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Version finale

34e législature, 3e session
(17 mars 1994 au 17 juin 1994)

Le lundi 13 juin 1994 - Vol. 33 N° 36

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Quatorze heures neuf minutes)

Le Président: Mmes, MM. les députés! Mmes, MM. les députés!

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Alors, présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je vous demanderais d'appeler l'article a du feuilleton, M. le Président.


Projet de loi 37

Le Président: Alors, en sollicitant votre attention, s'il vous plaît! Alors, à l'article a du feuilleton, M. le leader du gouvernement et ministre de l'Environnement et de la Faune présente le projet de loi 37, Loi modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale. M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur l'Assemblée nationale pour permettre au Bureau d'accorder, par règlement, à un parti politique représenté à l'Assemblée nationale à la suite de la dernière élection générale et à un député indépendant, des sommes à des fins de recherche et de soutien.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

(14 h 10)

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Article b du feuilleton, M. le Président.


Projet de loi 34

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre responsable de l'application des lois professionnelles présente le projet de loi 34, Loi sur l'acupuncture. Alors, M. le ministre.


M. Jacques Chagnon

M. Chagnon: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le projet de loi 34. Le projet de loi prévoit la constitution d'une corporation professionnelle dont les membres exercent, à titre exclusif, la profession d'acupuncteur. À cet égard, il définit ce que constitue l'acupuncture et en réglemente l'exercice.

Par ailleurs, le projet de loi prévoit des mesures visant l'intégration dans cette nouvelle corporation professionnelle des personnes qui, lors de l'entrée en vigueur de la loi, seront inscrites au registre des acupuncteurs tenu par le secrétaire de la Corporation professionnelle des médecins du Québec en application de la Loi médicale. Il maintient, dans la Loi médicale, le pouvoir du bureau de cette corporation de déterminer des règles relatives à la formation des médecins qui désirent exercer l'acupuncture.

Le projet de loi prévoit également des modalités d'intégration des diverses catégories de personnes en fonction de leur niveau de formation au jour de l'entrée en vigueur de la loi.

Enfin, le projet de loi prévoit des mesures visant à assurer le fonctionnement de la nouvelle corporation dès l'entrée en vigueur des dispositions prévoyant sa formation. Voilà, M. le Président.


Mise aux voix

Le Président: Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Consentement.

Le Président: Adopté? Donc, adopté.


Dépôt de documents

Maintenant, dépôt de documents. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapport annuel du Conseil de la santé et du bien-être

Mme Robillard: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1993-1994 du Conseil de la santé et du bien-être.

Le Président: Alors, ce document est déposé. Ce rapport est déposé. Maintenant, M. le ministre de la Justice.


Rapport annuel de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles

M. Lefebvre: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel 1993-1994 de la Commission d'appel en matière de lésions professionnelles.

Le Président: Je vous remercie. Ce rapport est donc déposé. Vous avez un autre rapport, M. le ministre?


Rapport annuel de la Commission des droits de la personne

M. Lefebvre: J'ai un deuxième rapport, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer également le rapport annuel 1993 de la Commission des droits de la personne.

Le Président: Ce rapport est donc déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Maintenant, dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de l'aménagement et des équipements et député de Lévis.


Étude détaillée du projet de loi 9

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 8 et 10 juin 1994 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 9, Loi sur le ministère de l'Environnement et de la Faune et modifiant diverses dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé. Vous avez un autre rapport, M. le député?


Étude détaillée du projet de loi 151

M. Garon: M. le Président, je dépose le rapport de la commission de l'aménagement et des équipements qui a siégé les 3, 4, 5, 10, 12, 19 et 26 mai et les 8 et 10 juin 1994 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 151, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.

Le Président: Ce rapport est également déposé. Je vous remercie. Maintenant, M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Fabre.


Étude détaillée du projet de loi 4

M. Joly: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé le 10 juin 1994 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 4, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l'Énergie et des Ressources et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi a été adopté avec des amendements. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président: Alors, ce rapport est déposé. Je vous remercie, M. le député. Maintenant, M. le président de la commission des institutions et député de Sauvé.


Étude détaillée du projet de loi 7

M. Parent: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des institutions qui a siégé le 9 juin 1994 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 7, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires internationales, la Loi sur le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et d'autres dispositions législatives. Le projet de loi, M. le Président, a été adopté avec un amendement.

Le Président: Je vous remercie, M. le député. Ce rapport est donc déposé.

Maintenant, dépôt de pétitions.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Questions et réponses orales

Nous allons donc procéder à la période de questions et réponses orales des députés. Je reconnais, en première question principale, M. le député de Portneuf.


Impact des compressions budgétaires sur les emplois dans la fonction publique

M. Bertrand: M. le Président, les grandes manoeuvres de démantèlement de l'État, à travers le Québec, sont en cours, alors que les ministères et organismes doivent transmettre, ces jours-ci, au Conseil du trésor, une série de compressions qui porteront sur 2 % de la masse salariale, 30 % des dépenses de fonctionnement et 10 % des dépenses de transfert. Des têtes vont tomber, M. le Président. D'ailleurs, la présidente du Conseil du trésor disait, vendredi dernier, qu'elle ne pouvait pas réduire le déficit sans toucher à quelqu'un. Par cette offensive, le gouvernement libéral crée le désordre dans l'appareil gouvernemental, diminue la qualité des services et tente de susciter un contexte politique pour démanteler davantage l'État et provoquer ainsi d'autres mises à pied à travers tout le Québec. Et c'est ce même gouvernement qui nous parle de création d'emplois.

Ma question s'adresse à la présidente du Conseil du trésor: Est-ce qu'elle peut nous dire quel sera le nombre de pertes d'emplois, directes et indirectes, à travers tout le Québec, comme suite à ces compressions dans la fonction publique?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, vous savez fort bien que, l'année dernière, on a réduit de près de 2300 le nombre d'effectifs. Ça ne signifiait pas des pertes d'emplois comme telles: il y a eu de la réaffectation, vous savez qu'il y a des postes vacants, il y a aussi des personnes qui quittent la fonction publique. Nous avons réussi, bien sûr, à réaffecter ces personnes.

Cette année, la commande est supérieure, étant donné le dernier budget, avec 2 % supplémentaires d'effectifs. Nous verrons, au fur et à mesure, qu'est-ce que ça peut représenter. Jusqu'à maintenant, nous réussissons à contenir et à réaffecter les personnes. Et je dois dire, M. le Président, qu'il ne faut pas, non plus, alarmer tous les fonctionnaires en leur disant qu'ils vont perdre leur emploi. Ce que le gouvernement demande, c'est d'avoir suffisamment de souplesse et de flexibilité pour réaffecter les personnes, les réorienter là où les besoins sont.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Bertrand: Est-ce que la ministre peut, au moins, nous dire si cette offensive contre le secteur public sera généralisée à travers tout le Québec, d'une manière générale et aveugle, sans tenir compte de la situation économique passablement dramatique des régions, par exemple, et, notamment, la région de la Gaspésie, avec plus de 26 % de chômage?

Le Président: Alors, Mme la ministre.

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, nous sommes conscients que, actuellement, bien sûr qu'il y a des personnes qui sont inquiètes, parce que ces personnes ont des familles à faire vivre. Et, aussi, bien sûr que, quand vos emplois peuvent être mis en cause, ça dérange toujours et ça peut affecter certaines personnes, et nous sommes très au fait de ça. Cependant, nous voulons les rassurer. Si nous pouvons avoir cette flexibilité, cette mobilité qui nous permettra de les réaffecter, bien sûr que nous pouvons, à ce moment-là, dire que le choc ou la réaffectation permettra peut-être... on n'aura pas besoin, finalement, de mettre à pied ces personnes.

Cependant, quant à savoir qui ça va affecter exactement, si ça va affecter les régions ou autre chose, c'est à chaque ministère, à l'intérieur de ses effectifs, de décider là où on doit faire des compressions. Il n'appartient pas au Conseil du trésor de décider pour chacun de ces ministères, mais bien aux ministères de le faire.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Terrebonne.


Plan de réduction des dépenses à la Commission des services juridiques

Mme Caron: Merci, M. le Président. Suite aux nouvelles demandes de compressions budgétaires par le ministère de la Justice, le président de la Commission des services juridiques, Me Pierre Lorrain, déposait son plan de réduction de dépenses. Les coupures, M. le Président, pourraient se traduire par la fermeture de 35 bureaux à temps plein et 34 bureaux à temps partiel situés dans toutes les régions du Québec, à l'exception de Montréal. Catégorique, le président mentionnait: La réalisation des objectifs de compressions qui nous ont été transmis par le ministère de la Justice serait contre-productive et désastreuse pour le réseau d'aide juridique. La réalisation d'économies par l'exécution de ce plan d'affaires non seulement est impossible, mais des dépenses supplémentaires seront encourues.

Puisqu'il faut respecter les conventions collectives qui se terminent en juin 1995, puisqu'il faut respecter la signature aussi des loyers et puisque chaque coupure au niveau du réseau public se traduit par une augmentation au niveau du réseau privé, est-ce que le ministre de la Justice compte associer son nom au démantèlement du réseau de l'aide juridique?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Lefebvre: M. le Président, c'est un gouvernement libéral qui, en 1972, a mis en place le système d'aide juridique que l'on connaît aujourd'hui, et je veux tout de suite indiquer à la population et également à ceux et celles qui oeuvrent à l'intérieur du régime d'aide juridique que ce n'est pas un autre gouvernement libéral qui va l'abolir.

Une voix: Bravo!

Une voix: On a de la cohérence, nous autres.

M. Lefebvre: M. le Président, Mme la députée de Terrebonne aurait dû lire le deuxième paragraphe de la lettre du président de la Commission qui dit ceci: «La Commission souscrit entièrement à l'objectif gouvernemental de réduire les dépenses publiques».

Des voix: Ah!

M. Lefebvre: Ça, c'est le premier élément que pointe le président de la Commission des services juridiques, à savoir que l'objectif ultime du gouvernement libéral est correct et qu'il y souscrit.

Cependant, M. le Président, je veux tout de suite ajouter qu'il y a une commande qui a été effectivement passée au président de la Commission des services juridiques, à qui on a demandé de soumettre un projet quant à la réduction, quant à des compressions possibles de la somme de 108 000 000 $ dont dispose présentement l'aide juridique. Nous sommes à évaluer la proposition du président Lorrain, sauf que je conclus en disant, parce que j'imagine qu'il y aura une question additionnelle, que la décision finale sera prise par le ministre et non pas évidemment par le président de la Commission des services juridiques.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre se rappelle que les coupures de son gouvernement libéral, de 1992-1993, au niveau des services juridiques, coupures de 3 700 000 $, se sont traduites finalement, à cause du réseau privé, par des augmentations de 14 200 000 $, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Lefebvre: M. le Président, il y a des compressions auxquelles la Commission des services juridiques est confrontée, comme d'autres organismes. Le président Lorrain soulève des éléments particuliers sur lesquels on se penche présentement au ministère de la Justice. Ce que je veux indiquer, M. le Président, c'est que, partout au Québec, on continuera à donner des services d'aide juridique. Ce qu'il est également extrêmement important de rappeler à ceux et celles qui nous écoutent, c'est que je n'ai pas l'intention d'utiliser ce que le Parti québécois a introduit dans la loi, en 1982, ce qui pourrait être, si on paniquait, une solution aujourd'hui – exiger des justiciables des frais d'ouverture de dossier. Jamais on ne se rendra là, M. le Président. Ça ne fait pas partie des stratégies du ministère de la Justice.

(14 h 20)

Alors, essentiellement, on travaille sur un plan de réduction. Le président de la Commission des services juridiques réagit – c'est légitime, c'est correct – à la demande du ministère. D'ici la fin de la semaine, M. le Président, on aura arrêté une décision finale, mais, essentiellement, on va protéger les plus démunis quant à l'accessibilité à l'aide juridique au Québec.

Des voix: Bravo!

Le Président: Toujours en question complémentaire.

Mme Caron: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre s'engage non seulement à maintenir les services, mais tous les bureaux? Parce que tous les bureaux des services d'aide juridique, ce sont des bureaux, partout en région, où il y a un seul ou deux avocats, M. le Président. Est-ce qu'il s'engage à maintenir tous les bureaux?

Le Président: M. le ministre.

M. Lefebvre: L'engagement que je prends, M. le Président, c'est d'évaluer toute la situation en tenant compte essentiellement des besoins de la population et, ultimement, l'engagement, il est clair, c'est de continuer à donner des services d'aide juridique à tous les justiciables, partout au Québec.

Une voix: Sur tout le territoire.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Lévis.


Politique maritime fédérale et contrats de la MIL Davie

M. Garon: M. le Président, même si on sait depuis longtemps qu'au cours des neuf dernières années le Québec s'est fait avoir 100 noeuds à l'heure en matière de construction navale, les chiffres rendus publics en fin de semaine par le Comité Action MIL Davie sont accablants pour le régime fédéral. M. le Président, depuis 1986, le fédéral a donné des contrats de construction navale, dans l'Est du Canada, totalisant 13 430 000 000 $ si on tient compte des contrats liés au projet Hibernia. Sur ce total, la MIL Davie, le seul chantier maritime majeur qu'il reste au Québec, a reçu des commandes fédérales totalisant 1 094 000 000 $, soit 8 % du total. Ces contrats fédéraux donnés sans soumissions ou avec des soumissions bidon ont été l'instrument d'une pseudo-rationalisation qui ne s'est faite qu'au Québec, parce que, dans les Maritimes, le fédéral, au lieu de rationaliser, a financé la construction d'un nouveau chantier tout neuf et le sauvetage de tous ceux qui agonisaient.

Ma question au premier ministre qui, du temps où il était le ministre de l'Industrie et du Commerce, nous disait: Ce n'est pas grave de ne pas avoir les frégates, on va avoir les sous-marins nucléaires; puis, ce n'est pas grave de ne pas avoir les sous-marins nucléaires, on va avoir Hibernia: Le premier ministre, est-il capable, cet homme vigoureux que nous avons eu comme ministre de l'Industrie et du Commerce, de comprendre les chiffres que je viens de citer et qui montrent noir sur blanc à quel point le Québec s'est fait avoir depuis que les libéraux sont au pouvoir, et surtout pendant la période où c'est lui qui était responsable du dossier?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: Toujours la même nostalgie du député de Lévis, M. le Président. La nostalgie! On s'en souvient d'avoir réclamé la construction de navires sur lesquels le député a perdu sa chemise, genre de chose qu'il m'apparaît qu'on doit éviter. Ce sur quoi... Bon, le député feint d'ignorer ce dont il s'agit, M. le Président. Enfin, on fera l'histoire sur les contrats de frégates dont il se vantait...

Le Président: Bon! Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Donc, à l'ordre, s'il vous plaît! Alors, M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, ce sur quoi on peut mettre le doigt, c'est le manque de rigueur du député de Lévis, de son parti et de son chef lorsqu'il est question de calculer où sont les avantages et où sont les bénéfices. J'en veux simplement comme exemple la nouvelle querelle que vient d'inventer le chef de l'Opposition sur le nombre d'emplois qui auraient été créés au Québec depuis cinq mois. Il y a 50 000 Québécois, M. le Président...

Le Président: Un instant! Donc, Mmes et MM. les députés! M. le premier ministre, à la question du député de Lévis, s'il vous plaît.

M. Johnson: M. le Président, nous tentons, et le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie l'a indiqué plus d'une fois ici même à l'Assemblée nationale, de faire en sorte que le chantier maritime de Davie soit occupé, qu'il y ait des commandes, que des milliers plutôt que des centaines de travailleurs de la région puissent y trouver du travail pour eux et pour leur famille. C'est ce qui est en cause. Il y a un développement d'un plan d'affaires qui a été arrêté, qui a été examiné par les actionnaires, et c'est la base sur laquelle nous devons travailler à créer des emplois.

Moi, je veux bien que le député de Lévis fasse preuve de nostalgie, mais je lui annonce, de même qu'à son chef et à son parti, que l'avenir commence aujourd'hui, pas hier.

Le Président: En question complémentaire.

M. Garon: M. le Président, dans cette perspective d'avenir dont vient de parler le premier ministre, est-il au moins capable d'obtenir d'Ottawa le colossal contrat du nouveau traversier des Îles-de-la-Madeleine, qui représentera 0,57 % des contrats donnés par le fédéral dans les Maritimes depuis neuf ans et dont, selon la SGF, dépend présentement la mise en oeuvre du plan d'affaires, justement, de la MIL Davie, 0,57 %, un demi de un pour cent de ce qui a été donné dans les Maritimes? Est-ce que le premier ministre est capable de faire ça, à défaut de sous-marins nucléaires?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: D'abord, M. le Président, à l'égard des sous-marins nucléaires dont veut nous entretenir le député de Lévis, on doit constater que ce n'est pas le marché qui ferait en sorte que ce chantier maritime pourrait avoir quelques contrats de cette nature, mais que, si jamais ça existait avec le gouvernement du Parti québécois, avec ses politiques de désarmement, d'antinucléaire, jamais ça se ferait au Québec avec vous autres de toute façon, même si le marché était là. Première des choses.

(14 h 30)

Deuxième des choses, ce qui est en cause, c'est la capacité du chantier maritime d'obtenir des contrats, oui, mais à partir d'une base qui fait en sorte que c'est davantage concurrentiel. On connaît les conditions qui ont été énoncées par la direction; on connaît les conditions des actionnaires; on connaît les conditions dont nous avons parlé, comme gouvernement. Il est entendu que tous ceux qui sont intéressés à la relance du chantier doivent faire leur bout de chemin; le gouvernement entend le faire. Les actionnaires, la direction et les employés, bien évidemment, sont en voie de négocier, avec la direction, un nouveau partenariat qui ferait en sorte qu'on créerait davantage d'emplois dans la région de Québec.

M. le Président, si ce sont les pourcentages qui intéressent le député de Lévis, je lui dis, quant à moi, que, lorsqu'on calcule le nombre d'emplois qu'il faut créer dans la région – et que nous devons créer, au Québec, de notre côté – lorsqu'on regarde le nombre d'emplois qui ont été créés depuis cinq mois, on s'occupe de cinq des cinq derniers mois, pas de quatre des cinq derniers mois, comme le chef de l'Opposition.

Le Président: En question complémentaire, toujours.

M. Garon: M. le Président, comment un gouvernement qui prétend avoir deux raisons de vivre – un, le statu quo dans ses relations avec le fédéral et, deuxièmement...

Le Président: Oui. Alors... Oui, un instant! Un instant, s'il vous plaît! Un instant! Alors, je vous invite à poser une question sans préambule, M. le député. Sans préambule. Allez-y.

M. Garon: M. le Président, comment un gouvernement qui prétend avoir deux raisons de vivre – un, le statu quo dans ses relations avec le fédéral et, deuxièmement, l'emploi – peut-il ne pas sombrer...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, question de règlement.

Le Président: À l'ordre! M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Strictement – parce qu'on ne l'a pas encore fait cette semaine – rappeler à mon bon ami, le député de Lévis, les dispositions de l'article 78 du règlement: «Il est permis de poser une ou plusieurs questions complémentaires. Elles doivent être brèves, précises et sans préambule.» Ce sont trois critères auxquels vous devez vous en tenir, M. le député.

Le Président: O.K. C'est correct. S'il vous plaît, là! Alors, votre question, M. le député de Lévis.

M. Garon: C'est ça!

Le Président: Allez-y!

M. Garon: Comment un gouvernement qui prétend avoir deux raisons de vivre...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Posez votre question. C'est ça.

M. Garon: M. le Président, mais, c'est ça, ma question! Alors, comment un gouvernement qui prétend avoir comme raisons de vivre le statu quo et le plein emploi...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président...

Le Président: O.K. Oui. Bon, merci. Alors, je vous invite à poser votre question. Vous faites... Oui, je comprends, madame, mais je vais le reconnaître en question principale, si on fait un préambule déguisé en ce sens-là. Alors, vous avez déjà énoncé vos propos. Enchaînez votre question, M. le député de Lévis, il n'y aura pas de problème. Allez-y!

M. Garon: M. le Président, étant donné ces deux objectifs du gouvernement, comment ne peut-il pas sombrer dans la schizophrénie, lorsqu'il est aussi évident que le régime fédéral signifie perte d'emplois et chômage pour des milliers de travailleurs québécois?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Johnson: M. le Président, comment, sauf par le manque total de rigueur, est-ce que le député de Lévis peut faire un lien entre le marché mondial – par exemple, pour les sous-marins nucléaires ou le niveau de militarisation du monde occidental – et la performance d'un chantier maritime, en particulier, et assigner ça à une option constitutionnelle? Il y a seulement le député de Lévis, dans sa tête, qui se comprend, et c'est seulement le député de Lévis qui s'est promené pendant des semaines avec un chèque de 11 000 000 $ du fédéral. On a perdu l'intérêt là-dessus, des dizaines de milliers de dollars, grâce à vous, des dizaines de milliers de dollars. Alors, franchement!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Lévis, une question de règlement?

M. Garon: Oui. Est-ce que le premier ministre peut rétracter ses paroles, parce que le député de Lévis...

Le Président: Non, non, non. Écoutez! Écoutez! Écoutez, M. le député de Lévis, alors ce n'est pas une question de règlement, à ce moment-ci. S'il y a une divergence sur un... Écoutez, là, si vous avez une divergence par rapport aux propos qu'a énoncés le premier ministre sur une question de fait, vous pourrez le corriger par une question de fait personnel, mais ce n'est pas une question de règlement qui peut s'appliquer à ce moment-ci ni une question de privilège.

Alors, question principale, M. le... À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député! Alors, M. le député, s'il vous plaît! Alors, sur une question principale maintenant, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.


Période de recensement en vue de la prochaine élection générale

M. Chevrette: Merci, M. le Président. En fin de semaine, au conseil national des libéraux, régnait, nous dit...

Des voix: ...

Le Président: Alors, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, vous avez vu comme le mot «national» leur fait peur?

Le Président: Alors, j'en appelle à votre collaboration, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Donc, on nous rapporte qu'il y avait une véritable ambiance électorale; publicité, vidéo, etc. J'avouerai, M. le Président, que j'ai de la misère à suivre le premier ministre qui disait avoir hâte aux élections. Quand on sait que c'est lui qui décide et qu'on lui en demande depuis février... D'ailleurs, plusieurs personnes nous disaient hier, quand on les rencontrait: Comment peut-il avoir si hâte puis ne pas les déclencher, alors qu'il a eu le temps et la chance de le faire, abondamment?

On sait que le 7 juillet prochain, M. le Président, le premier ministre devra déclencher des partielles au moins dans Rivière-du-Loup, le 10 dans Marquette, le 11 dans Charlesbourg, le 12 juillet dans Chomedey, et le premier ministre devra donc soit déclencher ces partielles ou bien décréter une élection générale. Or, compte tenu du calendrier électoral, M. le Président, ces échéances feront en sorte que le recensement aura lieu les 25, 26, 27 et 28 juillet, soit en pleine période de vacances pour des dizaines, pour ne pas dire des centaines de milliers de Québécois qui seront en vacances.

Ma question au ministre délégué à la Réforme électorale: Compte tenu que tout l'esprit de notre Loi électorale vise la participation des citoyens au scrutin, compte tenu également que le Québec, à ce chapitre, obtient une très bonne performance en termes de participation si l'on se compare aux États-Unis, par exemple, et donc que la tenue des élections générales pour un 29 août, avec un recensement en pleine période de vacances, est un scénario qui est de nature à favoriser la...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. S'il vous plaît! Pour votre question, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Quand on est arrêté quatre fois, M. le Président...

Une voix: ...

Des voix: Wo! Wo!

Le Président: J'en appelle à la collaboration des collègues, s'il vous plaît. Alors, je vous invite à poser votre question.

M. Chevrette: Qu'on nous la laisse poser, M. le Président, ça va aller plus vite. M. le Président, je demande donc au ministre: Est-ce que le ministre délégué à la Réforme électorale, chargé d'appliquer à la fois la lettre et l'esprit de cette loi, a avisé le Conseil des ministres de tout l'impact que peut avoir un recensement en pleine période intensive de vacances pour des dizaines et des centaines de milliers de Québécois?

Le Président: Alors, M. le ministre délégué à la Réforme électorale.

M. Lefebvre: M. le Président, poser la question c'est y répondre. Le député de Joliette et leader de l'Opposition officielle a pointé certaines difficultés auxquelles on ferait face si ces hypothèses se réalisaient. Mais, au moment où on se parle, et je lui rappelle l'article qu'il connaît très bien, 77, paragraphe 3°, il ne s'agit que d'hypothèses ou de suppositions. Je lui rappelle également la responsabilité qu'a le Directeur général des élections d'administrer la Loi électorale et de prendre les décisions en temps et lieu. Si jamais, par hypothèse, il devait y avoir des élections complémentaires, le Directeur général des élections aurait une responsabilité bien évidente.

Mais c'est encore, au moment où on se parle, purement hypothétique, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que le ministre est bien conscient que ce qu'il nous dit, M. le Président, c'est que c'est le Directeur général des élections qui a la responsabilité d'appliquer la lettre et l'esprit de la loi? La question est claire: Est-ce que le ministre est conscient qu'un recensement à la période la plus intensive de vacances des citoyens québécois risque de priver ces derniers du droit le plus fondamental, de voter?

(14 h 40)

Le Président: M. le ministre.

M. Lefebvre: Je suis parfaitement conscient de ce que soulève le député de Joliette, M. le Président, mais la question ne se pose pas pour le moment. C'est ça ma réponse. Il s'agit d'hypothèses, de spéculations et de suppositions.

Une voix: Demain.

Le Président: En question principale, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.


Orientations du gouvernement en matière d'aménagement de territoire

M. Gendron: Oui, M. le Président. Les orientations du gouvernement libéral en matière d'aménagement du territoire, rendues publiques vendredi dernier, ont été accueillies avec déception par les principaux intéressés responsables des schémas d'aménagement, c'est-à-dire les MRC du Québec. En effet, alors que la très grande majorité des intervenants municipaux réclament tous avec raison davantage de décentralisation, le document du gouvernement s'inscrit à contre-courant de cette tendance, en favorisant même l'exode régional, selon l'UMRCQ.

En fait, les orientations gouvernementales renvoient les MRC à leur rôle premier, soit l'élaboration des schémas d'aménagement, en passant complètement sous silence tout ce qui pourrait ressembler à une véritable politique de décentralisation, notamment au chapitre du développement économique régional.

Question, M. le Président, au ministre des Affaires municipales: Est-ce que le ministre des Affaires municipales peut expliquer à la population du Québec et aux membres de cette Assemblée pourquoi son gouvernement refuse de proposer des mesures tangibles et concrètes liées à une véritable décentralisation de pouvoirs en faveur des municipalités du Québec et des MRC?

Le Président: Alors, M. le ministre des Affaires municipales.

M. Ryan: M. le Président, lors d'une rencontre que j'ai eue vendredi matin avec les préfets des MRC de tout le Québec, réunis à Québec, j'ai eu l'occasion de leur expliquer ce document dont vient de parler le député d'Abitibi-Ouest et de rectifier une fausse impression qui avait été créée dans un article paru le jour même dans Le Soleil . Ce document a pour but de définir les orientations du gouvernement en matière d'aménagement de territoire. Je l'ai expliqué aussi clairement que j'en suis capable aux délégués. Il y a eu plusieurs interventions après ma présentation – malheureusement, le député d'Abitibi-Ouest n'était pas là – et tout le monde, tous ceux qui se sont levés ont félicité le gouvernement de l'orientation et de la teneur de ce document. On a constaté que ceux qui avaient fait la critique au nom de l'UMRCQ, avant même d'avoir entendu parler de ce qui était dedans, sont passés à côté.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Gendron: Oui. Est-ce que le ministre ne convient pas, contrairement à son appréciation trop rapide... Ce n'est pas les témoignages que j'ai entendus de ceux qui étaient là. Est-ce que vous ne convenez pas que le moment est venu de considérer ce lieu qui s'appelle la MRC comme autre chose qu'une structure pour donner suite à ce qui était son mandat il y a 10 ans, l'aménagement du territoire, et qu'entre-temps elles souhaitent, les MRC, avoir des pouvoirs additionnels qu'elles pourraient exercer convenablement? Et c'est ça, de la décentralisation. En quoi, dans le document que vous avez annoncé, il y a quelque mesure de décentralisation que ce soit?

Le Président: M. le ministre.

M. Ryan: M. le Président, je complète. Ce matin, je participais à une réunion de la Table de concertation du Montréal métropolitain. C'était la troisième depuis la création de la Table, en avril. Les personnes qui étaient là avaient reçu une copie du document il y a à peu près trois semaines, lors de la dernière réunion, puis tout le monde a trouvé que c'est un document qui va être extrêmement utile pour la préparation des schémas d'aménagement. C'est l'objet du document, encore une fois.

L'autre objet, là, la décentralisation des fonctions gouvernementales, sera la matière d'une autre présentation à une table spéciale dont le premier ministre annonçait la création il y a à peu près trois semaines, à l'occasion du congrès de l'UMQ. C'est un autre document, et le mandat de cette table sera l'objet d'un article à l'ordre du jour de la prochaine rencontre de la Table Québec-municipalités qui aura lieu avant la fin du mois de juin. Il faut situer chaque chose à son niveau propre. Que le député ne soit pas inquiet, chaque chose sera traitée clairement et efficacement.

Le Président: En question principale, M. le député de La Prairie.


Surplus et congés de cotisation dans les régimes complémentaires de rentes

M. Lazure: Merci, M. le Président. La semaine dernière, dans un jugement touchant certains régimes complémentaires, qu'on appelle régimes privés de retraite, de l'Alberta, la Cour suprême a statué que les employeurs peuvent suspendre leur cotisation, à moins que le régime de retraite stipule autre chose, selon le principe: ce qui n'est pas interdit est permis. La Cour suprême, cependant, pense qu'il est nécessaire que les provinces légifèrent sur la question des surplus et des congés de cotisation.

La question au ministre de la Justice: Puisque, au Québec, les congés de cotisation touchent près de 25 % des régimes complémentaires de rentes et qu'ils privent les employés, ces congés de cotisation privent les employés de 160 000 000 $ par année, puisque c'est une façon détournée de s'accaparer de surplus, est-ce que le ministre de la Justice entend inciter sa collègue responsable de la Régie des rentes à se conformer aux recommandations de la Cour suprême et à légiférer le plus vite possible à la fois sur les surplus et sur les congés de cotisation?

Le Président: Alors, M. le ministre de la Justice.

M. Lefebvre: Alors, M. le Président, ce que je veux indiquer très clairement au député de La Prairie, c'est que, si par hypothèse, Mme la ministre responsable de la Sécurité du revenu requiert du ministre de la Justice ou de son sous-ministre une opinion sur l'interprétation qu'il faille donner au jugement auquel il a fait référence, c'est évident que je vais m'empresser de donner cette opinion à Mme la ministre.

Le Président: En question complémentaire.

M. Lazure: Oui, M. le Président, pour compléter l'opinion que le ministre de la Justice pourrait transmettre à sa collègue, est-ce qu'il pourrait lui rappeler qu'elle a actuellement un projet de loi, le projet de loi 20, qui vient amender la loi des régimes de rentes, justement? Et est-ce qu'il ne serait pas opportun d'inclure, dans ce projet de loi 20 qui est à l'étude actuellement, des amendements pour mettre une fin à l'ambiguïté, la confusion qui régnent sur les surplus et sur les congés de cotisation?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Lefebvre: M. le Président, j'ajoute à la réponse que j'ai donnée tout à l'heure que, si, par hypothèse, Mme la ministre me demande un avis, je vais lui suggérer d'ajouter les deux questions que le député de La Prairie vient de nous suggérer.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.


Subvention à l'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts

Mme Marois: Merci, M. le Président. L'Association québécoise pour l'évaluation d'impacts est l'hôte, à Québec, dès demain matin, jusqu'au 18 juin prochain, d'un important congrès international portant sur l'évaluation environnementale. Le ministère de l'Environnement et de la Faune s'est désisté et refuse d'accorder la subvention de 10 000 $ pourtant promise à l'organisme. De plus, le ministre invité à y prendre la parole décline l'invitation et y délègue le député démissionnaire de Louis-Hébert.

Pourquoi le ministre de l'Environnement et de la Faune a-t-il décidé de retirer son appui à l'Association québécoise, alors que ses collègues des Ressources naturelles et des Affaires internationales appuient financièrement le projet? Est-ce qu'il s'agit là de représailles à l'égard de l'Association qui a critiqué le projet de loi 61, adopté en catastrophe et en urgence, M. le Président, et qui n'est cependant toujours pas en vigueur?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je remercie Mme la députée pour sa question. Les subventions, comme telles, font l'objet de réévaluation au ministère de l'Environnement et de la Faune. Nous avons, dans un premier temps, privilégié les petits projets qui étaient inscrits dans le cadre du Mois de l'environnement. Comme j'ai eu l'occasion de l'indiquer à cette Chambre, les chèques ont été versés. Il s'agissait de chèques qui, pour la plupart, sont inférieurs à 1000 $, mais qui rejoignent, dans chacune des régions du Québec, nos militants qui s'occupent d'écologie.

Maintenant, on avait à privilégier d'autres programmes. Je ne sais pas si madame aurait souhaité que le ministre ampute le programme Action-Environnement. J'ai choisi également là de maintenir le programme Action-Environnement. C'est un programme de 1 000 000 $ qui rejoint également, dans chacune des circonscriptions électorales, dans chacune des régions du Québec, les groupes écologiques. Malheureusement, ces choix de privilégier les militants de la base nous ont amenés, sur certains organismes d'envergure plus nationaux ou internationaux, à demander à ces gens de composer avec d'autres ressources, ce qu'ils ont fait. Ils se sont adressés à d'autres collègues d'autres ministères, qui ont pu, à ce moment-là, affecter des ressources minimes. Vous avez parlé de 3000 $, 4000 $. C'est le cas au niveau de mon collègue des Ressources naturelles.

Quant à la présence du député de Louis-Hébert, elle a été fort bien accueillie par l'ensemble des gens qui sont sur le comité d'organisation. On va l'attendre. Et ce qu'on me dit, c'est que, si le message qu'il a à livrer est un message positif en faveur du maintien de l'Association, de l'avenir des évaluations environnementales au Québec, on applaudira son discours.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

(14 h 50)

Mme Marois: M. le Président, est-ce que le ministre, plutôt que de passer en revue toutes les mesures qui concernent l'aide à certains organismes en environnement, peut répondre à ma question et me dire pourquoi il n'a pas respecté l'engagement pris à l'égard de cette Association, qui est de leur verser une somme de 10 000 $, M. le Président? Le congrès ouvre demain matin, il est d'envergure internationale, il permet de faire connaître le Québec au plan international au niveau environnemental.

Le Président: Mme la députée...

Mme Marois: Pourquoi le ministre n'a-t-il pas respecté son engagement?

Le Président: Alors, merci. M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Mme la députée a raison d'insister sur l'importance du congrès, sur son aspect international. Ça va sans doute permettre à mon adjoint parlementaire, dans son discours, d'indiquer que, dans la société canadienne, dans l'univers nord-américain qui nous entoure, c'est le Québec qui, sur le plan des évaluations environnementales, a confié, depuis la venue au pouvoir du Parti libéral, le plus de mandats au Bureau d'audiences publiques sur l'environnement. En tout cas, beaucoup plus que le gouvernement qui l'a précédé, qui avait une moyenne, entre 1978 et 1982, de deux audiences publiques par année: une sur une marina de 101 bateaux et plus et l'autre sur un petit bout de route quelque part dans la province de Québec. C'est ça, le bilan environnemental de ces gens-là. De ce côté-ci, nous avons confié des mandats importants en ce qui concerne la forêt, en ce qui concerne l'énergie, en ce qui concerne les matières importantes, et je pense que le congrès va permettre au Québec de souligner son leadership dans ce domaine-là et que mon adjoint parlementaire va le faire de façon éloquente. Merci, M. le Président.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Dubuc.


Rapport sur les offres d'achat du Mont-Sainte-Anne

M. Morin: Merci, M. le Président. Dans une édition du Journal de Québec de la semaine dernière, on faisait mention de l'intention du gouvernement de ne pas rendre public le rapport sur les offres d'achat du Mont-Sainte-Anne. D'ailleurs, au sujet de ce rapport, M. Drouin, de la firme d'experts mandatée dans ce dossier, a déclaré que le travail était terminé depuis plus d'une semaine et qu'il attendait l'occasion de rencontrer les ministres concernés.

Alors, puis-je savoir, M. le Président, du ministre des Finances, si le rapport a été analysé par le Conseil des ministres de la semaine dernière et, si oui, est-ce qu'une décision a été prise?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Bourbeau: M. le Président, le rapport des consultants a été reçu par le ministre des Finances et par son collègue, le ministre responsable du Tourisme. Il a été analysé, bien sûr, par les fonctionnaires, et j'ai l'intention de soumettre nos recommandations au Conseil des ministres au cours des prochains jours.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Morin: Considérant que le gouvernement n'a pas procédé par appel d'offres public, le ministre entend-il faire preuve de plus de transparence et s'engager à rendre publics tous les éléments à l'appui de son éventuelle décision, et cela avant l'ajournement de la présente session, et davantage avant la prochaine bordée de neige?

Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, dans le dossier du Mont-Sainte-Anne, nous avons procédé comme nous avons procédé dans un grand nombre de dossiers de privatisation, c'est-à-dire en employant les services d'un consultant externe. Ce consultant-là a fait le tour de tout ce qu'il y avait de possibilités à travers le Québec, les États-Unis et même le monde comme investisseurs possibles et a sensibilisé tous les milieux à l'intérêt qu'il pourrait y avoir à s'intéresser au Mont-Sainte-Anne. Nous avons reçu un certain nombre d'indications d'intérêt, dont trois ont osé éventuellement faire une offre concrète. Les offres ont été analysées, de ces trois-là. Deux ont précisé leurs offres au cours des dernières semaines, et le Conseil des ministres aura, au cours des prochains jours, je crois, à se prononcer sur la meilleure des offres qui aura été reçue par le gouvernement.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Morin: M. le Président, considérant que, tout ce que le ministre vient de nous dire, on le savait déjà, est-ce qu'il s'engage à rendre public ce qu'on ne sait pas?

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, lorsque le gouvernement sollicite des offres, dans tous les cas, nous faisons signer des documents de confidentialité avec les investisseurs. La raison est simple, M. le Président, c'est qu'il y a beaucoup d'investisseurs qui sont intéressés à regarder, à étudier les dossiers, mais ils ne sont pas intéressés à ce que leur nom ou les montants d'argent qu'ils seraient intéressés à soumissionner soient rendus publics. Nous nous engageons auprès de ces gens-là à garder confidentielle leur offre d'achat si parfois elle n'était pas retenue.

Alors, M. le Président, à moins que ces gens-là ne nous permettent de nous dégager de cette entente de confidentialité, on n'est pas pour rendre publiques les offres d'achat d'individus ou de groupes qui n'auraient pas été retenues, à moins d'avoir leur consentement.

Le Président: Complémentaire?

M. Filion: Complémentaire, M. le Président.

Le Président: Complémentaire, M. le député de Montmorency.

M. Filion: Parmi les deux offres reçues, M. le Président, est-ce qu'il est possible de savoir s'il s'agit de la vente du Mont-Sainte-Anne ou simplement d'une offre de bail emphytéotique pour gérer et administrer le Mont-Sainte-Anne?

Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, le gouvernement n'a pas mis en vente la montagne du mont Sainte-Anne comme telle, elle demeurera toujours la propriété du Québec. Ce qui est offert, c'est le vente du fonds de commerce, oui, des instruments qui servent au domaine skiable, tous les équipements, l'utilisation de la montagne, bien sûr, et du domaine skiable...

Une voix: L'exploitation.

M. Bourbeau: ...oui, de même que l'exploitation et de même, éventuellement, les terrains adjacents, non pas le domaine skiable, qui sont offerts en vente, bien sûr, et qui pourront l'être au fur et à mesure que les options pourraient être exercées.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Gouin.


Présence du Québec aux assises européennes de l'audiovisuel

M. Boisclair: Oui, M. le Président. Au retour d'une mission en France, la ministre de la Culture et des Communications annonçait, avec fierté, que le Québec serait représenté aux assises de l'audiovisuel qui débuteront à Bruxelles, à la fin du mois. Or, au lendemain d'une mise en garde de l'Opposition officielle, la ministre indiquait que, malgré l'engagement qu'elle avait obtenu du ministre Toubon, le Québec ne pourrait assister aux assises de l'audiovisuel.

La ministre, compte tenu de l'intérêt, autant pour la France que pour le Québec, compte tenu justement de cet intérêt de maintenir les ententes de coproduction, la ministre peut-elle nous dire de quelle façon elle entend faire entendre la voix du Québec et défendre les intérêts du Québec ou si, simplement, elle compte sur son grand-frère d'Ottawa pour présenter nos intérêts dans ce dossier?

Le Président: Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Mme Frulla: M. le Président, je voudrais remercier le député de Gouin pour sa question...

Des voix: Ah!

Mme Frulla: ...parce qu'il y avait, d'ailleurs, un article de La Presse canadienne dans tous les journaux où c'était dit que nous n'avions pas de représentant, effectivement, sur la table lors des assises européennes de l'audiovisuel qui se tiendront à Bruxelles du 30 juin au 2 juillet, mais qui citait aussi le fait où on disait que, peut-être, le Québec n'était pas représenté parce qu'un représentant canadien était suffisant. Alors, ça me fait plaisir de remettre les pendules à l'heure et de dire qu'il n'y a aucun représentant de pays étrangers au niveau de cette table, ni canadien, ni américain non plus, donc ni québécois.

Par contre, nous avons reçu une assurance des ministres Toubon et Carignon... D'ailleurs, lors de mon récent voyage et par des communications entre les deux cabinets, ceux-ci regarderont de près et défendront les intérêts, particulièrement les intérêts québécois, puisqu'on sait que, en coproduction, nous coproduisons énormément avec la France, et 75 % du budget se fait, d'ailleurs, entre le Québec et la France sur le grand budget de coproduction canadien.

Donc, c'est de leur intérêt de s'assurer que nous soyons défendus, d'une part, mais je tiens quand même à dire qu'il n'y aura aucun représentant étranger, ni canadien, ni québécois et ni américain.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Boisclair: M. le Président, compte tenu du peu de succès que la ministre de la Culture et des Communications a eu dans le passé, particulièrement avec son homologue Toubon sur cette question, alors que le ministre s'était engagé à reconnaître...

Le Président: Alors...

M. Boisclair: ...une présence québécoise, comment la ministre peut, aujourd'hui, nous offrir simplement de belles paroles? Quelle sera la stratégie du Québec pour faire valoir nos intérêts, et autant ceux des Français aussi?

Une voix: Sauce à spaghetti...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Frulla: M. le Président, ça me surprend qu'on dise «peu de succès». Alors, je ne sais pas d'où on qualifie ça, le peu de succès, sachant très bien que les coproductions France-Québec sont de l'ordre de 394 000 000 $, coproductions France-Canada de 513 000 000 $, donc notre part du Québec est de 77 %. Donc, c'est de notre intérêt à tous les deux, d'une part.

Deuxièmement, au niveau du grand autoroute de l'information, il y a un communiqué de presse qui a été envoyé vendredi dernier où, dans le plan budgétaire de 50 000 000 $, il y a 5 000 000 $ qui ont été établis justement pour des projets sur la francophonie, entre autres, entre la France et le Québec. M. Carignon et M. Toubon communiquent avec nous et vice versa au niveau des cabinets pour s'assurer que les intérêts québécois sont représentés sur la table de l'audiovisuel, sachant qu'il n'y a aucun pays étrangers et sachant aussi que je serai à Bruxelles moi-même, au mois de juillet, pour parler aux représentants de l'audiovisuel. M. le Président, on n'a pas de leçons à recevoir de personne!

(15 heures)

Le Président: En question principale, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette. S'il vous plaît!


Construction d'une centrale de pointe, dans le projet SM 3

M. Chevrette: M. le Président, le décret du 24 février dernier, autorisant le démarrage des travaux pour la construction de la centrale hydroélectrique Sainte-Marguerite 3, fait état d'une centrale de base et non d'une centrale de pointe. Toutefois, Hydro-Québec soutient que ce même décret lui permet de faire de Sainte-Marguerite 3 une centrale de pointe plutôt qu'une centrale de base, ce à quoi s'objecte le ministère de l'Environnement et de la Faune, qui va même jusqu'à dire que la transformation de SM 3 en centrale de pointe nécessiterait de nouvelles études d'impact, car les effets sur l'environnement sont différents de ceux d'une centrale de base.

Ma question au ministre, à double volet: Est-ce que le ministre des Ressources naturelles peut nous dire, dans un premier temps, nous expliquer comment il se fait que, à peine quatre mois après avoir autorisé les travaux de Sainte-Marguerite, Hydro-Québec change maintenant de cap et se tourne vers une centrale de pointe? Et, est-ce qu'il peut nous dire qui, de l'Environnement et de la Faune ou d'Hydro-Québec, a raison?

Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.

M. Sirros: M. le Président, il ne s'agit nullement de quelque changement de cap que ce soit. Hydro-Québec est en train de voir les possibilités. Comme on sait, on a demandé à ce qu'ils aillent de l'avant avec le projet SM 3. Il y aura des décisions à prendre ultérieurement sur les autres volets du projet, basées sur les études. Et, entre-temps, Hydro-Québec consulte et discute avec le ministère de l'Environnement là où c'est nécessaire, M. le Président.

Le Président: C'est la fin de la période de questions.

Il n'y a pas de votes reportés.


Motions sans préavis

Motions sans préavis. M. le député de D'Arcy-McGee.


Souligner le décès du rabbin Menachem Schneerson

M. Libman: M. le Président, je veux déposer la motion sans préavis suivante: «Que l'Assemblée nationale souligne le décès du rabbin Menachem Schneerson, leader spirituel de la communauté juive hassidique Lubavitch.»

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous débattions de cette motion? M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Strictement pour spécifier que, si la motion est sans débat, il y a consentement de ce côté-ci. Et j'explique rapidement, M. le Président: nous allons saisir, dans quelques minutes, l'Assemblée nationale d'un projet de loi spécial.

Le Président: Alors, la motion est présentée. Donc, est-ce qu'il y a consentement à la présentation de la motion?

Des voix: Consentement.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Toujours aux motions sans préavis, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): À ce moment-ci, M. le Président, je vous demanderais de suspendre nos travaux pour cinq minutes, de façon à ce qu'il y ait des consultations qui s'effectuent avec l'Opposition officielle et les députés indépendants.

Le Président: Alors, très bien. Nous allons donc suspendre les travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 15 h 3)

(Reprise à 15 h 12)

Le Président: Mmes, MM. les députés, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je solliciterais le consentement des membres de cette Assemblée pour que nous procédions aux avis touchant les travaux des commissions. Nous pourrions donner les avis immédiatement et les parlementaires pourraient se diriger dans les commissions parlementaires.


Avis touchant les travaux des commissions

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous procédions immédiatement aux avis touchant les travaux des commissions?

Des voix: Consentement.

Le Président: Consentement, donc allez-y, M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je rappelle à cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes, jusqu'à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'aménagement et des équipements entendra les intéressés et procédera à l'étude détaillée des projets de loi suivants, et ce, dans l'ordre ci-après indiqué: projet de loi 203, Loi concernant les villes d'Anjou, Montréal, Montréal-Est et Montréal-Nord; projet de loi 286, Loi concernant certains immeubles du cadastre de la paroisse de L'Ancienne-Lorette.

Le Président: Merci, M. le leader du gouvernement.

Donc, nous revenons maintenant aux motions sans préavis. Je cède à nouveau la parole au leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je vous demanderais de reconnaître le ministre de l'Emploi, mais peut-être qu'auparavant ou par la suite – je ne sais pas ce qu'il souhaite... Le leader de l'Opposition officielle m'a indiqué qu'il souhaitait intervenir.

M. Chevrette: Après.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): On présenterait le projet de loi immédiatement. Le ministre de l'Emploi va s'exécuter, et, par la suite, tel que convenu, le leader de l'Opposition officielle souhaiterait intervenir sur le plan procédural pour une période d'à peu près cinq minutes.


Présentation de projets de loi


Projet de loi 35

Le Président: Donc, vous me demandez de reconnaître le ministre de l'Emploi pour la présentation d'un projet de loi? C'est ça? Est-ce qu'il y a consentement à ce que nous procédions immédiatement à la présentation d'un projet de loi par le ministre de l'Emploi? Il y a consentement unanime?

Une voix: Consentement.

Le Président: Consentement. Alors, vous avez la parole, M. le ministre de l'Emploi.


M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci, M. le Président. Le projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, suspend, pour une période d'un an, susceptible de prolongations, les pouvoirs et fonctions des dirigeants, membres et mandataires du Comité paritaire de l'industrie du verre plat ainsi que de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec.

Il confie, à titre d'administrateur provisoire, l'exercice des pouvoirs et fonctions du Comité paritaire et de la Corporation à trois membres du personnel de la Commission des normes du travail.

Le projet de loi pourvoit aussi aux principales conditions et modalités de l'exécution de l'administration provisoire et prévoit diverses sanctions.

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...j'ai demandé au ministre leader de pouvoir m'exprimer pendant quelques minutes avant de donner le consentement officiel. Vous aurez remarqué qu'on n'a pas procédé, à venir jusqu'à date, à la suspension des règles. Normalement, le leader se serait levé, dans un tel cas, pour demander la suspension des règles et, pendant deux heures, nous aurions dû débattre de l'opportunité de suspendre les règles avant de déposer le projet de loi. Et, si nous avons agi de la sorte, c'est purement et simplement parce que, effectivement, il y a une entente. Il y a une entente, M. le Président, pour ne pas utiliser les deux heures de suspension des règles.

Et pourquoi? C'est peu courant qu'une Opposition ne demande pas le débat de suspension des règles pour pouvoir exprimer son point de vue, etc., mais, dans le cas très précis auquel nous sommes confrontés, nous avons été mis dans le coup, dans le sens que nous avons eu toute l'information, M. le Président, sur le dossier. Nous avons à la fois eu les dossiers de police au complet. Nous savons exactement ce qui se passe au niveau judiciaire également, des contestations qui peuvent aller jusqu'à la Cour suprême, et il y va du fond même du comité paritaire pour l'ensemble des travailleurs et même des employeurs.

Et, à ce compte-là, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que c'est l'unique raison pour laquelle on n'a pas demandé de suspension des règles. On y va de consentement pour que ce projet de loi soit déposé et adopté dans sa forme actuelle, c'est-à-dire, possiblement, peut-être de légers amendements après discussion entre le ministre et notre critique. Il n'est pas question pour nous d'utiliser les deux heures mais bien de participer à l'étude du projet de loi à toutes ses étapes. Probablement que, d'ici 18 heures ce soir, le tout devrait être adopté.

Et je suis convaincu, M. le Président, qu'il y va d'une responsabilité même du Parlement dans les circonstances, compte tenu qu'il y a de l'argent en cause, qu'il y a des actes, qu'il pourra y avoir des poursuites, en plus, face à des abus de pouvoir, etc. Sans juger ici, à l'Assemblée nationale, parce que ce n'est pas l'endroit pour le faire, il n'en demeure pas moins que les faits invoqués sont tellement troublants qu'ils méritent que ce secteur soit pris en charge pour le moins temporairement pour remettre de l'ordre, dans l'intérêt de tout ce secteur qui, à mon point de vue, aurait dû, même, peut-être, être scruté peut-être même bien longtemps avant aujourd'hui.

Donc, M. le Président, c'est dans cet esprit-là que j'ai donné mon accord au leader du gouvernement pour que ce projet de loi puisse être étudié dans les meilleurs délais. Mon collègue de Laval-des-Rapides, d'ailleurs, s'exprimera en deuxième lecture et également procédera à l'étude article par article.

Le Président: Alors, très bien, M. le leader de l'Opposition. Maintenant, M. le leader du gouvernement.


M. Pierre Paradis

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Avant que nous n'en venions, M. le Président, aux affaires du jour, je profite de l'occasion pour vous indiquer qu'il y aurait entente entre les différents parlementaires, l'Opposition officielle et les députés indépendants pour que nous procédions comme suit.

Au niveau de l'adoption du principe du projet de loi, les interventions du côté ministériel seraient limitées à une personne, en l'occurrence le ministre de l'Emploi; du côté de l'Opposition officielle, on m'indique que le député de Laval-des-Rapides interviendrait; du côté des indépendants, le député de Drummond nous a fait part qu'il souhaiterait intervenir quelques minutes au niveau de l'adoption du principe du projet de loi, suivi de la réplique du ministre de l'Emploi. Par la suite, je ferai motion pour que le projet de loi soit déféré en commission plénière et les parlementaires l'étudieraient article par article. Nous reviendrions à l'Assemblée nationale où, encore une fois, de ce côté-ci, le ministre de l'Emploi serait le porte-parole du gouvernement, et ce serait limité à une intervention; de l'autre côté, le député de Laval-des-Rapides. Je ne sais pas si, à ce moment-là, le député de Drummond souhaiterait intervenir... Oui. En troisième lecture.

Le Président: À l'étape de l'adoption.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour l'adoption, M. le Président. Et la réplique du ministre de l'Emploi, de façon à ce que le projet de loi soit adopté dans les meilleurs délais, compte tenu de son importance et de son urgence.


Mise aux voix

Le Président: Très bien. Alors, dans un premier temps, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté? Donc, adopté.

Maintenant, je comprends que nous allons faire un ordre de l'Assemblée à l'effet que l'étude du projet de loi se fera tel que le ministre l'a établi au niveau de l'adoption du principe: une intervention du ministre de l'Emploi, le député de Laval-des-Rapides, le député de Drummond et la réplique. Nous allons, après ça, aller en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi. Nous reviendrons au niveau de l'adoption, à l'étape de l'adoption du projet de loi, avec une intervention du ministre de l'Emploi, une intervention du député de Laval-des-Rapides, une intervention possible du député de Drummond et une réplique du ministre. C'est bien ça? Très bien.

Également, je comprends aussi qu'il y a consentement de l'Assemblée à ce que nous puissions procéder à toutes les étapes de l'adoption du projet de loi, malgré les dispositions du règlement. Il y a consentement à cet effet-là?

M. Chevrette: Consentement.

(15 h 20)

Le Président: Consentement. Et c'est un ordre de l'Assemblée à ce que nous puissions procéder à toutes les étapes de l'adoption du projet de loi, malgré les dispositions du règlement. Il y a consentement à cet effet-là?

M. Chevrette: Consentement.

Le Président: Consentement, et c'est un ordre de l'Assemblée. C'est un ordre de l'Assemblée. Alors, très bien.

Alors, maintenant, renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Il n'y en a pas. Donc, ceci met fin aux affaires courantes.


Affaires du jour

Nous allons donc procéder aux affaires du jour.


Projet de loi 35


Adoption du principe

Tel que le prévoit l'ordre de l'Assemblée, je vais, à ce moment-ci, reconnaître M. le ministre de l'Emploi sur l'adoption du principe du projet de loi... Si vous voulez me donner le document, s'il vous plaît. Nous procédons donc à la motion d'adoption du principe du projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, présentée par M. le ministre de l'Emploi. Donc, je cède la parole au ministre de l'Emploi, sur la motion d'adoption du principe du projet de loi. Le projet de loi a été déposé, l'Assemblée en est saisie.


M. Serge Marcil

M. Marcil: Merci, M. le Président. Il y a des situations où l'on doit avoir recours d'urgence à l'Assemblée nationale. Habituellement, ce recours est utilisé pour mettre fin à un conflit de travail important par ses effets sur l'économie du Québec, ou pour protéger la santé et la sécurité de la population, ou pour mettre fin à des gestes illégaux.

Le problème que j'ai à vous soumettre aujourd'hui est de nature fort différente. En effet, il s'agit, en l'espèce, d'adopter des mesures exceptionnelles pour restaurer un climat de confiance chez les employeurs et les salariés régis par le décret sur l'industrie du verre plat et permettre une application sereine de la législation et de la réglementation, tout en favorisant la protection des intérêts des personnes concernées.

Plusieurs assujettis au décret sur l'industrie du verre plat, suite aux divers articles parus dans les journaux, s'interrogent sur la gestion des fonds constitués par les prélèvements qu'ils paient au Comité paritaire de l'industrie du verre plat. Tous exigent que la lumière soit faite sur les diverses allégations. Certains songent à mettre fin à leurs paiements et à leurs obligations envers le Comité paritaire du verre plat tant et aussi longtemps qu'ils n'auront pas retrouvé une pleine confiance dans l'organisme chargé de veiller à l'application des conditions de travail prévues au décret de ce secteur, de même que de régir la qualification des travailleurs et de gérer le fonds des avantages sociaux et autres fonds.

La Loi sur les décrets de convention collective, telle qu'elle existe présentement, ne permet pas de relever provisoirement les administrateurs d'un comité paritaire tant qu'une enquête n'a pas été complétée.

Le ministre de l'Emploi ne peut empêcher que des informations ou des rumeurs, vraies ou fausses, circulent et minent la confiance des assujettis et des citoyens en général dans nos institutions. Je reconnais que les moyens dont je dispose dans de telles situations sont limités. Ce contexte particulier ne signifie pas que l'État doive s'abstenir d'intervenir. Au contraire, l'État a la responsabilité d'agir adéquatement avec les outils à sa disposition, et ce, dans l'intérêt public. C'est pourquoi j'utilise une procédure inhabituelle, celle de la présentation d'une loi spéciale.

Avant de poursuivre plus loin mon exposé, il m'apparaît essentiel de préciser que le geste que je demande à l'Assemblée nationale de poser n'est ni une accusation ni une condamnation des personnes qui sont mises en cause. J'invite l'Assemblée nationale à faciliter le maintien d'un climat propice à ce que les enquêtes en cours puissent se poursuivre tout en veillant à protéger les intérêts individuels et collectifs. Pour éclairer la décision que nous avons à prendre, je vous livrerai un certain nombre d'éléments dans le respect des droits des personnes concernées, tout en faisant preuve de retenue.

Le 7 novembre 1964 entrait en vigueur le décret sur l'industrie du verre plat. Il rend obligatoire, pour tous les employeurs, artisans et salariés couverts par son champ d'application, les conditions de travail négociées entre l'Association de l'industrie du verre plat et du fenêtrage du Québec et les vitriers et travailleurs du verre, local 1135. Conformément à la Loi sur les décrets de convention collective, le Comité paritaire de l'industrie du verre plat a été constitué pour surveiller l'application dudit décret.

Depuis quelques années, le décret a fait l'objet de nombreuses plaintes portant autant sur son existence que sur son application. Il en est de même pour la gestion du Comité paritaire qui l'administre. Ces diverses plaintes ont donné lieu, au printemps de 1992, à une vérification administrative des activités du Comité paritaire pour l'année 1991, effectuée par mon ministère, conformément à la loi. Le rapport, issu de cette vérification, fait état d'un certain nombre d'irrégularités administratives, de l'absence de pièces justificatives et de contrôles appropriés, de même que de l'exécution de mandats outrepassant ceux prévus à la Loi sur les décrets de convention collective pour un comité paritaire ou encore de prêts à une corporation sans résolution ou autorisation du conseil d'administration. D'autres points, tels, entre autres, les jetons de présence et la fiscalité, certaines dépenses et l'utilisation de l'argent du fonds des avantages sociaux, nécessitaient une expertise particulière. C'est pourquoi, quatre jours après la réception du rapport de vérification, le ministre d'alors soumettait celui-ci à l'attention du ministère de la Justice pour analyse et action appropriée.

Dans les jours qui ont suivi, mon prédécesseur remettait le rapport au président du Comité paritaire, en présence des membres du conseil d'administration. À cette même occasion, il exigeait la mise en place d'un plan de redressement administratif, au plus tard le 31 décembre 1992. Bien qu'un délai de plus d'un an et demi se soit écoulé depuis, il importe de noter que ce plan de redressement n'est, à ce jour, que réalisé partiellement.

Malgré ces gestes concrets et un suivi de la mise en place partielle du plan de redressement, les plaintes ont continué de parvenir au ministère. Le 2 février 1994, l'escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec effectuait une première perquisition au Comité paritaire, dans le cadre de son enquête. Les motifs allégués pour obtenir ce mandat de perquisition étaient basés sur le rapport de vérification produit par le ministère et sur l'interrogatoire d'un certain nombre de personnes. La Sûreté du Québec émet des doutes sur l'utilisation de certaines sommes d'argent. Elle allègue, entre autres, que des contrats auraient été octroyés en non-conformité avec les statuts et règlements, que des avantages personnels auraient été reçus en contrepartie de contrats de location, que des dépenses personnelles auraient été payées par le Comité paritaire et que certaines dépenses importantes auraient été effectuées sans être autorisées.

J'ai utilisé volontairement le conditionnel, car aucune de ces affirmations n'a fait l'objet d'accusation, encore moins de condamnation. Cependant, la réalisation de cette perquisition a semé le doute, la confusion et l'inquiétude chez ceux qui sont régis par le décret sur l'industrie du verre plat, lequel est administré par le Comité paritaire perquisitionné.

À la lumière des faits portés à ma connaissance et des nouvelles plaintes reçues, j'ai procédé à la nomination de deux enquêteurs, conformément à l'article 26 de la Loi sur les décrets de convention collective, pour procéder à une enquête sur toute matière se rapportant à l'administration ou au fonctionnement du Comité paritaire de l'industrie du verre plat ou sur la conduite de ses membres. Cette enquête a débuté le 9 mars 1994.

Le 23 mars 1994, le Comité paritaire présentait à la Cour supérieure une requête en évocation, en révision et en jugement déclaratoire et une requête pour l'émission d'une ordonnance de sursis et autres ordonnances accessoires. Le 16 mai 1994, la Cour supérieure rejetait la requête en évocation. L'enquête reprenait alors son cours.

Le 25 mai 1994, le Comité paritaire inscrivait ce jugement de la Cour supérieure en appel, le tout accompagné d'une requête pour l'émission d'une ordonnance de sursis. Le 6 juin 1994, le juge McCarthy rejetait la requête en sursis. Dès le lendemain, l'enquête reprenait.

(15 h 30)

Entre-temps, le 28 avril 1994, d'autres perquisitions étaient effectuées par la Sûreté du Québec, suite à la présentation de 37 pages de motifs découlant de l'analyse des documents saisis lors de la perquisition du 2 février 1994. La Sûreté du Québec allègue, entre autres, l'utilisation des fonds du Comité paritaire par certains de ses membres à des fins autres que celles prévues par la loi; l'existence de double ou de fausses facturations; le paiement, par le Comité paritaire, de voyages de chasse, de missions à l'étranger et de dépenses personnelles. Ces motifs ayant été rendus publics, une inquiétude encore plus vive s'est installée chez les assujettis concernant la gestion de l'argent prélevé auprès d'eux. Cette inquiétude est d'autant plus importante que le Comité paritaire de l'industrie du verre plat dispose actuellement de sommes d'argent considérables à administrer, soit plus de 30 000 000 $.

En avril 1991, le Comité paritaire constituait la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec. Cette corporation sans but lucratif est constituée en vertu de la partie III de la Loi sur les compagnies pour recevoir des subventions à la formation de Emploi et Immigration Canada. Le fonds de capital de cette corporation a été constitué à partir d'une somme de 1 400 000 $ provenant du fonds des avantages sociaux de l'industrie.

Il importe de préciser que l'argent appartenant aux employeurs et aux travailleurs a été transféré dans une entité légale distincte du Comité paritaire et fait donc désormais partie des actifs de cette nouvelle entité légale. Détail très important, également: les membres fondateurs de la Corporation de formation des vitriers et des travailleurs du verre du Québec sont des administrateurs du Comité paritaire et des différents fonds de celui-ci. Ces éléments étant maintenant publiquement connus des assujettis, ils ne sont pas de nature à les rassurer, d'aucune façon.

C'est dans ce contexte bien particulier que je soumets à votre attention la Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec. Comme je l'ai souligné précédemment, cette loi vise à restaurer le climat de confiance des assujettis, à assurer une application sereine du décret et de la réglementation afférente et à favoriser la protection des intérêts des assujettis.

Ce projet de loi vous invite à suspendre les pouvoirs et fonctions des dirigeants, membres et mandataires du Comité paritaire et de la Corporation de formation et de confier, à titre d'administrateurs provisoires, l'exercice des pouvoirs et fonctions de ces entités à trois membres du personnel de la Commission des normes du travail. Le projet de loi édicte, en conséquence, les conditions et modalités de l'exécution de cette administration provisoire et diverses sanctions.

J'ai tenté, dans cette présentation, M. le Président, de faire preuve de modération tout en donnant suffisamment d'éléments justifiant l'intervention que je propose, et ce, dans le respect des droits des personnes susceptibles d'être affectées par cette mesure. Le gouvernement ne pouvait rester inactif et attendre les résultats des diverses enquêtes en cours. L'intérêt public exigeait une action que je considère préventive, mais essentielle. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de l'Emploi.

Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec. Je cède la parole à M. le député de Laval-des-Rapides. M. le député.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Si je comprends bien, M. le Président, j'ai 20 minutes?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vous avez une heure.

M. Ménard: J'ai une heure. Je ne prendrai pas une heure. Je vous remercie.

M. le Président, l'Opposition est prête à donner son support le plus total au projet de loi présenté par le ministre, quitte à y apporter quelques modifications. On va discuter de quelques modifications, simplement pour s'assurer que le projet de loi atteint ses objectifs, dans le respect de certains principes juridiques auxquels j'attache une certaine importance. Autrement, nous sommes d'accord pour ce projet de loi.

Mais nous ne pouvons nous empêcher, en donnant cet accord, de signaler que les circonstances particulières qui justifient cet accord nous apparaissent être dues à l'inaction du ministre du Travail et de la Main-d'oeuvre qui, avant le ministre de l'Emploi... Elles ne visent aucunement le ministre actuel, qui, je pense, a pris un certain temps à se convaincre de prendre les responsabilités qu'il devait prendre. Mais on ne peut s'empêcher de penser que nous ne serions pas dans cette situation si le ministre qui l'avait précédé avait utilisé la Loi sur les décrets de convention collective, les pouvoirs qu'il avait dans cette loi pour, d'abord, mieux surveiller ce Comité, sur lequel on avait des indices depuis au moins 1991, de dilapidation des fonds qui étaient sous sa responsabilité. Et, à part nommer un enquêteur en 1992... Et les raisons pour nommer l'enquêteur, déjà, justifiaient que l'on regarde de plus près l'administration de ce Comité. On ne peut pas croire qu'il s'est écoulé un délai de plus de deux ans avant de conclure qu'il fallait mettre ce Comité du verre plat en tutelle.

Pour ceux qui nous écouteraient sans savoir trop de quoi on parle lorsqu'on parle d'un comité paritaire du verre plat, laissez-moi donner quelques explications, parce qu'il s'agit de quelque chose, d'une originalité dans les lois québécoises par rapport au reste de l'Amérique; pas d'une originalité sur le plan mondial, mais il y a quelque chose. Ce qu'on appelle les décrets de convention collective, je pense, joue un rôle très utile dans les relations de travail et dans la distribution de la richesse par le travail, quelque part entre la Loi sur les normes et le Code du travail. La Loi sur les normes, on l'aura compris, protège les travailleurs les plus démunis de l'exploitation en établissant des normes minimales de travail, dont, entre autres, le salaire minimum. Le Code du travail permet aux travailleurs de s'unir pour négocier des conditions justes de travail. Mais, dans tous les pays où existe ce genre de loi, il y a une large partie de la population qui est entre les deux. Généralement, dans des unités trop petites pour pouvoir être syndiquées, on a trouvé dans les pays européens cette formule – qui est vieille ici, elle date de 1934 – qui est... Disons que, dans un secteur qui est difficilement syndicable, il y a quand même une ou deux conventions collectives qui se signent entre les employeurs – évidemment les plus gros – et un syndicat. Eh bien, par décret, et c'est pour ça qu'on parle de décret de convention collective, l'on peut, si le ministre estime que l'industrie le désire dans sa majorité, étendre cette convention collective par décret à l'ensemble de l'industrie. Cela permet donc que ces travailleurs difficilement syndicables pour la majorité puissent lentement décoller des conditions minimales de travail et trouver, en somme, les avantages des autres travailleurs syndiqués.

C'est une formule originale qui a sa place, qui, j'en suis convaincu, aura encore plus sa place dans la fragmentation que l'on remarque dans le domaine du travail. Et je crois que nous en sommes tous venus, au cours de la dernière série d'audiences que nous avons tenues à la commission de l'économie et du travail, à dire que nous devions garder cette formule, mais évidemment apporter certains ajustements à la loi, qui date de 1934, pour qu'elle ait sa pleine efficacité et que cette efficacité soit appliquée à l'ensemble des industries qui en auraient besoin.

Lorsque, ainsi, une convention collective est étendue par décret à l'ensemble des travailleurs d'une industrie, un comité paritaire est créé. Il s'appelle paritaire parce qu'on y trouve des représentants des employeurs, des représentants des travailleurs. Le ministre peut aussi nommer certains membres sur le conseil d'administration du comité paritaire. Essentiellement, le rôle de ce comité paritaire est d'administrer cette convention collective qui a été étendue par décret à l'ensemble de l'industrie. C'est aussi s'assurer que tous les employés visés par ce décret vont bénéficier des avantages que leur donne le décret.

Il y a là, comme on le voit, un rôle utile, mais qui n'est évidemment pas un rôle aussi important que d'avoir des responsabilités ministérielles. Je dis ça parce qu'on verra que, parmi les incongruités que l'on remarque dans l'administration du Comité du verre plat, il y a l'octroi d'une limousine à son président, de bien meilleure qualité que celle que l'on donne au premier ministre de la province, et je dirais même, au lieutenant-gouverneur. Alors, je ne vois pas en quoi ce travail est si important pour justifier des déboursés considérables lorsqu'il est arrivé ici.

(15 h 40)

Mais il y a quand même quelque chose de grave dans le cas du Comité du verre plat. D'abord, une petite explication amusante; pourquoi ça s'appelle le verre plat? Bien, le verre plat, c'est les fenêtres. D'ailleurs, ça a été créé, paraît-il, quand on construisait Place Ville-Marie et que, pour la première fois, on avait de ces fenêtres de très haute qualité que l'on doit exiger dans ces édifices modernes faits principalement de verre. Alors, les employeurs et les ouvriers de cette industrie ont décidé de créer un comité paritaire de l'industrie du verre plat. Alors, le verre plat, c'est les fenêtres par rapport à toute autre sorte de verre – les bouteilles, les pots – qui est un verre qui, plutôt que d'être plat, peut prendre toutes les formes possibles, imaginables.

Alors, essentiellement, ce Comité, d'abord, je pense que c'est celui sur lequel nous avons eu le plus de plaintes des entrepreneurs, d'abord par sa tendance à essayer de s'étendre sur les autres. On comprendra qu'il pose nécessairement des difficultés dans la fabrication des fenêtres et des portes, où on va trouver du verre plat et où il faut ajuster ça avec les autres ouvriers qui travaillent dans la même usine avec le bois ouvré, qui entoure ce verre, ou encore la menuiserie métallique, qui sont deux autres comités paritaires. La combinaison de toutes les règles de ces comités paritaires différents cause aux entrepreneurs beaucoup d'ennuis, dans un domaine de l'industrie québécoise qui est moins spectaculaire que l'informatique, mais qui est quand même une des belles industries québécoises, qui occupe une part importante du marché en Amérique et, maintenant, à travers le monde.

Je crois que, pour concilier toutes ces règles, le ministre avait, à l'époque, les moyens voulus, comme on le verra, pour éviter à cette industrie les ennuis tracassiers que peuvent lui causer l'existence de plusieurs comités paritaires qui gèrent essentiellement une même industrie, c'est-à-dire l'industrie qui utilise le verre plat pour fabriquer des fenêtres et des portes principalement.

Maintenant, de ce Comité, ça fait des années que l'on entend non seulement des plaintes des entrepreneurs, mais des plaintes de toutes sortes. On remarquait, déjà en 1991, des dépenses absolument incroyables, des dépenses de voyages, entre autres, à peu près partout: San Francisco, les Bermudes, l'Asie. Demandez-vous ce que des gens qui sont nommés pour administrer une convention collective qui est étendue par décret à l'ensemble d'une industrie ont besoin d'aller faire à San Francisco, en Asie, aux Bermudes et ailleurs dans le monde.

On avait déjà remarqué, en 1991, n'est-ce pas, que ces gens-là s'étaient payés – je ne trouve pas mes notes là-dessus – un voyage de chasse à la Roue du roy, une chasse au faisan – je vous assure qu'on est loin du verre plat – et ainsi de suite. On a remarqué par la suite que le président se faisait fournir gracieusement, par une compagnie fort généreuse sans doute, une BMW, sauf qu'on remarquait que la compagnie en question, qui avait aussi loué à l'ensemble des inspecteurs qui font l'inspection pour trouver les employeurs qui ne respectent pas le décret, louait plus cher les voitures qu'elle louait pour ces inspecteurs. Alors, c'était une façon bien adroite que ces gens avaient trouvée de se faire payer une voiture par l'un des fournisseurs de services au Comité paritaire. Des dépenses de cet ordre, et aussi bizarres que celle-là, apparaissaient déjà dans un rapport d'enquête sur l'administration du Comité paritaire, ce qui avait poussé le ministre, en 1992, à, justement, ordonner une enquête. C'est ça, c'était déjà le 8 juin 1992.

On avait remarqué aussi que bien des règlements n'étaient pas approuvés, et, généralement, ce qui était bien bizarre, c'est que les règlements qui n'étaient pas approuvés visaient le déplacement d'argent du fonds du Comité paritaire vers des organismes voisins, vérifiés par d'autres vérificateurs que ceux qui vérifiaient... Alors, il me semble que quand on voit de pareilles cachettes s'établir à l'intérieur d'un organisme comité paritaire, il y a là non seulement anguille sous roche, mais il me semble que le ministre avait des indications claires qu'il se passait là des dilapidations de fonds publics que l'on voulait cacher à quelqu'un. Et, à qui d'autre pouvait-on vouloir le cacher sinon justement au ministre ou encore aux représentants de l'industrie, qui paient les cotisations qui permettent à ce Comité paritaire de vivre? Et, que je sache, sauf erreur, je pense qu'il s'agit dans ce cas-là de plus de 1 000 000 $ par année.

Maintenant, quand on examine la Loi sur les décrets de convention collective, c'est là qu'on constate qu'on avait des moyens d'agir bien avant. D'abord, on comprendra, toujours en se souvenant comment fonctionne le système... C'est-à-dire que, un comité paritaire, sa fonction est de voir à ce que tous les employeurs de cette industrie se soumettent aux exigences du décret, c'est-à-dire paient les bons salaires, le bon taux horaire à chacun des travailleurs qui travaillent dans cette industrie; et aussi, ils ont certaines fonctions qu'on a voulu leur donner dans la formation des travailleurs.

Mais, encore là, on est loin, n'est-ce pas, du rôle d'un président de compagnie importante ou d'un ministre. D'abord, déjà, dès l'article 8, on dit que «Le gouvernement peut prolonger ou, en tout temps, abroger le décret.» Non seulement il peut le prolonger ou l'abroger, ce décret de convention collective, mais il peut aussi le modifier sur recommandation du ministre. Donc, on sentait déjà le besoin, probablement dès 1934, de ne pas laisser ces petits empires se créer, recueillir des fonds par une forme de taxation, au fond, même si ce sont des cotisations, et les employés, à leur avantage personnel; ils étaient toujours sous la surveillance d'un ministre.

Plus loin, on aurait pu, par exemple, confier la surveillance du Comité paritaire du verre plat à un comité voisin. Le deuxième paragraphe de l'article 16 dit: «...le gouvernement peut ordonner que l'observation d'un décret soit surveillée et assurée par un comité déjà existant si ce dernier y consent, ou par la Commission des normes du travail.»

L'article 17 donnait d'autres pouvoirs au ministre: «...peut en tout temps, aux conditions et pour le terme qu'il juge à propos, adjoindre au comité tels membres, n'excédant pas quatre, qui lui sont désignés en nombre égal par des employeurs et des salariés, non parties à la convention.»

Alors, devant des gens, n'est-ce pas, qui se paient des histoires complètement farfelues comme des chasses au faisan à la Roue du roy, qui transfèrent des sommes hors la vérification des vérificateurs qui regardent les bilans financiers du Comité paritaire, est-ce que ce n'était pas le temps d'utiliser ce pouvoir pour nommer des hommes en qui on avait confiance et examiner ça d'un peu plus près?

Ensuite, le ministre a les pouvoirs d'approuver les règlements qui sont émis par le comité paritaire. Il peut en suggérer la modification au cabinet. Il peut même adopter des règlements généraux pour le comité. Il peut même abroger purement et simplement le comité paritaire. Plus loin, c'est que le comité paritaire est obligé, chaque année, de transmettre au ministre ses prévisions budgétaires et un rapport de toutes ses activités. Mais, bon dieu! dans le cas de ce Comité paritaire, «y-a-tu» quelqu'un qui le lisait, ce rapport? Le ministre peut, par inspecteur nommé par lui, vérifier ces rapports ou, en tout temps, faire enquête sur l'administration d'un comité ou de son bureau d'examinateurs. Tel inspecteur a des pouvoirs analogues à ceux d'un inspecteur du comité. C'est ce que le ministre a fait en 1992. Mais comment se fait-il qu'on soit à l'été 1994, puis c'est maintenant qu'on est obligé d'intervenir par loi spéciale?

(15 h 50)

Sur rapport de cet enquêteur, il peut nommer ensuite un autre enquêteur. L'article 26 poursuit en disant: «Le ministre peut charger une personne qu'il désigne d'enquêter sur toute matière se rapportant à l'administration ou au fonctionnement d'un comité paritaire ou sur la conduite de ses membres.» Et, à la suite de ce rapport, l'article suivant dit: «Le ministre peut, s'il estime que le rapport de l'enquêteur le justifie, ordonner que les pouvoirs de ce comité paritaire soient suspendus et nommer un administrateur qui en exerce les pouvoirs pour la période que le ministre détermine.»

Voilà les pouvoirs qu'avait le ministre du Travail et de la main-d'oeuvre, avant le ministre de l'Emploi, qu'il a commencé à exercer en 1992, mais sans avoir été plus loin. De sorte que, aujourd'hui, quand l'actuel ministre de l'Emploi décide d'exercer les derniers pouvoirs que je vous ai indiqués – c'est-à-dire, d'abord, de nommer des enquêteurs qui pourront lui faire un rapport le justifiant de mettre, comme nous le réclamions récemment en Chambre, en tutelle le Comité paritaire du verre plat – on se demande – et on n'a pas de réponse à ça – pourquoi ça n'a pas été fait auparavant. Cependant, enfin, le ministre a décidé d'agir dans l'industrie du verre plat.

Bien que nous soyons d'accord pour une mise en tutelle de ce Comité paritaire, il n'en demeure pas moins que les faits étaient connus depuis 1992. C'est en effet le 21 janvier 1992 que le ministre du Travail, Normand Cherry, commandait une enquête sur l'administration du Comité paritaire. Selon le rapport d'enquête du ministère du Travail, l'intervention débute le 28 du même mois, et, le 11 mars 1992, les services d'un vérificateur du ministre du Travail étaient autorisés. Rien ne se passe, apparemment, sinon d'autres dilapidations des fonds publics, avant que nous apprenions, le 2 février 1994, que l'Escouade des crimes économiques de la Sûreté du Québec intervenait en effectuant des perquisitions au siège du Comité paritaire et au Centre de formation.

Quand, le 31 mai dernier, nous avons interrogé le ministre sur les raisons qui empêchaient le gouvernement de mettre en tutelle le Comité paritaire, le ministre actuel nous indiquait que la loi, telle qu'elle était libellée, ne permettait pas de le faire tant et aussi longtemps que le rapport des enquêteurs ne le recommanderait pas – c'est un peu ce que je vous expliquais tout à l'heure, lorsque je lisais les articles 26 et 26.1. À partir de ce moment-là commence la guérilla judiciaire: on conteste la nomination des enquêteurs; on veut les empêcher dans leur travail; on prend une injonction, qui est refusée; on s'adresse en Cour d'appel pour suspendre ça; la Cour d'appel refuse. Mais on peut prévoir une longue guérilla judiciaire. Et, étant donné les longs délais qui se sont écoulés depuis les premières observations, qui auraient dû nous convaincre de quelque chose d'anormal, des indications qu'il pouvait y avoir des dilapidations, même frauduleuses, des biens du Comité paritaire... À partir de ce moment-là, je pense que, effectivement, la meileure solution, ce n'est pas d'affronter la guérilla judiciaire, qui n'ajouterait qu'au délai, c'est la loi que nous propose le ministre, actuellement.

C'est d'ailleurs dans le sens de la réponse que le ministre nous avait donnée quand, une deuxième fois, nous lui demandions d'expliquer pourquoi le ministère du Travail d'abord, et, ensuite, de l'Emploi, n'avait pas agi plus tôt. Au lieu de répondre exactement à notre question, il s'est mis à nous expliquer que, à moins de déposer aujourd'hui une loi spéciale qui ira à l'encontre de la Loi sur les décrets, il ne pouvait pas les mettre en tutelle.

Le projet de loi 35 va donc mettre un terme à cette saga, quoique la durée de celle-ci aura été plutôt longue, hein, 30 mois! C'est à se demander pourquoi on ne l'avait pas fait auparavant, compte tenu des faits que l'on reproche au Comité paritaire. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Laval-des-Rapides. Nous en sommes à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi 35. Et je cède la parole à M. le député de Drummond.


M. Jean-Guy St-Roch

M. St-Roch: Oui, merci, M. le Président. M. le Président, je n'ai pas l'intention de prendre tout le temps qui m'est alloué, mais simplement pour rappeler, dans un premier temps, que nous en sommes maintenant à la cinquième session consécutive où on a à statuer sur des débats d'urgence. J'ai eu l'occasion de m'exprimer sur les débats d'urgence dans le passé, où on profitait de ces moments-là pour faire approuver, en mettant le bâillon aux parlementaires, un paquet de lois. Si j'ai donné mon consentement, M. le Président, sans utiliser cet état d'urgence et ce bâillon-là, ici, pour approuver ce projet de loi, c'est un signe de responsabilité qu'un parlementaire doit avoir. Lorsqu'on a un projet qui fait face à une situation d'urgence, vous avez la preuve aujourd'hui que l'ensemble des parlementaires sont capables de donner leur consentement dans les intérêts supérieurs de la collectivité ou des segments de la collectivité québécoise.

Nous avons tenu, M. le Président, il y a deux semaines passées, une consultation générale sur la Loi sur les décrets de convention collective. On avait demandé, on avait souhaité entendre le Comité paritaire de l'industrie du verre plat, qui s'est désisté à la dernière minute. Avec notre collègue de Duplessis, nous avons essayé de voir si, par réglementation, nous, les parlementaires, nous pouvions forcer un organisme, quand on avait la perception, à ce moment-là, qu'il y avait des problèmes, à venir témoigner devant la commission parlementaire de l'économie et du travail. À notre grand regret, M. le Président, on a été obligé de constater que rien, dans notre réglementation, ne peut forcer, dans des situations comme nous avons connues, des organismes à venir témoigner en commission parlementaire.

C'est la première remarque que j'aimerais faire, M. le Président. À partir d'un vécu, comme on est obligé de statuer aujourd'hui, à même une loi spéciale, où on va contribuer à l'approbation de cette loi-là, de revoir aussi le règlement de l'Assemblée nationale, pour faire en sorte que, lorsque les parlementaires et une commission responsable détectent qu'il y a des problèmes, qu'on ait un mandat, qu'on puisse assigner devant cette commission les individus ou les associations concernées afin que nous puissions apporter des éléments correcteurs.

Deuxième remarque, M. le Président – je le souligne ici, dans cette Assemblée, depuis maintenant trois ans – une des lacunes majeures que nous avons au niveau de nos projets de loi, et même dans cette loi spéciale que nous présenterons cet après-midi, c'est qu'ils ne contiennent jamais de clause crépusculaire. Cette loi-là, qu'on modifiera et dont on suspendra l'application, date de 1934. C'est la Loi sur les décrets de convention collective. Parce qu'on n'a pas regardé cette loi-là à intervalles réguliers, pour l'adapter et pour l'actualiser, on a fait face, en commission parlementaire, à beaucoup d'intervenants qui sont venus nous demander d'abroger ce projet de loi en utilisant, dans bien des cas, le Comité paritaire de l'industrie du verre plat, qui avait étendu ses tentacules, comme l'a souligné mon collègue de Laval-des-Rapides, dans toute l'organisation de la fabrication de la fenêtre et de la porte, ce qui fait en sorte que nous avons aujourd'hui de grands segments des activités commerciales et industrielles qui ont le double assujettissement.

Alors, cette non-prévoyance, M. le Président, de nos règlements fait en sorte que, souvent, on essaie d'éliminer des lois dont nous avons encore immensément besoin. La commission parlementaire l'a démontré, que c'était une constatation générale des deux côtés de la table de la commission, que cette loi-là devrait être maintenue, mais actualisée. Si elle avait été actualisée, s'il y avait eu une clause crépusculaire, au moins, comme minimum, à tous les cinq ans, de revoir nos lois, on se serait peut-être aperçu que le ministre n'avait pas, comme il nous l'a dit dans ses remarques préliminaires, tous les outils nécessaires pour agir en temps voulu et en temps approprié.

Alors, je n'entrerai pas non plus, M. le Président, dans le fond du projet de loi. M. le ministre a donné une série d'événements. Je connais le dossier depuis 1991, et je crois aussi qu'il est de la responsabilité des parlementaires de ne pas entraver un processus judiciaire... qui pourra découler de contestations. Alors, les motifs sont connus et je suis d'accord avec l'urgence qu'il y avait. C'est une loi qui est réellement urgente... pour qu'on puisse, ici ensemble, en tant que parlementaires, apporter les correctifs voulus.

Alors, en conclusion, M. le Président, j'espère que l'Assemblée nationale, dans un premier temps, prendra avis qu'il est temps qu'on révise le pouvoir des commissions parlementaires, dans la foulée de la réforme de 1984. Dans un deuxième temps, M. le Président, j'espère qu'il deviendra de nos habitudes, ici, dans cette Assemblée, à chaque projet de loi que nous passerons, d'avoir une clause crépusculaire, d'avoir les impacts sur les ressources humaines et les impacts aussi que ces lois-là peuvent avoir sur les finances publiques. Dans ce cas-ci, il n'y a pas d'impact sur les finances publiques en tant que telles. Il y a des impacts, comme M. le ministre l'a souligné, au niveau des 30 000 000 $, pour les groupes, les individus concernés et les associations. Il n'y a pas d'impact non plus sur les ressources humaines, sinon, comme on l'a vu clairement dans les notes explicatives, qu'on nommera trois personnes pour gérer maintenant ce secteur d'activité.

(16 heures)

Alors, je concourrai, M. le Président, à adopter ce projet de loi dans les plus brefs délais, parce que c'est plus que le Comité paritaire de l'industrie du verre plat qui est en danger, c'est toute la Loi sur les décrets de convention collective. J'espère qu'aujourd'hui les parlementaires enverront un signal clair que, à partir d'aujourd'hui, M. le Président, on ne laissera pas traîner les dossiers pendant de nombreux mois, mais que, dès qu'une situation se présentera, les parlementaires de l'Assemblée nationale seront capables de donner leur consentement pour faire en sorte que des lois soient adoptées dans les plus brefs délais pour corriger les situations qui sont iniques. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Drummond. Alors, nous poursuivons le débat sur l'adoption du principe, en permettant au ministre de l'Emploi de nous apporter sa réplique.


M. Serge Marcil (réplique)

M. Marcil: Merci, M. le Président. Très brièvement, d'abord, je voudrais remercier les membres de cette Assemblée d'avoir donné leur consentement à ce qu'on procède, sans la suspension des règles, à l'analyse article par article de ce projet de loi. Donc, je pense que c'est de montrer un signe de maturité dans des situations comme celle que nous vivons présentement, et surtout pour protéger les gens qui sont assujettis à ce décret-là et redonner une confiance en leur Comité paritaire.

Je voudrais, par contre, essayer de rectifier certains faits que le critique de l'Opposition a soulevés. Les plaintes, on en a... À ma connaissance, on a commencé à recevoir des plaintes de certaines personnes assujetties au Comité paritaire à peu près dans les années quatre-vingt, vers la fin de l'année quatre-vingt-dix, début 1991. Immédiatement, le ministre de l'époque, M. Norm Cherry, a procédé à la nomination d'un enquêteur.

Donc, les gens ne peuvent pas deviner s'il y a des plaintes quelque part ou s'il y a des choses qui fonctionnent ou qui ne fonctionnent pas. C'est un comité paritaire qui semblait, par sa face même, du moins au niveau de la perception, assez bien fonctionner. Donc, au moment où il y a eu des plaintes, comme lorsqu'on a des plaintes, des inquiétudes qui sont soulevées par d'autres membres assujettis à d'autres comités paritaires, on agit exactement de la même façon.

Il y a eu des plaintes. Immédiatement, il y a eu un enquêteur qui a été nommé. Et, lorsque le rapport a été déposé en début de 1992, immédiatement, le ministre de l'époque, M. Norm Cherry, a rencontré le conseil d'administration du Comité paritaire et a exigé d'eux un plan de redressement. Il leur avait donné un an pour que ce plan-là soit déposé. Et, pendant ce temps, le rapport avait été remis au Procureur général du Québec. Donc, il faut penser qu'il y a plusieurs intervenants dans le dossier, et personne, à ma connaissance... Tous ceux et celles, tous les intervenants dans ce dossier n'avaient qu'un seul intérêt: faire en sorte que ce Comité agisse bien, que les intérêts des travailleurs et des travailleuses et des employeurs également soient bien protégés et bien administrés.

Et, pendant la période de la mise en place d'un plan de redressement, il y a eu naturellement le Procureur général qui étudiait le rapport du Vérificateur en question. Et, à un moment donné, il a pris ses responsabilités, il a fait intervenir les personnes nécessaires. Donc, il s'est servi de ses outils, mais ç'a pris peut-être quelques mois, mais les quelques mois sont dûs à des délais qui ne sont pas de la responsabilité du ministre qui m'a précédé.

Donc, je crois que, dans ce dossier, les étapes ont été franchies une à une. Et c'est vrai que, au niveau de la Loi sur les décrets, il y a des articles qui permettent au ministre d'intervenir, mais c'est une loi qui date de 1934. Aujourd'hui, vous savez que, avec l'évolution du droit, au moment et à chaque fois qu'un ministre veut intervenir, souvent dans un dossier comme celui-là, il y a toujours quelqu'un, quelque part qui interprète la loi, les articles de loi de façon différente, et ça allonge, ça prolonge les délais, et c'est ça qui fait que, à un moment donné, on a de la difficulté à intervenir de façon drastique dans des délais plus courts.

Donc, j'ai suivi la procédure nécessaire, c'est-à-dire la loi, le processus qui me permettait... et je m'aperçois aujourd'hui qu'il faut prendre une autre façon pour pouvoir intervenir encore plus rapidement. Parce qu'il ne faut pas penser, aussi, qu'à l'Assemblée nationale on doit se servir de cet outil, de ce Parlement, et, à chaque fois qu'il y a un conflit quelque part, intervenir continuellement avec des lois spéciales. Il y a des lois qui existent. Il faut travailler avec ces lois-là, les corriger si nécessaire.

C'est ce que nous essayons présentement de faire avec la Loi sur les décrets de convention collective. Nous avons un rapport interministériel qui a été déposé sur l'avenir de la loi des décrets. J'ai procédé par des consultations publiques, il y a quelques semaines, à la fin du mois de mai, pour connaître l'opinion de l'ensemble des intervenants régis par la loi sur les décrets, et nous nous apprêtons, naturellement, d'ici quelques semaines, quelques mois à rétroagir aux propositions qui nous ont été faites en commission parlementaire, toujours dans un seul objectif, moderniser la loi sur les décrets et donner également, par le biais de cette modernisation, des outils au ministre en titre, responsable de l'application de cette loi, des outils pouvant lui permettre d'intervenir de façon plus rapide et de façon plus ponctuelle.

Donc, M. le Président, moi, j'ai terminé ma réplique, et je tiens encore à remercier les membres de cette Assemblée, mon collègue de l'Opposition et le député indépendant également de participer de façon aussi rapide à l'étude article par article de cette loi. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Alors, le principe du projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Doyon: Maintenant, M. le Président, je voudrais, avec votre permission, faire motion pour que ledit projet de loi soit déféré à la commission plénière. Je fais donc motion dès maintenant pour que l'Assemblée se constitue en commission plénière et, pour nous permettre de le faire, je demanderais que nous suspendions nos travaux pour quelques instants.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion, la motion que le projet de loi soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée, est-elle adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que la motion, également, pour que l'Assemblée se constitue en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi 35 estadoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. En conséquence, l'Assemblée se constitue en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi 35. Je suspends donc les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 16 h 7)

(Reprise à 17 h 5)


Commission plénière

M. Bissonnet (président de la commission plénière): Si vous voulez prendre place. Conformément à l'ordre qui vient d'être adopté, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec. Nous allons donc entreprendre nos travaux par les remarques préliminaires. Est-ce que M. le ministre de l'Emploi a des remarques préliminaires?

M. Marcil: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Non. M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Ménard: Non, M. le Président.


Étude détaillée

Le Président (M. Bissonnet): Alors, nous procédons à l'article 1. Est-ce qu'il y a des commentaires sur l'article 1?

M. Marcil: Je vais le lire, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): Non, non, ça va.

M. Marcil: Non? Ça va.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Nous en sommes à l'article 2. Est-ce qu'il y a des remarques sur l'article 2?

M. Marcil: Non.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 2 est adopté?

M. Marcil: Cet article prévoit, M. le Président, les pouvoirs et fonctions des personnes pouvant agir pour le Comité paritaire, soit ses membres, officiers, substituts et mandataires ainsi que son secrétaire. Il prévoit de plus que cette période de suspension peut être prolongée de six mois en six mois par le ministre de l'Emploi et que ce dernier donne avis d'une telle prolongation par publication à La Gazette officielle du Québec.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Ménard: Nous sommes d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va. L'article 2 est adopté. Article 3.

M. Marcil: M. le Président, l'article 3 vise à confier à trois personnes membres du personnel de la Commission des normes du travail les pouvoirs et fonctions suspendues en vertu de l'article 2, soit ceux des membres, officiers, substituts et mandataires du Comité paritaire et ceux de son secrétaire. Ces trois personnes seraient nommées par la Commission ou son président et elles demeureraient en fonction jusqu'à la fin de l'administration provisoire ou jusqu'à ce que la Commission les remplace. En outre, la Commission pourrait leur adjoindre le personnel nécessaire. Cet article prévoit de plus qu'au sens de la loi ces trois personnes constituent l'administrateur provisoire.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Laval-des-Rapides, ça va?

M. Ménard: J'ai quelques remarques.

Le Président (M. Bissonnet): Oui.

M. Ménard: Il y en a qui sont strictement de rédaction. Je ne sais pas pourquoi les personnes devraient s'appeler l'administrateur provisoire. Mais, en tout cas, je ne m'obstinerai pas sur l'orthographe des lois, sinon qu'il y avait une certaine époque où on était fier d'avoir des lois clairement écrites au Québec par rapport aux lois fédérales. Il semble que ce temps soit révolu. En tout cas, peu importe. C'est votre loi. Gardez-la comme ça.

Mais, par contre, je comprends mal pourquoi vous vous limitez à choisir les trois membres qui constitueront ensemble l'administrateur – un peu comme la Sainte-Trinité – pourquoi vous vous limitez à les choisir parmi le personnel de la Commission alors que, dans la loi des décrets de convention collective, vous auriez pu ordonner la tutelle. Cette loi, en son article 26.1, dit que le ministre peut nommer, après consultation du ministre de la Main-d'oeuvre, etc., la Commission des normes du travail pour agir en qualité d'administrateur. Donc, ce n'était pas obligatoire. Puis, dans le paragraphe qui précède, on disait: «Le ministre peut, s'il estime que le rapport de l'enquêteur le justifie, ordonner que les pouvoirs de ce Comité paritaire soient suspendus et nommer un administrateur qui en exerce les pouvoirs pour la période que le ministre détermine.» Donc, la loi générale vous donnait le pouvoir de nommer un administrateur n'importe où, d'assumer votre responsabilité ministérielle et d'assumer cette responsabilité vis-à-vis de l'électorat, ou vous pouviez déléguer ça à la Commission des normes du travail. Ici, vous vous imposez de choisir parmi le personnel de la Commission. C'est une contrainte que je ne souhaitais pas vous imposer. Si vous la désirez, gardez-la. Nous, au cas où nous aurions à administrer cette loi, on ne sait jamais, ou encore à en faire une semblable éventuellement, notre position serait que notre choix soit aussi vaste que celui prévu par la loi des décrets de convention collective, et, par conséquent, j'enlèverais «désigne parmi le personnel de la Commission».

Le Président (M. Bissonnet): Oui, M. le ministre de l'Emploi, sur... Vous n'avez pas fait de motion encore, c'est simplement une suggestion que vous faites, si je comprends bien?

M. Ménard: Oui, bien, je vais vous suggérer un amendement, c'est que soient enlevés les mots...

Le Président (M. Bissonnet): Non, je n'ai pas compris que vous faisiez un amendement maintenant. Mais, si vous en faites un, veuillez l'écrire. Je vais accepter l'amendement et on prendra une décision plus tard.

M. Ménard: Passez-moi ça, ce ne sera pas long. Ça aurait été mieux de l'écrire à ma place, ça aurait été plus clair. Moi, j'écris bien mal.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de l'Emploi, sur... Je n'ai pas accepté d'amendement encore. C'est une suggestion que M. le député a mentionnée. M. le ministre de l'Emploi.

M. Marcil: Je comprends l'objet de l'intervention de mon collègue de Laval-des-Rapides. J'ai essayé de demeurer dans l'esprit de la Loi sur les décrets. Vous savez qu'on lit, à l'article 26.1: «Le ministre peut nommer, après consultation du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, la Commission des normes du travail pour agir en qualité d'administrateur dans ce cas.»

Dans ce cas-ci, moi, j'ai préféré nommer la Commission des normes du travail qui, elle, aura à déléguer trois personnes, trois administrateurs qui joueront le rôle d'administrateurs provisoires. Il faut dire que c'est un organisme, la Commission des normes, quand même, où on retrouve une main-d'oeuvre qualifiée, des ressources très, très qualifiées, beaucoup de spécialistes. Elle pourrait répondre aux besoins, justement, de ces administrateurs provisoires, si tel était le cas. C'est une façon simple et rapide d'intervenir, plutôt que de faire le recrutement d'autres administrateurs à l'extérieur.

M. Ménard: Moi, je vous propose comme amendement, M. le Président... Est-ce que je suis dans l'ordre pour vous proposer un amendement?

Le Président (M. Bissonnet): Oui, oui, certainement. Vous pouvez proposer un amendement, M. le député.

M. Ménard: J'ai besoin de conseils, comme jeune député...

Le Président (M. Bissonnet): Ça va bien. Vous pouvez faire un amendement à l'article 3, il n'y a pas de problème.

M. Ménard: ...de gens plus expérimentés que moi! Merci.

Le Président (M. Bissonnet): Mon rôle, c'est de décider s'il est recevable, mais je vous laisse proposer votre amendement.

M. Ménard: Mon amendement sera à l'effet de remplacer, à la – j'espère que nous avons tous les mêmes lignes – quatrième ligne de l'article 3, les mots «la Commission des normes du travail ou son président désigne parmi le personnel de la Commission» par «nomme le ministre».

La première phrase se lirait donc ainsi: «Pendant la durée de cette suspension, les pouvoirs et fonctions du Comité paritaire et ceux des personnes visées au premier alinéa de l'article 2 sont exercés, pour et au nom du Comité paritaire, par trois personnes que nomme le ministre de l'Emploi.» Alors, remplacer par «que nomme le ministre de l'Emploi».

Est-ce que je peux parler juste au soutien, brièvement, de l'amendement, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): Certainement.

M. Ménard: Merci. Alors, cela aurait l'avantage de bien faire assumer par le ministre et non par personne interposée la responsabilité de choisir les personnes qui vont mettre de l'ordre dans l'administration de ce Comité paritaire. De plus, nous avons remarqué, ces dernières semaines, que la Commission des normes du travail avait elle-même ses problèmes. Elle a fait l'objet d'un rapport de la Commission de la fonction publique pour la façon dont elle avait congédié son personnel. Le président lui-même est venu nous dire les efforts considérables qu'elle faisait pour corriger les plaintes dont elle avait fait l'objet. Ça m'apparaît être une commission qui est déjà assez surchargée de travail à remettre de l'ordre dans ses affaires.

Finalement, voici le texte écrit...

Le Président (M. Bissonnet): Je veux vous informer, M. le député de Laval-des-Rapides, que, suite à l'amendement que vous apportez au premier alinéa, il faudrait... Pour que ce soit concordant, il faudrait que vous proposiez également, au deuxième alinéa et au troisième alinéa, des changements. Nous allons passer au premier alinéa, et si votre motion d'amendement est adoptée, il y aura des changements à faire adopter pour que les deuxième et troisième alinéas soient concordants avec le premier.

M. Ménard: J'ai l'impression qu'ils le sont. En tout cas...

Le Président (M. Bissonnet): Non. Il faudrait dire, au deuxième alinéa: «Elles demeurent en fonction jusqu'à la fin de l'administration provisoire ou jusqu'à ce que le ministre les remplace.»

M. Ménard: «...jusqu'à ce que le ministre de l'Emploi les remplace.» Vous avez bien raison.

Le Président (M. Bissonnet): «Le ministre peut adjoindre à l'administrateur provisoire le personnel qu'il juge nécessaire.» Alors, évidemment, nous allons passer au premier amendement. S'il y a lieu, si c'est adopté, je vous indique qu'il faudra apporter des amendements en concordance avec le premier alinéa.

(17 h 10)

M. Ménard: Ce que j'allais ajouter au soutien, c'est qu'il me semble que le ministre nous a fait la démonstration qu'il fallait une intervention particulière. Et, quand il faut une intervention particulière à l'autorité de l'Assemblée nationale, je pense qu'il faut une intervention particulière de l'Exécutif, qui répond devant la population.

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre de l'Emploi, vous avez la parole.

M. Marcil: M. le Président, je comprends toujours l'intervention de mon collègue, sauf que j'ai choisi, comme ministre, d'utiliser un organisme qui relève de ma responsabilité. Donc, c'est une institution, pour nous, la Commission des normes du travail. Elle relève du ministre de l'Emploi, donc je peux toujours intervenir, au niveau de la Commission des normes, comme ministre responsable. J'ai favorisé, c'est-à-dire j'ai préféré utiliser les instruments, les outils que le gouvernement du Québec, que le ministre de l'Emploi a mis sur pied plus que tout autre choix, dans le sens que nous avons les éléments nécessaires pour occuper le poste d'administrateur provisoire, parce que ça demeure toujours une administration provisoire, d'une part. Ayant les outils nécessaires, ce choix, pour moi, est préférable par rapport à la nomination de trois personnes, qui auraient pu être des fonctionnaires également, sauf avec un processus administratif qu'il aurait fallu que je respecte, donc qui aurait pris un peu plus de temps.

Je voulais intervenir de façon rapide, et, pour moi, c'est le moyen le plus rapide d'intervenir, comme l'article 26.1 de la loi des décrets dit au ministre qu'il peut confier le mandat à la Commission des normes. Et aussi, c'est de responsabiliser, également, cette Commission, qui a aussi ce pouvoir, par le biais de l'article 26, d'intervenir et d'agir comme administrateur. Donc, j'ai bien compris l'argumentation de mon collègue de Laval-des-Rapides, mais je préfère m'en tenir à ce que j'ai proposé par le biais de l'article 3.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'amendement proposé par M. le député de Laval-des-Rapides, qui se lit comme suit: Que l'article 3 du projet de loi 35 soit modifié par le remplacement, dans la quatrième ligne du premier alinéa, des mots «la Commission des normes du travail ou son président désigne parmi le personnel de la Commission» par «nomme le ministre de l'Emploi», est adopté? Rejeté?

M. Marcil: Rejeté pour nous, M. le Président.

M. Ménard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Rejeté, sur division.

M. Marcil: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Rejeté, sur division.

M. Ménard: Bon.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 3 est adopté?

M. Ménard: Sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté, sur division. L'article 4. Est-ce qu'il y a des remarques sur l'article 4?

M. Marcil: Oui. Cet article prévoit que les trois personnes qui constituent l'administrateur provisoire pourront adopter des règles de régie interne pour la conduite des affaires de l'administrateur provisoire et que, tant que ces règles ne sont pas adoptées, ces trois personnes devront prendre, à la majorité, les décisions touchant l'administration provisoire.

Le Président (M. Bissonnet): Des remarques, M. le député de Laval-des-Rapides?

M. Ménard: Je n'en ai pas.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 4 est adopté? Adopté.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 5.

M. Marcil: L'article 5, M. le Président, prévoit que l'administrateur provisoire peut modifier ou mettre fin aux fonctions de direction que détient une personne pour le Comité paritaire.

Le Président (M. Bissonnet): Remarques sur l'article 5, M. le député de Laval-des-Rapides?

M. Ménard: Non, je pense que c'est l'essentiel des pouvoirs qu'on veut lui donner, justement. C'est une des parties des pouvoirs importants. Nous sommes d'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 5 est adopté? Adopté. L'article 6.

M. Marcil: L'article 6 prévoit que l'administrateur provisoire peut ester en justice pour et au nom du Comité paritaire.

M. Ménard: Nous le soutenons entièrement.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 6 est adopté? Adopté.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Dites-moi que c'est adopté.

M. Marcil: Oui, adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Ça m'aide un peu, dans ce temps-là. L'article 7.

M. Marcil: Cet article octroie à l'administrateur provisoire le pouvoir d'annuler les décisions ou les actes du Comité paritaire ou de l'un de ses dirigeants si cette décision ou cet acte est antérieur à la date de l'administration provisoire. Si cet acte ou décision porte sur un bien, l'administrateur provisoire pourra le récupérer en quelque main qu'il soit ou réclamer l'équivalent de la valeur de ce bien. Toutefois, ces opérations ne pourront affecter les droits des tiers de bonne foi.

Le Président (M. Bissonnet): Des remarques sur l'article 7, M. le député de Laval-des-Rapides?

M. Ménard: Oui. Ce sont des pouvoirs extrêmement importants qui sont donnés à ces administrateurs, qui permettent, justement, de résilier des contrats qui ont été passés, même les contrats qui ont été passés, si je comprends bien, avec des tiers de bonne foi. Mais, évidemment, on réserve leurs droits, et on verra plus loin, à l'article 9, qu'on réserve leur droit de réclamer des dépenses.

Étant donné les réserves qui sont apportées pour la protection des tiers qui sont de bonne foi, nous donnons notre accord à cet article qui donne des pouvoirs vraiment extraordinaires à un groupe de personnes. Ce sont des pouvoirs qui sortent du droit commun et qui sont parmi les plus importants prévus dans ce projet de loi. C'est donc adopté unanimement.

M. Marcil: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 7 est adopté. L'article 8.

M. Marcil: Cet article prévoit que, en cas d'annulation d'un acte ou d'une décision en vertu de l'article 7, la personne qui a pris la décision ou y a participé ou celle qui a prescrit ou autorisé l'acte est responsable de façon personnelle en cas de réclamation par l'administrateur provisoire. De plus, si plus d'une personne a posé un tel geste, ces personnes sont responsables de façon solidaire.

Le deuxième alinéa de cet article prévoit qu'il en est de même à l'égard de toute personne qui a profité de façon indue de la décision ou de l'acte annulé.

Le Président (M. Bissonnet): Sur l'article 8, M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Ménard: Bon, sur l'article 8, nous avons des problèmes sérieux. Malgré l'urgence d'agir, malgré les soupçons de dilapidation des fonds publics, pour ne pas dire même les soupçons de manoeuvres frauduleuses que nous avons à l'égard des gens qui ont administré le Comité paritaire – et vous remarquerez que, dans nos présentations, nos termes étaient encore plus vigoureux que ceux du ministre, qui a toujours voulu préciser qu'il n'avait pas encore la preuve de ces actes frauduleux – malgré tout cela, je trouve que, imposer à une personne la responsabilité d'un montant réclamé pour des décisions qu'elle a prises, qu'elle a pu prendre de bonne foi, elle-même, avant la passation de cette loi, ce sont des pouvoirs qui, sans aucune balise – et il n'y a aucune balise prévue à l'article 8 pour l'exercice de ces pouvoirs – sont inacceptables dans une société de droit. Je sais qu'il y a des actes qui ont été posés par ces administrateurs, où les administrateurs étaient évidemment de mauvaise foi. Il y en a probablement d'autres où les administrateurs étaient évidemment de bonne foi, ou, enfin, parmi les actes qu'ils ont posés, il y en a sûrement un grand nombre qui étaient à l'avantage du Comité paritaire puis dans l'exercice de leurs fonctions. Mais il y a probablement des cas où ça va être difficile de déterminer entre les deux.

Moi, si on combine l'effet de l'article 7, avec lequel je suis d'accord, et l'effet de l'article 8, les administrateurs qui vont être nommés par la Commission des normes du travail pourront annuler toutes les décisions, les bonnes comme les mauvaises, et si, parmi ces décisions, il y en a des bonnes qui avaient été prises et que ces bonnes décisions ou même des choses qui sont, disons, discutables, ont coûté de l'argent, eh bien, ces administrateurs pourront être poursuivis personnellement pour les montants qui seraient réclamés.

Autrement dit, ça donne un pouvoir discrétionnaire énorme aux administrateurs provisoires, le genre de pouvoir discrétionnaire que, normalement, on n'oserait même pas donner au ministre dans une loi. Et, pour ces raisons, je pense qu'il aurait fallu baliser plus étroitement l'application de cet article.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce qu'il y a d'autres remarques?

M. Marcil: Oui, M. le Président. Qu'est-ce que le député de Laval-des-Rapides pourrait nous suggérer comme balises? Quel serait le genre de balises qu'il pourrait nous proposer pour faire en sorte que cet article-là ne crée pas de préjudice à certaines personnes ou administrateurs, puisqu'il faut bien comprendre...

(17 h 20)

M. Ménard: Bien, je pense qu'il faudrait y insérer des notions comme «préjudice évident» et le fait que la décision a été prise de mauvaise foi, dans une situation où les administrateurs étaient en conflit d'intérêts. Pour que ces gens-là encourent une responsabilité personnelle, c'est-à-dire l'obligation de rembourser des deniers, que l'on doive démontrer que ces gens-là savaient, par exemple, que l'un des administrateurs était dans une situation de conflit d'intérêts, qu'on donnait à cet administrateur – même si on le donnait à un autre administrateur qu'eux-mêmes – mais que ces gens-là savaient qu'on donnait à cet administrateur un avantage indu; je pense même – indu – quelque chose qui se rapproche de la fraude ou, certainement, en tout cas, d'un abus de confiance ou d'une situation de conflit d'intérêts.

Mais, ici, il n'y a aucune balise. Remarquez que j'ai dit, d'abord, à l'article 7, que j'étais d'accord, étant donné la situation exceptionnelle, pour donner à ces administrateurs des pouvoirs très larges, pour annuler les actes posés dans le passé, et cela, à leur discrétion. Mais, de là à ce que cette annulation discrétionnaire entraîne la responsabilité personnelle des administrateurs, qui ont pu y concourir de bonne foi, et qu'ils soient obligés de débourser les montants d'argent qu'ont entraînés ces décisions, ça m'apparaît être quelque chose qui dépasse les règles généralement admises dans un État de droit basé sur des principes élémentaires d'équité.

Le Président (M. Bissonnet): Je vais suspendre pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 22)

(Reprise à 17 h 23)

Le Président (M. Bissonnet): Alors, la commission plénière reprend ses travaux sur l'étude détaillée, article par article, du projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec.

M. le ministre de l'Emploi, vous avez la parole.

M. Marcil: Oui, M. le Président. On réfléchit toujours à l'article 8. Si vous voulez, on pourrait suspendre l'article et le reprendre vers la fin.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, vous proposez la suspension de l'article 8.

M. Marcil: Et on appellerait, à ce moment-là, l'article 9.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que c'est adopté? Alors, l'article 8 est suspendu pour le moment.

Article 9. Est-ce qu'il y a des remarques sur l'article 9?

M. Marcil: Oui, M. le Président. Cet article permet à l'administrateur provisoire de mettre fin à une entente ou à un contrat conclu avant l'administration provisoire. En ce cas, ce dernier paie au contractant, de bonne foi, les frais et dépenses qu'il a encourus, et le contractant doit rembourser toute avance monétaire qu'il a reçue.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Laval-des-Rapides.

M. Ménard: D'abord, nous sommes d'accord avec le but poursuivi dans cet article. Ce sont là des pouvoirs extraordinaires, mais qui sont justifiés par une situation exceptionnelle. Cependant, nous sommes heureux, aussi, que l'on ait décidé d'y ajouter un article pour protéger les intérêts légitimes de ceux qui ont contracté de bonne foi avec le Comité paritaire. Cependant, nous ne voyons pas pourquoi, si ces personnes étaient de bonne foi lorsqu'elles ont contracté avec le Comité paritaire, elles n'auraient pas droit à une indemnisation de tous les dommages qu'elles subissent par l'annulation d'un contrat, l'annulation unilatérale d'un contrat, ce qui est évidemment exceptionnel dans notre droit. Dans notre droit, quand un contrat est passé entre deux parties, les deux parties sont liées, et il n'y a aucune des deux qui peut le résilier unilatéralement.

Alors, c'est pourquoi nous proposons l'amendement suivant. Alors, le deuxième paragraphe se lit comme ceci: «Il est tenu de payer au contractant de bonne foi les frais et dépenses encourus par ce dernier jusqu'à la date de la résiliation.» Alors, nous proposons d'ajouter, à la deuxième ligne de ce deuxième alinéa, après le mot «résiliation», justement, les mots «, ainsi que, s'il y a lieu, les dommages subis en raison de celle-ci».

Ce qui veut dire que l'article se lirait ainsi: «L'administrateur provisoire peut résilier unilatéralement tout contrat ou entente, conclu au nom du Comité paritaire avant» la date de la sanction de la loi. Et, ça se lirait ainsi, ensuite: «Il est tenu de payer au contractant de bonne foi les frais et dépenses encourus par ce dernier jusqu'à la date de la résiliation, ainsi que, s'il y a lieu, les dommages subis en raison de celle-ci.»

Le Président (M. Bissonnet): Remarques sur l'amendement?

M. Marcil: Je vais permettre à mon conseiller juridique, s'il vous plaît, d'intervenir sur l'amendement, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Bon, voilà. Alors, de consentement, le conseiller juridique du ministre de l'Emploi va intervenir sur l'amendement proposé par M. le député de Laval-des-Rapides. Puis-je savoir le nom de ce conseiller juridique?

M. Marcil: Me Rochon.

Le Président (M. Bissonnet): Son prénom?

M. Rochon (André): André.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, Me André Rochon, membre du Barreau, pour le ministre de l'Emploi.

M. Rochon (André): La raison pour laquelle le texte, tel que rédigé, ne propose pas les dispositions soumises en amendement, c'est que l'article 9 vise la possibilité de résilier des actes suspects, pas nécessairement illégaux, comme suspects aux intérêts du Comité paritaire lui-même.

Si tous les dommages possibles, directs, qui peuvent en découler, de ce choix, doivent être indemnisés, la disposition devient complètement inutile, à notre avis, sur le plan juridique. Et la résiliation devient tout autant inutile, à notre avis, sur le plan juridique. De telle sorte que le texte de l'article 9, tel qu'il est actuellement rédigé, c'est-à-dire, donc, sans l'amendement proposé, vise à remettre les parties en état, comme s'il n'y avait pas eu de contrat, mais en obligeant toutefois l'administrateur provisoire à indemniser, à payer au contractant de bonne foi les frais, les dépenses qu'il a, dans les faits, déjà encourus. C'est en quelque sorte pour éviter de donner une portée, donc, si je me résume, trop large à l'article 9 qu'il a été restreint à remettre les parties en état, tout simplement.

Le Président (M. Bissonnet): Je vous remercie de votre intervention, Me Rochon. Est-ce qu'il y a d'autres interventions?

M. Ménard: Bon. En somme, si je contracte avec un bandit sans savoir que c'est un bandit, pour un contrat frauduleux, je n'ai pas droit à la protection que m'accorde la loi, même si, pour moi, il avait l'air d'avoir les pouvoirs de passer où il est passé. Enfin, ça ne me convainc pas, mais ce n'est pas moi qui décide.

Le Président (M. Bissonnet): Me André Rochon, pour M. le ministre de l'Emploi, la parole est à vous.

M. Rochon (André): La bonne foi se présume systématiquement jusqu'à ce qu'on démontre le contraire. Si un cocontractant était de bonne foi, il aura droit d'être remis en état, tout simplement. C'est la portée de l'article 9. Sinon, il est inutile de résilier. On est aussi bien de faire exécuter le contrat, même si celui-ci vise à accorder des bénéfices ou à remplir des intérêts autres que ceux du Comité paritaire au sens strict du terme.

L'administration provisoire qui est proposée dans le projet de loi vise tout simplement, dans son esprit, à voir aux meilleurs intérêts du Comité paritaire de façon provisoire, comme son titre l'indique. Et c'est toujours guidé par cet aspect fiduciaire que les administrateurs provisoires devront agir, et non pas s'exprimer en désaccord ou en accord simple avec la décision qu'ils visent.

Le Président (M. Bissonnet): Merci, Me Rochon. D'autres remarques?

M. Ménard: Non.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'amendement proposé par M. le député de Laval-des-Rapides, qui se lit comme suit: L'article 9 du projet de loi 35 est modifié par l'insertion, dans la deuxième ligne du deuxième alinéa, après le mot «résiliation», des mots «,ainsi que, s'il y a lieu, les dommages subis en raison de celle-ci», est-ce que cet amendement est adopté?

Des voix: Rejeté.

Le Président (M. Bissonnet): Rejeté, sur division. Nous revenons à l'article 9. Est-ce que l'article 9 est adopté? Adopté sur division.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. L'article 9 est adopté.

M. Ménard: Il est important. Il est plus important que mes réserves.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va. Article 10.

(17 h 30)

M. Marcil: L'article prévoit que l'administrateur provisoire doit périodiquement soumettre au ministre de l'Emploi un rapport de ses constatations accompagné de ses recommandations quant à l'administration provisoire. Ce rapport devra contenir de plus les renseignements que pourrait exiger le ministre. En outre, l'article 10 prévoit que l'administrateur provisoire doit lui fournir tout autre renseignement qu'il demande.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 10 est-il adopté?

M. Ménard: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 11.

M. Marcil: L'article 11 prévoit que le ministre de l'Emploi, lorsqu'il estime que la situation le justifie, soumet un rapport au gouvernement afin que ce dernier puisse prendre une décision quant à l'administration provisoire, tel que le prévoit l'article 12 du présent projet de loi.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté, l'article 11. L'article 12.

M. Marcil: L'article 12, M. le Président, permet au gouvernement de prendre une ou plusieurs des mesures énumérées après qu'il ait reçu le rapport du ministre de l'Emploi, prévu à l'article 11 du présent projet de loi. Ces mesures peuvent prévoir soit la fin de l'administration provisoire, la déchéance ou le remplacement des dirigeants, la continuation de l'administration provisoire, la désignation d'un contrôleur budgétaire, la liquidation du Comité paritaire. À certains égards, le gouvernement pourra fixer certaines conditions à ces mesures.

M. Ménard: Nous sommes d'accord, M. le Président. Alors, adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 12 est adopté? Adopté. L'article 13.

M. Marcil: À l'article 13, on prévoit que les coûts attribuables à l'administration provisoire sont à la charge du Comité paritaire.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 13 est adopté? M. le député...

M. Ménard: Je suis juste curieux. Si c'est déficitaire?

M. Marcil: Jusqu'à maintenant, on n'a aucun élément qui nous indique que le Comité paritaire de l'industrie du verre plat est déficitaire.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 13 est adopté? Adopté. L'article 14.

M. Marcil: Cet article octroie une immunité de poursuite à l'égard de l'administration provisoire – donc, à l'égard de chacune des trois personnes qui la constituent – ainsi qu'à l'égard de toute personne qui exerce un pouvoir ou une fonction que la présente loi lui confie, sous réserve que la personne visée agisse de bonne foi dans l'exercice de ses fonctions.

M. Ménard: Encore une fois, étant donné la réserve, nous sommes d'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 14 est adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. L'article 15.

M. Marcil: Cet article prévoit l'impossibilité d'entreprendre certains recours contre les personnes auxquelles la présente loi confie des pouvoirs et fonctions, outre certains recours extraordinaires prévus au Code de procédure civile. L'article vise le recours en interdiction d'un administrateur ainsi que de l'injonction.

M. Ménard: Oui, adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. L'article 15 est adopté. L'article 16.

M. Marcil: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 16 est adopté?

M. Marcil: Non, mais, pour l'article 15, j'ai oublié de vous dire «adopté».

Le Président (M. Bissonnet): Il est adopté. Monsieur a dit que c'était adopté.

M. Marcil: Ah, que ce soit l'un ou l'autre, c'est bon? C'est bien.

Le Président (M. Bissonnet): Moi, d'abord que j'entends le mot adopté ici et qu'il n'y a pas de contestation, j'adopte. Alors, nous en sommes à l'article 16, M. le ministre.

M. Marcil: Merci, M. le Président. Cet article, tout comme l'article 1 du présent projet de loi, énonce que l'expression «Corporation» désigne la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, telle qu'elle y est décrite.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. L'article 17.

M. Marcil: Cet article, M. le Président, est le pendant de l'article 2 du présent projet de loi. Il prévoit, à l'égard de la Corporation, la suspension pour un an des pouvoirs et fonctions des personnes pouvant agir pour cette dernière, soit les membres du conseil d'administration ainsi que ses officiers, membres et agents. Il prévoit les même modalités de prolongation que l'article 2. Adopté.

M. Ménard: Juste un instant.

Le Président (M. Bissonnet): M. le député de Laval-des-Rapides, sur l'article 17.

M. Ménard: Oui, c'est peut-être l'occasion de vous demander: Qu'arrive-t-il du personnel, tant du Comité paritaire que de cette Corporation?

M. Marcil: Tout le personnel du Comité paritaire est régi par une convention collective. Donc, c'est du personnel qui est là pour le fonctionnement et l'administration du Comité. Pour le moment, on ne touche qu'aux administrateurs par le biais de cette loi.

M. Ménard: Alors, les inspecteurs, les secrétaires, les téléphonistes, s'il y en a...

M. Marcil: Ils demeurent en poste et continuent à faire leur travail, à moins que le comité provisoire ne découvre des anomalies. Il pourrait intervenir pour corriger certaines situations.

M. Ménard: D'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté?

M. Ménard: Adopté.

M. Marcil: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Article 17, adopté. Article 18.

M. Marcil: Cet article vise à confier aux trois personnes désignées en vertu du premier alinéa de l'article 3 du présent projet de loi les pouvoirs et fonctions suspendus en vertu de l'article 17. Ces trois personnes constituent donc l'administrateur provisoire, tant de la Corporation que du Comité paritaire.

M. Ménard: Nous sommes d'accord. Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 19.

M. Marcil: Cet article prévoit que les articles 3 à 15 de la loi s'appliquent, en les adaptant, à l'administration provisoire de la Corporation.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 20.

M. Marcil: L'article 20 prévoit que: Constitue une infraction: faire obstacle ou nuire à l'administrateur provisoire, à une personne qui le constitue, au personnel, à la Commission ou à son président lorsque ceux-ci agissent dans l'exercice des fonctions et pouvoirs de cette loi.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 21.

M. Marcil: Cet article prévoit que: Constitue une infraction: aider ou amener une autre personne à commettre une infraction prévue à l'article 20.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 22.

M. Marcil: Cet article prévoit le montant des amendes dans le cas où une personne est reconnue coupable d'une infraction en vertu de la présente loi.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. L'article 23.

M. Marcil: Cet article prévoit que, en cas d'infraction à la présente loi, seul le Procureur général est autorisé à poursuivre.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté...

M. Ménard: Nous sommes d'accord...

Le Président (M. Bissonnet): ...M. le député de Laval-des-Rapides?

M. Ménard: ...mais j'en profiterais peut-être pour démontrer un peu mon ignorance au conseiller juridique. On n'a plus besoin de dire que des poursuites sont prises en vertu du Code de procédure pénale? Non? C'est vrai, c'est dit dans le Code de procédure pénale, ça ne sert à rien de le répéter ici.

M. Rochon (André): Le Code de procédure pénale prévoit déjà les trois...

Le Président (M. Bissonnet): Je m'excuse. Me André Rochon, c'est pour les fins du Journal des débats , évidemment.

M. Rochon (André): Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Bissonnet): Me André Rochon, soyez bien à votre aise, pour le ministre de l'Emploi. Me Rochon, la parole est à vous.

M. Rochon (André): Le Code de procédure pénale prévoit déjà les trois ordres de recours et qui peut les prendre: le Procureur général, la personne que la loi autorise et la personne que le juge autorise.

M. Ménard: On ne fait plus comme avant, si je comprends bien? Si je comprends bien, on ne fait plus comme avant, dans chaque loi; on n'a plus à dire que les poursuites sont prises conformément... Avant, on disait, à la Loi sur les actions pénales ou... Mais, là, c'est... Donc, c'est en vertu du Code de procédure pénale. Parce que, le Code de procédure pénale prévoit justement que toutes les poursuites qui sont prises en vertu d'une loi provinciale sont prises en conformité avec le Code de procédure pénale. Alors, on n'a pas besoin de le répéter.

Le Président (M. Bissonnet): Ça va?

M. Rochon (André): C'est tout à fait exact.

M. Ménard: Je suis d'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'article 23 est adopté, M. le député?

M. Marcil: Adopté, M. le Président.

M. Ménard: Il m'apparaît aussi inutile que le reste, mais, enfin, oui, adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que c'est adopté?

M. Ménard: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 24.

M. Marcil: L'article 24 prévoit que la personne déclarée coupable d'une infraction est inhabile à exercer une fonction au sein d'un comité paritaire. Elle ne peut être ni élue ni nommée, ni occuper des fonctions comme membre, officier, substitut, mandataire ou secrétaire d'un tel comité ou comme administrateur ou officier de la Corporation. Il prévoit, de plus, la durée de cette inhabilité.

M. Ménard: Je trouve ça bien, et puis c'est mesuré.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 24 est adopté?

M. Marcil: Adopté.

M. Ménard: Oui.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 25.

M. Marcil: Cet article prévoit que l'administrateur provisoire devient partie à toute procédure à laquelle est partie le Comité paritaire ou la Corporation, qu'il n'y a pas lieu d'y avoir reprise d'instance ou que l'administrateur agit pour et au nom du Comité paritaire ou de la Corporation.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 25 est adopté? Adopté. Article 26.

M. Marcil: L'article 26 accorde une priorité aux dispositions de la présente loi et à celles des règles de régie interne adoptées par l'administrateur provisoire sur les statuts et règlements du Comité paritaire ou de la Corporation.

M. Ménard: Ça va sans dire, mais c'est peut-être mieux de le dire. Je suis d'accord.

Le Président (M. Bissonnet): L'article 26 est adopté. Article 27.

M. Marcil: L'article 27 prévoit que l'enquête entreprise en vertu de la Loi sur les décrets de convention collective n'est pas empêchée par la présente loi.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 27 est adopté?

M. Ménard: D'accord.

Le Président (M. Bissonnet): Est-ce que l'article 28 est adopté?

M. Marcil: Cet article prévoit que le ministre de l'Emploi est chargé de l'application de la présente loi.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté?

M. Marcil: Adopté.

M. Ménard: Ça, c'est un article important. Il faut qu'il y ait une responsabilité politique dans un dossier comme celui-là, et j'espère qu'il sera bien porté par le ministre de l'Emploi.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'article 28 est adopté?

M. Marcil: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Article 29.

M. Marcil: Avant l'adoption de l'article 29, M. le Président...

Le Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Marcil: ...on devrait revenir à l'article 8.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, nous reprenons l'étude de l'article 8...

M. Marcil: Est-ce qu'on pourrait avoir...

Le Président (M. Bissonnet): ...qui a été suspendu à une phase antérieure de cette Assemblée.

M. Marcil: Est-ce qu'on pourrait suspendre deux minutes, M. le Président?

Le Président (M. Bissonnet): Nous allons suspendre avec plaisir les travaux de cette Assemblée à votre demande, M. le ministre.

(Suspension de la séance à 17 h 40)

(Reprise à 18 h 3)

Le Président (M. Bissonnet): La commission plénière reprend ses travaux sur l'étude détaillée, article par article, du projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec.

Nous reprenons l'étude de l'article 8. Est-ce que l'article 8 est adopté? Est-ce qu'il y a des remarques?

M. Marcil: Est-ce que je pourrais ajouter, M. le Président, que la décision ou l'acte qui est annulé, dont on fait mention à l'article 8, ait été pris ou prescrit par une ou plusieurs personnes, chacune est responsable, de façon personnelle, en cas de réclamation. À titre d'exemple, le membre du Comité ayant posé ce geste pourrait être poursuivi en réclamation et être responsable, de façon personnelle, même s'il s'agit d'un geste du conseil d'administration. C'est l'objet de la responsabilité personnelle.

Dans le cas où la décision ou l'acte qui est annulé a été pris ou prescrit par plusieurs personnes, chacune d'elles est responsable de l'entièreté de la réclamation, sans que le créancier soit obligé de diviser sa réclamation. C'est l'objet de la responsabilité solidaire.

Dans le cas où une personne a profité de façon indue de la décision ou de l'acte annulé, cette personne est aussi responsable, de façon solidaire, avec celle qui a pris la décision ou prescrit l'acte. Un membre du Comité paritaire qui a été dissident à une décision n'est pas visé. Il n'est pas considéré avoir participé à une décision ni l'avoir approuvée s'il a enregistré sa dissidence, tant en vertu du Code civil du Québec que de la Loi sur les compagnies. Voilà, M. le Président.

M. Ménard: Moi, j'ai tout dit ce que j'avais à dire. Si vous voulez l'adopter, ça va être sur division.

Le Président (M. Bissonnet): Alors, est-ce que l'article 8 est adopté? Adopté sur division. L'article 8 est adopté sur division. Est-ce que l'article 29 est adopté?

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté?

M. Marcil: Adopté.

M. Ménard: Adopté.

Le Président (M. Bissonnet): Adopté. En conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux. Je remercie celles et ceux qui y ont participé. Et, pour permettre à l'Assemblée de poursuivre sa séance, je vais suspendre les travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 18 h 5)

(Reprise à 18 h 9)

Le Président: Veuillez prendre place, s'il vous plaît. M. le président de la commission plénière.

M. Bissonnet (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, et qu'elle a adopté le projet de loi.


Mise aux voix du rapport

Le Président: Merci. Alors, est-ce que ce rapport est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Nous allons maintenant procéder à la motion d'adoption du projet de loi 35, projet de loi qui s'intitule Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, motion présentée par M. le ministre de l'Emploi. Est-ce que cette motion d'adoption du projet de loi est adoptée?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Président: Adopté. Donc, en conséquence, le projet de loi 35, Loi sur l'administration provisoire du Comité paritaire de l'industrie du verre plat et de la Corporation de formation des vitriers et travailleurs du verre du Québec, est adopté. Donc, M. le ministre de l'Emploi.

M. Marcil: Oui, M. le Président. Compte tenu de l'heure, je vous demanderais de suspendre les travaux jusqu'à 20 heures ce soir.


Avis de sanction

Le Président: Très bien. Maintenant, je voudrais simplement informer l'Assemblée également qu'il y aura sanction du projet de loi que nous venons d'adopter au cabinet du lieutenant-gouverneur immédiatement à la suspension des travaux. Donc, à la demande du ministre de l'Emploi, les travaux de l'Assemblée sont donc suspendus jusqu'à ce soir, 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 10)

(Reprise à 20 h 6)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, Mmes, MM. les députés, si vous voulez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Compte tenu de l'heure, je vous demanderais d'appeler l'article 20 du feuilleton.


Projet de loi 17


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 20, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives. Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport?


Mise aux voix du rapport

Le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi 17, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Dans le même sens, je vous demanderais d'appeler l'article 27 du feuilleton.


Projet de loi 31


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 27, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. Y a-t-il des interventions sur ce rapport? Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Lucienne Robillard

Mme Robillard: M. le Président, en premier lieu, j'aimerais déposer un amendement, de concert avec l'Opposition, et que cet amendement soit inséré au rapport de la commission.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement?

Des voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Donc, l'amendement est inséré au rapport de la commission. Mme la ministre, si vous voulez poursuivre votre intervention.

Mme Robillard: Merci, M. le Président. Je soumets à la prise en considération de l'Assemblée nationale le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse. Ce projet de loi a été étudié très attentivement par la commission des affaires sociales, qui a siégé les 1er, 6 et 7 juin 1994. Les travaux en commission parlementaire ont permis d'améliorer cet important projet de loi qui vise la protection des enfants.

Qu'il me soit permis, M. le Président, d'indiquer les principaux amendements qui ont été apportés au projet de loi. En premier lieu, certains amendements visent à renforcer les responsabilités qu'ont les établissements, les organismes et les personnes qui interviennent, en vertu de la Loi sur la protection de la jeunesse, envers l'enfant et ses parents. À cet effet, les mots «dans la mesure du possible» ont été supprimés à certains articles du projet de loi.

À titre d'exemple, M. le Président, l'article 30 du projet de loi tel que proposé ajoute certaines responsabilités au directeur de la protection de la jeunesse lorsqu'il constate que la sécurité ou le développement de l'enfant n'est pas compromis. Il doit notamment, dans la mesure du possible, disions-nous dans le projet de loi, informer l'enfant et ses parents des services et des ressources disponibles dans leur milieu de vie ainsi que des modalités d'accès à ceux-ci. Les mots «dans la mesure du possible» ont été supprimés afin d'affirmer davantage cette responsabilité du directeur de la protection de la jeunesse.

De plus, compte tenu de l'importance accordée aux responsabilités des parents par le projet de loi 31, certaines modifications ont été faites. Ainsi, l'article 3, au titre des objectifs pour guider les interventions, tant au niveau social que judiciaire, a été modifié pour s'assurer que les parents ont compris les informations et les explications qui doivent leur être données dans le cadre de l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse.

(20 h 10)

En outre, une modification à cet article vise à clarifier les facteurs qui doivent être pris en considération lorsque des mesures sont prises auprès de l'enfant et de ses parents. Il a été également précisé, M. le Président, à l'article 8, que la décision à l'effet d'interdire à un enfant de communiquer avec certaines personnes doit être remise, le cas échéant, à ses parents. Enfin, un paragraphe i a été ajouté à l'article 34 pour faire en sorte que les parents s'assurent que l'enfant reçoive des services de santé requis par sa situation.

Par ailleurs, M. le Président, des modifications ont été introduites afin d'assurer l'application de l'article 52 concernant la non-nécessité de corroborer le témoignage non assermenté d'un enfant âgé de moins de 14 ans rendu devant le tribunal et de l'article 53 relatif aux déclarations extrajudiciaires d'un enfant inapte à témoigner ou qui en est dispensé par le tribunal.

D'une part, un article a été introduit en vue d'assurer la continuité de la règle adoptée en 1989, et qui écartait la nécessité de corroborer le témoignage de l'enfant de moins de 14 ans. À cet effet, il est prévu que l'article 52 du projet de loi a effet depuis le 1er janvier 1994.

D'autre part, une disposition transitoire a été introduite afin de préciser que la règle qui prévoyait la recevabilité des déclarations extrajudiciaires faites en cour d'instance par un enfant inapte à témoigner à l'instance ou qui en est dispensé par le tribunal s'appliquera aux instances en cours devant la chambre de la jeunesse de la Cour du Québec, dès son entrée en vigueur. Il faut également mentionner qu'une modification prévoit que ces derniers articles entrent en vigueur à la date de la sanction de la présente loi.

Enfin, M. le Président, certains amendements d'ordre technique tiennent compte de la modification apportée à la Loi sur la protection de la jeunesse par le paragraphe 36° de l'article 23 du projet de loi 17 de 1994. Il s'agit essentiellement de remplacer, aux articles 1, 36, 39 et 41 du projet de loi 31, les mots «Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris et inuit» par les mots «Loi sur les services de santé et les services sociaux pour les autochtones cris». De plus, certaines modifications utiles ou de concordance ont été faites afin d'assurer la mise en application des modifications proposées.

Pour terminer, M. le Président, je veux remercier mon collègue, le ministre de la Justice, de sa collaboration dans ce dossier, de même que tous les membres de la commission des affaires sociales, et de façon particulière les députés de l'Opposition, critique en matière de santé et de services sociaux et critique en matière de justice. Tous ont contribué à améliorer ce projet de loi, M. le Président.

Je soumets donc à la prise en considération de l'Assemblée nationale le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, adopté avec des amendements par la commission parlementaire des affaires sociales. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Alors, nous en sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission des affaires sociales sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, et je cède la parole à M. le député d'Anjou. M. le député.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, vous me permettrez d'utiliser le temps de parole normalement donné à mon collègue, le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, qui est, lui, le porte-parole en matière de santé et de services sociaux, donc porte-parole de l'Opposition officielle relativement à ce projet de loi.

Alors, ce projet de loi 31, M. le Président, fait suite au rapport Jasmin, qui a été publié en 1992, il y a plus de deux ans. Il faut dire que ce rapport Jasmin avait été précédé par deux rapports, les rapports Harvey I et II, et faisait un peu un bilan de l'application de la Loi sur la protection de la jeunesse.

Il faut comprendre, M. le Président, que nous sommes toujours en attente d'un deuxième rapport de cette commission Jasmin, qui fera un rapport sur les effets de la Loi sur les jeunes contrevenants et, en même temps, certaines recommandations relativement à la Commission de protection de la jeunesse. Donc, on nous a présenté ce projet de loi. Il faut comprendre, M. le Président, qu'on s'attendait à un projet de loi peut-être plus volumineux que celui qui nous a été présenté. Il faut bien comprendre que ce rapport Jasmin de 1992 contient 146 recommandations, et qui touchent à la fois le volet social et le volet justice des interventions au niveau de nos jeunes. Il faut comprendre, M. le Président, que c'est un régime, en matière de protection de la jeunesse, qui est très spécial. On pourrait parler d'un mariage entre deux intervenants, qui sont les intervenants judiciaires et les intervenants sociaux. On sait que, dans le passé, il y a eu, comme on pourrait dire, certains tiraillements peut-être entre les deux volets, entre les deux approches, qui sont celles du volet social et le volet justice. Mais on peut dire que, maintenant, il y a, semble-t-il, un consensus ou une entente relativement à la façon de marier et d'orchestrer les interventions de ces deux volets.

Il faut comprendre un peu aussi notre déception, M. le Président, non pas notre déception sur le projet de loi en soi – puisque nous avons voté en faveur de ce projet de loi – mais nous aurions voulu, M. le Président, avoir plus d'articles de loi, plus de choses concrètes relativement à l'intervention judiciaire relativement à la Loi sur la protection de la jeunesse. Car il faut comprendre que, essentiellement, les amendements à la Loi sur la protection de la jeunesse qui ont été apportés par le projet de loi 31 ne touchent que le volet intervention sociale, ce qui nous a fait dire, lors du débat sur l'adoption du principe, M. le Président, qu'on était en présence, un peu, d'un demi-projet de loi. Nous aurions voulu voir, à la fois, des amendements à la loi concernant l'intervention judiciaire, mais on nous a expliqué, M. le Président, qu'on avait de la difficulté à obtenir des consensus au niveau de l'intervention judiciaire, ce qui a donné lieu, en commission parlementaire, à un assez long échange entre le ministre de la Justice et moi-même, car le ministre nous a bien fait comprendre qu'il était difficile, dans ce domaine, d'en arriver à des consensus, surtout au niveau des différents intervenants, ce qui m'a, à ce moment-là, porté à la réflexion suivante: Combien de temps allons-nous attendre avant de proposer des amendements relativement au volet intervention judiciaire?

Je comprends que c'est difficile d'avoir des consensus au niveau du volet judiciaire, M. le Président, mais s'il n'y en a pas, à un moment donné, le ministre de la Justice doit faire des recommandations, doit dire: Écoutez, je propose ceci, nous allons aller dans ce sens-là, nous allons donner la direction pour forcer le débat. Et ça a déjà été fait à maintes reprises. On aurait pu utiliser un avant-projet de loi relativement à ces dispositions qui étaient peut-être un peu plus délicates. Ma collègue, la députée de Terrebonne, pourrait très bien, je pense, parler de l'expérience qu'elle a vécue relativement au Code des professions, où c'était difficile, quand on considère le consensus qu'il fallait obtenir au niveau du nombre de corporations qui étaient impliquées dans le dossier. Plusieurs disaient que ce serait impossible. Mais on a quand même réussi à faire un bout de chemin en proposant un débat public. Ce débat public est proposé ou est enclenché par un avant-projet de loi, par un document qui force une réflexion publique.

Relativement à l'intervention judiciaire qui touche cette Loi sur la protection de la jeunesse, il n'y a rien, M. le Président, ou pratiquement rien. Quelques modifications qui, disons, ne portent pas trop à conséquence ou ne portent pas trop à un débat. Nous aurions voulu, à ce moment-là, un peu plus de leadership au niveau du ministère de la Justice dans ce dossier pour forcer le débat. Car il faut comprendre qu'on va être obligé de réouvrir cette Loi sur la protection de la jeunesse quand on aura le deuxième rapport Jasmin, qui fait le bilan de la Loi sur les jeunes contrevenants. Ce rapport Jasmin, ce deuxième rapport Jasmin, on l'attend, nous dit-on, aux alentours de l'automne 1994. C'est pourquoi, évidemment, la majorité des intervenants du milieu judiciaire sont déçus de ne pas avoir eu au moins une proposition, ou au moins, qu'on leur ait annoncé la vision actuelle du ministère de la Justice relativement à ça.

(20 h 20)

Il y a eu des amendements qui ont été proposés par l'Opposition, en particulier par le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue. Il faut dire que, là-dessus, je pense qu'il y a eu une collaboration de tous les instants entre les ministériels, les ministres concernés et l'Opposition. Dans ce genre de projet de loi, M. le Président, ce ne sont pas des intérêts partisans qui guident les intervenants. Je pense que c'est une meilleure application de la... on pourrait dire, de la justice, mais avec, à ce moment-là, «justice» dans un sens large. On comprendra, ici, que ce n'est pas uniquement de la justice au niveau de l'intervention auprès des jeunes, mais aussi une réhabilitation, une prise en charge par notre système social, par notre service social. À ce moment-là, c'est ça qui doit nous guider, l'intérêt de l'enfant. C'est ça qui doit nous guider dans nos préoccupations, dans nos amendements. Je ne pense pas qu'il y ait de ligne de parti là-dedans ou qu'il puisse y avoir d'intérêt, même partisan, là-dessus. C'est pourquoi on en arrive très rapidement à avoir des consensus et à cheminer ensemble sur différentes dispositions.

Donc, la première modification qui a été proposée et qui a été obtenue dans ce projet de loi, ça a été d'enlever l'expression «dans la mesure du possible», qu'on retrouvait malheureusement trop souvent dans ce projet de loi. Tout le monde s'est rendu d'accord pour dire que, de toute façon, de la façon dont nos tribunaux interprétaient maintenant les lois, ils prenaient en considération le fait que l'État a des limites matérielles. C'est évident, on n'a pas besoin de le marquer dans un projet de loi. On sait que la police doit intervenir le plus rapidement possible sur les lieux d'un crime, mais on sait qu'il y a des routes, puis on sait qu'il y a des voitures de police qui vont à certaines vitesses. On ne peut pas être là instantanément. Donc, «dans la mesure du possible» est déjà sous-jacent, est déjà inclus dans toute disposition qui crée une obligation envers une autorité ou envers un gouvernement. Donc, on a enlevé cette première chose.

Aussi, il y a eu une modification qui a été apportée à l'article 2.4 de la loi, qui permettait, à ce moment-là, d'ajouter une condition ou de mettre d'une façon plus claire le fait que les parents, et non uniquement l'enfant, mais les parents devaient être informés de la démarche ou de l'intervention qui était opérée relativement au cas de leur enfant. Et je pense que, encore là, c'était tout à fait normal et souhaitable d'obtenir une modification de la loi à cet effet-là.

Donc, somme toute, M. le Président, on peut dire que, dans l'ensemble, le contexte dans lequel les amendements ont été faits, il y a eu échanges, évidemment, on pourrait dire nombreux pour s'assurer que les modifications proposées reflétaient l'ensemble des recommandations du rapport Jasmin. Il faut comprendre que ce n'est pas toujours évident de faire un projet de loi qui reflète les recommandations contenues dans un rapport, car, souvent, les recommandations d'un rapport ne sont pas exprimées en termes juridiques, où c'est évident de mettre ça dans des articles de projets de loi. Et, quelquefois même, dans un article de projet de loi, on peut vouloir dire quelque chose, mais on se rend compte, en regardant d'une façon attentive cet article, que l'interprétation qui pourrait en être donnée par les tribunaux n'est pas celle que le législateur voulait donner, même avec la meilleure volonté du monde.

Donc, ça a été un travail qui a dû être fait d'une façon, on pourrait dire, avec patience, article par article, en s'assurant aussi des conséquences et de la portée qui serait donnée à ces modifications. Et je pense qu'on en est arrivé à un résultat qui est tout à fait, quant à moi et quant à mon collègue de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, satisfaisant, M. le Président. Satisfaisant, mais aussi, pour les raisons que j'ai mentionnées tout à l'heure, on a été un peu déçu, on aurait voulu avoir l'autre moitié du projet de loi. Car avec ce deuxième rapport Jasmin que nous attendons pour cet automne, c'est la Loi sur les jeunes contrevenants qui verra maintenant son bilan affiché.

Je voudrais juste, quelques minutes, M. le Président, parler de cette Loi sur les jeunes contrevenants, on pourrait dire une autre loi qui... Je ne pense pas qu'il y ait grande divergence d'opinion entre ce côté-ci et l'autre côté, M. le Président, relativement à la Loi sur les jeunes contrevenants. Au Québec, on a un système qui, on pourrait dire, est unique dans le Canada relativement à notre traitement des jeunes, de législation en matière de la jeunesse. On peut dire que c'est spécial. Dans le sens qu'un jeune contrevenant est pris en charge par le ministère de la Santé et des Services sociaux, et non pas par le système judiciaire, par le système justice, comme il existe dans les autres provinces canadiennes. Et on sait que, par la modification unilatérale de la Loi sur les jeunes contrevenants telle que proposée par le ministre Rock, cet équilibre précaire est remis en question. Et ça inquiète la grande majorité, pour ne pas dire à l'unanimité, les différents intervenants en matière de protection de la jeunesse et qui travaillent dans les centres de services sociaux. Et je pense qu'on assiste présentement à une coalition, à un front commun, au Québec, contre toute modification sérieuse de cette loi.

Nous avons toujours pensé que cette loi est juste, nous avons toujours pensé que cette loi est efficace; cependant, nous reconnaissons qu'il y a des problèmes quant à son application. Mais, l'application de la Loi sur les jeunes contrevenants – qui est une loi fédérale – se fait par les provinces, M. le Président. Et le Québec a toujours été prêt à faire un débat sur la façon dont ça devrait être appliqué: que l'intervention devrait se faire sur le terrain, M. le Président.

Mais il faut dire que la Loi sur les jeunes contrevenants, c'est une loi assez récente; on commence à peine à s'y habituer. Donc, on trouve que, encore la changer, encore la modifier, c'est sur le dos des enfants, M. le Président, car, en augmentant les peines, il ne faut pas croire que c'est l'intérêt de l'enfant qui va être mieux servi. Car, en augmentant les peines, M. le Président, on met de côté, dans bien des cas, le volet réadaptation; le volet réadaptation, on l'oublie. Et on ne protège pas mieux, non plus, la société en donnant une peine de 10 ans à un jeune. Est-ce que vous pensez, M. le Président, qu'un jeune qui rentre dans un pénitencier ou un centre d'accueil à l'âge de 16 ans et qui en ressort à 26 ans va être moins dangereux pour la société 10 ans après, M. le Président? Non. Je pense que c'est tout simplement la philosophie qu'on essaie d'emprunter, la philosophie américaine, la «get tougher law», et qu'on voit dans certaines provinces anglaises du Canada, qui vise la répression, en pensant que c'est par la répression qu'on peut vraiment enlever les causes de la criminalité chez les jeunes.

Et, quand on regarde les statistiques relativement à la criminalité chez les jeunes, on constate qu'on n'est pas en présence d'une épidémie, ni même, on pourrait dire, d'une inflation au niveau des crimes commis par les jeunes; au contraire, c'est plutôt une stagnation. Ce qu'on constate cependant, c'est que les crimes sont plus violents, c'est vrai; les crimes sont plus violents, donc, plus médiatisés. Mais nous pensons toujours que c'est par rapport aux balises qui existent dans la Loi sur les jeunes contrevenants, par rapport, aussi, aux modes d'intervention qu'on a au niveau de cette loi-là, comme de le référer devant un tribunal pour adultes. Ça existe présentement dans la Loi sur les jeunes contrevenants. Si on considère qu'un jeune, relativement au crime qu'il a commis, au méfait qu'il a commis, devrait être traité devant le tribunal pour adultes, il peut être référé devant le tribunal pour adulte. Ça existe présentement. Cependant, la majorité des intervenants disent que cette procédure de référer n'est pas utilisée à bon escient, de la bonne façon, qu'il n'y a pas, on pourrait dire, des directives, d'une façon uniforme, qui sont données aux procureurs de la couronne dans ce domaine-là.

Donc, ça, c'est de l'administration. Les provinces peuvent le faire sans modification de la loi, et c'est pourquoi nous sommes, au Québec, contre une modification en profondeur de la loi. Mais c'est toute une vision que le Québec a relativement au traitement de ces jeunes, relativement à la criminalité, relativement aussi à la protection de ces jeunes. Et la majorité des gens qui travaillent dans ce domaine et qui travaillent dans les autres provinces le reconnaissent, que, relativement à l'esprit qu'on devrait donner à l'intervention législative auprès des jeunes, c'est le Québec qui fait le mieux les choses à ce niveau-là. Mais c'est plus facile de changer unilatéralement les lois, un peu comme on veut le faire à propos de la Loi sur les jeunes contrevenants, que de se doter d'une réelle infrastructure comme on l'a fait au Québec au niveau de l'intervention et de l'encadrement des jeunes. Et ça, je pense que ça va être un débat qui ne fait que commencer relativement au dépôt des modifications de la Loi sur les jeunes contrevenants.

Et, encore là, M. le Président, j'ose espérer que ce front commun qui semble se dessiner et qui... Même au niveau du terrain, en tout cas au niveau des intervenants sur le terrain, il s'est concrétisé; on l'a vu par la conférence de presse, la semaine dernière. Mais j'espère que, tant du côté du gouvernement que du côté de l'Opposition, on saura aussi montrer que le Québec a une position qui est ferme sur ce dossier, que nous ne voulons aucun changement en profondeur, même aucun changement de la Loi sur les jeunes contrevenants. Mais, néanmoins, nous reconnaissons qu'il faut regarder de quelle façon cette loi est appliquée. Il en va de l'intérêt de l'enfant, et aussi, je pense qu'il en va de l'intérêt de la société, M. le Président, car on ne me fera jamais croire qu'en augmentant les sentences, qu'en imposant le fardeau aux jeunes, dans certains cas, pour certains homicides en particulier, de prouver que c'est devant un tribunal pour jeunes qu'ils doivent être traduits et non pas devant un tribunal pour adultes... On ne servira pas la société, on ne simplifiera pas le système et, surtout, surtout, on ne réglera pas les causes de la criminalité. C'est les causes de la criminalité et non pas les... Parce que, les conséquences, on peut essayer de faire de la répression, mais on ne règle absolument rien.

Alors, M. le Président, pour conclure, je vous dirais que, donc, ce projet de loi 31 sur la protection de la jeunesse a donné lieu à un débat excessivement intéressant. Je pense qu'il y a eu, la ministre l'a dit, un esprit de collaboration qu'on pourrait dire de tout temps quant à l'étude article par article de ce projet de loi. Nous sommes, somme toute, fort satisfaits du résultat. Nous voterons en faveur de ce projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

(20 h 30)


Mise aux voix de l'amendement proposé par la ministre

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou. Est-ce que l'amendement présenté par Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux est adopté?

Des voix: Adopté.


Mise aux voix du rapport amendé

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Est-ce que le rapport de la commission des affaires sociales portant sur le projet de loi 31, Loi modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bélanger: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Robillard: M. le Président, pourriez-vous appeler l'article 17 du feuilleton?


Projet de loi 6


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À votre demande, il me fait plaisir d'aller à l'article 17. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives. Il me fait plaisir de céder la parole à Mme la ministre de la Culture.

Une voix: Bravo! Bravo! Bravo!


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: M. le Président, la commission de la culture a procédé, le 9 juin dernier, à l'étude article par article du projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives. Ce projet a été déposé à l'Assemblée nationale et l'adoption de son principe a eu lieu le 1er juin. Les échanges que nous avons eus lors de l'étude de ce projet de loi ont été intéressants et très, très fructueux. Une fois de plus, ils nous ont permis de constater que, de part et d'autre de cette Chambre, il y a unanimité quant au désir de voir la culture et les communications réunis au sein d'un seul ministère. En effet, la commission recommande l'adoption du projet de loi, tel qu'il avait été proposé au départ. Aucune modification, aucun amendement n'ont été nécessaires.

Je rappelle, M. le Président, que le projet de loi 6 permet d'actualiser la législation québécoise pour que celle-ci reflète de nouvelles responsabilités du ministère de la Culture en matière de communications, responsabilités qu'il assume depuis le 1er janvier dernier. Ces responsabilités s'exercent dans le secteur des médias, des télécommunications et des entreprises de communication. Il s'agit d'un secteur où l'industrie québécoise est à l'avant-garde et à la fine pointe à plusieurs points de vue. Le jumelage de la Culture et des Communications au sein d'un seul ministère accentue d'ailleurs le rôle de soutien que le gouvernement a toujours offert à cette industrie.

En terminant, M. le Président, je veux remercier tous les membres de la commission de leur précieuse collaboration et je recommande que soit accepté le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous en sommes à l'étape de la prise en considération du rapport et je cède la parole à M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, après l'intervention on ne peut plus brève de la ministre de la Culture et ministre honoris causa des Communications, je me demande ce soir si je ne m'adresse pas plutôt à la ministre de la Culture et des arts culinaires, puisque...

Des voix: Oh!

Une voix: Cheap shot! Cheap shot!

M. Boulerice: Il faut se rendre compte, M. le Président, du manque total de culture de certains membres de cette Assemblée nationale, puisqu'ils ne reconnaissent pas que la cuisine est un art. Ils ne reconnaissent pas que c'est un art. Il faut croire que, pour certains, la cuisine, c'est quelque chose qu'on fait en série, là, un plat après l'autre, alors que, au contraire, il y a des gens qui, eux, y apportent une espèce de passion, de sentiment, etc. Bref, M. le Président, c'était une légère taquinerie envers la ministre que des esprits chagrins, forcément, n'ont point comprise; le contraire, d'ailleurs, m'eût étonné, il va de soi.

Je voudrais profiter du débat pour aller sur un point très précis quant à l'autoroute électronique, et on verra fort bien la raison de l'avant-propos. La ministre va bien comprendre que le chaudron est peut-être important – et, quand je dis le chaudron, M. le Président, je ne fais allusion à aucun membre de ce Parlement, rassurez-vous – mais que ce qu'on met dedans compte puisque c'est ça qu'on va goûter.

M. le Président, le projet de loi, comme tel, de fusion des ministères de la Culture et des Communications répond à un voeu longtemps exprimé par le Parti québécois, ainsi que par les artistes eux-mêmes. D'ailleurs, la ministre se souviendra que, tout au long de cette gigantesque commission de la culture que nous avions faite, à laquelle, malheureusement, l'ancien ministre des Transports n'a pas pu assister puisqu'il n'était pas membre de la commission de la culture, la question était posée à chacun des participants, leur demandant: Croyez-vous que culture et communications soient dissociables? Ne jugez-vous pas que culture et communications doivent former un ensemble? Et la réponse quasi unanime des représentants du milieu de la culture était forcément oui, M. le Président. Ils avaient répondu oui. Ils répondront, d'ailleurs, toujours oui. La fusion des ministères va nous mettre à l'heure normale de l'activité culturelle mondiale, car on ne peut plus parler de culture, forcément, sans parler de communications, d'audiovisuel, de canaux d'information, etc.

Par ailleurs, et ça, c'est important, ce n'est pas parce que nous fusionnons les ministères et que nous avons un bel organigramme intégré que ce nouveau ministère exercera tous les pouvoirs que la société québécoise exige qu'il exerce à cause de sa spécificité culturelle. Les dernières décisions, les décisions récentes du CRTC, c'est-à-dire du conseil de la radiotélévision canadienne, sur les nouvelles chaînes de télévision nous prouvent que nous avons peu à dire, sinon rien à dire dans ce secteur névralgique de l'activité culturelle. Il nous faudra nous en remettre au Conseil des ministres canadien, pour ne pas dire «canadian», pour réviser ces décisions qui pénalisent les Québécois.

Il ne semble pas que cela trouble la ministre puisque, dans une instance de son parti, durant la fin de semaine, elle lançait un cri du coeur de ne pas briser un grand ensemble. Mais c'est un ensemble qui ne veut pas travailler ensemble, c'est-à-dire avec nous, qui prend des décisions en fonction des intérêts qui lui sont propres et, quant aux nôtres, eh bien, on peut toujours repasser. À quand, M. le Président, un conseil de la radiotélévision avec les pleins pouvoirs pour le Québec? C'est la question qu'on doit se poser. Et, à Mme la ministre: Avez-vous fait une demande formelle au ministre fédéral, demandant de réviser la décision du gouvernement fédéral? Et, si vous l'avez fait, eh bien, la question qui se pose, M. le Président: Est-il possible que la ministre dépose cette lettre avant qu'elle nous arrive d'Ottawa? Nous lui offrons la chance de la déposer elle-même, si elle l'a fait.

La même problématique du contrôle du contenu culturel, nous la retrouvons dans le débat sur l'autoroute électronique. Ainsi donc, le gouvernement s'apprête à jouer le rôle de bailleur de fonds pour les promoteurs industriels qui investissent dans l'autoroute électronique. Je n'ai rien contre. Je n'ai absolument rien contre, M. le Président, mais comment le gouvernement fera pour surveiller ce qui circulera sur les autoroutes électroniques? Le gouvernement sait-il où il doit aller en matière de développement de l'autoroute électronique?

(20 h 40)

Et nous pouvions lire dans l'édition de La Presse d'aujourd'hui un article de Mme Marie-France Léger, qui disait: «Les gouvernements devraient plus surveiller ce que véhiculera l'autoroute de l'information.» Vous voyez, M. le Président, ce titre très éloquent que je vous montre: «Ils ne font que donner leur approbation et notre argent, déplore une table ronde.» Et je vais, si vous me le permettez, vous en lire quelques extraits, au bénéfice de tous et, notamment, de la ministre de la Culture et des Communications.

«Au lieu de se contenter de jouer les bailleurs de fonds pour les promoteurs industriels qui investissent dans l'autoroute de l'information, les gouvernements devraient se préoccuper davantage des services offerts au public grâce à ce réseau. C'est l'opinion exprimée hier par les participants à une table ronde portant sur les dimensions sociales et culturelles de l'autoroute de l'information, organisée dans le cadre de la Fou'Art 1994, la Folle Fête foraine des arts», que mon collègue, le député de Gouin et porte-parole de l'Opposition officielle pour la culture, appuyait sans réserve, y voyant une idée novatrice, «promettrice», M. le Président. Sentiment, malheureusement, qui n'était pas partagé par sa vis-à-vis, enfin, par notre vis-à-vis, puisque nous nous la partageons; je parle de sa personne, pas nécessairement de toutes ses idées.

«"Les gouvernements ne jouent pas leur rôle, d'ajouter Mme Léger. Ils se contentent de donner leur approbation et notre argent à des industriels. Les politiciens sont complètement perdus dans ce débat – c'est ce que je dis depuis longtemps – et ne savent pas de quoi ils parlent. Ils devraient se préoccuper des aspects sociaux", a déploré Philippe Le Roux, responsable d'un comité de veille – un comité de veille, et ça, c'est important qu'il y en ait un – sur l'autoroute de l'information.

«Le hic, ont expliqué les participants, c'est que les entreprises de télécommunication avaient déjà des projets dans leurs manches avant même qu'on définisse ce que devrait être cette fameuse autoroute électronique! À titre d'exemple, ont-ils avancé, le gouvernement du Québec a eu beau annoncer au mois de mai l'octroi de 50 000 000 $ au secteur privé...» Enfin, 50 000 000 $ qui n'avaient pas été dépensés ailleurs et qui ont été transportés dans ce domaine au lieu de les périmer, comme c'est l'habitude. Donc, ce n'était pas de l'argent neuf; il ne faut pas, quand même, faire croire que c'était l'oeuf de Colomb. Donc, «le gouvernement [...] a eu beau annoncer au mois de mai l'octroi de 50 000 000 $ au secteur privé, il n'a jamais consulté la population ni fait enquête sur ses besoins réels.

«Les participants ont indiqué que l'autoroute de l'information nécessiterait des investissements de 30 000 000 000 $ sur 10 ans au Canada, provenant des gouvernements et des compagnies de téléphonie et de câblodistribution – deux secteurs, M. le Président, d'où nous avons été évacués par la suprême Cour suprême – et qu'il serait enfin temps de mettre la société dans la coup puisque, au bout du compte, ce sont tout de même les consommateurs qui paient.» Le propos est on ne peut plus véridique.

«Selon Yves Leclerc, journaliste et auteur de plusieurs ouvrages sur l'information et la télématique, l'aventure du réseau Minitel, en France, et Internet, chez nous, devrait suffire à faire réfléchir les élus. "Le Minitel et l'Internet sont des réseaux non commerciaux. Ils ont acquis leur dynamique à l'extérieur du modèle du profit. Ainsi, Minitel offre un marché de services gouvernementaux et de communications interpersonnelles. Internet offre un service de courrier et une banque de données". On peut supposer, disait M. Leclerc, que, pour l'autoroute de l'information, ce sera pareil. "Mais on n'en entend jamais parler", devait-il ajouter. "On ne parle que de l'aspect économique du réseau ou de l'aspect divertissement de Vidéoway, a renchéri M. Philippe Le Roux. Mais il y a aussi les secteurs de la santé – ce qui devrait préoccuper la ministre responsable – de l'éducation, des arts qui seront affectés".

«D'autres questions comme la protection de la vie privée et le droit d'auteur ont été soulevées à cette table ronde à laquelle participaient également Martin Pagé, cofondateur de l'association CyberôQuébec, organisme "chien de garde" de la démocratie dans cette autoroute électronique; Ginette Daigneault, professeur à l'Université du Québec à Hull – dont je pourrais célébrer les mérites et, surtout, la grande réflexion qu'elle mène à ce niveau – et artiste en infographie et en art réseau, et Nathaly J. Vermette, juriste intéressée par l'impact des nouvelles technologies de l'information sur la propriété intellectuelle et le droit d'auteur.» Il est dommage, d'ailleurs, que Mme Tadros, candidate défaite pour le Parti libéral fédéral à l'élection de l'automne dernier, n'ait pas été présente pour en discuter. J'espère qu'elle n'a pas perdu son intérêt face à ce dossier.

Mais voilà une réflexion que devrait partager la ministre de la Culture et des Communications; elle devrait la partager. Elle me fait des signes, M. le Président, que je ne peux, malheureusement, malgré la distance... Il n'y a pas d'autoroute électronique qui nous relie. Elle me fait des signes, elle me dit: La semaine prochaine. Eh bien, soit, M. le Président, je me réjouirai si, la semaine prochaine, elle se préoccupe de ce contenu et nous livre les choses que nous attendons impatiemment.

De quoi le Québec a-t-il besoin en matière de développement électronique? La question se pose et doit être posée au moment où nous sommes en train de légiférer sur un ministère qui devient un gigantesque ministère, enfin, qui aurait pu, M. le Président, être un gigantesque ministère, un ministère vraiment pivot dans toute l'activité nationale, si, malheureusement, nous ne vivions pas encore cette tutelle fédérale que célèbre d'ailleurs le député de LaFontaine, M. le Président, avec, sans doute, plusieurs autres de ses collègues. Est-ce seulement les priorités d'investissement de compagnies qui guideront les développements en cette matière? Ce n'était pas uniquement l'interrogation du porte-parole de l'Opposition pour les communications; c'est une interrogation que le milieu partage. Et où sont les pouvoirs d'orientation et de contrôle du Québec? Nous sommes absents.

Ah, certes, la ministre va sans doute, peut-être, M. le Président, profiter d'un temps de réplique pour me dire que, oui, il y a M. Bureau qui est là. M. Bureau est peut-être québécois – s'il l'est, de toute façon, c'est une qualité, ce n'est point un défaut – mais M. Bureau ne détient aucun mandat du gouvernement du Québec. Il a été placé là par le gouvernement fédéral; il n'a pas été placé là par le gouvernement du Québec qui aurait répondu soit à une offre... Et Dieu seul sait que, quand il s'agit du fédéral, les offres tardent toujours à venir ou, lorsqu'elles viennent, elles sont mauvaises: tous se rappellent Charlottetown, tous s'en rappellent.

Mais, si ça avait été une offre qu'il nous avait faite, tant mieux, on l'aurait acceptée, la présence de M. Bureau aurait été acceptable et profitable. Ou bien donc ça aurait été une ferme volonté du gouvernement du Québec, une volonté politique, c'est-à-dire qu'au lieu de s'indigner un jour et de se résigner le lendemain, d'annoncer une journée et de renoncer le surlendemain, eh bien, ça aurait été une volonté ferme du gouvernement d'exiger un représentant dûment mandaté par le Québec, comme le disait si bien l'ancien premier ministre du Québec, M. Bourassa, celui que nous avons connu ici – pas celui que nous livre Jean-François Lisée dans son livre «Le tricheur» où, là, nous désenchantons, il va de soi – quand il parlait de souveraineté culturelle et quand il parlait de société distincte. Mais c'est quand même un discours où l'ensemble des Québécois se reconnaissaient. Eh bien, ça aurait été une façon, pour nous, de nous reconnaître, mais il n'y a eu aucune offre du gouvernement fédéral et aucune demande formelle du gouvernement du Québec demandant d'avoir une place dans un débat, M. le Président, qui est fondamental au niveau de toutes les sociétés occidentales.

(20 h 50)

Et cette autoroute de l'information, je vois le député de Rosemont, ancien ministre délégué à la Francophonie, qui pourrait nous en parler avec éloquence puisque, avec nos partenaires francophones européens, il en a beaucoup discuté. D'ailleurs, la France nous offre un partenariat. Remarquez que c'est un autre débat, M. le Président. La francophonie n'est plus qu'un dossier. Nous avons maintenant un ministère des Affaires internationales non francophones, «non francophones» s'appliquant à «Affaires internationales». Il faut être prudent, parce que, quand le député de LaFontaine est là, il a tendance à vouloir mettre les virgules où il le veut. Eh bien, ce n'est qu'un dossier. Je lis la tristesse dans vos yeux, chers collègues, et sachez que je partage ce sentiment que vous éprouvez.

Donc, nous aurons, M. le Président, bientôt, une ministre de la Culture et des Communications. Malheureusement, nous n'aurons qu'une demi-ministre de la Culture – ah, une personne entière, ça, j'en conviens! – puisque le Québec ne contrôle pas tous ses outils culturels. Nous aurons une ministre de la Culture et des Communications qui ne gérera que l'ombre des ondes, puisque, je vous le répète, nous avons été évacués de ce champ primordial pour notre développement culturel, pour notre développement économique.

M. le Président, puisque cela constitue en quelque sorte un pas en avant... Je le dis et je le répète, cette idée de fusionner Culture et Communications a été, d'abord et avant tout, une idée énoncée, avancée par le Parti québécois, inscrite dans notre programme depuis fort longtemps. Nous estimons que le projet de loi constitue un pas en avant et amorce déjà les structures d'accueil des nouveaux pouvoirs que nous devrons et que nous devons exercer en ces matières, en sachant pertinemment qu'au grand désespoir de la ministre nous allons briser ce grand ensemble canadien. Nous allons perdre ces belles Rocheuses où nous pouvons aller passer tous les week-ends à faire du ski. Oui, nous allons perdre cette belle fenêtre sur le Pacifique, du haut du magnifique condo que tous les Québécois ont à Vancouver, hein? Ça, c'est le lyrisme fédéraliste. Bien, madame, pour faire une omelette, il faut casser des oeufs. Voilà! La poule fédérale a tellement «picaillé» chez nous que je n'ai vraiment aucune gêne à casser l'oeuf pour faire une omelette. Donc, ce sont des pouvoirs que nous exercerons pleinement au bénéfice de la population québécoise et de sa spécificité culturelle, tout en tenant compte de son pluralisme, ce que ne saurait me reprocher le député de D'Arcy-McGee qui souscrit à mes propos, M. le Président.

Mais, avant de dire que nous voterons pour la loi, vous me permettrez, M. le Président, de m'adresser, à travers vous, directement à la ministre, en lui disant: Madame, je serais tenté, par vengeance – mais vous savez que ce n'est pas un sentiment que je cultive – de voter non et de vous empêcher d'aller en conférence de presse après, en disant: Regardez, enfin, on a voté encore une loi à l'unanimité, parce que vous m'avez cruellement déçu. C'est une des dernières fois que nous nous affrontons en cette Chambre. C'est l'une des dernières journées de cette présente Législature, et je quitterai le Parlement sans que vous, votre prédécesseure et la prédécesseure de votre prédécesseure aient réglé un dossier important pour lequel je me bats dans ma circonscription depuis neuf ans, qui est celui de l'Écomusée de la maison du fier-monde. Heureusement que j'ai l'appui de mon collègue, le député de Gouin, qui comprend, lui, tout au moins, la valeur pédagogique, muséale de l'Écomusée. Mais il ne vous reste que quatre jours à peine, madame, pour réparer, quatre jours. Ah! M. le Président, je vois – j'emploierai l'expression du leader du gouvernement – nos amis d'en face, et on les regarde parce que j'ai déjà le sentiment triste de savoir que nous en perdrons beaucoup dans les mois à venir. Beaucoup. Et, quand je dis «beaucoup», je dirai énormément, M. le Président, énormément.

Eh bien, M. le Président, on me dit d'arrêter. C'est exactement ce que les citoyens de la circonscription d'Orford suggéraient à leur député, d'arrêter sa carrière politique le plus rapidement possible, M. le Président. Oui. Oui. Oui. J'irai, d'ailleurs...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Continuez, M. le député.

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. Alors, nos amis d'en face, comme dit si bien le leader du gouvernement, à qui, d'ailleurs, on m'a empêché de remettre un cadeau... Je lui avais acheté un magnifique moulin à prières tibétain pour lui rappeler ses nombreuses interventions quant à l'article 78 de notre règlement. J'espère un jour pouvoir le lui remettre. On m'a dit que le protocole de la Chambre ne le permet pas. Mais, trêve de digression, M. le Président, nos amis d'en face nous disent qu'il reste plus que quatre jours. Je ne sais pas de quoi on va se nourrir puisque le menu législatif de ce gouvernement à la dérive, naufrageur, M. le Président, est un menu Metrecal. Il n'y a plus rien dans l'assiette.

L'assiette de la ministre était mieux garnie, par contre, quand on lisait l'article de jeudi. Et c'était là l'allusion que je faisais, M. le Président. Le chaudron, certes, est important pour la cuisson, mais il faut savoir ce qu'il y a dedans. Donc, la ministre a bien compris quand je lui disais qu'investir dans les chaudrons de l'autoroute informatique c'est bien, mais qu'est-ce qu'on va mettre dedans? Il nous faut une recette, une bonne recette. La ministre a compris l'allégorie. Il paraît que c'est une forme supérieure d'ironie, que ça ne peut pas être accessible à tous, mais, au moins, nous nous sommes compris mutuellement; c'est déjà un bon pas en avant.

Donc, M. le Président, grâce à l'intermédiaire, effectivement, du président, malgré la déception que me cause la ministre dans un dossier où tellement de gens avaient mis leur espoir, alors que la ministre s'était elle-même déplacée – et ça, je lui accorde le geste – dans mon bureau pour les rencontrer et que ces gens-là vivaient d'espoir, et que, là, maintenant, ils n'ont comme consolation qu'un silence, je me permettrai de lui écrire de nouveau demain pour lui dire: Avant de quitter, madame, soyez bonne joueuse; donnez, donnez, donnez, donnez à un comté qui en a besoin, en sachant pertinemment...

Et c'est une pensée qui anime la pensée politique d'un grand ami du député de LaFontaine, le premier secrétaire du Parti socialiste de France, Michel Rocard, qui dit que le développement économique est précédé par le développement culturel. Idée d'ailleurs reprise par le gouvernement Balladur à l'intérieur de la délégation interministérielle à la ville qui dit que c'est par le développement culturel qu'on revitalise les quartiers défavorisés. Alors, j'ai déjà, M. le Président, un appui en la personne de l'adjoint à la ministre de la Culture et des Communications. Alors, j'ose espérer, M. le Président, qu'elle prendra note de ces dernières remarques.

(21 heures)

Et, là-dessus, M. le Président, je ne sais combien de temps il me reste. Je sais que d'autres intervenants veulent prendre la parole, mais je dirai à la ministre que, malgré les immenses failles que nous trouvons, malgré le carcan qu'elle subit, avec un peu la fascination de la victime envers son bourreau – c'est presque un remake de «Portier de nuit» – alors que le fédéral lui enlève tout et que cette loi, par contre, lui donnait tout. Il y a des pans qui ont tellement sauté...

C'est quand même un pas dans la bonne direction. C'est surtout une chose que nous trouverons à notre arrivée, donc que nous n'aurons pas à refaire, contrairement à bien des lois qui ont été votées par ce gouvernement. Donc, ceux-là seront en place. Les structures d'accueil existeront et nous pourrons exercer les pouvoirs en culture et en communications avec toute la plénitude que donne la dignité de la souveraineté. Je vous remercie, M. le Président.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Le rapport de la commission de la culture portant sur le projet de loi 6, Loi modifiant la Loi sur le ministère de la Culture et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je vous demanderais d'appeler l'article 19 de notre feuilleton et de reconnaître Mme la ministre de la Culture et des Communications.


Projet de loi 14


Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 19, l'Assemblée prend en considération le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles. Mme la ministre de la Culture.

Des voix: Bravo!


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Une loi très attendue, celle de la commission de la culture, qui a procédé le 8 juin dernier à l'étude article par article du projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles. Aussi, les 26 et 31 mai, cette même commission a tenu des consultations particulières sur ce projet de loi auprès de plusieurs associations qui seront concernées par les activités de la nouvelle Société. Le projet de loi 14 a été déposé à l'Assemblée nationale le 28 avril 1994, et son adoption de principe a eu lieu le 5 mai suivant.

On sait que l'accueil fait au projet de loi 14 a été très enthousiaste de la part des milieux culturels. La consultation des associations aura aussi permis d'entendre plusieurs propositions d'amendement visant à le bonifier. La commission de la culture a examiné l'opportunité de chacune de ces propositions de modification. J'ai moi-même proposé certains amendements particuliers qui ont tous été adoptés par la commission. Ces amendements ont été apportés dans le respect du principe et de la cohérence générale du projet de loi. Deux amendements se rapportent au chapitre I, sur la constitution et l'organisation de la Société. D'abord, un amendement à l'article 5 a pour but de prévoir la provenance des personnes nommées au conseil d'administration en fonction des domaines dans lesquels oeuvrent ces personnes. Ainsi, le conseil d'administration sera formé du président et de deux personnes oeuvrant dans chacun des quatre domaines suivants: du cinéma ou de la production télévisuelle; du disque ou du spectacle de variétés; du livre ou de l'édition spécialisée; et des métiers d'art. De plus, s'ajouteront deux personnes oeuvrant dans d'autres domaines culturels, ou encore, oeuvrant dans le domaine du financement d'entreprises.

Par ailleurs, on sait que le projet de loi contenait déjà les dispositions que l'on retrouve traditionnellement sur les conflits d'intérêts. Par souci de transparence, plusieurs intervenants consultés souhaitaient l'ajout d'une disposition visant à obliger la Société à établir des règles de déontologie applicables aux membres du conseil d'administration. Une disposition a donc été prévue à cet effet. De plus, les règles de déontologie devront prévoir des dispositions accessoires au principe établi à l'article 323 du Code civil du Québec, en ce qui concerne l'interdiction pour un membre d'utiliser, à son profit ou au profit d'un tiers, l'information qu'il obtient en raison de ses fonctions.

Trois amendements concernent le chapitre III, qui institue les instances consultatives au sein de la Société: un amendement à l'article 27 vient modifier le nom du Conseil pour celui du Conseil national du cinéma et de la production télévisuelle, pour s'arrimer avec l'organisme français; un amendement à l'article 28 a pour but de préciser la provenance des présidents du Conseil et des Commissions, pour s'assurer que ceux-ci oeuvrent dans le domaine de compétence concerné par chacune de ces instances. De plus, l'amendement vient préciser que le nombre de membres du conseil de chacune des Commissions est déterminé par règlement de la Société, mais il ne peut être inférieur à cinq.

Afin de clarifier le libellé de l'article 31, celui-ci a été remplacé de façon à donner au directeur général affecté aux Commissions les mêmes attributions que celles qui avaient été assignées au directeur général du cinéma et de la production télévisuelle.

Aux chapitres 6 et 7, deux amendements d'ordre purement technique ont été apportés aux articles 48 et 58. De plus, l'article 59 a été amendé afin de mettre fin au mandat des membres du conseil d'administration de la SOGIC. Ainsi, la composition du conseil d'administration de la Société de développement des entreprises culturelles pourra se faire selon le nouveau processus de nomination établi à l'article 5 du projet de loi.

La commission de la culture a donné son accord à l'ensemble des articles du projet de loi 14 tel qu'amendé, et je tiens personnellement à remercier tous les membres de la commission pour leur collaboration et de l'intérêt qu'ils ont mis à l'étude de ce projet de loi. Je recommande donc, M. le Président, que soit accepté le rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre de la Culture. Nous en sommes à l'étape de la prise en considération du rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles, et je cède la parole à M. le député de Gouin. M. le député, la parole est à vous.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, il me fait plaisir, à mon tour, de prendre la parole pour me prononcer sur la prise en considération du rapport de la commission de la culture, qui nous a permis d'étudier en détail les articles, les uns après les autres, du projet de loi 14. Peut-être, d'entrée de jeu, ce que j'aimerais faire, c'est rappeler, d'une part, les grands objectifs de ce projet de loi, objectifs sur lesquels, d'ailleurs, l'ensemble des membres de la commission de la culture, sous l'initiative de la ministre, ont fait consensus, en rappelant d'abord que la discussion que nous avons eue en commission était une discussion qui a été initiée au moment du dépôt de la politique culturelle du Québec. Il était clair, après les audiences en commission parlementaire qui nous ont amenés à réfléchir sur le rapport Arpin – qui nous a concrètement donné la politique culturelle – qu'il apparaissait important et même urgent de revoir le fonctionnement de l'ancienne Société générale des industries culturelles que nous nous sommes trouvés à remplacer par la nouvelle corporation créée par le projet de loi 14, qui est la Société de développement des entreprises culturelles. Donc, c'est la SODEC qui, dorénavant, remplacera la SOGIC.

Ce que je tiens à exprimer à ce moment-ci, c'est que le travail en commission parlementaire nous a permis de faire d'autres choses que de changer le simple patronyme de cette Société, mais c'est plutôt une véritable oeuvre de renouveau à laquelle les membres de la commission ont consenti pour justement donner suite au voeu qui a été exprimé au moment de l'élaboration de la politique culturelle.

D'abord, il apparaissait très clair pour ceux qui ont suivi le dossier et qui se sont exprimés en commission parlementaire qu'il était temps de revoir le fonctionnement de la SOGIC, d'une part parce que plusieurs mandats successifs qui se sont ajoutés à cette Société générale des industries culturelles avaient certainement fait en sorte de créer une espèce de dédoublement entre les différents services de cette Société, et surtout du fait que nous avions aboli les liens entre la Société et les organismes de consultation, ce qui avait certainement créé un très haut niveau d'insatisfaction dans le milieu des entreprises culturelles par rapport au mandat et à la façon dont la SOGIC s'acquittait de son mandat.

Bien que, généralement, les organismes qui transigeaient avec la Société étaient satisfaits de la façon dont elle s'acquittait des fonctions bancaires qui étaient les siennes, il apparaissait très clairement, si ce n'est après avoir entendu les gens qui sont venus s'exprimer en commission parlementaire, quant à la façon dont la Société opérait et quant à la façon dont elle entretenait les consultations dans le milieu, qu'il était important de revoir le fonctionnement de cette Société.

(21 h 10)

Il apparaissait aussi clair qu'en plus de ce problème de consultation et de concertation avec le milieu il fallait certainement revoir les structures mêmes de cet organisme, le faire en ayant une seule préoccupation, M. le Président, c'est d'essayer d'avoir une action gouvernementale la plus efficace possible, parce que, dans un contexte où la politique culturelle a amené de profondes modifications dans le paysage des institutions, il apparaissait encore plus impérieux de revoir le mandat de la SOGIC. Il était clair que les récentes modifications adoptées par le législateur ont fait en sorte que le ministère de la Culture joue un rôle tout à fait différent que celui qu'il jouait il y a quatre ou cinq ans, si ce n'est qu'à cause de la création du Conseil des arts et des lettres, qui s'est vu attribuer de nombreuses responsabilités qui étaient auparavant entre les mains du ministère de la Culture.

Aussi, il apparaissait important de revoir les liens qu'entretenaient les organismes consultatifs – je pense ici à l'Institut québécois du cinéma, je pense au Conseil consultatif de la lecture et du livre – et de faire en sorte que ces organismes qui ont la responsabilité de conseiller la ministre puissent le faire en ayant une véritable prise sur la réalité, en ayant véritablement l'occasion, aussi, de côtoyer – et de le faire sur le plan institutionnel – les gens qui administrent cette nouvelle Société.

En somme, ce que je cherche à exprimer, M. le Président, c'est que la dispersion des différents mandats qui touchaient un même domaine d'activité nuisait certainement au fonctionnement de l'appareil gouvernemental. Il alourdissait certainement son fonctionnement. Il engendrait aussi des dédoublements. Il favorisait les conflits entre les fonctions conseil et les fonctions gestion et, bien sûr, obligeait des organismes à faire plusieurs démarches auprès d'une série d'organismes qui, les uns après les autres, avaient des mandats particuliers. L'objectif recherché, donc, sur le plan de l'efficacité gouvernementale, était de faire en sorte, par ce projet de loi, de regrouper dans ce qu'on pourrait qualifier de guichet unique, même si l'expression n'est pas tout à fait adéquate, mais à tout le moins essayer, sur le plan de l'organisation des programmes, de faire en sorte que les gens puissent plus facilement se retrouver.

Donc, à partir de ce constat, de cette analyse de la situation, la ministre, effectivement, il y a quelques semaines, déposait le projet de loi 14, qui, effectivement, a reçu un accueil favorable de l'ensemble des membres de la commission de la culture. Je tiens à souligner que nous avons pu considérablement bonifier ce projet de loi, puisque les membres de la commission ont accepté d'entendre une série d'organismes, et je me permets de les rappeler pour les remercier de leur contribution: L'Alliance de la vidéo et du cinéma indépendant est venue témoigner devant la commission parlementaire; l'Association des cinémas parallèles; l'Association des éditeurs anglophones du Québec; l'Association des producteurs de films et de télévision du Québec; l'Association des propriétaires de cinémas et de ciné-parcs; l'Association nationale des éditeurs de livres; celle de l'industrie du disque et du spectacle et de la vidéo; l'Association québécoise des réalisateurs et réalisatrices de cinéma et de télévision; le Conseil des métiers d'art; l'Institut québécois du cinéma; et, finalement, la SARDeC, qui est la Société des auteurs, recherchistes, documentalistes et compositeurs. L'ensemble de ces intervenants qui sont venus présenter un mémoire devant la commission parlementaire nous ont d'abord tous fait valoir qu'il était impérieux d'adopter ce projet de loi. Alors, je tiens à souligner et je suis heureux de voir que c'est donc sans trop de délai que nous étudions maintenant le rapport de la commission de la culture pour la prise en considération de ce rapport.

La présentation aussi de l'ensemble des intervenants que j'ai énumérés tout à l'heure nous a permis d'enrichir le projet de loi, et je me permets d'insister sur un certain nombre d'amendements. Je le fais à mon tour. C'est toujours un peu ingrat d'avoir à parler en second, puisque la ministre a dressé rapidement un portrait des amendements adoptés, mais je me permets de le faire puisque plusieurs d'entre eux ont été apportés à l'initiative des membres de l'Opposition officielle, peut-être pas toujours officiellement au procès-verbal, mais certainement sous l'impulsion des membres de l'Opposition officielle qui siègent à la commission de la culture.

D'abord, un article important, sur lequel la ministre de la Culture a d'ailleurs beaucoup insisté, était toute cette question des règles de déontologie. De plus en plus dans l'appareil public apparaît cette préoccupation de doter nos sociétés d'État, que ce soient des organismes publics ou parapublics, de règles de déontologie qui vont au-delà des simples règles de conflits d'intérêts qu'on connaît dans plusieurs de nos projets de loi. Qu'on pense aux règles qui régissent la Caisse de dépôt et placement, qui régissent la Société Innovatech du Grand Montréal ou toute autre forme de société publique pour faire en sorte de s'assurer que les membres qui siègent au conseil d'administration ne soient pas en conflit d'intérêts.

Règle générale, M. le Président, vous le savez, la règle qui prévaut dans ce genre de cas, c'est tout simplement la divulgation des intérêts, pour faire en sorte qu'un membre d'un conseil d'administration qui serait en conflit d'intérêts lorsque vient le temps de débattre d'un sujet au conseil d'administration dénonce cet intérêt et se retire pour la période des débats et des discussions. La ministre a donc repris cet article qui se retrouve dans le projet de loi avec quelques nuances, et les membres de la commission ont cru bon de doubler cet article d'un autre qui prévoit l'adoption par la Société d'un code de déontologie qui sera applicable à l'ensemble des membres du conseil d'administration. Et je me permets de rappeler que ces règles devront prévoir des dispositions accessoires ou des mesures de contrôle pour assurer, d'ailleurs, la mise en application de dispositions du Code civil du Québec, particulièrement à l'article 323, en ce qui concerne l'interdiction pour un membre d'utiliser à son profit et au profit d'un tiers l'information qu'il obtient en raison de ses fonctions. Donc, en plus des dispositions usuelles qu'on retrouve dans de nombreux projets de loi qui ont été adoptés à l'Assemblée nationale, les membres de la commission de la culture ont ajouté cet article pour faire en sorte que cette Société puisse opérer en toute transparence et faire en sorte que les intérêts du public soient bien servis et que les sommes qui sont mises à la disposition de cette Société puissent être utilisées pour les fins qui sont prévues à la loi, essentiellement dans le respect du mandat de cette Société.

Il s'agit d'une disposition novatrice qui marquera sans doute le pas, puisqu'encore plusieurs de nos sociétés d'État n'ont pas de code de déontologie. Je me permets de rappeler la situation d'Hydro-Québec, longtemps débattue ici, à cette Assemblée, où le débat que nous avons eu avec mon collègue, le député de Joliette, et le député de Laurier, ministre responsable de l'Énergie et des Ressources, nous a bien fait comprendre l'importance, ou les conséquences, je devrais dire, de l'absence de règles de déontologie applicables aux membres du conseil d'administration d'Hydro-Québec. Alors, nous marquons donc le pas, et la commission de la culture, encore une fois, innove, et je pense que ce sera pour le bienfait et pour le mérite de l'ensemble de l'appareil public. Et je pense que le législateur aura de quoi s'inspirer pour les autres projets de loi qu'il aura à étudier.

Je me permets aussi de rappeler que nous avons adopté deux autres modifications importantes au projet de loi. La première est sans doute un peu moins significative, mais elle nous a permis de préciser le nombre de chacune des Commissions et du Conseil qui seconderont le conseil d'administration de la nouvelle Société de développement des entreprises culturelles. Parce que, essentiellement, sous la responsabilité du ministre de la Culture, se trouvera directement dans l'organigramme le conseil d'administration, qui sera formé de 11 membres. Mais, pour appuyer le conseil d'administration dans la réalisation de ses mandats, le conseil d'administration désignera, en collaboration avec la ministre, qui, elle, choisira, en bout de course, les membres de trois Commissions et d'un Conseil.

Essentiellement, par le projet de loi, nous créons, en appui au conseil d'administration, une Commission du disque et du spectacle de variétés, une Commission du livre et de l'édition spécialisée et, finalement, une Commission des métiers d'arts; à ces trois Commissions, s'ajoute non pas une commission mais bien un Conseil, qui sera, grâce à un amendement apporté par les membres de la commission, le nouveau Conseil national du cinéma et de la télévision. Donc, entoureront le conseil d'administration ces trois Conseils et cette Commission. Il nous apparaissait important de donner suite aux représentations que nous avons reçues en commission parlementaire et de préciser le nombre de membres de chacune de ces Commissions. Nous avons choisi une formule plutôt souple pour permettre, justement, au conseil d'administration de vraiment utiliser ses pouvoirs sans trop l'encarcaner dès le départ par la loi qui institue ce nouveau Conseil. Mais, essentiellement, M. le Président, ce que nous avons fait, c'est que nous avons inscrit dans la loi qu'il y a un nombre minimal de cinq personnes pour chacune des Commissions et pour le Conseil, mais ce sera à la Société, en bout de course, de déterminer par règlement le nombre de membres qui composeront chacune des Commissions et du Conseil, mais jamais une Commission où le Conseil ne pourra avoir moins que cinq membres.

C'était, un peu là, donner l'assurance aux gens qui sont venus témoigner devant nous que chacun des secteurs d'activité sera traité de la même façon, et sans manifester un préjugé favorable ou défavorable à l'endroit des secteurs, laissant plutôt le soin à la Société et à la ministre de travailler dans ce cadre, mais toujours en essayant de maintenir un juste équilibre entre les différents secteurs d'activité qui, dorénavant, transigeront avec la SODEC.

(21 h 20)

Autre article majeur adopté par les membres de la commission, qui va un peu dans le même sens que celui que j'énonçais tout à l'heure, pour préciser un peu la structure du conseil d'administration et pour s'assurer qu'un secteur ne soit pas prédominant par rapport à un autre, nous avons cru bon, en commission parlementaire, faire en sorte de préciser la provenance de chacun des membres du conseil d'administration en les identifiant à un milieu, à l'exception de deux personnes qui, elles, doivent tout simplement provenir d'un domaine culturel autre que ceux qui sont visés dans les autres articles du projet de loi, ou qui peuvent oeuvrer, aussi, dans le domaine du financement des entreprises culturelles.

Concrètement, M. le Président, ce que ça veut dire, c'est que nous avons apporté un amendement qui fait en sorte que nous avons précisé dans la loi la provenance des membres du conseil d'administration. Je me permets de le rappeler pour votre compréhension. D'abord, un président, qui sera nommé par la ministre, sur décret du gouvernement. Ensuite, deux personnes oeuvrant dans le domaine du cinéma ou de la production télévisuelle; deux personnes oeuvrant dans le domaine du disque ou du spectacle de variétés; deux personnes oeuvrant dans les domaines du livre ou de l'édition spécialisée; deux personnes oeuvrant dans le domaine des métiers d'art; et, finalement, les deux personnes dont je vous parlais tout à l'heure, qui doivent simplement provenir du domaine culturel, ou qui oeuvrent dans le financement des entreprises, qu'elles soient culturelles ou non.

Donc, pour justement s'assurer de l'équilibre dont je parlais tout à l'heure entre les différents secteurs, nous avons privilégié cette formule à celle qui était d'abord énoncée dans le projet de loi au moment de son dépôt à l'Assemblée nationale, qui lui, prévoyait tout simplement la composition d'un conseil d'administration de 11 membres, sans autre précision. C'est véritablement le débat que nous avons eu au moment de la consultation particulière. Nous avons cru bon reprendre les représentations de l'ensemble des membres qui sont venus témoigner devant nous et préciser, de façon très claire dans le projet de loi, malgré toute la confiance que nous accorderons aux éventuels membres du conseil d'administration... Mais, dès le départ, vraiment préciser cette réalité, pour éviter qu'il y ait un secteur qui l'emporte sur un autre et pour répondre aussi à la demande générale manifestée à la commission de la culture.

Je me permets aussi de rappeler un dernier article sur lequel nous avons longuement débattu et sur lequel, au moment des audiences particulières, je me suis permis d'interpeller l'ensemble des membres qui sont venus témoigner. L'article 59 du projet de loi, lorsque déposé à l'Assemblée nationale, malgré les attentes du milieu, prévoyait la reconduction de l'ensemble des membres du conseil d'administration de la SOGIC, qui auraient été transférés à la nouvelle Société, qui est la SODEC, la Société de développement des entreprises culturelles. On transférait l'ensemble des administrateurs, y compris le président-directeur général de cette Société, M. Charles Denis, qui, bien sûr, est au coeur d'un litige qui, à bien des égards, l'a opposé au milieu culturel.

Il n'y a pas un organisme, M. le Président, qui n'est pas venu devant nous, en commission parlementaire, demander que nous modifiions cet article pour faire en sorte que si, véritablement, nous voulions réformer l'institution, si nous voulions vraiment donner un second souffle au secteur des entreprises culturelles, autant à la fonction bancaire qu'à la fonction conseil, il fallait revoir la composition du conseil d'administration et nommer de nouveaux membres sur ce conseil. Il apparaissait clair, dans les discussions que nous avons eues, que l'exercice aurait pu être futile si nous avions reconduit les mêmes membres du conseil, avec le même esprit qui les animait au moment où ils siégeaient au conseil d'administration de la Société générale des industries culturelles.

Je pense qu'à ce moment-ci il est important de rappeler que, au-delà des questions de structures, il y a toujours des questions de personnalité, des questions de relations humaines, qui font en sorte qu'on aura beau avoir les plus beaux organigrammes, si, finalement, la volonté à la tête de l'organisme, si, finalement, la volonté des membres du conseil d'administration ne change pas, il y a toujours de forts dangers d'enrichir ou de conforter le statu quo.

Alors, pour répondre, encore là, aux préoccupations du milieu, et pour faire en sorte de véritablement donner un second souffle aux objectifs qui sont ceux qui nous animent de part et d'autre de cette Chambre, nous avons cru bon de modifier l'article 59 pour le remplacer par un article très, très clair, qui précise que les membres du conseil d'administration, leur mandat prend fin au moment de l'entrée en vigueur de l'article, et cet article entrera en vigueur au même moment que nous créerons la Société. C'est donc dire qu'au moment de l'entrée en vigueur de cette loi, le mandat des membres du conseil d'administration se trouvera à prendre fin, et que, rapidement, ils seront remplacés par de nouveaux membres qui seront nommés sur proposition de la ministre.

Je me permets de noter un fait intéressant. L'Opposition a réussi à... Nous avions une copie d'une version préliminaire du projet de loi, où, justement, cet article, comme je viens de vous le lire, se retrouvait dans les versions préliminaires. La ministre, dans ses premières discussions, prévoyait de mettre fin au mandat dès la mise en vigueur du projet de loi. L'article 59 de la version préliminaire proposait de mettre fin au mandat de l'ensemble des membres du conseil d'administration; on a même jusqu'à précisé – et je me permets de le souligner – «y compris son directeur général», dès l'entrée en vigueur de la loi. Nous avons rapidement comparé cette version préliminaire à celle déposée en Chambre, et nous avons été les premiers surpris, tout comme l'ensemble des intervenants, de voir que la ministre n'avait pu mener à terme cette proposition et qu'elle avait dû, peut-être sur les représentations qui lui avaient été faites, modifier la version préliminaire et proposer la continuation de l'ensemble des membres du conseil d'administration, y compris le mandat du président-directeur général.

La ministre nous a communiqué que c'est à la toute dernière minute, au sortir d'un Conseil des ministres, où elle a dû obtenir l'appui de ses collègues pour modifier l'article 59, qu'elle a pu, à la dernière minute, proposer la version que nous retrouvons aujourd'hui dans le rapport de cette commission. Il est étrange que, lorsqu'un sujet fait autant d'unanimité dans le milieu, la ministre doive se battre comme elle l'a fait pour apporter cet amendement. Il faut croire que certaines personnes – parce qu'il faut dire les choses comme elles sont, malgré les discours généreux qu'on peut tenir pour éviter des débats de personnalités, nous disait la ministre... mais il était clair qu'au conseil d'administration de cette Société il y avait eu plusieurs nominations à caractère politique.

Et je me permets de rappeler la nomination de M. Charles Denis, président-directeur général de la Société générale des industries culturelles, au coeur de plusieurs des controverses qui ont animé la SOGIC au fil des ans. Et ce n'est pas un secret de Polichinelle de rappeler que M. Denis est un protégé de M. Bourassa, qui a été nommé à la tête de la Société générale des industries culturelles et dont la ministre a eu moult difficultés à se défaire elle-même à chaque fois que venait l'étude des crédits, nous suggérant même d'adresser des questions plus que sévères au président-directeur général de la SOGIC, qui jamais, d'ailleurs, M. le Président – et le député de LaFontaine s'en souvient – nous a fait l'honneur de sa présence à la commission de la culture, prétextant toujours des obligations pour éviter de venir rendre des comptes, comme la loi, comme le règlement le prévoit, et qui s'est toujours échappé de ce contrôle parlementaire.

Si j'explique ça, M. le Président, c'est tout simplement pour émettre le voeu que, lorsque la ministre procédera à la nomination des nouveaux membres du conseil d'administration, qu'elle le fasse avec d'autres genres de préoccupations que celles qui ont animé ses prédécesseurs, et que ce soit plutôt l'intérêt du milieu qui l'emporte sur des préoccupations partisanes qui ont parfois animé certains de ses prédécesseurs, et, en particulier, le premier ministre. Donc, M. le Président, c'est là un portrait général du travail qui a été fait en commission parlementaire, éléments sur lesquels il me semblait important d'intervenir au moment de la prise en considération de ce rapport.

(21 h 30)

Je me permettrai une dernière remarque. Alors que nous nous apprêtons, M. le Président, à l'évidence, à faire campagne – puisque bientôt nous aurons, bien sûr, à affronter l'électorat; j'ai été pratiquement tenté de dire: en bataille électorale; il est toujours étrange de voir jusqu'à quel point on utilise un langage guerrier pour décrire l'exercice du jeu démocratique – mais, alors que nous nous apprêtons, M. le Président, à, bien sûr, débattre d'enjeux importants pour l'avenir du Québec, je tiens à rappeler que, parfois, bien sûr, ce débat risque d'être marqué d'un brin de partisanerie. Je pense que c'est l'évidence. D'ailleurs, déjà, les enchères commencent à monter; la ministre de la Culture, ce week-end, nous en a fait un exemple plutôt éloquent. Mais je tiens tout simplement à rappeler – parfois, il faut le faire – l'efficacité, dans ce cas-ci, du processus parlementaire, qui nous a véritablement permis de modifier de façon considérable et, je pense, dans le meilleur intérêt des parties le projet de loi 14. Et espérons – c'est là le voeu que j'émets – que l'attitude et la façon de faire des membres de la commission de la culture et de son président – qu'on voit rarement – puissent guider l'ensemble des parlementaires dans les interventions qu'ils auront à faire au cours du débat qui s'en vient, afin qu'ils les fassent dans le respect, en ayant les préoccupations des citoyens, des gens que nous représentons ici, à l'Assemblée nationale. Je pense que non seulement nos formations politiques en ressortiront grandies, non seulement le processus politique en ressortira, lui aussi, grandi, mais je pense que ça pourrait être, d'une certaine façon, une occasion de faire avancer la démocratie, et je pense que ça pourrait être une contribution intéressante que la ministre de la Culture et moi-même pourrions avoir à l'occasion de ce prochain débat, qui promet d'être assez virulent, M. le Président.

Je vous remercie.


Mise aux voix du rapport

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors, le rapport de la commission de la culture portant sur le projet de loi 14, Loi sur la Société de développement des entreprises culturelles, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Robillard: M. le Président, je propose l'ajournement des travaux au mardi 14 juin 1994, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion d'ajournement est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. Alors, les travaux de cette Assemblée sont ajournés à demain matin, le mardi 14 juin, à 10 heures.

(Fin de la séance à 21 h 32)

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