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(Quinze heures)
LE PRESIDENT (M. Lavoie): A l'ordre, messieurs !
Affaires courantes
Dépôt de rapports de commissions élues.
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Questions orales des députés.
QUESTIONS DES DÉPUTÉS
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Cours d'anglais aux immigrants
M. MORIN: En l'absence du ministre de l'Education, je vais poser ma
question au premier ministre. A Montréal, des classes clandestines
d'anglais sont présentement organisées par des parents
néo-québécois ou immigrants. Ces classes sont
données par des professeurs bénévoles et ont pour but de
permettre aux enfants d'immigrants de passer avec le plus de facilité
possible les tests d'aptitudes du ministère et, donc, en vue de
s'inscrire dans les écoles anglophones. A l'heure actuelle, ce mouvement
toucherait 6,000 à 7,000 enfants. J'aimerais demander au premier
ministre quels sont les moyens qu'il entend prendre pour mettre fin à
cet état de fait qui, à toutes fins pratiques, il faut bien
l'admettre, peut rendre la Loi sur les langues officielles totalement
inopérante.
M. BOURASSA: M. le Président, le chef de l'Opposition est au
courant des reproches qu'il nous faisait sur la trop grande flexibilité
de la loi 22, c'est-à-dire sur la possibilité pour le
gouvernement, par des règlements appropriés, de corriger la
situation selon les changements qui pourraient être apportés.
Cette flexibilité de la loi 22 va nous permettre de faire face à
une telle situation, si de fait elle existe.
M. MORIN: M. le Président, je voudrais demander au premier
ministre si ce n'est pas précisément cette flexibilité de
la loi et l'ambiguité des règlements qui vont permettre aux
enfants d'immigrants de passer à travers le filet aux mailles un peu
trop larges qu'il a voulu tendre devant les immigrants.
M. BOURASSA: M. le Président, c'est l'opinion du chef de
l'Opposition, mais nous, nous soutenons, de notre côté, que, comme
nous pouvons modifier les règlements selon les besoins de la situation,
nous serons en mesure de faire face à des problèmes comme ceux
que soulève le chef de l'Opposition, s'ils existent
réellement.
M. MORIN: Est-ce que le premier ministre pourrait être un peu plus
précis tout de même? Voici un état de fait. Ces enfants
qui, normalement, si j'ai bien compris les intentions du gouvernement,
devraient aller à l'école française, on est en train de
s'organiser pour qu'ils aillent à l'école anglaise. Cela se passe
en ce moment. Alors, que comptez-vous faire maintenant?
M. BOURASSA: M. le Président, j'aurai certainement l'occasion de
vérifier ave le ministre de l'Education, non pas que je ne croie pas le
chef de l'Opposition, mais avant de lui répondre, je voudrais
vérifier avec le ministre de l'Education si une telle situation existe
réellement.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Politique de garderies
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ma question s'adresse au
ministre d'Etat aux Affaires sociales. Avant-hier, la présidente du
comité SOS Garderies déclarait textuellement ceci: "Si le
ministère des Affaires sociales n'apporte pas de changement à sa
politique concernant les garderies, plusieurs devront fermer leurs portes d'ici
trois mois. D'ailleurs, déjà toutes les garderies accusent des
déficits financiers".
Je voudrais demander au ministre si, dans l'esprit des fêtes, le
ministre d'Etat pourrait leur annoncer que la politique de révision des
garderies, qu'elle a déjà annoncée, pourra se faire d'ici
trois mois afin de répondre aux besoins exprimés par la
présidente du comité SOS Garderies.
MME BACON: M. le Président, j'ai toujours dit que les politiciens
ne devraient pas être considérés comme des Pères
Noël. Même si c'est la période des fêtes, nous
continuons à étudier les améliorations qui doivent
être apportées au programme des garderies.
J'ai toujours dit que c'est un programme souple et flexible et qui peut
apporter des améliorations en temps et lieu. Je les annoncerai en temps
et lieu.
M. HARDY: Très bien.
M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce que je dois considérer la
réponse du ministre d'Etat aux Affaires sociales comme une fin de
non-recevoir à apporter les réformes...
DES VOIX: II n'a rien compris.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... nécessaires dans le délai
prescrit...
UNE VOIX: A l'ordre!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. BEDARD (Chicoutimi): ... puisqu'il s'agit d'une urgence pour les
garderies qui existent présentement? Il n'est pas question de jouer au
Père Noël, c'est une urgence qui existe. Bon, il semble que le
ministre d'Etat ne veut pas répondre à ma question.
UNE VOIX: A l'ordre!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. HARDY: La réponse était complète.
LE PRESIDENT: A l'ordre! L'honorable...
M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce que je dois considérer...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEDARD (Chicoutimi): ... ça comme une fin de non-recevoir?
LE PRESIDENT: A l'ordre! Le règlement ne vous le permet pas. Vous
n'avez pas le droit de faire une déduction en vertu du
règlement.
L'honorable député de Beauce-Sud.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une seconde, M. le Président.
LE PRESIDENT: Bon.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, est-ce que le ministre
d'Etat aux Affaires sociales a l'intention de rencontrer la présidente
du comité SOS Garderies afin de discuter avec elle des problèmes
auxquels elles ont à faire face?
MME BACON: M. le Président... LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEDARD (Chicoutimi): La flexibilité fait que vous n'apportez
jamais de changements à cette politique.
MME BACON: M. le Président, des rencontres ont déjà
eu lieu avec les représentants de SOS Garderies et les
représentants du ministère. Je répète parce
qu'il semble que le député de Chicoutimi n'a pas compris
qu'en temps et lieu, nous annoncerons des améliorations au programme du
service de garde d'enfants, au Québec.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud.
Subventions aux agriculteurs
M. ROY: M. le Président, ma question s'adresse à
l'honorable ministre de l'Agriculture. Dans la grande déclaration
qu'avait faite le ministre de l'Agriculture, lorsqu'il a annoncé ses
politiques de subvention de $22.8 millions, j'avais exprimé certaines
réserves en disant à l'honorable ministre que j'avais
l'impression, à première vue, que tous les agriculteurs ne
pourraient bénéficier de ce genre de subventions.
M. le Président, j'aimerais demander à l'honorable
ministre de l'Agriculture s'il a eu des représentations de la part de
l'UPA à ce moment-ci, à l'effet que plusieurs régions du
Québec, surtout les régions où l'agriculture est
diversifiée et polyvalente dont la région de celui qui
vous parle bénéficieraient très peu de la
subvention annoncée par le ministère.
M. TOUPIN: M. le Président, je n'ai eu, à ce jour, aucune
représentation de quelque groupe de producteurs que ce soit.
Néanmoins, je trouve, je dirais, curieuses, oui, l'attitude ou les
impressions du député de Beauce-Sud concernant les producteurs de
sa région parce que les nécanismes que nous avons mis de l'avant
et les critères que nous avons utilisés permettent à
presque tous les producteurs de bovins québécois de toucher
à la subvention, je ne dirai même pas à quelques exceptions
près. Néanmoins, des normes de la base permettent, par exemple,
pour qu'une mesure s'applique, qu'il y ait un minimum de têtes de
bétail, mais, à part ce minimum, tous sont touchés, dans
toute la province de Québec et dans toutes les régions du
Québec.
M. ROY: M. le Président, j'ai ici devant moi un communiqué
qui a été émis par l'UPA de ma région. J'aimerais
demander au ministre s'il est exact que les producteurs laitiers qui ont moins
de 20 vaches ne pourront pas toucher la subvention; et pour ce qui a trait aux
bovins de boucherie, les éleveurs spécialisés qui
n'auraient pas 25 veaux, soit qu'ils les aient vendus ou qu'ils les aient
gardés, ne pourront pas également toucher à cette
subvention.
M. le Président, je me réfère à une
déclaration de l'UPA qui a été faite dans ma région
et qui mentionne très clairement les deux points que je souligne
à l'attention du ministre.
M. TOUPIN: C'est exact, ce sont des critères qu'on a
établis, sauf le premier. En ce qui concerne les bovins laitiers, il
n'est pas question que nous tenions compte des unités de production
laitière.
Il est, par ailleurs, tenu compte d'un minimum de têtes sur la
ferme pour que nous puissions intervenir. Quand nous parlons de producteurs
spécialisés, il est évident que ce
n'est pas avec deux, trois ou quatre bovins qu'un producteur va faire sa
vie. Cela lui en prend au moins un minimum de 25. Donc, s'il a les 25 requis,
il touche une subvention à compter, je pense, du sixième, dans le
cas des gros bovins. Mais il ne faut pas oublier que celui qui a moins de 25
bovins bénéficie de $0.25 les 100 livres de lait versés
à tous les producteurs laitiers. Celui qui n'a pas de production
laitière et qui n'a pas 25 bovins, il est évident que c'est un
amateur.
Donc, le rôle du gouvernement n'est pas d'aider les amateurs,
c'est d'aider les professionnels de l'agriculture et c'est ce que nous avons
fait. Il est possible que certains producteurs qui ont 22 ou 23 têtes ne
puissent bénéficier de la subvention parce qu'ils ne respectent
pas le critère de 25. Là-dessus, on est d'accord. Mais celui qui
a seulement ces unités de 22, 23 ou moins de 25, ou c'est un producteur
laitier ou c'est un producteur amateur.
S'il est producteur laitier, il touche une subvention de $0.25 les 100
livres et, s'il est producteur amateur, c'est parce qu'il a un revenu à
l'extérieur de sa ferme.
M. ROY: M. le Président, une dernière question au
ministre. Je m'aperçois que les agriculteurs de ma région n'ont
pas eu de cadeau de Noël.
J'aimerais demander au ministre s'il est prêt à venir dire
aux agriculteurs de ma région qu'ils sont des agriculteurs amateurs. Il
s'agit d'agriculteurs ayant moins de 20 vaches laitières, qui vont
chercher des revenus d'appoint dans l'industrie de l'érable, qui vont
chercher des revenus d'appoint en forêt et en travaillant à temps
partiel dans d'autres secteurs de l'activité économique.
J'aimerais demander au ministre s'il est prêt à venir dire cela
publiquement aux agriculteurs de ma région qu'ils sont des cultivateurs
amateurs parce qu'ils sont de petits cultivateurs.
Je le savais, M. le Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!
M. ROY: ... que dans la subvention du ministre il y avait quelque chose
qui cachait de l'hypocrisie...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!
M. TOUPIN: Oui, M. le Président, je suis prêt en tout temps
à aller expliquer aux producteurs de la région de Beauce comment
la mesure s'applique et je répète encore une fois au
député de Beauce qu'il n'y a aucun critère relatif aux
bovins laitiers, c'est-à-dire aux vaches laitières.
Celui qui a deux, trois ou quatre vaches laitières
bénéficie d'une subvention de $0.25 les 100 livres de lait. On
est d'accord là-dessus?
M. ROY: II n'a pas droit à l'autre.
M. TOUPIN: Bien sûr que non il n'a pas droit à l'autre, on
n'est pas pour financer un élevage bovin sous deux formes. 'Pour ceux
qui ont moins de 25 unités, on les finance à compter de $0.25 les
100 livres de lait. Pour ceux qui ont plus que 25 unités, on les
considère comme des producteurs spécialisés. A
ceux-là, on donne une subvention additionnelle. Il me semble que le
député de Beauce aurait très très peu de
difficulté à expliquer ça à ses commettants. Il me
paraît évident, de deux choses l'une...
M. ROY: Je ne vous défendrai pas, je ne fais que dire la
vérité aux agriculteurs de ma région, M. le
Président.
LE PRESIDENT: A l'ordre! M. ROY: Je ne vante pas les...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. TOUPIN: Ou le député de Beauce-Sud est sérieux,
et il dit à ses producteurs exactement ce qui se passe, ou il veut
politiser le problème. S'il veut politiser le problème, c'est son
problème à lui, ce n'est pas le mien. Moi, je vous dis que ces
producteurs sont bien traités, ils sont traités sur le même
pied que tous les autres producteurs du Québec. C'est comme cela que
ç'a été accepté, et l'UPA était d'accord
avec nous à ce moment-là.
M. ROY: Cela a été accepté, il faut le dire vite,
M. le Président.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! Je suis bien prêt à
vous accorder une dernière question mais il ne faudrait pas que cela
dégénère en débat, comme c'est amorcé
actuellement.
M. ROY: J'avais promis d'être sage jusqu'à Noël.
LE PRESIDENT: Je prends acte de votre aveu que Noël est
passé. Bon, une dernière question.
M. ROY: M. le Président, j'aimerais demander au ministre s'il
serait prêt, dès que la commission parlementaire de l'agriculture
va être convoquée en janvier, à prendre des dispositions
pour que toute la réglementation des subventions qui sont
accordées soit discutée en commission parlementaire et qu'on
puisse également prendre connaissance de tous les règlements.
M. TOUPIN: Non, M. le Président, je n'ai absolument pas
l'intention de discuter de cette mesure en commission parlementaire parce que
c'est une mesure que nous avons discutée avec les producteurs, tout au
moins leurs représen-
tants, et ces derniers étaient d'accord. Le ministère de
l'Agriculture n'est pas pour implanter une politique pour chacun des
producteurs du Québec; il tient compte de l'ensemble des producteurs et
discute avec leurs représentants; c'est ce sur quoi nous nous sommes
entendus et je n'ai pas l'intention, sous aucune forme, de discuter cette
politique ailleurs qu'aux endroits où on l'a discutée
jusqu'à maintenant.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
Grèves à la United Aircraft et à
la Canadian Gypsum
M. BURNS: M. le Président, en l'absence du ministre du Travail,
ma question s'adresse au leader du gouvernement ou au premier ministre et cela
concerne toujours les problèmes de la United Aircraft et de la Canadian
Gypsum. Etant donné que nous devons revenir après Noël,
étant donné que les travaux parlementaires doivent se poursuivre
de façon indéfinie, et qu'il est difficile de prévoir la
date à laquelle ils finiront, j'aimerais savoir quelle est l'intention
du gouvernement relativement à cette commission parlementaire alors que
vous avez deux grèves actuellement qui bloquent dans leurs
règlements à cause de l'absence de la formule Rand et,
deuxièmement, est-ce que l'article 12 au feuilleton risque d'être
appelé avant la fin de la présente session, c'est-à-dire
le projet de loi que j'ai présenté sous le numéro 99,
rendant obligatoire la formule Rand dans tout le Québec?
M. BOURASSA: M. le Président, le ministre du Travail ne m'a pas
avisé qu'il jugeait opportun de convoquer la commission parlementaire en
même temps.
M. BURNS: Oui, mais quand cela se fera-t-il? C'est ce que je vous
demande. Dans le cas de United Aircraft, c'est une grève qui dure depuis
bientôt un an, et dans le cas de la Canadian Gypsum, alors que c'est le
seul point qui demeure en litige actuellement entre les parties, c'est une
grève qui dure depuis au-delà d'un an et demi. Je vous demande
quand vous allez convoquer la commission parlementaire. Je vous le rappelle,
c'était un engagement du gouvernement. Si jamais les
négociations, qui étaient reprises par la suite de la convocation
de la commission parlementaire, achoppaient, étaient rompues, comme
elles le sont actuellement, l'engagement du gouvernement était de
revenir en commission parlementaire. Je vous signale en passant qu'il y a un
certain nombre de documents que la commission a demandés à la
compagnie United Aircraft qui ne nous ont jamais été fournis.
Comme question accessoire, je vous demande si vous avez l'intention d'exi- ger
de la compagnie United Aircraft de nous fournir son état de profits et
pertes pour les années mentionnées.
M. BOURASSA: M. le Président, je crois que le ministre du Travail
a répondu au député de Maisonneuve, il y a quelques jours,
là-dessus.
M. MORIN: Non.
M. BOURASSA: Je n'étais pas en Chambre.
M. BURNS: Le député de Johnson a posé une question
là-dessus et il n'a eu aucune réponse. J'ai posé une
question là-dessus et je n'ai eu aucune réponse. Et le ministre
n'est pas là, actuellement, selon sa bonne vieille habitude. Je vous
pose la question à vous.
M. BOURASSA: M. le Président, il me semble avoir lu dans le
journal des Débats une réponse du ministre du Travail, en ce qui
a trait aux conditions, ou ce qui avait été proposé,
à l'occasion du vote à la United Aircraft, c'est-à-dire
les propositions que le ministre voulait qu'on propose et, de fait, qui ont
été proposées.
Avant de répondre au député de Maisonneuve, je
voudrais qu'il se réfère à la réponse du ministre
du Travail, qui a été faite en cette Chambre, il y a quelques
jours et qu'il relise cette réponse.
M. BURNS: M. le Président, si vous me le permettez, je n'ai pas
besoin de relire. C'est moi qui ai posé la question au ministre et ce
n'est pas la même que celle du député de Johnson. Ce que je
demande actuellement, c'est ce que le député de Johnson a
posé comme question au ministre. Dans la question que j'ai posée
la semaine dernière au ministre, je lui demandais s'il avait l'intention
de déposer ces recommandations. C'est à cette question et non pas
à celle du député de Johnson qu'il a dit: II faudra que je
m'assure que les offres ont été effectivement faites, ce qui n'a
rien à faire avec les séances de la commission parlementaire.
Je vous demande quand vous avez l'intention de faire siéger la
commission parlementaire.
M. BOURASSA: M. le Président, le député de
Maisonneuve dit que cela n'a rien à faire avec la séance de la
commission parlementaire. Si les offres du ministre n'ont pas, de fait, comme
le laisse entendre le député de Maisonneuve...
M. BURNS: Je ne laisse pas entendre, c'est le ministre qui m'a
répondu cela.
M. BOURASSA: D'accord. Si, de fait, les offres n'ont pas
été proposées telles quelles, je crois que c'est un
élément important dans la convocation de la commission
parlementaire.
M. BURNS: On pourrait le savoir à la commission
parlementaire.
M. BELLEMARE (Johnson): M. le Président, je soulève une
question supplémentaire.
LE PRESIDENT: Question supplémentaire.
M. BELLEMARE (Johnson): Je crois, M. le Président, que nous
tournons autour d'un débat du fait que la commission parlementaire a
été ajournée sine die, celui de la production de certains
documents qui étaient refusés par la compagnie et qu'Ottawa
le gouvernement fédéral était disposé
à rendre publics. A ce moment, la compagnie continuait à ne pas
vouloir produire les documents demandés par la commission parlementaire
et...
LE PRESIDENT: Quelle est votre question, s'il vous plaît?
M. BELLEMARE (Johnson): Ma question est de demander au premier ministre
si le ministre est disposé à convoquer la commission
parlementaire et à demander à la compagnie de produire,
véritablement, ce qu'on lui a demandé en plusieurs
circonstances.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Excusez-moi. Je n'ai
qu'une remarque à faire sur la deuxième partie de votre question,
qui est la même que la deuxième partie de la question du
député de Maisonneuve. Je crois que cette question du refus de la
compagnie de produire des documents, si refus il y a, doit être
réglée non pas ici, mais en commission, parce que c'est un ordre
de la commission et non pas un ordre de la Chambre et on ne pourrait pas en
discuter ici.
M. BELLEMARE (Johnson): Je respecte votre décision, mais je dis
que c'est la pierre d'achoppement pour le moment. Si la commission
parlementaire pouvait siéger d'ici la fin de l'année et si les
documents étaient déposés, tel que l'a demandé la
commission parlementaire, peut-être trouverait-on un moyen de
régler le problème. Je demande au premier ministre, s'il est de
bonne humeur... Il n'a pas l'air de bonne humeur. Je ne sais pas ce qui s'est
passé. Si la nuit de Noël ne lui a pas été favorable,
la nôtre a été très agréable.
Je demande au premier ministre s'il a l'intention de demander à
son ministre de faire siéger la commission parlementaire et d'essayer
d'avoir de la compagnie les documents demandés.
M. BOURASSA: Le député de Johnson me paraît
très optimiste quand il croit que la simple convocation de la commission
parlementaire permettrait de régler le conflit d'ici quelques jours. Je
n'ai pas l'impression que le ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre partage
cet optimisme et j'ai dit qu'il n'avait pas demandé au leader
parlementaire de convoquer une telle commission dans les prochains jours.
LE PRESIDENT: The Honourable Member for Saint-Anne.
Bourses d'étude
M. SPRINGATE: Mr. Speaker, I have a question for the Minister of
Education, but, in his absence, I will ask the Premier to take notice. There
was a news item in The Gazette stating that a $200 scholarship had been set up
at Concordia University for the best third year student on the Loyola Campus
who is a homosexual. Mr. Speaker, you can see that the sole critérium to
aspire to such a scholarship is one has to be queer. Therefore, I will ask the
Government if he is going to do anything to stop this type of discrimination
against normal males such as I and others who attend the Loyola Campus of
Concordia University.
M. BOURASSA: Je prends avis, M. le Président.
LE PRESIDENT: Le chef de l'Opposition officielle.
Industrie des pêches maritimes
M. MORIN: Cette question est destinée au ministre de l'Industrie
et du Commerce. Le gouvernement fédéral a annoncé, tout
récemment, un programme spécial de $20 millions pour sortir de
l'impasse l'industrie du poisson de fond, les pêches maritimes. Le
ministre peut-il nous dire s'il a été consulté dans
l'élaboration de ce programme? Peut-il nous dire également quelle
proportion de ces $20 millions est destinée au Québec, au cours
de l'hiver qui vient?
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je prend avis de la question.
Le travail de la Chambre ne m'a pas permis de rencontrer tous mes
fonctionnaires, au cours des dernières semaines. Au niveau des
pêches maritimes en particulier, je n'ai pas pu rencontrer mon
sous-ministre adjoint responsable. Ce serait difficile de le faire aujourd'hui,
mais demain matin je m'engage à le faire pour donner la réponse
au chef de l'Opposition.
M. MORIN: Une simple question supplémentaire pour indiquer au
ministre ce que je souhaiterais qu'il nous dise dans cette réponse.
J'aimerais qu'il nous dise la proportion qui revient au Québec et les
régions qui vont être touchées par cette subvention. Cela
s'applique-t-il seulement aux pêcheurs ou également à
l'industrie de traitement? Et, enfin, quelles sont les modalités des
prêts et subventions prévus?
M. SAINT-PIERRE: Je m'empresse de men-
tionner au chef de l'Opposition qu'en ce qui touche les pêches
maritimes le gouvernement du Québec a récupéré
l'administration sur le plan constitutionnel de ces programmes depuis
déjà plusieurs décennies. Ceci, à l'occasion,
implique que nous avons à payer nous-mêmes les programmes que nous
voulons bien mettre de l'avant et qui correspondent aux priorités de nos
pêcheurs. J'ai d'ailleurs rencontré les représentants des
Pêcheurs unis, il y a à peine deux semaines, pour des
problèmes analogues dans d'autres secteurs, mais cela me fera plaisir de
donner les chiffres. Encore une fois, je rappelle au chef de l'Opposition qu'au
niveau des pêches maritimes c'est le Québec qui a la juridiction
exclusive sur son territoire à la fois de la surveillance des
pêches, mais également de l'administration des programmes de
soutien aux pêcheurs. De là, il est un peu injuste de faire des
comparaisons sur des programmes que le gouvernement fédéral
aurait jugé bon de mettre de l'avant pour d'autres provinces qui ont
accepté de confier à Ottawa l'administration des pêches
maritimes.
M. MORIN: M. le Président, je ne voudrais pas laisser passer ces
propos; sur le plan constitutionnel, il y a des inexactitudes dans ce que le
ministre a dit. J'aimerais lui demander, sous forme de question, s'il pourrait
nous préciser sa pensée demain, en ce qui concerne la
compétence en matière de pêcheries maritimes. Dans quelle
mesure le pouvoir fédéral a-t-il vraiment renoncé à
cette compétence au profit du Québec? Deuxièmement, il y a
tout lieu de croire, en prenant connaissance du dossier, qu'une partie de cette
subvention est destinée au Québec. Je veux savoir quelle portion
et à quelles régions cela s'applique.
M. SAINT-PIERRE: Avec plaisir, M. le Président.
LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda.
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais adresser une question au
ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives.
M. LACROIX: M. le Président, une question de privilège. Au
point de vue des pêcheries, je voudrais simplement dire au chef de
l'Opposition...
M. MORIN: Encore des bêtises.
M. LACROIX: Une question de privilège. Je crois qu'il est
important...
Sur une question de privilège, M. le Président,
uniquement, je voudrais dire que je regrette une chose, c'est que le
gouvernement de la province est...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Un instant.
Malartic Hygrade
M. SAMSON: M. le Président, je voudrais m'adresser à
l'honorable ministre des Institutions financières, Compagnies et
Coopératives. M. Gerry Paquet, président de Malartic Hygrade Gold
Mines, avait demandé une enquête publique sur la Commission des
valeurs mobilières du Québec. Suite à cette demande, le
ministre a déposé un rapport d'enquête, la semaine
dernière. Je voudrais demander au ministre s'il est vrai que, suite
à ce rapport, la Commission des valeurs mobilières du
Québec s'apprête à poursuivre M. Gerry Paquet et Malartic
Hygrade Gold Mines pour fraude.
M. TETLEY: M. le Président, je ne veux pas annoncer d'avance une
procédure possible. Je suis certain que le député de
Rouyn-Noranda peut tirer lui-même les conclusions nécessaires du
rapport déjà déposé.
M. SAMSON: En question supplémentaire, M. le Président,
est-ce que le ministre peut nous dire s'il est vrai que, dans cette affaire de
Malartic Hygrade, la provenance des fonds de Malartic Hygrade n'a pu être
identifiée, soit que les transferts... Bien, M. le Président,
cela faisait partie du rapport. Je questionne le ministre sur le rapport qu'il
a déposé. Il y aurait des fonds en provenance de certaines
banques des Carai-bes, dont l'identification des investisseurs est quasi
impossible.
M. TETLEY: M. le Président, c'est vrai que des fonds venaient
d'endroits assez drôles, des achats et ventes de la Suisse, d'Europe et
des Bahamas. Je crois que le député de Rouyn-Noranda verra dans
un délai raisonnable certains faits qui vont répondre à sa
question.
M. SAMSON: Est-ce que le ministre peut me dire, M. le Président
dernière question supplémentaire si M. Gerry
Paquet, président de Malartic Hygrade Gold Mines, est la même
personne qui aurait eu des problèmes avec la Commission des valeurs
mobilières, il y a six ans?
M. TETLEY: Je crois que oui, il y a six ou sept ans.
LE PRESIDENT: Dernière question, l'honorable député
de Chicoutimi.
Projet Ferchibal
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ma question
s'adresserait au premier ministre concernant le projet Ferchibal. Est-ce que le
premier ministre pourrait commenter la nouvelle parue récemment à
l'effet que la société Campbell Chibougamau ferait cavalier seul
en exploitant seulement le gisement de Chibougamau? Le premier ministre
pourrait-il nous dire
si cela ne compromet pas sérieusement le projet initial, soit
celui de former un vaste consortium de quatre sociétés pour
l'exploitation tant des gisements de Chibougamau que de ceux du lac
Albanel?
M. BOURASSA: M. le Président, cela pourrait être une
question posée au feuilleton; au moins, on aurait pu me donner un avis
ce matin. Je comprends que, pour le député, à ce temps-ci
de l'année, c'est difficile de donner des avis, mais c'est difficile,
pour moi, de vérifier la teneur de cette nouvelle, où elle est
parue, quand et quelles conséquences elle peut avoir, si elle
était vraie.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une question supplémentaire, à
laquelle le premier ministre pourrait peut-être me répondre.
Peut-être qu'il peut répondre tout de suite à
celle-là. Maintenant que la société de la baie James
possède un droit majoritaire sur un des principaux gisements du lac
Albanel ce n'est pas une nouvelle; le premier ministre est
sûrement au courant de cela est-ce que le premier ministre entend
accélérer les différentes phases d'exploitation de ce
projet? Est-ce que cela va contribuer à les accélérer?
M. BOURASSA: M. le Président, je pense bien que des annonces ont
été faites par le ministre des Transports, il y a quelques jours,
qui démontrent la volonté du gouvernement
d'accélérer ou de prendre tous les moyens nécessaires pour
que cette région profite des richesses naturelles qu'elle
possède.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une dernière question...
LE PRESIDENT: Dernière question.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... supplémentaire, M. le
Président. Est-ce que le premier ministre pourrait me dire quel est le
rôle de M. Jean Lesage dans la compagnie Campbell Chibougamau, s'il le
sait?
M. BOURASSA: Je vais m'informer, M. le Président. Evidemment,
encore une fois, cela révèle le peu de sérieux de
l'Opposition pour poser des questions comme celle-là.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est votre opinion. Je vous demande quel est le
rôle de Jean Lesage.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. MALOUIN: Petit avocat.
M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous ne le savez pas, vous n'avez qu'à
me le dire que vous ne le savez pas.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BEDARD (Chicoutimi): Je vous le demande très correctement.
M. BOURASSA: C'est rendu, M. le Président, qu'on s'acharne sur
les hommes publics, même quand ils sont retirés de la vie
publique.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une question de privilège. Le premier
ministre, dans sa réponse, nous impute des motifs qu'on n'a pas.
DES VOIX: Ah! Ah!
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, il me semble que poser
la question à savoir si le premier ministre connaît le rôle
de Jean Lesage dans la compagnie Campbell Chibougamau, ce n'est pas essayer de
jeter du discrédit sur Jean Lesage ou sur le gouvernement.
LE PRESIDENT: Un peu de silence, s'il vous plaît.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est simplement une information à
laquelle le premier ministre peut répondre ou ne pas
répondre.
LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs!
M. BEDARD (Chicoutimi): II ne faudrait pas que le premier...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre, s'il vous
plaît! A l'ordre! Affaires du jour.
M. LEVESQUE: M. le Président, je fais motion pour que la
commission parlementaire de l'Assemblée nationale se réunisse
à la salle 81 pour poursuivre l'étude du projet de loi no 87.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: M. le Président, sur cette motion, encore une fois je
demande au leader du gouvernement s'il n'a pas objection à la remettre
immédiatement après l'article 2, si l'article 2 est toujours
prévu à son ordre du jour, parce que cela va éviter deux
votes et cela va éviter de faire sortir les gens de la commission.
M. LEVESQUE: D'accord. Article 2.
Projet de loi no 98 Troisième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Affaires municipales propose la
troisième lecture du projet de loi no 98, Loi concernant certaines
municipalités de l'Outaouais et du Haut-Saguenay.
Vote enregistré?
M. BURNS: Non, M. le Président. LE PRESIDENT: Un discours?
M. BURNS: Un petit discours de quelques minutes.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, concernant le projet de
loi no 98, qui prône la fusion forcée de plusieurs
municipalités du Haut-Saguenay, nous désirons apporter quelques
considérations. Connaissant la fierté et la dignité des
populations du Saguenay qui sont concernées par ce projet de loi, je
suis convaincu que ces populations ne méritaient pas de se voir imposer
leur avenir par voie législative forcée. Je suis convaincu que
ces populations étaient capables elles-mêmes de dicter leur avenir
et qu'elles avaient suffisamment le sens des responsabilités et
également qu'elles avaient une vision suffisamment lucide de leur avenir
pour pouvoir se l'imposer à elles-mêmes.
Même si je suis d'accord sur l'objectif principal, à savoir
créer une grande ville au Haut-Saguenay, je dois vous dire, M. le
Président, que ce n'est pas sans un certain pincement au coeur et un
certain sentiment de révolte que je contiendrai en acceptant d'orienter
mes efforts vers la réalisation de l'objectif principal de ce projet de
loi, à savoir la réalisation d'une grande ville dans le
Haut-Saguenay.
Je demeure convaincu, M. le Président, qu'à toutes les
étapes qui sont prônées dans ce projet de loi, il y aurait
eu non seulement avantage mais il y aurait eu une urgence et une obligation
démocratique de la part du gouvernement d'accepter, qu'avant de
procéder à chacune de ces étapes, il y ait une
consultation par voie de référendum au niveau des populations
concernées. Je suis convaincu que ces populations auraient
été capables de dicter elles-mêmes leur avenir, et je suis
convaincu que si le ministre des Affaires municipales avait accepté
qu'à chacune des étapes un référendum soit tenu, il
y aurait eu une expression de volonté beaucoup plus claire de la part de
la population.
Cette expression de volonté d'une population véritablement
consultée aurait été un meilleur ferment de
solidarité afin de construire cet objectif qui est une grande ville dans
le Haut-Saguenay.
Je crois qu'il aurait été d'autant plus nécessaire
de consulter la population et qu'il est inacceptable de se trouver devant le
refus du gouvernement non seulement d'accepter de consultation à la
première étape, soit celle de la formation de la ville de
Jonquière et la deuxième étape, soit celle de la formation
de la future ville de Chicoutimi. Il est inacceptable que le gouvernement ait
refusé un référendum avant la réalisation de la
dernière étape qui se situe en 1978.
Nous soumettons très respectueusement que le fait pour un
gouvernement de refuser deux ans à l'avance un processus
démocratique qui est celui de consulter les populations par voie de
référendum pour savoir leur opinion face à leur avenir, le
fait de leur refuser deux ans à l'avance ce processus
démocratique, c'est faire preuve d'une attitude qui ne se justifie en
aucune façon.
Nous avons fait l'étude de ce projet de loi le plus
sérieusement possible en commission parlementaire. Même si
c'était dans des conditions difficiles, des conditions de fin de
session, avec les mesures d'urgence, nous avons tenu quand même à
apporter le plus grand sérieux possible à l'étude de ce
projet de loi qui engage l'avenir de tout le Haut-Saguenay.
Je demeure convaincu que le cheminement adopté par le
gouvernement pour en arriver à un objectif qui est la formation d'une
grande ville au Saguenay n'est pas le cheminement le plus facile pour y
arriver, le plus adéquat. Je prétends qu'il aurait
été préférable, puisque le gouvernement voulait
procéder par voie de législation forcée, de le faire non
pas en deux étapes et même trois étapes, mais de le faire
en une seule étape, ce qui aurait eu pour but d'éviter dans
l'espace de trois ans, je dirais même deux ans, ce à quoi le
projet de loi oblige, un double chambardement de population et un double
chambardement administratif. Nous sommes convaincus que si le gouvernement
avait accepté de procéder en une étape, il aurait à
ce moment-là, et dès maintement, habitué beaucoup plus les
populations concernées à vivre ensemble en vue de la
réalisation d'un grand objectif, à savoir une seule ville au
Haut-Saguenay.
Je suis convaincu qu'encore une fois ce n'est pas la voie la plus facile
qu'a empruntée le gouvernement parce qu'elle comporte des
embûches, entre autres le danger de créer deux blocs de population
qui, avec le temps, seront peut-être tentés par le danger,
plutôt que de s'unir, au contraire, de se livrer à une sorte de
lutte qui ne serait valable en aucune façon et qui n'avancerait en
aucune façon les populations dans la réalisation de l'objectif
final du projet de loi.
Il aurait été également préférable de
le faire en une étape puisqu'à ce moment-là, toutes les
populations concernées seraient parties en même temps sur un pied
d'égalité pour relever un défi que les populations
concernées savent qu'elles ont à relever, celui de s'unir pour
former une grande ville.
Mais ce défi, M. le Président, je demeure convaincu que,
sans la loi forcée du gouvernement, ils auraient été quand
même capables de le réaliser et ils auraient été
capables de travailler ensemble pour que cela devienne une
réalité. Cette réalité serait peut-être venue
aussi
vite qu'elle a de chances de venir avec le projet de loi
présenté par le gouvernement.
De toute façon, le gouvernement a imposé son cheminement;
au niveau de l'étude en commission parlementaire, nous avons
également exprimé l'opinion que nous aurions aimé voir la
formation d'un conseil métropolitain qui aurait eu beaucoup plus de
pouvoirs que ne lui en donne la loi. Ce conseil, de par sa constitution et les
pouvoirs qui lui sont donnés par la loi, demeure quand même plus
un organisme de consultation qu'un véritable organisme
décisionnel. En effet, M. le Président, nous le savons, beaucoup
de problèmes communs devront être résolus en vue de
réaliser l'objectif d'une grande ville au Haut-Saguenay, à savoir
et je n'en énumère que quelques-uns, M. le
Président le problème de la coordination des
règlements de zonage s'appliquant à l'espace interurbain encore
non bâti et qui nécessiteront à brève
échéance la confection d'un plan directeur d'urbanisme unique
pour toute la conurbation. De même, il y a les problèmes communs
de la promotion industrielle, les problèmes de la localisation
précise des futurs établissements industriels qui devra
être coordonnée. Il y a des problèmes qui sont communs
comme celui concernant les forces policières, concernant certains
services municipaux comme la police, comme la lutte contre les incendies,
l'enfouissement des ordures ménagères; il y a déjà
un commencement de solution mais cela doit continuer. Il y a également
des problèmes communs comme celui du transport au niveau de toute la
région du Haut-Saguenay. Tous ces problèmes auraient, à
mon sens, en vue d'un règlement plus rapide, nécessité
peut-être la création d'un conseil métropolitain mais avec
plus de pouvoirs et avec plus de capacités de décision.
M. le Président, le ministre a dit qu'il aurait été
un petit politicailleur s'il avait accepté seulement la formation d'une
des étapes, à savoir celle de la future ville de
Jonquière. Je suis d'accord avec le ministre quand il dit cela:
maintenant, c'est dans ce sens, je crois, qu'il a voulu présenter
à l'Assemblée nationale un projet de loi comportant non seulement
cette étape mais également l'étape de la formation de la
future ville de Chicoutimi et de la formation de la future grande ville de
Saguenay pour 1978. Je veux bien le croire et j'accepte cette démarche,
les mobiles de cette démarche qui a été explicitée
par le ministre des Affaires municipales et je lui dis simplement ceci: Nous
aurons l'occasion de voir jusqu'à quel point allait sa
sincérité dans la manière avec laquelle il appliquera de
la rigueur en vue de faire respecter les autres étapes.
M. le Président...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Un instant. S'il vous plaît, un peu
de silence; c'est difficile pour l'orateur de parler. S'il vous
plaît!
M. BEDARD (Chicoutimi): Je sais, M. le Président, que cela peut
être très peu intéressant pour certains membres de cette
Assemblée nationale mais, pour ceux de la région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est plus important.
Cela ne m'empêchera pas de terminer et de dire ce que j'ai
à dire.
Alors, d'une part, nous n'acceptons pas la démarche contraire
à la démocratie qu'a adoptée le gouvernement dans la
présentation de ce projet de loi. D'autre part, nous sommes d'accord sur
l'objectif que ce projet de loi veut atteindre et qui est nécessaire
pour l'avancement de notre région et de tout le Haut-Saguenay, à
savoir la formation d'une grande ville. A ce sujet, étant placés
dans cette situation, nous nous abstiendrons sur le vote qui sera pris
concernant la troisième lecture. Et je tiens à dire que le cadre
et le cheminement pour atteindre l'objectif ayant été
fixés par le gouvernement, je sais très bien que maintenant il
nous faudra vivre avec eux.
La formation d'une grande ville je le répète
de Chicoutimi à Jonquière était une
nécessité pour l'avenir du Haut-Saguenay. Même si je
demeure convaincu qu'il eut été souhaitable qu'elle se fasse avec
une démarche plus démocratique et dans une seule étape, je
crois qu'il faut travailler positivement maintenant pour réaliser les
étapes qui ont été projetées en fonction de la
formation de cette grande ville nécessaire pour l'avenir du
Haut-Saguenay, et c'est dans ce sens que nous orienterons nos efforts.
DES VOIX: Vote!
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le ministre des Affaires municipales sur
son droit de réplique.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, je commence ce discours de
troisième lecture au même point où j'ai commencé
celui que j'ai prononcé en deuxième lecture. La mesure sur
laquelle nous serons appelés dans quelques minutes à voter
s'inscrit dans le cadre d'une mesure encore plus vaste et encore plus
importante, c'est-à-dire la refonte des chapitres 53 et 54 des lois de
1971 communément appelés les bills 276 et 277.
Le gouvernement ayant pris cette décision l'ayant prise
devant une constatation qui était fort simple: la loi 276 n'était
vraiment pas applicable devait choisir entre laisser tomber les trois
dossiers qu'il avait toujours entre les mains en vertu de cette loi, ou bien
agir pour poser des gestes dans ces trois cas, pour résoudre les
problèmes représentés par ces trois cas avant
d'entreprendre cette refonte de la politique du regroupement municipal au
Québec. C'est cette deuxième option que nous
avons retenue dans le cas de l'Outaouais et du Haut-Saguenay.
C'est une autre option que nous avons retenue dans le cas de
l'agglomération de Saint-Hyacinthe. Au cours du mois de janvier, M. le
Président, j'aurai l'occasion de me pencher de façon plus
particulière sur ce dossier et lui chercher la meilleure solution
possible pour enfin vider le dossier global du bill 276.
Le regroupement au Haut-Saguenay se discute depuis plus de cinq ans. Et,
enfin aujourd'hui, la population qui, je le reconnais volontiers, n'est pas
absolument unanime, mais qui a exprimé une volonté très
remarquable de laisser de côté le statu quo et d'aller vers un
avenir plus intéressant, cette population nous dit aujourd'hui: Enfin,
nous savons où nous allons.
Je pense que ce fait n'aurait pas existé si le gouvernement
n'avais pas choisi d'agir parce que l'application de la loi 276, dans le cas du
Haut-Saguenay, se butait à des mesures franchement dilatoires, des
mesures qui auraient empêché une décision pour au moins une
année et probablement plus.
M. le Président, je pense qu'au lieu de laisser continuer les
frictions et les tiraillements que l'on connaît dans cette région
depuis un certain temps le gouvernement a bien fait d'agir et d'indiquer
à la population où nous allons.
Le député de Chicoutimi a parlé exclusivement de sa
région. C'est normal. Vous me permettrez quand même de dire
quelques mots de l'autre région touchée par ce projet de loi.
C'est une région qui a une vocation un peu particulière et c'est
une région, on le sait, qui se plaint à juste titre, depuis
très longtemps, d'être tenue un peu à l'écart de ce
qui se fait au Québec.
La vocation particulière est évidemment celle de
participer aux activités qui entourent la capitale de notre pays. Il est
impensable et impossible que la région de l'Outaouais
québécois soit absente du développement et du
progrès stimulés par le fait que de l'autre côté de
la rivière des Outaouais se trouve la capitale du Canada.
Nous avons, de la même façon que nous l'avons fait au
Haut-Saguenay, pris des moyens de savoir aussi précisément que
possible ce que pense la population, ce que la population serait prête
à accepter. Je dis prête à accepter parce qu'il faut
reconnaître une chose fondamentale.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs! Je demande encore un
peu de silence et pas de petits caucus ici à côté, s'il
vous plaît.
M. GOLDBLOOM: Cette chose fondamentale est que le changement est
toujours menaçant. Si l'on demande à une population de se
prononcer d'une façon simple: Choisissez-vous le changement ou le statu
quo? elle a tendance à dire: On est mieux de garder le statu quo. C'est
Shakespeare qui écrivait: "Better to bear the ills we have that fly to
others that we know not of."
C'est une réaction bien humaine, mais il y a beaucoup plus de
nuances à apporter à cette question. Il faut savoir quel est
vraiment l'intérêt supérieur de la région et quelle
est la formule qui peut être acceptée par une population qui, si
la question simple est posée, opterait peut-être pour le statu
quo.
C'est ce que nous avons essayé de déterminer. C'est ce que
nous avons essayé de traduire dans le projet de loi.
M. le Président, nous avons essayé aussi de respecter les
intérêts particuliers du milieu rural. Nous avons voulu amener ce
milieu rural à participer davantage, notamment au Haut-Saguenay,
à la confection du schéma d'aménagement qui
déterminera, à l'avenir, le progrès et le
développement de la région.
Nous avons respecté l'intérêt d'un milieu rural qui,
fatalement, par la création de municipalités importantes, perd
certains éléments, certaines contributions. J'ai voulu assurer
les conseils de comté du remplacement par la contribution du
gouvernement de ces contributions perdues.
Je voudrais vous dire, en terminant, qu'à certains moments de
l'histoire un gouvernement doit avoir une vision et doit prendre ses
responsabilités pour la transformer en réalité. Je pense
que, pour les deux régions en question, c'est effectivement une telle
situation un tel moment dans l'histoire du Québec.
Si nous avons attaché beaucoup d'importance à l'attitude
des dirigeants municipaux, c'est justement parce que ce qui se créera
dans ces deux régions devra être géré par eux. Leur
assentiment quasi unanime dans les deux régions nous permet
d'espérer que l'implantation des nouvelles structures se fera d'une
façon cohérente et d'une façon constructive.
M. le Président, le gouvernement ne sera pas absent; au
contraire, il sera présent de façon continue pour prêter la
compétence qu'il peut posséder pour assurer l'harmonie dans
laquelle les transformations devront s'effectuer et pour assurer un meilleur
avenir pour toute la population de deux des plus importantes régions du
Québec.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): La motion de troisième lecture du
projet de loi no 98, Loi concernant certaines municipalités de
l'Outaouais et du Haut-Saguenay, est-elle adoptée?
M. BURNS: Un vote enregistré. Nous sommes d'accord, M. le
Président.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Qu'on appelle les
députés!
Vote de troisième lecture
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que
ceux qui sont en faveur de la motion de troisième lecture du
projet de loi no 98 veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Mailloux, Saint-Pierre,
Choquette, Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Simard, Quenneville, Mme
Bacon, MM. Hardy, Tetley, Lacroix, Bienvenue, Toupin, Massé, L'Allier,
Harvey (Jonquière),Vaillancourt, Arsenault, Houde (Fabre), Houde
(Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Brown, Fortier, Bossé, Bacon, Blank,
Veilleux, Brisson, Saindon, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance, Pilote,
Lamontagne, Ostiguy, Gratton, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey
(Charlesbourg), Pelletier, Shanks, Springate, Pepin, Bellemare (Rosemont),
Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand, Caron, Côté, Denis,
Déom, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours, Malépart,
Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte, Sylvain, Tremblay,
Vallières.
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Samson, Roy, Bellemare (Johnson).
LE PRESIDENT: Que ceux qui désirent s'abstenir veuillent bien se
lever, s'il vous plait.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Bédard
(Chicoutimi).
LE SECRETAIRE: Pour: 72
Contre: 3
Abstentions: 4
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée.
Motion pour faire siéger la commission de
l'Assemblée nationale
M. LEVESQUE: M. le Président, article 11.
Avant de procéder à l'article 11, M. le Président,
j'allais oublier quelque chose. Je fais motion pour que la commission
parlementaire de l'Assemblée nationale se réunisse
immédiatement à la salle 81-A pour l'étude du projet de
loi no 87 article par article.
M. BURNS: M. le Président, est-ce que le leader accepterait une
suggestion, soit de faire siéger cette commission au salon rouge?
DES VOIX: Non, non!
M. BURNS: A moins qu'il y ait des objections de principe majeures, il me
semble que l'intérêt que comporte ce projet de loi, tant au point
de vue des députés, puisque, M. le Président, j'ai
remarqué que même la salle 81 est un peu exiguë pour les
députés qui veulent participer...
M. LACROIX: Pour les députés ou...
M. BURNS: Pour les députés qui veulent participer, M. le
Président. Moi-même, mardi matin, quand j'ai voulu me joindre
à cette commission, après avoir fait mon devoir en Chambre, j'ai
eu toutes les difficultés du monde à me trouver un
siège.
Alors, M. le Président, il me semble que le salon rouge serait
plus adéquat. C'est une suggestion que je vous fais.
M. LACROIX: Vous n'avez qu'à demander à vos adjoints de se
retirer...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LACROIX: ... c'est-à-dire vos recherchis-tes.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs ! A l'ordre
!
M. LEVESQUE: M. le Président, je n'ai pas d'objection à
considérer cette demande, mais comme déjà nous avions
indiqué la salle 81 pour aujourd'hui, nous allons rester à la
salle 81. Mais je n'ai pas d'objection...
M. ROY: Quelles seraient les complications d'aller siéger au
salon rouge?
M. LEVESQUE: M. le Président...
M. ROY: La couleur du salon ne m'intéresse pas, mais il y a la
grandeur, quand même, qui m'intéresse.
M. LEVESQUE: Ce n'est peut-être pas la couleur, c'est
peut-être le confort des fauteuils que vous recherchez.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEVESQUE: Je considérerai la suggestion du
député de Maisonneuve. J'ai vu qu'il y avait des objections. Je
voudrais contrôler la nature de ces objections avant de faire la
modification en question.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: M. le Président...
LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît, messieurs !
M. BURNS: Voulez-vous un vote enregistré là-dessus?
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! S'il vous plaît !
M. BURNS: M. le Président, à la demande des
députés libéraux, un vote enregistré.
J'étais prêt, M. le Président...
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a un vote enregistré? Est-ce qu'il y
a cinq députés qui demandent un vote enregistré?
M. BURNS: Oui, il y en a cinq.
M. LEVESQUE: M. le Président, nous allons concourir.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Est-ce que l'Assemblée est prête à se prononcer,
messieurs?
Vote sur la motion
LE PRESIDENT: Tout le monde est d'accord pour qu'on vote?
Que ceux qui sont en faveur de la motion du leader parlementaire du
gouvernement pour la convocation de la commission de l'Assemblée
nationale veuillent bien se lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Mailloux, Saint-Pierre,
Choquette, Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Goldbloom, Simard, Quenneville, Mme
Bacon, MM. Hardy, Tetley, Lacroix, Bienvenue, Toupin, Massé, L'Allier,
Harvey (Jonquière), Vaillancourt, Cadieux, Arsenault, Houde (Fabre),
Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Brown, Fortier, Bossé, Bacon,
Blank, Veilleux, Brisson, Saindon, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance,
Pilote, Lamontagne, Ostiguy, Gratton, Assad, Carpentier, Dionne, Faucher,
Harvey (Charlesbourg), Pelletier, Shanks, Springate, Pepin, Bellemare
(Rosemont), Bérard, Bonnier, Chagnon, Marchand, Caron,
Côté, Denis, Déom, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance,
Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Picotte,
Sylvain, Tremblay, Vallières, Samson, Roy, Bellemare (Johnson).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Bédard
(Chicoutimi).
LE SECRETAIRE: Pour: 76
Contre: 4
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée et cette commission peut
siéger immédiatement.
M. LEVESQUE: Article 11.
Projet de loi no 200 Deuxième lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice propose la
deuxième lecture du projet de loi no 200, Loi concernant le conseil de
sécurité publique de la Communauté urbaine de
Montréal.
L'honorable ministre de la Justice.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, depuis l'institution du service de
la police de la Communauté urbaine, institution qui date du 1er janvier
1972, nous avons été à même de prendre conscience du
développement d'un certain nombre de problèmes en rapport avec
l'organisation de la police sur l'île de Montréal. Le projet de
loi que j'ai l'honneur de présenter aujourd'hui a pour but de
régler deux d'entre eux. On se souviendra, M. le Président, que
dans la loi qui amendait la loi de la Communauté urbaine de
Montréal et qui instituait le service de la police de la
Communauté urbaine, il était prévu que le directeur du
service de la police devait préparer dans un bref délai un plan
d'allocation des ressources humaines et matérielles de la police sur
l'île de Montréal. Ce plan d'allocation devait permettre
d'intégrer dans un tout cohérent l'ensemble des services
policiers sur l'île de Montréal et, par conséquent, devait
permettre l'intégration des 25 corps de police qui existaient avant
l'institution de cette loi et avant que le service de la police unifié
ne soit ordonné par la loi adoptée par l'Assemblée
nationale.
Par conséquent, M. le Président, le directeur de la police
de la Communauté urbaine de Montréal a, avec le concours de son
état-major et de ses services spécialisés, commencé
de préparer un plan qui prend en considération les services qui
existent à l'heure actuelle, les services existant dans les diverses
municipalités, les postes de police actuels, le matériel
comprenant les véhicules, les armes et également le personnel
policier et civil qui est au service du conseil de sécurité
publique qui, comme on le sait, a la responsabilité de la gestion du
service de police intégré. C'est ainsi que M. Daigneault et ses
collaborateurs ont préparé un document qui est intitulé
"Plan d'allocation des ressources humaines et physiques". Ce plan a
été approuvé par le conseil de sécurité
publique; ce plan a été transmis aux municipalités qui
composent la Communauté urbaine de Montréal et ce plan a
été envoyé à la Commission de police du
Québec qui, d'après la loi de 1969 formant le service de police
de la Communauté urbaine, a la responsabilité de statuer en
définitive sur les modalités de l'intégration des
ressources physiques et humaines de la police sur l'île de
Montréal.
Les municipalités ont envoyé à la Commission de
police des mémoires, ont indiqué à la Commission de police
leur intention de faire valoir leur point de vue sur les modalités de
l'intégration des services de police telles qu'elles sont contenues dans
le plan d'allocation soumis par M. Daigneault et approuvé par le conseil
de sécurité.
C'est ainsi que la Commission de police a accordé un délai
aux parties intéressées, c'est-à-dire aux
municipalités en question ainsi qu'aux autres groupes qui ont un point
de vue valable sur le plan d'intégration, parmi lesquels ils y a
incontestablement la Fraternité des policiers de Montréal. La
Commission de police a donc accordé à ces groupes un
délai, jusqu'au 15 janvier, pour produire des mémoires qui seront
considérés ultérieurement par la Commission de police au
cours d'assemblées, au cours de réunions, au cours de
séances d'audition où les parties pourront être
entendues.
A la suite de l'examen de ces mémoires soumis par les groupes
intéressés et à la suite aussi de ces séances
publiques qui permettront à la Commission de police d'étudier les
différents points de vue, soit des municipalités, soit de la
Fraternité des policiers de Montréal, soit d'autres groupes
intéressés, la Commission de police doit, suivant la loi que nous
avons adoptée, ordonner, fixer, proposer un plan d'allocation des
ressources humaines et physiques qui aura force exécutoire suivant la
loi déjà adoptée.
Il saute aux yeux que ce plan d'allocation aura des répercussions
extrêmement considérables tant au point de vue de la protection de
la population de l'île de Montréal qu'au point de vue financier.
Il est normal que le législateur s'interroge de nouveau sur les
mécanismes de vérification, les mécanismes d'examen, les
mécanismes de mise en place et de mise en vigueur de ce plan qui, comme
je le disais tout à l'heure, aura une influence historique
indéniable au point de vue de l'organisation de la police sur
l'île de Montréal et, par conséquent, de la protection que
la police va donner aux citoyens dans les diverses parties de l'île ainsi
que, et cela je pense est assez évident, sur les conséquences
financières et fiscales de ce plan d'allocation sur les contribuables de
l'île de Montréal.
Dans ce domaine, on pourrait prendre de multiples aspects qui sont de
nature à illustrer en quoi ce plan d'allocation peut avoir des
répercussions autant sur le maintien de l'ordre public et la protection
des citoyens que sur l'aspect financier, fiscal de la Communauté urbaine
de Montréal.
Prenons par exemple que la Commission de police décide que le
poste de police de telle municipalité doit être supprimé et
que les opérations de la police dans le territoire de cette
municipalité doivent être combinées avec un autre poste de
police existant ou un poste de police à être construit à un
endroit déterminé. Admettons que cela soit une des
recommandations du plan tel qu'il sera approuvé par la Commission de
police. D'ailleurs, je tiens à vous mentionner que dans le plan
Daigneault qui est soumis à l'examen de la Commission de police il y a
des recommandations à l'effet de supprimer un certain nombre de postes
de police existants et il me paraît assez clair qu'un certain nombre de
postes de police devront disparaître.
On voit par cet exemple extrêmement simple, facile à saisir
quelles peuvent être tout de suite les réactions des populations
desservies par les postes actuels de police appelés à
disparaître, ainsi que cela s'est déjà manifesté
dans certaines municipalités.
Les populations réagissent en disant: Cela ne nous privera-t-il
pas d'une protection policière? Cela n'est-il pas la perte de notre
contact avec la police? On peut comprendre ces réactions, et même
si on les comprend, ceci ne veut pas dire qu'on les approuve. Il peut se faire
que, considérant l'ensemble des impératifs de la protection de la
police sur l'île de Montréal, les intérêts de ses
citoyens soient mieux servis par un plan qui propose la suppression ou la
disparition d'un poste de police et son remplacement par un autre centre
d'opération qui a quand même une certaine proximité. Il
faut donc entrevoir que le plan d'allocation des ressources humaines et
physiques et je pense qu'on le devinera facilement par l'exemple que je
viens de donner aura une très grande influence sur l'avenir de
l'organisation policière sur l'île de Montréal, comme sur
l'efficacité de la protection du service policier pour les citoyens de
l'île.
Il aura aussi une influence extrêmement importante sur la
fiscalité de l'île de Montréal. Ai-je besoin de rappeler
à cette Assemblée que le budget du conseil de
sécurité publique, c'est-à-dire le budget pour la police,
pour l'année 1975, sera de $130 millions et que ce budget est la partie
la plus importante du budget de la Communauté urbaine de
Montréal?
La part faite à la police est donc très importante dans la
fiscalité municipale sur l'île de Montréal. Et le
gouvernement actuel, par l'octroi d'une subvention de $45 millions qui a
été annoncée récemment par mon collègue, le
ministre des Affaires municipales, entend reconnaître ses
responsabilités à l'égard de la population de l'île
de Montréal et venir donner un apport financier qui permette de
soulager, dans une certaine mesure, les contribuables fonciers, et de
contrôler l'évolution de la fiscalité municipale afin
d'éviter que les propriétaires immobiliers ne soient
écrasés sous le fardeau des impôts.
Et j'espère que, dans un avenir que j'ose le plus
rapproché possible, il sera possible au gouvernement dont je fais partie
de proposer une politique financière à l'égard de la
police sur l'île de Montréal et une politique financière
qui comporte le paiement de certaines subventions statutaires, de certains
montants préétablis et sur lesquels les autorités, soit de
la Communauté urbaine de Montréal, soit du Conseil de
sécurité, pourront compter dans le
calcul de leurs revenus et de leurs dépenses. La justification de
paiements de subventions à l'égard de la Communauté
urbaine de Montréal, dans le domaine de la police ou à
l'égard du Conseil de sécurité et à la gestion de
la police, me parait incontestable.
En effet, la police de la Communauté urbaine de Montréal
ne joue pas seulement un rôle de police municipale. Elle n'assure pas
seulement l'application des règlements municipaux ou des dispositions du
code de la route. Ce corps de police, en fait, applique intégralement
toutes les dispositions du code criminel. Il comporte des escouades
spécialisées dans le domaine de la fraude commerciale, dans le
domaine du crime organisé, dans le domaine du terrorisme et de la
subversion. Je pourrais énumérer tous les services hautement
spécialisés que sont ceux de la police de la Communauté
urbaine de Montréal, services spécialisés qui viennent
soutenir et faire partie, pour ainsi dire, de l'administration de la justice
qui est incontestablement une responsabilité provinciale.
Il faut donc que le législateur et le gouvernement reconnaissent
leur responsabilité financière à l'égard d'un
service de police aussi important que celui de la Communauté urbaine de
Montréal par des versements qui soient suffisants et adéquats
pour reconnaître la place, le rôle, la fonction que joue ce corps
de police qui est le plus nombreux de nos corps de police du Québec et
qui, par son action, vient soutenir celle de la Sûreté du
Québec dans le maintien de l'ordre et de la paix publique, ainsi que
dans l'application du droit criminel en général.
M. le Président, je dis je pense que ceci résulte
de mes prises de position antérieures qui ont été assez
claires sur la question qu'il ne fait pas de doute que le gouvernement
dont je fais partie les reconnaît, ses responsabilités.
Malheureusement, jusqu'à ce jour, il ne nous a pas été
possible, à cause de certaines circonstances très
particulières de donner un plein effet à cette reconnaissance,
sauf par l'octroi d'une subvention très importante j'y faisais
allusion tout à l'heure qui a été annoncée
par le ministre des Affaires municipales, subvention qui s'élevait
à la somme de $45 millions.
Si je discute, M. le Président, cet aspect que constitue la
fiscalité ou cet autre aspect, l'aspect des coûts de la police,
c'est parce que je veux relier cela à une des dispositions très
importantes du projet de loi qui est présentement à
l'étude. Cette disposition veut que le plan d'allocations, tel
qu'approuvé par la Commission de police, ne pourra venir en vigueur que
suivant les modalités et suivant les décisions du
lieutenant-gouverneur en conseil. Vous aurez compris que le plan d'allocations,
de par les exigences qu'il posera au point de vue de la protection
policière sur l'île de Montréal, entraînera des
coûts, des dépenses auxquels il faudra faire face soit par des
impôts qui seront prélevés par la Communauté urbaine
de Montréal, soit par des subventions qui viendront du gouverne- ment du
Québec. En somme, les budgets pour les années futures de la
police sur l'île de Montréal seront tributaires, seront
dépendants en large mesure des décisions qui seront prises dans
le cadre de ce plan d'allocations des ressources humaines et physiques, plan
qui sera décidé en dernière analyse par la Commission de
police, ainsi que je l'ai dit tout à l'heure, en vertu de la loi de 1969
qui avait organisé ce service de police sur l'île de
Montréal.
Devant cette situation, M. le Président, je pense qu'il est du
devoir des élus du peuple, c'est-à-dire de cette
Assemblée, de donner quand même un moyen de contrôle sur les
décisions de la Commission de police au lieutenant-gouverneur en
conseil, afin d'éviter que des décisions prises par un corps
purement administratif comme la Commission de police n'entraînent une
série de dépenses en capital ou en revenu et des
conséquences financières insupportables pour les contribuables
sur l'île de Montréal ou encore insupportables pour le
lieutenant-gouverneur en conseil ou le gouvernement dans l'octroi de
subventions pour venir en aide au service de la police en vertu du principe des
responsabilités, que j'ai mentionné tout à l'heure. Le
problème est donc le suivant. Jusqu'à quel point un organisme
quasi judiciaire comme la Commission de police doit-il être
habilité à prendre des décisions qui auront des
répercussions immédiates sur le niveau de la taxation sur
l'île de Montréal ou encore sur le niveau des subventions que le
gouvernement devrait être appelé à donner à la
police sur l'île de Montréal?
Eh bien! je dis qu'en toute logique démocratique, il faut que le
dernier mot dans ce domaine, que le dernier mot sur ce sujet, que les
décisions définitives appartiennent à des personnes qui
sont élues et qui appartiennent quand même au monde politique,
c'est-à-dire qu'en l'occurrence il faut donner au lieutenant-gouverneur
en conseil un pouvoir de dire dans quelle échéance et dans quelle
condition le plan d'allocation, mis en vigueur ou ordonné par la
Commission de police, sera exécutoire. Il faut donc permettre au
gouvernement de contrôler d'une certaine façon les
décisions de la Commission de police. Si je dis cela, ce n'est pas parce
que je n'ai pas confiance dans la Commission de police. Je voudrais dissiper
toute ambiguïté à ce sujet. J'ai une confiance
entière dans la Commission de police. Elle est composée de
spécialistes dans le domaine de l'organisation de la police et de
l'administration des corps policiers.
Donc, mes réserves ne proviennent pas du tout de
réticences que j'aurais à l'égard de la compétence
de cette commission. Mais cette commission, ce n'est pas elle qui va
prélever les impôts pour payer les conséquences de son
rapport. Cette commission, une fois qu'elle aura conçu un plan
d'organisation de la police sur l'île de Montréal en fonction des
meilleurs critères de l'organisation policière, ce n'est pas elle
qui aura la responsabilité ni d'aller chercher
les impôts dans la poche des contribuables montréalais, ni
de payer des subventions comme le fait le lieutenant-gouverneur, comme le fait
le gouvernement tous les ans à l'égard du service de la police et
comme devra le faire le gouvernement dans les années à venir. Car
aujourd'hui, s'il y a un fait que l'on peut constater dans le domaine municipal
à travers l'Amérique du Nord, c'est que les grandes
agglomérations urbaines, les métropoles, les grands secteurs
municipaux à haute densité doivent recevoir un appui financier
des gouvernements supérieurs. Cela est un phénomène que
l'on constate dans tous les Etats américains et dans toutes les
provinces canadiennes.
Je voudrais simplement citer un article paru récemment dans le US
News and World Report du 16 décembre 1974, où il y a justement de
très bons articles sur la question intitulée "The loosing battle
against crime in America".
Voici ce que l'on dit à la page 43: Le coût de la police
aux Etats-Unis a augmenté, d'une somme de $3 milliards en 1967, à
une somme de $8.6 milliards en 1974. Per capita, les coûts de la police
ont augmenté de $15 par personne en 1967 à $41 pour chaque
Américain, ce qui, je pense, démontre que l'accroissement des
dépenses dans le domaine de la protection policière ou dans le
domaine de la sécurité publique est un phénomène
nord-américain et que même si, sur l'île de Montréal,
on se plaint de l'accroissement très considérable des budgets de
la police, cet accroissement est dans les mêmes proportions ou à
peu près et dans le même ordre d'idées que l'accroissement
général à travers les Etats-Unis.
Il faut donc conclure que l'accroissement du coût de la protection
publique est un phénomène nord-américain et qu'il ne nous
est pas possible d'y échapper. Mais il faut, je pense, tirer des
conclusions de ça. C'est que la fiscalité municipale n'est
généralement pas suffisante pour supporter l'accroissement de ces
coûts de police et il faut que les gouvernements supérieurs
viennent à la rescousse des grandes agglomérations urbaines pour
les aider dans le domaine de la protection publique.
Je conclus sur cette partie du sujet en disant que compte tenu des
répercussions financières qu'aura ce plan d'allocation des
ressources humaines et physiques, il faut donner certains mécanismes
d'examen du plan d'allocation. Il faut, en somme, que le plan d'allocation
n'entre pas en vigueur d'une façon purement et simplement technocratique
comme un plan issu du cerveau de grands penseurs en matière de police,
de grands concepteurs en matière de la protection des citoyens mais sans
aucune référence à la capacité de payer des
contribuables et sans aucune référence à la
capacité de subventionner du gouvernement québécois.
C'est la raison pour laquelle j'ai pensé que de façon
à donner une protection suffisante ou du moins à donner certaines
garanties que le plan d'allocation n'aura pas des répercussions finan-
cières trop considérables ou au moins que ces
répercussions financières pourront être
étalées dans le temps, de façon à ne pas
créer comment pourrais-je dire? un état de crise au
point de vue des finances publiques, on fasse en sorte que le plan d'allocation
des ressources humaines et physiques ne devienne exécutoire qu'avec
l'approbation du lieutenant-gouverneur en conseil. Je crois que cette mesure
sera bienfaisante pour les citoyens de l'île de Montréal et
qu'elle donnera à ces mêmes citoyens des garanties à
l'effet que le plan d'allocation n'entrafnera pas des répercussions trop
grandes.
Il y a peut-être aussi d'autres aspects du plan d'allocation qui
seraient de nature à intéresser le lieutenant-gouverneur en
conseil. Je pourrais par exemple mentionner la protection policière. A
un moment donné si la Commission de police se trompait sur un des
éléments de la protection policière, il serait possible au
lieutenant-gouverneur en conseil de modifier la décision prise par la
Commission de police ou encore le plan d'allocation pourrait ne pas tenir
compte des intérêts de la Fraternité des policiers, du
syndicat des policiers. Là encore, ceci permettrait au
lieutenant-gouverneur en conseil de faire la part des choses et d'adopter une
solution qui soit, en définitive, conforme à
l'intérêt général, à l'intérêt
des citoyens ainsi qu'à l'intérêt d'avoir un corps de
police qui fonctionne efficacement, l'intérêt d'avoir un syndicat
des policiers qui accepte de travailler à l'intérieur du cadre
déterminé par la Commission de police.
En somme, M. le Président, il faut qu'après la Commission
de police il y ait lieu à un examen ou à une méthode de
vérification des conclusions proposées par la commission à
l'égard de l'organisation de la police et ceci principalement pour les
répercussions financières qui peuvent résulter de ce plan
d'allocation et pour d'autres aspects, tels la protection policière, le
syndicalisme dans la police, etc., etc.
Voilà donc, M. le Président, l'un des aspects de ce projet
de loi et je pense que nous serions imprudents si nous n'apportions pas
à ce moment-ci cette mesure. Je pense que l'apporter plus tard serait
dangereux car les questions concernant l'étude du plan d'allocation des
ressources humaines et physiques sont actuellement soumises à la
Commission de police. Est-ce qu'on devrait prévoir un mécanisme
d'appel après que la Commission de police aura pris ses
décisions? Je pense qu'arriver avec un mécanisme d'appel une fois
que la décision de la Commission de police aurait été
rendue serait une solution complètement ridicule et critiquable. Donc
c'est le temps, à l'heure actuelle, d'adopter une solution.
On peut appeler cela mécansime d'appel ou mécanisme de
vérification des conclusions de la Commission de police. C'est le
moment, car la Commission de police ne s'est pas encore prononcée, elle
n'a fait que recevoir les mémoires et elle se prépare à
tenir les séances
publiques avec les parties intéressées pour étudier
l'ensemble de la question.
C'est le moment d'adopter la solution proposée par ce projet de
loi qui devrait être de nature à rassurer beaucoup de gens
impliqués dans le problème. Je crois que c'est dans cet esprit
qu'il faut voir le projet de loi.
Ce projet de loi comporte un autre aspect sur lequel je
m'étendrai moins longuement. En effet, le projet de loi no 200 propose
la création d'un conseil consultatif auprès du conseil de
sécurité publique. Comme je le disais tout à l'heure, le
service unifié de la police sur l'île de Montréal est
géré par un conseil de sécurité publique. Ce
conseil est composé, pour moitié, de personnes
désignées par le gouvernement et, pour l'autre moitié, par
des personnes qui viennent du conseil de la Communauté urbaine de
Montréal.
C'est ainsi que le gouvernement du Québec désigne trois
des membres du conseil de sécurité publique, dont le
président, que la ville de Montréal en désigne deux, et
les villes de banlieue en désignent une, ces six personnes formant le
conseil d'administration de la police de l'île de Montréal.
Or, depuis l'intégration des services de police municipaux sur
l'île de Montréal, il y a eu, ne nous le cachons pas, des
critiques qui ont été formulées par des maires de
banlieue, par les élus des villes dont les corps de police avaient
été intégrés. Ces critiques, en
général, ont été à l'effet que le service
policier ou la protection policière avait baissé dans ces
banlieues depuis l'intégration.
En somme, les maires, les conseils municipaux ont formulé,
à l'égard du service intégré de la police sur
l'île de Montréal, des critiques parfois acerbes à l'effet
qu'ils ne bénéficiaient pas d'une protection aussi grande que
celle qui existait avant l'intégration.
Je n'approuve pas toutes ces critiques. Certaines me semblent
exagérées. D'autant plus que, dans certaines municipalités
de l'ouest de Montréal, par exemple, le corps de police est presque
doublé au point de vue du nombre par rapport à ce qu'il
était avant l'intégration de la police. Je me demande comment un
corps de police qui a augmenté, par exemple, de 30 à 55 personnes
pourrait donner une protection policière moindre aux citoyens. Il faut
admettre que le conseil de sécurité, surtout depuis
récemment, a fait des efforts très considérables pour
rassurer les populations de banlieue et les maires de banlieue sur les niveaux
de la protection policière, en augmentant les effectifs dans les
diverses banlieues et en rencontrant les élus dans ces banlieues pour
discuter avec eux de leurs problèmes en matière de police.
Donc, dans les critiques qui sont faites, il faut faire la part des
choses. Il est sûr et certain que les changements qui se sont produits
par l'intégration ont réduit le genre de services que donnaient
les policiers avant l'intégration. Il est incontestable qu'avant
l'intégration, les corps de police pouvaient peut-être rendre
certains services de nature plus personnelle aux citoyens. Par exemple, un
citoyen partait en vacances, la police allait vérifier tous les jours si
tout était bien aux abords de la maison. C'était un type de
service assez personnel, assez individualisé, et il faut peut-être
admettre que les citoyens, dans certaines banlieues ont perdu ces
avantages.
Par contre, je pense qu'ils ne pouvaient pas vivre isolés du
reste de la communauté de l'île de Montréal. Ils ne
pouvaient pas vivre dans une tour d'ivoire et s'imaginer qu'ils continueraient
à voir le service de la police de la ville de Montréal supporter
tous les grands problèmes de la criminalité moderne pendant qu'on
faisait une petite police genre pépère, une petite police maison
à prix réduit dans ces mêmes banlieues. Cela aurait
été injuste, M. le Président, pour les citoyens de
Montréal qui voyaient leurs impôts augmenter constamment à
cause des responsabilités toujours grandissantes du service de la police
de la ville de Montréal. Eh bien, M. le Président, il faut
l'admettre, si le service des banlieues est quelque peu moins
personnalisé qu'il ne l'était autrefois, au moins les banlieues
peuvent se dire qu'elles sont entrées dans le concert montréalais
et qu'elles assument pleinement leurs responsabilités avec les citoyens
et les contribuables de la ville de Montréal. Je ne regrette pas,
même malgré les critiques qui ont été faites,
l'intégration, car l'intégration était une mesure
nécessaire. M. le Président, il était absurde d'avoir, sur
un territoire aussi restreint que celui de la ville de Montréal, 25
corps de police, dont un grand corps de police ayant 4,000 hommes, celui de la
ville de Montréal, et les autres corps de police ayant au maximum une
centaine d'hommes. Je pense que Saint-Laurent était le corps de police
le plus nombreux avec 100 ou 125. Certains corps de police avaient 10, 15 et 20
hommes. C'était une situation absurde, c'était une situation
discriminatoire à l'égard des citoyens de Montréal et il
fallait y remédier par une meilleure organisation policière.
Mais, M. le Président, je suis prêt à
reconnaître que, par contre, certaines critiques des banlieues sont
peut-être valables et que le service policier a peut-être
été moins bon pour certaines choses dans certains domaines et
qu'il faut y remédier. C'est pour cela, M. le Président, que nous
proposons la création d'un conseil consultatif qui va réunir tous
les maires de l'île de Montréal. Ce conseil va parler directement
au Conseil de sécurité et il va être capable, de cette
façon, d'exprimer au Conseil de sécurité ce qui ne va pas
au point de vue de la protection de la police dans les différents
secteurs, de signaler les revendications des villes de banlieue et des citoyens
de banlieue, comme, d'ailleurs, les revendications des citoyens de
Montréal. En somme, M. le Président, ce conseil consultatif
permettra de canaliser vers le Conseil de sécurité l'opinion et
les revendications
des citoyens de l'île qui pourront être
représentés par leurs élus, c'est-à-dire les maires
des différentes villes intéressées.
Je crois que ce contact entre les autorités du Conseil de
sécurité, ainsi que les maires des villes permettra quand
même d'assurer un niveau de protection policière adéquat
dans toutes les parties de l'île de Montréal et qu'on pourra
aussi, de par ce mécanisme, faire face aux problèmes particuliers
qui peuvent exister dans certaines villes. On sait que les problèmes de
l'ouest de la ville de Montréal ne sont pas nécessairement ceux
de l'est. Dans l'ouest, par exemple, on m'a signalé qu'il y avait
beaucoup de cas de vandalisme par des jeunes. Cela ne veut pas dire qu'on a les
mêmes problèmes dans l'ouest de la ville. On m'a signalé
qu'à Montréal-Nord il y a un problème en rapport avec les
communications de la police. Eh bien, ce n'est pas le même
problème pour la ville d'Outremont ou la ville de Westmount. Dans la
ville de Westmount, le maire Ouimet nous signale d'autres type de
problèmes: baisse du service, baisse de la protection policière.
Eh bien, le conseil consultatif, ce sera l'endroit où les maires des
différentes villes pourront dire directement aux autorités
policières ce qui ne va pas et, ainsi, les obliger, moralement du moins,
à passer à l'action pour donner à tous les secteurs de
l'île de Montréal une protection adéquate.
M. le Président, je m'excuse d'avoir été
peut-être un peu long en exposant un projet de loi qui, lui, n'est
peut-être pas très long, mais je pensais qu'il était
nécessaire de donner aux membres de la Chambre le cadre
général dans lequel ce projet de loi était
présenté, car il avait fait assez peu l'objet de discussions
publiques récemment. Il m'a donc semblé utile que je fasse le
point de la situation actuelle sur l'intégration de la police en disant
comment ce projet de loi s'insère dans l'évolution de cette
situation.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, comme le disait le ministre de la
Justice, le projet de loi no 200 que nous avons à examiner en
deuxième lecture n'est peut-être pas bien long, mais c'est un
projet, d'autre part le ministre aurait dû le dire, je pense
lourd de conséquences.
A toutes fins pratiques, le projet de loi, qui ne comporte que trois
articles, dans ses deux premiers articles nous expose deux aspects
différents du projet. Le premier, que le ministre a traité en
dernier et que je traiterai, moi, en premier vous verrez l'approche
différente que nous avons à l'endroit de ce même projet de
loi est sûrement une mesure contre laquelle nous ne pouvons
véritablement faire de sérieuses critiques.
En effet, nous étions, lorsque la loi de l'intégration du
service policier sur l'île de Montréal a été
présentée, de ceux qui favorisaient cette intégration et
qui avaient, à la suite de longues discussions, permis, je pense, un
certain nombre d'amendements assez valables, amendements je le reconnais
tout de suite que le ministre de la Justice avait accepté comme
valables et avait intégrés à son projet de loi. De sorte
que je ne vois pas que les articles qu'on nous propose dans la première
partie du projet de loi soient contraires à ce que nous avions
envisagé au moment de cette loi de l'intégration des forces
policières de l'île de Montréal. Cela permettra de
façon plus institutionnelle de favoriser une consultation entre les
municipalités visées et le Conseil de sécurité qui,
lui, a des décisions importantes à prendre. Alors, nous ne
pouvons être contre cette mesure.
Cependant, une des choses qui avaient retenu le plus notre attention
lors de l'adoption du projet de loi no 281, si je me rappelle bien,
c'est-à-dire la loi intégrant les forces policières
à Montréal, est que nous avions été absolument sans
aucune restriction en faveur de la protection, d'une part, des
différents corps de policiers, au niveau des policiers eux-mêmes
et, d'autre part, toujours sans aucune restriction en faveur d'une protection
des municipalités elles-mêmes. Ce qui avait donné dans la
loi, comme mécanisme d'intégration, naissance à l'article
53 qu'une partie de ce projet de loi veut venir modifier.
Le plan d'allocation de ressources humaines est central, est primordial
dans un plan d'intégration des forces policières sur l'île
de Montréal. Vous aviez, comme le disait le ministre, quelque 25 corps
de police qui devaient avec le temps être intégrés les uns
après les autres à la grande force, au coeur, si vous voulez, de
la police sur l'île de Montréal, à ce moment,
c'est-à-dire la police de Montréal elle-même, et cela
devait se faire dans l'ordre sans brimer des droits, pas plus les droits des
policiers ou des fonctionnaires affectés aux différents services
de police que les droits des diverses municipalités, parce que le tout
partait, pour autant que mon souvenir est bon, du noyau principal, du corps
policier principal qui était celui de la ville de Montréal. Et
nous avons applaudi au plan d'intégration et surtout au plan
d'allocation de ressources qui était prévu à l'article
53.
En résumé, ce plan d'allocation de ressources humaines se
faisait par étapes. Et, à notre avis, il prévoyait
suffisamment de consultation, même si le conseil consultatif qui est
prévu par ce projet de loi no 200 n'était pas prévu dans
la loi à l'origine, quand même suffisamment d'étapes et
suffisamment de consultation pour que ni les municipalités, ni les corps
policiers, ni les fonctionnaires ne soient brimés.
Or, on nous amène aujourd'hui un nouveau projet de loi. Quand je
regarde le numéro, je suis porté à adapter un certain
proverbe et à
l'inverser, même, dans le cas présent. Il y a des gens qui
disent: "Les jours se suivent mais ne se ressemblent pas". Moi, je suis
porté à dire: "Les numéros se suivent et ils se
ressemblent drôlement". Ce projet de loi no 200 qui,
numériquement, précède le projet de loi no 201, est un
projet de loi qui ressemble en tous points fondamentalement au projet de loi no
201, c'est-à-dire celui où le cabinet se donne des pouvoirs
excessifs, absolument inexplicables eu égard à la situation.
Dans le projet de loi no 201, pour régler le problème de
la construction, on décidait de donner au lieutenant-gouverneur en
conseil le pouvoir de modifier, sans le consentement des parties, le
décret.
Dans le projet de loi no 200, après avoir donné des
étapes de discussion de ces plans d'intégration ou d'allocation
de ressources humaines, on décide de donner au cabinet un droit de veto
absolu.
C'est tout ce que je retiens de ce projet de loi parce que le conseil
consultatif, dans les faits, si mes informations sont bonnes, existe. Il y a du
monde qui se consulte sur l'île de Montréal. Il y a encore du
monde qui se parle entre les diverses municipalités. Il y a encore du
monde qui dit: Dans ma municipalité, telle et telle ville de tant de
milliers d'habitants, il n'y a pas suffisamment de policiers et le ministre
pourra même infirmer cette affirmation s'il le croit justifié,
mais, effectivement, des ajustements ont eu lieu en cours de route. Des
municipalités se sont plaintes de ne pas avoir suffisamment de
protection policière et il y a eu des ajustements.
Donc, à toutes fins pratiques, qu'apporte de nouveau le conseil
consultatif? Dans le fond, il institutionalise quelque chose qui existait de
façon non formelle, mais ce qu'apporte de nouveau le projet de loi no
200 est ce droit de veto, cette intervention dans un processus quasi
judiciaire, ce qui est encore pire que le projet de loi no 201. Au moins, dans
le projet de loi no 201, c'est une intervention dans un décret, ce qui
n'est pas une intervention dans un processus quasi judiciaire. Pour prouver mon
point, il suffit d'examiner les diverses étapes de cette fameuse
allocation des ressources humaines qui apparaît à l'article 53,
chapitre 93, des lois de 1971.
Le ministre a mentionné cette première étape. La
loi ne le dit pas, mais j'imagine qu'après avoir consulté son
état-major le directeur de la police de la Communauté urbaine de
Montréal fait ses recommandations au Conseil de sécurité.
C'est la première étape de l'établissement d'un plan
d'allocation de ressources.
Dans l'article 53 cela vaut la peine de lire le premier
paragraphe on dit : En priorité, mais après consultation
avec les municipalités"... Déjà, une première
méthode de consultation qui fait qu'on ne veut pas brimer les droits des
diverses municipalités. C'est pour cela que je vous disais tout à
l'heure qu'effectivement ces consultations ont eu lieu. En effet, en cours de
route, sans qu'il n'y ait eu officiellement respect complet du processus
prévu à l'article 53 de la loi, il y a eu de ces consultations et
il y a eu des ajustements. Mais on dit qu'après ces consultations avec
les municipalités et les associations qui représentent les
policiers et les fonctionnaires le directeur de ce service prépare et
soumet au Conseil de sécurité et à la Commission de police
un plan d'allocation de ressources humaines et physiques du service, compte
tenu des besoins de la communauté et de la protection contre l'incendie
des municipalités dans lesquelles les policiers cumulent la fonction de
pompiers.
Cela a été fait jusqu'à maintenant et, dans ce
même article, on prévoit une deuxième étape. Donc,
la première étape, résumons-la: Le directeur du service de
police de la Communauté urbaine de Montréal fait ses
recommandations, après avoir consulté les municipalités,
après avoir examiné de part et d'autre leurs réclamations,
leurs récriminations, leurs réquisitions.
Par la suite, ce dossier est transmis à la Communauté
urbaine de Montréal elle-même et un avis est donné aux
diverses municipalités. Sur réception de cet avis, les diverses
municipalités, ainsi que les associations de policiers ou de
fonctionnaires peuvent en appeler à la Commission de police de sorte
que, lorsque je parle de processus quasi judiciaire, je ne crois pas me
tromper. Je ne connais pas de processus autre qu'un processus judiciaire ou
quasi judiciaire qui prévoit un droit d'appel. Je ne connais pas de
législateur qui va mettre dans sa loi un droit d'appel, qui va utiliser
le mot appeler, si on n'est pas dans un domaine judiciaire ou quasi
judiciaire.
Là, qu'arrive-t-il à cette nouvelle étape? Il y a,
effectivement, audition, toujours selon ce même article 53, et il y a
décision. Je pense bien qu'il est assez clair, le quatrième
paragraphe de l'article 53, toujours de la Loi concernant le service de police
de la communauté urbaine, lorsqu'on lit les mots "La Commission de
police entend les parties. Au besoin, elle convoque le Conseil de
sécurité. Par sa décision, la commission approuve, avec ou
sans modifications, la décision du Conseil de sécurité".
Après avoir dit qu'il y a appel de la décision du Conseil de
sécurité, on dit qu'il y a décision puis appel de cette
décision, et qu'il y a décision de la Commission de police et que
cette Commission de police, dans sa décision, ne peut pas subir
d'appel.
M. le Président, on a tous les tenants et aboutissants d'une
décision d'un processus judiciaire et, même si on ne veut pas
aller plus loin, d'un processus quasi judiciaire, parce que c'est un tribunal
beaucoup plus administratif qu'autre chose, je l'admets. Ce que je ne peux pas
admettre, c'est qu'un tel projet de loi puisse, sans que le ministre de la
Justice, lui qui est gardien j'insiste énormément
là-dessus moins que tout autre... Je pardonne plus au ministre du
Travail d'avoir présenté un projet
de loi du type 201 que je puis pardonner au ministre de la Justice de
présenter un projet de loi du type du projet de loi no 200 que nous
examinons actuellement. Il est le gardien de l'administration de la justice au
Québec, et un des principes de l'administration de la justice je
défie, bien amicalement, remarquez, le ministre de la Justice de venir
me contredire c'est qu'il faut qu'il y ait absolument séparation
complète entre l'exercice de pouvoirs judiciaires et l'exercice de
pouvoirs exécutifs et l'exécution de pouvoirs
législatifs.
Le pouvoir législatif, nous sommes en train de l'exercer. Le
pouvoir judiciaire, le Conseil de sécurité l'a exercé et
la Commission de police est sur le point de l'exercer. Le pouvoir
exécutif qu'on vient greffer à tout ça, c'est ça
que je trouve grave dans le projet de loi, c'est ce fameux droit de veto que le
cabinet, l'Exécutif du Québec s'apprête à devoir
exercer s'il le juge à propos, donc de façon tout à fait
discrétionnaire, à la suite de l'exercice du pouvoir judiciaire,
c'est-à-dire celui de la Commission de police.
M. le Président, je ne pense pas qu'on puisse trouver de
semblables mesures dans quelque loi que ce soit du Québec, loi qui
institue des pouvoirs quasi judiciaires. Je réfère le ministre de
la Justice, par exemple, on peut en citer quelques-unes à
la Commission de transports instituée en vertu de la Loi des transports.
Elle n'est sujette à aucun appel sinon celui des tribunaux, lorsqu'elle
excède sa juridiction. Elle n'est sûrement pas sujette à
une décision du cabinet. Si je m'étais fait fort d'un tel
amendement lorsque nous avons étudié la Loi des transports, il y
a quelques années, je suis convaincu que le ministre de la Justice,
comme gardien de l'administration de la Justice au Québec, se serait
levé et m'aurait traité de tous les noms et il aurait eu raison
de le faire. Il aurait dit: Le député rêve dangereusement.
Il confond des choses. Le député de Maisonneuve veut mêler
l'Exécutif au Judiciaire. C'est un principe intolérable en
démocratie.
M. le Président, si j'avais fait le même amendement
lorsqu'on a constitué ce tribunal quasi judiciaire qui s'appelle le
commissaire-enquêteur en vertu du code du travail, qui a des
décisions judiciaires à rendre, si j'avais dit: Cela peut
impliquer des fonds, cela peut impliquer une dépense de fonds, il
faudrait quand même qu'il y ait contrôle, ce sont les mots
mêmes du ministre, du cabinet sur ces décisions, parce qu'il peut
y avoir des fonds, bien sûr, une décision du
commissaire-enquêteur, en vertu du code du travail, peut mettre en
faillite un employeur. Imaginez-vous, je vous donne cela uniquement à
titre d'exemple: un employeur qui congédie 35 employés, comme
cela a été le cas de Tétreault Shoe, il y a quelques
années, 35 employés sur à peu près 60.
Si l'employé ou les employés, par l'entremise de leur
syndicat, s'adressent tous au commissaire-enquêteur et qu'ils ont
été sans emploi pendant deux ans et demi et que le
commissaire-enquêteur rend une décision disant: Vous n'aviez pas
d'affaire à congédier ces 35 employés, imaginez-vous ce
que cela représente pour cet employeur de payer 35 salaires pour des
gens qui n'ont pas travaillé pour lui pendant deux ans et demi.
Est-ce qu'on va dire que c'est trop dangereux pour cette compagnie,
qu'on va reprendre en main ou, tout au moins, qu'on va se réserver un
droit de veto sur une décision quasi judiciaire? Je ne l'ai pas vu dans
le code du travail et j'espère ne jamais le voir. On peut citer d'autres
exemples. Je pourrais reprendre le même exemple que je viens de donner
à l'égard de la Commission des accidents du travail qui exerce
des pouvoirs quasi judiciaires et qui, à un moment donné, peut
rendre des décisions très graves au point de vue de leurs
conséquences sur un employeur. Mais la meilleure de toutes, c'est la
Commission d'appel en matière d'impôt. J'entendais le ministre
dire: Quand même, la Commission de police, on doit la contrôler
parce qu'elle n'a pas le pouvoir de prélever des impôts, elle n'a
pas le pouvoir de dire quels impôts on va imposer à la population
de Montréal. Cela est vrai. Cela est vrai aussi de la Commission d'appel
en matière d'impôt. Souvent, des décisions de ce tribunal
quasi judiciaire peuvent, par voie de conséquence, requérir un
acte de la part de l'Exécutif qui peut exiger une augmentation des
impôts.
Si on avait supposé que telle et telle cotisation fiscale devait
rapporter tant et que le ministère du Revenu, le percepteur officiel de
l'Etat, avait budgétisé là-dessus et que la Commission
d'appel en matière d'impôt vienne contrecarrer les vues du
ministère du Revenu, est-ce qu'on tolérerait qu'à cause de
ça on dise: Le cabinet, le lieutenant-gouverneur en conseil aura un
droit de veto là-dessus? Je pense qu'encore une fois je me ferais
traiter d'irréaliste, je me ferais traiter de personne n'ayant aucune
connaissance de la structure de base de fonctionnement d'un Etat
démocratique. On me dirait: Le député de Maisonneuve a
besoin de retourner aux bons auteurs britanniques qui nous ont donné de
grandes leçons de démocratie et d'où nous
procédons.
Je serais d'accord sur les critiques qu'on me ferait à cet
égard. Mais ces critiques, je les formule directement à l'endroit
du ministre de la Justice. Je pense que ce qu'il est en train de faire par son
projet de loi, c'est insérer justement le pouvoir exécutif dans
le processus judiciaire. C'est une première brèche, à ma
connaissance. Je n'en connais pas d'autre. Je ne connais pas d'autres lois du
Québec, ni du Canada d'ailleurs qui le fassent. Si on m'en cite, je
dirai que ces autres lois ne sont pas plus justifiables et pas plus valables
que celle-ci, me basant sur le principe de l'indépendance des pouvoirs
judiciaire, législatif et exécutif, les uns à
l'égard des autres.
La conséquence immédiate de ça, en plus des
grands principes que je viens d'énoncer, c'est que c'est un vote
de non-confiance à l'endroit de la Commission de police. Que le ministre
de la Justice le veuille ou non, qu'il dise, comme il l'a dit: Ce n'est pas une
critique de la Commission de police d'insérer ce texte dans la loi, il
reste que c'est un. vote de non-confiance à l'endroit de la Commission
de police de Montréal, organisme qu'on a mis en place, à qui l'on
confie régulièrement des décisions de grande importance,
à qui on confie même certains mandats comme celui de la Commission
d'enquête sur le crime organisé. Est-ce qu'on n'a pas confiance en
la Commission de police? C'est ça la question qui se pose à
l'occasion de l'étude du projet de loi no 200, en plus de la
brèche, de cet accroc fantastique qu'on fait au principe de
l'indépendance des pouvoirs.
Si on n'a pas confiance en la Commission de police, j'ai une suggestion
bien claire à faire au ministre de la Justice. Qu'on l'enlève de
là tout simplement, qu'on fasse autre chose avec elle, si c'est cela.
Mais qu'on ne dise pas, M. le Président, parce qu'elle peut rendre des
décisions qui ne feraient pas notre affaire et qui ne feraient pas
l'affaire des contribuables de la ville de Montréal: On va lui donner
une espèce de frein, un "brake à bras", comme disait le ministre
du Travail l'autre jour. C'est pas mal plus qu'un "brake à bras". On
enfreint carrément toutes les règles de respect du pouvoir
judiciaire par rapport aux pouvoirs législatif et exécutif.
M. le Président, de tout temps, quand le pouvoir
législatif ou encore quand le pouvoir exécutif voulait intervenir
dans le processus judiciaire, il le faisait par l'entremise du changement des
pouvoirs judiciaires, par voie législative, non pas par voie d'appel,
par veto ou autrement, à ces pouvoirs.
M. le Président, le ministre de la Justice a beau dire qu'il a
énormément de respect à l'endroit de ces
spécialistes dans le domaine policier que sont les membres de la
Commission de police, malheureusement, je suis obligé de ne pas le
croire lorsqu'il dit cela. Parce que si je devais le croire, je serais
assuré qu'en commission parlementaire, je lui demanderais de retirer
l'article 2 de son projet de loi et je serais assuré d'avance qu'il le
ferait, ce dont je ne suis pas assuré actuellement. Je n'en suis pas
assuré parce que dans son discours, il a défendu, justement, dans
la majeure partie de son intervention, ce pouvoir extraordinaire qu'il veut
donner, par l'entremise du projet de loi no 200, à
l'Exécutif.
Si, dans la Loi du Service de police de la Communauté urbaine, on
a pris la peine de préciser ces étapes que je vous
décrivais tout à l'heure, soit la première recommandation
du directeur de service, la première recommandation à la suite
des recommandations du Service de police de la part du Conseil de
sécurité, appel possible au Conseil de police, il me semble
qu'à ce moment, on a réfléchi aux conséquences. Il
me semble que lorsqu'on parle d'allocation des ressources humaines sur
l'île de Montréal, connaissant les problèmes policiers qui
existent sur l'îlede Montréal et malgré le fait
qu'on ait actuellement, qu'on avait surtout, à Montréal, au
moment où la Loi de police a été mise en vigueur,
probablement l'un des meilleurs, non seulement probablement mais sûrement
l'un des meilleurs corps de police au Canada et cela, c'est reconnu par
tous les autres corps de police, y compris celui que dirige indirectement, par
son sous-ministre adjoint, le ministre de la Justice, celui de la
Sûreté du Québec indépendamment de la valeur
de ce corps de police, tout le monde a toujours, de tout temps, surtout depuis
une quinzaine d'années, reconnu la grande valeur du corps de police de
Montréal.
Les gens qui, à l'intérieur du corps de police de
Montréal, ont fait valoir leur point de vue, tant au directeur du
Service de police de la Communauté urbaine, tant au Conseil de
sécurité et tant, éventuellement, à la Commission
de police, sont des gens qui vivent dans le milieu depuis un certain temps,
depuis, dans bien des cas, de nombreuses années. Les gens qui ont
à rendre des décisions, à quelque niveau que ce soit, que
ce soit le directeur du Service de police, conseillé par son
état-major, que ce soit le Conseil de sécurité, que ce
soit la Commission de police, sont des gens qui vivent dans le milieu.
Autrement pourquoi les a-t-on nommés là? Est-ce parce qu'ils sont
incompétents qu'on les a nommés là? Je ne le pense pas. Je
pars avec l'idée que j'accorde la bonne foi aux gens qui sont là.
J'accorde la bonne foi aussi à ceux qui les ont nommés. J'accorde
la bonne foi aux gens qui ont pris la décision de dire: Cela nous prend
des gens qui connaissent cela, à cet endroit-là. S'ils
connaissent cela, il me semble qu'on a dû tenir compte aussi de leur sens
des responsabilités.
Ce que craint le ministre, que certaines recommandations puissent causer
un fardeau fiscal impossible à rencontrer pour les citoyens, les
contribuables de l'île de Montréal, il me semble qu'on aurait
dû y penser lorsqu'on a institué ces corps, lorsqu'on a
institué ce système.
Encore une fois, je reviens avec un argument qu'on a fait valoir
à plusieurs reprises dans le domaine du travail.
Il est absolument anormal qu'à l'intérieur d'un processus
prévu par une loi qui concerne des parties diverses, ce soit les
municipalités, les associations, associations de policiers ou de
fonctionnaires, quelques intérêts que ce soit, lorsqu'on engage
quelqu'un dans un processus, il est absolument aberrant d'intervenir dans ce
processus et de faire faire une bifurcation au processus en cours de route.
A toutes fins pratiques, il est aberrant et incompréhensible
qu'on vienne, en plein cours de processus, changer les règles du jeu.
C'est ce qui arrive par l'amendement qui est proposé, le
seul véritablement significatif je le répète
encore celui de confier au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir
de changer, par son veto, une décision qui a été
judiciairement prise.
Ce qui m'inquiète encore plus dans tout cela, je vois une
mainmise du gouvernement du Québec sur des corps policiers aussi
importants que ceux de l'île de Montréal, que celui de la
Communauté urbaine de Montréal.
Si c'est un Etat policier que le ministre de la Justice veut faire,
qu'il nous le dise, qu'il fasse son ministère de l'intérieur qui
contrôle tout ça. Mais il faudra qu'il soit conséquent avec
lui-même, et c'est un argument qui risque de faire boomrang. C'est une
expression qui est très à la mode actuellement. On en a vu
quelques boomerangs depuis quelques jours, depuis quelques semaines.
Si c'est ce qu'il veut faire, il va être obligé
d'être conséquent avec lui-même. J'espère que le
ministre de la Justice continue à m'écouter, même si je le
critique. Il devra réviser son argumentation à l'égard de
son homologue fédéral, M. Warren Allmand, lorsqu'il lui dit qu'il
faut qu'il y ait remboursement de $80 millions pour les services qu'assure la
Sûreté du Québec sur le territoire du Québec,
services qui actuellement sont assurés, ailleurs qu'en Ontario et au
Québec, par la Gendarmerie fédérale du Canada.
Son argument de base, nous l'avons toujours appuyé, je continue
à l'appuyer mais c'est un argument qui pourra peut-être lui
revenir dans la figure à un moment donné. C'est sûr que le
Québec, comme province, à l'intérieur de la
Confédération canadienne, a le pouvoir d'administration
policière par la voie de l'administration de la justice. Personne ne va
nier cela, même M. Allmand l'admet. Il n'admet pas les
conséquences, mais il l'admet cela.
Mais, M. le Président, peut-être qu'à un moment
donné les municipalités vont se mettre à dire: Allez donc
un peu plus loin dans votre argument; si c'est quelque chose qui appartient au
Québec et si vous voulez nous départir de nos pouvoirs, si vous
voulez nous imposer un droit de veto dans un processus que vous nous avez
donné vous-même, prenez-la, la police, mais prenez-la au complet
au Québec, et enlevez-nous cela, ce fardeau-là.
Vous savez que la Communauté urbaine de Montréal aimerait
bien cela ne pas avoir à payer les centaines de millions que lui
coûte le service de police. Il n'y aurait aucun problème sauf
qu'il y a une décision politique à prendre. Comment allons-nous
vivre avec un gouvernement qui a le contrôle absolu "From the bottom to
the top", comme on dit, de toute la police au Québec? C'est une
décision politique très importante qui peut, même si
ça fait sourire le ministre de la Justice, nous mener à un Etat
policier.
Les années soixante-dix ne sont pas tellement loin. J'ai vu, il y
a quelques jours, avec beaucoup de plaisir, le film Les Ordres, parce que je me
suis aperçu que j'avais oublié ce qui s'était passé
en 1970. Si le ministre de la Justice n'a pas vu le film Les Ordres, je lui
suggère d'y aller. Qu'il mette des verres fumés pour ne pas se
faire reconnaître, parce qu'il va voir des réactions dans le
cinéma qui sont assez spéciales. Qu'il se mette une barbe, on lui
prêtera celle du député de Lafontaine. Qu'il aille voir Les
Ordres et on va se rappeler ensemble les années soixante-dix, on va se
rappeler jusqu'à quel point ça peut être
désagréable, maintenant qu'on en est sorti et tant mieux
jusqu'à quel point ça peut être
désagréable de vivre dans un Etat policier. Ces quelques
mois-là, en 1970, octobre 1970, pour ceux qui ne s'en souviennent pas,
ont été l'exemple concret, peu importe ce que dit le ministre
d'Etat aux Affaires sociales, le portrait absolu d'un Etat policier en
Amérique du Nord.
Dieu sait qu'on n'est pas habitué à cela ici, je suis
prêt à l'admettre. On n'est pas habitué à cela, M.
le Président, et on n'est d'autant pas habitué à cela que,
quand on l'impose, on le fait encore plus mal qu'aux endroits où ils
sont habitués. Des régimes de colonels, on n'en a pas connu
beaucoup, même s'il y en a qui essaient de s'instituer en petits colonels
de temps à autre. Voici, M. le Président, ce que donnerait ou ce
qu'amorcerait, à mon avis, une décision sur le plan administratif
qui pourrait dire simplement par droit de veto de la part du cabinet: Je refuse
telle et telle mesure, j'interviens à toutes fins pratiques, moi, le
cabinet, dans l'administration d'une des polices qui, au point de vue du nombre
et de la juridiction, est probablement le plus important corps de police au
Québec, celui de la Communauté urbaine de Montréal. C'est
un petit début d'Etat policier. Et cela, c'est loin de me plaire.
Alors, pour toutes ces raisons, M. le Président, je ne pourrai
pas voter en faveur du principe de ce projet de loi. C'est véritablement
sans aucune hésitation que j'enregistrerai ma voix contre le projet,
pour les trois raisons mentionnées: intervention dans le processus quasi
judiciaire, manque de confiance à l'endroit de la commission de la part
de l'exécutif, c'est-à-dire du cabinet, et, troisièmement,
lueur plus ou moins proche de l'installation d'un Etat policier au
Québec.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Le député de
Rouyn-Noranda.
M. Camille Samson
M. SAMSON: M. le Président, j'ai écouté le ministre
avec beaucoup d'attention. Il nous a dit, à la fin de son discours,
avoir été long; le projet de loi est moins long que le discours
du ministre ne l'a été. Je n'ai pas l'intention d'être plus
long que le projet de loi lui-même.
M. le Président, les deux points principaux
qui ont amené le ministre de la Justice à présenter
le projet de loi no 200 nous ont été expliqués par
lui-même comme étant, d'abord, le plan d'allocation des ressources
humaines et matérielles ou physiques et, deuxièmement, la
création d'un conseil consultatif. Bien entendu, je suis partiellement
d'accord avec le ministre lorsqu'il nous démontre le souci du
gouvernement de savoir quelles seront les sommes à être
dépensées, car il y va des fonds publics. Je suis absolument
d'accord sur ce point. Aucun gouvernement ne pourrait se permettre d'être
obligé de payer des dépenses s'il n'a pas été
partie aux décisions. Cependant, M. le Président, quant au projet
de loi qui nous occupe, il y va d'un rapport qui est terminé
présentement sur l'intégration, sur ce plan d'allocation des
ressources. Même si ce plan a déjà été
approuvé par le Conseil de sécurité publique, même
s'il a déjà été envoyé aux
municipalités, même s'il a été envoyé aux
différents corps de police, à la Commission de police du
Québec, M. le Président, étant donné que ce
mémoire sera discuté par la Commission de police, qu'il y a un
délai de quinze jours pour produire ces mémoires et ils
devront être entendus devant la Commission de police
éventuellement, je ne sais pas au juste la date je
considère qu'il est peut-être un peu prématuré de
nous arriver avec un projet de loi qui, en quelque sorte, à l'article 2,
constitue, il faut le reconnaître, un droit de veto que se donnera le
gouvernement par l'entremise du lieutenant-gouverneur en conseil. C'est un
droit de veto assez important parce qu'on y dit: N'a d'effet que dans la mesure
où elle est confirmée par le lieutenant-gouverneur en conseil et
suivant les modalités qu'il fixe.
M. le Président, je pense que ce n'est pas faire de la
démagogie que de se poser des questions. Je reconnais que dans les deux
allocutions que j'ai entendues, celle du ministre de la Justice et celle du
député de Maisonneuve, il y a des choses valables.
Je reconnais qu'autant le député de Maisonneuve a raison
de se poser la question et de s'inquiéter à savoir si un trop
grand pouvoir ne risque pas, en quelque sorte, de favoriser un élan vers
ce qu'il a appelé un Etat policier; autant je suis d'accord sur
certaines inquiétudes qu'a manifestées le ministre, à
savoir que des décisions qui seront d'ordre quasi judiciaire peuvent
engager les fonds publics dans une mesure dépassant la capacité
de payer. Cela est important. On n'est pas dans un Etat policier, on est dans
un Etat démocratique. Alors, si on est dans un Etat démocratique
et si on veut y rester, il faut aussi jouer le jeu de la démocratie.
Or, le jeu de la démocratie veut dire que le citoyen contribuable
a aussi son mot à dire quant aux dépenses publiques, parce que
c'est lui qui devra payer. Le citoyen contribuable doit aussi avoir un mot
à dire en ce qui concerne les priorités de dépenses. C'est
évident que le citoyen contribuable n'assiste pas au conseil des
ministres toutes les semaines. Le citoyen contribuable est consulté
généralement une fois tous les quatre ans. Mais, une fois tous
les quatre ans, il confirme ou il désavoue le gouvernement, quel qu'il
soit. Quand on parle d'un contexte démocratique, cela peut vouloir dire
que ce gouvernement un jour pourrait être changé; je
l'espère, en tout cas, en ce qui me concerne, et le plus rapidement
possible. Mais, pour le moment, l'électorat a dit que c'était
celui-là et moi, je respecte l'électorat. Mais il reste une
chose, c'est que tout gouvernement, quel qu'il soit, doit un jour venir devant
les électeurs faire rapport de son mandat. C'est à ce moment que
le gouvernement est jugé, parce que l'ultime juge dans une
société démocratique, c'est le citoyen électeur;
c'est lui, l'ultime juge.
Si nous faisons en sorte qu'un organisme, qu'il soit judiciaire ou
non... Vous remarquerez, M. le Président, que je dirais la même
chose d'un autre genre d'organisme qui aurait tous les pouvoirs d'engager des
dépenses sans qu'il y ait auparavant consultation ou sans qu'il y ait
auparavant une confirmation quelconque du pouvoir élu. Or, c'est
là le dilemme auquel nous faisons face présentement. D'une part,
il y a le danger qu'en donnant tous les pouvoirs de veto, comme nous le faisons
présentement, au lieutenant-gouverneur en conseil, les services de la
police soient subordonnés presque directement au pouvoir politique.
D'autre part, si l'on poursuit le raisonnement du député de
Maisonneuve uniquement, il y a un danger que des pouvoirs donnés
à ceux qui prennent les décisions en matière de police
engagent des deniers que nous ne pourrions pas payer. Cela aussi, c'est un
danger.
Alors, je me trouve pris entre le ministre et le député de
Maisonneuve. Je ne veux pas dire que je n'aimerais pas mieux avoir deux autres
interlocuteurs de chaque côté, mais, quand même,
ceux-là sont valables. Il demeure que la position que je prends est
celle d'être entre les deux parce que, d'une part, je n'admets pas que
l'on dépense de l'argent sans que les élus du peuple aient leur
mot à dire et, d'autre part, je n'admets pas, non plus, que ce droit de
veto empêche les services de police de fonctionner normalement.
C'est pourquoi je me demande s'il ne serait pas plus sage à ce
moment-ci de déférer ce projet de loi à une commission. Je
ne sache pas qu'il y ait une urgence telle que nous soyons obligés
d'accepter cela immédiatement. Je me demande s'il ne serait pas plus
sage... Je le fais en toute objectivité; loin de moi l'idée de
tirer de cela quelque avantage politique que ce soit.
Au contraire. C'est un sujet beaucoup trop sérieux pour qu'il
soit discuté politiquement. Cela doit se faire avec le gros bon sens qui
doit nous guider dans une telle situation.
Je le soumets à l'attention du ministre. Je sais qu'il le prendra
en considération. Il aura peut-être des arguments à
soumettre à l'encon-tre de ce que je lui suggère, mais, quand
même,
je pense qu'il est de mon devoir de lui suggérer, à ce
moment-ci, de déférer ce projet de loi. Evidemment, nous sommes
en deuxième lecture. Le ministre a toujours le pouvoir de retarder son
droit de réplique, ce qui veut dire qu'à ce moment cela nous
donnerait le temps qu'il faut pour que les mémoires qui seront soumis
à la Commission de police soient entendus.
Nous ne pouvons dire, en toute objetivité, que la Commission de
police prendra telle ou telle décision tant que la décision
n'aura pas réellement été prise ou tant que la Commission
de police n'aura pas fait savoir ses intentions.
Pour le moment, si on veut que les mémoires qui sont
présentés devant la Commission de police aient tous leur valeur,
il nous faut donner toute liberté de temps à ces gens pour que
les mémoires soient entendus et que la commission les prenne en
considération.
Si on se dépêche à faire une loi pour dire que,
quelles que soient leurs décisions, rien ne sera valable sans que le
gouvernement n'ait confirmé ou sans que le gouvernement n'ait
fixé les modalités, je pense que c'est un peu de bonne heure pour
s'attacher à une décision à être prise il
n'est pas encore temps ou pour provoquer peut-être un autre genre
de décision. Je ne le sais pas, mais mon impression est que ces gens ne
seront pas tout à fait à l'aise pour entendre les mémoires
si, à l'avance, on leur attache les mains.
C'est pourquoi je suggère au ministre, avec toute la conviction
dont je suis capable, de retarder ce projet de loi. C'est une question de jours
ou peut-être d'un mois au maximum. De toute façon, nous
reviendrons devant le Parlement en 1975, pas plus tard que vers la fin de
février peut-être avant même. Alors, il y a
évidemment, pour le ministre, une possibilité de faire adopter
son projet de loi s'il croit encore, après ce temps, qu'il doit le faire
adopter de cette façon. Mais je prétends et c'est pourquoi
j'insiste sur cette possibilité de le déférer
qu'une fois que les mémoires auront été entendus devant la
Commission de la police, le projet de loi pourrait peut-être être
un peu différent, tout en voulant conserver cet équilibre
recherché par le gouvernement et sur lequel je suis d'accord.
D'ailleurs, j'ai discuté avec des gens qui sont directement
concernés par ce projet de loi. Je dois vous dire honnêtement que
personne ne m'a dit que le gouvernement faisait fausse route en voulant assurer
un équilibre quant aux dépenses, quand aux implications
budgétaires.
Par contre, toujours la même inquiétude est revenue,
à savoir dans quelle proportion ce droit de veto n'entravera pas le
cours des opérations policières normales et, évidemment,
c'est une question qui peut nous inquiéter. Et je ne veux en aucun
moment m'en prendre aux intentions du ministre ou du gouvernement en ce qui
concerne ce projet de loi. Je pense que c'est plutôt une question de
faits à considérer et les faits sont que, d'une part, on ne peut
permettre d'engager des deniers publics sans savoir où on va et que,
d'autre part, on ne peut permettre, non plus, que les opérations
policières soient affectées par une décision qui pourrait
être politique.
En quelque sorte, on aurait tout avantage à connaftre la
décision que prendra la Commission de police une fois que les
mémoires auront été soumis. Il y a de nombreux
mémoires. Quelles seront les suggestions retenues? Nous ne le savons pas
présentement, mais lorsque nous les connaîtrons, nous serons en
mesure de nous prononcer.
Peut-être le ministre aurait-il un projet de loi qui pourrait
conserver quand même ce que j'appellerai le droit de regard des
élus du peuple sur les dépenses publiques tout en assurant le bon
fonctionnement du service de la police et tout en nous assurant que tout sera
mis de l'avant pour ne pas prêter flanc à la critique qui
pourrait, par exemple, être celle-ci, à savoir que la politique
commande la police. Ce n'est pas cela que le gouvernement recherche, j'en suis
persuadé, c'est encore moins cela que le ministre recherche, j'en suis
persuadé également.
Ma demande est aussi simple que cela; reporter ce projet de loi un peu,
pour permettre que les mémoires soient entendus devant la commission de
police. Et à ce moment, peut-être qu'il sera aussi valable que le
ministre convoque la commission parlementaire de la justice pour que les
élus du peuple, parce que c'est ce que le ministre veut, puissent en
prendre connaissance, et on pourra, en toute connaissance de cause, prendre une
décision.
Présentement, je ne pourrais voter pour ce projet de loi. Je sais
que cela ne l'empêchera pas de passer, je ne ferai pas de "filibuster".
Ce n'est pas parce que le gouvernement a le pouvoir de le voter, malgré
que l'Opposition ne l'appuie pas, que le gouvernement doit l'adopter quand
même. Je pense que le gros bon sens doit nous guider, et c'est à
cela que je fais appel lorsque je fais ma suggestion au ministre.
Merci.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): Le ministre des Affaires
municipales.
M. Victor Goldbloom
M. GOLDBLOOM: M. le Président, quelques mots seulement. J'ai
remarqué que le député de Maisonneuve et le
député de Rouyn-Noranda ont laissé de côté le
principe représenté par le premier article de ce projet de loi
pour parler de celui représenté par le deuxième.
Le député de Maisonneuve a même écarté
du revers de la main l'importance du premier article, en disant: On ne
crée effectivement rien. Il y a déjà, à toutes fins
pratiques, un comité consultatif, il y a des gens qui se
réunissent et qui se consultent. Je voudrais dire simplement que tel
effectivement n'est pas le
cas et que c'est un geste extrêmement important que pose le
ministre de la Justice en créant ce comité consultatif.
On sait que, depuis déjà une assez longue période
de temps, les maires des municipalités dites de banlieue cherchent
à obtenir une meilleure communication avec les services policiers, avec
le conseil de la sécurité publique. Et justement, la plainte se
renouvelle que les renseignements permettraient peut-être aux
municipalités de banlieue de comprendre pourquoi elles sont
appelées à payer certains montants, ce qui les amèneraient
donc à les payer sans hésitation. L'on connaît
l'hésitation qui est exprimée présentement, et qui est
exprimée par des résolutions adoptées par les conseils
municipaux, de retenir les paiements pour un certain temps en attendant qu'il y
ait éclaircissement de la situation.
Je pense que nous avons apporté, la semaine dernière, un
certain éclaircissement de façon tangible en donnant des montants
importants et en laissant prévoir une certaine augmentation des revenus
des municipalités pour leur permettre de rencontrer plus facilement
leurs obligations dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres. Et il est clair
qu'une partie importante de ce que nous avons donné doit être
consacrée au soulagement du budget des services policiers. M. le
Président, je trouve que c'est extrêmement important et que cela
s'inscrit dans le processus déjà engagé par le
gouvernement, notamment par le premier ministre, le 18 novembre, par le
ministre de la Justice et moi-même, qui étions à cette
réunion. Il y en a eu une deuxième avec les maires de toutes les
municipalités, le 2 décembre. Il y a d'autres réunions
prévues.
Je pense que c'est une preuve tangible, une preuve réelle, de la
volonté du gouvernement de faire de la lumière sur ce
problème complexe, de ne rien cacher quant aux dépenses qui sont
impliquées et de permettre à ceux qui voudraient savoir
exactement ce que l'on paie en contribuant à la Communauté
urbaine de Montréal et aux organismes connexes, quelle est la
justification de ces contributions.
Je pense qu'on ne doit pas sous-estimer l'importance du premier article
de ce projet de loi et du principe qu'il représente. Même si c'est
un style que je n'emprunte pas souvent, je voudrais féliciter
l'honorable ministre de la Justice pour le geste qu'il pose. Je suis convaincu
que les municipalités de banlieue trouveront dans ce comité
consultatif le mécanisme qui leur permettra de voir plus clairement ce
qui se passe, ce qui doit être payé, qui s'inscrit dans un
phénomène que le ministre de la Justice a décrit dans son
discours de deuxième lecture. L'augmentation, l'escalade, si vous
voulez, des coûts, nous ne pouvons nous en soustraire,
malheureusement.
Alors, il faut que nous soyons en mesure d'examiner objectivement et
calmement ce que nous avons comme responsabilité collective pour le bien
de la population. C'est dans ce sens que je trouve que c'est une excellente
chose que nous ayons un comité consultatif de cette nature.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Cornellier): L'honorable ministre de la
Justice exercera maintenant son droit de réplique qui mettra fin au
débat de deuxième lecture.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais tout d'abord remercier
mon collègue le ministre des Affaires municipales pour avoir
montré comment le conseil consultatif que nous créons en vertu de
ce projet de loi va permettre aux différentes municipalités de
l'île de Montréal d'avoir un échange extrêmement
direct dans un cadre institutionnalisé sur les problèmes de la
protection policière sur l'île de Montréal. Ceci afin de
dissiper, je crois, toute ambiguïté qui aurait pu naître dans
le passé par suite du fait qu'une distance s'était établie
entre les autorités du Conseil de sécurité publique et les
élus sur le plan local. C'est cette distance que nous cherchons à
raccourcir par la création de ce conseil consultatif en matière
de police. Je pense que la création de ce conseil est justement de
nature à dissiper toute impression, mal fondée, d'ailleurs,
à l'effet que le ministre de la Justice ou le gouvernement aurait
l'intention de créer un Etat policier et de mettre une main
extrêmement lourde sur le corps de police de la communauté urbaine
pour la contrôler dans tous ses aspects. Je crois que justement la
création de ce conseil témoigne de notre souci
démocratique d'associer les élus sur le plan local à la
surveillance, au moins, et à la discussion des décisions en
matière policière. Par conséquent, lorsque le
député de Maisonneuve fait allusion à la création
d'un Etat policier, je pense que c'est un grand coup d'épée dans
l'eau qui n'a aucune portée, compte tenu de la création de ce
conseil.
J'ajouterai, pour le bénéfice du député de
Maisonneuve et aussi peut-être pour le bénéfice du
député de Rouyn-Noranda, qu'il n'est pas possible ni souhaitable
que, dans un Etat démocratique, la police fonctionne pour la police et
suivant des impératifs policiers, sans aucun contrôle
démocratique par les élus du peuple.
Je veux bien croire, M. le Président, qu'il serait critiquable
pour le ministre de la Justice d'intervenir dans des opérations de
police particulières, en dictant une ligne de conduite à la
police à l'occasion d'enquêtes, et ceci dans le but de faire
évoluer l'enquête vers des résultats qui seraient
politiquement désirés par le ministre de la Justice. Cela serait
hautement critiquable, mais, M. le Président, je pense que personne n'a
jamais relevé, sur mon compte, aucune espèce de tentative dans le
sens d'orienter
l'action de la police vers des objectifs particuliers qui n'auraient pas
concordé avec l'intérêt général.
D'autre part, le député de Rouyn-Noranda sait que,
lorsqu'il intervient des actions policières, à qui demande-t-on
des comptes, sinon au ministre de la Justice? Qui le député de
Rouyn-Noranda interroge-t-il, dans cette Chambre, si l'action de la police
semble être insuffisante dans certains cas ou s'il considère que
le ministre de la Justice devrait insister auprès des corps policiers
pour avoir une action policière plus intense? C'est auprès du
ministre de la Justice qu'il le fait.
Je crois, M. le Président, que, dans ce domaine, il faut savoir
créer l'équilibre. Nous avons besoin d'une protection
policière qui ne soit pas sujette à des interventions
extérieures, parfois inqualifiables, mais, d'autre part, l'action de la
police ne peut pas se dérouler sans un contrôle
démocratique et sans qu'un ministre en soit principalement responsable,
même s'il n'est pas responsable de toutes les actions
policières.
C'est la raison pour laquelle, M. le Président, je ne me
gêne pas, avec les corps policiers du Québec, pour leur indiquer
certaines orientations générales. Par exemple, récemment,
je suis intervenu pour demander aux chefs de police des différents corps
municipaux d'intensifier la surveillance sur les routes du Québec
à l'égard des automobilistes qui contreviennent soit au code
criminel, soit au code de la route. Je pense que ceci découlait tout
naturellement de mes fonctions d'attirer l'attention des chefs de police sur un
des problèmes qui existent dans le domaine de l'application de nos lois
et de leur demander d'intensifier cette action. Je ne pense pas que cela
constitue, M. le Président, en aucune façon, la création
d'un Etat policier de donner des instructions de portée
générale comme celles-là. En effet, la population va tenir
le gouvernement actuel responsable si nous ne savons pas donner une
orientation, même dans le domaine policier.
Alors, il ne faut pas, M. le Président, prendre des
Bonshommes-Sept-heures comme l'Etat policier au sérieux, alors que tout
ce que le gouvernement fait, c'est s'acquitter de ses responsabilités en
matière de maintien de l'ordre public et en matière d'application
des lois.
J'ajouterai, M. le Président, que, lorsque nous donnons un
pouvoir de veto, comme l'a dit le député de Rouyn-Noranda ou au
moins un pouvoir d'examen je préfère l'appeler un pouvoir
d'examen au lieuteannt-gouverneur en conseil en matière de mise
en vigueur du plan d'allocation des ressources.
Nous ne cherchons même pas à contrôler les
opérations de la police. Il s'agit d'un plan de distribution des forces
de la police, sur l'île, de distribution des effectifs matériels
de la police. Il ne s'agit même pas d'opérations policières
dans ce cas-là; il s'agit d'examiner quelles sont les ressources qui
sont à la disposition des autorités sur l'île de
Montréal en matière de protection policière, et le
lieutenant-gouverneur se réserve un droit d'examen de la décision
qui sera adoptée par la Commission de police dans ce domaine.
Comment peut-on, même en déployant tous les prodiges
d'imagination que cela impose, s'imaginer que ceci permet au gouvernement
d'intervenir dans des opérations policières particulières
et même laisser soupçonner que cela pourrait constituer une
mainmise du gouvernement sur l'action de la police dans ses moindres
détails ou encore de l'instauration d'un commencement d'Etat policier,
alors qu'on sait très bien qu'il existe un conseil de
sécurité publique qui administre effectivement la police sur
l'île de Montréal? Ce conseil de sécurité est
suffisamment représentatif, comme je l'ai dit dans mon discours de
deuxième lecture, pour donner toutes les garanties que l'action de la
police n'est pas mise au service d'intérêts particuliers ou
politiques.
A ce point de vue je dirai que depuis que je suis ministre de la
Justice, la meilleure preuve que le gouvernement n'a jamais cherché
à agir de cette façon, c'est que jamais je n'ai eu à
essuyer la critique que j'aurais mis la police au service du parti auquel
j'appartiens ou au service de quelque formation politique que ce soit.
Sans aucun doute a-t-on pu critiquer certaines de mes décisions.
Je pense que cela est tout à fait normal. Les gens ne sont pas
obligés de partager mon avis sur les politiques d'ensemble que je mets
en vigueur ou sur les attitudes que je peux avoir à l'égard de
l'action de la police dans certaines circonstances peut-être, par
exemple, la crise d'octobre mais personne n'a jamais dit que par mes
actions, par ma politique, par mes attitudes, je cherchais à politiser
l'action de la police.
Je crois, si vous me permettez de faire cette parenthèse en
terminant, qu'il serait, d'un autre côté, dangereux d'instaurer un
système où la police fonctionnerait pour la police et par la
police sans aucun contrôle démocratique. Cela, c'est une autre
forme d'Etat policier dont il y a lieu de se méfier. Car, quand les
policiers commencent à ne plus avoir de comptes à rendre aux
autorités politiques, on peut craindre qu'il s'instaure des abus et que
les façons d'agir, les attitudes, les politiques policières ne
soient pas comptables devant une autorité quelconque, et, à ce
moment-là, que la police fonctionne sans qu'un contrôle suffisant
se fasse sur ses activités.
Donc, je reviens à cette idée que j'ai
énoncée plus tôt, le besoin d'un équilibre entre
l'action de la police, d'une part, et les pouvoirs politiques, d'autre part. Ce
principe s'applique surtout comme l'a dit si bien le député de
Rouyn-Noranda au cours de son intervention, lorsqu'il y va de dépenses
d'argent, car ce n'est pas la police de l'île de Montréal qui va
payer l'accroissement prévisible des coûts par suite
d'un plan d'allocation, ce n'est pas la Commission de police, ce sont
les contribuables.
Aussi bien demander à des élus comme le
lieutenant-gouverneur en conseil de contrôler d'une certaine façon
la dépense prévisible d'argent qui découlera de la mise en
place d'un plan d'allocation des ressources.
Finalement, je réponds au député de Maisonneuve,
qui fait grand état de l'intervention de l'exécutif dans le
judiciaire, que nous ne sommes pas dans le judiciaire, lorsqu'il s'agit
d'examiner la mise en place d'un plan d'allocation des ressources. Il s'agit
purement et simplement d'une mesure administrative qui découle d'une loi
adoptée par le Parlement actuel. Le Parlement actuel s'est
prononcé sur l'intégration de la police mais il restait quelque
chose de concret à réaliser par suite de cette loi, la
création d'un plan d'allocation des ressources. Et, au fond, tout ce que
nous faisons par ce projet de loi, c'est donner un contrôle au
lieutenant-gouverneur de la mise en place de ce plan d'allocation, même
s'il est passé par certaines étapes de consultation et d'examen
prévues à la loi.
Or, ce processus nous le faisons constamment dans cette Chambre. Ai-je
besoin, M. le Président, de vous...
M. BURNS: Pas de question?
M. CHOQUETTE: Non, non, je ne veux pas.
M. BURNS: Non?
M. CHOQUETTE: Je veux terminer, je ne veux pas d'interruption. Est-ce
que c'est clair?
M. BURNS: Je ne veux pas vous interrompre, je veux vous poser une
question.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je dis simplement ceci: Tous les
jours, par des lois, nous donnons à des organismes administratifs le
pouvoir de passer des réglementations qui sont, par la suite, soumises
au lieutenant-gouverneur en conseil. Tous les jours, nous donnons un pouvoir de
légiférer par voie de législation
déléguée au lieutenant-gouverneur en conseil et lorsque
nous avons fait proposer même ces législations
déléguées par des organismes administratifs. Ce n'est donc
rien de nouveau. En somme, M. le Président, il s'agit purement et
simplement de la ratification par le lieutenant-gouverneur en conseil d'un
programme, le plan d'allocation des ressources humaines et physiques, qui est
la même chose, par analogie, que la réglementation qui peut
être adoptée par la Commission de contrôle des permis
d'alcool ou par un organisme gouvernemental quelconque qui a des pouvoirs de
proposer des règlements qui viennent compléter des lois. Eh!
bien, dans le cas actuel, au lieu qu'il s'agisse d'une réglementation,
il s'agit tout simplement d'un plan d'allocation des ressources humaines et
physiques.
Je ne pense pas qu'en soumettant le plan approuvé par la
Commission de police du Québec cela constitue une expression de
non-confiance par le lieutenant-gouverneur en conseil à l'égard
du travail de la Commission de police. Il s'agit tout simplement, pour le
gouvernement qui, après tout, est responsable, de donner son
approbation, au fond, à certaines dépenses qui découleront
du plan qui pourrait nous être proposé.
Alors, pour toutes ces raisons, je pense que l'argumentation du
député de Maisonneuve porte à faux, que l'argumentation du
député de Maisonneuve n'a aucune application dans le cas actuel,
qu'il ne s'agit pas d'une intervention de l'exécutif dans le processus
judiciaire. Il s'agit tout simplement d'une mesure de prudence qui pourra
peut-être éviter aux contribuables de Montréal de faire
face aux conséquences financières de l'adoption d'un plan qui
pourrait ne pas correspondre aux besoins de l'île ou du moins qui ne
pourrait peut-être pas être supportées facilement par les
contribuables de la ville de Montréal, comme d'ailleurs du gouvernement
qui est appelé à payer des subventions annuellement, comme je
l'ai dit plus tôt dans mon exposé en deuxième lecture.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, je soumets qu'il n'y a
aucune hésitation: il faut voter cette loi. Le député de
Maisonneuve a peut-être fait défaut, dans son exposé, de
nous expliquer d'autres aspects qu'il aurait été plus
intéressant d'entendre de lui, d'autres aspects qui touchent
peut-être certains intérêts particuliers, alors que...
M. BURNS: En commission.
M. CHOQUETTE: ... le gouvernement se doit non pas de
légiférer en fonction des intérêts particuliers
et je pense que le député de Maisonneuve va admettre cela
mais que le gouvernement doit légiférer en fonction de
l'intérêt général. C'est ce qu'il fait par le projet
de loi que j'ai l'honneur de présenter.
M. BURNS: Est-ce que, maintenant, le ministre me permet une
question?
UNE VOIX: Adopté.
M. CHOQUETTE: Si vous voulez.
M. BURNS: Quand le ministre disait que, sur l'allocation de ressources,
la Commission de police agit comme un tribunal administratif, à son
avis, lorsqu'un tribunal d'arbitrage agit uniquement par exemple, dans
le cas des policiers pour décider de l'augmentation de salaires,
est-ce que ce tribunal agit uniquement de façon administrative
aussi?
M. CHOQUETTE: C'est justement pour cela que vos amis les syndicalistes
ont toujours adressé des reproches à l'égard de
l'arbitrage obligatoire, même dans le secteur public, en
disant que lorsqu'on instaurait un système d'arbitrage
obligatoire dans le secteur public, eh! bien on faisait voter des
dépenses par un organisme qui n'était pas directement
responsable.
M. BURNS: C'est le côté gouvernemental qui a toujours dit
cela. Je vous rappelle que cela a été dit, dans le cas des
policiers provinciaux, par le gouvernement.
M. LEVESQUE: M. le Président, s'il donne le consentement, cela ne
me fait rien. On ne peut pas dépasser six heures.
M. BURNS: De toute façon, je pense bien que le ministre et moi,
nous aurons l'occasion d'échanger ces questions beaucoup plus librement
en commission. Alors, ça va.
M. LEVESQUE: D'accord. Deuxième lecture.
LE PRESIDENT: Cette motion de deuxième lecture du projet de loi
no 200 est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté. Je vous demanderais d'enregistrer la dissidence
du député de Saint-Jacques et du député de
Maisonneuve. Egalement celle du député de Chicoutimi qui vient
d'arriver, je m'excuse.
M. LEVESQUE: Allez-vous lui demander la dissidence?
M. BURNS: Je vais le lui demander. Est-ce que vous êtes d'accord?
Il est d'accord pour inscrire sa dissidence.
LE PRESIDENT: Cette motion est adoptée sur division, avec la
dissidence des députés de Maisonneuve, de Saint-Jacques, de
Chicoutimi et de Rouyn-Noranda. Adopté sur division.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Deuxième lecture de ce projet de loi.
Second reading of this bill.
M. LEVESQUE: Je propose que ce projet de loi no 200, Loi concernant le
conseil de sécurité publique de la Communauté urbaine de
Montréal, soit déféré à la commission
parlementaire de la justice, pour étude, article par article, en
commission élue.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: Je donne avis que la commission parlementaire du travail,
de la main-d'oeuvre et de l'immigration étudiera ce soir, à
compter de 20 h 15, le projet de loi qui lui a été
déféré, Loi modifiant la loi du ministère de
l'Immigration, projet de loi no 46.
M. BURNS: Où?
M. LEVESQUE: Au salon rouge, parce qu'il y a déjà eu une
demande pour le salon rouge.
M. BURNS: Je l'avais demandé pour la commission de
l'Assemblée nationale. Mais, pour nous, cela sera beaucoup plus court et
moins fastidieux.
M. LEVESQUE: Je pensais que c'était une demande personnelle du
député de Maisonneuve.
Je propose l'ajournement de la Chambre à demain, dix heures.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté. L'Assemblée ajourne ses travaux
à demain, dix heures.
(Pin de la séance à 18 h 1 )