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(Dix heures onze minutes)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Mmes, MM. les
députés, bonjour. Si vous voulez prendre place.
Affaires courantes Motions sans préavis
Souligner la Journée internationale des femmes
(suite)
Alors, conformément à l'ordre adopté lors de la
séance d'hier, le 8 mars 1994, nous allons poursuivre le débat
sur la motion de Mme la ministre déléguée à la
Condition féminine et à la Famille. Les seules interventions
permises sont celles de Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière et la réplique de l'auteure de la motion,
après quoi la motion sera mise aux voix.
Je vous rappelle que le texte de la motion est le suivant: «Que
l'Assemblée nationale participe à la réflexion collective
à l'occasion de la Journée internationale des femmes,
décrétée le 8 mars.» Alors, je cède
maintenant la parole à Mme la députée des
Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée, la parole est
à vous.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Oui. Je vous remercie, M. le
Président. Je pense que c'est assez spécial, ce matin, de
poursuivre le débat sur une motion comme celle qui a été
déposée hier à l'Assemblée nationale concernant la
Journée internationale des femmes. Je pense que, moi, en tout cas,
à toutes fins pratiques, c'est une première pour moi depuis que
je suis ici. C'est la première fois que le débat sur cette motion
se poursuit sur deux jours.
Il y avait aussi, bien sûr, quelque chose d'assez spécial
parce que, hier, justement, c'était la première fois aussi que le
débat en Chambre sur cette motion se faisait la journée
même de l'événement. Habituellement, la session à
l'Assemblée nationale ouvre un petit peu plus tard. Donc, on reprend, on
prend le débat sur cette motion dans les jours qui suivent la
Journée internationale des femmes. Sauf que, si on n'a pas
réussi, à toutes fins pratiques, à passer à travers
la motion, dans son ensemble, hier, je pense que c'est ? et on a pu le
constater ? qu'il y a beaucoup de nos collègues, autant de notre
côté que du côté du gouvernement, qui tenaient
à s'exprimer et qui avaient aussi, on a pu le constater, beaucoup
à dire sur le sujet.
Cette année, le même de la Journée internationale
des femmes, on s'en rappellera, c'est: «Féministes cherchent
partenaires pour changer le monde». C'est le thème qui a
été choisi, et le Conseil du statut de la femme, qui
célèbre ses 20 ans cette année, je pense qu'il faut le
redire aussi, en a profité, je pense, pour faire une réflexion,
essayer de faire le point, faire faire une réflexion en profondeur sur
le cheminement, si on veut, du dossier de la condition féminine, le
dossier des femmes, depuis qu'il est en poste.
Concernant le Conseil du statut de la femme, j'aimerais souligner, M. le
Président, et j'en profite pour le faire, la qualité des
documents qui nous ont été fournis par le Conseil cette
année. Je prenais connaissance du document thématique, qui,
à mon sens, est d'une qualité exceptionnelle. Il suscite beaucoup
la discussion. C'est un document qui est très bien fait. Chaque
thème est campé de façon très claire. On donne
vraiment le détail, l'état de situation. On arrive en bout de
ligne avec des questions, sujets de réflexion, sujets de discussion, et
en plus, à chacun des thèmes, aussi, une bibliographie a
été fournie.
Pour une ancienne formatrice comme moi, là, je peux vous dire que
cet instrument-là est fort bien fait, d'une grande qualité, et je
suis persuadée qu'il y a eu des discussions et qu'il y en aura,
j'espère, partout. La seule chose que je peux regretter, M. le
Président, à titre de porte-parole, c'est de ne pas être
présente lors de ces discussions-là parce que je suis
persuadée que les réflexions et les discussions entourant chacun
des thèmes ont été sûrement fort... ont
été et seront, parce qu'on sait très bien que la
Journée internationale des femmes, c'est le 8 mars, mais qu'il y a des
événements, là, des activités qui se
déroulent à peu près toute la semaine, cette semaine, dans
ce domaine-là. Alors, la seule chose que je regrette, c'est de ne pas
connaître les réponses qui seront apportées à
chacune des questions, dans chacun des groupes. C'est trop demander, on ne peut
pas être partout à la fois, mais je suis persuadée qu'il y
aura des points qui pourront ressortir, qui seront probablement très
intéressants pour nous dans les décisions qu'on aura à
prendre dans ce genre de dossiers là.
Il y a aussi, bien sûr, le document «La lente progression
des femmes». Ce document-là a été produit
déjà par le Conseil du statut de la femme. C'est un document qui
nous donne, par ordre chronologique, si on veut, l'historique des droits des
femmes, les événements qui ont marqué... Et on part de
1608, donc on part du début de la colonie, si on veut. Et on se ramasse
comme ça avec toutes les lois, année après année,
les bons coups, les personnes qui ont fait avancer les dossiers, les femmes qui
ont vraiment participé, qui se sont impliquées. C'est un document
qui est intéressant puisqu'il nous donne une chronologie. Alors, quand
on le suit, on se rend compte qu'année après année il y a
eu des petits pas qui ont été faits. Mais on peut se rendre
compte aussi que, malgré les pas qui ont été faits, et je
pense que ce document-là est fait un petit peu dans ce sens-là,
il nous donne aussi l'idée, l'image des pas qui
ont été faits, même au niveau législatif
quand on parle, M. le Président, de l'égalité de droits
qu'on a atteinte, effectivement, à certains niveaux, sur papier
toujours, parce que, dans les faits, on peut se rendre compte que ce n'est pas
chose faite.
Je reprendrais quelques points comme ceux-là et j'aimerais donner
quelques exemples, d'ailleurs, si vous me le permettez, de cette
égalité qu'on a atteinte sur papier en termes de lois, en termes
de réglementations, et qui, dans la vie, malheureusement, ne sont pas
appliqués. Hier, en Chambre, vous avez remarqué, on a posé
une question au ministre de l'Emploi. Vous savez, le fameux droit de
reconnaître les congés de maternité au niveau du
gouvernement fédéral, ça a été reconnu en
1971. C'est depuis 1971 qu'on paie, on rémunère les congés
de maternité par le biais de l'assurance-chômage. Ici, ça a
été reconnu aussi, bien sûr, en 1978, au niveau des nonnes
du travail, le droit au congé de maternité. On a même ici,
à l'Assemblée nationale, rediscuté de tout l'aspect
congé de maternité, congés parentaux, et ça, il y a
quelques années à peine, il y a trois ans plus
précisément, où on a réinséré les
droits des travailleuses à prendre des congés parentaux de 34
semaines, par exemple, avec possibilité pour le conjoint d'en prendre
une partie pour s'occuper, lui aussi, de son jeune enfant.
Pourtant, hier, on a vu dans les nouvelles, on l'a vu dans les journaux,
et la Commission des normes du travail nous le confirmait, les
congédiements illégaux pour grossesse, encore aujourd'hui,
occupent le haut, remportent la palme, si on veut, des congédiements
illégaux. Alors, ça veut dire que... On l'a sur papier, le droit
aux congés de maternité, mais, dans les faits, ce n'est pas
quelque chose qui se vit tout à fait clairement et de la même
façon, parce que quand on parle de la Commission des normes du travail,
on sait que la Commission des normes va agir, va faire des enquêtes
uniquement sur les plaintes. Alors, c'est bien évident que c'est
uniquement par rapport aux femmes qui ont porté plainte auprès de
la Commission. Quand on parle de SIS plaintes pour congédiement
illégal en cette matière-là, dû à une
grossesse, c'est uniquement celles qui ont porté plainte, et on sait
très bien que ce n'est pas la majorité des gens qui portent
plainte. Alors, c'est un droit qu'on a sur papier, effectivement, qui est
reconnu dans nos lois et que, normalement, tout le monde devrait savoir parce
que, comme je le disais au début, M. le Président, ça fait
plus de 20 ans que ce droit-là est reconnu. Et, malheureusement, il
n'est pas appliqué.
Un autre droit qui est reconnu ? et là je sais que, la
ministre, ça va la faire peut-être un peu sourire ? par le
biais de la Charte des droits et libertés, cette fois, on parle du droit
au salaire égal pour un travail équivalent. Ce droit-là
est dans la Charte des droits et libertés de la personne, plus
précisément à l'article 19. C'est un droit qui est reconnu
depuis 1976 puisque cette Charte-là, qui, selon l'ancien ministre de la
Justice... Il nous disait que cette Charte-là est
supralégislative, hein, c'est la loi des lois. Alors, si la Charte ne
s'applique pas, je me demande bien où on s'en va. On sait pour- tant,
aujourd'hui, M. le Président, malgré l'article 19 de la Charte
des droits et libertés de la personne, que les femmes gagnent toujours
61 % du salaire des hommes, dans le cas de tout emploi, temps partiel, temps
plein, et, cette année, on parle de 70 % quand on fait la comparaison
uniquement sur les emplois à temps plein. On le voyait, les
écarts persistent, même par rapport aux gens qui sont
formés, même par rapport aux femmes qui font des études
universitaires. Dépendant des domaines, on se rend compte que le salaire
des femmes, malgré l'article 19, n'est pas équivalent. (10 h
20)
Un autre droit. C'est un autre droit qui est reconnu sur papier, mais
qui, malheureusement, n'est pas vécu comme tel. Il y a des choses qui
ont été faites, cependant, et je dois le reconnaître, M. le
Président. Le gouvernement a quand même essayé de
relativiser les salaires au niveau de la fonction publique. Il y a un pas qui a
été fait, et, d'ailleurs, suite à ce pas-là, on a
pu se rendre compte que l'écart le plus important, l'amélioration
la plus importante était arrivée suite à cette prise de
position du gouvernement par rapport à la fonction publique.
J'espère que la ministre va finalement comprendre que cet
écart-là serait encore beaucoup amélioré, de
beaucoup amélioré, si on en arrivait à étendre
cette relativité-là à l'ensemble du secteur public et du
secteur privé. Ça se fait ailleurs, M. le Président, on le
sait. L'Ontario a une loi en matière d'équité salariale
depuis 1988. Quand on se rend compte qu'une de nos lois ne fonctionne pas, ne
donne pas les effets escomptés, je pense qu'il faut corriger le tir,
faire en sorte, quand c'est possible, de remettre les choses en place. Et
l'Ontario s'est donné ce genre de moyens là pour obliger les
employeurs à réévaluer les emplois traditionnellement
occupés par les femmes. nous, on aurait à faire la même
chose, et je sais que la ministre a l'intention de déposer une loi en
matière d'équité en emploi, parce que la ministre
préfère de beaucoup, et elle me l'a déjà dit,
préfère de beaucoup le terme «équité en
emploi». elle s'interrogeait, d'ailleurs, à un certain moment
donné, lors d'une de nos rencontres en commission parlementaire,
à savoir comment ça se fait que la porte-parole de l'opposition,
elle, est porte-parole en matière d'équité salariale.
bien, écoutez, je pense que la ministre a pu avoir une réponse,
enfin un début de réponse, lors du dernier sondage, par le biais,
si on veut, du dernier sondage qui a été effectué par le
conseil du statut de la femme, justement, et qui démontre, qui
démontre très clairement que l'équité salariale est
la préoccupation qui vient en tête de ligne de toutes les
préoccupations, mêmes celles de l'accès à
l'égalité à l'emploi. et, là-dessus, je pense que
les chiffres sont quand même très clairs: on dit que 66 % des gens
qui ont répondu au sondage du conseil du statut de la femme
prônent l'équité salariale, demandent
l'équité salariale, jugent que c'est le dossier le plus
important, par rapport à 15 % qui demandent plus d'accès, de
faciliter l'accès aux emplois non traditionnels et 21 % qui demandent un
peu plus d'accessibilité aux postes de
direction. Alors, on se rend compte que c'est bien, l'accès
à l'égalité, c'est parfait, il faut continuer de se battre
pour ça, mais que la priorité, c'est l'équité
salariale.
Et j'espère que la ministre, qui est supposée
déposer sa loi, comme je le disais, M. le Président, pourra en
tenir compte, en faisant ressortir l'aspect de l'équité salariale
à l'intérieur de son projet de loi en matière
d'équité en emploi. J'espère que ce sera
déterminant pour le dossier, parce que la situation des femmes,
présentement, on le sait, est très difficile. On le sait par
rapport au dossier de la pauvreté, M. le Président, et,
là-dessus, on a quand même aussi des statistiques. Quand on parle
d'équité salariale, c'est très relié à la
pauvreté aussi des gens. Parce que, vous savez, M. le Président,
quelqu'un qui travaille à rabais prend sa retraite à rabais
aussi, parce que les allocations de revenu sont toujours basées sur les
salaires. Peu importe, la personne perd son emploi, retire son
assurance-chômage, par exemple. Bien, son assurance-chômage, ce
sera 60 % de son revenu, de son salaire. Alors, quand les femmes perdent leur
emploi, elles sont en chômage à rabais, parce que leur emploi
avait été mal évalué et qu'elles ne gagnaient pas
le salaire qu'elles auraient dû gagner. Et, quand elles prennent leur
retraite, les femmes plus âgées ont aussi un régime de
retraite qui est à rabais. Donc, elles travaillent à rabais,
prennent leur retraite à rabais. On les maintient, à toutes fins
pratiques, dans cet état de pauvreté.
Quand on parle de la pauvreté, M. le Président, j'aimerais
quand même faire état de certaines statistiques. Je pense qu'il
faut se le rappeler. Je sais que, l'an dernier, l'intervention que j'avais
faite ici, en cette Chambre, et que d'autres avaient faite, portait beaucoup
sur l'aspect de la pauvreté. Mais, malheureusement, M. le
Président, il n'y a pas grand-chose qui s'est corrigé et on est
toujours dans la même situation. Les virages n'ont pas
nécessairement été faits; on peut s'en rendre compte.
Alors, je pense qu'il faut reprendre, et c'est un peu notre rôle ici,
à l'Assemblée nationale, de reprendre et de continuer, de lutter
avec les femmes pour que ces aspects-là changent, et il faut le faire
tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas eu de correctifs d'apportés.
alors, on nous dit que 60 % des personnes vivant dans la pauvreté sont
des femmes. au canada, entre 1971 et 1986, la pauvreté chez les
salariés a augmenté cinq fois plus vite chez les femmes que chez
les hommes, soit dans une proportion de 160,4 % contre 28,3 %. le nombre de
femmes recevant des prestations de la sécurité du revenu ou de
l'assurance-chômage a progressé depuis 1981 à un rythme
plus rapide que le nombre de femmes en emploi. et maintenant que la ministre
déléguée à la condition féminine est aussi
ministre de la sécurité du revenu ? elle occupe les deux
places, les deux postes, les deux chapeaux ? elle sera sûrement
d'autant plus consciente de ce problème-là avec son nouveau
dossier.
Pour les familles monoparentales dont le chef est une femme, le risque
de pauvreté au Québec est, en 1990, près de cinq fois plus
élevé que celui des familles biparentales. et là je pense
qu'il faut aussi se poser de sérieuses questions, parce que le nombre de
familles monoparentales tend à augmenter, m. le président. je
prenais aussi connaissance des chiffres dans statistique québec, qui
nous démontraient qu'en 1985, par exemple, on avait 36 % des mariages,
36 mariages sur 100 qui divorçaient. on est en 1991, et, selon les
mêmes statistiques, les chiffres nous démontrent qu'on est
à près de 50 %, puisqu'on est à 49,6 %. et ce qu'on nous
dit aussi, c'est que ces divorces, ces séparations arrivent au moment
où le couple est avec des enfants très jeunes: deux ans, trois
ans, quatre ans. c'est dans les premières années du mariage
où on a le plus grand nombre, la plus grande proportion de ces
divorces-là. donc, quand on parle des familles monoparentales, on le
sait, 80 % de ces familles-là ont comme chefs les femmes. les chefs de
famille monoparentale sont à 80 % des femmes. on dit aussi que plus de
90 % des jeunes mères seules entre 16 et 24 ans vivent dans la
pauvreté; 95 % des familles monoparentales vivant de l'aide de dernier
recours sont dirigées par une femme. alors, on se rend compte qu'il y a
des problèmes majeurs, qu'il y a des règles qui ne sont pas
respectées, qu'il y a aussi des règles à mettre en place
parce que la société comme telle a changé.
Quand on regarde le pourcentage au niveau des divorces, on le voit, il y
a accroissement au niveau des séparations et des divorces. Donc, il y a
plus de familles monoparentales, il y a plus de jeunes mères seules, et,
quand on fait la comparaison avec les statistiques que je viens de vous donner
? que, bon, plus de 90 % des jeunes mères seules entre 16 et 24 ans
vivent dans la pauvreté ? on peut dire que, si on ne fait rien, la
situation ne s'améliorera pas, elle va aller plutôt en
s'aggra-vant.
Hier, j'entendais, M. le Président, des gens nous dire comment
ils avaient fait des pas en matière de services de garde à
l'enfance, comment le gouvernement avait performé, comment le
gouvernement nous avait donné des places. Effectivement, M. le
Président, je reconnais, je reconnais qu'il y a eu un ajout de places
important, beaucoup moindre cependant que les engagements qui avaient
été pris. Ça, je pense qu'il faut le redire aussi. Mais il
reste que les besoins aussi ont changé en matière de services de
garde. Et, encore là, je trouve ça très
révélateur parce que les chiffres parlent aussi, hein? Il y a des
gens qui vont dire qu'on fait dire n'importe quoi aux chiffres, mais je pense
qu'il y a des chiffres qui sont là, qui précisent des choses et
qu'on ne peut pas faire parler n'importe comment. Je vous parlais des divorces
il y a quelques minutes et, toujours selon le Bureau de la statistique du
Québec, moi, je regarde la proportion des femmes qui étaient sur
le marché du travail et qui avaient des enfants de moins de trois ans.
On a l'échelle, là, si on veut, de 1976 à aujourd'hui. En
1976, on parlait de 28,5 % de femmes qui occupaient une place sur le
marché du travail et qui avaient des enfants de moins de trois ans, donc
des enfants qui avaient besoin d'un service de garde. Aujourd'hui, on
est en 1992, et ce pourcentage-là de femmes qui ont des enfants
en bas de trois ans, donc qui réclament et qui ont besoin de services de
garde, bien, on est rendu à 61,3 % de mères de famille avec des
enfants en bas âge qui sont rendues sur le marché du travail.
Ce chiffre-là, M. le Président, quand on le regarde
année après année, a toujours augmenté. Il n'y a
jamais eu de décroissance; on a toujours augmenté. Le nombre de
femmes sur le marché du travail croît. Le nombre de mères
avec jeunes enfants est en croissance aussi, et je pense que la tendance va
à l'effet que ça va toujours s'accentuer. Parce que, vous savez,
les besoins ont changé, le rôle des femmes aussi a changé.
Antérieurement, les mères, on nous appelait les «reines du
foyer», M. le Président. Vous vous rappelez ce titre charmant,
n'est-ce pas? On était les reines du foyer. On avait un rôle.
C'était un peu le rôle historique, si on veut, mais, maintenant,
la mère est vraiment obligée d'aller sur le marché du
travail, d'aller chercher un salaire qui n'est plus un salaire d'appoint. On
n'a qu'à regarder, encore une fois, d'autres statistiques qui nous
arrivent. Statistique Canada nous produisait des documents, récemment,
qui nous démontrent que les familles ont des besoins de plus en plus
croissants, et que le revenu des familles, compte tenu de l'alourdissement des
taxes et des impôts, tend à se rapetisser, en termes de revenus
nets. Alors, vous comprenez, M. le Président, que les mères de
famille sont passées de reines au foyer à pourvoyeurs à
leur tour aussi. Il faut absolument que les deux conjoints, dans la
majorité des cas, la très grande majorité des cas, soient
sur le marché du travail et gagnent le salaire, gagnent la pitance pour
la famille. (10 h 30) alors, c'est sûr que les besoins de garde, quand on
regarde le nombre de femmes qui sont sur le marché, le pourcentage, qui
s'accroît de plus en plus, ne peut pas faire autrement que de
s'accroître. alors, quand le gouvernement me dit qu'ils ont fait des
efforts surhumains, bien, écoutez, on n'a qu'à se baser sur les
chiffres et l'évaluation des besoins est facile à faire. on voit
qu'il y a eu, bien sûr, des places supplémentaires, mais c'est
bien évident qu'on ne peut pas suffire comme ça à la
demande. et, à cet égard-là, j'espère que la
ministre va faire des démarches auprès de sa collègue au
niveau du fédéral parce que, vous savez, le gouvernement
fédéral nous a déjà fait le coup, une fois, de dire
qu'il promettait des montants pour établir des services de garde
nationaux, donner des places à l'échelle nationale, et le
gouvernement libéral de m. chrétien s'était engagé
sur la même voie. on sait ce qui est arrivé avec la promesse des
conservateurs; elle est tombée. on le sait, en 1988, ce qui est
arrivé. on a commencé à reculer pour finalement dire qu'on
ne le ferait pas. là, m. chrétien, lui, il nous a promis
ça aussi, de mettre des sous pour ajouter des places dans l'ensemble du
canada pour les services de garde. alors, j'espère que la ministre va
aller réclamer ces sous-là, va se battre pour les obtenir et
j'espère aussi qu'elle pourra peut-être essayer de se battre aussi
pour faire abolir la fameuse condition du 3 %, parce que le premier ministre du
canada, lui, pour donner des places en services de garde, il faut absolument,
dans sa tête à lui, là, dans sa façon de s'engager
dans ce dossier-là, que le pib, le produit intérieur brut, ait
augmenté de 3 %. c'est assez curieux de voir qu'il exige une condition
pareille dans le domaine de la garde à l'enfance et qu'il se permet de
ne rien exiger du tout et de s'infiltrer dans le domaine des affaires
municipales par le programme d'infrastructures. tout ce qu'on demande, les
familles au québec, les femmes, les familles, les gens qui ont besoin de
services de garde, et j'espère que la ministre va défendre ce
point-là, c'est que le premier ministre du canada fasse au moins comme
il a fait pour les infrastructures routières, qu'il oublie ses
conditions de 3 %... je pense qu'on mériterait effectivement, parce
qu'on en a grandement besoin, des services de garde plus abondants, mieux
répartis aussi, et on a besoin, évidemment, des montants qui vont
avec. ça créerait aussi de l'emploi permanent plutôt que de
créer des tâches saisonnières, si on veut, parce qu'on sait
que chez nous, les routes, c'est saisonnier. quand on parle de
réfection, on parle d'emplois d'été, à toutes fins
pratiques, alors que la garde des enfants, ça se fait à
l'année, m. le président. alors, peut-être que ça
l'aiderait dans son programme de création d'emplois, puisqu'il pourrait,
à ce moment-là, créer des tâches annuelles.
Alors, M. le Président, je pense que c'est un fait, c'est un fait
que les droits qu'on a sur papier, on ne les a pas nécessairement dans
les faits, il faut se rendre compte de ça, qu'il y a des règles
à changer aussi selon les besoins que l'on a, parce que la
société est en mutation, et je pense que les quelques chiffres
que j'ai essayé de donner nous démontrent qu'il y a des
changements majeurs et qu'il faut suivre ces changements-là, il faut
adapter nos règles à ces changements-là, aux besoins des
gens que l'on représente ici.
Je voudrais, bien sûr, en terminant, rendre hommage, moi aussi,
à toutes celles qui ont marqué l'histoire, qui ont marqué
l'historique, le cheminement, si on veut, du dossier des femmes. Je voudrais
rendre hommage aussi à celles qui ont réussi, et qui
réussissent encore aujourd'hui, à percer dans des domaines
traditionnellement occupés par les hommes, traditionnellement
occupés par d'autres qui, finalement, sont toujours difficiles. C'est
toujours difficile pour les femmes de percer dans ces domaines-là.
Alors, je voudrais rendre hommage à celles qui ont réussi, et qui
continuent de lutter pour réussir, à percer dans ces
domaines-là.
Surtout, M. le Président, je voudrais rendre hommage à
toutes celles qui se sont impliquées, peut-être de façon
moins éclatante, à toutes celles qui s'impliquent, jour
après jour, pour faire avancer la cause des femmes. Alors, je voudrais
féliciter, bien sûr, tous les organismes qui militent pour la
cause des femmes, tous ceux et celles, parce qu'il y a aussi des hommes dans
ça qui la font avancer, qui sont féministes aussi dans ces
dossiers-là... Parce que, pour moi, le féminisme, c'est plus
qu'une histoire de femmes, M. le Président. Le
féminisme, c'est un dossier qui touche la société
dans son ensemble. Quand on améliore les conditions de vie des femmes,
on améliore les conditions de vie des familles, on fait avancer un
dossier de société.
Alors, bien sûr, je voudrais féliciter tous ceux qui
s'impliquent, les remercier, les encourager à continuer, parce que, on
le sait, rien n'est terminé. Je vous remercie, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée, de votre intervention sur cette motion.
Conformément à l'ordre de la Chambre, nous en sommes maintenant
au droit de réplique de l'auteure de la motion, Mme la ministre
déléguée à la Condition féminine et à
la Famille. Je vous indique que vous avez un droit de réplique de 20
minutes, si vous le désirez. Merci.
Mme Violette Trépanier
(réplique)
Mme Trépanier: Merci, M. le Président. Je prendrai
quelques minutes pour revenir sur certains propos que les intervenants ont
tenus dans cette Assemblée hier et aujourd'hui. Je commencerai par
parler, je pense, de l'outil de conciliation entre la vie professionnelle et la
vie familiale le plus important, celui des services de garde. On a
véhiculé hier certains propos qui sont, à mon avis,
erronés, et je voudrais rectifier des chiffres.
Vous savez, notre gouvernement s'est impliqué dès son
arrivée au niveau des services de garde, en 1985, et nous avons une
performance très importante dans ce domaine-là. C'est
évident qu'il reste encore à faire, mais il ne faut pas oublier
qu'en 1988 nous avons adopté une politique de services de garde dans
laquelle nous prenions des engagements, à savoir de développer 60
000 nouvelles places en cinq ans. Nous l'avons entendu ce matin encore, il y a
eu retrait du gouvernement fédéral, et notre objectif sera
réalisé, mais en l'espace de sept ans.
Alors, durant cette période-là, M. le Président, en
1988, lors de la politique des services de garde, il y avait très
exactement 64 742 places en services de garde. Je dois vous rappeler, M. le
Président, que les services de garde ne sont pas qu'un mode de garde.
Alors, peut-être que les intervenants d'hier faisaient allusion aux
garderies, entre autres, mais il faut bien spécifier qu'il y a des
garderies, qu'il y a des agences en services de garde, qu'il y a de la garde en
milieu scolaire également. Alors, donc, de 64 742 places que nous avions
en 1988, le 16 février 1994, nous avons maintenant 120 493 places, soit
un ajout de 55 751 places. On est très loin du chiffre
évoqué hier par l'Opposition. Nous avons, M. le Président,
malgré la conjoncture extrêmement difficile que nous connaissons,
doublé les budgets des services de garde depuis 1988. Le budget
était de 93 000 000 $ en 1988 et il est passé à 187 000
000 $ cette année. Alors, c'est un dossier extrêmement important
pour les femmes du Québec, et je comprends l'Opposition de s'y
intéresser beaucoup, mais je voulais rectifier ces faits-là.
Vous savez, M. le Président, le Québec est en profonde
mutation et le Québec, présentement, prend des virages
importants. Il se donne des instruments extrêmement importants, des
instruments majeurs pour son avenir: politique de développement
économique, politique de développement régional, politique
de la main-d'oeuvre, politique de santé et bien-être, plan de
relance pour l'emploi. C'est de cette façon que nous avons
décidé de lutter contre la pauvreté, pauvreté
à laquelle faisait allusion la députée des
Chutes-de-la-Chaudière, et avec raison. (10 h 40)
Alors, nous avons énormément confiance en notre plan de
relance que nous avons mis en place récemment. Au niveau de la condition
féminine, nous avons adopté une politique de condition
féminine et cette politique, M. le Président, elle avait deux
objectifs: d'abord, celui d'accorder aux femmes la justice et
l'équité auxquelles elles ont droit et aussi d'utiliser les
ressources potentielles des femmes pour aider le Québec à
triompher des difficultés. On a effectué de nombreuses
consultations et un large consensus a été établi autour de
quatre grandes orientations: l'autonomie économique des femmes, le
respect de l'intégrité physique et psychologique des femmes,
l'élimination de la violence et la reconnaissance et la valorisation de
l'apport collectif des femmes.
Ces quatre orientations déterminent les interventions du
gouvernement au cours des prochaines décennies et la
concrétisation de ce nouveau contrat social se fera par le biais
d'engagements triennaux auxquels nous nous sommes engagés: 135
engagements précis, concrets, dans 44 ministères
différents. Claudette Tougas, Mme Tougas, de La Presse, disait, lors du
lancement de cette politique: «Une politique engagée,
concrétisée dans 135 engagements fermes et endossée par 44
ministères et organismes gouvernementaux est très
intéressante. Tous les engagements sont réalisables dans un
mandat de trois ans. D'aucuns, dit-elle, ne manqueront pas de critiquer cette
politique, d'y voir des faiblesses, des oublis, de répéter qu'il
s'agit de voeux pieux, mais rien n'est jamais parfait. Pourtant, dans son
ensemble, cette politique constitue un bon projet, même ambitieux
à certains égards, cohérent et réaliste.»
M. le Président, voilà comment notre gouvernement a
décidé de travailler pour l'équité des femmes. Mme
la députée de Chutes-de-la-Chaudière nous parlait
d'équité salariale, tout à l'heure. Moi, je suis
persuadée qu'au-delà de l'équité salariale, il ne
faut pas négliger l'équité en emploi, et notre
gouvernement s'est engagé à déposer une loi sur
l'équité en emploi dans les prochains mois.
Alors, M. le Président, il est sûr qu'il reste encore
énormément à faire. Nous sommes conscients de ça,
et une journée comme la Journée internationale des femmes sert
également à faire valoir le point de vue des femmes sur leurs
droits. Mais je pense qu'il ne faut pas négliger l'apport et l'effort
important que le gouvernement a faits dans toute cette question-là, et
je m'engage, au nom de mon gouvernement, à continuer
nos efforts dans ce sens et à arriver avec des mesures
concrètes pour que nous puissions favoriser l'accès des femmes
à l'égalité.
Et je termine en souhaitant encore mes meilleurs voeux à toutes
les femmes québécoises et aussi aux responsables d'organismes qui
font en sorte que nous puissions avancer, un pas à la fois, mais avancer
tout de même vers la bonne voie. Merci, M. le Président.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre.
Alors, cette intervention met fin au débat, et je vais mettre la motion
de Mme la ministre déléguée à la Condition
féminine et à la Famille aux voix. Est-ce que la motion, qui se
lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale participe à la
réflexion collective à l'occasion de la Journée
internationale des femmes, décrétée le 8 mars», est
adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.
Affaires du jour
M. le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la
Technologie.
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article 6 au feuilleton.
Projet de loi 148 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Bissonnet): À l'article 6, M.
le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie
propose l'adoption du principe du projet de loi 148, Loi modifiant la Loi
favorisant l'augmentation du capital des petites et moyennes entreprises. M. le
ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Merci beaucoup, M. le Président.
Nous procédons aujourd'hui à la prise en considération du
projet de loi 148 qui modifie certaines dispositions de la Loi favorisant
l'augmentation du capital des petites et moyennes entreprises. Ce projet de loi
donne suite aux mesures annoncées par le ministre des Finances à
l'occasion du discours sur le budget du 20 mai 1993.
Depuis le discours sur le budget 1991-1992, un crédit
d'impôt pour favoriser l'augmentation du capital a été mis
en place afin de venir en aide aux petites et moyennes entreprises qui
désirent se financer en émettant des actions ordinaires, des
debentures convertibles ou des actions privilégiées convertibles
en actions ordinaires. Afin d'être admissible, une corporation doit avoir
un actif inférieur à 25 000 000 $ ou un avoir net d'au plus 10
000 000 $. La souscription de ces titres par des institutions
financières ou par certaines sociétés à capital de
risque désignées permet à la corporation de
bénéficier d'un crédit remboursable de 24 % ou de 12 %
selon que le placement admissible prend la forme soit d'une souscription
d'actions ordinaires, soit d'une souscription de debentures ou d'actions
privilégiées convertibles. Un visa doit être accordé
par la Société de développement industriel du
Québec afin de valider le placement admissible.
M. le Président, la première modification contenue dans le
projet de loi 148 ajoute un pouvoir réglementaire à la loi qui
permettra au gouvernement d'adopter des tarifs pour les actes que la
Société de développement industriel du Québec pose
en vertu de la présente loi. De fait, dans le cadre de l'administration
de ce programme, la Société de développement industriel du
Québec émet des visas aux corporations qui veulent
bénéficier d'un crédit d'impôt pour favoriser
l'augmentation du capital des petites et moyennes entreprises. La SDI encourt
donc des coûts reliés à l'analyse des demandes et à
la validation des informations qui lui sont transmises dans le cadre de ce
programme et il convient qu'une partie de ces frais soit assumée par les
corporations qui présentent de telles demandes.
La deuxième modification permet d'accorder plus de souplesse
à la règle du dépôt d'une demande. De fait, les
règles actuelles stipulent qu'une corporation qui demande à la
SDI de lui accorder un visa à l'égard d'un placement admissible
doit présenter une telle demande au plus tard 90 jours après la
date de la fin de son exercice financier. Ce délai sera porté
maintenant à 180 jours après la date de la fin de son exercice
financier. Cette modification s'applique à un placement admissible
à l'égard duquel la SDI accordera un visa après le jour du
discours sur le budget.
Voilà, en bref, M. le Président, les objectifs
visés par le projet de loi 148 modifiant la Loi favorisant
l'augmentation du capital des petites et moyennes entreprises et auxquels, j'en
suis persuadé, adhéreront les membres de cette
Assemblée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre.
Alors, sur ce sujet, je cède la parole, maintenant, à Mme la
présidente de la commission de l'éducation et
députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme la députée,
la parole est à vous.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. M. le
Président, en fait, il s'agit d'un projet de loi qui porte sur la
tarification et qui aura comme conséquence d'introduire des droits et
des honoraires payables par les entreprises qui voudraient profiter d'un
crédit d'impôt pour favoriser leur capitalisation.
Je dois vous dire, M. le Président, d'abord, que
ce crédit d'impôt à la capitalisation n'a pas l'air
de donner les résultats que le ministre des Finances prétendait
lorsqu'il introduisait, en 1991-1992, cette nouvelle formule. Lors des
crédits du ministère de l'Industrie et Commerce, et maintenant
Science et Technologie, au mois de juin passé, j'avais tenté
d'obtenir un bilan d'où on en était rendu presque deux ans
après l'introduction de cette formule, pour me rendre compte,
finalement, que c'est tout au plus 16 dossiers, en juin dernier, 16 dossiers,
donc 12 durant l'année 1992-1993 et quatre exactement en 1991-1992. En
fait, des dossiers, ça veut dire des entreprises aidées. Seize au
total. Quand on sait la situation difficile que ces entreprises traversent
depuis le début de la récession, en 1990 en particulier, et puis,
depuis, évidemment, que l'on sait à quel point nombre d'entre
elles ont fermé leurs portes... Est-il nécessaire de rappeler les
nombreuses faillites d'affaires, qui ont amené le Québec à
avoir le championnat des faillites pendant quelques mois, pour comprendre que,
finalement, cette formule-là donnait prétendument des
résultats sur papier et n'a pas donné le coup de pouce aux
entreprises qu'on pouvait souhaiter?
Et le gouvernement introduit maintenant, avec ce projet de loi 148, des
droits, des honoraires pour que la SDI puisse émettre un visa. Pourquoi
cela à ce moment-ci? Et pourquoi pas en 1991-1992, au moment où
le gouvernement prétendait encore qu'il n'y avait pas de
récession? Parce que vous vous rappellerez sans doute que c'est en 1991,
à l'automne 1991 seulement, que la vice-première ministre
admettra qu'une récession brutale était engagée au
Québec. (10 h 50)
Alors, pourquoi maintenant des droits et des honoraires payables
à la SDI de la part des entreprises qui veulent obtenir un crédit
d'impôt pour favoriser leur capitalisation? C'est sans doute parce que
ça ne va pas très bien à la SDI présentement, et,
M. le Président, on aura l'occasion, certainement, d'en reparler durant
la présente session. Il y a à peine un mois, c'était le 4
février dernier, le journal La Presse titrait que la SDI connaissait,
depuis quelques années seulement, au total cinq ans, des mauvaises
créances qui totalisaient 600 000 000$: à peu près 485 000
000$ dues à des décisions du Conseil des ministres, suite
à des projets choisis par le gouvernement lui-même et, finalement,
refilés à la SDI, puis environ une centaine de millions de plus
qui étaient la conséquence de dossiers directement
acheminés à la SDI.
Il faut bien comprendre que le score du gouvernement là-dedans
était de cinq à un sur les fonctionnaires, c'est-à-dire
que, quand le gouvernement choisit, finalement, des projets en particulier, il
s'avère ? les chiffres sont là pour le démontrer
? que ça se termine souvent par des provisions de perte. En tout
cas, il y en a pour 500 000 000 $. Et d'autant plus que la SDI refuse,
jusqu'à maintenant, d'indiquer à toutes les personnes qui ont
tenté d'obtenir vainement une réponse à la question de
savoir si les 117 000 000 $ engloutis dans la papeterie de Donohue, à
Matane, qui a opéré quelques mois seulement après son
ouverture, qui a fermé moins d'un an après ses débuts
d'opération, si ces 117 000 000 $ étaient
considérés comme perte ou si le gouvernement prétendait
encore qu'il s'agissait tout simplement d'une fermeture temporaire... Vous
savez, le ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la
Technologie ne pourra pas échapper à répondre à ces
questions-là, d'autant plus qu'il est étonnamment silencieux,
puisque, depuis un mois, il n'a pas, d'aucune façon, réagi pour
infirmer, pour prétendre que ce n'était pas le cas. On voit
pourtant se confirmer ces mauvaises créances de 600 000 000 $ à
la SDI.
Et, M. le Président, d'autant plus que, l'Opposition, nous avons
pu obtenir copie, comment dirions-nous, d'une sorte de protocole que le
ministère et la SDI ont été, en fait, tenus de signer avec
le Conseil du trésor. C'était en avril dernier, il y a un an
maintenant. Sans doute alerté par ces mauvaises créances et ces
dossiers mal gérés, le Conseil du trésor a imposé,
en fait, au ministère de l'Industrie et du Commerce et à la SDI
une façon de faire qui resserre étrangement la marge de manoeuvre
de cette Société de développement industriel du
Québec. On y apprend, notamment, que la SDI accepte qu'il n'y ait aucune
indexation, plus encore, qu'elle accepte qu'il y ait de substantielles
compressions dans ses budgets de fonctionnement.
Cela se trouve confirmé, d'ailleurs, dans un document
préparé par le Conseil régional de développement
provisoire sur l'île de Montréal et qui émane du
Secrétariat aux affaires régionales de la région de
Montréal ? Secrétariat qui, je le rappelle, est
occupé par nul autre que l'ancien député libéral de
Sainte-Marie, M. Michel Laporte ? et qui confirme, et je cite, M. le
Président, les paragraphes qui concernent la SDI: «Dans l'exercice
d'appréciation du rôle de la SDI dans le développement
économique de la région de Montréal, il y a lieu de tenir
compte que la SDI doit participer à l'opération
réalignement de l'administration publique et qu'à ce chapitre il
est encore trop tôt pour prévoir les changements pouvant
survenir.» Au moment même où, pourtant, on aurait plus que
jamais besoin d'orientations claires sur ce qu'on entend faire avec des
instruments de développement économique, on ne peut pas, il est
trop tôt pour prévoir les changements pouvant survenir. Ça,
c'est en date du 24 novembre 1993. Ça ne fait pas une
éternité, comme on sait, et c'est un document qui a
été acheminé aux membres du CRD il y a à peine
quelques semaines.
C'est donc dire que la SDI est en sursis, et le gouvernement va devoir
nous indiquer clairement quelle orientation il entend prendre à
l'égard de la SDI, autre que celle de faire payer des tarifs et des
droits comme c'est le cas avec le projet de loi qui est devant nous. D'autant
plus que le ministre faisait réaliser une étude par la firme
Raymond, Chabot, Martin, Paré, qui, l'automne passé, aurait remis
un certain nombre de recommandations. C'est évident, M. le
Président, que tout ça ne peut pas se jouer en catimini. Tout
ça ne peut pas se jouer, finalement, porte fermée. C'est de
l'argent des
contribuables, c'est de l'impôt des Québécois qu'il
s'agit. On va devoir certainement, au niveau du gouvernement... le ministre en
particulier, va devoir être plus transparent dans ce dossier.
M. le Président, moi, je lui demande aujourd'hui de
déposer l'étude de la firme Raymond, Chabot, Martin, Paré.
Il semble que, dans les recommandations qui ont filtré tout au moins
dans la presse jusqu'à maintenant, cette firme recommanderait de mettre
un terme à l'article 7 de la loi qui donne au gouvernement, justement,
le droit de choisir des projets et ensuite de les refiler à la SDI.
Qu'est-ce que le ministre entend faire, là, à l'égard de
ces recommandations et des nouvelles orientations qui sont
préconisées pour la SDI? Ce sont là des questions
extrêmement importantes, extrêmement importantes à ce
moment-ci, justement, où le gouvernement prétend avoir
découvert l'objectif de l'emploi. C'est un peu tard, évidemment,
huit ans et demi à la fin d'un deuxième mandat, où les
résultats sont assez catastrophiques.
Sur le plan de l'emploi, je regardais dernièrement les
statistiques. Vous savez, les faits sont plus têtus que
l'interprétation qu'on peut en donner d'un côté ou de
l'autre de cette Chambre, M. le Président. Et puis, les faits, d'une
certaine façon, ne se contestent pas, n'est-ce pas? Et un fait qui est
assez grave, c'est la perte nette totale de 139 000 emplois temps plein depuis
trois ans. Ça, pour le Québec tout entier, ça veut dire un
moins, M. le Président. Vous vous rendez compte: 139 000 emplois perdus!
Une perte nette totale. Ce sont des emplois en moins. Et, quand on parle de
ceux qui se sont créés depuis le début de ce qu'on a
considéré être le creux de la récession, en avril
1992, ça fait maintenant deux ans, les emplois créés l'ont
été à temps partiel seulement. Ce sont, en fait, 33 000
emplois à temps partiel seulement, tandis que les emplois temps plein
perdus, c'est une perte nette. Alors, c'est heureux que, à la fin d'un
mandat comme ça, dans la période supplémentaire qu'il
s'est donnée, le gouvernement se rende compte que le problème est
là. Mais on va devoir faire autre chose que nous jeter de la poudre aux
yeux.
Je vais vous donner un exemple, et peut-être deux, si vous me
permettez. Un qui est arrivé hier encore, lorsque le ministre de
l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie annonce, ici
même dans cette Assemblée ? comme il l'avait fait,
d'ailleurs, à Montréal, un peu plus tôt ? qu'un
investissement de Bombardier à Canadair allait créer 350 emplois.
Il s'agissait donc d'un investissement majeur: on parle de 168 000 000 $. Et on
parle, pour les deux gouvernements, d'une subvention qui totalise 24 000 000 $.
Mais c'est une subvention, en passant, qui ne comporte, dit-on, aucuns frais
d'intérêt. Alors, on voit que le gouvernement s'engage dans cette
voie qu'il a reprochée au gouvernement précédent, il y a
quelques années seulement. Mais on ne lui en fait pas grief. Vous savez
ce que cet investissement de 160 000 000 $ va faire? Il va permettre, selon les
porte-parole de la compagnie, essentiellement d'augmenter la
productivité, et je cite la porte-parole de la compagnie Bombardier qui
dit exactement ceci: L'investissement maintiendra le même niveau
d'emplois en triplant notre productivité.
C'est un fait incontournable que le principal défi qu'on a
à relever comme société, c'est que la croissance
économique se fait sans création d'emplois. Ça fait
plusieurs fois que j'en parle, vous allez me dire, M. le Président, que
je me répète. Je me répète depuis des
années, dans le fond. Parce que c'est grave que le gouvernement n'ait
pas encore compris que c'est là, le défi, que l'investissement...
Parce que bien des gens, actuellement, n'ont pas besoin de diplôme
universitaire pour comprendre que, quand on annonce un investissement
important, ça ne veut plus souvent dire plus d'ouvrage, ça veut
souvent dire moins d'ouvrage, parce que ça veut dire un investissement
dans la productivité, dans les technologies et qu'on va pouvoir produire
avec moins de monde. Ça, ça fait des années, en tout cas,
que je le dis ici et que les gens de mon quartier le savent. Et le
gouvernement, lui, s'aveugle et continue à répéter que la
productivité, la compétitivité et l'exportation, ce sont
là les instruments qui vont assurer notre prospérité. (11
heures)
Je vous dis, M. le Président: oui, il en faut des investissements
dans la productivité, dans la compétitivité et dans
l'exportation, mais, M. le Président, ça ne crée pas une
job, ça. C'est ça, la réalité. La
réalité, c'est que l'investissement d'hier, l'investissement
à ville Saint-Laurent, une division de Bombardier, ça ne va pas
créer un seul emploi. Et l'investissement dans Camco, il y a un mois,
dans l'est de Montréal, qui a eu un mandat mondial pour faire des
laveuses-sécheuses, c'est important, évidemment, M. le
Président, c'étaient 25 000 000$ qui étaient
annoncés. Le ministre de l'Industrie est venu également et bien
d'autres personnalités. Vous savez combien d'emplois ça va
créer? Aucun. Est-ce qu'il fallait ne pas les faire, ces
investissements? Évidemment, il fallait les faire.
Ceci dit, M. le Président, est-ce que c'est suffisant, comme
société? Ce n'est bien évidemment pas suffisant et,
pendant des années, des années et des années, puis on en
voit le résultat maintenant... Ce n'est pas sans raison qu'il y a une
perte nette de 139 000 emplois, depuis cinq ans. Ce n'est pas sans raison.
C'est que le gouvernement n'a pas compris que la politique de l'emploi ne
reposait pas d'abord sur la très grande entreprise. Les grappes
industrielles du ministre de l'Industrie et du Commerce, hors le fait que, sur
papier, ça a bien du bon sens, voulez-vous bien me dire combien
d'emplois ça a pu créer? Bien, évidemment pas. Ça a
consolidé, quand ça a été possible, puis pas
toujours, même. Il y a des secteurs entiers, puis on y reviendra,
où, finalement, les grappes sont en train de tomber.
C'est une politique qui soutient la création d'entreprises,
petites et moyennes, qui peut, seule, à ce moment-ci, dans l'histoire
économique où on a à faire face à une
réalité de milliers, de centaines de milliers d'hommes et de
femmes sans emploi, et le gouvernement passe à côté.
Est-ce que j'ai besoin de rappeler que, dans ce que le ministre de
l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie appelait le plan
de relance, l'automne passé, ça date d'il y a à peine
quelques mois, savez-vous combien ? puis je reprends exactement l'impact
financier des mesures tel que publié l'automne dernier là, fin
novembre ? il était prévu pour 1993-1994? Ça se
termine avec l'année financière à la fin du présent
mois. Au total, tout le chapitre qui porte sur les politiques de
développement industriel et technologique, tout ce qui était
considéré comme mesure pour favoriser le développement des
grappes industrielles, pour favoriser l'innovation, la diffusion technologique,
pour favoriser les industries environnementales, en fait, ce qui, vraiment,
porte sur les politiques de développement industriel et technologique,
vous savez pour combien d'argent il y en a, en 1993-1994, le coût
prévu? 1 200 000 $. Ça, c'est scandaleux, M. le Président.
Puis c'est un gouvernement qui parlait d'emplois, en février, et qui,
fin novembre dernier, se permettait de ne rien dépenser... De ne rien
dépenser maintenant parce que, finalement, c'était faire semblant
que ce serait après, que ce serait dans les années qui
suivraient. Parce que c'est en 1994-1995, 1995-1996 qu'ils sont supposés
en dépenser beaucoup, en dépenser pour à peu près
un quart de milliard, dans les mêmes mesures.
Mais, si ça vaut la peine, alors, pourquoi ne pas le faire
maintenant? C'est maintenant que nos concitoyens considèrent qu'il est
urgent d'agir. Alors, pourquoi reporter ça à plus tard, si ce
n'est que pour faire semblant, M. le Président, faire semblant, le temps
de traverser une période électorale difficile où le
gouvernement aura à s'expliquer sur un bilan désastreux sur le
plan de l'emploi.
Et le ministre nous présente deux lois ce matin, deux lois qui,
toutes les deux, essentiellement, portent sur la tarification, vont tenter
d'obtenir des droits, si vous voulez, payables pour des services que les
entreprises vont demander à la SDI. C'est d'autant plus
inquiétant, évidemment, et j'y reviendrai, M. le
Président, que l'entreprise s'attendait à beaucoup mieux que
ça.
Et, finalement, quand on regarde ce qui est devant nous au niveau de la
petite et moyenne entreprise, on se rend compte que, finalement,
essentiellement, les annonces qui ont été faites,
supposément pour lui donner ce coup de pouce attendu, ces
annonces-là ont été, et je voudrais vous en donner des
exemples aujourd'hui, ces annonces-là, M. le Président, ont
été essentiellement des campagnes de publicité. Je vais
vous donner juste l'exemple, un seul, et je reviendrai sur quelques autres.
J'ai pensé qu'il pouvait être utile à ce moment-ci de se
rendre compte que les annonces faites... Puis l'argent annoncé sur
papier est rarement effectivement dépensé.
Pensez, par exemple, au programme Innovation PME. C'est un programme qui
a été introduit en 1992-1993, et c'était dans le budget du
ministre des Finances, le regretté Gérard D. Levesque. Ce
programme Innovation PME, il faudrait que je vous lise des extraits du discours
du budget pour voir le lyrisme qui entourait cette nouvelle mesure qui allait
injecter, prétendait le gouvernement, 24 000 000 $ sur trois ans. alors,
vous aviez là, donc, un tableau qui annonçait pour l'innovation
dans la petite et moyenne entreprise 24 000 000 $ nouveaux sur trois ans. on
peut prétendre, à ce moment-là, qu'il s'agissait de 8 000
000 $ par année. quand on a fait les crédits en juin
passé, un an après, quand on a fait les crédits de ce
programme innovation pme, on s'est rendu compte que les 8 000 000 $ de la
première année s'étaient rétrécis,
même sur le papier, à 4 500 000 $, et que, finalement, il n'y
avait eu que 1 800 000 $ de dépensés. 1 800 000 $, ce n'est
même pas 20 %. ce n'est même pas 20 % de ce qui avait
été annoncé un an auparavant, à grands renforts de
publicité, supposément pour soutenir l'innovation dans la petite
et moyenne entreprise.
Le même programme Innovation PME, dans ce qu'on a appelé un
plan de relance du gouvernement, en novembre passé, après en
avoir annoncé 24 000 000 $ et ne pas avoir dépensé la
première année plus que 1 800 000 $, alors, en novembre
passé, là on a prévu une augmentation de 25 000 000 $, une
enveloppe nouvelle sur trois années. Cette enveloppe Innovation PME de
25 000 000 $ sur trois ans, on en prévoit pour 1994-1995, et c'est
là l'impact des coûts que le gouvernement lui-même a
introduits dans ses documents... Pour l'an prochain, on prévoit 5 000
000 $, puis, l'année d'après, 7 000 000 $. C'est moins que ce qui
avait été annoncé en 1992-1993, et on prétend qu'il
s'agit d'une nouvelle annonce. Alors, on maquille une annonce
précédente, qui n'a pas, finalement, été
respectée, dans une nouvelle annonce, et on prévoit, finalement,
moins pour l'innovation dans la petite et moyenne entreprise que ce qui avait
été annoncé l'année auparavant. (11 h 10)
Des exemples, M. le Président. Le Programme de soutien de
l'emploi stratégique, programme de soutien qui, dans le budget
1992-1993, prévoyait 4 000 000 $ chaque année, investis dans
l'emploi stratégique dans la petite et moyenne entreprise. Ça,
c'est en 1992-1993. Comme c'est dans le discours du budget, c'est au mois
d'avril. On est dans le creux de la récession. Alors, là, on en
annonce pour 4 000 000 $ par année pour l'emploi stratégique dans
la petite et moyenne entreprise. À l'automne, comme tout était en
train de dégringoler et que la pression de l'opinion publique
était forte et celle de l'Opposition à l'Assemblée
également, à l'automne, le ministre de l'Industrie, du Commerce,
de la Science et de la Technologie, dans une conférence de presse bien
organisée, qui est suivie de plusieurs autres conférences de
presse de ses collègues, annonce un plan de relance, encore là
à l'automne 1992, puis il va porter cette enveloppe de 4 000 000 $,
annoncée dans le budget pour l'emploi stratégique dans la petite
et moyenne entreprise, à 14 000 000 $. C'est toujours sur papier,
cependant; 10 000 000 $ de plus, dit le communiqué du gouvernement. Pour
se rendre compte, finalement, au mois de juin passé, que, tout au plus,
ce sera à peine quelques
millions de dollars qui seront dépensés, bien loin des 14
000 000 $. Ce ne sera pas tout à fait 6 000 000 $, M. le
Président, qui seront dépensés dans ce programme d'emploi
stratégique où on annonçait une injection de 10 000 000 $
de plus.
Pire encore, il y a un volet qui s'intitulait «stage dans les
centres spécialisés», qui, d'ailleurs, a été
modifié, parce que, vous savez, il y a une sorte d'habileté puis
il y a comme une sorte d'habitude que le gouvernement a prise de changer les
noms des mêmes programmes pour pouvoir les annoncer la fois
d'après en n'ayant pas dépensé l'argent annoncé la
fois d'avant. Je vais vous donner un exemple, un autre exemple: le volet
«stage dans les centres spécialisés», pour lequel on
prévoyait des crédits de 3 000 000 $ répartis sur trois
ans, donc 1 000 000 $ chaque année, qui allaient pouvoir
bénéficier encore à la petite et moyenne entreprise pour
des stages dans les centres spécialisés. La totalité de ce
million de dollars est périmée; pas un sou de
dépensé. Puis on retrouvera, dans le plan de relance du mois de
novembre passé, ce même projet annoncé sur papier qui,
là, porte un nouveau nom. De «stage dans les centres
spécialisés», c'est devenu «centres collégiaux
de transfert de technologie». Alors, le premier programme annoncé
n'est pas dépensé, on change le nom, puis on annonce une nouvelle
enveloppe.
Les gens en ont assez de ça, M. le Président. Ils en ont
assez d'un gouvernement qui fait semblant et qui annonce qu'il va aider sur
papier puis qui, finalement, n'aboutit jamais. Et c'est d'autant plus
scandaleux qu'on est à un moment de notre histoire où on a des
records inégalés de personnes sans emploi. Ai-je besoin de
rappeler le championnat toutes catégories, pas seulement au niveau du
déficit avec presque S 000 000 000 $, pas seulement au niveau des taxes
et des impôts avec 3 000 000 000 $ de plus comme fardeau sur les
épaules à porter? Faut-il aussi rappeler le championnat toutes
catégories en matière de prestataires d'assurance-chômage:
445 000 prestataires le mois passé? Faut-il rappeler également le
championnat toutes catégories, malheureusement, en matière de
bénéficiaires à l'aide sociale: 740 000
bénéficiaires? Et faut-il rappeler, M. le Président, que
nous sommes dans une conjoncture où l'emploi ne se crée pas au
Québec? Des miettes, des miettes seulement quand on compare avec nos
voisins ontariens ou canadiens.
Et j'aurai l'occasion, M. le Président, de reprendre les chiffres
sur l'emploi, mais je veux simplement vous signaler combien il est
décevant présentement de constater à quel point,
finalement, le gouvernement tourne en rond. Sans doute, la semaine prochaine,
viendra-t-on encore tenter de nous faire «abracadabra» avec un
discours inaugural qui nous en promettra, comme il nous a été
promis l'automne passé avec un supposé plan de relance qui
s'ajoutait à l'année d'avant, avec les résultats qu'on
connaît maintenant. Je dois vous dire, M. le Président, que c'est
extrêmement décevant, et que, pour toutes ces raisons, nous allons
voter contre ce projet.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la
députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions sur ce projet de
loi? M. le député d'Orford.
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le Président, je suis un peu surpris de voir
que les gens de l'Opposition vont voter contre le projet de loi. C'est un
projet de loi qui est tout à fait technique. Et on voit l'état
d'âme de ces gens-là. Je pense que la partielle de Shefford les
inquiète particulièrement, et, là, ils vont tirer sur tout
ce qui bouge. Mais il faudrait voir ici quel est l'esprit de ce projet de loi
148; c'est un projet de loi tout à fait technique, où il y a deux
choses, finalement, qu'on introduit dans le projet de loi, et il n'y a pas
matière à faire un scandale là-dedans.
D'abord, M. le Président, on parle de tarification. Alors, nos
citoyens, autant dans Hochelaga-Maisonneuve que dans le comté d'Orford,
que dans le comté du ministre, nous disent: Écoutez, c'est
à l'ensemble de la société de payer pour des frais
précis à une corporation ou à un individu. Alors, la SDI
devait charger des frais, finalement, pour émettre des visas. Visas pour
s'assurer que ces crédits-là que nous donnions étaient
bien faits, étaient bien appliqués, que tout était bien
rempli. Ces frais-là, finalement, on dit: Maintenant, on va amender la
loi. On dit: Bon, écoutez, à l'intérieur de la loi, on va
permettre à la SDI de charger ces frais-là. Ça, c'est le
premier aspect de ce projet de loi là.
La deuxième partie de ça, c'est que le gouvernement a
introduit, vous savez, il y a quelques années, 1991, 1992... Ce n'est
pas nouveau, ça. On en avait parlé dans le budget, d'ailleurs,
pour ce qui est de l'augmentation du capital des petites et moyennes
entreprises qui désirent financer leur croissance développement,
et ce, sous la forme d'actions ordinaires, de debentures convertibles ou
d'actions privilégiées convertibles en actions ordinaires. De
plus, M. le Président, la souscription de ces titres par des
institutions financières ou par certaines sociétés
à capital de risque désignées permet à la
corporation de bénéficier d'un crédit remboursable. Je
vous signale également qu'un visa doit être accordé par la
Société de développement industriel du Québec afin
de valider le placement admissible. Telles sont les règles qui
régissent le fonctionnement de ce crédit d'impôt,
capitalisation des petites et moyennes entreprises. Ce qu'il faut retenir,
c'est que la mise en place de ce crédit d'impôt n'a pas
été sans entraîner des coûts administratifs
additionnels pour la SDI qui en assure la gestion à travers les visas
qu'elle émet. C'est donc, M. le Président, pour permettre
à la SDI de faire face aux coûts relatifs à ses
responsabilités d'attribution de visas d'admissibilité au
crédit d'impôt que nous modifions cette loi aujourd'hui.
Le deuxième objectif du projet de loi que nous avons devant nous
est de nature plus technique. Il concerne la règle du dépôt
d'une demande d'émission de visa. Ce projet de loi vise, M. le
Président, à accorder
plus de souplesse à la règle du dépôt d'une
demande. Ça aussi, les citoyens de Hochelaga-Maisonneuve, les citoyens
d'Orford, l'ensemble de la population nous demandent, les gouvernements, de les
déréglementer et, quand on ne peut pas
déréglementer totalement, de mettre un peu plus de souplesse.
C'est ça que le ministre de l'Industrie et du Commerce fait, il met un
peu plus de souplesse. Anciennement, on disait: Écoutez, après 90
jours de vos états financiers, c'est le plus loin qu'on ira. Maintenant,
on va permettre 180 jours. Il faut voir qu'une PME où c'est
l'homme-orchestre, la femme-orchestre qui fait tout à l'intérieur
de son entreprise, on va lui donner un petit peu de flexibilité. C'est
contre ça que le PQ va voter, M. le Président: un peu plus de
flexibilité dans les entreprises pour aider le petit entrepreneur qui,
dans Montréal-est, dans mon comté, dans le comté
d'Outremont, dans l'ensemble du Québec essaie de faire des choses,
essaie d'aider ses concitoyens, essaie de s'aider lui-même. Eh bien,
là, le PQ dit: Non, nous, on ne veut pas accorder 180 jours; ça,
c'est trop compliqué, c'est trop long. C'est probablement ça
qu'il pense. Mais, ce gouvernement-là, demandez-lui donc combien il en
a, des gens d'affaires? Combien de gens arrivent du milieu des affaires, dans
ce milieu-là? Qui ont géré des PME, qui ont
géré des entreprises? Je vais vous le dire, moi. Dans le Bloc
québécois, il y a 27 enseignants, il y a quatre psychologues. Il
y a combien d'hommes d'affaires ou de femmes d'affaires, dans le Bloc
québécois? Il y en a deux. C'est ces gens-là qui, en ce
moment, s'opposent à des règlements purement techniques pour
aider les petites entreprises dans Montréal-est. C'est ces
gens-là qui vont venir voter contre ça, M. le
Président.
Excusez si je m'emporte, mais ce sont des gens qui ne connaissent pas la
réalité des affaires au Québec, qui n'en ont jamais
créé, des entreprises, et, soudainement, viennent nous faire la
morale. Je vais vous en parler, moi, des crédits d'impôt qu'ils
ont accordés à ces gens-là, à l'époque
où ils étaient là. Ils l'ont fait d'une façon
autre, eux; ils ont créé un régime qui était le
REA. Là, ils nous parlent de la SDI qui perd de l'argent. On est dans le
milieu d'une récession, une des pires récessions depuis la
Deuxième Guerre mondiale, Mme la députée de
Hochelaga-Maisonneuve. Regardez les chiffres en Italie, regardez les chiffres
en Allemagne, regardez les chiffres en France; regardez les chiffres en
Amérique du Sud et aux États-Unis. Regardez ceux du
Québec, après vous allez relever la tête et vous allez
trouver qu'on a fait des choses extraordinaires. (11 h 20)
Je vais vous en parler, moi, des crédits d'impôt. Vous
l'avez fait d'une façon beaucoup plus subtile, dans les années
quatre-vingt, avec les REA. Savez-vous combien de REA, dont le chef de
l'Opposition a permis la création, n'existent plus? 42 sur 70.
Ça, c'était de l'argent des petits épargnants directement
qui a été «flushé» complètement. C'a
été ça, votre façon d'aider les PME: il y en a 42
qui ont fait faillite en date d'aujourd'hui.
M. le Président, je passais, il y a un an, et je voyais que la
SDI avait accordé un prêt dans mon comté pour une petite
compagnie qui faisait des commutateurs à distance pour partir votre
voiture. Vous savez, le genre de gadget qu'on était bien heureux
d'avoir, cet hiver, on n'avait pas besoin de sortir, on partait nos voitures
à distance. Il y a un entrepreneur, chez nous, jeune et dynamique, qui a
parti une compagnie, puis on lui a donné un peu d'aide, via la SDI, pour
la recherche et le développement. J'avais été le saluer
suite à ça, me présenter, et il y avait 16 voitures dans
le stationnement. Je me disais: Bien, c'est une petite PME, ils commencent. Et
voilà qu'il y a deux semaines je repassais devant son entreprise et je
me suis arrêté deux minutes, puis j'ai compté les voitures
dans le stationnement: il y en avait 60. J'ai dit: Mon Dieu, il doit faire un
party, il a invité ses vendeurs, je sais pas trop ce qui se passe. Je
vais aller le resaluer. Et puis, il me disait: Tu sais, le montant d'argent que
tu m'as donné, là, ou que la SDI nous a donné, bien, on a
créé pas mal de jobs avec ça. Notre produit, on est rendus
dans les grandes chaînes américaines. On avait des
problèmes techniques, on les a réglés, et puis le futur
nous appartient. Bien, ça, c'est le genre d'histoire heureuse.
On en a un autre, chez nous, il fabrique des tombes. Et le marché
des tombes, c'est un marché drôlement compétitif, croyez-le
ou pas. On lui a permis de faire une étude sur son marché, et
puis M. Laçasse me disait comment son entreprise a reviré de
bord, comment cette étude-là, qui a coûté 15 000 $
? la province a décidé de l'aider ? on a
retourné ça de bord. C'est ça que vous allez voter contre,
avec un projet de loi où on change deux petits articles dans une loi?
Voyons donc, ça n'a pas d'allure! je vais vous parler des exportations
du québec. vous en avez... c'est vous qui en avez parlé, mme la
députée de hochelaga-maisonneuve. savez-vous, dans l'estrie,
quelle est l'augmentation des exportations dans les trois derniers mois
à l'extérieur du québec? trente pour cent. au
québec, 22 %. il n'y a pas un pays sur la terre, en ce moment, qui a
augmenté dans les trois derniers mois ses exportations de 22 %; il faut
le dire. on est la partie de l'univers... la france, l'italie, l'allemagne ont
des niveaux d'exportation de leur production inférieurs à ce que
le québec fait en ce moment. on est supérieur à l'ensemble
du canada. moi, je suis fier de ça, voyons donc!
Vous nous parlez de problèmes de création d'emplois. Oui,
il y a des problèmes de création d'emplois, il y en a à
travers le continent. Je vais vous dire qu'au Québec, d'autre part,
entre 1993 et 1994, il y a eu 43 000 ? et je vous invite à nous
écouter, les gens de l'Opposition ? il y a eu, entre janvier 1993
et janvier 1994, 43 000 emplois créés par des PME, et ce n'est
que le début d'une histoire heureuse. Je vous le promets, moi.
Je vais parler un peu du plan de relance du ministre, qui est ici avec
nous aujourd'hui, plan de relance tout à fait extraordinaire. Moi, je
suis un peu surpris de voir que la députée de
Hochelaga-Maisonneuve a dit que ça ne correspond à rien. Faites
du bureau de comté
comme j'en fais, vous allez voir les entrepreneurs vous appeler, vous
allez voir les commissariats industriels vous appeler, vous allez voir
même les agriculteurs, dans mon comté, nous appeler pour nous
dire: II y a quelque chose pour moi, là-dedans, pouvez-vous m'ai-der, il
y a un aspect pour le développement...
Et puis vous avez parlé des petites PME. Bien, dans le plan de
relance, là ? je vous invite à le relire ? les petites,
petites PME, il y a un aspect tout à fait particulier, on est
allé même à regarder pour les inventeurs. On est, au
Québec, un peuple de gens qui inventent, qui ont des idées, et
ces gens-là, les Bombardier de ce monde, ça n'a pas
commencé avec Canadair, ça a commencé avec Roski à
Valcourt, dans le comté de Mme... du comté de Johnson. C'est
là que ça a commencé, un patenteux, un inventeur, et c'est
devenu une multinationale. Le ministre a reconnu ça dans son plan de
relance, et, maintenant, les inventeurs, les patenteux, on va même les
aider, on va les encadrer.
Moi, je vais vous dire franchement: chez nous, là, il y en a pas
mal, des hommes et des femmes d'affaires qui sont issus de ce milieu-là,
et on a un préjugé drôlement favorable ? et,
ça, c'est une expression de votre ex-chef ? pour les TPE, les
très petites entreprises. Moi, j'en ai eu un à mon bureau, la
semaine passée. Lui, il a perdu son emploi parce que cette
compagnie-là, elle a été fermée tout simplement. Et
puis, lui, il veut se partir... il va réparer des petites tondeuses, et
puis ça fait un an qu'il fait ça dans sa cave, puis, là,
il s'en va sur la rue principale, puis on va l'aider, ce bonhomme-là,
à se partir en affaires, puis son fils va se joindre à lui, puis
sa femme va tenir la comptabilité et puis on va en créer, des
jobs.
Vous savez, le Parti libéral, non seulement il a eu et il va
continuer à aider les TPE, les PME, mais il a aussi une vision
continentale. Quand le premier ministre va chez Canadair, quand on va chez
Bombardier, quand on va chez les grands de ce monde qui ont leurs sièges
sociaux au Québec, nous, on en est fiers de ça, puis on va
continuer à en être fiers.
M. le Président, je termine en disant que je suis très
surpris, je vous le dis franchement, c'est un projet de loi qui était
purement technique, on ne changeait pas grand-chose, finalement, dans la loi.
On voulait permettre, on voulait permettre à la SDI ? et on va le
faire ? que le coût soit directement lié à la personne
qui fait cette demande-là. Et c'est ce que les citoyens du Québec
nous disent: Arrêtez de piger dans le fonds consolidé, et ceux qui
demandent des services de l'État, pourquoi pas leur en charger une
partie de ces frais-là? C'est ce qu'on faisait. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors,
nous sommes toujours à l'étude du projet de loi 148, et je vais
reconnaître maintenant le ministre responsable de ce projet de loi.
M. Tremblay (Outremont): Alors, je vous demanderais, M. le
Président, d'appeler l'article 7 au feuilleton.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Avant, il faudrait faire
adopter ce projet de loi, M. le ministre.
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je fais motion
pour que ledit projet de loi soit déféré à la
commission de l'économie et du travail pour étude
détaillée.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que cette motion
est adoptée?
M. Gendron: Adopté.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Au départ, il
faudrait faire adopter le principe du projet de loi. Est-ce qu'il y a une
motion pour que le principe du projet de loi 148 soit adopté? Alors, M.
le ministre ou le leader.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Tremblay (Outremont): M. le Président, je fais motion
pour que ledit projet de loi soit déféré à la
commission de l'économie et du travail pour étude
détaillée.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, est-ce que ce
projet de loi est adopté...
Des voix: Cette motion.
Le Vice-Président (M. Tremblay): ...cette motion est
adoptée?
M. Gendron: M. le Président, cette motion est
adoptée sur division.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors,
le projet de loi est déféré à la commission
parlementaire.
Une voix: ...
M. Tremblay (Outremont): Alors, M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article 7 au feuilleton.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, l'article...
M. Gendron: M. le Président, ce n'est pas grave,
là. C'est parce qu'on ne peut pas faire la motion de
déférence avant l'adoption du principe. Et comme on n'avait pas
fait l'adoption du principe, je voulais juste rappeler que le leader appelle la
motion de déférence. Ce serait plus officiel.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, nous
sommes rendus à l'article 7. À l'article 7, M. le ministre
de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie propose
l'adoption du principe du projet de loi 149, Loi concernant certains
règlements pris en application de la Loi sur les sociétés
de placements dans l'entreprise québécoise. Alors, est-ce qu'il y
a débat?
M. Gendron: M. le Président, si vous permettez, avant
d'appeler l'article 7, puisque le ministre de l'Industrie et du Commerce fait
également office de leader adjoint et que je vois arriver le leader du
gouvernement, je voudrais, à ce moment-ci, M. le Président,
demander au leader du gouvernement, puisque pas plus tard qu'il y a une heure
je recevais des pressions, légitimes, en passant, normales, de la ville
de Montréal, du maire de la ville de Montréal, pour adopter le
projet de loi privé, disant qu'il y avait une urgence... Alors, je
voudrais juste, à ce moment-ci, indiquer à cette Chambre, M. le
Président, que c'est le choix du leader du gouvernement d'appeler le
projet de loi qu'il veut appeler plutôt que d'appeler les projets de loi
privés, qui ont été déposés, de la
commission de l'aménagement et des équipements. Mais je voudrais
juste indiquer, M. le Président, que, quant à nous, dès
que le leader du gouvernement se décidera à appeler les projets
de loi privés qui ont été déposés et
adoptés dans les rapports de la commission hier, lors de l'ouverture de
la session du 8 mars, nous sommes complètement d'accord à en
disposer. Mais je trouve curieux qu'on doive subir les pressions d'intervenants
privés, avec raison en termes de légitimité, puis que le
gouvernement, lui, fasse un autre choix. C'est de ses affaires. Mais je tenais
à dire ici, M. le Président, que, quant à nous, les
projets de loi privés concernant Port-Cartier, ville de Québec,
ville de Waterloo, ville de Montréal, Saint-Léonard et
Saint-Laurent, déposés dans les rapports de commissions hier, ces
projets de loi là ont fait l'objet d'une étude
détaillée en commission. Nous sommes d'accord de procéder
le plus rapidement possible à la finalisation de leur étape
d'adoption finale, en troisième lecture, mais, bien sûr, à
la condition que le leader du gouvernement assume ses responsabilités,
décide de les appeler. Il a fait le choix d'appeler des bills publics,
comme vient de le dire, d'ailleurs, le député d'Orford, et, dans
le dernier cas qu'on vient d'adopter, ça ne change presque strictement
rien à la loi. Il a fait le choix de faire adopter ces projets de loi
là avant d'autres projets de loi privés où il y a urgence.
Je voulais vous indiquer, M. le Président, que c'est le choix du leader
du gouvernement et je voulais le faire à ce moment-ci en lui demandant
pourquoi. Pourquoi le leader du gouvernement n'appelle pas le projet de loi,
entre autres, 271, de la ville de Montréal, où il y a eu urgence
par rapport aux fonds publics, quitte à un emprunt privé? Peut-il
nous donner des raisons qui le justifient de faire une
«priorisation» différente de celle que j'aurais
souhaitée?
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le
Président. En réponse aux remarques du leader adjoint du
gouvernement, je l'informe que j'ai eu des communications avec le leader de
l'Opposition et que, ce matin, après lui avoir donné un
préavis hier, à l'effet que l'Assemblée nationale serait
appelée à proroger ses travaux demain soir à 22 heures et
qu'elle reviendrait pour le discours inaugural le jeudi suivant, que nous nous
retrouvions dans une conjoncture de fin de session comme telle, et que, dans
ces conjonctures, il est de coutume que les projets de loi
d'intérêt public auxquels le gouvernement tient soient
appelés et que les projets de loi d'intérêt privé
auxquels le gouvernement tient également y fassent suite dans les
meilleurs délais. (11 h 30)
Nous avons, pour aujourd'hui, tenté de conserver le menu le plus
mince possible. Légiférer moins et mieux, c'est le thème
du Parti libéral du Québec. Dans les circonstances, j'ai
prévenu le leader de l'Opposition officielle, en sollicitant son
habituelle collaboration, que, dans l'ordre, nous appellerions les projets de
loi du ministre de l'Industrie et du Commerce, des projets de loi à
saveur économique porteurs de création d'emplois; que, par la
suite, un important projet de loi en matière environnementale, qui
touche la gestion des déchets, serait appelé, suivi du projet de
loi sur les conservatoires et suivi des projets de loi privés, parce que
c'est dans l'ordre où cette Assemblée en dispose.
Vous en avez énuméré quelques-uns. Il y en a
d'autres qui seront appelés: Loi concernant la ville de Port-Cartier,
vous l'aviez mentionnée; Loi modifiant la charte de la ville de
Québec, vous l'aviez mentionnée; Loi concernant la ville de
Waterloo, mentionnée; Loi modifiant la charte de la ville de
Montréal, mentionnée; Loi concernant la ville de
Saint-Léonard; Loi concernant la ville de Saint-Laurent. Je suis certain
que vous n'avez pas mentionné la Loi modifiant la charte de la ville de
La Prairie, mais M. le député de La Prairie tient
également à l'adoption, tout comme le gouvernement, de ce projet
de loi. Mais, pour passer à travers ce menu minceur, nous avons besoin
de la collaboration de tous les membres de cette Assemblée et de la
présidence. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
leader. M. le leader adjoint.
M. Gendron: Oui, je viens d'entendre les explications du leader
du gouvernement et je veux juste dire que c'est exact qu'il nous a
informés que l'ordre des travaux de la Chambre était dans ce
qu'il vient de dire. C'est tout à fait exact. Mon propos est: Pourquoi
n'a-t-il pas privilégié les projets de loi privés urgents
avant l'adoption de certains projets de loi publics qu'on aurait pu très
bien faire la semaine prochaine? Et il n'y a rien qui empêche le
gouvernement de convoquer la Chambre la semaine prochaine pour faire les bills
privés et les bills publics. Moi, tout simplement, M. le
Président, c'était uniquement pour indiquer au leader du
gouvernement notre collaboration quant à procéder rapidement
dans l'adoption des projets de loi privés qui sont
suppo-sément urgents, et on est d'accord pour les adopter dès que
le leader du gouvernement les appellera. C'est uniquement ça.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le leader.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je connais suffisamment le
leader adjoint de l'Opposition pour savoir qu'il est respectueux de nos us et
coutumes, de la tradition parlementaire, de notre façon de fonctionner.
Ce n'est pas la première fois que j'ai à le répéter
dans des situations de fin de session, les bills publics, on en dispose dans un
premier temps, suivis des bills privés et, généralement,
lorsque la collaboration est saine entre tous les membres de cette
Assemblée, l'ensemble de la législation qui revêt un
intérêt public assez urgent est adopté.
Projet de loi 149 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, nous allons
entreprendre le débat du projet de loi 149, l'adoption de principe. Je
suis prêt à reconnaître un premier intervenant. M. le
ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie.
M. Gérald Tremblay
M. Tremblay (Outremont): Merci, M. le Président. Nous
procédons aujourd'hui à la prise en considération du
projet de loi 149 modifiant certaines dispositions de la Loi sur les
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise.
Ce projet de loi donne suite aux mesures annoncées par le
ministre des Finances à l'occasion du discours sur le budget du 20 mai
1993. Depuis 1985, la Loi sur les sociétés de placements dans
l'entreprise québécoise a permis la création d'un
véhicule privilégié pour permettre aux PME d'assurer leur
développement.
M. le Président, le placement d'une SPEQ doit être
effectué dans une corporation oeuvrant principalement dans un secteur
d'activité admissible, notamment les secteurs manufacturier et tertiaire
moteur. Afin de faciliter le financement externe de la recherche et le
développement par le biais de SPEQ, l'un des secteurs également
reconnus à cette fin est la recherche et le développement. Ainsi,
le placement d'une SPEQ dans une entreprise dont la seule activité
consiste à effectuer ou à faire effectuer pour son compte de la
recherche scientifique et du développement expérimental est
admissible et peut conférer aux actionnaires de la SPEQ des avantages
fiscaux.
La première modification apportée par le présent
projet de loi vise à exclure la recherche et le développement
expérimental à titre de secteur admissible pour les fins du
programme des sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise.
Malgré cette exclusion, les entreprises opérantes qui
exploitent un laboratoire de recherche appliquée pourront cependant
continuer de recevoir des investissements d'une société de
placements dans l'entreprise québécoise auxquels sont
rattachés les avantages fiscaux accordés aux actionnaires de
celle-ci. Cette mesure s'applique à l'égard d'un placement
effectué après le jour du discours sur le budget, sauf si le
placement est visé par les règles transitoires annoncées
dans le cadre du moratoire du 23 avril 1993 concernant le financement externe
de la recherche et développement et par l'extension de ces règles
transitoires aux décisions anticipées favorables retenues avant
le 23 avril 1993.
La deuxième modification législative contenue dans le
projet de loi 149 permet au gouvernement d'édicter un règlement
rétroactif concernant des tarifs pour les actes que la
Société de développement industriel du Québec pose
en vertu de la présente loi. De fait, dans le cadre de l'administration
de ce programme, la Société de développement industriel du
Québec enregistre les SPEQ et valide leurs placements. La SDI encourt
donc des coûts reliés à l'analyse des demandes et à
la validation des informations qui lui sont transmises dans le cadre de ce
programme, et il convient qu'une partie de ces frais soit assumée par
les corporations qui présentent de telles demandes. C'est pourquoi un
tarif de 200 $ est dorénavant exigé pour l'émission d'un
numéro d'enregistrement d'une SPEQ. De plus, un montant
représentant 0,1 % du placement autorisé dans le cadre de ce
programme et du montant du placement admissible dans le cadre du crédit
d'impôt à la capitalisation sera également exigé. Le
montant maximum exigible sera toutefois limité à 1000 $ dans
chaque cas.
Voilà en bref, M. le Président, les objectifs visés
par le projet de loi 149, modifiant la Loi sur les sociétés de
placements dans l'entreprise québécoise, et auxquels, je suis
persuadé, adhéreront les membres de cette Assemblée.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
ministre. Nous sommes toujours à l'adoption du principe du projet de loi
149, Loi concernant certains règlements pris en application de la Loi
sur les sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise. Je suis prêt à reconnaître un
autre intervenant. Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Mme
la députée.
Mme Louise Harel
Mme Harel: Merci, M. le Président. Avec ce projet de loi
149, M. le Président, le gouvernement entend, comme il le faisait
précédemment avec le projet de loi 148, tarifer des entreprises
qui voudraient bénéficier de ce programme de
sociétés de placements dans l'entreprise québécoise
qui vise, en fait, à offrir du capital de risque à l'entreprise
petite et moyenne, à l'entreprise québécoise. Ce projet de
loi qui veut tarifer
les services de la SDI ? et j'y reviendrai ? veut
également exclure le développement et la recherche
expérimentale du programme de sociétés de placements, de
ce programme qui vient aider l'entreprise à capitaliser de façon
permanente en allant chercher du capital pour lequel elle peut obtenir un
crédit.
M. le Président, d'abord, l'abolition de l'admissibilité
à la recherche et au développement pour les
sociétés de placements dans l'entreprise québécoise
est tout à fait contraire aux recommandations que l'on retrouve au
Conseil de la science et de la technologie dans un rapport extrêmement
bien reçu, qui s'intitulait «Urgence Technologie» et qui a
été publié il y a quelques mois maintenant.
On se rappellera que, dans le discours du budget du ministre des
Finances, il était question justement d'une tarification des demandes de
visa des entreprises qui voulaient bénéficier du programme de
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, le programme de SPEQ. Déjà, dans le
discours du budget, on prévoyait une tarification des demandes de visa
des entreprises à la SDI, cette demande de tarification qui est contenue
dans le projet de loi 149. Maintenant, on ajoute également un autre
élément, c'est-à-dire l'exclusion d'activités de
développement et de recherche expérimentale. C'est donc dire que
le projet de loi 149 abolit la recherche-développement comme secteur
admissible pour les fins du programme des sociétés de placements
dans l'entreprise québécoise et introduit des tarifs et des
honoraires, comme je le disais tantôt. (11 h 40)
Cependant, M. le Président, loin de recommander l'abolition de la
recherche-développement comme secteur admissible, à l'inverse, le
rapport du Conseil de la science et de la technologie invitait le gouvernement
à bonifier plutôt qu'à abolir cette mesure. Je vais vous
citer ce que le Conseil de la science et de la technologie écrivait sur
ces incitatifs fiscaux. Parce que, essentiellement, le programme de
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, c'est un programme d'incitatif fiscal qui favorise du
capital de risque pour la petite et moyenne entreprise. C'a été
introduit par le gouvernement précédent en 1985, et on comprend
qu'il s'agit essentiellement de soutenir la capitalisation d'entreprises qui,
souvent, ont des difficultés avec des fonds de roulement qui
pèsent trop lourd sur leurs activités.
Alors, le Conseil de la science et de la technologie écrivait
ceci, et je cite: «Le gouvernement doit maintenir en force les incitatifs
fiscaux actuels pour l'ensemble des intervenants directs au financement des
investissements nécessités par les entreprises technologiques et
innovatrices, tout en changeant certaines de leurs modalités
d'application afin d'améliorer leur performance.» Et le rapport
Urgence Technologie ajoutait: «Le programme québécois des
sociétés de placements dans l'entreprise québécoise
? SPEQ, justement ce dont il est question avec le projet de loi qui est
devant nous ? est une source potentielle de fonds d'investissement,
utilisant à la fois l'épargne privée et la
fiscalité des entreprises à des fins incitatives. Établi
en 1985 dans le but premier d'inciter à la capitalisation des petites et
moyennes entreprises par des personnes formant des groupes financiers
restreints et intéressés à divers titres au
développement des entreprises concernées, ce programme, SPEQ,
représente toujours un outil exceptionnel de capitalisation des PME
technologiques à fort potentiel de croissance.» Et le rapport
poursuit sur les modifications qui doivent être incorporées au
programme afin de le rendre plus performant. Et là, M. le
Président, il faut comprendre que ces recommandations sont tout à
fait contraires aux dispositions qu'on retrouve dans le projet de loi, qui,
finalement, exclut le secteur de la recherche et développement
expérimental, sauf pour les laboratoires.
Ce que le Conseil de la science et de la technologie recommandait, et je
cite: «Le gouvernement doit notamment trouver et mettre en application
des mécanismes permettant l'admissibilité des compagnies de
gestion privées aux investissements SPEQ et le transfert des incitatifs
fiscaux qui en découlent à leur actionnaire principal lorsque
celui-ci s'engage à la fois financièrement ainsi que dans
certains dossiers liés au développement de l'entreprise.»
Et le rapport ajoutait: «Plusieurs investisseurs privés ont
créé dans le passé des sociétés de gestion
privées pour gérer leurs placements. Or, ces investisseurs
potentiels sont réticents à investir dans les SPEQ puisqu'ils
doivent payer le fisc dès qu'ils sortent de l'argent de ces compagnies
privées de gestion. Il en résulte un blocage à ce niveau.
En permettant l'admissibilité aux SPEQ des fonds de ces compagnies de
gestion-privées, on augmenterait les montants disponibles aux SPEQ, ce
qui renforcerait la santé financière de plusieurs petites et
moyennes entreprises et, partant, leur capacité d'innovation, sans
compter ? et là j'insiste, c'est toujours dans le rapport ?
qu'une partie appréciable de cet argent pourrait aller dans les
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise, recherche et développement.»
Alors, bien loin d'y arriver, au lieu d'améliorer les incitatifs
comme les SPEQ recherche-développement, on les coupe, là, M. le
Président. On exclut le développement et la recherche
expérimentale du secteur admissible à ces SPEQ. Alors, le
gouvernement va avoir à s'expliquer, certainement. Notre intention n'est
pas du tout, à ce moment-ci, de souscrire, je le dis tout de suite, M.
le Président, on va définitivement voter contre ce projet de loi
149, et c'est évident qu'en commission parlementaire, à
l'étude article par article, le ministre de l'Industrie et du Commerce
aura à nous expliquer comment il en est arrivé à exclure,
à abolir, en fait, l'admissibilité à la recherche et au
développement pour les SPEQ, sauf, là, pour une exception qui est
très restreinte.
Alors, M. le Président, d'autre part, ce projet de loi introduit
des honoraires et des tarifs lorsqu'une entreprise va demander un visa, et,
comme je le signalais, il s'agissait de demande de visa à la SDI pour
laquelle on prévoit jusqu'à un montant maximum de 1000 $ par
demande de visa. Et ça nous ramène à la situation
financière de la SDI.
Je vous parlais tantôt d'un protocole d'entente sur la gestion de
la SDI intervenu avec le ministère de l'Industrie, du Commerce, de la
Science et de la Technologie, la Société de développement
industriel du Québec et le Conseil du trésor. C'est en date du 24
avril dernier que ce protocole sur la gestion, pour la période
1993-1995, est intervenu. Et on y apprend notamment, M. le Président,
que le gouvernement a décidé ? et je vais citer des
dispositions qui sont incluses dans cette entente entre la SDI et le Conseil du
trésor ? d'aller compresser les activités de base et les
activités des programmes d'aide pour lesquelles il y a des enveloppes
fermées, comme, par exemple, les programmes d'aide aux quartiers
défavorisés de Montréal, comme, par exemple, les
programmes du plan d'action du Grand Montréal rendu public par l'actuel
premier ministre au moment où il était président du
Comité ministériel de développement du Grand
Montréal, et, également, a décidé de compresser les
nouveaux programmes qui étaient annoncés dans le discours du
budget 1992-1993.
Alors, il n'est pas surprenant, comme je vous le disais tantôt,
que l'argent annoncé sur papier, dans les discours du budget, dans les
annonces qui ont été faites ensuite par les ministres
concernés à l'occasion des communiqués sur les plans
d'action... il n'est pas surprenant, quand on lit, finalement, ce qui est
intervenu comme entente entre le Conseil du trésor et la SDI, de se
rendre compte que cet argent-là n'est pas dépensé, parce
que, une fois annoncé, ce qui avait été convenu,
finalement, M. le Président ? et je cite ? c'est de
réaliser, dans les activités de base et les activités non
récurrentes ? puis «non récurrentes», là,
j'insiste, c'est les quartiers défavorisés du Grand
Montréal, c'est le plan d'action du Grand Montréal, c'est les
nouveaux programmes du discours du budget 1992-1993 ? de nouvelles mesures
de réduction des dépenses pour un montant de 20 000 000 $ en
1993-1994 et un montant de 10 000 000$ en 1994-1995. Alors, vous vous rendez
compte, c'est 30 000 000 $, 30 000 000 $ que l'on exige de la SDI et du
ministère comme réduction des dépenses. Quand on dit
«réduction des dépenses», il faut comprendre à
ce moment-là qu'il s'agit de couper dans des programmes qu'on a fait
miroiter à la population comme allant l'aider.
En plus, M. le Président, de cette réduction de 30 000 000
$ en deux ans, il est aussi question... plus que question, il est aussi
exigé de la SDI ? et je cite ? que les prévisions de
dépenses soumises à l'Assemblée nationale ne soient pas
indexées. C'est donc dire qu'avec les augmentations qui, finalement,
génèrent un indice, là, que l'on sait être celui de
l'augmentation du coût de la vie, en plus de ces réductions de
dépenses, il n'y a pas d'indexation et, en plus, on exige des
crédits périmés de 5 500 000$ en 1993-1994 puis de 4 500
000$ en 1994-1995. C'est donc dire que c'est 10 000 000$ de crédits
périmés dans les programmes, plus 30 000 000 $ de
réduction, plus une non-indexation. Puis on va nous dire que la SDI est
là pour aider la petite et moyenne entreprise, comme le
prétendait le député d'Orford tantôt.
Ce n'est pas surprenant, l'an dernier, que la réduction de l'aide
accordée aux petites et moyennes entreprises ait tombé de 45 % en
un an. Puis le député d'Orford aurait encore, M. le
Président, la prétention de dire ici, à
l'Assemblée, que le gouvernement est du côté de la petite
et moyenne entreprise? C'est d'autant plus décourageant qu'on assiste,
et je le dis, M. le Président, à une diminution sans
précédent du nombre d'emplois au Québec. La population
active, celle engagée, là, dans l'emploi, diminue au
Québec. Et elle ne diminue pas que dans les régions que l'on
connaît être en difficulté. Dans la région de
l'île de Montréal et de l'île de Laval, le moteur
économique du Québec, la locomotive, prétend-on, dans
cette région, depuis quatre ans et demi, les statistiques nous
révèlent que le nombre d'emplois a chuté de 104 000.
L'île de Laval et l'île de Montréal comptent 104 000 emplois
de moins qu'il y a quatre ans et demi. C'est tout un deuxième mandat de
gouvernement, ça, M. le Président! D'autant plus que c'est
l'actuel premier ministre qui présidait le Comité
ministériel permanent de développement du Grand Montréal,
chargé du développement stratégique de la région.
Et ça ne va pas mieux dans le Québec tout entier. Pensez, par
exemple, que, au moment où il se créait, en Ontario, 117 000
emplois, depuis le creux de la récession, il y a deux ans, au moment
où il se créait, ailleurs au Canada qu'en Ontario, 135 000
emplois, depuis le creux de la récession, il y a deux ans, au
Québec, il s'est créé 32 000 emplois depuis avril, il y a
deux ans, pour un total de 284 000 emplois au Canada, à peine 32 000 au
Québec, M. le Président. (11 h 50)
Alors, quand le député d'Orford vient nous dire: C'est
continental, c'est mondial, et qu'il nous cite l'Amérique latine, et
qu'il nous cite l'Europe, et qu'il nous cite l'univers entier, d'abord, c'est
faux, M. le Président. Ce qui est mondial, c'est la restructuration de
l'économie, oui, mais pas le chômage, en tout cas pas le niveau
que ça a atteint ici.
L'automne passé, je vérifiais de près ses
chiffres... Parce que c'était l'alibi que le gouvernement se donnait,
que c'était mondial, qu'il fallait s'y résigner. C'est un mauvais
moment à passer. Une génération... Qu'est-ce que vous
voulez? On ne peut pas faire autrement. Vous savez, ça rejoint pas mal
le «on est né pour un petit pain» d'il n'y a pas très
longtemps. Alors, c'était mondial, prétendait le gouvernement. En
vérifiant, M. le Président, je me rendais compte, l'automne
passé, que, finalement, les sept pays les plus industrialisés
affichaient, en moyenne, un taux de chômage, en octobre dernier, de 7,2
%. Et c'était le Canada qui se classait dans le dernier peloton, comme
vous pouvez l'imaginez, au septième rang. Et, si on va plus large, les
23 pays membres de l'OCDE, ceux qui sont engagés dans le
développement des pays industrialisés, bien, le taux de
chômage, l'automne passé, faisait 7,8 %, M. le Président,
et ils trouvaient ça inquiétant, vraiment inquiétant.
Alors, vous vous rendez compte qu'avec le double au Québec on peut
constater que, si c'est
mondial, les changements structurels dans l'économie, le
chômage, lui, ne Test pas autant qu'ici.
Et la création d'emplois aussi, M. le Président. Parce que
ce que le gouvernement a prétendu, en faisant semblant avec le plan de
relance, c'est de faire semblant de créer des emplois qui ne durent pas
longtemps, de faire semblant d'inciter les gens au travail, sans créer
des vrais emplois. Et la réalité, c'est celle, finalement, des
statistiques; on ne peut pas les contester, puisque ce sont des statistiques
qui nous viennent de Statistique Canada, et c'est elles qui nous
révèlent que, finalement, le Québec traîne
lamentablement derrière même Terre-Neuve. Montréal est
rendue avec un taux de chômage plus élevé qu'à
Saint-Jean, Terre-Neuve. Et c'est évident que ça ne peut pas
durer.
Ça ne peut pas durer, M. le Président, et ça ne
pourra changer qu'en changeant de gouvernement. Il faut bien comprendre que
l'entêtement du gouvernement actuel dans des fausses mesures qui n'ont
pas comme résultat de soutenir la création d'entreprises, cet
entêtement-là, on en voit maintenant le résultat. Je
voudrais juste vous citer quelques chiffres obtenus suite au plan de
redressement appelé le plan Biron, suite à la pire des
récessions. La pire des récessions, c'est celle où on a vu
les taux d'intérêt s'élever jusqu'à 21 %. Ça,
demandez à n'importe qui dans notre société,
c'étaient les taux des «shylocks» sur le port de
Montréal, puis c'étaient les banques, puis les institutions
financières qui demandaient ces taux d'intérêt
là.
M. le Président, je veux faire référence au
programme Urgence-PME, programme mis en place par Rodrigue Biron, alors
ministre de l'Industrie et du Commerce du gouvernement du Parti
québécois. Je constate, chiffres à l'appui, que ce plan de
relance, appelé programme Urgence-petites et moyennes entreprises, a
injecté dans 800 entreprises, à l'époque, 17S 000 000 $ en
permettant de sauvegarder 35 000 emplois et puis que ce plan, finalement, avait
eu comme résultat un total de 52 entreprises en défaut de
paiement. Imaginez-vous que le filet qui avait été mis en place
avec le plan Biron pour permettre à l'entreprise de traverser la
tempête, l'adversité pendant la période difficile, eh bien,
il n'y en avait que 52 qui, finalement, n'avaient pas pu continuer, et c'est
finalement, pour le plan Biron d'Urgence-PME, un total de 2 000 000 $ que
ça aura coûté, ces 52 entreprises qui furent en
défaut de paiement. C'est finalement ce coup de pouce là au bon
moment, ce coup de pouce là à temps, le coup de pouce qui est
arrivé quand les entreprises traversaient la tempête, c'est ce
coup de pouce là que le gouvernement n'a pas donné à
temps, M. le Président. C'est d'autant plus regrettable qu'on en voit
les conséquences sur le chômage maintenant.
Alors, bien évidemment, nous allons, compte tenu des dispositions
qui se retrouvent dans le projet de loi 149, voter contre, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, Mme la
députée. Je fais remarquer à cette Assemblée que
nous sommes toujours à l'adoption du principe du projet de loi 149, Loi
concernant certains règlements pris en application de la Loi sur les
sociétés de placements dans l'entreprise
québécoise. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants? Alors, il n'y
a pas d'autres intervenants?
Mise aux voix
Le projet de loi est-il adopté? Le principe du projet de loi 149
est-il adopté? Il est adopté. Sur division. Très bien. M.
le leader du gouvernement.
Renvoi à la commission de l'économie et
du travail
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je fais donc motion, dans les
circonstances, M. le Président, pour que ledit projet de loi soit
déféré à la commission de l'économie et du
travail pour étude détaillée.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que cette motion
est adoptée? Adopté. Très bien. Je fais... M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Je vous demanderais, à
ce moment-ci, M. le Président, d'appeler l'article 9 du feuilleton.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, l'article 9 du
feuilleton, le principe du projet de loi 151, Loi modifiant la Loi sur la
qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives.
Est-ce que le principe de ce projet de loi est adopté?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Compte tenu des circonstances, ce
serait M. le député de La Prairie, M. Lazure, qui serait le
porte-parole de l'Opposition officielle en la matière. Je pense qu'il
serait plus avisé de donner le temps à Mme la
députée de Hochelaga-Maisonneuve de vérifier avec le
député de La Prairie s'il y a consentement à l'adoption du
principe dudit projet de loi et, pour lui donner ce temps, je vous demanderais
d'inverser l'ordre et d'appeler immédiatement l'article 19 du
feuilleton.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, est-ce que M. le
critique de l'Opposition officielle s'amène? Alors, nous appelons
l'article 19.
Mme Harel: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui.
Mme Harel: ...ce serait pour vous demander une suspension pour
quelques minutes, s'il vous plaît.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Nous
allons suspendre les travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 12 heures)
(reprise à 12 h 3)
Projet de loi 135
Prise en considération du rapport de la
commission qui en a fait l'étude détaillée et des
amendements transmis
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, l'Assemblée
reprend ses travaux. L'Assemblée prend en considération le
rapport de la commission de la culture sur le projet de loi 135, Loi sur le
Conservatoire de musique et d'art dramatique du Québec, ainsi que les
amendements transmis en vertu de l'article 252 du règlement par Mme la
ministre de la Culture et des Communications. Ces amendements sont
déclarés recevables. Y a-t-il des interventions sur ce rapport
ainsi que sur les amendements? Mme la ministre.
Mme Liza Frulla
Mme Frulla: Merci, M. le Président. Puisque nous reprenons
nos travaux après plus de deux mois d'interruption, vous me permettrez
sûrement, pour le bénéfice des membres de cette Chambre, de
rappeler les grands objectifs visés par le projet de loi 135, de
même que les différentes étapes du processus
législatif auxquelles il a été soumis jusqu'à
maintenant.
Le projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art
dramatique du Québec, déposé à l'Assemblée
nationale le 11 novembre dernier, vise deux objectifs principaux: traduire la
mission de l'institution en fonction de sa spécificité sur le
plan pédagogique et en fonction aussi du contexte des années
1990, et doter le Conservatoire d'une organisation plus souple, qui
réponde mieux aux exigences actuelles d'une maison d'enseignement. Il
convient aussi de rappeler, M. le Président, que le principe du projet
de loi 135 a fait l'objet d'un vote unanime des membres de l'Assemblée
nationale le 2 décembre dernier. Un consensus existe donc au sein de la
deputation pour reconnaître l'importance du Conservatoire dans la vie
culturelle du Québec et de ses régions. Ce consensus
s'étend aussi sur la nécessité d'actualiser sa mission et
de moderniser ses structures.
De plus, tel que je l'annonçais au moment de l'adoption du
principe du projet de loi 135, nous avons tenu une journée de
consultations particulières le 7 décembre dernier. Les membres de
la commission de la culture ont, à cette occasion, entendu des
représentants des élèves, des directeurs du Conservatoire
de même que des membres du Syndicat des professeurs. L'Union des
artistes, la Guilde des musiciens, le Comité Québec de
l'Association des orchestres canadiens ont également accepté
d'exposer leur point de vue sur la réforme proposée.
Ces consultations ont donné lieu à des échanges
intéressants, qui ont contribué à enrichir la
réflexion des membres de la commission de la culture lors de
l'étude article par article du projet de loi, qui a débuté
le 8 décembre pour se terminer le 16 décembre dernier. Pour des
raisons que j'ai énoncées publiquement, cependant, le projet de
loi 135 n'a pu être adopté avant l'ajournement de nos travaux.
Par ailleurs, grâce à la collaboration de tous les membres
de cette commission, nous avons apporté des amendements au projet de loi
afin de tenir compte des réalités et des préoccupations
exprimées par les élèves, le personnel du Conservatoire et
les milieux artistiques. Tout en respectant les grands principes qui ont
guidé l'élaboration du projet de loi 135, ces amendements
viennent bonifier le projet de loi qui devait rallier tous les intervenants qui
ont à coeur l'avenir du Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec.
Pour le bénéfice des membres de cette Chambre, vous me
permettrez, M. le Président, de souligner les principaux amendements qui
ont été apportés au projet de loi 135. La composition du
conseil d'administration est passée de 15 à 19 membres, de
façon, notamment, à s'assurer d'une représentation
régionale, à renforcer la participation des professeurs et des
étudiants, à favoriser un meilleur équilibre dans la
représentation des deux secteurs d'activité concernés,
à savoir la musique et l'art dramatique. La composition du comité
exécutif a également été précisée en
fonction des mêmes objectifs.
Au chapitre des objectifs et pouvoirs et à la demande de
plusieurs intervenants, nous avons reformulé le mandat qui sera
confié au nouveau Conservatoire. Le projet de loi 135, tel
qu'amendé, statue sans aucune équivoque que la mission
première du Conservatoire consistera à administrer et à
exploiter, dans diverses régions du Québec, des
établissements d'enseignement de la musique et de l'art dramatique
destinés à la formation professionnelle d'interprètes et
de créateurs et aussi à leur perfectionnement.
Dans le secteur de la musique et en fonction des besoins
régionaux, le Conservatoire devra aussi favoriser une formation initiale
de qualité et susciter la présence et la vitalité
d'organismes essentiels au monde de la musique dans chacun des milieux
concernés.
Au chapitre des organes consultatifs prévus dans le projet de loi
135, la composition des commissions des études a été revue
de façon à élargir le bassin des membres et à
laisser aux membres en fonction la prérogative de désigner le
président. Dans le secteur de la musique, des précisions ont
été apportées, afin de s'assurer d'une
représentation équitable des divers établissements qui
forment le réseau.
En ce qui concerne les conseils d'orientation prévus à
l'intérieur de chaque établissement du Conservatoire, les
amendements apportés auront essentiellement pour effet de favoriser
l'interaction souhaitée avec le milieu. Ces conseils joueront aussi
d'une latitude plus grande dans le choix de leurs membres, afin de s'ajuster
aux spécificités de leur environnement respectif.
Les amendements que nous proposons, M. le Président,
précisent et élargissent leur champ d'intervention, tout en
rendant possible une délégation de fonctions
et de pouvoirs du conseil d'administration du Conservatoire en faveur
des conseils d'orientation de chaque établissement.
Enfin, le projet de loi 135 a été amendé en
commission parlementaire pour identifier les articles dont l'entrée en
vigueur était requise pour assurer une transition harmonieuse entre le
Conservatoire actuel et son nouveau statut.
Quant aux amendements que j'ai déposés hier, M. le
Président, ils sont essentiellement de nature technique et ont pour
objet ou bien de s'ajuster au décret modifiant l'organisation
administrative du gouvernement ou, encore, de s'arrimer à la
récente refonte des lois du Québec entrée en vigueur le
1er mars 1994.
Enfin, en ce qui concerne l'amendement de l'article 94, il fixe,
à la date de la sanction de la loi, l'entrée en vigueur des
articles nécessaires à la transition des responsabilités
actuelles du ministère vers la nouvelle corporation.
En terminant, M. le Président, je remercie tous les membres de la
commission de la culture et plus spécifiquement le député
de Gouin de sa collaboration. Et j'espère, bien sûr, que cette
collaboration se poursuivra lors de la dernière étape de nos
travaux, c'est-à-dire celle de l'adoption de ce projet de loi. Merci, M.
le Président.
Une voix: Bravo! (12 h 10)
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, je suis prêt
à reconnaître un autre intervenant, M. le député de
Gouin.
M. André Boisclair
M. Boisclair: M. le Président, vous me permettrez à
mon tour, d'abord, de vous offrir mes félicitations pour votre
récente élection. Je suis heureux de voir que vous occupez ce
siège, et je suis convaincu que vous occuperez ces fonctions dignement,
d'ailleurs, comme tous les membres de l'Assemblée souhaitent le faire.
Et je tiens, d'ailleurs, à cet égard, à vous assurer de
mon entière collaboration.
Ce n'est sans doute pas surprenant, M. le Président, que nous
soyons, alors que nous reprenons nos travaux, en train de discuter du rapport
de commission du projet de loi 135. Pour les raisons que les membres de cette
Assemblée connaissent, nous n'avons pu, au moment de l'intermission de
nos travaux, en décembre dernier, aller au bout du processus d'adoption
du projet de loi 135 pour des raisons qui ont été bien
évoquées, rendues publiques, largement débattues, et que
même la ministre, tout à l'heure, nous rappelait.
L'objectif, aujourd'hui, donc, n'est pas de revenir sur les raisons pour
lesquelles nous n'avons pu, en décembre dernier, adopter le projet de
loi, mais plutôt d'essayer, alors qu'il est le temps de discuter du
rapport de la commission de la culture, qui a étudié article par
article le projet de loi 135... L'objectif serait donc de revenir sur la
façon dont les débats se sont déroulés en
commission parlementaire, rappeler aussi aux parlementaires de cette Chambre
l'importance des travaux et des amendements qui ont été
apportés en commission parlementaire, mais surtout porter un jugement
général sur la façon dont le gouvernement et la ministre
en tête se sont comportés dans l'étude de ce projet de loi.
Parce que, s'il est révélateur d'une chose, ce projet de loi,
c'est bien sur une certaine forme d'improvisation politique qui nous a
menés souvent à l'impasse et qui, si cette improvisation
persiste, risque de causer de graves problèmes à l'adoption du
projet de loi 135. Ces mots peuvent surprendre ceux qui n'ont pas suivi les
débats en commission parlementaire, mais j'aimerais, M. le
Président, m'appuyer sur un certain nombre de faits pour
démontrer leur véracité.
D'abord, quel était le ton, le climat au moment de l'adoption du
principe, donc de la première étape de l'adoption du projet de
loi, lorsque, en décembre dernier, la ministre intervenait pour la
première fois pour déposer ce projet de loi? Après nous
avoir fait un bref historique des conservatoires, dont la création
remonte au début des années quarante ? 1942 pour être
bien précis ? donc, après nous avoir fait la genèse
des conservatoires et nous avoir expliqué de quelle façon le
gouvernement s'est comporté sur ces questions, la ministre nous
présentait avec beaucoup de fierté son projet de loi, qui,
disait-elle, était le fruit de longues négociations autant avec
les gens du milieu, mais surtout avec les principaux intéressés,
à savoir les représentants des neuf différents
conservatoires, de leurs représentants, de leur direction et des
élèves. Donc, la ministre était convaincue qu'elle
déposait devant cette Assemblée un travail qui avait fait
consensus dans le milieu, qui avait fait consensus auprès des directeurs
de conservatoire, qui avait fait consensus auprès des
élèves, et qui, surtout, avait fait consensus dans le monde
intéressé par cette question de la formation professionnelle des
artistes. C'était ce que la ministre prétendait être la
réalité.
Cependant, il nous aura fallu quelques jours et quelques coups de
téléphone pour nous apercevoir que la réalité
était beaucoup plus complexe que celle que la ministre
prétendait, en ce sens que, bien loin de reprendre un semblant de
consensus, que bien loin d'avoir fait l'objet de consultations, comme la
ministre prétendait que ça avait été le cas,
l'Opposition s'est rapidement aperçue du peu de profondeur du discours
de la ministre et que, essentiellement, ce consensus n'existait que dans son
esprit, M. le Président.
Bien sûr, les directions de conservatoire avaient
été associées à la réforme. Quoi de plus
normal, M. le Président, que l'ensemble des neuf directeurs, des neuf
établissements ait été associé à la
démarche! Bien sûr, quoi de plus normal que les gens de la
direction de son ministère qui sont responsables de ce dossier aient
été consultés! Quoi de plus normal! Mais, lorsqu'on va un
peu plus loin, alors que la ministre invoquait devant nous l'urgence d'adopter
ce projet de loi parce que le milieu le réclamait, lorsqu'on va un peu
plus loin, M. le
Président, on s'aperçoit que la réalité est
tout autre. C'est pour cette raison que le travail en commission parlementaire
a été particulièrement utile, parce qu'il nous a permis,
d'une part, de faire cette distinction entre le consensus, qui, je le
répète, n'existait que dans la tête de la ministre, et la
réalité. Nous l'avons fait de quelle façon, M. le
Président? Bien, tout simplement en invitant des gens, comme le
règlement nous le permet, à venir se présenter devant nous
en commission parlementaire pour nous faire part de leur point de vue. C'est ce
qu'on appelle, dans notre jargon, des auditions particulières qui nous
auront permis d'entendre non loin d'une dizaine, six ou sept groupes, qui, les
uns après les autres, sont venus nous dire que, malgré
l'importance qu'ils accordent à une réforme,
particulièrement de la mission des conservatoires, malgré
l'importance qu'ils accordent à cette institution et leur volonté
d'en assurer la pérennité, malgré leur attachement, donc,
à cette institution qui a fait ses preuves depuis le temps qu'elle
existe, malgré tout ça, les gens sont venus nous dire: Attention!
Danger! avec le projet de loi 135. Les objectifs très
généreux sur lesquels tout le monde s'entend, ce n'est pas
ça qui nous divise d'un côté et de l'autre de la Chambre;
mais, malgré ces objectifs généreux, ce discours
généreux, la réalité est tout autre.
Alors, qui sont-ils, ceux qui sont venus nous parler en commission
parlementaire? L'Union des artistes. Le président de l'Union des
artistes est venu nous dire que d'aucune façon il avait pu se prononcer
sur le contenu du projet de loi 135. C'était la première fois, en
commission parlementaire, à la demande de l'Opposition, M. le
Président, qu'il pouvait s'exprimer sur le projet de loi. Beau
témoignage, M. le Président, de la façon avec laquelle le
gouvernement libéral a procédé.
En plus de l'Union des artistes, les étudiants sont venus nous
dire: Danger! Les frais de scolarité, on serait prêts à en
payer, mais, de grâce, assurez-vous que, lorsqu'on sort des
conservatoires, notre diplôme puisse être reconnu. Ceux qui
connaissent un peu la question savent bien qu'un étudiant qui sort d'un
conservatoire sort avec un prix, un premier prix ou un second prix, avec un
diplôme qui est signé de la main de la ministre de la Culture et
non pas de la main de la ministre ou du ministre, en ce moment, de
l'Éducation ou de l'Enseignement supérieur. Et ça cause de
graves problèmes de reconnaissance des diplômes,
particulièrement pour ceux et celles qui souhaitent se retrouver dans
l'enseignement et qui sont pris, pour faire reconnaître leur
diplôme, à procéder par une démarche d'exception en
demandant au ministère de l'Éducation ou de l'Enseignement
supérieur de reconnaître leur diplôme. Donc, les
étudiants sont venus nous faire part de leurs nombreuses réserves
à l'égard du projet de loi.
L'Association des orchestres canadiens, la Guilde des musiciens. La
Guilde des musiciens est venue nous dire: Attention! Danger! Oui, nous
souscrivons à une réforme de la mission des conservatoires; oui,
elle est importante; oui, il faut la mettre à jour parce que le milieu
n'est plus celui qu'il était en 1940; oui, la mis- sion de Wilfrid
Pelletier, qui a fondé ce Conservatoire, est nécessaire, elle est
pertinente plus que jamais, mais il faut un peu dépoussiérer
cette institution. Donc, cette association est venue aussi nous faire des mises
en garde importantes.
Le Syndicat des professeurs de l'État du Québec aussi est
venu faire de nombreuses représentations, M. le Président, non
seulement en commission parlementaire mais aussi dans les corridors de notre
Assemblée, de cet hôtel du peuple. Souvent, jusqu'aux petites
heures du matin, il n'était pas rare de les rencontrer en train de nous
refiler quelques documents et quelques points de vue.
Tout ça pour dire, M. le Président, que malgré le
fait que ça fait longtemps qu'on discute, au ministère de la
Culture, de cette réforme des conservatoires, force nous est de
constater que le processus dans lequel nous étions engagés en
décembre dernier était un processus pour le moins
improvisé. Je vous rappelle tout simplement, M. le Président, que
le projet de loi a été déposé la toute
dernière journée à laquelle nous pouvons déposer un
projet de loi pour qu'il soit adopté à la même session. Il
aurait été de beaucoup préférable qu'on
démontre plus de respect à l'endroit de cette institution et de
procéder de façon autrement plus claire, plus transparente, plus
riche dans son contenu que celle qui a été retenue.
Donc, malgré les réserves que j'émets, M. le
Président, l'Opposition se présente ? et, la ministre, je
l'en remercie de le souligner ? l'Opposition se présente de bonne
foi en commission parlementaire avec comme politique de travailler à
l'amélioration du projet de loi. Et je pense qu'il faut parfois le
rappeler, au-delà de nos débats plutôt partisans, M. le
Président, vous en conviendrez, que nous voyons et que nos citoyens
perçoivent à l'occasion de la période de questions,
à l'occasion du travail en commission parlementaire, eh bien, vous savez
comme moi, pour avoir siégé pendant plusieurs années en
commission parlementaire, que le ton est certes plus harmonieux et plus propice
à faire progresser les choses. . (12 h 20)
Donc, finalement, l'Opposition n'a pas voulu adopter la politique du
pire et tout simplement fermer ses livres et dire: Bien, ce projet de loi 135,
il n'est pas bon, nous n'en voulons pas. Nous souscrivions, nous aussi,
à notre façon, à cette importance de remettre à
jour la mission des conservatoires. Donc, c'est avec un esprit très
ouvert que l'Opposition, les membres de la commission de la culture qui
représentent l'Opposition officielle se sont donc
présentés en commission parlementaire avec cette réelle
volonté de travailler à l'amélioration du projet de loi,
voyant dans cette démarche le prolongement, M. le Président, de
notre sens des responsabilités et voyant là aussi un travail
honnête qui devait être fait et qui nous a animés tout le
long de cette commission.
Nous l'avons fait même dans des circonstances inhabituelles, en
souscrivant à des séances de travail
privées, pour permettre ? au-delà même de la
procédure qui parfois en commission peut être un peu lourde, qui
vient souvent alourdir les dialogues ? de travailler à
l'amélioration et à la bonification du projet de loi, toujours
dans cet esprit de bonifier le projet de loi 135.
Donc, de bonne foi, M. le Président, l'Opposition s'est
présentée à l'étude du projet de loi 135 en
commission parlementaire. La ministre de la Culture, tout à l'heure,
nous faisait part des principaux amendements qui ont été
adoptés en commission parlementaire. Je la remercie d'en avoir fait la
nomenclature. Ça m'évitera de le faire. Mais tout simplement,
pour qu'on puisse comprendre le sens de mon intervention dans les minutes qui
suivent, j'aimerais rappeler quelques éléments importants sur
lesquels je pense qu'il faut insister.
Le premier de ceux-là et des amendements qui ont
été longuement discutés en commission parlementaire a
trait à la mission des conservatoires. Nous avons fait en sorte
qu'au-delà de la mission prévue dans le projet de loi initial,
qui consistait, bien sûr... Et je voudrais vous retrouver la
référence exacte, M. le Président, pour être bien
sûr. C'est à l'article 18 du projet de loi. Au lieu de tout
simplement dispenser de la formation professionnelle, ou de susciter et de
favoriser une formation initiale de qualité, de susciter et de favoriser
dans le milieu la présence d'organismes essentiels à la vie
musicale, dans des domaines qui n'étaient que reliés aux domaines
de la musique et de l'art dramatique, nous avons, avec le consentement de la
ministre, élargi considérablement le Conservatoire pour en faire
un véritable lieu de ralliement dans chacune des régions pour
susciter un véritable dynamisme, non seulement le susciter, mais voir
aussi à le développer.
Vous comprenez que, lorsqu'on discute de la mission, chaque terme a un
sens, puisque c'est à partir de cette mission que les autres articles du
projet de loi se greffent, mais surtout parce que c'est à partir de
cette mission que le gouvernement accordera les budgets. C'est sur la foi de la
mission de l'institution que le gouvernement consacrera les crédits
qu'il juge opportuns au Conservatoire.
Donc, élément important, élément de fond sur
lequel nous sommes intervenus et qui, je pense, reprend une certaine
volonté des gens qui sont venus témoigner en commission
parlementaire, que ce soit la Guilde des musiciens, que ce soit l'Union des
artistes, même les étudiants ou le Syndicat des professeurs,
chacun à leur façon souhaitait qu'on élargisse la mission
des conservatoires. Et je pense qu'à cet égard, de façon
tout à fait non partisane, et bien soucieux de l'institution et soucieux
aussi dans les domaines de la culture de maintenir un débat à un
certain niveau, nous avons, je pense, correctement modifié l'article
18.
Autre élément qui a retenu notre attention en commission
parlementaire, c'est sur l'organisation même de cette nouvelle
institution. Les membres de cette Assemblée savent bien que les
conservatoires étaient traités au sein du ministère de la
Culture comme une direction, et qu'à cet égard ils étaient
véritablement intégrés à la fonction publique et
à l'organisation interne du ministère.
Un des objectifs du projet de loi, et sans doute le plus important,
consistait à sortir cette institution de l'organisation du Conservatoire
et de créer un conseil d'administration indépendant où
bien sûr la majorité des gens serait nommée par la
ministre, mais certainement sortir cette institution qui avait besoin d'un peu
d'air, M. le Président, qui avait besoin de conserver ses surplus, qui
avait besoin de plus d'autonomie dans sa gestion quotidienne, qui sentait dans
l'administration de chaque jour, le poids de la loi, particulièrement,
de l'administration financière. Il nous apparaissait important de
créer une organisation à part du ministère de la Culture
pour permettre une plus grande autonomie.
Ceci étant dit, bien, une fois qu'on a dit ça, il faut
voir de quelle façon ça s'articule. Le projet de loi
prévoyait une organisation, il faut le dire, plutôt
centralisée alentour d'un conservatoire, d'un conseil d'administration,
qui maintenant est composé de 17 membres, avec un conseil d'orientation
pour chacun des neuf établissements. Et ce réseau serait
appuyé par deux conseils, deux commissions, une commission
d'étude en art dramatique, puisqu'il y a deux conservatoires d'art
dramatique, et aussi une commission d'études musicales pour les sept
autres conservatoires de musique. Bien sûr, à travers cet
organigramme, nous retrouvions un directeur des études et un directeur
général du conservatoire.
Ce que nous avons tenté de faire, je pense, dans un certaine
mesure ? je dois vous dire que là-dessus nous ne sommes pas tout
à fait satisfaits sur la façon dont nous avons conclu nos travaux
? nous avons tenté, pour le moins, de faire en sorte que chaque
milieu, chaque endroit où un conservatoire existe puisse avoir
davantage, je ne dirais pas d'emprise, mais davantage de contacts avec les gens
du milieu. Le souhait que l'Opposition officielle a exprimé, c'est qu'il
s'entreprenne un véritable dialogue entre l'institution, entre
l'établissement qu'est le Conservatoire de musique, qu'il soit à
Hull, qu'il soit à Rimouski, qu'il soit à Chicoutimi, à
Trois-Rivières, ou à Montréal ou à Québec,
que puisse s'installer un véritable dialogue entre les dirigeants du
Conservatoire et le milieu.
C'est ainsi qu'il nous apparaissait, par exemple, tout à fait
absurde, M. le Président, que la discipline et l'application du
règlement pédagogique soient de la responsabilité d'un
grand conseil d'administration centralisé à Montréal ou
à Québec, composé de 17 personnes. Comprenez, M. le
Président, que c'est tout à fait à l'en-contre de cette
volonté maintes fois exprimée par l'Opposition officielle, par le
chef de l'Opposition officielle et par ceux et celles... Je vois ici mon
collègue le député François Gendron, qui, à
plusieurs reprises, est intervenu sur cette question de
décentralisation, et c'est entre autres sur la foi de ses bons conseils
que nous avons pris acte de dire: Bien, finis les programmes mur à mur,
fini de gérer un conservatoire à Chicoutimi comme on en
gère un à Rimouski, fini de gérer le Conservatoire de
Québec comme on gère celui de Montréal.
Donc, c'est ainsi que les amendements de l'Opposition ont pu reprendre
et, je pense, pousser plus loin le souhait exprimé par la ministre, qui
souhaitait faire de ce réseau des neuf conservatoires ce qu'elle a
à plusieurs reprises appelé un réseau à
géométrie variable, pour que puisse se développer dans le
sens de la politique culturelle, dans le sens aussi du rapport Arpin, permettre
à chaque milieu de développer ses régionalis-mes, de
développer ses particularités, qui, dans bien des cas, ne sont
pas les mêmes d'une région à l'autre. Vous comprenez que,
si ce n'est que dans votre... Dans votre circonscription, M. le
Président, il n'y aurait pas d'orchestre symphonique dans votre
région si ce n'était de la présence du Conservatoire, et
je pense que vous appréciez ? je vous vois, je vois vos signes de
tête ? vous appréciez certainement cette institution que
vigoureusement, à chaque jour, vous défendez. Mais tout ça
pour dire qu'il nous apparaissait important de véritablement bâtir
un réseau à géométrie variable.
Je vous disais, tout à l'heure, que nous aurions souhaité
aller plus loin dans cette réforme, parce que les conseils d'orientation
qui accompagneront chacun des établissements, bien qu'ils aient
été élargis dans leur composition, chaque conservatoire,
comme le conservatoire de votre circonscription, M. le Président... La
direction pourra bien s'associer à des gens qu'elle souhaitera
opportuns. Peut-être même un jour, M. le Président,
siégerez-vous au conseil d'orientation du Conservatoire de Rimouski. En
tout cas, si tel était le souhait des gens du milieu, vous pourriez
l'être. Si, par exemple, les gens de votre milieu souhaitaient s'associer
à des gens du milieu des affaires ou de généreux
mécènes qui participent à la mission des conservatoires,
ils pourraient le faire. Si les gens veulent s'associer à des gens du
milieu de l'éducation, que ce soient des représentants de
commission scolaire, de cégep ou d'université, bien, ils pourront
le faire. (12 h 30)
Donc, malgré le fait que nous ayons élargi la composition
du conseil d'orientation qui accompagne le Conservatoire dans sa mission, il
nous apparaît, et nous l'avons dit... Et là-dessus je tiens
à souligner et à saluer le travail de ma collègue et
députée de Chicoutimi, Jeanne Blackburn, qui, à plusieurs
reprises, est intervenue sur cette question. Et je remercie, d'ailleurs, la
ministre d'avoir souligné l'à-propos de ses recommandations,
parce que c'est sans doute la députée de Chicoutimi qui, mieux
que n'importe qui d'autre, est venue nous dire l'importance de
développer les pouvoirs de chacun de ces établissements pour
qu'ils puissent vraiment travailler à développer le
régionalisme de chacun des milieux.
Quand je vous dis que j'aurais souhaité aller plus loin,
concrètement, qu'est-ce que ça veut dire? Je pense qu'il aurait
été opportun que l'embauche des professeurs, des enseignants dans
chacun des conservatoires, puisse être faite par le Conservatoire, par
l'établissement et non pas par le conseil d'administration, qui sera
plus lourd, plus centralisé et où les besoins seront toujours
plus difficiles à véhiculer. On préfère toujours
prendre une décision directement que de demander à quelqu'un de
prendre une décision à notre place, par souci
d'efficacité, par souci aussi, je dirais, de proximité. Je pense
qu'il aurait été pertinent d'aller plus loin dans cet effort,
dans cette volonté de renforcer les conseils d'orientation dans chacun
des milieux.
Un autre exemple aussi, M. le Président, sur cette question des
budgets, c'est le conseil d'administration du Conservatoire qui aura la
responsabilité d'établir le plan d'effectifs de chacun des
conservatoires et qui devra le faire approuver par le gouvernement. Il est
assez étrange de voir qu'il y a beaucoup de bruit dans cette Chambre, M.
le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): À l'ordre, s'il
vous plaît! MM. les députés! Il faut entendre le
député de Gouin s'exprimer. M. le député, si vous
voulez continuer, s'il vous plaît.
M. Boisclair: M. le Président, pour le
bénéfice de mes collègues, je ne tiens pas
nécessairement à ce qu'ils m'écoutent, mais j'aimerais
tout simplement être sûr que la ministre, elle, m'entende.
Mais je reviens donc à cette idée, M. le Président.
Il est assez étrange que, dans cette volonté de
décentralisation, qui est pourtant celle que la ministre a
témoignée à plusieurs reprises, on se garde encore, ici et
là, des poignées pour encadrer, pour contrôler, comme s'il
y avait encore un certain nombre de réflexes jacobins en dedans de nous
qui nous empêchaient d'aller au bout de cette logique de la
décentralisation. Et je pense que cet article du projet de loi qui,
justement, reconnaît que le gouvernement doit approuver le plan
d'effectifs nous apparaît assez étrange.
Nous souhaitons qu'à travers tout ça puisse
s'élaborer une véritable dynamique où c'est
l'établissement qui va venir défendre son budget au Conservatoire
et que le Conservatoire va s'en faire le porte-parole auprès du
gouvernement, qui, lui, consentira une enveloppe, mais qu'au sein de cette
enveloppe les gens du Conservatoire puissent, entre eux, décider de
quelle façon ils répartissent cet argent. On ne peut pas, tout
simplement, M. le Président, dire: On est d'accord avec la
décentralisation. On applique de belles réformes
généreuses, mais, d'un autre côté, garder toutes
sortes de poignées dans les projets de loi qui font que les souhaits
exprimés ne sont pas ceux qui se traduisent dans la
réalité.
Autre élément et autre point d'achoppement, M. le
Président, qui est celui de la reconnaissance des diplômes. Les
étudiants, la Guilde des musiciens, l'Union des artistes, les uns
après les autres sont venus nous dire qu'un des graves problèmes
de cette institution était la reconnaissance des diplômes. Je l'ai
rapidement abordé tout à l'heure en rappelant que c'est la
ministre de la Culture qui décernait un prix, premier prix,
deuxième prix, et que c'est elle qui signait le diplôme de sa main
sans que, pour autant, ce diplôme soit reconnu dans le réseau
d'éducation.
La ministre souhaite corriger cette situation. Les parlementaires qui
ont travaillé à la commission de la culture le souhaitent aussi.
Mais ce qu'on s'aperçoit, c'est que ce n'est pas parce que nous allons
écrire quelques belles phrases dans un projet de loi que, pour autant,
la réalité va changer. Et je me permets de vous expliquer ce que
je veux dire par là, M. le Président. Nous disons, à
l'article 20 du projet de loi, que «le régime des études
collégiales établi en vertu de l'article 18 de la Loi sur les
collèges d'enseignement général et professionnel
s'applique à l'enseignement collégial que peut dispenser, avec
l'autorisation du ministère de l'Enseignement supérieur et de la
Science, le Conservatoire, la mention de Conservatoire se substituant à
celle de collège.» Finalement, si les gens de l'Enseignement
supérieur y consentent, le Conservatoire pourra décerner des
diplômes signés de la main du ministre, avec ce que ça
comporte comme reconnaissance dans le milieu. Sauf que ce n'est pas parce que
cette intention est indiquée dans le projet de loi que, pour autant, il
y a entente entre le ministère de la Culture et le ministère de
l'Enseignement supérieur.
La ministre disait: Bien, ce n'est pas à moi à
négocier cette entente-là; ce sera au Conservatoire, une fois
qu'il sera formé, de signer ce genre d'entente. Cependant, c'est
repousser, pour nous, un peu loin l'importance d'une entente comme
celle-là. À tout le moins, nous aurions souhaité avoir des
lettres d'intention qui-auraient pu être échangées entre la
ministre de la Culture et le ministre de l'Éducation et de
l'Enseignement supérieur pour que, véritablement, un des
éléments majeurs qui ont amené les parlementaires à
étudier le projet de loi 135, qui ont amené la ministre à
déposer ce projet de loi, soit autre chose que de simples... ne demeure
pas tout simplement au niveau des intentions, mais puisse véritablement
se traduire dans la réalité.
La ministre est tellement consciente de la fragilité de
l'interprétation de l'article 20 qu'elle a même, à
plusieurs reprises, affirmé que d'aucune façon le gouvernement ne
consentira à imposer des frais de scolarité aux
élèves qui fréquentent les conservatoires tant et aussi
longtemps que cette reconnaissance des diplômes ne sera pas acquise par
l'Enseignement supérieur et la Culture. C'est donc dire toute la
fragilité que la ministre, implicitement, reconnaît aussi dans ce
projet de loi.
Donc, je pourrais, à bien des égards, continuer cette
réflexion, vous parler, entre autres, de la nomination du personnel et
d'autres éléments, mais je pense que la ministre, tout à
l'heure, a bien rappelé les principaux amendements adoptés en
commission parlementaire et je tenais tout simplement à mettre l'appui,
l'emphase sur un certain nombre de ces amendements qui nous apparaissent
être au coeur de nos préoccupations.
J'aurai cependant, en conclusion, M. le Président, un dernier mot
pour le bénéfice des membres de cette Assemblée. Je
voudrais partager avec vous ce qui est plus une impression, ce qui est plus une
émotion qu'un fait, qu'une réalité que je peux
vérifier dans le concret, dans le tangible, sur papier ou d'une autre
façon, en disant aux membres de cette Assemblée de faire bien
attention lorsqu'ils étudieront en détail le projet de loi 135.
Tout au long de ces débats, que ce soit ici dans cette Chambre, que ce
soit en commission parlementaire, nous avons tous, à notre façon,
ressenti un certain malaise à cause du non-dit, que ce soit par des
réponses insatisfaisantes, que ce soit par des sujets que nous n'avons
pas abordés, non pas parce qu'il y a eu de la mauvaise foi d'un
côté ou de l'autre, mais il y a des enjeux importants sur la
gestion même, sur la gestion interne de ces établissements, sur
l'avenir de chacun d'entre eux, sur ce qui est arrivé, sur ce qui se
passe dans ces institutions, depuis plus de 10 ans. Nous n'avons pu, en
commission parlementaire, aborder ces questions qui m'apparaissent être
au coeur de plusieurs des préoccupations des membres de cette
Assemblée. (12 h 40)
Et je ne veux pas blâmer qui que ce soit, là, dans cette
réalité, mais, tout simplement, au-delà des objectifs
très généreux et sur lesquels l'Opposition a eu le loisir
de s'exprimer, que la ministre a, je pense, aussi bien défendus, il y a
des craintes importantes qui demeurent dans le milieu, qui ont, je dois
cependant le dire, été alimentées par l'attitude quelque
peu cavalière de la ministre dans ces débats. Je voudrais dire
qu'à quelques reprises les interventions, et ses interventions, ont
été malheureuses; malheureuses à l'endroit de l'Opposition
officielle, malheureuses à l'endroit des enseignants qui, à
chaque jour, oeuvrent dans ces institutions et qui seront des partenaires
essentiels parce que, quelle que soit la réforme, aussi bien
écrite qu'elle soit, malgré les bonnes intentions, c'est sur eux
que reposera, M. le Président, cette réforme.
Nous ne pouvons pas adopter tout simplement un ton cavalier. Et, alors
que nous avons eu quatre ou cinq mois de répit depuis le mois de
décembre, trois mois exactement, M. le Président, il est
inacceptable de voir qu'aucun dialogue n'a été repris, ni avec le
SPEQ, ni avec la Guilde des musiciens, ni avec l'Union des artistes. Aucun,
aucun ? je termine là-dessus, M. le Président ? des
organismes qui sont venus en commission parlementaire n'a eu de nouvelles de la
ministre. Nous souhaitions un temps de répit, nous croyions que la
ministre allait s'en servir à bon escient. Nous sommes aujourd'hui
devant l'évidence: plus de dialogue, la ministre a rompu les ponts, et,
pour l'avenir des conservatoires, pour l'avenir de cette réforme,
ça nous apparaît, M. le Président, plus ou moins
triste.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député. Est-ce que, Mme la ministre, vous voulez prendre un temps
de réplique ou... Ça va? Très bien.
Mise aux voix des amendements de la ministre
Les amendements proposés par Mme la ministre de la Culture et des
Communications sont-ils adoptés?
Des voix: Adopté.
Mise aux voix du rapport amendé
Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Le
rapport, tel qu'amendé, de la commission de la culture portant sur le
projet de loi 135, Loi sur le Conservatoire de musique et d'art dramatique du
Québec, est-il adopté?
Une voix: Sur division.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté sur
division. M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.
Compte tenu des propos du critique de l'Opposition officielle en matière
de culture, on pourrait à ce moment-ci, compte tenu des bonnes
dispositions qui semblent l'animer, solliciter le consentement qui est
absolument nécessaire de l'Opposition officielle pour procéder,
compte tenu de l'excellence des discours qui ont été
prononcés de part et d'autre, à l'adoption comme telle du projet
de loi, si l'Opposition veut bien y consentir.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Gendron: Je voudrais vous indiquer que la bonne collaboration
de l'Opposition existera, mais pour suivre les étapes prévues.
Alors, aujourd'hui, c'était l'adoption du rapport. Si le leader veut
faire l'adoption du projet de loi un peu plus tard, on sera aussi
collaborateurs que possible. Donc, il n'y a pas consentement pour ne pas suivre
les étapes prévues.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Donc, il n'y a pas
consentement. Alors, nous procéderons à un autre article de
l'ordre du jour. M. le leader.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Simplement pour indiquer à
mon bon ami, le leader adjoint de l'Opposition, que, souvent, avec la
collaboration de l'Opposition officielle, les étapes ont
été franchies plus rapidement pour que les clientèles en
bénéficient plus rapidement. C'était là le seul but
de mon propos. Dans les circonstances, M. le Président, je vous
demanderais d'appeler l'article 9 du feuilleton.
Projet de loi 151 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien.
À l'article 9, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune propose
l'adoption du principe du projet de loi 151, Loi modifiant la Loi sur la
qualité de l'environnement et d'autres dispositions législatives.
Je suis prêt à entendre un premier intervenant. M. le
ministre.
M. Pierre Paradis
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.
Très brièvement, il s'agit d'un projet de loi qui découle
de la politique de gestion intégrée des déchets du
ministère de l'Environnement qui a été introduite en 1987,
comme vous le savez, M. le Président, par mon
prédécesseur, M. Clifford Lincoln. Cette politique avait fait
l'objet de moult consultations auprès de l'ensemble des intervenants
socio-économiques, des partenaires, tel le monde municipal. Cette
politique, qui vise la réduction à la source, la
réutilisation, la revalorisation et l'élimination des
déchets, a été resoumise à des consultations des
groupes environnementaux, des municipalités, des intervenants du secteur
privé au cours de l'été 1993, ce qui nous a permis de
déposer à l'Assemblée nationale du Québec le projet
de loi 151, qui apporte des correctifs à une situation qui devient
intenable.
Essentiellement, M. le Président, le projet de loi 151 modifie la
Loi sur la qualité de l'environnement pour permettre la réforme
du domaine de la gestion des déchets au Québec et l'application
du Protocole national sur l'emballage. Le projet de loi attribue au
gouvernement de nouveaux pouvoirs réglementaires destinés
à favoriser et à mieux contrôler la réduction et la
valorisation des matières ou objets mis au rebut, notamment en
responsabilisant davantage les établissements à l'égard
des contenants ou emballages qu'ils utilisent ou mettent en marché.
Comme vous le savez, M. le Président, la loi établit
également de nouvelles règles applicables au domaine de
l'élimination des déchets. Ce projet de loi consacre le principe
que l'aménagement et la modification de toute installation
d'élimination des déchets devront être autorisés,
soit en vertu de la section IV. 1 du chapitre I relative à
l'évaluation environnementale, soit en vertu de l'article 22 de la Loi
sur la qualité de l'environnement que vous connaissez bien, M. le
Président. Le projet, également, impose à tout exploitant
d'une installation d'élimination des déchets l'obligation de
constituer, en fiducie, un fonds où seront versés les montants
d'argent nécessaires pour assurer, d'une part, le respect des normes
légales lors de la fermeture de cette installation et pendant la
période post-fermeture et, d'autre part, pour couvrir les coûts de
toute intervention en cas de violation des normes ou en cas d'accident.
C'était une mesure qui était réclamée, M. le
Président, par l'ensemble des intervenants, y inclus mon bon ami, le
député de La Prairie de l'Opposition officielle.
Le projet de loi soustrait également au contrôle de la
Commission municipale du Québec les tarifs qu'exigent les exploitants
pour les services offerts en matière d'élimination des
déchets. Il précise les pouvoirs réglementaires du
gouvernement concernant l'élimination des déchets, en ce qui a
trait surtout aux conditions applicables lors de la fermeture des installations
et par la suite. Également, le projet de loi fait en sorte qu'il
établit un régime transitoire entre la législation
actuelle, la loi que nous avons adoptée d'un commun accord au mois
de
juin 1993, la loi 101 qui impose des audiences publiques pour
l'agrandissement ou l'installation d'un site d'enfouissement sanitaire ou de
matériaux secs.
Finalement, M. le Président, ce projet de loi a reçu
l'approbation d'à peu près tous les intervenants des milieux
écologiques qui s'associent au gouvernement du Québec pour une
amélioration de notre qualité de l'environnement. C'est pourquoi
je sollicite l'appui de tous les membres, sans exception, de cette
Assemblée pour que le principe du projet de loi soit adopté, de
façon à ce que nous puissions, en commission parlementaire,
bonifier, s'il y a lieu... Si des recommandations vont dans ce sens, nous en
prendrons soin. Je peux assurer l'Opposition de mon habituelle collaboration
dans ce sens. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
ministre. Je suis prêt à reconnaître un autre intervenant
sur le projet de loi 151. M. le député de La Prairie.
M. Denis Lazure
M. Lazure: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
souligner que j'interviens en l'absence de la députée de Taillon,
qui est retenue pour des raisons majeures et personnelles à
l'extérieur de l'Assemblée. Je vais tenter, dans les quelques
minutes qui restent, M. le Président, de vous communiquer les
réactions de l'Opposition à ce projet de loi.
Bien sûr que, dans ses intentions, ce projet de loi est louable.
Quand on lit les notes préliminaires, l'Opposition ne peut pas
être contre un projet de loi qui va permettre une meilleure gestion des
déchets. Ceci étant dit, cependant, l'Opposition manifeste
beaucoup de scepticisme, de doutes quant à l'efficacité d'une loi
qui serait adoptée suivant le modèle de ce projet. Pourquoi je
fais cette remarque? Tout simplement parce que le ministre de l'Environnement,
depuis qu'il est titulaire, depuis 1989, est devenu le spécialiste des
lois qui ne sont pas mises en vigueur, soit totalement ou partiellement. Le
député de Brome-Missisquoi, avocat de formation, semble
s'être fixé comme objectif, lorsque son chef l'a nommé
ministre de l'Environnement en 1989, de présenter le plus grand nombre
de projets de loi possible, sans se soucier de l'application de ces projets de
loi. (12 h 50)
Par exemple, M. le Président, le projet de loi 65, qui a
été adopté en 1990, donc il y a quatre ans, projet de loi
communément connu sous le thème la «loi
pollueur-payeur» sur les sols contaminés et avec laquelle nous
étions d'accord aussi. Mais, M. le Président, de grandes sections
de ce projet de loi ne sont toujours pas en vigueur.
Deuxième exemple, toujours pour 1990, le projet de loi 143. Ce
projet de loi 143 sur la réduction des rejets industriels, il venait
modifier la Loi sur la qualité de l'environnement, la même loi que
nous sommes appelés à modifier par ce projet que nous avons
devant nous aujourd'hui. En 1990, le ministre de l'Environnement propose le
projet de loi 143, et dans le but d'améliorer la situation grave... On
connaît l'état, par exemple, du fleuve Saint-Laurent,
l'état pitoyable du fleuve Saint-Laurent, à cause des rejets
industriels. Eh bien, M. le Président, après quatre ans, ce
projet de loi de grande importance, sur lequel nous étions d'accord,
n'est en vigueur que pour un seul secteur, le secteur des pâtes et
papiers. Pour le reste des industries, zéro. Pour les autres industries,
ce projet de loi 143 ne s'applique pas, que ce soient les industries chimiques,
les industries de la métallurgie, les mines. On pourrait donner
plusieurs exemples. Et le résultat, c'est que, cinq ans plus tard ou
quatre ans plus tard, pas grand-chose de changé dans le secteur des
rejets industriels, dans la pollution de nos cours d'eau, notamment le fleuve
Saint-Laurent, par les rejets des différentes industries. Je
répète encore une fois, un seul secteur, pâtes et papiers,
se voit dans l'obligation de suivre cette loi. Mais, même pour ce
secteur-là, on sait, M. le Président, que ça a pris
beaucoup de temps avant que le ministère fasse adopter par le Conseil
des ministres une réglementation qui ait vraiment des effets concrets
sur les rejets industriels des usines de pâtes et papiers.
Troisième exemple: le projet de loi 405 sur les matières
dangereuses. Ça, c'est un projet de loi qui venait élargir le
concept des matières dangereuses. Souvenez-vous, M. le Président,
au lieu de parler simplement de déchets dangereux, on parle
dorénavant, depuis ce projet de loi, de matières dangereuses.
L'intention, là aussi, était bonne, était louable, et
l'Opposition a concouru avec cette intention. Mais, nouvelle pour vous, M. le
Président, qui avez même participé, je crois, au
débat en commission parlementaire sur ce projet de loi ? je vois
que vous opinez du bonnet; vous vous rappelez ? au moment où on se
parle, la loi n'est toujours pas en vigueur. Pas en vigueur! Pourquoi? Parce
que le règlement n'a pas été promulgué.
Un quatrième exemple: le projet de loi 61, un peu plus
récent, celui-là, 1992, la loi sur le processus
d'évaluation environnementale. M. le Président, ça, je
pense que c'est le bouquet, parce que je me rappelle très bien, et vous
aussi, vous vous rappelez, que ce projet de lof 61, en 1992, a
été adopté sous le coup d'une motion qui suspendait les
règles normales de procédure. C'était un projet de loi
tellement urgent, selon le député de Brome-Missisquoi, selon le
ministre de l'Environnement, tellement urgent qu'il a convaincu son leader
parlementaire ? puisqu'il n'était pas leader lui-même
à l'époque, c'était le député de Portneuf
? de suspendre les règles normales de débat dans cette
Assemblée pour faire ? et on appelle ça imposer le
bâillon à l'Opposition ? raccourcir le débat.
C'était urgent. C'était capital. On a eu beau faire valoir des
arguments raisonnables comme quoi il fallait tenir un débat plus large
sur cette question importante de l'évaluation environnementale, peine
perdue. Le ministre s'est entêté et, deux ans après, on
attend toujours la publication du règlement, et, donc, ce projet de loi
n'est pas mis en application, lui non plus.
Et, dans ce projet de loi 61 ?j'ajoute une parenthèse ?
ce qui est important, M. le Président, c'est qu'il y a un article, dans
le projet de loi 61, qui a été adopté. Au moment de
l'étude du projet de loi 61, le ministre a accepté un article,
l'article S dans le projet de loi 61, qui n'est pas promulgué, mais cet
article, c'était à la demande de l'Opposition et des
différents groupes environnementaux. Cet article, je le lis comme suit:
«Le ministre de l'Environnement doit, dans les 90 jours de
l'entrée en vigueur de l'article 12 de la Loi modifiant la Loi sur la
qualité de l'environnement, confier au Bureau d'audiences publiques sur
l'environnement le mandat de tenir une enquête avec audiences publiques
sur les problèmes relatifs à la réduction, à la
valorisation et à l'élimination des déchets
solides.»
En d'autres termes, à l'occasion d'un de ses nombreux projets de
loi, le ministre accepte qu'il y ait une enquête publique sur la gestion
des déchets. Cependant, cependant, c'est lettre morte, puisque ce n'est
pas promulgué, selon son habitude. Très mauvaise habitude, M. le
Président, vous allez en convenir, qu'un législateur se
précipite ? surtout en imposant le bâillon à
l'Opposition ? sous prétexte qu'il y a urgence, et on se ramasse
deux ans plus tard et la loi n'est toujours pas promulguée. Et, par
conséquent, c'a permis à ce gouvernement de ne pas tenir une
enquête publique sur la gestion des déchets, contrairement
à ce que la population demande, à ce que les groupes
environnementaux demandent et à ce que l'Opposition a
demandé.
Je continue l'énumération, M. le Président, sur les
devoirs mal faits du ministre de l'Environnement. Le dernier exemple, c'est le
projet de loi 151, celui-là en 1993, la loi sur la gestion des
déchets solides; c'est le projet de loi que nous avons devant nous. Et
nous disons, devant ce projet de loi, que le ministre met la charrue avant les
boeufs, que le ministre, avant de venir présenter un projet de loi
à l'Assemblée, devrait tenir cette enquête publique,
devrait demander au Bureau d'audiences publiques, au BAPE, de tenir une
enquête publique sur la gestion des déchets et, après,
profitant des lumières qui jailliraient d'une telle enquête, le
ministre pourrait améliorer son projet de loi.
Connaissant les habitudes de travail du ministre, nous lui disons, M. le
Président: De grâce! épargnez-vous des heures de travail,
épargnez à l'Assemblée des heures de travail. Allons
plutôt en enquête publique. Allons entendre la population, les
municipalités. M. le Président, vous venez du monde municipal,
vous avez été, pendant plusieurs années, un maire, un
notable dans votre région, vous connaissez les problèmes qui sont
reliés à la gestion des déchets. Le ministre et son
gouvernement, jusqu'ici, ont refusé de demander au BAPE de tenir cette
enquête publique. Parce que nous avons la conviction que, si une telle
enquête publique était tenue, son projet de loi pourrait
être bonifié de façon considérable.
Bon. Après avoir présenté la feuille de route du
ministre quant à ses projets de loi depuis quelques années, je
voudrais quand même dire quelques mots sur le fond, sur certains effets
de ce projet de loi s'il était adopté un jour par
l'Assemblée nationale. Ah! mais je n'ai pas parlé d'un autre
projet de loi, M. le Président ? et vous auriez pu me le reprocher
? un projet de loi qui avait été présenté il y
a deux ans environ, qui créait un office de protection de
l'environnement. Et ce projet de loi a été adopté en
dépit de l'Opposition, mais aussi de tous les groupes environnementaux,
de tout le monde, que ce soit du côté syndical ou du
côté patronal. Je me souviens très bien que le
côté patronal avait tapé sur les doigts du ministre, en
disant: Ça n'a pas de sens, de créer un tel office, ça
n'est pas nécessaire. Vous venez créer une nouvelle structure,
vous venez compliquer les choses. Passons donc au règlement de
problèmes concrets. Eh bien, ce projet de loi ?je ne l'ai pas
mentionné dans mes exemples, c'est donc un sixième exemple ?
ce projet de loi, qui a été adopté ? parce que,
jusqu'à nouvel ordre, les gens d'en face ont la majorité ?
n'est toujours pas en vigueur. Il dort quelque part dans les dossiers du
ministre ou du Conseil des ministres, mais il n'a pas été
adopté. (13 heures) vous savez, le québec, comme les autres, a
concouru au programme national de réduction des déchets.
ça, c'était en 1989, si j'ai bonne mémoire, au tout
début de 1989, les objectifs de réduire les déchets de 50
% d'ici l'an 2000. c'est un objectif qui est noble. ça donnait quelque
chose comme 11 ans. nous sommes en 1994, presque à mi-chemin de cette
échéance de 11 ans. moi, m. le président, je peux vous
dire que ça saute sur le sens commun, tout le monde peut le convenir,
qu'on n'est vraiment pas sur le point de réaliser l'objectif que le
gouvernement du québec s'était fixé, de réduire de
50 % la quantité de déchets produits d'ici l'an 2000. nous ne
sommes même pas à 15 %, 20 %, m. le président. alors, nous
disons, comme nous l'avons souvent répété depuis quelques
années au ministre de l'environnement, nous lui disons: cessez de
présenter toujours une série de projets de loi à chaque
session sur l'environnement. passez à l'action et, surtout dans le
domaine des déchets, demandez au bureau d'audiences publiques de tenir
une enquête publique.
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député, compte tenu de l'heure, je dois vous demander
d'arrêter votre propos et demander le consentement de cette Chambre pour
pouvoir poursuivre. Alors, est-ce qu'il y a consentement pour qu'on poursuive
les travaux?
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Donc, il n'y a pas
consentement. M. le leader.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Permettez-moi, M. le
Président. J'ai été informé par le leader adjoint
du gouvernement, tout comme il vient de le mentionner, qu'il souhaitait lui,
personnellement, entre autres, intervenir sur ce projet de loi. Compte tenu de
l'heure, M. le Président, et du rappel que vous faites au
règlement,
j'avise ou je demande au leader adjoint du gouvernement s'il ne serait
pas prêt à réviser ce consentement en l'assurant que, de ce
côté-ci, il n'y aurait pas d'autre intervenant, qu'il pourrait,
lui, disposer de son droit de parole, ce qui nous permettrait d'adopter
également les projets de loi d'intérêt privé qui
touchent les municipalités dans à peu près la demi-heure
qui suit. De ce côté-ci, nous serions prêts à
consentir.
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le leader adjoint de
l'Opposition.
M. Gendron: Non, malheureusement, je ne peux pas concourir
à cette demande. Le leader du gouvernement savait très
correctement que la séance devait se terminer à 13 heures, et je
ne veux pas limiter mes propos que je veux tenir sur ce projet de loi là
par une contrainte horaire et être bousculé par l'adoption de six
autres projets de loi.
Mon collègue n'a pas tout à fait terminé. Moi, j'ai
un propos à tenir, et possiblement que la critique de l'Opposition
officielle en matière d'environnement va souhaiter avoir l'occasion de
parler sur ce projet de loi là quelques minutes. Et, si le leader a
décidé de l'appeler, c'est sa décision. Et notre
collègue ne pouvant être ici cette semaine, on va en parler quand
le leader décidera de rappeler le projet de loi.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. M. le
leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, sur les droits de parole, je
conviens des propos avec le député d'Abitibi-Ouest. Quant
à la présence de Mme la députée de Taillon, je ne
questionne pas, comme c'est interdit de le faire par notre règlement,
les motifs sans doute valables de son absence. Mais il avait été
convenu que le porte-parole de l'Opposition officielle dans ce dossier, pour
les fins de ce dossier, serait le député de La Prairie, et on ne
m'avait jamais prévenu que Mme la députée de Taillon
insistait pour intervenir dans le cadre de ce dossier. Au contraire, les
représentations du leader de l'Opposition officielle étaient
à l'effet que le compétent député de La Prairie en
matière environnementale serait le porte-parole de l'Opposition
officielle, ce qui nous permettrait donc d'adopter des projets de loi
privés, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, comme il n'y a pas
consentement... Un moment. M. le leader...
M. Gendron: II n'y a pas consentement pour l'offre que le leader
du gouvernement vient de faire. Mais, si le leader du gouvernement veut
demander à l'Opposition officielle si nous sommes d'accord pour adopter
les bills privés immédiatement, avec consentement des deux
côtés de cette Chambre, sans débat, la réponse,
c'est oui, nous sommes d'accord pour adopter les bills privés
immédiatement. Ça, si le leader nous offre cette
opportunité, nous allons concourir.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le leader du
gouvernement.
Motion proposant de changer le nom des parrains des
projets de loi 264, 268, 271
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.
Devant cette offre magnanime de l'Opposition officielle, je vous demanderais,
dans les circonstances et sans débat, d'appeler, dans l'ordre, les
articles 41, 42, 43, 44, 45, 46 et 47 du feuilleton, en prenant note que, dans
le cas de l'article 42, il y aurait une motion du leader du gouvernement pour
que le nom de M. Michel Després soit substitué à celui de
M. Jean Leclerc comme parrain du projet de loi d'intérêt
privé 264, Loi modifiant la charte de la ville de Québec. Dans le
cas du projet de loi privé 268, je fais motion comme leader pour que le
nom de M. Bernard Brodeur soit substitué à celui de M. Roger
Paré, comme parrain du projet de loi d'intérêt privé
268, Loi concernant la ville de Waterloo. Et je fais également motion,
dans le cas du projet de loi 271, pour que le nom de M. Jean-Claude Gobé
soit substitué à celui de M. Jacques Chagnon comme parrain du
projet de loi d'intérêt privé 271, Loi modifiant la charte
de la ville de Montréal.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Est-ce que les motions de
changement de parrain des différents projets de loi sont
adoptées?
M. Gendron: Oui, M. le Président, les motions sont
adoptées.
Projet de loi 230
Adoption du principe
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté. Alors, M.
le député de Duplessis propose l'adoption du principe du projet
de loi 230, Loi concernant la ville de Port-Cartier.
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, le principe du
projet de loi est adopté.
Adoption Mise aux voix
Alors, M. le député de Duplessis propose
l'adoption du projet de loi 230, Loi concernant la ville de
Port-Cartier. Le projet de loi 230, Loi concernant la ville de Port-Cartier
est-il adopté ?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Tremblay): II est adopté.
Donc, le projet de loi 230 est adopté.
Projet de loi 264
Adoption du principe
Mise aux voix
J'appelle l'article 42. M. le député de Limoilou propose
l'adoption du principe du projet de loi 264, Loi modifiant la charte de la
ville de Québec. Est-ce qu'il y a des interventions? Donc, est-ce que le
principe du projet de loi 264, Loi modifiant la charte de la ville de
Québec est adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député de Limoilou propose l'adoption du projet de loi 264, Loi
modifiant la charte de la ville de Québec. Le projet de loi 264, Loi
modifiant la charte de la ville de Québec est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 268 Adoption du principe
Le Vice-Président (M. Tremblay): L'article 43. M. le
député de Shefford propose l'adoption du principe du projet de
loi 268, Loi concernant la ville de Waterloo. Est-ce qu'il y a des
débats? Il n'y a pas de débat?
M. Gendron: M. le Président, j'indique tout de suite que
pour tous les projets de loi privés...
Le Vice-Président (M. Tremblay): O.K., très
bien.
M. Gendron: ...que vous allez adopter, il n'y a pas de
débat. Donc, pas nécessaire de l'appeler.
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, alors
le principe du projet de loi 268, Loi concernant la ville de Waterloo, est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député de Shefford propose l'adoption du projet de loi 268, Loi
concernant la ville de Waterloo. Le projet de loi 268, Loi concernant la ville
de Waterloo est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 271
Adoption du principe
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Adopté,
très bien. L'article 44. M. le député de LaFontaine
propose l'adoption du principe du projet de loi 271, Loi modifiant la charte de
la ville de Montréal. Le principe du projet de loi 271, Loi modifiant la
charte de la ville de Montréal est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député de LaFontaine propose l'adoption du projet de loi 271, Loi
modifiant la charte de la ville de Montréal. Le projet de loi 271, Loi
modifiant la charte de la ville de Montréal est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 273
Adoption du principe
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien.
L'article 45. M. le député de Jeanne-Mance propose l'adoption du
principe du projet de loi 273, Loi concernant la ville de Saint-Léonard.
Le principe du projet de loi 273, Loi concernant la ville de
Saint-Léonard est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député
de Jeanne-Mance propose l'adoption du projet de loi 273, Loi concernant
la ville de Saint-Léonard. Le projet de loi 273, Loi concernant la ville
de Saint-Léonard est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Projet de loi 275
Adoption du principe
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien.
L'article 46. M. le député de l'Acadie propose l'adoption du
principe du projet de loi 275, Loi concernant la ville de Saint-Laurent. Le
principe du projet de loi 275, Loi concernant la ville de Saint-Laurent est-il
adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député de l'Acadie propose l'adoption du projet de loi 275, Loi
concernant la ville de Saint-Laurent. Le projet de loi 275, Loi concernant la
ville de Saint-Laurent est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien.
L'article 47. M. le député de La Prairie propose l'adoption du
principe du projet de loi 276, Loi concernant la ville de La Prairie. Le
principe du projet de loi 276, Loi concernant la ville de La Prairie est-il
adopté?
M. Gendron: Un instant.... À ma connaissance, M. le
Président, le projet de loi 276 n'a pas fait l'objet de
dépôt de la commission, hier. Moi, je ne dis pas qu'il n'est pas
adopté, là. Tout ce que je vous indique, c'est que le projet de
Loi concernant la ville de La Prairie n'est pas dans les six projets de loi qui
ont été déposés dans la commission de
l'aménagement et des équipements le 8 mars, et je n'ai jamais
indiqué à qui que ce soit que le projet de loi 276... Et je ne
dis pas qu'il y a des problèmes, là. Mais, juste une minute, M.
le Président, je veux juste demander au leader du gouvernement... Un
instant, là. (13 h 10)
Le Vice-Président (M. Tremblay): On m'informe, M. le
leader adjoint de l'Opposition, que le rapport concernant la ville de La
Prairie, le projet de loi a été déposé,
effectivement.
M. Gendron: Parfait, si c'est ça. C'est parce que moi, je
suivais le feuilleton d'aujourd'hui et je peux vous indiquer, jurer,
qu'à la page 11 du feuilleton il n'y avait pas de mention que le projet
de loi de La Prairie avait été déposé, par la
commission. Et c'était ma seule réserve, parce que je me rappelle
du contenu du projet de loi de La Prairie; je n'ai pas de problème avec
le projet de loi de La Prairie, et je suis prêt à concourir
à son adoption. Si j'ai exprimé une réserve, c'est
uniquement à cause de ce que je viens de vous indiquer.
On me dit qu'il y a eu une erreur, mais qu'est-ce que vous voulez, je ne
le savais pas avant qu'on me le dise.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, dans l'ordre,
j'appelle l'article 47, tel que mentionné. Oui, M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, sur cet
élément, il est possible que ça n'apparaisse pas au
feuilleton. On pourrait s'objecter sur une question de forme, de part et
d'autre, mais compte tenu que le projet de loi est parrainé par mon bon
ami le député de La Prairie, nous ne ferons pas de débat
sur cette question de forme. Nous constatons tous les deux qu'il
n'apparaît pas là, mais que, dans les faits, il aurait
été déposé hier et que tout est conforme, M. le
Président.
Projet de loi 276
Adoption du principe
Mise aux voix
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, devant cette
conformité, de part et d'autre, donc, nous procédons à
l'adoption de ce projet de loi. Alors, je reprends l'article 47. M. le
député de La Prairie propose l'adoption du principe du projet de
loi 276, Loi concernant la ville de La Prairie. Le principe du projet de loi
276, Loi concernant la ville de La Prairie est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Adoption Mise aux voix
Le Vice-Président (M.tremblay): M. le député
de La Prairie propose l'adoption du projet de loi 276, Loi concernant la ville
de La Prairie. Le projet de loi 276, Loi concernant la ville de La Prairie
est-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Ceci
met fin à nos travaux, et la séance est suspendue jusqu'à
15 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 13 h 12)
(Reprise à 15 h 12)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mmes et MM. les députés! Mmes et MM. les députés,
s'il vous plaît! Alors, nous allons nous recueillir quelques instants. Je
vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Présence du consul général du
Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, M. Ivor J.
Rawlinson
Alors, j'ai le grand plaisir de souligner la présence, dans les
tribunes, du consul général du Royaume-Uni, de Grande-Bretagne et
d'Irlande du Nord, M. Ivor J. Rawlinson.
Affaires courantes
Nous allons maintenant procéder aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi
Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, je
vous demanderais d'appeler l'article a de notre feuilleton.
Projet de loi 152
Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le
ministre du Revenu présente le projet de loi 152, Loi modifiant la Loi
concernant l'impôt sur le tabac. M. le ministre du Revenu.
M. André Vallerand
M. Vallerand: Merci, M. le Président. Dans le cadre du
plan d'action annoncé par le gouvernement en vue d'enrayer le commerce
illégal des produits du tabac et afin de donner suite au bulletin
d'information 94-2 publié par le ministère des Finances le 8
février 1994, ce projet de loi modifie la Loi concernant l'impôt
sur le tabac afin de réduire l'impôt exigible lors de la vente des
produits du tabac.
Le projet prévoit également les dispositions propres
à maintenir l'effet dissuasif des amendes et des pénalités
qui sont basées sur le taux de l'impôt sur le tabac.
Mise aux voix
Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte
d'être saisie de ce projet de loi?
Des voix: Oui.
Le Président: Adopté.
Dépôt de documents
Maintenant, dépôt de documents. M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
Lettres des parties impliquées quant
à
la distribution des revenus du Salon
québécois du cheval et communiqué
de
la Fédération équestre du
Québec
M. Picotte: Merci, M. le Président. Tel que je m'y
étais engagé hier, je voudrais déposer une lettre du 12
novembre 1992 du sous-ministre adjoint au ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation demandant un montant de 100 000 $ pour
financer les activités agricoles; la lettre du 18 novembre 1992 du
directeur général du Salon québécois du cheval
confirmant le versement de la subvention de 20 000 $ de l'expo de district de
la Mauricie et l'engagement de verser le solde de 80 000 $ devant être
utilisé comme aide à d'autres organismes agricoles; une lettre du
3 décembre 1992 du sous-ministre adjoint à l'Agriculture
reconnaissant la réception du chèque de 80 000 $; la lettre du 3
mars du directeur général du Salon demandant au ministère
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation la liste des
bénéficiaires des 100 000 $. Je voudrais aussi déposer la
lettre du 15 mars 1993 du sous-ministre adjoint de l'Agriculture identifiant
les organismes bénéficiaires du 100 000 $, ainsi, M. le
Président, que l'ensemble de la correspondance concernant les divers
organismes agricoles bénéficiaires du montant versé par le
Salon québécois du cheval et, enfin, M. le Président, un
communiqué de la Fédération équestre du
Québec qui s'intitule: «La Fédération
équestre du Québec dénonce les imprécisions dans
l'article de M. André Noël du journal La Presse du 9 mars
1994.» Merci, M. le Président.
Le Président: Ces documents sont donc
déposés.
Nomination de Mme Nicole Loiselle à la fonction
de whip adjointe du gouvernement
J'ai reçu de M. le premier ministre une lettre m'informant de la
nomination, au poste de whip adjointe du gouvernement, de Mme Nicole Loiselle,
députée de Saint-Henri.
Des voix: Bravo!
Le Président: Cette nomination est effective à
compter du 28 février 1994. Je dépose donc cette lettre.
Nouveau président de la commission
d'étude des questions afférentes
à l'accession du Québec à la souveraineté
J'ai également reçu de M. le premier ministre une
lettre m'informant de la désignation du député de
Nicolet-Yamaska, M. Maurice Richard, à titre de nouveau président
de la commission d'étude des questions afférentes à
l'accession du Québec à la souveraineté. Je dépose
également cette lettre.
Dépôt de rapports de commissions
Dépôts de rapports de commissions. Mme la présidente
de la commission de l'éducation.
Élection du vice-président de la
commission de l'éducation
Mme Harel: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission de l'éducation qui a
siégé le 26 janvier afin de procéder à
l'élection du vice-président de la commission.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Maintenant, M. le vice-président de la commission du budget et de
l'administration et député de La Prairie.
Étude trimestrielle de la politique
budgétaire du gouvernement et de l'évolution des finances
publiques
M. Lazure: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui
a siégé le 3 mars 1994 afin de procéder à
l'étude trimestrielle de la politique budgétaire du gouvernement
et de l'évolution des finances publiques.
Le Président: Ce rapport est déposé.
Dépôts de pétitions.
Interventions portant sur une violation de droit ou de
privilège
Divulgation, par les députés de
Montmagny-L'IsIet et de Bellechasse,
avant le dépôt des crédits, de
montants
devant être alloués dans le
secteur
des transports en 1994-1995
Interventions portant sur une violation de droit ou de privilège
ou sur un fait personnel. J'ai reçu en temps utile du
député de Lévis un avis de son intention de soulever une
question de privilège en vertu des articles 66 et suivants de notre
règlement. Le député de Lévis prétend que le
député de Montmagny-L'Islet et le député de
Bellechasse auraient agi de manière à outrager le Parlement et
ses membres en informant la population de montants alloués pour la
programmation 1994-1995 du ministère des Transports concernant la
construction du réseau routier et l'entretien des infrastructures de
communication dans leurs circonscriptions respectives, alors que le processus
de dépôt et d'adoption des crédits du gouvernement n'a pas
été réalisé.
N'ayant pas, à ce moment-ci, complété
l'étude de cette question, je prends l'affaire en
délibéré et verrai à rendre une décision
dans les meilleurs délais.
M. Garon: M. le Président.
Le Président: Oui, M. le député de
Lévis.
M. Garon: Étant donné qu'il est question de
proroger la session actuelle demain à 10 heures, est-ce qu'il est
possible d'avoir une décision dans le cours de la session actuelle?
Le Président: Écoutez, M. le député
de Lévis, je prends la question en délibéré. Je ne
suis pas informé qu'on prorogera demain à 10 heures, mais je vais
faire tout en mon possible pour rendre la décision dans les meilleurs
délais. Et je n'ai pas étudié non plus à ce
moment-ci... J'ai reçu l'avis, votre avis, à 13 h 20 exactement.
Alors, j'ai tenté d'arriver à une décision pour 15 heures,
ce que je n'ai malheureusement pu faire, je n'ai pas terminé. Je verrai
à faire le plus possible diligence pour être capable de rendre une
décision avant la prorogation de la session, mais je ne sais pas non
plus quel sera l'effet de la prorogation de la session sur cet avis de
privilège, et je l'ai déjà en main. Je réexamine la
situation en entier pour tenter de répondre à votre demande le
plus rapidement possible. C'est une question importante, je la considère
très importante.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que le député
de Lévis a accompagné sa missive de précédents qui
constitueraient des décisions pouvant influencer votre décision,
M. le Président?
Le Président: Je m'excuse, M. le leader du gouvernement.
Oui?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Est-ce que le député
de Lévis a accompagné sa missive, qu'il vous a adressée
conformément à notre règlement, de
précédents pour soutenir sa demande de question de
privilège?
M. Chevrette: M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, il y a eu des
précédents au niveau des ministres et, de facto, ça
s'applique à n'importe quel parlementaire. On ne peut pas
présumer des décisions de l'Assemblée nationale.
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Je ne voulais absolument pas
présumer, M. le Président, mais il s'agissait d'une question qui,
à première vue, peut apparaître un peu différente
des autres questions de privilège qui sont soumises par les membres de
cette Assemblée. Je m'interrogeais sur le fait que le
député de Lévis, qui est quelqu'un qui bâtit
généralement bien des dossiers, aurait pu prendre la peine
d'accompagner sa demande de précédents.
Des voix: Ha, ha, ha!
(15 h 20)
Le Président: Alors, effectivement, je dois vous dire que
j'ai reçu du député de Lévis une lettre, laquelle
lettre était accompagnée d'un communiqué de presse, tel
qu'il alléguait dans sa lettre, et d'un communiqué d'un journal.
Il a fait certaines références dans sa lettre, tel qu'on le fait
usuellement. D'accord? La question est en délibéré, et je
verrai à rendre la décision dans les meilleurs délais.
Questions et réponses orales
Nous allons maintenant procéder à la période de
questions et réponses orales des députés, et je reconnais
en première question principale M. le chef de l'Opposition.
Objectif de création d'emplois pour
réduire le chômage de 5 %
M. Parizeau: M. le Président, le premier ministre se dit
obsédé par l'emploi. Et, justement, en fin de semaine, le
congrès du Parti libéral va se pencher, j'imagine, sur le
document «Agir pour le Québec», où on s'engage
à réduire le taux de chômage de S % dans un premier terme,
objectif louable. Le président de la Commission politique du Parti
libéral, celui qui a succédé à M. Jean Allaire, en
présentant le document, a dit que cet objectif
représentait...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! O.K.
À l'ordre, s'il vous plaît! O.K. À l'ordre, s'il vous
plaît! MM. les députés, s'il vous plaît!
Alors, M. le chef de l'Opposition.
M. Parizeau: II paraît que c'est le deuxième
successeur. Bon.
Donc, le président de la Commission politique du Parti
libéral indique, dans la présentation de ce document, que cela
représentera la création de 200 000 emplois. Il y a erreur. On a
oublié de tenir compte de l'augmentation de la population active. Et, si
je me fie aux projections du ministère que dirige le ministère
des Finances, qui, ces jours-ci, navigue aux limites de l'intolérable et
du tolerable, ce n'est pas 200 000 emplois qu'il faut créer pour
atteindre cet objectif, c'est un peu plus de 400 000; 418 000, pour être
exact. Ça démontre, comment dire, avec quel soin on a
cherché à traduire l'obsession de l'emploi du premier ministre.
Deux cent mille emplois de plus ou de moins, dans un document, ce n'est
peut-être pas important, mais, pour 200 000 personnes qui sont en
chômage à l'heure actuelle, c'est important.
Le Président: Votre question, M. le chef de
l'Opposition.
M. Parizeau: Je demande au premier ministre: Est-ce qu'il ne
croit pas que c'est d'assez mauvais augure de lancer une campagne
électorale sur le thème de l'emploi à partir de
prémisses pareilles, où on se trompe du simple au double? Et
a-t-il l'intention de faire amender le document, au cours de la semaine
prochaine, de façon à ce que les chômeurs du Québec
sachent exactement et précisément ce que les libéraux leur
annoncent? De quoi parle-t-il exactement, de 200 000 emplois ou de 400 000?
Est-ce que le premier ministre a l'intention de faire préciser ça
en fin de semaine? Il aura tout le temps voulu, il a refusé de venir
participer à la marche pour le Collège militaire. Il a tout le
temps de faire amender ça.
Le Président: Alors, M. le premier ministre.
M. Johnson: Oui. M. le Président, lors de la
présentation de la proposition de programme, du projet de programme du
Parti libéral du Québec, le président de la Commission
politique, à une question d'un journaliste, a chiffré ce que
pouvaient représenter aujourd'hui 5 % de taux de chômage. Grosso
modo, ce que M. Vandal a utilisé comme chiffres, c'étaient les
suivants: sur 3 500 000 à 4 000 000 de travailleurs, 1 %, c'est 40 000,
5 %, c'est 200 000. Règle de trois extrêmement facile pour montrer
l'ampleur du défi, mais certainement pas en admettant qu'il est
irréaliste. Parce que je dois remarquer que, de son côté,
en plaidant pour la séparation politique du Québec, le chef de
l'Opposition, quant à lui, parle de réduire le chômage au
Québec à 3 % ou 4 %. C'est de 800 000 emplois que le chef de
l'Opposition nous entretient, lui qui, d'habitude, lorsqu'il s'adresse à
des gens qui représentent beaucoup d'employés, trouve que c'est
une oeuvre futile.
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, en question principale maintenant...
S'il vous plaît! Question principale... Alors, question principale, M. le
député de Labelle.
Études sur la privatisation des services
publics
M. Léonard: M. le Président, le gouvernement
libéral a enclenché la privatisation des services publics par une
étude de préfaisabilité de 80 000 $ à Coopers
&
Lybrand et, avant même le dépôt du rapport, le
Trésor confiait sans appel d'offres à la même firme un
contrat de 718 000 $ pour accompagner la démarche de privatisation des
centres de traitement informatique. Malgré qu'il s'agisse
d'études payées par des fonds publics, le ministre des Finances a
refusé catégoriquement d'en rendre publiques les conclusions et
les recommandations. Le ministre veut éviter de discuter de ces
questions importantes, contentieuses, avant ou pendant l'élection.
Le ministre des Finances, qui nous a montré sa capacité de
changer rapidement d'idée, peut-il nous dire si aujourd'hui il compte
rendre publique l'étude de préfaisabilité ou si, au
contraire, il juge le dossier trop important, trop sérieux pour qu'il
soit abordé en campagne électorale?
Le Président: Alors, M. le ministre des Finances.
M. Bourbeau: M. le Président, j'ai déclaré
hier au député de Labelle qu'une bonne partie de l'étude a
déjà été rendue publique, enfin on l'a remise
à la Commission d'accès à l'information telle que...
Une voix: ...
M. Bourbeau: Pardon? M. le Président, je m'excuse, le
député...
Le Président: La parole est au ministre des Finances.
M. Bourbeau: Alors, on a remis à la Commission
d'accès à l'information tout ce que l'on devait remettre. On
s'est soumis à la demande. Il y a une partie de l'étude qui
contient des recommandations qui sont jugées d'ordre confidentiel dans
ce sens que ce sont des renseignements confidentiels dont le gouvernement a
besoin pour établir sa stratégie dans des dossiers de
privatisation. M. le Président, tout le monde comprend que, quand on
offre en vente des biens, le gouvernement n'est pas d'avance pour aller
déclarer sa stratégie aux acquéreurs! Ce serait un geste
qui irait dans le sens de nuire à l'intérêt public.
Alors, comme négociateur, le gouvernement, dans la vente de ces
biens-là, décide de garder pour lui sa stratégie et de ne
pas la montrer à tous ceux qui seraient susceptibles d'acheter ces
biens-là et peut-être de profiter indûment de renseignements
qui leur seraient utiles à eux, mais certainement pas au vendeur.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Léonard: Est-ce que le ministre des Finances ne se rend
pas compte qu'en refusant de rendre publique la démarche de
privatisation et le rapport de préfaisabilité il cache ses
implications sur l'accès à l'information, sur les tarifs qui en
découleront, sur l'impact pour la fonction publique, sur la
qualité des services, qu'il maintient la population dans l'ignorance des
véritables intentions du gouvernement jusqu'après
l'élection?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, tout le monde sait que,
quand on négocie avec quelqu'un pour lui vendre quelque chose, on ne met
pas sur la table ses cartes, en partant. Tous les gens qui négocient
savent ça! Ça ne serait pas dans l'intérêt public
? et les Québécois comprennent ça, certainement
? que le gouvernement aille se déshabiller devant les acheteurs
pour leur dire: Voici, on vous donne tous les renseignements, et maintenant
vous pouvez nous organiser comme vous voulez.
Alors, il me semble, M. le Président, si le député
a été dans les affaires ? je ne sais pas si le
député a été dans les affaires avant aujourd'hui
? mais il devrait savoir qu'il y a quand même un certain nombre
d'éléments qu'on doit garder pour soi quand on négocie, et
c'est ce que le gouvernement fait, M. le Président. Les électeurs
demandent au gouvernement d'être des bons gestionnaires. Être bons
gestionnaires, M. le Président, c'est de gérer comme on
gère dans l'entreprise privée et garder pour soi les
renseignements confidentiels dans des cas comme ceux-là.
Le Président: Alors, en question principale, M. le
député de La Prairie.
Impact des coupures au régime
d'assurance-chômage sur le régime d'aide sociale
M. Lazure: Merci, M. le Président. Les coupures au
régime de l'assurance-chômage, contenues dans le dernier budget
fédéral, vont créer une forte pression sur le coût
de notre régime d'aide sociale, en augmentant le nombre de prestataires.
Selon une étude du département d'économie de
l'Université du Québec à Montréal, l'impact de ces
mesures représente un coût supplémentaire de 280 000 000 $
pour 1995-1996. Le ministre des Finances, amateur de pirouettes, évalue
à 175 000 000 $ les pertes du Québec pour cette même
année, estimant que cette réduction était très
acceptable, que le budget était satisfaisant. (15 h 30)
La question à la ministre de la Sécurité du revenu
est la suivante: Est-ce qu'elle peut nous faire part de son évaluation
de l'impact de ces coupures sur le régime de l'aide sociale pour les
trois années à venir?
Le Président: Alors, Mme la ministre de la
Sécurité du revenu.
Mme Trépanier: Alors, M. le Président, les
modifications proposées à l'assurance-chômage dans le
dernier budget fédéral concernent le taux et la durée des
prestations ainsi que la période minimale de travail
requise. C'est évident qu'il y a un impact sur la
Sécurité du revenu. Selon notre analyse, 14 700 nouveaux
ménages s'ajouteront à la clientèle pour une
période additionnelle de 12 semaines, en moyenne.
Cependant, il faut mettre cet impact en perspective. Les modifications
représentent des mesures intérimaires en attendant la
réforme complète de la sécurité sociale. Et il y a
eu une conférence fédérale-provinciale sur la prochaine
réforme du gouvernement fédéral, et nous avons fait valoir
les points suivants: premièrement, le champ de la sécurité
du revenu est de compétence provinciale et il faut absolument s'assurer
que la compétence sera observée, d'une part; deuxièmement,
c'est à titre de partenaire que le Québec doit être
associé à la réforme des programmes
fédéraux, puisque ceux-ci ont des répercussions
énormes sur les programmes provinciaux; troisièmement, la
réforme devra permettre aux provinces ? et, ça, c'est
extrêmement important, M. le Président ? une très
grande souplesse dans la détermination et le financement des programmes
et le quatrième point, et je termine là-dessus, la réforme
ne devra pas exercer de pressions additionnelles sur les finances
publiques.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Lazure: Oui. Avant de passer à la question
complémentaire, est-ce que je dois comprendre que 280 000 000 $ est
vraiment le chiffre exact?
Le Président: Alors, c'est une question. C'est une
question...
M. Lazure: Non.
Le Président: ...donc ce sera une question à la
fois. Vous reviendrez pour une autre question. Mme la ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Trépanier: Pour 1994-1995, l'impact escompté
s'élève à 20 000 000 $ à peu près et, pour
une pleine année, soit 1996-1997, ces ménages entraîneront
un coût évalué à 127 000 000 $. Alors, on est loin
des 480 000 000 $ dont nous parle...
Le Président: Alors, pour une autre question
complémentaire.
M. Lazure: M. le Président, quelles représentations
la ministre et son gouvernement ont-ils faites auprès du gouvernement
fédéral pour que cesse ce pelle-tage du déficit dans la
cour du Québec sur le dos des chômeurs? Et comment
réagit-elle à l'intention exprimée par le gouvernement
fédéral, à la page 44 du discours du budget, de revenir,
dans le transfert sur la sécurité sociale aux provinces pour
1996-1997, au même mon- tant que l'année 1993-1994,
c'est-à-dire une soustraction d'au moins 300 000 000 $? Comment
réagit-elle à cette intention du gouvernement
fédéral?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Trépanier: M. le Président, cette
réforme d'assurance-chômage, elle est fédérale. Et
je dois ajouter aux chiffres que j'ai donnés tout à l'heure, soit
des 20 000 000 $ pour l'année 1994-1995, qu'il ne faut pas oublier qu'il
faut diviser par deux. Parce qu'il y a 50 % dans le RAPC, le Régime
d'assistance publique du Canada. Alors, 50 % est payé par le
gouvernement fédéral; ça, il ne faut pas l'oublier. Et ce
que nous avons fait, dans ce dossier-là, M. le Président, c'est
que nous avons fait valoir les demandes du Québec pour la prochaine
réforme de l'aide sociale fédérale. Alors, c'est là
où on a joué notre carte la plus importante.
Le Président: En question principale, M. le
député de Rouyn-Noranda?Témiscamingue.
Frais encourus dans le dossier de l'Hôtel-Dieu
de Montréal
M. Trudel: En avril 1992, le gouvernement décidait de
déménager l'Hôtel-Dieu dans l'est de Montréal. Au
mois de novembre 1992, la majorité gouvernementale, y compris
l'ex-président du Conseil du trésor, votait contre une motion
présentée ici, à l'Assemblée nationale, visant
à maintenir au centre-ville de Montréal et à
redéployer l'Hôtel-Dieu, avec son statut universitaire, dans le
centre de Montréal et également à développer un
hôpital pour les services de première ligne dans le nord-est de
Montréal. Le 12 janvier dernier, à nouveau, le gouvernement vire
son capot de bord et décide d'adopter la solution
préconisée depuis le début par le milieu
montréalais et le milieu de la santé.
Aujourd'hui, la ministre de la Santé, puisque les militants
libéraux réclament eux-mêmes plus de transparence et moins
de gaspillage, la ministre de la Santé peut-elle nous dire combien de
millions ont été engloutis en frais d'architectes,
d'ingénieurs ou de dessinateurs dans un projet qui, semble-t-il, n'aura
fourni que des avantages à des amis du parti?
Le Président: Mme la ministre de la Santé et des
Services sociaux.
Mme Robillard: M. le Président, je me serais attendue
à ce que le député de Rouyn-Noranda?
Témiscamingue félicite le nouveau gouvernement pour cette
décision si rapide.
Des voix: Bravo!
Le Président: S'il vous plaît! Mme la ministre...
S'il vous plaît! MM. les députés, s'il vous plaît!
Mme la ministre, vous avez la parole.
Mme Robillard: M. le Président, le nouveau premier
ministre a été assermenté le 11 janvier 1994 et, le
12 janvier 1994, le Conseil des ministres, sous son autorité, a pris
trois décisions: un, l'Hôtel-Dieu ne déménage pas;
deux, nous allons rénover l'Hôtel-Dieu et, trois, nous allons
construire un nouvel hôpital dans le nord-est de Montréal.
À ce que je sache, le député de Saint-Louis, où se
retrouve l'Hôtel-Dieu, et le député de LaFontaine,
où se retrouvera le nouvel hôpital, étaient fort heureux de
la décision. Mais toute la communauté montréalaise
était fort heureuse de cette décision. Et présentement, M.
le Président, nous mettons toutes...
Le Président: Un instant! Un instant! S'il vous
plaît! Je reconnais une seule personne à la fois. À
l'ordre, s'il vous plaît! Je reconnais une seule personne. Je vous
demanderais de vous conformer au règlement, s'il vous plaît.
Alors, en conclusion, Mme la ministre.
Mme Robillard: En conclusion, M. le Président, l'ensemble
de la communauté montréalaise est fort heureuse de cette
décision gouvernementale, et nous sommes, à l'heure actuelle,
à travailler sur des plans, un, de la rénovation de
l'Hôtel-Dieu et, deux, des plans du nouvel hôpital du nord-est de
Montréal.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Trudel: Mais, par ailleurs, Mme la ministre, combien de
millions de dollars ont été investis, engloutis dans les frais
d'architectes, d'ingénieurs, de dessinateurs pour des amis qui avaient
contribué à la caisse? Combien? Est-ce que 2 000 000 $ est un
chiffre raisonnable? Combien, Mme la ministre?
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Vous
aurez compris, comme tous les parlementaires dans cette Chambre qui connaissent
bien le règlement, y inclus parfois le député de
Rouyn-Noranda?Témiscamingue, que, telle que libellée, la
question additionnelle formulée par le député violait les
dispositions du premier alinéa de l'article 77 de notre
règlement. Et, dans les circonstances, M. le Président, je vous
invite à lui demander de reformuler sa question conformément
à notre règlement.
Le Président: Écoutez... Alors, la question a
été posée. Il y avait une partie d'élément
où il y avait une question d'opinion; on peut la retirer. La question
est posée. Alors, Mme la ministre, pour la réponse.
Mme Robillard: M. le Président...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît! M. le
député de Lévis, s'il vous plaît! Mme la
ministre.
Mme Robillard: M. le Président, est-ce que je dois
comprendre que l'Opposition n'est pas d'accord avec la décision
gouvernementale et voudrait qu'on déménage l'Hôtel-Dieu
dans le nord-est de Montréal? Est-ce que je dois comprendre ça,
M. le Président?
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
S'il vous plaît! M. le leader, s'il vous plaît! Alors, Mme la
ministre, pour conclure.
Mme Robillard: M. le Président, il était
très clair qu'en prenant cette décision de ne plus
déménager l'Hôtel-Dieu, la conséquence, c'est qu'il
y a eu des dépenses faites dans le plan fonctionnel et technique pour le
nouvel hôpital de l'Hôtel-Dieu dans le temps, disait-on, qu'on
voulait construire dans le nord-est. On a engagé des dépenses
gouvernementales. À ce que je sache, non seulement la coalition de
Montréal était contre le déménagement mais le PQ
aussi était contre le déménagement. Et, donc, c'est tout
à fait normal que nous ayons engagé des dépenses. (15 h
40)
Le Président: En question principale, M. le
député de Masson.
Subvention au Manoir Richelieu pour faire de la
promotion touristique à l'étranger
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Concernant
l'octroi d'une subvention de 200 000 $ au Manoir Richelieu pour faire de la
promotion touristique à l'étranger, véhicule
utilisé, selon M. Malenfant sous serment, afin de remplir une vieille
promesse libérale de 1 000 000 $ à l'endroit de M. Malenfant
lui-même pour l'amener à compléter les travaux de Pin
rouge, le ministre responsable du Tourisme, à ma demande, a
déposé hier une liasse de factures disant vouloir faire preuve de
limpidité et de transparence, mais en omettant, volontairement, j'en
suis persuadé, d'y inclure la demande...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Blais: Je «peux-tu» finir ma question?
Le Président: S'il vous plaît! Oui. Alors,
poursuivez, M. le député de Masson.
M. Blais: En omettant volontairement d'y inclure la demande du
Manoir Richelieu supportant ces factures. Alors, je demande au nouveau ministre
du Tourisme du vieux gouvernement libéral, toujours dans un souci de
limpidité et de transparence... Je réclame à nouveau du
ministre responsable du Tourisme le dépôt de la demande d'aide
financière qu'a dû formuler le Manoir Richelieu avant d'obtenir
cette subvention, demande qui, selon les critères du ministère
? promotion coopérative ? devait notamment comporter une
description détaillée du projet ainsi que du plan de
financement.
Le Président: Alors, M. le ministre responsable du
Tourisme.
M. Farrah: Alors, M. le Président, toujours par souci de
limpidité et par souci de transparence, je sollicite le consentement de
cette Chambre pour déposer cette demande, M. le Président.
Des voix: Ha, ha, ha! Bravo! Bravo! Document
déposé
Le Président: Alors, il y a consentement au
dépôt du document? Alors, consentement. Le document est
déposé.
S'il vous plaît! O.K. À l'ordre! Alors, pour... S'il vous
plaît! Allons!
Alors, question complémentaire, M. le député de
Masson.
M. Blais: Merci, M. le Président. Sachant que cette
demande est datée du 12 décembre 1990 et que vous nous avez remis
des factures, hier, de 1986, 1987, 1988 et 1989, comment avait-on
présumé, dans une demande de 1990, que des factures de 1986 y
seraient contenues?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Farrah: M. le Président, c'est bien simple, c'est que
le programme dit qu'il faut payer sur présentation de factures. Alors,
quand on reçoit les factures, on défraie selon les normes du
programme. C'est bien simple, M. le Président!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, en question... S'il vous plaît!
Alors, pour une autre... O.K. S'il vous plaît! À l'ordre, s'il
vous plaît! O.K. À l'ordre, s'il vous plaît!
Donc, en question complémentaire toujours, M. le
député de Masson.
M. Blais: Comment le ministre peut-il concilier la réponse
qu'il me fait avec, dans les normes de ce programme, le fait qu'il faut
connaître le plan de financement et les buts visés, et d'avance le
nommer? Et là vous arrivez avec des factures de 1986 puis un projet qui
aurait été demandé en 1990.
Le Président: M. le ministre responsable du Tourisme.
M. Farrah: Absolument, M. le Président. Il n'est pas
question... Dans ce dossier-là, nous avons respecté en toutes
lettres les normes du programme. Qu'on nous prouve le contraire, et on verra.
Mais, absolument, nous avons respecté les normes de ce
programme-là, qui existe depuis 1975, donc 19 ans. Et, dans ce
sens-là, en tout point... Prouvez-nous que nous n'avons pas
respecté ce programme et nous agirons. Mais en tout point nous l'avons
respecté, M. le Président.
Des voix: Bravo! Bravo!
Le Président: En question principale, M. le
député d'Anjou.
Mise en tutelle de compagnies par la
Société d'habitation du Québec
M. Bélanger: Merci, M. le Président. On apprenait
hier que la Société d'habitation du Québec a, le 9
février 1994, déposé une requête auprès de la
Cour supérieure du Québec concernant la mise en tutelle de la
compagnie Habitats Métis du Nord et de la corporation Waskahegen ainsi
que de leurs administrateurs qui agissent comme mandataires pour le
gouvernement du Québec. Cette requête faisait suite à des
vérifications effectuées par la SHQ et la SCHL auprès de
M. Gilles Bérubé, P.-D.G. de ces compagnies, qui administre un
parc immobilier subventionné, en plus de réaliser des projets
d'habitation pour la clientèle autochtone hors réserve. Les
médias nous informaient, entre autres, que, depuis 1989, M.
Bérubé s'est placé en constante situation de conflit
d'intérêts par rapport à des achats effectués
à son commerce. On faisait également état d'un
fonctionnement déficient desdites corporations.
Ma question au ministre de la Justice: Au-delà des
problèmes de gestion déficiente et de manque de contrôle de
la SHQ sur ces deux mandataires, le ministre de la Justice peut-il nous
confirmer si, comme les médias l'ont mentionné, la SHQ avait,
dès 1991, averti son ministère de la présence de
nombreuses irrégularités? Si oui, pourquoi le ministère
n'a-t-il pas agi à ce moment-là?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Par mesure de prudence, M. le
Président, vous aurez compris, de même que le député
d'Anjou, que je me lève, à ce moment-ci, pour rappeler aux
membres de cette Assemblée les dispositions de l'article 35,
alinéa 3 de notre règlement, qui stipule ce qui suit: «Le
député qui a la parole ne peut parler d'une affaire qui est
devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet
d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter
préjudice à qui que ce soit.» Les paroles prononcées
par le député d'Anjou n'ont pas porté préjudice
à qui que ce soit, le ministre de la Justice en est conscient
également. J'attire simplement la prudence de tous les intervenants dans
ce dossier.
Le Président: Alors... S'il vous plaît! Alors,
l'article 35 doit être respecté par l'ensemble des parlementaires.
Je vous invite à vous y conformer. Donc, M. le ministre de la
Justice.
M. Lefebvre: Merci, M. le Président. M. le
Président, je dois, dans un premier temps, indiquer à cette
Chambre que les avocats de la Société d'habitation du
Québec ne relèvent pas de l'autorité du ministre de la
Justice. Et je pense que, en toute bonne foi, le député d'Anjou
comme, j'imagine, plein d'autres citoyens au Québec ont
été induits en erreur par un journaliste qui, j'imagine, lui
aussi, est de bonne foi. En aucun moment, ni l'an passé, ni en 1990, ni
en 1991, le ministère de la Justice n'a reçu de demande d'avis de
la Société d'habitation du Québec. Donc, le
ministère n'ayant pas reçu de demande d'avis, c'est
évident qu'on ne peut pas donner d'opinion.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, en question principale, M. le
député d'Arthabaska.
Permis de tenir un casino dans les foires
agricoles
M. Baril: Oui, M. le Président. Le ministre de
l'Agriculture a eu l'audace, hier, de dire que le Parti québécois
ne s'intéresse pas au petites expositions agricoles, et ça,
après avoir lui-même mis fin à un programme norme de 1 000
000 $. Aussi, le ministre de l'Agriculture a admis qu'une partie des profits du
casino du Salon québécois du cheval ont été
détournés à des fins autres que celles des organismes qui
ont organisé le casino. Ils sont 28 au Québec. Vingt-huit fois
100 000 $, ça fait 2 800 000 $. Il s'agit d'une pratique immorale et
à la légalité plus que douteuse. Le ministre met les
organismes agricoles dans une position de faiblesse, car il peut marchander
l'octroi du droit de tenir un casino en retour d'une remise d'une partie des
profits dans un fonds spécial dont la gestion est laissée
à sa discrétion. C'est le retour, M. le Président, aux
politiques de Taschereau et de Duplessis où on fournissait un frigidaire
puis une caisse de bière pour se faire élire!
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Baril: Ma principale, M. le Président.
Le Président: Mmes, MM. les députés! Pour
votre question principale, M. le député d'Arthabaska.
M. Baril: Est-ce que cette obligation est appliquée
à chaque permis de casino et est-ce que le ministre a demandé aux
28 organismes qui tiennent un casino agricole de mettre en réserve un
montant à même leurs profits, qui sont, par la suite,
attribués selon sa propre discrétion?
Le Président: Alors, M. le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Picotte: Je ne sais pas, M. le Président, si le
député parle de caisses de bière parce que c'est un
domaine qu'il connaît mieux que les autres, mais, en tout cas, M. le
Président, ce que je voudrais mentionner... (15 h 50)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Picotte: ...ce que je voudrais...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, M. le ministre.
M. Picotte: De toute façon, moi, je ne connais rien dans
les caisses de bière. Vous comprendrez que je n'en distribue même
pas.
Alors, M. le Président, d'abord, je voudrais relever deux points:
un point qui est exact quand j'ai dit que le Parti québécois
détruisait les organismes agricoles en région et souhaitait que
ces gens-là ne soient pas aidés...
Le Président: Un instant, s'il vous plaît,
là. Je vais demander la collaboration des collègues, s'il vous
plaît. S'il vous plaît, M. le député! M. le
député! À l'ordre, M. le député, s'il vous
plaît! À l'ordre!
Écoutez, vous savez fort bien... Comme président de
l'Assemblée, vous savez fort bien que je réprouve de toute
façon tous les commentaires directement d'un côté à
l'autre. Ceux qui veulent discuter, allez donc discuter à
l'extérieur et laissez l'Assemblée poursuivre ses travaux en
toute conformité au règlement.
Alors, j'ai reconnu une personne, le ministre de l'Agriculture, et je
vous laisse la parole.
M. Picotte: Oui, M. le Président. J'accepte ce que
dit le député d'Arthabaska à l'effet que, oui, c'est
exact, le Parti québécois tente par ses gestes, ses questions de
faire en sorte de détruire les organismes agricoles en région, et
même les petits organismes agricoles qu'on a dans chacune des
municipalités, M. le Président. Et il y en a eu partout à
travers le Québec, et ça, c'est dommage. C'est dommage. Et
même, parfois, il y a des gens qui ont pu en bénéficier,
beaucoup plus proches que le député d'Arthabaska... beaucoup plus
proches du député d'Arthabaska que du député de
Maskinongé, M. le Président. Quand on fait une collaboration, par
exemple, une entente avec les femmes collaboratrices en agriculture, quand on
est un agriculteur, et que sa femme est collaboratrice, et que son association
travaille en fonction d'aller chercher des choses intéressantes pour
eux, il y a des gens qui en bénéficient beaucoup plus proches que
le député de Maskinongé. Peut-être que le
député d'Arthabaska en est un de ceux-là, M. le
Président, puisque sa femme doit être une agricultrice qui est
collaboratrice, de même que sa bru et ceux qui gravitent alentour. Mais,
M. le Président, je serai d'accord là-dessus qu'on tente de
détruire...
Deuxième des choses, je dirai tout simplement au
député d'Arthabaska qu'il ne semble pas être capable
de lire les documents, que le ministre ne demande rien à qui que ce
soit. C'est purement administratif. Jamais le bureau du ministre n'est
intervenu. Jamais le cabinet du ministre n'est intervenu. Jamais le ministre ne
fait des distributions comme ça. C'est une entente administrative entre
l'administration du ministère de l'Agriculture et les organismes qui
bénéficient de casinos, M. le Président.
Le Président: Alors, en question
complémentaire.
M. Baril: M. le Président, qui est le boss du
sous-ministre?
Deuxièmement, le ministre peut-il dire si les 28 casinos sont
obligés de déposer une somme de 100 000 $ ou plus dans la petite
caisse du ministre de l'Agriculture?
Le Président: M. le ministre.
M. Picotte: M. le Président, je regrette, je ne peux pas
accepter de faire partie des charognards de mauvaise information. Il n'y a pas
de petite caisse de ministre, M. le Président, d'aucune façon.
Et, si le député d'Arthabaska veut mettre son siège en
jeu... Il y a un règlement ici, à l'Assemblée nationale.
Je défie le député d'Arthabaska de démontrer qu'il
y a une petite caisse qui appartient au ministre, qui est administrée
par le ministre. Mettez votre siège en jeu, espèce de peureux,
tel que vous êtes, comme c'est votre coutume...
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, je rappelle aux députés
simplement une chose: on ne doit jamais interpeller un député
directement, ni en réponse ni en question. Deuxièmement, si
quelque accusation veut être portée, vous devez procéder
suivant le règlement et procéder aux accusations tel que le
règlement le prévoit. D'accord?
Alors, simplement, j'aimerais...
Vous avez une question de règlement? Je vous écoute.
Allez-y.
S'il vous plaît!
M. Chevrette: M. le Président, la dernière partie
du ministre à l'endroit de mon collègue, les paroles doivent
être retirées, M. le Président.
J'espère que ça ne fait pas partie de l'ancien et du
nouveau gouvernement, là.
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Il y
a eu...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a eu, et le leader de
l'Opposition, s'il veut faire preuve d'une objectivité et d'une
honnêteté... des propos qui, de part et d'autre, ont
été exprimés, qui sont à la limite de ce qui
pourrait être acceptable suivant notre règlement. J'insiste, M. le
Président, que la provocation est venue de l'autre côté et
que la réponse a été mesurée.
Le Président: Alors, j'ai avisé simplement le
ministre de ne pas interpeller un député indirectement comme il
ne peut le faire. J'invite les gens à respecter le règlement.
Vous connaissez tous le règlement, donc je vous invite à le
respecter.
Question complémentaire, M. le député
d'Arthabaska.
M. Baril: M. le Président, est-ce que...
Le Président: M. le député, s'il vous
plaît! Alors, question complémentaire.
M. Baril: M. le Président, est-ce que l'énerve-ment
du ministre proviendrait des nombreuses enquêtes policières qu'il
se fait à peu près sur tout ce qui bouge alentour de lui?
Le Président: M. le député, simplement, je
vous ai reconnu pour une question... Un instant! Je vous ai reconnu pour une
question complémentaire relative à votre question. Alors, pas
d'insinuation ? vous le savez fort bien d'un côté comme de
l'autre ? c'est défendu et ça dégénère
en situation inacceptable. Alors, si vous avez... Question de privilège,
M. le ministre.
M. Picotte: À ce moment-ci, au moment où des gens
tentent d'insinuer quoi que ce soit, M. le Président, je voudrais vous
lire une lettre de M. Robert Lavigne, directeur général de la
Sûreté du Québec. Et, je demande, M. le
Président...
Le Président: Oui, oui, une minute! Une minute! M. le
leader de l'Opposition.
M. Chevrette: M. le Président, la question de
privilège en cette Chambre, ce n'est pas de demander le privilège
de lire quoi que ce soit. Il faut d'abord plaider sur le privilège
lui-même, en quoi le privilège est lésé; vous
statuez et, à ce moment-là, vous donnez le temps. Mais vous ne
pouvez pas accepter une plaidoirie avant même de reconnaître le
privilège en cette Chambre.
Le Président: Alors, effectivement... M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Je
suis drôlement surpris de la réaction de mon bon ami le leader de
l'Opposition officielle. Je vous rappelle, M. le Président, une de vos
décisions récentes, dans le cas où le député
de Joliette avait été interpellé ou
interrogé par la police, où le premier ministre du
Québec, M. Robert Bourassa, y avait fait allusion. Il a
été le premier à se lever sur une question de
privilège et vous avez décidé, à l'époque,
qu'il s'agissait d'une question de fait personnel, et vous lui avez permis de
s'exprimer. À ce moment-ci, je demande votre permission pour que le
collègue de Maskinongé, le ministre de l'Agriculture, puisse
s'exprimer.
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, le député de
Maskinongé et ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation invoque une question de privilège. Dans un premier temps,
il doit identifier la question de privilège ? ce qu'il va me faire
à l'instant ?et, après ça, je lui permettrai ?
si, prima facie, c'est une question de privilège ? je lui
permettrai de s'exprimer là-dessus, tel que le prévoit le
règlement. Il y a deux façons de procéder: une
façon, immédiatement après le fait, comme le ministre le
fait, et, la deuxième façon, on a eu un exemple aujourd'hui, le
député de Lévis, par un avis au président, une
heure avant la période de questions. Alors, c'est ça. Donc, le
ministre se prévaut de la première disposition de l'article 66,
et je vous invite à me formuler quel privilège vous mettez en
cause, M. le ministre.
M. Picotte: Oui, M. le Président. Le député
d'Arthabaska a fait allusion à différentes enquêtes et
à certaines insinuations et je voudrais là-dessus, M. le
Président, de mon siège, dire immédiatement et
déposer une lettre, et lire une lettre, M. le Président, que j'ai
en ma possession, réfutant les faits que vient de dire le
député d'Arthabaska. Et je pense qu'on n'a pas le droit, comme
parlementaires, de permettre à qui que ce soit de laisser insinuer quoi
que ce soit et de ne pas permettre à la personne concernée de
défendre ses droits, M. le Président. Et ça, j'y tiens
par-dessus tout. Et je tiens à ça encore plus qu'à mon
siège de député de Maskinongé, M. le
Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: Oui, un instant! Alors, vous faites allusion
aux questions des enquêtes qui ont été
énoncées par le député. Vous voulez réfuter
cette chose-là. Techniquement, au sens du règlement, ceci
constitue une question de fait personnel. Ce que j'avais rendu comme
décision à l'époque où ça avait
été soulevé, j'avais permis qu'on s'exprime
là-dessus. Alors, il y a deux façons de fait personnel: soit
qu'on s'exprime immédiatement aujourd'hui, s'il y a consentement de
l'Assemblée, ou sinon vous devez revenir demain à la
période des affaires courantes en me donnant un avis d'une heure.
Alors, à ce moment-ci, est-ce qu'il y a consentement pour que le
ministre puisse s'exprimer là-dessus immédiatement ou si on doit
revenir demain? Ça me prend un consentement unanime. Est-ce qu'il y a
consentement? M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement à l'endroit de
mon bon ami le député de Joliette, lorsque des questions de
réputation de membres de cette Assemblée sont en cause, le plus
rapidement on peut les liquider, quel que soit le membre impliqué, je
pense que ça sert l'Assemblée nationale du Québec. Et,
dans les circonstances, j'insiste pour que mon bon ami le député
de Joliette nous donne le consentement; dans des circonstances similaires, nous
l'avons accordé. (16 heures)
Le Président: Bon. Effectivement. Alors, est-ce qu'il y a
consentement à ce qu'on puisse laisser le ministre s'expliquer sur cette
question rapidement, comme le prévoit le règlement, ou si vous
voulez qu'on revienne demain? Il y a consentement? Donc, il y a consentement.
Donc, M. le ministre.
M. Chevrette: ...
Le Président: M. le leader, oui. M. le leader de
l'Opposition.
M. Chevrette: De consentement, on pourrait s'entendre pour ne pas
que ça écourte la période de questions.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, consentement, M. le
Président.
Le Président: La période de questions est d'un
maximum de 45 minutes. Donc, il y a consentement. Nous rajouterons le temps
nécessaire pour que les explications... auquel les explications... Nous
reprendrons le temps nécessaire pendant lequel le ministre s'exprimera.
Alors, M. le ministre.
Question de privilège du ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation sur certaines
allégations
d'enquêtes policières le
concernant
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Oui, M. le Président. Suite à certaines
allégations qui avaient eu lieu par certains journalistes au
Québec et à d'autres, M. le Président, celles qui ont
été soulignées par mon collègue d'Arthabaska il n'y
a pas si longtemps, j'avais demandé au secrétaire
général du Conseil exécutif, M. Benoît Morin, de
clarifier cette situation-là avec le ministère de la
Sécurité publique et la Sûreté du Québec. Je
voudrais déposer une lettre de moi-même adressée à
M. Morin faisant cette demande-là et je voudrais vous lire, M. le
Président, brièvement ? ce n'est pas long ? la lettre
du directeur général de la Sûreté du Québec
signée par lui-même, M. Robert Lavigne, qui dit ceci en
répondant au secrétaire général: «La
présente fait suite à votre lettre du 21 février
1994 concernant le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation et ministre délégué aux Affaires
régionales, M. Yvon Picotte. «La Sûreté du
Québec a eu à enquêter le domaine des courses à
plusieurs reprises depuis quelques années. Ce domaine a
été vivement critiqué par des gens de divers milieux.
«La Sûreté du Québec, lors de ses enquêtes ou
rencontres avec les gens du milieu des courses et autres, n'a pas reçu
d'information qui porte atteinte à l'intégrité du ministre
Yvon Picotte. «Veuillez agréer, M. le secrétaire
général, l'expression de mes sentiments les meilleurs.»
Signé: Robert Lavigne, directeur général de la
Sûreté du Québec. Et c'est daté du 28 février
1994, et je vous demande, M. le Président, de déposer ces deux
lettres.
Documents déposés
Le Président: Alors, très bien. Il y a consentement
au dépôt des documents? Il y a consentement. Les documents sont
déposés.
Questions et réponses orales
Alors, nous poursuivons maintenant la période de questions.
Question complémentaire, M. le député d'Arthabaska.
Permis de tenir un casino dans les foires agricoles
(suite)
M. Baril: Est-ce que le ministre a demandé une opinion
juridique sur la légalité de cette pratique, qui fait en sorte
que son sous-ministre écrit aux organismes puis les oblige à
débourser une somme de 100 000 $? Est-ce que cette pratique-là...
Est-ce que le ministre a un avis légal sur cette pratique, qui consiste
à détourner des fonds provenant des profits de casinos agricoles
pour les distribuer selon le bon vouloir du ministre?
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président...
Le Président: Alors, s'il vous plaît! S'il vous
plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le...
À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le
député, s'il vous plaît! MM. les députés!
S'il vous plaît!
Alors, M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le
Président. Tout simplement pour rappeler au député
d'Arthabaska les dispositions de l'article 35 de notre règlement: on ne
peut, en vertu de la quasi-totalité des 10 alinéas,
alléguer qu'un parlementaire...
Le Président: S'il vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...alléguer dans...
Le Président: Un instant, là. Un instant, s'il vous
plaît! Il y a une question de règlement, on va l'écouter.
Après ça, on verra la suite. D'accord? Alors, M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Alléguer dans sa question
qu'un parlementaire détourne des fonds, à moins d'être
prêt à mettre son siège en jeu. Si c'est le cas, il y a une
procédure appropriée, et nous l'appliquerons.
Le Président: Bon. Écoutez, j'ai les propos du
député. Chaque député vit avec ses propos; un.
Deuxièmement, on parle de détourner... À mon sens, on
pourrait comprendre que ça veut dire détourner en
confrontation... aller à rencontre de la loi. Ce n'est pas ce que je
comprends nécessairement à ce moment-ci. On ne porte pas
d'accusation. Le député vivra avec ses propos. Le ministre pourra
répondre en corrigeant la situation avec des propos aussi
mesurés. Alors, j'invite les parlementaires à faire
véritablement attention au vocabulaire utilisé et à
être très, très soucieux du respect de l'ordre. D'accord?
M. le ministre.
M. Picotte: Merci, M. le Président. L'éducation,
c'est comme la boisson, il y en a qui ne portent pas ça, M. le
Président.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le ministre, s'il vous plaît.
À la question posée, s'il vous plaît.
Une voix: ...
M. Picotte: Non, il n'y a pas de...
Le Président: Bon. Donc, sur un rappel au
règlement, M. le leader de l'Opposition. S'il vous plaît!
M. Chevrette: M. le Président, question de
règlement, pour faire comme le leader du gouvernement. Je ne me suis pas
senti visé, M. le leader du gouvernement. C'est des propos tout à
fait insolites, vous aussi.
M. le Président, si je me lève, c'est
précisément parce que vous avez un bel exemple du respect du
règlement dès le départ. C'est des deux côtés
de la Chambre, ça, quand on se permet de rappeler les règlements.
M. le Président, vous avez pris la peine d'expliquer la nuance
même des propos de mon collègue d'Arthabaska. Demandez donc au
ministre de plonger dans le renouveau.
Le Président: Alors, M. le ministre, je vous invite
à répondre à la question sans commentaire, sur la question
directe qui vous ai posée, s'il vous plaît. Allez-y.
M. Picotte: M. le Président, ce que fait, au niveau
administratif, mon sous-ministre, c'est par ententes administratives. Il y a
des ententes qui se font au niveau administratif. Et en ce qui me concerne,
pour moi, comme il s'agit de sauver des gens dans le monde agricole, des
expositions agricoles, des groupes, de les aider à mieux
«performer», à être plus dans l'excellence pour se
préparer à l'avenir agricole, M. le Président, j'en suis
fort aise et je ne serai pas celui qui va être le fossoyeur des
régions au niveau agricole, comme certains d'entre nous, M. le
Président.
Le Président: Alors, pour une question principale, M. le
député de Montmagny.
M. Fllion: Merci, M. le Président.
Le Président: Excusez, de Montmorency. Je m'excuse.
Montmorency.
Remise au ministère du Revenu des taxes
perçues par les stations-service à Kahnawake
M. Filion: Merci, M. le Président. Sous le faux
prétexte de la confidentialité, le ministre du Revenu n'a pas
répondu à mes questions hier. Pourtant, M. le Président,
le ministre a toutes les preuves à l'appui. Il n'a qu'à consulter
l'ordinateur du ministère pour constater que les propriétaires
des stations de service à Kahnawake n'ont fait aucune remise de taxe
depuis plus de cinq mois. Son prédécesseur les avait d'ailleurs
pointés du doigt publiquement le 9 octobre 1993 et les avait
menacés de révoquer leurs certificats d'enregistrement, exposant
ainsi tous les fournisseurs d'essence à des pénalités
allant jusqu'à des peines d'emprisonnement, M. le Président.
Ma question, M. le Président. Alors, M. le ministre, ça
fait plus de cinq mois que la situation perdure. Qu'attendez-vous pour
révoquer sur le champ les permis d'opération des stations de
service qui empochent les taxes et ne les remettent pas au
ministère?
Le Président: Alors, M. le ministre du Revenu.
M. Vallerand: M. le Président, j'ai dit au
député de Montmorency hier, et à cette Chambre, que le
ministère du Revenu prendrait tous les moyens dont il dispose,
conformément à ses lois et à ses règlements, pour
faire en sorte de contrer toute évasion fiscale au Québec de
sorte à rétablir le principe de l'équité. J'ai
également ajouté, dans la foulée de cette explication, M.
le Président, qu'on n'amènera ni le ministère ni son
titulaire à faire le procès fiscal de qui que ce soit dans cette
Chambre. La notion de confidentialité est extrêmement importante
dans l'appréciation d'un système fiscal qui est basé sur
l'autocotisation. Le principe de l'autoco-tisation, c'est une invitation au
contribuable à nous faire, de son propre chef, ses déclarations
d'impôt. Cette confidentialité, pour moi, elle ne se transgresse
pas, d'aucune façon, M. le Président.
Sauf que je rassure cette Chambre, à tous égards, que
toute forme d'évasion fiscale avouée, systématique, qu'on
peut même percevoir comme étant connue, sera traitée avec
beaucoup de rigueur et de diligence. Et, à ce titre-là, nous
prendrons tous les moyens que la loi et les règlements nous permettent
de prendre au ministère du Revenu pour contrer cette évasion
fiscale.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de
questions.
Il n'y a pas de votes reportés?
Motions sans préavis.
Avis touchant les travaux des...
Oui, motions sans préavis, M. le leader de l'Opposition.
M. Chevrette: C'est la journée du mercredi?
Une voix: Oui.
M. Chevrette: C'est correct.
Le Président: Alors, il n'y a pas de motions sans
préavis.
Avis touchant les travaux des commissions
Donc, avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président,
j'avise cette Assemblée que demain, le jeudi 10 mars 1994, de 10 heures
à 12 heures, à la salle du Conseil législatif, la
commission des institutions poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de
la consultation générale sur le régime d'aide juridique et
sur le document intitulé: «L'aide juridique au Québec: une
question de choix, une question de moyens»; de 10 heures à 12
heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de
l'économie et du travail poursuivra ses consultations
particulières dans le cadre de l'étude détaillée du
projet de loi 116, Loi modifiant le Code du travail; de 10 heures à 12 h
30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
vos places, s'il vous plaît! M. le leader.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui. Donc, de 10 heures à
12 h 30, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission de
l'éducation entendra les intéressés et procédera
à l'étude détaillée des projets de loi
d'intérêt privé suivants, et ce, dans l'ordre
ci-après indiqué: projet de loi 228, Loi modifiant la Loi sur la
Corporation de l'École des hautes études commerciales de
Montréal; projet de loi 272, Loi concernant certains immeubles des
divisions d'enregistrement d'Arthabaska, de Bécancour et de Nicolet. (16
h 10)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vos avis sont
déposés. Je vous avise qu'aujourd'hui, mercredi le 9 mars, la
commission d'étude des questions afférentes à l'accession
du Québec à la souveraineté se réunira en
séance de travail après les affaires courantes, à la salle
1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de
statuer sur une demande d'accès à un document.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée. M. le
député de D'Arcy-McGee.
M. Libman: Je veux juste demander au leader du gouvernement s'ils
ont l'intention d'appeler l'article 25 du feuilleton, le projet de loi 195, Loi
modifiant la Loi sur l'Assemblée nationale, qui a été
présenté par le député de Mille-Îles, le 21
octobre 1993.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader du
gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président, en
temps opportun.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien. Est-ce
qu'il y a d'autres renseignements? Ceci met fin à la période des
affaires courantes.
Affaires du jour
Nous allons maintenant passer aux affaires du jour.
Affaires inscrites par les députés de
l'Opposition
Motion proposant que l'Assemblée exige
du gouvernement fédéral qu'il
renonce
à sa décision de fermer le
Collège
militaire royal de Saint-Jean
Aux affaires inscrites par les députés de l'Opposition, M.
le whip en chef de l'Opposition officielle et député de
Lac-Saint-Jean présente la motion suivante: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
renonce à sa décision de fermer le Collège militaire royal
de Saint-Jean.»
Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous informe
de la répartition du temps de parole établie pour la discussion
de cette motion. Mises à part la réplique de 10 minutes
accordées à l'auteur de la motion et les 10 minutes
allouées à l'ensemble des députés
indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront
également la période consacrée à ce débat.
Dans ce cas, les interventions sont limitées à une durée
de 30 minutes chacune.
Je suis maintenant prêt à reconnaître le premier
intervenant, M. le whip en chef de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, avant que ne
débutent les travaux...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, M. le...
M. Chevrette: ...nous allons exiger que l'Assemblée
nationale soit réceptive.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je demanderais
l'attention des députés. M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Pour souscrire aux propos du
leader de l'Opposition officielle, je conviens qu'une application un peu plus
stricte des dispositions de l'article 32 de notre règlement serait
appropriée.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, les
députés qui ne sont pas à leur place, si vous voulez
prendre vos places, s'il vous plaît. Et ceux qui ont des discussions
à entreprendre entre eux, il y a des salons pour le faire.
Alors, M. le whip en chef de l'Opposition officielle, je vous
reconnais.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, tout le monde
reconnaît, aujourd'hui, qu'il faut, de toute nécessité,
réduire les dépenses militaires, donc s'imposer des compressions
et des restrictions, de façon à ce que le budget du
ministère de la Défense diminue de façon substantielle.
Compte tenu du déficit astronomique du gouvernement
fédéral, compte tenu de l'endettement monstrueux du gouvernement
fédéral, il y a unanimité pour s'engager dans la voie des
réductions des dépenses militaires, aussi bien au Parti
libéral du Canada qu'au Bloc québécois, et même au
Reform Party, et on peut dire que tout le monde est d'accord pour aller assez
loin dans cette voie. Il faut comprimer, il faut couper le budget du
ministère de la Défense.
La question qui se pose, une fois qu'on a reconnu cela, c'est comment on
coupe, de quelle façon et, surtout, quelles sont les conséquences
de ces coupures et de ces restrictions sur l'économie
québécoise? Comme Québécois, je pense que ça
nous préoccupe au plus haut point. Quelles sont les conséquences
sur les investissements du ministère de la Défense au
Québec? Quelles sont les conséquences sur les emplois du
ministère de la Défense au Québec? Je pense que ce sont
des questions majeures qu'il faut se poser. Et, surtout, avant de sabrer, avant
de couper, il faut examiner scrupuleusement et sérieusement quelles sont
les retombées actuelles du ministère de la Défense au
Québec, les retombées économiques et les retombées
en termes de dépenses. En d'autres termes, est-ce que le principe de
l'équité est respecté? Est-ce que le principe de
l'équité s'applique? Est-ce que le Québec reçoit sa
juste part des
dépenses du ministère de la Défense? Est-ce qu'il y
a une répartition équitable qui favorise le Québec ou qui
le défavorise?
Il nous apparaît, M. le Président, qu'il est
impérieux, essentiel d'examiner ces questions, cette question de la
répartition, cette question de l'équité, avant de prendre
des décisions de compressions et de coupures. Bien, la réponse,
elle est simple; la réponse, c'est non, le Québec n'est pas
favorisé, le Québec n'a pas sa juste part des retombées
économiques du ministère de la Défense. Et ça, ce
n'est pas récent, c'est de tout temps, de tout temps. On peut prendre
n'importe quelle année budgétaire du gouvernement
fédéral et on va se rendre compte que la répartition des
dépenses du ministère de la Défense défavorise le
Québec. Et je pense que c'est dans cette perspective-là qu'il
faut situer la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean. quelle
est-elle, cette perspective? rapidement, m. le président, je pense que
quelques chiffres s'imposent. le québec est perdant et de façon
très notable, très substantielle en matière de
retombées du ministère de la défense. il n'est pas
traité équitablement, ça saute aux yeux, il suffit de
regarder les chiffres, et ça, de tout temps. le québec, vous le
savez, compte 25 % de la population du canada. on paie à peu près
l'équivalent en impôts, également; 24 % à 25 % des
taxes, c'est des impôts qu'on paie au gouvernement fédéral.
eh bien, quelle est notre part en matière de dépenses du
ministère de la défense? elle est, en 1990-1991, de 17 %. elle
est, en 1992-1993 ? ça s'est détérioré l'an
passé ? de 15,8 %. nous constituons 25 % de la population du canada
et nous recevons tout au plus, au maximum, 17 % des dépenses du
ministère de la défense, des dépenses militaires. et
même, l'an passé, c'était à 15 %. évidemment,
l'ontario est privilégié. la proportion de retombées en
ontario est toujours de l'ordre de 35 %, 36 %. et ça, c'est dans presque
tous les postes budgétaires, que ce soit en personnel, par exemple... en
personnel, nous recevons, en rémunération de personnel de tous
ordres, civil ou militaire, venant du ministère de la défense, au
québec, 773 000 000 $. c'est 15 % des dépenses du
ministère en personnel; 15 % seulement. la nouvelle-ecosse reçoit
793 000 000$, soit 15,4%. imaginez-vous! la nouvelle-ecosse, qui compte
à peu près 5 %, 5 % à 6 % maximum de la population du
canada, reçoit 15 % des dépenses en personnel. pour les
infrastructures, c'est encore pire. le québec ne compte que 13 % des
infrastructures en matière de défense par rapport au reste du
canada.
Donc, la cause est entendue, M. le Président. Il suffit
d'examiner les chiffres et la conclusion s'impose d'elle-même. En
matière de défense, en matière de retombées
économiques du ministère de la Défense et de
retombées budgétaires, le Québec n'a pas un traitement
équitable. Le Québec ne reçoit pas sa juste part.
Par conséquent, l'argument de M. Chrétien, premier
ministre fédéral, voulant que le Québec doit faire aussi
sa part et doit subir des coupures, et les accepter, et s'y résigner est
un raisonnement, est un argument simpliste, pour ne pas dire grossier et
passablement démagogique. Parce que, quand on regarde les chiffres, il
est évident que le Québec fait déjà sa part.
À partir du moment où on ne reçoit pas, depuis des
années et des années, notre juste part de retombées, c'est
évident qu'on ne doit pas subir des coupures et des compressions qui
vont venir aggraver, accentuer cette inéquité. Sans compter, il
faut le dire, qu'on a déjà quand même contribué
substantiellement, depuis quelque temps, aux réductions des
dépenses militaires. On n'a qu'à penser à l'annulation du
contrat des hélicoptères. Les retombées auraient dû
se situer surtout au Québec. Bien, cette annulation, c'est clair que
c'est une bonne contribution du Québec à la réduction des
dépenses militaires. Et, il n'y a pas si longtemps encore, on a
fermé, un peu partout au Québec, des stations de radar. Je le
sais très bien puisqu'on en a fermé une dans mon propre
comté, ce qui a entraîné la suppression de 200 emplois
à la station du mont Àpica, qui est située dans la
réserve des Laurentides. (16 h 20)
Alors, non seulement le Québec n'a pas sa juste part des
dépenses militaires, non seulement le Québec est traité
inéquitablement, mais, en plus, on peut dire qu'il fait quand même
sa part.
C'est dans ce contexte-là, M. le Président, que la
décision du gouvernement fédéral de fermer le
Collège militaire de Saint-Jean est à la fois injustifiée,
injustifiable, c'est une décision bâclée, c'est une
décision totalement irresponsable, c'est un coup de matraque sauvage
contre le Québec et c'est une décision qui ne tient aucunement
compte du traitement inéquitable que reçoit le Québec
depuis des dizaines et des dizaines d'années en matière de
dépenses militaires du ministère de la Défense.
Fermer le Collège militaire de Saint-Jean, c'est fermer
l'institution qui a contribué à amorcer ? je dis bien
à amorcer; non pas à compléter mais à amorcer
? le rétablissement de l'équilibre linguistique au sein
d'une armée de métier qui était carrément
étrangère et hostile aux francophones. Il faut se rappeler
l'histoire, M. le Président, il faut avoir un peu de mémoire dans
ce domaine-là. L'armée canadienne, depuis qu'elle existe, est une
armée considérée par les Québécois
francophones comme une armée étrangère, en quelque sorte,
comme une armée résolument hostile au fait français et aux
francophones. Qui peut avoir, M. le Président, la mauvaise foi de
prétendre que le travail amorcé par le Collège militaire
de Saint-Jean est un travail achevé et qu'on peut désormais dire
«mission accomplie»? D'aucune façon. Avant que ne soit
créé le Collège militaire de Saint-Jean, l'armée,
c'était une grosse machine assi-milatrice, c'était une grosse
machine «anglicisatrice». C'est ça, l'histoire, et ça
l'est très largement encore.
Le Collège militaire de Saint-Jean, qui a été
fondé, comme on le sait, en 1952, au début des années
cinquante, par sa création, on permettait à tout le moins aux
francophones d'avoir accès à une formation
d'officier de qualité, d'avoir aussi accès à des
grades supérieurs, d'avoir accès à des postes importants
de la défense et de l'armée. Mais, encore là, il ne faut
pas plastronner ni claironner, les objectifs sont encore assez modestes, hein.
Il faut se rappeler qu'actuellement il y a à peine 10 % des
gradés supérieurs de l'armée qui sont des officiers
francophones, à peine 10 %, alors que, rappelons-le toujours, nous
constituons 25 % de la population. Alors, on est loin de
l'équité. Mais il y a quand même eu des progrès.
Pourquoi il y a eu des progrès? À cause de l'existence même
du Collège militaire de Saint-Jean. C'est l'évidence, et tout le
monde le reconnaît.
Fermer le Collège militaire de Saint-Jean, M. le
Président, c'est reculer de 40 ans et c'est remettre en branle le
processus d'anglicisation des officiers francophones, c'est réduire
l'apport des francophones dans le corps des officiers de l'année
canadienne, c'est le retour en force de la discrimination linguistique dans
l'armée canadienne et c'est perdre aussi, pour la région de
Saint-Jean et pour le Québec, 1700 emplois dans un milieu où
c'est considéré, à juste titre, M. le Président,
comme une catastrophe, comme un désastre économique.
Fermer le Collège militaire de Saint-Jean, c'est perdre
près de 4 000 000 $ en recherche quand on sait, encore une fois, que,
dans ce domaine-là comme dans bien d'autres, le Québec est
traité de façon fort peu équitable en matière de
recherche. Fermer le Collège, M. le Président, c'est se priver
d'une institution de haut niveau en aérospatiale, en études
stratégiques, en administration militaire. René Bouchard, qui est
un éditorialiste, je pense que c'est de La Voix de l'Est, disait
à ceux qui, entre autres, essaient d'imaginer des solutions de rechange
et d'instaurer à la place, d'établir à la place une
institution de niveau universitaire, on ne sait pas trop de quelle nature, puis
dans quel ordre et dans quelle voie, puis quel programme, il disait qu'il y a
actuellement au Collège militaire de Saint-Jean des programmes qui se
donnent et qui ne se retrouvent pas ailleurs, en particulier en informatique
hautement spécialisée, de haut niveau, en particulier un
département d'études stratégiques de fort calibre et
très reconnu, disait René Bouchard. C'est là aussi qu'on
dispense le seul diplôme d'études en sciences spatiales du Canada,
très bien coté.
Alors, M. le Président, je pense que la solution à la
fermeture du Collège militaire de Saint-Jean que préconise le
gouvernement libéral fédéral est une solution qui est
burlesque. C'est une farce sinistre, qui transpire l'hypocrisie la plus pure et
la mauvaise foi. On prétend que ce n'est pas grave, la fermeture du
Collège militaire de Saint-Jean, ça va être remplacé
par Kingston. Le collège militaire de Kingston, c'est là qu'on va
désormais former les officiers francophones en français. C'est la
farce la plus grotesque dans ce dossier-là, quand on sait ce que c'est
le milieu de Kingston: c'est un bastion loyaliste de résistance farouche
au fait français.
La Fédération des communautés francophones et
acadienne du Canada, M. le Président ? s'il y a une organisation
qui a une expertise sur ce qui se passe sur le sort, sur la santé des
communautés françaises hors
Québec, c'est bien la Fédération des
communautés francophones et acadienne du Canada; ils connaissent
ça, ils regroupent les communautés francophones ? quand elle
a pris connaissance de cette solution-là, la Fédération
n'en revenait pas. Elle s'est indignée, révoltée.
Ça n'a pas de bon sens, a-t-elle dit. Écoutez, les francophones
de Kingston vivent dans un climat très hostile, dans des conditions
pitoyables sur le plan linguistique. Leur école secondaire est
installée dans des baraques, sans eau courante. On se croirait devant
une école d'un bidonville du tiers monde, l'école secondaire
francophone. L'école primaire, soi-disant francophone, à
Kingston, s'appelle Niagara Park School. Les parents ne peuvent même pas
changer son nom, lui donner un nom français. Vous imaginez?
C'est ça, Kingston. C'est ça, le milieu dans lequel on
prétend que les officiers francophones, formés à
Saint-Jean, vont maintenant être formés en français.
Là, c'est rire du monde. Ça, c'est rire du monde.
Évidemment, les parents n'ont aucune gestion scolaire, ce que
réclament les communautés francophones hors Québec depuis
longtemps, c'est-à-dire gérer leurs propres écoles. C'est
évident qu'on est loin du compte à Kingston. Ça n'existe
pas. C'est même considéré, sans doute, comme un
véritable scandale.
C'est dans un milieu comme celui-là, M. le Président,
qu'on prétend qu'on va assurer la formation en français des
officiers francophones de l'armée canadienne. Fumisterie et supercherie
de plus haut niveau. Personne n'est dupe, la Fédération des
communautés francophones et acadienne certainement pas, elle qui
connaît ça, qui connaît la situation des francophones hors
Québec. Et elle affirme que toute institution bilingue ? parce que
c'est ça que ce serait, prétend-on, à Kingston ? hors
du Québec est un foyer d'assimilation. Elle sait ce qu'elle dit; elle
connaît ça.
Quelle est l'attitude du premier ministre dans ce dossier-là, M.
le Président? Attitude pour le moins désolante et
déplorable, mais il a une chance de se reprendre, là, avec la
motion. Une espèce de réflexe conditionné de capitulation
qui a joué à plein. La première réaction, c'est de
dire: Écoutez, moi, je n'ai pas de ministre de la Défense. Je
n'ai pas ça, de ministre de la Défense. Nous, la défense,
on ne connaît pas. Ça ne nous regarde pas, cette
décision-là. Le ministre des Finances, M. Bourbeau, lui, a
été encore plus loin. Il a affirmé ? il faut dire
qu'il est assez ineffable dans ses déclarations depuis quelque temps: Je
serai le dernier à blâmer Ottawa de rationaliser ses
opérations s'il y a trop de collèges. Bravo,
félicitations, allez-y gaiement. (16 h 30)
Mais, devant le tollé de protestations, devant l'indignation
générale, la résistance qui s'organise,
particulièrement dans le milieu de Saint-Jean, regroupant des
intervenants de tous ordres et de toutes allégeances, là,
évidemment, le premier ministre a pris conscience des enjeux
réels et il a effectué une conversion tardive, sous la pression,
évidemment, de l'opinion publique, et là il a affirmé que
Saint-Jean, le Collège, c'était un
établissement utile et nécessaire. Il a finalement
compris. Ça a pris du temps, il n'est pas vite, mais il a finalement
compris, quoique ce n'est pas évident.
Parce que, quand on l'écoute et quand on constate son insistance,
son instance à faire la distinction byzantine entre la vocation
militaire et la vocation universitaire du Collège militaire de
Saint-Jean, là il y a anguille sous roche. Il y a de quoi être
inquiet, préoccupé, parce que, s'il insiste autant que ça,
à mon avis, c'est qu'on doit en conclure qu'il s'est
résigné dès le départ à ce que le
Collège de Saint-Jean soit amputé de sa vocation militaire, de sa
mission militaire. Moi, c'est comme ça que je le décode,
là. J'espère que je me trompe, puis j'espère qu'il va nous
détromper en appuyant la motion, mais c'est comme ça que je le
décode.
Ses propos sont inquiétants parce qu'il insiste trop, là,
pour dire: Écoutez, il y a deux missions, là, au Collège,
il y a la mission militaire puis il y a la mission d'enseignement
supérieur. Il insiste trop là-dessus pour ne pas nous
inquiéter et nous porter à conclure qu'il a déjà
baissé les bras, abandonné la partie, puis qu'il a
déjà accepté que la mission militaire, qui est la mission
centrale du Collège militaire de Saint-Jean, soit abandonnée.
Je disais que c'est une distinction byzantine, puis c'est vrai parce que
les deux missions sont enchevêtrées. Les deux missions sont
confondues. C'est une institution d'enseignement supérieur, oui, mais
c'est une institution d'enseignement supérieur pour former des
officiers. C'est une académie militaire, en quelque sorte, si on veut
une autre expression. Et, à partir du moment où vous ne formez
plus d'officiers, où la formation d'officiers disparaît, bien,
là, écoutez, ça perd sa raison d'être. L'institution
perd sa raison d'être. Donc, j'ai peur que déjà le premier
ministre ait signé sa reddition, qu'il ait déjà
baissé les bras et renoncé vraiment à faire la
bataille.
Il y a une façon de nous détromper, une seule
façon. La motion que je présente est très claire, elle est
limpide, elle est sans équivoque. Elle n'est pas longue, elle dit bien
ce que ça veut dire, c'est de demander au fédéral de
renoncer à sa décision de fermer le Collège militaire de
Saint-Jean en tenant compte de sa vocation dans toute sa plénitude, au
complet. Et la meilleure façon de dissiper l'équivoque,
l'ambiguïté, c'est, pour le premier ministre et pour les
députés ministériels, d'appuyer sans réserve cette
motion. De cette façon, les choses seront claires. Ça permet de
clarifier les choses. C'est l'occasion d'être transparent.
Les jeunes du Parti libéral réclament de la transparence.
Ils ont raison. Il faut être transparent comme gouvernement. Mais
ça signifie aussi que, s'ils réclament d'être transparent,
ça signifie qu'ils constatent, qu'ils se rendent compte que leur
gouvernement est peu transparent ou ne l'est pas assez.
Dans le dossier du Collège militaire de Saint-Jean, il y a une
seule façon d'être transparent et d'être clair. C'est de
dire au gouvernement fédéral: Vous avez pris une mauvaise
décision, une décision qui ne se justifie pas, qui n'est pas
fondée, qui va à rencontre des recommandations des experts, qui
ferait un tort économique considérable au Québec et
particulièrement à la région de Saint-Jean, une
décision qui nous ferait reculer 40 ans en arrière en ce qui a
trait à la présence et à la place des francophones dans
l'armée. Par conséquent, c'est de dire au gouvernement
fédéral: Vous devez renoncer à cette fermeture, vous devez
revenir sur votre décision. Puis ce n'est pas indigne de revenir sur des
décisions. On a vu ça, des gouvernements qui revenaient sur des
décisions. Ce n'est pas scandaleux non plus. Et, pour ce faire,
cependant, il faut qu'il y ait un large consensus, une mobilisation de tout le
monde. Il faut qu'ici même, à l'Assemblée nationale, et
c'est l'objet de la motion, M. le Président ? puis je conclus
là-dessus ? il faut qu'ici même, à l'Assemblée
nationale, l'unanimité se dégage et que tout le monde, de tous
les partis, ministériel comme députés de l'Opposition, on
soit unanimes à dire au gouvernement fédéral: Renoncez
à cette décision, ne fermez pas le Collège militaire de
Saint-Jean. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député. Je vais reconnaître maintenant M. le ministre de
l'Éducation. M. le ministre.
M. Jacques Chagnon
M. Chagnon: Merci, M. le Président. J'ai
écouté l'exposé de notre collègue de
Lac-Saint-Jean, et il a approché la question sous deux angles: l'angle
militaire, d'une part, et, un peu plus tard, l'angle un peu plus
académique.
En ce qui concerne l'angle militaire, je n'ai pas ses connaissances et
sa culture militaire, mais j'imagine que, si des gens connaissent la
Nouvelle-Ecosse ou le Nouveau-Brunswick, ils seront sûrement surpris
d'apprendre qu'ils n'ont pas perdu Cornwallis ou Chatham, qui étaient
d'immenses bases de l'armée canadienne, immenses bases, dans ces deux
provinces.
Quant à nos soldats qui venaient d'armées
étrangères, je connais les membres du Régiment de
Maisonneuve qui n'ont rien de parfaits assimilés, qui sont des
francophones qui ont vécu l'expérience militaire et qui ont fait
fructifier l'armée canadienne de leur expérience. Le
Régiment de la Chaudière a une réputation immense dans
toute l'armée canadienne comme groupe de francophones qui a reçu
à peu près tous les honneurs possibles au moment du baptême
du feu, sans parler évidemment de toutes les qualités de tous les
militaires qui ont servi dans le 22e Régiment, où ces
francophones n'ont jamais eu, à mon avis, l'impression qu'ils vivaient
dans une armée d'occupation ou encore moins dans une armée
étrangère.
Ceci étant dit, ma connaissance militaire s'arrê-tant
là, M. le Président, je vais davantage parler de la question
académique. Je l'ai dit immédiatement quand la nouvelle nous est
parvenue, le soir du budget, tout
comme le milieu universitaire, j'ai déclaré être
attristé par la fermeture d'une école militaire dans laquelle on
offre tant une partie du cours collégial qu'on retrouve ici que des
cours de niveau universitaire.
Peut-être serait-il opportun, à ce moment-ci, de faire un
peu l'historique. Le député de Lac-Saint-Jean est un ancien
professeur d'histoire, mais toujours féru de cette matière, et je
voudrais lui faire remarquer qu'un Canadien français, probablement, du
nom de Brook Clackston, à l'époque, était ministre de la
Défense, et c'est lui qui est intervenu en faveur des Canadiens
français et du français au Conseil de la défense
nationale, et c'est lui qui a incité les chefs d'état-major
à la création et à l'importance de recruter davantage
d'officiers dans l'état-major et à la création
éventuelle du Collège militaire royal de Saint-Jean, ce qu'il a
fait le 12 juin 1952. Et, déjà, le 15 septembre 1952, 125
premiers élèves officiers et, par la suite, un
élève officier du Collège militaire royal se sont
ajoutés à ceux-ci. Mais le Collège a commencé
à donner ses cours le 22 septembre 1952 et il a reçu ses premiers
gradués le 30 avril 1955. (16 h 40)
C'est donc un collège, M. le Président, qui a 40 ans, un
collège dont la qualité des enseignements ne fait aucun doute, un
collège qui, pendant plusieurs années, a été
associé à l'Université de Sherbrooke. Plusieurs d'entre
nous le savent ici. Et le gouvernement du Québec témoigne de son
attachement à cette institution depuis de nombreuses années.
D'ailleurs, c'est depuis le 20 juin 1985 qu'on autorise le Collège
militaire royal de Saint-Jean à décerner des diplômes. Le
Collège militaire royal de Saint-Jean est autorisé à
décerner des grades, des diplômes Ou des certificats
universitaires aux membres des Forces armées relativement à des
programmes correspondant aux grades suivants: Baccalauréat en
administration; Baccalauréat es arts, études militaires et
stratégie; Baccalauréat es arts, études canadiennes en
administration. Il y a un Baccalauréat es sciences avec
spécialisation en physique. Il y a les deux premières
années de génie; pour les étudiants qui choisissent cette
matière, ils peuvent terminer leur cours à Kingston,
déjà.
Mais, sur l'avis du Conseil des universités, le ministre peut
ajouter à la liste des grades, diplômes ou certificats
universitaires du premier cycle que le Collège est autorisé
à décerner, ce que nous avons fait, ce que nous avons fait en
juin 1989 en permettant au Collège de pouvoir offrir un programme de
deuxième et de troisième cycles. Il n'y a pas beaucoup
d'étudiants, au moment où on se parle, dans le programme de
deuxième cycle: il y en a quatre ou cinq. Mais ça demeure un
programme possible et qui était donné et qui est encore
donné au Collège militaire royal.
Le Collège militaire royal est aussi connu comme un centre de
formation continue pour les officiers de l'armée canadienne, de la
marine ou de l'aviation qui peuvent se recycler en cours de leur
préparation militaire.
La fermeture d'une école technique comme celle de Saint-Jean est
préjudiciable aux francophones ? risque d'être
préjudiciable aux francophones, à tout le moins. J'ai
manifesté, en premier mouvement, non seulement un mouvement de surprise
désagréable, mais j'ai aussi estimé qu'il fallait un
organisme de formation de militaires spécialisés,
éventuellement des membres de l'état-major. J'ai toujours
pensé qu'il était important d'avoir la réalité
canadienne avec ses deux composantes culturelles les plus importantes comme
étant celles qu'on retrouve dans la formation de ces membres de
l'état-major. Évidemment, des membres de l'état-major, M.
le Président, vous comprendrez qu'on n'a pas besoin d'en produire des
milliers puis des milliers. Le Canada n'a pas besoin de milliers de colonels,
de lieutenants-colonels et de généraux. C'est une formation,
donc, très spécialisée.
Mais, quand on la compare avec d'autres formations
spécialisées, M. le Président, on ne s'étonne pas
de constater, par exemple, qu'il y a deux écoles de médecine
vétérinaire au Canada: il y en a une à Saint-Hyacinthe,
bien connue, l'autre à Waterloo. Il y a deux écoles d'actuariat
au Canada: une ici, à l'Université Laval, une seconde à
l'Université de Toronto. Il y a deux écoles d'optométrie
au Canada: une à Montréal, l'autre à Toronto. Pourquoi?
Parce que, dans un pays comme le nôtre, on n'a pas besoin puis on ne peut
pas former des milliers d'actuaires, des milliers de
vétérinaires, des milliers d'optométristes. Or, notre
histoire, notre cheminement nous ont amenés généralement
à bâtir des écoles fondées sur des
caractéristiques linguistiques. Désormais, M. le
Président, je ne vous cache rien, même notre système
d'éducation primaire et secondaire, d'ici quelques années, sera
fondé, aura comme pierre d'assise une réalité linguistique
plutôt qu'une réalité confessionnelle. Or, ce n'est pas
anormal de retrouver une école spécialisée pour former des
membres d'état-major qui se situe au Québec, foyer central de la
francophonie canadienne et nord-américaine.
Depuis maintenant presque 15 jours, trois semaines, je suis en contact
régulier avec ? maintenant, disons 15 jours, depuis le 22 ou le 23
février ? le député de Saint-Jean, M. Charbonneau, et
le maire de Saint-Jean qui ont formé un comité de défense
du projet de la base militaire et aussi de l'école militaire de
Saint-Jean. Je les ai appuyés depuis le tout début, et le
gouvernement les a appuyés depuis le tout début. Le premier
ministre l'a fait avec diligence et, maintenant, nous prenons acte que le
gouvernement fédéral a l'intention, non pas probablement de
changer d'idée ? ce n'est pas ce que j'ai compris non plus, comme
le député de Lac-Saint-Jean ? mais j'ai compris que le
gouvernement fédéral cherchait à faire en sorte de voir
à une transition de ce Collège pour permettre aussi probablement
à des membres des Forces armées de pouvoir profiter encore de
cette bâtisse et de ces bâtiments.
Mais, ce qui me préoccupe et ce qui préoccupe le
gouvernement ? et nous nous adressons à ce moment-ci au
ministère de la Défense, au gouvernement canadien ? c'est
davantage l'avenir du fait français dans
Pétat-major de l'armée canadienne et sa capacité,
sa capacité de faire une démonstration ? et c'est là
que le fardeau de la preuve est sur le dos, je dirais, du gouvernement
fédéral ? que des francophones pourraient avoir tous les
services auxquels ils se réfèrent, avec lesquels ils vivent
à Saint-Jean actuellement, dans une autre ville du pays, soit
Kingston.
On sait, on l'a mentionné un peu plus tôt, à
Kingston, certains problèmes ont été soulevés en
regard, par exemple, des capacités d'enseignement en français aux
niveaux primaire et secondaire. Et c'est là une des mesures absolument
essentielles pour nous, pour satisfaire notre volonté de faire en sorte
que des francophones, s'ils doivent être capables d'évoluer en
français pour recevoir leur formation comme membres futurs de
l'état-major, ils se doivent de le faire et nous devons avoir les
garanties nécessaires de la part du gouvernement fédéral
pour s'assurer que le fait français dans les Forces armées et que
l'enseignement en français de la stratégie militaire et des
certificats qui sont donnés actuellement à Saint-Jean puissent se
faire s'il devait y avoir déménagement.
D'ailleurs, le Commissaire aux langues officielles lui-même
mentionnait que, depuis quelques années, même si l'armée
canadienne a amélioré le statut des gens qui la servent et qui
sont francophones, elle a encore de grands, de grands, grands chemins à
parcourir avant d'être parfaitement crédible sur le plan de sa
capacité de bien représenter la situation canadienne de sa
façon la plus commune, c'est-à-dire la façon
sociodémo-graphique. On sait qu'encore trop peu de francophones dans
l'armée canadienne occupent des emplois de cadre, même si parfois
le général en chef des Forces armées est un francophone,
comme c'est le cas actuellement, d'ailleurs.
Il n'en demeure pas moins que, pour le gouvernement du Québec, la
volonté réitérée, et du premier ministre et du
gouvernement, est de faire en sorte d'exiger du gouvernement
fédéral de démontrer que les francophones ont une place
dans l'armée et que l'accueil académique qu'ils pourraient
recevoir devrait être au moins aussi satisfaisant que celui qu'on a
reçu dans la ville de Saint-Jean. Pour nous, cette
démonstration-là reste à faire, et j'exhorte le
gouvernement fédéral à faire cette
démonstration-là le plus rapidement possible.
Dans son rapport de 1992, le Commissaire aux langues officielles
déplorait les lacunes qui persistaient toujours par rapport à la
langue dans laquelle les services sont fournis non seulement aux militaires,
mais aussi à leur famille, ce qui est important. Quand il y a des bases
militaires canadiennes comme celle de Lahr en Allemagne dans laquelle on peut
recevoir un enseignement français pour les enfants des militaires
francophones, on se trouve un peu dans une position fort délicate,
j'imagine, à Kingston de ne pas pouvoir offrir le même
service.
Le Commissaire, dans son rapport de 1992, disait ceci: La qualité
des services aux minorités de langue officielle varie beaucoup d'une
base à l'autre. Les servi- ces dispensés par les employés
civils ? centres de ressources familiales, services de garde et de loisirs
? recrutés sur place laissent le plus à désirer.
Quant aux services fournis par le personnel militaire, l'aumônerie, les
services sociaux, services médicaux, juridiques, des incendies, de
sécurité et de logement, ils ne répondent pas toujours aux
exigences de la loi et présentent des lacunes pouvant avoir de
sérieuses conséquences pour les familles. Or, selon ces
considérations, en fonction de ces considérations, dis-je, M. le
Président, il me semble tout à fait à point de regarder la
motion qui nous est présentée et peut-être de l'amender de
la façon suivante.
Motion d'amendement
Alors, M. le Président, je vous propose un amendement, en fait,
deux amendements: Que la motion en discussion soit amendée par le
remplacement des mots «renonce à sa décision de
fermer» par le mot «soutienne» et, deuxièmement, par
l'ajout, après le mot «Saint-Jean», des mots «à
titre d'établissement d'enseignement supérieur, tout en lui
assurant, entre autres, une vocation pour la formation des officiers
francophones». (16 h 50)
La motion amendée se lirait comme suit: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
soutienne le Collège militaire royal de Saint-Jean à titre
d'établissement d'enseignement supérieur, tout en lui assurant,
entre autres, une vocation pour la formation des officiers
francophones.»
Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, si on peut me
donner copie de l'amendement. Alors, si vous voulez remettre copie de
l'amendement à M. le whip. Je vais prendre l'amendement en
délibéré. Est-ce qu'il y a consentement, selon la
tradition, à ce que nous poursuivions le débat sur la motion
principale et sur l'amendement, sous réserve de sa recevabilité?
Consentement.
Alors, je vais céder la parole à M. le
député... J'indique à la formation de l'Opposition
officielle qu'il lui reste 18 minutes de temps de parole, et je cède la
parole à M. le député... Je cède la parole... Il
n'y a pas de députés qui veulent intervenir sur l'amendement, sur
la recevabilité? Alors, on va remettre... Un instant! Alors, M. le
leader de l'Opposition officielle.
M. Chevrette: M. le Président, je voudrais qu'on puisse
continuer le débat, si le leader du gouvernement est d'accord, et qu'on
se réserve le droit, cependant, après en avoir pris connaissance,
de plaider quelques minutes sur la recevabilité, pour ne pas
arrêter les...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement.
Alors, les débats vont se poursuivre et je reviendrai vers 17 h S. Suite
à l'intervention du député de Bertrand, je reviendrai pour
écouter vos interventions sur la recevabilité de cet amendement.
M. le député de Bertrand.
M. François Beaulne
M. Beaulne: Merci, M. le Président. Le débat
entourant la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean aura eu au
moins l'effet salutaire de faire tomber les masques et de saisir la
véritable intention des gouvernements, d'abord celle du
fédéral. À première vue, on serait tenté
d'attribuer la fermeture du Collège à de la petite mesquinerie
«politicailleuse» libérale de Jean Chrétien,
désireux de punir la population de Saint-Jean d'avoir élu un
député bloquiste. Mais, en réalité, il y a
derrière cette décision quelque chose de beaucoup plus
pernicieux, quelque chose de beaucoup plus réfléchi,
médité et mûri. Elle camoufle en fait l'objectif, à
moyen ou long terme, soit de dissuader les jeunes francophones de joindre
l'armée canadienne, soit d'angliciser ceux qui s'y joignent.
Le débat n'est pas d'aujourd'hui, puisque ce qui m'inspire cette
réflexion c'est un article paru en 1952 dans un petit journal de
province appelé L'Émerillon, article qui s'intitulait, et
je cite: «Pour un collège militaire français», fin de
la citation. Permettez-moi de vous en citer quelques extraits qui
m'apparaissent d'une actualité frappante. En 1952, M. Hermann Taupier,
qui signait l'article, écrivait, et je le cite: «Les Canadiens
français ne peuvent plus se résigner à être à
peu près exclus de l'armée. Quelle que puisse être la
politique étrangère du Canada et la réaction de
l'électorat québécois devant les décisions du
gouvernement, il nous faut une représentation dans l'armée comme
dans tous les autres secteurs de la vie nationale. Cette représentation,
à l'heure actuelle, est insignifiante [...] Le gouvernement et
l'état-major font de leur mieux pour décourager les jeunes
Canadiens français qui pourraient éprouver de l'attrait pour la
carrière des armes. Les cas d'injustices dont les nôtres ont
été victimes dans l'armée sont innombrables; d'ailleurs,
l'ambiance anglaise n'est pas faite pour les mettre à leur aise.»
Fin de la citation.
Je rappellerai à cette Chambre que c'est le député
conservateur de Trois-Rivières, M. Léon Balcer, qui le premier
proposa au gouvernement fédéral la fondation d'un collège
militaire français pour permettre aux francophones d'accéder aux
postes de commandement d'où ils étaient
généralement exclus. M. Balcer parlait d'expérience,
puisqu'il avait servi dans la marine pendant la Deuxième Guerre
mondiale. Sa proposition à l'époque fut d'ailleurs reprise et
appuyée par la Fédération des jeunes chambres de
commerce.
Je reprends un autre extrait révélateur de l'article paru
en 1952 dans L'Émerillon, et je cite un autre extrait de cet
article: «Les griefs des Canadiens français contre l'armée
de leur pays sont très nombreux. Au mépris de la Constitution, la
seule langue de commandement et de communication est l'anglais. Les
unités françaises n'existent que pour l'infanterie. L'ignorance
de l'anglais barre la route à la majorité de ceux des
nôtres qui pourraient aspirer à devenir officier. Et même
ceux qui savent l'anglais se voient défavorisés et
condamnés à demeurer aux grades inférieurs. L'armée
est une école d'anglicisât ion pour nos jeunes. Ces griefs ne se
corrigeront que lorsque nous aurons une représentation satisfaisante
à l'état-major. Et il est difficile d'espérer que notre
représentation pourra s'accroître sensiblement à
l'état-major aussi longtemps que nous n'aurons pas d'école
militaire française pour former des officiers de carrière en
nombre suffisant [...] Il nous faut un collège militaire où nos
aspirants officiers apprennent leur métier en français et
où ils apprennent l'autre langue officielle du pays, l'anglais, pendant
leur cours et non pas avant de le commencer. Il faut commencer par le
commencement et, le commencement, pour nous, c'est le collège militaire
français.» Fin de l'article paru dans L'Émerillon en
1952.
Chers collègues, en relisant ce texte, il m'est revenu à
l'esprit un reportage que j'avais vu à Radio-Canada l'an dernier sur
l'attitude que prendraient les jeunes Québécois dans
l'armée canadienne advenant la souveraineté du Québec. Il
y a 90 % de ceux qu'on avait interrogés qui disaient qu'Us se
rangeraient du côté du Québec. N'est-il pas curieux que la
décision de fermer le seul collège militaire français du
Canada arrive à un moment où les Québécois et les
Québécoises pourraient être appelés dans un avenir
assez prochain à se prononcer sur leur devenir dans un pays souverain?
Serait-ce que les unités francophones créées dans les
Forces armées canadiennes depuis maintenant quelques années ont
trop bien réussi leur vocation, c'est-à-dire offrir un
entraînement militaire adéquat dans le respect d'un esprit de
corps français? La décision du gouvernement fédéral
vise à étouffer cet esprit de corps français dans
l'armée canadienne. Et j'en ai pour preuve le milieu inaccueillant et
inhospitalier pour les francophones où on voudrait expatrier nos
aspirants officiers. Depuis une semaine, ou même plus, les journaux ne
tarissent pas de nous décrire l'état lamentable dans lequel se
trouvent l'école primaire française et i'école secondaire
française de Kingston, qui supposément accueilleraient les
enfants de nos officiers.
Ce débat aura eu également l'avantage de mettre en relief
le traitement de citoyens de seconde classe réservé à nos
compatriotes de langue française de l'Ontario auxquels tous les
gouvernements ontariens, dont celui de Bob Rae, ne reconnaissent les droits
fondamentaux qu'au compte-gouttes. Une chronique de Michel Vastel dans Le
Soleil de ce matin nous rappelle qu'en Ontario même les grenouilles
sont protégées par la loi. Paraît-il qu'elles font partie
de ces espèces animales en voie de disparition. Comme le recommande
Michel Vastel un peu ironiquement, on pourrait peut-être se servir de
cette loi pour protéger les francophones aussi. Après tout,
n'appelle-t-on pas les francophones des «frogs» dans l'armée
canadienne?
Chers amis députés, il m'apparaît urgent que
l'Assemblée nationale envoie au gouvernement fédéral un
message clair et précis quant à notre volonté de maintenir
à Saint-Jean notre seul collège militaire de langue
française au Canada. C'est pourquoi, à titre de président
du caucus des députés du Parti québécois de la
Montérégie et de député parrain de
Saint-Jean pour le Parti québécois, je souscris
entièrement au texte de la motion principale. Merci.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député. M. le leader de l'Opposition officielle. M. le leader, je
vais vous entendre.
Débat sur la recevabilité de
l'amendement
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: Oui, M. le Président, je voudrais donner
quelques arguments sur la recevabilité de la motion. D'abord, M. le
Président, la motion se lit comme suit: «Que l'Assemblée
nationale exige du gouvernement fédéral qu'il renonce à sa
décision». Donc, la décision est bien connue, c'est la
fermeture. L'ordre ou le voeu l'enjoignant de faire, c'est de renoncer
à. Ce n'est pas de soutenir un changement de vocation, c'est de renoncer
à son intention de changer la vocation. C'est une contre-proposition, M.
le Président, quand on la lit au sens littéral du terme. Regardez
comme il faut, vous allez le voir à sa face même. On ne lui
demande pas de soutenir un changement de vocation, on dit de garder la
même vocation, donc de renoncer à toute décision de
réorientation. Ça, c'est un premier point.
Le deuxième point, M. le Président, quand vous lisez
l'amendement, ça peut être n'importe quoi d'autre l'expression
«entre autres». «Entre autres», ça veut dire
quoi? Vous venez d'introduire n'importe quoi, alors que, le but de la motion,
c'est de garder intacte la vocation actuelle du Collège militaire de
Saint-Jean. Ce n'est pas d'ouvrir à n'importe quoi. Ce n'est pas de
vouloir faire n'importe quoi avec, c'est de renoncer à sa
décision de fermer le Collège militaire de Saint-Jean qui est une
porte d'entrée pour les francophones dans l'armée canadienne. (17
heures)
C'est aussi clair que ça. On l'a fait avec une simplicité,
M. le Président, précisément pour ne pas qu'on vienne
rendre ça ambigu, qu'on vienne rendre ça fluide, qu'on vienne
rendre ça louvoyant. On veut un message clair au gouvernement
fédéral. On dit: Écoutez, l'Assemblée nationale
vous demande de renoncer à. Point final.
Je comprends, M. le Président, qu'ici, en Chambre, on a eu le
don, à la période du mercredi... D'ailleurs ça fait partie
des réflexions qu'on va devoir faire un jour ou l'autre. On ne peut pas
faire en sorte qu'une motion soit complètement défigurée,
qu'on ne se reconnaisse plus. Le but d'un amendement, M. le Président,
c'est de modifier quelque peu. Si on disait «de renoncer pour trois
ans», là, vous pourriez dire qu'on l'amende, mais on ne change pas
la nature, ou le voeu, ou la volonté de la motion. La motion, c'est de
dire: Renoncez à votre décision que vous avez prise, changez-la
et laissez-le ouvert. C'est ça qu'on dit. Si le gouvernement a trop peur
de vouloir demander au fédéral de renoncer, il aurait pu dire
«renoncer pour trois ans» ou bien avoir le courage de voter contre,
mais pas dénaturer une motion.
Ce n'est pas de le soutenir pour que ça devienne n'importe quoi
qu'on veut. C'est qu'on demande l'appui de l'Assemblée nationale, nous,
de ce côté-ci, pour inviter le fédéral à
renoncer à. Quand vous y ajoutez le terme principal ? et c'est
ça qui est bon dans ces amendements, M. le Président ? et
qu'on change les mots «renonce à sa décision de
fermer» par le mot «soutienne», automatiquement, c'est
complètement changé. On demanderait au fédéral de
nous soutenir pour faire on ne sait pas trop quoi, entre autres une maison de
haut savoir, entre autres une maison d'enseignement. Voyons! Ce qu'on demande,
et le voeu de la motion, l'essence, l'esprit de la motion, c'est de dire au
fédéral: Change donc d'idée, l'Assemblée nationale
te demande de changer d'idée et de garder intégral ce
qu'était le Collège militaire de Saint-Jean.
Donc, M. le Président, par ces explications-là, je crois
que vous aurez compris que je considère que c'est dénaturer la
proposition que d'accepter sa recevabilité.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le leader de
l'Opposition officielle. M. le leader adjoint du gouvernement.
M. Jean-Pierre Bélisle
M. Bélisle: Merci, M. le Président. Quelques
minutes seulement pour plaider sur la recevabilité de la motion
d'amendement. Il me semble très clairement, M. le Président, que
la motion originale, lorsqu'on dit: «Que l'Assemblée nationale
exige du gouvernement fédéral qu'il renonce à sa
décision de fermer le Collège militaire de Saint-Jean»,
ça signifie très clairement qu'une fois que la décision
est prise il n'existe plus rien à Saint-Jean. Mais, au Collège
militaire de Saint-Jean, il existe présentement, oui, une formation pour
les officiers de langue française dans les arts martiaux,
également dans toute la stratégie militaire et, également,
il y a des enseignements donnés au niveau d'autres matières,
c'est-à-dire qu'il y a un enseignement supérieur qui est
donné également.
Alors, quand on dit «soutienne» dans l'amendement, M. le
Président, qu'est-ce que qu'on dit en réalité? On dit
exactement la même chose que la motion originale, sauf que c'est beaucoup
plus large. «Soutenir», ça signifie ne pas fermer.
«Soutenir», ça signifie mettre des fonds, continuer de
supporter financièrement le Collège militaire qui existe et qui
dispense de l'enseignement à des officiers francophones
présentement. Et, quand l'on ajoute dans la proposition amendée
«tout en lui assurant, entre autres, une vocation pour la formation des
officiers francophones», ce n'est que de reconnaître l'état
de situation qui existe présentement.
Vous savez très bien, M. le Président, qu'on a reçu
hier, sur nos bureaux, ici, un recueil des décisions
concernant la procédure parlementaire, qui est, soi-disant,
très bien fait. J'ai eu beau regarder tantôt une série de
décisions rendues par la présidence au cours des dernières
années, que ce soit... Je fais référence au Journal des
débats du 28 novembre 1990, décision de Jean-Pierre
Saintonge, président, aux pages 5413 et 5414. Quand on ne
dénature pas, conformément à l'article 197 de notre
règlement, la motion principale et qu'on essaie d'obtenir l'assentiment
de plus de parlementaires... Il est bien évident que, si la formation
ministérielle propose cet amendement-là, elle va voter en faveur.
Donc, je suppose, si vous regardez l'état du nombre, qu'on devrait avoir
plus de parlementaires qui vont appuyer cette motion amendée.
Et, M. le Président, quand vous regardez d'autres, n'importe
quelle des décisions, l'interprétation de la présidence a
été très large, que ce soit la décision rendue par
le président Lawrence Cannon le 4 avril 1990, Journal des
débats, pages 1597 et 1598. Il disait, entre autres, et je cite au
texte: «...c'est-à-dire qu'il doit porter sur le même sujet
que la motion de fond et qu'il ne peut aller à rencontre de son
principe... Elle peut avoir pour objet d'apporter des changements même
importants qui permettent un débat plus large ou encore qui permettent
à un plus grand nombre d'y adhérer».
Or, M. le Président, il me semble que c'est un cas typique,
là, classique qui peut-être dans un autre règlement ou un
nouveau règlement ne devrait pas être accepté ou reconnu
comme étant un amendement valable, mais, dans notre règlement
actuel, oui, il s'agit d'un règlement valable en vertu de la
jurisprudence que vous connaissez très bien. Donc, je pense que
l'amendement «soutenir», dans le sens de permettre que des fonds
soient mis à la disposition, c'est-à-dire de ne pas fermer et de
maintenir l'enseignement militaire et paramilitaire... Il me semble, M. le
Président, que la motion même amendée est beaucoup plus
large que la motion originale.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je prends cet amendement
en délibéré. Je cède la parole à M. le
député de Saint-Jean.
M. Lafrance: Sur la recevabilité.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ah, sur la
recevabilité? M. le député d'Iberville.
M. Y von Lafrance
M. Lafrance: Oui. M. le Président, est-ce que j'ai le
droit de plaider sur la recevabilité comme indépendant? Oui.
Bien, très, très brièvement...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): En étant
très bref.
M. Lafrance: ...parce que vous comprendrez, M. le
Président, que je n'ai pas les moyens de recherche et aussi de
référence en jurisprudence, mais permettez-moi néanmoins
de questionner l'esprit de cet amendement. Moi, je pense que la motion
originale, dans son esprit, veut que la responsabilité du Collège
militaire royal de Saint-Jean reste celle du fédéral, qu'elle ne
soit pas transférée à d'autres instances, qu'elles soient
provinciales ou autres. Alors, je pense que la motion d'amendement force donc
un changement dans l'esprit de base, parce que le mot «soutienne»,
que le fédéral soutienne, veut dire qu'il peut soutenir de
façon monétaire ou autre, de façon très minime
comme de façon très large aussi. Deuxièmement,
«à titre d'établissement d'enseignement
supérieur», ça veut dire que ça peut être un
enseignement supérieur civil autre que militaire; d'ailleurs, un peu
plus loin, on introduit les mots «entre autres». Et, finalement, la
«vocation pour la formation des officiers francophones» peut
vouloir dire à peu près n'importe quoi. Ça peut vouloir
dire un cours de langue, un cours d'appoint. Ça peut même changer
la vocation universitaire du collège complètement.
Alors, je pense que l'esprit de la motion initiale est donc
changé. L'esprit de la motion initiale, c'est de dire que cet
établissement-là est militaire et doit rester sous la
responsabilité du fédéral. Puisqu'il a été
payé avec les impôts et les taxes des Québécois,
entre autres, il devrait rester sous la responsabilité du
fédéral. Voilà pourquoi je m'oppose à cette motion
d'amendement qui, je pense, change l'esprit initial.
Reprise du débat sur la motion principale et
sur l'amendement
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député d'Iberville. Alors, je vais céder maintenant la
parole à un prochain intervenant. Est-ce qu'il y a un prochain
intervenant sur cette motion? M. le député d'Iberville?
Alors, j'indique aux membres de cette Assemblée que je vais
prendre cet amendement en délibéré et que je ferai
connaître ma décision plus tard au cours de cette
journée.
Alors, M. le député d'Iberville, vous avez la parole.
M. Yvon Lafrance
M. Lafrance: Oui. Alors, M. le Président, si j'ai bien
compris, on est encore sur la motion...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vu qu'actuellement il y
a eu un consentement, c'est sur la motion principale et sur l'amendement, sous
réserve de sa recevabilité. Ça va?
M. Lafrance: Alors, merci, M. le Président. Vous
comprendrez que je suis particulièrement préoccupé par
cette motion et ce sujet aussi. Je suis un gradué du Collège
militaire royal de Saint-Jean et aussi un ancien vice-commandant du
Collège militaire royal de
Saint-Jean. Je représente aussi la population du comté
d'Iberville, qui est durement touchée également par la fermeture
et l'annonce de la fermeture. J'ai été consterné lorsque
j'ai appris cette nouvelle et, même après 15 jours de
délibérations et d'écrits dans tous les médias, je
reste tout à fait consterné encore.
On a touché, tantôt, à l'aspect historique. M. le
ministre a mentionné que c'est le ministre Claxton qui, à
l'époque, a permis la fondation. J'aimerais lui dire que ce sont avant
tout les généraux francophones des Forces armées
canadiennes qui ont réussi, après de durs efforts, à faire
autoriser la création de ce collège militaire là pour
justement aider nos francophones dans les Forces armées. Ils ont
réussi à convaincre les autorités politiques de
l'époque, et ceci, bien avant les rapports initiés au
fédéral, le rapport de la commission Laurendeau-Dunton et aussi
la formule Fulton-Favreau, qui, éventuellement, préconisaient le
bilinguisme au Canada. (17 h 10)
II y a eu des efforts ? je le sais parce que j'ai participé
aussi à ces efforts-là ? exceptionnels qui ont
été faits durant 42 ans pour amener le Collège militaire
au haut niveau et au haut standard où il est présentement. En
1971, on a réussi à avoir un cours complet sur cinq ans dans les
matières qui ont été mentionnées un peu plus
tôt. En 1985, on a réussi à avoir le diplôme
universitaire et, en 1988, la charte qui nous permet maintenant de donner des
maîtrises et des doctorats. En plus, ce Collège militaire
là, M. le Président, est situé sur un site historique, le
deuxième site historique militaire le plus ancien en Amérique du
Nord, après la Citadelle de Québec. Il y a donc là des
valeurs historiques tout à fait exceptionnelles.
M. le Président, moi, ce qui m'a surpris dans l'annonce de cette
fermeture-là, c'est la complaisance avec laquelle les autorités
ont reçu cette nouvelle. Tout d'abord, dans le milieu militaire, le
commandant du Collège militaire royal de Saint-Jean et, aussi, le
commandant de la base militaire de Saint-Jean ? qui est affectée
par cette diminution-là, comme on le sait, des efforts militaires dans
notre coin de la province ? ont dit publiquement qu'ils avaient appris
ça par le truchement de la télévision. Le recteur du
Collège militaire aussi s'est absenté quelques heures
après, soi-disant vers l'extérieur de la province.
Au niveau provincial, le premier ministre, M. le Président, a
qualifié ça d'annonce, entre guillemets, spéciale, tout
simplement. Par après, il a dit qu'il n'avait pas de ministre de la
Défense. Je peux comprendre qu'on n'a pas de ministre de la
Défense, M. le Président, au Québec, mais les
intérêts qu'on a dans la défense, par exemple, on doit
s'assurer de les protéger, parce que ce sont nos taxes et nos
impôts qui ont contribué à construire ce Collège
militaire là et qui contribuent aussi à maintenir les efforts de
défense nationale qui sont faits et qui ont des répercussions
donc dans la province de Québec. J'ai donc été très
surpris et déconcerté de voir cette complaisance-là, et
j'ajoute aussi les propos du ministre des Finances, M. Bourbeau, auxquels on a
fait allusion tantôt.
Pour le bénéfice du ministre de l'Éducation, le
chef d'état-major de la défense, actuellement, n'est pas un
francophone. Il est un gradué du Royal Roads Military College de
Colombie-Britannique. Il est aussi un gradué du Royal Military College
de Kingston. Il est un ancien commandant du Royal Military College de Kingston.
Il a suivi un cours d'un an, ici, à Québec, pour parfaire son
français dans les années, je pense, soixante-dix, fin des
années soixante-dix.
M. le Président, il y a deux aspects à cette
fermeture-là. Évidemment, il y a un aspect d'impact local ?
l'impact local est avant tout, évidemment, sur l'économie ?
mais aussi d'impact national. Je trouve ça déconcertant de voir
qu'après avoir injecté des millions dans des soi-disant
programmes d'infrastructures au niveau municipal, qui impliquent, soit dit en
passant, des emprunts fédéraux, puisqu'on est déjà
en déficit, des emprunts provinciaux, puisqu'on est en déficit
aussi, et des emprunts au niveau des municipalités, parce que les
municipalités vont devoir emprunter pour faire ces
infrastructures-là, qu'alors qu'on a annoncé donc des injections
de programmes d'infrastructures pour créer des emplois, on se retourne
de bord et...
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député, malheureusement, le temps qui vous était
alloué est écoulé. Si vous voulez peut-être conclure
en 10 secondes, je vous donnerai ce temps.
M. Lafrance: M. le Président, je vais conclure en vous
disant: Je me demande jusqu'où l'imbécillité politique,
des décisions comme celle-ci qui n'ont pas de rationalité
politique et aussi économique, va nous mener. Et je dis tout simplement:
Comme si Meech n'avait pas suffi!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien. Alors,
je suis prêt à reconnaître un autre intervenant. M. le
député de Saint-Jean. M. le député.
M. Michel Charbonneau M. Charbonneau: M. le
Président...
Le Vice-Président (M. Tremblay): M. le
député, il ne semble pas que votre débat soit
enregistré. On va attendre quelques minutes. Est-ce qu'on peut, s'il
vous plaît, corriger? Ça va? Très bien. Vous pouvez y
aller.
M. Charbonneau: Alors, je vous disais donc, M. le
Président, que c'est avec plaisir, mais aussi avec une vive
émotion que j'interviens aujourd'hui sur cette motion de l'Opposition.
M. le Président, avec une telle décision, soit l'annonce de la
fermeture du Collège militaire royal de Saint-Jean, vous n'êtes
pas sans savoir que chez nous, dans mon comté et dans la grande
région du Haut-Richelieu, nous sommes tous et toutes en état de
choc, choc qui nous indique qu'un lien est en train de
se briser, un lien avec une institution universitaire, militaire, qui
est bien ancré dans nos moeurs. M. le Président, 2000 emplois
directs et indirects, un volet universitaire remis en cause et, surtout, la
place des francophones dans l'armée canadienne rediscutée.
Alors, dès le lendemain matin de l'annonce par le ministre des
Finances fédéral, le maire de la ville de Saint-Jean, M. Delbert
Deschambault, me communiquait immédiatement son intention,
évidemment, de former le comité de travail. Le premier magistrat
de la ville, je pense que c'était tout à fait légitime
qu'il pose un tel geste. Il m'a demandé de le seconder, et j'ai
accepté avec grand plaisir. Alors, dès le jeudi 24 février
dernier, en début d'après-midi, nous annoncions la formation du
comité de travail de cinq personnes. Et, quelques jours plus tard, M. le
Président, M. le premier ministre du Québec nous recevait
à ses bureaux de Montréal. Et vous avez été
à même de constater que, dès la sortie de notre rencontre,
le premier ministre a indiqué clairement à la population du
Québec son intérêt pour la filière francophone au
sein de l'armée canadienne que le Collège militaire royal de
Saint-Jean a mise sur pied au fil des décennies, mais aussi qu'il
était très sensibilisé par la vocation universitaire du
Collège. Je pense que ça a été clairement
indiqué de la part du premier ministre du Québec. Et
permettez-moi de souligner sa rapidité et surtout l'écoute qu'il
a eue non seulement à mon égard, mais aussi à
l'égard du maire de la ville de Saint-Jean, M. Delbert Deschambault, et
des autres membres du comité. Permettez-moi de les souligner: M.
Gérald Brassard, qui agit comme commissaire industriel, M. Edouard
Bonaldo, directeur général de la ville de Saint-Jean et M. Daniel
Bissonnette, consultant, représentant, entre autres, les hommes
d'affaires.
Différents groupes se sont manifestés, M. le
Président. Permettez-moi simplement de mentionner le Club des anciens du
Collège militaire, qui ont manifestement indiqué leur position;
l'Association des professeurs d'université, qui aussi a clairement
indiqué sa position et a indiqué qu'elle était très
inquiète quant à la vocation universitaire. Que dire de la
Fédération des francophones hors Québec, du Commissaire
aux langues officielles? Je pense que vous avez été à
même de lire tout ce qui a été écrit à ce
sujet.
Mais, au-delà de ça, M. le Président, j'ai une
préoccupation, comme député, comme élu, comme
représentant ici, à l'Assemblée nationale, des gens, des
citoyens et des citoyennes du comté de Saint-Jean, une
préoccupation qui veut, entre autres, la conservation de
l'établissement d'enseignement supérieur, d'enseignement
universitaire qu'est le Collège militaire royal de Saint-Jean. C'est une
préoccupation majeure dont je discute, évidemment, sur une base
journalière avec beaucoup d'intervenants. Également, je suis
très préoccupé par le volet de la filière
francophone pour la formation de nos officiers. Et aussi, je ne peux que
souligner le volet économique; on a, chez nous, un impact tout à
fait majeur dans notre région. (17 h 20)
Alors, il serait tout à fait irréaliste et irresponsable
de ma part, comme député, de ne ménager aucun effort pour
m'assurer d'obtenir en bout de piste une solution qui soit acceptable aux
citoyens et citoyennes non seulement de mon comté, mais aussi du
Québec, parce que le problème déborde largement mon
comté. Je ne voudrais pas réussir à obtenir
l'équivalent, mais j'aimerais aussi améliorer notre
situation.
Permettez-moi de remercier, en quelques mots seulement, de
l'intérêt qu'il a manifesté
«journalière-ment» le ministre de l'Éducation, qui a
pris la parole avant moi tantôt. Je lui parle
régulièrement. Il suit le dossier à la virgule. Et,
vendredi matin de cette semaine, nous avons rendez-vous au bureau du premier
ministre du Québec, et le ministre de l'Éducation fera partie de
cette rencontre.
Alors, non seulement je me dois d'être réaliste, je me dois
d'être responsable, je me dois d'envisager aussi toute solution, toute
piste de solution qui soit acceptable dans la ligne de pensée que j'ai
expliquée tantôt. Alors, nous faisons face à un
problème économique, à un problème
académique et à un problème linguistique. Alors, j'ai
indiqué tantôt que nous avions une rencontre vendredi prochain.
J'ai beaucoup d'attentes de cette rencontre, de cette discussion avec, entre
autres, le premier ministre du Québec et le ministre de
l'Éducation.
Alors, M. le Président, je voulais simplement indiquer, en
quelques mots ? je sais que mon temps est expiré ? à la
population de mon comté ma très grande préoccupation et
surtout assurer les concitoyens et concitoyennes de mon comté du travail
inlassable que je vais fournir et des efforts que je vais y mettre afin de
trouver, de concert avec le gouvernement du Québec, le premier ministre
du Québec et le ministre de l'Éducation et de l'Enseignement
supérieur, une solution acceptable. M. le Président, je vous
remercie.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député. Je vais maintenant reconnaître le
député de Jacques-Cartier. Compte tenu de la répartition
du temps, je ne pourrai pas vous consacrer plus que quatre minutes. Alors, M.
le député de Jacques-Cartier.
M. Lafrance: Question de règlement, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui, M. le
député.
M. Lafrance: Question de règlement, M. le
Président. Est-ce qu'en vertu du règlement je pourrais poser une
question au député de Saint-Jean sur les propos qu'il vient de
dire?
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, à la
condition que le député de Saint-Jean l'accepte, M. le
député.
M. Charbonneau: Oui.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Vous acceptez la
question. Alors, posez votre question.
M. Lafrance: Oui. M. le Président, est-ce que le
député de Saint-Jean ne croit pas qu'en cherchant des solutions
comme ça il admet la fermeture et le retrait du fédéral du
dossier?
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député de Saint-Jean.
M. Charbonneau: M. le Président, permettez-moi d'indiquer
que je me devais d'être responsable et réaliste. Alors, dans cette
optique et dans cette façon de traiter le dossier, on se doit de
regarder de tous côtés. Et le maintien du Collège comme tel
a toujours été une priorité, et je l'ai clairement
indiqué aussi.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député de Jacques-Cartier, à vous la parole pour quatre
minutes.
M. Neil Cameron
M. Cameron: Merci, M. le Président. I won't take long. I
mourn the passing of CMR in its present form. I have been there for conferences
of the Canadian Committee on World War II Studies and I know it to be a fine
institution, and I know it has done a great deal for both French-speaking and
English-speaking Canadians. I do not think, however, it could have continued in
its present form. I think it has to be admitted realistically that the entire
Canadian Armed Forces and their educational system and their requirements have
been changed not only by modern circumstances, the circumstances which, after
all, led to the closing of Royal Roads as well in Canada, but also to a
changing of circumstances in the world.
We are not entirely clear exactly how the Canadian Armed Forces are to
be used in the future, how they are to be trained or even how they are to be
divided. The original role of three separate military schools was that Kingston
RMC would take care of the army, Royal Roads would take care of the navy and
CMR would take care of the air force. We wound up with integrated armed forces,
which really made a case only for one anyway. We do have the facilities in
Kingston. I suspect that the complaint that has been made by some that that
will not be as pleasant for many French-speaking Canadians is not entirely
untrue, but I believe there is enough openness and enough of a possibility
there, from what I have seen at the Royal Military College as well, that
something of the same excellent tradition that has long been maintained between
English and French-speaking officers in the Canadian armed services will also
be maintained.
But above all, the one point I wanted to make was that I think it is
mistaken, every time a budgetary cut takes place in Canada, over whatever
issue, when it is manifestly clear that these cuts have dramatic effects in the
Atlantic provinces, in Western provinces, in Ontario and in Québec, that
there will always be some people who will identify the one in Québec and
somehow pretend this represents a particular attack by the federal government
when it is instead a result of a general economic retrenchment. This kind of
conspiracy mongering is ridiculous and it has nothing to do with what this
country is really all about. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député. Je vais maintenant reconnaître Mme la
députée de Chicoutimi. Mme la députée, vous avez
sept minutes à votre disposition.
Mme Jeanne L. Blackburn
Mme Blackburn: Merci, M. le Président. M. le
Président, je suis bien sympathique à la cause du
député de Saint-Jean. Je pense qu'il s'est avoué battu. En
fait, le gouvernement s'est avoué battu avant même d'avoir
combattu. Et l'attitude du premier ministre, qui, à l'annonce de la
fermeture du Collège de Saint-Jean, annonce qu'il a reçue avec
assez d'insouciance, pour ne pas dire d'indifférence... La nouvelle de
cette fermeture-là ne l'a pas vraiment énervé, puisqu'il
déclarait: Pourquoi s'énerver? Des grands militaires
québécois comme le général Dextraze ou le
général Vanier ont connu une glorieuse carrière sans
être passés par Saint-Jean. Cependant, une semaine plus tard,
devant la levée de boucliers, il se réveille et,
l'échéance électorale oblige, le premier ministre s'agite
doucement, il faut le dire, et tout compromis est acceptable. Personne n'est
dupe de la parade du gouvernement actuel. Il n'a pas l'intention de
défendre le Collège militaire de Saint-Jean.
Pourtant, la fermeture du Collège militaire de Saint-Jean
représente un recul majeur pour les Québécois et pour les
Canadiens français. J'y reviendrai, mais cette décision illustre
le peu de considération du gouvernement de Jean Chrétien à
l'endroit du français, un gouvernement visiblement à la merci des
Manning, des gens de l'Ouest dont il craint davantage les manifestations qu'il
ne semble craindre avec raison celles qui pourraient émaner du
gouvernement libéral du Québec.
Le Collège de Saint-Jean, c'est un acquis pour le Québec
et les Canadiens français, il faut le rappeler. D'abord, parce qu'il a
favorisé la place des francophones dans les Forces armées
canadiennes dans les grades supérieurs et parce que, également,
l'école de langues a permis à de nombreux militaires anglophones
de mieux maîtriser le français, mais de mieux comprendre le
Québec français également. Et ajoutons que la fin des
activités de recherche au Collège de Saint-Jean, ça
représente un manque à gagner de 3 700.000 $, alors que
déjà, au Québec, nous connaissons un manque à
gagner, par rapport aux dépenses du fédéral, de 300 000
000 $
annuellement. ça en ajoute un peu. là-dessus, je n'ai pas
entendu le ministre de l'industrie et du commerce. le québec, nous le
savons, n'a pas sa quote-part en matière de dépenses du
ministère de la défense canadienne: 13 % à 15 %, alors
qu'on paie 25 %, faut-il le rappeler, des dépenses militaires
canadiennes, comme de toutes les dépenses. (17 h 30)
Déménager les activités de formation à
Kingston et prétendre que les francophones pourront s'y intégrer
harmonieusement et fonctionner en français sans risquer d'y être
marginalisés, assimilés, c'est supercherie et mensonge. Kingston
est au coeur du Canada anglo-saxon loyaliste. Nous le savons tous, y compris
les plus fédéralistes, qui le savent et le reconnaissent: une
région où les services en français sont inexistants.
L'école primaire est, enfin, une école d'immersion où il y
a moitié français, moitié anglais; une école
primaire où l'on refuse à l'école de s'afficher en
français. On est loin du bilinguisme intégral qu'on connaît
actuellement au Québec. L'école secondaire, pour sa part,
l'école Marie-Rivier, construite depuis 1987, ouverte, devrais-je dire,
depuis 1987, réside dans des locaux préfabriqués, ce qu'on
appelle les «préfab»: il n'y a pas d'eau courante, ils
doivent aller aux toilettes à l'école anglaise. On en a du
service dans ce coin-là! Si jamais on faisait ça ici, au
Québec, on serait absolument mis au ban de la société.
D'ailleurs, la médiocrité des installations, et de l'aveu
même des parents des jeunes enfants francophones, la
médiocrité des installations les amène à inscrire
leurs enfants dans les écoles anglaises. C'est la situation qui existe
actuellement.
Le ministre responsable de la Charte de la langue française, il
semble se réveiller un petit peu là, mais, en même temps,
il admet que, oui, ça va poser des problèmes, mais il n'est pas
prêt à défendre, à l'évidence, avec la
modification qu'il vient d'apporter à la motion de l'Opposition.
Le gouvernement a invoqué ? et j'entendais un peu le premier
ministre le dire ? le fait qu'il y a seulement 15 % des officiers qui sont
formés à Saint-Jean, des officiers francophones, ce qui est vrai.
Mais, le Collège de Saint-Jean, c'était un puissant symbole, tant
aux yeux du Canada français que du Canada anglais, de la place que le
Canada entendait réserver aux francophones dans l'armée
canadienne. C'est pour ça que c'est important, le Collège de
Saint-Jean. Et, ne nous trompons pas, sa fermeture sera
interprétée par tout le Canada comme une victoire contre le
français dans les Forces armées canadiennes, une victoire qui
rendra futiles tous les efforts que les anglophones, militaires anglophones,
ont faits pour maîtriser le français.
Fermer ce collège alors qu'il mettait en route un projet visant
à offrir une formation aux officiers de tous les pays appelés
à diriger une force de maintien de la paix dans le monde, par l'ONU,
c'est également amener et transférer ce projet à
Kingston.
Rappelons, comme l'a fait le ministre de l'Éducation, les
performances du Collège militaire de Saint-Jean. Personne ne l'a
nié. Non seulement est-il perfor- mant, mais c'est le moins
coûteux. En matière d'enseignement, Kingston, per capita,
coûte 29 000 $, alors que le Collège de Saint-Jean en coûte
17 000 $. Est-ce que c'est ça, les recettes du gouvernement canadien
pour assurer une meilleure gestion des deniers publics?
M. le Président, si le gouvernement est sérieux, si le
député de Saint-Jean a eu un peu de poids sur ce gouvernement,
sur son gouvernement, je pense qu'il n'a qu'une voie: il doit appuyer
solidairement, avec l'Opposition, mais avec tous ceux qui sont intervenus sur
cette question, la motion de l'Opposition. Elle est claire, elle est simple,
elle est limpide, elle dit au gouvernement canadien: Ne touchez pas au
Collège de Saint-Jean, d'une part, parce que c'a permis la croissance et
favorisé la place des francophones dans les Forces armées
canadiennes, mais également parce que, de toute façon, nous
n'avons jamais eu notre quote-part en matière de dépenses
canadiennes. C'est le temps que ça prenne fin. Alors, j'espère
que le gouvernement aura, d'ici demain, l'occasion de se raviser et d'appuyer
intégralement et textuellement la motion de l'Opposition.
Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, Mme la
députée. Maintenant, je vais reconnaître le
député de Verdun. M. le député. Je ne vous ai pas
vu. Je reconnais le député de Verdun. C'est le
député de Verdun qui a la parole.
M. Henri-François Gautrin
M. Gautrin: M. le Président, la position de l'Opposition
est de la pure et simple démagogie, à l'heure actuelle. Et je
regrette que des personnes que j'estime puissent arriver à des positions
aussi démagogiques.
Premièrement, analysons l'ensemble des faits. Dans le budget
fédéral, une décision, qui est regrettable, certes, et qui
a créé beaucoup d'émoi, peut entraîner et
entraînera la fermeture du Collège militaire. Quelle est la
position démagogique? C'est de demander que l'on change une
décision qui est dans le budget, sachant bien qu'une fois qu'un budget
est discuté et déposé on ne peut pas la changer.
Ça, c'est la position de l'Opposition. C'est une position purement et
simplement... de la démagogie.
Quelle est la position du gouvernement du Parti libéral de Daniel
Johnson qui veut agir? C'est celle d'agir pour faire en sorte que cette
institution d'enseignement supérieur de première qualité
puisse continuer, sous une autre forme, à exister. D'agir pour faire en
sorte aussi ? et c'est extrêmement important pour nous ? que
l'on puisse obtenir les garanties que les francophones puissent avoir dans
l'armée, M. le Président, une formation dans leur langue.
Nous n'essayons pas de nous heurter et de renverser des murs, nous
essayons d'être pragmatiques. Et je dois ici tirer mon chapeau au
député de Saint-Jean. Il n'a pas essayé, à l'heure
actuelle, de vouloir bâtir et crier et déchirer sa chemise. Il
essaie d'être efficace
pour sa région. Il essaie réellement de travailler pour
protéger un établissement d'enseignement supérieur. Et,
levons notre chapeau ici, de part et d'autre de cette Chambre, pour regarder
à quel point cet établissement d'enseignement est un
établissement d'enseignement de qualité et, dans certains
secteurs, de première qualité, M. le Président.
Et, ce que dit l'amendement et... La position, de notre
côté, c'est de dire: Nous allons nous battre jusqu'au bout pour
faire en sorte qu'à Saint-Jean un établissement d'enseignement
supérieur de qualité, qui est là et qui maintient les
personnes en place, puisse être maintenu. Ça, c'est agir
réellement d'une manière efficace.
Deuxième objectif. Non pas simplement de crier: II n'y a
qu'à Saint-Jean, strictement, qu'on peut former les officiers de
l'armée canadienne francophones. Nous voulons absolument obtenir les
garanties nécessaires à ce qu'un jeune francophone puisse faire
carrière et obtenir sa formation militaire dans sa langue. Et plusieurs
pistes sont devant nous. Plusieurs pistes sont possibles. Il y a toutes sortes
de mécanismes dans lesquels, dans un cadre d'un établissement
d'enseignement supérieur qui pourrait même se trouver, d'ailleurs,
à Saint-Jean, on peut continuer à donner une partie de la
formation militaire au jeune francophone qui veut faire carrière dans
l'armée.
Mais l'approche que nous avons, de ce côté-ci de la
Chambre, ce n'est pas de tirer bénéfice de la fermeture du
Collège de Saint-Jean pour faire croire qu'on est maltraité
à l'intérieur du fédéralisme; ce n'est pas
ça, notre point de vue. Nous sommes ici en train de trouver, dans un
cas, dans un problème tout à fait concret et réel, de
trouver des solutions concrètes et des solutions réelles. C'est
ça, et c'est dans ce sens-là que veut agir le gouvernement, et
particulièrement que veut agir le gouvernement de Daniel Johnson.
Je dois, M. le Président, réellement féliciter
? et je pense que toute cette Chambre devrait, après avoir
voté la motion ? le député de Saint-Jean pour son
réalisme, pour la manière avec laquelle il sait défendre
d'une manière concrète l'ensemble de ses concitoyens et la
manière dont, au lieu d'avoir des visions purement hypothétiques,
il va être en mesure, pour protéger sa région, de maintenir
dans le cadre de sa région un établissement d'enseignement
supérieur et d'assurer aux jeunes francophones une formation militaire
dans leur langue. Ça, M. le Président, c'est une action
réaliste, concrète, réelle. C'est dans ce sens-là
qu'on doit tirer parti et chapeau et féliciter à l'heure actuelle
le député de Saint-Jean, et le premier ministre, et le ministre
de l'Éducation qui, dans cette démarche, l'appuient totalement et
complètement. (17 h 40)
M. le Président, je voudrais terminer ici en rappelant que, de ce
côté-ci de la Chambre, notre engagement à maintenir,
à l'heure actuelle, un établissement d'enseignement
supérieur de qualité à Saint-Jean et, deuxièmement,
à faire en sorte que les militaires puissent être formés
dans leur langue, lorsqu'ils sont francophones, au Canada.
M. le Président, c'est un objectif réaliste, c'est un
objectif que, je suis convaincu, le député de Saint-Jean, avec sa
détermination, est en mesure d'obtenir. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Merci, M. le
député. M. le député de Pointe-aux-Trembles.
M. Bourdon: Oui. En vertu du règlement, je voudrais poser
une question, s'il accepte, au député de Verdun.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, est-ce que, M. le
député de Verdun, vous acceptez?
M. Gautrin: ...avec plaisir et le plus vif des
agréments.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député de Pointe-aux-Trembles, posez votre question.
M. Bourdon: Est-ce qu'il lui arrive de trouver humiliant de
céder et de lâcher avant même d'avoir entrepris une bataille
pour garder le Collège de Saint-Jean?
M. Gautrin: Mon cher, je pense, à l'heure actuelle, M. le
Président, que je ne... pas sur les questions d'humilité ou quoi
que ce soit. Je pense, au contraire, que nous sommes en train de trouver la
vraie solution pour protéger à la fois un établissement
d'enseignement supérieur à Saint-Jean et la formation en
français des militaires canadiens.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député d'Iberville, une question...
M. Lafrance: M. le Président, est-ce que, en vertu du
même règlement, je pourrais... Vous ne m'avez pas reconnu un peu
plus tôt. Est-ce que je pourrais poser une question au
député de Verdun et aussi au député de
Jacques-Cartier sur leurs propos...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Non. Non. M. Lafrance:
...en vertu de notre règlement?
Le Vice-Président (M. Tremblay): Non. Vous pouvez
peut-être poser une question au député de Verdun, le
dernier intervenant. C'est la seule question... à condition que le
député de Verdun accepte.
Alors, M. le député de Verdun, est-ce que vous acceptez de
répondre à la question du député d'Iberville?
M. Gautrin: Ah! avec le plus vif des agréments et
le...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député d'Iberville, vous posez votre question. Très courte
question, s'il vous plaît.
M. Lafrance: Oui. Bien, M. le Président, ce n'est pas une
question de se sentir maltraité, comme il a dit là, mais
j'aimerais qu'il commente les propos qu'ont tenus les membres du Club des
anciens du Collège militaire, qui sont des anciens qui ont passé
dans la machine, à Kingston, qui l'ont dit: II est illusoire de
prétendre que l'égalité des chances sera
préservée en offrant une formation académique soi-disant
bilingue, concentrée au Royal Military College de Kingston.
M. Gautrin: M. le Président...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Oui.
M. Gautrin: ...c'est pour ça qu'il faut féliciter
encore le député de Saint-Jean, qui veut s'assurer qu'il y ait un
établissement d'enseignement supérieur à Saint-Jean qui
puisse offrir, le cas échéant, une formation aux jeunes
militaires canadiens.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le
député.
Je vais maintenant reconnaître un autre intervenant, M. le
député...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Non.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Alors, M. le
député de LaFontaine, à vous la parole. M. le
député de LaFontaine, au préalable, vous avez quatre
minutes pour vous faire entendre.
M. Jean-Claude Gobé
M. Gobé: Merci, M. le Président, et permettez-moi
de vous saluer en cette première intervention qui sera faite sous votre
présidence. Et je fais appel à votre
générosité si, par hasard, je dépassais le temps.
En ce qui concerne la réglementation, soyez assuré que je vais la
suivre.
M. le Président, le dossier de la fermeture du Collège
militaire de Saint-Jean s'inscrit dans un concept beaucoup plus global,
certainement, que celui dans lequel l'Opposition veut bien nous
entraîner. Il s'agit, M. le Président, de regarder le contexte
international. Que se passe-t-il? Nous assistons, suite à la fin de la
guerre froide, suite au démantèlement du Bloc de l'Est...
M. le Président, pourriez-vous demander au député
de Lévis si je pourrais parler tranquillement, s'il vous
plaît?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Article 32. Je demande
aux collègues le respect des règles de cette
Assemblée. On m'a demandé, aujourd'hui, des deux
côtés de la Chambre, de le faire strictement, et je le ferai
davantage plus strictement.
M. le député, si vous voulez poursuivre.
M. Gobé: Merci, M. le Président, de ce rappel
à l'ordre. Alors, comme je le disais, cette fermeture du collège
s'inscrit dans un concept beaucoup plus global que celui strictement
québécois ou canadien. M. le Président, tout le monde le
sait, nous avons assisté au démantèlement du Bloc de l'Est
et à la fin de la guerre froide, et on se rend compte que les missions
imparties aux armées occidentales ne sont plus les mêmes. Nous
avons assisté aussi au rapatriement de nos troupes canadiennes des pays
comme l'Allemagne, où nous avions un certain nombre de militaires qui
étaient là depuis 25 ans. Nous avons assisté aussi,
parallèlement, à la même performance ou à la
même dynamique de nos partenaires de l'OTAN, le pacte de l'Alliance
atlantique, en particulier des Américains, et on voit que l'armée
américaine, elle aussi, va quitter bientôt l'Allemagne et que,
rendu au mois de septembre 1995, il n'y aura plus un seul militaire
étranger sur le territoire allemand. Et cela amène, bien entendu,
une révision des effectifs et des missions imparties à nos
régiments.
Parallèlement, M. le Président, il est vrai aussi que les
conditions budgétaires que les gouvernements connaissent nous
amènent à faire des choix parfois dramatiques en termes de
services ou en termes d'organismes et de missions allouées à ces
organismes, qu'ils soient militaires, civils, sociaux, éducatifs ou
autres.
Et, M. le Président, je suis un ancien militaire, moi. J'ai fait
des études militaires, pas dans une école comme à
Saint-Jean, mais dans une école qui m'a permis de rentrer, comme jeune
soldat, dans la troupe et d'acquérir par la suite un grade, moi aussi,
que j'ai obtenu dans une école qui a permis de compléter ma
formation. Aussi, M. le Président, on ne pourra pas me targuer
d'être antimilitariste. Bien au contraire, j'ai beaucoup de respect pour
les gens qui pratiquent ce métier et qui, bien souvent au péril
de leur vie, assurent des missions de paix.
Alors, je crois, M. le Président, qu'il faut dire que, si nous
avons actuellement une décision de fermeture du collège militaire
? et je n'ai pas beaucoup de temps, malheureusement, pour l'expliquer
? c'est dû, il est vrai, à un contexte international
différent et aussi à une situation budgétaire
extrêmement difficile. Alors, je ne crois pas qu'il faille mettre
là de harcèlement envers les Québécois, envers les
Canadiens français. Je ne crois pas que nous avons à nous
retrouver avec... M. le Président, si nous prenons les moyens
adéquats pour faire en sorte de consolider, dans un collège
unique, à Kingston, les mesures et les moyens nécessaires pour
donner un enseignement de haut calibre et de haut niveau à nos
militaires, je ne crois pas que nous allons nuire à la carrière
de nos jeunes francophones dans les Forces armées canadiennes.
J'aurais aimé en parler plus longtemps, M. le
Président, mais vous me faites signe, et je vois que,
malheureusement, le temps est terminé, et je le déplore
grandement, soyez-en assuré, car j'aurais aimé informer la
population de plus de détails et du concept international et global de
cette décision, et ne pas la ramener à un concept
extrêmement territorial et ethnique, parce que ce n'est pas ça, le
problème, M. le Président.
Décision du président sur la
recevabilité de l'amendement
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le
député. Alors, avant de vous donner votre droit de
réplique, M. le whip en chef de l'Opposition officielle et
député de Lac-Saint-Jean, je suis maintenant prêt à
rendre la décision concernant la recevabilité de la motion
d'amendement présentée par le ministre de l'Éducation
à la motion du mercredi, présentée par le whip en chef de
l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean.
Je déclare cette motion d'amendement recevable. Elle est conforme
à l'article 197 du règlement pour les motifs suivants. La motion
d'amendement concerne le même sujet que la motion principale, soit la
non-fermeture du Collège militaire Saint-Jean ou, autrement dit, le
maintien en activité du Collège militaire Saint-Jean. La motion
d'amendement ne va pas à rencontre du principe de la motion principale.
La motion principale exige que le gouvernement fédéral renonce
à la fermeture du Collège militaire Saint-Jean alors que la
motion d'amendement exige le soutien du Collège militaire, entre autres,
à titre d'enseignement supérieur pour les officiers francophones.
En exigeant le soutien des activités d'enseignement supérieur du
Collège militaire Saint-Jean pour les officiers francophones, on exige
implicitement du gouvernement fédéral qu'il renonce à sa
décision de fermer le collège. La motion d'amendement n'a donc
pas pour effet d'écarter la motion principale.
Une motion d'amendement peut avoir pour effet de permettre un
débat plus large que la motion principale. Une motion d'amendement peut
apporter des changements importants à la motion principale. Une motion
d'amendement peut ouvrir des avenues non prévues par la motion
principale. Enfin, la motion d'amendement présentée par le
ministre de l'Éducation n'a pas pour effet de nier la motion
principale.
En conséquence, cette motion d'amendement est recevable.
M. le whip en chef de l'Opposition, sur votre droit de
réplique.
Reprise du débat sur la motion principale et
sur l'amendement
M. Jacques Brassard (réplique)
M. Brassard: M. le Président, d'abord, je dirai au
député de Lafontaine que le démantèlement du Bloc
de l'Est et les changements majeurs intervenus sur le plan
géostratégique, ça peut peut-être expliquer la
ferme- ture de bases militaires et justifier la fermeture de bases militaires,
mais ça ne justifie d'aucune façon la fermeture du seul
établissement de niveau supérieur qui forme des officiers
francophones dans l'armée canadienne. D'aucune façon.
M. le Président, je suis désolé de ce qui s'est
passé cet après-midi, parce que j'avais présenté
une motion d'une clarté absolue et d'une simplicité aussi
absolue. Je la relis parce que je pense que c'est important d'en constater
à la fois la simplicité et la clarté: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
renonce à sa décision ? qu'il a prise ? de fermer le
Collège militaire Saint-Jean.» C'est simple et c'est clair. (17 h
50)
Malheureusement, par les amendements apportés par le ministre de
l'Éducation, par une entourloupette qui n'est pas une exception ?
à l'occasion des débats sur des motions du mercredi, c'est
arrivé maintes et maintes fois ? par une pirouette
procédurière, on en est arrivé à défigurer
complètement le sens et la substance même de la motion. Voici
qu'on ne demande plus au fédéral, maintenant, de renoncer
à sa décision, on lui demande de soutenir le Collège
militaire Saint-Jean à titre d'établissement d'enseignement
supérieur tout en lui assurant, entre autres, une vocation pour la
formation des officiers francophones.
M. le Président, je suis du même avis que le
député d'Iberville. Il y a là une entourloupette, il y a
là une procédure tout à fait louche parce que, avec une
telle motion, telle qu'amendée, on va se retrouver à cautionner
par avance. C'est ça que je soupçonne, M. le Président,
c'est ça, le «deal», le «deal» qui est
probablement déjà intervenu entre le premier ministre
fédéral et le premier ministre du Québec.
Déjà. Parce que, quand on examine les propos du premier ministre
du Québec, on comprend très bien les amendements. Il doit y avoir
un «deal». Et, quand on se rappelle les propos du premier ministre
fédéral, cette semaine, qui répondait au leader de
l'Opposition officielle à la Chambre des communes: La décision
est définitive, mais, écoutez, on est prêts à aider.
Ah bon! Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que le
Collège militaire de Saint-Jean, comme institution militaire de
l'armée canadienne, dont la vocation est de former des officiers
francophones, ça, ça va demeurer. Mais, pour permettre au
gouvernement du Québec de sauver la face ? c'est de ça dont
il s'agit présentement ? on va lui refiler les immeubles. C'est
comme ça que ça va se présenter.
Prenez donc les immeubles. On vous les donne pour 1 $, puis on va vous
soutenir. C'est leur façon de soutenir. Le soutien là, ça
peut prendre cette forme-là, le soutien. On ferme la boutique, mais on
vous donne les immeubles. Puis, continuez d'y maintenir un enseignement
universitaire, un enseignement supérieur, et puis, on va envoyer
quelques officiers francophones, là. Comme ça, ça
paraîtra bien, ça va paraître comme étant une
institution qui forme des officiers francophones. On va vous en envoyer
quelques-uns. Ce qui ne sera pas nouveau, là, ni inédit,
là, parce que, dans toutes les
universités, il y en a, des officiers francophones. Ce n'est pas
nouveau, là, des officiers de l'armée canadienne qui
étudient dans d'autres universités du Québec. Ça
existe déjà. Alors, on va vous en envoyer si vous maintenez un
enseignement supérieur à Saint-Jean dans les immeubles qu'on vous
cède, qu'on va vous céder. Alors, il y aura là une
institution d'enseignement supérieur, et puis on enverra des officiers
francophones pour y recevoir une formation. Comme ça, on aura permis au
gouvernement de sauver la face. Mais le gouvernement fédéral,
cependant, aura fermé véritablement la seule institution qui
formait des officiers et qui relevait du gouvernement fédéral et
qui relevait de l'armée canadienne.
M. le Président, je ne peux pas accepter ça, moi. Je ne
peux pas accepter ça parce que ça ne répond pas, d'aucune
façon, au voeu de la population, ça ne répond pas,
d'aucune façon, au voeu de tous les intervenants qui se sont
coalisés à Saint-Jean, au-delà de toutes les
allégeances politiques: il y a des libéraux, il y a des
souverainistes, il y a des péquistes, il y a des
«allairistes», il y a du monde venant de tous les horizons, dans
cette coalition-là. Leur objectif, c'est très clair, c'est de
maintenir le Collège militaire tel qu'il existe en maintenant
intégralement sa vocation actuelle. C'est ça, le voeu de la
population. Et, par cette motion-là, on se trouve à cautionner
toutes sortes de changements dont il est question, de scénarios de
rechange, de solutions de rechange dont on ne connaît pas la nature
? on ne sait pas ce que ça signifie ? qu'est en train
soi-disant d'étudier le ministre de l'Éducation. Mais personne ne
sait à quoi ça va ressembler. On cautionnerait ces soi-disant
scénarios de rechange. Nous, on ne marchera pas là-dedans, M. le
Président. Je vais faire un test, moi, pour voir si, vraiment, ils sont
sérieux, si, vraiment, ce qu'ils nous disent là, c'est
véritablement le maintien du Collège militaire de Saint-Jean, tel
qu'il existe.
Motion de sous-amendement
Je vais présenter des sous-amendements, M. le Président.
Je propose que l'amendement soit sous-amendé par le remplacement, dans
le paragraphe a, du mot «soutienne» par le mot
«maintienne» et par le remplacement, dans le paragraphe b, des mots
«lui assurant, entre autres, une vocation pour la» par les mots
«confirmant sa vocation actuelle de», ce qui ferait que la motion
amendée et sous-amendée se lirait comme suit: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
maintienne le Collège militaire de Saint-Jean à titre
d'établissement d'enseignement supérieur tout en confirmant sa
vocation actuelle de formation des officiers francophones.» Voilà,
M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): On va faire une
photocopie pour la mettre... Est-ce qu'il y a des... On va attendre que vous
ayez la copie, M. le député.
M. Brassard: Pardon?
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vais attendre que
vous ayez la copie du sous-amendement. Pas de commentaires? Je vais suspendre
les travaux pour quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 57)
(Reprise à 18 h 1)
Décision du président sur la
recevabilité du sous-amendement
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Veuillez prendre place,
s'il vous plaît! Alors... S'il vous plaît! Alors, la motion de
sous-amendement est recevable. Cette réplique met fin au débat
sur la motion du député de Lac-Saint-Jean. Cette motion se lit
comme suit: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement
fédéral qu'il renonce à sa décision de fermer le
Collège militaire Saint-Jean.» Il y a eu un amendement
proposé et il y a eu un sous-amendement proposé. Alors, je vais
mettre aux voix le sous-amendement. Vote enregistré...
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Non, non, mais...
M. Chevrette: ...appel nominal.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, oui, mais, c'est
ça, je me dois de mettre aux voix... Vous me demandez: Appel nominal, et
je vais appeler les députés. Alors, j'ai un appel nominal qui est
demandé. Alors, qu'on appelle les députés!
(18 h 2 - 18 h 8)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre
place. Si vous prendre place, s'il vous plaît! A l'ordre! Mme la
députée de Kamouraska-Témiscouata. M. le
député de Viau.
Mise aux voix de la motion de sous-amendement
Alors, je vais mettre aux voix la motion de sous-amendement
proposée par M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en
chef de l'Opposition officielle. L'amendement est sous-amendé par le
remplacement, dans la paragraphe a, du mot «soutienne» par le mot
«maintienne», et par le remplacement, dans le paragraphe b, des
mots «lui assurant, entre autres, une vocation pour la», par les
mots «confirmant sa vocation actuelle de».
La motion amendée et sous-amendée se lirait comme suit:
«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement
fédéral qu'il maintienne le Collège militaire Saint-Jean
à titre d'établissement d'enseignement supérieur tout en
confirmant sa vocation actuelle de formation des officiers
francophones.»
Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se lever.
(18 h 10)
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), M. Garon (Lévis), Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Bertrand (Portneuf), Mme
Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M.
Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard
(Labelle), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Holden (Westmount), M.
Ménard (Laval-des-Rapides), M. Trudel
(Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Qiaudière), M. Bélanger
(Anjou).
M. Lafrance (Iberville).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis
(Brome-Missisquoi), M. Sirros (Laurier), M. Tremblay (Outremont).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le
député de Lévis, c'est un vote, hein.
M. Garon: Oui.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Ah. Vous le savez? Si
vous voulez poursuivre.
Le Secrétaire adjoint: M. Bourbeau (Laporte), Mme
Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil), M. Picotte
(Maskinongé), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Blackburn
(Roberval), M. Gobé (LaFontaine), M. Lemire (Saint-Maurice), M.
Thérien (Rousseau), M. Farrah (îles-de-1 a-Madeleine), M.
Vallerand (Crémazie), M. Leclerc (Taschereau), M. Middlemiss (Pontiac),
M. Paradis (Matapédia), M. Cusano (Viau), M. Cherry (Sainte-Anne), Mme
Trépanier (Dorion), M. Lefebvre (Frontenac), M. Vallières
(Richmond), Mme Robillard (Chambly), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Pelchat (Vachon), M.
Maltais (Saguenay), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Bélisle (Mille-Îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata),
M. Houde (Berthier), Mme Hovington (Matane), M. Parent (Sauvé), M.
Benoît (Orford), M. Fradet (Vimont), M. Gautrin (Verdun), M.
Lafrenière (Gatineau), M. Williams (Nelligan), M. MacMillan (Papineau),
M. Camdem (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), Mme Bleau (Groulx),
Mme Bégin (Bellechasse), M. Kehoe (Chapleau), Mme Cardinal
(Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost),
M. Hamel (Sherbrooke), M. Joly (Fabre), M. Khelfa (Richelieu), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-
Yamaska), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Elkas (Robert-Baldwin), M.
Charbonneau (Saint-Jean), Mme Boucher Bacon (Bourget), M. Bergeron
(Deux-Montagnes), M. Lesage (Hull), M. Brodeur (Shefford).
M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Y a-t-il des
abstentions? Aucune abstention.
Le Secrétaire: pour: 21 contre: 63
Abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, cette motion de
sous-amendement est rejetée. Vous demandez que M. le
député...
Une voix: II a le droit d'entrer.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, d'accord, il a le
droit d'entrer.
Mise aux voix de la motion d'amendement
Alors, nous allons passer maintenant à la motion d'amendement
proposée par M. le ministre de l'Éducation. Cet amendement se lit
comme suit: Que la motion en discussion soit amendée par le remplacement
des mots «renonce à sa décision de fermer» par le mot
«soutienne», et par l'ajout, après le mot
«Saint-Jean», des mots «à titre d'établissement
d'enseignement supérieur tout en lui assurant, entre autres, une
vocation pour la formation des officiers francophones».
La motion amendée se lirait comme suit: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
soutienne le Collège militaire Saint-Jean à titre
d'établissement d'enseignement supérieur tout en lui assurant,
entre autres, une vocation pour la formation des officiers
francophones.»
Que ceux et celles qui sont pour cette motion...
M. Chevrette: Je suis prêt à accepter un vote
inversé.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Vote inversé?
Consentement?
Des voix: ...
Une voix: Vote nominal.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): II y a M.
Boisclair qui s'est ajouté. Il s'agit d'une motion qui est
importante. L'amendement du. ministre de l'Éducation est important. Dans
les circonstances...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, que
ceux et celles qui sont pour cette motion d'amendement veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis
(Brome-Missisquoi), M. Sirros (Laurier), M. Tremblay (Outremont), M. Bourbeau
(Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil),
M. Picotte (Maskinongé), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Blackburn
(Roberval), M. Gobé (LaFontaine), M. Lemire (Saint-Maurice), M.
Thérien (Rousseau), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Vallerand
(Crémazie), M. Leclerc (Taschereau), M. Middlemiss (Pontiac), M. Paradis
(Matapédia), M. Cusano (Viau), M. Cherry (Sainte-Anne), Mme
Trépanier (Dorion), M. Lefebvre (Frontenac), M. Vallières
(Richmond), Mme Robillard (Chambly), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Pelchat (Vachon), M.
Maltais (Saguenay), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Bélisle (Mille-Îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata),
M. Houde (Berthier), Mme Hovington (Matane), M. Parent (Sauvé), M.
Benoit (Orford), M. Fradet (Vimont), M. Gautrin (Verdun), M. Lafrenière
(Gatineau), M. Williams (Nelligan), M. MacMillan (Papineau), M. Camden
(Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), Mme Bleau (Groulx), Mme
Bégin (Bellechasse), M. Kehoe (Chapleau), Mme Cardinal
(Châteauguay), M. Després (Limoilou), M. Forget (Prévost),
M. Hamel (Sherbrooke), M. Joly (Fabre), M. Khelfa (Richelieu), M. Messier
(Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Loiselle (Saint-Henri), M.
Elkas (Robert-Baldwin), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Boucher Bacon
(Bourget), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. LeSage (Hull), M. Brodeur
(Shefford).
M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cet amendement veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), M. Garon (Lévis), Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Bertrand (Portneuf), Mme
Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M.
Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard
(Labelle), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Holden (Westmount), M.
Boisclair (Gouin), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Trudel
(Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger
(Anjou).
M. Lafrance (Iberville).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
abstentions? Aucune abstention.
le secrétaire: pour: 63 contre: 22 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Cette motion est
adoptée. (18 h 20)
Mise aux voix de la motion principale
Je mets maintenant aux voix la motion principale, telle qu'elle vient
d'être amendée. Cette motion se lit comme suit: «Que
l'Assemblée nationale exige du gouvernement fédéral qu'il
soutienne le Collège militaire Saint-Jean à titre
d'établissement d'enseignement supérieur tout en lui assurant,
entre autres, une vocation pour la formation des officiers
francophones.»
Que ceux et celles qui sont pour cette motion veuillent bien se
lever.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, à
ce moment-ci, je demanderais le consentement de mon bon ami, le leader de
l'Opposition officielle, pour que le même...
Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...vote soit
enregistré.
M. Chevrette: Son bon ami, là, les liens d'amitié
sont rompus!
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Et, sur ce, nous allons
procéder au vote.
Que ceux et celles qui sont pour cette motion, tel qu'amendée,
veuillent bien se lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Johnson (Vaudreuil), M. Paradis
(Brome-Missisquoi), M. Sirros (Laurier), M. Tremblay (Outremont), M. Bourbeau
(Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ryan (Argenteuil),
M. Picotte (Maskinongé), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Blackburn
(Roberval), M. Gobé (LaFontaine), M. Lemire (Saint-Maurice), M.
Thérien (Rousseau), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Vallerand
(Crémazie), M. Leclerc (Taschereau), M. Middlemiss (Pontiac), M. Paradis
(Matapédia), M. Cusano (Viau), M. Cherry (Sainte-Anne), Mme
Trépanier (Dorion), M. Lefebvre (Frontenac), M. Vallières
(Richmond), Mme Robillard (Chambly), M. Chagnon (Saint-Louis), M. Marcil
(Salaberry-Soulanges), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), Mme Pelchat (Vachon), M.
Maltais (Saguenay), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M.
Bélisle (Mille-Îles), Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata),
M. Houde
(Berthier), Mme Hovington (Matane), M. Parent (Sauvé), M. Benoit
(Orford), M. Fradet (Vimont), M. Gautrin (Verdun), M. Lafrenière
(Gatineau), M. Williams (Nelligan), M. MacMillan (Papineau), M. Camden
(Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), Mme Bleau (Groulx), Mme Begin
(Bellechasse), M. Kehoe (Chapleau), Mme Cardinal (Châteauguay), M.
Després (Limoilou), M. Forget (Prévost), M. Hamel (Sherbrooke),
M. Joly (Fabre), M. Khelfa (Richelieu), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M.
Richard (Nicolet-Yamaska), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Elkas
(Robert-Baldwin), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Boucher Bacon (Bourget), M.
Bergeron (Deux-Montagnes), M. LeSage (Hull), M. Brodeur (Shefford).
M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Que ceux et celles qui
sont contre cette motion principale, tel qu'amendée, veuillent bien se
lever.
Le Secrétaire adjoint: M. Chevrette (Joliette), Mme
Blackburn (Chicoutimi), M. Biais (Masson), M. Garon (Lévis), Mme Harel
(Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Bertrand (Portneuf), Mme
Caron (Terrebonne), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M.
Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard
(Labelle), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Holden (Westmount), M.
Boisclair (Gouin), M. Ménard (Laval-dès-Rapides), M. Trudel
(Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Beaulne (Bertrand), Mme
Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger
(Anjou).
M. Lafrance (Iberville)
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a des
abstentions? Aucune abstention. le secrétaire: pour: 63 contre:
22 abstentions: 0
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Cette motion est
adoptée. Alors, compte tenu de l'heure et compte tenu du
règlement, les travaux de cette Assemblée sont ajournés
à demain, jeudi 10 mars, à 14 heures.
(Fin de la séance à 18 h 25)