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Version finale

32e législature, 4e session
(23 mars 1983 au 20 juin 1984)

Le vendredi 1 juin 1984 - Vol. 27 N° 100

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures quatre minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons nous recueillir quelques instants. Veuillez prendre vos places.

Aux affaires courantes, il n'y a pas de déclaration ministérielle, ni de présentation de projet de loi, ni de dépôt de documents.

Modifications concernant

la vérification des engagements financiers

Au dépôt de rapports de commissions, j'ai le plaisir de déposer le rapport de la commission de l'Assemblée nationale qui a siégé hier, le 31 mai 1984, afin d'apporter des modifications aux règles de fonctionnement des commissions concernant la vérification des engagements financiers et de discuter de diverses affaires courantes. Le rapport peut-il être adopté, M. le Vice-Président de l'Assemblée?

Adoption

M. Jolivet: Permettez-moi, M. le Président, de faire motion pour qu'on adopte le rapport de la commission de l'Assemblée nationale.

Le Président: Ce rapport est-il adopté? Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Il n'y a pas de pétition, ce qui nous mène à la période de questions des députés. M. le député de Mont-Royal.

Questions et réponses orales

Les propos du premier ministre au sujet de Nordair

M. Ciaccia: M. le Président, hier, j'ai invité le premier ministre à répondre sur les divergences de points de vue entre le ministre des Transports et lui-même quant à l'offre pour l'achat de Nordair. Le premier ministre a dit que c'était une question de procédure. Peut-être a-t-il eu le temps de se préparer.

Mardi, le ministre des Transports avait indiqué qu'il appuyait l'offre de Innocan pour l'achat de Nordair. Le lendemain, le premier ministre a indiqué qu'il avait un préjugé favorable et qu'il appuyait l'offre des Cris. Hier, un communiqué de presse a été émis par son chef de cabinet, M. Jean-Roch

Boivin, indiquant que le gouvernement appuyait l'offre de Innocan pour l'achat de Nordair. Comment le premier ministre explique-t-il son changement d'attitude alors qu'il est venu contredire son propre ministre des Transports et que le lendemain, son chef de cabinet écrit au ministre fédéral que le gouvernement appuie l'offre de Innocan?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, ce que j'ai dit découlait d'une rencontre qu'on avait eue dans le Nord lors d'un voyage que je faisais il y a quelques jours, une rencontre avec M. Billy Diamond, le chef du Grand Conseil des Cris, qui m'apprenait certains changements dans l'attitude des Cris eux-mêmes vis-à-vis d'Air Ontario. C'est-à-dire qu'ils auraient pris la majorité du nouveau groupe qu'ils avaient constitué ensemble. Ce que j'ai dit hier, essentiellement, c'était ceci... On s'est arrangé immédiatement pour transmettre la nouvelle à Québec - je cite - "et il a été entendu que le ministre des Transports, qui a précisément dit que, jusqu'à nouvel ordre, on allait dans tel sens, va s'empresser de prendre contact, premièrement, avec les interlocuteurs cris et d'étudier cela et de l'étudier dans un sens favorable si cela devait confirmer les objectifs essentiels qu'on connaît qui sont que Nordair reste à Montréal."

Alors, on a étudié, en effet, très rapidement. On a pris contact et surtout on s'est consulté, ce qui est parfaitement normal, parce qu'il y avait là un élément nouveau quand même, et le résultat, en concentré, se trouve dans le télex qui, sous forme de communiqué, a été transmis, d'abord, au cabinet du premier ministre fédéral et, ensuite, transmis aux journaux. Ce télex comporte une phrase que, je crois, le député de Mont-Royal a oubliée par inadvertance. Alors, je vais le lire au complet. "Après avoir consulté le ministre des Transports et le président du Comité ministériel permanent du développement économique, le premier ministre Lévesque confirme que le gouvernement du Québec appuie la proposition faite par Innocan d'acheter Nordair. L'Association des Cris au groupe ainsi formé serait sûrement souhaitable, mais devrait intervenir, le cas échéant, après la décision du cabinet fédéral."

Ce que cela a changé, c'est que, surtout à cause du fait qu'il n'y aura pas de

déréglementation dans le Nord - donc, il y a un service qui va continuer d'être assuré de la même façon dans la partie nordique où les Cris et aussi les Inuits sont particulièrement intéressés - on a donné une impulsion à la participation des Cris dans l'éventuelle transaction ou dans l'éventuel nouveau groupe de Nordair. Ce qui a d'ailleurs été, heureusement, confirmé par une partie de la décision fédérale que le député de Mont-Royal n'ignore sûrement pas et qui est de demander que les Cris soient impliqués, qu'éventuellement les autochtones du Nord soient impliqués.

Il nous semble qu'il n'y a rien de plus logique que cela. Premièrement, Nordair restera solidement enracinée au Québec. Deuxièmement, une place importante est réservée pour les autochtones s'ils continuent d'en manifester le désir. Troisièmement, il faut bien dire une chose: c'est qu'il y a là, après tant d'efforts, des années d'efforts, de revendications, de pourparlers, une étape logique qui peut mener, je crois, à un développement dans le domaine aérien qu'on avait presque fini d'espérer depuis quelque temps.

Le Président: M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, je ne comprends pas tout à fait, je comprends mal l'explication du premier ministre. Le premier ministre doit sûrement être au courant que Innocan avait déjà offert aux Cris de participer à l'achat de Nordair sans la participation d'Air Ontario. Alors, cela n'a rien ajouté.

Le Président: M. le député.

M. Ciaccia: Est-ce que - j'ai arrêté juste en temps - le premier ministre veut nous dire qu'il ne consulte pas son ministre des Transports avant de faire une telle déclaration? Le premier ministre n'est-il pas conscient que ses paroles ont un certain poids parce que c'est le premier ministre du Québec, et qu'en faisant une telle déclaration, cela a porté à confusion, cela a pu porter aussi à de fausses expectatives de la part des Cris? Est-ce que la position du premier ministre avait pour but d'acheter des votes pour les Cris pour la prochaine campagne, soit référendaire ou électorale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est vraiment jouir d'une imagination extrêmement fertile. Ce qui est arrivé, il y quelques jours, c'est qu'aussitôt que j'ai eu cette conversation très rapide avec M. Diamond, j'ai transmis à Québec, aux intéressés à commencer par le ministère des

Transports, du Grand-Nord où nous étions, la nouvelle de façon qu'on puisse intégrer dans les dernières réflexions, cette donnée qui avait quand même quelque chose de nouveau. Pour le reste, le télex d'hier explique, et je ne recommencerai pas à faire tout le cheminement de nouveau.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

Des correctifs à Louis-Hippolyte-

Lafontaine et Robert-Giffard

M. Paradis: M. le Président, les coupures budgétaires imposées par le Parti québécois continuent de provoquer l'engorgement des salles d'urgence et des hôpitaux à travers toutes les régions du Québec. Ces coupures affectent également des centres hospitaliers où sont hébergés ceux et celles qui sont sans aucun doute les plus démunis de notre société. Le ministre aura compris qu'il s'agit des centres hospitaliers Louis-Hippolyte-Lafontaine et Robert-Giffard.

Récemment, les médias ont fait état de situations inhumaines et intolérables dans ces centres hospitaliers. Des droits fondamentaux des bénéficiaires sont ' continuellement bafoués. Hier le ministre des Affaires sociales s'est engagé à apporter des correctifs en l'occurrence au centre hospitalier Louis-Hippolyte-Lafontaine. Ma question au ministre: Quels sont les correctifs que vous comptez apporter?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Laurin: M. le Président, le député de Brome-Missisquoi répète la même cassette malgré les faits qui viennent le démentir constamment. Je lui répète encore une fois que c'est le ministère des Affaires sociales qui a le plus gros budget cette année, 7 100 000 000 $. Une augmentation de 6,5%, alors que les autres ministères augmentent beaucoup moins, que nous avons un plan de développement de 180 000 000 $ d'immobilisations, de 54 000 000 $ de développement, qu'il y a énormément d'augmentations qui ont été apportées, que les coupures, les compressions pour cette année ne portent que sur trois dixièmes pour cent du budget total des hôpitaux. Il faut le lui répéter mais j'espère que la population comprendra qu'on ne fait ici que de la démagogie.

En ce qui concerne Louis-Hippolyte-Lafontaine, j'ai dit que nous avons pris nos responsabilités. Nous avons commandé immédiatement un rapport d'enquête que nous avons maintenant en notre possession, que nous étudions, qui a été transmis au CRSSS de Montréal, comme la loi nous le

demande. Le CRSSS doit nous faire parvenir rapidement ses avis, ses recommandations et dès que nous les aurons en main nous procéderons aux correctifs nécessaires. J'ai assuré hier le député et la population que dès que nous aurons en main, dès que nous connaîtrons ces avis et recommandations -et on peut se douter, connaissant déjà les recommandations passées du CRSSS, dans quel sens ils iront - nous prendrons des décisions rapides et appropriées pour que particulièrement les plus démunis de la société, c'est-à-dire les déficients mentaux et les personnes âgées, puissent recevoir les traitements humains, décents, adéquats, modernes, scientifiques dont ils ont besoin comme tous les autres citoyens de la société qui ont des affections dont ils souffrent. Le moment viendra quand nous aurons en main tous les éléments, M. le Président.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: M. le Président, le 21 mai 1984, soit le 21 mai dernier, un rapport de la commission d'enquête sur la qualité de l'administration du fonctionnement de l'hôpital Louis-Hippolyte-Lafontaine était produit. Est-ce que le ministre des Affaires sociales a soumis ce rapport au Conseil des ministres?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Laurin: M. le Président, comme je viens de le dire, je le répète, avant d'aller au Conseil des ministres avec un projet, il faut avoir le dossier complet et, comme je l'ai dit aussi, lorsque nous aurons en main tous les éléments du dossier, nous prendrons les décisions. Le Conseil des ministres, au besoin, donnera son appui aux propositions que nous ferons mais, encore une fois, il faut attendre que nous ayons en main tous les éléments du dossier.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi suivi de Mme la députée de Maisonneuve.

M. Paradis: N'est-il pas exact, M. le ministre, que votre ministère a reçu dès 1978 un rapport sur la situation à Louis-Hippolyte-Lafontaine, que votre prédécesseur a créé un comité tripartite sur le fonctionnement de Louis-Hippolyte-Lafontaine en 1980, que vous avez reçu de Louis-Hippolyte-Lafontaine un autre rapport en 1983? Est-ce que vous allez faire avec le présent rapport ce que vous avez fait avec les précédents, soit le "tabletter" et laisser souffrir les plus démunis de la société?

Le Président: M. le ministre des

Affaires sociales.

M. Laurin: M. le Président, ce sont des faits bien connus. Il y a eu plusieurs études internes et externes sur la situation de Louis-Hippolyte-Lafontaine, le conseil régional de santé et des services sociaux a déjà participé à des comités, il y a eu des études à l'intérieur de l'hôpital sur le devenir de l'hôpital Louis-Hippolyte-Lafontaine. Mais justement, ces efforts n'ont abouti que partiellement. C'est une des raisons pour lesquelles j'ai demandé une enquête publique sur les allégations qui avaient été faites récemment. C'est justement parce que ces enquêtes ou ces études n'ont pas abouti qu'il revient maintenant au gouvernement, une fois qu'il aura en main les éléments suffisants, de prendre des décisions qui iront au fond des choses et qui régleront une fois pour toutes le problème qui nous est soumis.

Le Président: Une question complémentaire, Mme la députée de Maisonneuve.

Mme Harel: M. le ministre des Affaires sociales, j'aimerais vous demander si vous considérez comme prioritaire une des recommandations contenues dans le rapport d'enquête de décentraliser les services de psychiatrie externes dans les différents quartiers desservis par l'hôpital Louis-Hippolyte-Lafontaine. À ce titre, j'aimerais savoir si, parmi justement ces priorités qui pourront être retenues, il y a la réouverture du service externe de psychiatrie qui était offert à la population de Hochelaga-Maisonneuve dans les locaux du CLSC et qui ne l'est plus depuis bientôt trois ans. Est-ce qu'on peut compter que la population de Hochelaga-Maisonneuve va pouvoir bénéficier à nouveau de services de psychiatrie externes facilement accessibles à la population?

Le Président: M. le ministre des Affaires sociales.

M. Laurin: M. le Président, c'est là en effet une des constatations et recommandations du rapport. On constate que la sectorisation qui s'impose maintenant pour le traitement des malades psychiatriques n'a été suivie que partiellement au centre Louis-Hippolyte-Lafontaine et surtout que ses cliniques externes de secteur qui préférablement devraient être situées en pleine communauté dans le milieu qu'elles doivent desservir étaient pour la plupart d'entre elles situées à l'intérieur des locaux de l'hôpital avec certains inconvénients que la commission d'enquête a bien mis en lumière. Lorsque le dossier sera complet, comme je viens de le dire, ce sera sûrement là une des voies de solution que nous prendrons et je ne doute pas qu'il sera

nécessaire de réinstaurer dans les secteurs eux-mêmes ces cliniques qui ont pour but de répondre immédiatement et de la façon la plus appropriée possible aux patients qui souffrent de maladie mentale, soit à leur début ou lorsqu'ils se présentent en état de crise.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, question principale.

La signalisation unilingue française aux sorties des autoroutes

M. Ciaccia: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports. Il était ici il y a quelques instants. Il est là? Merci.

Mercredi, en réponse à une question du député de Gatineau qui lui demandait s'il n'était pas conscient du danger que pourrait comporter une affiche installée dans le sens inverse de la circulation sur une sortie d'autoroute et qui se lit "Reculez", pour une personne inhabile à lire le français, le ministre des Transports, et je dis bien le ministre des Transports, disait, et je cite le journal des Débats: "Quand le député de Gatineau dit qu'il y a des affiches qui disent "Reculez", je n'en ai jamais vu au Québec des affiches qui disent "Reculez". Ce n'est pas cela qu'on utilise." Le ministre n'a-t-il jamais vu au Québec une affiche comme celle-ci? N'en avez-vous jamais vu? (10 h 20)

Le Président: M. le député, il y a un rappel au règlement de la part du leader du gouvernement.

M. Bédard: M. le Président, je soulève une question de règlement ou de demande de directive en vertu de notre règlement. Je comprends que le député qui pose la question veut se rendre le plus convaincant possible et il réussit à l'être aussi, je pense. Je pose simplement la question: Jusqu'à quel point l'Assemblée nationale peut-elle être une place où on utilise, en fait, les moyens qu'utilise le député? Autrement, cela peut devenir très rapidement une foire parce que, de part et d'autre, il y a toutes sortes de manières d'essayer de prouver son point de vue. Il me semble que c'est plutôt par des questions et des réponses.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: M. le Président, sur la question de règlement soulevée par le leader du gouvernement, sans doute qu'il conviendra que quand on pose une question au ministre des Transports sur l'effet que peut avoir une affiche - il est responsable de l'application du Code de la sécurité routière - et que le ministre des Transports répond qu'il n'a jamais vu un tel panneau...

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: ...eh bien, on prend les moyens qu'il faut pour lui faire comprendre.

Le Président: C'était un appel au règlement. Donc, il est nettement préférable et plus utile pour le président quand le leader plaide sur le fond de la question plutôt que de profiter de leur intervention pour faire une intervention.

M. Bédard: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: Très respectueusement pour mon collègue leader de l'Opposition, je ne crois pas que son argumentation soit très forte parce qu'il y a toutes sortes de manières de convaincre un collègue que quelque chose existe ou non. Ici, à l'Assemblée nationale, je pense que la parole appartient à n'importe qui pour faire valoir son point de vue. M. le Président, s'il fallait employer l'argumentation du leader de l'Opposition... Ce n'est pas parce que c'est le ministre des Transports qu'on peut apporter des affiches de circulation ici. Demain matin, est-ce qu'on va amener un camion? Peut-être une autoroute à un moment donné qui n'est pas faite ou qui devrait être continuée. Je ne crois pas que l'argumentation soit sérieuse.

M. Gratton: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Sur le fond de la question de règlement, M. le Président, je vous signale qu'il n'y a aucune disposition dans nos règles de pratique qui interdise au député de Mont-Royal d'exhiber un document.

M. Bédard: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: II y a quand même des dispositions très claires et, je dirais, presque une tradition que l'Assemblée nationale n'est pas un endroit pour faire de la réclame comme des compagnies de savon avec des affiches. Comme je le disais tout à l'heure, c'est pour cela que... J'ai laissé le leader de l'Opposition s'exprimer. Est-ce qu'on peut s'exprimer de ce côté-ci? J'en faisais une question de directive, M. le Président, parce que je pense que dans ce domaine il faut

être d'une certaine prudence parce que s'il y a certains précédents qui s'établissent, jusqu'où pourront-ils aller? Je crois que c'est une question très sensée qu'il faut se poser.

M. Dupré: Question complémentaire.

Le Président: Sur le rappel au règlement et la demande de directive en même temps. Je vais la prendre en délibéré tout en signalant que depuis l'avènement de la radiotélévision des débats, on a tranquillement commencé à développer une pratique heureuse ou malheureuse, en vertu de laquelle des députés viennent en Chambre et, avec des tableaux faits à l'avance, de part et d'autre... C'est une question qu'il faudrait que vous posiez et il se peut, en effet, à un moment, que cela contrevienne singulièrement au décorum de l'Assemblée nationale. Quoi qu'il en soit, je la prends en délibéré. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Sûrement que le premier ministre a vu ce panneau dans le dossier d'Innocan.

Le Président: M. le député de Mont-Royal, avez-vous toujours une question? Avant de poser une question complémentaire, il faut terminer la première question.

M. Bédard: ...de l'Opposition et la continuité dans la banalité.

Le Président: II y a eu un rappel au règlement en cours de question. M. le député de Saint-Hyacinthe s'était levé bien avant. En complémentaire, M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Dupré: En complémentaire au ministre de la Justice, M. le Président. Est-ce qu'un citoyen, même un député, peut subtiliser un panneau du ministère des Transports, et à quelle fin? Même si on sait que le rouge, déjà, ça fait peur, est-ce qu'ils ont le droit d'apporter...

Le Président: Si le ministre de la Justice veut répondre, je n'ai pas d'objection, je vous signale que vous lui demandez presque une opinion professionnelle. M. le ministre de la Justice.

M. Johnson (Anjou): M. le Président, si je comprends bien, le député de Saint-Hyacinthe laisse entendre qu'il y a peut-être matière à évaluation de la provenance de cette chose et du contexte dans lequel cela a été fait. Nous allons évaluer la chose.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Vous me permettrez de dire, M. le Président, qu'on doute qu'il y ait une enquête publique là-dessus. Le gouvernement n'est pas très friand d'enquêtes.

La question du député de Mont-Royal visait à savoir si le ministre des Transports avait déjà vu l'affiche dont on lui parlait mardi dernier. S'il ne l'avait pas vue avant ce matin, il sait maintenant de quoi on parle. Dans ce contexte, pourrait-il nous dire s'il considère qu'une telle affiche unilingue installée de façon à être lisible par un automobiliste seulement après qu'il s'est engagé en sens inverse à la circulation sur une sortie...

Le Président: On ne fera quand même pas des modifications au mobilier de l'Assemblée nationale en pleine période de questions. Voulez-vous retirer le panneau en question... M. le leader de l'Opposition. À l'ordre!

M. Gratton: M. le Président, si le leader du gouvernement voulait écouter ma question, il verrait qu'il y a une profondeur, en effet. Il y a 490 personnes qui se sont engagées en sens inverse sur une sortie d'autoroute, et il y en a une qui s'est tuée dans un accident il y a deux ans.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Gratton: Ma question complémentaire, je la reprends, M. le Président.

Le Président: Oui, allez-y.

M. Gratton: Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il considère qu'une telle affiche unilingue installée de façon à être lisible par un automobiliste seulement après qu'il s'est engagé en sens inverse à la direction de la circulation sur une sortie d'autoroute ne constitue pas un danger public quand l'automobiliste est inhabile à lire le français? En l'occurrence, entend-il, comme le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration l'a suggéré, assurer qu'à l'avenir ces affiches soient bilingues là où elles sont installées?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: M. le Président, par rapport à l'affiche elle-même, je ne peux quand même pas dire que j'ai vu une affiche lorsque je ne l'ai pas vue. Je dois dire là-dessus - je pense que j'ai un bon chauffeur -que depuis longtemps je me conforme aux directives du premier ministre de ne pas conduire moi-même ma voiture. Je comprends une chose, M. le Président, c'est que ce soient les gens de l'Opposition qui aient vu cette affiche les premiers. C'est

bien leur habitude de s'engager en sens inverse dans un sens unique.

M. le Président, sur la question qui est posée par le député de Gatineau - je comprends qu'il l'ait vue le premier cette affiche - je me suis engagé à l'Assemblée nationale mercredi à faire déposer un rapport par mon ministère. Ce rapport a été demandé et lorsqu'il sera prêt je le déposerai. (10 h 30)

Par ailleurs, je dois dire que nous avons quand même l'habitude de voir des pictogrammes dans le paysage et parfois il y a des mots là-dessus. Il faut s'attendre à en voir en français ici au Québec - cela me paraît bien clair - comme nous en voyons en anglais en Ontario ou aux États-Unis. Les Québécois respectent les signaux de signalisation. J'attends ce rapport de mon ministère et les recommandations qui en découleront. Quant à moi, il reste que la loi 101 s'applique au Québec autant sur les routes qu'ailleurs au Québec.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Est-ce que je pourrais signaler au ministre, M. le Président, qu'en Ontario...

Le Président: Cette question-ci a donné lieu à suffisamment de bris du règlement. La question, en complémentaire.

M. Gratton: Est-ce que le ministre est au courant, M. le Président, que la situation ne se présente pas en Ontario parce qu'ils n'ont pas une disposition dans leur Code de la route qui est celle de l'article 287 de notre Code de la sécurité routière et qui exige qu'on installe de telles affiches pour ne pas déroger à l'article 286 qui interdit la marche arrière sur des routes à accès limité? Est-ce que le ministre est au courant de cela? Est-ce qu'il a besoin d'un rapport? Est-ce qu'il attendra que 500 autres personnes s'engagent en sens inverse dans une seule sortie de l'autoroute Ville-Marie? Est-ce qu'il attendra, M. le Président, que d'autres accidents se produisent avant d'agir comme son collègue des Communautés culturelles et de l'Immigration a déjà indiqué publiquement qu'on devait le faire?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: M. le Président, nous faisons tous les efforts nécessaires pour assurer le maximum de sécurité sur les routes. Mes prédécesseurs l'ont fait et nous allons continuer à le faire. Nous savons d'ailleurs que c'est une des priorités à laquelle il faut s'attaquer comme nous avions commencé à le faire parce que c'est une source de catastrophes humaines et un fardeau financier important pour la société qu'il y ait autant d'accidents d'automobiles. Donc, nous prenons toutes les mesures pour améliorer la sécurité et éviter les accidents. M. le Président, je pense qu'il faut quand même faire un minimum de distinctions. Ce n'est pas parce qu'il y a un panneau en français qu'il y aura moins ou plus d'accidents. Je pense que c'est l'endroit où peut être apposé un pictogramme. Quelle est la forme de la route? Je pense que cela fait partie du dossier; je pense qu'on ne doit pas ramener tout cela à un mot français ou non français parce qu'il se pourrait très bien que même avec des mots bilingues il y ait encore des accidents, malheureusement.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Vachon.

M. Payne: Pour essayer de montrer du sérieux dans un débat important, malgré les folies de l'Opposition, est-ce qu'on peut conclure, est-ce qu'on veut insinuer que ce sont exclusivement des anglophones unilingues qui ont perdu la vie, parmi les 500 dont on parle? Ma question s'adresse au ministre des Transports.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Le député de Vachon ne peut quand même pas me faire dire ce que je n'ai pas dit. Je n'ai jamais parlé de 500 personnes tuées; j'ai parlé de gens qui s'engageaient dans une voie à sens inverse.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: M. le Président, je n'ai aucune indication sur les gens eux-mêmes. Tant que je n'aurai pas reçu le rapport, je ne sais pas si cela sera inclus dans le rapport. À l'heure actuelle je n'ai pas les indications pour répondre à une telle question.

Le Président: Question principale, M. le député de Groulx.

La réglementation du camionnage

M. Fallu: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Transports mais sur un tout autre sujet. Il s'agit de la déréglementation du camionnage. On sait que depuis quelques temps a soufflé sur les États-Unis un véritable vent de déréglementation qui s'est d'ailleurs transmuté au-delà des frontières, notamment

dans l'Ouest. Un certain nombre de provinces ont déréglementé complètement les permis, les ligues et la tarification.

Hier, se tenait à Ottawa une conférence des ministres du Transport. Ce matin, le ministre fédéral des Transports laisse entendre qu'il s'attend à une entente interprovinciale sur la déréglementation. On sait que la situation du Québec est un peu particulière à cause, notamment, de son étendue, des traditions, de l'existence de la Commission des transports qui, dernièrement, a été rénovée.

J'aimerais savoir du ministre quelle position le Québec a tenue lors de cette conférence?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: M. le Président, il me fait plaisir de répondre à cette question parce que je crois qu'il est important de rectifier un certain nombre d'informations qui ont circulé sur le sujet et qui réapparaissent pas tout à fait exactes. Il y avait quatre positions exprimées; l'une que le gouvernement fédéral prenne ou reprenne toute la réglementation et l'abolisse a son gré, s'il le jugeait nécessaire, en particulier en ce qui touche le transport extraprovincial; une autre, que les provinces déréglementent l'ensemble du système, surtout à l'intérieur. Les deux autres propositions visent à continuer à faire de la réglementation, à contrôler et coordonner la réglementation sur le transport des marchandises.

Je pense qu'il est important de dire que nous en sommes venus à un accord, toutes les provinces et le fédéral, sur le point suivant: il faut prendre immédiatement des mesures pour effectuer une réforme réglementaire dans l'industrie du camionnage. La réglementation va donc continuer. C'est important que tout le monde sache qu'il y aura toujours de la réglementation. Mais nous avons convenu qu'il s'agissait d'assouplir, d'uniformiser le plus possible. Dans ce contexte, un comité travaille et il a déjà fait un rapport d'étape hier au Conseil des ministres des Transports de toutes les provinces ainsi qu'au ministre fédéral. Ce comité nous fera rapport - après ce rapport d'étape qui a été fait hier - au mois de septembre. Nous serons alors probablement en mesure de prendre une position définitive là-desssus. Fondamentalement, la réglementation reste, sauf que nous voulons l'assouplir.

Le Président: En complémentaire, M. le député de Groulx.

M. Fallu: Le ministre peut-il assurer le monde du camionnage que, dorénavant, et pour le temps qu'il faudra, des notions fondamentales comme les permis, lignes et tarifs seront en vigueur au Québec?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: Oui, mais tout cela va continuer. Il y aura des taux, disons une réglementation, sur l'accès à différents domaines du transport des marchandises. C'est justement là-dessus que le comité travaille. Je pense donc qu'il conviendrait de rassurer les camionneurs là-dessus. Par ailleurs, il est important de noter que la réglementation dans le domaine du transport des marchandises va rester sous la juridiction des provinces; elle ne sera pas sous celle du fédéral.

Le Président: M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Le ministre peut-il nous assurer que, s'il veut assouplir la réglementation, ou la changer il va le faire ouvertement en consultant les parties et non pas en cachette en prenant des mesures, par exemple, comme transférer les agents de sécurité à la Sûreté du Québec, sans donner de pouvoirs adéquats à la Commission des transports du Québec?

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Léonard: M. le Président, lorsque nous avons fait des modifications dans la réglementation sur le camionnage, cela a été après consultation des intéressés en la matière. Cette consultation continue, M. le Président.

Quant au point que soulève le député, les modifications qui sont apportées le sont à la satisfaction des intervenants et des intéressés. Dans différents domaines, on pourrait donner des exemples, mais au sujet du transfert des inspecteurs à la Sûreté du Québec ou de cette juridiction au ministère de la Justice, je dois dire que jusqu'à il y a quelques semaines il n'y avait pas eu de plaintes à ce sujet et qu'il y avait un très haut degré de satisfaction.

Le Président: M. le député de Maskinongé. (10 h 40)

La création d'emplois dans le secteur agricole

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je suis très heureux de constater que mon collègue, le député de Saint-Hyacinthe a une belle cravate rouge ce matin.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. J'aimerais savoir si elle

parle souvent, à son ministère, de relance et de création d'emplois. J'aimerais savoir s'il existe à son ministère un programme destiné spécifiquement à la création d'emplois dans le domaine agricole.

Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Mme Marois: Non, M. le Président. De toute façon, il n'a jamais existé directement à mon ministère de programmes de cet ordre. Ce que mon ministère a eu comme responsabilité dans le passé à l'égard des programmes d'aide à l'emploi dans des aspects sectoriels, qu'il s'agisse de l'agriculture ou qu'il s'agisse d'autres secteurs, nous dégageons des masses à même les crédits reliés à l'emploi, mais ce sont les ministères sectoriels concernés qui s'assurent de la gérance de ces programmes puisqu'il va de soi que ce sont eux qui connaissent davantage les clientèles et les besoins.

M. Picotte: M. le Président.

Le Président: M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: L'an dernier, son prédécesseur m'avait confirmé qu'effectivement, à la suite d'une question que je posais au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, son ministère, la Main-d'Oeuvre et la Sécurité du revenu, avait une politique de création d'emplois dans le domaine agricole. Votre collègue, le ministre de l'Agriculture, a-t-il fait des pressions cette année auprès de vous pour qu'on ait, chez vous, un programme de création d'emplois pour la main-d'oeuvre agricole?

Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Mme Marois: Nous avions effectivement dégagé, M. le Président, dans les dernières années - les deux années qui viennent de s'écouler - un certain nombre de crédits pour l'aide à l'emploi temporaire, dont on a d'ailleurs largement parlé ici. Nous avons réorienté l'ensemble des programmes d'aide à l'emploi. Nous avons fait des efforts assez clairement identifiés à l'égard du plan de relance, de sorte que des mesures privilégiées puissent favoriser l'emploi permanent. Effectivement, nous avons eu des discussions, mon collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et moi-même, concernant un de ces programmes qui était dans le secteur agricole. Cependant, de la même façon que l'ensemble des autres programmes d'aide à l'emploi temporaire ont été remis en cause pour une réorientation majeure à cet égard, celui-ci était aussi concerné.

M. Vallières: Question additionnelle, M. le Président...

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: ...au ministre de l'Agriculture. Compte tenu des pressions qui sont faites actuellement dans tous les secteurs du domaine agricole afin que le programme "Agri-Travail" soit reconduit, le ministre peut-il prendre l'engagement aujourd'hui en cette Chambre de répondre à ces gens, d'abord, et de tenir compte de leurs revendications? Compte tenu qu'il s'agit d'embauche d'employés à titre saisonnier seulement, peut-il donner l'assurance à cette Chambre que s'il met en vigueur un programme, ce sera suffisamment tôt pour que, dès cet été, les agriculteurs du Québec puissent s'en prévaloir?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: Oui, M. le Président.

Le Président: M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pourrait-il me dire exactement, pour que les agriculteurs sachent à quoi s'en tenir, à quelle date son programme "Agri-Travail" va commencer et à quel moment les formulaires seront disponibles dans les bureaux locaux du ministère de l'Agriculture?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: M. le Président, ce n'est pas sur cela que j'ai répondu. Ce n'était pas la question du député de Richmond. Le député de Richmond m'a demandé, s'il y avait un programme, si on l'annoncerait suffisamment tôt. Il n'a pas demandé s'il y en aurait un. Je peux vous dire une chose; cela ne dépend pas du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation qu'il y ait un programme de main-d'oeuvre agricole ou non. Je pense qu'il faut s'en remettre à la réponse de la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui a clairement répondu pour l'ensemble du gouvernement.

M. Vallières: M. le Président.

Le Président: M. le député de Richmond.

M. Vallières: Le ministre sera-t-il aussi clair dans sa deuxième réponse et nous dira-t-il que non? Dites-vous que non, le programme "Agri-Travail" ne sera pas reconduit cette année, afin que les nombreux députés et les électeurs du comté le sachent?

Le Président: M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. Garon: M. le Président, le ministre de l'Agriculture a depuis longtemps pour devise que le succès est le fruit du dernier essai.

M. Picotte: M. le Président, une dernière question additionnelle à la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Je crois comprendre que son collègue de l'Agriculture lui dit que cela dépend d'elle si, effectivement, il n'y a pas de programme. Avez-vous l'intention de proposer un programme d'emploi pour les agriculteurs et à quelle date avez-vous l'intention de mettre en vigueur ce programme?

Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Mme Marois: Je voudrais corriger l'intervention que vient de faire mon collègue, le député de Maskinongé. Je pense que mon collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation a bien dit qu'il s'agissait d'une orientation gouvernementale qui, effectivement, a réorienté l'ensemble des programmes d'aide à l'emploi vers de l'aide à l'emploi permanent.

Le Président: M. le député de Maskinongé, dernière question additionnelle.

M. Picotte: M. le Président, est-ce qu'il y aurait possibilité de faire revenir le premier ministre? Il était ici au début de la période de questions. J'aimerais lui poser une question à ce sujet puisque cela ne semble dépendre de personne...

Le Président: M. le leader du gouvernement, on souhaite poser une question au premier ministre.

M. Bédard: M. le Président, je crois qu'une note a été envoyée au leader de l'Opposition l'informant que le premier ministre devait s'absenter à 10 h 30. Il a trouvé le moyen d'être présent ici dès le début de la période de questions. Je pense que cela se comprend.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Oui, je m'excuse auprès de mon collègue de Maskinongé parce que je ne l'ai pas averti. Effectivement, j'ai été avisé. Je vous ferai remarquer, cependant, M. le Président, que la période de questions n'est pas terminée et qu'il y a seulement sept ministres au grand total qui sont actuellement présents. On m'a averti que seul le premier ministre ne serait pas ici.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: M. le Président, il y avait au moins quatorze, quinze ministres. Déjà, il y en a neuf ou dix qui sont présents. Non, mais il y en avait au moins quatorze ou quinze. Même si c'est vendredi matin. Quand on regarde le nombre de ministres présents de ce côté-ci avec le nombre de députés de l'Opposition qui sont présents, on n'a pas de leçon à recevoir.

Le Président: M. le député de Maskinongé, dernière question complémentaire.

M. Picotte: Dans ce cas-là, comme j'ai eu la réponse de deux ministres qu'il n'y aurait pas de programme "Agri-Travail", cette année, pour les agriculteurs, j'aimerais demander au vice-premier ministre de me répondre. Est-ce que vous entendez faire les pressions nécessaires auprès du premier ministre et de vos collègues pour qu'il y ait un programme "Agri-Travail", puisque cela ne dépend de personne à part du gouvernement péquiste, s'il n'y a pas de programme d'emplois pour les agriculteurs au Québec?

Le Président: Mme la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Mme Marois: M. le Président, il me semblait que les réponses que nous avions données étaient très claires, que, dans l'ensemble des programmes d'aide à l'emploi, il y avait eu une réorientation majeure. J'ai discuté effectivement avec mon collègue, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en ce qui a trait à des programmes possibles d'aide à l'emploi dans le domaine agricole. Ce dernier a d'ailleurs fort bien répondu en disant que, si jamais ces programmes devaient exister, il en aviserait les personnes concernées au moment voulu. Merci, M. le Président.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Ma question principale s'adresse au premier ministre.

M. Bédard: M. le Président, vous êtes en mesure...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: Question de règlement. Vous êtes en mesure de voir la tactique, que j'appelle déloyale, de l'Opposition de poser, à ce moment-ci, une question au premier ministre, alors que le premier ministre a pris la peine d'être présent au début de la période de questions, d'informer l'Opposition qu'il devait s'absenter vers 10 h 30. Le leader de l'Opposition a dit tout à l'heure qu'il était effectivement au courant. On persiste quand même à poser des questions alors qu'il y a pas moins d'une dizaine de ministres qui sont présents ici. Jamais je ne croirai que vous n'avez pas d'autres préoccupations concernant d'autres secteurs d'activité...

Le Président: C'est bien! Bien!

M. Bédard: Le ministre des Affaires municipales, le ministre de l'Éducation...

Le Président: M. le leader du gouvernement... Dernière question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: M. le Président, la question que je veux poser relève directement de la responsabilité du premier ministre. Est-ce qu'on peut s'attendre que le premier ministre sera possiblement ici la semaine prochaine pour une période de questions?

Des voix: Ah! Ah!

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: M. le Président, je me rappelle très bien de l'époque où le premier ministre était un dénommé Robert Bourassa. Je peux vous assurer que l'assiduité du premier ministre du Québec, à l'heure actuelle, est facilement comparable à celle du premier ministre Bourassa, dans le temps.

M. Gratton: Question de règlement, M. le Président.

Le Président: Sur une question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: M. le Président, il me semble que...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre!

Une voix: Vous n'avez pas de question à poser...

Le Président: À l'ordre! Il reste une minute à la période de questions, peut-on la passer dans le calme. M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Sur un rappel au règlement, M. le Président, je voudrais indiquer que la décision de faire siéger l'Assemblée nationale, le vendredi matin est une décision du gouvernement et que le ministre, qui nous reproche de ne pas poser de questions à ceux des ministres qui s'adonnent à être ici, n'a rien à voir avec les questions de règlement qu'il a soulevées tantôt. Quant à nous, on veut bien se plier à la décision du gouvernement de siéger le vendredi, mais on ne voudrait pas être limité dans le type, les sujets et le nombre de questions qu'on pose. (10 h 50)

Le Président: Je vois mal encore... Votre appel est un appel au règlement. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce a posé une question à quelqu'un du gouvernement sur la présence du premier ministre la semaine prochaine, le leader du gouvernement a donné la réponse qu'il voulait donner et la période des questions est terminée.

Deux ministres m'ont fait part, au cours de la période des questions, qu'ils souhaitaient, si possible, apporter un complément de réponse. Je leur ai signalé qu'il fallait pour cela avoir le consentement de la Chambre. Il s'agit du ministre de l'Énergie et des Ressources et du ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

Y a-t-il consentement à ces compléments de réponse?

Une voix: Oui.

Le Président: Bien. M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

Une voix: Ce sont deux bons ministres.

REXFOR et l'usine Les panneaux de la Vallée

M. Duhaime: Au sujet d'une question posée hier par le député d'Outremont concernant l'entreprise PANVAL, les panneaux de la Vallée, je rappellerais essentiellement que l'entente prévue entre les deux actionnaires, c'est-à-dire Proforêt et Kunz, prévoit une participation de 60% et 40% tant dans les dépenses capitales que dans les pertes ou dans les profits de fonctionnement. REXFOR n'assume aucune responsabilité autre que sa participation à 60%. Même chose pour Kunz à 40%. Lorsque l'un des partenaires décidera de ne pas avancer son prorata pour combler les pertes de fonctionnement, sa part comme actionnaire ou son prorata pourra être dilué en faveur de son partenaire ou d'un autre. À ce jour, REXFOR n'a versé aucun dollar à ce chapitre.

Le Président: M. le député d'Outremont.

M. Fortier: La question que je posais en était une d'économie en général. Est-ce qu'il est normal - je le demande au ministre - qu'une société qui possède, d'après lui, 60% - je croyais que c'était 40% des actions -assume éventuellement la totalité des déficits de fonctionnement pendant trois ans? Dans ce cas, si ce n'est pas une procédure normale dans le monde des affaires, est-ce que cela ne met pas précisément cette société en position de concurrencer d'une façon différente de celle des autres sociétés qui oeuvrent dans le même milieu? La question avait trait à la possibilité pour cette société de se retrouver éventuellement avec des déficits de fonctionnement considérables qui seraient assumés par le gouvernement, éventuellement.

Le Président: M. le ministre de l'Énergie et des Ressources.

M. Duhaime: Je regrette, M. le Président, mais le député d'Outremont ne comprend strictement rien. L'entente existe entre Kunz, qui possède 60% des actions et qui a avancé 60% du capital, et Proforêt, une filiale à 100% de REXFOR pour 40%. Lorsqu'il y a eu un dépassement au niveau de la construction, dont le coût était prévu à 73 000 000 $, les partenaires ont avancé 60-40. Le dépassement de 7 000 000 $ a également été comblé par les partenaires sur la base 60-40. Je pense que le député d'Outremont a certainement rencontré des compétiteurs ou des concurrents de PANVAL au cours de ses petites tournées régionales car il est revenu ici, en Chambre, avec de mauvaises informations.

S'il y a des pertes au "compte d'opérations" de PANVAL, les actionnaires vont les combler suivant le prorata. Ce que Kunz d'Allemagne a demandé, parce que c'est un nouveau venu sur ce continent et qu'il y avait, pour eux, une précaution à prendre, c'était de risquer la perte de contrôle dans le sens suivant: si Kunz décidait de ne pas combler ou de ne pas apporter son prorata aux pertes de fonctionnement de l'entreprise pour une année financière donnée, Kunz, automatiquement, accepte de diluer ses 60% vers 52%, 53%, 54% ou même éventuellement 49%, allant même jusqu'à une perte de contrôle. Je ne connais pas beaucoup de partenaires, dans ce genre d'entreprise, qui vont oeuvrer dans le sens de laisser aller une participation majoritaire vers une participation minoritaire.

Je réponds également à ce qui me paraît un peu farfelu autant dans un article de journal et répété en plus par un député de l'Opposition à l'Assemblée nationale, qu'une entreprise de ce genre pratique du dumping. On aura l'occasion, la semaine prochaine, en commission parlementaire, de démontrer non seulement le contraire, mais de démontrer que les renseignements qui ont été donnés au député d'Outremont sont faux, puisque des gens du secteur privé qui font concurrence à PANVAL vendent jusqu'à 20% en bas de leur coût de production. Cela s'appelle du "dumping".

Le Président: M. le ministre de l'Habitation et de la Protection du consommateur.

L'embauche d'étudiants en architecture à la SHQ

M. Tardif: Oui, M. le Président. Hier, le député de Pontiac me posait la question sur le programme "Êquerre" et relevait, disait-il, un achalandage élevé dans le nombre d'appels et dans le traitement des demandes.

J'ai demandé un rapport hier, comme je m'y étais engagé, et, effectivement, au 30 mai, plus de 50 000 appels avaient été reçus de la part de citoyens et 10 000 demandes étaient entrées impliquant plus de 15 000 logements.

Pour gérer ce volume de demandes, le personnel consacré à ce programme a été porté de 18 à 45 personnes-année occasionnelles et nous avons eu recours, dès que la phase d'inspection s'est imposée, à 78 inspecteurs. Ces 78 inspecteurs proviennent, pour 44 d'entre eux, de fonctionnaires empruntés à la Direction générale de l'inspection et à la Société d'habitation du Québec et 34 sont des contractuels, dont 2 proviennent de contrats signés avec des municipalités, 3 avec des GRT et 3 avec des firmes privées. Parmi le personnel occasionnel et les étudiants - ce qui semblait préoccuper le député - on me dit que parmi les étudiants déjà embauchés à la fin de l'année scolaire, quatre ont une formation en informatique, sept ont une formation en administration, deux une formation en architecture, un en génie civil et il y en aurait huit autres en voie de recrutement présentement, plus particulièrement, me dit-on, dans les disciplines mentionnées. Voilà essentiellement les ressources qu'il a fallu mettre en oeuvre pour rendre opérationnel ce programme qui, en moins de trois mois, a ouvert plus de 3000 chantiers au Québec.

Le Président: M. le député de Pontiac.

M. Middlemiss: Il semblerait que le ministre n'ait pas entièrement compris ma question d'hier. Dans sa réponse du 17 mai dernier, il disait que, pour résoudre le problème et accélérer le traitement des demandes, on attendait la fin des classes

pour embaucher des étudiants en architecture de Montréal et de Laval. Donc, il faisait miroiter qu'on allait créer des programmes d'emploi pour les étudiants. De plus, je lui ai demandé hier de quelle façon il a procédé pour recruter ces étudiants et quel était le nombre d'étudiants prévu pour accélérer le programme. Le ministre n'est pas sans savoir... Est-ce qu'il réalise-

Le Président: M. le député, votre question, s'il vous plaît!

M. Middlemiss: Oui. Est-ce que le ministre réalise qu'à cause de retards dans l'acceptation des demandes de subvention, il y a des usines qui fonctionnent présentement au ralenti et il y a des travailleurs qui sont forcés d'être en chômage pour une période indéterminée et alors que, normalement, ces gens seraient au travail? Est-ce que le ministre va trouver la solution pour s'assurer que les traitements soient faits? Il y a énormément de personnes qui, normalement... Est-ce que le ministre réalise que des travaux se...

Le Président: M. le député, vous avez droit à une question complémentaire et vous êtes en train de faire une intervention. Vous avez posé au moins une question dans votre intervention. Je laisse le ministre répondre.

M. Tardif: M. le Président, après le spectacle auquel on a eu droit tantôt de la part du député de Mont-Royal, je pense que ce n'est pas le genre de chose que veut faire le député de Pontiac. D'ailleurs, à ce sujet, je dirai que j'aime mieux "Les lundis des Ha! Ha!" que "Les vendredis de Ciaccia". Cela dit, nous avons effectivement engagé plusieurs étudiants. Certains d'entre eux ont été versés à la gestion du programme "Corvée-habitation" et d'autres, au programme "Équerre". De votre temps, du temps des libéraux, il n'y avait pas d'engorgement des lignes ni des dossiers, parce qu'il n'y avait pas de programme. Qu'est-ce que vous voulez faire? Présentement 78 inspecteurs sont sur la route à faire l'inspection de travaux... (11 heures)

Une voix: Écoutez donc!

M. Tardif: Ils n'écoutent pas la réponse, M. le Président.

Une voix: II n'y a pas de réponse.

M. Tardif: En trois mois, M. le Président, 3000 chantiers ont été ouverts et fonctionnent.

Des voix: Bravo!

M. Tardif: M. le Président, nous avons effectivement engagé des étudiants. Nous en engagerons d'autres. Présentement, nous avons aussi recours aux inspecteurs municipaux à contrat. Il y en a au-delà d'une trentaine qui ont été embauchés et qui travaillent présentement.

Le Président: En conclusion, M. le ministre.

M. Tardif: Encore une fois, dans leur temps, il n'y avait pas de problème là; il n'y avait pas de programme. On a ouvert 3000 chantiers en trois mois et je vous dis qu'il s'agit là d'un programme qui va très bien, y compris dans la région du député de Pontiac.

Des voix: Bravo!

Le Président: Aux motions sans préavis...

Aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader du gouvernement.

Avis touchant les travaux des commissions

M. Bédard: M. le Président, c'est un rappel à la Chambre. Le mardi 5 juin, à la salle du Conseil législatif, la commission de l'économie et du travail se réunira afin de procéder à une consultation particulière concernant le projet de loi 66, Loi sur la Société de récupération, d'exploitation et de développement forestiers du Québec. La réunion se tiendra à la salle du Conseil législatif.

Le Président: D'autre part, immédiatement après les affaires courantes, soit dans quelques secondes, à la salle 91, la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation tiendra une séance pour faire la vérification des engagements financiers du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation pour les mois de février et mars 1984.

M. Bédard: M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

M. Bédard: J'aurais une correction mineure à apporter à un avis que j'ai donné hier quant au moment où l'Assemblée nationale se réunira la semaine prochaine. Je crois qu'on avait dit mardi, 15 heures. De consentement avec l'Opposition, ce sera mardi, 14 heures.

Le Président: Y a-t-il consentement à cette modification?

M. le leader de l'Opposition.

M. Gratton: Est-ce que je pourrais demander au leader du gouvernement de bien vouloir confirmer le menu et l'ordre, si possible, dans lequel les projets de loi seront appelés, mardi, pour étude à l'Assemblée nationale?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bédard: Oui, M. le Président. Mardi, nous aborderons le bill omnibus des transports, le crédit aquacole, la commercialisation du poisson. Dans l'ordre, ce sera, d'abord, le projet de loi 86, Loi modifiant la Loi sur la qualité de l'environnement, qui en est au stade de l'adoption du principe; ensuite, le projet de loi 76, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les transports; l'adoption du principe du projet de loi 74, Loi sur le crédit aquacole; l'adoption du principe du projet de loi 82, Loi sur la commercialisation des produits marins.

C'est l'essentiel des sujets que nous aborderons mardi ainsi que l'ordre que, normalement, nous suivrons.

Débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits

Le Président: Cela nous mène aux affaires du jour et au débat restreint sur les rapports des commissions qui ont étudié les crédits budgétaires des ministères du gouvernement pour l'année 1984-1985. Il s'agit d'un débat de deux heures au cours duquel chaque groupe parlementaire disposera d'une heure.

M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. En ce qui concerne le débat restreint sur les crédits, je voudrais discuter de quelques sujets. D'abord, des crédits du ministère des Affaires sociales. Nous savons tous que, dernièrement, beaucoup de questions ont été posées concernant des problèmes dans les hôpitaux, surtout le problème dans les salles d'urgence, le patient qui se trouve dans le corridor et les graves problèmes que cela cause. Le ministre des Finances a parlé de ces hôpitaux parce qu'il a dit: - je cite son discours sur le budget - "Évidemment, M. le Président, le budget, c'est l'autre côté des crédits, cela marche main dans la main." Je cite le ministre des Finances quand il a dit concernant le déficit des hôpitaux à la page 17. "Si on laisse filer ces déficits, les hôpitaux bien gérés renoncent petit à petit aux exigences d'une bonne gestion et la contagion se répand. Il n'y a donc rien d'autre à faire que de forcer les récalcitrants à entrer dans le rang."

Malheureusement, le gouvernement semble considérer presque tous les hôpitaux comme des récalcitrants sans faire aucune distinction. Je fais référence à un cas particulier dans l'agglomération de Montréal. Il y a une semaine, j'ai visité, avec le député de Brome-Missisquoi, l'hôpital Reddy Memorial parce que c'est justement là qu'on voit l'attitude du gouvernement.

C'est un petit hôpital pour soins aigus. Un hôpital qui est tellement bien administré que le facteur coût est le mieux contrôlé dans toute la province de Québec. C'est connu. Le ministre des Affaires sociales a décidé de changer la vocation de cet hôpital et d'en faire un hôpital à soins prolongés. Premièrement, on enlève tout de suite l'aspect particulier de ce petit hôpital du coin où le monde va parce qu'il se sent chez lui. Ces gens sont les bienvenus à cet hôpital. Ils ne sont pas traités comme des numéros. On décide que ces milliers de personnes du sud-est de Montréal, dans mon comté et dans le comté de mon voisin de Saint-Henri qui allaient à cet hôpital ne peuvent plus y aller maintenant. Ils doivent voyager pour se rendre à d'autres hôpitaux. On a changé la vocation.

Quand j'ai fait la visite de cet hôpital, j'ai vu qu'il y a maintenant une aile, un étage. Comme plan pilote, ce petit hôpital a mis ensemble des gens qui demandent des soins prolongés. Ce qu'on a constaté est intéressant. Au lieu de traiter ces gens, ces personnes âgées, comme ceux qui sont dans un hôpital pour se préparer à mourir dans quelques années, ils ont mis ces gens ensemble sur un étage. Ils communiquent. Il y a une petite salle de récréation avec un système de télévision. Fait intéressant, 40% de ces gens sont capables, après une période de quatre mois en moyenne, de retourner chez eux et de reprendre leurs activités.

Il faut penser dans cette direction. Il ne faut pas couper les budgets des hôpitaux, mais surtout essayer de trouver de nouvelles formules pour que ces gens puissent être guéris et reprendre leur vie normale. Une personne âgée qui est dans un hôpital de soins prolongés coûte en moyenne 30 000 $ à 35 000 $ par année. On nous a expliqué, quand on a fait la visite de ce petit hôpital, qu'il y a des gens qui viennent avec leur mère ou leur vieux père en disant: Voici, M. le médecin, pourriez-vous garder mon vieux père, ma vieille mère, parce qu'il ou elle a perdu 30 livres dans les derniers 30 jours? La personne reste là, mais ce n'est pas la vraie raison. La vraie raison c'est que le jeune couple part en vacances pour la Floride et pour se débarrasser de leur vieille mère ou de leur vieux père, les installe comme cela à l'hôpital. Cela prend à peu près trois ou quatre semaines pour vérifier la vraie raison de cette perte de poids et au moment où le jeune couple retourne à Montréal pour aller chercher le père ou la

mère dont l'hôpital a bien pris soin à un coût énorme à l'État, évidemment, la constatation c'est que votre père ou mère est en bonne forme.

Ils ont fait un service de garderie, de "baby sitting service" à des frais de 30 000 $, 35 000 $ par année. Le ministre des Affaires sociales ne parle pas de cela. Il dit que le gouvernement va donner un peu plus d'argent à l'enveloppe des soins à domicile. Ce que ce petit hôpital Reddy Memorial fait, c'est déjà un pas énorme dans la bonne direction. On coupe en même temps les dépenses. Dans cet hôpital, par l'expérience, ils ont réussi à réduire le séjour de ces gens. Évidemment, tous ne sont pas capables de retourner chez eux, mais ils ont constaté qu'un grand pourcentage peut être guéri avec des soins propres, avec une bonne attention personnelle. Par exemple, l'infirmière en charge de cet étage était une infirmière qui, auparavant, s'occupait du service des jeunes enfants. Là, elle a pris un cours spécial pour des personnes âgées, leurs problèmes de maladies, etc., et les résultats sont fantastiques. (11 h 10)

Le gouvernement, au lieu de dire: on va le suivre cet exemple, a décidé dans son idéologie, dans sa manière de marcher seulement d'une façon de changer la vocation de cet hôpital et il ne veut même pas regarder ces nouvelles formules. Il ne respecte pas le fait que le facteur coût de cet hôpital est extrêmement favorable: le meilleur dans la province de Québec. Non! Ces messieurs ont décidé dans leur théorie de péquistes de suivre la ligne dure: nous sommes mieux que vous! Ils ont décidé de changer la vocation de cet hôpital.

M. le Président, on parle du ministère des Affaires sociales. Je ne veux pas revenir là-dessus parce qu'il y a les crédits de tant d'autres ministères.

Je veux prendre un autre exemple: le ministère des Transports. Le fameux péage sur les autoroutes. C'est bien beau de nous annoncer dans le budget que le péage sur les autoroutes sera aboli. Soyez donc très honnêtes! Ce sera aboli, oui! Mais d'ici l'automne de 1985, pas tout de suite. Qu'est-ce qu'on prend comme excuse? On dit: On ne peut pas le faire tout de suite. On aimerait bien, monsieur et madame de la population, abolir immédiatement le péage sur les autoroutes, mais on ne peut pas à cause de la sécurité routière. Si vous roulez à grande vitesse, de 50 à 60 milles à l'heure sur une autoroute et, soudainement, vous arrivez à un poste de péage qui ne fonctionne plus c'est trop dangereux. Il faut que le poste de péage soit enlevé. Cela prend du temps.

Si c'est la vraie raison, pourquoi ne pas réduire immédiatement de 0,50 $ à 0,25 $ et même à 0,10 $. Aux heures de pointe, on a décidé de réduire les frais de 0,50 $ -cela coûte maintenant 0,50 $ - à 0,25 $. Mais si la vraie raison n'est pas encore d'aller chercher de l'argent dans la poche des contribuables, réduisez donc tout de suite ces frais de 0,50 $ à 0,25 $. Aucun problème!

Donc, la vraie raison, M. le Président, comme on dit en anglais, ils veulent continuer "to milk the cow". Leur stratégie est tellement claire qu'ils commencent à enlever les postes à péage là où il y a moins de circulation. Ils ne commencent pas à Montréal; ils commencent loin dans le Nord et, graduellement, ils viennent à Montréal. Quand ils arriveront à Laval, ce sera à l'automne 1985.

Il faut donc, M. le Président, que la population voit cela très clairement une fois encore. On fait ici cette belle déclaration du ministre: voici ce qu'on fait pour la population. Voici ce qu'on fait avec l'abolition des postes de péage. Je dis toujours que c'est un beau cadeau des péquistes: une boîte vide avec un beau ruban.

Un autre ministère, celui des Affaires intergouvernementales et du Commerce extérieur. Vous savez, M. le Président, que le député de Charlesbourg qui est ici a découvert ce fameux document qui s'appelle "rétablir la crédibilité". C'est intéressant. Je suis très content de voir que de jeunes écoliers sont ici aujourd'hui. Ils vont comprendre quelque chose de la stratégie politique d'un parti politique qui n'est pas honnête. Cela, c'est le gouvernement. Le gouvernement a préparé - peut-être pas le gouvernement comme un fonctionnaire qui travaille pour le président du Conseil du trésor - le document qui s'appelle "Rétablir la crédibilité." Une petite équipe a pris la peine de s'asseoir pour se demander comment on peut tricher la population? Comment peut-on s'organiser pour essayer de tromper la population et essayer d'obtenir une crédibilité que nous ne méritons pas? Vous ne méritez aucune crédibilité.

Une voix: C'est vrai!

M. Polak: Mais vous avez conçu un plan d'action pour donner une meilleure impression dans le public que celle que vous méritez.

Prenons, par exemple, le ministère des Affaires intergouvernementales et du Commerce extérieur. Voici leur plan d'action: d'abord, ceux qui sont visés, c'est la population et les intellectuels. Il est aussi important qu'on touche les intellectuels. On dit ici de faire une campagne de promotion des maisons du Québec à l'étranger. On va parler dans ce ministère de ces fameuses maisons du Québec à l'étranger, en mettant l'accent sur leur vocation économique. Les péquistes nous disent: il ne faut pas oublier

que lorsqu'on parle des maisons du Québec à l'étranger, on va mettre l'accent sur la vocation économique. Il est très important que la population pense, qu'elle ait l'idée et l'impression que nous, les Québécois, avons des maisons du Québec à l'étranger parce qu'elles nous avantagent sur un plan économique.

L'objectif de ce plan: bonne gestion, dépenses rentables pour notre collectivité et une ouverture sur le monde. M. le Président, quels sont les faits, les vrais faits? Ce plan a pour but de tromper la population et de dire: Dans les maisons du Québec à l'extérieur du pays sont des gens capables sur le plan économique qui travaillent là pour nous, pour le bénéfice de l'économie québécoise.

Je vais vous donner quelques exemples de vraies nominations où on voit ce qui arrive en pratique. Il y a eu la nomination, à l'automne 1983, d'un monsieur qui a été engagé comme conseiller auprès du délégué aux affaires francophones et multilatérales à Paris pour une période de deux ans. Le montant de l'engagement est de 168 082 $. C'est tout de même une jolie somme d'argent. Ce monsieur gagne 84 000 $ par année. Et que fait-il? Devant la commission des engagements financiers, lorsqu'on a discuté de cette nomination, on a demandé ce que faisait ce monsieur pour le bénéfice du Québec sur le plan économique et on nous a répondu: Mais vraiment, son action, son travail n'est pas sur le plan économique. Je vais vous lire la réponse qu'on a eue d'un ministre: "Ses responsabilités sont de collaborer avec le délégué du Québec à Paris en suivant certains dossiers spécifiques dans le cadre des relations avec l'UNESCO et pour obtenir des analyses des activités susceptibles d'intéresser le Québec, de préparer les notes et les conventions à cet effet." Donc, on a discuté des fonctions de ce monsieur et on a constaté que vraiment, il agit beaucoup plus sur le plan culturel et certainement pas sur le plan économique, à un salaire de 84 000 $ par année.

On a une autre nomination ici, au même ministère, les Affaires intergouvernementales, un contrat à un délégué du Québec à Atlanta. C'est un monsieur qui a été nommé comme délégué du Québec à Atlanta en novembre 1983 à un salaire de 436 000 $. Donc, 112 000 $, plus que cela, à peu près 140 000 $ par année. Et on a posé une question sur les qualifications de ce monsieur. Que fera ce monsieur pour le Québec? Quelles sont ses capacités sur le plan économique? Il nous a répondu que c'était un notaire. On n'a rien contre les notaires. Le député de Saint-Laurent est un notaire et c'est un homme très capable, mais pour avoir un délégué du Québec, on voudrait quelqu'un qui possède de l'expérience dans le monde commercial, parce que ce notaire n'a aucune expérience dans le monde du commerce. Il est meilleur dans la rédaction de documents. C'est sa spécialité. Mais - et c'est peut-être plus important - ce monsieur est l'ancien président du PQ dans le comté de Robert Baldwin. Ce monsieur était président du Parti québécois dans le comté de Robert Baldwin et cela semble l'avoir aidé à obtenir cette position.

Nous avons posé la question suivante: Y a-t-il eu un concours pour choisir au Québec la personne la mieux qualifiée pour travailler comme délégué du Québec à Atlanta aux États-Unis et faire la promotion sur le plan économique des produits québécois? On nous a répondu qu'il n'y avait pas eu de concours. C'est le ministre lui-même - l'ancien ministre qui a démissionné - qui l'a nommé. Il a décidé de nommer ce monsieur-là à cette position de haute importance. On a regardé le curriculum vitae de ce monsieur et il n'a vraiment pas les qualifications requises ou en tout cas, il y en avait beaucoup d'autres qui étaient mieux qualifiés pour obtenir une telle position.

Toujours au ministère des Affaires intergouvernementales où j'ai expliqué... Regardez bien. Le but était: On va faire la promotion des maisons du Québec à l'étranger en mettant l'accent sur la vocation économique. Il y a une autre nomination qu'on trouve ici aux Affaires intergouvernementales. On a nommé une personne pour agir à titre de coordonnatrice des communications, pour une somme de 85 000 $. Elle s'appelle Mme O'Leary. Il n'y a rien à cacher, parce que ce sont des documents publics. On a demandé: Quelles qualifications cette dame possède-t-elle? Il faut croire qu'elle est très qualifiée pour être capable de remplir cette fonction qui a trait à la visite du pape en septembre 1984. On lui paie une somme de 85 000 $. Et qu'est-ce qu'on a constaté, quand on a lu son curriculum vitae? On a constaté que c'est l'ancienne attachée de presse du premier ministre. (11 h 20)

Je ne dis pas qu'une attachée de presse du premier ministre n'a pas le droit de travailler, mais je dis qu'il est bien bizarre que quand on commence à analyser ces emplois, on ne trouve aucun concours. Quelqu'un est nommé. On trouve que cette personne, quand on commence à regarder le curriculum vitae, a beaucoup de contacts avec le gouvernement. En fait, cette dame était l'ancienne attachée de presse de M. Lévesque. J'ose dire, comme pour la nomination de l'ancien président du comté de Robert Baldwin pour le Parti québécois, qui est devenu le délégué du Québec à Atlanta, que cette dame est ce que j'appelle une amie du régime et que ce n'est pas une nomination pour le bénéfice de tous les Québécois et Québécoises. Cela ne nous

apportera pas beaucoup sur le plan économique mais cela a quand même été donné à quelqu'un qui était un ami du régime.

Je poursuis, car je n'ai pas beaucoup de temps et j'ai toute une série d'exemples. Au même ministère, le ministère des Affaires intergouvernementales, selon la fameuse stratégie dont le député de Charlesbourg a parlé, pour tricher, pour tromper la population, pour dire: Cette nomination va être profitable sur le plan économique, on a nommé, en mai 1983, quelqu'un pour un renouvellement de contrat pour agir à titre de conseillère en affaires éducatives et culturelles à la Délégation générale du Québec à New York. C'est un contrat de trois ans. Quel montant? 209 000 $.

Une femme a été nommée pour faire quoi? Pour agir comme conseillère en affaires éducatives et culturelles à New York. Nous avons posé des questions. Qu'est-ce qu'elle fait à New York pour le Québec? On comprend qu'on a besoin de quelqu'un à la délégation du Québec pour promouvoir la vente des produits du Québec aux États-Unis et sur le marché de New York, mais, comme priorité, on n'a pas vraiment besoin de quelqu'un à New York comme conseillère en affaires éducatives et culturelles. Le ministre nous a répondu: Cette dame va expliquer le système éducatif du Québec. Il est très intéressant pour les New-Yorkais d'apprendre comment cela fonctionne ici. Elle a aussi la fonction de promouvoir la culture québécoise à New York. Nous avons répondu: Nous n'avons rien contre la culture, sauf qu'on se pose la question de savoir s'il n'aurait pas été prioritaire de nommer quelqu'un à un poste d'influence économique pour l'avantage économique du Québec.

Je vois que mon temps expire, M. le Président. Quand on examine les crédits de ces différents ministères, on voit - et le document est très révélateur, ce fameux document interne péquiste qui s'appelle "Rétablir la crédibilité" - une certaine stratégie. On voit une stratégie pour tromper la population, pour donner une image de quelque chose qui n'est pas vrai et qui est certainement différente dans la réalité. Comme je vous l'ai indiqué, seulement en considérant quelques-unes de ces nominations à des postes importants, des postes qui coûtent très cher à la population, ce ne sont pas des gens qui travaillent au salaire minimum; ce sont des montants de 80 000 $ et plus, par année. On dit dans le document: "Pour le bénéfice économique du Québec..." J'ai fait ici la démonstration qu'il s'agit de nominations d'amis du régime. Deuxièmement, ils ne sont pas capables d'agir sur le plan économique mais ils agissent dans d'autres domaines. Ce sont peut-être des domaines intéressants, comme celui de la culture - on est pour la culture - mais, pour nous, il y a une priorité économique.

Je vois que vous me faites signe, M. le Président, que mon temps est écoulé. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Rousseau et leader adjoint du gouvernement.

M. René Blouin

M. Blouin: Merci beaucoup, M. le Président. Je rappelle simplement au député qui m'a précédé, le député de Sainte-Anne, que du temps des libéraux il y avait des péquistes qui étaient fonctionnaires et qui travaillaient pour l'État. Du temps des péquistes, il y a également des libéraux qui sont fonctionnaires et qui travaillent pour l'État. S'il s'étonne qu'il y ait quelques personnes d'allégeance péquiste qui oeuvrent effectivement pour la collectivité au sein de la fonction publique, il ne devrait pas s'en étonner puisque, au cours des dernières élections, le Parti québécois a remporté, rappelons-le, 49,5% du suffrage populaire. Donc, en toute logique, au sein de la fonction publique, comme dans les entreprises privées, un peu partout dans notre société, la moitié de la population a appuyé le Parti québécois la dernière fois. Si on veut faire le listing des 300 000 personnes qui travaillent dans la fonction publique qui ont des affinités à l'égard du Parti québécois, on en trouvera probablement 50% et fort probalement aussi 50% de ces gens qui ont des affinités à l'égard du Parti libéral.

Ceci étant dit, j'ai écouté le discours du député de Sainte-Anne et je n'ai pu m'empêcher de faire une certaine analogie avec les arguments qu'utilise le député de Vaudreuil-Soulanges, critique officiel de l'Opposition en matière de finances publiques. Revenons un peu en arrière et rappelons-nous le moment où le ministre des Finances, il y a maintenant un peu plus d'un an et demi ou deux ans, a décrété une surtaxe sur l'essence qui a beaucoup fait parler d'elle. Au moment du décret de cette taxe et pendant les deux années qui ont suivi l'application de cette mesure, invariablement, presque chaque semaine - et je n'exagère pas; souvent, c'était deux ou trois fois par semaine -pendant les périodes de questions, notamment, le député libéral de Vaudreuil-Soulanges se levait, adressait une question au ministre des Finances et utilisait toujours le même préambule: Compte tenu de la surtaxe sur l'essence qu'a imposée le ministre des Finances et qui a été une catastrophe pour l'économie du Québec, le ministre pourrait-il me dire telle et telle chose?

C'était la fin du monde, la surtaxe sur l'essence et c'était, selon le député de Vaudreuil-Soulanges, de là que provenait la

presque totalité des malheurs engendrés par la crise économique au Québec. Soit. Poursuivons cette logique qui a été affirmée pendant au moins deux ans par le député de Vaudreuil-Soulanges. Le ministre des Finances a annoncé, il y a presque six mois, la réduction de cette surtaxe de moitié; il décide de réduire cette surtaxe, de la couper de moitié. Que nous dit à ce moment le député de Vaudreuil-Soulanges? Cinq minutes après la déclaration du ministre, il se lève et nous dit que diminuer cette taxe de 50%, ce n'est même pas un cadeau, cela ne vaut même pas la peine d'en parler, c'est négligeable et que nous devrions effectivement discuter d'autres choses que de cela.

Dans un cas, lorsque la surtaxe est imposée, c'est la fin du monde économique; lorsqu'elle est enlevée en grande partie, cela ne vaut pas la peine d'en parler, cela devient négligeable. Alors, quelle est la logique, quelle est la théorie économique du député de Vaudreuil-Soulanges? Elle est difficile à suivre.

Un autre exemple. À la fin de l'automne dernier, lors de l'énoncé complémentaire aux politiques budgétaires du ministre des Finances, une somme de 45 000 000 $ venait accompagner le plan de relance qu'avait annoncé le premier ministre du Québec, M. Lévesque, à la fin du mois de novembre pour donner une impulsion nouvelle, pour accompagner et stimuler la reprise économique. Le député de Vaudreuil-Soulanges, encore une fois, a passé des mois à nous expliquer que 45 000 000 $ pour relancer l'économie au Québec, c'était complètement négligeable, que la démarche du premier ministre à la fin du mois de novembre dernier était factice et qu'effectivement cela ne donnerait pas de résultat parce que ce n'était pas accompagné d'un montant substantiel pour promouvoir ces mesures de relance économique.

Dans le présent budget, combien y a-t-il d'argent pour accompagner le plan de relance économique annoncé par le premier ministre au mois de novembre? 311 000 000 $ sont injectés directement dans l'économie du Québec dans tous les secteurs dynamiques de cette économie pour effectivement accompagner la relance, susciter des résultats supérieurs pour les sociétés qui nous entourent. Le député de Vaudreuil-Soulanges n'en parle plus. Le plan de relance, qui était accompagné de 45 000 000 $ au mois de novembre, était négligeable parce qu'il n'était pas soutenu par une injection de fonds. Maintenant qu'il est soutenu par une injection de 311 000 000 $, le député de Vaudreuil-Soulanges s'évanouit, on ne l'entend plus parler du plan de relance qui, pourtant, cette fois, est effectivement, et de façon colossale, soutenu par un effort financier de la part du gouvernement.

Parlons-en un peu, de ce plan de relance. Je ne parlerai pas de toutes les mesures, puisque je ne dispose que de quelques minutes. Parlons des principales mesures. Une d'entre elles concerne le financement des entreprises. Effectivement, nous l'avons vécu cruellement au cours de cette crise économique que nous avons traversée et qui, heureusement, commence à se résorber, ce qui fait plaisir à tout le monde. Nous l'avons donc vécu, les entreprises du Québec ont rencontré des difficultés majeures. (11 h 30)

Une des principales difficultés qu'elles ont rencontrées et qu'elles continueront à rencontrer si nous n'intervenons pas touche principalement le financement des entreprises. En effet, la société québécoise n'a d'impact de plus en plus significatif sur son économie que depuis dix ou quinze ans. Tout le monde sait qu'au cours des années quarante, cinquante et soixante, l'économie au Québec était complètement dominée par des investisseurs étrangers et que les investisseurs québécois eux-mêmes étaient, à proprement parler, inexistants.

Cette tradition d'affaires que nous n'avions pas et que nous commençons à développer fort heureusement, mais que nous n'avions pas pendant toutes ces années, avait des effets très importants sur l'économie du Québec, notamment en ce qui concerne le financement des entreprises. Au Canada, les grandes familles financières - et c'est la tradition qui le veut - sont des grandes familles qui ont principalement leur point d'attache en Ontario, à Toronto plus précisément. Mais au Québec, nous n'avons pas encore - puisque notre tradition en termes d'affaires est relativement jeune - de grandes familles qui nous permettent de financer un certain nombre d'entreprises importantes et de donner, lorsque cela est nécessaire, des coups de barre sur le plan des investissements privés dans un certain nombre de secteurs névralgiques de notre économie.

C'est pour pallier un peu cette carence de cette naissance de l'économie proprement québécoise que le gouvernement a accepté de garantir 2 000 000 000 $ de prêts aux entreprises du Québec. C'est un effort très considérable et c'est très important et très intéressant, principalement pour deux raisons. D'abord, parce que nous allons de ce fait nous associer aux institutions financières, aux caisses populaires, aux banques qui, elles, vont continuer à faire des affaires régulières comme elles le font avec ces entreprises. Mais nous allons tout simplement endosser les prêts aux entreprises diminuant ainsi les risques pour les institutions financières et rendant le crédit plus accessible aux entreprises qui désirent prendre de

l'expansion et créer un certain nombre d'emplois.

C'est un programme intéressant aussi parce que, puisqu'il privilégie cette relation entre l'entreprise et l'institution financière, il s'écarte des modèles traditionnels d'interventions de l'État qui fonctionnent ou par cadeaux de subventions ou avec mille et un couloirs qu'il faut traverser avant de réussir à pouvoir véritablement faire des affaires. Nous avons donc éliminé toute une série de contrôles qui sont plus ou moins utiles et qui sont surtout fastidieux pour les entrepreneurs et pour les hommes d'affaires. Nous avons donc privilégié la relation entre l'entreprise et l'institution financière; l'intervention du gouvernement ne fait que soutenir le crédit des entreprises et garantir aux institutions financières les deux tiers de ces prêts qui leur sont consentis.

En plus, pour les entreprises qui désirent se prémunir contre une éventuelle nouvelle flambée des taux d'intérêt qui - qui sait - pourrait se produire encore une fois, il y a donc une mesure qui peut leur permettre aussi, moyennant une contribution minimale, d'éviter de nouvelles flambées de taux d'intérêt au cours des cinq prochaines années.

Donc, garantie de prêts, accessibilité plus facile pour que l'entreprise puisse prendre de l'expansion, développer son marché, et aller éventuellement sur des marchés extérieurs et aussi permettre à ces entreprises de se développer en privilégiant, comme je le disais tout à l'heure, la relation habituelle entre l'homme d'affaires et l'institution prêteuse. Intervention du gouvernement pour soutenir le développement économique: une injection de près de 2 000 000 000 $ qui sera soutenue par le gouvernement.

C'est une mesure très importante qui touche non seulement - c'est bon de le souligner - les entreprises manufacturières, mais également les entreprises touristiques qui sont à tous égards admissibles à ce genre de programme d'aide gouvernemental.

Un deuxième point très important aussi sur lequel se base le plan de relance de l'économie du Québec, c'est la politique énergétique du Québec. Nous le savons, l'un des piliers centraux du développement économique du Québec, ce sont effectivement ses grandes ressources hydroélectriques. J'ai pu le constater il y a quelques jours, lorsque j'ai visité des États américains. Ils nous vouent un respect très grand particulièrement à l'égard de cette capacité énergétique que nous avons et qu'ils connaissent bien et, évidemment, des possibilités que cela représente pour eux en termes d'importation de cette capacité hydroélectrique du Québec. Ils en sont très conscients; ils manifestent beaucoup d'intérêt à l'égard de cette richesse naturelle proprement québécoise et cela les impressionne beaucoup.

Quelle est la politique hydroélectrique du Québec? C'est intéressant, puisque nous avons maintenant - pas ici à l'Assemblée nationale - un chef du Parti libéral qui en fait le fer de lance de sa propre relance politique. Donc, quelle est la politique énergétique du Québec, du gouvernement actuel, qui est greffée au plan de relance gouvernemental, comparée à la politique énergétique du nouveau chef du Parti libéral, enfin relativement nouveau, M. Robert Bourassa?

Pour bien comprendre cette situation, il faut savoir principalement une chose. Le Québec dispose d'un nombre considérable de kilowatts excédentaires, c'est-à-dire que nous avons trop d'électricité pour ce que nous pouvons consommer. Nous avons des surplus. Selon toutes les prévisions les plus scientifiques, nous avons ces surplus hydroélectriques pour un nombre d'années assez considérable à venir. Face à cette situation, quelle est l'attitude du gouvernement et quelle est la proposition du chef libéral, M. Robert Bourassa?

L'attitude du gouvernement est la suivante. Puisque nous avons des surplus hydroélectriques, beaucoup d'électricité produite dans nos barrages ne vient pas dans nos maisons, comme on le croit souvent, mais retombe à la rivière, de l'autre côté du barrage, puisqu'elle est inutilisée. Puisque nous avons un nombre considérable de kilowatts en surplus, qu'allons-nous faire? Nous allons offrir aux grandes entreprises d'investissements, qui désirent lancer des chantiers gigantesques au Québec, de l'électricité à rabais. Nous allons simplement faire une vente d'électricité. Est-ce que cette politique est celle du bon sens? Je vous en reparlerai dans deux minutes.

Quelle est l'hypothèse de M. Robert Bourassa? Nous avons des surplus hydroélectriques, soit; doublons la capacité hydroélectrique de la Baie-James et accumulons encore un plus grand nombre de surplus hydroélectriques. Cela m'apparaît plutôt être un slogan politique qu'une véritable politique énergétique. Permettez-moi de faire un certain rapprochement. Je pense que c'est probablement ce à quoi a pensé M. Bourassa.

Il y a un certain nombre de producteurs de cinéma qui, lorsqu'ils réussissent à faire un bon coup, un succès de guichet, ont l'idée de reprendre ce même succès dans une version à peine modifiée. Je vous donne un exemple. Il y a quelques années, le film "Les dents de la mer" a été très couru dans tous les cinémas, en Amérique, en Europe, partout. Qu'est-ce qu'ont fait les producteurs de cinéma quand ils ont vu que cela fonctionnait si fort et que les gens aimaient cela? Ils ont dit: Puisque les gens aiment

cela, nous allons faire "Les dents de la mer 2", et cela a effectivement provoqué, pendant une certaine période, un certain engouement. Beaucoup de gens allaient voir ce film. Quand ils s'apercevaient que c'était du réchauffé, ils en étaient moins stimulés. Mais il reste qu'initialement cela a provoqué un certain intérêt. (11 h 40)

M. Bourassa se dit: Puisque la Baie-James est un symbole qui plaît aux Québécois, je vais lancer le slogan de la Baie-James 2 et cela va certainement créer un engouement auprès de la population québécoise. C'est sa stratégie de développement hydroélectrique. Qu'en pensent les financiers américains et qu'en pensent -un autre type de financiers que nous connaissons bien aussi, qui sont plus modestes - les épiciers du coin au Québec? Les financiers américains ont porté le jugement suivant, et ce sont parmi les plus éminents qui consentent les prêts aux gouvernements étrangers et aux grandes entreprises étrangères. Ils ont dit: Si le Québec, par malheur, adoptait la politique suggérée par M. Robert Bourassa, nous serions obligés de décoter Hydro-Québec de façon significative, c'est-à-dire que sa cote de crédit ne pourrait plus être aussi bonne qu'elle l'est maintenant puisque, quand on dispose d'une grande quantité d'énergie excédentaire, on doit avoir le réflexe de l'utiliser au maximum, d'en profiter pour faire du développement économique, comme le suggère le gouvernement du Québec, plutôt que de penser à accumuler encore les surplus qui ne seront pas plus utilisés qu'ils ne le sont maintenant. Les Américains ont réfléchi. Ils ont même ajouté qu'ils avaient moins peur de la souveraineté du Québec que du retour de Robert Bourassa, qui était une véritable catastrophe, en termes de perspective, pour la capacité énergétique du Québec.

Je disais que non seulement les grands financiers américains ont réagi comme cela, mais aussi que les épiciers du coin ont réagi comme cela. Lorsque vous avez une tablette remplie de soupe de marque connue et que vous savez que vous en avez dix autres caisses dans votre entrepôt, votre premier réflexe n'est pas d'appeler la compagnie pour commander dix autres caisses supplémentaires de cette soupe qui n'est pas vendue. Non, c'est plutôt de faire une vente de soupe, de libérer vos tablettes et ensuite de penser à procéder à de nouvelles commandes. Ce que les grands financiers américains ont compris, ce que les épiciers du coin ont compris, le chef libéral ne l'a pas compris, et cela risque d'être très dangereux à l'égard de l'économie québécoise tout entière.

Il y a également un autre élément fondamental du plan de relance de l'économie au Québec qui est celui du reboisement. La forêt, c'est une autre richesse naturelle fondamentale du Québec. À titre d'exemple, sous la meilleure année du gouvernement de Robert Bourassa, il y avait 15 000 000 de plants de reboisement, de plants d'arbres de plantés au Québec. Au moment où nous nous parlons, il y en aura 65 000 000 cette année. Selon le plan de relance qui a été annoncé par le premier ministre, il y en aura 300 000 000. Donc, 15 000 000 sous le gouvernement Bourassa, 300 000 000 sous le gouvernement du Parti québécois, selon ce que prévoit le plan de relance qui sera effectif, selon une progression continue, au cours des trois prochaines années.

Je conclus en disant très simplement ceci. Le budget qu'a présenté le ministre des Finances est en parfaite continuité - et il vient l'épauler solidement - avec le plan de relance qu'avait annoncé le premier ministre en novembre dernier. En plus, ce qui n'est pas négligeable pour une bonne partie des citoyens et citoyennes qui habitent le comté de Rousseau, il comporte deux mesures extrêmement soulageantes. Une qui prévoit l'abolition des péages autoroutiers. Une autre pour tout le secteur agricole du comté de Rousseau. Je rencontrais, il y a deux semaines, les représentants de l'Union des producteurs agricoles qui me faisaient part de cette préoccupation et qui souhaitaient que cela soit inscrit dans les politiques gouvernementales. Il y a donc une mesure qui concerne les agriculteurs, qui concerne surtout la relève agricole et le dynamisme même de cette industrie d'une très grande importance au Québec. Lorsqu'un père de famille, lorsqu'un agriculteur décidait de céder sa ferme à son enfant, avant les dernières mesures qui ont été annoncées dans le budget, il ne pouvait déduire, il était exempté d'impôt uniquement sur les premiers 100 000 $ dans le legs qu'il faisait à son fils ou à sa fille. En vertu des nouvelles dispositions qui ont été annoncées, on peut dorénavant transmettre sa ferme à son fils ou à sa fille avec une mesure qui permet de faire en sorte que 300 000 $ ne seront pas taxés au cours de cette procédure de donation.

Ces deux mesures à elles seules, celle qui touche le dynamisme même de l'agriculture du Québec et celle qui touche les péages autoroutiers, sont de nature, avec l'ensemble des mesures fondamentales - je n'ai parlé que de quelques-unes - annoncées dans le plan de relance et épaulées par le présent budget, non seulement à susciter le développement économique du Québec, mais très certainement aussi à susciter et épauler le développement économique de notre région et, particulièrement, du comté de Rousseau. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé et whip adjoint de

l'Opposition.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole à l'occasion de ce débat qui, en quelque sorte, vient continuer, pour une heure et demie environ, le débat déjà engagé sur le discours sur le budget prononcé par l'honorable ministre des Finances, M. Jacques Parizeau.

J'aimerais livrer à la population qui peut nous écouter en ce moment une impression que plusieurs députés de cette Chambre ont, du moins du côté de l'Opposition, et lui dire que nous du Parti libéral, avons l'impression de vivre dans deux mondes différents. Nous avons, d'une part, le monde parlementaire qui nous amène à écouter ce qui se dit autour de nous. Nous avons aussi le monde ordinaire, c'est-à-dire les gens du public, ceux que nous côtoyons dans nos comtés. Dieu sait si, pour moi, c'est drôlement plus important puisque j'ai l'honneur de les représenter ici, à l'Assemblée nationale. Ce sont les gens de mon comté et les gens du Québec en général que nous rencontrons dans nos différents pèlerinages auprès de la population, si je peux m'exprimer ainsi. C'est un autre monde complètement différent, M. le Président, mais combien réaliste! Nous vivons ici dans un monde spécial. Il y a seulement à l'Assemblée nationale du Québec où j'ai entendu les commentaires que nous font les députés d'en face.

Je me force de croire que c'est là une stratégie obligatoire du Parti québécois. J'ai trop de respect et je connais tellement bien plusieurs de mes collègues d'en face qu'il n'est pas possible que ces gens parlent du budget Parizeau de la façon dont ils en parlent. Quand on les écoute, on a l'impression qu'ils sont les seuls au Québec à comprendre le budget comme il a été donné par le ministre des Finances. À les écouter, il n'y a pas de problème. À les écouter, il n'y a pas trop de chômage. À les écouter, on est sur la voie de la prospérité sans limite. Les gens du Québec n'ont pas à s'inquiéter si on prend chacun des discours prononcés en face de nous. Les gens du Québec n'ont pas à s'inquiéter. Cela va très bien au Québec, M. le Président!

On a souvent fait des comparaisons entre le député de Maskinongé et le député de Laviolette, deux individus de la même région qui font partie de deux formations politiques différentes. Je ne vous ai pas entendu parler là-dessus, M. le député de Laviolette, parce que je suis certain que vous êtes tellement près de votre population, vous la côtoyez tellement souvent que vous n'auriez pas pu tenir un tel langage. Même si on vous l'avait imposé, je suis certain que vous ne l'auriez pas fait. C'est être complètement déconnecté de la réalité de 1984 au Québec que de penser que cela va bien dans le meilleur des mondes, qu'il n'y aura pas de difficulté, qu'il n'y aura pas de problème, qu'on est sur la bonne voie. Les jeunes assistés sociaux manifestent, les jeunes assistés sociaux se font brasser comme il fut un temps où votre parti politique nous reprochait à nous, comme gouvernement, de laisser brasser les citoyens. C'est la même chose. Ils se font brasser de la façon la plus cavalière. Votre premier ministre - je dois dire notre premier ministre puisque c'est le verdict de la population - se fait chahuter autrement plus que ne l'a été M. Robert Bourassa dans les années 1975-1976. Il ne peut même pas aller voir une pièce de théâtre - vous le savez comme moi - sans avoir des problèmes. Mais cela va bien! Il n'y a pas de problème. (11 h 50)

Le ministre des Finances, dans sa tour d'ivoire, avec toute l'aisance qu'on peut lui fournir comme ministre... C'est sûr qu'un ministre - vous savez cela comme moi - a un chauffeur privé et bien des choses. Le ministre des Transports le sait. II ne voit même pas les panneaux-réclame. Il ne sait même pas qu'une pancarte "Reculez", cela existe. Il ne voit même pas les pictogrammes et il se dit: Cela m'importe peu, même si je suis en charge des Transports, parce que j'ai un chauffeur. C'est sûr que ce n'est pas un problème pour lui. Probablement que s'il fume, c'est son chauffeur qui va acheter son paquet de cigarettes. Donc, il ne s'est pas aperçu, malgré tout, qu'il y a eu une augmentation de la taxe sur les cigarettes. Et ainsi de suite pour tout ce qui peut se passer.

Mais je comprends que le ministre des Finances, M. Parizeau, soit déconnecté de la réalité. Il est entouré de personnes qui essaient de le convaincre que cela va bien et il a une aisance spéciale; il est probable que ce que le ministre se permet en lunch une fin de semaine, dans la belle province, c'est ce que nos jeunes ont durant un mois de temps pour vivre, pour payer leur lunch, pour payer leur pension - s'ils ont une pension à payer - ou encore pour payer aussi leur loyer, leur logement, leur téléphone et leur électricité. Ce qu'un jeune a pour tout le mois, ce que votre gouvernement donne à un jeune en bas de 30 ans pour un mois, pour assurer sa subsistance, un ministre dépense probablement cela en bouffe uniquement dans sa fin de semaine. Je comprends cela. Je sais qu'un ministre peut être déconnecté de la réalité, mais voir autant de députés d'arrière-ban complètement hors de la réalité, de ce qui existe, c'est effarant. C'est même dangereux d'entendre cela. Ce n'est pas possible qu'on ait fait un lavage de cerveau semblable à tout le monde. Cela va bien au Québec. Je comprends que vous

aimeriez bien mieux qu'on dise, nous, de l'Opposition, que cela va bien pour tâcher de créer des impressions, mais je n'ai pas le droit, en conscience, de dire des choses qui ne reflètent pas la réalité de mon milieu. C'est pour cette raison que j'ai l'impression de vivre dans un monde à part quand je suis ici. Il y a seulement cette gang qui prétend que cela va bien.

Par contre, même s'il y a un autre monde ici, quand on va dans nos comtés respectifs, quand on lit le moindrement les journaux - et il doit y avoir assez d'intellectuels dans ce parti pour être capable de lire décemment un article de journal - on se rend compte que tous les éditorialistes, tous les journalistes - sans trop d'exceptions - les chambres de commerce, le Conseil du patronat, les gens ordinaires, tout le monde dit: C'est un budget complètement plate. C'est un budget complètement amorphe. C'est un budget qui, à toutes fins utiles, ne change absolument rien à la situation actuelle des Québécois qui vivent en pleine crise. C'est ce qu'on entend dans toute la population. Je fais référence plutôt à ce jugement puisque je préfère avoir le jugement de quelques millions de personnes. Il y a 6 000 000 de personnes au Québec et je préfère me fier au jugement de quelques millions de personnes qui pensent toutes de la même façon que de me fier au jugement de quelque 60 députés - parce que, avec les élections partielles, on n'est plus capable de retenir le nombre exact de ceux qui restent de ce côté-là - qui, eux, nous disent que cela va très bien.

Il n'y a rien de surprenant dans ce qui arrive au Québec, avec tout ce qui se passe. J'écoutais et j'interrogeais même - vous vous en souviendrez - le ministre des Affaires sociales... Ma collègue, la députée de Mégantic-Compton, Mme Bélanger, interrogeait le ministre des Affaires sociales sur le rapatriement de l'argent des allocations de vieillesse du gouvernement fédéral vers le gouvernement provincial pour qu'ils soient capables de distribuer cette richesse, cette soi-disant richesse collective aux personnes âgées. J'écoutais ce que disait le ministre des Affaires sociales. J'interrogeais même le premier ministre là-dessus. On se souviendra de la sainte colère qu'il a pu me faire. C'est effrayant, ce que peut penser un gouvernement comme le vôtre. La Caisse de dépôt et placement sera à sec en 1994. Ce n'est pas si loin que cela. C'est une façon fort élégante d'aller chercher des millions à Ottawa pour les amener dans la Caisse de dépôt, pour renflouer rapidement la Caisse de dépôt et de dire: On va en donner plus aux femmes et aux personnes âgées. Mais allons donc! Le gouvernement du Québec n'est même pas capable de faire ce que font les autres provinces, c'est-à-dire de remettre un montant d'argent additionnel aux plus démunis. Comment allons-nous donner plus que ce que nous donnons là, plus que le gouvernement fédéral en donne là, avec quelles garanties? Jamais je n'accepterais, comme individu, de confier ma pension de sécurité de la vieillesse au genre de ministres qui nous répondent en face de nous. Mais jamais! C'est peut-être bon pour quelques-uns qui sont rendus tout près de l'âge de la retraite, mais jamais je ne confierais l'argent de la jeunesse du Québec, pour une sécurité de la vieillesse plus tard, à des gens comme cela, qui ne savent pas administrer; surtout pas au ministre des Finances. Encore moins au ministre des Affaires sociales. Ces gens-là prétendent avoir une crédibilité auprès des personnes âgées. Mais allons donc! C'est depuis que vous êtes au pouvoir comme gouvernement que vous ridiculisez les personnes âgées. On ne s'en cachera pas. On va se le dire bien honnêtement.

Je vais même vous rappeler des faits. Au risque de me faire traiter de démagogue, je vais vous rappeler des faits. Les faits ne mentent pas. Le 16 novembre 1978, deux ans et un jour après la prise du pouvoir par le PQ, le bal commençait du côté des personnes âgées. Il y avait un M. Tremblay, qui a démissionné depuis ce temps-là, mais qui était ministre de l'Industrie et du Commerce, Rodrigue de son prénom, Rodrigue Tremblay. Il n'avait trouvé rien de mieux à dire à l'honorable député de Champlain dans le temps, M. Maurice Bellemare, qui a des états de services beaucoup plus reluisants et beaucoup plus enviables que ceux de n'importe quel membre de cette Chambre en face de nous, il disait à M. Maurice Bellemare: "Comme disait le général De Gaulle, la vieillesse est un naufrage. Je constate l'épave que nous avons devant nous". Beau respect pour les personnes âgées'. On peut bien vouloir rapatrier l'argent pour tâcher de leur verser des allocations de vieillesse par la suite. C'est une belle garantie! C'était en 1978, deux ans et un jour après avoir pris le pouvoir; de la part d'un ministre du gouvernement péquiste, un ministre qui siégeait au Conseil des ministres!

Je vais vous rappeler d'autres faits; probablement que vous avez lu cela et que vous n'avez pas aimé cela, M. le Président. Dans le Nouvelliste du 23 mai 1980, M. Garon, mon ami personnel, disait ceci: "Quant à M. Garon, il a soutenu que la campagne a été - on parlait de la campagne référendaire - un succès puisque 45% ou 46% de la population francophone penche du côté de la souveraineté-association. Le ministre a précisé de plus que ce sont les forces dynamiques de la société qui ont opté pour le oui, tandis que le non trouvait ses appuis auprès des gens âgés et des gens moins instruits". Il associait les gens âgés aux gens

moins instruits et aux gens qui ne comprenaient pas grand-chose.

M. Blouin: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député de Maskinongé. Il y a une question de règlement. J'aimerais savoir en quoi le règlement a été...

M. Blouin: En vertu de l'article 204 de notre règlement, qui porte sur la pertinence du débat, c'est une demande de directive que je vous adresse. Nous sommes en train de parler des crédits budgétaires du gouvernement et le député de Maskinongé essaie de nous dresser sa propre politique à l'égard des personnes âgées. J'ai de la difficulté à le suivre. Est-ce que vous pourriez m'indiquer si nous ne devrions pas nous en tenir à la pertinence du débat, qui est de discuter des crédits budgétaires du gouvernement, au lieu de revenir sur de soi-disant déclarations que le député relève à gauche et à droite, sans aucune espèce de suite, et qui n'ont aucun rapport avec le sujet dont nous sommes en train de discuter?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, puisque vous m'avez adressé une demande de directive, je dois vous dire que la pertinence du débat, dans une discussion qui a trait à un débat restreint sur les crédits budgétaires des ministères du gouvernement du Québec pour l'année 1984-1985, est basée sur les rapports des commissions. Je pense qu'à l'intérieur de l'ensemble des commissions, il y a certainement eu, à l'une ou à l'autre, des discussions qui ont porté sur les crédits à être accordés à différents groupes de la société. Que le député de Maskinongé ait une opinion, c'est son droit le plus strict. Que vous en ayez une aussi, c'est votre droit le plus strict également. Je pense que le député de Maskinongé essaie de faire une démonstration d'après le rapport de ces commissions. M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: Merci, M. le Président. Je serais un peu d'accord avec mon collègue qui vient de soulever cette question de règlement, parce que, à toutes fins utiles, le gouvernement du Québec n'a pas de politique pour les personnes âgées. Il ne donne presque pas ou à peu près pas de budget pour les personnes âgées. Cela devient un peu difficile d'en parler. Mais, dès qu'on en parle... cela me permet d'en parler. Je vous remercie de m'en donner l'occasion. Cela vous montre aussi ce que vous n'auriez jamais dû faire, d'ailleurs. Soulever une telle question de privilège, c'est ne pas savoir ce qui est débattu. (12 heures)

Je continue. M. Garon, en 1980, après le référendum, comparait les personnes âgées aux gens moins instruits, aux gens qui ne comprenaient pas grand-chose à notre société d'aujourd'hui. Beau respect pour les personnes âgées! Et on confie de l'argent à un ministre semblable, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, et à l'ancien ministre de l'Industrie et du Commerce pour administrer le budget des personnes âgées. Quelle crédibilité:

Plus que cela, votre gouvernement a tellement décidé de se moquer et de ridiculiser les personnes âgées que le premier ministre s'est permis, lui aussi, d'en parler. Je vais citer le premier ministre, c'est trop important. Le premier ministre, c'est le gars qui dirige à peu près tout au Conseil des ministres. Quand il pense d'une façon, les autres pensent de la même façon aussi, on s'enligne sur lui. Voici ce que le premier ministre du Québec disait concernant les personnes âgées.

M. Blouin: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député de Maskinongé, j'ai une question de règlement.

M. Blouin: M. le Président, conformément à ce que vous avez dit tout à l'heure, j'insiste pour que le député de Maskinongé nous indique quel lien il y a entre la discussion qu'il est en train d'avoir, seul avec lui-même, les crédits budgétaires et les discussions qui ont eu cours, comme vous l'avez dit, M. le Président, au cours des commissions parlementaires qui ont étudié les crédits budgétaires. J'aimerais que le député de Maskinongé nous indique à quelle discussion il se réfère, provenant des commissions parlementaires, puisque nous sommes en train de discuter des crédits budgétaires du gouvernement. Est-ce que cela l'intéresse, l'économie, ou si cela ne l'intéresse pas?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député, vous allez un peu trop loin, là. Je dois vous dire que j'ai suivi avec attention, comme je le fais toujours, l'ensemble des discours. J'ai cru comprendre que l'argumentation de base du député de Maskinongé - sans vouloir aller au fond, parce que ce n'est pas mon rôle - se référait à des sommes disponibles à remettre à la Caisse de dépôt, comme il l'a très bien dit. Son argumentation portait sur cette partie des crédits budgétaires, si j'ai bien compris. Le député de Maskinongé a droit à son opinion, il a le droit de l'exprimer et c'est ce que je lui permets de faire.

M. Picotte: D'ailleurs, M. le Président, je faisais référence à une question qu'on posait hier en Chambre concernant des

crédits. Je pense qu'il n'y a que le député de Rousseau qui n'a pu saisir le lien.

Je continue, M. le Président, en espérant que les trois minutes perdues seront ajoutées à mon temps. Voici ce que pense le premier ministre du Québec des personnes âgées. Avant de se rendre en France, le premier ministre du Québec, qui est loquace, a répondu à certaines questions. On lui posait la question suivante: "Vous croyez qu'il s'agit seulement d'un phénomène conjoncturel? - en parlant de l'indépendance. - Oui, mais c'est préoccupant. - Comment comptez-vous attirer de nouveau les adhérents" - vers l'indépendance du Québec? - Les membres qui ont quitté le parti, à quelques exceptions près, vont revenir au moment où approcheront les échéances électorales. Le problème véritable se trouve du côté des jeunes de 18 ans à 24 ans. Depuis le référendum qu'on a perdu en 1980 et jusqu'aux prochaines élections en 1984 ou 1985, des centaines de milliers de jeunes auront atteint l'âge de voter."

Oui, avec 150 $ par mois leur venant de l'aide sociale parce qu'ils ne trouvent pas de travail, oui, ils vont avoir l'âge de voter et ils vont voter contre vous, c'est vrai!

Il va plus loin: "À l'autre bout - c'est ce que disait le premier ministre, je rapporte les paroles de M. René Lévesque, premier ministre du Québec - il y a beaucoup de gens qui avaient été terrorisés au moment du référendum et qui ont levé les pieds: ils sont morts." Eh! Belle considération pour nos personnes âgées! Ils ont levé les pieds, les vieux, et ils sont morts. C'est le premier ministre du Québec qui disait cela. Ils ont levé les pieds, les vieux, et ils sont morts. Ils vont nous débarrasser pour que nous puissions faire l'indépendance du Québec lors de la prochaine élection, en 1985.

Il va encore plus loin: "C'est la loi de la nature, et ces changements aux deux extrêmes de la pyramide des âges concernent près d'un million d'électeurs." Bravo pour l'indépendance! C'est ce que disait le premier ministre du Québec: "C'est là que se trouve la clé." Donc, la clé de l'indépendance passe par les jeunes qui vont atteindre l'âge de voter et elle passe aussi par le fait que les vieux vont les débarrasser et disparaître. C'est ce que le premier ministre du Québec disait.

Je vous ai donné trois exemples, deux exemples de ministre et celui du premier ministre, le premier citoyen du Québec, qui demande à être respecté mais qui tient un langage semblable. Je vous ai donné l'exemple du premier ministre qui souhaite la mort des personnes âgées pour gagner son élection. On va parler de rapatrier de l'argent du gouvernement fédéral pour tâcher d'avoir une sécurité de vieillesse pour les personnes âgées...

Une voix: C'est vrai.

M. Picotte: Mon oeil! Vous ne l'aurez jamais, l'indépendance du Québec, avec des solutions semblables, avec des idées pareilles et en traitant les gens de notre province de cette façon.

Cela a été la même chose ce matin. J'avais l'intention d'interroger le ministre de l'Agriculture et la ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu concernant des programmes destinés aux agriculteurs du Québec pour de la création d'emplois. Ces gens-là se vantent de créer de l'emploi. On avait un programme l'année dernière qui, dans mon seul comté, avait créé 300 emplois, plus précisément 328. Cette année, qu'est-ce qu'on fait? On parle de créer de l'emploi, on parle de mettre l'accent là-dessus. Qu'est-ce que le gouvernement a fait? On m'a annoncé ce matin qu'il n'y aurait plus de programme "Agri-Travail". Encore du beau trompe-l'oeil, encore une fois, on trompe la population. Assez, c'est assez!

Un budget comme celui présenté par le ministre des Finances, déconnecté de la réalité, cela mérite d'être réprouvé et c'est réprouvé par l'ensemble de la population. Je me ferai un devoir de voter contre l'adoption d'un budget aussi insignifiant, présenté par un gouvernement et un ministre des Finances usés, vidés. Il est grand temps que vous déclenchiez des élections générales pour que les 6 500 000 Québécois se débarrassent de votre genre de gouvernement qu'on ne peut plus endurer d'aucune façon.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

Une voix: II a quelque chose à dire. M. Raymond Brouillet

M. Brouillet: M. le Président, je crois qu'il serait temps que nous en revenions aux faits plutôt qu'aux cris de voix. On peut dire que le député de Maskinongé excelle dans la vocifération, mais il a appuyé ses cris sur très peu de faits et de données précis.

Le député de Maskinongé prend plaisir à dire que les membres du parti ministériel dans cette Chambre disent qu'il n'y a pas trop de chômage, répètent que cela va bien et qu'il n'y a pas de problème au Québec. C'est faux. Il n'y a aucun membre de cette Chambre, fût-il du parti ministériel, qui oserait affirmer et qui a affirmé qu'il n'y a pas de problème au Québec, qu'il n'y a pas trop de chômage au Québec, que cela va très bien au Québec. Dire cela, c'est vouloir faire de la démagogie.

Il y a trop de chômage au Québec et

nous le réaffirmons comme gouvernement. Tout ne va pas très bien au Québec et il y a des problèmes au Québec. Mais comme dans la réalité humaine, tant sur le plan personnel que sur le plan collectif des sociétés, tout est relatif, il faut quand même faire la part des choses et dire que, si tout ne va pas bien au Québec et qu'il y a trop de chômage, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu progrès, cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas eu d'efforts pour améliorer la situation. Cela ne veut pas dire non plus que nous ne sommes pas sur la bonne voie vers une amélioration de la situation au Québec.

Concernant le chômage, je vais relever simplement certains faits. Ces données viennent de Statistique Canada. En un an, de mars 1983 à mars 1984, le taux de chômage a diminué au Québec de 14,5% à 13%, donc une diminution de 1,5% du chômage en un an. Comme pour apprécier une donnée sociologique, il faut savoir la comparer à des sociétés comparables qui vivent autour de nous. Voyons l'état et l'évolution du chômage au Canada durant la même période, c'est-à-dire de mars 1983 à mars 1984. (12 h 10)

Au Canada, le chômage est passé de 11,4% à 12,5% - ce sont des données de Statistique Canada - donc une augmentation durant la même période de 1,1% tandis qu'au Québec, il y a eu une diminution de 1,5%. Donc, au Canada, 12,5% de chômage - c'est la situation actuelle - et 13% au Québec. C'est encore un peu plus que dans l'ensemble du Canada, mais l'écart entre le taux de chômage québécois et le taux de chômage canadien n'a jamais été, dans l'histoire des temps modernes au Canada, aussi mince. Ce sont des données. Relativement au reste du Canada, si le taux de chômage est moins élevé - l'écart du taux de chômage est moins considérable actuellement - c'est parce que au Québec il y a eu des efforts considérables depuis deux ans pour relancer l'économie et créer des emplois.

Encore là, ce n'est pas par des cris que nous allons pouvoir affirmer cela. C'est par des chiffres et des données qui nous viennent encore de Statistique Canada. Le taux de croissance au Québec a été surprenant, disent le Conference Board et Statistique Canada, en 1983-1984, et les mêmes institutions prévoient que, pour 1984-1985, le taux de croissance au Québec sera de 4% et qu'il sera au même niveau que certaines provinces canadiennes et supérieur à la plupart des provinces canadiennes.

Tout n'est pas rose au Québec, comme tout n'est pas rose au Canada, comme tout n'est pas rose dans les sociétés occidentales, comme tout n'est pas rose dans l'ensemble des sociétés. Surtout au lendemain d'une crise, nous avons à nous relever des coups que nous avons reçus d'une crise économique qui nous afrappés et dont les origines ne sont pas exclusivement du Québec, mais dont les origines proviennent de l'ensemble de la société industrielle nord-américaine et occidentale.

Il y a un autre sujet et, vraiment, je trouve cela absolument, je ne dirais pas dégoûtant, mais, enfin, ce serait peut-être le mot que je devrais dire, la façon dont le député de Maskinongé essaie d'exploiter certains sentiments que peuvent éprouver certaines catégories de notre population, les personnes âgées. Comment exploiter ces sentiments, le sentiment d'une certaine insécurité, ce qui est normal à cet âge, jouer démagogiquement sur ces sentiments pour faire les pires vilenies et affirmer les choses les plus aberrantes? Quand on dit que le gouvernement a du mépris pour les personnes âgées, je ne saurais qualifier de telles affirmations. Venons-en encore au fait.

Tout d'abord, les personnes âgées connaissent les députés du Parti québécois parce qu'on les rencontre, parce qu'on vit avec ces personnes, parce qu'on suit leurs activités, parce qu'on les soutient dans leurs activités, parce qu'on les supporte, et qu'on est prêts à collaborer avec elles dans toute entreprise qu'elles pourront désirer mettre sur pied pour améliorer leurs conditions de vie. Qu'est-ce que le gouvernement du Parti québécois a fait pour les personnes âgées? Tout d'abord, il y a les médicaments gratuits. Il y a la construction de logements, de foyers. Je n'ai pas les chiffres devant moi, mais vous savez que nous avons construit des dizaines de milliers de logements, dans les HLM, depuis ce temps, pour permettre aux personnes retraitées d'avoir un logement décent et convenable. On a quadruplé, quintuplé les possibilités de logements décents pour les personnes âgées. Pensons au programme "Logirente". Qui a mis sur pied le programme "Logirente"? Par ce programme, on paie une partie du loyer des personnes âgées pour leur permettre, si elles le désirent, de continuer à vivre dans le logement où elles ont vécu depuis des années. Encore cette année, le gouvernement a élargi, à l'ensemble des personnes retraitées ou préretraitées, l'accession à ce programme "Logirente". Les personnes de 60 à 64 ans, de même que les personnes de 65 ans et plus, seront admissibles au programme "Logirente". C'est donc un pourcentage du loyer, un pourcentage qui excède une partie du revenu, qui sera versé à ces personnes pour leur permettre de demeurer chez elles et de continuer à vivre dans le lieu où elles désirent vivre. Quand j'entends un député tenir les propos qu'il a tenus tantôt, cela me dégoûte, M. le Président.

Nous en venons aux crédits du gouvernement. Vous savez que lors de la crise économique que nous avons dû subir depuis deux ans, le gouvernement a fait des efforts considérables pour tâcher de contrôler ces

dépenses publiques pour éviter l'accroissement du déficit de la province, pour tenter de dégager dans ce contexte une marge de manoeuvre pour supporter l'économie, pour tâcher d'aider à la relance de l'économie et ainsi créer de l'emploi et soulager la misère qui, malheureusement, est trop répandue dans notre société.

Les efforts que pas uniquement le gouvernement, mais que l'ensemble des citoyens du Québec ont été appelés à fournir durant deux, trois ans... Nous savons comment des groupes de citoyens ont été appelés à collaborer, à contribuer, et dans certains cas grassement, pour tâcher d'établir cet équilibre des dépenses publiques et ainsi permettre de dégager une marge de manoeuvre pour soutenir l'économie. C'est l'ensemble des efforts des citoyens qui ont permis, cette année entre autres, de présenter un budget équilibré et qui ont dégagé 311 000 000 $, dans un budget qui n'accroît pas le déficit, mais au contraire qui le diminue si on compare le déficit actuel proportionnellement à l'ensemble des revenus du Québec. Il y a même une diminution réelle du déficit. On a quand même réussi, par une gestion rigoureuse, par un effort collectif de la société québécoise à dégager 311 000 000 $ pour les injecter dans l'économie et soutenir le plan de relance que le premier ministre du Québec annonça au mois de novembre dernier. Quand le premier ministre a fait connaître le plan de relance, qui a été le fruit de mois et de mois de réflexion et d'efforts, on a fait des gorges chaudes parce qu'on prévoyait pour les trois mois qui devaient terminer l'année financière le 31 mars... on avait annoncé des crédite de 30 000 000 $ pour le plan de relance dans ce budget.

On a fait des gorges chaudes en disant: Où voulez-vous que nous allions avec 30 000 000 $ pour supporter le plan de relance de l'économie du Québec? On a dit, à ce moment: Attendez le prochain budget; c'est là que la mise sur pied des différents éléments du plan de relance pourra être complétée et concrétisée et vous verrez, à ce moment, les sommes d'argent que le gouvernement sera prêt à consacrer pour l'appuyer et le réaliser. Nous retrouvons cela dans les crédits déposés par le gouvernement, 311 000 000 $ de marge de manoeuvre consacrés en totalité pour appuyer le plan de relance.

Ce plan de relance forme un tout avec différents volets, cinq en particulier. C'est l'interaction de ces différents volets qui va permettre d'infléchir notre développement économique, qui va permettre d'agir sur la structure de base de notre économie pour tâcher de la rendre plus solide, pour tâcher de la raffermir et pour tâcher aussi de la rendre concurrentielle face à toutes les autres économies du monde occidental. Ces principaux volets du plan de relance sont les suivants: II y a le volet entreprise. Le gouvernement a consacré une grande partie de ces 311 000 000 $ pour tâcher de soutenir l'entreprise, de la relancer, de la moderniser.

Je n'irai pas dans tous les détails parce que j'aimerais aborder un point qui me tient très à coeur, en particulier, c'est celui des jeunes. Pour ce qui est des entreprises, vous le savez, il y a plusieurs millions de dollars pour supporter l'entreprise. L'entreprise de la construction, le secteur agro-alimentaire, tout le programme de financement des entreprises, le reboisement de nos forêts, etc., et j'en passe. Il y a tout le volet de la recherche et de l'innovation. Il y a 45 000 000 $ qui ont été dégagés pour aider la recherche et l'innovation dans nos universités et aussi dans nos différentes entreprises. La main-d'oeuvre: 116 000 000 $ accordés pour la formation de la main-d'oeuvre. Je reviendrai sur ce volet tantôt quand je parlerai du cas des jeunes. (12 h 20)

Après cela, il y a le volet des investissements publics. Il y a 166 000 000 $, en plus des 311 000 000 $ dégagés dont j'ai parlé tantôt, pour appuyer le plan de relance, il y a 166 000 000 $ qui ont été ajoutés à au-delà de 1 000 000 000 $ pour des immobilisations publiques dans notre société, pour un total de 1 219 000 000 $ d'immobilisations que le gouvernement, à même le service de la dette, va injecter dans l'économie pour fournir à nos citoyens les équipements dont ils ont besoin dans les différentes sphères de leur activité sociale.

Je mentionne qu'il y aura aussi un cinquième volet: 2 900 000 $ seront accordés au ministère du Revenu pour améliorer l'accessibilité des services auprès de l'ensemble des citoyens: services de réception, services d'accueil et services téléphoniques.

M. le Président, quinze minutes, c'est très court et très bref pour aborder des questions d'une telle importance, mais j'aimerais dire ceci avant d'aborder le cas des jeunes. Ces 311 000 000 $ pour appuyer le plan de relance, ces 166 000 000 $ additionnels aux immobilisations dans le cadre des investissements publics représentent des milliards de dollars d'investissements de la part des partenaires et de tous les autres. Pour vous illustrer ceci, le plan de relance du mois de mars de l'an dernier, qui a demandé au gouvernement l'injection d'environ 200 000 000 $, a généré pour 8 000 000 000 $ d'investissements au Québec. Malheureusement, je n'ai pas le temps de détailler cela.

M. le Président, vous me faites signe, mais est-ce que j'ai encore au moins cinq minutes?

Une voix: Une minute.

M. Brouillet: Deux minutes?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je ne sais pas l'entente qu'il y a eu dans votre parti, si on avait prévu quinze minutes plus une demi-heure pour le ministre, mais d'après ce que je peux voir, ce sera 20 minutes chacun et le ministre aura 20 minutes, puisque c'est l'heure.

M. Brouillet: Je vais conclure très rapidement sur les jeunes. Qu'y a-t-il dans le budget pour les jeunes? Tout d'abord, pour les jeunes diplômés, il y a le programme de bourses d'affaires. Plusieurs millions de dollars seront consacrés à cela. C'est pour permettre aux jeunes qui ont un diplôme de cégep professionnel ou du premier cycle universitaire de mettre sur pied leur propre entreprise pour créer leur propre emploi et pour créer des emplois pour les autres. Vous avez entendu parler de ce programme. Sinon, vous pourrez vous référer aux bureaux de vos députés de comté et ils pourront vous fournir tous les renseignements.

J'en viens aux jeunes qui reçoivent de l'aide sociale, aux jeunes en bas de 30 ans, les 18-30 ans aptes au travail. Il y en a 80 000. Qu'est-ce que le gouvernement fait pour eux? Il y avait une alternative. Soit augmenter leur prestation parce qu'il est évident qu'on ne peut pas vivre avec 152 $ par mois - tout le monde est d'accord avec cela: on ne peut pas vivre de façon indépendante et autonome avec 152 $ par mois - donc, l'augmenter sans condition ou bien offrir une allocation additionnelle, mais à une condition, soit de parfaire leur formation par du rattrapage scolaire pour terminer au moins leur secondaire, soit encore par des stages en entreprise ou bien participer à une activité qui répond à des besoins sociaux du milieu. C'est la solution que le gouvernement a retenue.

Ce que désirent les jeunes, ce n'est pas de recevoir de l'argent à ne rien faire. Au fond, quand nous les rencontrons ou que nous discutons avec eux, ce qu'ils désirent c'est de pouvoir gagner leur vie et participer à l'élaboration de projets nécessaires à la société.

Le gouvernement a donc prévu des crédits pour compléter la formation scolaire, la formation en entreprise et, aussi, pour appuyer des projets communautaires venant du milieu. Ce que je demande, c'est que le gouvernement dispose des crédits nécessaires pour répondre à tous les projets communautaires du milieu et qu'on ne se limite pas uniquement à 30 000, 40 000 ou 50 000 jeunes. Il faut que les 80 000 jeunes puissent, s'ils le désirent, après avoir mis sur pied des projets communautaires en collaboration avec les gens du milieu, obtenir les crédits nécessaires pour réaliser ces projets. Ce sont les 80 000 jeunes aptes au travail qui pourront, s'ils le désirent, avoir plus de 152 $ et recevoir une allocation additionnelle qui leur permettra de vivre plus décemment et surtout plus dignement parce qu'ils auront participé à une activité sociale, une activité nécessaire soit pour parfaire leur formation ou encore pour répondre aux besoins de la société. J'invite les jeunes à se regrouper pour élaborer des projets et venir faire pression sur le gouvernement pour que celui-ci alloue les crédits disponibles à tous les projets valables dans le milieu et ainsi permettre aux jeunes de travailler dans la société. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, selon l'entente, il reste 20 minutes au député de Saint-Laurent et 22 minutes au ministre. M. le député de Saint-Laurent.

M. Germain Leduc

M. Leduc (Saint-Laurent): De l'étude des crédits budgétaires pour l'année 1984-1985 et du budget de cette même année, j'ai surtout retenu un aspect ou une chose: c'est que le gouvernement du Parti québécois s'intéresse beaucoup plus à la politique qu'à l'économie de la province de Québec. C'est ce que je vais tenter de prouver dans les minutes qui vont suivre. Je vais surtout tenter d'établir combien il est important d'être concurrentiel si nous ne voulons pas que l'économie du Québec soit déclassée.

Lors de la publication par l'European Management Forum de ses statistiques annuelles sur la compétitivité des pays industrialisés, on apprenait que le Canada se classait au onzième rang sur 24 pays. Dans les critères d'évaluation retenus par l'organisme, on retrouvait, entre autres, des facteurs relatifs au climat plus ou moins favorable à l'investissement dans le pays concerné. Sur ce point, le Canada arrivait, malheureusement, au quatorzième rang. Ce sont généralement les politiques trop indépendantistes ou trop nationalistes qui rendent incertains les investisseurs. Il faut bien le dire. Au Canada, on n'a qu'à penser à la FIRA, à l'agence de tamisage des investissements étrangers et au PEN, le fameux programme énergétique national.

Au Québec, bien sûr, on pense tout de suite à la question de la langue avec la loi 101. On pense au tas de règlements ou à la réglementation volumineuse et tracassière. Et bien sûr, immédiatement, on pense à l'objectif obsessionnel de ce gouvernement, l'objectif de l'indépendance véhiculé par le gouvernement québécois depuis 1976.

Ce dont nous avons besoin ici aujourd'hui pour poursuivre la reprise et pour conserver, sinon accroître notre position concurrentielle, c'est à la fois d'un climat

politique sain et d'une économie favorable, c'est-à-dire un environnement économique qui favorise l'investissement, tout ce qui, bien sûr, manque et fait défaut au gouvernement du Parti québécois. Il faut parler aux gens d'affaires. Il faut parler peut-être particulièrement aux industriels, aux gens qui créent la richesse, particulièrement aux implanteurs d'industries chez moi, dans le comté de Saint-Laurent. Il faut parler à ces gens pour entendre leurs doléances. Ils nous disent combien l'incertitude politique est également une incertitude économique, combien cela affecte le développement économique du Québec et combien, de cette façon, on ne vient pas à bout d'agrandir l'assiette fiscale au Québec. Voilà les deux préalables à la relance économique sur lesquels je vais maintenant m'attarder. En effet, ces crédits budgétaires et le budget étant, à mon sens, dans la continuité des politiques électoralistes du gouvernement du Parti québécois, on se doit de bien les situer pour les mieux comprendre.

L'incertitude politique qu'incarne l'indépendance a eu sur l'investissement privé des effets absolument négatifs qui, bien sûr, ne se comptabilisent plus tellement ils sont nombreux et dont le plus visible fut sans doute l'exode des sièges sociaux. Oui, M. le ministre, l'exode des sièges sociaux au Québec est, en fait, un facteur qui déclasse absolument l'économie du Québec. Malheureusement, ceux qui en ont le plus souffert, M. le ministre du Commerce extérieur, ce sont, en dernière analyse, tous les travailleurs et surtout les Québécois de classe modeste, parce qu'il y a une chose qu'il faut bien comprendre; quand les entreprises et les sièges sociaux quittent le Québec, ils emportent avec eux leurs capitaux. Ils emportent également leurs jobs ou leurs emplois. Ce sont des jobs ou des emplois qui sont perdus pour les Québécois, surtout pour nos jeunes. Il faut voir les problèmes qu'on connaît actuellement au Québec avec les jeunes. De cette façon, le Québec est en train de détruire les jobs ou les emplois pour nos jeunes. On est en train de détruire cette génération de jeunes. (12 h 30)

À la suite de multiples pressions et face à une conjoncture qui ne s'améliorait pas aussi facilement qu'il l'aurait bien souhaité, le Parti québécois a lancé, le 13 novembre dernier - on s'en souvient - son fameux plan de relance. Laissez-moi vous dire que, si j'aborde ce plan de relance en parlant du climat politique, c'est qu'à mes yeux, ce plan en était d'abord un de relance politique. Non pas de relance économique. Ce qu'on fait, de l'autre côté, c'est de la relance politique.

On a eu droit à un plan de relance absolument exempt de réelles mesures économiques, telle la stimulation des investissements. On sait le rôle important des investissements dans une économie qu'on veut prospère. C'est un plan de relance qui n'avait même pas le calibre de ce qu'on pouvait en attendre, soit redonner confiance aux investisseurs. Ce qui a motivé le Parti québécois dans toute cette affaire, c'était exclusivement de reconquérir l'opinion politique. C'est un exercice, comme je le disais tantôt, de relance politique.

Le document secret rendu public par trois de mes collègues, le 17 mai dernier, en est une preuve flagrante. Le Parti québécois identifie des publics cibles, des actions et des acteurs sur lesquels il entend intervenir pour rétablir sa crédibilité. À mon sens, il n'est même plus question de rétablir sa crédibilité puisque la crédibilité du Québec est terminée. Ce gouvernement est majoritaire au Parlement, mais il est minoritaire dans la population.

Toute cette relance politique s'est donc faite sous le signe d'une relance économique. Qu'il suffise maintenant de regarder le scénario de plus près. Le gouvernement du Parti québécois tiendra trois sommets nationaux en 1983; d'abord au mont Sainte-Anne, en février; ensuite, à Pointe-au-Pic, en septembre et, enfin, on s'en souvient, à Compton en novembre. On connaît la suite, bien sûr. Ces sommets économiques débouchent sur un plan de relance économique, le 13 novembre, et sur le manifeste "Face à un monde nouveau", rendu public le 25 mai dernier.

Afin de rendre encore plus visible et plus crédible toute cette action, on a eu droit entre-temps, soit le 6 mars dernier, à un remaniement ministériel. J'ai bien dit remaniement ministériel et non pas un renouvellement. Tous les Québécois ont assisté au fameux jeu de la chaise musicale. On cache les ministres. On enlève des ministres de poste où ils ont fait des gaffes. On essaie, en fait, de diminuer les vagues. Ce qu'on veut surtout, c'est se donner une belle image. Le gouvernement du Parti québécois affirme qu'il entend dorénavant miser sur l'économie. Comme si ce gouvernement était intéressé par l'économie.

Qu'est-ce qui a le plus stimulé ce gouvernement à prendre ce mirage? Est-ce un mirage ou un virage? Il y a d'abord eu, bien sûr, sa perte de popularité. Le remaniement mute les ministres les plus contestés, soit le ministre de l'Éducation, le ministre des Affaires municipales avec la fameuse loi 38 et celui du Revenu avec la non moins célèbre loi 43. Les chantiers de Camille. On en est rendu aux chantiers de Camille, tels qu'on les a appelés, et qui prônaient déjà la nécessité d'un rapprochement. Camille avait senti qu'il était nécessaire de se rapprocher de la population et des groupes sociaux.

Il y a aussi en corollaire les critiques

internes en provenance du Parti québécois. Parce que, bien sûr, le Parti québécois est conscient des problèmes. À ce titre, personne n'a encore mieux défini les objectifs électoralistes du Parti québécois que le conseiller aux programmes lui-même, dans les pages du Devoir, le 25 août 1983. Il intitulait son plaidoyer comme suit: "Le Parti québécois en quête d'une reprise politique". J'ai parlé tantôt de crédibilité politique et c'est ce qui préoccupe ce gouvernement. Il affirmait que la souveraineté demeurait le seul cadre politique possible pour faire face adéquatement aux défis économiques et techniques. Je passe sous silence le plaidoyer du député de Rouyn-Noranda-Témiscamingue, les conspirateurs de l'an 2000, pour qu'"enfin, les Québécois se reconnaissent dans le Parti québécois". Parce que les Québécois ne se reconnaissent plus dans le Parti québécois, au dire du député de Rouyn-Noranda.

Le premier ministre parvient finalement à rallier tous ses ministres à l'objectif de la souveraineté-association. Voilà donc une année complète pendant laquelle on s'affaire à ressourcer, à revitaliser le projet indépendantiste. Dans le manifeste du début de 1983, intitulé "Les aspirations de notre société", le Parti québécois affirme que l'indépendance n'est plus nécessaire seulement pour des raisons émotives, telle la langue, mais bien pour des raisons économiques, soit le mieux-être des Québécois. Le manifeste de la semaine dernière donne effectivement raison à cette première ébauche d'un nouveau projet collectif: la souveraineté-association aura une vision économiste.

Il y a, enfin, une troisième raison à la nouvelle vocation économique du Parti québécois: il s'agit de se placer sur le terrain de ce qui a toujours fait la force du Parti libéral et de son chef, l'économie. On pourra toujours nous dire que Robert Bourassa n'inquiète pas le Parti québécois. On le voit donc, toute cette démarche est d'abord et avant tout politique et l'hypothèque de l'indépendance demeure toujours. On ne fait que procéder à une mise à jour de l'indépendance. Ce n'est sûrement pas un climat politique dont nous saurions nous satisfaire, dont les Québécois pourraient se satisfaire.

Ce dont le Québec a besoin pour prendre le virage technologique à temps, c'est d'un climat économique favorable à l'investissement et aux investisseurs. Nous l'avons dit constamment et nous allons continuer à le dire: il faudra bien plus que les légers adoucissements de décembre dernier sur la loi 101 pour parvenir à ces fins. Le gouvernement doit de toute nécessité alléger le fardeau fiscal des Québécois, notamment, par l'abolition des droits successoraux, comme nous l'avons à nouveau prôné la semaine dernière, appuyés en cela par le député de Sainte-Marie, un député qu'on ne peut accuser d'être capitaliste, bien sûr. Il a compris que pour l'économie du Québec, il faudrait peut-être enlever les droits de succession, qui coûtent trop cher aux Québécois, aux plus démunis de la société qui perdent, de cette façon, des jobs, des emplois.

Que nous proposent les crédits budgétaires et le budget qui a suivi? Question à se poser. Je compte poursuivre mon argumentation à l'effet que derrière des mesures économiques, ou plutôt derrière l'absence de mesures économiques, se dessine un plan strictement politique et électoraliste. Dans son discours sur le budget, le ministre des Finances notait que le Québec fut le seul gouvernement du Canada à ne pas augmenter son déficit au cours de la récession, tout en étant le plus actif sur le plan des politiques de relance. À quelles politiques réfère-t-il? Sûrement au plan de relance de novembre dernier.

Et le ministre d'ajouter immédiatement: "Je suis convaincu que les orientations prises jusqu'à maintenant par le gouvernement sont essentiellement celles qui devaient être prises." Cette consécration du statu quo est loin de faire des crédits budgétaires et du budget des documents insignifiants. Non, je suis le premier à admettre que ces documents, tant les crédits budgétaires que le budget, ne sont pas des documents insignifiants. Au contraire, ils témoignent du peu de cas que fait le gouvernement actuel de la situation économique. Il détériore le climat économique au Québec. On ne peut, contrairement à ce que prétend le ministre, se réjouir de performances économiques macroscopiques ou de prévisions chrono-métriques futuristes pour crier victoire alors, que l'on connaît au Québec un taux de chômage qui affecte 410 000 Québécois, alors que nous connaissons au Québec 715 000 personnes dépendant de l'assistance sociale qui, malheureusement, ne sont pas embarquées, elles, à bord du train de la relance du ministre des Finances et des ministres de l'autre côté de la Chambre.

On ne peut sûrement pas non plus donner aux mesures gouvernementales le temps nécessaire pour en tirer l'effet désiré lorsqu'un travailleur sur sept au Québec ne travaille pas. Comment expliquer qu'il faille plusieurs mois pour mettre en place un programme de réinsertion des assistés sociaux sur le marché du travail alors qu'à l'annonce du plan de relance, tout aurait dû être fin prêt? N'avait-on pas travaillé plusieurs mois - M. le Président, je vous le demande - pour préparer ce plan? Peut-être que vous y étiez également.

Où sont donc allées toutes ces énergies ministérielles pendant ce temps si elles n'ont pas servi à fabriquer le plan de relance? En novembre, on nous a présenté un plan de

relance pour lequel on a toujours manqué d'estimations budgétaires. Le 22 mai dernier, le ministre des Finances réitérait qu'il n'a toujours pas les moyens de mesurer l'impact qu'auront les programmes de financement des entreprises et de main-d'oeuvre... (12 h 40)

J'avais 20 minutes, M. le Président. Est-ce que j'ai parlé durant 20 minutes? Pas du tout. Je vais utiliser mes 20 minutes.

À ce titre, sur quelle base peut-on affirmer que son plan réussira et sur quelle hypothèse a-t-on fondé sa conception? Il me semble que tout cet exercice manque de sérieux et manque sûrement de planification. Les crédits budgétaires et le discours sur le budget ne nous éclairent en rien sur le plan de relance, plan qui était déjà lui-même une pièce magistrale de théâtre télévisé.

À la suite de Jean-Louis Roy, directeur du Devoir, j'ajouterai, et je le cite: "À moins de s'attaquer aux causes du mal actuel, le gouvernement sera forcé de réaliser que son plan, si généreux soit-il, s'enlisera vite dans les vieilles rigoles du sous-développement."

Quels sont donc les préalables à la relance économique et à la rénovation de l'économie québécoise? Ce sont des mesures bien connues et que le ministre des Finances n'a aucunement retenues, soit, premièrement, une vigoureuse remise en cause de la réglementation; deuxièmement, une réforme de la fiscalité et, troisièmement, une réduction des ponctions fiscales sur la masse salariale.

D'abord, la réglementation. On estime que plus du tiers de l'économie est assujetti à une forme ou à une autre de réglementation au Québec, tels, bien sûr, le permis de travail, les barrières tarifaires, les quotas de production, le contrôle des prix, et ce sans parler du taux des salaires, des arbitrages de l'État et des règlements d'embauche et de licenciement. Il n'est donc pas surprenant que 15% du PIB provienne du travail au noir, une plaie au Québec. Si on reconnaît que 75% de la richesse, 67% des salaires et 50% des investissements relèvent du secteur privé, il est essentiel de donner à ce secteur les moyens de s'adapter aux nouvelles tendances de l'économie et d'innover. La réglementation a pour effet de diminuer la flexibilité des entreprises et l'adaptation aux nouvelles technologies. C'est la principale cause, selon l'Institut C.D. Howe, de la difficulté du Canada à se relever de la récession... Le Québec appartient au Canada, M. le ministre, pour votre information.

La fiscalité. Aucune mesure dans les crédits budgétaires ou dans le discours sur le budget n'est prévue pour venir alléger le fardeau des contribuables. Le ministre des Finances nous réserve la surprise, soi-disant, pour son livre blanc et pour le budget de 1985-1986, plus près des prochaines élections que le présent budget. Nous avons un régime fiscal plus élevé de 14,3% que celui de l'Ontario, c'est bien connu. Nous avons un système de taxation qui décourage profondément l'entrepreneurship et punit l'excellence: 44% de l'impôt provincial concerne la production. Il n'est pour s'en convaincre que d'observer l'ampleur de l'économie souterraine et l'utilisation croissante des abris fiscaux et subventions de toutes sortes qu'exploitent individus et entreprises, parfois de façon plus ou moins justifiée, tel le programme énergétique national du gouvernement canadien.

Le régime fiscal québécois est le frein le plus important à la croissance économique. Il n'y a pas que la crise qui ait amené les entreprises à préférer la consolidation de leurs finances ces dernières années plutôt que l'investissement en capital. Le système de taxation du Québec ne favorise aucunement l'entreprise privée ni n'attire les nouveaux investissements si importants pour le développement économique, pour nos jeunes. On peut penser, entre autres, aux droits de succession qui représentent, à juste titre, une prime au départ et une prime pour les investisseurs qui s'installeront ailleurs au Canada où ces droits de succession n'existent pas.

Je termine, M. le Président, dans deux minutes. Quand on sait que 65% de la croissance de la productivité s'explique par les investissements, il est très inquiétant de voir que, contrairement aux prétentions du ministre, l'investissement au Québec est passé de 21% du PIB en 1976 à 14,8% en 1984, alors qu'au Canada il s'est maintenu autour de 23% ou 24%.

Tout cela, M. le Président, pour vous dire combien les Québécois sont inquiets face au sous-développement, face aux problèmes qui sont créés à l'économie du Québec. Je pense qu'il est grandement temps... Je pense que certains Québécois ont commené à avoir de l'espoir parce qu'ils pensent que c'est la fin, la fin de ce régime et pour bientôt. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président suppléant (M. Tremblay):

La parole est maintenant au ministre du Commerce extérieur. Compte tenu que nous avons commencé ce débat avec cinq minutes de retard, il pourra intervenir jusqu'à 13 h 5.

M. Bernard Landry

M. Landry: Merci, M. le Président, de me donner la parole et de me dire avec beaucoup d'équité que je pourrai dépasser la limite fatidique de 13 heures.

Ce n'est pas tout à fait par hasard que le gouvernement demande au député de Laval-des-Rapides de conclure le débat sur le discours sur le budget. En effet, une des

mesures contenues, qui a frappé énormément la population et qui a été appuyée avec enthousiasme, c'est l'abolition du péage. Dans cette grande ville de Laval, la deuxième plus grande du Québec par sa population, il s'agit là d'une promesse qui en a laissé plusieurs sceptiques. Pourquoi? Parce que tous les parlementaires libéraux, depuis que le péage existe, ont promis de l'abolir. Non seulement aucun d'entre eux n'a réalisé sa promesse, mais ils en ont rajoutés, parce qu'on a deux autoroutes à Laval et on a des péages qui sont tout à fait récents qui ont été l'oeuvre de l'administration libérale.

Mes collègues de l'île de Laval et moi-même, au printemps 1981, avons convaincu la population, ce qu'elle fit, de voter pour nous et quatre des circonscriptions de l'île de Laval sont, en effet, représentées par la majorité ministérielle. Un des thèmes de notre campagne électorale qui, je dois le dire - les libéraux avaient tellement fait de démagogie, avaient tellement trompé le monde à ce sujet - faisait sourire, c'est que nous nous sommes engagés formellement -celui qui, aujourd'hui, est devenu le député de Vimont; celui qui est devenu le député de Fabre; celui qui est devenu le député de Mille-Iles - à débarrasser la population lavalloise de cet inconvénient majeur qu'était le péage. Nous avons dit cela à nos concitoyens. Plusieurs savaient que, quand le Parti québécois promettait une chose, il le faisait. Des fois même qu'on a fait des promesses et on les a réalisées et des gens qui ne les avaient pas prises au sérieux et qui étaient contre ces mesures ont dû convenir que, lorsque nous prenions un engagement, c'était sérieux. C'est avec beaucoup de plaisir que je le souligne pour les Lavallois, c'est la mesure la plus importante du budget, réaliser cette promesse.

Non seulement cela va permettre aux gens de diminuer leurs frais budgétaires quotidiens parce qu'un grand nombre de Lavallois et de Lavalloises travaillent dans l'île de Montréal, non seulement cela va leur faciliter l'accès à ce merveilleux royaume des Laurentides qui est situé immédiatement au nord, mais ce que peu de gens savaient, que les gens de Laval-des-Rapides savaient très bien, c'est qu'un poste de péage comporte en plus des désavantages d'environnement qui vraiment commençaient à être gênants, du bruit, de la pollution parce que les moteurs tournent au ralenti, évidemment, et une combustion beaucoup moins parfaite. Les sirènes des véhicules d'urgence qui essaient de se frayer un chemin, aux abords des postes de péage encombrés, pour vaquer aux obligations urgentes qui sont les leurs. Tout cela, aspect d'environnement, aspect économique, aspect de loisirs, est une transformation majeure de la vie des citoyens de cette île. Avec mes collègues de Laval, nous sommes extrêmement fiers d'avoir mené - le député de Vimont en particulier, qui a fait partie du comité qui a étudié la question - la bataille contre les péages, de l'avoir gagnée et nous allons maintenant continuer, pour l'amélioration de la condition de nos concitoyens, à faire d'autres batailles pour lesquelles nous reprendrons d'autres engagements à la prochaine campagne électorale. Comme le passé est garant de l'avenir, je pense que l'île de Laval qui est très largement québécoise et qui supporte très largement l'action du gouvernement le fera encore à la prochaine échéance électorale. (12 h 50)

Cela étant dit, qui est un peu local, j'en conviens, mais je ne pouvais pas m'empêcher de le souligner, je voudrais passer à quelques considérations plus générales sur le budget et suivre - cela va peut-être en surprendre certains - la logique du député de Saint-Laurent qui a parlé avant moi. Remarquez que ce n'est pas facile de suivre sa logique parce que, d'abord, il faut la découvrir et que ce n'était pas d'une clarté absolue, mais j'ai cru comprendre - il n'est plus ici pour le confirmer - qu'il disait que le niveau des investissements et des investissements privés, en particulier, était un indicateur de climat économique et de bonne gestion d'un gouvernement. En gros, je pense ne pas trahir sa pensée qui dit: Quand le climat est bon, les gens investissent et, quand le climat est mauvais, les gens n'investissent pas.

Quand les politiques sont bonnes, les gens investissent. Quand elles sont mauvaises, les gens n'investissent pas. J'admets que, sur le plan de l'analyse économique élémentaire, le député de Saint-Laurent a raison. Ce qu'il dit là, c'est vrai pour la France, c'est vrai pour les États-Unis, c'est vrai pour l'Ontario. Alors appliquons son raisonnement maintenant au cas québécois. Si le député de Saint-Laurent et l'Opposition veulent faire preuve d'une certaine logique, nous allons admettre leurs prémisses et nous allons l'appliquer au cas québécois en regardant dans le concret quels ont été précisément les investissements et les investissements privés au Québec en 1984.

Je donne quelques chiffres, mais ils sont absolument spectaculaires. Sans compter l'habitation, la croissance des investissements au Québec en 1984 est de 15,2%. En Ontario, environ 4 ou 5 fois moins: 3,6%. Au Canada: 1,2%. Appliquons la logique de l'Opposition: Si le climat est bon, les gens investissent. Les trois chiffres que je viens de donner démontreraient qu'au Canada le climat est particulièrement mauvais dans l'ensemble, qu'en Ontario il est beaucoup moins bon qu'au Québec, et qu'ici nos investisseurs ont décidé d'assurer une

croissance de 15,2%, ce qui fait que le Québec est, en pratique, la terre la plus accueillante et la plus favorable aux investisseurs, aux décisions d'investissement de tout l'espace économique canadien.

Si on poussait ces comparaisons au-delà du Canada... L'État de l'Illinois qui, à lui seul, est une puissance économique pratiquement comparable au Canada, l'État de l'Illinois est frappé d'un chômage de 20% présentement, les investissements y plafonnent et on regarde avec envie les chiffres québécois. Il m'a été donné de rencontrer au début de la semaine le lieutenant-gouverneur de l'Illinois qui m'a parlé des problèmes économiques cruels que subissaient ce grand État et plusieurs grands États américains.

Je dis à ces gens que, dans nos investissements dans le domaine manufacturier - ce qui est encore plus fort, eu égard à la thèse du député de Saint-Laurent: ce n'est pas le gouvernement, ce n'est pas Hydro-Québec, ce sont des entreprises privées, des grandes et des petites entreprises dans les parcs industriels de toutes les villes du Québec - il y a une hausse au Québec en 1984 de 38,3%, presque 40%.

Quelle est la situation en Ontario? C'est -2%. Pendant qu'on monte de 40% dans les investissements, l'Ontario diminue de 2%, le Canada diminue de 2,%. Une hausse de 40%, une diminution de 2,5%. Pourtant, en Ontario, où cela diminue de 2,3%, il n'y a pas de loi 101; il n'y a pas un gouvernement du Parti québécois. C'est l'évidence. L'Ontario n'a pas pour but d'acquérir la souveraineté nationale, comme la collectivité québécoise. En dépit de cela: un effondrement catastrophique des investissements et une hausse spectaculaire au Québec. J'aimerais que le député de Saint-Laurent soit toujours ici ou que quelque porte-parole de l'Opposition vienne m'expliquer comment, avec un climat mauvais comme celui qu'ils décrivent, on peut en arriver aux résultats les plus spectaculaires du Canada.

Je n'ai pas parlé jusqu'à maintenant de l'habitation. J'ai dit que mes chiffres excluaient l'habitation. Cela vaut vraiment la peine maintenant de regarder un peu cet aspect fondamental et, là encore, c'est de l'économie élémentaire. Les libéraux le diraient. Quand le bâtiment va, tout va. On a entendu cela mille fois et c'est relativement vrai. On va parler du bâtiment au Québec par rapport à la situation canadienne. En 1983 - le début des travaux, donc - le Québec hausse ses mises en chantier de 72%; l'Ontario, de 42%; le Canada, de 29%. Si, quand le bâtiment va, tout va, on hausse de 72% et que le Canada hausse de 29%, est-ce que cela ne veut pas dire que tout va moins bien au Canada et en

Ontario qu'au Québec, puisque, quand le bâtiment va, tout va et que nous sommes dans une reprise absolument extraordinaire?

Je reviens brièvement, entre parenthèses, à la ville de Laval. La ville de Laval, en 1983, a battu tous les records historiques de construction domiciliaire. N'y aurait-il pas un porte-parole de l'Opposition un peu plus perspicace que les autres qui, devant ces chiffres, admettrait modestement et humblement que c'est à cause du programme Corvée-habitation, un programme original et unique, incluant l'effort des travailleurs et des banques, incluant un effort collectif, avec un nom qui fait allusion à la grande tradition québécoise de la corvée où, quand on se serre les coudes, les choses marchent et marchent avec une évidence fulgurante?

Quand on entend des jérémiades semblables, qu'on s'intéresse à l'économie du Québec, qu'on s'intéresse à la situation des chômeurs, des bénéficiaires de l'aide sociale et qu'on s'intéresse véritablement au climat, on se demande quel est le but de l'Opposition. À qui veulent-ils faire mal? En ayant établi les positions logiques qu'il a établies, le député de Saint-Laurent ne fait sûrement pas mal au gouvernement, parce que, s'il dit que, quand les investissements sont bons, cela veut dire que le climat est bon - et je lui démontre que les investissements sont meilleurs au Québec que partout - ce n'est pas à nous qu'il fait mal. Alors, à qui fait-il mal? Il se fait sûrement mal à lui-même. Dire des sottises pareilles, cela n'améliore la crédibilité de personne. Il se fait mal à lui-même. Il fait mal à son parti, mais cela n'empêchera pas le monde de tourner, que le député de Saint-Laurent n'ait pas de crédibilité et que le Parti libéral sur le plan économique dise n'importe quoi.

Mais il y a une chose qui est légèrement plus grave. C'est que, ce faisant, il peut tirer dans le dos de l'économie du Québec elle-même. C'est beau d'être dans l'Opposition. Pour eux, c'est superbe, d'ailleurs. C'est un devoir important d'être dans l'Opposition. Cela ne dispense pas des obligations élémentaires vis-à-vis de notre appareil économique et vis-à-vis de notre population. Quand nos investissements montent de 40% et qu'ils baissent au Canada et qu'il y a un porte-parole d'en face qui dit que le climat du Québec est mauvais, il tire dans le dos de l'économie du Québec. Il peut faire croire à des entrepreneurs étrangers, qui reliraient cela, par exemple, dans le New York Times ou dans le Manchester Guardian, que la situation est mauvaise au Québec et, ce faisant, les déterminer à ne pas investir alors que les chiffres indiquent que c'est au Québec que l'on investit plus que partout ailleurs.

Les témoignages étrangers sont souvent

plus crédibles, et c'est vrai. Parce que, si l'Opposition ou nous-mêmes nous prononçons sur la situation en Cisjordanie par exemple, comme on n'a pas d'intérêts électoraux là, qu'on ne se présente pas à l'électorat là-bas et qu'il n'y a pas de signe à cet effet ni d'une part de la Chambre ni de l'autre, on peut avoir un jugement un peu objectif, plus objectif, disons.

Je vais citer des chiffres étrangers. Ce n'est pas par admiration béate devant l'étranger, mais c'est pour la simple raison que je viens d'expliquer. L'Union des banques suisses, par exemple. En général, la Suisse est considérée comme un pays sérieux et surtout la banque suisse est considérée comme extrêmement sérieuse, sinon austère. L'Union des banques suisses rend public un rapport sur le pouvoir d'achat dans toutes les villes importantes de la planète.

Je n'ai pas besoin d'expliquer ce qu'est le pouvoir d'achat. C'est la valeur de l'argent. Quand le pouvoir d'achat est élevé, on revient du marché avec des denrées dans son panier, suivant la vieille expression, et quand le pouvoir d'achat est bas, on va au marché avec un panier d'argent et on revient avec les denrées dans sa poche. Il y a un déséquilibre qui s'établit. Tout le monde sait bien ce qu'est le pouvoir d'achat.

Que dit l'Union des banques suisses? Parmi toutes les villes de la planète, pour la valeur qu'on peut acheter avec un dollar -cela comprend le logement, le transport, le panier de provisions, l'épicerie, les taxes -Montréal arrive troisième dans le monde. Qui nous bat? Genève, comme première ville; Los Angeles, comme deuxième ville. Qu'est-ce que les libéraux veulent de plus? Est-ce que cela leur donne le droit de hurler comme ils l'ont fait parce qu'on est seulement troisième dans le monde et qu'il y a seulement deux villes qui nous dépassent? Qu'est-ce que c'est? Vous pensez que, normalement, l'efficacité d'un gouvernement péquiste devrait nous avoir fait la première ville de la planète. J'aimerais cela. Moi aussi, je suis perfectionniste comme vous. Si Montréal n'est que la troisième ville de la planète pour le pouvoir d'achat, on va faire des pieds et des mains pour qu'on soit les premiers. Mais, en attendant, arrêtez de hurler à la catastrophe. C'est à l'économie du Québec que vous faites mal, c'est à vous-mêmes que vous faites mal. Le gouvernement du Québec n'a pas de politique économique? Il n'y a que les libéraux qui ne s'en sont pas aperçus. Le Conseil des sciences du Canada en octobre 1983 - ce n'est pas un texte du temps de Noé - dit ceci - je cite et j'attends une répartie libérale un de ces jours - "que les autorités du Québec - c'est qui, les autorités du Québec? Est-ce l'Opposition, les autorités du Québec, ou si c'est le gouvernement? - s'occupent plus que toute autre de l'organisation industrielle de leur province alors qu'ailleurs on s'agite confusément." Conseil des sciences du Canada.

Je ne dis pas qu'il n'y a pas des déclarations fantaisistes au Canada de temps en temps, surtout le Québec étant partie du Canada, comme l'a dit le député de Saint-Laurent, et que, lui, fait des déclarations fantaisistes, il y a des déclarations fantaisistes au Canada, mais le Conseil des sciences du Canada n'a pas une réputation de fantaisie, n'a pas une réputation péquiste non plus et il dit clairement que seul le Québec a une politique industrielle; ailleurs, on s'agite confusément. C'est peut-être pour cela que les statistiques que j'ai données, sur les 40% de croissance des investissements manufacturiers au Québec, sont si spectaculaires par rapport à la diminution au Canada de moins 2,5%, c'est peut-être parce qu'ici on travaille systématiquement et qu'ailleurs, on s'agite confusément.

Parlons un peu de taxe, un peu de fiscalité. Je ne peux pas parler d'un discours sur le budget sans parler de taxe et sans parler de fiscalité. Je vais rappeler quelques petites vérités élémentaires. D'abord, est-ce vrai que les hauts salariés au Québec paient plus d'impôt qu'ailleurs? Oui, c'est vrai. Vous, M. le Président, payez plus d'impôt qu'un salarié comparable en Ontario; je suis dans le même cas et le leader de l'Opposition, qui est à son siège, est dans le même cas, c'est admis.

Une voix: Le whip!

M. Landry: Le whip. Mais des présidents d'Assemblée, des ministres, des whips de l'Opposition, en d'autres termes, des gens qui, d'une façon générale, gagnent plus de 50 000 $, savez-vous que c'est une exception rarissime dans une société? Vous vous souviendrez que quand on a établi le programme d'assurance automobile, on s'est rendu compte que 80% des Québécois gagnaient moins de 20 000 $. Or, le contribuable marié, avec deux jeunes enfants, c'est ce qu'on pourrait appeler la caricature du monde ordinaire. C'est cela, le monde ordinaire. En général, ils sont mariés, légalement ou autrement, les moeurs ont changé et, malheureusement, ils n'ont plus douze enfants, quinze enfants, cela dépend du point de vue: ils en ont deux. Jusqu'à un revenu de 31 000 $, ce qui est beaucoup plus haut que le revenu moyen au Québec, ils paient moins cher qu'en Ontario.

Le député de Saint-Laurent décrivait l'Ontario comme un paradis de l'entreprise; j'ai dit que leurs investissements baissent et que les nôtres montent; comme un paradis des salariés, peut-être un paradis pour les hauts salariés mais ce gouvernement gouverne pour la majorité. Nous respectons énormément les hauts salariés. Nous savons

que ce sont des décideurs. Mais, nous savons que dans la société québécoise, et à Montréal en particulier où sont les sièges sociaux, quand ils sont dans la troisième meilleure position sur la planète, surpassée uniquement pour le pouvoir d'achat par Genève et par Los Angeles, le gouvernement a eu raison de protéger les contribuables au plus faible revenu.

Nous avons une société bien organisée, nous avons une grande société, nous avons une société dont la reprise économique est fulgurante et je suis très fier de cela. Je suis encore plus fier de savoir que le Québec est une société équitable, qu'on peut se faire soigner avec les meilleurs traitements du monde sans payer, qu'on a un réseau exemplaire de la maternelle à l'université pour instruire les gens, quelle que soit leur classe sociale. Je suis fier, et cela fait la preuve qu'on peut avoir une efficacité économique remarquable et rester sociaux, rester humains, et s'occuper des gens qui dans la société en ont le plus besoin.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Blouin: M. le Président, puisque ce débat est terminé le vote est donc reporté, conformément aux exigences des articles 269 et 280 de notre règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord, M. le leader.

M. Blouin: Sur ce, je propose que nous ajournions nos travaux à mardi prochain.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Je m'excuse. Est-ce que le leader adjoint du gouvernement pourrait nous confirmer les commissions qui doivent se réunir mardi matin?

M. Blouin: Tous ces renseignements ont été fournis par le leader en titre au début de la séance. Je lui suggérerais plutôt de vérifier dans le journal des Débats, où il retrouvera tous ces éléments. D'ailleurs, le leader est là et il pourra les lui communiquer dans quelques minutes. Cela va? Sur ce, M. le Président, je suggère que nous ajournions nos travaux à mardi 14 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord, nous ajournons nos travaux à mardi, 14 heures.

(Fin de la séance à 13 h 7)

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