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Version finale

32e législature, 3e session
(9 novembre 1981 au 10 mars 1983)

Le vendredi 4 juin 1982 - Vol. 26 N° 67

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures deux minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Affaires courantes. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents.

M. Rocheleau: M. le Président...

Avis de la Commission de la fonction

publique sur un règlement de

classification concernant

les cadres supérieurs

Le Président: Un instant, M. le député de Hull, immédiatement après. J'aurais quelque chose à déposer, s'il vous plaît. Conformément aux dispositions de l'article 30 de la Loi sur la fonction publique, je dépose copie de l'avis que la Commission de la fonction publique a transmis au Conseil du trésor sur le règlement modifiant le règlement de classification no 630 concernant les cadres supérieurs. Document déposé.

M. le député de Hull.

Pétition invitant le ministre

des Affaires municipales

à Baie-Comeau

M. Rocheleau: M. le Président, je trouve malheureux qu'il y ait à peine une quinzaine de députés du côté ministériel; je vais quand même déposer ce document. Je voudrais lire le préambule: "Par la présente, je déclare que la pétition contient 6070 signatures, que 11 personnes ont signé deux fois pour un total de 6059. Fait à Baie-Comeau le 2 juin 1982" et signé par un commissaire à l'assermentation. Le préambule, M. le Président, est titré: "Attendu que le ministre des Affaires municipales a accepté de défendre le projet de loi no 37 à Hauterive, le 5 avril 1982, sur invitation d'un comité de citoyens n'ayant pas présenté de rapport à la commission parlementaire du 15 décembre 1981; attendu que le comité conjoint formé de représentants des deux villes et assisté par des membres de la Commission municipale du Québec a rendu son rapport; attendu que ce rapport confirme les chiffres présentés par la ville de Baie-Comeau en commission parlementaire et démontre que les coûts exorbitants de la fusion projetée seraient assumés par les citoyens de Baie-Comeau; attendu que ce rapport constitue un élément nouveau dans le dossier, en conséquence, nous citoyens et citoyennes de Baie-Comeau, demandons au ministre des Affaires municipales, Jacques Léonard, de venir à Baie-Comeau expliquer en assemblée publique sa position et répondre à nos questions face au rapport du comité conjoint avant la poursuite des travaux parlementaires sur le projet de loi no 37."

M. le Président, j'aimerais déposer ce document. En l'absence du ministre des Affaires municipales, je regrette...

M. le Président, j'aimerais déposer ce document. Je regrette l'absence du ministre des Affaires municipales, car c'est lui qui aurait dû le déposer étant donné qu'il a fait la même chose pour Hauterive.

Le Président: Pétition déposée.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

Présentation de projets de loi au nom des députés.

Période des questions orales des députés. M. le chef de l'Opposition.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

M. Ryan: Je voudrais poser une question à M. le premier ministre. Je ne sais pas si on peut l'attendre d'une minute à l'autre. Je vois que le whip du parti ministériel est allé le chercher. Pardon?

M. Bertrand: II ne devrait pas tarder, M. le Président.

M. Ryan: Le voici.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

La récupération de deniers sur les

augmentations salariales dans les

secteurs public et parapublic

M. Ryan: Les chefs des centrales syndicales ont donné une conférence de presse hier dans laquelle ils ont dénoncé comme inique et illégal le projet de loi 70 qui vise à régler la rémunération des employés des secteurs public et parapublic pour les trois premiers mois de 1983 et, ensuite, l'année qui suivra à compter du 1er avril. Ils ont dit au gouvernement, si j'ai bien compris, qu'ils voudraient ouvrir dans les meilleurs délais les négociations en vue

des dispositions salariales que contiendront les prochaines conventions collectives en y mettant une condition, en demandant que le gouvernement retire d'abord le projet de loi 70 qu'ils ont dénoncé, à juste titre, à mon point de vue, comme un projet de loi sans précédent dans toute l'histoire des relations syndicales entre le gouvernement et ses employés syndiqués. Le gouvernement est-il disposé à écouter cette requête qui lui a été faite ou s'il va persister dans son intention de faire adopter ce projet de loi à la vapeur afin de se présenter ensuite à la table de négociation avec une question déjà réglée, ce qui serait contraire à tout l'esprit de nos lois du travail?

Deuxièmement, le gouvernement a conçu son projet en s'appuyant sur le postulat faux, à mon point de vue, que lorsqu'une convention de travail est terminée, disons le 31 décembre, l'employeur peut faire ce qu'il veut à compter du 1er janvier, ce qui est contraire aux thèses qu'a sûrement défendues pendant longtemps celui qui est actuellement adjoint parlementaire du ministre du Travail. C'est une vérité élémentaire en relations du travail, du moins dans les milieux syndicaux, que quand une convention est terminée, on attend que l'autre ait été signée pour oser y déroger, oser en modifier des dispositions essentielles. Est-ce que le premier ministre peut nous dire si la position de son gouvernement sur ce point particulier demeure la même? Est-ce qu'il pourrait déposer en cette Chambre et mettre à la disposition de l'Opposition les avis légaux sur lesquels il s'appuie pour agir d'une manière aussi arbitraire et sans précédent?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je suis un peu - le chef de l'Opposition l'a dit - incertain en ce qui concerne exactement ce qui a été dit par les chefs syndicaux. On fait faire des vérifications. Retirer le projet de loi no 70, c'est une version. J'ai entendu dire aussi qu'il pourrait peut-être y avoir une rencontre, à condition que ce soit avant que le projet de loi no 70 puisse être adopté, enfin, peu importe. L'essentiel, c'est que cela rejoint ce qu'on dit. Dieu sait ce qu'on s'évertue à dire depuis un bon bout de temps, à savoir que le projet de loi no 70 est évidemment une mesure de dernier recours par rapport à l'offre de gel modulé, gradué - enfin, peu importe le terme qu'on emploi - l'offre de gel progressif, selon les échelles de revenus, qui avait été faite au début d'avril et qui est toujours sur la table, à condition qu'on puisse se mettre à cette table et la négocier.

Ce qui n'est pas négociable, c'est l'essentiel de la récupération des 521 000 000 $, pour employer le chiffre que tout le monde connaît, du côté des syndiqués des secteurs public et parapublic, de la même façon que ne peut pas être négociable non plus la centaine de millions et plus que représente le gel des non syndiqués, c'est-à-dire des cadres, etc., qui doit s'appliquer à compter du 1er juillet. C'est en fonction du devoir qu'on se sent en conscience, nous, de protéger l'équilibre financier - dans le contexte actuel, il me semble que cela saute aux yeux - du gouvernement, la santé économique fondamentale, budgétaire comprise de l'État.

Pour ce qui est de l'argumentation du chef de l'Opposition, ce n'est pas la première fois que je l'entends, il a droit à son opinion sur ce qui se passe après le 31 décembre. Quant à nous, il nous semble que c'est une tradition qu'il faut respecter, quand on le peut, aussi loin qu'on le peut, mais qui n'a pas du tout le caractère sacré de cette période qui est couverte par la signature de la convention. Il est évident que la tradition s'est établie, que normalement, on ne change pas les choses jusqu'à ce qu'il y ait une autre convention. C'est malheureux, mais on ne peut pas se payer le respect de cette tradition pour l'année qui vient, à condition qu'on puisse négocier le plus vite possible. Demain, après-demain, si on veut, je l'ai déjà dit, je le répète, on pourrait étaler la récupération, et en même temps, peut-être amorcer le début d'une nouvelle convention sur tous les autres plans, parce que Dieu sait qu'il n'y a pas seulement les salaires dans l'ensemble des conditions de travail. Seulement, si on ne peut pas faire cela, il est évident que la loi 70 devra s'appliquer.

Le Président: Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Si je comprends bien le premier ministre, la décision qu'aurait prise le gouvernement d'aller chercher dans la poche des employés des secteurs public et parapublic une somme d'à peu près 521 000 000 $ à même des sommes qu'il avait déjà consenti à leur donner sous sa signature, c'est une décision qui est irrévocable et que le gouvernement va essayer de faire instituer à l'état de texte de loi avant même que des négociations en bonne et due forme puissent avoir lieu. Si j'ai bien compris, le premier ministre n'a pas exclu la possibilité d'une rencontre avec M. Louis Laberge et d'autres avant que le projet de loi vienne en discussion à la Chambre. Est-ce ce que je dois comprendre?

Une voix: Seulement avec ti-Louis.

M. Ryan: Sur ce point - je voudrais que ce soit bien clair - le premier ministre me disait, la semaine dernière, que c'est vrai

qu'il avait décidé d'aller chercher de la main droite ce qu'il avait été obligé de donner de la main gauche sous l'empire de sa signature. Cela reste toujours la politique du gouvernement de renier sa signature en faisant indirectement ce que sa signature ne l'autorisait pas à faire directement?

Une voix: C'est cela.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je veux bien répéter les mêmes réponses quand le chef de l'Opposition, au fond, reprend les mêmes questions. D'abord, au point de vue des rencontres, il n'est absolument pas exclu qu'il y ait des rencontres à quelque niveau que ce soit. Au contraire, quelles que soient les occasions qu'on puisse avoir d'amorcer, de discuter de l'ensemble de tout cela - on a déjà eu l'occasion de le faire avec les dirigeants syndicaux avant, au moment où il y avait sur la table une offre de réouverture et de négociation des conventions, et il n'y a absolument rien qui exclut que cela puisse avoir lieu de nouveau dans les jours qui viennent - on ne demande pas mieux, en fait. Est-ce que je dois le répéter encore une fois? On ne demande pas mieux et on voudrait bien que cela nous ramène tous à table.

Pour ce qui est de 1979-1980, quand on a signé les conventions actuelles - on l'a a dit, je le répète - tout le monde était de bonne foi, tout le monde a signé en se disant: On a confiance - l'économie allait bien - c'est même plus raisonnable que tout ce qui a été signé avant. C'est vrai, cela l'était. Il y avait eu, quand même, une sorte de rattrapage, si vous voulez, de l'escalade qu'était devenue cette ronde de négociations périodique. Seulement, c'est évident que cela n'a pas suffi. On est rendu aujourd'hui en 1982, après la cassure économique de 1981. Si vous regardez les journaux d'aujourd'hui, tous ces facteurs qu'on ne peut pas contrôler, que ce soit le taux d'intérêt, que ce soit l'inflation elle-même qui se profile derrière, tout cela continue jusqu'à nouvel ordre et on ne voit pas la fin du tunnel.

Dans un contexte comme celui-là, le devoir qu'on a vis-à-vis de nos concitoyens, avec le poids fiscal qu'ils portent, avec tout ce que cela implique pour les millions de gens qui sont dans le secteur privé qui doivent faire les frais de ce que coûte le secteur public, tout cela nous impose de faire, hélas - parce que Dieu sait que ce n'est pas réjouissant - ce que nous avons décidé de faire et cela va se faire d'une façon ou de l'autre.

Le Président: M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: M. le Président, nous ferons le débat sur le fond, la semaine prochaine, à l'occasion du débat sur le projet de loi no 70. J'étais content de voir le député de Prévost applaudir aux propos du premier ministre, applaudir au comportement d'un gouvernement qui va faire des choses que lui-même aurait condamnées il n'y a pas tellement longtemps.

Des voix: Ah!

Le Président: Question, s'il vous plaît!

M. Ryan: Je voudrais adresser une question supplémentaire soit au premier ministre ou, à défaut de précisions de la part du premier ministre, à l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

Tantôt, quand j'ai demandé au premier ministre s'il entendait violer cette règle sacrée de notre régime de relations du travail, en vertu de laquelle l'employeur ne s'attribue pas unilatéralement la faculté de modifier des dispositions d'une convention en vigueur, le premier ministre m'a parlé d'une tradition qui aurait existé que, dans ce cas-ci, on n'est pas capable de respecter.

Je demanderais au premier ministre si l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu lui aurait communiqué, par hasard, que c'est plus qu'une tradition, mais qu'il y a un article dans notre Code du travail qui prescrit un comportement précis aux employeurs dans ces questions. Je voudrais que l'adjoint parlementaire nous dise s'il souscrit à la ligne de conduite du gouvernement en cette matière et s'il accepte que le gouvernement modifie unilatéralement les dispositions de la convention collective, dès le jour de l'expiration, sans avoir même négocié sérieusement avec ses employés syndiqués. Qu'il prenne cette décision-là.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Lévesque (Taillon): Je vais laisser le député de Prévost apprécier le procédé qu'emploie le chef de l'Opposition pour voir s'il ne pourrait pas glisser des pelures de banane ici et là à partir d'une question...

Des voix: Ah!

M. Lévesque (Taillon): ... qui m'était adressée.

Le Président: À l'ordre.

M. Lévesque (Taillon): Je lui demanderais peut-être, quitte à échanger des questions, si jamais nos amis d'en face, disons, comme l'ancien ministre des Finances

dont on reparle au point de vue politique, M. Raymond Garneau, avaient le courage ou le bon sens de se prononcer sur le fond, à supposer qu'un jour ils aient la responsabilité du gouvernement, qu'est-ce qu'ils feraient? Est-ce que, par hasard...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le premier ministre, vous avez la parole.

M. Lévesque (Taillon): Est-ce que, par hasard, le chef de l'Opposition renierait cette belle vigueur avec laquelle, en avril 1981, il disait: Et nous, quand on sera le gouvernement - parce qu'à ce moment-là on parlait au futur - la masse salariale de l'État, ça ne sera pas négociable. Il n'y avait pas moyen d'être plus catégorique. Aujourd'hui, quand on est devant des problèmes comme ceux-là, qu'est-ce qu'on entend de l'autre côté? Ce sont des "giddy giddy" simplement parce qu'ils sont incapables...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): ... d'assumer le minimum de responsabilité qui signifierait "voici ce qu'on ferait, nous". On aimerait ça, avoir des suggestions.

J'ai entendu de la part, hélas, du chef de l'Opposition, encore davantage de la part de ceux qui l'entourent, toute une série de savantes analyses sur les périls de la conjoncture, mais strictement pas un mot sur ce que possiblement serait leur solution de rechance.

Cela étant dit, pour...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lévesque (Taillon): ... la dernière fois, je le répète au chef de l'Opposition -enfin, la dernière, sauf s'il veut répéter la question encore une fois - que, tel que se présente le contexte actuel, nous avons choisi, et nous en portons la responsabilité, ce qui nous semble la seule et unique façon équitable, dans le contexte actuel, de préserver l'équilibre financier de l'État québécois dont on a tous besoin, qui doit être autant que possible en santé, quelles que soient les conjonctures.

Deuxièmement, nous avons également la volonté ferme, j'en ai parlé hier lors de l'étude des crédits au chef de l'Opposition et à ceux qui l'accompagnaient, qui sera explicitée la semaine prochaine, de prendre, avec tous les moyens du bord, toutes les mesures possibles dans la conjoncture pour essayer de maintenir, de stimuler au maximum l'emploi. Il suffit encore une fois de lire les journaux d'aujourd'hui pour avoir une excellente idée de la nécessité absolue d'un effort maximum de ce côté-là.

Le Président: M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dean: M. le Président, je ne pense pas avoir des leçons de principe à prendre du chef de l'Opposition. Si la société québécoise essaie actuellement tant bien que mal d'équilibrer le principe du droit de grève avec le principe du respect des services essentiels des citoyens, moi, comme être humain, j'essaie d'équilibrer aussi mes principes de syndicaliste avec mes devoirs comme élu du peuple envers la population du Québec. (10 h 20)

II est vrai que le Code du travail et les us et coutumes prévoient que les conditions en vigueur à la fin d'une convention, en règle générale, restent en vigueur.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

M. Dean: Attendez une minute!

M. Pagé: M. le Président, question de règlement.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Portneuf, question de règlement.

M. Pagé: Pour être très bref, ce n'est pas en règle générale que la loi s'applique, c'est tout le temps...

Le Président: M. le député de Portneuf, vous savez manifestement qu'il ne s'agit pas d'une question de règlement.

M. l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

S'il vous plaît! Une question a été posée à l'adjoint parlementaire et je pense qu'il a droit d'y répondre.

M. l'adjoint parlementaire.

M. Dean: Le Code du travail prévoit, à l'article 59, qu'à compter du dépôt d'une requête, l'employeur doit maintenir en vigueur les conditions de travail...

Des voix: Ah!

M. Dean: Attendez une minute! Du calme dans le poulailler, je m'en viens! Tant que le droit de lock-out ou de grève n'est pas acquis - c'est le texte - on doit maintenir les conditions de travail. Le 31 décembre 1982, que je sache, le droit de grève ou de lock-out sera acquis. Peut-être que ceux qui ont passé leur vie à négocier dans le secteur public ou dans les salles de

rédaction des journaux devraient savoir que dans l'entreprise privée, il arrive parfois qu'à la fin d'une convention collective un employeur dit: Telle clause, qu'on a négociée la dernière fois ou il y a six ans, fonctionne mal, nous cause des problèmes, produit de l'inefficacité. Assez souvent, les travailleurs l'admettent.

J'ai connu des cas comme négociateur syndical - je peux nommer des dossiers - et cela a été accepté par les membres du syndicat que des clauses déjà accordées soient modifiées, toujours dans un contexte de négociation, oui, mais elles ont été négociées. Donc, il n'y a rien de sacro-saint dans une condition de travail une fois négociée. Tout le monde peut se tromper à la table de négociation, M. le Président. Cela se fait souvent, de part et d'autre.

Des voix: Consentement. Toute la matinée!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. l'adjoint parlementaire.

M. Dean: Les situations évoluent dans n'importe quelle convention collective, dans n'importe quelle entreprise privée. Ces grands défenseurs des "boss" de l'autre côté, ceux qui dénoncent les politiques du Parti québécois pour leur effet sur les grandes entreprises et tout ça, doivent savoir que les grandes entreprises sont les premières à demander, à la suite de l'expérience vécue, que certaines conventions collectives soient modifiées.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dean: Cela se fait dans un contexte de négociation, sauf que maintenant, M. le Président, il y a des droits et des devoirs qui doivent exister pour un représentant élu du peuple. On est élu pour le mieux possible servir les intérêts de la population du Québec. Dans la situation financière où on se trouve, au sommet économique, il a été unanimement décidé par les parties, M. le Président, qu'il n'était plus question de comprimer des services à la population, qu'il n'était plus question d'augmenter les impôts. Il reste très peu de choix au gouvernement.

Je veux dire, en terminant, M. le Président, que dans une manchette de ce matin, une autre manchette - peut-être n'ont-ils pas lu cette manchette - le futur chef du Parti libéral du Québec a dit qu'il était favorable à un gel des salaires, s'il le faut. M. Garneau.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dean: Je dis encore, M. le Président, que je souhaite que le projet de loi no 70 ne soit jamais appliqué.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je remarque que c'est la première période des questions qu'on tient un vendredi depuis plusieurs mois. C'est peut-être pour cette raison que les députés sont plutôt bavards, ce matin. Je demanderais, s'il vous plaît... À l'ordre, s'il vous plaît. La question a été adressée à l'adjoint parlementaire et j'ai entendu dire par quelques personnes que notre règlement, lorsque le ministre était présent, prévoyait une réponse du ministre. Je dois répéter que la question a été adressée, malgré la présence du ministre, à l'adjoint parlementaire et que, par conséquent, il a le droit de répondre à la question qui lui a été posée. Je lui demande, d'autre part, de conclure, s'il vous plaît.

M. Dean: Je conclus en disant, M. le Président, que s'il fallait que la loi 70 soit adoptée, je souhaite de tout coeur qu'elle ne soit jamais mise en application, parce que les centrales syndicales seront venues négocier...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre!

M. Dean: ... en travailleurs, mais aussi en citoyens québécois soucieux d'apporter leur contribution pour passer à travers la crise.

En terminant, M. le Président, je demande aux centrales syndicales de rencontrer les représentants du gouvernement dans les plus brefs délais afin de négocier une entente qui va respecter les droits des travailleurs, mais aussi représenter le bien commun de la population québécoise.

Des voix: Bravo!

Le Président: Une dernière question additionnelle, M. le chef de l'Opposition. À l'ordre, s'il vous plaît! Une dernière question additionnelle, M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: L'adjoint parlementaire, qui tenait un langage tellement différent quand il était vice-président de la FTQ aux côtés de M. Louis Laberge, pourrait-il nous dire s'il a eu connaissance de cas, dans le passé, d'employeurs importants, et je le défie d'en nommer du côté privé, en particulier - dans le temps, il se plaisait à dénoncer les employeurs du secteur privé, souvent dans des termes démagogiques - je le défie de citer un exemple ce matin d'un employeur privé qui se serait déjà mis dans une psychose de lock-out sept mois avant l'expiration de la période qui doit permettre des négociations convenables? Comment

explique-t-il que le gouvernement soit tellement pris dans cette psychose qu'il a déjà décidé, à sept mois de l'expiration de la période des conventions, d'imposer des réductions de salaires aux employés après les avoir accordées? Je voudrais seulement faire deux corrections, M. le Président, à titre d'information.

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le chef de l'Opposition...

Une voix: C'est fatigant? Vous trouvez cela dur? (10 h 30)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le chef de l'Opposition, vous êtes en période de question additionnelle, s'il vous plaît. Question additionnelle.

M. Ryan: Je voulais seulement rappeler qu'il y a eu deux inexactitudes qui se sont glissées dans les réponses et je voudrais... Préférez-vous que je les fasse plus tard?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Je vous répondrai ceci: J'ai toujours dit qu'envers le premier ministre et le chef de l'Opposition j'avais une certaine tolérance, tolérance que j'ai eue jusqu'à maintenant, parce que c'est, je pense, la troisième ou quatrième question additionnelle. La deuxième a été précédée d'un préambule, la troisième également. Je ne peux pas vous permettre, à ce stade-ci, M. le chef de l'Opposition, de corriger des choses qui pourraient ne pas être vraies dans certains propos qui ont été tenus en cette Chambre. Par contre, à d'autres moments, j'en suis sûr, vous aurez, en vertu de notre règlement, l'occasion de faire les corrections nécessaires. Cela ne veut pas dire que j'interprète d'avance votre éventuelle question de privilège comme étant acceptée, parce que je répète qu'une différence d'opinions ou d'interprétation ou des vérités différentes ne constituent pas une question de privilège.

M. le chef de l'Opposition, s'il vous plaît!

M. Ryan: M. le Président, je m'incline devant votre sage décision et je reconnais votre tolérance habituelle, dont je ne pense pas avoir abusé. J'ajoute simplement un complément de question à l'intention de l'adjoint parlementaire. N'est-il pas prêt à convenir, en toute honnêteté, que l'ancien ministre des Finances, dans sa déclaration d'hier, n'a jamais dit qu'un gouvernement devrait aller voler dans la poche de fonctionnaires des sommes qu'il leur a déjà données?

Le Président: M. le l'adjoint parlementaire au ministre du Travail.

M. Dean: En toute honnêteté, cet article ne constitue pas autre chose que ce que j'ai dit, dans le sens de la question du chef de l'Opposition. Vous avez demandé, si j'ai bien compris, malgré le chahut, s'il y a des entreprises privées qui ont entamé des choses au milieu d'une convention collective. Oui, la compagnie Ford et la compagnie GM viennent de le faire en plein milieu de la convention. Je vais vous dire comment ils l'ont fait.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. Dean: Je vais vous dire...

Le Président: M. l'adjoint parlementaire, vous avez la parole.

M. Dean: Ford est arrivée à la table de négociation aux États-Unis avec des listes d'usines et les dates de fermeture. Elle a mis cela sur la table. Elle a dit: Êtes-vous prêts à ouvrir les négociations?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je pense que toute question demande une réponse. La période des questions finit à 10 h 52. D'autres députés veulent poser des questions. En conséquence, M. l'adjoint parlementaire, vous avez la parole.

M. Dean: M. le Président, aux États-Unis, ces compagnies ont convoqué le syndicat et ont dit: Telle usine va fermer à telle date et telle usine va fermer à telle date. Ce n'était pas facile pour les travailleurs...

Le Président: À l'ordre! À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, cela fait déjà un certain temps que la période des questions est commencée. Vous aurez remarqué une chose. Le chef de l'Opposition a posé des questions au premier ministre, il a obtenu des réponses aux questions qu'il avait posées. D'une façon purement vicieuse et malicieuse...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le leader du gouvernement, avant de vous laisser poursuivre, j'aimerais dire que, depuis quelques semaines, nous avons fait, comme le leader a déjà eu l'occasion de le dire, un petit pas, parce que nous commençons à l'heure. Mais je pense que les pas les plus importants restent encore à venir. Or, ce matin, malgré le petit pas que nous avons encore respecté - nous avons commencé à 10 h 02 - je dois constater avec regret que les parlementaires ne

donnent certainement pas l'exemple de leur volonté et de leur intention d'accomplir d'autres pas dans l'amélioration de nos travaux parlementaires. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: D'ailleurs, à ce sujet, M. le Président, vous aurez remarqué que, pendant que le député de Prévost et adjoint parlementaire du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu voulait donner des réponses aux questions qui lui étaient posées par le chef de l'Opposition, au moins cinq, six ou sept fois il a été interrompu, on l'a empêché de répondre, alors que le chef de l'Opposition, ce matin, connaissant très bien le dossier -je l'espère, au moins sur le fond - pose une question au premier ministre...

Une voix: Une.

M. Bertrand: ... sur le dossier de la rémunération dans le secteur public, parle de problèmes de négociation, a, en présence ici à l'Assemblée nationale, le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, mais pour des motifs que je n'ose pas qualifier...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît, ou je suspends les travaux de l'Assemblée tout simplement! M. le leader du gouvernement, en terminant, s'il vous plaît.

M. Bertrand: M. le Président, pour des motifs que je n'ose pas qualifier, je pense que ceux et celles qui nous écoutent s'en sont rendu compte, le chef de l'Opposition essaie d'amener l'adjoint parlementaire du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu à faire la démonstration qu'il serait, paraît-il, dans une situation délicate...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce qu'on va...

M. Bertrand: ... puisque qu'il a un passé syndical et que, aujourd'hui, il a des responsabilités au sein de l'équipe ministérielle...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement, je pense que... S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! La dernière question additionnelle a été... J'allais dire au leader du gouvernement qu'il ne s'agit pas d'une question de règlement. La présidence a dit tout à l'heure que, malgré la présence du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, la question a été posée à l'adjoint parlementaire. Or, en temps normal, l'adjoint parlementaire ne peut répondre à une question qu'en l'absence du ministre dont il est l'adjoint.

Or, la question lui a été posée. D'après moi, il y a eu une sorte de consentement unanime voulant qu'il réponde à la question. Une dernière question additionnelle a été posée et, très brièvement, je demanderais à l'adjoint parlementaire de conclure, s'il vous plaît.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de règlement.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux tout d'abord faire cette mise au point. Lorsque la question a été posée par le chef de l'Opposition à l'adjoint parlementaire du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu, le ministre n'était pas à son siège.

Une voix: C'est cela.

M. Levesque (Bonaventure): Au moment de donner la réponse, le ministre est arrivé. Mon Dieu! on n'interrompt pas quelque chose en plein milieu. Si le ministre veut donner un complément de réponse, libre à lui, mais nous avons eu l'occasion d'entendre la réponse de l'adjoint parlementaire du ministre et tout le monde pourra juger de la qualité de la réponse.

Cela dit, M. le Président, je me demande encore une fois comment... Je suis très conscient que vous avez dit que le leader parlementaire du gouvernement n'avait pas soulevé une question de règlement, que ce n'était pas une question de règlement, mais, tout de même, on lui a permis assez longuement de faire état de la situation de conflit d'intérêts possible que pourrait avoir l'adjoint parlementaire du ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu. Cela n'est pas conforme à notre règlement et j'espère que le leader parlementaire du gouvernement n'était pas en train d'indiquer à l'Opposition quelle question on devait poser, à qui on devait poser une question, ou de quel genre. Jamais on n'acceptera cela du gouvernement. (10 h 40)

Des voix: Bravo!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le leader de l'Opposition, je dois vous dire que, dans votre cas, il ne s'agissait pas, non plus, d'une question de règlement, mais que j'ai fait preuve envers vous de la même tolérance dont j'ai fait preuve il y a quelques secondes envers le leader du gouvernement.

M. l'adjoint parlementaire, en conclusion, s'il vous plaît!

M. Dean: M. le Président, chez Ford et GM aux États-Unis...

Une voix: Canada. Une voix:Québec.

M. Dean: ... avec 200 000 travailleurs en chômage dans l'industrie de l'automobile et sans sécurité d'emploi, face à un gouvernement sans couilles qui refuse d'exiger des japonaises...

Des voix: Ah!

M. Dean: ... des compagnies japonaises de produire leurs produits aux États-Unis...

Des voix: Ah!

M. Dean: ... cette position des entreprises a été finalement acceptée par les travailleurs, démocratiquement, parce qu'ils avaient le choix entre accepter d'avaler la pilule ou perdre leur emploi. Vous voulez parler du Canada. Ford et GM, essaient par tous les moyens, de le faire valoir au Canada aussi. Oui, les travailleurs...

Le Président: S'il vous plaît! M. l'adjoint parlementaire, en terminant, s'il vous plaît!

M. Dean: Les travailleurs canadiens aussi, démocratiquement, ont refusé d'accepter de négocier leur convention collective avant son expiration face à l'incurie du gouvernement fédéral...

Des voix: Ah!

M. Dean: ... qui refuse aussi de protéger les emplois des travailleurs de l'automobile canadiens. En terminant, M. le Président...

Une voix: Changez de cassette.

M. Dean: ... on a parlé de l'entreprise privée et on va parler aussi de la politique. J'ai vu, à la télévision, la semaine dernière, un ministre communiste d'un gouvernement socialiste en France...

Une voix: René est parti.

M. Dean: ... qui a su faire la distinction entre sa loyauté, ses convictions de syndicaliste...

Une voix: Vous devriez faire pareil.

M. Dean: ... et ses devoirs de représentant de l'État.

Le Président: En terminant, M. l'adjoint parlementaire, s'il vous plaît! Une voix: Qui?

M. Dean: M. Le Pors, actuel ministre communiste du gouvernement. Il a dit...

Le Président: S'il vous plaît! S'il le faut, je resterai debout jusqu'à 10 h 52 et plus aucune personne en cette Chambre n'aura le droit de parole. Je suis absolument vexé de la façon dont se passe cette période des questions. C'est l'une des pires auxquelles j'aie assisté. Je fais tout mon possible pour faire respecter le règlement, mais je dois vous dire que, ce matin, vous ne m'aidez pas à remplir cette tâche qui n'est pas facile à remplir. S'il vous plaît, si ce n'est pas par respect mutuel envers les partis politiques ou les collègues que vous êtes, au moins, si vous ne respectez pas le président, respectez le poste qu'il occupe.

M. l'adjoint parlementaire, en terminant, s'il vous plaît!

M. Dean: J'ai vu, à la même émission, deux syndicalistes, communistes et socialistes, dire qu'ils respectaient, comme employés publics, leur devoir envers la population, tout en ayant des convictions syndicales. Ce ministre, en ce qui regarde le secteur public, a même employé les mots "on consulte les travailleurs et les syndicats" dans les applications, mais il n'a pas employé le mot "négociation". Alors, il semble qu'il y a quelque part, dans le monde, des gens qui savent, tout en admettant que le balancier est très délicat, distinguer les principes syndicalistes et le principe de gouverner de façon responsable la population. Je déplore, M. le Président, que le chef de l'Opposition sombre dans l'irresponsabilité qui caractérise sa délégation...

Une voix: II veut avoir des votes.

M. Dean: ... depuis l'élection de 1981.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu.

M. Marois: M. le Président, comme l'a souligné le leader de l'Opposition, j'ai effectivement un complément de réponse à fournir. Il y a une chose qui me frappe beaucoup. Alors que le leader de l'Opposition fait largement état de votre grand sens de tolérance à son égard, fait appel à la tolérance, je ne dirais pas que j'ai noté du côté de l'Opposition un très haut sens de la tolérance et un très haut sens des responsabilités.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, c'est un complément de réponse ou une provocation?

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bertrand: Gérard, mets tes mains dans tes poches!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! J'accorde le droit de parole au ministre du Travail, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu non pas sur une question de règlement, non pas sur une question de privilège, mais en complément de réponse parce que son nom a été cité au cours de la période des questions. M. le ministre, en complément de réponse, s'il vous plaît.

M. Marois: On vient de voir un bel exemple de ce que je venais d'évoquer en commençant mon complément de réponse. On en entend à nouveau, on en voit à nouveau. Les citoyens apprécieront, et encore.

À défaut d'avoir une position cohérente et responsable face à une situation de crise économique qui touche tous les citoyens et toutes les citoyennes du Québec, que ce soit dans le secteur privé, que ce soit dans le secteur public, cette Opposition, à défaut d'avoir des propositions cohérentes, à défaut d'assumer un sens fondamental des responsabilités... Je les entends à nouveau, on cherche à m'empêcher de répondre. C'est ce que le chef de l'Opposition appellerait un grand sens de la tolérance, je présume?

Cela suppose fondamentalement, et c'est vrai dans le secteur public, qu'en période de crise, chacun, chacune doit assumer sa part de responsabilité. On veut que ce soit sur une base négociée. Un projet de loi a été déposé, et nous invitons les centrales syndicales à venir négocier pour que, comme le disait l'adjoint parlementaire, il soit possible que ce projet de loi ne soit jamais adopté parce que les parties auront pu négocier ensemble, de bonne foi, une part partagée de la crise qui doit être assumée par chacun et chacune, et protéger surtout les plus faibles dans notre société.

Mais si tant est que chacun et chacune ne veulent pas prendre leurs responsabilités, le gouvernement, lui, se doit, au nom de l'intérêt public, de faire en sorte qu'il y ait une part partagée par chacun et chacune des Québécois. Et ceux et celles qui sont dans le secteur privé, qui, présentement, vivent des problèmes de licenciement et de chômage, comprennent très bien ce que ça veut dire.

Une voix: C'est beau, ça.

Le Président: Question principale, sans additionnelle, de la part du député de

Maskinongé.

Rapport confidentiel sur un vol au CH de la Mauricie

M. Picotte: M. le Président, étant donné que le premier ministre est gêné de la performance de ses adjoints et de ses ministres, est-ce qu'on pourrait le faire revenir, s'il vous plaît? Ma question s'adresse au premier ministre.

M. Pagé: C'est ça, qu'il revienne. M. Rivest: René! on veut René!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Étant donné l'allure qu'a prise la période des questions ce matin, je demanderais que la question du député de Maskinongé comporte le préambule le plus court possible et que la réponse du premier ministre soit la plus courte possible. Je demanderais la collaboration de tous, il reste environ deux minutes. M. le député de Maskinongé.

M. Picotte: M. le Président, ma question s'adresse au premier ministre. Je lui rappellerai tout simplement qu'au moment de la campagne électorale de 1976, le député de Saint-Maurice avait promis une enquête au Centre hospitalier régional de la Mauricie, enquête qui fut effectivement faite et dont une partie du rapport confidentiel a été remise au député de Bertrand, ancien ministre des Affaires sociales. À ce moment-là, on avait congédié, avec prime de séparation pour une valeur de 100 000 $, deux personnes - ces personnes avaient apparemment été congédiées injustement -qui avaient accumulé 700 000 $ de surplus budgétaire aux coffres.

Dans le même rapport confidentiel, il était question d'un vol commis par quelqu'un qui travaillait au Centre hospitalier régional de la Mauricie - vol pour lequel, d'ailleurs, l'individu a plaidé coupable - un vol de 41 000 $ en argent et en chèques au même centre hospitalier. (10 h 50)

Est-ce que le premier ministre pourrait m'assurer, après avoir consulté son ex-collègue des Affaires sociales, et l'actuel ministre des Affaires sociales que cet individu ne s'est pas replacé au même moment ou à peu près dans le même réseau des Affaires sociales au Québec? N'a-t-il pas obtenu une promotion à la suite de ce vol pour lequel il a plaidé coupable? Si oui, s'il est replacé, est-ce qu'il peut m'indiquer si, selon la loi, cet individu a le droit de siéger à un conseil d'administration comme directeur général d'un foyer sur le territoire du Québec?

M. Lévesque (Taillon): J'étais gêné, tout à l'heure, en effet, par ce que j'avais devant moi et en particulier - je le dis à regret -par la façon dont le chef de l'Opposition a fait dériver l'une de ses questions vers une cible qui lui paraissait plus indiquée.

Des voix: Oh!

M. Lévesque (Taillon): Cela étant dit, je prends avis de la question du député de Maskinongé.

M. Ryan: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: Fin de la période des questions.

M. le chef de l'Opposition, sur une question de privilège.

M. Ryan: Je m'excuse auprès du premier ministre, mais, voyant qu'il n'avait pas l'air de connaître les lois du travail, je me suis adressé à un collègue qui semblait les connaître davantage.

Le Président: On m'indique que le ministre des Transports aurait un complément de réponse à une question de Mme la députée de Chomedey.

Propositions de la députée de Chomedey

M. Clair: Oui, M. le Président, un bref complément de réponse. Hier, la députée de Chomedey disait, dans une question: Au début de la semaine, je faisais au ministre des Transports quelques propositions et je ne sais pas s'il en a pris connaissance. Je voudrais simplement dire qu'après avoir fait une vérification auprès de son bureau, dans son comté, et à l'Assemblée nationale, elle ne m'a pas fait parvenir ses suggestions. Alors, je n'ai pas pu effectivement en prendre connaissance. J'espère que cela ne manifeste pas un intérêt superficiel à la question mais bien davantage qu'elle me fera parvenir ses suggestions dans les prochains jours.

Le Président: Question additionnelle?

Mme Bacon: Question de privilège, M. le Président. Je peux y aller en question additionnelle aussi.

Le Président: Question de privilège.

Mme Bacon: Je pense que le ministre sait très bien qu'il fait fausse route dans les remarques qu'il vient de faire. Hier, je demandais au ministre s'il avait pris connaissance des solutions que je lui proposais. Je l'ai fait de la façon la plus raisonnable possible compte tenu des promesses et des engagements des cinq candidats péquistes dans Laval à la dernière élection, qui ont agi d'une façon irresponsable ou alors ils ont menti à la population, à ce moment-là.

Je n'ai pas dit que j'avais écrit au ministre, j'ai dit que je lui avais fait des propositions; je l'ai fait devant les médias d'information et je pensais, comme ministre bien informé, qu'il les avait. Il les a maintenant, aujourd'hui, à son bureau; qu'il vérifie, il les a à son bureau aujourd'hui.

Le Président: M. le ministre des Transports.

M. Clair: M. le Président, je n'ai pas dit que la députée de Chomedey avait affirmé qu'elle m'avait écrit, elle m'a demandé si j'avais eu l'occasion d'en prendre connaissance. Or, elle reconnaît qu'elle ne me les a pas adressées par écrit, d'une part, et, d'autre part, après avoir fait la revue de presse - sa conférence de presse a reçu une couverture à la mesure du contenu, j'imagine - rien, dans les journaux, n'était rapporté à ce sujet-là.

Le Président: Motions non annoncées. Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre.

M. le leader du gouvernement.

Travaux des commissions

M. Bertrand: Motions, M. le Président. Ce matin, de 11 heures à 13 heures, au salon rouge, la commission de la présidence du conseil se réunit pour étudier les crédits du ministère d'État au Développement culturel et, à la salle 81-A, on étudie les crédits du ministère d'État à la Réforme électorale.

Cet après-midi, de 15 heures à 18 heures, et, ce soir, de 20 heures à 24 heures, au salon rouge, la commission des finances et des comptes publics étudie les crédits relatifs aux Finances et aux comptes publics. Deux ministres répondront aux questions: le ministre délégué à l'Administration et président du Conseil du trésor et le ministre des Finances. Cet après-midi aussi, de 15 heures à 16 heures, à la salle 81-A, la commission des communications mettra fin à l'étude de ses crédits.

Le Président: Est-ce que ces motions seront adoptées?

M. Lévesque (Bonaventure): Adopté.

Le Président: Adopté. Avant de suspendre les travaux de l'Assemblée jusqu'à 15 heures cet après-midi,

j'indique qu'à compter de 11 heures et pour une durée de 2 heures, à la suite d'une entente qui est intervenue, aura lieu une question avec débat ici même, au salon bleu, question du député de Pontiac adressée au ministre des Transports sur le sujet suivant: la construction et l'entretien du réseau routier rural.

Donc, je déclare suspendus les travaux de l'Assemblée...

M. Rocheleau: En vertu de l'article 34...

Recours à l'article 34

Le Président: En vertu de l'article 34? Le temps est passé, mais, s'il y a consentement, on peut le faire. M. le député de Hull, en vertu de l'article 34.

M. Rocheleau: Merci, M. le Président. En vertu de l'article 34, j'aimerais demander au leader du gouvernement, étant donné que le ministre des Affaires municipales et le premier ministre, hier, ont reçu une pétition d'au-delà de 6000 noms de Baie-Comeau demandant de surseoir au projet de loi no 37 et demandant au ministre des Affaires municipales d'aller expliquer aux citoyens de Baie-Comeau ses intentions face au rapport du comité conjoint, étant donné que c'est sur le menu de ce soir à l'Assemblée nationale en deuxième lecture, s'il a l'intention de retirer le projet de loi no 37 et de respecter le voeu des citoyens de Baie-Comeau.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Non, M. le Président.

Le Président: M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: M. le Président, en vertu de l'article 34, je veux demander au leader parlementaire et ministre des Communications s'il est exact qu'il a commandé une étude à la firme Tamec sur la québécisation de la compagnie Bell Canada au coût de 150 000 $? Est-ce que le rapport de cette étude a été remis au ministre et quand le rendra-t-il public?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Effectivement, M. le Président, c'est l'automne dernier que le ministère des Communications a confié à la firme Tamec un contrat pour évaluer toute une série d'éléments relatifs à ce dossier de la québécisation de Bell Canada. Le dossier doit nous être remis dans sa phase finale incessamment. Dans un premier temps, j'en prendrai connaissance avec l'ensemble des fonctionnaires de mon ministère et, ensuite, j'évaluerai si oui ou non le document, au nom de l'intérêt public, peut être rendu public.

Le Président: M. le député de Hull, en vertu de l'article 34.

M. Rocheleau: En vertu de l'article 34, M. le Président, étant donné qu'on a certaines difficultés à connaître le menu du jour et des jours subséquents, j'aimerais que le leader du gouvernement...

M. Bertrand: Question de privilège, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement, question de privilège.

M. Bertrand: S'il y a une chose que le député de Hull ne peut pas dire, c'est qu'on a de la difficulté à connaître le menu du jour et des jours qui viennent; s'il y a une tradition qui a été établie depuis un certain nombre de mois, j'en prends à témoin le leader de l'Opposition, c'est bien que chaque semaine, le jeudi et maintenant le vendredi, je fais le maximum pour informer les parlementaires des travaux de la semaine suivante.

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, en vertu de l'article 34, est-ce que le leader du gouvernement pourrait me confirmer que mercredi et jeudi prochain on a l'intention, à compter de 11 heures, d'étudier le projet de loi no 258 concernant la ville de Grand-Mère, le projet de loi no 268 concernant la ville de Fermont, le projet de loi no 212, concernant la modification de la Charte de la ville de Vanier, la loi 238, Loi modifiant la Charte de la ville de Québec et, à compter de 15 heures, la loi 238, la loi 203 concernant la ville d'Anjou, la loi 235 concernant la ville de Val d'Or, la loi 246 concernant la ville de Saint-Basile-le-Grand...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement.

M. Rocheleau: ... la loi 250 concernant la ville de Victoriaville...

Le Président: M. le leader du gouvernement, sur une question de règlement!

M. Bertrand: M. le Président, une fois les deux ou trois premiers projets annoncés, je crois comprendre que le sens de la question du député de Hull, c'est de savoir si on va étudier les projets de loi privés qui relèvent de la commission parlementaire

permanente des affaires municipales. Effectivement, la semaine prochaine, la commission des affaires municipales siégera pour étudier l'ensemble de ces projets de loi. Je veux indiquer par contre, je pense que cela peut être intéressant à l'occasion de sa question en vertu de l'article 34, qu'il y a un certain nombre de projets de loi qui ne seront pas étudiés à la demande même des municipalités et à la demande aussi du ministère des Affaires municipales après consultation de la municipalité. Le projet de loi no 258 est reporté au 10 juin, alors qu'on devait l'étudier plus tôt. Le projet de loi no 245 est reporté à l'automne. Le projet de loi no 220 est reporté au 10 juin, immédiatement après le 258. Le projet de loi no 211 est reporté à l'automne et le projet de loi 265 a été reporté à l'automne. Les personnes concernées par ces projets de loi ont été avisées. Cela s'est fait en collaboration avec le ministère des Affaires municipales et les municipalités concernées. (11 heures)

Le Président: M. le député de Hull.

M. Rocheleau: En vertu de l'article 34, en tant que responsable des affaires municipales, j'aimerais bien connaître le menu. Le leader du gouvernement vient de nous dire qu'il y avait des changements, alors que la liste que nous avons eue ce matin ne semblait pas comporter ces changements.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: C'est pour cela, M. le Président, que, me prévalant de la tradition maintenant, je peux indiquer aux parlementaires quels seront nos travaux pour la semaine prochaine. Si le député de Hull veut que je commence par les projets qui l'intéressent plus spécifiquement, effectivement, la semaine prochaine, soit mercredi le 9, matin, après-midi et soir, ainsi que jeudi le 10, matin, après-midi et soir, la commission des affaires municipales se réunira pour étudier l'ensemble des projets de loi privés, sauf celui relatif à la Charte de la ville de Montréal qui viendra la semaine suivante. Dans ces projets de loi privés, il y en a exactement trois dont l'étude est reportée à l'automne. Tous les autres seront donc étudiés. Il y avait deux convocations qui avaient été faites pour le 9 juin; c'était pour le projet de loi no 258 et pour le projet de loi no 220. Leur étude sera faite le 10 juin. Donc, le député de Hull peut immédiatement indiquer sur son agenda que mercredi et jeudi il sera en commission parlementaire pour étudier les projets de loi privés présentés par différentes municipalités.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci.

Oui, M. le leader.

M. Bertrand: Maintenant, M. le Président, à moins que vous n'ayez quelque chose...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Non.

Travaux de la Chambre

M. Bertrand: ...je voudrais d'abord indiquer que, la semaine prochaine, nous commencerons nos travaux à 14 heures au lieu de 10 heures comme le règlement nous le permettrait. Nous commencerons à 14 heures.

Une voix: Lundi?

M. Bertrand: Oui, lundi prochain. Le premier projet de loi qui sera appelé sera le projet de loi relatif à la rémunération dans les secteurs public et parapublic et, par la suite, nous appellerons le projet de loi no 76 relatif à la protection du territoire agricole. Durant la journée, puisqu'il reste un certain nombre d'heures, environ neuf heures, je pense, à passer sur le discours sur le budget, il y aura évidemment un certain nombre d'heures consacrées à ce dossier.

Le mardi, 8 juin, durant la matinée, nous aborderons l'étude du projet de loi no 72 sur les services essentiels et nous continuerons durant la journée probablement avec le projet de loi no 46 sur la Communauté urbaine de Montréal et aussi le budget.

Mercredi, nous pourrons aborder l'étude du projet de loi no 68 en deuxième lecture, celui relatif aux régimes de retraite, celui aussi relatif à la Raffinerie de sucre du Québec, le projet de loi no 73, et nous continuerons avec ces projets de loi au cours de la journée de mercredi. Nous inclurons aussi, s'il reste du temps à passer là-dessus, des éléments relatifs à l'étude du budget présenté par le ministre des Finances.

Jeudi, les projets de loi inscrits au nom du ministre de la Justice et de la Réforme électorale - les projets de loi 66, 67 et 73 -pourront être étudiés, à mon avis, relativement rapidement, de même que le projet de loi no 75 sur la Société de développement industriel et peut-être, si nous avons du temps disponible durant cette journée, le projet de loi no 23 relativement à l'aménagement du port méthanier.

Vendredi de la semaine prochaine, nous étudierions en deuxième lecture le projet de loi relatif à la Loi sur les coopératives.

Ce seraient, M. le Président, les projets de loi qui feraient l'objet d'une deuxième lecture la semaine prochaine. L'ordre que j'ai donné ici, évidemment, pourra varier. Je voulais seulement que les députés aient une idée des projets de loi qui seront appelés

pour étude en deuxième lecture et de l'ordre qui, jusqu'à maintenant, a été retenu. Là-dessus, comme je dois rencontrer mon collègue, le leader de l'Opposition, peut-être pourra-t-il y avoir en cours de route des changements, mais les députés, bien sûr, seront prévenus suffisamment tôt pour se préparer en conséquence.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: M. le Président, sur le programme proposé en ce qui a trait aux commissions parlementaires pour la semaine prochaine, je remarque que mardi la commission parlementaire des transports et la commission des communications siégeraient le matin à la salle 81-A. Est-ce que la commission des communications, M. le leader parlementaire, siégera à la suite du débat sur les taxis qui aura lieu à la commission ou si c'est au salon rouge que la commission des communications siégera mardi matin?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, la commission des communications commencera ses travaux lundi après-midi.

M. Bissonnet: La question, c'est que mardi matin, vous avez, à la salle 81-A, la commission des transports. Pour la commission des communications, on n'indique pas que c'est le salon rouge, mais je présume que ces deux commissions vont siéger en même temps. Est-il possible que la commission des communications siège à compter de 11 heures au lieu de 10 heures, étant donné que je devrai être à la commission des transports?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je suis bien prêt à collaborer parce que je comprends qu'effectivement le député de Jeanne-Mance est très intéressé aux deux dossiers, celui des taxis et celui des communications sur le projet de loi no 65, l'accès à l'information. Je suis bien prêt à me plier à sa demande, dans la mesure évidemment où on pourra disposer assez rapidement du projet de loi no 48 sur les taxis. Quand on parle de 11 heures, il faut bien se comprendre, la période des questions commence à 10 heures et se termine à peu près à 11 heures. Cela veut dire de 11 heures à midi. Donc, il resterait à peine une heure pour étudier la loi sur l'accès à l'information. Je crois comprendre qu'implicitement le député de Jeanne-Mance m'indique que la collaboration de l'Opposition n'en sera que plus grande pour l'étude du projet de loi sur l'accès à l'information.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, sur le même sujet, le ministre sait fort bien que nous allons collaborer le plus possible quant au projet de loi no 65. Je voudrais proposer au ministre qu'il considère la possibilité de siéger quatre heures ce soir au lieu de lundi soir. Le député de Westmount, qui est aussi très impliqué dans le projet de loi no 65, serait disponible quatre heures ce soir, mais ne serait pas disponible lundi soir. Je me demande si c'est possible. Il n'est peut-être pas en mesure de répondre immédiatement. C'est une proposition que je lui fais. S'il était en mesure de me donner quelques heures d'avertissement, on serait prêt à le faire, M. le député de Jeanne-Mance et moi-même, avec le ministre des Communications, c'est-à-dire commencer ce soir l'étude du projet de loi no 65.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader.

M. Bertrand: II y a une ouverture intéressante. Personnellement, je serais disposé à commencer l'étude du projet de loi ce soir à 20 heures jusqu'à 24 heures, puisque je vois qu'au menu, effectivement, ce soir, il n'y a qu'une commission qui siège et que l'Assemblée nationale va étudier le projet de loi no 37. Je serais prêt à évaluer très rapidement la possibilité qu'on puisse siéger ce soir. Je vais simplement m'enquérir, premièrement, auprès de ceux qui doivent voir à ce que l'ensemble de l'étude des crédits se termine aujourd'hui même, et aussi auprès des gens de mon ministère, si tout cela peut effectivement se réaliser. Je pourrai donner une réponse d'ici à peine quinze minutes au député de Westmount.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Westmount.

M. French: M. le Président, je serai à l'étude des crédits de la présidence du conseil. Je voudrais tout simplement signaler que ma proposition, c'est un échange de temps, c'est-à-dire que lundi soir, on étudierait autre chose, parce que je ne serai pas ici lundi soir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Donc, M. le leader, vous avez pris bonne note. Oui, M. le leader?

M. Bertrand: Non, c'était prévu. Je suis prêt à regarder cela, et dans quinze minutes, on s'en reparlera.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Puisqu'il n'y a pas d'autres questions, je suspends les travaux jusqu'à quinze heures pour permettre à la commission des transports de siéger ici jusqu'à 13 heures, pour étudier la question avec débat.

(Suspension de la séance à 11 h 09)

(Reprise de la séance à 15 h 07)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît. Veuillez reprendre vos fauteuils. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, avant d'appeler l'article auquel apparaît l'objet du débat cet après-midi, je crois comprendre qu'à l'heure du lunch une entente est intervenue avec le représentant de l'Opposition en matière de communications pour que ce soir à 20 heures puisse siéger la commission des communications aux fins d'amorcer l'étude article par article du projet de loi no 65, de 20 heures à 24 heures selon les renseignements que j'ai. Je ne sais pas si c'est le renseignement que possède le whip de l'Opposition.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: M. le Président, je peux confirmer au leader adjoint du gouvernement que nous avons accepté que la commission parlementaire des communications siège pour étudier le projet de loi no 65 article par article. Elle viendra s'ajouter à la commission du ministère des Finances. Ce sont les deux seules? Est-ce qu'il y aura d'autres commissions ce soir? Il y en a une autre. Laquelle? Les finances et comptes publics, c'est celle-là, et communications. Le projet de loi no 37 ici à l'Assemblée, de 20 heures à 22 heures?

M. Fréchette: C'est cela. M. Pagé: 22 heures.

M. Fréchette: Un instant, je ne voudrais pas prendre sur moi de vous dire des choses dont je ne suis pas sûr. Je prendrai l'information et je la communiquerai.

M. Chevrette: Si vous en avez pour deux heures, c'est de 20 heures à 22 heures.

M. Fréchette: M. le Président, je fais donc motion pour que ce que je viens d'annoncer se fasse à 20 heures ce soir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion est-elle adoptée?

M. Fréchette: Je suis déjà informé que, quant à la loi 37, ce sera de 20 heures à 24 heures, M. le Président.

M. Pagé: M. le Président, quant à être là-dessus...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: ... est-ce que le ministre peut nous indiquer s'il est de son intention de poursuivre le débat en deuxième lecture sur la loi 37 lundi ou mardi?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, jusqu'à maintenant, il n'y a pas de décision prise à cet égard. Dès lors que cette décision sera prise, nous en informerons qui de droit.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, aux affaires du jour, je vous prierais d'appeler l'article 17. Je voudrais, par ailleurs, qu'on s'entende bien aussi sur l'ordre des travaux ici à l'Assemblée nationale cet après-midi. J'ai compris que le ministre livrerait un message d'à peu près 15 à 20 minutes, que le critique officiel de l'Opposition en ferait tout autant et que deux intervenants de chaque côté auraient des interventions pour à peu près dix minutes chacun. Cela va comme ça?

Projet de loi no 77 Deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Deuxième lecture du projet de loi no 77, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. M. le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. (15 h 10)

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, le projet de loi no 77 modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles que nous présentons aujourd'hui devant l'Assemblée nationale propose des amendements importants à une des lois agricoles les plus fondamentales. Avant d'expliquer en détail les modifications spécifiques proposées à cette loi, il m'apparaît essentiel d'exposer le cadre dans lequel ce type de loi se situe, les circonstances qui l'ont rendue nécessaire et

son développement au cours des années.

Il faut rappeler que cette loi est l'aboutissement d'un long périple vers la protection organisée des intérêts des producteurs agricoles. Ce périple commence il y a environ 45 ans, lorsqu'on a commencé à réfléchir au Québec sur les besoins alimentaires accrus d'une société en voie d'urbanisation et d'industrialisation. Au Québec comme ailleurs, les progrès de l'agriculture ont précédé et permis ces grands changements socio-économiques en libérant la main-d'oeuvre nécessaire au développement industriel.

Parallèlement, les possibilités techniques et humaines d'améliorer la qualité, la quantité et la diversité des produits tirés des terres en culture ont conduit à une réflexion sur les moyens à prendre pour en assurer la mise en marché de façon avantageuse, tant pour le producteur que pour le consommateur.

Dès cette époque, on constatait que les rapports de force dans la mise en marché des produits agricoles manquaient d'équilibre et que le pouvoir de marchandage des producteurs pris individuellement s'avérait minime face à des acheteurs beaucoup plus puissants. Il est évident que ce rapport est encore beaucoup plus inégal aujourd'hui, alors que les acheteurs de produits agricoles sont très peu nombreux face à des milliers de producteurs qui vendent leurs produits. Si les producteurs ne sont pas organisés collectivement pour mettre en marché leurs produits, ils sont vraiment désavantagés et obligés d'accepter les prix que leur offrent les acheteurs.

La formule du plan conjoint comportant le mécanisme d'extension de juridiction vis-à-vis de tous les producteurs s'imposait. Une extension de juridiction veut dire que lorsqu'un certain pourcentage des producteurs visés acceptent de se regrouper pour déterminer les conditions de mise en marché et négocier en commun la vente de leurs produits, la convention collective ou le plan conjoint s'applique à tous les producteurs.

À la suite de la recommandation d'un comité d'enquête d'utiliser la formule des plans conjoints pour assurer une mise en marché juste et ordonnée des produits agricoles, le législateur a voté, en 1956, M. le Président, un premier texte de loi intitulé "Loi établissant un office provincial pour aider à la vente des produits agricoles". Je tiens à souligner que c'est sous l'administration de M. Maurice Duplessis que ce premier pas fondamental a été franchi et qu'il est donc faux de prétendre, comme l'ont fait certains membres de l'Opposition, que la Loi sur la mise en marché des produits agricoles est une grande oeuvre libérale.

Ce premier texte législatif a subi, à de nombreuses occasions, de multiples amendements dont j'aimerais en rappeler certains. En 1961, les syndicats et les fédérations de l'UCC, l'Union catholique des cultivateurs du temps, se sont vu accorder le droit d'obtenir l'administration des plans au même titre qu'un office de producteurs, jusque-là l'organisme exclusif d'administration des plans. En 1963, apparaissaient à la loi des pouvoirs de mettre en vente en commun, de créer des agences uniques de vente et de contingenter la production et la vente. Même si la loi n'a pas comme premier objectif la sauvegarde de la ferme familiale, il n'en demeure pas moins qu'en assurant une meilleure sécurité de revenu au producteur les plans conjoints voulaient favoriser son essor et faire en sorte que l'agriculteur entouré de sa famille demeure maître sur sa ferme. L'adoption de telles mesures sans objectif de s'appliquer principalement à une ferme familiale aurait été impensable autrement.

La loi a prévu dès sa première version que l'initiative de la mise en place d'un plan conjoint doit venir des producteurs intéressés, puisque ni le Conseil des ministres, ni le ministre, ni la Régie des marchés agricoles ne peuvent proposer ou mettre en vigueur un plan sans la requête d'un groupe de producteurs. Mais, dès que ces derniers indiquent formellement leur désir à cette fin, l'organisme gouvernemental donne avis du projet de plan qui lui a été soumis et tient des audiences où tous les groupes et personnes intéressés peuvent intervenir pour y faire leurs représentations. La régie doit alors se prononcer sur l'opportunité du plan proposé et le soumettre en plus au référendum des producteurs. Ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles qu'elle peut recommander au Conseil des ministres d'approuver un plan sans référendum.

Pour rechercher cette volonté des producteurs, la loi prévoit d'ailleurs un pourcentage élevé d'approbation avant qu'un plan n'entre en vigueur. En effet, il doit recueillir l'appui d'au moins les deux tiers des producteurs qui votent et il faut au moins que la moitié des producteurs intéressés aient voté avant qu'un plan soit mis en application. On peut donc dire qu'un plan a reçu l'appui d'une bonne majorité des producteurs avant d'être en vigueur et qu'il représente vraiment leur volonté.

Certes, il y a souvent un certain nombre de producteurs ou d'autres personnes qui ne sont pas favorables à une formule de mise en marché ordonnée et qui s'opposent parfois farouchement à l'exécution efficace du plan et de ses règlements adoptés par l'assemblée générale des membres. C'est le droit des producteurs - pas celui des autres groupes de personnes - mais il ne faut pas oublier que cette minorité ne doit pas pouvoir faire échec au voeu de la majorité.

Les agriculteurs de qui on exige un

effort considérable d'organisation et un haut degré de solidarité dans la mise en place d'un plan conjoint, doivent pouvoir le faire fonctionner sans qu'une minorité de producteurs ou les entreprises auxquelles ils vendent leurs produits ne parviennent à empêcher à toutes fins utiles l'exercice des droits que leur accorde la loi.

Le but premier du projet de loi que nous étudions aujourd'hui est de faciliter le fonctionnement des plans conjoints, une fois qu'ils ont été votés conformément à la loi par une majorité d'au moins les deux tiers des producteurs visés. Je tiens à faire remarquer qu'il y a très peu d'exemples dans notre société où domine la formule de la majorité simple, où on demande un si fort consensus avant de permettre l'exercice d'un droit. Même notre Assemblée, M. le Président, ne fonctionne que rarement avec la majorité des deux tiers.

Il y a des exemples de plans conjoints et de règlements adoptés par la majorité des producteurs qui n'ont pu être appliqués efficacement à cause de l'action de groupements minoritaires et dont les succès ont souvent été causés par des carences dans la loi. En plus d'empêcher l'exercice des droits de cette majorité, des mesures dilatoires ou de guérillas de ces dissidents, guérillas judiciaires souvent, ont causé des pertes considérables aux producteurs, soit directement par les nombreux frais légaux encourus, soit indirectement en empêchant l'Office des producteurs d'utiliser ses pouvoirs et d'obtenir pour l'ensemble des producteurs de meilleures conditions de mise en marché.

Afin que ce mécanisme de mise en marché, librement choisi par une écrasante majorité de producteurs, puisse s'appliquer dans l'ordre, il m'apparaît nécessaire d'apporter des amendements à cette loi pour au moins assurer que l'organisme de producteurs, administrant un plan conjoint, puisse recevoir les contributions auxquelles il a droit pour exercer adéquatement son mandat.

Qu'on se rappelle les nombreuses difficultés que la Fédération des producteurs d'oeufs de consommation a eu à faire face au cours des années et auxquelles elle a à faire face encore, pour obtenir que tous les producteurs paient leur part des coûts nécessaires à l'application des règlements approuvés par l'ensemble des producteurs réunis en assemblée générale. Il m'apparaît de toute évidence injuste et inéquitable qu'une majorité de producteurs paient leur contribution tandis que les autres qui bénéficient des politiques de leur office de producteurs ne versent pas toute leur quote-part. La Fédération des producteurs d'oeufs a dû prendre un grand nombre de procédures devant les tribunaux judiciaires pour obtenir gain de cause, mais à quel coût?

Plus récemment, la Fédération des producteurs de porc a tenté de percevoir les cotisations prévues à son plan qui a pourtant été approuvé par 73,7% des producteurs, lors du référendum tenu en mars 1981. Or, elle en a été empêchée jusqu'ici à la suite d'interventions diverses provenant de producteurs et d'autres personnes sans qu'elle puisse agir de façon efficace pour faire valoir ses droits. Plusieurs procédures sont en cours, mais quel résultat concret pourra-t-elle obtenir dans un délai raisonnable?

La loi n'impose pas, en effet, d'amendes suffisamment élevées et, à mon sens, on n'y prévoit pas, de façon assez claire, la responsabilité des personnes qui achètent ou reçoivent du porc ou des produits agricoles sans effectuer le prélevé des contributions dues.

Le projet de loi que nous avons à étudier rend personnellement responsable du versement des contributions dues par les producteurs aux organismes qui administrent un plan conjoint, toute personne ou entreprise qui achète ou reçoit des produits agricoles sur lesquels un tel prélèvement doit être effectué en vertu des dispositions d'un plan conjoint et d'une ordonnance de la Régie des marchés agricoles.

Il s'agit, en fait, du prélèvement d'une cotisation syndicale à la source, comme cela se fait couramment dans le monde du travail. Dans l'état actuel de la législation, le refus d'un petit nombre de personnes de collaborer à la perception des cotisations nécessaires au fonctionnement d'un plan conjoint peut suffire à paralyser celui-ci bien qu'il ait été créé par la volonté de milliers de producteurs agricoles. Cela est inadmissible. (15 h 20)

En plus d'être personnellement responsables du prélèvement des cotisations et de leur transmission à l'organisme chargé d'administrer le plan conjoint, les acheteurs de produits agricoles qui ne se conformeront pas à cette obligation sont passibles d'amendes dont les montants sont sensiblement majorés par le projet de loi. Je ne veux pas faire l'énumération de tous ces montants, mais indiquer que, règle générale, ils sont triplés par la loi actuelle, la plus faible amende, celle pour une première offense par une personne physique, passant de 100 $ à 300 $ et la plus forte, celle pour une deuxième offense par une personne morale, passant, quant à elle, de 5000 $ à 10 000 $.

Il m'apparaît également que, pour justifier une condamnation devant un tribunal, il devrait suffire de lui prouver que la retenue n'a pas été faite ou que l'office de producteurs n'a pas reçu les contributions dans les délais prescrits. Les amendements proposés aux articles 78 et 114, ainsi que dans les ajouts des articles 116.1 et 121.1

veulent remédier à ce problème. Par ailleurs, afin d'éviter les abus, on donne, par l'amendement à l'article 116, l'opportunité à un contrevenant de remédier à la situation en versant les sommes dues dans un délai raisonnable. Un contrevenant recevra, en effet, un avis préalable de dix jours avant qu'une poursuite puisse être intentée contre lui.

Le projet de loi devant nous aujourd'hui a également pour objet d'obliger un office de producteurs et toute personne engagée dans la production ou la mise en marché d'un produit commercialisé à transmettre à la Régie des marchés agricoles, aux époques et dans la forme qu'elle peut prescrire, tout renseignement qu'elle peut juger à propos d'exiger en rapport avec les contingents d'un produit commercialisé et leurs détenteurs. Nous avons jugé bon de préciser de cette façon le pouvoir d'enquête de la Régie des marchés agricoles en raison d'un phénomène fort préoccupant qui, au cours des dernières années, est venu modifier les rapports de force dans le monde agricole au désavantage de la ferme familiale.

Ce phénomène, c'est la vente de contingents par des producteurs agricoles à des entreprises dont la principale fonction n'est pas la production proprement dite. Le droit de produire qu'elles détiennent est soit loué à des producteurs, qui deviennent alors des clients captifs de ces entreprises pour leurs approvisionnements, soit tout simplement rempli par des agriculteurs travaillant à forfait.

Comme je l'ai expliqué précédemment, l'objectif que sous-tend la Loi sur la mise en marché des produits agricoles depuis son adoption, il y a maintenant 25 ans, est de protéger le marché du producteur agricole et non pas de protéger le marché des entreprises qui lui fournissent des services. Le producteur agricole dont on parle ici est une personne physique, activement engagée dans l'agriculture, avec des moyens de production dont elle est propriétaire ou locataire à long terme. Par extension, ce dont on parle c'est, en fait, la ferme familiale.

Je dois avouer, M. le Président, avoir été déçu par les indications voulant que ce phénomène de concentration des contingents entre les mains d'entreprises ou de personnes qui ne peuvent pas être qualifiées comme producteurs agricoles dans le sens que je viens de décrire ait pris des proportions qu'on dit considérables dans certaines productions contingentées, notamment celle de la volaille, plus particulièrement, et le phénomène commencerait à se produire dans le cas des oeufs.

Je suis déçu parce que les fédérations de producteurs qui administrent ces plans conjoints ont, par règlement, le pouvoir de déterminer les modalités de transfert de contingents d'une personne à l'autre et auraient pu, par conséquent, empêcher le recul de la ferme familiale auquel nous avons assisté. Elles ne l'ont pas fait. Je comprends qu'il ne soit pas toujours facile de limiter la liberté d'action des personnes, mais la Loi sur la mise en marché des produits agricoles est-elle autre chose qu'un moyen légal, très démocratique, difficile d'accès même, de limiter la liberté d'action de l'individu lorsqu'une majorité d'au moins les deux tiers juge que cela est nécessaire pour le bien de l'ensemble?

Une fois qu'on a franchi les premiers pas, souvent difficiles, de l'adoption d'un plan conjoint et d'un règlement de contingentement, n'est-ce pas trahir toute la démarche que de ne pas réserver les avantages prévus dans la loi à ceux qui ont voté le plan conjoint?

C'est pourquoi j'ai fait ajouter un article au projet de loi, l'article 14.2: "La régie doit sur demande transmettre au ministre, en la forme prescrite par ce dernier, tous les renseignements qu'il peut exiger relativement aux contingents et à leurs détenteurs." De plus, "La régie doit, au plus tard le 30 juin de chaque année, faire au ministre un rapport de ses activités pour l'exercice financier précédent; ce rapport doit contenir tous les renseignements que le ministre peut exiger. Ce rapport devra être déposé devant l'Assemblée nationale..."

De plus, la régie, par la loi, aura les pouvoirs d'aller chercher les renseignements dont elle aura besoin pour répondre à ces interrogations. Elle pourra obliger un office de producteurs ou toute personne engagée dans la production ou la mise en marché d'un produit commercialisé à lui transmettre, aux époques et dans la forme qu'elle peut prescrire, tout renseignement qu'elle peut juger à propos d'exiger en rapport avec les contingents d'un produit commercialisé et leur détenteur. Ces données vont être nécessaires.

Je pense que le caucus des députés du Parti québécois a indiqué très clairement, et nous avons travaillé ensemble là-dessus, quelle était sa position. La volonté des députés du caucus du Parti québécois, caucus agricole principalement, mais caucus dans son ensemble, c'est de protéger la ferme familiale, pas la ferme familiale artisanale, mais la ferme familiale développée - avec la conception qu'il peut y avoir des fermes petites, des moyennes et des grosses - la ferme dans un cadre normal. Les contingents, quand il y en a, ont été établis en vue d'aider des agriculteurs qui étaient à leur compte essentiellement et non pas pour protéger des entreprises qui ne sont pas essentiellement des producteurs agricoles. Les contingents n'ont pas été placés là pour que les entreprises les acquièrent de sorte que les agriculteurs deviennent des locataires

chez eux comme on était dans le temps du Moyen-Âge, des locataires de terres du métayer, du propriétaire terrien.

Ce sont là des questions que nous posons, M. le Président. Le projet de loi no 77 n'apporte pas nécessairement toutes les réponses. Il donne à la régie le pouvoir de faire enquête de façon que nous puissions avoir un meilleur éclairage. Nous avons envisagé d'aller plus loin et d'inclure dans le projet de loi des articles réservant le droit de détenir des contingents des personnes directement impliquées dans la production agricole au sein d'entreprises de type familial qu'elles contrôlent. Nous avons préféré attendre pour disposer de plus d'informations et aussi pour pouvoir en discuter avec les organismes concernés, mais il doit être clair pour tout le monde dès maintenant que nous nous dirigeons dès à présent dans cette direction. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi qui a une valeur importante pour les producteurs agricoles, qui a également une valeur symbolique. D'abord, je dois vous mentionner qu'il y a de longs mois nous avons demandé au ministre de faire le dépôt de ce projet de loi comme d'autres projets de loi également parce que vous savez que l'Assemblée fut plutôt stérile dans le domaine de l'agriculture depuis une couple d'années. M. le Président, nous craignions même que le mois de juin arrive sans que le ministre n'ait déposé son projet de loi. Je suis bien content qu'il l'ait déposé et nous nous engageons à collaborer efficacement à son adoption rapide parce que nous comprenons, M. le Président, que c'est un projet de loi qui est désiré de la part des producteurs agricoles. C'est un projet de loi qui est important et nous sommes persuadés également qu'il est normal que lorsqu'un plan conjoint est voté démocratiquement, il puisse avoir les instruments pour fonctionner.

En parlant de législation, M. le Président, j'espère que le ministre déposera un autre projet de loi qu'il avait promis même en cours de campagne électorale l'an dernier, qui est la loi pour aider à l'établissement des jeunes, c'est-à-dire la loi pour décréter le prêt de 50 000 $ sans intérêt pour les jeunes agriculteurs. Nous savons qu'il y a beaucoup de transactions qui sont bloquées dans le moment, de père à fils ou autres, dans l'attente de cette loi. C'est une loi importante. Un journaliste ici appelait cette loi "la cerise de Garon". Dois-je comprendre, M. le Président, que la cerise est encore verte ou qu'elle prend du temps à mûrir? De toute façon, nous demandons au ministre de faire diligence également avec cette loi comme il l'a fait dans le cas de la loi 77, malgré qu'elle soit venue sur le tard. (15 h 30)

M. le Président, le ministre semblait un peu sceptique quant à la réception de cette loi par l'Opposition. Il semblait, à voir sa physionomie lorsqu'on en discutait, qu'enfin, nous assisterions à un éclatement du Parti libéral, à une division. C'est ignorer l'histoire féconde du Parti libéral du Québec en faveur de la classe agricole, en faveur des agriculteurs. Nous savons tous qu'au cours des années où il a assumé le pouvoir, le Parti libéral du Québec a adopté des lois nombreuses et importantes et, aussi des budgets comme il ne s'en est jamais vu de mémoire d'homme. Quand je parle de budgets, je parle de tranches de l'agriculture par rapport au budget global. Dans les années 1974-1975, le budget de l'Agriculture dépassait 2,5% du budget global, alors qu'il n'a cessé de diminuer depuis ce temps. Il représente maintenant 1,9%.

M. le Président, relativement à cette loi 77, j'ose espérer qu'elle pourra satisfaire les espoirs de ceux qui sont impliqués dans la production agricole. Nous savons que les producteurs avaient soumis certains projets de loi, certains types de projets de loi. Nous espérons que le projet de loi que nous adoptons présentement sera efficace. Nous espérons, autrement dit, que la pièce sera plus grande que le trou et non pas plus petite, parce que si vous avez une crevaison et que l'on met une pièce plus petite que le trou, ce n'est pas fameux. Cela n'améliore pas grand-chose.

Tout à l'heure, le ministre a parlé de rapport qu'il pouvait exiger de la régie. Cette loi donne au ministre des pouvoirs considérables, lorsqu'on dit, par exemple, que la régie doit, au plus tard le 30 juin de chaque année, faire au ministre un rapport de ses activités pour l'exercice financier précédent. Ce rapport doit aussi contenir tous les renseignements que le ministre peut exiger. Il est également dit que la régie doit, sur demande, transmettre au ministre en la forme prescrite par ce dernier, "tous les renseignements qu'il peut exiger relativement aux contingents et à leurs détenteurs". Cela nous semble exagéré comparé aux rapports que le ministre peut exiger d'autres commissions. Je prends, par exemple, la Loi sur la Régie des grains, chapitre 84 des Lois de 1979, où il est indiqué: "La régie transmet au ministre de l'Agriculture et de l'Alimentation, dans les quatre mois de la fin de son exercice financier, un rapport de ses activités pour l'exercice financier précédent. Ce rapport est, dans les trente jours de sa réception, déposé devant l'Assemblée nationale si elle

est en session. Si elle ne l'est pas, il est déposé dans les trente jours de l'ouverture de la session suivante ou à la reprise des travaux parlementaires?

Or, nous nous demandons pourquoi le ministre va plus loin dans le cas du projet de loi 77. Nous savons tous que le rapport que la régie doit faire à l'Assemblée nationale est un rapport public. Ce qui inquiète un peu, c'est l'article 14.2 qui stipule que la régie doit, sur demande, transmettre au ministre tous les renseignements que celui-ci peut exiger relativement aux contingents et à leurs détenteurs. Ce n'est pas public. On dit bien que cela ne fait pas partie du rapport à être déposé à l'Assemblée nationale, parce que, si c'était pour être inclus dans le rapport que la régie fait à l'Assemblée nationale, on l'aurait inclus à l'article 14.1. On a fait un article spécial pour indiquer que le ministre a un certain pouvoir discrétionnaire pour obtenir ces renseignements.

Or, nous croyons que non seulement le ministre devrait posséder ces renseignements s'il juge utile de les demander, mais que tous les membres de l'Assemblée devraient également les posséder. Nous ne voudrions pas que ces renseignements prévus à l'article 14.2 servent, à un moment donné, à des fins politiques. Je n'accuse pas l'actuel ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation en prétendant que ce soit son intention, mais nous voyons là un certain danger. Alors, nous aurions préféré que l'article 14.2 devienne seulement un paragraphe supplémentaire de l'article 14.1 pour que les renseignements que le ministre demande à la régie soient accessibles, non seulement au ministre, mais à tous les élus de l'Assemblée nationale.

M. le Président, les agriculteurs connaissent donc l'intérêt que le Parti libéral du Québec a toujours manifesté envers la classe agricole. Nous déplorons un peu que le projet de loi arrive à la dernière minute, qu'il soit étudié à la vapeur, qu'il soit adopté à la vapeur. Il aurait été probablement préférable de faire des consultations plus poussées. Nous n'en avons pas eu le temps, puisqu'il fut déposé mardi et que nous sommes vendredi aujourd'hui. Cependant, comme je l'ai dit tout à l'heure, il nous fait plaisir de collaborer efficacement et, je le répète, nous espérons que cette loi donnera satisfaction aux gens concernés. Nous espérons que ce ne sera pas seulement un tape-à-l'oeil, un projet de loi déposé pour la parade. Ce serait vraiment un peu méprisant pour la classe agricole.

M. le Président, je peux vous mentionner que, relativement à l'application ou à l'efficacité de cette loi, nous serons en mesure de juger l'action du ministre lorsque nous verrons cette loi en application, lorsque nous pourrons en tester l'efficacité. C'est là que je dis et que je répète: Nous espérons que ce n'est pas un projet de loi qui est présenté seulement pour donner bonne bouche aux producteurs, pour leur donner une impression favorable, pour leur donner une illusion, mais nous souhaitons qu'elle ait l'efficacité et la vigueur désirées.

M. le Président, pour ne pas prolonger le débat et pour nous conformer à l'entente intervenue des deux côtés de la Chambre, je ne vais pas plus loin pour le moment. Je suis tout à fait favorable au concept de ferme familiale tel qu'évoqué par le ministre. Nous avons, avec regret, déploré et devons déplorer encore chaque année la disparition de nombreuses fermes familiales, surtout avec le coût du crédit qui est de plus en plus considérable. Nous souhaitons que le projet de loi que nous adoptons aujourd'hui puisse favoriser le maintien et renforcer la solidité de ce concept de ferme familiale, M. le Président.

Je souhaite au monde agricole, au monde rural un bon succès dans l'application de cette loi et je répète qu'il nous fait plaisir, quand cela a du bon sens, quand les projets de loi présentés par le ministre sont de nature à servir le bien commun, nous avons l'esprit assez ouvert, pour donner notre consentement, un consentement efficace, un consentement rapide, comme le Parti libéral du Québec l'a toujours fait lorsqu'il s'agit du bien commun de la classe agricole et des agriculteurs. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Saint-Hyacinthe. (15 h 40)

M. Maurice Dupré

M. Dupré: Merci, M. le Président. Pour rassurer le député de Beauce-Sud au début, je voudrais dire que le caucus du parti ministériel, le caucus agricole dont je fais partie, a insisté fortement auprès du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation afin que le projet de loi concernant les 50 000 $ alloués aux jeunes agriculteurs soit déposé dès ce mois-ci. D'après la rencontre que j'ai eue avec lui, je crois déceler que c'est plus que possible qu'il le soit.

Ceci étant dit, M. le Président, la politique de notre gouvernement à l'égard du secteur agro-alimentaire vise nombre d'objectifs divers, et la population de mon comté a pu s'en rendre compte depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois et de son ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, M. Garon.

La politique gouvernementale à l'égard du secteur agro-alimentaire vise, disais-je, plusieurs objectifs et il est indéniable que l'intervention économique exercée dans ce

secteur cherche principalement à atteindre deux objectifs. Primo, influencer le revenu agricole et, en second lieu, parvenir à notre autosuffisance.

Le Québec, M. le Président, a axé, comme la plupart des pays occidentaux, sa politique du revenu agricole sur trois piliers fondamentaux: premièrement, assurer un niveau de vie convenable, pour ne pas dire agréable, aux éleveurs et aux agriculteurs; deuxièmement, garantir qu'à moyen et à long terme le taux de rendement des ressources consacrées à la production agricole primaire soit au moins égal à celui des ressources du même ordre utilisé dans les autres secteurs et, troisièmement, réduire les variations enregistrées d'une année à l'autre dans le taux de rendement du revenu des agriculteurs.

Tous connaissent très bien, M. le Président, les fluctuations relativement sensibles à court et à moyen terme du prix des produits agricoles et la possibilité de variations considérables de la production à cause des conditions météorologiques, de la maladie ou même des marchés interprovinciaux ou internationaux, et que dire des taux d'intérêt fixés par le gouvernement fédéral plus dommageables que toutes les causes que j'ai mentionnées et qu'on pourrait facilement appeler le grand dérangement des agriculteurs plus que toutes les maladies haemophilus connues et inconnues.

C'est là, M. le Président, que le projet de loi no 77 que nous étudions présentement est le bienvenu, afin de réduire davantage l'instabilité que connaissent certains élevages ou certaines cultures au Québec, sans oublier l'ampleur du défi de sauvegarder nos fermes familiales sous toutes ses formes afin qu'elles conservent leur quota, si je peux m'exprimer ainsi, et afin que ces fermes ne deviennent pas totalement dépendantes d'entreprises dont la production agricole n'est pas la première mais, souventefois, la dernière des fonctions.

Les producteurs indépendants de mon comté, comme ailleurs au Québec, ne veulent pas devenir des exécuteurs, mais des "décideurs" libres d'administrer leurs propres entreprises et, dans plusieurs cas, de voir leur fils et leur fille prendre la relève. L'encouragement, pour notre gouvernement, de plans conjoints, l'application de programmes de stabilisation et de syndicats de gestion, entre autres, sont des preuves évidentes de l'intérêt que nous portons à l'agriculture.

Un plan conjoint a intrinsèquement des pouvoirs considérables, entre autres, M. le Président, de contingenter une production. Mais ces plans conjoints ne seront administrables et efficaces que pour autant qu'ils auront les outils nécessaires pour bien les faire fonctionner.

Ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur la mise en marché des produits agricoles afin, notamment, de rendre personnellement responsable du versement des contributions des producteurs aux organismes qui administrent des plans conjoints toute personne qui néglige de retenir ces contributions ou de les remettre à ces organismes lorsqu'elle est tenue de le faire. La régie pourra alors, de sa propre initiative, à la demande d'un office de producteurs ou par ordonnance, l'obliger à remettre ces sommes, comme le mentionnait tantôt le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.

M. le Président, lorsque 74% des producteurs ont adopté un plan conjoint, comme c'est le cas dans l'industrie du porc, il n'y a pas de raison pour que cela ne fonctionne pas avec ce projet de loi qui modifie la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, en donnant les moyens plus efficaces pour que s'affirment certains plans conjoints, en "responsabilisant" les versements des contributions et en allongeant les dents de la loi.

J'aimerais souligner ici le travail de plusieurs producteurs de porc de mon comté qui ont travaillé avec acharnement à vouloir se donner ce plan conjoint par référendum, cet outil qui sera, j'en suis persuadé, des plus efficaces. Nonobstant ces nouvelles directives contenues dans le projet de loi, nous osons espérer que tout se déroulera dans l'harmonie la plus complète qui permettra aux agriculteurs - quand je dis aux agriculteurs, je ne parle pas ici des multinationales et des autres, mais des vrais producteurs - la possibilité d'exercer leurs droits.

Une autre facette de ce projet de loi qui n'apparaît pas au texte, c'est celle d'assurer directement ou indirectement une plus grande sécurité et stabilité des employés du secteur de transformation des produits de la ferme. Ici, je ne peux m'empêcher de penser aux problèmes qu'ont connus les employés des abattoirs de nos régions, lesquels furent durement touchés du côté pécuniaire en subissant les contrecoups des conflits de l'hiver dernier, de la perception des contributions des producteurs de porc, la fameuse retenue de 0,10 $, des arrêts de travail et des affrontements entre les travailleurs qui ne sont jamais agréables à voir, surtout pour un député.

Certainement que je voterai en faveur de ce projet de loi, un peu parce que je l'ai personnellement réclamé, mais aussi et surtout parce que cette loi assurera une plus grande stabilité dans le secteur agroalimentaire dont Saint-Hyacinthe en est la capitale incontestée au Québec et dans l'intérêt des exploitants comme des consommateurs. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Champlain.

M. Marcel Gagnon

M. Gagnon: Merci, M. le Président. Vous me permettrez sans doute de prendre quelques minutes - même si on dit que c'est un débat qui devrait être assez court parce qu'on fait l'unanimité pour une fois en cette Assemblée, je pense que c'est important de le souligner - pour dire jusqu'à quel point je suis heureux de voir que le ministre a présenté ce projet de loi pour améliorer sensiblement la situation de l'ensemble des producteurs agricoles, entre autres les producteurs de porc, qui se regroupent dans les plans conjoints.

D'abord je dois vous dire que j'ai vécu personnellement des expériences, étant moi-même producteur agricole impliqué dans un des plans conjoints qu'on a eu probablement le plus de difficulté à implanter - le ministre en a parlé tantôt - le plan conjoint des producteurs d'oeufs. Dans ce sens-là, je rejoins sûrement ce que dira le député de Berthier, parce que je me souviens avoir oeuvré avec lui en vue de l'application de ce plan conjoint. J'avais aussi été membre de l'exécutif de FEDCO et j'ai dû faire personnellement le tour du Québec pour essayer de ramener les troupes et essayer de faire en sorte que les producteurs d'oeufs, à ce moment-là avec l'UPA, se tiennent assez forts pour éviter qu'un certain petit groupe de profiteurs de la classe agricole ne vienne détruire nos rangs et détruire le plan conjoint.

Je réclamais à grands cris une amélioration de la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. On l'a aujourd'hui. C'est avec beaucoup de satisfaction que la classe agricole accueillera cette loi. C'est bien évident qu'on ne peut pas s'imaginer que la loi réglera tous les problèmes. La loi donne des outils additionnels. Une loi, c'est toujours contestable, surtout quand on est encouragé par des firmes d'avocats qui souvent font leur argent à semer la bataille au sein de la classe agricole, mais on devrait réfléchir un peu plus à celle-ci, parce que les amendes sont déjà un peu plus fortes et il y aura des responsables pour payer les redevances qui devront être payées au plan conjoint. (15 h 50)

J'aurais voulu souligner l'importance d'un plan conjoint, par exemple, pour la sécurité des producteurs agricoles, pour la sécurité de l'entreprise de type familial. Je pense qu'au Québec, on a depuis longtemps démontré à l'évidence que c'est l'entreprise de type familial qui doit développer notre agriculture. Mais, en même temps qu'on demeure avec des entreprises de type familial, il ne faut pas oublier qu'aujourd'hui - je pense qu'on est tous unanimes pour le constater - les fermes, même de type familial, ne sont plus des fermes artisanales. C'est devenu des petites et moyennes entreprises. Les fermiers sont des investisseurs qui investissent à coups de centaines de milliers de dollars et qui font des chiffres d'affaires de plusieurs centaines de milliers de dollars aussi. Si on veut développer et diversifier notre agriculture et avoir des investisseurs qui sont intéressés à investir dans l'agriculture, cela prend une sécurité pour le capital investi.

Le plan conjoint permet aussi aux producteurs de se regrouper pour transiger et pour vendre leurs produits, parce que les détaillants, ceux qui sont sur la chaîne entre le producteur et le consommateur, eux sont regroupés. Ces détaillants achètent en grosse quantité et, par l'entremise du plan conjoint, on permet à l'ensemble des producteurs de se regrouper et d'offrir finalement aux détaillants, en quantité et en qualité, les produits dont on a besoin pour notre consommation. Cela permet aussi de stabiliser - le député de Saint-Hyacinthe en a parlé un peu - l'approvisionnement. Cela me faisait toujours un peu de peine lorsque des associations, par exemple, de consommateurs mentionnaient que les plans conjoints étaient là pour faire monter les prix. Je dirais que c'est le contraire. Il est bien évident que le plan conjoint est là pour permettre à un producteur agricole d'avoir un prix juste pour son produit, un prix qui va lui permettre de fonctionner.

Aussi, cela permet aux consommateurs de s'approvisionner et de se nourrir à un prix qui est stable et juste. Avant l'avènement des plans conjoints, si je prends un exemple dans le domaine des oeufs, je me souviens -pas chez moi parce qu'à ce moment je n'avais pas de ferme vu que j'étais trop jeune - d'avoir entendu parler que, dans les années quarante, on a payé des douzaines d'oeufs au Québec à certaines périodes autour 1,25 $. À d'autres périodes, on pouvait payer 0,10 $ ou 0,15 $ pour une douzaine d'oeufs. Bon an, mal an, du fait qu'il n'y avait pas de stabilité, le consommateur, j'en suis persuadé, payait plus cher qu'il devait parce que, lorsque le produit était en surabondance, c'était le commerçant qui faisait le profit; lorsqu'à cause d'une année de difficultés dans le domaine agricole le produit devenait plus raréfié, c'était finalement le consommateur qui devait payer.

Aujourd'hui, on n'a qu'à regarder l'expérience du plan conjoint des oeufs et le prix que l'on paie pour une douzaine d'oeufs en 1982 et vous allez vous rendre compte que c'est un prix stable et un prix juste. Récemment, on a vu une diminution dans le prix des oeufs à cause de la diminution du coût de production, chose qu'on ne voyait

pas auparavant. Moi, je pense que les plans conjoints sont arrivés pour y rester définitivement. C'est l'avenir de l'agriculture de type familial.

On doit voir à ce qu'on ait des lois assez sévères pour faire face à ceux qui ont toujours profité et de l'agriculteur et du consommateur, à ceux qui ont toujours fait la pluie et le beau temps dans le domaine de l'agriculture et qui continuent de le faire en mettant tous les obstacles possibles pour empêcher qu'on puisse mettre en application un plan conjoint. Par l'entremise d'une loi comme celle-ci, il faut voir à ce que cela cesse. Il faut voir à ce qu'un plan conjoint qui a été voté démocratiquement à un pourcentage, comme on l'a mentionné tantôt, de 74% tout près, ait le droit de s'administrer, ait le droit de poursuivre les buts pour lesquels on l'a voté. Ce n'est pas cinq, six ou dix personnes au Québec, peu importe l'état de leur fortune ou l'épaisseur de leur portefeuille, qui doivent empêcher un plan conjoint comme celui-là d'entrer en application pour le bien du producteur agricole et pour le bien du consommateur.

Moi, je dis merci au ministre de l'Agriculture d'apporter cette modification à la loi. J'espère, moi aussi, comme le député de Saint-Hyacinthe et comme le député de Beauce-Sud l'ont mentionné tantôt, que la loi va atteindre l'objectif pour lequel on l'a présentée. Quand on voit les trous qui ont été bouchés par cette loi, je pense bien que cela devrait régler la situation et, en même temps, je fais appel aux producteurs agricoles de continuer de se tenir à l'intérieur des plans conjoints, de se défendre et d'arrêter le plus possible, surtout dans le cas des producteurs de porc, de travailler à salaire pour une entreprise qui, plus souvent qu'autrement, les a exploités dans le passé. Avec les outils qu'on donne, avec les crédits agricoles, avec les possibilités qu'on offre à la ferme familiale de demain, je pense que le producteur agricole doit tout faire pour rester indépendant sur sa ferme. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Berthier.

M. Albert Houde

M. Houde: Merci, M. le Président. D'abord, cela me fait extrêmement plaisir cet après-midi de parler du projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles au Québec. D'abord, je peux vous dire une chose, comme mon collègue, le député de Champlain l'a mentionné tantôt, je m'y connais un peu dans la production agricole ayant été pendant plusieurs années vice-président des producteurs de chair de volaille de ma région, et vice-président de la Fédération des producteurs d'oeufs du Québec de ma région aussi.

J'ai toujours été favorable aux plans conjoints, d'abord pour une raison qui est bien simple: lorsqu'un plan conjoint est implanté et voté démocratiquement par une majorité de personnes qui en fait la demande, pour ma part, je suis toujours prêt à le respecter. En démocratie, c'est ainsi. Lorsqu'on parle de plan conjoint, surtout dans les oeufs, c'est depuis 1966 que le plan conjoint des oeufs existe au Québec. Heureusement, il existe non seulement au Québec, mais il existe aussi au Canada. Pourquoi je pèse bien mes mots lorsque je dis "au Canada"? C'est parce qu'il est national, et lorsqu'il est national, toutes les provinces en font partie et toutes les provinces doivent le respecter. Par la même occasion, lorsqu'il y a eu des efforts de faits pour que le plan conjoint des oeufs soit respecté et appliqué dans chacune des provinces à leur valeur à elles, c'était bien important, parce qu'il fallait tenir compte du coût de production.

Lorsque, dans un plan conjoint, nous tenons compte du coût de production, je peux vous dire, M. le Président, que tous les gens sont heureux. Pourquoi sont-ils tous heureux? Parce qu'on tient compte d'abord des investissements d'une personne dans ce domaine à l'intérieur de sa ferme, et c'est bien important. Comme mon collègue le mentionnait tantôt, on tient aussi compte d'abord du prix aux consommateurs et de la qualité. Quand un plan conjoint bien administré tient compte des prix et de la qualité, tous les gens sont heureux. Il peut y avoir des exceptions, mais je pense que c'est minime. D'abord, la perfection, nous ne l'aurons jamais, mais la majorité des gens est satisfaite.

Lorsqu'on parle d'un deuxième plan conjoint, qui est le "broiler", le "barbecue", le poulet à rôtir, comme on l'appelle en termes courants, c'est la même chose. Pourquoi cette deuxième production que les producteurs ont pris en main? C'est bien simple. Comme je vous le disais tantôt pour les oeufs, en tenant compte du coût de production, la personne qui est dans cette production peut s'en aller à son compte et se détacher graduellement de l'intégration. Je n'ai rien contre l'intégration, parce qu'il en a fallu, de l'intégration. Cela a permis à beaucoup de gens, ici au Québec, de se lancer dans cette production du poulet à rôtir. J'ai déjà été gérant d'une meunerie pendant cinq ans, et aussi propriétaire d'une meunerie. Pour plusieurs personnes, si elles n'avaient pas eu la chance d'avoir un contrat d'intégration, elles n'auraient jamais pu démarrer dans ces deux productions. Heureusement, il faut le reconnaître aujourd'hui, l'intégration a beaucoup aidé l'agriculture. Aujourd'hui, la majorité des

producteurs est à son compte. Je dirais merci à l'intégration qui leur a donné la chance de démarrer. Aujourd'hui, l'intégrateur vit bien, parce qu'il vend de la moulée et des grains, il est payé régulièrement. C'est quelque chose aujourd'hui. Le producteur qui est à son compte est heureux, il fait sa petite affaire à lui. (16 heures)

On a encore une autre production qui est le lait. Dans cette production, il n'y avait pas d'intégration, parce que les gens commençaient tranquillement, augmentaient leur troupeau et, à un moment donné, atteignaient une production assez importante pour pouvoir vivre bien à l'aise chez eux.

Une autre production, le porc, est celle qui fait le plus mal aujourd'hui. Heureusement, depuis quelques semaines, cela semble vouloir se replacer mais, si on recule de trois ans, ce n'était pas rose dans le porc. Je parlais avec un type hier soir, d'une paroisse de mon comté et deux producteurs de porc ont encore failli la semaine dernière. C'est pour vous dire qu'ils n'ont pas été capables de remonter la côte, et pas seulement à cause du taux d'intérêt, car le taux d'intérêt est le même pour tous les producteurs du Canada. Que je sache, cela ne dépend pas seulement d'un gouvernement si le taux d'intérêt est haut. Je n'aurais pas voulu faire de la petite politique cet après-midi. Il m'ouvre une porte, mais je ne tomberai pas dans le piège. Je ne "maganerai" pas le ministre de l'Agriculture cet après-midi, je vais le flatter un petit peu pour qu'on puisse adopter ce projet auquel on travaille ensemble cet après-midi et qui, je pense, pour les cultivateurs du Québec, va apporter certaines améliorations.

J'espère que le ministre ne s'en servira pas pour lui personnellement pour chatouiller un peu les producteurs ou peut-être quelqu'un qu'il n'aimerait pas trop. Je ne sais pas, cela peut arriver parfois, parce que, dans certains cas, il se dit: On va les faire languir un petit peu, les députés libéraux, quand on lui demande certaines choses. Ce ne sera peut-être pas cela dans ce cas! C'est à souhaiter. Je souhaite de tout coeur, pour le bien des cultivateurs du Québec, que le ministre ne tiendra pas rigueur aux producteurs qui, parfois, lui font certaines revendications ou certaines menaces, qui parlent un peu plus fort, qui crient un peu plus fort. Il pense qu'ils lui veulent du mal; au contraire, c'est du bien qu'ils lui veulent et, en même temps, c'est du bien pour eux.

Tout cela pour dire que le porc, avec le plan conjoint qui existe dans le moment, qui a été voté majoritairement, je le reconnais - je ne suis pas contre, M. le ministre... Bientôt, le plan conjoint du porc va valoir des sous. Dans le moment, il ne vaut rien; les gens pensent qu'ils auraient été plus heureux de ne pas en avoir du tout parce qu'il mangeait pendant un bout de temps de l'argent à la place. Je demanderais au ministre, s'il voulait se pencher pour regarder les quotas - le quota pour la poule pondeuse, le quota pour le poulet à rôtir et même le quota pour la vache laitière sont excessivement dispendieux - s'il n'y aurait pas moyen de donner une chance aux jeunes cultivateurs pour qu'ils puissent commencer. Le fils d'un cultivateur, lui, peut avoir une chance de continuer à exploiter la ferme du père. Que fait celui qui n'est pas fils de cultivateur et qui veut s'installer dans l'une ou l'autre des productions avec un quota qui vaut quelque chose? Ne parlons pas du porc, pour le moment, il ne vaut rien mais il va valoir quelque chose tout à l'heure, je l'espère. Pour les quotas qui sont excessivement dispendieux, il faudrait trouver une solution pour qu'ils soient moins dispendieux, non seulement l'achat mais aussi, à un moment donné, il va falloir qu'ils tiennent compte, dans leurs coûts de production, du quota; il va falloir qu'ils tiennent compte de cela. Des quotas coûtent 7 $ ou 8 $, dans le barbecue, et 15 $, 16 $, 17 $, 20 $, 22 $, dans la poule pondeuse. Je vous assure que si on parle du taux d'intérêt, comme mon collègue de gauche me le disait tantôt, le député de Saint-Hyacinthe, c'est dispendieux. Si on pouvait trouver un mécanisme, M. le ministre, je serais prêt à participer à l'étude qui pourrait être faite pour le bien de notre classe agricole du Québec. Vous voyez qu'on veut travailler ensemble pour le bien de notre classe agricole. Vous êtes peut-être surpris aujourd'hui, mais c'est vrai, ce que je vous dis.

De toute façon, je pense que mon temps achève, il ne me reste que quelques minutes. Lorsque je suis passé, il y a quinze jours, à Joliette, dans la région Laurentides-Lanaudière qui fait partie de mon comté, parce que, pour cette région, le bureau de l'UPA est à Joliette, on me demandait et on demandait à M. le député de Beauce-Sud, M. Hermann Mathieu, de faire des pressions auprès du ministre pour qu'il puisse présenter des projets de loi le plus vite possible. Je suis content aujourd'hui qu'il en dépose. Il en manque un, malheureusement, et c'est celui sur lequel ils ont insisté le plus. Ils ont dit: Pensez-vous que le ministre va déposer le projet de loi - c'était une promesse qu'il avait faite; il faut toucher un peu à la politique - pour aider le fils du cultivateur en lui prêtant 50 000 $? J'ai dit: Je vous garantis une chose, je vais lui faire la commission. J'en serais fier, M. le ministre, et je suis certain que, si le député de Joliette prenait la parole, il dirait la même chose. Il y a dans son comté des fils de cultivateurs. Son comté est un peu agricole aussi. Il vous demanderait de le déposer le

plus tôt possible.

Retenez cette chose-là, M. le ministre. Vous avez pris l'engagement dans votre promesse électorale - peut-être que vous vous êtes trompé ou nous avons peut-être mal compris, c'est possible - de consentir un prêt de 50 000 $ pour cinq ans sans intérêt. Si vous n'aviez pas inscrit un maximum de 20 000 $, je dirais: C'est bien. Mais je pense qu'il y a un obstacle lorsque vous parlez d'un maximum de 20 000 $. Cela veut dire aujourd'hui, tenant compte des taux d'intérêt assez élevés, que l'aide que vous apportez aux fils de cultivateurs va durer seulement deux ans. Il faudrait que vous enleviez cela. Enlevez cela et vous allez voir qu'on va voter avec vous.

Je vous dis, en terminant, que nous voterons avec plaisir pour le projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles du Québec. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre, votre droit de réplique.

M. Jean Garon (réplique)

M. Garon: M. le Président, je voudrais seulement relever quelques affirmations qui ont été faites dans le cadre du débat sur le projet de loi 77, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles. Le député de Beauce-Sud mentionnait que ce projet de loi avait pris de longs mois de préparation. . J'ai un peu de misère à m'ajuster au "timing" ou, si on veut, au...

Une voix: Tempo.

M. Garon: ... rythme du député de Beauce-Sud. Il me reproche souvent d'être trop vite, parfois d'être trop lent, mais jamais d'être à la bonne vitesse. Je suis content qu'il ait trouvé que nous soyons trop lents; cela empêche le Parti libéral de demander une motion de report. Nous pouvons maintenant adopter le projet de loi sans motion de report, sans débat qui dure éternellement. Je dois dire que c'est essentiellement durant les mois d'hiver, quand les producteurs agricoles, les éleveurs de porcs avaient de la difficulté à percevoir leurs cotisations syndicales, que j'ai déclaré -et le caucus, section agricole, des députés du Parti québécois a également fait une déclaration à cet effet - que, si la loi actuelle ne suffisait pas pour permettre aux agriculteurs, aux éleveurs qui avaient voté un plan conjoint selon la loi de percevoir leurs cotisations, il faudrait peut-être changer la loi pour leur rendre la tâche plus facile. Immédiatement, nous avons mis des gens à l'ouvrage. J'ai même demandé des suggestions à différents organismes agricoles, notamment à l'Union des producteurs agricoles, pour préparer ce projet de loi. Ensuite, cela a suivi le rythme normal, puisque, dès la fin d'avril, c'était déposé au Conseil des ministre. (16 h 10)

Maintenant, comme un projet de loi fait par un gouvernement du Parti québécois est toujours un projet de loi sérieux, un projet de loi comme celui-là doit être approuvé par le Conseil du trésor, par le Comité ministériel de développement économique, par le Comité de législation que préside brillamment le député de Sherbroke et ministre du Revenu, M. Fréchette. C'est seulement après tout ce cheminement - il y a également une consultation du caucus des députés responsables du dossier agricole -que le projet de loi est prêt à être déposé à l'Assemblée nationale. C'est pour cette raison qu'un projet de loi, pour être bien fait, doit franchir toutes ces étapes. J'ai été content de voir que le député de Beauce-Sud, qui m'en parlait pour la première fois il y a quelques jours, collabore à ce projet de loi.

Par ailleurs, j'ai remarqué que, dans ses propos, il avait été un peu incohérent. II a dit qu'il était d'accord sur le projet de loi, qu'il voterait pour. C'est ce que j'ai compris. Mais il a dit qu'il ne voulait pas que ce soit une loi pour la parade. Je ne comprends pas que le député de Beauce-Sud dise que ce peut être une loi pour la parade et, en même temps, dise qu'il est pour, puisque, ayant une formation juridique, étant notaire, il peut analyser le projet de loi et voir s'il est bon ou s'il n'est pas bon. S'il pense qu'il doit voter pour, c'est parce qu'il considère que le projet de loi est bon. Donc, s'il est bon, ce ne peut pas être un projet de loi pour la parade. Ce ne peut pas non plus être un projet de loi qui, comme l'a dit le député de Berthier, va servir essentiellement au ministre. Je ne peux pas tirer, de ce projet de loi, d'avantages personnels; c'est impossible. C'est un projet de loi essentiellement à l'avantage des agriculteurs pour faciliter la perception de leurs cotisations. Mais, évidemment, je souhaite que la perception de la cotisation soit une question réglée facilement.

Le député de Berthier a dit que les producteurs voulaient du bien au ministre. J'ai été content de l'entendre dire cela. Le plus grand bien qu'ils ont voulu au gouvernement, et ce indirectement, cela a été lors des dernières élections au Québec où, dans les comtés ruraux, les agriculteurs ont montré qu'ils voulaient que nous continuions le travail déjà amorcé au cours d'un premier mandat. En tout cas, je ne sais pas s'ils nous veulent du bien, mais ils veulent qu'on continue à travailler pour le bien des agriculteurs. J'ai été très content, personnellement, du résultat des élections. Il nous manque encore quelques comtés à vocation agricole, mais il ne faut pas faire

tout cela dans...

Une voix: La prochaine fois.

M. Garon: ... une même élection. L'ex-député de Louis-Hébert dirait qu'il faut procéder par étapes. Il nous reste encore une étape à franchir pour aller chercher les derniers comtés ruraux qui ne sont pas encore avec le gouvernement.

Le député de Berthier a dit également que les quotas dans le porc ne valent rien et qu'il espère qu'un jour, ils vaudront quelque chose. Ils ne peuvent pas valoir quelque chose, M. le Président, parce qu'il n'y a pas de quotas dans le porc. Il faudrait d'abord qu'il y en ait, mais il n'y en a pas.

J'ai trouvé un peu incohérent le fait qu'il souhaite qu'ils vaillent quelque chose et, peu de temps après, il se plaignait que les quotas dans le lait et dans le poulet coûtaient trop cher. Alors, il faudrait que le député de Berthier s'ajuste. Je comprends un peu mieux maintenant pourquoi le président de la commission politique du Parti libéral, Me René Dussault, disait qu'en matière agricole, le Parti libéral ne sait pas trop sur quel pied danser.

Des voix: Ah!

M. Garon: Je comprends un peu pourquoi maintenant parce que, en l'espace de cinq minutes, le député de Berthier a dit qu'il souhaitait que les quotas dans le porc vaillent quelque chose et, en même temps, il souhaitait qu'ils ne vaillent pas grand-chose dans le lait et dans le poulet. Là, il y a une certaine incohérence, M. le Président.

J'ai remarqué également que les deux députés ont mentionné qu'ils souhaitaient que le gouvernement du Parti québécois réalise sa promesse d'un prêt de 50 000 $ sans intérêt aux jeunes agriculteurs. Je me suis dit: De deux choses l'une: ou ils savent que le projet de loi est déjà inscrit au feuilleton ou ils ne le savent pas.

Une voix: II n'est pas déposé encore.

M. Garon: Je me suis dit: S'ils le savent, ils aimeraient en parler pour faire croire qu'ils le demandent pour essayer de se greffer un peu de crédit. En effet, ce matin, au feuilleton du vendredi 4 juin 1982, apparaît à l'article b) 3 juin. - M. Garon. -Loi favorisant l'établissement de jeunes agriculteurs. Cela veut dire que le projet de loi est dans les avis au feuilleton et si le Parti libéral est capable de digérer assez rapidement les projets de loi - ça semble aller bien cet après-midi - si ça va bien au début de la semaine prochaine également on pourra en déposer d'autres, mais si on les sent étouffés par les premiers, ça ne nous donnera rien d'en déposer trop. Si on sent qu'ils ont du souffle un peu, alors on va pouvoir déposer d'autres projets de loi et, personnellement, je suis persuadé que ce sera une bonne chose. Ils constateront, peut-être avec surprise, que le gouvernement du Parti québécois est toujours prêt, quand l'Opposition ne met pas les bâtons dans les roues, à procéder rapidement dans le domaine agricole.

Là, ils ne pourront pas dire que c'était un projet de loi dans les tiroirs, ils pourront dire que c'est sûrement un projet de loi neuf et l'avenir démontrera à quel point nous avons travaillé fort, au cours des derniers mois, pour déposer ces projets de loi.

Nous avons déjà la Loi sur les terres publiques agricoles, qui a été adoptée, et je vous dis que des milliers et des milliers d'agriculteurs, de personnes qui vivent dans les milieux ruraux bénéficieront de ce projet de loi que nous avons adopté récemment. Je sais à quel point des milliers de personnes ont hâte que nous ayons adopté la réglementation pour devenir propriétaires chez eux. Des milliers de personnes dans des dizaines, sinon des centaines, de familles du Québec deviendront propriétaires grâce à ce projet de loi, alors qu'elles restent sur des lots dont elles n'ont jamais été les propriétaires même si, dans certains cas, elles demeurent sur ces lots depuis 100 ans. C'était un projet de loi complexe.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Garon: Aujourd'hui, on dépose un autre projet de loi sur la mise en marché des produits agricoles et, à cause de ça, le budget a augmenté de façon importante, c'est-à-dire de 79 000 000 $ cette année. Le député de Beauce-Sud m'a ouvert la porte parce que je n'en aurais pas parlé, mais puisqu'il en a dit un mot j'aimerais juste lui dire qu'en 1971 les paiements de transfert dans le secteur agricole - c'est-à-dire l'argent qui ne servait pas au fonctionnement du ministère, qui ne servait pas à acheter du papier, des effaces, des crayons et à payer les fonctionnaires, mais l'argent qui allait directement aux agriculteurs - étaient de l'ordre de 45 000 000 $; cela allait aux bénéficiaires du ministère. En 1976, c'était 99 000 000 $; durant le • régime libéral de 1970 à 1976, 45 000 000 $. C'est passé de 45 000 000 $ à 99 000 000 $, donc une augmentation de 54 000 000 $.

De 1976 à 1982, c'est quoi? Cela passe de 99 000 000 $, en paiements de transfert, à 311 000 000 $ en 1982.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Garon: Ce qui veut dire, M. le Président, que ça va être quatre fois plus durant les six ans de pouvoir du Parti québécois qu'en six ans de pouvoir du Parti

libéral, dans le secteur agricole, en paiements de transfert aux agriculteurs; pas pour payer les effaces, les crayons ou du papier et des plans qui ne se feront pas. Cela veut dire, au fond, que le rôle d'un gouvernement, c'est de travailler sur deux plans, principalement. Pour un gouvernement, il y a trois choses: Avoir de bons députés qui font leur travail dans leur comté, avoir des lois - on propose aujourd'hui un nouveau projet de loi qui fera plaisir aux agriculteurs - et avoir de bons budgets qui permettent le développement économique du Québec.

Actuellement, au Québec, le budget du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation permettra de faire un développement économique accéléré en 1982, d'autant plus que le président du comité ministériel de développement économique annonçait que le premier ministre annoncera la semaine prochaine des montants additionnels dans des programmes d'emploi. Je suis convaincu que le premier ministre annoncera avec un grand plaisir des montants additionnels dans le secteur agricole, secteur pour lequel il a une préoccupation constante.

M. le Président, je ne voudrais pas être plus long, mais je veux dire simplement que je suis content que ce projet de loi ait pu passer rapidement le stade de la deuxième lecture. Je souhaite que nous passions le stade de la commission parlementaire avec la même célérité. Merci, M. le Président. (16 h 20)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que cette deuxième lecture du projet de loi no 77, Loi modifiant la Loi sur la mise en marché des produits agricoles, est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader adjoint du gouvernement.

Renvoi à la commission

de l'agriculture, des pêcheries

et de l'alimentation

M. Fréchette: M. le Président, compte tenu du programme dont nous avions convenu, je ferai maintenant une motion de référence pour l'étude du projet de loi article par article. Cela devrait se réaliser dans la même sérénité que celle qu'on a connue cet après-midi. À ce stade-ci, M. le Président, et conformément au programme...

Le Vice-Président (M. Jolivet): La motion de référence à la commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté.

M. Fréchette: Vous m'arrachez les mots de la bouche, M. le Président. Je me reprends, M. le Président, et je vous signale que, conformément au programme dont nous avions convenu, je ferai maintenant motion pour que l'Assemblée se transforme en commission plénière, que vous quittiez le fauteuil pour procéder à l'étude des crédits de l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. (Suspension de la séance à 16 h 23)

(Reprise de la séance à 16 h 25)

Commission plénière

Étude des crédits de l'Assemblée nationale

M. Jolivet (président de la commission plénière): La commission parlementaire de l'Assemblée nationale est à nouveau réunie en commission plénière en vue d'étudier les crédits de l'Assemblée nationale. Nous en étions rendus, lors des dernières discussions, à un survol global de l'ensemble des programmes. Nous allons donc continuer en ce sens et on adoptera à la fin les programmes comme tels. La parole est au président de l'Assemblée nationale.

Le rôle de la Sûreté du Québec au parlement

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, avant que les députés de cette Chambre puissent m'adresser d'autres questions, j'aurais une mise au point à faire à la suite de deux articles, l'un du Devoir du jeudi 3 juin 1982 et l'autre du Soleil de la même journée, relativement au rôle de la Sûreté du Québec lorsqu'elle est appelée à l'Assemblée nationale du Québec.

Pour être précis, pour être clair, j'aimerais redire ceci: Lorsque la Sûreté du Québec vient ici à l'intérieur des murs de l'Assemblée nationale du Québec, c'est parce qu'elle a été demandée par l'Assemblée nationale du Québec. Ce qui veut dire, en conséquence, que la Sûreté du Québec ne peut venir à l'Assemblée nationale du Québec sans que l'Assemblée nationale du Québec en ait fait la demande. Or, lorsque l'Assemblée nationale du Québec fait la demande pour

avoir certains policiers de la Sûreté du Québec, c'est parce qu'on a des raisons.

Le Devoir titre "Quand la Sûreté du Québec est appelée à l'Assemblée nationale, elle n'y a pas juridiction" et dans l'autre article, on dit essentiellement la même chose. Comme le whip de l'Opposition l'a fort bien dit, les agents ne viennent pas ici, lorsqu'ils sont demandés, pour regarder les portraits qui se trouvent dans la galerie des présidents. Ils ne viennent pas ici non plus pour admirer l'Assemblée nationale. Ils ne viennent pas ici essentiellement pour regarder nos travaux parlementaires, surtout pas ceux de ce matin, je l'espère. Ils viennent essentiellement parce que nous avons des motifs, comme je le disais, probables et raisonnables de penser que des événements pourraient survenir. Essentiellement, la Sûreté du Québec, à l'intérieur du parlement, lorsqu'elle est ici, c'est pour porter assistance, le cas échéant, au service de l'Assemblée nationale que nous avons, c'est-à-dire ceux qu'on appelle communément les constables de l'Assemblée nationale du Québec.

Je voulais apporter cette précision parce que ces deux articles laissaient entendre qu'on appelait la Sûreté du Québec, mais qu'une fois rendue ici, elle n'avait aucune juridiction. Effectivement, elle n'a pas juridiction totale, mais elle est ici pour venir essentiellement et éventuellement prêter main forte à nos agents s'il arrivait des choses extraordinaires.

Prenons seulement un exemple: II n'y a pas que les manifestations à l'extérieur du parlement. Il y a eu dernièrement la visite du premier ministre français. Les constables de l'Assemblée nationale du Québec - comme vous le savez - ne sont pas armés. Si on a jugé bon, de concert avec la direction du sergent d'armes et la direction des relations parlementaires qui s'occupe du protocole, de faire en sorte que certains agents de la Sûreté du Québec soient ici, c'était justement pour assurer une entière protection au cas où un citoyen, quel qu'il soit, aurait voulu s'en prendre soit à un député, soit au premier ministre québécois, soit au chef de l'Opposition, soit au député de Hull, soit au président de l'Assemblée nationale ou encore au premier ministre de la France.

Je tenais à faire cette précision qui, je pense, est importante. Là-dessus, je suis tout à vous, messieurs de l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président (M. Jolivet): Sur cette question, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, étant donné que j'ai une intervention à faire et plusieurs questions à poser concernant les services de sécurité de l'Assemblée nationale, je vais, par déférence pour mon collègue, le whip en chef du gouvernement, lui passer la parole. Cependant, très brièvement, je me permettrai de faire part de façon bien sereine au président de l'Assemblée, et peut-être un peu en boutade, qu'en ce qui concerne la protection du premier ministre de la République de France, M. Mauroy, j'ai l'impression que la seule agression physique à laquelle il a failli être victime, c'est lorsque le ministre Laurin a failli s'enfarger dedans en passant, mais, à part cela, cela a bien été.

Le Président (M. Jolivet): M. le whip du gouvernement.

Travaux d'impression pour les députés

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je pensais que le whip en chef de l'Opposition prenait la parole pour parler de la protection de son propre chef. Je vais changer de sujet immédiatement.

Je voudrais purement et simplement demander au président de l'Assemblée nationale, parce qu'il y a eu une question posée par le député de Deux-Montagnes, qui a parlé de la reproduction ou l'impression ou la photocopie à l'Assemblée nationale qui devenait difficile dans certains cas... C'était passablement discrétionnaire, la façon de juger de la partisanerie ou de la non-partisanerie des documents que nous avions à faire imprimer. (16 h 30)

De part et d'autre, autant du côté de l'Opposition que de notre côté, nous recevons, en tant que whip, plusieurs plaintes de nos propres députés. Nous aimerions savoir s'il est dans votre intention de nous produire, premièrement, un canevas avec des hypothèses de travail, des hypothèses de définition de ce qu'est la partisanerie dans votre conception comme gardien de l'Assemblée nationale. C'est à partir de vos hypothèses que nous pourrons vous faire des recommandations précises, parce que, si vous nous demandez une définition, ce ne sera pas tellement long. Je pense bien que, dans l'espace de vingt minutes, le whip de l'Opposition et moi-même pourrions vous en concevoir une, ce qui ne fera pas nécessairement l'affaire du président de l'Assemblée nationale et de son équipe.

Je pense que, comme procédure, nous préférerions que vous nous fournissiez ce genre d'hypothèse et nous la critiquerions, comme représentants, avec diligence, pour faire en sorte que nos députés cessent de se plaindre. Il est assez frustrant pour un homme politique élu de se voir refuser, avec toute la gentillesse que peuvent avoir les fonctionnaires, mais c'est jugé d'une façon partisane. Je comprends que, quand il y a des heures et des dates de convocation ou

des invitations à des financements, par exemple, on puisse définir des cas précis de partisanerie, mais s'adresser à des électeurs en annonçant des réalisations ou en donnant de l'information qui peut être jugée partisane, je pense que nous avons été élus avec des options précises de part et d'autre, avec des programmes précis de part et d'autre. Nous aimerions avoir une définition claire et précise de votre conception de la partisanerie face à l'impression de documents et, si vous avez la chance de le dire également, le moment précis où vous pourriez nous fournir ce type de définition pour qu'on puisse en saisir nos caucus réciproques et vous donner, par la suite, nos observations.

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous comprendrez, M. le Président, qu'il est difficile pour l'impartialité de dire ce qu'est la partisanerie. Quoi qu'il en soit, j'aimerais redire...

M. Chevrette: Je voulais parler de votre conception.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... c'est une boutade en passant - au député de Joliette, qui est le whip en chef du gouvernement, qu'il y a plusieurs mois déjà, ce que j'ai eu l'occasion de dire d'ailleurs mercredi, nous avons fait parvenir aux deux whips des partis politiques représentés à l'Assemblée nationale un rapport qui avait été fait par la Direction générale des communications d'alors, demandant aux deux caucus de faire l'étude de ce document et de nous faire connaître leurs commentaires pour qu'on puisse justement adopter une politique relativement à la reprographie. Or, j'ai dit au whip de l'Opposition et à ceux qui étaient présents -d'ailleurs, je me réjouis de voir qu'il y a beaucoup plus de députés aujourd'hui qui s'intéressent aux crédits de l'Assemblée nationale que mercredi dernier - et je leur redis que, dès lundi, nous allons faire parvenir aux deux whips un projet dans lequel plusieurs hypothèses seront soumises. Je compte sur la collaboration des deux whips pour que ces hypothèses soient étudiées dans leurs caucus respectifs dans les meilleurs délais possible afin que, lors de la prochaine session, qui va s'ouvrir à l'automne 1982, à une date que j'ignore, nous soyons en mesure d'avoir tout d'abord les commentaires des formations politiques et ensuite d'adopter une politique qui aille dans le sens des revendications exprimées par les deux partis politiques qui représentent en fin de compte les 122 députés de l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.

La sécurité à l'Assemblée nationale

M. Pagé: Merci, M, le Président. Brièvement, cette semaine, lorsque nous avons amorcé l'étude des crédits de l'Assemblée nationale, le président a eu l'occasion de formuler des commentaires et de répondre à des questions concernant les services de protection.

Cette année, les parlementaires ont été à même de répondre à une invitation qui a été formulée par une première personne qui était mandatée par le président de l'Assemblée nationale pour revoir toute la question de la sécurité. Un rapport a été déposé au président et le président de l'Assemblée nationale du Québec a formé un comité avec les intervenants dans différents services de l'Assemblée nationale pour voir les suites à donner à ce rapport.

M. le Président, vous aurez certainement compris que, par mes remarques de mardi ou mercredi de cette semaine, j'ai demandé et j'ai même insisté -aujourd'hui, je me permets de le réitérer -pour que l'Assemblée nationale puisse être dotée, dans les plus brefs délais possible, d'un service de sécurité qui soit mieux structuré, dont les objectifs seront mieux identifiés et la juridiction mieux établie.

Le président de l'Assemblée nationale a fait référence au document que je lui ai fait parvenir, parce que, à cet égard, le président avait demandé aux deux whips des deux formations politiques de lui faire part de leurs commentaires. Je voudrais lui réitérer mes commentaires ici. Je ne lirai pas le document que je lui ai fait parvenir et qui a plusieurs pages, mais je lui réitérerai essentiellement les treize recommandations que je lui formulais. Tout d'abord maintenir un corps constabulaire spécifique à l'Assemblée nationale du Québec. Les députés libéraux affirment que, dans son mandat, la première responsabilité de ce corps constabulaire serait d'assurer la sécurité des personnes et des biens de l'Assemblée nationale du Québec. Confier, si besoin en est, l'aspect accueil aux différentes portes de l'Assemblée nationale aux services spécifiquement créés pour l'accueil des gens à l'Assemblée nationale. On sait que, bien souvent, la démarcation entre l'aspect accueil et l'aspect sécurité du travail, qui est confié aux constables de l'Assemblée, est peut-être difficile à faire. Réévaluer les normes de formation, d'entraînement, de sélection et de promotion du corps constabulaire de l'Assemblée nationale du Québec. Quelles sont les normes actuellement? M. le Président pourra tout à l'heure nous donner les paramètres sur lesquels s'appuient ceux qui ont à établir des

promotions à l'intérieur de ce corps constabulaire, mais on doit vous dire que des commentaires ont été portés à notre attention et même des constats, dans certains cas, qui nous permettent de soulever la question aujourd'hui. S'assurer que les équipements fournis au corps constabulaire pour remplir son mandat seront non seulement adéquats, mais régulièrement réévalués. Le président disait, tout à l'heure, que les policiers de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les gardiens et les constables, n'étaient pas armés. Si, un jour, à défaut de voir tous les constables armés, un nombre minimal de ces derniers doivent l'être, ce devra être décidé. Ce sera peut-être la meilleure façon, à cet égard, d'éviter de recourir, avec juridiction ou non, à la Sûreté du Québec qui arrive avec armes et bagages, comme on dit dans le jargon. On voit entrer souvent ces policiers avec leur poche de hockey, et cela contient matraque, bombe lacrymogène, casque, fusil, etc.

Confier au corps constabulaire de l'Assemblée nationale juridiction entière et exclusive sur l'ensemble de la colline parlementaire, c'est-à-dire dans les édifices relevant de l'Assemblée nationale et portant tant sur la sécurité physique des personnes et des biens que sur la surveillance. Incidemment, conférer des pouvoirs précis d'investigation et d'enquête à ce corps constabulaire.

Profiter des modifications prochaines qui seront apportées à la Loi sur la Législature pour affirmer clairement que tous les pouvoirs de contrôle de la sécurité physique et matérielle seront placés sous la juridiction du président de l'Assemblée nationale de façon que la situation qui prévaut actuellement, où on a ce qu'on appelle les hommes en gris, relève du ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement. Un certain nombre de personnes peuvent relever des services de sécurité du ministère de la Justice et, dans certains cas même, de la Sûreté du Québec qui est ici.

Confirmer dans les faits qu'aucun autre corps constabulaire et policier n'a aucune juridiction ni pouvoir quelconque sur le territoire délimité de l'Assemblée nationale du Québec, sauf à la suite d'une demande expresse du président de l'Assemblée nationale lequel, dans de telles circonstances, pourrait se référer à des avis exprimés non seulement par le premier ministre ou le ministre de la Justice, mais aussi par des représentants des différentes formations politiques. À notre avis, la juridiction devrait être, comme je vous le disais tout à l'heure, totale et exclusive, et c'est seulement dans des cas précis et dans des cas de force majeure que le président pourrait recourir à une aide de la Sûreté du Québec.

Exercer un contrôle plus strict sur les personnes qui accèdent au parlement. Je pense que tout le monde en est conscient. Si le contexte budgétaire le permet, analyser la possibilité d'étudier les avantages et les désavantages de se doter, comme c'est le cas dans d'autres parlements et dans d'autres édifices publics, d'un système de télévision en circuit fermé pour les espaces publics avec console et contrôle central. On sait que c'est un immeuble qui n'est pas jeune. On sait que c'est un immeuble qui a plusieurs voies d'accès et, à cet égard, il serait certainement possible d'améliorer, techniquement, les outils dont on a besoin pour atteindre ces objectifs.

Revoir complètement toute la politique, si politique il y a, d'attribution des clés et des passe-partout. J'aimerais savoir s'il y a une politique d'attribution des clés et des passe-partout. (16 h 40)

Confier, dans les plus brefs délais, un mandat spécial au service d'enquête de notre corps constabulaire d'élucider le nombre toujours élevé de vols d'argent ici. Je pense que c'est un constat ici. Trop souvent, malheureusement, des choses s'envolent dont, notamment, de l'argent. Je ne parle pas de l'argent des contribuables. Je parle de personnes travaillant au parlement qui, malheureusement, comme partout ailleurs, se font voler leur argent.

En attendant que les conclusions de votre étude soient arrêtées et mises en vigueur, s'assurer que la Sûreté du Québec ne puisse entrer et exercer quelque pratique que ce soit à l'Assemblée nationale sans le consentement exprès et signé du président de l'Assemblée nationale.

C'était là l'essentiel de nos recommandations. Je suis persuadé - je ne pense pas avoir besoin de soulever la question - que le comité qui a été formé par le président va en tenir compte.

Ce que j'aimerais savoir, c'est ceci: Dans quel délai ce comité sera-t-il habilité à déposer son rapport? Une fois que le rapport de ce comité sera déposé, dans quel délai peut-on s'attendre que des suites concrètes y soient données?

Je dois immédiatement, cependant, formuler au président de l'Assemblée nationale ma surprise de constater qu'aucun représentant du corps constabulaire ne soit présent à ce comité. On sait que trop souvent j'ai parlé d'un problème d'identification d'objectifs, d'un problème de mandat précis. J'ai vu, et j'étais peiné de les lire dans les journaux la semaine dernière, des articles remettant en cause même l'utilité des hommes en bleu, ici au parlement. C'était même titré "88 nullités?", avec un point d'interrogation, cependant. Je suis persuadé que ces gens-là sont franchement déterminés à bien travailler, sont franchement déterminés à gagner leur

salaire dans leur vécu quotidien, mais il semble y avoir un problème profond d'orientation. Ces gens-là sont certainement utiles à l'Assemblée nationale et peuvent certainement l'être plus. Encore faudra-t-il que les paramètres de leur travail, de leur mandat et de leur juridiction soient mieux définis. Sans vouloir vous formuler aujourd'hui un plaidoyer en faveur des hommes en bleu, je dois vous demander de prendre acte de notre ferme conviction que ces gens-là sont utiles, font un bon travail. Ils sont susceptibles de faire un meilleur travail, mais encore faudrait-il déterminer les objectifs et l'encadrement nécessaire.

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): II serait un peu long d'entrer dans tous les détails. Ce que je peux dire au whip de l'Opposition et à tous les députés de cette Assemblée nationale, c'est que, tout d'abord, le rapport qu'on appelle le rapport Auger, qui m'a été remis vers le mois de novembre 1981, je pense, a fait l'objet de nombreuses consultations. Les hommes en bleu, comme on les appelle, ont été eux-mêmes consultés et, à la suite du dépôt de ce rapport, les principaux hauts fonctionnaires de l'Assemblée nationale, le président, de même que le sergent d'armes, M. Jalbert, et le chef de la sécurité, M. Marois, étaient présents et nous avons tous pris connaissance ensemble du rapport qu'on appelle maintenant le rapport Auger.

Le rapport Auger contient au-delà de 140 pages. La conclusion qu'on en a tirée a été de demander justement à la Direction générale des services parlementaires, qui est représentée ici par M. Pierre Duchesne, et, donc, à la Direction du sergent d'armes, de travailler ensemble, à la suite du consensus qui s'était fait autour de la table après avoir discuté le rapport Auger, pour nous présenter, dans les meilleurs délais, ce qui serait éventuellement notre nouvelle politique de sécurité.

Ce rapport m'a été remis en mars ou avril 1982, je pense, et c'est le rapport que j'ai ici devant moi qui est divisé en quatre grandes parties. Tout d'abord, les principes directeurs qui doivent orienter la nouvelle politique de sécurité et, enfin, le modus operandi qui se divise lui-même en trois: des avis, des directives et les procédures qui doivent nous guider non seulement pour la sécurité, mais également au niveau du décorum. J'ai devant moi le document que le whip de l'Opposition m'a fait parvenir le 24 novembre 1981. Sans aller dans les détails, je peux dire au whip de l'Opposition que plusieurs des treize recommandations très précises qui étaient faites et qui sont faites dans sa lettre du 24 novembre 1981 font partie et vont faire partie des principes directeurs de cette nouvelle politique de sécurité qui devrait être en vigueur pour l'ouverture de la prochaine session à l'automne 1982. Évidemment, il y a certaines choses qui ne pourront être faites. Exemple, au niveau technique: Est-ce qu'on aura une caméra à une certaine porte? Je ne suis pas sûr qu'en novembre 1982, toute la politique sera appliquée. Mais les grands principes directeurs de votre lettre qui font partie de la politique sont généralement maintenus. Prenons l'exemple au niveau des clés des serrures; effectivement, dans les principes directeurs, on donne le pouvoir à quelqu'un d'être justement le responsable de ce système de clés parce que parfois on se rend compte qu'il y a plusieurs personnes qui ont des clés qu'elles ne devraient pas avoir. Il y a quelqu'un qui aura le contrôle sur les clés. De nouvelles serrures seront sûrement installées dans l'hôtel du Parlement, un contrôle strict et sévère aura lieu sur lesdites clés, de telle sorte que je puis dire, sans aller plus loin... Parce que je pourrais vous lire les quatorze ou treize principes directeurs qui m'ont guidé; on a presque fini l'étude du document.

Nous en sommes maintenant rendus, il nous reste peut-être une dizaine de pages à étudier sur la politique de sécurité. Je pourrais vous lire, si vous voulez, cela prendrait peut-être plusieurs minutes, les principes directeurs qui m'ont guidé dans cette politique de sécurité. Je pense que le whip de l'Opposition a certainement été un peu loin, je pense, involontairement, en disant que les gens de la sécurité n'ont pas participé à ce travail. Au contraire, les constables eux-mêmes, le chef de la sécurité, la direction du sergent d'armes ont participé...

M. Pagé: Je m'excuse, M. le Président, vous m'avez certainement mal interprété. Ce n'est pas grave. Vous avez un comité actuellement qui doit donner suite au rapport Auger.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, c'est que le comité qui est formé du secrétaire général, du directeur général des services parlementaires, de M. Drolet, de M. Audy et de moi-même, n'étudie pas le rapport Auger. Le rapport Auger a été étudié par l'ensemble des hauts fonctionnaires de l'Assemblée nationale accompagnés des gens de la sécurité, c'est-à-dire de M. Jalbert et de M. Marois et, à la suite de ce rapport Auger qui, en fait, a fait l'objet de consultations même auprès des constables de l'Assemblée nationale, on a fait un tour de table, parce que chacun avait pris connaissance du rapport Auger. On a demandé à la Direction générale des services parlementaires, dont fait partie le sergent d'armes, dont fait

partie le chef de la sécurité, à partir du consensus ou des idées directrices qui s'étaient dégagées autour de cette table où on était au moins douze, treize ou quatorze personnes, de nous présenter, à la suite du rapport Auger, un document synthétique qui serait une politique de sécurité. Donc, le document que j'ai devant moi sera essentiellement ceci. Ce n'est pas le rapport Auger. C'est la politique de sécurité telle que vue et préparée, à la suite du rapport Auger, par le sergent d'armes, le directeur général des services parlementaires et le chef de la sécurité. Donc, je veux réitérer le fait que la Direction générale des services parlementaires, que les hommes responsables du service de la sécurité ont travaillé énormément à la politique de sécurité et qu'il faut faire la distinction entre le rapport Auger et la conséquence du rapport Auger qui est justement la politique éventuelle de sécurité qui se trouve dans ce livre bleu.

Le Président (M. Jolivet): Est-ce que nous passons au programme?

M. Pagé: Question, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le whip.

M. Pagé: Quels sont les efforts qui sont déployés, qu'est-ce qui se fait en matière de formation de nos agents, de nos constables et comment cette formation est-elle tenue à jour - c'est le premier élément de ma question - et aussi les promotions?

Le Président (M. Jolivet): M. le Président. (16 h 50)

M. Vaillancourt (Jonquière):

Effectivement, je pense que vous venez de toucher un point faible de notre actuelle politique de sécurité. Vous avez dit avec raison tout à l'heure que nous avions des hommes capables de faire du travail, compétents pour faire du travail, à condition qu'ils aient une politique à suivre. Or, on doit dire que, sans porter préjudice à qui que ce soit qui travaillait dans ce domaine, on peut dire que c'était presque un laisser-aller total, parce qu'il n'y avait pas de directives. Il n'y avait pas de principes directeurs. Il n'y avait pas de ligne générale dans la sécurité, mais l'un des points faibles, justement, était non seulement le perfectionnement, mais la formation. Il y en a eu dans le passé. Cela a été négligé au cours des dernières années, mais on peut dire que l'un des principes directeurs de la nouvelle politique de sécurité sera, justement - l'un des treize ou quatorze que je voulais vous lire tout à l'heure - cette formation, ce perfectionnement continuel et régulier de nos hommes en bleu, de nos constables, afin que, non seulement sur le plan de la sécurité, mais sur le plan du décorum, l'Assemblée nationale soit, pour les visiteurs, quels qu'ils soient, un endroit où il est sécuritaire de venir et où il est agréable de venir. Donc, sécurité mais aussi décorum font partie de cette politique de sécurité que j'appellerais une politique de sécurité et de décorum à l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président (M. Jolivet): J'appelle le programme...

M. Pagé: Promotions.

Le Président (M. Jolivet): Les promotions, M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): En ce qui concerne les promotions, c'est le ministère de la Fonction publique. Ce sont des concours normaux par voie d'affichage, de demande d'emploi, jury et ainsi de suite. Donc, aucune promotion discrétionnaire, que ce soit de la part du supérieur immédiat, du directeur général ou du président. Ce sont des concours normaux de la fonction publique qui s'appliquent à ces personnes.

Le Président (M. Jolivet): Pouvons-nous passer au programme no 1? M. le député de Hull.

M. Rocheleau: Je voudrais simplement demander au président si ces gens - on les appelle les hommes en bleu, nos agents de sécurité - ont une accréditation syndicale particulière ou s'ils relèvent d'une accréditation syndicale comme les cols blancs.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, ils ont une accréditation, mais ils sont en train actuellement de se regrouper éventuellement dans un autre syndicat. Vous savez qu'il y a plusieurs syndicats des agents de la paix au Québec. On a eu certaines visites à l'Assemblée nationale à l'automne 1981. Ils sont accrédités. Ils ont une accréditation, mais, actuellement, ils sont en voie, éventuellement, de se regrouper autrement.

M. Rocheleau: Le président a-t-il été saisi de certaines demandes sur la possibilité d'une accréditation syndicale ou de sortir d'une certaine accréditation?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non. Les hommes en bleu ne m'ont jamais adressé personnellement la parole sur ce sujet précis que vous mentionnez, à aucun moment. Ils sont venus me voir pour d'autres raisons, mais pas pour leur allégeance syndicale.

M. Rocheleau: II est bien évident qu'on entend toujours parler de certaines choses et

il y en a parfois qui profitent de l'occasion pour formuler certaines plaintes et passer des messages. Il semblerait qu'il y aurait certaines difficultés quant à savoir au juste de qui ils relèvent.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le whip de l'Opposition l'a soulevé et les journaux en ont fait mention. Effectivement, l'un des problèmes majeurs à cette direction de la sécurité était: Qui est en charge de qui? Qui est le supérieur immédiat? Dans cette politique de sécurité, on essaie de dire: Telle personne aura tel mandat et tel autre. Les choses seront claires une fois pour toutes, alors qu'actuellement, parfois c'est le supérieur immédiat, parfois c'est le directeur général, parfois c'est le secrétaire général et parfois c'est le président. On va comme le vent nous envoie, en fin de compte, alors qu'à l'avenir, il va y avoir une politique ferme où les mandats précis des personnes qui sont là seront très clairement déterminés et les personnes sauront à qui aller adresser leurs demandes ou faire leurs reproches si elles en ont à faire.

M. Rocheleau: Parfait! Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui?

M. Pagé: Une dernière question sur la sécurité avant qu'on passe au programme 1, élément 1. Le président pourrait-il nous indiquer le nombre, pour le dernier exercice financier, de demandes d'enquête qui ont été déposées au service, dans combien de cas ces demandes d'enquête ont donné suite à une investigation et combien de poursuites ont résulté des enquêtes et des investigations? C'est une question bien importante.

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je m'excuse de ne pas être en mesure de répondre très directement à l'heure actuelle à la question qui est posée, parce qu'elle est de nature statistique, mais... On n'est pas en mesure de donner la réponse. En fait, j'aurais encore à vous lire un document qui comprend toutes sortes de choses sur le service de sécurité. En ce qui concerne les questions précises, il me faudrait quelques minutes pour, justement, demander à quelqu'un de faire des relevés statistiques sur ce que vous me demandez là. J'ai un document ici très général sur les opérations du service de protection. Il faudrait nécessairement que je le regarde de façon détaillée pour répondre.

M. Pagé: D'accord.

M. Vaillancourt (Jonquière): Parce que je peux vous dire combien il y a eu de demandes pour la sécurité, combien il y a eu d'alertes à la bombe, combien il y a eu de vérifications de faites, combien de bombes on a trouvées.

M. Pagé: Combien? En avez-vous trouvé?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non.

M. Pagé: On n'en parlera pas, cela peut donner des idées à du monde, un vendredi après-midi comme cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Combien d'objets variés sont sortis de l'hôtel du Parlement. La question était peut-être...

M. Pagé: La question est bien particulière et elle est bien spécifique. Je comprends que vous ne puissiez nous donner une réponse tout de suite, sauf que vous pouvez prendre le temps qu'il faut pour la donner. Au sein des services de sécurité, nous avons les patrouilleurs, nous avons les constables qui vaquent aux occupations de surveillance et d'accueil. Il y a aussi un service de sécurité, un service d'enquête. Il y a des enquêteurs dans cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): À ce que je sache, lorsque...

M. Pagé: Si vous me le permettez, M. le Président, je vais terminer. Combien de demandes d'enquêtes ont été formulées, combien y a-t-il eu d'investigations à la suite de ces demandes d'enquêtes et combien de poursuites ont été prises, combien de dossiers ont été transmis à la Sûreté du Québec à la suite de ces investigations?

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je prends avis de la question. Je m'engage, si ce n'est pas avant 18 heures, du moins dans les meilleurs délais, à donner la réponse précise au whip de l'Opposition. Ce que je peux dire, c'est qu'au moment où on se parle, d'abord, on ne peut pas poursuivre nous, ici, à l'Assemblée nationale. On peut faire des enquêtes internes, mais on n'a pas de pouvoirs d'investigation. S'il y a des plaintes qui ont été portées, elles ont été portées à la Sûreté municipale de Québec. On va essayer de vérifier combien de plaintes ont été portées, d'abord à la Direction du sergent d'armes, combien le sergent d'armes en a acheminé à la Sûreté municipale de Québec, à combien les procureurs de la Sûreté municipale de Québec ont-ils jugé bon de donner suite et, éventuellement, est-ce que ces plaintes ont conduit à des

condamnations ou à des acquittements?

M. Pagé: D'accord.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est essentiellement la question?

M. Pagé: Ce que je veux avoir, c'est tout le tableau, combien de demandes d'enquêtes. Supposons qu'il y a un vol d'argent ou de documents dans un bureau donné, c'est évident que la personne s'adresse au service de sécurité.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pas toujours.

M. Pagé: La personne qui est au service de sécurité et qui y va, ce n'est pas nécessairement le gars qui est au coin de l'ascenseur. C'est un constable. À ma connaissance, ils sont deux ou trois qui ont le mandat de faire des enquêtes. Je voudrais savoir combien de demandes d'enquêtes, combien d'enquêtes et combien de recommandations et, de ces recommandations, combien ont donné suite à des poursuites comme telles.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'accord. Je prends avis de votre question. Je la comprends très bien. On va essayer de vous donner une réponse le plus vite possible. Vous comprendrez, je m'en excuse, qu'elle est très mathématique et, dans ce sens, je suis incapable d'y répondre de façon précise.

M. Pagé: Merci, M. le Président.

Traitements et allocations des députés

Le Président (M. Jolivet): Nous pouvons donc appeler le programme 1.

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Jolivet): Programme 1? M. le Président, avez-vous des choses à dire sur le programme 1?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non.

Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Deux choses. À l'égard des allocations des députés, j'aimerais m'informer du degré d'avancement du dossier dans lequel étaient consignées les différentes possibilités qui pourraient s'offrir aux députés sur le personnel de comté par rapport au personnel du parlement. On se rappellera qu'avait déjà été évoquée la possibilité que les députés, les membres de l'Assemblée nationale bénéficient d'une enveloppe globale leur permettant de donner la rémunération à leur personnel de comté et aussi au personnel du parlement. Je voudrais savoir où cela en est rendu et dans quel échéancier on pourra avoir des réponses précises.

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je me rappelle fort bien avoir fait parvenir aux deux whips - encore une fois, parce que je ne m'adresse pas toujours à l'ensemble des députés, je me dis que, lorsque je parle aux deux whips, je parle à l'ensemble des députés - un document où quatre hypothèses étaient envisagées par le ministère des Travaux publics relativement, tout particulièrement, aux bureaux de comté. Je me rappelle avoir eu une réponse sinon écrite, du moins verbale du whip de l'Opposition en ce qui concerne... Je pense qu'elle était écrite... Je ne sais pas si elle était écrite ou verbale, mais je me rappelle sa réponse. (17 heures)

M. Pagé: Écrite.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'autre part, le whip du gouvernement n'est pas ici et, à ma connaissance, je n'ai pas eu de réponse de sa part encore. Je sais que le comité Bisaillon, d'après son mandat, semblerait devoir étudier cette question, mais en ce qui concerne le président lui-même ou l'Assemblée nationale elle-même, en ce qui me concerne, j'essaie de faire des changements lorsque je me rends compte que ces changements ou ces hypothèses rallient l'appui, l'accord ou un genre de consensus des partis politiques. C'est ma politique non seulement dans ce domaine, mais dans l'ensemble des domaines qui relèvent de ma compétence.

Or, à l'heure actuelle, j'attends la réponse du parti ministériel dans les meilleurs délais et, si elle est semblable à celle que me fait parvenir l'Opposition, je suivrai, comme c'est généralement mon habitude, le consensus des partis politiques et ce sera le statu quo qui s'appliquera.

M. Pagé: D'accord. M. le Président, il y avait deux questions. Il y avait la question des bureaux physiques de députés. On se rappellera que les Travaux publics sont encore venus se pointer le nez dans ce décor parlementaire, chose, selon moi, à laquelle il ne devrait pas avoir affaire. Le ministère des Travaux publics nous est arrivé avec un projet d'aménagement physique des bureaux des députés dans les 122 comtés du Québec où on aurait la reproduction d'un bureau de ministres, ou à peu près, avec salle de conférence, etc. Nous avons répondu non et j'ose espérer que le whip en chef du gouvernement va répondre dans le même sens. Cela n'avait tout simplement pas de

bon sens. C'est en ce qui concerne les espaces physiques.

Ce à quoi j'ai fait référence, c'est qu'on a déjà évoqué la possibilité, en termes budgétaires, pour le personnel que soit refondues les deux enveloppes qu'on a, c'est-à-dire le traitement, l'allocation donnée à la secrétaire du député au Parlement et les enveloppes pour le personnel du bureau de comté, que tout cela soit refondu comme c'est le cas d'ailleurs à la Chambre des communes à Ottawa.

M. Vaillancourt (Jonquière): On a eu une réunion de régie interne, je ne sais pas trop quand, à l'automne 1981, sur ce sujet précis de regrouper les deux masses et de laisser le député entièrement libre de faire les distributions qu'il voulait. Si ma mémoire est fidèle, les commissaires de la régie interne ont rejeté cette façon de procéder et ont décidé de donner à chacun des députés une enveloppe salariale pour sa secrétaire de district ou ses secrétaires de district et de laisser le personnel secrétaire de l'Assemblée nationale dans le système actuel. Je me rappelle fort bien, je ne sais pas trop la date, mais c'est à la suite de la réception de votre lettre ou de vos réponses, que j'ai soumis cela à la commission de régie interne et c'est là justement qu'à ce moment on a, pour une première fois, haussé la masse salariale des députés selon leur catégorie pour les secrétaires de district et que, d'autre part, on a laissé les secrétaires de l'Assemblée nationale dans le système qui leur est propre. Cela a été refusé à une commission de régie interne. C'est donc le statu quo en ce qui concerne cette question, mais il y a eu, je pense, une ou deux hausses depuis ce temps en ce qui concerne les secrétaires de district, selon le genre de comté que le député représente.

Le Président (M. Jolivet): Sur la même question, M. le député de Deux-Montagnes.

M. Vaillancourt (Jonquière): À l'avenir, ce sera le bureau qui étudiera ces questions. Vous y serez?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais dire que, quant à moi, je suis tout à fait d'accord avec les propos que le député de Portneuf a tenus il y a quelques instants à propos de nos bureaux de circonscription. Je ne vois pas de raison de changer le système actuel. Je pense que les députés sont parfaitement capables, à l'intérieur des limites qui sont fixées, de choisir leur bureau de circonscription. C'est un petit travail administratif qui ne dépasse pas nos capacités et je me méfierais beaucoup d'une intervention massive d'un ministère, quel qu'il soit, les Travaux publics ou n'importe quel autre, qui nous uniformiserait, qui nous passerait tous dans le même moule. J'appuie les propos du député de Portneuf sur cette question.

Quant à notre personnel de comté, il y a une enveloppe pour les traitements, qui a été augmentée. On pourrait discuter à savoir si elle est suffisante, mais il y a autre chose, c'est que ce personnel de comté n'a aucun avantage social et n'a pas droit à un remboursement des frais qui sont encourus par le travail. Ce n'est peut-être pas aussi grave dans toutes les circonscriptions, mais je suis sûr qu'il y a beaucoup de circonscriptions où le ou les secrétaires de comté ont à faire des déplacements et ils n'ont droit à aucun remboursement pour ces frais. Je pense qu'il y a là une injustice. Je ne vais pas réclamer qu'on donne à nos secrétaires de comté tous les avantages de la fonction publique, mais je pense que, quand même, nous pourrions examiner certains des aspects de leurs conditions de travail. Ils n'ont aucune sécurité. Ils n'ont aucun remboursement de frais. Ils n'ont aucun avantage social. Je pense que cette situation laisse à désirer. Quant à moi, je souhaite vivement que ce soit examiné de près de façon à faire atteindre un plus grand degré de justice à ces employés qui nous sont extrêmement dévoués. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Deux-Montagnes, il est vrai que les secrétaires de district qui ne font pas partie d'un cabinet politique, parce que ce ne sont pas tous les députés qui ont un cabinet politique, n'ont pas énormément d'avantages sociaux. Par contre, j'aimerais quand même dire qu'il y a eu des améliorations tangibles de ce côté. Premièrement, ils ont une prime de vacances de 4% à leur départ. En cas de congédiement, ils ont deux mois de salaire assuré. En cas de congédiement de la secrétaire par son employeur, qui est le député, il y a deux mois de salaire qui lui sont garantis. Évidemment, ce n'est peut-être pas comparable...

M. Pagé: S'il est congédié ou si le député est défait, qu'arrive-t-il?

Une voix: C'est la même chose.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est la même chose, défait ou congédié. Révocation, démission. Il a deux mois de protection de salaire. D'autre part, concernant les vacances annuelles - je pense que c'est l'une des

choses les plus importantes - la secrétaire de district n'est pas soumise à toutes les obligations, à tous les formulaires que doivent remplir les membres de cabinet politique, mensuellement. L'employeur de la secrétaire, c'est le député, qui peut lui accorder un mois, deux mois, trois mois, trois mois et demi de vacances dans l'année, quatre mois s'il le veut, et ce sans aucun droit de regard de l'Assemblée nationale sur la secrétaire de district. Évidemment, M. le whip, mes collègues de l'Assemblée et mesdames, je sais que les députés travaille tellement fort qu'aucun député ne peut se permettre de faire cela. Mais la possibilité est quand même là. Je peux dire que, personnellement, je ferme mon bureau de comté trois semaines durant l'été et tout le monde prend des vacances en même temps. Si, à l'occasion, ma secrétaire de district me demande un congé soit pour faire un voyage à l'extérieur avec son époux ou fêter un anniversaire, je vais lui donner congé.

Donc, c'est sûr qu'ils n'ont pas la protection que les autres ont, mais vous comprendrez que je suis assailli de lettres venant de députés, des deux côtés de la Chambre, tant en ce qui concerne leur allocation pour résidence secondaire à Québec, leurs frais de déplacement à l'intérieur de leur comté, leur allocation pour local de comté dans leur district, l'enveloppe de leur secrétaire de district. Je reçois des lettres régulièrement tous les jours. Chaque député a des suggestions différentes. On essaie, évidemment, de tenir une sorte d'équilibre et, compte tenu qu'on vit dans un contexte de compressions budgétaires, je pense que les cabinets politiques ont donné l'exemple, que l'Assemblée nationale a donné l'exemple. On essaie aussi, dans ce domaine, de donner l'exemple.

C'est sûr que, pour certains députés, je sais que la facture mensuelle personnelle qu'ils doivent payer, surtout pour le bureau de comté, est beaucoup plus élevée. Cela a été mon cas pendant trois ans et demi à Jonquière, alors que je n'étais ni vice-président ni président. La facture mensuelle personnelle à payer était d'une somme de dollars assez importante parce que c'est un centre essentiellement urbain. Je sais que d'autres députés vivent la même situation actuellement. Par contre, d'autres en ont assez.

Je n'ai pas devant moi une feuille que j'ai eu l'occasion de voir dernièrement, mais je pourrais vous dire que, sur les 122 députés de l'Assemblée nationale du Québec, actuellement, la grande majorité des députés, sur l'enveloppe qui leur est accordée pour leur allocation de bureau de comté, n'a pas dépensé le montant auquel ils avaient droit et il y a un maximum de trois semaines à un mois. Plusieurs députés restaient avec un surplus, dans leur enveloppe d'au-delà de 2000 $ à 3000 $. C'est surprenant d'entendre cela, malgré le nombre de lettres que je reçois. Mais les lettres, je les reçois de ceux justement qui paient mensuellement un montant personnel parce que l'allocation est insuffisante. J'ai ça ici et je pourrais vous en informer.

Le Président (M. Jolivet): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Très brièvement, M. le Président, à propos de toutes ces allocations en ce qui concerne le personnel du bureau de comté, nos secrétaires de comté, bien souvent les gens sont peut-être portés à croire qu'ils ont la sécurité d'emploi, les avantages sociaux, etc. Il faut convenir - et je veux ajouter cela à ce que M. le député de Terrebonne disait tout à l'heure - que ces gens-là...

M. de Bellefeuille: Deux-Montagnes.

M. Pagé: ... le député de Deux Montagnes, je m'excuse, il faut convenir, dis-je, que ces gens n'ont aucune sécurité d'emploi. C'est donc dire que le député décède, démissionne ou se fait battre demain matin, c'est fini, c'est deux ou trois mois d'indemnité. Point final, à la ligne.

Cependant, leur traitement a augmenté depuis 1973. Je me rappelle qu'en 1973, lorsque j'ai été élu, l'enveloppe budgétaire que j'avais pour mon personnel de comté était de 5500 $.

M. Vaillancourt (Jonquière): En 1976, lorsque j'ai été élu, elle était de 11 000 $.

M. Pagé: Et aujourd'hui elle est de 39 000, je crois.

M. Vaillancourt (Jonquière): Et, aujourd'hui, elle est de...

M. Pagé: Dans mon comté, une classe 4, c'est 41 000 $

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est 39 500 $, pour les catégories 1, 2 et 3.

M. Pagé: Je suis classe 4, alors, c'est à peu près 40 000 $. De toute façon...

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, c'est un peu plus de 40 000 $.

M. Pagé: Cela se peut.

M. Vaillancourt (Jonquière): 42 000 $ ou 43 000 $.

M. Pagé: J'aimerais être informé à quel moment la régie interne prévoit revoir les dispositions touchant les allocations. Vous

avez fait référence aux allocations pour les loyers. Il est évident qu'un loyer - il ne faut pas se le cacher - un espace à bureau dans un comté rural, une petite ville de 2000 habitants ou un espace à bureau dans un immeuble d'un milieu urbain, dans un sixième ou au huitième étage, avec air climatisé, etc., ce ne sont définitivement pas les mêmes coûts.

Dans notre formation politique, nous avons des députés qui doivent débourser jusqu'à 4000 $ par année de leur poche pour payer le surplus qui n'est pas couvert par l'Assemblée nationale et, compte tenu qu'au Québec, on est largement cotisé en termes d'impôt, ça veut dire que, si le gars est cotisé à 40%, pour payer ces 4000 $, ça lui prend à peu près 5300 $ ou 5400 $. 5300 $ sur un salaire faramineux - selon plusieurs -de député de 35 000 $, ça vient causer une brèche.

Vous parliez tout à l'heure des allocations. Souvent, M. le Président, vous allez lire ici au fauteuil, comme c'est votre obligation, que la régie interne a décidé d'augmenter les allocations pour frais de transport. Récemment, cela a été majoré de 0,16 $ à 0,18 $ le kilomètre. Oh! quel drame, selon plusieurs! Ce que les gens ne savent pas, c'est que l'enveloppe budgétaire demeure la même. Si le type a droit à 2000 $ pour frais de transport pendant l'année dans son comté, à 0,15 $, il pouvait peut-être faire dix mois et les deux derniers mois de l'année, c'est lui-même qui payait de sa poche pour son transport pour ses activités officielles dans son comté. Et quand vous majorez à 0,18 $, au lieu de prendre dix mois, ça prend six mois. Il paie pendant quatre mois au lieu de deux. C'est très bien d'augmenter les allocations pour le kilométrage, mais j'ai hâte de voir à quel moment l'enveloppe sera majorée.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bon, là, il faut faire la distinction entre les 1000 $ qui sont alloués à l'intérieur des limites de certains comtés à certains députés et les 0,18 $ le kilomètre, qui viennent d'ailleurs d'être augmentés, vous avez raison, pour le déplacement du député entre son domicile ou sa résidence principale dans sa circonscription et son lieu de travail, qui est l'Assemblée nationale du Québec. Dans ce cas-là, il y a effectivement une hausse de 0,02 $ ou 0,03 $ le kilomètre. Dans le cas de Jonquière, c'est 280 milles, ce qui fait environ 400 kilomètres, c'est augmenté de 0,02 $.

Mais si j'avais droit - et vous avez raison - à une enveloppe de 1000 $ - ce qui n'est pas le cas de Jonquière, mais ce qui est le cas de Portneuf certainement - même si on a monté la régie interne de 0,16 $ à 0,18 $ le kilomètre, quand vous êtes rendu à 1000 $, c'est arrêté. Là, vous avez raison.

Donc, il faut nuancer la réponse selon que c'est le déplacement du comté à Québec et l'intérieur des limites.

Vous parliez aussi des allocations pour les bureaux de comté. J'ai ici la progression qui s'est faite depuis le 1er avril 1975, alors que c'était de 4000 $ pour les groupes 1, 2 et 3 et 5000 $ pour les groupes 4 et 5. C'est maintenant rendu à 8800 $ et, depuis le 1er avril 1980, cela a été indexé à trois reprises pour atteindre maintenant une somme de 8800 $ pour les groupes 1, 2 et 3 et 10 200 $ pour les groupes 4 et 5. C'est sûr que j'accepte et je sais fort bien, pour avoir reçu des lettres et des appels téléphoniques, que les députés paient mensuellement des sommes de leur propre poche et je pense que ce sera toujours le cas. Je pense qu'il sera toujours impossible de donner satisfaction à l'ensemble des 122 députés de l'Assemblée nationale, surtout en ce qui concerne les allocations. De toute façon, dès que des demandes raisonnables me sont faites, je m'empresse de les soumettre à la régie interne, le bureau - on va le voir dans quelques mois, on aura l'occasion d'étudier encore ces choses - et on essaie d'y donner suite. Il y a une progression normale, on le sait.

En ce qui concerne les appartements secondaires à Québec, combien de députés m'ont dit qu'ils seront obligés de déménager au cours des mois prochains parce que leur propriétaire augmente le loyer d'un taux annuel d'environ 19% à 20%, alors que l'allocation pour la résidence secondaire a été augmentée, je pense, de 9,4%. On connaît un peu la politique que certains propriétaires emploient lorsqu'ils savent que leur locataire est député. Il y a bien des députés qui m'ont dit: M. le Président, je vais être obligé de démissionner.

C'est une chose que je comprends aussi, sauf que le système dans lequel on vit actuellement n'est pas facile. Des deux côtés.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Terrebonne.

M. de Bellefeuille: De Deux-Montagnes.

Le Président (M. Rancourt): Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Dites donc, c'est une manie! Je sais que nous sommes en train de discuter un grand nombre de choses en même temps et que cela pourrait donner à certains la tentation de noyer le poisson. Je ne vise personne, mais je voudrais revenir à un seul point pour que ce soit clair que ce que je soutiens, c'est que notre attitude est injuste et anti-professionnelle. Nous avons tous des secrétaires de comté. Nous voulons être justes envers ces employés et nous

visons au niveau le plus élevé possible de professionnalisme de la part de nos secrétaires de comté.

Supposons que ce soir, dans le comté de Deux-Montagnes - pas dans le comté de Terrebonne, que je connais moins bien, mais dans le comté de Deux-Montagnes - une assemblée du conseil municipal de Saint-Placide a lieu. Je suis ici à Québec, retenu à Québec par nos travaux. Mon secrétaire de comté part de chez lui, au volant de sa voiture, pour aller me représenter à Saint-Placide, à cette assemblée du conseil municipal. Il fait 50 kilomètres à l'aller, il fait 50 kilomètres au retour. Il paie cela de sa poche. Je trouve que c'est injuste et je trouve que ce n'est pas un stimulant au professionnalisme.

Je sais que le président de l'Assemblée a fait allusion, tout à l'heure, à la possibilité que nous donnions quatre mois de vacances par année à nos secrétaires de comté, mais il a lui-même ajouté peu après qu'il pensait que cela n'arrivait pas. Je suis bien d'accord avec lui. Je pense qu'il n'y a personne sur les 122 députés qui donne quatre mois de vacances à son ou ses secrétaires de comté parce que ce n'est pas possible, ce n'est pas désirable et ce serait antiprofessionnel. Même si on voulait le faire, ce n'est pas en donnant des compensations semblables qu'on va atteindre un objectif de justice, ni un objectif de professionnalisme. Je voudrais que mon secrétaire de comté qui va à Saint-Placide ce soir me représenter, qui fait 50 kilomètres à l'aller et 50 kilomètres au retour au volant de sa voiture, puisse être remboursé pour ses frais très réels. M. le Président de l'Assemblée, ne pourrait-on pas s'entendre entre les partis pour le remboursement de frais semblables pour lequel il pourrait y avoir la présentation de pièces justificatives?

Le Président (M. Rancourt): M. le Président.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je ne voudrais pas que le député de Deux-Montagnes, involontairement ou non, me fasse passer pour celui qui essaie de martyriser les secrétaires de comté. S'il y en a un qui partage l'opinion du député de Deux-Montagnes - je ne dirai pas de Terrebonne - c'est bien le président, et cette opinion est certainement partagée par d'autres, je pense, par la majorité ou la totalité des députés. Mais ce n'est pas le président qui décide de cela seul. Je vous surprendrai en disant qu'à ma connaissance, à moins que je n'aie un problème de mémoire extrêmement grave, je n'ai jamais reçu tellement de lettres de députés de cette Chambre, des deux côtés de la Chambre, me demandant que la régie interne se penche sur ce problème des frais de déplacement des secrétaires de comté. J'en ai reçu sur d'autres sujets, je vous l'ai dit tout à l'heure. (17 h 20)

Quoi qu'il en soit, je prends acte du fait qu'une demande m'est formulée aujourd'hui, mais je ne peux m'engager qu'à une seule chose. Je ne peux pas m'engager sur les résultats, parce que je ne peux pas prendre un engagement sur des résultats, mais je peux m'engager à faire un effort. Dès que le bureau de l'Assemblée nationale aura été formé, la nouvelle loi adoptée -parce que je suis sûr que le bureau fera partie de la nouvelle loi de l'Assemblée nationale - je m'engage, devant les sept députés qui seront alors membres de ce bureau, à étudier le problème des frais de déplacement des secrétaires de comté.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: J'aurais peut-être certains points à soulever, M. le Président. Disons que, personnellement, je n'ai pas eu, dans les discussions avec les collègues, de plaintes touchant tellement le montant annuel accordé aux secrétaires de comté.

M. Pagé: Dans les comtés urbains.

M. Rocheleau: Dans les comtés urbains. Pour ce qui est des comtés ruraux, ça demande souvent des secrétaires aux extrémités et, des fois, ça demande deux ou trois secrétaires. Cependant, il y a un point que j'aimerais soulever concernant les 1000 $ alloués en région pour les dépenses du député.

On demande de plus en plus au député de prendre les informations pertinentes au milieu quand il y a des projets de loi, on lui demande de se déplacer pour voir sur place. Je prends uniquement l'exemple de votre humble serviteur, dans les affaires municipales, souvent les conseils municipaux veulent rencontrer le responsable de l'Opposition.

M. Pagé: Avec enthousiasme.

M. Rocheleau: Avec enthousiasme, sûrement, surtout dans les conditions actuelles. Cela occasionne des déplacements assez fréquents. Je prends l'exemple de Baie-Comeau et Hauterive, le projet de loi no 37; j'ai eu à me déplacer à plusieurs reprises pour aller me rendre compte de visu des problèmes réels chez eux. Cela nous permet de défendre davantage les citoyens d'une région quand on est conscient des faits. Je me pose la question à savoir si le président a eu des demandes dans ce sens-là.

On a vu l'indexation des frais de déplacements chose qui a apporté un

correctif, du moins dans plusieurs cas, à l'exception de la région de Montréal où plusieurs étaient pénalisés en utilisant l'avion. Malheureusement, du côté de l'Opposition, on n'a pas les avantages des ministériels, on ne peut pas utiliser l'avion du gouvernement. Cela a donc été corrigé, mais je pense qu'on devrait peut-être apporter certaines modifications quant aux 1000 $ pour les visites hors comté, hors région. Si le président veut bien en prendre note et en tenir compte dans les revendications à venir.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Hull, encore une fois, chaque cas en est un d'espèce. J'ai reçu effectivement quelques plaintes verbales sur le sujet que vous venez d'aborder, mais j'ai devant moi, pour l'exercice financier 1981-1982, le bilan de l'utilisation de cette somme de 1000 $ pour des déplacements hors comté. 20% des députés ont pris cette somme, alors que la très grande majorité ne s'est même pas rendue à 500 $.

La présidence est prête à tout examiner; par contre, j'aimerais bien que les députés se servent de leur programme. Je me demande même s'il y a des députés qui connaissent l'existence d'une allocation de 1000 $ pour des déplacements à l'extérieur de leur comté.

M. Pagé: Je vais vous expliquer une chose, M. le Président...

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: ... ces 1000 $ doivent couvrir des dépenses encourues lors d'activités officielles en dehors de la région administrative. Je vais vous donner un exemple. C'est un problème qu'on a des deux côtés de la Chambre. Les députés de Montréal sont dans la région 05, à ma connaissance.

Une voix: 06.

M. Pagé: 06 et la région de Montréal est assez grande. Bien souvent, dans un comté urbain de Montréal, le député n'a pas d'allocation pour ses dépenses à l'intérieur de sa région administrative, il n'a même pas les 1000 $. S'il a une activité officielle au nom de son parti ou s'il doit rencontrer un corps intermédiaire, un organisme, un groupe à Saint-Jérôme, sur la rive sud de Montréal, dans le comté de Saint-Jean ou ailleurs, il n'a aucune allocation. Il n'a pas le droit de réclamer ces 1000 $ parce que c'est à l'intérieur de sa région administrative et il n'a pas d'enveloppe budgétaire dans son comté. Ne vous surprenez pas que les gars ne réclament pas les 1000 $.

M. Vaillancourt (Jonquière): Effectivement, vous touchez encore là le point faible de cette politique. Les députés de la région de Montréal subissent des préjudices, en effet, en raison de ce que vous venez d'évoquer. Ce point précis de certains députés de la région de Montréal ou d'ailleurs pourrait être examiné, mais quand même, je comprends le problème du député de Hull. Pour un cas très précis, on sait qu'il a travaillé très fort et qu'il travaille encore très fort. Par contre, quand je regarde la feuille que j'ai devant moi, 441 $, 289,60 $, nil, nil, 883 $, 540 $, 228 $, 383 $, 720 $, 444 $, 300 $...

Le problème des députés de Montréal et le problème particulier de certains députés qui remplissent certaines fonctions particulières dans leur caucus sur un projet de loi, ce sont effectivement des cas qui arrivent certainement des deux côtés de la Chambre.

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: ... le comté de Hull comme tel a quand même une superficie assez restreinte de 10 milles carrés. Donc il n'y a pas de dépenses dans le comté, mais si je me déplace pour aller dans le comté de Gatineau ou dans des comtés voisins, je n'ai pas d'allocation de dépenses parce que c'est dans la même région; par contre, les députés de comtés ruraux ont des allocations, eux, parce qu'ils ont à voyager dans leur propre comté et à se déplacer. Remarquez que je ne pense pas que personne ait ambitionné. Il y en a même qui ne s'en sont pas servi, mais pour ceux qui ont à utiliser des montants supérieurs, je pense que cela devrait peut-être être considéré dans le genre de travail que quelqu'un doit faire.

M. Vaillancourt (Jonquière): De toute façon je suis très sensible au point que vous soulevez, et on l'était auparavant parce que d'autres députés, comme vous, l'avaient soulevé. Encore là, on va essayer de tout faire, au cours des prochains mois, pour l'ouverture de la prochaine session, afin justement de faire en sorte que nos politiques ne soient pas discriminatoires pour un député par rapport à d'autres.

Je vous promets d'examiner la situation avec les fonctionnaires de l'Assemblée nationale pour essayer d'améliorer ça.

M. Rocheleau: M. le Président...

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Rocheleau: ... je ne suis pas venu ici pour régler mon cas, mais je sais qu'il y a des cas similaires.

M. Pagé: Le forum privilégié.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous n'êtes pas le seul.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Chambly m'a demandé la parole.

M. Tremblay: M. le Président, j'espère qu'il n'y aura pas de confusion et qu'on ne blâmera pas les députés qui n'utilisent pas des enveloppes quand ils n'en ont pas besoin. En fait, ce qui est important de savoir pour nous, c'est si un député peut faire son travail efficacement sans gruger sur son salaire qui n'est pas, comme on le sait, exagéré.

Quand un député n'a pas besoin d'une enveloppe, qu'il ne l'utilise pas, cela m'apparaît tout à fait normal. C'est comme pour n'importe quelle dépense; on la fait quand c'est nécessaire. Quand ce n'est pas nécessaire on ne la fait pas et les enveloppes restent là. Il me semble que ce devrait être la procédure et on n'a pas à blâmer les gens qui n'utilisent pas une enveloppe de ne pas l'utiliser.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je prends acte de ce que vous avez dit, M. le député de Chambly. En fait, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, il y a des députés qui ne sont peut-être même pas au courant de l'existence de ce programme, qui auraient peut-être pu utiliser ces 1000 $ pour des activités officielles en dehors de leur comté et qui ne l'ont pas fait. D'autres sont au courant et n'ont pas eu à faire de déplacements pour des activités officielles; d'autres sont au courant et doivent en faire plus. Ce sont trois cas différents qu'il faut examiner à la pièce. On va essayer d'améliorer cela, parce que toute politique est améliorable et les différents programmes d'allocations aux députés sont tous susceptibles d'améliorations. On a essayé de le faire au cours des derniers mois. C'est sûr que ce ne sera jamais à la satisfaction de la totalité des députés, mais on va essayer, compte tenu aussi des compressions budgétaires qui sont également appliquées à l'Assemblée nationale, de faire en sorte qu'une politique non discriminatoire soit appliquée. Il faudra toujours se dire une chose, c'est que le Québec est grand, que le Québec est composé de 122 comtés qui ne sont pas identiques. Jonquière, sur la carte électorale, c'est un petit point noir. Le comté d'Abitibi-Est, le comté d'Ungava, le comté de Portneuf, le comté de Mégantic-Compton et le comté de Deux-Montagnes sont de grands comtés. Le comté de Sherbrooke est un petit comté sur la carte électorale, un point noir probablement.

Donc, aucune situation n'est analogue et identique, et c'est pour ça que c'est difficile de...

M. Pagé: ... un point noir... je dirais même que c'est un mouton noir.

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! M. le député de Viau. (17 h 30)

M. Cusano: M. le Président, j'apprécie le fait que vous ayez dit que vous alliez peut-être apporter des changements pour l'ouverture de la prochaine session. Il y a un problème particulier et je suis sûr que vous le constatez d'après nos chiffres. Les membres de la mission de l'éducation du Parti libéral se promènent depuis assez longtemps dans la province à cause des fuites de votre collègue le ministre de l'Éducation, et l'été va nous nécessiter encore plusieurs voyages. Puisqu'on a déjà dépassé le montant de 1000 $, est-ce qu'il y aurait des exceptions que vous pourriez faire, des budgets qui pourraient être transférés?

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): Écoutez, la session va se terminer au plus tard le 23 juin, à minuit, en vertu du règlement. Elle pourra se terminer avant, tout dépendra des partis politiques. Non, je ne peux pas m'engager, parce que la régie interne actuelle, on doit le savoir, est composée du président, qui a un droit de vote, et de trois ministres du gouvernement. Le président préside la commission de l'Assemblée nationale, dresse l'ordre du jour, amène les sujets, mais il n'est pas le seul à décider. Il n'a aucun pouvoir décisionnel dans toutes ces politiques-là, il émet son opinion comme tout le monde et il essaie de représenter les 121 députés de l'Assemblée nationale pour faire en sorte qu'on ait un système d'allocations qui ait du bon sens et qui soit surtout équitable et juste, compte tenu des différences entre les comtés et des missions particulières que certains députés peuvent avoir.

Autant je me suis engagé à certaines choses tout à l'heure, comme à soumettre au futur bureau, lorsqu'il existera, le problème des secrétaires des districts, autant je me suis engagé à regarder, parce que je le savais déjà, on me l'avait dit, le problème des 1000 $ pour les activités officielles à

l'extérieur de notre comté ou de notre région administrative, autant je ne peux pas m'engager pour la fin de la présente session ou avant la fin de la présente session, à faire en sorte que, durant l'été 1982, le système en question soit modifié. Je pense que ce serait être prétentieux et je pense que ce serait vous mentir, en quelque sorte, que de vous dire que je puisse faire ça avant le 23 juin.

M. Cusano: J'apprécie votre franchise, M. le Président.

Le Président (M. Rancourt): Est-ce que ça veut dire que nous sommes prêts à étudier le programme 1.

M. Pagé: Oui, ça va aller vite maintenant.

Le Président (M. Rancourt): Le programme 1 par élément ou par programme? Est-ce que vous avez des questions particulières?

M. Pagé: J'avais une autre très brève question.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Je m'excuse, c'est au programme 2. Le programme 1 est adopté.

Le Président (M. Rancourt): Est-ce que le programme 1 est adopté?

M. Pagé: Oui.

Services parlementaires

Le Président (M. Rancourt): Programme 1 adopté. Programme 2.

M. de Bellefeuille: M. le Président, après le député de Portneuf, si vous voulez me donner la parole, s'il vous plaît.

Le Président (M. Rancourt): Sûrement, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: L'année dernière, M. le Président... On va étudier l'ensemble du programme, si vous voulez. En ce qui concerne la Bibliothèque de la Législature, le président de l'Assemblée nationale avait évoqué toute la question de la cueillette des archives des députés. J'en suis bien conscient, et je veux profiter de cet élément pour témoigner de notre appréciation du côté de l'Opposition, à l'égard du travail qui est fait par les officiers et tout le personnel de la bibliothèque, qui sont là pour nous répondre, toujours avec spontanéité, et qui ont toujours le document à la main quand on en a besoin. Je suis persuadé que ces gens font un travail concluant, qui est utile à nos travaux.

Cependant, à l'intérieur de ce service, le président avait évoqué toute cette question de la cueillette des archives des députés. Deuxièmement, vous aviez fait allusion ou vous vous étiez référé à une loi qui existe quelque part, obligeant un député, lorsqu'il quitte ou qu'il est défait, à remettre ses dossiers. Je sais que cela a déjà existé dans le décor et j'aimerais qu'on la revoie parce que cela avait déjà été évoqué ici aux crédits de l'Assemblée nationale, ça devait être votre prédécesseur, je présume.

J'aimerais avoir l'état de la question, à savoir où en est rendue cette affaire-là.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'ai reçu tout d'abord plusieurs lettres d'anciens députés - 25 lettres - ou de députés actuels, la plupart d'anciens députés, trouvant l'idée très intéressante. Les députés actuels de l'Assemblée nationale du Québec qui m'ont écrit m'ont dit qu'ils le feraient la journée où ils ne seraient plus en politique, mais, évidemment, tant qu'ils sont en politique, ils doivent garder leurs dossiers pour s'occuper de leurs concitoyens.

Au moment où on se parle, deux anciens députés l'ont fait, soit mon chef de cabinet et M. Louis-Philippe Lacroix, ancien député des Îles-de-la-Madeleine. Ce dernier nous a fait parvenir, au cours des derniers jours - on a eu le téléphone, justement - 38 grandes et grosses caisses de documents parce que je pense que sa carrière politique a été assez longue. M. Drolet, que vous avez d'ailleurs battu, M. le whip de l'Opposition, lors d'une élection en 1973 - mon chef de cabinet...

M. Pagé: Je ne ferai pas de commentaire, ça m'obligerait à dire: Avec plaisir!

M. Vaillancourt (Jonquière): ... n'est pas content que je dise ça - a envoyé les siens et 25 parlementaires ont manifesté leur intérêt d'envoyer de ces documents à la bibliothèque. Tout en félicitant, comme vous, les gens qui travaillent à la bibliothèque et surtout son directeur, M. Prémont, je pense que cela va enrichir notre bibliothèque. Je fais appel, encore une fois, la télévision aidant, aux anciens parlementaires et aux parlementaires actuels, dont la carrière sera

longue dans certains cas, courte dans d'autres cas, tout dépendant de nos concitoyens, lorsque leur carrière politique sera terminée, afin qu'ils nous fassent parvenir les documents qui peuvent nous être envoyés, parce que je sais que certains dossiers peuvent être confidentiels.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: J'apprécie que deux ex-parlementaires, que je connais d'ailleurs très bien, aient donné suite à votre invitation. J'aimerais savoir quel genre de traitement est donné à ces informations contenues dans ces dossiers parce que je dois vous dire, M. le Président, que j'ai fait une révision de mes dossiers personnels de comté, il n'y a pas longtemps, et, après neuf ans de vie politique, j'avais déjà quelque 8000 dossiers qui n'avaient pas été touchés depuis cinq ans. C'est-à-dire que tous les dossiers qui étaient plus vieux que cinq ans, je les ai acheminés vers une nouvelle classification. Est-ce à dire que ce sont tous ces dossiers de cas individuels, de cas municipaux, etc., que les députés seront invités à vous envoyer?

M. Vaillancourt (Jonquière): Lorsque je leur fais appel, je ne leur dis pas les dossiers qui nous intéressent ou ceux qui sont recevables ou ceux qui sont irrecevables, pour employer une expression qu'on emploie souvent en cette Assemblée. On leur demande tout simplement de nous envoyer les documents, en général, qu'ils pensent être en mesure de nous envoyer, mais ce qu'on fait à la bibliothèque, on les codifie selon les sujets. Que des cas de comté ou que des cas individuels nous soient envoyés, le directeur de la bibliothèque et ses employés regardent ce qui peut être intéressant pour la bibliothèque et ses usagers et, selon les sujets, font une codification et les personnes qui ont accès à la bibliothèque pourront consulter ces dossiers, sauf, évidemment, ce qui est confidentiel. Je sais d'avance que le député qui a des dossiers qu'il considère confidentiels ne les enverra sûrement pas, mais, dans l'hypothèse où un député enverrait des dossiers qui sont de nature confidentielle, je compte sur la conscience professionnelle de M. Prémont et de ses collaborateurs pour faire en sorte, justement, que ces dossiers de nature confidentielle soient retournés à leurs propriétaires ou à celui qui les a envoyés.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. Pagé: M. le député de Hull avait une très brève question spécifique là-dessus.

M. de Bellefeuille: Je ne veux pas changer de sujet, mais c'est des relations interparlementaires que je voudrais parler.

M. Pagé: Lui, c'est sur la bibliothèque.

Le Président (M. Rancourt): Donc, sur le même sujet, M. le député de Hull.

M. Rocheleau: M. le Président, c'était simplement pour m'informer d'une chose auprès du président. J'ai entendu dire que des personnalités politiques avaient remis à la bibliothèque leurs dossiers, qu'on en avait fait une évaluation et que même, dans certains cas, on a fait une espèce de crédit d'impôt sur une période d'années X. Est-ce qu'on pourrait nous informer si cela se produit ici?

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne suis pas le ministre du Revenu, mais je le vois à ma droite, par contre. C'est une discussion qui pourrait être amenée au bureau, mais à ma connaissance...

M. Rocheleau: En somme, c'est comme un actif.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... à ce qu'on me dit, cette politique existe au Parlement fédéral et non pas ici, à l'Assemblée nationale du Québec. C'est, cependant, une chose qui mériterait certainement d'être étudiée. Actuellement, cette politique de crédit d'impôt n'existe pas dans le cas que vous mentionnez.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, au sujet... (17 h 40)

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aurais peut-être une réponse à donner au whip de l'Opposition sur les plaintes, etc. Au cours de l'exercice 1981-1982, trois plaintes pour vol ont été portées à la connaissance du service de sécurité de l'Assemblée nationale du Québec. Dans chaque cas, une enquête maison a été faite sans résultat concret. Je parle bien de vol. Tantôt j'aurai quelque chose pour les objets perdus. Des objets peuvent être volés et peuvent être perdus. Dans chaque cas, le service de protection a communiqué avec la Sûreté municipale à la suite des plaintes portées au service de sécurité par les trois personnes qui se prétendaient être victimes de vol. Dans tous les cas la Sûreté municipale du Québec a communiqué avec les plaignantes. À ce moment il faut que la plaignante ou le plaignant qui a déjà porté plainte à

l'Assemblée nationale du Québec, lorsque son cas est envoyé par l'Assemblée à la Sûreté municipale de Québec, porte une autre plainte à la Sûreté municipale de Québec, donc, avec une signature. La réponse que je ne peux pas vous donner, c'est si et combien des trois personnes ont accepté de porter plainte devant la Sûreté municipale du Québec.

En ce qui concerne les plaintes pour objets perdus, pour la même année financière, onze plaintes ont été portées au service de sécurité, neuf des objets perdus ont été retrouvés et remis à leur propriétaire par nos propres agents. C'était essentiellement des sacoches, lunettes, porte-documents, là, je dis etc., parce que le mot que je vois après c'est dentier, et je doute que quelqu'un ait perdu son dentier. De toute façon...

M. Pagé: On est mort de rire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Grosso modo, sacoches, lunettes, porte-documents et possiblement un dentier.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, au sujet des relations interparlementaires, on pourrait, comme dans le cas de la bibliothèque, adresser des félicitations à cette direction des services de l'Assemblée nationale. Le travail qu'on y accomplit est excellent. La question que je veux poser n'a pas trait à la qualité des services, elle a plutôt trait à l'étendue de nos relations interparlementaires. À l'heure actuelle, l'Assemblée nationale du Québec a des relations suivies avec l'Association internationale des parlementaires de langue française, avec l'Association des parlementaires du Commonwealth et à l'occasion avec d'autres groupes. Je me demande s'il serait concevable que l'Assemblée nationale du Québec ait aussi des relations avec l'Union parlementaire mondiale... si le nom est bien. Je crois comprendre que cette union ne regroupe que les Parlements de pays souverains et que c'est ce qui fait obstacle.

Il me semble qu'il serait intéressant pour nous, en attendant la souveraineté qui viendra un jour, de participer...

Une voix: ... votre retraite?

Le Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. de Bellefeuille: II va y avoir un peu d'obstruction de l'autre côté de la Chambre, il faut s'attendre à cela. Il serait intéressant pour nous, même en attendant la souveraineté, de participer aux travaux de cette union pour élargir nos contacts. L'AIPLF, les pays de langue française, et l'APC, les pays du Commonwealth, c'est sûrement des contacts extrêmement intéressants, mais ce n'est pas le monde entier. Par l'Union parlementaire, nous pourrions avoir des contacts avec d'autres peuples, d'autres Parlements et d'autres pays. Cela pourrait être très intéressant pour nous. D'ailleurs, ce n'est pas seulement le cas du Québec. Il y a d'autres assemblées dans les provinces canadiennes, dans les États américains et dans d'autres pays, il existe des Parlements de provinces, ou des Parlements d'État qui auraient avantage, je pense, à participer aux travaux de cette Union parlementaire. Je voudrais demander au président de l'Assemblée nationale s'il est concevable que des démarches soient faites en vue d'une éventuelle participation de notre part aux travaux de l'Union parlementaire.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je répondrai au député de Deux-Montagnes que nous avons, d'une certaine façon, des contacts avec cette association puisque nous recevons toute sa documentation, mais elle ne reconnaît dans ses statuts que les États souverains, et comme le Québec, au point de vue du droit constitutionnel public, ou du droit international public, n'est pas un pays souverain, le Québec ne peut donc faire partie de cette association.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Sur la question du bureau des relations interparlementaires, j'ai eu l'occasion, lors de la séance qui a précédé, cette semaine, et plus particulièrement lors de la question posée par l'honorable député de Verdun, de témoigner de notre appréciation du travail et des objectifs que poursuit le service des relations interparlementaires.

Cependant, j'aurais une brève question à poser au ministre. Cette année, dans le cadre de missions parlementaires d'autres pays qui sont venues visiter l'Assemblée nationale du Québec et que l'Assemblée nationale du Québec et que l'Assemblée nationale a reçues, à une reprise au moins où parlementaires de Grande-Bretagne, je dois vous dire que j'ai eu la surprise de constater que la personne invitée par je ne sais trop qui à présider les dîners était un membre de l'Exécutif. Je porte cette question à votre

attention, M. le Président, convaincu que je suis que le Président de l'Assemblée nationale du Québec et député de Jonquière n'est pas responsable de cet état de fait qui malheureusement s'est produit.

Comme Opposition à l'Assemblée nationale, nous sommes toujours disposés, ouverts et prêts à participer à des activités interparlementaires et, pour le bénéfice de ceux qui nous lisent ou qui nous liront et de ceux qui nous écoutent, ces activités interparlementaires permettent aux parlementaires de l'Assemblée nationale du Québec de partager leur expérience avec d'autres parlementaires d'autres Législatures ou Parlements, francophones ou anglophones. Ces relations se font sous l'égide du parlementarisme, et jamais, au Québec, à l'Assemblée nationale du Québec, comme dans le temps de l'Assemblée législative du Québec, jamais les relations parlementaires ou les efforts déployés au chapitre des relations parlementaires n'ont servis à véhiculer des messages gouvernementaux.

Vous pouvez vous imaginer comme j'ai été surpris de participer à un dîner sous l'égide de l'Assemblée nationale du Québec, avec des parlementaires britanniques, et de constater que le président de ce dîner, au lieu d'être un parlementaire qui aurait pu être le Président de l'Assemblée nationale du Québec, ou un des vice-présidents, ou des présidents de commission qui sont habilités à remplacer un vice-président, c'était le ministre des Affaires intergouvernementales qui a présidé et nous a chanté sa sérénade souverainiste, antifédérale et anti-projet constitutionnel pendant un dîner. J'ai eu assez de déférence pour nos hôtes, qui étaient - ceux que nous recevions à ce moment-là - des parlementaires britanniques, pour ne point soulever de questions pendant le dîner, mais je dois vous dire que cela a été considéré comme insultant tant pour les parlementaires britanniques que pour les parlementaires québécois.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Pagé: Je termine là-dessus, ce n'est pas une critique à votre endroit, mais j'espère que des choses comme cela ne se reverront pas, parce que ça peut risquer de mettre en cause l'avenir de nos relations interparlementaires.

Le Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition, effectivement, je suis au courant des deux cas en question, deux cas qui sont survenus alors que j'étais moi-même à l'extérieur du Québec; je peux vous assurer que toutes les mesures ont été prises pour faire que de tels événements ne se reproduisent plus. Je pense que c'est une garantie que je peux donner à l'ensemble des collègues de l'Assemblée nationale du Québec.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'avais une autre question à l'égard de notre personnel ici. Je ne sais pas à quel programme cela se présente. Si vous le permettez, je vais poser une très brève question et, après cela, on adoptera peut-être l'ensemble des autres programmes, si les collègues n'ont pas d'autres questions. (17 h 50)

M. le Président, nous avons ici à l'Assemblée nationale du Québec des gens qui vivent très près des députés et dont le travail quotidien évolue au même rythme que nos travaux parlementaires. Vous aurez compris que c'est le personnel de soutien qui se tient là pour fournir son assistance aux députés, ce sont ceux qui s'occupent des services de messagerie et qu'on appelle communément les pages du Parlement. Ces personnes, hommes et femmes, travaillent aux mêmes heures que l'Assemblée, c'est donc dire que durant les mois de juin et décembre, en décembre dernier, notamment, où je me rappelle fort bien avoir eu à siéger jusqu'à 8 heures le matin après être entré au parlement à 10 heures l'avant-midi, la veille, ces gens travaillent sérieusement, font un travail valable. Or, j'ai constaté depuis un an ou deux que ces gens changeaient régulièrement. Au fil de chacune des sessions, en revenant d'un ajournement, bien souvent, des gens qui travaillaient pour nous depuis un bon moment ne sont plus là. Est-ce à dire qu'ils sont affectés ailleurs dans l'immeuble? Je l'espère, mais je m'inquiète du caractère occasionnel - pour ne pas utiliser un autre terme - avec lequel, nous, comme législateurs, acceptons que ces gens-là soient traités. Il semble y avoir un problème, il n'y a pas de sécurité d'emploi à ma connaissance. Les heures de travail sont les mêmes que nous sauf qu'eux, à ma connaissance, n'ont pas de bureau avec "lazy-boy" pour se recréer à l'occasion, individuellement tout au moins.

J'aimerais savoir ce que vous entendez faire à l'égard de nos collaborateurs et collaboratrices immédiats.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le whip de l'Opposition, je pense qu'on a déjà eu l'occasion, à d'autres moments, de parler de ce phénomène que j'ai moi-même constaté. J'aimerais d'abord, M. le Président, même s'il n'y a pas de dépôt de documents en commission parlementaire ni en commission plénière, remettre au whip de l'Opposition la politique d'embauche du personnel occasionnel, les critères d'embauche. J'aimerais que vous en ayez copie parce que

je pense qu'implicitement ça fait partie de votre question.

Après avoir parlé au directeur du personnel de ce problème, il y a plusieurs mois et au cours des dernières semaines également, je peux vous dire que, dans chacun des cas... Si vous voulez de plus amples détails, je pourrai vous les fournir à d'autres moments. Ce n'est pas le temps d'entrer dans des cas particuliers, surtout lors d'une commission plénière télévisée. Je suis en mesure de vous dire que j'ai des informations selon lesquelles dans ces cas-là le supérieur immédiat de la personne en question avait des motifs raisonnables d'aviser la direction du personnel que telle ou telle personne ne faisait pas le travail de la façon dont elle le devait. Donc, ce n'étaient pas des non-renouvellements de contrat discrétionnaires ou arbitraires, mais fondés sur des raisons qui paraissaient sérieuses. Si vous en faites une demande expresse, je suis prêt, à un autre moment, dans chacun des cas, à vous envoyer la liste des personnes concernées avec les raisons qui ont été invoquées pour leur non-renouvellement.

Quoi qu'il en soit, je vous ai remis il y a quelques minutes la politique d'embauche du personnel occasionnel à l'Assemblée nationale du Québec et je dois vous dire une chose en terminant sur ce sujet: en ce qui me concerne, je n'ai pas l'intention de m'impliquer directement dans la politique d'embauche du personnel occasionnel, entre autres, ceux dont vous parlez. Nous avons une direction du personnel qui comprend un directeur compétent et plusieurs personnes qui sont honnêtes, compétentes et intègres. Je puis vous dire que, dans tous les cas que vous avez à l'esprit, nous serons en mesure de justifier pourquoi tel acte a été posé.

M. Pagé: Je ne fais pas référence à des cas individuels. Le Parlement siège, c'est une des assemblées de la province qui siège peut-être le plus grand nombre de mois dans une année. Plusieurs des personnes qui sont ici ont un statut d'employé occasionnel. Plusieurs de ces personnes, que ce soit ici même sur le parquet de la Chambre ou dans les services de messagerie, les pages, au journal des Débats ou ailleurs... C'est évident, je ne demande pas que tout ce beau monde soit embauché à l'année, mais entre le statut d'un employé permanent, qui est là en disponibilité à l'année, besoin ou pas, et un statut strictement occasionnel - on sait ce que c'est que le statut d'occasionnel; à la fin du contrat, ça peut être: Bonjour, merci et au revoir - il y a un statut intermédiaire, à ma connaissance, et un effort pourrait être déployé dans ce sens-là. Je sais que, dans certains milieux, dans certains corps d'emploi, dans certaines classes d'emploi, il y a des droits de rappel qui existent et qui confèrent certains droits aux travailleurs qui occupent pendant une certaine période un emploi donné. Je dois vous dire, M. le Président, que le personnel d'un député à l'Assemblée nationale, c'est, dans un premier temps, sa secrétaire, je pense, et, par la suite, toute une foule de personnes qui s'occupent activement dans une journée à tenter de répondre à des besoins de différents ordres. C'est évident que le rythme des travaux parlementaires n'est pas de cinq jours par semaine, dix jours par année. La réponse facile, ce serait de dire: Écoutez, le statut, c'est occasionnel. C'est la voie la plus simple, c'est la voie la plus facile.

Il y a une façon de régler le problème, j'en suis convaincu, et j'espère qu'on pourra dégager de la part des services du personnel de l'Assemblée nationale une façon de le régler. Ce n'est pas drôle d'arriver ici à toutes les sessions, de changer de secrétaire ou de changer de personnel complètement. Pourquoi certaines catégories d'emploi sont-elles susceptibles d'être changées?

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): En boutade, je pourrais vous dire qu'il y a plusieurs députés qui ont changé plusieurs fois de secrétaire durant les dernières années, mais, pour compléter ma réponse, en ce qui concerne tout particulièrement le service des messagers et des pages, pour donner un complément de réponse, il y a des gens qui ont démissionné aussi. Il y a des gens qui sont devenus permanents parmi ceux qui ne sont plus ici à titre d'occasionnels, et il y a des gens qui se sont trouvé un emploi plus payant ailleurs. Donc, il ne faudrait pas présumer que, dans chaque cas de départ auquel on assiste, c'est un départ dû à un congédiement. Cela peut être une promotion, une permanence, ici ou ailleurs, dans le domaine privé. En terminant, je ne sais pas, je ne veux pas insister, je suis prêt à répondre aux questions encore longtemps, sauf que vous n'êtes pas sans savoir que, passé 18 heures, il y a une certaine politique qui s'applique, j'ai demandé au leader de l'appliquer. J'aimerais bien qu'on se l'applique à nous-mêmes.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aurais aimé avoir un mot de conclusion.

M. de Bellefeuille: Je vais vous laisser le temps de conclure, M. le Président. Je voudrais rapidement revenir à une

observation que le député de Portneuf a faite tout à l'heure à propos d'un dîner à l'occasion duquel le ministre des Affaires intergouvernementales aurait expliqué certaines de nos positions sur des questions constitutionnelles. Vous avez répondu, M. le Président, si j'ai bien compris, que vous entendiez prendre des mesures pour que cela ne se reproduise pas. Je veux bien, M. le Président, que vous preniez des mesures pour qu'on ne profite pas des relations interparlementaires pour exposer des positions partisanes ou strictement gouvernementales, mais je voudrais vous rappeler, avant que nous donnions trop vite raison au député de Portneuf, que, sur les questions constitutionnelles par rapport à des parlementaires britanniques, il y avait unanimité des partis à l'Assemblée nationale et que, dans des circonstances où il y a unanimité des partis, il est parfaitement normal que l'on expose à des parlementaires britanniques cette unanimité des partis.

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Deux-Montagnes, je ne vous rappellerai pas la théorie de Montesquieu sur la séparation des pouvoirs: le judiciaire, le législatif et l'exécutif. En ce qui me concerne, je maintiens, et ce n'est pas pour être d'accord avec le député de Portneuf, que, tout simplement parce que je tiens à ce principe de l'indépendance du législatif par rapport à l'exécutif, je maintiens que, lorsqu'une invitation est adressée par le président de l'Assemblée nationale à une délégation de parlementaires en mission officielle au Québec, je prétends que le représentant du président, si celui-ci est absent, doit être l'un de ses deux vice-présidents en premier lieu. C'est la réponse que j'ai à vous donner. En terminant, je m'étais engagé envers...

Le Président (M. Rancourt): C'est ce que j'allais vous demander.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je respecte toujours mes engagements en bon homme politique.

M. Pagé: Je n'en doute pas.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'aimerais déposer un document qui fait état de ce qui a été fait dans le plan quinquennal ou décennal, parce que je me pose la question pour voir si ce n'est pas un plan décennal de travaux à l'Assemblée nationale: ce qui a été fait, ce qui s'en vient au cours de la prochaine année. Je le dépose, c'est un document qui a été préparé par le bureau du président de l'Assemblée nationale et par l'Assemblée nationale et non pas par le ministère des Travaux publics, mais qui fait suite à la création du comité mixte conjoint des Travaux publics et de l'Assemblée nationale du Québec. (18 heures)

Le Président (M. Rancourt): Est-ce que ces programmes...

M. Vaillancourt (Jonquière): En terminant - si vous pouvez me permettre une minute - je voudrais remercier tout d'abord... Ah, oui! l'adoption des programmes!

Le Président (M. Rancourt): M. le Président de l'Assemblée nationale, j'aimerais bien savoir si les programmes 2, 3, 4, 5, 6 et 7 sont adoptés.

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Rancourt): Adopté. M. le Président de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement, trente secondes, tout d'abord pour remercier tous ceux qui m'ont aidé aujourd'hui, qui m'aident depuis le 11 novembre 1980, en fait, à remplir la tâche de président de l'Assemblée nationale. Vous n'êtes pas sans savoir, M. le Président, que la fonction de président de l'Assemblée nationale du Québec est très mal connue par les Québécois et les Québécoises. On s'imagine que présider l'Assemblée nationale, c'est présider la période des questions et présider les débats. Il faut que les Québécois et les Québécoises sachent que l'Assemblée nationale est aussi un ministère qui comprend au-delà de 825 employés permanents et 125 employés occasionnels, un budget de 43 000 000 $, un sous-ministre, trois directeurs généraux, plusieurs chefs de département qui composent, justement, cette pyramide où l'on retrouve au-delà de 950 employés. Donc, il y a aussi beaucoup d'administration à l'Assemblée nationale du Québec.

Je voudrais remercier tous les hauts fonctionnaires qui m'accompagnent aujourd'hui et d'autres qui ne sont pas ici, mais dont les mérites ne sont pas moindres, pour toute la collaboration qu'ils m'ont fournie. Merci également aux collègues de l'Assemblée nationale, plus particulièrement au critique en matière d'administration de l'Assemblée nationale, le député de Portneuf et whip de l'Opposition, et à tous ceux qui ont démontré de l'intérêt à cette commission de l'Assemblée nationale. Merci beaucoup.

M. Pagé: Merci, M. le Président. Très brièvement, je voudrais remercier le président, ses collaborateurs et sa collaboratrice pour les réponses qu'ils nous ont données. Je voudrais encore une fois, au

nom de l'Opposition, dire bien clairement, bien franchement et bien ouvertement au président, à tous ses collaborateurs et à sa collaboratrice qu'on accepte le travail et le dévouement qu'ils témoignent pour la cause des parlementaires québécois. Merci.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'invite tous les membres de l'Assemblée nationale, hauts fonctionnaires, députés de tous les partis politiques...

M. Pagé: On fait le rapport avant.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... au bureau de l'impartialité, au 103-B. Merci beaucoup.

M. Gagnon (président de la commission

plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous faire rapport que la commission plénière a adopté tous les crédits de l'Assemblée nationale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Ce rapport sera-t-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, je fais motion pour que nous suspendions nos travaux jusqu'à 20 heures ce soir.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nos travaux sont suspendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 05)

(Reprise de la séance à 20 h 02)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

Vous pouvez vous asseoir.

M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Fréchette: M. le Président, ce serait l'article 4 des affaires du jour. Je comprends que c'était le député de Maskinongé qui avait demandé l'ajournement du débat, il n'est pas là ce soir. Maintenant, on avait convenu de réserver son droit de parole pour le moment où il y sera.

Reprise du débat sur la deuxième lecture du projet de loi no 37

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Je vais donc lire l'article 4: "Reprise du débat sur la motion du ministre des Affaires municipales proposant que le projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, soit maintenant lu pour la deuxième fois." J'ai remarqué que le député de Saint-Henri, à la suite de cette entente, veut prendre la parole. M. le député.

M. Roma Hains

M. Hains: Merci, messieurs. M. le Président, le 30 novembre 1981, le gouvernement du Québec déposait à l'Assemblée nationale le projet de loi no 37 imposant la fusion des villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Depuis lors, que d'eau a coulé et que de paroles sur ce sujet explosif! Explosif pour nous du Parti libéral, parce que nous avons toujours vu dans ce projet une agression à la démocratie et à l'autodétermination des villes. En plus de cet argument fondamental, nous avons toujours douté du bien-fondé de cette fusion et les récentes études nous ont parfaitement donné raison. Nous y reviendrons plus loin.

Je m'arrête pour le moment sur la question de démocratie. Ce projet de loi no 37 illustre bien le sens actuel que le gouvernement donne à ce grand principe de la gouverne des peuples. Si on revient en arrière dans l'histoire des temps de conquête, c'étaient toujours les plus forts qui écrasaient les petits. Que de villes saccagées, anéanties, brûlées sous la loi des vandales! Mais, dans notre monde actuel, nous n'acceptons plus ces méthodes barbares; on se veut démocrate et respectueux des autres. On veut respecter les désirs des citoyens et c'est devenu pour tous une priorité. Dans les moments cruciaux où l'on semble hésiter entre deux tendances, on s'impose des consultations, des concertations dans le plus grand respect et on soumet les questions litigieuses à un référendum. On l'a déjà fait et ce fut retentissant, le fameux référendum sur la souveraineté-association.

Alors, pourquoi dans le cas de nos villes, Baie-Comeau et Hauterive, s'est-on obstiné à refuser cette consultation? Est-ce que les plus petits, les deux villes en l'occurrence, n'auraient pas eu ce droit inaliénable de la liberté de choix? Pourquoi deux poids et deux mesures? Pourquoi, cependant a-t-on permis un référendum à Pointe-aux-Trembles et persiste-t-on à le refuser aux deux autres villes précitées?

M. le Président, le gouvernement actuel, malgré toutes ses tendances et ses déclarations sociales-démocrates, a trop souvent la malheureuse habitude d'imposer ses décisions se basant sur sa prétendue infaillibilité. Ce projet de loi balaie de la main les notions les plus élémentaires du libre choix et les principes prioritaires de la démocratie.

Dans une première intervention sur ce projet de loi, sur la même longueur d'onde que mes collègues, j'énumérais les

déclarations antérieures des ministres actuels, alors qu'ils étaient dans l'Opposition en 1974. Le ministre actuel de la Justice, Marc-André Bédard, disait en ce temps-là: "La fusion doit être le fruit du consentement des populations qui ont eu l'occasion de s'exprimer majoritairement." Ou encore le vice-premier ministre, Jacques-Yvan Morin, déclarait solennellement en 1974: "Est-ce qu'on jette les uns sur les autres des gens qui se méfient? Quand on procède de la sorte, on récolte la tempête." L'ex-leader parlementaire, M. Claude Charron, disait ceci: "Nous, du Parti québécois, disons qu'aucune municipalité, aucune ville ne devrait subir de changement majeur profond jusqu'à la fusion sans que les citoyens de cette municipalité n'aient, par référendum, acquiescé à la proposition."

Et on pourrait continuer, M. le Président, ces citations de ces grands défenseurs de la liberté devenus muets dans le cas présent. Il y a, évidemment, très loin de l'Opposition au pouvoir ou, si on veut, de la coupe aux lèvres. Si l'habit ne fait pas le moine, comme dit le proverbe, le pouvoir a drôlement fait muer ces ténors des droits municipaux. D'ailleurs, le gouvernement actuel vire drôlement de cap par les temps qui courent. On affirme, de nos jours, le droit de déchirer une convention, le droit de trahir sa signature, d'imposer de nouvelles conditions de travail, même à l'encontre des clauses du code d'éthique professionnelle.

Étant de la mission éducative, M. le Président, toutes ces stratégies me rappellent drôlement l'attitude du ministre de l'Éducation. Lui, dans son optique infaillible, il a décidé qu'il fallait à fond une restructuration scolaire. Il affirme, avec son sens profond de l'insinuation, que cette réforme répond à une attente de la population. Pourtant, nous avons parcouru la province - et là-dessus, nous avons plusieurs milles d'avance sur le ministre - et nulle part nous n'avons trouvé de consensus sur la nécessité d'une telle restructuration scolaire. On désire quelques changements, mais non une refonte totale. Quand on entend M. le ministre nous dire qu'il recherche la démocratisation de l'école, c'est vraiment là qu'il déclenche le doute, le rire et les hochements de tête. Le pouvoir aux parents, passe encore, mais que chaque école soit autonome, c'est la mise en pratique du vieux proverbe: Diviser pour mieux régner. Chaque école jouera au bout de la ficelle, comme de multiples marionnettes manoeuvrées par le ministère de l'Éducation. Les moins clairvoyants crient déjà sans se tromper à l'étatisation des écoles.

On dit souvent que le pouvoir corrompt. Ici, c'est la social-démocratie qui en attrape pour son rhume. On a proclamé à cor et à cri les grands principes de la démocratie et, aujourd'hui, on la profane sans remords, imposant ses vues et ses décisions comme de véritables dictateurs. (20 h 10)

Dans le cas présent, on veut imposer la fusion parce que, dit-on, l'association des deux villes va sauver le développement économique de la région. N'est-ce pas troublant et dérisoire? Pour le Québec, c'est la séparation qui est profitable, mais pour Baie-Comeau et Hauterive, c'est la fusion. C'est vraiment dire que c'est toujours l'intérêt personnel qui fait jouer le prisme des couleurs et des avantages. Ce qui était bon hier ne l'est plus aujourd'hui et ce qui est bon pour soi ne l'est pas pour les autres. Les péquistes n'ayant jamais pu prouver qu'un Québec indépendant vivrait mieux que dans un cadre fédéraliste ont perdu le référendum. Aujourd'hui, voulant prouver que la fusion des villes précitées serait bénéfique, ils ont tellement peur de perdre un nouveau référendum qu'ils le refusent et veulent imposer leur décision par la loi no 37.

M. le Président, on cite souvent des rapports faits dans le passé pour justifier ce projet et, pourtant, dans les recherches faites par notre collègue Reed Scowen, aucune preuve à l'appui de ces affirmations du ministre Lessard. L'étude de Price Waterhouse, par exemple, dit ceci, il y a déjà 11 ans: "Suivant notre mandat, nous ne recommandons ni la fusion, ni le statu quo." Le rapport Major et Martin, lui, dont tout le monde a parlé, n'avait même pas comme étude le projet de fusion.

Alors, qu'est-ce qui pousse le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche à vouloir tellement faire cette fusion? Nous ne doutons pas des motifs du ministre, mais sa justification est toujours demeurée boiteuse et chez les intéressés la résistance s'est toujours accentuée jusqu'à nos jours. Ça devrait être pour lui un sujet de réflexion. Il ne faut pas tomber dans une politique totalitaire et certaines réflexions du ministre Lessard nous laissent des fois bien perplexes. Il nous a dit, par exemple: "La résistance des gens à cette fusion forcée est d'ordre sociologique et émotif." Pourtant, nous verrons plus loin que c'est aussi d'ordre économique. Alors, que reste-t-il pour justifier sa loi?

Non, le virus que renferme le projet de loi no 37, c'est le même virus qui contamine toute la politique gouvernementale actuelle, c'est le virus antidémocratique. Triomphal et orgueilleux au jour de sa victoire en 1976, le Parti québécois s'est mis à l'oeuvre avec détermination. Héritiers d'une bonne administration, malgré toutes les récriminations, ils ont voulu jouer aux grands seigneurs; les dépenses volaient généreuses, les syndicats jubilaient, les gens admiraient. Seule l'Opposition prévenait et s'opposait. Toujours obsédés par leur rêve de grandeur

indépendantiste et fidèles à une promesse électorale, ces héros du jour se risquent au référendum sur la souveraineté qu'on joint au mot association comme objectif plus rassurant. On bataille dur de part et d'autre pour un oui ou pour un non, mais le PQ mord la poussière de la défaite et c'est là le début d'une amertume sans nom, profonde comme la mer tumultueuse. Et comme la mer, ce sera un sac et un ressac continuel, parce que ces gens ne souffrent pas la contradiction et l'opposition.

Lors de l'élection, ils perdent encore des plumes, tout en remportant une victoire mitigée.

Une voix: On a 80 députés.

M. Hains: On est passé de 26 à 42. L'amertume se teinte maintenant d'un peu plus de dépit, car l'Opposition avait grossi ses effectifs. Vient alors la crise économique qu'on n'a pas prévue, bien qu'appréhendée; alors, ces fiers parlementaires se voient maintenant acculer à une nouvelle défaite, mais pire encore presque à la mendicité. Ils multiplient taxes sur taxes pour boucler des budgets et même doivent accabler leurs meilleurs soutiens politiques. Même la crise constitutionnelle s'est déroulée et s'est terminée par l'isolation hargneuse du Québec contre le reste du pays. Maintenant, la colère gronde chez le peuple, les syndicats menacent de représailles. Les corps publics ou professionnels se révoltent et nos glorieux élus se sentent maintenant coincés et torturés, mais, comme on le dit souvent dans la fable: Les chênes ne plient pas, ils cassent ou se brisent, résistant toujours aux tempêtes. C'est là, mesdames et messieurs, dans ces tourmentes, que l'amertume du référendum, le dépit des échecs et la rancune constitutionnelle se changent en une rancoeur incontrôlable. On veut alors couper toutes les têtes qui résistent. On veut se prouver à soi-même qu'on est encore maître et c'est là qu'on devient antidémocratique. Ayant perdu la confiance de la population, on lui en veut. On veut la dominer, la dompter, lui imposer ses vues et ses décisions et, de là à perdre le contrôle de soi-même et de ses affaires, il n'y a qu'un pas facile à franchir.

Le projet de loi no 37 dont nous parlons en deuxième lecture en est un exemple frappant. Ce projet de loi vivote déjà depuis six mois et nulle décision ne pointe encore à l'horizon. Va-t-on continuer sa marche ou l'effacer du rôle législatif? Souvent le ministre Lessard a fulminé contre l'Opposition et même contre la population: "Ces gens, dira-t-il, en parlant des citoyens, ont démontré un esprit maladif et un manque de cohésion." C'est vraiment arrogant. Quant au ministre "des affaires", lui, il se terre dans un mutisme complet.

Une voix: Des affaires? Des affaires de quoi?

M. Hains: Des Affaires municipales. Même après le rapport du comité conjoint, le 20 mai dernier. Est-ce là vraiment le sens de la démocratie?

Une voix: Sûrement pas.

M. Hains: Tu ne l'as pas gros, toi.

Pourquoi ce manque d'intérêt et ce silence équivoque? Ce rapport du comité conjoint des deux villes et des représentants de la Commission municipale du Québec est déposé depuis déjà trois semaines. Nul écho officiel depuis. Est-ce parce qu'il n'est pas tellement favorable à la fusion que ce rapport ne semble susciter aucun commentaire? C'est clair que, dans l'esprit et l'espoir du ministre Jacques Léonard, les résultats du document conjoint devaient prouver hors de tout doute la profitabilité de la fusion. Or, il n'en est rien et on a tout lieu de croire que les coûts de cette opération seraient tellement élevés qu'il y a lieu d'appréhender une hausse importante des taux de taxation.

Permettez-moi, M. le Président, de vous donner quelques conclusions du rapport officiel remis au ministre des Affaires municipales. Le coût annuel de la fusion s'établit à 4 303 700 $ payables entièrement par les citoyens de Baie-Comeau. Deuxièmement, les taxes augmenteraient d'environ 30%, dès la première année de fusion, à Baie-Comeau et cela baisserait à peine les taxes de Hauterive. Les chiffres dévoilés par le comité prouvent que les taxes augmenteraient tellement que le rôle de moteur économique de Baie-Comeau serait grandement compromis et que le développement industriel deviendrait, à toutes fins utiles, une utopie.

Hauterive fusionnée devra fixer un taux de taxation si élevé que l'avenir industriel et commercial du coeur économique de la région serait gravement compromis. Vu la situation financière de Hauterive, aucun aménagement domiciliaire n'est prévu pour les cinq premières années dans le secteur de Hauterive. Et malgré les affirmations de M. Lucien Lessard que les citoyens de Baie-Comeau ne seraient pas pénalisés, que leurs taxes ne monteraient pas et que la fusion se ferait dans le sens des intérêts des deux villes, le rapport ajoute qu'il en coûterait 4 000 000 $ par année aux seuls habitants de Baie-Comeau. Plutôt que de parler de la grosse force économique, on devrait donc parler de la grosse farce économique, car peut-on prétendre devenir un centre d'attraction économique en augmentant d'une façon aussi radicale les taxes foncières et la taxe d'affaires. (20 h 20)

M. le Président, devant de telles remarques, une seule conclusion s'impose, c'est le retrait du projet de loi no 37. Peut-être que le ministre des Affaires municipales aura la tentation de couper ici et là dans le projet pour le rendre plus acceptable et plus modeste, mais il ne faudra pas dans ces coupures humilier une partie de la population, celle surtout de Hauterive. Dans la conjoncture actuelle de crise et de restrictions, il est presque impensable de pouvoir revitaliser à 100% le secteur de Hauterive et de l'amener vers une plus grande prospérité. Alors, dans le présent, pourquoi fusionner la ville si l'on ne peut lui en donner plus ou améliorer sensiblement son sort?

Ce projet de loi ne fut qu'un beau rêve, si digne soit-il; tout était beau et bon, et l'on voulait procéder à la vapeur. Depuis un an déjà qu'on préparait ce projet chez M. Lessard et les péquistes, on s'explique mal, cependant, le manque de préparation et le manque d'évaluation de cette commande d'une fusion forcée. L'État n'a pas les fonds pour procéder dans ce dossier. Au lieu d'un avortement, il vaut mieux se bercer d'espérance et se dire que ce sera peut-être bon un jour avant de procéder au mariage. Il vaut mieux vivre accoté, comme je le disais une fois, plutôt que de contracter une alliance malheureuse pour les deux contractants.

Dans les circonstances et vu le rapport conjoint qu'on a reçu, vu aussi le temps perdu et l'argent investi dans ce projet, il vaut mieux admettre que cet espoir est vain et peu reluisant et que la meilleure solution demeure dans le retrait du projet de loi no 37. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que la deuxième lecture est adoptée?

M. Lachance: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Oui, M. le député de Bellechasse.

M. Lachance: M. le Président, je voudrais simplement bien amicalement, rappeler à mon collègue de Saint-Henri qu'en vertu de notre règlement on ne doit pas nommer les personnes par leur nom, mais par. leur titre. Alors, M. le député, vous auriez dû parler du ministre du Loisir.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Merci de rappeler le règlement que j'ai souventefois rappelé. Je sais que, de temps à autre, il y a des échappées, mais aussi il faut dire que, dans certains cas, quand l'on cite un texte soit d'un journal ou d'ailleurs et que le nom de la personne s'y trouve, il a la possibilité de le faire.

M. le député de Louis-Hébert. M. Réjean Doyon

M. Doyon: Merci, M. le Président. Le projet de loi que nous propose le Parti québécois est un projet qui, encore une fois, remet en question des principes fondamentaux et qui mérite d'être étudié d'une façon très spéciale de manière que nous puissions comprendre tous ensemble les principes qui y sont impliqués. Je pense qu'il faut remonter à la source et se poser la question suivante: Est-ce que nous sommes devant un projet de loi qui respecte le principe fondamental qui est celui de la démocratie? La démocratie, ce n'est pas seulement un mot; c'est aussi une réalité de tous les jours, qui doit être vécue et qui comporte des responsabilités très précises. La démocratie, c'est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. Et cela doit demeurer dans la réalité des choses et non simplement au niveau des paroles.

Ce que je veux dire, c'est que nous ne devons jamais croire en aucune circonstance, parce que nous détenons le pouvoir, parce que nous pouvons imposer certaines choses, que nous pouvons comprendre mieux ce que la population désire sans tenir compte de ses besoins et de l'expression de sa volonté.

Le Parti libéral dans ce projet de loi a pris une position qui veut que des consultations de nature référendaire aient lieu dans les deux municipalités, afin que nous puissions connaître d'une façon incontestable ce que la population désire, aussi bien à Baie-Comeau qu'à Hauterive.

Quand nous parlons de démocratie, M. le Président, et que nous parlons en même temps de municipalités et de villes, nous retournons à la source même de la démocratie, parce que, si je me souviens bien de mon histoire ancienne, les premières expressions de la démocratie ont eu lieu à l'intérieur de villes, de cités, les cités grecques plus particulièrement. Les anciens Grecs, M. le Président, se réunissaient, se rassemblaient, élisaient un conseil qui était l'agora, et ce conseil, qui est l'équivalent de notre conseil de ville, gouvernait la cité.

On ne parlait pas à cette époque, M. le Président, de pays, de grands ensembles. Les populations se gouvernaient au niveau de la cité seulement. Les gens qui étaient couverts, les gens qui étaient gouvernés, les gens civilisés étaient ceux qui étaient compris à l'intérieur d'une même ville. Dans le cas présent, dans le cas de Hauterive et de Baie-Comeau, on est à la base même de ce qui doit constituer les assises de notre démocratie.

C'est pour cette raison, M. le Président, qu'on doit être extrêmement prudent, de façon à ne pas bafouer, à ne pas mettre de côté l'expression faite par des

gens qui sont le plus près de la population, qui ont le plus accès aux gouvernés, aux administrés, pour prétendre qu'on connaît mieux qu'eux les besoins qu'ils ont, quelle est la nature de leurs besoins et quelles sont les meilleures solutions qui pourraient leur convenir. Je crois, M. le Président, qu'il faut se méfier de croire que les études qu'on fait, que les sentiments, les impressions qu'on a que les grands ensembles sont nécessairement meilleurs, c'est une règle de conduite qui doit être traduite par la fusion forcée de deux villes.

Je crois qu'il y a tout lieu de s'interroger profondément, à savoir s'il n'y a pas lieu de faire montre de la plus extrême prudence, de façon que ce qui touche de plus près les citoyens, c'est-à-dire les services municipaux, les services d'incendie, les services d'aqueduc, les services d'égout, les services de police, les services de pavage de rues, d'éclairage, etc., sont des préoccupations peut-être terre à terre, mais très immédiates et auxquelles les citoyens sont habitués. Ils ont le droit d'avoir sur ces choses un contrôle qui soit le plus direct possible, le plus immédiat possible, et tout ce qui irait à I'encontre de cela, M. le Président, doit faire l'objet d'une extrême prudence, doit faire l'objet d'un désir de s'assurer que les gestes qu'on pose ne sont pas contraires à ce que la population désire. Il est peut-être facile de dire qu'on le fait pour le plus grand bien de la population, qu'on le fait de façon à améliorer l'ensemble et d'oublier que si on pose ces gestes sans se préoccuper d'avoir trouvé chez la population ce désir de s'associer à quelqu'un d'autre, ce qu'on fera donnera de mauvais fruits, développera de mauvaises relations ce qui, finalement, aura des résultats absolument contraires à ceux qu'on recherche. Il est très louable de penser à améliorer en regroupant des gens et en fusionnant. Il est louable au niveau des principes de défendre ces choses, mais il faut regarder ce que la réalité nous enseigne à ce sujet. Il faut regarder de près si on n'aura pas exactement les résultats contraires à ceux qu'on recherche. (20 h 30)

M. le Président, le Parti libéral a demandé un rapport d'un comité conjoint. Ce comité conjoint, comme vous le savez, M. le Président, était composé tout d'abord de trois représentants de la Commission municipale du Québec. Il y avait, entre autres, le vice-président de la commission municipale, M. J.-P. Boucher. Il y avait un commissaire de la commission municipale, M. Gilles Arès, qui est un comptable agréé, et il y avait M. Lionel Harvey, un commissaire à la Commission municipale. Il y avait aussi trois représentants de la ville de Hauterive, M. Serge Simard, conseiller municipal, M. Jean-Guy Rousseau, gérant, et Mme R.-B.

Landry, trésorière; il y avait, finalement, trois représentants de la ville de Baie-Comeau, c'étaient M. Sylva Lord, conseiller municipal, M. Guy Massicotte, ingénieur et gérant, M. Normand Brochu, ingénieur et gérant adjoint. Ces gens-là ont passé de nombreuses semaines, et je ne sais combien de séances à étudier les implications financières, les implications budgétaires d'une fusion telle que celle proposée par le projet de loi no 37.

Les résultats qui ont été dévoilés par ce comité conjoint sont très probants, sont extrêmement probants, et il est bon de souligner ici qu'il n'y a eu aucune voix dissidente en ce qui concerne ce rapport, tout le monde a signé, ça a été unanime, et je pense qu'à partir de là, le rapport prend une force beaucoup plus grande encore, c'est-à-dire que les représentants de Hauterive ont signé le rapport et que les représentants de la commission municipale, qui sont des experts, qui avaient été désignés à ce titre comme soutien technique par le ministère des Affaires municipales, ont aussi signé un rapport; ce rapport qui est déposé maintenant depuis trois semaines a dévoilé que l'étude démontrait qu'on pouvait établir le coût annuel de la fusion à 4 303 700 $, coût payable entièrement par les citoyens de la ville de Baie-Comeau.

Il est à remarquer qu'en décembre 1981, la ville de Baie-Comeau avait prédit des coûts de 4 252 000 $; il y a donc à peu près équivalence au niveau des prévisions qui avaient été faites par la ville de Baie-Comeau. Dans les circonstances, il est aussi à remarquer qu'il est souligné dans le rapport que ces montants que je viens de mentionner ne tiennent pas compte de la perte des revenus qui sont tirés du réseau électrique de la ville de Baie-Comeau, revenus de l'ordre annuel de 2 000 000 $ pour 1982 en tout cas. On peut donc affirmer, sur la foi de ce rapport, qu'il y a des coûts considérables qui sont entraînés pour la ville de Baie-Comeau en ce qui concerne les taxes, les efforts fiscaux qui devront être faits par les contribuables de Baie-Comeau.

Dans les circonstances, ce serait illusoire, ce serait se bercer d'illusions que de croire qu'on peut faire accepter un tel effort fiscal par des gens qui, de toute façon, trouvent qu'ils font déjà un effort suffisant en ce qui concerne leur ville. On ne peut pas demander à des gens de faire abstraction de leur intérêt personnel et d'accepter tout simplement parce que ce serait un beau geste de leur part, parce que ce serait apprécié du gouvernement et parce que le gouvernement le leur demande. On ne peut pas demander aux citoyens de Baie-Comeau de faire un tel sacrifice, je pense que c'est irréaliste de croire cela et que le gouvernement tente de convaincre la

population au moyen d'arguments, au moyen d'exemples, au moyen de différentes choses ou de différents avantages qu'il peut leur faire valoir, je crois que cela est acceptable, que cela est dans les règles du jeu, mais qu'on désire le faire avec une loi purement et simplement en disant: Voici ce que nous avons décidé parce que nous, le gouvernement, non seulement nous pensons que c'est mieux pour vous, mais aussi nous avons le pouvoir de le faire et, à partir de là, nous allons exercer ce pouvoir-là. Je pense que c'est clairement un abus de pouvoir. L'Opposition ne nie pas au gouvernement que c'est un pouvoir dont il dispose; on ne le nie pas cela. Ce que nous disons, et notre propos est tout simplement à cet effet, c'est qu'il n'est pas opportun de poser ce geste actuellement et qu'il produira des effets contraires à ceux qui sont recherchés et qu'on se retrouvera dans une situation pire après que celle qui précédait le statu quo ante dont on ne veut plus justement.

Remarquons qu'au niveau des coûts d'intégration de services, le rapport dont je parlais tout à l'heure établit ces coûts-là à 1 193 400 $ en mai 1982, donc pratiquement à l'heure où nous nous parlons, et que les prévisions de la ville de Baie-Comeau, en décembre 1981, étaient de 1 252 550 $. Encore là, très peu de différence entre les prévisions de la ville de Baie-Comeau et les prévisions du comité conjoint en mai 1982. Il y a donc, encore une fois, concordance, ce qui doit nous amener à conclure que la ville de Baie-Comeau était bien fondée de faire valoir ses craintes et ses hésitations et de tenter d'amener le gouvernement à renoncer, tel que l'Opposition le suggère au gouvernement, à ce projet de loi qui, pour des raisons évidentes, n'est à l'avantage ni de Baie-Comeau, ni de Hauterive.

Je pense qu'on peut aussi établir que le rapport nous indique que la taxe après la fusion, si elle se réalise, en 1986, sera de 4 $ les 100 $ d'évaluation à Baie-Comeau, alors que Baie-Comeau prévoyait en décembre 1981 que cette taxe serait, après la fusion, en 1986, de 3,21 $. On s'aperçoit que Baie-Comeau a été très prudente. La ville de Baie-Comeau ne faisait pas de charriage, comme on dit, quand elle hésitait à croire les chiffres qui étaient avancés par le ministre des Affaires municipales qui affirmait que, finalement, la fusion n'occasionnerait pas à Baie-Comeau les augmentations de taxes de la nature de celles que Baie-Comeau prévoyait. Là encore, on s'aperçoit que Baie-Comeau non seulement n'était pas au-dessus de ce que le comité avait établi, mais était 0,79 $ en bas. Je pense que c'est important de le signaler en passant, M. le Président.

Il est aussi important de signaler qu'il n'y aura finalement pas à Hauterive de diminution de taxes appréciable. À Hauterive, on se retrouvera, selon le rapport du comité conjoint, avec une taxe de 4,25 $, alors que les prévisions de Baie-Comeau l'établissaient pour 1986 à 3,21 $, encore beaucoup moins que ce qu'avait établi le comité conjoint. Notons aussi, M. le Président, qu'au chapitre de la taxe sur la propriété à Baie-Comeau, pour une propriété de 40 000 $ en 1986... Il faut regarder un peu plus loin que l'année en cours; il faut regarder l'année prochaine et l'autre année d'après, si on veut avoir une idée des conséquences à long terme de ce projet de loi, il faut quand même regarder ce qui se passerait, par exemple, en 1986, qui a été prise comme année charnière, si vous voulez, M. le Président. Qu'apprend-on dans le rapport du comité conjoint? On apprend que la taxe, en 1986, pour une maison évaluée à 40 000 $ - et il n'y a rien d'exagéré là-dedans, une maison de 40 000 $, c'est absolument courant, vous le savez - la taxe s'établira à 1600 $, alors que Baie-Comeau, dans ses prévisions qui, encore une fois, étaient ultraprudentes - et Baie-Comeau, il est à noter, faisait sa bataille sur la base de ces prévisions - avait fixé cette taxe à 1284 $. Encore une fois, une différence considérable.

Si on regarde maintenant ce qui se passerait à Hauterive, c'est à peu près la même chose. La taxe s'établirait à 1700 $, alors que les prévisions de Baie-Comeau l'établissaient à 1284 $. On s'aperçoit que là aussi il y a une différence qui fait que le gouvernement devrait se rendre compte qu'il n'y a pas lieu d'aller de l'avant avec ce projet de loi et qu'il devrait faire marche arrière. M. le Président, il n'y a pas de honte à dire: On n'avait pas tous les chiffres. On n'avait pas toutes les données. Maintenant que les données sont publiques, que les données nous ont été fournies par des organismes crédibles, par un comité conjoint auquel le gouvernement a donné son aval en nommant à ce comité, au titre du support technique, trois membres de la Commission municipale du Québec, il n'y aurait pas de honte - et l'Opposition ne blâmerait pas le gouvernement, l'Opposition reconnaîtrait que le gouvernement a parfaitement le droit d'agir et qu'il agit dans ce cas en bon administrateur - à retirer ce projet de loi no 37, M. le Président.

Je pense qu'il faut reconnaître qu'on ne peut pas forcer des gens à vivre ensemble et à partager le même maire, les mêmes conseillers, le même hôtel de ville et les mêmes services s'ils ne veulent pas le faire. Les gens d'en face ont souvent comparé les communautés qui ne veulent pas vivre ensemble comme deux scorpions qu'on met dans un bocal. Ce sont des comparaisons qui nous ont été faites à de nombreuses reprises, des comparaisons qui ont frappé l'imagination en certaines circonstances et qu'il était

peut-être de bonne guerre d'amener. Je vous signale ce qu'on est en train de faire avec Baie-Comeau et avec Hauterive: c'est de prendre deux scorpions et de les mettre dans le même bocal en espérant qu'ils vont s'entendre. Je pense que c'est amener à coup sûr la destruction de ces deux communautés et que le gouvernement devrait éviter de faire cela. (20 h 40)

Je pense en terminant que c'est paradoxal de constater que ce gouvernement, qui est un gouvernement qui, dans le moment, axe son action politique sur la séparation du Québec, sur son retrait de la Confédération, veut tenter, alors qu'il est lui-même à l'intérieur même d'une fédération, d'une communauté qui fonctionne, de faire le contraire avec Baie-Comeau et Hauterive, c'est-à-dire tenter de fusionner ces entités, de les mettre ensemble, de les obliger à vivre ensemble, quand son objectif politique a lui est justement l'opposé de la fusion, le contraire de la fusion, puisque c'est la séparation.

Par quel miracle peut-il nous faire croire que ce qui serait valable dans le cas du Québec, c'est-à-dire l'anti-fusion, c'est-à-dire la séparation, que ce qui est désirable pour le Québec, serait néfaste pour Baie-Comeau et Hauterive? On a déjà une situation de fait qui nous apprend que ces gens-là vivent depuis de nombreuses années, des décennies, séparés l'un de l'autre et qu'ils s'entendent raisonnablement bien. Comment le gouvernement peut-il prêcher un credo politique qui est un credo d'anti-fusion, de séparation, et en même temps proposer à Baie-Comeau ce que lui-même refuse et ce qu'on a déjà au Canada, c'est-à-dire la fusion. On a cela au Canada, nous autres, une espèce de fusion qui s'appelle la fédération; le gouvernement affirme que cette fusion n'est pas désirable pour le Canada mais il la juge désirable pour Baie-Comeau. Poser la question c'est y répondre, je crois que le gouvernement manque d'arguments là-dessus, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, je ne voudrais que ce soit pris sur mon temps, mais je note que le quorum n'existe pas dans cette Assemblée, auriez-vous l'obligeance de vérifier, s'il vous plaît?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Nous allons vérifier. Il y a maintenant quorum. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Merci beaucoup, M. le Président. C'est drôle de constater que, sur un projet de loi auquel deux ministres du cabinet accordent tellement d'importance, on ait de la difficulté à avoir suffisamment de gens du côté du Parti québécois pour avoir quorum dans cette Assemblée.

Le projet de loi no 37 s'intitule "Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et Hauterive". M. le Président, n'auriez-vous pas l'obligation de maintenir la tranquillité?

Le Vice-Président (M. Jolivet): II est vrai que j'ai cette obligation, mais je vais avoir l'obligeance de demander aux gens de permettre au député, en vertu de l'article 100 - tout allait bien jusqu'à maintenant -de continuer. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Merci beaucoup, M. le Président. Ce projet de loi, je le disais donc, prévoit que la nouvelle ville, qui force deux municipalités à vivre ensemble, succède suivant l'article 2 du projet de loi aux droits, obligations, et charges des villes de Baie-Comeau et de Hauterive.

L'article 21 dudit projet de loi prévoit que la première séance du conseil provisoire, le nouveau conseil de ville, a lieu sans autre avis de convocation le troisième lundi suivant le 1er janvier 1982. L'article 4 prévoit que la première élection générale a lieu pour la ville le premier dimanche de mars 1982. L'article 11, à son sous-paragraphe 4, prévoit que, pour l'exercice financier de 1982, au lieu d'expédier un compte provisoire de taxes, la ville peut choisir de n'expédier, avant le 15 mai 1982, qu'un compte définitif, accompagné de l'avis d'évaluation, pour les taxes et compensations municipales. À l'article 5, alinéa 4, on prévoit que si aucun membre du conseil d'une municipalité mentionnée à l'article 2 (soit Baie-Comeau et Hauterive) n'assiste aux deux premières séances du conseil provisoire, le ministre des Affaires municipales peut désigner (d'office), parmi les personnes possédant le cens d'éligibilité et résidant dans le territoire de la municipalité dont tous les membres du conseil sont en défaut, le nombre de personnes requis pour siéger aux lieu et place des personnes en défaut. Que constate-t-on? On constate qu'on est en face d'un projet de loi que le gouvernement voulait passer au rouleau compresseur. On est en face d'un projet de loi qui prévoit un nouveau conseil municipal. On est en face d'un projet de loi qui prévoit la taxation, qui prévoit prendre de l'argent dans les poches des gens. On est en face d'un projet de loi -et je pense qu'on le doit un peu à l'habileté combinée du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et du ministre des Affaires municipales - où, si les gens n'en veulent vraiment pas, s'il n'y a pas un conseiller qui vient siéger, s'il n'y a pas un maire là, on va les nommer, parce qu'on est à Québec; on

n'est plus dans nos comtés, on est "boss" et cela va marcher à notre façon. C'est ce que contient le projet de loi.

Si le Parti libéral du Québec prend la peine de s'attarder sur ce projet de loi, c'est peut-être pour rafraîchir la mémoire d'un gouvernement qui a vieilli, qui a tellement vieilli qu'il en a perdu la mémoire et qu'il a oublié ce que contenait le programme du Parti québécois. Il a oublié qu'à l'article 4 du programme du Parti québécois on disait ce qui suit: "Améliorer l'administration municipale (premier élément) a) en consacrant le droit des citoyens à l'information afin qu'ils puissent prendre des décisions éclairées; b) en organisant une véritable consultation des citoyens." M. le Président, ce que le Parti libéral a demandé dans ce débat, c'est une véritable consultation des citoyens et, du côté ministériel, les députés d'arrière-ban qui ont des municipalités dans leur comté vont oublier le contenu du programme officiel de leur parti, vont oublier, M. le Président, un principe de démocratie aussi essentiel, vont oublier les paroles de l'ex-leader du gouvernement, M. Claude Charron, qui s'exprimait comme suit sur un projet de loi qui fusionnait obligatoirement deux autres municipalités.

Le député de Saint-Jacques nous disait: "Nous, du Parti québécois, disons qu'aucune municipalité, aucune ville, aucune agglomération urbaine ne devrait subir de changement majeur, profond qui va même, à l'occasion, jusqu'à la fusion avec d'autres municipalités sans que les citoyens -M. le Président, c'était le député de Saint-Jacques alors dans des fonctions importantes de cette municipalité n'aient, par un référendum clair, net et précis sur la question, acquiescé à la proposition soit des élus municipaux, soit du gouvernement du Québec." Et le député de Saint-Jacques de continuer dans la même ligne que le programme du Parti québécois: "Ce principe que nous retrouvons dans chacune des étapes et dans chacun des chapitres du programme du Parti québécois, cet engagement et cette volonté nette de ne jamais procéder à un changement qui a des conséquences quotidiennes sur la vie des citoyens sans que ceux-ci n'aient préalablement été informés, obligatoirement été consultés, sans qu'ils n'aient eux-mêmes librement décidé du sort de ce changement, c'est ce principe que nous défendons." (20 h 50)

Et le député de Saint-Jacques de continuer: "II est nécessaire de consulter, car, autrement, il y a des contribuables de certaines municipalités, des villes en projet de fusion qui auront effectivement à payer les frais de cette fusion sans qu'ils n'ont pu avoir l'occasion de juger après avoir été informés, éclairés et consultés. Ils écrivent bien, M. le Président...

M. Rocheleau: Question de règlement, M. le Président, s'il vous plaît. Je voudrais qu'on applique l'article 28 du règlement. Il n'y a pas encore quorum.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je vais compter.

Une voix: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Non, M. le député. Non. Tout à l'heure. Dans ce cas, je vais faire sonner les cloches. Qu'on sonne.

(Suspension de la séance à 20 h 52) (Reprise de la séance à 20 h 53)

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de directive de la part du député de Duplessis.

M. Perron: Pourriez-vous me dire parce que j'ai regardé le règlement comme beaucoup de gens dans cette Assemblée - à quel endroit et quel article du règlement dit que ce sont les ministériels qui doivent garder le quorum? On s'aperçoit que, de l'autre côté, il n'y a que deux députés libéraux et que de ce côté-ci, on a la différence du quorum.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Pour les besoins de la cause, je vais vous lire l'article 28: "Le quorum de l'Assemblée ou de la commission plénière est de trente députés y compris le président; ce nombre est réduit à 20 lorsqu'une commission élue de l'Assemblée siège en même temps que l'Assemblée ou la commission plénière." Au moment où nous nous parlons, il y a deux commissions parlementaires et, en conséquence, nous devons avoir ici en cette Assemblée 20 personnes. Rien dans le règlement n'indique que le nombre de personnes doit être partagé entre le parti au pouvoir et le parti d'Opposition.

En conséquence, je n'ai, en aucune façon, à vous donner des directives quant à la demande que vous me faites. Tout ce que je peux vous dire, c'est que je dois, comme président, en m'incluant, constater qu'il y a 20 députés en cette Assemblée. Comme il y a maintenant 20 députés en cette Assemblée, excluant le temps qu'on a pris pour obtenir ce quorum, je laisse la parole au député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Vous avez mentionné, à juste titre, que le quorum était de 20. Le député de Duplessis a souligné qu'il y avait deux députés libéraux. Je tiens pour acquis

qu'il y a au moins 18 députés péquistes et que la population du Québec aura compris que deux députés libéraux sur des projets de loi antidémocratiques, sur des projets de loi qui s'attaquent aux droits fondamentaux, sont capables, un vendredi soir, même s'il est tard, de faire face à une vingtaine de péquistes et on va le faire à n'importe quel moment.

M. le Président, je comprends que le parti...

Le Vice-Président (M. Jolivet):

Seulement pour éviter quoi que ce soit, je vous ai laissé aller, M. le député, je dois vous dire que votre intervention n'avait aucunement affaire à la demande de directive. Vous avez cependant droit à votre opinion, mais je dois vous dire que nous parlons du projet de loi no 37 sur la fusion de Baie-Comeau et de Hauterive.

M. Paradis: C'est pour cette raison, M. le Président, que j'ai dit que c'était antidémocratique, que c'était fait de façon poussée, au rouleau-compresseur, pour écraser la population de cette région de la province.

M. le Président, je comprends que les gens du Parti québécois qui seront appelés à voter sur ce projet de loi n'aiment pas se faire rappeler le contenu de leur programme officiel. Cela peut leur poser des problèmes de conscience lorsque le moment de voter arrivera. Je comprends que le Parti québécois ait de la difficulté à maintenir le quorum en cette Chambre et qu'il n'aime pas entendre l'ex-leader parlementaire, le député de Saint-Jacques, leur rappeler les principes fondamentaux de la démocratie. Je comprends également que les députés de l'autre côté de cette Chambre préfèrent être ailleurs qu'entendre citer le parrain officiel de ce projet de loi, l'honorable député de Saguenay, qui disait, le 18 décembre 1974, et si c'est un homme de parole, je sais qu'il contribuera avec l'Opposition à s'opposer à ce projet, parce qu'il a compris qu'il a conté des mensonges à la population... Et je cite une déclaration de Lucien Lessard: "Je sais que, tôt ou tard, il faudra envisager des possibilités de fusion entre deux villes comme Baie-Comeau et Hauterive. Cependant, dans la région, jamais nous n'accepterons que le gouvernement vienne nous imposer une fusion sans aucune consultation préalable, sans qu'il y ait, au préalable, un référendum au niveau de la population." La même journée, parce qu'à ce moment-là, il était dans un état d'âme démocratique - il a peut-être changé la journée où il a parrainé le projet de loi -"Nous voulons que les populations qui seront fusionnées aient d'abord appris à vivre ensemble. Nous voulons que ces populations qui seront les premières touchées, les premières impliquées dans ce nouveau système soient d'abord consultées par référendum."

Ce ne sont pas les paroles du député de Brome-Missisquoi que vous entendez, ce sont les paroles du député de Saguenay, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Le 18 décembre 1974, le même ministre qui me fait signe que oui, parce qu'il reconnaît avoir prononcé ces paroles, nous disait - je cite encore une fois le député de Saguenay - "Ce n'est pas de l'enfantillage, quand on parle de fusion de certaines villes. Il ne s'agit pas de jouer avec l'avenir des citoyens de ces régions. Il nous apparaît tout à fait normal et logique que les populations concernées puissent être consultées."

Je pourrais, dans le même sens, M. le Président, si le temps me le permettait, vous citer l'honorable ministre aux Affaire intergouvernementales, Jacques-Yvan Morin. Je pourrais vous citer le ministre de la Justice actuel, je pourrais vous citer le ministre de l'Environnement. Je pourrais vous citer à peu près tous les ministres de ce cabinet.

Ce qui m'inquiète, après toutes ces citations, ce qui m'inquiète, après avoir lu le programme du Parti québécois, ce qui m'inquiète, c'est qu'on dit qu'on ne fera jamais quelque chose sans référendum. On le fait dans un coin de la province, on a essayé de le faire le plus discrètement possible, on a essayé de le faire avec la complicité et l'habileté du ministre des Affaires municipales, un petit peu avec son portefeuille en même temps, un petit montant de 2 000 000 $ pour essayer d'adoucir, d'amoindrir, d'arrondir les coins. On s'est dit: Personne au Québec ne se rendra compte qu'on vient de violer des principes inaliénables, un principe de démocratie. Personnne au Québec ne s'apercevra qu'on a manqué à notre parole, qu'on a trahi notre programme officiel, qu'on a trahi les propos des ministres qui se sont déjà prononcés. Cela va se faire en pleine nuit et personne ne va s'en apercevoir, parce que le ministre Léonard, avec sa petite main de loup et ses 2 000 000 $... Si les gars refusent d'aller siéger, il va en trouver quelques-uns et cela va tout s'arranger sans que personne ne s'aperçoive de rien.

M. le Président, cela m'inquiète comme citoyen du Québec, parce que, avant que ce projet de loi soit déposé, je vous le dis bien humblement, je ne connaissais pas à fond les villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Je ne connaissais pas le secteur industriel, le secteur touristique, le secteur culturel. Je ne connaissais pas les activités de ces gens. Je connaissais celles des gens par chez nous, d'autres régions du Québec, mais cela m'a éveillé, parce que je me suis dit: S'ils sont capables de faire cela aux gens qui habitent

un comté de député péquiste, s'ils sont capables de faire cela à des gens qui habitent un comté de ministre péquiste, s'ils sont capables de renier leur parole dans une situation comme celle-là, quelle garantie est-ce que j'ai de plus comme Québécois, comme résident du comté de Brome-Missisquoi que l'article du programme du Parti québécois qui dit qu'il n'y aura pas de séparation, qu'il n'y aura pas d'indépendance sans référendum va être respecté? Est-ce que j'ai une garantie lorsque j'entends tous ces ministres dire que c'est un principe inviolable? (21 heures)

Lorsque je lis cet article inviolable dans le programme du Parti québécois, je regarde cela et j'ai la même garantie. La population de chez nous a la même garantie, la garantie de faire confiance à des gens comme cela. Un petit matin, les gens qui manquent à leur parole sur une petite affaire comme Baie-Comeau-Hauterive, ce n'est pas bien bien important, n'est-ce pas M. le ministre? Ils pourront manquer à leur parole sur une affaire beaucoup plus importante, sur une affaire qui guette l'avenir du Québec dans la fédération canadienne, et cela me fait peur, M. le ministre, quand vous manquez à votre parole.

On a encore certains principes pour lesquels on doit se battre dans cette Chambre et l'on se bat avec d'autant plus d'ardeur qu'on apprend à aimer les gens du coin qu'on défend, qu'on apprend à aimer les gens de Baie-Comeau. Je ne sais pas si les parlementaires du Parti québécois se sont complètement fermé les yeux il y a quelques semaines alors que les gens de Baie-Comeau, non pas en contestataires, non pas en personnes qui voulaient renverser le gouvernement, mais en personnes qui voulaient présenter leur problème à la face de la population, sont arrivés à Québec, sous le thème "Baie-Comeau vous aime". Ils nous ont présenté les richesses de leur municipalité; peut-être que le ministre a déjà connu ces richesses, mais il semble les avoir oubliées. Il a oublié Baie-Comeau, une ville industrielle, il a oublié Baie-Comeau avec ses exploitations forestières, avec sa papeterie, avec son aluminerie, avec ses silos à grains. Il a oublié Baie-Comeau avec son port de mer, il a oublié Baie-Comeau - cela devait être un peu plus difficile pour lui parce qu'il paraît qu'il allait faire du ski souvent à cet endroit avant que le monde le mette dehors dans ce coin - avec son centre de plein air du mont Tibasse; il paraît qu'il n'y va plus, il a sans doute peur de se casser une jambe en ski. Il a oublié les organisations de loisir, le club de curling de Baie-Comeau, il a oublié le club de motoneige Les Montagnais. Il a oublié le club de tir Les Pionniers; il a oublié le club de golf de Baie-Comeau, il a oublié tout cela d'un coup sec. Il a oublié que Baie-Comeau a une appartenance, une histoire, un patrimoine propre dans la province de Québec. Il a oublié le championnat canadien de judo en 1980. Il a oublié le championnat provincial de patinage artistique en 1976. Il a oublié les Jeux régionaux d'été de 1971 et de 1972. Il a oublié le congrès provincial des chambres de commerce.

J'entends de l'autre côté des voix qui disent: Qu'est-ce que cela a d'affaire ici? C'est cela un milieu d'appartenance; c'est cela une communauté; c'est cela une autonomie locale et c'est cela qui est inviolable. C'est cela que vous n'avez pas compris de l'autre côté de la Chambre; c'est cela qui vous fait manquer à votre parole, à la parole des militants péquistes. Tous les militants péquistes qui nous écoutent ici ce soir voient leur gouvernement, M. Lucien Lessard en tête - excusez, je n'ai pas le droit - le député de Saguenay, avec son copilote, le ministre des Affaires municipales, "crasher" leur avion dans tous ses principes qui sont là-dedans. Je ne veux pas qu'ils viennent "crasher" leur avion dans les principes qu'on défend, des principes de démocratie au nom de la population du Québec.

Il y a souvent des cas où, lorsqu'on est loin des problèmes, c'est bon de retourner se ressourcer sur le plan local. C'est bon de retourner voir ce que les journalistes du coin en disent. C'est bon de lire les grands journaux, mais quelquefois les journalistes du coin ont encore ce sentiment d'appartenance. Les gens qui ont le sentiment d'appartenance disent, et je vous cite un éditorial de M. René Vallée du 28 mai 1982 dans le journal Le Nordic: "La population s'explique difficilement qu'un projet de fusion qu'on devait adopter à la vapeur soit continuellement retardé. Cela fait un an, au moins, que les péquistes préparent le projet -que les péquistes préparent le projet, comprenez bien, c'est un éditorialiste, ce n'est pas le député de Brome-Missisquoi qui dit cela - voilà que les chiffres du comité conjoint éveillent un doute dans les esprits." Les chiffres commencent à s'enregistrer, on va s'apercevoir de ce qu'il va en coûter; en plus de se faire violer des principes inaliénables, on va avoir à payer pour cela à Baie-Comeau. Pourtant, on aurait dû évaluer ces chiffres avant de nous commander une fusion forcée. Nous avons l'impression que quelque chose ne tourne pas rond, mais tourne carré de la part des deux ministres, et ce n'est pas les 2 000 000 $ qui ont permis à M. Léonard d'arrondir les petits coins. Cela va en prendre peut-être plus, mais à Baie-Comeau, les gens ont assez de principes que ce n'est pas avec de l'argent que l'on va les acheter.

Nos deux communautés doivent trouver leur avantage dans une telle entreprise; tant qu'un doute persiste dans les esprits, il est

peu recommandable de ne pas en tenir compte. Il semble de plus que l'État n'ait pas grand argent à investir dans la fusion. Plus le temps passe, moins le Québec a d'argent. Le régime des coupures est le seul qu'on connaît présentement pour allonger les déficits. Même s'ils sont en région, ils analysent quand même les coupures, les déficits, les trous. Si Québec n'a pas d'autre solution qu'une invitation au partage fraternel dans l'espérance qu'un jour tout ira mieux, il serait alors préférable qu'on retire carrément le projet de loi no 37.

M. le ministre, voici ce que je vous demande au nom des gens qui résident là-bas. Maintenant que vous avez vos études en main - parce que l'Opposition a retardé suffisamment le projet de loi pour que vous ayez des études - est-ce que vous seriez capable de répondre aux 6000 personnes qui ont signé une pétition, déposée ce matin par le député de Hull, de vous rendre sur place et d'expliquer à la personne qui paie, pour une maison de 40 000 $ à Baie-Comeau en 1982, 900 $ de taxes annuelles, que l'an prochain elle paiera 1160 $, qu'en 1984 elle paiera 1204 $, qu'en 1985 elle paiera 1356 $, qu'en 1986 elle paiera 1600 $ et qu'en 1987, elle sera obligée de la vendre? Êtes-vous capable d'aller lui expliquer cela? Si vous pouvez la convaincre, on vous dira merci de l'avoir convaincue.

En terminant, M. le Président, je vois les deux parrains assis à ces chaises, si vous avez le courage, MM. les ministres, de commenter l'étude que vous avez reçue devant la population locale et que cette population vous dit: Oui, on veut vivre ensemble, on veut la fusion, vous la ferez la fusion et vous la ferez en vertu d'une loi déjà existante votée par le Parti libéral, une loi sur les fusions volontaires des municipalités. S'ils vous disent non, relisez votre programme, relisez MM. Charron, Morin, Bédard et vos principes et agissez suivant des principes, n'agissez pas suivant de petites manigances péquistes achetées à coups de 2 000 000 $. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Portneuf et whip de l'Opposition.

M. Michel Pagé

M. Pagé: Merci, M. le Président, nous avons entendu plusieurs interventions sur le projet de loi no 37 autant en deuxième lecture que lors de l'étude de la motion de report. Il y a une atmosphère de malaise qui a toujours prévalu en cette Chambre pendant l'étude de ce projet de loi; à chaque fois, à chaque séance où on a eu à se pencher sur le projet de loi no 37, il était facilement perceptible qu'un sentiment de malaise et d'inquiétude prévalait plus particulièrement du côté de la majorité péquiste.

Le gouvernement n'est pas fier de de projet de loi. Les députés péquistes, à juste titre, je pense, manifestent un air interrogateur à l'égard de ce projet de loi. Pourquoi un projet de loi comme celui-là? Pourquoi le gouvernement du Québec, un gouvernement qui est élu avec un programme politique, un gouvernement qui est élu avec une certaine tradition à l'égard de la chose municipale, un gouvernement qui, avant d'occuper les banquettes de votre droite, M. le Président, a eu l'occasion de se prononcer, de ce côté-ci de la Chambre, à l'égard de projets de lois comme celui-là. (21 h 10)

Certains diront que l'Opposition, à l'Assemblée nationale, le Parti libéral du Québec, s'est prévalu de tous les recours possible de façon parlementaire pour bloquer ce projet de loi. Je pense que la position adoptée par notre parti à cet égard ne reflète en rien une volonté pour nous de freiner tout désir qui pourrait s'exprimer dans ces deux villes du comté de Saguenay. L'inquiétude procède du motif de ce geste. Nous sommes surpris de voir agir le Parti québécois après avoir pris des engagements aussi fermes par la déclaration du chef de l'Opposition d'alors qui occupait le fauteuil ici, M. Morin, par des déclarations comme celles de ses cinq autres collègues qui formaient l'Opposition officielle à l'Assemblée nationale dans le cadre particulier de l'étude d'autres projets de loi comme celui-là. Qu'il nous suffise de vous référer aux fusions des municipalités au Lac-Saint-Jean et dans l'Outaouais québécois; essentiellement, le message qui était véhiculé par le Parti québécois à l'époque, c'était qu'une fusion ne peut pas se faire sans un consentement clairement exprimé par les contribuables qui sont affectés par une telle fusion. Et cela, c'est un principe qui est en soi tout à fait respectable, tout à fait justifié.

Il y a un autre élément. Vous me direz: Celui qui est l'artisan de cette fusion - et de cela tout le monde peut en convenir -c'est le député du comté. C'est le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui a, d'ailleurs, convaincu son collègue des Affaires municipales...

Le Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: Je me suis rendu faire un tour à la commission parlementaire au mois de décembre, lorsqu'on a eu le privilège d'avoir ici dans nos murs des citoyens et citoyennes des villes de Baie-Comeau et de Hauterive, notamment. M. le Président, vous n'étiez probablement pas là à ce moment, vous deviez occuper le fauteuil ici; on avait siégé jusqu'à 3 heures ou 4 heures du matin. C'était presque gênant de voir la situation,

combien délicate, combien difficile pour lui, dans laquelle se retrouvait le ministre des Affaires municipales qui se devait par solidarité ministérielle, et c'est normal, d'être solidaire, d'appuyer le député du comté et, par surcroît, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

Je vous disais donc que l'artisan de ce projet de loi - il ne faut pas se le cacher, c'est connu, c'est su, c'est public - c'est le député. Est-ce qu'on peut, à ce moment, adresser quelque reproche au député parce qu'il a été lui-même, comme homme public depuis douze ans déjà, l'artisan d'une telle fusion? À cet égard, je ne crois pas qu'on puisse lui adresser quelque reproche que ce soit, parce que je pense qu'un député dans un comté est quand même placé au premier plan des perspectives d'avenir de ces municipalités. Jusque-là, pas de problème. Mais là où on n'est pas d'accord, là où on s'inquiète, c'est qu'un député présente à son caucus, à son Conseil des ministres un projet de loi comme celui-là, une action politique, un geste juridique comme celui-là qui va, premièrement, à l'encontre de la tradition exprimée par le parti, qui va à l'encontre du programme politique du parti et qui va aussi contre les intérêts d'un pourcentage important des contribuables de ces deux municipalités. C'est là que les règles du jeu sont changées.

Autant moi, je crois qu'un député a son mot à dire dans son comté, et cela va de soi, autant, par contre, ce mot à dire doit s'établir selon certains paramètres. On a eu des inquiétudes lorsqu'on a vu arriver le projet de loi et on a posé certaines questions. Le ministre du comté, le député de Saguenay, nous a dit: Ne soyez pas inquiets, cela ne coûtera pas plus cher aux citoyens de Baie-Comeau. Vous ne connaissez pas le comté, vous allez vous faire battre dans le comté. Le Parti libéral du Québec va voir son pourcentage de votes diminuer, mais M. le Président...

Une voix: La démocratie, ça n'a pas de couleur.

Le Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Merci, M. le Président. J'espère que je vais pouvoir compléter mon intervention et que les députés libéraux ne seront pas l'objet de menaces aussi clairement exprimées que celles que j'ai entendues il y a quelques minutes. M. le Président, j'étais à vous dire que notre inquiétude c'est qu'on s'est demandé quels étaient les motifs qui étaient recherchés par le gouvernement et plus particulièrement par le député du comté lorsque le projet a été déposé.

Je tiens à ce moment-ci à remercier au nom de ma formation politique, au nom des députés à l'Assemblée un de nos collègues qui a travaillé d'arrache-pied, qui n'a pas ménagé ses efforts, qui a investi beaucoup de capital humain depuis bientôt sept mois dans ce dossier, qui s'est rendu sur place, qui a écouté les gens, qui n'a pas eu peur d'aller les rencontrer, qui ne s'est pas fait paqueter des assemblées pour aller converser avec les citoyens là-bas, qui a été beaucoup plus démocratique dans sa démarche que le ministre des Affaires municipales peut l'être actuellement, lui qui hésite, qui a peur de se rendre à Baie-Comeau pour expliquer les conclusions du rapport, qui est toujours caché derrière quelque paravent que ce soit, et je parle du ministre des Affaires municipales, vous allez comprendre. D'ailleurs, M. le Président, je n'ai vraiment pas besoin de le nommer. Je pense que sa renommée est clairement acquise à cet égard, ce n'est pas le plus brave parmi "cette gang".

M. le Président, vous aurez compris que je veux remercier ce soir le député de Hull et le porte-parole des affaires municipales... Celui qui, pendant les mois de décembre et février a posé des questions au ministre des Affaires municipales lors de la commission parlementaire qui a confronté le ministre des Affaires municipales avec des chiffres précis sur l'impact du coût de la fusion pour les citoyens de Baie-Comeau. On se rappellera, M. le Président, qu'à plusieurs reprises tant le ministre des Affaires municipales que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ont voulu réfuter les arguments de l'honorable député de Hull en lui disant que, d'une part, il n'était pas de la région et que, d'autre part, il ne connaissait pas son dossier, et que les chiffres qu'il avançait étaient sans fondement, qu'il n'avait pas assez de pénétration dans le milieu pour savoir ce qu'il pouvait véhiculer comme message ici.

À chacune de ces occasions, le député de Hull a demandé tout d'abord - et il a ainsi exprimé la position de notre parti - un rapport, une enquête, une étude qui seraient faits sur l'implication de la fusion, quitte à ce qu'on ait des représentants des deux municipalités et aussi de la Commission municipale. Ce comité a siégé, ce comité a délibéré, ce comité a analysé et il a conclu, M. le Président. Or, les conclusions du rapport viennent confirmer en tout point et même à certains égards viennent ajouter aux chiffres qui étaient avancés tant par la municipalité de Baie-Comeau que par le député de Hull, qui a été en mesure souvent de véhiculer leur inquiétude ici. Le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, j'en conviens, M. le Président, encore une fois, a un droit comme député, qui appartient à tous les députés de cette Chambre, d'être placé à

l'avant-scène de l'orientation du développement dans un comté. D'accord, on en convient. Mais pas à n'importe quel prix, par exemple. Le ministre, en janvier 1982, formulait certaines prévisions, on se le rappellera, certaines précisions; dès le moment où cela a été exprimé, on a eu tous les motifs de s'inquiéter parce qu'on sait que la performance du gouvernement du Parti québécois, en termes de prévisions, M. le Président, ce n'est pas un cadeau.

D'ailleurs, on le paie aujourd'hui. Coût d'intégration des services, prévisions de la municipalité de Baie-Comeau en décembre 1981, exprimées ici à l'Assemblée nationale du Québec: 1 252 250 $. Prévisions de la municipalité de Hauterive: 250 000 $. Prévisions de l'honorable député: 0,0 $, M. le Président. Prévisions du comité conjoint de mai 1982: 1 193 000 $. Cela est différent. C'est pas mal différent de 0,0 $ à 1 193 000 $. Je comprends que cela peut ne susciter aucune inquiétude chez les députés péquistes qui sont en arrière, aucune inquiétude chez le ministre des Affaires municipales, qui tout mal à l'aise qu'il puisse être avec ce projet de loi, ne dira probablement pas un mot là-dessus. Cela se comprend, ce n'est pas vous autres qui payez. Ce sont les contribuables qui vont payer, par exemple, et je comprends ces contribuables de s'être débattus tant qu'ils ont pu, malgré les moyens limités qu'ils ont. Je les comprends de s'inquiéter d'un tel chiffre, le coût annuel de la fusion parce que cela aura des impacts, l'intégration des services, etc. Je pense que le député de Hull est en mesure de bien indiquer à cette Chambre tous les impacts du coût annuel de cette fusion. On aura l'occasion d'en discuter en commission parlementaire, cela va de soi. (21 h 20)

Le coût annuel de la fusion, selon les prévisions du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, le député de Saguenay, en janvier 1982, était de 0,0 $. Cela ne coûtera pas un cent de plus. Les prévisions de Baie-Comeau - le ministre a dû se dire à ce moment-là, c'est de l'enthousiasme - étaient de 4 252 000 $. Les prévisions de la municipalité de Hauterive, beaucoup plus modestes, étaient de 1 000 000 $. Les prévisions de M. Lessard - je le répète -étaient de 0,0 $. Les prévisions du comité conjoint, non pas formé par l'Opposition, ou seulement par la ville de Baie-Comeau, mais formé par Baie-Comeau, Hauterive et des représentants de la commission municipale, des gens qui sont là avec toute l'intégrité et toute l'autorité qu'ils possèdent, tout le bon jugement et le sens du devoir qu'ils ont, délégués ainsi par le ministre des Affaires municipales, ces gens arrivent à quel montant? Les prévisions de Baie-Comeau sont de 4 252 000 $ et celles du comité conjoint, de 4 303 700 $. Les prévisions de M.

Lessard: 0,0 $.

Continuons, M. le Président. La taxe après la fusion à Baie-Comeau, évaluée en 1986, est de 3,21 $ du 100 $. Les prévisions de M. Lessard en janvier 1982: 2,57 $. Les prévisions du comité conjoint, toujours pour l'année 1986: 4 $ du 100 $ d'évaluation. La taxe après la fusion à Hauterive en 1986, toujours selon les prévisions de la municipalité de Baie-Comeau: 3,21 $. Les prévisions de M. le ministre et député du comté: 2,57 $. Les prévisions du comité conjoint: Le citoyen aura à payer 4,25 $ du 100 $ d'évaluation en 1986. La taxe sur la propriété à Baie-Comeau, présumée et évaluée pour 1986, pour une propriété évaluée à 40 000 $, la taxe que le citoyen de Baie-Comeau aurait à payer au lendemain de cette fusion: 1284 $; prévisions de M. Lessard: 1028 $; prévisions du comité conjoint: 1600 $.

M. le Président, quand on voit autant de chiffres, quand on voit des conclusions et des prévisions qui seront aussi coûteuses et aussi onéreuses pour le contribuable des municipalités, on comprend que des manifestations s'organisent, on comprend que ces gens veulent véhiculer leur message. À défaut d'être capables de se faire comprendre par le député du comté qui est normalement là pour véhiculer leur opinion, leurs besoins, leurs prévisions et leur orientation pour l'avenir, ces gens ont été obligés de faire quoi? De déployer des efforts dans les communications, de s'organiser à la radio et à la télévision. Je comprends qu'ils ont probablement fait - et ce, à juste titre - leur lobbying auprès des députés péquistes. Ceux-ci sont demeurés muets, n'ont pas dit un mot. Ils ont dit: C'est le député du comté, il a l'autorité. C'est peut-être son dernier mandat. C'est probablement son testament. On n'a pas le choix, on va laisser passer et on va laisser courir.

Un député, même dans son dernier mandat, qui, par surcroît, a été douze ans à l'Assemblée nationale du Québec, qui a occupé une place importante dans l'Opposition, comme c'est le cas pour les 43 députés libéraux actuellement, pendant quelques années, qui a fait son travail pour le Québec comme ministre à l'Assemblée nationale du Québec, je comprends qu'un député, un homme politique veuille laisser quelque chose avant de partir. Ce sera, de la part de celui-ci un pont; de la part de celui-là, une école; de la part du député de Saguenay, c'est probablement une fusion. Mais à quel prix?

Ces gens sont venus nous rencontrer. On a été très réceptif à leurs représentations, cela va de soi. On sait que le Parti libéral du Québec, pas parfait qu'il a été, est bien conscient qu'il doit être près de la population et il se veut davantage près

de la population. Il se veut être à l'écoute de cette population. On sait que nous aussi, on a fait des erreurs. D'ailleurs, si on n'en avait pas fait, on serait encore au pouvoir, messieurs, mais vous en faites tellement, que cela ne sera pas long, vous allez vous en venir de ce côté-ci. On a peut-être fait des erreurs dans des cas de fusion. On en a peut-être fait et, aujourd'hui, on est en mesure de réévaluer notre action. On est en mesure de réévaluer nos positions. C'est pourquoi, même si ce projet de loi est présenté ici à l'Assemblée nationale par le paravent gouvernemental par excellence, le ministre des Affaires municipales, on sait pertinemment que celui qui soutient le paravent, c'est le grand ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. On sait que c'est lui qui est en arrière de cela, même si l'autre en avant est bien mal à l'aise. On ne peut pas accepter cela, M. le Président. On se devait d'intervenir nombreux, parce que aujourd'hui c'est Baie-Comeau et demain, cela peut être d'autres municipalités. Un gouvernement qui est prêt à accepter cela, un gouvernement qui est prêt à renier ses principes, qui est prêt à renier ses engagements, qui est prêt à mettre de côté la parole clairement exprimée par ses représentants, lorsqu'il était dans l'Opposition. Je m'excuse, M. le Président, renier sa parole je ne devrais pas en parler, il est habitué maintenant; on sait ce qui se passe dans les négociations dans les secteurs public et parapublic. Le PQ n'a plus de parole, le PQ n'a pas de parole et cela commence à être clairement ressenti dans la population et les gens le savent.

Je termine, M. le Président, en vous disant ceci. Aujourd'hui, c'est Baie-Comeau et Hauterive; demain, est-ce que ce sera Québec et Sillery? Est-ce que ce sera d'autres municipalités du Québec? Est-ce que ce sera des municipalités comme Ancienne-Lorette, Loretteville qui seront fusionnées sous le couperet dictatorial du député de Charlesbourg, quoiqu'il n'est plus ministre, c'est peut-être un peu moins inquiétant actuellement. Cela peut arriver. Cela peut être d'autres municipalités, M. le Président, demain matin qui soient soumises à un régime imposé, un régime inacceptable pour les contribuables du Québec.

J'espère que notre démarche d'une quarantaine d'interventions, autant en deuxième lecture que sur la motion de report, pourra faire comprendre quelque chose au ministre des Affaires municipales, ce pauvre ministre des Affaires municipales. Je suis persuadé qu'il y a eu des commentaires au caucus. Je suis convaincu qu'il y a des députés qui se sont levés et qui ont dit: M. le président du caucus, M. le premier ministre, cela n'a pas de bon sens. Il y en a d'autres qui ne se sont probablement pas levés de crainte de se faire couper leur subvention du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. On sait ce que c'est, M. le Président.

Alors, j'espère que le gouvernement aura compris qu'à la lumière du rapport qui vient d'être déposé, il apparaît clairement -et je termine là-dessus, M. le Président -que les inquiétudes qui ont été formulées par la municipalité de Baie-Comeau se révèlent fondées. Ce n'est pas juste l'Opposition qui le dit, c'est la Commission municipale du Québec avec des représentants sur le comité des deux municipalités. Une fusion, M. le Président, pour qu'elle puisse s'intégrer, pour qu'elle puisse se faire sans trop d'écueils, comme l'a si bien exprimé mon collègue de Brome-Missisquoi, tout à l'heure, en termes de contexte et d'impact social dans la population, cela doit se faire sur une base volontaire. Alors, que le gouvernement se tourne de bord, qu'il aille consulter la population, qu'il n'ait pas peur d'aller la voir, qu'il réévalue sa position et, au besoin, qu'il retire son projet de loi et qu'il enclenche, par la suite, un autre mécanisme, un mécanisme de dialogue, un mécanisme de consultation, un mécanisme d'ouverture entre le gouvernement et la population et qui pourra peut-être conduire éventuellement à une fusion volontaire des deux municipalités.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette deuxième lecture est adoptée?

M. le député de Bonaventure et leader de l'Opposition.

M. Gérard D. Levesque

M. Levesque (Bonaventure): Je voudrais tout simplement, avant que nous ayons l'occasion d'entendre le ministre des Affaires municipales exercer son droit de réplique, ajouter quelques mots. Ces mots me sont inspirés, surtout ce soir, par le silence total jusqu'à maintenant et cela toute la soirée, vous l'avez vu vous-même, M. le Président, le silence total des ministériels au sujet de ce projet de loi. Ce silence contraste singulièrement avec les romans-fleuves que ces députés savent nous servir lorsqu'il s'agit de parler de l'avenir du Québec, un avenir qui sera si beau lorsque nous serons enfin délivrés de ce pays qui s'appelle ou qui s'appelait le Canada, que nous verrons bientôt. (21 h 30)

Voyez-vous, M. le Président, ils se sont réveillés, juste à dire cela et les voilà complètement éloquents, les applaudissements, c'est merveilleux. Nous les avons réveillés, M. le Président, nous avons touché la note et la seule note qu'ils comprennent: la note autonomiste, pas encore assez fort, la note souverainiste, pas encore assez fort, la vraie note indépendantiste. Là, nous savons où se trouvent les intérêts de

ces gens, et je les remercie de cette franchise qui ne peut même pas être silencieuse comme cette majorité a été silencieuse ce soir et dans la plupart des débats entourant cette fusion que l'on veut faire de Hauterive et de Baie-Comeau.

Je dois vous dire que j'ai pour ces populations de Hauterive et de Baie-Comeau également la plus grande estime, d'autant plus qu'elles ne sont pas tellement loin de la Gaspésie, de mon comté de Bonaventure, et plusieurs habitants de Baie-Comeau et de Hauterive viennent de la région que je représente ici à l'Assemblée nationale. Alors, je peux vous dire que je me sens très près de cette population et je ne voudrais pas que ni l'une ni l'autre de ces populations de Hauterive et de Baie-Comeau soit indûment traitée, ait à subir des conséquences qui ne lui seraient pas favorables.

Je m'imagine bien que le député de Saguenay doit être inspiré, lui qui est encore plus près de cette population, par cette volonté de voir à éviter des perturbations d'ordre social; je suppose qu'il voudrait garder ces deux populations très près l'une de l'autre et respecter évidemment la volonté de ces populations.

Est-ce que ce projet de loi va atteindre ses fins? Je me pose la question et il me semble d'autant plus difficile d'arriver à cette conclusion que nous avons vu au cours de ces derniers mois une évolution du dossier qui a été assez positive, si l'on veut, et cela grâce au travail du député de Hull et de ses collaborateurs, qui ont fait en sorte que toute la députation libérale soit sensibilisée à cette question de la fusion envisagée par le projet de loi que nous discutons présentement. Je voudrais dire que le député de Hull en particulier a étudié la situation non seulement d'une façon livresque, mais s'est rendu sur les lieux; il a voulu renconter la population, il a voulu nous rapporter à nous de l'équipe libérale les sentiments de cette population; nous n'avons pas seulement entendu un son de cloche, nous avons voulu également entendre ceux qui étaient favorables à la fusion, nous avons voulu écouter autant Baie-Comeau que Hauterive, nous avons voulu savoir ce qui était favorable et défavorable, nous avons voulu dire à la population de Hauterive et de Baie-Comeau que nous n'étions pas nécessairement contre la fusion des deux villes, mais que nous voulions que ce soit fait d'une façon civilisée, d'une façon qui respecte les citoyens de ces deux villes. C'est pourquoi nous avons voulu insister auprès du gouvernement, pousser le gouvernement à poser des gestes et nous nous sentions à ce moment-là appuyés par la population. Nous avons voulu intéresser la population concernée, et c'est ce qui a amené le gouvernement finalement à se retrancher derrière la formation d'un comité qui pourrait être représentatif de la population des deux villes et en même temps de ce grand organisme gouvernemental qu'on appelle la Commission municipale du Québec, dont on connaît l'objectivité et la compétence. Les gens formant ce comité se sont penchés sur la situation beaucoup mieux que quiconque d'entre nous pourrait le faire individuellement. Il y avait là l'expertise nécessaire, il y avait les intérêts qui pouvaient se confronter, il y a des chiffres qui pouvaient se confronter et se vérifier. Nous arrivons à la fin de tout cet exercice pendant que nous, ici, à l'Assemblée nationale nous tenons le fort pour qu'il ne se pose pas des gestes irrémédiables, irréversibles qui soient de nature à nuire à l'un ou à l'autre. Nous arrivons finalement au dépôt d'un rapport qui nous est arrivé il y a environ trois semaines. Le rapport est éloquent et à la fois troublant jusqu'à un certain point lorsqu'on voit qu'il y a des écarts tellement considérables entre ce qu'on nous avait dit et ce que le rapport nous dit. À ce moment, je me suis dit: Le gouvernement est chanceux, les villes en question sont chanceuses que nous ayons pu modérer un peu le processus, le retarder un peu afin que nous soyons tous le mieux éclairés possible. J'aurais pensé, à ce moment, que le gouvernement se serait empressé de venir à cette Chambre et de dire: Voici, nous avons maintenant un rapport et nous l'avons étudié; nous en sommes venus à la conclusion qu'il y a eu des erreurs, non pas des erreurs voulues, errare humanum est, mais des erreurs que nous avons l'intention de corriger. Nous n'avons pas l'intention à ce moment d'imposer une fusion qui aurait pour effet de créer autant de perturbations économiques, sociales, financières, budgétaires. Nous avons trouvé une solution que nous allons maintenant annoncer publiquement.

Mais non, M. le Président, ce qui me surprend, c'est ce silence, un silence de mort. Si le gouvernement était arrivé à des conclusions qui soient de nature à rallier les intervenants, les intéressés, à ce moment, j'imagine que nous aurions eu droit à une déclaration ministérielle. Ce gouvernement ne se gêne pas pour faire des déclarations ministérielles lorsque d'autres populations peuvent être impliquées. Cette question est dans le paysage depuis des mois, sinon des années. Pourquoi n'aurions-nous pas eu cette semaine, par exemple, ou même la semaine dernière, de la part du ministre des Affaires municipales, une déclaration dans laquelle il informerait la Chambre qu'à la suite du rapport signé d'ailleurs par Baie-Comeau, par Hauterive, par la commission municipale, bien, mon Dieu, nous arrivons à des conclusions qui nous permettent de suggérer une nouvelle solution?

Maintenant, mon bon ami, le ministre

du Loisir, de la Chasse et de la Pêche m'indique que ce n'est pas trop vrai, cela. Moi, je prends les informations...

M. Lessard: C'est de la publicité de Baie-Comeau.

M. Levesque (Bonaventure): Bien, voyons, je n'ai pas de préférence pour l'une ou l'autre des villes. Je les aime toutes les deux. J'aime la population de Baie-Comeau autant que la population de Hauterive. Je n'ai absolument aucun intérêt là-dedans. Moi, tout ce que je cherche, c'est une solution qui soit juste, raisonnable et qui tienne compte, évidemment, des principes que vous-mêmes, vous avez défendus et avec quelle vigueur. Je me rappellerai toujours ces discours à l'emporte-pièce de ces oppositionnistes du temps qui nous faisaient vibrer tellement ils semblaient convaincus de la justesse de leurs propos et de la profondeur de leurs convictions.

Devant ces faits, je ne peux pas m'expliquer le silence dont nous sommes témoins encore ce soir. Tout en félicitant mes collègues, le député de Hull, les membres de sa mission sur les affaires municipales, tout en félicitant ceux qui se sont penchés pour préparer le rapport, j'aimerais ajouter mes félicitations au ministre. Mais son silence m'empêche de le faire et, s'il avait eu quelque chose à dire, il aurait dû le dire avant ce soir. Pourquoi avoir laissé siéger la Chambre? Cela coûte de l'argent, il y a autre chose qu'on pourrait faire. Vous laissez faire des discours les uns après les autres; avez-vous un secret à dire en réplique? Vous auriez dû le dire il y a déjà quelque temps. Quelle sorte de réplique nous réserve le ministre? Ou est-ce qu'il a hâte de s'en aller en commission parlementaire élue où tout cela peut se faire plus en cachette, en dehors de ces fameuses caméras de la télévision? Là, on pourra continuer à discuter, à placoter si l'on veut.

Mais la population voudrait savoir ce qui se passe. Est-ce que ce rapport est bon, valable? Est-ce que le ministre a l'intention de dire: Ce rapport indique qu'on s'est trompé de 3 000 000 $, 4 000 000 $ ou je ne sais pas quoi et là on va régler cela, on va le payer? C'est cela que le ministre va faire? (21 h 40)

Est-ce que le ministre va dire: II y a une situation; nous sommes en faveur de la fusion, mais nous constatons qu'il faut y mettre des cents. Est-ce que le ministre veut y mettre des cents? Il aurait eu beau, pendant que tous les députés sont ici, nous faire une déclaration ministérielle alors que tous les collègues sont ici. Est-ce qu'il attend qu'il n'y ait plus personne en Chambre, ce soir, pour faire sa déclaration? Qu'est-ce qui se passe? Il me semble que ce que nous demandons est raisonnable. Nous demandons d'avoir l'occasion, et nous aurions dû l'avoir dès le lendemain ou au moins quelques heures, quelques jours... On comprend que cela peut prendre un peu de temps pour lire ce rapport; cela ne nous a pas pris de temps à nous, mais le ministre doit probablement demander conseil sur telle ou telle partie du rapport afin de se faire une idée définitive de la situation; il doit peut-être l'apporter au Conseil des ministres et au Conseil du trésor pour s'assurer qu'il aura les cents nécessaires pour régler son affaire.

Finalement, est-ce que le ministre a une réponse? Il a dû avoir une réponse, cela fait plus de trois semaines qu'il a ce rapport; il a dû avoir des rapports intérimaires, possiblement de la commission municipale; il a dû avoir des renseignements. Pourquoi ce silence? Pourquoi l'impose-t-on aux autres députés qui sont gênés ce soir? Non seulement ils sont gênés, mais ils sont absents et il n'y a pas quorum. On est rendu qu'on ne peut plus siéger ce soir parce qu'il n'y a pas assez de députés. Est-ce qu'on est convaincu de cela? Pourtant, lorsqu'on arrive dans les questions touchant l'avenir constitutionnel du Québec et du fédéral, ils sont tous là de l'autre côté; il n'en manque pas un. Tout le monde se bat avec le whip pour parler. On les voit qui disent, dans ce temps-là: Je veux avoir ma chance, je n'ai pas parlé, je n'ai pas fait mon... Pourquoi ne pas l'avoir fait ce soir? Pourquoi ce silence lorsqu'il s'agit de quelque chose de concret, non pas de quelque chose de futuriste, d'utopique et d'irréalisable dans les faits? On arrive à quelque chose qui touche réellement les populations concrètes, vivantes qui attendent une réponse du gouvernement. Le gouvernement ne parle pas, les députés ne parlent pas, mais mon Dieu... Je voyais cela ce soir, je n'avais pas l'intention de parler, mais il faut au moins que je proteste.

Je demande au gouvernement, et au seul député qui va parler apparemment ce soir et qui va exercer son droit de réplique, mon bon ami, le ministre des Affaires municipales, j'espère qu'on va mettre fin à ce débat, qu'on va arriver à des solutions, qu'on n'imposera pas des choses que le rapport nous indique comme ne devant pas être adoptées dans l'état actuel des choses, à moins que le ministre n'ait des secrets, qu'il n'ait gardé des choses dans la manche gauche ou dans la manche droite, qu'il n'ait peut-être une indication de la solution qui sera finalement retenue par le gouvernement.

Encore une fois, je veux féliciter le député de Hull et son équipe et tous mes collègues de l'Assemblée nationale, du côté de l'Opposition, et j'espère qu'à la fin de ce débat, nous pourrons féliciter également - je le souhaite de tout mon coeur - le ministre des Affaires municipales. On dirait qu'il a

hâte de se lever, c'est le seul qui a hâte de se lever. C'est probablement parce qu'il est le seul à avoir la réponse attendue, qui sera, je l'espère, bien accueillie par l'une et l'autre des villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires municipales, votre droit de réplique.

M. Jacques Léonard (réplique)

M. Léonard: M. le Président, je suis très heureux de conclure aujourd'hui ce débat de deuxième lecture d'un projet de loi que nous avions lancé il y a déjà plusieurs mois. Le dépôt a été fait le 30 novembre dernier; la commission parlementaire a eu lieu le 15 décembre dernier; le début de la deuxième lecture, que nous terminons aujourd'hui, a eu lieu le 23 mars dernier.

Je voudrais quand même rappeler certains éléments et qu'en parallèle à la détermination que nous avions mise dans les objectifs de ce projet de loi, nous avions aussi souhaité, à plusieurs reprises, qu'il y ait un débat large, ouvert, serein, dynamique, qui ait lieu à cette Assemblée comme au sein des villes de Baie-Comeau et de Hauterive. Nous avions dit, lors du dépôt de ce projet, en novembre, que nous étions conscients d'une urgence sociale certaine et que le milieu devait collaborer de tous ses avis et de tous ses commentaires à l'objectif de faire de l'agglomération de Baie-Comeau un ensemble municipal plus intégré, plus concurrentiel, tant en termes d'équipement que d'avenir économique.

J'ai le sentiment, M. le Président, d'avoir recueilli un nombre de témoignages positifs très volumineux depuis la venue de ce projet de loi. Beaucoup de citoyens, plusieurs organismes de développement économique comme les chambres de commerce locales, le conseil de développement régional et plusieurs autres contribuables des deux villes actuelles de Baie-Comeau et de Hauterive - j'ai d'ailleurs rencontré les deux maires, séparément, à un moment donné - nous ont fait part de leurs avis favorables depuis un bon moment.

Lors de ma visite, il y a quelques semaines, quand j'ai adressé la parole à plus de 3000 citoyens, que je qualifierai d'enthousiastes, de l'agglomération de Baie-Comeau, des gens de Hauterive et de Baie-Comeau, les deux villes, je leur avais d'ailleurs annoncé que la commission municipale allait venir appuyer techniquement le comité conjoint des deux villes qui travaillait à des hypothèses financières ou organisationnelles de Baie-Comeau et de Hauterive.

Il nous faut rappeler, évidemment, les objectifs que nous avons recherchés et qui reçoivent de plus en plus d'appui dans l'opinion publique, tant du milieu que du reste du Québec, parce que le dossier, M. le Président, commence à être connu partout au Québec. Je pourrais même répéter mot à mot mes premières déclarations ici, à l'Assemblée nationale. Je ne le ferai pas car je sais qu'il est assez tard, merci. Nous voulions, comme gouvernement, accorder un coup de pouce additionnel aux contribuables de l'agglomération de Baie-Comeau et de Hauterive tout en gardant le respect qu'il a toujours eu envers la plus large autonomie municipale possible et une concordance idéale avec la situation particulière et exceptionnelle que vivent les contribuables et les citoyens de ce milieu.

Le projet veut permettre que se forme sur la Côte-Nord du Saint-Laurent un pôle économique et social dont l'équipement sera concurrentiel et puissant. C'est ce que je disais à l'époque, je le dis encore: il veut que se forme dans l'agglomération de Baie-Comeau, au milieu d'une des régions les plus vitales du Québec, une ville mieux planifiée, mieux équilibrée, mieux intégrée, mieux articulée, qui sera moins assujettie aux aléas des conjonctures industrielles, et entièrement tournée vers l'avenir, ce qui n'a pas été le cas depuis 1950.

Le constat qu'a pu faire, après ce débat, n'importe quel citoyen québécois, de Hull jusqu'à Val-d'Or, comme je l'ai fait moi-même, c'est que les deux villes juridiques de Baie-Comeau et de Hauterive n'ont qu'un coeur économique et industriel, qu'une façon de vivre, un seul aéroport, un seul port, ce qui assure l'avenir des 26 000 citoyens de l'agglomération de Baie-Comeau.

Je voudrais, M. le Président, résumer simplement par quelques chiffres, quatre chiffres que tous les citoyens vont retenir sûrement. À Baie-Comeau, il y a 12 000 habitants et il y a 182 000 000 $ d'évaluation industrielle et commerciale.

M. Rocheleau: M. le Président, question de règlement, s'il vous plaît! Je vous demanderais qu'on applique l'article 28. Il n'y a pas quorum...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je vais...

M. Fréchette: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader adjoint.

M. Fréchette: ... vous ne teniez pas compte de la remarque du député de Hull. Il n'était pas à son siège. Il ne peut donc pas s'adresser à la présidence du siège où il est, de sorte que la remarque qu'il vient de faire

n'a aucune valeur juridique, M. le Président.

Une voix: C'est vrai, M. le ministre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires municipales.

M. Léonard: Je résumerai les deux chiffres qui sont très significatifs en ce qui concerne l'évaluation industrielle et commerciale. Baie-Comeau, 12 000 habitants, 182 000 000 $ d'évaluation industrielle et commerciale. Hauterive, 14 700 habitants, 27 000 000 $ d'évaluation industrielle et commerciale. Quant aux autres évaluations, elles sont proportionnelles à la population quoiqu'elles favorisent, encore une fois, Baie-Comeau. 12 000 habitants, 182 000 000 $; 15 000 habitants ou presque, 27 000 000 $. Les citoyens de Hauterive travaillent à Baie-Comeau. Ce sont tous des citoyens d'une même ville. Je pense que cela indique...

M. Rocheleau: M. le Président, question de règlement, s'il vous plaît! Je suis maintenant à mon siège et je demanderais le quorum...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député, je vais constater... (21 h 50)

M. Fréchette: M. le Président, au début de la séance de ce soir, une directive a été demandée par le député de Duplessis aux fins de savoir par qui devait être assuré le quorum en cette Chambre. Celui qui occupait le fauteuil, à votre place, M. le Président, a pris le temps de lire l'article du règlement pour nous rappeler que le quorum devait être assuré par les deux côtés de la Chambre et par le président dont on devait inclure la présence pour obtenir ce quorum.

Quand le député de Hull nous dit que c'est le côté ministériel qui doit assurer le quorum, je pense qu'il fait une erreur, encore une fois, fondamentale.

M. Pagé: Une question de privilège, une question de règlement. Très brièvement, j'espère que l'on va régler une fois pour toutes cette question pour la soirée. M. le Président, rien dans notre règlement n'indique que le quorum doit être assuré par la majorité. Mais lorsqu'on interprète notre règlement dans ce sens, c'est qu'on s'inspire d'une tradition parlementaire. S'il fallait que le quorum soit maintenu par l'Opposition, on pourrait vous battre n'importe quand, c'est là le problème. Alors le quorum doit être assuré complètement par les députés de la majorité et cela a toujours été la tradition parlementaire britannique qui nous lie, messieurs. Alors, assurez le quorum.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons quorum, donc M. le ministre des

Affaires municipales. S'il vous plaît!

M. Léonard: M. le Président, je conçois et je vois très bien que l'Opposition essaie d'interrompre les chiffres fondamentaux qui justifient en grande partie cette fusion.

Je répète donc, 12 000 habitants à Baie-Comeau, 182 000 000 $ d'évaluation industrielle et commerciale. 15 000 habitants à Hauterive, 27 000 000 $ d'évaluation industrielle et commerciale.

Maintenant, ce matin encore, le Soleil nous annonçait que la compagnie Reynolds a signé avec Hydro-Québec - on ne parle plus de rêve en couleur, je cite le dernier paragraphe - l'agrandissement de l'usine de la Reynolds à Baie-Comeau qui devrait entraîner des investissements de quelque 750 000 000 $ et fournir de l'emploi à 1200 travailleurs pendant sa construction. L'usine agrandie et rénovée emploiera environ 1600 personnes.

Des voix: Très bien. Bravo! Bravo!

M. Léonard: L'Opposition a tenté de dire que si on faisait la fusion, Reynolds s'en allait. Je pense qu'on vient de démontrer le contraire. Cela va ajouter de l'évaluation foncière considérable à Baie-Comeau agrandissant le déséquilibre si on ne fait pas la fusion.

On a parlé aussi, du côté de l'Opposition, d'une fusion qu'on devrait faire de façon civilisée. Nous avons déposé le projet de loi le 30 novembre dernier; nous terminons la deuxième lecture maintenant. Nous avons tenu la commission parlementaire en décembre, commencé la deuxième lecture le 23 mars.

Je voudrais vous rappeler une chose de la part du leader de l'Opposition qui a mentionné qu'il fallait faire une fusion de façon civilisée. Le projet de loi no 98 fusionnait 40 municipalités. Il y avait dix regroupements. Je vais me permettre de les lire pour faire le tour du Québec parce que cela est significatif.

Premièrement, premier regroupement: Jonquière, Kénogami, Arvida, paroisse Saint-Dominique-de-Jonquière.

Deuxièmement: Chicoutimi, Chicoutimi-Nord, Rivière-du-Moulin, canton de Chicoutimi.

Troisièmement: Port-Alfred, Bagotville, paroisse de Bagotville, Grande-Baie.

Quatrièmement: Jonquière et

Chicoutimi, deux parties.

Cinquièmement: Gatineau, Pointe-Gatineau, Touraine, Templeton, Templeton-Ouest, Templeton-Est, Templeton-Est (partie est).

Sixièmement: Buckingham, Masson, Angers, Buckingham-Ouest, Buckingham-Sud-Est, Ange-Gardien, Notre-Dame-de-la-Salette,

canton de Buckingham.

Une voix: C'est le bill omnibus.

M. Léonard: Septièmement: La Pêche: Sainte-Cécile-de-Masham, Wakefield, canton d'Haldfield, canton de Wakefield, canton de Masham-Nord.

Huitièmement: Dans Pontiac: village de Quyon, canton d'Eardley, canton d'Onslow, canton d'Onslow (partie sud).

Neuvièmement: Val-des-Monts: Perkins, Portland-Ouest, canton de Wakefield (partie est).

Dixièmement: Lucerne: Aylmer,

Deschênes, Lucerne.

Je vais vous dire M. le Président, après avoir fini d'énumérer toutes ces villes, toutes ces fusions, comment le Parti libéral l'a fait. Le leader de l'Opposition vient d'en parler alors qu'il était en Chambre. Première lecture, dépôt en Chambre le mardi 17 décembre 1974 à 10 heures. Deuxième lecture, votée le jeudi 19 décembre 1974 à 15 heures. Troisième lecture, adoptée le jeudi 26 décembre 1974 à 15 heures. Sanction...

Des voix: Scandale!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! À l'ordre! M. le ministre.

M. Léonard: La sanction, vendredi, le 27 décembre 1974, après avoir suspendu les règles de procédure. 40 municipalités fusionnées, et on viendra nous parler de faire des fusions de façon civilisée!

À un moment de ce débat, j'ai eu à rencontrer les maires de Baie-Comeau et de Hauterive, et j'ai décidé de demander à la commission de faciliter les choses pour qu'ils se parlent. C'est ce qui a été fait. La commission a offert ses services sur le plan technique avec le mandat que j'ai décrit ici en Chambre pour produire un rapport. Le critique de l'Opposition sur les affaires municipales m'a demandé quand je déposerais ce rapport. J'ai dit: M. le Président, ce n'est pas à moi de déposer ce rapport parce que ce sera le rapport du comité conjoint des deux municipalités et non pas le rapport de la Commission municipale du Québec. Maintenant, on tente de faire croire qu'il s'agit de la Commission municipale du Québec. Non, c'est le rapport du comité conjoint. La Commission municipale du Québec avait comme mandat d'assurer les chiffres des états financiers de 1981 et les chiffres du budget de 1982, et d'aider les deux parties à se parler sur des hypothèses de travail, techniquement. Ce rapport a été remis le 18 mai dernier au comité conjoint, il était terminé. J'ai demandé à M. le juge Beaulieu de bien situer ses travaux par rapport au comité.

Je vais donc lire cette lettre que je pourrai déposer en Chambre et que je pourrai commenter, si vous le voulez, par la suite ou durant la lecture. Je peux faire des commentaires personnels. Elle est adressée au ministre.

Québec, le 31 mai 1982, "Le comité conjoint créé par les villes de Baie-Comeau et de Hauterive pour procéder à l'évaluation des coûts de la fusion de ces deux villes a complété son rapport le 18 mai 1982. Ce rapport unanime - de la part des parties - a été préparé avec la participation de trois membres de la Commission municipale du Québec, soit MM. Jean-Paul Boucher, ingénieur, vice-président, Lionel Harvey, administrateur, et Gilles Arès, comptable agréé. On se souvient que la commission municipale avait été appelée à intervenir parce que les travaux du comité stagnaient faute d'entente sur des données essentielles." Stagnaient, c'est le moins qu'on puisse dire; il n'y a plus personne qui se parlait là-dedans.

Je continue: "L'aide technique de la commission municipale à laquelle vous avez fait allusion à l'Assemblée nationale a consisté, dans un premier temps, à faire accepter par les parties, comme élément de base de discussion, la validité des états financiers de l'année 1981 et des budgets de l'année 1982. Dans un second temps, le comité conjoint, ayant décidé de retenir comme hypothèse de départ que les services fournis par la nouvelle ville sur l'ensemble de son territoire se devaient d'être d'une qualité et d'une quantité sensiblement comparables à la qualité et à la quantité des services fournis présentement par la ville de Baie-Comeau dans son territoire, la commission municipale s'est assurée que tous les éléments ont été analysés et qu'ils l'ont été conformément à l'hypothèse retenue au départ. C'est, d'ailleurs, pour éviter toute confusion sur le rôle de chacun que les représentants de la commission municipale ont cru à la fois utile et nécessaire d'indiquer à la fin du rapport que celui-ci ne fait que refléter fidèlement les discussions du comité conjoint. Le comité conjoint aurait-il dû s'inspirer d'autres hypothèses en optant, par exemple, pour une hypothèse situant la qualité et la quantité des services à mi-chemin entre ceux que fournit la ville de Baie-Comeau et ceux que fournit la ville de Hauterive? S'il l'eût fait, c'est une lapalissade d'affirmer que les coûts d'intégration auraient été d'autant inférieurs. "Cette hypothèse aurait été d'autant plus plausible que l'on ignore quelle décision aurait dû prendre la ville de Baie-Comeau quant au maintien ou à la diminution des services rendus face à la perte prochaine des revenus provenant du réseau électrique." Évidemment, parce que c'est Reynolds qui les reprend.

"En conclusion, il m'apparaît important de rappeler, sans prétendre que le comité conjoint aurait dû s'inspirer d'hypothèses différentes, qu'il appartiendra en dernier ressort au futur conseil, et à lui seul, de faire les choix définitifs quant à la qualité et à la quantité des services fournis par la nouvelle ville et partant de déterminer ainsi les coûts véritables d'intégration des deux villes. Veuillez agréer, M. le ministre, l'expression de mes meilleurs sentiments. Le président-juge, Richard Beaulieu."

M. le Président, quand M. le juge dit dans cette lettre que le comité conjoint s'est inspiré du niveau de dépenses de la ville de Baie-Comeau, il faut savoir ce que cela veut dire. J'ai donc fait sortir le niveau de dépenses de certaines villes comparables au Québec. Les dépenses de fonctionnement de la ville de Baie-Comeau sont les plus élevées de toutes celles que j'ai fait sortir: Gaspé, Matane, Rimouski, Alma, Lévis, Victoriaville, Sorel, Saint-Bruno, Saint-Lambert,

Boucherville, Repentigny, Valleyfield, Aylmer, Sept-Îles, Baie-Comeau évidemment,

Hauterive; 888 $ par habitant, alors que, si vous regardez Gaspé, 272 $; Matane, 368 $, par exemple; Valleyfield, 399 $; Aylmer, 415 $; Sept-Îles, celle qui est une des plus élevées, 735 $. Le comité conjoint a évidemment fait une étude en nivelant les services vers la hausse. Baie-Comeau est celle qui a les dépenses les plus élevées de toutes les villes que je viens de vous citer.

En fait, quand nous regardons ce rapport, nous voyons qu'on a ajouté dans les coûts de fonctionnement les coûts additionnels ou qu'on a soustrait les revenus du réseau électrique de Baie-Comeau qui ne sont pas du tout reliés à la fusion, parce qu'il s'agit de revenus de la production électrique qui proviennent de l'entreprise Québec North Shore Paper.

On a nivelé tous les services par le haut. On a calculé des coûts d'intégration, mais on n'a pas calculé les économies d'échelle; on a additionné les services les uns par-dessus les autres en prenant comme niveau de dépense celui de Baie-Comeau. On n'a inclus aucun calcul ou aucune possibilité de subvention, M. le Président. Or, il y en a de temps en temps, il faut le savoir. On a estimé les immobilisations de la Reynolds à 60 000 000 $. Je crois humblement, modestement, M. le Président, que, lorsqu'on fait un investissement de 750 000 000 $, l'évaluation foncière sera de plus de 60 000 000 $ et, d'ailleurs, M. Leonard lui-même, à la commission parlementaire, a parlé d'une évaluation de 100 000 000 $, en décembre dernier.

M. le Président, quand on prend tous ces chiffres, on se dit: Vraiment, c'est fantastique. Ils vont sûrement payer des taxes sensationnelles.

Or, malgré tout cela, on peut penser que le compte de taxes d'une maison évaluée à 40 000 $ à peu près monterait d'un maximum de 300 $ alors qu'à Hauterive, cela pourrait baisser de 300 $ par maison, juste pour voir ce que cela peut vouloir dire, en mettant les choses au pire, comme l'a fait le comité. Je comprends que le comité l'a fait comme cela, parce que, en fait, il a voulu montrer la situation au pire en disant: Peut-être bien que le gouvernement pourrait augmenter sa subvention, évidemment. Mais, au fond, ce que tout cela démontre, c'est que les deux villes vont évidemment essayer de monter leur niveau de services. Ce sera leur décision après la fusion, mais ce n'est pas au gouvernement à payer un niveau de services aussi élevé.

Il y a cependant une chose, un élément positif qui ressort de tout cela, M. le Président, c'est que les gens ont commencé à se parler dans le milieu. C'est ce que nous visions en encourageant les travaux du comité conjoint et en demandant à la commission d'assister le comité conjoint.

M. le Président, je pense que nous en avons parlé beaucoup de cette fusion, nous n'avons pas procédé comme les gens d'en face en 1974, soit 40 d'un coup dans l'espace de dix jours; nous l'avons fait sur une période de six mois, nous en sommes à la deuxième lecture et nous allons en commission parlementaire pour l'étude article par article. M. le Président, je pense qu'au niveau du principe de la fusion c'est acquis, la fusion aura lieu, nous devons la faire pour toute la région de Baie-Comeau et de Hauterive.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de deuxième lecture du projet de loi no 37, Loi regroupant les villes de Baie-Comeau et de Hauterive, est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

M. Fréchette: M. le Président, je fais motion pour que le vote soit reporté à la prochaine séance, soit lundi, à la fin des affaires courantes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est accordée par le président. M. le leader.

M. Fréchette: Maintenant, M. le Président, je fais motion pour que nous ajournions nos travaux à lundi, 14 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté. Ajournement de nos travaux à lundi, 14 heures.

(Fin de la séance à 22 h 07)

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