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(Dix heures huit minutes)
M. LAVOIE (président): A l'ordre, messieurs!
Affaires courantes
Dépôt de rapports de commissions élues.
L'honorable député de Lévis.
Rapport sur le projet de loi no 170
M. CHAGNON: M. le Président, conformément aux articles 123
et 161 du règlement de l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission permanente des affaires municipales
chargée de l'étude du projet de loi privée no 170, Loi
modifiant la loi refondant la charte de la Commission des écoles
catholiques de Québec.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Frontenac.
Rapport sur le projet de loi no 111
M. LECOURS: M. le Président, pour le député de
Maskinongé, conformément aux articles 123 et 161 du
règlement de l'Assemblée nationale, j'ai l'honneur de
déposer le rapport de la commission permanente des institutions
financières, compagnies et coopératives, chargée de
l'étude du projet de loi privé no 111. Loi fusionnant Prêt
et Revenu Ltée et Fiducie, Prêt et Revenu.
LE PRESIDENT:
Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi
privés.
Présentation de motions non annoncées.
Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.
M. LEVESQUE: Article a).
Projet de loi no 24 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives propose la première lecture du projet
de loi intitulé Loi modifiant la loi de l'assurance-dépôts
du Québec.
M. TETLEY: M. le Président, ce projet de loi no 24 précise
à l'article 1 que non seulement les économies que les caisses
d'épargne et de crédit reçoivent de leurs membres dans le
but de les faire fructifier et de leur consentir des prêts sont
réputées être des dépôts d'argent, mais
également les sommes versées sur ses parts sociales par un membre
d'une caisse. L'article précise, de plus, que ni une caisse
d'épargne et de crédit qui sollicite des souscriptions de parts
sociales par l'intermédiaire de personnes qu'elle
rémunère, ni ces personnes ne sont soustraites aux dispositions
de la Loi des valeurs mobilières et des règlements adoptés
en vertu de cette loi. Merci.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
M. BURNS: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
Projet de loi déféré à la
commission
M. LEVESQUE: M. le Président, je propose que ce projet de loi
soit déféré à la commission parlementaire des
institutions financières, compagnies et coopératives.
LE PRESIDENT: Avec les mêmes modalités et les règles
de pratique et tout pour entendre les témoins...
M. LEVESQUE: Avec avis dans la Gazette officielle, etc.
Présentation de mémoires, s'il y a lieu.
LE PRESIDENT: Cette motion est-elle adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
M. LEVESQUE: Article b).
Projet de loi no 23 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Institutions financières,
Compagnies et Coopératives propose la première lecture de la Loi
des caisses d'entraide économique.
M. TETLEY: M. le Président, il y a trois pages de notes
explicatives et je me demande...
LE PRESIDENT: Un court résumé.
M. TETLEY: Un court résumé. C'est une très bonne
loi. C'est une autre réussite du gouvernement Bourassa.
LE PRESIDENT: Ce n'est pas suivant le règlement.
M. TETLEY: Et c'est la loi...
LE PRESIDENT: Je suis sûr que ce n'est pas un résumé
des notes explicatives.
M. TETLEY: Non, pas exactement. On ne mentionne pas le mot Bourassa ici.
C'est en effet la loi jumelle de la loi précédente que j'ai
présentée. C'est une loi qui va modifier le statut des caisses
d'entraide économique et leur donner certains grands droits et
responsabilités.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée?
M. LEVESQUE: Adopté. LE PRESIDENT: Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
LE PRESIDENT: Déférence...
Projet de loi déféré à la
commission
M. LEVESQUE: Même déférence, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Cette motion de déférence est-elle
adoptée? Adopté.
M. MAILLOUX: M. le Président...
LE PRESIDENT: Je vais la mettre aux voix.
Projet de loi no 27 Première lecture
LE PRESIDENT: L'honorable ministre des Transports propose la
première lecture de la Loi modifiant la loi de la Société
de développement immobilier du Québec.
M. MAILLOUX: M. le Président, ce projet a pour objet de permettre
à La Société de développement immobilier du
Québec de garantir le parachèvement des travaux à la Place
Desjardins et de garantir le remboursement et l'exécution des autres
obligations de Place Desjardins Inc. Il permet aussi au ministère des
Finances de verser à la société une somme
n'excédant pas $20 millions en plus de la somme de $10 millions qu'il
est déjà autorisé à verser à la
société.
LE PRESIDENT: Cette motion de première lecture est-elle
adoptée?
DES VOIX: Adopté.
LE PRESIDENT: Adopté.
LE SECRETAIRE ADJOINT: Première lecture de ce bill. First reading
of this bill.
LE PRESIDENT: Deuxième lecture, prochaine séance ou
séance subséquente. C'est tout?
Présentation de projets de loi au nom des
députés.
Déclarations ministérielles.
Dépôt de documents.
Questions orales des députés.
M. LEVESQUE: M. le Président, en ce qui concerne
"dépôt de documents", j'aimerais avoir le consentement pour y
revenir, s'il y a lieu, un peu plus tard durant la séance.
QUESTIONS DES DEPUTES
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle.
Transport d'énergie électrique
M. MORIN: M. le Président, permettez-moi d'adresser une question
au premier ministre. L'Hydro-Québec a pris, tout récemment, la
décision de réviser ses plans concernant le transport
d'énergie électrique en provenance de la baie James. Selon M.
Boyd, la Société d'énergie de la baie James a opté
pour des lignes que l'on peut considérer maintenant comme étant
traditionnelles, de 735,000 volts plutôt que le projet initial qui allait
être 1,200,000 volts.
Le premier ministre peut-il nous informer, compte tenu, d'une part, de
l'importance du transport de l'électricité dans l'ensemble du
projet ces coûts avaient été évalués
à environ $1 milliard et compte tenu, en d'autre part, du fait
que les plans originaux misaient sur des économies d'échelle de
l'ordre de 30 p.c. à 50 p.c. par la mise en place des lignes à
haut voltage, des répercussions de cette décision de
l'Hydro-Québec sur la hausse du coût des immobilisations, ainsi
que l'effet que peut représenter une telle décision sur le prix
du kWh de l'électricité en provenance de la baie James,
livrée à Montréal?
M. BOURASSA: M. le Président, régulièrement, je
demande à l'Hydro-Québec de me dire s'il doit y avoir des
révisions à la hausse dans les coûts. Pour ce qui a
déjà été annoncé, on sait qu'à cause
de l'inflation ce sont des questions qui paraissent pertinentes. Je n'ai pas
encore été avisé, par l'Hydro-Québec, que les
estimations, qui avaient été rendues publiques avec certaines
prévisions sur les taux d'intérêt et sur les augmentations
de salaire, devaient être révisées à la hausse. Ceci
ne change pas le problème écologique. J'ai eu l'occasion de le
dire au chef de l'Opposition que la solution de rechange pour la baie James, ce
serait 18 centrales nucléaires sur le bord du Saint-Laurent avec des
coûts supérieurs et avec des problèmes écologi-
ques évidents considérables, immenses pour la population
québécoise.
Alors, je pense qu'il reste encore évident, il reste encore
absolument clair que le projet de la baie James, avec ses retombées
économiques beaucoup plus importantes que dans le cas des centrales
nucléaires ou des centrales thermiques... Evidemment, il y a des
problèmes d'écologie, mais nous faisons le maximum. Il y a le
problème de la négociation avec les Indiens. Encore là,
nous avons fait des propositions, il y a deux ou trois semaines. Nous attendons
encore une réponse à ces propositions que nous avons faites aux
Indiens, eux qui nous ont accusés de ne pas vouloir négocier.
Nous avons, il y a plus de deux semaines, fait des propositions. Nous attendons
des réponses de leur part.
Je pense donc que la position du gouvernement, dans toute cette
question, est inattaquable.
M. MORIN: M. le Président, en question additionnelle, je ne sais
pas si le premier ministre a compris ma question. Je ne lui ai pas parlé
des Indiens et de l'écologie. Cela peut venir à un autre moment.
Je lui ai parlé du coût du transport de
l'électricité de la baie James à Montréal.
Je le vois qui sourit. Il est très content d'être
passé à côté de la question. Est-ce que je dois la
poser à nouveau?
M. BOURASSA: Non, ce n'est pas cela qui me fait sourire, M. le
Président. C'est la performance du chef de l'Opposition.
M. MORIN: M. le Président, je ne sais pas si c'est la peine de
poser une question supplémentaire, étant donné que je n'ai
pas eu de réponse à ma première question.
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai répondu que,
régulièrement, je demande au président de
l'Hydro-Québec s'il y a des révisions à la hausse dans les
coûts. Je ne lui demande pas le détail par rapport, disons, aux
constructions de barrages, au transport d'électricité.
Régulièrement on connaît ma préoccupation
pour la question des coûts je lui demande s'il y a des
révisions à la hausse.
Encore il y a deux semaines, je lui ai posé cette question et je
n'ai pas encore été avisé. Je ne dis pas que c'est
impossible, car, s'il y en a pour cela, il y en a pour toutes les entreprises
de construction. Qu'on pense, par exemple, à l'augmentation du prix de
l'acier. Je ne dis pas que c'est impossible, mais on a essayé, lorsque
les chiffres ont été préparés et tout cela a
été discuté à la commission parlementaire durant
des jours de faire les prévisions les plus réalistes
possible pour sept, huit, dix ou douze ans et je n'ai pas encore
été avisé.
Je peux m'informer sur le cas particulier qu'a soulevé ce matin
le chef de l'Opposition. Je peux m'informer cet après-midi. Je pourrai
donc lui répondre ce soir, à moins qu'on n'ait prorogé
d'ici ce moment, avec la collaboration de l'Opposition. Je peux m'informer
aujourd'hui et je lui donnerai la réponse sur le cas précis.
Mais, globalement, je n'ai pas encore été avisé d'une
hausse de coûts. Cela ne m'empêche pas de mettre en relief les
avantages du projet de la baie James, comme plusieurs l'ont fait, étant
donné qu'on traverse une crise de l'énergie.
M. MORIN: Bien, question additionnelle. Est-ce que le premier ministre
peut s'engager à convoquer périodiquement la commission
permanente des richesses naturelles de façon que les membres de cette
Assemblée y compris ceux de l'Opposition puissent suivre
l'évolution du dossier, le déroulement du projet mené par
la Société de développement de la baie James?
M. BOURASSA: De toute manière, il y a une convocation annuelle de
la commission des richesses naturelles et à chaque année
peut-être une ou deux fois par annéev on a à discuter
de cette question. Je n'ai pas d'objection à m'engager à ce
qu'annuellement la commission des richesses naturelles soit convoquée
pour étudier cette question, et plus souvent si ça parait
utile.
M. MORIN: Ce n'est pas un gros engagement.
M. BOURASSA: Bien, je veux dire... M. MORIN: Annuellement, dit-il.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
Stocks d'avoine
M. LESSARD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre de
l'Agriculture. On sait que les stocks d'avoine sont actuellement à un
niveau très bas et que l'Union des producteurs agricoles a estimé
que ces niveaux correspondaient à peu près à dix jours de
consommation, alors que normalement c'est de quatre à six mois.
Est-ce que le ministre de l'Agriculture a pris des mesures pour
empêcher que les producteurs agricoles plus directement dans
l'industrie laitière ne soient pas pénalisés ou
durement touchés par une telle pénurie?
M. TOUPIN: Le problème se dessine déjà depuis
quelque quatre ou cinq mois, attribuable à différentes
grèves dans les provinces de l'Ouest qui n'ont pas permis le transport,
des provinces à Thunder Bay pour qu'on puisse transporter les grains de
là en direction de l'Est.
Disons que j'ai abordé le problème à plu-
sieurs reprises avec mon collègue fédéral, M.
Whelan, et je lui ai fait voir très souvent ce danger qui guettait les
producteurs québécois. On a tenté, me dit-on, de le
corriger, mais on ne l'a pas corrigé à la satisfaction des
agriculteurs puisque les stocks de grain au Québec sont
décidément trop bas par rapport aux besoins
généraux de la province.
Seulement quelques statistiques: ça prend à peu
près 17 millions de boisseaux pour hiverner, au Québec,
c'est-à-dire de la fermeture de la navigation à l'ouverture de la
navigation. Actuellement, il y en a à peu près 9 millions
d'entreposés et la navigation ferme aujourd'hui.
A ce jour, dans les entrepôts du Québec, il y a huit fois
moins d'avoine qu'il y en avait l'an dernier.
Il y a quatre fois moins d'orge qu'il y en avait l'an dernier à
la même date et il y a deux fois moins de blé qu'il y en avait
l'an dernier à la même date.
M. LESSARD: C'est consolant, votre affaire !
M. TOUPIN: Ouais, est-ce que c'est possible de corriger la situation?
Oui, probablement, ce serait que la Commission canadienne du blé, qui
est responsable des approvisionnements de l'Est, et l'Office canadien des
provendes, qui, lui aussi, est responsable des approvisionnements de l'Est et
qui a les pouvoirs d'acheter en plus...
M. MORIN: L'indépendance!
M. TOUPIN: Ils nous ont assuré on va terminer que
des trains-blocs seraient mis en place dans le plus bref délai pour que
nous puissions remplir les besoins du Québec et de l'Ontario. Le
Québec n'est pas le seul à avoir ce problème, l'Ontario a
aussi une partie de ce problème. Les provinces de l'Est, les Maritimes,
ont aussi une partie de ce problème.
Alors, si la Commission canadienne du blé ou l'Office canadien
des provendes ne décide pas de mettre en place le plus rapidement
possible ces trains blocs, on risque de voir des pénuries encore plus
grandes de provendes au Québec. Ce qui nous paraît encore plus
dangereux, c'est que le peu qui se trouve dans les entrepôts peut voir
ses prix augmenter très rapidement. J'espère que ceux qui sont
propriétaires de ces entrepôts actuellement ne profiteront pas de
l'occasion pour faire payer la note aux agriculteurs québécois,
je l'espère bien.
Quant à nous, le travail continue à se faire avec la
Commission canadienne du blé, avec le gouvernement fédéral
pour que ces trains-blocs se mettent en place dans le plus bref délai et
que nous puissions donner aux agriculteurs québécois les
approvisionnements auxquels ils ont droit et dont ils ont d'ailleurs besoin
pour passer l'hiver. Et non seulement dans la production laitière, dans
tous les types de production.
M. LESSARD: Question additionnelle, M. le Président. Etant
donné ce manque de planification de la Commission...
UNE VOIX: Question!
M. LESSARD: ... canadienne du blé et de l'Office canadien des
provendes, est-ce que le ministre a l'intention de créer un office
québécois d'approvisionnement en grains de provende? Il en a
parlé à plusieurs reprises. On est bloqué encore, on est
encore dépendant du gouvernement fédéral, surtout lorsque
les prix augmentent. Les prix mondiaux augmentent considérablement et le
gouvernement canadien cherche à l'étranger plutôt
qu'à conserver au pays, un peu comme c'est le cas pour le
pétrole.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESSARD: Est-ce que d'accord, M. le Président le
ministre a l'intention de créer un office québécois
d'approvisionnement en grains de provende pour un peu mieux planifier et
assurer aux producteurs québécois une sécurité
d'approvisionnement?
M. TOUPIN: Une chose est sûre, en tout cas, c'est qu'il existe
pour l'Est ce qu'on appelle l'Office des provendes dont la
responsabilité essentielle est de voir à l'approvisionnement des
provinces de l'Est et notamment du Québec.
Or, il semblerait que cet organisme n'aurait pas tous les pouvoirs
requis pour pouvoir acheter le grain de la Commission canadienne du blé
et après le revendre au Québec pour l'entreposage, s'occuper de
l'entreposage, etc. Il me paraît évident, quant à moi
et là je parle très ouvertement que si de telles
situations devaient se répéter trop souvent, nous n'aurions pas
d'autre choix que de nous doter d'un organisme quelconque dont la
responsabilité pourrait précisément être celle de
l'actuel Office canadien des provendes, c'est-à-dire de racheter les
grains, de les entreposer pour assurer, dis-je, les agriculteurs
québécois des approvisionnements auxquels ils ont droit et dont
ils ont besoin.
M. LESSARD: ... moins vous.
LE PRESIDENT: Le député de Beauce-Sud.
Sidbec-Dosco
M. ROY: J'aurais une question à poser au premier ministre. Est-ce
que le premier ministre a pris connaissance d'une nouvelle voulant que la
sidérurgie SIDBEC-DOSCO connaisse cet année un nouveau
déficit de l'ordre de $10 millions et que de ce fait cette
société se trouverait dans le rouge pour $33 millions? Est-ce que
le premier ministre pourrait nous faire des commentaires à ce sujet?
M. BOURASSA: M. le Président, j'ai pris connaissance de la
nouvelle. Il y avait plusieurs inexactitudes dans la nouvelle et comme
d'habitude on essaie de relier cela à la parenté de ma femme, que
ce soit des troisièmes, quatrièmes ou deuxièmes cousins.
On essaie d'impliquer ça.
M. LESSARD: La famille des Simard est très grande.
M. BOURASSA: J'ai communiqué avec le journaliste en question, au
lieu de le critiquer publiquement, pour lui demander de faire des corrections,
et je verrai dans le journal d'aujourd'hui si cela a été fait.
Pour ce qui a trait au déficit de SIDBEC, je crois que le ministre de
l'Industrie et du Commerce avait donné les informations
là-dessus. Il y a eu un déficit, c'est vrai, mais c'est dû
à plusieurs raisons, notamment à la grève qui a eu lieu
à SIDBEC. Dans l'ensemble, la situation de SIDBEC est très
acceptable.
M. ROY: M. le Président, est-ce que le premier ministre pourrait
nous dire s'il prévoit une réforme administrative, puisqu'on a
parlé à plusieurs occasions d'incompétence chez les
administrateurs? Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il a
l'intention de demander à la Chambre de nouveaux crédits pour des
projets de relance de cette sidérurgie, ou de réorganisation, de
restructuration ou de réforme administrative?
M. BOURASSA: J'ai parlé tantôt, en réponse à
une question du chef de l'Opposition, de la hausse du prix de l'acier. On
connaît l'importance de l'acier comme matériel de construction et
on sait jusqu'où il peut contribuer à favoriser l'expansion
économique. On connaît également le rôle d'une
aciérie pour la force de la structure industrielle du Québec. Or,
je pense que ce sont des facteurs dont nous devons tenir compte. La
construction de SIDBEC a fourni aux Québécois des avantages
économiques considérables, ne serait-ce qu'en augmentant la
concurrence qui pouvait exister pour le prix de l'acier pour les entreprises
québécoises.
On accuse, évidemment, les administrateurs d'incompétence.
Je ne sais pas si c'est ce que le député de Beauce veut laisser
entendre. Je pense bien que personne n'a été capable de prouver
quoi que ce soit sur l'incompétence des administrateurs de SIDBEC.
Le gouvernement actuellement examine une proposition d'expansion de
SIDBEC, qui nous parait tout à fait justifiée. Le genre d'article
qui a paru dans les journaux hier n'est pas pour favoriser le succès
d'une telle expansion. Ce genre d'article, avec tout le respect que je dois aux
journalistes, se trouve à aider les concurrents de SIDBEC, les autres
aciéries québécoises ou canadiennes, et à nuire
à une entreprise proprement québécoise.
Je respecte totalement la liberté de la presse. Je pense que,
dans des questions comme celle- là, vu qu'elles impliquent des individus
en particulier, on doit être très prudent. Au moins, on doit
vérifier les renseignements qui nous sont donnés. Comme je
l'avais dit à la fin du mois d'août, au colloque du Mont-Orford,
nous respectons le rôle de la presse et nous considérons que la
vigilance de la presse est absolument essentielle. Cependant, lorsqu'il y a des
informations sérieuses et qu'on les publie en première page avec
force publicité, le moins qu'on puisse demander, c'est qu'on
vérifie des informations comme celle-là, étant
donné le tort que cela peut causer à une entreprise comme SIDBEC,
l'une des rares entreprises québécoises dirigées
majoritairement par des francophones. Je pense que, dans ce cas, on a
été très injuste vis-à-vis de SIDBEC et très
injuste vis-à-vis de la communauté québécoise, en
conséquence.
M. ROY: Comme le premier ministre a fait allusion à sa
parenté, tout à l'heure, j'aimerais lui demander s'il peut nous
assurer ce matin qu'il n'y a pas d'autres "mon oncles" ou "ma tantes" à
placer à des postes administratifs, à des postes de direction
dans le cadre de la nouvelle expansion ou de la nouvelle organisation de
SIDBEC.
M. BOURASSA: J'ai dit tantôt que ce qui avait été
affirmé était faux. M. Pontbriand n'est pas l'oncle de ma femme.
Il est peut-être le deuxième ou le troisième cousin. Je
trouve assez injuste qu'on fasse de telles affirmations. On l'avait fait dans
le cas de M. Cyrille Simard et, dans ce cas, il n'y avait aucune parenté
avec ma femme. On l'a fait à plusieurs reprises. Je trouve que ce sont
des affirmations assez injustes. Quand je pense qu'on implique la plus haute
autorité politique au Québec, le moins qu'on puisse demander,
c'est qu'on fasse des vérifications élémentaires avant
d'impliquer directement ou indirectement l'intégrité du chef du
gouvernement.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
Combat de boxe
M. LEGER: Je voudrais poser ma question changer
d'arène à un autre ministre que nous n'avons pas encore
dérangé souvent depuis le début de la nouvelle
Législature, et c'est le ministre d'Etat responsable de la Jeunesse, des
Loisirs et des Sports. Le 14 décembre dernier, les amateurs de boxe de
Montréal ont été témoins d'un triste spectacle lors
d'un combat opposant un certain Walter Raley qui s'est couché sans
pratiquement avoir été touché par un boxeur
montréalais, Jean-Claude Leclair. Ma question est la suivante : Suite
à ces événements qui cachent des choses, est-ce que le
ministre a l'intention c'est de la boxe provinciale; ce n'est pas de la
boxe ici de reprendre le projet de création...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEGER: II y en a qui ont des instincts de boxeurs à
l'Assemblée nationale. Le ministre a-t-il l'intention de reprendre le
projet de création d'une régie provinciale qui aurait les
pouvoirs nécessaires pour remettre de l'ordre dans le domaine de la boxe
ce qui semble être un grand besoin actuellement?
M. PHANEUF: M. le Président, je suis bien au courant du
problème. Je ne pourrai jamais faire un projet de loi, de toute
façon, pour empêcher un boxeur de se coucher, mais je puis assurer
cette Chambre que j'ai l'intention, justement, de présenter un projet de
loi pour créer une commission athlétique provinciale.
M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que cette commission, cette régie pourra s'occuper autant du
domaine de la boxe, de la lutte, etc., premièrement?
Deuxièmement, est-ce que le ministre donnera un mandat pour
vérifier les questions qu'on pose ici, dans l'immédiat au sujet
du contrôle de la boxe? On pose les questions suivantes: Comment se
fait-il qu'à Montréal, un gérant des boxeurs, Roger
Larrivée, puisse être associé à un promoteur,
Régis Lévesque? Comment se fait-il qu'à
Québec...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. LEGER: ... un gérant, Fernand Marcotte Sr, puisse être
copromoteur, en compagnie de Bernard Proulx? Et finalement, comment se fait-il
qu'un promoteur, Régis Lévesque, puisse obtenir
l'exclusivité d'un boxeur comme Jean-Claude Leclair? Trois questions.
Quand le ministre a-t-il l'intention de créer cette régie;
deuxièmement, de régler ces problèmes que dénotent
un ensemble de situations inacceptables au Québec?
M. PHANEUF: M. le Président, pour ce qui est du projet de loi, je
suis certain que, même avec une loi et même avec une commission
athlétique provinciale les faits que le député de
Lafontaine mentionnent se sont passés à Montréal,
où il existe une commission athlétique et malgré la
commission athlétique, cela n'empêche pas qu'il puisse y avoir des
problèmes.
J'ai dit et je le répète, c'est mon intention d'avoir une
commission athlétique provinciale pour couvrir l'ensemble du territoire
de la province. Ce projet de loi, je l'espère, sera
présenté au printemps, mais j'ai l'intention auparavant de
terminer le travail du comité qui est en train de terminer
l'enquête au niveau provincial. Lorsque j'aurai ce rapport, je suis
certain que le projet de loi sera déposé en Chambre.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Papineau.
Spéculation sur les terrains
M. ASSAD: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des
Affaires municipales. Est-ce qu'il y a possibilité que le
ministère des Affaires municipales étudie la formation d'un
organisme qui pourrait geler la vente de certains terrains, pour empêcher
la spéculation des terrains, dans le domaine de la construction des
maisons unifamiliales? Disons que c'est un organisme semblable à celui
de l'Ontario Land Bank.
M. GOLDBLOOM: M. le Président, effectivement c'est une
préoccupation actuelle du gouvernement et plusieurs ministères,
chacun dans le champ de son intérêt, se penchent sur les
façons de réserver, pour des fins particulières, des
banques de terrains. Le gouvernement fédéral, avec des
modifications à la Loi nationale sur l'habitation, a créé
un mécanisme qui aide au financement de cette activité, qui est
présentement l'obstacle majeur. Il va sans dire que l'avant-projet de
loi de l'urbanisme et de l'aménagement du territoire constitue
l'instrument possible par excellence, avec les autres lois
présentées par chaque ministère dans le domaine de sa
compétence, pour assurer la protection des terrains qui doivent
être réservés et protégés contre la
spéculation, pour que la collectivité puisse s'en servir de
façon utile et à long terme.
M. LEGER: Une question supplémentaire, M. le Président.
Est-ce que le ministre, à la suite de sa réponse concernant la
Loi nationale sur l'habitation et l'aménagement du territoire, a
l'intention de donner suite à ce qu'il a promis, au mois de novembre,
soit de doter le Québec, d'un code du bâtiment?
M. GOLDBLOOM: Oui, M. le Président. M. LEGER: Oui, mais
quand?
M. LESSARD: Dans quel délai, M. le Président?
LE PRESIDENT: L'honorable député...
M. LESSARD: Pas de détail. Dans quelle année?
LE PRESIDENT: L'honorable député de Chicoutimi.
Subventions aux garderies
M. BEDARD (Chicoutimi): Ma question s'adresse au ministre d'Etat au
ministère des Affaires sociales. Nous savons que le Québec a
exercé son droit de veto pour empêcher le gouvernement
fédéral d'octroyer des subventions aux garderies populaires de
Montréal via le Programme d'initiatives locales.
Ma question serait la suivante: Je voudrais
savoir pourquoi la raison profonde le Québec a
exercé ce droit de veto alors qu'il devait savoir qu'il n'avait pas les
capacités financières d'assurer la relève dans ce
domaine.
MME BACON: M. le Président, j'ai l'impression d'avoir
déjà répondu à cette question il y a quelques
jours. Je pense que le député de Chicoutimi sait très bien
qu'aucun droit de veto n'a été donné par le Québec.
Des avis ont été donnés, mais aucun droit de veto n'a
été donné par le Québec.
Je pense que c'est la seule réponse que l'on peut donner
aujourd'hui.
M. BEDARD (Chicoutimi): Question supplémentaire, M. le
Président. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi le gouvernement
fédéral a cessé? Est-ce à la suite d'une action
posée par le Québec que le gouvernement fédéral a
cessé ses subventions aux garderies populaires?
Question supplémentaire, M. le Président. L'honorable
ministre d'Etat au ministère des Affaires sociales nous a
déjà donné une réponse. Ma question de ce matin est
une suite logique à la réponse qu'on nous a donnée
où il était spécifié que le Québec, au
niveau du financement, n'avait pas le $1,500,000 nécessaire pour
continuer le programme et que le ministère des Affaires sociales,
n'avait pas les $30 millions nécessaires pour l'établissement
d'un système de garderies. Alors, ma question est une suite à la
réponse que me donnait, il y a quelques jours, l'honorable ministre des
Affaires sociales sur le financement. Si le gouvernement savait ou devait
savoir qu'il n'avait pas les possibilités financières, pourquoi
avoir arrêté le gouvernement fédéral de
subventionner les garderies populaires? Si ce n'est pas le cas, est-ce qu'il y
a eu une action du Québec vis-à-vis du gouvernement
fédéral face à la situation de l'arrêt des
subventions aux garderies populaires?
MME BACON: Ce que je dois encore répéter, M. le
Président, c'est qu'il n'y a aucun veto qui a été
exercé par le Québec. Le député de Chicoutimi a
l'air d'avoir une bonne mémoire. S'il se rappelle tous les chiffres qui
ont été cités, il devrait se rappeler, en même
temps, que j'ai dit qu'il y avait des avis qui avaient été
donnés par le ministère des Affaires sociales.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je suis d'accord... M. le Président,
question supplémentaire. Peut-être que je m'exprime mal. Que ce
soit un droit de veto qui ait été exercé par le
Québec, ou que ce soit un avis, peu importe, là n'est pas le fond
de la question. Le fond de la question, à laquelle je veux une
réponse ce matin, c'est pourquoi soit un droit de veto ou un avis a pu
être exercé par le Québec vis-à-vis du gouvernement
fédéral; pourquoi une action générale du
Québec, quelle qu'elle soit, vis-à-vis du gouvernement
fédéral a été posée dans le sens
d'arrêter les subventions...
UNE VOIX: Cela fait trois fois que vous posez la question.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je peux poser la question dix fois, c'est une
réponse que je veux. Comprenez donc. On ne l'a pas la
réponse.
UNE VOIX: Wo! Wo!
M. BEDARD (Chicoutimi): Je sais que cela leur passe par-dessus la
tête, les garderies populaires.
M. LESSARD: Ils ont le moyen de se payer des gardiennes, eux.
M. BEDARD (Chicoutimi): Peut-être que cela ne passe pas par-dessus
la tête, par exemple...
M. LESSARD: Ils ont le moyen de se payer des gardiennes, eux.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... d'autres personnes moins favorisées.
Alors, ma question...
M. CHOQUETTE: Allez, on vous attend.
M. LESSARD: C'est justement. Cela fait trois fois...
M. BEDARD (Chicoutimi): Arrêtez de crier...
M. LESSARD: ... qu'il la pose.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... et on va poser la question.
M. CHOQUETTE: Procédez. Renseignez-vous.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense bien que pour procéder je
n'attendrai pas les ordres de l'honorable ministre de la Justice....
M. CHOQUETTE: C'était une suggestion.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... mais ceux de l'honorable président de
la Chambre.
M. CHOQUETTE: Procédez.
M. BEDARD (Chicoutimi): A moins que le pouvoir, dans cette Chambre, ait
changé de place.
M. CHOQUETTE: Procédez.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, que ce soit un avis,
quelle que soit l'action qui ait été faite par le gouvernement du
Québec vis-à-vis du fédéral, je repose ma question
à laquelle je crois ne pas avoir eu de réponse:
Pourquoi le Québec a-t-il exercé soit un droit de veto,
soit un avis, comme le dit l'honorable ministre des Affaires sociales,
vis-à-vis du programme de subventions du fédéral face aux
garderies populaires si le gouvernement savait ou devait savoir qu'il n'avait
pas les possibilités financières d'assurer la relève dans
ce domaine? C'est au niveau de la finance.
MME BACON: M. le Président, j'essaie de comprendre une question
dans ce que vient de dire le député de Chicoutimi.
UNE VOIX: C'est bien simple, pourtant.
MME BACON: Je répète ce que j'ai déjà dit.
Je peux le référer à la déclaration que j'avais
faite au moment où il a posé sa première question, il y a
quelque temps. Je répète que des avis ont été
donnés, quant aux normes, par le ministère des Affaires sociales.
Je sais très bien que le ministère des Affaires sociales est
vraiment sensibilisé au problème des garderies. Nous tentons de
préparer un programme préliminaire cela peut
peut-être devancer d'autres questions que le député de
Chicoutimi aurait à poser et nous ferons des consultations dans
les premiers mois de 1974.
UNE VOIX: Sans argent.
UNE VOIX: Très bien, très bien.
M. BEDARD (Chicoutimi): Une question supplémentaire, M. le
Président.
LE PRESIDENT: La dernière, je crois, parce que l'honorable
chef...
M. BEDARD (Chicoutimi): Je suis très heureux de voir que le
ministère des Affaires sociales prépare un programme
préliminaire. Ma question est la suivante: Durant la préparation
de ce programme préliminaire, pourquoi avoir arrêté les
subventions que le fédéral donnait aux garderies populaires?
M. HARDY: Tiens, tiens, tiens: Les séparatistes!
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non! Ne ramenez pas la question sur un
problème fédéral-provincial !
LE PRESIDENT: Dernière question: L'honorable chef de l'Opposition
officielle.
Chômage d'hiver
M. MORIN: Cette fois, M. le Président, ma question est
destinée au ministre des Finances. A l'automne 1972, le ministre des
Finances annonçait son intention d'utiliser la quasi-totalité des
fonds mis à la disposition du Québec par le gouvernement
fédéral je crois qu'il s'agissait d'une somme d'environ
$100 millions dans le cadre de son programme de lutte au chômage
d'hiver. Il avait annoncé que ces sommes seraient utilisées, non
pas en 1972/73, mais en 1973/74.
M. le Président, compte tenu du fait que les dernières
statistiques estiment à 171,000 le nombre des chômeurs
québécois, à l'heure actuelle, et qu'on peut
prévoir qu'au cours de l'hiver, de janvier à mars en particulier,
ce nombre risque d'atteindre le chiffre de 200,000, le ministre a-t-il
prévu un programme de travaux publics susceptible de stimuler l'embauche
au cours de l'hiver?
M. GARNEAU: M. le Président, le programme qui a été
mis en marche l'an dernier, à la suite des discussions avec le
gouvernement fédéral, se poursuit.
J'avais annoncé que la partie concernant les municipalités
allait être effectuée au cours de l'hiver 1973/74, ce qui se
produit suivant les procédures établies et mises en application
par le ministère des Affaires municipales. Les municipalités ont
fait parvenir, au cours du printemps dernier et de l'été, des
projets qui ont été analysés par le ministère des
Affaires municipales et acceptés pour le montant disponible à
l'intérieur du programme, qui était d'une trentaine de millions
de dollars.
Pour ce qui est du reste des sommes mises à la disposition du
Québec, une liste de projets avait été discutée et
acceptée par le fédéral et par le Conseil du trésor
du Québec. Ces projets vont se poursuivre. Je n'ai pas le rapport devant
moi, évidemment, mais les projets qui ont commencé au cours de
l'hiver 1972/73 vont se poursuivre durant la période de 1973/74. Je
n'aurais pas d'objection à déposer d'ailleurs, je crois
l'avoir déjà fait ici la liste de ces projets auxquels les
sommes avaient été appliquées.
M. MORIN: Question supplémentaire, la dernière. Est-ce que
le ministre prévoit dépenser tous les fonds qui ont
été mis à sa dispostion?
M. GARNEAU: Pour ce qui est du gouvernement du Québec, je
répondrai oui. Pour ce qui est des municipalités, contrairement
aux programmes des années antérieures, elles ont
été avisées suffisamment d'avance pour qu'elles puissent
réaliser les projets pour lesquels elles ont demandé des
fonds.
Mais, si, au cours des prochains mois, des municipalités
changeaient d'avis, ralentissaient le rythme des travaux ou mettaient de
côté pour des raisons diverses des projets qui avaient
été acceptés, je ne peux pas garantir que la
totalité des $30 millions seraient ou ne seraient pas
dépensés, parce que ce n'est pas le gouvernement du Québec
qui est maître d'oeuvre dans ce cas-là.
LE PRESIDENT: Avant de passer aux affaires du jour...
M. LEVESQUE: Dépôt de documents. LE PRESIDENT:
Dépôt de documents.
DEPOT DE DOCUMENTS Commission des accidents du
travail
M. CHOQUETTE: Je voudrais déposer deux exemplaires du rapport de
la Commission des accidents du travail de Québec relativement à
l'administration de la Loi de l'indemnisation des victimes d'actes
criminels.
Commission des services juridiques
M. CHOQUETTE: Je voudrais également déposer deux
exemplaires du rapport de la Commission des services juridiques. Egalement je
dépose deux rapports du Conseil consultatif de la justice.
Conseil de la politique scientifique du
Québec
M. SAINT-PIERRE: II me fait plaisir de déposer le premier rapport
annuel du Conseil de la politique scientifique du Québec.
Décision de M. le Président sur la
demande d'un débat d'urgence
LE PRESIDENT: Avant de passer aux affaires du jour, j'avais remis
à ce jour une décision sur une demande de l'honorable
député de Maisonneuve pour la tenue d'un débat d'urgence
relativement à l'existence, au sein du Conseil exécutif, d'un
Centre d'analyse et de documentation, dont la création et le maintien
n'auraient pas été autorisés par l'Assemblée
nationale.
J'ai considéré cette question, et j'en ai même
discuté avec le leader parlementaire de l'Opposition. Disons que je
considère actuellement que nous avons déjà non seulement
des débats d'urgence, mais des débats privilégiés
en quantité au feuilleton. Il y en a un en route et deux sont
annoncés, dont l'un doit se tenir aujourd'hui et l'autre, samedi.
Je dois ajouter également que sa demande écrite et verbale
d'avant-hier ne m'a pas encore tout à fait convaincu que l'existence
d'un tel organisme causait une crise soudaine, qui est un des
éléments, entre autres, pour l'octroi d'un tel débat.
Egalement, je ne me suis pas convaincu que l'étude d'une telle question
s'impose.
Egalement, je dois remarquer que, dans les crédits
supplémentaires que la Chambre étudie ou étudiera
très prochainement, il y a un programme qui relève du Conseil
exécutif. Comme ce Centre d'analyse et de documentation semble relever
du Conseil exécutif, je suis convaincu que le leader parlementaire de
l'Opposition pourra en discuter à ce moment.
De toute façon, je ne ferme pas totalement la porte. Si
éventuellement, soit avant les Fêtes ou après les
Fêtes, l'existence d'un tel organisme peut soulever certains points
d'interrogation, le leader parlementaire de l'Opposition pourra toujours
renouveler sa demande.
M. BURNS: Merci, M. le Président.
Questions inscrites au feuilleton
M. LEVESQUE: M. le Président, en réponse à des
questions posées au feuilleton du mercredi 19 décembre, article
9, question de M. Roy, réponse de M. Massé.
M. MASSE: Lu et répondu. (Voir Annexe)
M. LEVESQUE: Article 16, question de M. Roy, réponse de M.
Massé.
M. MASSE: Lu et répondu. (Voir Annexe)
M. LEVESQUE: Article 22, question de M. Roy, réponse de M.
Tetley. Pour M. Tetley, lu et répondu. (Voir Annexe)
LE PRESIDENT: Article numéro...
M. LEVESQUE: Je suis entre vos mains.
Motion de censure de M. Morin
LE PRESIDENT: Messieurs, en ce qui concerne le débat restreint
que nous avons ce matin en vertu de l'article 24 de notre règlement, la
motion de censure proposée par l'honorable chef de l'Opposition
officielle, il nous reste environ 125 à 130 minutes avant la suspension
des travaux à 13 heures. Nous allons prendre, si vous voulez, la
même base que pour un débat récent. L'Opposition officielle
aura entre 55 et 60 minutes, le Parti créditiste, 15 minutes et le parti
ministériel, 55 minutes, y compris, dans le droit de parole du Parti
québécois, le droit de réplique. La mise aux voix sera
demandée quelques minutes avant 13 heures.
L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, l'Opposition a inscrit au feuilleton
de l'Assemblée nationale une motion privilégiée de censure
à l'encontre de la politique ou plutôt, je devrais dire, de
l'absence de politique linguistique, du gouverne-
ment. Cette motion se lit comme suit: "Que cette Assemblée
blâme le gouvernement d'avoir négligé de prendre les
mesures requises pour faire du français au Québec la seule langue
officielle, la langue de travail et la langue d'enseignement pour les
immigrants."
Dans une première partie, M. le Président, je voudrais
analyser la situation actuelle du français au Québec.
Deux mouvements sont perceptibles à l'heure actuelle, à la
lumière des plus récentes études statistiques, surtout
celles qui sont issues du recensement de 1971, dont l'analyse n'est
malheureusement pas tout à fait terminée, pas assez
poussée, pas aussi poussée en tout cas qu'elle le pourrait
être. Mais cette analyse permet toutefois de dégager deux
tendances générales et qui me paraissent convergentes.
J'analyserai maintenant ces deux tendances; je tenterai de montrer dans
quelle mesure elles se conjuguent pour créer un problème
linguistique aigu au Québec. Le premier phénomène, M. le
Président, c'est la perte de vitesse évidente,
c'est-à-dire l'assimilation de plus en plus prononcée des
francophones au Canada, à l'extérieur du Québec.
Je sais bien que le ministre me dira qu'il n'est pas responsable de
l'assimilation des nôtres à l'extérieur du Québec,
mais c'est un phénomène qui, lorsqu'il se conjugue avec la
tendance à l'assimilation que nous observons maintenant à
l'intérieur du Québec, donne à l'ensemble du
problème des proportions considérables. Cet aspect n'est pas le
coeur de mon propos et je ne ferai que l'illustrer d'une seule série de
statistiques qui démontrent clairement que le français au Canada
est en régression constante, je dirais même dramatique. Nous
verrons tout à l'heure d'ailleurs, comme je l'ai indiqué, que le
français est également en régression au Québec
même.
Malgré la régression du français au Québec,
les Québécois comptent pour une proportion croissante de tous les
francophones du Canada. Ainsi, alors qu'en 1941, 81 p.c. des francophones du
Canada résidaient au Québec, ce pourcentage passe successivement
à 82 p.c. en 1951, à 83 p.c. en 1961 et à 84 p.c. en 1971.
C'est donc un phénomène lent, mais inexorable.
Ce n'est pas dire, évidemment, que le pourcentage des
francophones augmente à l'intérieur du Québec même.
C'est dire que, malgré le recul au Québec, la proportion de
francophones à l'intérieur du Québec augmente par rapport
à la proportion dans l'ensemble du Canada. Nous sommes maintenant
à 84 p.c. Il est donc de plus en plus clair, M. le Président, que
les francophones de l'extérieur du Québec sont en voie,
hélas! d'assimilation, sauf quelques noyaux qui persistent encore. On
doit reconnaître que dans le cas du Nouveau-Brunswick, les Acadiens se
réveillent depuis quelque temps; mais, même là, même
en Acadie, les chiffres et les statistiques du dernier recensement sont
très troublants. J'inviterais donc les tenants du "bilingualism from
coast to coast" à méditer ces chiffres qui me paraissent
extrêmement troublants.
Pourquoi en est-il ainsi, M. le Président? Ce n'est pas bien
compliqué. C'est tout simplement, si je puis me permettre un rappel
historique, que le français a été battu en brèche
dans toutes les provinces, sauf le Québec, depuis la
confédération, depuis 1867. Dois-je rappeler, dois-je vous
rappeler, M. le Président, que dès 1870, les Acadiens se sont vus
privés de leurs écoles publiques francophones? Dois-je vous
rappeler qu'en 1890, le français a été aboli comme langue
officielle au Manitoba, alors que les écoles publiques francophones
avaient également dû être fermées puisqu'on
forçait les Manitobains francophones, non seulement à payer leurs
taxes comme tout le monde pour l'entretien des écoles publiques qui
devenaient des écoles anglaises, mais à financer en outre de
leurs propres deniers les écoles privées francophones?
Dois-je vous rappeler qu'en 1905, la Saskatchewan et 1'Alberta ont
refusé de reconnaître le moindre statut au français,
même s'il y avait dans ces provinces, nouvellement créées
à l'époque, des minorités francophones importantes?
Dois-je vous rappeler qu'en 1912, le français a été aboli
comme langue officielle dans les Territoires du Nord-Ouest? Dois-je vous
rappeler qu'en 1912 également, le règlement 17 a voulu abolir le
français dans les écoles de l'Ontario?
Tous ces faits qui sont l'histoire même du Canada, ces faits, qui
se traduisent par une érosion implacable des droits du français
dans ce pays, ont fait que dans les cinquante premières années de
la Confédération, un demi-siècle ne s'était pas
encore écoulé, M. le Président, déjà le
français n'avait plus de statut qu'au Québec. Le Québec,
pour célébrer son premier cinquantenaire, pouvait
déjà constater qu'il était devenu le seul bastion
francophone au Canada.
Parlons maintenant justement de ce bastion. C'est la deuxième
tendance que je voudrais vous décrire. L'assimilation maintenant
amorcée des francophones au Québec même est un
phénomène qui doit nous préoccuper, je pense, et qui
sûrement, M. le Président, vous préoccupe au plus haut
point, tel que je vous connais. Alors que nous étions tout à
l'heure...
M. CHOQUETTE: C'est une assimilation en sens inverse.
M. MORIN: ... alors que...
M. CHOQUETTE: Je disais que dans le cas du président, ou celui
qui occupe le fauteuil, c'est une assimilation en sens inverse.
M. MORIN: Et c'est pourquoi, M. le Président, étant
donné que vous êtes maintenant francophone, vous ne pouvez pas
vous désintéresser de ce problème.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): ... pour le moment.
M. MORIN: Très bien. Alors que nous étions tout à
l'heure devant un phénomène évident depuis
déjà plusieurs générations, un
phénomène qui avait déjà fait ses ravages en 1917,
après 50 ans de confédération, nous sommes maintenant en
face d'un phénomène qui a commencé avec le deuxième
demi-siècle de la confédération. C'est avec
l'industrialisation, l'urbanisation, tous ces phénomènes
sociologiques qui ont heurté notre peuple de front depuis une
cinquantaine d'années, voire depuis 75 ans. A vrai dire, nous sommes
maintenant devant un problème d'assimilation des francophones du
Québec, phénomène encore lent mais qu'on ne peut nier, qui
est même perceptible statistiquement. Et, pour illustrer mon propos, je
me permettrai de citer largement une étude extrêmement
intéressante...
M. LESSARD: Je m'excuse auprès de mon chef parlementaire mais je
constate qu'il n'y a pas quorum, M. le Président. Etant donné
l'importance de cette motion, on demanderait au moins aux quelques
libéraux qui restent à la suite des vacances qu'ils ont
décidé de prendre d'être présents à
l'Assemblée nationale.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Qu'on appelle les députés
!
M. MORIN: Pour illustrer mon propos, je me permettrai de citer largement
une étude extrêmement intéressante, l'une des
premières d'ailleurs à être faites depuis la publication
des chiffres du recensement de 1971. Il s'agit d'une étude du professeur
Charles Castonguay, du département de mathématiques de
l'Université d'Ottawa. Je sais que le député de Rimouski
va me dire que cela ne vaut rien puisque c'est encore un professeur, mais
j'estime que ces chiffres sont tout de même importants.
Je sais que ces problèmes lui passent largement par-dessus la
tête.
M. SAINT-HILAIRE: Question de privilège. On vient de m'accuser de
dire que cela ne vaut rien. Je considère trop ma langue française
pour dire que cela ne vaut rien. Je peux discuter longuement des propos de
l'honorable ministre de l'Opposition, qui nous fait perdre notre temps alors
que nous avons d'autres projets de loi beaucoup plus importants à
l'heure actuelle à discuter. Je m'excuse... de l'honorable chef de
l'Opposition.
C'est parce qu'il aimerait tellement ça se faire appeler ministre
qu'au moins, je peux lui rendre cet hommage, ce matin. Il parle comme s'il se
regardait dans un miroir.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît ! Le
député de Sauvé.
M. MORIN: M. le premier ministre...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): M. le Président.
M. MORIN: M. le Président, ça viendra certainement si nous
laissons l'assimilation continuer son oeuvre destructrice, M. le
Président. Je ne doute pas que vous feriez un excellent premier
ministre.
Je reprends donc cette étude de M. Castonguay. En comparant les
chiffres de 1961 avec ceux de 1971, de même que les statistiques
concernant la langue maternelle avec celles qui portent sur la langue d'usage
dont nous disposons, en 1971, je le signale, pour la première fois, on
peut croire qu'à la surface, le français se porte bien au
Québec, puisqu'il réalise semble-t-il, un gain net de 3,000 ou,
plus précisément, de 2,850 nouveaux usagers. Mais ce qui est
frappant c'est que l'anglais se porte encore bien mieux puisqu'il gagne 99,000
nouveaux usagers. Cela semble indiquer que le problème du
français réside uniquement dans son faible attrait pour les
Néo-Québécois. Mais, si l'on gratte un peu la statistique,
on constate que sous la surface, on ne peut pas en conclure qu'il faille jeter
tout le blâme sur l'immigrant. En effet, je me permets de tirer de tous
ces chiffres trois constatations.
La première, c'est qu'au niveau de 74 divisions de recensement
qui couvrent tout le Québec, on constate que dans 28 de ces
subdivisions, il y a assimilation nette de francophones par le groupe
anglophone, et que dans 22 autres, l'anglais attire vers lui des nouveaux
usagers plus fortement que le français, tenant compte évidemment
de l'importance numérique relative des deux groupes. Ces 50 divisions
regroupent plus de 75 p.c. de la population québécoise. Le
chiffre net de pertes, le chiffre net de francophones assimilés est de
7,135. Pour combler cette perte, 7,135 nouveaux usagers se sont donc joints aux
3,000 net au niveau du Québec. Ces 7,135 se répartissent entre
2,350 de langue maternelle anglaise et quelque 5,000 de langues maternelles
autres que l'anglais ou le français. Le professeur Castonguay conclut
que l'ampleur insoupçonnée à l'assimilation des
francophones diminue donc sensiblement le taux d'attraction net du
français. C'est un premier phénomène.
Le second est celui-ci. Si, au niveau d'une division de recensement, il
ne paraît pas y avoir assimilation d'un groupe par l'autre, il se peut
qu'en examinant ses composantes internes, un même phénomène
d'assimilation se révèle, comme nous l'avons vu plus haut.
Prenons par exemple et cela intéressera sûrement le
ministre de l'Education l'île de Montréal, le
français y réalise un gain net de 1,000 individus, tandis que
l'anglais réalise un gain de 72,000. Mais, dans 20 des 30
municipalités de l'île de Montréal, il y a assimilation des
francophones par le groupe anglophone, avec
un résultat net de 7,250 personnes assimilées. Les 10
autres municipalités comblent donc cette perte avec 8,250 nouveaux
usagers du français, presque tous gagnés dans Montréal
même, dans Montréal-Nord, que j'ai l'honneur de représenter
dans cette Assemblée et dans Saint-Léonard, et dont une centaine
seulement proviennent du groupe de langue maternelle anglaise. Donc,
l'attraction du français à Montréal n'est pas si faible
qu'il parait.
Par contre, l'assimilation des francophones compromet les gains
réalisés par cette attraction.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le chef de l'Opposition me permet une question,
M. le Président?
M. MORIN: Tout à l'heure, M. le Président. J'ai un
exposé beaucoup plus long que le temps qui m'est alloué. Je le
regrette.
M. SAINT-HILAIRE: Extrêmement savant!
M. MORIN: Donc, si maintenant on additionne 7,135 personnes avec 7,250,
on obtient 14,385 francophones assimilés. Donc, 14,385 transferts
linguistiques nets du français, langue maternelle, à l'anglais,
langue d'usage. Evidemment, ce n'est pas tout le phénomène des
transferts linguistiques; ce n'en est qu'un aspect. Je ne parle que des
transferts du groupe francophone à la langue d'usage anglaise.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! Messieurs, un peu de
décorum, s'il vous plaît! A l'ordre!
M. MORIN: Alors, quel est le chiffre brut des transferts linguistiques
au Québec? Bien, nous attendrons, pour le savoir d'une manière
précise, une publication prochaine de Statistique-Canada qui doit
paraître en 1974, au mois de janvier. Notons, cependant, que cette perte
de 14,385 individus s'inscrit aussi comme gain pour le groupe anglophone, ce
qui cause en réalité tous les gens qui ont fait des
élections, je pense, comprendront cela un écart de 28,770
entre les deux groupes linguistiques majeurs.
L'ampleur de cette assimilation n'est donc pas négligeable, nous
dit M. Castonguay, et l'assimilation prend place à côté de
la dénatalité, à côté de l'immigration et de
l'émigration dont je dirai un mot tout à l'heure
à côté aussi de l'assimilation des immigrants au groupe
anglophone, parmi les principaux facteurs influençant la situation
linguistique du Québec.
Au-delà de cette assimilation, il y a la baisse du taux de
natalité, la saignée alarmante du groupe francophone par les
migrations, ce qui est un phénomène dont on ne tient pas
suffisamment compte quand on sait maintenant que, de 1961 à 1971, se
sont transportés hors du Québec 112,000 Québécois
d'origine ethni- que française. Là-dessus, je pourrais renvoyer
à plusieurs études qui sont toutes concurrentes, qui ont toutes
les mêmes conclusions sur ce phénomène dont nous ne tenons
pas suffisamment compte et qui est encouragé, faut-il le souligner au
passage, par les politiques de déplacement de la main-d'oeuvre du
gouvernement fédéral.
M. CHOQUETTE: Ah! Ah! Ah! M. MORIN: Oui, oui, certainement. M.
CHOQUETTE: Vous ne pensez pas... M. MORIN: C'est difficile à chiffrer...
M. CHOQUETTE: Ah!
M. MORIN: ... mais je crois que cela va dans le même sens.
Alors...
UNE VOIX: C'est ça, des supositions!
M. MORIN: ... est-ce que ce ne serait pas...
M. CHOQUETTE: Vous ne pensez pas que c'est occasionné
principalement par le fait qu'on manquait d'emplois ici?
M. MORIN: ... tout simplement à cause, M. le Président, de
la situation économique des francophones du Québec et du statut
peu reluisant du français au Québec? Est-ce que ce ne seraient
pas là les principales causes de cette émigration? Ne serait-ce
pas aussi...
M. CHOQUETTE: M. le Président...
M. MORIN: ... pour reprendre une question...
M. CHOQUETTE: ... je vais poser une question.
M. MORIN: Non. Ecoutez, M. le Président,...
M. CHOQUETTE: Je vais poser une question.
M. MORIN: ... le ministre me dérange...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A moins que vous ayez le consentement.
M. CHOQUETTE: Non, non, mais je voudrais...
M. MORIN: ... depuis tout à l'heure.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ...
M. CHOQUETTE: Je voudrais m'instruire au contact du chef de
l'Opposition.
M. LESSARD: Le règlement, M. le Président.
M. MORIN: M. le Président,...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! ... A moins qu'il y ait
consentement de l'opinant, vous n'avez pas le droit de poser une question.
M. MORIN: ... le ministre...
M. SAINT-HILAIRE: II refuse de donner son consentement!
M. MORIN: M. le Président, le ministre est
intéressé; je vois que ces questions l'intéressent, je
m'en réjouis. Il aura tout le loisir de faire un grand discours tout
à l'heure.
M. LESSARD: ... sa police, lui.
M. MORIN: Peut-être qu'il pourra ajouter son grain de sel à
ce que dira le ministre de l'Education.
M. LESSARD: Le crime organisé, occupez-vous de ça.
M. HARDY: Vous n'acceptez pas les nouvelles méthodes
pédagogiques.
M. MORIN: Je me réjouis de l'intérêt...
M. LESSARD: La police et l'enquête sur le crime
organisé.
M. MORIN: ... du ministre, mais je voudrais qu'il cesse de
m'interrompre.
M. CHOQUETTE: Faites attention à vous, vous allez être
convoqué!
M. LESSARD: Ah! Je vais me faire "bobiner"!
M. MORIN: Ne serait-ce pas comme le constate le professeur Castonguay,
que l'anglais serait en passe de devenir, au Québec, la langue de la
promotion sociale, la langue de la promotion économique et, pour tout
dire, la langue de la réussite? C'est un phénomène qui, me
semble-t-il, est de plus en plus perceptible.
Alors, ce double phénomène que je viens de décrire,
à l'extérieur du Québec, d'une part, à
l'intérieur, de l'autre, ces deux tendances sont extrêmement
graves pour l'avenir du fait français au Canada, bien sûr, mais,
d'abord et avant tout, au Québec.
Nous constatons, d'une part, que le sort des minorités à
l'extérieur du Québec est gravement compromis, s'il n'est pas,
à toutes fins pratiques, réglé historiquement. En tout
cas, ces minorités ne pèsent plus dans la balance. Nous
constatons que la zone de compénétration linguistique, cette zone
de bilinguisme, qui, en réalité, est une zone d'assimilation,
s'est déplacée. Alors qu'autrefois, et cela jusqu'à,
peut-être, ces vingt dernières années, cette zone de
compénétration se situait au Manitoba, dans certaines
régions de l'Ontario, alors qu'elle se situait dans l'Ouest, loin du
Québec, aujourd'hui cette zone de compénétration
linguistique est rendue au Québec. Evidemment, elle est aussi
installée au Nouveau-Brunswick et dans tout ce qu'on pourrait appeler
les marches culturelles du Québec; j'entends le nord de l'Ontario, la
région circonvoisine de Montréal, qui se situe pour une large
mesure dans l'Ontario, la Vallée de l'Outaouais, Montréal, bien
sûr, cela va de soi, mais même, M. le Président, la
Gaspésie n'échappe pas, d'après les statistiques, à
cette zone de bilinguisation à sens unique.
Donc c'est ma conclusion pour cette première partie
le bastion culturel québécois lui-même, le bastion
linguistique lui-même est aujourd'hui assiégé. Autrefois,
nous pouvions nous bercer d'illusions. Nous pouvions parler des
problèmes des minorités à l'extérieur du
Québec. Désormais, ce problème se pose dans le sein
même du Québec. C'est comme si le cancer, autrefois
périphérique, s'attaquait maintenant aux organes vitaux. C'est
comme si le bastion culturel, qui n'était menacé autrefois que
par des escarmouches dans la plaine, était maintenant
assiégé au pied même du glacis québécois.
Cette situation me paraît très grave et je ne vois pas ce qui
pourrait permettre de la redresser.
Je vais, quand même, dans une seconde partie, examiner les signes
qui pourraient nous permettre de voir, dans un avenir prochain, une
amélioration ou ce qui est plus probable étant donné
l'absence de politique gouvernementale, étant donné que la
politique gouvernementale, si tant est qu'il y en ait une, n'a
été, à toutes fins utiles, jusqu'ici, qu'une série
de petites mesures plus ou moins efficaces ne s'agirait-il pas
plutôt non pas d'une amélioration, mais d'une
accélération du mouvement que je viens de décrire et qui
est déjà non seulement perceptible à l'oeil nu, mais
très nette?
Lorsqu'on examine le phénomène des transferts
linguistiques, celui qui nous intéresse actuellement, il faut en
rechercher les causes pour voir si le phénomène va se poursuivre
et également pour savoir où le gouvernement doit agir et par
quelles mesures, pour que son action porte des fruits et pour que cette
"souveraineté culturelle" ne soit pas qu'un slogan vide de sens, comme
le laissait entendre le mémoire du ministère de l'Education. Ce
mémoire dont la paternité demeure, semble-t-il, douteuse,
contenait des observations fort justes à l'occasion.
J'espère que le ministre de l'Education nous apprendra qu'il en
est effectivement le père ou en tout cas qu'il en endosse la
paternité.
Lorsque je parle d'une action qui pourrait porter des fruits, je prends
pour acquis que le
gouvernement a l'intention d'agir. Je prends pour acquis et le
ministre, quelquefois, a des velléités qui pourraient nous porter
à croire qu'il a l'intention de faire quelque chose que le
ministre ou le gouvernement, puisque le ministre, j'imagine, fait son possible,
n'est pas prisonnier de ces 20 p.c. d'anglophones qui en toute bonne foi,
certainement, lui accordent leur vote.
Il est possible de dégager pour les fins de cette analyse, qui
n'a pas de prétentions scientifiques cette fois, mais qui pourrait nous
aider à voir où le gouvernement a péché par
omission dans sa politique linguistique, trois facteurs d'assimilation ou de
transfert linguistique.
Avant d'aborder cette partie, M. le Président, puis-je demander
combien de temps il me reste?
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Vous avez 60 minutes pour votre parti.
Vous avez dépassé 30 minutes, mais vous pouvez parler comme vous
voulez.
M. MORIN: J'ai déjà parlé une demi-heure?
Je vais analyser successivement trois facteurs de transfert
linguistique. D'abord l'école, ensuite le travail et ensuite les mass
media. Enfin, je vais essayer de faire le tour de tout ce qui constitue
l'environnement culturel d'un être québécois.
Dans ces trois secteurs, nous pouvons déceler aujourd'hui des
éléments qui nous permettent d'affirmer, je crois sans l'ombre
d'un doute, qu'au train où vont les choses, non seulement le mouvement
de transfert linguistique en faveur de l'anglais ne se résorbera point,
mais qu'au contraire nous allons être témoins, au cours des
années qui viennent, d'un phénomène
d'accélération.
Je me contenterai sur ce sujet de rappeler les chiffres dramatiques sur
l'assimilation des francophones, chiffres contenus dans un rapport
préparé par le démographe Louis Duchesne pour la Direction
générale de la planification du ministère de l'Education.
Je me dois d'ailleurs de souligner que la population québécoise
doit la publication de ces chiffres à une fuite providentielle, au
quotidien La Presse. Et je crois que nous pouvons en remercier ce journal.
Le ministre nous a dit que c'étaient des chiffres
préliminaires. Mais je lui demanderais quand est-ce que des chiffres
cessent d'être préliminaires? Quand ils auront doublé? Je
parle de ce document Duchesne dont vous nous avez dit qu'il est provisoire,
préliminaire, et je ne sais trop encore quelle épithète
vous avez pu utiliser.
Et vous voudrez peut-être tout à l'heure nous dire quand un
document comme celui-là cesse d'être préliminaire. Va-t-on
attendre pour le publier officiellement que les chiffres se soient
aggravés? Pourquoi, au fond, cacher aux Québécois leur
véritable situation? C'est un autre élément qui intervient
dans cette motion de censure.
Toujours le jeu de cache-cache, impossible de savoir exactement
où nous en sommes. Il faut attendre fuite sur fuite, sur fuite pour que
les Québécois soient renseignés. M. le ministre, quand
vous lasserez-vous de ces fuites et pren-drez-vous la bonne habitude de rendre
les chiffres publics?
Qu'avez-vous à perdre, M. le ministre, à ce que les
Québécois connaissent la situation réelle de leur
langue?
Qu'avez-vous à perdre à sensibiliser les
Québécois? M. le ministre, je ne sache pas que vous ayez
cessé d'être francophone. Je ne sache pas que le ministre de
l'Education ait oublié la culture à laquelle il se rattache. Je
ne sache pas, non plus, qu'il soit devenu insensible aux responsabilités
qu'il porte non seulement en tant que ministre de l'Education, mais en tant que
responsable de ce qu'on appelle la "politique linguistique" du gouvernement
québécois.
Nous savions déjà que la très grande
majorité des immigrants fréquentait l'école anglaise-,
cette proportion est supérieure à 90 p.c. à
Montréal. Nous reparlerons de ce phénomène peut-être
en parlant du bill 63. Ce que nous savons aujourd'hui, c'est qu'un nombre
croissant de francophones fréquentent maintenant l'école
anglaise. Ce chiffre, nous le savons maintenant, est supérieur à
25,000 pour l'année dernière. Ce phénomène est
curieux, comme l'a noté d'ailleurs la journaliste de la Presse, qui, la
première, a porté ce document à la connaissance du public
dans un article du 8 décembre. J'en profite, d'ailleurs, pour signaler
que le rapport avait été remis au ministère dès le
mois d'octobre, n'est-ce pas?
M. CLOUTIER: Au ministère, pas au ministre.
M. MORIN: On me permettra de citer deux passages de cet article du 8
décembre: "C'est curieusement dans les régions les plus
françaises du Québec que les écoles anglaises
reçoivent la plus grande proportion d'élèves francophones.
Ainsi, au Saguenay, les francophones forment 43 p.c. de la clientèle des
écoles anglaises". Eh oui! A Québec, dans notre bonne ville de
Québec, M. le Président, que j'ai toujours à coeur puisque
j'en suis natif, 33 p.c! "A Trois-Rivières, les francophones constituent
plus de la moitié de la population des écoles anglaises". Je l'ai
signalé au ministre la semaine dernière: n'était la
présence des francophones dans certaines de ces écoles, elles
devraient fermer leurs portes. Ce sont des francophones qui font tenir ouvertes
ces écoles.
M. BACON: ...
M. MORIN: M. le Président, autrement dit, les francophones sont
plus nombreux à Trois-Rivières que les anglophones dans les
écoles
anglaises; ils y sont 54 p.c. "Au Saguenay et à
Trois-Rivières, ce phénomène s'est accentué de 1971
à 1972. En un an, continue l'article, la proportion
d'élèves français qui étudient en anglais s'est
haussée de 11 p.c. dans le premier cas et de 13 p.c. dans le second cas.
Pendant que, en dehors de Montréal, les francophones fournissent 17 p.c.
de la clientèle des écoles anglaises, 10 p.c. dans la
région de Montréal, une analyse démographique montre que
le pouvoir d'attraction de l'anglais comme langue d'enseignement augmente
partout au Québec". Oui, "la voix" commence à me manquer.
Comme ça fait plusieurs fois que je fais ce vilain jeu de mots,
M. le Président, vous voudrez bien m'en excuser.
M. BACON: On a quasiment peur d'une autre motion.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre!
M. MORIN: M. le Président, puis-je continuer? Eh bien, nous
savons que les transferts linguistiques permanents ne s'effectuent pas
dès l'école; ça, il y a plusieurs psychologues qui nous
l'ont appris. Mais nous savons également que l'école
prépare les transferts linguistiques permanents, lesquels se produisent
en général, nous dit-on, vers l'âge de la maturité,
c'est-à-dire entre 20 et 25 ans, à l'âge où
l'écolier, désormais devant ses responsabilités, doit
prendre une profession, à l'âge où il va se marier.
C'est à ce moment-là que les choix linguistiques
interviennent. Autrement dit, au moment où l'individu s'insère de
façon autonome dans la société en travaillant et en se
mariant.
M. le Président, je pourrais m'étendre encore longuement
sur ces phénomènes. Je mentionnerai peut-être, en passant,
le travail, qui est peut-être finalement le plus important. Je devrai
cependant abréger, car je ne voudrais pas monopoliser à moi seul
tout le temps que vous avez alloué à l'Opposition au cours de ce
débat.
Le travail est un facteur de transfert au moins aussi important que
l'école, même si les instruments qui permettraient de mesurer le
phénomène sont évidemment beaucoup moins raffinés
et, pour tout dire, font presque complètement défaut. Je ne
citerai à ce chapitre que quelques chiffres tirés des
études de la commission Gendron, commission à laquelle le
gouvernement nous a dit, à plusieurs reprises qu'il accordait beaucoup
de crédit. La langue de travail, est-il nécessaire de le
rappeler, cela touche la réalité quotidienne. Cela touche la
rentabilité économique de notre langue.
Une langue n'est pas et ne peut être, à moins de vouloir en
faire un résidu folklorique du passé plutôt qu'un moyen de
communiquer, autre chose qu'un moyen de travailler, un moyen de vivre. Autour
de la langue se greffent non pas seulement des moyens de communiquer d'homme
à homme, mais le ministre de l'Education en sa qualité de
psychiatre sait fort bien tous les phénomènes inconscients, tous
les réseaux mentaux qui sont reliés au phénomène de
la langue et qui font qu'une langue, ce n'est donc pas seulement un moyen de
communication mais une manière de vivre. C'est une manière
d'être. Il ressort clairement de l'observation de notre
société que toute la pression économique constitue un
facteur d'attrait pour l'anglais.
Cela est si vrai que 30 p.c. seulement des résidants
québécois gagnant plus de $15,000 par année sont
francophones. Et à Montréal, 15 p.c. seulement des cadres
supérieurs des sièges sociaux gagnant plus de $22,000 en
général sont francophones. Et quand je dis que seulement 30 p.c.
des résidants québécois gagnant plus de $15,000 par
année sont francophones, j'inclus là-dedans tous les
députés de cette Assemblée qui doivent en fournir un
certain contingent. Et j'inclus aussi les juges dont le ministre de la Justice
nous entretiendra sans doute encore au cours des heures qui viennent.
M. le Président, peut-être est-il temps que j'en vienne
à quelques conclusions j'aurai sans doute l'occasion de le faire
au cours de la prochaine session encore qu'on pourrait s'étendre
presque indéfiniment sur les dangers que court le bastion culturel
québécois à l'heure actuelle.
De plus en plus, les mass media anglophones envahissent le
Québec, et comme nous ne sommes pas maîtres des décisions
de créer telle station de radio ou de télévision, nous
sommes dans des situations, dans certains coins du Québec, où il
y a autant, sinon davantage, d'ondes anglophones que d'ondes francophones.
C'est une situation que le ministre connaît bien, j'imagine.
Eh bien, dans ce contexte que je viens de décrire de
manière incomplète, dans ce contexte, quelle est la portée
de ce slogan publicitaire, de ce slogan "savonnesque" de la souveraineté
culturelle?
Est-ce que le gouvernement va se donner, enfin, une politique
culturelle? Est-ce qu'il va passer au-delà des décors comme celui
de cette souveraineté culturelle, dont on a bien vu depuis quelque temps
qu'elle est totalement vide de sens? Et j'invoque là-dessus
l'autorité du ministère de l'Education.
De cette analyse trop brève, analyse à reprendre amplement
au cours de la prochaine session avec la coopération du ministre de
l'Education qui, dans l'entre-temps, aura peut-être eu l'occasion
de rendre publics les autres rapports qu'il possède ou des rapports plus
complets qu'il possède sur cette situation il ressort trois
points essentiels, et je vais terminer là-dessus. Trois points qui
motivent la motion de censure, la motion privilégiée de ce matin.
Premièrement, que l'assimilation des francophones est à toutes
fins pratiques en bonne marche, sinon même, dans la plupart des
cas, consommée hors du Québec et qu'elle est
désormais largement amorcée et même, dans certains coins,
avancée au Québec même.
Deuxièmement, que ce dernier phénomène risque de
s'accentuer, de s'accélérer plutôt que de s'atténuer
puisque, tant à l'école qu'au travail que dans l'environnement
culturel les forces de l'assimilation vont croissant. Il y a là un
phénomène d'accélération historique auquel aucun
Québécois digne de ce nom ne peut demeurer
indifférent.
Et enfin, troisièmement, il en ressort que le gouvernement du
Québec doit être blâmé pour son inaction, je dirais
même sa démission, devant les difficultés que lui posent
ces problèmes aigus de transfert linguistique.
Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député d'Anjou
M. Yves Tardif
M. TARDIF: Tout d'abord, je veux que cela soit bien clair que je
n'interviens pas comme représentant officiel du gouvernement; à
ce titre, je pense que j'ai un droit de parole limité à dix
minutes.
Dans le discours du...
LE PRESIDENT: Le côté ministériel a droit a 55
minutes, que vous pouvez vous partager.
M. LESSARD: Je ne veux pas empêcher mon collègue de parler
mais, étant donné que ses paroles seront probablement très
importantes, je constate que, malgré que nous ayons 102
députés libéraux, nous n'avons pas quorum.
M. HARDY: C'est votre chef qui les a fait fuir.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
L'honorable député d'Anjou.
M. TARDIF: M. le Président, en entendant le discours du chef de
l'Opposition, il est évident que celui-ci n'a pas tenu compte des
mesures que le gouvernement a prises, au cours des dernières
années. Mesures qui vont sans doute être expliquées plus
longuement, pour le bénéfice des six membres du Parti
québécois, par un autre orateur que moi, tout à
l'heure.
Toutefois, j'ai remarqué que le chef de l'Opposition avait
traité de certains sujets, dont la question de l'immigration. Ce n'est
un secret pour personne je l'ai déjà dit à plus
d'une reprise que, quant à moi, je suis tout à fait
d'accord sur le principe que les nouveaux arrivants éventuels devraient
être intégrés au système scolaire de langue
française, à tout le moins pour les niveaux primaire et
secondaire. Je l'ai dit à plus d'une reprise. Je l'ai dit en dehors de
la Chambre, il y a quelques années, et je pense que l'Opposition
admettra que je l'ai dit lors du discours en réponse au message
inaugural.
M. MORIN: C'est vrai.
M. TARDIF: Or, lorsque j'ai entendu les représentants du Parti
québécois, à plus d'une reprise, se prononcer sur cette
question, ils en ont toujours fait un principe et un dogme absolu. Us n'ont
jamais posé certaines conditions qui doivent exister
préalablement. Dans le discours que je prononçais au tout
début de cette session, j'avais mentionné cinq conditions qui,
à mon avis, doivent exister avant qu'on en arrive à
intégrer les nouveaux arrivants éventuels au système
scolaire de langue française aux niveaux primaire et secondaire. Je n'ai
certainement pas l'intention de détailler ces cinq conditions. Qu'on me
permette brièvement de les mentionner, à savoir:
premièrement, que la religion ne doit pas être un facteur, lors de
l'inscription à l'école; deuxièmement, que l'on doit
améliorer l'enseignement de l'anglais, comme langue seconde, au secteur
français; troisièmement, qu'on devra avertir les nouveaux
arrivants éventuels de ces nouvelles dispositions; quatrièmement,
qu'on devra améliorer la qualité du français qui est
enseigné à l'école primaire, secondaire et au niveau
collégial; et, finalement, peut-être ce qui est le plus important,
c'est qu'il va falloir modifier la mentalité de certains
Québécois vis-à-vis des immigrants.
Je pense que ce cinquième point est important, important à
un point tel que lorsque le ministre de l'Immigration a parlé sur cette
question, le 5 décembre 1973, il a dit ce qui suit: "Encore faut-il que
soit rempli un certain nombre de conditions; une attitude non équivoque
d'accueil et d'ouverture des Canadiens français envers les nouveaux
venus, une attitude coopérative et non ambiguë de ceux qui ont
quitté leur patrie et qui ont choisi de devenir des Canadiens vivant au
Québec, une collaboration harmonieuse des paliers de gouvernement, pour
que le Québec ait réellement les possibilités de
créer cette infrastructure que suggérait le premier ministre
Trudeau, qui fera que les gens voudront être francophones".
Je pense qu'on ne peut pas espérer de façon
réaliste intégrer les nouveaux arrivants si on ne remplit pas
certaines conditions préliminaires que j'ai mentionnées et
d'autres qui pourraient être ajoutées. En effet, je ne pense pas
que les conditions que j'ai mentionnées soient des conditions
exclusives; sans doute, d'autres personnes pourront apporter des conditions qui
devraient exister avant qu'on puisse passer à cette étape.
Je pense qu'il va falloir éventuellement en arriver à
intégrer les nouveaux arrivants au secteur scolaire francophone aux
niveaux primaire et secondaire, mais il ne faudrait tout de même pas
oublier et le ministre de l'Educa-
tion l'a dit, au début de la session, ainsi que le ministre de
l'Immigration qu'avant de pouvoir faire cela, il fallait implanter
certaines structures de façon à favoriser le but qu'on recherche.
C'est bien beau de demander à ces gens de s'intégrer ou de les
forcer à s'intégrer au système français, mais si on
en arrive au résultat que le nombre des nouveaux arrivants va continuer
à décroître, je pense que, considérant le fait que
la natalité, également, décroît au Québec, on
va arriver au but contraire à celui qu'on recherche.
Je pense que ce n'est pas tout à fait honnête, de la part
du Parti québécois, de toujours prôner cette
intégration sans mentionner certaines conditions. Ces conditions
n'étaient pas des conditions qui pouvaient se concrétiser du jour
au lendemain. Les structures qu'il fallait mettre en place, on n'a pas pu les
mettre en place du jour au lendemain.
Nous sommes arrivés au pouvoir en 1970, après quatre ans
dans l'Opposition, et on ne pouvait pas tout faire du jour au lendemain.
Je suis convaincu que, d'ici peu, le gouvernement va prendre des
mesures, que je ne connais pas parce que je ne fais pas partie du cabinet,
destinées à favoriser de façon concrète, de
façon tangible, de façon convenable l'intégration des
immigrants au secteur scolaire, aux niveaux primaire et secondaire.
J'endendais le chef de l'Opposition parler de transferts linguistiques.
Il a mentionné le chiffre de 25,000, chiffre qu'il aurait pris dans le
journal La Presse d'il y a environ deux semaines. Il y a une chose qui me
surprend toujours de la part du Parti québécois, c'est que,
nécessairement, on semble vouloir faire une équation entre les
gens de langue française qui fréquentent le secteur anglais
à l'école et les gens qui vont devenir nécessairement des
personnes assimilées.
Le chef de l'Opposition me fait signe que non, mais il ne semble pas
avoir expliqué suffisamment cette question. Il y a d'autres facteurs,
tels que les mariages mixtes qui n'a pas été un facteur
retenu par le chef de l'Opposition et que le ministre de l'Education a
déjà mentionné lors d'un discours au début de cette
session qui constituent, eux, un facteur d'assimilation peut-être
plus grand.
Ce n'est pas parce qu'une personne fréquente une école de
langue anglaise, alors qu'elle est elle-même canadienne-française,
qu'elle va devenir nécessairement une anglophone. Je pense qu'on en a
certains exemples en cette Chambre. Même le chef de l'Opposition a
fréquenté des établissements scolaires de langue anglaise.
Est-ce que c'est une personne qui a été anglicisée? Je ne
le sais pas. C'est à lui de répondre à cette question. Il
y en a d'autres également en cette Chambre qui ont été
à McGilI. Je pense que, la semaine dernière, il y avait justement
une espèce de rencontre des anciens de McGill ici. Il y avait un bon
nombre de Canadiens français là-dedans. Est-ce que l'on peut
prétendre que ce sont des personnes qui sont assimilées? Je ne le
pense pas. En effet, je connais ces personnes, il y en a qui sont ici, et il
n'y a aucun doute sur le fait que ces personnes sont demeurées des
francophones.
Il y a peut-être toutefois, et je l'admets, une distinction
à faire distinction que n'a pas faite le chef de l'Opposition
entre les Canadiens français qui sont ici et les nouveaux
arrivants. Pour les Canadiens français qui sont ici, aller à
l'école anglaise constitue un facteur secondaire d'assimilation parce
que, lorsqu'ils retournent chez eux, ils vivent sans doute en français.
Les media écrits ou parlés qu'ils lisent ou écoutent sont
souvent en langue française. A ce moment-là, ils
réussissent, néanmoins, à baigner dans un climat où
le français est prédominant. La question est peut-être
différente, toutefois, en ce qui concerne les nouveaux immigrants qui
n'ont pas le français ou l'anglais comme langue première, parce
que ces gens-là, s'ils parlent une troisième langue, doivent
nécessairement choisir soit l'anglais ou le français quand ils
arrivent ici.
C'est pour cette raison que je pense que le Parti
québécois, qui propose que les francophones fréquentent
obligatoirement l'école française aux niveaux primaire et
secondaire et, sans doute, au niveau collégial, fait fausse route. Le
but qu'il recherche ne sera certainement pas atteint de cette façon. Des
personnes m'ont dit qu'étant donné qu'elles voulaient que leurs
enfants apprennent, de façon convenable, l'anglais, elles seraient
presque forcées, pour ainsi dire, si cette loi que le Parti
québécois voudrait proposer était adoptée,
d'envoyer leurs enfants en Ontario ou aux Etats-Unis pour que ceux-ci
apprennent l'anglais.
Pour conclure, j'ai l'impression que toute cette question, on va avoir
l'occasion d'en discuter au cours des prochains mois encore là,
je ne suis pas dans le secret du cabinet, je l'admets avec
sobriété et pondération. Je donne le crédit au chef
de l'Opposition d'avoir utilisé un ton sobre, un ton
pondéré, un ton réservé. Mais il y a tout de
même certaines personnes dans son parti qui font appel, bien souvent,
à des sentiments. Je n'ai pas besoin de les nommer, mais j'ai
déjà vu le député de Saint-Jacques, qui parle
souvent de cette question, sur un ton chargé de sentiments et
d'émotivité. Je ne pense pas que sur une telle question on doive
discuter avec émotion ou avec des sentiments qui sont trop aigus, sinon
on va dresser l'un contre l'autre deux grands secteurs de la population; un
secteur qui représente tout de même 20 p.c. de la population et
qui a des droits, c'est indéniable nous, du Parti libéral,
nous reconnaissons ces droits aux 20 p.c. de gens qui ne sont pas francophones
et l'autre secteur formé de Canadiens français à 80
p.c.
Pour cette raison, M. le Président, considérant ce qui a
été fait durant ces trois dernières années et
demie, considérant les structures, les
centres d'accueil qui ont été mis en place, je
prétends que la motion du chef de l'Opposition est mal fondée et
qu'elle doit être rejetée.
LE PRESIDENT: Vote? DES VOIX: Vote!
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: M. le Président, une entrée en matière
trop répandue en cette Assemblée voudrait que je vous dise
d'abord à quel point il s'agit d'un thème délicat qu'on
doit aborder avec une circonspection débordante de nuance et de
sobriété. J'ai même entendu, depuis que je suis en Chambre,
certains pleutres nationaux dissimuler leur propre inconsistance et aller
jusqu'à prétendre qu'aucun parti, en cette Assemblée,
n'avait de position claire et précise sur cette question, qu'il est de
bonne rhétorique, d'ailleurs, de qualifier d'épineuse. D'autres
nous ont laissé entendre qu'il est presque impossible de trancher et de
choisir. C'est à croire, M. le Président, que la langue et que la
culture échapperaient à la politique.
En effet, la lâcheté de plusieurs d'entre nous a d'abord
voulu dissimuler la question. Il n'y a pas de problème linguistique au
Québec, a-t-on souvent entendu dire, et s'il y en a un, nous sommes
impuissants à intervenir. Lorsque le gouvernement fédéral,
par la commission Lau-rendeau-Dunton, a établi le caractère
politique de ce sujet et l'a rangé parmi les champs d'intervention
possible de l'Etat, il est bien clair que cette dissimulation devenait
impossible. Politiques que nous sommes, nous acquérons malgré
nous, dans plusieurs cas, le droit d'en parler.
Le second pas de l'hypocrisie a voulu que nous n'ayons cependant pas le
droit d'agir. Politiciens, nous pouvons parler de la langue, parlementaires,
nous pouvons parler de la langue, mais parlementaires aussi, nous ne pouvons
pas et nous ne devons pas intervenir. Si nous en parlons, c'est pour nous dire
constamment que ce que nous avons fait est déjà amplement
suffisant et qu'il faut être très circonspect dans ce qu'il nous
reste à faire.
En effet, selon ces tenants de cette opinion, la langue ne serait pas
une matière où on intervient avec des lois. Cette devise de
l'impuissance est encore servie avec régularité sur toutes les
tribunes, y compris celle que vous présidez, M. le Président,
depuis que ce gouvernement est à votre droite. Et pourtant, la ferme
démission et la solide négligence du laisser-faire s'est
trouvée, depuis quelque temps, des paravents bien meilleurs.
Comment prétendre que la langue n'est pas un objet de
législation ou, plus subtilement, que la législation est
inopérante en ces matières alors qu'on se refuse à
modifier la législation existante, constitutionnelle ou statutaire,
accordant ainsi à certains groupes les garanties légales qu'on
refuse à d'autres? Les minorités ont bien senti, elles, M. le
Président, tout ce qu'une loi pouvait leur apporter. C'est pourquoi
elles ont insisté auprès des deux vieux partis politiques
traditionnels, dont un est maintenant mort, M. le Président, pour qu'une
loi vienne garantir leurs droits.
Comment prétendre alors qu'une loi ne pourrait pas, à son
tour, garantir les droits de la majorité? Comment prétendre
qu'une loi joue si peu, alors qu'on se gargarise, à tort et à
travers, en adoptant des lois très partielles, comme le bill 64 sur
l'immigration, il y a déjà quelque temps, ou le bill 71, qui n'a
fait qu'un simulacre de réforme de structures sur l'île de
Montréal, dans le domaine scolaire, ou de la législation
déléguée, par exemple, comme à travers le
règlement no 6 du ministère de l'Education? Comment dire qu'une
loi n'ait pas d'importance? Comment dire qu'une loi n'est pas la condition sine
qua non d'une action positive dans ce domaine et, en même temps, se
gargariser de n'importe quelle petite loi que ce gouvernement a frauduleusement
adoptée, à un moment ou à un autre, comme étant
l'étiquette d'une véritable politique linguistique?
Un des paravents dont s'est servi ce gouvernement que nous blâmons
ce matin a été l'enquête et l'expertise, M. le
Président. Le problème de la langue existe, admettait-on à
ce moment-là, mais sa solution n'est pas politique. On doit la chercher
avec la rigueur scientifique comme les données d'une question nouvelle
et méconnue.
Aussitôt qu'on abordait le problème c'était pour se
dire qu'il fallait poser des conditions, ajouter des nuances, élargir
les fossés, retrouver toujours, fois après fois, des raisons qui
justifieraient l'impuissance dans laquelle on s'était ancré et
qu'il était impossible de remettre en question.
On doit la chercher avec une rigueur scientifique, disait-on, comme les
données d'une question qui serait absolument nouvelle et
méconnue, faisant appel à des mécanismes institutionnels
complexes ou à des techniques novatrices. Dans cette technique de
stérilisation du problème, on a été jusqu'à
dire et combien de fois qu'il fallait, je l'ai encore entendu ce
matin, dépolitiser la question.
Si une ultime pudeur n'avait pas résisté à la
veulerie, on serait peut-être allé jusqu'à dire que le
gouvernement était étranger au problème et devait rester
étranger à sa solution.
Mais qu'est-ce donc que le champ de la politique, que l'objet du choix
politique qui préoccupe normalement les travaux de cette
Assemblée, s'il ne porte pas d'abord et avant tout sur un
élément aussi essentiel à la cohésion de la
société que nous représentons ici, aussi essentiel
à sa qualité de vie que cet Etat donne à une
société?
Ce débat sur la langue de notre peuple a
toujours été, dans notre histoire, au coeur du
débat politique. Et puisque le plus souvent il a été
nourri par des hommes qui refusaient la question à l'avance, en refusant
à l'avance une partie des réponses possibles, ce débat a
réussi à fausser, en grande partie, le reste de notre vie
politique.
Mais c'est d'abord sur ce terrain de l'affirmation culturelle et
ethnique que l'on mesure au Québec les partis et les groupes qui font
les propositions de vie à notre collectivité. Et, pourtant, on
vient encore nous dire ce matin qu'il nous faut éviter de politiser le
débat, de ne pas politiser la chose, comme on nous a dit d'attendre
pendant trois ans qu'un groupe d'hommes choisis non seulement connaissent, mais
aussi décident pour nous de la question linguistique, comme si le trait
qui nous unit et qui comme le signalait le chef de l'Opposition
par un paradoxe inimaginable, nous sépare en même temps, pouvait
être la préoccupation exclusive de cinq seulement de nos
concitoyens.
Je crois, quant à nous, que nous savons ce que c'est
qu'être Québécois. Nous nous sentons tels et nous voulons
nous le dire, nous l'imaginer, nous donner le spectacle d'une
collectivité encore capable de se reconnaître. Et c'est pourquoi,
tout en endossant cette motion de blâme présentée par le
chef de l'Opposition, j'ai aussi la fierté d'appartenir au seul groupe
politique qui, dans la vie politique des Québécois, a
accepté à l'intérieur de ses structures un débat
fondamental sur cette question fondamentale. C'est le seul également, en
dehors des paravents officiels et officieux que se sont donnés tour
à tour les manipulateurs du dossier linguistique dans ce gouvernement,
ceux qui ont été chargés tour à tour, par le
soubresaut de leur vocabulaire ou par des techniques plus disparates, de noyer
le poisson dans des formules comme celle du séparatisme culturel que
véhicule le chef de ce gouvernement le seul sur cette question
qui ait un programme clair, net et cohérent, et que nous sommes en
mesure de présenter aux Québécois.
Si une élection ou une consultation populaire sur cette seule et
unique question, si une élection générale ne devait pas en
même temps donner lieu à plusieurs jugements de plusieurs
façons et sur plusieurs côtés de médailles que peut
avoir la gestion politique d'une société, si pour une fois une
seule consultation devait porter sur l'entendement que les
Québécois ont de la protection de la langue, de ce lien qu'ils
ont entre eux, nul doute que ce gouvernement n'aurait en aucun temps l'appui
populaire dont il peut se targuer maintenant d'avoir.
Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Beauce-Sud.
M. Fabien Roy M. ROY: M. le Président, pendant les quinze minutes
qu'on a mis à ma disposition, je vais tenter de faire part de mon point
de vue et du point de vue de notre groupement politique sur ce problème
de la langue française au Québec.
Devant un problème aussi complexe et aussi important, et devant
la situation que nous devons envisager, situation aussi lourde de
conséquences, malheureusement je n'aurai pas le temps de faire le tour
d'horizon que j'aurais aimé faire autour de cette question.
M. le Président, pendant ces quinze minutes...
UNE VOIX: Vous pourriez parler plus vite.
M. ROY: M. le Président, est-ce que j'ai droit de parole, oui ou
non?
LE PRESIDENT: Messieurs, étant donné que c'est un
débat très restreint et limité dans le temps, j'aimerais
qu'on donne toute la latitude voulue au député qui a la
parole.
M. ROY: M. le Président, la motion de blâme
présentée par le Parti québécois comporte quand
même trois volets et je la cite: "Que cette Assemblée blâme
le gouvernement d'avoir négligé de prendre les mesures requises
pour faire du français, au Québec, la seule langue officielle..."
C'est une question. Il y a une deuxième question: "la langue de
travail"; il y a également une troisième question "... et la
langue d'enseignement pour les immigrants." M. le Président, en ce qui a
trait à la langue d'enseignement pour les immigrants, je ne surprendrai
personne et je n'apprendrai rien de nouveau ici à l'Assemblée
nationale en disant que c'est une mesure que nous avons réclamée
et que nous continuons de réclamer. Que le gouvernement prenne les
mesures qui s'imposent pour faire en sorte que les immigrants qui viennent
s'établir au Québec doivent s'inscrire dans les écoles
françaises et que ces immigrants le sachent avant de partir de chez eux,
qu'ils sachent très bien ce à quoi ils «'engagent, ce
à quoi ils devront se soumettre en arrivant dans la province de
Québec.
M. le Président, il fut un temps, et un temps qui n'est pas
encore tellement éloigné, où les giands centres urbains,
les grands centres métropolitains augmentaient leur population par une
immigration qui arrivait des milieux ruraux du Québec, des milieux
typiquement canadiens-français, typiquement québécois. A
cause du taux de dénatalité que nous connaissons, cette
croissance démographique de nos grandes métropoles, de nos grands
centres urbains doit être faite en partie et une partie de plus en
plus grande en recourant à l'immigration. C'est justement
là un danger très grand que nous courons si le gouvernement ne
prend pas ses responsabilités dans ce domaine pour faire en sorte que
les immigrants qui arrivent au Québec soient tenus de s'inscrire dans
les écoles françaises.
M. le Président, si nous avions à émigrer en
Allemagne ou en Italie, il est évident que ce n'est pas parce que
nous arriverions du Québec qu'on nous donnerait des écoles
françaises. Nous devrions nous inscrire dans des écoles
italiennes en Italie, dans des écoles allemandes en Allemagne. Ce serait
tout simplement normal et naturel. Alors, qu'on fasse donc la même chose
dans la province de Québec. Je pense qu'il est important que le
gouvernement prenne ses responsabilités dans ce domaine et qu'il agisse
dans les plus brefs délais. Parce que, si le gouvernement continue
à patiner, s'il continue à hésiter, le temps, à
l'heure actuelle, joue contre nous dans ce domaine. Nous allons être
très bientôt à une croisée des chemins où
nous devrons nous demander: Est-ce que nous capitulons de façon
définitive ou si nous sommes encore prêts à faire quelque
chose pour garder notre culture et notre langue dans la province de
Québec?
Sur ce point, le gouvernement est à blâmer et j'appuierai
la motion de blâme du Parti québécois parce que le
gouvernement n'a rien fait dans ce domaine. Les quelques petites tentatives
qu'il a cru faire je dis bien qu'il a cru faire n'ont
été que des mesures qui n'ont eu pour conséquence ou pour
effet que de retarder le problème et de retarder le débat.
M. le Président, en ce qui a trait à la langue de travail,
il est inconcevable qu'on oblige des travailleurs au Québec, dans leur
province, dans leur patrie, lorsqu'il s'agit de travaux manuels, de travaux
d'ouvriers dans des chaînes d'assemblage, à apprendre la langue
anglaise pour être capables de gagner leur vie dans leur province, alors
que la langue de la majorité est bien la langue française. Sur ce
point, il est temps que le gouvernement prenne ses responsabilités, que
le gouvernement adopte des mesures énergiques de façon à
s'assurer que les droits de la majorité, les droits des francophones du
Québec soient respectés. Je me souviens trop, il y a 25 ans,
alors que j'étais à l'emploi de certaines compagnies
papetières au Québec, que nous devions travailler en
anglais...
M. BACON: Nommez-les!
M. ROY: Je pourrais les nommer, mais je n'ai pas besoin de les nommer,
parce que le député connaft très bien ces compagnies
papetières. Nous devions donc utiliser la langue anglaise en pleine
province de Québec, dans des entreprises et dans des compagnies qui
avaient reçu du Québec les droits exclusifs d'exploiter les
richesses naturelles, les forêts du Québec.
M. le Président, nous avons vécu cela et il n'y a pas
tellement longtemps, c'est une chose qui existait encore. Heureusement, de ce
côté-là, il y a des compagnies qui ont quand même, je
le dis bien, il y a des compagnies qui ont quand même apporté
quelques réformes, quelques modifications, de façon à
corriger la situation. Lorsqu'on voulait être comptable ou être
commis, pour une compagnie forestière dans la province de Québec,
alors que ces compagnies détenaient les droits de coupe de notre
patrimoine national, si on n'était pas bilingue, on n'était pas
capable de travailler dans la comptabilité.
On n'était pas capable de travailler dans une petite job de
commis. C'était la situation où nous nous trouvions dans la
province de Québec, oui, dans la province de Québec, non pas dans
la province de l'Ontario; alors, il commence à être temps que le
gouvernement se réveille de ce côté-là et, lorsqu'on
accorde des concessions, que ce soit des concessions forestières, des
concessions minières, pétrolières ou autres, à
même le patrimoine national, à même les richesses de la
province de Québec, que le gouvernement ait donc le courage de mettre
certaines clauses de façon à protéger les travailleurs de
la province de Québec, de façon à protéger les
citoyens de la province de Québec, afin qu'ils puissent gagner leur vie
dans leur langue, dans leur patrie, surtout lorsque les entreprises
internationales, les entreprises multinationales, américaines ou
anglaises, viennent chez nous pour exploiter nos richesses naturelles, alors
qu'on sait très bien que leur objectif premier n'est pas de créer
des emplois au Québec, mais bien de faire des profits à nos
dépens.
Or, sur ce point également, le gouvernement est à
blâmer de ne pas avoir pris des mesures, le gouvernement est à
blâmer de ne pas avoir agi et de ne pas agir, et surtout lorsqu'on
regarde la politique économique du gouvernement libéral actuel
que nous avons au Québec, alors qu'il rampe à New York, aux
Etats-Unis, qu'il rampe un peu partout, pour tâcher de solliciter,
d'inviter les entreprises multinationales à venir s'établir dans
la province de Québec, à n'importe quel prix, même avec des
subventions, des exemptions d'impôts, des exemptions de taxes, toutes
sortes de privilèges, M. le Président, on a le droit d'être
inquiet et de se poser des questions.
Alors, sur ce point, M. le Président, le gouvernement est
à blâmer, mais je mets une réserve. Il faudrait quand
même aussi, et c'est pour ça que je dis, dans le peu de minutes
que j'ai à ma disposition, que c'est très difficile de faire le
tour de ce sujet important, il faudrait que, dans certaines entreprises
secondaires que nous avons au Québec, j'en ai dans mon comté, des
entreprises qui sont la propriété des gens de chez nous, qui sont
possédées et dirigées par les nôtres,
administrées par les nôtres, mais qui quand même font un
chiffre d'affaires important et qui exportent leurs produits dans la proportion
de 90 p.c. et de 95 p.c. aux Etats-Unis, il faudrait, M. le Président,
dis-je, faire quand même certaines distinctions de façon à
ne pas limiter les entreprises du Québec au seul marché
québécois.
A ce moment-là, ce serait une perte, ce serait un
désavantage terrible et lourd de conséquences vis-à-vis
des Québécois. C'est pourquoi je dis
qu'il y a des distinctions à faire et c'est pourquoi sur ce point
je tiens quand même à apporter une certaine réserve. Il y a
des points où telles mesures s'appliquent, dans d'autres domaines, il y
a d'autres mesures qui s'appliquent. D va falloir quand même que le
gouvernement fasse certaines distinctions, qu'il voie à adopter les
politiques nécessaires face aux situations qui se présentent en
tenant compte de leurs particularités, en tenant compte de la
région où ils se trouvent, en tenant compte du contexte
économique et social du milieu.
M. le Président, on pourrait parler également des
politiques du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre et je suis
assez bien placé pour en parler. Le gouvernement provincial refuse
à des travailleurs de mon comté, de ma région, le droit de
travailler dans la province de Québec et ces gens-là sont
obligés de s'expatrier et d'aller travailler aux Etats-Unis, parce que
le ministère du Travail et de la Main-d'oeuvre a émis les fameux
permis de travail contre lesquels nous avons lutté, et nous continuerons
de lutter contre ce droit abusif...
M. BACON: La pertinence du débat.
M. ROY: ... à l'endroit des travailleurs; ce droit de travailler
dans sa province, c'est le gouvernement provincial qui le refuse et on oblige
les gens de mon comté et de ma région à s'expatrier aux
Etats-Unis. Cela est un autre point, quand on parle de la langue
officielle...
M. BACON: La pertinence du débat.
M. ROY: ... la langue de travail. On devrait, sur ce point particulier,
par un ensemble de politiques non seulement au sein du ministère du
Travail, non seulement au sein du ministère de l'Education, du
ministère de l'Immigration, du ministère des Affaires
culturelles, mais par un ensemble de politiques gouvernementales, faire en
sorte que les Québécois d'expression française puissent
continuer à être chez eux dans la province de Québec.
Ils devraient être capables d'exploiter une petite entreprise dans
la province de Québec, être en mesure d'être
propriétaires dans la province de Québec, être en mesure de
travailler dans la province de Québec. M. le Président, je
déplore et je le dis, nous déplorons qu'à l'heure
actuelle, le gouvernement du Québec ne se penche pas suffisamment sur
ces questions et on est en train, par toutes sortes de mesures, parce qu'on
regarde trop haut, parce qu'on est monté trop haut dans les nuages, de
regarder les grandes politiques, les grands investissements, les grands
emplois, les grandes entreprises, pendant le temps qu'on travaille à ce
palier, on assiste à la dépossession du sol, la
dépossession de nos petites entreprises, la dépossession de nos
propriétés. Les Québécois ont à faire face
à cette dépossession parce que de plus en plus, un nombre de plus
en plus grand de Québécois sont de moins en moins
propriétaires et doivent céder leurs
propriétés.
J'ai ici dans les mains un extrait du rapport Parent, tome II, page 621,
qui a paru en 1962, et je le cite à l'intention de l'honorable ministre
de l'Education et de l'honorable ministre des Affaires culturelles
également.
Voici ce que l'on dit: "Le gouvernement du Québec, tout entier,
doit, tout en veillant à ne pas isoler le Québec en un ghetto,
adopter des mesures très fermes pour protéger le français
non seulement dans les écoles et universités, mais dans toute la
vie publique." Et c'est sur ce point que nous insistons. Et on ajoute: "C'est
particulièrement urgent à Montréal..." Et le ministre le
sait et les députés de la région de Montréal le
savent également, toute la population le sait. "L'administration
provinciale et les services publics, la vie industrielle et commerciale,
l'affichage doit témoigner de ce respect de la langue de la
majorité québécoise. Il y a là une question de
justice et d'honneur. Aucun écolier ne prendra le français au
sérieux à l'école si à Montréal,
particulièrement, les ouvriers, administrateurs et hommes d'affaires
sont obligés de parler anglais dans leur travail quotidien ou pour
obtenir une promotion. Dans le Québec, une excellente connaissance du
français devrait être tout aussi nécessaire pour
réussir en affaires. Cette motivation socio-économique doit
être le point d'appui de la réforme que nous proposons pour
l'enseignement de la langue maternelle de la majorité."
Et j'ajoute sur ce point que la majorité au Québec a des
droits et parmi les droits que nous avons au Québec, si nous voulons
justement que la présence française puisse continuer à
survivre en Amérique, il faudra que nous ayons un gouvernement qui cesse
d'être à la remorque des autres et de ramper devant les
entreprises multinationales et les entreprises commerciales. Il est urgent
qu'on travaille de ce côté, qu'on agisse en ce sens.
Et c'est pourquoi sur les deux premiers points, je dis que j'appuierai
la motion du Parti québécois pour blâmer le gouvernement
parce qu'il est à blâmer de ne pas avoir pris les mesures
nécessaires de façon à améliorer la situation.
En ce qui a trait à la seule langue officielle, sur ce
troisième point, j'ai des réserves. On sait que la langue
officielle est une chose automatique lorsque les deux autres questions sont
réglées. Et je me demande à ce moment si on pense
réellement à la présence française en
Amérique, si on pense également à nos cousins du
Nouveau-Brunswick, de l'Alberta et du Manitoba parce que nous avons quand
même des populations qui proviennent du Québec dans ces
régions et comme nous faisons partie de la Confédération
canadienne, nous avons des droits à la grandeur du Canada. Si à
ce moment, on faisait preuve d'intolérance de façon aussi
radicale sur ce point, je dis que j'ai des réserves. J'aimerais avoir
beaucoup plus de temps pour
pouvoir parler plus longuement et discuter de cette question. J'ai des
réserves à ce stade-ci et sur ce point, je tiens à les
exprimer.
Si on décidait demain matin d'être intransigeant sur cette
question, et je pose la question à mes honorables collègues du
Parti québécois: Est-ce qu'à ce moment, vous n'ouvrez pas
la porte et que vous ne justifiez pas certaines Législatures
provinciales et le gouvernement fédéral à être aussi
radicaux vis-à-vis de la minorité française.
On sait qu'il y a un parti souverainiste, un parti séparatiste
qu'on appelle le Parti acadien au Nouveau-Brunswick, qui est en quelque sorte
le cousin ou le frère siamois du Parti québécois dans la
province de Québec, et qui travaille également au
Nouveau-Brunswick pour tâcher de permettre aux Acadiens, de permettre aux
francophones de cette région d'avoir des droits au moins égaux
comme point de départ à ce sujet.
M. le Président, je demanderais, au terme de mon exposé,
qu'on prenne trois votes différents sur la motion du Parti
québécois, étant donné qu'il y a trois questions
complètement différentes, qui requièrent des observations
nuancées. On ne peut pas faire, je le pense sincèrement, un genre
de "package deal" dans ce domaine.
M. le Président, je soumets respectueusement cette suggestion. Je
demanderais aux gens du Parti québécois de l'examiner avec toute
l'attention possible, de façon que lors du vote, on permette aux
différentes formations politiques de l'Assemblée nationale du
Québec de faire connaître leur point de vue sur chacun de ces
sujets.
J'aimerais voir le gouvernement se prononcer uniquement sur la question
de la langue des immigrants, j'aimerais voir le gouvernement se prononcer
uniquement sur cette question. Le gouvernement peut inventer d'autres raisons
pour ne pas voter, mais j'aimerais quand même savoir ce que le
gouvernement pense uniquement sur cette question. J'aimerais également
savoir ce que le gouvernement pense sur la question du français langue
de travail au Québec.
M. le Président, je termine là-dessus mes observations et
je demande encore une fois qu'il y ait trois votes différents sur cette
question.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de l'Education. Vous pouvez parler
jusqu'à une heure moins dix.
M. François Cloutier
M. CLOUTIER: Je vous remercie, M. le Président. La motion de
blâme de l'Opposition officielle se présente singulièrement
comme une motion dilatoire.
Nous avons eu, récemment, un débat sur cette très
importante question de la langue au Québec. Je trouve que le fait d'y
revenir aussi rapidement laisse planer des doutes sur la
sincérité du Parti québécois en cette
matière. Je n'hésite pas à le dire, d'autant plus que la
motion s'inscrit dans le cadre d'un "filibuster", "filibuster" qui a
été traité par un éditorialiste, récemment,
de vaudeville et de grand guignol. De toute façon, le débat,
jusqu'ici, si j'excepte, bien sûr, l'intervention du député
d'Anjou, a été d'une faiblesse insigne et certainement
très au-dessous de l'importance du sujet.
Je crois que le problème du français au Québec a
une importance telle, qu'il faut l'aborder avec sérénité,
mais également dans un cadre qui se prête à des discussions
de fond. C'est une discussion de fond que j'ai l'intention d'entreprendre
aujourd'hui.
M. le Président, rapidement, je voudrais disposer de
l'argumentation qui a été présentée par les trois
membres de l'Opposition qui sont intervenus. Le chef de l'Opposition qui
semblait, à certains moments, confondre l'Assemblée nationale
avec une salle de cours, nous a présenté...
M. LESSARD: Noyez le poisson dans le verbiage.
M. CLOUTIER: ... dans son style habituel, un exposé
statistique...
M. LESSARD: Noyez le poisson dans le verbiage.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. CLOUTIER: ... non dépourvu d'intérêt. Il sera
peut-être étonné de savoir que j'accepte d'emblée
toutes les statistiques qu'il a citées, à l'exception de
l'article de la Presse qui était tendancieux et qui ne se fondait
peut-être pas sur des chiffres absolument précis et bien
interprétés.
C'est donc dire que, pour moi, tout ce qu'a dit le chef de l'Opposition
est déjà acquis. Le gouvernement a, depuis le début de son
mandat, clairement indiqué que le problème linguistique se posait
et qu'il avait l'intention d'intervenir d'une façon rigoureuse. Si le
chef du Parti québécois veut s'acharner à prouver ce qui
est déjà acquis, libre à lui, mais je n'ai certainement
pas l'intention de me laisser entraîner sur ce terrain. D'ailleurs, en
cours de route, j'aurai probablement la possibilité de revenir sur
certaines autres de ses affirmations, parce qu'il reste que le discours qu'il a
fait, malgré ses limites, comporte tout de même un certain nombre
d'idées qui méritent d'être retenues.
Quant au député de Saint-Jacques, j'ai été
assez étonné, M. le Président, pour ne rien vous cacher,
de le voir lire un texte. C'est la première fois, je crois, depuis qu'il
a l'honneur de siéger dans cette Assemblée. Ceci l'a d'ailleurs
privé, semble-t-il, de ses moyens habituels. Il a été
beaucoup moins éloquent qu'il ne l'est en général.
Serait-ce, M. le Président, qu'on a décidé de le mettre au
pas et qu'on a préféré lui donner un texte pour
l'empêcher d'aborder sur
un ton trop démagogique cette question de la langue?
M. MORIN: Venons-en au problème.
M. CLOUTIER: Si tel est le cas, j'en félicite le chef de
l'Opposition.
M. MORIN: Venons-en au problème.
M. CLOUTIER: C'est, en effet, la première fois que j'entends le
député de Saint-Jacques...
M. LESSARD: ... d'un ministre qui ne prend pas ses
responsabilités.
M. CLOUTIER: ... parler intelligemment du problème
linguistique.
M. LESSARD: ... d'un ministre qui ne prend pas ses
responsabilités.
M. CLOUTIER: C'est la première fois que je ne le vois pas tenter
de stimuler les passions et le fanatisme. Peut-être sommes-nous à
l'orée d'un nouveau débat qui se ferait enfin en tenant compte de
la réalité québécoise et non des aspirations ou des
rêves de petits groupes.
UNE VOIX: C'est vrai.
M. LESSARD: Noyez le poisson, comme d'habitude.
M. CLOUTIER: Enfin, M. le Président... M. LESSARD: Noyons le
poisson.
M. CLOUTIER: ... le député de Beauce-Sud, le
député indépendant de Beauce-Sud...
M. ROY: M. le Président, je tiens à rectifier l'honorable
ministre de l'Education, et j'invoque une question de règlement. Pour
l'information du ministre, qui ne semble pas au courant des nouvelles, nous
nous sommes présentés sous l'étiquette du Parti
créditiste et c'est comme tel que nous avons été
élus...
M. BACON: Non, non, non !
M. ROY: ... et c'est comme cela que nous allons siéger...
DES VOIX: Dupuis!
M. ROY: à l'Assemblée nationale, que cela plaise...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, messieurs!
M. ROY: ... ou non au gouvernement ou au ministre de l'Education.
M. CLOUTIER: Je m'excuse, M. le Prési- dent, le
député indépendant rattaché au Parti
créditiste a voulu mêler sa voix au débat. Il l'a fait
d'une façon intéressante, je crois, bien que je n'aie pas
toujours pu saisir exactement le cheminement de sa pensée. Je me suis
demandé, à certains moments, s'il ne ferait pas mieux de
s'inspirer de son ex-chef et de nous parler de la personne humaine. Je dois
dire, d'ailleurs, que je regrette de ne plus entendre parler de la personne
humaine, depuis quelque temps, sur ce ton un peu curieux qu'adoptait l'ancien
chef... ou est-ce le chef présent du Parti créditiste? J'avoue
qu'on se mélange un peu dans tous ces avatars.
M. MORIN: Au point, au point, s'il vous plaît!
M. CLOUTIER: Je ferai remarquer au chef de l'Opposition, qui
m'interrompt en me demandant d'en arriver au point, que je suis ici pour faire
de la politique et non pour donner des cours.
M. LESSARD: ... des cours.
M. CLOUTIER: De la politique, cela ne se fait pas
nécessairement...
M. LESSARD: Il serait peut-être mieux de donner des cours, M. le
Président...
M. CLOUTIER: ... avec des statistiques, cela se fait
également...
M. LESSARD: ... que faire des choses comme ça.
M. CLOUTIER: ... avec des...
DES VOIX: A l'ordre!
M. LESSARD: Faites-en, de la politique.
M. CLOUTIER: ... prises de position...
M. LESSARD: Prenez vos responsabilités.
M. BEDARD (Chicoutimi): Arrêtez de faire de la politique avec la
langue.
M. CLOUTIER: ... pour mettre en évidence, l'action
gouvernementale.
M. MORIN: De la vraie politique, pas de la petite politique.
M. VEILLEUX: M. le Président, question de règlement. Je
m'excuse auprès du ministre de l'Education. Pourriez-vous demander au
député de Saguenay d'arrêter de croasser en
arrière?
M. LESSARD: Allez donner des cours, cela va être bien plus
utile.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît! ...
M. VEILLEUX: Le "backbencher" du parti séparatiste !
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. VEILLEUX: M. le Président, une question de
règlement.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): J'ai entendu votre question...
M. VEILLEUX: Pour une fois qu'on entend un discours qui a de l'allure,
demandez donc au député de Saguenay de se taire.
M. CLOUTIER: M. le Président, maintenant que j'ai disposé
des interventions de l'Opposition, maintenant que j'ai pu mettre en
évidence leur insuffisance dans un débat d'une telle
importance...
M. LESSARD: C'est ridicule.
M. CLOUTIER: ... je voudrais, dans une optique que je souhaite la plus
positive possible, vous parler de ce qu'a fait le gouvernement.
Je serai amené à répéter...
M. LESSARD: Un homme vous écoute.
M. CLOUTIER: ... un certain nombre de choses que j'ai dites. Mais il est
nécessaire de le faire pour bien manifester que cette volonté
d'intervention a été clairement indiquée dès le
début de notre premier mandat.
Une politique linguistique ai-je besoin d'y revenir? ne
peut être conçue dans l'abstrait. Elle doit tenir compte d'un
certain nombre de dimensions. Nous avons toujours voulu politiser, au meilleur
sens du terme, le débat linguistique mais non pas en faire le lieu de
rencontre de l'intolérance et de la discrimination. C'est la raison pour
laquelle nous avons tenu compte d'un certain nombre de contraintes...
M. LESSARD: Ne rien faire.
M. CLOUTIER: ... que tout gouvernement responsable doit respecter s'il
veut arriver avec des politiques qui collent à la réalité,
qui tiennent compte de la réalité et qui, également,
permettent de faire évoluer cette réalité.
La première de ces contraintes, c'est le fait que le
Québec est situé au Canada et en Amérique du Nord. Je
m'excuse de ce truisme, mais j'ai parfois l'impression que certains membres du
Parti québécois n'en sont pas conscients, que certains membres du
Parti québécois s'imaginent...
M.MORIN: Hélas!
M. CLOUTIER: ... que le Québec est une île...
M. MORIN: Hélas!
M. CLOUTIER: ... complètement isolée. C'est un ghetto que
vous voulez? C'est un ghetto que vous nous préparez?
M. MORIN: Allons donc!
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
Nous avons assez d'endurer le caquetage du député complexé
de Saguenay lorsqu'il est assis à son siège, voulez-vous lui
demander ou d'aller à son siège pour se faire entendre, suivant
le règlement, ou de se taire lorsqu'il fume derrière votre
fauteuil? Et gardez-le à l'oeil!
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Je suggérerais au
député de Saguenay de transmettre ses remarques au
député de Sauvé, qui aura un droit de réplique d'au
moins cinq minutes. Il pourra dire ce qu'il veut, à ce
moment-là.
M. CLOUTIER: M. le Président, je reviens donc à cette
première contrainte, qu'on peut ne pas aimer, mais qui existe pour tout
esprit qui se donne la peine de réfléchir. Cette contrainte veut
que le Québec, participant au réseau d'échanges
économiques nord-américain, n'a pas la latitude d'intervenir
comme le ferait un pays homogène sur le plan linguistique et
isolé de ses voisins sur le plan économique.
La deuxième contrainte, c'est que la population
québécoise n'est pas contrairement à ce que
certains semblent croire une population monolithique. J'emploie parfois
des grands mots mais c'est pour donner le change au chef de l'Opposition. C'est
pour montrer que nous aussi, à l'occasion, nous pouvons utiliser ce
vocabulaire.
M. MORIN: Je ne doute pas qu'un psychiatre connaisse des mots encore
plus complexes.
M. CLOUTIER: Mais, comme nous préférons être compris
par la population, nous n'avons pas peur de parler simplement.
Cette population québécoise est devenue une mosaïque.
Il est possible qu'aux premiers temps de l'implantation de la Nouvelle-France
vous voyez qu'à l'occasion je peux aussi faire des rappels
historiques nous nous soyons trouvés en présence d'une
population beaucoup plus homogène. Mais ce n'est plus le cas aujourd'hui
et le Québec est composé d'une majorité de parlants
français, mais d'une très importante minorité de parlants
anglais, laquelle se rattache d'ailleurs à une majorité dans
l'ensemble canadien.
Parmi ces parlants anglais, il y a un bon nombre de citoyens du
Québec, qui sont venus enrichir notre culture et qui appartiennent
à
divers groupes ethniques. Soit dit en passant, c'est une erreur de
s'imaginer que ceux que l'on appelle les Néo-Québécois...
Personnellement, je n'aime pas cette expression, parce que, pour moi,
aussitôt que quelqu'un est venu au Québec, il est
Québécois. Il n'y a pas de Néo-Québécois.
Qu'ils soient ici depuis dix ans, vingt ans, trente ans ou deux siècles,
il s'agit de citoyens d'une même province qui veulent construire l'avenir
ensemble.
Par conséquent, on ne peut concevoir une politique linguistique
qui ne tiendrait pas compte, précisément, de cette structure
démographique. On ne peut imaginer une politique linguistique qui serait
destinée uniquement à une fraction de la population, serait-ce
une fraction majoritaire. Je dirais qu'il n'y a pas là seulement une
question de justice, M. le Président, une question
d'équité élémentaire, mais une simple question de
bon sens et d'efficacité.
L'expérience de bien d'autres pays, car il n'y a pas que le
Canada à connaître des problèmes d'ordre linguistique,
démontre que, pour qu'une politique dans une telle matière puisse
être applicable, il faut qu'elle tienne compte de façon
extrêmement étroite des différents groupes qui composent la
population.
Par conséquent, c'est la perspective dont il faut s'inspirer dans
la définition de toute politique. Qu'a été, M. le
Président, le cheminement du gouvernement? Le gouvernement a agi
à deux niveaux. A un premier niveau, il a, chaque fois que l'occasion
s'en présentait, inscrit dans des textes législatifs ou dans des
réglementations une priorité réelle donnée au
français. Est-il besoin de revenir sur ces nombreuses mesures? Il y en a
une dizaine. Le député de Saint-Jacques a cité la loi 64,
qui concernait les professionnels immigrants. C'est, en effet, la
première loi, loi du ministère de l'Immigration, qui inscrivait
cette priorité dont je viens de vous parler et c'est très
certainement une loi historique de ce point de vue.
Je pourrais ajouter tout un ensemble de mesures législatives ou
réglementaires qui vont de simples directives administratives en
matière de communications entre l'Etat et les citoyens jusqu'à
certaines mesures concernant le contenu français à donner
à des programmations, concernant la façon dont les contrats
doivent être rédigés, etc.
Le gouvernement n'a jamais prétendu que ces mesures ponctuelles
constituaient une politique linguistique en soi. Et je vous défie de
trouver la moindre déclaration à cet effet. Il est clair que des
mesures ponctuelles, toutes utiles qu'elles puissent être, toutes
nécessaires qu'elles puissent être, toutes efficaces qu'elles
puissent être, ne constituent pas en soi une approche suffisante pour
apporter des solutions valables au problème à long terme qu'est
le problème linguistique.
Cependant, pourquoi aurions-nous refusé d'agir? Aurait-il
été plus expéditif d'attendre le rapport de la commission
Gendron? On nous a accusés à maintes reprises de nous en servir
comme d'un paravent. Mais, bien au contraire, nous avons agi de façon
empirique auparavant, précisément parce que nous ne voulions pas
que la collectivité québécoise ait trois ou quatre ans de
retard, les gouvernements précédents n'ayant rien fait en
matière linguistique.
A ces mesures ponctuelles, le gouvernement a voulu ajouter
l'infrastructure même d'une politique linguistique globale. Les mesures
ponctuelles présentaient tout de même un avantage, celui de faire
évoluer les mentalités. Et ceux qui connaissent le milieu
québécois, plus particulièrement le milieu
montréalais, où se vivent, où s'exacerbent la plupart des
problèmes linguistiques, savent fort bien qu'il y a une ouverture de
toutes les fractions de la population qui n'existait pas il y a cinq, dix ou
vingt ans.
Il y a une évolution nettement favorable. Et il est maintenant
possible d'en arriver à des solutions qui n'iront pas diviser une
société, qui peut-être ne permettront pas de l'unir plus
étroitement, mais qui au moins ne seront pas payées par un prix
exorbitant, par un prix hors de proportion sur le plan de la paix sociale et
sur le plan de la croissance économique; ce sont là des
dimensions indissociables, que nous n'avons pas le droit de
négliger.
Cette infrastructure a été mise en place sur deux plans:
le plan du français langue de travail et le plan de la langue
d'enseignement. Le français langue de travail, programme que le
gouvernement avait inscrit dans son manifeste avant même
l'élection de 1970.
En mai, le mois suivant cette élection, le gouvernement a
restructuré l'Office de la langue française, organisme qui se
présentait comme une espèce d'académie, qui avait surtout
pour fonction de veiller à la qualité de la langue, organisme qui
n'avait pas de véritable programme. Pourquoi? Parce qu'il n'avait pas
encore eu le leadership politique sous l'ancien gouvernement de l'Union
Nationale essentiel pour qu'il puisse véritablement se
révéler à lui-même.
Cet organisme a été restructuré, son budget a
été triplé, ses effectifs ont été
triplés. Il s'est vu scindé en deux parties, dont une a
été implantée à Montréal en plein coeur du
quartier des affaires, dans un immeuble commercial, pour que les fonctionnaires
sortent un peu des bureaux habituels et puissent être en contact
quotidien avec l'industrie et avec les hommes d'affaires.
C'est là qu'existe le problème linguistique, ce n'est pas
dans les bureaux de la tour...
M. MORIN: En contact avec la langue anglaise.
M. CLOUTIER: Une équipe a été mise sur pied qui
comprenait des représentants de quelques ministères, mais aussi
des représentants du patronat, des syndicats. Et cette équipe
refusant, à cause des directives qu'elle avait reçues,
d'attendre le rapport de la commission Gen-dron, qui était
peut-être susceptible de lui indiquer des solutions ou des
méthodes de travail, a entrepris la très difficile tâche de
se définir sa propre méthodologie.
Mais comment peut-on croire sérieusement qu'il suffit de dire
à une industrie qui emploie des milliers d'employés, qui fait
appel à une technologie qui est une technologie surtout
américaine qu'il suffit de se refranciser pour qu'elle se refrancise?
Encore faut-il lui fournir les vocabulaires, les cheminements
nécessaires, lui proposer des stratégies. C'est ça qu'il
fallait faire et c'est par là qu'il fallait commencer.
Le gouvernement n'a pas un instant perdu de vue cet objectif. Qu'on ne
vienne pas me dire qu'il ne s'est rien fait; qu'on ne vienne pas me dire qu'il
ne s'est rien fait! Oh! je sais que l'Opposition n'est pas là pour
approuver le gouvernement; ce serait pour le moins curieux. Je n'ai donc pas la
prétention de vouloir la convaincre, mais je veux, cependant informer
l'opinion publique qui n'a pas toujours été très bien
éclairée sur ce que faisait le gouvernement en matière
linguistique. A cause précisément de cette tendance à la
distorsion de l'information qui existe dans notre milieu et qui devrait
être corrigée et faire l'objet peut-être d'un code
d'éthique de la presse, l'opinion publique n'a jamais été
suffisamment éclairée. N'allez pas vous leurrer, le discours que
je fais aujourd'hui va probablement passer inaperçu comme les dix,
quinze, vingt ou trente discours et conférences de presse que j'ai faits
sur ce sujet même, apportant des chiffres, des statistiques, des faits,
des démonstrations.
Cet office, M. le Président, a travaillé dans plusieurs
secteurs industriels. Il a mis au point cette méthode dont je vous
parlais, méthode extrêmement complexe qui consiste à
analyser les communications au sein d'une entreprise, communications internes,
communications externes, à déterminer où sont les points
d'impact, les points d'intervention, à mobiliser les bonnes
volontés et à créer des comités du milieu
même, visant à la refrancisation. Je dois dire que la
collaboration dans la trentaine d'entreprises où nous avons
travaillé a été excellente. Une de ces entreprises, c'est
précisément l'Aigle d'Or, que le chef de l'Opposition, dans ses
interventions sur la politique énergétique, lorsqu'il
questionnait le ministre des Richesses naturelles, appelait la Golden Eagle,
alors que cette compagnie a accepté...
M. LESSARD: Pour mieux tromper les Québécois.
M. CLOUTIER: Vous n'avez qu'à voyager au Québec et vous
verrez que cette compagnie a accepté de s'appeler Aigle d'Or dans tous
ses centres de distribution.
M. LESSARD: Pour mieux tromperies Québécois.
UNE VOIX: A l'ordre! Voulez-vous le garder à l'oeil, M. le
Président?
M. CLOUTIER: Bien sûr, M. le Président, je ne
prétends pas et je n'ai jamais prétendu que cette démarche
était suffisante. Je n'ai jamais cru qu'il suffisait de mettre en place
cette structure pour régler tous les problèmes. En revanche, ce
que j'ai toujours pensé, c'est qu'il était indispensable de
commencer par cette structure; ce que j'ai toujours pensé, c'est qu'on
ne règle pas un problème par une législation. Même
si une législation peut faire évoluer une situation, encore
faut-il qu'elle arrive au moment opportun, au moment propice. C'est ma
conception politique à moi; j'y ai droit et j'ai l'intention de la
conserver. Je ne suis pas de ceux qui s'imaginent qu'avec une loi-matraque on
règle un problème. Je ne suis pas de ceux qui croient qu'il
suffit de faire une législation pour, ensuite, s'imaginer que tout est
réglé, que nous avons agi. C'est peut-être une tentation
que nos vieux nationalistes que représente si bien le chef de
l'Opposition ont eue dans le passé, ici dans notre
société. Mettons-nous au travail, ayons un peu plus le sens de la
discipline, ayons aussi une ambition bien orientée et je suis convaincu
que beaucoup de problèmes disparaî tront. En effet, un aspect du
problème linguistique, que l'on a tendance à passer sous silence,
c'est précisément la structure du pouvoir économique, le
peu de pénétration des francophones au sein des centres de
décision. Qu'on n'aille pas croire que ceci va se régler par des
lois. Nous ne sommes quand même pas et soyez convaincus que,
personnellement, je n'y tiendrais pas dans un pays totalitaire. Il ne
peut être question de se mettre à contingenter, dans une
économie libérale, dans une économie de libre
échange, à peu près tout, y compris le personnel de telle
entreprise.
En revanche, je crois qu'il y a là un défi que nous
n'avons pas toujours su relever. Ce défi, c'est celui d'être le
plus présents dans les industries. Je dirais, d'ailleurs, qu'un
francophone bien placé dans une entreprise vaut peut-être tout un
programme à lui seul, parce qu'il y a des effets d'entraînement
qui se créent. Cela nous impose une réflexion pertinente sur nos
orientations fondamentales, et j'irais même jusqu'à dire sur notre
système d'éducation. Comme je voudrais parfois que le Parti
québécois, qui dit avoir une certaine influence chez nos
francophones, au lieu de dramatiser le problème linguistique, essaie de
faire comprendre aux nôtres qu'ils ont le devoir de participer à
la société qui est la leur. Voilà peut-être la
véritable influence que ce parti devrait avoir. Comme je souhaiterais,
par exemple, qu'on puisse faire comprendre aux enseignents qu'ils ne sont pas
là pour véhiculer des idéologies, qu'ils ne sont pas
là pour transformer les interrogations de philosophie, en leçons
politiques orientées vers un parti mais qu'ils sont là pour
former des élèves, qu'ils sont là pour les
former en fonction d'un pays qui existe et qui est celui qu'a choisi la
majorité des Québécois, avec sa structure
économique et sa structure politique.
Voilà une chose qu'on ne peut quand même pas oublier. Il y
a une question de loyauté qui se pose chez les serviteurs de l'Etat,
qu'il s'agisse du secteur public ou du secteur parapublic et je ne vous cache
pas que j'entretiens les plus grands doutes sur cette loyauté dans ces
deux secteurs. Certains exemples récents me poussent à croire
qu'il y a là un manque de compréhension et un manque
d'éthique qui est certainement un signe de dégradation qu'il
faudrait contrer le plus rapidement possible.
Le chef de l'Opposition a fait une analyse de ce qu'il a appelé:
le bastion linguistique. Il est bien évident qu'une des causes qui a
permis la survie de la collectivité canadienne-française au cours
des âges, sa survie avec sa langue a été
précisément le fait qu'il s'agissait d'une société
refermée sur elle-même, repliée sur elle-même, d'une
société à structure rurale. Le véritable facteur
qui est venu bouleverser cette donnée fondamentale a été
l'industrialisation, l'urbanisation; le fait que cette société
était devenue non viable si elle ne s'ouvrait pas vers
l'extérieur. Et je me demande, à certains moments, si ce que
recherche le Parti québécois ce n'est pas
précisément d'en revenir au passé, de recréer le
ghetto antérieur. Et moi je vous dis que si ceci se produisait, la
collectivité canadienne-française serait condamnée du
point de vue de sa survie. Quels que soient les risques de l'ouverture qui est
la nôtre, quels que soient ces risques, il faut les assumer, et il faut
les assumer non pas en s'imaginant que tous les problèmes vont se
régler par magie ou par miracle parce que telle législation
symbolique aura été votée, mais parce que nous aurons su
prendre nos responsabilités dans un contexte qu'on aura bien
compris.
Assez de contestations, assez de révoltes stériles.
Tentons de canaliser toutes nos énergies, de créer quelque chose
de véritablement politique. Je souhaite que nous en finissions avec le
débat séparatiste. Je souhaite que nous en finissions non pas
avec le débat linguistique, parce que ce cheminement n'a pas encore
débouché sur toutes les solutions que le gouvernement a
l'intention d'apporter, mais que nous en finissions avec l'utilisation de ce
débat linguistique à des fins uniquement de basse politique, pour
que nous puissions enfin nous occuper des véritables défis de
notre société.
A certains moments, M. le Président, dans cette Assemblée,
je me demande si nous ne répétons pas les discours qui ont
été prononcés il y a 50 ans ou il y a 75 ans. C'est
souvent le même style, ce sont les mêmes problèmes, ce sont
exactement les mêmes interprétations...
M. LESSARD: C'est ce que vous faites exactement.
M. CLOUTIER: ... et pendant ce temps, M. le Président, les
éléments les plus actifs de notre population que font-ils?
M. LESSARD: Cela fait 75 ans que l'on parle de la langue comme
ça.
M. CLOUTIER: Les éléments les plus actifs de notre
population tiennent compte de la structure économique, de ce que doit
être le Québec. Nous avons connu de grands mythes au cours de
notre histoire. Je pense aux mythes de la colonisation, par exemple, alors
qu'on a envoyé toute une génération cultiver des pommes de
terre qui poussaient gelées, alors, M. le Président, qu'il y en
avait d'autres plus astucieux, mieux formés, mieux avertis qui
creusaient le sol et trouvaient les véritables richesses du
Québec.
Dans le domaine de la langue d'enseignement, nous avons suivi exactement
le même cheminement, cheminement qui a consisté à mettre en
place des structures qui auraient dû l'être auparavant mais qui ne
l'ont pas été. Allons-nous blâmer le gouvernement d'avoir
agi? Le député d'Anjou, dans son exposé, a indiqué
quelles étaient à son sens les conditions pour que les immigrants
puissent être intégrés au secteur francophone. Ce sont
précisément ces conditions que le plan de développement
des langues tente de rencontrer. Ce plan de développement des langues
qui est très contesté par les éléments les plus
douteux de notre population, ce plan de développement des langues vise
à donner, à promouvoir l'enseignement du français, langue
maternelle, à promouvoir l'enseignement de l'anglais et du
français, langues secondes, et à mettre en place des structures
d'accueil pour les immigrants.
M. le Président, comment voulez-vous retenir ces immigrants
même par loi dans le système francophone si vous ne leur apprenez
pas l'anglais? Comment voulez-vous munir les Québécois de cet
instrument essentiel partout au monde, autant en Europe qu'ici, que constitue
l'apprentissage d'une langue seconde et bien sûr, ici, la langue seconde
naturelle en Amérique n'est pas le chinois ou le grec, c'est bel et bien
l'anglais, qu'on le veuille ou non?
Il y a là quelque chose de très sérieux. Je suis
convaincu, pour ma part, que si ce plan de développement des langues
n'avait pas été mis en place, il y a un an, par le gouvernement
le plus responsable en matière linguistique qui ait jamais existé
ici au Québec, nous courrions vers une véritable impasse
culturelle. Quelle est-elle, cette impasse culturelle? Nous nous serions
trouvés en présence du paradoxe suivant, à savoir que nos
anglophones, dans le secteur anglophone, auraient été tous
bilingues d'ici quelques années alors que nos francophones, dans le
secteur francophone, n'auraient pas parlé anglais dans une proportion de
plus de 10 p.c. Est-ce que vous vous rendez compte qu'il y a là tous les
éléments d'une véritable catastrophe nationale? C'est par
là qu'il fallait commencer, non pas par des lois susceptibles de
brimer les citoyens du Québec, parce qu'il faut bien
réfléchir à cette question de l'immigration. Il est facile
de dire: Nous allons imposer aux nouveaux immigrants de fréquenter le
secteur francophone. J'ai à maintes reprises dit que j'étais loin
de m'y opposer. Il m'apparaît normal que les nouveaux immigrants qui ne
sont pas encore des citoyens de plein droit, fréquentent le secteur de
la majorité à la condition qu'ils soient informés avant de
partir, ce qui est maintenant possible, grâce à une entente
signée par le ministère de l'Immigration québécois
et le ministère de l'Immigration fédéral il y a quelques
années, entente qui avait été, bien sûr,
dénoncée par l'Opposition; de plus, qu'on puisse leur enseigner
l'anglais, ce qui est désormais possible par le plan d'enseignement des
langues et enfin, qu'on tienne compte des problèmes pédagogiques
spéciaux, comme l'a toujours fait d'ailleurs le secteur anglophone, des
problèmes pédagogiques spéciaux que posent les enfants qui
ne parlent ni le français, ni l'anglais.
Il est extrêmement important de s'interroger sur l'immigration,
car celle-ci a beaucoup diminué depuis quelques années et elle
sera appelée à diminuer encore parce qu'on n'immigre pas pour des
raisons culturelles, très rarement. On immigre pour des raisons
économiques, parfois pour des raisons politiques; et l'évolution,
à moins qu'il y ait des changements toujours possibles, est telle que
nous ne pouvons plus compter sur une immigration importante.
De plus, jamais la source d'immigration francophone n'a
été véritablement significative. Il n'y a jamais eu, au
Canada, plus que quelques miliers de francophones qui ont immigré, et
tous ne restaient pas au Québec, bon nombre allaient dans les autres
provinces canadiennes.
Actuellement, je ne crois pas qu'on puisse parler de plus de 2,000 ou
3,000 francophones qui immigrent chaque année. Or ceci, c'est pour bien
se rendre compte que nous n'avons pas le droit ou même la
possibilité d'utiliser l'argument de l'immigration pour tenter de
corriger nos insuffisances démographiques. Il y a là un mythe
qu'il convient de dénoncer. Le seul moyen de corriger nos insuffisances
démographiques, messieurs, madame, c'est de faire des enfants.
M. LESSARD: Combien en avez-vous, M. le ministre?
M. CLOUTIER: Et d'en faire beaucoup, cela a marché pendant deux
siècles.
M. le Président, je crois que si nous...
M. LESSARD: La revanche des berceaux.
M. CLOUTIER: ... n'abordons pas la question de l'immigration avec
infiniment de précautions et d'intelligence c'est un mot que je
n'ai pas peur d'utiliser à l'occasion, le mot "intelligence"..
M. LESSARD: Cela ne paraît pas.
M. CLOUTIER: ... nous risquons de nous trouver avec une
difficulté encore plus grande, dirigeant nos immigrants vers des
provinces qui leur paraîtront, à tort ou à raison
nous ne sommes pas là pour faire des jugements de valeur, nous sommes
là pour constater des faits plus accueillantes. La
Colombie-Britannique reçoit actuellement deux fois plus d'immigrants que
le Québec. L'Ontario en a reçu trois fois plus et la population
de l'Ontario atteindra les 8 millions très bientôt. C'est la
province la plus prospère et sa prospérité est liée
à cette immigration. Je ne dis pas qu'il faut favoriser une immigration
à sens unique qui renforcerait les positions anglophones, mais ce que je
dis en revanche, c'est qu'il ne faut pas prendre des méthodes qui
augmenteront encore le danger de minorisation. Parce que c'est là le
véritable problème. Ce n'est pas un problème
d'immigration, ce n'est pas un problème d'écoles
françaises ou d'écoles anglaises, c'est un problème de
population. Nous sommes une minorité au Canada et une minorité en
Amérique, et il est faux de croire que l'immigration à elle seule
viendra corriger ce risque de minorisation. N'allez pas me faire dire que je ne
compte pas agir au nom du gouvernement; les structures mises en place
constituent la première étape d'une action extrêmement bien
articulée. Et celles-ci pourraient être coiffées d'une
législation, le cas échéant, mais d'une législation
qui devrait tenir compte de toutes les dimensions que je viens
d'évoquer.
M. le Président, je crois en avoir dit suffisamment pour
sensibiliser cette Assemblée, d'une part, au fait que cette motion
dilatoire...
M. LESSARD: Cela se résume à pas grand-chose.
M. CLOUTIER: Cette motion a été présentée
dans un contexte qui, moi, m'attriste, c'est-à-dire le contexte d'un
filibuster, alors que précisément il faudrait en discuter dans un
débat de fond. Je suis un peu déçu, M. le
Président, que le Parti québécois, qui a fait de la langue
son cheval de bataille c'est à peu près le seul qui me
paraisse...
M. LESSARD: Et que dire de nous?
M. CLOUTIER: ...rester ait choisi d'utiliser si mal ses droits
démocratiques. Mais, enfin, je ne suis quand même pas là
pour donner des conseils, je m'en garderai bien. Mais ce que je veux dire, par
exemple, c'est...
M. LESSARD: Donnez-vous des conseils, cela va être mieux.
M. CLOUTIER: ... que le problème est d'une telle importance que
le gouvernement a agi, dès le début, et que le gouvernement
continuera
d'agir en tenant compte des intérêts de tous les
Québécois...
M. LESSARD: On peut vous aider, si ça va mal.
M. CLOUTIER: ... et également de l'avenir de la
collectivité.
LE PRESIDENT: L'honorable chef de l'Opposition officielle dans sa
réplique.
M. Jacques-Yvan Morin M. MORIN: M. le Président,...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît !
M. LESSARD: La gélatine, le troupeau.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre!
M. MORIN: ... ce n'est pas sans intérêt que j'ai
constaté que le ministre responsable de la politique linguistique a
accepté, en gros, sauf peut-être l'exception de l'article paru
dans la Presse, les chiffres que je lui ai proposés.
S'il en est ainsi, je m'étonne d'autant plus de constater que,
depuis 1970, nous sommes témoins de tactiques dilatoires, d'une
impuissance à régler ce problème. Bien sûr, on pose
des gestes ici et là pour donner le change, pour donner l'impression
qu'on va faire quelque chose. Mais je pense que les chiffres que j'ai
mentionnés et le caractère de plus en plus grave de cette
situation démontrent que l'efficacité des mesures
gouvernementales a été pour ainsi dire nulle.
Le ministre, avec raison, déclare qu'il entend politiser cette
question. Encore, s'il le faisait dans le sens le plus haut et le plus noble du
mot, mais ce n'est pas de cela que nous avons été
témoins.
Le ministre, malheureusement, aurait pu en parler avec
sérénité, avec chaleur même. Je crois qu'il l'a fait
plutôt sans doute le climat de l'Assemblée
déteint-il sur lui à cette occasion avec agitation. Il
nous disait qu'il avait l'impression, par moments, d'entendre des discours
vieux de 50 ans. Jamais n'ai-je eu cette impression aussi fortement qu'en
l'écoutant nous rappeler des histoires aussi vieillottes et aussi peu
adaptées au contexte industriel et sociologique du Québec
d'aujourd'hui que la revanche des berceaux.
M. LESSARD: Incroyable!
M. MORIN: Le ministre disait que les Néo-Québécois,
cela n'existe pas. Les Néo-Canadiens, semble-t-il, il y en a, mais pas
de Néo-Québécois. L'autre jour, ne nous disait-il pas que
les comtés anglophones, cela n'existe pas?
M. CLOUTIER: Cela n'existe pas.
M. MORIN: Je l'ai entendu dire et je commence à comprendre
qu'avec cette appréciation si fine de la réalité
québécoise, le ministre soit incapable de nous doter d'une
politique linguistique. S'il n'y a pas de Néo-Québécois,
s'il n'y a pas de comtés anglophones, eh bien oui, en effet, il n'y. a
aucune raison de se donner une politique linguistique le moindrement
cohérente. Quand on nie la réalité, forcément, par
la suite, on n'arrive pas à mettre au point les correctifs qui
s'imposent.
M. LESSARD: Dans les nuées.
M. MORIN: M. le Président, nous persistons à croire, dans
l'Opposition, qu'il est grand temps d'agir, non pas seulement de s'occuper de
mettre en place des offices, tout bien intentionnés qu'ils soient. C'est
sur les lieux du travail, c'est dans les faits concrets, quotidiens, qu'il faut
agir et malheureusement, sur ce plan, le gouvernement a été
totalement inefficace.
J'ai écouté avec intérêt le
député d'Anjou. Il nous a dit: Il y a un problème au
niveau de l'accueil des immigrants. Est-ce que le député d'Anjou
s'est interrogé sur les conditions qui font que beaucoup de
Québécois, hélas, sont tiè-des, quand ce n'est pas
hostiles, envers l'immigration? Est-ce qu'il ne s'est pas demandé s'il
n'y avait pas là un cercle vicieux? Est-ce que ce n'est pas
précisément parce que la langue des Québécois est
menacée qu'ils se montrent hostiles aux immigrants? J'aimerais bien en
discuter un jour, peut-être dans un climat moins survol-té, avec
le député d'Anjou.
C'est parce qu'ils sont dépossédés, M. le
Président, de leur langue comme de leur territoire, c'est parce qu'ils
sont en passe de devenir des locataires, dans tout le sens du mot, dans leur
propre pays, que les Québécois se montrent il faut
l'avouer quelquefois hostiles à l'immigration. Alors corrigeons,
non pas en essayant de leur mettre des immigrants de force dans la tête,
corrigeons la situation en leur donnant la sécurité linguistique,
la sécurité culturelle, et on verra que les problèmes
disparaîtront d'eux-mêmes.
M. le Président, j'espère que le député
d'Anjou représente l'opinion majoritaire au sein de son parti. Je me
permets d'en douter. Mais si tel était le cas, il peut être
sûr qu'il aura notre appui en tout temps et en tout lieu.
J'ai constaté que, malheureusement, s'il analyse correctement la
situation par moments, lorsque vient le temps de passer à l'action,
d'avoir des politiques définies, à ce moment, le
député se montre plutôt enclin à disculper son
collègue, le ministre de l'Education, à disculper le gouvernement
de son inaction, alors qu'il devrait être le premier, parmi les jeunes
dépu-
tés, parmi ceux qui s'intéressent à ces questions
et qui sont conscients de ce qui se passe dans les jeunes
générations, à pousser le plus fort sur le cabinet pour
qu'enfin se posent des gestes concrets.
Je conclus. Je pense que nous arrivons à l'heure du vote.
L'Opposition, en conclusion, persiste à croire que le gouvernement n'a
pas fait ce qu'il fallait faire. Ce débat linguistique, le ministre
souhaitait qu'il prenne fin. Eh bien, nous aussi, nous souhaitons qu'il prenne
fin le plus tôt possible. Mais, au train où vont les choses, il va
durer longtemps. Nous y reviendrons tant qu'il le faudra et, la prochaine fois,
souhaitons-le, dans une ambiance qui ne sera pas celle d'un "filibuster".
Je termine en disant qu'au train où vont les choses le
gouvernement n'est pas parti pour régler ce problème. Je me
demande même s'il a l'intention de le régler. J'ai l'impression
qu'il ne se réglera que le jour de l'Indépendance, M. le
Président. Merci.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Est-ce qu'il y a lieu d'avoir un
vote enregistré?
M. BURNS: Oui.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion de censure de M. Morin
LE PRESIDENT: Messieurs, que ceux qui sont en faveur de la motion de
l'honorable chef de l'Opposition officielle veuillent bien se lever, s'il vous
plaît !
LE SECRETAIRE-ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi), Roy.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Que celle et ceux qui sont contre
cette motion veuillent bien se lever, s'il vous plaît !
LE SECRETAIRE-ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Saint-Pierre, Choquette,
Garneau, Cloutier, Phaneuf, Berthiaume, Goldbloom, Mme Bacon, MM. Hardy,
Tetley, Bienvenue, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Arsenault,
Houde (Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Kennedy, Bacon,
Blank, Veilleux, Saint-Hilaire, Brisson, Séguin, Cornellier, Houde
(Limoilou), Lafrance, Pilote, Fraser, Picard, Gratton, Assad, Carpentier,
Dionne, Faucher, Marchand, Harvey (Charlesbourg), Larivière, Pelletier,
Springate, Pepin, Bérard, Boudreault, Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon,
Ca-ron, Côté, Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc),
Lachance, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Parent
(Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.
LE SECRETAIRE: Pour: 7. Contre: 68.
LE PRESIDENT: La motion est rejetée.
M. MORIN: Je le crains, ce sera pour une autre fois, M. le
Président.
UNE VOIX: La minorité a gagné.
UNE VOIX: Pardonnez-leur car ils ne savent...
M. LEVESQUE: Suspension à 15 heures.
LE PRESIDENT: L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 15
heures.
(Suspension de la séance à 13 h 7)
Reprise de la séance à 15 h
6
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Le député de
Maisonneuve.
Motion de M. Burns portant sur
la conduite du président de la
commission
étudiant le projet de loi no 8 (suite)
Motion d'amendement de M. Léger (suite) M.
Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, hier soir, nous en étions,
lorsque la Chambre a ajourné ses travaux, à discuter de
l'amendement d'un de mes collègues qui voulait substituer le mot
"regrette" au mot "réprouve". Avant même de continuer ou de faire
le lien avec ce que je disais hier, je sais que vous réprouvez
également ce genre de remarques de la part des députés en
Chambre, mais je pense que vous allez admettre que c'est peut-être une
bonne chose que ce soit un député de l'Opposition, qui a pris
certaines attitudes à l'égard du projet de loi visant à
augmenter le salaire des juges, qui signale la présence dans nos
galeries de deux de ces honorables juges, M. le juge Guy Guérin et M. le
juge Robitaille, qui sont là. Je tiens à souligner leur
présence.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député me permettrait une
interruption?
M. BURNS: Oui.
M. CHOQUETTE: Si vous saviez tout le mal qu'ils pensent de vous, vous ne
le signaleriez pas.
M. BURNS: M. le Président, je suis sûr qu'avec le temps,
s'ils pensent du mal de nous ce dont je ne suis pas certain; même
si je crois le ministre de la Justice, je ne prends pas à la lettre ce
qu'il vient de me dire ils vont sûrement comprendre, si ce n'est
pas déjà fait, que c'est dans les plus hauts
intérêts de l'administration de la justice que cette objection ou
cette obstruction de notre part est faite.
M. le Président, je reviens à mon propos d'hier. En
résumé, après vous avoir cité des extraits du
dictionnaire Robert et autres, je vous avais dit que cette espèce de
dilution de la motion principale, en changeant le mot "réprouve" par le
mot "regrette", m'agréait parce que je me disais que c'était, sur
le plan parlementaire, quelque chose qui était aussi fort, comme
reproche mais peut-être moins fort sur le plan de l'attitude que nous
tenons à l'égard du député de Roberval.
Cependant, et c'est là-dessus que je terminerai mon intervention,
puisqu'il ne me restait seulement qu'une minute ou deux, je crois que si on
regrette l'attitude du député de Roberval, et comme je voterai en
faveur de l'amendement proposé par mon collègue, et si on accepte
de diminuer le caractère verbal, l'attaque verbale que comporte ma
motion, je suis d'accord. Mais d'autre part, il faut aussi qu'il y ait des
mesures précises qui soient prises d'ici peu et au moins jusqu'à
la fin de la présente session. Je suggère que le
député de Roberval, eu égard à ce manque de
crédibilité en ce qui nous concerne en
matière de présidence de la commission de la justice, eu
égard à ce manque de crédibilité que nous
exprimions notre opinion, il n'ait pas à présider cette
commission, du moins pour la session en cours.
Motion d'amendement de M. Burns
M.BURNS: Et c'est pourquoi je propose comme sous-amendement ce qui suit:
"Que la motion d'amendement en discussion soit sous-amendée en ajoutant
à la fin les mots: ... et souhaite que d'ici la fin de la
présente session, il ne préside plus ladite commission".
Nous avons, depuis le début, relié les reproches que nous
avons à faire au député de Roberval au geste qu'il a
posé en tant que président de la commission parlementaire de la
justice.
Nous ne voulons pas l'exposer outre mesure à de nouvelles
critiques. Nous croyons même que vous tenterez de ne pas l'exposer
à nouveau à ce genre de critiques et nous croyons
même...
M. TETLEY: Votre temps est terminé. Too bad! Just too bad!
M. BURNS: ... que vous jugerez qu'il est très sage de notre part
de limiter encore une fois le corridor de cette motion. Nous l'avons d'abord
limité, M. le Président... Permettez-moi deux secondes...
LE PRESIDENT: Elle est faite, votre motion.
M. BURNS: II y en a d'autres qui l'expliqueront, M. le
Président.
M. TETLEY: It is too late, Mr Speaker.
LE PRESIDENT: Nous allons suspendre pour cinq minutes.
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Après de nouvelles consultations, nous avons
considéré ce sous-amendement, qui ajoute à la motion
amendée les mots "et souhaite que d'ici la fin de la présente
session, il ne préside plus ladite commission". Nous nous sommes
guidés sur Beauchesne, encore une fois, page 173, la quatrième
édition, où il est dit, au milieu de la
page, un texte que j'ai cité d'ailleurs, hier: "L'objet d'un
sous-amendement étant de modifier un amendement il le modifie
effectivement il ne devrait pas élargir la portée de
l'amendement".
Dans le moment, l'effet de ce sous-amendement élargit, selon mon
opinion, énormément le regret exprimé. Le regret est une
impression, une espèce de déplaisir que l'on ressent. On ajoute
à ça une punition, qui serait de ne plus siéger d'ici la
fin de la présente session. Egalement, notre règlement actuel,
à l'article 70, dit: "Un amendement doit se rapporter directement au
sujet de la motion proposée et ne peut avoir que les objets suivants:
retrancher, ajouter des mots ou les remplacer par d'autres. Il est irrecevable
si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a
été proposé..." Il faut bien se rappeler que sur la
question principale, actuellement, étant donné qu'il en est de
même d'un sous-amendement, par rapport à un amendement, il est
irrecevable si son effet est d'écarter la question principale. La
question principale est la motion telle qu'amendée, c'est le regret, en
somme. Suivant mon impression ce n'est peut-être pas subtil
je crois qu'en ajoutant une condamnation, on écarte indirectement
l'amendement qui n'est qu'un regret. Je trouve que ce sous-amendement aurait
été beaucoup plus recevable s'il avait été
accroché à la question principale non amendée, qui
était une condamnation.
Lorsque l'on réprouve quelqu'un, on peut faire suivre par une
condamnation. Mais du fait qu'on est parti de plus fort pour aller à
moins fort et qu'on revient encore à plus fort, pour toutes ces raisons,
je crois que ce sous-amendement ne serait pas recevable.
M. BURNS: Une simple question, M. le Président. Est-ce que je
dois comprendre de votre décision vous l'avez indiqué,
remarquez, mais j'aimerais vous l'entendre clairement me le dire afin
d'éviter des débats de procédure futurs que si ce
sous-amendement avait été proposé comme amendement, il
deviendrait recevable? C'est la question que je vous pose.
LE PRESIDENT: J'ai dit "plus recevable". M. BURNS: Bien,
justement...
LE PRESIDENT: Bien ce que vous me dites est hypothétique.
M. BURNS: Bien, M. le Président, c'est une directive que je vous
demande.
LE PRESIDENT: Bien oui, mais...
M. BURNS: Vous êtes la haute autorité de cette
Chambre...
LE PRESIDENT: Oui.
M. BURNS: ... et je me fie à votre décision.
LE PRESIDENT: Oui.
M. BURNS: Vous êtes notre guide, M. le Président.
LE PRESIDENT: Ecoutez, avec ce que je vous disais également hier:
Prudence! Prudence! C'est ici qu'on l'apprend. Je n'aime pas beaucoup donner de
directives, encore une fois, immédiatement après une
décision et surtout sur une question hypothétique.
M. BURNS: M. le Président, cela va être plus
qu'hypothétique. La directive que je vous demande est à l'effet
de savoir si un des députés, qui a actuellement encore le droit
de parole sur la motion principale et il y en a deux pourra
proposer, de façon acceptable...
LE PRESIDENT: Bon.
M. BURNS: ... à votre interprétation du règlement,
cette motion d'amendement. J'ai entendu et j'ai bien noté qu'elle serait
plus recevable, et j'ai vu cette nuance que vous mettiez, M. le
Président. Mais je voudrais être certain que je ne perdrai pas le
temps de cette Chambre...
LE PRESIDENT: En deux mots, c'est sur la...
M. BURNS: ... en proposant un nouvel amendement.
LE PRESIDENT: ... motion principale non amendée. Si on revient
à la réprobation, on réprouve... Je regarde un des
vice-présidents... Vous comprenez que lorsqu'on étudie une
question dans un cas assez délicat, on se limite à la question
même.
M. BIENVENUE: On pourrait peut-être revenir à la
réprobation !
LE PRESIDENT: Ecoutez, je n'aimerais pas suspendre encore. J'aimerais y
penser quelques minutes. Pour le moment, je vous dis que ce sous-amendement
n'est pas accepté.
M. BURNS: Pendant que vous y pensez, M. le Président, je vous
demande de penser également au fait que tous nos amendements ont eu une
tendance bien précise depuis le début.
M. VEILLEUX: ... c'est en arrière.
M. BURNS: C'était de plus en plus de limiter le corridor, de dire
de plus en plus, véritablement, ce que la motion principale devait
dire.
LE PRESIDENT: Bon. Le prochain...
UNE VOIX: Le sort en est jeté!
LE PRESIDENT: Nous revenons, je crois...
UNE VOIX: II faudrait disposer de...
LE PRESIDENT: Oui, oui! Vote, oui! Est-ce qu'il y a d'autres opinants
sur la motion telle qu'amendée?
M. LEGER: Est-ce qu'il y a un droit de réplique sur
l'amendement?
M. BEDARD (Chicoutimi): II y a le vote, là. Il y a un vote sur
l'amendement?
LE PRESIDENT: II n'y a pas de droit de réplique sur cela. Je
crois que l'honorable député de Chicoutimi a parlé sur
cela.
M. BURNS: M. le Président, il y avait deux opinants.
J'étais le dernier sur la motion d'amendement. Alors, je demande le
vote, avec mes collègues.
M. SAINT-PIERRE: II y en a deux debout, là. On en a assez
d'un!
M. BEDARD (Chicoutimi): Ce n'est quand même pas le ministre de
l'Industrie et du Commerce qui va me donner des ordres. Je les attends du
président de la Chambre.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés ou...
M. BURNS: Oui, M. le Président.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
A l'ordre,messieurs!
Vote sur la motion d'amendement de M.
Léger
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion de l'honorable
député de Lafontaine à l'effet que la motion en
discussion, qui est la motion du député de Maisonneuve et qui se
lit comme suit: "Que cette Assemblée réprouve la conduite de son
vice-président, le député de Roberval, lors de
l'étude en commission permanente de la justice du projet de loi no 8"
soit amendée en y remplaçant dans la première ligne le mot
"réprouve" par le mot "regrette", veuillent bien se lever, s'il vous
plaît.
LE SECRETAIRE-ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Leves- que, Mailloux, Saint-Pierre,
Choquette, Garneau, Lachapelle, Berthiaume, Mme Bacon, MM. Tetley, Drummond,
Bienvenue, Forget, Massé, Harvey (Jonquière), Houde
(Abitibi-Est), Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Kennedy, Bacon, Blank,
Veilleux, Brisson, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Lafrance,
Ostiguy, Picard, Gratton, Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg),
Larivière, Pelletier, Springate, Bellemare, Bérard, Bonnier,
Boudreault, Boutin (Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon, Caron,
Côté, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lecours,
Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Pagé, Parent
(Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.
Deux abstentions: MM. Roy et Samson.
LE SECRETAIRE: Pour: 6
Contre: 63
Abstentions: 2
LE PRESIDENT: La motion est rejetée. L'honorable
député de Chicoutimi.
Reprise du débat sur la motion principale M.
Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, parlant sur la motion
principale, on a tout à l'heure souligné...
M. TETLEY: C'est très intelligent!
LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît!
M. BEDARD (Chicoutimi): Que des députés interviennent,
invectivent les députés de l'Opposition, ça se comprend,
mais pas les ministres, voyons !
M. TETLEY: Vous ne serez jamais ministre, vous.
M. BEDARD (Chicoutimi): Qu'est-ce qu'il dit?
M. CHARRON: Il dit: Vous ne serez jamais ministre.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TETLEY: Qu'est-ce que dit votre "coach", votre petit...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! ...A l'ordre! Ecoutez,
à l'ordre! ...A l'ordre! ... A l'ordre, messieurs! ... Ecoutez, s'il y
en a à qui cette procédure parlementaire qui se déroule
actuellement, qu'on appelle communément un "filibuster" à
l'ordre, s'il vous plaît ne fait pas plaisir, je ne voudrais pas
qu'ils devien-
nent quand même partisans d'une chose qu'ils condamnent. Il reste
que leurs interruptions, je devrai les prendre en considération dans le
temps des députés qui ont la parole.
M. BEDARD (Chicoutimi): Surtout, M. le Président, que, jusqu'ici,
j'ai bien l'impression que l'Opposition a agi et c'est ce qui est
important en respectant les règlements et dans la complète
légalité. Les invectives qu'on peut faire à l'Opposition
à ce stade-ci, en fait, vont simplement contre le respect des
règlements et le respect des décisions de l'honorable
président de la Chambre. Je vois certains députés qui nous
accusent de faire perdre du temps. Il me semble que, si on se reporte aux
discours qui ont été prononcés en réponse au
message inaugural, nous avons assisté à ce moment-là, sans
faire de réprobation, à une sorte de "filibuster" de la part du
gouvernement sans que ça amène grand-chose dans
l'évolution des travaux de la Chambre; au contraire, ça les a
retardés. Cela nous a amenés à entendre des discours de la
part très bien, c'était leur droit à ce
moment-là de 25 ou 30 députés du gouvernement qui,
dans le fond, disaient sensiblement la même chose. Je tiens à
faire cette mise au point parce qu'en termes de perte de temps, si on ne
l'avait pas perdu au début de la session, peut-être qu'on aurait
fini la session, M. le Président; il y a d'autres lois importantes qui
seraient adoptées et que nous attendons pour les voter.
M. le Président, on a souligné, tout à l'heure, la
présence dans les galeries d'honorables juges; je crois qu'on pourrait
en profiter à ce moment-ci, puisque nous sommes dans le domaine de la
légalité, pour faire une sorte de rétrospective du
débat et peut-être leur permettre de juger, comme vous, M. le
Président de l'Assemblée, de la légalité et du bon
sens de la motion que nous avons faite.
Nous avons présenté une motion à l'effet de
réprouver la conduite du vice-président de la Chambre, le
député de Roberval, lors de l'étude en commission
permanente de la justice du projet de loi 8.
D'abord, nous avons très bien établi au départ que
par ce geste nous ne réprouvions en aucune façon l'ensemble de la
conduite du député de Roberval. A un moment donné, le
leader de l'Opposition a parlé de sa compétence, de son
objectivité, de son intégrité, et moi-même aussi. Je
ne faisais qu'entériner à ce moment-là les propos qui
avaient été tenus par le leader de l'Opposition dans cette
Chambre. Nous n'avons pas non plus accusé en aucune façon
et ce n'était pas notre intention le député de
Roberval de mauvaise foi dans la manière d'exercer les
responsabilités qu'il avait à exercer en étant
président de la commission. Au contraire, et nous tenons à situer
le débat très bien, nous avons simplement dit qu'il avait fait
une erreur de jugement, erreur qui est humaine, erreur qui est une chose
compréhensible et qui peut être faite par n'importe qui, que ce
soit un député de l'Opposition ou un député du
gouvernement. Je crois que c'est humain.
Nous avons même essayé de diminuer la portée de
notre motion où nous employions à ce moment-là le mot
"réprouver". Nous avons tenté d'en diminuer la portée en
apportant un amendement pour changer le mot "réprouver" par "regretter".
Nous voulions très bien spécifier à ce moment-là
qu'en aucune façon nous ne voulions remettre en question l'ensemble de
la conduite du député de Roberval. Au contraire, en amenant cet
amendement à l'effet de regretter plutôt que de réprouver,
on consacrait le fait que nous acceptions que c'était tout simplement
une erreur qui avait pu être faite par le député de
Roberval.
Ceci étant dit, nous avons basé notre motion sur trois
points. Premièrement sur et ça c'est strictement la
légalité la légalité des décisions
qui ont été prises par le président de la commission
parlementaire de la justice qui siégeait. Nous avons tout simplement,
à ce moment-là, réprouvé ou regretté
certaines décisions qui à notre sens n'étaient pas
correctes et n'étaient pas dans le sens des règlements de cette
Assemblée nationale.
Nous avons basé notre argumentation et nous n'en sommes pas
sortis. Nous l'avons dit: il y a une erreur qui a été commise.
Pour être logique, M. le Président, il n'a jamais
été question de rebrousser chemin ou d'essayer, de la part de
l'Opposition, de retraiter. Nous sommes tout simplement convaincus qu'une
erreur a été commise, erreur humaine, erreur
d'appréciation de règlement commise par le vice-président
de la Chambre, qui siégeait à ce moment-là comme
président de la commission parlementaire.
Les trois points sur lesquels nous nous sommes basés sont les
suivants: Premièrement, on a dit que le président, l'honorable
député de Roberval qui présidait la commission
parlementaire, n'avait pas respecté un précédent
déjà établi dans cette Chambre à l'occasion de
cette session, n'avait pas respecté des précédents
déjà établis en ne permettant pas à l'honorable
député de Saint-Jacques et à l'honorable
député de Saguenay de s'exprimer lors de la tenue de la
commission parlementaire.
Il est évident que lorsque nous apportions cet argument, nous
nous basions sur un article du règlement que vous nous avez fait
parvenir, l'article 3 qui dit, entre autres, que la procédure de
l'Assemblée nationale du Québec est réglée, d'une
part, par les lois, par les règlements, par les règlements
adoptés pour la durée d'une session, par des ordres
spéciaux adoptés par l'Assemblée et dont l'effet est
limité aux matières pour lesquelles ils sont votés;
quatrièmement, par des ordres spéciaux adoptés par
l'Assemblée et dont l'effet est limité aux matières pour
lesquelles ils sont votés, et cinquièmement, par des
précédents établis par suite de l'interprétation
des lois et des règlements.
Et justement, nous avons dit alors que le
président de la commission aurait dû permettre à
l'honorable député de Saint-Jacques et à l'honorable
député de Saguenay de se faire entendre. Nous avons
apporté comme argument qu'il y avait des précédents, entre
autres, une commission parlementaire à laquelle j'ai
siégé, à savoir celle des affaires sociales où,
à un certain moment, il y avait plusieurs représentants du
gouvernement et deux représentants de l'Opposition, en l'occurrence
l'honorable député de Maisonneuve et moi-même. Après
avoir commencé les travaux de cette commission, à un certain
moment, l'honorable premier ministre du Québec est arrivé, et
même s'il n'était pas délégué officiellement
à la commission, il a demandé le droit de parole et tout le monde
le lui a accordé et le président lui a donné ce droit de
parole.
Egalement, le chef de l'Opposition est arrivé et lui aussi,
même s'il n'était pas délégué officiel, au
sens légal du mot, du parti de l'Opposition, a demandé le droit
de parole et la commission le lui a accordé à ce moment.
Alors, pourquoi ce droit, ce précédent qui a
été établi au niveau de l'honorable premier ministre et au
niveau de l'honorable chef de l'Opposition, pourquoi ce précédent
n'a-t-il pas été respecté, M. le Président, au
moment de la tenue de la commission parlementaire de la justice? Est-ce qu'il y
aurait une inégalité entre l'honorable chef de l'Opposition et
les députés, entre l'honorable premier ministre et les
députés?
Je pense qu'en cette Chambre, dans les règlements concernant le
droit de parole... Heureusement que c'est cela parce que je me demande
jusqu'à quel point on pourrait se faire entendre lorsqu'on a plus ou
moins d'expérience...
M. MERCIER: Parlez intelligemment.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... par rapport à des gens qui ont acquis
de l'expérience. Je me demande jusqu'à quel point on pourrait se
faire entendre et faire valoir nos droits, ceux de nos comtés ou encore
les représentations des électeurs que nous avons à
représenter, si nous n'avions pas comme sauvegarde justement ces
règlements qui établissent d'une façon très claire
et on voit que c'est démocratique, au moins de ce
côté que les députés comme l'honorable
premier ministre, comme l'honorable chef de l'Opposition, peuvent se faire
entendre sur quelque projet de loi que ce soit en autant qu'ils respectent les
règlements.
Egalement, nous nous sommes basés sur un deuxième point,
et celui-là, à mon sens, est clair et on ne peut pas le
réfuter. Nous nous sommes basés sur le fait que l'honorable
président de la commission parlementaire de la justice avait commis une
faute à ce moment, en ajournant la commission parlementaire sans
permettre une motion d'ajournement, motion d'ajournement, en fait, si on se
réfère à l'article 163, qui établit que les
règles relatifs à l'Assemblée prévalent en
commission, mutatis mutandis, en faisant la relation avec l'article 148
je m'excuse, M. le Président l'article 147, paragraphe 2, qui
établit d'une façon très claire qu'à la fin d'une
séance, il doit y avoir une motion d'ajournement et que cette motion
donne le droit à chacun des représentants des partis d'être
entendu.
M. LEGER: M. le Président, je m'excuse auprès de mon
collègue, mais nous n'avons pas quorum. Est-ce que vour pourriez appeler
les députés pour qu'on puisse écouter les savantes
expressions du député de Chicoutimi?
UNE VOIX: On l'a maintenant.
M. LEGER: ... votre quorum, M. le député de
Saint-Jean.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Picard): Est-ce que je pourrais inviter les
honorables députés à prendre leur siège? Nous
aurons alors quorum.
Le député de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): J'imagine que le temps où vous appelez le
quorum ne compte pas dans mon intervention.
Pour en revenir à la motion, pour montrer notre logique
à un moment donné, il faut faire la rétrospective des
règlements que nous avons à invoquer cela a
été purement le respect des règlements que nous avons
demandé, jusqu'ici. Je reviens au geste qui a été
posé et qui est, à notre sens, une violation du règlement
par l'honorable député de Roberval, le président de la
commission parlementaire, qui n'a pas permis la motion d'ajournement, laquelle
est un droit. Ce n'est pas un droit pour le chef de l'Opposition, ce n'est pas
un droit pour l'honorable premier ministre; c'est un droit pour tous les
députés de s'exprimer lorsqu'ils sont les représentants de
leur parti à l'intérieur d'une commission, de pouvoir, autrement
dit, dans l'espace de dix minutes, résumer d'une façon aussi
complète que possible, les positions de leur parti, les arguments sur
lesquels ils se basent, sur lesquels ils font porter le plus fort de leurs
discussions ou de leur récriminations concernant le projet de loi qu'ils
ont à étudier en commission. C'est un point qui est très
clair, où il y a eu violation des règlements. A ce moment, on a
continué à être logique, on a présenté un
amendement disant que nous croyons que le rapport de cette commission et
nous continuons à le croire a été fait
illégalement. Lorsqu'il a été déposé en
Chambre, il a été déposé illégalement, parce
qu'une commission qui siège illégalement, encore une fois, ne
pouvait amener comme résultat qu'un rapport illégal. Et un
rapport illégal n'a pas sa place ici en Chambre. Le fait d'en accepter
le dépôt ici en Chambre aurait tout simplement été,
pour nous l'équivalent de
sanctionner quelque chose que nous croyons illégal. C'est cette
suite logique qui a tout amené, M. le Président, tout: la motion,
les amendements, les sous-amendements. Je crois qu'au cours de toute la
discussion que nous avons eue concernant amendements, motion principale et
sous-amendements, nous nous sommes toujours tenus dans le corridor de la
légalité. Qu'on ne vienne pas nous dire qu'on fait perdre du
temps à l'Assemblée, encore une fois. Comment en a-t-on perdu
à entendre, lors du débat sur le discours inaugural, 25 ou 26
discours qui n'ont absolument rien apporté, beaucoup moins que ce
qu'apporte, à l'heure actuelle, le respect des procédures. Je les
ai respectées, moi, et en aucune façon je n'ai exprimé de
désapprobation lorsque les 25 députés du gouvernement se
sont fait entendre lors du discours inaugural. On a pris seulement quelques
heures, alors que le gouvernement c'était son droit et il a bien
fait a pris le reste du temps pour se faire entendre. Chaque
député a pris le temps pour se faire entendre de son
comté, c'est normal. Pourquoi, M. le Président...
M. SAINT-PIERRE: La pertinence du débat.
M. BEDARD (Chicoutimi): Non, ce n'est pas cela, ne vous inquiétez
pas. C'est parce qu'on s'aperçoit...
M. VEILLEUX: C'est mauvais pour le coeur.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... jusqu'à quel point le processus qu'on
a suivi est légal. On s'est toujours exprimé dans la
légalité et l'Opposition peut être fière, tout
simplement, d'avoir toujours respecté les décisions de
l'honorable président de la Chambre, et d'avoir tout simplement
exercé les droits qu'il est de son devoir d'exercer. Effectivement,
autant le gouvernement a été élu pour faire la
législation, essayer de la rendre la plus rentable possible, la plus
équitable et la plus profitable possible pour tous les citoyens du
Québec, autant l'Opposition a été élue pour essayer
d'apporter des remarques suggestives ou encore des amendements
suggestifs...
M. MARCHAND: Il commence à faire...
M. BEDARD (Chicoutimi): ... concernant toutes ces lois qui sont
apportées dans cette Assemblée nationale ou qui sont
déférées en commission parlementaire.
Alors, on me dit qu'il ne me reste pas tellement de temps. Si je me suis
permis de faire cette rétrospective, c'est parce que, d'une part, je
l'ai dit et je sais bien que, pour tous les honorables députés de
la Chambre, cela fait quand même assez longtemps qu'on en discute pour
savoir jusqu'à quel point nous évoluons...
M. MARCHAND: ... pas conscient...
M. BEDARD (Chicoutimi): ... dans la légalité...
M. MARCHAND: ... inconscient...
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est du fait qu'il y avait la présence
d'honorables juges ici et cela leur permettait de voir...
M. SAINT-PIERRE: J'invoque le règlement, M. le Président.
Vu qu'il reste à l'honorable député à peine une
minute, peut-être que vous pourriez l'inviter...
M. BEDARD (Chicoutimi): Trois minutes.
M. SAINT-PIERRE: ... peut-être que vous pourriez l'inviter...
M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président.
M. SAINT-PIERRE: J'ai invoqué une question de règlement,
je m'excuse.
M. MARCHAND: Pas deux à la fois.
M. LEGER: J'invoque le règlement sur ce qu'il vient de dire.
M. SAINT-PIERRE: Sur le règlement, M. le Président.
M. LEGER: J'ai vérifié...
LE PRESIDENT: Sur quoi? En vertu de quoi?
M. LEGER: ... M. le Président, auprès... Le
député est en train...
M. SAINT-PIERRE: Non. LE PRESIDENT: II lui restait trois minutes. M.
SAINT-PIERRE: En vertu de quoi? M. LESSARD: M. le Président...
M. LEGER: C'est ça, il reste trois minutes et il dit une
minute.
LE PRESIDENT: Ce n'est pas une question de règlement... Allez,
allez.
M. SAINT-PIERRE: M. le Président, je sais qu'il reste au
député quelques minutes à parler. Pourriez-vous l'inviter
à la pertinence du débat et à nous donner au moins une
phrase dans laquelle il pourra parler sur l'amendement qui est devant la
Chambre dans le moment et non tenter...
UNE VOIX: Mais je pense que c'est impossible.
M. SAINT-PIERRE: ... de justifier le "filibuster" que le Parti
québécois nous fait subir?
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je trouve cette
remarque...
M. SAINT-PIERRE: Vous ne parlez pas. Parlez sur la motion, ne nous dites
pas pourquoi vous faites ça.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, en quoi cette remarque
peut-elle être pertinente? Je pense avoir parlé dans la
légalité. La meilleure preuve que j'ai parlé dans la
légalité, c'est que je n'ai eu aucune interruption de l'honorable
président de cette Chambre. Qui est le gardien de la
légalité ici, sinon l'honorable président de cette
Chambre?
M. SAINT-PIERRE: Une phrase, une phrase.
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je vais terminer...
M. MARCHAND: ... prends une déblayeuse.
M. BEDARD (Chicoutimi): ... parce que les remarques du ministre de
l'Industrie et du Commerce montrent qu'en termes de légalité il
s'y connaft très peu. Alors, je vais tout simplement terminer en
apportant un amendement à la motion principale qui se lirait comme suit:
...
M. MARCHAND: On commence!
M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce celle-là? Sur la
décision?
UNE VOIX: Ah! Ah!
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est parce qu'il en a plusieurs! Alors, que la
motion en discussion...
LE PRESIDENT: Est-ce que l'honorable député de
Maisonneuve...
M. BURNS: J'étais dans l'allée, M. le Président, je
me dirigeais vers mon siège.
M. LESSARD: Est-ce que l'on pourrait demander, M. le Président
c'est une question de règlement au député de
Laurier de respecter l'article 26 et de reprendre son siège?
M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, M. le Président...
M. LESSARD: Je vous le demande, M. le Président.
M. VEILLEUX: M. le Président, en vertu de l'article 92, demandez
donc au député de Saguenay de se tenir debout.
M. LESSARD: C'est la troisième fois, M. le
Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs!
M. LESSARD: ... regardez l'intelligence du député de
Saint-Jean.
LE PRESIDENT: Un peu de sérieux, un peu de sérieux.
UNE VOIX: C'est difficile de l'être avec eux, M. le
Président.
M. BEDARD (Chicoutimi): Alors...
M. VEILLEUX: Ils ne perdent rien pour attendre. On va les...
Motion d'amendement de M. Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): Je termine, M. le Président, en proposant
que la motion en discussion soit amendée en remplaçant les mots
"conduite de son vice-président" par les mots "décision
d'ajournement du 14 au 15 décembre 1973", de façon que la motion
principale se lise comme suit: Que cette Assemblée regrette
là, c'est réprouve, cela a été battu
donc réprouve la décision d'ajournement du 14 au 15
décembre 1973, rendue par le vice-président, le
député de Roberval, lors de l'étude en commission
permanente de la justice du projet de loi 8. Autrement dit, à
l'intérieur, nous apportons l'amendement suivant: Au lieu de "conduite",
qui est dans la motion principale,...
UNE VOIX: ...
M. BEDARD (Chicoutimi): Arrêtez donc d'intervenir, on va se
comprendre.
M. SAINT-PIERRE: C'est terrible!
M. BEDARD (Chicoutimi): Dans la motion principale, nous
remplaçons le mot "conduite" par "décision rendue". Je vais
expliquer pourquoi.
C'est parce...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. SAINT-PIERRE: En 1978, on va être 110.
M. LESSARD: A la suite de vos explications,...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. LESSARD: ... de vos
interventions.
M.BURNS: Continuez, c'est parfait. Continuez de croire à cela,
cela va être parfait.
UNE VOIX: A l'ordre!
M. BURNS: Vous agissez d'ailleurs de la façon...
M. SAINT-PIERRE: Non, et vous autres, vous faites perdre du temps au
Québec.
M. BURNS: ... absolument inverse.
M. LEGER: On vous laisse dans vos illusions.
M. SAINT-PIERRE: Vous faites perdre du temps au Québec.
M. LEGER: On vous laisse dans vos illusions.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, messieurs! ...
M. BACON: On vous a battus et on va vous battre encore.
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre! Messieurs! ... Bon!
L'honorable député de Chicoutimi.
M. BEDARD (Chicoutimi): Très succinctement, M. le
Président, d'une part, on avait apporté un amendement à la
motion principale, limitant dans le temps les actes posés par
l'honorable député de Roberval, en ajoutant: Lors de la
séance tenue les 14 et 15 décembre 1973. C'était là
une limitation dans le temps. A l'heure actuelle, nous croyons que
"condui-te"est un terme trop général qui a été
donné dans la résolution et nous voulons limiter l'acte qui a
été posé par l'honorable député de Roberval,
autrement dit, limiter de manière qu'on n'exploite pas le mot "conduite"
d'une façon démagogique et injuste envers l'honorable
député de Roberval. Nous voulons limiter son acte, très
bien circonscrire l'acte qui a été posé en changeant le
mot "conduite" par le mot "décision".
LE PRESIDENT: Donnez-moi la copie.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense que ce serait plus juste envers
l'honorable député de Roberval.
M. BURNS: M. le Président, désirez-vous m'entendre
là-dessus ou si vous préférez...
UNE VOIX: Non!
LE PRESIDENT: Dans quelques minutes. Vous me dérangez trop, je
préfère suspendre pour cinq minutes.
M. BURNS: M. le Président, je veux tout simplement vous
référer à deux décisions qui, à mon avis,
sont assez importantes à l'égard de la recevabilité de
l'amendement qui vous est soumis actuellement. Ce que nous tentons, par
l'amendement qui a été proposé par le député
de Chicoutimi, c'est de vous préciser l'occasion exacte à
laquelle nous aurions aimé regretter, mais nous réprouvons la
conduite du député de Roberval.
C'est quelque chose qui a été accepté dans d'autres
Parlements qui suivent les mêmes règles. Je vais plutôt
commencer par vous citer une réponse du président de la Chambre
des communes de Londres le 26 juillet 1901, que vous connaissez sans doute.
Justement, il s'agit d'un problème tout à fait analogue qui vous
donne raison, M. le Président, entièrement sur l'attitude que
vous avez tenue, il y a deux jours, lorsque je me suis plaint du retour du
rapport en Chambre, et qui dit tout simplement que vous n'aviez pas à
intervenir. Je le dis publiquement: Je suis entièrement d'accord sur
cette attitude que vous avez maintenue, parce que j'ai eu connaissance de cette
décision postérieurement.
Mais un certain député du nom de Swift MacNeil, ce 26
juillet 1901, se plaignait de décisions qui avaient été
prises en comité par le président. Il pose une question au
président, que vous me permettrez de vous citer. Evidemment, ça
va être en anglais, car ça se passait à Londres. Cela ne
vous choquera pas? "I desire to put a question to you, Mr Speaker, as bearing
upon the protection of the rights and privileges of Members. I am aware that
you are uanble to take cognizance of what takes place in committee of supply.
But will you say if there is any method of challenging a ruling of the
deputy-chairman given last night, and which appears to have been contrary to
practice and calculated to unduly shield ministers from criticism. Could such a
ruling be challenged in any other way thanby a motion? "Mr Speaker: I am not
aware of any other method".
Et le député MacNeil continue: "Then I beg, Mr. Speaker,
to give notice of a motion in the following terms: et on cite "That
this House disagrees with the ruling of Mr Stewart Worthly as deputy chairman
on Thursday, that criticism of the manner and method of response by the
Secretary of State forward to questions addressed to him in reference to
matters in his Department are out of order in discussion in committee of supply
on a motion for the reduction of the Secretary of State's salary inasmuch as it
is subversive, off free discussion, contrary to practice, and a grave
infringement on the rights of its members".
M. le Président, ce que j'essaie de vous démontrer en vous
citant cette décision ou cette motion qui, d'ailleurs, est
apportée dans "The Parliamentary Debates, fourth series, volume 98" du
25 juillet 1901 au 7 août 1901.
LE PRESIDENT: C'est "fourth...
M. BURNS: "The Parliamentary Debates",
de la Chambre de Londres. C'est la "fourth series", la quatrième
série, M. le Président.
LE PRESIDENT: "Fourth".
M. BURNS: C'est "fourth series, second session of the 27th Parliament of
the United Kingdom of Great Britain and Ireland". I am very happy, Mr Speaker,
that Ireland be mentioned in this.
M. le Président...
LE PRESIDENT: It was included at that time.
M. BURNS: Now, at that time...
LE PRESIDENT: Included in the United Kingdom.
M. BURNS: ... they had not separated, yet!
M. le Président, le deuxième cas que je veux vous citer
est beaucoup plus près de nous, il est à quelque 200 milles de
l'endroit où je vous parle, c'est-à-dire à Ottawa et, au
point de vue du temps, il est assez rapproché aussi. Il s'agit d'un
problème qui a été soulevé le 27 mars 1962 et que
je tire de "Parliamentary Debates, Commons"... je m'excuse. M. le
Président, c'est encore une décision britannique; je
m'aperçois qu'il s'agit...
LE PRESIDENT: En 1962.
M. BURNS: Oui, encore une décision britannique, je m'excuse de la
mauvaise référence, c'est parce que j'ai vu "Parliamentary
Debates, Commons"; c'est une série qui nous vient du Royaume de
Grande-Bretagne. M. le Président, à la page 1026 de ce recueil
que je vous cite, "Parliamentary Debates, Commons", 1961-1962, volume 656 qui
vaut pour les jours compris entre le 19 mars et le 30 mars et c'est la
cinquième série, "fifth series", on voit encore une fois une
même attitude.
Elle est posée par le député, Sydney Silver-man,
lorsqu'il fait la motion suivante qui a été jugée
régulière encore une fois. "That this House respectfully dissents
from the rulings given by the Chairman of Ways and Means, whereby the only
amendment called for a reduction of the navy estimates was not moved,
considered or decided, and declares that the right and, in appropriate
circumstances, the duty of the Committee of Supply to reduce any proposed grant
of money to the Crown cannot and ought not be frustrated, abrogated and
diminished in any manner by the Chair".
Ce que nous voulons faire, M. le Président, dans le fond, par
l'amendement proposé par le député de Chicoutimi, c'est
justement en réunissant, je ne dirais pas ces deux
décisions, mais ces deux attitudes, parce que cela n'a pas
été contesté à ces deux occasions; on a jugé
recevable la motion utiliser le seul moyen tout à fait en
accord avec votre décision, l'autre jour de ramener devant la
Chambre un geste précis auquel, soyons clairs, nous nous opposons et que
nous voulons, à toutes fins pratiques, porter devant la Chambre. C'est
la seule et unique façon, M. le Président, vous
référant à ces deux décisions-là, que nous
ayons pour porter ça devant la Chambre.
Nous n'avons aucun autre moyen, sinon par une motion très
précise, de dire dans quelles circonstances et à quel moment nous
en "appelons" de la décision du président de la commission, qui,
en l'occurrence, est vice-président de l'Assemblée nationale.
C'est sûr que ce n'est pas un appel, parce que nous n'avons pas droit
d'appel. C'est sûr aussi, conformément à votre
décision d'il y a deux jours, que vous ne devez pas être en appel.
Nous faisons appel à la Chambre. Pour que la Chambre puisse
éventuellement décider, il est important qu'elle sache, entre
autres, que c'est la décision d'ajournement du 14 au 15 décembre
1973, rendue par le vice-président de l'Assemblée nationale, que
nous contestons.
Si elle défait notre motion ainsi amendée, je
considère que notre appel aura été, selon le seul moyen
que nous ayons à notre disposition, mis de côté et la
procédure suivra son cours tout simplement.
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: J'ai écouté l'argumentation du
député de Maisonneuve autant sur ce qui se passe à
Westminster en 1901 que sur ce qui s'y passe en 1962. Je crois que c'est
plutôt rare que nous puissions nous référer à des
décisions, que j'appellerais assez récentes, de Westminster. En
effet, si on se le rappelle bien, au début, notre droit parlementaire,
souvent, n'était pas écrit. Je crois que, lorsqu'on a fait le
premier règlement de 1910 ou de 1915, il était dit qu'on
référait d'abord à ce qui se passait à Ottawa et
qu'à défaut de règle précise ou devant une zone
grise, on allait à Westminster. Les décisions récentes de
Westminster, en 1962, entre autres, ne m'ébranlent pas tellement, parce
que, depuis ce temps-là, nous avons un nouveau règlement soit
Geoffrion et celui que nous avons actuellement. C'est uniquement dans des cas
de grand doute qu'on peut je crois, y référer: Cela ne
m'impressionne pas tellement d'aller à Westminster en 1962.
Nous avons considéré cette question. Nous avons
considéré plusieurs aspects, mais il y a surtout une raison, en
particulier, qui nous a retenus, c'est la suivante. La motion qui est en
discussion, en somme c'est très important se lit comme
suit: "Que cette Assemblée réprouve la conduite de son
vice-président, le député de Roberval, lors de
l'étude en commission permanente de la justice, du projet de loi no 8".
Si on acceptait la recevabilité de l'amendement, la motion se lirait
maintenant
comme suit excusez-moi si j'insiste, mais je crois que c'est
très important "Que cette Assemblée réprouve la
décision d'ajournement du 14 au 15 décembre 1973 rendue par le
vice-président, le député de Roberval, lors de
l'étude en commission permanente de la justice du projet de loi 8".
Je crois que nous changeons tout à fait d'objet. Il ne faut pas
oublier que notre motion initiale s'attache et s'accroche et est faite en vertu
de l'article 68, qui est une motion vraiment spéciale, distincte, qui
est placée dans notre règlement dans un paragraphe, seule
à ce paragraphe ou à ce chapitre ou à cette section, qui
est la page 24, section 3, avec un titre: Motion portant sur la conduite du
lieutenant-gouverneur ou des membres de l'Assemblée. Et on lit l'article
68: "Une motion de fond annoncée est nécessaire pour mettre en
question la conduite du lieutenant-gouverneur, du président et d'un
vice-président de l'Assemblée, des présidents des
commissions ou d'un membre de l'Assemblée". Et quelque statut
particulier qu'on lui donne "Cette motion est
privilégiée."
Vraiment, c'est une motion, je dirais, qui sort de l'ordinaire à
cause de son importance. On réprouve et on met en question la conduite
d'un personnage en titre, en fonction, lieutenant-gouverneur, président
de la Chambre, vice-président, président des commissions ou d'un
membre. Je pense qu'on change énormément d'objet dans votre
amendement, parce que vous faites par votre amendement et vous avez dit
que ce l'était un appel d'une décision d'un
président. Cela n'est plus sa conduite qui est mise en cause, ce n'est
plus sa conduite en tant que vice-président, c'est une décision
qu'il a prise et c'est un appel indirect...
M. BURNS: M. le Président, qui peut plus peut moins. C'est cela,
l'idée. Si nous réprouvons la conduite...
LE PRESIDENT: Laissez-moi terminer. DES VOIX: A l'ordre!
LE PRESIDENT: Une raison de plus que si votre motion telle
qu'amendée était présentée comme motion principale,
elle ne serait pas recevable. Si votre motion telle qu'amendée
était présentée comme motion principale, elle ne serait
pas acceptée comme motion privilégiée.
M. BURNS: Parce que...
LE PRESIDENT: C'est une décision, cela n'est pas la conduite.
Messieurs, ma décision est que cette motion n'est pas recevable.
M. BURNS: M. le Président, permettez-moi de vous dire que c'est
d'être d'un grand formalisme à l'occasion d'un débat qui se
veut une discussion franche, honnête et directe de la conduite et en
particulier, à l'occasion de la décision qui a été
rendue par le député de Roberval et je suis sûr que mes
collègues du côté ministériel se rendent compte
jusqu'à...
UNE VOIX: La décision est rendue.
LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît !
L'honorable député de Saint-Jacques.
Reprise du débat sur la motion principale M. Claude
Charron
M. CHARRON: Je vous avertis immédiatement, M. le
Président, que j'ai l'intention de terminer avec un amendement.
J'interviens sur la motion présentée par mon collègue, le
député de Maisonneuve et qui vise directement la conduite du
député de Roberval, votre vice-président, M. le
Président, lors de l'étude en commission du projet de loi no 8
qui vise à augmenter de $5,000 par année des salariés qui
en font déjà $28,000, soit une augmentation de $100 par
semaine.
DES VOIX: A l'ordre!
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. CHARRON: Depuis le début de ce débat, avec tous les
moyens que nous avons pu utiliser et que nous permet notre règlement,
nous avons soumis à votre attention et à ceux de vos
collègues qui vous guident dans vos décision et c'est
parfaitement votre droit de consulter nous avons tenté,
inutilement et malheureusement, puisque l'ensemble de vos décisions ne
s'y est pas prêté, de préciser le but que nous visions dans
cette motion de blâme sur la conduite de votre vice-président
alors qu'il dirigeait les travaux de la commission parlementaire de la
justice.
Le seul amendement que nous ayons réussi à faire adopter a
été pour préciser. Il est maintenant ajouté
à la fin de la motion principale sur laquelle j'interviens à ce
moment-ci. On y dit: Lors de l'étude en commission parlementaire du
projet de loi qui augmente le salaire des juges. Le dernier amendement, vous
venez de le refuser, je me garde quand même le droit d'intervenir dans la
motion principale en le mentionnant. Parce que nous visions un but bien net.
Nous ne visons pas la personne du député de Roberval. La motion
du député de Maisonneuve ne vise pas l'ensemble de sa conduite,
contrairement à ce que la motion que nous sommes présentement
à discuter peut malheureusement laisser entendre.
Je m'en voudrais, moi, que le député de Roberval ait
à subir dans son propre comté et devant les électeurs
qu'il représente ici le fait
qu'on dit partout que c'est sa conduite en général qui ait
été blâmée. J'interviens donc sur la motion
principale, mais dans l'esprit de l'amendement que vous venez de rejeter, parce
que voici ce que je conteste. Je vais vous le dire en faisant la narration des
événements que je conteste. Je prierais le député
de Roberval de ne tenir grief du grief que je lui porte que sur les deux
domaines où j'insisterai plus particulièrement, ce que nous avons
toujours voulu faire par l'amendement.
Le premier endroit où il y a grief apporté dans la
conduite du vice-président de l'Assemblée nationale, c'est quand
il a interdit à un membre en titre de la commission de présenter
une motion parfaitement reconnue dans notre règlement, M. le
Président. Cela pourrait être acceptable pour un nouveau
député de cette Chambre qui n'a pas encore pris connaissance du
règlement, ça pourrait être acceptable pour même un
vétéran de cette Chambre, mais qui n'aurait jamais eu une
connaissance sérieuse de ce règlement. C'est inacceptable quand
c'est un vice-président de l'Assemblée nationale qui refuse
à un membre de la commission parlementaire de présenter une
motion et d'avoir un vote normal sur une motion de la commission.
De quoi suis-je en train de parler, M. le Président? Je vais vous
le dire. J'ai essayé à un moment donné, à la
commission parlementaire, d'intervenir. Je savais parfaitement que l'article
148 me l'interdisait à moins que je n'aie le consentement de la
commission. Mais pour susciter le consentement de la commission, ou pour subir
sa désapprobation, il fallait toujours bien que je le demande. La
commission elle-même ne pouvait pas deviner que j'avais envie
d'intervenir dans le débat, même si elle savait que les
électeurs que je représente en ont contre le fait qu'une
catégorie qui gagne $28,000 se voit augmenter de $5,000 comme ça,
la veille de Noël. Mais elle ne pouvait pas, la commission, le deviner
avant que j'en fasse la demande. J'en ai fait la demande, M. le
Président. Et d'une manière irrégulière, suite au
tonitruant ministre de la Justice, qui avant même que le
député de Roberval ait un mot à dire et cela
l'excuse en partie s'est empressé d'intervenir et de dire: M. le
Président, je refuse et vous ne pouvez pas accepter. Soit, j'en
conviens, M. le Président et j'en prenais mon parti. Mais ce qui
était inacceptable, c'est de refuser à un membre en règle,
comme l'est le chef de l'Opposition et comme l'est le leader de l'Opposition,
de présenter une motion pour que mon collègue de Saguenay et
moi-même puissions intervenir là-dedans.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député...
M. CHARRON: II m'avait pas le droit de refuser une motion.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député... M. CHARRON:
Trouvez-moi à quel endroit,
M. le Président, dans le règlement actuel qui
préside à nos travaux...
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député me permet une
question?
M. CHARRON: ... à quel endroit on peut refuser une motion.
LE PRESIDENT: C'est refusé.
M. CHARRON: ... quand un membre en règle de la commission le
propose. J'ai beau chercher partout, dans tous les vides que comporte notre
règlement et malheureusement on s'en rend compte actuellement.
M. CHOQUETTE: M. le Président, je sollicite...
M. CHARRON: ... ou remonter dans toutes les traditions parlementaires
par la suite...
M. CHOQUETTE: M. le Président, je sollicite...
LE PRESIDENT: Pas de question. Non accordé.
M. CHARRON: ... je puis dire qu'il n'y avait aucune raison de refuser
cette motion. Mais malheureusement le député de Maisonneuve s'est
fait illégalement refuser cette motion. Et c'est ainsi, M. le
Président, que non seulement j'ai été privé d'un
droit de parole que la tradition me reconnaît habituellement dans les
travaux parlementaires, mais le député de Maisonneuve s'est vu
privé d'un droit. Et c'est là-dessus qu'un vice-président
de l'Assemblée nationale est blâmable.
Il est blâmable où, aussi, M. le Président? Il est
blâmable dans ce que nous avons essayé d'amener sur le tapis par
l'amendement que vous venez de juger irrecevable. Lorsque les travaux de la
commission se sont terminés, à minuit, le ministre de la Justice
venait de se réveiller. Il avait oublié, parce qu'il ne
connaît pas le règlement de l'Assemblée nationale...
M. CHOQUETTE: J'invoque le règlement.
M . CHARRON: ... parce qu'il est absolument...
M. CHOQUETTE: J'invoque le règlement. LE PRESIDENT: Une question
de privilège?
M. CHOQUETTE: Une question de privilège, ah oui !
LE PRESIDENT: De règlement ou de privilège? C'est à
votre goût.
M. CHOQUETTE: De privilège, plutôt.
LE PRESIDENT: De privilège.
M. CHOQUETTE: Je n'ai jamais dormi à cette commission
parlementaire. C'est vrai que j'ai fermé les yeux, mais
j'écoutais tout ce qui se passait. J'écoutais tout ce qui se
passait.
LE PRESIDENT: Bon, c'est...
M. CHOQUETTE: Est-ce que ceci corrige l'affirmation du
député?
M. CHARRON: Bien, M. le Président. C'est encore pire s'il ne
dormait pas parce que le ministre de la Justice aurait dû savoir s'il
était attentif aux travaux de la commission, que minuit approchait et
que le règlement lui disait que si minuit approchait, il devait
intervenir plus rapidement qu'il ne l'a fait pour présenter une motion
d'ajournement parce que notre règlement présuppose, à
l'article 77, qu'un représentant d'un parti reconnu, c'est-à-dire
l'Opposition officielle, a droit à dix minutes d'intervention sur ce
débat. C'était un droit, c'était plus qu'un droit,
c'était l'intention d'utiliser ce droit qu'avait le député
de Maisonneuve à l'époque.
Mais le ministre de la Justice on sait que ce ne sont pas les
règlements et l'esprit des lois qui l'étouffent s'en est
foutu. Il a pensé que sa grosse majorité confortable et que son
gros poids à la commission allaient suffire pour faire plier la
commission d'un seul coup et d'un seul bond. C'était mal connaître
l'Opposition officielle. C'était surtout sous-estimer, ou alors
serait-ce estimer justement, ce que le député de Roberval allait
faire. Quand il a présenté sa motion d'ajournement, il
était à peine minuit moins cinq minutes. La transcription du
journal des Débats vous précisera le moment exact.
Donc, le député de Maisonneuve s'est prévalu de son
droit d'intervenir selon l'article 77 de notre règlement. Mais il
était passé minuit lorsqu'il a terminé son intervention.
Cette commission n'avait plus le droit de se prononcer. Elle n'avait plus le
droit de prendre un vote sur la motion d'ajournement. C'est donc dire que la
commission a mis fins à ses travaux sans que nous ne l'ayons
décidé par un vote de la commission sur une motion
présentée par celui qui, du mieux qu'il pouvait
c'était le plus qualifié qu'ils avaient trouvé
représentait le gouvernement, c'est-à-dire le ministre de la
Justice, alentour de cette table. Rien de cela. Nous nous trouvions donc, selon
la tradition parlementaire et toutes les règles qui prévalent aux
séances des commissions, à ajourner sine die, et nous avions
à attendre un ordre de la Chambre avant de nous réunir à
nouveau.
Or, le député de Roberval, vice-président de la
Chambre, dans un mépris et une méconnaissance du
règlement, s'est proclamé empereur à la fin de la
commission et a décrété réunion d'un caucus
libéral qui tiendrait lieu de commission parlementaire pour le lendemain
matin, à dix heures. A dix heures, le député de
Maisonneuve est allé rappeler à ces honorables messieurs, qui
s'apprêtaient à augmenter les salaires des juges de $5,000 par
année, alors qu'ils en font déjà $28,000, et qui allaient
adopter, dans l'unanimité la plus douloureuse, un projet de loi aussi
contestable et contesté par la population, est allé rappeler,
dis-je, au vice-président de la Chambre lui-même qu'il se
dégradait et qu'il dégradait le poste que vous occupez et qu'il
occupe de par sa fonction en se prêtant aussi bassement au jeu d'un
caucus libéral. C'était porter atteinte à la
réputation que vous, M. le Président, avez maintenue à la
présidence de cette Assemblée et que votre vice-président
se devait de maintenir aussi dans toutes ses décisions et dans toute sa
conduite, puisque tel est l'objet de la motion qui nous occupe.
Tels sont donc les événements qui ont marqué les
débats en commission parlementaire d'un projet de loi aussi
dégoûtant que celui que parraine le député
d'Outremont, actuellement. C'est donc à partir de cela... Il a fait
plus, en cautionnant une réunion de députés
libéraux par un beau samedi matin. H s'est trouvé à
permettre qu'un de ces nouveaux venus de la dernière portée
libérale du 29 octobre se voie gratifié, d'un seul coup, du nom
de rapporteur officiel d'une commission qui n'avait jamais existé, qui
n'avait jamais siégé légalement autrement que le vendredi
soir, 14 décembre dernier.
C'est ce même petit rapporteur qui mardi dernier, M. le
Président, est venu déposer sur la table de cette
Assemblée un rapport illégal, d'une réunion
illégale, présidée illégalement par un
vice-président de l'Assemblée nationale.
M. MALOUIN: C'est ton opinion, ça!
M. CHARRON: C'est alors, M. le Président, que figure depuis ce
temps au feuilleton un rapport que nous aurons l'occasion de commenter si le
leader du gouvernement se met en frais de l'appeler.
M. le Président, ce sont donc là des griefs bien
précis que nous avons voulu, d'ailleurs, identifier bien clairement dans
des amendements que vous nous avez refusés, mais je persiste à
dire, puisque je dois parler sur la conduite en général du
député de Roberval tel est l'objet de la motion que
je m'oppose à parler de sa conduite générale. Je me suis
efforcé, au cours de cette intervention, de bien indiquer, comme
normalement auraient dû permettre de le faire des amendements à
cette motion, trois endroits précis où votre
vice-président, M. le Président, a été pris en
faute.
Je dis en terminant, M. le Président, que nous aurions voulu
atténuer également l'accusation. C'est pourquoi, tout à
l'heure ou hier, je ne me rappelle plus, le député de Lafontaine
a présenté un amendement qui disait, parce que nous ne voulons
pas porter atteinte à la réputation du député de
Roberval, non pas "réprouver" mais "regretter". Nous étions
prêts
à bien identifier d'abord les trois endroits où nous
n'approuvons pas la conduite du député de Roberval et à
dire que nous ne la réprouvons pas, parce que ce serait lui porter
atteinte, mais nous la regrettons.
Nous avons fait ce pas pour bien identifier l'accusation que nous
faisons porter sur le député de Roberval. Qu'est-ce qui est
arrivé de notre amendement, M. le Président? Le Parti
libéral l'a défait. Le Parti libéral aime mieux
réprouver la conduite. Ce n'est pas l'intention de l'Opposition
officielle. C'est ainsi, M. le Président, que j'interviens à la
demande du Parti libéral, parce que j'aurais aimé bien mieux
intervenir sur une motion qui aurait comporté le mot "regrette". Ils
m'ont invité à réprouver la conduite du
député de Roberval puisqu'ils ont défait notre
amendement.
Devant cette attitude du parti ministériel et suite à
l'intervention que vous avez faite vous-même, tout à l'heure, M.
le Président, en vous prononçant sur la recevabilité du
sous-amendement présenté par le député de
Maisonneuve et en le refusant, ce que vous étiez parfaitement en droit
de faire, vous nous avez dit alors que si la motion demeurait telle quelle,
c'est-à-dire une réprobation de la conduite du
député de Roberval, il était admissible alors que ceux qui
présentent cette motion y joignent une sanction puisque, selon l'avis
même du parti ministériel, il ne s'agit pas de simplement
regretter ils ont défait notre amendement il s'agit de
réprouver. S'il s'agit de réprouver, je me sens parfaitement en
droit, à ce moment-ci de nos travaux, de vous présenter un
amendement qui identifierait physiquement la réprobation que cette
Chambre éprouve, selon l'appel du parti ministériel à
l'égard du député de Roberval.
J'admets, M. le Président, que si cette Chambre avait dit qu'il
faut regretter la conduite du député de Roberval, nous nous
serions trouvés en peine de sanctionner un regret. Je pense que l'avis
de la Chambre était en soi un avis suffisamment sérieux au
député de Roberval, l'avis du regret de la Chambre, pour qu'il en
prenne note. Mais puisque le Parti libéral nous invite à
réprouver la conduite du vice-président de la Chambre, j'en
prends bonne note, mais une réprobation, M. le Président,
implique que quand on est sérieux dans une réprobation, il y a au
bout de la ligne une sanction. D'accord, elle peut Être d'une
sévérité différente, j'en conviens.
Nous aurions pu, le règlement nous aurait permis d'aller
jusqu'à la destitution du vice-président de la Chambre. Ce n'est
pas le cas parce que ce n'est pas sa conduite en général, encore
une fois, c'est une, deux, trois décisions bien précises...
M. MALOUIN: Vous avez essayé quand même!
M. CHARRON: ... mais qui ont malheureusement attaqué
sérieusement les droits de dépu- tés qui s'opposaient
à un projet de loi aussi dégueulasse que le projet de loi no
8.
Je propose donc, à la suite de l'appel que vient de lancer le
Parti ministériel pour que nous réprouvions la conduite du
député de Roberval, cet amendement, M. le Président, qui
porte en lui-même une sanction à l'égard du
député de Roberval.
J'aurais également pu demander que, selon toutes les traditions
parlementaires, différentes sanctions soient imaginées à
l'égard du député de Roberval. Je crois, M. le
Président, que j'ai choisi, dans ma motion d'amendement, que je vous
prierai tout à l'heure de greffer à la motion principale
présentement en discussion, la plus souple et la moins aiguë des
sanctions.
Puisque les députés libéraux sont d'accord pour
réprouver la conduite du député de Roberval, plutôt
que de la regretter, probablement que je recevrai aussi, sur cette motion
d'amendement, le même consentement qu'ils ont émis à
réprouver sa conduite.
J'ai choisi, je crois, la sanction la plus mince, et je l'explique dans
les dernières minutes qui me restent. Cette session qui prendra fin en
janvier aura l'occation d'étudier d'autres projets de loi, bien
sûr. Vous savez vous-même, M. le Président, que nos travaux,
avant d'être abandonnés pour cette motion
privilégiée, en étaient rendus à l'étude des
projets de loi nos 2 et 3 qui visent malheureusement, c'est une
réforme amoindrie une réforme des loyers, qui est toujours
parrainée par le même député d'Outremont, ministre
de la Justice.
Il est bien probable que ces deux projets de loi, d'ici la fin de la
session en janvier, connaf-tront l'approbation de la Chambre en deuxième
lecture, même si c'est à corps défendant que nous devons
nous contenter d'une aussi ridicule réforme après avoir attendu
mieux.
Peu importe, il est donc loisible de penser que ces mêmes projets
de loi contestés et contestables seront déférés
à la commission parlementaire de la justice, puisque c'est le ministre
lui-même qui les parraine. Il serait, à notre avis, regrettable
que le vice-président de la Chambre qui, à cette même
commission parlementaire de la justice, a fait preuve d'une
méconnaissance du règlement et des droits qu'ont les membres de
cette Assemblée, en particulier ceux de l'Opposition, à
intervenir, soit appelé à présider nos travaux dans une
période aussi critique. Nous ne savons toujours pas si le projet de loi
no 8 sera même adopté encore, à l'époque où
nous étudierons en commission les projets de loi nos 2 et 3. Il serait
donc regrettable et j'invite la Chambre à le signaler en adoptant
la motion d'amendement que je présente que ce soit le même
homme, c'est-à-dire le député de Roberval, votre
vice-président, qui ait à siéger et à
présider les travaux de la commission parlementaire de la justice,
lorsque nous étudierons ces deux projets de loi.
Je crois que le vice-président de l'Assemblée
nationale, le député de Roberval, à la fin de cette
motion privilégiée que cette Chambre accorde ou non la
réprobation qu'elle indique à sa conduite, peu importe a
suffisamment pris avis, au cours de ce débat, du fait que l'Opposition
officielle allait être vigilante dans sa conduite comme dans celle de
tous les présidents de commissions et de tous ceux qui sont
chargés du respect du règlement dans cette Chambre.
Je crois que la leçon, en soi, est déjà prise. Ne
poussons pas trop loin et évitons à l'avenir les conflits. Pour
améliorer et finir dans le calme nos travaux, tant que cette session qui
s'achèvera en janvier 1974 ne sera pas terminée, qu'il me soit
permis de faire la motion suivante:
Motion d'amendement de M. Charron
M. CHARRON: Que la motion en discussion celle parrainée par
le député de Maisonneuve soit amendée en ajoutant
à la fin et c'est la plus souple sanction que j'ai pu imaginer
à la réprobation que l'ensemble de la Chambre éprouve
"et souhaite qu'il ne préside plus ladite commission."
Voilà.
Pour le reste, nous n'avons pas d'objection à ce que le
vice-président vous remplace, à l'occasion, au poste que vous
occupez en cette Chambre. Le député de Roberval est un des plus
sympathiques parmi les membres de la députation ministérielle. A
l'exception des endroits bien précis où nous l'avons pris en
faute malheureusement, c'était dans un débat aussi
contesté que ça il a toujours été un
éminent député, respectueux du règlement. Il nous a
aidés à le faire respecter, à le faire évoluer,
à l'interpréter. Il n'est aucunement question que le
vice-président de l'Assemblée nationale soit destitué ou
même mis au rancart, comme certains fonctionnaires le sont lorsqu'ils
vont un peu plus vite que le ministre.
Non, ce n'est pas ce que nous demandons. Ce que nous demandons, tout
simplement, c'est pour éviter le pire et pour que la session se termine
dans le calme. Puisque nous savons également que nous aurons encore
à subir le ministre de la Justice dans des commissions parlementaires,
nous voulons éviter le terrible fardeau qu'a sur ses épaules le
député de Roberval d'avoir à ses côtés le
député d'Outremont, qui lui dicte constamment sa conduite tout le
long des commissions parlementaires, comme il l'a fait lors de cette
séance fort contestée du 14 décembre dernier.
M. SAINT-PIERRE: C'est terrible de faire perdre du temps à la
province de même.
M. CHARRON: Ma motion vise à donner un temps de repos au
député de Roberval, à lui permettre de tirer leçon
des événements qui ont marqué les travaux de cette fin de
session et à lui permettre de devenir, une fois de plus,
l'éminent vice-président respecté à la fois par le
parti ministériel et je vous prie de me croire par le
parti de l'Opposition officielle. Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: Suspension de quelques minutes.
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: A l'ordre! Après la nième consultation, nous
en sommes venus à la conclusion, après avoir étudié
le règlement actuel et l'ancien règlement, ainsi que les auteurs,
que cette motion est acceptée.
M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: M. le Président, je me permettrai
brièvement...
M. TETLEY: Brièvement?
M. MORIN: Oui, je n'ai que dix minutes si je ne m'abuse, M. le
Président.
M. TETLEY: Ce n'est pas très bref ça. M. MORIN: C'est
très court pour...
M. TETLEY: Donnez-nous cinq minutes au lieu de dix. Faites-nous
plaisir.
UNE VOIX: Le travail à la chaîne.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!
M. MORIN: J'ai bien la parole? LE PRESIDENT: Oui.
M. MORIN: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir, une fois
de plus, mais peut-être de manière plus précise, plus
détaillée, à l'article dont l'interprétation a
causé tant d'embarras à la commission de la justice. Et je
voudrais...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Est-ce que vous me permettriez de vous
rappeler...
M. MORIN: Oui.
LE PRESIDENT: ... que la question qui est devant la Chambre actuellement
se lit comme suit: "Et souhaite qu'il ne préside plus ladite
commission."
M. MORIN: Oui.
LE PRESIDENT: Ce doit être limité à ça.
M. MORIN: Oui, c'est bien ce que j'ai dans l'idée, M. le
Président.
LE PRESIDENT: Ne me rappelez pas le passé et ce qui s'est
passé la semaine dernière.
M. MORIN: II faut tout de même que je puisse expliquer, nous en
discuterons en même temps.
M. BURNS: Sur la question de règlement, M. le Président,
simplement une chose par précaution. Si nous souhaitons qu'il ne soit
pas appelé à présider la commission de la justice à
l'avenir, je pense qu'il nous faut expliquer le sens de cette motion, et
comment ne pas relier ça aux séances qui ont eu lieu? Je vous le
soumets bien respectueusement, on ne peut pas argumenter dans le vague, on ne
peut pas argumenter dans l'absolu, M. le Président.
LE PRESIDENT: Ne pourriez-vous pas dire pour les raisons
déjà invoquées?
M. BURNS: Remarquez, M. le Président, que ça ferait
peut-être plaisir au gouvernement que ce soit plus court, etc.
peut-être à vous aussi, M. le Président. Mais une chose est
bien claire; le chef de l'Opposition, lorsqu'il explique l'amendement ou
l'appui qu'il va donner à l'amendement qui est recevable et qui est
actuellement en discussion, en délibération, n'a aucune
possibilité d'expliquer autrement son appui que par l'entremise des
séances de la commission dont nous nous sommes plaints, M. le
Président.
Je suis d'accord cependant qu'il n'a pas à entrer dans tous les
détails que nous avons discutés, tant sur la motion principale
que sur les amendements, et c'est là que je comprends votre indication
de nous garder dans la limite de cet amendement. Mais si nous souhaitons qu'il
ne siège pas comme président de cette commission, il faut quand
même faire le lien avec la commission. Or, le lien se retrouve aux
séances des 14 et 15 décembre.
LE PRESIDENT: Oui mais si je comprends bien et si je me rappelle bien,
l'honorable chef de l'Opposition officielle a déjà parlé
sur la question principale.
M. BURNS: Oui.
LE PRESIDENT: De quoi nous a-t-il entretenus sur la question principale?
A ce moment-là, il a respecté la pertinence du débat sur
la question principale, qui était: "Que cette Assemblée
réprouve on disait regrette à certains moments la
conduite de son vice-président lors de l'étude, en commission
permanente de la justice, du projet de loi no 8. Justement, en respectant la
pertinence du débat à ce moment-là, il a eu tout le temps
voulu pour le faire et il a eu d'autres étapes également. Je
pense bien que les répétitions en droit parlementaire ne sont pas
trop permises.
M. BURNS: M. le Président, sur les répétitions,
vous vous souvenez très bien...
LE PRESIDENT: Non, non, très bien! Cela n'existe pas dans notre
règlement.
M. BURNS: ... que c'était un projet dans le règlement,
mais...
LE PRESIDENT: D'accord.
M. BURNS: ... que cela a été exclu.
LE PRESIDENT: Oui, mais est-ce que vous convenez avec moi qu'on ne doit
pas avoir trois ou quatre débats sur la même question?
M. MORIN: Non, mais, M. le Président...
LE PRESIDENT: Rattachez-vous le plus possible à la question qui
est devant la Chambre, avec des courtes références, si vous
voulez. Que la matière de votre intervention soit votre souhait qu'il ne
préside plus ladite commission.
M. MORIN: Je vais tenter de m'en tenir à la "substantifique
moëlle", M. le Président. Nous souhaitons donc que le
vice-président ne préside plus les séances de ladite
commission. La raison pour laquelle nous le faisons, c'est pour éviter
qu'il n'y ait répétition d'un certain nombre d'actes que nous
avons déplorés. C'est aussi, je le dirai tout à l'heure,
parce que sa crédibilité, au moins pour l'instant, nous paraft
légèrement entachée, quoique nous lui conservions notre
estime, à ce point que nous avons proposé ai-je besoin de
vous le rappeler de remplacer le mot "réprouver" par le mot
"regretter".
M. MALOUIN: II a déjà dit ça.
M. MORIN: M. le Président, nous voudrions éviter qu'au
cours des séances prochaines, si par hasard nous invoquions cet article
157, la même interprétation ne lui soit donnée à
nouveau. Je vous rappelle que la dernière phrase de l'alinéa
premier dit qu"'en commission élue, un député peut
proposer que la commission ajourne ses travaux". Dans une future séance
et nous ne manquerons pas d'avoir des séances sur ce point,
puisque, comme on l'a rappelé tout à l'heure, les projets de loi
2 et 3 vont être discutés devant cette même commission, le
ministre de la Justice étant de nouveau présent nous ne
voudrions pas que l'expérience de cette dernière séance de
la commission, vendredi dernier, cette avant-dernière séance de
la commission puisque les ministériels prétendent que celle de
samedi était également valide, se répète au moment
de l'ajournement.
M. le Président, pour l'avenir toujours, puis-
que nous parlons de l'avenir, il y aurait deux moyens d'ajourner: soit
une motion comme celle qui a été faite par le ministre de la
Justice l'autre soir, motion en bonne et due forme, ou encore un consentement.
Or, il ne faudrait pas qu'à nouveau je vous le dis à vous,
mais à l'intention du ministre de la Justice il attende, comme il
l'a fait l'autre soir, le dernier moment et qu'il soit déjà
minuit pour faire sa proposition, sa motion.
Il ne faudrait pas non plus que le ministre dorme au moment
opportun...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Ce n'est pas la conduite du ministre de la
Justice qui est mise en cause actuellement.
M. MORIN: Au fond, quand je revois en esprit cette séance de
vendredi soir et que je me dis qu'il faudrait éviter la
répétition de semblables choses, j'ai l'impression qu'il faudrait
atténuer quelque peu la sanction qui jusqu'ici serait appliquée
à toutes les séances de ladite commission.
UNE VOIX: Vous avez déjà dit cela.
M. MORIN: Cela nous paraîtrait peut-être trop
sévère. Après tout, il y avait de la tension dans l'air,
et il ne manquera pas d'y en avoir non plus aux prochaines séances. Il y
avait également de la fatigue, c'est un fait et le vice-président
qui présidait à ce moment la commission ne pouvait pas se
permettre, comme le ministre de la Justice, de dormir. Nous comprenons donc
que, la fatigue aidant, il ait pu s'écarter, peut-être même
sans le vouloir, du règlement.
M. CHOQUETTE: Question de privilège, M. le Président. Cela
fait plusieurs fois que le député de Sauvé affirme que je
dormais à cette séance de la commission. Je ne dormais pas. Je
m'étais fermé les yeux, mais j'écoutais ce qui se passait
et j'ai entendu toutes les sottises qui ont été prononcées
par le chef de l'Opposition et son acolyte...
M. MORIN: C'est sans doute pour cette raison qu'à deux ou trois
reprises, le ministre de la Justice a semblé sortir des bras de
Morphée, les yeux tout bouffis. Il ne dormait certainement pas, mais je
reviens...
M. CHOQUETTE: M. le Président, question de privilège. Je
considère qu'il est injurieux de dire à un collègue qu'il
dort lorsqu'il ne dort pas et je demande au chef de l'Opposition de retirer ses
paroles à mon égard.
M. LESSARD: Sur la question de règlement, M. le Président,
nous sommes prêts à dire que le ministre ne dormait pas, il
sommeillait.
LE PRESIDENT: Ecoutez, je pense bien que vous devez respecter et prendre
pour vrai la parole et la déclaration de l'honorable ministre de la
Justice.
M. MORIN: Je suis disposé à la prendre pour vraie à
la condition qu'il prenne la mienne pour vraie également. Merci.
Toutefois, considérons cet incident comme clos...
M. CHOQUETTE: Toujours sur une question de privilège. Je
considère, M. le Président, que le député de
Sauvé, chef de l'Opposition, n'est pas suffisamment franc dans sa
façon de retirer ses accusations à mon égard.
M. LESSARD: M. le Président, sur le point de règlement. M.
le Président, l'article 99. Sur le point de règlement, l'article
99 dit ceci...
DES VOIX: L'article 92. DES VOIX: Debout!
M. LESSARD: Je dis bien l'article 99. On vient de découvrir
l'article 92 parmi les députés libéraux, mais cela ne
s'applique pas pour le moment. Est-ce qu'on voudrait que je me lève
debout sur mon siège?
DES VOIX: Oui.
M. LESSARD: M. le Président, je suis trop respectueux de cette
Assemblée nationale pour faire des bouffonneries comme voudraient le
faire les libéraux.
M. le Président, sur le point de règlement.
M. MERCIER: C'est vous qui êtes les bouffons, six bouffons.
M. LESSARD: M. le Président, sur le point de règlement.
L'article 99 est très clair et se lit comme suit : II est interdit
à un député qui a la parole...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je suis prêt à rendre ma
décision.
M. LESSARD: M. le Président, je veux tout simplement...
LE PRESIDENT: Je suis prêt à rendre ma décision. Je
suis prêt à rendre ma décision.
M. LESSARD: ...
LE PRESIDENT: Je vous rappelle à l'ordre pour la deuxième
fois. Je suis prêt à rendre ma décision. D'ailleurs, ce
n'est pas l'article 99 qui s'applique, c'est l'article 45.
Le président peut interdire la parole à un
député pour le reste de la séance si, lorsqu'il s'est
servi d'expressions que ne permet pas le règlement, après en
avoir été requis par le président, il ne les retire pas
sans commentaires.
Je donne la parole à l'honorable chef de l'Opposition officielle.
Je considère que ce n'est pas antiparlementaire ce que vous avez dit, ce
n'est pas contre le règlement mais ne revenez pas sur la question, parce
que vous devez prendre la parole du ministre.
M. MORIN: M. le Président, puisque vous me le demandez, je le
fais bien volontiers.
Je disais donc qu'il convenait d'atténuer quelque peu la sanction
qui serait imposée, si cet amendement était adopté et si
la proposition principale était adoptée, à l'honorable
député de Roberval. En effet, si sa crédibilité
peut être entachée pendant quelque temps, si une certaine
gêne risque de s'établir dans nos contacts au sein de cette
commission pendant quelque temps, je pense que sa crédibilité
n'est pas entachée pour l'avenir à moyen ou à long termes.
Je pense même qu'on peut affirmer que sa crédibilité sera
rétablie assez rapidement surtout à la suite des votes qui ne
manqueront pas d'avoir lieu, d'ici quelques jours, sur cette motion
privilégiée. Mais au cours d'une session subséquente, M.
le Président, il aura passé de l'eau dans le Saint-Laurent.
M. MERCIER: Sur le sujet!
M. MORIN: Sans doute la mémoire, qui est plus la faculté
d'oublier que la faculté de se souvenir, aura fait son oeuvre et nous
aurons tôt fait d'oublier les avatars de cette commission, les incartades
car ce n'est guère finalement plus qu'une incartade du
député de Roberval.
Motion d'amendement de M. Jacques-Yvan Morin
M. MORIN: C'est pourquoi je proposerais que la motion d'amendement dont
nous discutons soit sous-amendée de la façon suivante: En
remplaçant le mot "qu"' par les mots "que d'ici l'ajournement des
Fêtes" et l'amendement continuerait son cours.
UNE VOIX: Bébé!
M. MORIN: J'estime que c'est peut-être plus juste d'agir de cette
façon avec le député de Roberval et, en ce qui me
concerne, après l'ajournement des Fêtes, je serais tout à
fait disposé à siéger de nouveau dans une commission dont
la présidence aurait été confiée au
député de Roberval, vice-président de cette Chambre.
Merci, M. le Président.
LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez une copie, s'il vous plait?
M. MORIN: Oui, une copie.
M. MALOUIN: N'ajustez pas votre appareil!
Décision de M. le Président
LE PRESIDENT: Accepté.
M. Marcel Léger
M. LEGER: M. le Président, il est bien entendu que ce
sous-amendement nous amène une continuité dans cette proposition
principale amendée et sous-amendée. La proposition principale
nous disait que l'Assemblée réprouve la conduite de son
vice-président, et par la suite elle souhaite parce qu'il fallait
une sanction qu'il ne préside plus ladite commission.
C'était peut-être, M. le Président, une sanction un peu
trop pénible, qui aurait dépassé, nous le pensons, par la
qualité ou l'intensité de la sanction, le geste posé
pendant une commission parlementaire ou deux, si on accepte qu'une des
commissions était légale et l'autre illégale.
C'est donc la raison pour laquelle je dois appuyer le sous-amendement
présenté par le chef de l'Opposition, qui est en même temps
notre député de Sauvé, atténuant cette sanction
contre un personnage que nous voyons, depuis quelques jours, de plus en plus
peiné de cette situation, des conséquences de ce geste qu'il a
posé durant une commission, alors qu'il avait été
tellement à la hauteur de sa tâche pendant d'autres commissions.
Il fallait l'atténuer. Nous voyons que le vice-président de la
Chambre, depuis quelques jours, est des plus malheureux de cette situation.
Nous avons voulu, réellement, lui faire réaliser, en
atténuant cette sanction, jusqu'à quel point nous savons qu'il
est capable, dans d'autres circonstances, d'agir comme un président
objectif et que les quelques jours de pénitence qu'il a dû subir
par nos motions principales, motions d'amendement, motions de sous-amendement,
par le fait d'avoir été sur la sellette pendant plusieurs jours,
l'auront fait réfléchir. Ainsi pour les autres commissions qu'il
aura à présider, il fera réellement attention pour
éviter ce qui s'est passé dans les autres commissions. En
atténuant la sanction en une période qui se terminerait... Cela
dépend quel est le thème des Fêtes. Il y en a pour qui, les
Fêtes, ça peut durer longtemps.
Il y en a pour qui les Fêtes commencent à Noël et pour
d'autres, au Jour de l'An. Il y en a d'autres pour qui les Fêtes
continuent tous les samedis et dimanches du mois de janvier. On ne sait pas
à quel moment exact l'ajournement des Fêtes se fera. Il est
question même qu'on continue pendant toutes les Fêtes ou
après. La date exacte, on ne la sait pas.
Mais durant toute cette période où on sera encore, non pas
dans un ajournement, mais dans la période qui précède les
Fêtes, qui peuvent être longues parce que j'ai remarqué
qu'il y en a qui ont même commencé les Fêtes et que cette
période est déjà commencée, on se demande si
ça n'a pas déjà été ajourné...
Comme de raison, nous allons atténuer par
ce sous-amendement la portée que nous voulons donner. C'est
sûr que nous ne pouvions pas, à l'occasion de la motion principale
et vous nous voyez venir ne pas apporter une sanction. Et
l'amendement a été une sanction peut-être un peu trop
sévère puisque le député de Roberval avait
réellement agi dans d'autres circonstances avec beaucoup
d'objectivité, avec un sens des responsabilités et avec une
justesse qui nous le rendait des plus sympathiques.
Et moi-même, j'avais déjà proposé
d'atténuer cette motion principale en connaissant la sympathie de la
personne, et en voulant mettre un regret plutôt qu'une
réprobation, mais on ne l'a pas voulu.
Alors, M. le Président, si on est obligé d'apporter une
réprobation, il faut une sanction. Doit-elle être
sévère, doit-elle être atténuée? Voilà
la question que je dois méditer pendant la période de suspension,
parce qu'il est six heures, et je propose la suspension du débat.
LE PRESIDENT: Vous n'avez rien à proposer, ce n'est même
pas nécessaire. L'Assemblée suspend ses travaux jusqu'à 20
h 15.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
Reprise de la séance à 20 h 22
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Le député de
Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, quand nous avons suspendu la
séance, j'étais en train de dire que ce sous-amendement
proposé par le chef de l'Opposition avait justement comme but de limiter
l'étendue de cette sanction, que nous ne pouvions faire autrement que de
demander comme conséquence d'une motion principale. Mais cette sanction,
pour nous, si elle était jugée permanente, dépassait de
beaucoup en ampleur le geste que nous voulons réprouver qui s'est
limité dans le temps à une commission parlementaire qui a
siégé le 14 décembre légalement et, selon nous, qui
aurait siégé illégalement le 15 décembre.
M. le Président, c'est sûr qu'en faire une sanction
permanente était disproportionné. En effet, nous connaissons
notre collègue de l'Assemblée nationale, vice-président de
la Chambre, qui a présidé malheureusement cette malheureuse
commission et qui a dû, aujourd'hui, hier et avant-hier, subir les
foudres, indirectement, de l'Opposition. Nous avons vu, pendant trois jours,
qu'il a été réellement malheureux de cette situation et
nous, de même, l'avons été de voir qu'il soit un peu le
bouc émissaire. Comme nous savons qu'il possède, quand
même, toutes les qualifications voulues pour présider les
différentes autres commissions pour lesquelles il pourrait être
appelé à agir, il faut dire que même si, d'ici les
Fêtes, si le sous-amendement était accepté, on lui refusait
le droit, par sanction, de présider les séances de ladite
commission on ne sait pas le temps c'est quand même assez
court, comme je le disais tantôt. En effet, nos travaux peuvent
s'ajourner à la fin de janvier.
On revient après les Fêtes et c'est encore dans la
période des Fêtes. L'ajournement des Fêtes n'aura pas lieu
puisque cela pourra arriver qu'on siège, je ne sais pas, peut-être
les 6, 7, 8 et tout le mois de janvier. Mais d'ici à ce que
l'ajournement ait lieu, nous croyons que c'est une occasion d'atténuer
cette sanction, qui est symbolique du geste que nous réprouvons. Ceci
permettra à ceux qui suivent nos débats de constater, même
si la sanction est atténuée et mineure, jusqu'à quel point
il est important pour les députés, pour tous ceux qui auront
à présider les commissions de cette Chambre d'être le plus
objectif possible, le plus impartial possible parce que l'Opposition a
été vigilante et qu'elle a réclamé justement, pour
la bonne conduite des différentes commissions, comme à
l'Assemblée nationale, que les règlements soient observés
durant les quatre prochaines années et qu'une Opposition, qu'elle
comprenne 6 ou 8 députés ou qu'elle en ait 40 ou 50, devra
dorénavant être respectée. Le jeu du parlementarisme au
Québec, d'ici la prochaine élection, sera protégé
grâce à cette sanction que nous
avons voulu inclure dans l'amendement, que nous avons
atténuée dans le sous-amendement parce que nous ne voulons pas
faire du député de Roberval un bouc-émissaire qui subirait
les foudres d'un exemple qu'on voulait donner à ce nouveau Parlement,
cette 30e Législature, que nous sommes appelés à vivre
ensemble et de façon que les citoyens du Québec sachent
maintenant qu'à l'Assemblée nationale du Québec, il y aura
un parti au gouvernement et un parti d'Opposition qui fonctionneront dans un
parlementarisme équilibré. C'est-à-dire qu'il y a une
impartialité, une suite, un respect des règlements puisque ce
n'est pas le nombre qui compte dans une Opposition, mais la qualité, la
détermination et les idéaux que cette Opposition veut
défendre. Je pense que le sous-amendement, en terminant, M. le
Président, est une occasion idéale de le démontrer.
LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: Je suis l'auteur de l'amendement que le chef de l'Opposition
a bien voulu sous-amender.
J'ai présenté cette motion d'amendement, je vous l'ai
largement expliquée au moment où je vous l'ai
présentée, car je croyais qu'après le vote indicatif que
venait de nous donner la majorité ministérielle sur le fait
qu'elle refusait de remplacer le mot "réprouve" par le mot "regrette",
je me sentais justifié de présenter une sanction.
Le sous-amendement du chef de l'Opposition atténue la sanction
que j'ai moi-même présentée. Pourtant, M. le
Président, en vous la présentant, je vous avais signalé
moi-même que je la considérais mineure. Je la considérais
dans sa forme la plus limitée que nous puissions avoir pour, une fois de
plus, bien marquer notre détermination, comme vient de le signaler le
député de Lafontaine, que le député de Roberval ne
devienne pas le bouc émissaire de toutes les choses, de toutes les
conduites que nous pourrions lui reprocher. Nous voulons très clairement
et très nettement faire entendre notre point. A ce que nous lui
reprochons dans sa conduite, à la commission parlementaire du 14
décembre dernier, et de sa conduite illégale du lendemain matin,
à ce que nous lui reprochons au cours de ses décisions, une
sanction la plus minime possible devrait suffire, après le
sérieux avertissement que la majorité ministérielle
même vient de lui donner en lui rappelant qu'elle ne se contente pas de
regretter mais qu'elle réprouve son action.
Le chef de l'Opposition propose que la durée de son absence,
comme président de la commission parlementaire de la justice, se limite
jusqu'à l'ajournement des Fêtes qui devrait normalement venir
samedi soir minuit, M. le Président. J'avais, moi,
présenté dans l'amendement précédent, que ce soit
pour le temps de la session. C'est donc dire qu'à compter du 7 janvier
prochain, lorsque nous reprendrons nos travaux, on ne sera pas obligé de
tenir des séances de la commission de la justice sous le gouvernail
qu'imposerait le député de Roberval. J'accepte, comme parrain de
l'amendement, le sous-amendement présenté par le chef de
l'Opposition, parce que je crois que le but visé par mon amendement est
quand même atteint dans le sous-amendement. La leçon aura
porté, je crois, même d'ici samedi soir à minuit.
Au fond, ce que je voulais éviter, je vous l'ai rappelé,
M. le Président, lorsque j'ai présenté l'amendement, c'est
que ce même homme, qui a fait montre d'inconduite lors de la
dernière séance de la commission parlementaire de la justice, qui
a cédé aux pressions et au poids que faisait peser sur lui le
ministre de la Justice, qui n'a pas fait appliquer les règlements, ait
à diriger encore les séances de la commission parlementaire de la
justice qui sera appelée très bientôt, lorsque nous aurons
disposé des autres articles que le leader du gouvernement voudra bien
appeler, lorsque nous étudierons en commission le projet de loi no 2,
qui est la Loi concernant le louage de choses, et le projet de loi no 3, qui
est la continuation de la Loi pour favoriser la conciliation entre locataires
et propriétaires.
Or, je suis rassuré à cet effet, même avec le
sous-amendement du député de Sauvé, parce que je suis
maintenant convaincu que nous n'étudierons pas, en commission
parlementaire de la justice, le bill 2 et le bill 3 avant la reprise des
travaux en janvier. Donc, ma crainte de voir le député de
Roberval présider la commission parlementaire de la justice pour ces
lois très contentieuses et très discutées se trouve, par
le fait même, écartée. Je puis donc accepter le
sous-amendement présenté par le chef de l'Opposition.
En effet, quand le chef de l'Opposition dit que nous devons limiter
l'application de cette sanction jusqu'à samedi soir, minuit, c'est au
cas où une séance de la commission parlementaire de la justice
devrait avoir lieu. Je ne vois pas comment, dans ce feuilleton, à moins
que nous reprenions en commission parlementaire le projet de loi qui augmente
de $5,000 et de façon rétroactive le salaire de ceux qui font
déjà $28,000, je ne vois éminemment pas de danger que
l'intérêt que je visais par la présentation de mon
amendement se trouve contrecarré par le sous-amendement
présenté par le chef de l'Opposition.
D'ailleurs, le fait que vous ayez reconnu comme recevable ce
sous-amendement du chef de l'Opposition indique que vous-même, dans votre
entendement de notre règlement, n'avez pas jugé que ce
sous-amendement, dût-il être accepté par cette
Assemblée, serait entré en contradiction avec le but visé
par mon amendement.
Vous avez eu parfaitement raison de reconnaître la
recevabilité de cet amendement.
J'interviens à ce moment-ci de nos débats sur le
sous-amendement pour justement signaler aux honorables membres de la Chambre
que, s'ils s'apprêtaient à appuyer mon amendement ou s'ils avaient
l'intention de voter mon amendement après avoir voté la
réprobation de la conduite du député de Roberval,
malgré notre appel à l'atténuer en une forme de regret...
Peu importe, ils ont pris leur décision. Puisqu'ils réprouvent,
donc, comme ils l'ont indiqué par leur vote, la conduite du
député de Roberval...
UNE VOIX: C'est faux.
M. CHARRON: ... et puisqu'ils se sont donc dits d'accord pour qu'il y
ait une sanction, je leur dis...
M. LEVESQUE: M. le Président, j'invoque le privilège des
membres de cette Chambre. Libre au député de Saint-Jacques de
faire les interprétations qu'il voudra, mais, lorsqu'il touche justement
aux intentions qu'il veut nous prêter, je crois qu'il agit
illégalement et contre les dispositions de notre règlement.
Au contraire, M. le Président, nous n'avons pas l'intention
d'appuyer, d'aucune façon, la prise de position du Parti
québécois vis-à-vis du vice-président de la Chambre
et nous aurons l'occasion de le prouver amplement.
M. CHARRON: Peu importe, M. le Président. Je n'ai pas à
soupeser les légères intentions que peut avoir ce gouvernement.
Je dis, moi, que nous avions présenté une motion pour remplacer
le mot "réprouve" par le mot "regrette" et qu'ils ont refusé
"regrette". Nous fonctionnons donc avec le mot qu'ils nous ont appelés
à utiliser, celui de "réprouver".
M. LEVESQUE: M. le Président, sur une question de
privilège.
M. CHARRON: C'est encore le mot, M. le Président, qui figure au
feuilleton. C'est simple.
M. LEVESQUE: M. le Président, une question de
privilège.
UNE VOIX: A l'ordre!
UNE VOIX: Assis, je jeune!
LE PRESIDENT: Une question de privilège.
M. LEVESQUE: Une question de privilège, M. le Président.
Si le député de Saint-Jacques veut une définition des
termes quand il parle de réprouver et de regretter, pour qu'il comprenne
bien, je vais lui donner un exemple.
M. MARCHAND: Il a encore ses culottes courtes; il ne peut pas
comprendre!
M. LEVESQUE: Je vais lui donner un exemple et il va comprendre: La
province de Québec, la population du Québec a
réprouvé le Parti québécois, mais ne le regrette
pas.
M. LEGER: Mais elle regrette le Parti libéral!
M. CHARRON: M. le Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je n'aurais qu'un mot à ajouter sur la
question de règlement. Si je comprends bien, quand la majorité de
cette Chambre a voté, à un certain moment, contre un amendement,
ce n'est pas sur le fond de la question que le vote a été
exprimé, mais sur une question de procédure. Il faut que ce soit
rattaché à la question principale qui n'est pas encore mise aux
voix. Je ne voudrais pas que vous y reveniez. Cela fait deux ou trois fois que
vous le faites.
M. CHARRON: Je le sais, M. le Président, mais l'indication
pourtant claire que vous aviez donnée... Et je m'exprime à mon
tour, sur le point de règlement soulevé par le
député de Bonaventure, avant de revenir à mon droit de
parole sur le sous-amendement.
L'indication pourtant claire que vous aviez donnée, il n'y a que
les sourds qui ne pouvaient pas la comprendre. Vous aviez dit: Si la
majorité décide de remplacer le mot "réprouve" par le mot
"regrette", il ne sera pas possible de parler de sanction.
Par une maladresse du leader du gouvernement, qui a refusé de
remplacer le mot "réprouve" par le mot "regrette", vous nous avez donc
permis de poursuivre ce qu'ils appellent notre "filibuster" et ce qui est un
"filibuster" de présenter de nouveaux amendements. S'il avait
été le moindrement habile, le vétéran
parlementaire, pas besoin d'être ici depuis 35 ans pour connaître
la motion...
LE PRESIDENT: La motion. M. CHARRON: Très bien.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! Ce n'est
déjà pas assez facile de présider cette Assemblée,
je demanderais votre collaboration.
M. CHARRON: Merci, M. le Président. Je dis donc que si nous nous
en tenons à retenir cette sanction jusqu'à l'ajournement des
Fêtes, comme nous l'invite à le faire la motion de sous-amendement
du député de Sauvé, chef de l'Opposition, il me semble que
la leçon aura porté.
Toutes les tergiversations qui ont marqué les débats
alentour de ce projet de loi no 8, cette augmentation de salaire des juges que
réprouve la population et qu'elle ne fait pas que regretter...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je vous indique que votre droit de parole est
expiré.
M. CHARRON: Merci, M. le Président.
M. Lucien Lessard
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saguenay.
M. LESSARD: M. le Président, je n'avais vraiment pas l'intention
de parler sur cette motion.
M. LEVESQUE: II est bien peigné ce soir, oh!
M. LESSARD: C'est la tempête.
Bien honnêtement, je vous dis que je n'avais pas l'intention de
parler sur cette motion. Je n'avais pas l'intention du tout...
M. VEILLEUX: Question de règlement, M. le Président.
LE PRESIDENT: Article 92?
M. VEILLEUX: Oui. Pour parler, un député doit se
lever.
LE PRESIDENT: Al'ordre! L'honorable député de
Saguenay.
M. LESSARD: Franchement, l'intelligence du député de
Saint-Jean est vraiment faible.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LESSARD: II a trouvé un article du règlement qu'il peut
quand même utiliser.
LE PRESIDENT: La motion.
M. LESSARD: Oui, pour autant que je ne suis pas dérangé
par ces sénateurs libéraux qui attendent bien assis leur pension.
Le néophyte d'Anjou n'est pas encore rendu à sa pension.
Je disais que, bien honnêtement... Je vous parle, M. le
Président, je m'adresse à vous, parce que c'est vous qui
êtes la haute autorité en cette Chambre, en espérant par
exemple, comme je sais que vous le ferez, que vous appliquerez l'article 26 du
règlement.
LE PRESIDENT: Oui, mais n'empirez pas les interruptions comme vous le
faites assez fréquemment.
M. LESSARD: Et ça, M. le Président, je suis
assuré...
LE PRESIDENT: Regardez-moi, ne regardez pas de ce côté.
M. LESSARD: M. le Président, je suis bien d'accord à le
faire mais pour autant que je ne serai pas écoeuré par ceux,
justement, qui tentent de m'écoeurer.
LE PRESIDENT: Regardez-moi.
M. LESSARD: D'accord. Je vous aime bien d'ailleurs, M. le
Président, mais il reste que j'ai quand même deux oreilles, une
oreille gauche et une oreille droite. Le député de Saint-Jean ne
me dérange pas du tout. . LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous
plaît! Messieurs, messieurs!
UNE VOIX: Cela diminue la qualité de l'Assemblée
nationale.
M. LESSARD: Je suis bien d'accord, M. le Président, et c'est
justement, suite à ces interventions qui diminuent véritablement
la qualité de l'Assemblée nationale, que j'ai
décidé de parler parce que vraiment je trouvais cette motion
claire. M. le Président, je suis intervenu au cours du souper
auprès de mes collègues du Parti québécois, je leur
ai dit: Pourquoi devrais-je intervenir sur cette motion? Il me semble que c'est
une motion que les députés libéraux devraient facilement
accepter. C'est une motion qui est normale, il s'agit de limiter cette motion
et justement c'est pour vous convaincre. M. le Président; j'ai
tenté de convaincre mes collègues en leur disant: Ecoutez, je
suis fatigué, c'est une motion qui est claire, c'est une motion...
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. LESSARD: C'est une motion que nos collègues libéraux
devraient accepter. Mais, M. le Président, on m'a convaincu d'intervenir
en me disant: Tu sais, les députés libéraux sont
difficiles, ils ont de la difficulté à comprendre, ce sont des
sourds. Les députés libéraux n'ont même pas compris
la simple petite motion qui nous paraissait normale, la motion que nous avons
présentée sur la motion principale, lorsque nous avons
demandé, par exemple, de remplacer le terme "réprouve" par le
terme "regrette".
Il me semble que c'était une chose normale, cette motion. Oui, M.
le Président, en vertu de l'article 120...
LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est une décision de la Chambre et vous
n'avez pas le droit de revenir sur une décision de la Chambre.
M. LESSARD: D'accord, M. le Président, mais une décision
votée par des députés libéraux. En tout cas...
C'est justement quand je regarde le député de Saint-Jean. C'est
à la suite de ça que j'ai été convaincu de
l'obligation de parler, dans l'espoir de leur faire comprendre qu'il ne s'agit
pas de réprouver de façon continue la conduite du
député de Roberval. Il s'agit de faire ça dans un temps
limité. Et, justement, je voudrais en appeler de l'intransigeance des
députés libéraux qui, peut-être en
particulier des jeunes députés qui sont ici pour la
première fois ont vu le vice-président de
l'Assemblée nationale diriger les travaux de la commission
parlementaire. Ces jeunes députés ont pu eux-mêmes
constater quelle erreur le député de Roberval a faite en ce qui
concerne les délibérations de cette commission. Mais je comprends
qu'un certain nombre de députés libéraux
peut-être le député d'Anjou soient
véritablement eux-mêmes choqués de l'attitude du
vice-président de l'Assemblée nationale. Et ils nous l'ont
prouvé lors du dernier vote, que nous avons eu tout à
l'heure.
Mais je fais appel à leur bonne volonté et je leur dis:
C'est vrai que le député de Roberval est un collègue;
c'est vrai que le député de Roberval nous a prouvé depuis
trois ans et demi sa gentillesse; c'est vrai, M. le Président, que le
député de Roberval c'est pour ça que nous faisons
cette motion pendant un certain temps, quand il a présidé
un certain nombre de commissions parlementaires, a respecté les
règlements de l'Assemblée nationale; c'est vrai que le
député de Roberval a permis généralement et
je voudrais en informer les députés libéraux aux
députés de l'Opposition de s'exprimer de façon normale en
autant qu'ils respectaient les règlements, et c'est ça que je
voudrais que les députés comprennent. Je ne voudrais pas que les
députés libéraux soient tellement intransigeants qu'ils
votent contre notre motion. Je voudrais leur dire qu'il faut absolument
accepter la motion qui vous est présentée, la motion d'amendement
qui dit: "d'ici l'ajournement des Fêtes". D'ailleurs, cette motion est
importante justement à cause des qualités que nous avons pu
constater chez le député de Roberval.
M. VEILLEUX: II n'y aura pas d'ajournement...
M. LESSARD: On ira à l'ajournement, ce pourra aussi bien
être à Noël, qu'à Pâques, M. le
Président, on ira. Je voudrais, encore une fois, les inviter à
voter pour cette motion. Je voudrais leur dire qu'il est important que le
député de Roberval continue d'être vice-président de
l'Assemblée nationale. Il est important que le député de
Roberval continue de présider des commissions parlementaires, mais pas
n'importe quelle commission parlementaire.
Je vois que mon collègue et ami, le député de
Louis-Hébert, qui a même été mon conseiller
juridique, qui a même été mon employé pendant un
certain temps au niveau d'un organisme national, M. le Président,
était lui-même véritablement intéressé
à entendre, au cours de toute cette discussion, nos doléances
contre le député de Roberval.
Mais je voudrais justement lui dire que lui, peut-être, ferait un
bon président, il ferait un bon vice-président. Mais je regarde
parmi les autres députés libéraux...
LE PRESIDENT: La motion.
M. LESSARD: Oui, M. le Président, et je parle sur la motion. Je
parle de la motion et je vous explique pourquoi notre motion doit être
limitée à la période des Fêtes, parce que comme
président de commission parlementaire, nous n'avons pas le choix. Etant
donné que nous sommes six, nous ne pouvons quand même pas accepter
d'être président de commission parlementaire. Ce n'est pas facile
à trouver des présidents de commission parlementaire parmi les
députés libéraux que je vois autour de moi. Il est certain
que le député de Saint-Jean ne ferait pas un bon président
de commission parlementaire. Ah! peut-être mon collègue... parce
que ce n'est pas facile, comme on le disait, d'être président de
commission parlementaire, d'être impartial dans une commission
parlementaire et il y a peu de députés dans cette Chambre qui
sont véritablement "impartials"...
DES VOIX: Impartiaux.
M. LESSARD: ... impartiaux. Merci, M. le Président. Il y a peu de
députés qui sont véritablement impartiaux et même...
Quand on fait des fautes de grammaire, cela n'est pas pire, mais quand on fait
des fautes en politique, c'est grave.
UNE VOIX: Des fautes de syntaxe.
M. VEILLEUX: En vous regardant, on voit que la langue, c'est une langue
de travail.
M. LESSARD: Ce qui est grave, c'est que les députés
libéraux... Je continuerai une autre fois pour... Merci. Vous ne nous
impressionnez pas du tout, vous savez.
LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi. UNE VOIX: Vous
autres non plus.
M. Marc-André Bédard
M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, je suis d'accord sur le
sous-amendement qui a été apporté à l'amendement
présenté par un de mes collègues de l'Opposition,
premièrement, parce que je crois que cet amendement adoucit la sanction
qui était prévue au niveau de l'amendement on va plus
lentement si cet amendement était voté. Je pense que le
sous-amendement, en fait, qui restreint justement la portée de la
sanction énoncée à l'amendement reflète un peu plus
le caractère normal d'une sanction pas trop sévère
concernant l'erreur je dis bien l'erreur, parce que l'erreur
peut-être commise de bonne foi que nous croyons toujours avoir
été commise par l'honorable député de Roberval.
Il agissait comme président de la commission parlementaire de la
justice lorsqu'il a rendu certaines des décisions sur lesquelles
l'Opposition a cru bon de faire la motion privilégiée que
nous avons devant nous depuis presque deux jours. Je suis d'autant plus
d'accord que je crois d'abord qu'il y a des motifs qui sont rattachés
à la personne même du député, qui militent en faveur
du fait que je sois d'accord dans le sens qu'on rétrécisse ou
qu'on adoucisse la sanction prévue à l'amendement, des motifs qui
sont rattachés à la personne même de l'honorable
député de Roberval, en raison de son caractère
sympathique. C'est évident que plusieurs de mes collègues qui
sont ici, tant de l'Opposition que du gouvernement, ont eu l'occasion de vivre
ici en cette Chambre avec lui beaucoup plus longtemps et je m'aperçois
qu'effectivement, du point de vue du caractère, du point de vue de
l'intégrité en fait, du point de vue du dévouement du
député de Roberval, tout le monde est d'accord et moi de
même. J'ai eu peut-être moins l'occasion de le connaître dans
cette Chambre qu'en dehors, mais j'ai été à même de
constater aussi qu'on ne pouvait pas mettre en doute ses qualités de
vice-président de la Chambre.
D'une part, je suis d'accord sur le sous-amendement qui adoucit la
sanction, en raison de son caractère sympathique, parce qu'encore une
fois, on ne peut pas dire qu'il y a eu une question de partialité dans
la manière de procéder de l'honorable député de
Roberval, qu'il y a eu des motifs de partialité. Cela a pu être
très bien commis de bonne foi et je pense que c'est le cas. De la
même manière, il n'est pas question d'incompétence d'une
façon générale, au niveau des actes posés par
l'honorable député de Roberval, parce qu'encore une fois, je
crois que l'erreur qu'il a commise en est une qu'on aurait pu commettre, que
n'importe qui de nous aurait pu commettre.
Je suis d'autant plus d'accord, M. le Président, sur ce
sous-amendement, et je pense que c'est normal qu'on veuille atténuer la
sanction, parce que, dans le fond, ce n'est quand même pas facile de voir
la portée, d'évaluer toutes les interprétations qu'on peut
donner à des règlements. Je suis d'autant plus d'accord qu'on
adoucisse la sanction que ces règlements sont le fruit quand même
de dix ans de travaux, tel que c'est dit dans le préambule du livre des
règlements, et ils ont quand même...
M. VEILLEUX: Ce n'est pas...
M. BEDARD (Chicoutimi): Lisez-le. Est-ce que le député de
Saint-Jean est dans l'erreur?
LE PRESIDENT: Continuez sur la motion.
M. VEILLEUX: M. le Président, vous devriez quand même
éclairer la Chambre, ce n'est certainement pas dix ans de travaux.
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous devriez lire vos règlements, c'est
commode.
Le nouveau règlement est l'aboutissement de près de dix
ans de travaux qui se sont poursuivis sous la direction des présidents.
Lisez-le, vous allez voir. Ce n'est pas dix mois, dix ans.
M. VEILLEUX: C'est une erreur.
M. BEDARD (Chicoutimi): Ah! c'est une erreur de temps.
UNE VOIX: Le président n'est pas si vieux que ça,
voyons!
M. BEDARD (Chicoutimi): Vous le ferez corriger.
Alors, on est d'autant plus d'accord qu'on s'aperçoit
qu'après dix ans d'exercice du règlement, l'interprétation
en est toujours difficile. Etant donné qu'on a affaire à de
nouveaux règlements qui, pour la plupart du temps, n'ont pas subi
l'épreuve du temps en ce qui regarde les précédents, en ce
qui regarde tous les cas spéciaux qui peuvent se présenter lors
de l'application de chacun de ces articles, comme l'a dit l'honorable
président de la Chambre d'ailleurs, il en a fait la preuve
à bien des reprises, on est obligé non pas de se fier seulement
à ces règlements, mais d'aller dans les anciens
règlements, en termes de jurisprudence, pour pouvoir mieux comprendre la
vraie portée de ce règlement. Il faut même se
référer, de temps en temps, comme je l'ai vu faire par
l'honorable président, non seulement à des anciens
règlements de la Chambre, mais à d'autres règlements qui
sont en vigueur dans d'autres Législatures, comme la Législature
fédérale.
Alors, quand on voit jusqu'à quel point c'est difficile de se
retrouver, tout en étant de bonne foi, à travers un tel
dédale de règlements, on peut comprendre que ce n'est quand
même pas facile d'en faire une interprétation qui soit toujours
correcte, autrement dit qu'il n'est pas toujours facile d'en faire une
interprétation qui soit sans reproche.
C'est justement en raison de toutes ces circonstances difficiles
concernant l'application de ce nouveau règlement que nous croyons
qu'effectivement, de bonne foi, tout en jouant son rôle au meilleur de sa
connaissance... D'ailleurs, l'honorable député de Roberval, en
plus d'avoir toutes les qualités que j'ai énumérées
tantôt, en a une autre, à mon sens, qui est importante, celle
d'être originaire de la belle région du
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
M. MERCIER: Sur le sujet, M. le Président, s'il vous plaft.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est en dehors du sujet, je pense.
UNE VOIX: Oui, c'est sûr.
M. BEDARD (Chicoutimi): Cela n'empêche pas que c'est beau, quand
même.
UNE VOIX: Oui, c'est sûr.
M. BEDARD (Chicoutimi): D'accord. Alors, on va laisser la belle
région du Saguenay-Lac-Saint-Jean pour retourner au règlement. Je
com-
prends que c'est pas mal plus aride, pas mal plus froid, pas mal moins
vivant. Je suis d'accord pour que l'on atténue par le sous-amendement la
sanction prévue à l'amendement qu'on avait déjà
présenté parce qu'effectivement je pense que le dévouement
de l'honorable vice-président de la Chambre, le député de
Roberval, ne fait aucun doute. Lui, il a compris que les règlements
malheureusement, ce ne sont pas tous ses collègues qui le
comprennent ce n'est pas seulement je suis convaincu que c'est
son idée un amoncellement de délais, de dates, de
procédures ou d'avocasseries. Pour l'honorable vice-président de
la Chambre le député de Roberval, les règlements, c'est
l'aboutissement d'un processus normal démocratique, dans ce sens que ce
sont des gens responsables qui se sont donnés des règles de
procédure qui régissent leurs discussions d'une façon qui
soit la plus démocratique possible.
C'est donc à cause des qualités de démocrate, que
je reconnais quand même à l'honorable député de
Roberval, malgré l'erreur commise de bonne foi, que je suis toujours en
faveur de ce sous-amendement qui, à mon sens, respecte la
réalité, dans le sens qu'il dit ceci: Une erreur a
été commise. D'un autre côté, tenant compte des
circonstances dans lesquelles elle a été commise et de la bonne
foi de celui qui l'a commise, eh bien, à ce moment-là, il est
normal qu'on adoucisse cette sanction. Elle est tellement adoucie que, comme
l'a fait remarquer tout à l'heure l'honorable député de
Saint-Jacques, il est peut-être à prévoir que la commission
ne siégera pas, cela veut dire que cette sanction demeurera tout
simplement symbolique. Je vous remercie M. le Président.
M. VEILLEUX: Vote. DES VOIX: Vote.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, ma première intention
était de ne pas intervenir sur cette motion mais, M. le
Président, j'ai révisé cette intention à la suite
des interventions faites par, entre autres, le député de
Saguenay, le député de Saint-Jacques, le député de
Chicoutimi et le député de Lafontaine.
Je me suis senti une obligation d'intervenir sur cette motion,
obligation presque à caractère moral, parce que je suis et
je l'ai mentionné quand je l'ai fait à regret, la personne
d'où vient la motion principale qui est actuellement en
délibération.
Je me suis dit, M. le Président, sur le coup du moment, lorsque
j'ai rédigé la motion qui est apparue au feuilleton, puisqu'il
s'agit d'une motion qui doit être annoncée, donc écrite et
inscrite au feuilleton, que peut-être et vous remarquerez que tout
au long de ce débat cela a été un peu l'attitude que nous
avons tenue nous avions été un petit peu durs à
l'égard du vice-président de l'Assemblée nationale. Pas
que nous regrettions, M. le Président, d'avoir fait la motion
principale, pas du tout. Mais ce que nous avons tenté de faire depuis
que ce débat est commencé, c'est de limiter constamment la
portée de notre motion qui, vous l'admettrez, M. le Président, au
tout départ, était très large.
Elle était d'un énoncé large au point où
même le président de l'Assemblée nationale nous a
mentionné qu'on aurait même pu vouloir parler de la vie
privée du député de Roberval, ce qui n'était pas du
tout notre intention.
La motion originale s'est lentement rétrécie au point de
vue du corridor, rétrécissement, M. le Président, vous
allez me le concéder, qui ne nous est pas favorable au point de vue du
droit de parole, c'est-à-dire que, plus une motion en couvre large, plus
une motion en emporte, M. le Président, selon le terme consacré,
plus, évidemment, le droit de parole est large lui-même.
Mais c'est délibérément, que tout au long de ce
débat nous avons décidé de rétrécir le
débat. Et sans revenir sur une décision qui a déjà
été prise par l'Assemblée nationale, qu'elle avait
parfaitement le droit de prendre, lorsque nous avons, par exemple je
vous le cite uniquement à titre d'exemple et non pas dans l'intention de
revenir sur un débat qui a déjà été
tranché dit qu'au lieu de réprouver la conduite du
député de Roberval nous regrettions sa conduite, c'était
déjà une indication. Encore une fois, je ne me prononce pas
là-dessus. L'Assemblée, elle, a tranché.
L'Assemblée est souveraine, M. le Président, et,
là-dessus, je respecte sa décision, même si j'ai le droit
de ne pas être d'accord avec elle.
Par la suite, nous avons simplement tenté de réduire
encore davantage. Même si l'Assemblée refusait d'atténuer
la force du verbe réprouver, nous avons pris sur nous...
UNE VOIX: A l'ordre!
M. BURNS: Qu'est-ce qu'il y a, à l'ordre, M. le
Président?
UNE VOIX: Sur le sujet!
M. BURNS: Je parle de la motion. Si les honorables députés
qui sont à ma gauche, à ma droite et tout autour de moi, en face
et en arrière, comprenaient, ils verraient que je suis en train de faire
un peu l'historique du sous-amendement que nous avons devant nous
actuellement.
M. le Président, c'est uniquement dans ce sens. Je vous prie de
me rappeler à l'ordre si je sors de ce corridor, que je m'imposerai, M.
le Président, soyez-en certain.
Donc, à la suite de cette première tentative de notre
part, nous sommes revenus avec ce que j'appellerais un "atténuement",
encore, de notre motion en situant exactement ce n'est pas un
"atermoiement", c'est un "atténuement"...
M. MORIN: Une atténuation.
M. BURNS: Une atténuation, si vous préférez. Dans
le cas du ministre de la Justice, ça pourrait être un
éternuement, remarquez, mais ce n'est pas ça.
De toute façon, le ministre de la Justice et moi, je pense qu'on
a bien d'autres discussions à avoir ensemble que des discussions de
mots. Je pense bien que le ministre voudra à certaines occasions...
M. MERCIER: Sur le sujet, M. le Président.
M. BURNS: ... avoir des discussions de fond avec moi, et je serai
d'accord pour les avoir avec lui. D'ailleurs, c'est une personne que je
respecte suffisamment pour le tenir à une hauteur que lui et moi
considérons très élevée, je suis sûr.
Je disais donc que, dans un premier temps, nous avons tenté de
limiter notre motion. Et, je ne reviens pas je vous le dis d'avance
sur des motions d'amendement que nous avons tenté de faire et que
la présidence a décidé de trouver ou de juger
irrecevables. Mais je vous le mentionne simplement, pour vous indiquer le sens
de notre attitude tout au cours de ce débat, c'est-à-dire, ce
sens de tenter de cerner le plus précisément possible ce
reproche, disons-le, au député de Roberval, et ce, non pas, comme
je l'ai mentionné déjà, en tant que député,
non pas en tant qu'individu que nous connaissons, que nous respectons, que nous
aimons bien, non pas en tant que ce bon notaire du Lac-Saint-Jean, gai, aimant
la vie... Je l'ai dit, hier, et je ne le répéterai jamais assez
parce que ce député qui a toute notre estime se doit
véritablement de comprendre le sens véritable de cette motion et
même de l'ensemble de tout ce débat. Je ne le dirai pas
suffisamment, parce que je crois que le député de Roberval se
doit d'être fier de plusieurs choses qu'il a faites en tant que
vice-président de l'Assemblée nationale, et même dans le
temps où je l'ai connu quand il a fait ses premières armes comme
président de commission.
Et c'est d'ailleurs ses attitudes, son esprit ouvert, cette
espèce de sens inné de la démocratie qui, je pense, lui
ont permis d'accéder à cette fonction importante qui est celle de
vice-président de l'Assemblée nationale.
M. CHOQUETTE: Voulez-vous en faire une motion de
félicitations?
M. BURNS: II n'est pas question de faire un vote de félicitations
à l'endroit du député de Roberval, comme le suggère
le ministre de la Justice, il est question de rétrécir
c'est là le sens du sous-amendement exactement à son
niveau précis le reproche que nous dirigeons au député de
Roberval, vice-président de l'Assemblée nationale, et surtout
lorsqu'il a siégé les 14 et 15 décembre derniers comme
président de la commission parlementaire de la justice.
Donc, une fois que nous avions fait toutes ces tentatives, même si
l'Assemblée nationale n'a pas accepté nos amendements, même
si certains de nos amendements ou sous-amendements ont été
jugés irrecevables ce que je ne conteste pas par la
présidence, nous avons quand même, je pense, je vous le soumets
bien respectueusement, réussi à dire au moins dans quel cadre et
avec quelle force ou avec quel degré de force nous posions ce reproche
à l'endroit du député de Roberval.
M. le Président, ce cadre de reproches si je peux
l'appeler ainsi que l'on place une fois qu'on a réussi à
mettre devant l'Assemblée nationale cette espèce
d'éventail de reproches. Quand je dis éventail, j'utilise un mot
qui en dit peut-être encore plus que je ne veux dire parce qu'il ne
s'agit pas de très nombreux reproches. Il s'agit de certaines attitudes
et, en particulier, de trois attitudes précises que nous avons
reprochées au député de Roberval au moment des
séances de la commission parlementaire, le 14 décembre et le
lendemain, en permettant à la commission de siéger et,
finalement, en permettant et cet amendement, l'Assemblée
nationale en a disposé que le rapport vienne devant cette
Chambre.
Ce sont, dans le fond, ces reproches que nous faisons. Ils se
résument, en fait, à quatre, c'est-à-dire, d'une part,
d'avoir refusé à votre humble serviteur le droit de faire sa
motion pour faire siéger les députés de Saguenay et de
Saint-Jacques; deuxièmement, d'avoir prononcé, toujours à
notre avis, irrégulièrement l'ajournement, le soir du 14
décembre ou, si on peut dire, dans la nuit du 14 au 15 décembre
à quatre minutes après minuit; d'avoir fait siéger la
commission le lendemain, encore une fois selon notre opinion, de façon
irrégulière à 10 heures et d'avoir, en dernier lieu,
permis que le rapport vienne devant l'Assemblée nationale,
irrégulièrement toujours puisqu'il s'agit d'un accessoire d'un
acte irrégulier.
M. le Président, quand je me référerai à
l'éventail des reproches adressés au député de
Roberval, il s'agit de ces quatre prises de position ou ces quatre attitudes
maintenues par le député de Roberval.
Je continue en vous expliquant le cheminement de cette motion. Une fois
que nous avons tenté de rétrécir le plus possible
de rétrécir, j'insiste sur cet aspect de notre attitude le
blâme que nous avons adressé disons-le, M. le
Président, le blâme au député de Roberval,
malgré que certaines des motions que nous avons faites aient
été refusées soit par l'Assemblée nationale, soit
pas la présidence, nous avons dit: le lit est fait. Nous savons que
c'est dans ce sens-là que les gens de l'Assemblée
nationale, que nos collègues comprennent nos reproches.
Et c'est là, M. le Président, que le député
de Saint-Jacques a eu la brillante idée d'ajouter, aux reproches que
nous faisions, l'aspect de la sanction. Je vous avoue, M. le Président,
que nous y avons pensé à cette sanction; nous y avons
songé longtemps parce que, tant du point de vue du député
qui soulevait le problème qu'à l'égard du
député qui se faisait faire des reproches, ce geste comportait un
certain nombre de conséquences. Ces conséquences, je n'ai pas
besoin de les décrire, sont nombreuses, que ce soit le fait d'entacher
la réputation du député de Roberval, que ce soit le fait
de lui causer des traumatismes psychologiques pour l'avenir, nous y avons
pensé, remarquez; que ce soit, M. le Président, pour le
député qui aurait proposé une sanction excessive, le fait
d'être obligé par la suite de subir les foudres de
l'Assemblée nationale, parce que si je regarde le nombre de
députés, si je regarde le nombre de députés qui
siègent de l'autre côté de la Chambre, je sais fort bien de
quel côté se serait dirigé le blâme à
l'égard du député qui proposait la sanction.
La sanction, pour nous, était de caractère, il le fallait,
très pratique, encore une fois, tant pour le député
concerné qui faisait la proposition, en l'occurrence le
député Saint-Jacques, que pour le député à
l'égard de qui la sanction était faite ou, si vous voulez, contre
qui la proposition de sanction était faite. C'est bien sûr que
nous aurions pu proposer je pense que certains de mes collègues
l'ont mentionné la destitution du député de
Roberval comme vice-président de l'Assemblée nationale. Vous vous
demandez sans doute pourquoi on ne n'a pas fait cette motion. Je vois, M. le
Président, dans vos yeux, ce point d'interrogation qui se
soulève.
M. MERCIER: Pertinence des débats.
M. BURNS: Vraiment, M. le Président, les députés
qui me parlent de pertinence ne suivent pas mon intervention depuis le
début. Je connais le sens très élevé du ministre de
la Justice du respect des règlements, que ce soit dans cette Chambre ou
ailleurs et, jamais depuis le début de mon intervention, le ministre de
la Justice ne m'a interrompu. C'est la preuve qu'il comprend que
vous-même, M. le Président, vous auriez été le
premier, j'en suis sûr, à me rappeler à l'ordre. Je
prierais les députés qui me crient, pertinence, pertinence...
M. LEGER: D'arrêter leur impertinence.
M. BURNS: Je vous demanderais, M. le Président, s'ils veulent
soulever une question de règlement, qu'ils le fassent selon les formes,
qu'ils se lèvent en vertu de l'article 26, tout simplement, parce
qu'actuellement c'est moi qui ai la parole. Je vous demande tout simplement, de
leur rappeler le fait que c'est moi qui ai la parole, c'est moi qui suis debout
et avec votre autorisation. Je me sens fort de votre autorisation et soyez
certain qu'avec votre appui je ne laisserai pas ces députés
ministériels me bousculer. Et je vous prie d'avance de m'accorder cet
appui relativement à l'application des règlements.
Je disais donc et les députés qui m'ont fait
reproche de la pertinence du débat vont comprendre, ça s'en
vient, c'est très pertinent tout ce que j'ai dit depuis le
début...
M. VEILLEUX: Par chance qu'il a une demi-heure.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): ... parce que vous allez manquer de
temps.
M. BURNS: M. le Président, comme je suis l'auteur de la motion,
je pense, sauf erreur, que j'ai droit à une demi-heure sur cet
amendement.
LE PRESIDENT SUPPLEANT (M. Gratton): II vous reste treize minutes.
M. BURNS: Alors, il me reste treize minutes. Je vous remercie, M. le
Président. Je vais aller directement au point, M. le Président,
parce que j'ai peur que le nombre d'arguments que j'ai à soumettre
à l'Assemblée ne me permette pas de donner l'ensemble. Je vous
remercie de m'avoir rappelé qu'il ne me restait que treize minutes.
Je disais donc qu'il fallait en arriver à ce que le reproche que
nous faisions à l'endroit du député de Roberval se
concrétise par une sanction et c'est là que le
député de Saint-Jacques, dans sa sagesse, a soumis à
l'Assemblée nationale un amendement amenant cette sanction devant la
Chambre. Je tiens à dire tout de suite que cette sanction n'était
pas forte, elle n'est pas forte, même dans la version originale que le
député de Saint-Jacques a soumise à l'Assemblée
nationale. La sanction est réaliste et elle devient, c'est ça la
pertinence, encore plus réaliste par le sous-amendement qui a
été formulé par le chef de l'Opposition cet
après-midi. Je ne peux pas m'empêcher, je vous le dis d'avance, de
toucher et à l'amendement et au sous-amendement parce que ce n'est que
par la présence de cet amendement que je puis justifier la valeur de la
proposition de sous-amendement du chef de l'Opposition. Une fois cette sanction
décidée et, encore une fois, probablement en vertu de la
même réaction qui avait motivé la motion de base,
réaction, je dois le dire, un peu sur le coup du moment, nous avons dit:
Est-il normal d'empêcher le vice-président de l'Assemblée
nationale de siéger comme président de toute commission?
Au départ, le député de Saint-Jacques a dit: Non,
seulement celle de la justice. Et seulement celle de la justice, pourquoi? Pour
une raison bien simple, c'est qu'il y a, au moins, à cette commission de
la justice, quatre députés qui se sont sentis lésés
dans leurs droits. Le député de Sauvé, l'honorable chef de
l'Opposition en est
un. Il est un des premiers qui s'est senti lésé dans ses
droits à cette commission de la justice, les 14 et 15
décembre.
Le député de Saint-Jacques est un autre
député qui s'est senti lésé dans ses droits,
lorsqu'il a demandé le droit de parole et qu'on ne lui a même pas
permis de se faire entendre. Moi aussi, je me sens lésé, parce
qu'on ne m'a pas permis de déposer une motion pour protéger les
droits du député de Saint-Jacques. Le député de
Saguenay qui, lui aussi, voulait parler, lorsqu'on l'en a empêché
par le fait qu'on a mis de côté même mon droit de produire
une motion, s'est senti lésé également.
Et le député de Lafontaine, qui ne faisait pas partie de
ma motion, lui aussi se sentait lésé. Il se sentait
lésé parce que, si le précédent avait
été établi pour les députés de Saint-Jacques
et de Saguenay, je suis convaincu que le député de Lafontaine
aurait fait la même demande et je suis convaincu que le
député de Chicoutimi aurait fait la même demande.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député me permettrait une
question?
M. BURNS: Oui. Le ministre de la Justice veut me poser une question?
M. CHOQUETTE: Je voudrais demander...
M. BURNS: Vous voulez me poser une question et non pas intervenir dans
mon débat?
M. CHOQUETTE: Non. Une question. M. BURNS: D'accord.
M. CHOQUETTE: Je voudrais demander sérieusement au
député de Maisonneuve s'il considère que, suivant le
règlement, les députés de Saint-Jacques et de Saguenay
avaient raison de se sentir lésés devant la décision du
président de la commission, M. Lamontagne, de mettre leur demande de
participer au débat aux voix à la commission, ainsi que cela a
été fait. Est-ce qu'ils avaient raison de se sentir
lésés de cet acte très démocratique du
président de soumettre cette demande de leur part au vote des membres de
la commission? Seulement de ce geste.
M. LESSARD: Du refus de leur demande comme députés
représentants un comté.
M. BURNS: Le ministre de la Justice est probablement le dernier des
membres de cette Chambre qui devrait me poser cette question. Non seulement ces
deux députés, mais tous les députés de
l'Opposition, y compris le député du Parti créditiste qui
n'est pas membre de la commission de la justice devraient se sentir
lésés par l'attitude d'abord déclenchée et
je dirais même enclanchée par le ministre de la Justice.
Ils devraient se sentir lésés par cette attitude du ministre de
la Justice qui a rejeté un usage qui a été défendu
à l'origine je prie le ministre de la Justice de le
vérifier par d'autres personnes que des membres de l'Opposition,
entre autres par le député de Taillon, M. Leduc, à
plusieurs reprises.
M. CHOQUETTE: Est-ce que le député me permet une autre
question? Est-ce que, d'après le règlement, j'avais le droit de
m'opposer?
M. BURNS: Je l'ai admis hier. Je l'ai dit et je suis prêt à
le redire? Le ministre de la Justice, théoriquement je dis,
théoriquement et même, en vertu du règlement, avait
tout à fait le droit de faire cela, mais il n'aurait pas dû le
faire, comme ministre de la Justice. Si cela avait été le
ministre des Richesses naturelles, je n'aurais pas dit la même chose; si
cela avait été le ministre des Affaires municipales, je n'aurais
pas dit la même chose; si cela avait été le ministre du
Revenu qui, lui, est habitué à trancher des affaires rapidement
et à charrier du monde à gauche et à droite, je n'aurais
pas dit la même chose, mais le ministre de la Justice, le protecteur de
la société, cet être généreux que doit
être le ministre de la Justice, qui lui fasse cela, je ne le comprends
pas.
M. CHOQUETTE: Devant mon opposition ou mon objection, est-ce qu'il
n'était pas du devoir du président de mettre aux voix, comme il
l'a fait, cette demande de participer au débat?
M. LESSARD: En motion. M. BURNS: En motion.
M. CHOQUETTE: Non, non, parce qu'il n'y a pas eu même vote auquel
vous avez participé.
M. BURNS: Là, j'ai parlé de l'attitude du ministre de la
Justice et je l'écarte, elle est derrière. Le premier blâme
était, évidemment, adressé au ministre de la Justice. Mais
le deuxième et c'est alors qu'a commencé la situation,
était à l'endroit du député de Roberval, non pas
pour ne pas avoir consulté la commission, il l'a consultée, je
l'ai dit M. le Président je ne sais pas si le ministre
était là quand j'ai fait cette rectification hier, c'est
sûr que le député de Roberval a consulté la
commission il l'a consultée. Seulement, je l'ai bien
mentionné, hier il l'a consultée en me privant, moi, et en
privant le député de Sauvé, le chef de l'Opposition, d'un
de nos droits fondamentaux, c'est-à-dire de faire une motion de demander
à une commission de s'exprimer sur un sujet. Il l'a fait par un tour de
table: Qui est pour? Qui est contre? C'est ce que le député de
Roberval a fait et le ministre de la Justice...
M. CHOQUETTE: Mais est-ce que le député...
M. BURNS: ... connaisssant sa franchise ne pourra pas nier ce
fait-là. Il sait fort bien que cela a été tout simplement
en faisant un tour de table.
M. CHOQUETTE: ... qui a été un vote.
M. BURNS: II n'a même pas eu de vote enregistré...
M. CHOQUETTE: Certainement, bien oui!
M. BURNS: ... M. le Président, parce qu'un vote
enregistré, c'est bien simple; un vote enregistré en commission,
ça se fait en levant la main, en demandant à chaque
député ce qu'il pense.
M. CHOQUETTE: C'est ce qui s'est produit.
M. BURNS: M. le Président, même si on a fait ça, ce
n'est pas un vote.
M. CHOQUETTE: Certainement.
M. BURNS: Comment voulez-vous qu'on puisse voter quand il n'y a pas de
motion sur la table? M. le Président, vous seriez le premier à me
dire, à moi, député de Maisonneuve: Qu'est-ce que vous
faites-là? De quoi me parlez-vous actuellement, s'il n'y a pas de motion
sur la table? Vous seriez le premier et vous auriez parfaitement raison de me
le dire. Vous diriez: Vous n'avez pas d'affaire à me parler, je ne vous
entends même pas! Et vous auriez parfaitement raison. Il y a certains
endroits, dans la procédure où je pourrais intervenir sans qu'il
y ait motion. Le ministre de la Justice devrait apprendre son règlement,
à savoir...
M. CHOQUETTE: C'est un des cas.
M. BURNS: ... qu'entre autres il l'utilise à plusieurs reprises
d'ailleurs cette méthode. Entre autres, il peut se servir de la question
de privilège, voilà un des cas où on intervient sans qu'il
y ait de motion. Il peut se servir de l'article 34 pour poser au leader de la
Chambre un certain nombre de questions sur les travaux. Il peut soulever une
question de règlement, sans qu'il y ait quoi que ce soit devant la
Chambre, sans qu'il y ait de motion. Et comme les règles des commissions
sont, à toutes fins pratiques, pigées à l'intérieur
de l'ensemble des règlements de la Chambre mutatis mutandis, c'est
évident que ça s'appliquait à une commission. C'est
là que nous blâmons le député de Roberval.
Je m'aperçois, M. le Président que mon temps
s'écoule, alors je m'excuse auprès du ministre de la Justice,
mais je ne lui permettrai plus d'interventions. S'il veut intervenir, il pourra
toujours le faire sur la motion comme député et comme membre qui
n'a pas utilisé son droit de parole sur le sous-amendement.
Tout cela pour dire, M. le Président, qu'une fois revenu à
la sanction, parce que c'est ce dont on parle actuellement, une fois qu'on a
décidé de quelle sanction il s'agissait, on s'est dit de plus en
plus: Ça commence à nous paraître comme une chose
immédiatement possible. On s'est dit: II va y avoir un ajournement aux
Fêtes, d'habitude on ne siège pas à Noël, d'habitude
on ne siège pas au Jour de l'An. On ne le sait pas, on ne le sait pas.
De toute façon, en ce qui me concerne, je n'en ai pas connaissance. N'en
ayant pas connaissance, je me suis dit qu'à cause du traumatisme, d'une
part, que notre motion pouvait causer à l'égard du
député de Roberval, qu'à cause également de la
proximité des faits que nous lui reprochons, que possiblement, l'esprit
des Fêtes aidant, les vacances aidant, parce que le député
de Roberval, on est prêt à l'admettre, lui aussi, était
fatiqué, vendredi soir, lui aussi, il est humain et nous aussi,
même comme vice-président et avec toutes les
responsabilités qui lui pèsent sur les épaules, il avait
le droit de faire une erreur. Seulement, quant à nous,
députés de l'Opposition, sa crédibilité, du moins,
tant et aussi longtemps que ces faits resteront frais à notre
mémoire, est entachée à nos yeux.
C'est dans ce sens, vous voyez la pertinence du débat, que nous
avons demandé que le rétrécissement se fasse. Nous avons
demandé une sanction que nous avions choisie, c'est-à-dire celle
de ne plus présider la commission de la justice. Nous voulons que ce
soit juste pour un temps très limité, tant pour protéger
le député de Roberval, tant à l'égard de ceux qui
peuvent écouter ce débat, que certains qualifient de toutes
sortes d'adjectifs et d'épithètes, mais qui, à mon avis,
est salutaire pour cette Assemblée, et tant à l'égard des
membres de l'Opposition qui auront peut-être l'occasion de siéger
à cette commission de la justice. Entre autres, je vous cite un cas qui
est possible dans les heures qui vont venir: Nous avons actuellement trois
projets de loi qui sont parrainés par le ministre de la Justice, les
trois projets de loi étant le projet de loi no 2, le projet de loi no 3,
concernant les loyers, et vous avez le projet de loi concernant
l'enregistrement des actes civils. C'est possible que dans les heures qui
viennent nous ayons à siéger à la commission de la
justice. Ce que nous voulons, c'est que cette Chambre exprime clairement son
désir de ne pas avoir, du moins pour les jours qui viennent
jusqu'à l'ajournement des Fêtes, le député de
Roberval comme président de cette commission. C'est cela le sens de
notre sous-amendement.
LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres députés qui
aimeraient prendre la parole? Vote?
M. BURNS: Vote, M. le Président. LE PRESIDENT: Enregistré?
M. BURNS: Enregistré.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion d'amendement de M. Morin
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Que ceux qui sont en faveur de la motion de sous-amendement de
l'honorable chef de l'Opposition officielle, veuillent bien se lever s'il vous
plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Léger, Charron, Lessard,
Bédard (Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever s'il vous plaît.
Y a-t-il des abstentions? Abstentions.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Parent, Mailloux, Choquette,
Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond,
Bienvenue, Massé, Harvey (Jonquière), Houde (Abitibi-Est),
Desjardins...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! ... A l'ordre, messieurs!
LE SECRETAIRE ADJOINT: ... Giasson, Perreault, Brown, Bacon, Veilleux,
Brisson, Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Pilote, Picard, Gratton,
Carpentier, Dionne, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Pelletier, Springate,
Boudreault, Boutin (Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon, Caron,
Côté, Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance,
Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Parent
(Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.
LE PRESIDENT: Abstention?
M. ROY: Abstention, M. le Président.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Samson et Roy.
LE SECRETAIRE: Pour: 6
Contre: 0
Abstentions: 59
LE PRESIDENT: Est-ce que vous parlez sur...
M. BIENVENUE: Non. M. le Président, comme le permet la coutume,
je voudrais expliquer l'abstention du gouvernement.
Le gouvernement ayant décidé de s'abstenir de participer
à certaines manoeuvres de l'Opposition, il a en conséquence
décidé de s'abstenir de participer au vote sur ce type de
sous-amen- dement, qui, comme plusieurs autres, est à l'image de tout ce
"filibuster", c'est-à-dire c'est le mot qu'avait employé le
ministre des Institutions financières.
M. BURNS: J'espère qu'on s'abstiendra à tous les autres
votes qui vont venir.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
M. Marcel Léger
M. LEGER: Pour clarifier la situation, nous sommes maintenant rendus
à discuter dans le corridor que nous permet la motion principale
amendée et en même temps sous-amendée puisqu'elle a
été acceptée. Nous voilà donc maintenant à
discuter de cet amendement qui dit que l'Assemblée nationale
réprouve la conduite de son vice-président, le
député de Roberval, et souhaite qu'il ne préside plus
ladite commission d'ici l'ajournement des Fêtes. C'est là-dessus
clairement que nous pouvons parler.
LE PRESIDENT: Pas tout ce que vous avez lu, je crois. La pertinence du
débat s'applique à la dernière partie, qui se lit comme
suit: "et souhaite que d'ici l'ajournement des Fêtes il ne préside
plus ladite commission".
M. LEGER: Je suis dans les souhaits des Fêtes. Ce sont des
souhaits jusqu'à la période des Fêtes. Je ne peux pas
parler du tout du vice-président...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LEGER: ... d'après ce que vous me dites? Je demande une
directive. Si je ne peux pas parler de la portion où on réprouve
la conduite du vice-président, il ne me reste qu'à dire qu'on
souhaite ce sont de merveilleux souhaits qu'il ne préside
plus d'ici la période des Fêtes.
Là maintenant je suis rendu aux souhaits des Fêtes. Nous
aurions bien aimé avoir d'autres souhaits à faire au
député de Roberval que ce simple souhait qu'il ne préside
plus d'ici la période des Fêtes. Nous aurions eu beaucoup d'autres
souhaits à faire au vice-président de l'Assemblée
nationale, qui est en même temps le président de la commission
parlementaire. Nous aurions pu lui souhaiter de partir en vacances plus
tôt, parce que je suis limité au souhait qu'il ne préside
plus.
Alors, M. le Président, est-ce que nous sommes maintenant
d'accord exactement sur ce souhait tel qu'il est formulé? Va-t-il nous
falloir l'amender maintenant? Est-ce que, maintenant, un sous-amendement qui
est maintenant inclus dans un amendement n'existe plus? C'est devenu un
amendement à ce moment-là puisqu'il est incorporé à
l'intérieur de l'amende-
ment. S'il a été adopté, il n'y a plus de
sous-amendement, il n'y a qu'un amendement. Alors c'est un amendement que je
pourrais peut-être à la fin de mon intervention, amender puisque,
selon l'article 74 du règlement, il est permis d'amender par un
sous-amendement un amendement qui est devant nous.
M. le Président, je ne suis pas sûr de souhaiter au
député de Roberval, vice-président de l'Assemblée
nationale et responsable d'avoir présidé la commission
parlementaire, exactement ce qu'on devrait lui souhaiter pour les Fêtes.
Je ne suis pas sûr qu'on ne doive pas apporter un certain amendement
à ce nouvel amendement qui comprend la partie où nous avons
été les seuls, le Parti québécois, à nous
prononcer. Je ne suis pas sûr que nous souhaitions uniquement qu'il ne
préside plus ladite commission d'ici l'ajournement des Fêtes. Moi,
je ne connais pas la date de l'ajournement des Fêtes. Est-ce que ce sera
une période très longue? Est-ce que la sanction est
déjà trop forte ou est-ce qu'elle n'est pas assez forte? Est-ce
qu'on ajourne ce soir ou à la fin de décembre, ou à la fin
de janvier?
M. le Président, je ne connais pas, jusqu'à maintenant, la
portée de cet amendement et je suis, tout en discutant, en train de me
demander s'il ne faudrait pas lui apporter un sous-amendement pour clarifier
cette période que nous avons donnée au vice-président de
l'Assemblée nationale et que nous nous sentions obligés de lui
donner comme sanction. La motion principale telle que présentée
nous obligeait à présenter une motion, mais la motion
présentée est-elle trop forte, est-elle trop longue, est-ce qu'il
va falloir demander l'avis de certains députés comme le
député de Saint-Jean qui semble avoir beaucoup de suggestions
à m'apporter? Je connaîtrais beaucoup d'amendements actuellement
si le député de Saint-Jean pouvait se servir de l'article 26 du
règlement qui dit justement qu'un député, une fois
élu, doit demeurer à son siège je le connais par
coeur s'asseoir silencieusement, écouter religieusement ce qui se
passe autour de lui et de n'intervenir que s'il a quelque chose à dire,
en se levant et en demandant la permission au président et, à ce
moment-là, je serai heureux d'écouter les suggestions du
député de Saint-Jean qui me parle de l'article 92 mais qui n'est
pas du tout pertinent au débat, M. le Président, puisque je suis
debout. Je suis déjà plus haut qu'une personne assise. Je suis
debout, alors l'article 92 ne s'applique pas.
M. le Président, j'aurais besoin de solutions brillantes venant
du député de Saint-Jean ou du député d'Anjou qui
est un des rares qui sont intervenus en se levant et en posant des questions
sur la pertinence du débat.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement.
M. LEGER: M. le Président...
M. BIENVENUE: Un instant, j'ai invoqué le règlement. Vous
avez des propos qui sont à l'inverse de la pertinence, qui sont
absolument impertinents de la part du député de Lafontaine; je
comprends que vous étiez occupé avec le député de
Maisonneuve, mais je voudrais que vous rameniez à l'ordre le
député de Lafontaine qui s'égare davantage.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît!
M. LESSARD: Je suis d'accord, M. le Président, sur certains
propos, l'appel au règlement du député de Crémazie,
mais je vous inviterais aussi à demander aux autres
députés d'appliquer les articles 100 et 26.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Lafontaine.
M. LEGER: M. le Président, au moment où j'ai
été interrompu, j'étais en train de me demander si
l'amendement que nous avons devant nous ne devait pas être
sous-amendé et, comme vous étiez un peu préoccupé,
vous n'avez pas vu que des solutions m'étaient proposées par le
député de Saint-Jean et peut-être le député
d'Anjou. C'est la raison pour laquelle on m'a rappelé à l'ordre
parce que je n'ai pas pu saisir la valeur et la qualité des
sous-amendements que j'aurais pu apporter grâce aux brillantes
interventions des députés que j'ai mentionnés.
M. le Président, le député de Roberval va subir
actuellement dans notre amendement, une sanction que nous sommes obligés
d'apporter parce qu'il ne pouvait pas, selon nous, y avoir une
réprobation sans une sanction. L'amendement que nous avons devant nous
est une sanction qui pour nous est peut-être un peu plus
sévère, mais comme on n'en sait pas la portée en longueur.
On voudrait quand même que, dans cette sanction puisqu'on est pris
devant un dilemme que soit proposé un sous-amendement pour
limiter l'impact de cet amendement. On voudrait tout simplement faire
comprendre au député de Roberval que nous sommes liés avec
un amendement qui a été comprimé par les
députés ministériels et qu'en ce qui nous concerne, nous
n'avons aucune objection à ce qu'il puisse présider d'autres
commissions parlementaires d'ici la période d'ajournement des
Fêtes. C'est seulement ladite commission qui pourrait siéger,
comme vous le savez fort bien, pour le projet du code des loyers, pour les
projets de loi nos 2 et 3; c'est seulement à ces deux occasions. A moins
que le ministre de la Justice apporte d'autres projets de loi qui obligeraient
la commission parlementaire de la justice à siéger à
nouveau et à ce moment-là, le député de Roberval,
d'après l'amendement sur lequel nous discutons, se verrait dans
l'obligation, si elle est adoptée nécessairement, de ne pas
pouvoir présider.
Comme de raison, si cet amendement n'est pas sous-amendé, si le
gouvernement actuellement, M. le Président, continue de s'abstenir, cela
voudra dire que le député de Roberval ne pourra plus
réellement siéger pour les autres séances de la commission
de la justice.
Vous voyez le dilemme dans lequel nous nous trouvons. Du fait que le
gouvernement pourrait s'abstenir de voter, est-ce que nous, nous serons les
grands responsables de cette sanction sévère à moins de
l'amender? Alors... Je pensais que j'étais en dehors du corridor.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Là, vous allez être en dehors du
corridor de votre droit de parole, parce que votre temps est
écoulé. Très bien. Merci.
L'honorable député de Chicoutimi.
M. Marc-André Bédard M. BEDARD (Chicoutimi): M. le
Président...
UNE VOIX: Parlez donc pour qu'on vous comprenne.
LE PRESIDENT: A l'ordre !
M. BEDARD (Chicoutimi): ... si je comprends bien, nous sommes sur
l'amendement qui a été accepté six à zéro
à l'effet que nous souhaitions que la sanction qui soit exercée
contre l'honorable... J'ai de la difficulté à parler; il y a deux
conversations. Je ne demanderai pas qu'on rappelle à l'ordre l'honorable
député de Saint-Jacques. Je dois dire que je suis très
heureux que le gouvernement, par son abstention lors de ce vote, ait
accepté que soit adoucie la sanction qui était proposée
par la motion principale contre l'honorable député de Roberval,
suite à l'erreur commise alors que la commission parlementaire de la
justice a siégé les 14 et 15 décembre 1973.
Si je comprends bien, je crois qu'on peut souhaiter maintenant, puisque
cette période se terminera aux Fêtes, que l'honorable
député de Roberval, avec la compétence qu'on lui
connaît, pourra continuer de siéger comme président
après les Fêtes. C'est une décision dont je suis heureux
parce qu'à mon sens il y a maintenant une sorte d'équivalence
entre, d'une part, l'erreur commise par l'honorable député de
Roberval et, d'autre part, la sanction qui est demandée par
l'Opposition. Cette sanction, en soi, est symbolique, puisque, nous le savons,
il y a de fortes possibilités que la commission parlementaire de la
justice ne siège plus d'ici les Fêtes. Il reste que, même si
cette sanction n'est que symbolique, elle est quand même
nécessaire. Nous y tenons en ce qui concerne l'Opposition parce que nous
tenons à ne pas être complices dans le fait de sanctionnner une
erreur même commise de bonne foi par un président de commission
qui, à ce moment, représentait l'honorable président de
cette Chambre.
Je comprends que l'erreur était facile à faire, parce que
c'est toujours difficile, quand même, d'interpréter les
règlements. J'essaie de me placer dans la position de l'honorable
député de Roberval et il est fort possible que j'eusse pu
commettre exactement la même erreur.
Mais, à ce moment-là, j'aurais accepté un vote, non
pas de blâme, mais un vote qui aurait sanctionné d'une certaine
façon, d'une manière symbolique, le geste posé, à
savoir une erreur mais commise de bonne foi.
D'ailleurs, je trouve que cette sanction est suffisante, parce
qu'après tout, dans un premier temps, qu'est-ce qu'on a reproché
à l'honorable député de Roberval? C'est de ne pas avoir
respecté un précédent qui permet en commission
parlementaire que d'autres représentants que les représentants
officiels des partis désignés soient entendus, à
l'occasion.
Je comprends que l'honorable député de Roberval, qui
voulait peut-être, à cette période, en finir au plus vite,
ait pu être d'une certaine façon influencé. Ainsi un vote
étant pris, sans qu'une motion ait été faite ce qui
était illégal ladite décision équivalait
à priver du droit de parole l'honorable député de Saguenay
ainsi que l'honorable député de Saint-Jacques. Egalement, je
crois que cette décision, cette réprimande symbolique est
suffisante, parce qu'après tout on a accusé, à juste titre
à mon sens, l'honorable député de Roberval d'avoir
violé le règlement 157. Celui-ci, comme on le sait, stipule que,
pour qu'il y ait ajournement d'une commission parlementaire, il faut
nécessairement qu'il y ait une motion et que cette motion soit
débattable. De plus, une période de dix minutes doit être
allouée à chacun des représentants des partis reconnus
pour pouvoir exprimer leur dernier point de vue, s'il y en a un, concernant le
projet de loi qui est déposé, en l'occurence le projet de loi no
8 sur la justice.
Il est évident que lorsqu'on lit ce règlement, et c'est
pour ça que l'Opposition officielle ne pouvait pas reculer, qui dit
carrément ceci, au deuxième paragraphe: Ces motions sont mises
aux voix, sans amendement...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Vous êtes sorti du corridor.
M. BEDARD (Chicoutimi): Dans quel sens, M. le Président?
LE PRESIDENT: Parlez-moi du souhait. Ne me parlez pas de ce qui s'est
passé en bas, ni au salon rouge. Parlez-moi uniquement sur l'amendement,
qui est: Et souhaite que d'ici l'ajournement des Fêtes il ne
préside plus ladite commission.
M. BEDARD (Chicoutimi): Je ne cite pas l'article, M. le
Président, dans le sens de montrer qu'il y avait une
illégalité; je cite l'article dans le sens suivant: C'est qu'il
est quand même difficile d'interprétation, qu'il était
normal que, de bonne foi, on puisse se tromper sur son
interprétation. A ce moment-là étant donné les
difficultés d'interprétation, il est normal que l'amendement soit
à l'effet qu'on ait rétréci, encore une fois, la sanction.
Autrement dit, on étudie l'article dans une autre optique. En ce sens
que, les conditions d'interprétation étant difficiles, il est
normal, que faisant preuve de compréhension, l'Opposition ait
apporté cet adoucissement à la sanction qui a été
votée tout à l'heure.
LE PRESIDENT: C'était la motion précédente,
ça. L'adoucissement a été voté
déjà.
M. LESSARD: II faut qu'il l'explique. M. BEDARD (Chicoutimi): C'est
ça.
LE PRESIDENT: II a été voté l'adoucissement.
Continuez, continuez. A l'ordre, messieurs !
M. BEDARD (Chicoutimi): Ils ne peuvent pas se mêler eux autres,
pour le temps qu'ils parlent dans cette Chambre, à part de se
mêler dans leurs invectives et à part de se mêler dans leur
manière de ne pas respecter le règlement.
Le règlement leur interdit d'intervenir alors qu'un
député a la parole, à moins que je ne me trompe sur le
sens des règlements de la Chambre. Je comprends qu'on n'a pas de
leçon de démocratie à leur donner à ces honorables
députés d'en face. Mais leur comportement prouve que leur sens de
la démocratie est à la hauteur.
LE PRESIDENT: Même le député de Saguenay vous
ramène à la motion. Félicitation! Merci.
M. BEDARD (Chicoutimi): C'est parce qu'il est près de moi.
Alors, je soumets que je ne peux faire autrement que de souscrire
à ce qui a été voté, à savoir qu'on souhaite
que, d'ici la période des Fêtes, l'honorable député
de Roberval ne préside plus et qu'effectivement, la sanction qui est
prévue dans ce que je viens d'énoncer, ne soit pas plus difficile
ou plus sévère que l'acte qui a été posé par
l'honorable député de Roberval.
Encore une fois, il est normal que cette sanction ne soit pas plus
sévère, parce que l'acte posé par l'honorable
député de Roberval, dont on a reconnu quand même
l'intégrité, dont on a reconnu en fait la non-partialité,
ne subisse pas une sanction qui soit plus forte que les actes qui ont
été posés par l'honorable député de
Roberval.
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! L'honorable député de
Saguenay.
M. Lucien Lessard
M. LESSARD: M. le Président, en vertu de l'article 92, je me
lève. Je ne sais même pas de quel comté il est
député, je ne peux même pas en parler...
Si j'interviens sur cette motion d'amendement et sur les souhaits de
Noël en faveur du député de Roberval, c'est d'abord pour
féliciter le député de Saint-Jacques qui nous a
prouvé, grâce à la motion qu'il nous a
présentée, son intelligence; qui nous a prouvé sa
souplesse vis-à-vis des erreurs humaines. Et il y en a eu des erreurs
humaines au cours de cette discussion.
M. CHOQUETTE: Une question de privilège, M. le Président,
si le député de Saguenay me le permet. Un député
infirme ou malade, comme le député de Saguenay, a le droit...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... de parler assis.
LE PRESIDENT: A l'ordre! ...
M. LESSARD: Sur la question de privilège, M. le Président,
j'affirme que je ne suis pas malade.
Je disais que si j'intervenais sur cette motion, c'est d'abord pour
demander au Parti libéral, en votant en faveur de cette motion, de
reconnaf-tre enfin l'intelligence du député de Saint-Jacques, de
reconnaître la perspicacité du député de
Saint-Jacques lorsqu'il nous propose cette motion, de reconnaître
je suis assuré, M. le Président, que vous l'avez vous-même
reconnu depuis les quatre années que le député de
Saint-Jacques siège à l'intérieur de cette Chambre
ses connaissances profondes du règlement, de reconnaître la
subtilité du député de Saint-Jacques lorsqu'il nous
propose cette motion.
Pourquoi est-ce que le député de Saint-Jacques... Je pense
qu'il est extrêmement je vous précède, M. le
Président difficile de parler abstraitement d'une motion comme
celle-là.
Il faut expliciter pourquoi on fait ces souhaits à l'occasion,
justement, des Fêtes qui viennent, au député de Roberval.
On ne peut pas, justement, expliciter aux députés
libéraux, afin de les amener à voter avec nous autres cette
motion, pourquoi nous avons proposé cette motion si on ne peut pas
expliquer les raisons pour lesquelles on l'a proposée.
M. le Président, pourquoi souhaite-t-on, nous, du Parti
québécois, que d'ici l'ajournement des Fêtes, le
député de Roberval ne préside plus ladite commission?
C'est d'abord justement pour respecter la démocratie. C'est là
que le député de Saint-Jacques a été perspicace, a
été intelligent, lorsqu'il propose à l'Assemblée
nationale de voter cette motion.
Oui, M. le Président, respect de la démocratie. Pourquoi?
Parce que vous conviendrez et nous vous l'avons prouvé à
plusieurs reprises vous serez convaincu qu'il n'est plus possible au
député de Roberval de présider cette commission
parlementaire d'ici la période des Fêtes,
parce que nous jugeons que le député de Roberval a
démontré une certaine partialité lors de la discussion en
commission parlementaire, que le député de Roberval a
démontré une méconnaissance des règlements qui sont
là comme un outil pour permettre à la minorité de se faire
respecter.
Or, M. le Président, comment voulez-vous que nous, les six
députés du Parti québécois, puissions accepter que
le vice-président actuel de l'Assemblée nationale, le
député de Roberval, puisse présider nos
délibérations lorsque, comme le président lui-même
le disait, je pense, il y a quelques jours, lors d'une question de
privilège, nous ne sommes pas convaincus de son impartialité,
lorsque nous ne sommes pas convaincus de sa connaissance des
règlements?
Il faut justement que l'Opposition, le groupe des six
députés, soit véritablement assuré de se faire
respecter à l'intérieur de ces commissions, soit
véritablement assuré de pouvoir s'exprimer. Cela n'a pas
été le cas lors de cette commission parlementaire. Comment
voulez-vous que nous acceptions, d'ici l'ajournement de Noël, d'ici les
Fêtes, que le député de Roberval puisse présider les
délibérations de la commission quand, justement, il nous a
démontré, au moins à trois reprises, lors des
délibérations de la commission parlementaire de la justice, lors
de l'étude du projet de loi no 8, qu'il ne voulait pas permettre aux
députés de l'Opposition de se faire entendre.
C'est dans ce sens, M. le Président, que nous proposons cette
motion, parce qu'il est extrêmement important pour le respect de la
démocratie que les députés de l'Opposition soient
assurés de pouvoir se faire entendre à l'intérieur de
cette commission.
M. le Président, c'est là encore l'intelligence et la
perspicacité que je reconnais, et que les députés
libéraux devraient reconnaître au député de
Saint-Jacques. En effet, il ne s'agit pas, dans cette motion, de destituer le
vice-président de l'Assemblée nationale. Il ne s'agit pas, dans
cette motion, d'empêcher jusqu'au prochain Parlement le
député de Roberval de présider les séances de la
commission parlementaire, même les séances de la commission
parlementaire de la justice. Non, M. le Président. Nous reconnaissons
que se tromper, c'est humain. C'est là que je fais appel à
l'intransigeance des libéraux. Nous reconnaissons que la leçon
que nous avons donnée aujourd'hui au député de Roberval
peut être efficace et, comme je le connais, lui, si gentilhomme, je suis
assuré et lui aussi, M. le Président, si intelligent
que cette leçon a porté fruit.
Mais, M. le Président, en même temps, pendant les quelques
jours que nous aurons à nous reposer, étant donné que le
député de Saint-Jean nous annonçait tout à
l'heure...
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre!
M. LESSARD: ... que nous devrions revenir après Noël. Quant
à nous, nous n'avons aucune opposition à cela; d'ailleurs, c'est
ce que nous avons demandé à maintes et maintes reprises. Quand on
s'est opposé à la motion du leader parlementaire du gouvernement,
qui voulait nous faire siéger de dix heures à minuit, nous avons
justement dit et je reviens, mais je réponds à des
questions qui me sont posées que, quant à nous,
étant donné que notre travail, c'était de
légiférer, nous étions prêts à revenir
après la période des Fêtes.
Mais, lorsque nous reviendrons après les quelques jours de repos
que ce gouvernement devra accepter de nous donner, puisque, de toute
façon, nous ne pouvons pas siéger le dimanche, le
député de Roberval aura probablement reconnu que les
interventions des différents députés du Parti
québécois étaient valables. Il aura reconnu qu'il
était normal qu'on le blâme dans l'attitude qu'il avait
démontrée en présidant les séances des commissions
parlementaires.
Le député de Roberval comme je le connais
d'ailleurs probablement aura fait amende honorable pendant cette
période.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): A l'ordre! Le député de
Maisonneuve.
M. LESSARD: J'ai été dérangé. Je continuerai
après.
M. Robert Burns
M.BURNS: Au moment où s'écoulent les derniers instants
où nous avons droit de parole, c'est un peu avec la larme à
l'oeil que je prends la parole. Je parle du droit de parole de l'Opposition. Je
sais fort bien que les honorables membres du parti ministériel auront
sûrement un tas de choses à nous dire sur cette motion. Ils ont
attendu à la toute dernière minute pour nous épuiser
littéralement et pour nous donner le coup de Jarnac lorsque nous
sentirons que nos possibilités de droit de parole se sont
épuisées.
Sur l'amendement principal, tel que modifié par l'entremise du
sous-amendement, je m'en voudrais, dans ces derniers moments en tout
cas, en ce qui concerne l'Opposition de nos interventions, de ne pas
insister sur le fait qu'à notre humble avis, sur cette motion, il est
absolument nécessaire et je pèse bien mes mots que
notre réprobation à l'endroit du député de Roberval
soit précisée. Et c'est ça l'objet de l'amendement. Si je
le lis bien, il dit: "et souhaite qu'il ne préside plus d'ici
l'ajournement des Fêtes ladite commission," c'est-à-dire la
commission parlementaire de la justice.
Comme je l'ai mentionné plus tôt, nous aurions pu penser
à une sanction beaucoup plus draconienne, faite avec beaucoup moins
d'élégan-
ce. Vous allez nous accorder ça. Elle comporte une certaine
élégance, cette sanction. Nous savons nous sommes d'accord
également que, tôt ou tard, on devra revoir comme
président de commission le député de Roberval, et comme
président de l'Assemblée nationale en tant que
vice-président, comme vous, M. le Président.
On est assez réalistes pour savoir que ce député de
Roberval, qui a, depuis le début de cette Législature comme au
cours de la Législature précédente, reçu la
confiance et des députés ministériels et des
députés de l'Opposition je ne crains pas de le dire
aura à siéger à nouveau.
On est assez réaliste, M. le Président, pour savoir qu'il
aura à siéger à nouveau, qu'il aura de nombreuses
occasions de se retrouver comme, si vous voulez, l'appel ultime à
l'application des règlements, que ce soit en commission ou à
l'Assemblée nationale. Si nous avons fait cet amendement, c'est, comme
je le mentionnais tantôt, dans l'intérêt du
député de Roberval lui-même d'abord et dans
l'intérêt des députés de l'Opposition en second
lieu. Je m'explique, M. le Président. Comment un souhait exprimé
dans notre motion, un souhait que le député de Roberval ne
préside plus d'ici l'ajournement des Fêtes la commission de la
justice, comme cela je vous vois vous poser la question peut-il
être exprimé dans l'intérêt du député
de Roberval? Je vais vous l'expliquer, M. le Président.
Ce souhait que nous exprimons de ne pas voir d'ici la fin des travaux
qui seront ajournés sans doute ou qui seront prorogés, je ne le
sais pas, M. le Président, à l'occasion des Fêtes le
député de Saint-Jean n'a pas compris ce que j'ai dit; il dit:
Non, non. Je dis tout simplement qu'ils seront ajournés à
l'occasion des Fêtes ou prorogés, je ne le sais pas.
M. VEILLEUX: Ajournés.
M. BURNS: Ce n'est pas, c'est ça, exactement. Le
député de Saint-Jean, je vous suggère de lire la motion
que votre leader a fait adopter relativement aux travaux de la Chambre. Vous
lirez cela et après vous comprendrez peut-être ce que je suis en
train de dire.
M. le Président, j'étais en train de parler, lorsque j'ai
été de façon impolie, je pense, et même
irrégulière interrompu par le député de Saint-Jean
mais, que voulez-vous? c'est rendu qu'on s'y habitue; en tout cas on s'y fait.
Il semble, M. le Président, que le député de Saint-Jean
n'a plus, comme façon d'intervenir, que de lancer des invectives. Il
semble vouloir remplacer le député des Iles-de-la-Madeleine, qui.
lui, s'est calmé depuis le début de cette assemblée. Il
semble que le député de Saint-Jean veuille avoir cet honneur
douteux d'être l'invectiveur en chef des députés
ministériels.
Quoi qu'il en soit, M. le Président, je vais mettre de
côté ces insultes et ces impolitesses qui me sont adressées
par le député de Saint-
Jean parce que je suis pleinement conscient que lui n'est pas conscient
de ce qu'il fait.
Alors, M. le Président, je disais donc que, si nous avons voulu
compléter notre motion par ce souhait de ne pas voir d'ici l'ajournement
des Fêtes le député de Roberval présider une
commission parlementaire de la justice, c'est d'abord et avant tout
c'est la première raison dans son propre intérêt. Et
je m'explique, M. le Président. Le député de Roberval ne
peut pas être insensible d'abord aux reproches que nous lui avons faits
en commission. Le député de Roberval ne peut pas être
insensible aux reproches que nous lui avons adressés en Chambre, au
moment du dépôt du rapport de la commission. Même si,
à aucun moment et je vous prie de le reconnaître, M. le
Président, comme j'espère que les députés
ministériels le reconnaîtront nos attaques n'ont
été dirigées de façon personnelle contre le
député de Roberval mais plutôt à l'endroit de cette
personne en tant que personne désignée à une fonction, le
député de Roberval ne peut pas être insensible à nos
critiques. Je connais la sensibilité du député de
Roberval, comme je connais la proximité immédiate des
événements qui peuvent, je l'admets, l'avoir
ébranlé.
C'est d'abord et avant tout dans l'intérêt du
député de Roberval que nous lui demandons, que nous souhaitons
que cette Chambre s'exprime sur le fait que ce député n'ait pas
dans le fond ce serait un fardeau qu'on lui imposerait, ce serait une
tâche difficile à présider des travaux de la
commission parlementaire de la justice d'ici à l'ajournement des
Fêtes. Il ne pourrait pas, parce qu'il est profondément humain,
être insensible au fait que nous avons critiqué un certain nombre
de ses attitudes et, à ce moment-là, au lieu de corriger la
situation, je me demande jusqu'à quel point nous ne l'aurions pas
empirée, si le député de Roberval acceptait de
siéger à la commission parlementaire de la justice d'ici à
l'ajournement des Fêtes. Il ne peut pas si jamais on l'appelle
à présider des séances de la commission parlementaire qui,
comme je le mentionnais tantôt, peuvent très bien se
présenter à l'occasion d'un autre projet de loi oublier
qu'un certain nombre de députés de l'Opposition ont
critiqué son attitude. Non pas son attitude, encore une fois, en tant
qu'individu, mais son attitude en tant que détenant un poste important,
on l'a admis, poste que vous détenez vous-même, M. le
Président. Et vous en savez l'importance, vous connaissez toutes les
difficultés de cette fonction, difficultés particulières,
comme je l'ai mentionné et comme mes collègues l'ont
mentionné à plusieurs reprises, d'avoir cette espèce de
neutralité au-dessus de la partisanerie politique. Or, non seulement, on
demande au président de l'Assemblée nationale, aux
vice-présidents de l'Assemblée nationale d'avoir cette
neutralité, mais nous demandons actuellement en particulier au
député de Roberval de la garder. Et en vue de l'aider à
garder cette
neutralité "above and beyond" toute partisane-rie...
M. le Président, j'invoque le règlement. On vient juste de
dire : "Speak white". Je n'accepte pas ça de la part d'un
Québécois francophone. Je viens d'entendre un
député que je ne nommerai pas, pour ne pas gâter sa
réputation, lorsque j'ai parlé anglais, me dire: "Speak white".
Je n'ai pas de tendance fasciste à ce point et vous le savez.
J'espère que le député ne reviendra pas sur ça,
parce qu'on pourra avoir un débat acrimonieux.
Je disais qu'il faut absolument que le député de Roberval
laisse décanter pendant une période plus ou moins longue cette
espèce de choc je pense, le connaissant, que je peux dire un choc
qu'il a subi par la motion principale que j'ai formulée. C'est
ça qui explique notre souhait dans l'intérêt du
député de Roberval, qu'il ait le temps de s'en remettre pour
revenir et c'est mon plus grand souhait, c'est d'ailleurs une des choses
dans lesquelles je crois le plus absolument détendu,
libéré du choc que lui cause une telle motion. A n'en pas douter,
si c'était moi qui étais visé par une telle motion, je
vous avoue que ça me dérangerait, tout au moins, temporairement.
Dans l'intérêt du député de Roberval, je demande
à cette Chambre de ne pas lui imposer un fardeau plus lourd pour lui
permettre d'oublier ces événements, pour lui permettre de refaire
le plein de neutralité, ppur refaire le plein à l'égard
des députés d'Opposition. Non seulement c'est un souhait, mais
c'est une conviction que j'exprime. Je souhaite qu'il n'ait pas à
siéger à nouveau, pour lui-même et je suis convaincu que
s'il n'a pas à siéger à la commission parlementaire durant
quelques jours, quelques semaines, après que ces débats auront
vraiment pris le chemin de l'histoire par l'entremise du journal des
Débats, le député de Roberval aura refait son plein de
neutralité.
Qu'il puisse siéger à une autre commission comme
président, je n'ai aucune espèce de doute à ce sujet.
Qu'il puisse présider les travaux d'une autre commission qui n'a pas
connu le genre de débats que nous avons soumis à la commission de
la justice, je n'ai aucun doute qu'il soit capable de le faire. Mais à
la commission de la justice, la proximité de ces
événements causerait, à mon avis, cette espèce de
traumatisme dont je parlais un peu plus tôt.
Donc, dans un premier temps, le souhait que nous exprimons est un
souhait d'abord et avant tout dans l'intérêt du
député de Roberval. Dans un deuxième temps, ce souhait est
aussi dans l'intérêt de l'Opposition. Quand je dis de l'Opposition
cela veut dire, dans mon esprit, les députés du Parti
créditiste comme les députés du Parti
québécois, les uns et les autres.
Pourquoi est-ce que j'exprime ce désir relativement aux membres
de l'Opposition? C'est bien simple. Nous aussi, nous sommes sous le coup du
choc d'une attitude que je ne veux pas qualifier de partiale parce que cela n'a
pas fait l'objet de dispositions dans la motion mais qui nous laisse croire
justement que, dans certaines de ces attitudes, le député de
Roberval n'a peut-être pas manifesté toute la neutralité
dont on aurait pu s'attendre de la part d'une personne qui détient une
si haute fonction. Et encore là, je suis prêt à admettre
que c'est physiquement et mentalement difficile, surtout au sortir d'une
campagne électorale. Je sais que le député de Roberval a
participé d'une façon très active à cette campagne
électorale. J'étais dans son comté au cours de la campagne
électorale et il parlait, lui, à un autre endroit que le mien...
M. le Président, il y a d'autres comtés où j'ai
parlé et où le candidat libéral n'a pas gagné,
alors...
UNE VOIX: II n'y en a pas beaucoup.
M. BURNS: Dans Maisonneuve, dans Saguenay, dans Saint-Jacques, dans
Chicoutimi. Je n'ai malheureusement pas contribué à
l'élection de l'honorable chef de l'Opposition, mais la prochaine fois,
je suis sûr que j'irai lui donner un coup de main. Ce n'est pas parce que
je n'ai pas voulu, c'est parce que lui comme moi étions pris â
d'autres choses et nous n'avons pas réussi à nous rencontrer.
Je suis bien prêt à réduire mon intervention le plus
possible si les députés ministériels veulent bien cesser
de m'interrompre. Je suis bien prêt à ne pas utiliser tout le
temps qui est mis à ma disposition. Je suis là pour dire un
certain nombre de choses. J'ai l'intention de les dire; j'ai l'intention de
prendre, cependant, tout le temps nécessaire pour les dire si on
m'empêche de faire passer mon message, ceci dit sans aucune
prétention.
Je disais donc que nous aussi, de l'Opposition, avons besoin de ce
délai qui est exprimé dans la deuxième partie de notre
proposition, exprimé par le souhait de ne pas voir pour un temps
très court le député de Roberval siéger à la
commission parlementaire de la justice.
Nous aurions, dans les jours qui viennent, à cause du
présent débat, d'une part, à cause également des
diverses attitudes que nous avons reprochées au député de
Roberval, nous aurions certaines difficultés, dans notre esprit en tout
cas, quant à la crédibilité du député de
Roberval en commission parlementaire de la justice.
Je passe rapidement là-dessus, M. le Président, comme vous
me le suggérez par votre geste de la main, mais je ne peux pas
m'empêcher de mentionner ça. C'est justement parce que nous
croyons le député de Roberval capable d'une neutralité,
d'une impartialité bien au-dessus de la partisanerie politique, parce
que nous croyons le député de Roberval capable de faire
abstraction du fait qu'il a été élu sous une
bannière politique et que nous l'avons été sous une
autre...
M. le Président, je pense que notre ancien règlement
prévoyait que, s'il y avait des députés malades, ils
pouvaient parler assis de leur siège, mais il faudrait qu'il y ait une
motion à cet effet. M. le Président, lorsqu'on invoquera le
règlement dans ce sens, je me rassoirai. Dans le moment, je ne
vois pas de député debout, sauf d'autres députés
qui ne m'interrompent pas actuellement, quoique debout, et qui sont bien
gentils à mon égard.
Quoi qu'il en soit, M. le Président, en terminant, je dis
simplement ceci: II n'est pas pensable, dans notre esprit c'est
ça le sens de notre amendement d'imposer et les
circonstances peuvent l'imposer au député de Roberval
d'aller à nouveau dans les jours qui viennent présider des
séances de la commission parlementaire de la justice.
Je crois que c'est même une chose que l'ensemble de
l'Assemblée nationale devrait accepter. Si le vote qui s'en vient
je ne peux pas présumer du résultat de ce vote est
semblable à celui qui a été adopté sur le
sous-amendement, c'est-à-dire une abstention totale du côté
ministériel et un vote en faveur du côté de l'Opposition
officielle, nous serons bien heureux de voir qu'au moins le gouvernement
reconnaît une chose, soit qu'il est absolument impossible de demander au
député de Roberval, dans les circonstances actuelles et dans les
jours qui viennent, de présider les séances de la commission
parlementaire de la justice, encore une fois, dans son intérêt et
dans l'intérêt de sa crédibilité auprès des
membres de l'Opposition. C'est dans ce sens, M. le Président, que le
député de Saint-Jacques a eu la sagesse de faire cette motion.
C'est dans ce sens que le député de Saint-Jacques a osé
poser le problème. Encore une fois, ce problème est
délicat. Cela choque peut-être un certain nombre d'oreilles de
nous entendre parler de ces choses-là, mais nous pensons un peu plus
qu'à court terme par notre motion. Nous espérons, tant sur la
motion principale que par notre amendement, qu'un certain nombre de choses
seront comprises, qu'entre autres les gens qui détiennent des fonctions
comme la vôtre, aussi importantes que la vôtre, qui sont
appelés à vous remplacer quand vous êtes absent, que ce
soit des présidents de commissions ou que ce soit encore des
vice-présidents de l'Assemblée nationale, tels que le
député de Saint-Louis et celui de Roberval, sauront que c'est
beaucoup plus qu'un volet de "filibuster" que nous avons soulevé par
notre motion, que c'est beaucoup plus qu'une obstruction, dans le fond,
apportée à un projet de loi contre lequel nous en avons, que nous
faisons actuellement par l'entremise de notre motion. C'est, dans le fond, une
motion qui pose le problème suivant au président de
l'Assemblée nationale, aux vice-présidents et aux
présidents de commissions et, à toutes fins pratiques, à
l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale.
Ce problème, il pourrait se lire comme suit: Qu'est-ce que l'on
fait, à l'avenir, du parlementarisme québécois? Qu'est-ce
que l'on fait, à l'avenir, avec cette situation où un
gouvernement est numériquement très fort, où un
gouvernement fait face à une Opposition numé- riquement faible?
C'est cela, dans le fond, la question que posent et l'amendement qui est devant
nous et la motion sur la question principale. Et si nous la posons en termes de
délais, si nous souhaitons, par exemple, que le député de
Roberval s'abstienne, pendant un bout de temps, de présider les
séances de la commission parlementaire de la justice, c'est dans un but
bien précis. C'est, entre autres, pour faire réfléchir nos
honorables collègues sur ce que je viens de dire, quant à la
durée que nous imposons, que nous nous imposons dans le fond parce qu'on
aime bien voir le député de Roberval présider des
commissions. On connaît sa bonhomie, on connaît également sa
façon humaine d'approcher les problèmes.
Qu'on ait pu lui faire un reproche ou des reproches à
l'égard de certaines de ces attitudes à une occasion,
j'espère que le député de Roberval nous le pardonnera.
Mais, pour nous, cela posait l'ensemble de la question. Et, ce délai,
que nous inscrivons dans la motion d'amendement du député de
Saint-Jacques, c'est un peu pour nous un délai que nous nous fixons en
disant tout simplement: Pendant au moins cette période où nous
demandons, nous souhaitons que le député de Roberval ne
siège pas à la commission parlementaire de la justice, si cette
période est endossée par l'Assemblée nationale, il y aura
peut-être un certain nombre de réflexions qui se feront à
travers les discussions qui auront sûrement lieu entre
députés ministériels et les députés de
l'Opposition. Ils diront peut-être: C'est vrai que, si on s'engage dans
cette voie pour quatre ans, c'est peut-être une condamnation à
mort du parlementarisme québécois que nous sommes en train de
faire. C'est peut-être une espèce d'attitude qui peut facilement,
je l'avoue, être soutenue par un gouvernement numériquement
majoritaire et si numériquement majoritaire qu'il l'est.
C'est quelque chose qui est possible dans les faits. Mais nous ne
pouvons pas manquer cette occasion de laisser, d'ici au moins l'ajournement des
Fêtes, que nous ignorons au point de vue date, un certain nombre de gens
de cette Assemblée nationale, ceux qui pensent encore et qui
siègent ici... Il y en a encore quelques-uns je l'admets
du côté ministériel qui pensent, qui font autre chose que
de s'imaginer que l'Opposition ce sont des trouble-fête qui viennent
gâter leur petit "party". Je sais qu'il y en a qui pensent encore cela.
Voulez-vous que je les nomme? D'habitude, on me dit: Nommez-les. Mais je les
nommerai pas. Le député de NDG ne veut pas que je les nomme
sûrement. Je dis qu'au moins chez ces personnes, même du
côté ministériel, qui pensent encore que c'est utile une
institution comme la nôtre, il est possible que durant ce délai,
d'ici à l'ajournement des Fêtes et jusqu'au moment où nous
reviendrons, on se mette à penser à ça, pas pour
l'immédiat, pas pour le fait qu'un projet de loi, contre lequel on en a
sérieusement, soit adopté par la force numérique. Ce n'est
pas ça, M. le Prési-
dent. A la fin de tout ceci, on pourra nous dire: Vous avez perdu la
guerre, la bataille, etc. Moi, je pense que non. Je pense que nous aurons perdu
une bataille parce que c'est sûr qu'avec cette force numérique le
gouvernement aura sûrement l'occasion de faire adopter son projet de loi,
contentieux à nos yeux. Mais nous espérons simplement une chose:
C'est qu'à la fin de ce débat, il y a un certain nombre de
rouages qui seront mis en marche dans l'esprit d'un certain nombre de gens
à cette Assemblée nationale.
Nous espérons, en particulier, qu'on aura tiré des
leçons, à cause de cette première session, quant à
de futures fins de session. C'est le sens de l'amendement et c'est aussi le
sens de la motion principale, M. le Président.
LE PRESIDENT: Nous allons procéder à la mise aux voix sur
la motion d'amendement. Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion d'amendement de M. Charron
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont en faveur de la motion d'amendement de
l'honorable député de Saint-Jacques veuillent bien se lever, s'il
vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Lessard, Bédard
(Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît.
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Levesque, Mailloux, Saint-Pierre, Choquette,
Berthiaume, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond,
Bienvenue, Massé, Harvey (Jonquière), Houde (Abitibi-Est),
Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Bacon, Blank, Veilleux, Brisson,
Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Pilote, Fraser, Picard, Gratton,
Carpentier, Faucher, Harvey (Charlesbourg), Pelletier, Springate, Boudreault,
Boutin (Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest), Chagnon, Caron, Côté,
Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc), Lachance, Lapointe, Lecours,
Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier, Parent (Prévost),
Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.
LE SECRETAIRE: Pour: 5 Contre: 58
LE PRESIDENT: Voulez-vous enregistrer les deux abstentions au journal
des Débats?
LE SECRETAIRE ADJOINT: Abstentions: MM. Samson et Roy.
LE PRESIDENT: Est-ce que nous allons procéder à la mise
aux voix de la question principale?
M. BURNS: Si quelqu'un veut exercer son droit de parole sur la
motion...
LE PRESIDENT: Vous avez un droit de réplique.
M. BURNS: J'ai un droit de réplique; alors j'avertis qui de droit
que je veux l'exercer.
LE PRESIDENT: L'honorable ministre de la Justice.
M. Jérôme Choquette
M. CHOQUETTE: M. le Président, au moment de me lever, vous
comprendrez facilement que mon intention en intervenant dans ce débat
n'est sûrement pas de contribuer au "filibuster" auquel nous a
exposés le Parti québécois. Mon intention n'est pas
d'ajouter à ce flot de paroles, à ce flot d'accusations, à
ce flot d'insinuations auquel on a exposé un de nos collègues
estimés dans cette Chambre, le député de Roberval.
M. le Président, il est regrettable que le Parti qui forme
l'Opposition officielle ait laissé percer sa rancoeur devant sa
situation minoritaire en cette Chambre pour s'attaquer injustement,
profondément injustement, à la conduite du député
de Roberval alors qu'il avait présidé cette commission
parlementaire de la justice. Car, si l'on examine les débats de cette
commission parlementaire, si l'on examine la façon avec laquelle le
député de Roberval a dirigé les discussions ce
soir-là ce soir du 14 décembre dont on nous a entretenus
malheureusement trop longuement et le lendemain, on se rend compte que
le député de Roberval a non seulement agi dans la plus stricte
légalité, mais en plus de cela, a agi avec la bonne foi, avec la
meilleure foi du monde de façon à permettre à l'Opposition
de s'exprimer.
On ne vous a pas dit encore messieurs, que sur la première
question contentieuse qui est venue devant cette commission de la justice,
à savoir le choix d'un rapporteur alors que, comme dirigeant du projet
de loi devant cette commission, comme responsable en tant que ministre de la
Justice, je proposais le député de Portneuf et je prenais la
position qu'on devait mettre ma proposition aux voix immédiatement, que
le député de Roberval, à ce moment-là, a contredit
la position prise par le ministre de la Justice et qu'il a, au contraire,
autorisé le député de Maisonneuve et le
député de Sauvé à faire chacun une motion, chacun
proposant des députés différents en l'occurence, si je me
souviens bien, le député de Sainte-Anne tout d'abord et le
député de Nicolet-Yamaska. Un débat s'en est suivi alors
que nos honorables collègues je devrais retirer le mot
"honora-
ble" parce que je ne peux pas considérer que dans tout cela leur
conduite a été parfaitement honorable ont alors fait une
série de...
M. BURNS: M. le Président, j'invoque une question de
privilège. Si le ministre de la Justice tient à mettre en doute
notre conduite parce que dès qu'il parle de "nos honorables
collègues" et que, par la suite, il retire le mot "honorable" en reliant
ce retrait à notre conduite, vous le savez comme moi, vous avez
même donné des directives, vous avez donné un avertissement
d'ailleurs au député de Lafontaine là-dessus et nous avons
pris en sérieuse considération...
LE PRESIDENT: Lafontaine ou Saint-Jacques?
M. BURNS: Le député de Lafontaine, M. le Président,
à la suite d'interventions de la fin de semaine dernière.
LE PRESIDENT: Voulez-vous me rappeler l'occasion?
M. BURNS: Vous avez mentionné au député de
Lafontaine qu'il n'avait pas à critiquer les décisions à
l'extérieur de la Chambre, la partialité et la conduite du
président. Or, M. le Président...
UNE VOIX: A l'intérieur de la Chambre.
M. BURNS: ... pour l'information du ministre de la Justice, l'article 68
que nous avons utilisé à l'endroit du député de
Roberval et que vous nous avez suggéré d'utiliser si jamais on
voulait mettre en doute votre partialité ou votre conduite, s'applique
également, non seulement au lieutenant-gouverneur, au président
et aux vice-présidents, mais à tous les membres de
l'Assemblée nationale.
Si le ministre de la Justice veut mettre en doute notre conduite, il
peut très bien le faire par voix de motion qu'il inscrira lui-même
au feuilleton, mais je le prie de cesser de faire des insinuations relativement
à notre conduite tant qu'il n'utilisera pas les moyens que nous avons eu
la franchise d'utiliser.
LE PRESIDENT: Question de règlement. M. LEVESQUE: Le ministre de
la Justice...
M. BURNS: C'était une question de privilège que je
soulevais et c'était sur l'attitude que le ministre de la Justice, sans
le vouloir, a développée à notre égard.
M. LEVESQUE: J'invoque le règlement. Parce que, M. le
Président, les paroles du ministre de la Justice, à mon sens, ne
touchent en rien, ne constituent aucune infraction à notre
règlement. Il est clair qu'il n'est pas honorable de faire ce qu'a fait
chacun des membres, ou particulièrement certains membres du Parti
québécois, mais le ministre de la Justice a parfaitement le droit
de juger des gestes posés par nos honorables amis d'en face en disant
qu'il n'est pas honorable de faire ça. Cela n'attaque pas
personnellement et dans l'esprit du règlement, c'est permis, M. le
Président. Je serais prêt à dire, comme le ministre de la
Justice, que ce n'était pas honorable du tout.
LE PRESIDENT: Pas de débat, s'il vous plaît. Ecoutez, je
pense qu'il faut faire une distinction. Lorsqu'il s'est adressé,
c'était à un groupe de parlementaires. Il n'a pas visé un
député en particulier. Une fois, j'ai ramené le
député de Saint-Jacques à l'ordre alors qu'il traitait ses
collègues: Vous savez, je ne voudrais pas répéter les
mots, c'était plutôt une mise en garde. Mais en l'occurence ici,
il a dit, les collègues comme ensemble. Je pense bien... Ecoutez, je ne
sais si c'est blessant à ce point. D'ailleurs, je ne verrais pas dans
une motion de fond... Vous lui suggérez une motion de fond pour qu'on
attaque la conduite de six ou sept députés en même
temps.
M. BURNS: M. le Président, si vous me permettez, simplement pour
expliquer le sens de cette question de privilège, c'est que j'ai dit,
dès le début des paroles du ministre de la Justice, que s'il se
dirigeait vers une condamnation de notre conduite, il y a un moment, qu'il
l'utilise. Qu'il l'utilise et on aura sans doute un débat très
intéressant à ce sujet si vous voulez l'utiliser.
M. CHOQUETTE: M. le Président, de toutes façons, ce
soir-là, je disais que la première question controversée
qui était venue devant la commission, était la question du choix
du rapporteur. J'avais fait une proposition et à la suite de cette
proposition, j'avais soumis au président, le député de
Roberval, qu'il devait mettre ma proposition aux voix pour le choix du
rapporteur. Or, à ce moment, nos collègues d'en face
représentés à la commission par le député de
Sauvé et le député de Maisonneuve ont commencé
à faire des propositions contradictoires. On n'a qu'à lire le
journal des Débats et j'en appelle au ministre du Revenu qui est ici
présent et qui a assisté à une bonne partie de cette
séance qui a été d'un grotesque, d'un loufoque
extraordinaire. Parce qu'à un moment donné, nos collègues
de l'Opposition proposaient un député et puis l'autre
collègue prenait la relève pour suggérer un autre
député et on s'est trouvé... un instant...
M. BURNS: Vous n'avez pas été grotesque et loufoque en
vous proposant vous-même.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît! M. BURNS: Le plus
loufoque que j'ai vu,
c'est le ministre de la Justice qui s'est proposé comme
rapporteur.
LE PRESIDENT: A l'ordre, à l'ordre, à l'ordre ! Question
de privilège.
M. MORIN: Sur un point de privilège, et pour rectifier les
faits.
LE PRESIDENT: Un instant.
M. MORIN: Le premier à se proposer comme rapporteur
lui-même, ç'a été le ministre de la Justice.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Il n'y a pas de privilège dans
ça. A l'ordre, messieurs! Ecoutez, il y a un débat qui dure
depuis près de deux jours. Je pense que d'un certain côté,
il y a eu des attaques assez acerbes sur tout ce qui s'est passé en
commission. Il y a peut-être eu certaines interventions ou interruptions
plus ou moins légales.
Mais je pense bien qu'en général les opinants du parti de
l'Opposition officielle ont eu quand même l'occasion de faire une
trentaine de discours et je pense bien qu'ils ont eu l'occasion de
s'exprimer... Oui, mais laissez le ministre de la Justice...
A l'ordre! A l'ordre!
M. CHOQUETTE: Quoi qu'il en soit, M. le Président, mon
désir n'est pas d'envenimer le débat au moment de prendre la
parole mais plutôt de rétablir les faits, de rétablir la
vérité et de rétablir la réputation du
député de Roberval comme président de la commission.
Il s'est ensuivi une scène que l'on peut retrouver au journal des
Débats, où nous nous sommes trouvés devant les
propositions les plus contradictoires, soutenues par les arguments les plus
farfelus à tel point qu'un homme normalement sérieux comme le
chef de l'Opposition a commencé à se demander si le
député de Portneuf, que j'avais proposé comme rapporteur,
connaissait assez la langue anglaise, alors que c'est un ancien professeur
d'anglais. Il demandait s'il serait capable de comprendre ce qu'était le
California Plan et toute une série d'expressions comme le Court Bar
System of Judicional Nomination et toute une série d'arguments et
d'arguties qui vont véritablement laisser leur marque dans notre
parlementarisme.
Le chef de l'Opposition a quand même une excuse. Il est nouveau et
peut-être qu'il s'imaginait qu'il faisait bien à ce moment. Le
député de Maisonneuve en a moins, à mon sens. Le
député de Maisonneuve ne s'est pas comporté ce
soir-là avec le plus de sérieux, d'autant plus que nous
abordions, de notre côté, la discussion de ce projet de loi sans
aucune intention de brusquer de façon indue l'Opposition officielle, qui
avait le droit de discuter des articles qui se trouvaient dans ce projet de
loi.
Par conséquent, nous avons été pris dans ce
débat, un véritable débat de fous si on me permet
de le qualifier ainsi un dialogue qui n'avait aucun sens, ni queue, ni
tête. Nos collègues, plus tard, rougiront de ce qu'ils ont dit ce
soir-là lorsqu'ils verront jusqu'à quel point ils se sont rendus
ridicules. Le président était là, le député
de Roberval présidait d'une façon impassible la commission. Il a
attendu que tous les députés, membres de la commission, aient
fait des propositions pour la nomination d'un rapporteur et, finalement, il a
mis aux voix la nomination du rapporteur. En appliquant un des articles du
règlement, ma proposition a été soumise la première
et c'est ainsi que le député de Portneuf fut nommé
rapporteur.
Mais, il faut noter qu'au cours de ce débat qui a occupé
la plus grande partie de la soirée, c'est-à-dire ce débat
sur la nomination du rapporteur, nos collègues ont, non seulement et
malgré mes objections parlé à loisir, mais qu'ils ont
amplement dépassé les limites de temps qui normalement leur
étaient allouées sur une question particulière,
c'est-à-dire la question qui se posait à ce moment, à
savoir la nomination d'un rapporteur. Et le président, le
député de Roberval, a pris une attitude d'une telle largeur de
vue, d'une telle générosité qu'à mon sens j'aurais
pu adresser des reproches si je n'avais pas été aussi respectueux
de la présidence que je le suis.
Mais j'ai accepté que le président de la commission fasse
son devoir comme il l'entendait et qu'il donne l'occasion à nos
collègues de se faire entendre comme il l'entendait au cours des minutes
et des minutes qui se sont écoulées et qui ont
dépassé amplement le temps véritablement raisonnable
alloué par notre règlement. Ainsi, à un certain moment, le
président a fait venir des chronomètres pour être en mesure
de chronométrer les interventions parce que tout le monde se rendait
compte, à l'examen de l'horloge qui nous sert ordinairement de guide,
que nos collègues dépassaient le temps alloué.
M. le Président, je dis que, dans cette façon d'agir,
cette façon initiale qu'a adoptée le président de la
commission, il était évident que le président de la
commission n'avait aucune intention partiale à l'égard de
l'Opposition, que le président de la commission avait l'intention de
jouer sa fonction, de jouer son rôle de la façon la plus droite et
la plus impartiale possible.
C'est la raison pour laquelle, lorsque j'ai vu cette motion au
feuilleton, quelques jours après, j'ai été
scandalisé que le Parti québécois véritablement
fasse ou cherche un bouc émissaire en la personne du
député de Roberval, à qui faire supporter certaines
amertumes qu'ils ont de la difficulté à contenir. Mais
malheureusement, M. le Président, cette stratégie est hautement
répréhensible, parce qu'elle attaque, après tout, un
membre de cette Chambre, un membre respecté de cette Chambre, un
vice-président de cette Chambre qui n'a jamais fait d'accroc volontaire
aux règlements.
Je ne dis pas, à ce point de vue, que le député de
Roberval a nécessairement et constamment toujours raison dans ses
décisions, mais son attitude, sa bonne foi, n'en était pas une
qui cherchait à humilier, intimider ou brimer les droits de
l'Opposition. C'est la raison pour laquelle, je pense, de ce côté
de la Chambre, on aurait dû, devant le problème humain que posait
la question de faire une attaque aussi personnelle qui est contenue à
cette motion, se retenir, revenir à un sentiment d'un peu plus grande
objectivité et se dire qu'on n'était peut-être pas d'accord
sur toutes les décisions que le président avait rendues ce soir,
mais que ce n'était pas une raison d'attaquer sa bonne foi comme on l'a
laissé entendre dans la motion originale de l'Opposition.
M. le Président, plus tard dans cette soirée, je peux
donner d'autres exemples où le président de la commission a
été véritablement utile au débat. Je me souviens
que quand il s'est agi de nommer le député de Yamaska rapporteur
et on connaît jusqu'à quel point le député de
Yamaska n'est pas l'homme le plus volubile et le plus loquace de cette Chambre
et que, souvent, il a plutôt l'attitude d'un sphinx et ne sachant
pas si le député de Yamaska avait acquiescé à sa
nomination ou s'il avait refusé, le président, d'une façon
parfaitement objective et parfaitement intelligente, à mon sens, l'a
redemandé au député de Yamaska, à la suite d'une
intervention du chef de l'Opposition, assez subtile, où le chef de
l'Opposition nous expliquait que, dans certains pays, quand on fait ça,
ça veut dire non, et quand on fait ça, ça veut dire oui,
parce que nous avons eu le plaisir d'entendre le chef de l'Opposition sur les
différentes façons de s'exprimer par des gestes, suivant les pays
où l'on se trouve. Je sais maintenant qu'en Grèce et en Chine,
faites ceci, ça veut dire non, et que ceci veut dire oui. Le
président, étant fort embarrassé par la position prise par
le chef de l'Opposition et, d'un autre côté, par l'attitude
très réservée adoptée par le député
de Yamaska, a de nouveau soulevé le problème de façon que
la commission soit parfaitement éclairée et puisse
procéder.
M. le Président, lorsqu'est arrivée cette fameuse question
de la demande du droit de parole des députés de Saint-Jacques et
de Saguenay, il était devenu parfaitement évident que nous
faisions face à un "filibuster" en bonne et due forme, que, du
côté de l'Opposition, on avait décidé de faire une
moquerie de cette commission de la justice, de perdre du temps
délibérément et d'employer n'importe quel argument, qu'il
soit bon, faux ou moyen, d'employer n'importe quel argument pour
perpétuer les travaux de cette commission.
Il me semble que, en vertu du règlement, j'avais droit, comme
tout autre député appliquant le règlement, de m'opposer
à cette demande de prendre la parole de ces deux députés
qui ne faisaient pas partie de la commission. Et c'est ce que j'ai fait. Devant
cette objection de ma part, qu'est-ce que le président de la commission
a fait? Il a fait une chose parfaitement objective, à mon sens. Il a
soumis la demande des deux députés de l'Opposition aux voix de la
commission. H n'a pas pris la décision lui-même de leur interdire
la parole, étant donné que moi, ministre de la Justice, je m'y
opposais. Il a dit: II s'agit d'une matière sur laquelle la commission
doit se prononcer.
Et, de là, s'est déroulé un vote en bonne et due
forme, vote auquel ont pris part nos honorables collègues, membres de la
commission, le député de Maisonneuve et le chef de l'Opposition.
On pourra revoir dans le journal des Débats comment ils ont voté.
Le député de Maisonneuve a exprimé son accord à ce
que ses collègues parlent et le chef de l'Opposition a donné un
accord dans le même sens, mais ils étaient minoritaires.
De là, le député de Maisonneuve a fait une motion
pour rouvrir la question. Il n'était pas satisfait de la décision
prise par la commission et, là, il a dit: Je fais maintenant une motion.
Mais, là, le président était pris avec le dilemme suivant:
devait-il remettre aux voix une chose qui avait déjà
été décidée par la commission? A mon sens, il ne le
devait pas, parce que la question avait déjà fait l'objet d'une
décision. Je pense qu'il est de jurisprudence constante dans cette
Chambre que, lorsqu'une matière a été légalement
décidée à la suite du déroulement d'un vote, on ne
peut pas la resoulever immédiatement, surtout au cours de la même
séance.
J'ajouterais, sans que je sois tellement en cause dans le débat
actuel, que j'ai dit que je m'opposais, pour ma part, à ce que les
honorables collègues de l'autre côté de la Chambre, qui
n'étaient pas membres de la commission, parlent. J'ai dit que cela
s'appliquait à cette séance-là seulement, étant
donné cette attitude de "filibuster", et que notre attitude pouvait
être modifiée ultérieurement si nous étions en
mesure de constater la bonne foi de l'autre côté, chez nos
collègues.
Alors, ce n'était pas une position irrémédiable. Je
n'avais pas l'intention de créer un précédent ou une
tradition à l'effet qu'on interdirait, à l'avenir, dans toute
commission, le droit aux députés de venir s'exprimer. En effet,
on sait que c'est une chose que l'on fait couramment et on le fait vous
le savez comme moi sans aucun formalisme. Cette question, elle n'est
jamais soulevée en pratique, excepté dans ces périodes de
conflit ou de "filibuster", comme celle que nous faisait vivre le Parti
québécois. Moi, ne voulant pas contribuer à ce
"filibuster" en admettant deux députés qui n'avaient pas
automatiquement et légalement le droit de parole, je pense que je
faisais mon devoir vis-à-vis du règlement, en interdisant
à des députés étrangers de venir contribuer
à allonger les débats.
Mais le président n'avait peut-être pas les mêmes
responsabilités que moi. Il en avait
d'autres, c'est-à-dire de diriger impartialement les travaux de
la commission. Le président, qu'est-ce qu'il a fait? Il ne l'a pas
décidé lui-même, comme je l'ai dit tout à l'heure.
Il a mis la question aux voix et il y a eu un vote. C'est la raison pour
laquelle, quand la motion du député de Maisonneuve pour rouvrir
la question sur le même point a été
présentée, je pense que le député de Roberval a
fort bien décidé, parce que la question venait d'être
décidée.
C'est à ce moment-là que le député de
Maisonneuve a fait une motion pour forcer le président de la commission
à vous faire un rapport comme président de l'Assemblée
nationale. Il a dit que la question avait une grande importance. Il a fait une
longue argumentation, en disant que ceci créait un
précédent, étant donné que le président ne
voulait pas remettre la question aux voix.
Là, je suis intervenu dans un esprit conciliant. Même le
député de Maisonneuve l'a reconnu. J'ai dit au
député de Maisonneuve que je ne connaissais pas dans le
règlement d'article qui obligeait un président de commission
à faire rapport au président de la Chambre, que cette
procédure parlementaire, qui avait peut-être existé dans
d'anciens règlements, ne s'appliquait plus. Mais, étant
donné l'importance de la question, je proposais, de bonne foi, que le
président, le député de Roberval, à la prochaine
occasion, s'entretienne avec vous de la question pour se faire éclairer.
J'ai même dit que, si le député de Roberval avait raison,
eh bien, il pourrait persister dans cette attitude mais que si vous, comme
président, lui indiquiez, dans votre sagesse et votre connaissance
immense du règlement, des arguments suivant lesquels il s'était
trompé, je n'aurais, pour ma part, aucune espèce d'objection
à ce qu'il révise sa position à la prochaine
séance. Ma proposition était tellement faite de bonne foi que le
député de Maisonneuve l'a agréée sur-le-champ, avec
le concours du président qui, lui-même, ne voulant pas faire
d'entorse au règlement, a acquiescé. Il avait, d'après ce
qu'il nous a dit, l'intention de vous voir justement pour vérifier s'il
avait été dans la bonne voie en n'acceptant pas la motion du
député de Maisonneuve qui voulait rouvrir une question
déjà décidée précédemment.
Est-ce que c'est l'attitude, M. le Président, d'un
président de commission qui est partial, comme on l'a dit parmi les
députés de l'Opposition? A mon sens, cela n'indique aucune
partialité. Au contraire, cela n'indique que la bonne foi du
président.
C'est la raison pour laquelle, même si, de l'autre
côté de la Chambre, on devait être en désaccord sur
certaines décisions du président, je n'admets pas et c'est
la principale raison pour laquelle je me suis levé, à cette heure
tardive et au moment où nous subissons un tel "filibuster" que
l'on mette en doute la bonne foi d'un collègue, alors qu'il y a de
nombreux indices que ce collègue a voulu agir de bonne foi. Je ne
l'admets pas, M. le Président. Je pense que le Parti
québécois s'est laissé emporter véritablement,
peut-être par la déception, peut-être pour d'autres motifs.
Je ne veux pas discuter des motifs du Parti québécois, parce que
je n'en aurais pas le droit. Mais je voudrais dire simplement ceci:
Après s'en être pris à un collègue qui a fait ses
preuves dans cette Chambre et que tout le monde estime, est-ce qu'aujourd'hui
on ne ressent pas une certaine petitesse de l'autre côté de la
Chambre d'avoir cherché à jeter le blâme et la faute sur un
président qui, dans deux circonstances au moins, ce soir-là, a
démontré qu'il agissait en toute bonne foi, même si, de
l'autre côté de la Chambre, on a des idées
différentes sur l'application du règlement?
Finalement, M. le Président, je termine sur la question du
reproche sur l'ajournement de la séance. Sur la question de
l'ajournement de la séance, le chef de l'Opposition me dit: "Ah
voilà! ", comme si c'est tout ce qui restait que l'on pourrait reprocher
au président. Si, M. le Président, il fallait utiliser cette arme
très considérable qu'est l'article 68 de notre règlement
chaque fois qu'un président rend une décision d'ajournement sur
laquelle on n'est pas d'accord, cette Chambre deviendrait un véritable
enfer. En effet, M. le Président, on mettrait en doute constamment la
raison d'être ou la bonne foi des présidents des commissions et la
vôtre même, M. le Président.
Je dis donc que le Parti québécois a employé une
arme terrible à l'égard d'un individu, alors qu'aujourd'hui on
laisse entendre, d'après les réactions que je lis de l'autre
côté de la Chambre, qu'au fond on n'en voulait qu'à sa
décision sur l'ajournement. Or, M. le Président, sur la
décision de l'ajournement, l'article 163 du règlement dit ceci:
"A moins de dispositions contraires, les règles relatives à
l'Assemblée s'appliquent aux commissions".
Comme l'a expliqué le leader parlementaire du gouvernement avec
tellement de clarté et de bons sens, hier soir, il a fait adopter une
motion pour que nous siégions de dix heures le matin à minuit.
C'est la raison pour laquelle, quand je me suis levé, à minuit,
et que j'ai dit: II est minuit, je propose que nous ajournions nos travaux au
lendemain, mon intention n'était pas je le dis en toute candeur et
en ne me considérant pas comme un grand expert dans le règlement
de faire une motion, mais de constater que l'heure de l'arrêt des
travaux était arrivée et qu'il fallait que la commission
s'ajourne.
Comme le leader avait dit, l'après-midi même, au cours du
débat et des motions qu'il avait présentées, que la
commission continuerait ses travaux le samedi à dix heures
jusqu'à minuit et possiblement le lundi, de dix heures à minuit,
nous restions tout à fait, M. le Président, dans le cadre du
règlement de la Chambre. La commission de la justice, qui
siégeait au salon rouge, ne
dérogeait en aucune façon au cadre général
établi par la motion du leader, qui a été acceptée
par cette Chambre.
Par conséquent, il ne s'agissait pas pour moi de faire une motion
à minuit, mais de constater que, minuit étant arrivé, la
commission devait s'ajourner et arrêter ses travaux.
On n'a qu'à lire aussi, à l'appui de cette thèse
sur le plan juridique et d'interprétation du règlement, l'article
38.-1. du règlement, qui dit: "A l'heure fixée pour l'ajournement
d'une séance, le président, à moins qu'un vote ne soit en
cours et il n'y avait pas de vote en cours, à ce moment-là
se lève, rappelle l'Assemblée à l'ordre et prononce
l'ajournement de l'affaire en cours et celui de l'Assemblée". Etant
donné que la commission suivait les règles de l'Assemblée
nationale, je constatais qu'il était minuit et le président a dit
: Nous arrêtons nos travaux et nous les reprendrons demain.
La situation n'aurait peut-être pas été la
même si j'avais proposé qu'on ajourne, par exemple, au samedi
après-midi, à une heure ou deux heures de
l'après-midi.
Là, nous aurions dérogé à la règle
générale qui a été fixée pour la Chambre,
j'aurais en somme demandé une exception, une modification dans
l'évolution des travaux de la commission, alors que là il
s'agissait tout simplement de nous en tenir au règlement
général.
Par conséquent, il n'y avait pas de vote à prendre pour la
commission. A nos yeux, la question était simplement de dire: L'heure
est arrivée de terminer nos travaux. Alors le président le
constatait, se levait et ajournait les travaux au lendemain à dix
heures, soit à l'heure fixée par le règlement.
Je dis donc ceci: à mon sens, le président a bien
appliqué le règlement, et il n'y avait pas lieu de prendre une
motion ce soir-là. Mais, pour reprendre ce qu'a dit le
député de Saguenay, s'il y avait en cette matière un
doute... et on sait que notre règlement qui est nouveau n'est pas clair
sur tous les sujets, nous n'en avons pas encore fait tout le tour de ce
règlement, il est encore à la période
d'expérimentation, nous l'apprenons encore, et même les plus
experts, comme le député de Maisonneuve et le leader du
gouvernement ne connaissent pas d'une façon absolue les réponses
à toutes les questions qui surgissent, et la preuve en est que
vous-même n'êtes pas capable de nous donner toutes les
réponses aux questions qui surgissent dans cette Chambre de façon
instantanée chaque fois qu'un problème se présente, il
arrive souvent que vous devez ajourner pour délibérer...
M. BURNS: J'invoque le règlement, M. le Président. Je
n'accepterai pas que le ministre de la Justice vous attaque si bassement.
M. TETLEY: Vierge offensée! M. CHOQUETTE: Je dis donc...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHOQUETTE: ... que personne dans cette Chambre ne peut avoir la
prétention de dire qu'il connaît ce règlement tellement
à fond qu'il est capable de l'appliquer à toutes les
circonstances qui peuvent se produire dans notre vie parlementaire. Personne ne
peut dire qu'il ne peut pas y avoir de divergences et même parfois de
divergences importantes sur des questions de règlement.
En troisième lieu, personne ne peut me dire que ce
règlement est parfait et a prévu toutes les situations. Et c'est
la raison pour laquelle j'ai aimé, d'une certaine façon, la
candeur du député de Saguenay lorsqu'il nous a dit au cours du
débat, cet après-midi, que la question n'était pas
claire.
Quand la question n'est pas claire et qu'un président à
l'égard duquel on n'a aucune indication de mauvaise foi prend une
décision, on ne l'accuse pas le lendemain d'avoir agi de mauvaise
foi.
Je me résume. Au cours de cette soirée, des
décisions furent prises qui ont été favorables à
l'Opposition. Il y a d'autres décisions sur lesquelles l'Opposition
était en désaccord, mais dans tout cela, je n'ai noté, en
aucune façon, une attitude partiale de la part du député
de Roberval. Et pour autant que je suis concerné, et pour autant que s
ous sommes concernés, le député de Roberval a la pleine
confiance de la Chambre.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve
désire, je crois, exercer son droit de réplique qui mettra fin au
débat sur cette motion. L'honorable député de
Maisonneuve.
M. Robert Burns
M. BURNS: M. le Président, c'est d'abord avec beaucoup
d'étonnement, un étonnement que je peux difficilement
qualifier...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: ... que j'ai entendu le ministre de la Justice répondre
à notre motion. Je peux difficilement le qualifier pour une raison bien
simple, je ne peux pas trouver de superlatif pour rendre ma pensée
relativement à l'étonnement qui s'est emparé de moi en
écoutant le ministre de la Justice.
M. le Président, il y a une chose qui ressort de cette
intervention que nous venons d'entendre; c'est que le ministre de la Justice a
donc le scandale facile à des endroits où vraiment il ne devrait
pas se scandaliser. Si je compare un certain nombre de ses réactions
dans les semaines précédentes, dans les années
précédentes, dans les mois précédents, je trouve
qu'il a beaucoup plus le scandale facile relativement à un
problème comme celui qui nous occupe...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: ... qu'à l'égard d'autres problèmes
où il devrait se scandaliser davantage, les tables d'écoute, par
exemple, M. le Président.
DES VOIX: La motion! LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BURNS : Aussi le fait que des preuves ne vont pas devant la
commission...
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre! ... J'ai laissé aller
quelques moments l'honorable député de Maisonneuve, croyant qu'il
voulait rapporter peut-être les agissements ou les propos de l'honorable
ministre de la Justice lors de l'étude de la commission. Mais, lorsqu'il
s'aventure sur sa qualité de ministre de la Justice, je crois que c'est
hors d'ordre.
M. BURNS: Je voulais tout simplement, M. le Président, en guise
d'introduction, vous mentionner quel était le sens de
l'étonnement...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BURNS: ... qui s'était emparé de moi à
écouter le ministre de la Justice...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: ... venir faire son intervention. Et, comme c'est un droit de
réplique, c'est sûrement au sujet, entre autres, de son
intervention que je vais exercer mon droit de réplique parce que je
pense...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! D reste 35
minutes, la paix! Allez!
M. BURNS: Je disais, M. le Président, et c'est comme ça
que j'exprimais mon étonnement, que c'est un scandale facile que je n'ai
pas vu à d'autres endroits au cours de la discussion qui a eu lieu sur
le projet de loi 8 en commission parlementaire de la justice. Le
problème que nous discutons est, dans le fond, tout simplement une
conséquence. Actuellement, nous discutons des conséquences de
cette séance ou de ces séances de la commission parlementaire de
la justice. Je n'ai pas vu le ministre de la Justice se scandaliser au cours de
la séance où il s'est proposé lui-même, M. le
Président. Lui, le parrain du projet de loi, il s'est proposé
comme rapporteur. Je n'ai pas vu le ministre de la Justice dire: Je m'excuse
auprès de mes collègues, je n'aurais pas dû faire
ça. Et là, ce soir, il s'étonne.
LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît!
M. BURNS: Le ministre des Affaires culturelles aurait dû
peut-être être l'objet, dans le temps qu'il était
vice-président, d'une telle motion. On se rend compte de la
partialité avec laquelle il rendait des décisions dans le temps,
on le voit actuellement. Il n'est même pas capable d'écouter des
critiques.
LE PRESIDENT: S'il vous plaît!
M. BURNS: II n'est même pas capable.
LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs, s'il vous plaît
!
M. BURNS: Vous voyez, M. le Président, je regrette de ne pas
l'avoir utilisé dans le temps que c'était votre
vice-président, le ministre des Affaires culturelles ; je le
regrette.
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre, messieurs!
M. CHARRON: Je regrette qu'il soit ministre des Affaires
culturelles.
M. BURNS: Je regrette aussi qu'il soit ministre des Affaires
culturelles, M. le Président; ça, c'est le problème du
gouvernement actuel, c'est la pénurie, M. le Président, du
gouvernement actuel quand il s'agit de trouver des ministres. On voit où
on va les repêcher. M. le Président, en tout cas, je reviens
à la motion.
Ce qui m'étonne, de plus, M. le Président, c'est que ce
ministre qui se scandalise si facilement dans des occasions où il
ne devrait pas et qui ne se scandalise pas dans d'autres que je ne qualifierai
pas et où il devrait se scandaliser n'a véritablement pas
compris, et le sens de l'objection dont son projet de loi a été
l'objet en commission parlementaire, le 14 décembre, et le sens de la
présente motion, M. le Président. Cela m'étonne qu'un
ministre de la Justice ne comprenne pas cela. Cela me permet de comprendre un
certain nombre de choses cependant. Cela me permet de comprendre qu'un ministre
de la Justice qui veut rentrer de gré ou de force dans la gorge de
l'Opposition un projet de loi dont il sait qu'il fera l'objet d'un "filibuster"
s'étonne et appelle des choses contrairement à ce qu'elles
sont.
Cela me surprend énormément, M. le Président,
d'entendre le ministre de la Justice j'en ai pris note parler
d'un flot d'accusations et d'un flot d'insinuations de notre part.
M. le Président, je pense être en mesure d'affirmer
à la fin de ce débat, tant en mon nom personnel qu'au nom de tous
mes collègues de l'Opposition qui se sont exprimés, tant sur la
motion principale que sur les amendements et que sur les sous-amendements,
qu'à chaque occasion, nous avons fait véritablement tous les
efforts requis pour que les gens comprennent le sens de nos interventions.
Donc, qu'il n'y ait aucune accusation et aucune insinuation à
l'égard de l'individu que je ne peux pas nommer parce que les
règles de la
Chambre m'en empêchent, mais de l'individu que représente
le député de Roberval, nommément Robert Lamontagne. Il n'y
a eu aucune insinuation et aucune accusation à l'endroit de la personne.
Il y a eu, je l'admets, des accusations d'ordre technique et d'ordre aussi
psychologique, si je peux utiliser l'expression à l'endroit du
député de Roberval.
Quand j'entends le ministre de la Justice nous parler de la rancoeur de
l'Opposition, quand j'entends le ministre de la Justice utiliser de telles
expressions, c'est qu'il a manqué complètement le bateau; il ne
sait pas du tout ce qui s'est passé ici depuis une semaine. Mais,
à aucun moment nous n'avons caché notre intention de bloquer son
projet de loi qu'il voulait nous faire avaler de force. A aucun moment
l'avons-nous caché, je pense que je l'ai dit peut-être dix fois
depuis une semaine, et tous mes collègues sont revenus là-dessus,
on a dit qu'on "flibustait", si on veut franciser le mot, son projet de
loi.
Je ne vois pas pourquoi le ministre vient s'en étonner
aujourd'hui. C'est une technique parlementaire, au cas où le ministre ne
le saurait pas, qui est parfaitement acceptable dans des institutions qui
respectent régulièrement et constamment l'Opposition, telles que
The House of Commons of Westminster, M. le Président. C'est de là
que vient la technique du "filibuster". Il n'y a aucun problème
là-dessus, et on ne s'en est pas caché. Pas question de rancoeur
à ce moment-là, pas question d'accusation ni d'insinuation. Mais
si on a fait cette motion à l'endroit du député de
Roberval je vous ai cité aujourd'hui des autorités venant
de cette House of Commons, de Westminster, un cas de 1901 et un cas de
1962 c'était pour des raisons bien simples, pour essayer de faire
comprendre à des gens, comme le ministre de la Justice, qui ne veulent
pas nous croire quand on dit que, fondamentalement, le sens d'une telle motion
c'est une technique parlementaire, vous le savez, parfaitement acceptable, que
c'est le seul et unique moyen de ramener devant la Chambre et votre
décision récente m'a confirmé dans ma conviction à
cet effet un geste d'un président de commission qui a
été posé en votre absence. Des textes que je vous ai
cités cet après-midi, parlent de non-connaissance du
président des gestes qui se passent en commission, et c'est bien que
ça se passe comme ça. C'est une bonne chose, à moins que
le règlement prévoie qu'il y a appel au président. Or, le
règlement ne le prévoit pas.
Comment une opposition consciente de son rôle, une opposition qui
a l'intention, et je le dis au ministre, de jouer pleinement ce rôle,
peut-elle le faire? Je ne le dis pas de façon à nous vanter, nous
allons le faire avec modestie, nous allons le faire avec humilité, nous
allons jouer ce rôle malgré ce qu'en dit le député
de Notre-Dame-de-Grâces qui nous prouve, encore une fois, combien la
députation libérale est pauvre qu'il se retrouve au cabinet.
Notre rôle, M. le Président, nous allons le jouer avec
humilité et modestie, sans aucun doute. Cette modestie et cette
humilité, le ministre de la Justice a eu à plusieurs reprises
l'occasion de les vérifier dans le passé et il aura l'occasion,
dans l'avenir je l'espère de les vérifier à
nouveau.
Pour une Opposition, le fait de se lever sur un projet de loi
gouvernemental et de dire: Nous sommes d'accord avec votre projet de loi; votre
projet de loi est une bonne mesure et nous vous appuyons le ministre de
la Justice, particulièrement, sait que nous sommes capables de ce genre
de geste cela, c'est de l'humilité et de la modestie, et nous
sommes prêts à le faire encore.
Cependant, je n'accepterai pas qu'on vienne nous reprocher de nous
battre avec nos dernières énergies contre un projet de loi que
nous considérons comme inacceptable dans sa forme actuelle, et le projet
de loi no 8 est un de ceux-là.
Nous n'accepterons pas cela et j'avertis tous les membres de la Chambre:
Qu'on tente d'interpréter nos gestes comme on le voudra, on s'en
balance. Nous allons jouer notre rôle et nous le jouerons pleinement.
C'est cela que nous essayons de vous prouver, que nous essayons de prouver au
ministre de la Justice. Quand le ministre de la Justice se rendra compte que
c'est véritablement ainsi, dans certaines autres occasions, que nous
jouons notre rôle, il sera bien fier. Il sera bien fier, comme il l'a
été à quelques reprises, d'avoir comme bouclier
l'Opposition, parce que cela sert à cela aussi, M. le ministre. Vous
savez fort bien que, dans le cas de l'aide juridique, si vous n'aviez pas eu
l'appui positif de l'Opposition, les pressions dont vous étiez l'objet
et auxquelles vous avez résisté et on vous en a
félicité vous auriez peut-être eu plus de
difficultés à y résister.
C'est le sens, en ce qui nous concerne, de cette motion. H n'y a pas de
rancoeur. Il n'y a pas d'insinuation. H n'y a pas d'accusation à
l'endroit du député de Roberval. Il y a une technique
parlementaire que nous sommes en droit d'utiliser, que nous avons
utilisée et, pour l'information de nos collègues, que nous
utiliserons à nouveau toutes les fois que nous jugerons que cela sera
nécessaire. M. le Président, je pense que vous ne nous donnerez
peut-être pas l'occasion de l'utiliser à votre endroit: vous
connaissant, je sais qu'à ce moment nous aurions de la difficulté
à l'utiliser contre vous, mais nous l'utiliserons, si nécessaire,
à nouveau à l'égard de vice-présidents de la
Chambre, à l'égard de présidents de commissions. Je tiens
à assurer nos collègues que nous ne nous sentirons pas du tout
gênés de l'utiliser, à aucun moment, quand nous croirons
que c'est justifié.
Nous croyions et nous croyons encore que c'était justifié
de l'utiliser à cette occasion, parce que je suis prêt à
admettre une chose, une chose, et je vais terminer là-dessus, car je
pense
que mon temps achève. Cela résume l'opinion de mes
collègues de l'Opposition qui ont parlé là-dessus. Pour
vous prouver jusqu'à quel point il n'est pas question d'accusation, ni
d'insinuation dans la motion que nous avons faite, nous sommes prêts
à admettre et je l'admets au nom de mon groupe que le
député de Roberval a agi de bonne foi. Est-ce drôle cela?
Est-ce drôle que nous soyons capables de dire cela? C'est parce que
justement nous n'avons fait aucune insinuation, ni accusation malveillante
à l'endroit de la personne qui s'appelle le député de
Roberval.
En écoutant le ministre de la Justice, je me demandais, si, dans
le fond, cela n'était pas contre le ministre de la Justice qu'il aurait
fallu faire notre motion. Je me demandais si ce n'était pas à son
endroit que nous aurions dû la faire, lui qui avait la
responsabilité de piloter ce projet de loi, lui qui a été
l'instigateur des irrégularités. Je maintiens encore qu'il y a eu
des irrégularités à cette commission. Elles ont
été commises de bonne foi, d'accord, mais, justement, à
cause de cette pression indue ou de cette attitude du ministre de la Justice
qui, à trois reprises, se reprend pour tenter de nous vendre son projet
de loi en fin de session, c'est peut-être à lui que nous aurions
dû adresser notre motion.
Je tiens, en terminant, à assurer le député de
Roberval de notre collaboration. Cela va peut-être en faire sourire; je
le savais.
Le député de Notre-Dame-de-Grâce ne comprend pas
ça, il ne comprend pas, ce n'est pas sa faute, je lui pardonne. Je fais
comme si je ne l'avais même pas entendu.
Mais à l'endroit du député de Roberval, c'est
à lui que j'adresse ces derniers mots, au nom de mon groupe
parlementaire, au nom de l'Opposition, je lui dis tout simplement, M. le
Président, que nous continuerons à tout faire pour travailler
avec lui, lorsqu'il présidera des commissions. Je n'ai pas de doute sur
le sort de notre motion, mais dans un esprit de collaboration ou dans un esprit
surtout, j'espère que nos collègues y
réfléchiront...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: ... dans un esprit du maintien d'un régime
parlementaire dans lequel nous croyons, bien qu'on tentera de nous faire croire
et de faire porter sur nos épaules un tas de choses, je tiens à
dire que nous faisons...
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
M. BURNS: ... nous posons ce geste-là dans l'intérêt
du maintien de l'institution parlementaire. Je suis sûr que ce que je
viens de dire m'attirera des critiques de la part de certaines personnes, dans
l'avenir. Mais, j'y crois sincèrement.
LE PRESIDENT: Un instant, je m'excuse.
Je voudrais expliquer pourquoi j'ai accordé de bonne foi, moi
également, cinq minutes supplémentaires au député
de Maisonneuve, c'est parce qu'il m'avait demandé une directive avant de
prendre la parole. Tel que le ministre de la Justice l'avait dit, on peut se
permettre certaines erreurs et j'avais l'impression que le droit de
réplique du député de Maisonneuve était de vingt
minutes. C'était mon erreur. C'est pour ça que je n'ai pas voulu
l'interrompre et que je lui ai accordé, je crois, dix minutes. C'est une
motion de député...
De toute façon, écoutez, on pourra étudier la
question.
Nous allons procéder à la mise aux voix de la motion
principale.
M. BURNS: M. le Président, je demande qu'on appelle les
députés.
LE PRESIDENT: Qu'on appelle les députés!
Vote sur la motion de M. Burns
LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!
Que ceux qui sont en faveur de la motion de l'honorable
député de Maisonneuve veuillent bien se lever, s'il vous
plaît!
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Morin, Burns, Charron, Lessard, Bédard
(Chicoutimi).
LE PRESIDENT: Que ceux qui sont contre cette motion veuillent bien se
lever, s'il vous plaît!
LE SECRETAIRE ADJOINT: MM. Bourassa, Levesque, Mailloux, Saint-Pierre,
Choquette, Goldbloom, Quenneville, Mme Bacon, MM. Hardy, Tetley, Drummond,
Bienvenue, Massé, Harvey (Jonquière), Houde (Abitibi-Est),
Desjardins, Giasson, Perreault, Brown, Bacon, Blank, Veilleux, Brisson,
Séguin, Cornellier, Houde (Limoilou), Pilote, Fraser, Picard, Gratton,
Carpentier, Faucher, Marchand, Harvey (Charlesbourg), Larivière,
Pelletier, Springate, Boudreault, Boutin (Johnson), Boutin (Abitibi-Ouest),
Caron, Côté, Denis, Déziel, Dufour, Harvey (Dubuc),
Lachance, Lapointe, Lecours, Malépart, Malouin, Massicotte, Mercier,
Parent (Prévost), Picotte, Sylvain, Tardif, Tremblay, Verreault.
Deux abstentions: MM. Samson et Roy.
LE SECRETAIRE: Pour: 5
Contre: 59
Abstentions: 2
LE PRESIDENT: La motion est rejetée. M. LEVESQUE: Article 20.
Rapport de la commission sur le projet de loi no
8
LE PRESIDENT: Article 20: Prise en considération du rapport de la
commission permanente de la justice sur l'étude du projet de loi no 8,
Loi modifiant de nouveau la loi des tribunaux judiciaires.
M. BURNS: Simplement une directive, M. le Président, que je vous
demande au tout début. Est-ce que lorsque vous appelez l'article 20 et
que vous mentionnez "prise en considération du rapport de la commission
permanente", cela veut dire qu'il y a devant nous une motion? Si oui, quelle en
est la forme? De quelle façon se verbalise-t-elle?
LE PRESIDENT: La coutume que nous avons depuis que cette modalité
existe, depuis que cette procédure existe dans notre règlement,
c'est que le rapporteur, l'ordre du jour est au nom du député de
Portneuf... le débat se termine par l'adoption du rapport. Le
débat se termine par l'adoption du rapport, ce que nous avons fait dans
la dernière session.
M. BURNS: Donc, si je comprends bien, il y a devant la Chambre une
motion du député de Portneuf de proposer l'adoption du
rapport.
LE PRESIDENT: Le débat se termine par l'adoption d'un
rapport.
M. BURNS: En tout cas, M. le Président, quitte à ce que
vous ne me donniez pas une réponse immédiatement, est-ce que je
peux vous demander cette directive, sur le plan technique, à savoir
qu'est-ce que nous considérons comme motion? Je sais que c'est une
motion du genre de celles que nous adoptons habituellement et je sais
également que cette question n'a peut-être jamais
été soulevée. Mais je demande tout simplement : Est-ce
qu'il s'agit d'une motion disant: Je propose l'adoption du rapport?
LE PRESIDENT: Ce que nous avons fait à la dernière
Législature et dans le dernier Parlement, c'est que lorsqu'il y avait
des amendements de proposés, on prenait les votes sur les amendements et
on terminait par l'adoption du rapport.
M. BURNS: D'accord, M. le Président. Merci.
M. BOURASSA: Adopté.
LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Jacques.
M. Claude Charron
M. CHARRON: M. le Président, ce sera peut-être la
première occasion, mais je vais déplorer la disparition de
l'ancien règlement de l'Assemblée nationale.
En effet, M. le Président, vous vous souviendrez avec moi,
peut-être que cela a échappé à l'attention de
certains membres de la Chambre et cela, je l'admets volontiers parce que je les
connais bien, que dans l'ancien règlement de la Chambre, il y avait un
article qui permettait à un membre de cette Assemblée de proposer
une modification à l'ordre du jour des travaux de la Chambre. Il est
malheureusement disparu de notre nouveau règlement mais je dois vous
dire que s'il figurait encore à notre règlement, j'aurais envie
de l'utiliser ce soir.
Car, je trouve absolument incroyable qu'au moment où figure dans
le feuilleton du gouvernement un nombre considérable de projets de loi
notamment sous la même étiquette que le projet de loi no 8
parrainé par le même homme, ce projet de loi no 8 dont nous avons
à étudier la considération du rapport ce soir
figurent les projets de loi nos 2 et 3, qui touchent 80 p.c. des
Québécois et qui risquent de mourir au feuilleton avec la
prorogation de la session. On risque de retarder cette réforme,
même si le mot réforme est large pour définir ce qui en
reste.
C'est incroyable qu'au moment où il reste cinq ou six minutes de
séance, parmi tous les problèmes qui demeurent au feuilleton de
l'Assemblée nationale, les ouvriers de la construction qui attendent une
ratification de leur rétroactivité...
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque le règlement. Le
député est totalement hors d'ordre.
LE VICE-PRESIDENT (M. Blank): Je n'ai pas entendu, je ne sais pas.
M. CHARRON: Merci, M. le Président, laissez-le faire.
M. BIENVENUE: Mais moi, je ne vous laisserai pas faire.
M. CHARRON: Le rapport de la commission parlementaire de la justice qui
a étudié le projet de loi qui augmente de $5,000 par année
des gens qui en font déjà $28,000 et qui figurent parmi les 3
p.c. de la population à ce niveau de salaire, imaginez donc que ce
projet de loi et le rapport de ce projet de loi viennent d'être choisis
par le leader du gouvernement comme étant la priorité de ce
gouvernement avant l'ajournement des Fêtes.
M. BIENVENUE: M. le Président, j'invoque à nouveau le
règlement. Avec toute la déférence que je vous dois, je
vous invite à écouter...
LE PRESIDENT: Ecoutez, vous vous êtes rendu compte...
M. BIENVENUE: Actuellement le député,
comme il l'a fait précédemment, discute de l'ordre de
priorité du sujet de l'article qui a été choisi par le
leader du gouvernement. Il le fait et, chaque fois que vous parlez, il continue
de le faire.
Gardez-le à l'oeil et à l'oreille.
M. CHARRON: Sur le même point de règlement, parce que
j'avais quand même...
M. LEVESQUE: M. le Président, question de privilège.
LE PRESIDENT: Une question de privilège a priorité sur une
question de règlement.
M. LEVESQUE: Je tiens simplement à demander au
député de Saint-Jacques d'être un peu plus prudent car,
avant d'appeler cet article, je l'ai fait après consultation avec son
leader parlementaire.
M. CHARRON: M. le Président, ça c'est vraiment recourir au
plus bas commun dénominateur... J'étais informé...
M. LEVESQUE: Vous parlez mal de votre leader.
M. CHARRON: M. le Président, sur le même point de
règlement sans que ce soit pris sur mon temps d'intervention, au nom de
mon parti, sur ce rapport.
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre! ... M. CHARRON: M. le
Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... Allez, allez, allez ! Je ne me suis pas
levé, allez.
M. CHARRON: Non, mais eux autres parlent.
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHARRON: M. le Président...
LE PRESIDENT: A l'ordre! Ecoutez, en prenant votre siège, vous
savez que si j'appliquais le règlement...
M. CHARRON: M. le Président, je ne parlerai pas pendant qu'ils
vont parler, d'accord? C'est clair.
LE PRESIDENT: A l'ordre! Je pense qu'il n'y aurait pas de discours en
Chambre si on suivait votre directive, si personne ne parlait lorsque les
autres ne parlent pas, ça arrive assez fréquemment, je crois.
Bon, allez ! Allez !
M. CHARRON: M. le Président, j'ai été
informé par mon leader parlementaire du fait que le leader du
gouvernement l'avait informé que la priorité du gouvernement
devenait l'augmentation de salaire des juges et que s'il y avait une seule loi
qui devait être adoptée avant la fin de l'ajournement, ça
devait être celle-là. J'ai donc le droit et je le dis
à l'intention de l'immigré de Crémazie M. le
Président, de dire ici ce soir, de m'étonner en prenant parole
sur le rapport de la commission parlementaire de la justice qui a
étudié le projet de loi no 8, de dire comme première
remarque que je trouve fort singulier de la part de ce grotesque gouvernement
d'avoir choisi un moment où nos travaux achèvent, un moment
où figurent au feuilleton...
LE PRESIDENT: A l'ordre! ... A l'ordre!
M. CHARRON: ... un nombre considérable d'autres motions...
LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. CHARRON: ... que l'Opposition officielle aurait été
prête à étudier avec beaucoup plus d'attention que
n'importe quel projet comme celui-là, que ce soit celui-là que le
leader du gouvernement ait choisi de nous amener ce soir, M. le
Président. Parce que le projet de loi no 8 dont nous avons à
étudier le rapport, aujourd'hui, est un rapport qui est
irrégulier et j'aurai l'occasion, lorsque je reprendrai la parole
à la poursuite de ce débat, de vous expliquer comment ce projet
de loi a été irrégulier et dans son étude et dans
sa forme et dans le rapport qu'a soumis illégalement le
député de Portneuf.
Je vous dirai également, pour votre satisfaction de
vététan parlementaire en cette Chambre, comment il est incroyable
qu'un projet de loi aussi scandaleux que celui-là, qui augmente de $100
par semaine, les revenus de gens qui en font déjà $28,000, au
moment où l'ensemble des contribuables québécois à
cette date de l'année, sont en train de mesurer la faiblesse de leurs
revenus par rapport à la hausse du coût de la vie, quatre jours
avant Noël, au moment où on vient de sortir d'une motion aussi
importante que celle dont nous venons de disposer, soit la première
motion que ce gouvernement ait l'audace d'apporter sur la table.
Je vous raconterai ça lorsque le leader aura la même audace
de rappeler le même rapport en considération de la Chambre.
LE PRESIDENT: L'Assemblée ajourne ses travaux à demain,
dix heures.
(Fin de la séance à 0 h 1)
ANNEXE Référer à la version PDF page 814 - 815 ET
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