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Version finale

34e législature, 1re session
(28 novembre 1989 au 18 mars 1992)

Le mercredi 18 mars 1992 - Vol. 31 N° 185

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Mesdames et messieurs les députés, si vous voulez vous asseoir, s'il vous plaît!

Affaires inscrites par les députés de l'Opposition

Motion proposant que l'Assemblée réaffirme la position du gouvernement

à l'effet de négocier à deux, et non à onze, avec le gouvernement

canadien tout projet d'entente constitutionnelle

En ce mercredi, 18 mars 1992, nous entreprenons les travaux de l'Assemblée, à l'étape des affaires du jour et à l'article 40 de notre feuilleton. Aux affaires inscrites par les députés de l'Opposition, M. le whip de l'Opposition officielle et député de Lac-Saint-Jean présente la motion suivante: «Que l'Assemblée nationale réaffirme la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à 2 et non à 11, avec le gouvernement canadien tout projet d'entente constitutionnelle.»

Alors, avant que le débat sur cette motion du whip de l'Opposition officielle ne s'engage, je vous informe de la répartition du temps de parole établie pour la discussion de ladite motion. Mise à part la réplique de 10 minutes accordée à l'auteur de la motion, à savoir le député de Lac-Saint-Jean, et les 10 minutes allouées à l'ensemble des députés indépendants, les deux groupes parlementaires se partageront également la période consacrée à ce débat. Dans ce cadre, les interventions sont limitées à une durée de 30 minutes chacune.

Je veux également vous rappeler qu'il a été convenu que la motion sera en discussion pour un seul mercredi et, comme cette entente est en dérogation à la règle habituelle voulant que les motions du mercredi s'échelonnent sur deux mercredis, je comprends, M. le leader ajoint, que vous souhaiteriez qu'on en fasse un ordre de la Chambre.

M. Johnson: En effet, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, ce sera le cas. Je suis prêt, à partir de maintenant, à reconnaître le premier intervenant, à savoir M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Merci, M. le Président. On me permettra d'abord un peu d'histoire, probablement par déformation professionnelle, sur le dossier constitutionnel, très rapidement, pour rappeler à cette Chambre qu'au cours des 30 dernières années il y a eu trois rondes de négociations constitutionnelles et que ces trois rondes ont toutes échoué: la première, la plus lointaine, c'est celle de 1968-1971 qui s'est soldée par l'échec de la conférence de Victoria, on s'en rappellera, et où le premier ministre actuel était à ce moment-là aux commandes. Il amorçait son premier mandat comme premier ministre. Ça a été l'échec encore une fois par incompréhension, le Québec misant surtout sur le partage des compétences et le reste du Canada étant préoccupé par d'autres sujets comme le rapatriement de la Constitution, la réforme du Sénat, une charte des droits qui était un peu l'obsession du premier ministre fédéral d'alors, M. Trudeau.

Deuxième ronde, 1980-1981, celle qui a suivi le référendum de 1980. Ça, c'a été pire encore que la première. Un échec pour ce qui concerne le Québec, bien sûr, puisqu'on se rappellera du coup de force de l'époque, où l'on a, évidemment, fait fi des revendications et des exigences du Québec et où on a procédé à des changements majeurs à la Constitution canadienne en plus du rapatriement, sans le consentement, sans l'assentiment du Québec. Cela a donné lieu, d'ailleurs, à une motion quasi unanime ici, à l'Assemblée nationale, condamnant ce procédé puisqu'on réduisait, sans son consentement, les pouvoirs mêmes de l'Assemblée nationale. Donc, deuxième ronde, échec.

Troisième ronde, 1987-1990. C'est la ronde qui porte sur ce qu'on a appelé l'accord du lac Meech. Ça aussi, ça s'est terminé - je n'ai pas besoin de vous le rappeler, c'est encore plus récent - par un échec. Pourtant, le Québec avait formulé ses demandes les plus modestes, cinq conditions très, très modestes, selon les termes mêmes du premier ministre, mais, malgré cela, le Canada anglais, l'opinion publique du Canada anglais majoritairement a rejeté ces exigences, ces conditions modestes demandées par le Québec et deux premiers ministres ont, en quelque sorte, reflété cette opinion publique majoritaire et ont fait échouer le processus.

Trois rondes constitutionnelles de négociations constitutionnelles au cours des 30 dernières années. Trois échecs, M. le Président. Les causes de ces échecs, bien sûr, on peut accuser, à juste titre, le mode de négociations. Je pense que, quand on réunit autour d'une table 11 représentants de 11 gouvernements, dont 10 représentent l'une des deux nations, celle qui est majoritaire au Canada, et 1 seul de ces 11 gouvernements

représente l'autre nation, la nation québécoise, c'est évident que la position du Québec est ce qu'on pourrait appeler une position de faiblesse, d'une certaine façon, une position constante de faiblesse puisqu'il n'y a qu'un seul gouvernement parmi 11 qui représente l'une des deux nations, la nation québécoise.

Donc, le mode de négociations, sans doute, explique largement l'échec de ces trois rondes de négociations. Mais je pense que la vraie raison ou la vraie cause de l'échec également se retrouve, encore une fois, je me répète, mais ça me semble essentiel, fondamental, la vraie cause de l'échec se retrouve dans ce que le rapport Bélanger-Campeau appelait «le choc des visions, des aspirations et des identités nationales».

Je me permets une citation, M. le Président, qui résume bien cette cause de l'échec des négociations constitutionnelles au Canada et au Québec. Je cite: «Mais une lecture historique de l'expérience du fédéralisme canadien nous force à reconnaître une antinomie entre la tendance à la centralisation et à l'uniformisation du régime canadien, d'une part, et, d'autre part, la volonté sans cesse grandissante du Québec d'affirmer son autonomie et sa spécificité et d'être pleinement maître de ses décisions et des choix qui le concernent. Telle est donc là, fondamentalement, la raison première de l'impasse actuelle.» M. le Président, je n'ai pas indiqué la source de cette citation pour un peu m'amuser, d'une certaine façon. Il ne s'agit pas du livre blanc du Parti québécois de 1980, il ne s'agit pas du programme du Parti québécois, il s'agit du «Québec libre de ses choix», communément appelé le rapport Allaire. C'est là la façon dont, dans le rapport Allaire, on explique l'impasse actuelle. Ça me semblait important de le citer.

Mais je pourrais, également, citer le rapport Bélanger-Campeau qui est aussi très clair, très lumineux à ce sujet-là. On retrouve ce paragraphe dans Bélanger-Campeau: «Après 25 ans de discussions constitutionnelles, deux commissions d'enquête instituées par le gouvernement fédéral, des modifications constitutionnelles majeures apportées en 1982, sans le consentement du Québec, et, enfin, l'échec d'une entreprise constitutionnelle qui abordait pour la première fois, dans la perspective du Québec, la dimension politique du problème québécois, il est légitime de s'interroger, à tout le moins, sur la capacité du reste du Canada d'accéder à des choix qui répondent vraiment aux besoins, aspirations et visions propres au Québec. De tels choix ont été jusqu'ici perçus ou traités comme inconciliables avec d'autres besoins, aspirations et visions présents au Canada ou incompatibles avec le bon fonctionnement de la Fédération canadienne.» Rapport Bélanger-Campeau.

Alors, M. le Président, je pense qu'il était important de faire ce bref retour historique pour, à la fois, mesurer l'ampleur des échecs dans les négociations constitutionnelles et essayer aussi d'en percevoir et d'en identifier les causes véritables.

Voyons maintenant si les choses ont vraiment changé, s'il y a vraiment eu évolution de la réalité. D'abord, prenons le cas de cette conférence qui a eu lieu jeudi dernier, à Ottawa, regroupant a la fois des premiers ministres et des ministres responsables du dossier constitutionnel. Quelle conclusion, quelle leçon en tirer?

Premièrement, il apparaît évident que le rapport Beaudoin-Dobbie a été carrément et définitivement mis au rancart. Fini! Terminé! On n'en parle plus. Son existence a été brève; il n'a pas réussi à atteindre l'âge de la majorité. C'est un enfant mort-né. Remarquez que je ne verserai pas de pleurs sur ce décès, compte tenu évidemment de l'opinion que j'en avais, et de l'opinion que l'Assemblée nationale en avait aussi; je fais référence au vote de la semaine dernière à l'Assemblée nationale. Bon. Mais c'est quand même un constat qu'il faut faire: la mise au rancart du rapport Beaudoin-Dobbie. Enterrement de première classe.

Deuxièmement, ce qu'on a constaté également à l'occasion de cette conférence des premiers ministres, tenue à Ottawa jeudi dernier, c'est un refus très clair, très net de toute forme de statut particulier qu'on pourrait octroyer au Québec. Je pense qu'il faut décoder les choses telles qu'elles sont. Il est clair qu'on est prêt maintenant, au Canada anglais, à reconnaître de façon très symbolique le Québec comme société distincte. Oui, mais à condition, donc, que ce ne soit plus tout simplement qu'un ornement constitutionnel, mais sans pouvoirs. Sans pouvoirs. Clyde Wells a répété sa position tout récemment; on voyait ça dans les journaux d'aujourd'hui ou d'hier: «Clyde Wells dit oui à la société distincte, mais sans pouvoirs différents au Québec». Donc, que ce ne soit qu'un simple bibelot constitutionnel.

Mais ce qui est aussi évidemment très important, c'est que plusieurs premiers ministres ont exprimé de façon très nette leur refus d'accorder au Québec des compétences exclusives ou des pouvoirs particuliers, cela au nom, disaient-ils, ont-ils répété, de l'égalité des provinces et aussi parce qu'ils souhaitent un gouvernement central fort. Pour l'Alberta et pour Terre-Neuve, c'est on ne peut plus clair, mais pour d'autres provinces aussi, je pense au Manitoba et à la Colombie-Britannique, il est évident que, pour elles, le principe de l'égalité des provinces est un principe fondamental qui ne doit être violé d'aucune façon ni sous quelque forme que ce soit et, donc, par conséquent, on en tire, on déduit, à partir de ce principe-là, qu'on ne peut accepter quelque forme que ce soit de statut particulier au Québec et, aussi, qu'on ne peut pas accepter l'octroi d'un droit de veto pour le Québec à partir de ce principe-là de légalité des provinces. Alors, il n'y a pas de changement sur ce plan. Il n'y a aucun progrès

qu'on a pu constater à cette conférence de jeudi dernier.

(10 h 20)

On a cependant constaté une chose, c'est que c'est le premier ministre de l'Ontario, Bob Rae, qui a pris les commandes de l'appareil. Il a éjecté le pilote, Joe Clark, il l'a repoussé dans la carlingue, en arrière, il a pris les commandes de l'appareil. Bob Rae. Et c'est lui qui a imposé à la fois la forme des négociations. Il a dit: C'est comme ça que ça va se passer désormais, les provinces vont être là, on va former des comités, quatre comités de fonctionnaires, et on va amorcer les négociations et les pourparlers et c'est nous qui allons décider. En plus, il a imposé son calendrier. Il a dit: Ça ne sera pas avril, ça va être la fin mai. Et là, Clyde Wells dit que, fin mai, c'est un peu tôt aussi. Alors, ce n'est pas sûr que ça demeure fin mai. Mais, manifestement, jeudi dernier, l'élément déterminant, l'élément, je dirais, le plus important de cette conférence, c'est l'arrivée sur l'avant-scène de Bob Rae, le premier ministre de l'Ontario, qui a carrément écarté Joe Clark du dossier.

En plus, ce même Bob Rae a exigé et a obtenu que la table constitutionnelle soit élargie. Il y en avait 11 avant. Il trouve que ce n'était pas assez, il en fallait plus, le menu était assez chargé pour qu'il y en ait plus, tout le monde pouvait y trouver à manger, on ajoute du monde. Alors, on a ajouté les deux gouvernements territoriaux et on a ajouté les quatre représentants des grandes associations autochtones du Canada, de sorte qu'on se retrouve 16, 17 si le Québec se retrouvait, comme gouvernement, à cette table. Donc, on est passé de 11 à 16. Ça ne marchait déjà pas bien à 11, ça n'a jamais réussi à 11, imaginez-vous comment ça va se passer à 16! C'est ce que Lise Bissonnette a appelé, à juste titre, «une belle recette pour l'enlisement». C'est carrément... On ajoute un étage de plus à la tour de Babel qui existait déjà. On trouve qu'elle n'est pas assez haute - un autre étage! - accentuant ainsi la confusion des langues et des esprits. Voilà ce qui s'est passé, M. le Président, à cette conférence de jeudi dernier.

Évidemment, ça a créé des mécontents, des frustrés. On a vu, hier, la Fédération des francophones hors Québec qui a dit: Écoutez, nous, on est 900 000 ou près de 1 000 000; pourquoi ne serait-on pas à la table? pourquoi n'aurait-on pas un siège? les autochtones qui sont moins que nous en ont quatre; pourquoi pas nous? Clark leur a fermé la porte au nez. Il a dit: Non, non, il n'en est pas question. Mais c'est évident qu'en élargissant la table on suscite des mécontentements et des revendications. Alors, la thérapie de groupe est en route, mais ça va ressembler beaucoup à de la cacophonie.

Deuxièmement, M. le Président, en fin de semaine dernière, il y avait la conférence sur les autochtones, sur la question autochtone, qui s'est déroulée à Ottawa. Je vous signale d'abord et je vous rappelle que les autochtones avaient d'abord refusé ce genre de conférence. Ils avaient d'abord dit non; ensuite, ils se sont ravisés, ils ont exigé avoir leur propre conférence. Clark a cédé et ça a eu lieu en fin de semaine dernière.

Il ressort clairement de cette conférence que la question autochtone est devenue au Canada la priorité no 1 sur le plan constitutionnel dans le cadre de la présente ronde de négociations, cette ronde Canada qui est en cours. C'est clair, c'est évident, la priorité no 1 à l'agenda constitutionnel, maintenant, au Canada, c'est la question autochtone. Il y a une sorte de vague de sentimentalisme qui déferle actuellement au Canada anglais, une espèce de grande bouffée de romantisme à l'égard des autochtones, à l'égard des communautés autochtones. Comme je le mentionnais à un journaliste récemment, ça fait maintenant, au Canada anglais, bon chic, bon genre de considérer avec beaucoup d'intérêt, d'émotion, les revendications des communautés autochtones. Il y a donc une disposition d'esprit qui fait en sorte qu'au Canada anglais, actuellement, on trouve toujours, ou à peu près tout le temps, très équitable, très juste, très justifiable à peu près n'importe quelle revendication formulée par les autochtones. La moindre phrase qui est proférée par l'un ou l'autre des leaders autochtones est considérée un peu comme une révélation divine, parole d'évangile, et il faut, évidemment, y accéder sans plus de réserve.

Alors, évidemment, avec un tel état d'esprit, c'est clair que la question autochtone est devenue la priorité constitutionnelle no 1 au Canada anglais, ce qui faisait dire à Ghislain Dufour qui a participé à toutes les conférences - c'est un peu curieux quand même que ce soit le Québécois qui ait été le plus en vue à l'occasion de toutes ces conférences, c'est le président du Conseil du patronat, enfin, Ghislain Dufour qui disait: Écoutez, on a commencé le processus avec la question du Québec en tête de liste et, après ça, c'était la réforme du Sénat et la question autochtone. Là, on est rendu que c'est complètement inversé. C'est la question autochtone qui est en tête de liste, la réforme du Sénat et la question du Québec est à peu près évacuée ou, tout au plus, elle est inscrite maintenant à varia, divers de l'agenda. C'est ça qui s'est passé, finalement, et c'est ce qui a été confirmé, en fin de semaine dernière, à la conférence sur la question autochtone.

Le Canada est maintenant disposé à reconnaître un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Je ne sais pas si ça suppose qu'il y ait un droit transcendant aussi à l'autonomie gouvernementale, s'il y a son pendant, mais, en tout cas, un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale aux nations autochtones sans trop savoir, d'ailleurs, ce que ça implique concrète-

ment, sauf qu'il y a peut-être lieu de s'inquiéter, mais ça paraîtrait mal de s'inquiéter. Mme Bissonnette s'inquiétait, elle, en tout cas, hier, en disant qu'il s'agit quand même d'un gouvernement à fondement racial, d'un gouvernement fondé sur le droit du sang. Est-ce que c'est vraiment souhaitable d'arriver jusque-là? Enfin, c'est ce que réclament, ce que revendiquent les leaders autochtones, mais c'est quand même un concept vague, flou, assez nébuleux, qui génère beaucoup de confusion parce que c'est clair qu'une fois qu'on a admis le principe, qu'on essaie de le cerner, de le définir, bien, là, les contradictions apparaissent, les divergences d'opinions apparaissent aussi. Alors, on n'est pas sorti de l'auberge en ce qui concerne la définition du droit à l'autonomie gouvernementale pour lesdits autochtones, mais c'est, évidemment, la priorité du Canada anglais.

À partir de ce moment-là, les revendications du Québec sont reléguées à l'arrière-plan des enjeux constitutionnels. À partir de ce moment-la, qu'est-ce qui se passe? Bien, là, on commence à multiplier les appels pressants aussi bien chez les premiers ministres, Joe Clark, que chez les autochtones, au Québec, pour qu'ils reviennent à la table qui serait maintenant une table à 17 et non plus une table à 11. Alors, là, c'est les appels pressants. Hier, là, c'était quasiment indécent; M. Ovide Mercredi qui s'est fait flatteur, flagorneur à l'égard du premier ministre du Québec pour l'inciter à retourner à la table. Le sauveur du Canada, disait-il, vous êtes le sauveur du Canada, vous êtes le seul capable de sauver le Canada. On était dans la flagornerie la plus basse, mais ça s'ajoutait aux appels pressants de Bob Rae, de Clyde Wells, d'à peu près tous les premiers ministres, y compris Joe Clark, évidemment, qui disait au Québec: Revenez, nous vous en prions. Revenez vite à la table pour poursuivre cette ronde constitutionnelle.

Eh bien, M. le Président, je pense que le premier ministre du Québec doit résister au chant des sirènes qui nous arrivent du Canada anglais pour plusieurs raisons que je voudrais essayer d'énumérer rapidement.

D'abord, premièrement, le gouvernement fédéral et le Canada anglais n'ont aucune proposition sérieuse à soumettre au Québec, susceptible de satisfaire les revendications, particulièrement en regard du partage des compétences. Les propositions fédérales, aussi bien que le rapport Beaudoin-Dobbie, sont maintenant déjà des documents historiques, des documents d'archives et tout au plus destinées à la récupération et au recyclage du papier usagé. Je pense qu'il n'y a pas eu progrès à ce niveau-là.

Donc, il n'y a aucune raison, sur ce plan-là, pour que le Québec retourne à la table des négociations, d'autant plus, M. le Président, je le dis, qu'on se retrouve avec un gouvernement fédéral qui manifeste la pire des hypocrisies que j'aie vues depuis bien longtemps. Il y a comme une fourberie, là, qu'on doit constater actuellement du côté d'Ottawa. Et Joe Clark joue le personnage de Tartuffe de façon exemplaire. Pendant qu'avec des airs contrits il demande au Québec de revenir à la table, pendant qu'avec des propos mielleux il affirme qu'il est tout disposé a prendre en considération les aspirations et les revendications du Québec, en même temps que Joe Clark joue au Tartuffe, en même temps ses propres collègues, celui des Communications, celui de l'Environnement sont en train de faire adopter par le Parlement fédéral des lois qui expriment de façon tout à fait extraordinaire le fédéralisme dominateur que condamnait récemment le premier ministre du Québec.

Parce qu'il faut le faire! Joe Clark, lui, joue le rôle du Tartuffe dans tout ça. Il y a l'expression d'une hypocrisie incommensurable dans ce qui se passe présentement à Ottawa: Oui, on est prêts à reconnaître vos aspirations. Oui, on est prêts à une vaste décentralisation des pouvoirs. Et, en même temps, le rouleau compresseur de la centralisation est en marche à toute vapeur à Ottawa. Et on en parlait hier en cette Chambre avec la loi sur l'environnement, l'évaluation environnementale. Même le ministre de l'Environnement du Québec, M. Paradis, dénonçait avec vigueur ce projet de loi carrément centralisateur où le gouvernement fédéral s'ingérerait dans des domaines de juridiction québécoise. Même chose avec la loi sur les communications, exactement la même chose. Là, vraiment, il faut, je pense, prendre conscience de cette opération hypocrite du gouvernement fédéral et du rôle de Tartuffe que joue dans cette opération le ministre responsable du dossier, Joe Clark. (10 h 30)

Deuxième raison de ne pas participer, de ne pas répondre à ces appels pressants, c'est qu'en élargissant le nombre des intervenants à 16 et à 17, évidemment, si le gouvernement du Québec s'y retrouvait, non seulement d'abord Ottawa abandonne son leadership, toute sa capacité d'initiative, mais en plus, comme le disait Lise Bissonnette et je la citais tantôt, il met en place tous les ingrédients d'une recette pour l'enlisement, en reportant la date des offres, le dépôt des offres à fin mai et peut-être plus tard. Et, en faisant en sorte que maintenant on se retrouve 16 autour de la table, c'est évident, c'est manifeste qu'on s'en va directement vers le cul-de-sac.

M. le Président, autre raison qui m'apparaît esentielle. En retournant à la table, sans aucun gain à l'égard de ses revendications légitimes, le Québec serait appelé à contribuer et à participer, à mettre l'épaule à la roue, particulièrement à l'égard de la reconnaissance d'un droit inhérent à l'autonomie gouvernementale des autochtones, qui occupe désormais le premier rang du hit parade constitutionnel au Canada. Et là, vrai-

ment, je pense qu'il faut dénoncer cela. J'écoutais, en fin de semaine, les leaders autochtones, à la fois mielleux et provocateurs. Ça alternait. Matthew Coon Come, le Cri, était plutôt du genre provocateur. Mercredi, il a continué, lui, plutôt le genre flagorneur, flatteur.

Mais il fallait voir ces messieurs inviter le Québec à revenir s'asseoir à la table. Pas pour régler la question du Québec, non non, non, non, non, pour régler la question autochtone. Moi, ma grand-mère avait une expression tout à fait savoureuse pour parler de ça. Elle disait de quelqu'un, dans ce temps-là, qu'il était effronté comme un boeuf maigre. Un boeuf maigre, c'est très effronté, M. le Président. Ça saute le clos, ça va dans le champ du voisin, ça fréquente les vaches du voisin. C'est très effronté, un boeuf maigre. Mais là vraiment, il faut être effronté comme un boeuf maigre pour dire des choses pareilles: Écoutez donc, venez, le Québec, venez à la table, revenez à la table. Ah oui? Pourquoi? Vous êtes prêts maintenant à régler la question du Québec? Non non, non non, régler la question autochtone. Là, je me retiens, M. le Président, je me retiens parce que là, il y a des limites à l'effronterie. Et je pense que la réponse du Québec est tout à fait pertinente de dire non au retour à la table au moment même où la question du Québec n'est plus à l'agenda, n'est plus à l'ordre du jour. C'est la question autochtone qui est à l'ordre du jour.

Je ne veux pas dire par là que la question autochtone ne mérite pas d'être réglée. Ce n'est pas ça que je veux dire, comprenons-nous bien, mais je veux dire que la question du Québec, elle, elle ne l'est pas, réglée. On a essayé de la régler avec Meech, on n'a pas réussi. Et là, tout d'un coup, ce n'est plus important de la régler. On l'évacué du décor, on l'évacué du paysage, on en ressort une autre, et celle-là, ça devient la priorité qu'on essaie de régler maintenant. M. le Président, je dirais également qu'en retournant à la table, le Québec affaiblirait son pouvoir de négociation en reconnaissant à nouveau un processus de révision constitutionnelle que le premier ministre a condamné, a jugé tout à fait discrédité.

Alors, M. le Président, je pense qu'il y a là un piège dans lequel le gouvernement québécois ne doit pas tomber. Et là-dessus, je me permettrais une digression, M. le Président. J'écoutais, pas plus tard qu'aujourd'hui, un commentaire à la radio, où on disait que l'Opposition officielle, le Parti québécois, s'apprêtait a piéger le gouvernement avec une motion. J'ai été complètement renversé d'entendre ça. Le piège, M. le Président, il n'est pas à l'Assemblée nationale, il est là-bas, à Ottawa. La chausse-trappe, elle est là-bas. Le piège n'est pas ici. Qu'est-ce que c'est que cette histoire-là, de prétendre ou d'affirmer ou de conclure que l'Opposition officielle essaie de piéger le gouvernement? Ce n'est pas l'Opposition officielle qui essaie de piéger le gouverne- ment, c'est tout le Canada anglais, c'est les premiers ministres des provinces, c'est Joe Clark, c'est les leaders autochtones qui essaient de piéger le gouvernement en lui demandant de revenir à la table, en l'invitant à revenir à la table. Le piège n'est pas ici, je regrette, M. le Président. C'est en retournant là-bas, en retournant à la table que le gouvernement serait piégé, ce n'est pas en adoptant la motion présentée par l'Opposition officielle, qui rejoint, qui reprend, essentiellement, la position adoptée par le gouvernement et par le premier ministre le 23 juin 1990. On reprend la position du gouvernement. Où est le piège? Il n'est pas ici, le piège, il est là-bas. Il est à Ottawa, le piège.

Le Bloc québécois a parfaitement raison: En retournant à la table de négociation, le Québec deviendrait le bouc émissaire idéal, parce que c'est loin d'être sûr que ça va marcher, leurs négociations sur l'autonomie gouvernementale; c'est loin d'être sûr que ça va aboutir au succès. Mais, si le Québec revenait, alors voilà, là, on aurait le bouc émissaire idéal. «Bouc émissaire demandé», le Québec répond parfaitement aux normes. Là, il reviendrait. Si ça échouait - c'est fort possible que ça échoue sur cette question-là, on voit que la confusion est apparue partout - alors là, le Québec étant de nouveau à la table, on aurait: Regardez, c'est lui, c'est sa faute; ça ne marche pas, c'est sa faute, c'est la faute du Québec. Le bouc émissaire idéal! Je pense qu'on doit être conscient de ça et refuser de participer à cette opération, surtout quand on sait qu'on va devenir le bouc émissaire rêvé qui manque et dont on a besoin là-bas. C'est pour ça qu'on fait des appels tellement pressants au gouvernement du Québec de réintégrer la table, c'est parce qu'il manque un bouc émissaire et le Québec jouerait très bien ce rôle-là.

Alors, M. le Président, je pense qu'il est essentiel que le gouvernement québécois, comme l'a rappelé, d'ailleurs, le premier ministre, M. Bourassa, lundi de cette semaine, sur les ondes de Télémédia, et je cite: «On n'a pas l'intention de changer d'attitude; on n'a pas l'intention, dis-je, de changer d'attitude sur la participation du Québec aux négociations à 11 ou à 17. La décision de juin 1990 de ne pas participer au niveau politique est maintenue. On ne peut pas dire que les discussions effectuées à date ont permis de dégager des progrès importants.» Fin de la citation. (10 h 40)

Je me permets, M. le Président, de rappeler le discours solennel prononcé par le premier ministre, le 23 juin 1990, à la suite de l'échec de l'accord du lac Meech, et je cite M. le premier ministre: «Le processus de révision constitutionnelle existant au Canada est discrédité. Le gouvernement du Québec n'accepte pas de retourner à la table de négociation sur le plan constitutionnel. Pas question de discuter de la réforme du Sénat, pas question de discuter de

la clause Canada et, malheureusement - écoutez bien - pas question de discuter, également, de la réforme constitutionnelle qui pourrait impliquer les Amérindiens. Comment voulez-vous que j'accepte de retourner à la table constitutionnelle alors que j'ai refusé de le faire en 1986, avant le début des négociations sur l'accord du lac Meech? Comment pourrais-je y retourner maintenant que les accords ont été rejetés après avoir été ratifiés? En outre, c'est la position de mon gouvernement de négocier dorénavant à 2 et non à 11 avec le gouvernement canadien.» Fin de la citation, M. le Président.

Le jugement et la position apparaissent encore aujourd'hui tout à fait pertinents et fondés; j'ai essayé de le démontrer. Le premier ministre du Québec doit donc résister aux appels répétés du Canada anglais de retourner à la table de négociation, maintenant à 17, et, par cette motion présentée par l'Opposition officielle, le premier ministre du Québec peut, a l'occasion de réaffirmer de façon officielle et non pas uniquement sur les ondes d'une station de radio, même si ça a son importance, mais de réaffirmer de façon officielle la politique de son gouvernement de ne plus participer à des négociations constitutionnelles à 11 ou à 17, surtout dans un contexte où aucun progrès n'a été réalisé, mais, au contraire, où les revendications des autochtones ont relégué la question du Québec en arrière-plan pendant que les provinces du Canada anglais sont absolument incapables de s'entendre entre elles sur des questions majeures comme la formule d'amendement, la réforme du Sénat, le partage des pouvoirs et l'union économique. Mais il y a une dynamique de groupe, là, qui est enclenchée de leur côté et qui n'est peut-être pas mauvaise en soi.

Mais, par cette motion que nous présentons, M. le Président, qui devrait, à mon avis, être adoptée par les deux grands partis politiques représentés à l'Assemblée nationale - et, encore une fois, je répète que notre intention n'est certainement pas de prendre au piège le gouvernement, le piège étant ailleurs, le piège étant dans l'acceptation de participer, de répondre positivement aux appels venant d'Ottawa; c'est là qu'est le piège vraiment - par cette motion adoptée, je l'espère, par les deux grands partis politiques, pour reprendre les propos du premier ministre lui-même, le 23 juin 1990, «le Québec démontrerait qu'il est toujours plus fort quand il est uni». Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Toujours sur cette motion du député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle, je cède maintenant la parole à M. le ministre de la Justice et délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

M. Gil Rémillard

M. Rémillard: Merci, M. le Président. M. le Président, j'ai eu l'occasion mercredi dernier, en cette Chambre, d'exprimer les réserves que nous avons en ce qui regarde le rapport Beaudoin-Dobbie sur le renouvellement de la Fédération canadienne. Depuis la dernière semaine, donc à l'intérieur d'une semaine, M. le Président, le dossier constitutionnel a encore beaucoup évolué. Il a évolué sur deux aspects principaux: tout d'abord, en ce qui regarde le processus qu'on entend maintenant suivre et, ensuite, en ce qui regarde le nombre de membres à la table de discussions constitutionnelles.

En ce qui regarde tout d'abord, M. le Président, le processus, rappelons-nous qu'au mois de septembre dernier le gouvernement fédéral déposait des propositions de réforme en profondeur de la Fédération canadienne. C'était présenté comme des propositions, non pas comme des offres, mais des propositions qui, à la suite de certaines discussions qui avaient eu lieu depuis l'échec de Meech, devaient, selon le gouvernement fédéral, nous amener à une nouvelle entente qui se situe dans un «round» Canada pour l'ensemble de la Fédération canadienne. On se souvient que nous avons étudié ce document, ces propositions fédérales en commission parlementaire, la commission qui est responsable, qui est chargée d'étudier les offres, et la conclusion a été que ces propositions étaient nettement insuffisantes, et un comité mixte a été formé, comité présidé par le professeur Gérald Beaudoin, par le sénateur Gérald Beaudoin, et par Mme la députée Dobbie, un comité mixte Sénat-Chambre des communes, qui a rendu son rapport, donc, il y a quelques jours. Et nous avons dit à quel point, entre autres en ce qui regarde le partage des compétences législatives, ce rapport est nettement insuffisant.

On nous avait informés, M. le Président, qu'il y aurait une motion ou une résolution, une étape, disons, qui devait être discutée à la Chambre des communes fédérale pour qu'on puisse se référer à des grands principes, les principales données qu'on entendait, au niveau du gouvernement fédéral, inclure dans les offres qu'on voulait présenter au Québec. On nous avait dit: Probablement avant Pâques, peut-être après Pâques, on est en train d'évaluer toutes les possibilités, mais il y aura ce document, il y aura cette motion, cette résolution qu'on débattra à la Chambre des communes et qui nous permettra, donc, d'exprimer très clairement les principaux principes, les principales données qui devraient nous amener, à la suite donc des commentaires que nous avons reçus sur le rapport Beaudoin-Dobbie, à établir des offres pour le gouvernement, pour le Québec, pour renouveler donc la Fédération canadienne.

L'objectif d'un tel processus, M. le Président, d'avoir une telle motion, c'était de pouvoir

avoir un consensus, d'avoir même le consentement des trois grands partis représentés à la Chambre des communes - les conservateurs, les libéraux et les néo-démocrates - que ces trois grands partis puissent se prononcer sur les principaux éléments qu'on doit retrouver dans une proposition de réforme du fédéralisme canadien pour répondre aux objectifs légitimes du Québec. C'est un objectif que nous considérons comme très important parce qu'il est, à notre avis, extrêmement important que l'on puisse avoir, au niveau des grands partis politiques fédéraux, cette unanimité quant aux principaux éléments qu'on doit retrouver dans les offres qu'on pourrait nous faire.

M. le Président, lorsqu'on regarde le rapport du comité Beaudoin-Dobbie, il faut se rendre compte qu'il y a là des dissidences majeures en ce qui regarde certains des aspects les plus importants que nous devons discuter quant à cette réforme constitutionnelle. Je pense au partage des compétences législatives, je pense à la réforme du Sénat, où vous avez une dissidence majeure du Parti libéral fédéral quant aux pouvoirs qu'on dort donner à un nouveau Sénat. Il est important que l'on puisse avoir, donc, un consensus au niveau du Parlement canadien.

M. le Président, cette étape, elle disparaît. Elle disparaît, et on nous informe maintenant, à la suite de cette rencontre de jeudi dernier entre les ministres responsables du dossier constitutionnel, à la suite aussi de la conférence sur les autochtones de la fin de semaine dernière, que le processus est changé et qu'il y aura quatre, ou peut-être plus, groupes de travail qui seront créés. Le premier ministre de l'Ontario, M. Rae, propose quatre groupes de travail, mais on dit: Peut-être bien qu'il faudrait en avoir plus que quatre. On créera aussi des comités techniques. On aura aussi d'autres réunions pour les ministres responsables de ce dossier constitutionnel. Bref, M. le Président, un nouveau processus. On ne connaît pas exactement tous les aspects de ce nouveau processus. Combien y aura-t-il de groupes de travail? Quels seront les sujets qui seront étudiés par ces groupes de travail? Quel sera le rôle des comités techniques? Combien y aura-t-il de réunions de ministres responsables du dossier constitutionnel? Mais on nous dit que tout ça devrait amener le gouvernement fédéral et les autres provinces à faire des offres au Québec vers la fin du mois de mai.

M. le Président, ça signifie une chose pour nous. Ça signifie que le processus ou que l'échéancier établi dans la loi 150 est respecté. Ça signifie, M. le Président, qu'on se rend compte que cet échéancier de la loi 150 doit être respecté pour le bien du Québec et pour le bien de l'ensemble du Canada. (10 h 50)

M. le Président, il apparaît de plus en plus évident que pour les Québécois comme aussi pour l'ensemble des Canadiens, il est important qu'on règle, une fois pour toutes, ce problème constitutionnel. Lorsqu'on voit les problèmes économiques que nous avons, il est important qu'on puisse régler ce problème constitutionnel et qu'ensemble on travaille à trouver des solutions aux problèmes économiques. Bien sûr qu'il y a cette relation directe entre la Constitution et l'économie, et ce que nous recherchons, c'est un fédéralisme plus efficace, capable de nous donner des outils pour relever ce défi économique, défi, maintenant, même au niveau international par la mondialisation des économies. Mais, M. le Président, cet échéancier de la loi 150, ce n'est pas une épée de Damoclès sur la tête du reste du Canada. C'est un élément qui nous permet de travailler ensemble et de pouvoir trouver une solution. L'objectif du gouvernement est toujours d'avoir les offres les plus susceptibles de permettre au Québec d'exprimer ce qu'il est, de pouvoir nous permettre d'être un partenaire à part entière dans cette Fédération et de permettre au Canada d'exprimer pleinement ce qu'il est comme pays, qu'il prenne sa place sur la scène internationale, qu'il puisse refléter sa réalité, sociale, politique et économique.

Donc, M. le Président, le nouveau processus qui est mis en place peut être un processus qui apportera des résultats intéressants, peut-être bien. Il y a beaucoup de questions, beaucoup d'ambiguïtés qui se posent présentement. Mais il y a toujours cette possibilité que ça aboutisse, finalement, à des offres acceptables pour le Québec. Dans la mesure où ces offres nous arrivent à la fin mai, il sera toujours possible à la commission parlementaire qui est responsable du dossier constitutionnel en ce qui regarde les offres qui pourraient nous arriver du gouvernement fédéral et des autres provinces, il sera toujours possible à cette commission de les étudier, de faire rapport, et, comme Parti libéral dont le gouvernement est issu, il y aura un congrès où on discutera de ces offres et des décisions seront prises en toute démocratie.

M. le Président, en conclusion, en fonction de ce premier aspect qui est très important, en ce qui regarde le processus et qui est changé, il s'agit de changements majeurs, substantiels, mais, malgré les questions et les ambiguïtés que nous pouvons avoir, il demeure qu'on respecte l'échéancier de la loi 150.

L'autre aspect qui est changé, qui est aussi un aspect très important et, je dirais même, fondamental, c'est le nombre de partenaires assis à la table de discussions constitutionnelles. M. le Président, depuis que le Canada existe comme Fédération, depuis 1867, dans toutes les discussions de relations fédérales-provinciales, on s'est toujours référé aux institutions politiques gouvernementales qui existent de par le texte même de la Constitution canadienne, c'est-à-dire 10 provinces et le gouvernement fédéral. Selon la formule d'amendement que nous avons dans la Loi constitutionnelle de 1982, cette formule

d'amendement se réfère à des gouvernements, se réfère à des Assemblées législatives qui doivent voter une résolution pour accepter un amendement constitutionnel, un changement à la Constitution. Elle se réfère à un Parlement canadien, Chambre des communes, Sénat, qui doivent accepter, eux aussi, une résolution pour changer la Constitution. C'est donc dire que les partenaires, les partenaires politiques de la Fédération, c'est 10 provinces et le gouvernement fédéral, le Parlement canadien.

M. le Président, ça vient de changer. Ça vient de changer, et toute cette tradition suivie depuis 1867 est changée. Pour la première fois dans un processus de discussions constitutionnelles, on ajoute, premièrement, deux gouvernements territoriaux, c'est-à-dire le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le gouvernement du Yukon. Ce sont des gouvernements, mais des gouvernements administratifs qui dépendent d'Ottawa. Le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest ne sont pas des provinces canadiennes. Ils pourraient peut-être le devenir, mais ils ne le sont pas et leurs gouvernements sont là pour administrer, sous la gouverne du gouvernement fédéral, le territoire du Yukon et les territoires qu'on appelle les Territoires du Nord-Ouest canadien. M. le Président, on a décidé que le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest seront représentés à la table des discussions constitutionnelles, de plein droit, au même titre que les gouvernements des autres provinces. On vient d'ajouter aussi, M. le Président, qu'il y aura quatre représentants des nations autochtones, quatre représentants qui seront là, à la table des discussions constitutionnelles, pour discuter de la réforme de la Constitution.

M. le Président, c'est un élément qui est nouveau. Nous étions 11 à la table; nous serons 17. Il y a, là encore, des questions, des ambiguïtés qui se posent. Par exemple, je voyais M. Benoît Bouchard, ministre de la Santé, qui disait, je crois que c'était hier ou même lundi peut-être: Bien, on verra. Les autochtones devraient se prononcer sur des questions qui sont reliées à leur statut. Est-ce que c'est ça qui est prévu ou si on veut que les autochtones puissent se prononcer sur tous les sujets de la réforme constitutionnelle? C'est une question qu'on peut se poser, M. le Président.

M. le Président, le Québec a toujours été un des alliés les plus sûrs des peuples autochtones, et notre histoire est là pour le démontrer. D'une façon plus précise, rappelons-nous la Convention de la Baie James en 1975. M. le Président, quand cette entente a été signée en 1975, cette entente a été reconnue comme un modèle à suivre, non seulement au Québec et au Canada, mais un modèle à suivre partout au monde. Souvenons-nous, M. le Président, qu'à ce moment-là, aux Nations Unies, on avait fait de cette entente le modèle à suivre pour tous les groupes autochtones au monde. On disait: Voici ce qu'un gouvernement, le gouvernement du Québec, vient de réaliser avec ses autochtones. Il vient de reconnaître leurs droits ancestraux. Il vient leur donner la possibilité d'avoir des gouvernements autonomes d'une certaine dimension. Il leur donne la possibilité de se développer en fonction de leurs coutumes, de leurs traditions, mais aussi de profiter des avantages d'une vie moderne: services publics, hôpitaux, éducation et tout ce qui peut se référer aux conditions matérielles de vie qui font en sorte que les autochtones peuvent profiter eux aussi de services publics de grande qualité.

M. le Président, ce qui était un modèle en 1975 et qui a été suivi par, entre autres, nos voisins américains en 1978 et en 1981, avec des ententes qu'ils ont négociées avec leurs autochtones, qui ont suivi ce que nous avons fait dans l'entente de la Baie James de 1975, ce dossier a évolué et il évolue toujours, M. le Président. Nous avons toujours des éléments à mettre en place pour compléter cette entente de 1975. Pour ma part, comme ministre de la Justice, lors du dernier Sommet de la justice qui a eu lieu au mois de février dernier, il y a à peine quelques semaines, nous avons fait une discussion avec tous les groupes autochtones autour de la table et nous avons fait un consensus quant à l'administration de la justice, au Québec, pour respecter les droits, les coutumes, les traditions des autochtones. Il n'est pas question, M. le Président, de créer deux systèmes de droit; un seul système de droit, mais à l'intérieur de ce système de droit, la possibilité d'administrer la justice respectant les coutumes, les traditions, la façon de vivre de nos autochtones. (11 heures)

M. le Président, on a réussi, autour de la table, à établir un consensus fort, un consensus qui marque une étape pour l'administration de la justice, et je suis convaincu qu'on a là aussi un modèle qu'on peut suivre dans bien d'autres secteurs d'activité de notre société.

M. le Président, ce que je veux dire, c'est que le Québec l'a exprimé à plusieurs reprises dans les dernières années: Cette Assemblée, l'Assemblée nationale du Québec a exprimé solennellement à plusieurs reprises qu'elle reconnaissait le droit des autochtones à un gouvernement autonome, dans le cadre d'ententes négociées avec les autochtones, dans le cadre du respect des lois du gouvernement du Québec. Elle reconnaissait ce droit des autochtones à un gouvernement autonome. Et nous le mentionnons, nous le confirmons toujours. Mon collègue responsable du dossier autochtone l'a mentionné à plusieurs reprises. Nous sommes prêts à y travailler.

Toute cette négociation constitutionnelle, tout ce processus constitutionnel actuellement, il a son origine en 1981-1982, et ça, il ne faut pas l'oublier, parce qu'on semble l'avoir oublié. On semble avoir oublié que ce que nous avons voulu

faire avec l'entente du lac Meech, c'est de corriger l'injustice qui avait été faite au Québec en 1982 par le rapatriement de la Constitution. Ce que nous avons essayé de faire, c'est de compléter cette Loi constitutionnelle de 1982. Tout n'était pas mauvais dans cette Loi constitutionnelle de 1982. Entre autres, la Charte des droits qui était là. On n'est pas contre une charte des droits, M. le Président, mais il reste quand même qu'on a enlevé au Québec son droit de veto. Et ce qu'on a voulu récupérer avec l'entente du lac Meech, ce que nous voulons récupérer, parce que c'est un outil essentiel pour le Québec, c'est ce droit de veto, ce droit de pouvoir consentir à tout changement aux pouvoirs, aux privilèges, aux juridictions que nous avons comme société, que nous avons aussi au niveau de l'Assemblée nationale.

Mais, M. le Président, en 1982, lorsque le Québec n'était pas partie aux négociations constitutionnelles, on a reconnu les droits des autochtones. Dans la Charte des droits, à l'article 25, on a reconnu le fait que «la présente Charte garantit certains droits et libertés, ne porte pas atteinte aux droits ou libertés ances-traux issus de traités ou autres des peuples autochtones du Canada». Et, là, on cite ces traités. On a même ajouté l'article 35, toujours dans cette Loi constitutionnelle de 1982, où on reconnaît les autochtones comme des peuples. On dit: «Le droit des peuples autochtones du Canada». On reconnaît leurs droits existants ances-traux ou issus de traités.

M. le Président, en 1981-1982, les autochtones ont été reconnus. On a reconnu leurs droits. Dans la Charte des droits, on a mentionné que cette Charte devait s'appliquer en respect avec leurs droits, leurs coutumes, leurs traditions. Malheureusement pour le Québec, il n'y avait rien. Parce qu'il y avait quelque chose pour les autochtones, il y avait quelque chose pour toutes les autres provinces canadiennes, mais, pour le Québec, malheureusement, tout ce qu'il y avait, c'est la perte du droit de veto.

M. le Président, ce que nous avons voulu faire avec l'entente du lac Meech, c'est de récupérer ce droit de veto, donner au Québec les garanties qu'il va pouvoir exprimer ce qu'il est pleinement dans la Fédération canadienne et qu'il va jouer son rôle de partenaire à part entière dans cette Fédération canadienne. C'étaient cinq conditions que nous avions, M. le Président. Les cinq conditions les plus raisonnables jamais demandées par un gouvernement du Québec. Nous voulions partir de ces cinq conditions et construire ensuite une réforme constitutionnelle substantielle, capable de donner au fédéralisme canadien une vigueur nouvelle, un souffle nouveau pour faire face au défi tellement important que nous avons ici, au Canada, oui, mais sur la scène internationale aussi, comme pays, pour prendre notre place sur le plan économique, notamment.

M. le Président, n'oublions pas que cette ronde constitutionnelle que nous avons présentement a donc pour origine l'échec de l'entente du lac Meech, qui était là pour réparer l'injustice de 1981-1982 avec le rapatriement et pour compléter 1981-1982. À la suite de l'échec de l'entente du lac Meech, on a dit: C'est épouvantable. C'est une entente qui a été négociée, qui a été faite d'une façon confidentielle, en catimini. Le peuple a été mis de côté. Ce sont les politiciens qui ont réglé cette entente entre eux. On ne fera plus ça. On va avoir maintenant de grandes discussions publiques et, surtout, on ne fera plus une ronde constitutionnelle seulement pour le Québec. On va trouver des solutions pour tous les partenaires fédéraux, pour toutes les provinces, et on va trouver des solutions à tous nos problèmes au niveau de la Fédération canadienne. Nous, tout simplement, on a dit: Très bien. Vous voulez faire une ronde Canada? C'est très bien, faites-la. C'est faux de dire que l'entente du lac Meech a été faite en vase clos. C'est faux, M. le Président, parce qu'il n'y a pas une entente constitutionnelle, dans toute l'histoire du Canada, qui a été autant discutée ouvertement dans des commissions parlementaires au niveau de toutes les provinces, au niveau du Parlement canadien et de la Chambre des communes et du Sénat. Des commissions parlementaires qui ont duré deux semaines, trois semaines, un mois, même un mois et demi.

Le gouvernement de l'Ontario qui a produit, même, un rapport substantiel, très bien fait. M. le Président, il n'y a pas une entente constitutionnelle qui a été autant discutée. C'est faux de dire que Meech a été une entente qui a été rédigée en catimini par les politiciens sans que le peuple soit impliqué. C'est complètement faux. Mais, M. le Président, on nous dit: II faut maintenant une ronde Canada. Bon, c'est très bien. Mais il demeure, M. le Président, que l'opération est considérable: changement du partage des compétences législatives, changement des institutions, droits des autochtones, et tout ça, M. le Président, en fonction d'un échéancier qui a été déterminé par la loi 150 et qu'on doit respecter.

M. le Président, c'est à la suite de l'échec du lac Meech que, le 23 juin 1990, le premier ministre du Québec, M. Bourassa, disait que l'échec de Meech était l'échec d'un système. L'échec d'une négociation qui s'était faite, en dernier, avec 10 autres partenaires fédéraux du Québec et des premiers ministres qui ont refusé d'honorer leur propre signature, des législatures qui avaient voté une résolution et qui sont revenues sur leur décision pour voter une autre résolution pour annuler la première. En conclusion, le premier ministre disait: Nous ne participerons plus aux tables de négociation constitutionnelle. Nous allons discuter avec le gouvernement fédéral. Nous allons discuter avec les autres provinces, mais on ne retournera plus dans ces réunions qu'on appelle multilatérales,

impliquant toutes les parties.

M. le Président, est-ce que les choses ont changé au point où on devrait revenir sur cette décision? M. le Président, avec les changements que nous venons d'avoir dans les derniers jours, avec l'évolution du dossier, on ne voit rien qui devrait nous amener à changer l'attitude du gouvernement du Québec. C'est une attitude qui est dictée en fonction des intérêts supérieurs du Québec. Toutes les décisions du gouvernement en ce qui regarde la participation aux conférences fédérales-provinciales se réfèrent, premièrement, à ce critère, à ce principe du respect des intérêts supérieurs du Québec.

M. le Président, dans les circonstances, on ne voit pas pourquoi ce qui a été décidé par le chef du gouvernement, le 23 juin 1990, n'aurait pas maintenant son application. M. le Président, certains nous disent: Les absents ont toujours tort. M. le Président, imaginons-nous, quelques instants seulement, quelle aurait été la situation si le Québec avait été présent jeudi dernier? Est-ce que ça aurait changé les choses, M. le Président? Non, absolument pas. Absolument pas. Je dois dire, je le répète, que ce nouveau processus qui a été mis en place avec les groupes de travail, les comités techniques, les réunions de ministres, dans la mesure où on nous dit que ça pourrait aboutir à des offres liant et le gouvernement fédéral et les provinces à la fin mai, eh bien, tant mieux. Tant mieux s'ils pensent arriver à ça. (11 h 10)

Mais, M. le Président, les ambiguïtés, les questions que nous avons ne nous amènent pas, pour le moment, à évaluer ce dossier de façon à nous dire: Très bien, on devrait retourner à la table de discussions constitutionnelles. La position du gouvernement est toujours la même et la position du gouvernement n'a pas de raison d'être modifiée. Jeudi dernier, nous avions deux fonctionnaires qui étaient là sur le plan strictement technique, qui étaient des observateurs techniques. Le Québec ne participait pas; il y avait des observateurs techniques. La chaise du Québec était vide, mais il y avait des observateurs techniques qui étaient là pour donner des informations techniques et nous informer.

D'autre part, M. le Président, si nous ne sommes pas à la table de négociations multilatérales avec les autres provinces et les nouveaux membres à cette table, ça ne signifie pas que nous ne sommes pas actifs. Nous rencontrons plusieurs gouvernements des autres provinces. Le premier ministre est en contact constant avec les autres premiers ministres. J'ai eu l'occasion - au niveau des fonctionnaires, c'est la même chose - encore dernièrement, vendredi dernier, de rencontrer M. Horsman, le ministre des Relations fédérales-provinciales de l'Alberta; je rencontrais, il n'y a pas encore tellement longtemps, il y a quelques jours, M. Sihota de la Colombie-Britannique; les fonctionnaires rencontrent régulière- ment des fonctionnaires des autres provinces et du gouvernement fédéral. Nous sommes actifs, oui. Nous avons un objectif, M. le Président, comme gouvernement, c'est d'avoir un fédéralisme profondément renouvelé. Nous voulons qu'il y ait des offres capables de permettre au Québec d'exprimer pleinement ce qu'il est comme société distincte, mais aussi comme partenaire à part entière de cette Fédération canadienne. Nous voulons un fédéralisme efficace. Dans cette perspective-là, je le répète, dans les circonstances, on ne voit pas comment on en arriverait à changer la politique du gouvernement exprimée par le premier ministre, M. Bourassa, le 23 juin 1990.

M. le Président, en terminant, vous me permettrez de souligner la mémoire d'un grand Québécois, d'un grand Canadien, Roger Lemelin. Je souligne la mémoire de Roger Lemelin en conclusion de ces remarques que je viens de faire sur le débat constitutionnel. Roger Lemelin était pour moi et pour ma femme Marie un grand ami. J'offre mes condoléances à sa femme, à sa famille, à ses amis. J'ai eu l'occasion de le rencontrer dans les derniers jours, de le rencontrer lorsqu'il a eu cette nouvelle des médecins, qu'il était atteint de ce cancer. Nous avons eu à discuter ensemble beaucoup du Québec, du Canada. Roger m'a donné un message très clair de détermination, d'ouverture, un message de confiance.

M. le Président, un grand Canadien, un grand Québécois et, je devrais dire, avant tout, un grand humaniste nous a quittés, mais il nous laisse un esprit par son oeuvre littéraire, par son action. Il nous laisse un message qui, pour moi, est un message de confiance; un message de confiance en nous comme Québécoises, comme Québécois, en nous comme Canadiens, comme Canadiennes, le message de nous dire: Trouvons quelque part la raison qui va nous permettre d'atteindre cet objectif que nous avons et qui nous permettra d'exprimer pleinement ce que nous sommes comme Québécois, comme Québécoises à l'intérieur d'une Fédération canadienne renouvelée, profondément renouvelée.

Motion d'amendement

M. le Président, donc, en terminant, vous me permettrez de présenter un amendement à la motion qui est déposée aujourd'hui. La proposition d'amendement serait la suivante: Que la motion en discussion soit amendée, premièrement, en remplaçant, dans la première ligne, le mot «réaffirme» par les mots «, dans les circonstances actuelles, appuie»; 2° en retranchant, dans la quatrième ligne, après le mot «onze», la virgule; 3° en remplaçant, dans la cinquième ligne, le mot «canadien» par le mot «fédéral»; 4° en remplaçant, dans la cinquième ligne, les mots «tout projet d'entente constitutionnelle» par les mots «le renouvellement du fédéralisme canadien».

M. le Président, la motion telle qu'amendée se lirait ainsi: «Que l'Assemblée nationale, dans les circonstances actuelles, appuie la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à deux et non à onze avec le gouvernement fédéral le renouvellement du fédéralisme canadien.»

Le Vice-Président (M. Lefebvre): L'amendement est déposé.

M. Rémillard: Voilà, M. le Président, l'amendement que je dépose.

Une voix: Très bien.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Je souhaiterais entendre les leaders des deux formations sur la recevabilité des amendements déposés par M. le ministre. M. le leader adjoint du gouvernement.

Débat sur la recevabilité M. Daniel Johnson

M. Johnson: Oui, M. le Président. Sur la recevabilité, nous sommes persuadés, évidemment, que nous respectons l'article 197 du règlement, la jurisprudence et la doctrine qui s'y rapportent. D'abord, quant au texte, je le rappelle, «les amendements doivent concerner le même sujet que la motion et ne peuvent aller à rencontre de son principe. Ils ne visent qu'à retrancher, à ajouter ou à remplacer des mots.»

À l'égard de la doctrine, des rappels habituels nous amènent à citer Erskine May qui dit, et je cite: «Le but d'un amendement peut être d'apporter un tel changement dans une question qu'elle soit acceptée par ceux qui, sans ce changement, devraient voter contre.» On ajoute dans «Parliamentary Practice», toujours sous la plume d'Erskine May: «To modify a question in such a way as to increase its acceptability and to present to the House a different proposition as an alternative to the original question.»

À l'égard de la jurisprudence, de nombreuses décisions ont été rendues à cet égard, M. le Président, toujours dans le sens exprimé par la doctrine. Notre recueil est rempli d'exemples et, plus récemment, trois autres décisions se sont inscrites dans ce courant majoritaire que j'illustre. D'abord, le 22 mars 1990, votre collègue, le vice-président Bissonnet, sur la motion proposant des amendements à la motion de l'Opposition qui portait sur le sentiment antifrancophone qui existait au Canada, selon eux. Le 4 avril 1990, une autre décision dans le même sens, de M. le vice-président Cannon, sur la motion d'amendement du ministre délégué aux Affaires interna- tionales canadiennes. Le 7 novembre 1990, décision de M. le vice-président, vous-même, M. le Président, sur la recevabilité de la motion d'amendement du député de Saint-Hyacinthe. Et j'ajouterais la décision du 27 novembre 1991, toujours une de vos décisions, M. le Président, sur la recevabilité de la motion d'amendement du ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes.

Dans les deux premières décisions, on peut lire que «la motion d'amendement - je cite - peut avoir pour objet d'apporter des changements même importants qui permettent un débat plus large ou encore qui permettent à un plus grand nombre d'y adhérer.» Nous lisons, dans celle du 4 avril 1990, je cite: «En résumé, pourvu que l'amendement touche à la même question, on peut apporter à cette question toutes les retouches.» Dans celle du 7 novembre 1990, je cite: «Alors, l'amendement vise à rallier un plus grand nombre de parlementaires à la motion principale. L'amendement proposé n'écarte pas la motion principale.» Finalement, dans la décision du 27 novembre dernier: «L'amendement proposé - peut-on lire - par le ministre tient compte de ces deux idées maîtresses en ajoutant, illustrant ou précisant ces idées. Le but d'un amendement n'est pas de viser à dire la même chose avec d'autres mots, c'est-à-dire rechercher à remplacer des mots par des synonymes. Amender, c'est modifier, rendre plus acceptable une proposition, sans toutefois en altérer le principe ou en changer le sens ou la nature. Si l'Assemblée n'a pas cette compétence d'empêcher, elle peut sûrement se manifester d'une certaine façon, exprimer cette opposition ou s'objecter. Le but recherché apparaît le même; c'est seulement la manière de le dire qui diffère.»

Je vous demande donc, M. le Président, à la lumière de ces arguments, de déclarer recevable l'amendement du ministre. (11 h 20)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Sur la recevabilité, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

M. Jacques Brassard

M. Brassard: Oui, M. le Président, très brièvement. À mon humble point de vue, cet amendement n'est pas recevable parce qu'il a pour effet de dénaturer, de façon substantielle, l'essence même de la motion que j'ai présentée, particulièrement le premier élément de l'amendement où l'on remplace «réaffirme» par «appui dans les circonstances actuelles».

Voici, M. le Président. Il me semble, et non seulement il me semble, mais je pense que l'engagement pris par le premier ministre, le 23 juin 1990, n'était d'aucune façon lié aux circonstances. D'aucune façon n'était lié aux circonstances et... Au contraire, il avait condamné le mode de négociations à 11 comme étant

carrément complètement discrédité, dévalorisé. C'est le mode de négociations comme tel qu'il fallait rejeter, quelles que soient les circonstances. Quelles que que soient les circonstances! Là, évidemment, l'amendement introduit par le ministre nous laisse croire que, si les circonstances changent - et Joe Clark se tue à affirmer, à Ottawa, que les circonstances ne sont plus les mêmes, que les circonstances changent - donc, si les circonstances changent, eh bien, la condamnation du mode de négociations pourrait être retirée. Là, le mode de négociations à 11, et maintenant peut-être à 17, retrouverait toute sa valeur, deviendrait excellent, très efficace. Pourquoi faisait-on référence, nous, dans notre motion, à cet engagement très clair, très limpide qu'a pris le premier ministre, le 23 juin 1990? C'est justement parce que c'était un jugement sans appel. C'était une condamnation sans appel qui n'avait rien à voir avec les circonstances de l'époque ou les circonstances qui vont suivre. Donc, relier la motion, je dirais, à une dimension temporelle ou événementielle m'apparaît avoir pour effet de dénaturer la substance même de la motion. C'est pourquoi, surtout le premier élément, je le considère, à mon avis, comme irrecevable, et je vous prie de le déclarer comme tel.

Quant au reste, on remplace «gouvernement canadien» par «gouvernement fédéral». On a mis «gouvernement canadien», nous, parce que c'est ça que le premier ministre a dit, le 23 juin. Il a parlé du gouvernement canadien. Évidemment, en tant qu'amendement, ça m'apparaît difficile de dire que c'est irrecevable, mais on a mis «gouvernement canadien» parce que c'est exactement l'expression qu'a utilisée le premier ministre, le 23 juin 1990. Ça ne concernait pas uniquement le renouvellement du fédéralisme, cette condamnation du mode de négociations, ça concernait tout projet d'entente constitutionnelle. Tout amendement à caractère constitutionnel, même mineur, devait passer par la négociation bilatérale avec le gouvernement fédéral et non pas uniquement, comme le veut le ministre, le projet de renouvellement du fédéralisme. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le whip de l'Opposition officielle. Je vais prendre en délibéré, quelques minutes, la recevabilité de la motion. Je suspends donc les travaux quelques minutes. Je vais vous revenir le plus rapidement possible pour rendre ma décision sur la recevabilité.

M. Brassard: On pourrait peut-être continuer le débat.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): On va suspendre quelques minutes, M. le whip.

(Suspension de la séance à 11 h 24)

(Reprise à 11 h 30)

Reprise du débat sur la motion principale

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous reprenons le débat avec l'intervention du député de Pointe-aux-Trembles. Je serai remplacé par mon collègue, le député de Jeanne-Mance, ce qui me permettra de délibérer sur la question de la recevabilité de la motion d'amendement.

M. le député de Pointe-aux-Trembles.

M. Michel Bourdon

M. Bourdon: M. le Président, la semaine dernière, cette Chambre a adopté, avec l'accord des deux grands partis représentés dans cette Chambre, un désaveu de la proposition Beaudoin-Dobbie qui venait du fédéral. Ça nous met dans une situation où cette Chambre dit clairement que ce que les trois grands partis fédéraux ont élaboré en matière constitutionnelle ne peut, d'aucune façon, convenir au Québec.

Il y a des gens que de telles positions bipartisanes étonnent ou scandalisent. Je pense qu'il faut expliquer que la question de l'avenir du Québec concerne tous les Québécois et qu'il est normal qu'à l'occasion les deux grands partis s'entendent, dans l'intérêt du Québec, dans l'intérêt des Québécoises et des Québécois, sur des éléments de cette question constitutionnelle.

Ce matin, il s'agit d'être conséquent avec le discours tenu par le premier ministre après l'échec du lac Meech. Le discours du premier ministre du Québec était clair: Essayer de régler à 11 le retour du Québec dans la Constitution de 1981-1982 n'était pas possible. Le premier ministre disait clairement que, pour le Québec, il n'était pas question de retourner s'asseoir à une table où on serait 1 sur 11. Depuis ce temps-là, M. le Président, la situation a changé, mais dans le sens d'aller vers le pire, le pire dans le sens que le fédéral, avec les 9 autres provinces, a décidé qu'on ajoutait des joueurs à la table, ces joueurs étant les 2 territoires, c'est-à-dire le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest, plus 4 sièges pour les associations représentant les autochtones du Canada.

Donc, M. le Président, la table à 11 qui semblait inacceptable pour le premier ministre du Québec, c'est devenu une table à 17, à 16, pour l'instant, mais où on multiplie les appels pour que le premier ministre du Québec retourne pour être, d'une certaine façon, au banc des accusés à l'égard des droits des autochtones. Je pense que, dans le processus constitutionnel, ce qui commence à impatienter et même à exacerber les Québécoises et les Québécois, c'est la façon dont les 9 provinces et le fédéral veulent noyer le poisson. On ne peut pas appeler autrement ce procédé qui consiste à dire qu'en tête de liste des questions à discuter, il y a les droits des autochtones et non pas la place du Québec et

que, deuxièmement, la réforme du Sénat est le deuxième grand sujet. Tant qu'à faire, M. le Président, on en a ajouté d'autres. On a ajouté la charte sociale qui vient du premier ministre de l'Ontario qui est en train de jouer, dans ces pourparlers constitutionnels, le même rôle qu'un autre nouveau venu dans le cas du lac Meech, M. McKenna, du Nouveau-Brunswick, qui est arrivé avec ses sabots.

Donc, M. le Président, en somme, le message est le suivant: On veut bien parler des droits des autochtones, on veut bien parler de la réforme du Sénat, on veut parler de la charte sociale; la dernière chose dont on veut parler, c'est du Québec. Alors, je pense que la motion de notre parti ce matin vient à point nommé dire: Non, il n'est pas question que le premier ministre du Québec aille humilier la population du Québec en se retrouvant dans un panel, dans une instance où le Québec, au lieu d'être 1 sur 11 - on sait l'humiliation que ça a été dans l'accord du lac Meech - serait, là, 1 sur 17 et, qu'on le veuille ou non, un peu au banc des accusés, on demanderait - et c'est récemment qu'on a dit ça - est-ce que le Québec est prêt à faire quelque chose pour que les 4 porte-parole des autochtones retirent leur nouvelle demande - qu'ils n'avaient plus, mais qu'ils recommencent à avoir - soit de les reconnaître comme société distincte?

M. le Président, je pense qu'il y a là quelque chose d'irréel, de faux et de fou dans ce qui nous est proposé. À cet égard, M. le Président, je voudrais dire qu'à mon point de vue les hommes et les femmes politiques du Canada anglais sont bien obligés, notamment, de tenir compte du sondage Gallup d'il y a deux semaines où on posait la question au Canada anglais: Est-ce que, pour garder le Québec dans la Confédération, vous seriez prêts à ce que le Québec obtienne plus de pouvoirs? La réponse, M. le Président, à 92 % a été non. Alors, trouvez-moi une femme ou un homme politique qui puisse ne pas tenir compte de l'opinion de 92 % de la population qu'il représente. Ça, ça amène M. Joe Clark, par exemple, à venir dire - ce qui est tout à fait sot - à Anjou, en plus de ça, en plein est de Montréal: Beaudoin-Dobbie, c'est l'offre la plus extraordinaire jamais faite au Québec depuis 125 ans. Ça a mis le professeur Léon Dion en colère, et avec raison. Voyons donc! On nous offre moins qu'en septembre et ce serait supposé être exaltant. Et, là, la démarche qui nous est suggérée, au gouvernement du Québec qui a rejeté clairement, par une déclaration solennelle de son premier ministre, l'idée d'aller négocier à 11, on dit: Vous n'aimiez pas ça à 11 et, là, on vous supplie de venir le faire à 17.

M. le Président, juste un exemple de comment le milieu politique du Canada anglais est décroché de la réalité, c'est l'insistance à parler de la réforme du Sénat. Le Québec, faut-il le rappeler, a déjà eu l'équivalent du Sénat non élu qu'on a à Ottawa. Ça s'appelait le Conseil législatif et on l'a aboli, au Québec, en 1968. Ça fait maintenant 24 ans. Il y a déjà eu deux Chambres dans ce Parlement: une Chambre élue et une Chambre non élue. La Chambre non élue a disparu et les Québécois ne l'ont pas pleurée parce que ça faisait offense à notre sens démocratique. C'est devenu le salon rouge où on fait parfois des réceptions et où des commissions parlementaires - je pense à Bélanger-Campeau -siègent à l'occasion.

Donc, on nous propose, au fédéral, de parler du Sénat, de parler des autochtones, de parler de charte sociale, de parler de n'importe quoi, sauf de l'avenir du Québec. En bref, M. le Président, je pense que la même chose se présente maintenant, qui se présentait lors de l'accord du lac Meech, c'est-à-dire que le premier ministre du Québec doit tenir bon dans sa décision de ne pas aller faire humilier le Québec dans un vaudeville comme celui qui prévaut à Ottawa au sujet de la Constitution. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Pointe-aux-Trembles. Sur cette même motion, je reconnais M. le député de Vimont. M. le député de Vimont, vous avez la parole.

M. Benoît Fradet

M. Fradet: Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur cette motion aujourd'hui, mais je me pose de sérieuses questions sur l'honnêteté intellectuelle et politique des gens d'en face, du Parti québécois. J'ai entendu le député de Lac-Saint-Jean dire tout à l'heure que cette motion amendée était irrecevable parce qu'elle précise qu'il faut tenir compte des circonstances. Encore une preuve, M. le Président, que le PQ est incapable de tenir compte des circonstances et qu'il est incapable de tenir compte de la réalité. Et ça, je pense que c'est important. J'ai l'impression de revoir le film «II danse avec les loups». C'est ce que ça me donne un petit peu comme impression.

J'ai aussi l'impression que le Parti québécois n'a pas lu les journaux d'hier - il nous arrive avec une motion aujourd'hui, mais il n'a pas lu les journaux d'hier, et je pense que c'était clair La position du premier ministre Robert Bourassa était très claire en ce qui a trait aux négociations constitutionnelles. Je pense que c'était à la une de tous les journaux. Dans La Presse, par exemple: «Bourassa: pas question de négocier à onze». Dans Le Soleil: «Bourassa n'entend pas céder». Dans The Gazette: «Bourassa rejects calls to return to table». Je pense que c'est clair. M. Bourassa a toujours été très clair et, aujourd'hui, le Parti québécois nous arrive avec une motion pour réaffirmer ça. (11 h 40)

Ça donne quoi, M. le Président, d'avoir une

motion à toutes les semaines? On en a connu une la semaine dernière. Aujourd'hui, le Parti québécois nous arrive avec une motion sur les négociations bilatérales sur le renouvellement du fédéralisme, de la Constitution, et l'article 1 du programme du Parti québécois, c'est l'indépendance. Quelle crédibilité pouvons-nous donner au Parti québécois sur cette motion quand l'article 1 du programme de son propre parti est l'indépendance du Québec, la sécession? Ça, je pense que ça fait partie des questions que je me pose sur la motion que présente le Parti québécois aujourd'hui. Il veut défendre la position qu'a tenue le gouvernement du Québec quand, lui, sa propre position, en tout cas, à mon avis, elle n'est même pas claire. Le PQ n'est surtout pas crédible avec cette motion, surtout dans le contexte où il propose, dans cette motion, de continuer des négociations bilatérales sur le renouvellement de la Constitution.

Le PQ ne veut pas de projet d'entente constitutionnelle. Il faut se poser la question: Pourquoi propose-t-il ça aujourd'hui? Peut-être parce qu'il veut faire de la fiction politique? Peut-être parce que le Cyrano du Lac-Saint-Jean avait le goût d'une autre etite pièce théâtrale aujourd'hui. Peut-être que c'est pour ça...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député!

Des voix: Oh! Oh!

M. Fradet: Peut-être que...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le député! je vous demanderais de retirer vos paroles à l'endroit du député de lac-saint-jean, immédiatement.

M. Fradet: Je retire mes paroles, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Très bien, vous pouvez poursuivre.

M. Fradet: J'ai l'impression que le PQ ne sait plus où donner de la tête. Après avoir voté contre la loi 150, après avoir sorti avec fracas de la commission sur les offres constitutionnelles ne voulant plus étudier les propositions, aujourd'hui, je pense qu'il est difficile de trouver honnête la motion du Parti québécois. Il est difficile à suivre et même, M. le Président, dans Le Soleil du 22 février dernier, on disait: «Et si le PQ manquait d'idées...» Je pourrais peut-être citer quelques passages de cet article-la signé par Raymond Giroux: «En pleine crise constitutionnelle - et ça, c'est les propos du chef de l'Opposition - il déplore une carence dangereuse de son parti; le brassage d'idées fait défaut.» On en a une preuve aujourd'hui. Il déclarait aussi que la souveraineté, coûte que coûte, même si les Québécois décidaient finalement d'accepter les offres fédérales, et une malsaine indifférence volontaire envers les revendications autochtones... Et, aujourd'hui, on voit un autre coup de pied aux revendications autochtones. «Le PQ ne lève pas» - c'est écrit dans l'article, M. le Président. «Quand un parti - comme le Parti québécois - compte sur le défilé de la Saint-Jean-Baptiste pour influencer le premier ministre, c'est que quelque chose ne tourne pas rond.» Et ça, c'est écrit dans un editorial du Soleil, M. le Président, signé de Raymond Giroux.

Alors, ce sont toutes ces questions-là qui font qu'aujourd'hui je me pose... Quand un parti politique ne sait plus où donner de la tête, quand un parti politique ne sait plus quoi faire pour attirer l'attention, quand un parti politique est rendu à faire de la fiction politique et quand un parti politique comme le Parti québécois manque carrément d'idées, qu'est-ce qu'il fait, M. le Président? Il dépose une motion à l'Assemblée nationale. Et c'est ce qu'il a fait aujourd'hui. Et à cause de tout ça, M. le Président, je me pose toujours des questions sur l'honnêteté du Parti québécois dans la démarche qu'il entreprend aujourd'hui.

En terminant, je voudrais juste peut-être revenir sur cette motion et dire que j'appuie la motion telle qu'amendée par le ministre des affaires intergouvernementales. J'appuie mon premier ministre, M. Bourassa, dans sa démarche. Je pense que c'était clair. Il faut se souvenir pourquoi on ne renégocie plus à 11. Il faut se souvenir de ce qui s'est passé dans l'accord du lac Meech. Il faut se souvenir qu'on a discrédité le processus d'amendement constitutionnel et surtout les rencontres constitutionnelles à 11. Et, aujourd'hui, je suis convaincu qu'il faut maintenir notre position face à ça.

Le premier ministre l'a fait. Le gouvernement l'a fait. Et je ne vois pas du tout, M. le Président, l'opportunité du Parti québécois, et plus particulièrement du député de Lac-Saint-Jean, de déposer une motion comme celle-là à l'Assemblée nationale aujourd'hui. Je peux vous dire que j'ai toujours été d'accord avec ce que mon premier ministre a fait. Je vais continuer de travailler avec lui et, en équipe, je suis convaincu qu'on va passer à travers cette période très difficile face au dossier constitutionnel. Et gardons toujours à l'esprit que le premier ministre du Québec défend les intérêts supérieurs des Québécoises et des Québécois. Il défend l'intérêt économique et l'intégrité économique du Québec. Nous serons derrière lui dans tout le dossier constitutionnel. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Vimont de votre intervention. Sur cette même motion, M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.

M. Robert Libman

M. Libman: Merci beaucoup, M. le Président. Notre formation politique rejette catégoriquement la motion de ce matin, même la motion amendée, car nous croyons qu'elle est destructive, irréfléchie et nous croyons qu'elle ébranle le processus de renouvellement de la Constitution.

M. le Président, notre parti frissonne quand nous entendons des gens comme Ovide Mercredi, hier, dire que le premier ministre du Québec est le dernier espoir du fédéralisme, le seul qui pourrait sauver le pays. Si tel est le cas, M. le Président, il doit alors cesser de jouer ce jeu dangereux qui consiste à laisser le reste du Canada devenir ce qui satisferait le gouvernement du Québec.

Bill 150 is clear. It sets up a dynamic whereby Québec is awaiting an offer. Yet, it never says what type of offer would be acceptable to the Government of Québec. It is extremely difficult, M. le Président, for the rest of Canada to read Quebec's smoke signals. Does the Premier believe that the rest of Canada are mind readers? We have to ask the question: How in the world can anyone negotiate a deal if they are not there at the table negotiating? It is senseless to think that any good deal can be worked out, that any deal in anyone's best interest can be reached, any agreement, if one side is simply not at the negotiating table.

That empty chair at the constitutional conference, that ever present empty chair sends out a very nasty and a very dangerous signal to the rest of Canada. It hardens the resolve instead of stimulating an atmosphere of compromise which is much needed for us to arrive at a deal that is in everyone's best interest.

We also have to recognize that it is difficult enough for Quebeckers themselves to decode the Premier of Québec who seems to be a federalist on Tuesday, a sovereignist on Wednesday, he is undecided on Thursday. This is not good for Canada. We have to stop playing these games and there is absolutely no way for the rest of Canada to understand or to arrive at a deal if this ridiculousness continues. We have to stop bowing to the pressure of the sovereignists. The Premier's reflexive, poorly thought out announcement of this boycott in June of 1990 is making a mockery of constitutional reform. It may have sounded strong and firm and timely back in June 1990, but, now, it is starting to haunt the process. It is a very silly game that he is playing, in which the people of Québec lose out.

And we also have to recognize that the context itself for affirming the boycott in June 1990 is tainted. Throwing all the blame on the rest of Canada for the failure of Meech Lake ignores one of the events that damaged the Meech Lake Accord more than anything else, and that was the Québec Government's decision to override a Supreme Court decision in December of 1988 protecting freedom of expression. This decision inflicted greater damage upon the Meech Lake Accord than anything else, than any other circumstance. This decision by the Government of Québec broke the trust that was developing in the rest of Canada.

En terminant, M. le Président, s'il est vrai que le premier choix de notre premier ministre est de garder le Québec au sein du Canada, il doit être prêt à faire ce qui est dans les meilleurs intérêts du Canada et du Québec, et cela veut dire s'asseoir à cette table. S'il est vrai que le premier choix de notre premier ministre est de garder le Québec au sein du Canada, s'il s'intéresse vraiment aux meilleurs intérêts du Québec et du Canada, il doit oublier cette fierté artificielle et ignorer la pression des souverainistes. Les souverainistes ne seront jamais satisfaits, peu importe ce que le gouvernement négocie. Alors, cela étant compris, il vaut mieux faire monter la pression sanguine des souverainistes aujourd'hui que plus tard, alors que le contexte pourrait être beaucoup plus fragile. Les souverainistes vont ramasser tous ces votes hebdomadaires pour pouvoir encore mieux coincer le premier ministre. Nous demandons au premier ministre, aujourd'hui, d'ignorer ce vote, d'être ferme et de retourner à la table pour négocier, et de ne pas faire attention à ceux qui veulent démolir, qui ne peuvent même pas défendre la faisabilité de leur propre option.

This boycott may very well play into the hands of nationalist circles, for those who revel in turning their backs on the enemy, but if Québec continues to stay away from the discussion, letting others define the public debate, it will severely jeopardize any successful deal. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le vice-président de la commission du budget et de l'administration et député de La Prairie. M. le député. (11 h 50)

M. Denis Lazure

M. Lazure: Merci, M. le Président. Il est bon, peut-être, de rappeler le texte de cette motion qui est très simple, présentée par notre whip en chef et député de Lac-Saint-Jean. Elle se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale réaffirme la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à 2 et non à 11 avec le gouvernement canadien tout projet d'entente constitutionnelle.»

C'est simple, l'objet de cette motion, M. le Président; dans l'esprit de l'Opposition, c'est

d'offrir notre appui au gouvernement du Québec pour qu'il maintienne cette position. Au moment où le gouvernement fédéral crée de la confusion, avec toutes les contradictions dans son comportement vis-à-vis des provinces et vis-à-vis du Québec en particulier, il est important que la position du Québec demeure claire: le Québec, y compris le gouvernement Bourassa, a défini bien clairement ce qu'il attendait du gouvernement fédéral. Le Parti québécois l'a fait aussi de façon encore plus claire, plus éclatante. Mais, M. le Président, c'est au gouvernement fédéral de dire ce que le Canada veut offrir au Québec. Le Québec a dit ce qu'il voulait et il faut absolument que le premier ministre résiste à la tentation de retourner à la table, non plus des 11, mais des 17. Non seulement il avait raison de refuser de retourner a la table des 11, mais, M. le Président, ce serait catastrophique s'il retournait à la table des 17.

Le gouvernement fédéral, en paroles, prétend vouloir décentraliser surtout en faveur du Québec pour répondre à ses revendications traditionnelles depuis des générations. Je voyais une annonce tantôt dans le parlement, M. le Président, où le ministre Loiselle, du fédéral, s'en vient cette semaine prononcer une conférence sur la décentralisation. C'est une farce, M. le Président! Le même ministre Loiselle s'apprête à voter ces jours-ci un projet de loi, le projet de loi C-13, qui va permettre au gouvernement fédéral de s'ingérer dans les compétences du Québec en matière d'environnement. Et qui dit matière d'environnement dit matière de développement économique aussi bien, parce que, avec ce projet de loi odieux, le fédéral, à cause du pouvoir de dépenser qu'il a dans tous les champs qu'on peut imaginer, s'il finance une PME, par exemple, au Québec, il pourra dire: Moi, puisque je finance cette PME, je vais envoyer mon agence d'évaluation environnementale.

Il n'y a pas de fin, M. le Président, à tel point que le ministre de l'Environnement - et je dois le féliciter au passage pour sa prise de position - a appuyé une motion que j'ai présentée hier soir à la commission de l'aménagement et des équipements et cette commission parlementaire, en séance régulière, a approuvé à l'unanimité une motion qui désapprouve le geste que le gouvernement fédéral s'apprête à poser, M. le Président. Alors, de la même façon que les parlementaires du Québec qui sont soucieux de l'environnement et du développement économique du Québec ont fait front commun pour résister à cette ingérence du fédéral, M. le Président, nous demandons aujourd'hui, par cette motion, que le gouvernement Bourassa maintienne sa position. Il n'y a rien de nouveau et, s'il y a quelque chose, il a encore plus raison de maintenir sa position parce qu'il y a plus de confusion, il y a plus de contradiction du côté du gouvernement fédéral.

Encore aujourd'hui, un quotidien titre: «Ottawa envahit tous les champs de compétence provinciale.» Je viens de parler de l'environnement. On peut parler de l'éducation. Il n'y a pas si longtemps, le fédéral, pour la première fois, posait un geste officiel qui vient en complète contradiction avec l'Acte de l'Amérique du Nord britannique qui identifie la province comme étant la responsable du champ de l'éducation. Ils ont fait la même chose en télécommunications. Ils ont fait la même chose au développement régional. M. le Président, on a de moins en moins de raisons d'aller s'asseoir à une table de 11 ou de 17 qui est devenue un cirque tout à fait inacceptable, et la population en a assez. La population a le désir de se prononcer le plus tôt possible sur l'avenir du Québec.

M. le Président, ces contradictions du gouvernement fédéral, il serait temps que des députés du Québec, notamment du parti ministériel, les députés conservateurs du Québec - je pense à des Loiselle, à des Suzanne Duplessis, à des Jean-Pierre Blackburn, Benoît Bouchard et Marcel Masse - qui, à tout bout de champ, disent: Oui, oui, oui, nous allons surveiller les intérêts du Québec, faites-nous confiance... Mais, M. le Président, les actes ne suivent pas les paroles et le projet de loi C-13 qu'ils sont sur le point d'adopter à Ottawa est le pire exemple d'ingérence dans le domaine d'une compétence que le Québec a toujours exercée. Le journal de ce matin dit ceci: «Le gouvernement Mulroney est en train d'envahir, par la voie législative, appuyé par son pouvoir de dépenser, tous les champs reconnus de compétence provinciale depuis 1867». Et ça, c'est une dénonciation faite non pas par un péquiste, M. le Président, mais par le député de Brome-Missisquoi et ministre de l'Environnement. Il est cité au texte ici et, encore une fois, il faut reconnaître qu'il a eu le courage de dénoncer vigoureusement, suite aux questions que je lui ai posées hier à l'Assemblée nationale, cette tentative du fédéral.

Alors, nous disons, M. le Président, au gouvernement du Québec: Demeurez sur votre position, ne vous laissez pas prendre dans un piège préparé autant par les autorités fédérales que par les autorités de l'Ontario et les chefs des premières nations. De toute évidence, tout ce beau monde veut attirer le Québec à la table de négociation et répéter le même stratagème, le même mécanisme qu'en 1981-1982, d'où le Québec se retirait perdant.

M. le Président, en terminant, j'espère que cette Assemblée va appuyer à l'unanimité, peut-être à l'exception de deux ou trois députés, mais à l'unanimité presque, cette proposition qui n'est, au fond, qu'un appui, qu'un support pour les lignes de conduite déjà établies par le gouvernement Bourassa depuis un an et demi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de La Prairie. Avant de reconnaître le

prochain intervenant, je vais rendre ma décision...

M. Jolivet: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Oui, M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: ...vous me permettrez de prendre quelques instants de répit pour demander à notre collègue qui est responsable, qui est en réunion, de venir prendre place ici.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Dans les circonstances, je vais reconnaître immédiatement le prochain député qui veut intervenir, ce qui permettra au whip de l'Opposition officielle de se rendre à l'Assemblée. Mme la députée de Vimont.

Mme Pelchat: Je ne veux pas vous corriger, M. le Président, mais...

Une voix: Vachon, Vachon, Vachon. Mme Christiane Pelchat

Mme Pelchat: ...mon comté, c'est toujours le comté de Vachon. Merci, M. le Président. Je dois vous dire que c'est avec joie que j'interviens sur la motion présentée par l'Opposition officielle et amendée par le ministre responsable, M. Gil Rémillard. C'est assez rare, M. le Président, qu'on a l'occasion de dire qu'un député ministériel est fier d'intervenir sur la motion du mercredi qui est normalement toujours présentée par l'Opposition officielle. Mais lorsque, comme vient de le dire le député de La Prairie, il s'agit d'une motion de confiance au premier ministre du Québec, je pense qu'il faut se joindre à ces gens et accepter la fatalité, c'est-à-dire le bon travail du premier ministre du Québec.

Mais pourquoi, M. le Président, le premier ministre n'a-t-il pas changé de position depuis juin 1990? Pourquoi, pour le premier ministre du Québec, il est important de ne pas retourner à la table de négociation, comme il l'avait clairement dit en 1990 lorsque, suite à l'accord du lac Meech, il disait: Comment voulez vous que j'accepte de retourner à la table constitutionnelle alors que j'ai refusé de le faire en 1986 avant le début des négociations sur l'accord du lac Meech? Comment pourrais-je y retourner maintenant que les accords ont été rejetés après avoir été ratifiés? En outre, c'est la position de mon gouvernement de négocier dorénavant à 2 et non à 11. Pourquoi ce n'est pas changé, M. le Président? C'est parce qu'il n'y a rien qui a changé depuis 1990, depuis juin 1990. Il n'y a aucun élément nouveau qui justifierait la présence du gouvernement du Québec à la table constitutionnelle. (12 heures)

Force est de constater, M. le Président, que les progrès importants que l'on souhaitait et que l'on souhaite toujours - je pense que le ministre responsable l'a bien démontré tout à l'heure - ne se sont pas concrétisés. Le gouvernement a mis sur pied, suite à ce rejet, la commission Bélan-ger-Campeau. Et les conclusions de la commission Bélanger-Campeau se retrouvent intégralement dans la loi 150 qui a été adoptée à cette Assemblée et qui nous suggère de former deux commissions parlementaires, ce que le gouvernement a fait. Et nous sommes en plein dans ce processus.

Je vous rappellerais, M. le Président, si vous me permettez, une citation du rapport Bélanger-Campeau qui suggérait au gouvernement la création de ces deux commissions. Une tentative ultime de renouvellement du fédéralisme n'a de sens que dans la mesure où le Canada et les autres provinces sont disposés à y participer effectivement. En ce sens, il leur appartient de faire connaître au Québec la teneur d'arrangements éventuels auxquels ils consentiraient à s'engager. C'est ça, la base fondamentale de l'argumentation du premier ministre et du gouvernement du Québec. Nous attendons des offres du gouvernement fédéral. Nous n'avons pas ces offres. Semble-t-il qu'elles viendront fin mai. Pour l'instant, il n'y a pas lieu que le premier ministre retourne s'asseoir à la table constitutionnelle.

C'est la raison pour laquelle le premier ministre a réaffirmé, le 16 mars dernier, c'est-à-dire lundi dernier, sur les ondes de Télémédia, qu'il n'était absolument pas question de retourner. Et ce n'est pas nouveau et le premier ministre est tout à fait cohérent et il reste ferme sur sa position de 1990. Les journaux du lendemain titraient d'ailleurs, et c'est très éloquent: «Bourassa refuse de retourner à la table constitutionnelle. Bourasse résiste à l'appel de Clark. Toujours pas question de participer à une négociation à 11, à 15 ou à 17. Bourassa n'entend pas céder».

Et, M. le Président, le premier ministre ajoutait, lors de cette entrevue: «La loi 150 qui a été adoptée et que l'on doit respecter dit qu'après des décennies de propositions constitutionnelles, nous croyons que c'est au tour de nos partenaires canadiens de nous faire des propositions, étant donné que ça n'a pas fonctionné».

Alors, M. le Président, il n'y a rien de nouveau sous le soleil, rien non plus de la part du fédéral, mais la position du Québec demeure inchangée. Le message du premier ministre n'a pas changé depuis le 23 juin 1990. Il est toujours le même. Il l'a réaffirmé le 16 mars 1992, c'est-à-dire il y a quelques jours. Ce message, il est clair. Il est: Oui au fédéralisme profondément renouvelé, oui à des discussions sur une base bilatérale, oui à une obligation de résultats et l'échéance demeure la même, celle de la loi 150.

M. le Président, le Québec ne ferme pas les

portes mais, dorénavant, il contrôle la circulation de l'air, si vous me permettez l'expression. Il ne se fera plus emporter par un courant d'air et, dorénavant, le Québec n'ouvrira qu'une porte à la fois, que ce soit avec le fédéral ou que ce soit avec chacune des provinces.

Il y a cependant un élément nouveau qui est accessoire, qui n'est pas un élément principal, mais qu'il est quand même important de signaler, c'est la confiance réitérée du Parti québécois dans le gouvernement du Québec. Et certains diront que je fais preuve de naïveté. Peut-être, mais j'aime croire que ces gens-là font preuve de bonne foi. On ne peut pas toujours faire des procès d'intention, surtout des procès de mauvaise intention.

Quant à moi, M. le Président, c'est ça qui a changé. Mais, en fait, c'a commencé avec 1990 lorsque M. le chef de l'Opposition officielle témoignait d'une très forte solidarité au premier ministre du Québec. Et le premier ministre l'avait signalé en disant: «Je profite de l'occasion pour remercier M. Jacques Parizeau de la manifestation de solidarité dont il a fait preuve hier soir. Le Québec est toujours plus fort quand il est uni.»

Quant à moi, la motion du PQ n'est rien d'autre qu'un aveu que le Québec est bien dirigé et je remercie les gens du Parti québécois de cette reconnaissance. C'est une véritable déclaration du PQ à l'effet que notre premier ministre prend les bonnes décisions, réaffirmées, réitérées, entre autres, par le député de La Prairie. C'est ni plus ni moins, M. le Président, qu'un vote de confiance à l'égard du gouvernement du Parti libéral. Il faut comprendre que notre premier ministre mérite la confiance du parti ministériel, de toute la population, ça va de soi, mais il mérite même la reconnaissance du Parti québécois qui est un fait assez inusité. M. le Président, je peux vous dire que cela est une grande preuve de la lucidité du premier ministre du Québec et du gouvernement du Québec.

Je terminerai, M. le Président, en vous disant que, telle qu'amendée, je voterai en faveur de cette motion. Il est très réconfortant de penser que le Parti québécois considère que le réalisme, le calme et la lucidité du premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa, sont encore la meilleure garantie du Québec. Je trouve que c'est une profession de foi à l'égard du premier ministre du Québec et je la partage. Merci.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, Mme la députée de Vachon.

Décision du président sur la recevabilité de la motion d'amendement

Je vais maintenant rendre ma décision sur la recevabilité de la motion d'amendement du ministre de la Justice.

Alors, le premier élément de la motion d'amendement, soit le remplacement du mot «réaffirme» par les mots «dans les circonstances actuelles, appuie» vient modifier, peut-être atténuer la motion principale, mais ne vient pas la contredire ni la dénaturer. La jurisprudence de notre Assemblée, de même que la doctrine, a consacré à plusieurs reprises qu'est recevable un amendement qui pourrait atténuer la portée d'une motion principale sans la contredire. Cet élément de l'amendement proposé ne me semble qu'un accessoire à la proposition principale. Cet élément ne va sûrement pas à rencontre du principe de ladite motion principale.

Quant à la dernière partie de l'amendement, soit le remplacement des mots «tout projet d'entente constitutionnelle» par les mots «le renouvellement du fédéralisme canadien», cette dernière partie de l'amendement vient situer le cadre dans lequel les discussions dont on parle ont lieu. Encore là, cette partie de l'amendement n'écarte pas et ne nie pas la motion principale. Pour ces motifs, je déclare la motion d'amendement proposée par le ministre de la Justice et délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes recevable.

Je vais maintenant reconnaître le député de Westmount, en vous rappelant, M. le député de Westmount, que vous disposez d'une période maximale de cinq minutes.

Reprise du débat sur la motion amendée M. Richard B. Holden

M. Holden: Thank you, Mr. Speaker. Mr. Speaker, I can support the amended motion because I understand the reasons why the Premier made his statement on June 23rd and I do not blame him for making that statement. I think it must be intolerable to negotiate with somebody like Clyde Wells, but I certainly do not blame the Premier for not wanting to go back to the table which now has a cast of hundreds around it, if you count all the hangers-on, the advisors and the four members of the Native groups.

I do not blame the Premier for not going back there, but I do think that he should send a more impressive team up to the meetings, not that I do not think that Mme Wilhelmy, Mr. Tremblay and Mr. Rivest are impressive people, but, politically speaking, I think the Premier should send the Minister of Intergovernmental Affairs up there. I think he should send the Minister of Public Security up there. The Minister of Public Security has a great following in the rest of Canada, he is very very well looked upon. And, I think, on occasion, he should send the Minister responsible for Native Affairs up there because the rest of the country does not understand the fact that nobody who can speak for the Government is at these meetings. It is

all very well to have high level civil servants there, but nobody is there who can speak for the Government, even on an unofficial basis at these meetings.

So, while I can support the motion that the Premier should not go up there to this tower of Babel, I think that some of the ministers should go and I hope the Premier will arrange that on some occasions. I do not think that all these ministers should attend especially the minor meetings. I do not think they are important, but the major meetings, with the Premiers or other ministers should be attended by our high level ministers. As I say, I can support this motion as amended and I think the Premier is perfectly justified in doing what he is doing for the present time. Thank you, Mr. Speaker. (12 h 10)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Westmount. Sur la même motion, je cède maintenant la parole à M. le député de Verdun. Je vous rappelle, M. le député de Verdun, que vous disposez d'une période maximale de sept minutes.

M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Je vous remercie, M. le Président. Je vais intervenir sur deux niveaux: premier niveau, l'importance de l'amendement et pourquoi la résolution telle qu'amendée devient une résolution sur laquelle nous, du côté ministériel, nous allons voter en faveur. Deuxième niveau, je voudrais intervenir sur le fond de la question. Le fond de la question reste le principe réaffirmé par le premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa, qu'il ne participera pas à des négociations à 11, pas plus qu'à des négociations à 17. Donc, deux niveaux de mon intervention.

Première question, l'amendement. L'amendement vient ici utiliser le terme «appuie» plutôt que «réaffirme». Il est important, à l'heure actuelle, de bien comprendre la différence. Il est important ici que cette Assemblée laisse au premier ministre, au gouvernement, la totale liberté dans sa décision et la manière de mener les négociations. Nous ne voulons pas, à l'heure actuelle, comme Assemblée, gêner celui qui, d'une manière magnifique, de main de maître, est en train de jouer cette difficile partie d'échecs dans laquelle on cherche à obtenir des offres acceptables pour le Québec, dans le renouvellement du fédéralisme. Il ne s'agit pas de n'avoir qu'un joueur; il ne s'agit pas de gêner à l'heure actuelle celui qui gouverne le bateau; au contraire, nous devons tous ici l'appuyer dans ses démarches et l'appuyer dans ce qu'il a déjà affirmé: Qu'il ne participera pas à des négociations à 11 ou à 17, mais lui laisser sa totale marge de manoeuvre, parce qu'il a démontré d'une manière sans équivoque qu'il est à la gouverne du bateau du Québec et qu'il va nous amener réellement vers notre but très clair, à savoir d'obtenir des offres acceptables pour le Québec et le renouvellement du fédéralisme.

Donc, M. le Président, appui de cette Assemblée au premier ministre qui cherche, et c'est le deuxième élément de l'amendement, le renouvellement du fédéralisme canadien. Il est très clair de savoir quel est notre objectif. Nous ne faisons pas n'importe quoi, pas tout pacte constitutionnel. Notre objectif, c'est d'avoir des offres acceptables pour le Québec. L'objectif du premier ministre est très clair, c'est dans l'amendement. Ça vient rendre l'amendement acceptable pour le parti ministériel, le troisième élément de l'amendement. Dans les circonstances actuelles, il ne faut pas qu'on se lie d'une manière indélébile. Le premier ministre reste le maître de la stratégie. Aujourd'hui, la stratégie, et je vais l'expliquer dans un instant, implique qu'il ne faut pas participer à ces conférences à 11 ou à 17 ou à 150. La stratégie implique ça, mais il ne faut pas se lier et c'est ce que la résolution vient dire très clairement: Que, dans les circonstances actuelles, il est important de maintenir le cap, de maintenir la décision, de maintenir ce vers quoi nous allons, ces renouvellements du fédéralisme canadien, mais nous ne pouvons pas participer dans des négociations à 11 ou à 17.

Deuxième élément, pourquoi, dans le fond, à l'heure actuelle - et je pense qu'il est important de pouvoir répondre aussi aux arguments du député de D'Arcy-McGee - pourquoi, à l'heure actuelle, dit-il ne pas participer à ces négociations constitutionnelles? Pour répondre à cette question, on doit avoir un critère. Et le critère, c'est le critère d'efficacité. Qu'est-ce qui est le plus efficace pour atteindre notre but? Quelle est la démarche la plus efficace pour permettre réellement au Québec d'obtenir les offres substantielles, les offres de renouvellement du fédéralisme en profondeur que tous ici, du moins du coté ministériel, nous voulons avoir?

Nous pensons - et M. Bourassa l'a moult fois réaffirmé et nous le pensons ici dans une totale unanimité, du côté de l'aile ministérielle - nous pensons que participer à ces négociations constitutionnelles, où les positions se figent devant les caméras de télévision, ne fait pas avancer le dossier actuellement. Les négociations, qui ont été pendant trois ans, qui sont arrivées à l'échec du lac Meech, ont clairement démontré que, devant les caméras de télévision, avec ce qu'on appelle les négociations constitutionnelles à 11, avec les 11 premiers ministres - maintenant, on ajoute les 2 territoires du Nord-Ouest, les 4 représentants des peuples autochtones - ceci ne permet pas réellement de faire avancer le dossier.

C'est ça, la question de fond. Ceci ne permet pas de faire réellement avancer le dossier. Alors, M. le Président, strictement dans un objectif d'efficacité, pour permettre au Québec d'avoir les meilleures offres possible, le

premier ministre l'a réaffirmé il y a peu de temps, il est important pour le Québec de ne pas participer à ces négociations à 11 parce qu'elles n'amènent rien. Cela ne veut pas dire que, pour nous et pour le côté ministériel, l'objectif fondamental, l'objectif de fond ne reste pas quand même d'avoir ces offres acceptables.

En conclusion, M. le Président, je pense qu'on peut dire que la motion, telle qu'amendée, devient une motion qui est tout à fait acceptable et nécessaire pour ce côté de la Chambre. Elle est acceptable parce qu'elle fait confiance au premier ministre du Québec dans la stratégie qu'il a mise sur pied. Elle réaffirme son total soutien au premier ministre du Québec, M. Robert Bourassa, et, de ce côté-là, cette motion, sans lui lier les mains, lui donne ce vote de confiance envers le premier ministre.

M. le Président, je reste profondément convaincu que cette stratégie va nous permettre d'obtenir, dans les délais raisonnables, les offres de renouvellement en profondeur du fédéralisme canadien que nous attendons tous. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Verdun. Votre intervention met fin au débat, sauf quant à la réplique de l'auteur de la motion, à savoir M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle. Je vous rappelle, M. le député, que vous disposez, pour votre réplique, d'une période maximale de dix minutes.

M. Jacques Brassard (réplique) Motion de sous-amendement

M. Brassard: M. le Président, avant de procéder à ma réplique, je voudrais quand même déposer un sous-amendement, qui se lirait comme suit: Que l'amendement présenté soit sous-amendé en remplaçant, dans l'avant-dernière ligne du paragraphe d, le mot «le» par le mot «tout». Ce qui fait que le dernier amendement se lirait comme suit: «...dorénavant à deux et non à onze avec le gouvernement fédéral tout renouvellement du fédéralisme canadien.»

Ceci étant dit, M. le Président, je...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant.

M. Brassard: Oui.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Votre sous-amendement est déposé, M. le whip de l'Opposition officielle. Est-ce que M. le leader adjoint du gouvernement, vous désirez intervenir sur la recevabilité du sous-amendement? Si oui, je vous invite à le faire rapidement, je n'ai pas l'intention de rendre la décision immédiatement. On terminera le débat avec la réplique de l'au- teur de la motion. La décision, quant à la recevabilité, sera rendue probablement cet après-midi, avant qu'on procède au vote sur la motion. Allez-y, M. le leader adjoint du gouvernement. L'un ou l'autre, M. le ministre.

M. Rémillard: Oui, M. le Président. Le sous-amendement change l'amendement que nous avons proposé. J'ai bien mentionné - et mes collègues qui sont intervenus en cette Chambre l'ont bien mentionné - que l'objectif du gouvernement est toujours d'avoir les offres les plus substantielles pour la réforme du fédéralisme canadien en profondeur. L'objectif du gouvernement, c'est de réformer le fédéralisme canadien. Par conséquent, M. le Président, notre amendement est clair et il se réfère au renouvellement du fédéralisme canadien, non pas à tout...

M. Chevrette: Question de règlement. M. Rémillard: ...renouvellement du...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le ministre.

M. Rémillard: ...fédéralisme canadien.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Un instant, M. le ministre. M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: On n'est pas au stade de débattre le bien-fondé de son amendement, on est au stade de savoir si c'est recevable ou pas, l'amendement déposé. Le ministre n'a pas répondu et je pense que l'amendement doit être jugé recevable. (12 h 20)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Non, un instant, un instant! Je suis à écouter l'argumentation du parti ministériel sur la recevabilité du sous-amendement qui a été soumis par votre collègue, le whip en chef de l'Opposition officielle. J'écoute, pour le moment, le ministre de la Justice et je vous écouterai à votre tour.

M. Rémillard: M. le Président, je vais le dire très clairement, à mon sens, ce n'est pas recevable parce que ça dénature l'amendement qu'on a proposé et ça dénature aussi l'ensemble de la motion qui est présentée. Pour nous, il s'agit de se référer, essentiellement, au renouvellement du fédéralisme canadien et non pas à tout renouvellement de fédéralisme canadien. Il me semble, M. le Président, que c'est clair qu'un tel sous-amendement vient changer, vient dénaturer l'amendement que nous avons proposé et qui a été jugé recevable par vous, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le ministre. Sur la recevabilité du sous-amendement du whip de l'Opposition officielle...

M. Chevrette: Je voudrais remercier...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...M. le leader de l'Opposition officielle.

M. Chevrette: ...très sincèrement le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes qui vient de faire la preuve quel'amen-dement est tout à fait recevable parce que lui-même a changé les mots qui dénaturaient la proposition principale. Si vous deviez vous rendre à son argumentation, M. le Président, en disant que ça dénature, prima facie, à première vue, à sa face même, vous auriez accepté quelque chose qui dénaturait et vous refuseriez un amendement à la motion qui dit «toute forme de renouvellement du fédéralisme doit faire l'objet d'une négociation bilatérale et non pas à 11».

Le ministre lui-même a changé des mots. Remarquez son amendement, retournez à son amendement, M. le Président: En remplaçant, dans la cinquième ligne, les mots «tout projet d'entente». Il a enlevé ça, il a enlevé les mots «tout projet d'entente» et, là, il nous reprocherait de remplacer «le» par le mot «tout». C'est tout à fait admissible dans nos règles. Il n'a pas plaidé du tout sur le droit; au contraire, il a contribué à vous faire rendre une décision dans les meilleurs délais, comme quoi c'est acceptable. Je l'en remercie beaucoup.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, ça va. Allez-y, M. le whip, avec votre réplique.

M. Brassard: M. le Président, on s'y attendait un peu que le gouvernement, par la voix du ministre, apporte des amendements qui, évidemment, nuancent, apportent des nuances ou introduisent du clair-obscur dans une motion qui, pourtant, était très claire, très limpide, très transparente, puisqu'elle faisait référence, qu'elle rappelait une position adoptée de façon solennelle par le premier ministre le 23 juin 1990, et dont les phrases mêmes qu'il a prononcées se retrouvent dans la motion que j'ai présentée. Alors, c'était donc clair, la motion.

Mais, évidemment, comme à son habitude, le gouvernement a tenté d'introduire, par des amendements, des nuances, et je dois dire, M. le Président, que je le déplore, je le regrette vivement. La motion aurait été plus limpide si on l'avait laissée telle qu'elle. Est-ce que ça détruit ou est-ce que ça anéantit le sens de la motion que j'ai présentée? Bien, vous l'avez dit vous-même dans vos remarques concernant la recevabilité des amendements; vous avez dit: Le sens de la motion n'est pas dénaturé. Je pense qu'effectivement, aussi, le sens de la motion n'est pas dénaturé, même si je déplore ces amendements qui viennent apporter ou introduire du flou ou du clair-obscur dans une motion qui était très claire.

Quel est le sens, quelle est la substance de la motion qu'on a présentée? C'est important d'y revenir. C'est que l'Assemblée nationale s'implique, devienne présente sur la place publique pour dire au premier ministre: La position que vous avez adoptée le 23 juin 1990 doit être maintenue, de ne pas négocier à 11, et maintenant à 17, mais à 2. Ça, ça doit être maintenu. C'est ça, le sens de la motion. C'est ça, la substance de la motion.

On y introduit des nuances qui peuvent apparaître ou laisser transparaître chez le gouvernement, évidemment, des divisions ou les tensions qu'on connaît au sein du Parti libéral. On est au courant de tout ça, là. C'est clair que le Parti libéral, le premier ministre, le ministre a à composer avec des ailes, une plus nationaliste, une autre fédéraliste - on a entendu un digne représentant de l'aile fédéraliste tantôt, à la toute fin. Il doit, évidemment, composer avec ça. Alors, les amendements visent, évidemment, à apaiser les tensions au sein de son parti, c'est manifeste. On n'est pas dupes. On sait de quoi il retourne, évidemment. Bon. Mais la question première demeure: Est-ce que le sens premier, fondamental de la motion est anéanti, est supprimé? Je ne crois pas. Je ne pense pas.

D'autre part, je vous dirais, M. le Président, qu'il ne s'agit pas, comme le signalait tantôt le député de Verdun, d'une motion de confiance à l'égard du premier ministre. Bien non, c'est le contraire. Si on avait une grande confiance à l'égard du premier ministre, on n'aurait pas présenté la motion. Si on a présenté une motion, c'est justement parce qu'on a des doutes sérieux et fondés sur des comportements historiques du premier ministre. On a des doutes sérieux sur sa solidité, sa fermeté, sa détermination à maintenir la position qu'il a solennellement prise le 23 juin 1990. Alors, ce n'est pas une motion de confiance. Au contraire, c'est une motion pour dire au gouvernement, pour que l'Assemblée nationale dise au gouvernement: Surtout, maintenez le cap, maintenez la position que vous avez adoptée le 23 juin 1990, ne la changez pas. C'est ce qu'il nous annonçait lundi de cette semaine. Mais je pense qu'il est important que l'Assemblée nationale soit présente dans le débat sur cette question-là, que l'Assemblée nationale réaffirme très clairement que le gouvernement ne doit pas, d'aucune façon, s'embourber dans le marécage constitutionnel maintenant à 17, parce que l'embourbement... C'est clair qu'il va se retrouver dans peu de temps avec tout ce qu'on retrouve dans un marécage. Au-dessus de la tête, la noyade, l'étouffement, l'asphyxie sont proches à ce moment-là et prennent peu de temps. Par conséquent, ce que l'Assemblée nationale doit faire, c'est qu'elle doit devenir, en quelque sorte, la gardienne de la conduite du premier ministre et du gouvernement.

Je disais, il n'y a pas si longtemps, à la

clôture des débats de la commission Bélanger-Campeau, qu'il fallait que le premier ministre soit tenu sous surveillance. Oui, je maintiens qu'il faut toujours le surveiller. Il faut toujours qu'il soit sous surveillance, constamment, parce qu'il y a toujours danger que le premier ministre retrouve ou soit tenté par la flexibilité, la souplesse, le fléchissement, soit toujours tenté par ça, et il faut que l'Assemblée nationale lui rappelle qu'il a pris l'engagement, le 23 juin 1990, d'être ferme, déterminé, de se tenir debout et de considérer un mode de négociation comme discrédité à tout jamais. Et c'est dans ce sens-là que la motion que j'ai présentée intervient, à mon avis, à juste titre et au moment opportun.

Je vous signale, M. le Président, qu'en devenant partie prenante de ce qui se passe présentement sur la scène publique l'Assemblée nationale aussi devient juge des circonstances et que les circonstances actuelles nous incitent à indiquer au gouvernement qu'il faut qu'il maintienne le cap, qu'il maintienne sa position adoptée en juin 1990. Quant à nous, il est clair que la conjoncture ne changera pas. Au contraire, ça va sans doute se détériorer. C'est déjà le cas présentement. Dans son discours, le ministre indiquait très clairement que les circonstances avaient changé, mais pour le pire. Entre autres, au lieu de 11, on se retrouve 17. Les circonstances ont changé effectivement et pour le pire, et je n'ai pas l'impression que ça va s'améliorer par la suite. Mais ce qui est important, c'est de maintenir la position et que l'Assemblée nationale indique au gouvernement qu'on le surveille de très près, qu'on surveille sa conduite et que s'il fait mine de changer de cap, de changer d'orientation, il est clair qu'on reviendra à l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale, en adoptant cette motion, se donne le droit de revenir en tout temps, en toute circonstance, si elle juge que le gouvernement ne se comporte pas de façon fidèle à la position qu'il a adoptée en juin 1990. Si on juge qu'il est en train de la trahir, cette position-là, l'Assemblée nationale se réserve le droit et le pouvoir de revenir et de rappeler à l'ordre le gouvernement.

Pour maintenant, je dirais que c'est un premier appel à l'ordre. Le gouvernement semble vouloir maintenir sa position, mais ça ne signifie pas que, dans l'avenir, si le gouvernement fait mine de modifier son comportement, de se montrer plus souple et plus flexible et de vouloir s'engager dans un cul-de-sac... L'Assemblée nationale aura, à ce moment-là, le devoir et parfaitement le droit de revenir et de rappeler de nouveau à l'ordre, par les voies appropriées, le gouvernement.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip en chef de l'Opposition officielle. Votre intervention met fin au débat.

Décision du président sur la recevabilité de la motion de sous-amendement

Je vais maintenant rendre ma décision sur la motion de sous-amendement que vous avez vous-même suggérée. Alors, le mot «tout» qui remplacerait le mot «le» ne contredit pas l'amendement que j'ai déclaré recevable. Il ne fait que l'élargir, donc ne le contredit pas et, pour ces raisons-là, je déclare recevable le sous-amendement suggéré par le whip en chef de l'Opposition officielle.

Je comprends que vous demandez le vote enregistré et sur le sous-amendement, et sur l'amendement, et sur la motion principale. Vote enregistré, M. le leader. Qu'on appelle les députés!

M. Johnson: M. le Président, je demanderais qu'on reporte le vote.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Le vote sur le sous-amendement, l'amendement et la motion principale est reporté à la séance de cet après-midi.

Je suspends donc les travaux de l'Assemblée jusqu'à 14 heures, cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 32)

(Reprise à 14 h 12)

Le Président: Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants. Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi.

Dépôt de documents.

Dépôt de rapports de commissions. Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.

Dépôt de rapports de commissions Vérification des engagements financiers

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales qui a siégé le 21 novembre 1991 et le 23 janvier 1992 afin de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de la Santé et des Services sociaux pour les mois d'août 1990 à septembre 1991 et ceux relevant du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, pour les mois d'août 1990 à novembre 1991.

Le Président: Ce rapport est déposé. M. le

président de la commission du budget et de l'administration et député de Vanier.

Étude détaillée du projet de loi 418

M. Lemieux: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé les 17 et 18 mars 1992 afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec. Le projet de loi a été adopté.

Le Président: Ce rapport est déposé. Dépôt de pétitions. M. le député de La Prairie.

Dépôt de pétitions

Favoriser l'ouverture permanente

de l'estacade du pont Champlain

et en permettre l'utilisation pour le

transport en commun et le covoiturage

M. Lazure: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 3691 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec, du comté de La Prairie.

Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant que des milliers d'automobiles ont utilisé en toute sécurité l'estacade du pont Champlain entre le 4 septembre et le 16 novembre 1990 et l'utilisaient en octobre dernier; «Considérant que les fréquents travaux de réfection sur les ponts Champlain et Mercier pénalisent grandement les automobilistes de la rive sud; «Considérant que l'expérience de covoiturage s'avère positive et qu'elle doit être encouragée; «Considérant que l'utilisation en permanence de cette voie peut jouer un rôle important dans la relance économique de la région; «Considérant que l'estacade représente une infrastructure publique qui a coûté plusieurs millions de dollars; «Considérant que des incidents sur la réserve de Kahnawake inquiètent les utilisateurs du transport en commun qui empruntent le pont Mercier;»

L'intervention réclamée se résume ainsi: «Nous, soussignées et soussignés, prions l'Assemblée nationale d'intervenir auprès du ministre des Transports du Québec afin de favoriser l'ouverture, en permanence, de l'estacade du pont Champlain et d'en permettre son utilisation aux véhicules de transport en commun de même qu'aux automobilistes respectant les règles du covoiturage.»

Le Président: Votre pétition est déposée. Maintenant, M. le député d'Ungava.

Consentir à Hydro-Québec une majoration

des tarifs résidentiels d'électricité qui n'excédera pas le taux d'inflation

M. Claveau: Oui, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale du Québec par 745 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté d'Ungava.

Les faits invoqués sont les suivants: «Considérant que les travailleurs et travailleuses de notre région sont durement affectés par la récession; «Considérant que les travailleurs et travailleuses ont déjà été touchés par la TPS et que la TVQ viendra bientôt amoindrir leur pouvoir d'achat; «Considérant que la hausse de prix de 5,9 % demandée par Hydro-Québec pour les tarifs résidentiels est deux fois plus élevée que l'inflation; «Considérant que les contrats secrets conclus avec certaines grandes entreprises font perdre des revenus importants à la société d'État et que ce n'est pas aux consommateurs à payer pour cela; «Considérant que depuis cinq ans le tiers des Amérindiens de la réserve de Kahnawake reçoivent l'électricité gratuitement de la société d'Etat;»

Et l'intervention réclamée, M. le Président, est donc la suivante: «Nous demandons à l'Assemblée nationale de consentir à la société d'État une majoration des tarifs résidentiels d'électricité qui n'excédera pas le taux d'inflation.»

Je certifie que l'extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Alors, votre pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.

Avant la période des questions et des réponses, je voudrais vous aviser qu'après cette période de questions seront tenus des votes reportés sur la motion de M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle présentée aux affaires inscrites par les députés de l'Opposition, sur la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et sur la motion de sous-amendement de M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

Nous allons donc maintenant procéder à la période de questions et réponses orales et je vais reconnaître, en première question, M. le chef de l'Opposition.

Questions et réponses orales

Intentions du gouvernement face à l'adoption imminente d'un projet de loi fédéral sur l'environnement

M. Parizeau: M. le Président, hier, en réponse à une question du député de La Prairie, le ministre de l'Environnement, en cette Chambre, a dénoncé violemment le projet de loi C-13 du gouvernement fédéral, mettant en valeur en particulier les pouvoirs considérables que le gouvernement fédéral se donnerait par ce projet de loi sur un plus grand nombre, j'imagine, de projets d'investissements au Québec, aussi bien privés d'ailleurs que dans certains secteurs publics. Il s'agit effectivement d'une des tentatives de centralisation économique les plus sérieuses, par le truchement de l'environnement, que l'on ait constatées jusqu'à maintenant. Je ne vais pas élaborer là-dessus. Je pense que le ministre de l'Environnement, hier, a touché à l'essentiel de la question.

En raison de la gravité de ce projet de loi, en raison du fait, d'autre part, que le vote en troisième lecture à la Chambre des communes doit intervenir, si je comprends bien incessamment - ça pourrait être ce soir, peut-être pas, ou alors demain - le premier ministre du Québec a-t-il l'intention, de façon très claire, très ferme, de demander au premier ministre du Canada certainement de faire reporter le vote, ou bien de retirer ce projet de loi, ou alors de le transformer dans un sens qui serait plus compatible avec les intérêts du Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, le secteur de l'environnement est toujours un secteur qui implique des tensions inévitables entre le gouvernement fédéral et les gouvernements des provinces. Ce n'est pas un élément nouveau. Nous avions eu à protester également auprès des prédécesseurs de l'actuel ministre de l'Environnement, auprès d'un, entre autres, que connaissent bien le chef de l'Opposition et le critique constitutionnel qui siège derrière lui. (14 h 20)

J'endosse, par ailleurs, totalement les propos du ministre de l'Environnement, les propos qui ont été tenus hier en Chambre, et nous avons l'intention d'en discuter au Conseil des ministres cet après-midi pour voir quels gestes pourraient être posés de manière à protéger les intérêts du Québec.

Le Président: En question complémentaire.

M. Parizeau: M. le Président, tout en déplorant que ça soit à quelques heures, possiblement, de l'adoption d'un projet de loi à la Chambre des communes que le Conseil des minis- tres se penche sur cette question, tout en le déplorant, je dois demander au premier ministre du Québec, parce que c'est le seul qui peut poser un geste comme celui-là: Une fois que le Conseil des ministres aura délibéré, a-t-il l'intention, publiquement, dès ce soir, d'indiquer ce qu'il a l'intention de faire de façon à ce que ceux qui cherchent à défendre les intérêts du Québec à la Chambre des communes reçoivent un signal de ce qui est susceptible de se passer?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: M. le Président, nous nous réunissons dans une heure et trente, environ. Le chef de l'Opposition dit que la loi devrait être adoptée en troisième lecture aujourd'hui. Je n'ai pas reçu à date - et j'ai demandé qu'on vérifie - une telle confirmation. J'ai entendu le ministre fédéral de l'Environnement donner une interprétation différente de celle que nous avons de ce côté-ci de la Chambre sur la portée de la loi sur l'environnement, de la loi C-13. Je dis au chef de l'Opposition que, très très bientôt, nous allons discuter de cette question-là et nous aviserons par la suite. Je ne me réfère pas à une réunion qui aura lieu dans deux jours, dans trois jours, je me réfère à une réunion qui aura lieu dans une heure et demie.

Le Président: Toujours en complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le premier ministre, qui n'a pas l'air, si je comprends bien sa dernière réponse, de saisir tout à fait l'urgence de la chose, pourrait demander à son bureau de se renseigner sur les échéances? Ce projet-là devait passer à la Chambre des communes hier soir. Il a été retardé, par quelques discours, probablement jusqu'à ce soir. Il y en a qui cherchent à reporter le vote à demain. Ces choses-là, à l'heure actuelle, sont assez bien connues. Est-ce qu'au moins le Conseil des ministres pourrait être renseigné dans une heure ou deux sur les échéances qui lui pendent au bout du nez?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: C'est exactement ce que j'ai dit dans ma réponse précédente. J'ai l'impression très souvent que, quand je réponds, le chef de l'Opposition devient sourd. J'ai dit que je m'informais, que j'attendais d'un moment à l'autre des confirmations sur la procédure qui a été utilisée. Mon chef de cabinet doit parler ou a peut-être déjà parlé avec le chef de cabinet du premier ministre du Canada. Donc, nous suivons l'évolution de la situation d'une façon aussi proche que possible. Je ne vois pas pourquoi le chef de l'Opposition manifeste son insatisfaction vis-à-vis de l'attitude du gouvernement, alors que le ministre, parlant au nom du gouvernement, a exprimé un point de vue très ferme, appuyé par

tout le gouvernement et les membres de l'Assemblée nationale, alors que nous suivons la situation de très près. Et je ne vois pas pourquoi le chef de l'Opposition n'exprime pas son accord avec la position du gouvernement.

Le Président: Question complémentaire.

M. Parizeau: Est-ce que le premier ministre est conscient que la raison pour laquelle j'insiste un peu, c'est qu'au cours de la dernière année le gouvernement fédéral a annoncé des normes et des standards dans l'éducation et le gouvernement du Québec a à peine protesté? Le gouvernement fédéral a annoncé la création d'un ministère du développement régional du Québec et le gouvernement a à peine protesté et c'est devenu un bureau.

La loi sur les communications, la centralisation des pouvoirs par Ottawa dans la récente loi des communications, un ministre a protesté et tout le monde lui en sait gré. Mais le gouvernement, non. Est-ce que le premier ministre comprend pourquoi on peut être un peu inquiets à le voir, comme ça, à la veille des échéances, réunir son Conseil des ministres en se demandant: Qu'est-ce qu'on pourrait bien faire, donc?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition sait fort bien que le Conseil des ministres se réunit, quand nous sommes en session, le mercredi après-midi à 16 heures. Donc, ce n'est pas une réunion qui a pour but de parler de cette question-là. Je pense que le chef de l'Opposition devrait être au courant de ce fait-là. C'est son interprétation «a à peine protesté». On ne protestera jamais assez pour le chef de l'Opposition, nous le savons. Notre position est très claire et très ferme sur ce dossier. Nous savons qu'il y a des chances, comme il l'a dit lui-même - on nous a informés de cela - qu'il y a possibilité ou probabilité que le projet de loi soit adopté aujourd'hui. Mais, à ce moment-ci, ce n'est pas une différence d'une heure qui peut modifier le point de vue et la volonté du gouvernement d'agir de la façon la plus efficace.

Le Président: En question principale, M. le député de Labelle.

Mesures pour rétablir la situation financière du gouvernement et l'économie du Québec

M. Léonard: m. le président, après 2 433 000 000 $ de taxes de plus sur le dos des contribuables, voilà aujourd'hui que le ministre des finances estime son déficit; au 31 décembre dernier, à 4 125 000 000 $, soit 645 000 000 $ de plus que prévu à son budget, une hausse de 18,5 %. l'économie n'est pas repartie. les contribuables sont écrasés. le fédéral n'est pas au rendez-vous, malgré ce qu'il a déclaré il y a quelques semaines. Et l'économie n'est pas repartie parce qu'on l'avait prévenu qu'avec son avalanche de taxes il la bloquerait. Alors, après un résultat aussi déplorable, aussi minable, que compte faire maintenant le ministre des Finances pour rétablir la situation économique du Québec et la situation financière du gouvernement?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: En effet, M. le Président, nous avons déposé aujourd'hui, au ministère des Finances, sous la signature du sous-ministre, la Synthèse des opérations financières pour l'exercice se terminant le 31 décembre 1991. On remarquera tout simplement que dans cette Synthèse, par rapport à la Synthèse au 30 septembre 1991, il y a très peu de changements. On veut dramatiser, mais regardons les chiffres. Il s'agit de deux éléments qui s'ajoutent, c'est-à-dire les résultats de fin d'année des sociétés d'État commerciales. Du temps de mon honorable ami d'en face, on n'en tenait pas compte; aujourd'hui, on en tient compte. Et c'est là l'élément principal de cette différence. Quant à l'autre élément, il s'agit des taxes à la consommation et ventes au détail qui étaient plus faibles dans la période pré-Noël que ça n'avait été prévu. C'est tout.

Le Président: En question complémentaire.

M. Léonard: M. le Président, le ministre des Finances oublierait-il dans son enumeration qu'il vient de perdre 422 000 000 $ au titre des paiements de péréquation et que le gouvernement fédéral, cette armée, a diminué ses paiements par rapport à l'an dernier, entre autres raisons de son déficit?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Je comprends, M. le Président, et vous comprendrez fort bien que la question du fédéralisme semble chicoter beaucoup plus le député de Labelle que d'autres éléments bien importants de ce rapport. Mais je tiendrais simplement à lui faire remarquer que, s'il veut regarder le détail des transferts fédéraux, il verra, oui, en effet, qu'il y a une diminution du côté de la péréquation. Ça avait été, d'ailleurs, annoncé l'automne dernier par une révision qui avait été faite, mais, par contre, nous avions dit à ce moment-là qu'il fallait attendre, non pas arriver à des conclusions prématurées, mais attendre l'ensemble des transferts. Et là on voit qu'il y a une augmentation sensible du côté du financement des programmes établis et également du côté des transferts relatifs à l'aide sociale. (14 h 30)

Le Président: En question principale maintenant, M. le leader de l'Opposition et député de Joliette.

Gel des tarifications d'Hydro-Québec

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Après 2 400 000 000 $ de taxes, on aurait cru que c'était assez. La semaine dernière, Hydro-Québec a déposé sa proposition tarifaire et, dans cette proposition tarifaire, M. le Président, Hydro va chercher 203 000 000 $ additionnels dans les poches des contribuables pour l'année 1992. De ces 203 000 000 $ pour l'année 1992, M. le Président, 180 000 000 $ sont directement la cause de taxes du gouvernement, à savoir la taxe sur les frais de garantie et l'augmentation de la taxe sur le capital. Donc, 90 % de l'argent que demande Hydro-Québec pour 1992 est la responsabilité directe, par des taxes déguisées, du gouvernement actuel. Comme le gouvernement doit se prononcer sur les tarifs, est-ce que le gouvernement ne devrait pas demander à HydroQuébec d'assumer les 23 000 000 $ de sa partie et au gouvernement d'effacer ses revendications de taxes ou ses demandes de taxes de 180 000 000 $ pour permettre aux contribuables québécois de respirer et d'avoir un gel des tarifications en 1992?

Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: Je dois dire, M. le Président, que j'apprécie l'intervention fort positive de mon collègue, le leader de l'Opposition. C'est un peu plus positif que certaines choses qu'il a dites à la commission parlementaire la semaine dernière, mais j'apprécie ce qu'il vient de nous dire. Depuis la commission parlementaire, qui n'est pas une commission pour la frime, M. le Président, nous avons quand même questionné, lui comme moi, Hydro-Québec sur non seulement les frais d'exploitation, parce qu'il y a aussi les frais d'exploitation dont il faut tenir compte, mais il y a aussi la faible hydraulicité dont il faut tenir compte. Quand la faible hydraulicité existe, il faut qu'on aille acheter ailleurs l'énergie dont nous avons besoin, et il faut tenir compte de ces centaines de millions de dollars qu'il faut dépenser - le député n'en parie pas. En plus, M. le Président, nous avons encore quelque temps pour bien analyser en profondeur ce dossier. Nous allons tenir compte qu'il y a, au Québec, des consommateurs. Il y a aussi, au Québec, des contribuables. Nous allons tenir compte aussi qu'à Hydro-Québec il peut y avoir encore de la place, comme je l'ai dit la semaine dernière, pour faire en sorte que les frais d'exploitation soient davantage diminués. Je pense qu'eux aussi, comme nous, comme les fonctionnaires, doivent faire leur part et nous allons aviser le gouvernement de la recommandation qui doit être faite, M. le Président.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: En question complémentaire.

M. Chevrette: ...tout d'abord, je voudrais remercier la ministre de ses félicitations et je voudrais lui demander: Est-ce que Mme la ministre reconnaît que les 180 000 000 $ sur les 203 000 000 $ demandés pour l'année 1992 par Hydro-Québec sont causés directement par l'imposition des frais de garantie par le ministre des Finances, qui va chercher 150 000 000 $, et, pour 30 000 000 $ additionnels, sont dus à l'augmentation de la taxation sur le capital? Est-ce que la ministre ne reconnaît pas que vous êtes allé chercher, comme gouvernement, 180 000 000 $ sur 203 000 000 $ qu'Hydro-Québec demande? À ce compte-là, est-ce que la ministre peut nier ces faits devant cette Assemblée et est-ce qu'elle peut prendre l'engagement de demander au ministre des Finances de retirer ces frais de garantie qui ne devaient pas, l'an passé, soit dit en passant, affecter la tarification? C'est ce que vous nous aviez dit en cette Chambre.

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Je n'avais pas dit qu'ils ne devaient pas affecter la tarification. J'avais dit que les chiffres que vous soumettiez à l'époque étaient beaucoup trop élevés par rapport aux chiffres qui doivent être considérés dans les frais de garantie.

M. le Président, j'ai questionné moi-même le président d'Hydro-Québec, la semaine dernière, sur ces frais de garantie et lui-même dit qu'il serait désastreux que le gouvernement ne serve pas de garantie à Hydro-Québec lorsqu'elle va sur le marché des emprunts. Il serait désastreux aussi, M. le Président...

Le chef de l'Opposition s'amuse. Il pourrait peut-être écouter la réponse.

Il serait aussi désastreux, M. le Président, si nous chargions 1 % comme certaines autres provinces le font. Alors, je pense qu'il faut tenir compte de ça avant de lancer n'importe quels chiffres ici.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: Question complémentaire.

M. Chevrette: Est-ce que Mme la ministre pourrait dire à cette Chambre que vous avez toujours donné cette garantie à Hydro-Québec, sans imposer une taxe indirecte comme vous le faites présentement?

Le Président: Mme la ministre.

Mme Bacon: Ça ne dit pas le contraire de ce que je viens de dire, M. le Président. Je dis qu'il serait désastreux que le gouvernement n'accorde pas une garantie à Hydro-Québec quand elle va sur le marché des emprunts. Je

comprends que le chef de l'Opposition se bidonne, M. le Président. C'est drôlement important quand Hydro-Québec va emprunter.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Duplessis.

Études sur le projet SM 3 d'Hydro-Québec

M. Perron: Merci, M. le Président. Au début des années quatre-vingt, au plan d'aménagement d'Hydro-Québec, nous retrouvions, à ce moment-là, la rivière Sainte-Marguerite 3, dans le comté de Duplessis, où il y avait une puissance possible de 544 MW, et ce, sans détournement des rivières Carheil et aux Pékans, dans le nord du comté de Duplessis. En 1987, est apparu un nouveau plan d'aménagement où on fait, justement, le détournement des rivières Carheil et aux Pékans qui sont tributaires de l'actuelle rivière Moisie, la plus belle rivière à saumon au monde, et ce, pour un montant de puissance de 822 MW en moyenne. Depuis cette annonce d'Hydro-Québec, au cours des derniers mois en particulier, il y a, dans le milieu, confrontation au lieu de concertation. Ma question à la ministre de l'Énergie et des Ressources: Est-ce que la ministre de l'Énergie et des Ressources peut s'engager devant cette Chambre à l'effet que la société Hydro-Québec dépose, dans de très courts délais, toutes les études concernant le projet SM 3 afin qu'on arrête de se chicaner dans le milieu et qu'on sache où on s'en va?

Le Président: Mme la ministre de l'Énergie et des Ressources.

Mme Bacon: II ne me semble pas qu'on se chicane tant que ça dans le milieu, M. le Président. Je rencontre, demain, des maires et des représentants de chambres de commerce qui sont tout à fait d'accord avec le dossier. Je ne sens pas de chicane chez eux, M. le Président. Au contraire, ils viennent discuter avec nous de ce dossier-là. Il y a un processus d'évaluation environnementale qui est en marche. HydroQuébec continue de discuter avec les Montagnais. Il n'y a jamais eu d'arrêt dans les discussions avec le conseil de bande de Sept-îles. Il y a aussi des discussions avec les gens. Laissons le processus se poursuivre, M. le Président. J'aurai, demain, cette rencontre avec les gens du milieu pour connaître leur position dans le dossier, qui me semble une position assez homogène. Compte tenu des développements d'autres dossiers, je suis persuadée que tous les intervenants qui sont impliqués dans ce projet-là pourront en arriver à une entente qui va être une entente négociée, M. le Président.

Le Président: En question complémentaire.

M. Perron: M. le Président, une question au ministre de l'Environnement. Est-ce que le ministre de l'Environnement peut déposer devant cette Chambre le rapport de recevabilité de son ministère, c'est-à-dire les 33 pages de questions portant surtout sur la rivière Moisie, rapport qui était déposé devant la société Hydro-Québec le 17 février dernier?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président.

Des voix: Quand? Quand?

Le Président: M. le député de Duplessis, en complémentaire.

M. Perron: Oui, M. le Président. Est-ce que le ministre pourrait nous dire quand il va le déposer? Est-ce que ça va être dans la semaine des quatre jeudis, ou cette semaine, ou la semaine prochaine?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): La réponse étant positive, M. le Président, le ministre de l'Environnement, compte tenu de la tradition de transparence au ministère de l'Environnement, va s'exécuter dans les meilleurs délais, au maximum d'ici à une semaine, M. le député de Duplessis.

Le Président: En question principale maintenant, M. le leader adjoint de l'Opposition et député d'Abitibi-Ouest.

Plan d'action pour contrer le phénomène de l'abandon scolaire

M. Gendron: Ma question s'adresse au ministre de l'Éducation et je ne le vois pas.

Une voix: C'est ça qui est le problème, on ne le voit pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Allez-y, M. le leader adjoint de l'Opposition.

M. Gendron: Pourtant, je n'ai pas publié d'avis de recherche. M. le Président, le 10 septembre dernier, le ministre de l'Éducation annonçait, avec raison, je pense, un document majeur sur les orientations qu'il entendait prendre concernant l'obligation pour son ministère de centrer, comme objectif majeur au cours de l'année, un plan pour contrer le phénomène toujours effarant et grandissant de l'abandon scolaire. Il a convié tous les agents de l'éduca-

tion au Québec à tenir différents colloques dans toutes les régions du Québec, lesquels ont très bien fonctionné et, par la suite, il s'est engagé à rendre public un plan d'action pour contrer le phénomène évoqué tantôt. Or, dans Le Devoir, le 27 janvier dernier, le ministre annonçait un premier report de son plan d'action. Il a annoncé par la suite un deuxième report en disant: Malheureusement, je ne pourrai pas le produire à la fin février, début mars. Il a parlé de fin mars, début avril. Nous sommes à la mi-mars et nous n'avons toujours rien devant nous. (14 h 40)

Ma question très simple au ministre de l'Éducation: Est-ce que vous avez toujours l'intention de présenter votre plan d'action au cours du mois de mars, tel que promis, et croyez-vous toujours pouvoir convaincre les différents intervenants de votre volonté de combattre efficacement le problème des abandons scolaires si l'argent nécessaire à la réalisation de cet objectif ne suit toujours pas? Parce que je suis au courant de vos problèmes.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: m. le président, effectivement, le plan d'action pour mettre en place des mécanismes davantage porteurs de garanties pour la réussite éducative au québec a été bien élaboré. il a fait l'objet de vastes consultations. au lendemain de la tournée des colloques régionaux, il a fait l'objet de précisions, de modifications, tel que je l'ai déjà invoqué. nous avons eu l'opportunité, au cours des dernières semaines, de valider le tout auprès des agents, celles et ceux qui vivent l'éducation via les grandes associations qui les représentent. j'ai indiqué mon intention pour mars ou avril. nous sommes le 18 mars. avril est après-demain et après-demain. je vous invite à être confiant. je vous invite à souscrire, à m'appuyer dans cette démarche et, si vous êtes au courant de mes problèmes, vous devriez me supporter dans les solutions.

Le Président: En question complémentaire.

M. Gendron: C'est justement le but de la question, M. le Président. Comment allez-vous faire pour le livrer, ce fameux plan que tout le monde souhaite avoir? Parce que ça urge d'avoir un plan pour contrer le phénomène grandissant des 36 % de décrocheurs, alors que vous avez promis de l'argent neuf pour actualiser votre plan. Et, pas plus tard que vendredi dernier, quand vous avez rencontré les agents de l'éducation, vous leur avez annoncé encore que, dans le prochain budget de l'Éducation, malheureusement il y aura des coupures. Alors, ma question très simple: Est-ce qu'on peut encore croire au plan nécessaire contre le décrochage scolaire avec l'apport de l'argent neuf si, déjà, vous avez commencé à annoncer des coupures?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: M. le Président, la pratique, la coutume veut que le ministère de l'Éducation publie, pour fins de consultation, ses règles budgétaires avant le début de l'exercice financier qui s'en vient, premièrement. Ça se fait dans le cadre de la Commission nationale de financement que j'ai rencontrée, que j'ai réunie vendredi soir dernier. Vous parlez de coupures, ce n'est pas le cas, M. le député. Vous en avez parié l'année passée et, finalement, ultimement, il n'y en a pas eu. On a ergoté un peu partout de ce côté-là, M. le Président: On a 100 000 000 $ de coupures, et ça s'est soldé par l'indexation plus 131 000 000 $. Vous devriez le dire, ça, aujourd'hui. Vous ne le dites pas, cependant.

Des voix: Bravo!

M. Pagé: À la rencontre de vendredi dernier, je vous invite à vérifier auprès de celles et ceux qui y ont participé, la Fédération des commissions scolaires, l'Association des commissions scolaires protestantes, les cadres scolaires, les directeurs généraux, les gestionnaires, etc., ces gens-là ont exprimé de la très grande satisfaction à l'égard des crédits qui seront éventuellement déposés ici, à l'Assemblée nationale, et probablement la semaine prochaine; indexation, certaines modulations pour un montant d'environ 20 000 000 $. Mais ces gens-là sont très, très, très satisfaits. Appelez-les! Je vais leur demander qu'ils vous recherchent pour qu'ils puissent vous le dire.

Le Président: Alors, en question complémentaire.

M. Gendron: Comment expliquez-vous le degré de satisfaction alors que, le lendemain de cette rencontre-là, la présidente écrit et elle communique au public québécois: «La présidente de la Fédération s'inquiète des restrictions budgétaires»? Il y a toujours un bout, là! Elle était là, elle, à la rencontre. Oui, j'ai vérifié. Le lendemain, elle s'inquiète. Vous le savez bien qu'il y a des coupures. Deuxièmement, comment se fait-il qu'ils ont le dépôt des crédits avant nous autres, à l'Assemblée nationale? C'est ça que vous venez de dire.

M. Pagé: Je m'excuse, non.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Pagé: Ils n'ont pas eu de dépôt de crédits. Ils ont eu des indications d'affectations budgétaires par certains programmes, et ça, ça s'est toujours fait, et si vous ne l'avez pas fait quand vous étiez ministre de l'Éducation, c'est parce que vous n'avez pas rempli vos responsabilités.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Transformation de l'Hôtel-Dieu de Montréal en centre de soins palliatifs

M. Atkinson: Merci, M. le Président. En ce qui concerne la fermeture imminente de l'hôpital Hôtel-Dieu de Montréal et la construction de nouveaux locaux ailleurs, ma question, M. le Président, s'adresse au ministre de la Santé et des Services sociaux. Dans la grande région de Montréal, qui est au service de plus de 2 000 000 de personnes, il y a un manque sérieux de lits pour soins palliatifs. Avec une population vieillissante, il y aura, dans un avenir prévisible, un besoin de beaucoup plus de lits pour soins palliatifs. Ma question est la suivante: Est-ce que le ministre a examiné la possibilité de convertir l'Hôtel-Dieu de Montréal en un centre pour soins palliatifs pour faire face au nombre croissant de la demande?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Côté (Charlesbourg): M. le Président, je remercie le député de Notre-Dame-de-Grâce pour sa question. Elle s'inscrit parfaitement dans la logique du dossier qui veut voir réaffecter des locaux qui, dans la mesure où le gouvernement déciderait de la relocalisation, puisque ce n'est pas le cas maintenant... Dans la mesure où le gouvernement le déciderait, il y aurait des hypothèses qui feraient que les locaux de l'Hôtel-Dieu pourraient être affectés à une mission apparentée à la santé, tel que le souhaite la corporation de la communauté religieuse. Et, dans ce sens-là, oui, il y a eu examen de ces possibilités-là, et, oui, effectivement, il pourrait y avoir dans les solutions alternatives un certain nombre de lits qui pourraient être affectés aux soins palliatifs, sans pour autant concentrer les lits sur l'île de Montréal, mais davantage ajouter un peu à l'offre pour être capable de satisfaire les exigences de notre société.

Le Président: Alors, question principale maintenant, Mme la députée de Terrebonne.

Financement des frais d'appel du jugement rejetant la demande des victimes de la MIUF

Mme Caron: Merci, M. le Président. Le 13 décembre 1991, le juge Hurtubise rejetait la demande des six familles, causes types, victimes de la MIUF et, dans les conclusions...

Le Président: Oui. Un instant. Oui, effectivement. On m'avise qu'on ne comprend pas. Donc, je vais demander la collaboration de tous les collègues, s'il vous plaît. Alors, allez-y, madame.

Mme Caron: Le 13 décembre 1991, le juge Hurtubise rejetait la demande des six familles, causes types, victimes de la MIUF et, dans les conclusions du jugement, les condamnait aux dépens. Cette décision venait détruire les attentes de quelque 18 000 familles québécoises.

Le 9 janvier dernier, M. le Président, tout juste à la veille de la date limite pour l'inscription en appel, le ministre de la Justice, responsable de la protection du consommateur, permettait le dépôt de ladite inscription sans toutefois prendre de décision quant au financement de l'ensemble des frais de l'appel par l'Office de la protection du consommateur. Depuis, grand silence du ministre.

Est-ce que le ministre a enfin pris sa décision concernant le financement de l'ensemble des frais de l'appel puisque, il faut le rappeler, la date limite pour le dépôt du mémoire des appelants est mardi prochain, le 24 mars?

Le Président: M. le ministre de la Justice.

M. Rémillard: Oui, M. le Président, donc à la suite du jugement du juge Hurtubise, ce jugement a été étudié et nous avons fait ce que nous devions faire pour permettre que les droits d'appel soient respectés. À partir de là, M. le Président, avec l'Office de la protection du consommateur et les différents groupes et intervenants, il y a des discussions qui ont eu lieu.

Comme ministre de la Justice, pour ma part, je vois l'aspect juridique, oui, et je vois à ce que ce jugement ait toute son implication sur le plan juridique, sur le plan de la légalité. Mais, au-delà du juridisme, M. le Président, je dois dire que je suis aussi très préoccupé par l'aspect humain, et de voir comment nous pourrions trouver une solution qui pourrait satisfaire les intervenants sur l'aspect juridique et surtout, je me permets d'insister, sur l'aspect humain.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Caron: Justement, sur l'aspect humain, M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte que son indécision chronique a permis à des compagnies de faire des pressions indues en attendant sa décision juridique, ou humaine, ou politique, et que les victimes, dont l'âge moyen est de 60 ans, ont subi des pressions pour se désister de leur recours? Est-ce qu'il peut prendre sa décision avant le 24 mars, qui est la date limite, et est-ce qu'il va les rencontrer pour ce règlement humain et politique?

Le Président: M. le ministre.

M. Rémillard: M. le Président, j'ai pris les décisions quand il fallait les prendre, et les droits de tout le monde sont protégés. A partir de là, la décision qui reste à prendre maintenant,

quand je fais référence à l'aspect humain, c'est de savoir: est-ce qu'on investit des millions de dollars en frais judiciaires, en frais légaux, etc., ou si on prend cet argent et on trouve d'autres moyens pour pouvoir combler des besoins dans une situation qui peut être difficile à certains niveaux?

Donc, c'est sous étude. L'Office de la protection du consommateur est impliqué et je prendrai mes décisions en temps et lieu, toujours pour moi comme priorité de faire en sorte qu'on puisse trouver la solution la plus humaine et la plus judicieuse possible.

Le Président: En question principale maintenant, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

Mesures pour préserver les emplois dans l'industrie du tabac

M. Boulerice: Oui, M. le Président. L'industrie de transformation des produits du tabac représente 2000 emplois directs au Canada et 80 % de ces emplois sont au Québec. La moyenne des salaires peut s'évaluer à environ 45 000 $ par année, la moyenne d'ancienneté des travailleurs est de plus de 24 ans, pour une moyenne d'âge de 45 ans. (14 h 50)

Ma question au ministre de l'Industrie et du Commerce: Qu'est-ce que le ministre a fait de concret ou qu'entend-il faire d'utile pour préserver ces emplois québécois et les marchés considérables que cette industrie trouve ailleurs dans le monde alors que ses amis, c'est-à-dire le gouvernement fédéral, taxe l'exportation de ces produits.

Le Président: M. le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie.

M. Tremblay (Outremont): L'information que j'ai, M. le Président, c'est que cette industrie n'a jamais été aussi prospère, n'a jamais produit autant de tabac. Alors, si jamais les intervenants sont prêts à me rencontrer et si le député a des représentations particulières à faire, comme dans tous les cas où il y a une possibilité de perte d'emplois, je suis prêt à rencontrer tous les intervenants pour en discuter, mais je n'ai pas été approché par aucune de ces entreprises pour en discuter et pour m'informer de supposés problèmes comme le laisse entendre le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques.

Le Président: En question complémentaire.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que je pourrais informer le ministre que 100 emplois ont été perdus ici, à Québec, dans le comté de Taschereau? Est-ce que je pourrais informer le ministre que de la machinerie a été enlevée d'une usine de Montréal pour être transportée à Puerto Rico parce que la taxe à l'exportation ne leur permet plus de produire, donc leur marché est bloqué tant et aussi longtemps qu'ils produisent au Québec? D'où les pertes d'emplois possibles et je me permets d'ajouter qu'ils vont venir vous rencontrer si vous avez quelques disponibilités à votre agenda.

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Je note, M. le Président, que l'Opposition est à court de questions. On recycle des dossiers.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Tremblay (Outremont): Non, non. Alors, la nouvelle, c'est une vieille nouvelle. Il y a des rationalisations qui peuvent se comprendre dans certains secteurs plus vulnérables que d'autres et, pour répondre à la deuxième partie de la question, je suis prêt, j'ai toujours été prêt à rencontrer des intervenants pour essayer de trouver des solutions concrètes à des problèmes importants au Québec, surtout lorsqu'on parle de protection et de création d'emplois.

M. Chevrette: Question additionnelle.

Le Président: En question additionnelle, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: M. le Président, est-ce que le ministre sait que c'est la semaine dernière que les travailleurs ont manifesté à Ottawa? Est-ce qu'il sait que ce n'est pas un vieux dossier? C'est un dossier tout neuf qui risque carrément de voir les produits québécois, avec cette taxe-là, être tout simplement à la baisse sur le marché américain et, de facto, mettre en péril les emplois québécois et même la production du tabac québécois, où le comté de Joliette en particulier serait durement touché?

Le Président: M. le ministre.

M. Tremblay (Outremont): Alors, au lieu de lire les journaux, est-ce que le leader de l'Opposition, s'il est si bien informé, pourrait dire aux travailleurs, au lieu d'aller faire des démonstrations à Ottawa, que le ministre de l'Industrie, du Commerce et de la Technologie est prêt à les rencontrer pour trouver des solutions concrètes au dossier?

Le Président: En question complémentaire ou principale?

Une voix: Principale.

Le Président: Alors, en question principale, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Moratoire sur les surplus des caisses de retraite

Mme Harel: Le 15 novembre 1988, le gouvernement libéral imposait un moratoire sur les surplus des caisses de retraite. Le moratoire ne devait durer qu'un an et l'actuel ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle promettait rapidement une loi sur la propriété des excédents qui totalisent maintenant 1 000 000 000 $. Il y a 40 mois de cela. Entre-temps, des dizaines de milliers de travailleurs et de travailleuses âgés licenciés ont été privés de ce surplus, leur modeste rente de retraite non indexée en attente du bon vouloir du ministre. M. le Président, quand le ministre va-t-il enfin se décider à arbitrer dans ce dossier? Quand va-t-il enfin prendre ses responsabilités? Et peut-il nous assurer qu'il déposera un projet de loi d'ici à la fin de la présente session pour enfin mettre un terme à ce dossier, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle.

M. Bourbeau: M. le Président, s'il y a une chose qui est évidente, c'est que c'est plus facile d'imposer un moratoire que de le lever. Ça, je l'ai appris il y a quelques années. C'est encore vrai aujourd'hui.

M. le Président, c'est facile de trancher comme nous dit de le faire la députée de Hoche-laga-Maisonneuve, mais il y a des sommes considérables en cause et il y a des intérêts importants aussi en cause. Ces intérêts-là concernent, d'une part, les travailleurs et, d'autre part, aussi les entreprises. On ne peut pas, comme ça, du revers de la main, prendre une décision qui est sujette à brimer soit les travailleurs, soit les entreprises, sans avoir tenté le maximum pour faire en sorte que les parties soient d'accord avec la solution recherchée. J'ai proposé, dans un premier temps, une solution que je croyais équitable. Les deux parties m'ont dit qu'elles n'en voulaient pas. M. le Président, en bon démocrate, j'ai retiré la proposition.

Dans un deuxième temps, M. le Président, j'ai amorcé une consultation exhaustive avec les parties et j'ai requis la collaboration d'un expert en la matière, le sénateur Claude Castonguay, qui, à ce moment-là, a fait une proposition qui tournait autour d'un arbitrage. Ça n'a pas encore rencontré un enthousiasme délirant et disons que ça n'a pas non plus suscité assez d'adhésion pour apporter une décision. Présentement, nous sommes en train de tester une nouvelle solution, toujours avec l'aide du sénateur Castonguay. Je crois déceler, cette fois-ci, un intérêt de la part de toutes les parties, intérêt qui fait en sorte que j'ai bon espoir. Mais je ne veux pas aller plus loin que ça. Dans les prochaines semaines, possiblement qu'on pourra arriver à une solution qui rencontre l'adhésion de la majorité des gens raisonnables dans ce dossier.

Le Président: En question complémentaire.

Mme Harel: Est-ce que le ministre reconnaît que c'est la 6e fois en 40 mois que je lui pose la question en Chambre et qu'il me répond qu'il a bon espoir d'en arriver à une solution? M. le Président, le ministre reconnaît-il que, le 16 décembre dernier, le ministre disait à cette Chambre: J'ai l'intention, au cours des prochaines semaines, de faire le point sur ce dossier. M. le Président, la question est simple: D'ici à la fin de cette session de printemps, peut-on avoir la garantie que le ministre va enfin arbitrer?

Le Président: M. le ministre.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai appris, quand j'étais jeune, qu'il fallait 20 fois sur le métier remettre l'ouvrage. La députée vient de nous dire que ça fait 6 fois seulement qu'elle la pose la question, il me reste encore quelques fois.

M. le Président, c'est facile, c'est très facile de trancher comme ça, péremptoirement, du haut d'une statue et dire: C'est ça, la solution, arrangez-vous avec. Ce n'est pas ma façon de procéder. M. le Président, s'il y a moyen d'en arriver à un consensus entre les parties, c'est de beaucoup préférable. J'ai la réputation d'être tenace. Certains de mes collègues sont au courant. Et je n'ai pas l'intention de lâcher ce dossier-là rapidement. Cependant, si la députée de Maisonneuve a une solution facile, qu'elle sait rencontrer l'adhésion des parties, qu'elle nous la donne donc, sa solution. Je m'attends qu'elle l'ait et qu'elle nous la donne.

Le Président: En question principale, M. le député de Pointe-aux-Trembles.

Orientation de Radio-Canada quant à sa chaîne d'information News World

M. Bourdon: Le ministère des Communications attend toujours la permission de son gouvernement pour formuler des exigences en matière...

Le Président: un instant, s'il vous plaît. je vais demander la collaboration des collègues pour qu'on puisse entendre très bien le député de pointe-aux-trembles. allez-y.

M. Bourdon: M. le Président, le ministère des Communications attend toujours la permission de son gouvernement pour formuler des exigences en matière de radiotélévision. Pendant ce temps, Radio-Canada nie l'existence du Québec français en opérant, depuis 1987, une chaîne d'information

continue qui s'appelle News World et qui diffuse exclusivement en anglais. Comble d'injustice, les Québécois francophones se voient imposer un tarif pour ce service qui n'est pas disponible dans leur langue. Pire encore, Radio-Canada a demandé récemment au CRTC, dans une requête rédigée exclusivement en anglais, pour faire bonne mesure, la permission d'augmenter le tarif de 50 %. Enfin, News World condescendra à traduire en anglais des reportages d'affaires publiques de la télévision francophone. Ainsi, si le ministre manque une émission du «Point», il pourra toujours l'entendre en traduction anglaise à News World. Ma question au ministre: Convient-il que cette orientation de CBC et du CRTC est carrément insultante pour la majorité de la population du Québec?

Le Président: M. le ministre des Communications. (15 heures)

M. Cannon: Oui, merci, M. le Président. Il est évident que le dossier auquel se réfère mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, est un peu difficile à expliquer et ce n'est pas celui qui vous parie qui va expliquer l'incohérence parfois exagérée des décisions qui sont rendues par le CRTC, et aussi l'incohérence des fois dans les politiques du gouvernement fédéral à l'égard du comportement du CRTC.

J'ai eu l'opportunité, M. le Président, précisément de dénoncer ce que le député, deux mois plus tard, dénonce. Je l'ai fait non seulement ici, je l'ai également fait à Toronto, et j'ai également avisé le ministre fédéral que ça n'avait pas de bon sens. Et je continue, M. le Président, à travailler avec les autorités de mon ministère afin que nous puissions justement, aussi avec les gens du milieu, les télédiffuseurs publics et privés, trouver une solution afin que notre entreprise télévisuelle québécoise puisse fonctionner pleinement.

Le Président: En question complémentaire.

M. Bourdon: Le ministre espère-t-il pouvoir bientôt avoir l'autorisation de formuler des exigences au nom du Québec en matière de communications, en particulier, en matière de radiotélévision?

Le Président: M. le ministre.

M. Cannon: II serait peut-être important, M. le Président, d'indiquer à mon collègue, le député de Pointe-aux-Trembles, que celui qui fait des propositions au nom du gouvernement du Québec et qui est chargé du dossier constitutionnel est le ministre responsable des affaires canadiennes. Ici, il y a de l'ordre et il y a de la discipline dans les façons de faire les choses, contrairement à la position de l'Opposition, alors que nous ne savons pas s'ils sont pour, s'ils sont contre, ça dépend parfois de la façon dont ils se lèvent le matin.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période des questions. Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder aux votes reportés sur la motion principale et les motions d'amendement et de sous-amendement introduites ce matin.

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Tel qu'annoncé, je mets aux voix la motion de M. le député de Lac-Saint-Jean...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Ça va?

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): ...la motion de M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle proposant que l'Assemblée nationale réaffirme la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à deux, et non à onze, avec le gouvernement canadien tout projet d'entente constitutionnelle; la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes et la motion de sous-amendement de M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle.

Mise aux voix de la motion de sous-amendement

à l'amendement à la motion de l'Opposition

proposant que l'Assemblée réaffirme la position

du gouvernement à l'effet de négocier a deux,

et non à onze, avec le gouvernement canadien

tout projet d'entente constitutionnelle

Conformément à l'article 201 du règlement de l'Assemblée, je mets d'abord aux voix la motion de sous-amendement de M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle. Cette motion de sous-amendement se lit comme suit: «Que l'amendement présenté soit sous-amendé en remplaçant, dans l'avant-dernière ligne du paragraphe d, le mot "le" par le mot "tout"»».

Que les députés qui sont en faveur de cette motion de sous-amendement veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Go-din (Mercier), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La

Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou). M. Holden (Westmount).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît!

Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent), M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sir-ros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Valle-rand (Crémazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Mar-guerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Taschereau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Orford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Chapleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nicolet-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Belle-chasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Acadie), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bradet (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention.

Le Secrétaire: pour: 32 contre: 80 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion de sous-amendement est rejetée.

Mise aux voix de la motion d'amendement

Je mets maintenant aux voix la motion d'amendement de M. le ministre délégué aux Affaires intergouvernementales canadiennes, motion qui se lit comme suit: «Que la motion en discussion soit amendée en remplaçant, dans la première ligne, le mot "réaffirme" par les mots "dans les circonstances actuelles, appuie"; en retranchant, dans la quatrième ligne, après le mot "onze", la virgule; en remplaçant, dans la cinquième ligne, le mot "canadien" par le mot "fédéral"; en remplaçant, dans la cinquième ligne, les mots "le projet d'entente constitutionnelle" par les mots "le renouvellement du fédéralisme canadien". »

La motion ainsi amendée se lirait comme suit: «Que l'Assemblée nationale, dans les circonstances actuelles, appuie la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à deux, et non à onze, avec le gouvernement fédéral le renouvellement du fédéralisme canadien. »

Que les députés qui sont en faveur de cette motion d'amendement veuillent bien se lever. (15 h 10)

Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent).

Des voix: Bravo!

Le Secrétaire adjoint: M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud), M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), M. Elkas (Robert-Baldwin), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Maciocia (Viger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon

(Louis-Hébert), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Tasche-reau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Or-ford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nico-let-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Aca-die), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bra-det (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau). M. Holden (Westmount).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que les députés qui sont contre cette motion d'amendement veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Go-din (Mercier), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

M. Libman (D'Arcy-McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions?

Le Secrétaire: pour: 79 contre: 34 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): La motion d'amendement est adoptée.

Mise aux voix de la motion amendée

Je mets maintenant aux voix la motion du député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition officielle telle qu'amendée. Cette motion se lit désormais comme suit: «Que l'Assemblée nationale, dans les circonstances actuelles, appuie la position du gouvernement exprimée solennellement par le premier ministre à l'occasion d'un message à la population, le 23 juin 1990, à l'effet de négocier dorénavant à deux, et non à onze, avec le gouvernement fédéral le renouvellement du fédéralisme canadien. »

Que les députés qui sont en faveur de cette motion, telle qu'amendée, veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Parizeau (L'Assomption), M. Chevrette (Joliette), M. Perron (Duplessis), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Blais (Masson), Mme Marois (Taillon), M. Garon (Lévis), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Jolivet (Laviolette), M. Baril (Arthabaska), M. Go-din (Mercier), Mme Juneau (Johnson), M. Claveau (Ungava), M. Dufour (Jonquière), M. Lazure (La Prairie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Léonard (Labelle), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Paré (Shefford), M. Boulerice (Sainte-Marie-Saint-Jacques), M. Morin (Dubuc), M. Filion (Montmorency), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Bourdon (Pointe-aux-Trembles), M. Trudel (Rouyn-Noran-da-Témiscamingue), Mme Dupuis (Verchères), M. Beaulne (Bertrand), Mme Carrier-Perreault (Les Chutes-de-la-Chaudière), M. Bélanger (Anjou).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que les députés qui sont contre... Vous êtes pour, allez- y!

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Secrétaire adjoint: M. Bourassa (Saint-Laurent), M. Pagé (Portneuf), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Levesque (Bonaventure), Mme Bacon (Chomedey), M. Ryan (Argenteuil), M. Côté (Charlesbourg), M. Bourbeau (Laporte), M. Dutil (Beauce-Sud)...

Le Vice-Président (M. Lefebvre): S'il vous plaît! Un instant! Un instant! S'il vous plaît, j'aimerais bien qu'on puisse faire le décompte du vote dans un ordre relatif. Allez-y, continuez.

Le Secrétaire adjoint:... M. Côté (Rivière-du-Loup), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond), M. Vallerand (Crémazie), M. Elkas (Ro-bert-BaldwIn), M. Tremblay (Outremont), M. Rémillard (Jean-Talon), M. Rivard (Rosemont), Mme Robic (Bourassa), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla-Hébert (Marguerite-Bourgeoys), M. Cherry (Sainte-Anne), M. Bélisle (Mille-Îles), M. Johnson (Vaudreuil), M. Cusano (Viau), M. Picotte (Maskinongé), Mme Robillard (Chambly), M. Blackburn (Roberval), Mme Bleau (Groulx), M. Maciocia (Vi-

ger), M. Maltais (Saguenay), M. Savoie (Abitibi-Est), Mme Trépanier (Dorion), M. Cannon (La Peltrie), M. Philibert (Trois-Rivières), M. Beaudin (Gaspé), M. Hamel (Sherbrooke), M. Doyon (Louis-Hébert), M. St-Roch (Drummond), Mme Pelchat (Vachon), M. Paradis (Matapédia), M. Marcil (Salaberry-Soulanges), M. Leclerc (Tasche-reau), M. Poulin (Chauveau), M. Thérien (Rousseau), M. Tremblay (Rimouski), M. Benoit (Or-ford), M. Dauphin (Marquette), M. Kehoe (Cha-pleau), M. Fradet (Vimont), M. Lemieux (Vanier), M. Messier (Saint-Hyacinthe), M. Richard (Nico-let-Yamaska), M. Charbonneau (Saint-Jean), Mme Bégin (Bellechasse), M. Bélanger (Laval-des-Rapides), M. Gauvin (Montmagny-L'Islet), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Gautrin (Verdun), M. Forget (Prévost), M. Khelfa (Richelieu), M. Gobé (LaFontaine), Mme Hovington (Matane), M. Joly (Fabre), M. LeSage (Hull), M. Bergeron (Deux-Montagnes), M. Bordeleau (Aca-die), M. Audet (Beauce-Nord), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Camden (Lotbinière), M. Brouillette (Champlain), M. Bra-det (Charlevoix), M. Després (Limoilou), Mme Loiselle (Saint-Henri), M. Lafrenière (Gatineau), M. Lafrance (Iberville), M. MacMillan (Papineau).

M. Holden (Westmount). (15 h 20)

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Que les députés qui sont contre cette motion, telle qu'amendée, veuillent bien se lever!

Le Secrétaire adjoint: M. Libman (D'Arcy McGee), M. Cameron (Jacques-Cartier), M. Atkinson (Notre-Dame-de-Grâce).

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Est-ce qu'il y a des abstentions? Pas d'abstention.

Le Secrétaire: pour: 110 contre: 3 abstentions: 0

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Alors, la motion telle qu'amendée est adoptée.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Lefebvre): Nous continuons les travaux de l'Assemblée. Un instant... Mmes et MM. les députés, que ceux et celles qui ont des travaux en commission parlementaire veuillent bien laisser le parquet de l'Assemblée le plus rapidement possible.

Alors, tel que je viens de l'indiquer, nous continuons les travaux à l'étape toujours des affaires courantes. Aux motions sans préavis, je vais maintenant céder la parole à M. le ministre de l'Éducation.

Motions sans préavis

M. Pagé: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Chambre pour présenter la motion suivante... Cela veut dire que nous aurons deux motions sans préavis... Un certain nombre de motions sans préavis, mais deux qui sont susceptibles de revêtir un caractère particulier...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît, M. le député.

M. Pagé: Oui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci de votre collaboration. M. le ministre, si vous voulez poursuivre. M. le sergent, si vous voulez bien fermer les portes, s'il vous plaît. Alors, nous en sommes aux motions sans préavis. M. le leader du gouvernement.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Nous aurons un certain nombre de motions sans préavis à étudier cet après-midi, dont une portant, évidemment, sur la Semaine du français et l'autre sur la Journée de la francophonie.

Souligner la tenue de la Semaine du français

Alors, je demanderais le consentement pour que la motion suivante puisse être adoptée: «Que l'Assemblée nationale souligne la tenue de la Semaine du français qui se déroule du 16 au 20 mars, réaffirmant ainsi son attachement à la langue française, en encourageant toutes les Québécoises et tous les Québécois a poursuivre leurs efforts pour l'épanouissement de leur langue.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): y a-t-il consentement des membres de cette assemblée pour débattre cette motion? consentement? m. le leader du gouvernement et ministre de l'éducation.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Alors, merci, M. le Président. Je suis heureux, comme ministre de l'Éducation du Québec et au nom du gouvernement de présenter cette motion sur la Semaine du français, une semaine qui a été élaborée et qui fait suite à l'initiative de l'Office de la langue française et du Conseil interdisciplinaire du Québec d'organiser de nouveau en 1992 cette année, la Semaine du français, et de souligner ici à l'Assemblée nationale cette semaine, cette semaine qui doit nous réunir. C'est le moment privilégié pour nous, finalement, de nous ressourcer et de revoir cet engagement entier et profond que nous avons à l'égard de cette langue de communication qui nous réunit ici au Québec.

M. le Président, on doit constater que la qualité autant du français parlé que du français écrit, la qualité du français exprimé par les arts

d'interprétation, par l'écriture, par le roman, par la poésie doit faire l'objet d'une très grande fierté de notre part.

Mon collègue, le député de Rimouski, au nom de mon collègue, le député d'Argenteuil et ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française, interviendra, dans quelques minutes, plus particulièrement à l'égard de cette amélioration, combien formidable qu'on peut sentir, qu'on peut palper et qu'on peut vivre, qu'on peut voir dans le vécu quotidien, c'est-à-dire des travailleurs et des travailleuses du Québec dans leur milieu de travail.

Comme ministre de l'Éducation, M. le Président, je dois assumer des responsabilités, notamment à l'égard du français qui est enseigné dans nos réseaux public et privé d'enseignement au Québec. Je dois vous dire, M. le Président, toute la fierté qui m'anime à plusieurs égards, malgré le fait que, je dois en convenir, nous ayons des corrections, des réorientations ou des modifications importantes à amener et à conduire à terme dans certains programmes.

Globalement, M. le Président, si on se réfère à nos jeunes, celles et ceux qui, somme toute, constituent notre avenir, nos jeunes qui, à l'heure où on se parle, sont dans nos écoles, qui sont au nombre, dans le réseau primaire et secondaire, de 1 400 000 élèves, on doit constater que ces jeunes ont une maîtrise des pratiques langagières qui est beaucoup plus développée, beaucoup plus accentuée que la nôtre, à titre d'exemple, à pareil âge ou à pareille époque.

Vous savez lorsqu'on échange, aujourd'hui, avec un enfant de 12 ans, de 13 ans, on constate qu'il s'exprime beaucoup plus ouvertement, qu'il a une capacité de conceptualiser certaines situations et s'y référer via ses réactions, ses émotions, sa sensibilité, dans un langage qui se veut plus raffiné, plus exact que ça ne pouvait être le cas pour nous. Et, je pense que mon collègue, le député d'Abitibi-Ouest, va abonder dans le même sens que moi.

On doit reconnaître que l'accent qui a été mis sur l'expression orale, dans le cadre de nos cours de formation en français, donne de très bons résultats. Certains questionneront, j'en conviens, la qualité du français écrit. Je pense, comme ministre de l'Éducation, ne pas être le seul à me préoccuper de cette situation, de cet état de fait. C'est vrai qu'on doit revoir certaines de nos pratiques. Je voudrais profiter de cette Semaine du français pour indiquer très clairement à cette Chambre la volonté très claire, très ferme, et déjà bien arrêtée qui m'anime, comme ministre de l'Éducation, de proposer éventuellement, probablement d'ici à l'automne, des modifications pour fin de consultation. J'espère qu'on aura un débat ou un échange le plus large possible sur une question aussi importante, à savoir la maîtrise d'un français bien écrit tout le temps, par chacun et chacune de nos concitoyens et concitoyennes, et plus particulièrement mieux campé au niveau de l'école québécoise.

M. le Président, comme je l'indique souvent dans mes interventions, une langue maternelle, c'est beaucoup plus qu'un véhicule d'expression. Ça doit transporter en même temps tout le bagage culturel où sont puisées les racines les plus fortes de cette langue. À cet égard, j'ai déjà eu l'opportunité d'indiquer ma préoccupation et ma volonté de revoir le contenu de nos programmes d'enseignement du français, langue maternelle, et aussi, pourquoi pas, de l'enseignement du français, langue seconde, de revoir le contenu de ces programmes de façon à revenir à davantage de lectures, davantage de contacts avec ce que notre langue, cette grande langue qui est la nôtre, véhicule comme bagage culturel en référence, entre autres, aux grands auteurs.

Bien supporter notre langue maternelle, c'est aussi, évidemment, supporter l'école québécoise. À cet égard, je dois vous dire que, suite à la commission de la culture, avec ma collègue, Mme la ministre des Affaires culturelles, on a l'intention d'élaborer ensemble une intervention qui nous permettra véritablement de concrétiser le retour, somme toute, le retour des artistes à l'école. En ce qui nous concerne, c'est notre objectif. Mais, en ce faisant aussi, on va définitivement toucher la langue française puisque la langue est au coeur même non seulement de notre vécu quotidien, mais de tout ce que cette langue transporte en termes de bagage, d'histoire, de culture, de coutumes, de racines et de traditions. (15 h 30)

Le député d'Abitibi-Ouest, avant qu'il s'y réfère, je dois lui dire que j'ai l'intention aussi de revoir, comme ministre de l'Éducation, nos interventions dans les bibliothèques scolaires au Québec, et ce dès la prochaine année. Pour moi, la meilleure garantie d'être capable de bien écrire sa langue, c'est d'avoir un contact quotidien, régulier, constant avec la lecture des grands auteurs. Et c'est un peu avec le sourire en coin, comme ça m'arrive à l'occasion quand j'entends les critiques qui me sont adressées par mon honorable collègue pendant la période de questions. Je crois que la satisfaction que j'ai vue vendredi soir s'appuie entre autres sur des démarches comme celles-là au niveau des bibliothèques, alors qu'un rapport avait été rendu public il y a quelques années, interpellant directement le ministère de l'Éducation. Et j'entends, à compter de la prochaine année financière, amorcer véritablement la mise en place des mesures adéquates nécessaires pour donner suite à ce rapport.

M. le Président, voilà essentiellement ce que j'avais à vous indiquer, et je dois vous indiquer que, dans l'école québécoise, dans nos écoles au Québec, il y a de belles expériences. Vous savez, nous sommes davantage sujets à critique parfois qu'à témoignage d'appréciation.

Nous discutions il y a quelques minutes de toute la question de l'abandon scolaire, du décrochage. Cependant, on doit constater, si on veut être honnête - c'est loyal - envers celles et ceux qui vivent l'éducation quotidiennement, on doit reconnaître qu'il se fait de belles choses dans nos écoles. Je dois dire que c'est avec fierté que je m'associais, il y a quelques semaines, au lancement d'une revue, le Magazine jeunesse, en collaboration avec l'équipe du Salon de la jeunesse et l'équipe du Mouvement Desjardins, où on rendait publics certains documents et on procédait à la publication d'un magazine.

Vous savez, M. le Président, que dans nos écoles secondaires, on a quand même un nombre très appréciable d'élèves qui suivent un cours en journalisme. J'espère que les membres de l'Assemblée nationale liront avec beaucoup d'attention ce magazine qui a été rendu public et qui sera publié à un rythme régulier pendant l'année.

Je lisais un texte d'une élève. D'abord, c'est un magazine qui est écrit uniquement par des jeunes, en français. Je lisais un texte, dans ce magazine: «Le français à améliorer?» d'une élève de la polyvalente d'Arvida, commission scolaire de Jonquière, Mlle Pascale Bergeron, qui disait, dans son texte qui est très beau, et je le cite en partie: «Le français de l'avenir, cela sera ce que nous autres, nous aurons bien voulu qu'il soit. On récolte ce que l'on a semé. Certes, l'avènement des ordinateurs de plus en plus perfectionnés facilitera la tâche d'un français écrit correctement, mais ce n'est là qu'un outil. Je crois que la fierté de posséder et de conserver sa langue doit nous pousser à faire de plus grands efforts pour y parvenir. En connaissant mieux notre français, nous serons mieux armés pour le défendre.»

M. le Président, quand je vois l'engagement de nos jeunes dans nos écoles, quand je vois autant d'attachement à l'égard de ce qui nous réunit et de ce qui constitue un élément essentiel de notre tissu culturel au Québec, je me dis qu'on doit avoir confiance en l'avenir, on doit avoir confiance en notre langue et on doit être fiers de notre culture, ce pourquoi je vous invite à voter pour cette motion, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de l'Éducation, pour votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le leader adjoint de l'Opposition officielle et député d'Abitibi-Ouest. M. le député.

M. François Gendron

M. Gendron: Oui, M. le Président. Comme critique, comme porte-parole en matière d'éducation et comme leader adjoint, au nom de ma formation politique, c'est évident que nous allons concourir à la présentation de la motion pour souligner la Semaine du français qui vient d'être présentée par le ministre de l'Éducation. C'est important, je pense, de rappeler qu'il s'agit, M. le Président, pour la cinquième année consécutive, de cette initiative pour souligner la Semaine du français. Cette initiative origine du Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec, et je l'en félicite. Avec son concours «Le français, ça compte», il décerne à chaque année des prix méritants, venant ainsi souligner les efforts des professeurs de tous les ordres d'enseignement afin d'améliorer, par le biais d'activités spécifiques, la qualité du français.

Le Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec publie également à chaque année, M. le Président, un recueil des différentes activités qui se déroulent dans chacune des commissions scolaires, parce qu'il y a beaucoup plus de commissions scolaires qu'on le pense qui tiennent des initiatives heureuses et des activités pour souligner cette nécessaire promotion du fait français. Cette année, entre autres, le Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec remettra ces prix et rendra public ce recueil le 20 mars prochain - donc, on n'est pas loin - à l'occasion de la Journée de la francophonie. L'Office de la langue française s'est joint, depuis quelques années, au Conseil interdisciplinaire et il souligne, pour sa part, davantage les efforts de francisation réalisés en milieu de travail. Cet aspect-là sera touché par ma collègue. je voudrais juste faire quelques commentaires. parce qu'il me semble que, quand on a à souligner la semaine du français, il faut le faire assez rapidement, en évoquant les principaux éléments sur lesquels il y a lieu d'insister. c'est sûr que nous, m. le président, on est heureux de s'associer à cette motion, puisqu'en même temps on a l'occasion de souligner le 15e anniversaire de la loi 101, 15 années d'existence d'une loi-cadre, majeure, importante qui, malheureusement, a été triturée sous le gouvernement actuel, mais qui, globalement, a permis énormément d'application et de progrès dans le domaine de la francisation tout court. on pourrait aller dans chacune des activités, mais, dans le domaine de la francisation tout court, je pense que la loi 101 a permis d'accomplir des progrès importants, notamment, m. le président, au niveau scolaire. parce que, je ne sais pas si vous le savez, c'est bon de le rappeler, avant l'adoption de la loi 101, 85 % des immigrants s'intégraient à l'école anglaise, alors qu'aujourd'hui 73 % d'entre eux fréquentent l'école française. je répète: 85 % à l'école anglaise il y a 15 ans; aujourd'hui presque autant, mais à l'école française. donc, c'est un avantage majeur et important. de plus, parmi celles et ceux qui fréquentent l'école secondaire française, 80 % choisissent le collégial ou des études collégiales en français.

J'écoutais le ministre tantôt qui disait: On a, vous savez, dans le monde de l'éducation, mis l'accent sur toute la question qu'on appelait communément «l'expression orale». C'est beau,

c'est bien et c'est vrai, il n'y a pas de nuance. Mais, en mettant parfois trop l'accent à un seul endroit, ça crée les inconvénients que nous vivons actuellement. Oui, l'accent a été mis sur l'expression orale. Oui, l'expression orale de nos jeunes, gars et filles du Québec, est pas mal plus intéressante en 1992 qu'elle ne l'était il y a quelques années. Mais combien de fois encore a-t-on recours à l'usage trop fréquent du jouai, de l'ellipse et de l'écriture phonétique, sans connaître adéquatement la bonne signification du fait français?

Il me semble, M. le Président, qu'on ne peut pas parler de la Semaine du français sans rappeler, malheureusement, qu'en 1990, c'étaient encore nos jeunes du secondaire qui faisaient en moyenne une faute à tous les 10 mots. Et quand je rappelle ça, ce n'est pas parce que j'aime ça, M. le Président, c'est parce qu'il reste énormément de malaise. Alors, une faute à tous les 10 mots. L'an dernier, à Montréal, à peine 52 % des élèves du secondaire V des écoles publiques ont réussi l'épreuve de français écrit du ministère et le tiers des étudiants admis à l'Université du Québec à Trois-Rivières en 1990 ont échoué un test obligatoire de français dont le seuil de réussite était d'environ une erreur à tous les 30 mots. Donc, la situation est passablement encore critique au niveau du fait français, au niveau de la phrase complète, au niveau du bon usage.

Et comme je n'ai pas énormément de temps, puisque j'ai une autre obligation, je dois dire que, bien sûr, M. le Président, on doit se réjouir du succès remporté à certains égards, mais des efforts majeurs de redressement s'imposent, et je ne sens pas toujours que ce gouvernement-là les pose. Je répète, des efforts majeurs s'imposent, et d'une façon très urgente. Et on doit encourager les enseignants et les enseignantes à faire ces efforts, eux qui, année après année, dans le cadre de la Semaine du français, tentent de tenir des activités de promotion de la qualité du fait français. C'est sûr que je les félicite d'avance, toutes celles et ceux qui seront récompensés lors de la remise des prix du concours «Le français, ça compte», organisé par le Conseil pédagogique interdisciplinaire du Québec. Bravo à celles et ceux qui prendront des initiatives. (15 h 40)

En guise de conclusion, M. le Président, je ne peux pas faire autrement, en ce qui me concerne, que de dire qu'il est toujours de très grande actualité au Québec que tout soit mis en oeuvre afin de préserver et d'enrichir davantage à la contribution et au rayonnement de la langue et de la culture françaises. C'est beau, la Semaine du français. C'est fantastique. La Semaine du français, ça compte, mais ça devrait compter à l'année, dans nos familles, dans l'entreprise, partout dans nos milieux de travail, parce que la dégradation progressive du français dans l'usage que nous en faisons est un problème de société, et on devrait profiter de cette journée, M. le Président, pour s'en convaincre tous qu'il appartient à chacun et chacune d'entre nous, dans cette société, de ne rien négliger afin de maximiser le bon usage du fait français et fa promotion de la langue française. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. l'adjoint parlementaire au ministre des Affaires municipales et député de Rimouski. M. le député.

M. Michel Tremblay

M. Tremblay (Rimouski): M. le Président, je suis honoré d'ajouter ma voix à celle du leader du gouvernement et ministre de l'Éducation pour souligner la tenue de la Semaine du français. Le gouvernement se réjouit de l'initiative qu'ont pris conjointement l'Office de la langue française et le Conseil interdisciplinaire du Québec d'organiser de nouveau, en 1992, la Semaine du français. Grâce à la collaboration de plusieurs partenaires gouvernementaux et privés qui ont reçu l'appui des milieux patronal et syndical, de nombreuses activités se dérouleront du 16 au 20 mars dans l'ensemble des régions du Québec pour souligner l'importance du français dans la vie de tous les citoyens du Québec.

La Semaine du français vise à sensibiliser le public en général, et le monde du travail et de l'éducation, en particulier, à l'importance de promouvoir la diffusion et la qualité du français. La tenue de cet événement rappelle la place capitale du français dans l'ensemble des activités de la vie collective. Il est indéniable qu'au cours des 20 dernières années, le français a fait de nets progrès dans de nombreux secteurs, notamment dans les milieux du travail et de l'éducation.

Malgré ces progrès impressionnants, il est évident qu'il y a encore du travail à faire et que le gouvernement entend continuer à favoriser l'atteinte des objectifs de la Charte de la langue française. Dans le domaine du travail, ainsi que l'exprimait récemment dans une allocution le ministre responsable de l'application de la Charte de la langue française, M. Claude Ryan, la qualité du français dans l'entreprise traduit une volonté que n'ont cessé de proclamer les gouvernements qui se sont succédé au pouvoir depuis l'entrée en vigueur de la Charte de la langue française.

À bien des égards, c'est dans les milieux du travail et des affaires que se jouera en longue période l'avenir du français au Québec. Tout ce qui peut être accompli pour rendre le français davantage présent et plus dynamique dans la vie des entreprises est, pour notre société, souverainement important. Grâce à l'effort soutenu de l'Office de la langue française et de ses partenaires dans les entreprises, il y a lieu d'être optimiste quant à l'évolution de la place du

français comme langue de communication dans les milieux de travail.

Dans le contexte actuel de la mondialisation des marchés et du libre-échange, nous devons nous assurer que la qualité de notre langue accompagne la recherche de la qualité totale de nos produits. Ces enjeux sont indissociables. Il faut viser à les promouvoir de pair. C'est peut-être dans le secteur de l'éducation où les progrès les plus sensibles ont été réalisés en matière de promotion du français. En effet, on observe depuis le début des années quatre-vingt un accroissement significatif du pourcentage d'élèves québécois inscrits dans les écoles françaises. Durant cette période, nous sommes passés de 86 %à90 %.

Plus récemment, au niveau collégial, on constate une tendance croissante chez des élèves allophones à s'inscrire dans les établissements de langue française. Il est clair que, chez les enfants de foyers immigrants, l'intégration au Québec français est en bonne voie. Nous sommes toutefois conscients qu'en éducation nos jeunes font face à de sérieux problèmes de motivation et d'orientation. Le gouvernement et ses partenaires du milieu éducatif prennent les correctifs qui s'imposent. Il faut nous assurer, entre autres, qu'au plan de la formation fondamentale, nos enfants acquièrent la maîtrise d'un français de qualité. C'est là un outil essentiel de développement individuel et social.

Un événement comme la Semaine du français s'inscrit, croyons-nous, comme un temps de réflexion et d'action sur les valeurs profondes de notre société. La responsabilité de promouvoir la qualité de la langue française revient non seulement au gouvernement et aux organismes qui s'y rattachent, mais aussi à chaque personne, à chaque entreprise et à chaque institution qui est appelée à prendre des décisions en matière linguistique. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Rimouski, de votre intervention. Sur cette même question, je reconnais Mme la députée de Chicoutimi. Mme la députée, la parole est à vous.

Mme Jeanne L. Blackburn

Mme Blackburn: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de m'associer à la motion présentée par le ministre de l'Éducation pour souligner la Semaine du français. Cette motion veut nous donner l'occasion de réaffirmer notre attachement à la langue française, encourager les Québécoises et les Québécois à poursuivre leur effort pour corriger et améliorer la langue écrite et parlée.

Je veux me joindre à la motion du ministre pour exprimer mon attachement et notre attachement collectif à la langue française, la fierté que nous éprouvons de parler français, de parler français plus de quatre siècles après l'arrivée des premiers explorateurs français et en dépit des pressions exercées par l'environnement linguistique, entourés que nous sommes de quelque 300 000 000 d'anglophones.

Le Conseil de la langue française nous propose de faire la promotion du français au travail. Il faut le souligner, des progrès remarquables ont été réalisés dans les secteurs publics, particulièrement dans le secteur public de compétence provinciale. Cependant, les établissements et les services, de même que les institutions relevant de la compétence du fédéral... Pour ces institutions et établissements, les résultats tardent à venir, pour ne pas dire que dans certains cas, il y a carrément de l'obstruction.

Qu'en est-il, par ailleurs, du français au travail à Montréal et, plus particulièrement, dans le secteur privé? «L'usage du français au travail - situation et tendances», c'est le titre d'un document paru au printemps 1991 et publié par le Conseil de la langue française. Ce document nous apprend qu'au 31 mars 1990, 63 % de l'ensemble des grandes entreprises de 100 employés et plus et 76 % des petites et moyennes entreprises de 55 à 99 personnes avaient un certificat ou détenaient un certificat de francisation. C'est un progrès remarquable. si on regarde les secteurs d'activité, on se rend compte qu'en ce qui concerne le secteur manufacturier, près de 50 % des grandes entreprises n'ont toujours pas de certificat de francisation. on sait qu'il s'agit d'un secteur où se retrouve une forte proportion de la main-d'oeuvre immigrante. dans ce contexte, on doit encore aujourd'hui multiplier les efforts. il faut également se pencher le plus tôt possible sur le cas des petites entreprises de 10 à 50 employés, parce que ces entreprises ne sont toujours pas soumises aux dispositions de la loi 101 en ce qui concerne le français au travail.

Par ailleurs, un autre objet de préoccupation est la situation des entreprises du secteur manufacturier qui utilisent la technologie parce qu'on constatera que plus il y a utilisation de haute technologie, moins le français fait de progrès, pour ne pas dire qu'il effectue des reculs. A cet égard, les chiffres du Conseil de la langue française sont très éloquents. Ainsi, 67 % des grandes entreprises du secteur manufacturier qui utilisent fortement les nouvelles technologies ne sont pas certifiées. On comprendra que c'est énorme si on pense que ça peut aller jusqu'à 76 % dans les grandes entreprises, alors que vous retrouvez, à l'inverse, dans les entreprises à haut contenu technologique, 67 % qui n'ont toujours pas de certificat de francisation. On sait que ce sont ces entreprises qui se sortiront le plus aisément de la crise économique actuelle, et il est dommage de constater que la majorité d'entre elles n'ont pas encore de certificat de francisation. (15 h 50)

Par ailleurs, il faut le rappeler, toujours dans le document du Conseil de la langue française, l'anglais domine encore largement le secteur privé, à Montréal en particulier, dans les entreprises privées. L'étude du Conseil de la langue nous apprend que près de 65 % des métiers manuels peuvent travailler en français, mais la proportion s'inverse totalement lorsqu'il s'agit des cadres, des gérants, des administrateurs, des professionnels ou des techniciens spécialisés. Ces personnes ne parlent français au travail que dans une proportion de 32 % à 36 %. Vous constatez que si vous êtes manoeuvre et ouvrier, vous parlez français, mais si vous avez des ordres à donner, deux fois sur trois ils seront, dans le secteur privé de Montréal, donnés en anglais. Donc, les personnes qui administrent, gèrent, dirigent les entreprises privées à Montréal le font en anglais, deux fois sur trois.

M. le Président, que nous disent les données quant à l'utilisation des logiciels et de l'informatique au travail? Le Conseil de la langue nous fournit des informations intéressantes à cet égard mais, ici, les données sont intéressantes et méritent un peu qu'on s'y arrête. Si on a réalisé des progrès quant aux logiciels - ce dont je me réjouis - en 1989, 41 % des logiciels utilisés par les francophones étaient en anglais. En 1986, le pourcentage était de 54 %. Cependant, il faut se demander ce qu'il advient des manuels d'utilisation des appareils. On avait, en 1989, 41 % des manuels d'utilisation qui étaient en français contre 43 % en 1986. On constate, à cet égard, un léger recul. S'il y a des progrès réalisés à certains égards, il demeure que dans ce secteur en particulier, en ce qui a trait à l'utilisation des manuels d'instruction ou d'utilisation, nous constatons un recul.

Les progrès du français au travail sont très fragiles et ne peuvent être considérés comme des acquis permanents. Dans cette perspective - je dois le dire pour le regretter - les déclarations du maire Doré ont de quoi nous inquiéter. Comment parier d'attachement et de fierté à l'endroit de la langue française si le premier citoyen de Montréal propose que la métropole du Québec, sa ville, deuxième ville française au monde, se bilinguise, devienne une ville bilingue? Comment convaincre nos jeunes qu'ils ont intérêt à mieux maîtriser le français, écrit et parié? Comment inculquer aux jeunes immigrants le goût du français et comment développer chez eux un attachement à la langue française dans ces circonstances?

Montréal doit demeurer une ville francophone. On ne pourrait soutenir une politique linguistique qui minimiserait l'influence de la grande région de Montréal sur la perception que les Québécois et les Québécoises ont ou auraient de l'importance de la langue française dans leur vie quotidienne. Les déclarations de M. Doré manifestent, je dirais, un certain désarroi devant la situation économique de Montréal qui peut pratiquement être qualifiée de désastreuse, mais ce n'est pas en niant ce qui fait notre spécificité culturelle, en oubliant que, pour de nombreux francophones qui oeuvrent dans le milieu des affaires et de l'industrie, dans le monde économique de façon générale, le français a soutenu leur promotion, ce n'est pas en oubliant ces faits qu'on va relancer l'économie de Montréal.

Il faut toutefois comprendre que le débat linguistique touche d'abord Montréal, pour ne pas dire exclusivement ou quasi exclusivement Montréal. La loi 178, cette loi toute croche, finalement, est devenue un symbole d'oppression pour la communauté anglophone, un cheval de bataille pour tout antisouverainiste à tous crins, j'allais dire un cri de ralliement. La loi 178, et je le dis, malheureusement, a servi de prétexte à un discours démagogique largement exploité par les adversaires de la souveraineté qui, malheureusement, je le redis, a terni l'image du Québec à l'étranger.

On ne peut pas, en dépit de cela, envisager des modifications à la loi 101 à la pièce. L'Opposition avait invité, l'automne dernier, le ministre à reporter toute modification à la loi 101 après un examen plus exhaustif de la situation actuelle. Nous avons réclamé à cet égard la tenue d'un large débat public, un débat de société sur la langue au Québec, débat qui devrait se tenir une fois terminé... le débat constitutionnel. Toute discussion touchant une disposition ou l'autre de la loi 101, que ça soit de la loi 101, de la loi 178 ou de ses règlements, dans le contexte actuel, ça demeure une espèce de baril de poudre, et on n'aurait pas, me semble-t-il, la sérénité requise pour examiner cette loi avec sérieux et sans émotion.

M. le Président, la question de l'affichage, les lois 178 et 101 ne peuvent pas - il faut le répéter - être examinées dans le contexte actuel, mais on ne pourrait pas examiner cette loi sans égard au statut constitutionnel du Québec. Dans un Québec, province canadienne, où la loi 101 a été jugée inconstitutionnelle dans ses dispositions, le débat ne peut pas se faire de la même façon. Dans un Québec, province canadienne, où le Québec ne participe pas à la sélection des immigrants à l'étranger, la question ne se pose pas de la même manière. Les immigrants qui viennent au Québec sont accueillis à l'étranger en anglais. La situation et la question ne se posent pas de la même manière. Dans un Québec, province canadienne, où le français au travail demeure fragile et demeure encore, faut-il le dire, dans deux cas sur trois, organisé et dirigé en anglais, la question de la révision ou de l'adoucissement ou de modifications à la loi 101 ne se pose pas dans la même perspective. Tout assouplissement à la loi 101 risquerait, dans les circonstances actuelles, d'entraîner des reculs, car dans certains secteurs, les gains demeurent fragiles. Seul un débat large, public, un débat de société nous permettra d'évaluer, s'il y a lieu,

d'adoucir ou d'assouplir certaines dispositions de la loi 101 ou d'en renforcer d'autres, mais après que ce débat aura été tenu.

Cependant - il faut le dire, je pense - le débat linguistique pourrait prendre une autre dimension ou se poser différemment dans un Québec souverain. Dans un Québec souverain - l'État du Québec, qui aurait le français comme langue officielle - sa présence internationale serait reconnue comme celle d'un pays francophone. Le Québec accueillerait ses immigrants en français, et celui qui immigrerait au Québec saurait qu'il entre dans un pays francophone. La situation ne se poserait pas de la même manière puisque les messages seraient clairs. Si vous voulez participer à la vie culturelle, sociale, économique du Québec, vous devez parler français. Cette perspective d'un débat linguistique, dans le cadre d'un Québec souverain, se poserait différemment, et on pourrait envisager certains assouplissements à la loi 101, pour ne pas dire certains resserrements des droits de la communauté anglophone, de manière à ce qu'ils ne soient pas niés.

M. le Président, c'est dans la perspective d'un Québec souverain et dans cette perspective seulement que l'on pourra envisager des assouplissements à la loi 101. On peut envisager qu'un Québec souverain pourrait faire preuve de plus de souplesse, mais jamais nous ne pourrons faire abstraction du fait que nous sommes entourés de quelque 300 000 000 d'anglophones.

Parlant de l'affichage bilingue, M. René Lévesque disait, et je cite de mémoire: Chaque affiche bilingue dit à l'immigrant: Vous avez le choix de parler français ou anglais. Et elle dit à l'anglophone: Tu n'es pas obligé d'apprendre le français. Ces paroles demeurent d'actualité. Aussi longtemps que le Québec ne pourra affirmer sa personnalité internationale de pays francophone, tout comme le Québec ne pourra faire reconnaître comme légitime et légal le statut du français comme langue nationale, nous devrons demeurer vigilants. (16 heures)

Pour le moment, il faut se rappeler que l'anglais demeure la langue de travail de 66 % des cadres professionnels, techniciens spécialisés et administrateurs. Il faut se rappeler que ce sont eux qui décident encore pour deux travailleurs sur trois à Montréal, dans le secteur privé, de l'organisation du travail, du déploiement, de la progression de l'entreprise et de la progression dans la profession. Le message qui est livré ici: Si vous voulez avoir des promotions au travail, vous devez le faire en anglais. C'est le message qu'on livre à deux travailleurs sur trois dans le secteur privé à Montréal.

L'analyse de M. Doré m'apparaît un peu courte et, si je me fie aux déclarations rapportées dans le journal La Presse, l'anglais domine encore largement - je le disais - dans le secteur privé à Montréal. Le 12 février dernier, M. Doré suggérait devant des hommes d'affaires, plus précisément le 11 février dernier, que les commerces à vocation touristique devaient être bilingues. On peut difficilement imputer aux affiches françaises le déclin de l'industrie touristique à Montréal, parce que l'industrie touristique est en déclin dans tout le Québec.

Le dépaysement et le caractère français du Québec ont, nous semble-t-il, une valeur économique pour le touriste en particulier. Généralement, lorsque vous voyagez à l'étranger, ce n'est pas pour retrouver exactement ce que vous avez chez vous. Sinon, vous demeurez chez vous. Le déclin du tourisme à Montréal pourrait, me semble-t-il, mieux s'expliquer par l'avalanche de taxes qui a frappé cette industrie.

Par ailleurs, quand M. Doré réclame que les affiches des petits commerces pourraient être bilingues, comment expliquer cette demande avec le fait que ça pourrait encourager l'installation de gros investisseurs dans la région de Montréal puisque ces derniers, les gros investisseurs, ne sont pour ainsi dire pas touchés par les affiches commerciales dans les petits commerces et que, par ailleurs, on le sait déjà, les deux tiers des entreprises dans le secteur privé à Montréal, dans les cadres, ça se passe déjà en anglais? Qu'est-ce qu'on y gagnerait au plan des investisseurs?

Le maire s'inquiète comme beaucoup d'autres, comme moi-même d'ailleurs, de l'exode des jeunes. Actuellement, l'exode des jeunes frappe les anglophones, mais il frappe aussi les francophones, les allophones également, mais il frappe tous les jeunes de toutes les régions du Québec. Ce n'est pas le débat linguistique, M. le Président, qui fait quitter les jeunes, qui fait que les jeunes quittent la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, de la Gaspésie, de l'Abitibi et de la Côte-Nord. Ils quittent et ils quittent pour des raisons économiques, pour les mêmes raisons que la majorité, qu'une proportion importante de jeunes anglophones quittent Montréal. Il faut se le rappeler. L'exode des jeunes anglophones, ça a toujours existé.

Je termine une tournée des milieux anglophones à Montréal, et c'est connu, ce phénomène. Ils sont plus mobiles parce qu'anglophones et ils cherchaient des possibilités de promotion professionnelle plus intéressantes dans d'autres entreprises un peu à travers l'Amérique, tant au Canada qu'aux États-Unis. C'est un fait connu et ça a peu à voir avec la loi 178. Cependant, par le passé, on le remarquait moins parce que l'exode des jeunes anglophones était immédiatement compensé par l'arrivée des immigrants qui rejoignaient la communauté anglophone. On s'en inquiète depuis que les jeunes immigrants sont obligés de s'inscrire dans les écoles françaises, donc, se rapprochent de la communauté francophone. Ce n'est pas un phénomène nouveau. Cependant, les jeunes anglophones, on nous l'a dit, on nous l'a répété, quittent pour des raisons

économiques d'abord. L'affichage et la loi 178 jouent de façon tout à fait marginale dans leur décision. Il faut relancer l'économie. C'est une solution pour contrer l'exode des jeunes.

M. le Président, je terminerai là-dessus, proposer la bilinguisation de Montréal comme solution aux problèmes économiques m'apparaît bien ténu. Il me semble qu'on devrait y privilégier une véritable relance économique et des mesures fiscales, tant municipales que provinciales, qui pourraient favoriser à la fois le maintien des Montréalais sur l'île de Montréal et l'installation des entreprises sur l'île de Montréal. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Chicoutimi, de votre intervention. Alors, est-ce que la motion présentée par le ministre de l'Éducation qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale souligne la tenue de la Semaine du français qui se déroule du 16 au 20 mars, réaffirmant ainsi son attachement à la langue française, en encourageant toutes les Québécoises et les Québécois à poursuivre leurs efforts pour l'épanouissement de leur langue.» Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté à l'unanimité. M. le député de La Prairie.

Motion proposant d'exprimer l'opposition

de l'Assemblée à l'adoption d'un projet

de loi fédéral sur l'environnement

M. Lazure: Merci, M. le Président. Je veux remercier le leader gouvernemental d'avoir donné son consentement pour que je présente une motion sans préavis et sans débat, et c'est véritablement une motion conjointe du ministre de l'Environnement et député de Brome-Missisquoi et de votre serviteur. Elle se lit comme suit, M. le Président: «Que, tel que requis par une motion unanime de la commission de l'aménagement et des équipements, l'Assemblée nationale désapprouve vivement le projet de loi C-13 du gouvernement fédéral, Loi de mise en oeuvre du processus fédéral d'évaluation environnementale, puisque projet de loi contraire aux intérêts supérieurs du Québec, et s'oppose à son adoption par le Parlement fédéral.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement des membres de cette Assemblée pour débattre cette motion? Consentement?

Une voix: Sans débat.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Sans débat. Strictement pour indiquer à la Chambre...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): M. le ministre.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...qu'il s'agit d'une motion conjointe...

Une voix:...

M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...et de l'Opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, M. le ministre de l'Environnement, sur la motion.

M. Paradis (Brome-Missisquoi): Strictement pour confirmer à cette Chambre qu'il s'agit d'une motion conjointe du parti ministériel et de l'Opposition officielle.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Une motion conjointe. M. le ministre délégué à la Francophonie.

Souligner la Journée de la francophonie

M. Rivard: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de proposer la motion sans préavis suivante: «Que l'Assemblée nationale souligne la Journée de la francophonie qui sera célébrée le 20 mars prochain, pour la deuxième année consécutive au Québec.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour débattre cette motion?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le ministre délégué a la Francophonie.

M. Guy Rivard

M. Rivard: M. le Président, pour la deuxième année consécutive, nous célébrons au Québec la Journée de la francophonie. À l'heure où il n'a d'autre choix que de s'ouvrir à un monde de plus en plus interdépendant et en profonde mutation, le Québec s'affirme chaque jour davantage comme un partenaire essentiel de la francophonie internationale. La Journée de la francophonie, c'est l'occasion privilégiée pour nous, Québécoises et Québécois, de reconnaître avec fierté notre appartenance à cet ensemble

d'une quarantaine de pays et d'États où on utilise le français et de voir comment nous pouvons tous en tirer partie dans une perspective de codéveloppement.

La francophonie, M. le Président, constitue, en effet, une réalité vivante, une opportunité de rayonnement et de développement à la fois pour le Québec et pour tous les pays qui en sont membres. Cette Journée de la francophonie doit donc servir à intéresser un nombre croissant de partenaires éventuels ici même, au Québec, et ailleurs. Ainsi, à l'occasion de cette journée du 20 mars, je suis heureux de constater que, dans plusieurs régions du Québec, des activités sont prévues et que la plupart de celles-ci toucheront les jeunes, ceux-là même à qui il faut inculquer, aussitôt que possible dans la vie, le goût de l'international. Par exemple, grâce notamment à la collaboration précieuse du Club 2/3, un organisme de coopération internationale, et de l'Association québécoise des professeurs de français, plus d'une centaine d'écoles secondaires au Québec souligneront, chacune à sa manière, cette journée du 20 mars.

Je m'en voudrais de ne pas souligner une première, résultant d'une concertation avec les députés ministériels et l'Opposition officielle. Il s'agit d'un jumelage avec des pays francophones, grâce à la visite des ambassadeurs de ces pays dans huit comtés du Québec. Les députés impliqués ont préparé un programme qui comprend des activités dans les milieux de l'éducation, de la culture, de l'industrie et des affaires. Ces activités sont sûrement susceptibles de faire naître des projets prometteurs, conjoints, en plus de contribuer à une meilleure reconnaissance commune. Souhaitons vivement que cette expérience devienne une tradition. Les députés de cette Assemblée contribuent ainsi a mettre directement en contact les gens d'ici et les francophones qui vivent ailleurs. (16 h 10)

Dans cette opération de sensibilisation, car c'en est une, nous ne sommes pas seuls, M. le Président. M. Jean-Louis Roy, secrétaire général de l'Agence de coopération culturelle et technique, nous annonce, dans un message qu'il adresse aux Québécois à cette occasion, que plus de 15 pays célébreront la Journée de la francophonie. Nos célébrations sont ainsi reliées à celles qui se déroulent ailleurs dans notre espace francophone commun.

J'aimerais profiter de cette dernière journée, tout probablement, de session de la présente Législature pour rappeler qu'en octobre 1989, au moment du discours d'ouverture, le gouvernement annonçait son intention de travailler à la consolidation de l'espace francophone international: 28 mois plus tard, nous avons plusieurs raisons d'être fiers du chemin parcouru.

Les initiatives de notre gouvernement furent nombreuses, et je me contenterai très simplement de n'en donner que quelques exem- ples: l'élection de M. Jean-Louis Roy à l'Agence de coopération culturelle et technique; la publication d'une politique en matière de francophonie élaborée en concertation avec des partenaires québécois; la consolidation de TV5, une vitrine unique de l'espace télévisuel francophone; le maintien, aussi, de l'effort budgétaire gouvernemental à l'égard des programmes et institutions francophones. Ces gestes sont en continuité avec ceux du passé, et il est heureux qu'il en soit ainsi.

En 1991, la participation québécoise au renforcement de la francophonie a été centrée sur la préparation et la participation du Québec au quatrième Sommet de la francophonie, à Paris, en novembre dernier; et je puis vous assurer, M. le Président, que le Québec a été un acteur majeur de ce Sommet que l'on appelle le Sommet de Chaillot.

Nous avions comme objectif, dans le processus de réforme institutionnelle, de renforcer l'Agence de coopération culturelle et technique. Elle est devenue, dans les faits, le secrétariat de la francophonie. Nous avions comme objectif de participer concrètement aux changements démocratiques en cours dans plusieurs de nos États membres. Le Québec a annoncé à cet effet un programme de coopération que l'École nationale d'administration publique et le Directeur général des élections du Québec sont à préparer, en collaboration avec notre ministère et celui de la Justice. Nous avions comme objectif de «multilatéraliser» notre programmation et son financement. Nous avons proposé l'adoption à l'ACCT d'une programmation de base financée par des fonds multilatéraux déliés en grande partie et confiés à l'Agence. Cette approche a été retenue et elle est sous-tendue au Québec par une large concertation entre les partenaires de tous les secteurs impliqués dans la coopération internationale francophone.

Nous avions aussi comme objectif de consolider la programmation économique de la francophonie. Nous avons à cet effet augmenté les moyens mis à la disposition du forum francophone des affaires, une invention québécoise au Sommet de Québec en 1987, et nous avons mandaté l'ACCT pour préparer un plan d'action en matière de coopération économique.

Finalement, nous avions aussi - comme c'est toujours le cas en matière d'affaires internationales - comme objectif de faire rayonner le Québec. Nous n'étions pas peu fiers lorsque à Chaillot, en présence d'une vingtaine de chefs d'État et d'une douzaine de premiers ministres, le président de la France s'est adressé en ces termes à notre premier ministre, M. Robert Bourassa, qui venait de faire rapport des travaux du Sommet, et je cite: «J'apprécie toujours, M. le premier ministre, votre contribution, non seulement pour ce que vous représentez mais encore en raison de votre autorité personnelle» a dit M. Mitterrand. En deux mots, M. le

Président, mission accomplie.

Je terminerai en rappelant les propos que je tenais lors du dévoilement de notre politique francophone l'automne dernier, à quelques jours du Sommet. Le Québec, M. le Président, a choisi d'assurer son développement en français, dans le respect des diverses composantes de sa société, et avec l'ambition de tenir son rang parmi les sociétés les plus avancées. Ce défi ne peut être relevé sans une collaboration étroite et fructueuse avec ses divers partenaires étrangers qui partagent avec lui l'usage du français comme langue de ('administration ou de l'éducation, comme langue des affaires ou des communications. L'avenir des francophones ne dépend pas seulement de leur nombre. Il repose sur la volonté des pays de s'engager dans une action commune favorisant l'établissement des conditions fondamentales au développement de chacun des pays. C'est la conscience du caractère vital des enjeux reliés à l'avenir de la francophonie qui a amené le Québec à jouer un rôle de premier plan dans la création et le développement des institutions intergouvernementales francophones, et dans la promotion d'une action en réseau dans les secteurs névralgiques pour l'avenir des parlant français.

Le gouvernement du Québec, M. le Président, est résolu a assumer la responsabilité qu'il partage avec ses partenaires de faire de la francophonie l'une des alliances qui saura relever les défis de notre temps et apporter une contribution originale au nouvel ordre mondial. Je souhaite vivement que cet engagement du Québec soit celui de toutes les Québécoises et de tous les Québécois. Avec nos partenaires étrangers, nous pouvons ainsi assurer l'un des volets importants de notre avenir. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre délégué à la Francophonie, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques. M. le député, la parole est à vous.

M. André Boulerice

M. Boulerice: Je vous remercie, M. le Président. C'est avec un plaisir certain, M. le Président, que l'Opposition officielle appuie cette motion, présentée par le ministre délégué à la Francophonie et député de Rosemont, visant à souligner pour une deuxième année consécutive cette Journée de la francophonie. Le plaisir est double, M. le Président, d'appuyer le ministre délégué à la Francophonie puisque - je me dois quand même de le souligner, il faut respecter la justice et surtout ses droits - le ministre a eu la délicatesse, M. le Président, d'associer, dans l'élaboration d'une partie de la programmation de cette journée, a eu la délicatesse, je vous dis, d'inviter son vis-à-vis en cette Chambre, votre humble serviteur, M. le Président.

Donc, nous la célébrons d'abord, aujourd'hui, en cette Assemblée nationale, qui est le plus vieux Parlement de langue française au monde, M. le Président, puisque nous célébrons, vous le savez tous, notre 200e anniversaire. D'ailleurs, vous connaissez tous cette toile qui orne ce salon où c'est le débat sur la langue, où, effectivement, en 1792, on décrétait que le français était la langue de ce Parlement. Donc, nous célébrons cette journée en la débutant à Québec, M. le Président. Nous la poursuivrons vendredi, à Montréal: Montréal, deuxième ville de langue française au monde, une ville qui doit résister à des tentatives de bilinguisation comme, malheureusement, semble vouloir nous imposer le maire de Montréal, M. Doré, je ne sais piqué par quelle mouche.

M. le Président, le ministre y a fait allusion également, plusieurs députés seront associés à cette fête par un système de parrainage fort judicieux qui permettra à bien de nos concitoyens et concitoyennes de comprendre l'importance et les grands enjeux de cet espace francophone que nous sommes en train de créer, puisque son avenir est quand même récent. J'aurai, pour ma part, l'immense plaisir de recevoir vendredi, dans la belle circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques, Son Excellence, l'ambassadeur de la république du Burundi, M. Philippe Kanonko.

Relativement méconnues, malheureusement encore, je pense que les actions conjointes que nous entreprenons feront en sorte que ce mot disparaîtra de nos allocutions respectives à chaque année. L'espace francophone, c'est plus de 40 pays ou États membres ayant en commun l'usage du français. C'est plus de 420 000 000 de personnes, si l'on parle de francophilie, comme j'aime aborder ce thème, et 120 000 000 de pariant français quotidiennement. (16 h 20)

M. le Président - l'exemple étonne toujours mes interlocuteurs - c'est la Roumanie qui comporte plus de personnes parlant français qu'il n'y en a au Québec, puisque 42 % du peuple roumain s'exprime dans un français plus qu'excellent. C'est donc un espace linguistique, c'est un espace culturel, c'est un espace social, et c'est également, M. le Président, un espace économique considérable pour le Québec. Pour renforcer son identité culturelle comme seule enclave majoritairement francophone en Amérique du Nord, et contribuer au rayonnement de la culture et de la langue française, le Canada, dis-je, le Québec plutôt, doit miser sur la francophonie et en être un acteur politique important. Le cadre multilatéral de la francophonie doit être l'un des fondements de la politique de relations internationales du Québec. L'histoire, d'ailleurs, est là pour nous le démontrer. L'ouverture du Québec sur le monde s'est amorcée au

début des années 1960 et s'est concrétisée avec la France, M. le Président, partenaire principal et majeur de l'émergence d'un forum multilatéral francophone. Et, cette francophonie, au cours des années, M. le Président, s'est dotée progressivement d'institutions propres à assurer son développement.

Créée au début des années 1970 - et j'étais heureux d'entendre le ministre en parler -l'Agence de coopération culturelle et technique, avec comme premier secrétaire, M. Jean-Marc Léger, que je tiens à saluer personnellement et à lui renouveler ma fidèle amitié, est devenue l'outil de mise en oeuvre des décisions prises lors des Sommets de la francophonie.

Et puis ce fut la mise sur pied de TV5, la télévision internationale francophone. M. le Président, vous qui connaissez bien ma modestie lorsqu'il s'agit de parler de ma circonscription, je vous rappellerai que la télévision francophone internationale est un diffuseur qui s'est installé dans la belle circonscription de Sainte-Marie-Saint-Jacques, plus précisément dans le centre-sud de Montréal.

Il y a eu la création - et cela est très important - du Forum francophone des affaires, dont le siège social est à Paris, et l'Institut de l'énergie des pays ayant en commun l'usage du français, un institut fort important, M. le Président. J'ai bien peur là aussi, malheureusement, que ses travaux ne soient connus que d'une infime minorité de personnes. Il y aurait lieu de publiciser plus à fond l'importance de cet Institut et sa présence, entre parenthèses, dans nos murs.

Il y a également une autre institution, M. le Président, qui est née il y a fort longtemps, qui est l'AIPLF, qui est l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française. J'ai le plaisir d'ailleurs de vous rappeler que je suis le rapporteur de cette Assemblée internationale pour ce qui est des questions des droits de la personne et de l'accès au multipartisme.

Mais, l'Assemblée internationale des parlementaires de langue française, M. le Président, qui regroupe un nombre de pays aussi important que ceux qui siègent aux Sommets de la francophonie, voit son rôle remis un peu en question par ce Sommet de la francophonie. Je serais particulièrement déçu, M. le Président, et sachant l'importance que le Président de notre l'Assemblée nationale, qui est vice-président international de cette Association... Nous serions, autant notre Président de l'Assemblée nationale que moi-même, passablement déçus que le Québec ne se porte pas à la défense de cette institution regroupant les parlementaires d'au-delà d'une quarantaine de pays, et qui, je crois, a son rôle à jouer dans l'avenir de la francophonie. Alors, M. le Président, sans paraphraser une phrase qui n'est plus d'actualité dans certains pays d'Europe de l'Est, je dirai: Parlementaires de tous les pays du monde francophone, unissez-vous!

Bon nombre de réalisations, si je continue, M. le Président, découlent des Sommets de la francophonie. Par la tenue en février 1986 à Paris du premier Sommet de la francophonie, les pays francophones se sont donné un forum intergouvernemental en vue de poser des gestes susceptibles de contribuer à l'émergence de cet espace francophone sur le plan économique, et au rayonnement de la culture et de la langue française. L'on doit se réjouir à juste titre, M. le Président, du succès du récent et quatrième Sommet de la francophonie, tenu à Chaillot en novembre dernier, comme une étape importante sur le plan de l'institutionnalisation et de l'enracinement de ce forum multilatéral auquel ont participé 47 États faisant usage du français.

L'on me permettra de déplorer, malheureusement, M. le Président - et je ne comprends pas l'éloge dithyrambique tantôt de mon collègue - la discrétion absolue du Québec lors de ce Sommet de Chaillot, pendant que le premier ministre canadien, M. Brian Mulroney, tenait le haut du pavé et qu'il a affirmé à Paris, mais le plus sérieusement du monde, M. le Président - et je vous permets de sourire, d'ailleurs, il est évident à votre figure - que l'on pouvait vivre et travailler en français au Canada d'un océan à l'autre. M. Bourassa a laissé passer une belle ineptie, et je trouve cela navrant de la part de notre premier ministre. Pourquoi? Parce que le premier ministre du Québec ne veut pas indisposer le Canada anglais dans le contexte de la crise constitutionnelle qui perdure, d'ailleurs, depuis 1989. La discrétion affichée - et c'était là l'objet de mon étonnement de voir le ministre faire ce long dithyrambe sur notre premier ministre - par le premier ministre du Québec, lors du troisième Sommet de la francophonie tenu à Dakar, en 1989, s'est amplifiée lors du Sommet de Chaillot, malheureusement. Dommage que le Québec refuse d'occuper toute la place et la marge de manoeuvre que lui confère son statut de gouvernement participant.

Enfin, M. le Président, le ministre délégué à la Francophonie, collègue en cette Chambre mais néanmoins ami, aura beau, aujourd'hui, se faire chantre de la francophonie - je ne lui en voudrai quand même pas, je suis heureux - mais je ne comprends toujours pas qu'il ait pu cautionner la décision de son gouvernement. Je sais qu'il est tenu à la solidarité ministérielle, et que de crimes commet-on en son nom, M. le Président, mais qu'il ait pu cautionner la décision de son gouvernement de mettre fin à l'aide financière qu'il consentait au Secrétariat des peuples francophones et qui provoquera inévitablement la fermeture de ce Secrétariat, c'est une décision - et l'occasion est fort belle pour moi d'en parler - regrettable et inacceptable d'un gouvernement qui prétend, dans un énoncé de politique «Le Québec et l'interdépendance»: L'horizon de la francophonie internationale accordera une

autre priorité à la dimension francophone comme axe fondamental de l'action internationale du Québec. La décision du gouvernement qui conduit à la fermeture du Secrétariat des peuples francophones va à rencontre de cette prétention et constitue, vous en conviendrez avec moi, M. le Président, un désengagement du Québec au chapitre de son action dans le cadre multilatéral de la francophonie. Incompréhensible, M. le Président, inqualifiable, d'autant plus que cette décision prive Québec, la capitale, notre capitale, notre capitale nationale, d'un outil, d'un organisme international qui contribuait à son rayonnement international. Il nous faudra revoir ces choses rapidement. Si ce n'est pas par l'actuel, ce sera par le suivant, je vous en donne l'engagement en cette Chambre.

M. le Président, après ces critiques, mais critiques que le ministre ne pouvait pas éviter - il est partie prenante d'un gouvernement - je vais quand même le remercier d'avoir présenté cette motion en cette Chambre aujourd'hui et souhaiter bonne journée dans la francophonie! Bonne journée quand même! en espérant que les gestes du gouvernement soient davantage conformes à son discours sur les avantages pour le Québec de s'engager et d'investir dans la francophonie comme partenaire responsable.

Ceci dit, M. le Président, nous aurons, vendredi, cette journée internationale. Elle sera célébrée dans de nombreuses écoles. La visite d'ambassadeurs de pays francophones et, forcément, de pays amis permettra d'animer cette discussion, de susciter une curiosité également dans nos usines, dans nos entreprises, dans nos laboratoires, puisque nous serons dans différents milieux de vie. Je suis persuadé que cette journée aura une amplitude supérieure à la première et, j'ose espérer, une amplitude moindre que celle que nous aurons à la troisième Journée de la francophonie que le Québec célèbre toujours avec beaucoup de joie et beaucoup de fierté. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Sainte-Marie-Saint-Jacques, pour votre intervention. En vertu de votre droit de réplique, M. le ministre. Il n'y a pas de réplique. Alors, est-ce que la motion présentée par M. le ministre délégué à la Francophonie, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale souligne la Journée de la francophonie, qui sera célébrée le 20 mars prochain pour la deuxième année consécutive au Québec», est adoptée? Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui. M. le Président, avec le consentement de l'Opposition, j'aimerais donner les avis touchant les travaux des commissions, pour permettre aux commissions de siéger. (16 h 30)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement des membres de cette Assemblée pour passer à la rubrique, à l'item «avis touchant les travaux des commissions»? J'ai une demande de passer immédiatement à la rubrique des affaires courantes, aux avis touchant les travaux des commissions. Je reviendrai, s'il y a consentement, aux motions sans préavis. Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Oui.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. M. le leader adjoint du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bélisle: Merci, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 16 h 30 à 18 h 30 et, si nécessaire, de 20 heures à 22 heures, à la salle louis-hippolyte-lafontaine, la commission de l'aménagement et des équipements poursuivra l'étude détaillée du projet de loi d'intérêt privé 281, loi concernant la ville de saint-laurent. enfin, m. le président, de 19 heures à 21 heures, à la salle louis-joseph-papineau, la commission des institutions complétera ses consultations particulières dans le cadre de l'étude du projet de loi 404, loi modifiant la loi sur les conditions de travail et le régime de pension des membres de l'assemblée nationale et d'autres dispositions législatives. je fais dépôt de ces avis, m. le président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger, en vertu de l'article 143, quant à l'heure de la commission des institutions qui siégera ce soir à compter de 19 heures? est-ce qu'il y a consentement? consentement.

Alors, je vous avise que, demain, le jeudi 19 mars 1992, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle RC-161, la commission de l'aménagement et des équipements se réunira en séance de travail. L'objet de cette séance est de procéder à l'étude du projet de rapport sur l'examen des orientations, des activités et de la gestion du Bureau de révision de l'évaluation foncière du Québec et à l'étude du projet de rapport sur la procédure d'évaluation des impacts sur l'environnement.

Je vous avise qu'il y aura, aujourd'hui, sanction d'un projet de loi au cabinet du lieutenant-gouverneur. Conformément à un ordre adopté le 17 mars dernier, il sera tenu un débat de fin de séance entre M. le député d'Artha-baska et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sur une question concernant les négociations du GATT. Ceci termine les avis.

Nous poursuivons avec les motions sans préavis. Je reconnais Mme la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration. Mme la ministre.

Motions sans préavis

Souligner la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, je désire présenter la motion suivante à cette Assemblée: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale et réitère son engagement à lutter contre toute forme de racisme et de discrimination raciale.»

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Est-ce qu'il y a consentement des membres de cette Assemblée sur cet avis de motion? Il y a consentement. Mme la ministre, si vous voulez procéder.

Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: M. le Président, le 21 mars a été choisi Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale par les Nations unies, pour commémorer les événements sanglants survenus en 1960, à Sharpeville, en Afrique du Sud, lors d'une marche pacifique contre l'apartheid. Cette journée, M. le Président, permet aux différents intervenants de mieux sensibiliser les peuples du monde entier à l'importance de la lutte contre l'exclusion et l'intolérance basées sur la race. Malheureusement, le racisme et la discrimination raciale ne disparaissent pas aussitôt que leur caractère inacceptable est dénoncé. Il faut, sans relâche, reprendre le bâton du pèlerin et rappeler aux personnes tentées d'adhérer à des idéologies d'exclusion et d'intolérance que leur attitude ne saurait être acceptée, et que tous les membres de notre société ont les mêmes droits et les mêmes obligations.

Nous, députés, représentants élus par l'ensemble de la population, avons une responsabilité particulière. Il nous incombe de faire en sorte que les droits de chaque citoyen soient respectés dans leur totalité. Mais, pour y arriver, il faut que l'ensemble de la population se sente concerné et y contribue.

Dans ce sens, il importe aussi que nous fassions de façon personnelle un examen de conscience pour être bien sûrs que nous n'adoptions pas, inconsciemment ou par imitation, des comportements racistes. La cohésion de notre société et sa capacité de relever les défis auxquels elle doit faire face à l'échelle mondiale dépendent en grande partie de la collaboration que nous aurons su développer entre nous, Québécois et Québécoises de toutes origines et de toutes classes sociales. L'histoire nous a appris que les sociétés qui s'entredéchirent, à l'intérieur desquelles vivent des communautés séparées par la haine, sont incapables de progresser et stagnent, trop préoccupées par leurs luttes fratricides et futiles.

Tous les jours, les médias nous montrent des exemples de telles situations survenant dans différents coins du monde. Le Parti libéral du Québec et le gouvernement ont depuis longtemps compris le rôle qui leur incombe en matière de lutte contre la discrimination raciale et pour le rapprochement intercommunautaire. Un geste important fut, sans nul doute, l'adoption, en décembre 1986, par l'Assemblée nationale, de la Déclaration gouvernementale sur les relations interethniques et interraciales. Cette Déclaration venait ainsi appuyer la Charte québécoise des droits et libertés, un texte fondamental qui établit les droits reconnus à chaque citoyen du Québec. En décembre 1990, l'énoncé de politique en matière d'immigration et d'intégration prévoyait une foule de mesures faisant des relations intercommunautaires un élément central, et nous y proposons des façons claires de voir et de faire pour permettre à l'ensemble des Québécois de toutes origines d'occuper la place qui leur revient et de contribuer activement à l'avancement du Québec.

De même, la Semaine interculturelle nationale, organisée par le ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, qui se tiendra du 4 au 11 avril prochain, est aussi un outil original de rapprochement qui permet de mieux sensibiliser la population québécoise à la richesse de l'apport des membres des communautés culturelles. Comme on peut le constater, M. le Président, le gouvernement contribue activement et de différentes façons à la lutte contre le racisme et la discrimination raciale. Mais je le répète, c'est une responsabilité qui incombe à tous les Québécois.

C'est seulement ici que nous serons capables d'édifier un Québec de plus en plus fort et ouvert et de léguer à nos enfants une société tolérante et respectueuse des différences qui la composent. Au cours de cette Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, j'invite la population du Québec à poursuivre la réflexion et à échanger sur le sujet avec leurs proches. C'est en dialoguant que nous apprenons à mieux connaître l'autre et, ce faisant, que les tabous tombent et les stéréotypes disparaissent.

Notre message doit être clair et sans équivoque pour qu'il porte fruit et c'est pourquoi j'invite tous mes collègues à voter en faveur de cette motion. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M. le député de Pointe-aux-Trembles. M. le député, la parole est à vous.

M. Michel Bourdon M. Bourdon: Alors, M. le Président, l'Oppo-

sition officielle est heureuse de souscrire à la motion que M. le ministre a déposée dans cette Chambre. On sait que c'est en décembre 1986 qu'à l'unanimité l'Assemblée nationale du Québec a adopté la Déclaration sur les relations interethniques et interraciales. J'ajoute qu'aujourd'hui il y a un motif supplémentaire pour parler de cette question puisqu'à l'origine, ce sont les troupes de Sharpeville en Afrique du Sud qui avaient amené l'Assemblée générale des Nations unies à décréter une journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale et qu'en 1990 le ministre délégué aux Communautés culturelles rappelait dans cette Chambre la joie qu'on pouvait éprouver de voir que l'Afrique du Sud venait de libérer M. Nelson Mandela. Aujourd'hui, on a la joie aussi d'accueillir la nouvelle que le référendum en Afrique du Sud du président De Klerk a recueilli la majorité des suffrages dans un État qui était auparavant, qui était jusqu'ici fondé sur la notion raciale et où les droits sont basés sur la couleur de la peau des personnes.

Inutile de rappeler, M. le Président, que jusqu'ici, en Afrique du Sud, le suffrage universel a été réservé aux 3 000 000 de Blancs au détriment des 28 000 000 de Noirs qui composent la société sud-africaine. Je pense qu'on peut noter avec beaucoup de satisfaction que, pour une rare fois dans l'histoire de l'humanité, la minorité dominante vote démocratiquement la fin d'un système basé sur des privilèges indus basés sur la couleur de la peau. On sait, M. le Président, qu'en Afrique du Sud il n'y a pas que le suffrage universel qui était refusé à la majorité noire, mais que la politique d'apartheid voulait dire aussi le refus des mariages mixtes, la ségrégation dans l'habitation et de nombreuses discriminations d'ordre économique.

Alors, je pense qu'on peut se réjouir de ce que le gouvernement d'Afrique du Sud, où la discrimination raciale a trouvé longtemps son expression la plus étatique dans le monde sans doute, se dirige vers un régime où «une personne, un vote» va être la règle et où tout le monde va reparticiper à la vie nationale. (16 h 40)

M. le Président, je m'en voudrais de ne pas mentionner, dans ce que nous avons adopté comme Assemblée en 1986, quelques-uns des principes qui sous-tendaient cette Déclaration sur les relations interethniques et interraciales. On y parlait, premièrement, de la volonté de combattre le racisme et la discrimination raciale sous toutes leurs formes; deuxièmement, de la promotion du respect mutuel entre tous les groupes de la société; de la représentation des différents groupes ethniques, raciaux et culturels dans les divers secteurs de la vie nationale; de la pleine participation des personnes, indépendamment de leur origine ethnique; du progrès économique, social et culturel du Québec et, finalement, du droit des personnes à l'égalité dans les différents domaines de la vie collective et, notamment, du développement des programmes d'accès à l'égalité.

Bien sûr, M. le Président, au Québec comme ailleurs, on doit déplorer des manifestations sporadiques de racisme ou de discrimination raciale, mais je voudrais rappeler que dans l'histoire même du parlementarisme québécois... Et il y a quelqu'un qui le soulignait tout à l'heure, on est un des plus vieux Parlements du monde, et le plus vieux Parlement francophone du monde. Je voudrais rappeler à cet égard, pour ce qui est de combattre le racisme et la discrimination raciale, le comportement exemplaire des électeurs du comté de Trois-Rivières qui, en 1807, avaient élu M. Ézékiel Hart comme député, M. Hart étant juif. Et on sait qu'il n'a pas pu siéger pour des raisons de prestation de serment - que sa religion l'empêchait de prêter - mais que la population de Trois-Rivières l'a néanmoins réélu en 1808, dans une élection générale, sa première élection étant survenue dans une élection partielle. C'est le gouvernement de Londres qui avait décrété qu'étant juif il ne pouvait pas siéger dans notre Assemblée. Cependant, les électeurs québécois, eux, l'ont élu et réélu et n'ont pas participé à la discrimination fondée sur la religion ou la race qui avait cours à cette époque-là.

Je voudrais, M. le Président, brièvement, revenir sur la promotion du respect mutuel entre tous les groupes de la société et dire qu'à cet égard M. Mordecai Richier fait l'inverse. Par ses outrances, il a adopté un comportement très provocateur à l'endroit des Québécois francophones. J'ai lu, comme d'autres aujourd'hui, l'édito-rial indigné - avec raison - de Mme Lise Bissonnette dans Le Devoir, puisque M. Mordecai Richier, dans une entrevue au réseau anglais de Radio-Canada, a comparé Le Devoir des années trente à un journal nazi, à un journal fasciste allemand. Je partage l'indignation de Mme Bissonnette. Il ne s'agit pas de donner à M. Richier une importance qu'il n'a pas, mais juste de dire que le respect entre les différents groupes de notre société devrait l'empêcher non pas d'avoir ses opinions - il a droit à ses opinions comme tout le monde - mais de dire, par exemple, que les Québécois francophones ne constituent pas un peuple mais une tribu paranoïaque, ou que nos ancêtres, nos grands-mères qui avaient beaucoup d'enfants pouvaient être comparées à des truies. Je trouve que la littérature haineuse, d'où qu'elle vienne, doit être dénoncée et que M. Richier a tort de faire des sentiments, de la suspicion et presque de la haine à l'endroit des Québécois francophones un facteur de marketing quelconque. Je trouve que ça doit être dit que, dans les rapports entre les différents groupes, c'est la tolérance qui doit prévaloir.

Maintenant, M. le Président, cette Assemblée a adopté des déclarations de principe sur les

relations interethniques et interraciales et on n'accepte pas que d'aucuns disent que le Québec serait plus porté à ces formes de discrimination que d'autres sociétés. Le racisme et la discrimination raciale doivent être combattus en tout lieu et sous toutes les latitudes et ils le sont au Québec. À cet égard, il y a unanimité de vue, je pense, en cette Chambre, sur la nécessité de combattre toutes les manifestations d'intolérance basées sur la race, l'origine ethnique ou la religion.

Je voudrais également dire, M. le Président, que si je parle des communautés culturelles du Québec, il y a des pas supplémentaires à franchir en termes d'embauché dans la fonction publique, par exemple. On sait qu'en mars 1988 la fonction publique québécoise comptait 12 fonctionnaires issus des communautés culturelles de plus qu'en 1987 et que, toujours en 1988, il y avait, dans la fonction publique québécoise, 3,9 % des personnes qui provenaient des minorités culturelles. Quand notre parti formait le gouvernement, nous avions manifesté l'intention d'essayer d'obtenir une participation à la fonction publique des personnes issues des communautés culturelles de 9,5 %, ce qui correspond à leur pourcentage de la population.

Donc, on sait que la déclaration de principe de cette Assemblée est bonne, mais que dans des cas concrets comme l'embauche dans la fonction publique, la discrimination dans le logement, ou la discrimination dans l'embauche, il y a encore un travail considérable à faire. Je pense que la société québécoise, tout au long de son histoire, a manifesté son ouverture et il est vrai de dire que le Québec est une terre de liberté pour toutes les composantes de la société québécoise.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Sur cette même motion, je reconnais M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député de D'Arcy-McGee, la parole est à vous.

M. Robert Libman

M. Libman: Merci, M. le Président. M. le Président, notre formation politique appuie totalement, fortement la motion du gouvernement. Malheureusement, M. le Président, trop de personnes dans trop de pays sont encore méprisées et réprouvées parce qu'elles ont une couleur de peau, des croyances religieuses, une langue ou des coutumes qui les distinguent des autres.

Like most countries, Canada has a mixed record, both as a State and as a society, when judged for the treatment of racial minorities throughout its history. Relations with indigenous Native populations were sometimes quite good in New France and were not always bad in the later colonial era, but usually involved the casual assumption of European superiority at the best of times and a suffocating and destructive paternalism for the past century.

The Chinese who came here to build the railway were subject to terrific hardships and to highly discriminatory acts of exclusion. Almost all other racial minorities encountered at least initial hostility from many elements in the longer established population, both English and French-speaking.

On the other hand, M. le Président, it has been broadly true that only the Natives and the Oriental minorities have had to face much discrimination originating in actual government legislation. The combination of political and economic freedom and social stability that has generally characterized Canadian history has given countless peoples of many backgrounds and origins the possibility of becoming not only the coworkers, but partners, friends, even lovers and spouses as well. There seems to be some danger today in Canada, and in other countries as well, that racial bigotry of the worst kind is flaring up again in groups like the youthful skinheads, for example.

Même sur une petite échelle, cela semble être de malheureuses tentatives d'individus qui ont peu de sens de l'identité et qui pensent se rehausser en calomniant les autres. La meilleure chose à faire pour les personnes au pouvoir, pour les politiciens, est de mettre constamment plus d'emphase sur le principe d'une société libre et ouverte et d'encourager les projets sociaux et éducatifs qui font avancer la compréhension et la tolérance parmi la jeunesse.

Beyond that, we can only advocate respect for the law. We will never be able to eliminate some forms of prejudice. There will always be some unhappy and unfortunate individuals who feud on their irrational hatreds, but it is not that difficult for us to limit their destructive-ness. Our party, the Equality Party of Québec, is dedicated to the most important principle of all in this regard, which is the concept of equal rights before the law. (16 h 50)

M. le Président, l'État, par l'entremise d'institutions, du Parlement, de la Commission des droits de la personne et de la Charte des droits, est apte à contrer la discrimination raciale. Nous devons éviter la xénophobie évidente et apparente et la paranoïa vis-à-vis de ceux qui sont dissemblables. Nous, membres du Parti Égalité, croyons farouchement au-delà de tout au concept de l'égalité des droits. Lorsque l'élite politique transpire des idéologies, des politiques et des lois qui vont à rencontre de ce concept, nous nous devons de répliquer et de nous battre afin que tous puissent vivre réellement en harmonie au Québec et que chaque personne qui habite sur le territoire de notre province soit considérée pleinement comme Québécois ou Québécoise. Merci, M. le Président.

Le Président: II n'y a pas d'autre intervention. Est-ce que cette motion présentée par Mme

la ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, qui se lit comme suit: «Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale et réitère son engagement à lutter contre toute forme de racisme ou de discrimination raciale», est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. Toujours aux motions sans préavis, M. le leader de l'Opposition.

Motion proposant de maintenir l'avis

relatif à l'interpellation du

vendredi 20 mars 1992

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais proposer que l'Assemblée nationale décide, conformément à l'article 47 de nos règles de procédure, de maintenir, malgré la clôture de la première session de la trente-quatrième Législature, les avis relatifs à l'interpellation prévue le vendredi 20 mars 1992. Ça fait l'objet d'une entente entre les partis.

Le Président: Je comprends que c'est l'avis relatif à l'interpellation prévue pour le vendredi 20 mars 1992 et permettre aussi la tenue de cette interpellation. C'est bien ça?

Il y a consentement à la présentation de cette motion et cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Toujours aux motions sans préavis.

M. Chevrette: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: Je sais que vous ne pouvez pas présumer de la programmation de la session qui va s'amorcer demain après-midi. Vous ne pouvez donc pas donner l'avis pour l'interpellation du 27 mars prochain. Cependant, lorsque nous déposerons la motion pour l'interpellation du 20 mars, il y aurait lieu de mentionner publiquement et pour enregistrement qu'il y a une entente entre les leaders du gouvernement et de l'Opposition, à l'effet que l'avis sur l'interpellation du 27 mars portant sur les assurances apparaîtra au feuilleton de mardi prochain pour avoir lieu, comme prévu, le vendredi 27 mars.

Le Président: Très bien. Donc, j'en prends acte purement et simplement, à ce moment-ci. C'est bien ça?

Aux motions sans préavis, toujours. Il n'y a pas d'acte de procédure là-dessus. C'est pour l'interpellation du vendredi, non pas cette semaine, mais la semaine prochaine. Donc, on constate qu'il y a consentement, mais, pour la procédure de l'assemblée, nous y reviendrons la semaine prochaine avec le consentement établi et l'avis particulier pour ce débat de l'interpellation du vendredi. aux motions sans préavis toujours, m. le député de lévis.

Motion proposant que la commission de

l'aménagement et des équipements se

réunisse le jeudi 19 mars 1992

malgré la clôture de la session

M. Garon: M. le Président, sur cette motion sans préavis, advenant la proclamation du décret annonçant la clôture de la présente session, je fais motion pour que la commission de l'aménagement et des équipements tienne une séance de travail demain, le jeudi 19 mars 1992, tel que prévu, de 9 h 30 à 12 h 30, et ce, malgré la clôture de la session.

Le Président: Y a-t-il consentement à la présentation de cette motion? Consentement. Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: II n'y a pas d'autres motions sans préavis?

Maintenant, aux avis touchant les travaux des commissions, je pense que ça a déjà été donné.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Moi-même, j'aurais un avis à vous transmettre à ce moment-ci. Je vous avise qu'il y aura aujourd'hui sanction de projets de loi au cabinet du lieutenant-gouverneur, à la fin des travaux de cet après-midi.

Je voudrais également aviser l'Assemblée que je rendrai une décision ultérieurement sur la question qui m'avait été posée relativement au refus du ministre de répondre à une question en vertu de l'article 82 du règlement. La décision sera rendue immédiatement avant l'ajournement de cet après-midi, juste avant le débat de fin de séance qui est prévu entre le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et le député d'Arthabaska. Ça va?

Donc, ceci met fin à la période des affaires courantes. Nous arrivons maintenant aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, si vous le permettez, tout simplement à titre d'information générale, j'aimerais aviser cette Chambre que le premier ministre du Québec ainsi que le leader du gouvernement m'ont demandé d'informer et d'aviser cette Chambre qu'il y aura prorogation

de cette session ce soir, à 23 heures, par décret. Je vous demanderais d'appeler, M. le Président, l'article 14 aux affaires de l'Assemblée.

Le Président: Très bien.

M. Bélisle: Pardon, M. le Président. Aux affaires du jour, vous avez une note concernant le ministre des Finances qui doit remettre un message du lieutenant-gouverneur.

Le Président: très bien. dans un premier temps, nous mettons fin aux affaires courantes. nous passons maintenant aux affaires du jour. effectivement, je reconnais, à ce moment-ci, m. le ministre des finances.

Message du lieutenant-gouverneur

M. Levesque: Alors, M. le Président, un message de son honneur le lieutenant-gouverneur du Québec, message signé de sa main.

Le Président: Veuillez vous lever, s'il vous plaît. Alors, l'honorable lieutenant-gouverneur du Québec soumet à l'Assemblée nationale, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, une partie des crédits pour l'année financière se terminant le 31 mars 1993, représentant un douzième des crédits du programme Sécurité du revenu du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et un quart des crédits du programme Sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris du même ministère, soit une somme de 282 668 750 $ et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée.» Signé, l'honorable Martial Asselin, lieutenant-gouverneur du Québec.

Alors, je dépose ce message. Alors, est-ce qu'il y a consentement... Vous pouvez vous asseoir. Merci. Alors, y a-t-il consentement de l'Assemblée pour déroger à la section de règlements concernant les crédits budgétaires?

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président: Oui, M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: ...je voudrais faire part à la Chambre qu'il y a eu une entente entre les leaders à l'effet qu'il y aura un projet de loi adopté en première, deuxième et troisième lecture pour ce douzième des crédits et ce quart pour ce qui est des Cris. Il y aura un exposé maximum de 10 minutes de chaque côté, si ma mémoire est fidèle.

Le Président: Oui, M. le leader.

M. Bélisle: Je confirme l'entente intervenue, M. le Président.

Dépôt du projet de loi 419

Le Président: Alors, très bien. Il y a donc consentement et M. le ministre des Finances, à ce moment-ci, propose la présentation, l'adoption du principe ainsi que l'adoption du projet de loi 419, Loi no 1 sur les crédits 1992-1993. Donc, je vais reconnaître comme premier intervenant M. le ministre des Finances.

M. Levesque: Alors, M. le Président, avant de donner les explications d'usage sur le projet de loi, comme je dois quitter pour aller au Conseil des ministres, j'aimerais que la Chambre accepte que je propose présentement l'adoption du principe et l'adoption du projet de loi a la fin des interventions mentionnées par le leader parlementaire de l'Opposition officielle. Alors, ce sera comme si ça avait été fait au moment opportun.

Le Président: Oui, très bien. Alors, ça va comme ça. Oui. Disons qu'on accepte dans le fond les trois étapes. C'est ça que vous disiez, M. le ministre des Finances, tel que convenu?

M. Levesque:...

Le Président: O.K., donc, vous serez absent après les interventions, mais vous faites votre intervention principale. Après, il y aura l'intervention de l'Opposition officielle et, ultérieurement, il y aura l'adoption sans que vous soyez obligé d'être ici. Très bien. Ça va?

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque: Ça va. Merci. Alors, ce projet de loi a pour objet d'autoriser le gouvernement à payer sur le fonds consolidé du revenu une somme de 282 668 750 $ représentant un douzième des crédits du programme Sécurité du revenu du ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et un quart des crédits du programme Sécurité du revenu des chasseurs et piégeurs cris du même ministère. Cette somme apparaîtra au budget des dépenses du Québec pour l'année financière 1992-1993. Je vous remercie, M. le Président, et je remercie les collègues de leur bonne collaboration.

Le Président: Alors, merci, M. le ministre des Finances. Est-ce qu'il y a un prochain intervenant? Oui, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Écoutez, étant donné que le ministre des Finances vient de faire sa présentation, peut-être que ce serait plutôt à la députée de Hochelaga-Maisonneuve à prononcer un discours immédiatement après la présentation du ministre des Finances. C'est comme ça que je

l'avais compris, M. le Président, depuis le départ, là. Je ne veux pas créer d'incident, mais il me semble.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Chevrette: II n'y a pas eu de... À ce niveau-là, il n'y a pas eu de discussion pour savoir qui commençait. Moi, on m'a dit: Dix minutes de chaque côté.

Le Président: Bon.

M. Levesque: Si ça peut aider...

Le Président: Oui, alors, M. le ministre des Finances.

M. Levesque: ...on m'a remis ici une indication des travaux et si ça peut aider, c'est qu'on dit ici: Le leader indique que dans les termes de l'entente avec l'Opposition, il a été convenu qu'une intervention de dix minutes serait accordée à la députée de Hochelaga-Maisonneuve, suivi d'une intervention de dix minutes du ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. (17 heures)

Le Président: Écoutez, moi, je suis prêt à reconnaître un intervenant s'il y en a un. Bon, très bien. Alors, à ce moment-ci, je vais donc donner la parole, pour une période de dix minutes, à Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Je vous remercie, M. le Président. Alors, M. le Président, permettez-moi de lire quelques phrases seulement du communiqué de presse qui était transmis à tous les médias d'information par ceux-là mêmes qui ont à gérer les programmes de sécurité du revenu et les mesures d'employabilité au Québec. Évidemment, je parle des agents d'aide socio-économique et je parle des fonctionnaires qui, dans les centres Travail-Québec dans les régions du Québec présentement, dans toutes les régions, dans toutes les localités du Québec, sont à même de constater les problèmes croissants de la clientèle à la sécurité du revenu.

Ce que disent les personnes qui, pour le ministère et le gouvernement, administrent les programmes, c'est ceci, et je cite: «La situation est catastrophique. La surcharge de travail, l'organisation du travail, la formation du personnel, l'information, tout est défaillant et tout doit être repensé. Le ministère n'a pas tenu compte de l'impact de la prise en charge des programmes d'employabilité. Il ferme les yeux sur l'augmentation du taux de chômage, reste insensible à une situation déplorable partout, mais encore plus aiguë quand on se rapproche des grands centres comme Montréal et Québec, plus touchés par l'ampleur de la crise économique. Les charges de travail atteignent une ampleur inhumaine.» Et les employés de l'État continuent, M. le Président: «Le désengagement de l'État québécois, l'incohérence des politiques de formation, les programmes inachevés, le manque de perspectives liées au plein emploi et, finalement, l'ensemble des politiques néoconservatrices du gouvernement nous portent à croire que le mépris affiché à l'égard des personnes assistées sociales n'a d'égal que celui manifesté à l'endroit du personnel du réseau qui doit gérer des programmes et des services sans vision d'ensemble.»

M. le Président, cet après-midi, j'aurais pu évidemment, dans ces dix minutes qui me sont imparties, vous parler de la progression de la clientèle à l'aide sociale: 114 000 000 $ de plus, principalement dûs à cette augmentation de clientèle. C'est ce qui justifie la motion que le ministre des Finances déposait tantôt. J'aurais pu vous parler des banques alimentaires, entre autres de Jeunesse au soleil qui a écrit à chacun des 125 députés de cette Assemblée pour lancer un cri du coeur en disant: Nous sommes en mars 1992 - et non pas à la veille des paniers de Noël de décembre prochain - nous sommes en mars 1992, nous écrit Jeunesse au soleil qui fait de la distribution alimentaire, et, déjà, nous sommes coincés. Aidez-nous, parce que nous ne serons plus en mesure, même durant les mois d'été, de distribuer aux personnes qui sont privées de nourriture ce qu'il leur faut pour subsister.

J'aurais pu, évidemment, M. le Président, mais si vous me permettez, compte tenu du peu de temps, je veux vous parler surtout à partir du point de vue des gens qui ont à offrir un service et qui ne peuvent pas l'offrir, M. le Président, compte tenu des conditions qui leur sont faites par le ministère. Évidemment, le ministre va certainement, tout de suite je vous en informe, me signaler qu'il a obtenu du Conseil du trésor, la semaine passée, une augmentation des effectifs et qu'il va pouvoir distribuer à travers les différents centres Travail-Québec un total de 354 postes supplémentaires, dont 266 dans le réseau des régions et, finalement, 88 dans les services administrés par la ville de Montréal.

Mais, M. le Président, moi, ce que je veux interroger... Une fois informée de cette nouvelle, de ces postes, j'ai pensé que les problèmes seraient réglés. Et en contactant les personnes concernées, je leur ai dit: Écoutez, si je comprends bien, avec ces postes supplémentaires, malgré l'augmentation de clientèle, vous allez peut-être maintenant être capables de faire face aux problèmes qui se sont présentés et qui se sont aggravés durant les dernières semaines. Il faut vraiment, M. le Président, que la situation soit assez catastrophique pour qu'il y en ait 800 d'entre eux et elles qui aient décidé de se rassembler au Palais des congrès de Montréal un

soir de semaine, il y a peu de temps, pour dire au ministre: C'est assez, il faut que ça change, ça ne peut plus durer. Vous savez ce qu'on m'a dit, M. le Président? C'est que ces postes-là n'allaient pas régler un certain nombre de problèmes qui continuent à se présenter. Un des problèmes majeurs auxquels fait face tout le réseau de la sécurité du revenu, et pas simplement le réseau en termes bureaucratiques mais les gens aussi, les personnes qui font appel à de l'aide, c'est qu'il s'agit essentiellement de postes occasionnels.

Quand vous pensez que le ministère est en train de participer à une sorte de refonte et joue à la réorganisation totale de tous ses dossiers sans qu'il y ait une heure, une seule heure de formation qui soit offerte au personnel pour pouvoir, de façon adéquate, rendre service à la population qui vient le lui demander... Vous savez, M. le Président, j'ai trouvé ça paradoxal que le ministre de la Formation professionnelle, le même que de la Sécurité du revenu, oublie, en matière de gestion de la sécurité du revenu, que là aussi il faut de la formation du personnel.

M. le Président, ces 354 postes supplémentaires, c'est des personnes à temps plein qui auront à consacrer des heures considérables pour tenter de leur apprendre, compte tenu de la complexité et de l'hypercatégorisation que l'on retrouve depuis la réforme introduite par la loi 37, au-delà de 42 catégories différentes qui évoluent dépendamment de la situation conjugale, familiale, maritale et qui, à chaque mois, peuvent changer la situation des personnes.

M. le Président, ce qui est extrêmement inquiétant, c'est cette impression que le gouvernement assiste impuissant à cette progression à l'aide sociale. Le ministre pourra bien essayer de brandir le fait qu'on n'en a pas encore autant qu'on en avait lors de la récession de 1983-1984. Vous savez pourquoi, M. le Président, on n'en a pas autant? Moi, j'ai vérifié le taux d'activité. On n'en a pas autant parce qu'il y a plus de gens découragés et parce qu'il y a moins de gens qui s'inscrivent.

Vous savez, le taux d'activité en 1984... Le taux d'activité, c'est ce qui est bien plus représentatif que le taux de chômage parce que le taux de chômage, ça ne tient compte que des personnes inscrites à l'assurance-chômage. Quand on lit dans le journal qu'il y a 18 % de chômage à Montréal ou qu'il y en a 24,5 % dans le Bas-Saint-Laurent, il faut comprendre que c'est seulement le pourcentage des personnes inscrites à l'assurance-chômage. Le taux de chômage, ça ne prend pas en considération les personnes sans emploi qui, par exemple, seraient inscrites à l'aide sociale ou celles sans emploi qui ne peuvent pas être inscrites parce que leur conjoint travaille et qu'elles n'y ont pas accès. Alors, c'est bien plus le taux des sans-emploi qui est important.

Présentement, le taux d'activité dans la société québécoise est à 62,5 % et il était, en 1984, M. le Président, à 61,5 %. Et c'est en chute constante. Il y a deux ans le taux d'activité était à 64 %. On voit une diminution constante de ce taux d'activité et on voit la progression des sans-emploi. C'est ça, finalement, M. le Président, qui est le plus inquiétant. Ce qu'on devrait recevoir aujourd'hui quand on est devant une motion pour faire progresser les crédits en matière de sécurité du revenu, c'est évidemment quelles mesures le gouvernement entend prendre pour cesser de faire tourner en rond les personnes inscrites à l'aide sociale dans des programmes d'employabilité qui, finalement, ne les entraînent que dans le cercle vicieux des programmes eux-mêmes.

C'est évidemment pour toutes ces raisons que nous souhaitons qu'il puisse y avoir un débat public, un débat de fond, dans notre société, sur toute cette question des personnes aptes au travail et sans emploi. Ce n'est pas parce que le ministre a réussi, en changeant de nom, puisqu'il s'agissait auparavant de personnes en chômage qui recevaient de l'aide sociale... Il les a appelées «aptes au travail» comme si, de façon magique, elles allaient être tenues responsables de se trouver de l'ouvrage. Ce n'est pas parce qu'elles ont changé de nom que la situation s'est pour autant améliorée, M. le Président. (17 h 10)

II y a présentement un bassin de 700 000 personnes sans emploi. Des personnes adultes. Je ne parie pas de leurs dépendants. Je ne parie pas des enfants de ces hommes et de ces femmes. Il y a un bassin de sans-emploi de 700 000 personnes adultes. La question de fond, c'est: Qu'est-ce que le gouvernement, qu'est-ce que le ministre de la Main-d'oeuvre attend pour présenter une politique de l'emploi? Qu'est-ce que le ministre attend pour présenter un véritable remaniement des programmes qui ont simplement été modifiés quant au nom? On retrouve les mêmes programmes qui, avant 1984, s'adressaient aux moins de 30 ans. De façon presque magique, le ministre a élargi ses programmes aux plus de 30 ans, dans un bassin de 225 000 nouveaux ménages. M. le Président, la constatation qu'on peut faire, c'est que, parmi ces personnes, une sur deux a une expérience de travail continu de plus de six ans. Parfois, chez le quart d'entre elles, de plus de 20 ans de travail. Ce n'est pas des mesures d'employabilité dont elles ont d'abord besoin, mais du soutien d'une formation qualifiante pour occuper les nouveaux emplois dont les exigences sont haussées. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve et présidente de la commission de l'éducation. Alors, suite au consentement, j'appellerais maintenant M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle, en lui indiquant qu'il a un temps

maximal de dix minutes. M. le ministre. M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous sommes en présence d'une proposition du ministre des Finances pour faire en sorte que les budgets de l'année prochaine soient votés dans une proportion de un douzième, dès aujourd'hui, pour permettre au ministère de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle de pouvoir payer, dès le 1er avril prochain, les prestations d'aide sociale à la clientèle. Comme vous le savez, on paie toujours, parfois quelques jours avant le début du mois, ça dépend. Si le premier du mois arrive une fin de semaine, par exemple, on va payer le vendredi.

Alors, on doit avoir les crédits autorisés dès maintenant pour éviter, bien sûr, que nos clients ne puissent pas avoir leurs chèques en temps. Or, c'est un montant substantiel. Le ministre des Finances propose que, pour le mois d'avril, on vote des crédits de 282 000 000 $. Évidemment, c'est beaucoup d'argent, on doit le reconnaître.

C'est comme ça, M. le Président. Le programme d'aide sociale, c'est un programme ouvert. C'est un programme qui fait en sorte qu'on admet à la Sécurité du revenu, à l'aide de derniers recours, tous ceux qui y ont droit. On ne contingente pas le programme. On ne refuse l'entrée à personne. Tous ceux qui y ont droit peuvent y venir. C'est très sécurisant dans notre société de savoir que, quand on est mal pris, quand on est rendu dans un état de dénuement, on peut compter sur l'État. Bien sûr, l'État ne peut pas donner des sommes d'argent à tout le monde, simplement en le demandant. Il faut faire certains contrôles, puisque ça coûte très cher et que tout le monde y a droit, bien sûr, si les gens rencontrent les critères.

Alors, M. le Président, nous avons devant nous, ici, cette proposition, et la députée de Hochelaga-Maisonneuve vient de faire état de l'augmentation de clientèle. Eh bien, oui, la clientèle augmente. Elle augmente, M. le Président. C'est pour ça que, la semaine dernière, le Conseil du trésor m'a autorisé 354 postes additionnels à l'aide sociale. C'est beaucoup, mais comme la clientèle a augmenté de 20 % depuis deux ans, il commençait à y avoir un certain essoufflement chez nos fonctionnaires. Nos fonctionnaires, qui travaillent déjà passablement fort, avaient un surcroît de travail. Je dois leur rendre hommage, M. le Président, aujourd'hui, d'avoir tenu le coup pendant cette période de travail accru. Au moment où on est encore en train d'implanter la réforme de l'aide sociale, de nouvelles méthodes de travail, on est en train de faire une refonte de l'informatique. Tout ça arrive au même moment où la clientèle augmente. M. le Président, on pourra ajouter ces postes-là.

La députée de Maisonneuve semble se scandaliser que ce soient des postes occasionnels. Moi, M. le Président, je dis: Tant mieux, ce sont des postes occasionnels. J'espère qu'ils vont être très occasionnels et que, le plutôt possible, on pourra voir la clientèle de l'aide sociale baisser, baisser à un tel point qu'on n'aura plus besoin de ces fonctionnaires. Quant à moi, M. le Président, d'une certaine façon, j'aimerais bien que le nombre de fonctionnaires diminue encore, de façon à ce que la clientèle diminue encore aussi. Enfin, la clientèle faisant diminuer les fonctionnaires, et non pas l'inverse, bien sûr.

M. le Président, ce n'est pas un objectif d'augmenter la clientèle pour avoir le plaisir d'avoir plus de fonctionnaires. Voyons donc! C'est un système de dernier recours. Il est là tant qu'on en a besoin. Notre objectif, c'est de faire en sorte de trouver des emplois afin que les gens qui sont à l'aide sociale et qui sont aptes au travail puissent s'en sortir et retourner sur le marché du travail, retrouver leur autonomie par l'emploi. Le jour où tous les assistés sociaux du Québec auront réussi à s'en sortir, M. le Président, à se trouver un emploi, je serai l'homme le plus heureux du monde. Et j'espère qu'on pourra trouver à nos fonctionnaires d'autres fonctions à l'intérieur de la fonction publique de façon à ce qu'ils ne soient pas eux-mêmes sans emploi.

M. le Président, la clientèle de l'aide sociale, quand on regarde son évolution, on se rend compte qu'entre 1981 et 1986, c'avait augmenté continuellement. C'avait augmenté continuellement et c'est un peu étonnant que la clientèle ait augmenté jusqu'en 1986. Je comprends qu'en 1982-1983 on sortait de la crise de 1981-1982 et qu'il y avait eu une recrudescence de clientèle à l'aide sociale. Mais comment se fait-il qu'en 1984 la clientèle augmentait encore alors qu'on était en pleine reprise économique? En 1985, alors que l'économie commençait même à surchauffer, la clientèle à l'aide sociale augmentait encore. Et ce n'est qu'à l'arrivée du Parti libéral, on doit le dire, que la clientèle a commencé à baisser, à partir de 1986. C'a baissé pendant quatre années, M. le Président. C'a baissé de 20 % pendant 4 ans, jusqu'en 1990. Et depuis 2 ans, depuis la récession, on a repris ces 20 % de sorte qu'aujourd'hui, ne dramatisons rien, il y a le même nombre d'assistés sociaux au Québec qu'il y avait en 1986. Il n'y en a pas plus. On est au même point qu'en 1986. Ce n'est donc pas aussi dramatique que semblent vouloir le faire croire certaines âmes charitables, M. le Président.

Je ne suis pas content d'avoir autant d'assistés sociaux qu'en 1986. J'aimerais mieux en avoir moins. Mais il n'y en a pas plus. Bon, possiblement que si la récession se poursuit il y en aura un peu plus. On est au même stade. Et si on se compare à l'Ontario, M. le Président - je sais qu'on n'aime pas toujours se comparer à l'Ontario - eh bien, je peux vous

dire que l'Ontario, eux, en ont deux fois plus aujourd'hui qu'en 1986. Ça vous donne une petite idée de la situation ici et là-bas. Depuis 2 ans, je viens de le dire, on a augmenté de 20 % la clientèle au Québec. En Ontario, on a augmenté de 74,5 % depuis 2 ans.

M. le Président, il ne faut pas se réjouir du malheur des autres, mais il faut au moins réaliser qu'au Québec on a fait une gestion du dossier qui est correcte, je pense. Le Québec a été généreux, en ce sens que le programme est ouvert à tous, mais on contrôle, aussi. On s'arrange pour faire en sorte de s'assurer que ceux qui y ont droit y viennent, mais que ceux qui n'y ont pas droit n'y viennent pas. Et ça, M. le Président, de la bonne gestion, je pense que c'est ce que souhaitent les Québécois. Le programme est ouvert à tous, mais il faut y avoir droit. Et ça nous a permis, je pense, en tous les cas, d'économiser pas mal d'argent en exerçant ces contrôles qui sont essentiels quand on parle de fonds publics.

La députée de Hochelaga-Maisonneuve a administré plusieurs blâmes au gouvernement dans son allocution tout à l'heure. Je pense qu'elle a la mémoire un peu courte, M. le Président. Moi, je me souviens que, quand nous sommes arrivés au pouvoir, le Parti québécois avait gelé le salaire minimum pendant cinq années, de 1981 à 1985, disons quatre années et demie. Nous avons indexé le salaire minimum à chaque année depuis ce temps-là, et c'est pour ça que nous réussissons à garder une clientèle à l'aide sociale qui est moins nombreuse. Entre 1981 et 1985, en gelant le salaire minimum et en indexant les prestations d'aide sociale à tous les trois mois, on attirait littéralement à l'aide sociale des gens, des travailleurs à faibles revenus qui trouvaient que c'était plus payant de revenir à l'aide sociale indexée à tous les trois mois que de gagner un salaire minimum gelé pendant cinq ans. C'est évident. Ça crève d'évidence. Et, M. le Président, cela a fait en sorte que la clientèle a augmenté continuellement, comme je l'ai dit tout à l'heure.

Je me souviens également, M. le Président, que nous avons haussé les barèmes du programme de soutien financier; nous avons tenu compte de la situation particulière de ceux qui ont de sévères contraintes à l'emploi alors que, sous l'ancien gouvernement, selon l'ancienne façon de procéder, je ne peux pas oublier qu'on traitait de la même façon ceux qui avaient de sévères contraintes à l'emploi que les autres qui étaient aptes au travail. Il n'y avait aucune reconnaissance de statut particulier à l'égard de cette clientèle-là avant la réforme de l'aide sociale. (17 h 20)

M. le Président, nous avons indexé annuellement les barèmes de l'aide sociale depuis que nous sommes arrivés au pouvoir. Nous avons également donné la parité à ceux qui ont moins de 30 ans par rapport à ceux qui ont plus de 30 ans. Sous l'ancien système et l'ancien gouverne- ment, ceux qui avaient moins de 30 ans recevaient des prestations qui étaient à peu près du tiers de celles des autres. Vous aviez un jeune de 28 ans, il avait le tiers de la même prestation qu'un autre de 30 ans. Ce n'était pas très logique et pas très équitable. Nous avons mis fin à cette iniquité-là en donnant la parité à tout le monde.

M. le Président, je vois que vous me faites signe que mon temps achève.

Nous avons également, M. le Président, indexé les allocations familiales à chaque année et j'ai souvenance que sous l'ancien gouvernement, pendant trois années, on n'a pas indexé les allocations familiales correctement. Une année, on les a indexées à peu près à la moitié - en 1983 - du coût de la vie; en 1984, à peu près aux deux tiers du coût de la vie et, en 1985, on a gelé complètement les allocations familiales du Québec. Ça, c'est le gouvernement qui nous blâme aujourd'hui de ne pas nous occuper des pauvres. Nous, nous avons indexé à chaque année les allocations d'aide familiale depuis que nous sommes au pouvoir, même si nous vivons une récession, M. le Président. Le gouvernement n'a pas lésiné sur l'aide à apporter aux pauvres.

Nous avons introduit de nouveaux programmes également: allocations-logement, qui vient apporter, cette année, 41 000 000 $ de plus pour les familles pauvres, les plus pauvres, qui sont à la Sécurité du revenu et qui ont de gros problèmes pour se loger. Les grands bénéficiaires de ce programme-là sont les familles monoparentales. Dans une proportion de presque 80 %, ce sont des familles monoparentales qui bénéficient du programme d'allocations-logement.

M. le Président, je pourrais continuer comme ça... J'ai toute une liste ici. J'ai à peu près 20 items. Vous me faites signe que mon temps est écoulé, M. le Président. C'est triste de le dire. J'aurais aimé continuer à vous dire comment le présent gouvernement a fait beaucoup pour venir en aide aux pauvres, à ceux qui sont démunis, M. le Président. Je suis fier de ce que le Parti libéral du Québec a fait dans ce domaine-là depuis qu'il est au pouvoir et je peux vous assurer que nous allons continuer à faire le maximum d'efforts pour être juste et équitable envers tous les citoyens et surtout ceux qui en ont le plus besoin. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle. Ceci met fin au débat.

Adoption du principe et adoption

Est-ce que les motions de M. le ministre des Finances proposant la présentation, l'adoption du principe ainsi que l'adoption du projet de loi 419, Loi no° 1 sur les crédits 1992-1993, sont adoptées?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Je vous demanderais, M. le Président, d'appeler l'article 14 de notre feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi 418

Prise en considération du rapport de la commission qui en a fait l'étude détaillée

Le Vice-Président (M. Bissonnet): L'article 14. L'Assemblée prend en considération le rapport de la commission du budget et de l'administration sur le projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 253 du règlement parce que ce n'est pas une séance distincte? Est-ce qu'il y a consentement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Consentement. Est-ce qu'il y a des interventions sur ce rapport? N'ayant pas d'intervention, le rapport de la commission du budget et de l'administration portant sur le projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Adoption

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté. M. le ministre des Approvisionnements et Services propose l'adoption du projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec. Y a-t-il consentement pour déroger à l'article 230 du règlement?

Une voix: Consentement.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): II y a consentement? Consentement. Adoption du projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec. Est-ce qu'il y a des interventions? M. le ministre des Approvisionnements et Services.

M. Robert Dutil

M. Dutil: Merci, M. le Président. Il s'agit d'une loi relativement brève qui a pour effet de nous permettre de vendre 49 % des actions qui étaient détenues par la Société immobilière du Québec dans Place Desjardins, à Montréal, à Place Desjardins et à diverses constituantes du Mouvement Desjardins, au Québec. Nous avons discuté de cette loi-là en commission parlementaire. Il est important de préciser que la discussion a beaucoup plus porté sur la transaction, le prix de la transaction et l'opportunité de la transaction, que sur la loi elle-même, qui permettait d'y donner effet, puisque la loi elle-même n'était que d'ajouter les noms de ceux à qui nous vendons, ce qui n'était pas prévu et permis par la loi initialement et qui était de permettre à la SIQ d'être sur le conseil d'administration de Place Desjardins alors qu'actuellement elle doit en faire partie. Elle devait en faire partie selon la loi qui avait été adoptée au moment de la construction de ce vaste complexe, ce complexe qui est le deuxième plus important au Québec.

Quant au prix, je pense qu'il est important de revenir sur cette question-là. Nous avons établi, je pense, d'une façon très claire, que le prix s'est fait à la juste valeur marchande. L'évaluation de la bâtisse a été faite à 355 000 000 $. Je pense avoir fait la démonstration, à la commission parlementaire, que ce prix-là pouvait être ajusté - si on voulait voir la véritable valeur de la transaction - à 423 000 000 $, si l'on tient compte du fait que nous détenons un bail qui nous permet d'obtenir un prix de base du loyer de 5 $ le pied carré pour 590 000 pieds carrés, jusqu'en l'an 2005.

C'est un avantage que nous avons eu, lors de la construction du complexe Desjardins, jusqu'en l'an 2005. C'est un avantage que nous gardons jusqu'en l'an 2005 et qui a donc sa valeur. Il est évident qu'en faisant cette transaction-là on ne demande pas à Place Desjardins de nous payer deux fois l'avantage qu'il nous donne. Ou nous avons un avantage du prix du loyer qui se maintient jusqu'en 2005 - à ce moment-là, la valeur de la bâtisse, la valeur de la transaction est moins élevée - ou nous perdons cet avantage et nous payons le prix du marché - à ce moment-là, le prix de la transaction sera plus élevé. Nous avons estimé...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui, Mme la députée de Terrebonne.

Mme Caron: M. le Président, est-ce qu'il y a quorum?

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. A votre demande, je vais vérifier le quorum. Alors, qu'on appelle les députés.

Si vous voulez prendre place, s'il vous plaît. Il y a maintenant quorum. L'Assemblée poursuit ses travaux. Nous sommes à la motion du ministre... S'il vous plaît! Nous sommes à l'adoption du projet 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec. Je reconnais M. le ministre des Approvisionnements et Services qui poursuit son intervention. M. le ministre.

M. Dutil: Merci, M. le Président. Nous en

étions donc à parler de la transaction qui implique la Société immobilière du Québec et Place Desjardins. Je parlais de la discussion qui s'est faite, sur le prix, lors de la commission parlementaire, et où nous avons établi que le prix, à toutes fins pratiques, était évalué à la juste valeur marchande. Je voudrais dissiper tout de suite, ici, un malentendu. Quand on évalue une bâtisse à un montant de cette ampleur, sur laquelle nous détenons 49 % des actions, on ne peut pas faire la règle aussi simple que de diviser la valeur, le prix de la bâtisse en deux pour déterminer ce que recevra le gouvernement. (17 h 30)

Je le mentionne, M. le Président, parce que dans les journaux on a parlé d'une transaction qui devrait rapporter 200 000 000 $ au gouvernement du Québec. Ce qui est faux évidemment. Il faut d'abord et avant tout soustraire du montant de la valeur établie de la bâtisse les dettes, le passif, les créances qui sont à payer, pour estimer la véritable valeur. Après avoir soustrait ces dettes-là, après avoir additionné la valeur au livre, avoir additionné les bénéfices non répartis, avoir soustrait une portion du calcul d'impôt et en avoir additionné une autre, donc, des chiffres sur lesquels nous avons eu l'occasion de nous expliquer en commission parlementaire, le montant résiduel est plutôt de 209 000 000 $ que de 355 000 000 $, montant à partager que l'on divise en 49 %-51 % et duquel est soustrait un montant de 4 400 000 $ pour dépréciation d'escompte suite au fait que nous sommes minoritaires dans cette transaction-là. Ce qui laisse au gouvernement, à la Société immobilière du Québec un montant de 98 300 000 $ de la transaction globale.

La question du prix, à mon avis, a été pleinement clarifiée. On verra ce que l'Opposition dira dans ses commentaires de fin du projet de loi, suite à la commission parlementaire et en vue de l'adoption. Ce qui a été également discuté et sur lequel on ne s'est pas entendu, c'est sur l'opportunité d'agir à ce moment-ci. Pour ma part, M. le Président, je conçois qu'à partir du moment où nous avons un prix valable, un prix intéressant - et c'est ce que nous prétendons avoir obtenu dans cette négociation-là qui s'est déroulée sur plusieurs mois, qui s'est déroulée d'une façon correcte et qui se conclut à un prix qui nous apparaît avantageux - il est intéressant pour le gouvernement, à partir de l'entente de principe que nous avons, de conclure le plus rapidement possible, puisque 98 300 000 $ qui entrent dans les coffres de la SIQ rapportent quand même un intérêt ou empêchent la Société immobilière ou le gouvernement de payer un intérêt qui est considérable. Le litige là-dessus, la différence d'opinion sera certainement exprimée par l'Opposition. Je lui laisse le soin de le faire.

Pour ma part, je crois qu'après avoir participé à la construction du complexe Desjar- dins dans les années soixante-dix, complexe qui a été terminé en 1976, après avoir permis que ce projet se réalise, puisque je pense qu'à l'époque, si le gouvernement n'avait pas été présent, il est possible que ce complexe n'ait pas vu le jour, il est intéressant de voir, ayant réussi à établir un pareil complexe au Québec, il est important de se rendre compte que nous avons là une mission accomplie et que les priorités gouvernementales peuvent changer.

Il n'est pas de notre rôle d'être un actionnaire minoritaire dans un grand complexe où il n'y a pas que des bureaux et où nous ne sommes pas, loin de là, les seuls locataires puisque nous occupons environ 24 % des espaces globaux qui sont occupés par l'ensemble des diverses fonctions de ce complexe-là qui ne sont pas que des espaces à bureaux, je le précise. Il y a également un hôtel, l'hôtel Méridien, comme on le sait; il y a également beaucoup de commerces dans le complexe Desjardins, comme on le sait également. Alors, ayant donc accompli cette chose-là, les diverses sociétés Desjardins et Place Desjardins étant prêtes à acquérir notre participation à un prix convenable, nous avons décidé de nous en départir et c'est la raison du projet de loi que je souhaite voir adopter ici par l'Assemblée nationale. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je vous rappelle que nous en sommes à l'étude de l'adoption du projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec, et je reconnais Mme la députée de Verchères. Mme la députée.

Mme Luce Dupuis

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Le projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la Société immobilière du Québec, fait en sorte de permettre à la Société immobilière du Québec, qui détient les intérêts du gouvernement dans Place Desjardins, de vendre ses actions à Desjardins ou à ses filiales.

C'est un projet de loi de deux articles qui semble anodin, qui semble sans importance. Le gouvernement, par le biais de son ministre, a fait en sorte que ça ait l'air d'un projet pas important du tout. Quand on pense qu'en cinq minutes, lors de la deuxième lecture sur l'adoption du principe, le ministre a expliqué cette transaction qui est tout de même... Là, il y a des millions en jeu, on vend nos actions, les actions du gouvernement - en fait, l'argent des contribuables investi dans la Place Desjardins pour des millions - et on prend cinq minutes pour expliquer tout ça, cette transaction-là. En commission, je vais y revenir tantôt comment ça s'est passé... C'est à dénoncer, M. le Président. Le ministre, en troisième lecture, prend encore cinq minutes alors qu'il aurait droit peut-être à une heure, une demi-heure... Je ne connais pas

les règles exactement. Chose certaine, c'est que ça dénote, dans la manière de faire, un mépris. Ça dénote un mépris de l'Assemblée nationale. Ça dénote un mépris envers les élus...

M. Bélisle: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): S'il vous plaît... Sur une question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: Oui, M. le Président. J'aimerais que vous rappeliez la députée à l'ordre, à l'effet qu'on ne peut imputer aucun motif à un député en cette Chambre, et surtout pas que le ministre a un mépris de quelque membre que ce soit ou de l'institution qu'est l'Assemblée nationale. Je vous demanderais de lui demander de retirer ses paroles.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez poursuivre votre intervention, Mme la députée.

Mme Dupuis: Merci, M. le Président. Je dis simplement que je trouve ça regrettable qu'on traite à la légère des transactions où c'est l'argent des contribuables, et qu'on essaie de nous passer ça à la vapeur. Pour nous, pour faire notre travail de l'Opposition, si on veut le faire sérieusement, on a besoin d'un peu plus de temps et il faut aller soutirer les informations. Il faut pratiquement se battre pour avoir les informations nécessaires pour prendre une décision éclairée, tout simplement. On ne veut pas se faire reléguer au rôle d'estampilleur. C'est tout simplement ça, et je pense que c'est important de le noter, de le signaler. Ce n'est pas la première fois, je m'aperçois que c'est une constante. Je suis une nouvelle députée et je trouve ça indécent parce que je n'aurais jamais pensé que ça pouvait se passer de même dans un Parlement. C'est important que les contribuables le sachent aussi.

M. le Président, en commission parlementaire, nous avons apporté trois motions. Ce n'était pas du «filibuster», on n'a pas «filibusté». On a présenté trois motions: une qui demandait à la Société immobilière du Québec, qui est un organisme gouvernemental, d'être présente, d'être entendue. Il me semble que ça aurait été éclairant pour l'Assemblée, pour la commission, de savoir ce qui s'est passé dans cette transaction. Quels sont les motifs pour lesquels on l'a vendu, quels sont les motifs de... qu'est-ce qu'il y avait dans cette entente? Des informations tout simplement.

Quand on pense que le président était absent, que le vice-président qui a signé l'entente, M. Prémont, était absent. On a donc déposé une motion pour demander qu'il soit entendu. La commission, par le biais des députés de l'aile parlementaire, a dit: Non. Le ministre a endossé, le ministre en tête. Selon moi, M. le Président, il aurait été normal et de bon aloi que le ministre lui-même demande aux dirigeants de la Société immobilière du Québec, qui est un organisme gouvernemental sous la juridiction du ministre, qu'ils soient présents. Est-ce qu'il peut y avoir quelque chose de plus normal? C'est demandé dans le rapport Bernard, que le ministre endosse aussi, où on demande plus de transparence, plus d'efficacité. On a eu une belle occasion d'impliquer et de demander aux sociétés, aux organismes qui relèvent du ministère, de venir s'expliquer, de venir jeter au moins une lumière pour que les gens de la commission, s'ils prennent position pour ou contre, au moins le fassent d'une façon éclairée, et qu'ils ne votent sur n'importe quoi, n'importe comment.

La deuxième motion, M. le Président, c'était pour demander que les dirigeants de Desjardins, qui est l'autre partie dans cette transaction, soient présents. Il me semble que c'est normal, tu sais. Il me semble que ça aurait été utile qu'ils soient là, pour répondre aussi aux questions, nous donner une information qui aurait pu être très pertinente, éclairante, surtout que ce n'était pas évident. La démonstration n'a pas été faite que, dans ce dossier, le gouvernement et le ministère des Approvisionnements et Services avaient le plein contrôle de cette transaction. On a des signes qui se sont manifestés et qui nous ont porté à croire le contraire. M. Coulombe, qui est le signataire de l'entente de Desjardins, aurait pu nous apporter une lumière éclairante. Ça aurait peut-être été intéressant aussi, à travers ce qu'il aurait pu nous dire, de voir jusqu'à quel point ce sont de bons administrateurs. (17 h 40)

En passant, si vous me le permettez, M. le Président, je voudrais rendre hommage au Mouvement Desjardins. Ça a parti tout petit, dans une cuisine, et je voudrais leur rendre hommage parce qu'ils ont su développer une solidarité. Ça a commencé par des 0,10 $ puis après ça des 10 $, puis on a mis des zéros au bout, puis, finalement, la caisse Desjardins... Si je pense aux caisses populaires Desjardins, par exemple, qui sont des fonds de nos Québécois, ils ont su gagner la confiance de nos Québécois. Ça aurait pu être intéressant de les entendre. Ils ont su développer le sentiment d'appartenance.

Et ça, M. le Président, c'est peut-être ce qui manque dans notre Chambre ici, de développer un gouvernement capable de développer le sentiment d'appartenance pour que les contribuables aient l'impression qu'ils ne se font pas avoir par le gouvernement. Mais, pour ça, il faut être transparent. Pour ça, il faut être limpide. Pour ça, il faut prendre le temps de faire notre travail sérieusement.

Je reviens au sentiment d'appartenance. Peut-être que si ça se développait un peu plus,

ça serait peut-être intéressant de voir la réaction des Québécois. Tu sais, ils n'essaieraient peut-être pas de payer le moins d'impôt, si on n'exagère pas, bien sûr, mais de donner leur dû avec ce sentiment que le gouvernement, les fonds publics, c'est leurs fonds, c'est leur propriété. Et là, j'y reviens à Place Desjardins. Finalement, c'est des actifs. Ça appartient à tout le monde, ça, là. C'est l'argent du gouvernement. C'est l'argent des contribuables.

On a fait une autre motion, M. le Président. On a demandé que le service d'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal vienne nous donner son point de vue. Objectif: il n'était pas partie là-dedans, il n'était pas partie prenante dans ce dossier. Ça aurait pu être intéressant de les entendre dire, par exemple, sur quelle base, sur quel niveau ils se basaient pour évaluer la Place Desjardins à 414 000 000 $. C'est les chiffres qui nous ont été fournis, alors que l'évaluation de base du gouvernement est de 355 000 000 $. Il y a une marge, là. Ça aurait été intéressant de les entendre.

On aurait eu d'autres questions à poser, par exemple, la valeur, s'il y a moyen de comparer la Place Desjardins à la Place Ville-Marie. Je comprends - je ne fais pas de reproches au ministre - qu'il y ait des éléments au niveau du service d'évaluation, au niveau de l'évaluation foncière qui lui échappent. Mais pourquoi refuser une information qui aurait pu être pertinente, objective? La commission a dit non par le biais des députés présents. Et le ministre en tête, ils ont encore voté non. Ça n'aurait pas du tout retardé les travaux de la commission, si ça avait été prévu aussi.

Alors, les demandes de motions. Les motions qui ont été déposées par l'Opposition n'ont pas été des demandes farfelues. Ce n'était pas un blocage systématique. On était deux. On ne pouvait tout de même pas essayer de les tenir 50 heures à deux. Ça n'a pas été... on n'a pas envahi la commission. On a eu un non.

M. le Président, je pense aussi qu'à ce moment-là je reviens au rapport Bernard, un rapport qui relève du ministère des Approvisionnements et Services, qui concerne les Approvisionnements et Services et où on parlait de l'efficacité dans la transparence. Je pense que là, le ministre a raté une très belle occasion de démontrer qu'il était disposé à effectuer un travail sérieux dans la transparence. Il a raté une belle occasion de donner un appui à ce rapport-là. On l'a favorisé, on lui a pratiquement donné tous les outils pour qu'il le fasse. Le ministre a dit non. Pourquoi après ne serait-on pas légitimés de penser que ça ressemble à une vente de feu? L'urgence avec laquelle on l'a passé, le manque de transparence dans la manière de faire, ça ressemble à une vente de feu. Ça ressemble à un gouvernement qui veut nous passer cette loi-là pour aller chercher de l'argent et l'injecter dans les coffres pour boucler l'année financière avec un déficit un peu moins gros. Sinon, qu'est-ce qui presse? Quelques jours d'intérêt, peut-être? Nous avons même donné l'opportunité au ministre de se dédouaner face à cette opinion publique, face à l'opinion de l'Opposition, en apportant une motion pour dire: Pourquoi ne pas effectuer la transaction le 1er avril? Ce n'est pas une journée de différence qui va faire tant. Encore là, la commission a dit non. Des membres de la commission ont dit: Non, motion rejetée, avec le ministre en tête.

M. le Président, nous avons demandé tout ce qu'il était possible de demander pour prendre une décision éclairée. Nous avons eu deux documents de déposés, des documents sur lesquels nous avons demandé un éclairage, des renseignements, deux petits documents. Sur toute cette transaction de plusieurs millions, nous avons eu droit à deux petites feuilles minces, pour ne pas dire maigrichonnes, qui ne nous donnaient pas grand-chose. Je pense que nous avons fait notre travail et je pense que nous l'avons fait honnêtement en refusant le rôle d'estampilleurs.

Moi, je pars avec l'idée - et à date ça ne m'a pas menti - qu'il faut d'abord se respecter soi-même si on veut que les autres nous respectent. Je pense que faire un travail consciencieux en commission et refuser d'endosser n'importe quoi, de venir simplement mettre l'estampe, c'est se respecter soi-même, c'est respecter le vote de la population, la confiance que la population nous a donnée et c'est ce rôle-là qu'on a essayé de jouer. Mais la manière de faire du gouvernement nous en a empêchés, ce qui fait en sorte qu'on n'est pas tellement plus éclairés après la commission qu'on ne l'était au début de la commission.

Nous avons la très nette impression, M. le Président, que le ministre est victime du ministre des Finances, qui lui aurait placé une commande, et que la Société immobilière n'a pas eu grand-chose à dire là-dedans et le ministre des Approvisionnements et Services non plus. Petite anecdote: il y avait deux membres, il y avait le sous-ministre adjoint en arrière du ministre des Approvisionnements et Services. Il y a eu une réaction spontanée à la motion qu'on a apportée, à savoir: Pourquoi ne pas faire la transaction le 1er avril? Ils avaient l'oeil et de très près, ce qui nous porte à croire, et avec raison, que c'est une commande du ministre des Finances. Je trouve ça blessant pour le ministre des Approvisionnements et Services. Je le dis comme je le pense, je trouve ça blessant. Peut-être que le ministre des Approvisionnements et Services ne le voit pas comme ça mais, moi, je trouve ça un petit peu blessant.

En fait, il s'agit d'une passe de pas loin de 100 000 000 $. C'est ça, les faits. Il faut tout de même arrêter de se conter des histoires. C'est une passe de pas loin de 100 000 000 $. Alors, on n'est pas capable de boucler son budget. J'administre mal mon budget, mais je ne veux pas

que ça paraisse, je ne veux pas que papa me dispute, alors je vends l'immeuble. En l'occurrence, on vend les immeubles. Après ça, on dit qu'on est un bon gouvernement, on gère bien. Surtout, ils se sont fait élire là-dessus, M. le Président. (17 h 50)

Parlons du fonds maintenant. Un des arguments qui est revenu le plus souvent, c'est qu'on avait négocié à 5 $ le pied carré pour jusqu'à l'an 2005. C'est de la gestion de courte vue. Après 2005, quel genre de contrat on va être obligé de signer? Ou est-ce qu'on va être obligé de déménager? On a sauvé combien là-dedans?

Une gestion de courte vue. On n'arrive pas dans le budget, on déclare un déficit plus haut que prévu, mais sans prévoir les conséquences. Et il peut y avoir des conséquences passablement importantes et négatives à une transaction comme celle-là. Si le gouvernement ne voulait pas qu'on aille sur des hypothèses ou sur des peut-être, il n'avait, en commission parlementaire, qu'à amener tous les documents, qu'à mettre les chiffres sur la table et qu'à jouer ouvert. On ouvre les livres. À ce moment-là, il n'y a pas de spéculation. Pourquoi cacher si on n'a rien a cacher?

De toute évidence, M. le Président, le gouvernement a perdu le contrôle de ses dépenses, et à la toute dernière minute: Dépêchons-nous, ça urge, vendons les meubles, puis essayons de boucler l'année avec un déficit pas trop gros. Parce qu'à aucun moment en commission parlementaire, M. le Président, la démonstration n'a été faite que c'était une bonne transaction. Je vais être honnête et je vais le dire, la démonstration n'a pas été faite non plus que c'était une mauvaise transaction. Ni l'une ni l'autre. Donc, on n'est pas plus avancé qu'on l'était. Le ministre nous dit qu'il pense qu'il a fait une bonne transaction. J'espère qu'il a raison. J'espère. Je ne suis tout de même pas assez diabolique pour souhaiter qu'il ait fait une mauvaise transaction. Je l'espère et je le lui souhaite de tout coeur.

Mais comment se fait-il que ce même gouvernement - et je pense que, pour l'Opposition, lorsqu'elle était au pouvoir, c'était la même chose - a toujours essayé de mettre en oeuvre des politiques pour permettre l'accès à la propriété? Qu'on pense à Mon taux, mon toit, par exemple. Vous allez me dire que c'était pour contrer la récession et que c'était pour relancer la construction. Si la construction va bien, l'économie va bien, mais peut-être. Mais il me semble que c'est un acquis d'être propriétaire. Il me semble que c'est un objectif qu'un particulier peut avoir, si je reviens à un particulier. Il me semble que c'est un objectif souhaitable, que tous les gouvernements souhaitent. Puis on encourage l'accès à la propriété. Au moment où le gouvernement fait ça d'un côté de la bouche, de l'autre côté de la bouche, bien, eux autres, ils passent de propriétaires à locataires. Comme ça. Ce n'est pas grave. On vend. C'est payant, mais on vend.

M. le Président, on n'a pas pu avoir de réponse, ou c'était encore très vague. On m'a dit: Bien, je ne le sais pas, peut-être que... Bon. Dans les faits, ce qui va revenir dans les coffres du gouvernement, c'est 98 300 000 $. Ça a été confirmé tantôt par le ministre des Approvisionnements et Services. On a demandé au ministre: Où vont-ils aller, les fonds? Est-ce que ça va dans le fonds consolidé? Il a dit: «Peut-être, pourquoi pas?» ou quelque chose du genre. Il dit: C'est possible. Ce n'est pas impossible.

On lui a fait une petite suggestion. Puisque c'est un investissement qu'on avait fait à Montréal, on lui a proposé de prendre ces 98 300 000 $ et de les réinvestir à Montréal, pas forcément dans des immeubles - puisqu'on vend, on n'est pas pour aller acheter ailleurs - mais peut-être, quel que soit le projet, de les réinvestir dans Montréal. Pourquoi pas à Montréal-Est, qui a des problèmes, où ça se déserte, où tout ferme? Les gens de Montréal s'en viennent en Montérégie, puis ils s'en viennent en banlieue. Il y a des problèmes économiques à Montréal. Alors, on a fait - de bonne foi, je pense - cette proposition-là au gouvernement, en espérant, bien sûr, qu'il saura la prendre en considération et tout mettre en oeuvre pour essayer de remonter l'économie de Montréal.

Puisque je parle de Montréal et qu'on n'a pas été capable de me faire la démonstration des impacts négatifs que ça pourrait avoir, parce qu'il peut y en avoir... Par exemple, une transaction de cette envergure peut peut-être apporter des perturbations ou apporter des modifications dans le marché immobilier, à Montréal. Et, si ça dévalue les autres immeubles, par effet secondaire il va y avoir moins de taxes dans les coffres de Montréal. Donc, il peut y avoir des protestations. On peut être pris avec ça aussi. Est-ce qu'on a pensé à ça dans une transaction? Est-ce qu'on a pensé à tout? Peut-être que Montréal ne sera pas très heureuse d'apprendre qu'il y a une transaction qui s'est faite. Peut-être, je dis bien peut-être. La lumière n'a pas été faite. À un prix peut-être en bas du marché. si je compare, par exemple - peut-être que ça ne se fait pas de la même façon - mais, si je compare à une maison privée, on sait très bien que, dans une rue, s'ils se basent, pour le taux d'évaluation, sur les ventes qui se sont faites durant l'année... on ne sait pas. bon. et là, s'il y a trois maisons qui se sont vendues à des prix exorbitants, par une chance ou un concours de circonstances, bien, l'ensemble du prix des autres maisons monte. l'inverse se fait de la même façon. si, pour une raison x, quelqu'un est obligé de vendre rapidement et qu'il va en rabais, bien, ça fait baisser le prix des autres évaluations. on n'a pas pu savoir non plus la

date de la dernière évaluation. Donc, c'est un chiffre approximatif. Est-ce que c'est une bonne transaction, est-ce que c'est une mauvaise? On n'est pas en mesure de le dire.

Ça m'amène à dire, M. le Président, que ce gouvernement manque, dans sa manière de faire, dans ses prévisions, de fondement. Quand on vend, quand on fait une transaction, est-ce que c'est appuyé sur une politique, sur une orientation, par exemple? Est-ce qu'on a une politique, par exemple, dans le champ des immeubles? Est-ce qu'on a une politique? Et elle va vers quoi? On n'en a pas parlé.

Pas de plan d'action, pas d'orientation, pas de politique de fond, une vue très courte de la gestion des fonds publics, des projets à court terme et à très court terme. Sauvons la face et laissons croire à tout le monde, surtout aux contribuables, qu'on est de bons gestionnaires en donnant les chiffres à la fin seulement. C'est là que je pense que c'est un petit peu plus grave, surtout que ce gouvernement, M. le Président, s'est fait élire sous l'étiquette de bon gestionnaire. C'est toujours le maquillage en surface. Sauvons les apparences pour le moment. Au lieu d'aller un petit peu plus en fondement, d'essayer de trouver des solutions à un peu plus long terme, à moyen terme et à long terme, exactement comme les politiques qui ont été mises en place pour contrer la récession... Est-ce qu'il y en a? Si peu.

M. le Président, ma courte intervention était simplement pour rappeler ces quelques faits, sur la manière de faire, et que, sur le fond même, il est difficile de dire si c'est une bonne ou une mauvaise transaction. Ce qui me console un peu, c'est le fait que peut-être ce soit au Mouvement Desjardins. Il est sympathique. Peut-être que j'aurais eu une réaction beaucoup plus agressive si on avait vendu à Power Corporation, je ne m'en cache pas et j'ai l'honnêteté de le dire. Mais il reste que, si les caisses Desjardins sont de bons gestionnaires pour leurs membres, le gouvernement, lui, doit être un bon gestionnaire pour l'ensemble des contribuables québécois, et je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Verchères. Sur cette même motion, M. le député de Labelle. Le temps maximum d'intervention est de dix minutes, en troisième lecture.

M. Léonard: Ah! c'est dix minutes? Le Vice-Président (M. Bissonnet): Oui. M. Jacques Léonard

M. Léonard: Oh! M. le Président, je vous remercie. (18 heures)

Nous en sommes à ce projet de loi 418, en troisième lecture, et j'ai participé hier à la deuxième lecture de ce projet de loi. Je voudrais nous rappeler à tous que le ministre a fait une deuxième lecture en moins de cinq minutes - moins de cinq minutes - parce qu'il a... Au fond, lorsqu'on relit son document ou sa déclaration, il a un seul principe: mission accomplie. Il n'a pas explicité la mission qu'il avait accomplie, mais c'est mission accomplie et il est passé à autre chose. Je crois que c'était un peu court, mais nous allons y revenir.

Deuxièmement, M. le Président, en commission parlementaire, nous avons demandé à entendre des groupes. Vous remarquerez que le gouvernement est juge et partie dans ce projet de loi. C'est lui qui est propriétaire et c'est lui, maintenant, qui se donne, par un projet de loi, certains pouvoirs dans la loi. Dans ce contexte, il nous apparaissait important, à nous, de l'Opposition officielle, d'entendre des tierces parties, d'autres personnes au dossier, si l'on veut, mais de façon moins impliquée. Nous avons demandé à entendre le président de la Société immobilière du Québec pour nous expliquer ce qu'il pensait de la transaction. Il a un conseil d'administration de 11 personnes. Ils en ont probablement discuté à leur conseil d'administration; normalement, il devrait y avoir une résolution. Il demeurait tout proche du parlement, rue Saint-Amable - c'est là que sont ses bureaux - et le ministre a dit: Non, pas question de faire venir à la commission le président de la Société immobilière du Québec. Je suppose qu'il devait penser, en son for intérieur, que lui-même pouvait répondre aux questions. Mais, encore une fois, je rappelle qu'il était juge et partie. Il représentait le gouvernement alors qu'il aurait été important d'entendre le témoignage d'un président, du président de la Société immobilière du Québec.

Nous avons aussi demandé à entendre la Confédération des caisses populaires et d'économie Desjardins. Il nous semblait aussi intéressant d'entendre ce que pensait la Confédération Desjardins. Le ministre nous a lancé des chiffres à la volée au début de ses notes préliminaires, sa déclaration préliminaire à la commission, et il me semble que la Confédération Desjardins aurait pu venir aussi nous exposer son point de vue. C'était l'autre partie à la transaction. Non. Tout ce à quoi nous avons eu droit, c'est aux commentaires du ministre, aux remarques du ministre, aux déclarations du ministre. Encore une fois, ce n'est pas que je veuille mettre en doute sa parole, mais encore faut-il vérifier le bien-fondé de ce qu'il dit vis-à-vis d'autres personnes. Il nous a dit non. Bon. Remarquez que le processus démocratique en prend un coup, parce qu'on ne doit entendre personne, même pas les parties impliquées. Chose que l'on fait, d'ailleurs, dans les projets de loi privés. Nous en sommes à un projet de loi public; on n'a pas eu droit à cela. La Confédération Desjardins n'est pas venue ici, à l'Assemblée nationale, alors qu'il s'agissait d'un

projet de loi qui la concernait, parce que le ministre ne l'a pas jugé utile et que les députés se sont rangés à l'avis du ministre. Bon. l_a commission a décidé qu'on n'entendrait pas la Confédération Desjardins. Je vois, M. le Président, le ministre de l'Industrie et du Commerce qui fait des grimaces. Alors, il les retiendra pour son projet de loi tout à l'heure.

M. le Président, après cette décision de la commission, nous avons demandé au moins une chose: entendre le Service de l'évaluation foncière de la Communauté urbaine de Montréal. Les évaluations foncières, actuellement, de par la loi du Québec, doivent se rapprocher de la valeur au marché des actifs. Dans le contexte de la Communauté urbaine de Montréal, il s'est fait un immense travail en ce sens. Nous aurions aimé vérifier la base sur laquelle reposait la transaction, voir si l'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal, de 414 000 000 $, était fondée, si elle remontait à l'année 1989 ou 1990. Parce que, normalement, dans le rôle déposé à l'automne 1991 il est question de valeur établie selon le marché de l'année 1990, donc l'évaluation de 414 000 000 $ remonte pratiquement à deux ans. Est-ce que cette valeur tient encore aujourd'hui par rapport à la transaction? Les gens qui auraient pu nous en parler étaient, à mon sens, ou pouvaient être ceux du service de l'évaluation foncière de la Communauté urbaine de Montréal. Il me semble que, là, nous avions une tierce partie, des personnes indépendantes qui auraient pu nous renseigner, nous, de la commission parlementaire, sur la valeur exacte de cet actif dont le gouvernement veut se départir.

Peine perdue. Rien, M. le Président, et nous n'avons eu droit qu'aux explications du ministre, uniquement, sans jamais pouvoir contrevérifier les données qu'il avançait.

Voilà pour la manière. Pour le fond, M. le Président, le seul principe qui a été émis, énoncé par le ministre, ça a été: mission accomplie. Je comprends qu'il n'ait pas parlé longtemps, parce qu'il n'en avait pas, de principe. C'est ça, sa position. Il ne peut pas parler longtemps. Mission accomplie! Je voudrais simplement rappeler la mission que devait remplir cet investissement du gouvernement, lorsqu'il a été fait, autour des années 1975. Le centre-ville de Montréal, en face de la Place des Arts, comportait de nombreux terrains vacants. À partir du début des années soixante-dix, il y a eu une politique systématique de meubler le centre-ville de Montréal, en termes d'investissements immobiliers. Il y a eu la Place des Arts au début des années soixante.

Par la suite, le premier gros investissement qui s'est annoncé, ça a été celui de la Place Desjardins, début des années soixante-dix, avec une implication de la ville de Montréal qui, en passant, est toujours le bénéficiaire du bail emphytéotique du terrain de la Place Desjardins. Je pense que la Place Desjardins a été un succès. D'ailleurs, il faut reconnaître à l'ancien maire de montréal, m. jean drapeau, qu'il a bien donné des directives urbanistiques pour en faire un succès. ,

Troisième élément qui a été impliqué dans le mobilier du centre-ville: le Palais des congrès que nous avons construit lorsque nous étions au pouvoir, le Palais des congrès au-dessus de l'autoroute Ville-Marie pour rejoindre cet ensemble au Vieux-Montréal. Finalement, s'est construite aussi la place Guy-Favreau, par le gouvernement fédéral, cette fois. Donc, nous avons vu un centre-ville beaucoup mieux meublé maintenant qu'auparavant. l'implication du gouvernement a été d'être le partenaire de la confédération desjardins pour construire place desjardins, et ça a été un succès. maintenant, le ministre dit: «mission accomplie.» je lui ai dit qu'il ne s'était pas promené à montréal, parce qu'il y en a d'autres, terrains vacants à montréal. à mon sens, l'action d'un gouvernement, dans le cadre de l'urbanisme d'une ville, c'est: lorsqu'il se retire d'un dossier, lorsqu'il se sort d'un dossier, ce n'est pas pour récupérer la mise de fonds qu'il avait investie à l'origine, mais plutôt pour s'embarquer dans une autre action qui va aussi faire étendre le développement urbain au centre-ville.

Or, ceci nous amènerait à demander au ministre ce qu'il va faire des 98 300 000 $ qu'il va récupérer de la transaction. Nous n'avons eu aucune explication à ce sujet, M. le Président. Vous me faites déjà signe que c'est terminé ou presque, mais je dois dire que c'est triste de voir qu'il n'a aucune intention, puisqu'il a dit: «Mission accomplie. On retire nos billes.»

Ils retirent leurs billes en ne spécifiant pas s'ils viennent de changer leur politique gouvernementale d'être propriétaires ou locataires des locaux qu'ils occupent. C'est une question de fonds. S'ils se retirent du dossier au moment où le marché est déprimé, ce qui est le cas, ça nous amène à dire qu'ils font une vente de feu en ce qui concerne la Place Desjardins. Mais, au fond, le chat est sorti du sac lorsque nous avons proposé un amendement au dernier article de la loi qui dit que cette loi entre en vigueur au moment de sa sanction. Nous leur avons proposé que cette loi entre en vigueur le 1er avril. Le sous-ministre des Finances, derrière les tables, s'agitait, parce que ce qu'ils veulent, c'est 100 000 000 $ pour réduire le déficit qu'ils ont annoncé aujourd'hui à 4 125 000 000 $ et qui devrait être, finalement, à 4 225 000 000 $, si cette transaction n'avait pas lieu. C'est ça. C'est ça, l'orientation, l'intention profonde qu'ils ont derrière ce projet de loi. Ils vendent leur maison pour payer leur déficit. (18 h 10)

Une voix: Ah! ça n'a pas de bon sens!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Labelle, de votre intervention. Sur cette même motion, je reconnais maintenant M.

le député de Lévis.

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, j'écoutais parier le député de Labelle et je ne pensais jamais qu'on en arriverait à une situation où on serait en train de débiter la galerie pour chauffer le poêle. On est dans la situation, au fond, où le ministre qui a coûté le plus cher au gouvernement dans le secteur des ambulances - qu'on se rappelle: 1500 $ du voyage quand c'est pour le bien-être social ou encore pour l'assurance-automobile, plus le kilométrage, peu importe la distance - aujourd'hui, il est en train de nous faire une vente de feu des actifs du gouvernement, en pleine période de récession économique, comme vient de l'indiquer M. le député de Labelle. Et qui va payer pour ça, M. le Président? Les citoyens. On agit avec l'argent du gouvernement comme si c'était de l'argent de monopoly et on se demande, à ce moment-ci, comment ça se fait qu'on arrive avec des déficits de plus de 4 000 000 000 $, alors qu'on a tout taxé. Puis là on est rendus à vendre les immeubles. On est en train de débiter la galerie pour chauffer le poêle-Une voix: Ça n'a pas de bon sens.

M. Garon: ...et tantôt on va se retrouver tout seul avec la fournaise, plus de maison. On aura la fournaise; on aura débité la galerie, débité la maison et on aura chauffé le poêle, M. le Président. Voilà la situation dans laquelle on se retrouve avec le député de Beauce-Sud, qui nous a donné un bel exemple de sa façon de faire dans le domaine des ambulances où il a été le ministre le plus dispendieux, qui a coûté le plus cher au gouvernement. Là, aujourd'hui, on est en train d'assister à une vente de feu, en pleine récession économique, non pas par quelqu'un qui est en faillite mais par le gouvernement lui-même, M. le Président. Pas besoin de se demander comment il se fait qu'on assiste à des augmentations de taxes, avec la demande d'Hy-dro-Québec de cette année, de 32,9 % sur deux ans, M. le Président. Le gouvernement est rendu dangereux. On a un gouvernement dangereux, M. le Président, qui est en train de nous mener à la banqueroute avec des taxes, des tarifs, des impôts, des taxes scolaires, des taxes municipales, des tarifs d'Hydro. En plus, le déficit augmente d'une façon vertigineuse, puis là on est en train de vendre les actifs.

Écoutez, M. le Président, ça nous prend quoi pour réaliser à quel point on a un gouvernement d'administrateurs à la petite semaine? Un gouvernement d'administrateurs à la petite semaine, «pogné» dans les grappes, M. le Président. «Pogné» dans les grappes, un peu comme Tarzan qui se promenait de liane en liane. Mais on a le résultat quand on regarde ce qui se passe devant nous, M. le Président. On a le résultat quand on regarde ce qui se passe devant nous. Oui, M. le Président, parce qu'on n'a pas eu besoin du ministre de l'Industrie et du Commerce pour faire, par exemple, un développement dans l'agro-alimentaire en regroupant tout ça ensemble. On n'a pas appelé ça des grappes, parce qu'on ne pensait pas qu'on avait besoin de raisins et de pépins. On a appelé ça un secteur agro-alimentaire, et le résultat, c'est que le Québec, au cours des dernières années, a été premier au Canada grâce à des politiques qui ont été adoptées par l'ancien gouvernement.

On ne faisait pas des ventes de feu, M. le Président. On ne vendait pas les principaux actifs du gouvernement en pleine dépression économique; pas en récession économique, on est en dépression économique, M. le Président. Là, aujourd'hui on ne veut pas, en commission parlementaire, faire venir les principaux intervenants qui peuvent dire quelle est l'évaluation des actifs. Pourquoi? Est-ce qu'il est normal qu'on soit dans la vente d'actifs de centaines de millions sans même s'interroger sur les gens qui sont à même de donner l'évaluation? Et même le fait qu'on ne veuille pas qu'ils soient là, M. le Président, c'est un mauvais signe en soi. En soi c'est un mauvais signe.

Ce n'est pas normal qu'on adopte ça aujourd'hui, en fin de session. On finit la session. On me dit qu'à 18 h 30 on peut finir la session. Qu'on soit en train de vendre des actifs de centaines de millions de dollars en fin de session, comme ça, pour boucler le budget de fin d'année, est-ce que le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui est ici présent, ferait ça dans ses entreprises? Est-ce qu'il conseillerait, aux gens qui viennent demander son expertise, de faire ça? Est-ce qu'il demanderait à des gens, normalement, dans les affaires, de faire ce qu'il est en train de faire avec les actifs du gouvernement, l'actif de l'ensemble des citoyens?

M. le Président, ce n'est pas normal. Ce n'est pas normal, ce qu'on est en train de faire là, actuellement. On aura beau dire que ça va au Mouvement Desjardins, que le Mouvement Desjardins a ses actionnaires ou ses sociétaires, mais les citoyens ont le droit, comme contribuables, eux aussi, d'être protégés, parce que tantôt il y aura des taxes. Le résultat de ça, ça va être des taxes, des taxes, des taxes, des hausses d'électricité, des hausses d'électricité, des hausses d'électricité. Est-ce que c'est normal, M. le Président? C'est ça, ia question fondamentale qu'il faut se demander. Est-ce qu'on peut agir de cette façon-là?

M. le Président, demandons-nous pas pourquoi nos consommateurs s'en vont faire leurs achats aux États-Unis. Demandons-nous pas pourquoi la solidarité est en train de disparaître. Qui peut être solidaire, avec une façon de gouverner comme ça? Les gens sont à la veille de se mettre des zippeurs après les poches,

comprenez-vous, avec des cadenas, pour ne pas que le gouvernement vienne fouiller dans leurs poches quand ils dorment. Pourquoi? Parce c'est rendu, actuellement, que ce qu'il y a de plus dangereux dans le Québec, ce n'est pas la mafia, c'est le gouvernement! C'est le gouvernement qui est en train...

On ne peut pas écouter les nouvelles sans entendre un malheur, M. le Président. Tantôt, le budget va arriver sans augmentation de taxes, puis on verra dans l'annexe iiii que, là, dans un bas de note, il est écrit - il faut prendre une loupe pour le lire - que les revenus de l'immatriculation auront doublé, parce qu'on augmentera les frais d'immatriculation des automobiles comme on a fait, je suppose, un vendredi après-midi, à 17 h 15, avant la fin de semaine de la Confédération, pour qu'il n'y ait plus personne à la galerie de la presse et que plus personne ne puisse réagir.

M. le Président, on assiste à un gouvernement où il n'y a plus de débat public, où on a mis des taxes dans toutes les municipalités au Québec. Comment? Avec un bâillon après quelques articles. On a assisté à ça avec le ministre. Comprenez-vous, quand il était directeur du Devoir, qu'il faisait la morale à tout le monde alors qu'il n'est même pas capable de pratiquer la morale, que lui-même pourfendait tous les gens au Québec dans ses beaux éditoriaux? Oui, M. le Président, la vertu était dans la théorie, mais le vice dans la pratique.

Le jupon dépasse. Le jupon dépasse, M. le Président, et je le dis sans sexisme, parce que ça n'a pas de bon sens qu'on voie ce genre de comportement là. Les gens sont effrayés quand ils regardent le gouvernement agir. Ils sont effrayés, et les gens doivent agir aussi, puis ils doivent réagir. La ligue de protection des contribuables contre le gouvernement, il va falloir qu'elle soit plus active, parce que le gouvernement est dangereux.

On verra un discours inaugural demain, après ça un discours du budget, alors qu'on est en train de vendre les actifs, qu'on est en train de débiter la galerie pour chauffer le poêle.

Est-ce que c'est normal, M. le Président? Auriez-vous confiance à un gestionnaire qui se comporterait comme ça? Je conseillerais à tous de relire la parabole du bon et du mauvais intendant. Vous vous rappelez le bon ou le mauvais intendant quand celui qui lui demande des comptes dit: Qu'est-ce que tu as fait avec ce que je t'avais confié? Il voulait que les gens se comportent correctement par rapport aux biens qu'il leur avait confiés.

Le gouvernement, les électeurs du Québec lui ont confié temporairement la gestion du gouvernement. Tantôt, il va y avoir des élections. Les gens vont vous demander: Qu'est-ce que vous avez fait avec l'argent que je vous ai confié, avec la gestion du Québec que je vous ai confiée? Comment vous êtes-vous comporté, M. le Président? Ils vont demander au ministre, député de Beauce-Sud: Qu'est-ce que tu as fait avec les ambulances? 1500 $ le voyage quand c'est l'assurance-automobile; 1500 $ le voyage quand c'est le bien-être social, puis quand c'est d'autres, 70 $ le voyage plus le kilométrage. Est-ce que c'est ça, un bon intendant? Est-ce que c'est ça? Est-ce que les députés qui sont ici présents, dans cette Chambre, vous auriez confié la gestion de vos biens? M. le député, qui êtes ici, de votre ferme laitière? Puis il aurait fait des ventes de feu comme ça! Qu'est-ce que vous diriez de cet intendant-là? Vous diriez que ça n'a pas de bon sens!

Puis là, actuellement, l'intendant, maintenant, n'est plus dans les ambulances; là il est rendu dans les actifs du gouvernement et puis il est en train de vendre à la course, à la dernière minute, en pleine récession économique, des biens que, normalement, on ne vend pas en récession économique alors que le taux d'inoccupation des bureaux est condisérable. Ce n'est pas le temps de vendre. Tout le monde sait ça. Tout le monde sait ça. Mais là, le gouvernement est en train de faire ça, M. le Président, et c'est pourquoi ça n'a pas de bon sens.

Et puis, je suis d'accord à 100 % avec mes collègues, la députée de Verchères qui a fait un discours extraordinaire, le député de Labelle aussi qui est en train de faire comprendre au ministre des Finances... Évidemment, faire comprendre au ministre des Finances, c'est quelque chose comme une mission impossible. J'aimerais mieux essayer de me mordre le front avec les dents d'en haut que d'essayer de convaincre le ministre des Finances! Ça serait peut-être plus faisable. (18 h 20)

Mais, M. le Président, j'aimerais vous dire simplement que c'est un projet de loi qui n'a pas de bon sens. On est en fin de session puis on n'a pas d'affaire à liquider le gouvernement comme on est en train de le faire. Alors que les citoyens paient les taxes qu'ils paient actuellement, les tarifs qu'ils paient actuellement, avec les déficits qu'on a actuellement, en plus, on vend les actifs, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je vous remercie, M. le député de Lévis. Alors, sur votre droit de réplique, M. le ministre des Approvisionnements et Services.

M. Robert Dutil (réplique)

M. Dutil: M. le Président, rapidement, en réplique, je tiens à préciser que la Société immobilière du Québec, évidemment, a été impliquée tout au long du processus de négociations avec les caisses populaires Desjardins, et que la loi qui avait à être adoptée était la loi

qui devait être présentée par le ministre titulaire, le ministre des Approvisionnements et Services. Et laisser croire, du fait qu'il n'y ait pas eu de présence du président de la Société immobilière à la commission parlementaire que ça veut dire qu'elle n'était pas impliquée et que les informations n'ont pas été données, ce n'est pas exact.

Deuxièmement, l'évaluation municipale était connue. C'est un chiffre qui monte à 414 000 000 $. Et nous avons fait des comparaisons entre le prix de vente et les réajustements à faire étant donné le fait que nous bénéficions d'un loyer extrêmement bas de 5 $ le pied carré, pour la majorité de nos espaces, jusqu'en l'an 2005; ça devait être pris en compte. Et si on le prenait en compte, la transaction se faisait véritablement à la valeur marchande. Je pense que cette démonstration-là, elle a été faite face à l'Opposition, et il n'était donc pas nécessaire d'avoir le directeur de l'évaluation de la municipalité, de la CUM de Montréal pour venir expliquer davantage.

Et, évidemment, quand j'ai parlé de mission accomplie, je ne parlais pas des divers autres problèmes que l'on peut rencontrer partout, y inclus au centre-ville de Montréal. Je parlais du fait que l'objectif du gouvernement était de participer à la construction du complexe Desjardins. Il l'a fait. C'est réalisé. Le complexe Desjardins peut voler de ses propres ailes et nous vendons notre actif pour cette raison-là. Je fais une différence entre le fait que nous ayons des actions minoritaires dans un complexe où il y a une partie commerces, une partie hôtellerie et le fait que nous possédions des espaces à bureaux à 100 % ailleurs et que nous n'avons pas l'intention, quand nous sommes le propriétaire d'espaces à bureaux, de vendre. Il n'y a pas de changement de notre politique de ce côté-là.

Je ne puis pas m'empêcher, M. le Président, rapidement, de vous dire, quant à la performance du député de Lévis tout a fait improvisée, qu'il est un critique coloré de tout ce qui se fait, mais évidemment superficiel. Je voudrais juste lui rappeler qu'il s'est un jour promené avec un chèque de 11 000 000 $ dans ses poches en provenance du fédéral, de l'argent des citoyens du Québec, pendant une semaine. Alors, quand il fait des leçons de gestion, il devrait se rappeler ce petit événement assez scandaleux en soi. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, ceci met fin au débat. Est-ce que le projet de loi 418, Loi modifiant la Loi sur la société immobilière du Québec, est adopté?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Adopté sur division. M. le Président.

Décision du président sur une demande

de directive concernant le refus de

répondre de la part d'un ministre

lors de la période de questions

Le Président: Alors, tel que je m'y suis engagé cet après-midi, au moment des renseignements sur les travaux de l'Assemblée, je vais maintenant rendre une décision concernant la demande de directive que m'avait soumise le leader de l'Opposition.

Jeudi dernier, à la fin de la période de questions, le leader de l'Opposition officielle a adressé une demande de directive à la présidence. L'objet de cette demande porte sur la régularité d'une absence de réponse à la suite d'une question dûment formulée à la période de questions orales. Il évoquait alors le cas survenu à cette séance où la ministre de l'Énergie et des Ressources s'est abstenue de toute réponse à une question posée par le député de D'Arcy-McGee. J'ai pris cette question en délibéré et je suis maintenant prêt à rendre ma décision. Je statuerai sur la question soulevée par le leader de l'Opposition officielle en me fondant non seulement sur le règlement, mais également sur la tradition parlementaire et les usages de notre Assemblée. En outre, j'indiquerai ce qu'en disent les auteurs et relaterai la situation sur ce point à la Chambre des communes d'Ottawa.

Afin de savoir si le refus de répondre mentionné à l'article 82 peut être implicite ou explicite et comporter ou non un énoncé de motif du refus, il est indispensable de retourner aux sources de cet article. L'article 82 tire son origine de l'article 171 du règlement précédent de l'Assemblée qui, à son tour, tire la sienne de l'article 686 du règlement Geoffrion. Le paragraphe 2 de l'article 171 du règlement précédent se lisait comme suit: «Un ministre ou un député peut toujours refuser de répondre à une question sans donner de raison et son refus ne peut être discuté d'aucune façon.» Le paragraphe 2 de l'article 686 du règlement Geoffrion s'énonçait de la façon suivante: «Un ministre peut refuser de répondre à une question sans donner de raison.» Sous cet article, les deux premières notes infrapaginales indiquent ce qui suit: «1. Quand un ministre refuse de répondre, il n'est pas permis à un député d'insister pour avoir une réponse. 2. L'orateur ne peut obliger qui que ce soit à répondre à une question.»

Ces deux anciennes dispositions des règlements précédents ont en commun qu'elles prévoient spécifiquement le refus de répondre à une question et qu'au surplus on indiquait que cela pouvait se faire sans donner de raison. Tous les éléments de ces anciennes dispositions n'ont pas été repris dans l'article 82 du règlement actuel, notamment, le fait de refuser sans donner de raison. Cependant, même si cet article a été rédigé autrement, cette nouvelle formulation impose-t-elle au ministre une nouvelle obligation?

Je dois constater que ce n'est pas le cas et il faut alors s'en référer aux usages antérieurs de l'Assemblée en pareil cas. en effet, la nouvelle disposition n'a rien changé au principe applicable à cette procédure particulière. s'il y a un changement outre la forme de la disposition actuelle, c'est par l'introduction du mot «notamment» au début de l'article 82. ce terme indique qu'on n'a pas voulu i limiter, mais plutôt élargir les circonstances dans lesquelles un ministre peut refuser de répondre à une question. La nouvelle formulation m'apparaît même moins restrictive que la précédente.

Examinons maintenant la pratique prévalant à la Chambre des communes d'Ottawa en cette matière. Celle-ci a fait l'objet de quelques décisions dont la plus récente, celle du président James Jerome, rendue le 15 avril 1975, a fixé l'usage actuellement en vigueur. Permettez-moi de vous citer l'extrait suivant de cette décision, et je cite: «Naturellement, les ministres peuvent répondre à une question, mais ils peuvent aussi la prendre en délibéré ou comme préavis. Ils peuvent aussi donner une explication si, pour une raison ou pour une autre, ils ne peuvent répondre immédiatement, ou, enfin, ils peuvent ne rien dire du tout.» Fin de la citation.

Quant aux auteurs, Erskine May, à la page 293 de la 21e édition de son traité, énonce ce qui suit, et je cite: «An answer to a question cannot be insisted upon if the answer be refused by a minister and the Speaker has refused to allow supplementary questions in these circumstances.» Fin de la citation.

Beauchesne, dans la sixième édition de Règlements annotés des formulaires de la Chambre des communes, à la page 125, s'exprime comme suit, et je cite: «Un ministre peut refuser de répondre à une question sans avoir à motiver son refus et il est contraire au règlement d'insister pour obtenir une réponse, aucun débat n'étant permis. Le refus de répondre ne peut donner lieu à la question de privilège.» Le règlement interdit de commenter ce refus. «Un député peut poser une question, mais il n'a pas le droit d'insister pour qu'on y réponde.»

Également, on retrouve dans le traité australien de J.A. Pettrfer, à la page 526, sous la rubrique "No obligation to answer", le principe suivant, et je cite: "It is the established practice of the House, as it is in the House of Commons, that ministers cannot be required to answer questions." On peut donc retenir les grandes lignes suivantes relativement au fonctionnement des Assemblées sur ce sujet particulier. Un ministre peut toujours refuser de répondre à une question. Il n'est pas permis à un député d'insister pour avoir une réponse. Le ministre peut refuser de répondre sans donner de motif, en donnant un motif ou en ne disant rien.

Le président ne peut obliger qui que ce soit à répondre à une question. En résumé, à la lumière des règlements, des diverses pratiques dans notre type de Parlement ainsi que des auteurs consultes, j'en conclus que le refus de répondre peut être explicite - le ministre dit qu'il refuse, en indiquant le motif de son refus - ou le refus de répondre peut aussi être implicite - le ministre ne dit rien. Cependant, vous comprendrez qu'il m'apparaîtrait souhaitable, pour faciliter le déroulement des travaux, que le refus d'un ministre de répondre à une question soit manifesté de façon expresse. Dans le cas contraire, je devrai constater qu'il n'y a aucune réponse et passer à une autre question. (18 h 30)

J'ajouterai en corollaire que, quoi qu'il en soit, pour la présidence, le refus de répondre, implicite ou explicite, motivé ou non, ne pourrait donner application à l'article 80 du règlement et permettre une réponse différée.

Débat de fin de séance

Alors, voilà. Maintenant, avant que nous ajournions nos travaux, il a été convenu qu'un débat de fin de séance devrait se tenir à ce moment-ci entre le député d'Arthabaska et le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation concernant une question posée la semaine dernière sur les négociations du GATT. Donc, à ce moment-ci, je vais reconnaître, comme premier intervenant, M. le député d'Arthabaska.

Négociations du GATT en matière agro-alimentaire

M. Jacques Baril

M. Baril: Oui, M. le Président. Comme vous l'avez dit, mercredi dernier, je posais une question au ministre de l'Agriculture, à savoir s'il était d'accord ou s'il approuvait les propos de son sous-ministre adjoint aux affaires économiques à l'effet que si les quatre piliers de l'agriculture québécoise ne faisaient pas partie ou étaient rejetés des ententes, des négociations du GATT, que ce ne serait pas un drame au Québec, et que le gouvernement du Québec appuierait quand même la position du gouvernement fédéral de signer cette entente-là.

J'ai été étonné de cette déclaration du sous-ministre adjoint dans Le Devoir du 28 février parce que ça contrevient ou ça contredit exactement la position du gouvernement du Québec qui, depuis deux ans, s'acharne, s'évertue à dire qu'il va défendre d'une façon acharnée la protection de nos offices de commercialisation au Québec. Cette position ambiguë du gouvernement du Québec est semblable à celle du gouvernement fédéral. Malgré qu'il dise qu'il défend les piliers de notre agriculture québécoise, il va défendre ça à l'étranger et c'est tout à fait contradictoire avec ses propres propositions. Donc, je demanderais au ministre, à savoir: Est-ce qu'il était

d'accord avec ça?

Comme on connaît le ministre de l'Agriculture, c'est plutôt - je ne sais pas le mot français - un «showman». C'est un gars de théâtre, en français, je ne sais pas quoi. Ici, pour la caméra, il est parti sur une virée en disant qu'il ne comprenait pas d'abord, de toute façon, ce que, moi, je disais et c'est ça qui est le drame. C'est ça qui est grave parce que c'est le ministre de l'Agriculture du Québec. Ce n'est quand même pas n'importe qui. C'est quand même le ministre de l'Agriculture du Québec qui est là pour défendre les agriculteurs et les agricultrices québécois et qui dit: II n'y a rien là et il fait une farce ici, en cette Chambre, pour s'en tirer ou s'en sortir, à l'effet de dire: J'aime mieux que mes fonctionnaires, au lieu de regarder par la fenêtre, regardent vers l'avenir. Ça, un coup qu'il a dit ça, c'est beau ça. Mais pour les agriculteurs qui, eux autres, travaillent dans le champ, c'est quoi que ça représente?

C'est cette façon que je déplore du ministre de toujours revirer un peu en ridicule celui qui pose des questions, de le revirer en ridicule, à savoir que, lui, il ne connaît rien, en parlant de moi-même. Moi, je ne connais rien là-dedans. Pendant que lui-même, par ses réponses, souvent, il démontre qu'il ne connaît rien en agriculture. Parce que là, il défendait la position de son sous-ministre en signalant que le vice-président du Parti québécois, Bernard Landry, était lui-même contre toute subvention à l'agriculture, et c'est là qu'est le danger. C'est ça qui est dangereux, M. le Président, et c'est ça que je n'admets pas.

C'est pour ça que j'ai demandé ce débat de fin de séance. Le ministre ne semble même pas faire la différence entre ce que Bernard Landry, vice-président du Parti québécois, dénonçait, les innombrables, les incalculables subventions que le gouvernement fédéral donne à l'agriculture de l'Ouest - 4 000 000 000 $ cette année, entre autres, 4 200 000 000 $ au niveau des céréales - qui ne font pas partie des offices de commercialisation, pendant que ces mêmes offices, chez nous, ne coûtent pas un sou au gouvernement du Québec ni au gouvernement d'Ottawa.

Et c'est ça le drame, M. le Président, que le ministre de l'Agriculture doit être là à agir comme leader, à agir comme motivateur des agriculteurs, à supporter les agriculteurs et les agricultrices. J'allais dire, pratiquement, qu'il les méprise, parce que tous les outils qu'on s'est donnés depuis des années, il compare ça en disant: «II n'y a absolument rien là», parce que son sous-ministre a dit que, si des ententes étaient signées tel qu'on le préconise au niveau des négociations du GATT, il n'y aurait rien là. Les producteurs laitiers auraient deux, trois ans sans sortir, mais, au niveau des producteurs de volaille et de dindon, ils seraient lavés, et c'est les expressions que le sous-ministre a utilisées.

Ils seraient littéralement lavés.

C'est ça que je reproche, et je demande au ministre de l'Agriculture: Comment se fait-il qu'il appuie son sous-ministre, qui est responsable des affaires économiques, qu'il a lui-même délégué au moins deux fois à Bruxelles pour défendre notre agriculture alors que son sous-ministre n'y croit même pas, aux piliers des agricultures québécoises, soit nos offices de commercialisation, les assurances-stabilisation, les assurances-récoltes, notre financement agricole et nos systèmes de quotas, pour que les gens comprennent mieux au lieu des offices de commercialisation? Comment se fait-il que le ministre approuve la position de son sous-ministre?

Il a beau faire un spectacle, ici, en cette Chambre, les agriculteurs, les agricultrices, les producteurs d'oeufs et les producteurs de volaille, depuis la déclaration du sous-ministre, sont dans l'incertitude et, juste en terminant, ça a un impact économique, M. le Président, de 400 000 000 $ au Québec, et il n'y a rien là, ils vont être lavés et il n'y a aucune position, puis le ministre appuie ça.

Le Président: Je cède maintenant la parole à M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, je veux bien, évidemment, accepter tous les qualificatifs que mon collègue le député d'Arthabaska veut bien coller à mon nom, mais il y a une chose que je vous dirai bien honnêtement. En ce qui me concerne, moi - et je ne parie pas nécessairement pour les autres, mais en ce qui me concerne - je me refuserai toujours, M. le Président, à me comporter en sépulcre blanchi, en Ponce Pilate et en quelqu'un qui veut justement maquiller la vérité.

Ceci étant dit, M. le Président, la seule façon de savoir exactement ce que les gens ont dit, c'est de prendre les paroles textuelles, exactes, rapportées par les individus eux-mêmes. Mon sous-ministre à l'Agriculture, mon sous-ministre adjoint, M. le Président, dit ceci: Le gouvernement québécois croit toujours que le GATT devrait accepter les quatre piliers de l'industrie bioalimentaire défendus par le front commun dont il fait partie avec l'UPA et la Coopérative fédérée. Ça, c'est mon sous-ministre qui a dit ça. Donc, on ne met aucunement en péril, on ne change aucunement la façon de défendre ce qu'on appelle l'agriculture.

Ça, ce sont les premiers mots, les premières phrases de ce qu'a dit mon sous-ministre adjoint. Je n'expliquerai pas davantage pourquoi il a dit, par la suite: Advenant le cas où on ne serait pas satisfait, on ne néglige pas de regarder ce qui pourrait être fait. Allons maintenant voir, M. le Président... Ça, ça parle par soi-même. Ces

phrases-là sont explicites. Devoir expliquer ça une minute de plus, c'est faire injure à l'intelligence de ceux qui m'écoutent. Donc, je n'ai pas besoin d'aller plus loin.

Prenons maintenant exactement ce que dit M. Bernard Landry. Lui, je dois vous dire que ce gars-là est comme moi; il ne se comporte pas en sépulcre blanchi, en Ponce Pilate, pour maquiller la vérité. Lui, il est sincère. Je suis obligé de vous dire ça parce que je le lis au texte. Et Bernard Landry n'est pas un membre du Parti libéral, donc on ne me calculera pas partisan, M. le Président.

Bernard Landry, sur les réseaux SRC à CKTM-TV, à Trois-Rivières, à 17 h 30, «En Mauricie ce soir,» dit textuellement ceci. À une question qui lui est posée en ce qui concerne le GATT, il dit ceci, textuellement. C'est de la bouche de M. Bernard Landry, qui se comporte en honnête citoyen, qui ne maquille pas la vérité: Mais ça ne veut pas dire que le Québec peut s'isoler, évidemment, que le Canada pourrait quitter le GATT ou que le Québec pourrait - le Québec souverain - ne pas être membre du GATT. Donc, il faut s'ajuster et les agriculteurs québécois ont fait la preuve de capacités d'«ajustation» fantastiques - je dis «d'ajusta-tion», c'est lui qui l'a dit, pour se reprendre après ça et dire «d'ajustement» - depuis 25 ans et je n'ai aucune crainte pour eux.

Plus loin, M. Bernard Landry dit ceci: Dans le porc, évidemment, on exporte. Alors, là, il faut jouer la règle internationale - donc, Bernard Landry dit ce que certains de mes collègues d'en face oublient de dire, M. le Président, c'est qu'il ne faudrait pas défendre uniquement les producteurs d'oeufs, les producteurs de volaille et les producteurs de lait. Il dit: Dans le porc, évidemment, on exporte. Alors, là, il faut jouer la règle internationale - donc, il est prêt à jouer la règle internationale. Maintenant, ce que nos collègues d'en face oublient, c'est qu'il y a d'autres agriculteurs qui ont besoin d'être défendus. Autrement, on cesse d'exporter puis on exporte pour 300 000 000 $. Mais dans les autres productions, je ne suis pas plus pessimiste que ça. D'ailleurs, on va avoir le droit, pendant des années, de mettre des droits de douane très élevés - donc, il pense exactement comme mon sous-ministre, M. Bernard Landry. Il ne trimballe pas la vérité sans précautions dans notre langage. Plus de 100 % et plus sur les productions essentielles, ça nous donne le temps de voir venir et je ne suis pas - trois petits points de suspension - pessimiste. Ça, M. le Président, c'est Bernard Landry qui dit ça. Il fait peut-être un peu de théâtre, comme moi, mais il se comporte en honnête citoyen, M. le Président.

Et je termine en disant ceci: Même si j'étais en Europe à ce moment-là, j'ai fait sortir ce qu'a dit M. Jacques Proulx quand on lui a posé la question au «Point» en ce qui concerne la signature des accords du GATT. M. Jacques

Proulx a dit ceci: Oui, je répondrai à M. Mul-roney par l'absurde. C'est bien évident qu'il faut qu'il y ait un organisme mondial qui va gérer le commerce. On ne peut pas garder le statu quo. À l'heure actuelle, c'est l'anarchie la plus totale. Je termine par ça. Oui, c'est évident. Écoutez, il n'y a pas le moindrement une personne sensée qui pourrait affirmer qu'il ne faut pas signer le GATT. C'est M. Jacques Proulx qui dit ça.

On pourra bien faire tous les spectacles qu'on voudra, on pourra se comporter comme on voudra, mais on n'a pas le droit de tromper la classe agricole, M. le Président. Je ne voudrais pas que vous considériez mes paroles, là-dedans, parce que je n'ai dit qu'à peu près trois phrases qui relèvent du ministre de l'Agriculture. J'ai cité des gens au texte, le vice-président du Parti québécois et mon sous-ministre. À toutes fins utiles, ces gens-là sont sur la même longueur d'onde, M. le Président.

Le Président: Merci. Alors, je cède maintenant la parole au député d'Arthabaska pour sa réplique.

M. Jacques Baril (réplique)

M. Baril: Comme vous avez pu le constater, M. le Président, même avec un débat de fin de séance, le ministre ne nous a absolument pas donné sa position. Il a pris cinq minutes pour nous expliquer la position des autres: la position du président de l'UPA, la position du vice-président de l'UPA et la position de son sous-ministre. Il ne nous a pas dit la sienne, laquelle. Il n'en a pas parlé de la sienne, de sa position.

Ça fait deux ans qu'il ment. Excusez, ça fait deux ans, M. le Président - je sais que ce n'est pas parlementaire, je vais me reprendre avant que vous me le disiez - ça fait deux ans qu'il trompe les producteurs en disant: On vous défend à tous crins. Son sous-ministre dit: Ce n'est pas grave. Même si le GATT passe, les agriculteurs, les producteurs de volaille, les producteurs d'oeufs, ils sont lavés. 700 producteurs...

Dans sa déclaration sur les perspectives économiques... L'an prochain, il va y avoir 700 producteurs de moins au Québec. C'est pas grave, comprends-tu. C'est ça l'avenir de l'agriculture. C'est pas grave, on s'en foute comme de l'an quarante! C'est quoi la réaction du ministre là-dessus? Il ne dit rien. Il fait son spectacle ici, en cette Chambre. Quand le sous-ministre dit que les producteurs de poulet vont être lavés, j'ai des prix ici. Les producteurs de lait... Le coût de production des producteurs de poulet au Québec, c'est seulement 0,17 $. Il y a seulement 0,17 $ le kilo d'écart avec les États-Unis. Il y a une étude qui vient de sortir comme quoi 7 États américains seulement... Le gouvernement fédéral, pour une bonne chose qu'il a faite... Il a fait calculer les coûts de production américains. Ils n'ont pas

eu le temps de faire les 51 États. C'est trop compliqué parce qu'ils subventionnent ça de toute façon: 9 000 000 000 $ de subventions dans 7 États américains! On s'en vient dire, le sous-ministre responsable des affaires économiques dit: Ils vont être lavés nos producteurs, il n'y a plus rien là. 700 producteurs de moins, ce n'est pas rien.

M. le Président, en terminant, je dirais que le ministre de l'Agriculture, c'est un fossoyeur de l'agriculture québécoise. Il a mis un frein à l'établissement des jeunes agriculteurs. Il les a traités de voleurs et de bandits, l'automne passé, parce qu'ils se sauvaient avec 15 000 $ - selon lui - des investissements qui devaient se terminer en agriculture.

Donc, M. le Président, en terminant, je n'ai pas eu plus de réponse que je n'en ai eu l'autre jour. Le ministre vient de nous faire la démonstration qu'il n'est pas un leader, qu'il n'est pas un chef de file, qu'il n'est pas un motivateur pour les agriculteurs et les agricultrices québécois. Il est plutôt un fossoyeur, un éteigneur.

Le Président: Alors, ceci met donc fin à ce débat de fin de séance. Je vais reconnaître M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Bélisle: M. le Président, je fais motion pour ajourner nos travaux au jeudi 19 mars 1992, à 14 heures.

Le Président: très bien. est-ce que cette motion est adoptée? adopté. en conséquence, nos travaux sont donc ajournés à demain, le jeudi 19 mars, à 14 heures.

(Fin de la séance à 18 h 44)

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