Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Dix heures cinq minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
Affaires courantes.
Dépôt de rapports de commissions élues.
Le député de Mille-Iles.
Rapport sur le projet de loi no 46
M. LACHANCE: M. le Président, conformément à notre
règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission
élue permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration qui
a étudié le projet de loi no 46, Loi modifiant la loi du
ministère de l'Immigration.
LE PRESIDENT:
Rapport déposé.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DÉPUTÉS
LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.
Autochtones de la baie James
M. MORIN: J'aurais eu une question pour le ministre des Finances, mais,
en son absence, j'en poserai une autre au premier ministre. Dans l'accord de
principe intervenu, récemment, entre le Québec et les autochtones
de la baie James, on déclare, au chapitre des Terres que: "environ 1,274
milles carrés seront régis et administrés en vertu de la
Loi sur les Indiens. Le reste des terres de la catégorie 1 pour les Cris
de la baie James sera attribué de façon telle que la continuation
de la juridiction provinciale sur ces terres soit assurée".
Devant cette clause de l'accord provisoire, je voudrais demander au
premier ministre s'il peut nous donner les raisons pour lesquelles le
Québec est prêt à céder sa compétence au
gouvernement fédéral sur 1,274 milles carrés de son
territoire, dont il est le propriétaire, consti-tutionnellement, alors
qu'il nous paraît qu'il eût été plus raisonnable que
le Québec exerce pleinement sa compétence sur ce domaine. Quels
ont été les motifs qui ont dicté cette décision? Et
quelles pressions ont été exercées sur le Québec
pour qu'il en vienne à céder de la sorte une partie de son
territoire?
M. BOURASSA: M. le Président, si le chef de l'Opposition me le
permet, je peux vérifier, je crois que c'était pour des
raisons... de toute façon c'est une entente de principe, ce n'est pas
une entente finale. Je crois qu'il y avait, si ma mémoire est bonne, des
raisons juridiques à cette clause, mais je peux vérifier et je
pourrai répondre plus en détail au chef de l'Opposition demain ou
cet après-midi.
M. MORIN: Puisque le premier ministre va s'enquérir, j'aimerais
lui souligner que jusqu'ici le gouvernement fédéral
exerçait sa compétence sur 291 milles carrés. En ajoutant
1,274 milles carrés qui sont cédés au gouvernement
fédéral pour les fins de la compétence, il y aura
maintenant plus de 2,000 milles carrés sous compétence
fédérale. Je voudrais demander au premier ministre, s'il est
conscient du fait que ces dispositions, ajoutées aux parcs dits
nationaux, ajoutées à la compétence que le gouvernement
fédéral exerce sur les rives du Saint-Laurent et à tous
ces autres moyens dont il dispose pour gruger les compétences
québécoises, si cela n'a pas été une erreur que
d'augmenter de la sorte la compétence fédérale sur le
territoire québécois?
Dernière question, est-ce que ce n'est pas la
responsabilité du premier ministre de sauvegarder la compétence
de son gouvernement sur son propre territoire?
M. BOURASSA: M. le Président, c'est la première fois que
le Parti québécois, par son chef, énonce un point de vue
sur cette entente. Je crois qu'il avait exprimé son accord sur l'entente
qui avait été signée avec les Indiens. Ce matin, il arrive
avec une objection sur cette question.
M. MORIN: C'est une question que je vous pose. Ce sera peut-être
une objection plus tard. Pour l'instant c'est une simple question...
M. BOURASSA: Je tiens compte de la distinction. J'ai dit que
j'étais pour vérifier s'il n'y avait pas des raisons juridiques
qui pouvaient justifier cette clause dans l'entente qui, dans l'ensemble, a
été jugée excellente de part et d'autre, entente de
principe qui doit être finalisée d'ici un an.
Pour ce qui a trait au territoire détenu par le gouvernement
fédéral, il y a les aéroports, il y a les ports, le
gouvernement fédéral n'est quand même pas un gouvernement
étranger, et je ne crois pas qu'on doive concevoir le fait que le
gouvernement fédéral détient certains territoires au
Québec comme étant une entrave au développement du
Québec.
M. MORIN: Puis-je savoir quand j'aurai la réponse,
approximativement?
M. BOURASSA: Le chef de l'Opposition a élargi sa question en
mettant en cause le fait, pour le gouvernement fédéral, de
détenir des
territoires qui, dans l'ensemble du territoire québécois,
sont très marginaux, si on prend le total des territoires détenus
par le gouvernement fédéral.
M. MORIN: C'est considérable!
M. BOURASSA: C'est dans l'ensemble, je pense bien. Mais en ce qui a
trait à la question de la baie James elle-même, je pourrai
vérifier, cet après-midi, et donner une réponse au chef de
l'Opposition.
LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.
Salaire des juges
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais poser une question au
ministre de la Justice. Dans son intervention de lundi soir dernier sur le
projet de loi concernant l'ajustement du salaire des juges, le ministre de la
Justice a fait une déclaration qui peut sembler ambiguë. Justement,
c'est dans le Journal de Québec de ce matin...
M. CHOQUETTE: Dont le porte-parole est M. Normand Girard, à
l'Assemblée.
M. SAMSON: Cela va peut-être permettre au journaliste de rectifier
ou préciser la pensée du ministre, s'il la précise ce
matin. Le journaliste se posait une question. Il a dit: "Est-ce que le public
sait que les fonctionnaires auront 29 p.c. d'augmentation le 1er janvier
prochain? " Doit-on comprendre, dans cette déclaration, que les
fonctionnaires obtiendront 29 p.c. d'augmentation le 1er janvier prochain, ou
si c'est une compilation des augmentations depuis un, deux ou trois ans qui
feront que cela totalisera 29 p.c. le 1er janvier prochain?
M. CHOQUETTE: M. le Président, je ne savais pas que le
député de Rouyn-Noranda était devenu le porte-parole de M.
Normand Girard, ce journaliste très sympathique.
M. SAMSON: M. le Président, je pose la question de
privilège pour vous dire que si je devais être le porte-parole de
quelqu'un, je préférerais être le porte-parole de M.
Normand Girard que celui du ministre de la Justice. Mais ce n'est pas le
cas.
M. CHOQUETTE: Pourtant, M. le Président, je trouve que le
député de Rouyn-Noranda est aussi sympathique que M. Normand
Girard. Je ne vois pas pourquoi le député de Rouyn-Noranda me
cherche noise ce matin.
Mais pour répondre à sa question, je voulais simplement
faire une comparaison entre ce que les fonctionnaires obtiendraient par
l'application de leur convention collective et aussi des dispositions qui les
régissent, en vertu de la Loi de la fonction publique, et d'autre part,
l'ajustement de traitement que je proposais à la Chambre de donner aux
juges.
Je disais que, par application des dispositions existantes, les
fonctionnaires du Québec bénéficieraient d'augmentations
dues à des changements dans leurs échelons, plus des ajustements
au coût de la vie, et que tout cela, suivant les renseignements que
j'avais, formait un total d'environ 29 p.c.
Ce n'était pas une annonce d'une augmentation que le gouvernement
donnait; c'était strictement cité à titre de comparaison
pour indiquer que les fonctionnaires du gouvernement québécois
voyaient leur sort amélioré d'une façon
considérable et qu'il ne fallait pas oublier les juges dans tout
cela.
LE PRESIDENT: Affaires...
Scierie de Taschereau
M. SAMSON: Un instant, on va en poser d'autres. Je voudrais en poser
une, M. le Président, à l'honorable ministre des Terres et
Forêts, pour lui demander s'il a des nouvelles à nous annoncer
concernant le problème de la scierie de Taschereau, dans le comté
d'Abitibi-Ouest. Est-ce qu'il y a eu entente entre son ministère, REXFOR
et la coopérative?
M. DRUMMOND: Rien de nouveau à annoncer depuis la dernière
fois où j'ai répondu à cette question, M. le
Président. Je suis censé rencontrer les gens de REXFOR, le 5 ou
le 6 janvier, pour discuter de tout le dossier et pour essayer de faire le
point là-dessus.
M. BELLEMARE (Johnson): II s'est acheté "une froque" neuve!
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. DRUMMOND: M. le Président, je me suis habillé pour
l'occasion aujourd'hui, à cause du député de Johnson. Je
porte une cravate et l'étiquette dit bien que c'est 100 p.c. en soie! De
plus, M. le Président, cela augmente ma collection de cravates d'un
tiers!
DES VOIX: Ha! Ha!
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je n'ai rien dit de mal.
J'ai dit qu'il s'était acheté une veste neuve dans un "encan de
feu"!
DES VOIX: Ha! Ha!
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Impôt foncier scolaire
M. MORIN: Ma question est destinée au ministre des Finances. Elle
fait suite aux questions que nous lui avons déjà posées,
les 6 et 17 décembre, au sujet de l'impôt foncier scolaire. Le
ministre peut-il, en premier lieu, nous confirmer que, pour l'année en
cours, les recettes de l'impôt foncier vont doubler le cap des $500
millions? Effectivement, les derniers chiffres que nous possédons sont
$503 millions. Je me réfère à ce que le ministre m'a dit,
l'autre jour, à l'étude des crédits; il ma plutôt
indiqué le chiffre de $450 millions à $475 millions. Il semble
maintenant que cela va doubler le cap des $500 millions et va donc
dépasser d'environ $50 millions, soit de 10 p.c, ses
prévisions.
Si tel est le cas, le ministre peut-il nous dire s'il envisage de
réduire puisque nous disait-il dans le passé
c'était là son objectif par exemple, de $1.25 à $1
le taux normalisé, de façon à faire contrepoids à
la hausse vertigineuse de l'évaluation foncière entraînant
ainsi forcément des hausses très fortes dans le fardeau fiscal
des contribuables québécois?
M. GARNEAU: M. le Président, j'ai déjà eu
l'occasion de répondre, comme l'a indiqué le chef de
l'Opposition, à cette question en termes d'objectifs que nous voulions
atteindre. Je n'ai pas l'intention de reprendre le débat ce matin. Je
n'ai pas eu de chiffres plus précis que ceux que j'ai cités
récemment, c'est-à-dire des montants de taxes foncières de
l'ordre de $450 millions à $475 millions. Je n'ai pas de données
plus précises concernant cette recette. Je ne sais pas à quel
endroit le chef de l'Opposition peut avoir pris ses statistiques, mais, en
provenance du réseau scolaire, je n'ai pas eu de changement. On se
rappellera que l'actuel gouvernement a réduit de $1.40 à $1.25 le
taux normalisé de l'impôt foncier. On a soumis, dans certains
milieux que cette baisse avait été remplacée par des
augmentations pour des dépenses inadmissibles.
Je dois souligner qu'en 1972 et 1973, au 30 juin 1973
c'était la deuxième année de notre modification fiscale au
niveau foncier et scolaire le montant perçu en taxes pour des
dépenses inadmissibles était demeuré à un montant
de l'ordre de $27millions à $30 millions. Ce qui veut dire que la baisse
du taux normalisé dans l'ensemble du Québec n'avait pas
donné lieu, et je parle toujours en moyenne, en général,
à des augmentations correspondantes pour des dépenses que l'on
qualifie d'inadmissibles pour fins de subventions en termes d'équilibre
budgétaire.
C'est donc dire qu'il y a eu, au cours de ces années, une baisse
réelle du fardeau fiscal scolaire en termes d'impôt foncier.
Pour ce qui est de l'avenir, le discours du budget sera
vraisemblablement au cours du mois de mars ou du mois d'avril, comme à
l'habitude et les modifications, s'il y a lieu d'en apporter, seront
annoncées à ce moment.
M. MORIN: En question supplémentaire, M. le Président,
j'espère que le ministre va pouvoir se renseigner rapidement parce
qu'effectivement, à l'heure actuelle, selon nos renseignements,
ça dépasse $500 millions et j'aimerais demander...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!
M. MORIN: ... au ministre s'il est conscient qu'en période de
forte inflation et de spéculation foncière
effrénée, alors que la valeur marchande des biens fonciers, des
maisons augmente à un rythme très élevé, s'il est
conscient du fait qu'un tel système...
UNE VOIX: Cela baisse depuis une semaine. LE PRESIDENT: Allez,
allez.
M. MORIN: Je ne m'entends pas moi-même poser la question, M. le
Président.
LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs!
M. MORIN: Est-ce que le ministre est...
LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît!
M. MORIN: Le ministre est-il conscient du fait que le système
d'imposition actuel, fondé sur l'impôt foncier, entraîne des
hausses de taxes draconiennes, que la plupart des propriétaires
fonciers, en particulier des petits propriétaires fonciers, sont
incapables de supporter une augmentation de taxes qui ne correspond...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! M. MORIN: ... pas du
tout... LE PRESIDENT: A l'ordre! M. MORIN: ... à la
capacité...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Messieurs, s'il vous plaît! S'il vous
plaît! J'avertirais en premier lieu nos collègues; je sais qu'il
peut y avoir invitation à cette période des questions à
réagir et, en l'occurence, j'y voyais une invitation du chef de
l'Opposition, pour ses collègues qui ne sont pas de son opinion,
à intervenir et à réagir. Je voudrais souligner, comme je
l'ai déjà fait une fois, que la période des questions
n'est pas une période invitant les députés de l'opposition
à ouvrir des débats. Si on commence, et je le
répète pour la deuxième fois, une question en demandant
à un ministre s'il est conscient de telle chose, surtout dans le sens
que c'est posé,
c'est beaucoup plus l'amorce d'un débat. La période des
questions, c'est pour obtenir des renseignements factuels sur l'administration;
ce n'est pas en posant des questions de cette manière, en demandant si
le ministre est conscient. Si le ministre dit oui ou non, je considère
que ni le oui ou ni le non n'est un renseignement valable pour l'Opposition.
C'est un peu peut-être la raison pour laquelle d'autres
députés interviennent parce que c'est beaucoup plus l'amorce d'un
débat que le désir d'un député de l'Opposition
d'obtenir des renseignements véritables.
M. MORIN: En attendant, le ministre pourrait-il répondre à
ma question?
M. GARNEAU: Je pourrais répondre oui et me rasseoir. Mais je
trouve que le chef de l'Opposition prend beaucoup de détours; il me
semble qu'il devrait être un peu plus généreux, en cette
période de Noël, à l'endroit du gouvernement qui, depuis
cinq ans, a présenté des budgets sans augmentation de taxes et
qui, au cours de ces cinq dernières années, a baissé le
taux d'imposition foncière pour fins scolaires de $0.15 les $100
d'évaluation. Ce que nous proposions, en 1971, de faire sur cinq ans,
nous l'avons fait en trois ans. Il me semble que le chef de l'Opposition
devrait tenir compte de ce facteur lorsqu'il pose une question. Peut-être
n'inviterait-il pas à un débat, mais aussi peut-être
serait-il plus juste à l'endroit du gouvernement.
Je lui ai répondu tout à l'heure que le prochain discours
du budget aurait lieu au cours du mois de mars ou du mois d'avril. Il y a
plusieurs facteurs dont il faut tenir compte. Ce que mentionne le chef de
l'Opposition est un facteur, un parmi d'autres et c'est après avoir
analysé tous ces points de vue que nous prendrons une
décision.
M. MORIN: J'ai une question supplémentaire, M. le
Président.
M. BOURASSA: Juste pour ajouter un point à la réponse du
ministre des Finances.
M. MORIN: Volontiers.
M. BOURASSA: Le chef de l'Opposition sait fort bien que, si les
rôles d'évaluation ne sont pas modifiés, cela suppose deux
choses pour augmenter la taxe foncière: l'augmentation du taux
lui-même et des changements aux rôles d'évaluation. Dans
plusieurs municipalités au moins, si ce n'est pas dans toutes, selon la
Loi des cités et villes, cela peut se faire tous les deux ou trois ans.
Donc, il peut n'y avoir aucune augmentation du rôle d'évaluation,
donc aucune augmentation du taux. C'est d'ailleurs pourquoi le taux de
croissance de l'impôt foncier est tellement faible par rapport aux taux
de croissance des autres impôts.
M. MORIN: II s'agit quand même d'une croissance de 10 p.c., M. le
Président.
DES VOIX: Oh! Oh!
LE PRESIDENT: Messieurs, s'il vous plaît!
M. MORIN: Je vais tâcher de me conformer à la directive en
posant la question d'une autre façon, mais de toute manière je
désire obtenir le renseignement. Aussi vais-je poser la question comme
ceci au ministre des Finances; je vais essayer de me "contorsionner les
méninges" pour obtenir une réponse qui a du sens.
DES VOIX: Ah!
LE PRESIDENT: Messieurs!
M. MORIN: La situation, selon le ministre des Finances,
n'évolue-t-elle pas vers une hausse constante des taxes foncières
pour fins scolaires, ce qui va directement à l'encontre du plan dont le
ministre nous avait fait part l'année dernière et qui consistait
à réduire, au contraire, le fardeau fiscal du contribuable
foncier comme moyen de financer le système d'éducation au niveau
primaire? Et, dernière question, à moins que la réponse du
ministre n'en suscite d'autres dans mon esprit, n'aurons-nous pas une
augmentation de 10 p.c. des impôts fonciers scolaires cette
année?
M. GARNEAU: Tout dépend de la date à laquelle cette
année, par rapport à l'année dernière, la
révision du rôle d'évaluation a été faite. Si
l'évaluation a été faite le rajustement et
l'équilibre à l'intérieur de la région scolaire
en 1973, et qu'elle n'a pas été refaite en 1974 ni en
1975, c'est évident qu'il n'y aura pas eu augmentation du fardeau
fiscal. Par contre, si cette révision a été faite en 1974
et qu'elle n'avait pas été faite depuis 1972, cela signifiera une
augmentation du fardeau fiscal.
Pour ce qui est de la première partie de la question du
député de Sauvé, j'ai déjà eu l'occasion de
répondre à cette question en commission parlementaire et je crois
qu'en réponse à un député de l'Opposition je
ne sais pas si c'est au député de Rouyn-Noranda ou à un
autre député de l'Opposition j'ai eu l'occasion d'indiquer
que notre objectif, celui qui avait été annoncé en 1971,
était toujours le même. Tout à l'heure, en disant au chef
de l'Opposition que le fardeau pour les dépenses inadmissibles n'avait
pas augmenté, je répondais, en ce faisant, à une des
objections que dans certains groupes, dans certains milieux on a faites
à la baisse de l'impôt foncier scolaire en disant: Vous avez
baissé le taux normalisé et les commissions scolaires sont
entrées dans le vacuum que vous avez fait par un taux pour
dépenses inadmissibles. Je pense que cette argumentation, dans
l'ensemble du Québec,
n'est pas vraie, puisque le montant de taxes foncières
perçu pour des dépenses inadmissibles est demeuré au
même niveau au cours des trois ou quatre dernières années,
c'est-à-dire entre $27 et $30 millions, ce qui signifie que
l'impôt libéré n'a pas été remplacé,
d'une façon générale, par une augmentation d'impôt
pour dépenses inadmissibles. Pour ce qui est de l'avenir, malgré
l'invitation que me fait depuis trois questions le chef de l'Opposition, je
n'ai pas l'intention de dire à ce moment-ci quelle sera la politique du
gouvernement. Elle sera connue lors du discours sur le budget.
Mont Valin
M. BEDARD (Chicoutimi): Ma question s'adresse au ministre responsable de
l'OPDQ. Je voudrais savoir s'il est exact qu'une étude de
rentabilité se fait présentement concernant l'occasion de
procéder à l'aménagement du mont Valin pour en faire un
centre de ski d'envergure provinciale.
M. LEVESQUE: Je prends avis de la question.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez toujours fait cela. Pourrais-je savoir
si le premier ministre est en mesure de répondre à la question
que je lui ai posée hier et dont il a pris avis?
M. BOURASSA: Je n'ai pu communiquer hier avec... Demain, je vais
essayer. Hier, c'était fermé partout.
UNE VOIX: Demain ou lundi.
LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous connaissez le dossier par coeur.
Dépôts exigés de certains
abonnés par l'Hydro-Québec
M. SAMSON: Je voudrais poser une question au ministre des Richesses
naturelles. Je posais une question dernièrement à savoir s'il est
vrai qu'Hydro-Québec envoyait, en ce moment, des factures à
certains abonnés, en réclamant un dépôt de $50 pour
couvrir des factures futures, et que ce dépôt de $50 porterait
intérêt à 4 p.c.
M. MASSE: M. le Président, en effet, j'ai reçu de la part
de l'Hydro-Québec la confirmation, par un arrêté en conseil
qui est daté du 23 décembre 1965, où le paragraphe qui
nous intéresse se lit comme suit: "Le fournisseur pourra, en tout temps,
exiger de l'abonné, en plus d'un dépôt en argent pour la
garantie du paiement de ses factures, toute autre garantie qu'il pourra juger
nécessaire. Tous les dépôts effectués depuis au
moins un an porteront intérêt simple au taux de 4 p.c. par
année. L'intérêt échoit à la fin de
l'année civile et est payable sur demande après cette date au
bureau régional du fournisseur ou, s'il n'est pas réclamé
par l'abonné, payable tous les cinq ans. Quand l'abonné met fin,
conformément aux dispositions du présent règlement, au
service qui lui est fourni, le dépôt est alors remboursé et
l'intérêt payé après déduction de toute somme
due". C'est le texte du paragraphe qui nous intéresse. Je voudrais
ajouter que les autorités de l'Hydro-Québec soulignent que la
garantie, le montant d'une facture de deux mois, qui est exigé sur
recommandation du bureau local de l'Hydro-Québec, uniquement pour les
abonnés ayant eu des difficultés à faire leurs paiements
antérieurement ou pour de nouveaux abonnés qui ne
démontreraient pas toujours les garanties financières voulues, ce
règlement s'applique donc non pas à tous les abonnés, mais
dans des cas exceptionnels.
M. SAMSON: M. le Président, comme le règlement qui nous a
été lu par le ministre peut laisser entendre que
l'Hydro-Québec pourrait le faire dans tous les cas, est-ce que j'ai bien
compris que ce règlement ne permet pas à l'Hydro-Québec de
le faire dans tous les cas?
M. MASSE: II est dit que le fournisseur, soit l'Hydro-Québec,
"pourra".
M. SAMSON: Sachant que, d'après la réponse que le ministre
vient de nous donner, cela ne se fait pas dans tous les cas, mais seulement
dans les cas où il y a des antécédents de mauvais paiement
de factures, mais que, par contre, l'arrêté en conseil permet
à l'Hydro-Québec de le faire dans tous les cas, est-ce que le
ministre des Richesses naturelles n'a pas l'intention ou n'aurait pas
l'intention de revoir cet arrêté en conseil afin de lui faire dire
exactement ce dont l'Hydro-Québec a besoin, c'est-à-dire que cela
puisse se faire dans le cas où il y a eu mauvais paiement, où le
risque est trop grand, mais que l'arrêté en conseil ne permette
pas à l'Hydro-Québec de le faire dans tous les cas? Il n'y a rien
qui nous dit que l'Hydro-Québec ne décidera pas demain matin de
l'appliquer intégralement et le faire dans tous les cas. C'est pourquoi
j'insiste auprès du ministre pour savoir si le ministre n'a pas
l'intention de réétudier cette situation aux fins d'apporter les
correctifs qui s'imposent.
M. MASSE: M. le Président, je pense que depuis que ce
règlement existe, soit décembre 1965, à ma connaissance,
l'Hydro-Québec a utilisé ce règlement uniquement dans des
cas exceptionnels, comme on le disait. D'autre part, je n'ai pas
été mis au courant d'abus de l'Hydro-Québec, à
partir de ce règlement, et je
ne vois pas la nécessité de le changer. Il y a
peut-être les 4 p.c. qui sont légèrement inférieurs
à ce qu'on a sur le marché actuellement.
M. SAMSON: M. le Président... LE PRESIDENT: Dernière.
M. SAMSON: Une question supplémentaire. Est-ce que le ministre,
quand même, n'accepterait pas de faire une révision? Est-ce que le
ministre ne considère pas qu'il y a quand même des
éléments qui sont désuets? D'abord les 4 p.c, et
également un arrêté en conseil. Même s'il date de
1965, c'est comme la Loi des mesures de guerre, ils ne s'en sont servi qu'en
octobre 1970, mais ils auraient pu s'en servir n'importe quand avant. Pourquoi
laisser ça là, si on n'en a pas besoin? Est-ce que le ministre ne
voudrait pas réviser cet arrêté en conseil?
M. MASSE: D'abord, M. le Président, je voudrais préciser
que les règlements de l'Hydro-Québec sont des décisions
internes des commissaires de l'Hydro-Québec. D'autre part, je n'ai pas
d'objection à souligner aux commissaires de l'Hydro-Québec qu'il
faudrait peut-être remettre du neuf, entre autres dans le taux
d'intérêt.
M.SAMSON: C'est un arrêté en conseil, ce n'est pas un
règlement de l'Hydro-Québec.
M. MASSE: C'est un règlement qui est accepté d'abord, qui
est soumis par les commissaires au gouvernement qui l'adopte ou qui ne l'adopte
pas. Dans les circonstances, je pourrais en discuter avec les commissaires de
l'Hydro-Québec pour voir s'il y aurait avantage à
améliorer ce règlement.
LE PRESIDENT: Dernière question principale.
Le chef de l'Opposition officielle.
M. MORIN: Ce n'est pas exactement une question, je ne voudrais pas la
prendre à un autre collègue.
LE PRESIDENT: Il n'y en a pas d'autre.
Port de Gros Cacouna
M. MORIN: Je voudrais demander au ministre de l'Industrie et du Commerce
s'il va effectivement déposer la lettre au ministre
fédéral de l'Expansion économique régionale sur le
port de Gros Cacouna, lettre qu'il devait déposer ce matin, si je ne
m'abuse.
Deuxièmement, compte-t-il répondre à la question
que je lui posais hier, dont il a pris avis, au sujet des subventions aux
pêches maritimes?
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je n'ai pas pu rejoindre ce
matin le sous-ministre responsable des pêches maritimes, qui était
à l'extérieur de ses bureaux. En ce qui concerne la lettre, on
est à en faire la reproduction, elle sera déposée demain
matin. Si jamais la session se terminait aujourd'hui, il me fera plaisir de
vous en transmettre une copie par la poste.
M. MORIN: Merci.
LE PRESIDENT: Affaires du jour.
Motion pour faire siéger la commission sur le
projet de loi no 87
M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour que la
commission parlementaire de l'Assemblée . nationale se réunisse
à la salle 81-A, pour l'étude du projet de loi no 87, Loi
modifiant la loi de la Législature et la loi de l'exécutif.
M. BURNS: M. le Président, sur cette motion, j'ai fait la
remarque hier, et j'ai été à même de constater
moi-même, même si je ne suis pas membre en fait, je suis
membre de cette commission, mais ayant été occupé à
d'autres travaux, soit ceux concernant l'immigration, je n'étais pas
participant à la commission j'ai eu l'occasion d'entrer dans
cette salle, alors qu'on siégeait depuis déjà quelques
heures. Je répète ma suggestion d'hier, il me semble qu'à
cause de l'intérêt que comporte ce projet de loi pour tous les
députés, et aussi pour un certain public qui vient nous visiter,
il me semble que ce serait beaucoup plus adéquat de faire siéger
cette commission au salon rouge.
D'autre part, j'ai même noté, je ne sais pas si c'est de
propos délibéré du côté du gouvernement pour
hâter les travaux de cette commission, que même à la salle
81-A, où il y a un système de climatisation de l'air, ce
même système ne fonctionnait pas hier. Je ne sais pas si le
ministre des Travaux publics est au courant de cela.
UNE VOIX: II fait 91 degrés!
M. BURNS: II faisait quelque chose comme 90 degrés dans cette
salle hier. M. le Président, est-ce que vous penseriez nous cuire pour
obtenir plus rapidement le résultat de ce projet de loi, et le faire
adopter à la vapeur, comme dit le chef de l'Opposition? Il me semble
que, décemment, on devrait envoyer cette commission au salon rouge, et
l'autre commission pourrait très bien aller à la salle 81-A.
C'est une suggestion que je fais.
M. LEVESQUE: M. le Président, je voudrais d'abord conclure ou
croire ou espérer, ou présumer que les propos du chef de
l'Opposi-
tion sont teintés de l'humour des Fêtes. Le
député de Maisonneuve ne pense toujours pas que nous avons fait
augmenter la puissance de la fournaise!
M. BURNS: On vous a déjà vu chauffer le parlement en plein
été!
M. LEVESQUE: La légende est parvenue à vos oreilles! Je
n'ai aucune objection à accommoder les députés, s'ils
préfèrent une salle plutôt que l'autre. Je n'ai pas
d'objection.
M. BURNS: Ne niaisez pas!
M. LEVESQUE: Je suis allé également à cette
commission hier après-midi.
M. BURNS: Hier soir, c'était un peu plus surchauffé.
M. LEVESQUE: II y avait des fauteuils libres, et tout le monde avait
l'air confortable.
M. MORIN: ... pour couper les débats.
M. BURNS: Dans une atmosphère aérée, cela peut
peut-être aller plus vite!
M. LEVESQUE: Je ne suis pas sûr.
M. BELLEMARE (Johnson): Le député est optimiste!
M, SAMSON: Au salon rouge, les fauteuils sont beaucoup plus
confortables.
M. LEVESQUE: Nous allons faire un essai aujourd'hui au salon rouge. On
verra. Et si les motifs sont aussi louables que voudrait le laisser entendre le
député de Maisonneuve, on pourrait récidiver.
M. SAMSON: Le chauffage est-il indépendant?
M. LEVESQUE: Alors, la motion se lit: au salon rouge. D'accord.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Vote enregistré, M. le Président. LE PRESIDENT:
Qu'on appelle les députés.
Vote sur la motion
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Que ceux qui sont en faveur de la motion du leader parlementaire du
gouvernement veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bouras- sa, Levesque, Mailloux, Saint-Pierre,
Choquette, Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon,
MM. Hardy, Tetley, Drummond, Bienvenue, Toupin, Massé, L'Allier, Harvey
(Jonquière), Vaillancourt, Cadieux, Arsenault, Houde (Fabre), Houde
(Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Fortier, Bossé,
Bacon, Blank, Veilleux, Brisson, Séguin, Saindon, Cornellier, Houde
(Limoilou), Lafrance, Pilote, Lamontagne, Ostiguy, Picard, Gratton, Assad,
Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Pepin, Bellemare
(Rosemont), Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand, Caron,
Côté, Déom, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours,
Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Picotte, Sylvain, Tremblay,
Vallières, Samson, Roy, Bellemare (Johnson).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Bédard
(Chicoutimi).
LE SECRETAIRE: Pour: 73 Contre : 4
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée et cette commission de
l'Assemblée nationale peut siéger immédiatement au salon
rouge.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose qu'une autre commission
siège, soit la commission parlementaire de la justice, pour
l'étude des projets de loi nos 84, Loi concernant les juges, et 200, Loi
concernant le conseil de sécurité publique de la
Communauté urbaine de Montréal. Ces deux projets de loi seront
donc étudiés à cette commission, article par article, et
la commission pourra siéger à la salle 81-A.
LE PRESIDENT: C'est un avis?
M. LEVESQUE: Immédiatement. Oui, c'est-à-dire que c'est
plus qu'un avis, M. le Président, parce que nous allons en commission
plénière pour quelques minutes. Alors, il serait peut-être
bon que nous acceptions cette motion, de toute façon.
LE PRESIDENT: D'accord. Je n'étais pas au courant qu'il y aurait
commission plénière. Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté, M. le Président.
Projet de loi no 46 Commission
plénière
M. LEVESQUE: M. le Président, pour permettre certaines
corrections à un projet de loi qui a été
étudié en commission élue hier, le
projet de loi no 46, Loi modifiant la loi du ministère de
l'Immigration, de consentement unanime, je voudrais que vous quittiez
maintenant le fauteuil afin que la Chambre se forme en commission
plénière pour apporter ces corrections au projet de loi no
46.
LE PRESIDENT: De consentement unanime, est-ce que cette motion de la
formation de la commission plénière est adoptée?
M. BURNS: Adopté, M. le Président, avec plaisir.
LE PRESIDENT: Avec le grand chapeau du consentement unanime.
M. BURNS: Je l'avais même suggéré hier, M. le
Président.
M. BLANK (président de la commission plénière): A
l'ordre, messieurs!
Projet de loi no 46, Loi modifiant la loi du ministère de
l'Immigration.
M. BIENVENUE: M. le Président, cela va être très
court. Il s'agit, premièrement, de l'article 3 du projet de loi, qui
abroge l'ancien article 6 de la loi organique du ministère de
l'Immigration. On m'interrogeait hier soir, notamment le député
de Maisonneuve, pour s'assurer que, dans l'abrogation, rien ne se perdait
d'utile et de valable pour le ministère que je dirige.
Alors, une partie de l'ancien article 6, M. le Président, se
retrouve à l'alinéa g) du nouvel article 3, c'est-à-dire
de l'article 2 qui modifie l'ancien article 3, et l'autre partie, qui faisait
l'objet des inquiétudes du député de Maisonneuve et de
celui qui vous parle, se retrouve à l'alinéa f) du même
article qui se lit comme suit: "établir et maintenir des services
d'adaptation chargés de l'intégration harmonieuse des immigrants
dans le milieu québécois".
Nous avons voulu, par cette nouvelle rédaction, rendre plus
vastes les dispositions qui nous permettent d'intégrer et d'adapter les
immigrants sans limite, dans une foule de domaines. Nous n'avons pas voulu nous
limiter à ceux qui étaient spécifiquement
énumérés dans l'ancien article 6 et nous avons voulu faire
sauter les mots "de concert avec le ministre de l'Education". Comme on avait
suspendu cet article, M. le Président...
M. BURNS: Vous ne voulez plus faire de concert avec le ministre de
l'Education?
M. BIENVENUE: Nous voulons faire un vol plané plus long avec nos
propres ailes.
LE PRESIDENT (M. Blank): Adopté?
M. BURNS: M. le Président, je veux simplement dire que je suis
d'accord sur l'amende- ment maintenant que ces explications nous sont fournies.
Cependant, je vous avertis qu'on va surveiller la façon dont le ministre
utilisera ces pouvoirs plus larges; j'espère qu'il va les utiliser au
complet et qu'il va maintenir justement sa juridiction et tenir mordicus,
particulièrement sur les COFI.
M. BIENVENUE: L'étendre.
M. BURNS: Et l'étendre, si possible. Là-dessus, nous
appuyerons le ministre dans toutes ses tentatives d'étendre sa
juridiction le plus possible. Mais s'il n'utilise pas cette juridiction, qu'il
soit également assuré que nous serons les premiers à le
critiquer.
M. BIENVENUE: "Watching brief".
M. BURNS: Un "watching brief", c'est vrai.
M. BIENVENUE: M. le Président, ce n'est peut-être pas le
moment approprié, mais je me soumettrai à vos directives. La
seule autre correction n'est pas dans l'étude même en commission,
mais provient de l'étude en commission et se retrouve au rapport
où, par erreur, on a mis un mot à la place d'un autre. Je me
demande si on ne pourrait pas tout de suite faire la correction qui
s'impose.
LE PRESIDENT (M. Blank): Où cela?
M. BIENVENUE: A la première page du rapport de la commission
parlementaire qui a siégé hier soir. Au bas de la page, au moment
où on traite d'un amendement du député de Maisonneuve,
amendement qui insère après l'article 3, un article 4, on dit
à la fin: "que ce conseil juge approprié". Il faudrait lire: "que
ce comité juge approprié".
M. BURNS: M. le Président, je ne pense pas qu'on puisse corriger
le rapport en commission plénière. Il faudrait revenir, je pense,
à l'Assemblée nationale. J'accepterai à ce
moment-là qu'on étudie le rapport et qu'on fasse la
modification.
UNE VOIX: Le bill a été corrigé.
M. BURNS: Oui, le bill a été corrigé
effectivement.
M. BLANK (président de la commission plénière): M.
le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission
plénière a étudié le projet de loi no 46 et a
adopté l'article 3, qui était en suspens.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Ce rapport est-il
agréé?
M. BURNS: Agréé.
M. SAMSON: Je suis bien d'accord, mais est-ce que je pourrais en avoir
une copie?
M. BURNS: Je n'aurais pas d'objection à ce qu'on prenne en
considération le rapport et qu'on fasse la correction maintenant que
nous sommes en Assemblée nationale.
M. LEVESQUE: Prise en considération du rapport.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Prise en considération du
rapport de la commission élue sur le projet de loi no 46.
M. BIENVENUE: Je répète ce que je viens de dire, M. le
Président. Il faudrait corriger sur le rapport le rapport est
exact et complet le mot "conseil" par le mot "comité" à
l'avant-dernière ligne, je dis cela de mémoire, de l'amendement
apporté par le député de Maisonneuve qui insère,
après l'article 3, un article 4. Je pense que le greffier de la Chambre
a devant lui le texte en question. Cela se terminerait par les mots "que ce
comité" et non pas "que ce conseil juge approprié quant aux
mêmes questions".
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Cette correction est-elle
acceptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Adopté.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que nous suspendions
maintenant nos travaux en Chambre... Excusez-moi, adoptons le rapport.
Adoption du rapport concernant le projet de loi no
46
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Est-ce que le rapport tel
qu'amendé est agréé?
M. BURNS: Agréé.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Agréé.
M. LEVESQUE: M. le Président, j'avais commencé à
proposer que la Chambre suspende ses travaux et ce, jusqu'à vingt heures
aujourd'hui. Nous nous réunirons donc de nouveau à vingt heures
ce soir. Alors, suspension et non pas ajournement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): La Chambre suspend ses travaux
jusqu'à vingt heures, ce soir.
(Suspension de la séance à 10 h 58)
Reprise de la séance à 20 h 4
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEVESQUE: M. le Président, l'honorable député de
Nicolet-Yamaska aurait un message important à nous communiquer.
Rapport sur le projet de loi no 200
M. FAUCHER: M. le Président, conformément à notre
règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission
élue permanente de la justice qui a étudié le projet de
loi no 200, Loi concernant le Conseil de sécurité publique de la
Communauté urbaine de Montréal.
Rapport sur le projet de loi no 84
M. FAUCHER: M. le Président, conformément à notre
règlement, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission
élue permanente de la justice qui a étudié le projet de
loi no 84, Loi concernant les juges.
LE PRESIDENT: Rapports déposés.
M. LEVESQUE: Evidemment, M. le Président, la commission de
l'Assemblée nationale continue ses travaux tel que le mandat lui en a
été confié précédemment.
Article 8.
LE PRESIDENT: L'honorable leader parlementaire du gouvernement propose
la deuxième lecture du projet de loi no 81, loi concernant...
M. LEVESQUE: Un instant. Avons-nous le même feuilleton?
Le feuilleton de demain?
LE PRESIDENT: J'étais rendu au 28, justement.
Projet de loi no 78 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 78, Loi concernant la protection
des enfants soumis à des mauvais traitements.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, l'honorable lieutenant-gouverneur
de la province a pris connaissance de ce bill et il en recommande
l'étude à la Chambre.
M. le Président, les honorables membres de l'Assemblée
nationale qui ne sont pas familiers avec le problème des enfants soumis
à de mauvais traitements seront probablement surpris de l'étendue
de ce problème dans une société comme la nôtre. En
effet, M. le Président, il existe malheureusement, dans une
société fortement urbanisée, où il existe un
certain anonymat, dans la vie urbaine, des cas extrêmement malheureux,
très déplorables, d'enfants qui sont malheureusement victimes de
mauvais traitements physiques et ceci de par la main de leurs parents,
père ou mère, ou de leurs gardiens et un certain nombre meurent
de ces mauvais traitements.
Je voudrais, M. le Président, tout d'abord signaler que cette
question a soulevé un intérêt récemment dans
l'opinion publique québécoise par suite de certaines
manifestations du phénomène en question. Ainsi, récemment,
le juge Duranleau, de la cour des Sessions de la paix, condamnait un
nommé Lessard à huit mois de prison parce que ce
dénommé Lessard avait mis son enfant dans un placard pendant une
période de 45 jours et que l'enfant vivait ainsi dans ses
excréments sans aucun soin, sans aucune attention de la part de ses
parents. Et le juge Duranleau, dans une analyse extrêmement
sérieuse de ce cas, a dû conclure à la condamnation de ce
père qui avait manqué à ses devoirs les plus
élémentaires.
Ce cas a soulevé de l'émotion dans l'opinion publique, et
sans aucun doute cette émotion était justifiée dans les
circonstances. Mais ce n'est qu'un cas isolé parmi tant d'autres enfants
qui sont les victimes de leurs parents ou gardiens.
Dans un autre ordre d'idée, la commission parlementaire de la
justice et des affaires sociales qui avait siégé pour
étudier le projet de loi no 65 relatif à la protection de la
jeunesse avait eu l'avantage d'entendre le Dr Jeliu, un médecin de
l'hôpital Sainte-Justine de Montréal, qui était venu faire
un exposé à la commission parlementaire au sujet de ces enfants
qui sont soumis à des sévices, ou à des cas de
malnutrition. Cet exposé avait soulevé l'intérêt des
parlementaires de telle sorte que nous avions eu l'occasion cette fois
d'être saisis par un spécialiste de l'extension de ce
problème. Et j'invite les membres de la Chambre à étudier
les compte rendus de la commission conjointe de la justice et des affaires
sociales sur le projet de loi no 65, le 5 avril 1973, où l'on pourra
prendre connaissance de l'exposé du Dr Jeliu.
Je dirai que, personnellement, avant d'avoir entendu cet exposé,
je n'étais pas au fait de l'importance de ce problème que
représentent ces enfants victimes de mauvais traitements.
Plus récemment j'ai eu l'occasion d'être invité par
l'Association des femmes universitaires de l'Université de
Montréal et, à cette occasion, le Dr Lamothe, médecin au
service de l'hôpital Sainte-Justine, a fait un exposé remarquable
sur ce problème, et le Dr Jean-Pierre
Valcourt, de l'Institut médico-légal, a illustré un
certain nombre de cas d'enfants qui finissent à la morgue à
Montréal et ceci comme suite à de mauvais traitements.
C'est donc dire que, dans l'opinion publique québécoise,
il y a eu un éveil récemment à cette question. Ce n'est
pas un phénomène nouveau, il faut l'avouer. Mais, en raison des
circonstances que j'ai mentionnées tout à l'heure, le
problème est devenu actuel et des personnes comme moi, qui
n'étaient pas au fait de l'étendue de ce problème, en sont
saisies. Comme ministre de la Justice, je me sens l'obligation d'intervenir et
de présenter ce projet de loi que je soumets à la Chambre ce
soir.
Je dois dire tout d'abord qu'aux Etats-Unis, au cours de la
décennie 1960 à 1970, 47 Etats américains, au moins, ont
adopté des lois qui visent à limiter le phénomène
que l'on appelle le "child abuse". Ainsi, ces Etats ont-ils adopté des
lois, sur lesquelles le projet que je présente à la Chambre est
largement fondé, qui visent à rendre obligatoire la
dénonciation de cas d'enfants qui sont soumis à de mauvais
traitements physiques. Ceci est au centre du projet de loi que je
présente à la Chambre, puisque le projet de loi en question
oblige toute personne à dénoncer un cas de mauvais traitement
physique imposé à un enfant, et cette dénonciation doit se
faire auprès du Comité pour la protection de la jeunesse, dont la
formation est prévue par le projet de loi.
En faisant une obligation à toute personne de dénoncer un
parent ou un gardien ou peut-être le personnel de certaines institutions
qui se livreraient à de mauvais traitements, on comprendra, je pense,
que ceci est une innovation dans notre droit. Je ne connais pas d'autres
questions, d'autres problèmes, d'autres domaines où on fasse une
obligation à une personne de se faire le dénonciateur d'une
autre.
C'est donc dire que ce principe nouveau introduit dans notre droit aura
ou devrait avoir l'heur d'étonner nos collègues, étant
donné cette obligation qui est maintenant imposée à toute
personne.
Je dois dire que la faiblesse des enfants qui sont soumis à de
mauvais traitements, le fait que la grande majorité de ces enfants sont
âgés de deux ans, de trois ans ou moins est la raison pour
laquelle il faut, devant l'incapacité de ces enfants d'offrir une
défense quelconque aux abus qu'ils peuvent subir, faire en sorte que
nous employions des moyens légaux nettement extraordinaires,
c'est-à-dire l'obligation pour les citoyens de dénoncer ce genre
de situation.
Je sais bien qu'en vertu des législations américaines, il
y a, pour un certain nombre d'Etats, une telle obligation seulement pour
certaines professions. Ainsi, les professions médicales, les
travailleurs sociaux, les policiers, les enseignants dans certaines lois sont
les seuls visés par l'obligation de dénoncer.
Dans le cas du projet de loi que je présente, nous avons rendu
l'obligation générale, nous l'avons imposée à tous
les citoyens. En cela, nous avons suivi l'exemple de trois Etats
américains, le Nebraska, le Tennessee et un autre Etat dont je ne me
souviens pas où on a instauré une telle obligation
générale.
Avant d'aborder le projet de loi dans ses grandes lignes, en plus des
deux aspects que j'ai mentionnés aux collègues tout à
l'heure, c'est-à-dire, cette obligation générale de
dénonciation, qui est un des principes du projet de loi, et aussi la
création d'un Comité pour la protection de la jeunesse, qui en
est un autre aspect avant d'entrer dans d'autres grandes lignes du projet de
loi, je voudrais tenter de cerner l'importance du problème au
Québec, parce que je pense que nos collègues ont le droit de
savoir ce qui se passe réellement. Nous n'avons pas, évidemment,
de chiffres actuellement sur un tel problème. Il va de soi que les
enfants qui sont soumis à des mauvais traitements, dans la plupart des
cas, les parents, les gardiens ou les auteurs de ces sévices ne se
dénoncent pas eux-mêmes.
Au contraire, c'est bien plutôt dans la clandestinité que
cela se passe, dans le secret de la famille et on essaie de garder cette triste
réalité de la connaissance du monde extérieur. Et c'est
une des caractéristiques des milieux dans lesquels ce
phénomène se produit. C'est que généralement, les
milieux familiaux où cela se produit sont des milieux coupés de
l'extérieur, sont des milieux qui vivent repliés sur
eux-mêmes, sont des milieux qui vivent en vase clos. Par
conséquent, ceci explique pourquoi il est particulièrement
difficile de déterminer ou déceler avec précision
l'importance du phénomène.
J'ajouterai, M. le Président, que ceci se passe souvent dans des
milieux où la formation intellectuelle est assez réduite, est
assez basse, est assez limitée. Ceci se passe également dans des
milieux où il y a un stress, soit à cause des circonstances de la
vie propre de ce milieu familial, de cette famille, soit en raison de
circonstances économiques et sociales extérieures, mais ce
facteur du stress concourt certainement à l'existence de tels
événements.
Donc, sans m'ériger en spécialiste des motifs ou des
raisons qui font qu'on aboutit à de tels événements aussi
déplorables, j'ai suffisamment lu sur la question pour en conclure que,
lorsque ce phénomène se produit, il se passe dans certains
milieux de types très particuliers; l'exacerbation des problèmes
de la famille ou des problèmes de gagne-pain, la pauvreté, le
manque de formation, le manque de principes et enfin l'isolement, tout cela
concourt, M. le Président, à créer des circonstances
où ce phénomène, malheureusement, peut se produire.
Par conséquent, il est difficile de déterminer dans notre
propre milieu, compte tenu du fait que généralement tout cela est
assez secret et clandestin, jusqu'à quel point le
phénomène est
important. Mais, je peux dire que j'ai parlé avec nos avocats
devant les cours du Bien-Etre social et que ces avocats m'ont fait remarquer
que le phénomène était assez répandu, bien plus
répandu qu'on le pense communément.
Et celle qui me disait cela était une des avocates de la cour du
Bien-Etre social dans la ville de Québec. J'ai eu la même
réaction d'avocats de la cour du Bien-Etre social à
Montréal.
De plus, comme je le signalais tout à l'heure, les hôpitaux
pour enfants, par exemple l'hôpital Sainte-Justine, le Children's
Memorial, ont fréquemment ce genre de cas. Et c'est aussi le
témoignage des médecins qui, souvent, voient arriver des enfants
avec des fractures multiples, avec des brûlures pour lesquelles il n'y a
aucune explication plausible ou logique, M. le Président, sinon que ces
enfants ont été l'objet d'agressions de la part des parents ou
des gardiens.
Il est vrai que, dans ces cas, les parents ou les gardiens vont dire:
L'enfant est tombé ou l'enfant s'est brûlé. Mais cela ne
tient pas. Les médecins, à l'heure actuelle je mentionne
ceci simplement en passant ont quelques réserves à
dénoncer ce genre de cas. La même chose s'applique aux
hôpitaux, parce qu'ils se sentent liés par le secret
professionnel. On verra tout à l'heure que nous libérons les
médecins et les hôpitaux, et d'ailleurs toutes les personnes qui
bénéficient du secret professionnel, pour leur imposer justement
cette obligation de dénoncer ces cas, car, ainsi qu'il a
été dit dans l'information pertinente sur ce sujet, il y a un
syndrome du "battered child". Il y a ce que l'on appelle une analyse clinique
je pense que mon collègue, le ministre des Affaires municipales,
serait beaucoup plus apte que moi à donner en termes scientifiques ce
que l'on veut traduire par le syndrome du "battered child" ce sont les
résultats des agressions qui indiquent qu'il n'y a pas d'autre
explication plausible ou logique que cet enfant a subi une agression
délibérée et non pas accidentelle de la part de son
milieu, que ce soient les parents, les gardiens ou d'autres personnes avec
lesquelles il entre en contact.
Donc, M. le Président, dans les hôpitaux
québécois, on constate très fréquemment ce genre de
cas qui ne s'expliquent pas autrement que par une agression aux dépens
d'un enfant sans défense.
J'ai mentionné tout à l'heure le Dr Jean-Pierre Valcourt,
de l'Institut médico-légal, de Montréal. Il a
montré, à cette réunion à laquelle j'assistais, des
diapositives d'enfants morts, dont il avait fait J'autopsie, ces enfants ayant
été, de toute évidence, victimes de mauvais traitements
qui avaient entraîné leur mort.
Mais, M. le Président, il existe une autre façon,
peut-être un peu plus précise, de tenter de cerner l'importance du
phénomène chez nous. L'Etat de l'Illinois a adopté un
"Child Abuse Act", lequel est entré en vigueur en 1965. Cet Etat, pour
la première année d'application de sa loi, a analysé le
nombre de cas d'enfants qui avaient été rapportés comme
ayant été victimes de mauvais traitements.
Du 1er juillet 1965 au 30 juin 1966, le service qui avait la
responsabilité de l'administration de cette loi a reçu 476 cas
prouvés et démontrés d'enfants soumis à de mauvais
traitements.
Si l'on fait les changements voulus au point de vue de la population
entre le Québec et l'Etat de l'Illinois, on arriverait à 400 cas
ici, au Québec, qui pourraient exister. Remarquez que je ne pense pas
que, dans l'Etat de l'Illinois, la première année, ils ont
décelé tous les cas d'enfants maltraités, comme je ne
pense pas que, la première année, notre propre service va
réussir à empêcher et à prévenir des assauts
ou des blessures causées à des enfants. Je ne crois pas que nous
aurons décelé même tous les cas qui pourraient se
produire.
Mais, nous fondant sur l'expérience de l'Illinois, tenant en
considération les populations respectives des deux endroits, on pourrait
arriver à un minimum de 400 cas ici, au Québec.
Remarquez que, dans 50 p.c. des cas qui ont été
constatés dans l'Etat de l'Illinois, les enfants avaient moins de trois
années d'âge. Or, qu'est-ce qu'un enfant d'un mois, deux mois, six
mois, d'un an ou de deux ans, jusqu'à trois ans, peut faire pour
éviter les mauvais traitements en question? C'est donc dire
jusqu'à quel point il est important de légiférer dans ce
domaine-là justement pour tenter de prévenir dans la mesure du
possible des cas d'agressions à l'égard d'enfants en aussi bas
âge que ceux que j'ai mentionnés, c'est-à-dire des enfants
de moins de trois ans.
Dans la majorité des cas rapportés en Illinois, il
s'agissait de fractures, de malnutrition ou généralement de ce
qu'on appelle en anglais "neglect", ce qui désigne beaucoup de choses
à la fois, c'est-à-dire une attitude totalement
relâchée sur le plan physique à l'égard de
l'enfant.
Dans 40 p.c. des cas dans l'Etat de l'Illinois, ce n'était pas la
première fois que l'enfant était soumis à des mauvais
traitements, c'est-à-dire que c'était une récidive. Par
conséquent, étant donné qu'il s'agissait d'un cas de
récidive, une loi comme celle qui est proposée peut-elle
empêcher, si on réussit à constater les premières
agressions, des agressions ultérieures qui peuvent avoir des
conséquences très graves pour l'enfant en question.
J'ai tenu à faire cette comparaison entre la situation de l'Etat
de l'Illinois et la nôtre. Je ne serais pas surpris, d'après les
renseignements que j'ai eus, soit dans les milieux hospitaliers, soit
auprès des cours québécoises ou les autres
renseignements que le phénomène soit encore beaucoup plus
considérable que le chiffre de 400 cas que je mentionnais tout à
l'heure car, comme je l'ai dit, il va de soi que l'Etat de l'Illinois n'a pas
décelé tous les cas d'enfants
ayant subi des mauvais traitements, comme, au Québec, nous ne les
décèlerons pas non plus au moins dans les premières
années.
Donc, M. le Président, c'est à la lumière de ces
faits que le gouvernement croit qu'il importe d'apporter une législation
qui est de nature à nous permettre de dépister les cas où
il peut y avoir eu mauvais traitements et, s'il est nécessaire, de
permettre que l'enfant soit retiré de son milieu familial, soit avec le
consentement de ses parents, soit par une décision de la cour du
Bien-Etre social en vertu de la Loi de la protection de la jeunesse. Car une
intervention au moment approprié pourra peut-être empêcher
des blessures encore plus graves par la suite; elle pourra peut-être
empêcher la mort de tels enfants. C'est pour cela que dans le projet de
loi nous avons créé ce Comité pour la protection de la
jeunesse, qui recevra les dénonciations qui lui viendront des personnes
qui peuvent être au fait de telles situations. Le comité pourra
faire enquête. L'obligation est même faite au comité de
faire enquête; il dépêchera auprès de la famille des
enquêteurs qui iront voir de quoi il s'agit. S'il s'agit
évidemment d'une dénonciation qui n'est pas fondée et qui
est purement vindicative à l'égard de cette famille, eh bien, il
est évident que l'enquête n'ira pas plus loin.
Mais s'il y a un fondement, si la situation paraît, disons donc,
une situation qui se serait produite à un moment donné dans des
circonstances très spéciales, sans qu'il y ait crainte que cela
ne se reproduise dans l'avenir, car il n'y a aucun passé de mauvais
traitements dans cette famille, le comité pourra avoir certains agents
qui iront visiter la famille régulièrement de façon
à voir si tout se passe bien et peut-être l'épauler pour
éviter que de telles choses ne se reproduisent. Si, d'autre part, il
s'agit d'un milieu où il y a lieu de craindre que les mauvais
traitements puissent se renouveler, eh bien, le comité pourra faire des
pressions morales sur la famille en disant: Ne croyez-vous pas qu'il serait
dans votre intérêt comme dans celui de l'enfant de confier
volontairement la garde de cet enfant à un foyer nourricier ou à
une institution? Si la famille est prête à le faire, le
problème sera réglé.
Mais en dernière analyse, si nous nous trouvons devant une
famille qui est complètement récalcitrante et où il y a
lieu de craindre de mauvais traitements ultérieurs, le comité
pourra demander l'intervention de la cour du Bien-Etre social et là, une
enquête en forme judiciaire aura lieu, une enquête de protection de
la jeunesse au cours de laquelle on pourra entendre les personnes qui sont
aptes à rendre un témoignage sur ce qui s'est passé. Si le
juge trouve que l'enfant est en péril, il pourra le retirer de la
famille et le confier à des tiers ou à une institution
appropriée de façon à éviter des mauvais
traitements ultérieurs.
Voilà quelle est la fonction de ce comité. Et ce
comité, je l'admets facilement, il se situe à peu près
à égale distance entre la Justice et les
Affaires sociales. Le comité en question a une fonction
d'intervention qui se veut largement sociale mais qui n'empêche pas un
développement judiciaire ultérieur si le cas particulier le
nécessite. Les cas qui peuvent le nécessiter de la façon
la plus caractéristique, les cas les plus graves, où vraiment
l'enfant a été soumis à des mauvais traitements
très sérieux et qui peuvent laisser deviner facilement qu'il y
ait récidive par la suite, à ce moment le comité doit
immédiatement mettre en marche les rouages judiciaires pour retirer
l'enfant de son milieu et pour lui éviter des mauvais traitements
ultérieurs.
Je dis donc que ce comité est à égale distance des
deux ministères en question. Et si nous avons choisi de le situer au
sein du ministère de la Justice c'est parce que nous avons pensé
que la fonction essentielle de ce comité est quasi judiciaire. Il fera
des interventions même au niveau social dans les familles et des
enquêtes, il pourra donner des conseils aux familles de délaisser
volontairement la garde de leur enfant parce qu'elles sont en danger de
récidiver et, en les convainquant, il pourra leur éviter de le
faire. Sans compter aussi le rôle de ce comité de mettre en marche
l'action judiciaire pour retirer l'enfant de son milieu familial. Nous avons
donc pensé qu'il était préférable, malgré
ses deux vocations sociale et judiciaire, de le situer au sein du
ministère de la Justice.
Je crois que ce projet de loi permettra d'assurer une protection bien
accrue à l'égard de ces cas. Et, parmi les moyens qui sont mis
à la disposition du Comité pour la protection de la jeunesse, il
y a ce fichier que le comité sera chargé de tenir. Ce fichier
devra comprendre les noms des familles et des enfants où il y a eu de
tels mauvais traitements. Et ainsi on aura, même malgré les
déplacements des familles à travers le Québec, des
renseignements sur les familles où des événements
semblables se sont déjà produits dans le passé, ce qui
permettra aux hôpitaux, ainsi qu'au Comité pour la protection de
la jeunesse de mieux apprécier l'opportunité d'intervenir dans
des cas particuliers, si des circonstances le requerraient.
De plus ce comité sera multidisciplinaire.
Il sera composé de personnes qui représentent à la
fois les milieux médicaux, les milieux de l'éducation et les
milieux de justice de façon que l'envergure du comité soit telle
qu'elle s'ouvre sur toutes les dimensions qui sont celles du problème
des enfants et surtout des enfants soumis à de mauvais traitements.
Egalement, le comité aura des enquêteurs à sa
disposition, enquêteurs qui ne seront pas des policiers et qui ne feront
pas des enquêtes de police, mais qui seront des enquêteurs
spécialisés dans ce genre de problèmes, sachant faire la
part des choses dans ces situations.
Je crois qu'avec ce personnel le comité devrait être
capable de répondre aux dénonciations qui peuvent être
faites et qui peuvent requérir son intervention.
Je lisais un mémoire préparé par la Ligue des
droits de l'homme sur le projet de loi no 78, c'est-à-dire le
projet de loi en question, et la Ligue des droits de l'homme posait la question
suivante: Pourquoi le ministre de la Justice n'a-t-il pas étendu
l'obligation de dénonciation à des cas autres que ceux de mauvais
traitements? Pourquoi le ministre de la Justice n'a-t-il pas, en fait, rendu
obligatoire, pour toute personne, de dénoncer un cas où un enfant
est en état de danger moral, par exemple, à cause de son
milieu?
C'est parce que si nous avions été aussi loin que cela,
nous aurions ouvert une porte beaucoup trop grande à la
dénonciation, sinon à la délation des familles entre elles
qui peuvent approuver ou qui ne peuvent approuver, suivant le cas, la
manière dont tel enfant est élevé dans telle famille ou
tel autre enfant est élevé dans telle famille. Je pense que
l'obligation de dénoncer aurait été beaucoup trop large,
beaucoup trop étendue et aurait ouvert la porte à des abus
très considérables.
C'est la raison pour laquelle nous avons restreint le projet de loi au
point de vue de l'obligation de dénoncer les mauvais traitements
physiques, c'est-à-dire aux coups et blessures, à la
malnutrition, au cas, par exemple, de l'enfant Lessard que je mentionnais plus
tôt dans mon exposé, d'un enfant, par exemple, laissé dans
un placard, sans aucun soin, pendant une période de 45 jours, en somme
d'un enfant qui est laissé à l'abandon. Là, il y aurait
sûrement une obligation de dénoncer un tel cas au Comité
pour la protection de la jeunesse. Nous n'avons pas voulu aller plus loin que
cela et commencer, en somme, à introduire, par la loi, de la discorde
entre les familles ou les différents milieux québécois qui
peuvent avoir des idées assez différentes sur la façon
d'élever les enfants.
Je pense que cette critique de la Ligue des droits de l'homme nous
démontre qu'ils n'ont pas, malgré tout le sérieux de cet
organisme, la bonne foi de ce groupe, réellement compris la
portée du projet de loi puisqu'ils en faisaient leur premier sujet de
grief.
Je pense que, pour qui va réfléchir à un tel
problème, pour qui va donner un instant de réflexion à une
telle suggestion, elle tombe automatiquement parce qu'en fait, nous ne pouvons
pas organiser un système de dénonciation générale,
même avec les meilleures intentions du monde de protéger les
enfants en état de danger moral.
Qu'il nous suffise, M. le Président, aujourd'hui, de
régler le cas des enfants en état de danger physique et je pense
que nous aurons déjà fait beaucoup pour eux et beaucoup pour la
société.
M. le Président, je conclus tout simplement en invitant les
collègues à réfléchir au fait que, malgré le
secret professionnel, les médecins, les hôpitaux, enfin toute
personne ayant un secret professionnel sera néanmoins obligé de
dénoncer de tels cas. Nous avons pensé que l'état de
faiblesse de l'enfant, le fait qu'il est sans défense, le fait qu'il
subit une agression ou de mauvais traitements étaient une justification
suffisante pour faire tomber le secret professionnel dans ces cas et faire en
sorte que les professionnels, à ce moment, soient obligés quelle
que soit la source de leurs connaissances sur des cas, de passer par-dessus
cette défense qui, normalement, les aurait empêchés de se
constituer dénonciateurs. J'aimerais, si j'avais le chef de l'Opposition
en Chambre ici, en discuter avec lui. S'il n'était pas à cette
commission de l'Assemblée nationale, en train de perdre le temps de tout
le monde avec la loi des députés, j'aimerais avoir une discussion
avec lui à un plus haut niveau dans le sens que je le
remènerais...
M. GARNEAU: Avec le député de Chicoutimi.
UNE VOIX: C'est impossible.
M. CHOQUETTE: C'est possible parce qu'il va être capable de lui
dire ce que j'ai dit. J'aimerais simplement rappeler au chef de l'Opposition
les critiques qu'il faisait à l'égard de la loi sur les droits et
libertés fondamentales de la personne, quand, dans cette Chambre, il
disait: Mais le gouvernement apporte une loi bien ordinaire; la loi du
gouvernement ne transcende pas toutes les autres lois. C'était sa
critique contre la charte des droits de l'homme. Je montrerais au chef de
l'Opposition, s'il était ici en Chambre, deux principes qui sont
absolument contradictoires dans cette charte ou, du moins, qui
requièrent de s'interpréter l'un par rapport à l'autre.
D'abord, le secret professionnel est consacré dans la charte des droits
de l'homme. Il est consacré, il est absolu et les tribunaux doivent y
donner suite. Ensuite, il y a le principe aussi qui est énoncé
que tous les enfants ont droit à la sécurité et à
la protection de leur famille et, à défaut, de la loi. Donc, je
prends ces deux principes et je dis: Comment s'appliquent-ils à
l'occasion d'une loi comme celle que je présente aujourd'hui et sur
laquelle je suis sûr que les partis d'Opposition vont voter
favorablement, parce que je connais leur état de faiblesse au moment
où nous terminons une session. Il est normal qu'ils soient moins
résistants sur le plan intellectuel.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ne présumez pas!
M. CHOQUETTE: Ils se laissent gagner plus facilement par le ministre de
la Justice, et ainsi je peux les amener à voir la
vérité.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ne faites pas de présomption.
M. CHOQUETTE: Tout cela est normal, nous les avons à l'usure, M.
le Président, et cette usure est bénéfique pour eux, parce
que leur
cerveau s'ouvre. Au bout d'un certain temps, ils voient jusqu'à
quel point le gouvernement et le ministre de la Justice en particulier leur
apportent de bonnes lois. Donc, je n'ai aucun doute, M. le Président,
qu'ils vont voter en faveur de cette loi. Mais j'attire l'attention du
député de Chicoutimi qui m'écoute et qui est avocat:
Comment concilie-t-il le principe du secret professionnel, d'une part, et le
principe du droit des enfants à la sécurité et à la
protection dans leur famille?
Dans le projet de loi que je présente à la Chambre ce
soir, il va de soi que le secret professionnel tombe devant l'impératif
de la protection de l'enfant. Il tombe. Donc, le principe du secret
professionnel n'est pas un principe absolu. Si j'avais eu le chef de
l'Opposition devant moi, je lui aurais expliqué cela. Je lui aurais dit:
Vous voyez, M. le chef de l'Opposition, comme vos critiques étaient mal
fondées quand nous avons parlé de cette charte des droits de
l'homme et que vous me faisiez des reproches, disant: Comment se fait-il que
les principes que vous énoncez dans votre charte ne soient pas absolus?
Eh bien, je lui dirais, un mois après avoir déposé cette
charte: Voyez-vous comme le principe du secret professionnel, même
consacré par la charte, n'est pas un principe absolu et qu'il y a assez
peu de choses absolues d'ailleurs dans la réalité? Mais
peut-être que le député de Chicoutimi va se faire mon
interprète auprès du chef de l'Opposition...
M. BEDARD: ... bien mauvais, bien mauvais.
M. CHOQUETTE: Non, j'ai confiance au député de Chicoutimi.
Il n'est pas encore complètement corrompu par son parti.
M. BEDARD: II commence par...
M. CHOQUETTE: C'est parce qu'il vient d'arriver à la Chambre,
c'est un nouveau député. Il est rempli d'idéal. Plein de
bonne foi. Prêt à entendre la vérité. C'est cela. Il
n'a pas encore été complètement corrompu par le milieu
dans lequel il se trouve. C'est la raison pour laquelle je pense qu'il est
capable de dire au chef de l'Opposition ce que je suis en train de lui dire ce
soir. Je dis ceci sérieusement quand même simplement
pour illustrer, comment et pourquoi il faut que le secret professionnel des
médecins, auquel nous tenons tous et je pense qu'il y a
peut-être des médecins dans cette Chambre, je vois le
député de Frontenac, je ne vois pas d'autres médecins que
le député de Frontenac, d'ailleurs, c'est le meilleur
médecin de la... il y a aussi le ministre des Affaires municipales qui
est un pédiatre le secret professionnel des médecins,
dis-je, est une chose particulièrement importante. Mais voyez-vous, dans
un cas particulier, lorsque nous parlons d'enfants soumis à de mauvais
traitements, à ce moment, le bien-être de l'enfant l'emporte
même sur un secret professionnel dont nous reconnaissons tous la
valeur.
Je conclus, M. le Président, car je sens que le
député de Chicoutimi est impatient de prendre la parole. J'ai
hâte moi-même de l'entendre pour avoir son point de vue sur ce
projet de loi.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Pilote): L'honorable député de
Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'attention le ministre de la Justice, surtout dans les
dernières cinq minutes de son exposé, vanter son projet de loi.
Je pense bien que si la suffisance tuait, le ministre serait mort depuis au
moins deux ou trois minutes. Il y a mis vraiment un ton de louange qui,
à mon sens, dépasse le mérite. J'admets que ce projet de
loi s'imposait, c'est clair. D'ailleurs, le ministre de la Justice a senti le
besoin de le présenter, même si c'est à la fin d'une
session parce qu'il y voyait une nécessité, étant
donné que les mesures législatives déjà en place
il le réalise ne permettent pas d'assurer une protection
équitable, efficace aux enfants soumis aux mauvais traitements.
L'importance de ce projet de loi ne fait aucun doute. D'ailleurs,
lorsque nous avons soulevé à différentes reprises le
problème des enfants mineurs qui étaient hébergés
dans des prisons pour adultes, par ce biais, nous avions parlé
également de la nécessité d'une refonte, d'une
modification de la Loi de la protection de la jeunesse, et le ministre de la
Justice s'était engagé à présenter à la
Chambre un projet de loi dans le sens de celui qu'il nous présente ce
soir. En cela, nous pouvons dire qu'il a tenu parole.
Cependant et cela, ce n'est pas négatif pour le ministre
de la Justice il ne faut quand même pas conclure en disant que le
projet de loi est un chef-d'oeuvre.
M. GARNEAU: C'est difficile de faire mieux!
M. BEDARD (Chicoutimi): II est clair qu'il est très difficile de
légiférer dans une matière telle que celle-là parce
qu'il y a la nécessité de concilier plusieurs droits qui, en
fait, sont concernés. Entre autres, il y a le droit qui s'applique
à la protection du secret professionnel dont il est fait état
dans le projet de loi. Il y a également la conciliation avec le droit
à la protection de la vie privée de la famille. Il y a
également à concilier un des droits qui concernent la
responsabilité de la cellule familiale. Il y a également le droit
fondamental de l'enfant à être protégé contre de
mauvais traitements.
C'est évident, M. le Président, que le projet de loi nous
arrive à la dernière minute. Il aurait été, j'en
suis convaincu, préférable, vu son importance, qu'il nous arrive
en une autre
période. Il aurait été également
préférable je le crois que sur un tel projet de loi
il y ait eu la possibilité de faire des consultations. Je suis convaincu
que tous les intéressés par ce projet de loi, entre autres la
Ligue des droits de l'homme et bien d'autres organismes, M. le
Président, auraient aimé se faire entendre. Je suis convaincu que
les témoignages ou les recommandations qu'ils auraient pu faire au
niveau d'une commission parlementaire auraient été de nature
à améliorer ce projet de loi.
Le ministre de la Justice, en parlant des recommandations ou des
appréciations faites par la Ligue des droits de l'homme, s'est
arrêté à la première recommandation qui a
été faite par la Ligue des droits de l'homme alors que celle-ci,
entre autres, demandait une modification, à savoir que la notion de
mauvais traitements ne devrait pas être restreinte au physique mais
qu'elle devrait également s'appliquer pour les mauvais traitements
psychologiques.
Sur ce point, je dois dire que je suis d'accord avec le ministre de la
Justice, à savoir qu'il est bien difficile d'aller plus loin que de
légiférer en ce qui regarde les mesures à prendre dans le
cas de mauvais traitements du point de vue physique. Etendre la notion de
responsabilité jusqu'aux mauvais traitements psychologiques, cela aurait
probablement été ouvrir la porte à une certaine
délation systématisée qui, au bout de la ligne, n'aurait
pas nécessairement apporté des résultats positifs. Il
reste quand même qu'il aurait été je ne veux pas me
poser en expert là-dessus, M. le Président important et
sûrement avantageux d'entendre la Ligue des droits de l'homme sur ce
point en particulier. Elle aurait eu peut-être d'autres
considérations à faire valoir que celles que font valoir à
l'Assemblée nationale le ministre de la Justice et moi-même,
puisque, pour une fois, nous sommes d'accord sur ce point précis.
Cependant la Ligue des droits de l'homme a fait d'autres
représentations qui me semblent très valables et je suis
convaincu que le ministre de la Justice s'est borné à citer
seulement la première recommandation. Il aurait eu avantage,
peut-être, à mentionner également plusieurs autres
recommandations qu'elle a faites. Entre autres, la Ligue des droits de l'homme
recommande que l'enfant qui pourrait être victime de mauvais traitements
ailleurs que dans la famille soit également touché par ce projet
de loi, ce qui voudrait dire qu'il y aurait lieu de l'amender peut-être
dans ce sens. Nous aurons l'occasion, de toute façon, d'en discuter lors
de l'étude article par article.
Egalement, la Ligue des droits de l'homme recommandait qu'à la
suite d'une plainte une obligation devrait être faite au comité ou
à ses employés et délégués d'entreprendre
une action dans un délai de 24 heures. J'ai hâte de voir quelles
seront les remarques du ministre de la Justice sur cette recommandation.
La Ligue des droits de l'homme recommandait aussi l'accès au
comité ou à ses employés, en tout temps, 24 heures par
jour, y compris les jours non ouvrables. Je ne sais pas quelles seront les
remarques du ministre de la Justice sur ce qu'il entend par la
disponibilité des membres de la commission ou du comité qu'il a
formé par cette loi, le Comité pour la protection de la
jeunesse.
Enfin, il y a d'autres recommandations que nous soumettrons lors de
l'étude article par article et qui, à mon sens, sont très
sérieuses. Je ne crois pas qu'on puisse, comme l'a fait le ministre de
la Justice, jeter, du revers de la main, le mémoire qui a
été fait par la Ligue des droits de l'homme en s'attardant
simplement à la première de leurs recommandations.
Concernant la création d'un Comité pour la protection de
la jeunesse, nous n'aurions qu'une remarque principale à faire sur ce
point, à savoir qu'on a nettement la conviction qu'on établit un
comité de surveillance, mais que son mandat est si vaste et que ses
responsabilités sont si grandes qu'il aurait fallu prévoir des
mécanismes, dans la loi, beaucoup plus précis en ce qui concerne
son action.
Même si le ministre de la Justice a tenu à vanter à
grands renforts de publicité son projet de loi, ça ne nous
empêche pas de nous poser la question, à savoir: jusqu'à
quel point, malgré l'urgence du problème, il n'y aurait pas eu
avantage à retarder quelque peu, je ne dis pas retarder
indéfiniment, mais retarder quelque peu ce projet de loi-là. On
sait que, d'une part, il y a le livre blanc sur l'administration de la justice
qui est censé proposer une solution concernant ce problème.
Il y a également la Commission de révision du code civil
qui doit toucher ce sujet dans le deuxième tome de son rapport sur la
famille, entre autres concernant le chapitre qui retouchera la perte ou la
portée de la puissance paternelle.
Il y a également le Comité de la protection de l'enfance,
de l'hôpital Sainte-Justine de Montréal, qui vient de rendre
public, tout récemment, un mémoire sur ce sujet-là. Il y a
également la ligue des droits de l'homme, qui étudie actuellement
le sujet. Je comprends qu'elle a eu une réaction spontanée,
à la parution du projet de loi.
Mais, il reste quand même, selon nos informations, que la Ligue
des droits de l'homme était à faire une étude vraiment
plus approfondie de tous ces problèmes que constituent les enfants qui
sont soumis à de mauvais traitements. Comme le ministre l'a dit, et sur
cela je suis d'accord avec lui, l'action de ce comité de surveillance,
de ce Comité pour la protection de la jeunesse, se situe vraiment entre,
d'une part, le ministère de la Justice et le ministère des
Affaires sociales; il y a, de ce côté, le ministère des
Affaires sociales qui doit avoir ses points de vue sur la protection de
l'enfance et que nous aimerions connaître. Nous avons ici, ce soir, la
chance d'avoir avec nous le ministre d'Etat aux Affaires sociales. Alors,
peut-être qu'on aura
l'occasion de connaître les points de vue du ministère sur
ce projet de loi, puisqu'il est clair que, si cela touche, d'une part, le
ministère de la Justice, en grande partie cela touche également
le ministère des Affaires sociales.
M. le Président, c'est l'ensemble des remarques que nous avons
à faire à ce stade-ci. Nous aurons l'occasion, lors de
l'étude du projet article par article, de poser les questions qui
s'imposent concernant surtout les mécanismes d'action qui sont
prévus au Comité qui est formé pour la protection de la
jeunesse. En somme, M. le Président, nous savons que c'est une loi qui
était nécessaire et qu'elle comble, même si elle n'est pas
parfaite, loin de là, un vide dans l'intérêt
supérieur de l'enfant. Nous savons que ce projet de loi n'était
quand même pas facile à rédiger, puisqu'il s'agissait de
concilier les différents droits dont nous avons parlé tout
à l'heure. Alors, M. le Président, en ce qui regarde l'Opposition
officielle, nous voterons pour le projet de loi en deuxième lecture.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Pilote): L'honorable député de
Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, je m'étais demandé un
jour, en réfléchissant à haute voix, quand aurons-nous une
société de la protection des humains, alors que nous savons tous
que nous avons depuis longtemps une société de protection des
animaux. Je n'avais pas répondu à cette question à ce
moment-là, M. le Président, mais la loi qui est
présentée devant nous ce soir répond partiellement
à cette question. Je ne dirai pas au ministre: Vous présentez une
mauvaise loi. Je dis: Vous présentez une bonne loi; elle aurait dû
être présentée bien avant aujourd'hui. Bien entendu, il y a
de la place à de l'amélioration dans cette loi, comme dans toutes
les autres lois. Cependant, lorsqu'elle sera appliquée il y a un
commencement partout ceux qui auront à l'appliquer, à
surveiller son application reviendront probablement devant nous avant longtemps
pour nous suggérer certaines modifications. Mais ces modifications, je
pense que nous pourrons les envisager en connaissance de cause,
c'est-à-dire en ayant l'expérience de l'application d'une telle
loi.
M. le Président, une loi concernant la protection des enfants
soumis à de mauvais traitements, c'est une loi qui aurait dû
exister depuis toujours. Dans quelle proportion y a-t-il des enfants qui sont
soumis à de mauvais traitements? C'est difficile à dire. Je ne
crois pas que nous puissions facilement nous fier à des statistiques
dans ce sens, parce que, M. le Président, il y en a probablement
beaucoup plus qui sont soumis à de mauvais traitements qu'il n'y en a de
connus. En effet, il n'existe, à ma connaissance, présentement
aucun mécanisme réellement valable non seulement pour
détecter, mais pour en arriver à corriger les abus dans le
domaine des mauvais traitements physiques aux enfants.
Bien sûr, tous, nous avons nos petites expériences, tous,
nous avons eu un jour ou l'autre des gens qui nous ont rapporté des
situations extraordinairement pénibles, mais je pense que personne
ou du moins très peu de gens ne savait de quelle
façon s'y prendre pour amener les autorités à corriger ces
situations. Qui devait prendre l'initiative? Qui devait poursuivre? De quelle
façon devait-on dénoncer? Comment devait-on s'y prendre? Ce sont
des questions que tellement de gens se posaient que finalement les cas qui
auraient dû être soumis à l'attention des autorités
ne sont pas toujours arrivés à l'attention des
autorités.
Cependant, nous avons tous un jour ou l'autre pris connaissance
publiquement, par la voie des journaux ou d'autres moyens, de certains abus.
Mais lorsque le public est mis au courant de ces abus, c'est parce qu'il est
trop tard, c'est parce que ces abus sont allés tellement loin que les
enfants sont décédés ou tellement blessés que
finalement, une fois que les autorités en ont pris connaissance, elles
n'ont pu malheureusement corriger la situation.
Ce qui importe, ce n'est pas seulement de connaître la situation,
de savoir qu'il y a des enfants maltraités; ce n'est pas seulement non
plus de dénoncer et de poursuivre des gens. Ce qui importe
réellement, c'est la protection de l'enfant. C'est de voir à ce
que ça ne se produise pas. Evidemment, si nous n'avions pas ce genre de
loi, si dans le projet de loi actuel il n'y avait pas l'obligation de
dénoncer, je pense que la pression nécessaire pour éviter
un maximum d'ennuis aux enfants ne serait pas là.
Parce qu'il faut le réaliser, une fois que l'obligation de
dénoncer va être connue de tout le monde, il y a sûrement
beaucoup d'enfants qui ne seront pas assujettis aux mauvais traitements
auxquels ils auraient été assujettis avant ce projet de loi. La
peur on l'a dit souvent est le commencement de la sagesse.
Quand ce projet de loi sera connu et j'espère que le
ministre a l'intention de faire toute la publicité nécessaire
autour de ce projet de loi quand les gens vont savoir que les voisins
peuvent, à n'importe quel temps, faire des dénonciations au cas
où ils soumettraient leurs propres enfants à de mauvais
traitements physiques, ils seront beaucoup plus prudents. Je ne parle pas de
l'ensemble de la population, car ces mauvais traitements physiques aux enfants
sont des cas isolés. Ce n'est pas la majorité.
Même s'il y avait un seul enfant au Québec un seul
ce n'est pas tellement dont la vie serait sauvée par ce projet de
loi, le ministre aurait eu raison de le présenter, car c'est une vie
humaine, et une vie humaine, c'est beaucoup de choses. Il y en a beaucoup plus
d'un, mais ce n'est pas la majorité, c'est une minorité. Cette
minorité, nous devons la protéger, nous devons protéger
ces enfants et faire savoir à certains
parents qui n'ont aucune espèce de scrupule en ce qui concerne
les mauvais traitements physiques aux enfants qu'en vertu de ce projet de loi
il y aura des yeux de témoins tout autour d'eux qui vont être aux
aguets. Qui seront-ils? Personne ne le saura. Ce projet de loi va loin en
créant l'obligation de dénoncer.
Je n'accepterais pas ce principe dans d'autres projets de loi. Jamais!
Mais dans ce projet de loi en ce qui concerne la protection des enfants qui
n'ont, eux, aucun moyen de protection personnelle, qui sont des innocentes
victimes, il faut que quelqu'un les protège.
Il faut que quelqu'un fasse la surveillance et c'est pourquoi je suis
d'accord avec le ministre quand il nous dit son désaccord avec la Ligue
des droits de l'homme en ce qui concerne le point qu'il a soulevé. Je ne
parlerai pas des autres, mais du point qu'il a soulevé, à l'effet
qu'il ne faut pas étendre la protection de ce projet de loi aux mauvais
traitements psychologiques ou autres parce que cela serait vraiment
exagéré, surtout avec le pouvoir et l'obligation de
dénoncer. Cela serait vraiment exagéré. Vous verriez des
situations extraordinaires où, comme le dit si bien le ministre, dans ce
cas, des membres d'une même famille profiteraient des dispositions de
cette loi pour laver leurs petites chicanes personnelles qui n'ont rien
à voir avec les enfants. Cela serait, évidemment, un pouvoir
extraordinaire et une possibilité d'abus sans
précédent.
C'est pourquoi je suis d'accord sur ce projet de loi. Je suis d'accord
parce que les enfants ont besoin d'être protégés. Cela
s'adresse aussi bien aux enfants qui sont sous la garde de leurs parents
qu'à une autre sorte d'enfants qui sont sous la garde de foyers
nourriciers. Je n'ai pas besoin de vous dire je ne suis pas lié
par le secret professionnel, cela ne me gêne pas de le dire
lorsque nous rencontrons des électeurs dans nos bureaux de
député, on nous fait part souvent de certains petits
problèmes soulevés par certains foyers nourriciers pour qui
l'argent versé par le bien-être social est plus important que le
confort de l'enfant qu'ils ont sous leur garde. Je ne nommerai personne parce
que la litanie serait trop longue, mais c'est un fait et tous les
députés sont à même de le vérifier. Tous les
députés le savent. On nous rapporte assez souvent ces cas
où les enfants sont maltraités dans des foyers nourriciers.
Alors, je ne m'adresse pas uniquement au ministre de la Justice. Cela
s'adresse en même temps au ministre d'Etat aux Affaires sociales, qui
nous fait l'honneur d'être des nôtres ce soir. De ce
côté, il y a beaucoup d'amélioration à apporter dans
le choix des foyers nourriciers, dans les enquêtes à être
faites par le bien-être social ou des agences sociales pour choisir des
foyers. Ces enfants qui ont besoin de foyers nourriciers sont ou bien des
orphelins ou bien des enfants dont les parents sont séparés. Ce
sont des enfants qui ont besoin d'autant plus d'attention et de bons soins
qu'ils sont désavan- tagés par le fait qu'ils ne sont pas dans
leur propre foyer avec leurs parents.
Il y a également cette question et j'y fais
référence parce que le ministre en a parlé; ce n'est pas
du mauvais traitement physique de malnutrition dans certains foyers.
Sans être un mauvais traitement physique, c'est peut-être ce qui
amène certains mauvais traitements physiques.
C'est une cause. J'ai eu connaissance que des gens dans des familles
manquaient du nécessaire pour des raisons de toutes sortes, des raisons
économiques ou autres, parce qu'il y avait un besoin qui n'était
pas comblé, parce qu'il y avait malnutrition. Par la suite, il en
découle autre chose et cela regarde drôlement le ministre de la
Justice. Il y a des situations où les parents, à tort ou à
raison je ne les jugerai pas en sont arrivés à
entraîner des enfants à faire du vol à l'étalage
pour tâcher de faire vivre les autres membres de la famille.
Je n'accepte pas ce genre de choses et je parle de façon
générale. Je ne veux pas que le ministre me demande de citer des
noms. De toute façon, je ne le ferai pas. Là, je me sentirais
lié par mon secret professionnel.
M. CHOQUETTE: Je ne veux pas le savoir.
M. SAMSON: Mais je pense que le ministre est parfaitement au courant de
ces choses. C'est déjà arrivé, cela ne veut pas dire que
cela n'arrivera pas encore un jour. Il faut éviter cela et pour
éviter cela, évidemment, il faut aller à la source du mal.
Or la source du mal, dans des cas comme cela, est la responsabilité
parentale oui, mais il peut y avoir une autre responsabilité. Si la
responsabilité parentale est entravée par un manque à
gagner quelconque, entravée par des malchances quelconques, il y a aussi
la responsabilité gouvernementale. Dans ce domaine, cela relève
des Affaires sociales, encore une fois, pas du ministre d'Etat aux Affaires
sociales, quand même on n'est pas pour lui mettre tous les maux de la
terre sur le dos, mais son ministre des Affaires sociales qui aurait, lui,
beaucoup d'avantages à circuler un peu plus dans toute la province et
regarder les problèmes qui se posent.
M. le Président, si le ministre des Affaires sociales circulait
physiquement dans toute la province au lieu de circuler par l'entremise de sa
machine IBM à Québec, il en trouverait des problèmes.
Cette expérience serait sûrement avantageuse, et pour le ministre
et pour les citoyens du Québec qui sont dans ces cas spécifiques
que je viens de mentionner. Ces choses découlent autant de la
responsabilité du gouvernement que de la responsabilité des
parents dans certains cas, mais ceci crée un stress, à un moment
donné, et cause, dans certaines familles, des dépressions.
La mère de famille, par exemple, qui se voit aux prises avec un
problème d'ordre économique. Vous savez, quand la mère de
famille
n'est pas capable de boucler les deux bouts, à la fin de chaque
semaine, de chaque quinzaine, chaque mois, qu'est-ce qui lui passe par la
tête? Toutes sortes de choses. Le père arrive à la maison,
puis la mère l'attend avec les problèmes que les enfants ont
rapportés de l'école. Il ne faut pas oublier que quand le
père a fait sa journée d'ouvrage à petit salaire, qu'il a
travaillé à la sueur de son front, qu'il arrive à la
maison et que son épouse l'attend avec tous les problèmes que les
enfants ont rapportés de l'école c'est un problème
humain, c'est un problème qui existe il arrive, des fois,
qu'avant de manger la soupe, le gars n'a plus faim, parce qu'il a trop de
problèmes. Cela ne se produit pas éternellement sans que cela
finisse par sauter. Là, les enfants se retrouvent dans un foyer
nourricier souvent avec des gens qui les maltraiteront.
Alors cela, il faut le savoir, il faut le considérer et il faut
avoir l'intention de corriger cela aussi. Bien entendu, je ne mettrai pas tout
sur les épaules du ministre de la Justice, c'est un ministre qui a un
ministère, et le problème que je viens de mentionner
relève d'un autre ministère. Mais ces ministères devraient
se rencontrer plus souvent, parce que ce que le ministre de la Justice veut
corriger, avec les bonnes intentions qu'il nous présente, ce qu'il veut
corriger, lui, cela peut peut-être ne pas se corriger, parce qu'à
l'autre ministère, on ne prend pas toutes ses
responsabilités.
J'invite le ministre à consulter davantage le ministre des
Affaires sociales et à lui faire comprendre cela. Autant j'ai compris,
autant j'ai porté toute mon attention au ministre de la Justice quand il
s'est adressé au député de Chicoutimi, tantôt, en
lui disant: Allez dire cela au chef de l'Opposition, autant je dis au ministre
de la Justice: Allez dire cela au ministre des Affaires sociales. Vous allez
lui rendre service, vous allez nous rendre service en même temps.
Comme dit le député de Chicoutimi, le ministre des
Affaires sociales ne veut rien savoir de cela, c'est peut-être vrai,
parce que cela fait longtemps qu'on le brasse, cela n'a pas l'air de donner des
résultats.
M. CHOQUETTE: Je pense que vous êtes méchant,
là.
M. SAMSON: M. le Président, non, non, je ne suis pas
méchant, au contraire, je suis de bonne humeur, ce soir, je suis de
bonne humeur.
M. CHOQUETTE: Vous avez une drôle de belle humeur.
M. SAMSON: Si j'étais méchant, cela ferait des
flammèches plus que cela, mais j'attends quand je vais voir le ministre
des Affaires sociales, parce que c'est à lui que j'en ai, c'est contre
lui que j'en ai, pas contre le ministre de la Justice. Le ministre de la
Justice a un projet de loi, en tout cas pour une fois, qui a du bon sens. Je
trouve qu'il a du bon sens ce projet de loi. Mais il ne pourra pas l'appliquer
facilement ou, du moins, il pourra l'appliquer en exerçant des pressions
sur des gens qui seront peut-être des victimes des mauvaises politiques
d'un autre ministère. C'est aussi bête que cela, c'est cela.
Il est évident, pour en revenir au projet de loi lui-même
je m'excuse de cette incursion dans le domaine des Affaires sociales,
mais incursion nécessaire malgré que je pense que c'est la
minorité, il y a encore beaucoup trop d'enfants qui sont victimes de
mauvais traitements physiques. Quand on entend dire et qu'on lit dans les
journaux que deux enfants d'une même famille, dans l'espace de deux ans,
ont été victimes de fractures du crâne, un enfant parce
qu'il est tombé du deuxième étage, l'autre parce qu'il est
tombé en bas d'une camionnette, il y a du moins une certaine
négligence. A l'époque, quand on a entendu parler, il y a eu des
soupçons beaucoup plus que cela, mais ce n'est pas facile à
prouver. Et même si on avait prouvé quelque chose contre les
parents, est-ce que cela aurait évité les fractures, les
blessures à ces enfants-là? Non, c'était fait. C'est
pourquoi j'insiste beaucoup plus sur les provisions dans ce projet de loi qui
vont faire réfléchir les gens afin d'éviter que ces
enfants-là soient victimes de mauvais traitements, ce qu'on recherche,
nous, ce n'est pas de punir les parents quand les enfants ont eu des mauvais
traitements. Bien sûr, quand c'est fait, il faut punir, mais ce n'est pas
cela qu'on recherche. Ce qu'on recherche c'est d'éviter que les enfants
subissent de mauvais traitements.
M. le Président, ce projet de loi qui va créer le
Comité pour la protection de la jeunesse, avec un secrétariat
à Montréal et un à Québec, pouvant établir
des bureaux ailleurs au Québec, je vous souligne que ce projet de loi a
tellement d'importance à mes yeux que je suggère
immédiatement au ministre qu'il faut beaucoup plus que des bureaux ou
des pieds à terre à Montréal et Québec. Il faut que
ce soit organisé sur une base qui permettra aux gens de toutes les
régions de pouvoir entrer en communication avec un responsable dans leur
région immédiate et que ce soit connu publiquement. Je ne sais
pas quelles sont les intentions du ministre, mais peut-être y aurait-il
avantage dans la publicité à demander aux gens de s'adresser au
ministère des Communications locales qui ont des bureaux dans toutes les
régions du Québec, qui pourront, eux, les diriger aux endroits
où il faut pour que ces gens-là puissent acheminer leurs plaintes
aux autorités concernées.
Ce comité-là aura des enquêteurs, bien sûr, M.
le Président. Il est évident qu'ils ne pourront pas faire des
miracles, mais le fait d'avoir accès aux endroits qui seront
dénoncés est déjà un moyen qui va permettre de
connaître la vérité, de pouvoir faire la preuve plus
facilement et aussi et c'est toujours cela qui est important
c'est que sachant que tout cela pourra être fait, il y aura une certaine
crainte pour
ceux-là qui ont des intentions de maltraiter les enfants; il y
aura une certaine crainte et plus de prudence, c'est-à-dire qu'ils
feront plus attention. Ils se retiendront plus dans certains cas.
Ce projet de loi donne des moyens qui n'existent pas présentement
en créant l'obligation de dénoncer. Quant à ceux qui sont
tenus au secret professionnel, je ne m'offusque pas du tout qu'on leur
crée à eux également cette obligation de dénoncer.
C'est pas parce qu'on bénéficie, M. le Président, du
secret professionnel qu'on ne doit pas participer aux mieux-être de la
population et surtout des enfants. Ce n'est pas trahir un secret professionnel
que de dire aux autorités qu'on est au courant qu'il y a des enfants qui
sont maltraités.
Bien sûr, si cela nous vient d'une tierce personne qui nous le dit
sous le sceau du secret professionnel, cela dérange un peu le secret
professionnel, mais que ceux-là qui sont liés par le secret
professionnel le disent à la tierce personne: Mon secret professionnel
ne m'empêchera pas de faire la dénonciation. Au contraire, je suis
obligé de la faire. Le sachant à l'avance, ces gens sauront
à quoi s'en tenir. Il n'y aura pas trahison du secret professionnel dans
ces cas.
A part cela, si on le publie, tout le monde va le savoir. Je trouve, M.
le Président, que c'est tellement important qu'on donne la protection
aux enfants qui sont maltraités. On n'a qu'à penser aux exemples
que nous a donnés le ministre tantôt et aux nombreux exemples que
tous les députés pourraient nous donner, si chacun voulait se
lever et nous faire part d'un exemple qu'il connaît, dans son entourage,
dans sa localité ou dans son comté. Tout le monde aurait des
exemples dans ce sens.
C'est pourquoi, M. le Président, je voterai en faveur du projet
de loi no 78.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Pilote): L'honorable député de
Saint-Jean.
M. Jacques Veilleux
M. VEILLEUX: M. le Président, vous devez être très
surpris de voir le député de Saint-Jean se lever pour parler
d'une loi de la protection des enfants soumis à de mauvais traitements,
compte tenu que celui qui vous parle n'a pas d'enfants, puisqu'il est un jeune
célibataire.
M. BIENVENUE: Mais il a l'air d'un enfant.
M. VEILLEUX: M. le Président, l'expérience que j'ai
acquise et que vous avez acquise, vous aussi, dans l'enseignement me porte
à dire quelques mots sur ce projet de loi.
Je sais, M. le Président, que vous, en tant que président,
vous ne pouvez vous exprimer sur ce projet de loi, même si vous
désireriez le faire. Ce que je veux dire au ministre, ici, et compte
tenu de cette courte expérience dans l'enseigne- ment, comme le
signalait tout à l'heure le député de Chicoutimi, c'est
que le projet de loi ne prévoit que les mauvais traitements d'ordre
physique.
J'admets que, lorsqu'on veut parler de mauvais traitements, des
sévices, notamment, psychologiques, c'est un problème très
difficile à cerner. Il peut y avoir d'autant plus que, dans le
projet de loi, on le prévoit de la part des gens une obligation
de dire au comité si tel ou tel enfant subit de mauvais traitements
physiques. C'est entendu que, si on parlait de mauvais traitements
psychologiques, il pourrait y avoir facilement des abus. Mais je ne peux pas
oublier des cas pratiques que j'ai eu l'occasion de rencontrer dans
l'enseignement. Ce n'était pas, à proprement parler, de mauvais
traitements physiques, mais il y avait certains enfants qui subissaient ce que
je pourrais qualifier de mauvais traitements psychologiques ou moraux.
Il va sans dire que quelqu'un qui subit ce genre de traitements s'en
ressent toute sa vie. C'est pourquoi il y aurait peut-être lieu que le
ministre demande au Comité formé pour la protection de la
jeunesse de lui faire peut-être des recommandations sur une
manière de prévoir ce genre de mauvais traitements d'ordre
psychologique.
Hier, au salon rouge, lorsque nous discutions du projet de loi du
ministère de l'Immigration, le ministre a accepté de la part de
l'Opposition un amendement. Au départ, j'étais assez
récalcitrant à ce genre d'amendement, mais je l'ai accepté
compte tenu de l'exposé brillant du ministre de l'Immigration. Je
pourrais peut-être faire la même suggestion au ministre de la
Justice pour le le Comité pour la protection de la jeunesse qu'il forme
ici puisse lui faire des recommandations quant à la transformation de la
loi, quant à l'amélioration de la loi pour les sévices
physiques, mais qu'il puisse en faire aussi pour améliorer la loi et y
inclure éventuellement les sévices d'ordre psychologique.
Le ministre, dans le projet de loi, mentionne que ce comité doit
prévenir de tels excès ou de telles négligences. Je crois
qu'il est beaucoup plus important de s'arrêter sur le mot
"prévenir" que de s'arrêter sur le mot "sévir".
Peut-être, comme première étape pour essayer de
résoudre le genre de problème que j'ai mentionné tout
à l'heure, ce comité pourrait-il essayer de prévenir
plutôt que de sévir lors de mauvais traitements d'ordre
psychologique.
Lorsqu'on parle de prévenir, je rejoins le député
de Rouyn-Noranda qui mentionnait tout à l'heure qu'il faudra
nécessairement que le ministre donne toute l'information voulue pour que
ce projet de loi soit connu par l'ensemble de la population. Il est bien beau
de dire dans un projet de loi que tout citoyen du Québec qui a
connaissance qu'un enfant subit de mauvais traitements physiques est dans
l'obligation, sans délai, d'en avertir le comité, mais encore
faut-il qu'il sache où trouver ce comité. Je suis persuadé
que bien des citoyens qui auront
connaissance que des enfants subissent de tels sévices d'ordre
physique viendront nécessairement voir le député pour
connaître la personne à qui ils doivent s'adresser pour
dévoiler de tels excès ou de telles négligences d'ordre
physique.
Maintenant, le ministre mentionne, et c'est là que je me pose des
questions même si je ne peux pas mentionner le numéro de
l'article, permettez-moi de le faire à l'article 14 h): "Commet
une infraction quiconque refuse de répondre à une personne
visée..." Lorsqu'un des membres du comité fait l'enquête,
essaie d'interroger des personnes pour se rendre compte s'il y a
réellement des sévices d'ordre physique, si la personne refuse de
répondre, il y a infraction à la loi. Le ministre pourra
peut-être nous dire dans sa réplique, tout à l'heure, qui
commet une infraction, subit nécessairement une peine ou a
nécessairement une sanction et de quel ordre peut être cette
sanction ou cette peine si la personne refuse de répondre à un
des commissaires nommés en vertu de la loi.
A la page suivante, à l'article 14 j), on lit: "Toute personne,
même liée par le secret professionnel, qui a des motifs
raisonnables de croire qu'un enfant est soumis à des mauvais traitements
physiques par suite d'excès ou de négligence est tenu
là aussi il y a obligation de signaler sans délai la
situation au comité".
Deuxième paragraphe: "Tout manquement à l'alinéa
précédent celui que je viens de mentionner
constitue une infraction à la présente loi". Là aussi,
j'aimerais tout à l'heure que le ministre nous dise quel genre de
sanction, de peine, par exemple, un médecin qui se sentirait...
Nécessairement, lorsqu'on parle de secret professionnel, il y aura des
individus, notamment des médecins qui vont se sentir tiraillés
entre cette obligation qui est prévue dans le projet de loi no 78 et le
secret professionnel tel que prôné et défendu par le
Collège des médecins.
Il se peut qu'un individu, un médecin se sente plus attiré
ou plus obligé vis-à-vis le secret professionnel que
vis-à-vis de la loi. Il serait bon que les membres de cette Chambre
connaissent le genre de sanction que pourrait encourir un individu qui ne
voudrait pas dénoncer, même si c'est son devoir et s'il a
l'obligation de le faire. Est-ce une sanction identique à celle qu'on
peut retrouver à 14 h), ou est-ce deux sanctions différentes? Le
ministre pourra, tout à l'heure, nous en faire part.
Un autre point a été soulevé par le ministre de la
Justice lorsqu'il nous disait que le rôle de ce comité se situait
à mi-chemin entre les affaires sociales et la justice. J'ose
espérer, M. le Président, que le rôle de ce comité
se situera ou tendra beaucoup plus vers le secteur social que vers le secteur
judiciaire, compte tenu qu'il existe déjà la cour du Bien-Etre
social et que ce rôle du judiciaire, ce rôle de poursuite de
parents qui feraient subir des sévices physiques à des enfants,
ce rôle pourrait être joué, notamment, par le procureur de
la Couronne au nom du ministre de la Justice, pourrait être
discuté, et le jugement rendu à la cour du Bien-Etre social
plutôt j'ai peut-être mal compris ou saisi la pensée
du ministre tout à l'heure qu'une décision de cette nature
prise par le Comité pour la protection de la jeunesse. Le ministre
pourra peut-être clarifier sa pensée là-dessus, tout
à l'heure, parce que je verrais très mal ce comité jouer
un rôle plus important du côté judiciaire que du
côté social, parce qu'alors ce comité serait
peut-être tenté d'oublier un des rôles que le ministre veut
lui faire jouer, qui est celui de prévenir de tels excès ou de
telles négligences.
Je termine, M. le Président, en formulant le voeu que je
mentionnais au départ: que le ministre puisse demander à ce
comité de se pencher sur le problème des mauvais traitements
d'ordre psychologique pour, dans un avenir assez rapproché, pouvoir
cerner ce problème de telle façon que des abusne puissent se
produire mais qu'on puisse régler ce genre de problèmes qui
existent, que j'ai pu, pendant dix ans d'enseignement, rencontrer plusieurs
fois. Merci, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre des Affaires municipales.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je ne voudrais pas que vous jugiez
l'importance de ce projet de loi par la longueur de mon discours parce qu'il
sera court. Mais il me semble normal qu'à l'occasion de la
présentation d'un projet de loi de cette nature et de cette importance,
le seul pédiatre de l'Assemblée nationale ait quelques mots
à dire.
M. le Président, la situation que nous étudions ici, celle
sur laquelle nous nous apprêtons à légiférer, est
absolument exceptionnelle pour ne pas dire inhumaine. Effectivement, quand,
pour un enfant, ses parents qui devraient normalement être ses
protecteurs deviennent ses agresseurs, c'est une situation qui dépasse
notre compréhension du comportement normal de l'être humain.
Pourtant, la situation existe et, comme tous les opinants qui m'ont
précédé l'ont clairement indiqué, la
nécessité d'une telle loi saute aux yeux.
M. le Président, j'ai joué dans ce contexte le rôle
de pédiatre à plusieurs occasions. Je dois vous avouer que la
première fois que j'ai vu à l'hôpital un enfant battu
et je dois dire que l'expression enfant battu, même enfant victime
de mauvais traitements, ne traduit pas tout à fait ce que l'on exprime
en anglais quand on parle du "battered child's syndrom", comme a dit mon
collègue le ministre de la Justice la première fois que
j'ai vu un tel enfant, je n'ai pas cru le diagnostic posé par le
radiologiste. Et pourtant, j'ai été obligé de me rendre
à l'évidence, d'accepter le diagnostic et de surveiller la
possibilité de ce syndrome à d'autres occasions.
J'ai donc eu l'occasion d'en discuter avec des collègues
médicaux, avec d'autres professionnels de la santé et de
constater avec eux le problème juridique qui entourait, et qui entourera
encore jusqu'à l'adoption de ce projet de loi, l'action du professionnel
de la santé qui veut poser un geste utile pour protéger la
santé et même la vie d'un enfant.
Effectivement, il faut que la loi permette au médecin, à
l'infirmière, au travailleur social de mettre de côté le
secret professionnel et ce faisant, de jouir d'une immunité contre des
représailles possibles s'il agit de bonne foi.
J'aimerais dire un mot au sujet du secret professionnel, dans ce
contexte particulier. On a souvent l'impression que le secret professionnel
appartient au professionnel de la santé ou d'une autre profession. Mais
tel n'est pas le cas. Le secret professionnel appartient au client, au malade.
Et il s'agit ici d'un malade qui, par le fait qu'il est enfant, est incapable
de poser le geste légal qui permettrait au professionnel de la
santé de mettre de côté le secret professionnel. Les
parents, qui normalement seraient ceux qui devraient le faire, sont
évidemment les intéressés, à mauvais escient, qui
ne le feraient pas.
Il faut donc que la loi le fasse. L'honorable député de
Rouyn-Noranda a invoqué l'intérêt certain du
ministère des Affaires sociales dans un domaine comme celui-ci, et j'en
suis. Il faudra que dans l'application de la loi on définisse davantage,
de plus en plus clairement le rôle du ministère des Affaires
sociales. Après tout, dans cette situation, ce n'est pas seulement
l'enfant qui a besoin d'aide, il y a les parents aussi qui en ont besoin, et de
façon très particulière.
Mais puisque ces parents, devenus agresseurs au lieu de protecteurs, ne
sont pas capables, dans l'immédiat, avant d'avoir reçu cette
aide, d'agir d'une façon normale, d'assumer leur rôle normal
auprès de leur enfant, nous sommes obligés, nous de la
collectivité, de l'Etat, de nous placer in loco parentis et de nous
occuper de cette responsabilité.
Ce que nous faisons ici a déjà été fait dans
beaucoup d'autres Etats de l'Amérique du Nord et ailleurs dans le monde.
Il était temps que nous posions ce geste.
En terminant, je voudrais relever une suggestion de l'honorable
député de Chicoutimi, qui, tout en reconnaissant l'importance du
projet de loi et tout en lui reconnaissant une certaine urgence, a
suggéré que l'on en retarde l'adoption pour permettre des
consultations, notamment avec la Ligue des droits de l'homme et avec d'autres
intéressés. Je le comprends, mais je dirai tout simplement qu'il
me serait impensable de retarder l'adoption de ce projet de loi.
Est-il imparfait? C'est possible. C'est une oeuvre humaine, elle peut
être imparfaite.
Dans la mesure que l'application d'une telle loi pourra sauver la vie ou
la santé d'un certain nombre d'enfants, comme le disait l'honorable
député de Rouyn-Noranda, même d'un seul, je pense qu'il est
essentiel que nous procédions à l'adoption du projet de loi et
que nous lui apportions ensuite les retouches, les améliorations qui
pourront être indiquées par tous les intéressés et,
notamment, par les professionnels de la santé qui auront à s'en
servir au cours des prochaines semaines et des prochains mois.
Il y aura toujours moyen de bonifier ce projet de loi, mais, si nous ne
l'adoptons pas avant la fin de la présente session, si nous attendons,
donc, un certain nombre de mois avant d'y revenir, à ce moment, nous
aurons, fatalement malgré nous, condamné un certain nombre
d'enfants à subir des blessures et à, peut-être, se trouver
en danger de mort.
Je pense que nous devrons, avec tout le respect que nous devons à
nos collègues de cette Chambre et 'aux intéressés qui
voudraient s'exprimer sur le projet de loi, procéder à son
adoption, l'exposer à la critique de ceux qui s'en serviront et de ceux
qui l'examineront sur papier aussi et revenir, en temps utile, pour lui
apporter des améliorations, s'il y a lieu d'en faire.
M. le Président, je trouve que c'est une des plus importantes
lois jamais adoptées par l'Assemblée nationale. Une loi qui fait
de la collectivité les parents d'un certain nombre d'enfants est
nécessairement une loi extrêmement importante.
Je pense que nous agissons très bien en fin de session, en fin
d'année, en présentant et en adoptant une telle loi.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre de la Justice exerce son droit
de réplique.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, je me rallie, sans
hésitation, à la conclusion du ministre des Affaires municipales,
lorsqu'il a signalé à l'Assemblée l'intérêt
de ne pas retarder l'adoption de ce projet de loi, en raison, je crois, des
interventions prévisibles du Comité pour la protection de la
jeunesse qui sont de nature à éviter des agressions, des actes
pouvant entraîner des blessures les plus graves, sinon la mort de
certains enfants. Je pense que nous ne pouvons pas, sous prétexte de
délibérer, retarder l'adoption de ce projet de loi.
J'ajouterai une chose: Cela fait longtemps que ces problèmes sont
discutés dans divers milieux, même ici dans ce Parlement. J'ai
fait allusion, plus tôt, à ce bill 65, Loi de la protection de la
jeunesse, qui a été l'objet de discussions en commission
parlementaire conjointe des affaires sociales et de la justice et où le
problème des enfants battus nous a été exposé. J'ai
aussi mentionné que, dans d'autres milieux, on s'était
intéressé au sujet, mais il ne faudrait pas que les conflits
idéologiques ou autres entre la justice et les affaires sociales
soient tels qu'ils paralysent l'action des législateurs et
l'empêchent d'intervenir, car c'est un peu cela que nous vivons,
malheureusement, au Québec.
Lorsque j'entendais le député de Chicoutimi nous proposer
d'autres consultations, je vous dirais ceci...
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous auriez pu consulter avant.
M. CHOQUETTE: Non. Je sais que vous l'avez fait.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je m'excuse. Je vous ai dit que vous auriez pu
consulter avant de le déposer.
M. CHOQUETTE: Mais j'ai consulté avant et je sais ce que je fais.
Pour moi, le problème n'est pas nouveau. Ce n'est pas un problème
qui est arrivé sur ma table, avec une loi rédigée par des
légistes en laboratoire ou en vase clos, hier matin. C'est un
problème que nous avons à l'esprit depuis quelques années
et qui est en train d'évoluer de par les discussions et les
mémoires que nous avons reçus, que cela soit du Barreau ou de
l'Association des femmes universitaires ou d'autres groupements.
Je ne fais pas de reproche au député de Chicoutimi de nous
demander d'approfondir nos projets de loi. Lorsqu'il suggère au ministre
de la Justice et au gouvernement de faire cela, je pense qu'il est tout
à fait de bon ton pour lui de le faire, comme membre de l'Opposition,
mais, aujourd'hui, dans ce problème, je dis: Assez d'études.
Nous savons qu'il y a une intervention nécessaire. Nous savons
qu'il faut que ce comité intervienne efficacement. Nous n'avons pas la
prétention de dire que ce comité, ainsi que la loi qui sera
adoptée par ce gouvernement, seront la fin de toute discussion sur le
sujet, car il faut bien prévoir qu'il y aura toute une évolution
législative à la suite de ce projet de loi no 78 dans le domaine,
plus vaste, de la protection de la jeunesse. Ici, je rejoins les
préoccupations du député de Saint-Jean, qui demandait au
ministre de la Justice et au comité de s'intéresser aux
agressions psychologiques, comme il le disait, à l'égard des
enfants, dont certains, avait-il constaté à l'occasion de sa
carrière dans l'enseignement, étaient les victimes. Je le
reconnais facilement et c'est la raison pour laquelle il y a toute une
politique de protection de la jeunesse à créer et à
développer. Mais moi je pense qu'en adoptant cette loi, nous posons le
premier pas dans cette direction et surtout nous nous attaquons aux cas des
enfants qui sont vraiment à nos yeux, je pense, les plus sympathiques
puisqu'ils sont victimes d'assauts physiques, avec toutes les
conséquences qui peuvent en résulter.
Il est vrai que le comité ici je voudrais répondre
à l'interrogation du député je l'ai décrit
comme étant à mi-chemin entre la justice et les affaires
sociales. C'est parce que j'essaie de traduire un peu que le comité n'a
pas une action punitive judiciaire, que le comité, même s'il
s'insère dans le ministère de la Justice, doit être
animé de préoccupations de prévention, comme il a
été mentionné, d'interventions amicales dans beaucoup de
cas auprès des familles en question qui, souvent, sont elles-mêmes
des victimes. On sait que souvent les parents qui battent leurs enfants ont
eux-mêmes été les victimes de leurs propres parents avant
et qu'il y a toute une tradition qui s'est instaurée dans ces familles.
Donc c'est le résultat de l'ignorance...
M. VEILLEUX: Un genre de réhabilitation.
M. CHOQUETTE: En effet, alors je dis interventions amicales dans le cas
où cela est permis, mais interventions judiciaires énergiques
là où c'est nécessaire, et le comité ne jugera pas
ces cas. Le comité, dans les cas où cela s'imposera, les
soumettra à la cour pour que la cour du Bien-Etre social se prononce sur
la déclaration de cas de protection à l'égard d'un enfant
et son retrait de son milieu familial, lorsque, pour sa protection, pour sa
vie, cela est essentiel. Le comité a donc toute la gamme possible des
interventions, à partir des plus bénignes jusque peut-être
aux plus draconnien-nes lorsque cela est nécessaire. Je pense qu'il faut
le donner au comité, parce que les cas peuvent varier à
l'infini.
Je crois que les députés d'Opposition, le
député de Chicoutimi, le député de Rouyn-Noranda
ainsi que le député de Saint-Jean, qui n'est pas de l'Opposition,
mais qui est ministériel, ont tous les trois insisté, et, je
pense, à juste titre mais c'est vrai qu'il a pas mal l'esprit
d'opposition. Tous ses collègues le connaissent.
M. VEILLEUX: C'est ce que mon collègue de Maisonneuve a dit cet
après-midi, mais il me fait peur.
M. CHOQUETTE: Au caucus tout le monde...
Si les députés de l'Opposition le connaissaient au caucus,
ils s'empresseraient de se ménager l'amitié du
député de Saint-Jean, parce que le député de
Saint-Jean sait être très agressif, alors je les mets en garde.
Ceci est une parenthèse.
M. BEDARD (Chicoutimi): Prenez garde d'en dire trop.
M. CHOQUETTE: Mais tous les intervenants ont souligné et
insisté sur la nécessité d'une information adéquate
du public à l'égard de cette loi, sur une présence du
Comité pour la protection de la jeunesse et sur des moyens
d'accès rapides à ce comité pour permettre des
interventions à leur tour rapides de la part du comité
dans les cas qui vont nous être signalés. Vous pouvez être
sûrs que je souscris entièrement aux propos qui ont
été tenus àce sujet. Il n'y a pas de doute que le
comité devra se rendre très présent et les
dénonciations pourront être faites auprès d'un
téléphone unique qui sera peut-être branché sur les
différents secteurs du Québec. On pourra faire la
dénonciation par téléphone, pas besoin d'envoyer des
lettres et d'aller dans des bureaux faire des rapports. Il va falloir qu'on
prenne les moyens les plus modernes et les plus expéditifs pour aller
attirer l'attention du comité sur des cas qui peuvent requérir
son intervention.
De toute façon, je détaillerai en temps et lieu avec,
évidemment, les dirigeants du comité une politique d'information
qui sera suffisante.
Le député de Saint-Jean m'a demandé quelles
étaient les pénalités prévues pour des infractions
à cette loi. Eh bien, nous n'avons pas voulu mettre de
pénalités précises dans la loi, justement pour ne pas la
rendre répressive, pénale, dans ce sens-là, mais on peut
se référer à la Loi des convictions sommaires qui dit que
lorsqu'une pénalité n'est pas édictée
spécifiquement dans une loi, la pénalité qui s'applique
est une amende d'au plus $500. Cet article permettrait donc, dans les deux cas
sur lesquels le député de Saint-Jean m'a interrogé,
à la cour d'imposer une amende allant jusqu'à $500,
c'est-à-dire à l'égard de la personne qui, étant
mise au fait d'une situation où un enfant est battu, s'abstiendrait de
dénoncer le cas ou encore d'une personne qui refuserait de collaborer
avec un des enquêteurs du Comité pour la protection de la
jeunesse.
M. le Président, je crois que c'était toutes les questions
qui avaient été soulevées. Je suggère que nous
adoptions ce projet de loi en deuxième lecture et que nous passions en
commission par la suite.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que la motion de la deuxième
lecture du projet de loi no 78, Loi concernant la protection des enfants soumis
à des mauvais traitements, est adoptée?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
M. BEDARD (Chicoutimi): On n'a pas le quorum.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Nous sommes exactement 20.
M. BIENVENUE: M. le Président, je fais motion pour que vous
quittiez maintenant le fauteuil et que l'étude de ce projet de loi se
fasse en commission plénière article par article.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que la motion pour que je quitte
maintenant le fauteuil et que la Chambre se forme en commission
plénière est adoptée?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Adopté.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, pour une loi aussi
importante, je vous ferai remarquer qu'on n'a pas le quorum.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Nous sommes exactement 20.
M. BEDARD (Chicoutimi): II y en a un qui vient d'entrer à la
course.
Commission plénière
M. CORNELLIER (président de la commission
plénière): A l'ordre, messieurs! Projet de loi numéro 78,
Loi concernant la protection des enfants soumis à des mauvais
traitements. Article 1, sous-article 14 a)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): 14 b)?
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, à 14 b), il me
semble que cela pourrait être de nature à dissiper bien des
malentendus si on avait, une fois pour toutes, une vraie définition de
ce que le législateur entend dire lorsqu'il parle de mauvais traitements
physiques. Je pense que de ce côté-là, il serait
important... Tout à l'heure le ministre de la Justice parlait d'un
enfant qui, par exemple, est gardé dans un placard ou encore à
qui physiquement on ne donne pas de coups. S'il n'y a pas une définition
très précise, on peut permettre à bien des gens, à
bien des parents de s'en sortir.
M. CHOQUETTE: Je pense que les mots "mauvais traitements physiques par
suite d'excès ou de négligence" permettent d'appréhender
les cas qui tomberaient sous cette loi-là. J'attire l'attention du
député sur les mots "mauvais traitements physiques" tout
d'abord.
Cela implique soit des coups, des brûlures, soit un cas, par
exemple, de malnutrition qui entraîne, mettons, une perte de poids
très rapide et ceci par suite d'excès ou de négligence. Il
faut qu'il y ait un élément coupable dans la conduite des parents
ou des gardiens. Un mauvais traitement, si on pouvait employer le terme dans ce
contexte, qui serait dû à un pur accident, ne tomberait pas sous
cette loi. Par exemple, le père qui ouvre une porte et assomme son fils
de deux ans, par mégarde. D'abord, ce n'est pas un mauvais traitement.
Il
n'y a pas l'élément, en somme, intentionnel de
méchanceté qui est sous-jacente aux mots "mauvais traitements".
Deuxièmement, il n'y a pas excès ou négligence. C'est plus
accidentel qu'autre chose.
Alors dans le cas actuel, nous avons voulu couvrir des cas de coups, de
blessures et tout cela, des cas de malnutrition ou d'absence d'entretien
suffisant de l'enfant, par exemple. Mauvais traitements, c'est assez large.
J'ai cité le cas de l'enfant Lessard, qui avait été
incarcéré dans un placard.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est un mauvais traitement physique.
M. CHOQUETTE: C'est un mauvais traitement physique. Que voulez-vous? Cet
enfant n'a aucune liberté, il vit dans ses excréments.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est tout ce qui met en danger, en fait, la vie
physique d'un enfant.
M. CHOQUETTE: Exactement. Nous ne pouvons pas aller plus loin que le
côté physique parce que, quant au côté psychologique,
ce serait compliqué d'inviter tout le monde à dénoncer
ceux qui commettent des erreurs psychologiques vis-à-vis de leurs
enfants.
M. VEILLEUX: M. le Président, à titre d'exemple, un enfant
qui je ne veux pas donner trop de fait précis parce que cela
pourrait situer un cas que j'ai déjà vécu comme enseignant
vit dans un milieu familial où il y a des pensionnaires et que
les pensionnaires torturent de différentes façons, de telle sorte
que l'enfant devient traumatisé. Il peut y avoir des troubles,
peut-être pas un bras cassé ou des choses comme cela, mais
étant traumatisé, ayant subi un préjudice toute sa vie,
est-ce que cela pourrait être considéré comme un mauvais
traitement physique, compte tenu que la répercussion peut être,
médicalement parlant, palpable, si je peux m'exprimer ainsi?
M. GOLDBLOOM: M. le Président, peut-être que je pourrais
dire un mot là-dessus. Il est extrêmement difficile
d'apprécier ce genre de problèmes. Comment rédiger, dans
un texte de loi, une appréciation aussi difficile?
Il y a plus que cela. Quand il y a des relations sur le plan
émotif, disons, sur le plan psychologique, entre parents et enfants, que
l'observateur jugerait mauvaises, il n'est pas prouvé que, pour
l'enfant, c'est nécessairement une mauvaise chose. Dans le comportement
de l'enfant que l'on peut trouver peu normal, il y a des éléments
peut-être de relations entre parents et enfants, il y a aussi
peut-être des éléments de vraie maladie mentale. C'est
toute la question du diagnostic que l'on va poser.
Troisième élément, il y a des situations où,
sur le plan psychologique, on trouve que cela va mal, mais on sort l'enfant du
milieu familial, on le place dans le meilleur foyer nourricier et c'est pire.
L'enfant est parfois mieux avec les parents, si inadéquats soient-ils,
qu'avec les meilleurs parents adoptifs ou parents nourriciers.
Alors permettre à n'importe qui après tout c'est ce
que la loi prévoit de poser des diagnostics dans ce domaine aussi
complexe et aussi délicat et dire qu'il faut que l'on intervienne et que
l'on examine la possibilité de sortir l'enfant de son milieu, je pense
que c'est aller extrêmement loin.
Je pense que c'est un bon exemple de ce à quoi je faisais
allusion tout à l'heure, d'un élément de l'application de
la loi que nous devrons examiner au fur et à mesure que nous la vivrons
pour les problèmes d'ordre physique.
Après cela, nous pourrons voir s'il y a lieu d'élargir,
dans une définition qu'il reste à confectionner, l'application de
la loi.
M. CHOQUETTE: Le ministre des Affaires municipales est très
éloquent; on voit qu'il connaît bien ça.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de
Taschereau.
M. BONNIER: M. le Président, je voudrais un
éclaircissement de la part du ministre sur les dernières phrases
où on semble élargir le pouvoir et les responsabilités du
comité "de préserver, dans toute la mesure du possible, la vie de
l'enfant dans son milieu familial". Du côté anglais, on dit: "To
preserve the family life of the child". Il me semble que ce n'est pas tout
à fait la même chose.
M. CHOQUETTE: C'est une traduction du bill 22, ça.
M. BONNIER: Ce texte donne des pouvoirs trop étendus, tel que
ça avait été soulevé lors de la deuxième
lecture.
M. CHOQUETTE: Je crois que le député de Taschereau a tout
à fait raison d'indiquer en quoi la traduction anglaise est fautive. "To
prevent such abuse and neglect and to preserve..."
M. BONNIER: "The child's life"?
M. CHOQUETTE: Non, pas besoin. "And to preserve the family life if at
all possible" ou "preserve the life of the child"?
M. BEDARD (Chicoutimi): Mais quelle est l'intention du
législateur de ne pas vouloir étendre la protection de l'enfant
en dehors du milieu familial?
M. CHOQUETTE: Vous avez mal compris l'article, mon cher
collègue.
M. BEDARD (Chicoutimi): Peut-être.
M. CHOQUETTE: L'article 14 s'applique à n'importe quel enfant,
où qu'il soit, qu'il soit dans sa famille, qu'il soit en foyer
nourricier ou qu'il soit dans un milieu d'institution. Il n'y a pas de limite,
excepté que, dans ses interventions, le comité doit avoir parmi
ses objectifs de maintenir, dans la mesure du possible, l'enfant dans sa
famille, dans son milieu. C'est une préoccupation de portée
sociale bien connue et bien acceptée, c'est-à-dire qu'on ne
retire pas facilement un enfant de la garde de ses parents. C'est ce que nous
cherchons à indiquer par cet article.
M. VEILLEUX: L'Etat ne prend pas la place des parents, comme
principe.
M. CHOQUETTE: II la prend lorsqu'il est obligé de le faire
à cause des circonstances qui le rendent absolument impératif.
Mais, parmi les objectifs du comité, il doit tenter des mesures
d'assistance à l'égard de la famille, plutôt que de dire:
Je vais retirer l'enfant.
M. VEILLEUX: Si on étendait la réhabilitation.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas cette
interprétation-là que je veux donner. Remarquez, si je suis dans
l'erreur, ce n'est pas plus compliqué que cela, il s'agira de se
remettre dans le droit chemin, mais sur la rédaction elle-même de
l'article, il est dit: "De prévenir ces excès et ces
négligences et de préserver, dans toute la mesure du possible, la
vie de l'enfant dans son milieu familial." C'est quand même restrictif,
je ne sais pas, étymologiquement parlant, si on parle de milieu
familial. Si le ministre de la Justice veut dire que ce n'est pas
nécessairement sa famille, que c'est le milieu où il se trouve au
moment où les mauvais traitements peuvent lui être
donnés...
M. CHOQUETTE: Pour clarifier, on pourrait peut-être dire ceci: "et
de préserver, dans la mesure du possible, la vie de famille".
C'est seulement ça, l'intention.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ah! Cela change.
M. VEILLEUX: Si je comprends bien le ministre, il faut regarder cette
dernière partie de la phrase avec la deuxième qui est
"prévenir ces excès et ces négligences". Le comité
peut les prévenir, par exemple, en faisant la réhabilitation, en
donnant des conseils aux parents. Les parents agissent de telle façon
parce qu'eux ont été élevés de cette
façon-là.
M. CHOQUETTE: Exactement.
M. VEILLEUX: C'est dans ce sens-là?
M. BEDARD (Chicoutimi): II me semble, par exemple, que vous changez le
sens de l'article. Vous lui donnez un autre sens si vous ajoutez...
M. VEILLEUX: Dans son milieu naturel.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous permettez, je vais finir mon intervention.
Si vous ajoutez "la vie de famille", vous changez le sens parce que la vie dont
on parle à l'avant-dernière ligne est carrément
reliée aux mauvais traitements physiques.
C'est une question de vie humaine, ce n'est pas une question de vie de
famille, à mon sens. Mais vous changez le sens. Si vous voulez changer
le sens de l'article, je n'ai pas d'objection.
M. GOLDBLOOM: Je fais remarquer à l'honorable
député de Chicoutimi que la première partie de l'article
parle de la protection des enfants soumis à des mauvais traitements
physiques.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est cela.
M. GOLDBLOOM: L'élément de protection de la vie de
l'enfant est déjà là, dans l'article. Si je comprends
bien, l'intention de mon collègue de la Justice était d'ajouter
et de préserver autant que possible le contexte familial dans lequel
l'enfant vit.
M. VEILLEUX: L'entourage naturel.
M. BEDARD (Chicoutimi): Si c'est l'esprit que veut lui donner le
ministre de la Justice, aussi bien mettre "vie de famille".
M. CHOQUETTE: C'était cela l'intention...
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce serait mieux que...
M. CHOQUETTE: ... les mots le disaient peut-être mal.
M. BEDARD (Chicoutimi): Oui.
M. CHOQUETTE: Parce que là on pouvait voir les mots "la vie de
l'enfant" dans le sens de sa vie immédiate. Ce n'était pas
vraiment cela l'intention parce que, comme le disait le ministre des Affaires
municipales, dans la première partie du paragraphe, il me semble qu'on
réglait pas mal le problème de la protection.
M. GOLDBLOOM: Alors, si l'on écrit "la vie familiale", la
traduction anglaise deviendrait valable.
M. CHOQUETTE: "To preserve family life".
M. BEDARD (Chicoutimi): La vie familiale de l'enfant.
M. CHOQUETTE: Oui, c'est cela. Est-ce que je peux suggérer un
amendement? Après "préserver, dans", on va enlever "toute", pour
dire "dans la mesure du possible, la vie de famille..."
M. BEDARD (Chicoutimi): La vie familiale de l'enfant.
M. CHOQUETTE: ... la vie familiale de l'enfant".
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est cela.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Cet amendement aux deux dernières
lignes, après le mot "préserver", se lirait ainsi: "dans la
mesure du possible, la vie familiale de l'enfant".
M. CHOQUETTE: Très bien.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Ce paragraphe 14 b) est-il
adopté?
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, simplement comme interprétation,
j'entends, il est clair que l'enfant qui subirait de mauvais traitements en
dehors de son milieu familial serait tout aussi protégé par la
loi...
M. CHOQUETTE: Absolument, absolument.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... et les obligations de dénonciation
sont aussi impératives.
M. CHOQUETTE: Exactement.
M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord.
M. CHOQUETTE: Exactement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Paragraphe 14 b), adopté.
Paragraphe 14 c).
M. BEDARD (Chicoutimi): ... d'un président et d'un
vice-président... Pour combien de temps, cela? On dit un peu plus loin:
Le président, le vice-président et les dix membres qui sont
nommés par le lieutenant-gouverneur en conseil selon son bon plaisir,
mais dans l'esprit du ministre, cela peut vouloir dire pour quelle
période? Est-ce qu'ils sont nommés indéfiniment?
M. CHOQUETTE: Bon, on voit qu'ils appartiennent à la fonction
publique, au deuxième alinéa de l'article 14e). Alors, ils vont
être nommés pour un certain temps. On verra ce qu'ils vont faire,
s'ils sont efficaces, s'ils rendent service.
M. BEDARD (Chicoutimi): Bien, ils sont nommés, ils peuvent rester
à l'intérieur de la fonction publique...
M. CHOQUETTE: Oui, mais...
M. BEDARD (Chicoutimi): ... ce qui n'empêche pas qu'ils peuvent
être mutés...
M. CHOQUETTE: ... si cela ne va pas, ils peuvent être
mutés. C'est cela.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... à d'autres postes. Dans l'esprit du
ministre, ce n'est pas plus permanent que cela, ces nominations?
M. CHOQUETTE: Ah! bien, il n'y a pas de doute que l'on voudrait nommer
des gens qui vont occuper la fonction un certain temps. Surtout s'ils
l'occupent avec succès, on n'est pas pour les déplacer, on va les
garder là.
M. SAMSON: Ne serait-il pas mieux, M. le ministre, qu'il y ait un terme
de fixé? Il me semble que c'est un petit peu flou, cela. S'ils sont
nommés pour un temps indéterminé, assujettis à la
fonction publique, cela peut vouloir dire dans les faits que c'est quelqu'un
qui peut être remplacé du jour au lendemain par la mutation de
quelqu'un qui vient d'ailleurs dans la fonction publique, et cela pourrait en
quelque sorte enlever, je pense, l'autorité nécessaire à
ce comité.
M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, en plus, on s'aperçoit qu'ils sont
nommés après entente entre le ministre de la Justice et le
ministre des Affaires sociales.
M. SAMSON: C'est ça.
M. BEDARD (Chicoutimi): II me semble que ça peut créer un
climat d'instabilité.
M. BONNIER: Ils ne sont pas nommés par la fonction publique mais
par le lieutenant-gouverneur en conseil.
M. SAMSON: Oui d'accord, mais ça ce n'est pas grave.
M. CHOQUETTE: Mais, étant donné qu'ils sont permanents,
ils ont des garanties de sécurité de par...
M. SAMSON: Ce n'est pas ça.
M. BEDARD (Chicoutimi): Nous ne parlons pas en fonction du bien de ces
personnes, mais dans l'esprit du député de Rouyn-Noranda...
M. SAMSON: Pour donner de l'autorité au comité, il faut un
mandat avec un terme.
M. BEDARD (Chicoutimi): Et un esprit de continuité.
M. SAMSON: Si c'est flou... Evidemment qu'ils sont
protégés par la fonction publique, qu'ils ont une
sécurité d'emploi, mais ce n'est pas ça que je veux
dire.
M. CHOQUETTE: S'ils ne sont pas bons, qu'est-ce qu'on fait?
M. SAMSON: Qu'est-ce que vous faites avec les autres qui sont
nommés pour dix ans?
M. CHOQUETTE: Nous avons toujours la solution des tablettes. Mais
admettons que nous avons un président et un vice-président et il
s'avère, au bout de cinq, six mois ou un an, que ce sont des...
M. SAMSON: Je ne suis pas le ministre là-dedans. Dans toutes les
autres lois où on nomme des comités comme ça, on les nomme
pour quatre, cinq ou dix ans, et on nous dit que c'est nécessaire.
M. CHOQUETTE: Mais ici je tiens à attirer votre attention. Je ne
suis pas en train de créer un tribunal, une commission, un nouvel
organisme administratif. Ce que nous sommes en train de créer, c'est un
comité qui va être rattaché au ministère de la
Justice, donc qui est à l'intérieur des services du
ministère de la Justice, qui a une certaine identité par rapport
au reste du ministère. Je ne veux pas nier le fait que ce comité
se distingue bien du reste du ministère, mais quand même il
appartient au ministère. Le comité a une certaine autonomie dans
son administration, parce qu'il a des décisions à prendre qui ont
un caractère quasi judiciaire.
C'est une formule un peu différente des formules habituelles. Je
ne suis pas allé directement jusqu'à créer une commission
complètement indépendante du gouvernement, complètement
autonome avec des garanties de nomination pendant des dizaines d'années.
Je préfère commencer avec une expérience plutôt
pratique.
M. SAMSON: C'est peut-être un peu ce qui nous inquiète.
M. CHOQUETTE: Mais...
M. SAMSON: Un comité comme ça, si on veut qu'il fonctionne
bien, il faut quand même lui donner une certaine liberté d'action
et de l'autorité.
M. CHOQUETTE: II l'a.
M. SAMSON: Si ces gens, qui sont le président, le
vice-président, ne sont que des gens protégés par la
fonction publique, je ne vois pas comment il sera facile pour le ministre de
recruter des gens qui seront spécifiquement intéressés
à ce problème. Parce que...
UNE VOIX: ... pas.
M. SAMSON: Si je peux poursuivre mon raisonnement, le ministre va
peut-être comprendre où je veux en venir. Si ce sont des gens qui
sont des fonctionnaires au sens de ce mot, ils peuvent avoir d'autres
préoccupations que ce problème particulier dans le sens que, si
on ne sait pas quel jour on va être muté ailleurs, il est humain
de protéger ses arrières. Et, dans le fonctionnarisme, Dieu sait
si c'est courant que de protéger ses arrières.
C'est parce que nous connaissons le problème qui existe à
la fonction publique que ça nous amène à dire qu'on
préférerait des nominations pour un mandat précis. Mais je
suis d'accord avec le ministre qu'il y a une expérience à faire.
Cela ne veut pas dire que j'opterais pour un mandat de dix ans, non, mais
peut-être de deux, trois ou quatre ans. Nous ne savions pas, quand le
ministre de la Justice a été élu, s'il serait bon. Son
mandat est de quatre ans. Il faut donner une certaine sécurité au
comité, mais il faut lui donner de l'autorité.
Evidemment, il sera subordonné au ministère de la Justice,
tout le monde sait ça, mais il faut lui donner une autorité pour
qu'il puisse agir comme un vrai comité et que ça ne soit pas un
bureau de fonctionnaires ordinaires où on n'est pas plus
intéressé qu'il faut à ramasser les plaintes.
LE PRESIDENT (M.Cornellier): Le député de
Gaspé.
M. FORTIER: Est-ce qu'au paragraphe 14 c) on pourrait ajouter à
la fin, après "ou occupations diverses et intéressées
à la protection de l'enfance" les mots: et qui soient eux-mêmes
responsables d'enfants? Que ce soit des gens qui aient des enfants. Si vous
nommez des célibataires qui n'ont pas d'enfant et ne connaissent rien
à ça, qu'est-ce qu'ils vont faire dans ça?
M. VEILLEUX: Je m'élève, M. le Président, contre ce
que le député de Gaspé vient de dire.
M. SAMSON: Des célibataires avec enfants.
M. FORTIER: II faut tout de même, pour faire des lois pour des
enfants, savoir comment élever des enfants, les éduquer et
quelles sont les responsabilités.
M. VEILLEUX: Mais quelqu'un, par exemple, qui est dans l'enseignement
est peut-être au courant.
M. FORTIER: Oui, et ici on parle de choses physiques, non
psychiques.
M. CHOQUETTE: Si vous permettez, pour revenir au sujet...
M. VEILLEUX: On est deux. Le ministre d'Etat aux Affaires sociales est
du même avis que moi. Il n'est pas d'accord.
M. CHOQUETTE: On va revenir au sujet, si
vous voulez, soulevé par le député de Rouyn-Noranda
qui voulait un terme fixe pour le président et le
vice-président.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est moi qui... M. SAMSON: Tous les deux.
M. CHOQUETTE: II s'agit de personnes qui s'intègrent à la
fonction publique. Je me demande comment on peut leur donner un terme fixe dans
une fonction déterminée.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est important de le leur donner.
M. SAMSON: Ah! oui.
M. BEDARD (Chicoutimi): Au moins une garantie de continuité. Cela
n'est pas pour les personnes elles-mêmes. C'est pour la fonction qu'elles
occupent. Si elles sont constamment sujettes à des changements du jour
au lendemain... Ecoutez. Quand même, la nature humaine est la nature
humaine. Vous avez deux ministres qui s'occupent de leur nomination, de leur
mise en place, et vous risquez que ces gens, qui ont toujours le danger de
mutation qui leur pend au-dessus de la tête, ne prennent pas les
initiatives que, normalement, ils prendraient s'ils avaient au moins
l'assurance d'être pendant un certain temps en fonction. Vous pouvez bien
balayer cela de la main, si vous voulez...
M. SAMSON: Le ministre du Travail, il va avoir du temps.
M. CHOQUETTE: Je ne partage pas l'avis de nos honorables
collègues. Je vais vous donner le cas de l'Institut
médico-légal, qui est actuellement dirigé par le Dr
Jean-Pierre Valcourt, dont j'ai parlé ce soir dans mon exposé en
deuxième lecture, et qui est également dirigé par M.
Bernard Peclet. Le premier est un médecin-pathologiste; le
deuxième est un chimiste. L'Institut médico-légal fait des
expertises dans tous les domaines pour donner des versions ou des
témoignages devant les cours de justice criminelles ou civiles. Le Dr
Valcourt et M. Peclet sont membres de la fonction publique, mais personne ne
leur dicte le témoignage qu'ils vont rendre ou le résultat de
leur expertise, et ils gèrent leur organisme d'une certaine
façon, d'une façon assez autonome par rapport au ministère
de la Justice. Evidemment, on s'occupe de leur procurer des budgets, du
personnel, tout cela, mais on n'intervient pas dans leur travail. Alors, ici,
on a un peu la même chose, et je me demande si avec cette histoire de
donner des termes fixes... Supposons qu'on nomme quelqu'un qui ne vaut rien, on
va être obligé de le garder durant ce terme fixe? C'est cela que
les députés veulent?
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous n'êtes pas obligé de le nommer
pour dix ans.
M. SAMSON: Cela signifie-t-il que le ministre ne se fie pas à son
jugement? Voyons donc!
M. CHOQUETTE: Je me fie à mon jugement, mais je me trompe
parfois.
M. SAMSON: Bien oui, souvent.
M. CHOQUETTE: Et c'est bien beau le terme fixe. Je suis d'accord que
souvent dans une fonction judiciaire, il faut nommer des gens pour un terme
fixe. Il faut leur donner l'indépendance de la magistrature, mais ici,
c'est une fonction qui n'est pas judiciaire. Elle est quasi judiciaire, mais
elle n'est pas judiciaire. Est-ce qu'on doit se sentir obligé de donner
un terme fixe? Si la personne fait un grand succès de sa fonction, il
est sûr et certain qu'elle va s'imposer, qu'elle va rester. Si c'est
raté, on pourra la changer. C'est tout.
Vous savez, si on donne trop de garanties de ce genre, on
s'empêche d'agir par la suite.
M. SAMSON: Ce n'est pas la garantie d'emploi qu'on recherche pour les
personnes concernées, parce que, de toute façon, par la fonction
publique, elles auront cette garantie d'emploi. Ce n'est pas ce qu'on
recherche. C'est la garantie qui nous semble nécessaire, pour ces gens,
d'un certain temps. Ce comité ne viendra pas au monde à sa
grandeur. Il s'améliorera en travaillant. Il prendra de
l'expérience, et c'est important pour les responsables, pour le
président et le vice-président, de pouvoir préparer un
travail à long terme. Cela ne veut pas dire qu'ils auront prouvé
en l'espace d'un an une certaine efficacité parce que cela peut
peut-être prendre plus qu'un an pour en arriver à roder le
système. Alors, si on ne permet pas un terme, du moins minimum, le
système ne sera peut-être jamais rodé parce que chaque
responsable qui pourrait être nommé, si on le fout dehors au bout
de six mois, ce sera peut-être un autre système qui sera
essayé et on n'en rodera peut-être jamais.
Maintenant, je vais poser une question hypothétique au ministre,
qui peut peut-être être utile pour les fins du débat.
Vous nommez quelqu'un qui n'a pas un mandat fixe. Au bout de quatre ou
cinq mois, il y a des plaintes, des dénonciations qui arrivent. Ce
comité veut bien faire son travail. Il donne suite aux plaintes et il se
trouve, par malchance, à toucher à une famille bien en vue
parce que cela arrive aussi dans ce monde qu'ils maltraitent les enfants
parfois avec beaucoup d'influence. Quelles sortes de pressions
pourraient s'exercer? On est dans le domaine des humains. Si, au bout de deux
mois, le président du comité est changé, on
prêterait le flanc à une drôle de critique, à ce
moment. C'est très hypothétique; remarquez, je ne prête pas
d'intentions au ministre, au contraire, mais je pense que c'est le genre de
situation qui pourrait prêter le flanc à la critique. S'il y a un
mandat
fixe, vous allez mettre les responsables et les autorités du
comité à l'abri de ce genre de choses qui pourraient
peut-être se présenter.
M. CHOQUETTE: M. le Président, il ne faut pas oublier que ce
comité est encadré par le ministère de la Justice. Je
pense que, dès ce moment, il a pas mal de protection contre les
pressions extérieures, parce que moi, je ne connais pas beaucoup de
pressions extérieures qui font bouger le ministère de la Justice.
S'il y en a, j'aimerais bien que quelqu'un les cite. Mais je sais qu'il n'y en
a pas; donc, personne ne peut en citer. Le ministère de la Justice
n'accepte aucune pression extérieure, ne les accepte pas. C'est sa
politique, sa ligne de conduite; elle est universellement acceptée. Il
est évident que cela va s'appliquer â ce comité et je pense
que cela va constituer une très bonne protection pour lui. Si votre
raisonnement était vrai, le sous-ministre de la Justice aux affaires
criminelles, il n'a pas été nommé pour un mandat fixe; il
est nommé pour deux ans. Il n'a pas été nommé pour
deux, cinq ans, etc. Supposons qu'il prend une cause, demain matin, contre un
tel, une célébrité ou une famille bien en vue, comme vous
le mentionnez, puis quelqu'un vient me voir pour dire: Le sous-ministre de la
Justice aux affaires criminelles a donné des ordres de prendre telle
cause. Il n'a pas plus de garantie. Je pourrais bien dire: Tu viens de changer
de ministère, tu t'en vas sur une tablette, mais il sait très
bien qu'il n'ira pas. C'est la même chose ici. Il ne faut pas
s'imaginer...
M. SAMSON: M. le Président, la comparaison est boiteuse. Le
sous-ministre de la Justice, lui, fait son devoir en fonction de lois à
appliquer, c'est une autre affaire.
M. CHOQUETTE: C'est la même chose.
M. SAMSON: Non, non, là, il s'agit de dénonciations qui
peuvent amener une réprimande, un conseil ou être
transférées à la cour du Bien-Etre social. C'est
différent cela. Il peut arriver que ce comité ait beaucoup plus
de travail à faire dans le domaine de réprimandes ou encore dans
le domaine de conseils à être donnés aux familles,
d'interventions auprès des familles, sans qu'il y ait action judiciaire
à être prise. C'est différent. Ecoutez, on ne fera pas de
"filibuster" là-dessus. En tout cas, il m'a semblé qu'il aurait
peut-être valu mieux changer cela, mais on verra si le ministre a raison.
On va lui donner raison.
M. CHOQUETTE: Je pense qu'on va le voir à
l'expérience.
M. SAMSON: Oui. Mais, si vous en venez à changer d'opinion plus
tard, vous le noterez pour nous le dire.
M. CHOQUETTE: En effet.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Cette discussion qui devait porter
à l'article 14 e) et f) est un peu avant son temps. Nous n'en
étions qu'à l'article 14 c).
M. SAMSON: Non, on l'a fait à l'article 14 c).
LE PRESIDENT (M. Cornellier): C'est ça que je dis. Vous l'avez
fait avant votre temps, avant d'adopter l'article 14 c).
M. SAMSON: Ce n'est pas avant notre temps, c'est en plein temps.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Est-ce que l'article 14 c) est
adopté?
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est parce que cela se tient un peu, tous ces
articles.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Tout de même, puisqu'on a
décidé de procéder paragraphe par paragraphe,
procédons dans l'ordre.
M. SAMSON: Adopté, l'article 14 c). Ne nous faites pas de
"filibuster", M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Article 14 c), adopté. Article 14
d)?
M. SAMSON: Article 14 d), "Le comité a un secrétariat
permanent dans les villes de Montréal et de Québec. Il peut,
suivant les besoins, établir des bureaux ailleurs au Québec."
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président, en
espérant qu'il y en aura le plus possible en dehors de Québec et
de Montréal.
M. SAMSON: Je m'excuse, quelles sont les intentions du ministre à
l'extérieur de Québec?
M. CHOQUETTE: A l'heure actuelle, je ne peux pas dire comment le
comité va se rendre présent à l'extérieur de
Montréal et de Québec. Quelle est l'importance du problème
dans diverses régions québécoises, jusqu'à quel
point est-il nécessaire que nous ayons des représentants ou des
services dans ces régions? Je crois qu'il va falloir décider
suivant les vérifications qui seront faites dans les différents
milieux. Pour le moment, c'est assez difficile pour moi d'aller commettre le
gouvernement et commettre le comité dans une loi et de le
préciser.
Il va y en avoir un à Rouyn-Noranda, un à Chicoutimi. Je
ne peux pas le faire à l'heure actuelle.
M. SAMSON: Pour les fins de la dénonciation, vous avez, M. le
ministre, tantôt indiqué qu'il y aurait possibilité que ce
soit fait par téléphone, directement par numéro
zénith, j'imagine.
M. CHOQUETTE: Oui, en effet. C'est cela, exactement. Maintenant il va
falloir regarder le coût de tout cela.
M. BEDARD (Chicoutimi): Comme il n'y a pas juste le ministère des
Affaires sociales là-dedans et puisqu'on sait que le ministère de
la Justice est là-dedans aussi, cela a des chances d'aller assez vite,
je pense.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): 14 d), adopté. 14 e)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): On en a discuté tantôt,
adopté. 14 f)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Une seconde, M. le Président. Qu'est-ce
qui arrive si le ministre des Affaires sociales et le ministre de la Justice ne
sont pas capables de se mettre d'accord?
M. CHOQUETTE: Il n'y aurait pas de nomination qui pourrait se faire. Je
m'entends très bien avec mon collègue des Affaires sociales et je
n'ai aucune crainte que nous ne puissions pas...
M. SAMSON: Vous n'êtes pas sur le bien-être social,
vous!
M. CHOQUETTE: Lui, il s'entend peut-être moins bien avec moi pour
ces affaires-là.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): 14 f)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Sur la formulation, M. lePrésident. "Les
membres du comité et toute personne à son emploi ne peuvent
être recherchés en justice". Il me semble que...
M. CHOQUETTE: Pardon? Je n'ai pas saisi la première partie de la
question du député.
M. BEDARD (Chicoutimi): Au troisième paragraphe de 14 e), on dit:
"Les membres du comité et toute personne à son emploi ne peuvent
être recherchés en justice". Ce ne doit pas être le bon mot,
ce doit être "poursuivis" ou encore: Aucune action ne peut être
intentée contre ces personnes dans l'exécution de leur
devoir.
M. CHOQUETTE: Bah! C'est presque la même chose.
UNE VOIX: En anglais ils disent "prosecuted".
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, mais ce n'est sûrement pas
"recherchés".
M. CHOQUETTE: Comme le dit le ministre de l'Immigration, qui
connaît sa terminologie juridique, "recherchés" c'est du
français impeccable.
M. SAMSON: Vous copiez les lois françaises.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez beau ne pas changer le mot, mais ce
n'est sûrement pas le bon mot.
UNE VOIX: Du français de Paris.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... suivi et en cela je serais d'accord avec le
député de Saint-Jean.
M. BIENVENUE: C'est du français recherché.
M. BEDARD (Chicoutimi): Prenez du français
compréhensible.
M. SAMSON: Vous allez plus loin que le Parti québécois
dans votre français.
M. CHOQUETTE: On est toujours en avance sur le Parti
québécois. Le député de Rouyn-Noranda devrait
savoir cela. Prenez par exemple, ce soir, le député de Chicoutimi
ne voulait pas que le gouvernement avance trop vite. Et le gouvernement pose
des gestes. Le gouvernement agit. Le Parti québécois dit: N'allez
pas si vite, nous avons de la difficulté à vous suivre.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est pas vrai ! Ce n'est pas vrai ce que
vous venez de dire là. Ce n'est pas vrai, ce que je vous ai dit...
M. SAMSON: Vous avancez comme dans les tramways, par en
arrière.
M. BIENVENUE: C'est encore la social-démocratie.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ce n'est pas vrai ce que
le ministre de la Justice vient de dire. Ce que j'ai dit dans le discours de
deuxième lecture c'est que justement le ministère de la Justice
avait promis que son livre blanc sur l'administration de la justice trouverait
au plus vite une solution concernant le problème dont on parle. On ne
l'a pas encore. C'est le gouvernement qui est en retard. La même chose
pour l'Office de révision du code civil; ce n'est pas fait encore. Ce
n'est pas fait encore.
M. CHOQUETTE: ... le code civil.
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non, non, ce n'est pas fait encore.
M. CHOQUETTE: Pensez-vous que c'est facile...
M. BEDARD (Chicoutimi): Sur le tome particulier qui touche la perte de
la puissance paternelle. Vous avez la même chose...
M.CHOQUETTE: Pensez-vous que c'est facile de réviser un code
civil centenaire?
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non, l'Office de révision du code
civil, il y a longtemps que c'est promis cela.
M. CHOQUETTE: Peut-être. Mais là c'est plus actif
maintenant et puis M. Crépeau nous promet enfin une version d'un nouveau
code civil d'ici un an.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Tout cela est bien intéressant,
mais revenons à la pertinence des débats.
M. BEDARD (Chicoutimi): Si le ministre était resté dans la
pertinence de mon discours de deuxième lecture, on n'aurait pas perdu ce
temps-là.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Mes remarques s'appliquent à ma
gauche et à ma droite. Nous en sommes à l'article 14 f ).
UNE VOIX: Merci, M. le Président.
M. SAMSON: On est d'accord sur 14 f).
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté.
M. BEDARD (Chicoutimi): "Sont nommés durant bon plaisir".
Cela...
M. CHOQUETTE: Cela vient de Louis XIV. LE PRESIDENT (M. Cornellier): 14
g)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela peut vouloir dire quoi en termes
d'indemnités?
M. CHOQUETTE: C'est une vieille phrase!
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela peut vouloir dire quoi en termes
d'indemnisations?
M. CHOQUETTE: Cela veut dire que c'est vieille France, c'est nouvelle
France; quand ils nommaient le gouverneur de la Nouvelle-France, ils le
nommaient "durant bon plaisir".
M. BEDARD (Chicoutimi): Mais c'est réglé...
M. CHOQUETTE: Cela veut dire qu'à un moment donné le
gouverneur ne fait plus l'affaire.
Tu dis: Tu reprends le bateau, tu t'en reviens en France.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est réglé, la question du bon
plaisir. Je vous posais la question concernant l'indemnisation...
M. SAMSON: L'allocation de présence.
M. CHOQUETTE: Je crois que le député a raison.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... et l'allocation de présence dont il
est fait état dans l'article.
M. CHOQUETTE: Oui. Le montant de l'allocation?
M. BEDARD (Chicoutimi): Oui. Est-ce que le ministre peut nous en donner
une idée approximative?
M. CHOQUETTE: Au Conseil consultatif de la justice, nous donnons, je
pense et ce n'est pas une grosse allocation $50 ou $75 pour une
journée ou une séance. Je sais qu'il y a des comités
consultatifs du gouvernement où l'allocation est plus
élevée, pouvant aller jusqu'à $100 et il y en a de moins
élevées.
Dans le cas actuel, je ne sais pas. Cela peut se situer, en fait,
à ces niveaux.
M. SAMSON: On va référer cela au conseil national!
M. CHOQUETTE: Au conseil national? M. BIENVENUE: Ce n'est pas
indexé!
M. SAMSON: Ce n'est pas indexé! Ha! Ha!
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela a l'air de fatiguer le député
de Rouyn-Noranda, notre conseil national. D'ailleurs, si le chef de
l'Opposition n'était pas en train de se battre contre l'augmentation du
salaire des députés, vous auriez l'occasion d'en discuter avec
lui.
M. BONNIER: La pertinence du débat! M. CHOQUETTE: J'aimerais
cela.
M. BEDARD (Chicoutimi): II est en train de remplir un autre devoir qui
est très important.
M. SAMSON: II se bat fort!
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Paragraphe 14 g).
M. BONNIER: Au paragraphe 14 g), M. le Président, est-ce que les
employés de ce comité auraient, à toutes fins pratiques,
des pouvoirs d'enquêteurs?
M. CHOQUETTE: Exactement. Les employés du comité vont
être des enquêteurs chargés de faire des enquêtes sur
les cas qui seront signalés au comité.
M. SAMSON: M. le Président, ces personnes pourront
pénétrer, en tout temps convenable,
dans tous les lieux ou endroits dans lesquels se trouve,
présumeraient, un enfant soumis à des mauvais traitements, etc.
Cela veut dire qu'elles n'ont besoin d'aucun mandat. Ces personnes auront une
identification leur permettant de pénétrer.
M. CHOQUETTE: Exactement.
M. SAMSON: S'il arrive un refus, par exemple, des parents de laisser
entrer l'enquêteur, il aura le recours, j'imagine, d'aller chercher de
l'aide policière.
M. CHOQUETTE: Et vous avez le recours du paragraphe 14 h) aussi.
Maintenant, vous pouvez avoir un recours judiciaire. Le fait, par exemple,
d'empêcher l'entrée, avec d'autres éléments de
preuve, pourrait constituer une indication pour la cour du Bien-Etre social
d'émettre une ordonnance de protection pour aller quérir
l'enfant. Il y a différents recours.
M. SAMSON: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Paragraphe 14 g), adopté.
Paragraphe 14 h).
UNE VOIX: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Paragraphe 14 i).
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Paragraphe 14 j).
M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant le secret professionnel, je ferais
remarquer au ministre de la Justice, qui a souligné qu'il aurait bien
aimé que le chef de l'Opposition soit ici, parce que ce dernier avait
parlé du caractère sacré du secret professionnel, dans
la...
M. CHOQUETTE: Pas juste de, non, non...
M. BEDARD (Chicoutimi): ... charte des droits de l'homme. Je pense que
le chef de l'Opposition c'est dans l'ordre à ce
moment-là, n'a jamais dit qu'il ne devait pas y avoir d'exception
à la charte des droits de la personne concernant le secret
professionnel, mais que lorsqu'il y avait une exception, elle devrait
être explicitement contenue, dans un projet de loi. Il me semble que
c'était son raisonnement.
M. CHOQUETTE: Oui, mais si c'est la version que me donne le chef de
l'Opposition, je lui dirai qu'à ce moment la charte des droits de
l'homme va être remplie d'exceptions parce qu'il y a des milliers
d'exceptions, dans notre législation, aux principes
énoncés dans la charte des droits de l'homme, et des exceptions
nécessaires dans certains cas, nécessaires. Cela surchargerait le
texte. Ce ne serait plus une charte, cela perdrait son caractère de
charte.
De toute façon, aussitôt que le chef de l'Opposition aura
terminé ses démêlés avec la commission de
l'Assemblée nationale, autant à l'occasion du bill amendant la
Loi de la Législature qu'à l'occasion d'un certain procès
qui a été entrepris par le ministre de l'Immigration, je
m'entretiendrai avec lui à ce sujet-là. Mais, est-ce qu'il aura
l'esprit plus libre à ce moment-là?
M. BEDARD (Chicoutimi): Ne parlez pas des choses judiciaires.
M. BIENVENUE: Pourriez-vous répéter, le ministre de la
Justice parle dans mon dos, c'est-à-dire moi dans son dos?
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Article 14 j), adopté. Article 14
k).
M. BIENVENUE: Je ne crois pas que le chef de l'Opposition officielle
soit une autorité supérieure à celle du
député de Chicoutimi en matière de secret professionnel,
parce que le député de Chicoutimi a pratiqué le droit
abondamment, ce qui n'est pas le cas de l'autre personnage dont on vient de
parler.
M. BEDARD (Chicoutimi): N'essayez pas de m'amadouer avec ce genre de
raisonnement. Dans son discours de deuxième lecture, le ministre de la
Justice semblait dire que le chef de l'Opposition avait laissé entendre
qu'il ne devait jamais y avoir d'exception en ce qui regarde le secret
professionnel. Ce n'est pas exact, et je pense que c'est bon de le corriger,
puisqu'on en parle, à cet article-là. Ce qu'a dit le chef de
l'Opposition, c'est que lorsqu'il y a des exceptions en ce qui regarde le
secret professionnel, elles doivent être contenues explicitement dans les
lois, comme c'est fait dans cette loi-ci, comme ça peut être fait
dans d'autres lois également.
M. CHOQUETTE: Mais vous seriez obligé de l'inscrire dans la
charte des droits de l'homme.
M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, dire: le principe général
c'est que le secret professionnel vous devez le respecter...
M. CHOQUETTE: Vous seriez obligé de dire, quand on arrive
à l'article sur le secret professionnel: Cet article-là ne
s'applique pas au cas où les enfants...
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non.
M. CHOQUETTE: On serait obligé de dire: Cet article-là ne
s'applique pas aux cas de maladies vénériennes, parce que vous
savez que les médecins sont obligés de les dénoncer. Vous
seriez obligé d'énumérer tous les cas de...
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, le ministre de la Justice sait très
bien qu'il n'a pas besoin de faire toute cette
énumération-là dans la charte des droits de l'homme. Il
n'a simplement qu'à consacrer le caractère du secret
professionnel en disant: Sauf lorsqu'il y a des exceptions explicitement
contenues dans une loi à l'effet contraire. C'est tout.
M. CHOQUETTE: Oui mais si vous ne le mettez pas dans la charte, les
principes de votre charte ne sont pas intangibles puisqu'ils sont
modifiés dans d'autres lois. C'est pour cela que je vous dis qu'il faut
que vous mettiez vos exceptions dans votre charte, si on suit votre
logique.
M. BEDARD (Chicoutimi): II faut que vous mettiez le principe qu'il peut
y avoir des exceptions dans d'autres lois.
M. CHOQUETTE: C'est ce que j'ai fait. Alors, je vois que le
député de Chicoutimi abonde dans le sens du ministre de la
Justice.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ce que disait, j'en suis sûr, le
chef de l'Opposition.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Article 14 k), adopté. Article 14
1).
M. CHOQUETTE: C'est une concordance parce qu'il donne l'immunité
de poursuite au dénonciateur de bonne foi. C'est la contrepartie de son
obligation de dénoncer.
M. BEDARD (Chicoutimi): Comment va se faire la preuve de bonne ou de
mauvaise foi?
M. CHOQUETTE: La bonne foi se présume toujours. Alors, il
faudrait prouver la mauvaise foi du dénonciateur.
M. BEDARD (Chicoutimi): Devant le comité?
M. CHOQUETTE: Non, devant les cours de justice.
M. BEDARD (Chicoutimi): Devant les cours de justice.
M. CHOQUETTE: C'est parce que le dénonciateur, s'il est
poursuivi, disons, par ceux qu'il a dénoncés, il va pouvoir
plaider l'article 14 k) en disant: Je suis présumé de bonne foi.
Si eux peuvent présumer qu'il a agi dans une intention vexatoire ou
d'une façon vindicative, ils pourraient possiblement obtenir des
dommages, mais tant que le dénonciateur est de bonne foi, il n'est
exposé à aucune poursuite.
M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Article 14 k), adopté. Article 14
1).
M. SAMSON: A l'article 14 1), M. le Président, je voudrais poser
une question au ministre. Quand on dit: "Le comité ou toute personne
à son service ne peut être contraint à dévoiler
l'identité de la personne qui lui a signalé une situation
visée à l'article 14 j)" y-a-t-il une raison pour laquelle, au
lieu de dire "ne peut être contraint", on ne dirait pas: "ne doit pas
dévoiler"? A mon sens, il y a une différence entre ne peut
être contraint à dévoiler et ne doit pas
dévoiler.
M. CHOQUETTE: C'est-à-dire qu'il y a peut-être des cas
où le comité voudrait le dévoiler mais avec le
consentement de la personne en question.
M. SAMSON: A ce moment-là, il faudrait...
M. VEILLEUX: Pour répondre à la question du
député de Rouyn-Noranda, hier, le ministre de l'Immigration a
demandé d'ailleurs le député de Rouyn-Noranda
était là un avis au comité de
législation.
On nous a fait part, si mon souvenir est bon, qu'on n'intercale jamais
dans une loi le mot "doit", parce qu'il peut y avoir, comme le ministre vient
de le mentionner, le désir, par exemple, de la personne de dire: Je veux
que mon nom soit dit.
M. CHOQUETTE: C'est cela. C'est pour cela qu'on emploie toujours "peut",
au lieu de "doit".
M. VEILLEUX: C'est pour cela que ce n'est jamais employé dans une
loi, l'expression "doit" mais qu'on emploie l'expression "peut".
M. CHOQUETTE: C'est cela.
M. VEILLEUX: Est-ce que le député de Rouyn-Noranda s'en
souvient?
M. SAMSON: J'étais là. Le cas était
différent hier. On voulait dire "doit" faire telle chose. On disait
"peut" faire telle chose, au lieu de dire "doit". Mais ici, c'est
différent; c'est ne doit pas le faire. Je considère qu'il y a une
différence entre le fait que le comité n'est pas tenu de le faire
ou que le comité ne doit pas le faire. C'est différent. Je ne
veux pas dire que j'ai la phraséologie qu'il faut; peut-être que
cela pourrait se lire "le comité ou toute personne à son service
ne peut dévoiler l'identité". En effet, "ne peut être
contraint", cela veut dire que quelqu'un pourrait tenter de contraindre le
comité à la dévoiler, alors que moi, je considère
que, dans tous les cas, le comité ne doit pas dévoiler
l'identité de la personne.
M. CHOQUETTE: D'ailleurs, on n'est pas pour créer un autre secret
professionnel. Supposons que le comité est libéré de son
obligation par le dénonciateur; supposons que le dénonciateur est
appelé comme témoin dans une cause
de protection de l'enfant en question, je comprends que le comité
ne voudra pas dévoiler qui était le dénonciateur, mais
supposons que le dénonciateur dit: Je n'ai pas d'objection.
M. SAMSON: A ce moment-là, M. le Président, je vais poser
une autre objection. Comme le ministre l'a dit tantôt, les
dénonciations pourront être faites par téléphone. Je
téléphone, par exemple, pour dénoncer quelqu'un. Si je
prends l'identité d'un autre, comment pourrez-vous le prouver?
M. CHOQUETTE: Ah bien, on ne pourra pas le prouver.
M. SAMSON: Si on accepte les dénonciations par
téléphone, comme c'est possible qu'il y ait dénonciations
faites par des gens au nom d'un autre, pourquoi dit-on que le comité
pourra dévoiler les noms, si on présume que la
dénonciation sera valable de façon anonyme? Au
téléphone, c'est anonyme dans le fond.
M. BONNIER: M. le Président, j'aurais tendance à ne pas
accepter la suggestion du député de Rouyn-Noranda parce que je
pense qu'à ce moment-là on limite les possibilités
d'action du comité. Il peut, à un moment donné, juger
opportun de dévoiler qui a fait la dénonciation, justement pour
renforcer sa position vis-à-vis peut-être des parents. Lorsqu'un
enfant est en foyer nourricier, par exemple, les parents peuvent dire: Bien,
nous autres, on s'oppose à telle et telle chose. S'ils ont le
dénonciateur qui est de très bonne foi, peut-être que le
comité pourra dans son jugement dire: Voici quel est le
dénonciateur, pour vous montrer jusqu'à quel point cette
dénonciation est faite objective et authentique. Si on met le mot
"doit", je crois qu'on empêche, à toutes fins pratiques...
M. SAMSON: M. le Président...
M. BONNIER: Cela va être difficile si on met le mot "doit".
M. SAMSON: ... en deuxième lecture, j'ai appuyé le projet
de loi, mais je ne l'ai pas vu comme cela. Moi, en tout cas, je trouve cela
drôlement important. D'une part, on déclare l'obligation de
dénoncer pour un citoyen; d'autre part, dans un autre article, on dit:
"Aucune action civile ne peut être intentée en raison du fait
qu'une personne a, de bonne foi, signalé au comité une situation
visée..." Mais, si le comité peut dévoiler les noms de
personnes qui ont signalé une situation, je pense qu'au point de vue
pratique vous allez restreindre la portée de votre loi. Même s'il
y a obligation de dénoncer, toute personne sachant que son nom peut
être dévoilé je vous le dis, moi, M. le
Président il y a beaucoup de situations qui ne seront pas
dénoncées; il y a des gens qui vont prendre la chance de
commettre l'infraction de ne pas dénoncer, plutôt que de voir
dévoiler leur nom. Il y a des situations où ce sont
peut-être des membres proches de la famille qui, en conscience,
voudraient peut-être faire une dénonciation, mais, sachant que
leur nom peut être dévoilé et sachant les
conséquences que cela peut entraf-ner pour des années et des
dizaines d'années au sein d'une famille, ils ne risqueront pas la
dénonciation.
A ce moment, ce sera à l'encontre des intérêts de
l'enfant dont nous voulons préserver la vie, l'enfant que nous voulons
préserver contre les mauvais traitements. Dans le fond, que
recherchons-nous? C'est de préserver l'enfant contre de mauvais
traitements.
M. GOLDBLOOM: Est-ce que je comprends la pensée du
député de Rouyn-Noranda? Est-ce qu'il voudrait que l'article
constitue une défense absolue de révéler le nom de
l'informateur? Est-ce qu'il aimerait que l'article se lise: Le comité ne
doit jamais dévoiler le nom, l'identité de la personne?
M. SAMSON: Oui.
M. GOLDBLOOM: M. le Président...
M. SAMSON: A moins que...
M. CHOQUETTE: J'ai une idée.
M. SAMSON: Peut-être une position entre les deux: ...ne doit
jamais dévoiler l'identité de la personne à moins d'avoir
son autorisation.
M. CHOQUETTE: Je pense qu'on peut satisfaire tout le monde. Le
comité ou toute personne à son service ne doit dévoiler
l'identité de la personne qui lui a signalé une situation
visée à l'article 14 j) sans son consentement.
M. SAMSON: D'accord.
M. BEDARD (Chicoutimi): A ce moment, ça veut dire quoi, vos
poursuites? Une personne qui dénonce de mauvaise foi n'a qu'à ne
pas donner le consentement au comité de révéler son nom et
il n'y aura jamais de poursuite contre elle.
M. CHOQUETTE: C'est exact.
M. SAMSON: D'un autre côté, si une personne...
M. CHOQUETTE: Si elle est reconnue autrement, par exemple.
M. BEDARD.(Chicoutimi): Si vous me permettez, je me demande comment vous
allez appliquer votre article 14, advenant une poursuite devant les tribunaux,
comment vous allez pouvoir fonctionner avec cette restriction.
M. CHOQUETTE: Nous ne voulons pas encourager les poursuites contre les
dénonciateurs.
M. VEILLEUX: Oui, mais...
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous ne pouvez pas systématiquement
barrer la porte non plus.
M. VEILLEUX: Comme le député de Chicoutimi le mentionne,
vous pouvez avoir...
M. GOLDBLOOM: M. le Président, c'est une
préoccupation...
M. VEILLEUX: ... des types qui vont se complaire à faire des
dénonciations pour le plaisir d'en faire et faire travailler le
comité. Si c'est toujours le même individu, il faudrait qu'on
puisse donner la permission.
M. CHOQUETTE: Le comité va le savoir et ne s'en occupera pas. Il
va être repéré. Les personnages de cet acabit vont
être repérés.
M. SAMSON: Ce qu'il y a d'important, c'est qu'une personne qui va faire
une dénonciation et qui refuse son consentement, ce sera pris en
considération par les enquêteurs. Ils devront faire la preuve en
partant de l'indice. Dans ce cas, c'est l'indice qu'ils auront. Ils peuvent
quand même travailler. Tandis que si la personne donne son consentement,
en plus de l'indice, ça peut aider à faire la preuve, ce qui
facilitera... Au moins, vous contournez certains autres problèmes qu'on
veut éviter également.
Et, comme nous le disons, si la même personne dénonce
toujours sans donner son consentement, vous aurez là une indication de
mauvaise foi.
M. GOLDBLOOM: J'ai l'impression que nous parlons de deux idées
légèrement différentes l'une de l'autre. L'article tel que
rédigé dit: "Le comité ou toute personne à son
service ne peut être contraint à dévoiler
l'identité..." Cela, c'est une chose. 'Je me pose la question :
je ne suis pas avocat, donc je m'adresse à mon collègue de la
Justice pour qu'il m'aide Qui pourrait contraindre une personne à
dévoiler un nom? Ce serait normalement un tribunal.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ça.
M. GOLDBLOOM: II me semble qu'il y a des situations où
l'intérêt public pourrait être en jeu et le comité
pourrait se réunir et dire: Nous ne pouvons être contraints de
révéler le nom, mais puisque le tribunal le demande, nous allons
témoigner. Est-ce que c'est une considération qui est
significative?
M. CHOQUETTE: Oui. Je pense que ce que dit le ministre des Affaires
municipales mérite d'être considéré. Il semble dire
que derrière les mots "ne peut être contraint" pourrait se trouver
une espèce de facteur discrétionnaire pour le comité de
dénoncer le nom de la personne qui a été le
dénonciateur. La façon la plus simple peut-être de
clarifier ce serait de suivre la suggestion que je faisais.
C'était celle-ci: "Le comité ou toute personne à
son service ne doit dévoiler l'identité de la personne qui lui a
signalé une situation visée à l'article 14 j) sans son
consentement". Ceci ne veut pas dire que le dénonciateur ne sera pas
témoin. Il peut très bien être témoin. Mais cela
veut qu'on ne dira pas que c'est lui qui est le dénonciateur, que c'est
lui qui a mis le travail du comité en marche.
M. SAMSON: C'est cela.
M. CHOQUETTE: C'est cela. Cela n'exclut pas que le dénonciateur
soit invité par un subpoena à témoigner dans une cause ou
à témoigner dans un cas de protection.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté? M. BEDARD (Chicoutimi): Je
trouve...
M. GOLDBLOOM: Je pense que, pour que le français soit correct, il
faudrait écrire: "Le comité ou toute personne à son
service ne doit dévoiler l'identité de la personne qui lui a
signalé une situation visée à l'article 14 j) qu'avec le
consentement de cette personne."
M. CHOQUETTE: Oui, c'est cela.
M. GOLDBLOOM: Ou: "ne doit pas, sans son consentement". Le mot "pas"
était absent tout à l'heure.
M. CHOQUETTE: Très bien. Alors, "Le comité ou toute
personne..."
M. BEDARD (Chicoutimi): Si on se place dans la situation de celui qui a
été victime d'une dénonciation vraiment injuste, qui
n'était pas fondée, en quoi lui refuserait-on la
possibilité de savoir du comité quelle est la personne qui l'a
dénoncé? On dit que le comité peut refuser de donner
même l'identité. Cela équivaut presque d'une certaine
façon à encourager les dénonciations plus ou moins
sérieuses. Il me semble que le dénonciateur doit être
astreint à autant de sens des responsabilités que les parents qui
ont charge d'enfants.
M. CHOQUETTE: Je suis d'accord avec le député de
Chicoutimi qu'il peut naître des abus de cette loi. Il se peut qu'il y
ait des dénonciateurs qui fassent des dénonciations sans aucun
fondement et purement dans le but de causer des ennuis à des personnes.
Mais c'est une chose qu'il faut accepter, compte tenu du résultat final
qui est la préservation de la vie et de la santé des enfants.
M. BEDARD (Chicoutimi): A moins que vous ne disiez: Sauf que le
comité n'est pas tenu de garder le secret, lorsqu'il a la preuve que
cela a été une dénonciation futile, lorsque, dans son
esprit, il croit que cela a vraiment été futile. Cela ne veut pas
dire, à ce moment, qu'il part à la course pour aller dire
à celui qui a été dénoncé: C'est un tel qui
a fait cela et sa dénonciation était futile. Mais, au moins, si
la personne qui a été, d'une certaine façon, victime
s'informe au comité ou auprès des personnes qui ont fait
l'enquête, à ce moment, elle a droit à une
réponse.
M. CHOQUETTE: Vous savez, les procédures du comité, sont
empreintes de secret. Même s'il y a eu une dénonciation futile
faite au comité et qu'il y a eu enquête sur le cas en question,
cela ne veut pas dire que cela a entrafné des ennuis à ce point
considérables qu'il faille laisser tomber le principe du secret sur le
nom du dénonciateur. Je crois que le secret quant au nom du
dénonciateur est très important comme facteur qui facilitera aux
gens qu'ils s'acquittent de leurs responsabilités juridiques.
C'est pour cela que je ne serais pas tout à fait prêt
à appuyer la suggestion du député de Chicoutimi et dire
qu'il faut que le comité révèle, dans certaines
circonstances, l'identité du dénonciateur...
M. BEDARD (Chicoutimi): Pas nécessairement, la
révèle, mais ne soit pas astreint à ne pas la
révéler. C'est une distinction de taille. Ce que je veux exprimer
est que je trouve que l'article tel que rédigé le premier
paragraphe rend mieux la situation que de commencer à y greffer,
par exemple, un amendement dans le sens qu'il faudra obtenir auparavant le
consentement du dénonciateur.
M. CHOQUETTE: Je pense que l'article, au fond, est assez convenable tel
quel.
M. SAMSON: Je m'excuse, mais je dois insister là-dessus. Si on
permettait, si les policiers étaient tenus de dévoiler les noms
des dénonciateurs, il y a beaucoup d'enquêtes qui ne se rendraient
pas à terme et le ministre de la Justice le sait.
Une dénonciation, dans le cas présent, n'est pas une
condamnation. Une dénonciation ne fait que mettre en branle le
mécanisme du comité. C'est tout ce que cela fait la
dénonciation. Cela ne fait pas autre chose que cela. Si le
dénonciateur accepte que son nom soit révélé, il
aide à l'enquête, il aide aux mécanismes. Mais vous ne
m'enlèverez pas de la tête qu'avec les dispositions que vous allez
prendre à l'effet que les dénonciations pourront se faire par
téléphone, de toute façon dévoiler les noms des
dénonciateurs dans le cas où cela pourrait être fait par
téléphone, n'importe qui pourra contourner facilement la loi en
dénonçant de façon anonyme. Puis vous allez être
obligé de le prendre, si vous voulez aider les enfants. Qui va, au
téléphone, m'obliger à me nommer, si je ne me nomme pas?
Personne ne peut le faire. Je dénonce quelque chose, je raccroche la
ligne puis je m'en vais. Là, le comité est obligé quand
même de prendre action, de faire enquête parce qu'il peut sauver la
vie d'un enfant dans plusieurs cas. Puisqu'on peut le faire de façon
anonyme, pourquoi ne protégerions-nous pas ceux qui se nommeront?
M. BIENVENUE: Si on me permet, le député de Chicoutimi a
entendu souventefois, comme criminaliste, le vieux dicton, le vieux proverbe
qui dit: Mieux vaut mille coupables acquittés qu'un innocent
condamné. Je transpose dans le cas de la présente loi et je dis:
Mieux vaut 100,000 dénonciations mal fondées si elles ont pour
effet, grâce à la présente loi, de permettre qu'un cas bien
fondé soit dénoncé et qu'un seul enfant ne souffre
pas.
M. SAMSON: Adopté avec amendement.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'article 14 1) avec l'amendement qui a
été suggéré. Le comité ou toute personne
à son service...
M. BEDARD (Chicoutimi): II reste quand même que les coupables que
vous acquittez, vous les obligez à subir des procès, tandis que
là les dénonciateurs qui sont folichons n'ont même pas
à subir...
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Est-ce qu'on maintient l'amendement...
M. CHOQUETTE: L'article est assez clair comme ça.
M. SAMSON: Qu'est-ce que le ministre va faire dans ce cas?
M. CHOQUETTE: Quoi?
M. SAMSON: Si vous ne protégez pas les dénonciateurs qui
vont vouloir se nommer, vous allez faire quoi avec ceux qui ne se nommeront
pas? Vous allez inviter toute la population à faire des
dénonciations par téléphone sans se nommer.
M. CHOQUETTE: Pas du tout.
M. SAMSON: Bien oui, vous allez le faire au téléphone. Je
vous ai cité tantôt l'exemple: Je vous appelle, j'appelle le
comité pour faire une dénonciation, je fais la
dénonciation et je raccroche le téléphone, je ne me nomme
pas, comment pouvez-vous m'obliger à me nommer au
téléphone? Puis vous allez la prendre, vous l'avez dit
tantôt que cela va se faire par téléphone.
A ce moment, cela veut dire qu'une dénonciation anonyme va
être considérée.
M. CHOQUETTE: On va le suspendre, l'article, puis je vais y penser.
M. SAMSON: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'article 14 1) suspendu. Article 14
m).
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 14 n)?
M. SAMSON: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 14 o)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté, M. le Président.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 14 p)?
M. SAMSON: D'accord.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Article 14 q)?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 2.
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 3?
M. SAMSON: Adopté.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Article 4?
M. BEDARD (Chicoutimi): Adopté.
M.SAMSON: L'article 4, M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre. Pourquoi la loi sera-t-elle en vigueur par
proclamation du lieutenant-gouverneur en conseil, au lieu du jour de sa
sanction?
M. GOLDBLOOM: II faut avoir un comité pour faire fonctionner la
loi, c'est aussi simple que cela.
M. SAMSON: C'est une bonne réponse.
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Adopté. Nous allons revenir
à l'article 14 1).
M. CHOQUETTE: On va faire plaisir au député de
Rouyn-Noranda. On va amender l'article 14 1) qui va se lire dorénavant
comme suit: "Le comité ou toute personne à son service ne doit
pas dévoiler l'identité de la personne qui lui a signalé
une situation visée à l'article 14 j) sans son consentement".
LE PRESIDENT (M. Cornellier): Cet article est adopté avec
l'amendement? Adopté.
DES VOIX: Adopté.
M. CORNELLIER (président de la commission
plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire
rapport que la commission a étudié article par article le projet
de loi no 78 et l'a adopté avec amendements.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que ces amendements sont
agréés?
DES VOIX: Agréé.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Est-ce que le rapport est
agréé? Agréé.
UNE VOIX: Agréé.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Troisième lecture?
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, M. le Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Prochaine séance ou séance
subséquente.
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que la Chambre s'ajourne
à demain matin, dix heures.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): La Chambre ajourne ses travaux à
demain matin, dix heures.
(Fin de la séance à 23 h 8)