec le leader. Mais on ne m'empêchera pas, M. le Président, de parler quand je sais que les gens de Rimouski sont très préoccupés par le projet de loi, ça a été affirmé à plusieurs reprises dans les médias locaux, par la voie du journal local, et que la députée de Rimouski ne s'est pas fait entendre ce soir sur cet important projet de loi. Elle était présente, elle n'a jamais pris la parole, M. le Président. Et j'ai dit: Si la caméra était pointée en direction de la député de Rimouski, je pense que, si le maire de Rimouski et les maires des municipalités régionales de comté avaient vu leur députée représenter les citoyens de la façon qu'elle le faisait, M. le Président, ils auraient rapidement tenté d'appeler pour la réveiller.

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Le député de Marquette a contrevenu deux fois à notre règlement. Dans un premier temps, il sait très bien qu'il ne peut souligner la présence ou l'absence d'un député en cette Chambre. Donc, il n'avait aucunement à dire si la députée de Rimouski était en cette Chambre ou non.

Deuxièmement, M. le Président, 35.5°, on ne «peut attaquer la conduite d'un député». Donc, c'est carrément attaquer la conduite d'un député en cette Chambre, et c'est inacceptable, M. le Président. Jamais, et je suis en cette Chambre depuis sept ans, je n'ai vu des députés, de quel que côté que ce soit, M. le Président, utiliser tout le temps uniquement pour faire des attaques personnelles. C'est tout à fait inacceptable, M. le Président! S'ils ont des arguments, qu'ils les utilisent sur le report et non sur les personnes.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, tout à l'heure, il y a une couple d'heures, Mme la députée de Terrebonne, leader adjointe du gouvernement, a commis la même erreur, là. Elle vous indique... Le député de Maskinongé, on l'entend de temps en temps, M. le Président, exprimer des sons, ça ressemble à des paroles. M. le Président, on ne peut pas souligner l'absence, ça va, mais on peut souligner la présence, puis je le dis avec beaucoup de gentillesse, Mme la députée de Terrebonne. Écoutez, on serait rendu à dire... M. le Président, j'ai entendu tout à l'heure l'allocution du député de Laviolette qui, à son tour, m'écoute, puis je serais en infraction. J'aimerais que vous indiquiez à Mme la députée de Terrebonne qu'elle se trompe, en toute amitié.

Ceci étant dit, que l'on reproche à mon collègue député de Marquette que, maintenant, ça serait antiparlementaire d'indiquer que le maire de Rimouski, M. le Président, serait malheureux de savoir que Mme la députée de Rimouski n'a pas fait ci, n'a pas fait ça, tout est correct, il n'y a rien d'irrégulier là-dedans. Je ne comprends pas, là. Je comprends qu'il est 3 h 44, 4 décembre 1996. Le député de Marquette dit des choses qui font mal. Ça va continuer à faire mal jusqu'à 9 h 58 parce qu'on va reprendre l'autre séance à 10 heures. Ça va continuer à faire mal, M. le Président, en toute amitié, de façon bien correcte, en respect de nos règlements, de la Loi sur l'Assemblée nationale et de la vérité.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, en toute amitié, M. le leader de l'opposition, permettez-moi de vous souligner, jurisprudence parlementaire de Beauchesne, 6e édition, page 146, article 481:

«Outre les restrictions prévues à l'article 18 du règlement, l'usage veut qu'un député, lorsqu'il a la parole, s'abstienne:

«c. de souligner l'absence ou la présence de tel ou tel député.»

Alors, je fais mienne la décision du recueil Beauchesne et je compte bien que, d'ici à la clôture de nos débats, on va respecter en tous points notre jurisprudence.

Maintenant, je remarque également qu'en vertu de 35.2° il faut quand même comprendre que, dans cette Chambre, on n'a pas à déterminer la conduite d'un député. Il faut faire attention à ce niveau-là. Alors, je vous prierais maintenant – et je suis persuadé que vous allez le faire – de poursuivre vos débats dans l'ordre et de la façon coutumière à laquelle vous nous avez habitués, M. le député de Marquette.

M. Lefebvre: M. le Président, 30 secondes...

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: ...pour vous dire, là, puis je ne veux pas contester votre décision, que je ne veux cependant que vous rappeler que votre interprétation, quant à moi, en toute amitié, n'est pas correcte, puis ça, c'est de la jurisprudence. Je vous suggère – puis je vais le faire de mon côté – de bien vérifier l'interprétation qu'on donne au sens de la phrase à laquelle vous avez fait référence tout à l'heure. On peut parler de députés qui sont en Chambre. Tout est dans l'intention que l'on a dans notre propos, sinon il n'y a plus rien qui tient. Qu'on ne puisse souligner l'absence d'un député, j'en conviens; la présence, c'est une autre histoire. Je m'arrête là-dessus parce que je veux surtout qu'on fasse le débat de fond.

Mme Caron: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: M. le Président, le leader adjoint n'a pas à contester votre décision. Vous avez rendu votre décision et vous avez cité la jurisprudence, et je l'avais très bien lue et je l'avais très bien comprise. J'aimerais aussi rappeler qu'il y a des atteintes aux droits de l'Assemblée. Rappelez l'article 55. Dans l'article 55, on nous dit, au point 7°, que «nul ne peut porter atteinte aux droits de l'Assemblée. Constitue notamment une atteinte aux droits de l'Assemblée le fait d'attaquer, gêner, rudoyer ou menacer un député dans l'exercice de ses fonctions parlementaires». Je considère que ce que le député de Marquette a fait, c'est effectivement attaquer et gêner un député.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Merci bien. Alors, M. le député de Marquette, il vous reste...

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laviolette et whip du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais que vous vérifiiez une chose, et c'est une demande de directive en même temps. Nous avons, en 1978, installé ici, à cette Assemblée, les caméras. Les caméras – il y a toujours un comité aviseur formé d'un représentant de l'opposition, d'un représentant du côté ministériel et d'un représentant à la présidence pour justement éviter ce que l'on a entendu tout à l'heure – c'est qu'en aucune façon les caméras – et c'est dans l'entente entre les partis politiques – ne fassent du balayage en cette Assemblée. Comme on ne peut pas faire indirectement et utiliser les moyens indirects pour faire des choses, comment peut-on interpréter les paroles du député quand il dit: «Si la caméra avait fait un balayage et était allée chercher telle personne...», alors qu'on sait très bien que la caméra doit viser la personne qui parle et non pas d'autres personnes en cette salle? Est-ce que vous pouvez me donner de quelle façon on peut interpréter l'intention malveillante de la part du député de Marquette?

Une voix: Excellent!

M. Ouimet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le député de Marquette, M. le député de Roberval s'était levé. M. le député.

M. Laprise: M. le Président, je voudrais savoir comment il reste de minutes à la partie ministérielle, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Roberval, j'avais reconnu le député de Marquette, et le député de Marquette, il lui reste actuellement 12 minutes à son intervention. Alors, si le député de Marquette termine son intervention avant l'expiration du 12 minutes, il me fera plaisir de vous reconnaître, si vous êtes l'intervenant qui s'est levé. Alors, M. le député de Marquette.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le whip en chef du gouvernement.

M. Jolivet: J'aurais une demande...

Le Vice-Président (M. Pinard): Un instant.

Des voix: ...

(3 h 50)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je vais vous répondre très simplement. C'est que quiconque, comme député, a le droit de se lever et soit de demander une directive ou soit d'intervenir sur une question de règlement. Alors, M. le député de Marquette, c'est la raison pour laquelle, à chaque fois que le whip en chef et député de Laviolette se lève, que ce soit sur une question de directive, que ce soit sur une question de règlement, je suis obligé de l'entendre. M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'ai une question de directive. Vous venez de dire à la personne qu'il restait 12 minutes de temps. J'aimerais savoir la chose suivante: Nous avons un débat restreint, il est de deux heures. Dans le débat restreint de deux heures, les droits de parole comprennent aussi les questions de règlement et des choses semblables. Il me semble que nous avons commencé à 2 h 55. Il me semble qu'il reste environ cinq minutes et non pas 12 minutes, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laviolette, s'il y a une question de règlement ou une question de directive durant une intervention de député, à ce moment-là, c'est comptabilisé. Mais, lorsqu'il y a une question de règlement ou de directive entre deux interventions, à ce moment-là, ça n'est pas comptabilisé dans le débat. Alors, M. le député de Marquette.

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Laviolette.

M. Lefebvre: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Frontenac, je vais vous entendre sur la question de règlement...

M. Lefebvre: Non, c'est justement, M. le Président, c'est là-dessus, là. C'est là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Parce que, vous savez, sur une question de règlement on peut soulever une autre question de règlement. Ça aussi, c'est consacré.

Le Vice-Président (M. Pinard): Avant d'aller plus loin, messieurs, parce que... Bon. Un débat restreint, c'est deux heures d'intervention. C'est deux heures de débats. Alors, les questions de règlement ou de directive entre deux interventions ne sont pas comptabilisées par la table.

Non. Je m'excuse. Je m'excuse. Le 12 minutes, M. le député de Frontenac, non, c'est parce que les questions de directive, les questions de règlement ont eu lieu pendant l'intervention du député de Marquette. Bon. Ça va, là? Prenons tous notre souffle, là, il est 3 h 55. Alors, à ce stade-ci, combien reste-t-il de temps, Michel, s'il vous plaît? M. le député de Marquette, à compter de ce moment-ci, il vous reste huit minutes à votre intervention. Vous pouvez les prendre ou...

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Ça embête, et on le constate au plus haut point, que l'opposition se lève, prenne le temps du gouvernement que le gouvernement ou les ministériels n'ont pas souhaité prendre, surtout lorsqu'on parle de la municipalité, de la ville de Rimouski, parce que le maire de Rimouski, lui, disait: C'est un dossier important, puisqu'il implique les taxes des citoyens. Or, ça embête au plus haut point que l'opposition ne permette pas au gouvernement d'aller enfoncer dans la gorge des citoyens, et surtout les citoyens de Rimouski, des taxes additionnelles qui vont s'élever à environ 40 000 000 $. Et, si on ajoute les taxes additionnelles pour l'Institut de police de Nicolet, c'est un autre 8 000 000 $. Ça embête le gouvernement au plus haut point.

Et là on constate le double discours du ministre de la Sécurité publique, le ministre de la Sécurité publique qui, lui, disait dans son intervention que ce n'est pas vrai que ça va coûter plus cher. Sauf qu'on a l'impression qu'ils sont les seuls, lui et les autres députés ministériels, à penser une telle chose. Parce que le ministre de la Sécurité publique, dans ce projet de loi, n'a aucun appui. Aucun appui. Tous les groupes, tous les organismes, toutes les personnes qui sont venues devant la commission parlementaire lui ont dit qu'elles étaient contre son projet de loi. Il a réussi à faire l'unanimité, M. le Président, contre son projet de loi et contre les intentions du ministre de la Sécurité publique.

Il disait également que, depuis deux ans, le gouvernement a baissé les taxes. Comment pouvons-nous demeurer assis et écouter de tels discours, alors qu'on sait que dans le monde municipal, pour l'année 1995-1996, ça a été une augmentation de taxes de 115 000 000 $, que dans le monde scolaire ça a été une augmentation de taxes de plus de 77 000 000 $? Lorsqu'on pense à l'assurance-médicaments, ce sont de nouveaux tarifs de 200 000 000 $ sur les médicaments, sur le dos des personnes âgées. Je comprends pourquoi le député de Laviolette et whip du gouvernement se levait à chaque fois pour m'empêcher de prendre la parole et de dire la vérité. Ça fait mal, cette vérité-là, M. le Président...

M. Jolivet: M. le Président, question de règlement, question de règlement.

M. Ouimet: ...et, à nouveau, il fait la même chose, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): Messieurs, messieurs, de part et d'autre, je tiens à vous aviser d'une chose, c'est que, dès que le président est levé, même si vous haussez le ton, il n'y a absolument rien qui est enregistré, il n'y a absolument rien qui passe à l'écran non plus. Alors, ça peut soulager, là, ça peut soulager, mais...

Bon. Alors, sur une question de règlement ou de directive, M. le whip du gouvernement?

M. Jolivet: De règlement, M. le Président. Il n'y a personne ici, en cette Chambre, et le député de Marquette non plus, M. le Président, en vertu du règlement, qui a le droit de me prêter des intentions. Ce que j'ai fait, je l'ai fait en regard du règlement, M. le Président. Donc, les intentions malveillantes qu'il me prête sont fausses.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Marquette, si vous voulez poursuivre, tout en respectant votre règlement, s'il vous plaît.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Alors, je vous rappelais, M. le Président, qu'il n'est pas vrai que nous allons demeurer assis et que nous n'allons pas dénoncer les taxes additionnelles que le gouvernement veut imposer à l'ensemble des municipalités régionales de comté à travers la province de Québec; on parle de plus de 48 000 000 $ de taxes. Et ce n'est pas vrai non plus... Si la députée de Rimouski, M. le Président... Et je ne veux signaler ni sa présence ni son absence, mais je me dois quand même de signaler qu'elle n'a pas pris la parole sur le projet de loi n° 77. Donc, M. le Président, je vais prendre le temps du parti ministériel pour plaider en faveur du maire de Rimouski qui disait: C'est un dossier important, puisqu'il implique des taxes des citoyens et que la ville de Rimouski est contre le projet de loi n° 77, M. le Président.

Si la députée de Rimouski ne se lève pas en cette Chambre pour dire qu'elle n'est pas d'accord avec l'action du gouvernement et qu'elle souscrit davantage à la position de l'ensemble des commettants de sa circonscription, c'est-à-dire qu'ils sont contre une hausse de taxes additionnelle pour financer la Sûreté du Québec, moi, je vais le faire, M. le Président. Et je suis convaincu que l'ancien député de Rimouski l'aurait fait également. L'ancien député libéral de Rimouski l'aurait fait. Et je souhaite que, lors de la prochaine élection, ce sera un député libéral qui sera élu et qui pourra prendre la défense des citoyens et des commettants de ce comté. C'était le but de mon intervention, M. le Président.

Comment comprendre et comment croire le ministre de la Sécurité publique lorsqu'il dit que ce n'est pas vrai que ça va coûter 48 000 000 $, alors que tout le monde est venu lui dire ça? Tout le monde est venu lui dire ça. Et je rappelle les propos de Mme Jacinthe Simard, qui disait ceci, le 21 novembre dernier: «Il n'y a rien dans votre document qui soit susceptible d'établir un lien de confiance entre les municipalités et le gouvernement.» Ce n'est pas n'importe qui qui parle, M. le Président, c'est la présidente de l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec. Et elle disait également ceci au ministre de la Sécurité publique, elle disait: «Sachez, M. le ministre, que le document qui nous a été remis nous a plus que jamais convaincus que ce chiffre – le chiffre dont parlait le ministre de la Sécurité publique – est un chiffre gonflé, trafiqué et arbitraire.»

Alors, vous comprendrez, M. le Président – et je vois que le ministre de la Sécurité publique semble reconnaître les propos assez sévères que lui adressait la présidente de l'UMRCQ – que ça va tout à fait...

(4 heures)

M. Jolivet: M. le Président, regardez, en vertu du règlement, ce qu'ils viennent de faire. Ils viennent de dire que le ministre reconnaît... ce qui n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai. Il n'a pas le droit de faire ça, en vertu du règlement. Qu'il se limite donc à être un gars correct, puis on n'interviendra pas dans ses débats. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président!

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette, conformément au règlement – le parti ministériel l'a bien relevé – veuillez, s'il vous plaît, vous conformer au règlement pour terminer votre allocution. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, je me conforme au règlement et chaque fois le député de Laviolette vient m'interrompre. Chaque fois que je lui dis que lui et l'ensemble de son gouvernement ont imposé plus de 2 000 000 000 $ de taxes à l'ensemble des contribuables, M. le Président, alors que le premier ministre nous disait en cette Chambre que les citoyens ne seraient pas touchés, qu'il n'y aurait pas d'augmentation de taxes, force est de constater après deux ans que c'est plus de 2 000 000 000 $ de taxes additionnelles que vous avez imposées aux contribuables. Et c'est un autre exemple, le projet de loi n° 77, où on va aller chercher un autre 47 000 000 $ de taxes. Je comprends que ça fait mal au député de Laviolette, mais c'est la vérité et je vais l'affirmer en cette Chambre. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Le débat restreint sur la motion de report est terminé, motion qui a été déposée par le député de LaFontaine – de Shefford? – qui a été déposée par le député de Shefford et qui se lit comme suit:

«Je fais donc motion pour que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots "soit maintenant adopté" par les mots "soit adopté dans six mois".»

Alors, veuillez appeler les députés, s'il vous plaît, et nous allons suspendre quelques instants.

(4 h 2 – 4 h 7)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Mise aux voix

Alors, nous allons maintenant mettre aux voix la motion de report du député de Shefford qui se lit comme suit:

«Je fais donc motion pour que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots "soit maintenant adopté" par les mots "soit adopté dans six mois".»

Que les députés qui sont en faveur de cette motion de report veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Brodeur (Shefford), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que les députés qui sont contre la motion de report veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions?

Une voix: Aucune.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour:17

Contre:31

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je déclare donc la motion de report rejetée.

(4 h 10)


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, nous revenons maintenant à l'adoption du principe du projet de loi n° 77, Loi modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il d'autres intervenants sur... M. le député d'Argenteuil.


M. Régent L. Beaudet

M. Beaudet: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai le plaisir de parler devant une assemblée nombreuse malgré l'heure tardive. J'espère que vous allez tous rester présents et attentifs à mes paroles dans le but de vous convaincre du bien-fondé de la démarche que nous avons entreprise afin de faire réaliser au ministre l'importance d'écouter les gens du milieu.

Les gens du milieu, M. le Président, sont les gens les plus près du citoyen. Et combien de fois on a entendu le ministre responsable des municipalités nous dire que ce sont ces personnes qui sont les plus près du service, qui devraient être celles qui nous donnent les notions à écouter. Pourtant...

Le Vice-Président (M. Pinard): Je regrette, mais, même s'il est 4 h 15, le député d'Argenteuil a droit à autant d'attention que ceux ou celles qui se sont exprimés à 14 heures hier. Alors, que ceux qui n'ont plus d'affaire ici veuillent bien sortir.

Merci. Je sais que ce n'est pas facile. Je vous remercie beaucoup.

Alors, M. le député d'Argenteuil, si vous voulez bien poursuivre.

M. Beaudet: Merci, M. le Président. Je réalise bien, M. le Président, que, malgré l'heure tardive, il y en a qui sont encore remplis d'énergie.

Je disais donc, M. le Président, que la structure la plus près du citoyen est celle qui est la mieux placée, la mieux positionnée pour porter jugement. Et deux regroupements nous ont clairement dit, nous ont clairement exposé leurs objections au projet de loi du ministre, que ce soit l'Union des municipalités régionales de comté ou l'Union des municipalités du Québec.

Lorsque l'on procède à des coupures sans discernement, que ce soit dans les hôpitaux, dans la fonction publique, ou dans la diminution de services, ou qu'on procède à des augmentations de taxes et de tarifs – et on en a eu pour au-delà de 650 000 000 $ à 750 000 000 $ au cours des quatre ou cinq derniers mois, M. le Président – et qu'en même temps le ministre demande à la population, aux gens des municipalités, des petites municipalités surtout, en bas de 5 000 de population, de financer son plancher d'emploi qu'il recherche à la Sûreté du Québec, ou sa hausse salariale, et qu'il va demander aux petites municipalités d'augmenter leur compte de taxes pour favoriser sa réforme, M. le Président, on ne peut supporter une telle démarche.

Dans mon comté, une petite municipalité de 800 habitants verra le compte de la Sûreté du Québec passer de 48 000 $ à 112 000 $, 112 000 $ qu'une population de 800 habitants devra supporter. C'est invraisemblable que l'on demande à des citoyens qui sont déjà étouffés par les taxes, par les impôts d'aller contribuer de façon additionnelle à des mesures que nous jugeons exagérées de la part du ministre. Le ministre essaie de maintenir un nombre de policiers à la Sûreté du Québec sur le dos des citoyens, sur le dos des petites municipalités.

M. le Président, le ministre s'oppose au rôle des municipalités régionales de comté, qui sont l'entité après la municipalité, qui pourraient regrouper un certain nombre de municipalités et leur permettre d'avoir un corps de police même si elles sont en bas de 5 000 de population. Mais on laisse au jugement du ministre le soin de décider si, oui ou non, il sera d'accord avec la proposition qui lui sera faite par la MRC.

Vous savez, M. le Président, malgré toute la confiance que j'ai dans le ministre, malgré le travail qu'il fait, je dois quand même manifester mon opposition, parce que je ne connais pas le futur ministre de la Sécurité publique et, lui, je ne sais pas si je pourrai lui donner ma confiance. Et ça, c'est un élément essentiel dans la démarche. La solution du ministre, ça a été d'augmenter les taxes pour protéger les emplois. Pourtant, on nous a toujours dit que c'était la mauvaise façon de créer de l'emploi. C'est évident que le ministre a subi des pressions. Mais pourquoi ces pressions, M. le Président? C'est des pressions économiques. Elles lui sont venues, ces pressions, du président du Conseil du trésor ou encore du ministre des Finances.

La facture de 48 000 000 $ qu'il va refiler aux municipalités, M. le Président, il y a quelqu'un qui va la payer. On ne peut pas envoyer une facture sans s'attendre à recevoir, à un moment donné ou à un autre, un chèque. Ce chèque ou ces chèques, ce seront les citoyens et les citoyennes des petites municipalités, en grande partie, qui devront les assumer. Et le ministre nous dit qu'il n'accepterait pas, en bas d'un ratio de 1 à 1,25 policier par 1 000 habitants, de supporter une démarche par une MRC. Pourtant, il y a des corps de police qui fonctionnent avec un ratio de beaucoup inférieur. Il y en a jusqu'à 0,63, 0,89, et ça fonctionne. Et ils jouent le rôle d'assurer la sécurité des citoyens; ils jouent le rôle de patrouiller, de voir à ce que les citoyens se sentent en sécurité, M. le Président.

Là encore, on peut facilement utiliser l'expression du «pelletage». C'est un transfert de facture, c'est un pelletage dans la cour de l'autre. Le ministre se sent serré dans son budget, incapable de rencontrer ses engagements et, à la demande du Conseil du trésor et du ministre des Finances, il refile la facture aux municipalités sans respecter le droit des citoyens qui, eux, ont le droit d'exiger, ou de souhaiter, ou d'avoir les services qu'ils veulent. Mais le ministre s'acharne à vouloir leur imposer un service qu'ils ne veulent pas, un service qu'ils trouvent trop dispendieux et qu'ils ne peuvent se payer de toute façon, mais surtout duquel ils n'ont pas besoin. Et, devant une situation comme celle-là, on ne peut pas s'abstenir de soulever l'adage qui dit: Pas de taxation sans représentation. Mais ces personnes qui n'en veulent pas de services, alors pas de services sans leur demande et que le ministre se soumette à leur position de refus. Ils ne veulent pas les services que le ministre leur offre. Ils sont trop dispendieux, ils sont trop raffinés pour eux. Ce n'est pas de ce genre de services qu'ils ont besoin.

(4 h 20)

En plus, M. le Président, pour joindre l'insulte à la démarche, il demande aux municipalités de payer pour l'Institut de police de Nicolet. On est rendu qu'on va demander aux municipalités de défrayer le coût de la formation des policiers et, bientôt, on va demander aux municipalités de défrayer la formation des ingénieurs, puis la formation des médecins, puis la formation des dentistes. Bien, pourquoi ne pas tout mettre? Finalement, on va refiler la facture du ministère de l'Éducation aux municipalités. Tant qu'à y être, les municipalités n'ont pas un mot à dire. Elles n'ont qu'à se soumettre, à fouiller dans leurs poches et à payer!

Alors, nous avons deux poids, deux mesures. Le ministre de l'Éducation qui dit aux étudiants: Non, on gèle les frais de scolarité puis on ne les augmentera pas, puis ça va rester comme cela, puis, de l'autre côté, le ministre de la Sécurité publique qui nous dit: Bien, écoutez, les frais de scolarité, il n'y a rien là, on va demander aux municipalités de les payer, puis ça va finir là. Et pourtant les policiers ou les futurs policiers, qui, à l'intérieur d'une période de cinq ans gagnent déjà plus de 55 000 $, seraient définitivement plus en position d'assumer leurs frais de scolarité que beaucoup d'étudiants à qui la ministre de l'Éducation a demandé d'assumer leurs frais de scolarité, bien qu'elle se soit abstenue pour cette année d'augmenter les frais.

M. le Président, les petites municipalités seront soumises à un jugement du ministre. Elles ne veulent pas des services de la Sûreté du Québec. Elles n'en n'auront aucun contrôle. La Sûreté du Québec ne répondra qu'au ministre, qu'à son directeur, mais les élus municipaux n'auront aucun contrôle sur ce corps policier. Ils jugent qu'ils auront un meilleur service par leur propre force policière, parce qu'elle répondra à leurs besoins; elle répondra à ce que les citoyens recherchent.

Alors, M. le Président, ce projet de loi qui a été présenté à la hâte, en toute fin, le 14 novembre, si ma mémoire est juste – c'était la dernière journée pour permettre le dépôt des projets de loi – ce projet de loi va affecter au-delà de 1 250 municipalités au Québec, petites municipalités avec une population inférieure à 5 000. Et le ministre va les forcer à se soumettre à son projet de loi. Il va leur ajouter une taxe importante, importante puisqu'on va passer de 0,10 $ à 0,18 $ le 100 $ d'évaluation. C'est 80 % d'augmentation. Nommez-moi une taxe... Malgré toutes les taxes que le gouvernement a mises en place depuis six mois, c'est la plus importante en pourcentage: 80 % d'augmentation. Cette taxe va faire passer... Un exemple: une maison évaluée à 100 000 $, qui payait 100 $ pour la Sûreté du Québec, va passer à 180 $; 180 $ au lieu de 100 $, c'est important. Et les citoyens ne peuvent se payer – d'autant plus dans les conditions économiques dans lesquelles nous sommes – des augmentations aussi importantes.

J'espère, malgré l'heure tardive, que mes confrères et consoeurs d'en face vont s'éveiller à cette notion d'une taxe écrasante de 80 % que les citoyens des petites municipalités devront assumer grâce à l'imposition par le ministre de sa loi, une loi qui couvre toutes sortes de terrains, qui couvre les taxes, qui couvre l'éducation et qui couvre aussi les privilèges aux policiers de pouvoir siéger sur des conseils municipaux, ou dans d'autres organismes, ou situations officielles où il leur était interdit par le passé.

Lorsqu'on parle des taxes, M. le Président, et j'en ai mentionné suffisamment, il me semble que les membres du parti ministériel, gouvernemental, devraient réaliser qu'on en a déjà assez demandé aux citoyens et qu'assez, c'est assez. On devrait cesser d'aller fouiller dans la poche des citoyens à nouveau, surtout pour un service qui ne connaîtra aucune amélioration, qui ne donnera aux citoyens aucun service additionnel auquel ils n'ont déjà accès et, surtout, qui ne leur donnera aucun service additionnel à ceux qu'ils ont déjà. Ils ne veulent pas avoir la Sûreté du Québec, ils veulent avoir la possibilité de se regrouper par groupes de petites municipalités, ou encore avec l'aide de la MRC, qui pourrait très bien gérer le nouveau corps policier.

Si on parle de l'éducation, j'en ai glissé un mot, l'Institut de police va se faire financer dorénavant par les municipalités; un nouveau système d'éducation en perspective au Québec où l'éducation viendra des municipalités. Bien, M. le Président, si ça continue, on va fermer tous les ministères. L'éducation, c'est les municipalités qui vont s'en charger; la sécurité, c'est les municipalités qui vont s'en charger; les finances, ça va être les municipalités, c'est de là que tout l'argent va venir. Finalement, on n'a plus besoin des ministres ni des ministères, et peut-être que ce serait la meilleure solution! Elle me semblerait, en tout cas, plus juste et plus proche des citoyens, et je suis assuré qu'à ce moment-là les citoyens des municipalités auraient l'écoute de leurs élus, ce qui n'est pas le cas actuellement. Lorsque l'on voit l'importance des taxes que nous avons reçues depuis la prise de pouvoir par le Parti québécois, en particulier depuis la venue du nouveau premier ministre – je dis «nouveau», mais ça fait déjà neuf mois, ce n'est plus nouveau... Et tout ce que nous avons reçu en cadeau, c'est des taxes et des taxes, bien qu'il avait pris l'engagement de ne jamais aller toucher aux plus démunis, aux gens les plus fragiles. Et pourtant on va toucher partout, dans toutes les municipalités, tous les propriétaires, les grands comme les petits, qui vont devoir assumer une taxe additionnelle, qui vont devoir assumer l'enseignement aux policiers à l'école de police de Nicolet.

Et, finalement, on va permettre aux policiers de jouer un rôle auquel ils n'ont pas eu accès depuis de nombreuses années. Ils vont pouvoir occuper des postes publics dans un endroit, ou un lieu, ou un terrain où ils n'oeuvrent pas dans leur travail. Et je ne peux que soulever un regret: on a l'impression aujourd'hui que tout ce qui a été planifié dans le passé n'a plus aucune valeur. Nos pairs avaient dû réfléchir avant de demander aux policiers de ne pas exercer de fonctions publiques. Alors, M. le Président, comme j'y ai touché, d'ailleurs vous réalisez que ce projet de loi touche à plusieurs éléments: les taxes, l'éducation, les rôles sociaux des policiers, et ça m'apparaît un peu disparate comme projet de loi. Si le ministre pouvait le couper, il me semble que ce serait plus facile à débattre que de débattre tout ça ensemble, dans un grand tout. Et, dans cet esprit, j'aimerais soumettre une motion de scission, motion qui se lit comme suit:

(4 h 30)


Motion de scission

«Qu'en vertu de l'article 241 du règlement de l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 77 soit scindé en trois projets de loi: un premier intitulé Loi modifiant la Loi de police concernant l'organisation et la dispensation des services policiers de base sur le territoire québécois, comprenant les articles 1 à 3, 6 à 18 et 23 à 26; un deuxième intitulé Loi concernant l'exercice de certaines activités politiques par des membres de corps de police, comprenant les articles 4 et 5; et un troisième intitulé Loi modifiant la Loi sur l'organisation policière concernant l'Institut de police du Québec, comprenant les articles 19 à 22.»

Et, M. le Président, si le député de Laviolette avait écouté, il n'aurait pas été surpris lorsque je lui ai présenté la motion, puisque j'en ai parlé au cours de mon exposé qui était assez clair et qui montrait les trois volets de la loi présentée telle quelle par le ministre. Et je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député d'Argenteuil. Nous allons suspendre quelques minutes pour...

Mme Caron: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, très bien, pour délibérer sur la motion.

Mme Caron: M. le Président, quelques minutes sur la recevabilité.


Débat sur la recevabilité

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, oui, j'en viens là. Alors, avant, cependant, de nous retirer, je vais permettre à la leader adjointe du gouvernement d'intervenir. Elle veut intervenir sur la recevabilité. Alors, Mme la leader adjointe.


Mme Jocelyne Caron

Mme Caron: Oui, M. le Président. Alors, j'aimerais bien ça faire quelques remarques sur la recevabilité de cette motion de scission.

Alors, M. le Président, concernant la jurisprudence de cet article pour la motion de scission, il y a deux critères qui sont utiles, qui nous ont d'ailleurs été fournis dans la jurisprudence, M. le Président, par l'actuel leader adjoint de l'opposition, qui était alors vice-président de l'Assemblée nationale et qui nous signalait, et je le cite, le 4 décembre 1990: «Un premier critère veut que chaque partie d'un projet de loi ne constitue pas une fraction d'un tout, le tout constituant le principe.» Alors, on nous disait que, finalement, un projet de loi pouvait contenir des parties distinctes, mais qu'il constituait, malgré ça, un tout unique. D'ailleurs, à cet égard, M. le Président, je vous ferai remarquer que nous considérons effectivement que le projet de loi constitue un tout, puisque, tout au long des débats, quand le ministre a expliqué le projet de loi, il a bien clairement exprimé que ce projet de loi, c'est d'abord et avant tout une réforme de l'organisation policière, donc un seul principe.

Le deuxième critère que nous rappelait le leader adjoint de l'opposition actuelle, qui était alors vice-président de l'Assemblée, était: «Un second critère consiste à distinguer entre l'essence et les modalités du projet de loi.» Alors, M. le Président, il est bien vrai que le projet de loi n° 77 est divisé en différentes fractions, notamment l'organisation des services de police sur le territoire, les activités politiques des constables, le financement de l'Institut de police, mais toutes ces fractions-là, ça constitue un tout unique: la réforme de la police.

D'ailleurs, M. le Président, je dois vous dire que les intervenants de l'opposition, ils n'ont pas parlé du même principe que nous. C'est vrai qu'ils n'ont pas parlé du principe de la réforme de l'organisation policière. Mais, l'un après l'autre – et je les ai tous entendus, il y en a eu 23 – sont venus nous dire que ce projet de loi là, c'était uniquement un projet pour taxer les contribuables. Il y avait un seul principe dans ce projet de loi là, c'était la taxation aux contribuables. C'est ce qu'on nous a répété l'avant-midi, l'après-midi, toute la soirée et jusqu'à cette heure, M. le Président. On nous a dit, l'un après l'autre, qu'il n'y avait qu'un seul principe dans le projet de loi, que c'était uniquement un projet de loi pour venir chercher de l'argent chez les contribuables. Il n'y avait absolument pas d'autre but au projet de loi. Donc, un seul principe, M. le Président.

Je vous rappellerai aussi une jurisprudence, celle du 21 mai 1986. La motion de scission était jugée irrecevable, M. le Président, parce qu'on disait que le projet de loi ne contenait qu'un seul principe. Cette fois-là, c'était la modification du fonctionnement de la Société de radio-télévision du Québec. Alors, cette fois-ci, M. le Président, c'est l'organisation policière ou, si on pense aux députés de l'opposition, c'est une loi qui vient apporter uniquement un principe de taxation.

Même si le projet de loi contient plusieurs modalités, il ne faut pas nécessairement en conclure qu'il existe plusieurs principes. Une décision rendue le 12 juin 1985 vient d'ailleurs confirmer la distinction à établir entre un principe d'un projet de loi et une simple modalité. Et on ajoutait: «Dans la recherche des principes d'un projet de loi, les notes explicatives de ce projet de loi n'ont aucune valeur juridique en soi.» Donc, on ne peut pas prendre uniquement les notes explicatives et puis nous dire que, à partir des différentes notes explicatives, on peut scinder le projet. Absolument pas, M. le Président. D'ailleurs, je vous invite à regarder les discours de tous les députés de l'opposition et je vous assure qu'ils ont, l'un après l'autre, dit qu'il n'y avait qu'un seul principe. L'un après l'autre nous a dit que ce projet de loi là était uniquement un projet de loi pour taxer les contribuables, qu'il n'y avait absolument rien d'autre.

Nous, on dit qu'il y a un seul principe: c'est celui de faire une réforme de l'organisation policière, une réforme qui est importante et qui est constituée de la carte policière, des droits des policiers, et qui est constituée aussi, bien sûr, de mesures financières qu'il faut appliquer pour rendre apte cette réforme.

M. le Président, je conclus que le projet de loi n° 77 ne contient qu'un seul principe. Si on parle du côté du gouvernement, on vous dira que le seul principe, c'est la réforme de la police au Québec et que les différentes parties du projet de loi ne sont que des modalités qui sont mises de l'avant par le ministre pour lui permettre d'atteindre cet objectif qui est la réforme. Si on parle du côté de l'opposition, bien, on vous dira qu'il y a un seul principe, c'est celui d'une taxation.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, Mme la leader adjointe du gouvernement. Je vais maintenant céder la parole à M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, je n'ai pas vu souvent, autant alors que j'étais, comme madame l'a soulignée, vice-président de l'Assemblée ou leader adjoint du gouvernement ou de l'opposition, quelque chose d'aussi évident quant à la scission dont on parle à l'article 241 et à l'article 205 de notre règlement. Le principe est très simple, vous le connaissez, vous avez vous-même rendu des décisions qui nous indiquent très clairement ce qu'il faut rechercher pour décider de la recevabilité d'une telle motion: un projet de loi, ça doit contenir un seul principe. À partir du moment où il y a deux principes, deux objectifs, deux sujets, on peut requérir que ce projet de loi là soit séparé, scindé en deux parties: un projet de loi faisant référence à un principe, un deuxième faisant référence à un deuxième principe et, dans le présent cas, à un troisième principe.

C'est tellement évident dans le présent cas que, pour les deuxième et troisième volets, c'est du droit nouveau. Premier principe, contenu entre les articles 1 à 3, 6 à 18 et 23 à 26: Loi modifiant la Loi de police concernant l'organisation et la dispensation des services policiers de base. C'est très clair. Ça fait référence à la question suivante: Est-ce que ce sera la Sûreté du Québec ou la sûreté municipale qui verra à donner la protection aux citoyens et citoyennes dans certaines parties du Québec? Et, si oui, il y aura ou pas une taxe portée de 0,10 $ du 100 $ à 0,18 $ du 100 $. Ça, c'est une chose. Moi, je pourrais être d'accord avec ça puis en désaccord avec les deux autres sujets, entre autres le changement quant au financement de l'Institut de police.

(4 h 40)

Deuxième sujet: droit nouveau. Le premier sujet, c'est de modifier à la hausse du droit ou une politique déjà existante. Deuxième volet: financement de... Bien, je vais y aller dans l'ordre. Celui-là est tellement évident. M. le député d'Argenteuil y a fait référence. Est-ce que les policiers peuvent ou non occuper des postes électifs? Droit nouveau. On n'en a jamais parlé. On ne modifie pas une loi existante, on n'en a... Oui, on modifie la Loi de police, évidemment, mais c'est la première fois qu'on parle au Québec – parce que ça existe ailleurs au Canada – de la possibilité de permettre à nos policiers d'occuper des postes au gouvernement fédéral, au gouvernement provincial ou municipal. Droit nouveau.

Bon, bien, moi, je pourrais être en accord avec ça, puis être en désaccord avec le premier point et être aussi en désaccord avec le troisième qui suit – droit nouveau encore une fois: déplacer le financement de l'Institut de police du gouvernement du Québec sur la tête des municipalités. Peut-être que je suis d'accord avec ça. Peut-être que je suis en désaccord avec le deuxième sujet. Et l'objectif, justement, de la motion de scission, c'est de permettre aux parlementaires de bien comprendre sur quoi ils votent. C'est ça, une motion de scission. Et Mme la députée de Terrebonne a fait référence au débat entre modalités et principes et elle a raison. Ce n'est pas des modalités, là, ce à quoi j'ai fait référence, c'est carrément des objectifs, des principes, des sujets complètement différents qui pourraient s'opposer entre eux.

M. le Président, j'ai effectivement – madame y a fait référence – rendu une décision dont elle vous a donné le résumé, mais j'en ai rendu une autre à peu près à la même époque, le 3 décembre 1992, où je disais – je n'aime pas me citer parce que ça a l'air un peu prétentieux, se citer lorsqu'on est sur votre banc, parce que vous savez qu'on n'est pas appelable; en principe, on ne se trompe jamais; ce n'est pas tout à fait comme ça lorsqu'on descend de trois marches parce que ça vous arrive de nous dire «vous avez raison ou vous avez tort»: «La motion est recevable. En effet, le projet de loi contient plusieurs principes. Chacun des principes énumérés dans la motion elle-même pourrait constituer la base d'un projet de loi complet en soi et cohérent.»

Ça va exactement dans le sens de ce que je viens de plaider. Ça serait cohérent de présenter un projet de loi qui ne contiendrait que le premier sujet auquel j'ai fait référence: Sûreté du Québec, hausse de 0,10 $ à 0,18 $ le 100 $ avec toutes les modalités accrochées à cette intention du gouvernement. Un autre projet de loi: l'élection des policiers, très cohérent en soi et seulement ça. Et, aussi, c'est une évidence: financement de l'Institut de police à partir de maintenant à même la masse salariale des policiers municipaux, 1 %, très cohérent, existence totale en soi possible.

M. le Président, je veux vous soumettre aussi une autre décision. Là, je vous cite. Je suis convaincu que vous l'aviez déjà à l'esprit, cette décision-là, parce que je vous voyais crayonner tout à l'heure. Je pense que votre décision est rendue, puis vous allez être obligé d'être constant dans votre propre jurisprudence. Vous avez dit le 1er juin 1995: «Cette motion de scission est recevable, puisque le projet de loi 83 contient deux principes. Pour déterminer si un projet de loi contient un ou plusieurs principes, il faut se référer au contenu même du texte législatif.» C'est pour cela que j'ai insisté sur «droit nouveau ou pas». C'est important.

Alors, je m'arrête là-dessus. Ça m'apparaît tellement, tellement évident que la motion de scission est recevable. Vous allez peut-être décider de délibérer quand même quelques minutes, mais il me semble qu'il n'y a pas d'hésitation à avoir, il faut qu'on donne la chance aux parlementaires des deux côtés de la Chambre. Vous savez, si par hypothèse le ministre se levait puis disait: Oui, je suis d'accord, je vais m'en retourner à mes bureaux puis je vais présenter trois projets de loi, nos discours pourraient être complètement différents. Moi, l'élection des policiers à des postes, peut-être que je pourrais être d'accord avec ça, puis je suis en désaccord avec tout le reste. Recevable sans l'ombre d'un doute, M. le Président, quant à l'opposition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader adjoint de l'opposition. Nous allons suspendre quelques minutes pour examiner la question et rendre une décision le plus rapidement possible.

(Suspension de la séance à 4 h 45)

(Reprise à 5 h 9)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.


Décision du président sur la recevabilité

Nous avons considéré la motion de scission et nous en sommes arrivés à la conclusion que, oui, il y avait trois principes que nous devons reconnaître dans ce projet de loi: l'organisation des services de police sur le territoire du Québec en est un; le deuxième, il s'agit de permettre aux policiers et aux constables spéciaux d'exercer certaines fonctions politiques; et le troisième concerne le financement de l'Institut de police et la composition de son conseil d'administration.

(5 h 10)

Maintenant, trois principes, parce que, si nous regardons chacune de ces parties du projet de loi, nous voyons qu'elles peuvent être considérées distinctement et que les projets de loi qui résulteraient de cette scission constitueraient des projets de loi cohérents en eux-mêmes. Bien, pour ces raisons, nous croyons que la motion est recevable. Alors, ceci nous ouvre un débat de deux heures. M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: M. le Président, je vais vous faire la même suggestion que tout à l'heure, lorsqu'on a débattu la motion de report: une conférence des leaders, pour qu'on récapitule les règles quant au débat sur une motion de scission, avec Mme la députée de Terrebonne.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Je proposerais d'établir les mêmes règles que ce qui a prévalu sur la motion de report, qui sont nos règles habituelles.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, est-ce que vous tenez à ce qu'il y ait une rencontre pour qu'on puisse en discuter? S'il y a une des parties qui y tient, alors on pourra délibérer quelques minutes pour revoir les règles. Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour revoir le partage du temps.

(Suspension de la séance à 5 h 11)

(Reprise à 5 h 15)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez vous asseoir.

Alors, avant d'entreprendre le débat sur la motion de scission, débat de deux heures, je rappelle la répartition du temps. Il y a un 10 minutes qui sera réservé pour les députés indépendants. Le reste du temps est partagé à 50 % entre les deux groupes parlementaires. Le temps non utilisé par un groupe sera transféré à l'autre groupe et il n'y a pas de limite pour chacune des interventions.


Débat sur la motion de scission

Alors, nous sommes prêts à céder la parole au premier intervenant. Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: M. le Président, M. le député d'Argenteuil a proposé cette motion de scission du projet de loi n° 77 pour des raisons fort simples, et vous l'avez reconnu en déclarant la motion recevable, c'est qu'il y a dans ce projet de loi trois objectifs très, très différents qui ne se contredisent pas, M. le Président, mais qui pourraient éventuellement faire l'objet, pour un, de l'assentiment de tous les membres de l'Assemblée nationale; pour un deuxième, peut-être être rejeté par l'opposition puis agréé par les ministériels; pour le troisième, éventuellement, à l'intérieur même de la députation ministérielle, certains députés pourraient être en accord avec une partie, d'autres en désaccord avec l'autre.

Les ministériels, M. le Président, évidemment, sont plus mal pris dans une situation comme celle-là que les députés de l'opposition, parce que, même s'ils ont des réserves sur l'ensemble du projet de loi, compte tenu de la solidarité qui doit les guider, même s'ils sont en désaccord, pour certains députés du gouvernement, que ce soit le gouvernement actuel ou les gouvernements qui ont précédé celui qui est présentement en place, on sait à quel point c'est difficile, dans certaines circonstances, d'appuyer des législations proposées par leur propre gouvernement.

Lorsque l'opposition suggère de scinder un projet de loi en deux ou en trois, ça facilite évidemment l'évaluation du projet de loi en question pour les membres de l'opposition et également, M. le Président, pour les députés ministériels. Alors, c'est ca, l'objectif recherché par une motion telle que celle présentée par le député d'Argenteuil.

Ceci étant dit, le parlementarisme, M. le Président, nous fait vivre des paradoxes, nous fait vivre des situations surprenantes. Et, pour des députés qui arrivent à l'Assemblée nationale, on va, pour certains, comprendre tout à l'heure, lorsqu'on appellera le vote sur la motion de scission, que, si vous déclarez recevable la motion, ça veut dire, M. le Président, que vous arrivez à la conclusion qu'il y a vraiment trois principes, trois sujets et objectifs dans le projet de loi n° 77. Mais, à moins d'une surprise – on a une heure de notre côté, les ministériels ont une heure pour nous répondre – je ne crois pas qu'on réussisse. Je n'ai pas vu ça souvent, moi, qu'on réussisse à convaincre le gouvernement ou un ministre de donner suite à la décision de la présidence de déclarer recevable la motion de scission et de s'en retourner à son ministère puis de réécrire le projet de loi en trois projets de loi différents, 77a, 77b puis 77c. Alors, c'est ça, le Parlement, M. le Président. C'est ça, le Parlement, puis il y a des fois qu'on trouve ça... pas embêtant, contradictoire, paradoxal.

(5 h 20)

Recevable par la force du nombre, M. le Président. Jusqu'à preuve du contraire, on est plus nombreux de l'autre côté que de ce côté-ci de l'Assemblée. Alors, même si on a raison aveuglément... Parce que le leader du gouvernement ou Mme la leader adjointe dira: Bien, on aura beau dire, on aura beau faire, ça a plein d'allure, plein de sens que le projet de loi n° 77 soit scindé en trois parties, mais on va renverser ça. On va renverser ça parce que le gouvernement a décidé que son intention ne serait modifiée d'aucune façon, peu importent les interventions de l'opposition, peu importe la décision de la présidence, qui nous donne raison.

Le gouvernement, pour toutes sortes de raisons, pour des stratégies que l'on peut difficilement comprendre, va probablement rejeter la suggestion de l'opposition appuyée par la présidence puis dire: On continue avec le projet de loi n° 77 tel qu'il est écrit, plaçant les députés dans la situation suivante. Du côté des ministériels, je l'ai dit, tout à l'heure, pour certains – et pour la plupart, j'oserais dire – ça ne changera pas grand-chose parce que, sauf exception, les députés ministériels, j'en suis à peu près convaincu, à date, n'ont pas vraiment compris ce qu'il y avait dans le projet de loi, pas parce qu'ils ne sont pas capables de comprendre, ils ne s'en sont pas... À date, on s'en est plus ou moins désintéressé, du projet de loi n° 77.

Mais, au cours des prochains jours... Et ça a probablement commencé depuis quelques jours, compte tenu de la réaction extrêmement agressive qu'il y a, un petit peu partout dans la population, eu égard à tout ce qu'il y a dans le projet de loi. Je suis convaincu que, depuis 24 heures, les députés ministériels, à tout le moins pour certains, ont demandé des explications, ont demandé à des officiers de l'Assemblée nationale de leur faire parvenir le projet de loi n° 77 pour en prendre connaissance. Évidemment, le premier exercice, c'est de lire les notes explicatives puis d'aller vérifier, en partant des notes explicatives, le contenu du projet de loi comme tel, des articles que l'on retrouve dans le projet de loi n° 77.

M. le Président, si le gouvernement, si le ministre de la Sécurité publique, avec son leader, rejette à toutes fins pratiques votre décision en la contredisant par le vote de l'ensemble des ministériels, bien on placera les députés de l'opposition dans la situation suivante, M. le Président: on devra continuer, nous, à maintenir le cap parce qu'on est en désaccord très profond avec certaines parties du projet de loi. Parce qu'on est en désaccord avec certaines parties, on doit rejeter le tout.

Si le ministre, M. le Président, voulait faire un effort et nous soumettre trois projets de loi distincts, moi, je serais probablement en accord – je l'ai mentionné tout à l'heure lorsque je plaidais la recevabilité – je serais probablement d'accord à partir du moment où on m'expliquera – et le ministre le sait que je l'ai soulevée lors de nos auditions publiques, jeudi dernier, je parle de la possibilité pour des policiers d'occuper des postes électifs... Si le ministre me convainc qu'on ne vient pas en contradiction avec les règles de déontologie, moi, probablement que je le suivrais, le ministre, dans cette voie-là, de façon cependant prudente, d'amener chez nous ce qui existe ailleurs: permettre à des policiers d'occuper des postes électifs.

Alors, en prenant pour acquis que j'aurais des explications pour me rassurer en commission parlementaire et aussi peut-être des amendements pour garantir qu'il n'y aura pas de contradiction entre le contenu du projet de loi n° 77 et la déontologie, j'appuierais le ministre sur ce volet-là. Alors, voyez-vous, il aurait gagné un tiers, M. le Président, un tiers de ce qu'il souhaitait, avec moi et d'autres de mes collègues probablement. Alors, ce que le ministre devrait faire, je pense, c'est de dire à son leader: On est d'accord avec la motion du député d'Argenteuil, surtout parce que la présidence a reconnu que la motion était recevable. La motion étant recevable, ça veut dire que la décision de l'opposition, elle est sage, elle est correcte. Alors, moi, comme ministre de la Sécurité publique, avec Mme la députée de Terrebonne, leader adjointe, on arrête tout ça – je l'ai dit tout à l'heure – on va réécrire les trois projets de loi. Et déjà on aurait l'assentiment fort probablement de l'opposition sur un tiers. C'est beaucoup, ça! Le ministre de la Sécurité publique pourrait peut-être dimanche matin faire à nouveau le point de presse, dire: Voyez-vous, j'ai gagné beaucoup cette semaine parce que j'ai écouté l'opposition.

C'est ça, le parlementarisme, M. le Président: l'opposition s'oppose et l'opposition propose une motion de scission. Là-dessus, je suis convaincu que le député de Laviolette, qui a souvent, je ne dirai pas la mauvaise habitude, mais d'attaquer l'opposition en disant: Vous soulevez des mesures dilatoires... Moi, je trouve que c'est de bonne guerre. C'est de bonne guerre. Je suis convaincu que, sur la motion de scission, le député de Laviolette va le reconnaître, d'autant plus – évidemment si on en parle encore c'est qu'elle a été déclarée recevable – que l'opposition, en proposant la scission du projet de loi n° 77, M. le Président, fait vraiment oeuvre utile. Là, l'opposition ne s'oppose pas pour s'opposer, elle propose des améliorations à l'intention du gouvernement.

Et le député de Laviolette, M. le Président, va probablement suggérer au ministre de la Sécurité publique et à Mme la députée de Terrebonne, peut-être après que mon collègue aura complété notre argumentation sur la motion de scission, de réécrire le projet de loi. J'espère. Puis là ce serait agréable, comme parlementaires, de pouvoir dire à la presse parlementaire, à 5 h 30, le 4 décembre: On est arrivés à dégager quelque chose d'intelligent, tous ensemble, les ministériels et l'opposition, hein? Puis on aurait l'impression qu'on n'a pas perdu notre temps, qu'on est arrivé à quelque chose. Ça simplifierait les étapes à venir: commission parlementaire qui va commencer à siéger, là, commission des institutions sur le projet de loi n° 77, probablement, je ne sais pas, moi, en soirée ou demain. Ça simplifierait de beaucoup le travail des membres de la commission des institutions, parce qu'on aurait éliminé à toutes fins pratiques le tiers.

C'est gros, ça, M. le Président, c'est gros, ce que propose le ministre, de permettre à des policiers de pouvoir occuper des postes électifs. C'est du droit nouveau, puis il va falloir qu'on l'évalue comme il faut. Mais, à première vue, il me semble que ça a du sens. Mais, si le ministre ne consent pas à scinder son projet de loi, comme je suis en complet désaccord avec le financement de l'Institut de police puis comme on est en complet désaccord... Quand je dis «je», c'est qu'on est tous, du côté de l'opposition, en désaccord avec les deux autres volets, Sûreté du Québec, dont le tarif est augmenté de 0,10 $ à 0,18 $ le 100 $. Les députés ministériels sont en désaccord avec ça, à plus forte raison l'opposition. Nous, on peut le manifester par notre vote, par nos interventions. Les députés ministériels font exactement l'inverse: par leur vote, ils ne peuvent pas le manifester puis ils ne...

M. le Président, imaginez-vous, les députés ministériels sont placés dans la situation suivante: ils ne peuvent pas être en accord avec ça, augmenter de 0,10 $ du 100 $ à 0,18 $ le 100 $ et ils sont contre puis ils votent pour, puis ils sont pour puis ils ne peuvent pas le dire. Ce n'est pas drôle, être – dans certaines circonstances – des députés ministériels. Ils sont contre, ils vont voter pour; puis ils sont pour, ils ne peuvent pas le dire. Situation écrasante puis, dans certaines circonstances, je le répète, humiliante. Mais, si le ministre fait preuve de sagesse, il va séparer en trois blocs son projet de loi n° 77; on l'écoutera de façon plus attentive lorsqu'il voudra nous parler du financement de l'Institut de police de Nicolet.

(5 h 30)

Moi, il ne me convaincra jamais quant au premier bloc, Sûreté du Québec, 0,10 $ à 0,18 $; ça, M. le Président, moi, non. Est-ce que c'est la Sûreté du Québec ou la sûreté municipale qui donne dans des petites agglomérations une meilleure protection? On peut en parler de ça, on peut en discuter longuement de ça, puis, moi, je suis prêt à écouter puis j'ai beaucoup d'ouverture là-dessus, Sûreté du Québec, sûreté municipale, ou la sûreté municipale appuyée par la Sûreté du Québec, puis ça pourrait être des discussions extrêmement agréables si on mettait de côté la tarification de 0,10 $ à 0,18 $ le 100 $. Mais, parce que le ministre va probablement résister, M. le Président, à la proposition du député d'Argenteuil, on va continuer de notre côté, parce qu'on est en désaccord, et profondément, on est en profond désaccord avec plusieurs éléments du projet de loi, puis peut-être un petit peu en accord avec d'autres, on va nécessairement continuer à s'opposer.

Parce que, et je conclus là-dessus, M. le Président, que des policiers puissent occuper des postes électifs, on peut être ouvert – je ne suis pas encore convaincu, loin de là. Je suis carrément en désaccord que – et je me répète – pour la Sûreté du Québec, la tarification soit augmentée de 0,10 $ à 0,18 $ le 100 $ et également, M. le Président, en complet désaccord avec le financement de l'Institut de police à raison de 1 % sur la masse salariale des corps policiers municipaux.

Alors, M. le Président, en conclusion, quant à moi, j'espère que le ministre prendra acte et de votre décision et de ce que j'ai plaidé tout à l'heure sur la recevabilité, et aussi, M. le Président, bien humblement, qu'il prendra acte également des arguments que j'ai soulevés au cours des 15 ou 20 dernières minutes.

M. le Président, je vais laisser un de mes collègues continuer à argumenter, à moins que, du côté des ministériels, on ait des choses à dire. Peut-être que le ministre de la Sécurité publique... J'ai apprécié, M. le Président, j'ai apprécié que, sur la motion de report, le ministre s'exprime. Il ne m'a pas convaincu, mais au moins il s'est levé, il a fait son travail, il a gagné son argent, M. le Président, il n'a pas fait qu'acte de présence. Puis j'ai trouvé que c'était correct, ça, M. le Président, puis il a donné l'exemple à d'autres de ses collègues qui, cependant, eux, sont bâillonnés, menottés, pas le droit de parler, condamnés au silence. Condamnés au silence! Je vais vous dire une chose, M. le Président, moi, pour avoir le droit de parole dans le Parlement, j'aime quasiment mieux être dans l'opposition. Le député de Papineau, M. le Président, est probablement aussi en accord avec moi. Au moins ici, dans le Parlement, du côté de l'opposition – puis vous saurez me le dire dans deux ans, vous allez le vivre, vous allez le voir – il y a des parties agréables dans l'opposition, M. le Président, on peut...

Une voix: Bientôt, bientôt.

M. Lefebvre: Bien oui, bien oui! Mais, si jamais on avait des élections avant, bien, ça serait plus vite que dans deux ans. Mais, M. le Président, du côté de l'opposition, on peut s'exprimer, on dit ce qu'on pense, on en parle entre nous, on se bâtit une ligne, puis on l'exprime, on l'exprime sans aucune réserve, M. le Président. Du côté des ministériels, bien, je ne sais pas. On nous dit – c'est ce qu'on vous dit, M. le Président, c'est ce qu'on dit à vos collègues ministériels, à votre droite: Vous allez tourner à gauche, on tourne à gauche. Tout à coup, oups! on s'est trompé. Vous allez tourner à droite maintenant, on tourne à droite; vous arrêtez, on arrête. Oui, mais il n'y a pas de stop, vous arrêtez pareil. Il y a un feu rouge, vous passez pareil. C'est comme ça malheureusement, M. le Président, qu'est bâti le système.

Et, moi, en conclusion, ce que je souhaite aux ministériels, c'est de ne pas être ministériels encore bien, bien longtemps. Qu'ils puisse, M. le Président, s'exprimer de façon complètement libre sur des projets de loi qu'on leur soumettra, parce qu'on aura changé de côté. Mais, en attendant, je demande au ministre de la Sécurité publique, avec Mme la députée de Terrebonne, leader adjointe du gouvernement, et M. le whip et député de Laviolette, de suspendre. Et on donnerait notre accord immédiatement. Une quinzaine de minutes, M. le Président, et on pourrait réécrire rapidement le projet de loi n° 77, on vous l'a réécrit en trois projets de loi, et vous allez voir qu'on va sortir de l'Assemblée beaucoup plus rapidement et avec quelque chose de positif.

Il est 5 h 35, pas du soir, là, parce que, ici, on ne s'en rend pas trop compte, l'éclairage est excellent. Mais, M. le Président, est-ce que c'est le jour, est-ce que c'est la nuit? Moi, je pense que c'est le matin. Alors, on pourrait, M. le Président, sortir avec quelque chose de positif et on aurait l'impression qu'on n'a pas perdu notre temps. J'espère que mon message aura été entendu. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le leader adjoint de l'opposition. Alors, le prochain intervenant sera le député de Saint-Jean. M. le député.


M. Roger Paquin

M. Paquin: Bonjour, M. le Président. Bon matin. Nous avons eu une proposition pour faire la scission du projet de loi en trois morceaux. Dans le discours qu'on nous tient, c'est qu'il est préférable de n'avoir qu'un principe à l'intérieur de chaque projet de loi, de le morceler, de le voir à la pièce. Je pense qu'il est inopportun de travailler à la pièce quand on a une vue systémique, une vue d'ensemble des réformes qu'il faut appliquer. Que ce soit pour des raisons de gestion ou de déploiement des ressources... Tantôt les députés de l'opposition nous indiquaient que ça leur semblait être un principe simple et unique à l'intérieur de l'ensemble du projet de loi, celui des préoccupations budgétaires. Donc, que ce soit d'un point de vue de gestion ou de déploiement des ressources judicieux, ou encore que ce soit du point de vue, qui est plutôt le nôtre, d'une réforme d'ensemble à faire sur les services de police, qui contient, bien sûr, les éléments qui ont été mentionnés par les députés de l'opposition mais d'autres aussi, donc, dans un cas comme dans l'autre, de notre point de vue, il vaut mieux maintenir le projet de loi en une seule unité.

D'autre part, je voudrais vous rappeler, M. le Président, que lorsqu'un projet de loi contient plusieurs principes – ce qui est prévu par notre règlement – on peut, si on le désire, avant l'adoption, le mettre en différentes pièces, auquel cas il nous faut retourner à la première étape du travail.

Cependant, on peut décider de le maintenir en un seul ensemble, et, à ce moment-là, ça devient un des projets de loi qui est traité à la section 6, chapitre II de notre règlement, où on parle des projets de loi qui modifient plusieurs lois. Ce qui est le cas d'ailleurs de cette loi n° 77. Les lois qui sont modifiées par le projet de loi n° 77 sont le Code de la sécurité routière, la Loi sur les élections et les référendums dans les municipalités, la Loi sur le ministère de la Sécurité publique, la Loi sur l'organisation policière, la Loi de police et la Loi sur les villages nordiques et l'Administration régionale Kativik, et non pas Katimavik, comme on a entendu un peu plus tôt au cours des heures précédentes.

Alors, dans ces circonstances, notre règlement prévoit tout à fait que l'on peut fonctionner avec un seul projet de loi. Notamment, à l'article 260, on nous explique que les principes vont être à ce moment-là: l'ensemble des modifications ne contenant qu'un seul principe apportées à une ou plusieurs lois; l'ensemble des modifications à une loi qui ne contient qu'un principe; ou encore, ça peut-être, dans le cas d'une loi qui contient plusieurs principes, l'ensemble des modifications à chaque partie de la loi qui contient un même principe.

(5 h 40)

Donc, on voit que notre règlement nous autorise tout à fait à travailler sur des lois qui contiennent un certain nombre de principes parce que, en fait, il y a des approches systémiques qui commandent que l'on utilise plusieurs principes à la fois. Et je veux bien considérer que les députés de l'opposition ont raison de dire que les préoccupations budgétaires pourraient être un des principes de ce projet de loi. En effet, notre gouvernement a des préoccupations budgétaires. Et, si les députés qui ont occupé le gouvernement à la période antérieure avaient eu la même préoccupation, peut-être qu'on en aurait tiré des avantages et que ça serait beaucoup plus simple aujourd'hui de gérer l'État.

Néanmoins, donc, M. le Président, je veux bien considérer que la gestion correcte et le déploiement judicieux des ressources de l'État soient un des principes de ce projet de loi. Je veux bien aussi considérer que l'ensemble des mesures, des dispositions qui ont été évoquées par les députés de l'opposition constituent un programme, un ensemble, une réforme du système de police. Mais, dans l'ensemble, donc, nous pouvons tout à fait fonctionner en gardant le projet unifié, et même il m'apparaît qu'il est plus opportun de le faire ainsi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Saint-Jean. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Il est clair, à mon sens, qu'il faut voter en faveur de la motion de scission, et je vais vous expliquer pourquoi. D'une part, vous avez décidé qu'on pouvait «scissionner» le projet de loi. Scinder? Merci, M. le député de Taschereau. Scinder le projet de loi. Maintenant, je vais essayer de vous convaincre, et de convaincre particulièrement la députée de Terrebonne, dont je connais l'esprit ouvert, d'être en mesure de la convaincre de voter en faveur de la motion qui est présentée, la convaincre pour permettre à sa collègue la députée de Hochelaga-Maisonneuve de pouvoir se sentir à l'aise avec ce projet de loi, et je vais vous expliquer pourquoi.

Dans le projet de loi, il y a évidemment plusieurs, plusieurs points, et vous l'avez reconnu, M. le Président. Il y a des questions qui touchent le financement du système de police, le transfert, l'imposition aux petites municipalités d'une taxe supplémentaire, aux personnes qui résident dans les petites municipalités, qui vont devoir voir leur contribution au service de police passer de 0,10 $ du 100 $ d'évaluation à 0,18 $ du 100 $ d'évaluation. Nous sommes contre cet élément-là. Je comprends que le ministre est pour et que les députés ministériels sont pour. Disons qu'il y a matière à débat, et on prend acte de nos divergences sur cette question-là.

Le deuxième point à l'intérieur de ce projet de loi, M. le Président, va toucher un concept complètement différent – et le député de Frontenac l'a rappelé tout à l'heure – qui est celui d'étendre à nos fonctionnaires qui travaillent dans les services de police la possibilité d'exercer pleinement leurs droits démocratiques. Personnellement, j'ai beaucoup de difficultés à être contre une telle mesure. J'ai énormément de difficultés à être contre une telle mesure parce que je crois sain, dans une société démocratique, que, quelles que soient les fonctions que vous exercez, y compris les fonctions de policier, vous devez pouvoir participer pleinement au processus électif et pouvoir assumer, lorsqu'il n'y a pas de conflit d'intérêts – et là il y aura, bien sûr, à devoir préciser le moment où il peut y avoir conflit d'intérêts – un rôle électif.

Alors, vous comprenez déjà, M. le Président, que, dans ce projet de loi, il y a une partie qui nous semble totalement inacceptable, c'est-à-dire celle qui va surcharger les contribuables, qui va demander pour les services de police aux petites municipalités un effort financier additionnel important sur lequel, nous, de ce côté-ci, nous ne sommes pas d'accord et nous nous opposons le plus farouchement possible. C'est pour ça qu'on est en train encore de parler, à 5 h 45, sur ce projet de loi, malgré la promesse que nous avait faite la leader adjointe de ne pas siéger la nuit. Évidemment, on est le jour maintenant, parce que la nuit est passée, et on continue. Devant cela, on a réellement deux situations où, d'un côté, on s'oppose farouchement, et une autre question, une autre partie du projet de loi complètement différente, qui touche des droits fondamentaux sur lesquels des parlementaires du Parti libéral ont de la difficulté à se prononcer contre.

Alors, c'est déjà pourquoi il est important de voter en faveur de la motion de scission, pour permettre à ce Parlement de se prononcer clairement sur deux choses de nature vraiment différente, et vous l'avez reconnu, M. le Président, ne pas, par un seul vote, mêler à ce moment-là nos expressions. On peut parfaitement être opposés à la taxation supplémentaire qui est proposée dans le projet de loi aux citoyens et aux citoyennes du Québec et on peut en même temps être en faveur de l'extension des droits démocratiques aux policiers et aux policières.

Sur le troisième point, M. le Président – et c'est peut-être sur le troisième point, je crois, qu'il est important que les ministériels votent en faveur de la motion de scission, et je vais essayer de vous convaincre de cela – le troisième point touche le financement de l'Institut de police et, dans le financement de l'Institut de police, à l'article 22 du projet de loi qui institut un nouvel article 17.1, il y a un principe qui est en contradiction avec ce qui a été affirmé l'année dernière par un membre de ce gouvernement. On est en train, en votant ce projet de loi – et lorsqu'on aura à le débattre article par article, M. le Président, ça sera facile de mettre les déclarations en contradiction – de mettre en contradiction la position de la députée de Hochelaga-Maisonneuve lorsqu'elle débattait la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre et le projet de loi à l'heure actuelle, n° 77.

Le gouvernement est là, les déclarations, les textes seront là, et on pourra les mettre de l'avant. Et, si on ne fait pas la scission, on va pouvoir avoir un gouvernement qui, d'un côté, sur la loi de la formation, prétendait que le principe du 1 % devait être absolument général, qu'il devait s'appliquer à tous et partout, qu'il était incontournable pour toutes les corporations et les éléments du gouvernement dépassant un certain nombre d'employés, et, du même souffle, un an après, ce gouvernement s'en va se donner par un autre projet de loi une possibilité de contourner ce principe qui était un principe fondamental, qui était un principe qu'on mettait de l'avant, qui était un principe qui devait être incontournable complètement. Je rappellerai qu'il sera facile, M. le Président, de rappeler et de citer en cette Chambre les discours de la députée de Hochelaga-Maisonneuve qui était porteuse du dossier sur la loi sur la formation de la main-d'oeuvre.

(5 h 50)

Comme député de l'opposition, je ne peux pas accepter que le principe du 1 %, pour les personnes qui travaillent dans les corps de police, que les municipalités puissent le contourner parce qu'elles auront versé leur quote-part au financement de l'Institut de police. Parce que là c'est la première brèche, M. le Président, d'un principe qui se voulait un principe général, un principe mur à mur, un principe qui couvrait à ce moment-là toutes les compagnies, les corporations de la province de Québec, un principe qui devait faire en sorte qu'on entrait dans un règne de la formation professionnelle, où on améliorait lentement la qualification de notre main-d'oeuvre, quels que soient les secteurs. Et là on dit, par ce projet de loi, qu'il y a un secteur – et Dieu sait si ce secteur a aussi des mutations technologiques importantes – on dit: Ce secteur-là, nous l'éliminons de la loi sur la formation professionnelle. Parce que le 1 % qui devait être réservé dans chacune des municipalités pour la formation et l'amélioration de la qualification de nos policiers, les municipalités ne seront pas obligées de le verser parce qu'elles auront contribué au financement de l'Institut de police.

M. le Président, si on ne scinde pas ce projet de loi, on va amener, on amènera ma collègue, la député de Hochelaga-Maisonneuve, à être en contradiction flagrante avec ses discours, à être en contradiction flagrante avec ce qu'elle a affirmé il y a un an, lorsqu'elle a défendu en cette Chambre et en commission parlementaire la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre. C'est ça qu'on est en train de faire en ne scindant pas ce projet de loi.

Nous, de l'opposition, parce que nous avons un énorme respect pour la députée de Hochelaga-Maisonneuve et parce que nous ne voulons pas la mettre dans cette situation pénible de devoir voter pour ce projet de loi et de se mettre en contradiction avec ce qu'elle avait affirmé et en commission parlementaire et en Chambre lorsqu'elle a défendu ce projet de loi, nous allons proposer, dans un geste de générosité, le principe de la scission de manière qu'on sépare cette partie du financement de l'Institut de police, mais particulièrement ce qui touche la rémission ou la possibilité pour les municipalités qui auront contribué au financement de l'Institut de police d'éviter, de contourner le principe de la formation continue de leurs policiers, ce qui est contenu dans l'article 17.1, page 13, du projet de loi qui est devant nous et qui est en contradiction flagrante avec ce que la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité avait affirmé il y a un an, dans ces débats.

Scinder le projet de loi, M. le Président, permettrait aux députés ministériels... On aurait un débat et on ferait acte de nos points de divergence. Nous continuerions bien sûr à nous opposer le plus farouchement possible à l'augmentation de la taxation, à l'augmentation du poids du service de police sur nos concitoyens, nous continuerions à nous opposer à ce principe de ce projet de loi, mais il y aurait un débat. Et le gouvernement, s'il veut taxer les citoyens comme il est en train de le faire, s'il veut augmenter les impôts sur le dos des Québécois et des Québécoises, il peut le faire. Nous allons le critiquer jusqu'au bout, nous allons nous battre contre ça, et ça sera la meilleure manière, la meilleure preuve sur laquelle il sera jugé après par nos concitoyens.

Bien sûr, sur le deuxième point qui touche les droits démocratiques des officiers des forces policières, il est clair que ça serait difficile de s'opposer à un principe comme celui-là. C'est un principe de justice naturelle qui est balisé; je crois que les balises sont fixées à l'intérieur du projet de loi. C'est un principe sur lequel on pourrait difficilement vouloir s'opposer. Mais, en dernier lieu, M. le Président, et je le répète ici, il me semble extrêmement important pour les ministériels, pour la députée de Terrebonne, avec son esprit ouvert habituel, de comprendre que ne pas scinder le projet de loi, c'est mettre en difficulté sa collègue de Hochelaga-Maisonneuve, c'est mettre en contradiction sa collègue de Hochelaga-Maisonneuve, c'est l'amener, sur le principe de la solidarité ministérielle, à voter en faveur – ce n'était pas loin, c'était trois lignes à l'intérieur du projet de loi – d'un principe qui vient briser un principe général qu'elle avait affirmé partout et qu'elle avait défendu. Et ce principe était très clair, c'était le suivant: c'était que, quelle que soit l'entreprise de taille raisonnable que vous avez au Québec, vous devez contribuer 1 % non pas au financement d'une école ou d'un institut de police, vous devez contribuer au financement de la formation continue de vos employés pour améliorer la qualification de vos employés et de votre main-d'oeuvre. L'article 17.1 va dire: Pour les policiers, les municipalités ne seront plus obligées de le faire, elles pourront uniquement le faire parce qu'elles auront contribué au financement de l'Institut de police.

M. le Président, et j'en appelle au sens politique de la députée de Terrebonne à cet effet, si on ne scinde pas le projet de loi, le vote sur le projet de loi actuellement va mettre complètement en contradiction la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Je suis sûr que les ministériels ne veulent pas mettre en contradiction la députée de Hochelaga-Maisonneuve avec ce qu'elle a dit l'année dernière et ce qui est dans le projet de loi. Alors, en résumé, la sagesse, à l'heure actuelle, pour faciliter les votes, pour faciliter aux parlementaires de s'exprimer, devrait être de voter en faveur de la scission.

Si on vote en faveur de la scission, le ministre pourra bien sûr obtenir la partie sur laquelle nous sommes en désaccord. Bien sûr, il pourra continuer à taxer. Bien sûr, il pourra le passer. Nous pourrons signaler, nous aussi, notre soutien au principe de la démocratie et de l'extension aux droits fondamentaux des policiers. Mais, ce qui sera encore le plus grave, s'il accepte la scission, il permettra à sa collègue la députée de Hochelaga-Maisonneuve de ne pas être en conflit entre deux principes, la solidarité ministérielle, d'une part, et les déclarations qu'elle a faites il y a un an, quand elle défendait un principe fondamental et son projet de loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre.

Dans ce sens-là, M. le Président, j'en appelle une dernière fois à la députée de Terrebonne. Je suis sûr que vous allez voter en faveur de la motion de scission. Et j'attends maintenant avec empressement le vote, de manière qu'on puisse procéder et rapidement réécrire trois projets de loi sur lesquels on pourrait facilement s'entendre. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Alors, malheureusement, M. le Président, je pense que nous ne pourrons pas aller dans le sens des adjurations de notre collègue d'en face, puisque le projet de loi qui est devant nous est un projet de loi qui est conçu comme une réforme, une réforme globale de l'organisation des services policiers au Québec, que, de ce point de vue là, il a son unité, même si effectivement il y a un certain nombre d'aspects de cette réforme... Cette réforme prend divers aspects, mais il s'agit d'une réforme. Et mon collègue le député de Saint-Jean a très bien illustré que, si une motion peut être recevable, elle est également débattable quant à l'opportunité d'aller dans le sens d'un vote pour scinder un projet de loi. D'autant plus qu'on nous propose, en quelque sorte, si on suivait l'opposition, de prendre une réforme, une grande réforme et d'en faire trois petits projets de loi, ce qui serait complètement à l'encontre de l'esprit avec lequel nous avons abordé cette réforme.

(6 heures)

J'ai dit que c'est un projet, c'est une réforme. Elle procède d'une vision de l'organisation des services policiers. Elle propose un modèle quant à cette organisation sur le territoire du Québec. Et donc, de ce point de vue là, je pense qu'il est tout à fait compréhensible que, de ce côté-ci, on voie ce projet de loi comme un tout qui doit être analysé, étudié, regardé, discuté dans son ensemble. Autrement, si on ne le fait pas, on va perdre de vue l'objectif du gouvernement du Québec.

M. le président me permettra, j'allais dire, d'en appeler à une lettre que je reçois de l'Union des municipalités du Québec. L'opposition en a reçu copie également. Elle est maintenant datée d'hier, puisqu'on est le matin. Et puis vous me permettrez de citer quelques extraits de la lettre du président de l'UMQ, qui dit: «Comme vous le savez, l'Union des municipalités du Québec avait appelé de ses voeux une réforme de l'organisation policière au Québec, car ses membres constataient l'iniquité d'un système basé...», etc. «Le projet de loi n° 77 est le fruit de cette volonté de réforme qui vous anime.» Et on dit encore que l'UMQ est en général favorable à certaines des dispositions du projet de loi, même si, effectivement, l'UMQ manifeste, sur certains des aspects de cette réforme, certaines réserves.

M. le Président, ce que fait la lettre du président de l'UMQ, c'est effectivement de reconnaître que le gouvernement vise à faire ce qui aurait dû être fait depuis longtemps, c'est-à-dire une réforme de l'organisation policière au Québec, une réforme de la carte policière au Québec, une réforme des diverses règles du jeu qui entourent l'organisation des services policiers. Je ne prétends pas – je veux être bien clair – que l'UMQ est favorable à tous les aspects de ce projet de loi, à tous les aspects de cette réforme, mais elle manifeste quand même, sur plusieurs de ces aspects, un accord très clair, donc un accord concernant justement la réforme qui est proposée et l'esprit de cette réforme.

M. le Président, j'entendais tantôt les gens dire qu'ils étaient favorables, eux aussi, à plusieurs des aspects de ce qui est sur la table, notamment concernant les droits des policiers, l'exercice des droits démocratiques des policiers. Je suis heureux de l'entendre, parce que, lorsque nous avons reçu en commission parlementaire, lorsque nous avons entendu les organismes, ce n'était pas très clair. L'opposition n'avait pas encore l'air d'avoir fait son nid, son opinion définitive. On entendait des avis un peu partagés, d'après les questions.

Je constate aujourd'hui que, semble-t-il, là-dessus l'opposition nous rejoint. Effectivement, dans le cadre de la réforme qu'on propose, l'exercice des droits démocratiques des policiers est un aspect important, significatif de cette réforme. Je suis convaincu qu'en conservant à cette réforme toute son unité d'orientation d'action on va finir par convaincre également l'opposition à travers nos discussions. On va finir également de la convaincre que cette réforme forme un tout et que, si déjà elle est sensible à certains aspects de ce tout, bien, peut-être qu'on pourra la convaincre d'adopter l'ensemble des mesures.

Tantôt, j'entendais le député de Frontenac parler de blocs, M. le Président. C'est vrai que le mot «bloc», par les temps qui courent, fait l'actualité. Moi, je préfère voir le projet qui est devant nous comme un train. Il y a plusieurs wagons, mais c'est un train. C'est un train de mesures qui vise une réforme de l'organisation policière au Québec.

On a beaucoup fait état, du côté de l'opposition, en parlant d'un des aspects du projet de loi, de la question du 1 % qui serait réservé à l'Institut, M. le Président. Et ça fait partie des raisons pour lesquelles l'opposition veut scinder le projet de loi, ça fait partie des raisons pour lesquelles elle veut le faire. Je veux juste rappeler là-dessus, puisqu'on en a beaucoup fait état de l'autre côté, que les corps policiers, au Québec, consacrent beaucoup plus que 1 % à la formation des corps de police et que, de ce point de vue là, l'argument qui est évoqué me semble tout à fait ne pas se conformer à la réalité de ce que sont la formation policière au Québec, les coûts de la formation policière, les contributions des diverses municipalités.

On évoque aussi, pour scinder le projet de loi, la question du financement. Je suis un peu surpris d'entendre le député de Verdun parler de la façon dont il parle, puisqu'à titre de représentant d'une agglomération urbaine il devrait savoir que les contribuables qu'il représente payent déjà 100 % de leurs coûts de police, payent, à travers leurs impôts, également une part des coûts de police sur le reste du territoire. M. le Président, il ne s'agit pas d'être là-dessus inutilement hargneux; il s'agit tout simplement de reconnaître qu'on doit rechercher un peu plus d'équité entre les divers contribuables du Québec. Il me semble que le député de Verdun pourrait reconnaître que, pour ses propres électeurs, il y a là un rééquilibrage qui va dans le sens de leurs intérêts puis qui évidemment peut peut-être, pour certains autres contribuables du Québec, apparaître comme un effort supplémentaire de demandé, mais, en même temps, M. le Président, il faut reconnaître qu'ils ont pu profiter au cours des dernières années d'une partie de congé de contribution. Il y a actuellement un effort de rééquilibrage, mais qui ne se situe encore qu'à 50 % des coûts de police. Donc, cette solidarité entre les divers contribuables du Québec va continuer de s'exercer.

Donc, M. le Président, les raisons pour lesquelles l'opposition demande et souhaite une telle scission entre les divers aspects, encore une fois, d'un même train de mesures, d'une même réforme me semblent honnêtement mal fondées. M. le Président, donc, quand on regarde tout ça et quand on regarde, encore une fois, la façon dont toutes ces questions ont été débattues au Québec, on se rend compte que, même si effectivement, je le reconnais, tous les divers aspects ne font pas l'unanimité – d'ailleurs, je n'ai jamais prétendu qu'il y avait unanimité sur tous les aspects de cette réforme – je pense qu'on peut dire que cette réforme était souhaitée, était attendue, qu'elle vise à réorganiser de façon importante les services policiers au Québec, et je pense qu'elle le fait avec une vision d'ensemble. Cette vision d'ensemble doit être préservée, et c'est la raison pour laquelle le gouvernement, la partie ministérielle souhaite conserver au projet de loi son unité, M. le Président, et c'est la raison pour laquelle nous sommes défavorables au projet qui est soumis devant nous, à la proposition qui nous est soumise. J'invite l'opposition à réfléchir au fait qu'il s'agit bel et bien d'une réforme, et j'espère que nous réussirons à l'en convaincre et à la convaincre également des aspects positifs de cette réforme, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Sécurité publique. Y a-t-il d'autres intervenants? Il n'y a pas d'autre intervenant. Alors, la motion de scission est-elle adoptée? M. le député de Jeanne-Mance, vote par appel nominal. Alors, que l'on appelle les députés...

(6 h 9 – 6 h 14)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons procéder au vote sur la motion de scission.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Fournier (Châteauguay), M. MacMillan (Papineau).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), Mme Caron (Terrebonne), Mme Vermette (Marie-Victorin), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Rivard (Limoilou), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:10

Contre:25

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion de scission est rejetée.


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Alors, nous revenons au projet de loi, au débat sur l'adoption du principe. Y a-t-il des intervenants?

M. le député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Merci, M. le Président. M. le Président, 6 h 15, on commence à être habitué à passer des projets de loi à ces heures-là. Je voudrais vous rappeler, M. le Président – vous étiez là – qu'à la session intensive du mois de juin, à 5 heures, on avait voté sur le projet d'assurance-médicaments...

Une voix: À la cachette.

M. Marsan: ...et, à minuit, le ministre de la Santé avait déposé pour 120 pages d'amendements.

Une voix: À la cachette, là.

M. Marsan: M. le Président, je vous rappelle également la loi n° 83 sur les fermetures d'hôpitaux, votée à la session intensive, encore à 5 heures. Et nous revoilà, à 6 h 15 cette fois, en train d'étudier le projet de loi n° 77.

Je voudrais vous rappeler la promesse de l'ancien leader du parti gouvernemental qui nous avait dit qu'on ne siégerait pas la nuit et...

Une voix: Le député de Joliette.

M. Marsan: ...le député de Joliette. Je pense qu'on n'a jamais autant siégé depuis qu'il nous a fait cette promesse-là.

M. le Président, on profite toujours de la grande noirceur pour essayer de passer des projets de loi qui ne sont pas populaires, évidemment, parce que, contrairement aux promesses qui ont été faites par le parti ministériel, contrairement à cette promesse qu'il n'y aurait pas d'augmentation d'impôts, eh bien, tous les moyens sont bons, toutes les façons possibles, on essaie d'aller piger dans les poches. Quand c'est le domaine de la santé, c'est dans les poches des patients; quand c'est le domaine des affaires municipales, eh bien, c'est dans les poches des contribuables.

Ce n'était pas assez, M. le Président. Vous vous en souvenez, au dernier budget, on a parlé d'enlever des crédits d'impôt, particulièrement aux personnes âgées? Eh bien, maintenant on a – et on devrait sûrement... de l'autre côté, on doit être fier – une taxe sur la police.

M. le Président, j'aimerais rappeler ce que la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Mme Vera Danyluk, mentionnait quant au projet de loi n° 77: «La Communauté urbaine de Montréal demande au gouvernement du Québec de ne pas adopter le projet de loi n° 77 modifiant la Loi de police et d'autres dispositions législatives. Par ailleurs, la Communauté urbaine réclame également la tenue d'états généraux sur la police du Québec afin d'examiner la question dans une perspective globale plutôt que d'un point de vue restreint.»

Pour le parti ministériel, la Communauté urbaine de Montréal, ça ne semble pas être très, très important. Lorsqu'on sait, cependant, combien de municipalités en font partie, combien de contribuables y sont associés, eh bien, M. le Président, j'ai de la difficulté à comprendre pourquoi on ne veut pas écouter Mme Vera Danyluk. Elle ajoute qu'elle déplore que le gouvernement du Québec n'ait pas consulté la Communauté urbaine. Et là, M. le Président, ça me fait tellement penser à ce qu'on a connu dans le domaine de la santé, avec des consultations bidon. On a connu ça dans les régies régionales. Une après l'autre, les régies ont fait des consultations et, en aucun temps, ni les régies ni le ministre n'ont retenu ce que les gens avaient à dire. Alors, on retrouve le même modèle calqué sur le domaine de la santé: on n'écoute pas ce que les gens ont à dire. Alors, Mme Danyluk déplorait qu'il n'y ait pas de consultations suffisantes avant de déposer le projet de loi, malgré une demande en ce sens. Et je la cite: «Nous jugeons tout à fait de notre devoir et légitime de vous demander de surseoir à l'adoption du projet de loi n° 77 afin d'être entendus au nom de notre population et d'amorcer un dialogue constructif pour contribuer vraiment à une réforme en profondeur de l'organisation policière.» Toujours selon la présidente de la CUM: «Les modifications que le gouvernement veut apporter au projet de loi n° 77, notamment en ce qui a trait à la formation des policiers, auront des impacts majeurs pour la Communauté urbaine.»

Pourquoi, M. le Président, est-ce que le gouvernement n'accepte pas d'écouter les gens qui sont en responsabilité, les maires des différentes municipalités qui auraient tellement à dire sur un projet de loi assez important?

(6 h 20)

«Le projet de loi prévoit imposer à tout corps de police municipal une contribution pouvant aller jusqu'à 1 % de sa masse salariale pour financer une partie des activités de l'Institut de police du Québec. Une telle mesure imposerait au Service de police de la Communauté urbaine une facture additionnelle de 2 200 000 $. Or, le Service de police de la Communauté urbaine déboursera, en 1996, 10 800 000 $ en coûts de transformation, soit 4,9 % de sa masse salariale.» M. le Président, c'est une autre façon d'aller piger...

M. Lefebvre: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Même si on siège à 6 h 30, le matin, il faut respecter les règles fondamentales, le quorum. On est à peine une quinzaine de députés; le quorum est de 21.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous n'avons pas quorum. Si ça ne se rétablit pas dans les secondes à venir, je devrai faire un appel. Que l'on appelle les députés.

Alors, nous n'avons pas encore quorum.

(6 h 22 – 6 h 23)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, là nous avons quorum. Nous allons pouvoir poursuivre nos débats. Je cède la parole à M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. Je pense que c'est important que l'ensemble des députés puissent écouter ce que les gens de la grande région de Montréal, particulièrement la présidente de la Communauté urbaine, qu'ils écoutent ce qu'elle a à dire, elle qui représente plusieurs millions de contribuables, comparativement au ministre qui, lui, espère, et c'est son seul objectif, soutirer de l'argent aux contribuables.

Alors, je me permettrais de poursuivre. «Le projet de loi confie à la Sûreté du Québec le mandat de la patrouille des autoroutes, mais le Service de police de la Communauté urbaine considère que la patrouille des autoroutes traversant son territoire doit relever de son propre service.» Mme Danyluk estime donc que le gouvernement ne peut légiférer à la pièce en matière de services policiers de base sans que cette question n'ait fait l'objet de consultations auprès de tous les corps policiers. Pourquoi est-ce qu'on ne veut pas écouter la présidente de la Communauté urbaine de Montréal lorsqu'on fait partie du parti gouvernemental?

Comme c'était passé, cette digne représentante des citoyens de la grande région de Montréal rappelle également que le partage actuel des coûts en matière d'organisation policière est une source d'iniquité pour les citoyens, ces derniers fournissant par leurs impôts 23 % du budget de la Sûreté du Québec, alors que la Communauté urbaine ne dispose que de très peu de services policiers sur le territoire. De plus, les contribuables assument des coûts excédentaires de 65 000 000 $ à cause du rôle métropolitain de l'île de Montréal. La Communauté urbaine espérerait que la démarche du gouvernement sur l'organisation policière permette d'éliminer cette iniquité.

Enfin, elle conclut en soutenant que l'exercice de ce projet de loi ne doit pas se limiter à imposer de nouvelles taxes pour financer les services de la Sûreté du Québec et ceux de l'Institut de police du Québec. Alors, vraiment, je pense qu'elle a tout de suite cerné le fond du problème: c'est l'imposition d'une nouvelle taxe. M. le Président, notre premier ministre nous avait dit qu'il n'y aurait pas d'augmentation d'impôts, qu'on ne devait pas ajouter au fardeau des contribuables. Alors, depuis son entrée en fonction, c'est effrayant le nombre de nouvelles taxes, de taxes déguisées. Je vous ai parlé de l'assurance-impôt-médicaments. Il y a l'abolition des crédits d'impôt pour les personnes aînées. Maintenant, on trouve un moyen détourné pour refiler une facture importante aux contribuables. Le ministre de la Sécurité publique, qui avait annoncé lors de l'étude des crédits qu'il financerait le coût des activités de la Sûreté du Québec, a pris progressivement à même les revenus générés par la tarification aux municipalités qui reçoivent des services de la Sûreté... est en train de prendre une somme qui devrait atteindre les 50 000 000 $.

Présentement, la Sûreté du Québec dessert 1 248 municipalités, ce qui représente 24 % de la population. Elle compte 4 182 policiers syndiqués, dont 1 963 sont patrouilleurs. Et je me permets de souligner la qualité du service de police de la Sûreté du Québec. Je pense qu'on est tous redevables à nos policiers, dans le sens qu'ils assurent vraiment la sécurité publique de la bonne façon. On ne peut pas en dire autant du ministre de la Sécurité publique, malheureusement, qui, lui, est là pour faire une job, prendre la commande du ministre des Finances d'aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables. Le ministre de la Santé, c'est la même chose. Prenez les tous un par un, c'est vraiment le mandat de ce gouvernement actuellement.

M. le Président, une municipalité de moins de 5 000 habitants peut avoir son propre corps de police ou passer une entente avec une autre municipalité pour avoir des services. Elle peut aussi s'en remettre à la Sûreté ou à un autre corps de police municipal qui agit sur son territoire. Ce projet de loi obligera une municipalité de moins de 5 000 habitants à conclure des ententes avec la Sûreté pour ses services de police, sauf si le ministre l'autorise à utiliser les services d'un autre corps de police. Elle n'aura donc plus le choix et elle devra payer, tel que le demande le projet de loi.

Ce projet de loi propose de permettre aux membres de la Sûreté du Québec ou d'un autre corps de police, autres que le directeur et le directeur général adjoint de la Sûreté ou directeur de tout autre corps de police, de se porter candidats à une élection fédérale ou provinciale. Pour ce faire, ils devront obtenir un congé sans solde. M. le Président, on peut espérer qu'il y aurait, du côté du parti gouvernemental, des représentants qui pourraient faire comprendre à leurs collègues des leçons de vérité, à savoir: Est-ce qu'on va continuer? Jusqu'à quand est-ce qu'on va continuer à demander aux contribuables des charges additionnelles?

Parlons quelques instants de l'Institut de police. Depuis septembre 1990, l'Institut a des revenus assez importants, des revenus autonomes qui proviennent du gouvernement, des frais d'inscription pour 1 000 000 $, des frais d'hébergement, 2 000 000 $. Pour 1996-1997, les crédits du ministère de la Sécurité prévoient la somme de 7 800 000 $ pour subventionner l'Institut. Alors, ce projet de loi modifie la Loi sur l'organisation policière en obligeant les municipalités à financer en partie cet Institut, et la contribution annuelle est basée sur un pourcentage de la masse salariale du personnel policier, ce pourcentage ne pouvant excéder 1 %.

M. le Président, je vois que le temps passe, mais, en terminant, simplement rappeler... Tantôt, j'ai fait un rappel de ce que la présidente de la Communauté urbaine de Montréal avait mentionné à propos du projet de loi. Si on va juste un peu plus loin, l'UMRCQ, elle est contre: le projet de loi n° 77 est inacceptable; on veut un plus grand respect de l'autonomie municipale; on veut un délai pour les regroupements municipaux; on s'oppose au financement de l'Institut de police de Nicolet; le projet de loi n° 77 ne reflète pas les préoccupations exprimées lors de la tournée du ministre et il ne règle pas le problème numéro un de l'organisation policière, soit le contrôle des coûts.

(6 h 30)

L'Union des municipalités, M. le Président, est contre: ne corrige pas l'inéquité fiscale quant au financement des coûts de la police; le financement de l'Institut de Nicolet n'a jamais été vraiment discuté; l'Union des municipalités veut le retrait temporaire du 1 % pour le financement de l'Institut de Nicolet au moins jusqu'au 31 mars 1997 et elle veut une plus grande autonomie municipale pour le choix des services policiers, donc avoir son propre corps de police, faire des ententes intermunicipales ou encore avec les services de la Sûreté du Québec.

La Communauté urbaine de Montréal, aussi contre, demande de surseoir à l'adoption du projet de loi. La facture de 2 200 000 $ pour le financement de l'Institut, bien, Montréal va payer 53 % de ce montant, soit près de 1 200 000 $. On rappelle: aucune consultation sur le financement de l'Institut de Nicolet; contre le changement de la représentation au C.A., au conseil d'administration, M. le Président, de l'Institut de Nicolet; et on souhaiterait avoir de véritables états généraux, pas comme ceux qu'on a eus dans l'éducation, mais des vrais. Le député de Lévis nous a déjà mentionné ce que ça devrait être, des vrais états généraux. Et, à ce sujet, je pense que ce serait extrêmement important d'écouter ce que les gens ont à dire plutôt que de prendre des décisions, comme on le fait présentement, alors que, en campagne électorale, bien, c'est tout le contraire qu'on avait promis, M. le Président.

La Fraternité des policiers de la Communauté urbaine de Montréal, contre. On veut un sommet sur la sécurité publique. Je ne sais pas si on veut débattre du leadership du ministre à ce moment-là. On demande le retrait de la contribution du 1 % pour le financement de l'Institut de Nicolet. On demande d'extirper du projet de loi les éléments qui touchent l'organisation policière pour pouvoir en discuter davantage. Et on considère les mesures timides quant aux activités politiques concédées aux policiers. Alors, de nouveau, M. le Président, je pense que ce serait important si on pouvait davantage s'associer les représentants des corps de police lorsqu'on prend ce genre de décision.

L'Association des policiers provinciaux du Québec, eh bien, ils se questionnent sur l'augmentation des tarifs, mais ils veulent, comme les autres corps de police, des effectifs adéquats. Et la Fédération des policiers du Québec, eh bien, souhaite qu'on laisse le choix aux municipalités. On veut un moratoire d'un an. Quant au regroupement des municipalités, on craint le maraudage et, là aussi, on supporte cette idée d'avoir des états généraux sur les services de police.

M. le Président, en résumé, on considère que tous les groupes les plus importants sont contre le projet de loi. Il me semble que le ministre devrait refaire ses devoirs, qu'il devrait écouter davantage la population.

Je voudrais, et j'insiste, M. le Président, pour simplement rappeler, en terminant, que du côté ministériel on présente des projets de loi en pleine nuit, au moment où la population n'écoute pas les parlementaires. On essaie de passer en catastrophe des projets de loi, particulièrement ceux qui vont chercher de l'argent. Vous avez mentionné le projet de loi d'impôt-médicaments qui, lui, devait aller chercher 300 000 000 $, mais, encore une fois, par l'imprévision du ministre de la Santé, bien, ça n'a pas marché, puis il y a d'autres problèmes au niveau de son financement, semble-t-il.

Revenons au ministre de la Sécurité publique. Eh bien, c'est le même modèle. On constate que le ministre de la Sécurité publique, toujours à la solde du ministre des Finances, eh bien, a décidé de faire porter le fardeau de cette compression, de cette contrainte, de cette coupure aveugle – c'est un terme que vous connaissez bien – sur le dos des contribuables des différentes municipalités.

M. le Président, en terminant – vous me faites signe que mon temps est écoulé – j'insiste à nouveau pour qu'on écoute au moins la présidente de la Communauté urbaine de Montréal, Mme Vera Danyluk, qui, elle, je pense, avait des choses extrêmement importantes à dire, comme tous les autres regroupements, que ce soit au niveau des municipalités, au niveau des corps policiers. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions le débat.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Mme Caron: M. le Président?

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Caron: Oui, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à aujourd'hui, mercredi le 4 décembre 1996, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Les travaux sont ajournés à mercredi 4 décembre, 10 heures.

(Fin de la séance à 6 h 36)


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