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(Dix heures quinze minutes)
Le Président: A l'ordre, mesdames et messieurs!
Un moment de recueillement.
La séance est suspendue pour quelques instants.
À l'ordre, s'il vous plaît!
Mesdames et messieurs, veuillez vous lever, le lieutenant-gouverneur va
maintenant faire son entrée.
Allocution d'ouverture
Le lieutenant-gouverneur: Mesdames et messieurs de
l'Assemblée nationale, vous avez été réunis
d'urgence dans l'unique dessein d'adopter des mesures nécessaires pour
assurer que les négociations entre les commissions scolaires et les
syndicats d'enseignants qui se déroulent présentement à la
suite de l'entente nationale conclue en mai dernier ne viennent pas mettre en
danger l'année scolaire de milliers d'élèves
québécois. Cette cinquième session de la 31e
Législature que j'ouvre aujourd'hui sera donc, je l'espère,
courte et profitable à l'ensemble de nos concitoyens, notamment à
ceux qui ont des enfants à l'école.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
Je voudrais maintenant donner lecture de quelques avis qui me sont
parvenus depuis la prorogation de la Chambre.
M. Serge Fontaine, leader de l'Union Nationale "Québec, le
7 juillet 1980. M. le Président, le député de Richmond, M.
Yvon Brochu, m'ayant fait part de sa décision de démissionner de
son poste de leader parlementaire à compter du 1er juillet 1980, je me
vois dans l'obligation de désigner un remplaçant. C'est le
député de Nicolet-Yamaska, Me Serge Fontaine, qui agira
dorénavant comme leader parlementaire de l'Union Nationale du
Québec. J'inclus, ci-joint, copie de la lettre de démission de M.
Brochu. Vous remerciant de votre collaboration, je vous prie d'accepter, M. le
Président, l'expression de mes sentiments distingués." Et c'est
signé du chef de l'Union Nationale, Michel Le Moignan,
député de Gaspé.
M. Jean Alfred, député
indépendant
Un autre message: "Québec, le 29 août 1980. M. le
Président, je vous avise que désormais j'entends siéger
comme député indépendant à l'Assemblée
nationale." Et c'est signé du député de Papineau, Jean
Alfred.
Des voix: Ah!
M. Camil Samson, député
libéral
Le Président: Et maintenant: "Québec, le 15 octobre
1980. M. le Président, veuillez prendre avis que dorénavant je
siégerai comme député du Parti libéral du
Québec.
Des voix: Ah!
Le Président: "Convaincu que vous en prendrez acte, je
vous prie de croire, M. le Président, à l'expression de mes
distingués sentiments." Et c'est signé du député de
Rouyn-Noranda, M. Camil Samson.
Des voix: Bravo!
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Une voix: II manque quelque chose. (10h20)
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît! En
conséquence de ces changements, je dépose le nouveau diagramme de
l'Assemblée nationale.
M. le leader parlementaire du gouvernement.
Ordre des travaux
M. Charron: M. le Président, je sais qu'en vertu du
règlement, à ce moment-ci, vous devriez reconnaître le
premier ministre pour le message inaugural. Je voudrais, si l'Assemblée
y consent, faire la proposition suivante: Que le premier ministre soit
dispensé de la lecture du message inaugural; qu'il y ait plutôt
immédiatement une période de questions orales de 45 minutes et
que, par la suite, vous me reconnaissiez afin que je puisse présenter la
motion que nous a annoncée le lieutenant-gouverneur dans son message. Je
fais cette proposition à l'Assemblée, M. le Président,
à la suite des consultations menées auprès des partis
d'Opposition.
Le Président: M. le chef de l'Opposition officielle.
Auparavant, est-ce qu'il y a consentement à la motion
présentée par M. le leader parlementaire du gouvernement?
Des voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement et, en
conséquence, j'en fais un ordre de la Chambre pour qu'il puisse y avoir
une période de questions.
Pour la période de questions, M. le chef de l'Opposition
officielle.
QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS La
situation constitutionnelle
M. Ryan: M. le Président, nous nous réunissons,
aujurd'hui, dans une atmosphère plutôt artificielle. Normalement,
si le gouvernement
avait suivi la tradition solidement établie au Québec et
au Canada, nous serions présentement engagés dans une
période électorale qui permettrait au public, après quatre
ans de gouvernement péquiste, de décider lequel des partis en
présence est le plus apte à diriger le Québec au cours des
prochaines années. Le gouvernement, invoquant la situation
spéciale créée par les projets du gouvernement
fédéral en matière constitutionnelle, a
décidé de s'accrocher au pouvoir et - pour reprendre une
expression ancienne du premier ministre lui-même - de vieillir au pouvoir
plutôt que de courir le risque de mourir en affrontant les
électeurs. Je voudrais demander au premier ministre, ce matin - il me
semble que nous devons profiter de cette brève session que nous aurons
aujourd'hui pour au moins faire le point sur les événements des
dernières semaines et sur les événements à venir -
d'abord, si nous l'avons bien compris quand il a dit que la situation
constitutionnelle dont prend prétexte le gouvernement pour
différer des élections qui auraient dû avoir lieu cet
automne est vraiment la seule raison. Dans l'hypothèse affirmative, je
voudrais que le premier ministre nous résume le point où en sont
les démarches du gouvernement, à trois niveaux différents.
D'abord, auprès du gouvernement fédéral, je voudrais qu'il
nous dise s'il y a eu des communications avec le gouvernement
fédéral, s'il y a eu de la correspondance échangée,
si le gouvernement a fait des représentations au gouvernement
fédéral depuis que la conférence constitutionnelle du mois
de septembre s'est terminée sur un échec lamentable.
Deuxièmement, je voudrais savoir où l'on en est au point
de vue de la préparation des démarches qui doivent être
faites auprès des tribunaux - et dont parlaient les journaux de ce matin
- à la suite d'une rencontre tenue hier à Winnipeg.
Troisièmement, je voudrais qu'on nous dise où en sont les
démarches qui seraient en cours au niveau du représentant du
Québec à Londres.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, c'est
évident que j'avais le choix, il y a quelques jours, d'entrer en
campagne selon une tradition ou de retarder. Je pense qu'on était
relativement prêt, de part et d'autre - enfin, c'est l'impression que
j'ai eue - pour entrer en campagne, mais puisque la décision me
revenait, j'ai considéré que devant ce qui est incontestablement
un coup de force d'Ottawa - avec la guillotine d'hier soir, on a même
l'impression que c'est quasiment comme un coup d'Etat comme
échéancier follement accéléré - j'ai eu
à prendre la responsabilité de décider et j'ai cru - je
crois encore - profondément que cela n'aurait pas été
responsable d'avoir une vacance parlementaire pendant un mois ou un mois et
demi avec ce qui nous pend au bout du nez possiblement vers le 8 ou le 9
décembre à Ottawa et de se ramasser à peu près vers
le même moment quand le mal pourra voir été fait. Je crois
qu'il faut faire tout ce qu'on peut pour bloquer les chambardements
unilatéraux de la constitution qui sont, je crois - ce n'est pas moi qui
l'ai dit le premier - une trahison de ce qu'on avait le droit d'espérer,
de ce à quoi on était en droit de s'attendre après la
campagne référendaire et les promesses qui avaient
été faites. Il ne s'agit pas de s'accrocher au pouvoir. Je peux
assurer le chef de l'Opposition et aussi nos concitoyens que cela ne durera
pas...
Une voix: Ah!
M. Lévesque (Taillon): ...plus longtemps qu'il ne faut
parce que vieillir au pouvoir, comme l'a dit le député
d'Argenteuil, on commence à savoir ce que c'est et personne ne va
s'accrocher. Démocratiquement, c'est normal qu'il y ait des
élections et qu'à un moment donné on se dispute le
pouvoir, chacun pensant qu'il peut mieux l'exercer. Mais une chose est
certaine, c'est qu'il n'est pas question de s'y accrocher au-delà de ce
qui nous paraît... Je pense que certaines réactions du chef de
l'Opposition...
Une voix: La peur.
M. Lévesque (Taillon): ...entre autres, donnent
l'impression que derrière cette façade qui est normale, je pense
bien dans les circonstances, lui aussi considère - enfin, devrait
considérer, je ne veux pas parler pour lui - qu'on est dans une
situation qui peut être extrêmement dangereuse pour le
Québec si on ne contre pas certains efforts qui sont faits pour
chambarder le régime au lieu de le réformer et de le
renouveler.
Maintenant, pour ce qui est des questions spécifiques du chef de
l'Opposition, auprès du fédéral, autant que je sache,
depuis soit la fin de la semaine du 8 au 12 septembre ou soit encore depuis le
2 octobre ou le 6, si vous voulez, au moment où le projet de
chambardement a été présenté en public et, ensuite,
à la Chambre des communes, la réponse, correspondance,
échange, etc., en ce qui nous concerne, c'est zéro. Je crois que
c'est la même chose d'ailleurs dans la plupart des provinces, qui forment
la majorité, à la fois une majorité des provinces et une
majorité de la population du Canada, qui s'opposent à la
démarche du gouvernement fédéral, et tout
spécialement du premier ministre fédéral. Et autant que
nous sachions, les seuls "bargainings", les seules tractations qui se soient
déroulées depuis le début d'octobre ont été
avec - je pense que c'est bien connu - le NPD, pour voir s'il n'y avait pas
moyen d'ajuster au moins un appui dans l'Ouest, en passant par M. Blakeney, qui
n'a pas l'air d'être absolument convaincu jusqu'à nouvel ordre, et
forcément aussi, mais là, je le dis de "confiance", entre
guillemets, il a dû y en avoir avec l'Ontario, pour des raisons qu'on
connaît. Mais, autant que nous sachions, du côté des
provinces qui s'opposent, c'est une espèce de train express qui
prétend s'en aller, guillotine comprise, vers les décisions
choisies par le gouvernement fédéral.
Pour ce qui est des tribunaux, je ne peux pas ajouter. Je n'ai pas eu de
rapport parce que j'étais trop pris jusqu'à assez tard hier - je
pense qu'on l'imagine assez facilement - par la question qui, elle aussi, est
d'urgence, qui nous réunit aujourd'hui, c'est-à-dire la question
des deux commissions scolaires en particulier qui, depuis des semaines, se
trouvent à mettre en danger l'année scolaire des enfants. Je n'ai
pas eu de rapport de mon collègue, le ministre de la Justice, seulement
je sais, comme d'ailleurs cela a été rapporté de Winnipeg,
que des six provinces
qui s'opposent, et qui ont décidé de s'opposer devant les
tribunaux à ce qui se passe à Ottawa, il y en a trois - je sais
que nous, nous avions fait la préparation préliminaire de cette
présence devant les tribunaux - dont le Québec et aussi le
Manitoba et Terre-Neuve, qui prendraient l'initiative avec l'appui des trois
autres.
Quant à Londres - il n'y a pas de secret là-dedans, mais
je n'ai pas de rapport très précis dans l'immédiat - il y
a une décision qui avait été prise à Toronto quand
on s'est réuni, il y a quelques jours, et c'était qu'on mettait
en commun tout ce qu'on pouvait avoir, soit de contacts ou d'appuis potentiels
du côté du Parlement britannique. Cela a dû être fait
hier à Winnipeg, mais là non plus je n'ai pas eu de rapport,
alors je ne peux pas aller plus loin que ce que je pense que tout le monde sait
déjà. On a fait notre maximum, avec la délégation
à Londres, pour établir des contacts, y compris du
côté des constitutionnalistes, des parlementaires, etc., et voir
ce que cela peut donner.
Le Président: M. le chef de l'Opposition. (10 h 30)
M. Ryan: Si je comprends bien, M. le Président, le premier
ministre et son gouvernement, depuis à peu près trois ou quatre
semaines que ce projet du gouvernement fédéral est devenu public,
il n'a même pas pris le téléphone pour appeler son
homologue fédéral, il n'a même pas pris sa plume pour lui
adresser des représentations officielles au nom du gouvernement du
Québec, il n'a même pas cherché à établir des
contacts au moins de manière officieuse ou indirecte. Il y a, quand
même, 74 députés du Québec, il y a, quand
même, un grand nombre de ministres du Québec qui siègent
dans le cabinet fédéral. On nous dit qu'on est en face de la
situation la plus grave qui ait existé sur le plan constitutionnel
depuis très longtemps. On nous dit qu'on s'accroche au pouvoir parce
qu'il y a des choses très importantes à faire. On écoute
le rapport qui nous est donné à l'instant et on s'aperçoit
qu'il n'y a pratiquement rien eu de fait depuis trois semaines ou un mois.
M. Levesque (Bonaventure): C'est cela.
M. Ryan: Est-ce que c'est cela que vous entendez continuer
à faire au cours des prochaines semaines?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): Je crois, M. le Président,
que l'interlocuteur le plus indiqué du gouvernement
fédéral, en particulier du premier ministre
fédéral, dans les circonstances actuelles, ce n'est pas celui qui
vous parle et ce n'est peut-être pas, non plus, le chef de l'Opposition.
De toute façon, jusqu'à nouvel ordre...
M. Pagé: C'est qui? Qu'est-ce que vous faites, vous?
M. Lévesque (Taillon): C'est M. Davis, de l'Ontario, avec
qui, je crois, le chef de l'Opposition a des relations plus intimes que moi, le
long du chemin. C'est probablement aussi maintenant peut-être le NPD
à Ottawa. Nous, on a fait ce qu'on pouvait et on continue de le faire,
publiquement ou en privé, avec des membres de l'Opposition, en
particulier à Ottawa. Je dois remarquer, avec une certaine
mélancolie, que ce qui peut très dangereusement affecter les
droits du Québec nous est imposé ou prétend nous
être imposé par un premier ministre d'origine
québécoise et que celui qui défend le mieux, jusqu'ici, ce
qui correspond aux intérêts du Québec, c'est un anglophone
de l'Ouest, le chef conservateur. On est obligé de le dire parce que
c'est vrai.
De ce côté-là, autant qu'on peut, on maintient des
relations. On n'a pas d'objection à avoir des relations - il y en a
d'ailleurs - sur les plans sectoriels avec des ministres
fédéraux, mais on se rend compte, même dans la façon
dont, pour l'instant, une série de projets conjoints qui devraient
être en marche sont bloqués littéralement par plus qu'une
mauvaise volonté, par une sorte de volonté absolument
précise et pernicieuse de ralentir les choses en ce qui concerne toute
coopération fédérale-provinciale jusqu'à nouvel
ordre, que jusqu'au début de décembre, en ce qui concerne les
relations avec les libéraux fédéraux, tout est
bloqué et on n'y peut rien. Les libéraux provinciaux pourraient
agir et moi, je terminerais ma réponse de la façon suivante. On
pourra peut-être s'entendre là-dessus beaucoup mieux si, par
hasard, il arrivait, à la suite de certaines déclarations
extrêmement précises, et, je crois, dans l'intérêt du
Québec, qui ont été faites au moment de la commission
parlementaire sur la question constitutionnelle, il y a quelques mois, et
récemment depuis le coup de force qui a été
effectué ou qui est en marche du côté de libéraux
fédéraux, on aurait peut-être plus de chance d'agir d'une
façon concrète si on pouvait se mettre ensemble pour, au moins,
affirmer les intérêts du Québec, ici, à
l'Assemblée nationale.
Le Président: M. le chef de l'Opposition.
M. Ryan: Ce qui étonne, M, le Président, c'est ce
bilan d'une inaction absolument étonnant alors qu'on invoque une
situation d'urgence et de nécessité pour le gouvernement de
s'agripper aux commandes pour être en mesure d'agir
immédiatement.
Je demande au premier ministre, en terminant, le plus simplement du
monde, après un tel bilan, au cours des dernières semaines, et
dans la perspective où son gouvernement va continuer de vieillir et de
perdre de sa crédibilité en s'accrochant au pouvoir, comment il
peut prétendre mobiliser la force qu'il faudra pour défendre les
intérêts du Québec dans une situation aussi difficile, au
cours des prochains mois. Envisage-t-il, si les choses ne sont pas plus
encourageantes pour lui au plan électoral qu'elles le sont depuis deux
ans et demi, de continuer à s'accrocher au pouvoir, même
au-delà de ce que permet la constitution?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): On a assez de coups de force sur un
autre plan de gouvernement, je ne pense pas qu'on s'en irait dans
l'illégalité; donc, le chef de l'Opposition n'a pas à
s'inquiéter. Je pense que son inquiétude est
quelque peu factice. Je laisse à l'opinion publique le soin de
décider qui vieillit le plus vite et qui vieillit le mieux ou le plus
mal! Ce n'est pas à moi d'en juger.
Des voix: Ah, ah, ah!
M. Lévesque (Taillon): Voici, pour ce qui est du travail
qu'on veut faire pendant la période qui passe et qui est une
période d'urgence. Conformément, d'ailleurs, à des
conseils que nous prodiguait le chef de l'Opposition et à une
idée qu'on avait eue déjà à peu près en
même temps, dès le lendemain du coup de force de M. Trudeau, on a
mis en marche, avec une équipe de premier plan, le travail de recours
judiciaire, pour autant qu'il puisse donner des résultats et cela
demande le temps que ça demande; il fallait l'amorcer le plus vite
possible avec les moyens d'un gouvernement. Deuxièmement, sans entrer
dans le détail, on a fait tout ce qui était possible, et on va
continuer, avec les autres provinces qui s'opposent à la manoeuvre de M.
Trudeau, de travailler du côté du Parlement britannique, parce
que, le cas échéant, ça peut aller jusque-là. Je
répète ce que j'ai dit, je crois qu'il y a un avantage à
ce qu'il n'y ait pas de vacance parlementaire, dans les semaines qui passent,
parce que, d'ici un mois et demi, on peut être devant une
échéance finale. Et, là, je crois qu'il serait important
que l'Assemblée nationale - ce sera le premier thème de notre
session régulière, je l'ai dit, hier, au chef de l'Opposition -
conformément à des attitudes prises au moment des commissions
parlementaires et avant comme après ce projet fédéral,
puisse trouver, si brièvement que ce soit, une unanimité pour
affirmer la défense des droits du Québec. Mais cela reste
à voir les 5 et 6 novembre prochains.
Je crois que dans les circonstances, si tout cela peut se
réaliser convenablement, on défend mieux les
intérêts du Québec qu'en allant, pendant les semaines qui
passent - cela viendra toujours assez vite et, je le répète, on
ne s'accrochera pas plus longtemps qu'il faut - dans le paysage et d'avoir un
maximum de confusion suscitée par la maison mère de nos amis d'en
face, les libéraux fédéraux, comme l'a dit, il y a deux
jours, le premier ministre du Canada lui-même en regrettant qu'on ne
puisse pas avoir des élections pour qu'il puisse venir les
"confusionner" au maximum, s'en mêler et mêler les gens au mileu de
tout cela.
Le Président: M. le chef de l'Opposition. Une voix:
II n'est pas...
Le Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
Des voix: Ah!
Réduction des prestations d'aide
sociale
M. Samson: M. le Président, j'espère qu'ils
m'applaudiront après ma question autant qu'ils m'ont applaudi
tantôt, s'ils la comprennent. En l'absence du ministre des Affaires
sociales, M. le Président, j'aimerais poser ma question à
l'honorable premier ministre.
Nous savons que le ministère des Affaires sociales tente par
plusieurs moyens, ces temps-ci, de faire signer les assistés sociaux
pour qu'ils acceptent de voir réduire leurs prestations d'aide sociale
pour des montants qui peuvent varier. Si les assistés sociaux
n'acceptent pas le 1er novembre - c'est dans quelques jours - le
ministère va d'office réduire, selon les catégories, les
prestations de $5 ou $10 par mois et, le 1er janvier, encore une fois,
réduire les prestations d'aide sociale de $10 ou $25 par mois pour ceux
pour qui il y a des réclamations.
Je suis intervenu auprès du ministre des Affaires sociales avec
un télégramme du 26 septembre. Je lui ai demandé de mettre
fin à cette pratique et j'ai reçu, M. le Président, une
réponse écrite qui est datée du 15 octobre. Je ne vous
lirai pas toute la réponse; elle est assez longue, mais je pense qu'on
peut comprendre dans quelques paragraphes quel est le sens et l'essence de
cette réponse. M. le ministre des Affaires sociales dit ceci: Les
assistés sociaux à qui on réclame de l'argent se classent
en trois catégories; un tiers qui est composé de personnes qui
sont retournées sur le marché du travail, dont on perçoit
des sommes d'argent; un deuxième tiers qui se trouve dans une zone
grise, la zone grise étant constituée de ceux qui sont
décédés, de gens qu'on ne trouve pas ou de gens gui ont
fait faillite, et le troisième tiers, ce sont ceux qu'on va "collecter".
Les pauvres, ceux qui reçoivent encore des prestations d'aide sociale,
ceux qui sont obligés de vivre avec les actuelles pitances de l'aide
sociale sont ceux que le ministre veut "collecter". (10 h 40)
Je veux demander au premier ministre s'il a l'intention de demander au
ministre des Affaires sociales de rappeler ce dossier qui constitue une honte
pour une société qui se doit de prendre soin de ses
démunis et de ces gens qui sont dans la misère. Est-ce que le
premier ministre peut me dire s'il a l'intention d'intervenir lui-même
dans ce dossier, pour qu'on n'assiste pas à ce genre de
harcèlement envers les assistés sociaux?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, pour ce qui
est des détails très spécifiques que pourrait vouloir
obtenir le député de Rouyn-Noranda - pour aujourd'hui,
numéro deux du Parti libéral, simplement pour la période
de questions, bien sûr...
Des voix: ...
M. Lévesque (Taillon): ... mais tout en se permettant un
instant - qu'on comprendra - de divertissement, je crois que la question du
député de Rouyn-Noranda mérite une réponse plus que
sérieuse, parce qu'il s'agit en effet de cas douloureux. Je prends avis
de la question pour mon collègue des Affaires sociales en ce qui
concerne tout ce qui peut être - je m'excuse de l'expression - la
"plomberie" de ce dossier, parce que c'est lui qui en est responsable. Je dirai
simplement ceci: Je crois que cette année, dans le budqet du
Québec, le coût de l'assistance sociale, qui est un coût
absolument essentiel -c'est évident, dans une société
civilisée - va dépasser $1,000,000,000, mais, ça, on n'y
peut
rien. Seulement, quand c'est rendu à ce point, on ne peut pas non
plus jouer avec ça - l'argent, ce n'est pas de l'onguent - ce sont quand
même des fonds publics qu'on va chercher dans la poche de ceux qui
peuvent payer pour aider nos concitoyens qui ne peuvent pas réussir
à tenir le coup devant la vie d'aujourd'hui. Ce qui veut dire qu'il faut
l'administrer, là comme ailleurs, le mieux possible.
Je soulignerai simplement ceci - peu importe les zones grises, noires ou
blanches qu'évoquait le député de Rouyn-Noranda - c'est
que dans l'immense majorité des cas, sauf erreur, il s'agit de
prêts, d'avances qui avaient été faites. Je donne un
exemple très simple; dans le délai de carence qui peut
précéder l'assurance-chômage, il est courant qu'on accorde
des avances - qui sont des prêts, qui sont reconnues comme des
prêts - qui sont faites à des gens en attendant
l'assurance-chômage. Quand l'assurance-chômage est expirée,
je suppose qu'on en arrive, si on n'a pas trouvé d'emploi, à
l'assistance sociale, mais il y a quand même des prêts qui ont
été consentis. Dans l'immense majorité des cas, je crois
que c'est de ça qu'il s'agit.
Est-ce que c'est normal d'aller rechercher cet argent? Cela vous a paru
une façon trop brutale, trop rapide, ce qui a été fait,
sans même qu'on ait eu la chance de le voir cet été, quand
on disait: On coupe tout de suite. Alors, on a retardé
l'opération. On a averti les gens en demandant s'ils ne pouvaient pas
prendre des arrangements, et on leur a demandé aussi au moins, de se
donner la peine - après tout ce n'est pas la fin du monde - d'aller
trouver le bureau de l'assistance sociale et de dire: Oui, je peux le faire; ou
alors, sinon, voici les raisons pour lesquelles je ne peux pas le faire. On a
demandé que ce soit traité de la façon la plus humaine
possible, il n'y a pas d'excès possible de ce côté mais,
enfin, avec le maximum d'humanité. Je ne sais pas où ça en
est, mais je suis sûr que le ministre des Affaires sociales pourra
répondre plus en détail au député de Rouyn-Noranda
- peut-être dans l'intersession, si le député veut
l'appeler - mais il n'y a pas de raison de ne pas rendre public ce qui se
fait.
M. Samson: M. le Président, je pense que le premier
ministre devrait nous expliquer comment on peut comprendre qu'il trouve
affreux, en quelque sorte, qu'on coupe l'aide à ces gens et que, d'autre
part, dans d'autres dossiers, dans des réclamations qui dépassent
les $30,000,000, on règle ça, hors cour, pour $200,000...
Des voix: ...
M. Samson: ... dans le cas de la Baie James. D'autre part, dans
d'autres dossiers, il y a des dépenses extravagantes. Par exemple, dans
la propagande, on pourrait peut-être couper là un peu et moins
couper dans le cas des assistés sociaux.
Mais, M. le Président, est-ce que le premier ministre trouve
normal - parce qu'il vient de dire qu'il faut être réaliste et
qu'il faut couper les dépenses - que, dans le cas des assistés
sociaux... On va prendre un exemple: une veuve avec trois enfants, ça
donne $451 par mois; si elle a six enfants, les trois derniers valent $2
chacun, par mois; suivant votre barème actuel, cela fait $457. Est-ce
que vous trouvez normal qu'on aille amputer cette pitance de $25 par mois
à des gens qui sont dans le besoin et qui sont dans la misère?
Est-ce qu'on trouve cela normal, du côté du Parti
québécois, ou si on ne serait pas mieux de convoquer au moins une
commission parlementaire pour permettre à tous les députés
de venir parler de ce problème? La, on verrait des députés
du Parti québécois, comme celui d'Arthabaska, qui viendraient
dire au ministre des Affaires sociales, en pleine Chambre et en public, ce
qu'ils pensent de cela. Cela se fait en catimini et on coupe dans les pensions
des miséreux.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): En tout cas, je reconnais un style
qui ne change pas, même si les partis changent, de la part du
député de Rouyn-Noranda. Cela peu avoir son efficacité
à court terme. Il y a un mot dans le dictionnaire que connaît bien
le député de Rouyn-Noranda. Je ne l'emploierai pas parce qu'il
soulèverait une question de privilège. Mais c'est une
façon de faire de la politique.
C'est évident que c'est dur et c'est douloureux pour n'importe
qui de devoir...
Des voix: Ah!
M. Lévesque (Taillon): ... couper ses dépenses pour
le remboursement de ce qui a été un prêt. Mais il reste
ceci: c'est que, si vous faites le compte par rapport à quelqu'un qui
gagne le salaire minimum et qui est devant des remboursements à faire et
qui, Dieu sait, n'est pas beaucoup plus avancé que quelqu'un qui a une
famille et qui bénéficie de l'assistance sociale, lui, il doit
rembourser normalement quand il a emprunté. Qu'on soit riche ou qu'on
soit pauvre, qu'on soit puissant ou misérable, comme disait l'autre, je
pense qu'il faut rembourser quand on a emprunté. Maintenant, je le
répète, c'est fait avec - j'espère que c'est vrai; si cela
n'est pas vrai, on corrigera - le maximum de délais, de consultations,
de chances de pouvoir dire: On ne peut pas le faire, donc de permettre
d'étendre les délais. Mais je crois que le principe doit demeurer
que, si on a emprunté, normalement on doit rembourser si on le peut.
C'est tout.
M. Beauséjour: M. le Président...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M.
le député d'Iberville.
M. Samson: Est-ce sur la même question?
Le Président: Un instant, s'il vous plaît, M. le
député de Rouyn-Noranda. M. le député d'Iberville,
est-ce qu'il s'agit d'une sous-question à la question du
député de Rouyn-Noranda?
M. Beauséjour: Non, c'est une question principale.
Le Président: C'est une question principale. Alors, vous
devrez attendre que j'aie accordé une question à l'Union
Nationale. Dernière question.
M. Samson: Est-ce que je dois comprendre...
Le Président: M. le député de
Rouyn-Noranda.
M. Samson: ... des propos du premier ministre, M. le
Président, que, pour l'actuel gouvernement, on traite de façon
différente ceux qui sont démunis, ceux qui n'ont pas le moyen de
se défendre et ceux qui ont le moyen de se défendre, comme dans
le cas des assistés sociaux versus le cas du saccage de la Baie James?
Est-ce que je dois comprendre que les assistés sociaux devraient
saccager quelque chose pour que le gouvernement les prenne en
considération?
M. Lévesque (Taillon): M. le Président,
premièrement, on sait les raisons pour lesquelles le règlement
est intervenu comme il est intervenu en ce qui concerne la Baie James et je
n'oserai même pas qualifier le genre d'appel quasiment qu'a fait le
député de Rouyn-Noranda en terminant ce qu'il appelle une
question.
Une voix: Irresponsable.
Le Président: M. le député de
Saint-Laurent.
M. Forget: M. le Président, le premier ministre, dans ses
réponses, laisse croire qu'il s'agit, dans ce cas, de remboursements
d'emprunts, d'avances faites à des assistés sociaux qui se
seraient déjà engagés à rembourser. Il devrait
savoir, je crois, qu'il ne s'agit pas de façon majoritaire d'emprunts,
mais de ce que l'aide sociale appelle les trop-payés,
c'est-à-dire des erreurs commises soit par les fonctionnaires, soit par
les assistés sociaux dans le calcul des prestations. Dans ce
cas-là, ce que l'aide sociale fait, c'est pénaliser les
assistés sociaux pour des montants que, autrement, on considère
comme non saisissables. Le gouvernement, étant le payeur, décide
de se payer de façon privilégiée...
Une voix: C'est cela.
M. Forget: ... pour des erreurs que, parfois, ses
préposés ont commises. Je pense qu'il devrait corriger sa
réponse en tenant compte de ce fait-la.
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je dois
vous dire gu'on invente facilement sur ce sujet n'importe quoi. Je sais qu'il y
a eu des cas d'erreurs et, autant que je sache, les cas d'erreurs qui
étaient dues à l'administration publique, on a demandé de
les oublier. Ce sont non seulement de mauvaises créances, mais ce sont
des erreurs qu'on n'a pas le droit de faire payer à la clientèle,
et Dieu sait que ce n'est pas une clientèle qui est riche. Dans la
majorité des cas - je suis sûr de cela pour la bonne et simple
raison que c'est cela qu'on a pris comme décision au Conseil des
ministres - on a demandé d'effacer à peu près totalement
les cas qui sont des erreurs dues au gouvernement, des erreurs
d'administration. Je l'ai dit tout à l'heure au député de
Rouyn-Noranda, la majorité des cas, pour autant que je sache, rejoignent
ce qu'on peut appeler des avances et qui étaient reconnues comme des
emprunts.
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale. (10 h
50)
Possibilité de moratoire au sujet de la loi
125
M. Le Moignan: Ma question s'adresse également au premier
ministre, qui rencontrait, il y a quelques jours a peine, quelques milliers de
représentants du monde rural. Le premier ministre a pris la parole
à cette occasion.
Le premier ministre a été à même de constater
l'inquiétude évidente qui règne dans le milieu rural,
alors qu'on est pris avec l'application de certaines lois comme le zonage
agricole, les lois sur l'environnement, la fiscalité municipale et
d'autres encore. Étant donné que les municipalités
régionales de comté devront fonctionner à partir du 1er
janvier 1981, et étant donné aussi que les élus...
Une voix: Première erreur.
M. Le Moignan: Première erreur. Le premier ministre me
corrigera sur la date, que je n'ai pas à lui indiquer.
Le premier ministre sait très bien qu'il y a certains remous,
chez les élus municipaux surtout, qui craignent de ne pouvoir agir de
façon autonome lorsqu'une structure régionale leur imposera un
cadre de développement.
Je voudrais savoir ceci du premier ministre, étant donné
que trop de questions demeurent sans solution; en plus de celles que j'ai
nommées, il y a le financement, le mode de représentation et le
scrutin, et, ensuite, on ne connaît pas encore les résultats des
réformes municipales dans leur entier. Le premier ministre a dit qu'il
ne s'agit de "bulldozer" personne, le premier ministre a dit aussi qu'on est
décidé, de son côté, à prendre le temps de
diriger ces changements. Entend-il se rendre au désir de l'Union des
conseils de comté du Québec en déclarant un moratoire au
sujet de la loi 125? Et, dans l'affirmative, de quelle sorte de moratoire
s'agira-t-il dans les faits?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je vais
demander à mon collègue, le ministre d'État à
l'Aménagement, de compléter la réponse très
générale que je vais faire au départ.
Pour ce qui est des dates, le chef de l'Union Nationale s'en est rendu
compte lui-même, je crois qu'il a fait une anticipation
extraordinairement dramatique en parlant du 1er janvier 1981 qui s'en vient
très bientôt. Cela ne s'applique pas de cette
façon-là. Il a mentionné trois lois ou trois mesures. Pour
la protection du territoire aricole, la loi de l'aménagement et la loi
qui a aménagé un supplément de revenu important pour les
municipalités, la réforme de la fiscalité municipale, il
s'agit de trois gros morceaux, de changements, de réformes qui
étaient demandés et souvent attendus depuis des fois dix ans,
quinze ans. Je me souviens, je ne sais pas combien de fois, que dans les
années qui ont précédé 1976 les
municipalités, rurales ou urbaines, se sont plaintes d'une façon
de plus en plus insistante, du fait qu'elles s'en allaient
littéralement dans le trou et que l'endettement, le manque de
revenu étaient en train de les égorger. De la même
façon, je me souviens qu'un ex-ministre de l'ancien gouvernement nous a
dit publiquement - on l'a apprécié - qu'il avait essayé
tant bien que mal, mais contre toutes les pressions il n'avait jamais
réussi à faire adopter une mesure aussi fondamentale pour une
société civilisée qui veut se respecter que le zonage
agricole ou la protection du territoire agricole.
Je crois aussi que, pendant dix ans, on a attendu et passé
à travers de je ne sais combien de brouillons d'une loi de l'urbanisme
ou de l'aménagement qui n'a jamais réussi à aboutir. Au
moins ces trois choses sont faites, ce qui ne veut pas dire, Dieu sait, qu'une
fois que cela est fait cela n'a pas besoin d'être ajusté,
harmonisé dans certains cas, de façon qu'il y ait une
espèce de rythme de croisière qui puisse s'établir.
Maintenant, pour ce qui est de ce rythme de croisième, de
questions comme la représentation dans les nouveaux conseils de
comté ou les municipalités régionales qui se posent au
point de vue des échéanciers, là, le député
de Gaspé, le chef de l'Union Nationale, me permettra de demander
à mon collègue de l'Aménagement de donner les
renseignements, je pense, qui sont pertinents.
Le Président: M. le ministre d'État à
l'Aménagement.
M. Léonard: M. le Président, je voudrais d'abord
corriger la première assertion de M. le chef de l'Union Nationale. Il
n'y a pas de date limité fixée au 1er janvier 1981. Au contraire,
dans la loi, il n'y a pas de délai qui a été
indiqué, sauf un délai implicite qui fait que les
municipalités régionales de comté devront avoir
commencé leur schéma d'aménagement le 15 avril 1983. Donc,
il faut qu'elles aient leurs lettres patentes avant.
Maintenant, nous nous sommes engagés à faire une
consultation pour un article de la loi 125, et nous l'avons mise en route au
cours du printemps dernier, mais surtout au cours du mois d'août. Alors,
cette consultation porte justement sur la délimitation des territoires
des municipalités régionales de comté et les modes de
représentation ainsi que d'autres éléments qui peuvent
entrer dans les lettres patentes. Cette consultation est commencée; je
crois qu'elle va bien, mais, encore une fois, il n'y a pas urgence quant au 1er
janvier 1981.
Je voudrais simplement, par rapport à la question du chef de
l'Union Nationale, dire une chose sur l'inquiétude ou l'incertitude
qu'il soulève ou qu'il croit voir. Les municipalités
régionales de comté proviennent en fait des conseils de
comté parce qu'en ce qui concerne les matières régies par
le Code municipal, les conseils de comté, qui vont devenir des
municipalités régionales de comté, vont s'asseoir, ou les
municipalités qui vont en faire partie vont s'asseoir autour de la
même table et vont discuter, à l'exclusion des villes, de ces
matières. Dans la municipalité régionale de comté,
les villes et les municipalités rurales sont ensemble seulement pour les
fins de l'aménagement. Il me semble que c'est un élément
important.
En ce qui concerne les territoires, il me semble que c'est une
première démarche qu'il faut faire. Il faut d'abord
délimiter les territoires; la consultation s'engage à l'heure
actuelle là-dessus. Par la suite, des modes de représentation
seront fixés, mais ce sont toujours les municipalités qui font la
consultation. Les comités de consultation, d'ailleurs, comprennent un
représentant de l'Union des conseils de comté ou des
municipalités rurales, un représentant des villes sur le
territoire et le président nommé par le gouvernement. Si ces
éclaircissements peuvent vous aider, tant mieux!
Le Président: M. le chef de l'Union Nationale.
M. Le Moignan: Oui, une question additionnelle au ministre
d'État à l'Aménagement. J'ai quelques petites questions et
le ministre pourra répondre à toutes ensemble.
Premièrement, les commissions scolaires actuelles seront-elles
éventuellement incorporées, de gré ou de force, aux
futures municipalités régionales de comté?
Deuxièmement, comment les municipalités régionales
se financeront-elles?
Troisièmement, devront-elles inventer de nouvelles sources de
revenus?
Quatrièmement, qui versera les salaires des fonctionnaires des
municipalités régionales de comté?
Enfin, quelles seront les structures administratives des
municipalités régionales de comté? Est-ce qu'il s'agira,
par exemple, d'un président élu au suffrage...?
Je ne sais pas si je suis allé trop vite, mais en tout cas...
Le Président: M. le ministre d'État à
l'Aménagement.
M. Léonard: Je pense qu'il y en a une que j'ai
sautée. En ce qui concerne les commissions scolaires, je rappelle que
les comités de consultation, à l'heure actuelle, sont
formés par des élus municipaux pour deux de leurs membres et d'un
représentant nommé par le gouvernement. Les commissions scolaires
vont pouvoir exposer leur point de vue au cours de la consultation, mais au
conseil de la municipalité régionale de comté, il n'y a
pas de représentant de commission scolaire puisque ce sont les
élus, les maires de chacune des municipalités qui en feront
partie, à l'exclusion de tout autre représentant. C'est ce que
dit la loi. C'est aussi ce qu'il y avait dans les conseils de comté
auparavant et qu'il y a même actuellement.
En ce qui concerne le financement des municipalités
régionales de comté, le conseil de comté a ses propres
sources de financement à l'heure actuelle, qu'il continuera d'avoir dans
la municipalité régionale de comté. Là où il
y a une nouvelle responsabilité, qui est celle de confectionner des
schémas d'aménagement, le gouvernement a dit qu'il y pourvoirait
en cours de route. Je ne peux pas vous dire ce qui arrivera dans 25 ans, quant
au financement relativement à cette responsabilité, mais il reste
que, pour l'instant, le gouvernement a dit qu'il donnerait aux
municipalités régionales de comté les fonds
nécessaires pour faire leur schéma d'aménagement. On ne
parle pas de nouvelles sources de revenus autres que celle qui vient du
gouvernement, et la seule responsabilité qui est ajoutée
aux municipalités régionales de comté, c'est de faire un
schéma d'aménagement.
Les structures administratives font partie - il y en a
déjà dans les conseils de comté actuels - des
modalités qui seront prévues aux lettres patentes qui seront
émises à la suite de la consultation.
Le Président: M. le député d'Iberville. (11
heures)
Les trains de Sainte-Thérèse et de
Farnham
M. Beauséjour: M. le Président, ma question
s'adresse au ministre des Transports.
Le Pacifique canadien a l'intention de cesser son service de train de
banlieue entre Montréal et Sainte-Thérèse et
Montréal-Farnham d'ici le 26 octobre. Dans la Presse d'hier, on disait
que pour Farnham, ce serait aujourd'hui. Dans la Presse, on indique aussi que
le ministre a adressé au Pacifique canadien une demande de
révision de sa décision. Je voudrais savoir du ministre s'il y a
d'autres démarches qui ont été faites, soit aux
autorités fédérales, et quels en sont les
résultats?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. de Belleval: M. le Président, je pense qu'il faut
déplorer tout d'abord une décision, en l'occurrence celle du
Pacifique canadien, dans le contexte actuel. Qu'on pense en particulier
à l'importance de maintenir les services de transport en commun partout
et de leur donner de l'extension là où il en existe. On doit
déplorer cette décision, à cette époque-ci, de
terminer des services de transport en commun entre Montréal et diverses
villes de sa périphérie et en particulier en ce qui nous
concerne, Farnham et Sainte-Thérèse, de l'autre
côté, du côté nord.
Il faut voir dans quel contexte cette décision est prise. Il
s'agit de services assumés depuis très longtemps par les
compagnies de chemin de fer, qui sont de juridiction fédérale,
des services qui sont réglementés, d'ailleurs, par des
institutions fédérales, en particulier la Commission canadienne
des transports.
Les compagnies de chemin de fer, depuis plusieurs années,
s'adressent à la Commission canadienne des transports pour obtenir la
permission de terminer ces services interrurbains ou de banlieue sous
prétexte qu'ils sont déficitaires. Je dois dire qu'effectivement,
même si ces services sont déficitaires, ils sont assumés
par des entreprises qui, elles, sont souvent multimilliardaires et font des
profits sous tous autres aspects. Indépendamment de ces profits, on
décide d'enlever des services aux citoyens et la Commission canadienne
des transports se fait, ni plus ni moins, la complice de ces décisions
par une astuce juridique qui est la suivante: des services dits interurbains,
du jour au lendemain, sont qualifiés de services de banlieue et on remet
le bébé, à ce moment-là, entre les mains des
gouvernements provinciaux et, en particulier, du gouvernement du Québec,
en disant: Ce ne sont plus des services interurbains. Cela a été
considéré des services interurbains depuis cent ans ou
soixante-quinze ans mais, maintenant, ce sont des services de banlieue et
occupez-vous-en. On nous remet le bébé! C'est un des aspects
loufoques du fédéralisme dont parlait le premier ministre du
Canada, il y a une couple de jours, dans cette même ville.
Qu'est-ce que j'ai devant cette décision? J'ai offert au
Pacifique canadien d'étendre notre système de subventions au
transport en commun, à savoir de payer une subvention de 40% des revenus
que retire actuellement le Pacifique canadien de ces services de façon
qu'ils soient maintenus, étant conscient, évidemment, qu'à
court terme, il s'agit d'une solution du moindre mal, mais prenant cette
décision dans un contexte, dans une perspective d'avenir.
Là-dessus, je veux faire remarquer qu'il y a quelques
années, par exemple, il y avait un service de banlieue assuré
entre la ville de Montréal-Nord et le centre-ville de Montréal
via le tunnel du Canadien national. À l'époque, on a dit que ce
n'était pas rentable; on a aboli ce service. Aujourd'hui, le
gouvernement et la Communauté urbaine de Montréal sont en train
de remettre sur pied un service moderne dans ce secteur. Je pense que nous
serons en face d'une même décision dans le cas, par exemple, de
Sainte-Thérèse ou de Farnham, durant les prochaines
années, et qu'il est irresponsable actuellement que le gouvernement
fédéral, que la Commission canadienne des transports permette
d'abolir ces services. Quoiqu'il en soit, nous, nous sommes prêts
à faire notre part pour tenter de les maintenir.
M. Beauséjour: M. le Président, j'aimerais que le
ministre des Transports me dise s'il a eu des échos à ses
démarches, soit auprès du Pacifique Canadien ou des
autorités fédérales.
Le Président: Très brièvement, M. le
ministre des Transports, s'il vous plaît.
M. de Belleval: Je dois dire que du côté du
gouvernement fédéral nous n'avons à peu près aucune
réponse depuis de nombreux mois sur la plupart de ces sujets, comme vous
le savez, qu'il s'agisse du dossier de Québecair, Nordair, de l'avenir
de Dorval ou de Mirabel, etc. Dans ce cas-là, je n'ai pas eu de
nouvelles de la part du ministère fédéral des Transports.
J'attends incessamMent la réponse du Canadien Pacifique à la
lettre que je lui ai expédiée la semaine dernière, lui
faisant l'offre de subvention que je viens d'indiquer.
Le Président: M. le député de
Marguerite-Bourqeoys, vous avez le temps pour une très brève
question.
Rumeurs de remaniement ministériel
M. Lalonde: M. le Président, après avoir entendu le
ministre des Transports dire qu'il subventionne une entreprise milliardaire,
j'aimerais poser la question suivante au premier ministre. Vous comprendrez que
je ne peux pas la poser au vice-premier ministre.
Le rapport du Vérificateur général sur le trou de
$500,000,000 dans les finances de l'enseignement primaire et secondaire vient
de confirmer le gâchis administratif du présent gouvernement et
plus particulièrement du ministre de l'Éducation et du ministre
des Finances. M. le Président, à cela, il faut ajouter
l'hostilité du
ministre de l'Éducation à l'égard des commissions
scolaires, les interminables conflits de travail -on est ici justement pour en
régler un aujourd'hui - qui sont les conséquences du règne
de l'actuel ministre de l'Education.
Ma question au premier ministre est la suivante: Compte tenu de ce bilan
déprimant, le premier ministre a-t-il l'intention de confier à
l'actuel ministre de l'Éducation des responsabilités moins
exigeantes au point de vue administratif?
Le Président: M. le premier ministre.
M. Lévesque (Taillon): M. le Président, je
m'aperçois qu'on prépare la période des questions selon le
mode antique et solennel à partir de la dernière manchette, au
moins en partie. Je dois dire ceci très simplement en laissant de
côté le préambule légèrement coloré du
député: Quand il n'y a pas de rumeurs à propos des
élections, il faut qu'il y en ait sur autre chose. Alors, là, il
y en a sur autre chose. Même si c'est très difficile pour moi,
c'est douloureux parce que j'ai fait...
Des voix: Ah!
M. Lévesque (Taillon): ...toute ma carrière dans ce
qu'on appelle les communications, j'ai décidé qu'à partir
de ces rumeurs, désormais, je ne communiquerai plus.
Le Président: Fin de la période des questions.
Des voix: Démission. Démission.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Charron: M. le Président, je voudrais d'abord...
Le Président: Je...
M. Charron: Oui?
Le Président: ... vous signale...
M. Charron: Je m'excuse.
Le Président: ...M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale, qu'il y a eu un ordre de la Chambre qui a été
donné pour céder le droit de parole à ce moment-ci au
leader parlementaire du gouvernement. Je sais que vous voudriez intervenir si
vous avez ce consentement unanime, mais même avec un consentement
unanime, ce serait difficile.
M. Fontaine: Sur la fin de la période des questions, le
député de Bellechasse avait une très brève question
à poser concernant les sinistrés en Algérie. Il y a un
problème particulier qu'on pourrait régler très
facilement. Si on avait le consentement de la Chambre, on pourrait poser cette
question, une minute seulement.
Le Président: Y a-t-il consentement?
M. Lalonde: Si j'ai une question additionnelle, M. le
Président, certainement.
Le Président: Cela signifie-t-il, M. le
député de Marguerite-Bourgeoys, que vous ne donnez pas votre
consentement à ce que M. le leader parlementaire de l'Union Nationale
pose une question?
M. Levesque (Bonaventure): Voulez-vous, M. le Président,
donner aussi votre consentement au député de
Marguerite-Bourgeoys?
Le Président: Bon! M. le leader parlementaire du
gouvernement.
Motion d'urgence
Suspension de certaines règles
M. Claude Charron
M. Charron: M. le Président, je voudrais, comme le
lieutenant-gouverneur l'a laissé entendre en expliquant la raison de
cette réunion de l'Assemblée, me prévaloir de l'article 78
du règlement et proposer, dans quelques instants, après avoir
donné l'explication des raisons qui nous ont amenés à
convoquer cette session, la motion d'urgence que je peux, d'ailleurs, si vous
le souhaitez, M. le Président, faire distribuer immédiatement
auprès de mes collègues responsables de ces affaires afin qu'on
puisse suivre tout à l'heure à la lettre lorsque je la
formulerai. (llhl0)
M. le Président, l'Assemblée est à nouveau
réunie afin de se prononcer sur une loi spéciale. Je crois que
tout le monde conviendra qu'il y a deux raisons pour qu'on se rende à
des lois spéciales. La première, qui saute aux yeux, est celle
des catastrophes, des cataclysmes. Ce n'est pas le cas. La deuxième est
plus délicate et c'est pour cela qu'elle mérite plus d'attention;
c'est littéralement lorsque l'exercice d'un droit, par un groupe de
citoyens - droit qui leur est reconnu par les lois adoptées par cette
Assemblée - ou des groupes de citoyens peut mettre en péril ce
qu'on conviendra d'appeler, dans l'ensemble du Québec ou dans certains
coins du Québec, l'intérêt public ou, encore plus
concrètement, mettre en péril l'exercice de droits qui
appartiennent à d'autres citoyens.
Or, l'opinion que nous nous sommes faite, après plusieurs heures
de discussion, est que, dans le cas de deux commissions scolaires au
Québec, dans celle des Vieilles Forges, dans la Mauricie, et dans celle
de la région de Sorel et de Carignan, l'exercice du droit de
grève, par des travailleurs de l'enseignement, met en péril,
actuellement, l'année scolaire des étudiants et étudiantes
de ces deux territoires du Québec, met en péril l'exercice du
droit des parents à bénéficier des services scolaires et
met en péril le droit des enfants - s'il est non écrit, il n'est
pas moins vrai, M. le Président - à ce qu'une année de
leur vie ne soit pas irrémédiablement gâchée.
Nous en sommes à une situation d'urgence, parce que, dans l'un et
l'autre cas, le conflit, même s'il ne date pas du même moment,
vient d'atteindre le point d'être suffisamment avancé pour que,
prolonger plus longuement - d'autres de mes collègues, au cours de la
discussion, développeront ce point - ferait que, si ce n'est pas toute
l'année, c'est au moins une bonne partie de cette année qui
serait gâchée et perdue.
En conséquence, un autre de mes collègues... Si
l'Assemblée consent à suspendre un certain nombre de
règles régulières et à étudier le projet de
loi que présentera le ministre de l'Éducation, projet que je fais
circuler à l'instant et qui est le projet de loi no 113, portant sur
certains différends entre des enseignants et des commissions
scolaires... Je demanderais, M. le Président, que, conformément
au règlement, on le distribue immédiatement. Ce projet de loi, au
nom du ministre de l'Éducation - s'il est débattu, cet
après-midi, comme nous l'espérons - pourra donner l'occasion
à mon collègue du ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre d'expliquer que, si nous en sommes rendus à cette
étape, c'est que toutes les autres prévues par nos lois,
conformément à nos traditions en relations du travail, ont
dûment été franchies, comme le ministre se chargera de
l'expliquer à l'Assemblée.
En conséquence, M. le Président, je sollicite, très
brièvement, l'Assemblée pour que, à cause de ces raisons -
ou de cette raison, puisqu'elle est unique dans les deux cas - elle consente
à reconnaître l'état d'urgence et à adopter le
projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des enseignants
et des commissions scolaires.
Et, conformément à l'article 84, paragraphe 2, du
règlement, je propose que cette Assemblée suspende l'application
des articles 22, paragraphe 1 - ce qui a déjà été
fait par l'ordre de la Chambre en ce qui concerne le message inaugural - 23,
30, 31, 77, 87, 88, 115, 134 et 157.
Que, nonobstant les dispositions de l'article 47, paragraphe 1, du
règlement, toutes les séances de l'Assemblée soient
publiques;
Que, nonobstant les dispositions de l'article 121 du règlement,
il n'y ait pas d'amendement en deuxième lecture;
Que, de plus, la commission plénière fasse rapport au plus
tard trois heures après le début de ses travaux;
Que dix minutes avant l'expiration de ce délai, le
président de la commission mette immédiatement aux voix, sans
débat, les articles du projet de loi et les amendements dont la
commission n'aura pas alors disposé, s'il en est;
Que le débat portant sur la troisième lecture soit
limité à une intervention de 20 minutes par parti reconnu.
Que l'Assemblée puisse siéger à partir de
maintenant, sans interruption sauf de l'adoption de cette motion d'urgence
à 13 h 30,..."
Je quitte le texte de ma motion, M. le Président, pour expliquer
que si, dans quelques minutes, comme je l'espère, l'Assemblée
consent à cette motion, selon la tradition et pour que les partis
politiques puissent prendre une connaissance approfondie, en groupes
parlementaires, du projet de loi qui vient d'être distribué, nous
suspendrons nos travaux jusqu'à 13 h 30 et nous reprendrons, à ce
moment-là, au niveau de la deuxième lecture, comme il
convient.
Finalement, dernier paragraphe de ma motion, M. le Président:
"Que la suspension de l'application des règles ci-dessus
énumérées soit en vigueur dès maintenant et
jusqu'après l'adoption de la motion d'ajournement de
l'Assemblée."
J'ai deux informations qui peuvent paraître superflues, mais que
je me dois de dire. Il est évident - c'était dans le texte du
message du lieutenant-gouverneur - que dès l'adoption de cette loi
spéciale, la session ouverte ce matin sera prorogée. Finalement,
je désire informer aussi, ou confirmer un engagement que le premier
ministre et moi avions pris hier en rencontrant les représentants des
deux partis d'Opposition. Nous avons donc des officiers du ministère de
l'Education et peut-être du ministère du Travail aussi - enfin
sûrement du côté du ministère de l'Éducation -
qui seront à la disposition des réunions des groupes
parlementaires - je crois que c'est nécessaire - pour donner toute
l'information quant aux applications de la convention collective
déjà signée ou quoi que ce soit qui puisse être de
nature à renseigner les partis politiques, dès 11 h 30, si
l'Assemblée ajourne en ce moment.
Le Président: Merci. M. le leader parlementaire de
l'Opposition officielle.
M. Gérard D. Levesque
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, nous avons
à ce moment-ci à étudier une motion de suspension de
l'application de certaines règles de procédure, motion
présentée par le leader du gouvernement. On le sait, M. le
Président, notre règlement prévoit que cette motion peut
être débattue pendant une période de deux heures.
D'après les propos du leader parlementaire du gouvernement, ce dernier
s'attend que nous disposions de cette motion dans une période beaucoup
plus courte. D'ailleurs, l'indication que nous avons reçue du
lieutenant-gouverneur au tout début de la séance indique
également que le gouvernement voudrait bien que tout se passe d'une
façon assez brève, courte et comprehensive.
Voilà, M. le Président, comment se passent les choses
maintenant dans cette Assemblée nationale. Voilà comment les
choses semblent contraster, du moins chez ceux qui tiennent certains propos,
avec une période que nous avons connue et où ces honorables
messieurs d'en face étaient beaucoup plus loquaces et prenaient non
seulement les deux heures de discussion sur cette motion, mais en profitaient
justement pour condamner, d'une façon presque violente, sinon
irresponsable, les attitudes du gouvernement qui était alors au pouvoir.
Je n'ai pas à rappeler, M. le Président, que j'avais, comme le
leader parlementaire du gouvernement l'avait aujourd'hui, la tâche
peut-être ingrate, si on veut, d'avoir à présenter ces
motions ou ce genre de motion.
À ce moment-là, M. le Président, je pense que
j'utilisais un peu le ton que vient d'utiliser le leader du gouvernement, et je
ne serais pas surpris que le leader du gouvernement ait puisé dans les
débats anciens certains passages de certains discours que j'ai
moi-même prononcés alors que j'avais à remplir cette
fonction. Moi, M. le Président, je serais porté,
évidemment, à aller fouiller dans les propos tenus par le leader
du gouvernement alors qu'il était dans l'Opposition. (11 h 20)
Évidemment, M. le Président, je ne me rendrai pas à
cette démarche qui semble ne pas être celle du gouvernement. Mais
voici que tombent justement par hasard, M. le Président, devant moi,
certains passages d'un discours de M. Claude Charron; c'était en 1976,
il n'y a pas tellement longtemps, c'était en avril 1976. On lit ce que
disait, à ce moment-là, le leader
parlementaire du gouvernement actuel lorsqu'il avait à faire face
à une motion exactement comme celle qu'il vient de déposer, et
d'ailleurs dans un domaine qui ressemble fort à celui qui fait l'objet
du projet de loi que nous aurons à étudier dans quelques minutes,
une question dans le domaine de l'enseignement. Voici ce que disait notre ami,
le leader parlementaire du gouvernement: "Nous étudierons tout à
l'heure, si la Chambre dispose de cette motion, la solution bâtarde que
nous présente le gouvernement après avoir laissé faire la
situation pendant deux mois." On dirait que c'est exactement la même
situation, M. le Président.
Une voix: Deux mois, c'est deux mois.
M. Levesque (Bonaventure): Que voulez-vous, M. le
Président? Voici ce que disait le leader parlementaire du gouvernement
alors qu'il siégeait dans l'Opposition.
Une voix: Charron?
M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. Claude Charrron, en effet.
"Mais, M. le Président, si l'urgence existait bien avant et si le
gouvernement s'est enfin décidé à apporter sa solution
magique, sa solution miracle, il faudra bien prendre le temps de
l'étudier". Il disait: "S'il est un endroit où il est important
pour les membres de l'Assemblée de peser le pour et le contre de chacune
des interventions du gouvernement dans le monde de l'éducation, lui qui
a tellement tardé, lui qui a laissé pourrir la situation avant
d'arriver avec une loi, etc., c'est bien ici. Le gouvernement - continuait-il -
nous invite à bousculer les horaires traditionnels de la Chambre. Plus,
M. le Président - et c'est contenu dans la motion, cette règle
absolument inqualifiable - les députés seront obligés
d'étudier article par article le projet de loi en dedans de trois heures
pour faire rapport." M. le Président, ce même monsieur vient de
nous communiquer sa motion qui dit ceci: "...que, de plus, la commission
plénière fasse rapport au plus tard trois heures après le
début de ses travaux." Ahl Que voulez-vous? Ceux qui ont vécu ces
moments ne peuvent pas laisser passer la présente heure ou demi-heure ou
ces présentes courtes minutes sans évoquer, évidemment
très respectueusement pour la présidence, mais très
cruellement pour les amis d'en face, ces quelques propos tenus par M. Charron.
On me permettra de le nommer parce qu'il est ainsi cité au journal des
Débats. Il disait ceci: "II est absolument irresponsable de la part du
gouvernement d'obliger les députés à étudier ce
projet de loi dans des conditions anormales".
Je n'ai pas l'intention de tourner le couteau dans la plaie, mais il est
intéressant de voir qu'il ne s'agit pas simplement d'une intervention,
disons, qui faisait exception dans cette Opposition du temps. Malgré son
absence, j'aimerais rappeler que le ministre de l'Environnement, alors qu'il
siégeait de ce côté-ci...
Une voix: La pollution.
M. Levesque (Bonaventure): M. Marcel Léger, disait ceci,
dans ce même débat, d'ailleurs: "Autrement dit, à quoi sert
un Parlement, M. le Président, si, à chaque fois qu'on a à
discuter d'une chose essentielle, on est obligé de mettre de
côté les règles de procédure normales, si, à
chaque fois qu'on a un problème majeur à régler, il faut
suspendre les règles de procure du parlementarisme? Si c'est cela,
abolissons, disait-il, le parlementarisme.
Il continuait:"Ce gouvernement a deux bâtons: le bâton du
patron et le bâton législatif, d'autre part." M. Léger
continuait: "On a créé une situation absolument intenable dans
tout le Québec, maintenant qu'on est la cause de cette situation, de ce
chaos, on veut maintenant dire: Nous sommes le sauveur."
D'autres également, dans d'autres circonstances, avaient
d'excellentes interventions de ce genre. Je pense en particulier au futur
ministre d'État au Développement culturel, si on en croit les
manchettes, ou au vice-premier ministre d'aujourd'hui, ministre de
l'Éducation. Lui, lorsqu'il intervenait sur ce genre de motion, ce
n'était pas tellement les propos tenus par le député de
Saint-Jacques. Lui, ce qui le préoccupait, c'est qu'il fallait se
réunir pour une session spéciale, qu'il y avait des choses
à régler encore plus importantes et qu'on aurait dû
être convoqué avant. Pourquoi, M. le Président?
Écoutons M. Jacques-Yvan Morin. "Oui, il y a des problèmes
urgents au Québec et, de fait, nous devrions siéger dans cette
Chambre depuis déjà plusieurs semaines pour tenter de les
régler. Il y a des problèmes de fond sur l'économie
québécoise auxquels nous devrions immédiatement, de toute
urgence, nous attaquer. Si le gouvernement, par exemple, continuait M.
Jacques-Yvan Morin, avait voulu convoquer cette session d'urgence pour traiter
la hausse du coût de la vie - cela l'inquiétait, c'était la
faute à Bourassa, n'oubliez pas ça dans votre esprit - avait
voulu convoquer une séance d'urgence pour traiter de la hausse du
coût de la vie dont j'ai pu constater, au cours de ma récente
tournée, à quel point elle heurte en ce moment - écoutez,
M. le Président, le premier ministre, tout à l'heure, semblait
verser quelques larmes, qu'il écoute ce que disait son
prédécesseur en Chambre alors qu'il disait ceci -les familles
dans tout le Québec, si le gouvernement avait voulu que nous traitions
de l'inflation, de la perte du pouvoir d'achat des travailleurs
québécois, si c'était de cela que le gouvernement avait
voulu traiter, nous serions réjouis d'être en Chambre aujourd'hui,
M. le Président." Il continue à donner d'autres exemples parlant
de l'indexation, des tables d'impôt. Si cela avait été pour
cela, M. le Président, il y avait toutes sortes d'exemples qui
méritaient que l'on se réunisse d'urgence. C'est avant le trou de
$500,000,000
M. le Président, nous en avions plusieurs autres et nous
pourrions continuer, mais j'ai pensé que pour donner a nos honorables
collègues l'occasion d'étudier ce projet de loi qu'on vient de
nous distribuer, il ne fallait pas non plus abuser du temps de cette Chambre.
J'aurai sûrement l'occasion, à d'autres moments, de rappeler
à ces honorables amis d'en face les propos qu'ils tenaient alors qu'ils
étaient dans l'Opposition.
M. le Président, le vocabulaire a même changé. J'ai
déjà parlé de vocabulaire qui changeait. Là, vous
n'avez pas entendu parler de loi matraque, c'était la façon dont
on parlait de ce genre de loi. On a changé de vocabulaire,
ayant changé de côté. Même le titre de la loi.
On ne parle pas de loi de retour au travail, on parle de loi sur certains
différends, comme si on ne savait pas trop ce qui se passait. Il devait
y avoir quelque chose qui n'allait pas quelque part. On ne parle pas du
maintien des cours ou du retour des enseignants à l'école: Loi
sur certains différends entre des enseignants et des commissions
scolaires. Est-ce précis? C'est merveilleux de précision, mais
cela encore fait partie du vocabulaire de ce gouvernement.
Nous allons, non pas de gaieté de coeur, mais avec un sentiment
tout de même de responsabilité qui a toujours
caractérisé le Parti libéral du Québec, qu'il soit
au pouvoir ou qu'il soit dans l'Opposition, nous allons donner notre
consentement pour que nous puissions, dans les meilleurs délais,
accepter cette motion d'urgence afin d'aborder, le plus sérieusement
possible, avec le meilleur de nos énergies, entreprendre, au cours de
l'après-midi, l'étude du projet de loi no 113. A cette fin, nous
allons concourir à cette motion présentée par le leader
parlementaire du gouvernement. (11 h 30)
Le Président: M. le leader parlementaire de l'Union
Nationale, vous avez la parole.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Malgré les
bons moments que nous venons de passer avec le leader de l'Opposition
officielle, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'une situation très
sérieuse actuellement. Le leader du gouvernement doit sûrement
être un homme très tiraillé aujourd'hui, il doit vivre des
heures troublantes à ce moment-ci, lui qui, solidaire d'un gouvernement
affichant un préjudice favorable envers les travailleurs, se voit dans
l'obligation, pour la quatrième fois en très peu de temps, de
forcer l'adoption d'une loi spéciale en vue de rétablir la paix
sociale perturbée par des conflits de travail qui mettent en danger, en
péril l'année scolaire de dizaines de milliers d'enfants.
Ce doit être dur de se rendre à l'évidence que son
gouvernement a failli lamentablement à la tâche de reconstruction
sociale qu'il s'était fixée au départ. J'aimerais rappeler
ici non pas les propos du leader du gouvernement, ni ceux de
députés de l'Opposition de 1973 à 1976, mais bien
plutôt une déclaration du premier ministre actuel du Québec
alors qu'il était en campagne électorale, en 1976, plus
précisément le 24 octobre 1976. Il commentait des conflits des
secteurs public et parapublic; il disait ceci: "C'est d'ailleurs vrai dans tous
les domaines, les promesses, même en période électorale,
ça ne vaut pas le papier sur lequel c'est écrit quand c'est
formulé par des gens qui, trop souvent, ont été incapables
de les tenir."
Il continuait: "Et je crois que la paix sociale et l'harmonie que tout
le monde souhaite, on les verra seulement quand un gouvernement pourra
s'atteler à la tâche nécessaire de créer un nouveau
climat. Je devrais même dire, je m'excuse, un nouveau départ."
Le premier ministre actuel disait cela en 1976, il devait être le
sauveur du Québec dans le domaine des relations du travail, il devait
rétablir la paix sociale à travers le Québec dès le
moment où il prendrait le pouvoir. On nous dit aujourd'hui qu'on a
réalisé toutes les promesses et qu'on est maintenant prêt
à affronter l'électorat. Il y a au moins une promesse que le
gouvernement actuel n'a pas réalisée, celle de rétablir la
paix sociale dans le Québec puisque maintenant on est encore aux prises
avec beaucoup de conflits qu'on est obligé de régler par des lois
spéciales. On n'a pas réussi, encore aujourd'hui, à
adopter une loi qui permettra de régler ces conflits de façon
définitive.
En politique, il ne faut donc jamais faire l'erreur de prendre ses
rêves pour des réalités car lorsque celles-ci prennent le
dessus - et, a un moment donné, elles le font toujours - c'est avec
amertume, avec sûrement une certaine désillusion qu'on doit
forcément admettre un échec. D'ailleurs, à voir le leader
du gouvernement défendre doucereusement, presque la larme à
l'oeil, tout à l'heure, la nécessité qu'il y a à
mettre de côté certaines règles de procédures
habituelles à cause de la situation qui prévaut
particulièrement dans la région de Trois-Rivières, il
devient manifeste que le député est mal à l'aise dans ce
rôle de matraqueur que lui impose le gouvernement d'aujourd'hui.
Je n'ai pas l'intention de parler très lonqtemps sur le
caractère d'urgence de l'intervention législative qui pousse le
leader du gouvernement à nous présenter une motion de suspension
des règles de procédure de cette Chambre. Après deux mois
de grève des enseignants de la Commission scolaire régionale des
Vieilles-Forges - aucun, et je le répète, jour de classe pour
environ 40,000 élèves du secteur public - je pense qu'il est
grand temps que le gouvernement bouge! À mon avis, il y a longtemps que
l'urgence de la situation exigeait une intervention vigoureuse du gouvernement.
C'est sans doute son préjudice favorable envers les travailleurs gui l'a
empêché d'agir plus vite.
Ahl je sais bien, Mme la Présidente, qu'on me répondra
qu'il y a eu conciliation, qu'il y a eu injonction, qu'il y a eu enquête,
etc., mais le gouvernement sait fort bien que lorsque le climat est pourri,
lorsque les rapports de force entre les parties indiquent clairement
l'existence d'une guerre de tranchée, de positions quasi immuables de
part et d'autre, toutes ces tentatives, louables en soi, mais peu efficaces, ne
servent, en réalité, qu'à augmenter la frustration des
parties en cause et à exaspérer les victimes innocentes gui
servent de cobayes dans ces conflits interminables.
D'ailleurs, je l'ai dit la semaine dernière à
Trois-Rivières, le gouvernement a fait preuve de laxisme indu et
d'attentisme exagéré. L'urgence existe depuis plusieurs semaines.
C'est évident pour les étudiants; c'est évident pour les
parents et pour de nombreux citoyens de Trois-Rivières et des environs.
Il est temps que le gouvernement laisse de côté ses documents de
stratégie constitutionnelle et qu'il s'occupe avec plus de diligence,
avec plus de sérieux, des problèmes quotidiens que vivent les
citoyens dans leur milieu.
Oui, M. le Président, il y a urgence et ça presse. Mais je
comprends la lassitude du leader du gouvernement. Moi non plus, je n'aime pas
les lois matraques, car elles sont le signe criant, la preuve accablante que
notre système de négociation des conventions collectives dans les
secteurs public et parapublic est déficient, a besoin d'être
repensé, d'être réévalué en pro-
fondeur. Il faudra en venir là si on veut vraiment éviter
la répétition de ce scénario qui devient de plus en plus
loufoque à mesure qu'il se répète d'une fois à
l'autre.
Quant à la motion elle-même, M. le Président, elle
semble conforme à la règle qui, habituellement, dans de telles
circonstances, est suivie.
Nous sommes dans une situation ridicule, mais c'est une situation qui
n'est pas drôle pour ceux qui sont touchés par ces grèves.
Le gouvernement a donc laissé pourrir ce conflit, surtout aux Vieilles
Forges, depuis deux mois. On invoque l'urgence; ça presse, c'est urgent,
on ne doit prendre que quelques heures pour discuter du projet de loi. On
dirait tout à coup que le gouvernement vient de prendre conscience qu'il
est encore le gouvernement. Encore là, M. le Président, on n'agit
que de façon partielle, on ne pose que des cataplasmes, on ne
règle que deux conflits alors qu'il y en a de nombreux qui surgissent un
peu partout à travers le Québec. On nous dit: Cela ne fait pas
assez longtemps. On dirait que le gouvernement veut laisser pourrir la
situation dans les autres commissions scolaires, comme il l'a laissé
pourrir à la commission scolaire des Vieilles Forges. Ils vont attendre
que ces autres conflits soient aussi pourris que celui des Vieilles Forges pour
agir. Ils ne veulent pas déplaire à leurs amis les syndicats. Le
bien des enfants, le bien des parents, ça passe après.
M. le Président, nous de l'Union Nationale, notre groupe d'ici,
nous aurions eu le goût ce matin de nous opposer à cette motion
que le gouvernement nous demande d'adopter. Nous aurions eu le goût de
nous opposer à cela, à moins que le gouvernement ne s'engage
à régler en même temps tous les conflits scolaires du
Québec. Mais nous savons que le gouvernement a fait son lit, Nous savons
que le temps de ces discussions est limité à deux heures. Nous
savons également que le rouleau compresseur du gouvernement va arriver
d'une façon ou d'une autre, un peu comme on l'a fait à Ottawa,
hier soir, pour d'autres raisons.
Nous nous inclinerons donc, M. le Président, et nous verrons
à régler au moins les deux conflits que le gouvernement nous
invite à régler. Pour le bien des enfants, pour le bien des
parents qui sont touchés, nous acceptons cette motion de suspension des
règles de procédure. (11 h 40)
Nous vous informons immédiatement, M. le Président, que
nous collaborons avec le gouvernement pour l'adoption de cette quatrième
loi spéciale en quelques mois et cela, nous le ferons dans les meilleurs
délais et dans le meilleur intérêt de la population du
Québec.
Le Présidents M. le leader parlementaire du
gouvernement, vous avez maintenant la parole.
M. Claude Charron
M. Charron: M. le Président, je ne veux qu'ajouter mes
remerciements à la collaboration qui nous a été offerte,
comme le faisait si bien aussi, lorsqu'il était à ma place, le
député de Bonaventure dans ces circonstances. Je veux dire au
député de Bonaventure que je trouve de fort bonne guerre et tout
à fait normal ce qu'il a fait ce matin. C'est parfaitement son droit. Je
suis rendu à une époque où je me cherche des beaux
côtés à vieillir et un des beaux côtés
à vieillir, c'est précisément de constater qu'on
évolue, comme m'a donné l'occasion de le faire ce matin le
député de Bonaventure.
Je veux dire au député de Nicolet-Yamaska que ce n'est pas
si difficile que cela, une fois que l'on a pris la décision. C'est la
phase de la décision qui est plus difficile à prendre.
Je ne relèverai pas les allusions du député de
Bonaventure aux critiques que nous faisions à l'époque du
gouvernement Bourassa parce que je ne veux pas tourner davantage le fer dans la
plaie du chef de l'Opposition. En conséquence, M. le Président,
je crois que nous faisions à ce moment-là ce qu'elle fait
aujourd'hui, à ce que j'ai pu entendre; nous adresser au gouvernement
sans exclure aucune autre responsabilité à quelconque autre
parti. Mais quand nous sommes dans cette Assemblée - je crois que c'est
ce à quoi nous allons nous livrer à partir de 13. h 30 -c'est au
gouvernement en particulier, parce que c'est lui qui est sur la sellette,
d'expliquer ses gestes, ce que feront mes collègues de
l'Éducation, du Travail et des Finances au besoin selon
l'évolution de la discussion, comme nous l'avons dit hier.
Je rappelle que cette session ne portera que sur ce projet de loi. Nous
aurions pu, effectivement, pour reprendre les propos qu'a cités le
député de Bonaventure, nous pencher sur des questions d'ordre
économique, sur des questions d'ordre social comme ces problèmes
sont désormais au fil de l'évolution des sociétés.
Je rappelle simplement qu'il y a une session régulière de
prévue où tous ces sujets seront abondamment traités, nous
l'espérons. Nous aurions même souhaité qu'elle ait lieu
plus tôt que la date sur laquelle nous nous sommes entendus hier. Donc,
si ces problèmes ne sont pas traités aujourd'hui, je pense que
c'est avec l'agrément de tous et nous saurons donner place à ces
problèmes lors de la session qui débutera le 5 novembre.
M. le Président, je propose l'adoption de ma motion, en rappelant
aux députés, autant que possible, d'être présents
dès la reprise à 13 h 30 pour le débat en deuxième
lecture qui, lui, n'est pas limité.
Le Président: La motion du leader parlementaire du
gouvernement visant à suspendre l'application de certaines règles
de procédure sera-t-elle adoptée?
Des voix: Adopté.
Le Président: Adopté, M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Charron: Alors, je propose la suspension, M. le
Président, conformément à l'ordre.
Le Président: L'Assemblée suspend ses travaux
jusqu'à 13 h 30.
Reprise de la séance à 14 h 4
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Le manuel de l'électeur
Le Président: A l'ordre, s'il vous plaît!
Veuillez vous asseoir.
J'aimerais maintenant solliciter le consentement unanime de
l'Assemblée pour me permettre de déposer aujourd'hui même,
à la demande du Directeur général des élections du
Québec, une brochure qui est intitulée Le manuel de
l'électeur. S'il y a consentement, je vais déposer ce document.
Comme il y a consentement, le document, Le manuel de l'électeur, est
déposé.
Le Secrétaire adjoint: Document déposé.
Projet de loi no 113
Première lecture
Le Président: J'appelle maintenant la première
lecture du projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des
enseignants et des commissions scolaires. Est-ce que cette motion de
première lecture sera adoptée?
M. Charron: Adopté. Le Président:
Adopté.
Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce
projet de loi.
Le Président: Deuxième lecture, même
séance?
M. Charron: Oui, M. le Président.
Deuxième lecture
Le Président: J'appelle maintenant la motion de
deuxième lecture, présentée par M. le ministre de
l'Education, du projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre
des enseignants et des commissions scolaires.
M. le ministre de l'Education.
M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, comme on peut
s'en douter, ce n'est pas de gaieté de coeur que le gouvernement a
décidé de présenter ce projet de loi à
l'Assemblée nationale. La situation qui règne dans le monde
scolaire, particulièrement dans les régions de
Trois-Rivières et de Sorel-Tracy, est telle que le gouvernement n'avait
pas le choix. Bien qu'il n'ait pas été partie et ne soit pas
partie actuellement aux négociations locales, dont j'expliquerai dans un
instant la portée, il se devait d'intervenir. En effet, dans ces
commissions scolaires, les négociations locales ont
entraîné des grèves qui, au moment où nous nous
parlons, mettent en péril l'année scolaire des
élèves tant du primaire que du secondaire, selon le cas.
Dans le passé, on se souviendra que, lorsque les droits des
jeunes à l'éducation ont été menacés de
cette façon - et quelquefois de façon différente - le
gouvernement n'a pas hésité à intervenir, allant
même, au mois de juin dernier, jusqu'à mettre en tutelle une
commission scolaire pour s'assurer que l'année scolaire des enfants ne
fût pas sabordée. Or, la situation dont nous sommes saisis
aujourd'hui est plus grave encore s'il est possible, puisque, dans le cas de la
région de Trois-Rivières, l'année scolaire n'a même
pas pu débuter! Nous en sommes maintenant à huit semaines,
à deux mois de grève, tandis que, dans la région de Sorel,
la grève a cours depuis le 23 septembre, c'est-à-dire qu'elle
dépasse maintenant la durée d'un mois.
Les droits de l'enfant et de l'adolescent à l'éducation,
vous le savez, font l'objet de plusieurs grands documents constitutionnels ou
internationaux; on les trouve affirmés dans les chartes de droits et
libertés. Cela ne va pas, certes, jusqu'à abolir le droit de
grève, je le dirai plus loin, mais on ne peut perdre ces droits de vue
lorsque le comportement d'un groupe est de nature à compromettre un
droit aussi socialement fondamental que celui-là.
Que la portée du projet de loi que les députés ont
sous les yeux soit donc claire. Nos lois reconnaissent le droit de grève
dans les services publics et il n'est pas question d'y mettre fin. Cependant,
lorsqu'un droit empiète sur celui des autres, il est temps d'intervenir,
il est temps de rétablir l'équilibre entre les droits des uns et
des autres. M. le Président, c'est un principe que j'ai entendu souvent
évoquer en cette Assemblée: les droits des uns s'arrêtent
là ou commencent les droits des autres. C'est un principe que vous
connaissez bien en tant que juriste. C'est la raison pour laquelle, M. le
Président, le présent projet de loi n'ordonne le retour au
travail, sous peine d'amende, que dans les commissions scolaires où
l'année scolaire des jeunes et des adolescents est maintenant
compromise. (14 h 10)
Ce n'est pas que le gouvernement souhaite que la grève continue
dans les autres commissions scolaires, on s'en doute bien, mais tout simplement
parce que, au meilleur de notre jugement, nous estimons que l'année
scolaire, dans deux commissions scolaires régionales et dans quelques
commissions scolaires locales, est maintenant compromise. Nous n'avons pas
d'autre choix que de venir à la rescousse des victimes, somme toute
innocentes, de ces procédés, c'est-à-dire les enfants et
les adolescents.
D'ailleurs, nous ne nous désintéressons pas des conflits
qui peuvent avoir lieu ailleurs en ce moment ou qui pourraient éclater,
puisque nous avons prévu des dispositions qui indiquent dans la loi
qu'il n'y aura rien à gagner, soit du côté du salaire, soit
du côté des effectifs par quelque moyen que ce soit, puisque ces
questions ont été réglées dans la convention
nationale. Nous avons voulu limiter l'intervention du Parlement aux cas
où la mesure a été dépassée, où les
droits des citoyens, en l'occurrence des jeunes ou des futurs citoyens, sont
menacés par le comportement de certains enseignants et - je m'empresse
de l'ajouter - là où il n'existe aucune espèce d'espoir de
règlement.
Pour comprendre les événements qui ont mené
à l'impasse dans laquelle nous nous trouvons dans les
négociations locales, je pense que quelques explications sont requises.
Il faut savoir, par exemple, qu'il existe deux paliers de négociation.
Ce n'est sûrement pas aux députés qu'il faut apprendre
cela, mais il est peut-être bon de le rappeler tout de même
à l'intention de la population. Il y a donc deux paliers de
négociation: le palier dit national, où nous
discutons de questions de portée nationale, de questions qui
intéressent l'ensemble des 250 et quelques commissions scolaires du
Québec et qui touchent tous les enseignants. Il y a également des
questions d'intérêt local comme, par exemple, les cotisations
syndicales, l'affichage, les locaux mis à la disposition du syndicat,
les régimes complémentaires d'assurances, l'application des
critères d'affectation, de mutation, etc. Il existe donc deux paliers de
négociation. Et il est connu de tous, je pense, que les questions qui
relèvent de ce qu'on appelle "le monétaire lourd",
c'est-à-dire les salaires et les effectifs, étaient, depuis le
début, destinées à être réglées au
niveau national et non pas discutées ou rediscutées au niveau
local.
Dans les négociations préliminaires qui ont eu lieu entre
les enseignants et la partie patronale, il avait été convenu que
des ententes pourraient être conclues à ces deux niveaux. Et,
lorsque la partie patronale et la partie syndicale se mettaient d'accord pour
qu'une matière, comme on dit, soit traitée au niveau local, le
gouvernement, dans un décret, entérinait la volonté des
deux parties. Lorsque les parties n'arrivaient pas à se mettre d'accord
- et c'est arrivé dans au moins deux cas sur les seize matières
d'intérêt local - le gouvernement a dû trancher et
décider que certaines questions n'étaient pas
d'intérêt local et seraient réservées à la
négociation au niveau national, ou encore seraient envoyées au
niveau local, de sorte que nous avons adopté au moins deux
décrets par lesquels le gouvernement a fait une distinction bien nette
entre ce qui devait faire l'objet d'une discussion au niveau national et les
seize questions d'intérêt local ou régional. Je m'empresse
de le dire parce que certaines des tables de négociation regroupent
plusieurs commissions scolaires tant locales que régionales. C'est
ainsi, par exemple, que bien qu'il y ait plus de 250 commissions scolaires,
nous n'avions que 72 tables de négociation locales puisque les
regroupements étaient non seulement permis mais encouragés
même.
Le principe de la répartition, je le rappelle, est le suivant:
les questions d'intérêt général et, notamment," le
monétaire lourd", les effectifs, les salaires, les avantages sociaux
divers, tout cela a été traité au niveau national et a
fait l'objet d'une convention en bonne et due forme entre la CEQ d'une part et
la partie patronale d'autre part, au mois de mai. Depuis, les
négociations ont été entreprises au palier local ou
régional entre les commissions scolaires, cette fois, chaque commission
scolaire intéressée et chaque syndicat d'enseignants
concerné. En tout, 72 tables de négociation et je devrais ajouter
- ce n'est pas directement pertinent - qu'il existait également 16
tables du côté protestant. J'ajoute que, du côté
protestant, toutes les conventions locales sont maintenant
réglées à l'intérieur des paramètres
prévus dans l'entente nationale, entièrement à
l'intérieur des règles. C'est du côté catholique que
les difficultés se sont accumulées et encore, pas dans l'ensemble
des tables ou des commissions scolaires puisque, à l'heure actuelle,
dans 36 tables, couvrant environ 150 commissions scolaires, des ententes
locales ou régionales ont maintenant été conclues et
même signées.
Ce n'est pas le gouvernement, je le rappelle, qui négocie au
niveau local ou régional.
L'intervention que nous sommes appelés à faire en tant
qu'Assemblée nationale, à laquelle se résout le
gouvernement, ne tient pas au fait qu'il soit partie à ces
négociations. Il tient au fait qu'il est le garant de l'ordre public,
des droits des citoyens et que, dans une situation où le droit des uns a
mené à des abus et empiète sur le droit des autres, en
l'occurrence les jeunes citoyens, le gouvernement et cette Assemblée
n'ont d'autre choix que d'intervenir et de poser les gestes qui s'imposent.
Dans 36 autres tables - la moitié des tables, en somme,
exactement la moitié au moment où nous nous parlons - des
ententes locales ou régionales n'ont pu être signées. Je
précise que ces tables regroupent environ 70 commissions scolaires. On
peut dire que la moitié des tables qui ont réglé
représentent deux fois plus de commissions scolaires que celles qui
n'ont pas encore réglé.
On voit à ces chiffres qu'il est possible de régler
à l'intérieur des paramètres, des règles dont il
avait été convenu au niveau national. On voit qu'il est possible,
pour une commission scolaire et un syndicat d'enseignants, de se mettre
d'accord pour conclure une entente qui respecte, dans ces grandes lignes,
l'entente nationale, bien que dans certains cas - auxquels nous ne toucherons
pas puisque, cette loi ne veut pas être rétroactive, il y a eu ce
qu'on pourrait appeler des péchés véniels,
c'est-à-dire de petits dépassements au-delà des
critères, des paramètres qui permettent de déterminer le
nombre d'enseignants dont une commission scolaire pourra se prévaloir
pour dispenser l'enseignement. (14 h 20)
M. le Président, l'entente nationale signée entre
commissions scolaires et enseignants ne saurait être remise en question
au niveau local ou régional. C'est le principe même qui a
inspiré le présent projet de loi. Une fois qu'on s'est entendu
entre la partie syndicale, en l'occurrence la CEQ, et la partie patronale au
niveau national, il n'est pas question - et le législateur ne saurait le
tolérer - que ces règles soient remises en question ou
contournées, au plan local ou régional, d'une manière ou
d'une autre.
On sait que, lorsque des négociations se déroulent, que ce
soit d'ailleurs sur le plan national ou sur le plan régional ou local,
il se produit des échanges. Le gouvernement cède ou la partie
patronale, dont le gouvernement fait partie cède certaines choses. On se
souviendra, par exemple, qu'en matière d'avantages sociaux, le
gouvernement a franchi des pas importants dans la dernière
négociation. Sur d'autres questions, c'est la partie syndicale qui met
de l'eau dans son vin. De la sorte, on arrive, par une série
d'échanges, de trocs, devrais-je dire, à l'occasion, à se
mettre d'accord sur une convention nationale. Cette convention, une fois
signée, doit s'imposer aux parties.
Voilà le principe fondamental. On ne saurait admettre qu'il soit
possible de revenir sur la convention nationale dans les négociations
locales ou régionales. Or, c'est précisément ce que
certains syndicats locaux ou régionaux, ou représentant plusieurs
syndicats à certaines tables, ont tenté de faire, non pas en se
contentant de contester la lettre à l'occasion, mais allant
jusqu'à contester la lettre et l'esprit de la convention collective
nationale.
Ce n'est un secret pour personne, je pense, qu'il existait divers
mouvements au sein de la CEQ au moment de la négociation et de la
signature de l'entente nationale. Je ne pense révéler aucun
secret, puisque cela était public, en disant que les majorités en
faveur de la signature étaient variables et qu'au sein de la CEQ
même, certains éléments n'ont jamais accepté que la
CEQ signe l'entente qu'elle a siqnée; mais elle l'a signée. En la
signant, après avoir obtenu des votes majoritaires favorables, la CEQ
engageait -c'est le principe même des lois du travail - tous les
syndicats qui y sont affiliés. Certains éléments au sein
de la CEQ n'ont pas accepté la chose et tentent maintenant, par le
truchement des néqociations locales ou régionales, de remettre en
cause ce qui a été acquis et qui a fait l'objet, disons le, de
rudes négociations au plan national.
M. le Président, on ne saurait permettre que ces questions - qui
ont été réglées à la suite de ces
échanges au plan national, échanges dans lesquels chacun a mis un
peu d'eau dans son vin -que ces ententes deviennent l'objet de nouvelles
négociations, en quelque sorte, au palier local ou national. Dans le
projet de loi déposé aujourd'hui devant cette Assemblée,
le gouvernement a tenu à ce que cela soit dit très clairement,
afin d'éviter tout malentendu. Il a tenu à préciser quelle
est la portée de l'entente nationale qui touchait, entre autres choses,
un certain nombre de critères, de règles comme, par exemple -
c'est ce qui fait l'objet des plus vives contestations au niveau local ou
régional - ce qu'on appelle le ratio maître-élèves
en langage de négociation collective, c'est-à-dire la proportion
maître-élèves dans chaque commission scolaire.
Dans toute négociation - dans toute négociation de bonne
foi, j'entends - il y a échanges, chacun met de l'eau dans son vin, on
commence avec des exigences élevées, de part et d'autre et, peu
à peu, on cède ceci ou cela en échange de ceci ou cela.
C'est ce qui s'est produit le printemps dernier, au moment de la
négociation nationale, et c'est ce qui nous a valu la convention entre
la CEQ et la partie patronale dans le domaine de l'enseignement.
De quoi avons-nous convenu? Peut-être serait-il bon que,
brièvement, je montre comment cette négociation a
été fructueuse du point de vue même des enseignants
lesquels ont gagné, dans cette négociation, de très
nombreux points. Je m'empresse d'ajouter que je reconnais très
volontiers que les enseignants ont fait progresser l'éducation sur plus
d'un point, depuis quelques années en obtenant des conventions
collectives dans lesquelles, par exemple, le maximum d'élèves par
classe était de moins en moins élevé - j'en donnerai
quelques exemples dans un instant -c'est pourquoi, M. le Président,
c'est vraiment lorsqu'on est devant l'abus d'un droit que le législateur
doit intervenir et pas autrement.
Aux termes de l'entente nationale qui a été conclue au
mois de mai, on sait peut-être que le salaire moyen des enseignants en
1980-1981 est de $23,500 - je ne parle pas du salaire de chaque enseignant,
mais du salaire moyen - et cela sans compter même les
bénéfices marginaux qui amènent le coût de
l'enseignant moyen à travers le Québec à une trentaine de
milliers de dollars au moment où nous nous parlons. Pour la même
année 1980-1981 - l'année actuelle, n'est-ce pas - la tâche
hebdomadaire d'un enseignant est de 23 heures au niveau primaire et au
préscolaire et de 22 périodes de 50 minutes au niveau secondaire.
En 1982-1983, c'est-à-dire en fin de convention, parce qu'on
négocie quelquefois de manière à étaler sur la
durée de la convention collective, des progrès dans les salaires
et dans les critères qui servent à déterminer le nombre
d'enfants par classe ou le nombre d'enseignants dans chaque commission
scolaire, en fin de convention, dis-je, la tâche sera de 22 heures au
primaire et au préscolaire, 22 heures par semaine. J'estime que ce n'est
pas un régime outrancier. Il y a beaucoup de travailleurs dans la
société québécoise qui font des heures infiniment
plus longues que celles-là et dans des conditions infiniment plus
pénibles, quand on sait ce que la Loi sur la santé et la
sécurité du travail a tenté de corriger.
M. le Président, l'année de travail d'un enseignant, aux
termes de la dernière convention, comme, d'ailleurs, aux termes de la
précédente, est de 200 jours, dont 180 en présence des
élèves. Il peut y avoir de 15 à 18 congés
statutaires par année. On conviendra que ce sont là, somme toute,
d'assez bonnes conditions de travail. En tout cas, je sais beaucoup de gens qui
aimeraient en bénéficier.
En outre, la sécurité d'emploi a été
considérablement améliorée dans la dernière
convention collective. On peut dire qu'elle est, pour ainsi dire, absolue
dès que l'enseignant a atteint la permanence, en principe après
deux ans de service, et dans un rayon de 50 kilomètres de l'école
où il travaillait. Dès qu'il a obtenu la permanence, l'enseignant
obtient la sécurité à vie! II n'y a pas beaucoup de
secteurs de la société, soit dit en passant, qui peuvent se
vanter d'avoir des avantages sociaux aussi considérables.
Il faut dire que le Québec a fait de très grands efforts
depuis une quinzaine d'années pour améliorer les conditions de
travail dans le monde de l'enseignement. En ce qui concerne - prenons un autre
exemple - le rapport maître-élèves qui était d'un
enseignant pour 22 élèves en 19681969, on estime aujourd'hui, en
se fondant sur l'entente nationale qui a été signée au
mois de mai, qu'il sera d'un enseignant pour 16 ou 17 élèves en
1981-1982, en fin de convention, l'année prochaine. Un enseignant pour
16 ou 17 élevés, en moyenne. Il convient, je pense, de noter
à ce sujet que pendant la durée des trois dernières
conventions collectives, les clientèles scolaires du Québec ont
diminué; le nombre d'enfants et d'adolescents dans les écoles
primaires et secondaires a diminué d'à peu près 20% tandis
que le nombre d'enseignants, grâce aux progrès qui ont
été négociés dans chaque convention collective, a
augmenté de plus de 3%. Donc, pour une diminution de l'ordre de 20%, non
seulement le nombre d'enseignants est-il demeuré stable, mais il a
augmenté. (14 h 30)
II est toujours bon - cela éclaire la situation - de comparer
notre situation avec celle de quelques-uns de nos voisins. Prenons l'Ontario,
puisque c'est souvent à cette province que nous aimons nous comparer
pour voir si notre développement est aussi avancé que le leur. Si
on compare la situation des enseignants québécois avec celle de
leurs confrères de l'Ontario, on constate que le rapport
maître-élèves était d'un enseiqnant pour 21
élèves en Ontario et d'un
enseignant pour 17 élèves au Québec, et cela en
1978-1979; ce sont les derniers chiffres dont nous disposons. Depuis lors, la
situation s'est encore améliorée de par la dernière
convention collective nationale au Québec. Ce ne sont pas là de
mauvaises conditions de travail, que je sache.
Prenons une autre question dont il a été fait état
à bien des reprises, on s'en souviendra, pendant les négociations
nationales: le nombre d'élèves par groupe. On sait à quel
point des enseignants, avec raison, ont fait valoir en de nombreuses occasions
qu'il y avait trop d'élèves dans les classes. Noua avons, dans la
dernière convention, fait des progrès assez remarquables.
L'entente prévoit maintenant - et c'est obligatoire - des règles
qui indiquent un maximum quant à la dimension de chacun des groupes
d'élèves que rencontre un enseignant. Si, pour des raisons
majeures qui sont d'ailleurs prévues à l'entente, il y a un, deux
ou trois élèves de trop dans une classe, il y a compensation
financière que reçoit l'enseignant ou encore compensation sous
forme de temps. Evidemment, ce n'était pas le cas auparavant. Cela dure
tant que dure le dépassement.
Je vais vous donner un exemple pour illustrer ces règles, qui
peuvent paraître un peu abstraites. Au secondaire général,
le nouveau maximum d'élèves par classe est de 33 cette
année et sera de 32 l'an prochain. Pour le primaire, la règle est
de 26 élèves par groupe avec un maximum absolu - cette fois,
c'est un maximum absolu - de 28 élèves: 27 au premier cycle et 29
au deuxième, ce qui nous donne cette moyenne de 28. Il faut
considérer que l'entente a amélioré l'ancienne convention
qui ne prévoyait pas de tels crans d'arrêt, mais se limitait
à ce qu'on appelait les dimensions moyennes des classes.
Désormais et à chaque niveau de l'enseignement primaire,
secondaire et préscolaire, il existe des maximums d'élèves
par classe. Ce n'était pas le cas auparavant, sauf sous forme de
moyenne.
Ces mesures, compte tenu du fait qu'elles visent des dizaines de
milliers de groupes d'élèves, sont fort coûteuses; je pense
que tout le monde peut le deviner. Les dépenses entraînées
pour les fonds publics sont très considérables. Au total, le
gouvernement aura, dans cette entente du mois de mai, au chapitre de la
tâche et des groupes d'élèves, augmenté l'effectif
de quelque 1500 enseignants; cela coûte actuellement et coûtera
chaque année qui vient $45,000,000. Ce ne sont pas là, que je
sache, de mauvaises conditions de travail. Et je ne parle même pas des
effectifs supplémentaires qui sont prévus pour mettre en oeuvre
le plan d'action de l'école primaire et secondaire, qui a
été rendu public il y a deux ans, qui amène encore
l'engagement d'un certain nombre d'autres enseignants et de personnel non
enseignant.
On conviendra, M. le Président, que ces conventions collectives,
notamment la toute dernière, ont permis aux enseignants de faire des
progrès considérables. Lorsque nous nous comparons avec l'Ontario
- je pourrais le faire sur d'autres points mais ce serait abuser de la patience
de cette Chambre - le Québec se tire très bien d'affaire. Il est
même, je le dirai tout de go, à l'avant-garde dans le monde de
l'enseignement. Nous battons littéralement la marche, que ce soit pour
les maximums d'enfants par classe, pour les salaires, pour à peu
près n'importe quel aspect des conventions collectives.
Le Québec a fait de grands efforts depuis quelques années
et globalement, les conditions de travail dont nous avons convenu au mois de
mai 1980 nous paraissent exemplaires. Peut-être aurions-nous pu faire
encore davantage si le Québec avait été une
société plus riche, mais nous devons tout de même nous
comparer aux autres, et nous ne sommes pas une société aussi
riche que l'Ontario, par exemple, qui se développe, pour les raisons
qu'on sait, quelquefois plus vite que le Québec, surtout dans le secteur
manufacturier. C'est une province qui est plus riche que nous, non seulement
collectivement, mais par tête d'habitant. L'enseignement au
Québec, par tête, coûte plus cher qu'en Ontario et il s'agit
de plusieurs centaines de dollars de différence.
M. le Président, ces conditions de travail sont de nature,
à notre avis, à rendre possible une éducation de
qualité dans les écoles du Québec. Nous pensons que tous
les enfants du Québec ont droit à cette éducation de
qualité. Nous faisons de grands efforts depuis quelques années.
D'ailleurs, les gouvernements antérieurs ont aussi fait de grands
efforts pour s'assurer du succès de la réforme scolaire et de ce
qu'on a appelé la révolution tranquille. Malheureusement, on se
rend compte quelquefois que l'argent n'y suffit pas. Il faut autre chose; des
qualités pédagogiques, du dévouement, une attention
à l'enfant et à l'adolescent qu'on ne trouve hélas pas
aussi constamment qu'on le souhaiterait. Et cet autre droit, celui des
enseignants d'avoir de bonnes conditions, est fermement consacré, je
crois, par la dernière convention collective.
J'en arrive maintenant aux négociations locales intervenues dans
la foulée de l'entente nationale. Vous le savez, le ratio
maître-élèves, la proportion, le rapport
maître-élèves, ne faisait pas partie des objets de
négociation locale ou régionale. C'était, par excellence,
"du monétaire lourd." On s'en rend compte quand on sait que la
différence entre ce qui est revendiqué dans certaines commissions
scolaires à l'heure actuelle et ce que contient la convention nationale,
est de l'ordre de $60,000,000 par an. Une question comme celle-là ne
pouvait pas être renvoyée à la négociation locale ou
régionale.
Depuis que nous avons décidé au Québec d'organiser
des négociations générales, nationales, pour traiter de
ces questions, il y a maintenant de cela plusieurs années, le sort en
est jeté, ces questions doivent être tranchées au plan
national. Depuis la rentrée scolaire, malheureusement, des syndicats
locaux ont, dans les négociations locales, utilisé divers moyens
de pression dont la grève, justement pour tenter de revenir sur cette
question du ratio. C'est notamment le cas dans la régionale des
Vieilles-Forges, où 20,000 élèves sont privés de
cours, depuis maintenant deux mois. La même situation prévaut
depuis un mois, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, dans la
commission scolaire Carignan qui touche Sorel et, à certains
égards aussi, Tracy, selon qu'il s'agit du niveau primaire ou
secondaire. C'est cette situation qui amène le gouvernement, cet
après-midi, à intervenir et à présenter ce projet
de loi à l'Assemblée nationale, projet de loi qui, je me permets
de l'espérer, pourra rallier l'unanimité parmi les
députés.
Ce projet de loi, pour être bref, a trois objectifs. Le premier,
est le suivant. Le gouvernement estime que le retour immédiat des
élèves en classe et des enseignants au travail est absolument
nécessaire puisque l'année scolaire est déjà
compromise - sûrement dans le cas des Vieilles-Forges - et risquerait de
l'être irrémédiablement dans le cas des deux commissions
scolaires régionales et des locales qui en dépendent dont il
s'agit dans ce projet de loi.
Je ne le cacherai pas, M. le Président, dans le cas des
Vieilles-Forges, les parents et les citoyens ont bien raison d'être
inquiets. L'année scolaire est maintenant dans la balance, puisque
déjà s'achève la première étape de
l'année, qui survient à la fin du mois d'octobre;
déjà les enfants, dans la plupart des commissions scolaires du
Québec, ont progressé et déjà vont obtenir leur
premier bulletin. Voila que, dans cette régionale des Vieilles-Forges,
la rentrée n'a même pas eu lieu, les enfants sont encore à
la maison ou quelquefois dans la rue. Je pense que c'est une situation qu'aucun
gouvernement civilisé et, je devrais dire, qu'aucun syndicat
civilisé ne devrait tolérer. (14 h 40)
Deuxième principe: II ne s'agit pas d'imposer un règlement
dans les négociations au niveau local ou régional, le
gouvernement laissant aux parties la possibilité de s'entendre pendant
quinze jours, après quoi, s'il n'y a pas eu entente, interviendra,
à la demande de l'une des parties, un arbitre.
Troisième principe. Le gouvernement entend préciser, dans
son projet de loi, la portée qu'il convient de donner aux clauses
contenues dans l'entente nationale signée par la centrale syndicale,
celles-là mêmes qui ont fait difficulté et qu'on semble
vouloir contourner ou remettre en question au niveau local ou
régional.
Mais, revenons, si vous le voulez bien, pour terminer, aux fondements
mêmes du projet de loi, puisque nous sommes en deuxième lecture et
qu'il convient de traiter du principe même de la loi. S'il existe dans
notre société, dans toute société civilisée,
un droit fondamental, c'est bien celui des enfants de s'instruire. On ne
saurait indûment prétendre faire obstacle à ce droit et
c'est l'une des responsabilités de l'État de veiller à ce
qu'il soit respecté. Certes, les enseignants ont le droit de
grève et nous ne le suspendons point là où l'année
n'est pas compromise. Cependant, lorsque ce droit vient en conflit avec le
droit social fondamental de l'enfant ou de l'adolescent à
l'éducation, il n'y a pas de doute dans mon esprit que c'est le droit de
l'enfant, le droit du futur citoyen qui doit l'emporter, d'autant qu'il est
parfaitement sans défense.
M. le Président, que l'on songe un instant aux adolescents du
secondaire V qui doivent terminer leurs études cette année
même, présenter leur dossier scolaire pour accéder au
collège, ou encore le présenter pour obtenir un emploi. Quel
préjudice ne risquent-ils pas de subir du fait de leurs enseignants!
C'est une situation absolument intolérable et, encore une fois, je ne
connais pas de société civilisée qui endurerait de pareils
procédés. Ce sont les enfants qui doivent boire cette
grève jusqu'à la lie...
Une voix: Que c'est beau!
M. Morin (Sauvé): Et qui doivent en porter toutes les
conséquences pour leur avenir, particulièrement ceux qui
terminent leurs études cette année.
Il me faut, Mme la Présidente, rappeler une réalité
que trop souvent, hélas, nous avons tendance à oublier. Le
système scolaire est un service. C'est un service public, qu'il s'agisse
des commissions scolaires, du ministère, des enseignants. Nous sommes
tous au service des enfants, des adolescents, des étudiants et de leurs
parents. Nous sommes au service de la population et quand nous perdons ce
principe fondamental de vue, toutes les aberrations deviennent possibles et,
quelquefois, des situations qu'on n'aurait même pas osé
imaginer.
Lorsqu'une année scolaire est compromise, lorsque les parents
exigent que le gouvernement prenne ses responsabilités, lorsque les
parties aboutissent à un cul-de-sac, lorsque les enseignants
défient ouvertement les ordonnances d'un tribunal, lorsque les tribunaux
n'arrivent pas à remettre de l'ordre, Mme la Présidente, je pense
qu'il est temps que le gouvernement intervienne. Il doit le faire en vue de
faire respecter les droits d'une partie importante de la population, en
l'occurrence, plus de 20,000 élèves.
Encore une fois, le droit de grève est reconnu par la loi, encore
qu'il me paraisse étonnant, en dépit de l'expérience que
j'en ai, qu'il nous soit impossible d'en arriver à des ententes
collectives de travail convenables sans avoir recours à des moyens de
pression dont les victimes principales sont des gens qui ne peuvent se
défendre, par définition.
Le moins qu'on puisse dire, c'est que ce droit de grève n'est pas
un droit absolu, en ce sens qu'il ne prévaut pas sur les droits de tous
les citoyens. D'ailleurs, dans cette Chambre, nous avons déjà eu
l'occasion de le dire et de le constater à plusieurs reprises: les
jeunes Québécois de la dernière génération
n'auront guère connu d'année scolaire qui n'ait été
interrompue, d'une manière ou d'une autre, par des congés
forcés que leur imposaient les grèves d'enseignants. Dieu seul
peut mesurer les préjudices que les jeunes ont pu en subir.
M. le Président, bien que le droit de grève ne puisse
être abrogé, il était temps que le gouvernement prenne ses
responsabilités et il n'y avait pas d'autre choix que de mettre un terme
à ces grèves qui duraient depuis deux mois, dans un cas, et un
mois, dans l'autre. Tous s'entendent pour dire - dans cette Assemblée
comme à l'extérieur - qu'on ne doit recourir à ce moyen
extrême que pour appuyer des demandes essentielles et non d'une
façon qui mette en cause l'avenir même des enfants.
Les parents, quant à eux, vous le savez, essaient de s'y
retrouver tant bien que mal, ils tentent de comprendre les raisons qui peuvent
expliquer de pareilles situations. Je dois dire, hélas! que ce n'est pas
en lisant des textes de conventions collectives, réservés pour
ainsi dire à des initiés, à des spécialistes du
vocabulaire de ces conventions qu'ils pourront y comprendre quelque chose; il
faut sûrement d'entrainement pour arriver à comprendre les
centaines d'articles qui se trouvent dans ces conventions collectives, mais,
les parents y sont tout de même intéressés et les enfants,
qui ne les voient jamais, le sont également.
L'intérêt des parents pour ces questions est parfaitement
légitime et, en ce qui nous concerne, je pense que le gouvernement doit
tenir compte de l'inquiétude qui s'empare des parents et de certains
étudiants à l'heure actuelle. Dans le cas des parents, c'est tout
à fait compréhensible et je comprends l'état d'âme
de ceux de Trois-Rivières en ce moment, puisqu'ils sont les premiers
intéressés à l'éducation de leurs enfants. Ils se
doivent de nous rappeler, si jamais on venait à l'oublier - comme c'est
le cas, en ce moment, aux Vieille- Forges - que c'est l'enfant qui doit
être notre principale préoccupation. Je vous remercie, Mme la
Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Marguerite-Bourgeoys.
M. Fernand Lalonde
M. Lalonde: C'est un chant du cygne que nous venons d'entendre de
toute évidence, Mme la Présidente.
J'ai tenté, ce matin - à cet égard, je ne voudrais
pas accabler le ministre - par une question au premier ministre, d'inviter ce
dernier à défendre son ministre de l'Education. Il l'a
laissé tomber lamentablement, il a refusé de dire un seul mot
à son endroit et il le condamne même, comme il vient de le faire,
à venir nous dire l'oraison funèbre que d'autres auraient
dû faire.
Mme la Présidente, je vois le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre qui surveille de très près la performance du
ministre de l'Education. Je lui suggérerais, lorsqu'il prendra la
succession, de le faire sous bénéfice d'inventaire.
Nous voilà donc à la quatrième ou cinquième
loi spéciale depuis que ce gouvernement aux bons préjugés
est au pouvoir - quatrième ou cinquième, j'ai perdu le compte,
Mme la Présidente, on en a eu tellement - en plus d'une tutelle à
la Commission des écoles catholiques de Montréal, une autre
tutelle dans l'Outaouais. (14 h 50)
C'est dans une perspective bien spéciale aussi que cette loi nous
est proposée. Ce qu'il y a de particulier, depuis que le Parti
québécois est au pouvoir, Mme la Présidente, c'est que les
grèves durent plus longtemps et sur une période de temps plus
longue. Savez-vous, en milieu scolaire, seulement en 1979 et en 1980, combien
de jours-personne ont été perdus par les enseignants et les
autres salariés au Québec dans les négociations
provinciales? A la Provincial Association of Protestant Teachers, 78,000 jours;
à la Laurenvale School Board, 23,200 jours; dans le secteur
collégial, la grève des enseignants du 28 janvier au 15
février, 24,000 jours; pour le personnel de soutien à la CSN,
87,000 jours; pour la grève générale du 28 janvier au 12
février, à la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec, 144,000 jours; pour le personnel de soutien, du
25 janvier au 19 février, 180,000 jours; à l'Alliance des
professeurs de Montréal, 58,500 jours. Si vous ajoutez les PNE, les
professionnels non enseignants, et quelques autres grèves, vous arrivez
à 1,249,000 jours. En ajoutant encore les jours perdus en 1979, ajoutez
à cela les grèves qui ne sont pas réglées au moment
où on se parle. A la Commission scolaire des Vieilles-Forges, à
Trois-Rivières, on est rendu à 53,200 jours perdus pour les
salariés. On parlera des élèves tout à l'heure, on
verra jusqu'à quel point le ministre avait l'air sincère
lorsqu'il pleurnichait sur le sort des élèves. Donc, 53,200 jours
à Trois-Rivières; à la Commission scolaire Carignarr,
13,320 jours; à la Commission scolaire Baldwin-Cartier, qui est absente
d'ailleurs de ce projet de loi, 7,150 jours. Si vous ajoutez les jours perdus
par les enseignants qui n'étaient pas en grève, mais qui n'ont
pas traversé les lignes de piquetage du personnel de soutien - on se
souvient - vous ajoutez encore 400,000 jours perdus, ce qui totalise plus de
2,000,000 de jours-personne perdus par le personnel enseignant depuis que le
Parti québécois s'est chargé de faire le bon gouvernement
dans les relations du travail dans ce domaine.
Une voix: Succès.
M. Lalonde: Si on parlait des élèves, multipliez ce
chiffre par quel ratio, M. le ministre? Par 10? Par 15? Par 17? Alors, vous
avez le compte. Si c'est par 17, cela veut dire que c'est incroyable. Soyons un
peu plus modestes, donnons une chance au coureur. Je dirais autour de
20,000,000. Le ministre, au mois de juin, avait admis 15,000,000 lorsque nous
avons étudié les crédits de son ministère.
20,000,000 ou 30,000,000, on ne sait plus, Mme la Présidente.
25,000,000, 30,000,000, 34,000,000 de jours perdus pour les
élèves au Québec depuis 1979 sous le bon gouvernement du
Parti québécois. C'est cela la qualité de l'enseignement,
M. le ministre, que vous pérorez à gauche et à droite,
partout au Québec? Quelle sorte de diplôme signez-vous, M. le
ministre? Vous rendez-vous compte que votre ministère, depuis un an et
demi, a fait de l'enseignement une situation chaotique qui n'a de comparable
que celle de votre ministère?
Parlons de la qualité de l'enseignement. Qu'est-ce qui arrive des
régimes pédagogiques? On le saura seulement en 1981. C'est
facile, on remet cela à plus tard. Il y a eu quelques nouveaux
programmes qu'on n'est pas en mesure de mesurer. On sait, toutefois, que le
plan d'éducation physique à l'élémentaire serait
sur le point d'être aboli. M. le ministre pourrait peut-être nous
répondre là-dessus. Le PEP, ça vous dit quelque chose?
C'est important, ça, à l'élémentaire. Est-ce que
c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que vous
l'abolissez ou si, dans les politiques de restrictions financières d'un
gouvernement à demi en faillite, vous devez projeter de l'abolir? Est-ce
pour améliorer la qualité de l'enseignement, ça aussi?
Est-ce que c'est pour améliorer la qualité de l'enseignement que
vous vous apprêtez, paraît-il, à abolir le programme de
recherche et d'expérimentation? J'espère que dans votre
réplique vous pourrez nous éclairer là-dessus.
Dans quel cadre se déroule ce film d'horreur? Dans un cadre
d'administration qui, lui-même, tient de la légende. Nous sommes
au fond d'un trou de $500,000,000 d'incurie du ministre, de l'administration.
Nous sommes dans une période de centralisation. Comme réaction,
justement, à son incurie, qu'est-ce qu'on voit? On voit un effort de
centralisation auprès des commissions scolaires alors qu'il avait bien
dit, en réponse à des questions que nous lui avons posées
en juin: Nous devons contrôler davantage - et
nous sommes d'accord avec le contrôle du gouvernement pour
éviter le gaspillage d'un demi-milliard qu'on a vu depuis trois ans -
tout en respectant l'autonomie des commissions scolaires. M. le ministre,
j'espère que vous allez nous dire dans quelle mesure, de quelle
façon vous allez vous y prendre. Jusqu'à maintenant, il semble
que le conflit, que vous mettez facilement sur le dos de certains intervenants,
de certains agents, soit le résultat direct des restrictions
financières que vous-même et le Conseil du trésor imposez
actuellement aux commissions scolaires. On aimerait avoir la
vérité là-dessus et on aimerait avoir la
vérité aussi sur le sort que vous proposez aux commissions
scolaires à l'avenir. Est-ce qu'elles seront seulement des chapitres du
ministère ou si nous allons pouvoir leur conserver une mesure
d'autonomie nécessaire pour l'expression locale des parents et des
enseignants dans cette mission importante qu'est l'éducation?
Le cadre de cette loi comprend aussi l'affrontement nourri,
carabiné du ministre avec les commissions scolaires depuis quatre ans,
la méfiance viscérale que le gouvernement, par son ministre de
l'Education, a nourrie pour ces instances locales extrêmement importantes
et que nous, du Parti libéral, reconnaissons comme étant
extrêmement importantes dans cette mission d'éducation au
Québec. C'est un affrontement qui a donné lieu à des
poursuites en cour. Le ministre est toujours rendu devant le tribunal. On
n'entend parler que de conflits entre les commissions scolaires et le ministre
de l'Education, sans parler du coup de force absolument inqualifiable que le
ministre a fait à la Commission des écoles catholiques de
Montréal.
La Commission des écoles catholiques de Montréal, on s'en
souvient, ne voulait pas accepter un certain nombre de choses qui se
négocient localement. Alors, le ministre a déclaré une
tutelle, a nommé son tuteur qui, pendant la nuit, a signé la
convention collective et, après, il est parti. Si ce n'est pas un coup
de force, cela, M. le ministre, je me demande comment ça s'appelle.
C'est cela, le respect que vous avez pour les instances locales. Ce n'est pas
la dernière venue, la Commission des écoles catholiques de
Montréal, c'est probablement la plus importante en nombre, en
expérience, en responsabilité de notre province. Enfin, c'est le
cadre d'administration qui entoure ce que le ministre nous propose
aujourd'hui.
Je pourrais vous parler des promesses brisées. Pendant quatre
ans, le ministre n'a su que faire de l'enseignement aux adultes. Après
trois ans de tergiversations et d'hésitations, il a créé
un comité. Quatre ans pour avoir une politique de financement des
écoles privées et on ne l'a pas encore...
Une voix: On ne l'a pas!
M. Lalonde: ...après des promesses quasi mensuelles! C'est
un véritable roman de voir les promesses du ministre de l'Education
à cet égard. (15 heures)
Et la gratuité scolaire? C'est dans le programme du Parti
québécois. Naturellement, Mme la Présidente, on sait que
le programme du Parti québécois a deux chapitres maintenant: le
chapitre des choses qu'on s'engage à ne pas faire comme la
souveraineté-association et le référendum, et les choses
qu'on s'engage à faire. C'est nouveau, ça. Un proqramme
politique, d'habitude, ce sont les choses qu'on s'engage à faire.
Maintenant, le Parti québécois invente. Alors, j'espère,
M. le ministre, que vous verrez, au prochain congrès de votre parti,
à recevoir l'appui pour cette gratuité scolaire que votre parti
promet depuis dix ans aux Québécois et que vous avez
laissée complètement de côté depuis que vous
êtes au pouvoir.
Mme la Présidente, le projet de loi spécial qui nous est
proposé se situe dans ce cadre que je viens de vous décrire, un
cadre de faillite, d'incurie, de mauvaise administration, et maintenant on nous
demande, à nous, législateurs, de bien vouloir appuyer le
gouvernement. Tout d'abord, laissez-moi vous dire, Mme la Présidente,
que j'ai eu beaucoup de difficulté à prendre au sérieux
les larmes du ministre, tout à l'heure, lorsqu'il invoquait le sort que
l'on réserve aux enfants. M. le ministre, qu'est-ce que vous avez fait
jusqu'à maintenant, depuis le 2 septembre 1980 pour régler la
grève aux Vieilles-Forges? Qu'a fait le ministre des Affaires
culturelles, député de Trois-Rivières, qui brille par son
absence ici, qui aime mieux faire des chicanes avec le juge en chef de la Cour
supérieure à Montréal et parler des vieux procès
que de s'occuper des affaires de son comté? Qu'a fait le ministre, sauf
des grands discours somnifères sur le béton et l'acier et sur la
réforme pédagogique, mais, en même temps, qu'est-ce que
ça vaut, la réforme pédagogique, M. le ministre, si vous
ne vous assurez pas que les écoles ouvrent? Vous vous penchez avec
beaucoup d'indulgence sur le sort de ces enfants. Mais, M. le ministre,
ça fait 38 jours - pas 38 heures - aujourd'hui qui ont été
perdus par les élèves, par chacun des 20,000 élèves
aux Vieilles-Forges. 24 jours à la Commission scolaire Carignan pour les
9000 élèves. Quand avez-vous commencé à verser des
larmes, M. le ministre? Seulement aujourd'hui? Est-ce que vous avez fait autre
chose que vous apitoyez? Il me semble que votre serment d'office vous engaqe
à faire davantage.
Parlons de Baldwin-Cartier, ça fait 11 jours aujourd'hui que
c'est fermé. Lorsque le gouvernement a décidé de convoquer
la Chambre pour prendre connaissance de ce projet de loi, c'est il y a deux
jours, on en était rendu à 22 jours à Carignan.
Aujourd'hui, nous sommes à 11 jours perdus, fermés, à
Baldwin-Cartier. Pouvez-vous nous dire, M. le ministre, quand ça devient
nécessaire de faire adopter une loi? Entre 11 et 22 jours? Quand votre
coeur commence-t-il à saigner pour les enfants qui perdent... On est
intéressé à le savoir, ça, M. le ministre, puisque
c'est absolument nécessaire aujourd'hui - et j'en conviens - c'est plus
que nécessaire. Le député de Maskinongé,
accompagné du député de Portneuf ont dû
eux-mêmes se déplacer pour exiger cette convocation de
l'Assemblée nationale. Cela fait déjà plusieurs jours.
Donc, nous convenons qu'il est grand temps. Mais, M. le ministre, pourquoi pas
Baldwin-Cartier? Je vous le demande. J'espère que vous nous direz quand
l'année scolaire devient en péril?
M. Morin (Sauvé): Faites un amendement.
M. Lalonde: Pardon, M. le ministre, on n'a pas le droit d'amender
la loi, actuellement, vous
nous l'avez défendu ce matin. Donc, si nous sommes, nous de
l'Opposition libérale...
M. Rivest ... un trou de mémoire Une voix: II va de trou
en trou.
M. Lalonde: II semble que ce n'est pas une trouvaille que le
ministre a faite; il a eu un trou de mémoire sûrement
là-dessus. Mme la Présidente, il y a deux principes dans ce
projet de loi. Le premier, c'est le retour au travail des enseignants, donc,
assurer l'enseignement aux enfants, et nous sommes d'accord là-dessus,
100%, nous du Parti libéral. Nous l'appuyons sans aucune
hésitation - au contraire, je l'ai dit tantôt, nous l'avons
exigé - et nous avons exigé du gouvernement qu'il assure
l'enseignement aux enfants ici au Québec. Mais il y a un autre principe
aussi. Un autre principe sur lequel le ministre a glissé un peu,
quoique, vous savez, dans le langage des technocrates qui ont
préparé son discours, on parle du lourd, du léger, etc.
C'est très lourd pour nos taxes, M. le ministre, ce que vous payez, de
toute façon. J'entendais le ministre se vanter de ce que cela
coûte cher l'enseignement au Québec. Mais c'est effrayant! Il se
vantait de cela. Cela coûte, ici au Québec, l'enseignement d'un
enfant, $500 de plus qu'en Ontario. Vous vous vantez de cela, M. le ministrel
Cela fait quatre ans que vous êtes là et vous n'avez pas
réussi à mettre de la rigueur dans votre administration;
ça coûte $500 de plus par année, par enfant, pour
l'enseignement au Québec comparé à l'Ontario.
M. le ministre, j'aurais aimé que vous nous disiez davantage
pourquoi dans l'article 11 - je sais qu'on n'étudie pas l'article
maintenant - vous demandez au législateur d'intervenir dans ce qui
semblait être réglé parce que c'est une question qu'on nous
pose. Comment se fait-il que ce n'est pas réglé? Il me semblait
qu'avant le référendum, dans la période critique
préréférendaire, le gouvernement avait réglé
tout cela, la question des enseignants, la question des relations du travail
dans l'enseignement et dans le reste. Comment cela se fait-il? Est-ce que cela
a été mal écrit, M. le ministre? Est-ce que le
libellé est assez large pour donner ouverture à toutes sortes
d'interprétations, de sorte que vous venez nous demander à nous,
les législateurs, de sabrer dans la convention collective et de lui
faire dire ce que vous pensez qu'elle devrait dire? J'espère que non.
Nous l'avons examiné ce projet de loi; nous aurons des questions
à vous poser à l'étude article par article et nous voulons
être rassurés là-dessus. Nous croyons que si la convention
collective a été signée, quels que soient les motifs du
gouvernement, à ce moment-là, d'éviter tout
problème à cause du référendum, le gouvernement
doit respecter sa signature. Nous allons avoir des questions à vous
poser à cet égard. Donc, si nous sommes, nous de l'Opposition
libérale, en faveur du projet de loi spécial, c'est uniquement
parce qu'il nous apparaît que cette loi spéciale est aujourd'hui
le seul moyen d'assurer l'ouverture des écoles qui sont frappées
par les conflits de travail.
La loi spéciale n'est sûrement pas la meilleure solution.
Je pourrais citer des discours du ministre de l'Education, il y a quatre ans,
que je relisais, mais on n'a pas le droit de s'amuser autant ici à
l'Assemblée nationale. Ce n'est sûrement pas la meilleure, ce
n'est sûrement pas la solution qui assure la paix scolaire dans les
écoles - cela vous rappelle des souvenirs, M. le ministre, la paix
scolaire, en 1976? - mais c'est la seule voie qui peut nous mener vers la
reprise de l'enseignement dans les écoles. Nous avons le droit, nous
avons le devoir de vous poser un certain nombre de questions; j'en ai
posé quelques-unes. En ce qui nous concerne, dans l'Opposition, nous
croyons que le ministre de l'Education est le grand responsable de la situation
actuelle. En effet, si le gouvernement péquiste impose des restrictions
budgétaires aux commissions scolaires qui, d'autre part, doivent
appliquer la convention collective signée par ce même
gouvernement, c'est qu'il y a une raison; la raison, on a le droit de la
savoir. Est-ce que c'est parce que le ministre des Finances n'a pas fait ses
devoirs? A-t-il mal calculé ses prévisions budgétaires?
(15 h 10)
A cause de l'incertitude politique engendrée par la
présence d'un parti indépendantiste au pouvoir, on le sait, M. le
Président, vous le savez comme nous, l'économie du Québec
ralentit. La rentrée des impôts est moins élevée que
ce que prévoyait le ministre des Finances. Tout le monde le sait, le
ministre des Finances a émis des directives très
sévères pour tenter de colmater le bateau qui coule. Son
déficit de $2,300,000,000 au mois de mars serait plus près de
$2,500,000,000 aujourd'hui, M. le Président. Donc, c'est une des raisons
des restrictions budgétaires imposées par le gouvernement aux
commissions scolaires.
Il y a aussi une autre raison et c'est celle du fameux trou de
$500,000,000 qui s'est creusé sous les yeux mêmes du ministre de
l'Education sans qu'il ne le voie pendant trois ans. Naturellement, le
Vérificateur général a confirmé
l'incompétence et l'incurie administrative au ministère de
l'Education depuis trois ans. Le ministre n'a pas su prévoir, il n'a pas
su corriger le gâchis de son ministère avant le mois de novembre
1979 et là, c'est important. Pendant trois ans, le ministre de
l'Education a vu des gaspillages de centaines de millions de dollars qu'il n'a
pas su arrêter et ce n'est qu'en novembre 1979 - rappelez-vous cette date
- qu'il en a avisé son collègue des Finances. Or, quelques
semaines à peine auparavant, le ministre des Finances offrait 1,600
nouveaux postes dans la négociation de la convention collective des
enseignants. Ces 1600 nouveaux postes sont maintenant dans le système ou
enfin, pour la durée de la convention et ils coûtent ou
coûteront au bas mot $35,000,000 à $40,000,000 par
année.
Le ministre des Finances lui-même dans son discours du budget de
mars 1980 admettait que s'il avait connu le coût véritable du
système d'enseignement primaire et secondaire au Québec, il
n'aurait jamais fait l'offre de 1600 postes. Donc, à cause de
l'incompétence et de l'incurie administrative de son collègue de
l'Education, le ministre des Finances admet que cela nous coûte à
nous, payé à même nos taxes, de $30,000,000 à
$40,000,000 de trop par année pour le seul système primaire et
secondaire. Le ministre des Finances veut-il les récupérer sur le
dos des enseignants, sur le dos de l'enseignement, sur le dos de la paix
scolaire, sur le dos de la qualité
de l'enseignement? Impose-t-il donc des restrictions budgétaires
aux commissions scolaires gui sont prises entre deux feux, comme je le disais
tout à l'heure? Serait-ce la deuxième raison majeure? M. le
Président, nous posons ces guestions au ministre.
Il reste - je vais terminer là-dessus - que notre appui à
la loi est un appui aux parents qui s'inguiètent, à bon droit, du
sort fait à leurs enfants dans ces commissions scolaires. C'est un appui
à la gualité de l'enseignement gui est mise en péril comme
jamais auparavant par l'incurie du gouvernement péguiste, mais c'est une
condamnation, condamnation gue nous crions, M. le Président, à
l'égard du gouvernement et du ministre de l'Education.
Une voix: Bravo!
Le Président: M. le député de Gaspé.
M. Michel Le Moignan
M. Le Moignan: M. le Président, lorsgu'il s'agit d'un
conflit de travail gui affecte des services publics jugés essentiels
pour une société, le gouvernement doit faire preuve d'un esprit
de décision. Vous me direz gue c'est là une vérité
de La Palice. Malheureusement, ce ne l'est pas pour tout le monde et
sûrement pas pour le gouvernement actuel.
Je déplore le fait gue le gouvernement se voie dans l'obligation,
pour la guatrième fois en guelgues mois seulement, d'avoir recours
à une procédure gui constitue, à sa face même,
l'admission d'un échec lamentable de sa part vis-à-vis de
l'électorat québécois. Voilà maintenant guatre ans
gue je siège en cette Chambre et je n'arrive pas à m'habituer
à ce scénario de plus en plus loufogue gue nous impose le
gouvernement chague fois qu'un conflit de travail met en danger un service
essentiel destiné au grand public, qu'il s'agisse des services de
santé ou, comme dans le cas présent, des services
d'éducation.
M. le Président, loin de moi l'idée de nier le droit
d'association des travailleurs; loin de moi l'idée de nier le droit de
ceux-ci d'entreprendre des négociations de bonne foi, des
négociations avec la partie patronale pour la conclusion de conventions
collectives en vue d'établir des conditions de travail acceptables et
dignes d'une société qui se veut civilisée et à la
fine pointe du progrès.
Ces droits sont reconnus et il est bon qu'il en soit ainsi, mais dans
les secteurs public et parapublic en particulier, il faut reconnaître, en
toute responsabilité, que ces droits d'association et de
négociation ne doivent pas s'ériger en absolu face à des
droits aussi fondamentaux que le droit à la santé et aussi le
droit à l'éducation.
Les conflits de travail gui ont provoqué la tenue de cette
session spéciale illustrent bien le problème de fond auquel nous
faisons face aujourd'hui et gue malheureusement, encore une fois, nous risquons
d'escamoter, soit par faute de temps, soit par faute de volonté
populaire d'aller vraiment au fond des choses. Cela m'apparaît beaucoup
plus grave, beaucoup plus tragique.
M. le Président, nous pourrions discourir longtemps sur l'aspect
technigue de ce conflit, je devrais plutôt dire sur l'aspect
technocratique de ce conflit, tellement la question, qui est au coeur de ce
problème qui oppose enseignants et commissions scolaires, est complexe
et, en définitive, ne peut être comprise dans toute sa
signification que par des experts de ce domaine.
Bien au-delà des questions d'interprétation de conventions
collectives et des accusations qu'on se lance de part et d'autre pour justifier
soit la grève, d'une part, soit le lock-out d'autre part, je voudrais
profiter du temps qui m'est accordé pour sensibiliser les membres de
cette Assemblée et, bien sûr, la population qui nous
écoute, sur la nécessité pour nous, législateurs,
d'aller un peu plus loin dans notre réflexion d'aujourd'hui et d'aborder
franchement la question de fond, la racine du mal qui est la source de tous ces
conflits qui, depuis un an au moins, nous ont forcés à
siéger de manière urgente pour adopter ce qu'il est convenu
d'appeler les lois matraques.
M. le Président, il ne faut pas camoufler la
réalité, il ne faut pas avoir peur de dire les choses telles
qu'elles sont, nous sommes ici pour refléter, dans tous ses aspects, la
réalité sociale et politique du Québec. Nous devons avoir
le courage de nos convictions et agir aussi en conséquence.
M. le Président, vous le savez comme moi, la population
guébécoise est vraiment à bout de nerfs, elle en a
soupé de ces conflits interminables et trop fréquents dans tous
les secteurs publics et parapublics. La population québécoise ne
veut plus que, pour des motifs de stratégie de négociations ou
encore pour la défense de principes qu'un groupe peut estimer essentiels
à son bien-être, on remette en cause ces droits aussi
fondamentaux, des droits aussi essentiels que celui de la santé ou
encore pour revenir au problème qui nous préoccupe aujourd'hui,
ce droit à l'éducation.
Je suis certain que je me fais le porte-parole de l'immense
majorité des citoyens en affirmant que, dans une société
civilisée, il est insensé, il est inadmissible même que
l'on permette à un groupe de citoyens, nonobstant les raisons qui les
motivent, de mettre en péril, de nier catégoriguement à
toute une population sans défense des services auxquels ces mêmes
populations ont un droit fondamental. J'inclus dans cette catégorie de
droits fondamentaux le droit des enfants à une éducation de
qualité. (15 h 20)
D'ailleurs, on tend à oublier et trop rapidement que ce droit
à une éducation de qualité, à une éducation
publique accessible à tous, est consacré dans la Charte des
droits et libertés de la personne adoptée par cette
Assemblée. En effet, on lit à l'article 40 de cette charte, sous
le titre Droits économiques et sociaux, ce qui suit: "Toute personne a
droit, dans la mesure et suivant les normes prévues par la loi, à
l'instruction publique gratuite." Or, qu'en est-il, en réalité,
de l'existence de ce droit dans les conflits actuels, particulièrement
dans la région de Trois-Rivières où, depuis le
début de l'année scolaire, des enfants au nombre d'au moins
20,000 n'ont jamais mis les pieds dans l'école, n'ont même pas eu
une seule journée de classe? Il ne peut exister, à mon avis, une
raison capable de justifier une telle situation au point de vue moral. Je sais
que la loi à l'heure actuelle le permet, mais le temps n'est-il pas
venu de réévaluer cette législation qui permette
à de telles situations de se produire, des situations qui, en
définitive, nous enlisent dans un cul-de-sac qui mène
irrémédiablement à la loi matraque?
Je l'ai constaté mercredi lors d'un passage à
Trois-Rivières. A l'occasion d'une ligne ouverte, nous avons reçu
des témoignages vraiment époustouflants. On sentait là-bas
que le climat est pourri et les gens sont exaspérés et les
parents sont excédés face à leur impuissance. On sent
là-bas qu'il y a un sentiment de dégoût qui ne peut laisser
personne indifférent. J'ai été frappé
également par les nombreux témoignages reçus alors que
j'ai passé quelques heures dans l'après-midi et dans la
soirée à rencontrer des gens. C'était toujours le
même raisonnement que l'on faisait: Pensez-vous que nos enfants vont
enfin retourner à l'école après deux mois d'absence?
C'est un plaidoyer en faveur du bon sens, en faveur du respect des
droits fondamentaux des citoyens que je fais aujourd'hui. Je demande à
mes collègues de cette Assemblée et tout particulièrement
à ceux qui détiennent le pouvoir et, avec ce pouvoir, la
faculté de changer les règles du jeu, je demande à tous
ces gens d'entendre cet appel qui ne vient pas seulement de l'Union Nationale,
mais bien d'une vaste majorité de citoyens québécois dans
toutes les régions du territoire.
Au cours d'une brève tournée en province que j'ai
entreprise au début du mois d'octobre, j'ai eu le loisir de discuter de
cette question avec de nombreux contribuables et j'ai pu constater aussi bien
à Trois-Rivières où j'étais il y a deux jours,
aussi bien chez les jeunes du collège d'Alma où j'étais la
semaine dernière, aussi bien chez les gens de Roberval et de Chicoutimi,
aussi bien à Matane, à Rimouski, à Rivière-du-Loup
et à La Pocatière, que le temps est propice à une action
gouvernementale qui s'attaquerait à la racine du mal,
c'est-à-dire la remise en cause du droit de grève dans le secteur
public.
L'Union Nationale, M. le Président, a déjà fait
oeuvre de pionnier dans ce domaine. Au mois d'octobre 1979, l'Assemblée
nationale du Québec adoptait à l'unanimité une motion
présentée par l'Union Nationale qui se lisait comme suit: "Que
cette Assemblée est d'avis que la commission permanente du travail et de
la main-d'oeuvre soit convoquée afin d'étudier la
possibilité de remplacer le droit de grève dans les secteurs
public et parapublic par une formule de négociation permanente
comprenant l'arbitrage obligatoire pour le règlement des clauses
normatives et l'élaboration d'une politique salariale basée sur
la moyenne payée dans le secteur privé."
M. le Président, nous sommes revenus à la charge
constamment depuis ce temps pour connaître, pour essayer de sonder les
intentions du gouvernement face à ce voeu unanime de tous les membres de
l'Assemblée nationale. Le 5 mars dernier, à peine quelques jours
après mon entrée en fonction comme chef intérimaire de
l'Union Nationale, je demandais au premier ministre ses intentions à ce
sujet et celui-ci m'avait dit à l'époque ce qui suit:"On ne peut
pas donner au nouveau chef de l'Union Nationale la date de la commission
à laquelle on s'était engagé, mais une chose est certaine,
c'est qu'aussitôt qu'on verra un peu plus clair, que les conflits
importants, surtout celui qui affecte les professionnels du gouvernement,
seront réglés et qu'on sera sorti du débat actuel,
sûrement qu'on pourra discuter avec les intéressés de cet
engagement qui a été pris et qui sera tenu."
Le 17 juin 1980, quelques heures à peine avant la prorogation de
la dernière session, le leader parlementaire du gouvernement ajoutait
à mon collègue de Richmond la précision suivante et je
cite: "C'est notre voeu unanime, à l'Assemblée, de respecter
l'ordre de la Chambre. En ce qui concerne la réunion sur les relations
du travail dans les secteurs public et parapublic que la commission doit tenir
à la suite d'un ordre de la Chambre, maintenant que les
règlements sont tout à fait terminés avec tous ceux avec
qui nous avions à négocier, il devient possible de nous rendre au
voeu de la Chambre. Je crois simplement - on en discutera plus
profondément -qu'il serait plus opportun de tenir à l'automne ce
genre de consultation plutôt qu'au milieu des vacances parce que ce n'est
pas simplement entre nous que nous devons tenir cette discussion mais, bien
sûr, avec tous les partenaires impliqués." Le leader s'exprimait
donc en ces termes le 17 juin 1980.
Nous voici déjà rendus à l'automne et on veut en
discuter plus profondément, comme l'a dit lui-même le leader
parlementaire. Je pense à l'importance du sujet pour tout le monde:
travailleurs, parents, étudiants, malades dans les hôpitaux et
centres sociaux; vraiment tout le monde exige qu'on passe à l'action et
cela le plus vite possible. Je demande donc encore une fois au leader
parlementaire du gouvernement de consulter ses collègues du Conseil des
ministres le plus tôt possible au sujet de la convocation de cette
commission parlementaire. Je tiens à lui dire tout de suite que l'Union
Nationale ne voit aucune objection à élargir le cadre de cette
réflexion au grand public. Nous serions très heureux que cette
initiative de l'Union Nationale débouche sur une action concrète
qui mènera éventuellement à une révision en
profondeur des règles du jeu pour les négociations des
conventions collectives dans les secteurs public et parapublic.
Je demande au leader du gouvernement aujourd'hui de prendre l'engagement
ferme de donner suite aux propos qu'il a tenus lui-même en cette Chambre
le 17 juin dernier à l'effet que ce soit à l'automne,
c'est-à-dire maintenant qu'on tienne la consultation demandée par
notre formation politique et approuvée unanimement par tous les membres
de cette Chambre.
Le projet de loi no 113 doit passer à l'histoire comme
étant le dernier d'une série de lois matraques qui ont servi de
soupapes d'urgence à trop de gouvernements pour régler des
problèmes qui exigeaient une intervention beaucoup plus en profondeur,
qui exigeaient, en somme, des solutions à long terme et non des
cataplasmes de dernière minute dans un climat de panique et d'urgence.
Je disais, au début de mon intervention, que l'existence de ce projet de
loi, le quatrième présenté par ce gouvernement qui nous
avait promis un nouveau départ, un nouveau climat social, est la preuve
d'un échec lamentable que la population ne lui pardonnera jamais. Bien
sûr, le gouvernement a failli à son engagement, il
n'a pu faire mieux que le gouvernement précédent et - il
faut bien le dire - le ministre de l'Education doit également se rendre
à l'évidence qu'il partage cette responsabilité
d'échec de son gouvernement. (15 h 30)
Que ce soient les conflits sérieux qui ont opposé le
ministre et les commissions scolaires depuis plus de trois ans, que ce soit le
fouillis administratif qui a donné naissance à un trou financier
de plus de $500,000,000 de l'argent des contribuables, que ce soit le recours,
pour la deuxième fois, dans l'espace de quelques mois seulement,
à des lois matraques pour mettre fin à des conflits de travail
dans le domaine de l'éducation, je pense qu'il s'agit là d'un
triste bilan pour le ministre de l'Education qui se voit aujourd'hui dans
l'obligation de parrainer un projet de loi qui illustre dans les faits les
difficultés qu'il a eues à imposer sa marque et à conduire
à bonne fin les projets qu'il s'était initialement imposés
lors de sa nomination à ce poste.
Il semble de plus en plus certain, s'il faut se fier aux rumeurs, que le
ministre parrain de la loi 113 occupera bientôt de nouvelles fonctions au
sein du Conseil des ministres. J'aurais préféré, pour ma
part, si cette information est exacte, que ce changement se fasse dans de
meilleures circonstances. M. le Président, mon collègue de
Nicolet-Yamaska disait ce matin, en parlant sur la motion d'urgence, qu'il faut
éviter, en politique, de prendre ses rêves pour des
réalités, car, tôt ou tard, il arrive toujours que ces
réalités prennent le dessus et, à ce moment-là,
c'est la désillusion, l'amertume, même quelquefois le
désespoir.
Nos collègues d'en face, députés du Parti
québécois, sont sûrement aujourd'hui
désillusionnés face au bilan très négatif du
gouvernement dans le domaine des négociations des conventions
collectives dans les secteurs public et parapublic. Ils peuvent se
réconforter car ils ne sont pas les seuls à partager cette
opinion. Ils ne sont pas les seuls à partager cette désillusion.
La population entière du Québec partage aujourd'hui ce sentiment
et nul doute qu'aux prochaines élections générales, qui ne
sauraient tarder en 1981, les députés ministériels vont
récolter les fruits de cette semence et se verront
sévèrement répudiés par les contribuables
québécois.
M. le Président, si j'ai insisté surtout sur le
problème de fond, c'est que je vais laisser à mon collègue
de Mégantic-Compton le soin d'aborder le sujet dans des détails
plus précis et plus techniques. Merci, M. le Président.
M. Fontaine: II est déjà élu! M. Johnson:
M. le Président... Le Vice-Président: M. le ministre
du Travail. M. Pierre-Marc Johnson
M. Johnson: M. le Président, vous me permettrez, d'abord,
une première remarque. Le sujet que nous touchons aujourd'hui est quand
même d'une certaine importance pour environ 20,000 étudiants,
quelque 1000 enseignants ou un peu plus même que 1000 enseignants et les
populations de la région de Sorel-Tracy et de la grande région de
Trois-Rivières. C'est pour ça, M. le Président, que je
vous dirai que je suis convaincu que, s'il fallait que les débats
à cette Assemblée se situent au niveau où le
député de Marguerite-Bourgeoys les a situés tout à
l'heure, cela deviendrait, M. le Président, intolérable pour les
citoyens du Québec et indigne du traitement de sujets importants en
cette Chambre.
M. le Président, on a demandé tout à l'heure quelle
avait été l'implication des membres du gouvernement et du
côté ministériel dans ce conflit. Le ministre de
l'Education a eu, tout au long de l'entente nationale, à y
représenter les intérêts de la collectivité à
travers une série de règles qui avaient été
établies par ce Parlement il y a déjà deux ans. Il a, dans
les deux conflits locaux sur lesquels nous légiférons
spécifiquement quant au retour au travail, eu à suivre, lors de
ces semaines de grève, presque quotidiennement, le déroulement de
la négociation et à s'en inquiéter et à en faire
rapport à celui qui vous parle, dans la mesure où celui qui vous
parle avait la responsabilité de mettre en branle les mécanismes
du Code du travail au niveau local. A cet égard, je pense que son
implication, je pense aussi que son souci d'homme public et d'homme respectant
d'abord et avant tout le mandat qui découle des lois de ce Parlement
sont tout à son honneur.
Je voudrais également souligner les interventions nombreuses et
malgré tout sereines à travers ces difficultés de mon
collègue de Trois-Rivières, de celui du comté de Champlain
et du député de Richelieu. Ils étaient
préoccupés, comme je le présume, le député
de Maskinongé a dû l'être également, par ce qui se
passait chez eux; ils étaient préoccupés par ce qui
arrivait à des citoyens, à des jeunes, à des enseignants
et à une population qu'ils connaissent.
M. le Président, il faut bien, pour mieux voir, reprendre la
perspective de ce conflit et de ce qui nous a amenés ici, ce qui a
amené cette notion d'une négociation à deux paliers. Le
ministre de L'Education, tout à l'heure, l'a évoqué avec
une assez grande précision; je reprendrai simplement brièvement
ce tableau pour être bien sûr qu'on se comprend.
Historiquement, au milieu des années soixante, le Québec a
connu une revalorisation ou une valorisation de l'enseignement. A cet
égard, des hommes et des femmes qui avaient consacré une partie
de leur vie à enseigner étaient, jusqu'au début des
années soixante, sous-payés et même méprisés
à certains égards par une partie de la société. Le
milieu des années soixante a permis cette revalorisation et le travail
accompli par les gouvernements successifs, depuis le milieu des années
soixante, a fait en sorte que ces efforts qui étaient nécessaires
dans notre société, sont arrivés à amener l'Etat
à définir les règles du jeu en matière de
négociations parce que les négociations devaient amener la
dépense de fonds publics considérables. C'est ainsi que les
derniers développements dans ce secteur ont amené - par les lois
55 et 59, on s'en souviendra, pour la définition du cadre des
négocations des conventions collectives dans les secteurs public et
parapublic - à établir une règle très simple et
très claire pour tout le monde, à savoir que les
conséquences financières, ce qui va coûter de l'argent aux
"payeurs de taxes" du Québec, cela devait se négocier au niveau
québécois, c'est-à-dire dans son ensemble; c'est la
négociation dite provinciale ou nationale. Par ailleurs, d'autres
sujets pouvaient faire l'objet d'ententes au niveau local entre un syndicat et
une commission scolaire ou un syndicat et un conseil d'administration
d'hôpital dans le secteur de la santé. Qu'est-ce qui s'est
passé dans les faits? Il s'est passé dans les faits qu'il y a eu,
au cours de l'hiver dernier, une entente de principe intervenue entre le
gouvernement du Québec, l'Etat à travers les lois adoptées
par ce Parlement, et la Centrale de l'enseignement du Québec et
qu'à ce titre le ministre de l'Education est intervenu dans la signature
d'un instrument, comme on le dit en droit, d'une convention collective, au mois
de mai dernier. Le président de la Centrale des enseignants du
Québec est également intervenu et il a signé ces
documents. Or, il fallait donc que les négociations locales reprennent.
Ce qui avait duré, dans certains cas, en même temps que la
négociation nationale sur les grandes clauses à
conséquence financière. Dans le cas, par exemple, de Carignan,
Sorel-Tracy, 50 séances de négociations ont eu lieu
jusqu'à ce que soit déclenchée une grève à
la fin du mois de septembre. (15 h 40)
II y a eu conciliation les 24, 28 et 29 septembre, les 1er, 3, 5 et 6
octobre, et au cours de ces séances de conciliation, il y a eu certains
progrès accomplis sur ce qu'on appelle les clauses locales qui, dans
certains cas, peuvent toucher l'affichage, la réaffectation ou la
participation des enseignants, les versements de traitement, le calendrier
scolaire, etc. Et là, un point central, comme on le verra tout à
l'heure dans le cas de Trois-Rivières, a achoppé,
c'est-à-dire toute cette question de ce qu'on appelle le 8-6, la
question des ratios et des conséquences que l'on connaît à
cela.
Dans le cas des Vieilles-Forges, c'est-à-dire de toute la
région de Trois-Rivières, 25 février, première
rencontre entre les parties, entre l'Association des commissions scolaires
catholiques des Vieilles-Forges et le Syndicat des enseignants des
Vieilles-Forges. En février, mars et avril, 24 séances de
négociation en direct. Le 8 avril, demande de conciliation au
ministère du Travail. Le 16, nomination de M. Normand Gauthier,
conciliateur au dossier. Du 22 avril au 28 mai 1980, seize séances de
conciliation. Du 12 au 20 juin, offres globales et finales de la commission et
rejet par les enseignants. Juillet et août, calme plat que je reproche
ici aux représentants de la commission scolaire et aux
représentants des enseignants, un calme plat qui est inadmissible.
Le 20 août, à la demande du conciliateur et à ma
demande auprès de celui-ci, convocation des parties, l'impasse
subsistant. Puis la grève, comme on le sait, le 2 septembre. 22
séances de conciliation entre le 4 et le 23 septembre. Le 1er octobre,
étant donné l'impasse, nomination de l'enquêteur en vertu
de l'article 111 du Code du travail et le 10 octobre, signification des
procédures demandant au tribunal d'ordonner le retour au travail.
Ce qui s'est passé, à toutes fins pratiques, c'est
qu'entre autres, après 40 séances de négociation et de
conciliation, pas un article n'était paraphé. C'est ce qui s'est
passé dans le cas des Vieilles-Forges en particulier. On a le droit de
se poser des questions sur ce qui se faisait à cette table. Cela a
achoppé essentiellement autour de deux grands aspects de la
négociation: le thème véhiculé dans la
région de Trois-Rivières, entre autres, sur la notion de droits
acquis et également cette question du ratio, c'est-à-dire du
nombre de professeurs qu'on voudrait voir la commission scolaire s'obliger
contractuellement à embaucher.
Sur la question des droits acquis, il faut bien comprendre que dans le
cadre d'une convention collective, c'est une des notions les plus
répandues, les plus connues et les plus populaires, je dirais. Quand un
syndicat a obtenu dans une convention collective certaines choses, il n'aime
pas qu'on revienne dessus, de façon générale, et c'est
normal. Il ne faut pas en être surpris, mais ce qui est différent
dans le cas présent, c'est que les deux demandes syndicales, à
savoir la conservation des acquis au niveau local en 1976-1977 dans certains
cas, sont contradictoires avec une entente nationale signée par le
représentant de la Centrale des enseignants du Québec. A cet
égard, on ne peut pas parler de droits acquis dans la mesure où
le président de la CEQ, en signant, a accepté de remettre en
cause des dispositions qui, par ailleurs, pouvaient affecter ces enseignants
à Trois-Rivières. On ne peut pas mettre non plus en cause la
bonne foi ni du gouvernement, dans cela, ni des négociateurs au niveau,
je présume, de la partie patronale dans la mesure où, à
cet égard - et à cet égard seulement - ils se
référaient à l'entente nationale, ni, évidemment,
la bonne foi ni l'efficacité ni l'énergie des conciliateurs et
des différents intervenants du ministère du Travail. Ce qui s'est
fait au niveau national et ce qui a été échangé,
peut-être, par exemple, tout le problème de la répartition
des journées pédagogiques, l'a été dans un contexte
qui, normalement, est un contexte de donnant, donnant, un maximum de
tâches, la sécurité d'emploi sous la notion du 50
kilomètres.
On présume que quand le président de la Centrale des
enseignants du Québec a signé ce document, il avait
accepté, peut-être en échange, de renoncer à
certaines dispositions qui, par ailleurs, avaient fait l'objet d'ententes
antérieures aux Vieilles-Forges, en 1976-1977 ou même avant
ça. A cet égard, il faut bien se rappeler qu'aux Vieilles-Forges,
depuis dix ans, il n'y a jamais eu de convention collective authentique de
signée. Le règlement, aux Vieilles-Forges, s'est toujours fait
par décret ou par une espèce d'acceptation de quasi-arbitrage
comme en 1976-1977; il n'y a pas une très longue tradition de signature
aux Vieilles-Forges entre les parties; il faut s'en rendre compte aussi.
Evidemment, il y a toute cette question des ratios sur laquelle, je
présume, mes collègues reviendront.
La négociation, à certains égards, est devenue une
affaire de spécialistes. Une convention collective nationale de 223
pages, M. le Président, ç'a commencé quelque part dans les
années soixante. Une convention locale de près d'une centaine de
pages échangée entre le Syndicat des Vieilles-Forges en
particulier - puisque je parle de ce conflit en ce moment - et la partie
patronale; 150 pages de demandes ou de documents syndicaux, et à peu
près l'équivalent ou un peu moins du côté patronal,
c'est devenu une affaire de spécialistes.
Par exemple, sur l'affichage, pas l'affichage des postes, l'affichage
pour savoir quant aux assemblées syndicales, etc., de nombreuses pages
dans une convention collective; le syndicat veut faire une partie
d'huîtres, c'est compliqué, quatre pages et demie à peu
près de procédures pour savoir où on peut mettre ça
sur un babillard. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas aux Vieilles-
Forges. Et je ne suis pas sûr que ce soit seulement le syndicat qui soit
responsable à cet égard. Si la partie patronale elle, de son
côté veut annoncer - je ne sais pas - un tarif réduit sur
les autobus pour aller à une partie des Expos, même chose: des
procédures interminables, sur l'allocation des locaux, par exemple, dans
la commission scolaire. Il y quelque chose qui ne va pas aux
Vieilles-Forges.
A cet égard, c'est à se demander si les
spécialistes de la négociation, de part et d'autre, ne sont pas
devenus des obsédés de la virgule et où on présente
une victoire sur une peccadille, pour le monde en vie, l'enseignant ou le
commissaire ou la population ou l'enfant. On se met à ériger au
niveau d'une victoire existentielle, la victoire sur une virgule. A un moment
donné, il faut que ça cesse. Il faut s'apercevoir que les enjeux
et les conséquences sont disproportionnés.
Les conséquences. Une fois qu'on a clarifié les questions
monétaires, une fois qu'on le sait tous, comme ç'a
été le cas, il y a deux ans, que ce qui est monétaire,
lourd comme on dit dans le langage technique, c'est du ressort national, c'est
du ressort de l'Etat dans son ensemble; une fois qu'on a clarifié que le
document signé par le président de la CEQ - qui est une entente -
c'est la parole d'un syndicat et c'est la parole de la Fédération
des commissions scolaires et qu'il faut le respecter, une fois qu'on a conclu
ça, une fois qu'on sait qu'il faut respecter ces deux choses, il reste
maintenant à régler des choses sur le plan local et ces choses ne
semblent pas - soit dit en passant - en voie de règlement, ni à
Carignan ni aux Vieilles-Forges. C'est pour ça que cette loi, à
toutes fins pratiques, est issue de la comparaison entre ce qu'on pourrait
appeler les intérêts, d'une part, de l'ensemble de la population
qui est affectée à Carignan ou à Trois-Rivières,
aux Vieilles-Forges et, d'autre part, les intérêts que je ne pense
pas qu'on puisse qualifier de vitaux dans les circonstances, ni pour la
commission, ni pour les enseignants. Il faut accepter - c'est le rôle de
l'Etat, c'est le rôle de cette Assemblée - de trancher dans le
sens de ce qui, au meilleur de notre jugement, est le bien commun. C'est
peut-être ça qui est difficile de définir. (15 h 50)
A cet égard, la loi impose donc le retour au travail et
prévoit quinze jours pour les parties pour s'entendre. Si elles le
désirent, elles pourront parapher des textes et, en l'absence de textes
ce sera l'imposition de l'arbitrage sur ces questions, sur l'ensemble des
questions à l'exception, cependant - c'est très clair dans le
projet de loi - de ce qui voudrait être ou pourrait être
perçu ou voulu comme détournant la règle du jeu
fondamentale qui avait été posée quant aux questions
financières, à savoir qu'on ne peut pas, par la voie locale ou
réqionale, remettre en question des choses qui devaient faire l'objet
d'une entente nationale, être réglées entre l'Etat
responsable de l'ensemble des ressources fiscales, c'est-à-dire des
taxes des citoyens, et le monde de l'enseignement.
A cet égard, M. le Président, je pense que cette loi
était devenue inévitable, qu'elle est évidemment opportune
et qu'elle est juste. Je souhaite évidemment que dans ces deux
régions, comme dans toutes les autres régions où il y aura
cette négociation locale sur les objets locaux, on en revienne à
la normalité, celle que nous recherchons tous et celle qui est au fond
de tous les êtres que je connaisse, ici et ailleurs. Merci, M. le
Président.
Le Vice-Président: M. le député de Portneuf.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Quatrième
loi spéciale, dans des délais quand même assez brefs,
déposée par le gouvernement du Québec, le gouvernement du
Parti québécois. Le gouvernement doit, à la lumière
du projet de loi no 113 qui est déposé aujourd'hui,
reconnaître qu'il a manqué à son engagement, qu'il a
manqué à ses promesses, promesses qu'il avait faites pendant la
campagne électorale de 1976 notamment et aussi pendant les trois ans
où il a formé l'Opposition officielle ici, à
l'Assemblée nationale. Le gouvernement a manqué à
l'engagement qu'il avait pris de rétablir un climat de
sérénité et un climat de confiance au chapitre des
relations du travail au Québec entre l'interlocuteur gouvernemental,
l'interlocuteur des commissions scolaires, ou tout le secteur de ses
associés, dans les négociations dans les secteurs public et
parapublic. La loi no 113 d'aujourd'hui vient confirmer l'échec des
mécanismes et des modifications législatives qui ont
été apportées à nos lois existantes par le
gouvernement, notamment lorsque celui-ci a présenté la loi no
55.
Aujourd'hui, M. le Président, on peut accepter à la
rigueur le discours que vient de faire le ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre, qui a fait un discours de futur ministre de l'Education ou de
prétendant au ministère de l'Education, parce que celui-ci
n'était pas là, celui-ci n'était pas à
l'Assemblée nationale entre 1973 et 1976. Mais le ministre de
l'Education, lui, y était; il était chef de l'Opposition à
l'époque. Tout cela nous permet aujourd'hui de constater que la
population du Québec, la population de la Mauricie, la population de
Trois-Rivières, du Cap-de-la-Madeleine, la population de Sorel,
récolte comme état de fait, comme climat social, ce que le Parti
québécois a semé pendant ces années.
Il faut se rappeler, M. le Président, que lorsque le Parti
québécois était dans l'Opposition, il a adopté des
attitudes qui ont été marquantes. Le Parti
québécois, cela a été la caution d'à peu
près toutes les causes où il y avait de l'agitation, de la
contestation et où on s'en prenait au gouvernement de l'époque.
Le Parti québécois dans l'Opposition et le chef de l'Opposition
d'alors en tête, qui est aujourd'hui ministre de l'Education, ont
cautionné des actions, des demandes formulées par des syndicats
envers le gouvernement, employeur et patron, dans la dernière ronde des
négociations. Qu'on se rappelle, Mme la Présidente, le
préjugé favorable
aux travailleurs. Les ténors du Parti québécois de
l'époque - ce qui d'ailleurs a été repris par plusieurs
candidats dans la campagne de 1976 -avaient un préjugé favorable
à l'égard des travailleurs, ce qui allait impliquer qu'un
gouvernement formé par le Parti québécois allait non
seulement régler les problèmes, mais qu'il allait en faire plus,
qu'il allait en donner plus pour les travailleurs.
Rappelons-nous la position du premier ministre du Québec pendant
la campagne électorale de 1976. Rappelons-nous le débat qu'il
avait eu avec le premier ministre d'alors, M. Bourassa, sur une chaîne de
radio ici au Québec. Celui-ci disait et je cite - c'est le premier
ministre d'aujourd'hui qui parle, M. Lévesque -: "Ce n'est pas seulement
un slogan quand on dit que ça ne peut plus continuer comme ça,
surtout dans ce domaine des relations du travail où tout
l'équilibre repose sur le respect que doivent se porter les
interlocuteurs. Quand quelqu'un est brûlé, il faut le changer et
ça commencera à aller mieux quand le Québec sera
dirigé par un gouvernement capable de rétablir un climat de
dialogue de bonne foi entre toutes les parties; un climat de paix et d'ordre
social, bien sûr, mais que seul pourra amener un gouvernement qui se
préoccupe aussi très clairement de la justice et dont la
fermeté et la capacité de décision - pas de traîner
indéfiniment - vont de pair avec le sens de l'équité."
Qu'est-ce que c'est, Mme la Présidente? Ils ne traîneraient
plus, les conflits, avec eux, il y aurait du leadership moral! Je me rappelle
que c'était l'expression favorite du candidat dans Taillon, qui est
aujourd'hui premier ministre du Québec: du leadership moral! Il ne
devait plus y avoir de conflits au Québec, il devait y en avoir moins
avec eux, ils devaient établir des mécanismes qui verraient
à régler ces problèmes. Cela a donné quoi? Mon
collègue le député de Marguerite-Bourgeoys en a fait
état tout à l'heure; on aura l'occasion d'y revenir lorsque les
rondes de négociations seront terminées et on comparera les
chiffres en termes de nombre de jours-homme et jours-femme perdus au
Québec dans le cadre de conflits de travail dans les négociations
des secteurs public et parapublic. Quand ce sera terminé, on pourra
comparer la performance de ce gouvernement qui se disait si bon avant
d'être placé aux guides de la société du
Québec et de former le gouvernement.
On se rappellera que tout cela a créé un certain
engouement, ces déclarations, ces engagements de la part des gens du
Parti québécois. Rappelez-vous la position adoptée par le
Parti québécois au lendemain de la prise du pouvoir. On se
rappellera que des poursuites avaient été intentées en
vertu de la loi 23, des poursuites par lesquelles le Procureur
général du Québec avait porté plainte contre des
syndicats, contre des syndiqués, contre des personnes qui n'avaient pas
respecté une loi adoptée par l'Assemblée nationale du
Québec. Il y a eu des poursuites, il y a eu des condamnations qui
s'élevaient à un minimum de $4,240,000. Rappelez-vous ce que
Marc-André Bédard, ministre de la Justice, nous disait. Le
ministre de la Justice, Me Marc-André Bédard, a donné les
arguments suivants pour justifier le retrait des poursuites à
l'époque:"Premièrement, certaines dispositions de la loi
étaient inadéquates par rapport à l'objectif de la loi.
Deuxièmement, le gouvernement libéral précédent
avait fait un usage abusif de ces lois en entretenant une politique de
provocation dans les relations du travail par ses lois spéciales.
Troisièmement, il faut s'interroger sur les effets sociaux de telles
poursuites. Quatrièmement, la ligne de conduite du gouvernement doit se
situer au niveau de l'intérêt général et de la paix
publique. Il faut rétablir enfin un climat de confiance dans les
relations du travail, ce qui est un prérequis à la paix
sociale."
D'autres députés y ont ajouté, comme le
député de Sainte-Marie, M. Bisaillon. M.
Lévesque, premier ministre, disait à l'égard du
retrait des poursuites: "A notre avis, tout bien pensé, c'était,
au point de vue de la santé sociale, de la santé
législative et de la santé judiciaire du Québec, la seule
décision qui pouvait être prise de façon cohérente."
Santé sociale. En enlevant les infractions et en se retirant des
poursuites et des plaintes, cela allait améliorer le climat social.
Qu'est-ce qu'il y a eu d'amélioré avec le nombre de jours-homme
et de jours-femme perdus et les millions de jours qui ont été
perdus dans nos écoles au Québec depuis que le PQ est à la
tête des négociations?
Cela devait améliorer la santé législative. La
santé législative? Quatre lois spéciales, deux tutelles.
La santé judiciaire? Les injonctions n'ont pas été
respectées. L'injonction émise par le juge Larue de la Cour
supérieure n'a pas été respectée, pas de poursuite
intentée, ce n'est pas gravel C'est ça la santé judiciaire
du premier ministre, député de Taillon. On parle de santé
judiciaire alors que n'importe lequel des membres de ce gouvernement se permet
de dire n'importe quoi, de bafouer la magistrature. On en a eu un exemple
combien éloquent par les positions adoptées par le
député de Trois-Rivières, ministre des Affaires
culturelles, dans le cas de l'affaire Coffin, le ministre qui, soit dit en
passant, aurait été pas mal mieux de s'occuper du conflit aux
Vieilles-Forges et des travailleurs qui sont en grève depuis le 2
septembre, des parents qui voient leurs enfants dans l'incapacité de se
rendre aux cours.
Tout cela a donné quoi, ces promesses, ces engagements, ce
léchage de bottines de la part des péquistes? Cela a fait en
sorte que des gens de bonne foi ont cru à la franchise et à
l'honnêteté intellectuelle des péquistes, des gens qui
forment le gouvernement du PQ. Ces gens se sont trompés. (16 heures)
Ce qui est le plus éloquent à l'appui de ce que je
soutiens, c'est leur bilan depuis 1976. Les conséquences de tout
ça, ce furent des rondes de négociation difficiles parce que les
gens, à juste titre, je pense, s'attendaient à aller en chercher
plus avec le gouvernement du PQ. Des milliers et des milliers de jours-homme
perdus, des millions de jours-enfant perdus dans nos écoles, une autre
aujourd'hui qui arrive pour venir régler le cas de deux commissions
scolaires: celle des Vieilles-Forges et celle de Carignan, après
beaucoup de tergiversations, d'attente, d'attentisme et de placotage de la part
de certains responsables gouvernementaux.
Aujourd'hui, Mme la Présidente, vous savez, j'entends le ministre
de l'Éducation ou encore le ministre du Travail nous dire: C'est
terrible, ces
gens-là gagnent des bons salaires, l'incapacité de payer
des contribuables, il met en relief le salaire minimum au Québec, ce
qu'ont dû vivre et subir les parents. C'est beau, tout ça, mais
ça traîne depuis le 2 septembre. Quand, par surcroît, le
ministre du Travail vient nous dire que le conciliateur a été
nommé le 16 avril, qu'il y a eu plusieurs séances de conciliation
entre le 16 avril et le début de juin, qu'au début de juin, les
enseignants et les enseignantes se sont prononcés sur les offres
finales, ces gens-là savaient qu'il n'y avait aucune négociation
pendant l'été. Où est-ce qu'il était, le ministre
du Travail qui vient nous dire aujourd'hui: 11 faut adresser des reproches tant
à la commission scolaire qu'aux enseignants? Pourquoi l'avez-vous
laissé traîner pendant l'été? Pourquoi, dès
le 2 septembre, voyant que les parties demeuraient polarisées sur leur
position initiale, n'avez-vous pas amorcé le processus
législatif? Pourquoi est-ce qu'il y a eu tout le dédale de
procédures? Vous étiez obnubilé, à ce
moment-là, par les élections. Vous étiez en train
d'analyser les sondages et vous veniez de constater, ça vous a pris
quelques semaines pour le constater, que vous alliez vous faire laver.
Mme la Présidente, vous savez, quand ces gens-là viennent
nous dire: II y a deux paliers de négociation, palier de
négociation provincial et palier de négociation local, c'est
vrai. Mais, tout ça, c'était connu, le 2 septembre. La
grève a causé des préjudices. Des milliers
d'élèves ont été affectés. Aujourd'hui on se
retrouve dans la situation où l'année scolaire est en
péril. Le ministre de l'Éducation actuel, pour aujourd'hui, l'a
confirmé tantôt. Ni le ministre de l'Éducation, ni le
ministre du Travail ne nous ont fait état de la possibilité de
récupération. Puis, dites-vous bien que cette situation, qui est
combien difficile pour les parents, les élèves et la
société en général, n'est certes pas plus facile
pour les travailleurs qui sont en grève. Cela ne doit pas être
drôle d'être sur une ligne de piquetage. Cela ne doit pas
être drôle d'être sur une ligne de piquetage, les 22, 23
octobre, quand tu n'as pas eu de revenu depuis le 2 septembre. Il faut se dire
une chose aussi: ces gens-là qui enseignent, ils en ont des enfants
aussi et ils sont conscients de l'impact du geste qu'ils posent. Dites-vous
bien que la position du gouvernement dans ce dossier est telle que la
grève était très probablement inévitable et ce,
pour deux motifs.
Premier élément, c'est que le noeud du problème, le
fond du problème, ce sont les mécanismes de la convention
collective qui a été signée au niveau provincial, les
articles 8.2, 8.5 et 8.9 et l'interprétation à donner à
ces articles. Le ministre du Travail nous a dit tantôt que le syndicat
des Vieilles-Forges était probablement un des syndicats au Québec
qui avaient les meilleurs contrats pour ses syndiqués. Ceux-ci plaident
droits acquis. On peut tout au moins convenir que ce sont des avantages qui ont
été acquis en vertu d'une négociation
précédente. Le gouvernement, aujourd'hui, par l'entente
nationale, par aussi un motif de restriction budgétaire - et j'y
reviendrai tantôt - s'est senti l'obligation d'indiquer clairement
à tous les interlocuteurs que le nombre d'élèves - le gros
problème, le noeud du problème - devait être
déterminé non pas en fonction de 8.9 mais en fonction de 8.2 et
8.5 de la convention nationale. Ces gens-là disent quoi?
Ces gens-là disent: on va batailler, on va se défendre, on
va alléguer, on va demander et on va faire des pressions, dont le droit
de grève, pour maintenir des avantages qu'on a acquis.
Par surcroît, Mme la Présidente, les syndicats qui
négocient aux niveaux locaux avaient la conviction que ça pouvait
se régler au niveau local parce que, dans certains cas, des choses, des
avantages ont été donnés au niveau local. Quand, par
surcroît, vient s'ajouter une déclaration comme celle que le
ministre de l'Education a faite à la mi-septembre à
Trois-Rivières... Je l'ai entendu moi-même sur les ondes de CHLN,
le ministre de l'Éducation venu dire: C'est la responsabilité de
la commission scolaire locale. On a eu une entente provinciale qui a
été négociée. Il reste maintenant l'entente locale
à régler et cette responsabilité est inhérente
à la commission scolaire locale. Je ne sais pas si c'est par
inadvertance, par ignorance ou encore pour se laver les mains que le ministre
de l'Éducation a dit cela, mais il l'a dit. Si moi, je l'ai entendu, il
y a certainement des travailleurs touchés par ce conflit qui l'ont
entendu et c'est partant de là notamment, par une déclaration
additionnelle comme celle-là, que les gens, dans le milieu, ont dit: Le
problème va se régler au niveau local et c'est là qu'il
doit se régler. Il ne peut pas se régler en fonction et en vertu
de la convention provinciale et on n'est pas liés par cela parce que le
mandat est strictement local. Ces questions doivent être
négociées au niveau local.
L'autre côté de la médaille, ce sont les commissions
scolaires; commissions scolaires qui ont eu à subir l'ingérence
et le mépris du gouvernement du Québec depuis quatre ans, coup
sur coup, régulièrement, de façon soutenue et continuelle.
Jamais un gouvernement n'a démontré et manifesté autant de
méfiance et de mépris à l'égard du monde scolaire
que le gouvernement du Parti québécois, le gouvernement de M.
René Lévesque l'a fait, jamais. Ces mêmes commissions
scolaires se sont fait enlever de plus en plus de responsabilités, de
droits et de latitude. Ces mêmes commisisions scolaires ont à
vivre avec des restrictions budgétaires sans précédent
actuellement avec, d'une part, la réforme de la fiscalité
municipale et, d'autre part, les implications, les suites du trou de
$500,000,000 où, encore une fois, le gouvernement s'est encore
lavé les mains; il a rejeté le ballon et il a rejeté le
petit sur les commissions scolaires. Parce que, dites-vous bien, entre
parenthèses, Mme la Présidente, que ce gouvernement a toujours
raison. Ce gouvernement ne fait jamais d'erreurs, selon lui. Ce gouvernement
est infaillible.
Il y a un paquet de gens qui ont appris à se méfier des
ténors qui venaient nous dire qu'ils avaient toujours raison. La faute
en est encore aux commissions scolaires. Les commissions scolaires sont
tellement limitées dans les possibilités en vertu des
restrictions qui leur sont imposées, d'une part, et aussi en vertu de la
loi 57 que des marges de manoeuvre, elles n'en ont pas.
On n'a qu'à se référer à la directive du
sous-ministre de l'Éducation, M. Girard, en date du 4 septembre 1980,
qui dit: "Les coûts additionnels résultant de toute entente locale
qui serait ainsi contraire aux dispositions de l'entente négociée
et agréée à l'échelle nationale - c'est
là
que c'est important - seront assumés exclusivement par la
commission scolaire." Qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que, si vous
débordez le cadre national, messieurs des commissions scolaires, peu
importent les limitations que vous avez, vous irez- taxer chez vous et, si vous
allez à plus de $0.25 en vertu de la réforme de la
fiscalité, référendum dans le secteur. C'est cela que
ça veut dire. D'une part, on a une partie syndicale qui avait
peut-être des avantages acquis en vertu d'un ancien contrat et qui veut
continuer à se battre - et je pense que c'est légitime, tout au
moins, de le demander -et, de l'autre côté, on a une commission
scolaire qui est très limitée, qui ne peut pas aller plus loin.
Cela voulait dire l'impossibilité pour les commissions scolaires d'aller
plus loin. Cela voulait dire que la commission scolaire est en quelque sorte
prise à la gorge, les mains dans le dos et bien attachées.
Ce n'est pas facile pour les commissions scolaires, vous savez. C'est
malheureux, on n'aura peut-être pas le temps d'en parler aujourd'hui,
mais on pourrait en parler, des problèmes que rencontrent nos
commissions scolaires.
Saviez-vous, Mme la Présidente, que les commissions scolaires
sont obligées de couper sur des éléments importants de
services pour payer le chauffage dans les commissions scolaires dans le moment?
Ces dépenses ont été indexées de 5%; on sait
comment les coûts ont augmenté depuis quelques années dans
le pétrole. Qu'est-ce qui arrive avec l'impression des conventions
collectives au niveau local? Normalement, lorsque c'est signé au niveau
local, on envoie cela au ministère de l'Éducation, le
ministère l'imprime et il retourne les copies. Ils ont eu une directive,
il n'y a pas lonqtemps. On n'a plus d'argent pour payer cela. Cela vient du
Conseil du trésor, on ne paie plus les coûts d'impression. Je suis
convaincu que cela va se régler d'ici quelques jours.
Cela, Mme la Présidente, reflète la situation
financière dans laquelle est le gouvernement du Québec, le
gouvernement du PQ. Je vous dirai, avec ironie, qu'il faudrait peut-être
prévoir un amendement constitutionnel pour permettre au gouvernement
d'une Législature, donc au gouvernement du PQ de présenter une
proposition de faillite éventuellement. Cela n'a pas de bon sens, la
façon dont ça fonctionne.
Mme la Présidente, on a la loi spéciale. Par cette loi, le
gouvernement, l'Assemblée nationale vient écrire une nouvelle
partie de la convention. On aura deux types de conventions et de contrats: ceux
qui auront signé avant le 24 octobre et qui auront réussi
à aller en chercher plus au niveau local. L'autre type de convention, ce
sera pour ceux qui siqneront après le 24 octobre. (16 h 10)
Cette loi vient changer une partie des règles du jeu
précédemment établies. On aura l'occasion de
l'étudier tantôt en commission plénière article par
article. On aura des points à faire valoir et des questions à
soulever, mais, dans tout ce débat, il demeurera un problème de
fond même après la loi. Que les députés du Parti
québécois ne partent pas avec la conviction que le
problème est réglé. Les problèmes seront loin
d'être réglés après l'adoption de cette loi. Il y
aura encore la question de la marge de manoeuvre des commissions scolaires et -
il faut le constater - le malaise au sein des enseignants. Ce n'est pas facile
pour les enseignants de vivre avec une situation où certains programmes
d'enseignement sont tout simplement enlevés, de vivre avec ce qu'on
appelle dans le jargon le "bumping" où on dit: Toi, mon vieux, tu
n'enseignes plus là parce que c'est un autre qui prend ta place,
l'ancienneté, etc. Ce n'est pas facile de vivre avec le reclassement
quand on dit à un enseignant, à un travailleur qui a
étudié pour travailler et enseigner les mathématiques: Mon
vieux, c'est fini. Madame, c'est fini. Vous allez enseigner de la physique
maintenant. Il y a des situations qui ne sont pas faciles et c'est ce qui
explique en bonne partie le caractère tendu des relations entre
l'employeur, les commissions scolaires, le gouvernement et les syndicats.
J'aurais aimé aussi que le ministre de la Justice soit ici
aujourd'hui pour nous dire ce qu'il va faire avec le problème du
non-respect des injonctions. Dans le prochain discours inaugural du 5 novembre,
il y aura certainement une annonce assez pompeuse que le gouvernement va venir
modifier les dispositions permettant à un employeur de recourir à
une injonction. Il y a eu une injonction qui a été
demandée. Elle n'a pas été respectée.
Qu'arrive-t-il? Que fera le gouvernement à cet égard? C'est quand
même une décision d'un tribunal.
Il y a aussi un autre élément. Je me permets de le
demander. Je suis convaincu, j'espère que la loi va être
respectée. Au cas où la loi ne serait pas respectée, le
gouvernement, par la voix du premier ministre, peut-il d'ores et
déjà annoncer que, si des poursuites sont intentées en
vertu de la loi 113 tel que c'est prévu, ces poursuites ne seront pas
retirées ni abolies par la suite comme il l'a fait? Je suis convaincu
que le gouvernement doit le regretter, doit s'arracher les cheveux d'avoir fait
cela en 1977, mais il l'a fait. Il a fait son lit et il a cautionné
ainsi des actions parfois irresponsables que malheureusement, aujourd'hui, on
doit vivre. Le gros problème de tout cela, c'est que la population
récolte aujourd'hui. La population du Québec paie le prix de
l'irresponsabilité de trois ou quatre ans d'administration
gouvernementale du Parti québécois. Merci.
La Vice-Présidente: M. le ministre des Affaires
culturelles.
M. Denis Vaugeois
M. Vaugeois: Mme la Présidente, c'est une journée
qui, apparemment, est plus agréable, plus drôle pour les gens de
l'Opposition que pour la députation ministérielle.
Des voix: Oh!
M. Vaugeois: A entendre le député de Portneuf et le
député de Marguerite-Bourgeoys, c'est un grand moment de
jouissance. C'est l'occasion de citer de vieux discours et d'avoir l'air,
finalement, malgré des apparences qu'ils essaient de cacher,
malgré une façade qu'ils essaient de camoufler, de laisser croire
qu'on se rapproche d'une étape convoitée depuis longtemps et
qu'on se réjouit finalement des difficultés d'une
société.
Lorsque le chef intérimaire de l'Union Nationale est passé
dans notre région, il a constaté une situation et aujourd'hui,
honnêtement, il a su en rendre compte. Le député de
Gaspé a senti le désarroi de parents, de jeunes et
également - je pense qu'il faut le dire - de ceux qui sont directement
impliqués dans ce conflit, les enseignants. Il n'y a personne chez nous
qui pavoise actuellement. Il n'y a personne qui se réjouit des
difficultés rencontrées. Il n'y a personne qui se réjouit
de cette impasse qui est la nôtre dans notre milieu, qui touche le monde
de l'enseignement, mais qui touche également d'autres secteurs de notre
société. Nous vivons une période particulièrement
difficile où les relations du travail dans d'autres entreprises ont
connu des moments de difficulté sans précédent, je crois,
chez nous. Je donne le crédit au député de Gaspé
d'avoir reconnu tristement une situation pénible. Elle est
également pénible pour les gens du gouvernement qui ont à
recourir à certains moyens au nom de l'ordre public.
Les gens chez nous, au début du dernier conflit que nous vivons
dans le domaine de l'enseignement se sont demandé ce qui se passait
encore une fois, parce que effectivement ce n'est pas la première
fois.
Pendant des générations les enseignants, au Québec,
ont été silencieux, n'ont à peu près jamais rien
revendiqué. Il faut voir d'ailleurs dans quelles conditions se faisait
leur travail, il y a une vingtaine d'années, au moment où se
laïcisaient les cadres d'enseignement, au niveau secondaire en
particulier, et au moment où se créait le collégial
public.
On ne s'est peut-être pas habitué suffisamment à ce
que cette classe de travailleurs ait des conditions de travail décentes.
Il y a des gens qui ne l'ont pas encore compris, qui ne l'ont pas encore
accepté. Au début du dernier conflit, chez nous, il s'est
trouvé bien des gens pour dire: Qu'est-ce qu'ils ont à se
plaindre? Comme je suis un ancien enseignant et comme je le redeviendrai
peut-être, et aux yeux de l'Opposition, le plus tôt serait le
mieux... Messieurs de l'Opposition, croyez-moi, je n'aurais pas honte de
retourner à ce métier que je respecte profondément.
Mais pour l'instant, j'aime mieux être au pouvoir, ici, que de
vous voir au pouvoir à Québec. Bien des gens ont
été portés, cette fois-ci comme d'autres fois
précédentes, à jeter la pierre, à dire: Des
vacances l'été, des vacances à Noël - je l'ai
entendu, comme enseignant - des vacances, un nombre d'heures limité par
semaine, 22 heures, de quoi se plaignent-ils? C'est dangereux, ce nombre de
jours par année, ce nombre d'heures-semaine, ce ratio
maître-élèves. Tous ceux qui ont enseigné, tous ceux
qui enseignent savent fort bien que 15, 20 ou 30 élèves dans une
classe, parfois 50 à certains niveaux, posent autant de cas
particuliers. L'enseignant apprend à vivre avec un groupe
d'élèves. Il sait fort bien que quand son groupe est trop
nombreux, son rendement est moins bon. Voilà pourquoi cette question a
été débattue et que des progrès importants ont
été réalisés ces dernières
années.
Le nombre d'heures par semaine est trompeur, le nombre
d'élèves par classe est trompeur, le nombre de jours par
année est trompeur.
Les gens qui sont allés dans l'enseignement n'y sont pas
allés par appât du gain; ils n'y sont pas allés pour se
tailler une carrière facile, pour avoir la vie facile. C'est un
métier qui, au moment où il a été choisi par la
majorité des enseignants, était un métier qui ne payait
pas, un métier ingrat, mais un métier qui a ses satisfactions.
C'est ce qui a amené dans l'enseignement des gens qui, pour autant,
aujourd'hui, n'ont jamais renoncé à des conditions de travail qui
font que leur enseignement est meilleur.
Cela, les gens, je pense, malgré un conflit difficile, le
réalisent progressivement. Ce qui me frappe, dans ce conflit, c'est que
les gens, après avoir jugé les enseignants, certains après
les avoir critiqués, d'autres après leur avoir donné leur
chance, se tournent, en désespoir de cause, vers le gouvernement, parce
que, ces derniers jours, des pétitions nous étaient
adressées. J'en ai porté comme je n'en ai jamais porté
ici. J'ai vu les parents, en moins de quatre jours, réunir 18,600
signatures. Ils les ont adressées aux membres du gouvernement. Ils
étaient, comme le disait le député de Gaspé, en
plein désarroi. Ils ont quand même, à mes yeux,
sauté un niveau de responsabilité, le niveau du patron local, le
niveau de la commission scolaire. Les gens d'en face défendent cette
institution. Cette institution est en place.
Je ne fais que m'étonner aujourd'hui qu'on saute si
allègrement par-dessus ce niveau de responsabilité. Je crois que
les règles du jeu se clarifient d'année en année, de
convention en convention. Il y a des choses qui sont à négocier
localement, des choses qui ont été négociées sur la
plan national.
Je pense qu'il faut reconnaître que chez nous, cet
été, on n'a pas négocié très
intensément et je pense qu'il faut reconnaître également
que la partie syndicale a été prête tout
l'été à négocier. Je le sais. Je connais ces gens.
Ce sont d'anciens collègues, ce sont des gens avec qui j'ai
travaillé. Je sais qu'ils négocient durement. Je sais qu'ils
travaillent sans arrêt, qu'ils travaillent avec acharnement au niveau de
leur convention. Je leur ai dit moi-même que je trouvais que
l'épaisseur des documents pour régler un certain nombre de
problèmes me paraissait assez volumineuse.
Je leur ai dit ces choses. Mais je reconnais par ailleurs, publiquement,
leur grand mérite et leur désintéressement total quand ils
négocient.
De l'autre côté, cet été, cela a
été pendant de longues semaines le silence. Est arrivée la
rentrée scolaire et les enseignants ont été
entraînés dans un mouvement de grève qu'ils n'avaient
jamais souhaité aussi long, c'est certain. Mais les circonstances les
ont défavorisés. Je pense qu'il faut en faire l'aveu,
nous-mêmes, nous avons amené un élément qui a un peu
brouillé les cartes. (16 h 20)
Le fait d'être à la veille possible d'une élection
pouvait laisser croire à ces gens que la perspective d'une
élection ou même le déclenchement d'une élection
pourrait ramener un certain nombre de concessions de dernière heure
parce qu'il y a des précédents à cet égard. Les
gens chez nous ont la mémoire de ce qui s'est passé en 1976, par
exemple, alors que des travailleurs, à la veille d'une
élection... Le député de Jean-Talon vient de se faire
réprimander du
regard par son chef, parce que son chef sait qu'en 1976, des concessions
assez importantes ont été consenties à des travailleurs
qui, je le crois bien, le méritaient, mais qui leur ont
été concédées un peu rapidement, tout simplement
par souci électoral. D'ailleurs, les travailleurs ont bien
répondu à ces concessions un peu trop faciles, à ce
moment-là. Cette fois-ci, il était légitime pour des gens
en stratégie de négociation de se dire: On est à la veille
d'une élection possible, cela s'est déjà passé de
cette façon, on peut peut-être essayer; on peut peut-être
essayer d'aller chercher des choses auxquelles on tient et sur lesquelles, moi,
je ne me pose plus de questions parce que j'avoue humblement que je m'y perds
à certains moments. C'est vraiment devenu, comme on l'a
déjà indiqué, une affaire de spécialistes.
Il reste qu'il y a des choses générales que nous pouvons
saisir, des choses importantes que les enseignants nous expliquent, des choses
importantes que la partie patronale fait valoir. Je constate, par ailleurs,
qu'il n'y a pas d'absolu dans ce domaine, puisque ce que revendique la partie
patronale a été concédé en partie ailleurs et c'est
vivable. Je prendrai pour exemple le CEGEP chez nous. A d'autres moments, j'en
conviens, un ratio maître-élèves peut être discutable
puisque, moi comme d'autres, nous en avons fait l'expérience et dans
d'autres pays également, cela se pratique de diverses façons; les
ratios sont différents et les systèmes d'éducation ne sont
pas abominables pour autant. Il n'y a pas de vérité absolue, mais
il y a des négociations. Il y a des négociations qui se
déroulent et je pense que se réjouir des impasses, se
réjouir des difficultés, ce n'est pas à l'honneur de qui
que ce soit. Les parents chez nous et les enfants, quand ils ont la chance de
s'exprimer - parce que ce sont des groupes qui ne sont pas organisés et
qui souffrent d'autant plus de la situation actuelle - quand ils
réussissent à faire entendre leur voix, ils disent: Ecoutez! il y
a des problèmes; cela a bien l'air évident; il y a des
problèmes à régler, mais est-ce qu'il y aurait moyen de
continuer à discuter de ces choses sans pour autant compromettre
l'enseignement, sans pour autant compromettre l'école. Les enseignants,
gui font métier d'enseignement et qui veulent améliorer
l'enseignement, sont un peu pris à leur propre jeu à ce moment-ci
en compromettant même la qualité d'une année. Voilà
pourquoi, à ce moment-ci, nous croyons que le gouvernement, qui ne
devrait pas normalement avoir à intervenir -sa part a été
faite - intervient. Sa part a été faite; elle a été
faite avec la CEQ et la partie patronale.
Je pense que je ne choquerai personne en insistant sur ce que le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre a rappelé tout à
l'heure et sur ce que le Nouvelliste nous rappelle encore ce matin. Il faut le
dire. Avant de vous réjouir à l'excès, il faut quand
même vous rendre compte de ce qui se passe et de l'enjeu. Il y a chez
nous, au niveau syndical, des gens gui avaient obtenu, dans des
négociations, lors d'une entente antérieure, avec un arbitre et
tout, des choses qui, sur certains points, paraissaient meilleures que ce qui
est obtenu dans l'ensemble actuellement. Il y a eu une contrepartie à
cela et le ministre de l'Éducation l'a bien expliqué. Il reste
quand même que pour les gens chez nous, c'est difficile sur certains
éléments d'avoir l'air de les échanger pour autre chose
qui a été négociée à un autre niveau.
Tout le monde sait, pour ceux qui ont suivi cela, qu'au début de
cette année, ce qui a été accepté par une
majorité de gens à la CEQ ne l'était pas chez nous, ne
l'était pas par une majorité d'enseignants chez nous. Les gens
sont allés très loin aux Vieilles-Forges. Ils sont allés
presque aussi loin que de dénoncer l'exécutif de la CEQ. A
certains moments, il y a eu rumeur même que certains d'entre eux
voulaient demander la démission du président de la CEQ. Il y
avait rumeur qu'on allait demander la démission de l'exécutif de
la CEQ. Cette partie doit être également connue et
rappelée. Ces enseignants ont momentanément contesté le
vote majoritaire et la position de l'exécutif de la CEQ. Par la suite,
ils se sont promis - c'était leur droit -d'essayer de reprendre un
certain combat au niveau local. Ils ont profité des moindres zones
grises pour essayer de reprendre certaines discussions, de reprendre certaines
choses. Plutôt que de poursuivre dans la voie de dénonciation,
vis-à-vis des chefs syndicaux, ils se sont ralliés. Ils ont
manifesté une solidarité, mais ils ont décidé de
reprendre une certaine lutte sur le plan local, et nous en sommes
là.
Ce matin, un porte-parole du groupe syndical, chez nous, a mis ses
cartes sur la table. Le Nouvellilste le rapporte en page 30 avec le titre
suivant: "Le gouvernement pourrait s'éviter l'odieux d'une loi
spéciale". Le qualificatif est de lui, et je suis d'accord; "l'odieux
d'une loi spéciale", il n'y a rien de réjouissant
là-dedans, sauf pour l'Opposition. Raymond Johnston le déclare
avec en sous-titre: "Si le gouvernement acceptait de reconsidérer ses
directives budgétaires."
L'article de la Presse canadienne commence de la façon suivante:
"Selon le négociateur du Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges,
M. Raymond Johnston, le gouvernement pourrait s'éviter l'odieux d'une
loi spéciale s'il acceptait seulement de reconsidérer ses
directives budgétaires découlant de l'entente
négociée au niveau provincial. Cette entente fixait les normes
permettant de calculer le nombre d'enseignants gui serait reguis dans chacune
des commissions scolaires, c'est-à-dire le ratio
maître-élèves. L'entente prévoit aussi un nombre
maximum d'heures de travail pour chaque enseignant ainsi que des maxima
d'élèves"... Il reste donc, sur le plan local, à
négocier certaines choses que je ne rappelle pas et, à un moment
donné, nous lisons ceci: "Le problème se complique encore, selon
M. Johnston, alors que les commissions scolaires, en vertu de la réforme
de la fiscalité municipale, sont tenues de se soumettre à un
référendum pour toute augmentation de taxes scolaires
découlant de dépenses non subventionnées. Il n'en fallait
pas davantage pour que les patrons transforment en charge minimale la charge
maximale de travail prévue dans l'entente." C'est une citation qu'on
attribue toujours à M. Johnston, et ainsi de suite.
M. Johnston et l'exécutif du syndicat chez nous, et les
enseignants chez nous, souhaiteraient - ils le disent clairement - que le
gouvernement retire les directives budgétaires qui découlent
d'une entente nationale qu'eux n'ont jamais
voulue, n'ont jamais souhaitée et, momentanément, n'ont
pas acceptée. C'est cela la réalité. C'est la
réalité brutale de la partie patronale, également, au
niveau local avec en face d'eux des négociateurs que je qualifierais
à certains moments de presque impitoyables. Ceux qui les connaissent
savent que ces gens-là travaillent tout le temps, avec acharnement; pour
l'instant, dans leur existence, c'est la bataille qu'ils ont choisi de livrer.
Je souhaiterais qu'à certains moments ils mettent autant
d'énergie sur autre chose, mais, à ce moment-ci, c'est leur
engagement, c'est leur bataille. Cela les a menés dans ce que nous avons
convenu être une impasse. C'est faire preuve de responsabilité
pour un gouvernement, à un tel moment, d'entendre la voix des parents,
d'écouter, d'être attentif au drame des enfants, d'être
attentif également à ce qui n'est plus que le désarroi des
parents et qui devient aussi le désarroi des enseignants. Ces
gens-là ont un métier d'enseignants pour enseigner. Si, pendant
des années, ils ont été entraînés par des
mouvements de grève, sans doute qu'il faudra se pencher là-dessus
et essayer de modifier ces processus. Ce n'est pas notre propos
aujourd'hui.
Notre propos, aujourd'hui, c'est, ensemble, d'essayer de sortir de ce
climat très tendu alors que chacun en veut à son voisin, chacun
se méfie de son voisin. Chacun vérifie à quel moment la
solidarité va se fractionner; les parents surveillent d'autres groupes
de parents. Il y a des appels, actuellement, dans les journaux disant:
Attention à tel autre groupe de parents, ainsi de suite. Une
société ne peut pas vivre comme cela. Ce qui est important,
à ce moment-ci, c'est de ne pas vouloir régler tous les
problèmes alors que la tension est extrême; il faut essayer de
retrouver un peu de calme.
Cette loi appelle finalement, de la part du gouvernement, compte tenu
justement des discours tenus par le passé, beaucoup plus de courage
qu'il n'en paraît. Je peux le dire sans dévoiler nos discussions
du Conseil des ministres, je peux dire que j'ai résisté, pour ma
part, jusqu'à la limite, à cette démarche, et le ministre
du Travail m'a offert une collaboration exceptionnelle en utilisant tous les
recours possibles, toutes les étapes possibles, sauf que je voudrais
bien savoir lequel, aujourd'hui, pourrait prétendre que nous ne sommes
pas dans une impasse.
Qu'on nous propose d'autres moyens d'en sortir; on n'en a pas
trouvé, on n'en a pas trouvé dans les discours antérieurs.
Aujourd'hui, nous sommes réunis pour considérer une
décision délicate à prendre. Déjà, nous
pressentons, de toute façon, que le vote pourrait être unanime sur
cette proposition du ministre de l'Éducation. Le résultat ne sera
pas de régler tous les problèmes, mais d'éviter de
compromettre tout à fait l'année scolaire d'un groupe de 20,000
étudiants. Je pense que c'est le geste que nous avons à poser et,
après, de nous tourner à nouveau vers des problèmes qui
nous ont amenés dans une escalade, année après
année, pour essayer peut-être de changer les modalités, la
façon de traiter un certain nombre de choses. (16 h 30)
Déroger à l'entente nationale, retirer les directives
budgétaires, moi, comme enseignant, je voudrais bien. Je voudrais bien
parce qu'il n'y a pas un groupe de travailleurs actuellement, je n'en connais
pas, qui se considèrent trop payés; je n'en connais pas. Les
travailleurs, les uns après les autres, devant l'inflation, souhaitent
un meilleur salaire, de meilleures conditions de travail. Et les enseignants
sont comme les autres travailleurs. Ils savent qu'ils pourraient encore
améliorer leurs conditions. Nous savons également que, dans cette
société, il y a des groupes de travailleurs qui ont des salaires
passablement supérieurs aux leurs sans faire nécessairement un
travail aussi important. Les parents, à ce moment-ci - et c'est
peut-être un des bons côtés de la chose - sont amenés
à reconnaître l'importance du travail des enseignants. Ils
réclament leur retour au travail et nous allons le leur demander.
Mais, cette situation-là... Je serais d'accord pour les
retirer... Je vous remercie, M. le député de Jean-Talon.
La Vice-Présidente: M. le ministre, vous devez conclure,
il vous reste deux minutes.
M. Vaugeois: D'accord, je vais conclure là-dessus et je
vous remercie, c'est ce que je voulais dire en terminant. Si les autres
secteurs de la société, les autres secteurs dont je n'ai pas
à rappeler les problèmes, dont je n'ai pas à rappeler les
difficultés, étaient gavés, si la distribution de la
richesse qui est la nôtre était réglée, nous
pourrions peut-être, sur ce plan-là, ajouter au fardeau financier
des propriétaires, ajouter au fardeau financier de celui qui paie des
impôts, de celui qui paie des taxes. Mais je pense qu'à ce
moment-ci, ce qui a été consenti aux enseignants n'est
certainement pas excessif, mais c'est sans doute raisonnable, puisque
d'ailleurs la CEQ en a convenu, pour un autre bout de chemin. Ce qu'il nous
reste de faible marge de manoeuvre dans ce régime politique, je pense
que nous devons le réserver à d'autres groupes de citoyens moins
favorisés.
La Vice-Présidente: M. le député de
Maskinongé.
M. Yvon Picotte
M. Picotte: Mme la Présidente, la remarque qu'a faite mon
collègue de Trois-Rivières il y a quelques instants est
déplacée, grotesque et insipide, celle que les gens qui trouvent
ça drôle dans une journée comme celle qu'on vit
aujourd'hui, ce sont les gens de l'Opposition. Il ne s'agit pas d'avoir
beaucoup d'expérience en cette Chambre pour s'apercevoir que les gens
qui étaient heureux lorsqu'il y avait un conflit de travail au
Québec étaient bien le député de Sauvé,
étaient bien son collègue, le leader parlementaire du
gouvernement présentement, lorsque eux-mêmes descendaient dans la
rue, lors des conflits en 1974, 1975, 1976, pour inviter des gens à ne
pas lâcher, pour dire aux gens: Lorsque vous manifestez en avant, nous,
on va aller s'amuser avec le gouvernement d'en face. C'est ça
exactement. Je trouve grotesque la remarque du député de
Trois-Rivières. Il y aurait eu bien d'autres choses à faire dans
le conflit que de faire ce qu'il vient de faire.
Mme la Présidente, on est en face d'un gouvernement que
j'appellerai un valseur à deux
têtes. Vous venez d'avoir, plus respectueusement, mon
collègue de Trois-Rivières, ministre par surcroît, qui
vient de dire tout simplement: Ce n'est pas drôle d'être
professeur, Mme la Présidente, c'est exigeant, ça demande
beaucoup de choses, ça exige que les gars soient obligés de se
recycler. Vous avez eu le côté où on disait: Ces pauvres
enseignants, aujourd'hui, on est obligé de leur passer la matraque sur
la tête par une loi spéciale. C'était le côté
du député de Trois-Rivières, valseur à une
tête.
Vous avez l'autre valseur qui est le ministre de l'Éducation, le
grand député de Sauvé qui se sauve devant ses
responsabilités plus souvent qu'à son tour. Vous avez cet autre
valseur qui lui... Voulez-vous demander au mythomane de Lévis, s'il vous
plaît, de se tenir tranquille? Vous regarderez ce que c'est qu'un gars
qui souffre de mythomanie.
Mme la Présidente, je n'ai dérangé personne pendant
que les autres ont parlé et je ne tiens pas à ce qu'on me
déranqe. Mme la Présidente, cet autre valseur, qui s'appelle le
député de Sauvé, vice-premier ministre par
surcroît... Justement, s'il peut y avoir un remaniement
ministériel pour qu'on le place en arrière de son collègue
de Chauveau, ça va être une bonne chose pour les
Québécois. Ce grand valseur, ministre de l'Éducation, est
venu dire, lui: Vous savez, les enseignants, il ne faut pas se pâmer
là-dessus, ils travaillent à peu près 180 jours par
année. Ils travaillent à peu près 180 jours par
année et la personne intelligente qui regarde cela à la
télévision, elle se dit: 180; 365 jours par année,
divisés par deux, ces gens travaillent seulement six mois par
année. C'est ce que le député de Sauvé est venu
dire. Avec des salaires, Mme la Présidente, assez
phénoménaux.
Présentement, dans la Mauricie, on a une situation où les
parents sont alarmés et avec raison, d'ailleurs, et où les
parents malheureusement font porter le blâme uniquement sur les
enseignants. Et ce grand valseur de Sauvé vient dire aux parents: Vous
savez, ils ne travaillent pas, ces gars; seulement six mois par année.
Ils gagnent cher et ils ont seulement 17 élèves dans les classes.
C'est cela que le grand valseur de Sauvé vient faire. Le gouvernement a
deux têtes. Dans le cas présent, je pense qu'il n'en a pas du
tout. C'est cela qu'on a à faire présentement, Mme la
Présidente, au moment où on est appelés à adopter
une loi spéciale.
Moi, Mme la Présidente, je vais vous dire une chose: Je veux
d'abord féliciter le ministre du Travail qui a daigné
répondre à un de mes télégrammes dans lequel je lui
demandais d'intervenir et avec qui j'ai eu une conversation d'ailleurs à
une heure tardive le soir; il travaillait encore à son bureau, je veux
le féliciter pour cela. Mais je ne peux pas féliciter le premier
ministre du Québec. Lundi, je lui ai envoyé un
télégramme. Vous savez, le premier ministre du Québec, il
y a beaucoup de gens qui travaillent alentour de lui mais, présentement,
ils ont bien plus souvent l'esprit à Ottawa et bien plus souvent
l'esprit en Angleterre, alors, les conflits de la Mauricie, cela ne les
intéresse pas. Le premier ministre n'a même pas eu le temps de
faire parvenir un accusé de réception en réponse à
mon télégramme de lundi, lui demandant de convoquer
l'Assemblée nationale.
Une voix: Elle est convoquée!
M. Picotte: Oui, elle est convoquée, mais il aurait quand
même pu communiquer avec nous pour savoir exactement ce qu'on voulait. Je
lui dis aujourd'hui ce qu'on aurait aimé parce que cela va
peut-être clarifier ce que le ministre du Travail, tantôt, a
mentionné. Le ministre du Travail est, lui aussi, un petit peu abasourdi
par ce conflit. II a jeté le blâme sur les commissions scolaires
et il a jeté le blâme sur les enseignants; il a dit que cela
faisait dix ans qu'il n'y avait pas eu d'entente signée, chose qui est
vraie. Il dit: On ne sait pas pourquoi on n'est pas capable de s'ajuster
là-dedans. Si j'avais eu l'occasion de discuter avec ces honorables amis
d'en face lorsque j'ai fait ma demande de convocation de l'Assemblée
nationale, j'aurais aimé qu'avant qu'on amène une loi
spéciale, on puisse demander à la commission parlementaire de
l'Assemblée nationale de se réunir hier ou avant-hier. J'ai
demandé cela lundi. J'ai donné un délai de 48 heures, ce
qui allait à peu près à mercredi vers deux heures,
normalement, pour respecter les 48 heures. On aurait pu, hier, prendre une
journée pour écouter et demander aux gens qui,
présentement, ne s'entendent pas le pourquoi de la mésentente.
Moi, je connais les deux parties. Je suis persuadé à l'avance que
les deux parties sont de bonne foi. Moi aussi, je suis resté
estomaqué lorsque, entre autres, on a dit, de la part des commissions
scolaires, au mois de juin: Nous autres, on ne négocie plus. Les offres
finales sont sur la table et on ne reviendra pas là-dessus.
Le président du syndicat a envoyé une lettre, le 20 juin,
demandant à M. André Gauthier, qui était responsable des
négociations, de bien vouloir reprendre les négociations, disant
qu'il était prêt à négocier durant les mois de
juillet et août. Le 1er juillet, la commission scolaire a répondu
qu'il n'en était plus question, que les offres finales étaient
sur la table et qu'on ne discutait plus. C'est ce qui s'est passé
exactement.
Jusque-là, ce n'était pas urgent, ce conflit. Mais
normalement, si quelqu'un avait été de bonne foi dans ce
gouvernement, il y a une petite lumière qui aurait dû s'allumer et
dire: On va avoir tantôt un conflit pas mal plus grave, étant
donné que les négociations sont rompues. C'est sûr qu'on
est dans un état d'urgence, Mme la Présidente,
présentement, parce qu'il y a l'année scolaire de nos enfants, et
quand je dis nos enfants, ce sont les enfants de tous les gens de la Mauricie,
y compris les enfants des professeurs, y compris eux. (16 h 40)
Cela veut dire, que les professeurs qui étaient sur une ligne de
piquetage n'étaient sûrement pas là de gaieté de
coeur. Eux aussi, normalement, ont le souci de l'éducation de leurs
enfants. Ce n'est pas réservé au grand député de
Sauvé, le souci de l'éducation. Tout citoyen bien pensant au
Québec est intéressé, lui aussi, à
l'éducation de son enfant et cela vaut pour les professeurs. Je connais
des professeurs qui ont des enfants et, pour eux aussi, cela vaut, mais il y
avait quelque chose qui empêchait de négocier.
A cette commission parlementaire qu'on aurait pu avoir hier de 10 heures
à minuit, on aurait pu entendre les commissions scolaires du
territoire, le Syndicat des enseignants des Vieilles-Forges, le ministre
aussi, évidemment, et le premier ministre pour voir exactement où
était le litige, ce qui accrochait. On aurait pu dans le même
délai, dans le même temps, voyant qu'il n'y avait aucune
possibilité d'entente, préparer ce matin la même loi,
puisqu'elle était déjà pensée dans l'esprit des
gens d'en face. On l'aurait étudiée, la même chose, mais au
moins on aurait su de quoi on parlait. On n'aurait pas lancé à
tort et à travers des conneries comme certains des gens d'en face en ont
lancé tantôt. On aurait vu exactement ce qui ne fonctionnait pas
dans le dossier.
Le vrai responsable, Mme la Présidente -c'est malheureux, on
discute de cela, mais, depuis le début, il n'est pas ici - c'est le
ministre des Finances du Québec. C'est lui, le vrai responsable avec les
normes budgétaires qu'il a imposées aux commissions scolaires.
Où est le ministre des Finances présentement? On ne le sait pas.
De toute façon, je ne sais pas où il est est, mais je sais que le
conflit vient de là. Si on ne veut pas parler au niveau de la commission
scolaire, si on n'est pas capable de s'entendre au niveau des
négociations locales, c'est parce que les gens de la commission scolaire
disent: Nous n'avons pas le droit d'aller plus loin que cela. J'ai même
eu l'occasion de discuter avec un représentant du ministère de
l'Education qui a dit: Vous savez, la commission scolaire régionale des
Vieilles-Forges et ses constituantes sont au maximum de la taxation, tout
près de $0.25. Dépassé cela, elles vont être
obligées d'aller en référendum. Ce n'est pas surprenant
et, face à cette situation, c'est sûr que les gars de la
commission scolaire ne peuvent pas s'asseoir pour négocier.
Par contre, de l'autre côté, il y a le Syndicat des
enseignants des Vieilles-Forges qui a obtenu, à la dernière
convention collective, à la dernière entente, des traitements de
faveur, à ce que ces gens d'en face ont dit, la meilleure convention du
Québec. Je regrette, mais c'est à la suite de
négociations, à force d'avoir discuté et parlé
ensemble qu'on en est venu à avoir une belle convention. Ces gens se
voient aujourd'hui tout simplement retirer certains droits acquis qu'ils
possédaient. J'ai entendu cela souvent en cette Chambre, du leader du
gouvernement actuel, que des droits acquis, messieurs, cela se respectait, cela
ne s'enlevait pas, les droits acquis. J'ai entendu charrier cela souvent de
1973 à 1976. Mon collègue de Sainte-Marie doit probablement avoir
la même opinion que moi là-dessus. Le whip du gouvernement a
peut-être aussi la même opinion, sauf qu'il ne le dira pas. Il a un
poste, alors, il ne le dira pas. Mais, je suis pas mal certain que ces gars et
d'autres gars d'en face sont du même avis que moi. C'est ce qui est la
nature du conflit, mais avec les normes émises et édictées
par le ministre des Finances...
Vous allez dire: II y a eu une signature. Oui, il y a eu une signature,
une signature qu'on ne qualifiera pas. Nous allons qualifier cela, de ce
côté-ci, d'entente préréférendaire acceptable
pour faire aller la tête des enseignants du bord d'en bas,
c'est-à-dire leur faire dire un oui. Cela a peut-être
été ainsi. Je vais vous rappeler à ce sujet, à
juste titre, un article que j'ai lu dans la Presse du 18 octobre 1980. C'est
signé par Jean-Guy Dubuc. Cet article s'intitule: "Le même conflit
qui se réanime". Il est question d'une quarantaine de mille enseignants,
c'est-à-dire les enseignants des Vieilles-Forges, plus d'autres
commissions scolaires dont il est fait mention et d'autres qui ne font pas
partie du même projet de loi. L'article dit ceci: Mais
déjà, à ce moment-là, on pouvait prévoir que
la latitude que laissait l'interprétation de certaines clauses pouvait
conduire à de nouvelles difficultés d'entente au plan local.
Quand on regarde cela comme il faut, il y a tellement de latitude dans cette
entente, c'est tellement flou. On voulait tellement ne pas déplaire
à personne durant la période du référendum que
maintenant on se relève et on dit: C'est tellement flou que personne
n'est capable de se retrouver là-dedans. On a des étudiants qui
ont perdu, jusqu'à maintenant, près d'une quarantaine de
journées d'école. On a des enseignants qui ont un manque à
qagner au moins depuis 40 jours et là on dit: Nous allons nous
ériger en juge et partie. Et vous allez vous rappeler certaines paroles
de nos honorables collègues d'en face qui n'étaient pas nombreux,
ils étaient six, mais ils doivent trouver qu'à six ils en ont
encore trop dit. Ces six disaient: Le gouvernement est à la fois juge et
partie. Il est partie à une négociation et après cela il
vient juger; quand le feu est bien pris, il assomme les gars qui font partie du
syndicat. C'est ce qu'on disait dans le temps. La même situation, avec un
peu plus de journées de grève, avec un peu plus de complexes, se
reflète quatre ans plus tard.
C'est le député de Nicolet-Yamaska qui disait que le 24
octobre 1976, dans le temps qu'on était en élection, le premier
ministre du Québec se promenait et parlait de la paix sociale. C'est
cela la paix sociale qu'on vit présentement? Mon collègue, le
député de Marguerite-Bourgeoys, l'a souligné tantôt,
le nombre de jours-élève perdus: entre 20,000,000 et 35,000,000.
C'est cela la paix sociale qu'on crachait partout à la face du
Québec le 24 octobre, il y a quatre ans, jour pour jour, lors d'une
élection provinciale. Cela nous amène aujourd'hui à voter
une loi spéciale contre les mêmes syndiqués. Cela nous
amène à voter une loi spéciale mais avec quel
préjugé favorable aux travailleurs? Le député de
Sauvé, du temps où il était chef de l'Opposition, est
tombé dans le même trou que son budget. Le préjugé
favorable est en dessous du trou. On n'a plus de préjugé
favorable, parce qu'on dit: Les enfants, nos enfants, c'est grave, le droit de
l'enfant. Le ministre le sait, si on avait fait une commission parlementaire,
Mme la Présidente, on aurait pu savoir que, dans le cas des
Vieilles-Forges il y a trois points principaux qui accrochent: la notion de
capacité, le chapitre quatre qui parle de la participation, du
perfectionnement, le conseil d'école et, troisièmement, la
tâche des enseignants, le ratio maître-élèves. On
aurait pu en savoir davantage sur ces trois points, hier, en commission
parlementaire.
Quand j'entends le député de Sauvé venir nous
parler du bien de l'enfant, j'aimerais, à l'intérieur de ce
projet de loi... Le bien de l'enfant est le seul bien qu'on va faire avec cette
loi lorsqu'elle sera adoptée, c'est qu'ils retournent à
l'école, c'est déjà beaucoup. C'était cela l'ultime
but et c'est pour cela que nous, de l'Opposition, on va voter pour faire entrer
les enfants à l'école, mais c'est le seul point qui
traite du bien de l'enfant là-dedans. Le bien de l'enfant, dans
les négociations entre la commission scolaire et les enseignants,
où est-il? Qu'est-ce qu'on en fait? Est-ce que le député
de Sauvé a ouvert la trappe pour en parler dix minutes de temps
tantôt? Il avait droit, dans son discours, d'envelopper cela durant une
heure. Il pouvait nous en parler, du bien de l'enfant. Il aurait pu être
au courant que le bien de l'enfant peut être endommagé s'il avait
écouté les parties en cause hier. Ce n'est pas cela qu'on a voulu
faire. On a voulu faire comme tous les autres gouvernements qui ont
gouverné auparavant, on a voulu faire une loi spéciale pour dire:
Le feu est pris et, avant que la bâtisse soit toute brûlée,
on essaie de ménager au moins une partie des bâtiments. C'est ce
qu'on a fait.
Je dis, comme d'autres l'ont dit avant moi, que ce n'est pas la
meilleure façon de régler des conflits au Québec. Elle
n'est pas unique d'ailleurs, il y en a eu quatre. J'espère qu'il n'y en
aura pas d'autres et je ne suis pas certain qu'avec ce projet de loi qui
crée, encore une fois, comme l'a dit mon collègue de Portneuf,
deux régimes différents de négociation locale, cela ne
reviendra pas, et je ne suis pas certain que la Chambre ne sera pas
obligée de se réunir à nouveau pour étudier un
autre conflit qui va dégénérer en conflagration. (16 h
50)
Mme la Présidente, c'est avec regret que nous, de l'Opposition,
participons aujourd'hui - pas avec joie, comme l'a laissé entendre le
député de Trois-Rivières, mais avec regret - à
l'adoption de cette loi spéciale, tout d'abord pour les enfants, pour
que nos enfants retournent à l'école, en espérant... Je
fais appel aux enseignants des Vieilles-Forges, je fais appel à eux pour
leur dire: Messieurs, vous allez peut-être entrer à quatre pattes
avec cette loi, mais entrez donc. Faites votre travail à la perfection
comme vous l'avez toujours fait, du moins dans la région de la Mauricie,
pour respecter cette loi qu'aura été appelé à voter
le Parlement, en espérant que dans les prochains quinze jours, la
négociation qui est proposée dans le projet de loi va porter des
fruits, en espérant que pour le mieux-être de toute la
collectivité, une fois pour toutes, ce conflit soit réglé
à la satisfaction des deux parties. Merci.
La Vice-Présidente: M. le député de
Richelieu.
M. Maurice Martel
M. Martel: Mme la Présidente, heureusement que mes enfants
ne sont pas entre les mains d'éducateurs qui ont la qualité de
l'ex-professeur, député de Maskinongé. Je pense que son
seul avantage, c'est de ne plus être dans l'enseignement.
Comme député de Richelieu, qui comprend la
régionale Carignan et la commission scolaire de 5orel, ce n'est pas de
gaieté de coeur que je voterai ce projet de loi. Mais étant
donné que le gouvernement a donné toute la chance aux processus
de négociation qui, malheureusement, n'ont pas produit les
résultats escomptés, il s'agit maintenant d'assurer à nos
enfants l'éducation à laquelle ils ont droit.
Lorsqu'il se présente un conflit, il y a inévitablement
négociation entre les parties. Il y a, à l'intérieur du
gouvernement, un ministère qui met à la disposition des parties
des mécanismes pour en venir à une entente. Comme le ministre du
Travail et de la Main-d'Oeuvre l'a expliqué ce matin, il y a eu, dans le
comté de Richelieu, à la régionale Carignan,
au-delà de 50 séances de négociation. Il y a eu des
séances de conciliation également. Malgré tout cela,
malgré tous ces efforts, nous n'avons obtenu aucun résultat. La
situation est que, présentement, les professeurs et la commission
scolaire sont véritablement dans un cul-de-sac et que l'année
scolaire de nos enfants est sérieusement compromise.
En ce qui concerne le député de Richelieu, j'ai
rencontré les représentants des enseignants, les
représentants de la commission scolaire régionale. J'ai
également rencontré les représentants des parents, afin de
remplir mon travail de député, c'est-à-dire de
connaître les différentes versions. Non pas d'agir comme
négociateur au conflit, mais d'être en mesure d'apporter un
certain jugement auprès de mon collègue, le ministre du Travail
et de la Main-d'Oeuvre.
Mais, encore là, malgré toutes ces rencontres que nous
avons eues, malgré tous ces déplacements que les parents ont
effectués auprès de la commission scolaire, auprès du
corps enseignant, du syndicat de la régionale Carignan, il n'y a eu,
malheureusement, aucun aboutissement positif à leurs
démarches.
Etant donné que l'année scolaire est compromise, tant pour
les gens de la Mauricie que pour les gens de Richelieu, parce que chez nous,
nous en sommes maintenant rendus à presque un mois de conflit,
étant donné également que tous les mécanismes ont
été mis à contribution, comme il s'agit évidemment
d'implications économiques à long terme également, parce
que tous ces enfants entreront sur le marché du travail avec une
année de retard, si nous n'intervenons pas a ce moment-ci, nous avons,
comme gouvernement, le devoir d'assurer le droit à l'éducation de
ces milliers d'enfants. Dans le présent projet de loi, il s'agit de
demander aux professeurs, aux commissions scolaires de faire reprendre les
cours à partir du 27 octobre prochain. Il s'agit également de
demander aux commissions scolaires locales, de même qu'au syndicat des
enseignants, d'essayer de s'entendre durant les prochains quinze jours, sinon,
de se soumettre, comme je vais le suggérer moi-même aux deux
parties concernées dans le comté de Richelieu, aux
décisions d'un arbitre. Cette suggestion, je l'avais formulée.
J'avais demandé à la partie syndicale et à la partie
patronale de se soumettre d'avance aux décisions gu'un arbitre pourrait
rendre dans le conflit qui sévit chez nous. Malheureusement, cela a
été refusé. A ce moment, cela aurait sans doute
été une solution qu'aujourd'hui nous sommes obligés de
mettre dans une loi qui prévoit que, d'ici quinze jours, les deux
parties concernées seront obligées de se soumettre à la
décision de cet arbitre.
Il va de soi que, dès l'entrée en vigueur de ce projet de
loi et dès la reprise des cours, lundi prochain, les deux parties
devront accepter l'entente qui a eu lieu au niveau national. C'est la
priorité du présent projet de loi. Il reste à
espérer que la négociation qui va se faire durant
la prochaine quinzaine, ou bien l'arbitrage qui sera imposé,
apportera une solution juste et équitable tant pour les professeurs que
pour les commissions scolaires et que l'amélioration de l'enseignement
à nos enfants pourra se faire dans le meilleur climat possible.
Merci.
La Présidente: M. le leader de l'Union Nationale.
M. Serge Fontaine
M. Fontaine: Mme la Présidente, je voudrais, en tant que
député situé au milieu de ce conflit, mais qui n'a pas a
en subir les conséquences, apporter un point de vue qui, en
l'occurrence, peut être un peu plus impartial. Il y a un mot que le
député de Trois-Rivières, entre autres, a
répété à plusieurs reprises, en disant que nous
sommes maintenant dans une impasse. Nous sommes dans un cul-de-sac, comme vient
de le répéter également le député de
Richelieu, et, le gouvernement, face à cette impasse, à ce
cul-de-sac, doit maintenant agir.
Mme la Présidente, j'aimerais vous dire que, d'après moi,
le gouvernement du Parti québécois savait depuis très
longtemps que cette impasse que nous sommes forcés de constater
aujourd'hui existait. Je vais vous dire pourquoi.
Déjà, avant le 26 mai 1980, avant même que l'entente
nationale ne soit signée entre les représentants patronaux, les
représenteants du gouvernement et les représentants de la CEQ,
les observateurs de la scène syndicale avaient été
à même de constater qu'au sein même de la CEQ, certains
syndicats n'acceptaient pas certains points de l'entente nationale et, entre
autres, le syndicat des Vieilles-Forges. Les dirigeants de ce syndicat et plus
particulièrement M. Raymond Johnston, qui était leur
représentant étaient intervenus auprès de la direction de
la CEQ pour demander à M. Gaulin de ne pas signer l'entente nationale
parce que, selon eux, on leur enlevait des droits acquis. Je pense que
c'était leur droit à ce moment-là de demander à
leur représentant de ne pas signer cette entente-là parce qu'ils
perdaient des choses qui leur étaient acquises. (17 heures)
Malgré cette opposition farouche du syndicat de
Trois-Rivières et plus particulièrement de M. Johnston, les
représentants de la CEQ, M. Gaulin, ont quand même signé
l'entente nationale pour des raisons que je n'ai pas à juger
aujourd'hui. Suite à cette signature, nous savions d'ores et
déjà qu'il y avait une scission au sein de la CEQ, qu'il y avait
une guerre de tranchées et qu'il y aurait des choses qui se passeraient
au niveau local pour faire reviser l'entente nationale. C'était
tellement fort, que M. Gaulin lui-même a été obligé
de reviser ses positions et de revenir dans la région de
Trois-Rivières pour défendre le syndicat des Vieilles-Forges et
renier la signature qu'il avait lui-même apposée au bas de
l'entente nationale. Déjà, en date du 26 mai 1980, lorsque la
signature de l'entente a été paraphée, le ministre de
l'Éducation, le Conseil des ministres, le gouvernement savaient qu'il y
aurait des problèmes de négociation au niveau local.
De plus, Mme la Présidente, en juin 1980, si je ne me trompe,
alors que les discussions sur l'interprétation de certaines clauses de
l'entente nationale ont été connues, alors que la CEQ a
avisé le gouvernement, le ministère de l'Éducation plus
particulièrement, qu'il y avait un problème
d'interprétation de certaines clauses de l'entente nationale, il y a eu
une entente entre la CEQ et le gouvernement, et le ministère de
l'Éducation pour essayer de voir comment est-ce qu'on
interprétait certaines clauses de l'entente nationale qui sont au centre
du conflit actuel. A ce moment-là, le gouvernement a donné son
interprétation de la clause, la CEQ a dit au gouvernement qu'elle
n'était pas d'accord avec l'interprétation du gouvernement et,
d'ores et déjà on savait qu'il y aurait des conflits graves suite
à une mésentente sur l'interprétation de l'entente
nationale.
Dans ces conditions, Mme la Présidente, déjà, en
juin, le ministre de l'Education savait que des conflits surgiraient sur une
question d'interprétation d'entente nationale. Pourquoi, le
gouvernement, le ministre de l'Éducation n'a-t-il pas, à ce
moment-là, en juin, demandé à l'Assemblée nationale
de se prononcer, d'écrire l'interprétation que le gouvernement
donnait à cette entente pour faire en sorte qu'il n'y ait pas de
mésentente au niveau local? Il aurait réglé tout le
problème des conflits au niveau local. Le gouvernement n'a pas pris ses
responsabilités à temps et il est aujourd'hui responsable du fait
que des élèves, dans différentes régions du
Québec, sont en train de perdre leur année, si ce n'est pas
déjà fait.
Mme la Présidente, nous tenons le gouvernement responsable de ne
pas avoir agi alors qu'il connaissait les faits, d'autant plus que le ministre
de l'Éducation, alors que le conflit commençait à
Trois-Rivières, venait visiter la région et comme l'a dit le
député de Portneuf tout à l'heure, remettait la
responsabilité de cette négociation sur le dos de la commission
scolaire locale. Il disait, à ce moment-là, que la solution au
problème relevait de la commission scolaire locale et cela, alors
même qu'il savait que, par l'entremise de son sous-ministre, il avait
envoyé une directive à toutes les commissions scolaires du
Québec à savoir que si elles dépassaient ce qui
était contenu dans l'entente locale, ce seraient les commissions
scolaires locales qui devraient en payer le coût.
Mme la Présidente, j'aimerais vous citer la lettre que le
sous-ministre, M. Jacques Girard, a envoyée aux commissions scolaires
locales et aux commissions scolaires régionales en date du 4 septembre
1980, avant même que le ministre ne daigne se déplacer pour aller
à Trois-Rivières: "Monsieur, Madame, le ministre de l'Education a
pris connaissance des ententes locales qui ont été
négociées et agréées à cette date par
plusieurs commissions scolaires. Suite à cette première analyse,
il semble que certaines de ces ententes locales seraient contraires aux
dispositions négociées et agréées à
l'échelle nationale et ne respecteraient pas le partage des
matières définies par l'arrêté en conseil 262-79 et
modifié par les arrêtés en conseil 2015-79 et 2601-79. "Les
coûts additionnels résultant de toute entente locale qui serait
ainsi contraire aux dispositions de l'entente négociée et
agréée à l'échelle nationale ou qui irait
au-delà de la juridiction prévue par le partage des
matières, seront assumés exclusivement par la commission
scolaire."
Mme la Présidente, en date du 4 septembre
1980, le ministre de l'Éducation savait que, s'il y avait des
dépassements à l'entente nationale, ce seraient les commissions
scolaires locales qui devraient en assumer le coût et que
déjà ces commissions scolaires locales, les contribuables de ces
commissions scolaires locales sont surchargés de taxes, alors que le
gouvernement a coupé son budget, à la suite d'une lettre, entre
autres, du 26 septembre 1980.
Mme la Présidente, malgré qu'on ait passé toutes
les étapes pour essayer d'en arriver à une convention collective,
conciliateurs... On a envoyé deux personnes qui voulaient, semble-t-il,
proposer des solutions, M. Yvan Blain et M. Raymond Désilets. On a
également nommé un enquêteur spécial qui est encore
en fonction alors même que le gouvernement savait qu'il devait faire
adopter une loi spéciale. On a eu une demande d'injonction, injonction
qui n'a pas été respectée. Je pense que le gouvernement a
été jusqu'au bout de la limite et on se voit aujourd'hui face
à un conflit que nous devons régler si nous voulons que les
enfants puissent recevoir l'éducation à laquelle ils ont
droit.
Mais le ministère de l'Éducation, le gouvernement actuel,
ne prend même pas la peine de régler en même temps les
autres conflits qui persistent dans d'autres régions du Québec.
Pourquoi ne pas régler ces autres conflits? La raison qu'on nous donne,
c'est: ça ne fait pas assez longtemps. Imaginez-vous quelle sorte de
raison cela peut faire! Ce n'est pas assez pourri. Cela ne fait pas assez
longtemps. On n'agit pas. On attend que ce soit aussi pourri que dans la
région de Trois-Rivières ou dans la région de Sorel avant
d'intervenir, alors qu'on sait déjà qu'il n'y aura pas d'entente,
que ça va faire la même chose que dans les commissions scolaires
pour lesquelles nous adoptons une loi actuellement.
Les parents, entre autres, de la Commission scolaire Baldwin-Cartier ont
envoyé aujourd'hui même au chef de l'Union Nationale, au chef du
gouvernement, au chef de l'Opposition officielle un télégramme
leur demandant d'intervenir immédiatement pour régler ce conflit,
et je vous le lis, Mme la Présidente:" Nous vous informons de ce qui
suit: Attendu que les parties négociantes sont unanimes à
admettre l'impasse " - on revient au même mot que celui que le
député de Trois-Rivières a employé tantôt - "
de la situation et que les parents veulent éviter une guerre d'usure;
attendu que cette impasse se situe au niveau d'un principe
déclaré non négociable par les deux parties, à
savoir l'intervention ou non d'un arbitre dans l'évaluation des
habiletés et aptitudes des enseignants; attendu que les enfants
subissent pour la deuxième année consécutive les
préjudices d'un conflit de travail; attendu que les enfants n'ont pas
à subir un fardeau supplémentaire à cause de
l'intérêt stratégique des deux parties en cause; attendu
que les parents de la Commission scolaire Baldwin-Cartier nous prient
d'intervenir afin que les enfants réintègrent leurs écoles
de façon régulière le plus tôt possible; attendu que
les parents n'ont pas à se poser en juge; en conséquence, nous
demandons à l'Assemblée nationale de régler
immédiatement le conflit de la Commission scolaire Baldwin-Cartier au
moyen d'une loi spéciale."
Je me fais le porte-parole de ces parents pour demander au ministre de
l'Éducation, au chef du gouvernement, de modifier son projet de loi et
d'y inclure le règlement de la Commission scolaire Baldwin-Cartier
également. (17 h 10)
Je pense que ces enfants ont également droit à
l'éducation. Ce n'est pas parce que ça ne fait qu'un mois qu'ils
sont en grève ou en lock-out qu'on doit dire: II faut laisser pourrir le
conflit encore plus longtemps avant d'intervenir. Mme la Présidente, si
le ministre de l'Éducation veut faire cet amendement, nous, nous ne
pouvons pas le faire parce que les règles de procédure ont
été limitées ce matin. Alors, c'est au gouvernement
à proposer des modifications qui seront sûrement acceptées
de part et d'autre de l'Assemblée nationale.
Il y a ces conflits-là. Nous devons les régler. Mais
au-delà de cela, il y a, bien sûr, le problème de fond, que
l'Union Nationale a soulevé à plusieurs reprises devant cette
Assemblée nationale. Nous devons, les parlementaires, ensemble, devant
une commission parlementaire, nous réunir le plus rapidement possible
afin de trouver une solution à ces conflits permanents, non pas une
négociation permanente à laquelle nous avons à faire face
actuellement, mais plutôt aux conflits permanents qui subsistent dans le
domaine de l'éducation et dans le domaine hospitalier
également.
Nous devrons trouver une solution à ce problème. C'est le
principe même du droit de grève qui est mis en cause. L'Union
Nationale a proposé des choses à cet effet et je pense que le
gouvernement devrait agir le plus rapidement possible. Nous devons en arriver
à une négociation permanente dans les secteurs public et
parapublic qui sont jugés essentiels.
Mme la Présidente, il y a une grande différence entre les
travailleurs des services parapublic et public et ceux de l'entreprise
privée. L'embouteilleur de Coke qui fait la grève, ce n'est pas
trop trop grave, on peut s'acheter du Kik à la place. Mais, quand on
arrive dans le domaine hospitalier ou dans le domaine de l'enseignement
où c'est le gouvernement du Québec qui est responsable, par
l'entremise de nos taxes, à ce moment-là, ce n'est plus la
même chose. Nous ne pouvons pas faire appel à un autre service
à côté, il n'y a pas de service parallèle. D'autant
plus que le gouvernement actuel limite considérablement les commissions
scolaires privées. Alors, nous sommes dans une impasse quand nous
arrivons dans une situation comme celle que nous vivons aujourd'hui et il faut
trouver des solutions permanentes à ces conflits.
Nous avons le sentiment, Mme la Présidente, que les travailleurs
qui sont eux-mêmes affectés par ces conflits sont insatisfaits des
mécanismes actuels et seraient d'accord pour essayer de trouver des
solutions permanentes pour faire en sorte que nos enfants puissent recevoir
l'éducation à laquelle ils ont droit présentement.
Je fais appel, Mme la Présidente, également aux syndicats,
leur demandant d'être plus imaginatifs dans les moyens de pression qu'ils
font contre le gouvernement, qu'ils devraient faire contre le gouvernement et
non pas contre les enfants, et non pas contre les parents. C'est contre le
gouvernement qu'on doit manifester notre désaccord quand il y a des
problèmes. Qu'on dise qu'on ne remplit plus les fiches
d'évaluation, qu'on ne fait plus les fiches de
présence, qu'on ne fait plus les bulletins, qu'on ne fera plus de
rapport pédagogique, qu'on assiste aux séances des commissions
scolaires en masse pour dire aux commissions scolaires notre insatisfaction,
qu'on bloque la machine gouvernementale, d'accord, mais qu'on empêche les
étudiants d'aller à l'école, de recevoir
l'éducation, je pense que nous nous devons de demander aux syndicats
d'être plus imaginatifs dans les moyens de pression qu'ils exercent.
En terminant, Mme la Présidente, je leur demande
également, malgré que ce ne soit pas satisfaisant pour eux, je
pense, le fait d'être obligé de retourner à leur travail
à cause d'une loi spéciale, je leur demande de respecter cette
loi puisqu'elle est la volonté de la population qui nous a élus.
Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Sainte-Marie. Je reconnaîtrai Mme la députée de L'Acadie
immédiatement après.
M. le député de Sainte-Marie.
M. Guy Bisaillon
M. Bisaillon: Mme la Présidente, je voudrais faire porter
mon intervention principalement sur trois points: d'abord la situation
vécue sur le territoire des commissions scolaires concernées par
le projet de loi. Dans un deuxième temps, une analyse rapide des
principes contenus dans la loi, de même que leurs effets, et
troisièmement, terminer avec des considérations
générales sur la situation des enseignants actuellement au
Québec. (17 h 20)
Après avoir écouté mes collègues de
l'Assemblée nationale nous expliquer quelle était la situation
dans leur milieu, sachant aussi que le Code du travail, dans son esprit, depuis
les tout débuts, indique qu'il peut y avoir des cas particuliers dans
les secteurs public et parapublic, il est évident qu'on ne peut pas
être actuellement contre le fait qu'il faille prendre des mesures
particulières pour assurer l'année scolaire des
élèves sur le territoire des commissions scolaires
concernées.
Ce premier principe étant acquis, M. le Président, il
semble, cependant, qu'on ne peut pas aller au-delà et se servir d'une
loi qui pourrait dans ses effets ou dans son application répondre aux
problèmes en en créant d'autres ou en allant au-delà de ce
qu'on veut faire. Si on regarde attentivement les principes qui sont
énoncés dans cette loi, il y en a deux. Le premier: assurer la
reprise de l'enseignement sur le territoire des commissions scolaires.
Là-dessus, tout le monde est d'accord. Deuxième principe: elle
prévoit, de plus, que l'entente intervenue le 26 mai, la convention
collective signée au plan national entre les parties doit
s'appliquer.
Est-ce qu'on a besoin d'une loi, M. le Président, pour affirmer
qu'une convention collective négociée entre les parties doit
s'appliquer? Mais, plus loin, on dit: "précise la portée de cette
entente en ce qui concerne les règles de répartition des
fonctions et responsabilités entre enseignants." Selon moi, il est clair
que, dans le deuxième principe que cette loi veut appliquer, on va
au-delà de ce qu'on peut faire comme État, comme Assemblée
nationale. On se substitue à ce qu'on a déjà fait
auparavant. On porte un jugement sur les gestes qu'on a posés autrefois.
On a, comme gouvernement, comme Assemblée nationale, approuvé une
convention collective entre des parties: les enseignants et les commissions
scolaires, et le gouvernement du Québec. Cette convention collective
peut effectivement être difficile à interpréter. Mais, dans
notre façon de fonctionner, quand on a un problème
d'interprétation d'une clause, de deux clauses ou de certaines clauses
de la convention collective, il est habituellement compris qu'on fait examiner
la position de chaque partie par un tribunal d'arbitrage.
Or, actuellement, M. le Président, que faisons-nous? Nous prenons
la convention collective qu'on a signée; nous ajoutons dans la loi 113
l'interprétation que l'on veut bien nous-mêmes donner à la
clause qui a été convenue entre les parties. Il me semble que cet
aspect de la loi ne correspond pas; il ne vise pas à régler, non
plus, le problème du retour en classe des étudiants des
commissions scolaires concernées par le projet de loi actuel. Il me
semble que, ce faisant, on devient effectivement juqe et partie.
Pour rappeler au député de Maskinongé que je
demeure convaincu que l'État et que l'Assemblée nationale comme
telle n'a pas le droit en aucun temps d'être juge et partie, M. le
Président, je suis porté à examiner plus
particulièrement comment s'est créée cette situation. On a
convenu d'une convention collective qui, dans un de ses aspects,
prévoyait ce qu'il est convenu d'appeler dans le milieu un plancher
d'emploi, c'est-à-dire qu'en prévoyant un nombre maximal d'heures
d'enseignement pour les enseignants, de même qu'un nombre maximal
d'élèves dans chacune des classes, on établissait ce qu'il
est convenu d'appeler le plancher, c'est-à-dire le minimum d'enseignants
ou de personnel requis pour effectuer le travail, c'est-à-dire remplir
le nombre d'heures qu'il faut remplir, plus donner l'enseignement à
l'ensemble des élèves.
Or, la convention collective prévoyait aussi autre chose qu'un
plancher; appelons ça un frein. Elle prévoyait que les
commissions scolaires et que les syndicats ne pouvaient pas aller
au-delà d'un certain nombre d'enseignants, ce nombre étant
déterminé par dix pages de calculs qui nous amènent
à établir ce qu'on appelait tantôt le ratio
maître-élèves. Appelons l'autre partie, la deuxième
partie, le plafond. Autrement dit, on a convenu dans une convention collective
qu'il y aurait un plancher, c'est-à-dire un minimum en bas duquel on ne
descendrait jamais, et un plafond au-dessus duquel on ne pourrait jamais aller,
non plus. (17 h 20)
La position du gouvernement et son interprétation de cette
clause, c'est de dire: Le plafond n'est pas arbitrable. Comme il n'est pas
arbitrable, sauf pour deux questions, sauf quand il s'agit de
sécurité d'emploi et quand il s'agit d'enfance inadaptée,
comme le plafond n'est pas arbitrable, il n'est pas applicable non plus. Je
prétends, M. le Président, que sur un certain nombre de
commissions scolaires et de syndicats qui ont déjà
négocié et convenu de leur entente locale, 36, treize d'entre
elles sont allées entre le plancher et le plafond.
Dans plusieurs conventions collectives, on ne
se contente que d'indiquer le plancher d'emploi, ce qu'on appelle le
plancher. Lorsqu'on ne met que le plancher, tout le monde convient que c'est le
seul nombre auquel on est tenu. Mais quand on pense aller plus loin un peu,
quand on donne la possibilité de monter en haut, on doit convenir qu'il
est peut-être possible que cela se situe entre les deux. Or, après
la conclusion de la convention collective, il y a eu des règles
budgétaires émises par le gouvernement aux commissions scolaires.
Ces règles disaient quoi finalement? Elles disaient aux commissions
scolaires: Ce que nous allons subventionner quant au salaire des enseignants,
cela va être ce qui va correspondre au plancher d'emploi, au minimum
requis par des clauses d'heures de travail et de maximum
d'élèves. Ce faisant, on prévenait nos partenaires que
tout ce qui dépasserait, tout ce qui serait entre le plancher et le
plafond serait à leurs frais.
Je me pose la question, M. le Président; au moment où on
était en négociation, il y a quelques mois, si a ce
moment-là on avait prévenu les commissions scolaires
qu'effectivement on ne subventionnerait que le plancher, est-ce que les
commissions scolaires auraient consenti à inscrire un plafond dans la
convention collective? Il me semble qu'à partir du moment où
intervient quelque chose d'autre, il y a un certain nombre de conditions qui
sont modifiées. M. le Président, ces conditions étant
modifiées, on se sent maintenant obligé de prendre
l'interprétation qu'on donne de la convention, probablement à
raison; probablement qu'on aurait raison de donner l'interprétation
qu'on donne à la clause de la convention collective. Ce que je dis,
c'est qu'on n'a pas le droit de le mettre dans la loi. Il me semble que
l'interprétation, on devrait la faire arbitrer comme n'importe quelle
autre difficulté d'interprétation des conventions
collectives.
Le deuxième point, M. le Président, me semble être
aussi une question de principe qui est dangereuse. La loi prévoit, dans
la section VI, des sanctions au cas où, évidemment, elle ne
serait pas respectée. Dans les clauses 13, 14, 15, et 16, on parle des
pénalités financières qui vont s'appliquer aux individus,
aux groupes ou aux administrateurs scolaires, mais, aux articles 18, 19 et 20,
on parle d'un autre type de pénalités, c'est-à-dire que,
si au jugement du gouvernement le gouvernement est d'avis que moins de 70% des
enseignants ne respectent pas la loi, il peut ordonner que cesse l'obligation
de verser les cotisations syndicales. Dès qu'il a avisé une
commission scolaire de son jugement, la commission scolaire est tenue de ne pas
percevoir les cotisations syndicales. Je voudrais bien qu'on comprenne, M. le
Président, que ce que je veux défendre ici, ce n'est pas le fond
de la question: Est-ce qu'on devrait ou pas percevoir des cotisations
syndicales? Ce que je veux dire c'est que, quant aux autres
pénalités, on dit: Les gens seront poursuivis - c'est l'article
17 - une poursuite est intentée suivant la Loi des poursuites sommaires,
donc soumise à un tiers. On ne dira pas à un enseignant ou
à un administrateur scolaire ou à un syndicat: Tu es
pénalisé pour $100 par jour. On va, en plus de cela, devoir se
présenter devant un juge puisqu'on fait une poursuite selon la Loi des
poursuites sommaires, on va devoir faire arbitrer notre chose par un juge, par
un tiers. Pourquoi, dans l'autre cas, ne fait-on pas aussi arbitrer par un
tiers le jugement qu'on a porté sur le pourcentage d'enseignants qui
respectent ou ne respectent pas la loi? Est-ce qu'il ne serait pas normal et
est-ce que ce n'est pas un droit fondamental reconnu dans à peu
près toutes les chartes des droits de la personne dans le monde qu'un
individu a droit à une défense juste et équitable?
Pourquoi, dans ce cas-là, se limite-t-on uniquement au jugement du
gouvernement? Il me semble que c'est un deuxième principe, M. le
Président, qu'on devrait analyser de plus près au moment
où on fera l'étude article par article. J'espère que le
gouvernement, là-dessus, pourrait, par exemple, soumettre les quelques
cas qu'il pourrait y avoir au jugement du Tribunal du travail, faire au moins
confirmer sa position par le Tribunal du travail.
Le troisième élément, M. le Président, ce
sont les effets, les effets sur l'ensemble des autres syndicats ou des autres
organisations syndicales et des autres commissions soclaires, qui ne sont pas
visés par le projet de loi. Dans un article, on prévoit que tout
ce qui a été réglé avant l'adoption de cette loi,
peu importe que ce soit au plancher, au plafond, ou entre le plancher et le
plafond, cela sera reconnu, pour autant que l'entente aura été
signée avant le 24, donc avant l'adoption de la loi.
Mais les autres syndicats, M. le Président, à partir du
moment où on place notre interprétation dans la loi, même
si on ne les nomme pas, même si on ne les implique pas dans la loi,
est-ce que, par voie de conséquence, ils ne sont pas tout autant
visés que les syndicats ou les commissions scolaires visés par le
projet de loi actuel?
Il me semble que si, dans la loi, on met l'interprétation d'une
clause, cette interprétation va valoir pour l'ensemble des autres
négociations qui se déroulent. Quelle peut être l'attitude
des autres commissions scolaires et des autres organisations syndicales?
Dans un premier temps, si le problème repose là-dessus,
elles jugeront que le problème a été réglé
unilatéralement par l'Assemblée nationale. Si c'est d'autres
types de problèmes, les négociations vont devoir se poursuivre.
Et si les négociations se poursuivent, il se pourrait
éventuellement, dans ces cas-là, qu'il y ait aussi des
arrêts de travail.
Il faudrait comprendre que cette loi ne vise qu'un groupe particulier et
ne règle pas l'ensemble du problème.
Le dernier élément, M. le Président, c'est que dans
les autres cas, dans ceux qui ont été traités avant, qui
l'ont fait de bonne foi, comme ceux qui le font actuellement le font
probablement de bonne foi aussi, pourquoi reconnaît-on ceux du
passé et ne reconnaîtrait-on pas demain ceux qui le feraient de
bonne foi, en l'appliquant dans leur milieu? L'objectif des négociations
locales, c'était d'appliquer un pattern national, de l'appliquer aux
conditions particulières d'un milieu, d'une région. Cela devrait
s'appliquer sur l'ensemble. Et si l'on prétend que cela ne s'applique
pas, il me semble qu'il faudrait qu'on le fasse au moins confirmer par un tiers
plutôt que, d'autorité, l'imposer par l'Assemblée
nationale.
En terminant, M. le Président, plusieurs commentaires aujourd'hui
ont été faits sur le
statut des enseignants et sur leurs conditions de travail
particulièrement intéressantes. Le député de
Trois-Rivières a souligné dans son intervention qu'il y a une
vingtaine d'années, le travail des enseignants était assez
difficile. Je voudrais le corriger, M. le Président. Ce n'est pas il y a
une vingtaine d'années, c'est il y a une dizaine d'années. Il y a
encore douze ans, les conditions salariales et les conditions de travail des
enseignants étaient pitoyables. C'est seulement depuis douze ans que
cette catégorie de travailleurs a réussi à avoir des
conditions de travail convenables. Il me semble que si on a des discussions
à faire avec eux, si on veut faire la discussion sur le fait que dans
notre société il y a des groupes plus démunis qu'eux et
que ces groupes, pour que le gouvernement puisse les assister, pour que
l'État puisse les assister, il va falloir que l'État ait des
fonds, il me semble que si on voulait faire cette discussion, c'est au moment
des négociations qu'il nous aurait fallu la faire.
Il est un peu "démagogique" d'utiliser aujourd'hui
l'amélioration qu'un groupe de travailleurs a réussi à
obtenir dans ses conditions de travail et dans la qualité de vie pour
les retourner contre les autres. Notre objectif, M. le Président, c'est
d'améliorer le sort de chaque Québécois. Et a partir du
moment où on aura les fonds, on pourra améliorer le sort de
chaque Québécois. Cela va prendre la collaboration de l'ensemble
des travailleurs, y compris du groupe des enseignants. Mais cette discussion,
si on ne l'a pas faite au moment où on devait faire la
négociation, ce n'est pas aujourd'hui qu'on doit leur reprocher des
conditions qu'à cette époque on leur a consenties, parce qu'on
trouvait qu'elles étaient justes et équitables. Merci, M. le
Président.
Le Président: Merci, M. le député de
Sainte-Marie.
Mme la députée de L'Acadie, vous avez maintenant la
parole. (17 h 30)
Mme Thérèse Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Avant de
commencer, je voudrais remercier le député de Sainte-Marie pour
la façon très claire dont il a posé le problème. Je
pense qu'on doit à sa franchise de bien situer la où se trouve le
conflit qui a finalement pris les proportions que nous connaissons dans
plusieurs endroits de la province.
Sans vouloir trop accabler le ministre de l'Éducation, je
voudrais quand même lui rappeler que, lorsque l'étude des
crédits du ministère de l'Éducation, en juin dernier,
relativement aux négociations, il se réjouissait du grand
succès que son gouvernement avait eu dans ces négociations. Il
ajoutait: les débrayages de 1980 ont été moins
néfastes que ceux de 1975, puisqu'ils sont intervenus à
l'intérieur de quatre semaines, alors qu'en 1975, les difficultés
et débrayages de toutes sortes ont duré six mois.
Je sais que ce que vit le ministre de l'Éducation n'est pas
facile, mais je pense qu'il faut toujours être très modeste dans
ce type d'affirmation, parce que, si je compte bien, les débrayages au
niveau scolaire ont débuté en janvier et nous approchons d'un
autre mois de janvier. C'est novembre la semaine prochaine.
M. le Président, j'ai entendu le ministre de l'Éducation,
faire fort élégamment, comme il sait le faire d'ailleurs, cette
différence entre les deux niveaux de négociation, le niveau
national ou provincial et le niveau local, en disant: Ecoutez, nous ne sommes
pas partie aux négociations locales. Mais je regrette, cela aurait
été le cas, n'eût été l'objet du litige qui a
créé les conflits que nous connaissons. Le député
de Sainte-Marie vient de l'expliquer fort bien. On a laissé, compte tenu
peut-être de la trop grande rapidité avec laquelle on a voulu - je
ne l'utiliserai pas, je devrais peut-être utiliser le terme -
bâcler, d'une certaine façon, les dernières
négociations dans le monde de l'enseignement, parce qu'on était
évidemment très près du référendum. C'est
d'ailleurs ce qui explique en partie la rapidité avec laquelle on a
déterminé, en mai dernier, que l'année scolaire des
étudiants ou des élèves de la CECM était en danger
après onze jours de grève, alors que là, il a fallu
attendre 38 jours pour décider que c'était périlleux.
J'entends tout de suite le ministre de l'Éducation rétorquer: Ah
oui! mais c'étaient les examens, leur année était en
péril. Je lui ferai remarquer que les examens du ministère
valaient pour quelques cours du secondaire IV et secondaire V et que,
déjà en d'autres occasions, les examens de fin d'année de
la CECM n'avaient pas coïncidé avec ceux de l'ensemble de la
province. Mais, à ce moment, il y avait l'échéance du
référendum, on était en pleine campagne
référendaire, si ma mémoire est bonne. On a alors
jugé selon d'autres critères que ceux qu'on a utilisés
aujourd'hui, ce qui est tout à coup périlleux pour les
élèves.
Peut-être que le ministre de l'Éducation, dans sa
réponse, pourrait nous dire selon quels critères il
détermine qu'une année scolaire est en jeu.
Je vous ferai remarquer ceci. Il était fort clair, dès que
la directive - plusieurs l'ont mentionné avant moi - du sous-ministre de
l'Education eut été envoyée aux commissions scolaires, le
4 septembre, et qu'on connaissait l'objet exact du litige qui était
relié à cette interprétation très ambiguë de
la convention nationale et qu'on essayait de ranimer, comme le disait un
éditorialiste, au niveau local, qu'on ne pouvait rien régler.
M. le Président, je voudrais brièvement parler des
inconvénients pour les étudiants et pour les élèves
en particulier. Pour ce qui est des parents, je pense qu'à peu
près tout le monde ici, dans l'Assemblée nationale, est un parent
dont les enfants sont encore à l'école, dont les enfants
s'apprêtent à entrer à l'école, ou sont sortis de
l'école il n'y a pas tellement longtemps. Je pense donc que
l'intérêt des parents pour l'éducation de leurs enfants, on
n'a pas besoin de se gargariser de grands mots et de faire du pathos, tout le
monde le sait.
Mais, exactement, qu'est-ce que ça représente pour les
élèves? On n'a peut-être pas assez insisté sur ceci.
Il faut rappeler que vous avez des élèves qui entraient pour la
première fois à l'école cette année. Au niveau
maternel, ils peuvent peut-être attendre, mais il y en avait qui
accédaient à la première année et un retard de deux
mois, c'est considérable pour ces enfants-là qui ont une
période d'attente, somme
toute, de quatre mois avant d'entrer à l'école. On sait
fort bien que la récupération, pour ces enfants du premier cycle
de l'élémentaire, n'est pas chose facile parce qu'on ne peut pas
accélérer ou leur imposer un rattrapage qu'ils ne pourraient pas
absorber, comte tenu de leur âge.
Pour ce qui est des autres enfants, on sait fort bien que les mois les
plus fructueux du point de vue de l'apprentissage scolaire durant une
année scolaire et je pense que là-dessus, le ministre de
l'Éducation sera probablement d'accord avec moi - ce sont les mois
d'octobre et de novembre. Les deux premières semaines de septembre
aussi, bien que cette année, l'année scolaire ait
débuté plus tôt qu'à l'accoutumée, compte
tenu de la date de la Fête du travail. Les deux premières
semaines, j'admets qu'il y a organisatin et qu'on procède lentement avec
les élèves, mais octobre et novembre sont les deux mois les plus
importants de toute l'année scolaire pour l'apprentissage. Ce sont
là des mois extrêmement fructueux.
On se retrouve maintenant avec des élèves de
l'élémentaire qui vont devoir faire cette période
d'organisation scolaire en novembre et déjà pointe en
décembre Noël, avec le climat que cela crée, le climat de
vacances, le climat de vouloir arriver aux Fêtes, comme on dit. Ceci veut
dire que le premier semestre de ces élèves est compromis. Mais on
peut espérer que des élèves de l'élémentaire
ou du primaire pourront, s'ils n'ont pas trop d'accrocs ou s'ils ne connaissent
pas trop de grèves, faire un rattrapage raisonnable.
Qu'en est-il des élèves des secondaire III, IV et V?
Evidemment, le ministre a fait allusion aux élèves du secondaire
V qui devaient passer des examens et qui voudront accéder à des
études supérieures ou entrer sur le marché du travail.
Mais ce qui arrive, peut-être pas volontairement, mais qui, à mon
point de vue, est l'aspect le plus important, c'est la démotivation des
élèves de ce niveau à l'égard de l'école.
Les élèves de cet âge-là utilisent souyent, quand il
y a une grève, ce prétexte pour décrocher de
l'école.
Ce serait peut-être intéressant que le ministre de
l'Éducation demande à la régionale des Vieilles-Forges -
ils avaient quand même fait les inscriptions en mai ou en juin - de faire
le suivi et voir combien de ces jeunes de secondaire III, IV ou V auront
décroché. Ceux-là, ce sera peut-être bien difficile
non seulement de leur faire faire du rattrapage, mais de les rattraper dans un
système d'éducation qu'ils auraient normalement suivi si les
circonstances avaient été plus propices.
J'aurais trois questions à poser aux membres du gouvernement. La
première, et là-dessus, encore une fois, le ministre a
été absolument muet: Quelles sont les mesures de
récupération qui seront prises pour assurer que les
élèves soient le moins possible pénalisés? Je ne
voudrais pas que le ministre me donne à nouveau cette assurance qu'il
m'a souvent donnée à l'occasion de l'étude des
crédits au sujet de la récupération au niveau
collégial. On s'en souviendra, la récupération
s'était fort bien faite et quand je lui ai demandé où on
avait récupéré, il ne connaissait même pas le nom
des collèges et on savait fort bien que la récupération
avait été plus que boiteuse, même là où il y
en avait eu.
La deuxième question, qui peut-être s'adresse davantage au
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre: Quelles sont les intentions du
gouvernement touchant la révision des mécanismes de
négociation? On se souviendra qu'en janvier dernier il y a eu un
colloque organisé, si je me souviens bien, par le département des
relations de travail de l'Université de Montréal et le ministre
du Travail et de la Main-d'Oeuvre, à ce moment-là - cela portait
davantage sur les services essentiels dans les hôpitaux - avait dit: Je
compte bien et j'espère qu'en juin - c'était presque un
engagement, je voudrais quand même vérifier avant de l'affirmer
d'une façon absolue -on aura une commission parlementaire qui se
penchera justement sur tout ce problème de négociation et la
façon dont ça touchait le monde de la santé. Je pense
qu'on pourrait y ajouter le monde de l'enseignement. Cela me semble urgent,
parce que la convention actuelle sera terminée en décembre 1982.
Cela semble loin, mais c'est très proche. On le sait par
expérience. (17 h 40)
Je voudrais également vous suggérer ceci: N'y aurait-il
pas lieu d'alléger le contenu de ces conventions collectives, par
exemple celle des enseignants? Je ne tiendrai pas le gouvernement actuel
responsable de l'épaisseur de cette convention collective. Je pense que
c'est devenu presque historique, si on peut dire, mais il y a une chose
certaine: quand il n'y a plus personne qui se comprend dans une convention
collective et même pas les enseignants au premier titre, il y a quelque
chose qui ne marche pas. Je pense que c'est beaucoup plus difficile de
dialoguer, à ce moment-là, avec les enseignants.
Une dernière question et celle-ci, je l'adresse au ministre de
l'Éducation: Qu'a fait le ministre de l'Éducation pour
revaloriser le rôle de l'enseignant? On sait fort bien qu'il s'est
exercé, pendant les quatre années qu'il a occupé ce poste
on dit qu'il doit le quitter bientôt - à déprécier,
dans l'opinion publique, le plus possible, les administrateurs scolaires locaux
qui sont quand même des gens élus. Si au moins, en contrepartie,
il avait réussi ou tenté d'établir un dialogue avec les
enseignants, je me dirais: Tout compte fait, dans le fond, ce sont les
enseignants qui sont auprès des élèves; j'aurais
trouvé que c'était un échange qui en valait
peut-être la peine, mais c'est que, dans les deux cas, il a raté
son coup.
Si on se trouve présentement devant des problèmes aussi
aigus que ceux que nous connaissons dans le monde scolaire, je dois dire que le
ministre de l'Éducation n'y est pas étranger.
Je voudrais, en terminant, simplement lire -et cela, le ministre de
l'Éducation l'avait reçu à titre de ministre de
l'Éducation - une opinion du Conseil supérieur de
l'éducation dans son rapport annuel de 1976-1977 qui, à ce
moment, faisait le post mortem des négociation
précédentes. Je pense que c'est une conclusion qui résume
ce que je voulais communiquer. Le Conseil supérieur de
l'éducation dit - et je dois vous dire que je suis totalement d'accord -
"On ne saurait minimiser un constat qui se révèle finalement
très négatif. On ne peut fermer périodiquement les
écoles durant des jours, des semaines et des mois, sans encourir des
conséquences graves pour l'école publique et pour le
développement de la société québécoise. Nous
y croyons, nous aussi, au développement de la société
québécoise. Il reste
d'ailleurs tant à faire pour consolider une réforme
scolaire qui a besoin d'un second souffle". Je vois immédiatement le
ministre se dire: Cela fait quatre ans que je veux donner un second souffle.
J'ai pourtant tenté de l'appuyer dans ses efforts de donner un second
souffle, mais, quand on voit ce qui se passe présentement, quand on voit
que les efforts mis au livre vert, au livre orangé, restent presque
lettre morte, il faut bien le reconnaître, le ministre pourrait
peut-être nous en dire davantage sur ce qui arrive à
l'intégration des exceptionnels, qui était prévue dans le
livre orangé, et sur les régimes pédagogiques qui ne sont
pas encore en place, sur la révision des programmes qui a
été commencée d'ailleurs avant son arrivée, mais
qui, elle aussi, est lente à se concrétiser. Et je continue. Le
Conseil supérieur de l'éducation ajoute: "Toutes les campagnes en
faveur de la revalorisation de l'école publique et tous les millions
dépensés pour améliorer la qualité de
l'éducation demeureront pratiquement vains si les parties en cause ne
consentent à réviser en profondeur leurs aptitudes et leurs modes
d'intervention dans le processus de la négociation. Ce serait une
supercherie de dire que l'on travaille pour la protection de la forêt si
on allait se permettre tous les quatre ans un ravage éhonté. Il
sera impossible de revitaliser l'école si les parties ne s'efforcent
d'éviter à tout prix l'hémorragie périodique. C'est
bien en vain - je sais que là-dessus, le ministre de l'Éducation
sera sensible - que devant une école publique saignée, l'on
maudira alors la santé de l'école privée. Ces
prévisions concernent - je pense qu'il n'y a pas personne dans cette
Assemblée qui peut s'abstenir d'une certaine restriction
là-dessus - au premier chef les gouvernants, les administrateurs
scolaires et les dirigeants syndicaux, mais elles regardent aussi toutes les
personnes intéressées à l'éducation, enseignants,
parents, élèves.
S'il est vrai que l'école publique n'est la
propriété d'aucun plan et doit appartenir au peuple, chacun a sa
part à faire pour qu'au moment des négociations, l'école
ne soit à la merci d'un ou de quelques groupes en particulier. Il n'en
demeure pas moins que le gouvernement a un râle d'initiative et de
leadership à jouer dans la révision des mécanismes de
négociation.
En terminant, M. le Président, je souhaite seulement que le
gouvernement - c'est de bonne guerre - essaie de se cacher vis-à-vis ce
fameux principe ou cette réalité des deux niveaux de
négociation. Dire qu'il n'avait rien à faire dans la
négociation locale, mais ce qu'il ne faut pas oublier, c'est lui qui a
mis en place et qui a signé cette convention nationale, qui a
créé le conflit principal, c'est-à-dire cette
ambiguïté dans l'interprétation des clauses de l'entente
nationale. Le résultat, nous le connaissons aujourd'hui. II ne faut pas
chercher ailleurs le responsable. Cette convention nationale a peut-être
été signée trop vite sans vraiment peser la portée
de toutes les clauses qui y étaient incluses. Merci, M. le
Président.
DÉPÔT DE DOCUMENTS
Carte électorale du Québec
Le Président: Merci, Mme la députée de
L'Acadie. Maintenant, je voudrais, une fois de plus aujourd'hui, solliciter le
consentement unanime de la Chambre à la requête de la Commission
de la représentation pour déposer le rapport de cette
dernière pour l'année 1980, qui n'est rien d'autre que la carte
électorale du Québec. Avec votre consentement, je voudrais
déposer ce document.
Des voix: Consentement.
Le Président: II y a consentement. M. le
député de Joliete-Montcalm, vous avez maintenant la parole.
Projet de loi no 113
Deuxième lecture (suite)
M. Guy Chevrette
M. Chevrette: M. le Président, j'aurais aimé que le
député de Maskinongé soit présent, puisqu'il
demandait, à toutes fins utiles, que s'expriment les membres de
l'Assemblée nationale qui jadis ont oeuvré dans le monde
syndical.
J'aurais voulu lui rappeler, au tout début, que si c'est vrai
qu'il y a eu de beaux discours en 1976, c'étaient sans doute ces beaux
discours qui avaient amené M. Claude Ryan, alors éditorialiste au
Devoir, dans un editorial du 13 ou du 14 novembre, à inciter les
Québécois à voter pour le Parti
québécois.
Le Président: À l'ordre!
M. Chevrette: M. le Président, ce n'est sans doute pas la
seule erreur qu'il a faite, parce que, le 11 novembre de la même
année 1976, le même éditorialiste écrivait
qu'à toutes fins utiles, à part la couleur du
député de Rouyn-Noranda, il n'y avait pas grand-chose là.
Donc, si on veut parler d'erreur, on va lui en rappeler souvent.
M. le Président, appelé à me prononcer sur une loi
d'exception... Quand on parle de vous, c'est vrai, M. le député
de Rouyn-Noranda, on manque de matière.
Le Président: M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Bien sûr, M. le Président. C'est parce
que je voulais aiguiser leur appétit pour qu'ils m'écoutent comme
il faut. Donc, M. le Président, appelé à voter sur une loi
d'exception, je vous avoue que, personnellement, cela me répugne. Chaque
fois - cela fait quatre fois - c'est même un cauchemar. On n'est pas
encore rendu à la douzaine comme le Parti libéral, mais cela s'en
vient bien. C'est fort ennuyeux, c'est vrai.
Il y a des choses, Mme la Présidente -puisque vous avez
changé maintenant - que je ne comprends pas absolument et que je
voudrais exprimer en cette Assemblée. En particulier à compter de
1967, où j'ai vraiment été de plain-pied dans le
syndicalisme enseignant, on se battait contre les mesures administratives qui
devenaient, à toutes fins pratiques, le seul critère pour
définir des tâches, pour définir des nombres
d'élèves par groupe. Je me souviens qu'en 1972, en particulier,
à la convention de 1971-1972, on s'est battu d'arrache-pied pour bannir
et honnir les ratios des conventions collectives en
prétextant que ces mêmes ratios créaient de la
discrimination totale, en ce sens que là où il y avait des
concentrations urbaines fortes, on pouvait avoir des tâches relativement
réduites et des nombres d'élèves relativement
intéressants par groupe, alors que nous, des milieux
éloignés, des milieux semi-ruraux et semi-urbains, il y avait des
petits centres où on devait composer des groupes minimes. Cela nous
forçait, dans des concentrations un peu plus fortes, à grossir le
nombre d'étudiants et à se ramasser avec 35, 40 et 42
étudiants pour permettre à Saint-Michel-des-Saints, par exemple,
dans le comté de Berthier, d'avoir son groupe de treize étudiants
qu'on ne voulait pas voir déplacer. C'est cela les ratios. (17 h 50)
On ne voulait pas que le ratio maître-élèves
devienne la norme qui détermine les conditions de travail et qui fasse
en sorte que, dans une forte concentration urbaine, on pouvait
bénéficier de 18 périodes et d'un nombre
d'élèves normal, soit 30, 31 ou 28, alors que dans les centres
où la concentration était moins forte, on se ramassait avec 22
périodes et des petits groupes, dans certains coins, parce qu'on ne
voulait pas faire voyager les étudiants, et d'immenses groupes, dans
d'autres coins, parce que la concentration le permettait, mais pour sauver
toujours l'équilibre du ratio maître-élèves.
C'était cela qu'on avait dans les conventions collectives
antérieures.
Pour une première fois dans la convention collective actuelle, on
a une tâche maximale, un nombre maximum de périodes par
enseignant, quel que soit l'endroit où l'enseignant oeuvre. Qu'il soit
dans une forte concentration urbaine ou qu'il soit dans un petit centre
défavorisé, il y a une tâche maximale d'assurée
à chaque enseignant du Québec. Pour une première fois
aussi, que tu sois dans une forte concentration urbaine ou que tu sois dans une
petite municipalité, tu as le droit d'avoir un nombre maximum, sinon tu
as une compensation en temps ou en argent, et c'est dûment signé
dans la convention collective. Pour une première fois également,
il y a une sécurité d'emploi qui ressemble à une
sécurité d'emploi, contrairement à ce qu'on avait
antérieurement, parce que, avant, il s'agissait d'affecter le professeur
à 50, 60 ou 75 milles et, s'il refusait, il était banni de la
liste. Pour une première fois, tu as au moins une sécurité
d'emploi.
C'est un peu ma surprise parce que j'ai essayé, j'ai vraiment -
et de bonne foi - tenté d'avoir des réponses. Comment il se fait
qu'après avoir combattu pendant dix ans, douze ans, une norme
administrative qui faisait l'objet de la détermination même des
conditions de travail cette fois-ci c'est le rappel de la norme administrative
qui est un objet de litige? Moi, je ne le comprends vraiment pas. J'ai
posé des questions à des gens qui oeuvrent dans le monde syndical
et ils disent que c'est une façon, pour eux, d'atténuer là
où il y a de gros groupes.
Là-dessus, je les comprends, parce qu'il y a vraiment des
commissions scolaires, - je vais le dire - qui, à l'intérieur
d'une même école, ne sont même pas capables
d'équilibrer les groupes d'étudiants. On se retrouve avec dix
groupes de quarante élèves et dix groupes de vingt, au lieu
d'avoir vingt groupes de trente. Mais ça, ce n'est pas dû à
la norme administrative, ce n'est pas dû au fait qu'il y a une subvention
qui est rattachée à ça.
On s'est battu tellement lonqtemps comme enseignants du Québec
contre le fait qu'une norme administrative devienne le seul critère pour
déterminer une tâche, je ne comprends pas qu'on se batte pour le
rappel d'une norme administrative; mais je comprends que ça serait dans
les circonstances, cependant, une soupape pour pallier à
l'incompétence dans la distribution; ça, je le comprends. A mon
avis, ce n'est pas aux citoyens du Québec de payer pour cette
incompétence. Qu'on prévoie des mécanismes d'arbitrage
prioritaire, qu'on prévoie la rectification de certains tirs là
où il y a vraiment de l'incompétence marquée, là
où, à l'intérieur d'une même école ou dans
deux écoles dans une même ville, on fait face à une
disproportion totale à l'intérieur des groupes. Mais je pense
qu'on ne doit pas s'attaquer à des mesures administratives et qu'on ne
doit pas tenter d'aller chercher les deniers de l'État d'une
façon plus substantielle pour essayer de corriger, dans les
circonstances, une certaine forme d'incompétence administrative. Je
pense que tous les parlementaires devraient comprendre cette
situation-là.
Si c'était là un seul des points, mais il y a plus que
cela. Il y a plus que cela, parce que même les professeurs en
disponibilité sont affectés à des écoles et ils
peuvent passer des matinées et des après-midi à ne rien
faire, plutôt que d'être affectés dans le cadre de la
diminution de certains groupes. Je comprends certaines réactions de
certains syndicats, mais, d'après moi, ce n'est pas en voulant siphonner
les deniers de l'État dans les circonstances qu'ils régleraient
une situation. Je sais que certaines commissions scolaires ne donnent
même pas accès à l'informatique aux syndicats, pour qu'on
puisse leur aider, comme syndicats d'enseignants, à distribuer, d'une
façon plus intelligente, le nombre d'enseignants.
Mais si on veut, par exemple, pour corriger, à un certain niveau,
une certaine forme d'incompétence, aller chercher X millions de dollars
qui privent de certains programmes gouvernementaux d'autres groupes de
citoyens, je ne marche pas. On ne doit pas, par des millions de dollars,
camoufler l'incompétence de certains milieux administratifs. On se doit,
je pense, de prendre le taureau par les cornes et corriger les problèmes
là où ils sont. Et, à mon sens, ce n'est pas en
débloquant des millions. Quand tu as compris, comme travailleur, que ce
qui t'importe, c'est de négocier une tâche maximale de travail, de
négocier les nombres maximaux par groupe et d'obtenir une
sécurité d'emploi et que tu l'obtiens, tu dois faire porter ta
bagarre là exactement où est le bobo et non pas, à mon
sens, prendre un moyen détourné pour camoufler certaines
incompétences à certains niveaux administratifs pour dire: Voici,
dans notre milieu, on a tant de groupes de 40, on a tant de groupes de 35. Si
vous débloquiez la norme administrative, on pourrait peut-être
corriger certains groupes-normes. Ce n'est pas là la méthode.
J'aurais voulu répondre à la députée de
L'Acadie, qui s'est retirée. Il n'y a pas une commission scolaire qui
est pénalisée sur le plan administratif quand elle veut respecter
la tâche maximale, les maxima d'élèves et la
sécurité
d'emploi. Les commissions scolaires ne sont nullement exploitées
de ce côté-là, ne sont nullement pénalisées
sur le plan administratif. Vous voulez les défendre à tout prix,
les commissions scolaires? Si vous voulez les défendre à tout
prix, ce n'est pas en débloquant des millions de dollars et faire en
sorte - parce que vous avez parlé du trou de $500 millions, vous vous
êtes accrochés à cela quand cela a passé, comme
parti de l'Opposition. Vous avez dit: N'est-ce pas effrayant? - de
découvrir que cela remonte à seize ans en arrière, vos
normes administratives. Et il a fallu les corriger justement parce que les
millions n'y allaient même pas pour corriger des aberrations et
améliorer la qualité de l'acte pédagogique. Absolument
pas. Ces millions de dollars allaient, les trois quarts du temps, dans
l'administration, et le bois de rose, et le tapis mur à mur, dans les
commissions scolaires.
Ne nous leurrons pas là-dessus. On l'a corrigé, le montant
de $500 millions. Il y a des mesures serrées. Mais qu'on fasse respecter
à la lettre les conditions obtenues, la sécurité d'emploi,
la tâche maximale et le nombre d'élèves par groupe, et
qu'on donne une priorité aux griefs; là où les commissions
scolaires useraient de discrimination entre des groupes de professeurs,
à l'intérieur d'une même école ou dans deux ou trois
écoles, on pourrait corriger la situation. Mais ne demandons pas aux
citoyens du Québec de se serrer la ceinture pour corriger des
incompétences administratives. Merci.
La Vice-Présidente: M. le chef de l'Opposition
officielle.
M. Claude Ryan
M. Ryan: Mme la Présidente, nous avons
écouté avec intérêt M. le député de
Joliette nous défiler des refrains bien connus. Tout ce qu'il a dit
n'empêche pas qu'il n'infirme en aucune manière le fait que nous
sommes aujourd'hui à l'examen de la quatrième loi d'exception
présentée devant cette Chambre par le gouvernement actuel dans ce
domaine des conflits du travail où il prétendait naguère
avoir une sorte de science infuse ou de compétence
privilégiée, sans parler des cas également très
importants où l'on a recouru à la tutelle, à la
manière d'un véritable coup de force, contre des commissions
scolaires qui avaient parfaitement le droit et la capacité de vaquer
elles-mêmes à leurs affaires. Nous n'avons pas parlé
aujourd'hui des nombreux conflits de travail dans le secteur privé que
le gouvernement actuel laisse pourrir avec une impuissance extrêmement
déplorable, parce que le sujet ne s'y prêtait guère. Je
pense en particulier au conflit de la Reynolds, au conflit de Canron, dans la
même région, qui durent depuis des mois et des mois. Combien
d'autres conflits dans le secteur privé ont duré et
perduré sans que jamais l'on entende les fameux ténors des droits
syndicaux, qui se manifestaient continuellement autrefois, faire valoir leur
dépit ou leurs revendications à l'endroit du gouvernement
actuel.
Le député de Joliette a rappelé tantôt un
fait intéressant dans mon humble cheminement politique et social. Il a
rappelé qu'en 1976, j'avais recommandé aux électeurs de
voter pour le candidat du Parti québécois là où il
se révélerait supérieur au candidat libéral, mais
il n'a pas cité l'article au complet. En cela, il a été
très typique de son maître, le chef du gouvernement, et d'autres
ministres qui ont très souvent pratiqué ce jeu
dégoûtant de la distorsion intellectuelle. S'il avait lu ou
cité l'article au complet, il se serait souvenu très bien qu'un
des arguments que j'avais invoqués pour justifier mon attitude, c'est
que ces gens s'étaient montrés tellement irresponsables dans
l'Opposition qu'avant qu'ils soient devenus tout à fait
irrécupérables, il fallait leur donner une fois au moins dans
leur vie l'expérience des responsabilités pour qu'ils sachent ce
que cela voulait dire. fl8 heures)
Nous les avons vus à l'oeuvre depuis quatre ans. Je pense qu'ils
ont d'abord démontré qu'ils avaient été joliment
naïfs et que la performance a été considérablement en
deçà des rêves que l'on nourrissait quand on vivait en
chapelle, dans les jours heureux ou malheureux de l'Opposition. Ils ont
montré - par l'obligation où ils se sont trouvés de
recourir à des lois d'exception contre leurs amis d'hier et
d'aujourd'hui - que les abus du pouvoir syndical, dans plusieurs secteurs de
notre société, sont devenus tellement évidents et
tellement nocifs pour le bien général, qu'il faut absolument,
contrairement aux convictions qu'ils professaient naguère, y
réagir par des interventions extraordinaires du législateur.
Nous sommes en train de faire la preuve, très facilement
d'ailleurs, que le bilan du gouvernement actuel, en matière de relations
du travail, malgré tous ces liens privilégiés qu'il
prétendait avoir, sera finalement encore plus défavorable
qu'avait pu sembler l'être le bilan du gouvernement
précédent, lequel s'était accumulé dans des
conditions joliment plus difficiles.
Encore une fois, je l'ai déjà dit dans cette Chambre,
c'est très heureux que l'expérience des responsabilités
ait été donnée pour un temps limité à ces
messieurs, et on comprend, devant le bilan qu'ils ont accumulé, qu'ils
soient si peu empressés de revenir franchement devant le peuple pour
demander le jugement qui serait normal et régulier, après quatre
ans.
Le principe du projet de loi ne nous crée pas de
difficultés spéciales. Dans les deux commissions scolaires
principales, qui sont visées par le projet de loi, il est évident
que la situation des écoles, la violation du droit de l'enfant à
une instruction de qualité, a atteint un point tel qu'il faut absolument
une intervention exceptionnelle du pouvoir législatif, les autres
pouvoirs ayant fait la preuve de leur impuissance dans ce conflit.
S'il y avait un reproche à adresser au gouvernement, ce serait un
reproche que nous avons entendu à maintes reprises cet
après-midi, et que je reprends à mon compte: Cette intervention
vient trop tard. On a invoqué jusqu'à maintenant, du
côté ministériel, le principe voulant que ce soit
l'année scolaire menacée qui doive dicter le moment où
intervient la mesure d'exception. À y penser comme il faut, je pense
qu'il faudrait raffiner ce principe et en venir à affirmer clairement
que le droit véritable qui est en cause ici est celui de l'enfant
à une année scolaire normale, à une année normale
de formation.
Quand une année a été amputée de deux
mois, une année d'environ huit ou neuf mois, compte tenu des
périodes de congé qui interviennent pendant cette
année-là et compte tenu de la qualité toute
spéciale des deux premiers mois dans le bilan général de
l'année, je pense que c'est une mesure qu'il faudra réviser
sérieusement. Il faudrait l'écourter sensiblement si on veut
vraiment que le premier principe passe avant le deuxième,
c'est-à-dire que le droit de l'enfant à une année scolaire
normale passe avant le droit d'un syndicat d'enseignants à exercer un
arrêt de travail qui lui permette de faire valoir ses revendications.
Nous avons, au cours des dernières années, connu de
nombreux abus de ce côté. Je pense que l'équilibre a
été rompu en faveur de l'exercice souvent excessif du droit de
grève. Il faut revenir à un équilibre qui mettra au
premier plan, dans le domaine scolaire, le droit des jeunes à une
éducation normale, à une formation régulière,
à une formation qui ne soit pas entrecoupée constamment, de ces
arrêts de travail qui sèment la perturbation psychologique chez
les enfants et qui compromettent très sérieusement leur
cheminement intellectuel.
Je déplore à ce sujet, comme on l'a fait avant moi, que
certains cas déjà aigus aient été ignorés
par le législateur, par le gouvernement. Je pense en particulier au cas
de la Commission scolaire Baldwin-Cartier; le cas de la Commission scolaire Les
Manoirs, si je comprends bien, c'est le même problème qui est
impliqué. On en reparlera tantôt. Si je comprends bien, c'est le
même problème. Est-ce qu'on va les laisser aller en grève
juste pour le plaisir de leur dire dans un mois: Venez au travail, messieurs,
on vous l'avait dit il y a un mois. Il me semble que si la raison qu'on invoque
aujourd'hui pour ramener au travail les enseignants des commissions scolaires
visées par le projet de loi est bonne et valable, il faudrait
également qu'elle s'applique pour ceux qui sont en grève pour la
même raison; autrement, on est, je ne sais pas, dans un régime
où c'est très difficile de voir la logique qui anime les gestes
du gouvernement.
En conséquence, au sujet du principe même du projet de loi,
moyennant les réserves que je viens de formuler, je suis d'accord, le
parti de l'Opposition officielle est d'accord également et nous allons
continuer de collaborer aujourd'hui en vue de l'acheminer le plus tôt
possible vers l'adoption définitive et surtout la mise en oeuvre.
Avant de le faire, cependant, je pense qu'il est bon de s'arrêter
quelques minutes à la source du problème. Il me semble que la
source du problème a fait l'objet de beaucoup de développements
cet après-midi mais qu'on n'a pas tout dit, qu'on a laissé de
côté des aspects importants. La source principale du
problème que nous sommes appelés à résoudre par une
mesure d'exception aujourd'hui, il me semble que ce fut la confusion, le
tâtonnement et la politique gouvernementale.
Le ministre de l'Éducation a invoqué des
interprétations différentes de l'article 8-9.0 de la convention
signée au niveau provincial. Je pense que cette explication est un petit
peu sommaire. Et je vais adresser au ministre une série de questions
à ce sujet, auxquelles je lui serais reconnaissant de nous apporter des
réponses quand il fera sa réplique, à la fin du
débat.
D'abord, une chose me frappe. Je n'étais pas au courant; je suis
comme bien d'autres députés de cette Chambre, je ne suis pas un
expert dans les conventions collectives des enseignants. Elles sont beaucoup
trop touffues, beaucoup trop complexes, beaucoup trop détaillées,
pour que plusieurs d'entre nous puissent prétendre les
interpréter avec une expertise sûre. On m'a signalé que,
dans la convention antérieure, on avait exactement la même
disposition qui donne lieu aujourd'hui au litige avec lequel nous sommes aux
prises, avec cette exception: c'est qu'au cours de la dernière
négociation, on a ajouté la disposition voulant que cette clause
ne soit pas matière à grief.
Mais, indépendamment de ceci, tout l'article a fait l'objet
d'application au cours de la période qui a marqué la convention
antérieure. Il n'a pas été question de ces
interprétations ou de ces règlements unilatéraux dont nous
sommes témoins maintenant.
S'il est vrai qu'il y eut une entente claire entre les deux parties
à l'entente provinciale, je remarque que, de la dernière
convention à la convention d'aujourd'hui, on est passé de la
convention provinciale à la convention nationale. C'est une petite
déformation qu'on remarquait souvent à cette époque. Il
faut dire que la rédaction a probablement été faite avant
le référendum, on vivait déjà en pleine
république. J'espère qu'on va moins se gaver de mots et de
réthorique à l'avenir pour reqarder davantage le contenu. De
toute manière, ce ne sont pas des choses qui nous impressionnent
beaucoup.
M. Morin (Sauvé): Est-ce que vous désavouez
l'expression "l'Assemblée nationale"?
M. Lalonde: ...mais le ministre de l'Éducation aussi.
M. Ryan: Mme la Présidente, si l'entente fut conclue aussi
nettement entre les deux parties, lorsque fut signée cette entente
provinciale - je crois que c'est au mois de mai ou au mois de juin; on verra la
date tantôt -comment expliquer le silence de la partie syndicale, comment
expliquer que les deux parties ne soient pas venues nous dire: C'est cela que
nous avons voulu dire? C'est clair, c'est cela. Vous pourrez nous l'expliquer
tantôt. M. Gaulin, le président de la CEQ, on a coutume de
l'entendre avant les référendums, on a coutume de l'entendre se
plaindre de ce qu'il ne peut pas exhorter ses gens à voter pour la
souveraineté-association. Peut-être pourrait-il aujourd'hui nous
dire qu'il a compris cette clause de la même manière que son
homologue le ministre de l'Éducation, le ministre des Finances ou le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre! (18 h 101
Comment expliquer qu'il ait fallu attendre jusqu'au 4 septembre pour
qu'une directive claire du sous-ministre, M. Jacques Girard, soit
adressée aux commissions scolaires alors que la convention provinciale
fut signée en mai 1980? Juin, juillet, août; vous avez
laissé s'écouler trois mois avant de donner une directive claire
aux commissions scolaires. Vous les avez laissées s'engager dans des
négociations. Vous avez laissé plusieurs d'entre elles signer des
conventions qui donnent à cet article de l'entente provinciale une
interprétation différente.
Comment expliquer que vous soyez entrés en scène seulement
le 4 septembre par le truchement d'une directive du sous-ministre, dont je n'ai
pas connaissance qu'elle ait fait l'objet d'une interprétation
réciproque préalable avec la partie syndicale? Peut-être me
trompai-je là-dessus! On pourra me corriger si on le veut. Mais j'ai
l'impression que les consultations avec la partie syndicale ont eu lieu
à la dernière minute, il y a dix ou quinze jours, et là
ils se sont dit, chacun étant pris dans ses problèmes de petite
politique interne: On ne se souvient pas de cela. Comment expliquer cette
incurie, cette période d'inaction, de non-intervention qui a duré
trois mois et pendant laquelle on a laissé s'empêtrer un grand
nombre de commission scolaires et d'orqanisations syndicales dans la recherche
de voies qui devaient s'avérer ensuite par un diktat autoritaire du
gouvernement, sans issue? Comment expliquer que des commissions scolaires
sérieuses et responsables aient éprouvé le besoin de
demander au gouvernement, aussi tard que le 15 octobre, le 16 octobre, le 18
octobre et le 20 octobre, une interprétation claire et nette de cette
partie de l'entente dont le ministre nous disait qu'elle était
parfaitement claire au début du débat actuel?
Je voudrais vous citer à ce sujet, par acquit de conscience, des
messages qui m'ont été adressés par des commissions
scolaires. D'abord, je voudrais citer la commission scolaire Jean-Talon,
commisssion scolaire régionale de la région urbaine de
Québec, dirigée par des personnes très compétentes,
qui nous dit ceci: "Considérant que la Commission régionale
Jean-Talon doit respecter les règles budgétaires établies
par le ministère en regard des effectifs en personnel enseignant;
considérant que la Commission régionale Jean-Talon doit respecter
l'entente nationale établie entre les parties, ministère de
l'Éducation et CEQ; considérant que la Commission
régionale Jean-Talon estime ambiguës les interprétations
faites à l'article 8-9.0; considérant l'importance et l'urgence
de procéder à la signature de l'entente locale laquelle se heurte
à des interprétations fort divergentes en cete matière, il
est proposé, etc., que la Commissionn régionale Jean-Talon
demande aux parties à l'entente nationale de rédiger une
interprétation commune de l'article 8-9.0 en regard du calcul du nombre
d'enseignants dans une commission scolaire et ce, dans les meilleurs
délais; et, deuxièmement, demande à M. Jacques Parizeau,
ministre des Finances, d'adapter des paramètres relatifs aux effectifs
enseignants à l'interprétation faite par les parties.
Ensuite une autre commission scolaire, la Commission scolaire
d'Orléans, dans la région de Beauport, familière au
président de cette Chambre, a adopté une résolution
entérinant ou prenant à son compte la résolution qui avait
été adoptée par la Commission scolaire régionale
Jean-Talon. La Commission scolaire régionale Carignan visée par
le présent projet de loi a, elle aussi, adressé au comité
patronal de négociations des commissions scolaires et au ministre des
Finances, une requête présentant sensiblement la même
demande. Est-ce que tout ce monde-là, est-ce que toutes ces commissions
scolaires, Mme la Présidente, sont dirigées par des
imbéciles, par des imcompétents, par des gens qui ne savent pas
lire, par des gens qui seraient de mauvaise foi et qui n'auraient pas compris
ces choses dont l'on nous dit qu'elles auraient dû être
évidentes pour tout le monde?
Je conclus de tout ceci que la confusion et les tâtonnements de la
politique gouvernementale ont été la source principale du
problème auquel nous sommes obligés de remédier
aujourd'hui par l'adoption d'une loi d'exception.
Je termine par quelques commentaires sur le projet de loi
lui-même. Je souscris entièrement à l'opinion qui a
été émise par le député de Maskinongé
et suivant laquelle, avant d'adopter une loi d'exception comme celle-ci, nous y
gagnerions tous à avoir l'occasion d'entendre les parties une
dernière fois. On nous demande d'intervenir comme juges ultimes d'un
différend. On nous fait entendre seulement le point de vue de l'une des
deux parties impliquées, c'est-à-dire la partie gouvernementale.
Il me semble qu'il serait juste et équitable, simple et possible,
d'inviter les deux parties à se faire entendre une dernière fois
avant que tombe la guillotine de la loi d'exception. Je demande au ministre de
nous indiquer quelle politique il entend suivre dans le cas des commissions
scolaires de Baldwin-Cartier et Les Manoirs. Je lui demande, en particulier, de
nous dire s'il est satisfait de ce critère de l'année scolaire
menacée ou s'il ne trouve pas qu'il y aurait lieu de l'approfondir
davantage afin d'en venir à un critère qui serait beaucoup plus
proche du droit de l'enfant à une année scolaire normale.
Est-ce que le projet de loi présente des garanties contre des
arrêts de travail dans des commissions scolaires visées par
l'article 12, mais où le syndicat déciderait de faire la
grève quand même? Il semble que le projet de loi ne comporte pas
de garanties de ce point de vue-là et qu'on pourrait se retrouver avec
des arrêts de travail dans d'autres commissions scolaires. Tout en
créant une obligation pour les commissions scolaires de ne pas accepter
l'engagement qui découlerait de l'article 8-9.0 de la convention
collective, on ne crée aucune obligation à ce sujet pour les
syndicats d'enseignants de ne pas faire de grève pour des motifs qui
seraient entièrement futiles. On nous dira que les syndicats
comprendront très bien cela par eux-mêmes. Je pense qu'on a la
preuve, aujourd'hui, que c'est une affirmation naïve et fausse. Il faut
que les choses soient dites clairement. Si on applique ce régime et ce
traitement aux syndicats des commissions scolaires visées par le projet
de loi, il me semble qu'on doit aller plus loin.
Soulignons aussi que la loi crée deux régimes
différents de négociations et de conditions locales de travail,
avant et après le 24 octobre 1980. En conséquence, et encore une
fois, je l'attribue à l'impéritie du gouvernement. Deux
catégories différentes: ceux qui ont eu l'avantage de
négocier et de régler avant que parvienne la directive du 4
septembre dernier et ceux qui ont eu l'avantage de régler avant que
n'intervienne la loi spéciale d'exception que nous sommes appelés
à voter aujourd'hui.
Je termine ici cette intervention, Mme la Présidente. Je crois
que nous avons été témoins, une fois de plus, dans ce
conflit, d'un geste absolument inacceptable dans une société
démocratique. Je le dis sans aucune espèce d'amertume ou de
rancoeur contre qui que ce soit. Le syndicat des Vieilles-Forges a
refusé
d'obéir à une injonction émise par un tribunal
dûment saisi du problème grave qui se posait dans la région
trifluvienne. Je ne sais pas ce que le gouvernement entend faire à ce
sujet. Je n'ai pas souvenance que les porte-parole gouvernementaux aient
précisé les interventions que prévoit ou qu'aurait
déjà instituées le gouvernement à cet égard,
mais je pense qu'avant que ne se termine le débat sur ce projet de loi,
il est très important que le gouvernement nous dise clairement la
politique qu'il entend suivre, où il en est devant ce fait qui est de
notoriété publique et qui vient s'ajouter à une liste
déjà trop longue de gestes semblables posés dans le
passé.
Je n'ai pas de leçon à faire à qui que ce soit,
mais je pense qu'il est important que nous réalisions que la connivence
qui nous permet d'exister ensemble dans une paix relative repose sur le respect
de certains principes élémentaires qui doivent être communs
à tous. Et quand ce principe du respect des tribunaux est violé
ouvertement et systématiquement pour des motifs dont le gouvernement
nous dit qu'ils sont passablement secondaires, qui ne violent en rien des
droits ou des revendications essentiels, je pense que le devoir des élus
du peuple c'est au moins de dire très fort, très fermement qu'on
ne peut pas vivre dans un climat comme celui-là et qu'une
société qui accepterait que ses institutions les plus
essentielles soient bafouées de cette manière est une
société qui inviterait ses membres à l'anarchie tôt
ou tard.
Alors, mon parti est favorable à cette loi, malgré les
critiques de détails qu'il en fait et les responsabilités qu'il
faut imputer au gouvernement quant à l'origine du conflit. Mais autant
nous sommes favorables au principe du projet de loi, autant nous collaborerons
de toutes les manières possibles, surtout par une action responsable
auprès de l'opinion publique, à l'application exacte,
précise, loyale et fidèle des dispositions du projet de loi. Il
me semble que la démocratie est à ce prix. (18 h 20)
Je signale, en terminant, que, chaque fois que dans cette Chambre nous
avons été saisis d'un projet de loi d'exception, nous n'avons
fait aucune espèce d'obstruction, nous n'avons cherché en aucune
manière à empêcher le règlement d'intervenir, nous
n'avons cherché en aucune manière à pactiser avec qui que
ce soit en vue de chercher à porter obstacle à la
réalisation d'un but qui nous apparaissait légitime. J'invite nos
amis d'en face, dès qu'ils auront le courage de se présenter
devant le peuple pour recevoir le verdict que leur ont mérité
leurs quatre années de séjour au gouvernement, à retenir
cette leçon et à se rappeler qu'il vaut toujours mieux, quand on
est dans l'Opposition, agir comme si on était au gouvernement. Cela
empêche beaucoup de démagogie et cela aide une
société à se mettre plus vite sur la voie de la
responsabilité qui est la seule durable.
La Vice-Présidente: M. le ministre des Finances.
M. Jacques Parizeau
M. Parizeau: Mme la Présidente, j'ai l'intention
d'examiner certains des aspects de la loi que nous avons devant nous,
plutôt que d'essayer d'en faire le tour. Je voudrais, en particulier,
parler fort peu de ces dispositions qui prévoient le retour au travail
dans les deux régions mentionnées dans cette loi, non pas parce
que cela n'a pas d'importance, mais parce que, je pense, l'urgence d'une telle
mesure a été soulignée des deux côtés de la
Chambre.
Il y a, cependant, quelque chose dont nous discutons depuis quelques
heures qui me semble encore chargé de beaucoup d'ambiguïté
et j'aimerais, si on me le permet, essayer de clarifier cela. Il s'agit
essentiellement de cette disposition du projet de loi qui, en pratique,
interdit de discuter des clauses monétaires ou d'effectifs au niveau
local. Je vais essayer d'expliquer cela de la façon suivante: 90%,
à l'heure actuelle, les 9/10 de toutes les dépenses des
commissions scolaires sont des salaires, des effectifs. Le trou de $500,000,000
dont nous avons abondamment parlé, qu'est-ce que c'est? Des effectifs,
du personnel. Ce n'est pas de l'argent qui a été
dépensé ou jeté par les fenêtres; c'est
essentiellement du personnel.
Lorsque nous disons qu'au Québec, le coût par
élève de l'enseignement est de $500 supérieur au
coût par élève en Ontario, de quoi parlons-nous? De
personnel. Mme la Présidente, si on pense vraiment que la qualité
de l'enseignement au Québec est mesurée par la quantité de
personnel, vraiment la qualité de l'enseignement au Québec doit
être tout à fait remarquable. Mais là ce qu'on nous dit -
je reviens à l'intervention du chef de l'Opposition officielle à
cet égard - depuis quelque temps, depuis quelques mois, c'est qu'il en
faut encore davantage, de personnel. Pourtant, au printemps dernier...
M. Ryan: Ce n'est pas nous autres.
M. Parizeau: ... on s'était entendu sur essentiellement un
partage entre deux niveaux de négociation. On disait: Ce qui concerne
les salaires et ce qui concerne les effectifs, c'est national ou, si le chef de
l'Opposition officielle y tient absolument, c'est provincial. Au contraire, les
règles de gestion interne des commissions scolaires quant à leur
personnel, c'est local. Tous ceux qui ont participé à ces
discussions, l'hiver et le printemps dernier, aussi bien du côté
patronal que du côté syndical, savent très bien qu'il n'y a
jamais eu la moindre ambiguïté à ce sujet, pas la moindre.
Les règles de gestion interne du personnel dans les commissions
scolaires: local; tout ce qui a trait à la détermination des
effectifs et des salaires: national. Il était hors de question qu'il y
ait une sorte de match-revanche après la négociation nationale.
Cela avait été confirmé, d'ailleurs, par un décret
du gouvernement, dont le ministre de l'Éducation a expliqué la
genèse un peu plus tôt aujourd'hui. C'était clair pour
tous.
Qu'est-ce qui a été établi au niveau national? Je
ne pense pas, en termes d'effectifs, qu'on puisse présenter ça
valablement comme le député de Sainte-Marie, par exemple, l'a
fait un peu plus tôt. Il n'y avait pas un plancher et un plafond. Il y
avait, comme le disait le député de Joliette, pour la
première fois, la détermination de tâche d'enseignement.
Pour la première fois, il y avait des limites données dans chaque
école et dans chaque classe, dans chaque classe, plutôt. Les
règles budgétaires dont on parle ont été
établies sur cette base. Mais il y avait une autre façon
traditionnelle depuis une quinzaine d'années d'établir les
besoins réels ou appréhendés d'une commission scolaire,
c'était le rapport maître-élèves.
Comme le disait le député de Joliette, les enseignants se
sont battus pendant dix ans pour faire disparaître ces ratios, ces
rapports maître-élèves. Nous les avons gardés dans
la convention nationale à deux fins bien spécifiques: d'une part,
déterminer dans quelles conditions un professeur peut être mis en
disponibilité - c'était quand même important pour assurer
leur sécurité d'emploi à vie comme on l'a établi
pour la première fois - et, d'autre part, pour l'enfance en
difficulté, où ça causait des problèmes
spécifiques. Pour tout le reste, il est indiqué très
clairement que ce n'est pas arbitrable, cette deuxième mesure. Va-t-on
s'étonner alors qu'on ait établi des règles
budgétaires à partir des tâches d'enseignants telles
qu'établies dans la convention collective nationale? Cela faisait dix
ans que les enseignants nous demandaient ça et c'est exactement ce
qu'ils ont.
Il n'y a pas un plancher ou un plafond, il y a des additions de
tâches qui donnent des budgets. Il n'en reste pas moins que si on croit
que c'est ambigu, comme l'a dit le chef de l'Opposition officielle ou comme
d'autres membres de son parti l'ont souligné cet après-midi, si
on croit que des dispositions de l'entente nationale ne sont pas claires,
qu'est-ce qu'on doit faire? Aller en arbitrage, invoquer le jugement d'un
tiers, bien sûr, mais pas amener ça au niveau local. Il a toujours
été clairement entendu que ça n'allait pas au niveau
local. Si la convention nationale n'est pas claire, qu'un arbitre la clarifie.
Mais qu'on ne cherche pas à clarifier la convention nationale en
l'amenant, comme on l'a fait depuis quelque temps, au niveau local parce que
ça, ça rompt toutes les ententes que nous avions tous entre nous.
Au niveau local, on discute de la gestion du personnel.
On comprend bien pourquoi, néanmoins, il y a eu des tentatives
d'amener des discussions pareilles sur les effectifs au niveau local depuis
quelque temps. Entre ce que l'ancien mode de calcul aurait donné et les
additions de tâches dont je parlais tout à l'heure, il y a, pour
l'ensemble des commissions scolaires, à peu près une soixantaine
de millions de dollars. C'est à peu près ça que ça
représente par année. On comprend que les syndicats locaux se
disent: On préférerait avoir ces $60,000,000 par année
pour ajouter du personnel enseignant. On peut comprendre aussi que certaines
commissions scolaires se disent: Si nous avions les $60,000,000 par
année, on ajouterait du personnel non enseignant et peut-être
d'autres dépenses. Le gouvernement dit clairement, et ça
découle de l'entente nationale: Ces $60,000,000, ils appartiennent aux
contribuables. Du personnel enseignant, compte tenu de la convention nationale
que nous avons, il y en a suffisamment comme ça. Les $60,000,000
retournent aux contribuables. On ne va pas maintenant ajouter encore du
personnel à celui qui est là et qui est suffisamment nombreux
pour faire en sorte que d'éduquer un élève au
Québec, ça coûte $500 de plus par année qu'en
Ontario.
Dans un premier temps, on a effectivement envoyé une lettre du
sous-ministre de l'Éducation disant: Quelque dépassement que ce
soit sur le plan du personnel qui serait négocié localement, le
gouvernement ne paiera pas un sou.
Néanmoins, l'effervescence au niveau local qui n'aurait pas
dû être là continuait. Pourquoi? Parce qu'on s'est dit: Dans
la mesure où le gouvernement prend la position que je viens d'exprimer,
Mme la Présidente, on pourrait peut-être néanmoins faire
des ententes sur le plan local et ne pas faire financer ça par le
gouvernement; il ne veut pas et c'est contraire à l'entente nationale.
Mais peut-être gue faire financer ça par le contribuable local, on
lui ajouterait quelques cents de taxe inadmissible, il y a des chances
peut-être qu'il ne le voie pas. (18 h 30)
Mais, Mme la Présidente, on ne peut pas accepter cela. Le fardeau
fiscal des Québécois est déjà assez
élevé comme cela pour fournir les services d'éducation au
Québec. Et le contribuable qui paie des impôts au gouvernement du
Québec, c'est le même contribuable qui paie des impôts
locaux à la commission scolaire. On ne peut tout de même pas faire
en sorte que, parce qu'une partie voudrait avoir $60,000,000 pour avoir
davantage d'enseignants et qu'une autre partie voudrait avoir $60,000,000 pour
avoir davantage de non-enseignants ou des tapis mur à mur ou autre
chose, ils s'entendent entre eux, en dehors de la convention nationale et
passent la facture, non pas au gouvernement du Québec qui ne veut pas la
payer, mais sur le dos des contribuables locaux.
Cela est contraire, encore une fois, à toutes les ententes que
nous avons depuis le début. On ne devait pas discuter d'effectifs ou de
salaires dans les ententes locales. C'était clair. Je comprends
qu'à l'intérieur de la CEQ, il y a un certain nombre de syndicats
qui n'ont pas vraiment accepté la convention nationale. Mais qu'est-ce
que vous voulez, quand nous signons avec la CEQ, nous pensons signer avec un
organisme responsable.
Je reconnais que dans certaines commissions scolaires, on s'est dit:
Plutôt que d'avoir une grève, ajoutons des effectifs. Le
contribuable local les paiera. Je peux les comprendre, ces braves gens.
Qu'est-ce que vous voulez? Personne n'embarque dans une grève quand il
peut l'éviter.
Mais il reste que nous, comme gouvernement, nous avons la
responsabilité de faire observer la convention nationale, d'une part, et
le fardeau fiscal qui a été établi pour payer
l'éducation, d'autre part.
C'est dans ce sens, Mme la Présidente, qu'il y a effectivement
deux éléments dans le document que nous avons devant nous, dans
le texte de loi que nous avons devant nous.
Est-ce que deux éléments constituent une sorte de loi
matraque, comme on l'a dit cet après-midi? Non, ce n'est pas une loi
matraque, dans la mesure où l'année scolaire est en péril
dans deux commissions scolaires. Dire: Vous rentrez, par une loi, c'est
simplement observer quelque chose qui existe dans nos lois depuis fort
longtemps. C'est-à-dire par injonction, mais a fortiori, si l'injonction
est violée, par loi, on intervient quand l'année scolaire des
enfants est en péril. Il n'y a rien là-dedans qui soit
particulièrement matraque. Les gouvernements qui nous ont
précédés et, j'imagine, les gouvernements qui nous
suivront devront toujours
garder dans leurs lois des dispositions en vertu desquelles, quand
l'année scolaire est en péril, il faut faire quelque chose. On
peut chercher à faire porter le stigmate d'une loi spéciale. Mais
ce n'est pas plus non plus. On peut faire porter le stigmate d'une injonction.
Mais le fond de la question, c'est qu'aucun gouvernement responsable ne peut
permettre que les élèves perdent leur année. Ce n'est pas
nier un droit de grève que de faire cela. C'est simplement assurer
l'intérêt public bien compris.
Deuxièmement, nous affirmons et nous réaffirmons dans
cette loi les dispositions de la convention nationale. Si la convention
nationale n'est pas claire, qu'on la fasse clarifier par des tiers - et je
répète ce que je disais tout à l'heure - mais ce n'est pas
parce que certains se demandent si la convention nationale est claire ou non
qu'on doit commencer ou laisser discuter de questions monétaires ou de
questions d'effectifs, au niveau local, ce qui n'a jamais été
accepté par qui que ce soit, au départ.
Voilà, Mme la Présidente, ce que j'avais à dire. Je
pense que c'est une loi qui, effectivement, rectifie un certain nombre de
choses. Nous ne l'adopterons pas avec le sourire aux lèvres. On aurait
bien voulu s'en passer, mais il arrive un moment donné où,
lorsque les choses ont atteint l'état qu'elles ont atteint, il est
important que le gouvernement gouverne. Merci, Mme la Présidente.
La Vice-Présidente: M. le député de
Chauveau.
M. Louis O'Neill
M. O'Neill: Mme la Présidente, le ministre des Finances
vient de dire que c'est une loi que nous n'adopterons pas avec joie. Je pense
bien que c'est une loi qui ne réjouit personne. Cela ne réjouit
pas le gouvernement lui-même, cela rappelle quelques mauvais souvenirs
à l'Opposition, je crois et cela rappelle peut-être aussi quelques
souvenirs ambigus à ceux qui jadis faisaient partie de l'Opposition.
Mais toujours est-il que nous sommes là.
Quant à moi, Mme la Présidente, mon embarras ne vient pas
simplement du fait d'avoir à adopter une loi spéciale, puisque je
pense que ce qu'on a invoqué comme motifs pour présenter cette
loi sont des motifs suffisants et importants, majeurs, qui emportent
l'adhésion de la plupart de ceux qui sont ici. Mon malaise vient du fait
même de me trouver ici pour discuter de cette loi, c'est-à-dire
d'avoir à constater que nous sommes devant non pas l'échec d'un
gouvernement, mais le signe d'un échec d'une société, du
fait qu'on aurait pu, quand on regarde tous les éléments dans le
dossier, me semble-t-il, éviter de verser dans une telle disproportion
entre les objectifs et les moyens utilisés et, finalement, arriver
à un accord entre les parties.
Je dirais ceci, qui a l'air un peu brutal: Nous sommes obligés,
finalement, d'adopter cette loi, parce que le bon sens n'a pas réussi
à prendre le dessus. Il y a un paradoxe dans le fait même que nous
soyons ici tous ensemble pour discuter d'une telle loi. Le paradoxe, c'est
qu'en fait nous aurions pu être ici pour discuter de choses beaucoup plus
importantes. Mon collègue, tout à l'heure, le
député de Sainte-Marie, disait:
Vous savez, il ne faudrait pas ici formuler des critiques trop
sévères envers certaines catégories de travailleurs, sous
prétexte que d'autres sont beaucoup plus défavorisés, ce
n'est pas ce qu'on enlèvera aux uns qui nous permettra de le donner aux
autres. Mais il reste que, dans les faits, il y a des gens qui, dans une
société, cherchent un peu à défoncer un plafond et
d'autres, qui sont en retard, n'ont pas encore réussi à
accéder au plancher. Ceux-là devraient retenir notre attention.
Ceux d'entre nous qui reçoivent des gens à leur bureau de
comté, qui reçoivent des délégations, qui vont
visiter des groupes de citoyens savent que, actuellement, quand même, les
problèmes majeurs du travail, quels sont-ils? Ce sont les jeunes de 18
à 25 ans, qui ne réussissent pas à entrer sur le
marché du travail; ce sont les gens qui, tout à coup, sont mis
à pied dans des circonstances très particulières - je
pense, à Québec, aux employés de Vaillancourt qui ne
réussissent pas à se replacer - ce sont les gens qui ont
été mis à pied entre 40, 45 et 50 ans, qui ne trouvent
plus d'emploi; ce sont les travailleurs non spécialisés, pour qui
il est extrêmement difficile de trouver un emploi; ce sont les femmes au
foyer, qui tentent en vain de retourner sur le marché du travail; ce
sont des gens comme les handicapés. Je voyais, hier, quelqu'un qui nous
rapportait le problème de ces handicapés qui, au Québec,
essaient d'obtenir de meilleurs services, mais encore là, cela va
coûter de l'argent. À chaque fois qu'un gouvernement, qu'une
administration prend la décision d'accorder telle ou telle somme
d'argent, cette administration doit en même temps se demander si, par le
fait même, elle n'est pas en train d'en priver une autre
catégorie. Il y a là des problèmes qui devront, un jour,
retenir notre attention. Il arrive, et c'est peut-être inévitable,
et c'est regrettable, qu'aujourd'hui, ce ne sont pas ces catégories de
citoyens qui retiennent notre attention.
Il y a aussi des problèmes plus grands. Je vous avoue que cela me
fait quelque chose d'étrange d'être ici aujourd'hui à
débattre cette question, encore une fois, dont je ne sous-estime pas
l'urgence et la gravité, alors qu'il y a des questions
présentement qui concernent la société
québécoise comme telle, et son avenir, qui doivent retenir notre
attention, alors qu'en fait le Québec est en danger. Le Québec
est menacé par la dangereuse utopie d'un prince déphasé
qui est en recherche de la célébrité, qui a
décidé d'ajuster le pays à sa théorie. Il est en
danger, alors que nous sommes obligés, en un sens, de ne plus parler de
souveraineté pour parler de résistance et de survivance.
Voilà où nous sommes rendus présentement, où les
gens devraient se regrouper et être solidaires, parce que c'est une
collectivité, c'est une société qui est placée
devant un grave défi. Nous sommes obligés de mettre cette
question de côté, pour nous occuper d'une autre question qui,
toute proportion gardée, n'aurait pas dû revêtir cette
importance, si on y avait mis la bonne volonté nécessaire, si on
y avait mis, je dirais, le civisme nécessaire. C'est cela qui fait que
nous sommes ici aujourd'hui.
Toujours est-il que nous y sommes, mais je souhaite que la prochaine
fois que le ministre de l'Éducation nous convoquera, ce sera pour faire
autre chose que cette tâche-pompier inévitable, que ce sera pour
aborder les grands problèmes de
l'éducation au Québec, auxquels il faudra mettre beaucoup
plus de temps, je dirais: y aller avec une certaine hauteur dans nos
préoccupations. Il y a l'avenir d'un système d'éducation
au Québec. Il y a des problèmes de concertation entre enseignants
et parents. Il y a une remise à jour d'un système
d'éducation qui est cloisonné, qui est dépassé, qui
devrait être de plus en plus ouvert à toutes les cultures et
devenir un instrument de cohésion nationale. Voilà ce dont il
faudrait parler en éducation un de ces jours. (18 h 40)
Je ne peux pas croire que ce qui est majeur en éducation ait
toujours, de près ou de loin, un rapport avec une convention collective.
J'ai hâte aussi d'une école où les enseignants, au lieu
d'avoir à se contenter d'être des exécutants
convenablement, me semble-t-il, payés, mais enfin des exécutants,
auront le sentiment d'être des participants, d'être des
responsables, de travailler en équipe, entre autres, avec les parents,
où ils auront le sentiment que l'école aussi leur appartient et
qu'ils n'aient pas, je dirais, à affronter des administrateurs qui, eux,
s'érigent ou se conduisent en propriétaires. Une école
où des jeunes auront le sentiment d'être vraiment pris en charge
par des adultes et non pas d'être au centre d'adultes qui s'affrontent et
qui se querellent sans arrêt. Une école qui soit un lieu
d'apprentissage, de civilisation et de vie communautaire et non le
théâtre d'affrontements interminables qui, parfois, frôlent
le ridicule.
Vous allez dire que c'est un rêve, que c'est loin de la
réalité. Cela peut devenir la réalité. Je dois vous
dire que dans une journée comme aujourd'hui, je pense qu'il n'est pas
mauvais de rêver un petit peu. Cela nous permet quand même de
croire encore qu'il y a des choses possibles en éducation. Je ne suis
pas fier plus que d'autres de cette loi qui est nécessaire. Il n'y a
sans doute pas lieu de s'en vanter, mais c'est un remède partiel, c'est
un remède nécessaire. Il faudra, un jour, aller au fond du
malaise.
Remarquez qu'un système d'éducation traverse, à
l'occasion, une crise. Qu'un lieu d'enseignement soit, à l'occasion, un
lieu d'affrontement, je pense qu'il n'y a rien de catastrophique dans tout
cela. Il arrive assez souvent qu'une tension sociale, une crise sociale, soit
le point de départ d'un changement, d'une amélioration. Mais
quand le malaise devient permanent, je pense que cela devient autre chose. A ce
moment-là, je crois que c'est un malaise qui est celui de toute une
société. Nous rêvons tous d'une société, d'un
pays à nous. Je pense que nous rêvons d'une société,
d'un pays qui soit en santé et la santé de ce pays, c'est d'abord
garanti par la santé de son régime, de son système
d'éducation.
M. le Président, je pense qu'elle est très évidente
l'humilité de ce gouvernement qui est obligé de recourir à
un tel moyen d'exception. Je pense qu'il y a aussi sans doute cette
humilité de l'Opposition qui, là-dessus, se rappelle des
souvenirs pas très joyeux. Je souhaite la même humilité et
le commencement d'un examen de conscience chez ceux qui ont rendu
inévitable un tel recours. Merci.
Le Vice-Président: M. le député de Robert
Baldwin.
M. John O'Gallagher
M. O'Gallagher: M. le Président, je voudrais que le
ministre me dise très clairement dans sa réplique les raisons
pour lesquelles la Commission scolaire Baldwin Cartier n'est pas incluse dans
cette loi. Je suis sûr qu'il est conscient qu'il y a aussi une
grève à cette commission qui affecte 11,300 élèves
et que cette grève dure depuis onze jours. On commencera la
troisième semaine de la grève lundi, le 27. Les enfants,
après onze jours d'absence de l'école, sont aussi en péril
que les autres enfants des autres commissions scolaires qui sont
traitées dans cette loi. C'est extrêmement important surtout
d'être conscients du fait qu'au secondaire V, il y a une perte d'environ
20% des jeunes qui sont des "dropouts" à ce niveau-là. Si cette
grève continue encore deux semaines, on risque de perdre plus d'enfants
que le taux normal. Je voudrais savoir du ministre quand il va traiter de ce
cas-là et pourquoi ne pas l'inclure immédiatement dans la loi?
Merci.
Le Vice-Président: M. le ministre de l'Education.
M. le député de Maskinongé.
M. Picotte: M. le Président, j'aimerais vous demander une
directive avant que le ministre de l'Éducation exerce son droit de
réplique. Un comté est aussi particulièrement
touché dans le conflit de la régionale des Vieilles-Forges, c'est
le comté de Champlain. Peut-être que le député de
Champlain qui était ici tantôt pourrait apporter un
éclairage additionnel...
Le Vice-Président: À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaîtl Je reconnais le ministre
de l'Éducation, s'il n'y a pas d'autres orateurs qui veulent prendre la
parole en deuxième lecture. M. le ministre de l'Éducation.
M. Jacques-Yvan Morin
M. Morin (Sauvé): M. le Président, en dépit
de leurs discours, dans lesquels les députés de l'Opposition,
notamment, ont tenté de faire peser la responsabilité de la
situation actuelle sur le seul gouvernement, ils ont annoncé qu'ils
appuieraient la mesure. C'est ce que je retiendrai d'abord de leurs discours.
Après nous avoir quelque peu taquinés, ils finissaient par
admettre, comme nous, que le gouvernement devait intervenir, parce que la
situation a maintenant atteint un degré tel de difficulté que
nous n'avons pas d'autre choix que celui-là.
Bien qu'il me paraisse utile de souligner que le gouvernement n'est pas
mêlé aux négociations locales ou régionales, je
dirai qu'il devait assumer la responsabilité, au point où en
étaient les choses. Notre tâche, notre tâche principale en
tant que gouvernement, nous avons tenté de la remplir au mieux de notre
compétence, le printemps dernier, au moment où se
négociait l'entente nationale. Je pense que cette entente -en
dépit des lacunes qui caractérisent toutes les conventions
collectives, qui comportent des centaines d'articles - somme toute,
n'était mauvaise ni pour les enseignants, ni du point de vue de
l'administration de la chose scolaire.
Cette convention nationale, nous avons
réussi à la signer. Nous avons réussi - c'est l'une
des premières fois que cela se passe - à signer une convention
nationale complète, sans avoir recours à des décrets ou
à de la législation, une convention nationale librement
acceptée par les parties, la CEQ, d'un côté; la partie
patronale, commissions scolaires et gouvernement, de l'autre. Notre devoir,
donc, nous l'avons accompli l'année dernière et, normalement,
nous n'aurions pas eu à être mêlés à ces
nouvelles négociations au plan local et au plan régional, parce
que celles-ci portent sur des objets qui ne sont pas d'intérêt
national. Cependant, il a fallu assumer la responsabilité de ces
conflits, parce qu'ils avaient complètement
dégénéré au plan local. Ce n'est pas de
gaieté de coeur - de nombreux intervenants, de ce côté-ci
de la Chambre, l'ont souligné - mais nous n'avions pas le choix; quand
l'année scolaire des enfants est menacée, en péril, un
gouvernement manque à son devoir s'il n'intervient pas.
Je sais bien que l'Opposition a intérêt à faire
croire que le gouvernement est responsable de la situation dans les
régions de Trois-Rivières et de Sorel; c'est de bonne guerre,
mais la vérité conserve tout de même ses droits. La
vérité, c'est que nous avons jugé qu'il fallait assumer la
responsabilité, au point où nous en étions, mais cela ne
signifie pas que nous étions responsables du bon ou du mauvais
déroulement des négociations locales. (18 h 50)
Quand nous avons constaté, cependant, qu'il y avait une impasse
au plan local et qu'il était impossible d'aboutir à des accords,
nous sommes intervenus. D'ailleurs, il faut bien constater que le rôle de
l'Opposition dans cette affaire consiste à nous faire des reproches, si
nous n'intervenons pas, et à nous en faire encore si nous intervenons.
Autrement dit, nous avons tort, quoi que nous fassions, aux yeux de
l'Opposition. Mais je pense que la population, elle, peut juger; elle comprend
sans doute, surtout celle qui est directement concernée, la nature des
difficultés et elle sait très bien qu'il était temps que
le gouvernement, sans pour autant être responsable de l'échec
local, intervienne de façon décisive. La réalité,
donc, c'est que nous avons assumé, parce que nous sommes le
gouvernement, la responsabilité d'une situation où d'autres n'ont
pas pris leurs responsabilités devant les droits des enfants et des
parents.
Je me tourne maintenant vers quelques-unes des interventions que nous
avons entendues cet après-midi dans cette Assemblée. Je suis
habitué aux petites perfidies du député de
Marguerite-Bourgeoys, mais je dois avouer que je ne puis m'habituer à
ses petits mensonges. Il a dit que le ministère a l'intention ou est sur
le point d'abolir le programme d'éducation physique. Je ne sais
où le député a pris cette fausseté, quelle mauvaise
source de renseignements il peut posséder qui l'amène à
induire la Chambre en erreur de cette façon. La réalité,
M. le Président, c'est qu'en 1976-1977, on consacrait $3,100,000
à ce programme, à ce PEP, tandis que cette année, on y
consacre $1,000,000 de plus. Ce programme ne sera pas aboli et il n'a jamais
été question de l'abolir. Aussi, je m'attendrais, à un
moment ou à un autre, à ce que le député de
Marguerite-Bourgeoys rectifie les paroles qu'il a prononcées, cet
après-midi, dans cette Chambre.
Ce n'est pas, d'ailleurs, la seule fausseté dont il s'est rendu
coupable. Il nous dit que le gouvernement a l'intention de mettre fin au
programme "recherche et innovation". Encore là, c'est parfaitement faux.
Non seulement ce programme n'est-il pas aboli, mais le budget vient d'augmenter
cette année de quelque $2,000,000, de près de $2,000,000 par
rapport à l'année dernière.
M. le Président, je regrette d'avoir à consacrer du temps
à rectifier les propos du député de Marguerite-Bourgeoys,
mais si je les avais laissé passer, il y a de nombreux enseignants ou
parents qui l'auraient peut-être cru sur parole et qui, demain, seraient
venus nous demander au ministère: Est-ce vrai que vous avez aboli le
programme d'éducation physique, que vous abolissez "recherche et
innovation"? Qu'ils se rassurent, c'est faux.
Je me tourne vers quelques propos du chef de l'Opposition. J'aurais
aimé qu'il fût là parce que j'ai quelques observations
à faire au sujet de certains arguments gu'il a fait valoir. Le chef de
l'Opposition nous dit, dans un bel élan: "Les enfants ont droit à
une année scolaire normale". M. le Président, on ne peut pas en
disconvenir, mais le chef de l'Opposition ne nous dit pas ce qu'il entend par
"une année scolaire normale". Qu'est-ce que cela signifie, de
façon précise? Il se réfugie dans une sorte de flou fort
éloigné de la rigueur intellectuelle, de ce que nous
appellerions, dans cette Assemblée, la rigueur intellectuelle.
Est-ce que le droit de grève doit être suspendu
après deux jours, après dix jours, après deux semaines
peut-être? Le chef de l'Oppositioin n'a pas parlé de cela. Il se
contente de belles généralités qui ne veulent rien dire.
C'est très beau de dire que l'enfant a droit à une année
scolaire normale. Tout le monde est d'accord; c'est pour cela que nous
intervenons aujourd'hui. Mais qu'il soit plus précis et qu'il nous dise
après combien de jours ou après combien de semaines il serait
intervenu, lui. Je serais très intéressé à
connaître sa réponse un jour ou l'autre, si tant est qu'il se
pique de rigueur intellectuelle.
Je voudrais faire un autre commentaire et constater que la convention
nationale prévoit que les proportions maître-élèves
ont été négociées au niveau national et ne sont pas
"arbitrables". Qu'est-ce que cela signifie, M. le Président? On joue
beaucoup sur les mots, ces temps-ci. Ce ne serait pas "arbitrable", mais cela
pourrait être "applicable". Pour quiconque connaît le vocabulaire
un peu technique des négociations dans le domaine de l'éducation,
quand ce n'est pas arbitrable, cela signifie qu'il n'y a pas droit de grief,
donc qu'il n'y a pas de recours contre la décision d'une commission
scolaire et, à plus forte raison, qu'il n'y a pas de recours contre les
règles prévues dans la convention nationale. Voilà ce que
cela signifie! Qu'on ne vienne pas jouer sur les mots, comme le faisait le chef
de l'Opposition, tout à l'heure, et nous dire: Ce n'était
peut-être pas arbitrable, mais c'était peut-être applicable.
Quicongue s'est frotté aux négociations dans le secteur de
l'éducation sait très bien ce que cela veut dire.
La preuve, M. le Président, c'est qu'il y a eu lutte très
âpre autour de cette question de l'arbitrabilité des proportions
maître-élèves, lutte
qui a duré des semaines, voire même des mois. La CEQ a
décidé, sur ce point précis et en échange, sans
doute, d'avantages qui lui ont été concédés sur
d'autres points, de céder et elle a signé la convention. Ce n'est
pas le gouvernement qui a forcé M. Gaulin ou l'état-major de la
CEQ à signer la convention. C'est librement qu'ils l'ont fait. Et c'est,
je pense, normal de leur demander maintenant de respecter leur signature et de
ne pas profiter des négociations locales et surtout de la lutte
menée par des gens qui leur tenaient tête au moment de la
signature, au moment où ils débattaient, dans leurs divers
organismes, les clauses de la convention collective nationale. C'est une
attitude étrange que d'utiliser des gens qui, à ce
moment-là, voulaient les empêcher de signer pour maintenant les
faire passer à l'assaut d'une convention conclue en bonne et due forme.
Si cette question de l'arbitrabilité n'avait eu qu'un sens superficiel
ou, si elle n'avait pas porté à conséquence, je puis vous
assurer, M. le Président, que jamais il n'y aurait eu autour de cette
question une lutte aussi âpre.
Mme le député de L'Acadie a fait une intervention que j'ai
trouvée infiniment plus sérieuse et sereine que plusieurs autres,
dont celle du député de Marguerite-Bourgeoys, par exemple, qui
était un chef-d'oeuvre du genre. Mme le député de L'Acadie
a posé deux questions sérieuses auxquelles, je pense, il faut
tenter de répondre. Elle nous dit: Le gouvernement a-t-il prévu
des mesures de récupération à la suite de cette
grève? Effectivement, le ministère de l'Éducation s'en
soucie, seulement - nous en avons déjà parlé, de ces
questions - il faut se rendre compte que la récupération est
effectuée d'abord et avant tout par les enseignants. On peut les aider,
on peut encadrer la chose, on peut convenir avec le syndicat de journées
de rattrapage, mais on ne peut se substituer à l'enseignant, à sa
motivation, on ne peut pas faire en sorte que la qualité de sa
pédagogie soit meilleure que celle dont il veut bien faire preuve de
sorte que, comme toujours, dans ces questions de récupération,
les enfants sont à la merci des enseignants, comme ils le sont durant la
grève, d'ailleurs. Nous allons, du côté gouvernemental,
tout faire pour encourager la récupération la plus efficace
possible, mais, évidemment, il ne faut pas se faire d'illusions. Si les
enseignants ne veulent pas la faire et surtout s'ils se mettent à
exiger, en compensation, qu'on les paie pour les jours de grève, eh
bien! nous ne pourrons pas trouver de terrain d'entente, c'est bien
évident.
Qu'avons-nous fait, demande le député de L'Acadie, pour
motiver les enseignants? Eh bien! M. le Président, de très
nombreuses choses que je voudrais rappeler, en terminant. Depuis deux ou trois
ans, en fait, depuis le livre vert, nous sommes en train, en ce moment
même, de revoir les programmes d'enseignement avec les enseignants.
Nous sommes à faire en sorte que les enseignants rédigent
enfin des manuels et je dois dire, d'après les premiers
résultats, que ce sont d'excellents manuels québécois
à l'intention des jeunes. (19 heures)
J'ai, pour ma part, renoué contact avec le Conseil
interdisciplinaire des enseignants et avec leurs associations professionnelles:
professeurs de français, d'histoire, de mathématiques et ainsi de
suite. C'est l'intention du gouvernement de continuer à miser sur des
rapports étroits, au sens professionnel du mot, avec les enseignants en
vue d'améliorer sans cesse la qualité de l'enseignement.
Qu'avons-nous fait encore? Nous avons - on doit le répéter
- en dépit des difficultés de la négociation locale ou
régionale, consenti aux enseignants de très nombreux avantages au
cours de la dernière négociation. On l'a rappelé cet
après-midi, c'est la première fois, en vertu de la convention de
mai dernier, que les enseignants vont se voir reconnaître le droit
à une sécurité à vie, sécurité
d'emploi complète après deux ans, lorsqu'ils auront obtenu leur
permanence.
M. le Président, je pense que ces avantages, de même que
les conditions de travail très favorables qui ont été
concédées aux enseignants dans la négociation - qu'ils ont
obtenus de haute lutte, d'ailleurs, il faut bien le reconnaître - de
même que les avantages sociaux sans précédent qui ont
été octroyés, tout cela démontre la volonté
du qouvernement de nouer le dialogue avec les enseignants, de faire en sorte
que la pédagogie soit d'abord et avant tout leur premier souci. C'est
à eux que nous avons fait appel, combien de fois, pour les programmes,
pour le régime pédagogique. Nous les consultons à l'heure
actuelle, nous sommes à consulter la CEQ elle-même. Je ne pense
pas que le gouvernement antérieur puisse se vanter d'avoir
procédé à de telles consultations avant de changer les
régimes pédagogiques; d'ailleurs, il n'a rien changé aux
régimes.
Que le député de L'Acadie se rassure. Elle mettait en
doute notre volonté de mettre à jour, de rendre publics les
régimes pédagogiques. Ce sera chose faite d'ici quelques
semaines. Les régimes pédagogiques du primaire et du secondaire
viennent tout juste de nous revenir du Conseil supérieur de
l'éducation à qui je les avais soumis. En vertu de la loi,
c'était mon devoir de leur soumettre ces régimes. Le
régime pédagogique des collèges se trouve devant le
Conseil des collèges à l'heure actuelle. J'attends d'ici guelques
mois, sans doute à la fin de l'année courante ou au début
de l'année suivante, un avis circonstancié du conseil sur le
régime pédagogique des collèges.
M. le Président, vous me faites siqne que mon temps est
près d'expirer. Je vais donc en venir à mes conclusions. Je
voudrais simplement vous dire, de même qu'aux parents qui sont aux prises
avec les difficultés actuelles dans la région de
Trois-Rivières et à tous les parents qui se trouvent dans des
commissions scolaires où il n'y a pas de difficultés - elles sont
tout de même nombreuses - que nous devons persister à avoir
confiance dans l'école québécoise. Je crois que celle-ci
peut être améliorée. Je pense qu'elle a commencé de
s'améliorer depuis quelque temps.
Il y a quelques jours à peine, je participais à un
débat télévisé avec le député de
Marguerite-Bourgeoys. Il fallait voir sa tête à la fin de
l'émission. On demandait aux gens - c'était un débat avec
interpellation du public "Etes-vous satisfaits, oui ou non, de l'enseignement
au Québec, de l'enseignement qui est dispensé à vos
enfants?" L'animateur rappelait, au début de l'émission, qu'en
1976 ou 1977 les sondages révélaient que 68% des gens
étaient insatisfaits de l'enseignement au Québec. Or, ce
soir-là, il y a eu 900 appels téléphoniques
et la proportion - j'étais très heureux de le constater -
s'est renversée; 63% ou 64% des parents québécois disaient
être satisfaits de l'enseignement dispensé dans les écoles
du Québec. La proportion était renversée! Il fallait voir
la tête du député de Marguerite-Bourgeoys! A la fin, il
n'avait plus qu'une ressource, c'était de convenir que nos politiques
n'étaient pas si mauvaises.
Nous allons continuer dans la même veine, avec acharnement. Nous
allons y travailler. L'école québécoise peut encore
progresser, à condition qu'on y travaille sans relâche. Merci, M.
le Président.
M. Lalonde: M. le Président, en vertu de l'article
96...
Le Vice-Président: Très brièvement.
M. Lalonde: Très brièvement, M. le
Président. C'est parce qu'il y a certaines divergences d'opinions,
parfois, entre le ministre de l'Éducation et votre serviteur. Si ce
n'était que cela, je ne prendrais pas le temps de la Chambre mais il m'a
accusé d'avoir menti, d'avoir dit des mensonges. J'aurais
espéré qu'il vérifie le texte de mon discours, où
je posais la question, sous forme interrogative: On sait toutefois que le plan
d'éducation physique serait sur le point d'être aboli; M. le
ministre pourrait peut-être me répondre là-dessus. Je
posais la question au ministre.
Un peu plus tard: Est-ce que c'est pour améliorer la
qualité de l'enseignement que vous vous apprêtez, paraît-il,
à abolir le programme de recherche et d'expérimentation?
J'espère que, dans votre réplique, vous pourrez nous
éclairer là-dessus.
M. le Président, je dis au ministre, tout d'abord, que son petit
sondage de vendredi dernier, c'était 55-45.
Le Vice-Président: S'il vous plaît!
M. Lalonde: Je dis au ministre: Qu'il se rassure. Nous le
surveillons de près. S'il s'accroche au pouvoir encore jusqu'au
printemps, nous vérifierons avec lui les budgets de l'an prochain.
M. Morin (Sauvé): M. le Président... Le
Vice-Président: M. le ministre.
M. Morin (Sauvé): ...je ne veux pas lier de querelle avec
le député de Marguerite-Bourgeoys mais j'ai la transcription de
son intervention sous les yeux et cela dit bien: Est-ce que c'est pour
améliorer la qualité de l'enseignement que vous l'abolissez?
M. Lalonde: Ah oui, mais lisez tout! Lisez tout.
Le Vice-Président: Est-ce que la motion de deuxième
lecture du projet de loi no 113 sera adoptée?
M. Lalonde: Vote enregistré.
Le Vice-Président: Qu'on appelle les
députés!
Le Président: J'appelle maintenant le vote sur la motion
de deuxième lecture du projet de loi no 113, Loi sur certains
différends entre des enseignants et des commisisons scolaires.
Je demande à ceux et celles qui sont en faveur de cette motion de
deuxième lecture de bien vouloir se lever, s'il vous plaît.
Le Secrétaire-adjoint: MM. Lévesque (Taillon),
Charron, Mme Cuerrier, MM. Bédard, Morin (Sauvé), Parizeau,
Landry, Léonard, Vaugeois, Mme Ouellette, MM. Vaillancourt
(Jonquière), Johnson, Chevrette, Duhaime, Tardif, O'Neill, Martel,
Gagnon, Marcoux, Bertrand, Fallu, Proulx, Laberge, Guay, Laplante, Mme
LeBlanc-Bantey, MM. de Bellefeuille, Dussault, Marquis, Ouellette, Perron,
Gosselin, Jolivet, Brassard, Beauséjour, Lavigne, Boucher, Desbiens,
Baril, Bordeleau, Mercier...
Le Président: M. le secrétaire
général associé.
Le Secrétaire adjoint: MM. Desbiens, Baril, Bordeleau,
Gravel, Lévesgue (Kamouraska-Témiscouata), Lacoste, Ryan,
Levesque (Bonaventure), Caron, Forget, Lavoie, Mailloux, Lalonde, Picotte, Mme
Lavoie-Roux, MM. Lamontagne, Giasson, Rivest, Mme Chaput-Rolland, MM. Samson,
O'Gallagher, Dubois, Pagé, Verreault, Springate, Lalande, Le Moignan,
Fontaine, Goulet, Cordeau.
Le Président: Que ceux et celles qui sont contre cette
motion de deuxième lecture veuillent bien se lever, s'il vous
plaît!
Le Secrétaire adjoint: M. Bisaillon.
Le Président: Que ceux et celles qui désirent
s'abstenir veuillent bien se lever.
Le Secrétaire: Pour: 68 - Contre: 1 - Abstentions: 0
Le Président: La motion est adoptée. M. le leader
parlementaire du gouvernement.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...
Le Président: M. le leader parlementaire de
l'Opposition.
M. Levesque (Bonaventure): Je veux simplement demander, vu
l'absence du ministre de la Justice au cours de la journée, si ce
dernier serait disposé à demeurer au cours de la commission
plénière.
M. Bédard: Je dois malheureusement partir, M. le
Président. S'il y a des questions précises, elles peuvent
m'être adressées.
M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, avec le
consentement de la Chambre, ce serait simplement pour savoir où en sont
rendues les procédures d'outrage au tribunal.
M. Bédard: Les requêtes ont été
présentées hier au tribunal et les causes seront entendues le 30
octobre. Le délai a été fixé par le tribunal.
Le Président: M. le leader parlementaire du
gouvernement.
M. Charron: Conformément à la motion adoptée
ce matin, je propose que, pour les trois prochaines heures, l'Assemblée
étudie article par article le projet de loi qui vient d'être
adopté en deuxième lecture.
Le Président: Si je comprends bien, vous me proposez de
quitter mon fauteuil.
M. Charron: Je vous propose donc de quitter le fauteuil et que
cette Chambre se transforme en commission plénière.
Le Président: Est-ce que cette motion sera
adoptée?
Une voix: Adopté.
Le Président: Adopté.
Commission plénière
M. Vaillancourt, Jonquière (Président de la commission
plénière): A l'ordre, s'il vous plaît!
M. le député de Chicoutimi, s'il vous plaît!
Nous allons étudier, article par article, le projet de loi no
113, Loi sur certains différends entre des enseignants et des
commissions scolaires et j'appelle l'article 1, du projet de loi.
M. Lalonde: M. le Président...
M. Morin (Sauvé): M. le Président, puis-je attirer
votre attention, une seconde, sur un fait qui me paraît important? En
effet, je ne serai pas le seul à exposer les motifs du gouvernement
à l'endroit de ce projet de loi et j'aimerais vous faire savoir que le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, qui a été
associé de très près au projet de loi et à sa
rédaction, participera également à l'échange au
sein de la commission plénière. Peut-être, même, par
moments, comme cela se fait à l'occasion, d'autres collègues
voudront-ils intervenir; peut-être le ministre des Finances, à
l'occasion, s'il y a des aspects financiers d'évoqués.
Voilà, M. le Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
règlement permet à tous les députés d'intervenir en
commission plénière.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, le ministre de
l'Éducation est bien généreux. J'aimerais savoir, tout
d'abord, comme le ministre du Travail me l'a indiqué tout à
l'heure, s'il y a des papillons qui auraient été
préparés, j'aimerais qu'on nous les distribue
immédiatement pour qu'on en prenne connaissance, si c'est possible.
M. Johnson: Je n'ai pas d'objection. Il y a trois papillons, en
fait, qu'on va distribuer aux représentants de l'Opposition. Il y en a
un qui semble assez long mais qui reprend simplement l'essence et la substance
de certains articles, mais dans un vocabulaire juridique qui apparaît
plus adéquat, compte tenu de la complexité des textes qui sont en
jeu.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'appelle l'article 1.
M. Johnson: M. le Président, si vous me le permettez,
avant que mon collègue commence, il y aura peut-être deux ou trois
petits amendements oraux en cours de route qui sont sur des détails
d'écriture. Le premier, à l'article 1, il faut lire 23 octobre et
non pas 24 octobre. A l'article 1, donc, après le mot "enseignant",
à la ligne suivante: "qui le 23 octobre 1980"; même chose à
la ligne qui suit "association de salariés".
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. M. le ministre de l'Education. (19 h 30)
M. Morin (Sauvé): M. le Président, l'article
premier est sans doute celui qui offre le moins de difficultés, quel que
soit le côté de la Chambre où l'on se trouve, puisque ce
sont des définitions, puisqu'il consiste en un certain nombre de
définitions. En effet, on y trouve le sens et la portée
d'expressions qui seront utilisées dans la loi par la suite, comme le
mot "enseignant", l'expression "association de salariés" ou encore le
vocable "commission scolaire", ou encore "convention collective",
"différend", "grève", "lock-out", "salarié". Je tiens
à vous faire observer qu'il se peut que le contexte indique un sens
différent de celui qui est prévu dans l'article premier; si on se
reporte, par exemple, à l'article 11, on pourra constater que le
contexte indique que, lorsqu'on parle d'une commission scolaire, on ne parle
pas seulement des commissions qui sont mentionnées à l'article
premier, mais de l'ensemble des commissions scolaires du Québec.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
D'accord. Oui?
M. Lalonde: M. le Président, je pense qu'on va commencer
par l'article premier avant l'article 11; on verra la signification des termes
à ce moment-là. Pour l'article premier, si je comprends bien,
dans la définition d"'enseignant" et d'"association de salariés",
on change le 24 pour le 23, c'est tout. Je n'ai pas de difficultés pour
ces deux premiers alinéas; à la définition de "commission
scolaire", j'aurais des questions à poser.
M. Morin (Sauvé): Posez-les.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre a considéré
d'inclure d'autres commissions scolaires dans sa définition, comme le
lui a demandé le député de Robert Baldwin?
M. Morin (Sauvé): M. le Président, effectivement,
cette option a été longuement étudiée non seulement
par le ministère de l'Éducation, mais par le gouvernement, et la
décision qui a été prise par le gouvernement était
de n'inclure, dans la définition de la commission scolaire de l'article
premier, que les commissions de la région de Trois-Rivières, la
grande région de Trois-Rivières, et de celle de Sorel-Tracy.
En
d'autres termes, le gouvernement a décidé, étant
donné le caractère d'urgence et les motifs qui expliquent ce
projet de loi, d'exclure des commissions scolaires comme Les Manoirs ou
Baldwin-Cartier.
M. Lalonde: Est-ce que le ministre se rend compte du fait
qu'aujourd'hui, le 24 octobre, nous sommes à la 11e journée
d'absence d'enseignement dans cette commission scolaire et qu'à moins
d'une autre session spéciale avant la session normale, avant la reprise
de nos travaux le 5 novembre, il va se passer deux autres semaines? Est-ce que
le gouvernement est prêt, autrement dit, à imposer, dans
l'hypothèse qu'il n'y aurait pas de règlement, cette situation
déplorable aux parents de la commission scolaire pour deux autres
semaines? Quand commence-t-il à s'inquiéter de la qualité
de l'enseignement pour l'année scolaire actuelle?
M. Morin (Sauvé): II va de soi, M. le Président,
que nous nous en inquiétons d'ores et déjà et que nous
faisons tout ce qu'il est possible d'accomplir pour que les négociations
aboutissent dans ces deux autres commissions scolaires. Toutefois, la situation
nous paraît différente et nous pensons que cette loi, ce projet de
loi numéro 113, par son seul effet, pourra faire réfléchir
les syndicats d'enseignants de ces autres commissions scolaires qui sont en
grève ou encore en lock-out actuellement, puisque je dois rappeler au
député de Marguerite-Bourgeoys que, dans le cas de la Commission
scolaire Baldwin-Cartier, il s'agit d'un lock-out.
M. Lalonde: Le résultat est le même, M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Nous sommes bien conscients de cela,
mais je tenais quand même à ce que ce soit mentionné.
M. Lalonde: Alors, si je comprends bien, le gouvernement refuse
d'inclure dans la définition de "commission scolaire",
c'est-à-dire de soumettre à cette loi spéciale, la
Commission scolaire Baldwin-Cartier qui en sera rendue à peut-être
une vingtaine de jours perdus lors de la reprise de nos travaux.
M. Morin (Sauvé): Je n'admets pas du tout que le
député de Marguerite-Bourgeoys tire de telles conclusions, M. le
Président. Au contraire, nous pensons, comme je l'ai indiqué il y
a un instant, qu'il y a des chances que ces conflits se règlent dans la
foulée du projet de loi actuel.
M. Lalonde: M. le Président, si le gouvernement refuse de
couvrir cette situation et d'assurer le retour au travail dans cette commission
scolaire, j'aimerais qu'on appelle le vote sur l'article 1, alinéa par
alinéa.
M. Morin (Sauvé): Nous n'avons pas d'objection, M. le
Président.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
"Enseignant"?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. "Association de salariés"?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. "Commission scolaire"?
M. Morin (Sauvé): Adopté.
M. Lalonde: Sur division.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté sur division. "Convention collective, différend,
grève, lock-out et salarié".
M. Morin (Sauvé): Adopté. M. Lalonde:
Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. Article 1? Sur division?
M. Lalonde: Adopté sur division.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
J'appelle l'article 2.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, je demanderai
à mon collègue, le ministre du Travail, de faire quelques
commentaires, si la chose paraît nécessaire.
M. Johnson: Oui. Il s'agit essentiellement du dispositif, quant
au retour au travail, où en vertu des dispositions des articles 2, 3 et
4 les salariés à l'emploi des commissions scolaires
décrites doivent se soumettre à l'obligation d'entrer en classe
à compter du 27 octobre, en fonction de leur horaire.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: Concernant l'article 2, tantôt le ministre de
l'Éducation a eu certaines questions de la part de mon collègue
de L'Acadie concernant la récupération, devoir attaché
à ses fonctions quand on parle de l'enseignant. Le ministre de
l'Éducation a fait réponse que tout dépendra des exigences
des enseignants, etc. Etant donné que cela va prendre de la
récupération, peut-être pas à tous les niveaux, mais
il y a au moins une chose certaine, c'est que la dernière année,
avant le passage au secondaire, est une année importante, qui
méritera, à mon avis, la récupération - secondaires
III, IV et V, plus précisément V, mériteront aussi la
récupération - n'y aurait-il pas lieu que directement à
l'intérieur du projet de loi, à l'article 2, on insère
l'obligation à la récupération, quitte à ce que, si
les parties ne s'entendent pas, cela se fasse par ce que le projet de loi dit
dans tout l'ensemble: l'arbitre nommé, si jamais on n'est pas capable de
s'entendre, verra aussi à trancher cette question de
récupération qui, à mon avis, est importante et
nécessaire avec les 40 jours perdus pour les étudiants?
M. Morin (Sauvé): Je conviens avec le député
de Maskinongé que la question de la
récupération est très importante. Pour les
élèves qui ont perdu deux mois de classe, c'est même une
question cruciale. Les parents ont bien raison de s'en soucier. Jamais dans le
passé - je crois bien que l'avenir sera au même effet - on n'a
prévu dans la loi, ni la nécessité, ni l'obligation de
récupérer. Ce serait évidemment mettre à la
disposition de tout le monde un nid à chicanes terrible. C'est pourquoi
nous ne pouvons nous autoriser d'aucun précédent. Même s'il
y avait des précédents, je pense qu'ils seraient malheureux et
qu'ils auraient abouti à des impasses, de sorte que je ne pense pas
qu'il soit opportun de parler de récupération dans la loi. Cela
ne veut pas dire qu'il ne pourra pas en être question, bien
sûr.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, j'imagine que le ministre de
l'Éducation doit certainement avoir un plan en tête quant à
la récupération pour les jours perdus. On sait, entre autres,
qu'il y a des budgets affectés aux commissions scolaires avec lesquels
ils peuvent faire de la récupération. Cependant, on sait
également que ces budgets ne sont pas prévus pour un tel cas et
que, sûrement, les budgets en question seront épuisés
très rapidement. On peut également penser à
récupérer des journées pédagogigues et les utiliser
à de l'enseignement. A ce moment, je sais que par le passé, les
professeurs étaient payés à temps double lorsqu'ils
avaient à effectuer des journées d'enseignement pendant les
journées pédagogiques. Est-ce que le ministre de
l'Éducation peut nous dire, premièrement, s'il y a un plan de
prévu concernant la récupération et nous en donner les
détails? Quels sont les budgets supplémentaires qu'il peut
affecter à la récupération? Est-ce que les journées
pédagogiques peuvent être employées pour faire de la
récupération? Combien en reste-t-il de journées? (19 h
40)
M. Morin (Sauvé): Au moment où nous nous parlons,
M. le Président, bien sûr que le ministère de
l'Éducation se soucie de cette question mais, comme on le sait, elle se
traite chaque fois au niveau local. C'est une question locale par essence, en
quelque sorte.
Bien sûr, nous intervenons, en ce sens que nous encourageons les
parties à traiter de la chose, mais je dois dire qu'il n'y a aucun
budget qui soit prévu aux crédits du ministère de
l'Éducation pour une question pareille.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Le ministre nous dit qu'il n'y a pas de
crédits prévus au budget du ministère de
l'Éducation. On sait cependant que le ministre des Finances va
certainement déposer un budget supplémentaire d'ici le mois de
décembre. Est-ce que le ministre de l'Éducation peut s'engager
à demander au ministre des Finances un budget supplémentaire
à ce sujet-là?
M. Morin (Sauvé): Non, je ne peux certainement pas prendre
un engagement de cette sorte, M. le Président.
M. Lalonde: M. le Président...
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Maskinongé.
Ce ne sera pas long, M. le député de Marguerite-Bourgeoys,
j'arrive.
M. Picotte: Le ministre a admis tantôt qu'il y aurait
nécessité de récupération sans doute pour un groupe
d'étudiants donné. J'ai bien peur que, de la façon dont
nous sommes partis, on parle encore de budget, ce qui va arriver, lorsqu'il
sera question, au niveau local, de récupération, la commission
scolaire va dire: On n'a pas de budget qui permette qu'on fasse de la
récupération. Et à ce moment-là, ce sera un peu
l'exemple du chien qui court après sa queue et qui ne la rattrape
jamais. La commission scolaire va donner exactement les mêmes raisons que
le ministre vient d'invoquer à l'effet qu'elle non plus n'a pas de
budget pour faire de la récupération et qu'elle est
exposée aux normes établies dans une autre entente. Que va-t-il
se passer? Il n'y aura pas de récupération? Tout le monde est
d'accord que ça va en prendre une, mais on ne pourra pas en donner aux
étudiants.
M. Morin (Sauvé): Cela va dépendre, bien sûr,
de la bonne volonté des parties au niveau local, et je ne peux
certainement pas me substituer aux parties.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: M. le Président, je trouve absolument
inacceptable l'attitude du ministre de l'Éducation à
l'égard de la récupération et de la demande qui a
été faite par le député de Maskinongé. Je
lui demande de réfléchir quelques minutes. Il fait de beaux
discours sur la qualité de l'enseignement à qui veut l'entendre,
ad nauseam, comme il le dit. Et pourtant, lorsqu'arrive l'occasion de prendre
une décision concrète concernant la récupération,
il s'en remet à des voeux pieux du bout des lèvres. Le
ministère se soucie, dit-il, de la récupération, nous
encouragerons la récupération. Mais le ministre se rend-il compte
que la récupération, dans ce cas-ci comme dans d'autres, est
rattachée directement à la qualité de l'enseignement pour
l'année de ces élèves? Il s'en remet au passé, mais
dans le passé, est-ce que le ministre est satisfait de la
récupération qui a été faite dans tous les cas? Je
ne pense pas. Et s'il est satisfait, il est le seul parce qu'il sait
très bien qu'au niveau collégial, par exemple, la
récupération se fait à la maison, dans beaucoup de
cas.
Il me semble que le législateur ne ferait que son devoir en
incluant, dans les fonctions qui sont décrites ici à l'article 2,
les fonctions tout à fait spéciales, la
récupération dont ces enfants-là ont absolument besoin, si
le ministre veut être en mesure de signer le diplôme à la
fin de l'année. Je ne comprends par l'insouciance du ministre à
cet égard, lui gui aime tellement parler de la qualité de
l'enseignement.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, le
député de Marguerite-Bourgeoys fait de la politique avec une
question pédagogique. C'est au plan pédagogique que ces
questions-là doivent être traitées. Effectivement, il le
sait fort bien, dans le passé, les expériences de soi-disant
récupération aboutissaient à des échecs complets.
Certains syndicats prenaient des engagements de faire de la
récupération et, en fait, au moment où il fallait la
faire, se refusaient tout net à mettre en oeuvre les engagements qu'ils
avaient pris. C'est donc une question fort délicate et que je n'ai pas
l'intention de trancher sur le parquet de cette Chambre.
M. Lalonde: M. le Président... M. Picotte: M. le
Président...
M. Lalonde: ...si vous permettez, M. le député de
Maskinongé. Le ministre vient d'avouer que lorsqu'on laisse à la
bonne volonté des gens le soin de faire de la
récupération, cela ne se fait pas. Il refuse de confier ici
à la loi...
M. Morin (Sauvé): Le député se trompe.
M. Lalonde: C'est ce que vous venez de dire.
M. Morin (Sauvé): Le député se trompe. Ce
n'était pas laissé à la bonne volonté des gens.
Cela faisait l'objet d'ententes locales entre certains syndicats et certaines
commissions scolaires. Au moment de s'exécuter, la chose n'était
pas accomplie, bien que de l'argent ait été versé pour
obtenir ces services supplémentaires. C'est donc avec beaucoup de
circonspection qu'il faut approcher des questions comme celle-là. Le
député de
Marguerite-Bourgeoys, qui connaît tout de même un petit peu
ces questions - il ne les connaît pas à fond, malheureusement -
sait qu'il essaie en ce moment de m'entraîner à prendre des
positions qui seraient par la suite inacceptables.
M. Lalonde: M. le Président, je rappellerais au ministre
qu'il fait de la politique actuellement. Au cas où il l'aurait
oublié, il est encore ministre de l'Éducation. Lorsqu'il propose
un projet de loi à l'Assemblée nationale, il fait de la
politique, pas de la pédagogie. Il devrait, quand même, se rendre
compte que la récupération, dans ce cas, c'est extrêmement
important. Il ne devrait pas laisser cela simplement à des voeux pieux.
Si, dans le passé, des ententes n'ont pas donné les
résultats escomptés, des résultats satisfaisants, raison
de plus de l'inclure dans la loi, de ne pas laisser la question simplement
à des ententes qui n'auraient pas donné de résultats
satisfaisants. Peut-être que le ministre de l'Éducation est dans
ses derniers milles. Peut-être qu'au fond il se fout un peu de toutes ces
questions, étant donné qu'il ne sera peut-être pas
là encore longtemps.
M. Morin (Sauvé): Encore de la politique:
M. Lalonde: Je vais demander au prochain ministre de
l'Éducation, par exemple, de s'inquiéter et de proposer un
amendement au deuxième article qui ferait de la
récupération une obligation légale.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): M. le Président, il n'est pas
question d'en faire une obligation légale qui serait, évidemment,
un fardeau à porter par les enseignants et qui nous mènerait
probablement, étant donné qu'il s'agirait d'une obligation
juridique consacrée par une loi, à des difficultés
nouvelles, pour ne pas dire des chicanes à n'en plus finir. Je puis vous
assurer que tout va être fait pour que les élèves aient
à souffrir le moins possible des difficultés dont ces commissions
scolaires ont été le théâtre, mais il n'est pas
question d'inscrire cela dans la loi.
M. Lalonde: Si le ministre nous dit que tout va être fait -
enfin, il vient de nous assurer cela de son siège de ministre à
l'Assemblée nationale - qu'est-ce que c'est, tout ce qui sera fait?
Qu'il nous donne des détails!
M. Morin (Sauvé): Le ministère fera tout ce qu'il
est possible de faire, grâce à son expérience de la chose
et compte tenu du bon sens, pour faire en sorte que les élèves
aient le moins possible à souffrir de ces événements.
M. Lalonde: Qu'est-ce que c'est?
M. Morin (Sauvé): II n'est pas question de faire de cela
une obligation juridique qui ne ferait, tout simplement, qu'ajouter aux
difficultés existantes. Au fond, ce que le député de
Marguerite-Bourgeoys tente de faire - il devrait avoir la franchise de
l'admettre - c'est nous compliquer la tâche. Il sait très bien que
ces questions ne sont pas politiques. Ce sont des questions
pédagogiques.
M. Lalonde: Une question de privilège, M. le
Président. J'ai droit à une question de privilège en
commission plénière. On n'est pas en commission parlementaire,
là.
M. Morin (Sauvé): II voudrait transformer des questions
pédagogiques en questions politiques. Je trouve le manège du
député de Marguerite-Bourgeoys inqualifiable.
M. Lalonde: Non, je ne peux pas laisser passer cela, quand
même. Il me prête des intentions indignes, ce qui est
défendu par le règlement. Je n'ai rien à faire pour rendre
sa tâche difficile. Le ministre fait cela tout seul, très bien
à part cela, jusqu'à des montants de $500,000,000. On n'y est
pour rien. Il fait cela parfaitement seul. Je réprouve, par exemple, ses
propos quand il dit que c'est à des fins strictement malicieuses que je
m'inquiète de la récupération. Il sait très bien
que la récupération dans le passé ne s'est pas faite
partout de façon satisfaisante. Il sait très bien que, s'il
laisse cela à la volonté locale ou aux moyens locaux, les chances
qu'elle se fasse sont minces. Je réprouve le laisser-aller et la
négligence du ministre qui ressemble à sa négligence
administrative.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, les deux
ministres qui sont en face de nous sont en train de me faire regretter
d'avoir voté en faveur de la loi. Comme le disait l'ancien
député de Johnson, l'enfer est pavé de bonnes intentions.
Le ministre nous dit aujourd'hui qu'il est prêt à faire tout en
son pouvoir pour qu'il y ait de la récupération, mais il ne met
pas de sous à côté. (19 h 50)
Si on veut faire de la récupération dans ces commissions
scolaires, il faut absolument mettre de l'argent, parce que cela correspond
à de l'argent. Et le ministre de l'Éducation nous dit qu'il n'y
en a pas et qu'il ne veut pas en mettre non plus. Quand bien même il
mettrait tout ce qu'il voudra dans la loi, s'il ne met pas de l'argent en
même temps, il ne réussira pas à faire de la
récupération.
J'aimerais qu'il nous dise également si, après 40 jours
perdus, les enfants ont perdu leur année, sans
récupération.
M. Morin (Sauvé): Cela dépendra évidemment.
Le député a certainement une certaine expérience de la
vie, des choses, et sait très bien que, dans ce domaine de
l'école, dans le domaine de la pédagogie, les choses ne se
tranchent pas au couteau. Les choses ne peuvent pas être noir ou blanc.
Ce serait trop simple. Il suffirait d'additionner des jours de classe et on
aurait le résultat au bout. De bonnes journées de classe peuvent
donner de bons diplômes, des enfants qui posèdent une bonne
instruction. De mauvaises journées de classe, elles auront beau
être aussi nombreuses que les bonnes journées, elles aboutiront
à un résultat tout autre et l'enfant sortira peut-être de
la classe sans s'être vraiment instruit. De sorte que ce n'est pas une
question quantitative, c'est, dans une large mesure, une question qualitative;
de même d'ailleurs, le député le sait bien, que les
rapports qu'il doit connaître entre un père et ses enfants. Ce
n'est pas une question quantitative, ce n'est pas le nombre d'heures qu'il
passe avec eux, c'est la qualité de sa présence. C'est la
même chose pour les enseignants.
Donc, on ne peut pas trancher cela au couteau et dire: S'il n'y a pas
tant de jours de récupération, l'année est fichue. Cela
dépend comment le reste de l'année se déroule. Cela
dépend de la motivation des enseignants, cela dépend de leur
compétence, cela dépend de leur dévouement. Si tout cela
manque, on aura beau ajouter 50 jours, cela ne vaudra rien, comme c'est le cas
de nombreux précédents dont on pourrait s'inspirer.
M. Fontaine: M. le Président, le ministre me permettra de
le reprendre un peu là-dessus. Ce n'est pas pour rien non plus qu'on dit
qu'il y a 200 jours de classe. On vient d'en faire tomber 40.
M. Lalonde: C'était 180 à un moment donné,
à cause des congés. Nous sommes rendus à 140.
M. Fontaine: II n'en reste pas beaucoup. Il y a quand même
une question de quantité, même s'il y a une question de
qualité.
M. Morin (Sauvé): Le député n'a pas vraiment
à nous apprendre cela. Nous le savons.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Maskinongé.
M. Picotte: II y a déjà 40 jours de perdus. On
s'entend tout le monde pour dire que cela va nécessiter une
récupération. On entreprend la période hivernale. Il ne
faut pas avoir été lonqtemps dans le domaine scolaire pour savoir
que généralement, dans un hiver normal, les étudiants
perdent cinq ou six jours de classe annuellement, dû à des
tempêtes de neige, ce qui vient ajouter au nombre de jours perdus
jusqu'à maintenant, dans un secteur donné, au niveau de la
régionale des Vieilles-Forges.
Je sais que le ministre va être inflexible à notre demande
et d'ailleurs, avec la majorité qu'il possède en Chambre, il n'y
a pas de problème, il ne s'en passera pas. Mais on lui donnait une bonne
occasion de nous prouver ce qu'il nous a dit tantôt, qu'il se souciait du
bien de l'enfant.
Là, on vient de vous demander une chose qui prouve que le bien de
l'enfant passe au-dessus de toutes les questions financières. Le bien de
l'enfant, c'est justement qu'il y ait une récupération pour
être capable de réussir son année scolaire au niveau de
certains secondaires. On demande au ministre de l'inclure à
l'intérieur, pour que ce soit discuté, au cas où les deux
parties ne s'entendraient pas. Il refuse cela.
Alors, ne venez plus nous parler du bien de l'enfant; autrement, vous ne
connaissez pas cela.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): Le député de
Maskinongé, je pense, a bien fait de laisser le monde de l'enseignement.
Il devrait savoir que les questions de pédaqogie, cela ne se
légifère pas. La bonne et la mauvaise pédagogie, une bonne
année scolaire et une mauvaise année scolaire, cela ne se
légifère pas.
Avant de décider quoi que ce soit, il va falloir que la
rentrée s'effectue, qu'on constate dans quel état d'esprit elle
s'effectue, il va falloir que les choses se tassent, il va falloir que les gens
se parlent, il va falloir que les gens évaluent la situation. Cela ne se
fait pas dans un projet de loi. Et, s'il ne sait pas cela, je m'étonne
qu'il ait occupé des fonctions dans l'enseignement.
M. Picotte: Mais je sais une chose, M. le ministre de
l'Éducation. Avec votre système, présentement, on va se
retrouver dans le même cul-de-sac que celui auquel nous faisons face
présentement. La commission scolaire dira aux enseignants que cela
dépend du ministre de l'Éducation, le ministre de
l'Éducation dira que cela dépend de la commission scolaire.
Ensuite, on passe la balle au ministre des Finances, on passe la balle au
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre et, quand on en a fait tout le tour,
le bien de l'enfant, on l'a vous savez où. C'est cela.
M. Morin (Sauvé): Je ne sais pas où vous l'avez, M.
le député.
M. Picotte: Mais moi je sais où vous l'avez, de la
façon dont vous nous répondez depuis tantôt.
M. Morin (Sauvé): M. le Président...
Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): M. le
ministre.
M. Morin (Sauvé): ... je ne sais pas si l'ancien
enseignant qu'est le député de
Maskinongé utilisait ce vocabulaire quand il enseignait, mais je
pense que ce n'est...
M. Picotte: ... donner une précision.
Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Morin (Sauvé): ... pas digne de cette
Assemblée.
M. Picotte: Est-ce que j'ai donné une précision
quelconque?
Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): À
l'ordre, s'il vous plaît!
M. Picotte: C'est vous qui, par déduction...
M. Morin (Sauvé): Je dirai simplement, M. le
Président, qu'on ne légifère pas la pédagogie.
C'est une affaire qui se règle à un tout autre niveau par le
dialogue, par les tentatives de compréhension de part et d'autre, et
ça, ça se fait très localement, dans chaque école,
pour ne pas dire dans chaque classe.
Le Président (M.Vaillancourt, Jonquière): L'article
2 sera-t-il adopté?
M. Lalonde: Sur division.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté sur division. Article 3.
M. Johnson: Adopté, M. le Président.
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. Article 4, adopté?
M. Lalonde: Oui, adopté.
M. Johnson: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. Article 5.
M. Lalonde: A l'article 5, j'aurais une question à poser.
J'aimerais savoir qu'est-ce que ça ajoute à la
réalité juridique de dire que les conditions de travail sont
applicables aux enseignants, alors que la convention collective est applicable
actuellement.
M. Johnson: Non, c'est qu'elle ne l'est pas en ce moment,
techniquement, en vertu du Code du travail.
M. Lalonde: Ah, bon!
M. Johnson: L'entente nationale qui a été
adoptée, c'est en fait le coeur battant, si on veut, sur le plan
monétaire, et même, sous certains aspects, des conditions de
travail des enseignants. Mais ça ne devient une convention collective
qu'au moment où cette entente est intégrée dans ce qui,
normalement, doit être négocié localement. Le tout est
ratifié, cependant, en deux volets au niveau du syndicat local, en vertu
du Code du travail.
Donc, l'effet très concret de l'article 5, c'est de permettre aux
enseignants des Vieilles-Forges et de Carignan - quand je dis: Vieilles-Forges
et Carignan, j'entends l'ensemble des commissions scolaires dont il est
question -de bénéficier des conditions de salaire ou de
l'ensemble des conditions qu'ils ont obtenues dans l'entente nationale,
même si la convention collective locale n'est pas signée et
même si la sentence arbitrale n'est pas encore arrivée. Alors, ils
auront droit à leur rétroactivité, ils auront droit
à l'ensemble des conditions qui ont été
négociées par leur centrale au niveau national.
M. Lalonde: Cela va, je vous remercie; adopté en ce qui
nous concerne.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article
5, adopté. Article 6.
M. Johnson: M. le Président, l'article 6 dit
essentiellement qu'à partir de l'adoption de cette loi, les syndicats
impliqués et les commissions scolaires décrites dans l'article 1
- c'est-à-dire dans les régions de Trois-Rivières et de
Sorel-Tracy - peuvent conclure, dans les quinze jours, une convention
collective. C'est peut-être là un espoir assez mince, quand on
regarde la tradition, dans le cas en tout cas de Trois-Rivières,
cependant, c'est également l'ouverture - comme on le verra un peu plus
loin aux articles 7 et 8 - la possibilité pour les parties de parapher
des textes sur des choses, par exemple, si on a réussi à
s'entendre. Comme cela a été le cas à Carignan et
également à Trois-Rivières, sur une série de
chapitres locaux, et ce fut paraphé. Ce qu'on dira plus loin c'est que
l'arbitrage devra tenir compte obligatoirement de ce sur quoi les parties se
sont entendues, dans les secteurs qui sont de juridiction locale et qui ne
seront pas exclus par l'article 11.
M. Lalonde: Je vous remercie. J'aimerais simplement savoir quel
est le ministre qui est décrit au dernier mot de l'article 6? Il n'est
pas défini dans la loi et je ne vois pas de référence
à d'autres lois. Est-ce que c'est le ministre du Travail ou le ministre
de l'Éducation?
M. Johnson: II s'agit - comme il est nommé après,
je pense que le député comprendra bien, puisqu'il est juriste...
"...sur demande écrite adressée au ministre du Travail et de la
Main-d'Oeuvre par la commission scolaire ou l'association de salariés,
être soumis à un arbitre nommé par le ministre." Donc,
c'est le ministre du Travail.
M. Lalonde: D'accord, je m'excuse, ça m'avait
échappé. On pourrait l'adopter.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 6 est adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. Article 7, adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Article
8.
M. Johnson: II y a papillon à l'article 8, M. le
Président. Il s'agit de changer "... toute stipulation ayant fait
l'objet..." pour "... toute stipulation faisant l'objet...". J'explique la
portée du papillon; il s'agit de ne pas interdire, dans les cas de
Trois-Rivières et de Carignan, l'intervention d'ententes entre les
parties sur certains objets qu'elles pourraient signer, et l'arbitre, à
ce moment, serait lié par ces objets. (20 heures)
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que la motion d'amendement est adoptée?
M. Lalonde: Pour l'amendement,oui.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Oui.
M. Johnson: Pour l'article?
M. Lalonde: Pour l'article, pour le premier alinéa...
M. Johnson: Je m'excuse. Est-ce qu'on pourrait voir tout le
papillon? Il y a un autre amendement aussi au même article; cette
fois-ci, à la première ligne du deuxième alinéa,
remplacer les mots "la teneur de l'accord" par les mots "cette stipulation".
Encore une fois, c'est strictement une question de précision ici.
M. Lalonde: Comment... Là, c'est une question de fond.
M. Johnson: Est-ce que l'amendement est adopté, M. le
Président?
M. Lalonde: Oui. On l'a adopté, pas de
problème.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté.
M. Johnson: Le troisième papillon, toujours au même
article, à la deuxième ligne du deuxième alinéa,
remplacer les mots "pour rendre compatibles" par les mots "pour la rendre
compatible" évidemment, en concordance avec le précédent.
Adopté, M. le Président?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté.
M. Lalonde: Adopté pour les amendements. Maintenant,
j'aimerais poser une question de fond. On sait qu'on a deux régimes
comme conséquence de cette loi: les conventions locales, qui ont
été adoptées, qui ont été acceptées
avant le 24 octobre, demeurent. En vertu de l'article 12, l'article 11 que l'on
propose se trouve à s'appliquer pour toutes les conventions collectives
à venir.
M. Johnson: Je m'excuse. On se comprend bien. Quand le
député parle des conventions collectives, il parle de celles en
dehors de Sorel-Tracy et de Trois-Rivières.
M. Lalonde: Oui.
M. Johnson: D'accord, on se comprend bien. C'est parce que la
notion "les commissions", il faut bien se rendre compte qu'à Sorel et
à Trois-Rivières, il y a plusieurs commissions scolaires, parce
que c'est une régionale.
M. Lalonde: Je parle de deux régimes. Jusqu'à
maintenant, il y a à peu près les deux tiers des commissions
scolaires - pas dans le sens de la loi - qui ont réqlé leur
affaire et souvent -je dirais peut-être la majorité des cas
conformément à l'article 11.
M. Johnson: II y a des conventions qui, effectivement, sont
intervenues et qui ne respecteraient pas les dispositions de l'article 11. Je
ne crois pas, d'après ce qu'ont pu en dire les gens à
l'Éducation, qu'il s'agisse de la majorité, bien au contraire.
Mais dans certains cas, effectivement...
M. Lalonde: Disons qu'il y en a.
M. Johnson: Bon. C'est cela. Il y en a.
M. Lalonde: Et on dit que c'est une espèce de droit
acquis; ils se sont entendus...
M. Johnson: C'est cela. Il n'y a pas de caractère
rétroactif de la loi à cet égard.
M. Lalonde: Non, il n'y a pas de caractère
rétroactif de la loi. Les gens se sont entendus au niveau local. On
respecte cela...
M. Johnson: C'est cela.
M. Lalonde: ... même si ce n'est pas conforme à
l'interprétation de l'article 11.
M. Johnson: C'est cela.
M. Lalonde: Maintenant, à l'article 8, on dit: "Toute
stipulation faisant l'objet d'un accord écrit..."
M. Johnson: Oui.
M. Lalonde: Alors, dans ce cas, même si c'est un accord qui
a été écrit et paraphé, on se trouve à
l'assujettir à l'interprétation arbitrale. Comment se fait-il que
ce qui est déjà signé n'est pas bon pour tout le
monde?
M. Johnson: C'est que 8 ne vise que Carignan et
Trois-Rivières.
M. Lalonde: Oui, mais ce qui est déjà...
M. Johnson: On veut faire en sorte qu'à Carignan et
à Trois-Rivières, par exemple, s'il y a eu une entente sur
l'affichage, s'il y a eu une entente sur un problème de la participation
des
enseignants, s'il y a eu une entente sur une des 16 matières,
à l'exclusion de cette question du 8.6, il n'y a rien qui interdit
qu'interviennent des ententes à cet égard. Par ailleurs, toute
entente à l'égard de la question des ratios, etc., devra
être celle qui est prévue dans cette loi; c'est vrai pour
Carignan, Trois-Rivières et ce sera vrai pour l'ensemble des commissions
scolaires au Québec où n'est pas encore intervenue une
entente.
M. Lalonde: Je regrette, mais je ne comprends pas comment le
ministre peut respecter ou nous suggérer de respecter les accords
écrits pour toutes les autres commissions scolaires, mais pas
nécessairement pour celles de Carignan et de Trois-Rivières.
M. Johnson: Oui, oui. Ce qu'on respecte ailleurs...
M. Lalonde: Mais non, vous dites: "Toute stipulation..."
M. Johnson: ... ce ne sont que les conventions collectives
complètes. Or, il n'y a pas de convention collective complète
à Carignan et à Trois-Rivières. Dieu sait qu'on le
sait.
M. Lalonde: D'accord! Mais ce n'est pas une question de savoir si
la convention est complète ou non. C'est la question de savoir sur quoi
vous vous êtes entendus. Vous l'avez écrit, vous l'avez
paraphé, c'est un contrat; on respecte cela.
M. Johnson: D'accord. Parce qu'il s'agit de savoir ce qui fait
l'objet d'une négociation en vertu du Code du travail et de nos lois. Ce
qui fait l'objet d'une négociation de convention collective, que ce soit
dans le public, le parapublic ou ailleurs, c'est un ensemble de conditions de
travail. Or, l'autre principe qu'on retient, c'est la
non-rétroactivité de nos lois. À cet égard, on dit
que, si une entente sur l'ensemble des conditions de travail est intervenue
entre une association de salariés et une commission scolaire, même
si elle n'est pas encore ratifiée par l'assemblée, tel que
l'exige le Code du travail pour devenir une convention collective, nous allons
respecter cet échange de volontés qui est la base, on le sait, de
notre régime de droit du travail, sauf quand on est dans des situations
exceptionnelles.
À cet égard, ce qu'on dit, c'est que toute convention
collective conclue va être respectée, c'est-à-dire
lorsqu'il y a eu une entente de principe, qu'elle est allée en
assemblée, qu'elle a été ratifiée par un vote,
qu'il y a eu signature par la suite de la part de la commission locale et de la
part du syndicat local. Également, seront exclus de l'application des
dispositions de l'article 11 - on verra dans sa reformulation tout à
l'heure qu'il deviendra l'article 12 pour les fins des articles qu'on
considère - les endroits où un syndicat et une commission
scolaire se sont entendus sur l'ensemble des conditions de travail, mais
où il y a une étape qui manque, c'est-à-dire où la
ratification par l'assemblée générale n'est pas encore
intervenue. On dit: II y a quand même eu échange de
volontés de part et d'autre et, à cet égard, on va
considérer exceptionnellement, par respect des traditions juridiques et
par respect des parties, qu'à toutes fins pratiques c'est une
convention, évidemment, à moins que l'assemblée ne la
rejette. À ce moment-là, si l'assemblée la rejette, on
retourne au sens d'une convention qui est en négociation, donc les
dispositions vont s'appliquer.
M. Lalonde: Pour revenir à ce qu'on dit dans l'article 8:
"Toute stipulation ayant fait l'objet d'un accord écrit - cela, c'est le
critère -entre les parties au cours de la négociation est
consignée dans la sentence arbitale." L'arbitre n'a pas le choix, il
faut qu'il la prenne dans sa sentence. Cela est conforme au principe que ce qui
a été entendu, on le garde. "Dans la mesure où cette
stipulation est conforme à l'entente"; c'est cela qui me fait tiquer.
Qu'est-ce que c'est, la conformité à l'entente? En vertu de quels
critères, en vertu de quelles normes cette conformité est-elle
décidée par l'arbitre? Quand on parle de l'entente
mentionnée a l'article 5, c'est-à-dire la convention collective
provinciale.
M. Johnson: La notion de conformité, c'est une notion de
logique, finalement. Je comprends que cela devient juridique dans la mesure
où on le consigne ici, mais il est bien évident qu'un arbitre...
On dit: L'arbitre va être obligé de tenir compte du consentement
des parties. Ce n'est pas pour rien qu'on nomme un arbitre, c'est qu'il n'y a
pas eu de consentement sur certaines choses. Et on dit: Comme on impose
à l'arbitre de consigner dans sa sentence les ententes intervenues entre
les parties, il faut bien, par ailleurs, que l'arbitre s'assure que, si, lui,
comme arbitre, avait eu à juger non pas du bien-fondé, mais de la
conformité de ces dispositions avec l'ensemble des lois qui existent ou
avec l'entente nationale, il en aurait tenu compte. Donc, on dit: À la
rigueur, à cet égard, il pourrait modifier une stipulation comme
si lui écrit la sentence, mais le principe de base demeure qu'il doit
respecter l'entente intervenue entre les parties.
M. Lalonde: On peut présumer, par exemple, que cette
conformité a été respectée par la partie patronale
et par la partie syndicale lors de l'entente écrite, parce qu'il y a un
écrit là-dessus.
M. Johnson: Oui.
M. Lalonde: Alors...
M. Johnson: Pas nécessairement.
M. Lalonde: Non, l'arbitre peut changer cela.
M. Johnson: D'ailleurs, je dois vous dire - je pense que le
ministre de l'Éducation et le ministre des Finances en ont parlé
assez longuement tout à l'heure - qu'une bonne partie du problème
qui s'est posé dans certaines des commissions scolaires, semble-t-il,
c'est que, d'une part et de l'autre, pour des motifs sur lesquels on pourra
s'étendre tant qu'on le voudra, du c6té des commissions scolaires
comme du côté de certains syndicats, on a décidé de
ne respecter ni l'esprit, ni la lettre de l'entente nationale.
M. Lalonde: Vous voulez parler des articles
8 et 9?
M. Johnson: Et cela ne les a pas empêchés de
signer.
M. Lalonde: Vous voulez parler des articles 8 et 9?
M. Johnson: Je parle de toute la question des articles 8 et 9,
entre autres.
M. Lalonde: On va voir cela dans l'article 11.
M. Johnson: Oui, on y reviendra tout à l'heure, aux
articles 11 et 12.
M. Lalonde: D'accord.
M. Johnson: Est-ce que l'article 8 est adopté, M. le
Président?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 8 est-il adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 8 adopté, tel qu'amendé. L'article 9,
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 10, adopté?
M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait élaborer un peu sur ces
références?
M. Johnson: Oui, il s'agit essentiellement de dispositions du
Code du travail qui touchent à l'arbitrage de différends. En
d'autres termes, ce qu'on dit, c'est que l'arbitre qui sera nommé pour
Trois-Rivières et Sorel-Tracy, ou les arbitres, selon le cas, devront
respecter l'ensemble des dispositions du Code du travail qui touchent aux
tribunaux d'arbitrage de différends. (20 h 10)
On sait qu'il y a deux sortes d'arbitrage de différends qui sont
prévues dans le Code du travail: d'une part, l'arbitrage d'une
convention collective dans le cas de ceux qui n'ont pas le droit de
grève, comme les policiers et les pompiers, et, d'autre part,
l'arbitrage auquel ont consenti les parties décidant de s'en remettre
à un arbitre. Or, ces articles du Code du travail prévoient la
façon de procéder de ce tribunal d'arbitrage et également
les pouvoirs de l'arbitre. Alors, on se réfère aux articles du
Code du travail et, encore une fois, en étant cohérent avec
l'ensemble des dispositions du code.
M. Lalonde: Ce sont tous des articles qui ont trait au tribunal
d'arbitrage, c'est-à-dire à l'arbitrage.
M. Johnson: C'est ça; exactement, sans aucune
exception.
M. Lalonde: D'accord.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que l'article 10 est adopté? M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté. J'appelle l'article 11.
M. Johnson: Papillon, M. le Président. Il s'agit du
papillon no 2, intitulé article 11. Dans un premier temps, il faudrait
d'abord ajouter, après les mots "dans la clause 8-9.01E" dans la
deuxième ligne du deuxième alinéa, les mots "de cette
entente". En d'autres termes, c'est strictement une question de
précision. Est-ce que l'amendement est adopté, M. le
Président?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
Adopté.
M. Johnson: D'accord. Premièrement, l'amendement suivant
consiste simplement à dire que l'article 11 tel que nous venons de
l'amender se termine après le mot "entente". Les deux alinéas qui
suivent et qui sont actuellement dans la version de l'article 11 deviennent
l'article 12. C'est simplement une renumérotation et je m'explique.
L'article 11 se lirait maintenant comme suit: "Les stipulations
négociées et agréées à l'échelle
locale ou régionale doivent être conformes aux stipulations
déjà agréées à l'échelle nationale et
prévues à l'entente mentionnée à l'article 5."
C'est l'article 11. D'accord?
M. Lalonde: Ah bon; l'article 12 commence à "Une
commission".
M. Johnson: C'est ça.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Est-ce
que le nouvel article 11 sera adopté?
M. Lalonde: Écoutez, on a déjà dit ça
à l'article 8, ce qu'on dit à l'article 11.
M. Johnson: C'est-à-dire qu'il s'agit ici d'une
disposition d'application générale, contrairement à ce
qu'il y a dans l'article 8 qui est une disposition qui s'applique dans le cas
de 5orel-Tracy et Trois-Rivières. Il s'agit de reprendre les notions
qu'on retrouve dans l'article 8 et de les formuler dans la section V du projet
de loi au titre des dispositions générales. L'article 11 serait
un article de portée générale sur les stipulations quant
à leur nécessité d'être conformes à l'entente
nationale.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Le
nouvel article 11 est-il adopté?
M. Lalonde: Adopté.
M. Johnson: Si vous me le permettez, M. le Président, je
sais que le député de Marguerite-Bourgeoys a de nombreuses
questions sur ce qui s'appelait l'article 11 auparavant, mais, dans le fond,
les questions qu'il veut soulever, j'en suis sûr, concernent ce qui va
devenir l'article 12, à toutes fins utiles, quant à l'application
de l'article 8-9.00 et le reste.
M. Lalonde: Oui, quoique j'aimerais peut-être - je ne sais
pas s'il y a d'autres députés qui se posent des questions
là-dessus -que le ministre nous démontre la
nécessité de légiférer dans ce sens-là,
à savoir est-ce qu'en principe les stipulations négociées,
agréées à l'échelle locale ou régionale, ne
doivent pas être conformes aux stipulations déjà
agréées à l'échelle nationale? Alors, pourquoi le
dire dans la loi? Est-ce que cela ne va pas sans dire? Quel en est le
besoin?
M. Johnson: J'ajouterais: Mais c'est mieux en le disant.
M. Fontaine: Si vous voulez qu'elles soient conformes à
l'interprétation que vous en donnez.
M. Johnson: Écoutez, c'est la racine du problème
dans peut-être quinze ou vingt commissions scolaires.
M. Lalonde: D'accord. Alors, l'article 11...
M. Johnson: Et, à cet égard, l'article 11 affirme
clairement, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté, que, dans toutes
les commissions scolaires du Québec où n'est pas encore
intervenue ou une convention collective ou une entente de principe... Cela
réaffirme ce qui a toujours été dit depuis deux ans et ce
qui a toujours été l'objet du partage des matières au
niveau national et au niveau local, c'est-à-dire que les dispositions
d'une convention collective locale ne peuvent pas contrevenir aux dispositions
de l'entente nationale.
Et on comprendra que, sur le plan juridique, c'est un peu
spécial, dans la mesure où toute la notion de ce qu'est une
convention collective en vertu du Code du travail a été
soulevée par toute cette question des deux paliers depuis une quinzaine
d'années au Québec et que, si on arrive un peu à des
textes bâtards depuis quinze ans, c'est parce que c'est le Code du
travail qui, de façon générale, s'applique. Il s'applique
même à l'enseignement et même dans le cas des hôpitaux
où on sait qu'en pratique la négociation sur ce qui, dans bien
des cas, est considéré comme l'essentiel, par exemple, le
monétaire, ne se fait pas au niveau des associations
accréditées, ce qui a fait qu'on a une série de
dispositions dans nos lois du travail qui touchent le secteur public et
parapublic qui sont, en fait, des choses qui sont un peu en conformité
avec le Code du travail, qui s'y réfèrent et, de temps en temps,
ne s'y réfèrent pas.
Étant donné que, dans la loi 55 ou 59 sur le partage des
matières au niveau national et au niveau local dans tout le public et
parapublic, on référait à la notion des deux paliers et
étant donné que le Code du travail, par ailleurs, lui, ne
prévoit pas ça, ici il est peut-être très bon de le
dire et peut-être que la démonstration qu'on a eue au niveau de
ces deux endroits et d'autres commissions scolaires nous démontre qu'il
faut le faire; il faut peut-être le préciser carrément dans
un texte qui, dans le fond, est du droit administratif, qui n'est pas le Code
du travail comme tel.
M. Lalonde: Sur le nouvel article 11, en ce qui me concerne, je
n'ai aucune objection. C'est l'article 12 qui soulève des
problèmes.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, est-ce que ça veut
dire que vous voulez, dans le fond, que les ententes soient conformes à
l'interprétation que le gouvernement a donnée à l'entente
nationale?
M. Johnson: Bien que je n'accepterais pas tout à fait la
formulation qu'en donne le député de Nicolet-Yamaska parce que je
pense qu'il y a un petit peu plus qu'une affirmation dedans, disons que cette
question qu'il veut soulever, c'est vraiment dans l'article 12; ce n'est pas
dans l'article 11. Dans l'article 11, c'est le principe général
qui, malheureusement, est absent de nos droits, est absent du Code du travail
et qu'il faut peut-être mettre ici pour que ce soit clair. D'accord?
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière): Alors,
le nouvel article 11 adopté?
M. Lalonde: Adopté.
Le Président (M. Vaillancourt, Jonquière):
L'article 12?
M. Johnson: Alors, l'article 12, M. le Président, est
composé des deux alinéas qu'on retrouvait à l'article 11
et qui formaient le deuxième et le troisième paragraphes. J'en
ferai lecture juste pour que ce soit bien clair. L'article 12, M. le
Président, pour les fins du journal des Débats, se lira comme
suit: "Une commission scolaire ne peut sous réserve des dispositions
sujettes à l'arbitrage dans la clause 8-9.01E de cette entente s'obliqer
à engager un nombre d'enseignants basé sur les règles
prévues à l'article 8-9.00, mais elle doit respecter
l'application des règles de formation des groupes d'élèves
prévues à l'article 8-5.00 et celles de la charge d'enseignement
prévues à l'article 8-2.00."
Deuxième alinéa de l'article 12: "La commission scolaire
peut toutefois convenir de règles prévoyant des modalités
de rappel d'enseignants mis en disponibilité ou non rengagés pour
surplus de personnel et ce jusqu'à concurrence du nombre total
d'enseignants obtenu par l'application de l'article 8-9.00 de l'entente. Ces
règles doivent respecter les dispositions des paragraphes 1 et 4 de la
clause 5-3.18 de l'entente. Toutefois, par l'effet de ces règles, la
commission scolaire ne peut être tenue de procéder à de
nouveaux engagements."
M. Lalonde: M. le Président, le premier alinéa du
nouvel article 12, je pense, mérite qu'on se pose des questions. Cela
sulève le deuxième principe important, je pense, de ce projet de
loi. En effet, on retrouve dans cet article l'interprétation qui est
prévilégiée par le gouvernement dans la convention
collective. C'est en vertu de cette clause 8-9.00 que les syndicats locaux
exigent des commissions scolaires l'engagement d'un nombre d'enseignants qui
pourrait dépasser le nombre qui serait calculé simplement en
vertu des clauses 8-5.00 concernant la formation des groupes
d'élèves et 8-2.00 concernant la charge d'enseignement
prévue à cet article. (20 h 20)
J'avoue que cela me crée un certain problème. J'ai entendu
le député de Sainte-Marie, ce soir, exprimer aussi des
hésitations, des appréhensions. J'espère que le ministre
pourra nous répondre et éliminer nos appréhensions, mais
il m'apparaît, à première vue, que - c'est certainement au
coeur du conflit actuel - c'est une différence d'interprétation
de ces articles qui a amené le conflit que l'on connaît. Pourquoi
demander à l'Assemblée nationale de changer le contrat? On dira:
C'est pour préciser. Si la précision n'est pas une modification,
on n'a pas besoin d'adopter une loi pour le faire. J'avoue que je me demande
jusqu'à quel point c'est notre rôle ici de changer une convention
collective unilatéralement, alors qu'à l'article 8 ou 9, au
troisième alinéa - je vais le retrouver - on dit bien que ce sont
les parties à cette convention qui peuvent s'entendre, qui doivent
s'entendre, qui doivent se parler pour en déterminer l'application. Il
semble qu'on se soit parlé, mais qu'on ne se soit pas entendu. On dit:
Si on ne s'est pas entendu, on va aller voir l'Assemblée nationale et on
va légiférer. Le ministre pourrait-il répondre à
ces questions?
M. Johnson: M. le Président, je sais que mes deux
collègues auront des choses à dire sur cette question. Ils ont
déjà évoqué, je pense, au cours du débat de
deuxième lecture, certaines de ces choses-là. Je voudrais
simplement, d'entrée, sur le plan purement technique, encore une fois,
puisque c'est mon rôle ici à côté de mon
collègue de l'Éducation, sur le plan de la loi telle quelle et
sur le plan de l'interprétation juridique, rappeler au
député de Marguerite-Bourgeoys qu'il y a deux paliers. Il y a une
entente. Cette entente est normalement intégrée au texte d'une
autre entente qui est conclue localement et forme la convention collective.
Dans cette entente nationale, il y a l'engagement, à toutes fins
pratiques, d'un des partenaires majeurs dans notre société, et
cette entente, disons-nous, comme premier principe, doit être
respectée et ne peut être mise en question sur le plan local.
Vient la question de l'interprétation de l'entente nationale.
C'est ce que pose le député de Marguerite-Bourgeoys à qui
je rappellerai qu'en droit du travail - il le sait très bien - les
principes d'interprétation, bien qu'ils demeurent les mêmes que
sous n'importe quel autre régime de droit dans notre
société, sont des principes qui s'appliquent sur des ensembles
juridiques et contractuels qui sont fort différents du droit civil,
puisque la résultante de ce qui va devant, par exemple, un arbitre de
griefs ou un arbitre de différends, c'est la résultante d'une
négociation qui, par définition, implique des consentements qui,
dans certains cas, font l'objet ou bien d'un échange où les
parties, assez fréquemment - je ne parle pas ici de ce contexte, mais de
façon générale en droit du travail; j'en ai vu
quelques-unes depuis trois ans, comme le député de
Marguerite-Bourgeoys a eu l'occasion d'en voir aussi - d'une certaine
façon, à l'occasion, s'accommodent fort bien de certaines
ambiguïtés. C'est cela la différence fondamentale entre le
droit du travail qui est un droit collectif et le droit civil, par exemple,
chez nous, qui s'appuie sur des textes clairs et où il y a
échange de consentement et présomption que ce consentement s'est
fait dans un contexte de totale liberté, etc., sans
nécessairement les pressions ou les tensions qu'on retrouve dans
l'application du Code du travail, c'est-à-dire dans l'application d'une
notion de rapport de force. Je pense qu'il faut bien noter cela quand on parle
d'interprétation en droit du travail.
Deuxièmement, il y a, à l'égard du jeu de
référence dans l'entente nationale, non seulement l'entente
elle-même qui est extrêmement complexe, mais également la
volonté très claire qu'ont affirmée les parties sur le
plan national de régler les problèmes de fond, monétaires,
sur le plan national et, finalement, une zone qui, sur le plan juridique - et
le député de Marguerite-Bourgeoys va y consentir contrairement
à ce que disait le chef de l'Opposition au cours de son discours de
deuxième lecture, fait que, par définition, en droit, il peut y
avoir ultimement, sauf dans les cas du droit pénal, et encore, quelqu'un
qui invoque toujours qu'une chose est "questionnable", entre guillemets. Sans
cela, il n'y aurait pas d'avocats, ce qui serait peut-être un bienfait
pour la société à certains égards, mais on ne
vivrait pas dans la société dans laquelle on vit. Or, je peux
vous dire, pour avoir travaillé sur ces textes pendant de nombreux jours
avec les gens du comité de législation, que je suis
personnellement convaincu qu'effectivement le droit réside dans ces
dispositions.
À cet égard, on pourrait citer, par exemple, la
jurisprudence de la Cour d'appel, dans un cas qui interprétait les
dispositions de l'entente nationale de 1976, où on a
référé, entre autres, à ce qui est aujourd'hui,
dans l'entente nationale, 8-11.02. On y dit: "Les dispositions de l'article 8-9
ne constituent pas un mode d'organistion scolaire, ni des règles de
distribution d'enseignants." La grande différence entre ce texte et
celui de 1976, c'est qu'en 1976 on prévoyait au même texte les
mots: "mais une obligation d'engager". Les mots "mais une obligation d'engager"
étant supprimés, il me paraît évident qu'il y avait
une intention de les supprimer. À cet égard, c'est
l'interprétation sur le plan technique que je donnerais, mais il y a
beaucoup d'autres arguments qui militent en faveur de cela. Je n'irai pas plus
loin dans ce qui me paraît être une démonstration,
finalement, technique et juridique.
Quant aux autres questions de fond que pose le député de
Marguerite-Bourgeoys, je pense que le ministre des Finances veut intervenir, et
le ministre de l'Éducation également.
M. Lalonde: Avant que les autres ministres n'interviennent, parce
que, au fond, c'est la question qui a été expliquée par le
ministre du Travail qui m'inquiète, j'avoue que je n'ai pas
trouvé une clarté étincelante dans ses propos. Que ce soit
le droit du travail, que ce soit le droit civil, un contrat est un contrat. La
façon d'interpréter, la façon d'appliquer un contrat, si
ce n'est pas prévu, par exemple, que c'est l'arbitrage, on peut avoir
toutes sortes de dispositions à l'intérieur d'un contrat à
savoir comment on va faire en sorte qu'il soit interprété
à chaque cas qui est présenté. À ce moment, si ce
n'est pas prévu, il y a les cours de justice qui sont là pour
déterminer la signification et
l'application d'un contrat. C'est pour cela que je n'ai pas suivi
très facilement la démonstration du ministre du Travail en ce qui
concerne la différence entre le droit du travail et le droit civil.
M. Fontaine: Même en droit constitutionnel.
M. Lalonde: Je sais que c'est complexe. J'ai lu et relu ces
articles avec beaucoup d'intérêt. J'avoue qu'on pourrait passer la
nuit ici à discuter à savoir si on doit appliquer 8-9 en
conformité avec 8-2, plus 8-5, etc., et personne n'y comprendrait rien.
Mais il y a une chose que je lis et tout le monde peut lire cela facilement. Si
vous le permettez, c'est le troisième alinéa de B-9, à la
page 129: "Seules les parties à l'entente nationale ont juridiction pour
discuter et adopter les solutions qui s'imposent advenant toute
difficulté relative à l'application des dispositions du
présent article et ce, uniquement dans le cadre de la clause 9-4.02."
(20 h 30)
On dit que ce sont seulement les parties. Qui sont les parties? Ce n'est
pas seulement le gouvernement. Ce n'est surtout pas l'Assemblée
nationale. L'Assemblée nationale n'est pas partie à cette
convention. Si les parties s'entendent pour dire: On va appliquer l'article 8-9
d'une telle façon, je suis parfaitement d'accord. Je présume
même que le gouvernement ou que la Fédération des
commissions scolaires et la CEQ ont eu des échanges de vues
là-dessus et ont tenté de s'entendre. Mais, ne s'entendant pas,
ce n'est pas à l'Assemblée nationale de trancher. Est-ce qu'on
devrait, chaque fois que vous ne vous entendez pas avec la CEQ ou avec un autre
partenaire, venir à l'Assemblée nationale et dire: Nous, on
pensait vouloir dire telle chose, on va demander à l'Assemblée
nationale de dire que c'est cela que cela voulait dire? C'est l'impression que
j'ai actuellement.
M. Parizeau: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: ...je pense qu'effectivement le député
de Marguerite-Bourgeoys approche du fond des choses. Nous avons établi
une distinction dans nos lois entre les matières nationales,
c'est-à-dire d'importance nationale et les matières locales; nous
sommes liés par les dispositions de la loi 55. Cette loi 55 indique,
entre autres choses, que, sur le plan local, il y a des négociations
quant aux matières qui sont locales et, d'autre part, a abouti à
un décret du gouvernement, en fait à deux décrets du
gouvernement dont je vais citer celui du 11 juillet. C'est le 2018-79. Et ce
décret, qui indique ce qui sera négocié sur le plan local,
se termine par un article 3 que je tiendrais à lire et qui est le
suivant: "En cas de contradiction entre une stipulation négociée
et agréée à l'échelle locale ou régionale en
vertu de l'article 2 des présentes - l'article 2 des présentes
indique les matières locales - et une stipulation négociée
et agréée à l'échelle nationale en vertu de
l'article 1 des présentes -qui indique les matières nationales -
cette dernière a priorité."
Or, qu'est-ce que dit la convention nationale? Elle dit très
clairement que, sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas arbitrables, ne
peuvent pas donner lieu à un grief. C'est le paragraphe que vient de
citer le député de Marguerite-Bourgeoys. La convention nationale
dit: Sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas arbitrables et ne peuvent pas
donner lieu à un grief des parties. Et je souligne "des parties", parce
que je reviendrai tout à l'heure sur ce qu'on entend par les parties.
Tout à coup, ils veulent s'entendre au niveau local pour rendre les
ratios arbitrables dans tous les cas, parce que c'est cela qui s'est produit et
c'est cela le débat à l'heure actuelle, dans un certain nombre de
commissions scolaires, dans leurs négociations avec les syndicats. On
veut faire en sorte que, dans tous les cas, les ratios soient arbitrables et
donnent lieu à un grief. Il y a donc clairement contradiction. En vertu
même du décret dont je viens de parler, il y a clairement
contradiction entre les matières nationales et les matières
locales. Au niveau national, on dit: Sauf dans deux cas, les ratios ne sont pas
arbitrables. Et nous avons maintenant des parties qui disent: Au niveau local,
on va rendre cela arbitrable. Il y a contradiction absolue. Et que dit le
décret? Il dit: Dans ce cas-là, c'est la convention nationale qui
a préséance.
Pourquoi une situation comme celle-là est-elle apparue? Elle est
apparue, là encore, en violation, mais qu'on comprend, du
troisième paragraphe que citait le député de
Marguerite-Bourgeoys. Il disait: "Seules les parties à l'entente
nationale ont juridiction pour discuter et adopter les solutions qui s'imposent
advenant toute difficulté relative à l'application du
présent article." C'est là qu'on voyait la volonté de
toutes les parties de faire en sorte que les salaires et les effectifs, c'est
au niveau national, ce n'est jamais au niveau local.
On dit: "Seules les parties à l'entente nationale". Qui
étaient les parties à l'entente nationale? La CEQ et la
Fédération des commissions scolaires. C'étaient les
parties. Quand tout à coup des négociations sur les effectifs
sont arrivées au niveau local, ce n'est plus la CEQ qui négocie;
c'est le syndicat des Vieilles-Forges. Ce n'est plus la
Fédération des commissions scolaires qui négocie; c'est la
commission scolaire locale.
Mais cela est en contradiction totale de ce que à la fois nos
décrets et la convention nationale disent. Des parties sont apparues qui
n'ont rien à voir avec les parties nationales et qui se sont
arrogé le droit, en contradiction aussi bien de la convention nationale
que des décrets, de dire: Nous sommes des parties pour négocier
des effectifs. C'est cela qui est à l'origine. De fausses parties
veulent négocier de fausses conventions collectives applicables à
des choses où clairement elles n'ont pas le droit d'intervenir. Mais,
néanmoins, cela se fait. Ceci démontre, peut-être,
d'ailleurs, soit dit en passant, le désordre incroyable dans lequel ces
rapports de force se sont développés dans notre
société où des parties qui n'existent pas en vertu des
conventions collectives négocient des dispositions qu'elles n'ont pas le
droit de négocier, en contradiction avec des décrets et des
lois.
Qu'est-ce que nous faisons dans l'article 12? Nous ne disons pas: On va
interdire à la Fédération des commissions scolaires ou
à la CEQ
de s'entendre sur d'autres dispositions de la convention nationale. Nous
interdisons à une commission scolaire, à une commission scolaire
qui n'a jamais été visée par l'entente nationale -elle
n'était pas une partie en vertu de l'entente nationale, c'est
très clair - de prendre certains engagements à l'égard
d'un syndicat qui n'a jamais été partie à l'entente
nationale. En somme, nous faisons simplement en sorte que la loi respecte
à la fois nos ententes, nos décrets et nos conventions, et nous
voulons éviter que de fausses parties ne s'érigent en vraies
parties pour négocier des choses qui littéralement et
d'après tous nos textes n'ont jamais été des dispositions
qu'elles pouvaient négocier. C'est dans ce sens-là que nous
n'interprétons rien. Nous utilisons les possibilités de la loi
pour faire en sorte que des gens qui ne sont pas partie au débat
continuent de ne pas être partie au débat.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: Mme la Présidente, si vous me le permettez, je
remercie le ministre des Finances des précisions qu'il nous a
données. J'ai tenté de le suivre. Je comprends qu'il y a des
difficultés de complexité des parties enqagées
là-dedans. Il y a la CEQ qui signe l'entente nationale, mais ce sont les
syndicats locaux qui négocient les ententes locales. C'est la même
chose pour les commissions scolaires et la Fédération des
commissions scolaires. Le ministre pourrait-il me dire - je présume que
la Fédération des commissions scolaires est d'accord avec le
nouvel article 12; enfin, on me corrigera si je fais erreur - si la CEQ, qui
est une partie à l'entente nationale, est d'accord avec
l'interprétation que le gouvernement nous propose au nouvel article 12,
à savoir que l'article 8-9.00 ne doit pas être la norme, mais
qu'on doit respecter l'application des rèqles de formation des groupes
d'élèves prévues à l'article 8-5.00 et celles de la
charge d'enseignement prévues à l'article 8-2.00? La CEQ est-elle
d'accord avec l'article 12?
M. Parizeau: Mme la Présidente, il m'est très
difficile de me mettre à la place des autorités de la CEQ pour
savoir ce qu'elles pensent. Il y a eu un certain nombre de réunions. On
s'est rendu compte qu'elles n'étaient pas exactement de bonne humeur,
mais je les comprends. Ici, la raison pour laquelle elles ne sont pas de bonne
humeur, ce n'est peut-être pas dû essentiellement ou exclusivement
- comment dire? - à leurs rapports avec le gouvernement, mais
possiblement à des rapports internes que le ministre de l'Education
décrivait plus tôt aujourd'hui et sur lesquels je ne reviendrai
pas. Je ferai remarquer au député de Marguerite-Bourgeoys que,
dans la publicité même faite dans les journaux par la CEQ, jamais
elle n'a demandé au gouvernement de respecter la lettre de la convention
nationale, mais ce qu'elle appelait son esprit. Curieux! Moi, je n'en ai jamais
vu. (20 h 40)
M. Morin (Sauvé): Pour l'information du
député de Marguerite-Bourgeoys, je serais bien
étonné que la CEQ fût d'accord avec l'article 12 puisque,
pour une plus grande sûreté, nous tranchons un débat au
sujet duquel elle n'était pas d'accord avec l'interprétation
gouvernementale. Je serais bien étonné que la CEQ fût
d'accord.
M. Lalonde: J'interprète ces propos prudents de la
façon suivante: la CEQ n'est pas d'accord avec cela. D'accord, on peut
présumer cela ici.
M. Morin (Sauvé): Le député pourrait le lui
demander.
M. Lalonde: D'ailleurs, le ministre des Finances dit que la CEQ
est de mauvaise humeur. C'est peut-être pour d'autres raisons. Il ne peut
pas se mettre dans la tête de la CEQ pour savoir si elle est d'accord. Le
ministre de l'Education nous dit qu'il serait étonné si la CEQ
était d'accord. Il me semble qu'il y a eu des consultations.
M. Morin (Sauvé): II n'y a pas eu de consultations au
sujet de l'article 12 avec la CEQ.
M. Lalonde: Écoutez, vous changez le contrat, vous
demandez à l'Assemblée nationale de changer la convention
collective et vous n'avez même pas consulté vos partenaires.
M. Morin (Sauvé): II y a eu consultations avec la CEQ au
sujet de l'interprétation qu'il convenait de donner au calcul du nombre
d'enseignants, ce qu'on appelle les proportions
maître-élèves, de l'article 8-9.00. On s'est certainement
aussi entretenu de l'article 8-5 et de l'article 8-2, bien sûr, mais pour
constater que nous n'arrivions pas a des conclusions communes.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: Je reviens encore sur ce que je disais tout à
l'heure. La CEQ, comme partie nationale, non pas un syndicat des Vieilles
Forges, au sens de l'entente qu'elle ait le goût ou pas d'être
d'accord avec l'article 12, il est difficile de sonder les reins et les coeurs,
mais on n'écrit pas les projets de loi en se demandant si les parties
visées vont nécessairement être d'accord ou non. Une chose
est claire, cependant, ce que l'article 12 fait, ce n'est pas
interpréter la convention nationale. Encore une fois, si nous ne nous
entendons pas sur la portée de la convention nationale, les parties
nationales peuvent aller en arbitrage ou faire des griefs en vertu des pouvoirs
normaux. Les parties nationales gardent tous les recours communs, normaux et
évidents d'interpréter la convention nationale. Ce n'est pas de
cela que nous parlons; c'est du fait qu'un syndicat de la CEQ qui n'est pas une
partie nationale et une commission scolaire qui n'est pas une partie nationale
décident de discuter d'une matière qui, en vertu des
décrets et de la loi 55, n'est pas de leur compétence et pensent
échapper à tout contrôle, à la fois de nos lois et
de nos budgets, en disant: On va faire payer le contribuable local; lui, il ne
peut pas nous échapper. C'est le sens de l'article 12. Nous disons que
cette opération ne doit pas se faire. Ce n'est pas interpréter
l'entente nationale; c'est déterminer que des parties qui n'ont pas le
droit
en vertu non pas de la convention nationale, mais en vertu de la loi et
des décrets de transiger ce genre de matières, qu'elles ne les
transigent pas.
M. Lalonde: Mme la Présidente, je regrette, mais on aura
beau faire toutes les distinctions du monde, il reste que cette entente dite
nationale contient un troisième paragraphe ici où on dit: "Seules
les parties à l'entente nationale ont juridiction pour discuter et
adopter des solutions qui s'imposent advenant toute difficulté relative
à l'application de la disposition "justement de cet article. Et on me
dit que la CEQ, qui est une partie, n'est pas d'accord. Enfin, on
présume; on serait étonné que la CEQ soit d'accord.
Ce qui m'étonne, c'est qu'elle n'a pas été
consultée, alors qu'on demande aux législateurs -avec tout le
respect que j'ai pour le ministre des Finances - de privilégier une
interprétation. Je regrette, vous n'êtes peut-être pas
devant le bon forum; c'est peut-être devant la Cour d'appel que vous
devriez aller. Vous nous demandez, à nous les députés,
d'interpréter cela; on est dans une discussion juridique à savoir
si 12 est une interprétation.
Lorsqu'on dit qu'une commission scolaire ne peut s'obliger "à
engager un nombre d'enseignants basé sur les règles
prévues à l'article 8-9.00", cela veut dire que, dans l'article
8-9.00, il y a des règles qui prévoient l'engagement d'un nombre
d'enseignants, `qa moins que vous n'ayez mal rédigé votre projet
de loi!
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du Travail et
de la Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: II s'agit de l'établissement d'un nombre et
non pas de l'engagement d'un nombre.
M. Lalonde: C'est votre loi, je sais que c'est difficile à
rédiger, je ne veux pas compliquer les choses inutilement, mais vous
dites: "Une commission scolaire ne peut s'obliger à engager un nombre
d'enseignants basé sur les règles prévues à
l'article 8-9.00." Même sans avoir lu l'article 8-9.00, je pourrais
présumer que l'article 8-9.00 contient des règles concernant ou
qui peuvent influer sur le nombre d'enseignants engagés. Écoutez,
vous dites que ça contient des règles concernant l'engagement;
c'est ça que ça dit. À ce moment-là, retournez
à votre table de travail.
M. Johnson: Je m'excuse, sur le plan technique, c'est concernant
les règles et l'établissement d'un nombre pour des fins
très spécifiques, comme l'ont dit mes collègues. On va
calculer combien il y a d'enseignants pour ce qu'on appelle la période
de rappel, je crois, de l'automne, pour les fins de la sécurité
d'emploi.
M. Lalonde: D'accord. Alors, est-ce que... M. Johnson: Ce
n'est pas l'engagement...
M. Lalonde: ... l'article 8-9.00 - je l'ai devant moi, je
pourrais vous le lire, mais ce serait long - contient des règles
concernant le nombre d'enseignants?
M. Parizeau: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Finances.
M. Lalonde: Vous allez me permettre de répéter
peut-être autrement ma question. Est-ce que l'article 8-9.00 contient des
règles dont l'application peut nous amener à un nombre
d'enseignants? En chiffre, 100, 200, 1000 ou 95.
M. Parizeau: Oui, à une seule condition, c'est que les
parties à l'entente nationale, c'est-à-dire CEQ,
fédération et gouvernement, dans le comité prévu
à l'annexe 17, puissent amener un résultat comme celui-là.
Il est très clair qu'il faut que ce soient les parties nationales,
à partir, par exemple, du comité prévu à l'annexe
17 et sur le plan national.
Il n'y a aucun moyen pour le député de
Marguerite-Bourgeoys de faire passer une commission scolaire comme étant
une partie à l'entente nationale dans l'article 8-9.00. Une commission
scolaire n'est pas une partie à l'entente nationale.
M. Lalonde: Ce n'est pas ce que je prétends faire, Dieu
m'en garde, mais il reste...
M. Parizeau: Pourquoi s'occupe-t-elle de ça?
M. Lalonde: ... que nous... nous sommes d'humbles
législateurs; nous ne connaissons pas par coeur tous les grands livres
que vous connaissez et que vous avez négociés et vous nous dites
qu'il faudrait, comme législateurs, dire qu'une commission scolaire ne
peut pas s'obliger à engager un nombre d'enseignants basé sur les
règles prévues à l'article 8-9.00, mais qu'elle doit
respecter l'application des règles de formation. Aucun problème
pour le respect de l'application des règles de l'article 8-2.00 et de
l'article 8-5.00. Mais si vous devez empêcher une commission scolaire
d'atteindre le nombre qu'elle pourrait atteindre en appliquant les
règles de l'article 8-9.00, c'est peut-être parce qu'elle pense
avoir le droit d'atteindre ce nombre-là. Et cela n'est pas inventer quoi
que ce soit puisqu'il y a justement un conflit là-dessus.
M. Parizeau: Mme la Présidente, quand l'entente nationale
entre les parties nationales indique spécifiquement que, sauf à
deux fins, le ratio ne peut pas donner lieu à des griefs et que les
parties qui ne sont pas prévues à l'entente nationale s'arrogent
le droit, sur les mêmes matières, de rendre ça arbitrable,
c'est contraire aux lois et aux règlements. Nous voyons
apparaître, encore une fois, des parties qui n'étaient à
l'origine dans aucune des ententes. Dans ces conditions, puisque ces parties,
qui n'ont pas le droit, en vertu des lois et des décrets existants, de
procéder à quelque entente que ce soit en vertu de l'entente
nationale, cherchent en dehors, par contrats privés, si vous voulez,
entre elles, à prévoir à la fois davantage d'effectifs et
davantage de taxes, ce qu'aucun texte ne leur permettrait de faire, il ne faut
pas s'étonner que, par une loi, le gouvernement ferme cela. (20 h
50)
M. Lalonde: Mme la Présidente, je ne veux pas
perpétuer le débat, on est limité à trois heures.
Je regrette que les brillants exposés - je suis généreux -
des ministres n'aient pas clarifié
la situation. Si le gouvernement sent le besoin de demander aux
législateurs de faire une loi concernant l'application de trois articles
d'une convention collective signée formellement par des organismes dont
l'accord n'a pas été démontré ici, y compris la CEQ
en particulier, à ce moment, je ne marche pas. C'est une
responsabilité très grande que le gouvernement prend
actuellement. Peut-être qu'il pourra démontrer, après avoir
plaidé pendant des semaines devant une cour de justice, qu'il ne s'agit
pas d'une interprétation, mais la présomption est très
grande. Là-dessus, il m'apparaît qu'un contrat est sacré.
Si c'était si évident qu'il fallait avoir une loi dans ce sens,
il aurait fallu que les parties au contrat soient d'accord. On n'a pas
démontré l'accord des autres parties.
Mme la Présidente, si le gouvernement veut adopter l'article 12,
ce sera sur division.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté sur
division.
M. Johnson: Mme la Présidente, au moment de l'adoption de
l'article 12, je voudrais simplement rappeler, parce que le
député de Marguerite-Bourgeoys avait fait une remarque à
ce sujet au début, que c'est cela, la notion paradoxale d'un droit qui
est collectif. C'est la volonté de l'expression d'un droit collectif,
dans une partie patronale ou syndicale qui est un regroupement, qui est
génératrice d'ambiguïté. À certains
égards, je pense que le ministre des Finances a bien
démontré que, dans certains cas, c'étaient les parties
dites locales, mais qui ne sont pas des parties à l'entente nationale au
sens des regroupements, qui ont décidé des grandes choses sur le
plan financier, qui ont décidé de remettre en cause - des
commissions scolaires en signant et des syndicats en demandant que cela soit
fait dans certains cas - ce qui a été décidé par
les parties reconnues en vertu de la loi 55. C'est cela que le gouvernement
vient simplement faire. Il n'interprète pas un contenu, il faut bien le
comprendre; il affirme clairement, il réaffirme simplement que la loi 55
doit s'appliquer.
M. Lalonde: Mme la Présidente, on ne peut pas laisser
passer cela. Que ce soient des "droits collectifs" ou des droits individuels,
lorsqu'il y a un contrat, il y a un échange de consentements. Que cet
échange de consentements ait été accepté par des
organismes qui représentent des collectivités, comme la CEQ,
comme le gouvernement, comme la Fédération des commissions
scolaires, c'est la même chose. Le contrat, c'est la loi des parties.
Cela ne se change que par le consentement des parties. Cela ne
s'interprète que par la cour de justice. Je regrette.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre des
Finances.
M. Parizeau: Comme dernière intervention là-dessus,
je dirais simplement ceci. Je suis parfaitement d'accord avec le
député de Marguerite-Bourgeoys. La loi des parties ne
s'interprète que par des tiers entre les parties. Ce que nous faisons
par cette loi, c'est empêcher ceux qui ne sont pas parties et qui
voudraient y être de modifier les contenus. La loi 113 s'applique
à des groupes qui, en vertu de cette entente nationale, ne sont pas des
parties, n'ont jamais été des parties. Ce que nous disons par cet
article de loi, c'est que ceux qui ne sont pas parties à l'entente n'ont
pas le droit de la modifier. Cela devrait aller de soi, mais cela va mieux en
le disant.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 est-il
adopté?
M. Lalonde: Sur division.
La Présidente (Mme Cuerrier): Tel qu'amendé alors.
Adopté sur division tel qu'amendé. Sur l'article 13, M. le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: A l'article 13, le papillon a été
distribué, il s'agit, d'une part, de rénuméroter l'article
12 qui figure au projet de loi, qui devient l'article 13 et qui est
remplacé par le suivant.
M. Lalonde: C'est écrit 12.
M. Johnson: 13. L'article 12 devient l'article 13 et est
remplacé par le suivant:
M. Lalonde: D'accord.
M. Johnson: Et l'article 13 se lit comme suit: "L'article 12
s'applique à une commission scolaire mentionnée à
l'article 1."
Deuxième alinéa: "II s'applique également à
une commission scolaire locale ou régionale qui n'est pas
mentionnée à l'article 1 et qui conclura, après le 23
octobre, une convention collective actuellement en négociation avec une
association de salariés non visée par l'article 1 qui est
accréditée à l'égard de cette commission scolaire
pour représenter des enseignants et qui adhère, appartient ou est
affiliée à la Centrale de l'enseignement du Québec le 23
octobre.
L'alinéa suivant: "Toutefois, il ne s'applique pas à une
commission scolaire visée dans le deuxième alinéa si la
convention collective, conclue après le 23 octobre, est la ratification
d'une entente écrite portant sur l'ensemble des conditions de travail
intervenue avant le 24 octobre. Dans le cas où l'article 12 s'applique
à une commission scolaire, une sentence arbitrale rendue selon la
section IV de la présente loi ou selon la section I du chapitre 4 du
Code du travail ne peut contenir une conclusion contraire à l'article
11."
Essentiellement, il s'agit d'une reformulation, comme l'a vu le
député de Marguerite-Bourgeoys, de ce qui était l'article
12. Cela a l'air bien long, mais, dans le fond, je pense que le lanqage
utilisé dans le nouveau 13 est beaucoup plus clair que l'article
précédent. C'est le même contenu, essentiellement - on peut
peut-être le résumer - sauf pour la question de la sentence. Si
jamais des parties localement décident de référer leur
conflit, leur différend sur le plan local - je ne parle pas des conflits
dans le cas de Trois-Rivières et de Sorel-Tracy, mais d'autres -
à l'arbitrage volontairement, en vertu du Code du travail, on dit que
les dispositions devront s'appliquer quant au respect des ententes nationales,
etc., et du partage des matières.
Le premier alinéa affirme que l'article 12, dont nous avons
parlé si longuement, s'applique à une commission scolaire
visée à l'article 1 du projet de loi, c'est-à-dire
région Sorel-Tracy et région Trois-Rivières.
Deuxièmement, il s'applique également à toute autre
commission scolaire régionale ou locale qui n'est pas mentionnée
à l'article 1, qui est actuellement en négociation et avec qui
une association de salariés qui n'est pas visée à
l'article 1 conclut des négociations.
Finalement, les dispositions en question ne s'appliquent pas dans tous
les cas où est intervenue - disons en langage laïque - une entente
de principe qui sera ratifiée par les voies normales du Code du travail
ou encore une convention collective dûment conclue, c'est-à-dire
une entente de principe déjà ratifiée par voie du Code du
travail, le tout ayant été fait avant le 24 octobre.
M. Lalonde: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Marguerite-Bourgeoys.
M. Lalonde: ...on consacre ici le régime, au nom des
droits acquis, de deux poids, deux mesures. Étant donné qu'on
vient de nous remettre ce papillon et qu'on a la guillotine, quand même,
suspendue au-dessus de nos têtes pour terminer ça dans les trois
heures, je ne pourrai pas me rendre responsable du libellé de cet
article. J'aimerais quand même attirer l'attention sur certaines choses.
J'imagine que ce serait bon de mettre 1980, au 23 octobre 1980.
M. Johnson: Pardon?
M. Lalonde: 1980, ce serait peut-être bon de l'ajouter.
M. Johnson: Oui, 1980.
M. Lalonde: Parce qu'il ne faudrait tout de même pas que ce
soit perpétuel.
M. Johnson: Pardon?
M. Lalonde: On va arrêter ça, comme votre
gouvernement, un jour?
M. Lévesque (Bonaventure): C'est un article qui
accroche.
M. Lalonde: Oui.
La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, il s'agirait d'un
amendement qui serait adopté. Ajouter "1980" après 23 octobre.
Adopté?
M. Johnson: Trois fois, Mme la Présidente.
M. Lalonde: Pour l'amendement, il arrive à deux
endroits.
M. Johnson: Partout où figure l'expression "23 octobre" ou
"24 octobre", ajouter "1980", à côté.
M. Lalonde: Si vous avez le texte que j'ai eu, Mme la
Présidente, il faudrait faire attention, il y a quelques fautes
d'orthographe. "Il s'appliquent", au pluriel.
La Présidente (Mme Cuerrier): Oui, nous tenterons de
corriger cela, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, comme nous
tenterons de faire la concordance. C'est adopté?
M. Lalonde: Sur division.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Lévesque (Bonaventure): Autrefois, Mme la
Présidente, il n'y avait pas de fautes d'orthographe.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 sera
renuméroté 13. (21 heures)
M. Lalonde: II faudrait faire faire un peu de
récupération au ministre de l'Éducation qui a écrit
ça, hein?
M. Levesque (Bonaventure): Ce n'est pas sa faute!
M. Johnson: Je dois dire, à la décharge du ministre
de l'Éducation...
M. Lalonde: C'est quand même lui qui est parrain.
M. Johnson: ... que, sur cette phrase, les papillons ont
été faits, comme je le disais au député tout
à l'heure, par les fonctionnaires du comité de
législation. Nous avons procédé à la photocopie et
le blanc, malheureusement, n'a pas effacé les lettres "nt" qui donnent
un pluriel. Ce n'est pas une faute d'orthographe, c'est une erreur.
M. Lalonde: Je vais me porter à la défense des
légistes qui ne sont pas ici pour se défendre. Le ministre
parrain porte toutes les responsabilités, même des fautes
d'orthographe. Mais quand je parle du ministre de l'Éducation, je ne
sais plus auquel je m'adresse.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 12 sera donc
renuméroté 13. Est-ce adopté?
M. Lalonde: Sur division. Je ne veux pas toucher à
ça.
La Présidente (Mme Cuerrier): C'était seulement la
numérotation, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.
M. Johnson: L'article 13 devient 14, Mme la Présidente,
comme tous les autres.
La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 13 est
adopté?
M. Lalonde: Adopté sur division.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté sur division.
Article 13 devenu 14. M. le ministre.
M. Johnson: Mme la Présidente, les concordances; l'article
13 devient l'article 14 et, à l'intérieur de l'article 13, au
dernier alinéa, à
l'avant-dernière ligne, il y a une référence
à un article qui, lui-même, a été changé dans
la numérotation. Donc, il faut lire "alinéa de l'article 15", au
lieu de "alinéa de l'article 14".
M. Lalonde: J'aurais seulement deux questions.
M. Johnson: Voulez-vous qu'on fasse l'ensemble du chapitre des
sanctions là-dessus?
M. Lalonde: Non, on va les passer une par une.
M. Johnson: D'accord.
M. Lalonde: Au nouvel article 14, les sanctions de $5000 à
$50,000 se comparent de quelle façon avec les nombreuses lois
spéciales que le gouvernement actuel a imposées à la
population?
M. Johnson: Sans prendre à mon compte le préambule
du député de Marguerite-Bourgeoys, les précédents
ont été respectés à cet égard et les
sanctions à l'égard des regroupements sont celles qui sont
prévues dans d'autres lois de ce type.
M. Lalonde: II y a une particularité et peut-être le
ministre pourrait-il l'expliquer. La façon dont on décrit la
période d'application; on la commence à l'entrée en
vigueur de la présente loi et on la termine à la date
d'expiration de la convention collective qui est le 31 décembre 1982.
Une fois qu'il y a une convention collective - supposons qu'il y ait un autre
problème dans un an - vous vous trouvez à enlever le droit de
grève pour deux ans.
M. Johnson: Je suis sûr que le député de
Marguerite-Bourgeoys a fait un lapsus, puisqu'il sait très bien que la
conclusion d'une convention collective ou d'une sentence arbitrale
équivalant à une convention collective, par définition,
amène la suppression, pour la durée de la convention collective,
du droit de grève. Le droit de grève existe chez nous, mais il
n'existe qu'au moment de l'expiration d'une convention collective. Donc,
à partir du moment où on en conclut une, on ne supprime pas le
droit de grève; c'est le Code du travail qui s'applique, tout
simplement.
La Présidente (Mme Cuerrier): A l'article 14, on n'a pas
fait adopter l'amendement. A l'avant-dernière ligne, il fallait
remplacer "14" par "15". Est-ce que c'est adopté?
M. Lalonde: Pour ça, oui.
La Présidente (Mme Cuerrier); Le nouvel article 14 est-il
adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Est-ce que le régime normal du Code du travail
prévoit des sanctions de $5000 à $50,000 pour chaque jour ou
partie de jour où une association de salariés contreviendrait
à son obligation de se présenter au travail?
M. Johnson: Je n'ai pas saisi le début de la question; je
n'ai pas entendu, je m'excuse.
M. Lalonde: C'est que votre article 14 crée une sanction
pour toute contravention à l'article 2; l'article 2 demande de se
présenter au travail à compter de une minute le 27 octobre
1980.
M. Johnson: C'est ça.
M. Lalonde: C'est jusqu'à la fin de la convention
collective.
M. Johnson: Oui.
M. Lalonde: S'il y a une contravention, les amendes sont de $5000
à $50,000.
M. Johnson: Oui.
M. Lalonde: Dans les régimes normaux, est-ce que ce sont
les mêmes amendes?
M. Johnson: Non, effectivement il y aurait un effet
aggravant...
M. Lalonde: C'est là que je voulais dire qu'il y a un
deuxième...
M. Johnson: II aurait un effet aggravant. Oui, mais il ne
supprime pas le droit de grève, qu'on se comprenne bien. A partir du
moment où il y a une sentence arbitrale ou une convention collective, on
ne vit pas dans un régime de droit de grève permanent au
Québec. On n'a jamais vécu là-dedans, non plus. On vit
dans un régime où c'est encadré. Ceci dit, cependant, une
entreprise qui déciderait de procéder par lock-out ou un syndicat
par grève pendant la durée d'une convention collective,
effectivement, en vertu du Code du travail se rend passible de sanctions par le
Tribunal du travail. Dans le fond, ce que suggère le
député de Marguerite-Bourgeoys, c'est qu'on devrait faire en
sorte que les sanctions à l'égard des dispositions de cette loi
cessent à partir du jour où est conclue la convention collective
et où la sentence arbitrale est rendue, et que...
M. Lalonde: II me semble...
M. Johnson: ...après cela, ce soient les dispositions du
Code du travail qui s'appliquent. En soi, je n'ai pas d'objection à
cela.
M. Lalonde: C'est important parce que c'est un caractère
exceptionnel. Cette loi crée une situation exceptionnelle. Les
enseignants et les commissions scolaires, pour prendre l'article 14 -on
arrivera au même problème aux articles suivants - se trouvent
assujettis à un régime beaucoup plus sévère - c'est
pour cela que je posais la question au ministre, à savoir quel serait le
régime normal - jusqu'à la fin de la convention collective.
M. Johnson: D'accord. Le régime normal prévoirait,
effectivement, dans le cas d'une grève dite illégale au sens du
Code du travail, des sanctions qu'on retrouve aux articles 120 et quelques;
avec la nouvelle numérotation, c'est 140 ou quelque chose comme
cela.
M. Lalonde: C'est parce que je ne me souviens pas des sanctions
que je vous pose la question.
M. Johnson: Ah bien, les sanctions sont de $100 à $1,000
au lieu de $5,000 à $50,000. Ecoutez, il s'agirait simplement de changer
les mots "date d'expiration" par "date d'entrée en vigueur" et on vient
de régler le problème.
M. Lalonde: Ah bon!
M. Johnson: Mme la Présidente, à la septième
ligne du premier alinéa de l'article 14, changer le mot "expiration" par
les mots "entrée en vigueur".
La Présidente (Mme Cuerrier): L'amendement est-il
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Le nouvel
article 14 est-il adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Adopté.
M. Johnson: A l'article 14, Mme la Présidente, il y a deux
choses. D'abord, il devient 15 et, deuxièmement, la
référence à l'article 13 qu'on retrouve à deux
reprises, il faut lire 14 plutôt que 13.
M. Lalonde: A trois reprises.
M. Johnson: Je m'excuse.
M. Lalonde: A quatre reprises.
M. Johnson: Au premier alinéa à deux reprises.
M. Lalonde: D'accord.
M. Johnson: Dans le deuxième alinéa, une fois.
M. Lalonde: Deux fois.
M. Johnson: Deux fois. Donc, à quatre reprises, remplacer
le chiffre 13 par le chiffre 14.
M. Lalonde: Simplement une question de prudence. On se
réfère au premier alinéa de l'article 13 qui devient 14.
Est-ce que c'est toujours valide?
M. Johnson: Oui, cela n'a pas changé.
M. Lalonde: Est-ce qu'on pourrait avoir le même amendement?
Ah non. La période visée par le premier alinéa. Alors, la
référence, c'est correct.
La Présidente (Mme Cuerrier): Cet amendement est-il
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. Le nouvel
article 15 est-il adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: L'article 15, Mme la Présidente, devient
l'article 16, tout d'abord. En second lieu, il faudrait changer la
référence à l'article 13 par une référence
à l'article 14, à la troisième ligne.
La Présidente (Mme Cuerrier): Cet amendement est-il
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
M. Johnson: Est-ce que l'article est adopté, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 16 est-il
adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du
Travail.
M. Johnson: L'article 16, Mme la Présidente, devient
l'article 17 et la référence à l'article 13, qu'on
retrouve à la quatrième ligne, devient l'article 14.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: L'article 17 devient l'article 18, Mme la
Présidente.
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Un instant. Le nouvel
article 17 est-il adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. M. le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: L'article 17, Mme la Présidente, devient
l'article 18.
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: Est-ce que l'article 18 est adopté, Mme la
Présidente?
La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 18 est-il
adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: L'article 18, Mme la Présidente, devient
l'article 19.
La Présidente (Mme Cuerrier): Le nouvel article 19
sera-t-il adopté tel qu'amendé?
M. Lalonde: Un instant! Pour la numérotation, d'accord,
mais on a des questions à poser sur l'article 19.
La Présidente (Mme Cuerrier): Alors, adopté pour la
numérotation.
M. Bisaillon: Mme la Présidente...
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Pendant mon intervention en deuxième
lecture, Mme la Présidente, j'avais posé une question au ministre
concernant les articles 18, 19 et 20, mais je peux poser immédiatement
ma question à l'article 18. (21 h 10)
Comment se fait-il que, contrairement aux autres pénalités
qui sont prévues dans la loi et pour lesquelles on utilise la Loi des
poursuites sommaires pour juger de l'infraction, il n'y a pas de
mécanisme, à l'article 18 pour évaluer le jugement
porté par le gouvernement?
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre du Travail et
de la Main-d'Oeuvre.
M. Johnson: Pour deux raisons. La première, c'est qu'il
s'agit de sanctions d'une nature collective et que ces sanctions de nature
collective amènent à considérer des ensembles. Si on
référait cela, par exemple, à la cour des poursuites
sommaires, des problèmes de règles de preuve pourraient amender
des situations un peu aberrantes. Il s'agit de donner la responsabilité
et ce que cela représente pour le gouvernement, le cas
échéant, de trancher sur cette question, c'est-à-dire de
l'évaluer et ensuite de procéder à la sanction qui
consiste, comme on le sait, sur le plan du contenu, à dire que, pour
chaque journée d'infraction, il peut y avoir une suspension des
cotisations syndicales, non pas une confiscation, mais une aboliton de la
perception à la source, de l'équivalent de deux mois de
cotisation.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le leader de l'Union
Nationale, je vous entends mal.
M. Fontaine: Si vous me donnez la parole, vous allez m'entendre.
Ils n'ont pas ouvert le micro.
La Présidente (Mme Cuerrier): Vous avez la parole, M. le
député.
M. Fontaine: II me semble un peu aberrant, comme le disait le
député de Sainte-Marie en deuxième lecture, que le
gouvernement soit à la fois juge et partie, qu'il décide
lui-même si les enseignants en question ne respectent les 70%.
M. Johnson: ...il est juge.
M. Fontaine: II est en même temps partie à
l'entente.
M. Johnson: Mais non. Le gouvernement n'est pas partie à
la loi. Il est, à la rigueur, partie à l'entente 9.02e, etc., et
tout ce qu'on veut. Le gouvernement n'est pas partie à la loi. Le
gouvernement ne peut pas faire une infraction à cette loi. Les personnes
qui peuvent faire une infraction à la loi, ce sont les commissions
scolaires, si elles faisaient un lock-out, et les syndicats, s'ils ne
respectaient pas les dispositions de la loi.
M. Fontaine: D'accord, mais moi, il me semble que normalement,
quand le gouvernement a quelque chose à décider, on peut
contester cette décision devant les tribunaux. Là, je ne vois
aucun mécanisme - et je ne pense pas qu'il y en ait de prévu dans
le Code du travail - à l'effet de permettre au syndicat de contester la
décision du gouvernement.
M. Johnson: Effectivement, mais c'est de la nature même de
ce qui est, dans notre législation, une sanction collective à
l'égard du syndicat en tant qu'institution et non pas de ses officiers,
et non pas des individus.
M. Fontaine: Mais il existe une règle, en droit, la
règle audi alterem partem, qu'avant de condamner quelqu'un,
habituellement, on entend ses...
M. Johnson: Les recours devant les tribunaux de droit commun
existent toujours, si le gouvernement faisait une erreur grossière et
manifeste.
M. Lalonde: Cela pourrait être contesté en cour.
M. Johnson: En vertu même de la loi.
M. Lalonde: Chaque fois. Je ne suis pas d'accord avec...
M. Johnson: Eventuellement, si jamais le gouvernement ne
respectait pas les dispositions qu'il a lui-même adoptées, il est
bien évident qu'il est susceptible d'être sanctionné par
les tribunaux.
M. Fontaine: II faudrait qu'il y ait un excès de
juridiction. A ce moment-là, on va devant la Cour supérieure avec
un bref.
M. Johnson: Justement.
M. Lalonde: Même pas un excès de juridiction.
M. Morin (Sauvé): Mme la Présidente, puis-je
ajouter un mot?
Le député de Sainte-Marie avait fait une suggestion
à laquelle j'ai réfléchi avec d'autres. Il s'était
demandé, si ma mémoire est bonne, s'il n'y aurait pas lieu, par
exemple, de faire appel à un tribunal comme le Tribunal du travail. Cela
m'a paru une suggestion qui valait au moins la peine d'être
explorée.
Mais, en y pensant bien, cela serait littéralement s'enfoncer
dans des procédures qui pourraient durer des mois, sinon davantage,
alors qu'il s'agit vraiment d'un type de sanction qui est de nature
administrative et collective. On ne s'en prend pas aux individus. Je pense que
le député de Sainte-Marie a compris cela d'ailleurs. On ne s'en
prend pas aux personnes parce que là, si c'était le cas, je pense
qu'il faudrait s'en référer aux tribunaux de droit commun.
M. Bisaillon: Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le député
de Sainte-Marie.
M. Bisaillon: Le seul fait que j'ai voulu soulever, c'est que,
dans la procédure, le gouvernement portait un jugement. Or, personne
n'était appelé à se prononcer sur l'exactitude du jugement
porté par le gouvernement. Je suggérais de référer
cela au Tribunal du travail. Je n'y tiens pas mordicus. A partir du moment
où on me dit qu'effectivement l'application des articles 18, 19 et 20
tels qu'ils sont est contestable devant les tribunaux, cela en est un recours,
mais il faudrait qu'on me dise qu'effectivement il y a un recours devant les
tribunaux, si on juge que les articles ont été mal
utilisés.
M. Johnson: S'il y avait une erreur, en effet, effectivement une
partie intéressée ou tout intéressé - et, en
l'occurrence ici, le seul intéressé serait le syndicat, la
structure syndicale -pourrait contester cette décision d'avoir mis fin
à la perception à la source, donner ordre à la commission
scolaire de cesser la perception des cotisations syndicales à la
source.
M. Lalonde: On n'est pas ici pour donner des avis juridiques, il
y en a d'autres qui le font mieux, mais il n'y a aucun doute qu'un juge ne
pourrait pas dire que le gouvernement a pris une mauvaise décision,
qu'il n'aurait pas dû prendre cette décision-là. Tout ce
qui pourrait être soumis au juge, c'est que les 70% dans les faits
étaient inexacts, quelque chose comme cela. Autrement dit, sur
l'à-propos de la décision du gouvernement, un juge ne peut pas se
prononcer. Enfin, je serais prêt à l'adopter.
M. Johnson: Vous savez, c'est un peu le même type de
responsabilité qu'encourt le gouvernement tous les jours quand le
Procureur général dépose des plaintes. A un moment
donné, il faut que ce soit inscrit quelque part au processus.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article...
M. Johnson: Ce l'est par le Procureur général s'il
dépose une plainte contre un individu qui a commis une infraction
à une loi.
M. Lalonde: Mais il y a quand même un petit
problème, le problème de la majorité qui est un
problème de démocratie. Un syndicat, à 60%, décide
de rentrer. Les 40% qui votent contre ne rentrent pas. On coupe les vivres au
syndicat.
M. Johnson: Je n'ai pas à spéculer sur ce qui
arrivera.
M. Lalonde: Vos 70% créent un problème.
M. Johnson: C'est pourtant ce que l'ancien Solliciteur
général avait utilisé dans une loi de 1976, et je pense
que c'était le député de Marguerite-Bourgeoys...
M. Levesque (Bonaventure): Qui n'avait pas reçu votre
approbation enthousiaste.
M. Lalonde: Quelle loi?
M. Johnson: C'était le chapitre 29 du 24 juillet 1976,
à l'article 16. "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, s'il est
d'avis que moins que 70% des personnes à l'égard desquelles une
association de salariés est accréditée..."
M. Lalonde: Non, je veux dire que vous avez mis en cause l'ancien
Solliciteur général. Je n'étais pas parrain de cette
loi-là.
M. Johnson: Pardon?
M. Lalonde: Je n'étais pas parrain de cette
loi-là.
M. Johnson: Non, mais vous étiez au Conseil des
ministres.
M. Lalonde: Ah oui!
M. Johnson: Vous étiez solidaire?
M. Lalonde: A notre corps défendant, naturellement.
M. Johnson: Ah bon! Je voulais seulement être
sûr.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 18
renuméroté article 19 est-il adopté?
Une voix: Oui.
M. Lalonde: Pas tellement.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 19
renuméroté article 20. M. le ministre.
M. Johnson: L'article 20, donc...
La Présidente (Mme Cuerrier): Non. Alors, automatiquement,
nous renumérotons l'article 19...
M. Johnson: Oui.
La Présidente (Mme Cuerrier): ...qui devient...
M. Lalonde: L'article 20.
La Présidente (Mme Cuerrier): ...l'article 20.
M. Johnson: Oui. Adopté?
La Présidente (Mme Cuerrier): Est-il adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: L'article 20, Mme la Présidente, qui devient
l'article 21.
La Présidente (Mme Cuerrier): Oui.
M. Johnson: II y a deux références. A la
deuxième ligne de l'article, les mots "prévue à l'article
18" deviennent "prévue à l'article 19" et, au bout de cette
même ligne, les mots "prévue à l'article 19" deviennent les
mots "prévue à l'article 20". Le nouvel article 21 est-il
adopté,
Mme la Présidente? Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Les deux amendements sont
adoptés?
M. Lalonde: Oui, l'article est adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. L'article 20
renuméroté article 21 est adopté tel qu'amendé?
Adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: L'article 21, Mme la Présidente, devient
l'article 22. A l'intérieur de l'article 22, Mme la Présidente,
à la troisième ligne, la référence à
l'article 19 devient 20 et, à la quatrième ligne, la
référence à l'article 16 devient 17. Les amendements
sont-ils adoptés, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Cuerrier): Les amendements sont
adoptés?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté.
M. Johnson: Merci.
Le nouvel article 22 est-il adopté, Mme la Présidente?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Tel qu'amendé?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté, tel
qu'amendé.
M. Johnson: Section VII, Mme la Présidente. L'article 22
devient l'article 23.
M. Fontaine: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): L'article 22
renuméroté article 23 est-il adopté?
M. Lalonde: Adopté.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. L'article 23
est renuméroté article 24, sans doute.
M. Johnson: C'est cela, Mme la Présidente.
La Présidente (Mme Cuerrier): Sera-t-il adopté?
M. Lalonde: Adopté.
M. Fontaine: Adopté.
Une voix: On ne peut rien vous cacher.
La Présidente (Mme Cuerrier): Adopté. (21 h 20)
M. Johnson: Mme la Présidente, je sug- gérerai
maintenant... Doit-on considérer que les travaux du comité
plénier sont terminés, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme Cuerrier): Oui.
M. Lalonde: Oui, le ministre de l'Éducation peut
disposer.
M. Johnson: Je vous demanderai donc, Mme la Présidente, de
céder votre siège au président afin que nous retournions
en Assemblée.
La Présidente (Mme Cuerrier): M. le ministre, j'ai
l'intention de faire rapport immédiatement.
Des voix: À l'ordre, s'il vous plaît! À
l'ordre!
Mme Cuerrier (Présidente de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de vous
faire rapport que la commission plénière a étudié
le projet de loi no 113, Loi sur certains différends entre des
enseignants et des commissions scolaires et qu'elle l'a adopté avec des
amendements.
Le Vice-Président: Est-ce que ce rapport sera
adopté?
Des voix: Adopté.
Troisième lecture
Le Vice-Président: La troisième lecture du projet
de loi no 113...
Une voix: Adopté.
Le Vice-Président: Adopté? Adopté.
Le journal des Débats va inscrire le même vote qu'en
deuxième lecture. D'accord. M. le leader adjoint du gouvernement.
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Alors, l'Assemblée suspend...
M. Levesque (Bonaventure): Pour combien de temps, M. le
Président? Parce que ce serait important pour nous de le savoir.
Le Président: L'Assemblée suspend ses travaux,
selon l'expression consacrée, M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle, jusqu'à loisir du lieutenant-gouverneur.
Comme il appartient au lieutenant gouverneur de proroger cette
session, il faut suspendre jusqu'à bon loisir du lieutenant-gouverneur.
Alors, en conséquence, je suspends les travaux de l'Assemblée
jusqu'à loisir, M. le leader parlementaire de l'Opposition
officielle.
Reprise de la séance à 22 h 11
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
Mesdames et messieurs, veuillez vous lever, le lieutenant-gouverneur va
maintenant faire son entrée.
Prorogation de la session
Le lieutenant-gouverneur: Mesdames et messieurs de
l'Assemblée nationale, re-bonjour. En prorogeant cette cinquième
session de la trente et unième Législature, session
spéciale qu'a imposée l'urgence de la situation dans certaines
commissions scolaires, j'exprime le souhait que vos travaux pourront
résoudre les conflits qui mettent en danger l'année scolaire de
milliers d'élèves et faciliter la tâche et la conclusion
des conventions locales qui restent en négociation.
Je suis certain que celles et ceux qui sont visés par la loi que
vous avez adoptée voudront s'y conformer par respect pour votre
Assemblée qui, parce qu'elle est démocratiquement élue,
représente la nation et en exprime l'intérêt
supérieur.
Le Président: Veuillez vous asseoir. À l'ordre,
s'il vous plaît!
C'est la volonté de Son Excellence le lieutenant-gouverneur que
cette session soit prorogée sine die et, en conséquence, elle est
prorogée sine die.
Au revoir à tous.
(Fin de la séance à 22 h 11)