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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mardi 18 juin 1996 - Vol. 35 N° 40

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Table des matières

Présence du leader de la majorité au Sénat du New Jersey et coprésident de l'Eastern Regional Conference du Council of State Governments, M. John O. Bennett

Affaires courantes

Affaires du jour

Projet de loi n° 11 – Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives

Projet de loi n° 20 – Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique

Projet de loi n° 116 – Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux

Projet de loi n° 33 – Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives

Projet de loi n° 32 – Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu

Projet de loi n° 36 – Loi modifiant la Loi sur l'administration financière et d'autres dispositions législatives

Projet de loi n° 4 – Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives


Journal des débats


(Dix heures six minutes)

Le Président: Nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien. Si vous voulez vous asseoir.


Présence du leader de la majorité au Sénat du New Jersey et coprésident de l'Eastern Regional Conference du Council of State Governments, M. John O. Bennett

J'ai, aujourd'hui, le grand plaisir de souligner la présence, dans les tribunes, du leader de la majorité au Sénat du New Jersey et coprésident de l'Eastern Regional Conference du Council of State Governments, M. John O. Bennett.


Affaires courantes

Aux affaires courantes, déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Je vous demanderais d'appeler, M. le Président, l'article b de notre feuilleton.

Projet de loi n° 191

Le Président: À l'article b de notre feuilleton, M. le député de Rivière-du-Loup présente le projet de loi n° 191, Loi modifiant la Loi sur l'assurance automobile. M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, ce projet de loi a pour but de modifier la Loi sur l'assurance automobile afin que les cotisations des assurés soient exclusivement utilisées pour les fins pour lesquelles elles ont été perçues. En ce sens, il vise à faire en sorte que toutes les sommes recueillies pour financer les obligations de la Société de l'assurance automobile du Québec, dont principalement les indemnités découlant d'accidents d'automobile survenus au cours de la période en vue de laquelle les montants d'assurance ont été fixés, soient déterminées seulement après une expertise actuarielle.

Ce projet de loi vise également à s'assurer que toute somme versée pour le coût des services de santé occasionnés par les accidents d'automobile et du transport ambulancier soit établie en fonction du coût réel de ces services. À cette fin, le gouvernement devra, à compter du 1er janvier 1997, déposer chaque année un projet de décret devant la commission de l'aménagement et des équipements fixant les coûts réels de ces services.

Par ailleurs, le projet de loi vise à permettre à la Société de maintenir une réserve de stabilisation qui soit conforme à ses besoins réels de financement.

Enfin, le projet de loi comporte des modifications de nature technique et de concordance au Code de la sécurité routière. Merci, M. le Président.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? M. le leader du gouvernement.

Question de règlement sur l'incidence

financière du projet de loi

M. Bélanger: M. le Président, c'est juste une question de règlement relativement à ce projet de loi là. Je voulais vérifier si la présidence, en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés, a vérifié qu'il n'y a pas d'implications financières. Nous n'avons pas vu ce projet de loi là, il vient juste d'être soumis à l'Assemblée nationale. Est-ce que la présidence a vérifié qu'il n'y a pas d'implications financières dans ce projet de loi? Parce qu'une décision de votre prédécesseur, d'un de vos prédécesseurs, le 16 décembre 1991, c'était, à l'époque, le député de Westmount– Saint-Louis qui avait déposé un projet de loi et la présidence avait refusé que l'Assemblée puisse même être saisie de ce projet de loi vu le fait que ce projet de loi comportait une certaine incidence financière. Et, en vertu de l'article 192, seul un ministre peut déposer un projet de loi qui a une incidence financière, qui a une incidence budgétaire au niveau de ce gouvernement.

Alors, je voulais juste vérifier que la présidence a fait cette évaluation afin, à ce moment-là, que nous puissions donner notre consentement ou non relativement au dépôt de ce projet de loi.

(10 h 10)

Le Président: Écoutez, très franchement, je l'ai appris, en fait, je pense que c'était hier, et je n'ai pas eu l'occasion de faire cette vérification. Je sais, par ailleurs, je connais les dispositions du règlement, et c'est pour ça que j'avais l'intention, si le problème était soulevé aujourd'hui par un ou l'autre des leaders, de prendre cette question en délibéré et puis de rendre une décision dès demain pour informer à la fois le député de Rivière-du-Loup et les membres de l'Assemblée si le projet de loi privé, en fait le projet de loi qui est présenté par le député de Rivière-du-Loup est conforme aux dispositions du règlement.

À ce moment-ci, je ne suis pas en mesure de donner une appréciation correcte, puisque je n'ai pas pris connaissance du projet de loi lui-même. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Alors, M. le Président, à ce moment-ci, est-ce que je pourrais soumettre, peut-être, que le projet de loi soit déposé demain, à ce moment-là, pour que vous puissiez faire la vérification qui s'impose, M. le Président? Parce que ce n'est pas uniquement une incidence budgétaire, c'est aussi tout réaménagement financier au niveau du gouvernement qui, à ce moment-là, ne peut être fait que par un ministre. Alors, je pense que ça vaudrait la peine, M. le Président, que cette vérification soit faite, et, à ce moment-là, demain, nous pourrons donner ou non notre consentement au dépôt de ce projet de loi.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Vous me permettrez, M. le Président, de plaider la recevabilité du projet de loi. D'abord, le principe auquel fait référence le leader du gouvernement, c'est l'incidence financière d'un projet de loi sur l'année financière en cours et sur les crédits et le budget déposés par le gouvernement. Dans ce contexte-là, le projet de loi qui est présenté aujourd'hui ne vise pas ou n'a pas d'impact, d'incidence financière sur les crédits déposés, sur le budget en cours. Il agit au niveau des principes selon lesquels ou en fonction desquels pourront être utilisées les cotisations versées par les assurés de l'assurance automobile du Québec.

Évidemment, M. le Président, il va de soi que tout projet de loi a indirectement une incidence financière. Vous avez accepté le projet de loi du député de Viau qui vise à mettre un petit autocollant sur une carte, bien, l'autocollant, ce n'est pas gratuit. Tout projet de loi, tout geste que peut poser un gouvernement a nécessairement, directement ou surtout indirectement, une certaine incidence financière. Vos prédécesseurs ont toujours reconnu aux députés de l'Assemblée nationale, non seulement aux ministres, le pouvoir de déposer des projets de loi, à condition qu'ils ne modifient pas les conditions du budget ou des crédits en cours, mais à condition qu'ils agissent au niveau des principes. Et je pense que vous venez d'en accueillir un, il y a à peine quelques jours ou quelques semaines.

Deuxièmement, je tiendrais à vous rappeler, pour plaider la recevabilité, M. le Président, que je suis surpris que le leader du gouvernement se lève comme ça parce que le chef du gouvernement, le premier ministre, avait lui-même dit, le 24 avril 1996, en cette Chambre, en parlant des crédits de l'année budgétaire en cours, que le gouvernement ne posera pas de geste, s'est engagé à ne pas poser ce geste, et il est évident qu'il n'y aura pas de répétition des transferts de fonds de la même sorte. Donc, ça veut clairement dire, si on prend la parole du premier ministre – et je pense qu'on est obligés, en cette Chambre, de tous prendre la parole du premier ministre – que, dans les crédits, dans le budget de l'année en cours du gouvernement, il n'y a aucune incidence financière possible. C'est la parole donnée, M. le Président, et, donc, on agit au niveau des principes pour l'avenir et non pas au niveau de l'année financière en cours.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Question de règlement, M. le Président. Le but de mon intervention n'est pas de m'opposer au projet de loi. Je ne l'ai même pas vu. C'est tout simplement qu'il y a des règlements en cette Assemblée nationale et le député de Rivière-du-Loup doit s'y conformer. Et, à ce moment-là, seul un ministre peut déposer un projet de loi qui a une incidence budgétaire ou même qui vise le réaménagement financier ou budgétaire du gouvernement.

Moi, je vous dis, M. le Président... Je ne veux pas refuser ce projet de loi, mais, si vous me dites que, vous-même, vous n'avez pas fait la vérification qui s'impose, quant à moi, à ce moment-là, je ne suis pas en mesure de donner ou non mon consentement au dépôt de ce projet de loi. C'est pour ça que, pour ne pas refuser que ce projet de loi soit déposé, je vous soumets respectueusement que nous pourrions faire cela demain.

Le Président: Écoutez, j'ai accueilli les remarques du leader du gouvernement ainsi que celles du député de Rivière-du-Loup parce que j'ai indiqué, effectivement, que je n'ai pas pris connaissance du projet, et, par ailleurs, pour prendre une décision éclairée, je pense que les commentaires que j'ai eus jusqu'à maintenant vont me permettre de faire une évaluation correcte. À ce moment-ci, je suis prêt aussi à reconnaître le leader de l'opposition officielle quelques instants.

M. Paradis: Oui. M. le Président, comme c'est l'habitude, nous nous en remettrons à votre sagesse légendaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: Légendaire, c'est un peu fort, là.

Le Président: La sagesse, pour s'épanouir, a besoin d'un peu de temps pour «percoler». Alors, vous allez permettre au président de prendre la question en délibéré et de faire les vérifications. Normalement, dès demain, je serai en mesure de donner les indications qui permettront à l'Assemblée de savoir si elle peut être saisie et si elle peut se saisir de ce projet de loi.


Dépôt de documents

Alors, nous en arrivons maintenant au dépôt de documents. Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.


Rapports annuels du Conseil du statut de la femme et de la Régie des rentes du Québec

Mme Harel: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 du Conseil du statut de la femme et j'ai également l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Régie des rentes du Québec.

Le Président: Alors, les documents sont déposés. Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Rapport annuel de la Régie du cinéma

Mme Beaudoin: Oui, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Régie du cinéma.

Le Président: Très bien. Ce document est déposé. M. le ministre de la Justice, maintenant.


Rapports annuels de la CALP et de la Direction de l'indemnisation des victimes d'actes criminels de la CSST

M. Bégin: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles. De plus, je dépose le rapport annuel d'activité 1995 de la Commission de la santé et de la sécurité du travail concernant l'application de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et de la Loi visant à favoriser le civisme.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre des Affaires municipales.


Rapports annuels de la Société d'habitation du Québec et de la Société québécoise d'assainissement des eaux

M. Trudel: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer deux rapports annuels: d'abord, le rapport de l'année 1995 de la Société d'habitation du Québec et le rapport annuel 1995-1996 de la Société québécoise d'assainissement des eaux.

Le Président: Ces documents sont déposés. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.


Rapports annuels de la Commission de protection du territoire agricole et de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires

M. Julien: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 de la Commission de protection du territoire agricole du Québec ainsi que le rapport annuel 1995-1996 de la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre du Travail.


Rapports d'activité de la Commission de la construction du Québec et de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération

M. Rioux: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport d'activité 1995 de la Commission de la construction du Québec et le rapport d'activité 1995-1996 de l'Institut de recherche et d'information sur la rémunération.

Le Président: Ces documents sont déposés. Mme la ministre déléguée à l'Industrie et au Commerce.


Rapport annuel du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1995-1996 du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.

Le Président: Merci, Mme la ministre. M. le ministre délégué aux Relations avec les citoyens, maintenant.


Rapports annuels de la Commission d'accès à l'information, du Conseil permanent de la jeunesse et de l'Office de la protection du consommateur

M. Boisclair: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer les trois rapports suivants: le rapport annuel 1995-1996 de la Commission d'accès à l'information du Québec, le rapport annuel 1994-1995 du Conseil permanent de la jeunesse, ainsi que le rapport annuel 1995-1996 de l'Office de la protection du consommateur.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés.


Rapport des résultats officiels des élections partielles tenues le 10 juin 1996

De mon côté, j'ai reçu du Directeur général des élections, en vertu de l'article 381 de la Loi électorale, le rapport détaillé des résultats officiels des scrutins qui se sont tenus le 10 juin dernier dans les circonscriptions électorales de L'Assomption et d'Outremont. Je dépose ce rapport.


Rapport annuel de la Commission de la fonction publique et rapport du Vérificateur général sur les frais d'administration de cet organisme

Je dépose également le rapport annuel 1995-1996 de la Commission de la fonction publique accompagné du rapport du Vérificateur général pour l'année financière terminée le 31 mars dernier, le tout conformément aux articles 124 et 125 de la Loi sur la fonction publique.

Dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions. M. le député.

M. Parent: J'aurais une question de directive, M. le Président, ou une question d'information. Je laisse naturellement à votre sagesse légendaire de juger laquelle devrait s'appliquer.

Hier, M. le Président, à Montréal, une pétition de 5 000 noms a été déposée au bureau du premier ministre. Alors, comment je peux faire, M. le Président, pour informer le premier ministre, pour lui dire que nous serions d'accord à ce qu'il dépose cette pétition, même si elle n'est pas conforme?

Le Président: Normalement, puisque c'est une question au gouvernement, vous auriez dû poser votre question à la période de questions et réponses orales.


Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège

Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Consultations sur le projet de loi n° 11 modifiant les services de garde à l'enfance

J'ai reçu, dans les délais requis, de M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, une lettre faisant part de son intention de soulever une question portant sur une violation des droits et privilèges de l'Assemblée et de ses membres. Selon M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, la ministre de l'Éducation aurait trompé les membres de cette Assemblée en déclarant qu'elle a rencontré les représentants de l'ensemble des services de garderie du Québec concernant le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, alors que l'association des employés de soutien de la CECM n'a jamais été invitée à faire part de ses commentaires sur ledit projet de loi.

Alors, compte tenu du texte de la lettre qui m'a été envoyée par le député de Notre-Dame-de-Grâce et des explications, je prends cette question en délibéré et je rendrai ma décision dans les meilleurs délais, et normalement dès demain matin. Non pas au mois d'octobre, dès demain.

Nous en arrivons maintenant à la période des questions et des réponses orales.

M. Bélanger: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

(10 h 20)

M. Bélanger: Question de directive. Normalement, quand une question... Je pense c'est une question de privilège, finalement, qui vous a été soumise. Il me semble que normalement... Je voudrais avoir tout simplement une question de directive, je ne veux pas nuire à la légende. Je voudrais tout simplement savoir, M. le Président, est-ce que c'est vraiment coutumier de lire la question qui est soumise avant que la présidence ait pu porter un jugement sur la question qui est soumise? Il me semble que, normalement, on a finalement l'objet de la question qui est fait uniquement quand la décision est rendue par la présidence relativement à la question qui a été soulevée à la présidence.

Le Président: Écoutez, le texte que j'ai indiqué est au conditionnel. La lettre, elle, fait une affirmation. Alors, ce que le président a fait, c'est qu'il a informé les membres de l'Assemblée de la teneur et du contenu, en fait de l'objet précisément de la question de privilège qui est soulevée par le député de Notre-Dame-de-Grâce, sans prendre parti, et en indiquant que, bien sûr, ces affirmations sont au conditionnel.

M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, c'est parce qu'en faisant la lecture de la question qui vous a été soumise par le député de Notre-Dame-de-Grâce vous avez utilisé des mots antiparlementaires, le mot «tromper», en particulier. Alors, vous comprendrez, M. le Président, ma surprise quand je vous ai entendu.

Le Président: M. le leader du gouvernement, ce que j'ai indiqué, c'est que, selon le député, la ministre aurait, et c'était l'objet de la question de privilège qui était... Écoutez, en prenant la question de privilège en délibéré, je vais également regarder la question de règlement que vous soulevez et voir dans quelle mesure la présidence aurait pu utiliser une formulation différente – je n'en suis pas convaincu pour le moment – mais je pense que vous conviendrez qu'à ce moment-ci il n'était pas dans l'intention de la présidence de faire siens des propos qui seraient antiparlementaires. Par ailleurs, il n'est pas non plus dans l'intention de la présidence de dénaturer le sens d'une question de privilège qui est posée par un membre de l'Assemblée.


Questions et réponses orales

Alors, nous en arrivons à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle.


Implantation du régime d'assurance-médicaments

M. Johnson: Hier, à l'émission de Jean-Luc Mongrain, j'ai trouvé, un peu comme tout le monde, que le premier ministre était enfin passé aux aveux sur les louvoiements et les changements de cap dont il nous a... je dirais, auxquels il nous a habitués, quand même, depuis quelques mois, et avec raison, parce que les dossiers sont extrêmement nombreux où le premier ministre dit une chose et fait son contraire, ou alors fait une chose et ensuite fait son contraire, qu'il s'agisse de l'équité salariale, que la ministre, évidemment, responsable avale de travers, qu'il s'agisse des réactions et du comportement du premier ministre dans ce qu'il est convenu d'appeler l'affaire Bertrand.

Sur le dossier linguistique, aujourd'hui, on va de rebondissement en rebondissement sur les opinions non seulement de la ministre, mais de ses collaboratrices, à l'égard de l'opportunité qu'il y avait d'introduire de telles mesures; qu'il s'agisse, évidemment, des promesses du premier ministre que les Québécois et Québécoises, les citoyens, ne seraient pas touchés par les compressions budgétaires, à part le double langage entre les discours de Laval, le discours d'assermentation, le discours inaugural et tous les discours du premier ministre et ce qu'il fait en réalité – et je passe, évidemment, rapidement sur le point de presse du New Hampshire. Dans le dossier, surtout, de l'assurance et impôt-médicaments, on voit là que c'est essentiellement une commande budgétaire et que le premier ministre persiste à la présenter comme une question de justice et d'équité sociale. C'est une mesure budgétaire qui est présentée comme une mesure sociale.

Est-ce que le premier ministre, pour qui l'antidote à louvoyer c'est d'oser faire les vraies choses, est-ce que le premier ministre envisage enfin de faire la vraie chose dans ce dossier-là, compte tenu de tous les commentaires et de toutes les analyses, c'est-à-dire de reporter ce dossier afin qu'on l'examine de novo et qu'on prenne les vraies décisions et les bonnes décisions tous ensemble, dans l'intérêt de tous les Québécois?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, j'ai la conviction personnelle que, lorsque nous aurons adopté cette loi et que nous aurons mis en vigueur le nouveau régime d'assurance-médicaments, une fois que les preuves seront faites, les gens diront: Oui, voici une mesure salutaire, voici une mesure qui s'est fait longtemps attendre, voici une mesure qui vient soulager presque 1 200 000 personnes qui ne sont pas couvertes par rapport à l'assurance-médicaments, qui est équitable par rapport au revenu de ceux qui vont verser des franchises et qui vont devoir bénéficier de plafond. Le gouvernement croit fondamentalement que cette loi est juste et bonne et qu'elle constitue un progrès social, un pas en avant pour le Québec. C'est pour cela que nous allons voter pour cette loi lorsqu'elle sera appelée pour être votée.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre est d'accord que, dans le cas des centaines de milliers de Québécois âgés de 65 ans et plus, ce sera également une mesure qui va leur faire dire: Assez, c'est assez, on a notre voyage, on est assez taxés?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, les personnes âgées dont parle le chef de l'opposition sont des Québécoises et des Québécois qui sont très conscients de leur responsabilité sociale, qui ont élevé des familles, qui ont des petits-enfants, qui savent qu'il y a, au Québec, 300 000 enfants qui vont être couverts gratuitement, en ce qui concerne les enfants, par ce nouveau régime. C'est donc une mesure qui fait avancer les choses et qui s'inscrit dans le sens des valeurs de nos aînés.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Pas pour contredire le premier ministre, mais est-ce qu'il compterait déposer ici, en Chambre, la pétition que des milliers de personnes âgées lui ont remise afin qu'il reporte ce projet de loi?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je n'ai pas vu cette pétition, j'étais au travail ici, à Québec. Cette rencontre a eu lieu hier, je crois, à Montréal. Je me ferai transmettre la pétition et j'aviserai s'il y a lieu de la remettre à l'Assemblée nationale, mais je crois que sa publicité est maintenant assurée, de toute façon.

Le Président: En principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Réévaluation des services de transplantation d'organes

M. Copeman: Merci, M. le Président. Nous apprenions, cette fin de semaine, par un quotidien montréalais, qu'une dame de Portneuf, en attente d'une greffe pulmonaire depuis deux ans sans succès au Québec a choisi, en désespoir de cause, de s'inscrire au programme ontarien pour obtenir enfin cette double transplantation. Le résultat, M. le Président, 11 jours plus tard, 11 jours, elle est transplantée, à London, Ontario.

Question fort simple au ministre de la Santé: Est-ce que le ministre ose continuer à dire que notre programme de transplantation d'organes répond réellement aux besoins des Québécoises et des Québécois en attente?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, lorsqu'on a soulevé, la semaine dernière je crois, pour la première fois des questions en ce qui concerne les transplantations, spécialement les transplantations d'organes, j'avais différencié au moins deux aspects dans ce problème-là. Le premier, la question des ressources que, globalement, on investit comparativement à d'autres provinces, y compris l'Ontario, et ça, il y a une confirmation, vérification faite, qu'on a, dans l'ensemble, les ressources qui devraient nous permettre de donner un très bon service aux Québécois et aux Québécoises.

Par ailleurs, pour m'assurer qu'on va au fond de cette chose-là et m'assurer de l'organisation et de la coordination des services, spécialement dans la région de Montréal, présentement, où se font les transplantations pulmonaires... j'ai mandaté directement le président du Conseil médical du Québec, qui est présentement sur le terrain, pour revoir avec les établissements, de façon critique, leur façon de fonctionner et leur façon de se coordonner, parce qu'il semble y avoir des améliorations à apporter en ce qui regarde la rationalisation des ressources et le regroupement des ressources, question qui avait d'ailleurs été soulevée. Et c'est un mandat avec un délai très court. D'ici une semaine ou deux, j'aurai une réévaluation complète de la situation et j'entends bien, dans les délais très courts, intervenir dans ce dossier-là pour resserrer notre façon de fonctionner et assurer une meilleure coordination entre les trois établissements qui sont principalement impliqués présentement dans ce domaine-là, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Copeman: Comment est-ce que le ministre de la Santé peut, de façon sérieuse, de bonne foi, réconcilier ses paroles avec les paroles de l'époux de la madame concernée qui a dit, et je le cite, M. le Président: «Nous sommes vraiment contents. Au Québec, nous pensions que cela jamais n'arriverait»?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: C'est ce que je dis, M. le Président. On a souligné, au cours des deux dernières semaines, deux ou trois situations où, semble-t-il, on aurait pu et on aurait dû, avec les ressources investies dans ce domaine-là, on aurait pu et on aurait dû procéder, semble-t-il, plus efficacement. Alors, j'ai mandaté quelqu'un qui a toute la compétence, toute la connaissance de ce dossier-là pour intervenir. Il est présentement sur le terrain avec les gens concernés. D'ici une semaine, 10 jours, j'aurai une analyse de cette situation et j'entends m'assurer très rapidement que les ressources investies dans ce domaine-là donnent aux citoyens du Québec et aux citoyennes le service auquel ils ont droit, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: Oui, en additionnelle.

Le Président: En complémentaire.

(10 h 30)

M. Marsan: D'abord, M. le Président, je demanderais le consentement de cette Chambre pour déposer deux lettres adressées au député de Viau, une première lettre écrite par la mère de Vanessa, 18 ans, atteinte de fibrose kystique et en attente d'une double transplantation pulmonaire, et une seconde lettre écrite par une dame de 42 ans, diagnostiquée en 1990 d'une maladie héréditaire, espérance de vie de cinq ans; seule chance de vivre: transplantation pulmonaire. Et j'aurais également une troisième lettre, celle-là adressée au ministre de la Santé, dans laquelle une dame tente de sensibiliser le ministre à l'insécurité vécue par les personnes en attente de transplantation et aussi par l'absence de suivi pour les personnes greffées.


Documents déposés

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, vous pouvez déposer les documents. Votre question, maintenant.

M. Marsan: Ma question, M. le Président: Est-ce que le ministre de la Santé, qui n'a pas daigné prendre la parole lors de l'adoption du principe du projet de loi facilitant les dons d'organes, projet de loi proposé par mon collègue, le député de Viau, acceptera l'offre de l'opposition officielle d'étudier et d'adopter cet important projet de loi avant la fin de la présente session?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Le projet de loi dont on parle, M. le Président, parle du contexte d'une politique dans le domaine de la transplantation, mais propose une intervention très pointue qui est celle de restaurer ce qui a déjà été une habitude, au Québec, d'avoir soit sur la carte d'assurance-maladie ou sur le permis de conduire, ou les deux qui seront maintenant unifiés, une déclaration formelle d'engagement des gens qui sont prêts à ce que leurs organes, en cas de décès rapide, puissent être offerts et transplantés. On a dit d'ailleurs qu'on était entièrement d'accord pour procéder dans ce sens-là et de réinstaurer... Je ne suis même pas certain qu'il faille vraiment une loi pour pouvoir agir dans ce domaine-là. Peut-être qu'on peut le faire le plus rapidement possible, et on va sûrement aller dans ce sens-là. Sur quel calendrier? Ce sera à voir, ce n'est pas moi qui commande l'agenda de ce côté-là. Mais les actions vont être prises de toute façon.

Je reviens sur cette question de transplantation, M. le Président. Je veux vraiment que la population comprenne, là, et soit rassurée que, selon toutes les informations que j'ai, on investit des ressources là-dedans, dans tout le domaine de la transplantation, et qu'il n'y a pas de raison de ne pas nous donner un bon service. Il y a des...

Le Président: M. le ministre. Il n'y a qu'un député qui a la parole pour le moment, c'est le ministre de la Santé et des Services sociaux. M. le ministre.

M. Rochon: Alors, je conclus rapidement, M. le Président. On veut que ce soit très, très clair qu'à la suite des derniers cas qui ont été soulevés je veux vraiment m'assurer que, s'il y a eu des délais pour que des gens reçoivent des transplantations au Québec alors que, globalement, on a les ressources qui devraient permettre un excellent service de ce côté-là, tout est en place sur le terrain présentement pour que j'aie le portrait de la situation très rapidement – on parle d'ici une semaine, dix jours – et que ce qu'il y a à faire dans ce domaine-là pour que nos ressources soient utilisées efficacement et qu'il y ait une meilleure coordination et rationalisation entre les établissements concernés va être fait, et va être fait rapidement, M. le Président.

Le Président: En principale? En complémentaire ou en principale, M. le chef de l'opposition?

M. Johnson: Oui, en complémentaire au premier ministre: Étant donné que le ministre de la Santé ne nous a jamais dit si, oui ou non, il comptait user de son influence à lui pour faire adopter le projet de loi n° 190 qui a été suggéré par le député de Viau, est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si lui, comme premier ministre, va faciliter justement cette prise de renseignement à l'égard des dons d'organes et qu'en conséquence, avant la fin de la session, avant la fin de la semaine, le projet de loi n° 190 sera adopté? D'après le premier ministre, est-ce que c'est assez important pour lui ou, à tout le moins, est-ce que c'est plus important pour lui que pour son ministre de la Santé?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Il faudrait qu'on s'entende sur les façons de procéder. On présente des projets de loi après les avoir préparés et développés pendant quelques années, et on nous dit que ça va trop vite. Là, on nous a amené un projet de loi comme ça, où le travail et les vérifications n'ont pas été toutes faites, et on trouve qu'on ne va pas assez vite.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, ce que je dis, c'est que, dès que le projet a été déposé, on a entrepris de faire les vérifications nécessaires, s'assurer de voir comment on peut procéder dans ce domaine-là. On a déjà dit qu'on était d'accord avec le principe de ce projet de loi, et, ce que le projet de loi propose, on va s'assurer de pouvoir le faire. Est-ce qu'il faut le faire par un projet de loi? Est-ce qu'il y a d'autres moyens peut-être plus rapides d'y arriver? C'est ce qu'on examine et on va procéder dans les meilleurs délais, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte que son ministre est en train de nous dire qu'administrativement il va peut-être rétablir ce qu'un autre membre du gouvernement, administrativement, a aboli?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, pas du tout, je ne pense pas qu'il faille faire une grande question autour de cela. Le ministre de la Santé vient de dire que nous sommes d'accord en principe et que nous trouverons le moyen le plus adéquat de le faire. Si c'est le projet de loi, ce sera le projet de loi et, sinon, ce sera autre chose, mais ça va être fait.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Viger, en principale.


Avenir de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont

M. Maciocia: Oui, M. le Président. Au printemps 1995, le ministre de la Santé et des Services sociaux refusait de se prononcer, de statuer sur l'hôpital Maisonneuve-Rosemont, en le reportant à l'automne dernier, parce qu'il y avait un rapport présidé par M. Pichette qui devait être déposé. Neuf mois après que ce rapport a été déposé, le ministre n'a pas encore statué sur l'hôpital Maisonneuve-Rosemont et laisse traîner et pourrir le dossier. Avec cette action, il pénalise d'une façon, je dirais, épouvantable la population de l'est de Montréal. Et le ministre a laissé croire tout dernièrement qu'une décision serait prise au mois de mai dernier, mais, comme d'habitude, aucune décision n'a été prise.

Ma question, M. le Président, au ministre de la Santé: Est-ce que le ministre de la Santé est conscient des conséquences désastreuses que son inaction provoque notamment au niveau du recrutement de spécialistes, de médecins, de chefs de département et aussi sur le fonds de recherche de l'hôpital, qui, dans l'espace de quelques années, a triplé son montant, M. le Président? Je pense que le ministre doit être conséquent et essayer de donner une décision précise et rapide dans le dossier de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, présumant que le député connaît bien la situation, il sait sûrement que les décisions au sujet de l'hôpital Maisonneuve sont reliées de très près aux décisions finales qui seront prises dans le dossier du Centre hospitalier universitaire de Montréal, l'Université de Montréal, le CHUM, parce qu'il s'agit de rééquilibrer, pour l'ensemble du réseau de l'Université de Montréal dans le domaine de la santé, les ressources de recherche et les ressources d'enseignement. Et les gens de Maisonneuve savent aussi très bien – et j'ai été en contact régulièrement avec eux, de même que mes collègues – que la question est très reliée... savent très bien qu'on est sur un agenda pour probablement terminer l'opération du CHUM dans les semaines et les mois qui suivent, et que toutes ces décisions-là vont être prises ensemble.

Le dossier, en ce qui les concerne, a évolué beaucoup. L'orientation... Ils sont assurés, ils savent qu'ils ont un rôle prédominant dans le domaine des soins spécialisés pour l'est de Montréal et il n'y a absolument rien qui menace ça, ça évolue très, très bien avec le plan de la Régie régionale de Montréal. Ils savent très bien qu'ils ont un rôle universitaire dans des secteurs bien identifiés et que tout ça va se finaliser ensemble.

(10 h 40)

Alors, il n'y a pas de retard, et, pour que ça aille plus vite, il s'agit que tout le monde qui est impliqué là-dedans, dans le dossier du CHUM à Montréal comme dans le dossier de Maisonneuve, prenne chacun sa responsabilité, avec l'Université de Montréal, fasse les dernières ententes. Moi, j'attends après eux pour pouvoir procéder rapidement. Quand tout le monde aura pris ses responsabilités, ça va aller très vite, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Maciocia: M. le Président, comment le ministre peut-il affirmer qu'il est en contact constant avec les gens de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont quand il a reçu une lettre le 4 juin dernier du Conseil des médecins et dentistes et pharmaciens de l'hôpital Maisonneuve-Rosemont qui lui demande de le rencontrer et, ce matin encore, il n'a même pas répondu à ces gens-là pour les rencontrer, M. le Président? Comment il peut être en contact constant avec ces gens quand il n'a même pas répondu à la lettre qu'il a reçue le 4 juin dernier, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, j'ai déjà, au cours de la dernière année, rencontré à quelques reprises les représentants des médecins. Ils ont aussi rencontré de mes collègues députés dans la région de Montréal. Il y a à peu près 15 jours, j'ai eu une longue conversation au téléphone avec le vice-président ou le président du comité qui appuie l'hôpital Maisonneuve. Les contacts ont été très, très, très réguliers, et ils savent très bien qu'on aura d'autres rencontres dans les prochaines semaines. Je pense que, eux, ils ont très bien compris qu'entre le 4 et aujourd'hui il y avait une activité assez intensive ici, au Parlement, à l'Assemblée et en commission, et qu'ils ont toute la patience d'attendre pour qu'on puisse se reparler à la fin du mois.

Il n'y a pas de panique, M. le Président, dans cette situation-là. C'est une situation qui évolue très bien et, encore une fois, tout est prêt pour débloquer quand on va finaliser le dossier du CHUM et tout doit se tenir et être rationnel ensemble. Des décisions prises sans contexte dans ce domaine-là ne vont pas aider. Ça risque de faire reculer les choses. On en arrive à la fin de ce dossier-là. Avec un petit peu de patience de tout le monde, ça va être terminé et ce n'est pas impossible que ce soit réglé avant les grandes vacances de l'été, M. le Président. Merci.

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Destruction de plants de marijuana à Kanesatake

M. Lefebvre: Oui, M. le Président. Le 30 juillet 1995, à Kanesatake, l'ex-ministre de la Sécurité publique a fait du spectacle devant les caméras de la télévision. Il a détruit en compagnie d'agents de la Sûreté du Québec des milliers de plants de cannabis, et rien d'autre. La Sûreté du Québec n'a procédé à aucune arrestation ni, non plus, à aucune perquisition, M. le Président, ce qui a fait dire au journaliste de L'actualité Jean Paré, qui résumait l'opération de la façon suivante, jugement très sévère: «Depuis quand voit-on des policiers et leur ministre détruire les preuves au lieu de les saisir?»

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Lefebvre: M. le Président, depuis ce temps, il ne s'est rien passé, sinon qu'on sait que la Sûreté du Québec n'a transmis à date son dossier à aucun substitut du Procureur général, et ce, contrairement à la règle de l'article 7.2 du code de déontologie des policiers qui dit ceci: «Le policier ne doit pas cacher ou ne pas transmettre une preuve ou un renseignement dans le but de favoriser ou de nuire à une personne.»

M. le Président, ma question au ministre de la Sécurité publique: Comment le ministre peut-il expliquer les raisons pour lesquelles la Sûreté du Québec n'a transmis à date son dossier à aucun procureur de la couronne, et en particulier au procureur de la couronne de Saint-Jérôme – Kanesatake étant dans le district de Saint-Jérôme – qui a indiqué n'avoir reçu, effectivement, aucun dossier ni, non plus, M. le Président, n'avoir jamais été consulté dans ce dossier-là? Comment le ministre peut-il expliquer une telle situation après 11 mois?

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: Oui. Alors, M. le Président, le critique de l'opposition participait comme moi à une commission parlementaire qui a rencontré le directeur de la Sûreté du Québec et le critique de l'opposition a posé ces questions au directeur de la Sûreté et il sait très bien quelles ont été les réponses. Le directeur de la Sûreté du Québec a indiqué que, oui, dans le cas de Kanesatake, le dossier est toujours ouvert mais que, non, il n'avait pas été possible jusqu'à maintenant de réunir les éléments qui permettraient de poursuivre de façon très précise des individus.

Quant aux autres remarques du critique de l'opposition, je dois dire que je ne les partage d'aucune façon parce que je pense que l'action de mon prédécesseur à Kanesatake a permis de réveiller la situation, M. le Président.

Des voix: Ah!

M. Perreault: On assiste actuellement à un changement d'attitude. Il suffit de regarder quelle est l'attitude, par exemple, actuellement, des gens qui sont à la direction du conseil de bande, des efforts qui se font du côté d'une volonté de reprendre un peu le contrôle de la situation policière. M. le Président, je pense que l'action qui a été menée est de nature à nous diriger vers une situation plus conforme à ce qu'on souhaite, tout le monde, dans l'intérêt de la sécurité publique.

Le Président: M. le député de Frontenac.


Enquête sur la culture de marijuana à Kanesatake

M. Lefebvre: M. le Président, même sujet, mais en principale. Est-ce que le ministre de la Sécurité publique sait – ou doit savoir – qu'il y a dans le dossier de la Sûreté du Québec des faits et des éléments de preuve très graves qui doivent être soumis au procureur de la couronne, et je vais en citer quelques-uns: révélations contenues dans différents reportages de télévision; les plans de cannabis que l'ex-ministre n'a pas réussi à détruire; le témoignage bouleversant de Mme Maryjane Hannaburg, à la radio de Radio-Canada, au mois d'août 1995, qui dénonçait la culture du cannabis par la pègre locale à Kanesatake – ce témoin existe toujours, M. le Président – et surtout les révélations de l'ex-ministre de la Sécurité publique qui disait publiquement, le 28 juillet 1995, en entrevue, décrivait dans le détail – c'est le ministre qui parlait, M. le Président – tout le réseau des trafiquants de drogue à Kanesatake, 18 personnes, dont 5 personnes qui dirigeaient et 13 jeunes armés qui protégeaient les plants de marijuana? Ces renseignements-là existent toujours, M. le Président.

Alors, ma question au ministre de la Sécurité publique: Est-ce qu'il réalise que son refus de soumettre ce dossier au procureur de la couronne de Saint-Jérôme nous amène à tirer une seule conclusion, que son prédécesseur, l'ex-ministre de la Sécurité publique, a carrément garanti l'immunité aux criminels pour faire son spectacle de télévision, M. le Président?

Des voix: Oh!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, vous comprendrez, je pense, mon intervention à l'effet que, quand on accuse un ministre de garantir l'immunité à des criminels, c'est complètement antiparlementaire, c'est imputer des motifs indignes à un membre de cette Assemblée, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: M. le Président, dans les circonstances, le ministre de la Sécurité publique a toute la latitude pour répondre. Et, si ce n'est pas vrai, qu'il soumette le dossier au Procureur général.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, on impute des motifs indignes à un membre de cette Chambre, je demande le retrait de ces paroles.

Le Président: L'article 35, paragraphe 6 est très clair: le député qui a la parole ne peut «imputer des motifs indignes à un député ou refuser d'accepter sa parole». En conséquence, M. le député de Frontenac, je vous inviterais à reformuler votre question autrement, en n'utilisant pas ces propos. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, reformuler et retirer, ce n'est pas pareil. J'ai demandé le retrait des paroles, M. le Président.

Le Président: M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, je vais retirer mes propos, mais en indiquant qu'on peut le penser. Ceci étant dit, ma question additionnelle, M. le Président: Si le ministre de la Sécurité publique veut que la population pense le contraire de ce que je viens de dire, est-ce qu'il ne peut pas s'engager aujourd'hui, devant cette Chambre, à exiger de la Sûreté du Québec de transmettre sans délai le dossier Kanesatake au procureur de la couronne de Saint-Jérôme pour que les poursuites dans ce dossier soient intentées, M. le Président? Et, à ce moment-là, on le croira.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Perreault: M. le Président, je suis un peu surpris de la question du député de l'opposition. Depuis quand le ministre de la Sécurité publique se substitue-t-il au travail des policiers en matière de cueillette de preuves? Il appartient aux services policiers concernés, M. le Président, lorsqu'ils ont les preuves nécessaires et suffisantes, de les déposer au procureur qui fait son travail, au substitut du Procureur général.

M. le Président, le critique de l'opposition est l'ancien ministre de la Justice. Il ne demande quand même pas au ministre de la Sécurité publique de s'ingérer dans le travail quotidien des policiers, ce serait inacceptable, M. le Président. Je répète que, dans ce dossier, notre gouvernement, le gouvernement et le ministre qui m'a précédé se sont tenus debout, M. le Président, et ont fait un travail remarquable.

Des voix: Bravo!

Le Président: En complémentaire, M. le député de Masson.

(10 h 50)

M. Blais: En additionnelle, s'il vous plaît. Pourrait-on savoir du ministre responsable de la Métropole et ancien Solliciteur ce qu'il entend répondre à la question que vient de poser le leader adjoint de l'opposition? C'est clair.

Le Président: M. le ministre d'État à la Métropole. M. le ministre.

M. Ménard: M. le Président, je vais exposer avec clarté des choses que le député de Frontenac sait très bien et qu'il fait mine d'ignorer. D'abord, je n'ai gatanti aucune espèce d'immunité à qui que ce soit pour aller à Kanesatake. Deuxièmement, je n'ai pas convoqué les journalistes, c'est eux qui sont venus. Troisièmement, quand on trouve de la marijuana sur des terres publiques plantée, de toute évidence, par des gens à qui n'appartiennent pas les terres – ce que Jean Chrétien appelait si joliment des terres qui n'appartiennent à personne – à peu près la seule façon de faire une preuve hors de tout doute raisonnable, c'est de prendre les gens au moment où ils cueillent ces choses-là. À partir du moment où la piste est brûlée, on n'a à peu près pas de preuves qu'ils vont venir. Ce n'est pas impossible. Il peut y avoir un délateur, à un moment donné...

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Ménard: Quatrièmement, M. Paré aurait dû être à la conférence de presse dans laquelle les journalistes m'ont demandé ce qu'on faisait avec tant de marijuana une fois que c'était saisi. Est-ce qu'on la gardait longtemps? Je lui aurais expliqué et il aurait compris que la loi prévoit que, dans le cas où il y a beaucoup de drogue comme celle-là, on n'est pas obligé de la garder pendant des années en attendant plusieurs procès. Il suffit de la détruire sous surveillance, avec une autorisation du ministère des aliments et drogues, d'en prendre des échantillons, de la compter, de faire les certificats qui seront ensuite produits en preuve. Je n'ai donc pas participé à une entreprise de destruction de la preuve, comme tous les journalistes qui étaient là l'avaient compris. Et ils n'ont pas cru bon de rapporter ça dans les journaux.

Quant au témoignage auquel vous faites allusion, vous qui connaissez les exigences de la loi criminelle et, entre autres, les exigences du ouï-dire, n'est-ce pas, ce n'est pas parce que quelqu'un a entendu dire qu'une telle autre personne avait été sur les champs de marijuana un soir, que ça fait nécessairement une preuve hors de tout doute raisonnable.

Le Président: M. le ministre, vous avez largement utilisé le temps prévu pour une réponse. Une question complémentaire, M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que l'ex-ministre de la Sécurité publique ne considère pas souhaitable, normal, dans les circonstances, particulièrement, dans le but justement d'éviter toutes sortes de spéculations, que le dossier soit transmis à celui qui, ultimement, doit décider, le procureur de la couronne de Saint-Jérôme? Est-ce qu'il ne souhaite pas, lui – je lui demande de répondre franchement, de son siège – que le dossier soit transmis au procureur de la couronne de Saint-Jérôme, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Ménard: Je vais répondre à tout le monde ce que le député de Frontenac sait déjà et qu'il fait, encore une fois, mine d'ignorer actuellement. Les policiers savent généralement si un dossier est suffisant pour être présenté au procureur de la couronne ou s'il est évident que, devant les éléments de preuve qu'ils ont, le procureur de la couronne décidera qu'il n'y a pas suffisamment de preuves. C'est à eux de décider si le dossier... Dans le doute, ils se rendent au procureur de la couronne. Parfois, le procureur de la couronne estime qu'il a assez de preuves. Parfois, il estime qu'il n'en a pas assez. J'espère que tout le monde comprend que, quand on trouve de la marijuana sur un terrain public, il faut avoir une preuve hors de tout doute raisonnable et une identification des gens à l'avantage de qui cette marijuana était plantée. À défaut de les prendre là, on en est réduit à la possibilité d'un délateur ou d'écoute électronique, mais des moyens qui sont beaucoup moins sûrs.

Le Président: M. le député de Rousseau, en principale.


Négociations concernant la réouverture de l'abattoir de Saint-Esprit

M. Brien: Merci, M. le Président. Depuis mon élection en septembre 1994, j'essaie, avec toute l'énergie qu'il m'est donnée, de faire réouvrir l'abattoir de Saint-Esprit, dans mon comté, où il y a 30 % de sans-emploi. Notre région, la région de Lanaudière, produit 500 000 porcs par année, qui doivent se faire abattre ailleurs. Une entreprise, en l'occurrence le Groupe Brochu Lafleur, ainsi que de nombreux producteurs se sont portés acquéreurs de l'abattoir de Saint-Esprit et entendent l'opérer à partir des droits acquis historiques de l'abattoir.

Ma question, M. le Président, s'adresse à notre ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation: M. le ministre, quand peut-on espérer le résultat d'arbitrage de la Régie de marchés agricoles dans le dossier de l'abattoir de Saint-Esprit? Et, deuxièmement, s'il n'y avait toujours pas d'entente entre la Fédération des producteurs de porcs du Québec et le Groupe Brochu Lafleur sur un quota d'abattage permis, notre ministre entend-il déposer un décret gouvernemental pour forcer, une fois pour toutes, un règlement dans ce dossier des plus urgents pour les producteurs porcins de ma région et pour l'emploi chez nous?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Julien: Alors, M. le Président, je remercie le député de Rousseau de sa question. Effectivement, c'est un dossier dont les problèmes ont débuté autour des années 1993-1994, où l'ancien gouvernement a fait des tentatives de rapprochement qui n'ont pas fonctionné. Par la suite, lorsqu'on est arrivé au pouvoir, mon prédécesseur, avec le ministre délégué de la région, ma collègue, entre autres, de Terrebonne et, aussi, mon collègue de Rousseau – qui, je dois le dire en passant, m'en parle à peu près tous les jours, donc je dois vous dire que je suis très préoccupé par ce dossier-là – a fait en sorte qu'on a fait plusieurs tentatives de rapprochement des parties.

Effectivement, c'est un dossier qui est difficile, qui n'est pas facile à régler. Et la Régie, dernièrement – c'est son mandat de voir à régler ce genre de conflit là – a convoqué les deux parties pour une séance de conciliation. Et, maintenant, nous sommes rendus à une séance d'arbitrage qui devait avoir lieu au mois d'août, et j'ai demandé, compte tenu de l'urgence du dossier, de ramener ça, de faire en sorte que, malgré les vacances, on puisse traiter de ce dossier-là dans le mois de juillet. Donc, il va y avoir une rencontre d'arbitrage le 19 juillet. Ils sont convoqués pour faire en sorte que, après ça, la Régie puisse émettre une décision à ce sujet-là.

Quant à la deuxième question, vous comprendrez que je vais attendre la décision de la Régie, parce que je considère que c'est une institution et, comme ministre responsable de cette institution-là, je dois respecter quand même la façon dont ça doit «processer». Alors, la Régie va prendre sa décision, va émettre ses recommandations et, après ça, on verra. Mais je dois vous dire que je fonde quand même beaucoup d'espoir dans la décision de la Régie dans la prochaine session d'arbitrage.

Le Président: M. le député de Papineau, en principale.


Financement de la Société de diversification économique de l'Outaouais

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Qui dit la vérité? Pendant les élections, M. le Président, le Parti québécois faisait de belles promesses aux citoyens de l'Outaouais. Avant le référendum, l'ex-premier ministre, M. Parizeau, le 7 septembre 1995, promettait un montant de 20 000 000 $. Le 13 juin, M. le Président, je questionnais, ici, en cette Chambre, le premier ministre concernant la Société de diversification économique de l'Outaouais. M. le Président, le ministre disait en cette Chambre qu'il était pour faire tout ce qu'il faut pour que rien n'entrave l'action d'Innovatech dans la région de l'Outaouais. Or, M. le Président, pendant qu'on nous sert des promesses, et bien avant la réponse du ministre en cette Chambre, la Société Innovatech écrivait, le 7 juin dernier – et, avec le consentement, j'aimerais déposer la lettre, M. le Président...


Document déposé

Le Président: Il y a consentement pour le dépôt de la lettre?

M. MacMillan: ...au responsable de la région pour refuser l'aide nécessaire pour mettre en place cette Société de diversification. Pendant que je posais ma question, M. le Président, le ministre savait que le projet ne fonctionnait pas. Double langage, M. le Président.

(11 heures)

Au ministre responsable du Développement des régions: Quand le gouvernement du Parti québécois va-t-il cesser de camoufler la vérité et dire la vérité à la population de l'Outaouais et quand va-t-il débloquer les budgets nécessaires pour la mise en place de la Société de diversification économique de l'Outaouais?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre responsable du Développement des régions.

M. Chevrette: M. le Président, il est tout à fait juste que l'ex-premier ministre, M. Parizeau, a pris un engagement pour 3 000 000 $ à être versés à la Société de diversification de l'Outaouais. Tout à fait vrai. Ce qu'on a mis en branle, c'est de trouver ces 3 000 000 $ à l'aide de divers programmes, dont Innovatech. Il y a eu une demande de faite à Innovatech, il y a eu un plan qui a été soumis à Innovatech, il y a eu une réponse d'Innovatech qui dit que le contenu ne répond pas à la mission d'Innovatech, donc on n'a pas l'assurance que les argents qui sortiraient d'Innovatech soient en fonction de sa mission. Et c'est l'Assemblée nationale du Québec qui a adopté la loi d'Innovatech. Donc, Innovatech répond correctement. Il s'agit qu'on trouve les 3 000 000 $ ailleurs. Puis on va le faire. Il n'y a pas de mensonge dans ça, il n'y a pas de cachette dans ça, M. le Président, c'est un processus normal. On va le trouver puis on va honorer nos paroles.

Le Président: M. le député.

M. MacMillan: En additionnelle, M. le Président. Est-ce que c'est parce que c'était une promesse de M. Parizeau que le nouveau premier ministre n'est pas d'accord avec la Société de diversification de l'Outaouais?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement assume la continuité de ses engagements, peu importe celui qui les a contractés. Le ministre vient de répondre très clairement que ces 3 000 000 $ seraient trouvés et seraient versés à qui de droit.

Une voix: Ça fait un an.

M. Bouchard: Qu'on laisse le temps au gouvernement de trouver, dans les programmes que nous avons... Nous savons combien sont serrées les finances de l'État. On comprendra que l'État va chercher attentivement pour trouver un 3 000 000 $ et ne pas l'enlever à d'autres secteurs qui sont déjà très, très privés, comme on le sait. L'engagement a été pris, il sera respecté.

Le Président: Je m'excuse, M. le ministre, mais le temps...

Des voix: ...

Le Président: M. le député de LaFontaine, en principale.


Barème d'indemnisation de certains travailleurs victimes d'accidents du travail

M. Gobé: Merci, M. le Président. Le ministre du Travail a mis sur pied, il y a quelques semaines, un comité chargé de réviser les barèmes d'indemnisation des travailleurs saisonniers, des travailleurs à temps partiel, des travailleurs à contrat déterminé et des travailleurs de la construction victimes d'accidents du travail. On sait, depuis, qu'une levée de boucliers a été faite dans le milieu, 3 000 personnes écrivant au bureau du ministre et le ministre bloquant sa ligne de fax pour éviter de recevoir d'autres lettres.

Ma question, M. le Président, est la suivante: Est-ce que le ministre a l'intention de légiférer ou de réglementer pour baisser ou modifier à la baisse le barème d'indemnisation de ces travailleurs victimes d'accidents du travail?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, en effet, il y a un comité qui a été formé. Nous sommes à étudier les barèmes d'indemnisation des travailleurs qui sont victimes d'accidents du travail et on essaie... J'ai demandé à des experts de me formuler des recommandations dans les meilleurs délais de sorte que ces travailleurs ne soient pas pénalisés.

On a porté à mon attention, par exemple, que certains travailleurs qui sont victimes d'accidents du travail et qui sont indemnisés reçoivent ou recevraient 100 %, 102 % et 104 % de leur salaire normal. Alors, la question qui s'est posée et l'interrogation qui m'a été posée, ça a été de savoir: Est-ce qu'il est juste qu'une telle situation prévale dans des cas aussi précis que ceux qui ont été portés à mon attention? Ce travail-là est en cours, et, lorsque le travail sera terminé, je rendrai public le rapport et j'aviserai. Merci.

Le Président: M. le député.

M. Gobé: M. le Président, est-ce qu'au lieu de reprendre des vieux clichés éculés, antisociaux pour les travailleurs, le ministre pourrait constater qu'en effet il se prépare à toucher aux travailleurs saisonniers, aux travailleurs temporaires, aux travailleurs à temps partiel et aux travailleurs de la construction? Quand il emploie des mots comme 102 %, c'est pour jeter de la poudre aux yeux, parce que ce n'est pas la réalité de ces travailleurs-là.

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, ce n'est pas de la poudre aux yeux, c'est un problème concret qui m'a été posé, et j'estime qu'on a le devoir de donner une réponse rationnelle, une réponse cohérente à une question aussi importante qui implique les travailleurs et qui implique aussi les employeurs. On va agir avec autant de célérité et autant d'efficacité, comme on l'a fait dans le cas du Méridien, puis comme on l'a fait dans le cas de Firestone, et comme on l'a fait dans le cas d'AMF. On a sauvé des emplois, en plus. Quant au dossier précis, vous aurez une réponse le moment venu.

Le Président: M. le député.

M. Gobé: M. le Président, est-ce que le ministre peut s'engager en cette Chambre à ne jamais baisser les indemnités des travailleurs saisonniers, temporaires ou à temps partiel victimes d'accidents du travail?

Le Président: M. le ministre.

M. Rioux: M. le Président, il n'y a pas d'engagement à prendre, à savoir si on va baisser les indemnités. Il y a un problème réel, très concret, qui a été porté à mon attention non seulement par des employeurs, mais aussi un tas de personnes qui sont venues et qui ont dit: Il y a une question qui est extrêmement délicate et qu'on ne peut pas régler à l'improviste ou par improvisation. J'ai donc mis des experts au travail et j'attends les recommandations. Ce n'est pas dans la nature du ministre du Travail d'essayer de pénaliser les travailleurs de l'industrie de la construction ou les travailleurs saisonniers, M. le Président.

Le Président: En principale, M. le député de Jeanne-Mance.


Approbation du plan de garantie sur les maisons neuves

M. Bissonnet: M. le Président, le gouvernement du Québec, dans la foulée du Sommet sur l'industrie de la construction, a modifié la Loi sur le bâtiment, en décembre 1995, afin de mettre en place un plan de garantie obligatoire pour la construction de maisons neuves en faveur des consommateurs du Québec.

Un projet de règlement a été prépublié en janvier 1996, et on se rappellera que la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité était responsable de ce dossier. Et le délai de 40 jours, M. le Président, est terminé depuis le début du mois de mars dernier.

Lors d'une interpellation à une réponse du député de LaFontaine, le ministre du Travail disait ceci, et je le cite: «Un jour, je m'en allais à Matane et j'ai décidé de lire et de décortiquer le plan de garantie. J'ai dit: Je vais toujours bien savoir ce qu'il y a là-dedans avant de le signer. Je l'ai annoté. Et, revenu à Québec, j'ai demandé à mes collaborateurs et j'ai demandé au sous-ministre, j'ai dit: Écoutez, on va faire un petit exercice. Là, pas de jésuite.» Plus tard, il disait: «Ça, c'est ce que j'appelle être proactif. Je n'avais pas le goût de m'en faire passer une petite vite.»

M. le Président, la question est simple: Quand le ministre du Travail va-t-il cesser de s'asseoir sur ses mains et quand va-t-il faire approuver le plan de garantie par son gouvernement?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Rioux: M. le Président, il est exact qu'après avoir pris connaissance du plan de garantie, qui avait sa valeur, très certainement, et qui l'a toujours, d'ailleurs, on a examiné avec beaucoup d'attention la portée de ce plan de garantie pour les employeurs, pour les travailleurs de l'industrie, mais également pour les consommateurs. Et, à l'examen, j'ai pensé qu'il était peut-être utile de voir si véritablement le plan garantissait aux consommateurs – qui mettent 1 000 $ lorsqu'ils interviennent pour faire construire leur maison, et que... Par ailleurs, ce consommateur qui investit pour se construire une maison – et c'est souvent l'investissement de sa vie – a le droit d'être protégé adéquatement.

Alors, avant de rendre officiel le plan de garantie, on a décidé de l'examiner plus à fond et, d'ici quelques semaines, quelques mois, on sera en mesure d'agir et de le mettre en application, M. le Président.

Le Président: Alors, le temps imparti pour la période des questions et des réponses orales est terminé. Je suis prêt maintenant à reconnaître le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député de Pointe-aux-Trembles.


Démission du député de Pointe-aux-Trembles


M. Michel Bourdon

M. Bourdon: J'ai le regret, aujourd'hui, de prendre congé de cette Assemblée, et je veux d'abord remercier de leur confiance les électeurs du comté de Pointe-aux-Trembles regroupés dans les petites patries de Tétreaultville, Montréal-Est et Pointe-aux-Trembles qui m'ont donné et renouvelé leur confiance en 1989 et 1994. Mes premières paroles, c'est pour les remercier et pour saluer, dans la tribune, la femme de ma vie et les femmes de ma vie politique qui s'y trouvent.

(11 h 10)

Je m'en voudrais de quitter cette Assemblée sans saluer le courage de toutes les femmes pas assez nombreuses qui s'y trouvent et, en particulier, le courage de la députée de Sherbrooke et de la députée de Hochelaga-Maisonneuve, qui ont préparé, qui ont défendu et qui, je l'espère, vont faire adopter le projet de loi sur l'équité salariale.

Je m'en voudrais également de ne pas saluer le plaidoyer que fit un soir le député de Viger en faveur de l'énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration, de même que la députée de Saint-François, qui l'a fait adopter par cette Assemblée, et il est toujours, cet énoncé, la politique du gouvernement du Québec.

Parmi les meilleurs souvenirs de ma vie politique figure l'amitié que les collègues des deux bords m'ont manifestée durant les sept années où j'ai eu l'honneur de représenter au meilleur de ma connaissance les électrices et électeurs de Pointe-aux-Trembles.

Et je voudrais également inviter tous les collègues, des deux bords de la Chambre, à venir me saluer cet été dans le beau comté, la région de Charlevoix, que représente si bien en cette Chambre mon ami Rosaire Bertrand. La maison est facile à trouver: au début du village, dans la côte, sur la droite, elle est bleue. Et le tout petit établissement touristique, un coucher-déjeuner – il y en a 60 dans Charlevoix – porte un nom qui est facile à retenir, qui est approprié à la région et à la saison, il s'appelle – j'y serai «busboy» bénévole pour le compte de la présidente-directrice générale de la toute, toute petite entreprise, ma conjointe – il porte un nom facile à retenir et qui convient à la fois à la saison et à la région: la Sainte Paix. Au revoir!

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, j'inviterais le député de Pointe-aux-Trembles à reprendre son siège, puisque je crois que d'autres députés voudraient, à ce moment-ci, peut-être ajouter quelques interventions. M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, au nom du gouvernement et des membres de la députation ministérielle, je voudrais dire un mot très simple et très senti à notre collègue qui nous quitte: Merci. Merci d'avoir donné ses années, ses énergies, ses ressources, son engagement à la vie politique.

Je voudrais rappeler, cependant, qu'il laisse derrière lui des souvenirs vivaces. Le souvenir certainement reconnaissant des gens de son comté, Pointe-aux-Trembles, où il s'est enraciné de façon exemplaire. C'est un député absolument remarquable. Les rapports qu'il a su entretenir avec ses électeurs et ses électrices en ont fait un ami, un membre de toutes ces familles. Nous savons combien il avait le soutien de cet électorat, de ces gens qui sont devenus de ses proches et nous voulons le souligner ici.

L'engagement politique. Bien sûr, c'est quelqu'un qui a vécu dans le sens d'une conviction que l'on connaît, d'une conviction qui est fondamentalement, d'abord, je crois, sociale. C'est quelqu'un qui s'est dévoué aux causes que nous connaissons, animé par la compassion, animé par l'engagement syndical. Moi, je l'ai connu à l'époque où il était très actif à la CSN. Je me souviens de l'avoir croisé aux alentours des auditions de la commission Cliche, où il était un participant actif à ces débats vivants qui animaient alors le Québec. Un homme qui a été d'une constante fidélité pour la cause de la souveraineté, qui a donné, nous le savons, une partie de sa santé pour cela. Il quitte la politique maintenant avec l'admiration de tous pour le courage qu'il a montré dans la façon dont il a vécu l'épreuve de la maladie.

Nous lui souhaitons, M. le Président, une retraite longue, active, une retraite qui le verra entouré de l'amour des siens, du respect de ses collègues et de la population qui a vu entrer, vivre et quitter la politique quelqu'un qui mérite notre reconnaissance et notre admiration.

Je voudrais terminer par deux remarques. D'abord, à l'endroit de la famille et de madame en lui exprimant nos hommages et nos sentiments les plus sincères pour ce beau bout de vie qu'elle pourra faire en compagnie de son mari maintenant que nous le lui rendons. Nous savons qu'entre Les Éboulements, dans ce merveilleux Charlevoix, et Montréal, il y aura des espaces de temps qui seront magnifiques et qui seront meublés de l'amitié.

Deuxièmement, je voudrais dire au député de Pointe-aux-Trembles de se rassurer, de partir en paix, que la Loi sur l'équité salariale sera adoptée et que nous penserons à lui ce jour de l'automne prochain où nous allons, je l'espère, tous voter pour cette loi.

Le Président: Alors, M. le député de Pointe-aux-Trembles, vous devrez vous résoudre à attendre encore quelques instants avant d'avoir la sainte paix. M. le chef de l'opposition officielle.


M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président, le député de Pointe-aux-Trembles avait peut-être peur de ce que je dirais de lui, mais il ne devrait pas s'en faire, parce que c'est avec une réelle tristesse, évidemment, comme chef de l'opposition, chef de ma formation politique, en mon nom et en celui de tous mes collègues, que je prends la parole ici, également, pour souligner, comme on le fait dans toutes ces circonstances-là, le dévouement absolument entier que le député de Pointe-aux-Trembles a consacré et manifesté aux gens de son comté, et notamment aux Montréalais.

Il est montréalais dans l'âme et dans le coeur. Je l'ai vu moi-même, compte tenu des responsabilités que j'exerçais, mettre de côté une partisanerie très vigoureuse, dont nous avons fait l'objet comme membres d'un parti adverse, ici à l'Assemblée nationale, chaque fois qu'il était question des intérêts de Montréal et des Montréalais.

Je souligne, et c'est important de le faire, que le député, comme l'ensemble de la députation doit le faire le plus souvent possible, s'est élevé au-delà des lignes de parti afin de chercher la voie du plus grand intérêt, du plus grand nombre non seulement de ses concitoyens qui lui renouvelaient leur confiance, mais également de tous nos concitoyens de la grande région de Montréal et du Québec tout entier.

Je suis, quant à moi, extrêmement peiné de perdre un plaideur de la diversité et de la variété du milieu montréalais qu'a toujours été le député de Pointe-aux-Trembles. Je pense qu'il a toujours joué un rôle pédagogique à l'endroit d'autres Québécois pour qui le rôle de Montréal est quelquefois un peu mystérieux ou à tout le moins inconnu.

(11 h 20)

Je suis profondément convaincu que c'est une perte, à ce titre-là, que le départ du député de Pointe-aux-Trembles. Je lui souhaite, moi aussi, de recouvrer le maximum de sa santé. Je l'envie un peu, comme nous tous, de pouvoir retrouver des nouveaux moments avec ses intimes, ses parents et ses amis. C'est son choix, nous l'envions, je le répète, mais, encore une fois, je sais qu'il se souviendra longtemps des bons moments qu'il a passés avec nous et nous nous souviendrons, de notre côté, seulement des bons moments.

Le Président: Alors, nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 11 h 21)

(Reprise à 11 h 24)

Le Président: Alors, si vous voulez bien reprendre vos places, nous allons poursuivre la séance. Vous me permettrez, à titre de président et un peu d'arbitre de nos travaux, de souligner que nous venons d'assister à un moment assez exceptionnel dans la vie politique et parlementaire.

Il y a parfois des moments de grâce comme ça qui anoblissent l'institution. On pourra se rappeler, entre autres... et on me permettra de déroger à la règle... On se rappellera de Michel Bourdon comme d'un député qui aura réussi, jusqu'à la fin, à rallier, sur l'essentiel, ses collègues des deux côtés de l'Assemblée. Il l'aura toujours fait avec élégance et avec conviction, et, ça aussi, on s'en souviendra, parce que, au-delà de nos différences, ce qui est important, c'est qu'à des moments donnés on se rende compte que les Québécois et les Québécoises ont besoin d'avoir des représentants qui soient des hommes et des femmes de conviction, de compassion et de courage, et Michel Bourdon a été un de ces députés dont on se souviendra longtemps. Alors, au nom de tous, je voudrais le remercier et lui souhaiter, à lui et à sa famille, beaucoup de chance et beaucoup d'avenir pour la suite des événements sur le bord du fleuve. Merci.

Alors, nous reprenons l'étape des affaires courantes. Il n'y a pas de réponses différées ni de votes reportés.


Motions sans préavis

Nous en sommes aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.


Motion proposant que la commission des affaires sociales procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 35

M. Bélanger: M. le Président, je pense que ça va être d'actualité. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que la commission des affaires sociales procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 35, Loi sur l'équité salariale, à compter du 20 août 1996 et qu'à cette fin elle entende les organismes suivants: l'Association des manufacturiers du Québec, l'Association des industries forestières du Québec, l'Association des fabricants de meubles du Québec, Au Bas de l'échelle, la Centrale de l'enseignement du Québec, la Centrale des syndicats démocratiques, Les Cercles de fermières du Québec, la Chambre de commerce du Québec, la Coalition en faveur de l'équité salariale, la Confédération des syndicats nationaux, La Confédération des caisses populaires, la Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec, le Conseil d'intervention pour l'accès des femmes au travail, Le Conseil québécois du commerce de détail, le Conseil du patronat, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec, la Fédération des femmes du Québec, la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, groupe Jean Coutu, L'R des centres de femmes du Québec, le Syndicat des professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec, le Syndicat de la fonction publique du Québec;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques préliminaires, partagée entre la ministre responsable de la Condition féminine et la porte-parole de l'opposition officielle;

«Qu'une période de 30 minutes soit prévue pour les remarques finales, partagée également entre le groupe parlementaire formant le gouvernement et celui formant l'opposition officielle;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et que l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la ministre responsable de la Condition féminine soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement, à nouveau.

M. Bélanger: Alors, nous en sommes aux avis touchant les travaux des commissions, M. le Président. C'est ça?


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: S'il n'y a pas d'autre motion sans préavis, effectivement nous en sommes aux avis touchant les travaux des commissions.

M. Bélanger: M. le Président, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui la commission des affaires sociales poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle du Conseil législatif;

Que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 23, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions législatives afin de favoriser la protection des activités agricoles, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre indiqué, soit le projet de loi n° 16, Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, et le projet de loi n° 9, Loi abrogeant la Loi sur le Conseil de la conservation et de l'environnement et modifiant la Loi sur les réserves écologiques, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et, si nécessaire, de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que la commission de l'aménagement et des équipements procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur la Société d'habitation du Québec, de 15 heures à 18 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

M. le Président, j'ai un autre avis aussi. Alors, M. le Président, après entente avec l'opposition et en dérogation de l'article 40 des règles de fonctionnement de l'Assemblée nationale en ce qui a trait au délai de sept jours pour la convocation des intéressés, j'avise cette Assemblée que la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude du projet de loi d'intérêt privé n° 201, Loi concernant la Ville de Lévis, le mercredi 19 juin 1996.

Ainsi, les travaux de la commission de l'aménagement et des équipements se dérouleront à la salle Louis-Joseph-Papineau, le mercredi 19 juin 1996, de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, et ce, dans l'ordre suivant: projet de loi n° 231, Loi concernant le Canton d'Orford; projet de loi n° 216, Loi concernant la Régie d'assainissement des eaux usées de Piedmont, Saint-Sauveur et Saint-Sauveur-des-Monts; projet de loi n° 223, Loi concernant la Ville de Sainte-Marie; projet de loi n° 228, Loi concernant la Ville de Mont-Laurier; projet de loi n° 245, Loi concernant la Paroisse de Saint-Joseph-de-Lanoraie; projet de loi n° 246, Loi concernant la Ville de Mirabel; projet de loi n° 201, Loi concernant la Ville de Lévis; projet de loi n° 249, Loi modifiant la Charte de la Ville de Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 40 des règles de fonctionnement concernant le délai de convocation des intéressés lors de l'étude de projets de loi privés en commission?

Des voix: Consentement.

(11 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Consentement.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le député de Robert-Baldwin.

M. Marsan: M. le Président, le 10 juin dernier, j'ai posé une question au ministre de la Santé et des Services sociaux sur le sort d'un jeune patient, d'un jeune patient quadriplégique, Jean-Charles, 21 ans, qu'on veut, sans raison, sortir du pavillon de Longueuil, centre de réadaptation Horizon.

Je sais qu'il ne reste que trois périodes de questions d'ici à la fin de la semaine. Est-ce que vous allez indiquer au ministre de la Santé si on peut avoir une réponse? Je dois vous aviser que la famille aussi attend une réponse dans ce dossier-là.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je vais veiller à ce que la réponse arrive dans les meilleurs délais, M. le Président.


Affaires du jour

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci. Alors, nous abordons maintenant les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.


Motions du gouvernement


Motion de suspension de certaines règles de procédure


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, je présente la motion de suspension des règles suivantes, en vertu des articles 182 et 183 des règles de l'Assemblée nationale...

Des voix: ...

M. Bélanger: «Qu'en raison de l'urgence...»

Des voix: Wo! Wo!

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît! Vous aurez sûrement l'occasion de vous exprimer. Vous aurez sûrement l'occasion de vous exprimer ultérieurement. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, donc:

«Qu'en raison de l'urgence de la situation et en vue de permettre l'adoption des projets de loi suivants: projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation; projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives; projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique; projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux; projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives; projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu;

«Le premier paragraphe de l'article 19, les articles 20 à 22, les mots "ou sur un fait personnel" au quatrième paragraphe et le septième paragraphe de l'article 53, les premier, deuxième, troisième et cinquième paragraphes de l'article 54, les articles 71 à 73, les deuxième et troisième alinéas de l'article 84, les mots "ou à la demande d'un député", au premier alinéa de l'article 86 ainsi que le deuxième alinéa du même article, les deuxième, troisième et huitième paragraphes de l'article 87, les articles 88 à 94, 100 et 101, 105 à 108, 110 à 114, 157, 164 et 165, 175 et 176, les mots "et, le cas échéant, de ses observations, confusions et recommandations" à l'article 177, les articles 194 et 195, 205 à 209, les articles 212, 213, 215, 216, 220, 230, 241, le deuxième alinéa de l'article 244, les articles 245, 246, les mots "et l'adoption du projet de loi est fixée à une séance subséquente" au deuxième alinéa de l'article 248, les articles 249 à 251, le premier alinéa de l'article 252 ainsi que les premier et troisième alinéas de l'article 253, l'article 254, les deuxième et troisième alinéas de l'article 256, l'article 257 et les articles 304 à 307 soient suspendus jusqu'à l'adoption desdits projets de loi et que;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des affaires sociales mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, et dépose son rapport à l'Assemblée malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des institutions mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des affaires sociales mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente des affaires sociales mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Dès l'adoption de la présente motion, la commission permanente du budget et de l'administration mette fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, et dépose son rapport à l'Assemblée, malgré l'article 53;

«Tout député puisse, au plus tard une heure après le dépôt des rapports concernant l'étude détaillée des projets de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, et n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, transmettre au Bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer;

«Dès l'adoption de la présente motion, un ministre ou un leader du gouvernement puisse proposer que l'Assemblée se constitue en commission plénière pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«La durée de l'étude détaillée dudit projet de loi en commission plénière soit fixée à un maximum d'une heure après le début de ses travaux, et ce, malgré les dispositions de l'article 245;

«Un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse, plus d'une fois au cours d'une même séance, proposer de faire rapport à l'Assemblée que la commission plénière n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Le président de la commission plénière, à l'expiration de ce délai, mette aux voix immédiatement, sans débat et sans appel nominal, les articles et les amendements dont la commission n'aurait pas disposé, y compris des amendements que le ministre qui présente le projet de loi n'aurait pas pu proposer en cours d'étude mais dont il saisira le président de la commission à ce moment, le titre et d'autres intitulés du projet de loi et fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultées ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires sociales sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, dont la commission permanente des affaires sociales n'aurait pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des institutions sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, dont la commission permanente des institutions n'aurait pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires sociales sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, dont la commission permanente des affaires sociales n'aurait pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

(11 h 40)

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, dont la commission permanente des affaires sociales n'aurait pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu...»

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, je m'excuse d'interrompre le leader du gouvernement à ce moment-ci. Il s'agit d'une des motions les plus importantes qui puissent être présentées à l'Assemblée nationale du Québec et il y a tellement peu de parlementaires qui veulent s'associer à ce geste odieux que personne n'est ici pour l'écouter.

Le Vice-Président (M. Pinard): Faites sonner les...

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Appelez les députés!

(11 h 42 – 11 h 43)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, messieurs dames les députés, veuillez vous asseoir. Comme je constate que nous retrouvons le quorum en cette Assemblée, je vous prierai, M. le leader du gouvernement, de continuer sur votre motion.

M. Bélanger: Alors, je continue, M. le Président, malgré qu'il n'y ait pas plus de députés de l'opposition.

«La durée du débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, soit fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants; le ministre qui présente le projet de loi puisse exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes;

«Une fois terminé le débat sur la prise en considération du rapport de la commission permanente, les amendements soient mis aux voix successivement sans appel nominal, de la manière indiquée par le président; les articles du projet de loi ainsi amendés, les articles du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, dont la commission permanente du budget et de l'administration n'aura pas disposé, le titre et les autres intitulés du projet de loi et le rapport de la commission amendé ou non soient ensuite mis aux voix sans appel nominal;

«La durée du débat sur l'adoption du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, soit fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 10 minutes pour les députés indépendants et une réplique d'une durée maximale de 10 minutes au ministre qui présente le projet de loi; le vote sur l'adoption du projet de loi soit fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal;

«Au cours des débats sur l'adoption des projets de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives et n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, un ministre ou un leader adjoint du gouvernement puisse faire motion pour qu'il soit envoyé en commission plénière, en vue de l'étude des amendements qu'il indique; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal; en commission plénière, l'étude soit limitée aux amendements proposés; la durée du débat, en commission plénière soit fixée à un maximum de 15 minutes, dont cinq minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, cinq minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, trois minutes pour les députés indépendants et deux minutes de réplique au ministre qui présente le projet de loi, au terme de laquelle les amendements seraient mis aux voix immédiatement et sans appel nominal, y compris les amendements que le ministre qui présente le projet n'aurait pas pu proposer en cours d'étude; après quoi le président de la commission plénière fasse rapport à l'Assemblée sans que soient consultés ni la commission ni l'Assemblée; ce rapport soit mis aux voix immédiatement sans débat et sans appel nominal;

«L'ajournement du débat puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«L'ajournement de l'Assemblée puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Le retrait d'une motion puisse être proposé à tout moment de la séance par un ministre ou un leader adjoint du gouvernement; une telle motion ne requière pas de préavis, ne puisse être amendée ni débattue et soit immédiatement mise aux voix sans appel nominal;

«Outre les dispositions prévues à la présente motion, tous les votes soient faits à main levée, à moins qu'un ministre ou un leader adjoint du gouvernement n'exige un vote par appel nominal;

«L'Assemblée puisse siéger tous les jours, à compter de 10 heures, jusqu'à ce qu'elle décide d'ajourner ses travaux;

«Sous réserve de ce qui précède, les dispositions du règlement particulières aux mois de juin et décembre soient appliquées;

«Les règles ci-haut mentionnées puissent s'appliquer jusqu'à l'adoption des projets de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, et n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement. Est-ce que cette motion est adoptée? M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, vous conviendrez qu'à ce moment-ci, compte tenu qu'il s'agit d'une motion qui touche plusieurs projets de loi qui font l'objet d'étude devant l'Assemblée nationale du Québec, nous sollicitions de la présidence de prendre le temps de prendre connaissance de la motion présentée par le leader du gouvernement, de façon à vous faire des représentations quant à la recevabilité comme telle de ladite motion.

Dans l'intervalle, M. le Président, j'ai de la difficulté à saisir la stratégie gouvernementale qui, encore une fois, vous place – je dois le déplorer, c'est encore votre tour – dans une situation plutôt inconfortable quant à la conduite des travaux de l'Assemblée nationale.

Ce matin, mon collègue le député de Notre-Dame-de-Grâce a soumis à la présidence une question de droit et de privilège, parce que, dans le cadre de l'étude du projet de loi sur les services de garde, qui est un des projets de loi visés par la motion du leader du gouvernement, la ministre aurait, suivant la lecture qu'en a faite la présidence de l'Assemblée nationale, trompé les membres de l'Assemblée nationale. Comme c'était sa possibilité de le faire, le président a décidé de prendre cette question en délibéré, et il nous a indiqué qu'il rendrait sa décision probablement demain matin.

Dans les circonstances, M. le Président, quant à ce projet de loi, nous sommes face à une question de droit et privilège qui, j'insiste, doit être traitée en priorité. Je demande donc à la présidence de vérifier s'il n'y aurait pas moyen de rendre la décision quant à cette question de droit et privilège avant que nous entreprenions ou que nous poursuivions plus loin les travaux. Les circonstances exceptionnelles dans lesquelles nous nous trouvons font en sorte que nous insistons auprès de la présidence. Et je crois ne pas me tromper en disant que la question de privilège a été soumise hier, dans la soirée, à la présidence de l'Assemblée nationale.

Deuxième élément quant à ce même projet de loi, M. le Président, les services de garde, comme tel, c'est un petit peu sans précédent que, lorsqu'on veut bâillonner les parlementaires, on appelle en commission parlementaire des gens à venir communiquer leur point de vue. C'est exactement ce qui se passe au moment où le leader du gouvernement se lève en Chambre pour invoquer l'urgence de bâillonner les parlementaires. Il a fait précéder cette motion d'un avis concernant les travaux des commissions où le projet de loi sur les services de garde va se retrouver en commission parlementaire pour entendre, entre autres, le Regroupement des garderies privées du Québec, également le regroupement des garderies en milieu scolaire.

Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu à ce moment-ci, et le plus rapidement possible, que l'affront qu'on veut faire ou qu'on se propose de faire aux parlementaires ne soit pas, par extension, un affront qu'on fait aux représentants de la population qui pensent que ça peut donner quelque chose de se déplacer pour faire des représentations à l'Assemblée nationale du Québec?

C'est les deux éléments, M. le Président, avant de discuter comme tel de la recevabilité, que je soumets à l'attention de la présidence, de façon à ce que notre institution ne se retrouve pas, encore une fois, dans une situation ridicule qui affecte sa crédibilité de fois en fois, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

(11 h 50)

M. Bélanger: M. le Président, quant au premier point, je pense que vous pourrez en disposer excessivement rapidement. Il y a une décision, à la page 152 de notre recueil, la décision 244.1, qui avait été rendue par Jean-Pierre Saintonge. La question était: «Est-ce qu'un délibéré de la présidence concernant une question de privilège relative à un projet de loi encore à l'étude devant l'Assemblée empêche une commission de procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi?» Alors, la décision a été rendue, M. le Président, et je pense qu'elle est fort éloquente: «Le président rendra sa décision dès qu'il aura terminé l'analyse de la question, et nul ne peut présumer de la décision qui sera rendue. Entre-temps, le processus législatif doit suivre son cours normal. Le président ne possède aucun pouvoir – c'est ça qui est important, M. le Président – lui permettant d'interrompre les travaux législatifs puisque l'Assemblée est souveraine en cette matière.» Donc, je pense que, avec cette décision-là, M. le Président, on vient de disposer du premier élément.

Quant au deuxième élément, M. le Président, tant que cette motion n'est pas adoptée, cette motion de suspension des règles, à ce moment-là, les commissions continuent à siéger. Moi, j'ai bon espoir que, avec un peu de collaboration de l'opposition officielle... Il y a un débat au moins de deux heures, M. le Président, sur la motion de suspension des règles. En deux heures, je peux vous dire qu'on peut en entendre, des gens, on peut entendre les gens qui se sont déplacés pour être entendus dans la commission. Avec un peu d'efforts, M. le Président, de la part de l'opposition officielle, on pourra même faire l'étude détaillée du projet de loi en commission parlementaire, et, à ce moment-là, une partie de ce qui est inclus dans la motion sera réalisée selon le cours normal. Je pense qu'on ne peut pas souhaiter quelque chose de mieux.

Je pense, M. le Président, que vous voyez à quel point on fait confiance aux parlementaires et, même, on donne encore une chance à l'opposition officielle de travailler. Sur ce projet de loi là, elle pourra, en commission parlementaire, M. le Président, travailler. On lui demande uniquement de faire son travail, de regarder attentivement les projets de loi qui vont être en commission parlementaire. En travaillant rapidement, en travaillant bien, M. le Président, on pourra faire l'étude détaillée du projet de loi. On pourra, à ce moment-là, revenir dans cette Chambre en disant: M. le Président, regardez, on a fait notre travail, et, maintenant, cette partie qui était incluse dans cette motion de suspension des règles, eh bien, aura été réalisée dans le cours normal. Alors, je pense, au contraire, que c'est un signe de bonne foi de la part de ce gouvernement vis-à-vis des parlementaires, et je suis certain que les parlementaires de l'opposition officielle se sentent maintenant interpellés et sont maintenant prêts à travailler en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, sur les deux points. M. le Président, vous conservez toute l'autorité et toute la latitude qui est la vôtre quant au moment de rendre la décision. La décision qui vous a été citée par le leader du gouvernement n'affecte en rien, compte tenu des nouvelles circonstances devant lesquelles nous nous retrouvons présentement et qu'ignorait la présidence au moment où elle a indiqué, ce matin, qu'elle préférait rendre sa décision demain... Vous possédez des éléments de faits nouveaux. Si vous le jugez à propos, vous conservez cette discrétion de nettoyer le débat sur la question de droit et privilège soit en l'accordant soit en le refusant. Mais ce n'est pas les ordres qui peuvent vous venir du leader du gouvernement qui devraient, à ce moment-ci, influencer votre décision, ce sont les faits devant lesquels nous nous retrouvons et le fait que nous sommes saisis d'une motion de suspension des règles normales de fonctionnement de l'Assemblée nationale. D'ailleurs, dans son plaidoyer, le leader du gouvernement a parlé d'un fonctionnement normal. C'est le même leader qui invoque le fonctionnement anormal de l'Assemblée au moment où nous vous soumettons cette question.

M. le Président, le deuxième élément. La commission sur le projet de loi n° 11 sur les services de garde a été convoquée par le leader du gouvernement pour siéger jusqu'à 24 heures, ce soir. Il sollicite, à ce moment-ci, la collaboration de l'opposition pour ne pas que les gens qui s'y présentent aient l'impression, comme les parlementaires, d'être bâillonnés ou ridiculisés. Il l'a convoquée jusqu'à 24 heures, ce soir. S'il veut, à ce moment-ci, retirer de ce qu'on appelle sa motion d'urgence, de son bâillon le projet de loi en question, les parlementaires de même que les gens qui se retrouvent devant la commission auront compris que le leader est transparent et sérieux. Sinon, ils pourront saisir tout à fait un autre message, qui est plus conforme à ce qui se trame vraiment dans son esprit à ce moment-ci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader de l'opposition. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, vous comprendrez qu'il est difficile pour moi de retirer cet avis de convocation ou de le retirer, même, de ma motion, puisque le leader de l'opposition l'a lui-même annoncé dans son communiqué de presse, ce matin, à l'effet que j'allais suspendre les règles relativement à ce projet de loi. Il a annoncé à tout le monde, à la presse, au public en entier, que j'allais le faire. Alors, vous comprendrez, donc... Je pense que, au moins, il est constant dans ce qu'il dit, M. le Président, le leader de l'opposition, il ne plaide pas la surprise, parce qu'il était déjà au courant des projets de loi qui allaient être suspendus. Il n'avait pas la motion, c'est un fait, mais, donc, feindre la surprise, je pense que ça aurait été un peu gros, M. le Président.

Donc, vous comprendrez... Non, je ne retire rien, et j'ai confiance, au contraire, M. le Président, que les membres de cette Assemblée, les membres en commission parlementaire vont faire un travail efficace, et, à ce moment-là, j'ai bon espoir qu'on pourra arriver avec un travail bien fait en commission parlementaire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président, je serais tenté de succomber aux arguments du leader du gouvernement s'ils ne portaient pas si à faux. Hier, M. le Président, oui, j'ai émis un communiqué à l'effet que le gouvernement s'apprêtait à aller fouiller dans les poches des contribuables et s'apprêtait à suspendre les règles quant à six projets de loi qui permettraient des rentrées de fonds.

Le leader n'a pas cru bon de le faire dans six cas, il l'a fait dans cinq cas. Ce que je lui demande présentement, compte tenu qu'il a convoqué des gens, au moment où nous nous parlons et au moment où nous discutons d'une motion de suspension des règles, pour la crédibilité – s'il ne tient pas à celle du gouvernement, qu'il fasse au moins semblant de tenir à celle de l'Assemblée nationale – que les gens qui sont en bas puissent savoir que ça va être suspendu, que ce qu'ils ont dit, ça ne compte pas, que vous êtes en train de disposer d'une question de droit et de privilège sur le fait que les membres ont été trompés et que ça n'a pas de bon sens de faire siéger une commission qui entend des gens au moment où vous êtes en – comment je pourrais dire? – délibéré sur des décisions importantes à rendre.

Maintenant, comme il y a cinq projets de loi, M. le Président, qui sont inclus dans ladite motion, sinon six, là... six projets de loi, tel que vous l'avez annoncé, M. le Président, qui sont inclus dans ladite motion et que la motion s'applique à chacun des projets de loi qui touchent des domaines différents – il y en a deux en santé, de mémoire, services de garde, éducation, ministère du Revenu et Justice – et que la motion, telle que lue rapidement par le leader du gouvernement, touche ces six projets de loi dans leur spécificité et qu'il n'y a aucun lien ni de parenté ni d'autre chose dans ces projets de loi, nous voulons prendre le temps, sur la motion de recevabilité, d'évaluer à son juste mérite la recevabilité de la motion.

Dans les circonstances, le délai accordé par la présidence – et je cite comme précédent – n'est habituellement pas trop long lorsque ça touche un projet de loi. Je vous demande de tenir compte que, dans ce cas-ci, nous faisons face à six motions comme telles et que nous avons l'intention... Combien de temps, M. le Président? Il est présentement 11 h 57, 11 h 58, si l'horloge a été réparée. Nous en avons à peu près pour 45 minutes, M. le Président.

M. Bélanger: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: ...alors, brièvement. Je comprends le leader de l'opposition d'être très minutieux sur la formulation, la manière qu'est écrite une motion de suspension des règles. J'ai même, M. le Président, songé sérieusement à lui payer des droits d'auteur parce que vous comprenez que, au cours des neuf années du gouvernement libéral, tellement de motions de suspension des règles nous avaient été présentées qu'à ce moment-là je me demandais laquelle choisir. Est-ce que c'était celle du député de Brome-Missisquoi, celle du député de Portneuf, à l'époque, qui avait suspendu 26 projets de loi en même temps, dans une même motion de suspension des règles? Le gouvernement libéral avait fait ainsi.

Alors, évidemment, je n'ai pas pris ce modèle, M. le Président. Je n'ai pas pris ce modèle, vous comprendrez. Je comprends pourquoi il est soucieux, M. le Président, de vouloir vérifier si j'ai bien copié, si je me suis bien inspiré, à ce moment-là, de la plume, qui était très rapide et très légère, du député de Brome-Missisquoi.

Maintenant, quant au moment de suspension, oui, M. le Président, on peut suspendre... une quinzaine de minutes, je pense que ce serait suffisant, surtout que, comme l'a si bien dit le député de Brome-Missisquoi, M. le Président, 15 minutes, ce serait amplement suffisant. Il l'avait déjà annoncée, la motion de suspension des règles, il la connaissait. Alors, à ce moment-là, je pense qu'il avait pu se préparer pendant la nuit pour savoir quels étaient les arguments qu'il allait nous servir.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, très brièvement, M. le Président. Je suis certain qu'il n'a pu s'inspirer des motions présentées par le leader du gouvernement qui était le député de Brome-Missisquoi à l'époque, parce que, chaque fois, nous le faisions, lorsque nous étions obligés de le faire, par projet de loi. C'est d'ailleurs un des arguments que j'aurai à vous présenter tantôt. Je n'ai pas reçu, contrairement à ce que vient de m'indiquer le leader du gouvernement, la motion de suspension des règles qu'il vient de présenter à la Chambre. C'est la première fois que j'en prends connaissance comme tel, M. le Président. Donc, je n'ai pas pu l'évaluer et l'étudier.

M. le Président, si on se fie au précédent du leader actuel du gouvernement, chaque fois qu'il présente une motion, il commet une erreur grave. Nous en avons six, présentement, M. le Président, il s'agira de les repérer.

Le Vice-Président (M. Pinard): Une dernière intervention, M. le leader du gouvernement?

M. Bélanger: M. le Président, Ô mémoire, tu t'envoles! 17 décembre 1992, quatre projets de loi, le leader de l'opposition officielle, le député de Brome-Missisquoi. Vérifions, M. le Président, vérifions avant de dire des choses.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, suite aux discussions que j'ai entendues de part et d'autre, je crois, M. le leader de l'opposition, connaissant votre compétence et votre expérience, qu'un temps de 30 minutes serait le juste milieu entre le 15 et le 45, ce qui pourrait probablement nous sembler...

M. Paradis: M. le Président, deux minutes la page! Ça n'a pas de bon sens.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors...

M. Bélanger: On suspend.

Le Vice-Président (M. Pinard): ...je vais vous demander...

M. Bélanger: Suspendez, M. le Président.

(12 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): ...d'y aller au niveau de la rapidité et célérité. Je pense que vous êtes capable de nous en sortir pour un délai de 30 minutes.

Concernant la décision sur le droit et privilège, j'ai l'intention tout simplement de laisser à la présidence, à M. Charbonneau, qui en a pris bonne note lors des affaires courantes, le soin de délibérer et le soin de préparer sa décision concernant la question de droit et de privilège qui a été soulevée par le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Alors, à ce stade-ci, nous allons suspendre jusqu'à 12 h 30.

M. Paradis: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Nous allons nous soumettre à votre ordre. Nous reviendrons en cette Chambre à 12 h 30 pour vous faire part de l'analyse que nous avons faite. Et, si cette analyse est incomplète, à ce moment-là, nous aurons des représentations additionnelles à vous faire.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons jusqu'à 12 h 30.

(Suspension de la séance à 12 h 1)

(Reprise à 12 h 34)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, M. le leader de l'opposition. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Kelley: Merci, M. le Président. Je veux soulever une question de privilège dans cette Chambre. Moi, je viens d'apprendre qu'il y avait, dans la motion qui a été présentée par le leader du gouvernement, question d'inclure le projet de loi n° 11, la loi qui touche l'organisation des services de garde.

Vu que je suis le porte-parole de l'opposition officielle, je vais, ici dans l'Assemblée, poursuivre le débat sur cette question très importante, mais, au même moment, je suis également convoqué dans la salle du Conseil législatif pour entendre des groupes qui ont été convoqués hier pour discuter effectivement du même projet de loi n° 11. Ce sont des groupes qui se sont déplacés, ce matin, de Montréal pour venir ici, pour proposer des modifications, pour suggérer des choses aux législateurs quant à l'amélioration du projet de loi n° 11. Alors, je veux également suivre le débat de l'autre côté de la Chambre.

Alors, je pense que mes droits, mes privilèges, comme député, sont remis en question parce que je ne peux pas être à deux places au même moment. Alors, je pense que mes droits ne sont pas respectés.

Je soumets que, soit le leader du gouvernement doive enlever le projet de loi n° 11 de la motion qui a été présentée ici – je ne comprends pas pourquoi il se trouve là-dedans, parce qu'on n'a pas eu l'occasion, en commission parlementaire, de discuter article par article de ce projet de loi qui est très important pour l'avenir des services de garde du Québec – ou, il faut changer les avis de la Chambre concernant les commissions parlementaires pour réaménager le temps qu'il faut, parce que, comme porte-parole de l'opposition officielle, M. le Président, je ne peux pas être à deux places au même moment.

I think the question here is very important, Mr. Speaker. I think what is going on is a complete lack of respect of groups that have come from Montreal, groups that have come here on good faith to testify, to propose changes to Bill 11, the bill that touches the organization of day-care services in the Province of Québec. There were groups that were shunt a week ago by the minister. They finally get their chance to speak, but at the same moment we are going to be invoking closure on it. I think that I would like to follow the debate in this House concerning the motion of closure, I cannot do that and listen to the groups in the «salon du Conseil législatif» at the same time.

So, I think my rights, my privileges as a member of this House have indeed been violated by the two motions that are on the table.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Mais, à ce stade-ci, je suis immédiatement en mesure de vous stipuler qu'actuellement la motion de suspension des règles n'est pas acceptée, au moment où on se parle. Donc, je vous invite à poursuivre vos travaux en commission parlementaire, parce que, comme député, je ne vois pas en quoi votre privilège de parlementaire, votre droit de parole peut être brimé ici alors que vous travaillez actuellement en commission parlementaire sur la loi n° 11. Ici, actuellement, il n'y a pas de débat de fond qui peut se faire tant et aussi longtemps que la motion de suspension des règles n'est pas acceptée par l'ensemble, par la majorité des parlementaires. Alors, la question de privilège, je me dois de la rejeter.

Alors, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Le député vous a indiqué très clairement, dans la question de privilège qu'il a soulevée, qu'il ne pouvait être à deux places en même temps. Vous avez complètement raison de dire que la motion n'est pas encore déclarée recevable, M. le Président, comme telle; nous en sommes à cette étape-là. Mais le député a le droit de participer à l'entièreté des débats au salon bleu. Il a le droit de participer à la question de la recevabilité comme telle. Il a le droit de plaider sur les arguments de fond qui sont soulevés, et, lorsque vous le renvoyez en commission parlementaire, vous le privez de ce droit et de ce privilège qui est celui du député de l'Assemblée nationale.

On ne peut pas faire porter l'odieux de la mauvaise planification des travaux du leader du gouvernement à un député qui tente, en toute conscience – il l'a fait tout au long de la commission parlementaire et il souhaite continuer de le faire... Mais il ne peut pas être à deux endroits en même temps. Au moment même où nous débattons de cette question de privilège, son privilège est affecté. Les gens sont en bas, en commission parlementaire, le député souhaiterait être là, mais il souhaiterait également être ici pour faire des représentations sur la recevabilité comme telle de la motion présentée par le leader du gouvernement.

Il est placé, à cause du manque de planification des travaux du leader du gouvernement, dans une situation impossible, qui atteint le droit et le privilège d'un membre de l'Assemblée nationale de participer à un débat sur un projet de loi qui, dans les circonstances, M. le Président, je l'indique, fait qu'il est le porte-parole de l'opposition officielle en la matière, qui le brime davantage, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, premièrement, votre décision est rendue. On ne peut contester votre décision. Vous avez rejeté la question de privilège telle que proposée par le député de Jacques-Cartier. Donc, je pense qu'on est en train de contester votre décision ouvertement, sans vergogne.

Maintenant, M. le Président, autre chose que je voudrais rappeler, c'est que, quand j'étais dans l'opposition – j'ai été, moi aussi, dans l'opposition – le député de Brome-Missisquoi n'a jamais arrêté les commissions parlementaires de siéger pendant qu'on était en train de parler de la recevabilité d'une motion de suspension des règles. Alors, là, la vierge offensée, aujourd'hui, M. le Président, je pense qu'on repassera!

(12 h 40)

Autre chose, M. le Président, je n'ai pas terminé mes remarques. Au niveau de la recevabilité, M. le Président, il est de coutume que ce sont les leaders qui, au niveau de la recevabilité, font de l'argumentation, et c'est à votre discrétion de nous écouter relativement à la recevabilité. Ce n'est pas un droit qui est conféré à tous les membres de l'Assemblée nationale de débattre de la recevabilité. C'est une autre chose que du temps de parole, M. le Président, sur un débat. Mais, sur la question de la recevabilité, c'est: quand vous vous jugez assez bien informé, vous arrêtez à ce moment-là de nous écouter et vous dites: Je suis assez bien informé, je rends ma décision. Il n'y a pas de privilège de l'Assemblée nationale à débattre sur la question de la recevabilité. Sur un débat de temps de parole, oui, mais pas sur la recevabilité. Et c'est tout à fait prématuré, comme vous l'avez si bien expliqué, la question de privilège du député de Jacques-Cartier. La motion n'est pas adoptée, et votre décision, M. le Président, elle est rendue. Donc, ne vous laissez pas contester ni intimider, M. le Président, relativement à votre décision qui a été rendue.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je ne sais pas si je devrais, à ce moment-ci, invoquer les dispositions de l'article 71 de notre règlement et nous pourrions, après ça, en revenir à la question de privilège. Je ne veux pas avoir préséance sur mon collègue. C'est à vous de décider. Mais le leader du gouvernement vient, je pense, peut-être pas de mauvaise foi, peut-être parce qu'il n'a pas une connaissance suffisamment approfondie du déroulement des travaux, en tout cas pas la même connaissance qu'en avait celui qui l'a précédé à ce poste... M. le Président, j'affirme, de ce côté-ci, qu'à chaque fois que je me suis retrouvé dans l'obligation, et ce n'était pas souvent, de suspendre les règles de l'Assemblée, jamais je n'ai convoqué en même temps des commissions parlementaires pour entendre des gens et ridiculiser ainsi l'Assemblée nationale et les gens qui étaient convoqués.

Maintenant, si le leader veut s'excuser immédiatement ou procéder à des vérifications, je n'en ferai pas une question de fait personnel. Sinon, M. le Président, j'en ferai une question de fait personnel.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, si le leader de l'opposition officielle... Je comprends, il était peut-être un peu préoccupé par d'autres choses qu'il vérifiait dans ses notes personnelles. Je n'ai jamais dit qu'il avait convoqué en même temps qu'une motion de suspension des règles...

Des voix: ...

M. Bélanger: Non, non. Qu'il m'écoute comme il faut. Moi, ce que j'ai dit, M. le Président, c'est qu'il n'a jamais suspendu des commissions parlementaires alors qu'il y avait une motion de suspension des règles qui était présentée. C'est exactement ce que j'ai dit. Et c'est vrai qu'il n'a jamais suspendu, en général, les commissions parlementaires quand il y avait une motion de suspension des règles qui était présentée. C'est exactement ce que j'ai dit, M. le Président.

Alors, à ce moment-là, je pense qu'en réécoutant, et il pourrait même aller voir les galées, s'il le veut, il pourra le faire, il pourra bien voir que ce que j'ai mentionné spécifiquement, c'est que jamais le leader de l'opposition, alors qu'il était leader du gouvernement, a présenté une motion de suspension des règles, il n'a jamais suspendu les commissions parlementaires. C'est ce que j'ai dit.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui. Il me fait plaisir, M. le Président, à ce moment-ci, et je ne veux pas en faire une question personnelle avec le leader du gouvernement... que nous suspendions quelques minutes pour vérifier le texte et la transcription.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous suspendons...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): ...suspendons les travaux quelques instants pour permettre au leader de l'opposition d'aller vérifier les galées. Alors, M. le leader de l'opposition.

(Suspension de la séance à 12 h 43)

(Reprise à 12 h 54)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir. Alors, si vous le permettez, M. le leader de l'opposition, j'aurais quelque chose à vous lire.

Oui, tout de suite. Merci.

Alors, concernant les discussions que nous avons eues antérieurement, je tiens à vous mentionner que les affirmations du leader du gouvernement, qu'elles soient fondées ou non, ne peuvent fournir un prétexte à un rappel au règlement. Comme la présidence n'a pas à décider de la véracité des arguments de part et d'autre, je considère que l'incident qui a conduit à la suspension de nos travaux est clos et, puisque le leader de l'opposition officielle a manifesté le désir de soulever une question de fait personnel, je lui rappellerai les dispositions de l'article 71, qui exigent un avis d'une heure avant les affaires courantes de la prochaine séance.

Alors, comme les travaux de l'Assemblée arrivent maintenant à tout près de 13 heures, nous allons suspendre les travaux jusqu'à 15 heures cet après-midi. Merci.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

(Reprise à 15 h 10)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir s'il vous plaît.

Alors, j'ai devant moi une motion de suspension des règles. Je serais prêt...

Une voix: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute s'il vous plaît. Je serais prêt à me retirer pour décider de la recevabilité de cette motion.

Une voix: M. le Président, avant que...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, donc, je serais prêt à entendre quelques commentaires avant de me retirer pour décider de la recevabilité.

M. Lefebvre: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition.

M. Lefebvre: Oui, M. le Président, avant que vous n'abordiez l'étape de la discussion de la motion de suspension des règles de M. le leader du gouvernement, à savoir, quant à sa première étape, la recevabilité, je voudrais revenir sur le débat qui avait cours à l'Assemblée au moment de la suspension de nos travaux, à 13 heures.

Je veux vous rappeler les faits très rapidement parce que ce n'était pas vous, M. le Président, qui étiez sur le banc. À une question de violation de droit ou de privilège soumise par mon collègue le député de Jacques-Cartier et au moment où on débattait de cette question de violation de droit ou de privilège, mon...

M. Bélanger: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement, pour une question de règlement.

M. Bélanger: M. le Président, vous avez rendu une décision à l'effet qu'il n'y avait pas de manquement au privilège quant à la question soulevée par le député de Jacques-Cartier. La présidence a été ferme à l'effet que la décision avait été rendue, à l'effet qu'il n'y avait pas de privilège de député qui avait été, de quelque façon que ce soit, brimé relativement à ce qui avait été fait par le gouvernement.

M. Lefebvre: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, écoutez, je n'ai pas entre les mains une décision dans ce sens actuellement, mais... Alors, si vous voulez, brièvement, parler de cette question-là, puis on verra après si on se réfère...

M. Lefebvre: M. le Président, vous, je sais que vous êtes pas mal plus patient que le leader du gouvernement peut l'être, mais vous comprendrez qu'on est sur une procédure très, très particulière qui est une motion de suspension des règles. Il y a des incidents accessoires qui se sont produits avant la suspension, à 13 heures, et je veux vous les expliquer, puis vous prendrez vos décisions. C'est vous qui êtes le maître du jeu ici.

Au moment où on discutait d'une question de privilège, voici que mon confrère, mon collègue de Brome-Missisquoi, a soulevé, lui, une question de fait personnel sur une intervention du leader du gouvernement. Et, M. le Président, vous relirez les galées que j'ai sous les yeux, dès le moment où mon collègue de Brome-Missisquoi a soulevé la question de fait personnel, la présidence s'est considérée saisie de la question à un point tel que le leader du gouvernement est intervenu sur la question de fait personnel. Mon collègue de Brome-Missisquoi, victime du fait soulevé par la question de fait personnel, lui aussi est intervenu, et la présidence a suspendu les travaux pour vérifier les galées.

Alors, en revenant, à 12 h 55, votre collègue, M. le Président, a contredit – c'est là-dessus que je veux soulever mon questionnement – c'est ce qu'on prétend de notre côté, sa propre décision en toute bonne foi, puisqu'il a indiqué à l'opposition et au député de Brome-Missisquoi que, s'il voulait soulever une question de fait personnel, il devait le faire en utilisant les prescriptions de l'article 71, à savoir donner un avis d'une heure précédant la prochaine séance des affaires courantes; et je vous rappelle que c'est demain matin.

Alors, ce qu'on plaide de notre côté, M. le Président: la présidence s'est considérée comme étant, dès le moment où ça a été soulevé, saisie de la question de fait personnel du député de Brome-Missisquoi. Le leader du gouvernement, à la première occasion, n'a pas fait objection. Et, ceci étant dit, vous devrez permettre à mon collègue de justement vider la question de fait personnel dès maintenant, M. le Président.

Alors, c'est ce que je vous soumets. Et, si vous n'êtes pas d'accord avec ce premier raisonnement et si mon collègue de Brome-Missisquoi ne peut pas, sur cette argumentation-là, dès maintenant débattre de sa question de fait personnel, je vous le dis tout de suite, j'ai une autre argumentation.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors rapidement, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. M. le Président, afin d'éviter tout débat ou toute polémique sur ce qui aurait pu se passer relativement aux propos que j'ai tenus et ayant un très grand respect de la Chambre et voulant que cette Chambre puisse aller le plus directement possible au vif du sujet qui est la motion qui est présentement devant nous, je retire toute parole que j'aurais pu prononcer à l'effet que le leader de l'opposition aurait pu, pendant qu'il était leader du gouvernement, présenter une motion de suspension des règles et faire siéger en même temps une commission qui faisait l'étude d'un projet de loi qui était mentionné dans la motion de suspension des règles.

Donc, à ce moment-là, si... Je ne pense pas que je l'aie dit, mais, si jamais, dans mes propos, M. le Président... Vous savez, des fois, nos propos dépassent notre pensée ou notre pensée dépasse nos propos. Alors, à ce moment-là, je retire tout simplement ces propos qui auraient pu induire la Chambre en erreur.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, je vais quand même statuer sur la question de faire appel aujourd'hui au règlement pour justifier une intervention sur un fait personnel. J'ai la décision qu'avait rendue le vice-président ce matin, et il a bien fait mention que, pour soulever une question de fait personnel, il faut se référer à l'article 71, qui dit très bien qu'il faut avertir la présidence une heure avant les affaires courantes.

Alors, si nous regardons la situation dans laquelle nous nous trouvons présentement, il n'y a rien qui empêche cela de se faire. Il y a encore plusieurs heures avant la période des affaires courantes, et puis je ne vois aucune raison de déroger au règlement à ce moment-ci. Alors, je crois qu'il faut respecter le règlement sur une question de fait personnel parce qu'autrement nous allons à tout bout de champ, à tout moment intervenir et interrompre le cours de nos débats en faisant appel, si vous voulez, à une question de fait personnel. Le règlement est très clair sur ça, et c'est demain aux affaires courantes qu'on pourra en discuter et préciser.

M. Lefebvre: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint de l'opposition, pour une dernière intervention sur cette question-là.

M. Lefebvre: Oui. Je comprends difficilement votre intervention. Alors que le leader du gouvernement nous donne raison sur les faits, reconnaît s'être trompé dans son attaque, entre guillemets, à l'égard de mon collègue de Brome-Missisquoi, vous, M. le Président, vous revenez finalement sur les faits en les interprétant de façon erronée. M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Asseyez-vous, s'il vous plaît, M. le leader. Je ne suis pas intervenu pour interpréter quelque fait que ce soit, je suis intervenu pour interpréter le règlement, et le règlement est clair: quand on veut soulever une question de fait personnel, on le fait par un avis à la présidence une heure avant les affaires courantes. C'est une interprétation de règlement et non pas une interprétation de fait.

Écoutez, sur cette question-là, le débat est clos, le débat est clos sur la référence au fait personnel. C'est demain matin que nous pourrons en débattre conformément au règlement. Je n'accepte plus l'intervention...

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition, si c'est pour revenir sur la question de fait personnel, je n'accepte pas que vous interveniez.

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Est-ce que c'est sur ce point-là?

M. Paradis: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le deuxième alinéa?

M. Paradis: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, dans le deuxième alinéa, ça exige aussi un avis par écrit à être remis à la présidence avant la période des affaires courantes. Brièvement sur l'article 69.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Sur l'article 69, j'ai pris connaissance des propos du leader du gouvernement, et je pense que les propos du leader du gouvernement auraient clos le débat. Le seul but de mon intervention à ce moment-ci, c'est que je ne veux pas que se créent dans des périodes de tension à l'Assemblée nationale des jurisprudences qui pourraient pour l'avenir nuire aux députés des deux côtés de l'Assemblée nationale du Québec.

Effectivement, la décision de la présidence, et j'avais indiqué, lorsque je me suis levé, l'article 71 du règlement... Mais, dans sa sagesse, le président qui occupait votre siège a plutôt préféré considérer ma question de fait personnel comme une question que je pouvais lui adresser immédiatement et il s'en est saisi immédiatement. Je ne voudrais pas qu'à l'avenir la présidence soit empêchée, lorsqu'un député se lève, de pouvoir l'entendre immédiatement et obligée de lui imposer la règle, de façon absolue, d'intervenir le lendemain, M. le Président. Si ces propos vous satisfont, s'il n'y a pas de jurisprudence de créée, je suis satisfait des propos du leader du gouvernement dans les circonstances et je considère, quant à cet incident, l'événement clos.

Maintenant, si la présidence insiste pour qu'il y ait une décision à l'effet qu'en aucune circonstance un député ne peut se lever et avoir immédiatement le droit, compte tenu de la discrétion exercée par la présidence de l'Assemblée nationale, de rectifier une question de privilège ou de fait personnel – il y a toujours un peu d'interprétation ou de confusion quant à la juxtaposition de ces articles au règlement – je me devrai, M. le Président, d'invoquer un autre article du règlement, à ce moment-ci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a un autre article du règlement qui dit qu'à un moment donné un député peut demander d'intervenir et faire de brefs commentaires pour rectifier les propos qu'on aurait tenus à son égard; ça, je crois que c'est maintenu, il faut le maintenir, vous avez raison. Alors, sur ce plan-là, je crois que je suis tout à fait d'accord avec vous, il faut maintenir cette possibilité-là, mais il y a un article qui le prévoit, à ce moment-là.

(15 h 20)

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, très bien, nous revenons donc à la motion de suspension des règles.

M. Paradis: Non, non. Sur la question de privilège du député de Jacques-Cartier, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Jacques-Cartier. Bon, brièvement encore...

M. Paradis: Oui.

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...si on peut s'entendre rapidement sur ça.

M. Paradis: Oui. Sur la question de privilège du député de Jacques-Cartier qui a été soulevée et bien que le leader du gouvernement ait plaidé qu'il y avait une décision de rendue, vous avez maintenu qu'il n'y avait pas de décision de rendue comme telle. Le député de Jacques-Cartier se retrouve dans une position impossible et intenable quant à ses privilèges, présentement. Il est le porte-parole de l'opposition officielle quant au projet de loi pour lequel on demande la suspension des règles présentement et au même moment on l'oblige à siéger en commission parlementaire.

Je vous rappelle deux précédents très récents, M. le Président. Le cas du ministre de la Santé et des Services sociaux dans le projet de loi n° 116, dernièrement, où le ministre de même que son critique officiel étaient dans l'impossibilité d'être à deux endroits en même temps. La présidence n'a pas eu à rendre de décision parce que le débat procédural – si vous me permettez l'expression – a duré quelque deux heures, et on s'est retrouvé dans une situation factuelle où le ministre et le critique de l'opposition officielle ont pu se retrouver au salon bleu. Je plaide cette situation de fait comme étant un précédent où on n'a pas empêché le ministre ou le critique de l'opposition d'être présents au salon bleu lorsque a été discuté le projet de loi n° 116 comme tel, qui concerne la possibilité de fermer des établissements de santé.

Encore plus récemment, hier ou avant-hier, M. le Président, dans le cadre d'un autre projet de loi, le leader du gouvernement – c'était hier soir – pour éviter une décision présidentielle...

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Bélanger: Oui, M. le Président. Je me dois d'interrompre ici le leader de l'opposition. Mes souvenirs sont, je crois, quand même assez frais et assez exacts. Quand la question a été soulevée par le député de Jacques-Cartier, le vice-président qui vous précédait a bien dit que c'était complètement prématuré. Ce ne sont peut-être pas les termes exacts, je n'ai pas le verbatim et les galées de ce qui a été dit, mais la motion de suspension n'est pas adoptée, donc, à ce moment-là, M. le Président, on est à l'étape de la recevabilité... on n'a même pas encore commencé la recevabilité.

Et ce que j'avais dit, M. le Président, c'est que, sur l'étape de la recevabilité, normalement, ce sont des courts échanges de part et d'autre qui sont faits de la part des leaders, et il n'y a pas de droit absolu à tous les députés de prendre la parole sur une question de recevabilité. C'est une discrétion du président d'entendre des arguments sur la recevabilité. Et, quand il se considère assez bien informé, à ce moment-là, il se retire et il déclare la recevabilité. Donc, il n'y avait pas de question de privilège qui touchait, qui affectait, en rien... M. le Président, avec tout le respect que je vous dois, il me semble que le vice-président qui vous précédait a bien déclaré qu'il n'y avait pas, à ce stade-ci, de question de privilège.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je voudrais que vous terminiez brièvement, monsieur. Comme ça, je vais pouvoir intervenir pour me prononcer sur cette situation-là. Brièvement, pour terminer.

M. Paradis: Oui, M. le Président. En plus du projet de loi n° 116 où il y avait eu erreur dans la planification des travaux, mais qui a été corrigée par les plaidoiries de part et d'autre en cette Chambre, hier, M. le Président, on s'est retrouvé dans une situation identique. Et, à ce moment-là, pour éviter une décision de la présidence quant au projet de loi n° 30 qui touchait la Société d'habitation du Québec, le leader a choisi de suspendre les travaux en commission pour permettre au ministre d'être présent en Chambre – il s'agissait en l'occurrence du ministre des Affaires municipales et de son critique – et le tout a pu procéder correctement, sans que les droits des parlementaires ou les privilèges des parlementaires soient affectés.

M. le Président, de la situation de fait qu'on a connue à l'occasion de l'étude du projet de loi n° 116 à la situation qu'a reconnue très explicitement – parce qu'hier il a accepté de corriger son erreur – le leader du gouvernement en faisant en sorte que la commission ne siège pas, on a placé les députés dans une situation de pouvoir être présents au salon bleu.

Le dernier argument, M. le Président, concerne celui qui est apporté par le leader du gouvernement. Sur la recevabilité comme telle de la motion, tous les députés ont un droit de parole. Vous n'êtes pas obligé de les reconnaître, M. le Président. Vous devez, en toute circonstance et suivant les dispositions de l'article 2 de notre règlement, juger de la pertinence de les reconnaître.

Je vous soumets que, dans le cas du projet de loi qui est visé, celui des services de garde, où on a convoqué des groupes pour les entendre, les privilèges du député sont d'autant plus importants qu'il se propose d'intervenir quant à la recevabilité même de la motion. Et, si vous jugez sa question de privilège irrecevable, il sera privé du droit que vous pourriez lui reconnaître dans la discrétion qui vous appartient d'intervenir. Dans des situations délicates, je vous rappelle les dispositions de l'article 2, la doctrine et la jurisprudence: la présidence se doit de trancher en faveur des droits et des privilèges des membres de l'Assemblée, particulièrement lorsque nous sommes face à une motion qui vise directement à suspendre ces droits et privilèges, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, cette question a été soulevée cet avant-midi. Il y a eu des interventions de part et d'autre, et la décision a été rendue par le vice-président cet avant-midi. Et, à ce moment-ci, j'endosse tout à fait cette décision qui a été prise antérieurement par le vice-président cet avant-midi. Alors, brièvement...

M. Paradis: Si la décision est rendue, M. le Président, est-ce à dire que le député de Jacques-Cartier se retrouvera dans l'impossibilité d'intervenir sur la recevabilité d'une motion dans laquelle il est directement concerné comme député de l'Assemblée nationale, comme porte-parole de sa formation politique, parce qu'il est en même temps, suivant un ordre du leader du gouvernement, obligé d'être en commission parlementaire?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ça, que voulez-vous, c'est la situation humaine qui est ainsi. Il faut souvent choisir entre plusieurs droits, dans la vie. Il y a des situations où on ne peut pas courir plusieurs lièvres; il s'agit d'ajuster...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ça, que voulez-vous, c'est à chacun à gérer l'exercice de ses propres droits. Moi, ici, au nom du règlement, je ne peux pas déclarer l'intervention comme de droit et privilège d'un député brimé. En fonction du règlement, il n'y a pas matière à reconnaître une violation de droit et privilège, et, sur ce plan, j'entérine la décision du vice-président qui était ici ce matin.


Débat sur la recevabilité

Alors, nous revenons à la motion de suspension des règles. Je serais prêt à entendre quelques commentaires sur la recevabilité de cette motion avant de me retirer pour décider de la recevabilité, ce qui ne devrait pas prendre trop de temps. Alors, brièvement, M. le leader de l'opposition.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président. Sur la recevabilité de la motion, j'aurais une série d'arguments que je vous demande de considérer dans le temps qui vous servira comme délibéré, M. le Président. Lorsque l'on présente une motion de suspension des règles de l'Assemblée nationale du Québec, on vise à priver les membres des deux côtés de la Chambre, pas simplement l'opposition officielle, mais les membres qui ont été élus dans chacune des 125 circonscriptions électorales, de leur droit reconnu par le règlement de l'Assemblée nationale de se prononcer à chacune des étapes. Dans le cas qui nous concerne, les étapes varient, M. le Président. Les projets de loi n'en sont pas tous à la même étape...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le leader de l'opposition, on est à l'étape de la recevabilité et non pas d'un débat sur le fond en vue d'accepter ou de rejeter. Alors, c'est évident que votre intervention, actuellement, fait en sorte que vous remettez en question la règle qui dit qu'on peut suspendre. On pourra en débattre le jour où on fera la réforme du règlement, mais ce n'est pas le temps d'en débattre aujourd'hui. La pertinence de cette possibilité de suspendre les règles, c'est ailleurs qu'on doit en discuter. Le règlement est là, et vous savez très bien que, pour décider de la recevabilité, on ne peut pas se poser la question à savoir si la règle est pertinente. Elle est là, elle rend possible.

Et, deuxièmement, on ne peut pas argumenter sur l'urgence. Vous savez que l'urgence, ce n'est pas un critère dont on doit tenir compte dans la recevabilité. Ça peut faire l'objet du débat pour amener les députés à voter contre la motion ou pour la motion, mais le règlement est très clair, le président n'a pas à prendre en compte l'urgence pour décider de la recevabilité. Je veux que cela soit très clair pour que vous puissiez intervenir sur ce qui peut mettre en cause la recevabilité et non pas la pertinence ou non de la motion.

(15 h 30)

M. Paradis: M. le Président, si vous aviez continué d'écouter l'argumentation que je vous soumets, je vous soumets qu'elle est irrecevable pour six motifs différents. Vous m'avez indiqué qu'un des motifs que je voulais plaider, qui n'était pas le premier, est irrecevable à sa face même. Je vous souligne qu'il faut être très prudent lorsqu'on utilise ces termes et qu'on occupe le fauteuil de la présidence parce que vous seriez le premier président, en 30 et quelques sessions que je siège à l'Assemblée nationale du Québec, qui refuse de considérer les arguments d'urgence. La présidence s'est prononcée à plusieurs reprises sur les arguments d'urgence, mais jamais la présidence n'a refusé d'entendre les arguments et a toujours considéré chacune de ces situations extraordinaires comme une situation extraordinaire. Autrement dit, il n'est pas question d'ajouter au bâillon souhaité par le leader du gouvernement un bâillon sur les arguments qui peuvent être soulevés, bien que, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Il ne faut pas confondre, M. le leader de l'opposition, entre une motion d'urgence qui est présentée... Là, à ce moment-là, le président a à se prononcer sur l'urgence. Quand il s'agit d'une motion de suspension des règles où on allègue l'urgence, le président n'a pas à se prononcer sur l'urgence. Alors, ça, que voulez-vous, c'est très clair, on laisse à l'Assemblée, au terme d'un débat, de décider de l'urgence ou non en votant pour ou contre la motion. Et je crois qu'il est temps que, dans nos discussions, nous en revenions, si vous voulez, au respect des règles. Et c'est clair que le président n'a pas à prendre en compte l'urgence pour décider de la recevabilité. Alors, ça, que voulez-vous, c'est pour ça que j'aimerais que vous vous en teniez à des défauts de forme ou des points comme ça, comme on a déjà eu à le faire ici. On a déjà rejeté la recevabilité au nom d'un défaut de forme, mais ce n'est jamais au nom, si vous voulez, d'une prise de position à savoir si, oui ou non, il y a urgence. Le président n'a pas à se prononcer sur cela quand il s'agit d'accepter la recevabilité d'une motion de suspension des règles. Et, ça, je crois qu'il est temps qu'on agisse selon les règles pour éviter, si vous voulez, qu'on traite de tout en n'importe quel temps.

M. Paradis: M. le Président, vous avez à la fois tort et raison. Vous avez raison, M. le Président, sur la série de décisions qui ont déjà été rendues par vos prédécesseurs. Je pourrais vous référer à la décision du 18 juin 1987, rendue par Pierre Lorrain dans des circonstances identiques... ou semblables, M. le Président, parce qu'il n'y a jamais de circonstances identiques. Mais M. Lorrain s'est prononcé après avoir entendu les arguments de part et d'autre, il n'a pas statué avant d'entendre les représentations.

Je pourrais également...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader, je ne dis pas qu'il n'y a pas eu toutes sortes de choses dans les argumentations qui ont été apportées de part et d'autre pour tenter de justifier la recevabilité d'une motion de suspension des règles, mais ce que je vous dis, moi, c'est que vous avez beau discuter deux heures sur l'urgence, jamais je ne prendrai en considération l'élément d'urgence pour décider de la recevabilité. Donc, vous allez perdre votre temps et faire perdre notre temps si vous discutez de l'urgence en vue de m'éclairer sur la recevabilité de la motion, je n'en tiendrai pas compte. Il faut que ce soit clair au point de départ. Il est temps qu'on ait des règles assez claires et qu'on les suive.

M. Paradis: M. le Président, je vous indique qu'en statuant comme vous le faites vous contrevenez à la décision que je viens de mentionner, du président, M. Lorrain. Vous contrevenez également... parce que les autres présidents faisaient face également à un amas de jurisprudence, mais n'ont jamais accepté d'abdiquer le droit de la présidence de se prononcer et d'entendre des arguments. Le 19 décembre 1988, ça devait être difficile pour M. Lorrain, il avait déjà entendu les même arguments et il a rendu une décision dans le même sens. Le 19 décembre 1988, deux fois dans la même journée, M. le Président. Si vous me dites qu'on n'a plus le droit de soumettre des arguments, que les décisions de la présidence sont déjà préétablies, moi, je vais me conformer, M. le Président. Je vais me conformer, mais je vous dis que vous brisez là une tradition parlementaire importante.

J'ai cinq autres arguments d'irrecevabilité à vous soumettre, M. le Président. Si vous me dites que les cinq autres arguments sont déjà préjugés et que la présidence a déjà décidé de la recevabilité de la motion...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Encore là, vous transformez tout ce qui s'est dit, là. Je vous ai dit, en ce qui concerne l'urgence – je n'ai pas mentionné d'autres points – que je n'accepte pas de prendre en considération l'urgence de la question pour en décider la recevabilité. Donc, votre plaidoyer sur l'urgence est un plaidoyer inutile dans les circonstances. Si vous avez d'autres arguments, faites-les valoir, mais pas sur l'urgence.

M. Paradis: M. le Président, je me dois de respecter votre décision mais de la déplorer et d'indiquer qu'il s'agit d'un précédent en cette Assemblée nationale du Québec. J'ai d'autres éléments d'irrecevabilité à faire valoir, j'espère que l'attitude adoptée par la présidence sur le premier élément, qui constitue un précédent, ne s'appliquera pas...

M. Bélanger: M. le Président, je suis un peu... M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: ...je suis un peu, je vous l'avoue, offusqué, scandalisé. On sent – j'espère que je me trompe dans l'interprétation des propos du leader de l'opposition – une intimidation relativement à la présidence. Il déplore votre attitude. Moi, je ne me permettrais jamais de déplorer une attitude de la présidence de l'Assemblée nationale. J'ai beaucoup trop de respect pour cette institution de l'Assemblée nationale pour tenter de quelque façon que ce soit de vous intimider comme le fait présentement le leader de l'opposition.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous savez, on apprend à avoir la couenne assez dure dans nos fonctions, et puis, de part et d'autre, j'essaie d'être au-delà, si vous voulez, des intimidations. Alors, quand je crois que je dois prendre des décisions pour le bon fonctionnement de l'Assemblée, de quelque part que ça vienne, je n'hésiterai jamais à faire valoir mon point de vue pour le bon fonctionnement de l'Assemblée. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, j'aurais préféré que le leader du gouvernement se lève et nous dise: Il y a beaucoup de précédents où les présidents ont fait fi de ce qui s'est passé avant. À ce moment-là, j'aurais pu considérer avec beaucoup plus de respect, sur le plan du droit parlementaire, les propos qu'il a prononcés. S'il n'en a pas cité, c'est sans doute qu'il n'en existe pas.

M. le Président, plus d'un projet de loi dans la même motion. Lorsque le président Charbonneau a été assermenté, il nous a parlé, quant à l'application du règlement, que nous connaissons, de l'Assemblée nationale du Québec, d'une nouvelle ère, d'une ère où on ferait en sorte que les droits et privilèges des parlementaires... Et vous pouvez retourner à la transcription des propos prononcés par le président de l'Assemblée nationale, à l'occasion de son intronisation, quant aux droits et privilèges des membres que lui, comme nouveau président... Une sinon sa première fonction était de s'assurer du respect des droits et des privilèges de ses membres.

Je vous soumets que, dans le cadre de ces propos de la présidence conjugués avec les dispositions de l'article 2 de notre règlement, de la jurisprudence et de la doctrine constante, le fait d'inclure plus d'un projet de loi nous éloigne de la lettre et de l'esprit des dispositions qui permettent, dans des circonstances exceptionnelles, à un leader du gouvernement de suspendre les règles de bon fonctionnement de l'Assemblée nationale du Québec. Le prédécesseur de l'actuel leader avait commencé une habitude de présenter, par projet de loi, une motion différente, ce qui, tout en brimant les droits des parlementaires, faisait en sorte que, malgré tout, on pouvait, dans des circonstances difficiles, exprimer un certain point de vue.

M. le Président, le leader du gouvernement va vous citer des précédents où il y a eu d'autres leaders en d'autres circonstances qui ont choisi, je pense, dans une circonstance exceptionnelle, plus de 20 et quelques projets de loi...

Des voix: Vingt-huit.

M. Paradis: ...28, et si vous lisez les traités d'analyse jurisprudentielle, vous allez voir que ce geste a été condamné par à peu près tous les observateurs de la scène du droit parlementaire comme tel, et je vous soumets respectueusement qu'il ne s'agit pas d'un exemple à suivre, qu'il s'agit d'un exemple dont il faut s'éloigner et que la tradition que nous avions commencé à établir de proposer une motion de suspension des règles par projet de loi se voulait davantage respectueuse de la lettre, de l'esprit du règlement, de la jurisprudence, de la doctrine, et j'insiste sur le dernier élément qui est nouveau, M. le Président, de l'énoncé de la présidence de l'Assemblée nationale lors de son intronisation. Lorsqu'on souhaite respecter les parlementaires, on commence par démêler les choses et par ne pas mêler les éléments.

(15 h 40)

Troisième point – troisième, je pourrais dire 2a, parce que vous ne voulez pas entendre parler de l'urgence – que j'aimerais soulever, M. le Président, c'est que, si vous déclariez recevable la motion présentée par le leader du gouvernement, vous contreviendriez par le fait même à une décision que vous venez de rendre. Le leader du gouvernement, par son action, par son initiative, place la présidence dans une situation qui devient intenable. En effet, vous avez, comme le règlement vous le permet, refusé de reconnaître la question de fait personnel que je vous ai adressée. Vous remarquerez, à la lecture de la motion du leader du gouvernement, que ce dernier suspend les dispositions qui m'autorisent et me permettent de soumettre une question de fait personnel.

Donc, M. le Président, si vous reconnaissez la motion ou la recevabilité de la motion, la décision que vous venez de rendre devient inapplicable dans les faits, parce que le leader du gouvernement a choisi de suspendre les dispositions qui traitent des questions de fait personnel. Donc, je serai dans l'impossibilité de suivre la décision que vous avez rendue en cette Chambre et de me conformer à ce que je considère bien respectueusement être un ordre de la présidence. Ou bien le leader du gouvernement retire ces dispositions de la motion ou la motion telle que présentée par le leader du gouvernement est irrecevable, et, lorsqu'une partie de la motion est irrecevable, la jurisprudence est constante...

M. Bélanger: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Oui. Je voudrais peut-être, à ce moment-ci, sauver un peu d'énergie pour le leader de l'opposition, puisque, la question de privilège qui avait été posée par le député de Jacques-Cartier, vous en avez disposé. Maintenant, quant à la deuxième question de fait personnel qu'avait soulevée à ce moment-là le leader de l'opposition, j'ai retiré mes propos, et le leader a dit que l'incident était clos. Donc, on parle d'une question tout à fait hypothétique, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader, si vous voulez poursuivre. J'attendais que vous ayez tout terminé pour prendre en considération les choses, là. Vous pouvez intervenir.

M. Paradis: Bien, M. le Président, c'est habituellement la façon dont on fonctionne à l'Assemblée nationale. Vous prenez des notes, le leader prend des notes, il note les arguments. Lorsque l'argumentation d'une partie est terminée, il y a réplique. S'il choisit à la place d'intervenir – et je ne peux pas l'empêcher de le faire – le débat risque de perdurer longuement et on va s'embarquer dans des débats de procédure dont on ne sortira plus. Mais, là, il s'agit du choix personnel du leader du gouvernement comme tel.

Je fais simplement remarquer, parce qu'il a fait son intervention, que vous avez quand même rendu une décision et que vous m'avez invité à soumettre ma question de fait personnel demain matin, une heure avant la tenue des travaux. Et vous remarquerez que ces dispositions ont été suspendues par le leader du gouvernement. Donc, si sa motion est recevable, l'ordre que vous m'avez donné devient inapplicable, et je vous soumets respectueusement que les décisions de la présidence doivent prévaloir sur les voeux pieux du leader du gouvernement.

M. le Président, quatrième élément comme tel – ou troisième, si vous ne considérez pas l'urgence – les dispositions de l'article 245 de notre règlement stipulent que «le temps de parole de 20 minutes dont disposent les membres de la commission vaut pour chaque article, alinéa ou paragraphe d'un projet de loi, chaque amendement ou sous-amendement ou chaque article qu'on propose de modifier ou d'ajouter dans une loi existante. Ce temps de parole peut être utilisé en une ou plusieurs interventions.»

M. le Président, cet article n'a pas été remplacé, comme tel, dans la motion de suspension des règles telle que proposée par le leader du gouvernement.

Une voix: ...

M. Paradis: L'article 245, M. le Président. Il est de coutume que, lorsqu'on soustrait l'application d'un article, on le remplace par une autre disposition, et, là-dessus, la motion que vous avez devant vous, très complexe, ne contient pas de disposition spécifique.

Ce sont là, M. le Président, les motifs directs d'irrecevabilité, mais à ces motifs directs d'irrecevabilité s'ajoutent – et je le plaide subsidiairement dans le cas où la présidence rejetterait les divers arguments apportés par l'opposition – des questions auxquelles il nous faut répondre avant de s'engager dans un débat où nos règles habituelles ne s'appliquent plus.

M. le Président, le premier argument concerne un des projets de loi qui fait l'objet de la motion de suspension des règles; il s'agit du projet de loi n° 37. Vous remarquerez que, dans son scénario apocalyptique – il faut l'appeler comme il se doit, M. le Président – le leader du gouvernement prévoit que les amendements... ou que l'opposition, ou que les membres de l'Assemblée nationale, parce que ce n'est pas simplement réservé à l'opposition, ont une heure pour présenter des amendements, comme tel.

Compte tenu que le projet de loi n° 37, comme tel, va être le premier qui va être appelé, aucun des députés ne va pouvoir jouir de l'heure qui est prévue dans la motion du leader du gouvernement pour apporter ses amendements quant au projet de loi n° 37. Je pense, et je ne veux pas interpréter faussement la motion du leader du gouvernement, que, pour les autres projets de loi, considérant que le projet de loi n° 37 est le premier appelé, le problème pratique ne se posera pas.

Mais je pose le problème à la présidence et aux membres de l'Assemblée nationale à ce moment-ci. Si on commence immédiatement et qu'on dispose d'une heure, on va se retrouver dans une situation qui deviendra impossible: Comment, si elle juge cette motion recevable, la présidence va-t-elle faire en sorte que la motion du leader du gouvernement puisse devenir applicable?

Également, accessoirement, M. le Président, si vous décidiez de reconnaître, comme tel, la recevabilité de la motion de suspension des règles, un autre problème se pose quant à l'application de l'article 220 du règlement de l'Assemblée nationale: «Le vote se fait à main levée ou, si cinq députés l'exigent, par appel nominal.»

Je vous soumets, M. le Président, que, pendant le peu de temps qui a été mis à notre disposition, nous avons fait des recherches. Il s'agit de la première fois. Parce qu'on a maintenu ce vote par appel nominal au niveau de l'adoption, à l'étape de l'adoption du projet de loi, mais on l'a enlevé à toutes les autres étapes. Je soumets bien respectueusement, M. le Président, qu'il s'agit, à moins qu'on puisse m'indiquer le contraire, d'un précédent. Habituellement, même dans des situations où on bâillonne les députés, où on brime leur droit de parole, on tente de conserver le minimum qui est le droit de vote par appel nominal. Je concède qu'il a été conservé à l'étape de la troisième lecture, à l'étape de l'adoption comme telle, mais il a été soustrait à toutes les autres étapes. Je ne pense pas, M. le Président, que nous soyons dans un concours: Qui est le pire des leaders en cette Chambre, qui brime davantage les droits, qui en enlève davantage? Si, dans d'autres circonstances, les leaders ont choisi de le maintenir, M. le Président, il s'agissait peut-être d'un geste de sagesse.

Maintenant, on n'aurait pas d'objection, de ce côté-ci de la Chambre, si le leader du gouvernement le souhaite, à ce que des corrections soient apportées aux deux derniers éléments que nous avons mentionnés: la question de l'article 220 et la question que nous avons soulevée quant au projet de loi n° 37, l'heure durant laquelle les amendements peuvent être proposés, pour ne pas que, si vous jugiez la motion recevable, nous nous retrouvions dans une impasse.

Maintenant, M. le Président, nous aurions souhaité que vous considériez nos quatre premiers arguments. Vous nous avez indiqué que vous en considéreriez trois; nous vous prions de les recevoir avec toute l'ouverture que vous devez manifester en pareille circonstance et en ayant à l'esprit, encore une fois, les dispositions qui doivent vous guider dans des circonstances difficiles où on enlève des droits de vote aux députés, qui sont des circonstances de privilégier les droits et privilèges des membres de l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Merci, M. le leader de l'opposition. M. le leader du gouvernement, brièvement, si vous voulez répliquer.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui, M. le Président. D'entrée de jeu, j'ai vraiment hâte qu'un président puisse faire de la jurisprudence relativement à la définition de quelques minutes accordées pour des questions de recevabilité. Parce qu'on le sait que, depuis longtemps – j'ai déjà occupé votre siège – on a déjà débattu de la question des quelques minutes sur la recevabilité. J'ai hâte qu'à un moment donné on ait de la jurisprudence pour que «quelques minutes», ce soit entre cinq à 10 minutes ou de 10 à 15 minutes, mais qu'on puisse se situer. Parce que, souvent, les quelques minutes... Vous savez, 240 minutes, c'est quelques minutes aussi par rapport à 3 000 minutes. Alors, ça, j'ai hâte, à un moment donné, M. le Président, qu'on ait peut-être des points là-dessus.

(15 h 50)

Autre chose. Je voudrais, très brièvement, prendre quelques points qui ont été mentionnés par le leader de l'opposition. Notion d'urgence: on n'a pas à invoquer, au niveau de la recevabilité, la notion d'urgence. Vous aviez absolument raison de rendre la décision que vous avez rendue. L'urgence, ce seront les députés qui, après le débat de deux heures, décideront s'il y a urgence ou pas et qui voteront en faveur ou contre la motion de suspension des règles.

Maintenant, quant à l'argument qu'on met plusieurs lois dans une même motion de suspension des règles, le leader de l'opposition dit que, finalement, le leader qui me précédait avait été inspiré par une nouvelle ligne à l'effet qu'il y ait une motion de suspension des règles par projet de loi. Je crois, à ce moment-là, M. le Président, que le député de Brome-Missisquoi, qui était leader du gouvernement, avait été mal inspiré; il n'avait pas voulu donner cette impulsion nouvelle au leader du gouvernement, puisque lui-même avait mis quatre projets de loi dans une motion de suspension des règles qui portait sa signature, qui était peut-être une de ses premières, M. le Président.

Et je vous rappellerai aussi le sombre moment dans notre histoire parlementaire où le gouvernement libéral, en 1992, avait, dans une même motion de suspension des règles, mis 26 projets de loi; 26 projets de loi, M. le Président, c'est comme si je mettais les trois quarts de mon feuilleton... du feuilleton de cette Chambre – puisqu'il ne m'appartient pas, M. le Président – des feuilletons de l'Assemblée nationale dans une motion de suspension des règles. Ce gouvernement, il l'a fait, M. le Président. Le gouvernement précédent, libéral, il l'a fait. Et le député de Brome-Missisquoi, M. le Président, était à l'époque ministre, était à l'époque député, et il a voté allégrement en faveur de cette motion de suspension des règles qui avait, à ce moment-là, mis le bâillon sur 26 projets de loi. Donc, vous comprendrez, M. le Président, que c'est un peu avec surprise que je le vois aujourd'hui plaider ce courant nouveau, cette évolution des décisions de la présidence relativement à ce point.

Maintenant, quand j'entends, M. le Président... Le député de Brome-Missisquoi dit que, quand on suspend une règle, il faut mettre une règle qui est supplétive. C'est plutôt l'inverse. C'est que, pour remplacer un article du règlement, il faut d'abord le suspendre. C'est l'inverse. Alors, donc, on peut suspendre un article sans nécessairement mettre une règle supplétive qui va être exactement dans le même sens. D'ailleurs, c'est ce qu'on a fait, car en suspendant, évidemment, la définition du temps de parole des députés en commission parlementaire, nous avons cependant délimité l'enveloppe globale qui est impartie aux députés relativement aux débats en commission parlementaire. Donc, à ce moment-là, la règle supplétive, elle existe, et c'est tout à fait permis, M. le Président.

Je suis intervenu tout à l'heure pendant le discours du député de Brome-Missisquoi relativement à la question de fait personnel, question de privilège. Les questions de privilège n'ont pas été suspendues, M. le Président, parce que ça fait partie de la Loi sur l'Assemblée nationale, et on ne pourrait pas suspendre des questions de privilège, parce que, un privilège d'un membre de cette Chambre, ça lui appartient toujours. Question de fait personnel: on a le droit de suspendre les règles relativement aux questions de fait personnel parce que ça fait partie du règlement de l'Assemblée nationale.

Donc, ceci étant dit, M. le Président, je vous soumets respectueusement, pour avoir suivi le mieux que j'ai pu l'exemple et les exemples donnés à la fois par le député de Brome-Missisquoi et ses prédécesseurs, l'ancien député de Portneuf, je crois que notre motion de suspension des règles, l'ancien... Maintenant, aussi, on m'a plaidé... Ah! j'ai trouvé ça très touchant, je vous avoue humblement, M. le Président, d'entendre le député de Brome-Missisquoi argumenter relativement... et faire les louanges du député de Joliette, son bon ami. On dénotait un certain esprit de mélancolie, de nostalgie dans sa voix, qui m'a profondément touché. Cependant, vous comprenez, M. le Président, autres temps, autres moeurs, on pourrait dire. Bien, non, M. le Président, je suis, je pense, ce que M. le député de Joliette a toujours été, c'est-à-dire être un leader du gouvernement responsable et présenter une motion de suspension des règles qui est tout à fait conforme à nos règlements.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le leader du gouvernement.

Nous allons suspendre nos travaux quelques minutes; je vais aller délibérer et revenir rendre ma décision sur la recevabilité.

(Suspension de la séance à 15 h 55)

(Reprise à 16 h 32)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Décision du président sur la recevabilité

Alors, je dois rendre ma décision concernant la recevabilité de la motion de suspension des règles. Je vais commencer par vous lire l'article 182 – je pense que c'est bon de temps en temps de relire le premier paragraphe: «Le leader du gouvernement ou un ministre peut proposer la suspension de toute règle de procédure prévue aux paragraphes 2° et 3° de l'article 179.» C'est-à-dire que, au paragraphe 2°, il s'agit du règlement et des règles de fonctionnement de l'Assemblée et, au paragraphe 3°, il s'agit des ordres que l'Assemblée adopte. Alors, vous voyez que c'est une règle qui donne finalement au leader du gouvernement une marge de manoeuvre très considérable et très grande. C'est ainsi que l'Assemblée nationale a voulu en disposer dans le passé.

Brièvement, je reprends les quelques points qui ont été soulevés. Tout d'abord le fait qu'il y ait plusieurs projets de loi visés par la suspension des règles. Il n'y a rien dans le règlement qui peut fonder un empêchement qu'il y ait plusieurs projets de loi, et la jurisprudence a profité de cette largesse du règlement pour en abuser, même, dans certains cas.

Alors, pour ce qui est de la question du fait personnel, l'impossibilité de faire appel, si vous voulez, à cette disposition qui permet à quelqu'un de soulever une question de fait personnel. Tôt ou tard, il y aura une période des affaires courantes et le fait personnel pourra toujours être soulevé à ce moment-là. L'exercice d'un droit peut, dans certaines circonstances, être reporté sans nécessairement être supprimé.

Pour ce qui est maintenant de la référence à l'article 245. L'article 245 a été supprimé et on a dit que cet article n'avait pas été remplacé par une règle substitutive. J'ai regardé attentivement et je considère que, pour restreindre le débat en commission plénière à une heure, il fallait suspendre l'article 245.

Maintenant, pour ce qui est de la loi 37, on a argumenté que les députés n'auraient pas la possibilité de présenter des amendements dans le cadre de l'étude article par article ou dans le cadre de la prise en considération du rapport. Alors, je ferais remarquer ici que le règlement dit ceci: Dans le cas d'une commission permanente, la journée du dépôt du rapport d'une commission permanente, le député a jusqu'à 22 heures pour déposer des amendements qui seront intégrés au rapport lors de sa prise en considération.

Dans le cas de la loi n° 37, elle n'a pas été référée à une commission permanente, elle a été référée à une commission plénière. Et, dans le cas d'une commission plénière, entre le dépôt du rapport et le vote, il n'y a pas de temps pour pouvoir introduire des amendements dans le rapport. C'est dit clairement qu'on soumet immédiatement au vote l'adoption du rapport. Alors, ce qui se passera dans le cas de la loi n° 37 correspond à cette disposition du règlement. Et tout député pourra, dans le cadre de l'étude détaillée en commission plénière, faire les amendements qu'il voudra faire, comme il peut le faire présentement dans le cas d'une commission permanente.

Pour ce qui est de la suppression de l'article 220, le vote nominal, le choix entre nominal et à main levée, ça, que voulez-vous, ça fait partie de la prérogative de la règle générale. Le gouvernement a décidé de supprimer ce choix pour, dans certains cas, décider que ça sera à main levée et, dans d'autres cas, à vote nominal. Le règlement accorde cette prérogative au leader du gouvernement.

Alors, sur la base de ces interprétations, si vous voulez, du règlement, j'accepte et je déclare recevable la motion de suspension des règles. Alors, maintenant nous allons...

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Question de directive, M. le...

M. Paradis: Oui, une question de directive et une question de précision.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien.

M. Paradis: Deux. M. le Président, lorsque vous mentionnez qu'il y aura un jour une période où nous pourrons invoquer des questions de fait personnel, j'imagine que, lorsque vous avez pris cette décision et connaissant, fort de votre expérience, le fonctionnement de nos travaux – motion de suspension des règles aujourd'hui, un projet de loi privé appelé demain en commission parlementaire – vous avez pris en considération – je fais simplement vous le souligner – qu'il est possible que le moment où je pourrai soulever cette question soit le mois d'octobre 1996. C'était la remarque que je voulais faire, et je voulais m'assurer que la présidence avait pris cette hypothèse en sérieuse considération.

Deuxième élément, quant à l'article 245 comme tel, tout en nous soumettant à votre décision, simplement une précision. Les temps de parole prévus à l'article 245 sont de 20 minutes pour chacun des députés. Compte tenu, comme vous l'avez mentionné dans votre décision, que le débat total est d'une durée d'une heure et qu'il n'y a pas, sauf erreur, de temps de parole de spécifié à l'intérieur de la motion déposée par le leader du gouvernement, quel va être le temps de parole alloué à un député?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ce sera comme dans le cas d'un débat restreint: on verra à s'entendre avant la discussion et l'intervention sur le partage du temps de l'heure. Alors, finalement, c'est qu'on indique que c'est un débat restreint, et on fera comme dans des cas de tout débat restreint, on s'entendra sur la répartition du temps de cette heure-là. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, vous comprendrez que, devant votre décision, nous nous inclinons.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, si vous voulez, nous allons suspendre quelques minutes pour s'assurer du partage du temps du débat restreint de deux heures, comme c'est l'habitude, avec les deux leaders, leaders du gouvernement et de l'opposition. Ce ne sera pas très long, on pourra voir ça rapidement. Très bien. Alors, nous suspendons pour quelques minutes.

(Suspension de la séance à 16 h 39)

(Reprise à 16 h 48)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous nous sommes entendus sur le partage du temps pour le débat restreint de deux heures: il y aura cinq minutes de réservées pour chacun des députés indépendants et le reste du temps, les 105 minutes restantes sont réparties à parts égales entre les deux groupes parlementaires. Il n'y aura pas de limite au temps de parole à l'intérieur de ces enveloppes et il y aura un transfert du temps non utilisé par un groupe ou un député indépendant, partagé entre les autres groupes.

Alors, je suis prêt à entendre le premier intervenant.

M. Dumont: Question de directive.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Question de directive, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. M. le Président, je voudrais savoir: Est-ce que le partage du temps est une décision de votre part, et la façon de répartir le temps non utilisé, ou est-ce que c'est le résultat d'une entente entre les leaders?

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est une décision du président. Maintenant, c'est la coutume, avant de rendre cette décision, que le président consulte les deux groupes parlementaires, mais la décision reste finalement au président. M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Je vous remercie de le spécifier. Et simplement pour indiquer aux membres de cette Chambre que, quand nous sommes à l'intérieur d'une motion de suspension des règles de l'Assemblée nationale, les ententes deviennent impossibles.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement, pour votre intervention.

M. Bélanger: Oui, je vais commencer mon intervention.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien, je vous cède la parole.

M. Dumont: Question de règlement. Je croyais que c'était sur une question de règlement.

(16 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Dumont: Oui. Sans vouloir remettre en cause, loin de là, votre décision, M. le Président, sur la répartition du temps de parole, il m'apparaît plus ou moins surprenant que le temps de parole qui est remis aux députés indépendants soit redivisé – et, ça, c'est une procédure pour laquelle les précédents sont assez récents – soit remis entre les groupes parlementaires et qu'un député indépendant... Et là je prends le cas qui nous occupe ici aujourd'hui, que, par exemple, la formation que je représente à l'Assemblée nationale et pour laquelle j'ai été élu ait un temps de parole qui dépende des chicanes qui peuvent survenir au sein des autres partis; dans le cas présent, du parti gouvernemental.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Monsieur, le règlement est très clair, ici: «À la suite d'une réunion avec les leaders [...] le président répartit le temps de parole entre les groupes en tenant compte de la présence de députés indépendants.» Alors, c'est le président, mais il doit, en vertu du règlement, au préalable tenir une réunion avec les leaders. Mais c'est le président qui, finalement, est là pour protéger les droits de l'ensemble des parlementaires et c'est le président qui prend la décision.


Débat sur la motion

Alors, M. le leader du gouvernement, pour votre intervention, je vous cède la parole.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Oui. Alors, M. le Président, je voudrais tout simplement, en commençant mon intervention sur cette motion de suspension des règles, rappeler au député de Rivière-du-Loup que, si on regarde le nombre de députés ministériels divisé ou multiplié par l'enveloppe que nous avons et qui est dévolue aux députés ministériels, ça fait quoi – divisé, c'est ça – ça fait environ une minute et demie pour chaque député ministériel. Donc, à ce moment-là, s'il fallait donner aux députés indépendants ce que le député de Rivière-du-Loup soumet, ce serait donner plus de droits aux députés indépendants qu'aux députés ministériels ou aux députés de l'opposition, qui n'auront pas non plus le temps, les minutes, l'enveloppe des minutes qui est octroyée aux formations politiques.

Alors, ceci étant dit, M. le Président, je voudrais entreprendre le débat sur cette motion de suspension des règles. Vous savez, ce n'est jamais avec gaieté de coeur qu'un leader du gouvernement présente une motion de suspension des règles, jamais. Vous le savez, j'ai été dans l'opposition, moi aussi, j'étais à la place que, présentement, occupe l'opposition officielle, j'étais porte-parole de l'opposition officielle en matière de justice, et j'ai vécu des motions de suspension des règles. J'en ai parlé: celle de l'ancien député de Portneuf, Michel Pagé, que je peux nommer puisqu'il n'est plus un membre de cette Chambre, celle faite aussi par le député de Brome-Missisquoi.

Et, M. le Président, j'avais la même attitude que les gens de l'opposition officielle, je déchirais ma chemise. C'est pourquoi, M. le Président, j'ai suggéré déjà au député de Brome-Missisquoi de peut-être mettre une fermeture éclair ou du velcro pour, à ce moment-là, faire en sorte que, quand on fait la déchirure, elle soit peut-être plus claire et plus rapide. Mais il est normal, quand même, au niveau de l'opposition, de se sentir un peu dans cette position d'opposition officielle, c'est-à-dire que ce n'est pas l'opposition officielle qui impose au gouvernement ses projets de loi, ce n'est pas l'opposition officielle qui décide de l'agenda de l'Assemblée nationale, mais c'est la majorité ministérielle.

Mais l'opposition officielle a un rôle à faire, un travail à faire, un travail fort important, qui est celui de faire des critiques relativement aux actions gouvernementales et qui est aussi, normalement, M. le Président – je dois dire «normalement» – de faire des propositions. Je dis ceci, M. le Président, parce qu'en majorité – je reviendrai un peu là-dessus – dans les différents projets de loi qui font ici l'objet de cette motion de suspension des règles, nous attendons toujours des propositions faites par les députés de l'opposition. Ils critiquent l'action gouvernementale, ils disent: Nous, on n'aurait pas fait ça. Qu'auraient-ils fait, M. le Président? On attend, on attend toujours des propositions, on attend toujours, exactement, ce que cette opposition officielle a de constructif à proposer au gouvernement pour pouvoir, à ce moment-là, faire en sorte, bonifier, même, les actions qui sont faites.

Et, comme je le mentionnerai tout à l'heure, on a donné la chance; pour tous ces projets de loi, M. le Président, qui font partie de cette motion, on a donné la plus grande chance possible, la plus grande opportunité à l'opposition officielle de nous faire part de ses idées, de vouloir porter des améliorations aux projets de loi. Et, malheureusement, malheureusement, cette offre est restée sans réponse, M. le Président, et nous n'avons eu aucune proposition de l'opposition officielle.

Alors, ce n'est qu'en dernier ressort, lorsque tous les arguments pour convaincre l'opposition officielle ont été déployés et qu'ils se sont révélés vains, que nous devons, à ce moment-là, procéder de la sorte par une motion de suspension des règles. Comme je le disais, le leader de l'opposition officielle en sait quelque chose, lui qui a dû s'y astreindre à l'époque où il occupait mon siège.

J'aimerais prendre quelques instants pour expliquer comment nous en sommes venus là, toutefois, avant d'aborder chacun des projets de loi et les motifs pour lesquels ils font l'objet d'une motion. Je rappellerai cependant certains faits au leader de l'opposition officielle, avant qu'il ne déchire, comme je l'ai dit, sa chemise et évoque le caractère scandaleux de la motion. Je pourrais lui rappeler la motion de suspension, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, de l'ex-député de Portneuf. On l'oublie, cette motion de suspension des règles, M. le Président, mais le député de Brome-Missisquoi a voté en faveur de cette motion. Et j'ai mentionné un peu plus tôt, dans mes arguments relativement à la recevabilité, qu'il y avait 26 projets de loi dans cette motion de suspension des règles... Non, ce n'était pas 26, c'était 28, 28 projets de loi dans un seule et même motion de suspension des règles, telle que proposée par le gouvernement libéral en 1992. Le 22 juin 1992, M. le Président, 28 projets de loi.

Si on considère qu'à la fin de cette session, probablement, on aura adopté un peu plus d'une trentaine de projets de loi, imaginez si, dans une même motion de suspension des règles, j'avais fait comme l'ex-député de Portneuf, député libéral, si j'avais mis 28 projets de loi. C'est à peu près l'équivalent de plus des trois quarts du menu législatif adopté à l'Assemblée nationale.

Je me souviens, dans l'opposition, à l'époque, M. le Président, nous, nous étions scandalisés, et, oui, les éditorialistes, à l'époque, avaient dénoncé cette façon de faire du gouvernement libéral, d'imposer le bâillon sur 28 projets de loi, 28 projets de loi. Et je peux vous dire qu'il y a même des députés de l'opposition officielle qui m'en parlent encore, de ce moment sombre de l'histoire de notre vie parlementaire: 28 projets de loi que le gouvernement libéral avait, à ce moment-là, imposés dans une motion de suspension des règles, le 22 juin 1992. Souvenons-nous de cette date, M. le Président. Donc, vous comprendrez que, quand j'entends le député de Brome-Missisquoi s'étonner, se scandaliser, je voudrais tout simplement lui demander pourquoi, alors, à ce moment-là, il a voté en faveur, le 22 juin 1992, de cette motion de suspension des règles.

Et je me contenterai aussi des faits et gestes de l'actuel leader de l'opposition, qui, le 17 décembre 1992, suspendait les règles pour quatre projets de loi parce qu'il avait mentionné, au début de son intervention sur la recevabilité, que, pour lui, le principe, c'était une motion de suspension des règles par projet de loi. Je lui rappellerais, à ce moment-là, ce qu'il a fait lui-même le 17 décembre 1992 pour quatre projets de loi. Et, pour être sûr qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, c'étaient: le projet de loi 61, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement; le projet de loi 59, Loi sur les heures d'affaires; le projet de loi 55, Loi sur la fiscalité municipale; et le projet de loi n° 57, Loi sur la voirie. Donc, quant au nombre de projets de loi, je n'ai pas de leçon à recevoir, M. le Président.

Quant au droit de parole, pas de leçon à recevoir parce que la motion du député de Brome-Missisquoi prévoyait 14 minutes de débat à la prise en considération du rapport et 30 minutes pour l'adoption finale. Nous prévoyons, nous, dans notre motion, respectivement un temps de parole de 30 et de 60 minutes. Donc, encore là, on a été plus généreux que le leader de l'opposition officielle quand il était, à l'époque, leader du gouvernement à ma place, alors que c'était le gouvernement libéral qui était, à ce moment-là, le gouvernement du Québec. Alors, nous sommes, je pense, plus généreux.

Regardons donc les projets de loi qui sont dans cette motion de suspension des règles. Je tiens à vous dire tout de suite, M. le Président, qu'on y songe à deux fois avant d'inclure, dans une motion de suspension des règles, un projet de loi. Je peux vous dire, et je peux le dire sans aucune crainte, que, même si on faisait siéger le Parlement deux mois, trois mois de plus, je suis convaincu que, en commission parlementaire, ces projets de loi n'auraient pas avancé d'un seul article, juste par le comportement, l'opposition systématique qui a été faite par les porte-parole de l'opposition officielle dans ces projets de loi. C'est un refus systématique de l'opposition officielle à ce que ces projets de loi voient le jour. À ce moment-là, ça nous met dans une situation où on se doit de décider, nous, du gouvernement.

M. le Président, ce sont des projets de loi auxquels nous tenons. C'est pour ça que je ne voudrais pas que la population, les gens qui nous écoutent présentement pensent qu'on fait une motion de suspension des règles pour sauver une ou deux journées de session, trois ou quatre journées de session, une semaine même de session. Non, c'est tout simplement qu'on arrive à un mur. L'opposition officielle dit: Non, nous ne voulons pas collaborer à ces projets de loi. Nous ne voulons rien savoir de vos projets de loi. Alors, à ce moment-là, le leader du gouvernement se doit d'utiliser les instruments qui sont à sa disposition, et la motion de suspension des règles est un de ces instruments qui est dans notre règlement, qui n'est pas exceptionnel, puisque, à peu près, je pense, à chaque fin de session, il a été utilisé. Et c'est le choix du gouvernement d'agir de la sorte et de montrer sa volonté que les projets de loi voient le jour et soient appliqués.

(17 heures)

Le premier projet de loi, le projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation. Nous avons attendu, M. le Président, jusqu'à la dernière limite des négociations pour déposer le projet de loi, et ce, afin de favoriser au maximum la négociation entre les parties. Cette volonté a toutefois eu comme conséquence que le projet de loi fut déposé après la date fatidique du 15 mai. Vous le savez, M. le Président, normalement, si on veut, sans le consentement de l'opposition, faire adopter un projet de loi avant la fin de la session, il faut qu'il soit déposé avant le 15 mai; ça n'a pu être fait parce que nous voulions, à ce moment-là, donner le plus de chances possible à la négociation de se faire entre, en particulier, les enseignants et les commissions scolaires.

Le consentement a été requis pour son adoption avant la fin juin; l'opposition l'a refusé. Non, ils n'ont pas voulu, et c'est pour ça qu'on l'a déposé. On a fait l'adoption du principe. À ce moment-là, l'opposition officielle nous a fait part qu'elle était tout à fait contre ce projet de loi. Ce projet de loi est tout à fait essentiel pour la planification financière des commissions scolaires, des intervenants du milieu de l'éducation. Pour pouvoir récupérer ce 100 000 000 $ de compressions qui étaient demandées, pour que ce 100 000 000 $ puisse être récupéré, il faut, à ce moment-là, que ce projet de loi soit adopté par cette Assemblée nationale.

Le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Ce projet de loi fut présenté à l'Assemblée nationale le 4 décembre 1995; donc, on ne peut pas parler d'un projet de loi qui a été déposé en toute hâte et en toute vapeur. Nous n'avions pu progresser, à l'époque, compte tenu que l'opposition réclamait des consultations. Nous avons accepté de ne pas adopter ce projet de loi à toute vapeur, nous avons accepté des consultations et 18 groupes ont été entendus. Et, malgré cette ouverture du gouvernement, il était devenu clair que jamais l'opposition officielle n'accepterait d'adopter ce projet de loi avant la fin de la session.

Après plus de 15 heures d'étude, sans compter les 17 h 30 min passées en consultations, la commission des affaires sociales n'avait abordé que l'article 1. M. le Président, je ne sais pas si vous réalisez: 17 h 30 min, un seul article d'adopté. Alors, je pense qu'on peut parler d'une certaine patience de la part du gouvernement pour permettre à l'opposition de faire son lit, de faire des propositions, de faire un débat. Un seul article en 17 h 30 min, et nous avons passé 4 h 14 min sur un sous-amendement. Alors, vous pouvez imaginer, si on veut pouvoir passer un tel projet de loi dans l'espérance de vie moyenne d'un individu, ce que ça peut représenter, si on travaille à cette vitesse. Et vous conviendrez avec moi qu'il était évident que l'opposition officielle refusait de collaborer afin que ce projet de loi soit adopté.

Le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives. Encore ici, l'opposition a été virulente. Nous avons accepté des consultations et entendu 45 organismes – et je suis certain que, dans les prochaines interventions, on va nous reprocher d'être un gouvernement qui n'écoute pas les gens – qui sont venus et qui ont été entendus par le ministre de la Santé et des Services sociaux. Certains étaient en faveur, d'autres étaient contre le projet de loi qui était présenté, mais on les a entendus, on les a écoutés; ce qui a fait en sorte aussi, M. le Président, qu'il y a eu des amendements qui ont été proposés.

On peut difficilement blâmer un ministre d'écouter les gens et d'arriver, justement, avec des modifications, comme il l'a fait, comme il l'a présenté et comme il va le présenter aussi à l'Assemblée nationale. Il a écouté les gens et il a dit: Oui, c'est vrai, certains amendements ou certaines améliorations que les gens voudraient voir, oui, je pense qu'on pourrait les inclure dans le régime; et, à ce moment-là, dans les modalités de ce régime, on pourrait faire en sorte que ce soit amélioré. Et c'est pourquoi on en arrive à la proposition qui maintenant fait partie et va faire partie du projet de loi.

Malgré les consultations et les modifications apportées par le ministre pour répondre aux critiques, donc, l'opposition s'est livrée à une opposition systématique, se refusant d'aborder l'article 1 malgré – tenez-vous bien, M. le Président; je sais que vous êtes bien assis – 58 h 43 min en commission – 58 h 43 min! Et là on va essayer de dire, dans l'opposition, qu'on n'a pas eu le temps, qu'on a été pressé. 58 h 43 min, et même pas un article d'adopté! Personne dans la population ne va croire l'opposition officielle quand l'opposition officielle va dire: Nous n'avons pas eu le temps de travailler sur le projet de loi, nous avons été bâillonnés. Bâillonnés 58 heures sur un article, M. le Président! Peut-être que ce seront les générations futures qui pourront adopter ce projet de loi, à la vitesse à laquelle travaille l'opposition officielle. Peut-être que mes arrière-petits-petits-fils ou petites-filles pourront dire: Oui, c'était le projet de loi de mon arrière-grand-père qui, à ce moment-là, l'avait entrepris et que l'opposition officielle a travaillé avec la vitesse qu'on lui connaît.

Cinquante-huit heures, M. le Président, même pas un article, alors on repassera quand on dira que l'opposition officielle a été bâillonnée. L'opposition officielle n'en veut pas, de ce projet de loi. Pour l'opposition officielle, 1 200 000 personnes qui ne bénéficient d'aucune assurance-médicaments, ça, ça ne compte pas. Ça ne compte pas. Ce n'est pas grave. Ce n'est pas grave, ça, 1 200 000 personnes. Et qui sont ces gens? En particulier des travailleurs à faibles revenus, à moyens revenus, qui travaillent dans des PME, qui n'ont pas d'assurance collective.

Nous, nous avons la chance, comme membres de cette Assemblée nationale, d'avoir des assurances collectives qui paient les médicaments, M. le Président. Mais les 1 200 000 personnes, elles, n'ont absolument aucune chance d'avoir une telle protection, et nous voulons couvrir ces gens-là, parce que, présentement, quand ces gens-là tombent malades, ils viennent nous voir dans nos bureaux de comté. J'en ai eu.

C'est drôle, je n'ai pas entendu beaucoup de députés de l'opposition nous parler de ces gens-là qui sont, j'en suis certain, venus les voir. Quand ces gens-là tombent malades, ils ont des petits salaires, ils veulent travailler, ils ont la fierté de vouloir travailler parce qu'ils ont un emploi qu'ils aiment, et tout ça. Ils sont obligés de quoi pour avoir des médicaments gratuits? Tomber sur la sécurité, se mettre sur la sécurité du revenu à contrecoeur. Ce n'est pas parce qu'ils le veulent, c'est parce qu'ils n'ont pas le choix. Donc, nous voulons que l'ensemble de la population du Québec puisse bénéficier d'une assurance-médicaments. C'est ça qu'on appelle l'équité, en tout cas la définition de l'équité, je pense, qui est communément entendue par l'ensemble de la population.

Mais, voyez-vous, M. le Président, l'opposition officielle, quant à elle, 58 h 43 min, et on n'adopte pas un seul article. Elle aurait pu dire: Sur division, nous sommes contre, mais l'article va être adopté sur division. Non. Même pas. Absolument pas. Absolument pas adopté un seul article.

Concernant le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, on se souviendra que le processus de réforme est engagé depuis juin 1995. Encore là, je ne pense pas qu'on va pouvoir parler de surprise du côté de l'opposition officielle. Le ministre a consulté abondamment et, s'il y a un ministre qui consulte – on l'a vu pour la loi relativement aux pensions alimentaires pour les grands-parents – un ministre qui n'a pas peur d'aller voir les gens pour avoir les commentaires de la population, pouvoir bonifier les projets de loi qu'il veut présenter à l'Assemblée nationale... Eh bien, le ministre a agi de la même façon avec cette importante réforme de l'aide juridique. Il a apporté des modifications importantes. Le projet de loi 87 est devenu le projet de loi n° 20.

Encore là, je pense que, si on veut reprocher à ce gouvernement de ne pas écouter, comment, à ce moment-là, peut-on expliquer que des ministres comme le ministre de la Santé et des Services sociaux, le ministre de la Justice, n'ont pas peur, quand ils écoutent des suggestions qui leur sont faites... Ici, c'est dans le cas du Barreau du Québec. Le Barreau du Québec dit au ministre: M. le ministre, nous voudrions plutôt que votre projet de loi soit amélioré de telle façon. Le ministre dit: Oui, nous allons modifier notre projet de loi pour l'adapter aux commentaires d'amélioration. Bien, c'est ça qu'on appelle un débat constructif. On peut être contre un projet de loi mais proposer quelque chose, et c'est un peu ce qu'on peut reprocher ici à l'opposition officielle, de critiquer mais sans proposer.

Encore là, j'espère que le porte-parole de l'opposition officielle en matière de santé et de services sociaux, lui, va nous parler de quel régime universel d'assurance-médicaments il proposerait à la population s'il était ministre de la Santé. Je ne l'ai encore jamais entendu là-dessus. Tout ce qu'il dit, c'est qu'on fait payer certaines personnes, mais, quant à lui, il ne nous dit pas comment il couvrirait les 1 200 000 personnes. Jamais on ne l'a entendu nous parler d'un tel régime universel qu'il pourrait créer pour en faire bénéficier l'ensemble de la population. Et je pense que, quand on est une opposition responsable, on propose des choses plutôt que d'essayer uniquement de détruire ou d'essayer de critiquer. On propose. Mais, des propositions, encore là, j'en attends toujours.

(17 h 10)

Il s'agit d'une réforme majeure qui est bien accueillie. Des milliers de personnes de plus auront accès à l'aide juridique. Le ministre de la Justice, récemment, en Chambre, montrait la première page du Journal du Barreau . Le Barreau était opposé d'une façon assez fondamentale au premier projet de loi sur l'aide juridique. Mais celui-ci, il est au contraire salué par l'ensemble de la communauté juridique, parce qu'on dit: Oui, c'est un pas, plus qu'un pas, même, c'est une réforme dans la direction demandée par l'ensemble des juristes du Québec. Et je pense que ce projet de loi est attendu. Oui, il est attendu. Parce que, encore là, avec ce projet de loi, on va faire en sorte que des milliers, des milliers de personnes qui n'étaient pas couvertes par l'aide juridique... parce qu'avec les barèmes qui n'avaient pas été augmentés depuis des années par le gouvernement libéral qui nous a précédés, c'était finalement juste les gens qui étaient sur la sécurité du revenu qui avaient droit à l'aide juridique, essentiellement.

Donc, vous comprenez que, pour nous, c'était important de faire en sorte que, encore là, plus de gens aient accès à l'aide juridique. Et c'est pourquoi le ministre de la Justice, dans son projet de loi qui a été déposé, le projet de loi n° 20, parle d'un volet contributoire. Donc, les gens ont une certaine protection, des gens qui, auparavant, n'avaient, encore là, aucune assurance juridique. Alors, on ne peut pas parler d'augmentation du fardeau fiscal relativement à des gens qui n'avaient rien, qui n'avaient aucune protection; ces gens-là, maintenant, ont une protection, et une plus grande partie de la population, dans le cas de l'aide juridique, maintenant, peut bénéficier de l'aide juridique.

Trente-quatre heures en commission parlementaire, dont neuf heures en consultations, et nous en sommes, M. le Président, à l'article 6. Nous avons demandé à l'opposition s'ils souhaitaient accélérer, la réponse fut négative. Le débat en commission a atteint un niveau, je dirais, peu souhaitable pour l'ensemble de cette Assemblée nationale, où le député de Chomedey a même des fois attaqué d'une façon assez virulente le ministre de la Justice. Je me dois de dire, malheureusement, M. le Président, qu'aucun travail constructif n'a été fait. Ce n'est pas la peine, quant à moi, de revenir en commission. Je voudrais juste prendre peut-être ici un extrait de ce qui a été dit; c'était le 7 juin 1996 en commission des institutions, il était environ 21 h 5. Et je pense que vous comprendrez.

Je vois ici – c'était le député de Chomedey qui avait la parole: «On entend les pères de la Confédération, on entend Louis-Hippolyte LaFontaine en train d'ajouter ça dans un grand discours, l'importance, aux fins définies au paragraphe 2, d'assurer la coordination des activités de la Commission et des centres d'aide juridique en favorisant entre eux et parmi les personnes qui y oeuvrent la concertation et la collaboration. La foule vibre à la lecture de cette disposition, M. le Président. J'espère que le ministre de la Justice va l'intégrer dans son discours en Chambre.» Et le député de Chomedey reprend: «Et je vais m'assurer d'y amener des représentants de tous les groupes communautaires dans les galeries pour l'entendre. Il pourrait peut-être en faire, oui, une déclaration solennelle à l'Assemblée nationale.» Et le député de Jacques-Cartier de rajouter: «Au lever du soleil, peut-être.» Et le député de Chomedey: «Oui, oui, on pourrait choisir le moment, le lever du soleil sur le Saint-Laurent, quelque chose comme ça; c'est la beauté. Mon collègue de Jacques-Cartier n'arrête pas de nous dire comment il est ému par cet article, que, pour lui, c'est vraiment de la poésie, c'est vraiment de toute beauté et ça reflète toute la profondeur de son auteur, le ministre de la Justice du Québec.» Et le député de Chomedey de reprendre: «Ça démontre à quel point celui-ci comprend la notion de principe.»

Alors, donc, M. le Président, on partait, là, sur des envolées oratoires et dans l'allégorie, on pourrait dire, d'une certaine façon. Alors, on comprend pourquoi, après, donc, 34 heures en commission parlementaire, six articles seulement ont été adoptés. Donc, encore là, ce n'est pas pour sauver une semaine ou deux semaines de débats que la motion de suspension des règles est nécessaire, c'est tout simplement pour que, finalement, ce projet de loi soit adopté.

Le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, après 20 heures en commission, nous en sommes encore à l'article 4. Des amendements importants ont été apportés, et ces amendements, M. le Président, avaient été demandés par la Commission d'accès à l'information et le Protecteur du citoyen, qui, maintenant, se sont déclarés, par écrit, en faveur du projet de loi. Donc, pourquoi cette opposition systématique relativement à ce projet de loi, puisque, justement, le ministre des Finances et le ministre délégué, ici, dans ce cas, le ministre délégué au Revenu, a écouté les commentaires qui lui ont été faits et il a apporté des amendements considérables à son projet de loi?

L'autre projet de loi, c'est le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives. Ce sont des milliers de places en garderie qui attendent d'être créées par ce projet de loi; ce sont des milliers de places en garderie. Ici, deux visions s'affrontent. L'opposition officielle voudrait que nous subventionnions les garderies privées. Le gouvernement, quant à lui, en prenant en considération le bien-être de l'enfant, le développement de l'enfant aussi, considère que ce sont toutes des garderies sans but lucratif, avec, en majorité, des parents sur le conseil d'administration, qui vont être plus aptes à faire ce travail. Il faut quand même penser, là, que les garderies à but lucratif, qui, présentement, jouissent d'un apport financier, continueront de l'être. Mais, pour celles qui vont se créer, le gouvernement, en période de restrictions budgétaires – il faut l'admettre, il faut se le dire, il faut être lucide – se doit de faire des choix, et le choix du gouvernement s'est arrêté sur les garderies sans but lucratif. Et, encore là, c'est une opposition systématique de la part de l'opposition officielle qui ne veut absolument rien savoir de ce projet de loi.

En résumé, tous ces projets de loi, je vous le dis, M. le Président, comme leader du gouvernement, j'aurais préféré qu'ils passent toutes les étapes de notre système parlementaire, parce que, dans la grande majorité des cas, quand un projet de loi réussit, avec un bon travail de la part de l'opposition et de la part du gouvernement, à franchir toutes les étapes, je pense que c'est l'ensemble de la population qui se retrouve mieux servie, que les projets de loi se retrouvent souvent bonifiés de commentaires de part et d'autre, à la fois de l'opposition officielle, à la fois de la part du gouvernement ou du ministre qui pilote le projet de loi. Mais, quand on assiste à un barrage, et il faut quand même... Quand on regardera le bilan de la session, c'est six projets de loi sur plus d'une trentaine. Il faut regarder, quand même, dans plus d'une trentaine de projets de loi. Je pense qu'il y a eu, au niveau de l'opposition officielle et du gouvernement, des échanges qui se sont faits. Même si l'opposition officielle a voté sur division sur les projets de loi, je pense que ces projets de loi ont cheminé et ont passé toutes les étapes. Mais, sur ces six projets de loi, l'opposition officielle nous a dit non. L'opposition officielle nous a dit: Non, nous ne voulons pas de ces projets de loi. Et, à ce moment-là, c'est à nous, comme gouvernement, de prendre nos responsabilités.

Le jugement qui sera à porter sur ces projets de loi sera un jugement politique rendu par la population. C'est ça, la politique. Il y a des élections qui sont tenues à tous les quatre ou cinq ans relativement au bilan législatif des gouvernements, peu importe quels sont ces gouvernements. Mais une majorité ministérielle a toujours le droit de faire adopter les projets de loi qu'elle veut. Une opposition a le droit, quant à elle, de faire le travail qu'elle a à faire, de s'opposer, de proposer des choses différentes, de critiquer le travail gouvernemental, mais la majorité ministérielle a la responsabilité de prendre ses décisions et de faire en sorte que les projets de loi auxquels elle tient soient adoptés. Et c'est finalement ça que nous faisons aujourd'hui, M. le Président.

Encore là, je vous le dis, ce n'est jamais un moment heureux pour un leader du gouvernement de faire une motion de suspension des règles. Ce n'est pas un plaisir que de procéder de la sorte, mais, devant l'opposition systématique, le refus systématique de l'opposition officielle de collaborer sur ces projets de loi, nous n'avons aucune autre alternative que de procéder par une motion de suspension des règles et nous espérons, donc, que ces projets de loi soient adoptés à la suite de ce débat et de tout ce processus qui vient d'être mis en mouvement par cette motion de suspension des règles, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le leader du gouvernement. Je cède maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. C'est un jour assez sombre dans les annales parlementaires. C'est la deuxième fois en deux années de pouvoir – même pas deux années complétées – que le Parti québécois, parti ministériel, impose le bâillon non seulement à l'opposition, mais à beaucoup de groupes, des groupes très représentatifs. Vous allez me permettre de vous donner ce que le réseau de la santé et des services sociaux ressent par rapport aux deux projets de loi que le ministre de la Santé a l'intention de traiter sous le bâillon. À noter que c'est son troisième projet de loi. L'an passé, il avait fait adopter le bâillon sur le projet de loi 83, la loi qui peut fermer des hôpitaux à la guise du ministre, sans aucun critère. Alors, maintenant, c'est la loi n° 116.

(17 h 20)

La loi n° 116, M. le Président, eh bien, elle comportait deux parties, une première qui fusionnait certains établissements de santé et la deuxième partie, c'était axé davantage sur les élections des établissements de santé et sur l'imputabilité des régies régionales. Nous avons reçu 18 groupes, et tout allait bien des deux côtés de l'Assemblée. Je pense qu'on faisait un travail extrêmement positif et constructif, M. le Président, jusqu'à ce que nous apprenions que le leader parlementaire avait choisi de rappeler ce projet de loi en pleine nuit. Le ministre, lui, nous a indiqué qu'il voulait continuer à travailler. Fait à noter et fait extrêmement important: tous les députés, des deux côtés de la commission, eh bien, étaient d'accord sur le projet de loi n° 116, d'accord pour trouver une façon de rendre plus imputables les régies régionales. Nous avons entendu des histoires d'horreur, M. le Président, des histoires où des assemblées publiques étaient vraiment paquetées, si vous me permettez cette expression, des endroits comme Montréal, où on avait quelques chaises seulement alors qu'il y avait beaucoup de gens qui voulaient intervenir, des endroits comme Trois-Rivières, où on avait un objectif, la régie a trouvé que ce n'était pas assez, ils l'ont doublé sans même l'avis du ministre de la Santé, alors que nous savons pertinemment que c'était une commande du ministre de la Santé.

M. le Président, le député de Lévis a proposé à la commission de rendre imputables les régies régionales devant une assemblée régionale de députés. La grande majorité des députés, des deux côtés de l'Assemblée, étaient d'accord avec la proposition du député de Lévis. Et, sans qu'on sache d'où ça venait, à minuit, la semaine passée, le leader a rappelé cette loi alors que tout allait bien, et que nous avions entendu les groupes, et que nous savions ce que nous voulions faire, et qu'il y avait vraiment un accord des deux côtés de l'Assemblée.

Le leader dit qu'on n'en a jamais, de solution. M. le Président, nous répétons la première solution qui devrait être envisagée par le parti gouvernemental: Est-ce qu'il pourrait, avant de s'attaquer aux patients, diminuer dans sa bureaucratie? Et sa bureaucratie, c'est actuellement les régies régionales, et le projet de loi est en train d'ériger, comme un véritable monument à la bureaucratie, ces régies, M. le Président. Je vous rappelle que les régies régionales coûtent, bon an mal an, plus de 100 000 000 $ – les 18 régies – qu'elles se composent de 1 500 postes et qu'il n'y a pas un patient qui est soigné là-dedans, M. le Président.

M. le Président, l'autre projet de loi, le projet de loi n° 33, eh bien, c'est, à la prétention du ministre, un projet d'assurance-médicaments, alors qu'on a été en mesure de démasquer ce qu'il était vraiment, c'est un impôt-médicaments. Un impôt, M. le Président. Le ministre a été obligé de l'avouer, et il va ajouter une ligne au rapport d'impôts de l'an prochain pour que les contribuables puissent l'indiquer. Nous allons payer 175 $ de plus comme prime d'assurance, M. le Président, et le ministre ose encore appeler ça une assurance.

Le leader a dit que nous avions discuté 58 heures avant d'arriver à l'article 1. C'est faux, M. le Président. Nous avons écouté 42 groupes en commission parlementaire, donc au moins près de 44, 45 heures à écouter l'ensemble des groupes, et c'est tout dernièrement qu'on a commencé à faire quelques motions. Et, M. le Président, nous avons fait des motions pour entendre de nouveau certains groupes. On voulait avoir une consultation plus particulière parce qu'on nous le demandait, parce qu'on nous écrivait, parce qu'on écrivait au Secrétariat des commissions, les gens voulaient se faire entendre; le front commun CEQ, CSN et FTQ voulait se faire entendre de nouveau; la Coalition des aînés, M. le Président, voulait se faire entendre de nouveau, et le Front commun des personnes assistées sociales voulait se faire entendre de nouveau. La grande majorité des groupes voulaient se faire entendre de nouveau.

Pourquoi, M. le Président, est-ce qu'ils voulaient se faire entendre de nouveau? Le ministre a laissé entendre qu'il avait fait certains amendements. C'était trop peu et trop tard, et c'était improvisé encore une fois, M. le Président. Tout ce qu'on a trouvé avec le projet de loi qu'on nous a transmis, bien, c'est: Qui va payer? Qui va payer, vous pensez, M. le Président? Eh bien, la question est facile à répondre. Qui consomme les médicaments? Et qui consomme les médicaments au Québec? Bien, ce sont les personnes aînées, surtout. Les personnes aînées consomment en moyenne 800 $ de médicaments par année. Et là on a un nouveau discours du ministre de la Santé puis du premier ministre, M. le Président: Les aînés sont riches, ils sont capables de payer – c'est ça que l'autre parti nous dit, M. le Président – puis les pauvres, ils ont les moyens. Les pauvres ont les moyens de payer 200 $ de prime, M. le Président, de franchise. Alors, qu'est-ce qu'on peut attendre d'un gouvernement qui s'attaque aux personnes aînées, d'un gouvernement qui s'attaque aux plus démunis, avec les beaux discours d'équité sociale qu'on a entendus, M. le Président, en campagne électorale, en campagne référendaire et dernièrement. Les aînés sont riches, ils sont capables payer, puis les pauvres, ils ont les moyens.

M. le Président, dans quel monde on vit? Vous savez, les aînés, c'est vraiment les sages d'une société. Eh bien, les sages d'une société, quand ils commencent à descendre dans la rue, je pense qu'il y a un problème sérieux qui se produit. Hier, lors d'une manifestation des personnes aînées à Montréal, on a déposé devant le bureau du premier ministre la signature de 5 000 à 6 000 pétitionnaires. Le bureau du premier ministre n'a même pas daigné recevoir les personnes aînées, M. le Président. Savez-vous ce qu'elles revendiquent, les personnes aînées? C'est bien simple, elles l'ont envoyé dans un communiqué, comme beaucoup d'autres groupes l'ont fait soit par communiqué, soit par lettre, aux commissions parlementaires: «La Coalition revendique le retrait du projet de loi, une véritable consultation publique et que le ministère refasse ses devoirs.» Le ministre n'a pas fait ses devoirs, M. le Président. Parmi les amendements souhaités: une meilleure redistribution des contributions entre les riches, les pauvres et les revenus modestes.

M. le Président, comment se fait-il que ce gouvernement en soit arrivé là? Ça ne fait même pas deux ans de pouvoir, ça fait deux premiers ministres qu'ils ont, et maintenant on s'attaque aux personnes aînées, les sages de notre société. Bien, M. le Président, il y a vraiment une difficulté; quand les aînés ne sont pas capables de s'exprimer en commission parlementaire et qu'ils décident de descendre dans la rue, il y a un problème avec ce gouvernement.

Il faut penser qu'à cause des coûts élevés ça va coûter cher, une prime, ça va coûter cher, une franchise, ça va coûter cher, une coassurance. On calcule que ça peut aller, pour les personnes aînées, jusqu'à 1 000 $ par année. Eh bien, les gens ne paieront pas leurs médicaments, ils ne suivront pas leurs traitements, et c'est cette roue qui va se poursuivre, c'est-à-dire qu'ils vont être soignés de nouveau, leur état va se détériorer, ils vont être hospitalisés de nouveau et il y aura des coûts additionnels.

M. le Président, la liste des médicaments que le ministre nous a promise, bien, on ne l'a pas encore. Des associations de patients, les patients qui ont la sclérose en plaques sont venus nous voir pour nous dire: Écoutez, nous, on a un médicament nouveau qui augmente la qualité de vie, qui ne guérit pas, ça s'appelle le Betaseron. Eh bien, on l'a donné comme exemple. Une jeune dame atteinte de la sclérose en plaques nous a dit qu'elle pouvait laisser son fauteuil roulant maintenant, qu'elle était en mesure de marcher, d'avoir une vie plus régulière. Eh bien, le ministre, jamais, jamais, n'a voulu inscrire ce médicament qui, pourtant, est reconnu dans la province voisine, en Ontario, qui est reconnu aux États-Unis, qui est reconnu par la communauté scientifique.

M. le Président, le ministre continue de rire des institutions parlementaires. Il n'a même pas déposé ses amendements à ses règlements, lui qui l'avait promis à cette Assemblée. Et, hier, pour comble de désespoir, alors qu'il a refusé d'entendre à peu près tous ceux que nous avons souhaités et que je vous ai mentionnés, il y avait, présente dans la salle, la présidente de l'Ordre des pharmaciens; eh bien, il a accepté à 23 h 30 de l'entendre. Nous avons également demandé que les associations de compagnies d'assurances qui étaient représentées dans la salle également puissent être entendues. Alors, de 23 h 30 à minuit, on a entendu deux groupes, parce que les gens étaient présents. Est-ce qu'il va falloir que les aînés viennent faire du camping dans le salon rouge pour être entendus, M. le Président? Ça n'a pas de bon sens, la logique de ce ministre. Le ministère de la Santé, c'est vraiment le ministère de l'improvisation, c'est le ministère de la taxation, c'est le ministère de l'imposition, c'est le ministère du manque de compassion. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Alors, je cède maintenant la parole au député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Qui aurait pensé...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Ouimet: Ça les fait bien rire, mais qui aurait pensé, en cette journée du 18 juin 1996, que nous assisterions à l'après-midi des longs couteaux? C'est de ça qu'il s'agit, M. le Président, poignarder et mettre le couteau dans le dos du partenaire du gouvernement, la Fédération des commissions scolaires du Québec, c'est ça, M. le Président. Nous assistons à ceci par l'entremise du projet de loi n° 37 que le leader du gouvernement tente de faire passer en bâillonnant l'opposition, et on ne demeurera pas muet par rapport à cette situation.

(17 h 30)

Présentons le contexte. La députée de Taillon, à l'époque présidente du Conseil du trésor, négocie une entente avec son partenaire et la partie syndicale. Elle nous l'affirmait le 22 avril dernier: J'ai moi-même signé, je l'avais compris comme ça quand je l'ai négocié et je l'ai moi-même négocié; il s'agit d'un contrat, il s'agit d'une convention collective. Après l'avoir négocié, elle signe le même contrat avec la partie syndicale et la partie patronale, un beau sourire, un petit clin d'oeil à sa façon coutumière, une poignée de main. Quelques mois plus tard, sort le couteau placé derrière le dos de la Fédération des commissions scolaires. C'est le couteau que place ce gouvernement dans le dos de la Fédération des commissions scolaires par rapport à une entente qui prévoyait déjà le mécanisme en cas de désaccord.

Ça faisait bien rire les gens d'en face, M. le Président. Trahir la parole donnée verbalement aux parlementaires – et j'ai des citations et je vais les citer – trahir la signature du gouvernement, signature dans une convention collective qui comporte 278 pages, convoquer... On a passé à peine quelques heures dans la soirée de vendredi dernier pour parler du principe de ce projet de loi là.

Comment le leader du gouvernement peut-il oser accuser l'opposition de ne pas proposer des solutions alors que la solution était déjà prévue dans la convention collective? Les parties et la ministre qui a signé la même entente avaient prévu à la clause 6 de l'annexe XLIX que, en cas de mésentente entre les parties, je cite, «l'écart entre le montant généré et la cible est comblé par des jours ou parties de jour de congé sans traitement pris à même les journées pédagogiques». C'est ça que prévoit la convention collective.

Comment le premier ministre pouvait-il, hier, en réponse à une question du chef de l'opposition, dire qu'il fallait que quelqu'un tranche la question? Oui, il fallait que quelqu'un tranche la question. La partie patronale et la partie syndicale avaient tranché la question, et ceci se retrouvait dans la convention collective librement signée par les parties. Alors qu'il y a un écart d'à peine 6 000 000 $ entre les parties sur un montant global de 100 000 000 $ et qu'on sait exactement ce que la convention collective disait, voici aujourd'hui l'après-midi des longs couteaux. Le bâillon est imposé à l'opposition. Le leader, les membres du gouvernement sortent leur couteau, le placent profondément dans le dos de la Fédération des commissions scolaires en tentant de forcer l'adoption de ce projet de loi.

C'est proprement scandaleux, ce qui se passe, scandaleux parce que ça a un effet de précédent, d'un précédent dangereux. J'étais en communication avec les représentants de la Fédération des commissions scolaires. L'équilibre entre la partie patronale et la partie syndicale qui doit être maintenu aux tables de négociation, cet équilibre-là, il est rompu.

Quel message la députée de Taillon, ministre de l'Éducation, qui doit voir à l'éducation de plus de 1 000 000 d'élèves au Québec, est-elle en train de donner à nos élèves? Quel message est-elle en train de donner à nos parents? Quel message est-elle en train de donner à l'ensemble des contribuables lorsqu'elle dit: Je ne respecterai pas la signature que j'ai apposée sur un contrat, je ne respecterai pas la parole que j'ai donnée aux parlementaires? Quelle était cette parole-là? Parce que nous l'avions questionnée à plusieurs reprises lors de l'étude des crédits, le 22 avril dernier, et elle disait ceci: «Je ferai remarquer aux membres de la commission, et en tout respect pour mon collègue le député de Marquette, que je n'impose rien.» Comment expliquer ce projet de loi là aujourd'hui? C'est par la voie de la négociation que les parties ont convenu de ce qui est là, la convention collective, et elles en ont convenu elles-mêmes, que, si elles ne réussissaient pas à s'entendre, c'était la deuxième avenue des négociations qui allait s'appliquer, le mécanisme de désaccord.

Elle m'a répété cet engagement-là trois fois, M. le Président: «Moi, je ne décréterai rien, là. Il est bien indiqué que, s'ils ne s'entendent pas, voici la mesure qui s'appliquera, et elle s'appliquera.» Et encore plus loin: «La convention – et, ça, ce sont les propos de la ministre de l'Éducation – collective s'appliquera, et c'est bien prévu, ce qui doit s'appliquer dans la convention. Je n'ai pas à intervenir, par ailleurs, autrement que de reconnaître ce qui est dans la convention.»

Trahir sa parole, ne pas respecter ses engagements, c'est de ça qu'il s'agit. Et, maintenant, avec la complicité du gouvernement, on met le poignard, le couteau dans le dos de la Fédération des commissions scolaires, qui a négocié de bonne foi, qui avait le mandat de négocier donné par la députée de Taillon. Et ce n'est pas comme si, contrairement à ce qu'affirmait le leader, nous étions devant une impasse, c'était prévu dans la convention collective, quel mécanisme s'appliquerait en cas de désaccord entre les parties; les parties l'avaient elles-mêmes prévu.

Quel message est-ce que ce gouvernement-là envoie à l'ensemble de ses partenaires lorsqu'il peut utiliser sa majorité en Chambre pour trahir des engagements écrits, des engagements importants – c'est une convention collective? C'est le déjà-vu de 1981, M. le Président. On est face à cette même situation là. Et, avec tout respect pour le leader du gouvernement, il n'a aucun argument aujourd'hui à invoquer pour forcer l'adoption du projet de loi n° 37, il n'a aucun argument. Et je lui soumets bien respectueusement, s'il veut garder la face, s'il veut maintenir le peu de crédibilité qui reste à son gouvernement, qu'il devrait retirer de la motion de bâillon le projet de loi n° 37. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Je cède maintenant la parole au député de Rivière-du-Loup. M. le député.

M. Williams: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Oui, M. le député de Nelligan.

M. Williams: Je voudrais m'assurer que nous avons quorum.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Nelligan, nous sommes actuellement 14 dans cette Chambre, et le quorum est de 13, étant donné qu'il y a actuellement des commissions parlementaires qui travaillent. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Permettez-moi, dans un premier temps, de déplorer ce qui est devenu une pratique courante pour ce gouvernement-ci, c'est-à-dire d'appliquer à tour de bras ce qu'il a dénoncé durant des années, entre autres la procédure du bâillon. On se souvient tous comment, durant leurs années d'opposition, les députés du Parti québécois ont dénoncé le bâillon, se sont scandalisés, se sont dit inquiétés de cette tendance-là qui se prenait à ce qu'en fin de session, systématiquement, sans qu'il y ait d'urgence, on utilise la notion d'urgence comme on le veut pour passer n'importe quel projet de loi.

Bien, M. le Président, le gouvernement du Parti québécois agit aujourd'hui de la même façon, puis plus un membre, plus un député de son côté ne se lève pour nous rappeler ce qui a été son slogan de campagne électorale – ça en a fait rire plusieurs, puis on avait raison de rire – la nouvelle façon de gouverner. On n'a aucune façon nouvelle de gouverner. L'autre façon de gouverner, on la cherche. On la cherche, M. le Président. D'ailleurs, dès...

(17 h 40)

M. Boulerice: ...dans son comté.

M. Dumont: Oui, l'autre façon de gouverner, dans mon comté les gens n'en ont pas voulu, puis ils ont bien fait, comme le souligne si bien le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

Alors, M. le Président, en novembre 1994, le leader du gouvernement précédent, M. Chevrette, a expliqué ne plus vouloir utiliser le bâillon ou la motion de clôture d'un débat, sauf – et là je demande aux gens d'être attentifs – pour l'étude et le règlement de situations impliquant la santé et la sécurité des citoyens. Là, c'est l'ancien leader du gouvernement qui parle, M. Chevrette. Impliquant la santé et la sécurité des citoyens, M. le Président. Pas détériorant la santé et la sécurité des citoyens, hein?

Bien, je regarde la liste des projets de loi qui sont devant nous: le projet de loi n° 37, qui vient d'être décrié par le député de Marquette; le projet de loi n° 11, sur les motivations réelles duquel on reviendra plus tard; le projet de loi n° 20, sur l'aide juridique, qui traîne depuis des mois et des mois; le projet de loi n° 116, un projet de loi de structures, d'augmentation des pouvoirs de la bureaucratie, c'est urgent. C'est urgent, ça, M. le Président. Essayez de comprendre ça, vous. Le projet de loi n° 33 sur l'assurance-médicaments. Il y a deux semaines passées, on ne savait même pas qui allait l'administrer, le public, le privé. On est tout mêlé. Personne ne l'a demandé, mais c'est urgent.

Curieusement, les projets de loi qui sont demandés par des citoyens et des citoyennes, eux, dans la liste, dans le feuilleton, n'ont pas été jugés urgents. Mais les projets de loi qui viennent écraser un peu la classe moyenne puis les projets de loi qui viennent piger dans la poche du contribuable, eux autres, ils sont absolument urgents.

L'urgence, M. le Président, c'est de grossir la bureaucratie, puis l'urgence, c'est les taxes déguisées. Puis l'urgence réelle, tout le monde le sait – il faut qu'à un moment donné quelqu'un le dise dans le parlement – c'est qu'il y a un «party» du Parti québécois demain soir. Et là le bâillon est rendu tellement banalisé que, pour faire un «party», on est à quatre jours de la fin de la session, puis là on décide qu'on suspend les règles, qu'on arrête de débattre des projets de loi, qu'on fait une petite sélection de projets de loi, ceux qui viennent piger dans les poches des contribuables, puis on dit: Ça, c'est ceux qui sont urgents. Puis on finit la session comme ça.

La réforme de la justice administrative. Le ministre de la Justice, il y a plein de bonnes choses dans son projet de loi, des choses qui respectent les citoyens, mais, lui, il n'est pas urgent. Lui, il ne vient pas piger dans le portefeuille du contribuable. Il n'est pas urgent, ce projet de loi là. Le droit de produire. Les municipalités et le monde agricole, il y a eu des... Mais, ça, ce n'est pas urgent. Le projet de loi que j'ai présenté ce matin sur la Société de l'assurance automobile du Québec, je suis convaincu qu'il n'est pas urgent, celui-là, pour le gouvernement. Le projet de loi du député de Viau sur les dons d'organes, je suis convaincu que celui-là n'est pas urgent pour le gouvernement.

Je serais curieux de demander à ce gouvernement-là de faire un test, de descendre dans la rue puis de demander aux gens, entre arrêter les détournements de fonds de la Société de l'assurance automobile, entre aider les transplantations puis entre mettre toutes sortes de projets de loi pour grossir la bureaucratie puis changer les structures puis aller piger dans les poches des contribuables, ce que les gens choisiraient comme étant le plus urgent dans le contexte présent.

Je conclus, M. le Président, en disant qu'on a écouté les discours du nouveau premier ministre et que tout à coup on a vu apparaître un agenda législatif déconnecté de ça, déconnecté de la réalité économique d'aujourd'hui, un agenda législatif qui date quasiment, quand on regarde les thèmes qui y sont traités, des années soixante-dix. Quand je regarde un agenda législatif des années soixante-dix, je me dis: On aurait eu 20 ans pour adopter toutes ces choses-là, et je ne vois pas en quoi, en cette fin de session, il y a une urgence.

Je me permets de dire que la facilité et la quasi-allégresse avec laquelle le leader du gouvernement utilise cette procédure-là, de bâillon de fin de session, et le peu de rigueur avec laquelle il invoque l'urgence m'inquiètent, compte tenu que c'est lui qui est ministre responsable de la Réforme parlementaire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Je cède maintenant la parole au député de Masson.


M. Yves Blais

M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Nous allons essayer de descendre du mont. Il y en a qui sont sur le faîte de leur gloire, je leur en sais gré. Mais, de temps en temps, il faut descendre de notre mont pour voir en bas ce qui se passe, et c'est justement cette motion qui nous ramène à la réalité.

C'est malheureux, M. le Président, que nous ayons à faire une motion de clôture. C'est très malheureux. Les raisons en sont simples, c'est que l'obstruction systématique de l'opposition... Nous avons déjà été dans l'opposition, mais de l'obstruction systématique ciblée comme celle que l'opposition actuelle fait, c'est menaçant, presque, pour la démocratie, M. le Président.

Ce n'est pas pour rendre service au peuple qu'on a fait de l'obstruction sur certaines lois, c'est pour miner la capacité et la crédibilité du gouvernement d'être capable de légiférer convenablement, de un. Et, de deux, ils ont choisi toutes les lois qui pouvaient aussi miner sa crédibilité financière, parce que toutes les lois qu'ils ont boycottées, ce sont des lois qui avaient un contexte financier. C'est malheureux. Parce que, l'an passé, nous avons respecté notre budget, nous sommes francs, ici, nous avons respecté le déficit dans notre budget. Cette année, nous avons dit: Nous le ferons, nous allons le respecter, notre déficit. Eh bien, pour essayer de nous faire mentir, on fait de l'obstruction systématique sur tout ce qui rend service à la population et, en même temps, aide à pondérer nos dépenses. Et c'est assez simple à comprendre. Je n'ai, moi aussi, que cinq minutes. Je tiens à dire: Regardons les projets de loi un par un. La loi n° 37, les lois n° 11, n° 20, n° 116, n° 33 et n° 32, chacune de ces lois-là a un impact direct.

Prenons la loi n° 32, où c'est collecter nos dus. Collecter nos dus. Le Vérificateur général nous a dit: Collectez vos dus. Il y a 2 300 000 000 $ de dus au gouvernement. La loi n° 32 nous donne des moyens d'aller collecter une partie de nos dus. On s'y objecte, de l'autre côté. On a été 10 ans sans collecter nos dus. On veut collecter nos dus. Tous les gens qui doivent de l'impôt au gouvernement se doivent de le payer.

La loi n° 33. Double volet: 1 200 000 personnes qui n'ont aucun service, aucun médicament gratuit, aucune assurance. De ces gens-là, 300 000 sont des enfants, 800 000 sont des gens qui gagnent peu, des petits salariés. Il faut que ces gens-là soient protégés, nous le faisons. Et le gouvernement va verser 276 000 000 $ de pilules, des médicaments dans les hôpitaux et 800 000 000 $ en dehors des hôpitaux pour les favoriser. Et il va chercher 200 000 000 $ supplémentaires. Ça veut donc dire que, dans les fonds consolidés, nous allons chercher encore 600 000 000 $. C'est énorme, l'apport que l'on fait, directement avec le fonds consolidé, pour aider 1 200 000 personnes. On se doit de le faire et on le fait.

Ensuite, la loi n° 116, la fusion des centres d'administration. On fusionne des administrations pour que ça coûte moins cher et pour donner un vrai service.

C'est court, cinq minutes, M. le Président, mais je tiens à vous dire que les lois où l'opposition a choisi de mettre un couteau dans le dos aux réalisations que le gouvernement a faites l'an passé... Et on met un couteau dans le dos aux réalisations que l'on veut faire cette année. Votre couteau, la lame n'est pas assez pointue. Notre leader avait une loi pour la recevoir. Et nous allons réussir ce que vous ne voulez pas qu'on réussisse, balancer notre budget, être sociaux-démocrates et donner de bons services à l'ensemble des citoyens. Je vous remercie, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Masson. Je cède maintenant la parole au député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. C'est une journée triste dans l'histoire du Québec et c'est une journée humiliante pour le ministre délégué au Revenu. Ça a commencé ce matin avec le bulletin de Michel David: «...Roger Bertrand sont condamnés à vivre dans l'ombre de Guy Chevrette et Bernard Landry.»

Une voix: M. le Président...

M. Williams: «Il doit être très humiliant de devoir jouer ainsi les figurants.»

Une voix: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Vous savez, M. le Président, qu'en cette Chambre nous ne pouvons citer ou nommer un ministre autrement que par son titre ou que par sa circonscription. Et on ne peut faire indirectement ce qu'on ne peut faire directement. Donc, à ce moment-là, quand on lit un texte où est mentionné un ministre ou un député, on doit faire les modifications qui s'imposent afin de faire en sorte que la règle soit respectée.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Nelligan, vous qui êtes un parlementaire de carrière, avec beaucoup d'expérience, je vous prierais de vous plier à cette exigence de notre règlement. M. le député.

(17 h 50)

M. Williams: Ça doit être une journée humiliante pour le ministre délégué au Revenu, celui que Michel David a cité – je peux nommer le ministre délégué au Revenu – effectivement, c'est son bulletin que nous avons trouvé ce matin.

Ça a commencé comme ça, M. le Président, et, maintenant, cet avant-midi, son leader parlementaire est arrivé avec le bâillon, un bâillon sur un projet de loi aussi important devant la population québécoise et, avec ça, son deuxième projet de loi devant cette Chambre; il arrive avec un bâillon. Le ministre délégué au Revenu, quand il était président de l'Assemblée nationale, avant qu'il perde ce poste, il avait compris que les règles des députés sont importantes, il avait compris que les règles démocratiques fondamentales, que nous avons ici, en cette Chambre, doivent être protégées. Maintenant, comme deuxième loi comme ministre délégué au Revenu, il arrive avec un bâillon.

Pendant deux jours, M. le Président – et je vais expliquer – moins de 14 heures, nous avons essayé de défendre les droits des contribuables. Nous avons, le Parti libéral a essayé de défendre les droits fondamentaux du peuple québécois, des Québécois et des Québécoises. Mais, ce matin, mardi – nous ne sommes pas arrivés à 18 heures, vendredi; c'est mardi, nous avons encore quatre jours – les premières victimes, encore une fois, de ce gouvernement au double langage, ce sont nos droits, nos droits parlementaires.

Je comprends mal, M. le Président, comment le ministre délégué au Revenu, ancien président de cette Chambre, peut arriver avec un bâillon comme ça. Parce que ce projet de loi est en train de faire une invasion dans la vie privée de la population québécoise. Effectivement, il veut améliorer ça. Mais n'oubliez pas que nous avons commencé à la toute dernière minute avec ce projet de loi. Et nous avons vu des articles: «Le fisc réclame des pouvoirs plus étendus que ceux de la police»; «Le fisc fait fausse route»; «Jacoby s'emporte contre les Finances»; «Jacoby parle d'atteinte abusive à la vie privée»; «Un chèque en blanc au Revenu». C'était sur le projet de loi n° 32, quand nous avons commencé.

Mais, vous vous rappellerez, M. le Président, il n'a pas tout de suite appelé ce projet de loi. Moi-même, j'ai insisté pour avoir des audiences publiques. Et, avec les négociations, finalement, nous avons eu un groupe restreint, huit groupes, si ma mémoire est correcte. Ils ont, l'un après l'autre, critiqué ce projet de loi. Quelques jours plus tard, le ministre, à la toute dernière minute encore... Et j'ai questionné le leader pour avoir les amendements, et, finalement, ça a été nécessaire de les demander ici, en Chambre, pour avoir ces amendements. Deux jours d'étude de ce projet de loi, moins de 14 heures, mais nous avons passé la moitié de ce projet de loi, M. le Président. Quatre articles sur huit. Nous avons travaillé avec le côté ministériel pour essayer de bonifier ce projet de loi. Mais, maintenant, M. le Président, on arrive avec une motion en raison de l'urgence de la situation.

M. le Président, quelle urgence? Quelle urgence est-ce qu'on trouve maintenant devant cette Chambre? Est-ce que c'est urgent de briser les droits des contribuables? Est-ce que c'est urgent de menacer la vie privée de la population québécoise? Est-ce que c'est urgent de faire de la discrimination contre tout le système de la fonction publique? Est-ce que c'est urgent de cacher ce projet de loi à la population québécoise? Il me semble que c'est exactement ça, M. le Président. Le ministre délégué ne veut pas que la population québécoise soit au courant de ce qu'on peut trouver dans ce projet de loi parce que, chaque fois qu'on questionne ce ministre délégué sur ce projet de loi, on trouve des surprises, et les surprises sont tellement dangereuses.

Nous avons l'article 1 qui a pris un peu de temps à être compris, mais, après que nous l'avons étudié, effectivement, le mot «montant» inclut tous les salaires de la fonction publique. Ils n'ont jamais dit ça devant la population. Tous les salaires de la fonction publique et parapublique. C'est du monde, M. le Président, qui va être discriminé. J'ai reçu une lettre de la CEQ, signée par Mme Pagé: «Un tel amendement crée, à notre avis, une discrimination à l'endroit des salariés des secteurs public et parapublic. Il devrait en conséquence être retiré dudit projet de loi.»

M. le Président, le ministre délégué n'a jamais mentionné cet article. C'est juste à cause de l'opposition qui, un, a insisté pour avoir des audiences publiques, après ça a questionné avec rigueur ce ministre délégué pour savoir ce qui se passait. Après l'étude détaillée, nous avons trouvé effectivement qu'il y avait une discrimination, dans mon opinion, contre la fonction publique et parapublique. Le ministre, peut-être, plus tard, va plaider qu'il y a toute une urgence, qu'il faut faire la bataille contre le marché souterrain, le marché noir. Tout le monde, il y a 125 députés ou bientôt 125 députés dans cette Chambre qui sont pour ça. Il n'y a personne qui est contre ça. Franchement! Voyons donc! Tout le monde veut travailler. Mais, avec un beau discours comme ça, d'une main, il ne peut pas tout mettre de côté les acquis, les droits fondamentaux que nous avons établis ensemble ici, à l'Assemblée nationale.

Urgence, M. le Président. Samedi, le 15 juin, dans Le Devoir : «L'Office estime qu'il faudrait entre six et 18 mois pour l'implantation de sa centrale de données.» Dix-huit mois, M. le Président. Où est l'urgence? Pourquoi le ministre... Dix-huit mois, ce n'est pas cette année fiscale. M. le Président – si je ne suis pas toujours interrompu – il peut utiliser quelques mois pendant l'été pour étudier ça, pour laisser la population comprendre ce que ça veut dire, le projet de loi n° 32, c'est quoi, les règles. Chaque fois que j'ai questionné le ministre délégué, ou plutôt son représentant qui a compris le projet de loi, chaque fois que j'ai questionné ses représentants, j'ai eu une autre réponse. C'est pourquoi je préfère laisser le temps...

Pourquoi il arrive avec une motion d'urgence? Pourquoi il ne prend pas quelques autres semaines? Pourquoi il n'a pas pris les quatre journées qu'il reste ici cette semaine pour étudier ce projet de loi? Il reste juste un autre quatre articles, M. le Président, quatre articles à étudier pour s'assurer que nous n'avons pas brimé les droits fondamentaux de la population québécoise.

Nous avons travaillé de bonne foi avec le groupe ministériel. Mais, avec les lettres qu'on commence à recevoir de l'ACEF, du Barreau, de la CEQ, on commence à se questionner encore une fois: Qu'est-ce que le ministre veut cacher? Pourquoi il dit: Vite, vite, vite, passons la loi, vite, vite, vite, passons la loi? On laisse maintenant juste un autre 10 minutes, un autre 20 minutes plus tard, peut-être vers 3 heures du matin, je ne sais pas. Qu'est-ce qu'il veut cacher? Il est en train de créer une discrimination entre les payeurs de taxes et nos fonctionnaires. Et il y a toute une différence avec ce que le vice-premier ministre a dit, M. Landry, pendant le discours – je m'excuse, le vice-premier ministre, sans le nommer – quand il a dit que, effectivement, il veut s'assurer que la fonction publique montre l'exemple. Ce n'est pas du tout la même réponse que nous avons reçue du ministre délégué du Revenu.

On trouve dans ce projet de loi toute une série de pouvoirs de ficher partout, de chercher l'information sur tout le monde, de chercher l'information sur toutes les municipalités et tous les départements, d'échanger de l'information avec les autres départements et avec les autres niveaux gouvernementaux. Il me semble, M. le Président, qu'une loi aussi fondamentale que ça on doit prendre le temps nécessaire pour étudier ce projet de loi.

Ce n'est pas ma faute, M. le Président, si le ministre délégué n'a pas eu assez d'influence devant son leader et s'il a été «bumpé» vendredi passé par le vice-premier ministre. Ce n'est pas ma faute si le projet de loi n° 29 a été appelé pendant le débat article par article... Nous avons essayé de faire notre travail avec bonne foi, et je pense que le minimum que l'opposition peut demander, c'est: S'il vous plaît, continuez le travail. Il n'y a aucune raison pour arriver avec un bâillon d'urgence mardi matin. Je suis prêt à travailler jusqu'à vendredi, je suis prêt à revenir ici la semaine prochaine, je suis prêt à faire d'autres audiences publiques si c'est nécessaire, et on pourra trouver ensemble un bon projet de loi, et peut-être que le premier mardi du mois d'octobre on pourra arriver avec un projet substantiellement amélioré, M. le Président.

Il me semble qu'il y a une leçon dans tout ça, il y a une leçon assez importante, M. le Président: que la population québécoise doit tellement être prudente. Si je peux passer le message ce soir avec ma courte allocution devant ce bâillon: Soyez prudents, mesdames et messieurs, soyez prudents avec le double langage de ce gouvernement du Parti québécois, soyez prudents concernant les pouvoirs exagérés que le ministre du Revenu cherche, soyez prudents envers un gouvernement qui veut tout savoir, qui veut tout ficher, qui veut être partout. Ce n'est pas un type de gouvernement qu'on veut dans notre société démocratique. Il n'y a aucun débat sur le besoin de collecter nos sommes dues, mais, s'il vous plaît, ne mettez pas les droits fondamentaux de la population québécoise en péril pour faire ça, comme le gouvernement et ce leader parlementaire sont en train de le faire avec nos droits comme parlementaires.

(18 heures)

Il me semble, M. le Président, que le geste que le leader parlementaire est en train de poser aujourd'hui est aussi grave que le pouvoir que le ministre délégué au Revenu veut avoir dans le projet de loi n° 32. La meilleure chose, M. le Président, qu'il peut dire, et j'offre ma collaboration s'il n'a pas brisé mes droits... Et, s'il veut prendre un peu plus de temps, un autre quatre jours, nous allons avoir une chance de trouver toutes les solutions à ce projet de loi. Mais non, malheureusement, c'est plus facile pour l'ancien président de cette Chambre, maintenant ministre délégué au Revenu, de nous bâillonner, de dire: Ce n'est pas important, vos droits, je voudrais avoir tout le pouvoir de tout ficher. Et, M. le Président, je trouve que c'est un geste complètement inacceptable et certainement contre la démocratie de la société québécoise. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Alors, considérant l'heure, je suspends les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 20 h 5)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Nous allons reprendre le débat sur la motion de suspension des règles, et le prochain intervenant: M. le ministre délégué au Revenu et député de Portneuf. Je vous cède la parole.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Je désire saisir cette occasion de prendre la parole quelques minutes sur cette motion visant à permettre l'adoption de différents projets de loi, dont le projet de loi n° 32, et je suis content de le faire à ce moment-ci, quelque deux heures après l'intervention du porte-parole de l'opposition officielle en matière de revenu, le député de Nelligan, parce que, de la façon dont il a argumenté, avec ce que j'oserais qualifier de petitesse dans les arguments, puisqu'il attaquait la personne plutôt que de s'intéresser au contenu du débat, je dois vous dire que, si j'avais pris la parole avant 18 heures, j'aurais risqué de tomber dans la fiente dans laquelle il semble se complaire.

Ceci étant dit, j'en viens au noeud même du sujet qui nous amène ici aujourd'hui. M. le Président, l'opposition officielle, à l'occasion de l'examen article par article d'un projet de loi fort important, le projet de loi n° 32, a utilisé toutes les manoeuvres de diversion qu'on peut imaginer pour faire en sorte que la commission parlementaire du budget et de l'administration fasse du surplace, n'avance pas, évite d'aborder les questions de fond dans la plupart des articles, et en particulier dans certains articles à l'intérieur de ce projet de loi. Je rappelle que le projet de loi n° 32 est un projet de loi qui vise essentiellement à assurer davantage d'équité en cette société en faisant en sorte qu'on puisse donner aux autorités fiscales ces quelques outils qui leur sont nécessaires pour faire en sorte qu'on puisse lutter efficacement contre le travail au noir et l'évasion fiscale, de façon à faire en sorte que, chez nous, toute personne, tous les contribuables paient essentiellement ce qui est dû, finalement, à l'ensemble de la société via le ministère du Revenu. Le projet de loi n° 32 prévoyait donc un certain nombre de dispositions via, notamment, l'accès à un certain nombre de fichiers de façon à permettre, justement, au ministère du Revenu de faire mieux son travail.

Au terme d'un processus fort intéressant où nous avons eu l'occasion d'entendre des groupes, lors d'audiences particulières, venir nous expliquer comment le projet de loi pouvait être amélioré éventuellement, nous avions constaté une convergence intéressante dans les propos qui nous amenait à conclure à la nécessité, effectivement, d'introduire dans le projet de loi une disposition qui aurait permis une vérification a priori, un certain mécanisme de contrôle a priori quant aux modalités selon lesquelles le ministère du Revenu pourrait effectivement faire des couplages de fichiers. Et, par voie de conséquence, nous avons proposé un amendement, entre autres, qui visait justement à introduire une telle modalité.

Or, M. le Président, nous n'avons jamais pu nous rendre, en deux jours intenses de travail avec mes collègues de ce côté-ci de la Chambre, membres de la commission parlementaire, à l'article en question, qui, de mémoire, est le cinquième article ou le sixième article. Nous en sommes restés, à toutes fins pratiques, au terme de la première journée de travail en commission parlementaire, encore au premier article à examiner. Et cet article-là, M. le Président, et je le cite à l'intention du public qui nous écoute dans le moment pour qu'il puisse juger du caractère frivole de l'attitude de l'opposition officielle dans de tels cas, cet article dit ceci: L'article untel de la Loi sur le ministère du Revenu, remplacé par tel autre article, est de nouveau remplacé par le suivant: «Pour l'application du deuxième alinéa de l'article 30.1 et de l'article 31.1.1, lorsqu'un montant doit être payé par un organisme public, l'organisme ou son agent doit en informer le ministre selon les conditions et les modalités prescrites en vertu de l'article 31.1.5.»

Neuf heures, M. le Président, à examiner cet article-là, et, au terme de toute une journée de travail, on ne l'avait même pas adopté encore. Après deux jours de travail intense en commission parlementaire, où mes collègues auraient souhaité pouvoir intervenir sur le fond des choses, on en était encore à discuter des quelques premiers articles du projet de loi. Au total, on aura, en deux jours, adopté quatre articles, et on n'aura pas pu arriver, justement, aux aspects les plus fondamentaux de ce projet de loi et, justement, à la proposition d'amendement qui visait à faire écho à ce que tous les organismes, sauf exception, nous avaient indiqué comme étant une priorité, c'est-à-dire de prévoir des mécanismes qui baliseraient l'action du ministère du Revenu dans ses opérations de comparaison de fichiers.

(20 h 10)

M. le Président, il s'agit là, manifestement, de mesures dilatoires qui visent, justement, à empêcher le gouvernement de réaliser trois choses. Bien sûr, aller chercher 200 000 000 $ de plus de revenus qui sont dus à l'État dans l'économie au noir et l'évasion fiscale, de faire en sorte que chaque citoyen ait la conviction raisonnable que son voisin paie aussi ses impôts. C'est ça qu'on nous empêche de faire dans le moment par ces tactiques-là. Deuxièmement, faire en sorte, de cette façon, à réaliser plus d'équité et assurer la solidarité dans notre société, puisqu'en allant chercher ces revenus-là, ça veut dire 200 000 000 $ de moins cette année en compressions, par exemple, donc en réduction de services, ça veut dire la capacité que conservent l'État et le gouvernement de continuer à financer nos services, des services de santé, des services dans le domaine de la justice, dans le domaine de la sécurité publique, bien sûr, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine social.

M. le Président, on empêche carrément ce côté-ci de la Chambre et, finalement, l'ensemble du mécanisme parlementaire, de faire correctement son travail et on nous force, de cette façon-là, effectivement, dans l'intérêt public, à prendre les dispositions qui sont prévues par la motion présentée par mon collègue, leader du gouvernement. Alors, il me fera plaisir de voter pour cette motion parce que je pense qu'elle correspond à une réponse tout à fait dosée par rapport aux tentatives d'éviter, finalement, qu'on discute des vraies choses dans cette Assemblée. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre délégué au Revenu. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me lever ici pour plaider contre cette motion. Moi, j'étais étonné, ce matin, de trouver le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, inclus dans la motion qui est devant nous ce soir. C'est étonnant, parce que, s'il y a une obstruction systématique qui a été faite, ça a été fait par la ministre elle-même pour essayer d'éviter toute discussion de son projet de loi devant la commission des affaires sociales.

Je veux juste faire un bref rappel des faits. Jeudi de la semaine passée, à midi, la ministre a convoqué en catastrophe quelques groupes pour être entendus sur le projet de loi malgré le fait qu'elle avait pris elle-même l'engagement dans cette Assemblée de prendre le temps qu'il faut pour organiser les consultations particulières. Elle n'a pas respecté son engagement, elle a appelé les groupes en catastrophe, à trois heures d'avis, pour descendre de Montréal pour venir ici, à Québec, témoigner. Les groupes n'étaient pas capables d'arranger une visite, alors nous avons défendu, jeudi soir, le droit de parole de trois groupes. On aurait pu présenter les motions une après l'autre, mais nous n'avons pas fait ça. Nous avons présenté trois motions, parce que je pense que c'est toujours important, comme parlementaires, comme députés de l'opposition, de défendre le droit de parole des organismes communautaires, dans ce cas-ci, qui travaillent dans le domaine des services de garde de nos enfants.

Alors, c'est ça que nous avons fait, et je pense que nous avons eu raison. Et la preuve de ça, c'est que c'est la ministre elle-même, hier, qui a décidé de convoquer les mêmes trois groupes que nous avons défendus en commission parlementaire. Alors, je pense qu'il y a une preuve tangible que nous avons eu raison. C'est le fait que la ministre ait décidé hier de convoquer les trois groupes ici pour 11 heures ce matin. Alors, imaginez, M. le Président, l'insulte faite à ces trois groupes. Au moment d'arriver ici, dans le salon du Conseil législatif pour témoigner, pour donner leur opinion, leurs perspectives pour le projet de loi n° 11, on dépose cette motion dans le salon bleu. Alors, au moment où le monde, de bonne foi, est arrivé ici pour témoigner, pour ajouter des modifications, pour suggérer comment la ministre peut bonifier son projet de loi, le bâillon arrive.

Alors, est-ce que c'est sérieux, M. le Président? Est-ce que c'est une façon de traiter les citoyens et les citoyennes du Québec qui ont pris le temps? Ce sont toutes des personnes qui travaillent à temps plein, qui ont trouvé de la relève, qui ont trouvé une façon de descendre ici, à Québec, parce qu'ils trouvent que notre processus parlementaire est important. Ils trouvent que c'est important, comme groupe, de venir témoigner devant une commission parlementaire. Ils arrivent ici à 11 heures le matin et l'accueil chaleureux de la ministre, c'est le bâillon: Malgré votre témoignage, je ne veux rien savoir de vous autres, je vais procéder à l'adoption de mon projet de loi sans vous écouter.

Alors, c'est ça, le processus qui nous a amenés... Nous avons écouté les trois groupes. Alors il nous restait, après la présentation du troisième groupe, de 16 heures à 18 heures et de 20 heures jusqu'à la fin des débats, ici... Mais, imaginez-vous, ça nous a donné uniquement deux heures avant le souper pour procéder à l'étude détaillée. Nous avons déjà adopté quatre articles vendredi, de bonne foi, pas d'obstruction. Nous avons adopté une autre douzaine d'articles aujourd'hui. Mais, imaginez-vous, dans les deux heures qu'il nous restait, c'était quoi, la première demande de la ministre? Je demande une suspension pour une demi-heure parce que je dois aller, j'ai une urgence. Alors, ce n'est pas moi qui ai fait de l'obstruction sur le projet de loi n° 11, M. le Président, c'est la ministre. Alors qu'il ne nous restait que deux heures de temps pour regarder son projet de loi, elle a trouvé une autre urgence plus importante. Ce n'était pas sérieux, du départ jusqu'à la fin, M. le Président, la façon dont elle a traité les parlementaires, les membres de la commission des affaires sociales, les membres de cette Chambre. Parce qu'elle a pris des engagements; elle a dit des choses qui ont induit la Chambre en erreur. Parce qu'elle a dit qu'elle a contacté le monde; ce n'est pas ce qui s'est passé, M. le Président.

Alors, dire que nous autres, on fait de l'obstruction sur le projet de loi n° 11, c'est loin d'être la vérité. Comme je l'ai dit, nous avons travaillé ça. Moi, j'ai préparé les amendements. On était prêt dès le 15 mai, parce que c'est un projet de loi qui n'a pas été déposé hier. On était prêts depuis cinq, six semaines, en tout temps, parce que le service de garde, ce qui arrive pour la protection de nos enfants, c'est très important pour l'opposition. Et on avait des choses à bonifier. Mais il y a beaucoup d'éléments dont nous avons parlé au débat sur l'adoption de principe, il y a des éléments qui sont très importants dans le projet de loi qui est ici, notamment sur les heures de garderie, sur les jardins d'enfants, un pouvoir d'inspection accru pour mieux protéger nos enfants. Il y a une série d'articles où on peut empêcher des personnes de travailler dans les garderies à cause des antécédents judiciaires, et tout ça.

Il y a des bons éléments; nous avons dit ça. Il y a d'autres éléments auxquels on s'oppose, surtout l'exclusion du secteur privé dans la gestion de nos services de garde, mais c'est le bon débat, on a le droit d'avoir un bon débat. Mais la ministre, dès le départ, ne voulait rien savoir. Alors, qu'est-ce qu'elle a dit: Oh! les commissions parlementaires, notre processus parlementaire, ce n'est pas important. Moi, la ministre, moi, j'ai fait mes consultations à moi. Moi, j'ai mon projet de loi de toute beauté, c'est de la poésie, on ne peut pas changer une virgule dans ça.

Ce n'est pas vrai, M. le Président. Et si le gouvernement est sérieux quand il parle de valoriser le travail des députés, il doit regarder sérieusement ce qui s'est passé avec le projet de loi n° 11 et, comme acte de conscience, comprendre qu'il n'y avait aucune occasion, ni pour l'opposition ni pour les regroupements qui travaillent dans le domaine des services de garde, d'avoir des consultations, de venir ici, à Québec, de témoigner, de suggérer les bonifications qu'on veut mettre dans notre projet de loi.

Alors, oui, M. le Président, il y avait obstruction systématique pour l'étude du projet de loi n° 11, et c'était mené par la ministre de l'Éducation, et c'est à cause de ça et pas à cause de l'opposition que maintenant elle a décidé: Je dois faire adopter mon projet de loi et je ne veux pas aller rencontrer les députés de l'opposition et les regroupements communautaires, je n'ai pas le temps de faire ça.

Alors, c'est ça, le processus qui nous amène ici ce soir, M. le Président. C'est complètement inacceptable, la façon, le manque flagrant de respect envers l'opposition, mais, plus important, envers les regroupements qui travaillent dans le domaine des garderies, envers les parents et les enfants qui sont gardés, jour après jour, dans les services de garde au Québec.

Alors, je vais voter contre cette motion, surtout la motion, qu'est-ce qui se fait... le projet de loi n° 11, parce qu'on avait le temps, on avait la volonté de procéder de l'opposition, et l'obstruction a été faite par la ministre elle-même. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jacques-Cartier. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Marie-Victorin. Mme la députée.


Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Je vous remercie, M. le Président. Alors, M. le Président, effectivement, il y a urgence parce que nous sommes arrivés en pleine fin de session, il y a des lois très importantes pour notre gouvernement et il faut que ces lois-là, en fait, soient adoptées avant le congé estival de l'ensemble des députés. Et ce n'est pas parce qu'on n'a pas voulu prendre le temps nécessaire, de notre côté. On a fait une planification, le leader du gouvernement a fait une planification de tous les projets de loi pour favoriser, justement, une plus grande écoute des projets de loi et un plus grand échange entre les parlementaires sur les projets de loi, M. le Président.

(20 h 20)

Mais il y a une place qu'on ne contrôle pas, M. le Président, c'est l'opposition. L'attitude que prendra le leader, premièrement, de l'opposition par rapport à nos travaux en Chambre et, deuxièmement, l'attitude de l'ensemble des députés de l'opposition, leur comportement en commission parlementaire, et ce, là-dessus, on n'y peut rien comme gouvernement, c'est une question d'attitude et de comportement. Alors, je considère que l'opposition était de mauvaise foi à certains égards sur certaines commissions parlementaires lorsqu'il s'agissait de discuter article par article de différents projets de loi dont il est question au niveau de l'urgence que nous imposons à l'heure actuelle à cette Chambre pour la fin de nos travaux parlementaires.

Je comprends, en fait, la frustration de certains parlementaires de l'opposition. Je pense que, pour eux, en fait, ils n'ont pas les avantages de dire que c'est de leur cru que, finalement, on peut adopter ces projets de loi là. Je comprends, parce que j'ai déjà passé par l'opposition. Je sais ce que c'est, être dans l'opposition, et quelquefois, bien sûr, nous avons évidemment le réflexe de vouloir bonifier, améliorer un projet de loi. Mais, d'autre part, quand on fait de l'obstruction systématique pour empêcher que les travaux puissent s'accélérer à une vitesse normale, comme ça doit se faire pour l'étude d'un projet de loi article par article... Parce que c'est tout à fait logique, c'est tout à fait correct qu'on puisse vouloir échanger, bonifier, améliorer, mais, quand on est rendu à passer plus de neuf heures sur un article d'un projet de loi et qu'on n'est capable d'arriver à aucune entente, qu'on n'est pas capable, même, d'adopter ce projet de loi, je considère qu'à ce moment-là, il y a mauvaise foi. Ce n'est pas une façon de vouloir améliorer ou faire avancer nos travaux, bien au contraire. C'est une façon, pour l'opposition, de gagner du temps, d'empêcher que le gouvernement puisse faire passer et voter ses lois et aussi de faire en sorte que l'odieux retourne au niveau du gouvernement plutôt que de l'opposition.

C'est sûr que l'opposition veut dire qu'elle a joué un bon rôle. Ils ont, en fait, empêché que certains projets de loi puissent passer parce qu'ils pouvaient être négatifs pour l'ensemble de la population. Mais, M. le Président, s'ils avaient travaillé à bonifier les projets de loi, je pourrais vous dire qu'ils auraient joué un rôle positif dans l'opposition. Mais ce n'est pas le cas à l'heure actuelle. Nous sommes obligés, malheureusement, de constater que l'opposition, actuellement, ce qu'elle fait, c'est tout simplement de l'obstruction qui nous empêche de fonctionner au niveau de nos travaux. Alors, j'espère qu'ils auront compris et que, à l'avenir, ils pourront partager avec le gouvernement un échange fructueux et responsable. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Marie-Victorin. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. À entendre la députée de Marie-Victorin, on serait porté à dire: Pauvre gouvernement! Il a seulement une majorité de 30 sièges dans cette Assemblée, les résultats de tous les votes sont ainsi décidés d'avance, et pourtant, on a un gouvernement qui envoie des représentants se lever en cette Chambre pour pleurer sur leur sort et dire: L'opposition fait de l'obstruction, on est là, on est élus, c'est nous qui devrions gouverner – sans respect pour les lois et règlements de l'Assemblée nationale du Québec.

Je suis désolé pour mon estimée collègue qui vient de parler, mais je dois lui apprendre que, même à l'époque de Duplessis, il y avait une opposition. Les règles de l'Assemblée nationale sont là pour s'assurer que toutes les voix soient entendues dans cette Chambre, n'en déplaise à mon honorable collègue qui vient de parler. Et, oui, l'opposition officielle va continuer de faire le travail qui est le sien aux termes de notre système parlementaire britannique, c'est-à-dire un travail de critique de la législation qui est proposée par un gouvernement qui, rappelons-le, a à sa tête un premier ministre désigné qui n'avait aucun mandat pour commencer le virage à droite qu'il vient de commencer, parce qu'il n'est jamais allé en élection là-dessus, et qui nous fait présenter des projets de loi qui ne respectent pas des droits fondamentaux dans notre société, droits fondamentaux qui sont pourtant garantis aux termes de la Charte des droits et libertés de la personne.

Un exemple d'une telle loi, M. le Président, qui fait défaut de respecter les droits fondamentaux garantis par la Charte des droits et libertés de la personne est, bien entendu, le projet de loi n° 20 portant sur la réforme de l'aide juridique. Évidemment, dans le peu de temps dont on dispose dans la motion de suspension des règles de l'Assemblée nationale, on ne peut pas aller dans tous les détails du projet de loi n° 20. Mais qu'il suffise de dire qu'il s'agit d'un des projets de loi que ce gouvernement souhaite faire adopter en imposant sa motion de clôture, le bâillon, brimant ainsi l'ensemble des citoyens de leur possibilité d'avoir une voix au chapitre des modifications législatives qu'il faut apporter pour veiller au respect de ces lois et ces droits fondamentaux.

M. le Président, aussi récemment que le 14 juin 1996, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse du Québec a écrit au ministre de la Justice pour lui dire que son projet de loi portant sur la réforme de l'aide juridique manquait à plusieurs égards de respecter la Charte des droits et libertés de la personne. Et il faut aussi dire, M. le Président, que le ministre de la Justice et Procureur général, qui propose de mettre le bâillon sur le projet de loi n° 20, est la même personne qui est responsable de l'application de la Charte des droits et libertés de la personne.

Or, M. le Président, à plusieurs chapitres, dont non le moindre est le fait que le ministre de la Justice, responsable des procureurs de la couronne, va mettre tout le monde dans une situation plus qu'inconfortable... Il prévoit dans son projet de loi que, seulement s'il est probable qu'une déclaration de culpabilité entraînerait une peine d'emprisonnement, on va avoir le droit à l'aide juridique. Comme le souligne très justement la Commission des droits de la personne en invoquant non seulement la Charte québécoise, mais aussi le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ainsi que la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ils sont en train de dire que tu ne peux pas limiter ainsi le droit de quelqu'un à la représentation par avocat sur la base d'une telle disposition parce que, comme le rappelle la Commission des droits de la personne, la jurisprudence reconnaît unanimement que le tribunal détient la discrétion ultime en matière de sentence.

Alors, M. le Président, que dire d'un ministre de la Justice qui ne sait même pas que les procureurs de la couronne dont il est responsable ne sont pas les personnes qui décident à l'avance si, oui ou non, il va y avoir une peine? C'est le juge. On a eu l'exemple du ministre des Affaires municipales, cette semaine, qui a tenté de présenter un projet de loi dans cette Assemblée – il l'a fait, mais, heureusement, ça n'a pas franchi d'autres étapes – qui était pour entériner les tentatives du gouvernement d'avoir gain de cause devant les tribunaux. Le seul problème pour le gouvernement là-dedans, c'est que, jusqu'à date, à quatre reprises, les tribunaux se sont prononcés contre la Société d'habitation du Québec. Qu'est-ce que la SHQ a convaincu le gouvernement de faire? Pas de problème, on va modifier la loi rétroactivement pour se donner raison.

C'est comme ça que ce gouvernement fonctionne, M. le Président. Il ne comprend pas la distinction qu'il y a à faire entre le travail de cette Assemblée nationale, qui édicte les lois, le travail des tribunaux, qui doivent interpréter et dire la loi, et celui de ceux, comme les officiers de justice, qui sont les procureurs de la couronne, qui sont là pour faire appliquer la loi. C'est cette confusion totale qui amène le ministre à faire fi de l'avis de la Commission des droits de la personne et des nombreux autres groupes et individus qui sont venus lui dire que son projet de loi sur l'aide juridique avait des gros problèmes.

M. le Président, je peux me permettre de citer une lettre signée par 42 groupes communautaires parvenue le 13 juin 1996 au ministre de la Justice et qui résume bien certaines des difficultés avec ce projet de loi. Ils disent au ministre – et ça, c'est important, parce que tantôt le ministre va se lever pour dire qu'il est en train d'étendre la couverture d'aide juridique – «Il est faux de prétendre, comme vous le faites, qu'il s'agit d'une amélioration. Avec la réforme proposée, les personnes à faibles revenus du Québec n'auront droit au service d'un avocat que si elles sont prises avec une problématique juridique dont un tribunal est ou sera saisi et, en plus, pour un nombre limité de services.» C'est ça qu'ils sont venus nous dire.

Ils ont aussi mentionné que le projet de loi n° 20, M. le Président, vient modifier l'essence même de notre régime d'aide juridique. Et c'est pour ça qu'ils disent que les organismes communautaires avec lesquels – ça, c'est la clinique juridique Pointe Saint-Charles et Petite Bourgogne – ils travaillent partagent leur opinion et les appuient. Et, effectivement, ils mentionnent qu'ils sont au nombre de 42. Ils disent au ministre: «Nous disons non à votre proposition que nous qualifions de marchandage par lequel, pour un simulacre d'augmentation des seuils d'admissibilité financière, vous coupez des pans complets de services que l'on doit qualifier d'essentiels compte tenu de ce qu'est la pratique du droit de l'aide juridique.»

(20 h 30)

M. le Président, le nouveau bâtonnier du Québec, M. Claude Masse, dans une interview qu'il accordait au journal La Presse dimanche, disait et rappelait qu'il avait lui-même commencé sa carrière à la clinique juridique Pointe Saint-Charles et Petite Bourgogne, que, pour lui, c'était essentiel de respecter ces droits-là, et notamment au chapitre du fait qu'une personne accusée de violence conjugale ou d'une agression sexuelle, dans les cas où elle ne risquerait pas de peine d'emprisonnement, va être la personne à contre-interroger le témoin. Le bâtonnier du Québec, M. le Président, a dit que c'était complètement inacceptable. Qu'est-ce que le ministre propose en échange de ça? Croyez-le ou non, M. le Président, démontrant encore une fois son incapacité de comprendre la distinction des rôles des uns par rapport aux autres, il dit que, lui, ministre, va donner des directives aux procureurs de la couronne pour ne pas que ça se fasse.

M. le Président, la loi est là. C'était le moment ou jamais de régler ce problème pour ne pas qu'il y ait de discrétion, pour ne pas que la difficulté surgisse. Qu'est-ce qu'il nous propose? Une directive. Je soupçonne que même ce ministre de la Justice, M. le Président, est conscient qu'un ministre ne peut pas, par règlement, contrecarrer la volonté claire de l'Assemblée nationale, et à plus forte raison lorsque l'Assemblée nationale est en train de voter une loi qui dit le contraire de ce que lui dit qu'il va faire par directive, par simple déclaration ministérielle, M. le Président. Ça n'a pas de bon sens.

Qu'ont eu à dire les groupes sociaux là-dessus, M. le Président? Je peux vous citer la COPHAN, qui est le groupe qui représente des organisations pour personnes handicapées au Québec. Ils disent ceci: «Enfin, nous vous avons également mentionné qu'il nous semblait aberrant que des femmes ayant des incapacités puissent se retrouver, en tant que victimes de violence conjugale ou d'agression sexuelle, à devoir confronter leur agresseur, puisqu'elles n'auraient pas d'avocat dans le dossier.»

Ils font référence aussi là-dedans, M. le Président, au système d'assurance-médicaments que le gouvernement est aussi en train de tenter d'imposer par bâillon. Et la référence est tout à fait opportune, car le ministre de la Justice, voyant comment son collègue, le ministre de la Santé, proposait de s'en tirer dans le dossier de l'assurance-médicaments, est allé voler une page dans son livre de jeu. Il est en train, comme le disent les 42 groupes communautaires, sous un simulacre d'augmentation des seuils, de diminuer le panier de services couverts. Comment il fait ça? Très simplement. Une personne seule, au salaire minimum, à temps complet n'est en aucun cas, avec ou sans contribution, admissible à l'aide juridique. Si cette personne-là travaille 37 heures par semaine au salaire minimum, elle va être admissible à l'aide juridique, mais seulement si elle paie 800 $ de ses poches. Est-ce que vous connaissez des gens, M. le Président, qui travaillent au salaire minimum, à moins que temps complet, qui peuvent se trouver 800 $? Mais, ça, comme le remarque la COPHAN, M. le Président, c'est en plus des 750 $ qui vont être nécessaires en assurance-médicaments. Alors, vous voyez l'astuce. Ce qu'on fait, c'est qu'on va chercher, dans le cas de l'aide juridique, 16 000 000 $ dans les poches des citoyens et on dit: Mais regardez, on est gentils, on est en train de distribuer cet argent-là plus largement.

Et, encore une fois, M. le Président, ce n'est pas étonnant que le ministre puisse enfin se lever et dire que l'ancienne bâtonnière était d'accord avec son projet de loi, parce qu'il est en train de prendre cet argent-là puis il le répartit sur un plus grand nombre d'avocats. C'est facile de comprendre l'appui en question. Mais c'est intéressant de constater que le nouveau bâtonnier a exprimé des réserves autrement plus importantes en fin de semaine à l'égard du projet de loi du ministre de la Justice, M. le Président.

Il y a aussi un autre sujet qui est particulièrement préoccupant, et c'est le sujet du logement. L'effet combiné de deux projets de loi présentés par le ministre de la Justice risque d'avoir un impact négatif très important sur l'ensemble des citoyens du Québec. D'abord, M. le Président, dans le projet de loi n° 7, qui traitait surtout d'une réforme importante, que nous avons appuyée, M. le Président, une réforme importante du Code de procédure civile pour prévoir une procédure accélérée dans les matières de moins de 50 000 $, le ministre a glissé en toute fin quelques articles qui ne traitaient pas du tout du même sujet. Et on lui a parlé de ça en Chambre – mon collège, le député de Notre-Dame-de-Grâce, qui est porte-parole de l'opposition officielle en matière de logement, l'a soulevé aussi – il a glissé là-dedans aussi la question des appels à partir de la Régie du logement. M. le Président, jusqu'à maintenant, ça a toujours été un droit de porter en appel une décision de la Régie du logement. C'était compréhensible, ça affecte une des choses fondamentales dans la vie. Le logement, le gîte, l'endroit où l'on vit, c'est fondamental. Avec la nourriture et les vêtements, ce sont des choses fondamentales dans la vie, et on prévoyait que les gens avaient un droit d'appel. Le ministre l'a éliminé, sauf sur permission, ce qui, de la manière que la loi a été rédigée, va être assez rare.

Dans le projet de loi n° 20, M. le Président – et beaucoup de groupes sont venus le dénoncer également – le ministre est en train d'éliminer, à toutes fins pratiques, l'aide juridique en matière de logement, sauf en cas d'expulsion de la propriété par le propriétaire. Comme l'a dit un des groupes communautaires qui a écrit très récemment, c'est le Regroupement information logement: De nombreuses interventions en droit social et en droit civil sont totalement exclues du projet de loi sur l'aide juridique, dont certains services en matière de logement et droit de la consommation. Et il continue en disant: C'est pourquoi ils dénoncent vigoureusement le projet de loi n° 20 et ils réitèrent leur soutien au travail accompli par ceux... y compris la clinique juridique Pointe-Saint-Charles et Petite-Bourgogne, pour aider justement les plus démunis de notre société, les gens qui ont effectivement besoin de soutien, besoin qu'on vienne en aide à leurs besoins les plus pressants dans la société.

J'ai entendu aussi tout à l'heure ma collègue du gouvernement exprimer son désarroi devant le fait que l'opposition officielle est en train d'utiliser son droit et son pouvoir d'interpeller le gouvernement sur ces questions si importantes. La Commission des droits de la personne est venue dire au ministre de la Justice qu'il faisait fausse route à plusieurs chapitres à l'égard de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne. Quand on fait face à un ministre qui refuse d'entendre raison, qui, lui-même, refuse toute modification...

Au moment d'imposer le bâillon, M. le Président, on était en train de discuter d'une modification proposée par l'opposition qui aurait réinstauré le droit à de l'aide juridique dans le domaine du logement. Le ministre de la Justice ne voulait pas entendre parler de ça ni de toutes les autres choses qu'on lui avait proposées, y compris pour éviter qu'une femme soit contre-interrogée par la personne qui est l'auteur d'une agression sexuelle à son endroit, M. le Président. C'est ça, la réalité du gouvernement. Alors, entendre ma collègue du gouvernement se lever tout à l'heure comme elle l'a fait et nous dire: Bien, on a fait notre planification estivale – M. le Président, c'est ça qu'elle est venue nous raconter tantôt – le gouvernement a fait sa planification estivale, alors, les pauvres, à côté, la Charte des droits et libertés de la personne, oublions ça...

Le ministre de la Justice va se lever et, comme plusieurs autres de ses collègues au gouvernement, dans des dossiers comme le ministère du Revenu, qui intervient de plus en plus dans la vie privée des gens sans respecter la loi sur l'accès à l'information et de protection de la vie privée, comme dans le domaine des garderies, où on est en train de démolir des pans entiers d'une structure et d'un système qui ont été mis en place au cours des 10, 15 dernières années, dans le domaine des assurances-médicaments et dans plusieurs autres domaines, ce gouvernement est en train de dire que sa seule manière de gouverner, c'est d'imposer le bâillon, bafouer l'opposition, enlever au public son droit d'être entendu sur ces importants projets de loi. C'est ça, M. le Président, l'autre façon de gouverner. Nous, on le sait et, maintenant, de plus en plus, la population est au courant, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. Le temps de parole de l'opposition officielle est épuisé, sauf qu'il y a un cinq minutes et le député indépendant... Il y a 10 minutes, en fait, qui n'ont pas été utilisées, mais il pourrait y en avoir cinq pour le groupe de l'opposition officielle, si vous le jugez à propos. Il y a encore un cinq minutes disponible, étant donné que les députés indépendants n'interviennent pas pour le moment. Et, pour le Parti québécois, il reste 11 minutes et demie, plus le cinq minutes qui sera ajouté si l'autre député indépendant n'utilise pas son temps. Alors, M. le ministre de la Justice.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, oui, j'ai l'intention d'intervenir sur cette motion parce que, pour avoir travaillé en commission parlementaire depuis déjà presque deux ans, j'ai rarement vu une intention aussi manifeste de faire en sorte qu'un projet de loi ne soit pas adopté, non pas parce que les motifs qu'on invoque sont des motifs qui vont au fond du dossier, mais des motifs qui sont purement et simplement de gagner du temps pour empêcher que le projet de loi ne soit adopté comme tel.

M. le Président, dans le cas du projet de loi n° 20, l'opposition peut difficilement prétendre ne pas avoir eu la chance de se faire entendre, de faire entendre ceux et celles qui n'étaient pas favorables à ce projet de loi, puisque, à la même époque l'an dernier, un autre projet de loi portant le numéro 87 avait été présenté et, en commission parlementaire, des groupes s'étaient fait entendre. Ils sont venus à plusieurs demander que le projet soit modifié de manière substantielle. Le gouvernement s'est rendu à leurs arguments et a reporté à plus tard l'adoption du projet de loi.

(20 h 40)

Entre ce moment et aujourd'hui, il y a eu effectivement la création d'un comité, le comité Schabas, qui a entendu toutes les personnes, tous les groupes qui voulaient se faire entendre relativement à ce projet de loi qui éventuellement serait adopté. Non seulement pouvaient-ils critiquer ce qui avait été déjà proposé, mais ils étaient invités à faire entendre ce qu'ils voudraient voir dans ce projet de loi par rapport à ce qu'ils y trouvaient. Et, effectivement, les groupes qui avaient demandé d'être entendus se sont fait entendre par le comité Schabas, qui a produit, au mois de décembre – 21 décembre 1995 – un rapport qui non seulement faisait le tour d'horizon de l'ensemble du dossier, mais qui faisait aussi des propositions concrètes que l'on retrouve en bonne partie dans le projet de loi n° 20 qui a tenu compte en bonne partie des recommandations faites et en particulier d'une proposition qui consistait à introduire un volet contributoire, mais qui permettait et qui permet, avec un volet gratuit accru au niveau de l'accessibilité, qui donne accès à 650 000 personnes de plus à l'aide juridique.

Je pense qu'on peut dire que cette opposition ne veut absolument pas que le projet d'aide juridique soit adopté. Non seulement la dernière fois où y a-t-il eu des modifications à l'aide juridique pour bonifier les seuils d'admissibilité, pour faire en sorte que des personnes aient accès en plus grand nombre à l'aide juridique, remonte à 1985, alors que le gouvernement était un gouvernement du Parti québécois, mais, pendant 10 ans, M. le Président, ils n'ont absolument rien fait, sauf faire des rapports, sauf essayer de faire quelque chose, faire semblant de faire quelque chose. C'est la commission Macdonald, c'est le Sommet de la Justice, où on promet à tout le monde mer et monde, mais, dans les faits, on ne fait absolument rien.

M. le Président, 10 ans plus tard, le gouvernement du Parti québécois a retrouvé le dossier dans l'état où il l'avait laissé 10 ans auparavant. Le gouvernement libéral n'a absolument rien fait pour permettre à un plus grand nombre de personnes d'être admissibles à l'aide juridique ou encore pour changer autre chose dans la loi. Maintenant, depuis presqu'un an complet, il s'oppose à l'aide juridique. Or, si vous voulez savoir de quelle manière il procède, M. le Président, le 5, le 6, le 7, le 10 et le 11 juin 1996, la commission des institutions a siégé par rapport au projet de loi n° 20. À la demande de l'opposition, nous avons décidé de faire entendre, malgré tout et malgré toutes les consultations qui avaient eu lieu, 10 groupes. Nous n'avons pas refusé 20 groupes, nous avons accepté les 10 groupes proposés et qui ont pu se faire entendre. Ils se sont fait entendre pendant 10 heures en commission parlementaire. Chacun et chacune ont pu parler pendant 20 minutes, le gouvernement a pu poser des questions pendant 20 minutes et l'opposition a pu le faire également pendant 20 minutes.

Après avoir entendu ces groupes pendant 10 heures, les travaux de la commission ont commencé, et nous avons travaillé pendant 26 heures de temps après ces 10 heures. Donc, nous avons mis, à date, 36 heures sur le projet de loi. Et savez-vous à quel article nous sommes rendus? À l'article 6 du projet de loi. Oui, M. le Président, après 36 heures, nous sommes rendus à l'article 6. Si on le prend sur la base et qu'on exclut les consultations, ça fait 26 heures d'étude article par article divisées par le nombre d'articles adoptés, ça fait 5,2 heures d'étude pour adopter un article; 5,2 heures. À ce rythme-là – le projet de loi a 60 articles – savez-vous combien ça prendrait d'heures pour l'adopter? Ça prendrait 312 heures pour adopter ce projet de loi. Bien, 312 heures à neuf heures par jour de travaux en commission, ce qui est le maximum, ça – vous travaillez de 11 heures à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures jusqu'à minuit – ça aurait pris 34 jours et demi pour adopter le projet de loi. Je pense que c'est un non-sens. C'est un scandale, M. le Président. Ces gens ne veulent pas le projet de loi, ils veulent absolument empêcher le gouvernement de permettre à un plus grand nombre de citoyens dans la population d'avoir droit à l'aide juridique, de bénéficier de l'avantage de l'aide juridique, de pouvoir être défendus par un avocat gratuitement devant les tribunaux.

M. le Président, je pense qu'on a vraiment là une manifestation de gens qui se comportent bizarrement. Pendant 10 ans, ils ont l'occasion d'agir et ils ne font rien. Ils promettent, par exemple! Ah! ils promettent, ils font des sommets, ils font des commissions d'enquête, ils disent aux gens: Nous allons vous donner la lune. Ils ne font strictement rien. Lorsque d'autres personnes qu'eux prennent la suite des choses et commencent à s'en occuper: Non, on est contre. On est contre. On essaie de rallier du monde contre. On téléphone aux gens pour être contre. On leur dit n'importe quoi pour être contre.

M. le Président, je pense que leur jeu a été bien découvert non seulement par le gouvernement, mais par d'autres personnes. Je pense que le député de Chomedey, qui avait monté tout son bateau, son avenue autour d'une coalition, et avec le Barreau en tête, s'est vu tout simplement démasqué, parce que le Barreau a compris que, dans le projet de loi, il y avait certes des choses à modifier, certainement des choses à modifier, et il a fait des représentations en ce sens. Non seulement il en a fait en commission parlementaire, mais il en avait fait avant, lors des rencontres nombreuses qui avaient eu lieu non seulement avec eux, mais avec également les membres de la coalition dont parlait le député de Chomedey tout à l'heure.

Oui, M. le Président, il y a eu des rencontres pour étudier le projet de loi. Et le Barreau a compris que c'était à l'avantage des citoyens du Québec que de permettre l'adoption de ce projet de loi avec des modifications. Ils ont compris qu'en ce faisant on aidait les gens qui étaient dans la misère, les plus petits dans notre société, ceux qui gagnent le moins dans notre société, à pouvoir bénéficier de l'aide juridique.

Mais, cependant, l'opposition n'a rien compris. Ils ne veulent pas que la population bénéficie de cette aide. Ils l'empêchent. Et il a fallu, et je l'ai déjà fait à deux reprises, faire dire que le Barreau n'était pas du même avis que l'opposition. En cette Chambre, à deux reprises, j'ai montré une photocopie d'un article, et cette fois-ci, M. le Président, je n'ai pas pris de chance, j'ai apporté le journal lui-même, le journal du Barreau. Peut-être que, cette fois-ci, ils vont le reconnaître. Alors, c'est bien le Barreau, le journal du Barreau du 15 juin 1996. Et on voit, en page frontispice, dans le bas, ici: «Aide juridique. Le Barreau salue la réforme proposée».

M. le Président, je pense que c'est assez clair. Le Barreau appuie la réforme. Il demande, bien sûr, des amendements. À ce moment-là, il demandait des amendements. Et, en commission parlementaire, il nous a demandé d'autres amendements. Et j'ai dit au Barreau qu'effectivement la plupart de leurs recommandations étaient tout à fait acceptables et recommandables et qu'en conséquence des amendements seraient proposés. Ils sont prêts, les amendements, M. le Président. Ils étaient prêts au moment de l'étude article par article, mais on n'a jamais pu se rendre au premier article où le Barreau faisait une proposition d'amendement, ils ont systématiquement refusé d'avancer.

Oh! il y a eu une petite éclaircie d'une demi-journée en commission parlementaire. J'ai cru que quelqu'un... l'inspiration avait frappé. Deux ou trois députés, en l'absence du député de Chomedey, ont travaillé, je vous dirais, honnêtement pendant trois ou quatre heures, de manière vraiment intensive, correcte. Ils travaillaient pour essayer de comprendre et d'améliorer le projet de loi, M. le Président. Et ça, je trouve que c'est le travail, exactement celui que nous devrions faire en commission parlementaire: échanger, poser des questions, proposer des modifications parce qu'on veut, de bonne foi, améliorer le projet de loi.

Alors, pendant quelques heures, j'ai pensé: Oups! Ça y est, on va être capables d'adopter. Mais non. Au retour du député de Chomedey, M. le Président, nous sommes retombés dans la même ornière. Nous nous opposons, nous nous opposons, nous relisons cinq fois le même document, les mêmes passages, les mêmes artifices, 20 minutes après 20 minutes et, quand c'est fini, on recommence.

Pensez-y, M. le Président. Quelqu'un vous dit: Je ne suis pas d'accord avec vous. Je ne suis pas d'accord avec les trois lignes qui sont là. Et il parle pendant 20 minutes pour dire: Je ne suis pas d'accord avec cet article-là. C'est long, 20 minutes, parce que ça fait à peine six minutes que je parle, M. le Président, et puis c'est déjà long. Imaginez-vous 20 minutes! Et l'autre personne qui nous suit prend un autre 20 minutes pour dire: Je ne suis pas d'accord. Et il dit: Ce que mon collègue a dit, je le redis et je le relis. Et on recommence, le troisième. Et là, quand il reste à peu près une minute avant l'expiration de tous les temps de parole de 20 minutes, toujours sur le même article puis toujours pour dire les mêmes choses, toujours pour dire qu'on est contre et sans rien ajouter, on dit: Ah! Ah! M. le Président, j'aurais un amendement à faire: Le mot «untel», je le remplacerais par un mot «untel», qui veut dire la même chose. Et là le compteur repart à zéro, et on dit: Je suis contre ce paragraphe, je suis contre ce paragraphe, je suis contre ce paragraphe, je suis contre ce paragraphe. Pourquoi je suis contre? C'est parce que je suis contre, M. le Président. Et c'est comme ça pendant 26 heures de temps, M. le Président. Je pense que ça démontre clairement qu'on est contre uniquement parce qu'on ne veut pas que le projet de loi soit adopté.

(20 h 50)

M. le Président, toutes les personnes qui se sont présentées et qui sont assises de ce côté-ci de la salle se sont présentées parce qu'elles voulaient changer des choses. Elles voulaient transformer la société, elles voulaient aider les gens. Et certains d'entre eux ont été mandatés pour occuper des fonctions ministérielles et ils présentent des projets de loi parce qu'ils sont les porteurs d'un message qui leur a été donné par la population à un moment dans le temps et qu'ils essaient de le livrer concrètement par des mesures adoptées en cette Chambre.

Il y a des gens qui avaient un mandat analogue, mais qui le transforment en autre chose. Ils le transforment en opposition systématique, en empêchement de faire avancer les choses, en empêchement de faire avancer la population, en empêchement d'aider les gens à bénéficier de services dont ils sont privés actuellement. M. le Président, je pense que ça, c'est inacceptable. C'est inacceptable. On peut dire qu'on est contre quelque chose, oui, deux fois, trois fois, mais, après ça, le message, s'il est clair, il va être rendu, mais, s'il n'est pas clair, quand même vous feriez comme un disque qui est accroché et qui fait toujours le même bruit, ça ne changera rien à la réalité des choses.

Je pense que, dans le fond, il y a peut-être une seule expression, c'est qu'ils sont jaloux. Ils sont jaloux. Pendant 10 ans, ils n'ont rien fait, puis là ils nous voient aller puis ils disent: Ça n'a pas de bon sens! Il faut les arrêter! Hein! Ils changent les choses, eux autres. Ils font ce qu'ils ont promis de faire. Ça n'a pas de bon sens!

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre, permettez-moi simplement de vous dire que le temps imparti au groupe... Mais il reste le petit cinq minutes aux indépendants. Je voulais vous mentionner simplement que nous étions rendus à se partager le cinq minutes des indépendants. Alors, je voulais simplement vous faire part de ça. M. le ministre de la Justice.

M. Bégin: Alors, M. le Président, ils ont fait des semblants, des simulacres. Par exemple, ils ont fait un sommet de la justice. Bien, je dirais que c'est le sommet de l'inaction, parce que tout ce que je récolte depuis que je suis rentré au ministère de la Justice, c'est: M. le ministre, est-ce que vous pourriez donner suite à telle chose que le ministre Untel avait promis de faire? Est-ce que vous pourriez faire telle chose?

Je vois mon collègue, ex-ministre de la Justice, ici, il est un petit peu la victime aussi de son ex-collègue qui avait promis mer et monde à tout le monde et qui n'a absolument rien fait. Pendant les six mois qu'il a été là, il n'a pas été capable de faire grand-chose non plus, mais il a participé à tout ça. Il a participé comme participent aussi les gens sur les transformations et les déformations de mots. On a entendu tantôt le député de Chomedey parler de M. Masse, Claude Masse, bâtonnier, qui est nouvellement élu, personnalité de la semaine dans La Presse, dimanche, le 16 juin. Il dit qu'il s'oppose au projet de loi, il a cité un passage où il parlait d'autre chose que du projet de loi comme tel. Moi, j'aimerais dire ce que je lis ici, dans l'article: «La dernière version – parlant de l'aide juridique – marque un net progrès sur la première», dit le bâtonnier du Québec. M. le Président, oui, il y a un net progrès parce que nous avons écouté, nous avons entendu les gens, nous avons travaillé en collaboration avec eux pour bonifier ce projet de loi.

Par exemple, et, là-dessus, les députés de l'opposition se sont bidonnés en disant: Ça n'a aucun sens, parce que le bâtonnier, accompagné du vice-président, a dit: Nous aimerions qu'il y ait un comité de suivi sur deux choses, sur comment on va implanter le volet contributoire, parce que nous pensons que, sur le plan administratif, il peut y avoir des problèmes de gestion et qu'on aimerait vous accompagner dans cette démarche. Deuxièmement, on aimerait qu'il y ait un comité de suivi sur les matières pénales et criminelles parce que nous pensons qu'il peut y avoir des problèmes. Imaginez-vous, M. le Président, j'ai dit quelque chose de scandaleux. J'ai dit: Oui, je trouve que c'est une bonne idée; oui, on va créer ces deux comités, on va vous permettre, le Barreau, qui êtes quand même des gens assez bien informés en matière de justice, de travailler ensemble. Réponse: Le Barreau est contre ces dispositions, ne veut rien savoir, s'oppose au projet de loi.

M. le Président, quand quelqu'un me dit: Je veux t'accompagner dans ta démarche, j'entends qu'il a des réserves, qu'il s'interroge sur le résultat que j'escompte obtenir, et il me propose de m'aider à l'obtenir en m'accompagnant dans cette démarche. Moi, je considère que c'est quelqu'un qui travaille positivement et favorablement et non pas, comme l'opposition, qui s'objecte purement et simplement pour la forme et sans aucunement apporter quoi que ce soit. Le rôle de l'opposition, ce n'est pas d'être contre. Le rôle de l'opposition, c'est d'aider à bonifier des projets de loi pour que les citoyens puissent en bénéficier le plus possible dans la société. Or, c'est ça qu'ils refusent de faire, M. le Président. Mais, les amendements qu'ils ont refusé d'apporter au projet de loi, on va les déposer et on va le bonifier, notre projet de loi, et il va entrer en vigueur. Ce n'est pas leur opposition qui va empêcher de le faire.

M. le Président, ils ont tout fait pour empêcher ce projet de loi, comme d'autres. Il va passer, et les gens, la population, les 650 000 Québécois et Québécoises qui sont les plus démunis dans la société, vont pouvoir bénéficier, malgré eux autres, de ce service de l'aide juridique, et je suis certain qu'ils vont nous dire merci. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le leader de l'opposition. Pour cinq minutes, M. le leader.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président, comme vous le savez... Très bien, M. le Président. Comme vous avez pu le lire ce matin, aujourd'hui, c'était le jour du bulletin – celui qui vient de nous parler, c'est le ministre de la Justice – où les ministres étaient analysés suivant leur performance. Le ministre de la Justice a été recalé encore une fois. Michel David, qui est un des chroniqueurs les plus avertis de la scène politique québécoise, disait du ministre de la Justice ce matin: «On dirait qu'il y a toujours un de ses projets de loi qui bloque. L'an dernier, c'était l'aide juridique. Cette fois-ci, c'est la réforme des tribunaux administratifs. C-.» Comme parents, là, on n'est pas tellement fiers lorsque nos enfants nous arrivent à la maison... On tente d'améliorer, mais le premier ministre, lui, maintient sa confiance dans un ministre de la Justice qui, session après session, présente des projets de loi qui ne vont pas dans l'intérêt public, qui briment les droits des plus démunis, qui briment les Chartes des droits et libertés des citoyens du Québec. Et, encore une fois, celui que vous venez d'entendre, c'est quelqu'un qui a eu d'un analyste politique qu'on ne peut pas qualifier de libéral une note de C-, M. le Président. On pourrait faire mieux. J'espère que ça va s'améliorer à l'avenir.

Lorsqu'on regarde la motion de suspension des règles du leader du gouvernement, qui touche six projets de loi, il faut tenter de trouver le dénominateur commun. Qu'est-ce qui fait en sorte que ces parlementaires enragés contre le peuple, de l'autre côté...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Paradis: ...suspendent les règles fondamentales du fonctionnement de la démocratie québécoise? 650 000 000 $, M. le Président. De l'autre côté, on rit. 650 000 000 $ dans les poches des contribuables, ce n'est pas important. Les projets de loi sur la santé, 300 000 000 $ à 350 000 000 $. Un ministre de la Santé qui va fouiller dans les poches des contribuables.

En matière d'éducation et de garderies, près d'une centaine de millions de dollars qu'on va chercher dans le domaine de l'éducation, qui est le domaine qui nous garantit que nos enfants auront une éducation, qu'ils vont être capables de gagner leur vie convenablement.

En matière de justice, le ministre recalé. En matière d'aide juridique, des tarifs additionnels pour les gens qui étaient éligibles à l'aide juridique, M. le Président.

En matière de famille, de services de garde à l'enfance, on n'hésite pas à aller fouiller dans les poches des contribuables. Au total... Et, de l'autre côté, on se bidonne, on rit du contribuable qui aura à payer la facture de 650 000 000 $. Un bâillon parce qu'on veut fouiller dans la poche des gens.

M. le Président, le projet de loi antidéficit n'a même pas été appelé pour adoption de principe en cette Chambre. On se fout du projet de loi antidéficit. Équité salariale, le projet de loi qui était réclamé par les femmes du Québec, n'a pas été appelé pour être adopté par l'Assemblée nationale du Québec.

M. le Président, ce matin, le chef de l'opposition s'est levé de son siège et a demandé au ministre de la Santé de lui garantir que le projet de loi sur les dons d'organes... Pas besoin de motion de suspension des règles. Pas besoin de bâillonner l'opposition. Il y a des gens dont la vie dépend des décisions des membres de l'Assemblée nationale. Ça, ce n'est pas important. On veut s'en aller en vacances. On veut mettre fin aux travaux de l'Assemblée nationale avant la date prévue par le règlement de l'Assemblée nationale, et, de l'autre côté, on se bidonne. On va mettre fin aux travaux quand on aura fini de puiser dans la poche des contribuables à un niveau de 650 000 000 $ en matière de santé, en matière d'éducation et en matière de justice.

(21 heures)

M. le Président, quand un gouvernement attaque la santé de sa population, quand un gouvernement s'attaque à l'éducation de sa population, quand un gouvernement remet en cause les principes d'accès à la justice de sa population, le gouvernement aura réussi à s'attaquer aux trois piliers fondamentaux du fonctionnement de la société québécoise, et tout ça, dans la même motion.

J'ai parlé du bulletin du ministre de la Justice, M. le Président; j'aurais pu parler du bulletin des autres ministres impliqués parce que les autres ont tous été recalés. Quand vous avez besoin d'une motion de suspension des règles, M. le Président, c'est un aveu de faiblesse. C'est un ministre faible qui n'est pas capable de faire adopter son projet de loi par l'Assemblée nationale du Québec, M. le Président.

Des voix: Démission! Démission!

M. Paradis: Vous me permettrez, M. le Président, de conclure par les mots – et, souvent, les femmes trouvent les meilleurs mots pour le dire: Mais que valent les mots quand les gestes disent le contraire? Vous avez entendu les ministériels, M. le Président, c'est exactement le contraire de ce qu'ils ont promis. Et, quand Lorraine Pagé, une alliée du gouvernement, dit: «Je ne parlerai plus au premier ministre sans le soumettre à un détecteur de mensonge», peut-être que le détecteur de mensonge devrait s'appliquer à tous ces ministériels, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin au débat sur la motion de suspension des règles présentée conformément aux dispositions des articles 182 et 183 du règlement par M. le leader du gouvernement. Alors, je vais mettre cette motion aux voix. Cette motion de suspension des règles est-elle adoptée?

M. Paradis: M. le Président, vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition. Alors, nous avons un vote par appel nominal. Alors, que l'on appelle les députés! Je vais suspendre quelques minutes pour permettre aux députés de se joindre à nous.

(21 h 2 – 21 h 20)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais maintenant mettre aux voix la motion de suspension des règles présentée conformément aux dispositions des articles 182 et 183 du règlement par M. le leader du gouvernement. Avant d'appeler les députés à se lever, j'inviterais tout le monde à garder le silence pour faciliter la tâche de ceux qui ont à faire l'appel nominal.

Alors, que tous les députés qui sont en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Bélanger (Anjou), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Trudel (Rouyn-Noranda– Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Verchères), M. Paquin (Saint-Jean), M. Rivard (Limoilou), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Parent (Sauvé), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Et M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

M. Middlemiss: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez, M. le secrétaire général. Il y a eu une erreur, je crois, dans la désignation du comté de M. le député qui est debout là-bas. Je n'ose pas le nommer.

M. Landry (Bonaventure): Bonaventure.

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:29

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Brouillet): La motion est adoptée.


Dépôt de rapports de commissions

Nous devrons maintenant procéder au dépôt des rapports de commissions, et, si vous me permettez, je vais, tout simplement, vérifier si les rapports sont présents dans cette Chambre en ce moment. M. le secrétaire général, est-ce que...

Il manque encore un rapport.

Il est arrivé? Alors, les six rapports sont présents. Alors, conformément, donc, à la motion qui vient d'être adoptée, j'invite maintenant M. le président de la commission des affaires sociales et député de Charlevoix à déposer le rapport sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives. M. le député de Charlevoix.


Étude détaillée du projet de loi n° 116

M. Bertrand (Charlevoix): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer les trois rapports, si vous me le permettez, de la commission des affaires sociales qui a, d'abord, siégé les 7 et 12 juin 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux.


Étude détaillée du projet de loi n° 33

La commission a de plus siégé les 13, 14 et 17 juin 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.


Étude détaillée du projet de loi n° 11

Elle a, enfin, siégé les 13 et 18 juin 1996 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives.

La commission n'a pas complété l'étude de ces trois projets.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a donc trois projets qui viennent d'être déposés: le projet de loi n° 11, le projet de loi n° 33 – c'est bien ça? – et le projet de loi n° 116. Alors, j'inviterais maintenant le président de la commission des institutions et député de Bonaventure à déposer le rapport sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. M. le député de Bonaventure.


Consultations particulières et étude détaillée du projet de loi n° 20

M. Landry (Bonaventure): M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé les 5, 6, 7, 10 et 11 juin 1996 afin de tenir des consultations particulières et de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. La commission n'a pas complété l'étude du projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le rapport est déposé. Merci, M. le député. Finalement, j'invite le président de la commission du budget et de l'administration et député d'Arthabaska à déposer le rapport sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu. M. le député.


Consultations particulières et étude détaillée du projet de loi n° 32

M. Baril (Arthabaska): M. le Président, je dépose le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 10, 13 et 17 juin 1996 afin de procéder à des consultations particulières et à l'étude détaillée du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu. La commission n'a pas complété l'étude de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est déposé. Je vous remercie, M. le député d'Arthabaska.

Je vous rappelle que, conformément à la motion qui vient d'être adoptée, à compter de maintenant, tout député dispose d'une heure pour transmettre au bureau du secrétaire général copie des amendements qu'il entend proposer à l'un ou l'autre des projets de loi qui viennent d'être déposés.

M. le député de Marquette, sur une question de...

M. Ouimet: C'est une question de directive...

Le Vice-Président (M. Brouillet): ...directive.

M. Ouimet: ...à savoir s'il y a eu un rapport de déposé, par rapport au projet de loi n° 37, de la commission de l'éducation.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Le projet de loi n° 37 sera référé tantôt à la commission plénière. Alors, M. le leader du gouvernement.


Projet de loi n° 37

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière pour procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, cette motion est-elle adoptée?

M. Paradis: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Après l'adoption, M. le leader, ou si vous voulez intervenir avant?

M. Paradis: Avant de l'adopter, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: ...suite à une décision que vous avez rendue cet après-midi, compte tenu qu'en vertu de l'article 245 de notre règlement les temps de parole prévus sont de 20 minutes, mais que la motion du leader du gouvernement avait omis d'indiquer les temps de parole de chaque député, limitant le temps de parole total de tous les députés à une heure, vous avez indiqué à ce moment-là, M. le Président, si ma mémoire est fidèle, que vous convoqueriez les leaders de façon à établir les temps de parole accordés aux députés. Est-ce qu'on pourrait, avant d'entreprendre la prochaine étape, procéder à cette conférence des leaders de façon à réparer cette lacune du leader du gouvernement, M. le Président?

(21 h 30)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader de l'opposition, effectivement, si vous voulez, nous allons adopter la motion et, après, nous devons suspendre pour nous constituer en commission plénière; nous profiterons de cette suspension pour nous rencontrer et décider du partage du temps.

Alors, cette motion, donc, est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

M. Paradis: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.

En conséquence, je suspends les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, et en même temps voir au partage du temps. Nous suspendons quelques minutes.

(Suspension de la séance à 21 h 31)

(Reprise à 21 h 39)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît! Conformément à l'ordre qui vient d'être adopté, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation. Je vous rappelle que la durée de l'étude détaillée dudit projet de loi en commission plénière est fixée à un maximum d'une heure.

Après discussion, nous en sommes arrivés au partage du temps suivant. Nous accorderons un cinq minutes, au point de départ, à la ministre pour lancer le sujet en remarques préliminaires et nous lui réserverons un cinq minutes de réplique à la fin. Le reste du temps, nous le partagerons également entre les deux parties, et, s'il y avait un député indépendant qui était présent, nous lui consacrerions un trois minutes d'intervention.

M. Gautrin: M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Si une des parties ne prend pas la totalité de son temps, il est utilisé par l'autre partie, c'est la coutume, de manière à ce qu'on puisse utiliser notre heure jusqu'au bout?

Le Président (M. Brouillet): Oui, étant donné que...

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): En temps égal et à ce moment-là... Écoutez, un temps qui n'est pas épuisé, la règle générale fait en sorte qu'il peut être utilisé par l'autre partie, à moins qu'on en dispose autrement. Alors, nous avons prévu une heure, maximum. M. le député de Marquette.

(21 h 40)

M. Ouimet: C'est une question de directive sur la motion du gouvernement adoptée pour suspendre les règles de procédure. L'article 244, alinéa 2 a été suspendu, mais l'article 158, lui, n'a pas été suspendu. J'aimerais donc faire motion pour entendre la Fédération des commissions scolaires du Québec avant que nous puissions procéder à l'étude détaillée de ce projet de loi.

Le Président (M. Brouillet): Attendez un peu, vous parlez de l'article...

M. Ouimet: L'article 158.

Le Président (M. Brouillet): ...158.

M. Ouimet: Cet article-là n'a pas été suspendu. Je fais donc motion pour entendre la Fédération des commissions scolaires du Québec avant d'amorcer les discussions.

M. Bélanger: Question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, avant de voir ça, il faut voir si c'est recevable, d'abord, en fonction des règlements. Vous arrivez avec ça, nous allons prendre le temps de voir un peu. Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Dépendamment de la décision que vous prendrez relativement à savoir quelle est la portée de l'article et le fait qu'il a été suspendu ou non, le débat est limité à une heure. Alors, si le député de Marquette veut faire pendant une heure des motions, bon lui semblera, mais ça ne peut pas dépasser une heure, en vertu de la motion qui a été adoptée, M. le Président. Alors, si, plutôt que de faire un débat, il veut faire des motions, ça le regarde.

M. Ouimet: M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): C'est certain que la durée totale du débat, c'est une heure, dans le règlement. Ça, c'est...

M. Ouimet: M. le Président, j'ai bien mentionné que c'était une question de directive. Avant d'amorcer nos travaux, j'ai besoin d'être éclairé, parce que la motion de suspension des règles suspend effectivement l'article 244, deuxième alinéa, mais n'a pas suspendu l'article 158. Donc, avant d'amorcer la discussion et l'étude détaillée du projet de loi, j'aimerais faire motion pour pouvoir entendre la Fédération des commissions scolaires, et, par la suite, nous aurons une heure, tel que le dit le leader du gouvernement, pour faire l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Brouillet): À l'article 158, si on le lit très bien, c'est qu'en commission les motions ne requièrent pas de préavis...

M. Ouimet: Voilà.

Le Président (M. Brouillet): ...mais quand il y a lieu de faire une motion. Et c'est 244, à ce moment-là, qui réfère au contenu de la motion, qui qualifie la motion en question. Alors, c'est une règle tout à fait générale qui ne statue pas sur la nature des motions qu'on peut présenter en commission. Il dit que les motions qui peuvent être présentées en commission ne requièrent pas de préavis, mais cet article-là ne qualifie pas la nature des motions. Et l'article qui qualifie la nature d'une motion, lui, a été suspendu; et, ça, c'est 244 qui spécifie la qualité de la motion qui peut être avancée, si vous voulez. Tandis qu'ici c'est une disposition purement formelle qui dit que, quand une motion peut être présentée, elle ne requiert pas de préavis, en commission; mais ça ne préjuge pas du tout de la qualité de la motion qu'on retrouve à 244, et celle-là a été suspendue. Ça va? Très bien.

M. Ouimet: Juste une autre question de directive, dans ce cas-là. Comment, comme parlementaire, puis-je faire entendre la Fédération des commissions scolaires du Québec, qui est directement affectée et touchée par le projet de loi, qui n'a pas eu la chance d'être entendue sur ce même projet de loi, si je ne peux pas le faire parce que 244 a été suspendu? Je pensais que la porte était ouverte, selon les informations que j'ai obtenues, par le biais de 158, parce que...

Le Président (M. Brouillet): Écoutez, c'est l'inconvénient de la suspension des règles. Quand on suspend des règles... C'est évident qu'il y a beaucoup de dispositions dont on peut se prévaloir en d'autre temps, mais, une fois que les règles sont suspendues, que voulez-vous, on ne peut pas avoir recours à ces règles suspendues.

M. Gautrin: Malheureusement.

M. Ouimet: Donc on ne peut pas entendre la Fédération des commissions scolaires sur un projet de loi qui écarte la Fédération des commissions scolaires des comités de négociation?

Le Président (M. Brouillet): On aurait peut-être pu, si les règles n'avaient pas été adoptées. Mais les règles de suspension sont là et il faut vivre avec les règles de suspension.

M. Ouimet: Parfait.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Maintenant, Mme la ministre, je vous cède la parole pour votre cinq minutes de remarques préliminaires. Après ça, bien, on peut revenir pour le reste du temps, là, on va alterner.

Maintenant, pour la suite, je ne mettrai pas, là, que voulez-vous... chaque intervenant a un arrêt de trois, quatre minutes. Vous pourrez aller dans l'enveloppe du temps imparti à votre groupe parlementaire.

Mme Marois: Vous ferez le point, M. le Président, lorsque ce sera utile de le faire, pour qu'on sache exactement l'enveloppe qui nous a été impartie, c'est-à-dire là où on en est dans le temps, compte tenu de l'enveloppe qui nous est impartie de part et d'autre.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Mais les cinq dernières minutes vous seront réservées, les cinq dernières minutes en réplique.


Remarques préliminaires


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Parfait. Alors, je vous remercie, M. le Président. On peut donc sûrement reprendre d'abord les notes explicatives que l'on retrouve au projet de loi n° 37. En fait, ce projet de loi va permettre au gouvernement d'autoriser, de m'autoriser, donc, comme ministre de l'Éducation, s'il y a impossibilité d'en arriver à une position commune au sein d'un comité patronal de négociation, à convenir, au nom de ce comité, de modifications aux conventions collectives existantes applicables aux enseignants d'une commission scolaire.

Et, quand on arrive à l'article de loi, ce que l'on constate, c'est que cet article, puisqu'il ne s'agit que d'un article, M. le Président, me permet d'intervenir sur la convention collective en vigueur actuellement et, donc, n'ouvre pas la possibilité d'une intervention plus large, ou à d'autres fins, ou à d'autres conventions collectives.

Je pense que je l'ai dit à quelques reprises, M. le Président, ce n'est pas nécessairement avec beaucoup de plaisir que je suis arrivée à cette recommandation au gouvernement et à ce projet de loi qui est devant nous, parce que je crois qu'il faut être capable, dans l'ensemble des échanges que nous avons entre partenaires sur ces dossiers toujours susceptibles de soulever beaucoup de débats... Et c'est normal, parce qu'on parle évidemment d'efforts collectifs à faire en puisant chacun d'entre nous dans nos conditions de travail. Et, dans le cas présent, il s'agissait des conditions de travail, il s'agit toujours des conditions de travail et de rémunération des enseignantes et des enseignants, et, d'autre part, les fédérations de commissions scolaires, les commissions scolaires sont, elles, aux prises avec des dilemmes quant aux choix budgétaires auxquels elles doivent procéder, compte tenu, je le répète, toujours de cette volonté que nous avons collectivement de relever le défi de l'assainissement des finances publiques pour mieux préserver l'avenir et pour mieux nous assurer que les ressources que nous allouons actuellement à l'éducation soient préservées le mieux possible et au niveau le plus élevé possible.

J'ai donc eu l'occasion, à différentes reprises et lors du débat que nous avons eu vendredi dernier sur le projet de loi, de signifier aux membres de la commission que j'avais, je dirais, jusqu'au dernier moment essayé de voir avec les parties, sachant que j'étais associée à l'une de ces parties comme partie patronale avec les commissions scolaires, comment je pouvais, en prenant une certaine distance, tenter d'amener les parties à convenir d'une entente sans que j'aie à intervenir sur la somme du 100 000 000 $ qui est prévue comme économie à faire par les enseignantes et les enseignants. D'ailleurs, on se souviendra, M. le Président, que les parties devaient convenir de modifications au plus tard le 22 février dernier et que c'est deux mois après l'échéance que, l'impasse perdurant, je suis intervenue. Je ne rappelle pas tous les gestes que j'ai posés à ce moment-là, mais il est évident que j'ai rencontré l'une et l'autre des parties et qu'à l'intérieur de ce débat on est venu très près, avec différentes hypothèses qui ont été mises sur la table, très près – à quelques millions près, évidemment, pas dans une entente formelle, mais dans les hypothèses qui avaient été élaborées – à quelques millions près, d'une entente.

Malheureusement, nos discussions se continuant, on s'est les uns les autres rééloignés, ce qui fait qu'on s'est retrouvés avec des écarts assez significatifs qui nous auraient amenés à appliquer une partie de la convention qui prévoit qu'on peut ajouter des congés sans traitement ou des jours non payés, tel que le prévoit d'ailleurs l'entente de la convention.

(21 h 50)

Le dernier effort que j'ai fait – je vois qu'il me reste peu de temps, mais quand même je veux terminer avec ça – c'est que, dans le fond, voyant ce qui avait été proposé par les enseignantes et les enseignants, voyant le dilemme dans lequel se trouvaient les commissions scolaires, j'ai tenté de prendre ce qui m'apparaissait la meilleure des hypothèses, incluant que chacune des parties devait faire un bout de chemin et j'en ai fait ma proposition. J'ai pris ce risque-là et je pense que, lorsqu'on a des décisions aussi importantes à prendre, il faut être capable d'assumer ses responsabilités, et je les ai assumées au meilleur de ce que je croyais être fait à ce moment-là. J'ai donc retenu une hypothèse qui est devenue mon hypothèse, je l'ai soumise aux deux parties: elle a été acceptée dans un cas et rejetée dans l'autre.

Je peux comprendre les raisons des rejets, mais il reste que l'objectif que nous nous étions fixé d'une économie de 100 000 000 $ relativement aux conditions de travail des enseignantes et des enseignants est ainsi atteint par la proposition que j'ai faite et que j'avais retenue, et la loi va me permettre d'appliquer, évidemment, cette proposition.

En faisant cela, j'espère bien cependant que, dans les semaines et les mois qui viennent, on aura l'occasion d'engager de nouvelles discussions sur une base qui va nous permettre d'aboutir à un autre règlement qui n'obligera pas une intervention de l'ordre de celle que je dois faire maintenant. Et je m'adresse autant aux enseignantes et aux enseignants qui, évidemment, ont fait leur devoir correctement et à fond, mais qui avaient des listes relativement fermées quant aux 100 000 000 $ qui étaient concernés, et c'est évident que ça limitait un certain nombre de manoeuvres qui, autrement, auraient pu être faites. Je pense qu'il faut avoir en tête qu'on doit, en changeant nos façons de faire, nos attitudes, être capable d'arriver à des résultats sans qu'il y ait d'intervention par ailleurs.

Je termine avec une phrase. Il y a un protocole d'entente entre les parties patronales et qui permet que l'une des parties puisse prendre des décisions différentes de celles de l'un de ses partenaires. Ce protocole ne prévoyait cependant pas des ententes comme celle sur laquelle j'ai à intervenir maintenant, ce qui m'a amenée à devoir proposer la venue de la loi que nous étudions ce soir.

Le Président (M. Brouillet): Merci bien, Mme la ministre. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. J'espère que la ministre est consciente que, ce qui se joue ce soir, c'est sa crédibilité aux yeux de ses partenaires en éducation, tant au niveau de la Fédération des commissions scolaires qu'à celui de tous les autres partenaires, parce que le geste qu'elle va poser va avoir un effet de précédent. Je mets les choses en contexte.

Elle nous a affirmé en commission parlementaire qu'elle avait elle-même négocié la convention collective qui est devant nous, premièrement. Deuxièmement, elle avait prévu un mécanisme à l'intérieur de la convention que les parties ont signée, tant la partie patronale que la partie syndicale, selon lequel, en cas de désaccord sur le 100 000 000 $ – et nous sommes face à un désaccord par rapport à la récupération du 100 000 000 $ – il y avait un dispositif dans la convention collective, l'article 6, paragraphe 2 de l'annexe XLIX de cette convention, qui prévoyait exactement comment ce différend serait tranché.

La ministre en est consciente et elle en est consciente parce qu'elle nous l'a admis en commission parlementaire à plusieurs reprises à mes questions et aux questions du député de Maskinongé. Et je rappelle à la ministre qu'elle a signé cette convention, que le gouvernement a signé cette convention. Elle a dit en commission parlementaire, dans un premier temps: Moi, je l'avais compris comme ça quand je l'ai négociée et je l'ai moi-même négociée. Je ferai remarquer aux membres de la commission et en tout respect pour mon collègue le député de Marquette que je n'impose rien, que c'est par la voie de la négociation que les parties ont convenu de ce qui est là, et elles ont convenu elles-mêmes que, si elles ne réussissaient pas à s'entendre – c'est le cas – c'était la deuxième avenue qui s'appliquait. Mais, moi, je n'impose rien, j'applique les résultats des négociations qui ont eu cours entre deux parties consentantes. Je ne fais pas de décret, aucun, et je n'en ferai pas. Et cependant, les parties ont convenu que, si elles ne s'entendaient pas, il y avait une mesure qui était prévue, et c'est celle-là. Elle a répété ceci à au moins trois reprises.

Qu'est-ce qui a changé depuis? Qu'est-ce qui a changé? Parce que la ministre connaissait bien ce qui s'appliquerait, elle nous l'a elle-même exposé. La convention collective prévoit que faire en cas de désaccord. La ministre le sait.

Si le projet de loi est adopté, ce qui se joue, c'est la crédibilité de la ministre de l'Éducation face à tous ses partenaires, parce qu'elle va renier la parole qu'elle a donnée aux parlementaires d'une part, mais, encore plus important, elle va renier ses engagements et la signature du gouvernement dans le cadre de cette convention collective là. Il n'y a aucune raison de ne pas respecter la mesure identifiée d'un commun accord par l'ensemble des parties.

Je rappelle à la ministre la lettre que lui faisait parvenir la Fédération des commissions scolaires en date du 15 juin, où la Fédération lui disait: Ce que vous faites porte atteinte au droit fondamental de représentation au comité de négociation. Vous êtes en train de rompre l'équilibre entre la partie patronale et la partie syndicale.

M. le Président, j'ai de la misère à comprendre le comportement de la ministre de l'Éducation, qui, aujourd'hui même, impose le bâillon sur le projet de loi n° 11 et puis, par la suite, entend en consultation des groupes ou des regroupements de garderies. C'est de mépriser ces gens-là que de savoir que, dans quelques heures, le projet de loi sera adopté sans amendement, alors qu'elle entend ces mêmes groupes en consultation, et ces personnes-là, de bonne foi, proposent des amendements.

Qu'est-ce qui justifie le comportement d'une personne qui aspirait à devenir première ministre du Québec? Une personne qui a fait une convention à la chefferie, et, n'eût été de l'arrivée de l'actuel premier ministre, elle était sur les rangs pour devenir première ministre du Québec. Comment expliquer son comportement méprisant à l'égard de certains partenaires, le fait qu'elle renie sa propre signature, qu'elle renie ses paroles? Est-ce que la commande vient du bureau du premier ministre? Est-ce que c'est le premier ministre qui place la députée de Taillon dans une situation intenable où c'est elle qui mange les coups? Ou c'est elle qui doit renier ses paroles, ses engagements, sa signature? Et, si ça ne vient pas du bureau du premier ministre, alors la ministre va devoir s'expliquer devant l'ensemble de ses partenaires, parce qu'elle ne nous a pas encore expliqué pourquoi elle ne veut pas respecter la convention collective signée par toutes les parties, y compris la ministre de l'Éducation.

Le Président (M. Brouillet): Alors, merci, M. le député de Marquette. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Vous savez, quand on a assumé la responsabilité de quelques ministères, dont celui de l'Éducation, qui est le dernier en liste, on est capable d'assumer nos responsabilités, de les prendre complètement. On n'a pas besoin de commande. Ça comporte, bien sûr, des exigences, et des exigences de réussite et des obligations de résultat. Et, en ce sens-là, je crois avoir pris mes responsabilités dans le débat auquel nous participons ce soir, M. le Président.

(22 heures)

Et je voudrais rappeler aux membres de cette commission, et particulièrement à mes collègues d'en face que c'est de concert avec les deux parties concernées par ce projet d'entente que les discussions et que les négociations – si on peut parler de négociations, en tout cas, les discussions – et les échanges ont repris. Je n'ai pas procédé de mon propre chef. C'est vrai qu'au moment où je suis intervenue en commission parlementaire j'ai exactement tenu les propos que le député de Marquette a relus tout à l'heure; ce sont les relevés du Journal des débats , lorsque nous avons procédé à l'étude des crédits. Et, dans les faits, et je ne le nie pas, je l'ai même redit dans mon intervention de départ, la convention prévoit un mécanisme.

Le député de Marquette, à ce moment-là, tentait de dire: On devra imposer les congés Marois – je me souviens, c'était l'expression qu'il avait utilisée – et j'avais signifié que je ne voulais pas arriver à une situation comme celle-là et que, d'autre part, je croyais toujours que les parties pouvaient convenir d'une entente sur le résultat à atteindre qui était une économie de l'ordre de 100 000 000 $. J'ai senti, au début de mai, la possibilité que chacune des instances concernées puisse faire peut-être un pas qui éviterait d'aller vers le fait qu'on impose, tel que prévu par la convention, je n'en disconviens pas, des journées supplémentaires, en termes de congés non payés, bien sûr, ce qui venait ainsi permettre d'atteindre l'économie.

J'ai donc rencontré les parties. Je n'ai pas agi de mon propre chef sans, par ailleurs, rencontrer la présidente de la Fédération des commissions scolaires, de l'association des commissions scolaires, leurs administrateurs, leurs directeurs généraux. J'ai rencontré les gens de la Centrale qui étaient, je l'avoue, assez réticents parce qu'ils me disaient: On n'a pas de mandat. Et j'ai demandé à chacune des parties de faire un bout de chemin, d'essayer de voir s'ils ne pouvaient pas aller plus loin quant à la possibilité de s'entendre sur l'économie à réaliser. C'est sûr que je suis l'une des parties, jusqu'à un certain point, comme membre du Comité patronal et comme ministre de l'Éducation, mais, tant que les parties sont d'accord pour procéder autrement ou lorsqu'elles le sont, on en convient ensemble. Et c'est ce dont on a convenu à ce moment-là, avec le résultat que, après quelques jours de discussion – plus d'une dizaine de jours, en fait, de discussion – il y a eu des rapprochements assez significatifs où j'ai senti que de part et d'autre on avait bougé, malheureusement pour constater qu'en bout de piste on s'était rééloignés.

J'ai regardé, avec les mécanismes dont nous disposons, si je ne pouvais pas intervenir, parce qu'il est possible, par la voie d'un protocole qui est signé entre les différentes parties patronales, de trancher dans certains litiges lorsque l'objet de la décision relève majoritairement soit de la décision gouvernementale ou ministérielle ou soit du partenaire qu'est la Fédération des commissions scolaires, et on a constaté que le protocole ne permettait pas... ou n'était pas suffisamment clair dans les matières auxquelles on était confrontés. Alors, j'ai pris mes responsabilités, j'ai pris les propositions qui étaient sur la table, celles qu'avaient envisagées l'une et l'autre des parties, et j'ai bâti une hypothèse que j'ai soumise en espérant qu'elle soit acceptée par l'une et l'autre des parties, parce que, et ça, c'est important, c'est le départ de ce qui suit ou de ce qu'on va prendre comme décision maintenant, de ce sur quoi on va devoir prendre une décision maintenant de par la loi.

La convention, elle prévoit qu'on doive arriver à un effort budgétaire sur les conditions de travail des enseignantes et des enseignants qui va atteindre 100 000 000 $. Ce 100 000 000 $ a été identifié par les enseignantes et les enseignants. Si on nous avait dit: Non, il n'y a aucune somme qui a été identifiée, ou des sommes ont été identifiées jusqu'à hauteur, par exemple, de 70 000 000 $, il reste un 30 000 000 $ sur lequel il n'y a rien comme proposition... Or, il y a eu des propositions; enfin, il y a eu des hypothèses d'évaluées jusqu'à hauteur de 100 000 000 $ qui ne plaisaient pas à la Fédération des commissions scolaires, ou à l'association des commissions scolaires, mais qui, et on va en convenir ensemble, atteignaient l'objectif fixé par la convention, dont la moitié de la somme prise directement sur la feuille de paie des enseignantes et des enseignants.

Il y a eu, je pense, de la bonne foi et je pense qu'il y a eu et je suis certaine qu'il y a eu de la bonne foi de toutes les personnes qui ont été concernées par les échanges et les discussions qu'il y a eu, autant la Fédération. Cependant, le processus était parti d'une façon telle qu'il était difficile, je dirais, de vraiment parvenir à convenir. La preuve, on a tout fait pour que l'on convienne et, malgré tout, on est toujours restés avec un écart qui a varié de quelques millions à près d'une vingtaine... 15 000 000 $, à 20 000 000 $ à certains moments, mais allant à 15 000 000 $. Et, devant cela, j'ai cru que l'hypothèse que je mettais sur la table amenait la partie syndicale à aller plus loin que ce qu'elle avait accepté au départ, ou proposé, donc il y avait un effort qui leur était demandé, puis, évidemment, je souhaitais qu'il en soit de même pour la Fédération des commissions scolaires et nos partenaires à cet égard, et, malheureusement, on n'y est pas arrivés. On doit constater qu'il y a eu un échec.

J'espère qu'on va tirer des leçons de cela, d'ailleurs. J'espère qu'on va tirer des leçons de cela pour qu'on engage le nouveau processus, parce que j'essaie de préserver l'avenir aussi. Vous savez, le jour même où j'ai annoncé cela, je n'ai pas hésité à aller rencontrer l'Association des directrices et des directeurs généraux des commissions scolaires pour leur dire que je souhaitais qu'ensemble on privilégie des attitudes, des façons de faire autres qui nous permettraient peut-être de mieux identifier, là où il était possible, que ceux qui sont les opposants d'aujourd'hui deviennent ceux qui vont faire partie de la solution de demain. Et, dans ce sens-là, ce que j'essaie de faire, c'est d'éviter... Parce que c'est ça qu'elle fait aussi, ma décision, qu'elle va me permettre de faire, cette loi que l'on va adopter, et la décision que j'ai prise: ce qu'elle va permettre de faire, c'est qu'on n'exacerbe pas, je dirais, les oppositions des uns par rapport aux autres. Et je compte sur la maturité de mes partenaires dans ce sens-là, pour qu'on puisse reprendre un dialogue qui va nous permettre d'aboutir, pour les deux prochaines années auxquelles on est conviés, à des résultats qui seront des résultats négociés et acceptés par toutes les parties en cause. C'est ça, mon objectif, essayer de préserver l'avenir, et je compte sur la maturité des partenaires avec lesquels j'ai déjà commencé à travailler depuis quelques mois.

Il y a peu de temps, évidemment, que je suis impliquée au ministère, que j'assume ces responsabilités. J'y suis arrivée, comme plusieurs de mes collègues qui ont pris leurs responsabilités, depuis la fin janvier. Je suis intervenue, évidemment, en cours de processus. J'espère que je pourrai faciliter la suite des choses. Mais ce qui est sûr, c'est qu'on a à vivre un long moment encore ensemble et, si on peut essayer de se ménager les uns et les autres un espace qui va nous permettre d'assumer nos partenariats, de les vivre à fond sans pour autant, comme je le mentionnais, revenir à des batailles qui, j'espère, sont dépassées, je pense qu'on va sortir de ça gagnants.

(22 h 10)

Le Président (M. Pinard): M. le député de Marquette.


M. François Ouimet

M. Ouimet: M. le Président, la ministre persiste à éviter la question de fond. La question de fond, elle le sait très bien, c'est l'article 6 de l'annexe XLIX de la convention collective. Elle ne nous a pas encore expliqué pourquoi elle ne respecte pas ce que les parties avaient déjà prévu avec son consentement, parce qu'elle a signé cette même convention.

Ce qui est en jeu, et je le lui répète, c'est sa crédibilité comme ministre de l'Éducation, c'est son intégrité également. Et ça va plus loin, c'est: Comment est-ce que les partenaires vont pouvoir se fier dorénavant sur la parole que donne la ministre? Sur n'importe quel dossier, la ministre va pouvoir non seulement ne pas respecter sa parole, ne pas respecter ses engagements, mais renier ses signatures. Moi, j'ai des inquiétudes par rapport au dossier des commissions scolaires linguistiques. J'ai vu trop de volte-face de la part de la ministre de l'Éducation. Je ne sais pas où ce dossier-là se dirige, mais c'est extrêmement inquiétant. Ça a des conséquences pour l'avenir.

La Fédération des commissions scolaires du Québec se retrouve dans la position suivante. L'ensemble des négociations qui se poursuivent avec la partie syndicale, le comité patronal a moins de crédibilité parce que la partie syndicale sait qu'en tout temps la partie syndicale a un recours devant la ministre de l'Éducation parce qu'elle vient de tasser carrément le comité patronal bien que celui-ci négociait avec un mandat du gouvernement.

Alors, la ministre, j'essaie de voir si elle n'a pas des problèmes de conscience. Et, si elle dit dans son for intérieur qu'elle vit bien avec sa conscience, c'est peut-être parce qu'elle répond maintenant à une commande qui ne vient pas de sa propre initiative, mais qui vient davantage du chef du gouvernement qui, lui, fait faire le sale travail par la ministre de l'Éducation. C'est elle qui paie le prix sur la place publique. Et, moi, je lui dis que c'est sa crédibilité qui est en jeu. Les partenaires patronaux ne peuvent plus faire confiance à la ministre de l'Éducation, ministre qui a également la responsabilité d'éduquer plus d'un million d'élèves au Québec. Quel exemple est-elle pour l'ensemble des élèves, que ce soit des élèves du primaire ou du secondaire? Ça, c'est inquiétant.

Elle ne peut pas servir de modèle, parce qu'on le voit noir sur blanc, elle ne respecte pas ses engagements. Elle ne respecte pas des documents qu'elle a signés. Pas n'importe quel document, une convention collective. Et elle ne m'a toujours pas expliqué pourquoi, le 22 avril dernier, elle tenait des propos, nous disant: Voici ce qui va s'appliquer. À l'époque, je rappelle à la ministre que l'écart était de 34 000 000 $. Au moment où elle impose le projet de loi n° 37, l'écart n'est plus que de 6 000 000 $.

J'ai eu vent qu'il y a eu des négociations de dernière minute en fin de semaine et lundi, et que possiblement il y avait une solution à la portée de la main qui éviterait à la ministre d'avoir l'odieux, l'odieux d'imposer un projet de loi qui vient bafouer, qui vient renier sa signature, qui vient faire en sorte que la ministre perd de la crédibilité importante dans un réseau où on construit un partenariat sur le respect de la parole qu'on donne à autrui. Ça, c'est extrêmement important.

Alors, j'aimerais entendre la ministre sur la clause 6. Elle sait, dans son for intérieur, que c'est ça, l'objet du litige, ce n'est pas l'ensemble des négociations qui ont eu lieu. Elle a tenté, j'en conviens, de bonne foi, de faire en sorte que les parties puissent en arriver à une entente sans que la clause 6 s'applique. Mais, une fois qu'elle constate l'impasse dans laquelle les parties se retrouvent, son obligation morale et son obligation juridique, c'est de faire respecter la convention que les parties ont signée. Pourquoi est-ce qu'elle ne le fait pas? Pourquoi est-ce qu'elle trahit ses engagements, et pourquoi est-ce qu'elle trahit son principal partenaire au niveau de la table de négociation? C'est ça, Mme la ministre, qui est la question de fond.

Le Président (M. Pinard): Excusez-moi, Mme la ministre. Je vous demanderais... le mot «trahir», je ne crois pas que ce soit un mot qui fasse partie...

M. Ouimet: Le non-respect.

Le Président (M. Pinard): ...du lexique parlementaire.

M. Ouimet: Le non-respect, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): D'accord, le non-respect. Alors, un léger commentaire en réplique, Mme la ministre, et, ensuite, j'aimerais qu'on aborde effectivement le projet de loi comme tel.


Étude détaillée

Mme Marois: On avait convenu, je pense, M. le Président, qu'on pouvait y aller un peu à bâtons rompus, comme on le fait là, chacun abordant les points qui lui paraissaient les plus importants. Je vous remercie d'ailleurs...

Le Président (M. Pinard): D'accord avec les propos de la ministre de l'Éducation?

M. Ouimet: Je pense que ce qui a été convenu, c'est un partage de temps égal à l'intérieur de l'heure.

Mme Marois: C'est ça.

M. Ouimet: La ministre prendra le temps...

Le Président (M. Pinard): Bien, vous y allez à bâtons rompus...

M. Ouimet: Ah! je n'ai aucun problème.

Le Président (M. Pinard): ...sans nécessairement qu'on attaque directement les articles et les amendements.

Mme Marois: Oui. Parce qu'il y a un article au projet de loi qui est devant nous, M. le Président...

Le Président (M. Pinard): Bon. À ce stade-ci...

Mme Marois: ...et une fois qu'on discute... je pense que ce dont on discute c'est vraiment de ce que comporte, de ce qui est derrière cet article et de ce qui est de la portée de cet article.

Le Président (M. Pinard): Je suis d'accord, Mme la ministre de l'Éducation...

Mme Marois: Je suis d'accord.

Le Président (M. Pinard): ...mais, comme on m'a soumis à certaines règles tout à fait particulières, je veux m'assurer que, dans le temps requis pour passer à travers le projet de loi, j'aurai le temps d'adopter les amendements s'il y a lieu et les articles.

Mme Marois: D'accord.

Le Président (M. Pinard): Alors, si vous avez des amendements, j'apprécierais que vous les déposiez.

Mme Marois: Certainement, M. le Président. Nous n'en avons pas d'identifiés...

Le Président (M. Pinard): Alors, je vous cède la parole pour la réplique au député de Marquette.

Mme Marois: Merci, M. le Président.

M. Bélanger: M. le Président, juste pour peut-être préciser un peu le fonctionnement de la motion, et vous me corrigerez si je me trompe, M. le Président, je pense que le débat dure une heure...

Le Président (M. Pinard): Oui.

M. Bélanger: ...et, suite à ce débat, même si on n'avait pas adopté les articles à ce moment-là, vous mettrez immédiatement aux voix, la présidence mettra aux voix, à ce moment-là, les articles qui ont été... que contient le projet de loi et donc...

Le Président (M. Pinard): Et les amendements.

M. Bélanger: C'est à la suite, si ça n'a pas été fait pendant l'heure.

Le Président (M. Pinard): Oui. Mais je crois que, s'il y avait des amendements à être déposés, il serait bon que la présidence en ait connaissance.

M. Bélanger: Tout à fait.

Le Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vous remercie aussi pour être intervenu auprès de notre collègue quant aux propos qu'il avait tenus, parce que je pense que ce n'est pas parlementaire que d'utiliser de tels propos.

Je voudrais revenir sur une intervention qu'a faite le député de Marquette en disant qu'on avait mis de côté nos partenaires. Non, nous n'avons pas mis de côté nos partenaires, et je peux vous dire qu'en tout temps, jusqu'à il y a encore effectivement quelques heures, jusqu'à il y a quelques heures, nous avons été en contact, par mes collaborateurs, par des collaboratrices, au ministère ou au cabinet, avec des représentants de ces mêmes partenaires. Et, pour avoir eu des échanges en profondeur avec chacun d'entre eux, soit la présidente de la Fédération des commissions scolaires et la présidente de l'Association québécoise des commissions scolaires, nous avons toujours eu un dialogue franc, où nous avons été parfois en désaccord, je n'en disconviens pas, mais notre dialogue a toujours été très franc, et on n'a pas essayé de camoufler quoi que ce soit, et les règles du jeu ont été claires et bien dites.

Je voudrais revenir maintenant, cependant, sur le libellé même de la convention et de cette fameuse annexe à laquelle nous référons. Si on prend le point 6, le deuxième paragraphe, on dit ceci, et je cite: «Dans le cas où le total des économies générées par les modifications identifiées n'atteint pas la cible de 100 000 000 $ pour cette année scolaire...» Ce qu'il faut comprendre, c'est que l'un des partenaires, les représentants des enseignantes et des enseignants, avait identifié, a identifié un 100 000 000 $. Il est identifié. Il faut donc être, je dirais, à même, capable d'interpréter ce que ça signifie. Il y a eu d'identifié pour 100 000 000 $. On n'a pas arrêté à 70 000 000 $, on n'a pas arrêté à 80 000 000 $, il y a eu 100 000 000 $ d'identifiés. Cependant, l'une des parties a jugé que ce 100 000 000 $ ne convenait pas à certaines attentes qu'elle pouvait avoir. Mais il reste que ce 100 000 000 $ était pris à même les conditions de travail et concernait la rémunération globale des enseignantes et des enseignants.

(22 h 20)

Je dois constater, M. le Président, qu'il y a eu même... je crois que c'est trois hypothèses qui avaient été évaluées par les enseignantes et les enseignants et qu'il y avait une économie réelle de 100 000 000 $ d'identifiée. Ce que j'ai tenté de faire à partir de ce 100 000 000 $ et des échanges que j'ai eus avec les parties, je le répète, ça a été de voir comment on pouvait satisfaire tout le monde dans ça avec l'objectif de résultat qu'on s'était donné. Mais je ne peux pas dire qu'il n'y avait pas un 100 000 000 $ d'identifié et qu'il ne concernait pas les conditions générales de travail et la rémunération globale des enseignantes et des enseignants. Parce que c'est ça que dit l'annexe. Elle dit: Les parties conviennent d'entreprendre des discussions en vue d'identifier des modifications apportées à l'entente afin de générer des économies de 100 000 000 $ par année scolaire, pour chacune des années scolaires 1996-1997, ce qui est maintenant, et 1997-1998.

Et on prévoit pour les années subséquentes et on dit: Si le total des économies générées n'atteint pas la cible pour cette année scolaire. Or, les hypothèses qui ont été évaluées permettaient d'atteindre la cible. Pour essayer qu'elles soient acceptables à tout le monde, ces hypothèses, j'ai pris sur moi-même, en consultant et en rencontrant les parties... Je n'ai jamais joué, j'ai toujours travaillé à visière levée dans ce dossier, comme d'ailleurs je le fais dans tous les dossiers, à visière levée, en établissant très clairement les règles du jeu.

Et je peux vous dire que, jusqu'au dernier moment, si j'avais pu éviter le dépôt de cette loi, je l'aurais fait. Parce que je ne pense pas non plus que c'est la meilleure solution. Bon. J'en conviens. Cependant, c'est une solution qui m'apparaît la meilleure dans les circonstances pour éviter des affrontements qui risqueraient, à mon point de vue, d'empêcher de continuer la démarche qui est, malgré tout, bien engagée. Malgré tout.

Et je fais confiance, je le répète, à la maturité de mes partenaires avec qui j'ai eu des échanges corrects, que j'ai écoutés jusqu'à la fin, avec lesquels j'aurais souhaité évidemment que nous arrivions à retenir une proposition qui agrée à tout le monde. Nous n'y sommes pas arrivés. Mais je ne peux pas non plus dire à l'autre partie, qui a fait quand même des efforts considérables... Écoutez, M. le Président, regardez dans l'ensemble des ententes qu'on a eues avec les syndicats, qu'il s'agisse, dans le secteur de la santé et des services sociaux, dans celui de l'éducation, parce que, évidemment, je n'ai pas négocié spécifiquement cette convention – le député de Marquette intervient à quelques reprises – c'est mon collègue qui était à ce moment-là ministre de l'Éducation, avec ses partenaires, qui est arrivé à cette entente. Il faut lui savoir gré d'ailleurs d'y être arrivé. Bon. Mais il reste que, oui, je suis tout à fait solidaire de ce qui s'est discuté, négocié et signé, et loin de moi l'idée de me dissocier à cet égard d'aucune espèce de façon.

Mais, effectivement, quand on regarde l'ensemble – parce que, à une autre époque, j'ai occupé une autre fonction – quand on regarde l'ensemble de ce qui s'est fait comme négociations, c'est quand même assez extraordinaire qu'à partir d'affrontements, mais interminables, qu'on a connus à une certaine époque on arrive à ce que des enseignantes et des enseignants, à ce que des travailleurs et des travailleuses du secteur de la santé acceptent de revoir leurs conditions de travail, de revoir leur rémunération et disent: Ce sera notre façon à nous de contribuer à l'effort collectif que l'on doit faire.

Et je dois avouer, et il faut le dire, ils ont accepté à hauteur de 100 000 000 $ ce qui leur avait été demandé, et moi, pour m'assurer que, justement, je ne prenais pas fait et cause pour l'une des parties, j'ai tenté, d'une part, de rapprocher les partenaires et de proposer une hypothèse qui faisait faire un pas de plus aux enseignantes et aux enseignants, qui n'était pas l'une des trois hypothèses qu'ils avaient eux-mêmes étudiées. Si je ne m'abuse, c'est très clair pour un certain nombre de ces mesures, et pas une seule mesure, quelques-unes des mesures. Et quand, donc, j'ai proposé la répartition de ce 100 000 000 $, ce n'était pas la répartition proposée par la CEQ, là. Ce n'était pas, non plus, la répartition proposée par la Fédération des commissions scolaires. C'était une hypothèse qui était originale dans le sens où elle faisait faire un pas aux uns et aux autres.

Mais l'objectif sera atteint. J'espère qu'on le fait en limitant les risques, je dirais, d'affrontements inutiles, en préservant l'avenir et en comptant sur la maturité de ces mêmes partenaires. Et je peux assurer – et elles le savent, d'ailleurs – les commissions scolaires, pour avoir eu des échanges avec elles, qu'elles ont toute ma confiance, qu'elles étaient dans une situation aussi difficile, que certaines d'entre elles étaient tiraillées par les propositions qui étaient là, et j'ai essayé au meilleur de ma connaissance, en me disant que, si on pouvait passer à travers correctement cette première difficulté, par la suite, on allait se donner les moyens pour ne plus avoir à procéder d'une telle façon.

Le Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, malgré les propos de la ministre, qui continue de tourner autour du pot, parce que la réalité, elle est incontournable, il n'en demeure pas moins que la partie patronale, la Fédération des commissions scolaires, se sent... Et je ne peux pas employer le mot parce qu'il est antiparlementaire, mais c'est ce qu'elles ressentent. Et quand j'entends la ministre, maintenant, qui en est rendue à interpréter la clause 6 à l'effet qu'il suffisait qu'une des parties identifie un montant de 100 000 000 $ et le tour était joué, pourquoi le projet de loi n° 37? Mais son raisonnement ne tient pas la route pour cinq secondes, et je suis convaincu qu'elle le sait. Parce que les trois premiers mots de l'article 6 disent bien: «Les parties conviennent». Lorsqu'on convient de quelque chose, c'est qu'on le fait d'un commun accord. Donc, ça prend les deux parties ensemble, d'un commun accord, qui doivent identifier le 100 000 000 $.

M. le Président, je pense que c'est clair aux yeux de tout le monde ce qui s'est passé. La ministre n'a pas respecté son engagement, la ministre n'a pas respecté la signature du gouvernement. Et, d'après ce que nous entendons ce soir, la ministre a quand même l'intention d'aller de l'avant. Son lit est fait, il n'y a rien qui va pouvoir changer son opinion, sauf que je l'avise, elle perdra énormément de crédibilité lorsque la loi sera adoptée et ce sera à son détriment.


Amendement déposé

À ce moment-ci, M. le Président, j'aimerais déposer un amendement qui dit ceci: Le projet de loi n° 37 est modifié par l'ajout, à la fin de l'article 2, des mots «et cesse de prendre effet le 15 août 1996». Et je vais céder la parole à mon collègue, le député de Verdun, qui va plaider le bien-fondé de cet amendement. Merci.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce que vous le considérez comme recevable?

Le Président (M. Pinard): Je vais vous céder la parole et je vais l'examiner. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Brièvement, M. le Président, il s'agit d'une clause crépusculaire qui a pour effet de limiter le temps dans lequel la loi va pouvoir prendre effet. Si vous le déclarez recevable, M. le Président, je voudrais intervenir sur l'amendement.

Le Président (M. Pinard): Alors, je vais suspendre quelques minutes.

M. Gautrin: Qui ne sera pas compris à l'intérieur de l'enveloppe?

Le Président (M. Pinard): Non, qui ne sera pas compris à l'intérieur du temps...

M. Gautrin: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): ...afin d'analyser la recevabilité de votre amendement. Je suspends.

(Suspension de la séance à 22 h 30)

(Reprise à 22 h 39)

Le Président (M. Pinard): Nous reprenons notre travail en commission plénière. Nous déclarons l'amendement du député de Marquette recevable. Je cède maintenant la parole au député de Verdun, en lui mentionnant qu'il reste un temps de cinq minutes, et, Mme la ministre de l'Éducation, il vous reste un droit de réplique de cinq minutes. M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Il reste juste cinq minutes? Est-ce que le temps de la délibération est compté?

Le Président (M. Pinard): Non, le temps de la délibération n'a pas été inclus dans le calcul du temps du groupe parlementaire formant l'opposition, selon la table.

(22 h 40)

M. Gautrin: M. le Président, je vais essayer de convaincre, en quelques minutes, la ministre du bien-fondé de notre amendement. Toute l'argumentation du gouvernement a été de dire: Il y a actuellement un problème particulier dans les négociations. Le député de Marquette est intervenu pour bien expliquer que nous ne pensions pas que cette loi était le moyen approprié pour régler ce problème-là. Mais le problème est quand même éminemment ponctuel. Si on vote la loi sans l'amendement, on donne un pouvoir pour toute la durée de la convention collective, c'est-à-dire pour l'an prochain et l'année qui suivra où, là encore, il y aura un 100 000 000 $ à récupérer et un 50 000 000 $ à récupérer. On donne ce pouvoir absolument spécial que la ministre s'arroge par la loi pour les négociations qui vont venir l'an prochain et l'année subséquente.

La ministre, dans son intervention – et je pourrais reprendre certains de ses mots – a dit: Ce n'est pas avec beaucoup de plaisir que je fais ça; j'aurais souhaité que les parties s'entendent. Je voudrais quand même que la libre négociation fonctionne. Je pense qu'on a fait valoir, de notre côté ici, à quel point nous pensons qu'on aurait pu faire autrement que faire la loi spéciale. Mais vous faites une loi spéciale, faites-la donc au moins pour ce dont vous avez besoin, c'est-à-dire pour cette année, et laissez pour les années qui vont venir le libre jeu de la négociation fonctionner. C'est-à-dire, par l'amendement que nous proposons, donnons, si on accepte l'amendement, le pouvoir à la ministre pour cette année d'imposer le point de vue qu'elle a choisi, même si nous ne partageons pas le point de vue qu'elle a choisi, mais laissons, pour les années qui vont venir, c'est-à-dire pour la négociation qui doit avoir lieu l'année prochaine et l'année subséquente à l'année prochaine, libre cours aux négociations.

Je pense que notre amendement, M. le Président, peut permettre à la ministre de regagner de la crédibilité dans le mécanisme des négociations et, surtout, recréer ce que je pourrais appeler ce qui était important dans les positions des parties patronales et des parties syndicales dans la négociation où, réellement, le gouvernement et la Fédération des commissions scolaires sont des partenaires ensemble dans la négociation. Acccepter notre amendement, c'est vous dire: Vous faites ce que vous avez à faire cette fois-ci, même si nous ne le partageons pas, mais au moins vous pourrez laisser libre cours à des négociations dans les prochaines négociations.

Et, M. le Président, si vous me permettez, je crois que le député de Bourassa voudrait ajouter quelques mots aussi sur cette question, sur l'amendement.

Le Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Bourassa.

M. Charbonneau (Bourassa): Merci. Oui, M. le Président, j'aimerais, en ces deux ou trois minutes, rappeler à la ministre que ce qui est fondamental en relations de travail, c'est la responsabilisation des parties. Par une loi spéciale, la ministre intervient, en somme, à la place de l'ensemble de la partie patronale, et l'amendement que nous proposons lui offre de limiter les dégâts. Elle-même regrette, semble-t-il, d'être obligée d'intervenir à ce moment-ci. Alors, en limitant la portée de cette loi au 15 août, ça lui permet de faire appel, de nouveau, à la pleine – j'insiste sur le mot – à la pleine responsabilité des parties à compter de l'automne.

Il y a d'autres étapes à venir, il y a d'autres rendez-vous qui amèneront des négociations semblables. On sait aussi que, à compter de l'automne, il y aura le rapport de la commission des états généraux. Il y a toute la question des commissions scolaires, la transformation du système de commissions scolaires. La ministre est affrontée à des débats très, très importants, où elle a besoin de sa crédibilité et elle a besoin aussi de compter sur des parties, sur des partenaires qui sont pleinement responsables.

Alors, à compter de la fin d'août, après le 15 août, les partenaires reprendraient leur pleine responsabilité face à l'évolution de leurs conventions collectives, des conditions de travail. Et nous croyons que ce serait pour le mieux du milieu de l'éducation et de l'ensemble des intervenants si elle acceptait cet amendement.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Bourassa. M. le député de Verdun, merci. Alors, Mme la ministre de l'Éducation, vous avez un droit de réplique de cinq minutes. Mme la ministre.

Mme Marois: D'accord, Merci, M. le Président. J'avoue que j'ai évalué, avant de présenter le projet de loi, un projet qui ressemble à l'amendement qu'on a déposé de l'autre côté de l'Assemblée nationale, déposé par les membres de l'opposition. Je l'ai évalué. J'ai évalué deux hypothèses, en fait: la possibilité d'avoir un pouvoir plus élargi, pouvant permettre d'intervenir au-delà de la convention actuelle, ce que je trouvais démesuré, et la possibilité, tel que l'amendement est déposé, M. le Président, de le limiter à l'actuelle entente.

Malheureusement, je dois refuser ou m'objecter à l'amendement qui est déposé, parce que je pense que, si on devait se retrouver en juin l'an prochain et que j'avais à intervenir dans une situation comparable où je me verrais dans l'obligation d'intervenir pour proposer des éléments différents de ce que l'on trouve dans l'accord à l'annexe XXV parce qu'on ne serait pas arrivé au 100 000 000 $, à ce moment-là, je reviendrais devant vous, M. le Président.

On sait exactement, là, qu'on a un effort considérable à faire pour la prochaine année et l'année suivante. On est dans le domaine du complètement nouveau, il n'y a pas d'expérience derrière nous de ça, hein, on apprend à faire ça ensemble. Les premières ententes de réorganisation du travail, les premiers accords-cadres se sont signés il y a à peine quelques années. C'est complètement nouveau, ce qu'on a à développer comme outils, comme façons de faire, comme façons de travailler. C'est tellement nouveau qu'on est sorti des voies habituelles de discussion par la convention collective pour dire: Sur la base de la réorganisation du travail, sur d'autres éléments d'économie qu'on pourrait identifier, si on peut s'entendre en dehors de ce qui est prévu dans nos conventions, une fois qu'on l'aura fait, on l'introduira dans nos conventions.

Donc, on est essentiellement dans des expériences nouvelles et on n'a pas le choix que de réussir, puis on n'a pas le choix que d'avoir les moyens, si on n'arrive pas aux objectifs qu'on se fixe, pour que les solutions qui se dégagent ne viennent pas blesser, heurter l'une ou l'autre des parties et nous empêcher ensuite de respecter les engagements, qui sont des engagements majeurs à l'égard de la population québécoise, qui sont de dire: Voici les ressources dont on dispose, voici celles que vous nous confiez et voici ce qu'on fait avec en matière d'éducation, de santé et de services sociaux, de sécurité du revenu, de justice ou autre.

Alors, ce que l'on fait, c'est qu'on se donne des moyens pour nous permettre d'avancer, pour nous permettre de transformer nos façons de faire. C'est évident – et je le répète, M. le Président, je sais qu'il me reste peu de temps – je veux qu'on aborde différemment nos négociations. On a commencé, on a franchi des pas dans cette direction, mais je pense qu'on peut procéder à une amélioration encore plus significative du climat de relations de travail. Je veux donc qu'on se place en situation de collaboration. Je sais que cette loi ne règle pas tout. Elle donne, bien sûr, un signal sérieux sur la volonté du gouvernement et, je vous dirai, pour avoir eu des échanges à cet égard avec nos partenaires, qu'elle est respectueuse de ces mêmes partenaires, M. le Président.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci beaucoup, Mme la ministre de l'Éducation.

Alors, nous en sommes rendus à la mise aux voix. Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Ouimet: Vote nominal.

Le Président (M. Pinard): On ne peut pas, M. le député de Marquette, en vertu de la motion qui a été acceptée, en commission plénière... Il y a mise aux voix, mais sans appel nominal au niveau de la commission plénière. Alors...

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Alors, l'amendement du député de Marquette se lit comme suit: Le projet de loi n° 37 est modifié par l'ajout, à la fin de l'article 2, de «et cesse de prendre effet le 15 août 1996». Est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Pinard): Rejeté.

M. Ouimet: Question de directive, M. le Président. Qui se prononce sur cet amendement? Qui fait partie de la commission plénière?

Le Président (M. Pinard): C'est les députés.

(22 h 50)

M. Ouimet: Tous les députés présents au salon bleu?

Le Président (M. Pinard): Alors, nous allons poursuivre. Est-ce que l'article 2 est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Ouimet: Sur division.

Le Président (M. Pinard): Sur division. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Pinard): Sur division.

Alors, la commission met fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé.

Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je suspends les travaux quelques instants seulement et je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement. Merci beaucoup.

(Suspension de la séance à 22 h 51)

(Reprise à 22 h 54)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir. Conformément à l'ordre adopté précédemment, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption...

Une voix: Du rapport.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Malavoy (présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, et qu'elle l'a adopté sans amendement.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Sherbrooke. Est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, adopté sur division.


Adoption

L'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation. Alors, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, la durée de ce débat est limitée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique, d'une durée maximale de 10 minutes, est réservée au ministre qui présente le projet de loi.

Alors, Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Comme nous venons de discuter suffisamment longuement du contenu de la loi qui est devant nous ce soir, je serai très brève dans mes remarques, pour simplement rappeler que nous sommes en terrain nouveau puisque, effectivement, pour une première fois sûrement, on a signé des conventions collectives qui prévoient que des syndiqués, des enseignantes et des enseignants dans le cas présent, acceptent de revoir certaines de leurs conditions salariales ou de rémunération globale, de telle sorte qu'ils contribuent à des économies nécessaires et souhaitables, compte tenu des objectifs que nous nous sommes donnés de préserver l'essentiel de nos services publics, tout en nous assurant de combattre le déficit et d'atteindre ainsi un niveau d'équilibre entre les revenus et les dépenses, ce qui va nous permettre de préserver l'avenir.

On est donc sur un terrain nouveau, jamais exploré. C'est normal qu'en cours de route, à ce moment-là, il y ait parfois des accrochages au trajet qui avait été prévu. Je pense qu'en adoptant le projet de loi qui est devant nous ce soir on se donne des moyens d'éviter que ces accrochages prennent une ampleur qui ne servirait pas les objectifs que nous nous sommes donnés, ni le nouvel esprit et la nouvelle façon de faire qui animent nos relations de travail. Je le fais en tout respect pour les partenaires concernés, qu'il s'agisse des commissions scolaires ou qu'il s'agisse des enseignantes ou des enseignants, puisque la proposition que j'ai retenue pour arriver à résoudre ce 100 000 000 $ auquel on doit s'astreindre demande à chacun de faire un effort.

Je me permets, par la loi qui est devant nous, de pouvoir, s'il y a lieu, éventuellement intervenir à nouveau. Je le dis très clairement. Je ne le souhaite pas, M. le Président. J'ai demandé d'ailleurs aux partenaires d'avoir l'attitude la plus ouverte possible quant aux débats et aux discussions qui s'engageront, puisque nous ne sommes qu'à la première année du processus. Et ce que j'essaie de préserver aussi en faisant cela, c'est la suite du processus: ne pas nous fermer l'avenir, ne pas faire en sorte que les parties exacerbent les oppositions qu'elles pourraient avoir, mais, en même temps, obtenir les résultats sur lesquels nous avons convenu de nous entendre.

La convention est claire: il y a eu effectivement un 100 000 000 $ d'identifié d'économies auprès des enseignantes et des enseignants, qui n'est pas exactement, même si ce n'est pas très loin, ce qu'auraient souhaité la Fédération des commissions scolaires, l'Association québécoise des commissions scolaires. Cependant, j'ai pris sur moi, en assumant mes responsabilités, en évitant les embûches et les écueils, de proposer une hypothèse. J'ai tenté d'amener les parties à accepter cette hypothèse de règlement; l'une des parties l'a acceptée, l'autre pas. Je permettrai donc, par la loi que nous adopterons ce soir, que cette hypothèse soit maintenant retenue et que ce soit celle qui s'applique, M. le Président.

(23 heures)

Je nous dis à tous et à toutes, cependant: Nous sommes dans un processus profondément différent de ceux dans lesquels on s'est engagés jusqu'à maintenant. J'essaie de nous donner les meilleures conditions de réussite, en tout respect pour l'une et l'autre des parties qui sont concernées et, en ce sens, je demande aux membres de cette Assemblée d'approuver le projet de loi n° 37, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, Mme la ministre de l'Éducation. Je céderai maintenant la parole au député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Ce qui est en cause ce soir, ce qui est en jeu ce soir, et l'ensemble des parlementaires qui sont ici présents s'en rendent compte, c'est la crédibilité, l'intégrité de la députée de Taillon et ministre de l'Éducation qui renie la signature qu'elle avait apposée, que le gouvernement a apposée sur une convention collective, qui renie ses engagements face à ses partenaires patronaux, qui renie sa parole donnée aux parlementaires qu'elle n'interviendrait pas, que la convention collective prévoyait clairement le mécanisme qui s'appliquerait. Le mécanisme est prévu dans la convention collective, la ministre le sait, tous les parlementaires le savent, les parties impliquées le savent, et la ministre de l'Éducation a décidé d'imposer sa propre solution. Comment peut-elle affirmer dans cette Chambre qu'elle respecte les partenaires concernés, alors qu'un de ces partenaires-là lui écrivait une lettre, le 15 juin dernier, lui disant qu'elle portait atteinte au droit fondamental de représentation des commissions scolaires, au comité de négociation, et qu'elle venait de rompre, M. le Président, l'équilibre entre la partie patronale et la partie syndicale?

La suite des choses, maintenant: des réformes importantes qui s'en viennent; les commissions scolaires linguistiques, la ministre nous a donné des garanties formelles, je ne la crois plus, M. le Président. Au niveau des états généraux sur l'éducation, le coprésident disait lui-même: Nous sommes entre le mur et la peinture. Quelle genre de réforme en éducation allons-nous réaliser quand nous sommes face à une ministre de l'Éducation qui ne respecte pas non seulement la parole qu'elle donne, mais la signature qu'elle appose, au nom du gouvernement, sur un contrat, sur une convention collective? C'est ça qui est en jeu, et je pensais, je pensais que possiblement les ordres venaient du premier ministre lui-même. Eh bien, non, de sa propre initiative, la ministre de l'Éducation a décidé de fermer les yeux sur l'article 6 de la convention collective qui prévoyait exactement ce qui arriverait en cas de désaccord. Comme disait si bien le député de Bourassa: Les parties sont des parties responsables. Nous avons proposé à la ministre une clause crépusculaire pour lui permettre, après le 15 août, de regagner tranquillement la crédibilité qu'elle perd ce soir, et elle a même refusé cet amendement.

Comment comprendre le comportement de cette ministre de l'Éducation qui, aujourd'hui même, entend des groupes, pas n'importe quels groupes, M. le Président, des regroupements de garderies qui s'occupent de nos plus jeunes dans la société, les jeunes de trois ans, quatre ans et cinq ans? Elle les méprisait, M. le Président, et vous savez pourquoi? Elle les entendait sur un projet de loi pour lequel le leader, lui, allait imposer par la motion de suspension des règles de procédure; aucune possibilité d'amender ce projet de loi là. Quel mépris des gens qui étaient de ce côté-là, qui, de bonne foi, sont venus présentés des amendements. Et la ministre de l'Éducation avait le culot d'être assise là et de dire: Je vous écoute, je vous entends, pendant qu'au salon bleu on imposait le bâillon et qu'on allait passer cette loi-là sur le corps de tous les parlementaires.

M. le Président, c'est extrêmement inquiétant pour la suite des choses. Une ministre de l'Éducation qui était candidate à la chefferie du Parti québécois, qui aspirait à devenir première ministre du Québec, qui n'est même pas en mesure de respecter les contrats que le gouvernement signe, elle va pouvoir réaliser tout ça maintenant avec la complicité du gouvernement. Ça fait deux fois que ce gouvernement-là, ou le gouvernement du Parti québécois, ouvre des conventions collectives et bafoue ses partenaires. En 1981, il bafouait la partie syndicale, la CEQ; en 1996, il bafoue les commissions scolaires, le comité patronal. C'est ce qui est en train de se passer, M. le Président. Et, pourtant, de l'autre côté, c'est le silence le plus total. Le gouvernement renie sa signature sur un contrat, contrat qui est lourd de conséquences, et elle va aller chercher l'appui et l'aval de l'ensemble de ses partenaires.

Que reste-t-il de la crédibilité de cette ministre qui poignarde dans le dos – poignarde dans le dos – son partenaire patronal qui négociait à la table de bonne foi, qui a présenté au moins 20 hypothèses de règlement pour atteindre le 100 000 000 $ qui était encadré par les balises établies par la convention collective, qui écoutait le discours de la ministre de l'Éducation en commission parlementaire lorsqu'elle disait: Je n'interviendrai pas; les parties ont convenu d'un mécanisme en cas de désaccord, c'est ce que nous allons respecter?

Pourtant, ce soir, M. le Président, c'est le coup de poignard dans le dos des partenaires. Et comment, sur quoi allons-nous bâtir une relation de partenariat par la suite, dans le cadre de la réforme au niveau des commissions scolaires linguistiques et des états généraux de l'éducation? Une ministre qui va aller s'asseoir à la table de la Fédération des commissions scolaires qui va porter dans le dos le poignard qu'est en train de lui planter la ministre de l'Éducation avec la complicité de tous les parlementaires de ce gouvernement, qu'en est-il de sa crédibilité personnelle? Elle a signé un engagement, elle l'a négocié. Elle a dit: Je sais exactement ce qui va se passer en cas de désaccord. Et pourtant elle renie tout ça. Quel modèle, la députée de Taillon, par rapport à 1 100 000 élèves qui disent: La personne qui est responsable de notre éducation est en train – et j'emploie le mot – de trahir des partenaires! Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette, comme je l'ai souligné plus avant dans notre discussion, je vous prierais de retirer le mot «trahir».

M. Ouimet: Je vais remplacer «trahir», M. le Président, par «poignarde dans le dos son partenaire».

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, M. le député de Marquette. Je cède maintenant la parole au député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Je ne répéterai pas les arguments du député de Marquette, je ne répéterai pas à quel point, d'après nous, ce projet de loi n° 37 vient, ici, à la fois changer une convention collective qui avait été dûment signée, modifier l'engagement que la ministre avait pris en commission parlementaire, perturber le régime de négociation dans le secteur de l'éducation.

Mais je voudrais intervenir, M. le Président, sur la réponse de la ministre lorsqu'on a déposé notre amendement. L'argument de la ministre était le suivant, M. le Président: J'ai besoin actuellement, pour une raison tout à fait ponctuelle, de cette loi-là. Nous ne le croyons pas, M. le Président. Mais elle disait: J'ai besoin de cette loi-là parce que, dans le cas de la récupération des 100 000 000 $, nous y étions presque arrivés. Et nous lui avons dit, avec l'amendement: Prenez cette loi-là quand même pour cette négociation; pour celles qui vont venir, ne préjugez pas au départ que, dans les négociations qui vont avoir lieu l'an prochain et l'année qui suivra l'an prochain, les parties ne seront pas capables de s'entendre.

Et c'est ça que vous faites, vous êtes en train de vous donner un pouvoir non seulement pour régler un problème actuel, ponctuel, mais c'est le fait que vous êtes en train de changer le régime de négociation dans le secteur de l'éducation, et ça, c'est très grave, M. le Président, c'est extrêmement grave.

(23 h 10)

Si la ministre avait accepté et si les parlementaires ministériels avaient accepté notre amendement, qui est une clause crépusculaire, on aurait pu les croire un petit peu lorsqu'ils disaient: Bon, il y a un problème tout à fait particulier. Mais ils ont refusé l'amendement qu'on proposait. Donc, ils sont en train de se donner des pouvoirs énormes en prévoyant, éventuellement, des problèmes. Et ce qui est encore beaucoup plus grave, M. le Président, et extrêmement grave, c'est de se dire: Je ne devrai plus revenir devant les parlementaires, devant les élus du peuple si jamais j'ai à nouveau un problème tout à fait particulier d'un régime de négociation, parce que je me serai donné ce pouvoir pour toujours.

M. le Président, ça, pour moi, ça démasque réellement une démarche que nous ne pouvons, en aucune manière, accepter, en aucune manière accepter, en aucune manière accepter. On ne peut pas préjuger que, l'an prochain, dans les négociations, il y aura un problème, premièrement. Deuxièmement, si jamais il y avait un problème dans les prochaines négociations, je pense que, comme parlementaires, nous avons le droit que la ministre revienne devant nous et soit en mesure, le cas échéant, de refaire le même débat ou un débat différent avec le problème qui sera le problème d'alors. Mais, M. le Président, à l'heure actuelle, je ne peux pas être en mesure de croire la ministre lorsqu'elle dit: Je veux agir strictement – parce qu'il y a un petit problème et qu'il y avait une entente qui avait été proche du 100 000 000 $ – alors qu'elle s'arroge pour toujours, pour toute la durée de la convention, un pouvoir énorme. Et ça, M. le Président, ça démasque complètement toute l'argumentation qui avait été faite depuis le début et c'est extrêmement inquiétant pour les parlementaires et pour le Parlement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Verdun. M. le député de Bourassa.


M. Yvon Charbonneau

M. Charbonneau (Bourassa): Oui, M. le Président, je voudrais intervenir sur ce projet de loi n° 37 une autre fois pour dire mon inquiétude face à certains arguments apportés par la ministre ce soir, lors du débat en comité plénier, et tout à l'heure encore dans sa dernière intervention.

Elle nous dit: Nous sommes en terrain nouveau, nous sommes devant de l'inédit, nous devons procéder autrement. Je voudrais m'interroger publiquement et interroger la ministre sur ce qu'elle entend vraiment par «terrain nouveau». Pour moi, qui ai quelque idée de ce qui s'est passé dans les dernières années en matière de relations de travail dans le secteur public, et dans le secteur de l'éducation en particulier au Québec, il n'y a absolument rien de nouveau dans l'approche, dans la démarche de la ministre actuellement. Elle a renoué avec un filon profond de la tradition péquiste, c'est-à-dire une intervention unilatérale et d'autorité pour faire dénouer une impasse. Même chose qu'il y a 15 ans, M. le Président. C'est ça. C'est ça, le terrain nouveau.

Elle nous dit: Oui, nous sommes en discussions sur l'organisation du travail. Qu'est-ce que c'est, le terrain nouveau? Où est le régime de négociation du secteur public? Est-ce qu'elle veut le renouveler? Qu'elle le dise, si c'est ça qu'elle appelle le terrain nouveau. Qu'elle l'amène en commission parlementaire, le régime, et, si elle n'est pas satisfaite des dispositions qui lient son ministère aux commissions scolaires dans le bloc patronal, qu'elle le dise et nous allons en débattre, et tous les intéressés viendront s'expliquer, et on renouvellera le régime de négociation du secteur public. Les règles du jeu seront connues par tous les partenaires, par tous les intervenants.

Ce n'est pas ça qu'elle nous dit. Elle dit: Je fais une intervention et, à part ça, je veux m'assurer que cette intervention aura une portée jusqu'à la fin de la convention. Terrain nouveau! Plus de convention collective. Elle a signé une clause; l'encre est à peine séchée, M. le Président, que déjà ce n'est plus bon. Il n'y a rien de nouveau là-dedans, ils l'ont déjà fait dans le passé.

Donc, plus de convention collective. On change ça quand on veut. Le régime de négociation du secteur public, on change ça aussi par une loi spéciale. C'est quoi, le terrain nouveau dans lequel on s'avance, M. le Président? On pose les prémisses d'une démarche en relations de travail basée sur l'autoritarisme. Quand ça ne fait pas, quand on n'arrive pas à un dénouement par la voie de la négociation, tout de suite une intervention unilatérale.

M. le Président, moi, je pense que la ministre a manqué de clairvoyance. Elle a manqué aussi... Elle qui avait toutes les données comme présidente du Conseil du trésor il y a quelques mois, ministre des Finances aussi pendant quelque temps, elle avait toutes les mêmes données pour voir venir la situation. Manque de leadership aussi: pas capable de convaincre son partenaire de la Fédération des commissions scolaires d'en arriver à une solution, de faire quelques compromis, etc.

M. le Président, la même ministre va faire face dans quelques mois à des défis beaucoup plus importants, gigantesques par rapport à ce problème particulier. Les états généraux vont aboutir, j'imagine, à des recommandations de transformer quelques éléments du système scolaire. Elle s'aventure dans la transformation du système des commissions scolaires linguistiques, etc. Tous ces débats vont comporter des affrontement importants, tout le monde ne sera pas d'accord. Quel sera son leadership? Quelle sera sa capacité de persuasion, de conviction? Elle-même abîme son pouvoir de persuasion en le mettant au jeu à travers une telle loi.

On lui a proposé, tout à l'heure, comme amendement, au moins de limiter les dégâts en disant: Cette loi va avoir une portée jusqu'au 15 août et, après le 15 août, les parties reprendront leurs responsabilités. La ministre nous dit: Non, je préfère, parce que, l'année prochaine, peut-être qu'ils ne s'entendront pas non plus. Je préfère prévoir plutôt que d'être obligée de revenir par une loi spéciale. Ça veut dire qu'elle fait l'hypothèse, en son for intérieur, que les parties ne pourront pas, en toute responsabilité, négocier ce qu'il y a à négocier l'année prochaine. C'est grave ça, M. le Président. Elle dit: Nous en sommes en terrain nouveau. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau là-dedans? Je pense qu'elle devrait regarder les affaires sagement, calmement et se dire: L'opposition est prête à collaborer avec moi pour limiter les dégâts de ma proposition qui ne me plaît pas. Elle nous l'a dit elle-même, c'est une proposition qui ne lui plaît pas. Elle aurait aimé faire d'autre chose, elle aurait aimé proposer d'autre chose. On lui a suggéré d'éviter le pire, de rétablir la responsabilité des parties en négociation – c'est ça qu'il y a de plus sacré en matière de relations de travail – elle refuse.

Quelle est sa stratégie, au fond, quand elle nous dit: Terrain nouveau? C'est d'imposer, à travers les mois, les étapes de la convention collective, sa volonté. Est-ce que c'est ça le terrain nouveau sur lequel elle nous invite à avancer, M. le Président? Moi, je peux lui dire, en terminant cette intervention, qu'à chaque fois que ce gouvernement, que ce soit en éducation ou ailleurs, va préférer des solutions d'autorité aux solutions issues du consentement des parties, particulièrement en éducation et particulièrement en relations de travail, elle va nous trouver, nous, de ce côté-ci de cette Assemblée, en travers dans son chemin, parce que ce n'est pas comme ça qu'on bâtit les partenariats.

Ce gouvernement s'époumone sur toutes les places publiques à parler de partenariat, de conférences, de sommets, de bâtir les solidarités, toutes sortes de mots creux quand on regarde les réalités. Il y a un petit accrochage, 6 000 000 $ sur un ensemble de 100 000 000 $: intervention unilatérale. Où est la recherche du partenariat? Où est la préservation de l'avenir? Elle nous a parlé de ça dans son discours tout à l'heure: Je veux préserver, je veux éviter d'exacerber les positions. C'est le contraire, elle aurait dû prendre les moyens de persuader ses partenaires d'en arriver à une entente à ce moment-ci, elle aurait semé ce qu'il faut pour faire germer le partenariat. Elle en aura besoin du partenariat pour les transformations qui s'imposent dans le domaine scolaire, dans le domaine de l'éducation, dans le domaine des relations de travail dans le secteur public. Oui, on en aura besoin du partenariat, mais pas avec ce genre de projet de loi, pas avec ce genre de position gouvernementale. C'est le contraire du partenariat que ces gens-là sont en train d'édifier.

(23 h 20)

Et, d'ailleurs, on entend certains craquements du côté du discours du partenariat. La présidente de la CEQ, il y a quelque temps, disait: L'automne prochain, ce sera le temps où on va les passer au détecteur du mensonge, en parlant du gouvernement. Le président de la CSN, le président de la FTQ ont dit ces jours-ci: La confiance, on en a moins qu'on en avait. On se demande où s'en vont ces gens-là? Belle annonce pour le partenariat à l'automne. Et, avec un projet de loi, avec une loi comme celle-ci, on va à contre-courant. Je ne pense pas qu'on va rendre service ni à l'éducation, ni au régime de négociation dans le secteur public, ni à l'avenir du Québec, avec de telles interventions, M. le Président. Alors, nous serons vigoureusement opposés à cette loi. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Bourassa. Conformément à la motion de suspension... Excusez-moi, M. le député, je ne vous avais point reconnu. Alors, conformément à la motion de suspension, vous avez un temps de parole de 10 minutes. Alors, M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Je suis, évidemment, désolé, sûrement comme les autres parlementaires, d'avoir à intervenir sur un projet de loi comme celui-là sous le couvert du bâillon, surtout que, je le répète, j'en ai parlé cet après-midi, l'ancien leader du gouvernement nous avait dit que le bâillon serait une mesure exclue par ce gouvernement, avec l'autre façon de gouverner. Il nous avait dit que ce serait seulement utilisé quand la sécurité, la sécurité et la santé du public, de notre population, des choses que, évidemment, tout le monde dans cette Assemblée comprendrait, donc des facteurs majeurs seraient en cause. Évidemment, on n'est pas devant un projet de loi où, je pense, la sécurité de notre population est largement en cause. Je ne pense pas qu'on est devant un projet de loi où la santé de notre population est largement en cause. On est devant une situation où il y a une négociation, où les objectifs budgétaires du gouvernement sont fixés, imposés par le gouvernement, et semblent un peu difficiles à rencontrer. Je ne pense pas, non plus, qu'on est si loin des objectifs.

L'historique des projets de loi au Québec en matière de relations de travail a surtout été en matière de ce qu'on pourrait appeler de force majeure, c'est-à-dire de cas où les parties étaient extrêmement éloignées et où les conséquences étaient très graves. Parce qu'on a toujours fait un ratio. On sait très bien que, quand on amène ce genre de loi là, on crée de l'insatisfaction, on crée des tensions, et je pense qu'il faut toujours mesurer le ratio entre l'insatisfaction créée et les gains réels. Et, à mon humble avis, M. le Président, et c'est mon jugement de ce projet de loi là, c'est que le ratio entre l'insatisfaction, les tensions, les pertes de confiance qui peuvent être créées et les gains réels qui vont être amenés en termes d'économies pour le gouvernement par rapport aux gains qui auraient à être faits dans le futur, bien, ce ratio-là n'est pas très avantageux, n'est pas très en faveur de l'adoption du projet de loi qui est devant nous.

Loin de moi, M. le Président, l'idée de dire qu'il ne doit pas y avoir des réallocations de ressources, des transferts de fonds des mauvais endroits aux bons endroits en matière d'éducation. Le programme de l'Action démocratique est extrêmement clair là-dessus, il faut sortir les ressources des bureaucraties en matière d'éducation, remettre les ressources dans les écoles, proche des élèves, proche de là où sont les élèves, où il y a des besoins réels. Mais je n'ai pas l'impression qu'on est, avec ce projet de loi là, dans la bonne voie ou qu'on fait un pas significatif dans la bonne direction, d'autant plus qu'on est à la veille d'états généraux et que les coupures en matière d'éducation... on procède un peu à l'envers. On fait d'abord des coupures en matière d'éducation, qui viennent changer largement la configuration de notre système puis qui touchent durement les services aux populations étudiantes, et on dit: Par la suite, on va réorganiser tout ça. Habituellement, c'est l'inverse, c'est-à-dire qu'on réorganise un système avec les ressources qu'on a, mais pas faire tous les choix puis, ensuite, dire aux états généraux: Bien, essayez de vous organiser, après ça, pour ramasser les morceaux, les résultats de nos décisions.

On espérait aussi, puisque le discours qui entoure le projet de loi n° 37 concernant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, le discours qui l'entoure, c'est qu'il faut faire preuve d'imagination, il faut minimiser la coupure qui va toucher directement l'élève, il faut couper le plus possible dans les administrations. Or, ce que le gouvernement demande aux commissions scolaires, il me semble que le gouvernement lui-même n'a pas, dans ses propres affaires, dans son propre ministère, donné l'exemple. Le gouvernement n'a pas lui-même très largement fait preuve d'imagination et n'a pas lui-même fait un grand ménage dans sa bureaucratie comme gouvernement pour donner une indication claire que les ressources retournent dans les écoles. Et, quand un gouvernement dit aux populations, finalement, aux organismes concernés: Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais, quand le gouvernement ne prêche pas lui-même par l'exemple dans des domaines où il veut insuffler une tendance, bien, c'est comme lancer un «Frisbee» dans les airs, qui vous revient, ou c'est comme l'effet boomerang, c'est une action qui vous revient en plein visage, parce que les gens vont immédiatement se retourner vers vous, puis dire: De quelle façon, vous-même, comme gouvernement, avez-vous agi en ces matières-là? Je m'excuse, M. le Président, mais le ministère de l'Éducation du Québec, la ministre de l'Éducation du présent gouvernement n'a pas clairement donné ce signal de la réduction des bureaucraties, de la réduction des dépenses d'administration, d'une réallocation des ressources vers les écoles, et je pense que c'est ça dont on a besoin le plus rapidement possible.

Je dois dire, M. le Président, que mon opposition au projet de loi n° 37 n'est que renforcée par le refus par le gouvernement de l'amendement qui a été proposé par le député de Verdun, qui essayait de circonscrire dans le temps l'effet d'un projet de loi comme celui-là, d'en faire une chose plus temporaire, plus ad hoc. Le refus de cet amendement-là, pour moi, n'est qu'un argument de plus contre le projet de loi n° 37.

Alors, je voterai contre, M. le Président, en conclusion, parce que je suis très préoccupé d'éducation, mais je n'ai pas été convaincu, je n'ai pas vu les arguments nécessaires au support de ce projet de loi là. Je n'y vois pas la bonne approche. Je n'y vois pas des pas dans la bonne direction sur ce que, moi, j'attends de la réallocation des ressources nécessaires, oui, très nécessaires dans notre système d'éducation. J'aurais l'impression, en votant en faveur de ce projet de loi là, que je serais en train de concourir à des gestes sans direction et que ce ne seraient pas des améliorations pour l'ensemble de l'allocation des ressources à l'intérieur de notre système d'éducation et de nos écoles au Québec. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, conformément à la motion de suspension des règles adoptée précédemment, Mme la ministre de l'Éducation, vous avez droit à une réplique d'une durée maximale de 10 minutes.

Bon. Comme vous ne vous prévalez pas de ce droit de réplique, alors nous allons mettre aux voix... Est-ce que le projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation, est adopté?

M. Gautrin: Vote nominal, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vote nominal. Alors, qu'on appelle les députés!

(23 h 28 – 23 h 35)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre, s'il vous plaît! Merci. Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Mise aux voix

Je vais maintenant mettre aux voix l'adoption du projet de loi n° 37, Loi favorisant la conclusion d'ententes dans le secteur de l'éducation.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Perron (Duplessis), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière)...

Le Vice-Président (M. Pinard): On interrompt le vote. Écoutez, c'est excessivement difficile, pour nos préposés à la table, de faire le décompte du vote et de se souvenir de chacune des circonscriptions électorales. Alors, madame, si vous voulez bien poursuivre, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Rivard (Limoilou), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît.

La Secrétaire adjointe: M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Charbonneau (Bourassa), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? M. le secrétaire général, voulez-vous nous livrer le résultat du vote, s'il vous plaît?

Le Secrétaire: Pour:56

Contre:32

Abstentions:0

(23 h 40)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le projet de loi n° 37 est donc adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demande de procéder à la prise en considération du rapport sur le projet de loi n° 11.


Projet de loi n° 11


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements déposés

Le Vice-Président (M. Pinard): Le projet de loi n° 11, prise en considération du rapport de commission. Alors, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis par Mme la ministre de l'Éducation. Tous les amendements de la ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 24, 30, 31, 44, 52, 58, 60, 61, 62 et 63.

Je vous rappelle que la durée de ce débat sur la prise en considération de ce rapport a été fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. Le ministre... Écoutez, que tous les députés qui ont à travailler en commission parlementaire se retirent immédiatement. Merci beaucoup. Je disais donc 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. La ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur les amendements? Alors, Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Très brièvement, M. le Président. Nous avons eu l'occasion, cet après-midi, de regarder un certain nombre d'amendements qui sont venus clarifier ou ramener au niveau d'un même article des choses que l'on retrouvait par ailleurs dans la loi mais qui, à sa face même, lorsque ramenées dans un seul article, permettaient de clarifier les choses.

D'autre part, tous les autres amendements, M. le Président, à une exception près, sont des amendements de concordance avec une autre loi qui a été déposée et adoptée après la nôtre, pour définir des termes, entre autres, passer de la notion de corporation municipale à la notion de municipalité.

Alors, ce sont les amendements qui ont été apportés au projet de loi, M. le Président. J'aurai l'occasion d'intervenir, évidemment, lorsque nous procéderons à l'adoption de la loi, pour rappeler quelques-uns des éléments de fond de la loi n° 11, qui est une loi accueillie très favorablement par la très grande majorité des intervenants des milieux des services de garde. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Alors, je cède maintenant la parole au député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Règle générale, lors d'une prise en considération d'un rapport, on parle des travaux qui sont effectués par une commission parlementaire. Ce que nous avons fait avec la commission des affaires sociales était loin d'être ça, parce que la ministre a tout fait pour bloquer l'étude détaillée de ce projet de loi.

Un certain rappel des faits, M. le Président. L'opposition s'est montrée ouverte à discuter de ce projet de loi dès le 15 mai. On était disponible en tout temps pour le regarder. Nous trouvions que c'était un projet de loi très important. Nous autres, on a pris la peine de demander à la ministre, en cette Chambre si elle allait entendre les groupes. C'est la ministre elle-même qui a décidé qu'elle voulait entendre les groupes; pas une consultation faite par la ministre, mais une consultation parlementaire, c'est-à-dire en donnant une occasion pour les parlementaires de questionner les groupes. C'est ça que nous avons proposé.

La ministre, en catastrophe, jeudi dernier, a convoqué les groupes à trois heures d'avis, de tout laisser tomber à Montréal pour descendre à Québec pour témoigner ici. Malheureusement, il n'y avait qu'un groupe sur quatre qui était capable de prendre le temps de descendre ici en catastrophe comme ça. Alors, nous avons passé la journée à faire la demande pour entendre trois autres groupes et, je pense, sauf le député de Lévis, tous les membres ministériels de la commission des affaires sociales ont voté contre le fait qu'on puisse entendre ces groupes. Alors, ils ont voté contre le droit de ces groupes qui avaient montré un intérêt à venir ici témoigner sur le projet de loi n° 11. Alors, ils ont brimé leur droit de parole. Ça, c'est jeudi passé.

Malgré tout ça, on pouvait, de notre côté, continuer avec les motions, une après l'autre, mais on en a fait trois. On a fait notre point parce qu'on trouvait ça très, très important pour nous autres, pour tous les parlementaires dans cette Chambre, de défendre le droit d'entendre les groupes avant de procéder à ce que la ministre a qualifié comme une réforme majeure de nos services de garde, des services de garde qui donnent un service à 130 000 enfants à travers le Québec, jour après jour. Alors, c'est un dossier très important pour nous autres. Nous l'avons demandé, car c'est très important d'entendre les groupes. Et, hier, la ministre nous a donné raison, parce qu'elle a dit oui. Effectivement, les trois groupes que nous avons défendus en commission parlementaire, la semaine passée, elle les a convoqués à venir ici pour 11 heures pour donner leur point de vue sur le projet de loi n° 11.

Alors, imaginez, j'étais étonné de voir, quand le leader s'est levé dans la Chambre pour bâillonner les projets de loi, qu'on trouve le projet de loi n° 11 là-dedans. Alors, au même moment que ces groupes sont venus ici témoigner de bonne foi pour essayer de bonifier le projet de loi qui est devant nous ce soir, la ministre met le bâillon. Alors, c'est traiter les personnes... Elle les a insultées, la semaine passée, M. le Président, en disant: On ne peut pas vous entendre, en organisant ça en catastrophe. Mais, pour ajouter l'injure à l'insulte, elle les a convoquées aujourd'hui pour rire d'eux autres en disant: On va vous entendre, mais le projet de loi va être déjà adopté à la vapeur à la fin de la journée, vos commentaires ne valent rien.

Alors, c'est comme ça que la ministre a procédé en regard du projet de loi n° 11. C'était complètement se moquer des personnes qui sont venues ici aujourd'hui témoigner de bonne foi, se moquer également des parlementaires, parce que les parlementaires ont toujours le droit, aussi, de regarder un projet de loi. Sur ce projet de loi, nous avons procédé... je pense qu'on est rendu à l'article 14, l'opposition a proposé trois amendements que la ministre a jugés assez intéressants de faire adopter. On a travaillé de bonne foi. Nous avons essayé de bonifier le projet de loi, mais, à cause du fait que la ministre est trop préoccupée avec les compressions catastrophiques qu'elle doit faire dans le ministère de l'Éducation, je ne sais pas trop quoi, elle n'avait pas le temps de prendre en charge le dossier des services de garde comme il faut. Alors, elle a négligé ça, elle n'a pas trouvé ça assez important pour rester ici pour faire toute une interpellation sur ce sujet il y a trois semaines. Elle n'a pas organisé son temps et son travail d'une façon qu'on puisse regarder le projet de loi n° 11 comme il faut.

Il y a toujours des questions. On a soulevé une question au moment de la suspension des règles, à 21 heures, ce soir. On est en train de vérifier un problème entre la version anglaise et la version française sur le mot «audit» en comparaison avec le mot «vérifier» qui aurait des conséquences très importantes pour les garderies qui sont impliquées. Ça peut leur occasionner des frais additionnels de 2 000 $. C'est parti maintenant dans la brume, parce que la ministre n'était pas capable de clarifier ça avant le moment où nous avons décidé de suspendre nos règles.

(23 h 50)

Même l'opposition, nous, on était disponibles, malgré le fait que j'aie essayé de participer aux débats ici et également suivre les travaux de la commission à côté. À mon avis, c'était très difficile, mais mes privilèges étaient d'une certaine façon brimés par la façon de procéder qui a été adoptée par la ministre et ce gouvernement. Mais, malgré tout ça, on était disponibles. Nous avons travaillé, mais, en plein moment de l'étude détaillée, entre 16 heures et 18 heures cet après-midi, qu'est-ce que la ministre a fait? Elle a suspendu nos travaux. Même pour le petit deux heures de temps qu'elle nous a accordé pour faire l'étude détaillée, c'est elle qui a pris une pause d'une demi-heure.

Alors, ce n'est pas sérieux, M. le Président. Tout ça, c'est un manque de respect, pas juste pour moi – ça me dérange moins – mais pour les groupes, pour les personnes qui sont impliquées dans le domaine des garderies à travers le Québec, qui ont des choses à dire, qui rendent des services très importants.

Aujourd'hui, les groupes que nous avons entendus touchent deux domaines très, très importants. D'abord, les garderies à but lucratif, qui représentent 400 garderies, je pense que c'est pas loin de 4 000 travailleurs et travailleuses et 20 000 enfants qui sont dans ces services de garde à tous les jours. Alors, on a tout intérêt à les entendre et à peut-être travailler avec eux autres pour bonifier le projet de loi, mais la ministre ne veut rien savoir d'eux autres. Alors, on a fait, comme je l'ai dit, une consultation bidon, dans le style de la ministre, pour les entendre, mais elle n'avait aucune intention, aucune intention, même avant qu'ils aient commencé leur présentation, de donner suite à leur point de vue. Alors, c'était vraiment, comme je l'ai dit, les traiter du revers de la main, la façon dont on a procédé aujourd'hui.

Le deuxième réseau que nous avons consulté aujourd'hui, c'est également les services de garde en milieu scolaire, et c'était étonnant, M. le Président, après avoir entendu le groupe qui a témoigné de tous les dommages, de tous les problèmes, du manque de planification causé par l'improvisation de cette ministre... Elle a dit, à la fin: Je suis très sensible à vos problèmes. Ce n'est pas vrai, M. le Président, parce que c'est elle qui a causé ces problèmes. Alors, on ne peut pas à la fois être l'auteure des problèmes... C'est elle qui cause le fait qu'on a des services de garde en milieu scolaire... C'est 72 000 enfants par jour. C'est la fin de l'année scolaire vendredi de cette semaine, et ces enfants et leurs parents n'ont aucune idée de ce que sera le tarif pour le mois d'août, quels parents vont être admissibles à l'aide financière, quel va être le niveau de subvention accordé par le gouvernement. Toute la réforme était supposée être faite au nom d'avoir une organisation beaucoup mieux ordonnée, planifiée dans le domaine des services de garde, mais, avec les décisions, avec l'improvisation de la ministre, c'est le contraire qu'on est en train de faire.

Je le répète, les chiffres sont importants: 72 000 enfants par jour dans les services de garde en milieu scolaire, tout ça bouleversé par une compression de 50 % faite par la ministre. Alors, elle peut bien être sensible aux problèmes des services de garde en milieu scolaire, mais c'est elle, l'auteure. Et, également, comme je l'ai dit, au nom des garderies à but lucratif, c'est 400 garderies, c'est 20 000 enfants par jour qui ont accès à ce service essentiel grâce au travail des éducatrices et des propriétaires de ces services de garde.

Alors, c'est ça, les deux réseaux. C'est ça qu'on voulait entendre avant de procéder au projet de loi n° 11, mais les jeux étaient déjà faits avant de le faire. Alors, ça a été vraiment, de A à Z, une catastrophe. Ça doit servir comme un exemple de comment on peut mal planifier les travaux et l'étude d'un projet de loi dans notre Assemblée. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre, est-ce que vous voulez vous prévaloir de votre droit de réplique?

Mme Marois: Pour l'adoption, M. le Président.


Mise aux voix des amendements de la ministre

Le Vice-Président (M. Pinard): Très bien. Alors, je mets maintenant aux voix, puisqu'il n'y a pas d'intervenant indépendant, les amendements de Mme la ministre de l'Éducation aux articles 24, 30, 31, 44, 52, 58, 60, 61, 62 et 63. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté.


Mise aux voix des articles amendés

Je mets maintenant aux voix les articles du projet de loi n° 11 amendés par le vote précédent. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 11 que la commission des affaires sociales n'a pas adoptés ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi. Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, ces articles ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Je mets maintenant aux voix le rapport tel qu'amendé de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives. Le rapport tel qu'amendé de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Adoption

Alors, nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives. La durée de ce débat a été fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique d'une durée maximale de 10 minutes a été prévue pour la ministre qui présente le projet de loi. Alors, Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Alors, je vais intervenir très brièvement, peut-être juste pour corriger certains aspects d'abord de l'intervention de notre collègue, le député de Jacques-Cartier, qui a dit que nous ne souhaitions pas recevoir les groupes, certains groupes, parce que nous avions voté contre les motions qui avaient été présentées pour les recevoir.

Ce qu'il faut bien voir, c'est que ces motions étaient présentées dans un contexte où on ne commençait pas l'étude du projet de loi avant d'avoir entendu ces groupes, M. le Président, et la preuve était que nous étions de bonne foi, puisque, aujourd'hui, alors qu'on a eu le temps de les convoquer dans des délais plus raisonnables, je n'en disconviens pas – parce que la fin d'une session, c'est toujours comme ça, et, malheureusement, on doit bousculer parfois les groupes – on a accepté de les recevoir et de les entendre. Donc, il n'y avait pas d'objection à ce qu'on entende les groupes, il y avait une objection à ce qu'on ne commence pas le projet de loi au moment où, malheureusement, ces groupes n'étaient pas là. On aurait dû, effectivement, suspendre nos travaux et ne pas pouvoir commencer à étudier la loi.

Bon. Je reviens sur le fond de cette loi et sur le processus qui a mené à son adoption ce soir, M. le Président, je le souhaite à tout le moins. D'abord, il faut savoir, et ce n'était pas faire injure aux groupes que de ne pas prévoir une longue consultation, mais il faut savoir que ce projet de loi est le résultat d'une très longue consultation qui a eu lieu dès notre arrivée au gouvernement, au début du mandat, en 1994, qui a, cette consultation, proposé des amendements à la loi actuelle, qui a proposé de nouvelles modalités de financement, toutes mesures que nous avons mises en place. Et, dès ce moment-là, il est apparu clairement, par exemple, que les groupes à but lucratif, qui représentent un nombre important de services de garde au Québec, souhaitaient que nous continuions à les soutenir financièrement.

À quelques reprises, il avait été discuté du fait que nous le ferions pour les garderies existantes, respectant ainsi les droits acquis, mais que nous n'avions pas l'intention de le faire pour les nouvelles garderies qui obtiendraient des permis – ce qui sera donc possible, qu'on obtienne des permis, mais, effectivement, elles n'auront plus accès à du financement. Ce n'était donc pas très nouveau, ce qu'on retrouvait au projet de loi sous cet angle. Qu'elles se fassent entendre à cet égard, on l'a aussi reconnu, ce qui fut fait aujourd'hui, et un certain nombre des propositions qui nous ont été faites, qui ne viennent pas nécessairement amender la loi mais qui pourraient avoir des impacts sur le règlement ou sur certaines mesures administratives, seront retenues. Et, à cet égard, j'ai bien entendu les propos des différents groupes de services de garde qui sont venus nous faire des représentations.

Alors, essentiellement, cela prévoit effectivement de nouvelles règles en matière de financement des services de garde et agences de garde en milieu familial, cela prévoit l'instauration d'un processus de consultation au plan régional, de telle sorte qu'on essaie d'ordonner un peu le développement pour ne pas faire se concurrencer des garderies sur un même territoire.

Ce projet de loi met aussi en vigueur, M. le Président, les articles qui concernent les jardins d'enfants, les haltes-garderies, qui pourront être reconnus désormais et obtenir un permis, et, pour ce faire, qui auront le temps nécessaire dans le cas des services existants.

(minuit)

Nous resserrons aussi un peu les règles d'encadrement de la garde en milieu familial, de telle sorte qu'une famille puisse garder ses enfants et ne pas compter, parmi les enfants gardés, ceux qui sont plus âgés que neuf ans. Ça balise un petit peu mieux tout ce qui se fait à cet égard, et un certain nombre d'autres articles qui clarifient soit des pouvoirs, des responsabilités en matière de contrôle, d'exigences, qui vont concerner les services de garde au Québec. Nous proposons, d'autre part, que des permis puissent être émis pour des institutions comme les CLSC, comme des coopératives où les parents formeraient majoritairement le conseil d'administration, seraient donc des parents utilisateurs. Des nouvelles institutions donc qui pourront obtenir des permis, si ces institutions le souhaitent et respectent évidemment les exigences que la loi prévoira soit directement dans la loi ou par mode réglementaire.

Ce projet de loi a été accueilli très favorablement par la très grande majorité des services de garde au Québec, autant les garderies régulières, sans but lucratif, que la garde en milieu familiale, que la garde en milieu scolaire. Nous avons eu des témoignages à ce propos en commission, j'ai reçu des lettres d'appui à cet égard. Il y a bien sûr une objection; elle se trouve du côté des garderies à but lucratif. Je respecte leur point de vue, mais je crois qu'il est normal qu'un gouvernement décide, s'il s'agit d'une entreprise, de ne pas instaurer un système de subventions universel alors qu'elles ont d'autre part des mesures, au plan fiscal et au plan de l'administration, qui leur permettent d'être traitées différemment en termes de statut comme garderies.

Alors, voilà ce en quoi consiste le projet de loi qui est devant nous, M. le Président. Je crois qu'il améliorera la qualité de ce qui se fait dans nos services de garde, qu'il consolidera le réseau des services de garde et qu'il nous permettra surtout de continuer à progresser dans les meilleures conditions possible, sachant évidemment que nous sommes aussi, dans ce secteur comme dans d'autres, contraints par des exigences budgétaires et financières. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Je cède maintenant la parole au député de Jacques-Cartier. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci, M. le Président. Dès le départ dans ce débat, l'opposition a essayé de défendre trois grands principes qui doivent gérer nos services de garde à travers le Québec. Le premier c'est qu'il faut conserver la diversité de notre système des services de garde. Il y a plusieurs systèmes qui sont mis en place, qui répondent aux besoins différents des familles québécoises. Alors, nous avons dit dès le départ que c'est très important de conserver la diversité. Alors, il y avait de bons coups, et nous avons dit ça, dans le projet de loi, c'est-à-dire de reconnaître les jardins d'enfants, qui sont des choses qui sont importantes pour un certain nombre de familles québécoises. On a essayé d'avoir des précisions en commission cet après-midi, ce serait quoi une halte-garderie. La ministre n'était pas capable vraiment de préciser la définition d'une halte-garderie, mais, quand même, nous avons trouvé ça encourageant d'avoir ces deux modèles mis en vigueur dans notre loi.

Cependant, les décisions qui ont été prises par la ministre mettent en péril deux des modèles qu'on trouve dans notre réseau des services de garde à travers le Québec, c'est-à-dire les services de garde en milieu scolaire... Nous avons eu un témoignage très éloquent aujourd'hui d'une responsable d'un service de garde en milieu scolaire, et c'est le chaos causé par la ministre. Elle n'est pas capable de faire la planification pour cet automne, parce qu'elle n'a pas encore les données qu'il faut pour fixer les tarifs, pour déterminer ça va coûter combien aux familles et c'est combien de parents qui vont être capables de mettre leurs enfants dans un service de garde en milieu scolaire au mois d'août prochain. Alors, dans un des réseaux, le réseau le plus important au niveau des normes, 72 000 enfants qui sont dans les services de garde en milieu scolaire, au lieu d'avoir la planification et la grande réforme que la ministre a promises en grandes pompes et à maintes reprises, c'est le désordre total et c'est l'improvisation de A à Z qu'on trouve dans ce secteur.

Deuxièmement, oui il y a des services de garde à but lucratif, des garderies à but lucratif, il y en a 400 au Québec qui fournissent un service très important à 20 000 familles québécoises et 20 000 enfants au Québec. C'est très, très important; c'est créateur d'emplois, c'est 4 000 emplois pour des éducatrices qui travaillent dans ces services de garde. Et je pense qu'on a tous intérêt... Parce qu'en subventions directes, pour ces 20 000 places, le gouvernement investit uniquement 4 000 000 $. Dans les garderies à but non lucratif, c'est 96 000 000 $ pour 35 000 places. Alors, la ministre tantôt a souligné l'importance des exigences des finances publiques, alors je pense qu'on a tout intérêt, comme société, et le gouvernement a tout intérêt, comme société, et le gouvernement a tout intérêt de miser davantage sur le partenariat avec le privé, parce que ces garderies sont régies par les mêmes normes: les mêmes ratios, les mêmes exigences au niveau de la formation, le même droit d'inspection, le même système de traitement des plaintes est en place pour les deux.

Alors, je pense qu'on a tout intérêt, surtout avec un contexte avec les finances publiques limitées, à miser davantage sur le partenariat avec le privé. Mais, au lieu de faire ça, ce qui a un certain gros bon sens au niveau économique, la ministre a décidé la hache dans tout nouveau développement dans le secteur des garderies à but lucratif, ce partenariat très promoteur de création de nouvelles places pour les familles au Québec qui en ont besoin.

Deuxièmement, sur la notion des équités entre les enfants. Parce que, oui, si j'ai un enfant et si j'ai la chance d'avoir une des places dans une garderie subventionnée, c'est une très bonne nouvelle. Il y a des subventions directes à la garderie pour 2 000 $, 3 000 $ par année pour mon enfant. Mais il y a deux places pour chaque cinq enfants qui ont besoin, au Québec, d'une place dans une garderie. Ça, ce sont les chiffres de la ministre. Alors, sur cette loto-garderie, on a trois chances sur cinq de ne pas avoir accès à ces places subventionnées. Alors, qu'est-ce qu'on dit pour l'équité entre les enfants? On dit qu'un enfant qui est au moins capable de trouver une place dans une garderie à but lucratif, est-ce que, ça, c'est un moindre enfant, il a moins de droits, il est moins québécois, cet enfant, que l'autre enfant qui a une place dans une garderie subventionnée? Moi, je ne le pense pas. Et, moi, je pense que le gouvernement a l'obligation d'assurer – je n'ai pas dit égalité, parce que c'est bien dit dans la loi qu'il faut privilégier, qu'il y a une place importante à jouer pour les garderies à but non lucratif dans notre réseau – mais il faut toujours respecter une certaine équité entre les enfants aussi. Et, si une famille trouve une place dans une garderie à but lucratif, je pense qu'il faut respecter les droits de cet enfant aussi. Il faut fournir certaines subventions et, si c'est un enfant issu d'un milieu défavorisé, je pense aussi qu'on a tout avantage à rendre admissible cet enfant à cette garderie, même si c'est une garderie à but lucratif. Parce qu'il y a des besoins que le gouvernement ne peut pas combler. Le réseau des garderies à but non lucratif ne peut pas combler pour 60 % des enfants au Québec qui en ont besoin.

Alors, au nom de l'équité pour tous les enfants, je pense qu'on a tout intérêt à mettre l'argent à la fois dans les garderies à but lucratif et dans les garderies à but non lucratif pour assurer une certaine équité entre tous les enfants et surtout pour les 60 % des enfants au Québec qui n'ont pas accès à une garderie à but non lucratif.

Je pense que c'est le deuxième principe: diversité du système, équité entre les enfants. Et, le troisième, il faut respecter, d'une certaine façon, le choix des parents, et, de lancer une coopérative de gestionnaires dans une garderie à but non lucratif, il y a certains parents qui adorent ça, qui sont passionnés par ça. Je pense que c'est très important de respecter ce choix. Mais, pour d'autres parents – comme en ont témoigné les groupes aujourd'hui – il y a d'autres exigences aussi. Il y a d'autres critères que les parents recherchent. C'est quoi les heures d'ouverture? Est-ce que c'est proche de ma maison? Est-ce que c'est proche de mon lieu de travail? Est-ce que les éducatrices sont fines? Il y a beaucoup d'autres critères qui entrent en jeu. Est-ce qu'il y a une place disponible?

Et, si les parents ont choisi pour leur enfant une place dans une garderie à but lucratif, je pense que, M. le Président, il faut respecter ce choix et ne pas imposer uniquement un modèle «It's my way or the highway». Alors, je pense qu'on a tout intérêt à préserver la diversité, de respecter le choix des parents et de préserver une certaine équité.

(0 h 10)

Alors, ce sont les trois grands principes que nous avons pris en main pour regarder le projet de loi n° 11, et, comme j'ai dit, il y a certains articles dans ça qui ne respectent pas nos trois grands principes. Alors, c'est pourquoi nous étions prêts et on était toujours prêts à bonifier ce projet de loi. Il y aura certains articles pour lesquels on ne sera jamais d'accord avec la ministre, mais on voulait bonifier le projet de loi. Mais, au lieu de faire ça, la ministre l'a mis dans le bâillon. On avait à peine deux heures pour faire une étude détaillée. L'opposition a proposé trois amendements, que la ministre a acceptés, mais, quand même, on n'a pas eu le temps, à cause de la mauvaise planification de ce gouvernement et le manque d'intérêt de la ministre, de faire une vraie étude détaillée de ce projet de loi. Alors, on va être obligés de voter contre. On pensait que, de bonne foi, de notre côté, on pouvait bonifier ce projet de loi, et on n'a pas eu l'occasion. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Merci, M. le député de Jacques-Cartier. Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Dans les quelques minutes qu'il nous reste, M. le Président, je voulais faire l'état du processus de ce projet de loi et pourquoi ce projet de loi est soumis au bâillon aujourd'hui.

Le gouvernement prétend qu'il y a urgence, il y a urgence d'adopter le projet de loi n° 11. Quelques faits, M. le Président. L'Assemblée nationale du Québec siège depuis le 12 mars de cette année, 12 mars, le projet de loi a été présenté le 14 mai, en Chambre, deux mois plus tard, deux mois plus tard. Alors, déjà, si le gouvernement pensait, un moment donné, parce que, semble-t-il, ce projet de loi est le fruit de longues réflexions et consultations, peut-être le gouvernement aurait pu le présenter avant le 14 mai, M. le Président, si c'était tellement urgent. Pourquoi est-ce que le gouvernement a attendu deux mois de temps avant de le présenter ici en Chambre?

Mais c'est pire, M. le Président, parce qu'il a été présenté le 14 mai, mais le principe n'a été adopté que le 4 juin: encore un délai de trois semaines, M. le Président. Alors, on voit déjà l'urgence. Pendant deux mois, on ne présente pas le projet de loi. Là, on le présente. Pendant trois semaines, on ne saisit pas l'Assemblée nationale de l'adoption du principe du projet de loi, pendant trois semaines. C'est tellement urgent que le leader du gouvernement n'a pas jugé bon de proposer que le principe du projet de loi n° 11 soit adopté; trois semaines, on a attendu.

Après ça, M. le Président, on a passé deux jours en commission, et, je vous le dis, M. le Président, du fond de mon coeur, c'était une très grande déception de voir ce qui s'est passé en commission parlementaire. Là, on dit, on a passé deux jours, effectivement, un total de 12 h 30 min de fait, dont une grande partie, une partie a été prise à l'écoute des gens, à l'écoute. Mais, M. le Président, ce processus-là a été tellement pas crédible, mon collègue, le député de Jacques-Cartier y a déjà fait référence.

Jeudi, la ministre convoque de toute urgence, avec trois ou quatre heures d'avis, un certain nombre de groupes. Une étrange et heureuse coïncidence pour la ministre: le seul groupe qui était capable de se présenter jeudi, imaginez-vous, M. le Président, le seul groupe capable de se présenter jeudi, c'est un groupe, par pur hasard, qui appuie le projet de loi. Parmi les sept groupes que, nous, on avait soumis comme possibilités, comme suggestions même, d'être entendus devant la commission, on savait qu'il y avait un grand nombre, parmi les sept, qui étaient contre le projet de loi. Par pur hasard, pas un des sept n'était capable de venir. Le seul groupe qui était capable de venir était le groupe qui appuyait le projet de loi, pendant tout ce grand consensus social.

Mais, là, imaginez-vous, M. le Président, par la suite, pour tenter de rectifier, pour tenter de corriger ces choses, nous avons procédé à une série de motions pour tenter de convaincre la ministre qu'elle devrait procéder à certaines audiences, d'entendre des groupes. Le parti ministériel a, temps, après temps, après temps, après temps, voté contre la possibilité d'entendre des groupes. Là, la ministre dit: Bien, c'était une circonstance différente, on n'avait pas commencé l'étude, on voulait commencer l'étude, on avait dit oui, on a dit non, on ne peut pas. M. le Président, l'explication donnée par la ministre est tellement peu crédible, peu crédible, j'aurais préféré, M. le Président, que la ministre se dise... au moins démontrer une certaine gêne. Moi, j'étais gêné pour elle. Même des parlementaires de son côté de la Chambre étaient gênés, je peux vous le dire, M. le Président, parce qu'il y en a quelques-uns qui n'ont pas voté avec les ministériels, quand ils ont refusé d'entendre tous ces groupes-là. Le président de la commission a voté également contre... Il s'est abstenu, abstenu. Ça fait que la gêne était même du côté du parti ministériel.

Puis, là, on arrive aujourd'hui, M. le Président – en fin de compte hier – la ministre a fait volte-face hier, on ne sait pas pourquoi, mais elle a fait volte-face. Jeudi, les ministériels votent contre la possibilité d'entendre des groupes. Bien, là, hier, semble-t-il, on a dit qu'on serait favorable. Même après avoir commencé l'étude détaillée, on a changé d'idée, on a fait volte-face. Une drôle de façon de procéder. Mais on a dit: O.K., la ministre a changé d'idée, on dit, en anglais, Mr. Speaker: Only fools don't change their minds. That's what we say. So we thought: Ah! Well, this Minister is not a fool, she changed her mind! What a wonderful occasion for her to change her mind! She's not a fool!

Mais, M. le Président, on arrive en commission parlementaire aujourd'hui, jeudi, après avoir convoqué des groupes, puis qu'est-ce qu'on retrouve dans la motion du leader du gouvernement? Ça vaut la peine que je le cite, M. le Président: «Dès l'adoption de la présente motion qui suspend nos règles – qui bâillonne tout le monde – la commission permanente des affaires sociales met fin à ses travaux quant à l'étude détaillée du projet de loi n° 11.» Au même moment où nous avons reçu des groupes en commission parlementaire, le leader du gouvernement a décidé qu'on bâillonne le projet de loi n° 11. Ça, c'est un vrai mépris, M. le Président. Un vrai mépris, un vrai mépris. Puis, encore une fois, la ministre n'avait même pas la décence de donner un peu l'idée qu'elle est gênée par ce processus, de convoquer le monde pour les écouter, en sachant fort bien qu'au plus tard quelques heures plus tard on est pour bâillonner, suspendre nos règles les plus fondamentales. Puis, là, encore une fois, elle n'était pas gênée.

Mais je vous dis, M. le Président, malgré les discours mielleux de la ministre, les gens qui sont venus aujourd'hui étaient insultés par ses actions, insultés par les actions de la ministre, insultés par les actions du leader du gouvernement, qui nous amène ce bâillon. Le leader du gouvernement ne veut pas l'entendre, mais je peux lui assurer que ces gens étaient insultés par leur traitement aux mains de ce gouvernement du Parti québécois, profondément insultés. Si la ministre ne me croit pas, si le leader du gouvernement ne me croit pas, ils ont juste à communiquer avec ces groupes pour savoir ce qu'ils ont pensé de cette consultation bidon et méprisante qu'a amenée la ministre de l'Éducation ici en cette Chambre.

On devrait avoir tous honte comme parlementaires, tous et chacun de la façon dont ces groupes ont été traités par ce gouvernement, parce que ça se reflète également sur tous les parlementaires. Malgré le fait qu'on avait tenté de les convaincre, que ce n'était pas de ce côté de la Chambre qu'on voulait bâillonner ce projet de loi, ça se reflète quand même sur les parlementaires. Et on devrait tous avoir, tous et chacun, honte de ce qui s'est passé en commission des affaires sociales ce matin. Je sais que j'ai honte, M. le Président. Et je ne suis même pas responsable de la moindre possibilité, mais j'ai honte. J'ai honte pour la ministre de l'Éducation responsable des services de garde.

(0 h 20)

Vous savez, M. le Président, en sortant de cette commission, un journaliste expérimenté, en voyant ma colère, en voyant dans quel état j'étais, a dit: Bien, vous savez, M. Copeman, vous prenez ça bien trop au sérieux. Parce que lui avait vécu des choses, j'imagine, il avait vu des choses dans une longue carrière comme journaliste. Oui, je le prends au sérieux, M. le Président. C'est peut-être parce que j'ai été élu pour la première fois le 12 septembre 1994, mais, oui, je le prends au sérieux. Je sais que le député de Jacques-Cartier le prend au sérieux. Je sais que, malgré le fait que le député de Verdun est ici en cette Chambre depuis 1989, il prend ça au sérieux. Je sais que le député de Pontiac le prend au sérieux. Je sais que le député de Montmagny-L'Islet le prend au sérieux. Je sais que le député de D'Arcy-McGee le prend au sérieux.

Mais, les gens d'en face, je suis loin d'en être convaincu. Et surtout dans le cas de la ministre de l'Éducation responsable des services de garde, je suis convaincu qu'elle ne prend pas ça au sérieux. Parce que, semble-t-il, pour elle, insulter des groupes comme ça, on dit, en anglais: It is water off a duck's back. Just like water running off the back of a duck. These things don't bother the Minister of Education. She should have at least been embarrassed by what happened this morning, Mr. Speaker. She should at least have had the decency to be a little bit embarrassed, because members of her party were. Members of her party were, because they approach us, Mr. Speaker, with their discomfort at this process. But, no, not the Minister of Education responsible for day-cares. No. She maintained her icy composure throughout. Elle a maintenu, M. le Président, son attitude – une attitude que je qualifierais comme hautaine, je regrette de le dire – pendant tout le processus. J'avais honte comme parlementaire; elle aurait dû avoir honte.

Et, pour toutes ces raisons, M. le Président, à cause des objections qu'on a sur le contenu du projet de loi, à cause des objections qu'on a sur le processus qui nous amène ici et surtout à cause du fait qu'on est bâillonné, qu'il faut adopter ce projet de loi, selon le gouvernement, en suspendant nos règles les plus fondamentales... Pourquoi? Parce que, semble-t-il, il y a urgence. Malgré le fait que le gouvernement ait tergiversé pendant des mois et des semaines à ne pas amener ce projet de loi devant nous, là, semble-t-il, il y a urgence. Bien, nous, M. le Président, nous ne pensons pas qu'il y a urgence à adopter ce projet de loi par bâillon. Je suis étonné de penser que le gouvernement croit qu'il y a urgence de le faire. Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous allons voter contre le projet de loi n° 11, dans ces circonstances. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Mme la ministre de l'Éducation, vous avez un droit de réplique de 10 minutes. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Merci, M. le Président. Juste pour remettre un petit peu nos pendules à l'heure – c'est utile sans doute à cette heure-ci de la nuit. D'abord, pour rappeler à mes collègues d'en face, entres autres au député de Jacques-Cartier dans un premier temps, que c'est vrai qu'un des groupes qui est venu cet après-midi nous a parlé de son inquiétude en ce qui a trait au financement des services de garde en milieu scolaire. Ils auront des réponses sur ces inquiétudes très bientôt, M. le Président, et je pense que ces réponses devraient répondre à un certain nombre de leurs attentes. Mais la loi que nous avons étudiée concernait, pour une toute petite part, la garde en milieu scolaire, et les représentants de l'Association des services de garde en milieu scolaire se sont dit très satisfaits de ce qu'on y retrouvait. D'ailleurs, le groupe lui-même qui était là cet après-midi n'avait pas d'objection de principe à ce qui était dans la loi, était d'accord avec ce qui se retrouvait, mais nous parlait plutôt d'un problème budgétaire qui est vécu, entre autres, à la Commission des écoles catholiques de Montréal, puisqu'ils en venaient. Ils représentaient les employés de soutien de cette même commission scolaire qui s'occupent des jeunes enfants gardés en milieu scolaire.

D'autre part, M. le Président, le député de Notre-Dame-de-Grâce a mentionné le fait que j'aurais pu avoir une attitude méprisante à l'égard de certains groupes qui sont venus témoigner devant nous cet après-midi, parce que nous allions, par la suite, proposer l'adoption du projet de loi, ce que nous faisons maintenant. M. le Président, je crois qu'une attitude méprisante à l'endroit de ces groupes aurait pu être qualifiée comme telle, de méprisante, si, en les faisant venir, je les avais reçus comme si j'étais particulièrement et parfaitement d'accord avec leurs propositions, avec leurs orientations de fond. Je ne dis pas que je ne suis pas d'accord avec certaines des mesures qu'ils nous proposent, et, d'ailleurs, on les retrouvera éventuellement soit dans les règlements ou dans les mesures administratives. Là, j'aurais été méprisante. Là, je n'aurais pas considéré ces groupes en les traitant comme si je les entendais, alors que, dans les faits, ils savent, ces groupes – nous avons d'étroits contacts depuis un long moment, M. le Président – ils savent très bien quelles sont les orientations de notre gouvernement. Nous les confirmions par le projet de loi, et ç'a aurait été de les ridiculiser que de leur dire: Je vous écoute, je suis d'accord avec vous, alors qu'ils me présentaient leur point de vue en même temps que je proposais un point de vue complètement différent dans le projet de loi. Là, j'aurais eu une attitude méprisante, M. le Président, ce que je n'ai pas, ce que je n'ai pas eu non plus.

Et, donc, j'ai entendu ces groupes, qui ont fait, d'ailleurs, une belle et une intéressante présentation. Certaines des mesures qui nous sont proposées seront retenues non par voie législative, mais éventuellement par voie réglementaire ou par voie administrative, je le répète. Et c'est en ce sens qu'en se disant les choses franchement on a le respect des uns et des autres, M. le Président. Je vous remercie et je souhaite recevoir l'appui de l'ensemble des membres de cette Assemblée pour l'adoption de ce projet de loi sur les services de garde au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Alors, comme nous avons terminé notre débat, est-ce que le projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives, est adopté?

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

(0 h 27 – 0 h 32)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

L'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 11, Loi modifiant la Loi sur les services de garde à l'enfance et d'autres dispositions législatives.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Rivard (Limoilou), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bourbeau (Laporte), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Thérien (Bertrand), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions?

Alors, M. le secrétaire général, voulez-vous nous communiquer le résultat du vote, s'il vous plaît.

Le Secrétaire: Pour:54

Contre:29

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Le projet de loi n° 11 est donc adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais maintenant que l'Assemblée procède à la prise en considération du rapport de la commission permanente des institutions sur le projet de loi n° 20.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, la présidence va se retirer afin d'examiner les amendements qui ont été déposés. Alors, semble-t-il que nous devrons nous retirer pour environ 30 minutes. Je vous demanderais de rester à votre place afin de nous permettre de nous retirer, s'il vous plaît.

(Suspension de la séance à 0 h 37)

(Reprise à 1 h 41)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît. Alors, nous allons reprendre nos travaux.


Projet de loi n° 20


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements déposés

L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de la Justice et M. le député de Chomedey. Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 6 (4, 4.4, 4.11), 20, 22, 24, 30, 35, 39, 42, 48, 51, 59.1 et un amendement visant à remplacer les mots «revenus nets» par «revenus» et les mots «actifs nets» par «actifs» aux articles 6 (4.1 et 4.2) et 42, paragraphe 5°, sous-paragraphes a.3, a.4 et a.5, et au paragraphe 10° du projet de loi.

Enfin, sont déclarés recevables tous les autres amendements transmis par M. le député de Chomedey aux articles 6 (4.4, 4.5 – deux amendements – 4.7 – trois amendements – 4.8, 4.9, 4.10, 4.11 – deux amendements – 4.13), 8, 15, 27, 42, paragraphe a.9, paragraphe b.2, paragraphe b.3, paragraphe 7.1° et 46.

Je vous rappelle que la durée de ce débat sur la prise en considération du rapport a été fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes.

Alors, y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur les amendements? M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 20 propose une réforme de l'aide juridique. Lors de l'adoption de principe de ce projet de loi, une motion avait été votée afin que la commission des institutions procède à des consultations particulières et tienne des audiences publiques le mercredi 5 juin ainsi que le jeudi 6 juin 1996. Les organismes invités à faire valoir leur point de vue étaient les suivants: la Commission des droits de la personne, le Protecteur du citoyen, le Barreau du Québec, l'Association des avocats de défense, le Centre communautaire juridique Pointe-Sainte-Charles et Petite Bourgogne, le Réseau d'aide aux personnes seules et itinérantes de Montréal, l'Association québécoise de défense des retraités-es et préretraités-es, la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec, la Fédération des femmes du Québec, la Ligue des droits et libertés, l'Assemblée des travailleurs et travailleuses accidenté-e-s du Québec, l'Association des avocats et avocates en droit carcéral, la Fédération des ACEF du Québec, la Chambre des notaires et l'Association des juristes de l'État. M. le Président, la majorité de ces organismes ont accepté l'invitation et furent entendus les 5 et 6 juin. Se sont ajoutés par ailleurs à la liste initiale les syndicats des avocats et avocates de l'aide juridique affiliés à la CSN.

De façon générale, les intervenants ont souligné les nombreuses et importantes améliorations par le projet de loi n° 20 par rapport au projet de loi 87 du printemps 1995. Tous apprécient, évidemment, l'élargissement de la clientèle admissible à l'aide juridique, entre autres par le volet contribution, la représentation accrue en matière de droit social et l'intégration de la consultation d'ordre juridique.

Comme je l'ai mentionné lors de mon intervention précédente, nous n'avons pas pu, compte tenu de l'obstruction systématique de l'opposition, nous rendre à l'étude des articles où nous voulions apporter des amendements, et c'est pourquoi je les apporte maintenant. D'autre part, comme j'ai déposé un projet de règlement lors de la tenue des audiences publiques, d'autres demandes des organismes seront considérées au niveau de la réglementation. Je pense, entre autres, à la prise en considération, dans l'examen de l'admissibilité financière d'une personne handicapée, des dépenses que celle-ci encourt pour pallier son handicap.

En terminant, M. le Président, je tiens à rappeler que le projet de loi n° 20 est le fruit d'une longue et large consultation tant en commission parlementaire qu'au niveau interne au ministère de la Justice, quoi qu'ait pu en dire l'opposition. Si celle-ci avait collaboré, elle aurait pu contribuer à cette amélioration. Les bonifications apportées par les amendements que je propose aujourd'hui au rapport de la commission l'auraient convaincue de l'ouverture du gouvernement. Malheureusement, la volonté, je dirais, presque acharnée du critique de l'opposition en matière de justice de faire obstruction aux travaux de la commission des institutions n'a pas permis à celle-ci d'exécuter efficacement son mandat.

Je ne saurais prétendre que tous et chacun des voeux exprimés par les intervenants sont exaucés. Le gouvernement aurait aimé le faire, mais, dans le contexte économique actuel, cela lui aurait été impossible sans faire preuve d'une complète irresponsabilité. Toutefois, le projet de loi n° 20, tel que bonifié par les amendements, répond aux principales critiques formulées et saura rallier, j'en suis convaincu, la majorité des intervenants, sinon tous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour, il me fait plaisir de prendre la parole sur la prise en considération du rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. M. le Président, peut-être qu'il y a quelques «channel surfers» à cette heure tardive qui, entre deux films, sont en train de syntoniser les travaux de cette Assemblée, peut-être, justement, entre deux films. Et, surtout si c'est un film américain, il y a une formulation qu'on a tous l'habitude d'entendre: Vous avez le droit de demeurer silencieux. Vous avez droit à un avocat, et, si vous ne pouvez pas vous permettre financièrement d'avoir un avocat, un avocat sera nommé pour vous par l'État.

M. le Président, lorsque l'État met ses importantes ressources contre l'individu dans une société libre et démocratique comme la nôtre, il est de notre devoir de s'assurer que les droits de l'individu puissent être défendus. C'est un principe qui est accepté depuis des générations aux États-Unis, et l'avertissement en question, souvent traduit dans les films que l'on regarde ici, porte un nom. Ça s'appelle the Miranda Warning. C'est un avertissement qui a été élaboré par la Cour suprême des États-Unis dans un jugement, justement, qui porte le nom de Miranda, un jugement provenant de l'État de l'Arizona où, effectivement, une personne qui n'avait pas les moyens de se payer un avocat a été privée de certains droits, et les Américains se sont assurés que toute personne qui avait besoin de comparaître devant le tribunal, accusée d'un crime, aurait droit à un avocat. Ce sont des principes qui, malheureusement, échappent au gouvernement du Parti québécois, et plus particulièrement à son ministre de la Justice.

M. le Président, on aura l'occasion, tout à l'heure, lorsqu'on regardera un peu plus attentivement, dans la prochaine étape de notre débat de ce soir, de regarder dans le détail le rapport très récent de la Commission des droits de la personne du Québec qui, dans des termes sobres mais clairs, dit que le ministre de la Justice du Québec manque à ses devoirs. Et rappelons que le ministre de la Justice du Québec est en même temps le ministre responsable de l'application de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Donc, c'est d'autant plus important qu'il écoute ce qu'a à lui dire la Commission des droits de la personne du Québec.

(1 h 50)

Et c'est non seulement à l'égard de la Charte québécoise des droits de la personne qu'ils en ont, M. le Président, pour ce qui en est du projet de loi n° 20, mais aussi à l'égard de la Charte canadienne et même de deux pactes internationaux en matière de droits de la personne.

Le ministre, tout à l'heure, fort de sa majorité gouvernementale, a exprimé son désarroi devant le fait que l'opposition officielle veuille absolument assurer le respect des droits des citoyens. Avec tout le respect que je dois à mon confrère le ministre de la Justice, M. le Président, je dois lui dire que nous faisons notre devoir même si, lui, il refuse de faire le sien et même si, lui, il a fait systématiquement obstruction à toutes les modifications que nous avons proposées qui visaient justement à donner suite aux demandes et aux récriminations et aux recommandations des très nombreux groupes qu'il nous a cités tout à l'heure, dans son préambule, car, M. le Président, même si ces groupes ont été entendus en commission parlementaire, force nous est de constater que les groupes en question n'ont pas été écoutés par le ministre. Car, M. le Président, dans l'ensemble des amendements que vous venez de déclarer admissibles et présentés par le ministre de la Justice, il n'y en a aucun qui satisfasse aux demandes de la Commission des droits de la personne du Québec. Il n'y en a aucun qui donne suite à ses propres engagements et aux demandes des très nombreux groupes communautaires qui sont venus en commission parlementaire demander des changements pour protéger les plus démunis de notre société, les gens pauvres, justement, M. le Président, qui, face à l'appareil de l'État, face à l'administration ont besoin et, dans notre société, ont toujours eu droit à l'aide d'un avocat.

Le ministre se contente de nous dire, avec des mots assez anodins, qu'il y aura dorénavant un volet contributoire. En cela, M. le Président, il a volé une page dans le livre de son collègue le ministre de la Santé et des Services sociaux, car ce qu'il fait, c'est qu'il va chercher des dizaines de millions de dollars dans la poche des gens. Dans le cas du ministre de la Santé, c'est des centaines de millions de dollars qu'il est en train d'aller chercher dans les poches des gens. Mais, parce qu'il a ce contrat contributoire, les gens se disent: C'est quoi, ça? C'est une taxe. C'est une nouvelle taxe, une nouvelle manière d'aller chercher de l'argent dans la poche des gens.

Alors, M. le Président, plus tôt aujourd'hui, le ministre de la Justice, juste pour situer son propos et sa véracité, avait ceci à dire: Entre ce moment et aujourd'hui, entre la loi de l'année dernière, qui était aussi un échec, et aujourd'hui, il y a eu effectivement la création d'un comité, le comité Schabas. Et, de poursuivre le ministre, des groupes sont venus se faire entendre par le comité Schabas. Je vous dis, tout de suite en partant, M. le Président, ça ne s'est pas fait en commission parlementaire. Ça s'est fait dans des regroupements privés où l'opposition n'avait pas le droit d'être présente. Ils ont été entendus par le comité Schabas qui a produit, le 21 décembre 1995, un rapport qui non seulement faisait le tour d'horizon de l'ensemble du dossier, mais qui aussi faisait des propositions concrètes que l'on retrouve, en bonne partie, dans le projet de loi n° 20, qui a tenu compte, M. le Président, en bonne partie, des recommandations.

Qu'en est-il du rapport Schabas, M. le Président? Le ministre aime bien citer le Barreau. Regardons voir ce que le Barreau avait à dire, avec un gros titre dans son journal, sur le rapport Schabas: «Aide juridique, rapport Schabas, une avalanche de désaveux». Intéressant, ça, comme appui, n'est-ce pas, M. le Président? Le Barreau du Québec titrait que le rapport Schabas était, et je cite juste ces mots-là, «superficiel, démagogique et incomplet». Et le ministre arrive à l'Assemblée nationale pour se vanter du fait que son projet de loi s'inspire de ce fameux rapport Schabas, M. le Président. C'est désolant de le constater.

Aussi, M. le Président, pour ce qui est du fait que ce soi-disant volet contributoire va aider les gens, rappelons un seul fait, parce qu'on n'a pas tout le temps de faire tous les détails. Une personne seule qui travaille au salaire minimum, même pas à temps complet, c'est-à-dire même pas 40 heures par semaine, n'est d'aucune manière, en aucune circonstance et en aucun cas admissible à l'aide juridique. Qui plus est, M. le Président, même une personne qui travaille à l'aide juridique à temps partiel, mettons 35 heures par semaine, va être admissible à l'aide juridique seulement si elle paie 800 $ de ses poches. Comme l'a signalé un des groupes communautaires que le ministre s'est contenté de citer tantôt, la COPHAN, la Confédération des organismes provinciaux des personnes handicapées du Québec, ce 800 $ vient s'ajouter aux 750 $ que le ministre de la Santé et des Services sociaux est en train de venir chercher dans leurs poches.

Alors, vous voyez à quel point on a de la générosité et de l'ouverture d'esprit. Oui, le ministre peut se contenter de dire que, en allant chercher cet argent-là, il va ouvrir à un certain nombre de personnes qui n'étaient jusqu'alors admissibles... Ça, c'est vrai, M. le Président, mais c'est aux dépens de quoi? Comme le dénoncent de très nombreux groupes, y compris en particulier l'Association des avocats de la défense du Québec, c'est aux dépens de la présomption d'innocence, car il y a des gens qui, se voyant privés de l'aide juridique, vont plaider coupable pour troquer le non-emprisonnement, parce que, ça aussi, ça fait partie du projet de loi du ministre.

Je manquerais à mon devoir, M. le Président, si je ne citais pas cette lettre qui nous est arrivée il y a quelques jours à peine de la part de 42 groupes communautaires et qui dit: «Nous disons non à votre proposition que nous qualifions de marchandage par lequel, pour un simulacre d'augmentation des seuils d'admissibilité financière, vous coupez des pans complets de services que l'on doit qualifier d'essentiels dans notre société.» M. le Président, c'est ça qu'ils disent, les gens qui travaillent avec les pauvres. C'est ça qu'ils disent, les gens qui connaissent la réalité de la pauvreté et des gens qui sont, justement, dans une position de vulnérabilité face à l'administration de la justice au Québec.

Pour ce qui est des amendements, M. le Président, le ministre est passé très vite, tout à l'heure, en disant... Vous avez dit que les amendements du ministre et les nôtres étaient admissibles, mais, évidemment, le ministre va se lever tantôt pour dire qu'il n'accepte aucun de nos amendements. Le signal a déjà été donné de l'autre côté. Alors, pour ce qui est de ses larmes de crocodile disant que l'opposition lui a fait une obstruction dans cette commission parlementaire, je tiens à lui dire que les amendements que nous avons proposés tiennent compte des propos des groupes communautaires, tiennent compte des propos des groupes d'avocats de la défense, tiennent compte des propos de la Commission des droits de la personne, alors qu'aucune de ses modifications ne tient compte d'aucune de ces recommandations et suggestions, et on s'en désole.

M. le Président, on est dans le domaine des droits fondamentaux, on est dans le domaine des droits du citoyen face à l'État, et on n'a pas le droit, juste parce qu'on a un ministre qui suit servilement les diktats du Conseil du trésor, on n'a pas le droit de priver les gens de leurs droits fondamentaux dans notre société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Question de règlement, M. le Président. Bon, le député de Chomedey a fini son intervention, mais l'expression «servilement», ça a déjà été déclaré, en cette Chambre, antiparlementaire, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Chomedey, vous pourriez peut-être moduler votre dernière expression.

M. Mulcair: Avec tout le respect que je vous dois, j'ai utilisé le même terme, l'autre jour, avec le ministre parce que c'est un titre. Dans La Presse , on disait que c'était un ministre qui suit servilement et qui n'aide pas les gens. Mais, si on peut lire qu'il suit sans tenir compte de la réalité ni de ses obligations comme ministre, on peut le dire aussi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ceci met fin à l'intervention. Il reste maintenant au ministre... Si vous voulez exercer votre droit de réplique, M. le ministre.

Alors, à la suite d'une réunion avec les leaders des groupes parlementaires, j'ai organisé la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission des institutions sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique.


Mise aux voix des amendements du ministre

Je mets d'abord aux voix les amendements de M. le ministre de la Justice aux articles 6 (4, 4.4, 4.11), 20, 22, 24, 30, 35, 39, 42, 48, 51, 59.1, et un amendement visant à remplacer les mots «revenus nets» par «revenus» et les mots «actifs nets» par «actifs» aux articles 6 (4.1 et 4.2) et 42 (paragraphe 5°, sous-paragraphes a.3, a.4 et a.5 et au paragraphe 10°) du projet de loi. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des amendements du député de Chomedey

Je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Chomedey aux articles 6 (4.4, 4.5 – 2 amendements – 4.7 – 3 amendements – 4.8, 4.9, 4.10, 4.11 – 2 amendements – 4.13), 8, 15, 27, 42 (paragraphe a.9, paragraphe b.2, paragraphe b.3, paragraphe 7.1°) et 46. Ces amendements sont-ils adoptés? Rejetés?

Des voix: Rejeté d'emblée.

(2 heures)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, ces amendements sont rejetés.


Mise aux voix des articles amendés

Je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 20 amendés par les votes précédents. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 20 que la commission des institutions n'a pas adoptés ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi. Ces articles ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Une voix: Adopté.

Une voix: Adopté sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Je mets maintenant aux voix le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions sur le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des institutions sur le projet de loi modifiant la Loi sur l'aide juridique est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. La durée de ce débat a été fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique d'une durée maximale de 10 minutes a été prévue pour le ministre qui présente le projet de loi. M. le ministre de la Justice, je vous cède la parole.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, le projet de loi n° 20, qui propose une réforme du régime d'aide juridique au Québec, a principalement pour objet, d'une part, de donner accès à l'aide juridique à un plus grand nombre de personnes et, d'autre part, de revoir la gamme des services juridiques offerts afin de s'assurer que les fonds publics sont utilisés pour la prestation des services juridiques les plus essentiels.

Je voudrais souligner les propos de plusieurs des représentations qui ont été faites au cours des auditions publiques tenues les 5 et 6 juin dernier. J'ai été particulièrement sensible aux arguments avancés avec éloquence et conviction par la représentante de la Confédération des organismes provinciaux de personnes handicapées du Québec, Mme Lucie Lemieux-Brassard, dont les commentaires ont permis de bonifier le projet de loi et éventuellement les projets de règlement.

Avant de parler de ces modifications tant à la loi qu'au règlement, je voudrais revenir sur les éléments essentiels de la réforme. Tout d'abord, l'admissibilité financière. Un des principes de la réforme vise à élargir la clientèle admissible à l'aide juridique. À cet égard, la réforme vient non seulement hausser les seuils de l'admissibilité financière gratuite, mais introduit également, pour les personnes non admissibles à l'aide gratuite, un nouveau volet qui permettra aux bénéficiaires d'obtenir l'aide juridique en payant une contribution. Ainsi, les personnes dont les revenus, quoique modestes, dépassent légèrement les seuils de l'aide juridique gratuite ne seront plus pénalisées et pourront, au contraire de la situation actuelle, recevoir des services juridiques moyennant une contribution raisonnable.

Les changements apportés en matière d'admissibilité financière auront un effet majeur. En effet, ils devraient donner accès à l'aide juridique à environ 1 700 000 personnes, soit un citoyen sur quatre. C'est 650 000 personnes de plus qui deviendraient admissibles par rapport à la situation actuelle. À l'égard de l'admissibilité financière, je voudrais souligner que les projets de règlement seront modifiés pour tenir compte des observations faites lors des auditions publiques. Ce sera principalement le cas pour la prise en considération de la situation particulière des personnes handicapées aux fins de l'admissibilité financière. J'annonce donc que les règlements prévoiront que les dépenses assumées pour pallier une déficience physique ou mentale seront déduites des revenus considérés aux fins de l'admissibilité financière à l'aide juridique.

Quant aux services couverts par l'aide juridique, je rappelle que la nouvelle couverture demeurera la plus généreuse du Canada. Tout d'abord, l'aide juridique continuera d'être accordée lorsqu'une personne est poursuivie pour un acte criminel. Cela m'apparaît normal, puisque l'accusé fait face à une peine d'emprisonnement s'il est reconnu coupable. L'aide juridique sera également accordée aux adolescents poursuivis pour une infraction criminelle ou pénale fédérale, dans le cadre de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Quant aux poursuites sommaires pour une infraction à une loi fédérale et aux poursuites pénales intentées en vertu du Code de procédure pénale, l'aide juridique sera accordée s'il est probable qu'il en résultera pour l'accusé, en cas de culpabilité, une peine d'emprisonnement ou de mise sous garde, ou la perte de ses moyens de subsistance, ou encore s'il est dans l'intérêt de la justice d'accorder l'aide, par exemple en raison de la gravité ou de la complexité de l'affaire. Je rappelle que le Québec était la seule province à accorder l'aide juridique lorsqu'il n'y a pas de probabilité d'emprisonnement. La nouvelle couverture en matière de poursuites sommaires s'harmonise donc avec celle de l'ensemble des autres provinces.

Par ailleurs, dans la matière autre que criminelle ou pénale, le projet de loi traduit certains choix de société. Ainsi, la matière familiale demeure pleinement couverte ainsi que les régimes de protection du mineur et du majeur et les affaires de protection de la jeunesse ou d'enlèvement d'enfant.

Une des innovations majeures du projet de loi n° 20 concerne la couverture en droit social des programmes de prestations ou d'indemnités pour ces programmes. L'aide juridique sera accordée aussi bien devant le tribunal que devant le comité de révision purement administratif. En raison de la constante évolution de ces programmes de droit social, il m'apparaît préférable de désigner ces programmes par règlement. On pourrait ainsi actualiser la liste des programmes couverts avec plus de souplesse et de rapidité.

Le projet de règlement que j'ai déposé à la commission des institutions le 7 juin dernier désignait certains programmes de prestations ou d'indemnités. En raison des commentaires pertinents apportés par divers organismes lors des auditions, je voudrais indiquer d'autres programmes de prestations ou d'indemnités qui seront désignés dans le règlement: il s'agit des allocations d'aide aux familles; du retrait préventif prévu par la Loi sur la santé et la sécurité du travail; des programmes d'aide matérielle, en vertu de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, de la Loi sur les services de garde à l'enfance; des demandes d'exonération de paiement d'une contribution pour l'hébergement, en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux; les programmes d'indemnisation des victimes d'immunisation, en vertu de la Loi sur la protection de la santé publique; les demandes d'exonération de paiement des frais de garderie, en vertu de la Loi sur les services de garde à l'enfance; et, enfin, de la loi fédérale sur les allocations aux anciens combattants.

On voit donc, M. le Président, les nombreux programmes sociaux de prestations ou d'indemnités qui seront couverts par l'aide juridique, qu'il s'agisse d'un recours devant un comité de révision ou devant un tribunal. Ainsi, les citoyens ne seront pas défavorisés dans leurs rapports avec l'État dans le cadre de ces programmes sociaux.

Un amendement, M. le Président, tient compte d'observations faites par divers partenaires. Il concerne les règlements d'exclusivité, qui ont pour objectif d'assurer une administration à la fois souple et efficace du régime d'aide juridique en tenant compte de l'évolution des besoins. Ces règlements visent à réserver l'exclusivité de prestations de certains services soit aux juristes salariés, soit aux juristes de la pratique privée. Selon l'article 52.1 proposé par le projet de loi, les règlements d'exclusivité permanente étaient pris par le gouvernement et ceux d'exclusivité temporaire étaient pris par la Commission des services juridiques. À la suite des commentaires reçus, cet article a été amendé: ce sera le gouvernement qui pourra adopter ces règlements d'exclusivité, qu'ils soient d'application permanente ou temporaire.

Par ailleurs, l'exclusivité permanente ou temporaire pourra être réservée aussi bien à la pratique privée qu'aux juristes salariés. Ils pourront s'appliquer sur tout le territoire ou dans certaines régions. Évidemment, ces règlements ne seront adoptés qu'en cas de besoin, si les impératifs d'une bonne administration des fonds publics d'aide juridique le requièrent.

Divers autres amendements de nature plus technique ont été apportés au projet de loi afin de le bonifier. Ainsi, l'article 66 a été amendé pour prévoir que le bénéficiaire déclaré financièrement admissible, moyennant le versement d'une contribution, n'aura qu'une seule contribution à verser, même s'il exerce plus d'un recours dans la même affaire et quelle que soit la durée de cette affaire. En outre, le délai pour saisir le comité de révision de l'aide juridique, qui était fixé à 15 jours dans le projet de loi, a été porté à 30 jours, par un amendement.

Tel est donc le projet de loi n° 20, avec ses amendements. Nous avons été à l'écoute des divers intervenants et nous avons tenu compte, dans toute la mesure du possible, de leurs préoccupations, que ce soit en amendant le projet de loi ou en modifiant les projets de règlement. Je les remercie de leur contribution à la réforme de l'aide juridique. Je vous remercie de votre attention, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Justice. Y a-t-il un autre intervenant? Je vais céder la parole à M. le député de Chomedey. M. le député.


M. Thomas J. Mulcair

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Alors, on vient d'entendre toute la passion que le ministre de la Justice du Québec met dans la défense de son projet de loi. Voyons maintenant un petit peu plus en détail pourquoi il n'a pas l'air plus chaud qu'il faut à l'égard de son propre projet de loi, M. le Président.

Tout à l'heure, le ministre nous a dit qu'il a tenu compte des recommandations et des demandes formulées par certains groupes. Il est vrai qu'à certains égards ses modifications tiennent compte de ces demandes-là, mais il s'agit, notamment, des demandes formulées par le Barreau du Québec. Pour ce qui est des demandes formulées par les groupes communautaires, comme la COPHAN, c'est vrai qu'on va régler un problème qui subsistait, mais le problème à la base demeure. C'est assez intéressant. On est en train de prévoir, dans le projet de loi, que l'aide juridique est également refusée ou retirée lorsque les services pour lesquels cette aide est demandée peuvent être obtenus autrement, notamment par l'intermédiaire d'un autre service gouvernemental, ou d'un organisme, ou encore au moyen d'un contrat d'assurance, ou par l'entremise d'un syndicat. Alors, vous voyez tout de suite le problème, M. le Président. Dans notre société, on est en train de dire que, si les services peuvent être obtenus autrement, même si la personne est admissible à l'aide juridique...

(2 h 10)

Alors, c'est vrai, le ministre apporte un amendement qui donne suite à une demande, puis il dit: Sauf si c'est un groupe social, à but non lucratif, etc. Mais, M. le Président, peut-être que d'une manière plus importante le même groupe qui avait demandé ça avait aussi eu ceci à dire: Enfin, nous vous avons également mentionné qu'il nous semblait aberrant que des femmes ayant des incapacités puissent se retrouver, en tant que victimes de violence conjugale ou d'agression sexuelle, à devoir confronter leur agresseur puisqu'elles n'auraient pas d'avocat dans le dossier.

Ça, M. le Président, c'est un réel problème que le ministre a toujours refusé d'adresser, ou en commission parlementaire ou dans les amendements qu'il vient de présenter ici, en Chambre, ce soir. Alors, le ministre, à sa manière, vient de nous annoncer qu'on avait un des systèmes les plus généreux au Canada avec ce nouveau volet contributoire. Ce que le ministre omet de mentionner – ou peut-être qu'il l'ignore, dans le vrai sens, il ne le sait pas – c'est que les tribunaux supérieurs dans d'autres provinces, notamment, récemment, au Manitoba et en Ontario, ont eu tendance à confirmer l'opinion de la Commission des droits de la personne du Québec, à savoir que l'aide juridique, lorsqu'on est accusé d'un crime, est un droit. Car, M. le Président, ce n'est pas à un fonctionnaire de se substituer à un tribunal et tenter de décider d'avance si, oui ou non, il va y avoir peine d'emprisonnement, c'est au tribunal de décider cela. Et ça ne pouvait pas être mieux dit que par la Commission des droits de la personne dans l'analyse qu'elle vient de faire parvenir au ministre il y a quelques jours à peine.

Dans cet avis-là, M. le Président, la Commission des droits de la personne du Québec explique dans tous les détails au ministre de la Justice pourquoi son projet de loi viole les dispositions clés de la Charte québécoise, de la Charte canadienne. Et, comme je l'ai mentionné tantôt, M. le Président, ils ne se sont pas arrêtés là. Ils ont aussi informé le ministre que deux pactes internationaux, notamment le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, sont violés par son projet de loi, et la raison est fort simple, M. le Président.

Le ministre est en train de dire que c'est un fonctionnaire qui va décider d'avance si une personne risque l'emprisonnement. M. le Président, si la loi votée par la législation compétente... En l'occurrence, le Parlement fédéral a édicté qu'une peine d'emprisonnement était une des options qui s'offraient à un tribunal. C'est la réalité. Et on a eu en commission parlementaire le vice-président du Barreau du Québec, Me Francoeur, qui nous a donné un exemple très simple. Il a expliqué que, dans sa région, dans son district judiciaire, qui est dans le coin de Baie-Comeau, pour réduire le vol à l'étalage, lors d'une deuxième infraction, systématiquement, les juges vont imposer une peine d'emprisonnement, peut-être légère, mais une peine d'emprisonnement quand même, pour toute récidive, peu importe le montant en cause, et ce, malgré le fait qu'un procureur de la couronne aurait demandé qu'il n'y ait pas d'emprisonnement. Donc, premier accroc aux libertés de la personne, parce qu'on va lui offrir un «deal» qui, de toute évidence, ne lie pas le tribunal, qui demeure libre, bien entendu, de décider s'il y aura ou non une peine d'emprisonnement.

Mais il y a plus, M. le Président. Non seulement on est en train de jouer dans le libre arbitre des tribunaux, leur indépendance judiciaire, mais ce qu'on est en train aussi de faire, c'est de jouer avec la présomption d'innocence des gens, et, ça, l'Association des avocats de la défense l'a déploré. L'Association en question a expliqué la situation de la manière suivante. Ils ont dit: Regardez ce qui va se passer. Quelqu'un va être accusé d'un crime. Le procureur de la couronne va lui dire: Si tu plaides coupable, je ne demanderai pas de peine d'emprisonnement. Et, comme ils l'ont argumenté, ça va exercer une influence indue sur les gens pour plaider coupable même s'ils sont innocents, car une fois que le procureur de la couronne aurait exprimé cette intention-là, d'après la loi présentée par le ministre de la Justice du Québec, cette personne-là va se faire priver de son droit à l'aide juridique, un droit, rappelons-le, M. le Président, qui est fondamental lorsqu'on est accusé d'un crime, lorsqu'on est devant un tribunal, lorsqu'on risque de faire face à une peine, que ce soit une amende ou que ce soit de l'emprisonnement. Et, ça, encore une fois, ça relève strictement du juge.

Et rappelons que, même s'il n'y a pas d'emprisonnement, on ne peut pas dire qu'il n'y a pas de résultat néfaste d'une telle condamnation. Ça affecte notre capacité de traverser une frontière, pour ne citer que cet exemple-là, mais il y en a bien plus: ça paraît dans les registres du palais de justice. Et rappelons – ça, c'est le même ministre de la Justice qui refuse toujours obstinément de faire quelque chose – même les gens qui ont été déclarés innocents par les tribunaux, leur nom paraît toujours dans les registres de ces palais de justice, ici, au Québec. Et, ça, c'est ramassé par les compagnies qui donnent les cotes de crédit. Ça affecte donc notre capacité financière dans la société moderne dans laquelle on vit. Ça affecte notre capacité d'être embauché et, bien entendu, comme je le mentionnais tantôt, ça affecte même notre capacité de traverser librement les frontières. Alors, c'est pour ça, M. le Président, que des associations d'avocats de la défense, c'est pour ça que la Commission des droits de la personne du Québec, dans des termes simples, corrects mais directs, disent que le projet de loi n° 20 portant réforme de l'aide juridique viole, à plusieurs endroits, des droits que tous considèrent fondamentaux dans notre société libre et démocratique.

Je l'ai mentionné tantôt, M. le Président, que la première clinique d'aide juridique, qui s'appelle les Services juridiques communautaires de Pointe-Saint-Charles et Petite Bourgogne, a écrit au ministre il y a quelques jours à peine. Ils ont eu des termes assez durs pour le ministre et pour son projet de loi. Ils lui ont dit qu'il est faux de prétendre, comme vous le faites, qu'il s'agit d'une amélioration. Ils lui ont dit: Comment prétendre à une amélioration, alors qu'avec le régime actuel tous les services sont offerts aux citoyens? Et ils ont posé la question très pertinente suivante: Allons-nous perpétuer et renforcer une situation de déséquilibre des forces face à l'appareil judiciaire et laisser s'installer deux régimes de droit, un pour les personnes ayant les moyens d'être conseillées et représentées par des avocats et les autres qui seront laissées à elles-mêmes?

Ça, c'est vraiment la question pertinente qu'on doit se poser ce soir, M. le Président, car, lorsque le ministre utilise le bâillon, lorsque le ministre sort la guillotine gouvernementale de sa majorité pour imposer sa volonté malgré l'avis des gens qui connaissent la réalité de la pauvreté au Québec et des gens démunis face à l'État, lorsqu'il impose ça malgré l'avis de l'Association des avocats de la défense, lorsqu'il impose ça malgré l'avis de la Commission des droits de la personne, il n'est pas juste en train d'imposer un bâillon à l'opposition, il est en train d'imposer un bâillon à tous ceux qui représentent les pauvres et les plus démunis de notre société et qui connaissent leur situation réelle.

Alors, lorsque des groupes, comme je viens de mentionner... Et cette lettre-là a été appuyée par 42 groupes communautaires il y a quelques jours, M. le Président. Et, encore une fois, les modifications du ministre ne font rien pour s'adresser à leurs préoccupations. Ils disent non à sa proposition qu'ils qualifient de marchandage par lequel, pour un simulacre d'augmentation des seuils d'admissibilité financière, il coupe des pans complets de services. Un de ces pans de services, une de ces parties importantes de l'édifice de l'aide juridique qui est en train d'être coupé par le gouvernement du Parti québécois, et en particulier par ce ministre de la Justice, concerne le droit social en matière du logement.

L'effet combiné de deux projets de loi, M. le Président, doit être rappelé, ici, ce soir. Le ministre de la Justice, dans le projet de loi n° 7 qui contenait tout un chapitre important pour faciliter la procédure dans les causes en bas de 50 000 $ – et c'était bien et on l'a appuyé à cet égard – a par ailleurs glissé à la fin un chapitre – et on l'a dénoncé en Chambre, on l'a dénoncé en commission parlementaire – qui concernait la Régie du logement et il a transformé ce qui était auparavant un droit d'appel à la Régie du logement en un droit qui va être assujetti à un contrôle. Ce sera seulement lorsqu'un juge décidera qu'il peut entendre et qu'il veut entendre la cause que ça va être acceptable. Dans le projet de loi d'aide juridique, M. le Président, le ministre évacue presque tout service d'aide juridique dans ce domaine si important du logement.

Alors, on peut voir que, sous le couvercle d'un discours qui tend à dire: Oui, on aide de plus en plus de gens, lorsqu'on regarde les groupes qui s'occupent réellement des pauvres, réellement des plus démunis de notre société, ce n'est pas une mesure de solidarité sociale, loin de là, que le ministre de la Justice est en train de nous proposer. En fait, ce que le ministre de la Justice est en train de nous proposer, c'est une nouvelle taxe, c'est des coupures dans le système d'aide juridique, aux coûts de dizaines de millions de dollars, qui vont sortir de quelque part: ça va sortir, tout comme la célèbre assurance-médicaments, directement des poches des contribuables, M. le Président.

(2 h 20)

Et il y a un coût social qu'il va falloir payer pour ça. J'ai entendu le ministre, tantôt, dire dans ses remarques qu'il aurait été prêt à discuter de nos préoccupations concernant la lourdeur administrative que va générer son projet de loi. Mais est-ce qu'on trouve quoi que ce soit là-dessus dans ses modifications? Pas un mot, M. le Président. Alors, la lourdeur administrative, elle va exister, elle est réelle. Il est en train de dire qu'avec les mêmes sommes qui sont allouées à l'heure actuelle pour la commission d'aide juridique on va être obligé de faire des déterminations, des mathématiques et des calculs assez compliqués, M. le Président. On a même vu, vous l'avez lu tantôt, il est en train encore une fois de chambarder les définitions. Ça va être quoi, le revenu qui va être calculé?

Mais, M. le Président, savez-vous qu'avec sa manière de calculer l'admissibilité à l'aide juridique, quand une personne viendrait, admettons, à l'automne d'une année pour faire une demande, on va regarder son dernier rapport d'impôts, qui va remonter, évidemment, à l'année précédente. Si la personne vient de perdre son emploi, si la personne est face à toutes sortes d'autres difficultés qui font en sorte qu'elle n'est vraiment plus du tout dans la même situation financière, ils ne pourront pas en tenir compte. Auparavant, il y avait beaucoup plus de discrétion dans la loi pour tenir compte des situations particulières, M. le Président. Le ministre est en train de les évacuer.

Non seulement ça, M. le Président, mais il y a des pouvoirs énormes de réglementation qui vont avec cette loi-là, des pouvoirs, même, M. le Président, et c'est vraiment inusité, des pouvoirs de définir par règlement ce que veulent dire les termes utilisés dans la loi. Regardez concrètement ce que ça veut dire pour nous, comme parlementaires. Comme élus, on se présente ici, à l'Assemblée nationale, on étudie et on vote sur des projets de loi. Après, l'administration, et c'est normal, fait son travail de faire le fin détail d'application des lois. C'est normal, ça prend tellement de détails pour les programmes et les plans dans notre société, que c'est normal de confier une partie de ce détail-là à l'administration. Mais, ici, M. le Président, c'est l'inverse que le ministre nous propose comme démarche. Il est en train de dire qu'on va adopter une loi-cadre et on va confier à la machine bureaucratique, à l'administration, le soin de décider ce que les législateurs ont voulu dire. C'est littéralement ça qui est prévu dans le projet de loi, M. le Président: le pouvoir de définir par règlement ce que nous allons adopter ici ce soir. C'est assez incroyable, et c'est vraiment aberrant qu'une telle proposition puisse venir de la part d'un ministre de la Justice, Procureur général, qui est une personne qui est censée être là pour veiller à l'application des lois, veiller à la défense de nos institutions démocratiques et parlementaires.

Mais, M. le Président, le ministre ne s'est pas contenté d'en rester là. Avec tout ce qui a été décrié, critiqué vertement par l'ensemble des groupes, non, il fait encore plus fort ce soir, M. le Président, car, à l'intérieur des modifications que vous avez lues très vite tout à l'heure, il y a une modification qui prévoit qu'on va pouvoir faire, croyez-le ou non, entrer en vigueur différents aspects du programme d'aide juridique à différentes dates. En clair, M. le Président, ça veut dire que l'administration, par règlement, va pouvoir définir ce que les législateurs ont voulu dire et que, par après, par règlement, on va pouvoir décider si, oui ou non, on fait entrer en vigueur la partie volet contributoire, la seule partie sur laquelle le ministre peut s'appuyer pour tenter de se donner un minimum de bonne conscience avec sa démarche et son projet de loi. Il tente de nous dire que c'est une bonne chose parce que ça augmente les seuils, mais, avec le pouvoir qu'il est en train d'ajouter avec ces modifications ce soir, il est en train, même, de se donner le pouvoir de ne pas le mettre en vigueur du tout ou de le mettre en vigueur à une date ultérieure, et ce, M. le Président, sans revenir ici, devant l'Assemblée nationale, sans consulter les élus, sans consulter les députés.

Et c'est une autre indication du point auquel le ministre a tort de se lamenter sur le fait que l'opposition officielle a fait son travail en commission parlementaire, car en commission parlementaire, M. le Président, on a tenté par tous les moyens de faire comprendre à ce ministre de la Justice qu'il n'était pas normal qu'il présente un projet de loi qui ne respecte pas les Chartes des droits.

Et, M. le Président, le résultat va venir ici comme c'est venu en Ontario. Il y a des choses fondamentales dans notre société, nos chartes des droits prévoient qu'on a le droit à une défense pleine et entière, qu'on a le droit d'être entendu, et, lorsqu'on efface un appareil administratif et un appareil judiciaire si compliqué, on a le droit d'avoir une représentation par une personne spécialement formée pour le faire. Intéressant aussi, M. le Président, car, dans d'autres domaines, comme le nouveau droit administratif que le ministre propose, il est en train d'évacuer une bonne partie du champ d'exercice exclusif du Barreau du Québec, des avocats.

Encore une fois, M. le Président, on a eu l'occasion de rappeler que le ministre de la Justice est le ministre responsable de la Charte des droits, même si le gouvernement a cru nécessaire de confier la Commission des droits au ministre délégué aux Relations avec les citoyens. Vous savez ce que le ministre délégué aux Relations avec les citoyens est venu nous dire en commission parlementaire, M. le Président. Il nous a dit que c'était une bonne chose qu'il ait dorénavant, lui, la charge de l'Office de la protection du consommateur et de la Commission des droits, parce que, lui, il allait s'en occuper, alors que, si c'était resté à la Justice, ça allait connaître de graves problèmes. Avec le projet de loi ce soir, on comprend pourquoi le ministre délégué aux Relations avec les citoyens a dit ceci à l'encontre de son collègue, le ministre de la Justice. C'était assez étonnant d'entendre un ministre dire ça d'un autre, mais il l'a dit, M. le Président, et il avait raison de le dire. Il l'a dit pour la bonne et simple raison que le projet de loi présenté par le ministre est un autre reflet de jusqu'à quel point ce ministre de la Justice a de la difficulté à composer et avec les commandes du Conseil du trésor et avec les droits fondamentaux des citoyens.

M. le Président, les deux ne sont pas nécessairement inconciliables. Il faut accepter le fait qu'il n'est pas normal d'envoyer les gens faire face à un procès devant un tribunal lorsqu'ils n'ont pas l'argent pour un avocat. Et ça, M. le Président, sans parler d'un autre point qui a été soulevé par de très nombreux groupes, et à bon escient, le fait qu'un juge, face à une personne qui se défend seule, va faire son devoir de tout lui expliquer, retardant ainsi les procédures devant les tribunaux. Qu'est-ce que ça va faire concrètement? Ça va encore une fois alourdir, ça va encore une fois ajouter des coûts. Mais, lorsqu'on présente un projet de loi comme celui-ci et qu'on n'a fait aucune analyse des coûts-bénéfices, aucune analyse des coûts sociaux, aucune analyse en termes des Chartes des droits et libertés de la personne, c'est normal qu'un ministre comme celui-ci baisse la tête et dise: On fonce, je n'ai pas le choix, j'ai reçu une commande du Conseil du trésor.

M. le Président, lorsqu'on comprend ses obligations, lorsqu'on sait que, comme ministre de la Justice et Procureur général, on a l'obligation de défendre les citoyens et de défendre leurs droits, on ne laisse pas aller des choses aussi importantes que celles-là sur simple commande du Conseil du trésor, on défend le public. Ce qu'on a devant nous, M. le Président, c'est un ministre qui accepte les commandes du Conseil du trésor, ne regarde pas ses obligations comme ministre responsable de l'application de la Charte des droits et libertés de la personne et nous amène, encore cette année, tout comme il l'a fait l'année dernière – et on s'en désole – un projet de loi qui fait défaut de respecter les droits fondamentaux.

C'est pour ça, M. le Président, en terminant, que l'opposition officielle était formellement contre à toutes les étapes en commission parlementaire et c'est pour ça que nous allons voter contre ce soir, malgré le fait que la majorité gouvernementale utilise son pouvoir extraordinaire d'imposer un bâillon sur un débat aussi fondamental dans une société libre et démocratique. Merci, M. le Président.

(2 h 30)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Chomedey. D'autres intervenants sur le projet de loi? M. le député de Rivière-du-Loup, je vous cède la parole.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Alors, je tiens à intervenir en faveur du projet de loi modifiant la Loi sur l'aide juridique. Je dois souligner, M. le Président, qu'il est certainement malheureux que ce soit sous une motion de suspension des règles qu'on débatte d'un projet de loi comme celui-là qui, au niveau de son principe de base, amène une idée que, personnellement, je préconise depuis plusieurs années et que, je pense, le gouvernement, comme plusieurs intervenants au Québec, a reconnu qu'elle était devenu nécessaire: c'est l'admissibilité progressive. C'est-à-dire que, plutôt que d'avoir un seuil arbitraire, une ligne qu'on tire et au-dessus de laquelle il n'y a plus aucune forme d'aide possible, alors cette progressivité de l'aide qui puisse être apportée à l'aide juridique m'apparaît une forme plus juste d'appui et d'aide financière à nos concitoyens et concitoyennes qui peuvent avoir besoin de ce programme important qu'est l'aide juridique pour les Québécois et les Québécoises.

L'idée aussi d'inclure, à l'intérieur de ce régime-là, une participation financière pour ceux qui sont capables, avec l'aide du gouvernement en partie, mais qui sont capables aussi d'inclure une participation financière, m'apparaît, dans le contexte actuel des finances publiques, une formule à laquelle on va devoir avoir de plus en plus recours, c'est-à-dire que les principes de gratuité absolus... On sait que, dans la vie, il n'y a rien de gratuit. C'est bien connu que, dans la vie, il n'y a rien de vraiment gratuit. Et, quand les citoyens qui ne peuvent pas payer pleinement un service peuvent payer une part pour bien sentir qu'il y a un coût relié au service mais, en contrepartie, obtenir l'aide de l'État pour la suite des événements, bien, je pense qu'on crée un programme qui est préférable à un système où des gens sont complètement oubliés et où d'autres ont une gratuité totale et peuvent donc utiliser les services sans en sentir eux-mêmes les répercussions, sans en sentir eux-mêmes le coût.

Je conclurai, M. le Président, en disant que ça m'apparaît, cette réforme sur l'aide juridique, une balance honorable entre tous les éléments de Charte des droits mais pour lesquels il ne faut pas devenir non plus exagérément chatouilleux, donc une balance équilibrée entre la Charte des droits et le sens pratique d'un programme qui, dans un contexte de rareté des fonds publics, vient amener une participation des citoyens et vient amener un système qui va permettre à plus de citoyens qui sont à bas revenus mais qui n'étaient pas admissibles en fonction des seuils qu'on a connus – bien que leurs revenus souvent, dans le cas de certaines familles, étaient, quand on connaît le coût de la vie aujourd'hui, très bas – eh bien, qui va permettre à ces gens-là d'avoir, là aussi, une aide du gouvernement face à des frais que peuvent engendrer pour eux des démarches juridiques. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Alors, est-ce que le projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vote par appel nominal. Alors, que l'on appelle les députés.

(2 h 33 – 2 h 37)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): L'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 20, Loi modifiant la Loi sur l'aide juridique.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bertrand (Portneuf)...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît!

La Secrétaire adjointe: ...M. Rochon (Charlesbourg)...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une minute, s'il vous plaît! Une minute. Je vous inviterais, s'il vous plaît, à garder un peu le silence pour faciliter la tâche. Ce n'est pas une raison pour parler, là. Alors, nous allons poursuivre le vote.

La Secrétaire adjointe: Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Perreault (Mercier), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Lefebvre (Frontenac), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Fournier (Châteauguay), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:54

Contre:19

Abstentions:0

(2 h 40)

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Le projet de loi n° 20 est donc adopté.


Projet de loi n° 116


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements déposés

Alors, maintenant l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, M. le député de Robert-Baldwin et M. le député de Rivière-du-Loup.

Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables, ils concernent les articles 1.2 (126.1, 126.2, 126.4, et 126.5), 2.1, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 14, 27, 37, 38 (397.2, 397.3), 39, et un amendement au titre du projet de loi. Sont déclarés recevables tous les amendements transmis par M. le député de Robert-Baldwin aux articles 1.2 et 31. Enfin sont déclarés recevables les amendements transmis par M. le député de Rivière-du-Loup aux articles 2 et 6 du projet de loi.

Je vous rappelle que la durée de ce débat sur la prise en considération de ce rapport a été fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, et cinq minutes pour le député indépendant. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur les amendements? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, je vous cède la parole.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Alors, M. le Président, ce projet de loi apporte un certain nombre de modifications à la Loi sur les services de santé et les services sociaux. On se rappellera que c'est un projet de loi qui avait été déposé à la session précédente, en décembre 1995, mais le temps alloué au travail législatif n'a pas alors permis d'aller plus loin que la première lecture. Ce qui a été une bonne chose dans un sens parce que, dans sa forme originale, un article de cette loi, en particulier, a soulevé un bon nombre de questions. Et on a pu profiter du temps entre les deux sessions pour retourner sur le terrain rencontrer un bon nombre de personnes, qui soulevaient des questions, qui avaient certaines objections, refaire le point sur beaucoup de ces éléments.

Et, lorsque nous sommes revenus pour cette session-ci, comme vous les avez d'ailleurs déposés tout à l'heure, on a pu apporter un certain nombre d'amendements. Et, lorsque nous avons entendu, en commission, à peu près une vingtaine de groupes, qui représentaient à peu près tous les... soit les classes d'établissements dans le réseau de la santé et des services sociaux, les différents groupes de consommateurs et de professionnels, je pense qu'on peut dire que les modifications qui sont proposées pour être apportées au projet de loi rencontrent la plupart des difficultés qui avaient été soulevées à la suite du dépôt de la version originale du projet de loi.

Essentiellement le contenu des amendements qui sont proposés, qui sont des ajustements dans un sens... Ce n'est pas une restructuration du réseau, ce n'est pas une contre-réforme, loin de là, c'est un certain nombre d'améliorations à la loi qui donne la structure du système de santé et de services sociaux, sur la base de l'expérience au cours des trois dernières années, la loi actuelle ayant été approuvée en 1992.

Essentiellement sur trois éléments. On y retrouve d'abord des modifications qui améliorent l'équilibre et qui donnent une meilleure représentativité aux conseils d'administration des différents types d'établissements et aux conseils d'administration des régies régionales.

Par ailleurs, il y a un autre type d'amendement, une autre catégorie d'amendement à la loi qui a apporté des améliorations aux processus électoraux lors de la première ronde des élections en 1992 et, par la suite, on a pu s'apercevoir qu'il y avait vraiment des améliorations simples, mais qui vont rendre encore beaucoup plus démocratique le processus électoral des représentants de la population sur les différents conseils d'administration des établissements et de la régie régionale.

Finalement, un autre amendement vient généraliser l'utilisation d'un mécanisme qui s'est avéré très efficace pour permettre le rapprochement de différents types d'établissements, tout en conservant en place les corporations des établissements et en assurant une meilleure visibilité et un meilleur contrôle pour la protection des missions spécifiques des établissements, que ce soit un centre local de services communautaires, un centre d'hébergement et de soins prolongés ou un centre hospitalier, pour permettre des rapprochements sur le plan administratif, et qui donne une possibilité de développer et de gérer un réseau de services beaucoup mieux intégré et beaucoup plus utile. Alors, il s'était développé une formule de conseils d'administration unifiés pour différentes corporations, qui, dans le domaine des centres de jeunesse, a permis des regroupements très importants, et très rapidement et de façon très harmonieuse. Alors, le projet de loi – et j'y reviendrai tout à l'heure en présentant plus en détail le projet de loi – généralise cette formule, en l'adaptant à d'autres établissements que les centres de jeunesse.

Alors, c'est essentiellement ce projet qui a été présenté en commission parlementaire. Bon, c'est un peu malheureux que la commission parlementaire, qui a, après avoir permis d'entendre une vingtaine de groupes... Lorsqu'on est arrivés à l'étude article par article, on a fait face à un barrage systématique et on n'a même pas pu... On s'est rendu à l'article 1 qu'on a commencé à discuter, mais je pense que, si ma mémoire est bonne, on n'a même pas pu voter l'article 1. Et ç'a été une tentative systématique de l'opposition, M. le Président – je pense qu'il faut le dire – de réentendre tous les groupes qu'on avait déjà entendus, sans vraiment aucune raison évidente, parce que la première rencontre avait vraiment permis de faire le point. Elle avait été précédée, avant la commission parlementaire, comme je le disais tout à l'heure, d'une tournée dans le réseau qui avait permis de vérifier aussi un bon nombre de questionnements que les gens avaient.

On a même accepté de rencontrer de nouveau un des groupes qui est la Fédération des CLSC, parce que c'était peut-être le groupe qui était le plus impliqué dans le changement proposé pour les conseils d'administration unifiés. On les a réentendus, mais, malgré ça, ç'a été impossible de se rendre même à l'article 1. Alors, je le regrette vraiment. Je le regrette sincèrement, parce que je crois que le processus des commissions parlementaires fait partie de notre processus législatif. Alors, on aurait probablement pu bonifier encore le projet de loi si on avait vraiment pu l'étudier article par article, et, pour beaucoup d'éléments, au lieu de les soulever hors contexte dans des motions successives qui étaient une pure répétition et un pur processus dilatoire, on aurait pu avoir ces discussions-là de façon beaucoup plus constructive, M. le Président.

Alors, je suis convaincu, par ailleurs, que les amendements, tel qu'ils ont été apportés... le projet de loi, tel qu'il est maintenant, va être une amélioration importante à ce qu'on a comme législation et va permettre un fonctionnement beaucoup plus harmonieux de notre réseau de santé et de services sociaux. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président, et je vous remercie de me donner l'occasion de remettre un petit peu les pendules à l'heure, particulièrement sur le rôle de l'opposition et le rôle du ministre dans le dossier de la loi n° 116. Je dois vous dire, M. le Président, que, contrairement à ce qui a été affirmé par le ministre, chacun, des deux côtés de la Chambre, a bien travaillé en commission parlementaire. Nous avions même réussi à trouver un minimum de consensus, particulièrement sur l'imputabilité des régies régionales, lorsque le député de Lévis a proposé à la commission que les régies puissent être imputables à une assemblée des députés. La mécanique n'était pas formulée à ce moment-là, mais je pense que plusieurs députés ministériels, comme les députés de l'opposition, eh bien, on s'entendait assez rapidement pour trouver ce genre de mécanique.

(2 h 50)

Tout au long des audiences que nous avons eues, nous avons entendu des scènes d'horreur de ce que les régies régionales peuvent faire pour manipuler les séances d'information. Nous avons eu des exemples bien précis dans plusieurs coins du Québec.

M. le Président, je voudrais vous rappeler que le projet de loi en question a été déposé au début de décembre dernier, le 4 décembre, qu'en aucun temps, dans la session de l'automne, eh bien, ce projet de loi a été appelé, même pas le principe. Le ministre, aux mois de janvier et février, a décidé de faire une consultation, entre parenthèses, privée. Il a écrit à certains groupes du réseau. C'est son droit. Il a fait une consultation sur la loi n° 116, mais aussi sur un projet plus vaste de déréglementation. Le résultat, M. le Président, lorsque nous sommes revenus en session, bien, on pensait que le ministre avait compris, qu'il avait écouté les groupes, eh bien, nous avons eu une mauvaise surprise.

Malgré cette bonne entente entre les deux côtés de la Chambre, le projet de loi a été appelé en pleine nuit, à notre grand étonnement, puisque nous étions sur le point d'entreprendre l'étude article par article. De plus, un certain nombre de groupes ont demandé à être réentendus suite aux amendements, que nous avions eus à la dernière minute, comme d'habitude. Et nous avons été chanceux d'avoir présente, au moment d'une des commissions parlementaires, la Fédération des CLSC. Alors, en insistant fortement auprès du ministre, ce dernier a été obligé d'accepter d'entendre la Fédération des CLSC, et, devant eux, il s'est engagé à retenir les éléments de leur présentation. M. le Président, malheureusement, quoi que le ministre en ait dit, malgré ce qu'il a dit aux gens de la Fédération des CLSC, je ne pense pas que les gens qui représentent les CLSC vont être très heureux des amendements qui sont apportés et du projet de loi tel qu'il est formulé actuellement.

M. le Président, ce projet de loi, ce devait être un projet de déréglementation. On avait eu tellement de promesses en période électorale. Vous vous souvenez, M. le Président, des promesses en période référendaire. Eh bien, pas beaucoup de déréglementation dans ce projet-là; au contraire, on augmente les règlements. Et je pense que nous avons 21 amendements alors que le projet contient 56 articles. Eh bien, de nouveau, ça sent l'improvisation, ça sent le fait qu'on est obligé de travailler à la dernière minute, encore une fois, qu'on n'écoute pas les groupes. Et je pense que les groupes insistaient pour être entendus de nouveau. Ce n'est pas l'opposition seulement qui s'oppose au ministre, c'est le réseau de la santé et des services sociaux. Et le ministre ne s'en rend pas compte ou ne veut pas s'en rendre compte à ce moment-ci.

Je voudrais revenir sur une proposition que nous avons faite à quelques reprises. Eh bien, le ministre, dans la première partie du projet de loi, il nous propose de fusionner, de regrouper ou d'avoir des conseils unifiés d'établissements alors que la loi 120 prévoit tout ça. D'ailleurs, M. le Président, un certain nombre d'établissements ont profité de la loi 120 pour faire ce que le ministre souhaite que la loi n° 116 puisse faire.

Et je vous lis l'article extrêmement important: «Une régie régionale peut proposer au ministre de modifier l'organisation prévue aux articles 119 à 126 – 119 à 126, c'est l'ensemble des établissements de santé – lorsque la nature ou l'étendue du territoire ou la nature, le nombre, les caractéristiques particulières ou la capacité des installations des centres qui s'y trouvent, la densité de la population desservie, les caractéristiques socioculturelles, ethnoculturelles ou linguistiques d'une partie de la population ou des établissements le justifient.» Et, quand on sait qu'à l'article 1, il y avait des problèmes associés à cet article-là, particulièrement pour des considérations de garantie linguistique, eh bien, l'article poursuit: «La régie régionale doit plus particulièrement tenir compte des établissements reconnus en vertu des paragraphes de l'article 113 de la Charte de la langue française.» Et un peu plus loin dans la loi 120, M. le Président, l'article 323: «peuvent être fusionnés en un établissement public constitué en vertu de la présente loi différents établissements».

Tout était déjà dans la loi 120. On ne comprend pas l'insistance du ministre. On sait, cependant... Au moment où on était en commission parlementaire, il y a eu un lobbying intense, pas n'importe qui, la Conférence des régies régionales, M. le Président. Ça, c'est l'allié n° 1 du ministre et du seul ministre; ce n'est pas l'allié du gouvernement, du ministre seulement. Les régies régionales sont en train de devenir un véritable monument à la bureaucratie et, malheureusement, M. le Président, c'est les patients qui vont payer pour cette bureaucratie. 100 000 000 $ de dépenses pour l'ensemble des régies, 1 500 employés... Ça ne soigne pas un patient, ça, une régie, encore, M. le Président, vous le savez.

La deuxième partie du projet de loi traitait davantage des élections au conseil d'administration et nous avons proposé au ministre – et je pense qu'il y a une difficulté avec les élections au niveau des établissements de santé – de passer un projet de loi plus restreint ou moins volumineux mais qui porterait sur les articles concernant les élections des établissements. Nous pensions qu'il y a des paramètres à définir un peu mieux. Nous lui avons proposé.

Nous tenons à réitérer qu'il est important que les régies régionales aient une certaine imputabilité. Lorsqu'ils sont venus en commission parlementaire, ils ont dit: On est imputable parce qu'on fait une assemblée publique, une fois par mois, de 25 minutes. M. le Président, ce n'était pas décent de dire ça, en commission parlementaire, quand on a entendu différents groupes qui nous ont dit que c'est arrangé, ces assemblées publiques, que les gens doivent poser des questions des fois au début et qu'ils ne peuvent pas parler des sujets qui sont discutés. D'autres fois, comme à Montréal, il y avait 20 ou 25 chaises alors qu'il y avait plein de monde qui voulait rentrer. On change les salles de réunion à la dernière minute. Il y a plein de jeux qui sont faits pour nuire à la démocratie, pour nuire à ce questionnement qui est légitime et qui est inclus dans la loi 120.

M. le Président, j'aimerais également vous souligner qu'il y a eu une manifestation samedi dernier, à Laval, de la part des aînés. Eh bien, le directeur général de la régie a décidé qu'il faisait chambre à part, que le conseil d'administration faisait leur rencontre dans une salle et que les gens, le public, les aînés particulièrement, pouvaient suivre ça sur écran géant. M. le Président, c'était dans les journaux de la fin de semaine.

Alors, voilà où on en est rendu avec le monument érigé en l'honneur de la bureaucratie, et le patient, dans tout ça, on est bien loin de ses préoccupations.

M. le Président, j'aimerais, en terminant, rappeler de nouveau l'excellent travail qui a été fait par l'opposition mais en concertation avec les groupes qui se sont présentés en commission parlementaire. Je voudrais rappeler de nouveau que le ministre n'a pas écouté, il n'a pas écouté, dans le cas de la loi n° 116 comme dans d'autres – on y reviendra tantôt – et rappeler de nouveau que, dans le domaine de la santé, depuis que ce gouvernement est au pouvoir, depuis que ce ministre est en poste, eh bien, il faut toujours avoir le bâillon pour passer une loi. Et je vous rappelle que, nous, de l'opposition, nous travaillons étroitement avec le réseau de la santé, les différents intervenants, que ce soit les CLSC, les centres hospitaliers, les centres d'hébergement, tous les groupes qui sont associés et, M. le Président, je pense que c'est à l'honneur de l'opposition de faire ce genre de représentation.

Alors, encore une fois, le ministère de la Santé est malheureusement devenu, sous la gouverne du ministre actuel, un véritable ministère de l'improvisation où la priorité, c'est de se bâtir un empire bureaucratique, et cet empire bureaucratique, M. le Président, va à l'encontre des besoins fondamentaux des patients. On est bien loin de la politique de santé et de bien-être qu'on a connue. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. M. le député de Rivière-du-Loup. Une intervention maximale de cinq minutes. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Sur la prise en considération du rapport de la commission, je vais dire simplement quelques mots sur les amendements que j'ai soumis. Évidemment, on est tous sûrement un peu surpris de se retrouver dans un débat invoqué par l'urgence alors qu'on a devant nous un débat de structure, finalement, un débat sur l'organisation du système des conseils d'administration. Dans le système de santé, s'il y avait des urgences, on aurait l'impression qu'elles seraient ailleurs, dans les soins, dans les transplantations, pas tellement dans l'organisation des structures. Mais, enfin, on est devant.

(3 heures)

L'objet des amendements, M. le Président, vous connaissez ma crainte, ma phobie des pouvoirs bureaucratiques élargis et évidemment il va de soi que les régies de la santé et des services sociaux... Et, comme parlementaires, on est parfois à même de constater – quand j'ai intervenu sur le principe du projet de loi n° 116, j'en avais fait état – nous-mêmes, comme parlementaires, qui avons une responsabilité de répondre à nos concitoyens et à nos concitoyennes, il y a des moments où on a l'impression qu'on a de la difficulté à pénétrer les régies, à aller chercher les informations pour savoir ce qui se passe là, savoir ce qui va arriver avec nos centres hospitaliers, puis nos centres de soins de longue durée pour nos personnes âgées.

Alors, l'objet était relativement simple des amendements que je mettais de l'avant, M. le Président. Enlever ou abroger l'article 2 de ce projet de loi, c'est éviter de donner, à mon avis, des pouvoirs nouveaux, des pouvoirs accrus aux régies, pouvoirs, entre autres, pour proposer directement au ministre des regroupements de conseils d'administration. Dans un domaine où il est déjà possible d'agir – et j'ai vu, moi-même, de visu, de mes yeux, des exemples de regroupements volontaires possibles entre des établissements qui y trouvent leur compte – bien, il me paraît que, quand ça c'est possible, donner ces nouveaux pouvoirs à la régie, ce n'est pas une nécessité, ce n'est pas une urgence, et ça peut seulement grossir le pouvoir énorme des régies de la santé.

Deuxièmement, M. le Président, le résultat de ces propositions que pourrait faire la régie au ministre, c'est la réduction du nombre de conseils d'administration et, après examen de toutes ces réalités-là, il ne m'est pas apparu que la réduction en soi du nombre de conseils d'administration était un objectif. Parce que des conseils d'administration, c'est plus de démocratie; donc, moins de conseils d'administration, c'est moins de démocratie. C'est plus de bureaucrates impliqués dans les décisions, moins de gens de terrain impliqués dans les décisions. Moins de conseils d'administration, c'est moins de contrepoids au pouvoir grandissant des régies dans nos régions. Et l'autre amendement évidemment, l'abrogation de l'article 6 du projet de loi, bien, il est de concordance avec l'abrogation de l'article 2.

Alors, j'invite évidemment le parti ministériel, mais aussi tous les députés du côté ministériel à se pencher de près sur cet amendement-là, tous ceux qui, au cours de la dernière année, dans un plan de transformation que, je pense, plusieurs d'entre nous ont, dans les principes, accepté... On est conscients qu'il est nécessaire de faire des transformations dans notre réseau de la santé. On vit quand même, comme parlementaires, comme représentants dûment élus, mandatés par la population, des réalités et on doit, je pense, se questionner en profondeur avant de voter systématiquement parce que c'est le vote de notre parti. On doit se poser des questions avant d'adopter des choses comme celles-là qui donneraient plus de pouvoirs aux régies, moins de conseils d'administration, qui pourraient, en cours de route, évidemment faire perdre la nature de certains services, entre autres, au niveau des CLSC.

Et c'est pourquoi, M. le Président, je veux inviter tous les parlementaires à adopter ces amendements qui abrogeraient deux articles du projet de loi; sans quoi évidemment, M. le Président, comme, probablement, d'autres parlementaires, je serai forcé de voter contre le projet de loi n° 116. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Il n'y a pas d'autres intervenants?

Alors, à la suite d'une réunion avec les leaders des groupes parlementaires, j'ai organisé la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux.


Mise aux voix des amendements du ministre

Je mets, d'abord, aux voix les amendements de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux aux articles 1, 2 (126.1, 126.2, 126.4, 126.5) 2.1, 2.3, 2.4, 2.5, 2.6, 2.7, 2.8, 2.9, 2.10, 2.14, 2.27, 2.37, 2.38 (397.2, 397.3) 2.39 et un amendement au titre du projet de loi. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté sur division.


Mise aux voix des amendements du député de Robert-Baldwin

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Robert-Baldwin aux articles 1, 2 et 31. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Rejeté.


Mise aux voix des amendements du député de Rivière-du-Loup

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rejeté. Je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Rivière-du-Loup aux articles 2 et 6 du projet de loi. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Rejeté.


Mise aux voix des articles amendés

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rejeté. Je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 116 amendés par les votes précédents. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 116 que la commission des affaires sociales n'a pas adoptés ainsi que le titre du projet de loi. Ces articles ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Une voix: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Je mets maintenant aux voix le rapport, tel qu'amendé, de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, est-il adopté?

Une voix: Adopté sur division.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux. La durée de ce débat a été fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique d'une durée maximale de 10 minutes a été prévue pour le ministre qui présente le projet de loi. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, je vous cède la parole.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Je voudrais présenter de façon un peu plus détaillée le contenu, l'essence des modifications qui sont faites à la loi, qui ne veulent vraiment pas être, encore une fois, un débat de structures, mais vraiment une bonification de l'organisation de notre réseau. Et je peux les résumer en quatre groupes d'amendements, essentiellement. Le premier – c'est l'article 1 – c'est un amendement qui permet, en fait, tout simplement, de reconnaître ce qui est devenu une situation, au cours des trois dernières années, dans l'ensemble du Québec, à savoir que tous les centres de réadaptation, que ce soit réadaptation motrice, visuelle ou auditive, sont devenus, dans toutes les régions du Québec sauf à Montréal, un seul établissement régional qui travaille sur le terrain de façon déconcentrée compte tenu de la géographie des différentes régions et ont permis, à l'expérience, de pouvoir développer, de façon beaucoup plus intégrée, cohésive et efficace, l'ensemble des services de réadaptation pour une région.

À Montréal, la situation est différente, compte tenu de la composition de la population de Montréal, compte tenu du fait que la population, par exemple, de langue anglaise est beaucoup plus importante et qu'il y a des établissements qui desservent à peu près exclusivement une population de langue anglaise et d'autres une population de langue française. Et, dans cette situation, l'article prévoit de pouvoir faire exception pour Montréal. Alors, on se rajuste à la situation. Ce qui est devenu la règle est confirmé dans l'article, mais en reconnaissant que, pour Montréal, le ministre pourra, sur recommandation de la régie régionale, déterminer, par exception, l'organisation des services de réadaptation pour tenir compte de façon spécifique de la situation de Montréal. C'est le premier amendement, le premier type d'amendement qui est fait à la loi.

Le deuxième type d'amendement est celui des conseils d'administration uniques pour un certain nombre d'établissements, tout en maintenant en place les corporations. C'est ce à quoi je faisais référence, M. le Président, lors du rapport de la commission; il s'agit là pas de quelque chose d'expérimental qu'on veut essayer, mais d'une formule qui avait été introduite dans la loi en 1990, lorsqu'elle a été adoptée pour la première fois, de façon un peu expérimentale, à l'époque, pour les centres jeunesse. Et, à l'expérience, les dirigeants des centres jeunesse sont venus nous dire: Cette capacité pour le ministre, sur recommandation d'une régie régionale, de donner un seul conseil d'administration à certains établissements a été, comme nous l'ont dit les gens, un bon coup de pouce. À certains endroits, on hésitait encore, pour différentes raisons, la tradition, différentes considérations, à vraiment faire le pas, à gérer de façon plus intégrée différents établissements.

Cette décision de respecter les corporations, de les laisser en place, de bien identifier les différentes missions, mais d'avoir un seul décideur pour le développement s'est avérée – tout le monde le dit, de façon très unanime – être une expérience très heureuse, de sorte que beaucoup de ces établissements qui ont eu un conseil d'administration unifié pour l'ensemble de leurs établissements, après quelques années, ont décidé de se fusionner complètement.

Alors, ce qu'on veut faire, c'est pour deux types de situations. Et ça, je pense que c'est important de le réaliser, là, puis je vais prendre une minute ou deux de plus sur ce point-là parce qu'il est vital. Ce qui s'est développé au cours des dernières années dans le réseau de la santé et des services sociaux, c'est vraiment le fonctionnement des établissements qui veulent de plus en plus travailler de façon très intégrée, pas comme des établissements, mais comme un réseau de services – on le dit beaucoup dans le réseau de la santé et des services sociaux – qui permet une continuité de soins pour les patients, pour les clients, pour les consommateurs de services et qui permet aussi une meilleure complémentarité des ressources des différents établissements.

(3 h 10)

Et ça, ça se voit dans deux types de situations essentiellement. D'abord, et surtout, pour l'ensemble des services de première ligne pour un territoire donné, qui est le territoire des CLSC, qui correspond, dans la très grande majorité des cas, au territoire des MRC à l'extérieur des communautés urbaines. Et, quand on parle de services de première ligne maintenant, aujourd'hui, je pense qu'il y a un assez bon consensus pour s'entendre que ça représente l'ensemble des services sociaux et des services de santé qui sont donnés par des CLSC.

Ça comprend aussi les services de soins de longue durée où, essentiellement, dans des établissements d'hébergement et de soins de longue durée, on crée et on développe un milieu de vie pour des gens qui ne peuvent plus rester à la maison, dans leur famille, dans leur foyer, à cause d'une trop grande perte d'autonomie, qui sont des gens qui ont peut-être besoin de soins de façon un peu plus importante que d'autres dans la population, mais qui ont surtout besoin d'un niveau de vie dans un établissement, et les soins qu'ils doivent recevoir sont essentiellement des soins et des services de première ligne.

On y rajoute aussi des services de type hospitalier, mais d'un hôpital général, vraiment des services qui sont donnés à quelqu'un qui doit être hospitalisé pour une très courte période de temps et où, essentiellement, c'est le praticien général, le médecin de famille qui continue à s'occuper de la personne, avec, au besoin, l'aide de consultants, et où on peut avoir différents types de traitements et d'interventions, où on peut avoir des traitements chirurgicaux, mais des traitements chirurgicaux vraiment de types généraux.

Et l'intégration sous un seul conseil d'administration, quand la situation le justifie, peut permettre une beaucoup plus grande cohésion et, à ces trois types d'établissements – ou les deux, dépendant de ce qui existe sur le territoire – le centre local de services communautaires, le centre de services de soins de longue durée et le petit hôpital de soins généraux peuvent travailler avec une beaucoup plus grande harmonie avec les praticiens, avec les médecins qui sont dans leur cabinet et dans leur bureau sur le territoire.

Ça, c'est le premier type de regroupement, mais qui se fait – et l'article de la loi est très spécifique – dans le but de mieux intégrer un réseau de services et en s'assurant de protéger les missions des différents établissements, de bien les garder identifiées, et après consultation avec les établissements impliqués et la population du milieu. Et c'est cette première situation qui est décrite à l'article 2. Et le conseil d'administration, qui gère les différents établissements, est défini à l'article 6 du projet de loi, et c'est un conseil d'administration de type CLSC pour bien s'assurer que le regroupement en est un qui gère avec un esprit et une vision de services de première ligne sur une base d'une population.

Le deuxième type de regroupement qui est possible par le conseil d'administration unifié est pour les services de deuxième ligne, pour des centres hospitaliers de plus grande envergure entre eux, quand la situation se présente. Parce que, dans la plupart des régions, on regroupe maintenant les services spécialisés hospitaliers à ce deuxième niveau de services dans le réseau de la santé et des services sociaux dans des ensembles plus cohérents qui peuvent être deux ou trois campus différents, dépendant de la géographie de la région, mais qui, étant gérés par une seule autorité, un seul conseil d'administration, au lieu d'une compétition souvent qui utilise mal nos ressources, permettent plutôt une cohésion et une convergence entre les hôpitaux.

Mais, là aussi, tout ça doit se faire après consultation avec le milieu et ça permettra, dans certains cas, de donner ce petit coup de pouce, peut-être, qui a été si bénéfique dans le cas des centres de jeunesse. Ce qui n'empêche pas, comme le prévoit l'article 323 de la loi telle qu'elle est actuellement, que tous ceux qui veulent aller plus loin dès le début, comme on y a fait référence, tous ceux qui veulent une fusion complète et intégrale peuvent toujours le faire, mais, ça, c'est sur une base volontaire et dans aucune situation on ne va forcer une fusion d'établissements si les gens ne le désirent pas vraiment.

Troisième type d'amendements qui sont faits pour améliorer notre loi, ça vise la composition des conseils d'administration des établissements et des régies régionales. Là, ce qu'on a voulu faire essentiellement, c'est s'assurer qu'au niveau des établissements on puisse avoir une meilleure représentation du territoire et de la population. Alors, on a, par exemple, des établissements qui ont une vocation régionale ou certains qui ont une vocation même d'offrir des services à des citoyens d'une autre région, d'une région voisine.

Et ce que les amendements vont faire, c'est permettre de coopter un plus grand nombre de personnes sur les conseils d'administration, de sorte qu'on s'assure que les conseils d'administration ont des gens qui viennent des différentes parties du territoire que dessert l'établissement, et que la cooptation de membres puisse aussi assurer un meilleur équilibre de représentation socioculturelle de la population et aussi un meilleur équilibre hommes-femmes sur des conseils d'administration; donc, une plus grande souplesse visant une meilleure représentativité et permettant, donc, une meilleure démocratie dans la gestion de nos établissements.

La même chose s'applique au niveau du conseil d'administration de la régie régionale où on s'assure que tous ceux qui vont prendre les décisions pour la région soient des gens qui viennent de la population, qui ne sont pas impliqués dans le réseau comme employés ou comme gestionnaires et qu'on n'ait pas de situation où on semblait craindre, parfois, qu'il y ait une bureaucratisation des régies régionales. Là, les conseils d'administration vont être essentiellement composés de gens de la population, de bénévoles qui vont prendre des décisions au nom de la population qui les aura désignés sur les conseils d'administration. Alors, c'est, essentiellement, les bonifications qui ont été faites pour avoir des conseils d'administration mieux équilibrés et plus représentatifs de la population.

Quatrième et dernier type de modifications qui sont faites au projet de loi, M. le Président, c'est des modifications qui visent le processus électoral. On s'est aperçu, on a réalisé, à l'expérience, qu'il y avait quelques améliorations qui pouvaient être faites, d'abord, pour s'assurer que les gens puissent voter – mais votent comme on le fait en général dans le milieu municipal et dans les élections scolaires – selon leur lieu de résidence et non pas circuler et voter à une demi-douzaine ou à une douzaine d'endroits. Et c'est arrivé lors de la première élection où des autobus ont circulé sur certains territoires avec des gens qui allaient voter partout sur différents territoires et à différents types d'établissements.

Alors, là, les gens pourront voter, mais sur le lieu de leur résidence, dans la région de leur résidence et une fois par catégorie d'établissement, par type d'établissement, de sorte que c'est l'ensemble de la population qui veut voter qui va composer les conseils d'administration et non pas risquer d'avoir un petit groupe de personnes qui vont déterminer la composition des conseils d'administration sur un territoire.

Et, finalement, ce qu'on a rajouté, c'est de garder ce qui avait été le rôle essentiel des assemblées régionales, c'est-à-dire un mécanisme de collèges électoraux qui désignent des membres sur les conseils d'administration des différents établissements.

Alors, voilà, M. le Président, je voulais reprendre essentiellement, vu qu'on n'a pas pu le discuter en commission parlementaire, le contenu de cette loi-là pour que ce soit bien colligé à la fin de notre discussion. Et je suis convaincu que ces améliorations vont nous permettre, dès l'automne prochain, un meilleur déroulement des élections et vont permettre un meilleur fonctionnement de notre réseau, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Robert-Baldwin.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Alors, merci de nouveau, M. le Président. Nous allons simplement apporter des compléments d'information et peut-être dire au ministre l'autre vérité. D'abord, le ministre nous présente 21 amendements sur un projet de loi qui contient 56 articles. Nous avons eu les derniers amendements tantôt. Il a encore eu des changements. Et je suis certain, M. le Président, si vous reportez le vote à demain, qu'il y aura d'autres amendements qui vont aussi être déposés. De nouveau, c'est une façon de travailler au ministère qui est nouvelle avec ce ministre. C'est beaucoup dû à l'improvisation. On ne possède pas bien les dossiers. On demande des changements. Les conseillers, même s'ils ne sont pas nombreux, semblent, en tout cas, soucieux de bien installer leur bureaucratie. M. le Président, on arrive donc avec un projet de loi avec, sur 56 articles, 21 amendements. Et les derniers qui nous sont arrivés sont encore chauds, M. le Président.

Malgré les changements proposés, le ministre n'a pas répondu aux attentes des groupes qui ont été entendus en commission parlementaire. Et une des raisons pour lesquelles nous avons demandé de réentendre certains groupes... Nous ne voulions pas recommencer tout le processus des audiences publiques. Eh bien, nous avons voulu faire des consultations particulières pour quelques groupes seulement. Et, là aussi, le ministre nous a imposé son refus, malgré le fait qu'on avait réussi – et, je pense, dû, en partie, au président de notre commission – à avoir un climat, là, dans lequel on pouvait travailler d'une bonne façon.

L'article 1 n'a pas été abrogé, malgré les recommandations du milieu. L'article 1 est très important, M. le Président. Nous avons fait, je pense, quatre sous-amendements. Tantôt, mon collègue, l'excellent député de Notre-Dame-de-Grâce, vous parlera des implications de cet amendement, particulièrement au niveau des garanties linguistiques.

(3 h 20)

Alors, il y a des enjeux qui sont très importants à ce niveau et en aucun temps le ministre n'a été en mesure de nous apporter les garanties nécessaires, sauf de se faire dire: Écoutez, faites-moi confiance ou encore faites confiance aux régies. Et, pour les gens de la communauté anglophone, eh bien, ce genre de confiance là ne tient plus, après avoir vécu ce qu'ils ont vécu l'an passé, les fermetures d'hôpitaux, lorsqu'on s'est acharné à fermer les hôpitaux qui desservaient les populations anglophones, particulièrement à Montréal, à Sherbrooke et dans l'Est du Québec, avec l'hôpital Jeffery Hale.

L'article 2 n'a pas, non plus, été abrogé et le ministre n'a même pas pris en considération la recommandation des CLSC qui accepteraient plus facilement la fusion avec les centres hospitaliers de soins de longue durée de moins de 100 lits. Notre collègue, le député de Rivière-du-Loup, était même d'accord avec l'abolition de cet article. Nous aussi, nous souhaitions l'abolition de cet article compte tenu que la loi 120 déjà prévoit ce genre de situation.

Le ministre n'a trouvé aucun mécanisme, aucune mécanique pour remplacer les assemblées régionales, les rendre imputables devant la population, et ça, c'était unanime. Tous les groupes ont demandé que les régies soient imputables, M. le Président, et il n'y a rien dans le projet de loi qui permet aux régies d'avoir un minimum d'imputabilité. Je vous ai dit tantôt que les régies se sentent imputables parce qu'elles ont une assemblée publique, une fois par mois, un 25, 30 minutes; c'est la façon dont les régies se sentent imputables. J'aimerais ça, M. le Président, que ces gens-là connaissent le processus électoral que chacun d'entre nous a dû traverser en campagne électorale. Et ce qu'on sait, nous, de l'imputabilité d'un député, je pense que ça ne concorde pas du tout avec l'imputabilité des mandarins des régies régionales.

Le projet de loi, M. le Président, qui avait été déposé en décembre, pourquoi est-ce qu'il n'a pas été appelé en décembre? Pourquoi est-ce que, pendant l'intersession, on n'a pas travaillé ensemble? Je ne suis pas capable d'avoir de réponse. Le ministre a fait une consultation particulière, privée. Lorsqu'il a fini sa consultation, il a ramené le projet de loi. Aucun amendement à ce moment-là; les amendements sont arrivés à la dernière minute. Ils ont été rechangés et rechangés. Alors, c'est ça qui nous fait dire qu'il y a de l'improvisation dans ce dossier-là comme dans beaucoup d'autres, comme vous savez.

Pourquoi attendre au mois de mai pour entreprendre des consultations à l'Assemblée nationale? Les groupes nous ont dit: Bien, écoutez, nous autres, on l'a appris à la dernière minute. Certains groupes n'étaient même pas prêts; ils ont quand même tenu à venir présenter leur témoignage. Et, comme je vous l'ai dit, dans plusieurs cas, nous avons eu un «listing», si vous me permettez l'expression, d'histoires d'horreur de ce qui se passe aussi bien dans les régions du Québec que dans les métropoles, comme la région de Montréal. Eh bien, c'était vraiment des histoires d'horreur, et le patient est bien loin de son compte.

Je voudrais simplement rappeler, M. le Président – et vous vous en souvenez très bien, vous aussi – que, lorsqu'il y a eu les fermetures d'hôpitaux, il y a un an maintenant, eh bien, en aucun temps les régies régionales n'ont reflété ce que la population pensait. Nous avons été obligés de déposer de nombreuses pétitions à l'Assemblée nationale, et jamais les régies n'ont fait allusion au fait que les patients, les citoyens n'étaient pas d'accord avec leurs décisions.

Le projet de loi n° 116 aurait dû être un projet de déréglementation. C'était attendu dans le réseau et il y avait déjà eu des comités, des groupes de travail de formés, dont un présidé par M. Gérard Marcoux, qui avait fait un rapport d'étape et pour lequel il y a eu beaucoup d'espoirs qui ont été suscités. Alors, au lieu d'avoir un projet de déréglementation, on a un projet qui réglemente davantage, un hymne à la gloire des régies régionales. Eh bien, M. le Président, malheureusement, le patient est très loin derrière cette grande, vaste et large bureaucratie.

M. le Président, à ce moment-ci, j'aimerais rappeler à l'Assemblée la lettre de blâme qui a été adressée par le président de l'Assemblée au ministre parce qu'il n'a pas tenu compte d'un projet de loi; il a déjà procédé à certains affichages par rapport à l'approbation d'un projet de loi. Je pense que, dans le dossier de l'assurance-médicaments, comme dans le dossier de la loi n° 116, comme dans le dossier de la loi 83, c'est significatif du non-respect des institutions parlementaires.

Comment se fait-il qu'à chaque fois qu'il y a un projet de loi dans le domaine de la santé il faut absolument qu'il y ait un bâillon? Eh bien, je pense qu'on peut se poser de sérieuses questions. Quant à nous de l'opposition, nous sommes convaincus que, dans chacun des cas, nous avons reflété ce que le réseau pense, ce que les patients pensent, ce que les citoyens, les contribuables pensent. Nous sommes en mesure, M. le Président, de le prouver et, tantôt, sûrement, je pourrai donner des indications dans ce sens-là.

Un fait cocasse, M. le Président, c'est que, dans le rapport Rochon – vous allez me permettre, c'est la qualification qu'on a toujours mentionnée – le ministre de la Santé a toujours supporté un suffrage universel pour les établissements de santé. Alors, on a un double langage. On aurait souhaité avoir ce suffrage universel, mais, de nouveau, on est limité à des élections, là, très sectorielles et les bonnes recommandations de jadis, on n'en tient pas compte aujourd'hui.

Une solution aux coûts... Parce que, nous aussi, nous sommes d'accord qu'il faut faire un effort par rapport à la diminution de la dette et à l'amélioration de la saine gestion des finances publiques. On avait un bel exemple où on aurait pu diminuer les coûts, c'est-à-dire diminuer dans la bureaucratie des régies régionales, et, encore une fois, on a manqué notre chance de diminuer dans cette bureaucratie qui éloigne tellement les patients de leurs besoins.

M. le Président, je termine. Je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Robert-Baldwin. Je vais céder la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le député, il reste à la disposition de votre groupe parlementaire 11 minutes. Je vous cède la parole.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je ne veux surtout pas réveiller qui que ce soit en Chambre. Alors, je vais tenter de ne pas parler trop fort pour faire plaisir à mon ami, le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. le Président, je souhaiterais, à un moment donné, que le ministre s'écoute, lui, parce qu'il dit des choses, lui, absolument incroyables. En réponse à une critique de notre collègue, le député de Rivière-du-Loup, qui a qualifié ce débat de débat de structures, le ministre a répondu ainsi... Moi, j'écoute toujours attentivement le ministre; ça donne des petites perles sur comment on peut construire une phrase. Il a dit: Ce n'est pas un débat de structures – ça, c'est le ministre de la Santé qui parle – c'est une bonification de la configuration de notre réseau. C'est, effectivement, M. le Président...

Des voix: Bravo!

M. Copeman: Oui. C'est, effectivement, M. le Président, très beau, sauf...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Alors, je sais qu'il y en a plusieurs qui ont besoin de se réveiller, mais il ne faut pas exagérer. Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: C'est effectivement très beau, M. le Président, mais, je regrette, ça veut dire la même chose. Parler des structures ou parler d'une bonification de la configuration de notre réseau, il me semble que c'est la même chose, mais pas pour le ministre de la Santé. Non. Pour lui, là, une structure, c'est quelque chose; une bonification de notre configuration du réseau, c'est quelque chose d'autre. Une chance qu'il n'est pas ministre de l'Éducation, en tout cas!

M. le Président, on invoque, avec la loi n° 116, la notion d'urgence. M. le Président, quelques mots sur le processus. Le projet de loi a été présenté le 4 décembre 1995. Mais, là, là, 1995. Puis on est rendu le 18; on est peut-être aujourd'hui le 19 juin, puis ça devient urgent de l'adopter. Vous allez comprendre, M. le Président, que nous, de ce côté de la Chambre, on n'a pas tout à fait compris la logique de l'esprit de l'autre bord, là, qui présente un projet de loi en décembre 1995, qui invoque aujourd'hui un motif d'urgence de l'adopter quand il a passé, ce projet de loi, M. le Président, en commission parlementaire, un grand total de 32 heures de temps dont 17 heures étaient à l'écoute des gens.

(3 h 30)

Des voix: Bravo!

M. Copeman: Si le ministre délégué aux Relations avec les citoyens veut partir des applaudissements à chaque fois que je prends une pause, ça va juste m'obliger à parler plus fort pour être entendu en dehors du bruit.

Alors, 15 heures sur l'étude détaillée, semble-t-il, c'est suffisant pour le ministre de la Santé, on a fait assez de travail là-dedans. On a présenté, oui, nous, de ce côté de la Chambre, un certain nombre de motions, mais on était rendus à l'article 1, puis on faisait un travail assez constructif, je dirais. Là, simplement, le ministre de la Santé a dit tantôt: Si on avait passé l'article 1, on aurait pu travailler d'une façon constructive. Mais, nous, on a proposé quatre sous-amendements pour tenter de convaincre le ministre de la Santé, sur le fond des choses, que son amendement, quant à lui, n'était, dans un premier temps, pas bon, dans un deuxième temps, pas nécessaire et, dans un troisième temps, était abusif. Ça fait qu'on a proposé quatre sous-amendements et, encore une fois, la définition du ministre de la Santé... Parce qu'il dit: Si on avait pu travailler d'une façon constructive à l'étude détaillée... Mais non. On était allés à l'étude détaillée et, lui, sa façon constructive de travailler, c'était de rejeter toutes les motions de l'opposition. Alors, encore une fois, une notion très, très généreuse de ce que c'est que travailler de façon constructive.

M. le Président, drôle de circonstance pour le ministre de la Santé, il obtient la palme d'or des ministres qui sont obligés d'adopter leurs projets de loi par bâillon.

Une voix: Oui.

M. Copeman: Applaudissez-vous, maintenant, c'est le temps. Bon! Merci. Alors, il est le récipiendaire de la médaille d'or du gouvernement du Parti québécois pour imposer ses projets de loi par bâillon. Pas capable, ce ministre de la Santé, d'obtenir des consensus sociaux, pas capable. Pas capable d'obtenir un consensus dans le milieu et surtout pas capable, évidemment, de s'entendre avec l'opposition, puis c'est clair que le ministre... Il y en a d'autres, ministres, qui sont capables, mais pas lui. Ça doit être son entêtement. Il y a peut-être d'autres facteurs. C'est peut-être le fait que le député de Notre-Dame-de-Grâce est impliqué dans le dossier. En tout cas, on peut spéculer longtemps sur ce pourquoi ce ministre n'est pas capable, mais il n'est pas capable de s'entendre avec son milieu puis il n'est pas capable de s'entendre avec les autres parlementaires en Chambre, il faut qu'il fasse adopter ses lois par bâillon.

M. le Président, des six lois qui sont adoptées par bâillon, il y en a quatre qui ont une incidence financière. Ça, je peux au moins comprendre un peu la logique dans tout ça, le gouvernement a besoin de sous. Ils vont aller chercher les sous dans les poches des contribuables québécois et québécoises, puis, pour le faire, il faut le faire par bâillon. Mais ils en ont passé une petite vite, lui et la ministre de l'Éducation, deux petites vites, le projet de loi n° 11 puis le projet de loi n° 116: aucune incidence financière dans ces deux projets de loi, mais il faut les adopter par bâillon. Alors, on fait un bon «package», là, un bon «package» des mesures de taxes déguisées qu'il faut adopter par bâillon, puis on adopte en même temps deux petits projets de loi, mais sans incidence financière, parce qu'il n'est pas capable de les faire adopter de façon normale, M. le Président, en respectant nos règles démocratiques et fondamentales ici à l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne l'article 1, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de personnes handicapées, j'ai tenté de convaincre le ministre que, dans son projet de loi initial, ça n'avait pas de bon sens et là il a accepté que ça n'avait pas de bon sens. Il y a une situation particulière à Montréal avec trois centres de réadaptation pour personnes ayant une déficience physique. Il a reconnu qu'on ne peut pas nécessairement procéder à du mur-à-mur sur le territoire de Montréal. Alors, il amène une solution, lui, mais il amène une solution qui essentiellement lui donne les pouvoirs de statuer autrement sur recommandation de la régie régionale, et mon collègue le député de Robert-Baldwin, je pense, a très bien tenté de démontrer que, pour les Montréalais, faire confiance à ce ministre de la Santé et à sa régie régionale, et à son haut-parleur la régie régionale en matière de santé, c'est un peu difficile pour nous après la fermeture de sept hôpitaux dans la région de Montréal contre toute volonté du milieu, contre des pétitions à une centaine de milliers de noms contre certaines fermetures. Le ministre de la Santé s'est entêté, et c'est pour ça, d'ailleurs, que, comme Montréalais, je ne peux pas, malheureusement, faire confiance à ce ministre de la Santé et à sa régie régionale de statuer autrement pour les trois centres de réadaptation publics.

On avait proposé, nous, certaines modifications qui permettaient une autonomie décisionnelle avec les établissements, de ne pas permettre au ministre d'imposer des solutions, parce qu'on n'est pas nécessairement contre le regroupement des conseils d'administration quand les établissements le veulent, mais ces amendements à l'article 1 indiquent très clairement que lui va être capable d'imposer une solution, dit-il – ses solutions sont plus des problèmes, souvent, que des solutions – mais, lui, il va être capable d'imposer un problème à Montréal sans le consentement des établissements concernés. Et c'est ça qu'on a tenté de faire avec nos quatre sous-amendements, c'est de protéger l'intégrité décisionnelle des trois centres de réadaptation sur l'île de Montréal. Le ministre l'a toujours refusé du revers de la main.

Alors, quand il dit pour le réseau de CLSC-CHSLD «reconfiguration», il ne veut pas procéder contre la volonté des établissements, mais il devrait être conséquent dans ses paroles au lieu de dire des demi-vérités, être conséquent avec le réseau de la déficience physique aussi et prendre un engagement de ne pas procéder sans le consentement des établissements impliqués, ce qu'il a toujours refusé de faire en commission parlementaire et ce qu'il s'apprête à refuser de faire ce soir.

Il y a également le volet important de considération linguistique. Dans cette reconfiguration, M. le Président, quant à nous, on ne peut pas fusionner des conseils d'administration des établissements avec des missions différentes qui desservent des clientèles largement différentes sur le plan linguistique. Ça ne marche pas, et même ce gouvernement, à un moment donné, avait compris que ça ne marchait pas, parce qu'il a permis l'établissement de deux centres de protection enfants-jeunesse sur l'île de Montréal, un pour la clientèle largement anglophone, l'autre pour la clientèle largement francophone. Alors, normalement, la même logique devrait s'appliquer dans les centres de réadaptation pour personnes ayant une déficience physique, sauf pour ce ministre, parce que, peut-être, c'était une suggestion qui venait de l'opposition et que tout ce qui vient de notre côté de la Chambre, même si le réseau croit qu'on a des idées qui ont du bon sens, lui, il n'en prend pas.

Oui, j'espère que vous êtes fiers, de l'autre bord, j'espère que les députés sont fiers, de l'autre bord de ça. Ils méritent juste ça, M. le Président.

Le ministre...

M. Gautrin: M. le Président, sur une question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Verdun.

M. Gautrin: Pourriez-vous faire appliquer l'article 32 qui demande que chaque député soit assis à sa banquette, s'il vous plaît?

Une voix: Vous n'êtes pas placé sous la caméra, M. Boulerice.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, s'il vous plaît.

Une voix: M. le Président, pourriez-vous...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Surtout à cette heure-là.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous demanderais de bien vouloir conclure très rapidement.

Une voix: Il vous reste 45 minutes.

M. Copeman: M. le Président, je termine en indiquant que le réseau des centres de réadaptation pour personnes ayant une déficience physique est inquiet, même avec l'amendement du ministre. Je comprends que les ministériels trouvent ça drôle, mais, je regrette, le réseau ne trouve pas ça drôle, la clientèle des personnes handicapées ne trouve pas ça drôle et, à un moment donné, on demande qui rit de qui en cette Chambre.

(3 h 40)

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez droit à une réplique de 10 minutes.

Alors, puisque vous n'utilisez point votre droit de réplique, est-ce que le projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux, est adopté?

Alors, qu'on appelle les députés, s'il vous plaît.

(3 h 41 – 3 h 46)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, à l'ordre!


Mise aux voix

L'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 116, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Fournier (Châteauguay), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, que les députés qui s'abstiennent veuillent bien se lever. Il n'y en a pas. Est-ce que vous avez enregistré le vote du député de Berthier?

M. Bélanger: Consentement de cette Chambre, M. le Président, pour qu'on puisse ajouter le vote du député de Berthier.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que le consentement est donné? Le consentement est donné.

Alors, M. le secrétaire général, est-ce que vous pourriez nous donner, s'il vous plaît, le résultat du vote?

Le Secrétaire: Pour:46

Contre:19

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, le projet de loi n° 116 est donc adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je vous demanderais que cette Assemblée procède à la prise en considération du rapport de la commission permanente des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.


Projet de loi n° 33


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements déposés

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, projet de loi n° 33. Prise en considération d'un rapport de commission. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre de la Santé et des Services sociaux et M. le député de Rivière-du-Loup.

(3 h 50)

Tous les amendements du ministre sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 3, 4, 5, 8, 10, 11, 12, 13, 14, 15, 16, 17, 17.1, 17.2, 17.3, 17.4; l'intitulé de la section I du chapitre III et celui de la sous-section 1; les articles 18, 18.1 à 18.4, 19 à 19.6, 20, 21, 22, 23, 24; l'intitulé de la sous-section 2 de la section II du chapitre III; les articles 25, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 32, 33, 35, 36, 37, 38, 39, 40, 41, 42, 43, 44, 45, 46, 47, 48, 49, 50, 50.1, 50.2, 51, 57, 58, 62, 64, 69, 70, 74, 76, 77, 79, 81, 82, 84, 84.1, 87, 89, 92, 93, 97, 99.1, 104, 105, 106, 107, 108, 109, 114, 115, 116, 117 et 119.

Enfin, sont déclarés recevables tous les amendements transmis par M. le député de Rivière-du-Loup aux articles 5 et 109: 40.3 et 40.9.

Je vous rappelle que la durée de ce débat sur la prise en considération de ce rapport a été fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes.

Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur les amendements? M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: Merci, M. le Président. Ce rapport de commission qui a étudié le projet de loi n° 33 sur l'assurance-médicaments est l'aboutissement de plus de deux années de travail, M. le Président. On se rappellera que c'est en 1993 que la situation du financement du médicament et de l'accessibilité des médicaments à plusieurs personnes au Québec a vraiment posé un très grand problème. Tout ça a commencé parce que les médicaments, contrairement à l'ensemble des services de santé qui sont couverts par notre programme d'assurance-santé, qui l'ont toujours été de façon universelle et générale, c'est-à-dire qu'on a toujours assuré, pour l'ensemble de la population, une couverture pour les mêmes services... Dans le domaine du médicament, pour différentes raisons qu'il serait trop long de rappeler ici ce soir, pour les médicaments on a procédé d'une façon différente, c'est-à-dire qu'on a couvert dans le régime d'assurance-santé du Québec des médicaments en fonction de l'âge des gens, pour les personnes âgées ou de plus de 65 ans, et des médicaments, un peu plus tard, pour les gens souffrant de certaines maladies. C'est alors qu'on a adopté l'assurance-santé, au début des années soixante-dix. C'est en 1975-76 qu'on a commencé à offrir des médicaments à certains groupes de la population et, en 1981, à d'autres groupes pour certaines maladies. Et c'est une situation qui est devenue, chaque année, de plus en plus difficile à gérer, jusqu'en 1993 où, là, c'est devenu impossible de continuer. Le gouvernement d'alors s'est trouvé dans l'impossibilité de... et a dû retirer la couverture de certains médicaments, ce qui a provoqué un tollé important et qui a amené, là, en cadence, une série d'actions qui ont été posées.

D'abord, le précédent gouvernement avait lui-même demandé à un comité, qui s'est appelé le comité Demers, d'analyser cette situation, de faire des recommandations. La principale recommandation qu'a faite le comité Demers, ça a été de regarder sérieusement la faisabilité d'une couverture universelle et générale des médicaments pour l'ensemble des gens du Québec, comme on le fait pour l'ensemble des services de santé et des services sociaux, permettant ainsi de mutualiser, de partager collectivement le coût des médicaments, de sorte qu'on puisse vraiment les rendre accessibles à des gens qui, à cause d'un problème de santé particulier ou à cause de leur âge, doivent prendre des médicaments de façon régulière et parfois des médicaments coûteux.

Au lendemain des dernières élections, avec le changement de gouvernement, on a donné suite immédiatement à la recommandation de ce comité et un groupe de travail du ministère, de professionnels, a travaillé pendant toute une année – là, on est à la période de 1994 à 1995 – pour regarder tous les scénarios possibles, comment on pourrait vraiment, en termes de faisabilité, avoir un régime d'assurance-médicaments à partir d'un régime qui serait entièrement public, d'un régime entièrement privé ou d'un régime... différentes formules de régimes mixtes.

À la fin de 1995, pour pousser plus loin cette analyse, nous avons décidé de demander à M. Castonguay de présider un groupe de travail technique et de faire un pas de plus, de partir des différents scénarios qui avaient été développés par les professionnels du ministère et d'aller voir les partenaires éventuels avec qui il faudrait travailler de toute façon, principalement les assureurs, évidemment, et l'industrie du médicament, pour voir, parmi les différents scénarios, ce qu'il serait possible de faire, et ça, ça a permis, de septembre 1995 jusqu'à mars 1996, cette année, de dégager de façon beaucoup plus pointue deux ou trois scénarios possibles.

Et on se rappellera que, à partir du rapport du comité Castonguay qui avait proposé soit un régime entièrement privé ou un régime mixte qui serait partagé par les assureurs privés et la Régie de l'assurance-maladie du Québec qui couvre déjà les personnes âgées et les prestataires de la sécurité du revenu, le gouvernement a décidé, dans le projet de loi tel qu'il a été fait au début, de d'abord proposer, après plusieurs discussions et consultations avec les assureurs privés pendant huit ou neuf mois, un régime où les assureurs pourraient prendre l'ensemble de la population, sauf les clientèles qui sont déjà celles de la Régie de l'assurance-maladie du Québec. On a vu qu'en commission parlementaire les assureurs s'étaient ravisés. Après les derniers calculs qu'ils avaient faits, ils nous ont dit qu'ils n'étaient pas capables d'offrir un tel régime à l'intérieur des paramètres qu'avait visés le gouvernement comme objectif, et ça, ça a toujours été un objectif stable. On s'est dit: Il faudra... Et je reviendrai en détail, lors de la présentation du projet de loi, sur les paramètres du régime proposé.

On a voulu les maintenir et, comme, pour les assureurs, ça s'avérait, en dernière considération, impossible, alors on a repris un des scénarios alternatifs qui avaient déjà été considérés et, je le souligne, ça n'a pas été une improvisation, ça n'a pas été un truc sorti du chapeau à la dernière minute, ça a été un des scénarios qu'on avait prévus auparavant. On a fait une ouverture aux assureurs privés, ils n'ont pas pu suivre de ce côté-là, alors on est revenus à l'autre scénario, et ça, ça a permis, après avoir entendu 43 groupes et plusieurs commentaires, de faire un bon nombre de changements, et la liste des amendements que vous avez lue était assez longue, M. le Président, mais il y a beaucoup de ces amendements-là qui suppriment des articles, parce que, après avoir entendu tout le monde en commission parlementaire, il y a beaucoup de changements qu'on a pu faire, qui simplifient énormément la gestion du programme et qui nous mettent là vraiment un programme que je pense qu'on peut qualifier d'équitable et qui va permettre de régler un problème qui était devenu non gérable avec la façon dont on abordait le médicament précédemment. Alors, nous reviendrons pour discuter plus en détail de ce projet de loi.

(4 heures)

Je dois souligner en terminant, aussi, que, après avoir entendu les 43 groupes, on a continué à travailler en commission pendant quelques jours, deux journées complètes, peut-être un peu plus, et que, dans ce cas-ci, on n'a même pas pu se rendre à l'article 1. Tout ce que l'opposition a réussi à faire, c'est de demander de réentendre encore une fois tous les groupes qu'on avait entendus. On a accepté d'en réentendre deux qui étaient présents lors des travaux de la commission, mais ça n'a même pas été possible de se rendre à ce projet-là, et je le regrette beaucoup, parce que, ça aussi, ça aurait peut-être permis d'apporter encore des améliorations au projet de loi. Et là je ne comprends vraiment pas que, parce qu'on fait référence à des incidences budgétaires, on refuse de travailler sur un projet de loi qui est essentiel pour la population, qui donne à la population un régime que beaucoup de monde attend, alors qu'il y a beaucoup de gens qui sont en difficulté présentement. Ils ne peuvent pas payer le coût des médicaments qui leur sont offerts, et je reviendrai là-dessus pour expliquer comment on va changer la situation. Malheureusement, on doit le faire sans avoir pu bénéficier de la collaboration de l'opposition, M. le Président. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, je cède maintenant la parole au député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Nous venons de prendre connaissance des règlements du projet de loi impôt-médicaments. Nous les avons reçus aux environs de minuit; 96 amendements sur 121 articles, M. le Président, quand on disait qu'il y avait beaucoup d'improvisation dans un dossier comme celui-là, je pense qu'on a encore une autre preuve vivante, ou presque, en tout cas, chaude encore, que ce projet de loi n'est finalement pas autre chose que de récupérer des impôts. D'ailleurs, je suis surpris que le ministre n'ait pas changé le titre du projet de loi: au lieu d'avoir le programme d'assurance-médicaments universel, bien je pense que le titre convenable aurait dû être le programme d'impôt-médicaments universel, et je pense qu'on aurait parlé, à ce moment-là, des vraies affaires.

L'objectif d'un programme d'assurance-médicaments devrait être d'aider les personnes à avoir une plus grande accessibilité aux médicaments. Et, à partir de cet énoncé, je pense qu'on est capable de rallier beaucoup de gens, sûrement l'ensemble des Québécoises et des Québécois. Sauf qu'en voulant assurer 1 200 000 personnes de plus on a aussi fixé un objectif de récupération de 196 000 000 $, et c'est ce sur quoi nous ne sommes pas d'accord, M. le Président. Il fallait déjà atteindre le premier objectif, qui était d'assurer 1 200 000 Québécoises et Québécois, avec une masse qui totalise, là, près de 1 922 000 000 $, je crois, et on a ajouté à cela une récupération d'un montant de 200 000 000 $. Tout ce qu'on a fait, c'est qu'on a trouvé qui va payer, M. le Président. Qui, d'après vous, va payer? Eh bien, la réponse, c'est: Qui consomme les médicaments? Bien, ce sont surtout les personnes aînées qui consomment, à raison, en moyenne, de 800 $ par année.

En même temps qu'on demande aux aînés de contribuer davantage, on change le discours de l'autre côté de cette Chambre. On commence à nous dire maintenant que les aînés sont riches, qu'ils sont capables de payer. On nous dit aussi que les pauvres ont les moyens. Et ça fait changement de ce que nous avons entendu en campagne référendaire ou encore en campagne électorale, M. le Président. Cet impôt-médicaments, qui taxe particulièrement les personnes aînées, s'ajoute à d'autres décisions de ce gouvernement d'attaquer le portefeuille des personnes aînées, par exemple l'abolition des crédits d'impôt pour personnes seules, pour ceux qui ont des revenus de retraite, les 65 ans et plus, etc.

M. le Président, je voudrais rappeler que notre formation, le Parti libéral du Québec, a toujours été associée aux grands développements sociaux de notre histoire, que ce soit dans le domaine de l'éducation, que ce soit dans le domaine de la santé. C'est notre formation qui a créé, le ministre le confirmait tantôt, le fameux rapport... ou le comité du Dr Demers, et, par la suite, nous sommes arrivés à des conclusions, par différents groupes de travail, là, que c'était nécessaire d'avoir un régime d'assurance-médicaments pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois.

Le hic dans ça, M. le Président, c'est que ce n'est pas un régime d'assurance-médicaments, c'est un programme de récupération des impôts, de récupération des taxes. Et, quand on voit la rapidité avec laquelle on veut passer ce projet de loi, un autre bâillon, eh bien, je pense que ça confirme vraiment que c'est le seul objectif qui est en arrière de ce projet de loi.

Le fait de récupérer des montants d'argent aussi importants – on parle de 200 000 000 $ dès cette année et possiblement, pour l'an prochain, 300 000 000 $, 350 000 000 $ – eh bien, entraîne des coûts extrêmement élevés pour la population en général. Le ministre nous dit: Bien, dans certains cas, il y en a qui ne paieront pas la prime. Quand on fait le total de ce que les gens vont contribuer, la prime, plus la franchise, plus la coassurance, dans le cas des régimes collectifs, les taxes, eh bien, le montant devient trop élevé avec l'incidence, M. le Président, de se retrouver avec ce que les experts ont appelé une «infidélité au traitement», c'est-à-dire que les gens ne prendront pas leur médication, leur santé peut être détériorée et ils vont obligatoirement revenir dans le système soit par l'urgence soit par une hospitalisation soit par des visites en polyclinique ou dans les CLSC.

M. le Président, tout au long des premières audiences, les gens ont clairement dit au ministre que son projet n'était pas prêt. On en a une autre preuve ce soir avec les 100 pages d'amendements; je pense que c'est 96 pages. De nouveau, si on attend à vendredi, c'est la date limite pour siéger, je suis certain qu'il y a un autre 25 pages qui va s'ajouter. Ce n'est pas prêt, M. le Président, il va y avoir des difficultés sérieuses d'application. Le ministre aura l'obligation de vivre avec son projet de loi sous le bâillon.

Je voudrais simplement faire référence à la manifestation qu'il y a eu, hier, les personnes aînées qui commencent à descendre dans la rue. Pourquoi? Parce qu'elles ne peuvent pas venir en commission parlementaire. La première fois qu'elles sont venues, elles ont passé un message au ministre; le ministre ne les a pas écoutées. Les gens vont dans la rue, comme l'année passée, M. le Président, lorsqu'il y a eu les fermetures d'hôpitaux. Elles se sont rendues au bureau du premier ministre qui a même refusé de les recevoir. Là, on est avec les personnes aînées, ça, c'est les personnes les plus sages de notre société. C'est grâce à elles si nous sommes ici et, M. le Président, on ne veut même pas les écouter.

Ce qu'elles avaient à dire dans leur communiqué, même avec les derniers amendements – pas ceux qui sont là, c'était le communiqué de presse: Le projet semble inacceptable aux représentants des aînés et la coalition revendique le retrait du projet de loi, une véritable consultation publique et que le ministère refasse ses devoirs. Et, parmi les amendements souhaités: une meilleure redistribution des contributions entre riches, pauvres et revenus modestes.

Bien, M. le Président, à peu près tous les groupes ont signifié au ministre que son projet n'était pas prêt, qu'il fallait prendre le temps... pas le reporter aux calendes grecques, peut-être à l'automne, simplement prendre le temps, prendre la période d'été pour le travailler comme il faut, pour répondre à plusieurs questions. Je pense que le ministre ne retient encore une fois aucune des suggestions qui lui ont été faites.

Lorsque nous avons insisté pour recevoir de nouveau certains groupes – on ne voulait pas recommencer l'audience publique de 42 groupes, on voulait en voir un minimum, ceux qui avaient demandé à être vus d'abord – là aussi il y a eu une fin de non-recevoir de la part du ministre.

Il y a beaucoup, beaucoup de problèmes qui ne sont pas solutionnés dans son programme. On ne connaît pas la liste des médicaments. On nous avait dit qu'on devait l'avoir avec les amendements. M. le Président, il y a des problèmes sérieux avec la liste de médicaments. Il y a des patients qui sont venus en commission parlementaire nous dire: Écoutez, nous autres, il y a des médicaments qui ne sont pas sur cette fameuse liste et, parce qu'ils ne sont pas sur cette fameuse liste, on ne peut pas en bénéficier; par contre, il y a des régimes privés qui vont payer ces mêmes médicaments. M. le Président, tout l'arrimage entre le secteur privé et le secteur public, eh bien, il n'y a rien qui est fait actuellement.

Le critère coût: Est-ce que, parce qu'un médicament est trop coûteux, on va le refuser aux Québécoises et aux Québécois? C'est ce qui arrive actuellement et c'est ce qui risque de se prolonger, M. le Président, de la façon dont le projet est fait actuellement.

Il y a un problème sérieux d'associé avec les taxes. Pourquoi, lorsque vous avez un régime collectif, vous devriez payer 9 % de taxes, alors que, si vous avez un régime individuel, si vous êtes assuré avec la Régie de l'assurance-maladie du Québec, vous n'avez pas de taxes à payer? J'ai l'impression que le ministre des Finances va sûrement corriger ce problème à court terme.

(4 h 10)

Alors, finalement, tout ce qu'il y a d'universel dans le régime, actuellement, c'est cette récupération de taxes: taxe sur l'assurance-médicaments, taxe sur les médicaments. M. le Président, on considère que ce projet, qui nous est présenté devant nous, n'est pas un programme d'assurance-médicaments universel, mais vraiment un impôt déguisé. La preuve, on va être obligés d'utiliser notre rapport d'impôts pour bien inclure le paiement de la prime, 175 $. Le ministre, je ne sais pas pourquoi il s'entête à dire: Non, ce n'est pas de l'impôt. Quand vous payez votre prime à même votre rapport d'impôts, M. le Président, il y a un nom pour ça.

Alors, M. le Président, je pense qu'on a des difficultés sérieuses. Et, lorsque l'opposition, dans le cas de la loi n° 33, s'oppose, ce n'est pas seulement l'opposition qui s'oppose à ce projet de loi, c'est vraiment la collectivité québécoise qui a voulu être entendue de nouveau pour dire au ministre: Écoutez, vous êtes allé trop vite. Voulez-vous refaire vos devoirs? M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, est-ce que vous... Excusez-moi, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, vous avez droit à un temps de parole de cinq minutes. M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Je vous remercie, M. le Président. Je suis convaincu que le député de Saint-Jean aurait été inquiet de perdre la teneur des arguments que je voulais invoquer en faveur des amendements que je veux soumettre à l'Assemblée... Alors, M. le Président, les amendements sont de deux ordres essentiellement. D'abord, un amendement à l'article 5 parce que, je l'ai répété à plusieurs reprises, il me semble qu'il n'y a pas, en faveur de l'assurance-médicaments, si ce n'est que provenant du Conseil du trésor ou des impératifs budgétaires du gouvernement, une demande pour un tel régime universel largement répandue dans la population. Il y a, oui, des problèmes de personnes qui ont besoin de médicaments d'une façon intensive, mais j'ai l'impression, depuis le début, qu'on utilise un outil très, très gros pour régler un problème beaucoup plus restreint.

Et j'ai l'impression que les montants dont on parle, les chiffres qu'on m'a donnés... Dans le cas, par exemple, de la circulaire «malades sur pied», on parlait d'un montant de moins de 50 000 000 $, 35 000 000 $, 40 000 000 $, alors que là, avec ce régime d'assurance-médicaments universel, seulement en nouvel argent dans les poches des contribuables, on va chercher 200 000 000 $. On n'est pas dans le même ordre de grandeur, M. le Président. S'il y avait un problème avec les médicaments pour certaines catégories de personnes qui ont un besoin intensif de médicaments, qu'on avait dit: On va déplacer des ressources, c'est un nouveau 5 000 000 $, un nouveau 8 000 000 $, un nouveau 10 000 000 $, c'est très différent pour solutionner le problème qu'un régime universel qui devient un impôt ou une taxe déguisée pour aller chercher 200 000 000 $ ou 250 000 000 $ ou 300 000 000 $, selon les interprétations.

Or, si le gouvernement veut le mettre pour les personnes qui sont intéressées à un régime public d'assurance ou pour les personnes qui en font la demande, eh bien, personne ne pourrait être contre ça. Et, si la Régie de l'assurance-maladie du Québec est capable de l'offrir au meilleur coût possible, bien, sur une base volontaire, des centaines de milliers de Québécois et de Québécoises vont s'inscrire à ce régime.

Les autres amendements – et là, M. le Président, je pense qu'il est important que tous les parlementaires, des deux côtés de la Chambre, soient attentifs, à cause d'expériences qu'on a vécues dans le passé en adoptant des législations – ce sont des amendements pour éviter que ce fonds, ce fonds de l'assurance-médicaments qui est créé dans le projet de loi n° 33, ne devienne, comme le fonds de l'assurance automobile du Québec, un «pot» – on va parler français – un pot, un bassin dans lequel on va piger pour détourner les fonds puis faire d'autres choses avec.

On disait, M. le Président, il n'y a pas si longtemps, à peine 20 ans: L'assurance auto, ça va être extraordinaire. Puis, personne n'aurait pensé qu'un jour on allait détourner ces fonds-là. Bien, M. le Président, depuis ce temps-là, il y a un gouvernement qui l'a fait, puis ça a été dénoncé par l'opposition du temps. Mais, quand ils sont arrivés au pouvoir, ils sont allés devant les tribunaux pour défendre que c'était bien correct. Puis, aujourd'hui, ils ne se montrent pas prêts à appuyer un projet de loi pour mettre fin à ces pratiques-là.

Alors, je me dis, M. le Président, qu'il vaut mieux être prudent. Il vaut mieux que les parlementaires, aujourd'hui, dès aujourd'hui, jouent clairement leur rôle et disent que, entre autres quand on parle des frais d'administration, bien, on doit tenir compte du coût réel de ces frais. S'il y a des frais d'administration qui doivent être payés, que ça ne devienne pas une façon détournée d'aller chercher de l'argent qui aurait été payé pour une cause précise qui est l'assurance-médicaments.

L'autre amendement important, M. le Président, d'ajouter un article pour demander: «Les sommes perçues et versées au Fonds de l'assurance-médicaments ne peuvent être utilisées que pour les fins pour lesquelles elles ont été perçues. Elles ne peuvent être versées au fonds consolidé pour des raisons autres que celles prévues dans cette loi.»

Or, le refus de ces amendements-là, M. le Président, laisserait, à mon avis, planer un doute, laisserait à nouveau planer un doute sur les intentions réelles du gouvernement, sur sa volonté d'utiliser les fonds à bon escient. Ça nous laisserait un doute. On pourrait encore avoir l'impression que, comme dans le cas de l'assurance auto, on fait des fonds, on prend toutes sortes de moyens pour aller chercher de l'argent dans les poches des contribuables, puis, ensuite, on se sert, on y va à deux mains dans l'assiette au beurre, et puis on détourne les fonds, on s'en sert pour augmenter les dépenses ailleurs. Et c'est ce que je voulais éviter, M. le Président, dans l'assurance-médicaments. Sur le fond du programme, j'y reviendrai lors de l'adoption. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, M. le ministre, vous avez droit à une réplique de cinq minutes. Est-ce que vous l'utilisez? Non?

Alors, le débat étant terminé... Alors, à la suite d'une réunion avec les leaders des groupes parlementaires, nous avons organisé la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.


Mise aux voix des amendements du ministre

Je mets d'abord aux voix les amendements de M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix des amendements du député de Rivière-du-Loup

Alors, je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Rivière-du-Loup. Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Rejeté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Rejeté.


Mise aux voix des articles amendés

Alors, je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 33 amendés par les votes précédents. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 33 que la commission des affaires sociales n'a pas adoptés ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi. Ces articles, ainsi que les intitulés et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Je mets maintenant aux voix le rapport, tel qu'amendé, de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission des affaires sociales sur le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division.


Adoption

Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

La durée de ce débat a été fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique d'une durée maximale de 10 minutes a été prévue pour le ministre qui présente le projet de loi. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, le projet de loi sur l'assurance-médicaments a comme objectif essentiellement deux choses. D'abord, corriger l'iniquité d'une situation où on dépense collectivement, au Québec, par année, à peu près 2 200 000 000 $ à 2 300 000 000 $, si on prend tout ce qui est dépensé soit par les régimes d'assurance collectifs soit par l'assurance publique de la Régie de l'assurance-maladie du Québec, qui couvre les personnes âgées et les prestataires d'aide sociale, ou soit l'argent qui est dépensé directement de leur poche par les 1 100 000 personnes qui n'ont aucune couverture présentement. Ça, c'est sans compter qu'il y a près d'un autre 300 000 000 $ qui est dépensé en médicaments dans les établissements où les médicaments sont offerts gratuitement aux gens lorsqu'ils sont hospitalisés dans un centre hospitalier de courte durée ou dans un établissement de soins de longue durée.

(4 h 20)

Alors, là, cette situation, ça nous coûte globalement 2 500 000 000 $ de médicaments, et il y a des gens qui n'ont aucune couverture et d'autres personnes qui ont une couverture qui est très, très, très incomplète. D'une part, on a, par exemple, une personne qui est un prestataire de l'aide sociale présentement qui n'a rien à payer pour ses médicaments. Mais, à côté, la personne qui a un travail avec un petit revenu, qui va gagner peut-être 1 000 $, 2 000 $ de plus par année – au lieu d'avoir 6 000 $ comme le prestataire d'aide sociale, elle va avoir 7 000 $, 8 000 $, 9 000 $; il y a beaucoup de gens qui travaillent à des petits salaires comme ça – elle, elle n'a aucune, aucune, aucune protection. Et on sait que c'est des gens qui doivent très souvent consommer aussi des médicaments autant sinon parfois plus que des prestataires d'aide sociale.

Les personnes âgées de plus de 65 ans paient à peu près au maximum 100 $ par année pour leurs médicaments présentement, mais, parmi les personnes de 60 ans et plus, les personnes de 55 ans et plus, de plus en plus, il y a des groupes de gens qui sont des retraités aussi, qui sont un peu dans la même situation que les personnes de 65 ans, qui n'ont aucune protection et qui souvent doivent utiliser des médicaments autant sinon plus que des personnes de 65 ans et plus. Il y a donc des situations très, très, très inéquitables où on passe du 100 % à aucune couverture.

Pour les 4 500 000 personnes au Québec qui ont une protection dans des régimes collectifs, on voit toutes sortes de protections et certaines protections sont du type catastrophe, d'autres, c'est d'assez bonnes couvertures. Mais, en général, les régimes collectifs, présentement, comme toute assurance privée, exercent systématiquement une sélection de clientèle, et il y a des personnes à qui, à cause de leur âge ou de problèmes de santé qu'elles ont, on refusera une couverture d'assurance ou, à ce moment-là, les primes qui seront demandées seront vraiment exorbitantes et les gens ne pourront pas avoir d'assurance pour le médicament. Alors, pour 2 500 000 000 $, on pense que cette même somme d'argent là peut être utilisée, si on la gère autrement, pour donner une couverture égale à tout le monde pour les mêmes médicaments et avoir là une beaucoup plus grande équité. Ça, c'est le premier objectif, l'équité.

Deuxième objectif, celui du contrôle des coûts. Dans un système comme on a actuellement, avec plusieurs assureurs qui offrent plusieurs régimes d'assurance-médicaments, la Régie de l'assurance-maladie, qui couvre un autre groupe de personnes, des gens qui ne sont pas couverts du tout et qui doivent payer directement de leurs poches, il n'y a aucun moyen d'avoir un contrôle de l'évolution des coûts des médicaments. Si les prix augmentent, si la consommation augmente, le coût des régimes augmente, les assureurs refilent le coût nécessairement aux gens qui sont les assurés, et celui qui est en bout de ligne paie un peu plus d'année en année. Et on sait que, dans les régimes publics, pour lesquels on connaît mieux l'évolution des coûts... Au cours des 10 dernières années, dans les régimes publics, comme il n'y avait pas de mécanisme de contrôle pour l'ensemble de la population, c'est une augmentation de 15 % qu'on a eue. Même si ça a diminué dans les dernières années, c'est encore une augmentation d'à peu près 7 % par année. Donc, deuxième objectif, contrôle des coûts.

Ça, la seule façon de le faire – et, là-dessus, je dois corriger un peu le député de Rivière-du-Loup – et on le sait par expérience, c'est, à ce moment-là, de mutualiser les risques et de les payer collectivement. C'est d'ailleurs ce qui avait été proposé par le comité Demers. Je ne reviendrai pas là-dessus.

Après avoir entendu tout le monde en commission, les 43 groupes qui sont venus, voilà ce qui est proposé maintenant aux Québécois et qui correspond à certains des scénarios qu'on avait étudiés et qui ont été validés par la consultation en commission. On aura d'abord un régime général où tout le monde au Québec, soit ceux qui ont des plans collectifs présentement ou le plan individuel – le plan collectif avec des assureurs privés et le régime des primes individuelles avec l'assurance-maladie du Québec – va être assuré, indépendamment de son âge, de son sexe ou de sa condition de santé.

Deuxièmement, la liste de médicaments qui est celle qui évolue depuis 25 ans au Québec, qu'on connaît présentement, qui est celle qui a été recommandée au ministre par le Conseil consultatif de pharmacologie, que je viens d'approuver, qui vient d'être révisée encore une fois, comme elle l'est deux fois par année...

M. Copeman: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Copeman: Oui. Vous allez constater avec moi, même parmi les députés réveillés ou pas, l'absence de quorum.

Une voix: Vous avez raison.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous avez parfaitement raison, M. le député. Alors, que l'on appelle les députés. Alors, nous allons suspendre en attendant que nous formions le quorum.

(4 h 24 – 4 h 26)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous constatons maintenant que le quorum est de retour. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, si vous voulez bien poursuivre.

M. Rochon: M. le Président, le régime, donc, général fourni par les assureurs privés ou par la Régie de l'assurance-maladie du Québec, tout le monde partage quatre caractéristiques. Un, comme je le disais, il n'y a pas d'exclusion, tout le monde est assuré, peu importe son âge ou sa condition de santé. Deux, c'est la même liste de médicaments qui est disponible pour tout le monde et, sur la liste, il y a des médicaments pour que tout ce qui est requis pour l'état de santé des gens soit inclus dans la liste. Trois, tout le monde sera couvert avec un plafond maximum de 750 $. La somme maximale qu'on aura à payer, ce sera 750 $, et beaucoup de gens auront un plafond qui sera inférieur à ce niveau maximum. Et, finalement, la coassurance qui pourra être exigée ne pourra pas être plus que 25 %, c'est-à-dire qu'on ne pourra pas demander plus, au-delà de la franchise qui peut être demandée, que 25 % du coût de la facture du médicament.

Maintenant, dans le régime... Une fois que les régimes collectifs ont fait ces ajustements, ils continuent à évoluer tels qu'ils sont négociés entre les employeurs et les employés. Le régime, qui va couvrir 2 500 000 personnes maintenant au Québec, les prestataires de l'aide sociale, les personnes âgées et les 1 100 000 personnes qui n'ont aucune couverture, aura les paramètres suivants.

La prime qui sera exigée variera de zéro à 175 $ maximum. Il y a à peu près 50 % des gens qui seront dans les primes individuelles qui, compte tenu de leurs revenus, ne vont payer aucune prime. Il y a une bonne partie du 50 % additionnel qui va payer une prime partielle, qui va aller de 40 $ à 80 $, et progressivement par tranche de 1 000 $ de revenus au-dessus de 10 400 $ pour un individu et d'un montant supérieur, que je retracerai tout à l'heure, M. le Président, d'un montant de 21 900 $ pour une famille de deux adultes et de deux enfants et plus. À partir de ces montants-là, on paiera seulement 40 $ par tranche de 1 000 $ jusqu'à un maximum d'une prime. Donc, la majeure partie des gens ou ne paient pas de prime du tout ou paient une prime partielle qui est ajustée à leurs revenus. C'est la caractéristique: on paie, pour avoir droit à la protection du régime, en fonction de ses revenus et non pas en raison de son âge, de son groupe social ou quoi que ce soit.

Une fois cette prime payée, les coûts du régime dépendent de la consommation. Quand les gens iront acheter des médicaments, il y aura une franchise qui va être au maximum, le premier montant qu'on paie au complet, de 25 $ par tranche de trois mois, pour faire un total de 100 $ par année. Une fois qu'on aura payé ce premier 25 $, pour toute autre consommation de médicaments, on n'en paiera que le quart; seulement 25 % devra être payé. Et là le plafond qui va être atteint va être différent selon les revenus des gens, encore. Les gens qui sont des prestataires de l'aide sociale de même que toutes les personnes âgées qui ont le supplément maximum du revenu minimum garanti vont avoir un plafond maximum de 50 $ par bloc de trois mois, pour un plafond maximum de 200 $ par année. Ça, c'est 10 % des personnes âgées, 9 % à 10 % des personnes âgées, et l'ensemble des personnes qui sont des prestataires de la sécurité du revenu. Tout ça ensemble, ça fait à peu près 800 000 personnes qui ne paieront aucune prime et qui vont avoir un plafond de 50 $ par trois mois.

Les personnes âgées. 40 % des personnes âgées reçoivent un supplément de revenu de pension de vieillesse, de revenu minimum garanti partiel. Alors, ces gens-là vont payer une prime partielle aussi qui va varier entre 40 $ et 175 $. Mais la plupart auront une prime de l'ordre de 40 $ à 80 $ compte tenu de leurs revenus, et le plafond qu'ils paieront par année sera un maximum de 500 $. Il n'y a personne de ces gens-là qui va payer plus que 500 $.

(4 h 30)

L'ensemble des personnes qui ont des revenus supérieurs, plus élevés, paieront un maximum, dans toute l'année, de 750 $. Peu importe le revenu des gens, au-dessus d'un certain niveau, on ne pourra pas payer plus que 750 $ par année pour le médicament, et ça, sur une base trimestrielle. Donc, sur un bloc de trois mois, les gens ne paieront pas plus que 187 $, ceux qui ont le plafond maximum.

Pour les nouveaux, tous les gens qui n'ont aucune assurance, ce 1 100 000 personnes, il faut se rappeler qu'il y a 300 000 enfants là-dedans qui, comme tous les enfants du Québec, vont être couverts, eux, sans aucuns frais; il y a 500 000 personnes, sur les 800 000 adultes qui sont dans ce groupe de 1 100 000 personnes, qui, à cause de leur revenu, ne vont payer aucune prime; et les 300 000 qui restent, une bonne proportion d'entre eux vont payer une prime partielle. Alors, si on tient compte de ça, l'ensemble des enfants de moins de 18 ans plus les enfants qui ont de 18 ans à 25 ans, mais qui sont aux études et à charge de leur famille et les personnes handicapées, les enfants handicapés qui demeurent à charge de leur famille après 18 ans seront aussi couverts sans aucuns frais.

Alors, je pense que, compte tenu de tous les commentaires qu'on a eus, on a là le régime qui correspond à ce que, entre autres, les représentants des grandes centrales nous ont dit, un régime qui est, dans l'ensemble, assez généreux quant à ses paramètres, et on a pu ajuster à la baisse le plafond pour les plus petits revenus, comme on nous le demandait.

Un autre aspect que je veux souligner rapidement, c'est que, ayant ce régime et ces paramètres qui sont proposés aux gens pour payer les médicaments et dont tout le monde va bénéficier, on a un système qui va être contrôlé et dont l'évolution des coûts – c'était le deuxième objectif que j'ai annoncé tout à l'heure – va être contrôlée, parce qu'on va avoir une politique du médicament, c'est prévu dans la loi. Il y a un groupe de concertation qui va réunir des représentants de la population pour aviser le ministre quant à l'évolution de la politique du médicament pour s'assurer qu'on réalise nos objectifs et qu'on améliore la situation des gens. Le Conseil consultatif de pharmacologie aura un rôle élargi où, en plus d'évaluer la pertinence et la valeur thérapeutique des médicaments, il pourra aviser le ministre quant au prix juste et raisonnable, de sorte qu'on sélectionne parmi tous les médicaments disponibles ceux qui ont la valeur thérapeutique et offrent la protection aux gens et les soins aux gens au meilleur prix pour leur argent.

Et, finalement, on institue, en collaboration avec toutes les corporations professionnelles impliquées, surtout les médecins et les pharmaciens, un système de révision de l'utilisation du médicament qui protège complètement la confidentialité, mais permet de voir l'évolution de l'utilisation. Et on sait par expérience que, dans d'autres pays ou provinces où on a institué ce genre de mécanisme, on peut en arriver à une diminution de 10 % à 15 % de l'utilisation des médicaments, pas en privant les gens de médicaments dont ils ont besoin, mais en ayant une consommation plus adéquate du médicament et en évitant qu'une consommation inadéquate coûte plus cher et crée aussi des problèmes de santé. Et ça aussi, ça a été très documenté.

Finalement, M. le Président, je voudrais rappeler que, en plus de ce contrôle des coûts du médicament, de cette équité qui va être atteinte pour tout le monde, on va avoir une gestion très transparente de ce régime-là. Le fonds du médicament va financer complètement le régime. Donc, les gens qui paient une prime vont savoir où ça va, vont savoir à qui ça sert. Et, comme il y a beaucoup de personnes âgées qui ont des petits revenus, elles vont avoir une protection sans prime ou avec une prime partielle, diminuée. Ceux qui ont un peu plus de revenus, les gens qui ont des revenus plus élevés, en plus de leurs primes, avec leurs taxes, vont permettre au gouvernement d'assurer, sur l'ensemble des 2 500 000 000 $ qu'on paie, le tiers du coût du régime par les taxes des gens qui ont des revenus plus élevés.

Bien, les gens vont savoir, avec leurs primes mises dans un fonds, où ça va, cet argent-là, ils vont être assurés que ça ne va pas ailleurs pour payer d'autres dépenses et que, si le régime... Et c'est très possible qu'on gère ce régime-là avec certains profits. Ça va permettre pas de mettre l'argent ailleurs, mais de baisser la prime éventuellement et même d'améliorer les paramètres. Il y a autant de chances que ça nous arrive que d'être obligés de maintenir les paramètres au même niveau.

L'autre élément de transparence, c'est que, dans trois ans – c'est écrit dans la loi – le régime et cette loi seront révisés par une commission parlementaire, de sorte qu'on s'assure qu'on se donne un objectif de résultat, M. le Président, pour livrer la commande à laquelle on s'engage, en donnant la chance à la population, en toute transparence, de réviser ce régime-là pour l'améliorer, dans trois ans, dans toute la mesure du possible. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux. Alors, M. le député de Robert-Baldwin. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Oui, je vous remercie, M. le Président. On a donné, durant cette session, beaucoup d'exemples de double langage qui étaient manifestes du côté du parti ministériel. Tantôt, en écoutant le ministre, le ministre laissait entendre que, suite aux amendements proposés, le front commun CSN-FTQ-CEQ était d'accord avec lui. J'ai le communiqué, M. le Président, et je pense qu'on a parlé d'une demi-vérité, à ce moment-ci. Si le front commun reconnaît comme étant un pas en avant le fait que ce soit la Régie qui va assurer l'ensemble des 1 200 000 Québécoises et Québécois, il ajoutait, et je pense qu'il faut le dire pour la compréhension de tous les députés dans cette Assemblée: «Cependant, plusieurs problèmes soulevés par les centrales lors de la commission parlementaire ne sont toujours pas résolus et plusieurs questions fondamentales demeurent sans réponse.»

Là, ils partent. Alors, les trois quarts du communiqué de presse font référence à des problèmes qui ne sont pas réglés dans le dossier de l'impôt-médicaments. Le premier qu'ils mentionnent: «Les centrales s'inquiètent du fait que la nouvelle proposition du ministre reste muette sur la mutualisation des risques de même que sur l'évolution des mauvais risques.» M. le Président, ce n'est pas le député de Robert-Baldwin, là; c'est les centrales CEQ, CSN, FTQ qui représentent plus de 1 000 000 de Québécoises et de Québécois. «La liste des médicaments qui seront remboursés demeure toujours inconnue.» À ce que je sache, dans les 100 pages qu'on vient de nous remettre, je n'ai pas vu de liste, M. le Président. «De l'avis des centrales, les primes exigées de la part des personnes âgées et des personnes à faibles revenus demeurent encore trop élevées.» Eh bien, c'est un des problèmes majeurs du projet d'impôt-médicaments. Parce qu'on veut récupérer des impôts, 196 000 000 $, on est obligé de taxer davantage le contribuable et, en taxant davantage, on pénalise les personnes aînées et on pénalise les personnes à faibles revenus.

Par ailleurs, on se demande toujours sur quelle base a été déterminée la prime pour l'assurance. Là-dessus, M. le Président, on est perplexe, nous, quand on nous dit que la Régie de l'assurance-maladie va être capable d'assurer les 1 200 000 personnes sans que ça coûte plus cher. On sait qu'il y aura des frais de gestion, qui sont associés à n'importe quelle émission d'une police d'assurance, des frais de réclamation. On comprend également que, c'est vrai, il n'y aura pas de notion de profit pour la Régie de l'assurance-maladie, mais on sait que l'appareil bureaucratique coûte toujours plus cher. On sait également que, dans le cas de la coassurance, le gouvernement devra payer immédiatement les médicaments alors que les contribuables, eux, paieront leurs primes seulement sur le rapport d'impôts. Donc, il y a un délai, il y aura des frais d'intérêt.

Après les consultations que nous avons poursuivies avec les assureurs privés, on nous confirme que le prix qui est identifié comme étant le coût de la prime, 175 $, n'est vraiment que le coût du risque et qu'il y aurait des frais à rajouter là-dessus. Le ministre nous a dit aussi qu'il avait l'intention de consulter un expert. Il l'a fait après la présentation des assureurs privés. On attend toujours le rapport des experts en question, M. le Président.

Les trois organisations syndicales prévoient certaines difficultés quant à l'arrimage du nouveau régime public avec les régimes collectifs d'assurance. De même des problèmes importants se posent concernant les régimes d'assurance collectifs des retraités. Eh bien, on a eu plusieurs exemples en commission parlementaire. Il y a beaucoup d'employés, à cause des conditions économiques, qui ont un statut d'occasionnel, un statut précaire, qui peuvent passer d'un régime collectif avec un employeur à un régime public. Eh bien, comment tout ça va s'arrimer? Qui va payer quoi? Quelle portion de l'année? Beaucoup de questions sont en suspens.

Les centrales nous ont dit aussi qu'un problème majeur, c'est que, pour elles, s'ils veulent rouvrir les conventions collectives – il faut qu'elles rouvrent les conventions collectives – ça ne se fait pas aussi rapidement que le ministre le prétend. Il y a des enjeux extrêmement importants. Alors, là aussi, il n'y a pas de changement dans l'approche du ministre.

Autre considération importante, M. le Président, ce parti nous parle d'équité sociale. L'exemple qu'on a toujours donné au ministre, c'est la personne qui a des revenus de 15 000 $, qui a des revenus de 100 000 $, qui a des revenus de 1 000 000 $ par année, si elle consomme le même nombre de médicaments, la même sorte de médicaments, pour une même consommation, eh bien, elle va payer le même prix. Alors, on nous parle, on nous fait des gorges chaudes du fait qu'on présente le projet comme étant une équité sociale.

(4 h 40)

M. le Président, à notre avis, en tout cas, le ministre a vraiment bâclé le projet de loi. De plus, il s'est moqué de nouveau des institutions parlementaires. Je pense qu'on en a encore un exemple: il est 4 h 40. Alors, on passe en cachette, en douce un projet de loi aussi important. L'ensemble des gens qui sont intervenus en commission parlementaire ont suggéré d'avoir un débat de société. Alors, nous sommes, avec le ministre, en train de faire un débat de société, à 4 h 40 du matin. C'est un vrai débat de société, en cachette, et ça ne peut pas être plus en cachette, M. le Président. Un troisième bâillon en un an pour le ministre de la Santé.

M. le Président, je voudrais faire référence également, lorsqu'on discute de ce projet de loi, au fait que le ministre avait déjà fait sa publicité. Il avait pris pour acquis que le projet était déjà passé, et ça lui a valu une lettre de blâme du président, en lui demandant, en tout cas, de ne plus récidiver. Alors, j'espère qu'il a compris. Je ne sais pas s'il va mettre cette lettre dans son curriculum vitae. Ce sera à suivre, M. le Président.

Le leader du parti ministériel nous disait que nous avions déjà fait une cinquantaine d'heures en commission et qu'on n'avait pas adopté un seul article. Mais il a oublié de mentionner, le leader, que, sur les 50 et quelques heures que nous avons faites, il y a eu l'audition de 42 groupes. Quand on reçoit des groupes, on n'étudie pas article par article. À la fin de ces audiences publiques, le ministre a fait certains changements et, tout de suite, nous avons eu des lettres du réseau, du milieu, réclamant d'être entendu de nouveau sur les changements du ministre. On n'en a pas eu 42, M. le Président, mais quelques-unes.

C'était notre intention d'avoir une très courte consultation particulière et, chaque fois qu'on présentait une motion, bien, c'était toujours un non. On aurait voulu, nous, entendre M. Castonguay, l'auteur du rapport. Il me semble qu'on était en droit de le faire. On lui avait permis de s'asseoir avec le ministre, de répondre à toutes les questions, d'intervenir, toujours avec le consentement, jamais de difficultés. Pourquoi est-ce qu'on nous a refusé ce droit-là, à nous autres, de le questionner, puis d'avoir vraiment le sens de son rapport? Je pense que ça aurait été grandement apprécié.

Les personnes âgées sont celles qui sont visées dans le rapport; je pense que c'est maintenant clair et évident. Moi, je m'inquiéterais, si j'étais de l'autre côté de l'Assemblée, par rapport à ce qui se passe dans la population. J'imagine que chacun fait un peu de bureau de comté, un peu beaucoup même, et il me semble que le message doit être arrivé dans l'ensemble des comtés que les gens ne sont pas à l'aise avec ce dossier, que les gens se sentent visés, et on demande aux députés de faire une meilleure représentation. Alors, je ne pense pas que c'est fait de l'autre côté. De façon générale, M. le Président – et c'est un consensus presque mur à mur – on demande au ministre de reporter pour mieux le finaliser ce projet de loi. On ne demande pas de le reporter aux calendes grecques, je vous le rappelle; on demande seulement à l'automne pour qu'on puisse travailler sur un projet durant l'été.

M. le Président, il y a un article qui est très révélateur dans ce projet de loi, c'est l'article 118, si je me souviens bien. Le ministre avait tellement peur qu'à son projet de loi il manque des choses, parce qu'il a été fait à la dernière minute, eh bien, qu'il y a un article dans lequel, s'il a omis certaines décisions dans son projet de loi, il se donne un pouvoir pour ajouter au projet de loi par décret. Ça, c'est vraiment être rendu au summum de l'improvisation ou avoir peur de ne pas avoir fait ses devoirs comme il faut.

Alors, M. le Président, de nouveau, je termine en mentionnant que, malheureusement, le ministère de la Santé n'est plus ce qu'il était. Ce ministère ne s'inscrit plus en continuité avec la politique de santé et de bien-être qui a été la politique qui a régi tous les gouvernements depuis un certain nombre d'années. Ce ministère est devenu le ministère de l'improvisation, le ministère de la taxation, le ministère de l'imposition et, lorsqu'on pense aux patients, lorsqu'on pense à ceux qui sont venus en commission parlementaire, bien, le ministère du manque de compassion. M. le Président, je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Robert-Baldwin. Je cède maintenant la parole au député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. M. le Président, une brève intervention sur l'impact de ce projet de loi sur les membres les plus démunis de notre société. Je pense que ça vaut la peine de considérer chaque mesure qu'on adopte ici, à l'Assemblée nationale, et d'en évaluer l'impact sur les membres les plus démunis de notre société. Je pense, entre autres, M. le Président, aux prestataires de la sécurité du revenu qui, suite à l'adoption du projet de loi n° 33, seront assujettis à un plafond de 200 $. Oui, ils seront exemptés de la prime, mais tout prestataire de la sécurité du revenu, en dépit de circonstances familiales ou autres, sera assujetti à un plafond, franchise et coassurance, de 200 $.

M. le Président, nous avons eu à plusieurs reprises en commission parlementaire, dans les 43 heures qu'on a passées en auditions particulières, des témoignages très éloquents quant au choix difficile qui va s'imposer aux personnes prestataires de la sécurité du revenu suite à cette nouvelle mesure, suite à cette nouvelle taxe déguisée. Ils ont dit, M. le Président – et ce n'est pas moi qui invente cette phrase, le ministre en conviendra – les représentants de plusieurs groupes, que ça peut faire la différence entre choisir de manger ou choisir de prendre leurs médicaments, choisir de payer leur loyer ou choisir de prendre leurs médicaments. Et, quant à moi, je ne peux que déplorer une mesure gouvernementale largement fiscale dont l'effet serait d'obliger les membres les plus démunis de notre société à faire un choix entre manger et prendre des médicaments, sous guise d'instaurer un système universel d'assurance-médicaments, ou à faire le choix entre payer le loyer un mois et prendre des médicaments.

Quelques remarques, M. le Président, sur l'incidence sur les personnes handicapées également. Le regroupement des organismes de personnes handicapées, la COPHAN, a tenté de convaincre le ministre que les personnes handicapées devraient être exemptées de la prime, de la franchise et de la coassurance. Pas parce que les personnes handicapées consomment nécessairement plus de médicaments que les gens qui ne sont pas handicapés, mais parce que, dans leur vie quotidienne, les personnes handicapées dépensent des argents substantiels que des gens qui ne sont pas handicapés n'ont pas à dépenser. Je prends l'exemple des couches urinaires, toutes sortes d'accessoires qui ne sont pas couverts par le programme et pour qui il faut qu'elles déboursent. Même des choses aussi insignifiantes que de déblayer une entrée, l'hiver, il faut qu'elles paient pour ça, parce qu'elles ne sont pas capables nécessairement de le faire.

Et la COPHAN avait dit en commission, M. le Président: Compte tenu des restrictions financières qui existent déjà parmi les personnes handicapées, on ne devrait pas ajouter, sous forme de taxe déguisée, un programme d'assurance-médicaments; on devrait plutôt exonérer cette catégorie de personnes de la prime, de la franchise et de la coassurance. Le ministre n'a pas jugé bon d'accepter cette recommandation de la COPHAN et on ne peut que le déplorer. M. le Président, merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Alors, M. le député de Nelligan, il reste à votre groupe parlementaire un temps de parole de 5 min 54 s.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Moi-même, j'ai voulu ajouter ma parole, suite aux députés de Notre-Dame-de-Grâce et Robert-Baldwin, sur ce projet de loi n° 33. C'est une triste soirée dans l'histoire du Québec. Nous avons les six premiers bâillons du nouveau premier ministre. La première année, six premiers bâillons, six projets de loi assez importants. Avec ça, nous avons les six premiers bâillons du premier ministre qui maintenant est de plus en plus connu pour le double langage. Avec ça, on peut parler des six premiers bâillons du premier ministre du double langage, et c'est un bon exemple du double langage qu'on peut trouver avec le comportement de ce gouvernement du Parti québécois.

C'est une soirée assez différente aussi, parce que, pour une rare occasion, nous avons le plaisir d'avoir le député de Rivière-du-Loup avec nous, parce qu'il n'est pas ici souvent après la période des questions. Avec ça, il me semble que je peux conclure deux choses: une, qu'effectivement il travaille tard ce soir ou qu'il est arrivé tôt pour la période des questions.

(4 h 50)

Une voix: Ha, ha, ha!

M. Williams: Je ne sais pas, M. le Président. Je voudrais...

M. Dumont: Vous connaissez bien les...

Le Vice-Président (M. Pinard): Un point de règlement, M. le député de Rivière-du-Loup?

M. Dumont: Oui, M. le Président. Vous connaissez bien les dispositions de notre règlement, et le député de Nelligan n'a pas à commenter là-dessus. S'il manque d'argumentation sur l'assurance-médicaments – il me semble pourtant que son collègue de Notre-Dame-de-Grâce semblait en avoir abondamment – on va être obligé de parler d'autre chose. Il devrait laisser la parole à ses collègues qui en ont plein à dire.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Nelligan, je vous prierais de bien vouloir continuer dans le sens des allocutions qui ont été prononcées par vos collègues ce soir. Je suis persuadé que vous avez du matériel à livrer à vos contribuables, aux citoyens de votre comté; alors, nous vous écoutons.

M. Gautrin: Qui écoutent à cette heure-ci avec beaucoup d'intérêt.

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Effectivement, j'ai voulu juste mentionner la présence de mon collègue.

Il y a trois points... Parce qu'il ne me reste pas beaucoup de temps pour ce que je voudrais mentionner sur ce projet de loi n° 33. Un, c'est l'attaque contre les aînés que je trouve dans le projet de loi n° 33. Je trouve les gestes complètement inacceptables contre les personnes âgées de leur demander maintenant de payer une prime, une franchise et 25 % des médicaments jusqu'à un montant au-dessus de 900 $. Je trouve ça inacceptable. Nous avons eu un contrat social entre l'État et la population québécoise. Le ministre de la Santé et des Services sociaux est en train de briser ça complètement. Il me semble qu'on doit dire ça clairement ce matin, à 4 h 55, que c'est inacceptable.

L'autre chose, M. le Président, le ministre essaie de dire qu'il va couvrir tout le monde, qu'il va s'assurer que tout le monde a accès aux médicaments. Ce n'est pas vrai. Ce n'est pas vrai, M. le Président. Si les médicaments ne sont pas sur la liste des médicaments telle qu'approuvée par le Conseil consultatif de pharmacologie, ils ne sont pas couverts, et déjà nous avons vu que le ministre n'a pas vraiment montré une ouverture pour ajouter des médicaments sur cette liste. C'est clair, là, si les médicaments ne sont pas sur la liste, vous avez zéro, rien, aucune couverture. Il me semble que nous avons besoin aussi de mentionner ça aujourd'hui. Maintenant, il attaque les aînés et il n'y a aucune garantie que le médicament sera sur la liste.

Troisième chose, il me semble qu'il est aussi complètement inacceptable de traiter une personne qui a besoin de médicaments, mais qui gagne 15 000 $ par année de la même façon qu'on traite une personne qui gagne 150 000 $ par année. Je ne comprends pas la logique de ça, sauf qu'il me semble que ça ne fait rien, que ça n'a aucune importance pour le ministre de la Santé et des Services sociaux de demander aux personnes de choisir entre manger et prendre leurs médicaments. La seule et unique raison qu'il a de proposer ce projet de loi, c'est une commande du ministre des Finances. Il cherche 300 000 000 $ ou plus. Avec ça, ça ne fait rien, le contrat social; ça ne fait rien, l'inéquité dans ce projet de loi. Il veut avoir de l'argent. Il veut cacher ça, il veut déguiser ça, mais c'est un régime universel de taxe, comme mon collègue, le député de Robert-Baldwin, l'a mentionné.

M. le Président, j'ai juste nommé trois raisons qui, j'espère, vont convaincre ce gouvernement tout de suite qu'effectivement il doit reporter ce projet de loi. Il doit le reporter jusqu'à la prochaine session pour s'assurer que la population est au courant de ce que le ministre est en train de faire. Ce n'est pas correct de passer un projet de loi aussi important que le projet de loi n° 33 à 5 heures le matin, après un bâillon depuis hier matin. J'espère qu'après les interventions de ce côté de la Chambre le ministre va repenser son projet de loi, qu'il va reporter son projet de loi et qu'ensemble on pourra collaborer et s'assurer que nous avons un bon système une fois qu'ils auront amélioré ce projet de loi. Merci beaucoup pour cette opportunité, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. M. le député de Rivière-du-Loup, vous avez un temps de parole de 10 minutes. Alors, M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. D'abord, je dois aussi faire ce commentaire qu'on ne s'attendrait pas à adopter un projet de loi qui veut ou qui a la prétention de mettre en place un nouveau programme social qui représente un progrès supposé pour toute la société, à l'adopter de nuit, à 5 heures du matin, dans un débat bousculé. Il me semble que, si on faisait un brin d'histoire, on s'apercevrait qu'on a essayé... Les gouvernements, habituellement, qui étaient fiers de mettre en place des programmes pour répondre à des besoins de l'ensemble de la société le faisaient sur une base consensuelle, le faisaient en plein jour, faisaient un vote reporté après la période de questions pour que tout le monde le voie, puis c'était la fête. Ce n'était pas à 5 heures du matin, les traits tirés et les gens fatigués. Ce n'est pas de cette façon-là, habituellement, qu'on adopte des programmes généreux qui représentent des progrès sociaux.

Je reviens sur ce que je disais tout à l'heure, M. le Président. J'ai l'impression que, dans ce dossier-là de l'assurance-médicaments, on est parti d'un problème limité, d'un problème qui aurait pu être circonscrit et qu'on a étendu une solution mur à mur. Et, par la bande, en prenant une solution mur à mur à laquelle on a donné le nom d'un programme social, assurance-médicaments, on en a profité, comme gouvernement, pour donner un nouveau tentacule à cette pieuvre qu'est le gouvernement pour venir chercher de l'argent et vider toutes les poches. À la pieuvre, il lui est poussé une nouvelle patte, un nouveau tentacule pour venir chercher, elle aussi, de l'argent dans nos poches.

Alors, les craintes, M. le Président, sont nombreuses, les craintes sont sans réponse. D'abord, la crainte de l'explosion des coûts. On a beau dire n'importe quoi sur notre système, mais ailleurs, pour différentes raisons, au Manitoba et en Saskatchewan, des programmes semblables ont résulté en des augmentations considérables des coûts, en des explosions des coûts dans les années qui ont suivi. Et je ne vois pas, à l'heure actuelle, dans les plans de la Régie de l'assurance-maladie, je ne trouve pas dans le fait qu'on confie ça au secteur public, moi, comme parlementaire, des garanties claires de contrôle des coûts, de limitation des frais d'administration.

Et je suis obligé de m'inquiéter aussi, dans le même esprit, du fait qu'on ne peut pas encore obtenir, à l'heure où on se parle, des chiffres ou même une approximation du nombre de fonctionnaires qui seraient nécessaires pour gérer une affaire comme ça, de la taille de la bureaucratie qui serait générée par la mise en place d'un régime comme celui-là. Et c'est des réponses, M. le Président, et c'est une réflexion qu'on devra faire comme Parlement, un jour, avec la crise des finances publiques: avant d'adopter un projet de loi, savoir combien de ressources ça engage. Ça devrait peut-être même être dans l'en-tête d'un projet de loi: combien de ressources ça engage, combien il va falloir embaucher de monde pour mettre des choses comme celles-là en place.

Là, on adopte ça, puis on dit: Bien, en le mettant en place, on verra; dans deux, trois ans, on pourra faire rapport aux parlementaires, puis leur dire combien ça aura coûté et combien il y aura eu de monde là-dedans. Mais peut-être qu'entre-temps on aura créé un monstre de bureaucratie, puis c'est deux, trois ans plus tard qu'on va s'en rendre compte, M. le Président, puis c'est nos concitoyens et nos concitoyennes qui vont payer pour ça.

L'empressement à adopter le projet de loi. Évidemment, il y a eu toutes sortes de raisons un peu floues évoquées par le gouvernement. À l'étape du débat sur la suspension des règles, c'est le député de Masson qui a été le plus clair. Il a dit: Il ya des compressions budgétaires en cours; il faut se dépêcher d'adopter ces projets de loi là pour aller chercher de l'argent dans les poches des gens. Il ne l'a pas dit comme ça, mais, clairement, sans vouloir lui prêter des paroles, M. le Président, il a identifié le facteur financier comme étant la source de l'urgence.

(5 heures)

Puis, quand on regarde le facteur financier, bien, le plus gros morceau de ça, c'est les 250 000 000 $, environ, du projet de loi sur l'assurance-médicaments. Et ça ne peut pas faire autrement, M. le Président, que nous indiquer comment il se fait qu'à 5 heures – 4 h 58, pour être précis – on est en train de débattre d'un projet de loi dont le nom, dont le titre est un titre qui ressemble à un programme social, mais qui, dans le fond, répond à ce qui nous a été indiqué lors du débat sur la suspension des règles: aller chercher des nouvelles sommes dans les poches des contribuables. Et je ne refais pas tout le débat, M. le Président, sur le fait qu'il aurait été préférable de réduire des dépenses, de réduire dans les bureaucraties plutôt que d'aller chercher encore de l'argent dans les poches des contribuables, dans les poches d'une classe moyenne déjà surtaxée. On pourra faire tout le débat là-dessus, mais je le limite, parce qu'il faut s'en tenir au débat sur l'assurance-médicaments.

M. le Président, un motif lourd supplémentaire pour refuser ce projet de loi, c'est l'amendement qui a été battu par le gouvernement tout à l'heure, un amendement qui voulait clarifier que les sommes perçues et versées au fonds de l'assurance-médicaments ne peuvent être utilisées que pour les fins pour lesquelles elles ont été perçues et ne peuvent être versées au fonds consolidé pour des raisons autres que celles prévues par la loi.

Or, M. le Président, avec les précédents qu'on a à l'assurance automobile entre autres, le fait que le gouvernement refuse catégoriquement de s'engager à ne pas détourner les fonds qui seraient perçus, je comprends que, pour la première année, la deuxième année, bon, pour les premières années, on sauve l'image, mais le fait qu'on ne veuille pas inscrire des dispositions précises, des intentions claires sur le non-détournement de ces fonds-là, moi comme parlementaire, c'est une raison, déjà ça, suffisante d'être très inquiet et de ne pas appuyer un projet de loi comme celui-là. Quand on donne au gouvernement un nouveau tuyau d'aspirateur pour aller siphonner d'autre argent dans les poches des contribuables et qu'en plus on refuse de dire clairement qu'on ne détournera pas ces fonds-là, c'est un canon de plus sur la tempe des contribuables du Québec, et je refuse, M. le Président, moi, d'être complice de ce nouveau canon qui va être placé sur la tempe des contribuables du Québec.

Bon, je pourrais parler de la surconsommation. J'ai eu des représentations sur les risques, une fois les seuils atteints, que la consommation grimpe en flèche, parce que les gens, une fois qu'ils vont avoir atteint le seuil, une fois que ça va redevenir gratuit, on peut se demander, les niveaux de surconsommation, ce qu'ils pourraient être.

On peut aussi se demander... On sait ce que ça fait, les listes. Les listes de médicaments ont ce défaut, on s'est fait décrire, comme Parlement, des scénarios d'horreurs dans des listes de médicaments où les médecins prescrivent aux gens tel médicament qui serait sur la liste... Mon patient a besoin de tel médicament, mais il n'est pas sur la liste. Alors, qu'est-ce que tu as comme médicament sur la liste qui se rapproche le plus de ce dont le patient aurait besoin? Est-ce qu'on va entrer dans ce même genre de système du médicament qui se rapproche le plus de? Et est-ce que c'est ça qu'on souhaite comme soins de santé, comme médicaments? Il y a plusieurs questions qui restent en suspens.

Ce qui me fait dire, M. le Président, que la démonstration n'a pas été faite ni de l'urgence d'adopter un programme comme celui-là ni de la pertinence d'adopter un programme aussi large, aussi vaste; que, deuxièmement, je ne veux pas, M. le Président, participer à donner au gouvernement des nouveaux moyens pour siphonner de l'argent dans les poches des contribuables. Je ne pense pas que l'augmentation des revenus du gouvernement soit la bonne façon de s'attaquer aux problèmes des finances publiques et surtout au moment où on ne donne aucune garantie quant à l'usage qu'on va faire des fonds et quant à la volonté du gouvernement d'éviter catégoriquement des détournements de fonds. Alors, je vais être obligé, M. le Président, pour tous ces motifs-là, de voter contre le projet de loi n° 33. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, vous avez droit à une réplique d'une durée maximale de 10 minutes. Est-ce que vous désirez l'utiliser?

Comme les interventions sont maintenant complétées, est-ce que le projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives, est adopté?

Alors, vote nominal. Qu'on appelle les députés.

(5 h 5 – 5 h 9)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 33, Loi sur l'assurance-médicaments et modifiant diverses dispositions législatives.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

(5 h 10)

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Parent (Sauvé), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Bordeleau (Acadie), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Fournier (Châteauguay), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Kelley (Jacques-Cartier).

M. Dumont (Rivière-du-Loup).

Le Vice-Président (M. Pinard): Que les députés qui s'abstiennent se lèvent...

Alors, M. le secrétaire général... Y a-t-il consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Voulez-vous, madame...

La Secrétaire adjointe: M. Kieffer (Groulx).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le secrétaire général, voulez-vous indiquer le résultat du vote?

Le Secrétaire: Pour:48

Contre:20

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, messieurs dames les députés, le projet de loi n° 33 est donc adopté. M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, conformément à la motion adoptée, je vous demanderais donc que nous procédions à la prise en considération du rapport de la commission permanente du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu.


Projet de loi n° 32


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée et des amendements déposés

Le Vice-Président (M. Pinard): L'Assemblée prend maintenant en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, ainsi que les amendements transmis par M. le ministre délégué au Revenu et M. le député de Nelligan.

Tous les amendements du ministre délégué sont déclarés recevables. Ils concernent les articles 5, 6 et 7. Tous les amendements transmis par le député de Nelligan à l'article 6 – 71.0.3, alinéa a, alinéa d, 2° paragraphe, 4° paragraphe, 71.0.4, 71.0.5, 71.0.6, 71.0.10 – se rapportent aux amendements proposés par le ministre. Ils seraient incompréhensibles si on les lisait isolément. Ils seraient donc irrecevables.

En conséquence, j'ai dû en corriger la forme pour les rendre recevables. Ainsi, j'ai dû réécrire les amendements de l'opposition en tenant compte des amendements proposés par le ministre. Cette correction m'est autorisée par l'article 193 du règlement.

Je vous rappelle que la durée de ce débat sur la prise en considération de ce rapport a été fixée à un maximum de 30 minutes, dont 10 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 10 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et cinq minutes pour les députés indépendants. Le ministre qui présente le projet de loi pourra exercer un droit de réplique d'une durée maximale de cinq minutes. Y a-t-il des interventions sur ce rapport et sur les amendements? M. le ministre du Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Je soumets à cette Assemblée, pour prise en considération, le rapport de la commission permanente du budget et de l'administration concernant le projet de loi n° 32 qui a été présenté le 15 mai 1996 et dont le principe a été adopté le 3 juin 1996. Et la commission permanente du budget et de l'administration a ensuite entamé l'étude détaillée du projet de loi et, au terme de longues heures de travail, en a adopté les quatre premiers articles seulement. À cette occasion, des amendements ont été apportés à la suite des discussions intervenues avec la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen et le Directeur général des élections.

Le projet de loi n° 32 donne suite, en partie, au discours sur le budget du 9 mai 1996 concernant des mesures visant la communication de certains renseignements entre le ministère du Revenu et des organismes publics assujettis à la procédure d'affectation lorsqu'ils doivent verser un montant à une personne physique. Il confère au contribuable un droit d'accès explicite à son dossier fiscal. De plus, M. le Président, il donne ouverture au témoignage d'un fonctionnaire et à la production de documents concernant des renseignements obtenus dans l'application des lois fiscales dans le cadre d'un litige découlant d'une plainte ou d'un grief formulé par un fonctionnaire en matière de relations de travail.

Il permet aussi la communication de certains renseignements dans la mesure où ceux-ci ne permettent pas d'identifier l'identité du contribuable. Il vise, par ailleurs, la communication de renseignements aux fins statistiques ou lorsqu'une telle communication s'avère essentielle pour l'application et l'exécution d'une loi fiscale.

Enfin, M. le Président, ce projet de loi, notamment, prévoit l'établissement de nouvelles règles relatives à la conservation des documents et à leur versement auprès du conservateur des Archives nationales du Québec.

À noter également que plusieurs dispositions ont été prévues par nos propositions d'amendement afin de répondre aux préoccupations formulées par certains organismes, dont particulièrement la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen et le Directeur général des élections.

Je tiens à remercier l'ensemble des mes collègues pour leur collaboration et notamment les collègues du côté gouvernemental, notamment le député de Crémazie, Mme la députée de Vanier, M. le député, également, de La Peltrie, enfin beaucoup de mes collègues qui auraient certainement apprécié pouvoir intervenir en ce qui regarde l'article 6 de ce projet de loi, où on retrouvait véritablement la substance même du projet. Malheureusement, les manoeuvres dilatoires de l'opposition officielle ont fait en sorte qu'on n'a pas pu aborder, malheureusement, à l'étape de article par article, cet article. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Je cède maintenant la parole au député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Et, avant de commencer, merci pour votre aide avec les amendements, parce que, quand nous étions en train d'amender les amendements suggérés, c'était de temps en temps compliqué, et j'ai apprécié que vous ayez utilisé votre pouvoir technique de ne pas changer le contenu, mais de rendre mes amendements recevables. J'ai apprécié ça beaucoup.

(5 h 20)

Juste pour rappeler les faits et assurer que la population qui nous écoute à 5 h 20 ce matin comprend les faits comme il faut. Effectivement, nous avons eu un projet de loi n° 32 déposé le 15 mai, à la toute dernière minute, et nous avons eu l'étude détaillée les 13 et 17 juin. Mais ce n'étaient pas des journées complètes. Nous avons commencé la journée sans les amendements. Nous avons eu des interruptions dans la deuxième journée.

Mais, malgré ces problèmes-là, M. le Président, nous avons passé la moitié de la loi, quatre articles, mais il reste quatre autres articles. Et il me semble que c'était dans une bonne vitesse, particulièrement quand nous avons planifié de siéger jusqu'à vendredi prochain, ce vendredi qui s'en vient. Je comprends mal pourquoi nous avons juste passé 18 heures à bâillonner l'opposition quand nous avons passé moins de 14 heures sur l'étude détaillée du projet n° 32. Je trouve ça dommage que nous n'ayons pas utilisé le temps en commission pour continuer notre travail, qui, dans mon opinion, était efficace.

Et n'oubliez pas, M. le Président, que le projet de loi tel que proposé est un projet qui a menacé la vie privée de la population québécoise. C'est ça que tout le monde a dit. La Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen, les groupes comme ACEF et plusieurs autres groupes, un après l'autre, ils ont dit: C'est une menace contre la protection de la vie privée de la population québécoise.

Avec ça, M. le Président, j'ai pensé de protéger les citoyens québécois, les citoyens et citoyennes québécois. C'est important de prendre le temps d'étudier ce projet de loi. Deux jours, et, quand ça reste quatre jours, je ne comprends pas pourquoi nous avons un bâillon sur ce projet de loi.

Il y a une expression en anglais, M. le Président: «Once bit, twice shy», qui est assez utile maintenant, parce que, quand nous avons eu ce projet de loi déposé en toute vitesse, nous avons vu que, nonobstant les bonnes paroles du ministre délégué au Revenu et de tous les représentants gouvernementaux, du gouvernement, nous avons trouvé des menaces dans ça, nous avons trouvé des choses qui n'étaient pas mentionnées dans les notes explicatives. Il n'a pas parlé que, dans l'article 1, il cherche le pouvoir de saisir le salaire des fonctionnaires s'il y a une créance avec le gouvernement. Il n'a pas parlé de ça. Je ne sais pas si les députés ici sont au courant de ça maintenant, qu'il va traiter les Québécois de deux façons: ceux et celles qui travaillent dans le secteur privé, et, s'il y a un problème avec le gouvernement, s'ils doivent payer le gouvernement, avant que le gouvernement les paient, il va se connecter avec tous les fichiers centraux, et j'ai un problème, j'ai peur de ça. Mais j'ai peur avec les fonctionnaires, parce qu'ils peuvent aller dans leur salaire.

Avec ça nous avons utilisé le temps de discuter ce problème. Je n'ai pas eu la preuve jusqu'à maintenant que c'est un projet de loi nécessaire. Je n'ai pas eu la preuve que c'est une urgence, particulièrement quand nous avons vu que le fisc ne peut pas implanter ce système avant 18 mois, ou entre six et 18 mois. Je n'ai pas vu non plus, M. le Président, une étude de coûts-bénéfices. Avec ça, il me semble que ce sont des choses minimales que l'on peut demander. Mais nous avons, avec un bon esprit de collaboration, essayé de bonifier ce projet de loi. Et, jusqu'à la toute dernière minute, incluant ce soir, et avec votre aide, M. le Président, nous avons déposé huit amendements. Un qui vient du Barreau du Québec, qui a cherché plus de précisions sur ce projet de loi. Un qui est assez important, c'est qu'on trouve que, dans le plan d'utilisation mentionné par le ministre, il y a juste, dans le cas échéant, un système de protection, un système de sécurité. Nous avons pensé du côté de l'opposition qu'on doit enlever «le cas échéant», s'assurer que, dans chaque plan d'utilisation, chaque plan de fichier central, nous allons avoir une obligation d'avoir tous les systèmes sécuritaires.

M. le Président, aussi, nous avons recommandé, et j'espère que ça va être approuvé, qu'on doit ajouter, dans l'article 6 que le ministre délégué a déjà mentionné, où il y a plusieurs amendements, nous avons voulu ajouter le concept d'un délai d'utilisation et d'extraction des fichiers. On ne veut pas amasser cette énorme quantité d'information sans avoir une règle claire sur comment ils vont détruire ces fichiers, et c'est pour les délais d'utilisation. Il me semble qu'effectivement, M. le Président, ce sont des amendements tout à fait clairs et logiques.

Nous avons aussi voulu avoir un changement sur le concept de l'avis de la Commission d'accès à l'information, parce qu'il y a un amendement proposé par le ministre qui est une amélioration du premier article, mais il doit chercher dans le mot légal, il dit qu'il doit chercher l'avis de la Commission d'accès à l'information. Mais, s'il n'aime pas ça, si la Commission d'accès à l'information dit: Je ne donne pas mon approbation, l'article permet au ministre d'aller au Conseil des ministres faire approuver son plan d'une façon ou d'une autre.

Avec ça, M. le Président, je demande: Où sont les garanties? Notre amendement, si c'est accepté... la Commission d'accès à l'information doit approuver ce plan avant qu'il ne soit... C'est clair. Nous avons une Commission d'accès à l'information, si nous sommes en train de créer les plans d'utilisation des fichiers, que nous avons une obligation de demander un avis à la Commission d'accès à l'information, il me semble que c'est la simple logique de dire qu'effectivement elle doit donner cette approbation. De chercher l'appui et de ne pas nécessairement tenir compte de ça, il me semble que c'est complètement illogique, M. le Président.

Le prochain amendement, si le dernier est accepté, c'était juste une concordance. Il me semble qu'il y a aussi un article dans ce projet de loi, 71.0.5, qui donne un concept de confidentialité s'il y a une méthode d'enquête qui est questionnée dans ce plan d'utilisation. J'ai peur, M. le Président, que cet article rende tous les autres articles qui essaient de donner des balises au plan d'utilisation complètement inutiles. Parce que j'ai peur que le ministère du Revenu utilise ça pour cacher beaucoup de choses.

Aussi, nous avons, et souvent dans les discussions de cette session, M. le Président, demandé des amendements qui obligent le ministère à déposer les rapports annuellement. Il y a des articles où, effectivement, il doit déposer un an après, mais on veut s'assurer que les rapports sont déposés annuellement, les rapports qui touchent le plan d'utilisation.

Finalement, M. le Président, nous avons les derniers amendements que nous avons proposés, et on les inclut dans le rapport. Il y a un article qu'on retrouve dans les amendements où le ministre doit informer la population, les contribuables, des couplages, comparaisons, appariements. On veut s'assurer que cette obligation d'information, cette obligation d'informer la population doit être avant le couplage, doit être avant la collecte de toute information. Il me semble que c'est assez bizarre comme obligation que le fisc puisse avoir tous les pouvoirs d'amasser cette information, commencer à les coupler, commencer à faire les comparaisons et, après tout ça, il va dire: «Oh, by the way...» À ce moment-là, il va avoir le temps de... il doit passer l'information à la population, mais ça va être trop tard.

M. le Président, en terminant, il me semble que vous avez compris les raisons de nos amendements. Nous avons demandé un report de ce projet de loi. Je ne vois aucune raison d'urgence. Et, si le représentant du ministère du Revenu lui-même dit qu'il ne peut pas implanter cette loi tout de suite, il me semble que ça serait bon de profiter de la période estivale et septembre; on pourrait travailler ensemble, comme nous avons fait avant, en toute collaboration, et s'assurer aussitôt que la session reprendra au mois d'octobre que nous allons avoir un projet de loi bonifié qui fait deux choses: donne les outils au ministre du Revenu, mais aussi protège la vie privée de la population québécoise. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Nelligan. M. le ministre du Revenu, vous avez droit à une réplique de cinq minutes. M. le ministre.

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président, juste pour reprendre une affirmation du député de Nelligan. Il a dit qu'il était tard. En fait, il n'est pas tard, il est tôt, il est temps d'aller faire dodo illico.

(5 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre. Alors, à la suite d'une réunion avec les leaders des groupes parlementaires, nous avons organisé la mise aux voix des amendements proposés au rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu.


Mise aux voix des amendements proposés par le ministre

Alors, nous mettrons d'abord aux voix les amendements de M. le ministre délégué au Revenu, peut-être que je l'ai mentionné tout à l'heure, aux articles 5, 6 et 7. Alors, ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix des amendements du député de Nelligan

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. Je mets maintenant aux voix les amendements proposés par M. le député de Nelligan à l'article 6 (71.0.3: alinéa a, alinéa d, deuxième paragraphe, quatrième paragraphe, 71.0.4, 71.0.5, 71.0.6 et 71.0.10). Ces amendements sont-ils adoptés?

Des voix: Rejeté.


Mise aux voix des articles amendés

Le Vice-Président (M. Pinard): Rejeté. Alors, je mets maintenant aux voix tous les articles du projet de loi n° 32 amendés par les votes précédents. Ces articles amendés sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Mise aux voix des articles non adoptés par la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, je mets maintenant aux voix tous les autres articles du projet de loi n° 32 que la commission du budget et de l'administration n'a pas adoptés ainsi que le titre du projet de loi. Ces articles et le titre du projet de loi sont-ils adoptés?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Je mets maintenant aux voix le rapport, tel qu'amendé, de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu. Le rapport, tel qu'amendé, de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Sur division.


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Alors, nous allons maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu.

La durée de ce débat a été fixée à un maximum de 60 minutes, dont 20 minutes au groupe parlementaire formant le gouvernement, 20 minutes au groupe parlementaire formant l'opposition officielle et 10 minutes pour les députés indépendants. Une réplique d'une durée maximale de 10 minutes a été prévue pour le ministre qui présente le projet de loi. Alors, M. le ministre délégué au Revenu.


M. Roger Bertrand

M. Bertrand (Portneuf): Oui, M. le Président. Alors, M. le Président, brièvement, j'ai le plaisir de soumettre à l'Assemblée nationale pour adoption le projet de loi n° 32 intitulé Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu. Ce projet de loi a fait l'objet d'amendements pour donner suite aux commentaires, notamment aux commentaires et recommandations formulées par certains organismes, dont la Commission d'accès à l'information, le Protecteur du citoyen et le Directeur général des élections. Et, à ce sujet, permettez-moi de vous citer des extraits d'une lettre du Protecteur du citoyen datée du 13 juin 1996 et d'une lettre du président de la Commission d'accès à l'information du 12 juin 1996.

Dans la lettre du Protecteur du citoyen, je vous cite deux extraits. Premièrement: «J'ai toute raison de croire que l'ensemble de ces amendements, dans la mesure où ils seront intégrés au projet de loi n° 32 – ce qui est le cas, M. le Président – fera en sorte que les droits des personnes intéressées seront valablement protégés.» Et un peu plus loin, dans la lettre: «J'estime donc qu'avec les amendements le projet de loi n° 32 non seulement s'inscrit dans la philosophie et la lettre de la loi d'accès, mais respecte adéquatement les dispositions des chartes québécoise et canadienne.»

Le président de la Commission d'accès à l'information nous dit ceci: «Selon les commissaires, ces propositions d'amendement répondent aux inquiétudes que soulevait la Commission dans son avis du 24 mai et lors de la séance du 10 juin de la commission du budget et de l'administration. La Commission considère que l'ajout de l'article 71.0.3 permettrait d'amoindrir les effets de la dérogation. Cet article, croyons-nous, maintiendra le pouvoir de contrôle a priori de la Commission, pouvoir que nous jugeons essentiel. Les propositions d'amendement que vous nous soumettez permettront à votre ministère d'obtenir les renseignements nécessaires à la lutte contre l'évasion fiscale et le travail au noir sans pour autant remettre en cause les grands principes de respect de la vie privée que reconnaît la loi d'accès.»

En conséquence, M. le Président, je recommande l'adoption de ce projet de loi.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué au Revenu. Alors, je cède maintenant la parole au député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai un bref rappel, encore, afin de nous assurer que nous n'allons jamais oublier tout le passage de ce projet de loi n° 32, parce que, aujourd'hui, le ministre veut expliquer comment il a amélioré le projet de loi, et, effectivement, je pense que c'est mieux que ce que nous avions au début, mais ce n'est pas assez bon. Mais ce n'est pas assez bon. Et je comprends mal pourquoi il a demandé, ou que le leader, lui, a demandé de nous bâillonner sur ça. Nous avons travaillé ensemble à la commission du budget et de l'administration avec ça, et nous avons passé la moitié de ce projet de loi. Et il me semble que, si nous avions utilisé le temps que nous avons utilisé sur le bâillon aujourd'hui, nous aurions eu déjà une chance d'améliorer ce projet de loi.

Mais, M. le Président, ils n'ont pas décidé ça. J'ai besoin de conclure que, effectivement, ils veulent continuer de passer le projet de loi à toute vitesse, parce que chaque fois qu'on questionne sur les articles de loi, on trouve les problèmes et les erreurs. Nous avons trouvé plusieurs erreurs et, effectivement, nous avons eu tout un débat sur l'article 1 de ce projet de loi et la façon dont il traite la fonction publique. Le ministre des Finances et le ministre délégué au Revenu ont dit des choses, dans la même commission, tellement contradictoires sur ce sujet que j'espère qu'ils peuvent trouver un consensus entre eux.

Il me semble, M. le Président, que c'est un projet de loi qui n'est pas le genre de projet de loi qu'on doit passer pendant la session intensive, parce qu'il y a deux choses qu'on discute en même temps, qui peuvent être en conflit, et on doit s'assurer qu'il y a une coexistence entre les deux. Et j'ai peur que nous n'ayons pas trouvé cette coexistence jusqu'à maintenant. Un, on doit effectivement donner au ministère du Revenu les outils pour faire son travail, mais, aussi, on doit s'assurer que la vie privée de la population québécoise est bel et bien protégée. Il me semble qu'on doit faire les deux.

Au début, je pense, unanimement, dans toute la province de Québec, ils ont dit que le projet de loi n° 32, tel que proposé, était mal fait et menaçait la vie privée de la population québécoise. Mais je ne suis pas convaincu que nous avons fait assez d'améliorations, assez d'amendements à ce projet de loi, M. le Président.

J'ai reçu une lettre – le ministre aime citer les lettres – de Lorraine Pagé, son opinion, qui dit: «Avec le projet de loi, il y a potentiellement une discrimination envers les secteurs public et parapublic.» Ce n'est pas important pour le ministre. Mais, s'il n'est pas d'accord, là, qu'il donne le temps de discuter. Pourquoi ils nous ont bâillonnés ce matin, à 11 heures ou 11 h 15? Pourquoi il n'a pas appelé la CBA, la commission du budget et de l'administration, et on peut... hier, je m'excuse. Effectivement, nous avons pris presque 24 heures sur ce bâillon. Pourquoi nous n'avons pas utilisé les 24 heures pour nous assurer que toute la population soit au courant de tous les sujets de ce projet de loi? Dans ce projet de loi, M. le Président, mettre de côté pour le moment... Est-ce que l'information est protégée? Parce que nous avons quelque chose à dire sur ça.

Mais, juste sur le concept de «Big Brother», maintenant, il y a un appétit insatiable de ce gouvernement qui veut avoir toute l'information, il veut tout savoir, il veut être tout, il veut être partout. Là, le pouvoir qu'on trouve dans le projet de loi n° 32, c'est un pouvoir énorme. Il peut amasser de l'information sur chaque Québécois et Québécoise et il peut mettre ça dans le fichier central, il peut commencer à faire des comparaisons, des couplages, et tout ça. M. le Président, il me semble qu'un débat comme ça... Peut-être qu'il y a des députés ministériels qui veulent avoir cet aspect de «Big Brother» vivant dans notre société québécoise, mais j'ai eu une chance de parler avec plusieurs en privé, et il y en a plusieurs autres qui ne veulent rien savoir de ça.

(5 h 40)

Avec ça, il me semble, pourquoi pas, M. le Président, prendre le temps nécessaire pour discuter le concept même de jusqu'à quel niveau on veut avoir l'État dans notre face, jusqu'à quel point nous sommes prêts à donner le pouvoir à l'État de savoir l'information privée sur vous, sur moi, sur vous?

Je suis un bon payeur de taxes, je n'ai jamais manqué de payer mes taxes. Je n'ai pas besoin, je pense, et ce n'est pas juste de donner ce pouvoir énorme à un ministère du Revenu qu'on trouve dans le projet de loi n° 32, sans mentionner mes problèmes avec la protection de la confidentialité, juste le fait qu'il peut aller dans les municipalités, les CLSC et les hôpitaux, les commissions scolaires et les universités, partout, chaque département peut échanger avec les autres niveaux gouvernementaux. Avec ça, l'information va aller partout. Il me semble qu'on doit avoir un débat de fond substantiel là-dessus. Et, vous savez, M. le Président, voilà un bon exemple ce soir qu'on ne peut pas avoir un débat comme ça pendant la session intensive.

Il y a les autres exemples que pendant l'étude article par article nous avons commencé à trouver. C'est intéressant que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit encore ici, en Chambre, parce que, après son projet de loi n° 33, quand il a frappé les aînés avec sa taxe sur les médicaments, on trouve un article dans le projet de loi n° 32 qui peut faire mal à nos oiseaux de l'hiver qui voyagent souvent dans le sud pendant l'hiver.

J'ai vu moi-même le problème dans mon comté que, quand il y a de l'information du Revenu, combien de jours ils ne sont pas là, est-ce qu'ils sont effectivement résidents. Sans vérifier ni clarifier avec les contribuables, ils ont enlevé leur accès à l'assurance-médicaments. C'est grave, ça. On doit s'assurer que ce couplage ne peut pas mettre en doute les services fondamentaux que j'ai mentionnés.

M. le Président, Mme Pagé a des problèmes, j'ai des problèmes aussi avec ce projet de loi. Il me semble que les amendements ne sont pas allés assez loin. De donner le pouvoir au gouvernement d'oublier, de mettre de côté un avis de la Commission d'accès à l'information, c'est inacceptable. Avec ça, d'avoir un bon projet de loi, M. le Président, il me semble qu'on doit s'assurer, si on veut être crédible, si on veut vraiment dire à la population qu'on veut voir l'utilité de ramasser les fonds, ça va, mais nous sommes prêts, parce que le ministre délégué lui-même et ses représentants ont dit: Nous ne sommes pas les experts sur la protection de l'information... Pourquoi pas, M. le Président, utiliser nos experts? Et ils disent ceci: Si on met une obligation de chercher un avis à la Commission d'accès à l'information, pourquoi ne pas mettre l'obligation d'écouter cet avis, de tenir compte de cet avis? Mais là, avec cet article de loi, ils peuvent demander un avis à la Commission d'accès et ils peuvent oublier ça tout de suite.

Il me semble qu'on doit aussi, M. le Président, s'assurer qu'il y a les dates limites de toute cette information. Là, je ne veux pas avoir «Big Brother» bel et bien établi dans la société québécoise. J'ai droit à une vie privée. Je ne veux pas donner le pouvoir au ministre du Revenu de traiter tous les Québécois et les Québécoises comme des fraudeurs. Je n'aime pas le concept, je n'aime pas le goût de cette philosophie. La grande, grande, grande majorité de la population québécoise n'est pas des fraudeurs. Ce sont des contribuables honnêtes.

Il me semble, M. le Président, que c'est un pouvoir complètement exagéré que le ministre délégué au Revenu cherche, dans ce projet de loi. On peut travailler ensemble, faire la lutte contre le marché souterrain, mais il se cache en arrière de cette phrase et il veut mettre un pouvoir énorme, dans ce projet de loi, de chercher n'importe quelle information à n'importe quel temps.

M. le Président, il y a certainement quelques ajustements que nous avons demandés dans ce projet de loi, mais ce n'est pas assez. Il me semble que nous avons besoin d'un débat de fond. Est-ce qu'on veut laisser le pouvoir à l'État de tout savoir sur notre vie privée? Est-ce que nous avons donné tout ce pouvoir d'assurer...

Une voix: ...

M. Williams: Mais c'est certainement «Big Brother». Et ce serait intéressant, en terminant, M. le Président, «1984», le livre où on parle de «Big Brother», la dernière année de la dernière époque de «Big Brother»... excusez, la dernière année de l'époque du Parti québécois, il me semble que c'est assez intéressant, cette coïncidence. Quand le Parti québécois retourne au pouvoir, «Big Brother» retourne aussi.

Avec ça, M. le Président, on doit demander que le ministre reporte ce projet de loi et donne le temps, jusqu'à l'ouverture de la prochaine session, de s'assurer que nous avons un projet de loi amélioré et qu'on protège la vie privée de la population québécoise. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, M. le député de Verdun, il reste à votre groupe parlementaire 9 min 55 s. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Le projet de loi, au début, avait comme objectif d'essayer de lutter contre la fraude. De plus, les moyens qu'il s'était donnés étaient des moyens de couplage de fichiers qui avaient été déjà, en cours d'audition, jugés absolument inacceptables. À la deuxième étape du projet de loi, le ministre avait posé un certain nombre d'amendements qui changent en substance le projet de loi. Malheureusement, ces amendements, on n'a jamais pu les étudier en commission, et ça change absolument en substance le projet de loi, je pense qu'il n'y a personne ici qui peut le nier.

Le questionnement que l'on avait de ce côté-ci, sans remettre en question l'objectif de lutter contre la fraude – et je pense qu'il n'y a aucun parlementaire qui va plaider en faveur du maintien de la fraude fiscale – c'était que le couplage de fichiers créait une surveillance indue sur les citoyens et rentrait dans la vie privée de chacun des citoyens. Les amendements qui ont été déposés vont moduler ces couplages de fichiers en demandant l'avis de la Commission d'accès à l'information et un plan quant à l'utilisation des couplages de fichiers. Je dois dire néanmoins, et je crois que le député de Nelligan l'a rappelé tout à l'heure, qu'il y a deux éléments qui continuent à être extrêmement inquiétants, et je m'adresse, actuellement, à 5 h 45. C'est malheureux qu'on le débatte à cette période-ci, parce qu'on est en train de créer un changement extrêmement important dans la société avec les couplages de fichiers. On est en train, M. le Président, en couplant les fichiers, d'avoir l'information à peu près sur tout le monde et sur tout ce qui va se passer.

L'amendement 71.0.4 demande certes l'avis de la Commission d'accès à l'information, mais, si l'avis de la Commission d'accès à l'information est négatif en disant qu'un couplage de fichiers n'est pas nécessaire et n'est pas approprié, le ministère, après l'avoir soumis au gouvernement, peut néanmoins aller de l'avant avec les amendements qui sont déposés dans le projet de loi, et ça, ce n'est pas acceptable pour nous. Ce n'est absolument pas acceptable pour nous. Il aurait fallu, à l'intérieur du projet de loi, si on faisait référence à la Commission d'accès à l'information, qu'elle soit en mesure de bloquer des couplages de fichiers, le cas échéant, et ça aurait été l'étude qu'on aurait dû faire article par article si on avait pu le faire en commission parlementaire.

(5 h 50)

Le deuxième élément qui a été soutenu par le député de Nelligan concerne l'article 71.0.5 tel qu'amendé. Il dit que les plans d'utilisation des couplages de fichiers peuvent être considérés comme confidentiels, c'est-à-dire ne seront pas déposés à l'Assemblée nationale, parce qu'un des bons points des amendements, c'est que, si couplage de fichiers il y a, les parlementaires en seront informés. Mais ils n'en seront informés que dans la mesure où ces couplages de fichiers ne seront pas confidentiels. Et l'article 71.0.5 va considérer comme confidentiels les couplages de fichiers – et il y a un certain nombre de cas qui sont signifiés – en particulier lorsque le plan d'action des couplages de fichiers sera destiné à prévenir, détecter ou réprimer les infractions aux lois fiscales ou lorsqu'il sera de nature à révéler un renseignement protégé par l'article 69. Alors, le danger, actuellement, c'est que tout le mécanisme mis de l'avant par les amendements, et particulièrement par l'amendement 71.0.3, perd tout son sens à cause de 71.0.5 où, à ce moment-là, on pourra, à chaque moment, considérer que les couplages de fichiers – et la seule raison pourquoi le ministère du Revenu fera un couplage de fichiers, c'est bien sûr pour lutter contre une fraude fiscale – à ce moment-là seraient confidentiels et ne pourraient pas être déposés à l'Assemblée nationale.

Alors, M. le Président, vous avez là parfaitement l'exemple, vous avez devant vous l'exemple d'un certain nombre d'amendements qui ont été déposés pour améliorer un projet de loi. Les amendements n'ont pas pu être débattus en commission parlementaire et, justement, en voir et en limiter la portée, et tâcher de les corriger encore un peu plus, parce qu'une lecture attentive de ces amendements démontre qu'ils ne répondent pas ou ne répondent qu'en partie aux interrogations que l'on avait... Et on se retrouve actuellement, parce qu'on veut, disons, boycotter ou passer au-dessus du travail des commissions parlementaires, à voter un projet de loi qui est changé substantiellement. Les amendements qui sont devant nous ne sont pas des amendements mineurs, ça change en profondeur le projet de loi, et on n'a eu aucunement la possibilité de les débattre.

Le ministre, en haussant la tête, semble dire que ça ne change pas. Je dois dire que ça le change dans la mesure que ça balise. Je crois que, dans son intervention initiale, il était intervenu en disant que ce qu'il proposait était justement pour baliser l'utilisation des couplages de fichiers et répondre, en partie, aux interrogations de la Commission d'accès à l'information. Les interrogations de la Commission d'accès à l'information, ce sont essentiellement les interrogations que nous avons, de ce côté-ci de la Chambre.

Est-ce qu'on n'est pas en train de créer actuellement un monstre, un monstre de fichiers électroniques surveillant à peu près toutes les activités des citoyens? C'est ça qu'on est en train de faire, M. le Président, et les balises qui sont mises à l'intérieur du projet de loi sont malheureusement trop facilement contournables. Et, je m'excuse, si on avait eu la chance de pouvoir débattre dans un véritable processus d'échange, comme doit être fait un projet de loi, l'article 71.0.5, on n'aurait certainement pas, au bout d'une discussion, maintenu l'article 71.0.5 tel qu'il est, parce qu'il est en train, absolument, de renier virtuellement tous les autres articles.

Parce que le seul but, si vous me permettez, et je voudrais rerépondre là-dessus, le but des autres articles, c'est justement de baliser l'utilisation des fichiers électroniques et l'article 71.0.5 dit: lorsqu'on utilise ces fichiers électroniques pour lutter contre une fraude fiscale – et je voudrais vous prévenir – détecter ou réprimer les infractions aux lois fiscales, là, à ce moment-là, les balises ne pourront plus être utilisées. Les balises ne pourront plus être utilisées, c'est-à-dire l'utilisation de l'Assemblée nationale comme moyen de surveillance sur les balises d'utilisation des fichiers ne pourra plus être utilisée parce que ces fichiers seraient... À ce moment-là, ce plan d'utilisation des fichiers sera considéré comme confidentiel.

Alors, M. le Président, je vais terminer là-dessus en regrettant que cette loi, qui est extrêmement importante parce qu'elle fait une brèche importante dans la confidentialité de la vie des Québécois et des Québécoises, n'a pas pu être étudiée en commission parlementaire. On doit simplement recevoir les amendements. Prima facie, d'après moi, on ne répond pas aux interrogations que nous avions de ce côté-ci de la Chambre, à savoir l'énorme, l'énorme, l'énorme pouvoir que vont donner ces couplages de fichiers entre les fichiers de la RAMQ, celui de la Régie de l'assurance-automobile, celui de la Régie des rentes et celui du ministère du Revenu. Il y a un énorme danger. On aurait pu travailler mardi, mercredi, jeudi, vendredi, en CBA, pour être en mesure de passer à travers ces articles qui sont très importants – on n'a pas pu le faire, on le fait actuellement, à 5 h 55 – un projet de loi qui remet en danger la vie privée de chacun d'entre nous. Réellement, c'est quelque chose que nous ne pouvons pas accepter de ce côté-ci de la Chambre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Verdun. Comme nous avons terminé, M. le ministre, vous avez droit à une réplique de 10 minutes. Alors, M. le ministre du Revenu.


M. Roger Bertrand (réplique)

M. Bertrand (Portneuf): Ça va être plus 10 secondes que 10 minutes.

M. le Président, l'opposition officielle, et le député de Nelligan notamment, nous dit qu'elle a des problèmes avec ce projet de loi. Je dois vous dire qu'à l'exemple de nombreux concitoyens et concitoyennes qui m'ont parlé de ce projet de loi là depuis que j'en ai fait le dépôt je n'ai pas de problème avec le projet de loi pour une bonne raison, c'est que je paie mes taxes et mes impôts, je n'ai rien à me reprocher, et, sur cette base-là, je recommande l'adoption de ce projet de loi.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre délégué au Revenu. Alors, les interventions étant... S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Merci.

Alors, les interventions étant complétées maintenant, est-ce que le projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu, est adopté?

Des voix: Adopté.

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, qu'on appelle les députés.

(5 h 57 – 6 h 1)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, l'Assemblée va maintenant procéder à l'adoption du projet de loi n° 32, Loi modifiant la Loi sur le ministère du Revenu.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bélanger (Anjou), M. Chevrette (Joliette), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Bégin (Louis-Hébert), M. Campeau (Crémazie), M. Bertrand (Portneuf), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Julien (Trois-Rivières), M. Perreault (Mercier), M. Jolivet (Laviolette), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), Mme Caron (Terrebonne), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Kieffer (Groulx), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), M. Dion (Saint-Hyacinthe), Mme Charest (Rimouski), M. Brien (Rousseau), M. Désilets (Maskinongé).

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, puis-je vous demander votre collaboration? C'est déjà passablement difficile pour notre collaboratrice d'effectuer son travail, surtout à cette heure-là, à 6 h 5. Alors, un petit effort, s'il vous plaît. Madame a passé la nuit avec nous.

Alors, que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Middlemiss (Pontiac), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Parent (Sauvé), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Marsan (Robert-Baldwin), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Fournier (Châteauguay), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Kelley (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Pinard): Y a-t-il des abstentions? Alors, M. le secrétaire général, voulez-vous nous dévoiler le résultat du vote?

Le Secrétaire: Pour:47

Contre:18

Abstentions:0

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci beaucoup. Le projet de loi n° 32 est donc adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, l'article 29 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 36


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous revenons aux affaires du jour. À l'article 29, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur le rapport de la commission?


Mise aux voix du rapport

Alors, le rapport de la commission du budget et de l'administration portant sur le projet de loi n° 36, Loi modifiant la Loi sur l'administration financière et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: Et, finalement, M. le Président, l'article 30 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 4


Adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 30, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives. M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, en vertu de l'article 257 de nos règlements, je voudrais déposer un amendement et je garderai mon intervention pour après. Donc, qu'on se transforme en commission plénière, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Adopté. En conséquence, l'Assemblée se constituera en commission plénière pour l'étude de l'amendement indiqué par M. le ministre des Ressources naturelles. Alors, nous allons suspendre quelques instants, le temps de se constituer en commission.

(Suspension de la séance à 6 h 7)

(Reprise à 6 h 9)


Commission plénière

M. Pinard (président de la commission plénière): À l'ordre, s'il vous plaît!


Étude des amendements proposés par le ministre

Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier l'amendement ou les amendements qui nous seront déposés et qui sont proposés par M. le ministre des Ressources naturelles au projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives.

Avant de vous céder la parole, M. le ministre, permettez-moi de souhaiter la plus cordiale bienvenue à vos fonctionnaires qui commencent très tôt aujourd'hui, alors que certains députés iront se coucher très prochainement. M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, je pense que ce n'est pas nouveau, nos fonctionnaires sont là pour nous accompagner dans notre travail, et j'espère que ce n'est pas une surprise pour vous de voir qu'ils sont là. Ils sont là depuis longtemps d'ailleurs. Ils attendaient dans les corridors.

(6 h 10)

Voici, nous avons trois amendements. Ce sont trois ajouts au projet de loi. Tout d'abord, je l'expliquerai au besoin par les questions de mon collègue de Montmagny-L'Islet, il s'agit d'insérer, après l'article 2, l'article suivant que je vais présenter. Puis je vais vous le déposer par la suite ou si je vous le dépose?

Le Président (M. Pinard): Il faudrait les avoir pour qu'on puisse vérifier la recevabilité.

M. Chevrette: Je suis tellement convaincu qu'ils sont recevables que je m'empresse de vous les donner.

Tout d'abord, c'est d'insérer, après l'article 2, le suivant:

2.1 L'article 46.1 de cette loi est modifié:

1° par le remplacement, dans les sixième et septième lignes du premier alinéa, des mots «deuxième ou troisième» par les mots «troisième ou quatrième»;

2° par l'ajout, après le premier alinéa, du suivant:

«Il peut en outre, en septembre de l'année en cause, prendre l'une ou l'autre de ces mesures, ou modifier ou mettre fin à celle prise en application du premier alinéa, le cas échéant.»;

3° par le remplacement, dans la première ligne du quatrième alinéa, du mot «troisième» par le mot «quatrième».

Donc, le texte intégré de 46.1, je ne sais pas s'il est besoin que je le lise.

M. Gauvin: Pas nécessairement, M. le Président. Vous pourriez aller directement aux questions.

M. Chevrette: C'est beau. Je me plie volontiers.

Le Président (M. Pinard): Donc, est-ce que vous avez d'autres remarques à nous formuler?

M. Chevrette: Non. J'aimerais expliquer pourquoi on introduit cet amendement-là. C'est que vous savez qu'il y a mésentente entre l'association des copeaux et la papetière, en particulier pour l'achat des copeaux. Et, comme il n'y a pas d'entente globale, ce n'est pas toutes les parties qui ont... Il y a plusieurs compagnies qui ont signé des ententes avec les scieries indépendantes pour l'achat de copeaux, mais il reste qu'il y en a qui n'ont pas signé. C'est une minorité, mais on demeure avec un problème sur les bras.

Il y en a qui m'avaient suggéré de créer une régie pour établir les prix. Il y en a d'autres qui m'avaient dit: Introduis donc un système d'arbitrage pour faire en sorte qu'on puisse définir les prix. Et il y en a d'autres qui m'ont dit: Bien, étant donné qu'il y a déjà un pouvoir d'intervention sur le volume de bois à couper une fois par année, pourquoi ne pas en mettre deux fois et permettre ainsi de trouver le moyen que les copeaux soient utilisés au maximum? Et c'est tout à fait normal que ce soit cela également. Je ne vois pas pourquoi on autoriserait à abattre des arbres dans nos forêts en fonction des copeaux quand on a des tas de copeaux dans plusieurs scieries existantes.

En fait, l'article 46.1 a été introduit en 1990, celui-là, pour assurer à court terme le principe de résidualité des attributions de bois dans les forêts publiques. Ceci s'inscrit dans l'objectif d'aménagement durable de la forêt. Cet article permet au ministre de réduire les volumes des permis annuels d'intervention dans la forêt publique afin d'assurer un équilibre sur le marché des matières ligneuses. Et la décision doit être prise au plus tard le 1er mars et s'applique pour une année.

Cependant, la situation du marché, comme je le disais, de la matière ligneuse peut changer très rapidement. C'est ce qui s'est produit en 1996, d'ailleurs. En effet, au moment de prendre la décision au plus tard le 1er mars, un certain équilibre était perceptible sur le marché. La situation s'est dégradée rapidement et, depuis, des surplus de copeaux sont maintenant observés dans plusieurs endroits, et je pourrais vous en citer. Il est toutefois impossible d'intervenir après le 1er mars pour rétablir la situation d'équilibre. Donc, la modification proposée permettra d'intervenir une autre fois en septembre prochain pour faire face à de telles situations ou à tout changement observé sur le marché de la matière ligneuse.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Est-ce qu'on doit comprendre, M. le ministre, que, en présentant cet amendement-là, ça peut donner le pouvoir au ministre de confirmer des volumes de coupes en mars et que, s'il y a détérioration de l'écoulement des volumes de copeaux au cours des mois suivants, on peut corriger la situation en septembre à la baisse, toujours en tenant compte de l'écoulement des volumes de copeaux dans chacune des régions du Québec?

M. Chevrette: Exact.

M. Gauvin: Il faut que l'équilibre se crée d'une région à l'autre. C'est ce qu'on doit comprendre?

M. Chevrette: D'une région à une autre, non, c'est au global. C'est au global, non pas d'une région à une autre, parce qu'on ne gère pas la forêt québécoise région par région, on la gère globalement, et c'est par essence, naturellement. Il y a l'essence des copeaux de matières ligneuses en fonction des pâtes et papiers, puis des CAAF de feuillus, des CAAF de résineux, etc. Si vous voulez dire: Est-ce qu'on applique la mesure sur l'ensemble du Québec ou région par région? je vous dirai qu'on a une vision globale de la gestion de la forêt et on ne peut pas gérer la forêt pour une région. Est-ce qu'il y a des copeaux à Chibougamau qui sont de trop, par exemple, puis il en manquerait, supposément – je ne sais pas – dans l'Outaouais? Est-ce qu'on va permettre de couper dans l'Outaouais lorsqu'on a des surplus de copeaux dans d'autres régions? La réponse, c'est au global et non pas région par région.

M. Gauvin: C'était le sens de ma question, M. le ministre, à savoir que, et vous y avez en partie répondu, s'il y a des surplus dans une région, le ministre peut intervenir et que la distance est telle que ça permet le transport des copeaux pour aller alimenter le manque dans une autre région. En un mot, c'est une garantie que des surplus d'une région peuvent être écoulés dans l'autre région par l'intervention du ministre.

M. Chevrette: Oui, mais l'intervention, ce ne sera pas de dire: Achète tes copeaux là. Je vais essayer de vous l'expliquer le plus clairement possible. On accorde des volumes de bois. Il y a des scieries qui scient du bois, qui font des copeaux. C'est rendu un marché payant, les copeaux, c'est 115 $ la tonne, le prix moyen, et c'est allé jusqu'à 130 $ la tonne. Il y a donc des scieries qui s'en sont donné à coeur joie au moment où les prix étaient très élevés, puis qui stockent. Donc, il y a un problème du côté des scieries, effectivement. Il y a aussi, d'autre part, certaines compagnies qui ne veulent pas payer un prix raisonnable pour les copeaux. On les a donc amenées à faire une négociation. Il est demeuré à peu près trois points majeurs, dont deux où on pouvait anticiper des solutions entre les deux parties, mais ça n'a pas accroché.

Devant le fait... Et j'avais prévenu le député de Montmagny-L'Islet. S'ils ne s'entendent pas, ce n'est pas vrai qu'on va laisser stocker les cours de scieries de copeaux et qu'on va permettre en même temps d'abattre dans la forêt à qui mieux mieux, parce que le papier aussi avait des bons prix, vous le savez. Et il y a les intégrateurs ou les industries qui font à la fois leurs coupes, qui transforment, qui scient, qui utilisent leurs copeaux et qui ne veulent absolument pas acheter de scieries indépendantes. Ça, ça a des répercussions dans certaines régions du Québec.

Donc, comme ministre, je me donne le pouvoir de dire: Écoutez, il y a assez de copeaux au Québec que vous allez arrêter de couper un peu, vous allez diminuer vos coupes. C'est un peu ça, l'esprit de l'amendement. Et une fois par année ne me permettait pas de maintenir un équilibre. Avec deux fois, je pense que je peux maintenir un équilibre sur le marché. Si ça ne prend pas, on prendra d'autres moyens à part de ça. Je dois vous dire que, personnellement, j'ai demandé, par écrit, hier – je devrais faire la livraison de cette lettre aujourd'hui – aux compagnies de me donner les prix d'ici décembre, les prix des copeaux. Et ceux qui font du sciage, ils vont me donner le volume de copeaux. On va essayer d'avoir des données les plus précises, dorénavant. C'est des directives que je me suis permis de faire aux deux groupes en leur présence.

M. Gauvin: Ça va, M. le Président, pour le premier amendement.

Le Président (M. Pinard): Merci. Alors, l'amendement que nous avons jugé recevable, l'amendement de M. le ministre des Ressources naturelles à l'article 2 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

M. Chevrette: L'autre amendement que je vous dépose, M. le Président, de façon instanter et que je présente, c'est d'insérer, après l'article 4, le suivant:

4.1. L'article 86 de cette loi, modifié par l'article 11 du chapitre 37 des lois de 1995, est de nouveau modifié par l'insertion, dans la deuxième ligne – oui, c'est ça – et après le mot «année» des mots «et sous réserve d'une décision du ministre prise en application de l'article 46.1».

Il s'agit tout simplement d'harmoniser cet article avec la modification que j'ai faite tantôt, le premier amendement. Si le ministre va en application de l'article 46.1 en septembre, les permis annuels d'intervention qui ont été émis en avril devront être modifiés nécessairement.

M. Gauvin: Vous avez raison. M. le Président, je pense que M. le ministre a donné des explications globales, tantôt, qui couvraient au moins ces deux amendements-là. Adopté.

(6 h 20)

Le Président (M. Pinard): Alors, je juge l'amendement recevable. Donc, est-ce que l'amendement de M. le ministre des Ressources naturelles, à l'article 4, est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le ministre, est-ce que vous avez d'autres amendements?

M. Chevrette: Oui, j'en ai un autre, le dernier, M. le Président. Je vous le dépose. C'est un amendement... C'est d'insérer, après l'article 29, le suivant:

29.1 La modification à l'article 86 de la Loi sur les forêts, introduite par l'article 4.1 de la présente loi, est applicable à l'égard de tout permis d'intervention en vigueur le – et on indiquera la date de la sanction de la présente loi.

Il s'agit, encore là, d'une harmonisation par rapport au premier amendement que j'ai donné. Si la situation du marché de la matière ligneuse est actuellement problématique et s'il y a des surplus importants qui sont observés, on le sait tous, donc, le ministre pourrait être justifié – je dis bien pourrait – de recourir, dès cette année, à l'article 46.1 de la Loi sur les forêts, qui a été amendé par l'article 4.1 que j'ai déposé au tout début.

Le Président (M. Pinard): M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Gauvin: Oui. M. le Président, le sens de ma question tantôt, au premier amendement, touchait aussi cette partie-là. Est-ce que le ministre peut nous décrire la situation du marché des copeaux au moment où on se parle? Est-ce que, à la mi-juin 1996, au moment où on se parle, il se sentirait obligé d'intervenir déjà, là? Si la situation du marché ne change pas en septembre, est-ce que déjà il sent qu'il devrait intervenir?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Chevrette: Je peux vous donner la liste un peu de ce qui se passe présentement. Pour les scieries intégrées à des entreprises de pâtes et papiers, il y a la Domtar à Grand Remous, qui est en situation de surplus; Kruger à Parent; il y a Gérard Crête & Fils en Mauricie; Norbord inc. en Abitibi; Tembec inc. en Gaspésie et en Abitibi.

Pour les scieries non intégrées, il y a Barrette à Chapais; il y a Les Chantiers de Chibougamau; il y a Max Meilleur inc. dans la région de Montréal – quand on dit Montréal, c'est Laurentides aussi parce que les régions du ministère ne correspondent pas nécessairement aux régions administratives; matériaux Blanchet inc., Scieries Amos; il y a Scierie Landrienne en Abitibi-Témiscamingue; il y a scierie de Labrieville inc.; il y a le Groupe GDS inc.; il y a la coop Saint-Elzéar en Gaspésie et quelques autres petites.

Donc, il y a des surplus, effectivement, présentement, et il est fort possible, si ça ne change pas, que je sois appelé à intervenir en septembre.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Gauvin: M. le ministre a présenté la région de Montréal comme étant une région problématique qui a des surplus. Est-ce que le ministre responsable de la région de Montréal aurait le droit d'intervenir dans ce dossier-là?

Le Président (M. Pinard): M. le ministre.

M. Chevrette: Je dois vous dire que je suis convaincu que le ministre de la Métropole va laisser le ministre des Ressources naturelles se débrouiller tout seul dans ça.

Le Président (M. Pinard): M. le député.

M. Gauvin: Je pense, M. le Président, qu'on est en mesure d'adopter ce troisième amendement suite aux explications du ministre de la situation du marché des copeaux au Québec en juin 1996.

Le Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Montmagny-L'Islet. Alors, pour ma part, je considère l'amendement tout à fait recevable. Donc, je vais vous demander: Est-ce que l'amendement de M. le ministre des Ressources naturelles à l'article 29 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Pinard): Adopté. Alors, M. le ministre des Ressources naturelles, est-ce que vous avez d'autres amendements à nous proposer?

M. Chevrette: M. le ministre des Ressources naturelles n'a pas d'autres amendements à vous présenter. Il est prêt à faire son exposé de troisième lecture et pour lequel j'ai droit à une heure.

Le Président (M. Pinard): Alors, merci infiniment. Ça nous fera plaisir de vous entendre.

La commission plénière ayant...

M. Chevrette: M. le Président, si vous me permettez de remercier nos fonctionnaires, qui sont à notre disposition depuis quelque 4 h 30, 5 heures ce matin, je voudrais les remercier infiniment. Et mes attachés politiques, bien sûr, dévoués comme d'habitude.

Le Président (M. Pinard): Alors, la commission plénière ayant accompli son mandat, je mets fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé.

Pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance et d'entendre le ministre, je prie toutes les personnes qui doivent se retirer de bien vouloir le faire immédiatement.

Alors, nous suspendons quelques instants.

(Suspension de la séance à 6 h 25)

(Reprise à 6 h 26)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.

Alors, Mme la députée de Sherbrooke.

Mme Malavoy (présidente de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié les amendements proposés au projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives, et qu'elle les a adoptés.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée. Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Reprise du débat sur l'adoption

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons poursuivre maintenant le débat sur l'adoption du projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions sur l'adoption du projet de loi? M. le ministre des Ressources naturelles.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, il y a eu beaucoup d'efforts de faits pour la préparation de ce projet de loi là, par mon prédécesseur d'abord, le député d'Abitibi-Ouest, et par une foule de personnes qui ont participé à des consultations. C'est une première intervention d'un gouvernement en matière de forêt privée. Il ne faut pas oublier cela. C'est vraiment un partenariat qui va s'établir entre les municipalités, l'industrie, entre les différents intervenants du monde industriel de la forêt par... ce qu'on va créer, c'est des agences régionales. C'est les gens qui vont investir dans leur agence.

Je dois vous dire que ce qui me réjouit le plus – et ça réjouirait sans doute le ministre de l'Environnement – c'est qu'on introduit comme disposition préliminaire le développement durable dans le domaine forestier. L'État veut favoriser précisément un développement durable à l'intérieur de la forêt privée.

Donc, M. le Président, je suis très heureux d'être le parrain de cette loi, et je suis persuadé qu'avec les amendements on s'est donné ce soir – ou ce matin, plutôt, je m'excuse – un pouvoir d'intervention, encore une fois, pour faire en sorte que tous les intervenants y trouvent leur compte à partir de cette ressource naturelle qu'est la forêt.

Je remercie le député de Montmagny-L'Islet d'avoir contribué en commission parlementaire à la bonification du projet de loi et je remercie mes collègues également de la patience qu'ils ont démontrée jusqu'à 6 h 30 ce matin, pour adopter cette loi qui est un outil de développement économique non seulement pour le Québec, mais pour les régions du Québec.

(6 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre des Ressources naturelles. Je cède maintenant la parole au député de Montmagny-L'Islet. M. le député.


M. Réal Gauvin

M. Gauvin: M. le Président, l'adoption finale du projet de loi n° 4 est souhaitée, comme le mentionnait M. le ministre. Je pense que c'est attendu, l'application de ce projet de loi, dans la plupart des régions au Québec, et le point important du projet de loi, c'est la création d'agences régionales. Pour chacune des régions, l'agence régionale qui va être créée, formée au niveau d'une MRC ou de plusieurs MRC d'une région où la situation forestière, où le domaine forestier se ressemble, et je prends comme exemple – je l'ai aussi pris en commission parlementaire – la forêt des Appalaches, au niveau de la Côte-Sud du Québec, qui couvre les comtés de Bellechasse, Montmagny-L'Islet, Kamouraska et une partie du Témiscouata, je pense que c'est un exemple où, déjà, il y avait des plans d'aménagement en place pour faire en sorte que la forêt puisse alimenter les scieries pour plusieurs années.

Et je pense que M. le ministre vient d'y faire allusion, ce qu'il y a d'intéressant, aussi, dans le projet de loi n° 4, c'est que les plans d'aménagement visent... Le principe de ce projet de loi là est de développer un aménagement durable pour toute la forêt au Québec, du moins dans le secteur privé, là où il y avait souhait de voir mettre en place ces agences régionales, d'une part.

On vient d'adopter ici, en commission plénière, justement des amendements au projet de loi qui donnent le pouvoir au ministre d'intervenir selon l'évolution de la commercialisation des copeaux et des volumes de copeaux en surplus, je pense, ce qui était souhaitable aussi, dépendamment, justement, de quelle façon le ministre va se servir de ses pouvoirs dans de telles conditions. On sait qu'en 1996, déjà, il semble se développer des surplus dans le domaine du copeau, ce qui commence à inquiéter certaines scieries de différentes régions au Québec.

Donc, encore une fois, M. le Président, je pense qu'il est souhaitable que ce projet de loi soit adopté dans les meilleurs délais pour permettre justement à ces agences de participer au développement de chacune des régions du Québec.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Montmagny-L'Islet.


Mise aux voix

Puisqu'il n'y a plus d'intervenant sur ce projet de loi, le projet de loi n° 4, Loi modifiant la Loi sur les forêts et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader du gouvernement.

M. Bélanger: M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à très bientôt, c'est-à-dire à 10 heures ce matin.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

(Fin de la séance à 6 h 32)


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