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(Quatorze heures dix-huit minutes)
Le Président: À l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement, s'il vous plaît.
Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes.
À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous
plaît!
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
M. Charron: M. le Président, en vertu de l'article 180 du
règlement, le premier ministre aurait le dépôt d'une
pétition à présenter à l'Assemblée.
Pétition s'opposant à la
démarche
fédérale sur le rapatriement
de la constitution
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je voudrais
déposer cette pétition en déposant d'abord en deux
exemplaires, si on me le permet, le texte qui a servi a la remise de la
pétition en question le 12 février 1981. C'est une
pétition qui, je crois, est connue de tout le monde, qui a
été soutenue - sauf une exception - par tous les partis
politiques du Québec et qui a recueilli 715,180 signatures. Je crois que
le spectacle qu'on a devant nous, par son ampleur, montre quand même ce
que cela a pu représenter de motivation, de dévouement aussi et
de conviction de la part des Québécois et des
Québécoises qui ont signé cette pétition. C'est
avec fierté que je dépose ce texte de la présentation et
la Chambre peut voir le résultat.
Copie de la lettre transmise a M. Trudeau et
autres
M. le Président, j'ai un deuxième dépôt
à faire pour l'information de cette Chambre. C'est, en deux exemplaires,
copie de la lettre que j'ai transmise à M. Trudeau, premier ministre
fédéral. J'ai également les copies - mais je ne les ai pas
apportées - de lettres équivalentes, si on veut, à M.
Clark et M. Broadbent et également à tous les
députés et sénateurs qui sont au Parlement d'Ottawa,
représentants du Québec. Je dépose la lettre par laquelle
je transmettais le résultat de la pétition au premier ministre
fédéral.
Le Président: Documents déposés.
Lettre de démission de M. Jacques
Couture
Avant de continuer, le président aurait plusieurs
dépôts de documents à faire. J'aimerais tout d'abord
déposer, en deux exemplaires, copie d'une lettre que M. Jacques Couture
me faisait parvenir en date du 30 janvier 1981 et qui se lit ainsi: "M. le
Président, j'ai le regret de vous faire connaître ma
démission à titre de député du district
électoral de Saint-Henri et de membre de l'Assemblée nationale
à compter de ce jour. Veuillez agréer, M. le Président,
l'expression de mes meilleurs sentiments." C'est signé Jacques
Couture.
Par la suite: "Nous, députés de l'Assemblée
nationale, avons pris connaissance de cette lettre et avons signé,
à Québec, ce 30e jour de janvier 1981. Guy Chevrette,
témoin, député de Joliette-Montcalm, et Pierre de
Bellefeuille, député de Deux-Montagnes."
Lettre de démission de M. Guy Joron
En second lieu, j'aimerais faire état d'une deuxième
lettre que j'ai reçue, datée du 26 février 1981, de M. Guy
Joron: "M. le Président, j'ai le regret de vous faire part de ma
démission à compter de ce jour à titre de
député du district électoral de Mille-Îles et membre
de l'Assemblée nationale. Veuillez agréer, M. le
Président, l'expression de mes sentiments les meilleurs." C'est
signé Guy Joron. "Nous, députés de l'Assemblée
nationale, avons pris connaissance de cette lettre et avons signé,
à Québec, ce 26e jour de février 1981. Jacques Brassard,
député de Lac-Saint-Jean, et Jean-Paul Bordeleau,
député d'Abitibi-Est."
M. Michel LeMoignan,
chef parlementaire
de l'Union Nationale
En troisième lieu, j'aimerais faire état d'une lettre
datée du 10 mars 1981, signée du chef de l'Union Nationale, qui
est d'ailleurs, je pense, dans les galeries, adressée au
président: "M. le Président, j'ai l'honneur de vous informer
qu'à compter de ce jour, le député de Gaspé, M.
Michel LeMoignan, siégera à l'Assemblée nationale en tant
que chef parlementaire de l'Union Nationale. Veuillez agréer, M. le
Président, l'expression de mes sentiments distingués." C'est en
deux exemplaires également.
Des voix: Bravo!
M. Jean Alfred, député du Parti
québécois
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
J'aimerais également déposer, en deux exemplaires, une lettre que
j'ai reçue de M. le premier ministre, datée du 10 mars, et qui se
lit ainsi: "M. le Président, auriez-vous l'obligeance de
reconnaître dès aujourd'hui M. Jean Alfred, député
de Papineau, comme membre de la députation ministérielle."
À l'ordre, s'il vous plaît. "Je vous remercie à l'avance et
vous pris d'agréer, M. le Président, l'expression de mes
sentiments les meilleurs." C'est signé René Lévesque.
J'ai encore des documents...
M. Levesque (Bonaventure): Oui, justement...
Le Président: M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): ... étant donné que vous
venez de donner lecture d'un message du premier ministre, est-ce qu'on ne
pourrait pas en profiter pour féliciter M. Alfred, car c'est son
anniversaire de naissance aujourd'hui?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Cette heureuse idée, et
fraternelle, à part ça, du député de Bonaventure
m'a pris complètement au dépourvu, mais inutile de dire, parce
qu'on a eu beaucoup de préoccupations, sans compter celle qu'a pu
représenter le député depuis quelque temps, que nous
souscrivons de tout coeur à ce rappel.
Résolution sur les allocations des
députés
Le Président: Conformément aux dispositions de
l'article 83 de la Loi sur la Législature, j'ai l'honneur de
déposer, en deux exemplaires, pour information des membres de cette
Assemblée, copie de la résolution 684-81 adoptée par la
commission de la régie interne, le 4 février 1981, laquelle a
pour effet de modifier le règlement intitulé Allocations des
députés en vue notamment d'ajuster ledit règlement
à la nouvelle répartition des circonscriptions
électorales. Ce dépôt est fait en deux exemplaires.
Avis de la Commission de la fonction publique sur onze
règlements
Conformément aux dispositions de l'article 30 de la Loi sur la
fonction publique, je dépose copie des avis de la
Commission de la fonction publique au
Conseil du trésor sur onze règlements.
J'aimerais qu'on me dispense de la lecture, mais, si on veut, je peux
les lire. Copie déposée de ces onze règlements en deux
exemplaires chacun.
M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): Est-ce qu'on pourrait nous dire, au
moins succinctement, de quoi il s'agit?
Le Président: Le premier règlement modifiant le
règlement concernant le classement des fonctionnaires; 2,
règlement de classification no 239 concernant les inspecteurs en
tuyauterie; 3, règlement de classification no 248 concernant les pilotes
d'aéronefs; 4, règlement modifiant le règlement de
classification no 400 concernant le personnel ouvrier; 5, règlement
concernant certains aspects de l'admission aux classes d'emploi de la fonction
publique; 6, règlement concernant les conditions de travail du personnel
de maîtrise et de direction; 7, règlement modifiant le
règlement concernant les emplois occasionnels et leur titulaire; 8,
règlement modifiant le règlement de classification no 030
concernant les agents de maîtrise du personnel de bureau, techniciens et
assimilés; 9, règlement modifiant le règlement concernant
la rémunération et certaines conditions de travail du personnel
de maîtrise et de direction; 10, règlement modifiant le
règlement concernant la rémunération, les avantages
sociaux et les autres conditions de travail de certains hauts fonctionnaires;
enfin, 11, règlement concernant l'intégration dans la fonction
publique de certains employés de la Commission de protection du
territoire agricole du Québec. Ce sont les onze règlements sur
lesquels porte ce dépôt.
Dépôt de documents.
M. le ministre de la Justice.
Rapport de la commission d'enquête sur des
opérations policières
M. Bédard: M. le Président, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission d'enquête sur des
opérations policières en territoire québécois.
Le Président: Document déposé. M. le
ministre de la Justice.
Avis juridique de Me Yves Pratte sur
les conséquences possibles de l'application de
la charte fédérale projetée
M. Bédard: Également, M. le Président, avec
votre permission, je veux déposer deux
copies de l'avis juridique qui a été donnée au
gouvernement par Me Yves Pratte sur les conséquences possibles de
l'application de la charte fédérale telle que contenue dans le
projet de M. Trudeau.
Le Président: Merci.
M. le ministre de l'Éducation.
Rapport de l'Ordre des opticiens d'ordonnances
M. Laurin: M. le Président, à titre de ministre
responsable des corporations professionnelles, j'ai le plaisir de
déposer le rapport de l'Ordre des opticiens d'ordonnances du
Québec pour l'année 1979-1980.
Le Président: Rapport déposé.
Rapport de l'Ordre des infirmières et
infirmiers du Québec
M. Laurin: Également le rapport de l'Ordre des
infirmières et infirmiers du Québec pour l'année
1979-1980.
Le Président: Rapport déposé.
Rapport annuel de l'Université du
Québec
M. Laurin: Cette fois, à titre de ministre de
l'Éducation, j'ai le plaisir de déposer le rapport de
l'Université du Québec pour l'année 1979-1980...
Le Président: Rapport déposé.
Rapport statistique de l'UQ Rapport du Conseil
supérieur de l'Éducation Rapport annuel du ministère de
l'Éducation
M. Laurin: ... ainsi que le rapport statistique de
l'Université du Québec pour l'année 1979-1980, le rapport
du Conseil supérieur de l'Éducation pour l'année
1979-1980, et le rapport du ministère de l'Éducation pour
l'année 1979-1980.
Le Président: Rapports déposés.
M. le ministre des Affaires sociales.
Rapport annuel de la Commission des affaires
sociales
M. Lazure: M. le Président, j'ai le plaisir de
déposer le rapport annuel 1979-1980 de la Commission des affaires
sociales du Québec.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports de commissions élues.
M. Charron: M. le Président, j'ai le plaisir d'apprendre
à l'Assemblée qu'il y a un nombre assez élevé de
rapports de commissions élues du fait que toutes les commissions qui ont
été appelées pendant l'intersession à siéger
ont effectivement terminé leur travail, donc sont rendues à
l'étape du rapport des commissions.
Le Président: Merci.
M. le député de Joliette-Montcalm, au nom du
député de Lac-Saint-Jean. (14 h 30)
Télédiffusion des travaux de certaines
commissions
M. Chevrette: M. le Président, permettez-moi de
déposer le rapport de la commission élue permanente de
l'Assemblée nationale qui a siégé le mardi 27 janvier 1981
aux fins d'étudier la télédiffusion des travaux de la
commission de la présidence du conseil et de la constitution sur le
projet de résolution du gouvernement fédéral concernant la
constitution du Canada et également de la commission de l'énergie
et des ressources relativement au plan d'équipement et de
développement 1981-1990 d'Hydro-Québec.
Le Président: Rapport déposé. M. le.
député de Vanier.
Audition d'organismes sur un avis de l'Office des
professions
M. Bertrand: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente des
corporations professionnelles qui a siégé le 17 février
1981 aux fins d'entendre certains organismes relativement à l'avis
émis le 5 juin 1980 par l'Office des professions à
l'intérieur duquel se trouve le problème de qualification des
actes exclusifs.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Taschereau.
Étude des projets de loi nos 222, 238, 259, 258
et 221
M. Guay: Oui, M. le Président. Vous me permettrez de
soumettre à l'Assemblée et de déposer le rapport de la
commission élue permanente de la justice qui a étudié les
projets de loi privés suivants: loi 222, Loi concernant certains lots de
la partie révisée du cadastre officiel du canton de York,
division d'enregistrement de Gaspé; loi 238, Loi concernant Place
Notre-Dame de Hull Ltée; loi 259, Loi concernant un immeuble du cadastre
de la paroisse de Sainte-Anne, division d'enregistrement de Montréal;
loi
258, Loi concernant un immeuble de l'Église Unie St. Andrew de
Lachine; loi 221, Loi concernant la succession de J. Donat Langelier, et les a
adoptés avec amendements.
Le Président! Ce rapport sera-t-il adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Deuxième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente. M. le député
de Rosemont.
Audition de personnes et organismes
sur le projet de résolution
fédéral
concernant la constitution
M. Paquette: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente de la
présidence du conseil et de la constitution qui a siégé
les 9 et 10 décembre 1980 et les 3, 4, 5, 11 et 19 février 1981
aux fins d'entendre les personnes ou organismes relativement au projet de
résolution du gouvernement fédéral concernant la
constitution du Canada.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Viau.
Audition d'associations concernant
les modifications au décret
de la construction
M. Lefebvre: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente du travail et
de la main-d'oeuvre qui a siégé le 27 janvier 1981 aux fins
d'entendre les associations convoquées quant aux raisons motivant
l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux
modifications à apporter au décret de la construction,
adopté par décret 3938-80 du 17 décembre 1980 et
publié à la Gazette officielle du Québec du 30
décembre 1980 en vertu de l'article 51 de la Loi sur les relations du
travail dans l'industrie de la construction.
Le Président: Merci. Rapport déposé. M. le
député de Beauce-Nord.
Étude des projets de loi nos 223, 239 et
241
M. Ouellette (Beauce-Nord): M. le Président, qu'il me soit
permis de déposer le rapport de la commission élue permanente des
affaires municipales qui s'est réunie le 19 février 1981 aux fins
d'étudier les projets de loi privés suivants: 223, Loi concernant
la ville de Bedford; 239, Loi concernant la ville de Clermont; 241, Loi
concernant la ville de Sainte-Foy. Le projet de loi no 223 a été
adopté tel qu'édicté. Le projet de loi no 239 a
été rejeté. Le projet de loi no 241 a été
adopté tel qu'amendé.
Le Président: Rapport déposé. Est-ce que ce
rapport sera adopté?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté. Deuxième lecture,
prochaine séance ou séance subséquente.
M. le député de Duplessis.
Audition de personnes et organismes sur le plan
d'équipement et de développement d'Hydro-Québec
M. Perron: M. le Président, qu'il me soit permis,
conformément aux dispositions de notre règlement, de
déposer le rapport de la commission élue permanente de
l'énergie et des ressources qui a siégé les 24, 25, 26 et
27 février et les 2 et 3 mars 1981 aux fins d'entendre les personnes ou
organismes qui voulaient faire des représentations relativement au plan
d'équipement et de développement 1981 à 1990 de la
société Hydro-Québec.
Le Président: Rapport déposé. M. le
député de Joliette-Montcalm, au nom du député
d'Arthabaska
Étude du projet de loi no 4
M. Chevrette: Oui, M. le Président, qu'il me soit permis,
au nom du député d'Arthabaska, de déposer le rapport de la
commission élue permanente des transports qui a siégé les
3, 4 et 5 février 1981 aux fins d'étudier article par article le
projet de loi no 4, Code de la sécurité routière et l'a
adopté avec des amendements.
Le Président: Rapport déposé.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Le député de Rimouski propose la première lecture
du projet de loi no 228, Loi concernant la ville de Matane. Est-ce que cette
motion de première lecture sera adoptée?
M. Charron: Non, M. le Président, pas aujourd'hui, parce
que je dois d'abord retoucher à un aspect de la loi avant de la
présenter. Probablement demain.
Le Président: D'accord.
Période de questions orales des députés.
M. le chef de l'Opposition officielle.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS Les
dépenses gouvernementales
M. Ryan: M. le Président, nous sommes dans une
période assez spéciale vu que le gouvernement vit ses derniers
jours, selon toute apparence, et ce climat agonisant se manifeste à
plusieurs points de vue.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
À l'ordre, s'il vous plaît.
M. Ryan: C'est vous qui avez peur.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: Ce climat de fin de régime se traduit par un
nombre très élevé de décisions administratives qui
engagent l'avenir pour de nombreuses années. On dirait que le
gouvernement, sachant que ses jours achèvent, se dépêche de
multiplier les décisions que sera responsable d'exécuter le
gouvernement issu de la prochaine élection.
Par exemple, dans le domaine du transport en commun à
Montréal, on prend des engagements d'une valeur de $1 milliard qui
portent sur l'avenir, de toute évidence.
Des décisions qui ont traîné pendant des
années arrivent soudain à maturité, alors qu'ils n'ont
plus le pouvoir de les exécuter.
Dans le domaine de l'assainissement des eaux, dans le domaine routier,
on pourrait en parler tout l'après-midi, soudain le ministre se
réveille et s'aperçoit qu'il y a des projets qui ont
traîné pendant des années et des années; dans le
domaine de l'implantation industrielle, c'est la même chose.
En matière de nominations...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: En matière de nominations, M. le
Président, on multiplie les nominations de dernière heure. En
matière de publicité, le dévergondage dont nous avons
été témoin depuis quatre ans et demi s'accentue en ce qui
regarde la lutte constitutionnelle pour nous inonder de slogans enfantins. On
est rendu à des dépenses d'au-delà de $2,5 millions.
En matière de transport, je voudrais simplement porter à
votre attention un encart qui va paraître dans les journaux de
Montréal ces jours-ci, un encart publicitaire du ministre des Transports
du Québec, qui doit paraître dans la Presse. Je vois que le
premier ministre n'est pas au courant. Il y a bien des choses qu'il ne
connaît pas dans son administration. Ceci doit paraître dans la
Presse le 11 mars...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: ... et dans le Journal de Montréal le 14 mars,
après le déclenchement présumé des
élections. Le ministre des Transports va distribuer à travers le
Québec des feuillets publicitaires conçus pour chaque
région où il se vante...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Excusez-moi, s'il vous plaît, M. le chef de l'Opposition officielle, les
préambules semblent s'être allongés depuis le 19
décembre. Il est bien évident que lorsque les préambules
seront longs, la présidence devra être clémente pour les
réponses également. Je demanderais d'être...
M. Ryan: M. le Président, les préambules sont
à la mesure de l'aggravation du mal. Ici, on prend une colonne pour vous
dire le peu qui s'est fait pendant les trois dernières années et,
ensuite, deux colonnes pour vous dire l'hypothèque qu'on veut placer sur
les épaules du futur gouvernement. Je demande au premier ministre, bien
simplement, de nous indiquer ceci: D'abord, est-ce la politique du gouvernement
agonisant qui siège encore de l'autre côté par respiration
artificielle d'user jusqu'à la fin du peu de pouvoir qui lui reste pour
lier, pour les années à venir, le futur gouvernement qui sera
élu lors de l'élection prochaine? (14 h 40)
Deuxièmement, des normes ont-elles été
établies par le chef du gouvernement et son cabinet pour régir et
baliser la publicité et l'information gouvernementales pendant la
période qui doit s'écouler d'ici le jour de l'élection? Je
vous dis, M. le Président, qui si on continue au rythme où on va,
toute cette affaire de loi de financement des partis politiques devient une
vaste comédie et une fraude.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je
laisserai au chef de l'Opposition la responsabilité de son discours
préambule. Je dois simplement lui dire que des excès
d'agressivité aussi hargneux, c'est plutôt un signe
d'inquiétude qu'un signe de confiance. Enfin, comme le chef de
l'Opposition aime à le dire: On se retrouvera bientôt sur le
terrain. En attendant, nous essayons d'agir comme un gouvernement responsable
jusqu'à la dernière minute. Le ministre des Transports pourra
parler, s'il le veut bien, de ce plan de transport en commun sur lequel le
député d'Argenteuil a voulu faire un plat, qui représente
des années de travail et qui est l'aboutissement - non pas en quelques
semaines ou en quelques jours - d'un travail qui a demandé des efforts
absolument sans précédent. On sait le fouillis dans lequel se
trouvait l'ensemble du transport dans la région
métropolitaine.
Il y a une chose que le chef de l'Opposition a mentionnée - avant
de répondre à sa question - que je voudrais souligner. J'aurais
cru que, par ce que je pourrais appeler de la décence, il s'abstiendrait
d'évoquer ça. Il a repris des propos allusifs qu'il a tenus
récemment sur des nominations du gouvernement depuis quelque temps.
D'ici la fin de la séance... Je crois que cette déclaration qui a
semé un malaise compréhensible dans la fonction publique lui est
retombée sur le nez directement. C'était une déclaration
à la fois partisane et irresponsable. Je dois le dire comme je le pense.
Maintenant, je vais déposer - et ça c'est sur le sujet - avant la
fin de la période des questions - je n'ai pas pensé à
l'apporter parce que je ne croyais pas que le chef de l'Opposition ferait
l'erreur et s'enfoncerait dans cette erreur -la liste de toutes et chacune des
nominations qui ont été effectuées depuis le 1er janvier
1981 par le gouvernement actuel qui doit continuer à agir comme un
gouvernement responsable et remplir des postes qui sont ouverts là
où c'est sa responsabilité. Et je défie l'Opposition
très simplement de trouver autre chose là-dedans que des gens
responsables, des gens compétents et des gens dont la nomination
respecte leur droit de carrière dans la fonction publique.
M. Rivest: On verra.
M. Lévesque (Taillon): Je ferai remarquer au
député de Jean-Talon, qui essaie de faire un peu de
"fafinasseries" là, que lui-même, avec son expérience de
l'administration publique, pourrait peut-être scruter ces nominations et
dire à son chef...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Jean-Talon.
M. Lévesque (Taillon): ...de se conduire non pas comme un
prétendant irresponsable, mais comme un homme public qui a le sens du
devoir.
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. de Belleval: M. le Président, en ce qui concerne le
plan de transport en commun de la région de Montréal, en
particulier de la Communauté urbaine de Montréal, je veux
signaler au chef de l'Opposition que ce plan sera mis en vigueur à la
suite, d'abord, de nombreuses études qui se déroulent depuis
plusieurs années...
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, une question
de règlement.
Le Président: M. le leader de l'Opposition officielle, sur
une question de règlement.
M. Levesque (Bonaventure): Je voudrais, M. le Président,
que vous rappeliez le ministre des Transports à l'ordre. La question
posée par le chef de l'Opposition porte sur la publicité et la
propagande qui accompagnent le plan et non pas sur le plan lui-même. Il
ne faudrait pas, à ce moment-ci, que vous permettiez au ministre des
Transports d'utiliser encore cette tribune pour multiplier la propagande dont
nous l'accusons présentement. Qu'il réponde en nous disant quels
fonds publics sont utilisés pour cette propagande et pourquoi ce genre
de publicité.
M. Charron: M. le Président, question de
règlement.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Le ministre des Transports est justifié
d'intervenir à ce moment-ci, parce que, dans le libellé
même de la longue question du chef de l'Opposition, celui-ci a dit que la
parution d'informations aux citoyens sur ce que veut dire ce nouveau plan de
transport intégré sur le territoire de l'île de
Montréal arrive à la dernière minute. Pour répondre
à cette qualification qu'a faite le chef de l'Opposition, je crois que
le ministre des Transports a raison d'expliquer pourquoi cela arrive à
ce moment-ci, d'autant plus que cela a pris des années de travail pour
pouvoir le réussir.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, question de
règlement.
Le Président: Sur le même sujet?
M. Levesque (Bonaventure): Sur un sujet dont je vais vous
informer dans un instant.
Le Président: M. le leader de l'Opposition officielle.
M. Levesque (Bonaventure): Je pensais bien, M. le
Président, que vous céderiez à cette invitation
très chaleureuse que je vous faisais de me laisser parler.
M. le Président, je voudrais simplement faire remarquer que s'il
y a, dans le préambule du chef de l'Opposition, quelque chose qui puisse
affecter l'un des privilèges du ministre des Transports, autrement dit,
s'il y a là quelque chose qui attaque, d'une façon ou d'une
autre, la vérité qui le concerne...
Des voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
M. le leader de l'Opposition et M. le leader du gouvernement, je connais
votre longue expérience parlementaire à tous deux. La
présidence a écouté la question du chef de l'Opposition
officielle, a écouté également le préambule
ordinaire à une question, et je pense que le ministre des Transports a
le droit de répondre à la question du leader de l'Opposition,
puisque, même si la question a été adressée au
premier ministre, il a été effectivement question, dans la
question du chef de l'Opposition, d'un plan de transport. Je pense que,
décemment, je dois permettre au ministre des Transports de
répondre à la question, brièvement, s'il vous plaît.
M. le ministre des Transports.
M. de Belleval: M. le Président, comme je le disais, ce
plan est le fruit de plusieurs années d'efforts. Je veux juste rappeler
qu'en 1976, le précédent gouvernement avait interrompu, entre
autres, la réalisation du métro de Montréal, soi-disant
parce qu'on procédait sans plan de développement à long
terme du transport en commun dans la région de Montréal.
En collaboration avec, entre autres, mon collègue des Affaires
municipales maintenant à l'Aménagement du territoire, le
député de Crémazie, nous avons repris ce dossier qui a
abouti, je veux le rappeler au chef de l'Opposition, en décembre 1979,
et qui a été concrétisé à la suite de
rencontres intensives et de pourparlers laborieux avec les maires des
municipalités de la communauté urbaine, des villes de banlieue
et, en particulier, de la ville de Montréal. Cela a quand même
abouti à un accord qui est survenu il y a à peine quelques jours.
Les maires de ces municipalités, dont celles d'une bonne partie du West
Island de Montréal et le maire de Montréal, ne sont pas, que je
sache, des membres ou des représentants du Parti
québécois. Ce sont des membres élus dans leur
municipalité, qui ont travaillé pour les intérêts de
leur municipalité et qui ont conclu une entente avec le gouvernement du
Québec il y a à peine quelques jours.
Donc le chef de l'Opposition n'a pas raison de voir dans ce geste un
geste purement opportuniste, mais tout simplement le résultat de
nombreux efforts qui se sont enfin concrétisés avec succès
pour l'intérêt de l'ensemble de l'île de
Montréal.
Si le chef de l'Opposition est contre le plan de transport et veut le
dénoncer, il aura toute la campagne électorale pour le faire, M.
le Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle. (14 h
50)
M. Ryan: Je vois que le ministre n'a aucune notion de ce que doit
être l'usage judicieux des fonds publics dans le domaine...
Des voix: ...
M. Ryan: Non, vous autres non plus. Une voix: Non, pas
vous autres certain!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.
Question additionnelle, M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Ryan: Je crois que les collègues du ministre ne
comprennent pas plus que lui. Je vais essayer de prendre d'autres exemples plus
simples. Cet exemple est apparemment trop gros pour l'intelligence du ministre,
je vais essayer d'en prendre de plus simples.
Des voix: ...
M. Ryan: M. le Président, avez-vous déjà vu
une bande de...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
m'attendais à cette période des questions parce que cela fait
longtemps qu'on n'en a pas eu. C'est normal. Je ne voudrais pas vous rappeler
le règlement, mais je vous demanderais, M. le chef de l'Opposition, de
poser une question additionnelle et, à tous les députés de
l'Assemblée, d'écouter la question et la réponse qui
viendra. M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Merci, M. le Président. Je vais prendre deux
autres exemples que je porte à l'attention du premier ministre. Il
pourra me donner des explications. Nous avons reçu une lettre de son
bureau récemment du maître des hautes oeuvres, M. Jean-Roch
Boivin, qui nous informe que les budgets de dépenses de voyage du
personnel politique des ministres ont été augmentés du
tiers pour la durée de la campagne électorale...
Des voix: Ah!
M. Ryan: ...sans consultation avec les partis d'Opposition. Vous
pourrez peut-être nous donner des justifications à une chose comme
celle-là, mais cela me semble un autre exemple très
intéressant.
Il faut regarder dans les notes de la commission permanente des
engagements financiers. J'ai un exemple ici: des contrats de services pour la
réalisation d'études de réhabilitation des "régouts
d'égaux", des réseaux d'égout.
Des voix: Ah!
M. Ryan: Des réseaux d'égout.
Une voix: Des ragots.
M. Ryan: Des réseaux d'égout. Cela vous va bien.
Cela vous convient bien.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le chef de l'Opposition, brièvement, s'il vous plaît!
Des voix: Consentement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: M. le Président.
Une voix: ...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: En fait de ragots, si vous en voulez une saloperie, vous
lirez la feuille de chou que le Parti québécois publie dans la
région de Québec. Tissu de mensonges et de déformations
typiques de cette formation à l'esprit tout de travers.
M. le Président, vous me faites signe, mais je regrette
infiniment. Ce sont eux qui m'empêchent de poser ma question depuis
tantôt et je vais la poser librement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Ryan: Consentement, cela ne paraît pas. Je consulte le
cahier des engagements financiers soumis à la commission permanente des
engagements financiers pour le mois de janvier. Vous avez ces contrats de
services pour la réalisation d'études de réhabilitation
des réseaux d'égouts...
Des voix: Ah!
M. Ryan: ...dans trois comtés qui sont pas mal
péquistes (Chambly, Taillon et Terrebonne, que vous essayez de garder).
Vous avez des engagements pour un total de $3,190,000. Écoutez bien
cela! Imputation pour l'exercice budgétaire actuel: $20,000.
Des voix: Ah!
M. Ryan: Année suivante: $3,170,000, mes chers amis. Des
bonnes études à des amis qui pourront vivre pendant un an, deux
ans, trois ans.
Des voix: Ah!
M. Ryan: Voyons donc!
M. Levesque (Bonaventure): C'est sérieux.
Le Président: M. le chef de l'Opposition. S'il vous
plaît! M. le chef de l'Opposition, s'il vous plaît, votre question
additionnelle.
M. Ryan: M. le Président, c'est rempli...
M. Charron: M. le Président, on va permettre au chef de
l'Opposition de sortir des égouts.
M. Ryan: Pardon?
Des voix: Ah!
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Ryan: On va s'occuper de celui-là dans Saint-Jacques;
ne vous inquiétez pas. J'en ai un autre ici. C'est bourré
d'engagements comme ceux-là pour lesquels on ne verse absolument rien
à même le budget de l'exercice actuel et pour lesquels on engage
les budgets à venir. On a même donné des contrats, ces
derniers temps, dans lesquels on oblige l'entrepreneur à signer un
engagement en vertu duquel il doit commencer les travaux dès le mois de
janvier ou février mais pour lesquels il ne touchera aucun paiement
avant le mois d'avril.
Je demande au premier ministre: Est-ce ça la politique d'un
gouvernement qui se dit responsable?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Pour ce qui est du sujet qui a
amené un lapsus révélateur de la part du chef de
l'Opposition, parce que c'est vraiment chercher des ragots
désespérément, pour ce qui concerne les égouts - je
voudrais en sortir le plus vite possible - je demanderai demain au ministre de
l'Environnement, qui est obligé d'être absent aujourd'hui, de
donner la réponse que mérite la question que semble avoir
posée en cours de route le chef de l'Opposition.
Pour ce qui est des dépenses de voyage du personnel politique, je
trouve un peu indécente l'intervention du chef de l'Opposition. Pendant
la campagne référendaire on s'est rendu compte, après des
représentations de l'Opposition libérale en particulier, que la
règle n'était pas assez généreuse, en particulier
pour l'Opposition qui, elle aussi, se sert de son personnel politique, comme
c'est justifié pour tous les partis. À ce moment-là, on a
établi un régime spécial qui avantageait convenablement -
pas plus mais convenablement - le personnel politique de l'Opposition qui,
autrement, aurait été traité, aurait pu se croire
traité inéquitablement. Cette fois-ci, le Conseil du
trésor a augmenté quelque peu, et je dois dire que mon chef de
cabinet a demandé des commentaires à l'Opposition pour voir si
c'était normal que ça s'applique à elle aussi. Je ne vois
vraiment pas l'utilité de
l'intervention, ni, non plus, la bonne foi de l'intervention du chef de
l'Opposition. Maintenant...
M. Ryan: Question de privilège.
Le Président: À l'ordre! M. le chef de
l'Opposition, sur une question de privilège.
M. Ryan: M. le Président, j'affirme qu'il n'y a pas eu de
consultation auprès de mon bureau à ce sujet-là.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, il peut
arriver que le chef de l'Opposition, qui se promène, comme c'est normal,
comme une queue de veau depuis quelque temps, ne soit pas au courant de tout,
mais des commentaires ont été demandés quelque part en
tout cas dans son entourage. À ceux qui probablement s'en occupent.
Pour ce qui est de ce que le chef de l'Opposition appelle un tissu de
mensonges, c'est-à-dire une publication de notre parti pour la
région de Québec, je dirai simplement ceci... Feuille de chou, si
le chef de l'Opposition le veut, mais cette feuille de chou, à supposer
que cela en soit une, est identifiée, signée par des gens
responsables, et s'il y a des choses qui ne sont pas correctes, ils en
porteront la responsabilité.
Moi, j'ai commencé à recevoir en avalanches, très
évidemment originant de nos amis d'en face, toute une série de
feuilles de chou anonymes, mal identifiées et qui, déjà,
sont pleines de calomnies.
Le Président: Question principale, M. le
député de Maisonneuve.
Réduction des dépenses à
l'Éducation
M. Lalande: M. le Président, le déluge des
promesses péquistes in extremis a aussi gagné le ministre de
l'Éducation, ces derniers mois et ces dernières semaines. En
effet, le ministre de l'Éducation - le nouveau, j'entends, pas celui qui
a été dégommé, mais l'autre - au cours des
dernières semaines, a réussi à retenir l'attention des
gens de la presse sur plusieurs aspects, notamment sur son indécision
chronique à s'engager sur le projet de règlement des CEGEP. On
sait que depuis quatre ans ça tergiverse, on étudie, mais on
n'accouche sur rien. Il s'est aussi manifesté, dans son engagement de
dernière minute, pour les six années à venir au niveau des
régimes pédagogiques du primaire et du secondaire. Mais il a
surtout retenu l'attention concernant les coupures draconiennes qu'il a
l'intention de faire, qu'il a d'ailleurs faites dans certains cas, dans
certains secteurs cibles de l'éducation, notamment dans le financement
des universités. On sait que c'est le seul secteur qui est en expansion
au Québec au niveau de l'éducation; 2,5%, et c'est là
qu'on vise, c'est la proie du ministre de l'Éducation qui va faire des
coupures à ce niveau-là. (15 heures)
II y a aussi eu des coupures au niveau des OVEP, des organismes
volontaires d'éducation populaire. Il y a eu des coupures
également dans les classes d'accueil. Dans les classes d'accueil je
soulignerais le titre de Jean-Pierre Proulx dans le Devoir du 23
février, à savoir que c'est "une gaffe à éviter,
discriminatoire." Comme le dirait le député de Saint-Jacques, le
masque coule dans la figure du ministre de l'Éducation quand il nous
parle d'ouverture aux groupes ethniques alors qu'il vient justement de bloquer
l'intégration nécessaire au niveau des classes d'accueil.
Je finis là-dessus mon préambule, M. le Président,
avant de poser ma question. Je pense qu'on a tort de se marrer, de rire de cela
en face, surtout quand on vient de comtés de travailleurs.
Des voix: Question!
Le Président: Question, s'il vous plaît!
M. Lalande: Le ministre de l'Éducation s'acharne à
couper dans le secteur de l'enseignement aux adultes.
Des voix: Question!
M. Lalande: Des coupures de $24 millions!
M. Tardif: C'est sa dernière!
M. Lalande: Je reviendrai sur ces conséquences, s'il faut
les expliquer davantage. Est-ce que le ministre est conscient de la mauvaise
gestion administrative de son ministère au cours des quatre
dernières années? Ce fameux trou de $500 millions, on en mesure
les conséquences à l'heure actuelle. Cette mauvaise gestion nous
amène à faire des coupures aussi importantes...
M. Charron: À l'ordre!
M. Lalande: ... que celles subies par les travailleurs. Je
demande au ministre s'il est à même de comprendre le constat
d'échec du PQ en matière d'éducation et ce qu'il entend
faire, finalement, pour corriger les principales gaffes, lourdes, du ministre
en matière d'administration.
M. Charron: Question de règlement.
Le Président: M. le leader du
gouvernement sur une question de règlement.
M. Charron: M. le Président, vous aurez noté, comme
moi, que ce préambule n'a aucun bon sens. Je veux bien croire que c'est
bon pour Louise Harel, mais ce n'est pas bon pour lui, certain!
Le Président: Avez-vous terminé, M. le
député de Maisonneuve?
M. Lalande: M. le Président, si le pauvre
député de Saint-Jacques avait écouté, la question
est là: Qu'est-ce que le ministre entend faire pour réparer ces
gaffes effrayantes, surtout au niveau de l'éducation des adultes?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Garon: On va faire des élections! Une voix:
C'est excellent, ça! Le Président: M. le ministre.
M. Laurin: M. le Président, il s'agit d'une question
à de très multiples volets. J'avoue que j'ai eu de la
difficulté à la suivre et j'aimerais beaucoup que le
député me répète sa question.
M. Lalande: M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Maisonneuve, le président a bien compris et
le président pense que le ministre n'a pas compris la question, mais a
saisi le préambule; donc, seulement la question.
M. Lalande: M. le Président, je note que nos amis d'en
face me donnent leur consentement pour que je reprenne ma question. Je
soulignerai de façon particulière les problèmes aigus au
niveau des classes d'accueil. Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire
pour corriger ce qui nous apparaît complètement abusif envers un
milieu, des groupes ethniques comme les groupes anglophones au Québec
qui veulent s'intégrer à la communauté francophone?
Pourquoi le ministre fait-il du blocage systématique et psychanalytique,
psychédélique et tout ce que vous voudrez?
Deuxièmement, au niveau des travailleurs - je veux le
répéter pour le ministre, au cas où il n'aurait pas
compris -je veux souligner les conséquences de cette aberration que
constituent ces coupures au niveau de l'éducation aux adultes. Les
services d'accueil, c'est-à-dire le service d'orientation scolaire des
adultes, déjà mis en place dans cinq commissions scolaires seront
fermés. Deuxièmement, les structures administratives permettant
l'accès aux langues secondes seront réduites; les services de
formation sur mesure, permettant aux institutions de dépasser les
formats standards en vogue depuis 1970, seront démantelés. Je
demande au ministre de nous répondre là-dessus. M.
Bélanger, président des commissions scolaires régionales,
nous dit que c'est d'abord le secteur de la formation socioculturelle et
populaire qui sera frappé de façon draconienne, ainsi que la
formation générale à temps partiel et les activités
d'alphabétisation des commissions scolaires régionales. Or, ce
sont ces secteurs qu'on vise. Je peux le répéter au ministre,
s'il a encore des problèmes.
Le Président: M. le ministre de l'Éducation.
M. Laurin: M. le Président, je vous avoue qu'il m'est
très difficile de me retrouver dans le discours-fleuve que je viens
d'entendre, surtout qu'on me parle de psychanalytisme et de
psychédélisme. Je pense qu'on m'offre une tentation à
laquelle j'aurais le goût de succomber, mais à laquelle je ne
succomberai pas.
Plus sérieusement, M. le Président, en réponse
à cette question, je dois avouer qu'il m'est très difficile
à ce moment-ci de commenter une question qui s'appuie sur des chiffres
qui ne sont pas officiels et qui ne seront officiels que ce soir, après
le discours sur le budget. Je pense qu'il est opportun de situer chacune de ces
sept ou huit ou neuf questions qu'a soulevées le député de
Maisonneuve dans le cadre général du budget du Québec. Par
exemple, il importe de situer la diminution de la croissance des
dépenses par rapport à la diminution de la croissance des
revenus. Je pense qu'il est important aussi de situer toutes ces questions
à l'intérieur de l'impact que nous avons analysé, des
conventions collectives que nous avons signées, sur l'effet qui peut
s'ensuivre pour les autres personnels ou pour les services qu'il s'agit de
maintenir ou qu'il s'agit de diminuer ou qu'il s'agit d'augmenter.
De la même façon, il importe de situer cette question
à l'intérieur d'un autre paramètre qui est celui du
maintien ou de l'augmentation du pouvoir d'achat par rapport à la
croissance des dépenses affectées aux services. Je pense que
c'est seulement lorsqu'on aura le tableau global de la situation
économique et financière totale du Québec que nous
pourrons revenir d'une façon valable à l'analyse sectorielle et
détaillée de chacun des points qui a été
soulevé. Mais sans vouloir empiéter à l'avance sur le
discours que mon collègue va prononcer ce soir, je voudrais quand
même apporter quelques commentaires sur deux des points que je retiens
dans le discours du
député de Maisonneuve.
Parlons d'abord des classes d'accueil. Nous savons qu'il y avait des
classes d'accueil qui étaient en fait des prématernelles, dans le
secteur anglophone de Montréal, en particulier, alors qu'il n'y avait
pas de prématernelle dans le secteur francophone. Il nous est apparu
qu'il y avait là une situation qui désavantageait une certaine
clientèle par rapport à une autre. En même temps, il nous a
semblé que les classes d'accueil situées dans des écoles
uniquement anglaises pouvaient ne pas favoriser les objectifs que poursuit la
loi 101, c'est-à-dire non seulement la connaissance de la langue de la
majorité, mais également l'intégration des nouveaux
arrivants au courant majoritaire québécois. Ce sont là
deux des critères que nous avons retenus pour les priorités que
nous avons choisies pour l'année budgétaire qui s'en vient. Par
ailleurs, je rappelle au député de Maisonneuve que ces
décisions que nous avons cru devoir prendre ont été faites
en fonction également d'analyses et d'études qui avaient
été menées dans le milieu et même dans le milieu
anglophone. J'entendais hier encore le directeur général de la
Commission scolaire anglophone du Lakeshore se féliciter de la
décision du gouvernement en ce sens qu'elle permettra maintenant
à sa commission scolaire, en particulier, de promouvoir un meilleur
enseignement du français, langue seconde, pour la communauté
anglophone de Montréal.
En ce qui concerne l'éducation des adultes, il est vrai que cette
éducation des adultes, particulièrement en milieu
défavorisé, a connu un essor remarquable au cours des
dernières années et je pense qu'il faut en féliciter les
agents du milieu qui se sont pris en main, qui ont voulu devenir responsables
de leur situation concrète et en particulier de leurs besoins
d'éducation. Je pense qu'il faut se féliciter de cet essor qui
s'inscrit dans le développement économique aussi bien que social
et culturel de notre société. Mais il faut quand même
remarquer que cet essor même a fait intervenir un très grand
nombre de groupes de personnes dans le champ de l'éducation et, en
particulier, de l'éducation des adultes. Comme tout progrès
apporte également des problèmes, nous faisons face, depuis
quelques années, à un certain nombre de ces problèmes, par
exemple, la concurrence entre les divers secteurs, niveaux de
l'éducation, entre l'universitaire et le collégial, d'une part,
entre le collégial et les commissions scolaires, de l'autre. Par
ailleurs, comme il s'agit d'opérations nouvelles qui n'ont pas pour
elles la tradition et qui n'ont pas pour elles une rationalisation des
ressources, il a pu s'ensuivre - et, de fait, ceci est arrivé -une
augmentation très forte des dépenses dues à des efforts
insuffisants de gestion et de rationalisation. C'est d'ailleurs pour cette
raison que nous avons mis en place la commission Jean sur l'éducation
des adultes. Mais nous avons quand même identifié un certain
nombre de points sur lesquels il est possible d'en arriver immédiatement
à certains correctifs que nous entendons mettre en place dans le
prochain budget, sans que ceci ne mette en cause en rien le maintien et
même le développement des services, mais, encore une fois, nous y
reviendrons. (15 h 10)
M. Lalande: M. le Président...
Le Président: Une dernière question additionnelle,
M. le député de Maisonneuve.
M. Lalande: Oui. Le ministre nous a parlé de la commission
Jean. Je voudrais lui demander comment il explique le fait que le gouvernement
du Québec se prépare à réduire de $24,000,000 au
niveau de l'éducation aux adultes, alors que le gouvernement
fédéral - et on n'en parle pas - paie $105,000,000 qui sont
affectés à ce régime. Je voudrais demander au ministre
pourquoi le gouvernement du Québec, qui se veut le défenseur des
travailleurs, s'en va vers une réduction au niveau de la formation de
ceux qui n'ont pas pu l'avoir plus jeunes, alors que le gouvernement
fédéral, lui, maintient à $105,000,000 ses subventions au
niveau de l'éducation aux adultes.
M. Laurin: M. le Président, nous savons très bien
que le fédéral ne s'embarrasse pas, quand il s'agit des
dépenses, d'augmenter régulièrement son déficit
maintenant rendu à $15 milliards. C'est le gouvernement le plus
irresponsable que le pays ait jamais eu. Ce n'est pas un exemple que nous
voulons pour notre part imiter. Nous voulons être responsables dans la
gestion des fonds publics et nous voulons allier le développement des
secteurs qui en ont besoin avec une saine gestion des fonds publics. C'est la
raison pour laquelle nous en arrivons à ces décisions
responsables qui seront annoncées ce soir.
Quant au chiffre de $24,000,000, je l'ai dit tout à l'heure, je
ne veux pas le commenter. C'est un chiffre non officiel et le ministre des
Finances devra situer ce problème à l'intérieur des
problèmes généraux du Québec. Par ailleurs, les
chiffres que semble tirer de son chapeau le député de Maisonneuve
viennent probablement de règles budgétaires qui sont actuellement
étudiées pour l'implantation des programmes.
M. Lalande: M. le Président, question de
privilège!
M. Laurin: Ces règles budgétaires font actuellement
l'objet de...
M. Lalande: Question de privilège!
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député de Maisonneuve, sur une question de
privilège.
M. Lalande: Oui. Le ministre dit que je viens de tirer des
chiffres de mon chapeau. Je n'ai pas le chapeau du ministre des Finances, moi!
Je ne suis pas capable d'en sortir autant!
Le Président: À l'ordre! Question principale, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
L'option constitutionnelle du Parti
québécois
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je vais adresser ma
question au premier ministre. Elle porte sur une question fondamentale qui, je
pense, va être un des thèmes principaux de la prochaine campagne
électorale. Le conseil général du Parti
québécois, lors de ses deux dernières réunions,
s'est prononcé en faveur de mettre en veilleuse l'option fondamentale du
Parti québécois qui est la souveraineté-association ou
l'indépendance.
Depuis ce temps, plusieurs porte-parole du Parti
québécois, des députés, des candidats
éventuels se promènent également dans tout le
Québec et disent que le Parti québécois a mis son option
en veilleuse. D'un autre côté, certains députés,
certains ministre ou certains ex-ministres, même, démissionnent du
Parti québécois parce que le Parti québécois veut
mettre son option en veilleuse. Je prends le programme du Parti
québécois, la dernière édition - et, s'il y en a
une autre, j'espère que le premier ministre pourra me le dire - et je
regarde la présentation du programme. On y lit une phrase signée
par M. René Lévesque lui-même qui dit: La
souveraineté nationale, voilà un des principes moteurs auquel le
parti ne saurait renoncer sans se trahir.
Une voix: Ah!
M. Fontaine: Je regarde les deux chapitres suivants. On y parle
d'accession à l'indépendance et de
souveraineté-association. M. le Président, pour éclairer
la population du Québec qui va avoir à écouter cette
question pendant la période électorale, le premier ministre
est-il en mesure de nous dire aujourd'hui si oui ou non, et sans ambages, de
façon claire, le Parti québécois a mis en veilleuse son
option indépendantiste et s'il accepte de trahir son programme?
M. Marx: O'Neill va répondre à cette question.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président... Le
Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Lévesque (Taillon): Je voudrais d'abord, si le
député me le permet - c'est le premier moment disponible
où je puisse le faire - soulever une question de privilège,
rapidement, par rapport à une question de privilège que le chef
de l'Opposition officielle et député d'Argenteuil a
soulevée lui-même il y a quelques instants. Il s'agissait de ces
dépenses du personnel politique. Soulevant une question de
privilège, le chef de l'Opposition officielle a mis en doute ce que
j'avais dit, à savoir qu'on avait averti son cabinet.
J'ai ici copie - je vais la déposer -d'une lettre
expédiée par M. Boivin, chef de mon cabinet, à M. Pierre
Pettigrew, directeur de cabinet du chef de l'Opposition officielle, le 3 mars
1981. Il serait temps que le chef de l'Opposition sache ce qui arrive chez lui.
La lettre se lit comme suit: "Cher collègue, le Conseil du
trésor, à ses séances des 3 et 17 février 1981, a
jugé opportun de modifier la directive no C-74 concernant les frais de
voyage des cadres supérieurs, des adjoints aux cadres supérieurs
ainsi que du personnel des cabinets. Ces modifications plutôt
substantielles touchent principalement les dépenses de voyage encourues
pendant une période électorale ou référendaire. Je
joins pour votre information copie du texte en vigueur avant les amendements de
février, copie de la nouvelle rédaction. N'hésitez pas
à me faire part de vos commentaires, je suis à votre
entière disposition. Espérant le tout à votre
satisfaction, etc."
Si M. Pettigrew est revenu de Londres, où il est allé
tardivement montrer que ça intéressait quand même
l'Opposition officielle ce qui pouvait se passer au point de vue
constitutionnel, depuis le 3 mars il a été averti, et je
répète au chef de l'Opposition que je lui donnais l'information
dont je disposais tout à l'heure. Je dépose la lettre.
M. Ryan: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Ryan: Non seulement je ne retire pas mes paroles, mais je les
maintiens. J'ai dit tantôt que je n'avais pas été
consulté.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Fontaine: Question de règlement!
Le Président: Sur une question de règlement, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, on est à la
période de questions.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Vous comprendrez que je ne peux juger au préalable d'une question de
privilège sans l'avoir entendue.
M. le chef de l'Opposition officielle, sur une question de
privilège.
M. Ryan: M. le Président...
M. Goulet: M. le Président, je vous demande une
directive.
Le Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: J'aimerais savoir, M. le Président, comment
interpréter les articles 48 et suivants. Après une question qu'a
posée le député de Nicolet-Yamaska, on arrive avec une
question de privilège. Je pense qu'on pourrait consentir à la
question de privilège immédiatement après la
période des questions, tel que l'avait demandé le premier
ministre. On est en train de noyer le poisson, M. le Président, quant
à la question du député de Nicolet-Yamaska.
Le Président: Consentement. M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je m'excuse si le
député d'Argenteuil se sent brimé de quelque façon
que ce soit, mais c'est lui-même qui avait soulevé la
question.
M. Ryan: M. le Président, je proteste formellement, il y a
toujours des limites!
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Disons que l'incident est clos,
mais j'espère que le chef de l'Opposition aura des meilleurs rapports de
son entourage désormais.
M. Ryan: Question de privilège, M. le
Président.
Le Président: M. le chef de l'Opposition, sur une question
de privilège.
M. Ryan: Je crois avoir compris que vous réservez mon
privilège pour tantôt.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, avec mes
excuses au député de Nicolet-Yamaska, je voudrais répondre
à sa question parce que c'est une question importante. Ce n'est pas
aller chercher les ragots comme on l'a fait tout à l'heure. Le
député de Nicolet-Yamaska, dans sa question, a parlé de
mise en veilleuse; c'est un mot qui a fait son tour de presse. Je voudrais dire
simplement ce dont il s'agit.
Premièrement, la position fondamentale du Parti
québécois, de celui qui vous parle et de tous ceux qui y
travaillent depuis douze ans maintenant, en ce qui concerne ce que nous
espérons pour l'avenir du Québec n'a pas changé et on
continuera d'y croire. Cela implique la pleine maîtrise de nos affaires
le jour où, démocratiquement, la population sera d'accord. On ne
fera pas de chicane de sémantique.
Maintenant, pour ce qui est de nos positions actuelles, elles sont aussi
claires et aussi nettes qu'elles l'étaient en 1976 alors que, pour la
première fois, la population nous a fait confiance. Nous ne quitterons
pas - il n'en est pas question - nos positions fondamentales, mais nous
n'abandonnerons pas non plus le respect que nous avons toujours
démontré vis-à-vis de nos engagements, sur ce plan comme
sur les autres, le respect de la population et des volontés majoritaires
de la population. En 1976, on avait bien dit que la population serait
consultée, que personne n'essaierait de parachuter quoi que ce soit sur
le dos de citoyens qui n'auraient pas été consultés
démocratiquement. C'est ce qui est arrivé. (15 h 20)
Maintenant, nous avons à prendre ou à renouveler un
engagement; cela a été fait l'automne dernier, après le
référendum. Il est évident que, si une période
électorale arrive moins d'un an ou, en tout cas, à peine un an
après un référendum qui a donné les
résultats qu'on sait, ce serait littéralement, je crois, abuser
de la situation que de prétendre lancer de nouveau, à si
brève échéance, la population dans un tel débat.
Donc, on a pris l'engagement - ce n'est pas une mise en veilleuse - de ne tenir
ni une élection référendaire, bien sûr, ni de
référendum pendant la durée d'un deuxième mandat.
Nous tenons nos engagements.
Il y en a d'autres à Ottawa, il y en a même en face de nous
qui pourraient difficilement en dire autant, depuis et pendant et après
le référendum de mai 1980. Parmi nos engagements dans l'avenir
immédiat, dans le contexte où nous sommes qui est celui d'un
système fédéral, il y a celui de défendre et de
promouvoir, comme on l'a fait sans arrêt depuis 1976, les droits et les
intérêts fondamentaux du Québec. Cela s'est
reflété, d'ailleurs - je le soulignerais pour le
député - dans une motion que j'ai fait inscrire au feuilleton
d'aujourd'hui et qui résume ce qui serait notre perspective essentielle
pour le deuxième mandat, si les citoyens nous font confiance.
Cela signifie vraiment des exigences fondamentales et rivées
exclusivement aux intérêts du Québec. Nous ne serons
jamais
des gens qui diront à qui que ce soit à Ottawa: "Boss",
invitez-nous, patron, à venir vous trouver à table. Nous
demandons, parce que c'est son devoir, au gouvernement libéral d'Ottawa
de revenir à la table négocier honnêtement et en respectant
les aspirations fondamentales du Québec. Nous ne dirons pas au "boss"
comment se comporter vis-à-vis de nous.
Le Président: M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, le premier ministre essaie
de noyer le poisson en parlant d'un autre gouvernement alors que je lui parle
de questions fondamentales de son propre parti. Le premier ministre nous dit
dans sa réponse qu'il va défendre l'autonomie du Québec
alors que dans son propre programme on parle d'indépendance, de
souveraineté-association.
Quant à nous, M. le Président, nous disons qu'autonomie et
fédéralisme sont indissociables. Comment peut-on, sans
hypocrisie, se présenter devant la population comme des autonomistes et
garder la thèse souverainiste? M. le premier ministre, êtes-vous
prêt aujourd'hui à nous dire que vous êtes prêt
à renier ou à abolir l'article 1 de votre programme? Quand vous
ferez cela, vous pourrez avoir de la crédibilité.
M. Lévesque (Taillon): Si le député de
Nicolet-Yamaska s'était donné la peine de lire convenablement, il
aurait vu que c'est un programme qui dit que jamais quoi que ce soit de
changement fondamental - même celui qu'on espère de tout notre
coeur et pour lequel on va continuer de travailler par la persuasion, c'est
normal - ne se fera autrement que par des moyens démocratiques. Il n'est
pas question de renier un idéal, ni un objectif. Il est question de
dire: On va respecter l'attitude de la population. On a droit à nos
convictions, comme le député a droit aux siennes, mais une chose
que je sais et que je peux répéter ici en toute confiance, c'est
qu'on a été fiables dans nos engagements en 1976; on avait les
mêmes convictions, les citoyens le savent. À certains moments,
cela nous a déchiré le coeur d'être obligés de dire
- il y a des gens qui se sont révoltés, c'est normal - Il faut
respecter la décision majoritaire qui a été prise au
référendum. On continue d'être aussi fiables maintenant,
mais personne ne nous arrachera nos convictions, par exemple.
M. Fontaine: M. le Président, dernière question
additionnelle, très brève.
Le Président: Dernière, puisque la période
des questions est terminée. Dernière additionnelle.
M. Fontaine: M. le Président, comment peut-on à la
fois garder l'option indépendantiste et aller négocier le
fédéralisme renouvelé, si on n'y croit pas?
M. Marx: Honnêtement.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dirai
ceci, très simplement, que le député va comprendre
très vite. Qui veut le plus et tient, un jour si possible, à
avoir le plus, est probablement - je pense que les Québécois s'en
rendent compte - le meilleur défenseur du moins, en attendant.
Le Président: Fin de la période des questions.
M. le chef de l'Opposition, très brièvement, sur une
question de privilège. J'espère que cela n'entraînera pas
un débat.
Question de privilège
Budgets de déplacement des attachés
politiques des ministres
M. Ryan: M. le Président, vous avez affirmé
tantôt que le gouvernement avait pris la décision d'augmenter du
tiers les budgets de déplacement des attachés politiques des
ministres pendant la campagne électorale. J'ai dit que nous n'avions pas
été consultés à ce sujet. Je maintiens ce que j'ai
dit et j'affirme que la lettre dont le premier ministre a donné lecture
confirme mes propos et non pas les siens.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est sur
une autre question. Je ne crois pas que cela mérite un débat. Les
faits sont devant la Chambre.
Nominations effectuées par le
gouvernement
Je voudrais simplement compléter l'information que je donnais
tout à l'heure. J'ai fait venir, en deux copies, la liste des
nominations effectuées par le gouvernement, en Conseil des ministres,
celles qui dépendent de nous, depuis le 1er janvier 1981 jusqu'au 9 mars
inclusivement. Je dépose cette information. Comme je l'ai dit tout
à l'heure, si l'Opposition ou les oppositions veulent en scruter la
teneur et la qualité, libre à elles, on sera prêt à
répondre à toutes les questions, le cas
échéant.
Le Président: Document déposé.
M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce
que le premier ministre pourrait répondre rapidement à cette
question: Est-ce que cette liste comprend les
occasionnels engagés par le gouvernement?
M. Lévesque (Taillon): Non. Il s'agit de nominations. Les
occasionnels ne sont pas nommés par le Conseil des ministres. Ils sont
engagés un peu partout dans le gouvernement. S'il y a des cas qui
paraissent extraordinairement intéressants au député de
Bonaventure, il nous en parlera. Ce dont le chef de l'Opposition, sauf erreur,
a parlé récemment, à travers son chapeau - je m'excuse de
le dire - c'était des nominations que le Conseil des ministres ou que le
gouvernement faisait. Elles sont toutes là.
M. Levesque (Bonaventure): Simplement une précision au
premier ministre. Est-ce que la liste comprend les contractuels, je ne dis pas
les occasionnels, parce qu'on sait que le gouvernement a cette
discrétion de pouvoir engager des contractuels?
M. Lévesque (Taillon): Ce ne sont pas des nominations au
sens précis du terme. Ce sont des choses que vous avez tout le loisir de
scruter, soit par vos questions, si vous n'y avez pas pensé avant, ou
alors aux engagements financiers pour chaque ministère.
Le Président: Motions non annoncées. Enregistrement
des noms sur les votes en suspens.
Avis à la Chambre.
M. le leader du gouvernement.
Avis à la Chambre
M. Charron: M. le Président, je voudrais indiquer
immédiatement l'horaire pour confirmer ce qui a déjà
été annoncé sur l'horaire des travaux d'aujourd'hui, si ce
n'est pas de toute la semaine. Nous aurons une réunion de la commission
de l'Assemblée nationale, durant quelques minutes à peine, afin
de ratifier des décisions du comité de régie interne ou de
les modifier en conséquence, en tout cas, de les adopter après
que la séance de la Chambre aura été suspendue, cet
après-midi. Je dis donc tout de suite aux députés qui sont
présents ici qu'ils seront invités immédiatement à
se rendre en commission à la salle 81, sous nos pieds, pour une courte
séance de la commission de l'Assemblée nationale.
Ici, cet après-midi, à la suite des consultations que j'ai
eues - je ne le proposerais pas si je n'étais pas assuré d'une
unanimité de l'Assemblée, parce que ces choses doivent être
adoptées à l'unanimité, il me semble - nous aurons
à débattre une motion, que je présenterai dans quelques
instants, visant à faire du règlement sessionnel de notre
Assemblée, avec lequel nous vivons depuis trois ans maintenant à
titre d'essai, un règlement permanent. Donc, après discussion des
membres de l'Assemblée, tous ceux qui voudront y participer pourront le
faire, mais j'ose espérer que le débat sera rapide, nous
suspendrons la séance de l'Assemblée nationale et nous ne
reviendrons qu'à 20 heures très précises. Je dis
très précises parce que le discours du budget du ministre des
Finances, comme, d'ailleurs, les répliques de l'Opposition qui, elles,
auront lieu jeudi, est radiodiffusé et télédiffusé
pour l'ensemble des citoyens du Québec. Cela astreint nos travaux
parlementaires à une ponctualité qui n'est pas coutumière,
mais qui, ce soir, devra être dans l'esprit de chacun puisque le discours
du budget constitue, avec les répliques de dix minutes que le
règlement prévoit, le menu de la soirée.
Il n'y a pas de séance de l'Assemblée nationale demain
matin, pour permettre aux différents partis de préparer leur
réplique sur le budget. Demain après-midi, c'est une motion qui
est inscrite au nom d'un député de l'Opposition, je laisserai au
député de Bonaventure le soin de nous indiquer laquelle. Et la
réplique, qui aurait pu normalement avoir lieu dès 10 heures
demain matin, ce qui nous paraissait invraisemblable, M. le Président, a
été du gré de tout le monde reportée à la
séance de jeudi après-midi. La séance de jeudi sera donc
consacrée aux premières heures du débat sur le discours du
budget pour ensuite ajourner la Chambre à la semaine prochaine. (15 h
30)
Je voudrais indiquer tout de suite, M. le Président, que...
Des voix: Les élections?
M. Charron: Je n'en suis pas maître. Je voudrais simplement
indiquer, M. le Président, en conclusion, parce que j'ai oublié
de le mentionner, que, pour pouvoir procéder au débat sur la
motion visant à faire de notre règlement un règlement
permanent, il me faudra préalablement solliciter le consentement pour
appeler cette motion, puisqu'elle est en avis simplement au feuilleton
actuellement.
Le Président: En vertu de l'article 34, M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président, tout
d'abord une précision. Demain, le leader parlementaire du gouvernement a
indiqué que ce sera la journée de l'Opposition et une motion doit
être indiquée par nous aujourd'hui, c'est-à-dire que ce
sera cette motion qui apparaissait à mon nom, je crois, oui, et que l'on
retrouve à la page 7 du feuilleton. Je tiens simplement à
rappeler, M. le Président, qu'en avis aujourd'hui il y a quatre motions
de l'Opposition officielle, au moins quatre,
sinon cinq, et les trois autres que je ne lirai pas, parce que je ne
pense pas que nous puissions les passer toutes demain. L'une évidemment
concerne la fiscalité municipale, mais je le dis simplement en passant;
l'autre, les grèves - vous savez combien c'est important d'en parler, M.
le Président - et l'autre, c'est le règlement de placement dans
la construction, mais la motion que nous allons débattre demain se lit
comme suit: "Que cette Assemblée est d'avis que ce gouvernement dont
l'orientation demeure centrée sur la souveraineté-association et
sur une conception interventionniste de l'État ne peut renouveler le
fédéralisme canadien et promouvoir la véritable relance de
l'économie québécoise." Voilà la motion, M. le
Président, que nous avons l'intention de débattre demain et la
première précision que je voulais demander au leader
parlementaire du gouvernement...
Une voix: Une motion séparatiste.
M. Levesque (Bonaventure): ... c'était celle-ci: Vu les
rumeurs persistantes d'élection, d'un appel au peuple cette semaine et
vu que le droit de réplique appartient au parrain de la motion et qu'il
est possible que nous ne puissions pas nous rendre à mercredi prochain,
est-ce qu'on peut solliciter un consentement pour exercer le droit de
réplique demain...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Levesque (Bonaventure): évidemment sur la motion?
M. Charron: M. le Président, il n'y a rien qui me permet
de présumer que nous n'aurons pas le plaisir de nous retrouver ensemble
la semaine prochaine.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ceci
m'amène à mon autre question, en vertu des dispositions de
l'article 34. Avec les rumeurs persistantes d'élection - d'ailleurs, des
rumeurs persistantes d'élection, nous en avons eu l'automne dernier -
qu'est-ce que cela veut dire? Premièrement, cela veut dire qu'on
s'accroche au pouvoir depuis ce temps-là. Cela veut dire cela, oui, M.
le Président.
M. Ryan: Là, ils commencent à avoir les doigts
fatigués.
M. Levesque (Bonaventure): Devant ces rumeurs persistantes
d'élection, M. le Président, puis-je demander au leader du
gouvernement, au cas où il y aurait un appel au peuple cette semaine ou
même la semaine prochaine, s'il pourrait nous dire...
Une voix: Qui va gagner.
M. Levesque (Bonaventure): Qui va gagner, oui, c'est une bonne
chose, parce que vous ne le savez pas, mais nous le savons par exemple qui va
gagner. Vous devriez vous en douter à force de reculer
l'échéance des élections. C'est parce que vous avez peur
de faire face à l'électorat québécois. Vous avez
peur et vous avez raison d'avoir peur. M. le Président, je vais revenir
à la question en vertu de l'article 34.
Une voix: Dans deux semaines.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il y a
là une échéance importante. C'est qu'à partir du
1er avril 1981, c'est-à-dire dans deux semaines à peu
près, à ce moment-là commence un nouvel exercice
financier. Cette Chambre n'a pas adopté de crédits provisoires,
comme elle le fait régulièrement avant l'adoption des
crédits. Le leader du gouvernement ne nous a indiqué, au cours
justement de la présentation des travaux qu'il a faite en dehors de la
Chambre et en Chambre, aucune disposition, au moins son silence l'indique,
quant à l'étude de crédits provisoires. Ma question est
celle-ci: Est-ce que le gouvernement, qui s'accroche au pouvoir auquel il a
pris un goût sinon maladif du moins non équivoque, d'où la
frustration très grande qui l'attend, a décidé de
déposer en Chambre ce projet de loi qu'on pourrait adopter après,
je crois, cinq heures de débat et, ensuite, première lecture,
deuxième lecture, troisième lecture, ou est-ce que le
gouvernement ou le leader du gouvernement a décidé, dans sa
sagesse, à moins qu'il en sache beaucoup plus sur la date des
élections que nous, ou a prévu qu'il y aurait adoption de
crédits provisoires afin que le gouvernement puisse fonctionner
même en campagne électorale?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Le député de Bonaventure sait
très bien que si, effectivement, le budget n'était pas
adopté avant le 31 mars à minuit, il y a deux façons de
procéder à la permission de dépenser et d'utiliser cet
argent. Il y a celle qu'il indique lui-même. Cela veut donc dire qu'entre
aujourd'hui et le 31 mars, l'Assemblée aura tenu un débat minimum
de cinq heures sur des crédits provisoires, peut-être pas cette
semaine, mais peut-être au cours des semaines prochaines. Jusqu'au 31
mars, il reste 21 jours. Ou, si jamais la Chambre n'était pas en
réunion au cours de cette période ou s'ajournait sans que ce
débat de cinq heures
n'ait eu lieu, la Loi sur l'administration financière
prévoit que, par mandat spécial, pour une durée
très limitée, le Conseil des ministres peut décider
d'autoriser les dépenses gouvernementales sur la base du
précédent budget. Ces choses sont dans les lois
québécoises depuis des années. C'est donc un double
recours et, dans l'hypothèse qu'avance le député de
Bonaventure, ce sera l'un ou l'autre qui sera utilisé.
Si le député de Bonaventure insiste pour qu'on ait un
débat de cinq heures des crédits provisoires cette semaine, dans
les jours qui vont suivre le discours du budget lui-même, tout ce que je
pourrais lui proposer, ce sont les trois heures de demain matin et les deux
heures de jeudi après-midi, mais, ça recule la réplique de
l'Opposition officielle. Ce pourquoi je ne l'ai pas mis dans le menu de la
Chambre, c'est que ça ne m'apparaissait pas respectueux de l'Opposition.
En conséquence, j'ai préféré retarder ce
débat de cinq heures à une autre semaine.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): ...je dirai simplement au leader
parlementaire du gouvernement que si on avait voulu agir d'une façon
démocratique, surtout s'il y a un appel au peuple, on aurait dû
convoquer la Chambre avant le 10 mars et permettre de discuter des
crédits provisoires. Les mandats spéciaux, voilà une
procédure qu'on utilise uniquement lorsqu'on n'a pu prévoir la
situation. Mais lorsqu'on a pu la prévoir, comme on l'a fait
présentement, s'il y a un appel au peuple cette semaine, je pense qu'on
aurait pu siéger, même hier.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Je ne suis pas figé dans le béton quant
à ma stratégie, M. le Président. Si le
député demande qu'on ait un débat de trois heures demain
matin et de deux heures jeudi après-midi, je suis bien prêt
à réfléchir sur cette question.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président.
Le Président: M. le leader de l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Nous ne mettons de côté
aucune possibilité, mais il est clair que nous voulons donner
priorité au discours du critique financier de l'Opposition a la suite du
budget.
M. Charron: C'est ce que j'avais pensé, M. le
Président, c'est pour ça que j'ai fait le menu de cette
façon.
Le Président: Affaires du jour. Est-ce qu'il y a... Oui,
en vertu de l'article 34?
Recours à l'article 34
M. Mathieu: Oui, M. le Président, en vertu de l'article
34.
Le Président: M. le député de
Beauce-Sud.
M. Mathieu: J'avais posé une question au ministre du
Travail au mois de mars. Elle fut sans réponse. Je l'ai reposée
en novembre, j'ai eu une réponse partielle en décembre. C'est une
question qui a trait aux poursuites intentées en vertu des lois sur la
formation et la qualification professionnelle et également de...
Le Président: Malheureusement, ce n'est pas une question
en vertu de l'article 34. C'est une question de fond et non pas sur les travaux
de l'Assemblée, et les réponses écrites aux questions,
c'est le mercredi, M. le député de Beauce-Sud.
M. Mathieu: Je n'ai pas posé ma question, comment
pouvez-vous tirer la conclusion?
Le Président: C'est parce que l'article 34...
M. Mathieu: C'est au leader.
Le Président: Question au leader, d'accord.
M. Mathieu: Oui, une question au leader.
Le Président: Sur les travaux de l'Assemblée.
M. Mathieu: J'ai eu une réponse partielle et j'avais
demandé, entre autres choses, les nom et adresse des personnes
condamnées, le nombre de jours d'emprisonnement, amendes, tout
ça. On m'a seulement donné une liste qui m'a permis de constater
qu'il y a 7000 personnes par année qui furent condamnées,
traduites devant les tribunaux. Je n'ai pas la liste. Est-ce que je peux
m'attendre à un complément de réponse? (15 h 40)
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Je ferai tout mon possible
pour la fournir au député la semaine prochaine.
M. Mathieu: Merci.
Le Président: Affaires du jour.
Motion visant à adapter de façon
permanente le règlement sessionnel régissant les travaux de la
Chambre
Est-ce qu'il y a consentement unanime pour que la motion du leader du
gouvernement, qui est en appendice au feuilleton, soit étudiée
lors de cette présente séance, c'est-à-dire: "Que cette
Assemblée adopte, de façon permanente, le règlement
sessionnel qui régit présentement ses travaux"? Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Levesque (Bonaventure):
Consentement.
Le Président: Consentement. M. le leader du
gouvernement.
M. Claude Charron
M. Charron: M. le Président, je serai très bref
puisque, au besoin, je répondrai aux questions qui seront posées
au cours du débat lors du droit de réplique qui m'est
prévu. Pour les citoyens qui nous écoutent - il faut toujours
avoir cette dimension à l'esprit -il s'agira d'un jargon bien
particulier, mais pour les députés qui sont ici il s'agit de
questions très précises. En effet, il s'agit non seulement de nos
droits et privilèges comme le nouveau règlement que nous avons
à l'essai a voulu les établir, mais il s'agit très
concrètement aussi de nos conditions de travail et du déroulement
des travaux de l'Assemblée qui ont été modifiés par
le règlement qui est à l'essai depuis trois ans.
En gros, M. le Président - pour faire une très courte
histoire, quand je suis entré ici, en 1970 - le député de
Bonaventure en sait quelque chose, parce qu'il vivait dedans depuis plusieurs
années - il y avait un règlement de l'Assemblée nationale
qui était épouvantable, qui contenait 800 quelques articles dont
certains remontaient à peu près au déluge et n'avaient
plus rien à faire avec la réalité d'un Parlement moderne
comme l'était déjà celui du Québec de 1970.
Le président de l'époque, le député de
Laval, et les députés se sont mis à l'oeuvre sur un
règlement qui est aujourd'hui le règlement en vigueur de
l'Assemblée depuis 1972, si ma mémoire est fidèle. Je
dirais que ma motion aujourd'hui vise à compléter le travail de
ce groupe de 1972, les années qui ont passé nous ayant permis de
vivre le règlement de 1972 et, je le dis très
légitimement, de le parfaire. Si je me permets cette expression, c'est
que je n'y suis pour rien. On ne pourra, donc, prétendre que c'est de
l'exagération en ma faveur. Au contraire, c'est mon
prédécesseur et ami, Robert Burns, qui était ici à
cette époque, qui, en 1977, avait proposé aux
députés - et tout le monde avait été d'accord -
d'essayer un nouveau mode de fonctionnement de l'Assemblée.
Ce nouveau mode, je laisserai à l'Opposition le soin de nous en
montrer les mauvais côtés; sans aucun doute, et c'est
légitime, il y en a, M. le Président. Mais si nous sommes sur le
point d'avoir l'unanimité, je crois, pour faire de cet essai la
règle normale et habituelle de l'Assemblée nationale, c'est que
les bons côtés l'ont emporté sur les mauvais
côtés.
Par exemple, les députés ont décidé de
siéger, je ne dirais pas à date fixe, mais presque. Les citoyens
qui nous écoutent se rappellent sans doute avoir lu, parfois en plein
coeur d'été, que l'Assemblée nationale se permettait des
marathons de dix heures, quinze heures, vingt heures de débats, le
samedi comme la semaine, en plein milieu de juillet. Je me dis que l'ensemble
des citoyens qui regardaient cela devaient avoir un drôle de doute sur la
qualité des lois que nous votions à cette époque. Je ne
dis pas qu'ils avaient raison de penser qu'elles étaient mauvaises, mais
ils avaient sans doute raison de penser qu'elles n'étaient pas
étudiées comme il faut. Des lois présentées la
veille de l'ajournement étaient adoptées à la vapeur.
Bref, c'est tout cela qu'on a décidé ensemble, soit que
l'Assemblée ne dépasserait pas le 21 juin et le 21
décembre, pour ces deux bouts de session; que si un gouvernement veut
faire adopter quelque chose dans les derniers jours, il doit donner au moins 21
jours d'avis à l'Assemblée sur les lois qu'il veut faire adopter,
avant chacune de ces fins de session, de moitiés de session
annuelle.
Je crois, pour l'avoir entendu dire tellement de fois et par
expérience personnelle pour avoir vécu les deux régimes,
Mme la Présidente, que c'est une amélioration non seulement
très heureuse pour notre vie à nous et notre travail, mais,
très franchement, sur la qualité de législation que nous
avons aussi.
Je dirais que l'essai de ce nouveau règlement a duré assez
longtemps, trois ans, et dans plusieurs circonstances, à part ça.
C'est quand même un essai légitime et loyal qui nous permet
aujourd'hui, au moment où -si je reprends les rumeurs que
véhiculait le député de Bonaventure - cette
Législature pourrait être dans ses derniers jours de session, de
nous dire, entre nous: Cette Assemblée nationale, cette
Législature ayant fait cet essai, il est bon d'en faire notre
règlement permanent. Cela veut dire que le gouvernement nouveau sera
appelé à fonctionner comme celui dont je suis le
représentant dans cette Assemblée a été
appelé à le faire, que tous les partis politiques qui postulent
le poste de gouvernement du Québec, par l'adoption d'aujourd'hui,
acceptent de vivre dans ces règles et disent d'avance, à
l'élection générale, qu'ils s'apprêtent à
vivre dans ces règles.
Cela veut dire que toutes les équipes de députés,
les équipes de ministres et les cabinets ministériels
fonctionneront avec ces échéances désormais rigoureuses de
notre règlement. Je crois que c'est pour le bien de tout le monde, de
nous, d'abord, puisqu'il s'agit de nos conditions de travail, très
légitimement, mais aussi du produit qui sort de cette
Assemblée.
Je m'en voudrais de ne pas signaler que ceux qui ont eu le courage,
à l'époque, et l'imagination de mettre ce règlement
à l'essai, en 1977, à commencer par mon ami, Robert Burns, mais
aussi les députés de l'Opposition - je pense que le
député de Laval était le leader de l'Opposition
officielle, à l'époque, et le député de Richmond,
je crois, était le leader parlementaire de l'Union Nationale - ont fait
un bon choix à cette époque-là, puisque nous concluons
ensemble aujourd'hui que, l'essai étant fait, nous pouvons l'adopter
d'une manière permanente.
Sans entrer dans les détails de tuyauterie, je propose donc,
comme la motion l'indique, que ce règlement à l'essai, tel qu'il
a été modifié, même en cours d'essai, devienne le
règlement permanent de l'Assemblée nationale.
La Vice-Présidente: Sur cette motion, M. le leader de
l'Opposition officielle.
M. Gérard-D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, je voudrais,
au nom de l'Opposition officielle, dire quelques mots seulement sur cette
motion présentée par le leader parlementaire du gouvernement. Je
pense bien que mon collègue, le député de Laval, serait
l'homme tout désigné pour s'inscrire dans ce court débat,
étant donné la contribution énorme qu'il a apportée
à ce qu'on appelle maintenant le Code Lavoie.
Si, Mme la Présidente, le député de Laval avait
formulé des objections à ce que ce règlement sessionnel
devienne permanent, je suis convaincu qu'il aurait eu beaucoup d'influence sur
la décision de notre caucus.
Ceci étant dit, Mme la Présidente, ce que l'on fait
présentement, c'est rendre permanent une façon de vivre, quant
à ces amendements, qui est la nôtre depuis bientôt quatre
ans. Il semble que ces amendements, tels que nous les avons vécus, n'ont
pas réellement causé de problèmes sérieux; au
contraire, ils ont permis peut-être une meilleure planification, quant
à la vie des parlementaires.
Je me rappelle que, dans le passé, nous ne pouvions pas faire de
pronostics sur notre présence en Chambre, même lorsqu'il
s'agissait de la période entre Noël et le Jour de l'An - d'heureux
souvenirs pour le leader parlementaire du gouvernement - ou encore pour la
période de juillet et août où nous nous sommes
retrouvés encore, assez souvent, dans cette noble enceinte. Ce
règlement est une façon de pouvoir un peu mieux planifier la vie
de chacun, et cause, cependant, certaines obligations au gouvernement en
particulier. En effet, comme l'a évoqué, il y a quelques
instants, le leader parlementaire du gouvernement, au mois de juin et au mois
de décembre, il est impossible au gouvernement, à moins de
plaider l'urgence absolue et de présenter une motion à cet effet,
de faire adopter des projets de loi qui n'ont pas été
déposés avant le 1er décembre ou avant le 1er juin.
On sait ce qui se passe au comité de législation, qu'on
pense aux retards inévitables qui se multiplient pour une raison ou pour
une autre; il y a, après tout, combien de ministères, Mme la
Présidente, et combien d'organismes gouvernementaux? On peut s'attendre
qu'à la toute dernière minute il y ait des retards. Le
gouvernement, s'il veut faire adopter une loi, d'après ce
règlement, doit absolument être prêt à déposer
cette loi; s'il veut la faire adopter, encore une fois, durant ces mois de fin
de session, il doit le faire au moins trois semaines à l'avance.
Mais, il y a aussi, Mme la Présidente, un autre aspect que je
voudrais noter, c'est que le gouvernement, lui, par contre doit avoir devant
lui une Opposition responsable et une Opposition suffisamment réaliste
pour tenir compte des contingences, tenir compte de certaines circonstances
particulières. Et je vous donne un exemple: c'est qu'à la fin de
toute session ou avant tout ajournement, vous voyez l'Opposition donner des
consentements qui sont nécessaires, évidemment, si on veut
adopter les lois. Autrement, si l'Opposition, à la veille de Noël
ou à la veille de la Saint-Jean, commence à exiger que l'on suive
le règlement à la lettre, à ce moment, le gouvernement se
trouve dans une situation impossible, surtout si les débats ont
été prolongés, de sorte que le gouvernement ne pourrait
pas faire adopter ses lois.
Mme la Présidente, je tiens à souligner que depuis 1977
vous avez, à votre gauche ici, une opposition généralement
responsable - j'emploie le mot "généralement", parce que je veux
être modeste - j'allais dire toujours responsable, et je n'exagère
rien. Le leader parlementaire du gouvernement sait que nous avons
accordé notre collaboration et que c'est à cause de notre
collaboration et de
notre sens des responsabilités que ces amendements sont
demeurés vivables et que le gouvernement a pu faire adopter ses lois.
Autrement dit, qu'est-ce que c'est que ce règlement que nous avons, le
code Lavoie? Cela permet, comme tout règlement, au gouvernement de
gouverner, mais cela permet également à l'Opposition de pouvoir
se faire entendre. Or, si ces amendements avaient pour but d'empêcher le
gouvernement de pouvoir gouverner, ou si cela empêchait l'Opposition de
pouvoir s'exprimer, à ce moment, il faudrait rejeter ces amendements.
Nous allons les accepter simplement parce que nous allons faire confiance
à la prochaine Opposition. Nous ne voulons pas que la prochaine
Opposition soit comme celle d'avant 1976, parce qu'à ce moment nous
devrons revenir au règlement actuel, nous devrons, autrement dit,
retirer les amendements que nous adoptons aujourd'hui.
D'ailleurs, lorsque je parle de la future Opposition, je les vois
déjà sourire, pas beaucoup, seulement ceux qui pensent pouvoir se
faire réélire. Mme la Présidente, ce que je voulais
simplement dire, c'est que, lorsque cette Opposition de 1981 sera devant nous,
j'espère qu'on se rappellera les propos que j'ai tenus aujourd'hui.
Je voudrais simplement terminer en rappelant une chose au leader
parlementaire du gouvernement et le féliciter, parce que c'est un homme
prévoyant. Il a prévu à l'automne qu'il y aurait des
élections, comme tout le monde un peu, et à ce moment il nous a
parlé du règlement sessionnel. Il prévoyait
déjà, à ce moment, que le règlement sessionnel
l'aiderait dans l'Opposition. Il a oublié cela par la suite, il est
revenu encore tout récemment avec le règlement sessionnel parce
qu'il voulait préparer ses jours d'Opposition, évidemment, s'il
est réélu, un peu comme tout le monde. Tout le monde va passer
devant le grand verdict de l'électorat.
Mme la Présidente, je ne veux pas prolonger ces propos, mais
simplement assurer le gouvernement que nous allons appuyer cette motion; ces
amendements provisoires, nous allons les rendre permanents, mais toujours avec
cette réserve - que nous devons conserver - que nous devons avoir
affaire à une Opposition et à un gouvernement qui tiennent compte
de l'importance de maintenir l'esprit de ces amendements, parce que, si on s'en
tient à la lettre, la vie parlementaire peut devenir impossible; la vie
du gouvernement, quel qu'il soit, peut devenir impossible et, à ce
moment, je pense bien qu'on ne pourrait pas vivre avec ces amendements qui,
pourtant, sont faits dans le meilleur intérêt des citoyens, dans
le meilleur intérêt des parlementaires et qui sont des amendements
raisonnables avec lesquels nous avons vécu pendant déjà
plus de trois ans.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Union Nationale.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, Mme la Présidente. Les
députés de l'Union Nationale sont également d'accord pour
accepter la motion du leader du gouvernement pour rendre permanent le
règlement sessionnel que nous avons adopté il y a
déjà trois sessions, je pense.
Cette expérience s'est avérée extrêmement
positive pour les députés de l'Opposition et également
pour les députés du gouvernement, ainsi que pour le personnel
politique qui nous aide, ici, à l'Assemblée nationale.
Ce calendrier a sans doute permis une meilleure planification de nos
travaux et a, jusqu'à un certain point, forcé le gouvernement
à également mieux planifier le dépôt de ses projets
de loi et les mesures législatives qu'il voulait voir adoptées au
cours d'une même session. Malheureusement, le calendrier n'a pas
réussi à mettre fin à la folie du rouleau compresseur que
nous devons vivre et subir à la fin de chacune des sessions, tant au
mois de juin qu'au mois de décembre.
Nous, de l'Union Nationale, nous déplorons le peu de
progrès qui a été fait dans ce domaine et nous croyons que
la commission de l'Assemblée nationale devrait se pencher le plus
rapidement possible sur cet aspect de nos travaux parlementaires, afin que nous
trouvions le moyen d'alléger le fardeau de travail des
députés en fin de session. Je pense que tout le monde se rappelle
les longues heures de travail que nous devons fournir à la fin de la
session parlementaire, que ce soit au mois de juin ou au mois de
décembre; parfois, nous commençons à travailler à
dix heures le matin pour terminer très tard la nuit; j'ai
déjà vu des matins où il faisait clair quand nous sommes
rentrés chez nous et nous devions revenir pour dix heures le même
matin.
Je pense qu'on devrait trouver une solution à ce plan de travail
quasiment infernal, et ce le plus rapidement possible, pour le bien-être
de tous les députés, qu'ils soient de l'Opposition ou du
gouvernement.
Lorsque nous sommes forcés de siéger jusqu'aux petites
heures du matin pour étudier, très souvent, des projets de loi
d'une importance majeure pour le bien-être économique et social
des Québécois et que, quelques heures plus tard, nous sommes
tenus de recommencer la même ritournelle pendant plusieurs semaines, il
va de soi que le rendement du député se trouve diminué et,
par le fait même, certainement moins efficace.
Ceci dit, Mme la Présidente, il faut
néanmoins admettre que l'expérience d'un calendrier fixe,
qui divise les travaux de session parlementaire en deux périodes bien
déterminées, constitue une amélioration par rapport
à ce qui existait antérieurement. Nous sommes d'avis qu'il faut
maintenir ce calendrier fixe, tout en cherchant à améliorer la
situation qui prévaut à la fin des sessions.
Quant aux heures de séance, les députés de l'Union
Nationale sont d'accord pour qu'on maintienne les heures de séance
telles qu'elles existent à l'heure actuelle, en vertu de notre
règlement sessionnel. Nous croyons que c'est une bonne chose de
concentrer les travaux parlementaires proprement dits sur une période de
trois jours: c'est-à-dire les mardi, mercredi et jeudi. Cela permet aux
députés de bénéficier non seulement du lundi pour
s'occuper des problèmes de son comté, mais également de
disposer d'une journée additionnelle, soit celle du vendredi, pour se
concentrer sur les tâches administratives qui font également
partie de son mandat de député. (16 heures)
Pour les gens qui nous écoutent, je pense qu'il est important de
mentionner qu'un député a plusieurs rôles. Tout d'abord, le
député a un rôle de législateur. Il doit, ici
à l'Assemblée nationale, participer aux travaux en
élaborant des projets de loi, en les étudiant, en faisant en
sorte de les améliorer parce que, bien souvent, les projets de loi que
le gouvernement nous présente ne sont pas satisfaisants. Alors, il faut
essayer de les améliorer chaque fois qu'on nous en présente et
cela se fait tant à l'Assemblée nationale qu'en commission
parlementaire. Le travail en commission parlementaire, les gens ne le suivent
pas beaucoup parce que ce n'est pas télévisé, mais il faut
quand même souligner qu'il y a de nombreuses heures de travail qui sont
dispensées en commission parlementaire. Également, ces
commissions et ce travail à l'Assemblée nationale, il faut les
préparer. On n'arrive pas ici en Chambre pour lancer un discours sans
avoir une certaine préparation, sans avoir fait une certaine
étude du projet de loi en question.
Également, le député, surtout dans les milieux
ruraux, a une espèce de rôle d'ombudsman. Il doit recevoir les
gens à son bureau pour essayer de régler les problèmes
auxquels ils font face avec l'administration gouvernementale. Il doit
également participer aux activités sociales de son comté.
Dans les milieux ruraux, je pense que cela est encore plus prononcé que
dans les villes. Cela demande également beaucoup de temps.
Les députés jouent également un rôle à
l'intérieur de chacune de leurs formations politiques. Bien souvent, ils
prennent des engagements dans leur parti politique qui demandent des heures de
travail considérables. Si on met tout cela ensemble, je pense que le
fait de concentrer le travail parlementaire sur une période de trois
jours permet aux députés de passer plus de temps dans leur
circonscription électorale.
Quant au vendredi, avec la question avec débat, il y a un certain
travail qui se fait ici à l'Assemblée nationale par quelques
députés, chaque vendredi, alors qu'on étudie une question
particulière pendant que d'autres députés sont
occupés dans leur comté. Nous sommes d'avis qu'il y a lieu de
maintenir ces séances d'information et d'interrogation qui ont lieu le
vendredi matin. Pour les membres de l'Opposition, ces questions avec
débat constituent une occasion d'interpeller un ministre sur une
question spécifique pendant plusieurs heures. Cela permet d'avoir un
éclairage d'ensemble* sur une question importante qui est en
discussion.
Mme la Présidente, nous, de l'Union Nationale, sommes en faveur
de la motion qui est présentée par le gouvernement aujourd'hui
afin de rendre permanent ce règlement sessionnel que nous connaissons
depuis trois sessions. On ne manquera pas de souligner, cependant, le fait que
ce soit aujourd'hui que le gouvernement nous propose cette motion. Il faut,
bien sûr, se rendre à l'évidence que, si le gouvernement le
fait, c'est qu'il a probablement à l'esprit que, les jours prochains,
peut-être dans un mois, il sera sans doute rendu sur les banquettes de
l'Opposition et qu'à ce moment-là il pourra
bénéficier de la clémence de ce règlement.
M. Le Moignan: C'est cela. Merveilleux.
La Vice-Présidente: M. le député de
Sainte-Marie.
M. Shaw: Madam President...
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais tout de suite
rassurer le leader du gouvernement. Je me prononce, moi aussi, en faveur de la
motion qui est devant nous. Si je sens le besoin de m'exprimer sur cette motion
du leader du gouvernement, c'est peut-être pour remettre un certain
nombre de choses à leur place et pour rendre à César ce
qui appartient à César.
Il est normal, je pense, lorsqu'on parle de règlement, que les
leaders se congratulent, se tapent sur l'épaule et se félicitent
du travail qu'ils ont pu faire et de l'amélioration qu'ils ont
apportée au règlement de notre Assemblée. Dans le cas qui
nous préoccupe, je voudrais quand même souligner que ces
amendements qu'on a mis à l'essai pendant trois ans ont
été le fruit du travail d'un groupe de députés de
l'ensemble des partis de cette Assemblée, des représentants du
Parti libéral qui étaient le
député de Saint-Laurent et le député de
Gatineau, du représentant de l'Union Nationale qui était le
député de Richmond, qui n'était pas leader à ce
moment-là, et des représentants du parti gouvernemental, du parti
ministériel, le député d'Abitibi-Ouest, qui n'était
pas ministre à l'époque non plus, et moi-même ainsi que le
député indépendant de l'époque, Fabien Roy.
Ce groupe de députés avait travaillé pendant
près de trois mois à non seulement consulter leur caucus, mais
ils avaient travaillé ensemble sur l'amélioration des
règlements. La question avec débat dont on vient de parler, c'est
justement une suggestion du député de Saint-Laurent.
C'était, je pense, la première expérience vécue
à l'Assemblée nationale d'un travail conjoint des parlementaires
au-delà des partis politiques. Cela s'est poursuivi avec le
comité Dussault responsable d'un certain nombre d'autres mesures qui ont
été étudiées par les parlementaires dans des
comités de travail, en dehors des commissions parlementaires.
Je tenais, Mme la Présidente, à souligner cette
participation des députés à l'amélioration de leur
rôle d'abord à l'Assemblée nationale et à
l'amélioration du règlement de l'Assemblée nationale pour
qu'on sache qu'il n'y a pas seulement les meneurs de jeu qui s'en
préoccupent, mais aussi ceux qui le subissent.
M. Shaw: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: M. le député de
Pointe-Claire.
M. William Frederic Shaw
M. Shaw: In an effort to attempt to show unanimity to the motion
presented by the Leader today concerning the rendering permanent of the
temporary regulations as to the rules of procedure of the House, I wish to add
my personal support as well, Madam President.
I feel that this particular change in the schedule of the time used in
this House has been a definite improvement and has most certainly helped all
members, certainly those of us who, being independents, carry an additional
role, by providing us with the time to do our research and to cover the many
areas of responsibility we also must cover.
Obviously, the strength of this lies in the fact that there is a
determined period of time, that we know exactly when the work will be done. It
also has improved the work of the House by making more accountable ministers
through the Friday morning question period, the specific question period which
is also covered by television, allowing the public to become more aware of some
of the problems the Government is facing in being forced to meet and answer the
questions of those members of the House who are interested in that particular
problem.
I would also like to say, Madam President, that it has also improved
those roles that we must perform, that require time with our constituents in
our constituency. Each and every member in this House has a significant role to
play in order to meet the requirements of his constituents and to meet with the
constituents as well, and I assure you that the time has been used by the
members to better prepare themselves for the work they are doing in the House
and to better serve their constituencies.
Therefore, Madam President, I would like to join with the Leader of the
Liberal Party, the Leader of the Union Nationale, and the honorable Member for
Sainte-Marie, and support the motion of the Minister.
La Vice-Présidente: M. le député de
Laval.
M. Jean-Noël Lavoie
M. Lavoie: Mme la Présidente, des propos très brefs
sur cette motion. Je me rappelle lorsque l'ex-député de
Maisonneuve Robert Burns avait apporté cette modification. Si je me
rappelle bien, c'est à la fin de 1977 ou au début de la session
de 1978. Ces règlements sessionnels n'existaient pas en 1977, parce que
je me rappelle trop bien qu'on avait siégé sur la loi 101
jusqu'à la fin du mois d'août. Cela veut dire, sans
vérifier, je crois, que ça date du début de 1978 et toutes
les Oppositions, autant le Parti libéral que l'Union Nationale, ont
donné leur accord depuis 1978, 1979, 1980 et 1981.
C'est une amélioration importante, spécialement en ce qui
concerne les heures de séance. On se rappelle que la Chambre
siégeait du mardi au vendredi auparavant et, maintenant, on ne
siège plus. C'était une période de trois heures uniquement
le vendredi, de 10 heures à 13 heures, qui a été
reportée un peu au mercredi matin. Cela donne une journée
additionnelle au gouvernement et aux ministres pour voir à
l'administration de leur ministère et, aux députés, pour
vaquer à leurs occupations dans leur comté ou auprès des
ministères à Québec.
Je crois que c'est dû au mérite de Robert Burns qui avait
apporté ces modifications au règlement. (16 h 10)
Comme le mentionnait le leader du gouvernement, c'est la formule
normale, lorsqu'on apporte des changements assez importants au
règlement, aux règles du jeu de l'Assemblée nationale -
cela a toujours été fait dans le passé - qu'il y ait une
période de rodage, une période de probation.
Le règlement qui existe ici, à l'Assemblée
nationale depuis 1973, avait été mis en rodage, si je me rappelle
bien, en 1972; d'autres articles avaient été
éprouvés dans le temps de M. Bertrand, de M. Pierre Laporte, de
M. Daniel Johnson, de M. Jean Lesage et autres. C'est une évolution
normale. D'ailleurs, un règlement ne doit jamais être dans le
béton; ça, le leader le sait. Un règlement de
l'Assemblée nationale doit être en perpétuel mouvement.
Même encore aujourd'hui, si la présidence, si le leader du
gouvernement ou la commission de l'Assemblée nationale se penchait sur
l'ensemble du règlement et sur les amendements que nous y apportons,
nous savons qu'il existe encore certains trous, certaines lacunes; j'imagine
que le prochain président ou d'autres, dans un prochain Parlement, se
pencheront sur cette question pour encore améliorer notre
règlement. Comme le disait le nouveau ministre des Communications, alors
qu'il était président, le règlement que nous pratiquons
ici, à l'Assemblée nationale, a été
considéré à travers le Canada comme un règlement
non pas meilleur que les autres, mais un règlement d'avant-garde qui
permet, surtout lorsqu'on considère que les gouvernements, aujourd'hui,
avec la masse (trop forte) des interventions trop fréquentes de
l'État dans l'activité des individus, des sociétés
et des corporations, cette masse législative - je vois devant moi
l'ex-ministre du Travail qui a vécu cette situation pendant quelques
années - et également l'importance des budgets...
On se rappelle qu'il y a à peine quelques années le budget
du Québec, en 1960, était de $600,000,000 ou $700,000,000; 20 ans
après, il est de $17,000,000,000 ou $18,000,000,000. Les budgets doivent
être approuvés et il faut que ce règlement soit constamment
modernisé pour permettre au législateur d'expédier, dans
un temps convenable, la législation et l'étude des
crédits.
Par contre, je voudrais souligner également un autre engagement
que M. Burns avait pris avant son départ et qui, malheureusement, n'a
pas eu de suite. Cela date déjà de deux ou trois ans. On aurait
dû avoir une loi ou un amendement au règlement créant une
commission spéciale de l'Assemblée nationale pour que les
parlementaires, les élus de la population aient un droit de regard sur
la réglementation, sur la masse de réglementation que nous avons.
C'est vraiment inconcevable et c'est un appel que je fais aux parlementaires
pour que dans les meilleurs délais - pendant la Législature
actuelle ou la prochaine - on se penche sur la suggestion que les élus
de la population puissent scruter et approuver, ou du moins donner leur opinion
sur les milliers de points de réglementation qui existent à la
suite de l'adoption de lois "chèques en blanc" que le Parlement adopte.
On sait que souvent les règlements ont plus d'importance, plus de poids,
plus d'implications, ils créent encore plus d'embêtements pour la
population que les lois elles-mêmes. C'est vraiment inconcevable que le
Parlement adopte les lois et qu'il n'ait plus aucun droit de regard sur la
réglementation. Je pense que c'est une priorité sur laquelle le
Parlement devra se pencher.
Je termine en disant - je pense que c'est implicite - que je suis tout
à fait d'accord sur cette amélioration, sur cette bonification du
règlement. Mais sur un petit point technique, j'aurais une suggestion
à faire. Je n'en ferai pas un débat de fond. Je crois que l'avis
mentionné au feuilleton, que le règlement sessionnel devienne
règlement permanent, n'est pas suffisant, à mon point de vue. Je
crois qu'il aurait fallu que les modifications soient récitées au
long, en avis, mais on peut corriger cela. Je ne ferai pas d'opposition
à l'adoption de la motion. Au procès-verbal de la séance
d'aujourd'hui, la motion d'adoption de ces règlements devrait être
réellement dans les archives du Parlement et elle devrait être
inscrite au long; autrement, ce n'est pas dans un règlement sessionnel,
ce n'est nulle part. Autant au feuilleton que dans le procès verbal, il
n'y aurait que le règlement sessionnel mais qui n'aurait aucune force de
loi parce qu'il n'est pas en annexe, il n'est nulle part. Je crois qu'il
faudrait qu'elle soit récitée au long dans le
procès-verbal de la séance d'aujourd'hui. Je vous remercie, Mme
la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire du
gouvernement et ministre des Affaires parlementaires.
M. Claude Charron (réplique)
M. Charron: Mme la Présidente, je souscris à
l'intervention du député et je propose que le secrétaire
général de l'Assemblée prenne les mesures pour qu'au
procès-verbal figure effectivement le règlement sessionnel qui
deviendra dans quelques instants le règlement permanent de
l'Assemblée. Je vous remercie de l'unanimité qui était
indispensable et essentielle pour un règlement de cette nature. Nous
l'avons obtenue avec la collaboration de tous. J'aurai bon souvenir, dans
quelques semaines, lorsque nous serons sur les champs de bataille de ces
moments d'unanimité. Mme la Présidente, je crois que les
oppositions se sont montrées suffisamment responsables aujourd'hui pour
qu'elles reçoivent à nouveau la confiance, dans l'Opposition, de
la population lors de la prochaine élection. On ne peut pas se
départir d'aussi loyaux services, Mme la Présidente. Je propose
donc que nous
adoptions cette motion.
La Vice-Présidente: La motion est-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
La Vice-Présidente: La motion est adoptée.
Projets de loi nos 223, 241, 222, 238, 259, 258 et
221
Deuxième lecture
M. Charron: Avant que nous n'ajournions jusqu'à 20 heures
et que nous nous retrouvions en commission parlementaire pour quelques minutes,
puis-je proposer que les projets de loi privés dont nous avons
reçu les rapports cet après-midi - je les nomme, madame, pour
éviter le carrousel - les projets de loi no 223, Loi concernant la ville
de Bedford; no 241, Loi concernant la ville de Sainte-Foy; no 222, Loi
concernant certains lots de la partie révisée du cadastre
officiel du canton de York, division d'enregistrement de Gaspé; no 238,
Loi concernant Place Notre-Dame de Hull Ltée; no 259. Loi concernant un
immeuble du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne, division d'enregistrement
de Montréal; no 258, Loi concernant un immeuble de l'Église Unie
St-Andrew de Lachine, et no 221, Loi concernant la succession de J. Donat
Langelier, franchissent, à ce moment-ci, avec le consentement de tous,
l'étape de la deuxième lecture?
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, nous sommes
encore une fois amenés à faire la paix temporaire, la trêve
un peu, mais très courte, et c'est évidemment à cause du
fait qu'il s'agit de projets de loi qui ont recueilli l'unanimité une
fois qu'ils ont été amendés en commission. Nous sommes
heureux, Mme la Présidente, d'apporter notre modeste contribution
à l'adoption de ces projets de loi.
La Vice-Présidente: Les deuxièmes lectures
sont-elles adoptées?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté.
La Vice-Présidente: Les projets de loi 223, 241, 222, 238,
259, 258, 221 sont adoptés en deuxième lecture.
Le Secrétaire adjoint: Deuxième lecture de ces
projets de loi.
M. Charron: Mme la Présidente...
La Vice-Présidente: Troisième lecture, prochaine
séance ou séance subséquente.
M. Charron: Mme la Présidente, je propose la
suspension...
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: Oui, M. le leader.
M. Levesque (Bonaventure): Je m'excuse auprès du leader
parlementaire du gouvernement qui allait présenter une motion fort
importante d'ajournement, débattable, d'ailleurs, Mme la
Présidente, mais puis-je offrir au leader parlementaire du gouvernement
que nous puissions, maintenant qu'il m'a assuré que nous allons pouvoir,
au cours de la semaine, au moins mercredi et jeudi, procéder tel que
prévu, peut-être épargner quelques dollars à
l'administration en adoptant la troisième lecture des projets de loi
immédiatement?
M. Charron: Volontiers, Mme la Présidente, j'allais faire
la proposition. Très bien comme ça.
M. Fontaine: Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Union Nationale.
M. Fontaine: Nous donnons également notre consentement. Je
pense qu'il y a là-dedans des projets de loi fort importants pour
certaines municipalités et je pense que nous devons donner notre
consentement pour les adopter immédiatement.
Troisième lecture
La Vice-Présidente: Tous les projets de loi que nous
venons d'adopter en deuxième lecture sont maintenant adoptés en
troisième lecture?
M. Levesque (Bonaventure): On pourrait peut-être donner les
numéros pour l'intelligence du journal des Débats.
La Vice-Présidente: Certainement. Les projets de loi nos
223... Est-ce que vous voulez que je dise de quoi il s'agit aussi pour
chacun?
M. Levesque (Bonaventure): Oui.
La Vice-Présidente: Le projet de Loi no 223. Loi
concernant la ville de Bedford; le projet de loi privé no 241, Loi
concernant la ville de Sainte-Foy; le projet de loi privé no 222, Loi
concernant certains lots de la partie révisée du cadastre
officiel du canton de York, division d'enregistrement de Gaspé; le
projet de loi privé no 238, Loi concernant
Place Notre-Dame de Hull Ltée; le projet de loi privé no
259, Loi concernant un immeuble du cadastre de la paroisse de Sainte-Anne,
division d'enregistrement de Montréal; le projet de loi privé no
258, Loi concernant un immeuble de l'Église Unie St-Andrew de Lachine,
et le projet de loi privé no 221, Loi concernant la succession de J.
Donat Langelier, avec le consentement unanime de l'Assemblée nationale,
seront-ils adoptés en troisième lecture?
M. Levesque (Bonaventure): Adopté, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: Adopté. M. le leader
parlementaire du gouvernement.
M. Charron: Mme la Présidente, je propose la suspension
des travaux de la
Chambre jusqu'à 20 heures ce soir pour le discours sur le
budget.
La Vice-Présidente: Motion adoptée? Des voix:
Adopté.
La Vice-Présidente: Adopté. Suspension des travaux
de l'Assemblée jusqu'à 20 heures ce soir.
(Suspension de la séance à 16 h 21) (Reprise de la
séance à 20 h 06)
La Vice-Présidente: À l'ordre, s'il vous
plaît!
Veuillez vous asseoir.
En application de l'article 127 de notre règlement, j'accorde la
parole à M. le ministre des Finances. M. le ministre des Finances.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle.
Discussion de procédure
M. Levesque (Bonaventure): Je m'excuse auprès du ministre
des Finances, mais je lui avais indiqué avant le début de la
séance que j'aurais une question à lui poser. La question que
j'ai à lui poser, j'en fais une question de règlement, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: M. le leader, vous conviendrez avec
moi - et je pense que vous êtes rompu à la connaissance du
règlement que nous avons, je ne vois pas de précédent
à ce que je vous dis maintenant - que chaque fois que ce fut le moment
du discours du budget, la tradition a toujours été la même,
nous avons immédiatement, dans cette Assemblée, donné la
parole au ministre des Finances. Je vous demanderais de retenir votre
intervention et de permettre au ministre de prendre la parole maintenant. M. le
ministre des Finances.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, je
m'excuse.
La Vice-Présidente: M. le leader, s'il vous plaît.
M. le leader, est-ce que vous en appelez de ma décision? Est-ce que vous
en appelez de ma décision?
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, j'invoque le
privilège qui est le mien en même temps que je veux simplement
soulever une question de règlement, puisque vous ne semblez pas vouloir
donner suite à ce que j'avais indiqué au ministre des Finances,
que j'allais lui poser une question au début de ses remarques.
Maintenant, si ce n'est pas le cas, j'invoque mon privilège de
député.
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition
officielle, vous me placez dans une situation très difficile. Vous le
savez très bien et vous reconnaîtrez avec moi que, même au
moment où vous avez déjà été le leader du
gouvernement, vous n'auriez pas accepté, je crois, un accroc à
cette tradition qui a toujours été la même et à
laquelle, à mon sens, on n'a jamais fait de précédent.
J'ai déjà accordé la parole à M. le ministre des
Finances.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, je n'accepte
pas votre décision parce qu'elle ne correspond pas...
La Vice-Présidente: M. le leader...
M. Levesque (Bonaventure): ...aux critères et aux droits
des membres de cette Assemblée.
La Vice-Présidente: Je ne vous rappellerai pas à
l'ordre, M. le leader de l'Opposition officielle. Je sais que vous connaissez
le règlement et j'admets... S'il vous plaît! Je pense que, si
quelqu'un dans cette Assemblée connaît bien le règlement,
c'est M. le député de Laval et peut-être bien aussi M. le
député de Jean-Talon. M. le ministre.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, je suis
obligé d'intervenir à ce moment-ci en vertu du
règlement.
La Vice-Présidente: M. leader! Si vous en appelez
maintenant de ma décision, M. le leader, vous savez fort bien qu'il y a
des dispositions dans notre règlement qui vous permettent d'intervenir
à un autre moment
et j'espère que vous le ferez à ce moment-là. M. le
ministre.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, je m'excuse,
mais j'ai devant moi le règlement.
La Vice-Présidente: S'il vous plaît! Vous en appelez
actuellement de ma décision, M. le leader de...
M. Levesque (Bonaventure): Vous auriez pu au moins décider
de me faire continuer...
La Vice-Présidente: Vous connaissez fort bien, M. le
leader de l'Opposition, le règlement et je me dois maintenant de vous
rappeler à l'ordre. Je vous ai déjà dit que je ne vous
accorderais pas la parole maintenant.
M. Levesque (Bonaventure): Mme la Présidente, j'essaie
simplement de faire...
La Vice-Présidente: M. le leader de l'Opposition
officielle... M. le leader de l'Opposition officielle, je vous rappelle
à l'ordre une deuxième fois.
S'il vous plaît, je n'accorderai pas la parole à qui que ce
soit maintenant, puisque le règlement m'empêche de le faire, mais
je suspendrai pour trois minutes.
(Suspension de la séance à 20 h 13)
(Reprise de la séance à 20 h 16)
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je
voudrais m'excuser auprès des membres de cette Assemblée de ne
pas avoir été capable d'inaugurer la séance de ce soir,
étant donné que des rumeurs extrêmement importantes, qui
circulaient entre 19 h 55 et 20 h 05 à l'intérieur de
l'Assemblée nationale, m'ont obligé, pour m'acquitter de mes
responsabilités, à en vérifier l'exactitude ou non. Je
m'en excuse auprès des membres de l'Assemblée.
Mais, malgré tout cela, j'ai entendu par le perroquet et j'ai vu
à la télévision ce qui s'était passé
à l'Assemblée nationale. Je me dois, à ce stade-ci, de
respecter et de confirmer la décision qui a été rendue par
la députée de Vaudreuil-Soulanges et vice-présidente de
l'Assemblée nationale, selon laquelle il est de tradition en cette
Chambre, lors d'un discours du budget, de céder immédiatement la
parole au ministre des Finances, ce que je fais immédiatement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, avec tout le
respect que je vous dois, je vous demande la directive suivante. Loin de moi,
d'abord, l'idée de retarder le moindrement le discours du budget, mais
je vous demande ceci: Comment peut-on, à ce moment-ci, poser une
question bien simple au ministre des Finances relativement aux fuites qui ont
eu lieu sur le budget? Ceci a déjà eu comme effet la
démission d'un ministre des Finances dans plus d'un Parlement.
Le Président: Je vous répondrai, M. le leader de
l'Opposition officielle, que les articles 68 et 24 de notre règlement
prévoient des motions de blâme. À ma connaissance,
l'Opposition officielle a encore des motions de blâme à son
crédit; elle peut les utiliser quand elle le voudra. Mais en ce qui
concerne la décision qui a été prise et que je confirme,
je pense que ce soir n'est pas l'occasion privilégiée pour poser
ladite question, mais que demain, à la période des questions ou
jeudi, si vous mettez une motion en appendice, vous pourrez porter une motion
de blâme contre la personne que vous voudrez, et c'est le
règlement qui vous le permet. Mais à ce stade-ci, ce soir...
M. Levesque (Bonaventure): C'est une question...
Le Président: ... et compte tenu de l'existence de ces
articles de notre règlement, je pense que l'Opposition et tous les
députés de cette Chambre ont à leur disposition tous les
moyens pour condamner soit la conduite d'un ministre, d'un président,
d'un vice-président ou de tout député de cette Chambre. Je
ne pense pas qu'une simple question au ministre des Finances soit la
réponse à vos interrogations.
Je sais que l'article 43 existe. Je sais que vous pouvez en appeler de
la décision qui a déjà été rendue et que je
confirme. Vous pouvez, si vous le voulez, demander à l'Assemblée
d'en appeler de la décision du président. Mais connaissant votre
expérience parlementaire et votre gentilhommerie, je suis assuré
que vous permettrez au ministre des Finances de prononcer son discours, quitte,
par la suite, à ce que, demain ou après-demain, tous les moyens
qui peuvent être mis à votre disposition le soient et la
présidence les respectera. Il respectera le règlement de notre
Assemblée.
M. le ministre des Finances.
M. Lavoie: M. le Président. Le Président: M.
le député.
M. Lavoie: Une directive, s'il vous plaît.
Des voix: ...
(20 h 20)
M. Lavoie: Alors que vous étiez absent - une seule
directive très simple que je voudrais vous demander - si je me rappelle
bien, le leader parlementaire de l'Opposition a voulu soulever une question de
privilège
qui lui a été refusée, et je vous demanderais en
vertu de quel article du règlement le droit d'un parlementaire de
soulever les privilèges de cette Chambre ou ses propres
privilèges est suspendu à l'occasion du discours du budget.
Le Président: M. le député, même si je
n'ai pas, il est vrai, votre expérience parlementaire - je le
déplore en certaines occasions - je vous répondrai, tout en
disant que je n'ai pas l'intention de donner une conférence de presse
sur ce sujet, que c'est la tradition. Après avoir regardé au
moins les sept derniers discours du budget, parce que je me suis
préparé pour ce soir, les sept dernières années
m'ont démontré qu'à aucun moment il n'y a eu de question
de privilège ou de règlement...
Des voix: II n'y a pas eu d'occasion.
Le Président: ...et que la présidence a toujours
reconnu, lors du discours du budget, le ministre des Finances, et je vous donne
la parole, M. le ministre des Finances.
Dépôt des crédits pour
l'année financière se terminant le 31 mars 1982
M. Parizeau: M. le Président, un message de l'honorable
lieutenant-gouverneur, signé de sa main.
Le Président: Message de Son Honneur le
lieutenant-gouverneur de la province, M. Jean-Pierre Côté.
L'honorable lieutenant-gouverneur de la province de Québec transmet
à l'Assemblée nationale les crédits pour l'année
financière se terminant le 31 mars 1982, conformément aux
dispositions de l'article 54 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique
1867, et recommande ces crédits à la considération de la
Chambre.
M. le ministre des Finances.
M. Charron: M. le Président.
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: D'abord, si vous me le permettez, conformément
à l'article 128.1 du règlement, je propose que l'étude des
crédits de chacun des ministères soit confiée aux
commission élues appropriées, sauf celle des crédits de
l'Assemblée nationale et toute autre que l'Assemblée jugera
opportun de confier à la commission plénière de
l'Assemblée.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que
cette motion est débattable?
M. Charron: Non, sans débat ni amendement, selon l'article
128.
M. Lavoie: Depuis quand êtes-vous président, vous,
là?
Le Président: Je m'apprêtais à donner la
même réponse, mais compte tenu de l'expérience et de
l'habileté des deux leaders parlementaires, et à ma droite et
à ma gauche, je savais que l'un des deux se lèverait avant la
présidence. Or, elle est sans débat ni amendement. Est-ce qu'elle
sera adoptée?
M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président, mais
normalement on pourrait exiger un vote enregistré. Simplement pour
montrer notre esprit... Et pour bien indiquer au ministre des Finances que nous
n'avons jamais voulu retarder son discours, nous ne demanderons pas de vote
enregistré, M. le Président.
Le Président: M. le ministre des Finances, je vous
cède la parole.
Discours sur le budget M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: Merci, M. le Président. L'année 1980
restera probablement marquée comme étant celle où
l'économie nord-américaine a atteint le creux d'une vague dont on
voit mieux maintenant qu'elle avait commencé avec l'année
1976.
Pendant cinq ans, en effet, le rythme d'expansion de la production aux
États-Unis a régulièrement baissé jusqu'à
devenir nul en 1980. On a assisté à l'aboutissement d'une longue
contraction et, en début d'année, à un affaissement
soudain de la demande des consommateurs américains comme pour marquer la
dernière phase du glissement.
Au Canada le cheminement a été plus irrégulier,
plus fluctuant, mais finalement analogue. On avait retrouvé au
début de 1976 un rythme d'expansion important, voisin de 7%, une bonne
performance, somme toute, qu'on ne retrouve plus ensuite jusqu'à ce que,
en 1980, la production cesse de progresser complètement.
En un certain sens la performance de l'économie canadienne aura
été plus décevante que celle des États-Unis, encore
que bien évidemment influencée par elle. En effet la chute
prononcée de la valeur du dollar canadien qui touchera à la fin
de 1980 un creux historique et la résistance à laisser monter le
prix du pétrole auraient dû donner à l'économie du
Canada plus de solidité que l'économie américaine ne
pouvait en
manifester.
Encore faut-il reconnaître que les disparités
régionales ont atteint, au cours de ces années, une grande
ampleur. Alors qu'au creux de la vague générale l'Alberta et la
Colombie-Britannique gardent un rythme de croissance de l'ordre de 3%, la
production ontarienne baisse de 1% et celle du Québec augmente
légèrement.
En réalité, cela fait quatre ans que la performance
économique du Québec est supérieure ou égale
à celle de l'Ontario. Il ne fait pas de doute que les petites et
moyennes entreprises du Québec prennent graduellement la relève
de certaines grandes entreprises plus traditionnellement installées.
Elles apprennent à profiter du bas taux de change du dollar canadien.
Elles ont aussi été fortement appuyées par les politiques
du gouvernement québécois.
Tout cela se manifeste davantage à l'égard des
exportations que vis-à-vis des investissements. Les ventes
québécoises à l'étranger ont gardé, en 1980,
une vigueur qui dépasse celle des exportations du reste du Canada. En
trois ans, elles auront en effet plus que doublé. Les investissements
des entreprises privées connaissent une croissance de l'ordre de 15%, ce
qui est appréciable, même si on tient compte de l'inflation.
Néanmoins, l'ensemble des investissements au Québec augmente
nettement moins en raison du plafonnement des immobilisations
d'Hydro-Québec. Cette société d'État fait à
elle seule plus du quart de tous les investissements productifs au
Québec; or, les travaux à la Baie James ont maintenant atteint un
plateau. Cela se sent déjà et se fera davantage sentir avant que
d'autres grands travaux du même genre ne prennent la relève.
L'aspect le plus faible de l'économie québécoise en
1980 aura été, comme aux Etats-Unis, la réduction des
achats des consommateurs. On s'attendait, l'an dernier, à un tassement
de la demande; on ne l'attendait pas aussi prononcé.
Quant à la construction domiciliaire, on aurait pu croire
qu'après avoir longuement ralenti, elle redémarrerait vers la fin
de 1980. C'était compter sans les soubresauts de la politique
monétaire nord-américaine qui dépassèrent tout ce
qu'on avait vu jusque là.
Sans doute, les pressions inflationnistes s'intensifient-elles aux
États-Unis, au fur et à mesure que tombe le rythme de croissance
de l'économie. Il s'en faut de beaucoup que l'on comprenne à quoi
une telle divergence est due. Depuis plusieurs années, cependant, la
cure a été mise au point. À la fin de 1979, on
décida de l'appliquer. En la caricaturant un peu, la cure
monétariste consiste à tenter de contenir la hausse des prix en
réduisant graduellement l'expansion de la masse monétaire
à l'intérieur de bornes de plus en plus contraignantes.
L'idée n'est pas nouvelle, mais jamais on en avait fait à ce
point une idée-force, pour ne pas dire une idée fixe.
En tout cas, une telle politique peut provoquer des variations
fabuleuses des taux d'intérêt. C'est à cela qu'on assiste
depuis quinze mois. Une première flambée a porté le taux
préférentiel des banques à plus de 19% au début de
1980. Il est tombé à 11% au cours de l'été et est
remonté à plus de 20% avant Noël.
Complètement intégré aux circuits financiers
américains, le Canada a suivi, se permettant simplement des
décalages de quelques semaines qui se paient par une faiblesse
récurrente du taux de change.
On ne sait pas encore si la cure guérira le malade. Pour le
moment, comme la saignée ou la purge d'autrefois, elle l'affaiblit. On
espère qu'en 1981 l'inflation sera un peu réduite aux
États-Unis. Il est d'ores et déjà assuré qu'au
Canada elle sera plus forte, en raison surtout de la hausse du prix des
produits pétroliers qui dépassera 21%.
On ne peut, en tout cas, s'étonner, dans de telles conditions, du
peu de vigueur de la construction domiciliaire et des achats de biens durables
de consommation.
À travers ces phénomènes d'ampleur continentale, un
dernier aspect de l'économie du Québec en 1980 mérite
d'être décrit. La population totale n'augmente plus guère;
par contre, la population active continue à progresser assez rapidement
à cause du fort taux de naissances qui a prévalu jusqu'au
début des années soixante et de la hausse de la participation des
femmes sur le marché du travail. Le premier phénomène
achève, le second va petit à petit se stabiliser. Mais, en 1980,
la main-d'oeuvre s'est accrue de près de 3%, ce qui, par rapport aux
années précédentes, est exceptionnel. Ce n'est pas le
moindre sujet d'étonnement que de constater que, même avec une
croissance de la production d'un tiers de 1%, l'économie du
Québec aura absorbé une hausse du nombre de travailleurs
employés de 2,5%, presque égale, donc, à celle du nombre
de ceux qui se présentaient sur le marché du travail. On voit,
là encore, un signe de résistance assez remarquable de
l'économie québécoise à un environnement difficile.
(20 h 30)
La situation des finances publiques du Québec au cours de
l'année qui se terminera le 31 mars prochain aurait correspondu à
peu près à ce qu'on pouvait attendre du discours sur le budget de
l'an dernier, compte tenu d'une situation économique un peu plus faible
que prévue, d'une inflation un peu plus rapide et de taux
d'intérêt plus élevés, n'eussent été
deux grands programmes qui coûtent nettement plus cher qu'on ne l'avait
envisagé, soit l'aide sociale et l'assurance-maladie.
Les revenus budgétaires du gouvernement sont de $185 millions
inférieurs à ce qui était prévu, soit 1,2%.
L'impôt sur le revenu des particuliers sera exactement au niveau
escompté. L'impôt sur les sociétés produira $35
millions de moins que prévu; cela est dû, pour moitié,
à un niveau de profits un peu inférieur aux prévision et,
pour l'autre, à une accélération des remboursements aux
sociétés. La taxe sur les ventes au détail est de
$38,000,000 au-dessous des prévisions. Dans ce cas, on aurait pu
s'attendre à pire, compte tenu de la baisse des demandes des
consommateurs, un peu partout en Amérique du Nord.
Les autres revenus autonomes tombent de $49,000,000. Pour un tiers, il
s'agit d'un artifice comptable qui provient du transfert du Bureau des
véhicules automobiles à la Régie de l'assurance
automobile. Le reste se partage surtout entre des recettes inférieures
à ce qui était prévu à la Société des
alcools, à cause, en particulier, des changements apportés par le
gouvernement fédéral à la taxation des vins et spiritueux,
et une réduction des recettes prévues d'enregistrement des
véhicules automobiles.
Le dernier poste relatif aux revenus du gouvernement du Québec a
trait aux sommes qui lui proviennent du gouvernement fédéral. Ces
transferts rapporteront, en 1980-1981, $60,000,000 de moins que prévu.
Dans ces conditions, par rapport à l'année
précédente, les transferts fédéraux n'augmenteront
donc que de 3,8 pour cent. J'aurai l'occasion de souligner plus loin
l'importance, pour les finances publiques du Québec, d'une aussi faible
progression.
Quant aux dépenses budgétaires, malgré tous les
efforts que nous avons faits pour en contrôler la croissance, elles
seront de $490,000,000 plus élevées que prévu au dernier
discours sur le budget, soit près de 3 pour cent.
En moyenne, de 1977-1978 à 1979-1980, nous avons réussi
à maintenir l'expansion des dépenses à environ 12 pour
cent par an, ce qui était à peu près le rythme d'expansion
de la production nationale. Il s'agit là d'une discipline remarquable.
À cause de la situation économique prévue en 1980-1981, on
pouvait imaginer de passer à un rythme temporaire d'expansion de 14,5
à 15 pour cent. Mais 16,6 pour cent est nettement trop
élevé.
À cause de la situation économique, certains postes de
dépenses ont été volontairement augmentés en cours
d'année de façon substantielle. Tel est le cas, par exemple, de
plusieurs des programmes d'aide a l'emploi.
On doit aussi, avant d'expliquer d'autres dépassements qui sont
survenus, noter le succès obtenu dans le contrôle des coûts
pour la plupart des secteurs. C'est ainsi que le contrôle des
dépenses des hôpitaux, amorcé il y a trois ans, s'est
maintenu. Celui des dépenses des commissions scolaires, qui avait
créé une telle commotion, il y a un an, a fort bien
fonctionné. À preuve, les dépenses dans ce secteur seront
inférieures de $3,000,000 au montant prévu en début
d'année. Le contrôle des paiements aux universités, aux
collèges, aux établissements de santé autres que les
hôpitaux s'est maintenu. De même, le contrôle rigide du
nombre des fonctionnaires du gouvernement a à ce point bien
fonctionné que le nombre des employés permanents est tombé
de 1400 en un an, alors que celui des occasionnels ne s'est accru que de 400.
Nous n'en sommes plus à l'objectif de croissance zéro. La
réduction est maintenant amorcée.
Tout cela est bel et bien, sauf que les coûts de deux programmes
importants ont augmenté, en 1980-1981, bien plus que prévu.
Le premier a trait à l'ensemble des dépenses payées
par la Régie de l'assurance-maladie. Les dépenses qui devront
être assumées pour 1980-1981 seront de $150,000,000
supérieures à celles inscrites aux crédits d'il y a un an.
Sur cette somme, $90,000,000 doivent être payés aux membres des
fédérations médicales et n'étaient
budgétés qu'en 1981-1982. Ces fédérations ont en
effet proposé au gouvernement un moratoire sur l'ensemble des ententes
jusqu'en juin 1981, contre l'augmentation intérimaire des tarifs pour
une période de 18 mois. Jamais, de mémoire de négociateur,
n'aura-t-on vu une opération pareille s'amorcer et se conclure aussi
rapidement. Évidemment, ce que l'on paie cette année n'aura pas
à être payé l'an prochain.
Il n'en reste pas moins que, même sans ce geste inattendu, le
coût des divers programmes de santé qui sont gérés
par la Régie de l'assurance-maladie déborde les prévisions
initiales d'une soixantaine de millions de dollars. Il risque fort d'augmenter
plus rapidement que notre capacité de payer. Des mesures devront donc
être prises, notamment dans le renouvellement des ententes avec les
professionnels de la santé, pour mettre en place des balises qui
résistent mieux à la pression.
En ce qui a trait à l'aide sociale, la situation est très
différente. Il faut ajouter environ $160,000,000 à ce qui avait
été inscrit aux crédits de l'an dernier. Ainsi que j'ai eu
l'occasion de l'expliquer dans le précédent discours sur le
budget, un train de mesures a été mis au point pour permettre
à un certain nombre d'assistés sociaux de retourner au travail,
pour récupérer les pensions alimentaires payables a des personnes
divorcées ou séparées qui, bien souvent, sans cela, ne
peuvent qu'émarger à l'aide sociale et, enfin, pour
contrôler les abus.
Il a fallu un certain temps pour mettre en vigueur les dispositions
législatives et
réglementaires nécessaires. Les échanges de
renseignements entre les ministères, la mise en place
d'équipement complexe, des changements dans les habitudes de travail de
l'administration, tout cela ne se fait pas en un jour. Néanmoins, des
innovations intéressantes sont apparues. C'est ainsi que, pour la
première fois, une centaine d'agents de l'aide sociale ont
travaillé dans les centres de main-d'oeuvre pour faciliter la
conjugaison des efforts.
Il n'en reste pas moins que ce n'est qu'entre les mois d'octobre et de
janvier que les mesures envisagées ont vraiment démarré.
Les résultats obtenus au cours de ces quelques derniers mois ne sont pas
encore spectaculaires. Même si les crédits nécessaires
à la réinsertion d'un grand nombre d'assistés sociaux sur
le marché du travail ont été rendus disponibles, il s'en
faut de beaucoup qu'ils aient encore été tous
utilisés.
Il y a en effet beaucoup de résistance au rodage des
opérations que nous avons lancées. Résistance
compréhensible sans doute, mais dont on ne peut pas faire abstraction.
C'est ainsi que bien des employeurs hésitent à embaucher des
assistés sociaux et gardent à leur égard des
préventions tenaces. Certains assistés sociaux, de leur
côté, invoquent parfois les motifs les plus saugrenus pour refuser
du travail. Les mesures qui sont maintenant en vigueur vont prendre du temps
avant de produire tous les résultats qu'on en attend. Ce n'est pas une
raison pour ne pas les poursuivre énergiquement.
Ajoutons enfin que le resserrement des règlements d'application
de l'assurance-chômage ne nous a pas aidés en ce sens qu'il a
provoqué une hausse des allocations d'aide sociale de $50,000,000 en
1980-1981.
Enfin, deux autres postes du budget des dépenses coûtent
cette année nettement plus cher que prévu. D'une part, des
besoins financiers accrus et des taux d'intérêt bien plus
élevés qu'on ne le prévoyait ont augmenté le
service de la dette de $112,000,000. D'autre part, un taux d'inflation de 1%
plus élevé qu'estimé a ajouté $65,000,000 à
la masse salariale des secteurs public et parapublic. (20 h 40)
Pour ce qui a trait aux opérations non budgétaires, les
nouvelles sont excellentes. On avait, à l'occasion du dernier discours
sur le budget, annoncé que, dorénavant, les opérations de
prêts de la Société de développement industriel et
de la Société d'habitation du Québec seraient
assumées par les institutions financières privées, comme
nous l'avions fait précédemment pour l'Office du crédit
agricole, le gouvernement se contentant de payer les remises
d'intérêt et les subventions. Cela a été fait.
En outre, les nombreuses mesures que nous avons prises pour rentabiliser
nos sociétés d'État ont commencé à donner
des résultats tangibles. Ces sociétés, qui font maintenant
pratiquement toutes des profits, sauf SIDBEC, n'ont pas eu besoin de recourir
au fonds consolidé du revenu autant que par le passé. C'est une
des raisons pour lesquelles le surplus des opérations non
budgétaires qui, comme on le sait, compense une partie du déficit
budgétaire, augmente de $100,000,000, soit une hausse de près de
20%.
Le tableau qui suit résume tout ce qui vient d'être
décrit et établit les soldes. Je le dépose, M. le
Président, en deux copies, comme faisant partie intégrante du
discours sur le budget.(Voir annexe A)
Il ressort de ce tableau que le déficit des opérations
budgétaires s'établira, pour 1980-1981, à $2,975,000,000;
le surplus des opérations non budgétaires est de $630,000,000 et
doit être déduit du déficit budgétaire pour que l'on
puisse établir les besoins financiers nets qui sont, en
conséquence, de $2,345,000,000.
De tels niveaux de besoins financiers de déficit sont
élevés, cela ne fait pas de doute. Et, bien sûr, ils ne
sauraient être maintenus indéfiniment.
Encore faut-il bien en comprendre les causes. Si le déficit
budgétaire est à ce point élevé, c'est que nous
avons décidé de révéler, depuis quelques
années, l'ampleur des engagements du gouvernement, notamment à
l'égard de ses fonds de pension.
Si l'on dresse un état des opérations financières
sur la base des recettes et des déboursés, tel qu'il
apparaît en pages 8 et 9 de l'annexe II du présent discours, ce
qui est une formulation comptable sensiblement comparable à celle qui
est utilisée par plusieurs provinces canadiennes, le déficit de
1980-1981 tomberait de près de $600,000,000, soit à
$2,394,000,000.
D'autre part, une bonne partie de ce déficit est due aux
réductions d'impôts et de taxes réalisées par le
présent gouvernement. Imaginons que nous ayons perpétué la
structure des taxes et des impôts héritée du
précédent gouvernement et que nous n'ayons pas
procédé à la réforme de la fiscalité
municipale, à quel niveau serait le déficit aujourd'hui? Aux
environs de $1,000,000,000, presque au même niveau qu'il y a quatre ans,
alors que les prix ont augmenté de 40%.
Il n'est pas question de revenir sur les baisses d'impôt que le
présent gouvernement a consenties depuis trois ans et il n'est pas
question non plus de rétablir l'impôt foncier scolaire
normalisé.
La seule solution, c'est de couper les dépenses. C'est ce que
nous avons fait, d'abord par de nombreux gels de crédits pour la fin de
1980-1981 et par les coupures pour l'année qui vient.
En tout cas, pour ce qui a trait à la
dette en cours du gouvernement du Québec, on doit
reconnaître que la dette à long terme représente
actuellement environ 15% du produit intérieur brut du Québec. En
lui-même, ce chiffre n'a pas de signification véritable, car le
gouvernement peut emprunter lui-même ou faire emprunter des corps
publics, des sociétés d'État ou des gouvernements locaux
à sa place. Si l'on veut vraiment savoir quel est le poids réel
de la dette publique portée par la société, c'est donc la
totalité des sommes dues par les secteurs public et parapublic qu'il
faut examiner.
Si l'on tient compte des emprunts à long terme du gouvernement du
Québec, des institutions d'enseignement et de santé,
d'Hydro-Québec, des autres sociétés d'État, des
municipalités et de communautés urbaines, les émissions
d'emprunt chaque année, depuis six ans, se présentent de la
façon suivante. Elles représentaient 8,5% du produit
intérieur brut du Québec en 1975, presque 12% en 1976, 7,7% en
1977, 7,4% en 1978, 6,9% en 1979, et se situent à 8,8% en 1980.
Dans ce sens, tous déficits considérés et tous
besoins d'emprunts entrés en ligne de compte, il est vrai que
l'année 1980 se solde par une situation à peu près du
même ordre qu'en 1975, nettement mieux qu'en 1976, mais moins bonne que
pendant nos trois premières années de gouvernement.
Incidemment, une question se pose depuis six mois à laquelle il
convient de répondre: Est-il exact que le Québec emprunte pour
payer ses dépenses courantes? Remarquons, en premier lieu qu'advenant
que cela se produise il n'y aurait pas lieu de s'en offusquer si vraiment la
situation économique l'exigeait. Plutôt s'endetter temporairement
que de jeter des gens dans la rue. Mais, est-ce vraiment le cas?
Pour répondre correctement, il faut, une fois de plus,
considérer toute la dette des secteurs public et parapublic
québécois. Le gouvernement garantit la dette
d'Hydro-Québec et en autorise les tarifs; il paie la totalité du
service de la dette des commissions scolaires et des établissements de
santé; il paie de 60% à 100%, selon les cas, des investissements
dans l'épuration des eaux et le transport en commun. On comprendra alors
qu'il faut comparer chaque année le montant des emprunts nets totaux du
gouvernement du Québec, de ses sociétés d'État et
de toutes les autorités scolaires, municipales ou institutionnelles qui
en dépendent, d'une part, et, d'autre part, tous les investissements qui
en proviennent. C'est une telle comparaison qui est vraiment significative. Or,
que nous démontre l'annexe financière du discours sur le budget,
pages 11 à 14?
D'abord qu'en 1976, dernière année d'une administration
dont les membres aspirants ou survivants nous reprochent de payer nos
dépenses courantes avec des emprunts, effectivement les emprunts nets
ont légèrement dépassé les investissements, soit
$4,400,000,000 contre $4,200,000,000. Dès 1977, sous le présent
gouvernement, la situation est renversée; on investit $1 milliard de
plus que les emprunts nets. En 1978, l'écart passe à presque
$1,300,000,000. En 1979, il est de $1,600,000,000. En 1980, pour les raisons
qu'on a déjà énoncées, l'écart n'est plus
que d'une centaine de millions de dollars, mais il reste que les
investissements du secteur public dépassent toujours ces emprunts.
On n'emprunte donc toujours pas pour payer des dépenses
courantes. Il n'y a qu'une année récente où cela a
été fait. Il y a cinq ans, en 1976, sous le gouvernement qui nous
a précédés.
Encore faut-il reconnaître qu'en 1980 on a beaucoup
emprunté, qu'il est temps de resserrer les robinets et de mieux
répartir les sources de revenus entre les éléments du
secteur public; c'est le sens de plusieurs des propositions qui seront
annoncées ce soir.
Les taux d'intérêt élevés des quelques
derniers mois, l'augmentation persistante du prix du pétrole et la
prudence qui caractérise aussi bien les entreprises que les
consommateurs n'augurent rien de très bon pour 1981. De fait, la plupart
des pays du monde industriel occidental s'attendent à des taux de
croissance qui ressemblent fort à moins de 1% ou à des taux de
chute du même ordre, et connaîtront probablement une douce
stagnation. De tous les pays industrialisés, seul le Japon devrait voir
sa croissance se poursuivre à un taux réduit à 3,8%, ce
qui pour lui est un affaissement, mais dont le reste du monde se contenterait
volontiers.
Aux États-Unis, on prévoit une croissance d'une fraction
de 1%, dans l'hypothèse, évidemment, où les docteurs
Diafoirus de la politique monétaire ne remontent pas les taux
d'intérêt à plus de 20%. (20 h 50)
Ce qui se produit au Canada peut, sans doute, globalement
refléter ce qui se passe ailleurs dans le monde. Il n'en reste pas moins
que c'est le résultat de mouvements discordants, opposés,
où les agencements de politiques économiques ne sont que le
résultat de coïncidences. Il n'y a plus, à vrai dire, de
coordination des politiques économiques au Canada. L'attention qui n'est
pas saisie par le débat constitutionnel est tout entière
engagée dans le cul-de-sac des prix du pétrole et du gaz. Les
gouvernements font ce qu'ils peuvent avec les moyens qu'ils ont. Le
gouvernement fédéral ne peut pas, compte tenu de l'énorme
déficit auquel il a à faire face, procéder autrement qu'en
augmentant, comme il l'a fait l'automne
dernier, ses impôts, ses taxes, les taux de cotisation
d'assurance-chômage, d'autant plus que la décision de l'Alberta de
réduire ses livraisons de pétrole accroît encore l'ampleur
des accroissements de taxes.
Une telle politique, alors que la croissance est nulle, est navrante. On
ne voit pas, cependant, comment le gouvernement fédéral pourrait
faire autrement sans modifier profondément sa gestion. Et, en
décidant d'appliquer sa politique de canalisation des entreprises
pétrolières en plein creux de la vague, il accroît encore
la nécessité d'augmenter les impôts.
En Ontario, on commence à saisir ce qui est en train de se
produire. Si on a fait longuement état de ce qu'au Québec, en
1979-1980, il est parti 78,000 personnes, on a moins souligné que
143,000 Ontariens avaient quitté leur province au cours de la même
période. L'Ouest du Canada connaît un démarrage fulgurant.
L'Ontario vient de comprendre que sa politique, à d'autres égards
tout à fait remarquable, de compression des dépenses publiques,
jointe à l'impuissance du gouvernement fédéral et à
l'explosion dans l'Ouest, risquait de l'amener sur la pente du déclin.
Il est donc compréhensible que le gouvernement de l'Ontario renverse sa
politique budgétaire dans le sens de l'expansion et des déficits
accrus.
Pendant ce temps, l'Alberta, avec ses 2,000,000 d'habitants, dispose,
sur une base comparable, d'un surplus budgétaire du même ordre que
le déficit combiné de l'Ontario et du Québec. En pratique,
l'Alberta pourrait abolir tous ses impôts et toutes ses taxes, sauf les
redevances sur le pétrole et le gaz, et continuer à payer toutes
ses dépenses budgétaires.
En somme, alors même que le gouvernement fédéral met
l'accent sur le marché commun canadien, le Canada, comme entité
économique, perd rapidement de sa cohérence. On achète
Pétrofina pour oublier qu'il n'y a plus de politique économique
canadienne.
Pour le Québec, le problème financier majeur vient de ce
que les revenus provenant du gouvernement central, qui représentent
près de 30% de son budget, augmentent et augmenteront dans un avenir
prévisible, si rien n'est changé, à un taux qui, en
moyenne, serait environ le tiers de celui de l'inflation, alors que les
conventions collectives, l'aide sociale, les allocations familiales et tant
d'autres postes de dépenses sont liés directement au taux
d'inflation.
Nous en sommes arrivés, dans nos rapports fiscaux et financiers
avec le gouvernement fédéral, à un point où les
efforts de développement économique que tente le gouvernement du
Québec, et dont on conviendra qu'il les réussit souvent, servent
surtout à réduire les paiements du gouvernement
fédéral au Québec. Un dollar dépensé par le
Québec pour faire travailler un chômeur inscrit à
l'assurance-chômage se traduit par un gain de $0.70 pour le Trésor
fédéral, une récupération de $0.05 par le
Trésor québécois, et seulement $0.25 d'augmentation du
pouvoir d'achat des citoyens.
De fait, le plus clair des efforts du gouvernement du Québec pour
accroître la résistance de notre économie à la
récession ou pour en accélérer la croissance sert à
réduire, ou tout au moins à ralentir, la croissance du
déficit fédéral.
C'est pourquoi les arrangements fiscaux entre les provinces et le
gouvernement d'Ottawa qui viendront à échéance le 31 mars
1982 et auront à être renégociés dans le courant de
l'année devront être améliorés pour garantir au
Québec qu'il pourra mieux profiter de sa croissance économique.
Nous avons commencé à faire des suggestions dans ce sens et
à préparer des propositions.
Encore ne faut-il pas se faire d'illusion sur les résultats. On
ne peut attendre de miracles d'un gouvernement qui annonce $14 milliards de
déficit. Dans ces conditions, nous devons d'abord et avant tout nous
occuper de nos propres affaires tout en essayant d'éviter, si possible,
que, d'année en année, les contributions fédérales
qui, avec les subventions au prix du pétrole, ont joué un tel
rôle pendant la campagne référendaire ne se ratatinent. Il
faut, en particulier, préparer le Québec à un
réaménagement fiscal qui lui permettra, d'une part, de respirer
un peu et, d'autre part, en dépit de toutes les contraintes actuelles,
de profiter au maximum de la reprise de l'économie lorsqu'elle se
produira.
Quant au budget pour le prochain exercice financier, nous avons
adopté certaines règles de base que je voudrais d'abord
énoncer. En premier lieu, on devrait éviter de dépasser le
niveau de déficit actuel même si cela implique qu'il faille
prendre des mesures de contrôle inédites et même si l'on
doit, en 1981-1982, ajouter environ $200 millions aux sommes déjà
consacrées aux fonds de pension pour en assurer le service.
En second lieu, les besoins financiers nets du gouvernement,
c'est-à-dire ses appels nets d'emprunts sur les marchés
financiers et à la Caisse de dépôt et placement du
Québec, devraient être réduits par rapport à 1980.
C'est là, je pense, une règle de prudence.
Troisièmement, le niveau des emprunts, y compris les
remboursements, devrait rester en deçà de $3 milliards. Dans un
contexte de restriction de la masse monétaire où les taux
d'intérêt atteignent des sommets, nous devons diminuer notre
volume d'emprunts pour préserver une saine gestion des fonds
publics.
Finalement, le gouvernement ne doit
pas renoncer à la politique qu'il s'est fixée depuis trois
ans de réduire chaque année les impôts des particuliers. Le
Québécois, avons-nous dit déjà, il y a quatre ans,
est trop taxé. Depuis ce temps, une forme d'indexation des exemptions
personnelles a été introduite. L'échelle même des
impôts, après avoir été modifiée, a
été réduite de 3%. Les taxes de vente ont
été abolies sur les vêtements, les chaussures, les
textiles, les meubles ainsi que sur le prix des chambres d'hôtel. On a
inauguré un régime d'épargne-actions qui a
multiplié de façon spectaculaire les émissions d'actions
au Québec en réduisant en même temps les impôts
à payer de ceux qui en achètent. Le crédit d'impôt
foncier pour le paiement d'une partie des taxes municipales a profité
à plus de 600,000 Québécois. Dans l'ensemble, toutes ces
réformes, sauf sans doute le régime d'épargne-actions, ont
avantagé le citoyen dont les revenus sont faibles ou moyens. Pour la
première fois depuis 20 ans, le citoyen du Québec imposé
comme marié et qui gagne moins de $17,000 est moins taxé au
Québec qu'en Ontario.
Le présent gouvernement poursuivra donc la baisse graduelle du
fardeau fiscal des particuliers. Nous avons hérité d'une
situation intenable et coriace. Nous l'avons petit à petit
renversée. Nous continuerons dans cette voie, c'est le quatrième
objectif.
Dans ces conditions, il faut à la fois modifier la structure des
revenus pour qu'elle rapporte davantage et couper sérieusement le rythme
d'augmentation des dépenses. Ce sont ces deux tâches que vise le
présent budget. Nous verrons ensuite ce que nous pouvons nous payer en
termes de réduction des impôts ou d'augmentation des allocations
pour l'ensemble de la population.
Sur le plan des revenus, deux changements majeurs interviendront: l'un
à l'égard des sociétés d'État et l'autre
à l'égard de l'imposition des entreprises
québécoises.
Comme on vient de l'indiquer, la quasi-totalité des
sociétés d'État, à l'exception de Sidbec, sont
maintenant rentables. Les leviers dont la société
québécoise s'est dotée graduellement depuis 20 ans sont
prêts à se mesurer à l'aune des règles que l'on
applique à toute compagnie dans le genre de système
économique où nous vivons. Cela implique d'abord qu'elles soient
astreintes à la plupart des taxes que le gouvernement du Québec
applique aux entreprises privées. En outre, les sociétés
d'État doivent maintenant être amenées à une
politique de dividendes qui corresponde à leur situation réelle.
Il n'y a pas de raison pour que l'accumulation des profits ne serve qu'à
perpétuer les mêmes orientations. Dans la mesure où les
outils que possèdent les Québécois sont maintenant
efficaces, ils doivent contribuer au fonctionnement de la
société, comme les entreprises privées contribuent au
fonctionnement du système d'actionnaires qui les a
engendrées.
Parmi ces sociétés d'État, il y a plusieurs
catégories. Il y a d'abord des monopoles fiscaux qui doivent rendre la
totalité de leurs profits au trésor public. Telles sont la
Société des alcools et Loto-Québec. À leur
égard, rien ne sera changé dans l'obligation qu'elles ont de
remettre leurs profits à l'État.
En second lieu, plusieurs sociétés d'État ont un
caractère commercial et industriel qui les place en concurrence directe
avec le secteur privé. Telles sont, par exemple, la
Société générale de financement, Rexfor, Soquem,
Soquia, etc. Ces sociétés font maintenant, pour la plupart, des
profits significatifs. En plus de payer les mêmes taxes que celles
portées par les sociétés privées, sauf
l'impôt sur les profits lorsque le gouvernement contrôle plus de
90% de l'équité, elles seront soumises au paiement d'un dividende
de 20% de leurs profits ordinaires dont, le cas échéant, elles
pourront déduire la perte encourue au cours des deux années
précédentes. En vertu de ce cadre d'instructions, dès
cette année, plusieurs sociétés d'État auront
à payer des dividendes.
Il demeure que le cas d'Hydro-Québec est bien plus important, en
lui-même, que tout le reste. Ce que communément nous appelons
l'Hydro a été créé dans sa forme actuelle sous
l'impulsion de l'actuel premier ministre, à la suite du rachat des
compagnies privées d'électricité. Contre $300,000,000
d'emprunts en 1963, les Québécois ont ainsi acquis à la
fois le contrôle de leur principale richesse naturelle et une source de
revenus de plus en plus massifs.
La plupart des compagnies gouvernementales d'électricité
sont, en Amérique du Nord, chargées de centrales thermiques ou
nucléaires qui leur coûtent les yeux de la tête.
Hydro-Québec est placée dans une situation fort
différente. Ayant sextuplé ses profits en dix ans, elle est
maintenant menacée, si l'on peut dire, de payer ses barrages
comptant.
Or, pendant les quatre ou cinq prochaines années,
Hydro-Québec n'investira guère plus en dollars que ce qu'elle
investit aujourd'hui, ce qui veut dire qu'elle investira en ciment et en
salaires beaucoup moins qu'aujourd'hui. On peut bien vouloir
accélérer ses projets, mais, en termes de dépenses
effectivement réalisées, la hausse ne peut apparaître que
dans quelques années. Les plans et devis prennent ce temps.
Jusque-là, si on laisse le prix du courant électrique
suivre le rythme de l'inflation, on arrivera à une situation où,
dans quelques années, Hydro-Québec autofinancera 60% de tous ses
investissements, ce qui serait vraiment
exceptionnel parmi les sociétés d'État du
même genre en Amérique du Nord. Payer comptant des investissements
qui vont durer 50 ans ou davantage ne serait d'ailleurs pas le moindre des
paradoxes.
Les profits d'Hydro-Québec atteignent actuellement $700,000,000
et pourraient approcher, dans quelques années, $2,000,000,000. D'aucuns
diront alors qu'il faudrait stabiliser ou même réduire le prix de
l'électricité. Mais il serait contraire au sens commun que notre
électricité soit vendue à aussi bon compte par rapport aux
autres types d'énergie. Cela conduirait, en effet, à un
gaspillage de nos ressources hydro-électriques, qui, bien qu'abondantes,
ne sont pas illimitées. En particulier, alors que les coûts
d'énergie augmentent rapidement et que le taux d'inflation est vif,
comment va-t-on persuader les citoyens qu'il faut économiser
l'énergie si, pour ce qui a trait à l'électricité,
c'est le seul prix qui baisse ou, en tout cas, n'augmente pas?
Il faut donc considérer, ce qui est d'ailleurs manifeste, que la
nationalisation de l'électricité est le meilleur placement qu'ait
jamais fait la collectivité québécoise et qu'il est
maintenant temps que les $300,000,000 ainsi investis en 1963 commencent
à rapporter à l'ensemble de la population. C'est-à-dire
qu'à partir du début de 1982, Hydro-Québec, qui ne paie
pas d'impôt sur ses profits, paiera au gouvernement une redevance.
Le montant de cette redevance ne doit toutefois pas être
établi arbitrairement au gré des demandes du ministre des
Finances. Il faut qu'en établissant ce montant, on tienne rigoureusement
compte des assurances que, comme emprunteur majeur, Hydro-Québec doit
fournir à ses créanciers.
Je propose donc que la loi d'Hydro-Québec soit modifiée
non seulement pour prévoir le paiement d'une telle redevance, mais en
outre pour établir que le montant devra satisfaire deux exigences: en
premier lieu, les réserves constituées devront, en tout temps,
représenter au minimum le quart de la somme des réserves et de la
dette à long terme; en second lieu, les bénéfices
d'exploitation moins la redevance devront représenter au moins
l'équivalent des intérêts à payer sur la dette. Ces
garanties pourraient être rehaussées si jamais un accroissement
substantiel des investissements d'Hydro-Québec entraînait des
niveaux d'emprunts qui exigeraient de procéder ainsi.
Les garanties que je viens d'énoncer sont, toutes les deux, plus
sérieuses que n'importe quelle autre fournie par la plupart des
compagnies d'électricité gouvernementales. Elles devraient donc
amplement suffire.
À quoi servira la redevance payée par Hydro-Québec
au gouvernement? Dans certaines provinces de l'Ouest du Canada, une partie des
redevances sur le pétrole ou le gaz est placée dans un fonds
spécial, tel le "Heritage Fund" en Alberta. Cela se comprend, puisqu'il
s'agit de richesses non renouvelables. Une fois épuisés, les
puits ne rendront plus rien. Encore faut-il noter que l'Alberta elle-même
affecte à son fonds consolidé 70% de toutes les ressources
qu'elle tire du pétrole et du gaz.
Puisque les redevances que nous tirerons d'Hydro-Québec
proviennent de ressources perpétuellement renouvelables, il est normal
qu'elles soient versées au trésor public. Nous en affecterons
dorénavant une partie à deux types d'opérations
reliées directement au développement économique: d'une
part, aux programmes de modernisation des entreprises privées qui
prennent de plus en plus de place dans nos budgets et qui doivent se
développer bien plus encore, et, d'autre part, aux souscriptions au
capital-actions des sociétés d'État au fur et à
mesure de l'évolution de leurs plans d'expansion.
J'ai déjà indiqué que les sociétés de
l'État québécois, qui, dorénavant, paieront des
dividendes, paieront aussi leurs taxes et contributions comme toute entreprise,
à part l'impôt sur les profits, bien sûr. Cela
m'amène à décrire une réforme en profondeur de la
fiscalité des entreprises qui va entrer en vigueur au cours de
l'année qui vient.
Cette transformation de la structure des impôts des
sociétés est la troisième des réformes majeures de
la fiscalité entreprises par le présent gouvernement. En 1978,
nous avons modifié profondément la structure de l'impôt sur
le revenu des particuliers. En 1979 et 1980, c'était le tour de la
fiscalité municipale et scolaire. En 1981, nous terminons avec les
sociétés.
Dans un pays comme le Canada où un grand nombre d'entreprises
fonctionnent dans plusieurs provinces, sinon dans toutes, la taxation des
profits par chaque gouvernement provincial présente des problèmes
considérables. La déclaration des profits attribuables à
chaque province individuellement n'a guère de signification. On se
débrouille, sans doute, avec des formules empiriques et approximatives.
C'est ainsi qu'en prenant la moyenne arithmétique des salaires et des
ventes dans chaque province on pense avoir une bonne idée des profits
qu'on peut lui attribuer. Encore est-il enfantin de contourner les effets de
ces gymnastiques. À l'occasion du dernier discours sur le budget, j'ai
décrit la situation comptable des sociétés
pétrolières dont les profits atteignaient des sommets sans
précédent, mais qui, pour ce qui a trait à leurs
raffineries montréalaises, ne déclaraient presque aucun profit au
Québec.
De même, d'autres sociétés vendent leur production
à une filiale située hors du
Québec dans des conditions telles que c'est la filiale qui fait
l'essentiel des profits. Tout cela est parfaitement légal. Le
ministère du Revenu arrive à modifier des comportements
clairement abusifs, mais il faut reconnaître que le dépistage est
malaisé et que toute loi provinciale de l'impôt sur les
corporations présente en elle-même des carences fondamentales qui
ne peuvent être éliminées.
L'idéal serait d'abolir l'impôt sur les profits et de le
remplacer par autre chose, par exemple, par une taxe à la valeur
ajoutée, comme il en existe dans plusieurs pays d'Europe ou comme, plus
près de nous, l'État du Michigan vient d'en établir
l'équivalent. Il s'agit manifestement d'une taxe indirecte dont le
champ, on le sait, est fermé aux provinces. Le problème, donc,
c'est qu'une telle taxe serait inconstitutionnelle.
Dans ces conditions, et en nous servant des instruments à notre
disposition, nous procéderons à trois changements majeurs dans
chacun des trois champs de perception qui s'appliquent aux entreprises: soit la
contribution des employeurs au fonds de l'assurance-maladie, la taxe sur le
capital et l'impôt sur les profits.
À partir du 1er avril, la contribution des employeurs au
financement des programmes de santé passera de 1,5% à 3% de la
feuille de paie. Dorénavant, cette contribution ne servira pas seulement
à payer une partie du coût de l'assurance-hospitalisation. Le tout
sera versé à un "fonds des services de santé".
Une telle contribution est facile à administrer. Elle est
déductible du revenu imposable, ce qui en réduit le poids pour
les entreprises, et est plus facilement absorbable dans une situation
inflationniste où les salaires augmentent déjà d'environ
10% par année. Elle joue enfin dans le sens de l'accroissement de la
productivité des entreprises, ce qui, dans le cadre de marchés de
moins en moins protégés, est excellent. (21 h 10)
Ce sera la deuxième fois que cette contribution est
augmentée. En effet, au début de 1976, le gouvernement qui nous a
précédé l'avait fait passer de 0,7% à 1,5%,
c'est-à-dire l'avait déjà doublée, sans donner de
compensation aux entreprises, alors que, comme on le verra, j'ai l'intention,
cette fois-ci, de compenser. Ajoutons que, dans le cas des municipalités
dont le budget est maintenant fermé pour 1981, la hausse de la
contribution d'employeur ne prendra effet que le 1er janvier 1982.
Nous avions hérité d'un assemblage de taxes sur le capital
et sur les places d'affaires inutilement compliqué et dont certains
éléments étaient plus remarquables par leur
caractère de nuisance que par une intention fiscale intelligible. Nous
avons, il y a deux ans, remplacé tout cela par une taxe sur le capital
de 0,3% pour la plupart des entreprises, et de 0,6% pour les institutions
financières.
J'annonce qu'à partir du 1er juillet, cette taxe passera à
0,45% et à 0,90% respectivement. Elle sera dorénavant payable par
toutes les sociétés publiques à caractère
industriel et commercial, au même titre que les entreprises
privées. Les entreprises coopératives étaient, cependant,
jusqu'à maintenant, exemptées de cette taxe et le resteront.
Si l'on suppose qu'un rendement normal sur le capital, à notre
époque, est de l'ordre de 15%, une taxe de 3% sur ce rendement donnerait
effectivement une taxe de 0,45% sur le stock de capital. C'est l'origine du
chiffre.
Les contributions d'employeurs et la taxe sur le capital étant
dorénavant de 3% sur la masse salariale et le rendement du capital, cela
veut-il dire que l'impôt sur les profits devrait aussi être
ramené à 3%? Effectivement, à partir du 1er juillet,
l'impôt sur les profits de toutes les petites et moyennes entreprises, au
sens de la Loi fédérale de l'impôt sur les corporations,
sera réduit d'un crédit d'impôt de 10%, c'est-à-dire
que leur taux nominal d'impôt sur les profits inférieurs à
$150,000 par an tombera de 13% à 3%.
Pour les entreprises de plus grande taille, l'objectif est
théoriquement le même, mais les modalités doivent en
être ajustées. Il faut tenir compte du caractère
déductible du revenu imposable à la fois des contributions
d'employeurs et de la taxe sur le capital, des besoins financiers du
gouvernement, et du fait qu'en ramenant leur taux d'impôt à 3%,
elles économiseraient, au net, près de $185,000,000 par rapport
à la situation actuelle. Cela est un peu riche.
Dans ces conditions, j'annonce que pour toutes ces entreprises, un
crédit d'impôt de 5% sera applicable le 1er janvier 1982 et qu'il
sera porté à 7,5% le 1er janvier 1983. Par la suite, on
verra.
Il n'en reste pas moins qu'avec un pareil système de taxation des
entreprises, le Québec sera, de toutes les provinces canadiennes, celle
où le taux d'impôt sur les profits sera le plus bas, et de loin.
Il sera intéressant de voir ce qu'une telle situation provoquera quant
à l'affectation ou à l'imputation des profits par les
entreprises. Mais plus encore, il sera intéressant de voir dans quelle
mesure ces modifications pourront devenir un facteur important de
développement économique et de localisation pour de nouvelles
entreprises au Québec. Enfin, compte tenu du très bas taux
d'impôt sur les profits, il ne sera plus utile de maintenir le fonds de
relance industrielle. Mais ceux qui ont accumulé des sommes dans ce
fonds pourront les retirer, dorénavant, à un rythme de 50% des
investissements plutôt
que de 25%.
Parallèlement à la réforme générale
de l'impôt et des contributions des entreprises, des modifications plus
spécifiques du mode de taxation s'appliqueront à certaines
catégories d'entreprises, pour harmoniser les pratiques et les
obligations. C'est ainsi que les entreprises minières et les entreprises
qui paient des droits hydrauliques devront les verser selon les mêmes
modalités que celles qui s'appliquent au paiement d'impôt sur le
revenu des sociétés ou à la taxe sur le capital. Une telle
mesure les met sur le même pied que les autres entreprises à
l'égard des impôts généraux. De même, les
taxes payées à Québec par les entreprises
d'électricité, de gaz et de télécommunications et
qui sont versées ensuite aux municipalités comme "en-lieu" de
taxe foncière sur les propriétés de ces entreprises seront
maintenant payables dans les deux mois qui suivent la fin de l'année
financière de ces entreprises.
L'impact financier de toutes les mesures que je viens d'annoncer,
à l'égard des sociétés d'État et des
entreprises, est considérable. On trouvera en annexe du présent
discours sur le budget la décomposition des effets financiers et fiscaux
prévus. Nous y reviendrons, cependant, brièvement à
l'occasion des équilibres budgétaires pour l'année
1981-1982.
On aura noté que, jusqu'à maintenant, je n'ai pas
discuté des impôts et des taxes qui s'appliquent aux particuliers.
Il y a une raison à cela. Nous examinerons d'abord la situation des
dépenses, et seulement ensuite on indiquera dans quelle mesure et
jusqu'où l'on pense pouvoir pousser la réduction du fardeau
fiscal des contribuables que nous poursuivons depuis trois ans.
L'orientation des dépenses, pour 1981-1982, a été,
depuis quelques mois, fortement marquée par des opérations de
compression. On a vu que la croissance des dépenses, en 1980-1981, a
été nettement plus forte que celle des années
précédentes. Il a donc été décidé
d'en réduire la progression. Les décisions qui ont
été prises, affectant tous les ministères du gouvernement,
ont été vite connues du public.
Il faut d'abord saisir la raison de telles compressions. En
première étape de la préparation du budget, on projette
sur l'année suivante le coût des opérations et des
programmes existants, sans rien y changer, mais en les ajustant simplement en
fonction des taux prévus de salaires, d'inflation et
d'intérêt. Puis on tient compte, selon le cas, des projections de
clientèles et du coût, pour une année entière, des
mesures prises au cours de l'année précédente.
Cette vaste opération de projection purement mécanique
aurait produit, en 1981-1982, une augmentation de plus de 18% des
dépenses par rapport à 1980-1981. Comme il apparaît
nécessaire de réduire la progression des dépenses de 16,6%
observée en 1980-1981, il va de soi qu'une augmentation de 18%
était carrément inacceptable. Dans la mesure où la
production courante du Québec va augmenter, cette année, de 11%
à 12%, une hausse des dépenses de 12,5% à 13% serait
raisonnable. Le secteur public resterait légèrement
expansionniste, mais ne taxerait pas indûment les ressources du secteur
privé.
Pourquoi la projection mécanique donne-t-elle quand même un
aussi fort taux d'expansion?
Il y a à cela plusieurs explications. D'abord l'environnement
économique a rapidement changé. C'est ainsi, par exemple, que,
depuis deux ans, les perspectives du taux d'inflation à venir se sont
singulièrement accrues. La combinaison de la hausse des prix du
pétrole et du gaz, de la baisse du taux de change canadien et de l'effet
sur les produits alimentaires de la sécheresse de l'été
dernier aux États-Unis augmente de 2% à 3% la hausse des prix par
rapport à ce qui était prévu lorsque les conventions
collectives des secteurs public et parapublic ont été
préparées.
Conséquemment, les clauses de protection du revenu des
employés déclenchent des hausses de salaires.
Pour les mêmes raisons, il faut ajuster les subventions
payées aux institutions d'enseignement et de santé pour ce qui a
trait au coût de l'énergie et des aliments.
D'autre part, il apparaît d'ores et déjà que les
taux d'intérêt vont rester, en 1981, à un taux très
élevé, non pas par rapport à certains mois de 1980,
où ils ont battu tous les records, mais par rapport à ce qu'on
avait l'habitude de voir jusqu'ici.
Le gouvernement du Québec ne peut pas faire grand-chose à
l'égard du taux d'inflation ou des taux d'intérêt, sauf
adapter ses politiques en conséquence.
Dans d'autres cas, il doit payer des factures que des gouvernements
précédents lui ont laissées. C'est ainsi qu'à
l'égard des fonds de pension le gouvernement qui nous a
précédé avait été à la fois
prodigieusement généreux et fort imprévoyant. Maintenant,
il faut payer. Assurer, sans rien y changer, le service des fonds de pension
des secteurs public et parapublic implique qu'en 1981-1982 une hausse de 25%
est nécessaire, soit près de un quart de milliard de dollars.
Enfin, des augmentations rapides de dépenses sont directement
liées aux priorités du présent gouvernement, et il nous
semble qu'elles doivent être sans doute contrôlées, mais
néanmoins maintenues, même si cela veut dire que l'on coupe
ailleurs dans des domaines moins essentiels. Deux exemples, parmi d'autres,
peuvent être cités à cet égard. Le coût des
subventions aux intérêts payés sur les emprunts des
agriculteurs à l'Office du crédit agricole et des entreprises
à la Société de développement industriel
augmentent depuis quelques années d'une façon saisissante. Il
s'agit là, cependant, de politiques dont l'effet de levier sur la
croissance économique est certain. (21 h 20)
En somme, en 1981-1982, il faut satisfaire deux objectifs à la
fois. Limiter la hausse des dépenses globales à 12,5% ou 13%,
d'une part, et, d'autre part, satisfaire les exigences combinées de
l'environnement, économique dans lequel nous vivons, continuer de payer
les factures dont nous avons hérité et poursuivre la
réalisation des grandes priorités du gouvernement. Il faut donc
réexaminer toutes les dépenses. .
Une voix: La dette olympique n'est pas éteinte.
M. Parizeau: La décision a été prise
d'opérer des coupures de $1 milliard dans l'ensemble des
dépenses. L'objectif, grâce à la collaboration de tous les
ministères, a été à peu près atteint. Les
ministères de l'Éducation et des Affaires sociales, étant
les deux plus importants en termes de dépenses, sont aussi ceux qui ont
fourni les plus fortes contributions, soit $500 millions. "Il faut noter, en
outre, que 12 ministères sur 24 ont accepté un taux de croissance
inférieur à 5%, alors que le taux d'inflation est de 12%.
Voilà la preuve qu'il existe une certaine souplesse dans l'appareil
gouvernemental et qu'il est possible d'y réaliser des économies
tout en maintenant un niveau de services plus que satisfaisant.
Il, va de soi que les coupures ainsi opérées sont
très nombreuses et touchent une. foule de secteurs. Certaines,
même si elles choquent quelques spécialistes, n'auront
guère d'effet sur le public. De même, des services fournis par le
gouvernement sont payés à des prix ridiculement bas, dont
certains n'ont pas été modifiés depuis des années.
Il est temps de les ramener à un niveau plus en accord avec les prix de
notre époque.
Dans certains cas, une sorte de rigueur s'impose. Ainsi, les
établissements de santé et d'éducation ont
été invités à resserrer les règles de
recrutement et d'affectation de leurs employés au moins aussi
rigoureusement que le gouvernement l'a fait à l'égard de ses
propres fonctionnaires. Les sommes ainsi économisées permettront
au gouvernement de ne pas indexer l'ensemble des autres dépenses,
à l'exception de celles engagées pour l'énergie et la
nourriture.
Dans d'autres cas, où l'on juge que le personnel est trop
nombreux, les budgets seront bloqués de façon à laisser
l'attrition jouer fortement. La plupart des employés des secteurs public
et parapublic ont la permanence d'emploi. Mais, sur 330,000 salariés,
20,000 disparaissent chaque année. On n'est pas forcé de les
remplacer tous.
Enfin, des choix difficiles ont dû être faits. C'est ainsi,
par exemple, que la hausse rapide du coût du transport en commun
attribuable, entre autres, à la généralisation de la carte
d'abonnement mensuel, si profitable aux usagers, ne permet pas, cette
année, d'affecter autant d'argent qu'on le voudrait à l'expansion
du réseau routier. Lorsque, l'an prochain, la progression du coût
du transport en commun se sera un peu ralentie, on pourra reprendre un
programme plus vigoureux de construction de routes.
De même, puisque le gouvernement fédéral a
maintenant dépensé la totalité des sommes qu'il
prévoyait affecter à la construction de silos à la ferme,
il est clair que le gouvernement du Québec ne peut pas ramasser à
sa place les factures à venir. Cela veut dire que ces projets sont
toujours admissibles aux prêts subventionnés par l'Office du
crédit agricole, mais que le programme spécial
fédéral-provincial ne peut être remplacé par un
programme exclusivement provincial. Nous n'en avons pas les moyens, à
défaut d'un nouvel accord avec Ottawa.
Le secteur qui a le plus réagi aux coupures est celui des
universités. Je souhaiterais soumettre, à ceux qui se font les
défenseurs de la qualité de l'enseignement universitaire, les
considérations suivantes. Les universités au Québec
embauchent 28,000 personnes, soit un nombre équivalent à plus de
40% des employés de l'ensemble de la fonction publique. Est-ce
déraisonnable de leur demander de procéder comme les
hôpitaux, les commissions scolaires et les ministères,
c'est-à-dire surveiller la ligne et contrôler le poids?
Une voix: Weight Watchers.
M. Parizeau: Face au contribuable, il n'y a pas de programmes qui
soient des vaches sacrées. Il n'y a qu'un gouvernement qui choisit le
mieux possible avec les moyens dont il dispose en ne perdant jamais de vue les
intérêts de ceux qui paient les impôts.
Malgré l'importance des coupures effectuées, il n'en
demeure pas moins que la croissance rapide et continue des sommes devant
être affectées aux fonds de pension est préoccupante. Avant
longtemps, ces sommes représenteront près de 10% de tout le
budget du Québec. Jusqu'à maintenant, le gouvernement actuel a
tenu à respecter les obligations contractées par ceux qui
l'avaient précédé. Mais la situation devient
insupportable. Elle est parfois même aberrante. Un employé
marié peut actuellement, à certains niveaux de salaire, prendre
sa retraite à des conditions qui sont telles que, compte tenu des
allocations de sécurité de vieillesse, des dispositions de
l'impôt, de la Régie des rentes et des pensions du
gouvernement, il disposera, dès l'âge de 65 ans, d'un pouvoir
d'achat supérieur à celui qu'il avait à l'époque
où il travaillait. Cela dépasse un peu les bornes du
raisonnable.
Sans doute, par des mesures administratives, peut-on, en partie,
rectifier la situation. Globalement, toutefois, nous admettons qu'on ne peut
remettre en cause des droits véritablement acquis. Il faut, en tout cas,
arrêter l'hémorragie. J'annonce donc qu'à partir du 1er
janvier prochain tous ceux qui entreront dans les secteurs public et parapublic
devront accepter les conditions de pension suivantes: en premier lieu, leur
pension sera indexée au coût de la vie au-delà seulement
d'un certain seuil qui sera annoncé plus tard, mais qui sera
probablement de l'ordre de 3%. En second lieu, le coût de ce programme de
pension sera partagé moitié-moitié entre employeur et
employé. La plupart de ceux qui travaillent dans le secteur
privé, où les pensions ne sont souvent pas indexées du
tout, trouveront sans doute ces conditions encore très favorables. Elles
permettront, en tout cas, au gouvernement, au fur et à mesure du
renouvellement de la main-d'oeuvre, de réduire l'ampleur de ses
obligations et, donc, celles de l'ensemble de la population.
Après avoir modifié la structure des impôts et des
contributions des sociétés d'État et des entreprises, et
après avoir ralenti la croissance des dépenses, il nous reste
à déterminer ce qui arrivera quant aux impôts qui
s'appliquent aux particuliers. Après tout, c'est à cela que doit
aboutir n'importe quel budget d'un gouvernement qui a fait de la
réduction du fardeau fiscal des particuliers une de ses principales
priorités.
Encore faut-il reconnaître que le premier geste que nous poserons
ne les avantage pas. Il découle du lourd héritage olympique
laissé sans financement adéquat par l'administration
précédente. Il nous faut trouver, en effet, un moyen de
refinancer le Fonds spécial olympique. Il est maintenant apparent que la
dette encourue pour financer les installations olympiques, ou bien ne sera pas
remboursée avant l'an 2000, si les taux d'intérêt baissent
par rapport à ce qu'ils sont aujourd'hui, ou alors ne sera jamais
remboursée, s'ils demeurent à un niveau élevé.
Loto-Canada, qui devait servir à financer une partie de la dette, a
rapporté $175 millions de moins que prévu. La taxe
spéciale sur le tabac a aussi rapporté $80 millions de moins que
prévu. Les emprunts contractés par le précédent
gouvernement sont à taux d'intérêt variables,
c'est-à-dire coûtent beaucoup plus cher aujourd'hui que quand ils
ont été conclus.
Il faut tout de même que l'on finisse par payer le stade. Si on
fixait à dix ans, par exemple, l'échéance du remboursement
de cette dette, il manquerait environ $50 millions par an, en moyenne, dans le
Fonds spécial olympique.
Pour pallier cette carence, j'annonce qu'à partir de ce soir,
minuit, les taxes sur le tabac sont portées de 40% à 45%, ce qui
voudra dire environ $0.04 le paquet de 25 cigarettes. 30% du produit de la taxe
seront, dorénavant, affectés au Fonds spécial olympique et
l'on pourra ainsi espérer en finir avec cette dette.
Passons maintenant aux choses plus sérieuses.
La réforme de l'impôt sur le revenu établie il y a
trois ans, c'est-à-dire en 1978, comportait trois éléments
distincts: une nouvelle échelle d'impôts favorisant les
contribuables à revenus moyens et modestes, mais augmentant le fardeau
fiscal des revenus les plus élevés; deuxièmement,
l'augmentation de certaines exemptions personnelles, en particulier celles des
personnes mariées, des personnes âgées et des enfants
à charge de 18 ans et plus; et, en troisième lieu, la mise en
place d'un système d'indexation annuelle des exemptions
personnelles.
L'indexation a dû être retardée jusqu'au début
de 1980, le gouvernement du Québec ayant dû d'abord éponger
les résultats de la décision du gouvernement
fédéral de jouer à sa guise avec l'argent qu'il devait au
trésor public québécois dans l'affaire de la taxe de
vente. Finalement, tout a été mis en place et l'on a pu, en
outre, introduire, l'été dernier, une réduction de 3% de
toute l'échelle des impôts.
Nous allons poursuivre la même politique un an de plus. Dès
le 1er janvier 1982, toutes les exemptions personnelles seront
augmentées de 7,5%. En outre, à à la même date, la
réduction de 3% de l'impôt des particuliers annoncée l'an
dernier sera portée à 5%. (21 h 30)
Si on cherche à faire le point de la situation engendrée
par la réforme de l'impôt au Québec, on peut maintenant
l'évaluer de la façon suivante. Avant que nous arrivions au
pouvoir, les exemptions personnelles n'étaient qu'occasionnellement
augmentées et la structure générale des taux
modifiée.
En pratique, cela voulait dire qu'au fur et à mesure que les
revenus montaient en réponse à l'inflation, chaque contribuable
voyait son revenu imposable atteindre un taux marginal d'impôt plus
élevé. L'impôt à payer augmentait donc beaucoup plus
vite que le revenu et dépossédait graduellement les contribuables
de leur pouvoir d'achat. Le Québec était la seule province
à agir ainsi. C'est pourquoi le fardeau fiscal des
Québécois est devenu le plus lourd de toutes les provinces
canadiennes. C'est aussi la raison pour laquelle le gouvernement du
Québec, à l'époque, pouvait accroître ses
dépenses de 20% ou 22% par an. La correction et l'indexation des
exemptions personnelles que nous avons mises en place donnent maintenant les
résultats suivants, en incluant ce que je viens d'annoncer. L'exemption
personnelle de base aura été haussée de 30%, celle de
personne mariée est passée de $1900, avant la réforme,
à $3510 à partir du 1er janvier prochain, c'est-à-dire a
augmenté de 85%. Les exemptions additionnelles pour les personnes de 65
ans et plus sont passées de $1000 avant la réforme à $1950
l'an prochain.
En pratique, cela veut dire qu'un couple de personnes âgées
ne paiera aucun impôt sur le revenu au Québec l'an prochain si son
revenu est inférieur à $13,460. Enfin, les exemptions pour les
enfants à charge de 18 ans et plus auront augmenté de plus de
110%.
On peut se rendre compte, à partir des chiffres suivants,
à quel point le gouvernement a fait une priorité de la
réduction du fardeau fiscal des contribuables à revenu moyen ou
modeste. Un individu, taxé comme marié, gagnant $10,000, aurait
payé $443 d'impôt en 1979; il en paiera $138 en 1982. Mieux que
cela, puisque les revenus augmentent, le contribuable taxé comme
marié, qui gagnait $15,000 en 1979, a payé 9% de son revenu en
impôt au Québec. S'il gagne $20,000 en 1982, le pourcentage
d'impôt à payer est à peu près le même. Si
l'ancien système, qui existait lorsque nous sommes arrivés au
pouvoir, était encore en vigueur, le même contribuable aurait
payé un peu plus d'impôt en 1979, soit 10,8%, et presque la
moitié plus d'impôt en 1982, soit 13,3%.
De même, s'il gagnait $20,000 en 1979, et s'il en gagne $26,000 en
1982, avec la formule actuelle, ses impôts payables au Québec
restent en pourcentage au même niveau, soit 12%. L'ancien système
l'aurait forcé à payer 13,3% en 1979, et 15,3% en 1982.
Et si l'on ajoute à ces mesures les exemptions de taxe de vente
sur les vêtements et textiles, chaussures et meubles, le gouvernement
peut considérer, à la fin de son premier mandat, qu'il a
effectivement fait un bon bout de chemin pour ralentir et puis arrêter
l'alourdissement insensé du fardeau fiscal du citoyen ordinaire.
Des voix: Bravo!
M. Parizeau: On peut maintenant faire un pas de plus. La
fiscalité familiale en est encore, chez nous, à ses premiers
balbutiements. Il s'en faut de beaucoup que le régime des impôts
applicable à la femme mariée soit à la fois assez
généreux et assez flexible pour s'adapter correctement aux
circonstances de la vie au foyer et de la vie au travail.
Nous avons néanmoins posé jusqu'à maintenant
quelques gestes significatifs. C'est ainsi que, pour la femme mariée qui
travaille à l'extérieur, nous avons augmenté de $240 les
paiements consentis par l'assurance-chômage à l'occasion d'un
congé de maternité. De plus, il y a quatre ans, nous avons
établi qu'une femme qui se retire temporairement du marché du
travail pour élever ses enfants obtient un crédit de rente pour
tout enfant de 0 à 6 ans. De même, l'an dernier, nous avons permis
à un conjoint de déduire de son revenu imposable le salaire qu'il
verse à l'autre conjoint lorsqu'ils travaillent ensemble. Enfin, comme
je le soulignais précédemment, l'exemption personnelle de la
femme mariée qui ne travaille pas à l'extérieur a
été augmentée de 85%. Il reste cependant bien du chemin
à faire. Quoique l'état des finances publiques soit serré,
le gouvernement a décidé de franchir encore une étape. Il
s'agit du paiement de frais de garde des enfants d'âge
préscolaire. Une femme qui travaille à l'extérieur peut
déjà déduire de son revenu imposable $2000 par an par
enfant jusqu'à concurrence de $6000 par an. Cette déduction
existe depuis quelques années et nous avons eu l'occasion de l'augmenter
à son niveau actuel, il y a deux ans. Il faut reconnaître,
cependant, les imperfections de la formule. La déduction a d'autant plus
de valeur que le salaire est élevé. Beaucoup de femmes
travaillent à temps partiel et sont peu rémunérées
pour leurs travaux. D'autres font garder leurs enfants selon des arrangements
qui se prêtent mal à l'obtention de déductions aux fins de
l'impôt. Tout cela est finalement bien rigide.
Dans ces conditions, je propose qu'à partir de l'année
d'imposition 1981, le système applicable aux frais de garde soit
modifié. Tous les bénéficiaires actuels d'allocations
familiales qui ont des enfants de moins de six ans pourront réclamer une
allocation de disponibilité tenant lieu de crédit d'impôt.
Cette allocation sera de $400 pour un enfant de moins de six ans, de $600 pour
deux enfants de cet âge, de $700 pour trois enfants et de $100 de plus
pour chaque enfant additionnel de moins de six ans. Cette allocation sera
payée en un seul versement annuel, sur demande, en retournant un court
formulaire inclus dans l'envoi des chèques d'allocations familiales de
février prochain.
La femme qui travaille régulièrement à
l'extérieur pourra utiliser ce chèque pour défrayer une
partie du coût des frais de garde. La femme qui ne travaille pas à
l'extérieur ou qui ne travaille qu'occasionnellement utilisera le
montant du chèque comme elle l'entend.
Quant aux exemptions actuelles pour les frais de garde, elles
continueront de s'appliquer aux enfants de six ans et plus.
Ainsi s'amorce avec les moyens modestes dont nous disposons un
système d'aide aux familles qui est neutre, en ce sens qu'il ne cherche
pas à favoriser un mode de vie plutôt qu'un autre. On
reconnaît simplement que, dans la détermination de l'aide
financière aux familles, l'État n'a pas à juger s'il est
préférable ou non que les deux membres d'un couple travaillent
à l'extérieur. Tous et toutes seront, autant que faire se peut,
traités sur le même pied. Cette mesure coûtera en 1982
environ $185 millions, et les chèques arriveront en même temps que
les remboursements d'impôt. Encore une fois, la femme qui n'a pas de
revenu personnel et qui ne paie pas d'impôt le recevra comme toute
autre.
Cette année encore, le gouvernement du Québec va
poursuivre sa politique de réduction sélective de la taxe de
vente. L'an dernier, nous avions enlevé la taxe sur les meubles. Cette
année, on aborde les équipements ménagers. En
reconnaissant que l'équipement de base de tout logement, à notre
époque, comporte au moins un réfrigérateur et une
cuisinière, j'annonce qu'à partir de ce soir, minuit, la taxe de
vente est supprimée sur ces deux types d'appareils.
En outre, dans le cas des chaussures et des bottes, on a supprimé
la taxe de vente pour tous les achats de moins de $100, il y a deux ans.
À cause de la hausse des prix, j'annonce qu'à partir de minuit ce
soir le plafond est relevé jusqu'à $125. Il n'y aura donc plus de
taxes sur les achats de chaussures et de bottes jusqu'à ce prix.
Enfin, deux modifications mineures, mais néanmoins
intéressantes, seront apportées à la Loi de l'impôt
pour corriger des anomalies existantes. C'est ainsi qu'à certaines
conditions les intérêts payés à l'occasion d'un
emprunt sur une police d'assurance pourront être déduits du
revenu, lorsque le prêt est utilisé pour gagner un revenu. De
même, on assouplira certaines dispositions de l'impôt sur les dons
concernant le prêt d'un actionnaire à sa corporation. Enfin, le
gouvernement paiera dorénavant les intérêts sur les
remboursements d'impôt en adaptant la formule qu'il applique sur les
autres comptes, c'est-à-dire à partir de 60 jours après
réception de la déclaration, mais sans en imputer pour la
période qui précède la date statutaire de production. (21
h 40)
Voilà, en somme, les principales dispositions des modifications
apportées à la fiscalité des particuliers. Les baisses
d'impôt ne seront pas très coûteuses pour le Trésor
public en 1981-1982. Elles le seront bien davantage l'année suivante et
confirmeront, une fois de plus, la préoccupation du présent
gouvernement d'atténuer la charge fiscale des contribuables, tout en
ouvrant une nouvelle voie à la fiscalité familiale.
Il nous reste, pour terminer cette section du discours sur le budget,
à nous poser la question suivante. Imaginons que depuis qu'il est au
pouvoir, le gouvernement ait simplement maintenu la structure de l'impôt
sur le revenu telle qu'elle existait alors. De combien plus élevé
serait l'impôt sur le revenu des particuliers en 1981 par rapport au
régime tel que nous l'avons modifié? La réponse est
$1,300,000,000, soit près de $500 par contribuable. De plus, la hausse
des exemptions personnelles et la baisse des taux d'impôt qui
s'appliqueront en 1982 réduiront le fardeau des contribuables, cette
année-là, de $420 millions. Enfin, l'abolition d'un grand nombre
de taxes de vente a réduit de $350 millions par année la charge
fiscale des consommateurs. Voilà le résultat de quatre
années de persistance.
Des voix: Bravo!
Passons, enfin, à l'examen des équilibres financiers pour
l'année 1981-1982.
Avant d'aborder le tableau de l'équilibre des comptes du
gouvernement pour 1981-1982, il faut résumer brièvement le genre
de stratégie qui est mise en place aujourd'hui, aussi bien à
l'égard des revenus que des dépenses, et souligner l'impact
financier de la plupart des grandes mesures qui ont été
annoncées.
Les paiements du gouvernement fédéral au gouvernement du
Québec ont augmenté, on l'a vu, de moins de quatre pour cent en
1980-1981. Ils n'augmenteront pas plus, en moyenne, si rien n'est
changé, au cours des deux prochaines années. On peut facilement
se rendre compte de l'énorme manque à gagner que cela
représente pour le Québec. Si les paiements
fédéraux augmentaient au même rythme que l'inflation, le
Québec aurait reçu $230 millions de plus en 1980-1981, recevrait
$460 millions de plus 'en 1981-1982, et environ $940 millions de plus en.
1982-1983. Faire perdre au Québec des sommes pareilles, c'est le placer
dans un étau financier. Un des appâts utilisés pour
maintenir le Québec dans la fédération,
c'est-à-dire la péréquation, servirait maintenant à
le prendre au piège. Tant que le Québec n'aura pas atteint
à sa souveraineté, un tel danger existera.
Des voix: Bravo!
M. Parizeau: Quoi qu'il en soit...
Une voix: Bravo, Jacques!
M. Parizeau: ...on a modifié la taxation des entreprises
publiques et privées et leurs contributions aux régimes de
santé, ce qui rapportera au gouvernement du Québec $460 millions
en 1981-1982, $420 millions l'année suivante et environ $350 millions la
troisième
année.
Pour les entreprises privées dans leur ensemble
l'opération n'est pas pénible, au contraire. Elles paieront
nettement moins d'impôt, l'augmentation de leurs contributions et celle
de la taxe sur le capital étant en partie compensées par le fait
qu'elles sont déductibles du revenu imposable. Lorsque le crédit
d'impôt accordé aux grandes compagnies atteindra 7,5 pour cent le
1er janvier 1983, elles paieront globalement $85 millions de moins
d'impôt qu'aujourd'hui. Si on poursuit le crédit d'impôt
jusqu'à 10 pour cent, l'ensemble de leurs charges fiscales baisserait,
comme on l'a déjà signalé, de $183 millions.
Les dividendes des sociétés d'État rapporteront, en
1981-1982, $165 millions environ. Dans l'hypothèse d'une hausse des
tarifs d'électricité du même ordre que le taux d'inflation
prévu, ces dividendes augmenteraient assez vivement d'ici quelques
années, alors même que le changement du régime de taxation
des entreprises deviendra moins avantageux pour le trésor public.
Finalement, la réduction des impôts des particuliers se
poursuivra. Les mesures annoncées ce soir coûtent une centaine de
millions de dollars en 1981-1982, mais elles représentent un
allégement de plus de $550 millions au fardeau fiscal en 1982-1983. Et
ces mesures, comme je le disais précédemment, annoncent un
mouvement graduel pour faciliter la vie des familles au Québec.
Quant à la réforme de la fiscalité municipale, en
vigueur depuis plus d'un an, elle aura permis au gouvernement de
transférer plus de $400 millions aux municipalités et aux
communautés urbaines. On se souviendra que le gouvernement paie
maintenant toutes les taxes foncières sur ses propres immeubles, 80% des
taxes sur les immeubles destinés aux services de santé, sur les
universités et les CEGEP et 40% des taxes sur les écoles
primaires et secondaires. Il n'y aura pas de transfert additionnel en
1981-1982; la réforme est trop récente et ses avantages encore
trop palpables. En tout cas, les versements des "en-lieu" de taxes par le
gouvernement seront faits, à partir de l'an prochain, en deux
versements, à dates fixes. À partir de 1982-1983, on devrait
commencer à augmenter les pourcentages de façon que, quatre ans
plus tard, les taxes soient pleinement payées sur tous les immeubles des
réseaux. Plût au ciel que le gouvernement fédéral
fasse de même. Mais le freinage des ressources qu'il applique au
gouvernement du Québec, il le prolonge à l'égard des
municipalités.
Une voix: C'est vrai, cela.
M. Parizeau: Quoi qu'il en soit, voilà la stratégie
à l'égard des impôts, tel qu'on peut en projeter les effets
sur les quelques années qui viennent.
Quant aux dépenses, les compressions faites cette année
devraient permettre à la fois le maintien de la qualité des
services et le prolongement des politiques suivies par le gouvernement, sans
dépasser les bornes d'une augmentation raisonnable. Comme j'ai
déjà eu l'occasion de le dire, si on fait abstraction de la
hausse des contributions d'employeur au titre des services de santé, les
dépenses devraient augmenter de 12,8%, ce qui est tout à fait
raisonnable dans le contexte actuel. Encore faut-il être en mesure de
respecter un tel objectif. Il faut donc améliorer nettement les mesures
de contrôle. Déjà, on a noté que les dispositions
prises à l'égard des dépenses des commissions scolaires
par le ministère de l'Éducation ont produit d'excellents
résultats. Un tel succès ouvre la voie à d'autres mesures
du même genre ailleurs. Les budgets fermés ont un indiscutable
mérite. En outre, le Conseil du trésor a mis un an à
établir un mode de contrôle mensuel dés dépenses des
ministères. On pourra maintenant rectifier le tir tout au long de
l'année et non pas seulement à la fin, quand des
dépassements sont devenus inévitables.
De même, le ministère des Finances a amélioré
les techniques de projection mensuelle des opérations de caisse, qui
servira de double contrôle aux déboursés qui seront
scrutés par le Conseil du trésor. Dans ce sens, on peut penser
que l'encadrement du budget des dépenses permettra d'atteindre les
objectifs visés.
Voici alors comment se présentent les équilibres
financiers pour 1981-1982. Je dépose, en deux copies, le tableau sur
l'état des opérations financières 1981-1982. (Voir annexe
B).
Le déficit des opérations budgétaires à
$2,970,000,000 sera à peu près le même que celui qui a
été atteint en 1980-1981. Le surplus des opérations non
budgétaires, qui doit être déduit du déficit
budgétaire pour déterminer les besoins d'argent du gouvernement,
atteindra $980 millions, soit 55% de plus qu'en 1980-1981. Dans ces conditions,
les besoins financiers nets devraient être de $1,990,000,000, soit $355
millions de moins que cette année. Enfin, si l'on tient compte de
remboursements d'emprunts de $750 millions, les emprunts totaux devraient
être de $2,740,000,000, soit un niveau inférieur de près de
$550 millions à ceux de 1980-1981. . .
Compte tenu d'un taux d'inflation de 12%, de tels résultats
représenteront donc un fardeau nettement moins lourd que pour
l'année qui s'achève. Le financement des emprunts sera, comme
d'habitude, assuré pour une part par la Caisse de dépôt et
placement du Québec, dont j'attends environ $1,100,000,000, soit environ
45% des fonds
dont elle disposera. D'autre part, après l'énorme
émission d'obligations d'épargne de l'an dernier qui, je le
rappelle, a rapporté plus de $900 millions, il faudra cette année
en faire une autre au moins pour assurer les remboursements. On essaiera,
cependant, d'en limiter le montant à moins de $400 millions. Le reste
des emprunts nécessaires, soit environ $1,200,000,000, sera
emprunté sur les marchés financiers conventionnels. (21 h 50)
M. le Président, le Québec aura rarement connu une
conjugaison de circonstances difficiles comme celle qu'il vit aujourd'hui.
L'économie nord-américaine, à laquelle il appartient si
étroitement, traverse une phase de stagnation générale.
D'autre part, nous sommes aux prises avec une tentative
délibérée du gouvernement fédéral de nous
transférer une partie du déficit considérable qu'il a
tellement de difficulté à maintenir dans les bornes de
l'acceptable. Enfin, le coup de force constitutionnel d'Ottawa menace d'enlever
au Québec des droits aussi traditionnels que fondamentaux.
Et, pourtant, les Québécois peuvent être fiers de la
façon dont ils font face à ces difficultés. Sur le plan
économique, le remarquable dynamisme des entreprises, appuyé par
les politiques du gouvernement, permet au Québec de passer l'ère
de stagnation, que l'Amérique du Nord connaît, bien mieux que
d'autres régions.
Pour ce qui a trait aux finances publiques, sans renoncer aux
priorités et aux orientations fondamentales que nous nous sommes
fixées, nous sommes en mesure, maintenant et pour les quelques
années qui viennent, de ne pas avoir à accepter n'importe quel
règlement avec Ottawa, qui chercherait à nous mettre aux abois.
L'effort de redressement des finances publiques du Québec, lancé
depuis quatre ans par le présent gouvernement, se poursuit.
Sur le plan politique, le Québec, dix mois après le
référendum, non seulement n'est pas isolé, mais, face
à la crise constitutionnelle que nous connaissons, a réussi,
grâce à son gouvernement, à trouver les appuis
extérieurs qu'il lui fallait.
C'est donc dans une position de force que nous voulons aborder les
années qui viennent et que nous avons bon espoir d'y réussir,
jusqu'à ce que, à nouveau, après des luttes que nous avons
si souvent connues dans le passé et dont nous voyons qu'on veut encore
nous les imposer, nous puissions proposer à nos concitoyens, calmement,
et avec la confiance en soi qui vient des défis bien relevés, la
forme définitive de notre avenir national.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Parizeau: M. le Président, en vertu des coutumes, je
dois maintenant faire la motion suivante: je propose que cette
Chambre approuve la politique budgétaire du gouvernement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le chef de l'Opposition officielle.
Commentaires de l'Opposition M. Claude Ryan
M. Ryan: M. le Président, avant d'exercer le droit de
parole que me confèrent les règlements de cette Chambre, je
voudrais de nouveau signaler les graves incidents qui se sont produits en
rapport avec le budget dont nous venons d'entendre la présentation ce
soir. Les privilèges des membres de cette Chambre me semblent avoir
été violés de manière ouverte et expresse par la
publication, dans le journal de Montréal et de Québec, ce matin,
sous la signature de M. Normand Girard, d'un article dans lequel on indiquait,
avec beaucoup de précision, la plupart des mesures budgétaires
qui ont été confirmées par le ministre des Finances ce
soir.
Je pourrais donner des exemples, je pense que ça vaut la peine
que je les donne, parce que autrement, le public ne sera pas au courant de ce
que nous voulons dire. M. Girard annonçait ce matin, en toutes lettres,
que le ministre des Finances, dans son discours du budget, accorderait un
crédit d'impôt gradué pour tous les enfants de moins de six
ans, qu'il abolirait la taxe de vente de 8% sur les cuisinières et les
réfrigérateurs, qu'il augmenterait pour la énième
fois le prix de la cartouche de cigarettes, qu'il annoncerait un déficit
qui serait tout près de $3 milliards. Franchement, le budget
était presque complètement présenté dans l'article
de ce matin. Je ne veux pas insinuer que je voudrais blâmer le
journaliste qui a eu l'habileté de se procurer ces renseignements, mais
il me semble que le ministre des Finances a gravement failli au devoir de
discrétion qui lui incombe dans de pareilles circonstances. Dans tout
autre Parlement que celui-ci, un événement aussi grave de
conséquences possibles aurait été un sujet
d'inquiétude profonde. J'ai constaté que du côté
gouvernemental, on prend ces événements à la
légère, comme on le fait trop souvent quand on soulève les
privilèges de cette Chambre.
Je veux porter à votre attention, avec toute la gravité
qui s'impose, le caractère tout à fait inusité de cette
fuite de renseignements qui indique que le ministre des Finances a très
peu de contrôle sur les documents qui circulent dans son bureau.
Si on n'était pas si proche d'une élection, on attendrait
que le premier
ministre nous fasse peut-être part des mesures qu'il entend
prendre devant de tels développements, mais je pense que cela ne
servirait à rien à ce stade tardif. Il est bon que nos
concitoyens sachent que nous avons assez de respect pour les privilèges
des membres de cette Chambre pour ne pas être scandalisés de ce
qui s'est produit.
Je voudrais maintenant, dans les quelques minutes qui me sont
accordées par le règlement, communiquer quelques impressions sur
le budget que nous venons d'entendre. J'ai remarqué que le ministre des
Finances n'avait pas cette fois-ci l'assurance entière et altière
qu'il avait coutume de professer dans ses discours du budget antérieurs.
Cette espèce de modestie retenue jusque vers les dernières pages
en tout cas qu'il a manifestée nous le rend plus sympathique, même
s'il demeure le principal artisan des maux avec lesquels il se débat
aujourd'hui. Nous avons entendu nos amis du gouvernement applaudir à
plusieurs reprises vers la fin du discours, mais avant d'en venir à
l'examen des mesures qui nous ont été annoncées, je pense
qu'un examen de la crédibilité du témoin s'impose à
la lumière de sa performance passée.
Le ministre, à la veille du présent exercice,
s'était engagé à comprimer les dépenses, à
stimuler l'économie, à continuer de chercher à assainir
les finances de l'État. Or, sur chaque front, il a lamentablement failli
à la tâche. Les dépenses ont excédé les
prévisions qu'il nous avait soumises en mars dernier par plus de $450
millions, et les revenus qu'il avait anticipés ont été
inférieurs de $150 millions à ses prédictions, ce qui
explique que le déficit semble devoir être supérieur pour
le présent exercice de 30% aux prévisions du ministre. C'est
assez conforme à la moyenne qu'il a maintenue au cours des quatre
dernières années. Jamais on n'a vu un ministre des Finances
présenter des prévisions aussi éloignées de la
réalité. Contrairement à ce qu'a soutenu le ministre des
Finances, il faut dire que le Québec continue de financer une part
beaucoup trop importante de ses dépenses courantes à même
l'endettement. Pour le présent et pour l'exercice à venir, la
part des dépenses courantes qui sera financée à même
l'endettement sera de l'ordre de $2 milliards à $2 milliards et demi,
quoi qu'en prétende le ministre. Je souligne que nous avions dit l'an
dernier, le soir du budget, que le déficit de l'exercice, mais du
côté gouvernemental on ne nous a pas crus, évidemment,
serait de $3 milliards.
Une voix: Prévu à $2,300,000,000.
M. Ryan: Le ministre avait prévu un déficit de
$2,300,000,000 et le déficit est de l'ordre de $3 milliards. À
toutes fins utiles, c'est environ $2,900,000,000. Le ministre a eu de la
pudeur. Il n'a pas voulu employer le chiffre de $3 milliards, mais c'est ce
chiffre qu'il faut retenir.
Le ministre avait promis de stimuler l'économie. Tous les indices
qu'on peut invoquer pour examiner la performance de l'économie indiquent
que là aussi le ministre s'était dangereusement
trompé.
L'augmentation du produit intérieur brut avait été
fixé autour de 1,5%, elle a été de cinq fois
inférieure, c'est-à-dire de 0,3%. (22 heures)
Le chômage a monté de 9,6% à 9,9%. Il a
augmenté de 16,000. Il est à tout près de 300,000
actuellement. On donne le chiffre de 292,000, mais c'est très
près de 300,000.
Si on regarde le mouvement des investissements, surtout dans le secteur
privé, on constate que le Québec a continué de
traîner la patte dans ce domaine, comme il l'a fait d'ailleurs depuis les
quatre années et demie que le gouvernement péquiste est au
pouvoir.
La dette publique aura augmenté de $3 milliards au cours du
dernier exercice. Je n'insiste pas là-dessus, parce que j'y reviendrai
à propos du budget de l'exercice à venir.
J'entendais tantôt nos amis du gouvernement applaudir, quand le
ministre des Finances s'est vanté d'entrevoir des besoins financiers
pour le prochain exercice de l'ordre d'à peu près $2 milliards.
L'an dernier, il nous avait annoncé, avec son assurance d'autrefois, des
besoins financiers de l'ordre de $1,770,000,000. Or, les vrais besoins
financiers ont été de $2,345,000,000, c'est-à-dire une
légère différence de 32,5%. Toute personne, tout chef
d'entreprise, M. le Président, qui conduirait son entreprise avec de
telles marges d'écart serait en liquidation depuis longtemps.
Le ministre des Finances avait entrevu des emprunts de l'ordre de
$2,220,000,000. Or, les emprunts ont été en fait de
$3,285,000,000 bien sonnés; $1 milliard d'erreur, ce n'est pas
grand-chose pour nos amis d'en face. Ils applaudissent autant les
déficits de $3 milliards.
Quand on pense maintenant à l'exercice à venir, il est
évident que le gouvernement, s'il allait rester en place, continuerait
à entraîner le Québec sur la pente glissante où il
l'a engagé dès la deuxième année du gouvernement
péquiste. La première année, je l'ai dit à maintes
reprises dans cette Chambre, la performance du ministre avait été
très respectable, mais depuis ce temps-là, les déficits
n'ont cessé de s'accroître et l'endettement du Québec n'a
cessé de s'aggraver. Il prévoit pour le prochain exercice un
déficit de $2,970,000,000. Encore la même pudeur! Ne mentionnons
pas le chiffre 3: $2,970,000,000. Je lui prédis tout de suite que, si le
gouvernement actuel reste au pouvoir, le déficit réel sera de
$3,500,000,000 à $4 milliards.
Ce que le ministre n'a pas indiqué dans son discours, c'est le
coût de la dette publique qui était de $500,000,000 par
année, quand il a pris la charge des finances publiques, qu'il
s'était engagé à assainir. Ce sont seulement les
intérêts qu'il faut payer pour financer les emprunts qu'on devra
rembourser plus tard. Pour l'exercice 1981-1982, le coût de la dette sera
de $1,500,000,000, c'est-à-dire trois fois plus, trois fois plus cher
que quand M. le ministre des Finances a pris la charge des finances publiques
avec l'engagement solennel de les assainir. C'est assez formidable comme
résultat. Un critère qu'on emploie très souvent pour
mesurer l'importance d'un déficit, c'est le rapport entre le
déficit et le montant total des dépenses. En 1976-1977,
dernière année de l'administration précédente et la
plus mauvaise au point de vue financier - le ministre le souligne souvent, mais
il oublie de parler des six années qui avaient
précédé celle-là - le rapport entre le
déficit et les dépenses totales était de 9,3%. En
1981-1982, le rapport entre le déficit et les . dépenses totales
sera de 16% à 17%.
Au point de vue de la fiscalité - on a applaudi beaucoup
tantôt...
Une voix: Ça applaudit moins fort.
M. Ryan: Oui, ça applaudit moins fort, M. le
Président. C'est vrai et je défie qui que ce soit de contredire
ces chiffres. Au point de vue de la fiscalité, on a applaudi de l'autre
côté de manière compréhensible à certaines
mesures ponctuelles annoncées par le ministre et qui apporteront
certains allégements ici ou là. Mais ce qu'on n'a pas compris,
apparemment, c'est que la ponction fiscale globale exercée par le
gouvernement pour le prochain exercice va continuer d'être très
élevée. Si j'ai bien lu les chiffres qui sont dans le document du
ministre, l'augmentation des revenus autonomes, pour le prochain exercice, sera
de l'ordre de 19%. Le ministre aura beau donner une petite allocation ici et
couper ceci, s'il va le chercher dans la poche du même contribuable par
d'autres moyens, s'il va le chercher en augmentant les charges
d'Hydro-Québec, les charges de la Commission de santé et de
sécurité du travail ou ce qu'on voudra, ça revient au
même. Ce qu'il est important de souligner ce soir, c'est que le ministre
ne dit pas la vérité quand il nous fait croire que nous avons des
charges fiscales et parafiscales moins lourdes aujourd'hui qu'autrefois. Le
fardeau réel et additionnel qu'il faut envisager pour le prochain
exercice, il est de l'ordre de 19%.
En ce qui concerne l'impôt sur le revenu des particuliers,
l'augmentation entrevue des revenus que le gouvernement compte tirer de cette
source, si je compte bien, est de l'ordre de 14%. On peut bien couper ici ou
couper là, mais l'augmentation globale est de l'ordre de 14%, et c'est
de ça qu'il faut se souvenir au bout de la ligne.
Je reçois avec beaucoup d'intérêt le projet
qu'annonce le ministre de verser des allocations spéciales aux
mères de famille qui ont des enfants en bas âge afin de les aider
à procurer des services de garde à ces enfants au cas où
la mère travaille ou afin qu'elle puisse utiliser ces sommes à
bon escient si elle reste à la maison. Le principe de non-discrimination
qu'invoque le ministre est un principe qui est très intéressant.
Je souligne qu'on touche à peine à une fraction du
problème. Je rappelle au ministre, au cas où il l'aurait
oublié, que les charges qu'une famille doit encourir pour ses enfants
qui sont âgés de six à quinze ans sont encore beaucoup plus
lourdes que celles qu'elle doit encourir pour des enfants qui sont
âgés de zéro à six ans. Par conséquent, avec
ceci, on touche à la frange du problème. On aborde très
peu de choses. Je le dis pour qu'on ne... Pardon?
M. Chevrette: On peut augmenter les déficits.
M. Ryan: Non, vous savez ce que sera la ponction globale, je n'ai
pas besoin d'insister.
Maintenant, l'indexation de l'impôt. Je tiens à souligner
qu'elle demeure bien inférieure au Québec à ce qu'elle est
dans les autres provinces du Canada. Ici, on indexe les exemptions à un
taux qui est inférieur au taux véritable de l'inflation et
seulement pour l'exercice 1980-1981. Nous estimons, de ce côté de
la Chambre, que les contribuables québécois auront payé
$125,000,000 de plus à cause de l'indexation incomplète,
insuffisante et je dirais arbitraire qui est accordée par le ministre
des Finances. Et ce même jeu va continuer au cours du prochain
exercice.
Le ministre introduit une philosophie nouvelle en matière de
taxation des sociétés, des compagnies. Je souligne que les
principes qu'invoque le ministre sont des principes qui doivent être
scrutés de très près. Pour le prochain exercice, il va
faire beaucoup d'argent avec cela. Il nous annonce un ajustement des
impôts sur les profits des sociétés pour le début de
l'année 1982, si j'ai bien compris. En attendant, il va aller chercher
pas mal d'argent de ce côté-là, mais je le préviens
que, dans la mesure où la taxation à même la feuille de
paie prendra le pas sur la taxation à même les profits, c'est une
taxation sur le travail qui est imposée et les conséquences de
cette forme de taxation sur le mouvement de l'emploi risquent d'être
considérables. Et je tiens à le souligner avec force. Si on
allait généraliser cette philosophie, je suis loin
d'être sûr que ce serait bon pour le dynamisme de
l'économie.
La taxation d'Hydro-Québec, c'est une manière indirecte,
à peine voilée, M. le Président, d'augmenter les tarifs
d'Hydro-Québec. Il ne faut pas être naïf à ce
point-là. On a déjà enduré, sous le gouvernement
actuel, des augmentations de tarifs de plus de 80%, avec celles qui viennent
d'intervenir au début de l'année. Le ministre nous annonce, en
termes à peine voilés, qu'on s'en va rapidement vers d'autres
augmentations de taxes, M. le Président.
Je termine. Le déficit pour 1981-1982 sera de plus de $3
milliards, très probablement entre $3,500,000,000 et $4,000,000,000, ce
qui veut dire que pour les cinq années d'administration péquiste
nous aurons eu un déficit annuel moyen de $2 milliards, alors que le
ministre des Finances se scandalisait, il y a quelques années à
peine, d'un déficit de l'ordre de $1 milliard qu'allait encourir le
gouvernement précédent. La dette du Québec, sous le
gouvernement actuel, aura passé, dans l'espace de cinq ans, de $5
milliards à $15 milliards au 31 mars 1982, c'est-à-dire trois
fois plus. Elle aura augmenté de trois fois dans l'espace de cinq ans,
c'est-à-dire beaucoup plus que pendant toutes les années qui
s'étaient écoulées depuis le début de la
Confédération jusqu'à l'arrivée du gouvernement
actuel au pouvoir.
Le coût de la dette. Ce n'est pas mauvais qu'on sache exactement
ce que c'est. La dette a augmenté, sous votre administration, messieurs,
de $7000 par famille de quatre personnes au cours des cinq dernières
années. Et le coût de la dette sera, cette année, de $1000
par famille de quatre personnes; seulement le coût de la dette, $1000 par
famille de quatre personnes. Vous pouvez bien dire que vous réduisez le
fardeau fiscal. C'est une immense fumisterie! (22 h 10)
Nous notons enfin, M. le Président, que l'un des passages les
plus applaudis du discours du ministre des Finances fut celui où il a
confirmé la volonté souverainiste et séparatiste du
gouvernement péquiste. C'est là qu'on l'a vu. On peut lui
demander bien loyalement, aussi longtemps que nous aurons un gouvernement imbu
de cette mentalité souverainiste et séparatiste, comment
envisager qu'il puisse faire des négociations dans un esprit de loyale
et franche collaboration avec le reste du pays.
Le Président: M. le député de
Bellechasse.
M. Bertrand Goulet
M. Goulet: Merci, M. le Président. Comme tous les
Québécois, j'ai entendu le ministre des Finances nous livrer le
sixième - j'ai bien dit le sixième - discours de sa
carrière de ministre des Finances. Nous avions eu droit - vous vous le
rappelez - en 1973, au budget de l'an I et, ce soir, le ministre en a
profité pour nous livrer le budget que je qualifierais de fin de
pouvoir.
Le premier budget a été basé sur des
hypothèses. Ce premier budget, celui de l'an I, a été le
seul qu'on dit qui fut équilibré. Or, celui de ce soir est
semblable aux autres qui se sont concrétisés; il a, le budget de
ce soir, comme tous les autres, la désagréable manie de battre le
record des déficits. D'année en année, ce déficit
s'accentue. Le seul budget qui n'ait pas été déficitaire,
c'est le budget qui, en réalité, n'a jamais été
déposé officiellement, qui n'a donc jamais été
administré par le ministre des Finances. C'est le fameux budget de l'an
I, un budget purement hypothétique. Mais, quand il s'agit de la
réalité, M. le Président, c'est tout autre chose.
Ce budget décevra la quasi-totalité des
Québécois, du seul fait qu'il ne répond pas aux
interrogations et aux réelles attentes des Québécois. Nous
étions en droit de nous attendre à des mesures concrètes
qui s'attaquent aux problèmes majeurs de notre société
québécoise contemporaine. Quels sont-ils, ces problèmes?
L'augmentation constante du taux de chômage. Que retrouve-t-on dans ce
budget pour contrer l'augmentation de ce fléau? Rien, M. le
Président.
On devait s'attendre à l'augmentation des dépenses en
capital, c'est-à-dire des dépenses créatrices d'emplois,
plutôt que de celles de nature sociale. C'est exactement le contraire qui
se produit. Que retrouve-t-on dans ce budget qui aiderait à relancer
l'économie, et cela à brève échéance, M. le
Président? Rien, moins que rien. Augmente-t-on le pouvoir d'achat des
Québécois? Non, au contraire. Pour ce qui est de l'année
en cours, on aura même de la difficulté à maintenir ce
pouvoir d'achat.
On nous avait pourtant promis une réduction d'impôt. Que se
passe-t-il, si on se fie aux chiffres inscrits dans ce budget? Rien; au
contraire, au seul chapitre de l'impôt sur le revenu et au chapitre de la
taxe à la consommation, presque $2 milliards de plus comme revenus
autonomes, revenus gouvernementaux.
Vous voulez un exemple, M. le Président? Prenons un contribuable
moyen qui, en 1981, aurait eu un revenu net de $15,000; il aurait payé
tout près de $1215 d'impôt, soit, selon mes calculs, 8,1% de son
revenu. Ce même contribuable, en 1982, pour conserver le même
pouvoir d'achat, donc, ajoutant 10%, ce qui est à peu près le
taux de l'inflation - je dis bien pour maintenir son pouvoir d'achat - si le
revenu net de ce contribuable se situe à $16,500, il paiera environ
$1370 d'impôt, soit 8,3% de son revenu. Jugez par vous-même, M.
le
Président, s'il y a là matière à diminution.
Moi, je dis qu'il y a augmentation d'impôt.
Tout le monde parle d'équilibre budgétaire de ce temps-ci
et le budget de ce soir nous confirme un déficit prévu, un
déficit record prévu de $3 milliards. Si l'on tient compte du
coefficient d'erreur moyen des quatre dernières années
administrées par ce gouvernement, ce coefficient d'erreur se situe
à plus de 30%, ce qui veut dire concrètement que cette
année, si ce pourcentage se maintient, nous devrions atteindre le cap
record de $3,800,000,000 à $4,000,000,000 de déficit. Et dire
que, tout à l'heure, on a applaudi à de telles mesures.
L'an passé, on se le rappellera, le ministre des Finances avait
prévu un déficit de $2,300,000,000 . Et le soir même,
j'avais l'occasion justement de parler sur ce budget - et c'est
vérifiable au journal des Débats -j'avais prédit un
déficit de $2,800,000,000. Ce soir, il affirme que le chiffre
réel est bien de $2,970,000,000.
M. le Président, nous avions raison l'an passé et, si le
passé est garant de l'avenir, nous aurons encore raison cette
année; ce déficit sera de l'ordre de $4 milliards cette
année. C'est scandaleux! Nous sommes déjà, nous, les
Québécois, les plus taxés au Canada, nous continuerons
d'être les plus taxés au Canada. Ce qui est pire, nous sommes et
nous serons malheureusement les plus endettés des Canadiens. Et dire
que, tout à l'heure, on a applaudi à ça. Moi, je me
demande si c'est rassurant d'entendre des applaudissements à la suite de
l'annonce d'un tel déficit.
En effet, avec ce gouvernement, la dette publique est passée de
$3 milliards, qu'elle était en 1976, à $15 milliards à la
fin de cette année; 15,000 millions de dollars de déficit, de
dette, M. le Président.
Le premier ministre a clairement dit qu'il s'engageait à
maintenir le pouvoir d'achat des Québécois. Comment s'y prend-il
pour maintenir ce pouvoir d'achat? Voilà ce qui se passe; il me fait
penser à un père de famille qui annonce à son
épouse et à ses enfants qu'ils peuvent dépenser tant
qu'ils le veulent, sans égard au revenu. Le ministre des Finances nous
fait un peu penser à cela ce soir. Cependant, à l'épouse
qui demanderait: As-tu gagné le gros lot? le père de famille
répondrait non; as-tu eu une augmentation de salaire? le père de
famille répondrait non. Alors, que s'est-il passé? M. le
Président, la réponse est bien simple: notre homme a
rencontré, durant la journée, son gérant de compagnie de
finance et s'est fait consentir un cinquième prêt sur
hypothèque, prêt qui servira à rembourser les
intérêts de la première hypothèque et aussi, bien
sûr, à payer sa commande d'épicerie; un prêt sur
hypothèque qui servirait à payer une commande d'épicerie.
Voilà la logique de ce gouvernement et dire que, tout à l'heure,
j'ai entendu des applaudissements à l'annonce de telles mesures; c'est
vraiment décourageant, M. le Président.
La dette accumulée du gouvernement -et ajoutons celle du secteur
public, parce que les Québécois paient également pour la
dette du secteur public - coûtera cette année - tenez-vous bien -
entre $5 millions et $7 millions d'intérêt par jour, entre $5
millions et $7 millions d'intérêt par jour que les
Québécois devront payer cette année pour la dette
publique. Est-ce possible, M. le Président? Bien oui, c'est possible, et
tout à l'heure j'ai entendu des applaudissements à l'annonce de
telles mesures.
On se rappellera, M. le Président, que ce gouvernement a
vidé la Caisse de dépôt pour financer une partie de son
administration et on l'a dénoncé l'année dernière,
ainsi que les années précédentes. Ce soir,
malheureusement, on constate qu'il n'hésite pas un instant à agir
de la même façon avec Hydro-Québec. Il a vidé la
Caisse de dépôt et là il va vider les coffres
d'Hydro-Québec; il se sert de ça pour payer ses déficits.
M. le Président, croyez-le ou non - vous étiez dans cette Chambre
tout à l'heure - j'ai entendu des applaudissements à l'annonce de
telles mesures.
Nous aurions aimé que le ministre des Finances nous propose des
mesures concrètes pour, par exemple, baisser le taux de chômage.
Il veut un exemple? Je m'attendais, ce soir, à ce qu'il propose une
véritable politique qui favoriserait l'accessibilité à la
propriété, telle que préconisée par l'Union
Nationale. L'année que nous commençons sera catastrophique au
chapitre de la construction et on dit: Quand la construction ne marche pas, il
n'y a rien qui marche. Dorénavant, il sera quasi impossible de comparer
également le taux d'imposition des compagnies, des
sociétés du Québec avec ceux des autres provinces,
dû au seul fait que dorénavant le ministre ne peut plus supporter
la comparaison. Le ministre ne croit tellement plus que l'entreprise
québécoise puisse réaliser des profits qu'il a
décidé de taxer leurs dépenses et leurs emprunts
plutôt que de taxer leurs revenus.
Des voix: Ah!
M. Goulet: S'il fallait, M. le Président, que l'on
décide de taxer les emprunts et les déficits du gouvernement,
nous aurions droit à une deuxième catastrophe. Le ministre des
Finances agit de cette façon avec les compagnies.
En conclusion, M. le Président, nous constatons malheureusement
que ce budget ne répond pas, mais pas du tout aux préoccupations
du monde ordinaire. Au contraire, il n'aura comme effet que d'empirer la
situation économique déjà très
mal en point au Québec. À ce chapitre, on devait
s'attendre à au moins un pansement, mais au contraire, M. le
Président, on agrandit et on infecte davantage la plaie. C'est ce qu'on
nous annonce ce soir dans le discours du budget.
Voilà, M. le Président, une analyse rapide de ce budget
que je qualifie de très décevant. Dix minutes, vous en
conviendrez avec moi, c'est très peu, mais dès demain, si
l'occasion nous en est donnée, nous ferons part d'une évaluation
encore plus élaborée de ce budget et nous démontrerons aux
Québécois qu'il n'y a aucune raison, je dis bien absolument
aucune raison d'applaudir un tel budget.
Voilà, M. le Président, mes commentaires pour ce soir et
je me charge de revenir demain pour faire part aux Québécois
d'autres interrogations à l'intérieur de ce budget.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.
M. Ryan: M. le Président, je demande l'ajournement du
débat.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
M. Charron: Oui, M. le Président. Le Président:
Adopté.
Une voix: Le critique financier du Parti libéral...
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Charron: Je propose l'ajournement de l'Assemblée
à demain après-midi, 15 heures.
Le Président: Les travaux de l'Assemblée sont
ajournés à demain, 15 heures.
(Fin de la séance à 22 h 21)